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jeudi, 04 avril 2019

Hadrien Desuin : « Vers une nouvelle Groß Koalition au Parlement européen? »

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Hadrien Desuin : « Vers une nouvelle Groß Koalition au Parlement européen? »

Une note d’analyse signée Hadrien Desuin*

Ex: http://geopragma.fr

À l’issue des élections européennes, où chaque camp est parti en ordre dispersé, une recomposition aura lieu pour former une majorité parlementaire. Face à l’essor des partis populistes et souverainistes, la majorité du parlement européen devrait resserrer ses rangs autour du groupe libéral.

C’était un vœu d’Emmanuel Macron qu’il avait prononcé à la Sorbonne dès septembre 2017 à la faveur du Brexit. A l’aide de listes transnationales, le Parlement européen devait s’ériger en Constituante en 2019 et se mettre en marche vers une Europe fédérale. Pour les Jeux Olympiques de Paris en 2024, le président français voyait déjà ses athlètes courir sous les couleurs de l’Union Européenne…

Toute l’Europe applaudit l’enthousiasme du président français. On lui remet le prix Charlemagne à Aix-la-Chapelle en compagnie d’Angela Merkel. Mais toutes ces envolées visionnaires sont progressivement archivées pour mémoire. Les Allemands refusent de partager leurs économies et se contentent de mettre à jour le traité de l’Élysée de 1963. De fait, il n’y a ni liste transnationale, ni circonscription unique et encore moins de constituante.

Le découpage électoral, laissé à la discrétion des États-membres, fait de chacune des 27 campagnes nationales des événements politiques isolés. À part quelques personnalités venues symboliser l’unité européenne lors des grandes réunions publiques, on voit bien que le PPE (Parti Populaire Européen) ou le PSE (Parti Socialiste Européen) ont des rôles réduits. Ce sont des plateformes où cohabitent des partis aussi divers que Les Républicains de Laurent Wauquiez et le Fidesz de Victor Orban et qui, sans discipline de groupe, votent en fonction de leurs intérêts propres et parfois les uns contre les autres. De même, peu d’électeurs soupçonnent l’existence de l’ENL (Europe des Nations et des Libertés) et de l’ECR (Conservateurs et réformistes européens), les groupes qui représentent respectivement les populistes de droite et les conservateurs. Si le Parlement européen est très peu connu de ses électeurs, ceci peut aisément s’expliquer. En dehors de la confiance accordée à la Commission en début de mandature, cette assemblée de 750 membres n’a pas de réels pouvoirs législatifs. L’abstention bat donc tous les records.

Bien des rédactions ont d’ailleurs renoncé à décrire les méandres de la petite politique européenne à Strasbourg et Bruxelles, alors que les péripéties parisiennes, berlinoises ou romaines couvrent quotidiennement les journaux nationaux les plus respectés. Pour une campagne strictement européenne, il faudrait des médias européens. Or le seul quotidien dont la diffusion est proprement européenne est The New-York Times… Le journal a repris le nom de sa maison mère puisque le titre International Herald Tribune peinait à faire vendre. Ses pages en anglais traitent d’ailleurs plus souvent des différentes actualités nationales plutôt que de la machine Bruxelloise. Les chaînes de télévision comme Euronews n’ont pas non plus d’énormes succès d’audience. Le multilinguisme, comme le globish, a ses limites culturelles.

Coalition « roumaine »?

A la veille de ces élections du 26 au 29 mai 2019, les 750 députés sortants sont répartis en huit groupes. La majorité est composée des 218 députés du centre-droit PPE emmené par le bavarois Manfred Weber (CSU), alliés aux 186 députés sociaux-démocrates du PSE (dont les populistes du SMER slovaque et du PSD roumain). Ces derniers ont choisit le hollandais Frans Timmermans comme candidat à la tête de la commission. Avec un total de 404 parlementaires, ils peuvent se passer de leurs alliés libéraux d’ADLE (Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe). Le groupe dirigé par le belge Guy Verhofstadt a  68 députés (dont quatre de l’ANO du tchèque Andrej Babis.)

Après le 29 mai, la grosse coalition ne pourra plus se passer des libéraux pour atteindre la nouvelle majorité absolue fixée avec le Brexit à 353 députés. Ces derniers pourraient passer la barre des 100 députés avec Ciudadanos et LREM mais aussi les libéraux allemands et polonais. Le parti du président Macron voulait dynamiter les anciens partis du parlement et fédérer autour de lui un nouveau groupe central opposé aux populistes. Là encore ses ambitions se sont fracassées sur la résistance de la bipolarité allemande. Il est très probable que les successeurs et alliés idéologique

s du Modem reviennent de là où ils viennent: le groupe euro-libéral ALDE. Un renfort qui comblerait la baisse de la majorité actuelle du PPE sous la barre des 200 députés et du PSE sous les 150 représentants. La CDU en Allemagne, LR en France ou le PP en Espagne prévoient une érosion de leur socle électoral. De même pour le PS, le PD italien et le SPD allemands qui anticipent des scores plus faibles qu’en 2014. On se retrouverait alors dans une grosse coalition à trois qu’on pourrait qualifier de « coalition roumaine » (aux couleurs du drapeau de la Roumanie) : centre droit en bleu; centre libéral en jaune et centre-gauche en rouge. Cet attelage pourrait encore se passer des écologistes du groupe ALE, aujourd’hui au nombre de 52 mais dont le positionnement dans l’opposition est très ambiguë, partagé qu’il est entre les factions gestionnaires et contestataires. En revanche les libéraux ne devraient pas être assez nombreux pour former à eux seuls une coalition avec le centre-droit ou le centre-gauche. De même le centre droit ne serait pas assez fort pour se coaliser avec les libéraux et les conservateurs. Leur vision de l’Europe sont de toutes les façons trop divergentes.

Big bang souverainiste?

L’opposition, quant à elle, est scindée en quatre petits groupes répartis à droite et à gauche. Le principal, ECR (Conservateurs et Réformistes Européens) compte 74 députés dont 19 polonais principalement du PiS, et 19 conservateurs britanniques. Ce groupe va souffrir du Brexit et cherche à s’élargir. Il a déjà rallié Nicolas Dupont-Aignan qui selon les sondages pourrait obtenir une poignée de députés ainsi que les démocrates suédois. La rencontre entre Salvini et Kascinsky a été très commentée puisqu’elle pourrait entamer un « big bang » chez les souverainistes de droite si les italiens de la Lega ou les autrichiens du FPO passaient chez les conservateurs. Par ailleurs, le groupe EFDD (Europe de la liberté et de la démocratie directe) dont 19 élus sur 43 viennent du UKIP britannique cherche aussi à s’élargir (il faut 7 nationalités différentes au sein de chaque groupe et les moyens procurés par la formation d’un groupe ne sont pas négligeables). La composante M5S du groupe est très volatile idéologiquement et constitue une inconnue importante de l’équation. Ses relations avec la Lega sont compliquées et ne devraient pas faciliter l’union des souverainistes de droite dans un seul groupe au lieu de trois. Le groupe ENL (Europe des Nations et des Libertés) regroupe quant à lui 15 élus du RN français, 4 du FPÖ autrichien, 4 du PVV néerlandais et 6 de la Lega italienne. Le départ du député britannique devrait être compensé par l’arrivée de Vox, un mouvement national espagnol qui a le vent en poupe.

Enfin la gauche radicale regroupée au sein du groupe GUE (Gauche Unitaire Européenne) peine à faire campagne en restant unie. Les 52 députés sortant qui regroupent des communistes et des populistes de LFI ou de Podemos repousseront au lendemain du scrutin la négociation pour la formation du groupe. Leur score ne devrait pas baisser.

Sur le papier, la grande coalition majoritaire semble assurée de se voir reconduite. Avec la bonne tenue du groupe ALDE et en dépit de l’affaiblissement annoncée du PPE et du PSE, le parlement gravitera autour de son centre libéral. Ce sera un parlement à l’image du Bundestag dont le système représentatif proportionnel est assez proche. On devrait donc avoir une nouvelle commission centriste et libérale, dont la majorité sera seule face à une opposition eurosceptique et populiste. Si Manfred Weber a peu de chance d’obtenir la présidence de la commission, l’Europe à l’allemande a encore quelques années devant elle.

*Hadrien Desuin, chercheur associé chez Geopragma 

Universalisme islamique et droit-de-l’hommiste, même combat ?

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Universalisme islamique et droit-de-l’hommiste, même combat ?

Par Laurence Maugest, essayiste

La Charia pour l’Islam et l’ordre mondial pour les Droits de l’Homme. Existe-t-il des points de convergence ? Pour Laurence Maugest, contributrice régulière pour Polémia, c’est indubitable.

L’idéologie des Droits de l’Homme a en commun avec l’Islam de se vouer à la création d’un homme « sur-mesure », « construit », corseté dans des règles.

La religion musulmane est une doctrine qui s’immisce dans la vie privée des pratiquants, dans ses moindres recoins, lavage de mains, nourriture,  relations sexuelles…Tout est indiqué dans un calendrier que le bon musulman doit suivre à la lettre.

Curieusement, nous sommes dans l’obligation de noter que l’idéologie des Droits de l’Homme, notamment par les principes de précaution qu’elle sécrète, suit le même chemin.En effet, cette “religion” laïque devient de plus en plus invasive dans nos univers et s’évertue, de jour en jour, à réglementer davantage notre vie intime. Tel l’Islam, les Droits de l’Homme entrent dans nos foyers : des fessées aux enfants, maintenant interdites,au contenu de nos frigidaires, nous obligeant par exemple, à privilégier les légumes et à proscrire de plus en plus la viande.

Ces « avancées » se font toujours sous les coups de butoir de la culpabilité et nous mènent systématiquement à un résultat identique : notre déresponsabilisation « d’être libre ».

Le point de convergence, presque troublant, entre l’intrusion de l’Islam et celle des Droits de l’homme trouve son acmé dans ce qu’il y a de plus intime dans la vie des individus et de plus fondateur dans une société : la relation entre les hommes et les femmes.

Des chemins différents, voire opposés, aboutissent à un résultat identique

La mise à mal de la relation hommes – femmes :

  • Dans le monde masculin musulman, la femme doit se résoudre à « ne pas être », à « se dissoudre », à se dissimuler sous un voile, en dehors du regard de son père, de ses frères et de son mari.
  • L’homme occidental, lui est maintenu par l’épée des Droits de la Femme dans les reins, etne doit plus exprimer son désir.Il sera perçu, de plus en plus souvent, comme un prédateur, à surveiller de près et à maintenir à distance.

