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mercredi, 30 décembre 2020

Kinsey, Rockefeller et la CIA : philanthropie et révolution sexuelle au service du Nouvel ordre mondial

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Kinsey, Rockefeller et la CIA : philanthropie et révolution sexuelle au service du Nouvel ordre mondial

Par Judith Reisman et Marion Sigaut

Ex: https://strategika.fr

Dévouée depuis quarante ans à la défense des enfants contre la pieuvre pédosadique, Judith Reisman nous livre sa dernière analyse des liens entre la révolution sexuelle, la philanthropie des Rockefeller et les manipulations de la CIA. Ou la collusion entre la dépravation sexuelle, la science sans conscience et les services secrets.

Marion Sigaut 

Cette traduction et présentation du dernier livre de Judith Reisman est le fruit d’un travail collaboratif. Aussi elle peut comporter des coquilles. Ce dossier vous est offert gratuitement, n’hésitez pas à nous soutenir.  La rédaction de Strategika

RÉSUMÉ

kinsey-la-face-obscure-de-la-revolution-sexuelle.jpgEn 1932, le communiste W.Z. Foster a prédit que la destruction de plusieurs facteurs – « enseignement, moralité, éthique, science, art, patriotisme, religion » – était nécessaire pour l’établissement d’un « Nouvel Ordre Mondial »[1]. La stabilité sociale, économique et sexuelle de l’Amérique reposait jusqu’alors sur les croyances et les lois judéo-chrétiennes : abstinence avant et fidélité pendant un mariage hétérosexuel consenti. La santé et la prospérité américaines attestaient du succès de ce modèle biopsychologique sexuel normal. À partir de 1941, quand l’Amérique s’engagea dans la Deuxième Guerre mondiale, la Rockefeller Foundation (Fondation Rockefeller) commença de financer les travaux du Dr Alfred Kinsey, qu’elle connaissait pour être un sadomasochiste bi- et homosexuel. Le soutien de la Fondation Rockefeller assura un succès immédiat au livre publié par Kinsey en 1948 sous le titre « Sexual Behavior in the Human Male » [Le comportement sexuel de l’homme] ; l’« échelle Kinsey » codifia la « fluidité sexuelle » pour la postérité, assurant à l’auteur une célébrité internationale durable. La Fondation Rockefeller mit Kinsey en relation avec un réseau plus vaste de scientifiques financés également par elle. À partir de 1946 environ, Kinsey travailla en partenariat avec le Columbia-Greystone Brain Project de la Fondation Rockefeller au « Snake Pit »[2] de New York, le Rockland Mental Hospital. Les résultats des études de Kinsey faisant état des réactions sexuelles de patients lobotomisés sont exposés de façon édulcorée dans le livre de l’intéressé paru en 1953 sous le titre « Sexual Behavior in the Human Female » [Le comportement sexuel de la femme].

Le présent document fournit de nouvelles preuves que les 2.034 enfants et bébés (nombre approximatif) violés sexuellement pour établir la « preuve scientifique » – affirmée par Kinsey et appelée à révolutionner le monde – d’un orgasme chez l’enfant et le bébé, ont été trouvés notamment dans ces institutions. 82% des expériences réalisées par Kinsey sur des enfants sont l’équivalent des « techniques d’interrogatoire renforcées » utilisées sur les détenus de Guantanamo Bay soupçonnés de terrorisme. Comme la définition de l’« orgasme » par Kinsey repose sur une symptomatologie qu’on ne peut distinguer d’une crise d’épilepsie, d’un accès de terreur ou de détresse et (ou) d’un traitement par électrochocs, les réactions physiologiques en lesquelles il prétend identifier  un « orgasme » enfantin étaient en réalité d’authentiques réactions traumatiques. Il s’agit donc là d’une fraude kinseyienne découverte récemment, alors qu’elle était présentée comme relevant de la « science » par ceux qui finançaient l’intéressé à la Fondation Rockefeller. Bien loin de confirmer l’authenticité du « choc » organique dans lequel on a voulu voir une spectaculaire découverte scientifique, le présent ouvrage soutient que les travaux sexuels de Kinsey ont servi en partie à des opérations psychologiques (ou OPSPSY)[3] plus poussées servant à justifier un changement social complet.

Alfred Kinsey.jpgDernièrement encore, en 2020, la Fondation Rockefeller s’est vantée d’avoir « financé une révolution sexuelle » par le biais des « rapports Kinsey ». Depuis 1954, on assiste à un blocage efficace des efforts déployés au Congrès pour enquêter sur les travaux sexuels de Kinsey et sur le lien de cause à effet entre la pornographie et l’augmentation incessante des abus sexuels commis sur des enfants. Ceux qui agissent pour les intérêts des Rockefeller ont empêché toute dénonciation publique de Kinsey, non sans promouvoir encore ses conclusions. C’est par l’intermédiaire de Playboy que Hefner, le « héraut de Kinsey », a vendu les mensonges de la Fondation Rockefeller et du protégé de celle-ci.

La retenue sexuelle des générations antérieures – celles qui ont construit l’Amérique – a été travestie en un monceau de fabulations hypocrites ; les relations sexuelles préconjugales, extraconjugales, insignifiantes et sans amour ont été présentées sous un jour séduisant ; et une génération entière ayant Hefner pour gourou a adhéré au cynisme vis-à-vis des relations humaines, au nihilisme et au rejet de toute sagesse reçue. Le Code pénal modèle (MPC) – financé par la Fondation Rockefeller en 1955, élaboré par une équipe ayant l’approbation de celle-ci et citant Kinsey – prétendait inverser les lois relatives au comportement sexuel, y compris celles de 1957 réprimant l’obscénité, et il banalisait les abus sexuels. En 1964, le Conseil d’information et d’éducation sur la sexualité des États-Unis (SIECUS), créé par Playboy et ayant son siège à l’Institut Kinsey (KI), enseignait aux écoles à dénigrer la chasteté, l’hétérosexualité et la monogamie. Bientôt, les dérogations à la législation contre l’obscénité autorisées dans le domaine de l’« enseignement » permirent au projet d’éducation sexuelle K-12 (du jardin d’enfants à la Terminale) d’enseigner aux enfants des comportements sexuels érotiques. Il en a inévitablement découlé une progression constante des viols d’enfants, de la pornographie et des maladies sexuellement transmissibles (MST). En 2014, l’Institut Kinsey a obtenu un statut consultatif auprès des Nations Unies s’agissant des matériels « éducatifs » qui ont pour but de surmonter les instincts d’autoprotection les plus fondamentaux des enfants de tous âges, préparant efficacement ceux-ci à coopérer avec le programme de changement social de la Fondation Rockefeller. Depuis 2019, l’application du KI intitulée « Kinsey Reporter » incite les « scientifiques citoyens » (de tous âges) à enregistrer et signaler anonymement tous les actes ou crimes sexuels. Une enquête congressionnelle sur le réseau criminel constitué par la Fondation Rockefeller, KI, Big Pharma, Big Porn, Big Abort[4], ainsi que les pourvoyeurs et éducateurs en « santé sexuelle », passés et actuels, s’impose d’urgence afin de mettre un terme aux dommages que ces entités ont infligés à trois générations successives dans leur volonté obsessionnelle de mettre en place un Nouvel Ordre Mondial.

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[1] William Z. Foster (1932-2016). Toward Soviet America, Hauraki Publishing, Kindle Edition, p. 313.

[2] NdT (Wikipedia) : Mary Jane Ward (ou M. J. Ward), née en 1905 dans l’Indiana et décédée en 1981, était une musicienne et romancière américaine connue pour son roman « La Fosse aux serpents » (The Snake Pit) publié en 1946, puis devenu un film sous le même titre en 1948. Elle s’est mariée à vingt-huit ans à un statisticien. Elle souffrait de troubles psychotiques lorsqu’elle a été hospitalisée au Rockland State Hospital de New York en 1941.

[3] Opérations psychologiques…destinées à faire passer des informations et des indicateurs choisis à des publics dans le but d’influencer leurs émotions, leurs motifs, leur raisonnement objectif, de même que le comportement des gouvernements, organisations, groupes et individus.

[4] NdT : c’est-à-dire – outre la Fondation Rockefeller et l’Institut Kinsey – les grands laboratoires, les éditeurs de pornographie et les partisans de l’avortement.

Présentation vidéo du dossier de Judith Reisman par Marion Sigaut :

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jeudi, 17 décembre 2020

Lessons from the Collapse of Catholicism in France

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The Postwar Triumph of Social Liberalism
Lessons from the Collapse of Catholicism in France

Ex: https://www.unz.com

Jérôme Fourquet’s The French Archipelago provides a kind of dynamic radioscopy of the French nation as she has developed in recent decades. The picture, as detailed in my review of the book, is one of the fading away of the old sociological left and right, leaving behind a fragmented subcultural and political landscape, divided in multiple ways along educational/economic, ethnic, and religious lines.

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As part of this, Fourquet meticulously documents the decline of Catholicism and the triumph socially liberal values in postwar France. The pollster identifies a number of patterns which are instructive both for France and other Western nations, which are virtually all experiencing similar changes.

The decline of Catholicism in France is overwhelming and apparent in innumerable areas:

  • Baptism: once overwhelming, down to around 30% of newborns in 2015 (p. 25)
  • Regular mass-going: from 35% in 1961 to 6% today.
  • Divorce: taboo until the 1960s, then steadily rising.
  • Marriage: once a “hegemonic social norm,” declining since the 1973 Oil Shock (p. 37). Out-of-wedlock births have steadily risen from 5.9% in 1965 to 59.9% in 2017. A caveat: this figure is not synonymous with broken homes and single mothers, as many unwed couples live together, typically within a civil union (PACS, p. 42).
  • Abortion: 48% of French supported in 1974 (moreso among the young), with hegemonic 75% support across generations in 2014 (p. 44).
  • Gay marriage: steady support of over 60%, though only around half of French support adoption by gay couples, with some fluctuation (p. 48). Older people’s opinion on the matter is rapidly converging with the young, with little class divide.
  • Gay children: There is a marked male-female divide on the acceptance of homosexuality among one’s children. In 2000-03, two thirds of women said they would be perfectly happy with their child being gay, but only half of men said the same (p. 52).
  • Medically-assisted procreation: half of French support allowing lesbians and single mothers to conceive children through in vitro fertilization, with the mention that “fatherless children” would be born. Two thirds of young people support the measure (p. 55).

Catholicism’s decline to marginality and even oblivion in France is evident from the number of Catholic priests. In 1950, there were about as many priests and monks in France as during the French Revolution in 1789 (around 170,000, bearing in mind the general population had more than doubled). Today, they number only 51,500 and the authors predict that Catholic parish priests will be a virtually extinct breed within 30 years (p. 28).

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Number of Catholic diocesan priests in France

At the end of the nineteenth and in the early twentieth centuries, France provided three quarters of the Catholic missionaries proselytizing in Africa and Asia. Today, in a dramatic reversal, the bulk of new Catholic priests comes from the Third World. Some African prelates, such as Cardinal Robert Sarah, have themselves expressed grave alarm at Europe’s godlessness, infertility and invasion by Muslim immigration.

Catholicism has gone from forming the core of one of France’s two primary subcultures to merely one subculture for the 6-12% of French who remain practicing Catholics (6% being the ones who go to mass, 12% those who claim to be practicing). Even these have embraced many aspects of social liberalism (e.g. acceptance of sex before marriage). Practicing Catholics tend to be older than the general population.

Fourquet also documents other social changes. Only Muslims and practicing Catholics still prefer the traditional funerary practice of burial, with a majority of French now wishing to be incinerated after death (p. 57). Fourquet links this to the fact that most people no longer live in their old villages near to their ancestors’ graves and thus no longer feel the importance of lineage.

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Tattooing used to be a very marginal practice (sailors, soldiers . . .) but has steadily risen and now stabilized, with a quarter of young people having tattoos (p. 59). Tattoos and the adoption of rare names represent “a major phenomenon of today’s societies: mass narcissism” (60). There has also been a steady growth in the number of young people who have engaged in oral sex.

The attitude of the French towards animals is also changing. In the mold of the Old Testament, the French used to consider animals as essentially humans’ slaves, to be used however they saw fit. Today, two thirds of French oppose the use of circus animals or the stuffing of geese to make famous French delicacy of foie gras. “Anti-specism” is a new fashion among academics and talking heads.

The evolutionary meaning of traditional culture

Many see in the decline of Catholic practice and customs a triumph over the irrational superstitions inherited from the ignorant past. Even a secularist should ask however: How did these values come to predominate and what do they represent?

In The Descent of Man, Charles Darwin himself had stressed that traditional cultures tend in a crude and primitive way to be guided by what is good for the community: “The judgment of the community will generally be guided by some rude experience of what is best in the long run for all the members; but this judgment will not rarely err from ignorance and weak powers of reasonings.”

Many traditional cultures, including those of the West, emphasize patriarchy, the specialization of gender norms, child-rearing, and familial responsibilities. It’s easy to conceive how nations and families adhering to such norms would naturally outcompete those who did not.[1] This is especially so if we recall the conditions of premodern life: a fairly high fatality risk for pregnant mothers, high infant mortality, and constant struggle – undertaken especially by men – in the physical and social world to secure the one’s security and livelihood.

After the Second World War, the emergence of an affluent society meant that the egalitarian and individualist tendencies of liberalism, which had always been present since at least the eighteenth century, would dramatically radicalize and upturn the social order.

Human beings have always chafed against the apparently, and often actually, arbitrary rigors and constraints of their particular culture. As the sophist Hippias is supposed to have said some 2400 years ago: “I regard you all as relatives and family and fellow citizens – by nature, not by custom. For by nature like is akin to like, but convention is a tyrant over mankind and often constrains people to act contrary to nature” (Plato, Protagoras, 337c-d).

Put simply, young people increasingly could no longer accept the traditional familial and religious constraints of the past and no other coherent value system could rise to replace them – besides, precisely, an ethos of individual entitlement. What’s more rising prosperity and the welfare state actually meant that people could, more and more, get by materially with looser family ties. The father and husband’s economic responsibilities to the household were increasingly substituted by the corporation and the State.

Patterns of cultural change: deep generational shifts, not events

Fourquet identifies a recurring pattern to these trends: the new values first emerge among French youth and the secularizing geographical core (the greater Parisian basin in particular), then gradually spread to the whole population and territory. He does not discuss whether the media and educational systems shape these youthful attitudes, or whether these arise more spontaneously.

It is easy to underestimate the scale and speed of social changes because of a generational lag effect: even as the youth overwhelmingly adopt a new practice, one may have the impression the country has not changed much because the older generations representing the bulk of the population have not adopted them. The effect has gotten more marked as the French population has aged, the average now being over 41 years old.

When the population is evenly split on a new social practice, Fourquet describes this as like a chemical “unstable equilibrium” which can rapidly shift as the old generation dies out and the new norm becomes hegemonic. Indeed, eventually the old adopt the new norms, sometimes even before dying out. All these trends remind us of the importance of the young, as against the peculiar obsessions and taboos of older generations.

On all these issues, Fourquet shows that events tend to have a marginal impact on the overall trend. Neither the infamous May ’68 protests nor Pope Paul VI’s July 1968 encyclical Humanae vitae recalling of the ban on contraception seem to have had much impact. The decline of mass attendance did see a bump when it became no longer mandatory to attend systematically to receive communion, but this was only an accelerant.

France’s spectacular 2012 anti-gay-marriage protests, with hundreds of thousands of people marching across the country, may have a served as a moment of organization and consolidation for French conservatism, but appears to have had little impact on opinion. There appears to be a fait accompli effect whereby a portion of population switches to supporting a measure once it is passed into law.

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French public support for gay marriage (in blue) and adoption by gay couples (in red)

The appeal of liberal nihilism

The basic human drive beneath these changes seems quite straightforward: a rejection of traditional constraints in favor of new norms concerned primarily with maximizing personal choice and economic security.

It is unclear what are the limits, if any, to the disintegration of traditional norms, roles, and identities. The French have disconnected sex from procreation (contraceptives, abortion), mother-father complementarity in parenting (divorce, gay marriage), and the idea of the individual as part of a lasting family, lineage, or nation.

Fourquet highlights as an example of the reigning moral relativism the comments of Jean-François Delfraissy, President of the National Consultative Council on Ethics (CCNE), who said in 2018 that “The refusal to establish a framework or to give reference points is seen at all levels of society,” that “everyone has their own vision of ethics,” and that he did know what “good and evil” are (p. 56). Ultimately for Fourquet, what matters is demographics: “You [the losing side of culture wars] are philosophically wrong because you are sociologically and demographically in the minority” (p. 64).

The biotechnologies of enhancement . . . and disintegration

We can go much further on the road of identitarian disintegration. Will the youth accept transgenderism – that is to say the rejection of biological sex as such, letting people “choose” their sex, whatever their chromosomes or genitalia, through genital self-mutilation and hormonal manipulation? There is currently little pushback across the West, with the partial exception of the irreversible mutilation of children by transgender activists (see the recent court ruling in England requiring children under 16 to get court approval to access puberty blockers).

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With new biotechnologies, disintegration of traditional identities can go much further. Currently, enhanced reproductive techniques (procréation médicalement assistée or PMA, including notably in vitro fertilization or IVF) are only legal in France for heterosexual couples. However, there are efforts underway, which will likely be successful and widely accepted, to broaden access to PMA to single mothers and lesbian couples. After all, many ask, why shouldn’t such women be able to have children? The effect will be to have new generations of children willingly deprived of their biological father. The fatherless child may well become a normality. Such practices are already legal in France’s neighbor Belgium.

Single women and lesbians with access to IVF can of course choose from a wide variety of sperm without having to seduce the father. This is likely having eugenic and Nordicist effects as women disproportionately choose sperm from well-educated, healthy, and attractive White fathers. The demand seems to be strongest precisely where northern features are scarce. Serbian women, including Gypsies it seems, are fertilizing their eggs with Danish sperm. Indeed, Danish sperm is perhaps the most popular in the world. In multiracial Brazil, White Americans’ sperm is extraordinarily popular. Such practices further loosen the ties between fatherhood, family, and race.

Then there is the practice of surrogacy or gestation pour autrui (GPA), in which a woman carries to term another person’s embryo. Women who can’t or don’t want to face the hardships and risks of pregnancy could pay another woman to carry their child for them. Homosexual males, who obviously cannot become pregnant, could do the same. This could become a particularly profitable business in which Third-World women in particular could carry wealthy couples’ children. Pierre Bergé, the wealthy homosexual owner of the fashion label Yves Saint Laurent, once notoriously defended the marketization of surrogacy on television saying: “I am for all freedoms. Whether you rent your belly to make a child or rent your arms to work in a factory, what’s the difference? It’s the distinction which is shocking.”

Another technique is artificial gametogenesis. Scientists are learning how to create sperm or ovules from an organisms’ other cells. The most obvious application is in allowing infertile heterosexual couples to create working sperm or ovules and thus conceive. However, there are more radical possibilities: such techniques could enable you to create sperm from a woman or an ovule from a man. Lesbian couples could then have biological children as a couple as such. (Try to wrap your head around the implications for “motherhood” and “fatherhood.”)

The most promising techniques for eugenicists are embryo selection and CRISPR gene editing. The former already takes place in a certain sense: it is common practice in many countries for a woman to abort her fetus if it is found to have severe congenital defects such as Down’s syndrome. Wider embryo selection would allow parents to choose to a child with more genes predisposing to certain traits, such as intelligence or good health, without genetic modification. CRISPR could enable almost unlimited possibilities, including the creation of monstrosities.

Such biotechnologies, which are in principle neither good nor bad and anyway are probably inevitable in the long run, become dangerous in a nihilistic context like ours.

Catholic embers

Still, we should not write off traditional values yet. Fourquet also highlights another trend: the more economically backward, farmer-heavy, and religious regions of France in 1960 – especially concentrated in the western regions – are today among the most economically dynamic and socially cohesive. Demographers Hervé Le Bras and Emmanuel Todd have attributed this to what they call “Zombie Catholicism,” though it might be fairer to speak of residual Catholic traditional values. Fourquet “completely agrees with their analysis when they describe, for example, the higher educational performance and greater social cohesion reigning in the Grand Ouest as being the shadow of Catholicism, whose flame has since gone out” (p. 14).

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Percentage of farmers as a share of the active population in 1968

By contrast, the precociously dechristianized and industrialized regions of northern and eastern France are now economically depressed and culturally alienated. The Whites there often in a bad state. This may be because of the collapse of traditional values which imposed some structure on lower class Whites’ lives. This is an intriguing hypothesis. Then again, the reversal of economic fortunes between western and northeastern France may also be part of a cycle of difficult economic reconversion for regions heavily invested in now-obsolete industries.

In any case, religious minorities often have high fertility while liberal nihilists, understandably, do not. For those who see no particular importance for lineage, nation, or God, who consider that all human beings are basically equal atoms in an empty universe, raising children naturally seems a meaningless chore or, at best, a mere lifestyle choice. Enhanced or modified reproduction, at this is stage, make up a very small minority of births.

In France, Catholic religiosity is not synonymous with being a hick. Rather, provincial bourgeois Catholic families are famous for being high-functioning, educated, and high-fertility, providing the cadres for the country’s anti-gay-marriage movement in past years. A friend of mine from my university days is such a Catholic, an engineer, apologist of Marshal Philippe Pétain (finding “Work, Family, Fatherland” a much more constructive slogan than “Liberty, Equality, Fraternity”), and is currently expecting his fifth child.

But how significant are high-functioning Catholics actually? This is difficult to say, as there is a lack of data. It is noteworthy that today’s practicing French Catholics are much more likely to be religious out of sincere individual zeal rather than socially conformist pressure. If we look a century or two ahead, assuming humans are still ruling the roost, it seems probable the Earth will naturally fall to believers.

Notes

[1] Of course, traditional norms are not uniformly adaptive in an evolutionary sense. In Catholic Europe, the specific expression of these norms was partially determined in a top-down fashion by the particular doctrines of the Church. Several important Catholic doctrines may be considered maladaptive or dysgenic, notably the the sacralization of fetuses (retarding the development of medical technologies), the ban on abortion, and the drive to convert all human beings to the faith regardless of ethnicity.

lundi, 14 décembre 2020

Télétravail, la rupture...

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Télétravail, la rupture...
 
par Hervé Juvin
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin,  cueilli sur son site personnel et consacré aux conséquences de la généralisation du télétravail provoquée par les les mesures sanitaires de lutte contre l"épidémie.

Économiste de formation et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Candidat aux élections européennes sur la liste du Rassemblement national, il a publié récemment un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

Télétravail, la rupture

Et si les conséquences politiques et sociales de la réponse au COVID19 comptaient à la fin bien plus que les effets directs et indirects de la maladie ?

Télétravail, des heureux

Et si la réponse au COVID19 avait accéléré la fin de la société salariale européenne, de sorte que c’est est fini du travail au bureau, des immeubles de bureaux, et de la vie au travail telle que la société du tertiaire l’a réalisée et vécue pendant un demi-siècle, partout en Europe, telle qu’est s’est généralisée au point que l’universalisation du salariat semblait écrite ?

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Cette société de conseil, sise à la Défense, réduit sa superficie de bureaux des deux tiers, économisant au passage plusieurs centaines de milliers d’euros de loyers, et adopte le principe du « deux tiers télétravail ou chez le client, un tiers au bureau ou chez le client ».

Ce cadre dirigeant d’une banque voisine le reconnaît à mi-voix ; après un premier confinement (raté) à Paris, un second confinement (réussi) sur le bassin d’Arcachon, devenu virtuose dans l’art de manier téléconférences et webinaires, l’idée de revenir au bureau chaque jour de la semaine est devenue totalement improbable, et le travail à distance s’impose comme une évidence.

Et ces investisseurs britanniques et luxembourgeois de faire leurs calculs ; mettre en télétravail la majeure partie des salariés employés des sociétés dans lesquels ils ont investi, économisé l’espace de bureau, les abonnements et les frais correspondants, peuvent augmenter les dividendes de moitié dans l’année !

Ils ne font que tirer objectivement les conséquences financières d’un état de fait que bien peu semblent vouloir regarder en face ; les entreprises, et en fait leurs actionnaires, ont réussi ce dont ils rêvaient depuis longtemps, reporter le coût de l’outil de travail sur le salarié. Nous en revenons au travail à domicile, au travail à façon, au travail à la pièce !

Le télétravail soulève de vraies questions pour notre société

C’est entendu, le salarié pourra, ou devra, être en télétravail la majorité du temps — rappelons que dans une France dont les services représentent plus de 70 % de l’activité, c’est à peu près le tiers des salariés dont la nature du travail n’implique pas la présence physique sur le lieu de travail, chez le client, ou dans un lieu défini ; le déport des tâches vers le client final (par exemple dans la banque, qui rêve de fermer ses guichets et de déporter toutes les opérations sur le numérique) accélère l’évolution en ce sens.

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Qu’en est-il du télétravailleur ? Qu’il travaille depuis son appartement, sa résidence secondaire, ou un bureau qu’il a loué, c’est à lui d’assumer le coût de son lieu de travail, des abonnements d’électricité, de chauffage, d’Internet qui vont avec, et de son poste de travail (bien sûr, certaines entreprises prendront tout ou partie de ces coûts en charge. Seront-elles les plus nombreuses ?) Et, pour les entreprises qui n’ont pas de chèques déjeuner, et au titre de dispositions récentes du gouvernement, c’est à lui de supporter intégralement le coût de ses repas. Il est généralement estimé qu’un poste de travail acceptable occupe au moins 5 min 2 s à 6 min 2 s. Pour certains, le prix du m2 est négligeable ; à Paris, ou dans les autres métropoles, disposer d’un bureau individuel pour télétravailler est un luxe qui se paie, et quine pourra pas toujours se résumer à occuper un coin de la table de la cuisine, ou du salon !

L’organisation concrète du télétravail dans la durée pose des questions à ce jour peu résolues. Celles bien sûr de la construction et de l’animation du collectif ; que devient l’équipe, le service, l’entreprise même, quand les contacts à distance se substituent à la proximité du lieu de travail commun ? Et que devient cette fabrique de l’intelligence collective et de l’intimité professionnelle qu’est la machine à café, ou le restaurant d’entreprise ? Celles de la gestion du temps de travail, de la disponibilité et de la présence au travail.

Vers une réorganisation complète du lien salarial !

Qui n’a des exemples des débordements auxquels les mails, les téléconférences, les messages « urgent » envoyés à des heures baroques, soumettent des salariés qui de fait, n’ont plus d’horaires — c’est-à-dire ne ferment plus jamais la porte du bureau ; ils n’ont plus de bureau ! Et qui n’anticipe une déstructuration des temps sociaux qui transforme tout ce que nous croyions savoir sur la séparation entre temps de travail et loisir, entre présence au bureau et temps amical ou familial, etc. ? Le plus grave est d’une tout autre portée ; elle touche le fonctionnement démocratique lui-même. Le contact direct, dans l’entreprise comme entre citoyens, permet de confronter les points de vue, d’opposer les opinions, de creuser les désaccords — pas la téléconférence. La fabrique de la bonne décision, comme celle du vote, suppose cette expression qui peut avoir lieu en face à face, mais que les figurines en damier sur l’écran de « zoom » ne permettent pas. Dans l’entreprise comme à un Parlement européen tenté par le « tout virtuel », il faut mesurer ce qui est perdu, et qui s’appelle construction collective de la décision et du choix.  

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Il est plus que vraisemblable que les entreprises saisissent l’occasion donnée par la réponse publique à la pandémie, le télétravail, pour pérenniser et généraliser une modalité de travail qui a pour elles d’immenses avantages, au moins à court terme — et d’abord, celle de diviser les prix de leurs loyers et de leurs fournitures. Et il est tout aussi vraisemblable que cette occasion débouche sur une remise en cause du salariat, comme lien de subordination, comme engagement réciproque dans le temps, et comme institution de socialisation. Quand tout le travail est effectué « à la maison », avec un contact épisodique avec le chef de service, le manager ou le directeur qui agissent en donneurs d’ordres et en maître d’œuvre, avec un contrôle qualité et des livrables prédéfinis, qui a dit que le mot de « salarié » avait encore un sens ? Que deviennent la subordination et le lien hiérarchique, sinon ceux d’un prestataire à son client ? et quelle est la différence en un salarié en télétravail permanent, et un contrat de service de longue durée ?

Les expériences accumulées récemment, comme les expériences plus anciennes conduites dans des entreprises (EDF, etc.) et sous le contrôle de syndicats attentifs ont mis en avant l’ambigüité du télétravail, les risques de désocialisation qu’il peut entraîner, la difficulté à maintenir des rythmes de vie structurés, la difficulté plus grande encore à partager le savoir et à faire progresser la communauté de travail en mutualisant les retours d’expérience. La pression du court terme laisse peu de choix aux entreprises. C’est là que la politique sociale et conventionnelle devrait reprendre ses droits. Comme politique industrielle, comme politique des revenus, politique de l’emploi et politique du travail ne sont pas des gros mots.

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Et tout indique, des effets inouïs du numérique aux pratiques issues de la pandémie, qu’aucun gouvernement ne pourra longtemps laisser sans y répondre une situation qui conduit à la fois à l’éclatement du salariat comme nous l’avons connu, à une précarisation de l’emploi et des parcours professionnels sans précédent, à une « ubérisation générale » des emplois (nombre de professions dites « intellectuelles » se trouvant ravalées au rang de « petits boulots » précaires), et peut-être aussi à des libertés des offreurs de compétences et de services qui peuvent déboucher sur de nouvelles dynamiques et de nouvelles performances — hors de l’entreprise comme nous la connaissons, et de l’emploi comme nous l’avons connu.

L’entreprise comme assembleuse de compétences externes, l’entreprise comme conceptrice et ordonnatrice de réseaux de prestataires travaillant à la demande ; le travail comme travail à façon, travail à la demande, le travail comme prestation de service, disponibilité, ou vente d’informations ; ni les entreprises seules, ni les salariés devenus autoentrepreneurs, seuls, n’ont la capacité d’organiser, structurer et sécuriser leurs relations, et d’organiser la nouvelle société qui remplace déjà la société salariale. Car l’État seul, et les institutions, et la négociation collective peuvent faire de cette transformation un progrès, et assurer que la facilité du télétravail et le mirage du travail chez soi débouchent bien, pour finir sur le meilleur travail et la meilleure activité.

Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 1er décembre 2020)

dimanche, 13 décembre 2020

Immunité physiologique et immunité sociale

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Immunité physiologique et immunité sociale

Laurent Ozon

Les études de biologie et d’immunologie révèlent la centralité de la notion d’immunité dans le paysage médical contemporain sous l’effet de l’augmentation foudroyante des pathologies immunitaires. D’autres études de psychologie évolutionnistes révèlent simultanément que la notion d’immunité pourrait, sans risque d’abus, être la clé de lecture des marqueurs politiques et idéologiques dans les sociétés occidentales. A l’heure des épidémies faut-il s’attendre à un retour brutal des stress de conservation ?

Le soi, le non-soi et le soi-modifié

Selon le Larousse, l’immunité est définie comme « l’ensemble des mécanismes de défense d’un organisme contre les éléments étrangers à l’organisme ». Les immunologistes la considèrent comme un mécanisme de conservation : « la physiologie du système immunitaire est conservatrice et auto-réactive. Et les pathologies dérivent des défaillances de ces mécanismes de conservation ». Le système immunitaire repose donc sur la capacité initiale à reconnaître le soi, le non-soi et le soi-modifié, c’est à dire à identifier les corps étrangers ou devenus étrangers (soi modifié) puis ensuite, à identifier ceux qui doivent être combattus, détruits ou compensés. Les pathologies immunitaires peuvent être classées en trois catégories : les pathologies liées à une immunité déficiente, celles liées à une immunité exubérante et les pathologies dites auto-immunes. Les premières relèvent d’un affaiblissement et parfois d’une disparition totale du système immunitaire où l’organisme ne se défend plus. Les secondes, dites exubérantes, désignent des réponses excessives du système immunitaire (la plupart des mécanismes allergiques) et les troisièmes, dites auto-immunes, s’attaquent aux constituants normaux de l’organisme en ignorant ses pathogènes par le fait que le système immunitaire ne reconnaît plus le soi du non-soi.

Un regard immunologique sur les sociétés humaines

Diabète de type 1, Sclérose en plaques, maladie de Crohn, Lupus, polyarthrite rhumatoïde, cancer et maladies cardiovasculaires, dépression, SIDA, mais aussi épidémie de Coronavirus, l’explosion des maladies liées à des pathologies immunitaires a placé la notion d’immunité au cœur des problématiques médicales actuelles.

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En énonçant ces généralités, on comprend pourquoi de nombreux intellectuels, critiques sociaux ou scientifiques ont été tenté d’extrapoler en définissant les mécanismes et les contours d’une immunologie sociale, vers un regard immunologique porté sur la société humaine.

Les mécanismes immunitaires sociaux suppléent aux mécanismes immunitaires individuels.

On a tout d’abord parlé d’« immunité sociale » pour désigner les mécanismes sociaux par lesquels une collectivité établit une immunité collective. Nathalie Stroeymeyt, Sylvia Cremer ou Janine Kievits, ont ainsi étudié les mécanismes d’immunité sociale chez les insectes sociaux, à savoir la résistance des colonies aux pathogènes grâce à des mécanismes sociaux (organisation, relation, etc.). Des recherches qui ont révélé les liens entre la faible immunité individuelle et la forte immunité sociale des colonies : « l’abeille a moins de gènes de défense, situation probablement liée au fait qu’elle dispose d’autres moyens pour lutter contre les microbes et parasites. Car l’abeille a d’autres armes : elle vit en colonies. ».

Les mécanismes immunitaires sociaux viendraient ainsi suppléer aux mécanismes immunitaires individuels. D’autres chercheurs (par exemple Simon Babyan de l’Université d’Edimbourg) ont étendu cette notion d’immunité sociale à toutes les espèces sociales, rappelant que dans les espèces sociales, et bien évidemment dans les sociétés humaines , « la combinaison du contrôle comportemental de l'infection - par exemple, la ségrégation des malades, l'élimination des morts, l'évaluation de la qualité des aliments et de l'eau - et l'agrégation des individus immunisés, peuvent protéger les membres non immunisés contre la maladie ». A ce stade, l’on évoque la façon dont un groupe social se dote de mécanismes immunitaires collectifs qui viennent compléter les défenses individuelles de ses membres face à des agressions d’agents pathogènes extérieurs.

De l’immunité sociale à la sociabilité immunitaire

C’est à ce stade que les recherches de Joshua Tyburg, (professeur agrégé de psychologie enseignant à l’Université Libre d’Amsterdam) permettent d’approfondir et surtout d’élargir l’approche immunitaire pour comprendre les sociétés. Il s’agit de passer de l’étude de l’immunité sociale (stratégies sociales à fonctions immunitaires) à une socialité immunitaire, c’est à dire à une réinterprétation des stratégies et comportements sociaux d’un point de vue immunitaire.

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Joshua Tyburg, cherche à expliquer les bases du comportement humain conservateur en remontant aux sources du dégout comme transposition de comportements d’évitements anti- pathogènes, afin de permettre à la société de passer du «rejet à l’acceptation ». Il mobilise ainsi dans ses recherches les études démontrant que la perception du dégoût est à proportion plus forte chez les individus aux opinions les plus conservatrices sur le plan des mœurs, des valeurs et en matière politique.

Tyburg cherche en effet à mieux comprendre les comportements humains et en particulier les stratégies d’accouplement, la moralité et la perception des risques pathogènes en vue de faciliter selon lui le passage « du rejet à l’acceptation ». Sa méthodologie de travail le porte à étudier les causes et manifestations du dégoût (répulsion puis évitement) pathogène, sexuel et moral. Des manifestations dont les bases génétiques ont été largement prouvées par une étude de l’American Psychologist Association en 2015. Cette étude prétendait, elle aussi, contribuer à mieux comprendre les nombreux comportements normaux auxquels le dégoût est lié, y compris les préférences de partenaire les idéologies politiques et l'évitement social.

Dégoût et immunité

Les recherches de Joshua Tyburg comme celles Debra Lieberman (Département de psychologie de l’Université de Miami) ont permis d’avancer sur plusieurs constats. D’abord, la perception de dégoût peut être considérée comme une manifestation immunitaire, au moins dans la mesure où le dégoût des pathogènes en particulier, influence naturellement l'évitement des contacts mais aussi le choix des aliments, la coopération sociale et le choix du partenaire et donc les orientations sexuelles (Current Opinion in Psychology 2016, 6/7/11).

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Ces manifestations de rejet ne sont pas anodines puisque plusieurs scientifiques du XXe et du XXIe siècle ont noté que de nombreux objets qui provoquent le dégoût contenaient objectivement des agents pathogènes (Drs. Curtis, Aunger et Rabie du Département de Biologie de la Royal Society, 2004), que la sensibilité et la perception de dégoût diminuait avec l’âge (comme l’efficacité du système immunitaire), que le sentiment de dégoût est un facteur central dans les apprentissages des normes, de valeur et de culture (P. Rozin, A. Fallon, American Psychological Association, 1987). Ainsi, des études ont démontré que les femmes avaient des manifestations de dégoût et des perceptions xénophobes nettement plus accentuées en période d’ovulation et plus largement durant leur âge de reproduction. Je n’ai trouvé aucune étude symétrique concernant les modifications hormonales affectant les capacités de reproduction, leurs éventuels liens avec une diminution de l’efficacité immunitaire, l’atténuation des manifestations de dégoût ou la xénophobie.

Les liens entre stress immunitaire et conservatisme

Enfin, et logiquement, Tyburg, dans une étude publiée en 2015 par Evolution and Human Behavior s’est penché à nouveau sur la triangulaire dégoût (répulsion et évitement), stratégies sexuelles (fréquence des rapports, choix des partenaires, etc.) et système de valeurs (plutôt progressiste ou plutôt conservateur). Sans surprise, les résultats confirmèrent que le stress contre le parasitisme et la sensibilité au dégoût individuel (réaction à des images ou situations « dégoûtantes ») se manifestent plus fortement chez les individus adhérents à des normes traditionnelles ».

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Il existe donc bien une relation empirique entre la réaction immunitaire de dégoût et les options idéologiques dites « conservatrices » recensées ainsi: rejet de l’immigration, rejet de l’homosexualité, moindre confiance sociale élargie, mais aussi préférence pour des formes politiques moins éloignées et moins nombreuses, valorisation de la méritocratie plutôt qu’aspiration à l’égalité, intérêt pour les causes écologiques de proximité plutôt que mondiales, préférence pour la culture et les coutumes traditionnelles plutôt que l’expérimentation sociale, favoritisme intra-groupe, etc.

Tyburg note par ailleurs (Evolution and Human Behavior, novembre 2015, Vol. 36, n°6, Pages 489–497), qu’il convient de distinguer le conservatisme social (promotion d'un changement favorisant des traditions culturelles de longue date) d’un « conformisme social » ou d’une acceptation ou volonté de protection des acquis (salaire minimum ou prise en charge des frais de santé ) qui, eux, ne font pas apparaître chez leurs partisans, de corrélations particulières avec des manifestations immunitaires plus marquées de dégoût. De là à confirmer que le conservatisme idéologique est une manifestation immunitaire il n’y a qu’un pas, pas que Tyburg ne franchit évidemment pas.

Récapitulons : premièrement, les individus disposent d’un système immunitaire permettant à leur organisme de résister aux agressions extérieures et ce système fonctionne sur la capacité initiale à distinguer le soi, le non-soi et le soi-modifié. C’est l’altération de cette capacité de reconnaissance, fondamentalement conservatrice, qui engendre les pathologies immunitaires au nombre desquelles on compte la plupart des maladies dites génétiques ou de civilisation de notre époque. Deuxièmement, les groupes sociaux développent des capacités immunitaires c’est-à-dire des règles de communication et d’organisation qui assurent la prise en charge d’une part de ces fonctions immunitaires et, de ce fait, enlèvent à l’individu une partie de ses facultés immunitaires par transfert de compétences ou d’aptitudes. Troisièmement, les manifestations de dégoût par répulsion ou évitement sont largement corrélées à des manifestations idéologiques de dégoût ou d’évitement sexuels, moraux et sociaux. Quatrièmement, l’objet de ces manifestations de dégoût est lié à des pratiques factuellement à risque sur le plan pathogène, et par transfert, lié à des changements d’état importants sur le plan sociétal, social, sanitaire, axiologique et politique. Enfin, les chercheurs qui tentent d’analyser les phénomènes de « rejets » dans l’optique d’une amélioration de l’ingénierie sociale pour favoriser « l’acceptation » de ces changements, identifient un mécanisme immunitaire qui sous-tend les marqueurs idéologiques conservateurs.

Stress et révolutions « conservatrices »

De fait, l’immunité devient un concept étendu à la psychologie sociale et donc à l’étude des marqueurs idéologiques et politiques de notre époque. A l’heure de la crise du coronavirus, de l’immigration de masse, les conservateurs sont-ils les agents d’une réaction immunitaire qui s’ignore ? Si oui, la question d’une lecture « immunitaire » des marqueurs idéologiques dits « progressistes » serait, elle aussi, sans aucun doute utile.

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Pour ne pas conclure, et sans avoir décrit précisément les mécanismes de compensation sociale des stress immunitaires, il serait utile d’évaluer l’impact de la pandémie du Covid19, de ses conséquences sur la confiance des populations à l’égard de la prise en charge immunitaire du groupe. Utile aussi de mesurer ses effets sur la diffusion des marqueurs idéologiques conservateurs dans la population, pour mieux comprendre ces mécanismes à l’avenir. Car si les groupes sociaux développent bien des capacités immunitaires qui délestent les individus d'une partie de leurs facultés immunitaires, une prise en charge insatisfaisante de ces fonctions par les collectivités, pourraient bien favoriser des stress durs qui alimentent la diffusion des marqueurs idéologiques conservateurs. Des marqueurs qui précèdent des révolutions, au fond toujours "conservatrices" dans leurs aspirations.