Faut-il rappeler qu’aux Etats Unis, les hommes rechignent parfois à monter dans un ascenseur seul avec une femme de peur de se retrouver devant le Juge et de payer un avocat?

Faut-il rappeler que, depuis que les européens rejettent leur histoire qui les a construits, leur avenir est lisible dans le présent des Etats Unis ? Ce qui, évidemment, n’est pas pour nous réjouir sous réserve que l’on ne soit pas avocat.

Trois autres points communs :

  • L’hyper sexualisation des relations hommes – femmes qui se révèle dans une forme d’obsession pathologique qui gomme, au passage, toutes possibilités de rencontresautreset de sympathie en dehors du sexe. Ce qui, avouons-le, est particulièrement réducteur en ce qui concerne la richesse des échanges entre les êtres en général.Ceci relève d’une limitation au corps et réduit à l’animalité notre gent humaine pourvue, pourtant, d’un cortex cérébral qui a fait ses preuves.
  • L’apartheid sexuel qui n’est pas sans rappeler la prophétie d’Alfred de Vigny (*) :

« Bientôt, se retirant dans un hideux royaume,
La Femme aura Gomorrhe et l’Homme aura Sodome,
Et, se jetant, de loin, un regard irrité,
Les deux sexes mourront chacun de son côté. »

  • La judiciarisation progressive des relations entre les hommes et les femmes

Ce dernier point commun entre l’Islam et les Droits de l’Homme « la judiciarisation exponentielle» concerne l’ensemble de la société. En effet, la mode actuelle privilégie, après la délation dans les hashtags en tous genres, les plaintes et les appels à la justice au moindre « dérapage ».  Rappelons-nous avec Rémi Brague que si  « le christianisme est la religion de l’absolu (Hegel),…l’Islam est un système politique  et juridique ». (*)

En cela nous pouvons conclure que l’Islam s’apparente davantage au Droits de l’Homme qu’au christianisme.

Dis-moi ce que tu veux, je te dirai qui tu es

Le christianisme porte en lui une visée universelle certes, mais qui concerne l’au-delà : « Mon royaume n’est pas de ce monde ».

Ce qui est loin d’être le cas de l’Islam et de son point d’orgue : la Charia qui vise à l’élargissement de la « oumma » (« Communauté mondiale des croyants »).

Les « droits-de-l’hommistes », eux, déploient une énergie considérable à détruire les frontières. Ceci, sous le prétexte que seul « un ordre mondial » assurera l’équilibre politique,  la santé écologique de la planète, la démographie et la sécurité de la population, notamment des femmes.

L’Islam et les Droits de l’Homme poursuivent donc un but similaire, l’universalisme sur Terre pour l’Islam, le cosmopolitisme mondial en ce qui concerne les Droits de l’Homme.

Un problème de taille

Le Monde est vaste et demeure, pour notre bonheur, pétris de diversités et de cultures variées.

Olivier Rey montre que tout ce qui est grand ou plus précisément grandit trop est source d’accidents. Ces aléas concernent le domaine biologique et aussi le champ géopolitique. (**)

Pensons à la superficie de la Russie qui impose à ce pays, depuis des siècles, un régime fort pour éviter le chaos susceptible de naître dans la confrontation des peuples si différents qui la composent.

Si les musulmans peuvent espérer que leurs règles de vie contrôlent la communauté des croyants, les mondialistes, eux, n’ont pas de Coran ou de petit livre rouge pour jouer le rôle de partition sévère et raide  dans un monde disparate qu’ils rêvent d’unifier.

C’est pourquoi, les Droits de l’Homme trouvent ici leur place naturelle et leur rôle de « régulateur des soucis de taille et de disparité ». Ainsi, plus l’empire mondialiste s’étendra, plus les commandements des Droits de l’Homme deviendront rigides, toujours plus répressifs, toujours plus liberticides.

Cela signifie, en définitive, que le démantèlement des frontières, nationales, culturelles, individuelles (en ce qui relève de la singularité des êtres qui est de moins en moins respectée au profit de leur nivellement), nous amène, peu ou prou, à un système politique tyrannique, seul, capable de faire obéir tout ce monde-là !

Nous sommes en train de perdre notre « responsabilité » d’être humain et la grande liberté qui s’y attache. Ce « Libre arbitre » qui nous fut offert par notre histoire gréco-latine et chrétienne sensible au développement personnel qui ne peut s’épanouir que dans une culture enracinée dans l’espace et le temps.

Il y a une membrane fondamentale que les règles islamiques comme les doctrines tyranniques des Droits de l’Homme ne détruisent pas mais, obstruent, bien au contraire,  pour notre malheur, il s’agit de notre relation au monde. Cette membrane osmotique qui, depuis la nuit des temps, ouvre l’homme comme sujet identifié, responsable, curieux et questionnant à l’univers qui l’entoure et aux mystères de la vie. Cet homme debout ne pourra plus être dans un système qui épingle « hors la loi » toutes singularités, judiciarise à tour de bras et surtout, est convaincu de son savoir ce qui inhibe, inévitablement, tout questionnement.

Laurence Maugest
5/12/2018

(*)  Libérons-nous du féminisme !, Bérénice Levet, https://www.youtube.com/watch?v=PJ6GUtAoqDM

(**) Une question de taille, Olivier Rey, https://miscellanees01.wordpress.com/2015/07/27/olivier-r... (Vidéo)

Source : Correspondance Polémia

lundi, 01 avril 2019

Insurrection contre la canaille mondaine

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Insurrection contre la canaille mondaine

par Michel Maffesoli

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

 
Michel Maffesoli ne manque pas de préciser que l’expression de « canaille mondaine » est de Joseph de Maistre. Signe sympathique et profondément significatif pour nous qui considérons depuis longtemps Maistre comme une de nos grandes références, le nom de cet immense métaphysicien revient très souvent dans les écrits de Maffesoli. Ici, dans le texte que nous présentons, il (Maistre) est donc présent bien que, – ou parce que le sujet est d’une intense actualité : il s’agit des insurrections en cours dont les Gilets-Jaunes est le plus brûlant exemple, bien entendu insurrection contre la « canaille mondaine » (“les élites” dans le langage facile et ambigu de la postmodernité).

Maffesoli est professeur émérite à la Sorbonne, directeur du Centre d’études sur l’actuel et le quotidien, fondateur des revues Sociétés et Les cahiers européens de l’imaginaire, et aussi auteur de nombreux livres dont le dernier, de février 2019 (éditions Liber), La Force de l’imagination – contre les bien-pensants. Cela dit, Maffesoli sent le souffre et il est régulièrement dénoncé par les susdits bien-pensants et autres chiens de garde du Système.

... Il sent le soufre parce que, parmi les plus de 200 thèses qu’il a fait soutenir au début des années 1980, trois concernent l’astrologie, dont une de la vedette médiatique d’alors du domaine, Elisabeth Tessier. « S’ensuivit, écrit-il dans ‘La force de l’imaginaire’, une levée de boucliers d’une rare intensité (ce qui a fait bien sourire mes collègues étrangers, n’ayant pas, eux, ces pudeurs de jeunes filles !), m’accusant d’avoir fait “entrer l’astrologie à la Sorbonne”. Rien de moins ! »

Maffesoli fut donc l’objet d’une attaque en règle de la bienpensance du domaine, dont on retrouve des traces indélébiles dans les références auxquelles nous renvoie notre moteur de recherche universel et bien-pensant. (Une note dans son livre dit qu’en 1984, parce qu’il avait créé dans son centre une section de recherche sur l’homosexualité, Maffesoli avait été l’objet d’une semblable réprobation, et selon un collègue d’alors : « Michel, vous faites rentrer l’homosexualité à la Sorbonne ! » Tous les espoirs lui sont perelmis pour l'astrologie.) Finalement, on conclura l’épisode par cette citation : « Dans ce tintamarre médiatique, j’ai encore à l’esprit l’intervention de Jean Baudrillard qui, avec l’acuité qu’on lui connaît, teintée de malice, soulignait que, si les sociologues de base et leurs associations “professionnelles” (sic) protestaient avec tant de vigueur contre cette thèse [d’Elisabeth Tessier], n’était-ce pas parce qu’elle leur faisait concurrence en leur ôtant le monopole de la prédiction ? »

Cette mauvaise réputation dans les milieux de surveillance, quoiqu’on pense de l’astrologie, est une bonne introduction pour le texte ci-dessous qui traite des Gilets-Jaunes et des nouvelles conditions d’insurrection contre le Système (selon notre terminologie). Maffesoli juge que ces insurrections sont de caractère tribal à cause de l’éclatement des références permettant le reductio ad unum, notamment l’État-nation, sous la poussée de l’individualisme et du capitalisme-globaliste totalement déstructurant. Dans ce cas, le caractère “tribal” n’a aucun aspect péjoratif, il peut être le pire comme le meilleur et ce n’est qu’un moyen, en l’absence d’autres structures, par lequel se fait l’insurrection. Au reste, Maffesoli définit l’insurrection “tribale” des GJ de cette façon d’où la hauteur n’est certainement pas absente : « Nous assistons à un soulèvement quasi-mystique qui, dans l'absolu, reflète la fin d'une époque. »

Cette approche mystique d’une crise (celle des GJ) qui n’est, qui ne peut être qu’un signe parmi cent et mille de l’immense Grande Crise d’Effondrement du Système en cours nous convient parfaitement, comme nos lecteurs s’en doutent évidemment à la lecture de tant et tant de textes de ce site. Nulle timidité ni faux-fuyant dans cette appréciation générale, parce que la cause fondamentale ainsi décrite ne supporte pas de ces mégottages. La violence, par exemple... S’il le faut, et souvent il le faut pour contrebattre l’enfermement concentrationnaire et les garde-chiourmes efficaces et zélés du Système, qui entretiennent une violence constante faite de pression et d’oppression de l’esprit et des psychologies, – et, ces derniers temps, un peu plus directement, de la part des flics et d’une magistrature couchée, la même magistrature française qui successivement et à six ans de distance délégua ses mêmes juges condamner à mort, même élan de justice adaptée aux circonstances et variations atmosphériques, de Gaulle et Pétain.

« Il s’agit d’un ‘impératif atmosphérique’ auquel personne ne peut échapper. N’est-ce point cela que rappelle Victor Hugo : “et l’oiseau le plus libre a pour cage un climat”. Le climat est à l’effervescence. À la révolte des masses. Et rien ni personne n’en sera indemne. Tout au plus faut-il savoir l’accompagner, savoir la dire, le plus justement possible afin qu’elle ne s’aigrisse pas en une forme perverse, immaîtrisable et sanguinaire à souhait ! On retrouve cette idée dans le chemin de pensée de Martin Heidegger :“c’est le refus de l’animalité qui conduit à la bestialité” »

Et certes : « J’ai dit quête mystique. C’est à partir de la destruction qu’il y a une inéluctable renaissance. Contre tous les pouvoirs établis, seule la puissance populaire est le vecteur des métamorphoses. »

Dans cette longue liste des responsabilités et des culpabilités des sous-fifres, le commentateur met en bonne place pour notre plus grande approbation ceci que nous appelons presseSystème, qui ne cesse de déchoir à des profondeurs qu’on aurait pu penser impossible à atteindre tant la puanteur qui y règne est insupportable... Puisqu’il est question de puanteur, effectivement : « En la matière d’incompréhension, le summum est atteint par la Caste des journalistes. On se souvient de la formule assassine que Nietzsche prononçait en 1882 : “Encore un siècle de journalisme et les mots pueront”. Les mots puent quand, oubliant la soumission aux faits, fondement de la sagesse populaire, on se contente de s’inféoder à cette logique d’un “devoir être” dogmatique... »

Ce qui nous conduit au constat que nous-mêmes ne cessons de proclamer, bien entendu puisque nous sommes partie prenante, avec une conscience aigüe de ce qu’il nous est assigné de faire. C’est une idée qui traîne depuis 1999 pour notre compte, et cela réchauffe le cœur de voir que chaque événement d’importance la conforte, et qu’il se trouve d’aussi fortes phrases pour le confirmer :

« C’est sur les réseaux sociaux, les forums de discussion, les sites et autres plateformes du ‘Netactivisme’ qu’il faut suivre l’émergence de la socialité en cours de gestation. C’est cette presse alternative qui rend mieux compte des échanges, partages, entraides faisant des ronds-points un véritable Aventin postmoderne. »

Le texte de Maffesoli ci-dessous a été publié le 25 mars 2019 sur le site Atlantico.fr, auquel nous l’empruntons. On peut le compléter utilement par un entretien de Maffesoli avec Edouard Chanot, sur Spoutnik-français, le même 25 mars 2019.
dedefensa.org
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Bandits de grand chemin
L’ère médiatique de la canaille mondaine

Une intelligentsia déphasée se partage les débats médiatiques en croyant que le réel se pliera à ses apriori théoriques que telles des incantations d’un autre âge elle serine ad nauseam : valeurs républicaines, démocratie, citoyenneté, laïcité et autres fariboles du même acabit, n’intéressant plus personne, sinon les divers privilégiés se partageant les pouvoirs.

Les esprits libres le savent, tout comme, les amateurs de bonne chère : il faut de l’impertinence dans les analyses comme du poivre dans les ragoûts. Et ce, dans le souci de surprendre et non de choquer. C’est ainsi que l’on peut dire que l’anarchie n’a rien d’anarchique. N’est-ce point la définition proposée par Élisée Reclus : « l’anarchie, c’est l’ordre sans l’État ».

Voilà qui nous conduit fort loin de tous ces “a-priorismes” étant le fourriers des divers totalitarismes et attitudes dogmatiques qui ponctuèrent le siècle précédent. Totalitarismes , plus ou moins doux, contre lesquels les peuples, contemporainement, se révoltent.

Soulèvement qui n’est pas sans inquiéter ce que Joseph de Maistre nommait : la « canaille mondaine ». De nos jours c’est cette intelligentsia déphasée qui outre les chaines tv en continu se partage les débats de ces divers bulletins paroissiaux que sont les organes de presse “mainstream” : Le Monde, Le Figaro, Libération. Chaînes et journaux n’étant plus qualifiés de “référence” que dans les EPHAD et divers clubs du 4ème âge où l’on papote , entre soi, de l’avenir du monde. C’est dire !

Un avenir que les divers experts consultés par les politiques ont du mal à saisir, obnubilés qu’ils sont par ce que j’ai nommé “a-priorisme ”. C’est-à-dire une idéosophie on ne peut plus crédule, croyant, car c’est bien de croyance qu’il s’agit, que le réel doit se plier à ces a-priori théoriques que telles des incantations d’un autre âge on serine ad nauseam : valeurs républicaines, démocratie, citoyenneté, laïcité et autres fariboles du même acabit, n’intéressant plus personne, sinon les divers privilégiés se partageant les pouvoirs institutionnels d’une technocratie en déshérence.

En la matière d’incompréhension, le summum est atteint par la Caste des journalistes. On se souvient de la formule assassine que Nietzsche prononçait en 1882 : « encore un siècle de journalisme et les mots pueront ». Prophétie on ne peut plus d’actualité.

Les mots puent quand, oubliant la soumission aux faits, fondement de la sagesse populaire, on se contente de s’inféoder à cette logique d’un “devoir être” dogmatique on ne peut plus désuet.

C’est le dogmatisme d’un rationalisme abstrait, d’un utilitarisme à courte vue et d’un soi-disant individualisme dominant. Le tout confortant l’ économicisme dans la société officielle. Toutes choses ne faisant plus recette dans les rassemblements populaires. Ce peuple que les élites, toutes tendances confondues méprisent, ce peuple que l’on affuble du qualificatif de populisme, n’a que faire des aumônes que le pouvoir condescendant consent à lui jeter à la figure.

La perdurance de ces rassemblements, les multiples fortes des révoltes des peuples, la méfiance forcenée vis-à-vis de ces élites ayant le pouvoir de faire et de dire, tout cela est l’expression d’un réel souci du qualitatif. « L’homme du désir » qu’ont prophétisé certains philosophes retrouve une indéniable force et vigueur. L’ère d’un Je” égotiste est en train de céder la place à l’ère d’un Nous bien plus généreux. Voilà ce que le “vomitus matutinus” de la presse dominante ne veut pas, ne peut pas surtout admettre.

Restons dans le poivre du ragoût dont il a été question. C’est bien d’une quête mystique dont il est question dans les insurrections populaires. Mais comme toute réalité trouve son fondement dans l’ordre des choses sensibles, il faut bien passer, pour dire et vivre ce désir fondamental, par les expériences irréfragables de la vie de tous les jours : taxes, retraites, impôts divers.

Mais ce qui est essentiel, c’est bien cette “ère du Nous”. Créer un monde harmonieux, à partir du monde tel qu’il est, et non plus à partir de ce que des théories abstraites auraient aimé qu’il soit. Au-delà de ceux qui, avec une mentalité de vieillard, continuent de faire la leçon, de ceux qui enfermés dans les étroites limites d’un savoir appris dans les grandes écoles, de ceux qui se complaisent dans les “Grands Débats”, où sans écouter les questions on a déjà les réponses, en bref, au-delà des lieux communs dogmatiques, la révolte gronde et elle continuera à gronder.

C’est dans les plateformes libertaires qu’il faut chercher la reviviscence de la vie. C’est dans la hardiesse de vues qui est y est proposée que s’élabore en son sens fort une éthique nouvelle. “Ethos” étant tout simplement, le ciment confortant la vie de toute société. Ce ciment consistant à conforter les cœurs et les esprits dans un être-ensemble où ce qui est primordial, c’est être-avec. Réalisation effective d’un centre de l’union, préoccupation essentielle d’une dynamique sociétale digne de ce nom.

Ce ciment, quand il y a une rénovation culturelle, ce qui est en cours actuellement, ne peut pas faire l’économie de la force. La puissance populaire rappelle, régulièrement, que la force prime le droit. Voilà qui est difficile à dire. Voilà pourtant ce dont on ne peut pas faire l’économie. Dans le long déroulé des histoires humaines l’insurrection reste un élément essentiel.

N’est-ce pas cela que résume l’adage de Goethe : « Meurs et deviens » ? J’ai dit quête mystique. C’est à partir de la destruction qu’il y a une inéluctable renaissance. Contre tous les pouvoirs établis, seule la puissance populaire est le vecteur des métamorphoses. Fluidité de la vie, se vivant certes dans la crainte et le tremblement, mais n’en étant pas moins nécessaire.

Cela nous force à nous souvenir que tout homme est poussière. L’humanisme intégral nous forçant à admettre que l’humain est fait aussi d’humus. C’est dans une telle optique qu’il faut reconnaître que la violence peut être tout à la fois banale et fondatrice. Elle est au fondement de toute vie individuelle et sociale. C’est même le cœur battant de ce que le philosophe Max Scheler nommait : « Ordo amoris ». L’ordre de l’amour n’étant en rien celui des “bénis oui oui”, mais bien celui de l’effervescence.

Voilà ce que la canaille mondaine n’ose pas dire. L’esprit du temps est à l’effervescence. Les diverses élections, un peu partout de par le monde en sont les expressions on ne peut plus éloquentes. Il s’agit d’un “impératif atmosphérique” auquel personne ne peut échapper. N’est-ce point cela que rappelle Victor Hugo : « et l’oiseau le plus libre a pour cage un climat ». Le climat est à l’effervescence. À la révolte des masses. Et rien ni personne n’en sera indemne. Tout au plus faut-il savoir l’accompagner, savoir la dire, le plus justement possible afin qu’elle ne s’aigrisse pas en une forme perverse, immaîtrisable et sanguinaire à souhait ! On retrouve cette idée dans le chemin de pensée de Martin Heidegger : « c’est le refus de l’animalité qui conduit à la bestialité » et le 20ème siècle n’est pas avare d’expressions en ce sens. Ainsi plutôt que la dénier, ainsi qu’il est convenu de le faire, il faut savoir la ritualiser, l’homéopathiser, sans pour autant en méconnaître la redoutable efficacité.

En effet dans notre monde aseptisé, on ne le dit pas assez, la violence, en son sens étymologique, c’est le vouloir (volere ). C’est le vouloir essentiel, et c’est aussi la force en action (Vis). Pour les Grecs même, elle se rattachait à la force vitale (Bia) qui était l’apanage des dieux.

Mais d’une telle compréhension on est fort loin, lorsqu’on lit les articles publiés dans la presse officielle ou que l’on entend les débats propres au conformisme dominant. À côté de ceux-ci les discussions du café du commerce paraissent être de l’Académie Française. Et ce tant l’ennui prévaut, tant les lieux communs sont tirés en rafales. Pensée convenue édictée, comme il convient pour les “sachants” avec l’arrogance, la suffisance et la jactance que l’on sait. Toutes choses ne faisant plus grande illusion. Mais, dès lors, s’affichant avec une assurance redoublée.