Laurent Ozon

laurent.ozon@me.com

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dimanche, 22 novembre 2020

L’itinéraire de Henning Eichberg (1942-2017)

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L’itinéraire de Henning Eichberg (1942-2017)

par Robert Steuckers

Bartsch-Günter+Revolution-von-rechts-Ideologie-und-Organisation-der-Neuen-Rechten.jpgJ’ai entendu parler pour la première fois de Henning Eichberg sous le pseudonyme de Hartwig Singer, dans un ouvrage important de Günter Bartsch, historien des idées contemporaines, du trotskisme, de l’anarchisme et des nouvelles droites. Le volume qui traitait des « nouvelles droites » après les événements de 1968 s’intitulait Revolution von rechts ? (1975). Bartsch avait parfaitement saisi la nouveauté et la pertinence des idées véhiculées par cette myriade de groupuscules très actifs, très soucieux d’étayer leurs affirmations impavides par des références théoriques solides, aussi solides que celles des marxistes de l’opposition dite extra-parlementaire, animée notamment par Rudi Dutschke. Dès la parution de cet ouvrage de Bartsch, découvert à la librairie du Passage 44 à Bruxelles, je me suis senti en communion avec ces idées véhiculées de Munich à Hambourg et de Cologne à Berlin. Bartsch lui-même avait eu un itinéraire fascinant, expliquant l’objectivité et l’empathie qu’il cultivait à l’endroit de toutes les mouvances qu’il étudiait et dont il explorait le corpus doctrinal. Né en 1927, mobilisé à 17 ans dans la Wehrmacht, membre du parti communiste allemand et animateur important de la FDJ (les jeunesses du KPD), il est déçu par la répression féroce du soulèvement populaire berlinois de juin 1953 et passe à l’Ouest, où il deviendra journaliste et enquêteur. Ses thèmes de prédilection ont été les mouvances politiques extra-parlementaires. Notons également que Bartsch se tournera à la fin de sa vie vers l’anthroposophie de Steiner, dont il tirera bon nombre d’enseignements pour fonder son propre mouvement « écosophique » qui le rapprochera de Baldur Springmann, pionnier de l’écologie folciste (völkisch), qui participera à l’Université d’été de « Synergies européennes » en 1998 dans le Trentin, où, âgé de 87 ans, il reçut un accueil des plus chaleureux par de jeunes Italiens, adeptes du style Wandervogel. Le livre de Bartsch a été déterminant dans mes options métapolitiques futures et ce livre demeure un classique qui devrait être relu sans relâche, pour bien connaître la généalogie de la mouvance « nouvelle droite ».

Dans l’ouvrage de Bartsch intitulé Revolution von rechts ?, Hennig Eichberg, alias Hartwig Singer, apparaît comme un théoricien qui entend discipliner le spontanéisme des droites nationales allemandes en réclamant un recours à l’empirisme logique ou empiriocriticisme du Cercle de Vienne. Ce recours au positivisme logique sera repris également par les Français de la future « nouvelle droite » qui se regroupaient à l’époque dans la « Fédération des Etudiants nationaux » et par la revue Nouvelle école qui consacra à cette thématique l’un de ses premiers numéros. Pour le positivisme logique, il faut que toute assertion soit vérifiable. C’est ce que l’on appeler l’option « vérificationniste ». A la suite de Wittgenstein et d’Ayer (philosophe et logicien anglais), les discours métaphysiques et idéologiques sont « prescriptifs »et non « descriptifs », ce qui les plonge dans des errements sans fin et dans l’incohérence. Tant la mouvance allemande de la « Neue Rechte » que son homologue française de la « nouvelle droite » abandonneront cette piste empiriocriticiste sans donner trop d’explication.

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En fait, cette piste abandonnée avait sa raison d’être politique et idéologique : Lénine, dans sa Critique de l’empiriocriticisme, s’en prenait à Ernst Mach dont se réclamait son concurrent au sein de la mouvance communiste-marxiste russe, Alexandre Bogdanov. Si, avec le recul, cette querelle au sein du marxisme russe avant la première guerre mondiale peut paraître oiseuse, l’intérêt pour le contexte, où elle s’est manifestée, renaît aujourd’hui en France et en Italie, avec la parution toute récente du livre de Carlo Rovelli, Helgoland (2020).

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Alexandre Bogdanov.

Rovelli est membre de l’Institut Universitaire de France. Il rappelle l’émergence de la physique quantique de Werner Heisenberg, qui introduit dans le discours scientifique des visions évoquant des « ondes de probabilité », des « objets éloignés mais connectés malgré cet éloignement », etc. Dans le chapitre 5 d’Helgoland, Rovelli nous ramène à Mach, Bogdanov et Lénine. Mach n’était pas un philosophe systématique : il tâtonnait encore à la fin du 19ème siècle. Il estimait que le philosophème « Matière », prisé par tous les matérialistes de l’époque, dont Marx mais surtout Lénine, était une idée toute faite, un ersatz de la divinité métaphysique, ce qui allait ramener la pensée à des clôtures sous un vernis pseudo-scientifique (des « enclôturements » répétitifs). C’est ce qui provoqua l’ire de Lénine, pour qui la tentative de Mach (et de Bogdanov) de ménager des « ouvertures » au sein même de la pensée matérialistse et de se débarrasser simultanément des affirmations trop « prescriptives », est une démarche « réactionnaire ». Or pour Mach, les phénomènes ne sont pas des manifestations d’objets, fermés sur eux-mêmes, mais, autre perspective, les objets sont des noeuds de phénomènes en interaction permanente. Mach a jeté les bases d’une critique de la mécanique newtonienne qui se projetait dans les idéologies libérales et marxistes, bourgeoises et pseudo-prolétariennes, dans toutes les vulgates politisées. Mach annonce, cahincaha, la future physique quantique de Heisenberg. Sur le plan même du « matérialisme », de l’étude de la matière, Lénine, en le critiquant rageusement, s’avérait lui-même passéiste, newtonien et donc « réactionnaire ».

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Toute critique du marxiste, il y a maintenant plus de cinquante ans ; quand Eichberg a amorcé son itinéraire politico-philosophique, devait nécessairement passer par une relecture critique de « Matérialisme et empiriocriticisme » de Lénine. Par un réexamen des positions plus souples et plus organiques de Bogdanov qui soulignait surtout l’historicité des phénomènes, donc leur mouvance perpétuelle, historicité qu’avaient aussi soulignée avant lui Marx et Engels et qu’apparemment Lénine ne retenait pas. Bogdanov reproche à Lénine de faire de la « Matière » une masse inamovible, inchangeable, immobile, figée. Bogdanov veut l’ouverture aux besoins réels et mouvants des peuples, ce qui est le désir fondamental des révolutionnaires de chair et de sang. Rovelli résume bien la problématique : « Au contraire, le programme politique de Lénine veut renforcer l’avant-garde révolutionnaire, détentrice de la vérité, qui doit guider le prolétariat » (comme aujourd’hui les experts et les sachants doivent guider et castrer les masses, par le martellement constant de la propagande médiatique ou par la peur artificielle fabriquée à l’aide de l’hypothétique covid-19).

Bogdanov, rappelle Rovelli, avait prédit « que le dogmatisme de Lénine congèlera la Russie révolutionnaire et en fera un bloc de glace qui n’évoluera plus, étouffera les conquêtes de la révolution, se sclérosera ». Outre le caractère prophétique de ces paroles de Bogdanov, on y perçoit le fil conducteur de la pensée d’Eichberg : le peuple, en tant que peuple, en tant que nodalité vitale de phénomènes biologiques, culturels et historiques, tous intimement entrelacés, doit se soustraite aux manipulations des experts autoproclamés. En avançant la nécessité de réétudier l’empirisme logique, Eichberg, sans nul doute, connaissait cette problématique propre aux révolutionnaires marxistes-léninistes, propre à la querelle Lénine/Bogdanov, ce qui ne semble pas avoir été le cas de ses homologues de la « nouvelle droite » française, qui ont embrayé furtivement sur son engouement pour l’empiriocriticisme, en y ajoutant, avec une certaine maladresse, l’interprétation finalement libérale de Louis Rougier (photo), puis en abandonnant ce filon sans donner la moindre explication. louis-rougier.jpgIls donnaient ainsi l’impression de virevolter au gré des modes et de n’être pas sérieux. Aujourd’hui, le travail de Rovelli ne semble pas susciter davantage d’intérêt chez eux. Pour Eichberg, ajouterions-nous, l’empirisme logique était spécifiquement européen (occidental) car il rejetait les instances figées pour observer des dynamiques à l’œuvre dans le monde et au sein même de la matière. Pour ses homologues français, cette spécificité occidentale, le « syndrome occidental » disait à l’époque Eichberg/Hartwig, servait à rejeter un déisme trop figé et, simultanément, un communisme tout aussi figé parce que léniniste et non bogdanovien (non proudhonien).

Revenons à la personne d’Eichberg/Singer. Retraçons son itinéraire. Originaire de Silésie, une province allemande annexée au lendemain de la seconde guerre mondiale à la Pologne, Eichberg vivra sa prime enfance en République Démocratique Allemande (RDA) pour arriver, avec ses parents, à l’âge de sept ans à Hambourg. Très tôt, à peine adolescent, il entre dans la dissidence politique que les médias mainstream appellent fielleusement « l’extrême-droite ».

Otto_Strasser.jpgSon premier engagement se fera, vers treize ou quatorze ans, dans la Deutsch-Soziale Union d’Otto Strasser. Par la suite, il sera un rédacteur régulier de la revue Nation Europa, fondée par Arthur Ehrhardt. Cette collaboration durera de 1961 à 1974. Cette assiduité militante ne l’empêche nullement de réussir de brillantes études de sociologie, notamment en explorant des thèmes tels que l’histoire de la technique et la sociologie du sport (sujet sur lequel il poursuivra une longue carrière universitaire, en Allemagne comme au Danemark). Sa culture actualisée et non nostalgique fait de lui la figure jeune la plus prometteuse de la petite mouvance néo-droitiste en Allemagne dans les années 1960.

A son option première pour l’empiriocriticisme, qui s’estompe chez lui au fil des années 1970, s’ajoute donc l’instrumentalisation métapolitique de diverses méthodologies tirées des sciences sociologiques et de leurs applications pratiques, notamment une expérience en Indonésie qui le conduira à développer un thème majeur de sa pensée, celui de l’ethnopluralisme : s’il existe certes un « syndrome occidental », qu’il avait posé comme « supérieur », l’option de Mach, sous-jacente chez lui, qui est, rappelons-le, d’observer les phénomènes et les dynamiques à l’œuvre en leur sein, le conduit à accepter comme phénomènes objectifs les modes de vie et les cultures des peuples non occidentaux. L’option ethnopluraliste était née.

En 1972, Eichberg est le premier, avec quelques camarades, à créer un mouvement qui a porté l’étiquette de « nouvelle droite », l’Aktion Neue Rechte. Il en rédige les statuts et en fixe les principes. Il infléchira cette opposition extra-parlementaire non gauchiste vers le corpus doctrinal allemand d’avant-guerre, celui des nationaux-révolutionnaires et des nationaux-bolcheviques. Ce retour à des sources datant de la République de Weimar s’effectuera dans des structures parallèles comme « Sache des Volkes » (= La Cause du Peuple), auxquelles nous nous identifierons à Bruxelles.

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Si Eichberg a eu une influence évidente sur le groupe français autour de la revue Nouvelle école, en métapolitisant l’empirisme logique pendant une brève période au début des années 1970, filon que les Français complèteront en sollicitant les œuvres de Louis Rougier et de Louis Vax. Cependant, cette piste restera en jachère, tant en Allemagne qu’en France, et les néolibéraux s’en empareront en la couplant aux idées métapolitiques de Karl Popper, à la différence que, pour Mach, était scientifique ce qui était observable et vérifiable, tandis que pour Popper, est scientifique ce qui est réfutable, position qui relie la forme poppérienne du libéralisme à la fois au criticisme déconstructiviste des gauchismes tirés plus ou moins des thèses de l’école de Francfort, au gendérisme qui réfute même ce qui est physiquement irréfutable, aux critiques des « sociétés fermées » et donc aux stratégies subversives des ONG de Soros (qui rejettent ce qui est vérifiable pour privilégier une praxis constante de « réfutation pour la réfutation »). La querelle philosophique Lénine/Bogdanov et le rejet léniniste des implications épistémologiques et pratiques du positivisme vérificationniste de Mach et de la future physique quantique de Heisenberg, pourtant déterminante dans la formation du paysage intellectuel européen au 20ème siècle, passent désormais au second plan dans les démarches et spéculations des « nouvelles droites ». Dommage. Navrant. Mais il faudra y revenir. Non pas pour ressasser une critique du marxisme-léninisme, aujourd’hui défunt, mais pour amorcer une offensive contre le néolibéralisme popperiste à la sauce Soros, où le principe poppérien de réfutabilité se voit sur-sollicité pour nier le réel observable : il y a dès lors alliance tacite entre la négativité, prônée par les figures de proue de l’Ecole de Francfort (Horkheimer, Adorno, Habermas), et la réfutabilité poppérienne, ce que ne laissait pas présager la querelle des sociologues allemands à la fin des années 70, où se profilait une dualité politique entre, d’une part, une social-démocratie réformiste, appuyée sur l’Ecole de Francfort, et un libéralisme pré-néolibéral, fondé sur le principe de réfutabilité de Popper et sur son rejet des « sociétés fermées » ou des « Etats fermés » (1).

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Dès la fin des années 1970, Eichberg abandonne lui aussi le filon empiriocriticiste, qu’il avait qualifié d’ « occidental », qu’il considérait comme l’apothéose de la pensée occidentale/européenne et comme l’indice le plus patent de l’identité européenne. Il opte pour une critique sociologique des « habitus » (Bourdieu), des modes vie standardisés de la société de consommation occidentale et américanisée, qui affecte durement la société allemande des années qui ont suivi immédiatement le miracle économique. Cet infléchissement de sa pensée s’effectue en parallèle avec bon nombre de filons classés à gauche, dans le cadre de la pensée contestatrice qui s’impose définitivement dans nos paysages intellectuels européens et nord-américains après les événements de 1968.

Sous l’influence d’une lecture du philosophe et ethnologue français Claude Lévi-Strauss, explorateur des sociétés les plus primitives, notamment en Amazonie, Eichberg théorise l’ethnopluralisme, idée-guide pour laquelle chaque peuple développe une culture propre, qui est un éventail de stratégies vitales disposant de leurs logiques et de leurs raisons propres et qu’il convient de ne pas édulcorer ou éradiquer. Seule la préservation de ces acquis ethnologiques, anthropologiques et historiques permettra de maintenir un monde sainement bigarré, non aligné sur un modèle unique comme celui de l’américanisme. Eichberg rejoint là Guillaume Faye quand celui-ci terminait la rédaction, en 1981, de son premier livre, Le système à tuer les peuples. Toujours au même moment, entre 1979 et 1981, Eichberg théorisait le « nationalisme de libération » (Befreiungsnationalismus), expression politique de son anthropologie pluraliste, de son fameux ethnopluralisme. Au cours de ces années-là, qui furent déterminantes pour mon évolution ultérieure, Eichberg entame une longue collaboration à la revue Wir Selbst (= Sinn Fein), fondée en 1979 par Siegfried Bublies à Coblence, toujours actif aujourd’hui en Allemagne. Le nom de cette publication prestigieuse et pionnière en bien des domaines provient directement de la valorisation par Eichberg du combat irlandais, particulièrement celui du syndicaliste James Connolly. Eichberg l’avait explicité dans un ouvrage programmatique, intitulé Nationale Identität. Là aussi, Eichberg fut pionnier sur le plan du vocabulaire, un inventeur de termes percutants. Le vocable « identité » connaîtra, à partir de ce moment, de multiples avatars au cours de ces quarante dernières années et définit aujourd’hui encore toute une mouvance contestatrice des idées dominantes, tant en France, qu’en Allemagne ou en Autriche, notamment avec Martin Sellner à Vienne, bien épaulé par son épouse américaine Brittany Pettybone.

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Pendant la querelle des missiles en Europe au début des années 1980, quand les Allemands surtout contestaient l’installation de missiles américains sur leur sol national, une fraction de la gauche, dont Peter Brandt, le fils de Willy Brandt, s’ouvre à la question nationale et rêve de la réunification, qui ne surviendra qu’après la perestroika de Gorbatchev. Eichberg, dans ce contexte nouveau, demeure toujours soucieux d’opérer des ruptures avec tous les ronrons politiciens ; il suit cette évolution de la gauche dutschkiste de manière plus qu’attentive, en même temps que Bublies. Il parvient à se faire pleinement accepter chez ceux qui, quelques années auparavant, se seraient déclarés ses ennemis : il accorde des entretiens dans plusieurs revues de la gauche intellectuelle allemande, dont Ästhetik und Kommunikation, Pflasterstrand, etc. Ce nouvel infléchissement trouvera son apothéose lors d’un débat avec Klaus Rainer Röhl, qui fut l’époux d’Ulrike Meinhof de la Bande à Baader, et Rudi Dutschke, leader de la contestation étudiante en 1967-68. Le titre du débat était significatif : « National ist revolutionär ».

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La percée d'Eichberg dans les institutions: cet ouvrage, publié par Westermann, destiné à la formation des maîtres d'école et des enseignants du secondaire, donne pour directives d'enseigner selon les principes de l'ethnopluralisme.

Au cours de cette décennie, Eichberg garde certes ses tribunes dans Wir Selbst mais s’éloigne de plus en plus des droites nationales allemandes, tout en acceptant, dès 1982, des postes de professeur d’université au Danemark. De plus en plus, Eichberg trouve les dadas et les discours répétitifs de la droite horripilants et ne s’en cache pas : sa plume, acerbe et programmatique, fustige les droites et tente de montrer en quoi elles sont condamnées à la stagnation et à l’implosion. Ses modèles restent certes Lévi-Strauss mais il mobilise aussi Michel Foucault, du moins partiellement, sans sombrer dans le festivisme délirant du philosophe français. Il voit en Foucault le philosophe qui a su prouver que les Lumières du 18ème siècle n’étaient pas libératrices mais au contraire avaient déployé toutes sortes de stratégies pour discipliner les corps d’abord, les peuples ensuite. La rigueur du panzercommunisme soviétique et la mise au pas doucereuse des âmes et des corps par le consumérisme américain sont donc des avatars pervers des Lumières, qui dissimulent leurs stratégies derrière un discours lénifiant. C’est là un point de vue partagé, mutatis mutandi, par Guillaume Faye qui, pourtant, n’a jamais trop sollicité Foucault mais plutôt le dionysisme de Michel Maffesoli, donc la pertinente vitalité intellectuelle demeure d’actualité dans la France d’aujourd’hui.

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Trois ouvrages universitaires d'Eichberg, en allemand, anglais et finnois. Une notoriété internationale.

Dans les années 1990, Eichberg franchit le cap : il cesse de collaborer à Wir Selbst et adhère au « Parti socialiste populaire » danois. Il ne collaborera plus qu’aux revues théoriques de ce parti. Il rédigera aussi une partie de ses programmes. Dans un dernier ouvrage théorique majeur qui, en quelque sorte, récapitule ses thèses en langue anglaise, The People of Democracy (2004), Eichberg rappelle qu’il a toujours été un disciple de Herder, de Grundvigt et de Buber. Son apport à la sociologie universitaire réside essentiellement dans une critique des sports olympiques, trop standardisés à ses yeux et ne tenant pas compte des innombrables particularités ludiques, religieuses et physiques que revêtent les sports nationaux et tribaux chez les peuples non occidentaux et qu’ont revêtu également bien des sports populaires oubliés ou refoulés chez les Européens.

Henning Eichberg est décédé au Danemark en avril 2017. Je n’aurais jamais imaginé le voir disparaître si tôt. Personnellement, j’ai entretenu quelques fois une correspondance avec lui, ai toujours lu attentivement ses contributions à Wir Selbst ; je n’étais pas toujours d’accord avec la forme de ses critiques (mais non avec le fond) ou avec la véhémence de ses propos mais, respectueusement, je tenais toujours compte de ce qu’il disait, tout en concédant que les ronrons des droites (mais aussi des gauches) étaient incapacitants justement parce qu’ils étaient des ronrons, des ritournelles aurait dit Gilles Deleuze. En août 1981, nous avons tous deux participé à un long séminaire à Tinglev au Danemark. Il y donnait le ton, de manière très autoritaire, en dépit de son discours « bogdanovien » antiautoritaire. Lors d’un aparté dans l’autocar qui nous ramenait d’une visite à la minorité danoise d’Allemagne et à la minorité allemande du Danemark, il m’a dit ceci, à propos de la « nouvelle droite » parisienne : « Vous rédigez trop d’hagiographies, vous devez parler de choses (concrètes) ». Pourquoi ne pas méditer cette injonction qu’il m’a donnée, il y a déjà 39 ans.

Robert Steuckers.

PS : Pour montrer comment pouvait s’articuler la pensée d’Eichberg dans le cadre belge, lire mon hommage à l’activiste flamand Christian Dutoit :

http://robertsteuckers.blogspot.com/2016/06/linclassable-...

Pour connaître le contexte général:

http://robertsteuckers.blogspot.com/2014/12/neo-nationali...

 

Note :

  • 41sJ0S+33EL.jpg(1) Dans le numéro 36 de Nouvelle école, consacré à Vilfredo Pareto et impulsé par Guillaume Faye (seule voix raisonnable à l’époque dans cet aréopage de fanfarons sans réelle culture), j’ai voulu introduire, dans mes deux articles, les linéaments de la querelle des sociologues allemands (ou querelle allemande des sciences sociales). On m’a pris pour un fou. Le pontife qui entendait mener la danse, avec la lourdeur d’un ours de mauvais cirque, préparait son aggiornamento néolibéral et thatcheroïde. Il le ratera lamentablement. Une bonne connaissance de l’empiriocriticisme, via le pamphlet de Lénine (et via les thèses sur Lénine de Henri Lefebvre avec qui Faye entretenait d’excellentes relations), et de la querelle des sociologues allemands, dont Habermas, que Faye lisait attentivement, aurait permis d’être au diapason. Et de le rester. Quarante ans après, après que Faye et moi-même eurent tiré notre révérence, après notre ostracisme par fatwas hystériques répétées à satiété, on patauge toujours dans le solipsisme, dans la doxa à deux balles et surtout dans un insupportable parisianisme.

dimanche, 15 novembre 2020

Progressistes et populistes face-à-face

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Progressistes et populistes face-à-face 

Chronique de Paysan Savoyard

(n°238 – novembre 2020)

Ex: http://linformationnationaliste.hautetfort.com

Que Trump soit définitivement battu ou qu’il réussisse à renverser la situation sur le plan judiciaire, que sa défaite soit intervenue au terme d’un processus électoral régulier ou qu’elle soit le résultat d’une fraude massive, tout cela ne change rien à la situation qui est aujourd’hui celle des Etats-Unis : il y a deux Amérique, probablement irréconciliables. L’Amérique des Américains blancs de la classe moyenne et de la classe populaire, opposés à l’immigration et au libre-échange mondial qui ont bouleversé et dégradé leurs conditions de vie et détruit leurs emplois. Et l’Amérique de la classe supérieure, alliée aux minorités raciales, toutes deux favorables à l’immigration et à la mondialisation, par idéologie et parce qu’elles en tirent profit. Ces deux Amérique, l’Amérique populiste et l’Amérique progressiste, n’ont plus rien en commun. Elles pèsent le même poids démographique. Et elles sont face à face.

La situation est peu ou prou la même en France et en Angleterre. Elle est en train de devenir identique dans presque tous les pays d’Europe.

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  • La révolution libérale-libertaire

S’étendant sur une période d’une trentaine d’années entre la fin des années soixante et la fin des années quatre-vingt-dix, une révolution a touché le monde occidental, tenant à la fois aux mœurs et à l’organisation économique et sociale : la révolution libertaire et économiquement libre-échangiste. Partie des Etats-Unis, avant de se diffuser en Europe, elle a bouleversé et déstructuré les sociétés et les économies traditionnelles.

La révolution libertaire commence dans les années soixante, déclenchée par les milieux de la gauche américaine, particulièrement implantés dans les universités. Aux Etats-Unis comme ensuite en Europe, des groupes militants efficaces ont combattu les cadres de la société traditionnelle : la religion, la famille, le principe d’autorité ou encore la distinction des rôles traditionnels entre l’homme et la femme. Sous l’action de ces mouvements libertaires, féministes, LGBT et athées, relayés par les médias et les juges, les minorités ont été installées en position de force dans les différents lieux de pouvoir, des lois novatrices radicales sont intervenues et la société a été bouleversée et modifiée en profondeur dans ses structures, ses mœurs et ses croyances. Les mêmes mouvements, au nom de l’idéologie libertaire, qui récuse la légitimité de toute frontière, ont également soutenu l’immigration et l’antiracisme. L’immigration a constitué un autre bouleversement majeur dans plusieurs pays occidentaux : les sociétés homogènes, religieusement, culturellement et racialement, qui existaient jusque-là en Occident ont été remplacées par des sociétés multiraciales et multiculturelles.

Sur le plan économique, la révolution libre-échangiste, initiée elle-aussi par les Etats-Unis, date des années 90. Dès l’après-guerre les Etats-Unis avaient cherché à développer et à libéraliser le commerce mondial, qu’ils dominent notamment grâce au rôle du dollar, en négociant avec les autres pays occidentaux un abaissement général des droits de douanes. De même, en s’appuyant sur les politiciens européens, qui sont pour la plupart sous leur tutelle, les Etats-Unis ont favorisé la mise en place d’un marché commun européen ouvert et intégré au marché mondial. Le pas décisif a été franchi dans les années quatre-vingt-dix, grâce à une double évolution : la volonté des gouvernants chinois à partir de cette date de participer au jeu du marché mondial ; et la décision des Etats-Unis d’accueillir la Chine au sein de l’OMC. A partir de ce moment se sont engagées des évolutions économiques majeures : extension considérable du marché mondial ; financiarisation ; dumping social et fiscal ; délocalisations d’une grande partie de l’industrie et d’une partie des services occidentaux en Chine et dans d’autres pays à bas coûts…

John-Locke.jpgLa révolution libertaire et mondialiste a des racines philosophiques : dès le 18e siècle, la Modernité, c’est-à-dire le courant d’idées issu des Lumières, a contesté les fondements de la société traditionnelle. Ce courant d’idées a plusieurs composantes liées entre elles : l’athéisme, le matérialisme, le progressisme et le rejet de toute tradition, l’universalisme, l’individualisme, ce dernier concept étant le pivot autour duquel les autres s’articulent.

De la même manière les deux aspects de la révolution sociétale et socio-économique intervenue en Occident dans la dernière partie du 20e siècle sont intrinsèquement liés, se répondent et se renforcent : ils débouchent sur la position politique « libérale-libertaire ». On l’a vu en France par exemple ou d’éminents soixante-huitards sont devenus des patrons du CAC 40. Aux Etats-Unis les patrons de la Silicon Valley incarnent brillamment cette convergence. En France comme en Allemagne la figure emblématique de la position libérale-libertaire est D. Cohn-Bendit. 

  • La révolution libérale-libertaire a fracturé les sociétés occidentales en trois groupes

Cette révolution libérale-libertaire a entraîné dans de nombreux pays occidentaux le bouleversement de la société mais également sa fracturation en deux puis en trois groupes, à la situation et aux intérêts profondément dissemblables. La couche supérieure de la société, a tiré le plus grand profit des évolutions économiques récentes, à commencer par les délocalisations, qui l’ont enrichie dans des proportions sans précédent historique. Elle dispose d’autre part des moyens matériels et immatériels de profiter pleinement des ressources et des attraits des sociétés libérées de toute contrainte.

Au contraire l’évolution économique a bouleversé en quelques années, aux Etats-Unis comme en Europe, la situation des classes moyenne et populaire, qui ont été les victimes du chômage massif, de la dévitalisation de régions entières et du remplacement des emplois industriels relativement rémunérateurs par des emplois de services peu qualifiés et mal payés. La classe moyenne en particulier a dans ce contexte entamé un processus de déclin rapide. On le voit ces jours-ci avec les reportages sur les Etats de la Rust Belt, victimes de la désindustrialisation. Sur le plan sociétal, les évolutions libertaires ont également été préjudiciables à la plupart des membres des classes moyenne et populaire, en détruisant ou en affaiblissant les cadres sociaux structurants et protecteurs, la famille et le cadre religieux en particulier, et en précipitant de nombreuses personnes dans l’isolement, la perte de repères et l’anomie. En France par exemple, de nombreux indices, tels que la consommation de tranquillisants, montrent qu’un grand nombre de Français moyens sont en difficulté morale et psychologique. Depuis plus de trente ans les sondages indiquent qu’une majorité des Français sont pessimistes et convaincus que l’avenir sera sombre.

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L’immigration massive a encore accru l’impact et la portée de ces évolutions. Elle a amélioré la situation des plus riches, en tirant vers le bas les salaires et les conditions d’emploi dans les secteurs non délocalisables et en augmentant fortement, grâce notamment aux prestations sociales, le nombre des consommateurs solvables. Elle a bouleversé encore un peu plus la situation des classes moyenne et populaire, qu’elle a notamment chassées, en France du moins, des banlieues des métropoles.

Cette immigration est devenu tellement massive qu’un troisième groupe s’est constitué au sein des sociétés occidentales : dans de nombreux pays occidentaux, les personnes originaires de l’immigration, le plus souvent musulmanes, constituent progressivement une contre-société, qui se distingue nettement de la classe supérieure d’une part et des classes moyenne et populaire de souche d’autre part. L’Europe rejoint ainsi la situation des Etats-Unis qui comptent depuis l’origine une forte communauté afro-américaine, à laquelle viennent s’ajouter désormais les immigrants latinos et asiatiques. Ce troisième groupe constitué par les minorités raciales est pour l’instant l’allié de la classe supérieure, puisqu’il a comme elle intérêt à la poursuite de l’immigration. C’est ainsi que la quasi-totalité des Afro-Américains et une grande majorité des Latinos viennent de voter pour le candidat démocrate, représentant de la classe supérieure. La situation est identique en France et en Angleterre et dans la plupart des pays d’Europe occidentale : la classe supérieure mène une politique immigrationniste approuvée par les immigrés. Cette évolution entraîne l’apparition et la montée en puissance de partis « populistes » anti immigration, qui recueillent les suffrages d’une partie grandissante des populations de souche de classe populaire et moyenne. De toute évidence l’alliance de la classe supérieure et des minorités raciales est provisoire. En Europe occidentale en particulier, les immigrés sont engagés dans une guerre de conquête et exigeront le moment venu, quand ils seront suffisamment nombreux, l’exercice du pouvoir et la soumission des autochtones.

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Ajoutons cette précision. Au sein des sociétés occidentales, on trouve également le ventre-mou des personnes « de souche » qui refusent de se positionner dans un camp ou un autre et se prétendent neutres ou indifférents. D’autres, par peur de la guerre civile et du chaos, se résignent sans enthousiasme aux politiques mondialistes et immigrationnistes suivies par la classe dirigeante, en espérant le maintien d’un certain statu quo le plus longtemps possible : ces « résignés » essaient de se protéger pour eux-mêmes des conséquences catastrophiques de l’invasion migratoire, dont ils ont parfaitement conscience, espérant que la dégradation, qu’ils savent inéluctable, sera suffisamment progressive pour les épargner à titre personnel. Dans la pratique les résignés et les soi-disant centristes sont dans le camp du pouvoir. Quand ils travaillent dans les administrations et les services publics ils appliquent ses ordres sans sourciller. Sur le plan électoral ils favorisent le maintien au pouvoir de la classe dirigeante, en votant pour elle ou en s’abstenant hypocritement.

  • Ce sont les extrémistes qui dénoncent l’extrémisme, les incendiaires qui crient « Au feu », les criminels qui hurlent à la haine

Il y a lieu de mettre en évidence et d’insister sur cette situation remarquable. En organisant la mondialisation et les délocalisations, d’une part, l’invasion migratoire de l’Europe d’autre part, la classe dirigeante mène les politiques les plus extrêmes et les plus provocatrices qui soient. Elles sont contraires aux intérêts vitaux de la population de souche des pays occidentaux et font courir un danger mortel à leurs Etats, à leurs territoires et à leur civilisation : ces politiques criminelles constituent donc sans conteste des politiques de haute trahison.

La classe dirigeante occidentale y ajoute des politiques sociétales destructrices et provocatrices : la discrimination positive et les quotas de race et de sexe, le mariage homosexuel et la PMA en attendant la GPA, l’euthanasie active et bientôt le clonage et le transhumanisme. Tout montre que ces « réformes » bousculent les structures anthropologiques fondamentales et déboucheront sur des monstruosités.

Tout en menant ces politiques de bouleversement, la classe dirigeante parvient à se présenter comme le camp de la modération contre les extrêmes, le camp de la Raison contre les passions mauvaises, le camp du juste-milieu contre les extrémistes, islamistes d’une part, populistes de l’autre. A sa tête le Système place des figures souriantes à costume-cravate, dents blanches et bronzage ajusté, qui parviennent à donner l’image de la raison, de la mesure et de la compétence, comme Macron, Merkel ou Biden. Dans le même temps il réussit à présenter ses adversaires « populistes » comme des agités incontrôlables et dangereux autant que ridicules : Jean-Marie Le Pen pendant toute sa carrière a fait les frais de cette diabolisation. Trump, Johnson, Salvini ou encore Orban incarnent aujourd’hui cette catégorie des fous dangereux à tendance fascitoïde. Alors qu’ils mènent les politiques les plus extrêmes et les plus scandaleuses qui se puissent imaginer, les boutes-feu qui sont à la tête de la plupart des pays occidentaux réussissent à apparaître comme des dirigeants modérés et responsables : même si le contrôle presque absolu qu’il exerce sur les médias lui facilite grandement la tâche, ce tour-de-force du Système est particulièrement remarquable.

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La classe dirigeante ne se contente pas de dénoncer les leaders populistes. Elle met en accusation également les Européens moyens qui renâclent ou résistent aux évolutions en cours. Elle dénonce leur tendance à propager la haine, notamment sur les réseaux sociaux. Elle met en cause leur égoïsme et leur manque d’ouverture d’esprit : les médias insistent d’ailleurs fréquemment sur le fait que les électeurs populistes sont souvent peu diplômés.

Or les populistes ne font qu’essayer de défendre ce qui reste de la société traditionnelle, c’est à dire la société qui existait encore il y a cinquante ou soixante ans et faisait l’objet d’un consensus quasi général. Une société qui dans ses grandes lignes datait de plus de mille ans… Et ce sont les défenseurs des moeurs et des modes d’organisation traditionnels et pluriséculaires qui sont présentés comme des extrémistes et des provocateurs…

L’inversion accusatoire opérée par la classe dirigeante mérite d’être saluée. En menant des politiques extrêmes et criminelles tout en parvenant à accuser d’extrémisme et de pensées haineuses ceux qui s’y opposent, la classe dirigeante occidentale accède à un sommet sans doute jamais atteint jusqu’ici dans l’art de la propagande, de la manipulation et de l’amoralisme. 

Dans tous les pays occidentaux les deux camps se font face : les progressistes et les minorités raciales qui leur sont alliées d’un côté ; les populistes de l’autre. Ces deux camps sont désormais séparés par une hostilité, un mépris et une haine réciproques et grandissantes. Tout les oppose désormais : les intérêts économiques et sociaux, la vision de l’avenir, la conception même de ce que doit être la société. Comme on le sait leur opposition a également une dimension spatiale marquée : aux Etats-Unis comme en France, la classe supérieure habite les métropoles tandis que les classes moyenne et populaire résident le plus souvent dans les régions périphériques et rurales. En France, les immigrés sont désormais majoritaires dans les banlieues des agglomérations.

L’affrontement des deux camps est total et sur tous les terrains : l’idéologie, la culture, les médias, l’école, le judiciaire… Comme on le voit ces jours-ci aux Etats-Unis, c’est une lutte à mort qui s’est engagée. Les règles du temps de paix bientôt seront caduques. Dans les guerres civiles, on le sait, même les lois de la guerre n’ont plus cours. 

Voir également les chroniques suivantes :

La guerre civile tiède a commencé

Trois France désormais, qui se haïssent

« Peureux, incultes, méchants et dépressifs » : comment le Système s’efforce de discréditer les Dissidents

https://leblogdepaysansavoyard.wordpress.com/2020/11/10/c...

samedi, 14 novembre 2020

Jérôme Fourquet’s The French Archipelago

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Jérôme Fourquet’s The French Archipelago
 
A Statistical Portrait of a Nation in Decay

Jérôme Fourquet, L’archipel français: Naissance d’une nation multiple et divisée (Paris: Seuil, 2019)

Jérôme Fourquet is a mainstream pollster with the venerable French Institute of Public Opinion (IFOP), the nation’s leading polling agency. He made a splash last year with his book, The French Archipelago: The Birth of a Multiple and Divided Nation, which presented a fine-grain statistical analysis of socio-cultural changes in French society and, in particular, fragmentation along ethno-religious and educational lines.

The book persuasively makes case that the centrist-globalist Emmanuel Macron’s election to the presidency and the collapse of the traditional parties of government in 2017 were not freak events, but the reflection of long-term trends which finally expressed themselves politically. The same can be said for the growing popularity of anti-establishment movements like Marine Le Pen’s National Rally (RN) and the yellow-vests.

Following the works of many sociologists and historians, Fourquet sees French politics as historically divided between a Catholic Right and secularist Left. This divide had been highly stable since the French Revolution, if not earlier, with a dechristianizing core stretching out from the greater Parisian basin into the Limousin, with most of the periphery remaining relatively conservative. These subcultures united people of different classes within particular regions and corresponded politically with the conservative and Socialist parties who have taken turns governing France since World War II.

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Percentage of Catholic priests swearing loyalty to the Constitution in 1791, a good marker of secularism.

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Political party of representatives elected in the 1936 parliamentary elections. Supporters of the Popular Front Socialist-Communist coalition in red, pink, orange and yellow.

Since 1945, the collapse of Catholicism and the steady cognitive/economic stratification of French society have destroyed the reach and unity of the Catholic-right and secularist-left blocs. Macron was able to tap into the latent political demand of the wealthiest, most educated, and mobile 20% of French society, while the increasingly alienated and déclassés lower classes of French Whites have been falling out of the mainstream political system altogether.

Fourquet meticulously documents the social trends of the past 70 years: the decline of Catholicism, the Communist Party, and traditional media, the triumph of social liberalism, the division of cities into gentrified areas, crime-ridden ghettos, and the (self-)segregation of individuals along educational and ethnic lines. In all this, Fourquet’s book serves as an excellent statistical companion piece to Éric Zemmour’s Le Suicide français, which looks at many of the same themes through the lens of political and cultural events.

What’s in a first name? Quite a lot, actually

Fourquet uses a wealth of socio-economic and polling data to make his case. Some of the most innovative and striking evidence however is the big-data analysis of first names in France’s birth registries since 1900. This looks into the trends for numerous different types of names: Christian, patriotic, regional (Breton and Corsican), Muslim, African, and . . . Anglo. Far from being random, Fourquet shows that the trends in first-name giving correlate with concurrent social and political phenomena. For example, the number of people giving their girls patriotic names like France and Jeanne spiked during moments of nationalist fervor, namely the first and second world wars (p. 35).

More significantly, Marie went from being the most common name for girls (20% of newborns in 1900) to 1-2% since the 1970s. Unsurprisingly given the Virgin Mary’s importance in the Catholic religion, Marie was more popular in more religious regions and declined later in the conservative periphery. Marie’s decline thus seems to be a solid temporal and geographical marker of dechristianization (mass attendance and traditional Christian values, such as marriage and opposition to abortion and gay marriage, also collapsed during this period).

First names also provide a marker for assimilation of immigrant groups. Fourquet shows how Polish first names exploded in the northern mining regions of France in the 1920s and then fully receded within two decades. He shows the same phenomenon for Portuguese immigrants and first names in the 1970s. This assimilation is in accord with sociological data showing that European immigrants tend to rapidly converge in terms of educational and economic performance with the native French population.

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Percentage of new-born males with a Muslim first name.

By contrast, Fourquet shows that people with Muslim last names almost never choose to give their children traditional French first names. He documents a massive increase in the proportion of newborns given Muslim first names from negligible in the 1960s to around a fifth of the total. There is also an increase in the number of people with Sub-Saharan African names.

Somewhat similarly to Europeans, Asian immigrants (disproportionately from the former Indochina) are much more likely to adopt French first names and perform comparably in economic and educational terms.

Beyond these stark ethno-religious demographic changes, Fourquet also highlights more subtle trends that often fall below the radar. First names also provide a marker for the degree to which the French have a common culture or, conversely, of heightened individual or sectoral identities.

Fourquet identifies an explosion in the number of different names used by the French. This figure was stable around 2000 from 1900 to 1945, rising to over 12,000 today. And this does not count the proliferation “rare names” – those for which there are less than 3 people with that name – among all populations. Fourquet takes this as evidence of increased individualism and “mass narcissism,” more and more people wishing to differentiate themselves.

In principle, until recently the French were forced by Napoleonic-era legislation to choose their first names from the Christian calendar, medieval European names, or Greco-Roman antiquity. All of France proper used a common corpus of names, with little local variation. The list of acceptable names was extended by ministerial instruction to regional and mythological names in 1966, while in 1993 the restriction was abolished. However, the trend of more-and-more names in fact long predates these legal changes. Evidently municipal authorities already were tolerating unusual names more and more.