C’est sur les réseaux sociaux, les forums de discussion, les sites et autres plateformes du Netactivismequ’il faut suivre l’émergence de la socialité en cours de gestation. C’est cette presse alternative qui rend mieux compte des échanges, partages, entraides faisant des ronds-points un véritable Aventin postmoderne.

Voilà ce que les bien-pensants ne comprennent pas. Mais ne peut-on pas les comparer à ceux que Platon nommait les « montreurs de marionnettes ». C’est-à-dire des sophistes qui, au nom d’une rhétorique éculée et d’un prétendu savoir scientifique ( les “experts”), s’emploient à manipuler le tout-venant n’en pouvant mais. C’est ainsi, d’ailleurs, que le philosophe conclut : « La perversion de la cité commence par la fraude aux mots ». Voilà qui est on ne peut plus d’actualité.

Michel Maffesoli

07:48 Publié dans Actualité, Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, michel maffesoli, sociologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 30 mars 2019

Les États-Unis perdent le contrôle de l’Europe…

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Les États-Unis perdent le contrôle de l’Europe…

 
… alors que le pipeline Nordstream 2 est sur le point d’être achevé 
 
par Tom Luongo
 
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Le pipeline Nordstream 2 représente le dernier avatar de l’influence américaine sur les affaires intérieures de l’Europe. Une fois terminé, il témoignera de la scission fondamentale entre l’Union européenne et les États-Unis. 
 
L’Europe sera la première à défendre avec succès son indépendance nouvellement proclamée. Et les États-Unis devront accepter de ne plus avoir le contrôle sur l’étranger. C’est un schéma qui se répète partout dans le monde en ce moment. Votre vision de Nordstream 2 dépend de qui vous êtes.

Si vous êtes les États-Unis, il s’agit d’une rebuffade massive de l’ordre institutionnel de l’après-Seconde guerre mondiale, principalement financé par les États-Unis pour reconstruire l’Europe et la protéger du fléau de l’URSS.

Du point de vue de l’Europe, c’est : « Bien joué, mais la Russie n’est plus une menace et il est temps de nous débarrasser de la tutelle des États-Unis. »

Et si vous êtes Russe, Nordstream 2, c’est la fissure qui sépare les deux adversaires tout en améliorant la sécurité nationale à votre frontière occidentale.

L’Europe a ses propres ambitions impériales et Nordstream 2 en est une partie très importante. Ces ambitions, toutefois, ne sont pas conformes à celles des États-Unis, en particulier sous la houlette de Donald Trump.

Trump a cette étrange idée que les États-Unis n’ont rien reçu en retour pour avoir pris la direction du monde « libre » ces soixante-dix dernières années. Dans l’esprit simpliste de Trump, le déficit commercial massif du pays est une richesse volée par ses partenaires commerciaux.

Il refuse de voir la richesse gaspillée que nous avons « perdue » par des décennies de corruption, de paresse, d’atteinte aux réglementations, etc.

Ainsi, Nordstream 2 est une abomination pour Trump car celui-ci finance l’OTAN pour protéger l’Europe de la Russie, mais celle-la augmente ensuite la quantité de gaz acheté à ce même ennemi.

Et cela devrait vous indiquer où tout cela se dirige à long terme : à la dissolution de l’OTAN rendue inutile par la Russie et l’UE.

Aussi, peu importent les efforts des États-Unis et des forces anti-russes des sociétés européenne et britannique pour arrêter ce pipeline, comme en témoigne le vote non contraignant de cette semaine au Parlement européen, l’appétit américain n’existe plus réellement.

Le Sénat américain n’a aucun intérêt à demander au Président de sanctionner les sociétés qui construisent Nordstream 2. Cela n’empêcherait pas Trump de sanctionner de toute façon s’il le voulait.
 

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La vraie raison pour laquelle Trump ne sanctionnera pas Nordstream 2 est la même que celle qui le pousse à se tourner vers la Chine pour le commerce : liquidité du dollar dans le commerce mondial.

Il a déjà fait assez de dégâts. Il cherche maintenant à se faire réélire face à une réserve fédérale hostile.

S’il devait sanctionner Nordstream 2, il l’aurait fait. En vérité, ce vote au Parlement européen marque le dernier faible souffle pour tenter d’arrêter le pipeline et non le coup rusé d’un type qui détient des as dans ses poches.

C’est précisément parce que les États-Unis n’ont pas imposé de sanctions, qu’il ne reste que des incantations vertueuses pathétiques.

Pour que cela se produise, il faudrait que ce soit avant les élections au Parlement européen de mai, au cours desquelles nous pouvons nous attendre à voir au moins doubler le nombre de représentants eurosceptiques élus.

Si la situation continue de dégénérer en France, si l’Italie se durcit encore contre l’UE et si le Brexit est reporté, les eurosceptiques pourraient devenir le bloc le plus important du Parlement européen en juillet.

À ce stade, nous assisterons à une dégringolade en flèche de l’influence de la tristement célèbre liste Soros dans le parlement européen et peut-être même au sein de la Commission européenne. Et, le cas échéant, davantage de contrats de pipeline et d’investissements dans l’énergie russe.

En fait, un Parlement eurosceptique pourrait lever complètement les sanctions contre la Russie. De plus, les prochaines élections en Ukraine vont probablement amener au pouvoir une personne qui n’est pas pleinement soumise à la stratégie américaine.

Avec tout cela et les élections législatives ukrainiennes qui auront lieu plus tard cette année, nous verrons probablement l’Ukraine et Gazprom renégocier le contrat de transport de gaz, apportant encore plus de gaz russe sur le continent.

Et cela ne fera que rendre Trump encore plus furieux qu’il ne l’est maintenant, car il a énormément misé sur la stratégie globale de faire des États-Unis un puissant exportateur de gaz, et il a besoin de clients. L’Europe et la Chine sont deux clients évidents, mais la Russie a maintenant surclassé Trump chez les deux.

La fin de cette expansion interminable et superficielle met les États-Unis face à la dette insoutenable provoquée par le boom de la fracturation hydraulique (gaz de schiste), alors que le service de cette dette fait monter en flèche la demande de dollars, entraînant une forte hausse des taux d’intérêt.

Le marché du schiste va se fracasser à nouveau.

Tout cela confirme pour moi que le sommet des Jardins, l’été dernier, entre Poutine et la chancelière allemande Angela Merkel a accouché d’une stratégie visant à battre Trump sur Nordstream 2 et à entamer la prochaine phase des relations entre la Russie et l’Allemagne.

L’image est importante, et cette celle-ci capture bien ce que les deux parties ont voulu transmettre. Cette réunion marque le début d’un changement positif des relations entre l’Allemagne et la Russie.

La question est pourquoi ?

La réponse évidente est la nécessité résultant de la pression exercée sur les deux pays par Donald Trump, par le biais des sanctions et des droits de douane, ainsi que de leurs intérêts communs représentés par le gazoduc Nordstream 2.

Et tout ce que cela implique.

Tom Luongo Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone

vendredi, 29 mars 2019

The Rise of Unfreedom in the West

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The Rise of Unfreedom in the West

Our tradition of free debate, the sine qua non of democratic life, is increasingly under attack in academia, the media, and politics.

 
Andrew A. Michta is the dean of the College of International and Security Studies at the George C. Marshall European Center for Security Studies. Views expressed here are his own.

Europe: la Chine attaque l'Amérique!

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Europe: la Chine attaque l'Amérique!

 
 

Parallèlement à la Russie qui accueille en ce moment même le président libanais, quitte à inquiéter très sérieusement Américains et Israéliens qui ont peur de voir de riches réserves gazières quitter la côte israélienne de la Méditerranée pour se diriger vers la côte libanaise, la Chine a lancé cette semaine une terrifiante offensive contre les États-Unis en plein cœur de l’Europe « américanisée ».

Cette Europe qui s’accroche toujours au modèle américain, à l’OTAN ne voyant plus que le géant aux pieds d’argile qu’est l’Amérique, s’effondre comme un château de cartes.

En Italie, le président Xi Jinping a réussi un coup de maître. Faisant miroiter d’énormes intérêts que l’Italie, parent pauvre de l’Europe de l’Ouest a à gagner, il a mis la main sur les ports et les aéroports italiens et a fini par convaincre les Italiens d’adhérer à la route de la soie. Ce concept qui terrorise les Américains, ne devait pas trop plaire à Emmanuel Macron, représentant pur et dur de l’atlantisme moribond. Et pourtant, arrivé à Nice, en fin stratège militaire qu’il est, Jinping a su trouver les mots et les « sommes » pour séduire Jupiter qu’accompagnait l’Allemande Merkel et l’européiste, Junker.

Bien que la Macronie ait apposé une fin de non-recevoir catégorique au méga-projet « l’Initiative route et ceinture (BRI) », son président avait convié à Paris la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, rien que pour avoir un sommet tripartite avec Xi. Cette rencontre a réuni les trois plus puissants personnages de l’Union Européenne face au numéro un chinois.

Des sources proches des pourparlers, citées par Sputnik, affirment que la partie chinoise a tenté de dissuader l’Europe de recourir à des sanctions et que la dynamique sanctionnelle déclenchée par Washington vise avant tout les intérêts européens. Le président chinois a aussi encouragé la France à emboîter le pas à l’Italie dans le cadre de la BRI. Et cet encouragement est passé par d’alléchants contrats auxquels même la Macronie n’a pas pu dire non.

«La Chine et la France ont signé un contrat de 30 milliards d’euros pour la livraison à Pékin de 300 avions Airbus. C’est sans doute le résultat le plus tangible de la visite de Xi Jinping à Paris. Il témoigne de la confiance de la Chine envers Airbus, ce qui est particulièrement important sur fond de problèmes avec les appareils de Boeing et alors que les États-Unis multiplient leurs offensives contre l’industrie aéronautique française en imposant aux pays européens leurs F-14, leurs F-16 ou encore leurs F-35 …

 » Qu’a-t-elle la France à s’obstiner à refuser la perspective particulièrement prometteuse que lui offre la BRI ? La semaine dernière, le président US a porté un nouveau coup dur à l’OTAN en ouvrant grand ses portes au Brésil, un pays qui ne fait pas partie de l’axe transatlantique. La décision a été prise sans consultation avec les membres de l’Alliance dont la France qui s’est toutefois soumise aux exigences militaires des États-Unis. Dans presque tous les dossiers militairo-sécuritaires, de la Syrie au Yémen en passant par l’Irak voire l’Iran, la France de Macron s’est totalement alignée sur Washington pour n’avoir in fine que le mépris et l’irrespect de l’administration US, se demande Hanif Ghafari, interrogé par Press TV.