What are the names in question? All sorts. The use of Breton (Celtic) names in Brittany has more tripled from 4% to around 12% (p. 127), with sharp rises corresponding to moments of heightened Breton regionalist politics in the 1970s.

Similarly, Italian-Corsican first names have risen from virtually nil in the 1970s to 20% of Corsican newborns today, coinciding with the rise of the Corsican nationalist vote on the island to 52.1% in 2017 (p. 130). Corsican nationalism has risen despite the fact that use of the French language has largely supplanted the Corsican dialect. Many Corsicans resent colonization both by wealthy metropolitan French buying up properties on the fair isle and by Afro-Islamic immigrants.

There has also been a steady increase of the use of markedly Jewish first names like Ariel, Gad, and Ephraïm – which were virtually unheard of in 1945 (p. 213)

One of the most intriguing trends is the proliferation of Anglo first names from a mere 0.5% of newborns in the 1960s to 12% in 1993, today stabilized around 8% (p. 120). Names like Kevin, Dylan, and Cindy became extremely popular, evidently influenced by American pop stars and soap operas (The Young and the Restless was a big hit in France under the title Les Feux de l’Amour). Significantly, Anglo names are more popular among the lower classes, going against the previous trend of French elites setting top-down fashion trends for names. Indeed, many yellow-vest and RN cadres in France have conspicuously (pseudo-)Anglo first names, such as Steeve [sic] Briois (mayor of the northern industrial city of Hénin-Beaumont), Jordan Bardella (RN youth leader and lead candidate in the 2019 EU parliamentary elections), and Davy Rodriguez (youth deputy leader).

A fragmented France: Globalists, populists, and Muslims

Fourquet sees France as an “archipelago” of subcultures diverging from one another. Among these: Macron-supporting educated metropolitan elites, the remaining rump of practicing Catholics (6-12% of the population), conservative-supporting retirees, expats outside of France (whose numbers have more than tripled to around 1.3 million since 2002), alienated lower-class suburban and rural Whites (often supporting the yellow-vests and/or Marine Le Pen), and innumerable ethnic communities, mostly African or Islamic, scattered across France’s cities.

The French are less and less united by common schools, media, and life experiences. The fifth or so of most educated, wealthy, and deracinated French finally manifested politically with Macron’s triumph in 2017. But will these other subcultures become politically effective? Fourquet concludes that

Thus, over the past 30 years, many islands of the French archipelago are becoming politically autonomous and obey less and less the commands of the capital-island and its elites. Though indeed the scenario in which the [subculturally] most distant islands or provinces would declare their independence does not seem to be on the order of the day. (pp. 378-79)

Still, we can see major subcultural blocs consolidating. In the immediate, the most important is the vast suburban and rural bloc of alienated Whites. Support for Marine Le Pen correlates with distance from city-centers, the presence of Afro-Islamic immigrants (until these overwhelm the natives), and/or chronic unemployment. Fourquet says that “the yellow-vest movement has been particularly revealing not only of the process of archipelization underway but also of the peripheries’ inability to threaten the heart of the French system” (379). It seems probable the bloc of alienated Whites will continue to grow and develop politically.

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Vote for Marine Le Pen in the first round of the 2017 presidential elections.

 

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Unemployment rate in 2016 by territory.

The White “popular bloc” is not coherent politically but is basically entropic. The yellow-vests, themselves not an organized group at all, did not so much have a political program but a set of concerns essentially revolving around purchasing power, public services declining areas, and direct democracy. The most clear and political demand of the yellow-vests was the famous Citizen Initiative Referendum (RIC), similar to practices in Switzerland or California. This measure, whatever its merits, is more about means than ends and is entropic as such.

Marine Le Pen’s National Rally, the other great manifestation of this bloc, is characterized by a mix of socialistic civic nationalism and political opportunism. Given the travails of the Brexit and Trump experiences, one wonders how an eventual National Rally administration would or could govern, especially if virtually the entire French educated class would similarly rise in opposition.

The other great emerging bloc(s) is that made up of France’s fast-growing African and Islamic communities. I would have liked more information on this group. There is data indicating that French Muslims are considerably endogamous (most marry within their own ethny, though there is some variation by community). While the French overwhelmingly support abortion and homosexuality, only small majorities of Muslims do, an important marker of limited convergence. He also observes that a significant minority of Muslims are entering the middle and upper classes, and indeed that the more educated a Muslim is the more likely he or she is to be married to a native French.

However, other indicators of “assimilation” have if anything gone into reverse since the early 2000s: more Muslim women are wearing headscarves, Muslim youth are more likely to say sex before marriage is immoral than their elders (75% to 55%), and two thirds of young Muslims support censorship blasphemy and one quarter condones the murder of cartoonists mocking Mohamed. The War on Terror and renewed Arab-Israeli conflict appear to have rekindled Muslim identity in France. What’s more the sheer number of Muslims and the unending flow from the home country appear to be making them more confident in rejecting assimilation.

In the coming decades, we can reasonably expect French society to become polarized between an Afro-Islamic bloc, united by economic interests and ethno-religious grievances, and a middle/lower class White bloc. And I use the word White, rather than native French, advisedly: many prominent French nationalists and their supporters are of Italian, Polish, or Portuguese origin.

To his credit, Fourquet repeatedly emphasizes the scale and unprecedented nature of the ethno-religious changes in the French population. He also discretely observes the potential for conflict, saying of Paris: “This great diversity is the source of tensions (the demographic balance within certain neighborhoods is changing according to the arrival or reinforcement of this or that group)” (p. 377). And then hidden away in a footnote: “In a multiethnic society, the relative weight of different groups becomes a crucial matter, as individuals seek a territory in which their group is the majority or at least sufficiently numerous.” Indeed.

Fourquet concludes:

At the heart of the capital-island [Paris], the elites reassure themselves in the face of their opponents’ impotence. In so doing, they think that they can rely on the traditional exercise of authority without having to draw the consequences of the birth of a France with a new form and new drives: a multiple and divided nation. (p. 379)

This book left me curious, but also unnerved, about the further social transformations in store for our societies, even beyond the ethnic factor. The disturbing trends in France very much have their analogues in other Western nations. White proles – vilified by their own ruling class or left to their own devices – are in sorry shape. Western elites have lost their collective minds. Looking further afield, how will individualism and social fragmentation manifest in other nations, such as Israel or Japan? Will authoritarian states like China be better able to manage these tendencies, or not? To what extent will these trends intensify? What new trends will emerge in coming decades with advent of yet more new technologies? Amidst this uncertainty, there will certainly also be political opportunities.

mardi, 10 novembre 2020

Les féministes, pom-pom girls du Grand Capital

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Les féministes, pom-pom girls du Grand Capital

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

Dans quelques jours, ce sera l’anniversaire de la loi du 02 novembre 1892. Cette loi, votée sous la pression du mouvement ouvrier autochtone, a été une grande avancée sociale face à un patronat oligarchique cupide et sociopathe.  Grâce à cette loi, en effet, les femmes et les enfants sont soustraits au travail de nuit, au travail dans les milieux insalubres ou toxiques, au travail dans les milieux souterrains (mines, carrières…), et leur temps de travail effectif est réduit (pas plus de 11 heures par jour quand même !). Une petite plongée dans les Journaux Officiels de l’époque nous en apprend beaucoup sur l’argumentaire « féministe » des adversaires de la loi.  

Les débats portent principalement sur le travail des femmes, et très peu sur celui des enfants, qui semble faire consensus. Les députés et les sénateurs qui soutiennent la loi disent vouloir « protéger » les femmes. Cela va dans le sens des revendications ouvrières et nous intéresse moins ici que les arguments de leurs opposants, porte-paroles du Grand Capital.

Les arguments de ces derniers sont de deux ordres. D’une part, on fait valoir que la fin du travail de nuit des femmes et la réduction de leur durée journalière de travail vont « désorganiser » le monde du travail et peut-être même induire une diminution du temps de travail effectif des hommes. D’autre part, et surtout, on invoque des principes à la fois éthiques et républicains : faut-il considérer que la femme est différente de l’homme ?

On connaît la structure de base de la République : le corps politique est la somme des individus libres et égaux qui font individuellement contrat (pacte républicain). Chaque « individu » dont il est question ici est une figure de l’Homme abstrait (l’Homme des droits de l’homme), autrement dit ce peut être un homme ou une femme. Il découle de cette conception que la femme ne doit pas être considérée différemment de l’homme. Les opposants à la loi vont s’appuyer sur cette idéologie républicaine pour refuser la soustraction des femmes au travail de nuit ou en milieu toxique.

René Béranger, ancien ministre, sénateur et magistrat, proclame, au nom de la liberté individuelle et des dogmes républicains, que la loi doit consacrer la « liberté des contrats » entre employeurs et employées et ne pas s’interposer entre les contractants, égaux par définition (doctrine du renard libre dans le poulailler libre). Ainsi, dit-il, « Le législateur n’a pas le droit d’intervenir pour régler les contrats entre majeurs ». Le vote d’une telle loi à l’encontre des femmes serait une « hérésie ». Ce serait une « atteinte à leur liberté » (J.O. du 28 mars 1892). Ainsi, au nom de l’égalité et au nom de la liberté des femmes, il faudrait faire travailler ces dernières comme les hommes, 12 heures par jour, la nuit, au fond des mines et dans les milieux toxiques et insalubres ! C’est ce que signifient en substance les propos tenus par le sénateur Béranger !

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Aimé-Etienne Blavier, administrateur des Ardoisières d’Anger, censeur de la Caisse d’Epargne, approuve : « Le vrai terrain [de discussion] est, dit-il, celui de la liberté de la femme » ! (J.O. du 28 mars 1892). L’élévation morale de ce combattant de la liberté est telle qu’il ne veut pas renoncer au droit de libérer les femmes dans ses carrières, 12 heures par jour, y compris la nuit si possible ! Le cynisme et le mépris de la souffrance des autres sont la marque des sociopathes !

Après ces débats contradictoires, opposant les intérêts oligarchiques aux pressions exercées sur la République par le mouvement ouvrier autochtone, le rapporteur au Sénat pose la question : la loi en discussion doit-elle concerner aussi les femmes majeures, ou seulement les enfants ? Au nom de la « liberté du travail », un amendement est déposé par Victor Milliard, lié par sa famille à l’industrie textile et coloniale (Ets Dumarest). Pour Victor Milliard, les femmes ne doivent pas être concernées par cette loi liberticide. Le rapporteur au Sénat (J.O.) résume parfaitement les positions avant passage au vote : veut-on que la femme soit « absolument semblable à l’homme » et donc « régie par les mêmes dispositions législatives » que lui, ou veut-on faire bénéficier à la femme de dispositions particulières la protégeant ?

Les débats montrent donc que l’argumentaire des représentants du patronat oligarchique tourne autour de la « liberté de la femme », femme que l’on voudrait qu’elle fut appréhendée comme un individu « semblable à l’homme ». Significativement, les féministes reprendront ces arguments  pour faire abroger, en novembre 2000, la loi de 1892. La convergence profonde entre féministes et oligarques est donc indéniable, les premières défendant objectivement les intérêts des seconds et les seconds étant, au nom de leurs profits, des féministes avant l’heure (c’est encore vrai aujourd’hui, voyez Soros et ses Femen). En fait, et à bien y regarder, le féminisme est un outil créé par l’oligarchie, afin d’augmenter la main d’œuvre disponible, mais aussi pour accroitre le nombre des consommateurs.

imagesfumer.jpgSur ce dernier point, on se souvient par exemple de la stratégie employée par les cigarettiers américains pour étendre leur marché. Durant la première guerre mondiale ils avaient généreusement distribué des cigarettes aux soldats. Résultat, après la fin des hostilités, la plupart des hommes fumait. Mais comment faire fumer les femmes ? Les cigarettiers ont donc sollicité Edward Bernays, publicitaire et neveu de Sigmund Freud. Celui-ci s’est adressé aux suffragettes et féministes, les incitant à défiler clopes au bec, devant les caméras, lors du traditionnel défilé de la parade de Pâque 1929. Les cigarettes étaient appelées « torches de la liberté ». Ainsi, grâce à Bernays, fumer devenait soudainement le symbole de la conquête du pouvoir masculin et de la libération de la femme... au prix de quelques cancers mais pour le plus grand profit de l’industrie cigarettière (contrôlée par des hommes) !  Un cas d’école !

En France, le nom qu’il faut retenir est celui de Léon Richer, le « véritable fondateur » du féminisme selon Simone de Beauvoir, le « père du féminisme » selon Hubertine Auclert. Léon Richer est indissociable de la franc-maçonnerie. Il est lui-même franc-maçon, fait un grand nombre de conférences au Grand Orient et est aidé dans son action par des « féministes » francs-maçons : Alfred Naquet, à l’origine de la loi sur le divorce, Auguste Vacquerie, Gustave Rivet, à l’origine de la loi sur la recherche de paternité, René Viviani...

Leon_Richer_c._1900.jpgParadoxalement, c’est bien dans des loges masculines que s’élabore l’idéologie féministe. Si la franc-maçonnerie est alors le laboratoire de pensée de la République (elle le reste assez largement aujourd’hui), la République est alors un instrument au service de la banque, de la finance et de l’industrie (idem). Le sas entre les trois entités est donc loin d’être étanche : les francs-maçons sont surreprésentés dans les instances républicaines (à titre d’exemple, six présidents de la IIIe République sont francs-maçons), et le rôle des francs-maçons élus se cantonne essentiellement à défendre les intérêts bien compris de l’oligarchie. De là ces scandales qui, lorsqu’ils éclatent, éclaboussent à la fois la franc-maçonnerie, la République et l’oligarchie (krach boursier de 1882, scandale des décorations, scandale de Panama…). Tout cela pour dire que la franc-maçonnerie n’aurait jamais pu fonder le féminisme s’il y avait eu le moindre danger que le féminisme soit contraire aux  intérêts de l’oligarchie. Bien au contraire : la « libération de la femme » sort la femme de son foyer et la livre pieds et poings liés à un patronat immoral et cupide. De fait, la « libération de la femme » double la main d’œuvre disponible et, comme aujourd’hui avec l’immigration (les mêmes sont à la manœuvre), fait peser à la baisse sur les salaires. Les féministes sont les idiotes utiles du Grand Capital… et de ses agents francs-maçons, qui sont historiquement des hommes (notons que le rôle de la franc-maçonnerie dans l’élaboration du féminisme apparaît très clairement dans d’autres pays que la France. Citons notamment l’Espagne, la Grande-Bretagne ou les Etats-Unis…).

Finalement, on le voit, grâce à quelques idiotes, pom-pom girls à la chorégraphie convenablement réglée, les Blavier ou les Béranger qui avaient perdu en 1892, ont gagné en 2000 ! C’est une leçon pour nous : les grandes stratégies se conçoivent à l’échelle des siècles !

Antonin Campana

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00:22 Publié dans Actualité, Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, sociologie, féminisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 09 novembre 2020

La résistible ascension des "Villageois planétaires"

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La résistible ascension des «Villageois planétaires»

par Daniel COLOGNE

Conscients de l’obsolescence des clivages politiques et socio-économiques (Droite – Gauche, bourgeoisie – prolétariat), certains chercheurs proposent des nouvelles lignes de démarcation, culturelles, métapolitiques, voire anthropologiques. David Goodhart suggère une distinction entre les « Partout » (anywhere) et les « Quelque Part » (somewhere), et à l’intérieur de ces deux clans des sous-groupes extrémistes : les « Villageois planétaires » et les « Autoritaristes endurcis ».

Les pages qui suivent s’inspirent largement du livre de Goodhart. Je reprendrai désormais ces expressions sans mettre les guillemets. Quant à l’adjectif « résistible », il renvoie à Bertolt Brecht et à sa pièce La résistible ascension d’Arturo Ui. Il importe en effet de s’interroger sur la domination grandissante des types humains Partout et Villageois planétaires et sur la possibilité de la freiner ou d’y mettre un terme à la faveur d’une « noomachie » conduite par un « bloc contre-hégémonique », pour reprendre les termes d’Alexandre Douguine (1).

Goodhart s’appuie sur les résultats d’enquêtes et de sondages. Certes, les statistiques comportent une part d’« illusion » inhérente au « règne de la quantité » (René Guénon). Mais les chiffres qui parsèment le livre correspondent assez bien aux tendances actuelles telles que les ressentent nos lectrices et lecteurs. Ils rejoignent mon propre ressenti pour les trois pays d’Europe francophone où j’ai vécu et pour les soixante dernières années. Goodhart cite d’ailleurs des travaux effectués en Suisse, ainsi que des recherches menées aux États-Unis. La portée de son ouvrage dépasse largement le cadre du Royaume-Uni.

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C’est au seuil de la cinquantaine que je découvre Internet après avoir grandi avec un père représentant pour un fabricant de papier carbone. Je suis un produit de l’exode rural, un fils d’immigrés wallons venus s’installer à Bruxelles en février 1940. Après la traite des Noirs et avant les vagues migratoires issues successivement des rives Nord et Sud de la Méditerranée, le dépeuplement des campagnes constitue une des formes d’arrachement des Quelque Part à leur milieu ancestral pour en faire des Partout aux yeux desquels on fait miroiter le prétendu El Dorado citadin.

En moins de deux décennies, certains vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale ont perdu leurs empires (2) ultra-marins. Ce paradoxe a marqué la génération des enfants nés vers 1950. Chez ceux qui se sont assimilés au clan des Partout, on observe une sorte de culpabilité post-coloniale et le désir d’imposer une « relecture flagellatrice » de l’histoire européenne, selon l’excellente formule d’un rédacteur d’Éléments.

Dans la revue Culture Normande (3), Didier Patte distingue « la notion idéologique de colonialisme » et « la réalité certes ambiguë de la colonisation ». Entre les deux persiste une « équivoque soigneusement entretenue ». Certes, la colonisation est riche en excès et abus en tous genres, mais elle a aussi permis la construction d’écoles, d’hôpitaux, d’infrastructures routières et ferroviaires, comme l’a souligné l’acteur Roger Hanin peu avant son décès. Les Européens d’aujourd’hui n’ont pas à battre leur coulpe pour des exactions commises par leurs ancêtres issus de cinq ou six pays (4) riverains de l’Atlantique et de la Mer du Nord. Goodhart considère l’enseignement supérieur universitaire comme le principal foyer de gestation de la mentalité des Partout et des Villageois planétaires. Il note cependant qu’une fraction de la jeunesse semble avoir déjà basculé dans le clan des Partout avant même son entrée à l’université. Cela n’est pas surprenant pour qui se remémore le tourbillon de réformes qui s’est abattu, dans les années 1970, sur les études secondaires.

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Jusqu’en 1965, j’ai vécu toute ma scolarité dans un régime ultra-directif, et ceci malgré la variété de la coloration idéologique des écoles : cycle primaire dans un établissement communal d’orientation socialiste, un premier athénée dirigé par un franc-maçon notoire et un second athénée à la tête duquel se trouve un préfet membre des Scriptores Catholici. Même après Mai 68 et ses assemblées libres peu mouvementées – il est vrai – en comparaison des événements parisiens, les stages de l’Université de Bruxelles en vue d’obtenir l’agrégation restent marqués par une pédagogie autoritaire. Nous sommes alors en 1969.

Mais lorsqu’en février 1972, après un passage dans une école privée (non confessionnelle) de Genève j’entre dans l’enseignement officiel du canton, la découverte d’une pédagogie laxiste et permissive constitue un choc que je vis assez mal. À Genève sévissent alors ceux qu’Éric Zemmour appelle les « pédagogistes » : des concepteurs de bureau qui élaborent des théories sacrifiant toute forme de discipline sur l’autel de la « créativité », mais qui ne se confrontent jamais aux classes de vingt-cinq adolescents guettant la première occasion de perturber le cours.

311oZpMlZuL._SX362_BO1,204,203,200_.jpgDans toute l’Europe francophone apparaît brusquement « rénové », c’est-à-dire en rupture avec l’autorité magistrale, les techniques de dressage (Roland Barthes qualifie l’orthographe de « fasciste »), l’enracinement dans l’histoire nationale et l’apprentissage des langues anciennes (latin, grec). On retrouve dans la mentalité des Partout cette hantise de la « réalisation de soi » au mépris de toute règle contraignante, de toute référence au passé et de tout sentiment d’appartenance à une communauté organique.

Avant d’examiner comment ces Partout deviennent des Villageois planétaires au contact du monde universitaire, soulignons que les pédagogies non-directives inaugurent, pour le demi-siècle suivant, une série de bouleversements sociétaux qui désarçonnent les Quelque Part en raison de leur rapidité et de leur cumul relayé par les media : dépénalisation de l’avortement et de l’euthanasie, abolition de la peine de mort, mariage pour tous, GPA, PMA. Alors que chacune de ces mesures nécessite une approche singulière et un long temps de réflexion, nous sommes désormais tenus de les accepter en bloc, sans réserve ni délai, sous peine d’être traités de réactionnaires. Il en résulte un « retour de bâton », un « puissant contrecoup » qui génère les « Autoritaristes endurcis ». Goodhart se réfère ici à sa collègue Karen Stenner, titulaire d’un doctorat en psychologie politique, qui a parfaitement saisi cette dialectique des extrêmes analogue au binôme alchimique solve – coagula (dissolution – durcissement).

Contrairement à ce qu’affirme Goodhart à propos de l’enseignement supérieur, le système des campus résidentiels (un internat jouxtant les salles de cours et les amphithéâtres) n’est pas une exception britannique. Dans la région liégeoise, où je vis depuis 2015, je connais au moins trois hautes écoles doublées d’un pensionnat. En outre, toutes les villes universitaires belges renferment un important parc immobilier de logements estudiantins (en Belgique on les appelle les kots). La pratique de la colocation (à deux ou à plusieurs) est fréquente et favorise les contacts inter-culturels et inter-ethniques.

1200px-erasmus_logo.svg_.pngÀ l’époque où j’étudiais à l’Université de Bruxelles, il y avait deux cités universitaires : l’une pour les garçons au cœur du campus, l’autre pour les jeunes filles légèrement en dehors. Ainsi pouvaient déjà se côtoyer, vers 1970, des jeunes provenant de toutes les provinces du Royaume. Le programme Erasmus, d’abord à l’échelon européen, puis au plan mondial, accentue ensuite cet élargissement des horizons et l’impression que « le monde est un village », pour reprendre le titre d’une émission créée par la radio belge francophone en 1998. « La massification de l’enseignement supérieur », l’émergence d’un « secteur universitaire hypertrophié » : voilà des phénomènes qui remontent aux années 1960, vont de pair avec une disqualification du travail manuel et ipso facto avec l’immigration fournissant au patronat une armée de réserve, une classe ouvrière de rechange.

Depuis 1953, dans le quartier où mes parents font construire leur maison, les immeubles poussent comme des champignons grâce à des maçons italiens. Une décennie plus tard, c’est un chauffeur originaire d’Oujda qui m’emmène de Molenbeek au campus situé à l’autre bout de la capitale. Sans omettre l’importance de la communauté turque dans des communes comme Saint-Josse ou Schaerbeek, ainsi que dans certaines régions wallonnes, c’est l’accord belgo-marocain de 1964 qui constitue le principal fondement de la politique belge d’immigration. L’immigration est une des « pommes de discorde » entre les deux clans et a fortiori entre leurs sous-groupes extrémistes.

Sans faire la moindre concession au politiquement correct, Goodhart analyse le problème avec sérénité et ne jette jamais de l’huile sur le feu. En conclusion, il espère même la réconciliation des deux clans qui sont « les deux moitiés de l’âme politique de l’humanité ». Il faut néanmoins pointer du doigt quelques grossières erreurs de politique migratoire, en Belgique comme en France. Le regroupement familial, qui reconstitue chez les immigrés, sinon la tribu, au moins ce que les ethnologues appellent la « grande famille », est autorisé au moment même où notre famille « nucléaire » (noyau père – mère – enfants) commence à se décomposer.

De surcroît, cette mesure coïncide avec le début des réformes sociétales signalées plus haut et propres à heurter l’atavisme musulman de ces populations, à le réveiller sous des formes « Autoritaristes endurcies ». De nombreux jeunes Belges d’origine marocaine fréquentent aujourd’hui les universités. Des jeunes filles voilées entreprennent des études aussi diverses que le droit, le commerce, la logopédie ou la biologie médicale. On a voulu en faire des Partout mais elles semblent rejoindre les rangs des Quelque Part dans l’adhésion à un certain conservatisme.

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Selon Goodhart, ce phénomène concerne aussi une partie de la jeunesse autochtone, celle qu’il nomme la « génération Z » (jeunes filles et garçons nés après 2001). Cela donne l’espoir d’une résilience face au traumatisme de la « grande libéralisation » qui, depuis une quarantaine d’années, se présente volontiers comme un processus aussi irréversible que la succession des saisons. Après tout, parmi les 7,3 milliards de Terriens, « à peine plus de 3 % vivent hors de leur pays de naissance ». Dans ces 200 ou 250 millions de personnes, beaucoup se situent dans une zone intermédiaire entre les deux clans. La planète est donc gouvernée par une minorité de Partout et de Villageois planétaires : nouvelles élites « créatives » de l’Occident post-moderne et milliardaires émergents de l’ancien Tiers Monde.

Les « secteurs » et les « milieux » de la « création » sont, selon Goodhart, avec les universités et la caste médiatique, les plus importants fournisseurs de Partout et de Villageois planétaires. Le flou qui entoure la notion de « création » constitue à mon avis le seul point faible du livre de Goodhart. Je suppose qu’il utilise le mot « création » dans une acception large, non limitée aux arts et aux lettres. Je présume qu’il envisage aussi toute l’industrie du divertissement : tourisme, mode, sport, cinéma, variétés. J’espère pouvoir l’un ou l’autre article à l’application de la grille de lecture de Goodhart dans certains domaines sportifs (5) ou dans le secteur de la chanson française « à texte » (6).

41N2G+tUmcL._SX195_.jpgJe recommande tout spécialement, dans le livre de Goodhart, la lecture de la page 251. L’auteur y développe une critique de l’égalitarisme qui repose sur la distinction entre l’équité et l’équivalence. Les sondages montrent que les Quelque Part acceptent les réformes sociétales de la « grande libéralisation » dans la mesure où les circonstances les rendent équitables : par exemple, refuser l’avortement de confort, mais tolérer l’interruption volontaire d’une grossesse non désirée. En revanche, l’équivalence est érigée en dogme par les Partout qui considèrent que l’enseignement ne doit pas « remplir les cerveaux », mais « libérer ce qui s’y trouve déjà ». En d’autres termes, n’importe qui est capable de faire n’importe quoi en n’importe quel moment ou endroit. Cette vision du monde est à rebours de la conception du « temps qualifié » développée par Jean Phaure dans le sillage de René Guénon qui, de son côté, parle des « déterminations qualitatives de l’espace ». Ici s’impose également un renvoi à Julius Evola et à son chapitre « L’Espace, le Temps, la Terre » dans Révolte contre le monde moderne.

Comme les Partout et les Quelque Part de Goodhart, les « races de l’esprit » d’Evola reposent sur des visions du monde transversales qui dépassent le sfractures sociales ou ethniques. Un compromis est-il possible entre les deux clans ? Il faudrait pour cela « que les Partout cessent de prendre de haut les Quelque Part, blancs ou non, qu’ils apprennent à accepter la légitimité d’opinions contraires ». Les Quelque Part devraient se rendre compte qu’ils « ne peuvent pas exercer le pouvoir politique en braillant des insultes depuis le banc de touche – se sentir pris de haut n’est pas une raison suffisante pour porter un démagogue inexpérimenté à la présidence ».

telle pourrait être une conclusion respectueuse de l’état d’esprit de David Goodhart toujours ouvert au dialogue. Mais l’éventualité d’une « fracture » non résorbable n’est pas à exclure. Il y aurait alors, d’un côté, la mondialisation « sans racines et où plus rien n’est sacré », l’idéologie des Villageois planétaires où se dissoudraient les identités locales, nationales et continentales. En face se dresserait un « bloc contre-hégémonique », parfois exempt de durcissements monolithiques. Ce serait une sorte de fédérations d’empires se respectant les uns les autres, bâtis sur les affinités ethniques de leurs populations et renouant avec leur héritages spirituels. Ainsi serait l’Europe dans ce « nouvel ordre de la Terre » : un Phénix renaissant des cendres de l’Union européenne, un « empire sans impérialisme », selon la belle formule que nous a malheureusement confisquée Manuel Barroso.

Daniel Cologne

Notes

indexadnoom.jpg1 : Voir dans Synthèse nationale (numéro d’hiver 2020), la recension de deux livres d’Alexandre Douguine par Georges Feltin-Tracol. Selon l’étymologie grecque, « noomachie » signifie « combat spirituel ».

2 : Cet impérialisme moderne n’a rien à voir avec l’idée traditionnelle d’imperium développée par Julius Evola.

3 : n° 66, février 2020, p. 28.

4 : Aux cinq grandes puissances coloniales d’Europe occidentale, j’ajoute la Belgique qui, avant de coloniser le Congo sous Léopold II, avait déjà des vues sur la Chine et le Guatemala sous Léopold Ier.

5 : Il est clair que l’« arrêt Bosman » (1995) a fait basculer le football du clan des Quelque Part au clan des Partout. Le joueur liégeois Jean-Marc Bosman s’est vu refuser un transfert à Dunkerque et a saisi la Cour européenne de justice qui lui a donné raison au nom de la libre circulation des travailleurs dans l’UE.

6 : On peut observer chez Brel, Aznavour, Nougaro et bien d’autres un mélange de Quelque Part et de Partout. Nougaro est sublime quand il célèbre sa ville natale de Toulouse mais, par ailleurs, il dénie à la race blanche l’aptitude à l’élan mystique :

« Quel manque de pot

Je suis blanc de pot

Rien ne luit là-haut

Les anges zéro

Je suis blanc de peau. »

On retrouve ici le complexe de culpabilité post-coloniale propre aux Partout.

David Goodhart, Les deux clans. La nouvelle fracture mondiale, Les Arènes, 2019, 400 p., 20,90 € (version originale anglaise parue à Londres en 2016).

David Goodhart: les têtes, les mains, le coeur

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David Goodhart: les têtes, les mains, le coeur

Head Hand Heart

The Struggle for Dignity and Status in the 21st Century

David Goodhart

Allen Lane, 368 p.

Ex: http://www.micheletribalat.fr

En 2017, David Goodhart publiait The Road to Somewhere[1] qui fut traduit en français en 2019 aux Arènes. L’éditeur français a été plus prompt cette fois puisque la traduction française sort deux mois seulement après la parution anglaise sous un titre reprenant littéralement le titre anglais. En ce qui me concerne, j’avais déjà acquis et lu la version anglaise. C’est donc à partir de celle-ci que je vais essayer de donner une idée du livre. Des extraits ont été publiés dans Le Figaro Vox et les pages Débats du Figaro du 6 octobre 2020[2]. Ce livre est un approfondissement d’un chapitre du précédent qui traitait de la « méritocratie héréditaire ».

Goodhart-Headshot-200x300-300x300.jpgAprès bien d’autres, d’ailleurs cités par l’auteur (y compris Charles Murray[3] d’habitude oublié ou cité avec des pincettes), David Goodhart met en cause la hiérarchisation actuelle des sociétés occidentales en termes d’avantages et de statut, à laquelle a conduit l’économie de la connaissance. Celle-ci, fondée sur une méritocratie cognitive, a abouti à la formation d’une classe cognitive puissante qui façonne la société dans son propre intérêt en valorisant la mobilité sociale et géographique. Il retrace ce qui a conduit à la prise de contrôle de la société par la classe cognitive au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, mais aussi plus succinctement en Allemagne et en France, s’interroge sur les tendances futures des besoins économiques compte tenu de la robotisation et esquisse quelques suggestions pour rééquilibrer la considération et le statut attachés aux métiers manuels et du soin par rapport aux métiers intellectuels.

Le privilège cognitif

La priorité affectée par les politiques à l’éducation supérieure de type universitaire et généraliste a dessiné un sens unique vers la réussite. Pourtant, jusqu’au milieu du XXème siècle, les diplômes ont joué un rôle mineur dans la réussite économique et professionnelle. Sans avoir suivi un enseignement supérieur, on pouvait progresser dans sa carrière.

Le biais anti-technique était très fort en Angleterre, contrairement à l’Allemagne. En 1873, c’est Oxford et Cambridge qui administraient les examens du secondaire. Mais le nombre d’adultes ayant fait de longues études est resté longtemps trop petit pour exercer une influence significative. Puis, tout particulièrement au Royaume-Uni et aux États-Unis, l’orientation vers une économie post-industrielle a fait de l’enseignement supérieur la voie royale pour développer la finance, l’innovation et les services. Du temps de Margaret Thatcher, l’apprentissage était très mal vu car jugé trop protectionniste et destiné à des emplois voués à disparaître.

La prédominance des facultés cognitives a été favorisée par l’élaboration de moyens pour les mesurer (tests de QI), tout particulièrement aux Etats-Unis où ils furent importés dans l’éducation par l’institutionnalisation des Scholastic Aptitude Test (SAT), après un usage massif dans l’armée lors de la 1ère guerre mondiale. La composante génétique de l’intelligence reste aujourd’hui très débattue, malgré les progrès énormes accomplis par la recherche sur le sujet, avec des chercheurs qui préfèrent travailler dans l’ombre que sous la lumière. Dans son dernier livre, Charles Murray remercie ceux qui ont bien voulu en relire des passages sans citer leur nom pour ne pas leur causer du tort ![4] David Goodhart retient ce qu’écrivent « la plupart » des scientifiques travaillant sur l’intelligence cognitive : la moitié des différences serait d’ordre génétique, l’autre moitié tiendrait à l’environnement.

411yAnI+-7L._SX325_BO1,204,203,200_.jpgC’est la sélection croissante, au cours de 70 dernières années, sur les performances cognitives dans l’éducation supérieure qui a abouti à la création d’une classe cognitive, renforcée aujourd’hui par l’endogamie cognitive (combinant héritage génétique et ressources pour l’éducation), rendue plus facile avec l’accès croissant des femmes à l’éducation supérieure. Dans Coming Apart , Charles Murray avait montré que Princeton et Yale accueillaient plus d’étudiants provenant du dernier centile que des 6 premiers déciles de revenu.

N’oublions pas non plus que la focalisation extrême sur les capacités cognitives tient aussi au climat du suspicion généralisée de biais, conscients ou non, dans les admissions universitaires et dans l’entreprise.

Les revers de la diplômanie dans l’économie…

Les politiques qui cherchent à combiner – c’est particulièrement visible aux Etats-Unis et au Royaume-Uni – une massification de l’enseignement supérieur et une sélection de l’élite, ont privilégié cette dernière. C’est vrai dans ces pays avec leurs universités d’élite – Ivy League aux Etats-Unis et Russel Group au Royaume-Uni - mais aussi en France avec ses grandes écoles qui n’accueillent que 3 à 4 % des étudiants mais reçoivent 30 % du financement de l’éducation supérieure.

La massification a réduit la valeur des diplômes et provoqué une surenchère. Là où une maîtrise suffisait, il faut maintenant un doctorat. Le diplôme du supérieur est devenu, pour les employeurs, plus un signal sur les compétences sociales (application, concentration, aptitude au travail collectif…) qu’une garantie d’ acquisition de savoirs utiles. Comme l’écrit David Goodhart, il existe sans doute d’autres moyens d’acquérir ces compétences sociales que d’envoyer les jeunes trois ans à l’université. Et, ajoute-t-il, il faut parfois se débarrasser des mauvaises manies qu’on y a acquises. Il en va ainsi du journalisme : « écrire dans une prose simple et directe et apprendre à mettre en avant les faits les plus intéressants d’une histoire peut s’avérer incroyablement difficile après trois ans d’absorption du discours postmoderne. »  (traduction personnelle).

La course au diplôme a asséché l’intelligentsia ouvrière et poussé vers le bas les moins diplômés, dont, d’après l’OCDE, les salaires relatifs baissent depuis les années 1980.

Elle a entraîné des déséquilibres géographiques en drainant vers les grandes métropoles les plus brillants et les plus riches. Au Royaume-Uni, ce déséquilibre a été aggravé par la pratique de l’internat et par l’effet Londres. L’entre-soi est tel que peu de liens survivent après le lycée. Evidemment, seul les jeunes des milieux défavorisés en ayant les capacités devraient être encouragés à aller dans les universités d’élite. La volonté d’étendre l’université à tous et les discours sur la mobilité sociale sont une forme de narcissisme : « soyez comme nous ! ».

Cette frénésie pour les diplômes a créé un effet de troupeau chez les employeurs. Aujourd’hui, au Royaume-Uni, un tiers des policiers sont diplômés du supérieur (contre 1,6 % en 1979) et, en Angleterre-Galles, le College of Policing a annoncé que tous les nouveaux officiers de police devraient avoir un diplôme du supérieur pour augmenter les capacités de la police à recruter des gens « vraiment bien ».

La diplômanie a bouché l’horizon des peu diplômés en leur fermant la porte à l’avancement interne. Et des nouvelles recrues plus diplômées ont poussé vers le bas des gens meilleurs qu’elles. Ajoutons à cela l’arrivée des femmes au cours des trente dernières années dans les emplois diplômés, alors que travailleurs manuels masculins ont été les grands perdants de la montée de l’économie du savoir.

9780241391570.jpgEt en politique

Si, au 19ème siècle, les dirigeants étaient choisis parmi les mieux éduqués, ce n’était pas la source de leur pouvoir. Ils le tiraient de leur classe sociale et de leurs biens. Au Royaume-Uni, en 1964, les diplômés du supérieur étaient encore minoritaires au Parlement. Aujourd’hui, le niveau éducatif des politiques diffère beaucoup de celui des citoyens. Aux partis, syndicats, églises enracinés dans des communautés se sont substitués les ONG, les forums de discussion unis par une communauté d’idées. Si c’est plutôt bien d’avoir au pouvoir des gens diplômés, le problème est qu’ils ont tendance a confondre leur propre intérêt avec le bien commun et qu’ils voient trop souvent leurs concitoyens peu diplômés comme des arriérés irrationnels. De nombreux sujets, comme l’immigration, ont été retirés de l’arène démocratique et les décisions prises en dehors (banque centrale, arrêts juridiques, bureaucratie) le sont en fonction des priorités de la classe cognitive. Une enquête de Yougov en 2019 a montré que 80 % des parlementaires britanniques pensent qu’ils sont élus pour exercer leur jugement personnel quand 63 % des électeurs pensent que les parlementaires devraient agir en fonction des souhaits des électeurs. Seulement 7 % des électeurs pensent que les parlementaires devraient exercer leur propre jugement. Il faudrait donc parvenir à une représentation plus diversifiée.

Déclin des travaux et qualifications manuels

Le statut des travailleurs manuels n’a pas toujours été aussi bas. Dans les 70 1ères années du XXème siècle, les travailleurs manuels méprisaient les cols blancs, même si les mères rêvaient d’un emploi de bureau pour leurs enfants. Ensuite, le travail manuel est devenu impopulaire et ringardisé sous l’effet de l’attraction de l’université. Au Royaume–Uni, nombre de ces emplois ont été pris pas des étrangers venus ces quinze dernières années des nouveaux pays entrants dans l’UE (Pologne surtout). S’il n’y a pas à regretter la disparition d’emplois très pénibles, le déclin des compétences manuelles et pratiques dans la population n’est pas forcément un progrès. Et, comme l’avait anticipé Daniel Bell dans ses écrits sur la société post-industrielle, la progression du statut des travailleurs intellectuels s’est accompagnée d’une routinisation et d’une perte d’autonomie vers le bas de la pyramide hiérarchique. Pour David Goodhart, le déclin du salaire relatif, la perte de sens et d’autonomie au travail, conjugués à très peu de perspectives d’avancement font de la perte de statut des non diplômés du supérieur un fait social majeur.

Dévalorisation des compétences dans le soin

La plupart des économistes ne s’intéressent pas à l’éducation des enfants et aux soins des personnes âgées dans la sphère privée car cela n’entre pas dans le calcul du PIB. Des féministes y voient un piège et une oppression. Et les politiciens ont tendance à n’écouter que les femmes du haut de la pyramide sociale qui sont remontées contre les tâches domestiques.

imagesdgbrdr.pngL’économie du soin a un double problème : il est de moins en moins attractif et ceux qui y travaillent s’en vont, souvent désenchantés. Les hommes, particulièrement ceux qui ont un faible statut, ont perdu, sans pouvoir rien mettre à la place, leur rôle principal qui était celui de gagner l’argent de la famille. Un nombre disproportionné de métiers qui ne peuvent être automatisés sont traditionnellement occupés par des femmes, métiers qui n’attirent pas les hommes. Daniel Susskind, dans A World Without Work, publié en 2020, rapporte les résultats d’une enquête au Royaume-Uni selon laquelle « la plupart des hommes qui ont perdu leur emploi industriel préfèrent ne pas travailler que de prendre  un “pink collar work » (traduction personnelle).

Ce que nous réserve l’avenir

Les perpectives d’évolution du marché du travail dessinent une pyramide dans laquelle il y aura moins de place en haut. À l’âge des robots, on n’a besoin que d’un très petit nombre de gens très intelligents dans les technologies de l’information. Pour Phil Braun et Hugh Lauder, la nouvelle hiérarchisation devrait comporter trois fonctions : 1) les développeurs, autorisés à penser, qui devraient représenter 10 à 15 % d’une organisation professionnelle ; 2) les démonstrateurs formés de diplômés déqualifiés qui exécutent et mettent en œuvre les connaissances existantes (bien communiquer sera leur principale fonction) ; 3) ceux qu’il appelle des drones et qui accomplissent des taches monotones et répétitives. Une économie qui aurait toujours plus besoin de diplômés du supérieur, idée qui plaisait tant aux économistes et aux politiques parce qu’elle semblait résoudre à la fois le problème économique et celui de l’équité, ne sera pas la solution. La valeur de signal des diplômes devrait baisser auprès des entrepreneurs qui pourraient se tourner plus vers l’apprentissage.

Les propositions de David Goodhart à débattre

Si la société occidentale a été dominée dans les deux dernières générations par des forces centrifuges qui ont étendu la liberté individuelle mais affaibli les liens collectifs, des tendances récentes et la pandémie du Covid-19 suggèrent que nous entrons dans une phase centripète, avec une  consolidation de l’État national et une ouverture économique et culturelle plus limitée.

41N2G+tUmcL._SX195_.jpgS’il faut préserver les procédures de sélection méritocratiques, il faut aussi veiller à répartir respect et statut plus équitablement en élargissant les sources de réussite et en élevant le statut de ceux qui ne vont pas à l’université. Les dernières recherches sur les capacités cognitives pourraient nous y aider. Une étude menée à l’université Carnegie Mellon aux États-Unis définit trois types de styles cognitifs : la verbalisation (journalistes, avocats…) ; la visualisation spatiale (ceux qui pensent analytiquement : ingénieurs, mathématiciens…) ; la visualisation des objets (artistes…) qui ont tendance à penser un contexte plus large. Mais la diversité doit aussi s’appliquer aux idéologies et valeurs politiques.

Pour réduire les inégalités, David Goodhart suggère diverses taxations et moyens de réduire les rentes de ceux qui sont entrés les 1ers dans l’univers digital. Mais aussi le recours au déshonneur public des PDG qui se goinfrent abusivement. Un exemple : depuis 2020, toutes les entreprises britanniques de plus de 250 salariés doivent publier le ratio entre la paye du PDG et la paye moyenne du salarié de l’entreprise. Pour réduire les fractures géographiques, il propose diverses interventions publiques, comme l’investissement dans les centres villes pour que les pauvres puissent s’y maintenir. Il faut, dit-il, subventionner ceux qui restent (par exemple un Pub local pour lui éviter de fermer).

Il faut, écrit-il, revaloriser les métiers du soin. Symboliquement, l’inclusion du travail à la maison dans le PIB, s’il ne rend pas plus riche, pourrait contribuer à valoriser les activités domestiques. Il faut aussi attirer plus d’hommes dans ces métiers, peut-être en introduisant une forme de discrimination positive accompagnée d’une révision des appellations de métiers (infirmière par exemple) et une automation qui les rendrait plus attractifs. En capitalisant sur l’expérience du Covid-19, pourquoi ne pas créer une « armée de réserve » pour la santé, composée de gens ayant des formations basiques, écrit-il ? Pour revaloriser une forme d’artisanat, il propose d’obliger les jeunes à détenir, à 18 ans, une qualification manuelle (de la menuiserie au codage). Ce serait une sorte de service civique dispensé dans des centres dédiés, qui serait l’occasion d’un brassage social et ethnique et viendrait en plus d’une diversification des parcours à l’école et après l’école valorisant les trois H du titre du livre de David Goodhart.



[1] Notes de lecture ici : http://www.micheletribalat.fr/436804830.

[2] https://www.lefigaro.fr/vox/societe/les-extraits-du-livre-evenement-de-l-essayiste-britannique-david-goodhart-20201005.

[3] Pour son livre Coming Apart, publié en 2013 (pour un commentaire voir http://www.micheletribalat.fr/434724335). Le dernier livre de Charles Murray, Human Diversity, a été publié en janvier 2020, trop tard pour que David Goodhart intègre ses analyses, ce qui lui aurait été bien utile sur tout ce qui touche à l’intelligence et au QI. Dans ce livre, Charles Murray fait le tour des études, y compris les plus récentes, sur le sujet.

[4] “I am a controversial fugure. The last thing a geneticist or a neuroscientist working on college campus needs is to be thanked by me.”

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vendredi, 06 novembre 2020

Le contrôle social par la Jeune-Fille en Occident

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Le contrôle social par la Jeune-Fille en Occident

Les Carnets de Nicolas Bonnal

tiqqunthjf.jpgAlors que l’occident est sous contrôle psychiatrique-pathologique, belliciste-humanitaire, féministe-antiraciste, androphobe-russophobe et sociétal-transgenre, relisons ou découvrons un admirable ouvrage collectif (1) sur ce sujet instructif, la Jeune-Fille :

« La Jeune-Fille veut être “indépendante”, c’est-à-dire, dans son esprit, dépendante du seul ON. »

Oui, cet « on », ces « ils », ces indéfinis, qui ne font pas assez couler assez d’encre, en auront-ils fait couler du sang… Et regardez la guerre que May se prépare contre la Russie…

Tout comme une mauvaise demoiselle peut dans les romans du Graal dérouter le chevalier (2), la Jeune-Fille humanitaire, consumériste des temps postmodernes nous mène à de drôles de guerres psy :

« Sous les grimaces hypnotiques de la pacification officielle se livre une guerre. Une guerre dont on ne peut plus dire qu’elle soit d’ordre simplement économique, ni même sociale ou humanitaire, à force d’être totale. Tandis que chacun pressent bien que son existence tend à devenir le champ d’une bataille où névroses, phobies, somatisations, dépressions et angoisses sonnent autant de retraites, nul ne parvient à en saisir ni le cours ni l’enjeu. »

La Jeune-Fille (n’oubliez pas le tiret), c’est la guerre hybride du système pour arraisonner 95% des consciences :

« Paradoxalement, c’est le caractère total de cette guerre, totale dans ses moyens non moins que dans ses fins, qui lui aura d’abord permis de se couvrir d’une telle invisibilité. »

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La guerre hybride serait-elle d’origine chinoise ? Amusons-nous sans Sun Tze :

« Aux offensives à force ouverte, l’Empire préfère les méthodes chinoises, la prévention chronique, la diffusion moléculaire de la contrainte dans le quotidien. Ici, l’endoflicage vient adéquatement relayer le flicage général et l’auto-contrôle individuel le contrôle social. Au bout du compte, c’est l’omniprésence de la nouvelle police qui achève de la rendre imperceptible. »

Le but est pour chaque conscience de devenir sa propre police (peau lisse) :

« L’enjeu de la guerre en cours, ce sont les formes-de-vie, c’est-à-dire, pour l’Empire, la sélection, la gestion et l’atténuation de celles-ci.

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La mainmise du Spectacle sur l’état d’explicitation public des désirs, le monopole biopolitique de tous les savoirs-pouvoirs médicaux, la contention de toute déviance par une armée toujours plus fournie de psychiatres, coachs et autres “facilitateurs” bienveillants, le fichage esthético-policier de chacun à ses déterminations biologiques, la surveillance sans cesse plus impérative, plus rapprochée, des comportements, la proscription plébiscitaire de “la violence”, tout cela rentre dans le projet anthropologique, ou plutôt anthropotechnique de l’Empire. Il s’agit de profiler des citoyens… »

Il y a les asservis (clin d’œil à La Boétie, lisez notre texte) et les résistants :

« Les citoyens sont moins les vaincus de cette guerre que ceux qui, niant sa réalité, se sont d’emblée rendus : ce qu’on leur laisse en guise d’“existence” n’est plus qu’un effort à vie pour se rendre compatible avec l’Empire. »

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Mais définissons la Jeune-Fille ; d’abord par ce qu’elle n’est pas : 

« Entendons-nous : le concept de Jeune-Fille n’est évidemment pas un concept sexué. Le lascar de boîte de nuit ne s’y conforme pas moins que la beurette grimée en porno-star. Le sémillant retraité de la com’ qui partage ses loisirs entre la Côte d’Azur et ses bureaux parisiens où il a gardé un pied lui obéit au moins autant que la single métropolitaine trop à sa carrière dans le consulting pour se rendre compte qu’elle y a déjà laissé quinze ans de sa vie. »

Et qu’est-ce qu’elle est alors ?

« …la Jeune-Fille n’est que le citoyen-modèle tel que la société marchande le redéfinit à partir de la Première Guerre mondiale, en réponse explicite à la menace révolutionnaire. En tant que telle, il s’agit d’une figure polaire, qui oriente le devenir plus qu’elle n’y prédomine. »

En tant que fashion victimon s’en fout. C’est la jeune fille bio qui nous intéresse, qui donne la Suède, Barack-Hillary, May, Macron, Merkel et leurs croisades humanitaires, leur bolchevisme sociétal. L’équipe Tiqqoun explique (admirable texte collectif, une des rares aventures stylistiques récentes) :

« À mesure que le formatage jeune-filliste se généralise, la concurrence se durcit et la satisfaction liée à la conformité décroît. »

61sSrrZ8l8L._AC_UL320_SR208,320_.jpgD’où ce bon vieux virage bio :

« Un saut qualitatif s’avère nécessaire ; l’urgence impose de s’équiper d’attributs neufs autant qu’inédits : il faut se porter dans quelque espace encore vierge. Un désespoir hollywoodien, une conscience politique de téléjournal, une vague spiritualité à caractère néo-bouddhiste ou un engagement dans n’importe quelle entreprise collective de soulagement de conscience feront bien l’affaire. Ainsi éclot, trait à trait, la Jeune-Fille bio. »

Faut être gentil alors (si tu veux la guerre prépare la paix, si tu veux être méchant, exige la gentillesse) :

« La Jeune-Fille prise la “sincérité”, le “bon cœur”, la “gentillesse”, la “simplicité”, la “franchise”, la “modestie”, et d’une façon générale toutes les vertus qui, considérées unilatéralement, sont synonymes de servitude. »

L’important est la soumission :

« La Jeune-Fille vit dans l’illusion que la liberté se trouve au bout d’une soumission totale à la “Publicité” marchande. Mais au bout de cette servitude, il n’y a que la vieillesse, et la mort. »

L’empire (le pire) contre-attaque et il est sur ses gardes (mégarde) :

« Contrairement à son ancêtre, la Jeune-Fille bio n’affiche plus l’élan d’une quelconque émancipation, mais l’obsession sécuritaire de la conservation. C’est que l’Empire est miné à ses fondements et doit se défendre de l’entropie. »

Après on fait du Merkel. On aime les LGTBQ ou les migrants, c’est les hommes et les Allemands qu’on déteste :

« La Jeune-Fille bio sera donc responsable, “solidaire”, écologique, maternelle, raisonnable, “naturelle”, respectueuse, plus autocontrôlée que faussement libérée, bref : biopolitique en diable. Elle ne mimera plus l’excès, mais au contraire la mesure, en tout. »

61YPNmU3XaL._AC_UL320_SR210,320_.jpgSuccession d’aphorismes héraclitéens ou presque :

« Car la Jeune-Fille veut la paix du foutre.

La Jeune-Fille est le collaborateur idéal.

La Jeune-Fille conçoit la liberté comme la possibilité de choisir entre mille insignifiances.

La Jeune-Fille ne veut pas d’histoire.

La Jeune-Fille vise à la réglementation de tous les sens. »

Pauvre Rimbaud, encore un macho ! Et vive le dérèglement de tous les sens… interdits !

Par sa consommation et sa réglementation, la néo-nurse (cf. Chesterton) promeut la soumission :

« Dans le monde de la marchandise autoritaire, tous les éloges naïfs du désir sont immédiatement des éloges de la servitude. »

C’est que dans le monde américanisé (moderne), dit Chesterton (3), on n’aura pas plus de droits que dans une nursery (cf. Tocqueville qui devine vers 1830 qu’on sera « maintenus dans l’enfance ») :

« La violence avec laquelle la féminitude est administrée dans le monde de la marchandise autoritaire rappelle comme la domination se sent libre de malmener ses esclaves, quand bien même elle aurait besoin d’eux pour assurer sa reproduction. »

Evidemment pas question de râler (sinon on appelle les casques bleus, blancs, roses…) :

« La Jeune-Fille est le pouvoir contre lequel il est barbare, indécent et même carrément totalitaire de se rebeller. »

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L’homme doit être rééduqué (c’est déjà fait, allez, dans les années 80 Kundera parla de cet arbre à enfantsqui remplace le paternel) :

« Il faudrait créer un grand projet éducatif (peut-être sur le modèle chinois ou khmer rouge), sous forme de camps de travail où les garçons apprendraient, sous l’égide de femmes compétentes, les devoirs et les secrets de la vie ménagère.»

Ce n’est plus la mère aux trousses, c’est le khmer aux trousses ! Mais continuons comme dirait Jean-Paul :

« Et de fait, lorsque la Jeune-Fille “fait tomber le masque”, c’est l’Empire qui vous parle en direct.

« ... et si on éliminait les mecs de la planète ? Pourquoi essayer de faire du neuf avec du vieux ? Y en a marre des mecs, allez ouste, du balai ! D’ailleurs inutile de s’énerver, historiquement, génétiquement, l’homme a fait son temps. Il se pousse tout seul vers la sortie. »

Le bonhomme a fait son temps, la Jeune-Fille androphobe l’entame…

L’épuration éthique règne dans le camp de déconcentration de ce déconcertant féminisme épurateur :

« Chaque Jeune-Fille est en elle-même une modeste entreprise d’épuration. Prises dans leur ensemble, les Jeunes-Filles constituent le corps franc le plus redoutable que l’on ait à ce jour manœuvré contre toute hétérogénéité, contre toute velléité de désertion. Parallèlement, elles marquent à chaque instant le poste le plus avancé du Biopouvoir, de son infecte sollicitude et de la pacification cybernétique de tout. »

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Une phrase qui résume la philosophie de BHL (qui ressemble depuis longtemps à une vielle Jeune-Fille) :

« La Jeune-Fille n’aime pas la guerre, elle la fait. »

Enfin, comme pour parodier les vilaines chansons de Boris Vian, auteur et chanteur bobo, on liquide les ohms :

« MARRE DES MECS? PRENEZ UN CHIEN ! Vous avez quoi !? 18, 20 ans ? Vous entreprenez des études qui s’annoncent longues et ardues ? Croyez-vous que ce soit le moment de ralentir ce bel envol en cherchant désespérément de l’affection chez un garçon qui finalement n’a rien à donner ? Pire ! Vous affubler d’un compagnon, lui-même pas tout à fait fini, pas très gentil et pas toujours bien propre... »

On redéfinit la violence dans une sentence impeccable :

« Comme tout ce qui est parvenu à une hégémonie symbolique, la Jeune-Fille condamne comme barbare toute violence physique dirigée contre son ambition d’une pacification totale de la société. »

La société ludique est sécuritaire, comme le voyait Muray :

« Elle partage avec la domination l’obsession de la sécurité. »

Tout se militarise :

« Le caractère de machine de guerre qui frappe dans toute Jeune-Fille tient à ce que la façon dont elle mène sa vie ne se distingue pas de la façon dont elle mène sa guerre. Mais par un autre côté, son vide pneumatique annonce déjà sa militarisation à venir. »

Car la Jeune-Fille a déclaré la guerre à tout ou presque :

« La Jeune-Fille a déclaré la guerre aux microbes.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre au hasard.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre aux passions.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre au temps.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre au gras.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre à l’obscur.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre au souci.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre au silence.

La Jeune-Fille a déclaré la guerre au politique. »

Enfin, pourquoi la tautologique Jeune-Fille incarne-t-elle la fin de l’histoire alors ? Parce que :

« LA JEUNE-FILLE A DÉCLARÉ LA GUERRE À LA GUERRE. »

Et les hommes dans tout cela ? Comme me disait en 2006 une serveuse à Mar del Plata, tandis que je polissais mes contes latinos, « ils se sont éteints, les hommes. »

Notes 

(1) Premiers matériaux pour une théorie de la Jeune-Fille, groupe Tiqqoun

(2) Nicolas Bonnal, Perceval et la reine, préface de Nicolas Richer (Amazon.fr)

(3) Chesterton – What I saw in America (Gutenberg.org)

jeudi, 29 octobre 2020

Les Technocrates contre le pays réel

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Les Technocrates contre le pays réel

par Jean-Gilles Malliarakis

Ex: https://www.insolent.fr

vendredi, 23 octobre 2020

La postmodernité tragique

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La postmodernité tragique

 
Ex: https://www.bvoltaire.fr

Il est des expressions qui ne sont ni convenables ni pertinentes. « heureuse » est du nombre. La France, foyer où s’élaborèrent les grandes et belles valeurs du monde moderne, éprouve, toutes tendances théoriques confondues, une véritable crainte devant la mutation de fond s’amorçant sous nos yeux. D’où la multiplicité des réactions, celles des élites, plus ou moins émotionnelles, curieusement en accord avec l’esprit du temps.

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Ces mêmes réactions ne comprennent en rien la distinction entre « le savant et le politique » (Max Weber), conduisant comme nous le rappelait à loisir un de mes maîtres, Julien Freund, à une stricte « neutralité axiologique ». Lui-même en eut à souffrir !
« Neutralité axiologique » se contentant de constater ce qui est et non ce qui « devrait être » ou ce que l’on aimerait qui soit, etc.

C’est cela, la « pertinence » propre à la démarche universitaire, éclairant ceux qui en, fonction d’engagements politiques, philosophiques sociaux, veulent et peuvent s’en servir. Mais là encore, l’ambiance émotionnelle du moment est loin de favoriser la pensée et l’action sereines. Ainsi, la postmodernité naissante est-elle rien moins qu’« heureuse » et ne le sera jamais. Ayons la lucidité de mettre en perspective et évitons la confusion des mots : « mal nommer les choses contribue au malheur du monde » (Albert Camus).

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La modernité est-elle essentiellement dramatique : le drame (drao, en grec) consiste à trouver une solution, une résolution. Le cerveau reptilien de l’oligarchie médiatico-politique s’emploie à rechercher une société parfaite à venir. Karl Marx l’a bien résumé : « Chaque société se pose les problèmes qu’elle peut résoudre. » La dialectique en est l’instrument de choix. Dans la « marxisation » des esprits, censément éclairés, le concept hégélien de « dépassement » (Aufhebung) est le b.a-ba de toute analyse.

On peut, ainsi, dépasser le mal, la dysfonction, la maladie, voire la mort. C’est cela, le mythe du progrès, c’est de cela que témoigne le transhumanisme qui en est l’héritier direct. En ce sens, oui, la modernité est heureuse !

Tout autre est le fondement de ce que fut la prémodernité, et de ce qu’est la postmodernité. Le tragique en l’expression achevée. Nécessité d’antique mémoire stoïcienne oblige, il convient de s’accorder tant bien que mal à ce qui est. Le tragique est aporique, c’est-à-dire sans solution a priori. Gilbert Durand, à la suite de Stéphane Lupasco, parlait, à l’opposé de la dialectique, d’une logique « contradictorielle ». Le contraire : mal, dysfonctions, mort… ne peut être dépassé. Il faut, comme le rappelle la sagesse populaire, « faire avec ». Le catholicisme traditionnel rappelait cela. Le culte marial de Notre-Dame de la bonne mort (église Saint-Porchaire à Poitiers) ou celui de Notre-Dame du bien mourir (abbaye de Fontgombault) ou le quatrième mystère joyeux du Rosaire, celui de l’Assomption de la Vierge Marie en témoignent.

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Ainsi, parmi bien d’autres caractéristiques essentielles, l’analyse propre à la postmodernité, constate-t-elle, avec lucidité, le renouveau de la notion de limite. La frontière, le territoire, le terroir, etc., redeviennent d’actualité. Ainsi que je l’ai, à de multiples reprises, indiqué, le lieu fait lien. Pour reprendre une dialogie du philosophe Georg Simmel, « le Pont et la Porte », si le pont a caractérisé la modernité, le désir de la porte retrouve une indéniable actualité. Un oxymore peut résumer cela : « l’enracinement dynamique ! »

C’est en fonction de tout cela que, n’étant en rien spécialiste de l’islam, j’ai rappelé avec prudence (La Nostalgie du sacré, Cerf, 2020) que c’est le rouleau compresseur du rationalisme qui, en désenchantant le monde, a pu susciter les regains pervers (per via, prenant des voies détournées) du fanatisme. L’islamisme en est l’expression achevée.

Mais plus profondément, peut-être faudrait-il rappeler, avec Joseph de Maistre, que la « divinité des mahométans est un dieu des razzias ». Ou encore, en citant les premières pages du très beau livre d’Ernest Renan sur l’averroïsme, que « quand Averroès mourut, en 1198, la philosophie arabe perdit en lui son dernier représentant et le triomphe du Coran sur la libre pensée fut assurée pour au moins six cents ans ». Seul cet « au moins » est un peu trop prudent. L’actualité le prouve à loisir. C’est tout cela, également, qui rend peu pertinente l’astucieuse distinction, propre à la bien-pensance, entre l’islam et l’islamisme.

Voilà le constat que l’on peut, avec lucidité, faire. Et ce, en laissant à ceux dont c’est la fonction d’agir le soin de le faire. En reprenant une belle expression du cardinal Nicolas de Cues (in La Docte Ignorance), la coencidentia oppositorum, la coïncidence des choses opposées, doit se faire en rejetant cependant ce qui ne peut pas, ne doit pas être intégré dans ce qui pourrait être une harmonie conflictuelle. C’est cela que j’ai, en son temps, développé dans Le Temps des tribus. Voilà, également, en quoi la postmodernité est essentiellement tragique.

mardi, 20 octobre 2020

Où va la ville ? Entretien avec Pierre Le Vigan

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Où va la ville ?

Entretien avec Pierre Le Vigan

Archives: Entretien du 6 juin 2010 paru dans Europe Maxima, site numérique, novembre 2010.

De l'après-guerre aux années 60, la France a été dans l'obligation de développer son parc de logements pour répondre aux besoins de la reconstruction, au baby-boom et  aux flux migratoires (retour des Pieds-Noirs et immigration du Maghreb notamment), comment a été gérée la crise du logement et comment a-t-on décidé des nouvelles politiques d'urbanisme à mener ?            

        La France a été très lente à mettre en place une politique du logement d’autant plus nécessaire après 1945 qu’aux destructions de la guerre 39-45 s’ajoutaient les effets du retard pris dans l’entre-deux-guerres, malgré les lois Loucheur, les constructions de pavillons et de quelques cités-jardins. L’essor réel de la construction après-guerre date du Plan Courant de 1953, du nom de Pierre Courant, ministre de la Construction. La construction s’est accélérée à partir des ZUP (zones à urbaniser en priorité). Comme dans beaucoup de domaines, c’est la IVe République qui a initié les choses mais c’est la Ve qui en a récolté les fruits, du moins à l’époque du général de Gaulle.    A cette époque, en effet, on a vu les bénéfices de la politique de construction de masse de logements mais on n’en a pas vu les conséquences à long terme. Les bénéfices, c’est loger plus de familles – suite au baby boom qui démarre  en 1942 – et dans plus de confort. Les conséquences à long terme c’est un urbanisme sans âme, sans enracinement, des quartiers sans repères, souvent éloignés des moyens de transports, isolés des vieux centres-villes, et c’est la création de quartiers anonymes et dévalorisés.

            Comment en est-on arrivé là ?

             indexPDO.jpgC’est la politique de Paul Delouvrier, grand commis à l’urbanisme nommé par de Gaulle, qu’il faut incriminer. Les zones à urbaniser étaient choisies en « sautant » par-dessus les banlieues existantes. Donc en lointaine périphérie. On a préféré faire du neuf dans des endroits vierges plutôt que d’améliorer les territoires de vieilles banlieues. Il est vrai que celles-ci étaient communistes pour une bonne part et que le régime gaulliste voulait les contourner.  En outre, l’idéologie urbaine « fonctionnaliste » plus ou moins proche de Le Corbusier se prêtait plus à des constructions dans de l’espace vide plutôt qu’à des « retricotages » subtils de la ville dans des territoires déjà urbanisés.

            Des erreurs ont-elles été commises dans les années 50-60 à 70 ? Si oui,  lesquelles ? Ont-elles concerné d’abord le domaine architectural, ou urbanistique, ou les deux?

            Parmi les graves erreurs, il y a le manque de transports en commun : peu de gares, pas de tramway, pas assez de bus. Il y a l’isolement par rapport aux centres-villes, il y a des constructions de cités de logements à cheval sur plusieurs villes, qui favorisent l’irresponsabilité des élus. Il y a l’interven­tion­nisme d’Etat hors de toute concertation avec les élus locaux. Force est de constater que de Gaulle ne connaissait rien et ne comprenait rien aux questions de la ville et qu’il était surtout inspiré par la politique extérieure. Ce qui plaide, entre parenthèses, contre le pouvoir personnel et contre une présidence omnipotente. L’architecture des grands ensembles est contestable par sa monotonie, par l’équivalence du devant et du derrière des immeubles, par sa dimension souvent excessive. Je ne crois pas souhaitable de construire des immeubles au-delà de 7 ou 8 étages qui ne permettent guère de loger plus de gens, à moins de réduire les règles de prospects, donc de rapprocher les immeubles d’une manière pathologique, qui obligent à avoir plusieurs ascenseurs, et qui rendent plus complexes les règles de sécurité (incendie et autre).  Toutefois, dire cela, c’est déjà être plutôt dans la volu­métrie et le rapport entre les volumes, donc dans l’urbanisme  que dans l’archi­tecture stricto sensu. Des voies trop larges sont aussi à incriminer, des espaces non appropriés, trop d’espaces verts qui ressemblent à des terrains vagues.

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 « Pas assez de densité » : c’est à mon avis le reproche principal à faire aux politiques des dernières décennies. Les banlieues lointaines, les villes nouvelles sont 5 à 10 fois moins denses voire encore moins (en nombre de logements à l’hectare) que les centres-villes haussmanniennes. Exemple : Paris 20.000 habitants/km2, Sarcelles (Val d’Oise) 7.000 habitants/km2, Villiers le bel (Val d’Oise) 3.700 habitants/km2, Bièvre, en Essonne 500 habitants/km2. La faible densité rend difficile l’anonymat et donne au groupe une pression communautaires excessives (l’impossibilité des femmes de se promener en jupe), donne aux bandes une forte visibilité, rend trop couteuse la création de transports collectifs, favorise donc la voiture comme mode de déplacement, avec ses nuisances y compris en terme de paysage urbain (immenses parkings au pied des HLM). Les erreurs sont donc avant tout urbanistiques.

            Si des erreurs ont-été commises à ce moment-là, les politiques en ont-ils tenus compte lors des politiques ultérieures d'urbanisation ?

        A  partir de 1975, la réponse est oui. Bien entendu, tout n’est pas parfait à partir de cette époque, mais il se trouve que le très net ralentissement de la construction à partir de 1975, absurde à certains égards alors que le gouvernement encourageait l’immigration familiale qui amenait donc des familles nombreuses en France, ce ralentissement a mené à faire des opérations plus petites, mieux concertées, surtout à partir de la décentralisation de 1982-83, et mieux intégrées dans l’existant.  Cela a par contre amené les grands ensembles qui, sans immigration, auraient été peu à peu déserté et détruit, a devenir un réservoir de logements pour immigrés.

Autre changement, depuis les années 1970, un véritable corps professionnel des urbanistes a fini par exister et la culture des architectes a changé elle aussi, avec la fin (partielle) de la domination des idéaux modernistes et fonctionnalistes.  Ce qui ne veut pas dire que tout ce que l’on appelle post-moderne forme un ensemble cohérent (ce n’est pas le cas) ou convaincant (Ricardo Bofill est parfois assommant de mauvais goût). Un exemple de réurbanisation assez réussi est le centre-ville de Saint-Denis, dans le 93, avec des rues étroites, le tramway, le métro, à une erreur près, importante : avoir installé un grand supermarché dans le centre au lieu d’une multitude de boutiques. Malheureusement, le meilleur des urbanismes ne peut pas grand-chose face à des vagues d’immigrations non maitrisée et face à l’absence d’assimilation.

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            Quelles ont été les politiques de rénovation et de réhabilitation urbaine  menées en France à partir de la fin des années 1970 et sur la base du constat d’une certaine crise des grands ensembles ? Quel bilan peut-on en tirer ? Quelle a été la concertation avec les habitants et les acteurs locaux (municipalités et habitants notamment) ?  Que pensez-vous de la politique de la ville en général ? Et comment voyez-vous  l’évolution de la situation sur le plan du « vivre ensemble » et de la délinquance ?

             Le début des politiques de la ville, en fait la politique des quartiers « à problèmes » est Habitat et Vie Sociale (HVS). Nous sommes en 1977 et c’est surtout une idée de la « deuxième gauche » social-démocrate (par opposition à la première gauche « montagnarde »). Il se trouve que c’est aussi à ce même moment que la politique de l’aide à la pierre est remplacée par l’aide à la personne. A ce moment, les loyers des logements sociaux deviennent trop chers (puisqu’elles n’ont pas d’aide) pour les classes moyennes, qui sont poussés à quitter les HLM, ce qui nuit bien sûr à la mixité sociale. L’aide à la personne (les APL) rend solvables des gens qui ont de faibles revenus, ou des revenus de transferts sociaux, ou travaillent au noir. Cela amène à changer la composition des HLM : les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses, ainsi que les familles issues de l’immigration. En 30 ans, elles sont devenues majoritaires dans beaucoup de quartiers de banlieues ou en tout cas de quartiers HLM. Les réhabilitations qui ont été menés l’ont généralement été sérieusement. Le gain en confort est souvent réel même si, esthétiquement, l’aspect hybride des interventions n’est pas toujours très heureux. Mais les habitants vivent dans les immeubles avant de les regarder.

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Le problème est l’ampleur des dégradations et atteintes aux biens et personnes commises par une petite minorité d’habitants, qui instaure un climat de peur et de complaisance vis-à-vis des trafics, vols, dégradations dont les autres habitants, eux-mêmes en bonne part issus de l’immigration sont les premières victimes. Après HVS, le gouvernement Mauroy, en 1981, a mis en place la politique de DSQ (développement social des quartiers). Il s’agit alors avant tout de faire un travail éducatif et de prévention de la délinquance. Les études d’évaluation se sont succédées et les nouvelles mesures de politique de la ville aussi, en fonction des gouvernements. Elles se ressemblent toutes, étant définies par les mêmes hauts fonctionnaires, souvent assez autistes et munis d’une culture de type « fonction publique », respectable mais parfois bien naïve, culture associée à une formation sociologique de base amenant bien souvent à la « culture de l’excuse ». A cela s’ajoute le souci de ne pas « faire de vagues », souci partagé par les politiques. Le clientélisme communautaire s’ajoute ensuite à cela. 

      D’une manière générale, la situation ne s’est pas améliorée, sauf dans certaines villes de province car l’échelle plus petite de l’urbain et l’implication de certains élus locaux a permis des réussites. Le « mal vivre ensemble » gagne. Chômage, dévalorisation du travail, relations conflictuelles entre jeunes et police se sont installés dans la durée, avec une violence croissante. Les contrôles au faciès sont une réalité, mais dans le même temps, l’agressivité de certaines bandes de jeunes vis-à-vis de tout ce qui est public, des pompiers aux médecins, et en somme vis-à-vis de tout ce qui extérieur au quartier est réelle.  Cette logique du ghetto est dramatique et n’a été cassée par aucune loi, même bien intentionnée, comme la Loi d’Orientation sur la Ville (LOV) de 1991.

            Comment les autres pays européens ont-ils géré la reconstruction d'après-guerre et l'augmentation des populations urbaines? Ont-ils menés des politiques similaires à la France en la matière ?

             En Allemagne, il y a eu beaucoup de reconstructions qui respectaient l’usage des parcelles avant les destructions (peu à Berlin, par contre) et peu ou prou la volumétrie des immeubles détruits, très nombreux (il y avait des millions de sans-abris qui s’étaient ajoutés aux centaines de milliers de morts). L’influence de Le Corbusier est venue plus tard. En Grande-Bretagne la reconstruction a été plus rapide qu’en France. Dans tous les cas, l’arrivée en ville de populations rurales, puis immigrés a été l’occasion de production de logements de masse comparables (grandes cités-dortoirs) mais le phénomène a été plus marqué en France parce que l’urbanisation était plus tardive que dans beaucoup d’autres pays européens.

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Dresden: la reconstruction de la ville après la fin de la RDA.

            Qu’est-ce qu’un quartier de relégation en France? En quoi et comment se fait ce processus de relégation ? Sur le plan de la géographie, de la sociologie et des transports notamment ?

            Un quartier de relégation est un quartier qui donne une mauvaise image sur les curriculum vitae mais c’est aussi et surtout un quartier où on rencontre surtout des gens « paumés », sans repères, sans projet. Dans un quartier de relégation, il n’y a pas une dynamique sociale positive, ascendante. C’est un quartier ghetto, un ghetto de pauvres mais aussi un ghetto d’immigrés. Il manque une culture commune à laquelle s’agréger. Parfois, cette culture, c’est l’islam. Mais ce n’est pas ce qui aide le plus à l’intégration, notre pays n’ayant pas vocation à devenir musulman, pas plus qu’arabe, turc ou africain. Souvent, l’adoption de l’islam correspond à une réaction identitaire. « Puisque vous me rejetez, moi aussi je rejette votre Occident consumériste. » (sans négliger le fait que l’adhésion à l’islam ne s’accompagne pas forcément du rejet du consumérisme). On peut comprendre cette recherche identitaire de substitution, mais ce n’est pas très constructif quand on continue de « zoner » au pied de la cité, et c’est souvent très artificiel.  C’est un islam du ressentiment plus que de l’affirmation. Il nous faut dire : « La République française n’admet que l’on dissimule son visage dans l’espace public » (qu’il s’agisse de burqa, casque de motard, bonnet, déguisement, etc.) ». La polygamie est plus complexe – sans doute beaucoup plus massive aussi que le port de la burqa – et pose des problèmes plus graves.  Y compris la question du déséquilibre démographique entre Français « de souche » et immigrés, qu’ils soient Français ou non au plan de l’Etat civil.

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Mosquée de Montreuil, banlieue parisienne.

            Les services publics au sens large et les autres acteurs indispensables (médecins par exemple) sont-ils suffisamment présents dans ces quartiers ?

        Ils ne sont pas assez nombreux. Regardez par exemple le taux de médecins, qui est faible. Les conditions de séjour ne sont certes pas incitatives, pas plus en banlieue que dans la France périphérique. Tant que la sécurité n’est pas rétablie, ces sous-effectifs sont inévitables. Les professions libérales, à quelques remarquables exceptions près, vont là où il y a de l’argent, et de la tranquillité publique.  Quant aux policiers, ils sont beaucoup moins nombreux à la fois par habitant et par hectare de territoire à surveiller en banlieue qu’à Paris. Il faut plus de policiers mais aussi et surtout plus de police de proximité. Il faut certainement moins d’opérations coups de poing, qui sont faites pour être médiatisées, mais ne résolvent pas grand-chose, mais plus de travail policier en profondeur. Il faut par contre instaurer une insécurité quotidienne pour les dealers et les bruleurs de voitures. Actuellement, c’est plutôt l’insécurité quotidienne pour les honnêtes gens qui, rappelons-le, sont la grande majorité des habitants des banlieues. 

            Les diverses classifications opérées par la politique de la ville (ZUS, ZEP,...) ont-elles contribué, selon-vous, à stigmatiser ces quartiers ?

            Zones urbaines sensibles, zones d’éducation prioritaire, zones de redynamisation urbaine, zone franches urbaines : tous ces sigles visent à désigner des politiques publiques prioritaires et sur des territoires qui ne se recoupent pas tous. C’est une machinerie complexe et parfois utile. L’état de la banlieue ne serait-il pas pire sans un certain nombre de ces mesures sur lesquelles il est trop facile de ricaner ? Possible. Ceci dit, elles ne sont pas à la hauteur des problèmes. Déléguer la gestion des quartiers aux « associations », cela a ses limites. Cela aussi des effets de clientélisme et de communautarisation. 

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La vraie question est que beaucoup de quartiers ne sont plus des quartiers de travailleurs et quand il y a des travailleurs, ils n‘ont qu’une idée en tête : en sortir le plus vite possible pour échapper à un climat malsain pour eux, pour leur femme, leurs enfants. Les ZEP donnent plus de moyens, et c’est plutôt un atout d’être en ZEP de ce point de vue mais, ensuite, si la norme sociale et culturelle de la jeunesse de tel quartier en ZEP est de ne rien faire à l’école, au collège, au lycée et au contraire de vivre de petites magouilles (ou grandes magouilles et vraie délinquance), qui empoisonnent la vie du quartier, alors cela ne suffit pas.   Les gens d’origine immigrés sont les premiers à dire, bien souvent, « pas question pour moi de m’installer dans le "neuf-trois" » (la Seine Saint Denis). Ils ajoutent souvent, n’ayant pas l’habitude de la langue de bois : « Il y a trop de racaille ».  Je crois que ces quartiers se sont « stigmatisés » tout seul, du fait d’une partie de leur jeunesse et de la faiblesse du civisme en général en France. De même, on se stigmatise en s’habillant d’une certaine façon (‘‘survêtement à capuche’’…), en s’exprimant d’une certaine façon, etc. On ne peut vouloir être considéré comme un Français comme un autre si tout dans son comportement manifeste que l’on ne se sent pas de culture et de mœurs françaises. Quant à dire qu’ « il n’y a pas de culture française » (Emmanuel Macron), c’est là une réponse tout aussi stupide que de dire qu’il n’y a pas de culture turque, marocaine, iranienne, etc.

            Quelles sont les grandes orientations données par l’actuel ministère de la Ville pour les quartiers sensibles ? Existe-t-il des points critiquables ou qui ont fait débat ? Comment la politique de la ville entend-elle lutter, présentement et à l’avenir contre la délinquance ?

            Le logement, de 2007 à 2010, a été rattaché au vaste ministère de l’Ecologie de Jean-Louis Borloo. Fadela Amara a été secrétaire d’Etat à la ville (2007-2010). Cette dernière a eu de bonnes idées, mélange de volontarisme, de connaissance du terrain et de réalisme (elle ne se fait pas trop d’illusions). Elle est bien inspirée mais a été marginalisée. Le gouvernement a cherché en la nommant un effet d’affichage avant l’efficacité. En fait, pour comprendre, au-delà des mots et des discours quasi-interchangeables d’un ministre à l’autre, la vraie politique du gouvernement pour les banlieues, il faut regarder le projet du Grand Paris de Christian Blanc, sans même parler des extrapolations de Jacques Attali sur « Paris prolongé jusqu’au Havre », Jacques Attali jouant, comme Alain Minc, le rôle de ballon d’essai de Sarkozy (et plus généralement du libéralisme mondialiste – note de 2017).

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Or, c’est un projet du même ordre que celui de de Gaulle et Delouvrier  dans les années 1960 que ce projet gouvernemental du Grand Paris. A savoir un très mauvais projet. Non qu’il n’y ait pas matière à créer une instance fédérative entre Paris et les trois départements de la proche couronne. Cela, c’était le projet de Philippe Dalier à « droite », et de Georges Sarre à « gauche ».  Mais le Grand Paris de Christian Blanc (repris par les équipes de Hollande – note de 2017) se résume au super métro, le « grand huit » de 130 km, qui ne répond aucunement aux besoins des habitants. Là encore, on saute par-dessus la banlieue existante pour aller créer des problèmes ailleurs en développant plus encore l’urbanisation en très grande banlieue, une urbanisation en tâche d’huile. Une nouvelle catastrophe urbaine se prépare.

***

            Est-ce que démolir des tours pour faire des banlieues pavillonnaires améliore automatiquement la vie collective et fait reculer la délinquance ?

           Il est sidérant de voir que l’on va détruire des tours porte de Clignancourt (tours qui ne sont pas plus horribles que d’autres, ni en mauvais état du reste, même si je n’ai aucun goût pour les tours) au moment où on parle d’en construire porte de la Chapelle, soit à deux pas, et à un endroit où il y en a déjà dont on peut faire le bilan : elles fonctionnent très mal sauf quand elles sont hyper-sécurisées (donc très couteuses) et donc destinés à des classes moyennes ou supérieures, celles qui n’ont pas la moindre envie d’habiter la Porte de la Chapelle. D’où une contradiction sans solution.

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On marche sur la tête. Une nouvelle fois – et c’est le mal contemporain – ce qui compte pour les politiques, c’est l’image, l’image, l’image. Alors que l’efficace, l’utile pour les habitants, souvent, ce n’est pas le spectaculaire. C’est du terre à terre dont on a besoin. Et dans tous les sens du terme. Démolir des tours, dans certains cas, pourquoi pas ? Mais ce n’est pas la panacée. Trop souvent, on ajoute du traumatisme à du traumatisme, la destruction est vécue comme une dévalorisation rétroactive. Bien souvent, il vaut mieux densifier, construire autour des barres, ou modifier les barres.  Quant aux tours, de quoi parle-t-on ? 10 étages ? 15 étages ? Quand ce sont des tours résidentielles, cela ne pose pas toujours de problèmes particuliers, chacun respecte les espaces communs.  Quoique… les incivilités existent aussi chez les bourgeois. Pour ce qui est des tours de logements sociaux, elles sont tout à fait inadaptées mais il y a en fait peu de tours de logements sociaux en banlieues, en tout cas assez peu de tours de logements de plus de 10 étages.  Quand il y en a, comme à Bagnolet, il vaut sans doute mieux faire de l’urbanisme reconstructeur, restructurant plutôt que destructeur, améliorer les transports, amener des emplois, décloisonner plutôt que détruire. Dire que l’on détruit des tours pour faire des quartiers pavillonnaires n’est, par ailleurs, pas souvent exact. En général, on détruit des tours pour reconstruire des petits immeubles, qui ont souvent l’inconvénient d’être tous identiques.

            Quelles solutions d’urbanisme et d’architecture pourraient-elles être mises en œuvre pour améliorer la situation de ces quartiers en difficultés ?