« Une chose est néanmoins sûre : le départ du Brésil de BRICS se fera rudement ressentir par les puissances qui en font partie. La Chine prépare sa revanche : elle vise le cœur même de l’alliance atlantiste et anticipe la perspective d’un BRICS sans le Brésil. Pékin travaille à remplacer l’Union Européenne par une Union eurasiatique et la France finira, elle aussi par comprendre que ses intérêts résident en Asie et non pas à l’autre côté de l’Atlantique ».


- Source : Pars Today (Iran)

mercredi, 27 mars 2019

La défaite américaine et le le retour de l’empire des steppes

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La défaite américaine et le le retour de l’empire des steppes

 
Ex: https://www.geopolitica.ru

Ecrabouillement américain face aux soviets et aux chinois : le poing par Philippe Grasset (dans une mer de sarcasmes et par la Rand Corporation en personne). Problème : ils n’ont pas de solutions…A compléter avec les propos de Bayan-Orson Welles (la rose noire, 1950) ; les flèches (les missiles) valent mieux que les armures (les porte-avions). Pour comprendre l’empire des steppes, lire Grousset sur classiques.uqac.ca.

L’USS Pentagone et sa Mer des Sargasses

12 mars 2019 – La communauté des experts, aussi bien férue de l’objet de leur expertise que des relations publiques, commence à  s’alarmer des progrès russes et chinois en matière d’armement ; mais  piano pianissimo, cette alarme, au rythme postmoderne, bien que les termes et les trouvailles qui la justifient effraient les experts eux-mêmes.

Il s’agit essentiellement, pour notre propos de ce jour, d’un rapport suivant une simulation particulièrement sophistiquée de la  RAND Corporation. C’est un événement important, qui devrait faire autorité à Washington : la RAND est le  think tanks  US le plus prestigieux et le plus influent pour les questions techniques de la communauté de sécurité nationale ; basée en Californie et dominant le domaine de l’expertise technique depuis 1948 (date de sa création), directement connectée à l’USAF et à l’industrie d’armement (officiellement, c’est la firme Douglas, agissant comme faux-masque de l’USAF, qui créa la RAND). Ses analyses reflètent et inspirent à la fois les conceptions des milieux experts des forces armées : une étude de la RAND ainsi présentée publiquement fait autorité et indique selon les normes de la communication ce que le Pentagone et la communauté de sécurité nationale pensent et doivent penser à la fois.

En effet, RAND est venue à Washington présenter un rapport très technique sur des simulations d’une Troisième Guerre mondiale au CNAS (Center for a New American Security), autre  think tank  mais plus doué en relations publiques et établi en 2007 pour présenter une vision “bipartisane” de la  politiqueSystème suivie par les USA ; c’est-à-dire, un institut recyclant la politique-neocon  habillé d’une parure de consensus washingtonien dans le sens évidemment belliqueux qu’on imagine. La séance d’information a été rapportée par divers médias, et nous citons aussi bien ZeroHedge.com que SouthFront.org.

Le rapport, présenté  le 7 mars, envisage divers scénarios des engagements au plus haut niveau des USA contre la Russie ou contre la Chine. Le verdict est peu encourageant : “Nous nous ferons péter le cul !” : « “Dans nos simulations, lorsque nous affrontons la Russie et la Chine, les Bleus  [les USA]  se font péter le cul”, a déclaré jeudi l’analyste de RAND David Ochmanek. “Nous perdons beaucoup de gens, nous perdons beaucoup d’équipements. Nous n’atteignons généralement pas notre objectif d’empêcher l’agression de la part de l’adversaire”, a-t-il averti. »

Et pour suivre, sur l’état général des conclusions du rapport : « Alors que la Russie et la Chine développent des chasseurs de cinquième génération et des missiles hypersoniques, “nos éléments reposant sur des infrastructures de base sophistiquées, telles que des pistes et des réservoirs de carburant, vont connaître de graves difficultés”, a déclaré Ochmanek. “Les unités navales de surface vont également connaître de graves difficultés”

» “C’est pourquoi le budget 2020 présenté la semaine prochaine prévoit notamment de retirer du service actif le porte-avions USS Truman plusieurs décennies à l’avance, et d’annuler une commande de deux navires amphibies de débarquement, comme nous l’avons signalé. C’est aussi pourquoi le Corps des Marines achète la version à décollage vertical du F-35, qui peut décoller et atterrir sur des pistes aménagées très petites et très rustiques, mais la question de savoir comment entretenir en état de fonctionnement un avion de très haute technologie dans un environnement de très basse technologie reste une question sans réponse”, selon le site Breaking Defence… »

Certains points spécifiques des équipements par rapport aux simulations de la RAND font l’objet de précisions et d’observations, – en général très critiques, parce que personne ne semble satisfait de l’état des forces et de leurs capacités en cas de conflit. On en signale ici l’une et l’autre, par ailleurs sur des sujets déjà connus, et avec des conclusions qui n’étonneront personne, dans tous les cas parmi les lecteurs de dedefensa.org.

  • Le F-35, l’inépuisable JSF. On a lu plus haut cette remarque selon laquelle le F-35B des Marines à décollage vertical (ADAC/ADAV) trouvait sa justification dans les conditions dévastées pour les USA d’un conflit à venir, mais qu’on doutait grandement qu’il puisse jouer un grand rôle opérationnel à cause de l’extrême complexité de l’entretien opérationnel de l’avion dans un tel environnement. Un autre intervenant ajoute cette remarque, où l’on pourrait voir une ironie désabusée :

« “Dans tous les scénarios auxquels j’ai eu accès”, a déclaré Robert Work, ancien secrétaire adjoint à la Défense ayant une grande expérience des exercices opérationnels, “le F-35 est le maître du ciel quand il parvient à s’y trouver mais il est détruit au sol en grand nombre”. » Cette remarque, d’ailleurs bien trop follement optimiste sinon utopiste (ou ironique ?) pour les capacités du F-35 lorsqu’il parvient à se mettre en position de combat aérien, marque surtout la prise en compte de la fin de l’ Air Dominance pour l’USAF et les forces aériennes US en général, du fait de la puissance nouvelle acquise notamment par les Russes, suivis par les Chinois en pleine expansion militaire.

  • La décision de retrait et de mise en réserve (“mise en cocon”) du porte-avions USS Truman, annoncée au début du mois, a  d’abord été présentéecomme une manœuvre de l’US Navy pour obtenir un budget supplémentaire pour garder cette unité en service actif et poursuivre en même temps la construction des deux premiers classes USS  Gerald R. Ford, toujours  aussi catastrophiques et empilant délais sur augmentation de coût. (On cite le précédent d’une manœuvre similaire lorsque la Navy avait prévu de faire subir le même sort au USS  George-Washington  en 2012, la Maison-Blanche allouant avec le soutien du Congrès les fonds nécessaires pour éviter cette réduction de la flotte des onze porte-avions de la Navy.) La Navy économiserait jusqu’à $30 milliards en écartant le  Truman  qui va bientôt entrer en refonte de mi-vie s’il reste en service (un travail très complexe, coûteux et long : 2024-2028).

Mais on voit que la RAND suscite une explication qu’elle renforce d’autres constats, qui impliquerait que la Navy estime le danger des nouvelles armes hypersoniques trop grand pour continuer à mettre toute sa puissance stratégique sur les porte-avions. Venant de la RAND, avec tout son crédit, la chose doit être considérée sérieusement, pour marquer combien les USA commenceraient à prendre conscience de la puissance de leurs adversaires stratégiques du fait de la percée majeure constituée par les missiles hypersoniques.

  • Un autre exemple des insuffisances considérables débusquées par la RAND concerne la couverture anti-aérienne des forces terrestres. Les experts du think tank ont fait leur compte, ce qui est illustré par cette remarque :

« … Si l’on se base sur une situation purement hypothétique [selon les moyens actuels], “si nous partions en guerre en Europe, il y aurait une unité de [missiles sol-air de défense aérienne] Patriot qui serait disponible pour y être envoyée, pour être déployée à la base de Ramstein. Et c’est tout”, dit Work avec amertume. L’US Army compte 58 brigades de combat mais ne dispose d’aucune capacité de défense anti-aérienne et antimissile pour les protéger contre des attaques de missiles venues de la Russie. »

Cette situation US est en complet contraste avec celle des Russes, qui intègrent dans leurs forces terrestres des unités de défense anti-aérienne chargées de la protection des forces en campagne. C’est d’ailleurs autant une question de moyens qu’une question structurelle et même psychologique. Les forces armées US ont toujours fonctionné depuis 1945 selon le principe qu’elles disposaient d’une totale domination aérienne qui jouaient un rôle d’interdiction quasi-impénétrable. Cette situation est très largement mise en cause aujourd’hui, notamment avec les progrès russes en matière d’A2/AD («  [Z]ones dite A2/AD, ou Anti-Access/Area-Denial ; c’est-à-dire des sortes de No-Fly-Zone pour l’aviation ennemie, du fait des moyens russes parfaitement intégrés de détection, de brouillage et de contrôle électroniques, et de destruction, qui transforment toute incursion aérienne ennemie dans ces zones en un risque inacceptable »).

Non seulement les forces US sont affaiblies, non seulement l’apparition des missiles hypersoniques donne aux Russes une puissance de feu d’une catégorie nouvelle et révolutionnaire, mais en plus la structure des forces US est fondée sur le postulat psychologique quasi-inconscient (“inculpabilité-indéfectibilité”) de la supériorité US (notamment aérienne) qui dispense ces forces d’avoir une défense organique puissante.

USA : le Russiagate est vraiment fini

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USA : le Russiagate est vraiment fini

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Le 12 février, nous écrivions "Le Russiagate est fini". La conclusion était basée sur un rapport de NBC :

Après deux ans d'enquête et 200 entretiens, le Comité du renseignement du Sénat touche à la fin de son enquête sur les élections de 2016, n'ayant encore trouvé aucune preuve directe d'un complot entre la campagne Trump et la Russie, selon les démocrates et les républicains siégeant au comité. ... Les démocrates et autres opposants à Trump pensent depuis longtemps que l'avocat spécial Robert Mueller et les enquêteurs du Congrès découvriront de nouvelles preuves plus explosives de la coordination de la campagne de Trump avec les Russes. Mueller pourrait encore le faire, bien que des sources au ministère de la Justice et au Congrès affirment qu’il est sur le point de clore son enquête.