            On ne peut évacuer la question de la crise de civilisation : le manque de motivation pour le travail, et pour la création. La France, qui était une nation d’artistes, est devenue une nation de téléphages et de consommateurs d’internet, et pour ce qu’internet a de moins intéressant. La France, l’Occident en général et toute la planète tendent à entrer dans cette post-civilisation qui rétrécit les horizons et atrophie les sensibilités. Seule une minorité échappe à cela. Une minorité privilégiée par la culture, l’éducation et le niveau économique. Il est heureux, en un sens, que cette minorité existe, mais pourra-t–elle résister à la montée de la barbarie ?  Les quartiers en difficulté, habités par des gens eux-mêmes souvent déshérités, moins du reste au plan strictement financier qu’au plan culturel souffrent au premier chef de cette crise de civilisation.

    Les quartiers de grands ensembles, ceux ciblés par la « politique de la ville » – terme ambitieux, il vaudrait mieux dire modestement « l’infirmerie des banlieues » – nécessitent à mon sens de la modestie, continuer de travailler avec certaines associations, même s’il ne faut pas en attendre des miracles, et de l’ambition notamment dans le domaine des transports. Il faut absolument que les gens puissent sortir de ces quartiers, n’en soient pas prisonniers, puissent aller « voir ailleurs ». Donc, il faut des transports, y compris le soir et même la nuit. Il faut renforcer les effectifs permanents de police, mais aussi d’éducateurs.

           indexvict.png Il faut aussi refuser la victimisation. Bien des maghrébins qui « s’en sortent », bien des « noirs » – et non pas des « blacks » – Africains ou Antillais qui eux aussi s’en sortent socialement, c’est-à-dire travaillent, montrent que des jeunes, avec de l’énergie, peuvent trouver une formation, un travail, une voie, un avenir, une espérance, une place dans la société. La République française est généreuse, l’éducation gratuite, les soins gratuits, ce n’est pas rien, il faut le dire et le rappeler. En contrepartie, il faut être sévère avec ceux qui pourrissent la vie de ces quartiers, et qui sont tout simplement des canailles qui vivent de trafics de drogue, de vols, d’escroqueries, de harcèlements, etc.

            Arrive-t-on à faire de la mixité sociale dans les quartiers sensibles ? Sinon, comment expliquer qu'en dépit de la politique de la ville, les habitants fuient ces quartiers ?

      On arrive plus facilement à mettre quelques pauvres dans des quartiers riches que quelques riches dans des quartiers pauvres. La mixité sociale a reculé. Il y avait des bourgeois dans beaucoup de quartiers de banlieue nord il y a 100 ans. Combien en reste-il ? Par ailleurs, le caractère multiethnique des banlieues fait fuir beaucoup de classes moyennes et a fortiori supérieures. Tout le monde est pour l’immigration, les « bobos » en tête, mais chacun préfère habiter un quartier où il n’y a « pas trop » d’immigrés. Il y a beaucoup d’hypocrisie là-dedans. Il n’y avait que les élus communistes, jusque dans les années 1980, à habiter dans des HLM, et encore, pas tous !

            Le problème d’anomie (au sens de désagrégation des règles de vie en collectivité et du lien social) des quartiers sensibles, s’il existe,  est-il résoluble uniquement dans des politiques étatiques ? Où est-ce un problème qui va bien au-delà ? Un problème culturel, de civilisation ?

            L’anomie ou encore la perte de la décence commune dont parlait George Orwell est une réalité. Elle concerne surtout les jeunes de ces quartiers. C’est la conséquence du déracinement dû à l’immigration de masse. C’est la conséquence d’une perte d’identité, ou d’une impossibilité de construction identitaire dans la tolérance, le respect des autres, qu’ils soient issus d’autres communautés immigrées, ou qu’ils soient Français de souche. La société multiraciale est devenue multiraciste. Les injures sont très souvent raciales (et racistes) dans les quartiers que l’on appelait populaires, qui sont encore populaires mais sont aussi maintenant massivement multiethniques et multiraciaux.  Mais, en outre, l’américanisation des mœurs – pour faire court, la fascination par le fric – joue un rôle très déstructurant. L’intégration par les valeurs de l’effort, du travail, de la République qui ne reconnait aucune communauté ne marche plus. Il n’y a pourtant pas d‘autre voie que l’assimilation et le retour à ces valeurs qui n’ont, faut-il le rappeler, jamais impliqué de renier ses ancêtres et ses traditions. Mais est-ce que cela peut marcher avec une immigration de masse ? En tout cas, si cela ne marche pas, rien d’autre ne marchera, car il n’y a pas de communautés en France, de cadres communautaires réellement capables de prendre le relais et on ne peut les créer artificiellement dans les populations d’Afrique noire ou celles originaires du Maghreb. C’est d’ailleurs précisément parce que, dans leurs pays d’origine, le lien social était en crise que ces gens sont venus en France, alors comment peut-on imaginer que, une fois venus en France, leurs attaches d’origine fonctionnent de manière communautaire, ce qu’elles ne faisaient pas toujours dans leur pays ?

           41vZadgoLKL._SX334_BO1,204,203,200_.jpg Pour revenir à la question centrale, qui est celle des jeunes des quartiers, ce qui doit être géré est, ajouté au problème de l’identité, un problème « hormonal ». C’est ce qu’a bien vu Luc Bronner dans La loi du Ghetto. Les jeunes garçons ont pris le pouvoir.  Le culte de l’enfant-roi de nos sociétés n’a rien arrangé. Quand un parent donne une fessée à son gosse, les services sociaux le réprimandent. Les immigrés ne comprennent pas cela. Ils ont l’impression qu’on leur casse leur travail de parent éducateur. Mais surtout, il y a l’absence fréquente du père ou la dévalorisation de la figure du père. C’est souvent un chômeur. Nombre d’immigrés ont été licenciés de leur travail à 45 ans : cela n’aide pas à donner une image forte. Quant aux familles monoparentales, le garçon seul face à sa mère est roi dans certaines cultures. Il y a une asymétrie de la délinquance entre garçons et filles. Difficile donc de dissocier les questions de la banlieue de ces  questions culturelles liées à l’immigration, liées aux cultures des immigrés. Ce qui, bien sûr, ne veut pas dire que, sans problème de l’immigration, il n’y aurait plus de problème de la banlieue. Il resterait le problème de la laideur, et ce n’est pas une petite affaire, car l’homme a besoin de beauté. Il a besoin du ciel étoilé. Il a besoin des nuages. Il a besoin d’une poésie de la vie, et pas seulement de promotions sur les pâtes à tartiner. Il faut à cet égard revoir entièrement la forme et le contenu des centres commerciaux, véritables « rois anonymes » de notre temps, pour reprendre une expression de Georg Simmel à propos de la fonction marchande.

            Quels rapports ont les habitants des quartiers sensibles avec leurs lieux de vie ? Quel est l'état du lien social dans les quartiers sensibles ? Comment évolue-t-il ces dernières années ? S'il y a eu une dégradation de celui-ci à quoi peut-on l'imputer ?

            La question est-elle : aiment-ils leurs lieux de vie ? Je crois qu’ils ne les détestent pas dans bien des cas, mais qu’ils regrettent les problèmes de transport, la délinquance excessive, l’irrespect des lieux, les gens qui urinent dans les ascenseurs, etc. Les gens aimeraient aimer leurs quartiers. Ils n’y arrivent pas bien souvent. Ceci dit, il me parait difficile de généraliser : Vitry n’est pas Bagnolet, qui n’est pas Bondy, qui n’est pas la banlieue de Saint-Etienne ou de Rouen, etc.  On constate un mauvais état du lien social. Je n’ai pas suffisamment d’expérience de terrain pour en dire plus bien qu’ayant longtemps vécu en banlieues y compris dans des quartiers dits « sensibles ». Restaurer la valeur du travail et de l’effort, rendre possible l’accès concret au travail, mais aussi développer l’idée que le travail n’est pas la lutte de tous contre tous, que c’est aussi la solidarité et la coopération.  Il faut redécouvrir l’ « altruisme créatif » (Pitirim Sorokin). Et aussi développer un autre imaginaire que la consommation, voilà ce qu’il faudrait sans doute faire. Programme vaste et complexe.

            Quelles furent les grandes évolutions sociologiques dans les quartiers sensibles ces 30 dernières années? Y-a-t-il eu une ethnicisation de ces quartiers, un appauvrissement ? Une fuite des classes moyennes vers le périurbain ou le centre-ville pour les classes moyennes supérieures ? 

        633676_f.gifDepuis plus de 30 ans, il y a clairement une ghettoisation des quartiers, une pauvreté endémique, un désoeuvrement, une défrancisation qui touche notamment les mœurs, un développement des trafics de drogue et de toutes les délinquances.  Il y a bien sûr un départ de ceux qui peuvent partir notamment les Français « de souche » des classes moyennes, mais aussi les immigrés qui accèdent à la classe moyenne. Quant aux classes supérieures, elles n’ont jamais habité les quartiers sensibles et n’ont donc pas besoin de les fuir. En d’autres termes, la lutte de classes s’accompagne toujours d’une lutte pour s’approprier les lieux, d’une « lutte des places », comme écrit Michel Lussault[1].

            Le rôle des « créateurs de lien social » (animateurs sociaux, gardiens d'immeubles...) dans ces quartiers a-t-il évolué ? Ont-ils plus de difficultés à remplir ce rôle ? Si oui pourquoi ?

         On a renforcé le rôle des gardiens, et souvent leur nombre, et on a eu raison. Ceci dit, beaucoup de gardiens ne veulent plus travailler dans les quartiers difficiles (on les comprend) – ce qui rend ces quartiers encore plus abandonnés. Il faut aussi plus de police, plus de justice, plus de mise hors d’état de nuire de délinquants : mise en prison, interdiction du territoire national, double peine, déchéance de nationalité, les moyens de manquent pas, à condition de se débarrasser de la tutelle de la Cour européenne des droits de l’homme.

            Comment expliquer le fort taux de délinquance dans ces quartiers sensibles ? D’où vient l’origine du malaise et des conduites déviantes ? 

          C’est une question de civilisation. Ce qui joue, c’est la séduction de l’argent facile (les sportifs dont on parle à la télé…), le goût des objets technologiques sophistiqués, la fin du respect de la culture, mais aussi de toutes les institutions pourtant au service des gens  (maintenant, on brule les écoles, les MJC, les bibliothèques, les gymnases…). On vole dans les magasins de fringues, de chaussures de marque… Mais il y a aussi, comme je l’ai déjà souligné, la crise hormonale de ces jeunes garçons qui n’ont pas de défouloir, qui ne font plus leur service militaire, qui ne peuvent plus canaliser leur énergie. C’est le problème principal. Ce n’est pas l’immigré de 40 ans qui brule des voitures, en général. Ce n’est pas celui qui bosse sur les chantiers dans le bâtiment et qui part tôt le matin. C’est le jeune parasite de 12–18 ans qui, en plus de détruire son quartier et d’y bruler les voitures des honnêtes gens, pourrit la vie de son école. Cette jeunesse des émeutiers explique la peur des bavures qu’a la police.

            Comment les pouvoirs publics répondent-ils, dans le cadre de la politique de la ville, à ces difficultés sociales ? Les dispositifs en place soulagent-ils les habitants de ces quartiers en difficulté sociale ? Pourrait-on optimiser les réponses apportées ?

          On connaît les actions de la politique de la ville, avec notamment le soutien aux « associations » -– ce qui recouvrent toutes sortes de réalités. Cela joue sans doute dans le bon sens mais à la marge. L’isolement des quartiers arrange tout le monde : ils « mettent le bordel » chez eux et pas ailleurs. On ne met pas le paquet en éducation, prévention, répression, encadrement. La République ne croit plus en elle. Elle croyait plus en elle-même à l’époque de la Guerre d’Algérie, avec les SAS (sections administratives spécialisées) et, pourtant, cela n’avait pas suffi à l’intégration. La comparaison pourra choquer mais, pourtant, dans certains quartiers, il ne reste pas plus de Français de souche qu’il n’y avait de Pieds-Noirs en Algérie (1 million sur 10). Respecter les gens, c’est s’occuper d’eux, mais la vérité est peut-être que la République préfère abandonner les banlieues. J’espère me tromper. Il ne manque pourtant pas d’élus qui ont assez bien compris les choses, comme Claude Dilain (PS), qui fut maire de Clichy sous bois, ou Catherine Arenou (UMP), à Chanteloup les vignes.

            D’une manière plus générale, est-ce les habitants qui font le lieu de vie ou le lieu de vie qui fait les habitants ou est-ce un peu des deux ?

               C’est une question que l’on rencontre souvent. La misère a trouvé son décor. Mais c’est moins une misère matérielle – les gens ne meurent pas de faim, ni de manque de vêtements – qu’une misère morale. La délinquance des jeunes s’ajoute à cette misère morale. Elle en est aussi le fruit. Je crois que l’urbanisme pourrait changer beaucoup de choses. Des petites rues interdisant la vitesse, des immeubles dont on puisse plus difficilement jeter des choses des toits, des immeubles suffisamment petits pour permettre des relations de proximité. A terme, il faudrait envisager la création d’une garde civique – sorte de nouvelle « garde nationale » – en liaison avec la police nationale.

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Quartier "Orme seul", La Courneuve. Architecture de Catherine Furet.

Il faut refaire un urbanisme de proximité, d’immeubles de taille moyenne, de 4 à 6 étages, avec des rues adaptées, c'est-à-dire de gabarit modeste (exemple : le quartier de « l’Orme Seul » de Catherine Furet à la Courneuve) et des axes plus grands, mais jamais disproportionnés avec des bus, des tramways, des métros…. Il faut arriver à une densité beaucoup plus forte que dans les banlieues actuelles tout en évitant les tours. C’est parfaitement possible : regardez le 10e, ou le 11e arrondissement de Paris. Il y a une forte densité, et pas de tours.  Il faut penser l’urbanisme pour le lien social et aussi – ne soyons pas naïfs – pour la sécurité (on le fait déjà, mais dans la perspective d’interventions ponctuelles plus que dans le registre d’une  sécurité quotidienne). Cela coûtera très cher, mais pas plus que des milliers de voitures brûlées chaque année.

Note:

[1] De la lutte des classes à la lutte des places, Grasset, 2009.

vendredi, 25 septembre 2020

Maffesoli: «Gérer la pandémie ou faire peur pour sauver l’ordre social»

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Maffesoli: «Gérer la pandémie ou faire peur pour sauver l’ordre social»

par Michel Maffesoli

Professeur émérite à la Sorbonne
Membre de l’Institut universitaire de France

Ex: https://lecourrierdesstrateges.fr

Il n’est pas question de dire que la crise sanitaire n’existe pas, nous sommes nombreux à avoir des amis qui se sont en allés, ou des proches qui sont atteints ! Mais nos regrets et notre tristesse ne doivent pas nous faire oublier qu’il est une crise de plus grande ampleur : crise civilisationnelle s’il en est !

On ne le redira jamais assez : « tout est symbole ». Il faut avoir la lucidité et le courage de dire, pour employer un vieux mot français, ce que « monstre » ce symbole. Fût-ce dans ses aspects monstrueux. En la matière et en paraphrasant ce que disaient en leur temps nos amis situationnistes, il convient donc d’établir un « véridique rapport » sur le libéral mondialisme !

Une interprétation libérale mondialiste de l’épidémie

Puis-je le faire, tout d’abord, d’une manière anecdotique. Mais en rappelant qu’en son sens étymologique : « an-ekdotos », c’est ce qui n’est pas publié, ou ce que l’on ne veut pas rendre public. Mais qui, pour des esprits aigus, n’est pas sans importance ! On peut donc se poser cette question : pourquoi des milliardaires font-ils de la philanthropie ? Car, on le sait, il existe chez eux une étroite liaison entre leur morale et leur compte en banque.

Bill Gates, préoccupé par le « coronavirus » finance, largement, l’OMS. Sans oublier ses largesses pour bien le faire savoir. Ainsi en France, ce journal « de référence » qu’est Le Monde qui, oubliant sa légendaire déontologie, accepte, contre espèces sonnantes et trébuchantes, que le magnat en question publie un article pour expliquer ses généreuses préoccupations concernant le covid-19.

Un tel fait est loin d’être isolé. Ceux qui détiennent le pouvoir économique, politique, journalistique sentant, pour reprendre le titre de Georg Orwell leur « 1984 » menacé , tentent dans leur nowlangue habituelle, de faire oublier que leur préoccupation est, tout simplement, le maintien du nouvel ordre mondial dont ils sont les protagonistes essentiels. Et pour ce faire, ils surjouent, jusqu’à plus soif, la « panique » d’une pandémie galopante. Pour reprendre un terme de Heidegger (« Machenschaft ») ils pratiquent la manigance, la manipulation de la peur.

Mais il est certain que les hypothèses, analyses, pronostics etc. sur « le monde d’après » signifient bien que ce qui est en cours est un véritable changement de paradigme que l’aveuglement des élites au pouvoir n’arrive pas à occulter.

Michel Maffesoli 

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Faire peur pour sauver un monde en décadence

Il y avait, en effet, deux stratégies possibles : celle du confinement a pour objectif la protection de chacun, en évitant le trop plein de contaminations entraînant une surcharge des services de réanimation accueillant les cas graves. Protection organisée par un Etat autoritaire et à l’aide de sanctions, une sorte de sécurité sanitaire obligatoire. Stratégie fondée sur les calculs statistiques et probabilistes des épidémiologistes. Selon l’adage moderne, n’est scientifique que ce qui est mesurable. Autre stratégie, médicale celle-ci (la médecine est un savoir empirique, un art, pas une Science, en tout cas est fondée sur la clinique (expérience) et pas uniquement sur la mesure) : dépister, traiter, mettre en quarantaine les personnes contaminantes pour protéger les autres. Stratégie altruiste.

Certes l’impéritie d’un pouvoir technocratique et économiciste a privé sans doute la France des instruments nécessaires à cette stratégie médicale (tests, masques), certes l’organisation centralisée et étatique ne permet pas de telles stratégies essentiellement locales et diversifiées. Mais une telle stratégie traduit aussi la défiance généralisée du pouvoir, politiques et hauts fonctionnaires, envers le « peuple ». Protéger les gens fût-ce contre leur gré, au mépris des grandes valeurs fondant la socialité : l’accompagnement des mourants ; l’hommage aux morts ; les rassemblements religieux de divers ordres ; l’expression quotidienne de l’amitié, de l’affection. Le confinement est fondé sur la peur de chacun par rapport à chacun et la sortie du confinement va être encadrée par des règles de « distanciation sociale » fondées sur le soupçon et la peur.

Faire peur pour sauver un monde en décadence ! Faire peur afin d’éviter les soulèvements, dont on peut dire, sans jouer au prophète, qu’ils ne manquent pas (et surtout ne manqueront pas) de se multiplier un peu partout de par le monde. N’oublions pas qu’en France, le confinement a succédé à deux ans de révolte des gilets jaunes suivies par les manifestions contre la technocratique et libérale réforme des retraites. On imagine la haine du « populo » qui anime nos élites ! Mais l’esprit de révolte est dans l’air du temps. Ortega y Gasset, dans La Révolte des masses parlait à ce propos d’un « impératif atmosphérique ». Cet impératif, de nos jours, c’est celui de la révolution, si on la comprend en son sens premier : revolvere, faire revenir ce que l’idéologie progressiste s’était employée à dépasser. Revenir à un « être-ensemble » traditionnel et enraciné.

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Ce que cache la maladie saisonnière appelée « coronavirus »

C’est contre un tel impératif : le retour à un ordre des choses bien plus naturel, que les diverses élites s’emploient à attiser la peur, et ce pour faire faire perdurer les valeurs sociales qui furent celles des « temps modernes ». Pour le dire succintement, émergence d’un individualisme épistémologique et ce grâce à un rationalisme généralisé au motif d’un progressisme salvateur.

Ce sont, en effet ces valeurs qui engendrèrent ce que mon regretté ami Jean Baudrillard a appelé la « société de consommation », cause et effet de l’universalisme propre à la philosophie des Lumières (XVIIIe siècle) dont la « mondialisation » est la résultante achevée. Le tout culminant dans une société parfaite, on pourrait dire « trans-humaniste », où le mal, la maladie, la mort et autres « dysfonctionnements » auraient été dépassés.

Voilà bien ce qu’une maladie saisonnière érigée en pandémie mondiale s’emploie à masquer. Mais il est certain que les hypothèses, analyses, pronostics etc. sur « le monde d’après » signifient bien que ce qui est en cours est un véritable changement de paradigme que l’aveuglement des élites au pouvoir n’arrive pas à occulter. En effet, les mensonges, vains discours et sophismes ont de moins en moins de prise. « Le roi est nu », et cela commence, de plus en plus à se dire. Devant ce qui est évident : la faillite d’un monde désuet, les évidences théoriques des élites ne font plus recette.

Cette « pasteurisation » est, à bien des égards, tout à fait louable. C’est quand elle devient une idéologie technocratique qu’elle ne manque pas d’être elle-même pathogène.

Michel Maffesoli 

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Au temps de la novlangue scientiste façon Orwell

Devant cette méfiance grandissante, ce « on » indéfini caractérisant la Caste au pouvoir agite le paravent scientifique, peut-être vaudrait-il mieux dire, pour reprendre le terme d’Orwell, elle va utiliser la nowlangue  scientiste.

Revêtant l’habit de la science, et mimant les scientifiques, le « scientisme » est en fait la forme contemporaine de la croyance béate propre au dogmatisme religieux. Les esprits fumeux ayant le monopole du discours public sont, en effet, les croyants dogmatiques du mythe du Progrès, de la nécessité de la mondialisation, de la prévalence de l’économie et autres incantations de la même eau.

Il s’agit là d’un positivisme étriqué qui, comme le rappelle Charles Péguy n’est qu’une réduction médiocre du grand « positivisme mystique » d’Auguste Comte. La conséquence de ce positivisme étriqué est le matérialisme sans horizon qui fut la marque par excellence de la modernité. Matérialisme brutal que n’arrivent pas à masquer les discours grandiloquents, doucereux, empathiques ou tout simplement frivoles propres au pouvoir politique et aux « média main-stream » (véritable Ministère de la Propagande) lui servant la soupe.

C’est parce qu’il n’est pas enraciné dans l’expérience collective que le « scientiste » se reconnaît à la succession de mensonges proférés à tout venant. L’exemple des sincérités successives à propos des masques ou des test, est, à cet égard, exemplaire. Mais ces mensonges soit disant scientifiques sont aux antipodes de ce qu’est une science authentique.

Souvenons-nous, ici, de la conception d’Aristote. Avoir la science d’une chose, c’est en avoir une connaissance assurée. C’est-à-dire qui consiste à montrer en quoi cette chose est ainsi et pas autrement. C’est bien ce qu’oublie le « scientisme » dont se parent les élites politiques et divers experts médiatiques qui transforment la crise sanitaire en véritable fantasme. Et ce afin de « tenir » le peuple et de conforter sa soumission.

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Ce que cache la populophobie des élites

Ce faisant ce « on » anonyme qu’est le Big Brother étatique, ne sert pas la science. Il se sert de la science pour des objectifs politiques ou économiques : maintien du consumérisme, adoration du « veau d’or du matérialisme », perdurance de l’économicisme propre à la modernité. C’est cela que profèrent, ad nauseam, ceux que L. F. Céline nommait, bellement, les « rabâcheurs d’étronimes sottises » ; chargés de reformater n’importe quel « quidam » en lui servant, à tout propos, la soupe de la bien pensance. Et ce afin de le maintenir dans une « réification » objectale qui est l’enjeu de la crise sanitaire devenue un fantasme de plus en plus envahissant. Car pour reprendre l’image du Big Brother et du psitacisme dominant, il s’agit bien d’infantiliser le peuple. Répéter, mécaniquement, des mots vides de sens, que même ceux qui les emploient ne comprennent pas, ou de travers.

Considérer le peuple comme un enfant incapable de prendre les bonnes décisions, incapable de juger ou de discerner ce qui est bon pour lui et pour la collectivité, voilà bien l’essence même de la « populophobie » caractérisant les élites en faillite.

En faillite, car une élite est légitime lorsqu’elle est greffée sur la sagesse populaire. C’est ce qu’exprime l’adage : «omnis auctoritas ad populo ». Et parler, à tire larigot, de « populisme » est le signe que la greffe n’a pas pris, ou n’existe plus. En oubliant ce que j’ai, en son temps, nommé la « centralité souterraine », propre à la puissance du peuple, on ne peut plus saisir la poussée intérieure de la sève vitale. Ce qui est l’authentique science : avoir une connaissance essentielle de la substantielle réalité, celle de la vie quotidienne.

Voilà ce que sont incapables de faire les faux savants et les vrais sophistes qui dénaturent la raison authentique, celle s’appuyant sur le sensible, c’est-à-dire sur ce qui est Réel. Parler de populisme, c’est ne rien saisir de la bonhomie du peuple, ne rien comprendre à sa « popularité ».

C’est cela même qui est le fondement de la bonhomie populaire : solidarité, entraide, partage, que la suradministration propre à la technocratie est incapable de comprendre.

Michel Maffesoli 

Macron, voix du bourgeoisisme moderne, du libéral mondialisme

Le signe le plus évident de cette déconnexion c’est lorsqu’on entend l’actuel locataire de l’Élysée parler avec condescendance des manifestations, par exemple celles du Premier Mai, comme étant le fait de « chamailleurs » qu’il faut bien tolérer. Étant entendu, sous-entendu, que ces chamailleries ne doivent en rien perturber le travail sérieux et rationnel de la technocratie au pouvoir. Technocratie incapable d’être attentive à la voix de l’instinct. Voix de la mémoire collective, amoncelée depuis on ne sait plus quand, ni pourquoi. Mais mémoire immémoriale, celle de la société officieuse devant servir de fondement à l’éphémère société officielle, celle des pouvoirs.

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Cette voix de l’instinct avait, de longue tradition, guidé la recherche de l’Absolu. Et ce de quelque nom que l’on pare celui-ci. L’incarnation de l’absolu étant ce que l’on peut appeler, après mon maître Gilbert Durand, une « structure anthropologique » essentielle. Et c’est cette recherche que la modernité s’est employée à dénier en la vulgarisant, la « profanisant » en un mythe du Progrès au rationalisme morbide et au matérialisme on ne peut plus étroit. D’où sont sortis le consumérisme et le mondialisme libéral.

Auguste Comte, pour caractériser l’état de la société propre aux Temps modernes disait judicieusement, reductio ad unum. L’un de l’Universalisme, l’un du Progressisme, l’un du Rationalisme, de l’Économicisme, du Consumérisme etc. C’est bien contre cette unité abstraite que la colère gronde, que la méfiance s’accroit. Et c’est bien parce qu’elle pressent que des soulèvements ne vont pas tarder à se manifester que la Caste au pouvoir, celle des politiques et de leurs perroquets médiatiques, s’emploie à susciter la peur, le refus du risque, la dénégation de la finitude humaine dont la mort est la forme achevée.

C’est pour essayer de freiner, voire de briser cette méfiance diffuse que l’élite en déshérence utilise jusqu’à la caricature les valeurs qui firent le succès de ce que j’appellerais le « bourgeoisisme moderne ». Autre manière de dire le libéral mondialisme.

Individidualisme du confinement contre humanisme intégral

Ce que le Big Brother nomme le « confinement » n’est rien d’autre que l’individualisme épistémologique qui depuis la Réforme protestante fit le succès de « l’esprit du capitalisme »(Max Weber). « Gestes barrières », « distanciation sociale » et autres expressions de la même eau, ne sont rien d’autre que ce que l’étroit moralisme du XIXème siècle nommait « le mur de la vie privée ». Ou encore chacun chez soi, chacun pour soi.

Pour le dire d’une manière plus soutenue, en empruntant ce terme à Stendhal, il s’agit là d’un pur « égotisme », forme exacerbée d’un égoïsme oubliant que ce qui fonde la vie sociale est un « être-ensemble » structurel. Socialité de base que la symbolique des balcons, en Italie, France ou Brésil, rappelle on ne peut mieux.

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L’effervescence en gestation va rappeler, à bon escient, qu’un humanisme bien compris, c’est-à-dire un humanisme intégral repose sur un lien fait de solidarité, de générosité et de partage. Voilà ce qui est l’incarnation de l’absolu dans la vie courante. On ne peut plus être, simplement, enfermé dans la forteresse de son « chez soi ». On n’existe qu’avec l’autre, que par l’autre. Altérité que l’injonction du confinement ne manque pas d’oublier.

Mascarade des masques et théâtrocratie

Amusons-nous avec une autre caricature : la mascarade des masques.

Souvenons-nous que tout comme la Réforme protestante fut un des fondements de la modernité sous l’aspect religieux, Descartes le fut sous la dimension philosophique. Qu’ils en soient ou non conscients, c’est bien sous son égide que les tenants du progressisme développent leurs théories de l’émancipation, leurs diverses transgressions des limites et autres thématiques de la libération.

Descartes donc, par prudence, annonçait qu’il avançait masqué (« larvato prodeo »). Mais ce qui n’était qu’une élégante boutade devient une impérative injonction grâce à laquelle l’élite pense conforter son pouvoir. Resucée de l’antique, et souvent délétère, theatrum mundi  !

On ne dira jamais assez que la dégénérescence de la cité est corrélative de la « théâtrocratie ». Qui est le propre de ceux que Platon nomme dans le mythe de la Caverne, « les montreurs de marionnettes » (République, VII). Ce sont les maîtres de la parole, faisant voir des merveilles aux prisonniers enchaînés au fond d’une caverne. La merveille de nos jours ce sera la fin d’une épidémie si l’on sait respecter la pantomime généralisée : avancer masqué. Le spectaculaire généralisé. N’est-ce point cela que Guy Debord annonçait lorsqu’après la « Société du spectacle » (1967) dans un commentaire ultérieur, il parlait du « spectacle intégré ». Sa thèse, connue ? comprise ? c’est l’aliénation, c’est-à-dire devenir étranger à soi-même à partir du consumérisme et ce grâce au spectacle généralisé. Ce qui aboutit à la généralisation du mensonge : le vrai est un moment du faux.

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Le simulacre de la Caste, le divertissement du masque

Dans la théâtralité de la Caste politique, cela ne vous rappelle-t-il rien ? Le faux se présente masqué, comme étant un bien. Ce que Jean Baudrillard nommait le « simulacre » (1981) : masque du réel, ce qui masque la profonde réalité du Réel. Ce que Joseph de Maistre nommait la « réité » !

Comme ce que fut la série américaine « Holocauste », le masque consiste à susciter des frissons dissuasifs, (de nos jours la peur de l’épidémie, voire de la pandémie) comme « bonne conscience de la catastrophe ». En la matière implosion de l’économicisme dominant où la valeur d’usage telle qu’Aristote l’analyse, (Le Politique ch. III, par 11) est remplacée par la valeur d’échange.

C’est ce que les montreurs de marionnettes, inconsciemment (ils sont tellement incultes) promeuvent. Le masque, symbole d’une apparence, ici de la protection, ne renvoyant à aucune « réité », mais se présentant comme la réalité elle-même.

Pour donner une référence entre Platon et Baudrillard, n’est-ce pas cela le « divertissement » de Pascal ? Cette recherche des biens matériels, l’appétence pour les activités futiles, le faire savoir plutôt qu’un savoir authentique, toutes choses qui, éléments de langage aidant, constituent l’essentiel du discours politique et des rabacheries médiatiques. Toutes choses puant le mensonge à plein nez, et essayant de masquer que ce qui fait la grandeur de l’espèce humaine, c’est la reconnaissance et l’acceptation de la mort.

L’idéologie de la pasteurisation sociale triomphe pour préserver les élites

Car pour le Big Brother, le « crime-pensée » par excellence est bien la reconnaissance de la finitude humaine. De ce point de vue, le confinement et la mascarade généralisée sont, dans la droite ligne du véritable danger de toute société humaine : l’aseptie de la vie sociale. Protection généralisée, évacuation totale des maladies transmissibles, lutte constante contre les germes pathogènes.

Cette « pasteurisation » est, à bien des égards, tout à fait louable. C’est quand elle devient une idéologie technocratique qu’elle ne manque pas d’être elle-même pathogène. Très précisément en ce qu’elle nie ou dénie cette structure essentielle de l’existence humaine, la finitude. Ce que résume Heidegger en rappelant que « l’être est vers la mort » (Sein zum Tode). À l’opposé de la mort écartée, la mort doit être assumée, ritualisée, voire homéopathisée. Ce que dans sa sagesse la tradition catholique avait fort bien cristallisé en rendant un culte à « Notre Dame de la bonne Mort ».

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Si l’on comprend bien que dans les cas de soins donnés à des personnes contagieuses, les soignants observent toutes les règles d’hygiène, masque, distanciation et protections diverses, ces mêmes règles appliquées urbi et orbi, à des personnes soupçonnées a priori d’être contaminantes ne peuvent qu’être vécues comme un déni de l’animalité de l’espèce humaine. Réduire tous les contacts, tous les échanges aux seules paroles, voire aux paroles étouffées par un masque, c’est en quelque sorte renoncer à l’usage des sens, au partage des sens, à la socialité reposant sur le fait d’être en contact, de toucher l’autre : embrassades, calins et autres formes de tactilité . Et refuser l’animalité expose au risque de bestialité : les diverses violences intra-familiales ponctuant le confinement comme les délations diverses en sont un témoignage probant.

Le confinement comme négation de l’être-ensemble, la mascarade comme forme paroxystique de la théâtralité, tout cela tente, pour assurer la perdurance du pouvoir économiciste et politique, de faire oublier le sens de la limite et de l’indépassable fragilité de l’humain. En bref l’acceptation de ce que Miguel de Unanumo nommait le « sentiment tragique de l’existence ».

Face au triomphe final de la bonhomie populaire : la sagesse écosophique

C’est ce sentiment qui assure, sur la longue durée la perdurance du lien social. C’est cela même qui est le fondement de la bonhomie populaire : solidarité, entraide, partage, que la suradministration propre à la technocratie est incapable de comprendre. C’est ce sentiment, également, qui au-delà de l’idéologie progressiste, dont l’aspect dévastateur est de plus en plus évident tend à privilégier une démarche « progressive ». Celle de l’enracinement, du localisme, de l’espace que l’on partage avec d’autres. Sagesse écosophique. Sagesse attentive à l’importance des limites acceptées et sereinement vécues. C’est tout cela qui permet de comprendre la mystérieuse communion issue des épreuves non pas déniées, mais partagées. Elle traduit la fécondité spirituelle, l’exigence spirituelle propres aux jeunes générations. Ce qu’exprime cette image de Huysmans : « coalition de cervelles, d’une fonte d’âmes » !

C’est bien cette communion, qui, parfois s’exprime sous forme paroxystique. Les soulèvements passés ou à venir en sont l’expression achevée. À ces moments là le mensonge ne fait plus recette. Qui plus est, il se retourne contre ceux qui le profèrent. N’est-ce point cela que relève Boccace dans le Decameron : « Le trompeur est bien souvent à la merci de celui qu’il a trompé. » Acceptons-en l’augure.

mercredi, 16 septembre 2020

L’abrutissement de masse

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L’abrutissement de masse

J’ai trouvé ces deux opinions sur un forum internet et je les ai trouvé intéressantes. Certain point reste très discutable, mais j’approuve l’idée générale.

« Que ce soit par la télé avec des émissions de plus en plus vides de sens et d’intérêt, le nivellement par le bas dans les écoles publiques, la propagande dans les médias, l’éducation nationale qui n’est plus bonne à rien, la négation de faits afin de faire croire aux français ce qu’ils veulent croire….
Mais à quoi bon ? Alors c’est certainement plus facile de contrôler 60 millions de cons que 60 millions de mecs qui réfléchissent mais quand même….Essayer de rendre le peuple le plus con possible afin de parvenir à ses fins, c’est vraiment dégueulasse.
Que ce soit la gauche ou la droite, ils ont tous fait ça…ça commence avec la destruction de l’école publique et puis ça finira avec la destruction des écoles supérieures histoire de créer de parfait con(sommateurs) dociles….
Maintenant, il faut forcément être né avec une cuillère en argent dans le cul pour ne pas avoir le cerveau lavé par les médias …et même si les hautes études s’ouvrent au peuple, les gens qui y rentrent sont tellement lobotomisés qu’ils ne réfléchissent même plus et pense qu’en votant ils vont changer les choses »

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« -Abêtisation de la population:


OBJECTIFS
Empêcher le public de réfléchir et de se poser intelligemment des questions sur sa condition, et sur la manière dont la société est organisée et dirigée.
Rendre le public plus facilement manipulable en affaiblissant ses capacités d’analyse et de sens critique.


MOYENS UTILISES
Diffuser massivement des programmes TV débilitants
Noyer les informations et connaissances importantes dans un flot d’informations insignifiantes. Censure par le trop-plein d’informations.
Promouvoir des loisirs de masse débilitants
Encourager la consommation de tranquillisants et somnifères
Autoriser sans restriction la consommation d’alcool, et le vendre à un prix accessible aux plus défavorisés.
Faire en sorte que l’éducation donnée aux « couches inférieures » soit du plus bas niveau possible.
Réduire le budget de l’éducation publique, et laisser se développer dans les écoles des conditions de chaos et d’insécurité qui rendent impossible un enseignement de qualité.
Limiter la diffusion des connaissances scientifiques (en particulier dans les domaines de la physique quantique, de la neurobiologie, et surtout de la cybernétique – la science du contrôle des systèmes vivants ou non-vivants).
Limiter aussi la diffusion des concepts les plus puissants concernant l’économie, la sociologie, ou la philosophie.
Parler au public de technologie plutôt que de science. »

Pour rester objectif une petite image comme je les aime tant :

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Pour les anglophobes, une traduction approximative : Regardez ces gens. Des automates aux yeux vides menant leurs vies quotidiennes sans jamais s'arrêter pour regarder autour de d'eux et penser ! Je suis le seul homme conscient dans un monde de mouton.

K.E

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samedi, 05 septembre 2020

Les sept raisons pour lesquelles nous obéissons à l’autorité

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Les sept raisons pour lesquelles nous obéissons à l’autorité

 
 
Auteur : Tyler Durden
Ex: http://www.zejournal.mobi

Les rebelles sont une partie très importante de la société, mais ils obtiennent rarement la reconnaissance qu’ils méritent. Ils nous aident à briser les anciennes normes et nous empêchent de tomber dans la pensée de groupe.

Cependant, la nature humaine pousse la plupart d’entre nous à rester dans notre zone de confort, même si cela signifie moins de liberté ou des problèmes plus difficiles à résoudre.

Pourquoi tant de gens ignorent le monde extérieur ou le font passer pour le problème de quelqu’un d’autre jusqu’à ce qu’il atteigne leur propre porte ? Dans une vidéo récente, Brittany Sellner (Brittany Pettibone avant son mariage) décrit les sept raisons pour lesquelles les hommes obéissent à l’autorité, même lorsque c’est contre leur intérêt.

#1 Habitude

Comme chacun le sait, les habitudes sont extrêmement difficiles à rompre et même si nous avons des griefs sur l’état des choses, accepter notre réalité imparfaite nous semble préférable à la perspective décourageante du changement. À l’inverse… l’habitude cesse d’être un motif d’obéissance en temps de crise politique ; un peu comme ce que nous vivons actuellement à la suite du Covid. Bien que beaucoup d’entre nous ne voulaient pas changer leurs habitudes, celles-ci ont été modifiées de force pour nous.

#2 Obligation morale

La deuxième raison d’obéir est l’obligation morale qui est évidemment un motif que l’on trouve très souvent dans la religion, mais politiquement parlant… certains la considèrent comme une obligation morale de « 1) obéir pour le bien de la société », 2) « parce que le dirigeant a des facteurs surhumains tels qu’un être surnaturel ou une divinité », ce qui ne s’applique pas, à mon avis, à un trop grand nombre d’Américains… 3) Les gens considèrent qu’il s’agit d’une obligation morale d’obéir parce qu’ils « perçoivent le commandement comme étant légitime, du fait qu’il émane d’un émetteur ». Par exemple, un maire ou un officier de police [serait considéré comme tel], et 4) Les gens considèrent qu’il s’agit d’une obligation morale d’obéir en raison de la « conformité des ordres aux normes acceptées ». Par exemple, la plupart des gens pensent qu’un ordre tel que celui de ne pas commettre de meurtre est un ordre moral et, par conséquent, ils y obéissent.

#3 L’intérêt personnel

La troisième raison de l’obéissance est l’intérêt personnel et c’est peut-être l’un des motifs les plus courants de nos jours. Par exemple, la plupart des grandes entreprises sont immorales et cherchent à se servir des tendances sociales et politiques actuelles pour gagner de l’argent, un statut et l’approbation. Il suffit de regarder toutes les entreprises qui sont soudainement devenues des « champions de la justice sociale » après la mort de George Floyd ; aucune d’entre elles ne s’est souciée de la brutalité policière et de Black Lives Matter avant qu’il ne devienne dans leur intérêt de s’en préoccuper.

Cet intérêt personnel peut bien sûr s’étendre aux individus. Les personnes célèbres et non célèbres ont beaucoup à gagner en s’alignant, ou… il y a aussi un intérêt personnel négatif dans lequel la personne n’obéit pas simplement parce qu’elle va gagner quelque chose mais pour qu’elle ne perde pas tout : sa réputation, son emploi, son statut social et ses perspectives de carrière.

#4 Identification psychologique avec le dirigeant

La quatrième raison de l’obéissance est l’identification psychologique avec le dirigeant, ce qui signifie que les gens ont un lien émotionnel étroit avec le dirigeant, le régime ou le système. J’imagine que vous auriez rencontré beaucoup de ces situations dans la Russie communiste ou l’Allemagne nazie, par exemple.

#5 Zones d’indifférence

Le cinquième motif d’obéissance est extrêmement courant aujourd’hui : il s’agit des « zones d’indifférence », ce qui signifie que même si les gens ne sont pas pleinement satisfaits de l’état des choses, ils ont une marge d’indifférence ou de tolérance pour les aspects négatifs de leur société et de leur gouvernement.

#6 La peur des sanctions

La sixième raison de l’obéissance est la plus évidente… et c’est la « peur des sanctions », qui implique généralement la menace ou l’utilisation d’une forme de violence physique contre le sujet désobéissant et incite à l’obéissance par un pouvoir simplement coercitif, un pouvoir qui agit réellement sur les gens simplement par leurs craintes.

#7 Absence de confiance en soi

Enfin, la septième et dernière raison de l’obéissance est l’absence de confiance en soi chez les sujets, ce qui signifie que beaucoup de personnes n’ont tout simplement pas suffisamment confiance en elles, en leur jugement et en leurs capacités pour se rendre capables de désobéir et de résister.

Grâce à Internet, j’observe ce motif assez souvent. Des milliers de personnes décrient quotidiennement qu’elles sont malheureuses de l’état des choses et pourtant elles ne font rien parce qu’elles n’ont pas confiance en leur capacité personnelle à diriger, à organiser une manifestation pacifique, à lancer un mouvement, etc.

Bien que l’autorité puisse être légitime et significative, la résistance à des actes de violence inutiles ou à l’injustice draconienne du gouvernement est souvent meilleure pour l’individu et la société et montre plus de caractère que l’inaction.

Bien que cette liste ne soit certainement pas exhaustive, elle vous aidera peut-être à mieux comprendre votre propre rôle dans la vie et dans la société.

Regardez l’analyse de Brittany Sellner (VO anglais) :

Lire aussi : Le COVID-19 est-il le déclencheur d’un « nouvel ordre mondial » de stagnation économique et de destruction sociale ?

01:01 Publié dans Actualité, Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : obéissance, actualité, autorité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 31 août 2020

Laurent Ozon - Qu'est-ce que l'ingénierie sociale ?

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Laurent Ozon - Qu'est-ce que l'ingénierie sociale ?

 
 
 
Laurent Ozon - Qu'est-ce que l'ingénierie sociale ?
 
Conférence donnée lors de la VIIIeme université d'été d'Academia Christiana "Bâtir quand tout s'effondre". 2020
 
 

lundi, 24 août 2020

Analyse du féminisme

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Analyse du féminisme

par André Waroch

Le féminisme ne devrait pas exister. Tout comme l’Otan, qui était fait pour contrer une attaque de l’Occident par le Pacte de Varsovie, et qui aurait du donc être dissous après la disparition de l’URSS, et qui a pourtant a continué d’exister en devenant autre chose, le féminisme aurait dû disparaître après que l’égalité des droits totale ait été obtenue dans les années soixante-dix. Pour être honnête, le féminisme a bien disparu. Aucune trace de lui dans les années 80, 90, et pendant la plus grande partie des années 2000. Années que j’ai vécues, adolescent entouré d’adolescentes qui m’avaient l’air aussi libres que moi, qui se pensaient aussi libres que moi, qui ne menaient aucun combat contre « la charge mentale », « les inégalités de genre », « le mâle blanc », ou « le patriarcat ». Mais qui parfois avaient peur quand elles prenaient le train qui passait par Trappes. Moi aussi.

Le féminisme était mort, mort et enterré, tout simplement parce que l’égalité des femmes avait été gagnée, et depuis déjà longtemps. On pouvait donc se consacrer à autre chose qu’à ces vieilleries sans intérêt.

Mais cette absence apparente de problème majeur dans les relations entre les sexes, du moins à l’intérieur de la communauté française, représentait sans doute un problème pour certains. Un manque à gagner. Une possibilité de conflit humain qui n’était pas encore exploitée jusqu’à l’envenimer irrémédiablement. Une négligence qu’il fallait corriger. Le Système allait s’en charger.

A la fin des années 2000, à l’instigation de la militante socialiste Caroline de Haas, quelque chose qui se nommait toujours féminisme apparut, pour « sauver », tout d’un coup, celles qui pourtant ne leur demandaient rien, s’attelant, avec le concours et les subventions de l’Etat, du gouvernement, des multinationales, à organiser un lavage de cerveau massif sur les jeunes générations.

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On peut dater la prise de pouvoir des féministes du quinquennat de François Hollande qui nomma Najat Vallaud-Belkacem. Prise de pouvoir qui se confirma avec l’élection d’Emmanuel Macron et la nomination de Marlène Schiappa.

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Elle a coïncidé avec une explosion des violences contre les femmes, et notamment des plaintes pour viol, passées de 10406 en 2011 à 22848 en 2019, c’est-à-dire une augmentation de 120%. Evolution statistique totalement passée sous silence. Tout au plus admet-on parfois une légère augmentation d’une année sur l’autre, présentée par les militantes féministes comme « surtout une hausse des déclarations, mais pas forcément des viols eux-mêmes » (déclaration du haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes). Hausse des déclarations qui serait due elle-même à une « prise de conscience collective des violences faites aux femmes née de l’affaire Wenstein qui a éclaté en octobre 2017 et du mouvement metoo qui s’en est suivi » selon un mystérieux « service statistique ministériel de la sécurité intérieure ».

Très à l’aise avec les chiffres, le dit service nous informe en outre que la hausse des plaintes « procède sans doute à la fois d’une plus grande révélation des faits et d’un abaissement du seuil de tolérance à ce type de violence ».

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« Sans doute », « peut-être », « si ça se trouve », sont donc des exemples-type de statistiques ministérielles. Je n’invente rien : il s’agit là de déclarations officielles (article du Monde).

Il est en tout cas impensable, pour les féministes, que l’augmentation du nombre de plaintes pour viol soit causée par l’augmentation du nombre de viols.

En réalité, tout le monde sait très bien que cette explosion des « violences faites aux femmes » s’inscrit dans le cadre d’une explosion de la délinquance, due à deux choses : la continuation d’une immigration massive et criminogène en provenance du continent africain, et le laxisme judiciaire (parallèlement à l’explosion des viols, les condamnations pour viol ont chuté de 40% entre 2007 et 2016.) : deux phénomènes dont les féministes se sont fait les championnes ; témoin, cette tout récente pétition adressée à Marlène Schiappa qui, depuis qu’elle a été dessaisie de son ministère, s’est sentie pousser des velléités de fermeté bien que sous son règne le nombre de viols ait encore augmenté de 40% : « Si la maison de votre voisin s’effondre, vous l’accueillez ! S’il se met à tabasser votre sœur, vous le virez ! C’est du bon sens ». Immédiatement, à l’instigation de l’ineffable Caroline de Haas, une tribune-pétition est lancée, stigmatisant le « fémonationalisme » (enième concept creux surgi de l’imagination sans limite des féministes) de Schiappa. Pour Caroline de Haas et ses amis, il est fondamental que les violeurs étrangers restent en France à l’issue de leur condamnation. L’intérêt des femmes ? Il n’est plus à l’ordre du jour.

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Citons ce passage de la pétition : « L'une des démonstrations implacables du mouvement #Metoo, est le caractère massif des violences sexuelles et sexistes. 90% des viols sont commis par une personne connue de la victime. 50% par un conjoint ou un membre de leur famille. Comme l'a dit Adèle Haenel, ces hommes, ce sont nos pères, nos frères, nos collègues, nos amis. Ce ne sont pas des monstres, et ce ne sont pas structurellement des hommes d'origine étrangère, loin de là. Ces violences prospèrent grâce à l'impunité massive des agresseurs et à un système judiciaire inefficient qui ne comprend rien au continuum des violences sexistes, comme l'illustrent si bien maintes tirades de notre nouveau garde des sceaux, M. Éric Dupont-Moretti. »

D’abord, on révise les fondamentaux : déchainer la haine de la femme contre les hommes qui lui sont les plus proches : le père, le frère, le conjoint, le petit ami, l’ami. C’est-à-dire ceux qui pourraient éventuellement la protéger pour ne pas qu’elle se retrouve toute seule face à la racaille.

Ensuite, mettre hors de cause ladite racaille, en sortant des chiffres plus ou moins bidons censés mettre hors de cause les « hommes d’origine étrangère », innocentés car la majorité des viols seraient commis par un proche, un conjoint ou un membre de la famille. Ce qui revient à dire qu’il est impossible qu’une victime de viol puisse avoir un proche, un conjoint ou un membre de sa famille d’origine étrangère, même dans le cas où elle serait elle-même d’origine étrangère : logique insondable des féministes.

Enfin, et bien qu’on vienne de plaider pour l’accueil perpétuel sur le sol de France des violeurs étrangers, se plaindre de « l’impunité massive des agresseurs ».

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Le rôle des féministes est de monter les femmes européennes contre leurs hommes, ce qui aboutit par ricochet à monter les hommes européens contre leurs femmes, et ainsi à détruire le mariage, le couple et la société. Pour cela, il serait bien sûr contre-productif d’isoler et de désigner les hommes qui s’en prennent réellement aux femmes, puisque ce ne sont pas des Européens ; cela pourrait même avoir pour effet de ressouder les autochtones entre eux. Au contraire, il faut convaincre à toute force les femmes que l’homme en général est un agresseur par nature, un porc transportant avec lui la « culture du viol ». Il faut noyer le poisson, en noyant la racaille responsable des exactions dans la masse des hommes, et ainsi opérer cet incroyable retournement de situation : les véritables agresseurs échappent à toute stigmatisation médiatique, alors que les mâles blancs inoffensifs sont chargés de tous les maux.

Les-hommes-viennent-de-Mars-les-femmes-viennent-de-Venus.jpgDans les années 2000, le livre de John Gray « Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus » eut en France un succès colossal. Les lecteurs des deux sexes le dévoraient pour essayer de comprendre le sexe opposé. On pouvait surement opposer beaucoup d’arguments à la méthode « vulgarisante » de Gray, mais son objectif était clair : aider les hommes et les femmes à mieux se comprendre pour mieux vivre ensemble, et particulièrement en couple.

Aujourd’hui, l’obsession des féministes, devenues les véritables prescriptrices d’opinion dans le domaine des relations entre les sexes (c’est dire l’ampleur de la catastrophe) est de dégouter définitivement la femme de l’homme. En assénant, par exemple, qu’il n’est envisageable de se mettre en couple avec lui que s’il se soumet totalement au diktat du « 50-50 » des « tâches ménagères ».

Prenons cette dernière thématique, particulièrement tordue et malhonnête. Imaginons une jeune femme et un jeune homme, amoureux, sur le point d’emménager ensemble. Pour l’heure, ils vivent encore chacun dans leur appartement. Celui du jeune homme est dans un état quelque peu « bordélique ». Celui de la jeune femme, par contre, est rangé avec un soin que nous pourrions qualifier de « maniaque ». Il y a une raison très simple à cela : le jeune homme en question accorde beaucoup moins d’importance au fait que son intérieur soit bien tenu que la jeune femme. Le conseil le plus constructif à donner au jeune couple, pour qu’il gère le mieux possible sa future cohabitation, serait que chacun fasse un pas vers l’autre : que l’homme fasse un peu plus d’effort sur le rangement, et que la femme devienne un peu plus tolérante au désordre.

 Voilà maintenant le conseil des féministes : la femme ne doit rien changer à ses habitudes, et doit obliger l’homme à devenir exactement comme elle.  

Qu’un homme devienne une femme, voilà quelque chose qui, dans les faits, s’avérera à peu près impossible. Beaucoup d’articles désappointés circulent à ce sujet dans les milieux féministes : « Le couple ou les convictions, une féministe aura difficilement les deux » (Slate). « Mes conseils aux hommes qui ont une toute petite charge mentale » (Huffington post). « 5 conseils pour bien répartir les tâches domestiques » (Webdemain).

Le féminisme est donc une idéologie qui, dans les faits, non seulement ne peut pas marcher, mais qui est faite pour ne pas marcher.

Mais les féministes ne s’arrêtent bien évidemment pas là. Elles s’attaquent, comme on l’a vu, aux abus sexuels. Pas aux vrais, évidemment, comme on l’a déjà vu aussi : loin d’elles l’idée de voler au secours de la fille trainée dans un buisson à la sortie d’une boite de nuit et violée par trois racailles d’importation. Surtout pas. Les seuls abus dénoncés par les féministes sont, comme par hasard, ceux qui auraient lieu dans le cercle intime, et particulièrement au sein du couple.

Ainsi, le fameux « devoir conjugal » lointaine notion juridique héritée du catholicisme, qui désigne aujourd’hui le fait d’accepter, pour un des deux membres du couple, à accepter une relation sexuelle sans en ressentir particulièrement l’envie, juste pour satisfaire l’autre membre. Les féministes ont tranché, et c’est catégorique : le fait qu’une femme accepte un rapport sexuel sans en avoir envie, simplement pour faire plaisir à son partenaire, c’est un viol.

51bYHE7XW5L.jpgQu’une call-girl accepte une relation sexuelle pour de l’argent ne dérange pas les féministes. Qu’une carriériste accepte une relation sexuelle avec son supérieur pour obtenir une promotion ne dérange pas les féministes. Ce qui dérange les féministes, ce qui pour elle relève de l’abomination, c’est qu’une femme accepte, parfois, une relation sexuelle par amour pour son mari.

Voilà comment les féministes aboutissent à la conclusion que «50% des viols sont commis par un conjoint ou un membre de la famille ».

Une femme qui applique jusqu’au bout le féminisme ne se mettra tout simplement pas en couple. En tout cas pas avec un homme (le lesbianisme, contrairement à l’homosexualité masculine, est avant tout une démarche politique, consécutive au lavage de cerveau féministe et à la haine des hommes qu’elle engendre).

Mais peut-être est-ce que ce que veulent les femmes ? Peut-être suis-je aveuglé par mon égoïsme masculin ? Pourtant, une récente enquête du magazine Elle, publiée en 2017, prétend que leur principale source de bonheur et d’épanouissement réside dans la vie de famille (39%), la vie sociale (25%) et la vie amoureuse (21%), celle-ci étant évidemment liée intimement à la première.  La vie professionnelle est très largement négligée (7%). Si l’on en croit ce sondage, le rêve des femmes reste donc de rencontrer l’homme de leur vie et d’avoir des enfants qu’elles élèveront avec lui : ce qu’on appelle fonder une famille.

Alors il est important qu’elles comprennent cette chose fondamentale : le but des féministes est de leur faire faire exactement le contraire ; de les convaincre qu’elles doivent vivre une vie solitaire et égoïste, une vie consacrée au travail et à la consommation. Une vie sur laquelle elles se retourneront, la cinquantaine passée, avec le sentiment, inassumé mais persistant, d’être passé à côté de ce qu’elles voulaient vraiment.

Une société totalement gérée par les féministes ressemblerait à une société totalement atomisée, de plus en plus urbaine et de plus en plus laide, faite d’hommes et de femmes condamnés au célibat et à la solitude, se défiant les uns des autres, sans enfants, ou avec des enfants sans père, trouvant un exutoire dans les mondes virtuels, enfermés chez eux pendant qu’au dehors roderont les bêtes sauvages, et que règnera sur ce chaos l’hyper-bourgeoisie mondialisée. Cela y ressemble déjà.

André Waroch.

Notes et sources

Afin de répondre à l’argument « il n’y a pas une augmentation des viols, mais juste une augmentation des plaintes pour viol, car les femmes, grâce à nous autres féministes, osent davantage porter plainte depuis l’affaire Wenstein, leur parole s’est libérée, la peur a changé de camp, etc. » je reproduis les chiffres disponibles depuis l’années 2005. Ce sont des chiffres officiels, disponibles sur le net. Il manque les années 2007, 2008,2009, 2012 et 2013. Si quelqu’un dispose d’une source à ce sujet, qu’il me contacte. Précisons que l’affaire Wenstein a éclaté en 2017.

Année                                    nombre de plaintes pour viol                    évolution

2005                          9993

2006                          9784                                                              -2%

2010                          10762                                                           +10%

2011                          10406                                                           -3%

2014                          12768                                                           +22%

2015                           13881                                                           +8%

2016                          15848                                                           +14%

2017                          16400                                                           +3%

2018                          19200                                                            +17%

2019                          22848                                                           +19%

 

Ajoutons que la Suède, considéré comme un des pays les plus féministes du monde, voire le plus féministe, est un des cinq pays du monde où le taux de viols est le plus élevé :

https://fr.actualitix.com/pays/wld/nombre-de-viol.php. https://en.wikipedia.org/wiki/Rape_statistics#By_country

Il semble donc que plus les féministes acquièrent du pouvoir dans un pays, plus le nombre de viols explose.

Une des causes évidentes de cette explosion en France, outre l’immigration et le phénomène racaille qui en découle, est le fait que les condamnations pour viol ont baissé de 40% entre 2007 et 2016 : 

https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/09/14/...

On cherchera en vain une quelconque protestation des féministes envers ce laxisme judiciaire.

Sur le caractère éminemment politique de l’orientation lesbienne :

https://www.ifop.com/publication/lorientation-politique-d...

mardi, 11 août 2020

La culture moderne comme arme de destruction massive

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La culture moderne comme arme de destruction massive

par Nicolas Bonnal

Ex: https://strategika.fr

unnamedNBportrait.jpgNé en 1961 à Tunis, Nicolas Bonnal étudie beaucoup, voyage plus encore et commence à publier en 1995 : Mitterrand le grand initié. Il publie ensuite aux belles lettres le Coq hérétique sur l’exception française, la première étude en français sur Tolkien et Internet novelle voie initiatique. Il publie aussi des romans (les territoires protocolaires) et un recueil de contes (les mirages de Huaraz) après une vacance de cinq ans en Amérique du sud. Il revient vivre en Andalousie, puis publie des livres sur le cinéma (le paganisme, Kubrick, Ridley Scott, sans oublier les westerns). Anarchiste réactionnaire,  proche des libertariens américains et des traditionalistes européens, Nicolas Bonnal  se réclame aussi du genre pamphlétaire (un livre sur Céline) et décidément antimoderne. Il a publié des textes sur une dizaine de sites dont France-courtoise.infobvoltaire.frdedefensa.orgfr.sputniknews.com et pravdareport.com. Plusieurs de ses livres ont été traduits (russe, brésilien, ukrainien, espagnol). Son blog : nicolasbonnal.worpress.com

Cet essai se veut un rappel pour certains, une piste pour d’autres. A l’heure où l’électeur-téléspectateur est conditionné comme jamais, il nous semble important de rappeler comment nous en sommes arrivés là.

Sun Tsé écrit : « Un habile général ne se trouve jamais réduit à de telles extrémités : sans donner de batailles, il sait soumettre l’ennemi ; sans répandre une goutte de sang, sans tirer l’épée, il fait tomber les villes ; sans franchir la frontière, il conquiert les royaumes… »

Soljenitsyne avait fini par reconnaître qu’en Union Soviétique « on donnait une culture classique au peuple ». Et en occident ? Ne lui donne-t-on pas au contraire une inculture classique, au peuple ou à la plèbe qui l’a remplacé ?

La culture de masse est née dans les années 1920 aux USA. Elle se fait maintenant à coup de cinéma puéril en 3D, de livres d’ésotérisme déments, de jeux vidéo sadiques, de soap opéras pour sourdes-muettes, de drugstores bourrés de sucreries et de best-sellers sélectionnés par le NYT et tous ses relais. Comme disait Adorno, souvent attaqué par ceux qui ne le lisent pas :

La répétitivité, la redondance et l’ubiquité qui caractérisent la culture de masse moderne tendent à automatiser les réactions et à affaiblir les forces de résistance de l’individu.

La culture contemporaine postérieure à la Première Guerre Mondiale a toujours répugné à une élite intellectuelle sous sa forme élitiste ou massifiée. Voyez Céline ou Hermann Hesse… La culture dans laquelle nous vivons, et qui a tourné le dos à notre patrimoine, qu’il s’agisse de Lady Gaga, du bouquin Millenium, du jazz, du rap, de « la peinture contemporaine » ou du film Avatar, n’est pas fortuite, elle n’est pas le fruit des goûts du public et du génie naïf de ses initiateurs. Cette culture, remarquait le comte Tolstoï vers 1900, n’est plus chrétienne, n’est plus enracinée dans l’histoire d’un peuple ou dans un sol ; elle est liée au conditionnement de masse, elle est abstraite et massifiée, elle a des buts abscons et des objectifs précis, mondialisés, qu’on peut aussi retracer à travers l’histoire de « l’alittérature contemporaine » ou du cinéma postclassique. La musique moderne doit rendre fou, disait Adorno. La pollution sonore sert à détruire la personnalité humaine. Cela s’est du reste toujours su : Plutarque évoque le terrorisme sonore des Parthes avant la bataille de Carrhes, dans sa vie de Crassus. Les bruits désarment les troupes romaines (voyez mon Kubrick, qui a beaucoup insisté dans son œuvre sur l’importance du bruit et de la musique.

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On sait que le jazz a été fabriqué à l’époque de Gershwin et il a sciemment remplacé les negro spirituals traduits par la grande Marguerite Yourcenar. Il a contribué à la déchristianisation des noirs américains, chose visible aussi dans le biopic de Taylor Hackford sur Ray Charles. Ces noirs US ont été rendus amers et dépendants par le système dans les années 60, et je me souviens qu’Alain Daniélou, musicologue de l’UNESCO, l’observait dans ses mémoires. Quant aux rappeurs, ils ont accompagné le million de jeunes noirs américains tués en trente ans pour quelques trottoirs de drogue… A chacun ses vices : le cinéma classique hollywoodien lui-même devient pénible pour qui observe que tout le temps on voit des personnages fumer des Marlboro (dans chaque scène parfois, pour John Wayne ou Errol Flynn) ou absorber le whisky Seagram des Bronfman, les financiers de l’ADL…

On sait que cette culture a été lancée pour contrôler les activités de la jeunesse politisée. Le marxisme-léninisme a été court-circuité de cette manière par la CIA qui promotionnait des agents d’influence, des artistes comme Pollock et Kooning. Le film Daddy Long-Legs (1957) décrit le conditionnement psychique d’une jeune orpheline française et sa possession physique et psychique par son mécène amateur d’art moderne Fred Astaire, clone ici des Rockefeller (tout le cinéma de Fred Astaire fut lié au soft power US). Dans un texte passionnant Manfred Holler rappelle que la CIA est dirigée par les familles Illuminati et richissimes de Wall Street qui orientent l’humanité vers leurs goûts modernes ou déjantés (Tolstoï fait ce même reproche aux élites russes de son temps). Pensez à Pinault reprochant au grand public de n’être jamais assez éduqué pour comprendre le génie de sa collection de Rothko !

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On sait depuis eux aussi que l’intronisation des drogues et de la contre-culture correspondait à un projet policier et politique : on peut citer les projets MK-Ultra, Cointelpro, Artichoke dont Hollywood s’inspira peu et mal à une époque plus rebelle. Ken Kesey, l’auteur du Vol au-dessus d’un nid de coucous, essayait les drogues pour les programmes de contrôle mental. Le message libertarien de ce film antisystème dissimulait comme d’habitude un agenda plus sinistre et perturbant que prévu. Les univers parallèles ont été plus faciles à contrôler que les partis politiques à noyauter. Tu veux fuir ce monde ? On va t’aider et même te guider… c’est l’arc-en-ciel du magicien d’Oz (pauvre destin de Judy Garland) que l’on retrouve après dans le testament de Kubrick Eyes Wide Shut.

Quant à la révolution sexuelle, elle était perçue comme un remède à l’esprit contestataire par les tyrans antiques. La Boétie parle des tavernes et des bordels pour travailler le contrôle de la population de Lydie, qui a donné le mot de ludique. A notre époque ce contrôle social a débouché sur une pornographie de masse accessible à tous sur le réseau mais aussi sur les meutes hargneuses du politiquement correct. Mais le sexe n’est pas la seule arme de destruction massive du monde actuel. L’œil du voyeur fusionne avec celui du délateur. Le corps du petit monstre des télétubbies, émission emblématique chargé de conditionner les…bébés (mondialisme, héliotropisme, sociabilité de bonobo, animalisation, consumérisme) est déjà orné d’un énorme écran blanc. L’enfant est un hardware qui marche et qu’on programme jusqu’à l’âge adulte. Si vous lui demandez plus tard un dessin, il vous dessinera tous les canons lasers du monde destructeur de ses jeux vidéo.

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Dans le même esprit bien sûr, toute la culture « sexe drogue et rock’n’roll » de la génération du Baby-Boom a eu un seul but : abrutir la jeunesse et pour plusieurs générations, répandre le consumérisme, l’hédonisme et le nihilisme, détourner et canaliser ainsi toutes ses énergies : il faut se transformer en canal, en Ipod (cosse de l’oignon, en anglais), en tube (you…tube ?). Cette possession – ou connexion – induit bien sûr la référence au satanisme, qui a été évidente dans la musique heavy metal puis dans la littérature pour enfants (Harry Potter, War Craft, et tout le reste) et la culture pop contemporaine via des bourriques comme Rihanna, Gaga ou Beyonce qu’un œil expert comme celui de Daniel Estulin invite à voir d’un autre œil avec leur symbolisme maçon.

Dans son beau discours de Harvard, Soljenitsyne parle des « musiques insupportables » qui nous envahissent et nous abêtissent de tous côtés. L’auteur du Petit Prince Antoine de Saint-Exupéry s’était fait insulter pour avoir écrit que l’on pouvait écouter du Mozart à l’usine… mais en Union Soviétique. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si dans les films hollywoodiens ou franchouillards les nazis et les tortionnaires sont présentés comme des hommes cultivés (cf. Hannibal, Shutter Island, Opération corned-beef). Pour être bien intégré il faut être crétin. Le cinéma intelligent et artistique était d’ailleurs depuis longtemps réservé aux maîtres russes comme Tarkovsky, Paradjanov ou Sokurov ! Et la critique a fait après la guerre, de Bogart et son chapeau, notre Ulysse.

boorstin-image.jpgLe désarmement moral de la culture de masse américaine est allé de pair avec les délocalisations et la désindustrialisation forcée. On a ainsi liquidé avec les syndicats les risques de mobilisation populaire et on a dispersé tout le monde avec l’automobile (Mumford). Mais le grand outil de l’arme silencieuse est resté la télévision, avec sa propagande et ses pseudo-événements décrits par Boorstin. Comme le cinéma, mais en permanence, la télévision fournit un modèle mimétique. Il faut créer le troupeau d’animaux bien dociles, comme disait Céline. L’offensive fut menée par la publicité, issue de la propagande de guerre de Edouard Bernays, puis par l’école de Francfort et par exemple sa chasse systématique à la figure autoritaire. On a ainsi promu comme l’écrit Adorno la figure de l’homosexuel, on a crétinisé le père de famille, on a transformé la femme en modèle Bovary de série, éternellement endettée, enamourée et divorcée, on a créé l’ado rebelle (conforme) insatisfait et demeuré avec sa casquette retournée ; revoyez l’équipée sauvage de Brando qui remplace dès 1953, avec le suicidaire James Dean, les héros traditionnels comme John Wayne et James Stewart. On a détruit la famille puis l’idée de nation, jugée fascisante par les banquiers, et enfin celle de civilisation. On ne parlera pas de la race ou du sexe puisqu’ils n’ont (heureusement) jamais existé…

Pour liquider la contestation de type communiste, il fallait inciter à une perte de temps et à un désordre mental. Lucien Cerise rappelle que l’on a créé le modèle du jeune voyageur qui veut découvrir le monde, ses plages, ses drogues, ses bières et toutes ses excursions sexuelles ! Pensez à Kerouac, à la génération très crétine du routard qui gesticulait pour rien (revoir dans cet esprit la balade inepte des deux motards junkies d’Easy rider). Cette bougeotte sans but (Di Caprio toujours, dans The Beach) ne vaut pas mieux que la geste clownesque du touriste massifié qui clique tout le temps sur son appareil numérique dans un paysage réifié et recyclé.

6241_poster_scale_480x640.jpgLa culture comme arme de destruction massive est plus redoutable que les bombardements. Elle est le bombardement ultime. Elle nous sépare de notre histoire, de notre espace, de notre prochain, de nos compatriotes. Elle crée un « avatar » d’individu en marge de ce monde et prêt à être capté par la matrice technologique du commerce américain qui peut ainsi imposer partout ses projets, ses guerres et ses jouets transformés. L’usine à rêve prépare la prisonplanet.com et le camp de concentration indolore dont parlait Aldous Huxley vingt après son Meilleur des mondes. Et la matrice virale américaine est difficile à substituer aujourd’hui car elle a envahi tous les réseaux, tous les cerveaux. Ce n’est qu’en étant armé moralement contre elle que l’on peut s’en défendre – avec son âme, sa famille, sa classe et sa nation.

dimanche, 09 août 2020

Family Systems & History

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Family Systems & History

Emmanuel Todd
Lineages of Modernity: A History of Humanity from the Stone Age to Homo Americanus
Cambridge, England, and Medford, MA: Polity Press, 2019

9781509534470_medium.jpgMuch of today’s dominant globalist ideology derives from development theory, a body of thought which shares with Marxism the view that economic relations are the basis of social life and sees the races of mankind as fundamentally equivalent beneath the superficial cultural differences which have arisen over history. Human societies everywhere naturally develop from the hunter-gatherer stage to pastoralism, then to settled agriculture, and eventually to modern industrial civilization and “democracy” — the final stage, or at least the highest yet attained. Francis Fukuyama aptly characterized the development theorists’ dream as “getting to Denmark” — a world wherein all nations gradually converge on the model of a prosperous, stable, secure nation of the northern European type. But development occurs at different tempos in different places, with the result that some countries remain “undeveloped” (or, more euphemistically, still “developing”) while others have already reached the highest stage. Those in the vanguard of progress, mainly European-descended peoples, can help the rest develop by means of expertly managed international programs. Not the least important function of development theory, accordingly, is to justify prestige and rewards for a class of globe-trotting program administrators. Yet the world stubbornly refuses to evolve as globalist ideology foresees; plenty of differences remain intractable.

Emmanuel Todd is an anthropologist and demographer who focuses on family systems, an unusual but sometimes enlightening perspective to bring to historical and political questions. In the early 1980s, for example, he pointed out the connection between Leninist communism and a particular kind of peasant family pattern:

. . . a form that combined a father with his married sons, authoritarian as regards the relations between parents and children, egalitarian in the relations between brothers. Authority and equality, indeed, represent the hard core of communist ideology, and the coincidence between family and ideology was not difficult to explain. It resulted from a sequence at once historical and anthropological: urbanization and literacy broke down the communal peasant family; the latter, once it has disintegrated, releases into general social life its values of authority and equality; individuals emancipated from paternal constraint seek a substitute for their family servitude in fidelity to a single party, in integration by the centralized economy.

Todd found this pattern not only in Russia, China, and Vietnam, but also in Serbia (the backbone of Yugoslav communism) and north-central Italy (the region which voted heavily communist in the 1970s). In countries with different family systems — including Poland, the Czech lands, Slovenia and most of Croatia — communism is only likely to prevail for as long as it is imposed by an outside power. I thought I knew a fair amount about communism, but this was new to me.

Deep History

Todd advocates a three-level perspective on the history of nations, with change proceeding at a different pace on each level. At the conscious level we find war, politics, and economic policy. History often proceeds very quickly at this top level. At the subconscious level we find major educational changes such as the spread of basic literacy, which began in Germany with the Protestant Reformation and which Todd expects to reach its completion around the world within the next generation, i.e., over a period of about five hundred years. At the deepest, unconscious level we find religion and family structures, which change even more slowly. The economistic thinking characteristic of globalist ideology mistakes the most superficial level for the most fundamental.

unnamedtoddorsystfam.jpgIn previous works, Todd has demonstrated that even in fully secularized societies, the religious beliefs of the past continue to influence thinking on an unconscious level. He has, for example, described a “zombie Catholicism” which must be taken into account if one wishes to understand social behavior in the French provinces today. In this work, he finds an analogous “zombie Protestantism” useful for understanding the educational and economic effectiveness of Scandinavia. Furthermore, as he notes,

It is usually difficult to completely separate family systems from religious systems. Religion generally has something to say about sexuality and marriage, the status of women, the authority of parents, and the equality or inequality of brothers.

Regarding family structure, Todd proposes a model of historical development according to which families tend to become increasingly patrilineal over time,

from the undifferentiated nuclear family (level 0 patrilineality) to the stem family (level 1 patrilineality), then from the stem family to the exogamous communitarian family (level 2 patrilineality), and finally to the endogamous communitarian family (level 3 patrilineality).

It is important to understand that this is not simply a development from worse to better. The higher levels must, indeed, have some advantage over the lower; otherwise, it would be difficult to explain why they developed. But Todd stresses that the more primitive types also have advantages that get sacrificed along the way. The modern economic powerhouses treated as universally normative by development theorists, for example, tend to have what are historically and anthropologically more “primitive” family patterns, while the communitarian family practicing cousin marriage and sequestering its women is the most complex and sophisticated arrangement. Globalists mystified that economically backward Islamic societies do not simply abandon cousin marriage and embrace “modern, progressive” sexual and family norms are in effect expecting several thousand years of historical development to go suddenly into reverse.

The Original Human Family

Early on, Todd offers a description of the original anthropological system of humanity, the “undifferentiated nuclear family,” as an ideal type:

The family is nuclear, albeit without dogmatism — young couples or elderly parents can be temporarily added to it. Women’s status is high. The kinship system is bilateral, giving the mother’s and father’s kin equal places in the child’s world. Marriage is exogamous, but again without dogmatism [i.e., there is no formal prohibition against consanguineous marriage]. Divorce is possible. Polygyny too, and sometimes even, although more rarely, polyandry. Interactions between the families of brothers and sisters are frequent and structure local groups. No relationship is completely stable. Families and individuals can separate and regroup. There are two levels of aggregation above the family:

1. Several nuclear families, most often related, constitute a mobile group.

2. These groups exchange spouses with each other within a territory comprising perhaps a thousand individuals.

Such a primordial human society is fairly tolerant of occasional homosexual or other non-reproductive sexual behavior, but this remains marginal.

Todd’s general descriptor for such flexible arrangements is “undifferentiated.” As he notes, anthropologists have used this term “to describe kinship systems that are neither patrilineal nor matrilineal, but leave individuals free to use paternal and maternal filiations pragmatically.” Todd himself extends the concept “to all elements of the family structure that have not been polarized in the course of history by a stable dichotomous choice.” Todd believes the original undifferentiated family type was universal among Homo sapiens before the rise of cities and writing in ancient Sumer about 5000 years ago.

A family system is undifferentiated in regard to co-residence of generations, e.g., where it occurs temporarily according to convenience without being evaluated either positively (as in the Russian or Chinese peasant family) or negatively (as often in the Anglo-Saxon world). Undifferentiated inheritance is regulated neither in an egalitarian nor an inegalitarian (e.g., with primogeniture) spirit. Polygyny below about the ten percent threshold may be considered undifferentiated; both socially enforced monogamy and polygyny above fifteen percent indicate differentiation. Both the formal prohibition against cousin marriage (as in Christendom) and cousin marriage as a normative ideal (as in the Arab-Persian world) indicate differentiation.

Reading History in Space

If we look at a map of Eurasian family patterns today, we find that the more central regions display greater patrilineal development, while simpler systems (which also involve a higher status for women) survive on the peripheries. To explain this, the author appeals to a once commonplace linguistic and anthropological interpretive principle that fell out of fashion with the rise of structuralism after the Second World War: the conservatism of peripheral areas.

This powerful explanatory hypothesis makes it possible to read history in space: the most archaic forms (linguistic, architectural, culinary or family) survive on the periphery of cultural spaces. . . . If a characteristic A distinguishes several pockets placed on the periphery of a characteristic B that covers a continuous central space, we can suppose that A represents the ancient characteristic, and B a central innovation that has spread to the periphery without completely submerging it. The greater the number of residual pockets, the more certain we can be of our interpretation.

This is what we find with family patterns on the Eurasian landmass. The Arab-Persian world, Northern India, and China are the classic settings of the Communitarian Family. Northwest Russia shows this type as well, albeit without endogamy and only dating back to the seventeenth century.

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The nuclear family model survives in much of Western Europe. In Northeast Asia, it can still be found among relict native Siberian populations such as the Chukchi, as well as the Ainu of northern Japan. On the fringes of South Asia, it survives in Sri Lanka and among the natives of the Andaman Islands as well as the Christians of Southwest India. And it characterizes much of Southeast Asia, including Indonesia and the Philippine Islands. As Todd remarks: “Geography here provides us with the key to history. We can read the effects of time directly in space; we can see the patrilineal shift transforming the shape of the family, moving in waves toward a periphery that is never reached.”

The Differentiated Nuclear Family: England

It is important to note, however, that the nuclear family, where it has survived, has not remained undifferentiated; it now represents a “stable dichotomous choice.” In Europe, as Todd writes, the primordial patterns were “regulated rather than abolished by the Christian conception of sex and marriage.” In Christian England, e.g., undifferentiated de facto monogamy (with polygyny at the margins) was replaced by socially enforced and indissoluble monogamy: the covenantal marriage. Consanguineous marriage was not tolerated; neither were homosexuality or other nonreproductive forms of sex.

Lateral bonds between adult siblings lost all economic functionality. The three-generation household came to be frowned upon: young couples were required to establish their own households at marriage. This had the disadvantage of making it harder to care for the elderly and infirm. To meet the difficulty, the English Poor Laws of 1598 and 1601 required parishes to levy taxes for their support.

A sample of twenty communities, a picture of which can be formed from the parish register and the poor register combined, means we can study 110,000 pensions payments between 1660 and 1740. Statistical analysis reveals that 5 per cent of the population received a weekly pension, a figure that rose to 8 or 9 per cent in the city and 40-45 per cent for the over-sixties. For the latter, the average level of pension corresponded to the wages of a farm worker.

As the author notes, these facts contradict the “textbook commonplace” that Bismarck’s Germany pioneered social security.

Parents were left free to bequeath their property as they saw fit, a system neither egalitarian nor distinctly inegalitarian. English society also came to be characterized by extreme mobility: “Children moved as servants between large farms while still very young. Even the sons of better-off peasants were sent elsewhere as servants under the practice of ‘sending out.’”

Todd calls this system the absolute nuclear family; it was fully formed (=differentiated) by about the mid-seventeenth century. Apart from England, something broadly similar is found in Denmark, Southeast Norway (the Oslofjord), the Protestant and coastal parts of the Netherlands, as well as Upper Brittany in France.

Chaucer’s England was a land of about three million souls on the edge of a Eurasian continent with a population of about 300 million. Many historians have wondered that so tiny a country on the fringe of civilization went on to shape the modern world more than any other. Todd eventually came to the conclusion that England’s peripheral location and the anthropological backwardness that went with it were the secret of its success:

Its dynamism, and even more so that of [its offspring] America, is the dynamism of the original Homo sapiens. Elsewhere, successive civilizations have had time to imprison themselves in complex constructions that are liable to paralyze human creativity.

Encouraging the autonomy of children, the absolute nuclear family fosters individualism and allows major breaks between generations. These were anthropological preconditions for the industrial revolution, which uprooted much of the English peasantry within just a few decades. So there is a definite association between economic progress and anthropological “backwardness.” Todd devotes a chapter to demonstrating that democracy (or, perhaps better, participatory government) is primordial as well: “the rise of complex family forms corresponds to the rise of authoritarian political forms.”

The Stem Family and Literacy: Germany

Given the advantages of the nuclear family, one may ask why it was ever superseded. The answer is that in the preindustrial world wealth derives mostly from the possession of land, and as population increases, land eventually becomes scarce. If a farmer has many children and divides his land between them, the plots will eventually become too small to support new families. To avoid such a result, primogeniture is instituted:

Male primogeniture makes it possible to transmit real estate without dividing it. The emergence of a densely settled rural world crowned by a political system that controls the whole of the regional space, is the basic condition for it to emerge. As long as there are new lands to be conquered, the emigration of children when they reach adulthood renders the privilege of the eldest useless. When land becomes scarce, this privilege may appear. The stem family then develops as a logical consequence of primogeniture: the choice of a single heir gradually leads to the co-residence of two adult generations.

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Primogeniture and the stem family represent the first stage of patrilineality and, as compared to the nuclear family, tend to promote the values of authority and inequality. Younger sons must find their own way in the world.

Historically, this pattern first emerged from the undifferentiated nuclear family in Sumer not long after the invention of writing in 3300 BC. Skipping over antiquity, primogeniture arose in European history toward the end of the Carolingian period, with the founding of France’s Capetian monarchy among its first consequences. The institution subsequently spread through Europe’s aristocracy from the eleventh century. It arrived in England with the Conquest, but there remained the preserve of aristocrats. Yet primogeniture also emerged independently in peasant communities in Germany and Southern France beginning in the thirteenth century, also from a scarcity of land. Todd mentions that the German aristocracy distinguished itself from commoners by their practice of egalitarian inheritance — the reverse of the pattern in England.

The stem family was an essential component of a triple revolution that began in Germany and which, in Todd’s view, represents that nation’s single most important contribution to European and world civilization. The other two components of this revolution were Protestantism and universal literacy.

The author points out a commonality between primogeniture and writing: they both serve the purpose of transmission:

Writing is, in essence, a knowledge-fixing technique that allows human society to escape the uncertainty of oral transmission of memory. Primogeniture, with the stem family that ultimately stems from it, is also a technique of transmission: it transmits the monarchical state, the fief, peasant farming, the artisan’s stall and, at a deeper level, all the techniques that accompany these elements of social structures.