La théoricienne du complot Russiagate, Marcy Wheeler, a répliqué en affirmant que le complot avait été prouvé lorsque l’ancien chef de campagne de Trump, Paul Manafort, a admis avoir transmis des données sur les élections à des contacts ukrainiens/russes pour s’attirer les faveurs d’un oligarque russe auquel il devait de l’argent. Mais les crimes de Manafort, pour lesquels il a plaidé coupable le 14 septembre 2018, n’avaient rien à voir avec « la Russie » ou avec Trump et seulement de manière indirecte avec sa campagne électorale : Vendredi, Manafort, directeur de la campagne présidentielle de Donald Trump de juin à août 2016, a plaidé coupable devant le tribunal fédéral de Washington pour deux accusations de complot contre les États-Unis, dont un pour lobbying, impliquant des crimes financiers et la violation de l'enregistrement comme agent étranger, et l'autre impliquant la subornation de témoins. Dans le cadre de son plaidoyer, Manafort a également reconnu sa culpabilité dans des accusations de fraude bancaire qu'un jury fédéral de Virginie avait portées contre lui le mois dernier.

Marcy, la théoricienne du Russiagate, et d’autres personnes espéraient que l’enquête sur Mueller aboutirait à un acte d’accusation qui justifierait le non-sens absolu qu’elle-même et d’autres ont promu pendant plus de deux ans. Il y a à peine deux semaines, l’ancien directeur de la CIA, John Brennan, qui a probablement conspiré avec les services de renseignement britanniques pour confondre Trump dans l’affaire avec la Russie, a déclaré qu’il s’attendait à de nouvelles inculpations : Lors de son apparition sur MSNBC le 5 mars 2019, Brennan a prédit que Mueller émettrait des actes d’accusation pour «complot criminel» impliquant Trump ou les activités de ses collaborateurs lors de l’élection de 2016.

Ce dernier espoir des jusqu’au-boutistes est maintenant évanoui : Le Conseil spécial, Robert S. Mueller III, a remis vendredi au procureur général, William P. Barr, un rapport très attendu, mettant ainsi fin à son enquête sur l'ingérence de la Russie dans l'élection de 2016 et l'éventuelle entrave à la justice par le président Trump. ... Un haut responsable du département de la justice a déclaré que le Conseil spécial n’avait recommandé aucune autre inculpation - une révélation applaudie par les partisans de Trump, alors même que d’autres enquêtes liées à celui-ci se poursuivent dans d’autres départements du département de la justice. ... Aucun des Américains inculpés par Mueller n'est accusé d'avoir conspiré avec la Russie pour s'immiscer dans l'élection - la question centrale du travail de Mueller. Au lieu de cela, ils ont plaidé coupable pour divers crimes, notamment d'avoir menti au FBI. L’enquête s’est terminée sans inculpation de plusieurs personnalités qui étaient sous la surveillance de Mueller depuis longtemps. ...
 

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Les conclusions du rapport Mueller seront publiées par le ministère de la Justice dans les prochains jours.

Que les promoteurs du Russiagate aient eu tort de gober les conneries du dossier Steele et les mensonges sur les « hackers russes » propagés par les marchands de sornettes Clapper et Brennan était évident depuis longtemps. En juin 2017, nous avions évoqué un long article du Washington Post sur le piratage présumé des élections en Russie et avions remarqué : En lisant cet article, il devient clair - mais jamais dit - que l'unique source de cette affirmation de Brennan sur le "piratage russe" en août 2016 est l'absurde dossier Steele, un ex-agent du MI6 payé très cher pour des recherches sur Trump commanditées par l'opposition. La seule autre "preuve" de "piratage russe" est le rapport Crowdstrike sur le "piratage" de la DNC. Crowdstrike qui soutient un agenda nationaliste ukrainien, a été embauché par la DNC et a dû se rétracter sur d'autres affirmations de "piratage russe" et personne d'autre n'a été autorisé à consulter les serveurs de la DNC. Autrement dit : Toutes les allégations de "piratage russe" reposent uniquement sur les "preuves" de deux faux rapports.

Le dossier Steele était une fausse étude commanditée par l’opposition et colportée par la campagne Clinton, John McCain et un groupe de types de la sécurité nationale anti-Trump. La prétention encore non prouvée de « piratage russe » visait à détourner l’attention du fait que Clinton et la DNC se soient entendus pour éliminer Bernie Sanders de la candidature. L’affirmation stupide selon laquelle la pêche aux clics sur internet, par une entreprise commerciale de Leningrad, aurait été une « campagne d’influence russe », a été conçue pour expliquer la défaite électorale de Clinton contre l’autre pire candidat de tous les temps. L’enquête Russiagate visait à empêcher Trump de nouer de meilleures relations avec la Russie, comme il l’avait promis lors de sa campagne.

Tout cela a connu un certain succès parce que des médias et blogueurs étaient heureux de vendre de telles absurdités sans les mettre dans un contexte plus large.

Il est grand temps de lancer une enquête approfondie sur Brennan, Clapper, Comey et la campagne Clinton afin de mettre en lumière le complot qui a conduit au dossier Steele, à l’enquête du FBI qui en découla, et à toutes les autres conneries qui ont suivi cette enquête.

En ce qui concerne Marcy Wheeler, Rachel Maddow et d’autres imbéciles qui ont colporté l’absurdité du Russiagate, je suis d’accord avec l’avis de Catlin Johnstone : Tous les politiciens, tous les médias, tous les experts de Twitter et tous ceux qui ont gobé cette giclée débile de bouses de vaches se sont officiellement discrédités à vie. ... Les personnes qui nous ont conduits dans ces deux années de folie du Russiagate sont les dernières personnes que quiconque devrait jamais écouter pour déterminer l’orientation future de notre monde.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone

mardi, 26 mars 2019

The Great Delusion: Liberal Dreams and International Realities

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The Great Delusion: Liberal Dreams and International Realities

An excerpt from John Mearsheimer's latest book.
by John J. Mearsheimer

Ex: https://nationalinterest.org

Editor’s Note: This is an excerpt from the new book The Great Delusion : Liberal Dreams and International Realities by John Mearsheimer.

Liberal hegemony is an ambitious strategy in which a state aims to turn as many countries as possible into liberal democracies like itself while also promoting an open international economy and building international institutions. In essence, the liberal state seeks to spread its own values far and wide. My goal in this book is to describe what happens when a power­ful state pursues this strategy at the expense of balance­-of­-power politics.

Many in the West, especially among foreign policy elites, consider liberal hegemony a wise policy that states should axiomatically adopt. Spreading liberal democracy around the world is said to make eminently good sense from both a moral and a strategic perspective. For starters, it is thought to be an excellent way to protect human rights, which are sometimes seri­ously violated by authoritarian states. And because the policy holds that liberal democracies do not want to go to war with each other, it ultimately provides a formula for transcending realism and fostering international peace. Finally, proponents claim it helps protect liberalism at home by eliminating authoritarian states that otherwise might aid the illiberal forces that are constantly present inside the liberal state.

This conventional wisdom is wrong. Great powers are rarely in a position to pursue a full­-scale liberal foreign policy. As long as two or more of them exist on the planet, they have little choice but to pay close attention to their position in the global balance of power and act according to the dictates of realism. Great powers of all persuasions care deeply about their survival, and there is always the danger in a bipolar or multipolar system that they will be attacked by another great power. In these circumstances, liberal great powers regularly dress up their hard­-nosed behavior with liberal rhe­toric. They talk like liberals and act like realists. Should they adopt liberal policies that are at odds with realist logic, they invariably come to regret it. But occasionally a liberal democracy encounters such a favorable balance of power that it is able to embrace liberal hegemony. That situation is most likely to arise in a unipolar world, where the single great power does not have to worry about being attacked by another great power since there is none. Then the liberal sole pole will almost always abandon realism and adopt a liberal foreign policy. Liberal states have a crusader mentality hard­-wired into them that is hard to restrain.

Because liberalism prizes the concept of inalienable or natural rights, committed liberals are deeply concerned about the rights of virtually every individual on the planet. This universalist logic creates a powerful incen­tive for liberal states to get involved in the affairs of countries that seriously violate their citizens’ rights. To take this a step further, the best way to ensure that the rights of foreigners are not trampled is for them to live in a liberal democracy. This logic leads straight to an active policy of regime change, where the goal is to topple autocrats and put liberal democracies in their place. Liberals do not shy from this task, mainly because they often have great faith in their state’s ability to do social engineering both at home and abroad. Creating a world populated by liberal democracies is also thought to be a formula for international peace, which would not just eliminate war but greatly reduce, if not eliminate, the twin scourges of nuclear prolifera­tion and terrorism. And lastly, it is an ideal way of protecting liberalism at home.

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This enthusiasm notwithstanding, liberal hegemony will not achieve its goals, and its failure will inevitably come with huge costs. The liberal state is likely to end up fi endless wars, which will increase rather than reduce the level of conflict in international politics and thus aggravate the problems of proliferation and terrorism. Moreover, the state’s militaristic behavior is almost certain to end up threatening its own liberal values. Liber­alism abroad leads to illiberalism at home. Finally, even if the liberal state were to achieve its aims—spreading democracy near and far, fostering eco­nomic intercourse, and creating international institutions—they would not produce peace.

The key to understanding liberalism’s limits is to recognize its relation­ship with nationalism and realism. This book is ultimately all about these three isms and how they interact to affect international politics.

Nationalism is an enormously powerful political ideology. It revolves around the division of the world into a wide variety of nations, which are formidable social units, each with a distinct culture. Virtually every nation would prefer to have its own state, although not all can. Still, we live in a world populated almost exclusively by nation­-states, which means that liberalism must coexist with nationalism. Liberal states are also nation­states. There is no question that liberalism and nationalism can coexist, but when they clash, nationalism almost always wins.