The gradual development of the stem family in Germany can be traced in the historical record between the fourteenth and eighteenth centuries. In about 1454, printing with moveable type was invented by the German Gutenberg, leading to a drastic reduction in the cost of reproducing texts. After 1517, Martin Luther launched the Protestant Reformation which, from the beginning, “sought to establish, for each human being, a personal dialogue with God, without the mediation of the priest.” This meant that responsibility for religious instruction passed to fathers:

Luther’s Little Catechism, the first vehicle of the Protestant educational offensive, displays, right from the start, an unambiguous patriarchal familialism: “The Ten Commandments or the Decalogue, Such as a father of a family must teach them with simplicity to his children and his servants.” It is easy to see how the father’s authority would be reinforced by his new religious role in the family.

Todd even asserts a fundamental connection between the stem family and the specifically theological content of Protestantism:

The mechanism that leads from family organization to religious system is simple; primogeniture comes with a high level of authority in the father; it defines a son who is chosen and other children who are rejected. In such a domestic context, a theological system that affirms that the Everlasting predestines a minority to salvation and the rest of humankind to damnation can appear quite simply as normal. It should be noted that when Protestantism spread from stem-family areas toward regions where the absolute nuclear family dominated, its dogma of predestination eventually collapsed.

As is well-known, the reformation focused on making the Bible available to ordinary people in their national vernaculars. At first, this occurred principally through church services and sermons, but in the course of the seventeenth century, literacy and Bible reading began gaining ground among the masses. By 1700, an estimated 35-45 percent of the population of Protestant Europe could read. This was something new in world history: in the Graeco-Roman world, according to the most careful modern estimates, male literacy rarely exceeded twenty percent anywhere.

The Great European Mental Transformation

One of Todd’s best chapters is devoted to “The Great European Mental Transformation” which resulted from the spread of literacy:

We would be wrong to see learning to read as merely the acquisition of a technique. We are now beginning to measure the enlargement of the brain function induced by an intensive and early use of reading. Reading creates a new person. It changes one’s relationship to the world. It allows a more complex inner life and achieves a transformation of the personality.

According to sociologist David Riesman (The Lonely Crowd, 1950), reading provides the old human personality regulated by custom with a new type of internal guidance system; he may have been getting at something like the anthropological distinction between shame and guilt cultures. More specifically, Riesman writes: “The inner-directed man often develops a character structure which drives him to work longer hours and to live on lower budgets of leisure and laxity than would have been deemed possible before.” Hence, the Protestant work ethic. The spread of literacy also coincided with a significant fall in private violence.

Such self-discipline also carried over into the realm of sex. Historical research into marriage in Protestant countries during the early modern period reveals both a notable increase in age at first marriage and a larger number of permanently unmarried people. In the author’s view, it was Protestantism that finally fulfilled “the old project of sexual abstinence developed more than a thousand years [before] by the Fathers of the Church.” In the Middle Ages, disciplined celibate religiosity had been the preserve of monastic specialists — religious virtuosos, as Max Weber called them — while the surrounding society remained “bawdy and violent.” Protestantism did not so much abolish the priesthood as clericalize the laity. An important result was lowered population pressure which, combined with the industrial revolution, allowed for an unprecedented accumulation of wealth and rise in living standards.

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Todd speaks of a Protestant personality profile: “turned in on itself, predisposed by its morality (sexual or otherwise) to feelings of guilt, to leading an honest and upright life, an essentially active life turned towards study and work.” But he also notes that the Protestant surplus of interiority was compensated by a greater community and state hold over the individual: “The concrete life of Protestant communities, from the seventeenth to the nineteenth century at least, also displays an incredible strengthening of the local group and its ability to control the lives of individuals. The Reformation resulted in a reinforced surveillance of manners.” These are the “moral communities” which Kevin MacDonald has written about as substitutes for the kinship group in individualistic societies.

This era was also characterized by such negative phenomena as religious hatreds, the rise of absolutism, and a recrudescence of war: “the price to be paid for the internal pacification of behavior was a collective reorientation of violence.” Stem family Protestant countries in which younger sons had to fend for themselves pioneered standing armies and militarism. Louis XIV is generally considered a warlike king, but at their height in 1710, his forces enrolled only 1.5 percent of Catholic France’s population. Around the same time, the Swedish Empire of Charles XII was employing 7.7 percent of its population in the military. By 1760, 7.1 percent of Prussia, that “army with a country attached,” was in uniform. Hesse, whose soldiers made up the bulk of British forces during the American War of Independence, practiced a mercenary militarism with the goal of increasing state revenue; by 1782 they had matched the Swedish figure of 7.7 percent of the population under arms. In some stem family Protestant countries, younger sons were automatically enlisted upon coming of age.

It remains to speak of the relation of the stem family to the industrial revolution which, as we have seen, was pioneered by a nation with an absolute nuclear family. Firstly, we should mention that literacy is the single most important factor in industrialization, and we have seen that the ideal of universal literacy was one third of a revolution whose other aspects were the stem family and Protestantism.

But the stem family, being essentially a system of transmission, also has a certain conservative tendency. We find such areas resisting industrialism for a time:

A society based on the accumulation of what has been acquired is endowed with the capacity for making any progress that does not entail a radical change in its methods and objectives. For example, it will be more difficult to transform rural people into urban people, artisans into factory workers, or nobles into entrepreneurs. The uprooting and transformation of all these actors can only be brought about under external pressure, and at the cost of great pain.

Of course, the rise of Britain did put pressure on other European nations. The most important stem family nation, Germany, experienced a delayed and highly disruptive transition to industrial capitalism. Once that transformation had occurred, however, the stem family acted as an accelerant: by the beginning of the twentieth century, Germany had actually overtaken Great Britain economically. We might also mention that Japan, a stem family society on the opposite side of Eurasia, went through a similar process during the Meiji period.

Secularization and Ideological Crisis

Another central tendency of the modern era on which light can be shed by the study of family structures and the spread of literacy is secularization. At first, of course, the Protestant Reformation amounted to a religious revival, as did the Catholic Counter-Reformation. Todd, however, interprets puritanism — a kind of radicalized Protestantism — as a “stiffening of the faith” which marks “a step on the path to secularization.”

It was the Paris Basin of Northern France which witnessed “the first religious collapse of a ‘sociological’ magnitude.” Between 1730 and 1740, the recruitment of priests collapsed. Subsequently, both religious observance and the birth rate declined among the masses of Northern France. This process was complete well before the French Revolution.

The family structure of the Paris Basin is an egalitarian variant of the nuclear family wherein parents are expected to divide their property equally between all children. Unlike in the stem family areas,

there was no strong image of the father to prop up the image of God; and there was no inequality between children to justify inequality between the priest and the ordinary person. In such an environment, the shock of rationalism was not cushioned by a deeply rooted belief. In fact, the principle of equality. . . seemed destined to call into question the belief in a superior being of any kind — father, king, or God.

The French Revolution was the result of a long development involving the spread of literacy, secularization, and falling birth rates, as France’s Annales historical school has uncovered.

Although France was the most historically important center of this first wave of secularization, it also affected other areas with a similar family structure:

In Southern Europe, with its egalitarian nuclear families, literacy at this time affected only the urban world, which around the middle of the eighteenth century lay outside the grip of the Church. Because the cities were feeding the countryside with a flow of religious personal, which then dried up, [not only] the Paris Basin [but also] Andalusia and southern Italy entered this new phase . . . [of] secularization.

The apostasy of these egalitarian areas strongly affected the Catholicism which survived into the nineteenth century, largely dependent on stem family regions: the church became a bastion of hierarchy and respect for every sort of authority. As the author notes, this mentality is far removed from that of early Christianity in the Late Roman Empire.

The second round of European secularization occurred in the Protestant lands beginning in the late nineteenth century:

In Calvinist and Lutheran Europe, secularization did not begin until the publication of The Origin of Species. The subsequent collapse was a brutal affair in a world heavily dependent on a literal interpretation of the Bible. Between 1870 and 1930, throughout Northwest and Northern Europe, the recruitment of Protestant pastors collapsed. Secularization was finally hitting the most educated part of the continent. It opened up a phase of maximum ideological instability.

Generalizing from the work of the Annales school, Todd proposes a regular pattern of historical development running from literacy to secularization to a declining birth rate to an ideological crisis and revolution. The ideological crisis which followed the collapse of Protestantism in Germany was not, however, the rise of socialism, heir apparent of France’s revolution:

Socialism took an essentially reformist and reasonable form . . . in Protestant Europe. It was the rise of nationalism that eventually dragged the continent into the conflagration of the First World War. It is obvious that the epicenter of the ideological and mental crisis lay in Germany.

National Socialism was also, in Todd’s view, a consequence of the crisis of German Protestantism. Support for the NSDAP always remained weak in Catholic areas of Germany, despite the party’s Bavarian origins. The author dismisses explanations that focus excessively on the Great Depression as a product of superficial economistic thinking. The deeply authoritarian yet non-egalitarian character of National Socialist ideology Todd explains by Germany’s stem family structure, so different from the egalitarian nuclear family system of Northern France (as well as the egalitarian communal family of Russia).

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The Memory of Places

The family forms Todd discusses all arose before industrialization, and in a sense clearly belong to the past: there are no more three-generation households in Berlin today than there are in London; fathers do not co-reside with the families of all their grown sons in today’s Moscow any more than in the US. Nuclear households characterize these formerly stem- and communal-family areas no less than the Anglo-Saxon world. Might this represent a “convergence” such as globalists dream of?

Todd does not believe so. He stresses the distinction between

the family system — i.e., a set of values organizing the relationships between men and women, between parents and children, between brothers and sister — and the domestic group as can be seen in the census. It is quite conceivable that a system of values may survive the disintegration of the domestic group in which it was embodied in the peasant era. The nuclearization of households does not necessarily imply that of mentalities.

Mentalities can prove astonishingly stable even amid radical social change. An important example is the persistence of regional cultures. In 2013, Todd and the demographer and historian Hervé Le Bras collaborated on a book documenting

the perpetuation, across 550,000 square kilometers of France, of different systems of customs and manners in most recent times. Despite the acceleration of internal migration, despite the disappearance of complex households and the collapse of Catholicism, regional heterogeneity persists. Homogenization, via television, the TGV express train, and the Internet has not prevented the persistence of diverse cultures, stimulated rather than erased by economic globalization. And all this has happened within a single nation, unified by administration and language.

51hbtsbneql-sx323-bo1-204-203-200.jpgTodd calls this phenomenon the “memory of places.” His explanation for it is that even values weakly held at the individual level and transmitted through the most casual mimetic processes can produce extremely strong, resilient, and sustainable belief systems at the group level. Such an interpretation also helps us to understand the persistence of national temperaments without our having to assume that everyone is the incarnation of an immutable national archetype or Volksgeist.

The author offers an amusing illustration of how notions weakly held at the individual level can persist in groups: in the 1990s, he found it easy to convince people privately of the absurdity of the project for a single European currency.

But the belief in the inevitability of the euro was invulnerable at the collective level. The weak belief was already carried by a sufficiently broad group, and the individual, convinced for a while, returned to his or her belief at the same time as to his or her milieu after the conversation.

Stem Family Regions Today: The Case of Germany

Todd uses the concept of the memory of places to explain certain aspects of postwar German economic behavior which cannot be accounted for by economic theory itself. German consumers are more likely than those of the English-speaking world to prefer domestic products. German managers are less interested in short-term profit maximization than the long-term viability of their companies. Germany maintains a trade surplus while Anglo-Saxon countries cheerfully heap up debt. And more than other Western nations, the German economy relies on

small and medium-sized companies that dominate a narrow niche of global production, and prefer to develop their product or their range rather than to diversify. These companies are often located in areas that cannot be described as urban, and they continue, where possible, to prefer family transmission. They preserve the memory of primogeniture.

In the generation since reunification,

Germany has rebuilt its eastern area ruined by communism; it has reorganized Eastern Europe, putting to work the active populations brought up under the old popular democracies; in the West, it has conducted a real industrial blitzkrieg against the weaker nations trapped in the euro; it is proposing a partnership with China and posing as the economic rival of the United States.

All of this testifies to a continued German national consciousness and capacity for collective action, traceable to the stem-family mentality. This is all the more remarkable in that it can never be mentioned. Officially and publicly, the country operates on the assumption that the concept of nationhood was first introduced to the world by Adolf Hitler in 1933, so that any explicit national considerations are sufficient to mark one out as a “Nazi.” What we observe in Germany is a “zombie nationalism,” continuing at an unconscious level in spite of the country’s strict anti-national orthodoxy.

But all is not well in Germany. Todd observes that the birth rate in nuclear family regions of the West has remained reasonably close to replacement level at around 1.9 children per woman. In stem family areas it trends considerably lower, and is down to 1.4 in Germany. Todd ascribes this demographic disaster to

a mismatch between stem-family values and the ultra-individualism that has come from the West. In Germany, there is a widespread feeling that caring for a child full time is a moral obligation for the mother. Such a conception is not very compatible with the notion of a career. The level of state childcare provision is therefore low in the Federal Republic. But institutions here are simply reflecting mentalities.

German women have, indeed, increasingly opted for careers since the Second World War, but are more likely to remain entirely childless than their counterparts in France and the Anglosphere.

The eastward expansion of the EU and the recent departure of the United Kingdom have resulted in an EU dominated by its stem family areas — which include Germany, of course, but also the 47 percent share of the stem family population which lies outside the German-speaking world. This has given today’s EU a distinctly more inegalitarian and authoritarian cast than its founders intended:

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A hierarchy of nations, more or less rich, more or less powerful, more or less dominated, has appeared. Nothing about this system is an accident. The political, economic, and social system that has developed in Europe with its hierarchy of peoples, its economic inequalities, and its absence of representative democracy, is the normal form to which the stem family must give birth.

Communitarian Family Regions: Russia and Belarus

Besides nuclear and stem family forms, three regions in Europe developed exogamous communitarian families in which adult brothers and their families co-reside with the family patriarch. Such a system represents the second level of patrilineal development in Todd’s scheme. One such region is North Central Italy, including Tuscany, Umbria, and Emilia-Romagna where, as we have mentioned, support for the Italian Communist Party used to be quite high. A second communitarian family zone stretches from the Balkans into central Europe, including Bulgaria, Albania, most of the non-Catholic constituents of the former Yugoslavia, as well as Slovakia and parts of Hungary. Todd says relatively little about this area.

The third communitarian family region includes Northwest Russia, Belarus, and the Baltic States. This area developed the communitarian family relatively recently, between the seventeenth century and the abolition of serfdom in 1861. Todd suggests the system may have been “born of a confrontation between the Germanic stem family and Mongolian patrilineal organization.” It is unusual among communitarian regions in maintaining a relatively high status for women (such as is not found in the Balkans, for example). The communitarian family system of Northwest Russia was historically important in providing a sociological basis for Russian communism, as explained near the beginning of this review. In the 1917 elections to the Constituent Assembly, the Bolshevik Party gained only 24 percent of the vote over the whole of the Russian Empire, but achieved over 50 percent support in St. Petersburg, Moscow, and Belarus. In Livonia, a region that included parts of today’s Latvia and Estonia, its share of the vote rose to 71 percent.

Even today, after all the upheavals of the twentieth century, this family background can explain certain aspects of political behavior which mystify outsiders:

The permanence of communitarian values obviously explains the emergence, after the disorder of the 1990s and 2000s, of a stable authoritarian democracy, combining elections and an unanimist vote. Indeed, there is nothing in the electoral process to prevent Vladimir Putin being indefinitely re-elected to head the system. Control of the media is not the fundamental cause of permanence in power; authoritarianism is rooted in the people, and draws on communitarian values that are constantly being reproduced by the memory of places.

The memory of places [also] provides us with the fascinating example of Belarus that today is more attached than Russia to authoritarianism. Pres. Lukashenko is now the only “old-fashioned” dictator on the European continent, but the citizens of Belarus seem perfectly happy with the situation — and their society is functioning quite satisfactorily.

Putin’s Russia has instituted a protectionist regime to allow the reconstruction of the country’s industrial base. This amounts, as the author explains, to a “refusal of the Russian ruling class to see the people sold off as a cheap labor force to globalized capitalism,” and this is something the West’s neo-liberal elites cannot forgive. Poor as it is, Russia “remains a counter-model in a world that has moved towards a fierce ultra-individualism.” It also preserves a strong national consciousness without any of the embarrassment that affects Germany:

The values that have emerged from the communitarian family ensure the persistence of an integrated concept of the nation. The almost familial, concept of the people [narod] that characterizes Russia prevents Moscow from fantasizing about the dissolution of nations. In a world where most nations are small and militarily insignificant, the allure of the Russian approach is obvious, and very exasperating for the American geopoliticians who still think in terms of being all-powerful.

The best proof of the essential healthiness of today’s Russia can be found in demographic statistics. We may note here that Todd first gained notoriety back in the mid-1970s for predicting the impending collapse of Soviet communism on the basis of its rising infant mortality rate, something that had escaped everyone else’s attention. After reaching 22 per 1000 live births in the 1990s, infant mortality began to sink sharply around 2003 and now stands at 7 per 1000 (in Belarus, the figure is 3.6, comparable to Western Europe). Russia has recently experienced a drop of 53 percent in the suicide rate (2001-2014), 71 percent in the homicide rate (2003-2014), and 78 percent in the alcohol poisoning rate (2003-2014).

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A revealing large focus of anti-Russian agitation in the West today involves Russia’s so-called homophobia. Todd suggests the West may be shifting away from the nuclear family model in favor of an extreme individualism in which people are conceived of as monads “detached from the conjugal family [and] ideally embodied by the homosexual of either sex” (for whom a redefined “marriage” is now understood as a right rather than, as traditionally for men and women, a duty). Russia, meanwhile, after undergoing a disastrous fall in its birth rate during the late 1980s and 1990s, has rebounded to 1.8 children per woman, well above the European average. In 2008, the Russian Orthodox Church even introduced a new holiday, the “Day of Family, Love, and Faithfulness,” as a celebration of natural procreation. No wonder the West hates them!

Russia fills an important role on the international stage today by offering an alternative to the Anglosphere’s combination of globalism, liberal economics, and maladaptively exaggerated individualism: it stands for a multipolar world of independent sovereign nations.

Mass Immigration and the Clash of Family Systems

Europe, then, is characterized by three fundamental family types: nuclear, stem, and exogamous communitarian. But let us recall that Todd distinguishes a fourth type: the endogamous communitarian family. This variant idealizes cousin marriage and frequently involves polygyny and purdah, or the systematic sequestration of women. Until very recently, such practices were entirely absent from Europe; today, of course, mass immigration has introduced them. Todd, although a man of the Left, is sensible enough to describe this development as “a bridge too far.” “The memory of places requires limited flows of migrants for it to function,” he cautions; “The arrival in just a few months of a block of immigrants is a quite different phenomenon.”

p1.jpgOf Angela Merkel’s lawless decision to open Germany’s borders in the summer of 2015, he observes:

With the family reunifications that will follow, we can predict with absolute certainty the stabilization and growth of a separate population living in parallel with the [pre-existing] Turkish group. We must therefore imagine a Germany increasingly concerned about its internal stability and cohesion. The real risk is that of the internal hardening of a German society in which anxiety leads to a policing of the different ways of life.

To us, the real risk would seem to be something a great deal worse than this, and affecting not only Germany but our entire civilization.

Biology Denial

Thus far, we have had little but praise for Todd’s vision of a deep level of history where “anthropological substrata impose their values without the knowledge of the actors.” Yet we must note one essential limitation: he refuses to descend from the anthropological to the biological level. Early on, he claims that genetic analysis “in most cases . . .  does not go much further than the examination of trivial phenotypic differences such as skin color or facial features.” It is tempting to counter that picking up a book such as The Bell Curve might have relieved the author of such a misapprehension. Alas, he reports: “I read this book when it first came out, and it sickened me.” Elsewhere he refers to IQ researchers as “ideologues.”

This blindness is all the odder in that biology represents, even more than anthropology, a deep, unconscious level of history whose study can bring to light otherwise invisible constraints under which the games of international relations and economic policy are played out. It would seem to be the next logical step on the path Todd has taken throughout his professional life.

In practice, the errors into which the author’s refusal to confront biological reality leads him seem mainly to affect his interpretation of very recent history, particularly 1) the higher education revolution since the Second World War, and 2) the third and final wave of secularization affecting areas where Catholicism remained strong until the 1960s.

The Secondary and Higher Education Revolutions: America

The popular spread of literacy which began in Protestant Germany can be seen in retrospect as a first educational revolution. In twentieth-century America, it was followed by what Todd considers a second and third educational revolution involving secondary and higher education respectively.

In 1900, ten percent of young Americans attended high school; six percent graduated.  By 1940, 70 percent of Americans were attending high school and fully half of them completing it. Todd believes this rapid expansion of secondary education revolution was in part responsible for the New Deal and declining economic inequality between the 1920 and 1970s. The expansion continued after the war until, by the 1960s, “dropouts” (a term coined at this time) came to be seen as failures. The US was the undisputed leader of the movement to universalize secondary education: in the mid-1950s, when 80 percent of American 15-19 year olds were in education, the corresponding figures for Britain, France and West Germany hovered between 15 and 20 percent. Todd comments:

The second educational revolution was driven by an ideology of a democratic and egalitarian hue. American education was liberal, open, and concerned with the development of the individual as much as the acquisition of knowledge. This educational system showed absolutely no interest in elitist performance. It enabled the assimilation of immigrants [and] thus contributed to the emergence of an America that was not just prosperous but also culturally homogeneous.

In its egalitarian and homogenizing effects, this revolution was similar to the first educational revolution universalizing basic literacy.

The third educational revolution involved higher or tertiary education. Although historically it followed closely upon the expansion of secondary education and was motivated by the same ideals, Todd treats it as a separate phenomenon because of its association with inequality and social stratification.

On the eve of the Second World War, 7.5 percent of America’s men and 5 percent of its women earned Bachelor’s degrees. Following the war and passage of the GI Bill, higher education began expanding rapidly. Within a generation, by 1975, 27 percent of men and 22.5 percent of women were completing college. “Once these levels had been attained,” the author writes, “the model of ever-increasing education for all—applicable almost perfectly to primary and more or less to secondary education — lost its validity.” Higher education plateaued in the 1970s and 80s, and Todd recognizes that this “did not result from any restriction by the host system but from the fact that an intellectual ceiling had been reached.” Rather, “higher education is, by its nature, stratified.”

Misreading Contemporary Inequality: Higher Education and Neo-Liberalism

So far, so good. To a biological realist, it is obvious that the indefinite expansion of education was always a utopian project bound to crash into the wall of natural and inherited capacities, intelligence in particular. Todd’s reference to an “intellectual ceiling” seems to imply a recognition of this. Yet he then turns around and treats so knowledgeable authority on intelligence as Richard Herrnstein as an “ideologue . . . embarked on the theoretical shaping of a new inegalitarian creed” meant to justify social and economic inequality!

It may be that Todd accepts intellectual differences at the individual level but not the group level, or it may be that he simply has no consistent position; his statements remain ambiguous or contradictory. But he clearly affirms that the higher education revolution has produced inequality rather than merely revealing it; one of his chapter subsections is actually entitled “Academia: a machine to manufacture inequality.”

Each institution of higher education assigns each student a place in the social hierarchy. Knowledge is of course transmitted there, and research carried out. However, since studies are now longer than required for the acquisition of knowledge or the identification of aptitude for research, it is clear that the hierarchization of society has become the primary goal.

And he maintains that the rise in economic inequality since the 1980s has been a consequence of this educational system, although all he demonstrates is that, historically, one followed the other; in other words, he may be guilty of the post hoc ergo propter hoc fallacy. I share Todd’s disdain for an economic system that has “forced American workers to compete with Third World workers who were paid twenty or thirty times less,” even as CEO salaries at Fortune 500 companies have risen from 20 times that of the average worker in 1950 to 204 times in 2013. But the natural inequalities increasingly revealed in educational achievement were just as real before this change in policy came about, and will remain with us under any possible educational or economic system.

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Todd makes the valid point that the American revolution in higher education, which has since spread throughout the West,

impose[s] on the participants an attitude of submission to authority [and] nourishes a higher class which, because it is selected by merit, thinks of itself [as] intellectually and morally superior. This superiority is a collective illusion: the homogeneity and conformism engendered by the mechanism of selection produces the ultimate paradox of a ‘world above’ subject to intellectual introversion, unsuited to individual thought.

But the illusion is not that differences in natural aptitude for higher education exist; it is that today’s hypertrophy of professional and technical training is equivalent to an increase in education as such. I can only shake my head over the presumption of equivalence between the number of years people now spend in school and their intellectual and (especially) moral development. It should be obvious that neither the individual nor society gains much from any increase in the number of doctorates awarded in “early childhood education” or “resentment studies,” but such bogus programs of study were a nearly inevitable consequence of trying to expand higher education past the point of diminishing returns determined by the fixed factor of inherited natural aptitude.

In such an academic environment, the ideal of liberal education — i.e., the cultivation of the mind for its own sake — cannot survive. And it is a proper liberal education, especially, which can teach intellectual humility to the highly intelligent. Hence the degeneration of higher education into the combination of professional training and political indoctrination we see today. And hence our current elite consisting of admittedly high-IQ persons who mistake their cleverness and academic qualification for breadth of mind, depth of insight, and even moral superiority.

Our political and social elites badly need replacing, and our bloated and corrupt academy badly needs both extensive pruning and qualitative curricular change. But Todd does not succeed in demonstrating that the higher education revolution is responsible for the harmful effects of neo-liberal economic policies.

The Third Ideological Crisis of Secularization: Is Le Pen a Nazi?

In the 1960s, Catholicism began to collapse in the areas — mainly stem family areas — of Europe where it had survived the first two waves of secularization. Much of the mentality and many social practices associated with Catholic Christianity remain strong in such areas, and this is the context in which Todd developed his concept of “zombie Catholicism.” But specifically religious belief and practice is nearly as vestigial there today as in other parts of Europe. And we may recall that Todd has asserted a natural pattern of development leading from literacy, to secularization, to a declining birthrate and ideological crisis. “Zombie Catholic” areas, like other stem family areas, have been especially hard hit by recent demographic collapse. Can we expect an ideological crisis in these areas as well?

This is not a question of merely theoretical interest, for we may recall that the first wave of secularization was associated with the French Revolution and the Napoleonic Wars, while the second wave was associated with two world wars and German National Socialism.

Todd’s treatment of this theme is coy and extremely compressed, being mostly limited to a couple of sentences. But they are revealing:

Since the mid-1960s, the zones of Catholicism have been living through the final stage of European secularization. And again, the metaphysical emptiness this entails is leading, against a backdrop of economic instability, to great anxiety and to the identifying of scapegoats.

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Now, the Left’s favored way of explaining opposition to replacement-level immigration is to interpret it as a “scapegoating” of immigrants driven by economic and other anxieties on the part of irrational bigots. Todd’s free use of the cant expression “Islamophobia” suggests sympathy for this view as well. He appears to be suggesting that the identitarian movement which has arisen in Europe in response to the threat of demographic replacement represents the ideological crisis of the third wave of secularization. This would seem to imply that he considers its destructive potential comparable to that of the French Revolution and the World Wars.

By characterizing the ideological crisis of the second (Protestant) wave of secularization as a “rise of nationalism,” Todd also suggests a historical analogy between the rise of Hitler and today’s “nationalist” opposition to multiculturalism and the Great Replacement. But nationalism is a highly ambiguous term that has meant widely differing things in various historical situations. Today’s nationalism is largely a defensive response to an aggressive globalism that threatens the continued survival of any recognizably Western civilization. It would be either stupid or dishonest to equate it with Hitler’s 1939 invasion of Poland. I cannot help but think that Todd’s Jewish identity has influenced him to seek historical analogies where none exist.

Todd thus follows a pattern I have observed in a depressing number of scholars: he is a learned and original interpreter of the past who quickly turns into a cliché-ridden progressive journalist the moment he turns his attention away from his area of specialization toward questions of contemporary politics.

This does not, of course, negate the value of his scholarly work or diminish the truth of his book’s principal message: mankind is not converging; history is continuing, and its deeper levels will always generate differences in mentality and social behavior that may lead to conflict. As he puts it in the conclusion of his study: “We urgently need to accept the divergence of nations resulting from the differentiation of family systems, if we have the peace of the world at heart.”

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vendredi, 31 juillet 2020

Marxismo e ingeniería social

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Una nota sobre el Derecho como causa dentro del materialismo histórico

Marxismo e ingeniería social

La filosofía de Marx es, una “ontología del ser social” antes que una supuesta ciencia llamada Materialismo Histórico. Eugenio del Río, en La Sombra de Marx [La Sombra de Marx. Estudios sobre la fundamentación del marxismo (1877-1900), Editorial Talasa, Madrid, 1993] ha criticado la “debilidad” del método materialista histórico de Marx. Tal método más bien habría de llamarse “racionalismo analógico” (p. 200).

Este método consiste en que, a partir de procesos locales y concretos, se enuncian proposiciones globales por extrapolación. Este es el caso del concepto de “crisis” y la entidad que se disuelve o se genera a raíz de dicha crisis, a saber, el “modo de producción”. La crisis del feudalismo, proceso que involucra muchos procesos sociales, históricos y culturales, es el modelo para hablar de la muy ulterior crisis del capitalismo: análogamente a como la burguesía fue –se supone- revolucionaria frente las fuerzas feudales reaccionarias, el proletariado debería ser considerado igualmente revolucionario frente a esta burguesía ya en el poder, a su vez parasitaria e igualmente reaccionaria, etc. Es evidente que la revolución burguesa y la revolución proletaria no tienen absolutamente nada que ver entre sí, que el empleo del término común “revolución”, como tantos otros, “crisis”, “modo de producción”, etc., es puramente analógico, cuando no equívoco. Los procesos que dieron lugar a la disolución de la sociedad feudal, incluyendo la aparición de un modo de producción dominante de tipo capitalista son procesos completamente diferentes a los que darían lugar a una disolución del modo de producción capitalista y una eventual aparición de un modo de producción socialista.

El llamado “materialismo histórico” tiene de ciencia lo que tiene de saber descriptivo (de cada uno de los modos de producción, sus características distintivas) y analógico (las cualidades o términos comunes a distintas formaciones sociales y distintos modos de producción). Esto es tanto como decir que comparte con “la ciencia” los aspectos más rudimentarios y elementales de los saberes humanos, y en modo alguno la posibilidad de emprender predicciones. El materialismo histórico es, ante todo, saber histórico, y este saber es incompatible con el proceso mismo de la predicción. Como decía G. Sorel (citado por Eugenio del Río, p. 200): “La historia está entera en el pasado, no hay ningún medio para transformarla en una combinación lógica que nos permita prever el porvenir”. Lo que más se puede asemejar a una inferencia predictiva como las que acaecen en física, química y en las tecnologías basadas en las ciencias naturales, es una correlación entre las “esferas” de una totalidad social.

La más burda y simplista correlación es la que, metafóricamente, Marx y Engels plantearon entre la “base” y la “infraestructura” de la sociedad. El “peso” de cada una de esas esferas es muy variable según la coyuntura, la cultura, la fase histórica, la composición y la actividad de las clases sociales. Esto es, la Historia misma. La Historia misma es el estudio descriptivo y analógico de las formaciones sociales y demás morfologías culturales devenidas a lo largo del tiempo que, sin renunciar a formulaciones causales, evalúa el cambiante peso de los factores “básicos” y los factores “superestructurales”. Lejos de hallar un determinismo en las obras de Marx y Engels (si bien hay allí abundantes pasajes impregnados del positivismo y el determinismo habituales en el siglo XIX) el énfasis investigador ha de cifrarse en la unidad o totalidad social. El par base/superestructura es un esquema de conexión de aquello que precisamente el idealismo alemán pre-marxiano había disociado metafísicamente: el par materia/espíritu. Quizá no deberíamos reprochar a Marx y Engels la pérdida de la unidad o totalidad de “esferas” que todo el mundo reconoce como interdependientes (la economía, las relaciones sociales, las ideas y creencias (como parece hacer Del Río, p. 225), sino agradecerle su intento de superación (y por ende, continuación aunque “de otro modo”) del idealismo metafísico alemán.

El materialismo histórico, si habla de causas lo hace en el sentido de causas estructurales. Dentro de la totalidad social, los distintos elementos constitutivos guardan relaciones y correlaciones precisas, cambiantes según la situación histórica. Es ese mismo cambio de vigor o predominancia de uno de los elementos constitutivos, la materia sobre la que versa la ciencia de la Historia. Un ejemplo para ilustrar esto nos lo suministra Pierre Vilar (Economía, Derecho, Historia, Ariel, Barcelona, 1987) a propósito del Derecho. Éste elemento de la totalidad social no es meramente una superestructura, un efecto de causas económicas o, más en general, infraestructurales. Antes al contrario, en la obra de Marx, el Derecho aparece como elemento causal (estructural) de primer orden en ciertos contextos concretos. Diacrónicamente, el Derecho ocupa una posición estructural movilizadora y moldeadora:

“¿Es necesario añadir que el Derecho, producto de la Historia, es también uno de sus factores? Como cualquier elemento de la totalidad histórica, el producto se transforma en cusa. Es causa por su simple posición en la estructura del todo. No existen elementos pasivos en el complejo histórico” (p. 134).

El derecho moldea las mentalidades y las maneras de actuar, con lo cual es causa y condicionante de otras causas. No es lo mismo realizar acciones abiertamente o hacerlo a escondidas. Un ejemplo clásico lo tenemos en las líneas que Marx dedica al “robo” de leña en Renania:

“…La importancia del derecho, en la interpretación histórica de una sociedad, es que denomina, califica y jerarquiza cualquier divorcio entre la acción del individuo y los principios fundamentales de esa sociedad…Antes de la decisión de la Dieta Renana, se recogía leña, y después, se roba. Un artículo legal transforma a un “ciudadano” en “ladrón” (p. 111).

En nombre de una razón más “ilustrada” se suprimieron en tiempos en que Marx escribió sobre el tema,  los derechos feudales y consuetudinarios que garantizaban a los pobres el suministro de leña. Como tantas medidas legales “avanzadas”, aquellos cambios legales significaron un duro mazazo a los más desfavorecidos. Remover viejos derechos “feudales” y “anacrónicos” en nombre del Progreso es causa de la crisis de un viejo orden y advenimiento de nuevas relaciones de producción. La acumulación primitiva, la abolición de las “leyes de pobres”, las desamortizaciones, etc. siempre han sido instrumentos y causas del avance hegemónico de la burguesía. En el marco actual, todas las innovaciones jurídicas (altamente imaginativas y contrarias al Derecho Natural) en materia reproductiva (vientres de alquiler, p.e.) y política familiar (ampliación hasta el absurdo del concepto de matrimonio y familia), son perfectos ejemplos de ingeniería jurídica, mediante la cual se modifican mentalidades y costumbres en provecho del gran Capital. Si el gran Capital comprueba que las instituciones, costumbres y estructuras son obstáculos a su producción y acumulación, las remueve; y en la remoción es fundamental el cambio jurídico.

Que la izquierda apueste por legislaciones que, unilateralmente, parezcan “un paso adelante” significa, las más de las veces, un paso atrás en los derechos de los (más) trabajadores. Hay pasos adelante que lo son, pero hacia el abismo. Las instituciones de eficacia probada durante siglos no tienen por qué ser “retrógradas”. Este es el más pésimo legado de la izquierda postmoderna, confundir lo estable y valedero con lo reaccionario. La familia, el matrimonio monógamo, las legislaciones y organizaciones religiosas caritativas o educativas, etc. han sido muleta y escudo para las clases subalternas de la sociedad europea desde los albores de la Edad Media. Denigrar estas realidades podrá servir como propaganda para nuevas innovaciones en la ingeniería social, pero no constituye, en modo alguno, un homenaje a la verdad y a la ciencia.

 

mardi, 23 juin 2020

Le féminisme contre les femmes

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Le féminisme contre les femmes

par André WAROCH

J’ai grandi en banlieue parisienne, dans les années 80 et 90. Qu’était le féminisme, pour nous, adolescents du grand remplacement déjà en cours ? Un mot trop récent pour figurer dans nos manuels d’histoire, et pourtant déjà enterré. Les rares fois où je l’ai entendu, c’était par des adultes, et c’était par dérision. Pour eux, le féminisme était un mouvement entaché d’un folklorisme propre aux années 70, comme le groupe Abba ou les pattes d’éph’. Dans les années où je vivais, les femmes avaient le droit de travailler, de faire des études, et celles qu’elles souhaitaient. Elles avaient le droit de se marier ou pas, d’avoir des enfants ou non, et avec qui elles le souhaitaient. Elles avaient le droit de privilégier leur carrière ou de choisir de se consacrer à leur famille. Et tout le monde trouvait cela aussi normal que si cela avait toujours existé. Même si on savait que ce n’était pas le cas. Néanmoins, pas grand-monde n’associait les décisions prises par des responsables politiques pour aboutir à cette égalité, avec l’activisme des femelles hystériques du MLF. Il était connu, par exemple, que le droit de vote avait été octroyé aux femmes en 1945 par le général de Gaulle.

J’entrai dans la vie active, dans la vie « sérieuse », à l’orée des années 2000, et déménageai dans le Val-d’Oise. À l’époque, on commençait à parler des hommes et des femmes, je veux dire des relations qu’ils entretenaient, des différences qui les opposaient, comme d’un sujet problématique et passionnant. C’était l’époque où on se ruait sur le best-seller Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus de John Gray, dont le but était de rapprocher les deux sexes en favorisant leur compréhension mutuelle. Malgré les divorces, malgré la vie moderne et ses inévitables corollaires, les femmes et les hommes continuaient à compter les uns sur les autres, à voir leur avenir ensemble.

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Le féminisme était mort, mort et enterré, tout simplement parce que l’égalité des femmes avait été gagnée, et depuis déjà longtemps. On pouvait donc se consacrer à autre chose qu’à ces vieilleries sans intérêt.

Mais cette absence apparente de problème majeur dans les relations entre les sexes, du moins à l’intérieur de la communauté française, représentait sans doute un problème pour certains. Un manque à gagner. Une possibilité de conflit humain qui n’était pas encore exploitée jusqu’à l’envenimer irrémédiablement. Une négligence qu’il fallait corriger. Le Système allait s’en charger.

À l’orée des années 2010, de nouvelles féministes se firent connaître, prétendant continuer la lutte pour un combat qui, disaient-elles, n’était pas encore gagné, malgré l’eau qui avait coulé sous les ponts depuis l’obtention de l’égalité.

Leur grande prêtresse, celle par qui tout s’est enclenché, s’appelle Caroline De Haas (photo). La question de savoir qui est cette intrigante, au cœur d’un système pyramidal et complexe, fait de réseaux et de ramifications qui relient les mondes associatif, commercial et politique, nous parait donc incontournable pour savoir comment a eu lieu cette formidable arnaque, consistant à continuer le match trente ans après le coup de sifflet final.

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Sa date et son lieu de naissance ne nous apprennent pas grand-chose, sa jeunesse non plus. Seules comptent son engagement estudiantin à l’UNEF, voie royale pour carriéristes de gauche, et les dix ou quinze dernières années. À partir des années 2010, elle devient l’attachée de presse du porte-parole du Parti socialiste, Benoît Hamon, puis, après l’élection de François Hollande, « conseillère chargée des relations avec les associations et de la lutte contre les violences faites aux femmes ». Les associations féministes, elle connaît, Caroline De Haas, puisqu’elle a été à l’origine de la plus importante de toutes : Oser le féminisme ! en 2009.

En mai 2013, elle quitte le gouvernement. Un mois plus tard, elle se lance dans les affaires, et crée Egaé, une « agence de conseil en égalité professionnelle ».

Dans une sorte de déclaration de principe hallucinante, cet organisme déclare vouloir « percuter l’illusion de l’égalité ». « Le premier frein à la mobilisation d’équipes autour de l’égalité reste “ l’illusion de l’égalité “, ce sentiment partagé par une majorité de la population que les progrès ont été tellement importants ces dernières années que nous serions presque arrivés à l’égalité. »

Vous croyiez que tout allait bien, braves gens ? Que, au milieu de de tout ce désastre économique, identitaire, ethnique, migratoire, sécuritaire, une femme pouvait au moins encore espérer trouver l’amour, le plaisir et l’épanouissement dans ses relations avec l’autre sexe ? Mais heureusement que nous sommes là pour nous vendre nos conseils. Contre des espèces sonnantes et trébuchantes, nous vous expliquerons comment terrasser pour de bon l’infâme, cet homme patriarcal qui continue de vous opprimer alors que vous pensiez naïvement qu’on avait enterré la hache de guerre.

En 2014, Caroline De Haas se présente aux élections européennes en Île-de-France comme tête de liste pour les listes « Féministe pour une Europe solidaire ». Elle obtient 0,29% des voix.

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En 2015, par l’intermédiaire d’Egaé, elle crée le site internet Les expertes, moteur de recherche professionnel qui relève d’une sorte de communautarisme féminin. Il est « le premier annuaire gratuit de toutes les femmes expertes françaises et francophones ». Le gouvernement socialiste soutient officiellement le projet par l’intermédiaire de Radio France et de France Télévision.

Les affaires tournent bien, et le malheur des unes fait le bonheur des autresses. Et puis, peu à peu, Caroline dévisse. Elle est obligée de montrer son vrai visage sous la pression de la réalité de l’invasion de l’Europe, et, comme le veut l’expression consacrée, de sortir de l’ambiguïté à son détriment. Des déclarations se succèdent, qui démontrent que son féminisme est, avant toute chose, un racialisme. C’est d’abord l’affaire des agressions sexuelles de masse de Cologne le soir du nouvel an 2016, commises par des migrants arabes. « Ceux qui me disent que les agressions sexuelles en Allemagne sont dues à l’arrivée des migrants : allez déverser votre merde raciste ailleurs », twitte-t-elle.

Alors que François Fillon déclare dans la foulée sur le même média : « Faut-il rappeler aux sauvages qu’en Europe, les femmes ne sont pas des objets qu’on violente et qu’on couvre de noir », la grande « défenseuse » des femmes répond avec fierté « Je viens de signaler le tweet de Français Fillon pour incitation à la haine raciale ».