The influence of nationalism often undercuts a liberal foreign policy. For example, nationalism places great emphasis on self­-determination, which means that most countries will resist a liberal great power’s efforts to inter­fere in their domestic politics—which, of course, is what liberal hegemony is all about. These two isms also clash over individual rights. Liberals be­lieve everyone has the same rights, regardless of which country they call home. Nationalism is a particularist ideology from top to bottom, which means it does not treat rights as inalienable. In practice, the vast majority of people around the globe do not care greatly about the rights of individu­als in other countries. They are much more concerned about their fellow citizens’ rights, and even that commitment has limits. Liberalism oversells the importance of individual rights.

mears-tragedy.jpgLiberalism is also no match for realism. At its core, liberalism assumes that the individuals who make up any society sometimes have profound differences about what constitutes the good life, and these differences might lead them to try to kill each other. Thus a state is needed to keep the peace. But there is no world state to keep countries at bay when they have profound disagreements. The structure of the international system is anar­chic, not hierarchic, which means that liberalism applied to international politics cannot work. Countries thus have little choice but to act according to balance-­of-­power logic if they hope to survive. There are special cases, however, where a country is so secure that it can take a break from realpolitik and pursue truly liberal policies. The results are almost always bad, largely because nationalism thwarts the liberal crusader.

My argument, stated briefly, is that nationalism and realism almost always trump liberalism. Our world has been shaped in good part by those two powerful isms, not by liberalism. Consider that five hundred years ago the political universe was remarkably heterogeneous; it included city­-states, duchies, empires, principalities, and assorted other political forms. That world has given way to a globe populated almost exclusively by nation­ states. Although many factors caused this great transformation, two of the main driving forces behind the modern state system were nationalism and balance-­of-­power politics.

The American Embrace of Liberal Hegemony

This book is also motivated by a desire to understand recent American foreign policy. The United States is a deeply liberal country that emerged from the Cold War as by far the most powerful state in the international system. 1 The collapse of the Soviet Union in 1991 left it in an ideal position to pursue liberal hegemony. 2 The American foreign policy establishment em­ braced that ambitious policy with little hesitation, and with abundant opti­mism about the future of the United States and the world. At least at first, the broader public shared this enthusiasm.

The zeitgeist was captured in Francis Fukuyama’s famous article, “The End of History?,” published just as the Cold War was coming to a close. 3 Liberalism, he argued, defeated fascism in the first half of the twentieth century and communism in the second half, and now there was no viable alternative left standing. The world would eventually be entirely populated by liberal democracies. According to Fukuyama, these nations would have virtually no meaningful disputes, and wars between great powers would cease. The biggest problem confronting people in this new world, he suggested, might be boredom.

It was also widely believed at the time that the spread of liberalism would ultimately bring an end to balance-­of-­power politics. The harsh security competition that has long characterized great-­power relations would dis­appear, and realism, long the dominant intellectual paradigm in inter­national relations, would land on the scrap heap of history. “In a world where freedom, not tyranny, is on the march,” Bill Clinton proclaimed while campaigning for the White House in 1992, “the cynical calculus of pure power politics simply does not compute. It is ill­-suited to a new era in which ideas and information are broadcast around the globe before ambas­sadors can read their cables.”

Probably no recent president embraced the mission of spreading liberal­ism more enthusiastically than George W. Bush, who said in a speech in March 2003, two weeks before the invasion of Iraq: “The current Iraqi re­gime has shown the power of tyranny to spread discord and violence in the Middle East. A liberated Iraq can show the power of freedom to transform that vital region, by bringing hope and progress into the lives of millions. America’s interests in security, and America’s belief in liberty, both lead in the same direction: to a free and peaceful Iraq.” Later that year, on September 6, he proclaimed: “The advance of freedom is the calling of our time; it is the calling of our country. From the Fourteen Points to the Four Freedoms, to the Speech at Westminster, America has put our power at the service of principle. We believe that liberty is the design of nature; we be­lieve that liberty is the direction of history. We believe that human fulfill­ment and excellence come in the responsible exercise of liberty. And we believe that freedom—the freedom we prize—is not for us alone, it is the right and the capacity of all mankind.”

Something went badly wrong. Most people’s view of U.S. foreign policy today, in 2018, is starkly different from what it was in 2003, much less the early 1990s. Pessimism, not optimism, dominates most assessments of America’s accomplishments during its holiday from realism. Under Presi­dents Bush and Barack Obama, Washington has played a key role in sow­ing death and destruction across the greater Middle East, and there is little evidence the mayhem will end anytime soon. American policy toward Ukraine, motivated by liberal logic, is principally responsible for the ongo­ing crisis between Russia and the West. The United States has been at war for two out of every three years since 1989, fighting seven different wars. We should not be surprised by this. Contrary to the prevailing wisdom in the West, a liberal foreign policy is not a formula for cooperation and peace but for instability and conflict.

In this book I focus on the period between 1993 and 2017, when the Clinton, Bush, and Obama administrations, each in control of American foreign policy for eight years, were fully committed to pursuing liberal hegemony. Although President Obama had some reservations about that policy, they mattered little for how his administration actually acted abroad. I do not consider the Trump administration for two reasons. First, as I was finishing this book it was difficult to determine what President Trump’s foreign policy would look like, although it is clear from his rhetoric during the 2016 campaign that he recognizes that liberal hegemony has been an abject failure and would like to abandon key elements of that strategy. Second, there is good reason to think that with the rise of China and the res­urrection of Russian power having put great power politics back on the table, Trump eventually will have no choice but to move toward a grand strategy based on realism, even if doing so meets with considerable resistance at home.

John J. Mearsheimer is the R. Wendell Harrison Distinguished Service Professor of Political Science at the University of Chicago. His many books include The Tragedy of Great Power Politics and Conventional Deterrence .

lundi, 25 mars 2019

Lucien Cerise: Manuel de combat pour la guerre cognitive totale

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Lucien Cerise: Manuel de combat pour la guerre cognitive totale

par Iure Rosca

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com 

Préface à la traduction en roumain de « Neuro-Pirates – Réflexions sur l’ingénierie sociale », de Lucien Cerise.
Ce livre de Lucien Cerise est le premier de cet auteur traduit en roumain. Il succède aux autres ouvrages édités par l’Université Populaire et signés par nos amis français, que j’ai le plaisir de rappeler ici : Jean Parvulesco « Vladimir Poutine et l’Eurasie » ; Hervé Juvin « Le Mur de l’Ouest n’est pas tombé » ; Jean-Michel Vernochet « La guerre civile froide : La théogonie républicaine de Robespierre à Macron » ; Ivan Blot « L’Europe colonisée » ; Valérie Bugault & Jean Rémi « Du Nouvel Esprit des Lois et de la Monnaie » ; Youssef Hindi « La Mystique de la Laïcité. Généalogie de la religion républicaine de Junius Frey à Vincent Peillon » ; Hervé Juvin « Le gouvernement du désir ».

Ces livres ont été publiés en l’espace d’un an. Ils appartiennent au même courant d’opinion antimondialiste et manifestent des approches similaires face aux grands défis de notre époque. Tous ces auteurs français font partie de ce qu’on appelle depuis quelques années la nouvelle dissidence occidentale qui a émergé dans le monde de l’après-guerre froide.
 
L’émergence de ces travaux fondamentaux est d’une urgence extrême non seulement pour la France, mais aussi pour l’espace roumanophone car nous sommes également touchés par les effets néfastes d’un Occident globalisé, destructeur et même génocidaire. La capacité à pénétrer l’essence d’un système pervers, extrêmement complexe et multiforme, associé, non sans raison, avec l’empire mondial américain et son extension régionale, l’Union Européenne, est totalement censurée par l’oligarchie mondialiste, qui parvient à imposer un contrôle quasi total de la perception de la réalité.

Dans cette perspective, le livre de notre ami Lucien Cerise fait partie des outils de combat de la guerre cognitive, culturelle, idéologique, identitaire et psychologique en cours, qui englobe tous les peuples du monde sans exception. En ce sens, l’avertissement de Lucien Cerise – « La Patrie est en danger ! Toutes les Patries sont en danger ! » – est pleinement justifié et définit aussi clairement que possible l’abîme où toute l’humanité risque de s’effondrer si nous n’agissons pas.

LC-oli.jpgComme toute guerre, celle dans laquelle nous sommes engagés sans réserve nécessite une mobilisation totale. Et comme toujours dans l’histoire, les porteurs de vérité sont peu nombreux. Ils assument le rôle d’avant-garde sur le front intellectuel, portant la responsabilité morale d’une élite authentique pour guider leur nation vers l’objectif consistant à se libérer du joug de ce nouveau type d’impérialisme extraterritorial. Lucien Cerise défie fermement toutes les limitations imposées par la dictature du politiquement correct. Il parvient à détruire jusque dans les moindres détails le fonctionnement du Système dans ses dimensions géopolitique, militaire, économique, culturelle, éducative et médiatique. L’enjeu de cette guerre totale est sans précédent dans l’histoire de l’humanité puisqu’il s’agit, ni plus ni moins, de sauver l’espèce humaine de son extinction.

Les efforts de certains chercheurs comme Lucien Cerise méritent d’être appréciés non seulement pour leur érudition exceptionnelle, qui transcende toute approche sectorielle, partielle ou incomplète. Rassembler le puzzle d’une réalité aussi complexe et protéiforme, qui tente de masquer sa véritable essence sous une infinie variété de masques honorables, n’est possible que pour quelqu’un qui comprend que seul le dépassement des spécialités professionnelles et l’étude de tous les domaines de la vie humaine sont à même de leur offrir une image à peu près complète du monde. Son mérite est avant tout d’assumer la vocation de combattant qui connaît très bien son ennemi et sait à quel point il est puissant, perfide et dangereux.

Une des tâches de premier ordre assumée par l’auteur est donc de définir l’ennemi. Vous ne pouvez vaincre que si vous savez que le principe « Connais ton ennemi » est à la base de toute victoire. Qui sont les neuro-pirates, qui essayent de pirater notre capacité de réflexion, quels sont leurs enjeux, et comment les repousser ? Telle est la tâche de ce travail. Comment gérer les perceptions et le comportement, comment appliquer des techniques d’ingénierie sociale négative, quels sont les moyens de briser par effraction nos codes culturels, comment sont dissous nos traditions, l’identité, les frontières morales et les attachements naturels à la patrie et à notre prochain, tout cela est décodé de manière pertinente par Lucien Cerise. Mais pour renforcer, ou peut-être même retrouver, la capacité d’assimiler ces vérités bouleversantes, l’auteur nous invite à un premier acte de volonté minimum, consistant à sortir de la portée de l’arme de destruction massive qu’est la télévision.