En 2017, « Caro », de nouveau en grande forme, déclare que, pour lutter contre le harcèlement de rue visant les femmes dans le quartier de la Chapelle-Pajol, commis par le même genre de profil dont parlait Fillon, la meilleure solution est « d’élargir les trottoirs ».

Dans l’entre-deux-tours des présidentielles de 2017, après avoir plaidé sur tous les tons, pendant des années, pour que les femmes accèdent aux postes à responsabilité, elle appelle à voter Emmanuel Macron afin d’empêcher Marine le Pen d’accéder au pouvoir suprême.

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Le message est donc clair : il faut maintenir l’immigration, et l’insécurité due à cette immigration, à un niveau maximum. Entre un mâle blanc qui propose de continuer cette politique et une femme qui veut l’arrêter, Caroline choisira toujours le premier. Et sacrifiera les femmes sans aucun état d’âme. Marine le Pen ne deviendra pas la première présidente de la Ve République et les filles continueront à se faire traiter de pute dans la rue, mais un ingénieur raté ne sera pas expulsé et le médecin malgré lui aura sa remise de peine. Et ça, c’est quand même l’essentiel.

Mais foin de polémiques ! Et faisons le bilan. Car il est bel et bien temps, après huit ans de féminisme gouvernemental et associatif hollando-macroniste, sous la férule de Najat Vallaud-Belkacem et Marlène Schiappa. Et un bilan chiffré.

Parlons des familles monoparentales, par exemple, dont l’immense majorité (90 %) partage son quotidien avec la mère, et qui continue sa progression inexorable. 1 700 000 en 2005, 1 800 000 en 2013, deux millions en 2018. Selon l’INSEE, le taux de pauvreté de ces familles est trois fois plus élevé que celui des familles traditionnelles (chiffres de 2011).

Mais ce n’est là qu’une mise en bouche.

Toutes les statistiques sont disponibles sur le Net, tant qu’elles ne concernent que l’année en cours. Si l’on veut connaître la façon dont les choses ont évolué sur le long terme, cela devient beaucoup plus ardu. Il en est ainsi de la délinquance, y compris, et peut-être même surtout, de la délinquance sexuelle, dans un pays dont le régime prétend œuvrer en priorité pour le salut des femmes. Là, il faut faire le travail soi-même, année par année, pour connaître l’évolution statistique.

On comptait 10 406 dépôts de plainte pour viol en 2011.

violsas.jpgEn 2019, après sept ans d’hystérie féministe anti-hommes, on en comptait 22 900.

Donc plus du double.

Parallèlement, un simple petit tour sur le site de France info ou celui du Monde nous apprend que les condamnations pour viol ont chuté de 40 % entre 2007 et 2016.

Ces deux chiffres, ahurissants, révèlent l’ampleur du désastre, d’un désastre programmé, conséquence de décisions politiques prises froidement, que les médias et les féministes sont chargés de camoufler.

Le féminisme a un but, et un seul : briser ce qui reste de cohérence et de solidarité entre les hommes et les femmes autochtones; casser le mariage, le couple, et au final la société française. Il faut donc désigner l’homme blanc, et uniquement lui, comme un salaud dominateur et prédateur, qui doit faire ses excuses la queue basse pour les siècles d’oppression des femmes sous le joug du « patriarcat ». Ainsi dresse-t-on les femmes contre les hommes, et, par ricochet, on dressera les hommes contre les femmes.

Pour arriver à ses fins, le féminisme est financé, subventionné, soutenu de toutes les façons possibles par le Système, bénéficie de tous les passe-droits médiatiques imaginables.

L’homme blanc ne drague plus, et il rase les murs de crainte de paraître l’oppresseur. Le boulevard est alors ouvert pour les racailles allogènes (qui se torchent avec les « campagnes de prévention ») face aux femmes dorénavant esseulées, et elles-mêmes culpabilisées, refusant comme un devoir sacré de nommer les agresseurs par ce qui les caractérise le mieux, et ce qui explique de la manière la plus évidente leur comportement et leurs exactions, à savoir leur identité ethno-religieuse : car les féministes ont trouvé le précieux sésame, celui qui n’ouvre aucune porte, mais ferme au contraire celles de la réflexion, celui qui interdit de désigner le problème, de désigner les responsables et de désigner l’ennemi, c’est-à-dire les racailles qu’elles ont importées et dressées contre leur propre peuple. Ce sésame, c’est l’« oppression patriarcale » orchestrée depuis la préhistoire par le méchant mâle blanc, ainsi que la « culture du viol » au moins aussi ancienne.

illustration_sans_titre-2-2.jpgC’est en fait à un véritable redémarrage de l’histoire de la France et de l’Occident auquel nous assistons. Car il est fondamental pour les féministes de faire croire que le harcèlement de rue, par exemple, a toujours existé, et que les femmes se faisaient aussi bien insulter il y a cent ans qu’aujourd’hui. Il est fondamental de faire croire qu’il y a « encore » des viols et du harcèlement, et non pas « de plus en plus ». Il est fondamental de faire croire que le sexisme et le machisme bestial sont des survivances du « patriarcat blanc » et non pas l’avenir de la société islamisée.

Le but est toujours le même, obsessionnel : protéger les véritables bourreaux, continuer de jeter un voile pudique sur leurs innombrables exactions.

Car si l’on commence à admettre que les violences contre les femmes ont explosé durant ces dernières décennies, la question suivante sera : pourquoi ? Et la question subsidiaire sera : que se passe-t-il ? Que se passe-t-il en France depuis quarante ans ?

L’idéologie dominante interdit le raisonnement, interdit d’établir un lien entre une cause et un effet : les choses arrivent parce qu’elles arrivent. Il y a des viols parce qu’il y a des viols; et commencer à penser, c’est déjà désobéir.

Les jeunes femmes, d’abord flattées peut-être par cette idéologie qui leur fait croire qu’elles sont des victimes éternelles, sont très tentées de la suivre, d’adopter à l’endroit des hommes le comportement agressif qu’on veut qu’elles adoptent. J’aimerais dire, par stupide désir de vengeance et par rancœur, qu’elles seront les premières victimes de ce qu’elles soutiennent, mais c’est faux : tout le monde sera perdant.

Quant aux hommes, certains commencent à initier un féminisme à l’envers, ce que d’aucuns appellent le masculinisme. Ce faisant, ils font exactement ce qu’attendent d’eux Caroline De Haas et ses amis. Car ne croyez pas une seule seconde que le féminisme résoudra quelque problème que ce soit : les problèmes, le féminisme est juste là pour en créer de nouveaux et les ajouter à ceux qui existent déjà. Plus de haine, plus de violence, plus de division : c’est sa raison d’être.

080506_Male.jpgS’il existe une clef pour sortir du piège capitonné dans lequel sont en train de nous enfermer ceux qui veulent notre perte, je ne l’ai pas, ni moi ni aucun homme. Nous ne jouons dans cette affaire qu’un rôle secondaire. Seules les femmes, puisque c’est elles que la propagande a choisies pour cible, ont le pouvoir de nous faire sortir de cette impasse, par une réaction massive de rejet, sans aucune nuance ni ambiguïté. L’enjeu est clair : si le féminisme triomphe, non seulement la société européenne traditionnelle sombrera corps et bien, mais disparaîtra également le rêve apparu au cours des années soixante et soixante-dix, celui d’une société désinhibée où les hommes et les femmes auraient pu ensemble opérer un saut anthropologique à la recherche d’une nouvelle harmonie et d’un nouvel âge d’or, en se débarrassant du carcan des interdits judéo-chrétiens et de la logique productiviste. C’était le rêve de Pierre Clastres. C’était le rêve des hippies, anéanti par la prise de pouvoir de la gauche bourgeoise puritaine à partir des années quatre-vingt.

Nous vivrons alors dans le monde créé par nos ennemis, après qu’ils aient mené jusqu’au bout leur entreprise de destruction (pardon, de « déconstruction »). Cela ressemblera à une société totalement atomisée, de plus en plus urbaine et de plus en plus laide, faite d’hommes et de femmes condamnés au célibat et à la solitude, se défiant les uns des autres, sans enfants, ou avec des enfants sans père, trouvant un exutoire dans la pornographie et le virtuel, enfermés chez eux pendant qu’au dehors roderont les bêtes sauvages, et que régnera sur ce chaos l’hyper-bourgeoisie mondialisée. Cela y ressemble déjà.

Répétons-le, cette fois, les hommes n’ont plus la main. Ce ne sont pas eux qui décideront si la guerre à venir sera la guerre civile entre les sexes, où l’union sacrée contre l’ennemi commun. Ce ne sont pas eux qui décideront, ni de l’avenir de la France, ni de celui de l’Occident. Ce ne sont pas eux qui choisiront s’ils veulent redevenir des hommes responsables ou continuer à être des enfants jouisseurs. Ce sont les femmes qui leur feront honte, qui les rappelleront à leur devoir, qui les obligeront à redevenir ce qu’ils étaient- ou ne le feront pas.

Seules les femmes peuvent nous sauver du féminisme.

André Waroch

Liens

Nombre de viols en 2011

http://www.slate.fr/story/65729/75000-viols-an-chiffres#:...

Nombre de viols en 2019

file:///C:/Users/laurent/Downloads/IA24.pdf

Chute de 40% des condamnations pour viol entre 2007 et 2016

(https://www.francetvinfo.fr/societe/harcelement-sexuel/le...)

https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/09/14/....

12:56 Publié dans Actualité, Sociologie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : actualité, féminisme, sociologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 22 juin 2020

Huit grandes raisons pour lesquelles la Théorie critique de la race est calamiteuse pour traiter du racisme

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Huit grandes raisons pour lesquelles la Théorie critique de la race est calamiteuse pour traiter du racisme
Note du traducteurLa « Théorie critique de la race » [Critical Race Theory en anglais] est une discipline académique focalisée sur l'application de la théorie critique aux relations entre la race, la loi, et le pouvoir.
Aussi improbable que cela puisse paraître, une théorie académique très obscure connue sous le nom de « Critical Race Theory » s'est complètement intégrée dans la société, et aujourd'hui, tout le monde en parle [sans en saisir les doctrines - NdT]. Si la Théorie critique de la race a le noble objectif de mettre en évidence des problèmes qui peuvent être difficiles à discerner et qui entretiennent ou constituent le racisme, elle s'avère être une manière remarquablement mauvaise de procéder. Quelques connaissances sur les principes de base de cette théorie et sur la manière dont [les universitaires de cette discipline - NdT] se trompent peuvent, à cet égard, être utiles.
 
Avant de commencer, je présente mes excuses au lecteur. La Théorie critique de la race se développe depuis plus de quarante années et se trouve confrontée à de nombreux et profonds problèmes. Elle représente, par conséquent, un travail de longue haleine qui est encore loin d'être achevé. Ici, je ne documente que huit des plus grands problèmes de l'approche de la Théorie critique de la race. Traitez-les comme huit courts essais sur des sujets spécifiques de cette théorie et digérez-les un par un. Je les propose dans l'espoir d'aider ceux qui les liront à mieux comprendre cette théorie afin qu'ils puissent décider par eux-mêmes si elle constitue, dans notre société, le meilleur moyen de traiter des questions raciales et du racisme ou s'il nous est possible de faire mieux.

Et puisque c'est dense, voici en substance le résumé de ces huit points.

La Théorie critique de la race...
  • estime que le racisme est présent dans tous les aspects de la vie, dans toutes les relations et dans toutes les interactions, et fait donc en sorte que ses défenseurs le recherchent partout ;
  • s'appuie sur la « convergence des intérêts » — les blancs donnent aux noirs des opportunités et des libertés uniquement quand c'est également dans leur propre intérêt — et ne fait donc confiance à aucune tentative d'améliorer le racisme ;
  • est opposée aux sociétés libres, et veut les démanteler et les remplacer par une chose dont ses partisans auraient le contrôle ;
  • ne traite des questions raciales que selon les « groupes socialement construits », il n'existe donc aucun individu dans la Théorie critique de la race ;
  • croit que la science, la raison et les preuves sont un moyen « blanc » d'acquérir du savoir et que les récits et les expériences vécues sont une alternative « noire », ce qui nuit à tout le monde, en particulier aux Noirs ;
  • rejette toutes les alternatives potentielles — comme l'absence de préjugés raciaux — comme formes de racisme, se faisant ainsi l'écho de la seule chose disponible, souhaitable et admissible — ce qui est totalitaire ;
  • agit comme si toute personne en désaccord avec elle devait le faire pour des raisons racistes et de suprématie blanche, même si ces personnes sont noires — ce qui est également totalitaire ;
  • ne peut être satisfaite, devenant alors une sorte de trou noir activiste qui menace de détruire tout ce qu'elle touche.

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1 — Selon la Théorie critique de la race, le racisme est présent dans tous les aspects de la vie, toutes les relations et toutes les interactions

La Théorie critique de la race part de l'hypothèse que le racisme est un élément ordinaire de tous les aspects de la vie dans nos sociétés. Les chercheurs Richard Delgado et Jean Stefancic, qui en sont deux spécialistes, écrivent à la page 7 du manuel d'introduction standard sur le sujet, et intitulé Critical Race Theory : An Introduction [Une introduction à la Théorie critique de la race - NdT] :
Premièrement, le racisme est ordinaire et non aberrant — c'est une « science normale », la façon habituelle dont la société fonctionne, l'expérience commune et quotidienne de la plupart des personnes de couleur dans ce pays.
Il faut noter que cette hypothèse est, dans l'introduction de leur livre, citée en premier parmi les « principes de base de la Théorie critique de la race ». Comprenez également que ce qu'ils entendent par « racisme » ne correspond même pas à la signification que la plupart des gens donnent au mot racisme. Par « racisme », ils n'entendent pas un préjugé fondé sur la race ou la croyance que certaines races sont supérieures ou inférieures à d'autres. C'est plutôt le « système » de tout ce qui se produit dans le monde social et au-delà qui entraîne — en moyenne — toute disparité en faveur des groupes « racialement privilégiés » ou de toute personne « racialement opprimée » qui prétend subir une oppression raciale.

Ces suppositions conduisent les personnes adeptes de la Théorie critique de la race à chercher le racisme partout jusqu'à ce qu'elles le trouvent. Il s'agit, après tout, du travail d'un théoricien ou d'un militant « critique » : chercher les problèmes cachés dont ils supposent la présence dans tout ce qu'ils examinent.

Sur un lieu de travail qui adopte la Théorie critique de la race, cela signifie qu'une personne ayant cette vision du monde finira par découvrir en quoi votre entreprise et sa culture sont « racistes » ; ce n'est qu'une question de temps. À partir de là, il se produira un effondrement qui obligera tout le monde à prendre parti et à exiger une réorganisation de l'ensemble de la culture et de la gestion du bureau — désormais divisé.

À l'école, il faudra apprendre à nos enfants à penser de cette façon et à rechercher de façon systématique le racisme dans chaque situation et interaction. Dans nos relations personnelles, cela signifie que les amis et même les membres de la famille — en particulier nos enfants déjà éduqués avec les idées de la Théorie critique de la race elles-mêmes incorporées dans nos écoles — finiront par s'interpeller et se rejeter mutuellement, puisque tolérer le racisme est également considéré comme une forme de racisme qu'il faudrait débusquer et endiguer.

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2 — La Théorie critique de la race s'appuie sur la « Convergence des intérêts » : les Blancs donnent aux Noirs des opportunités et des libertés uniquement quand c'est également dans leur propre intérêt

L'un des fondateurs de la Théorie critique de la race — un universitaire de la Faculté de droit de Harvard nommé Derrick Bell, aujourd'hui décédé — a fait de sa « Thèse sur la convergence des intérêts » un élément central de la théorie. Revenons à Delgado et Stefancic,
La deuxième caractéristique, parfois appelée « convergence des intérêts » ou déterminisme matériel, ajoute une dimension supplémentaire. Puisque le racisme sert les intérêts des élites blanches — matériellement — et des travailleurs — psychologiquement — de larges pans de la société sont peu enclins à l'éradiquer. Prenons, par exemple, la proposition choquante de Derrick Bell (examinée dans un chapitre ultérieur) selon laquelle l'affaire Brown contre le Bureau de l'éducation — considérée comme un grand triomphe du contentieux des droits civils — pourrait avoir résulté davantage de l'intérêt personnel des élites blanches que d'un désir d'aider les Noirs. (p. 7)

[Brown contre le Bureau de l'éducation est le nom donné à un arrêt de la Cour suprême des États-Unis, rendu le 17 mai 1954 qui déclare la ségrégation raciale inconstitutionnelle dans les écoles publiques - NdT]
Comprendre à quel point cette idée est paranoïaque et cynique n'est pas difficile, mais quand on s'arrête pour réfléchir à certaines de ses implications, elle renferme également un concept terriblement malsain. Prenez l'exigence qui découle également de la Théorie critique de la race selon laquelle tout le monde devrait être antiraciste. En surface, cette idée peut sembler bonne, mais ce qu'elle cache est horrifiant. Si une personne ayant des « privilèges raciaux » — y compris les blancs, les asiatiques, les hispaniques, les arabes, les indiens et les noirs à la peau claire — décide conformément à cette exigence de devenir un antiraciste, la Thèse de la convergence des intérêts dirait qu'elle ne l'a fait que pour améliorer son image, se protéger des critiques ou éviter d'être confrontée à son propre racisme. Il ne s'agit pas non plus d'une idée marginale ou d'une éventuelle lacune dans le concept. La littérature académique propres aux « études sur la blanchitude » regorge de cette notion, y compris les pavés littéraires d'universitaires qui traitent de ce sujet, comme par exemple celui intitulé Good White PeopleThe Problem with Middle-Class White Anti-Racism [« Les bonnes personnes blanches — Le problème de l'antiracisme blanc des classes moyennes », ouvrage non traduit en français - NdT], publié en 2018 par la State University of New York Press.

La Thèse de la convergence des intérêts rend littéralement impossible à toute personne ayant un quelconque privilège racial — encore une fois, comme défini par la Théorie critique de la race — de faire quoique ce soit de bien parce que tout ce qu'elle fait de bien doit aussi être dans son propre intérêt. Si la Théorie critique de la race formule une exigence envers des personnes disposant d'une forme quelconque de privilège racial et qu'elles s'y soumettent, elles se rendent simplement plus complices du « racisme » tel que le conçoit la Théorie critique de la race. En ne laissant aucune issue à ces personnes, elle devient profondément manipulatrice et ne peut en aucune manière satisfaire à son arsenal d'exigences.

3 — La Théorie critique de la race est opposée aux sociétés libres

Croyez-le ou non, la Théorie critique de la race n'est pas une idée libérale. Elle est, en fait, critique des sociétés libérales et contre l'idée de liberté dans son essence. La Théorie critique de la race considère une société libre comme un moyen de structurer et de maintenir les inégalités en persuadant les minorités raciales de ne pas souhaiter mener de politique identitaire radicale. Puisque la Théorie critique de la race existe spécifiquement pour inciter et permettre une politique d'identité raciale radicale, elle est donc contre les sociétés libres et leur mode d'organisation. — Elle est ainsi très différente du mouvement des droits civils qu'elle prétend à tort perpétuer.

31Mp5HEOsdL._SX311_BO1,204,203,200_.jpgPour en revenir à Delgado et Stefancic, une position critique sur les sociétés libres et leurs normes est à nouveau au centre de la Théorie critique de la race : « les spécialistes de la [Théorie] critique de la race sont mécontents du libéralisme en tant que structure pour répondre aux problèmes raciaux de l'Amérique. De nombreux libéraux croient au daltonisme et aux principes neutres du droit constitutionnel » (p. 21). Le célèbre « éducateur critique de la blanchitude », Robin DiAngelo — auteur du désormais célèbre livre Fragilité blanche le dit encore plus clairement, en écrivant avec un collègue nommé Ozlem Sensoy dans un livre éducatif très lu intitulé Is Everyone Really Equal ? [« Tout le monde est-il vraiment égal ? », ouvrage non traduit en français - NdT] :
Ces mouvements [les mouvements de la Théorie critique sur lesquels se fonde la Théorie critique de la race] ont d'abord prôné un type d'humanisme libéral — individualisme, liberté et paix — mais se sont rapidement tournés vers un rejet de l'humanisme libéral. L'idéal d'autonomie individuelle qui sous-tend l'humanisme libéral — l'idée que les gens sont libres de prendre des décisions rationnelles indépendantes qui déterminent leur propre destin — a été considéré comme un mécanisme permettant de maintenir les marginalisés à leur place en occultant les systèmes structurels d'inégalité plus larges. En d'autres termes, elle [la société libre] a trompé les individus en leur faisant croire qu'ils avaient plus de liberté et de choix que ce que les structures sociétales permettent réellement. (p. 5)
En d'autres termes, la Théorie critique de la race considère les sociétés libres et les idéaux qui les font fonctionner — l'individualisme, la liberté, la paix — comme une sorte de théorie conspirationniste tacite à laquelle nous participons tous pour maintenir les minorités raciales à un niveau inférieur. Lorsque ses partisans accusent les gens d'être « complices de systèmes de racisme », cela fait partie de ce qu'ils veulent dire. Il est évident qu'ils préfèrent que nous n'ayons pas de sociétés libres et qu'ils préfèrent organiser la société comme ils l'entendent et nous faire tous adhérer à leurs idées.

4 — La Théorie critique de la race ne traite des questions raciales que selon les « groupes socialement construits », il n'existe donc aucun individu dans la Théorie critique de la race

La Théorie critique de la race ne s'oppose pas seulement aux sociétés libres et à l'individualisme qui les rend possibles, mais elle ne croit même pas que les individus existent de manière significative ! Dans la Théorie critique de la race, chaque personne doit être comprise en fonction des groupes sociaux auxquels elle est censée appartenir, et ceux-ci sont déterminés par son identité, y compris sa race. Delgado et Stefancic écrivent :
Un troisième thème de la Théorie critique de la race, la thèse de la « construction sociale », soutient que la race et les races sont des produits de la pensée et des relations sociales. Non pas objectives, inhérentes ou fixes, elles ne correspondent à aucune réalité biologique ou génétique ; au contraire, les races sont des catégories que la société invente, manipule ou supprime quand cela lui convient. (p. 7)
Selon la Théorie critique de la race, les races sont des catégories que la société invente et que nous imposons entièrement par des hypothèses sociales — principalement des stéréotypes — et les gens sont membres de ces catégories raciales qu'elles le veuillent ou non. En outre, ils affirment que la société est « stratifiée socialement », ce qui signifie que différents groupes sociaux — comme ces groupes raciaux — ont un accès différencié aux opportunités et aux ressources de la société. Bien qu'en moyenne cela soit vrai, cette affirmation ne tient pas compte des variations individuelles qui sont évidentes lorsque l'on considère les exemples de personnes noires puissantes, riches et célèbres comme Barack Obama, Oprah Winfrey et Kanye West. Cependant, la Théorie critique de la race force les « gens » à s'en tenir à ces moyennes et les considère principalement en termes d'identité de groupe plutôt que d'identité individuelle. C'est en partie pour cette raison qu'ils utilisent le mot « gens » au lieu de « personnes » — le premier désignant un groupe social [et faisant partie d'un langage plus « inclusif » - NdT].

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Ainsi, dans la Théorie critique de la race, l'objectif de traiter idéalement chaque personne comme un individu égal devant la loi et censé être jugé sur le contenu de son caractère et les mérites de son travail est considéré comme un mythe qui maintient les minorités raciales à un niveau inférieur. Au lieu de cela, elle voit les gens uniquement en fonction de leurs groupes raciaux. C'est pourquoi il est si courant que les programmes raciaux progressistes finissent par nuire aux personnes qu'ils sont le plus censés aider. La « justice raciale », au sein de la Théorie critique de la race, signifie obtenir la « justice » pour le groupe, qui, selon elle, est une construction sociale, et non pour la personne réelle, qui n'est qu'un membre de ce groupe. Comme l'écrit Lynn Lemisko à la page 193 de Educator to Educator, un autre manuel d'éducation dans les programmes de Justice sociale critique :
Si la démocratie concerne les droits individuels — justice pour les individus — alors la justice sociale concerne les droits des groupes — justice pour les groupes. Et pour moi, il y a une différence fondamentale entre la notion générale de justice et la notion de justice sociale.
5 — La Théorie critique de la race estime que la science, la raison et les preuves sont un moyen « blanc » d'acquérir du savoir et que le récit et l'expérience vécue sont une alternative « noire »

Rappelez-vous ci-dessus, quand Delgado et Stefancic disaient que la « science normale » fait partie du racisme quotidien et ordinaire de nos sociétés... C'est parce que la Théorie critique de la race n'est pas particulièrement favorable à la science, se situant quelque part entre un désintérêt général et une hostilité ouverte à son égard — souvent en fonction des circonstances. C'est parce que la Théorie critique de la race, utilisant cette thèse de « construction sociale », croit que le pouvoir et la politique des groupes culturels font intrinsèquement leur chemin dans tout ce que la culture produit. Ainsi, et selon la Théorie critique de la race, la science n'est rien de plus qu'un autre moyen de faire de la politique.

La science moderne étant principalement produite par des hommes blancs et occidentaux, la Théorie critique de la race la considère donc comme un « mode d'acquisition de connaissance » qui est blanc et occidental. Elle soutient donc que la science encode et perpétue la « domination blanche » et ne convient donc pas vraiment aux Noirs qui vivent dans une culture — politique — de négritude.

fragility-nyt-450.jpgC'est évidemment une opinion abominable, qui va à l'encontre de l'un des tout premiers piliers de la science : l'universalité. L'universalité de la science dit que peu importe qui fait une expérience, le résultat sera toujours le même. C'est parce que la science croit en l'objectivité, ce que la Théorie critique de la race appelle aussi un mythe oppressant. Par exemple, Robin DiAngelo et Ozlem Sensoy écrivent :
L'une des principales contributions des théoriciens critiques concerne la production de connaissances. Étant donné que la transmission du savoir fait partie intégrante de l'activité scolaire, les théoriciens critiques dans le domaine de l'éducation se sont particulièrement intéressés à la manière dont le savoir est produit. Ces chercheurs soutiennent qu'un élément clé de l'injustice sociale implique la revendication que la connaissance particulière est objective, neutre et universelle. Une approche fondée sur la théorie critique remet en question l'idée que l'objectivité est souhaitable, voire possible. Le terme utilisé pour décrire cette façon de penser la connaissance est que la connaissance est socialement construite. Lorsque nous faisons référence à la connaissance comme étant socialement construite, nous voulons dire que la connaissance reflète les valeurs et les intérêts de ceux qui la produisent. (p. 7)
Sensoy et DiAngelo affirment également que la science « présume de la supériorité et de l'infaillibilité de la méthode scientifique » (p. 5) — ce qui est faux, soit dit en passant — et que nous devrions donc nous demander « à qui revient la rationalité » et « à qui revient l'objectivité présumée » de la méthode scientifique. Puis, de manière encore plus cynique, ils insistent sur le fait que nous devons nous demander quels intérêts sont servis par la science, comme si c'était la question pertinente à poser à une méthode universaliste. La Théorie critique de la race affirme à tort que les intérêts des Blancs sont principalement servis par la science. Tout cela n'est pas seulement faux — et véritablement raciste ! — c'est dangereux.

Poursuivant la pensée véritablement raciste selon laquelle les Noirs ne sont pas adaptés à la science ou ne sont pas servis par elle, Delgado et Stefancic affirment que le récit de leur « expérience vécue » est le principal mode par lequel les Noirs et la Théorie critique de la race produisent et font progresser la connaissance. Il est important de noter que ces expériences vécues ne sont considérées comme valables que si elles sont en accord avec la Théorie critique de la race. Ils écrivent :
Les théoriciens critiques de la race se sont appuyés sur des expériences quotidiennes avec des perspectives, des points de vue et le pouvoir des histoires et de la persuasion pour arriver à une meilleure compréhension de la façon dont les Américains perçoivent la race. Ils ont écrit des paraboles, des autobiographies et des « contre-récits », et ont examiné le contexte factuel et les personnalités, souvent ignorées dans les recueils de jurisprudence de cas bien connus. (p. 38)
51iT1S1z5VL._SX338_BO1,204,203,200_.jpgAlors que les récits peuvent être informatifs, pour créer une position selon laquelle la science est un « mode d'acquisition de la connaissance » pour les blancs occidentaux — surtout les hommes — et que le conte est plus adapté aux minorités raciales, la Théorie critique de la race est elle-même raciste — contre les minorités raciales — et paralyse les personnes qu'elle prétend aider. Cela se produit de multiples façons, notamment en sapant leur capacité de réflexion critique, en leur apprenant à voir le monde d'une manière qui les opprime, et en les associant à des stéréotypes négatifs et nuisibles selon lesquels ce sont les Blancs, et non les Noirs, qui utilisent des méthodes rigoureuses.

6 — La Théorie critique de la race rejette toutes les alternatives potentielles — comme l'absence de préjugés raciaux — comme formes de racisme

La Théorie critique de la race est totalement contraire à l'idée de bon sens selon laquelle la race devient moins pertinente sur le plan social et que le racisme en est donc diminué en ne se concentrant pas tout le temps sur la race. Là où le libéralisme a passé des siècles à soustraire toute signification sociale des catégories raciales une fois qu'il avait été introduit au XVIe siècle, la Théorie critique de la race l'insère à nouveau, et au premier plan.

En fait, comme vous pouvez le deviner maintenant, elle considère l'idée d'« absence de préjugés raciaux » comme l'une des choses les plus racistes possibles, car elle dissimule le véritable racisme. « Si l'absence de préjugés raciaux sonne bien en théorie, en pratique elle est très problématique », écrivent Sensoy et DiAngelo (p. 108). Comme nous l'avons lu dans Delgado et Stefancic :
Les conceptions d'absence de préjugés racistes, ou « formelles », de l'égalité, exprimées dans des règles qui n'insistent que sur un traitement identique pour tous, ne peuvent donc remédier qu'aux formes de discrimination les plus flagrantes, qui se distinguent et attirent notre attention, comme la discrimination à l'hypothèque ou le refus d'engager un docteur noir plutôt qu'un blanc ayant abandonné ses études secondaires. (p. 7)
Bien que ceci constitue un argument — que le fait de n'avoir aucun préjugé racial peut amener quelqu'un à ne pas voir du tout le racisme, même quand il s'agit d'un vrai problème et surtout quand son influence est subtile (c'est ce qu'on appelle le « racisme aveugle ») — le remède que la Théorie critique de la race donne à cette imperfection dans l'approche de cette absence de préjugés raciaux est de faire exactement le contraire. Ainsi, le racisme doit être rendu pertinent dans chaque situation où le racisme est présent, c'est-à-dire dans chaque situation, comme nous l'avons vu au point n°1 énoncé ci-dessus, et il a attaché une importance sociale incroyable à la race et à la façon dont elle prend en compte chaque interaction. Cela signifie que, selon la Théorie critique de la race, vous devez trouver et vous concentrer sur le racisme « caché » sur votre lieu de travail, à l'école, dans votre société, dans votre quartier, dans vos livres, dans votre nourriture, dans votre musique, dans vos passe-temps, dans votre foi, dans votre église, dans votre communauté, dans vos amis, dans vos relations et en vous-même — et dans tout le reste aussi — tout le temps.

Cela va à l'encontre de l'effet prétendument recherché. Bien qu'elle fasse apparaître un racisme légitime que les individus n'auraient pas vu autrement, elle rend toutes nos relations et tous nos systèmes sociaux extrêmement fragiles et tendus, prêts à exploser sur une question qui divise fortement. Elle détourne également les ressources de la réalisation d'un véritable travail ou de l'établissement de véritables relations, parce que chercher et penser au racisme tout le temps demande des efforts. — Selon la Théorie critique de la race, les races minoritaires doivent déjà penser au racisme tout le temps et seuls les blancs ont le privilège de ne pas le faire, mais il s'agit là encore d'une analyse plus que bâclée qui ignore les rapports et les expériences de chaque minorité raciale qui n'est pas d'accord.

7 — La Théorie critique de la race agit comme si toute personne en désaccord avec elle devait le faire pour des raisons racistes et de suprématie blanche, même si ces personnes sont noires

Suite à la thèse de la « construction sociale » évoquée au point n° 4 ci-dessus, la Théorie critique de la race a décrit l'expérience essentielle de chaque groupe racial. Elle juge ensuite les individus — en particulier ceux des races minoritaires — sur leur capacité à témoigner de cette expérience — c'est-à-dire qu'elle juge les individus en fonction de leur adhésion à la Théorie critique de la race. Il est donc impossible de ne pas être d'accord avec la Théorie critique de la race, même si vous êtes noir.

Avant de discuter de l'impossibilité pour les Blancs — et les autres personnes « racialement privilégiées » — d'être en désaccord, examinons quelques exemples poignants. Le musicien noir Kanye West, superstar, a revêtu un chapeau « Make America Great Again » et a déclaré qu'il pensait par lui-même. En réponse, le poète lauréat de la Théorie critique de la race, Ta-Nehisi Coates, a écrit un article très lu suggérant que West n'est plus vraiment noir. Le musicien noir Daryl Davis, qui est surtout connu pour avoir fait sortir des centaines de vrais suprémacistes blancs de leur cagoule du Ku Klux Klan [il les a converti à sortir du Klan - NdT], a essayé une fois d'initier une conversation de ce genre en 2019, et les membres du groupe des « Antifa », « antifasciste » par définition, l'ont qualifié de « suprémaciste blanc » pour avoir accepté de s'associer avec — plutôt que de combattre ou de tuer — les personnes qu'il invitait à avoir une conversation.

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Ce phénomène peut s'expliquer. Comme Nikole Hannah-Jones, créatrice du « Projet 1619 » du New York Times Magazine — une historiographie de la Théorie critique de la race et non pas un article d'histoire — a tweeté (puis supprimé) qu'il y a « racialement noir » d'une part, et « politiquement noir » d'autre part. La Théorie critique de la race s'intéresse uniquement à la politique identitaire associée au fait d'être « politiquement noir », et quiconque est en désaccord avec la Théorie critique de la race — même si « racialement noir » — n'est pas admissible. La façon courante de le dire est qu'ils ne sont « pas vraiment noirs ». Cela signifie que dans la Théorie critique de la race, la diversité — qu'elle réclame souvent — ne doit être que superficielle. La politique de chacun doit être d'accord et doit être en accord avec la Théorie critique de la race.

C'est évidemment un problème bien pire pour les blancs ou d'autres personnes qui sont dites bénéficiaires de « privilèges raciaux ». Il y a plus de concepts dans la Théorie critique de la race pour traiter spécifiquement de comment et pourquoi les blancs sont racistes pour avoir été en désaccord avec la Théorie critique de la race que dans peut-être n'importe quelle autre notion. Charles Mills prétend que tous les blancs participent à un « contrat racial » pour soutenir la suprématie des blancs, qui n'est jamais discuté mais qui fait partie du tissu social. Barbara Applebaum affirme que tous les Blancs ont une « complicité blanche » avec la suprématie blanche parce qu'ils bénéficient automatiquement des privilèges des Blancs et de « l'ignorance des Blancs », ce qui est une façon pour eux de refuser délibérément de s'engager — et un engagement correct ne peut être prouvé qu'en étant d'accord. Selon Robin DiAngelo, les blancs bénéficient du « confort blanc » et souffrent donc d'une « fragilité blanche » qui les empêche de faire face à leur racisme par le biais de la Théorie critique de la race. — Par conséquent, dit-elle, tout ce qui maintient le confort des Blancs devrait être considéré comme suspect et nécessite d'être déstabilisé. — Alison Bailey affirme que lorsque des personnes racialement privilégiées sont en désaccord avec la Théorie critique de la race, elles s'engagent dans une « manœuvre défensive » appelée « repli épistémique de préservation des privilèges », ce qui signifie qu'elles ne font qu'argumenter pour conserver leur privilège et ne pourraient en aucune façon avoir de désaccords légitimes. Toutes ces idées associent au racisme les personnes racialement privilégiées chaque fois qu'elles sont en désaccord avec la Théorie critique de la race.

8 — La Théorie critique de la race ne peut être satisfaite

Nous avons déjà vu comment la Théorie critique de la race ne peut être désapprouvée, même pas par les Noirs. Nous avons également découvert la manière dont elle rejette toutes les alternatives et celle qui l'amène à croire que toute réussite se résume à une « convergence d'intérêts ». Parce qu'elle rejette la science, elle ne peut être ni falsifiée ni démontrée fausse sur la base de preuves, et puisqu'elle suppose que le racisme est présent et pertinent dans toutes les situations et interactions, le fait même d'accepter la Théorie critique de la race doit d'une manière ou d'une autre contenir le racisme. La Théorie critique de la race ne peut par conséquent qu'être insatisfaite. Elle est, en ce sens, comparable à un trou noir. Quel que soit le niveau de soutien dont elle bénéficie, elle ne peut être satisfaite et ne peut que se renforcer — et tout ce qui l'approche de trop près sera détruit.

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Cela signifie que si votre lieu de travail adopte la Théorie de la race critique, les militants finiront par formuler des revendications et menaceront de semer le désordre s'ils n'obtiennent pas ce qu'ils veulent. — Ils ne demandent généralement pas. — Quand bien même vous céderiez à leurs revendications, ils ne seront en rien satisfaits, puisque la Théorie critique de la race ne peut pas être satisfaite. Avant même d'avoir fait quoi que ce soit, ils ont la certitude qu'à cause de votre racisme vous commettrez des injustices. Vous l'aurez fait par « convergence d'intérêts », pour améliorer votre image de raciste. Vous l'aurez fait d'une manière qui n'a fait que créer de nouveaux problèmes assimilables au racisme. Vous ne l'avez pas fait plus tôt, plus vite ou mieux à cause de votre racisme. Quoi que vous fassiez, la situation qui en résulte doit contenir le racisme, et le travail de l'activiste de la Théorie critique de la race consiste à le détecter et à vous demander des comptes.

Par conséquent, céder à une demande de la Théorie critique de la race ne peut l'apaiser. Elle peut toutefois signaler que vous céderez face à leurs exigences, lesquelles continueront alors à affluer et à s'intensifier. Comme nous l'avons vu précédemment par d'innombrables exemples dans le monde des entreprises, ces exigences incluront des appels sollicitant la démission de votre poste pour le céder à des militants, et là encore ils ne seront pas satisfaits. Et si l'entreprise fait faillite suite à toutes ces perturbations, le racisme sera là aussi le responsable de ce fiasco.

Et ce n'est pas tout !

Il s'agit là d'une description sinistre mais juste de la Théorie critique de la race et, pire encore, elle est terriblement incomplète. Il existe en son essence même d'autres hideuses idées relevant du même schéma que nous n'avons pas le temps d'énumérer ici. Il s'agit notamment des notions selon lesquelles :
  • le racisme ne s'améliore guère — voire pas du tout ;
  • l'égalité constitue en soi une source de racisme ;
  • les personnes qui bénéficient du « racisme » n'ont aucune réelle motivation à se dresser contre le racisme ;
  • le racisme est un conflit à somme nulle organisé par les Blancs pour exclure tous les autres de toute véritable perspective sociale ;
  • les races ne peuvent pas vraiment se comprendre — tout en exigeant qu'elles le fassent et que le racisme soit la cause exclusive d'un inévitable échec ;
  • les personnes racialement privilégiées sont intrinsèquement oppressives et toutes les autres sont intrinsèquement oppressées — un principe dérivé du marxisme appliqué aux groupes raciaux ; et
  • la seule façon de mettre fin au racisme réside dans une révolution sociale qui démantèlerait entièrement la société actuelle et la remplacerait par un concept issu de la Théorie critique de la race.
51ob5TDrG1L._SX349_BO1,204,203,200_.jpgOn peut aisément concevoir les types de problèmes créés par la mise en pratique de ces doctrines, et constater avec horreur la manière dont la Théorie critique de la race s'attaque constamment aux meilleures parties de notre nature pour atteindre ses objectifs — ce qui, si elle était pertinente et elle ne l'est pas, ne laisse le plus souvent à son opposition que les pires candidats, de vrais suprématistes blancs, qu'elle utilise ensuite comme preuve de ses fausses revendications.

Par conséquent, il existe de nombreuses bonnes raisons, qui n'ont rien à voir avec le racisme réel, de rejeter la plupart des doctrines de la Théorie critique de la race. Les personnes honnêtes ont elles toutes les raisons de la rejeter en faveur de meilleures alternatives, et la principale raison pour laquelle elles ne le font pas est due à leur ignorance des fondements de cette théorie et au fait qu'elles considèrent les notions qui en émanent comme généralement fondées et justifiées.

En résumé, nous pouvons constater que la Théorie critique de la race est une manière vraiment calamiteuse de traiter des questions raciales et du racisme, et cela serait vrai même si chaque problème — ou « problématique » — qu'elle souligne était entièrement vrai. Il s'agit tout simplement d'une mauvaise stratégie pour résoudre ces problèmes, et, comme ses défenseurs le diraient eux-mêmes s'ils en tiraient les mêmes conclusions, nous avons l'obligation de nous instruire — sur les problèmes et les faiblesses de la Théorie critique de la race — et de faire mieux — que ce qu'ils peuvent espérer faire.
À propos de l'auteur : Mathématicien, auteur et commentateur politique d'origine américaine, le Dr James Lindsay a écrit six livres couvrant un large éventail de sujets, dont la religion, la philosophie des sciences et la théorie postmoderne. Il est le co-fondateur de New Discourses et fait actuellement la promotion de son nouveau livre How to have impossible conversations [« Comment avoir des conversations impossibles » - NdT].
Source de l'article initialement publié en anglais le 12 juin 2020 : New Discourses
Traduction
: Sott.net