Comme nous sommes dans une guerre culturelle, il faut veiller à notre hygiène mentale. À ce niveau, la priorité absolue, qui ne coûte rien, au contraire, consiste à se séparer définitivement de la télévision, qui reste le principal outil de management de perceptions du Pouvoir. Pour ma part, je n’ai plus de télé depuis des années, ça change la vie, car vous n’êtes plus sous l’influence virtualisante des images qui vous dépossèdent de votre propre vie mentale. Sans télé, vous récupérez votre souveraineté cognitive, vous gagnez en ”réalisme”, en capacité à voir les choses comme elles sont, et pas comme on vous dit de les voir.

Ayant pour ma part cessé de regarder la télévision, j’ai eu le plaisir de découvrir, parmi les amis de différents pays que j’ai acquis au cours des dernières années, des personnalités tout aussi hostiles que moi au téléviseur. C’est pourquoi mon ami français, Lucien Cerise, m’est cher notamment pour avoir rejeté la télévision qui détruit la capacité intellectuelle, anéantit l’esprit critique et liquéfie toute possibilité d’exercice intellectuel autonome et pertinent. J’insiste sur le besoin urgent de briser la fascination et la séduction exercées par les instruments de contrôle mental audiovisuel, car sans prendre nos distances face à ce tsunami cognitif, nous ne pouvons pas vraiment vaincre la condition « d’esclave heureux » (Ovidiu Hurduzeu). Heureux, car il ne réalise pas sa condition d’esclave. La suggestion de l’auteur est tout à fait valable pour les consommateurs de médias moldaves, en particulier pour ceux qui ont l’illusion que si vous regardez une chaîne de télévision opposée au gouvernement, vous obtenez des informations alternatives. Illusions ! Nous ne pouvons l’obtenir que par des sources « dissidentes », sur internet ou, peut-être tout d’abord, dans des livres qui vont au-delà des approches spécialisées.

Tous les efforts des intellectuels de marque, que j’ai découverts au cours des dernières années et dont je recommande les ouvrages aux lecteurs de langue roumaine, visent à clarifier les conditions de la gouvernance par le chaos, pour utiliser une expression pertinente de Lucien Cerise. Dans l’espace ex-communiste, même si nous avons finalement échappé à la dictature cognitive du régime, nous sommes, d’une certaine manière, désavantagés par rapport aux Européens qui vivaient de l’autre côté du « rideau de fer ». Nous avons naïvement pensé que le nouveau régime capitaliste, qui s’est étendu à notre espace, nous apporterait liberté, justice et dignité, tant personnelles que nationales. Mais après trois décennies de capitalisme, nous sommes tombés dans un désastre économique, politique, culturel et avant tout axiologique, bien pire que celui que nous avons connu sous les soviets. L’inertie de la pensée, le confort intellectuel et le manque de perspective empêchent encore beaucoup d’entre nous de réaliser l’ampleur de la catastrophe qui nous frappe. Nous vivons encore avec l’illusion que, pour éliminer un gouvernement corrompu et incompétent, il suffira de voter ou d’organiser des manifestations de masse et que tout sera résolu. Et ce genre de naïveté est un piège extrêmement dangereux.

L’eurolâtrie est encore en pleine vogue dans notre pays. Le message promu par le « nouveau clergé » (experts, analystes, journalistes, politiciens et autres idiots utiles du Système) à propos d’un Occident prospère, d’une Union Européenne vue comme une station terminale de notre succès, d’une démocratie libérale et d’une économie de marché au fonctionnement impeccable à l’Ouest, a des effets dévastateurs. Nous errons dans un faux système de référence et attendons notre salut terrestre en nous référant aux paramètres qu’il impose.

Le livre Neuro-pirates présente également une autre vertu qui peut être d’une grande utilité pour les théoriciens du phénomène identitaire en République de Moldavie. L’auteur analyse soigneusement le concept et la pratique de ce qu’on appelle le conflit triangulé (ou triangulaire), c’est-à-dire la technique d’instrumentalisation d’animosités inconciliables entre divers groupes sociaux présentant des différences identitaires mineures, afin de prendre le contrôle des deux camps belligérants. Le principe du conflit triangulé consiste en la collision des deux angles à la base du triangle, mais avec la préservation obligatoire du caractère anonyme et furtif de l’angle supérieur, qui est à la fois l’instigateur véritable et le bénéficiaire de ce conflit. En d’autres termes, les deux camps sont utilisés à l’aveugle, dans un conflit épuisant et stérile, permettant au sommet supérieur du triangle d’appliquer l’ancien principe impérial « Diviser pour mieux régner ». L’auteur écrit : « Cette ‘division du bas’ s’appuie notamment sur ce que René Girard a repéré sous le terme de ‘rivalité mimétique’ ou ‘capture imaginaire’ dans le vocabulaire de Jacques Lacan. Il s’agit du processus de montée aux extrêmes et de crescendo de violence qui saisit deux acteurs engagés dans un rapport de forces, mécanisme de vengeance et de vendetta parfaitement résumé dans la loi du Talion : ‘Œil pour œil, dent pour dent’. »

LC-maidan.jpgDans notre cas, cela évoque l’exacerbation maladive des obsessions et des traumatismes des communautés roumanophone et russophone en nourrissant des représentations catastrophiques sur certaines périodes historiques. L’une des parties du conflit occupe la place de la victime, et l’autre partie a le rôle de bourreau, chacune des parties ayant sur sa propre identité une perception narcissique en symétrie inversée dans une structure duelle où les rôles bourreau-victime sont interchangeables. Ainsi, le sentiment de frustration suscité par une injustice réelle ou imaginaire se transforme en une soif de vengeance par annihilation du groupe bourreau, associé au mal absolu. Ce procédé d’ingénierie sociale négative connaît un succès majeur en République de Moldavie en raison de la rivalité d’influence entre la Russie et la Roumanie sur notre territoire, historiquement explicable, mais contre-productive et exploitée avec perversité à l’heure actuelle. Par conséquence, les russophiles qui sont obligatoirement roumanophobes se confrontent avec les roumanophiles qui sont par définition russophobes, les moldovenistes sont en guerre avec les unionistes identitaires, et cela dure depuis des décennies. Et les efforts d’éclaircissements sur le caractère stérile de cette guerre d’identité sans fin sont rejetés avec agressivité et dans l’opacité totale. Qui profite de cette bataille absurde de deux camps également perdants ? Il existe deux niveaux d’acteurs gagnants qui restent plus ou moins dissimulés.

Le premier groupe d’acteurs gagnants de ce conflit triangulé est le plus facile à repérer. Ce sont les politiciens locaux qui partagent aisément l’une des deux niches électorales : la niche des soutiens de la Russie, qui sont automatiquement des adversaires de la Roumanie, et vice versa. Cet état de fait ouvre un champ de manœuvres très large aux manipulateurs. Avec ces tireurs de ficelles locaux, les choses sont claires.

Mais identifier les tireurs des ficelles externes, qui sont les grands profiteurs de ce jeu sordide, est beaucoup plus difficile pour le moment. Ce sont précisément ceux-là qui se tiennent dans le coin supérieur du conflit triangulé, en restant loin des yeux du grand public. Ce sont les centres de pouvoir occidentaux, qui ont tracé le chemin à sens unique qui mène à notre ruine. Nous pouvons appeler cela oligarchie planétaire, corporatocratie, élite mondiale, la mafia des banquiers ou Grand Capital, mais tous ces noms peuvent paraître abstraits et, en outre – horribile dictu ! – être associés avec la « théorie du complot ». Or, nous sommes des gens civilisés et ne croyons pas à l’existence de ce genre des choses. Nous allons donc mentionner les noms des outils institutionnels de cette entité apparemment nébuleuse : l’Union Européenne, les USA, l’OTAN, le FMI, la Banque mondiale, l’Organisation Mondiale du Commerce, le Conseil de l’Europe, la malsaine mafia internationale du « réseau Soros », etc.

Ce sont précisément ces centres de pouvoir qui ont imposé le modèle suivi avec docilité par les sociétés post-communistes. Leurs dogmes sont gardés avec soin, car leur application aux nations captives leur permet une domination sans entrave. Résumons les dogmes du nouveau catéchisme idéologique : économie ultralibérale, soit libre circulation des capitaux, des biens, des services, des personnes et du travail, donc libre-échange sans frontières et sans limites, c’est-à-dire annihilation de la capacité de l’État à se protéger face aux géants économiques étrangers, maintien de la Banque nationale sous contrôle externe (sous prétexte d’être une entité indépendante des autorités politiques nationales), inoculation du féminisme dans les structures politiques et étatiques, « théorie du genre » qui affirme que le sexe n’est qu’une construction sociale artificielle, donc optionnelle, tolérance à l’égard des soi-disant « minorités sexuelles » et du LGBT, planification familiale et stimulation de l’avortement, en fait, un génocide planifié pour réduire la population, etc.

Conclusion : tant que les acteurs politiques nationaux resteront concentrés aveuglément sur les jeux de pouvoir et captifs d’un système de références imposé de l’extérieur comme une norme absolue et indiscutable, alors les prestidigitateurs invisibles au sommet du triangle peuvent être certains que le principe « Diviser pour mieux régner » fonctionnera parfaitement et que la colonie moldave ne déviera pas du chemin qui la mène à l’abattoir.

Or, notre émancipation nationale ne pourra commencer qu’avec l’abandon des anciens et stupides clivages politiques et idéologiques, quand les combattants de cette guerre fratricide se réconcilieront en levant les yeux vers le sommet de la pyramide, surmontant ainsi le conflit triangulé. Réorienter le conflit d’horizontal à vertical, de la base vers le haut, marquera le début de notre chemin vers la conquête de la vraie souveraineté. Gardons à l’esprit que notre souveraineté politique est conditionnée par la souveraineté économique, mais que l’une et l’autre doivent nécessairement être précédées par le rétablissement de la souveraineté cognitive, c’est-à-dire la capacité de raisonner de manière indépendante et en harmonie avec la réalité, et non avec ses simulacres. Les lecteurs qui souhaitent approfondir la compréhension de cette thématique se reporteront au chapitre V de la première partie du livre, intitulé Ingénierie sociale du conflit identitaire, dont voici un extrait pour illustrer notre argumentation : « À l’opposé, l’ingénierie sociale négative consiste à produire de la violence, ou au moins du séparatisme, de l’envie de se séparer. Comment ? Dans un premier temps, en s’appuyant sur ce que Freud a appelé les ‘petites différences narcissiques’ pour les exacerber au maximum et les rendre insupportables. Aucune société n’étant parfaitement homogène, il suffira de repérer les éléments hétérogènes pour les stimuler, les cultiver, les amplifier, les grossir. Rompre la coexistence pacifique de gens qui se ressemblent, mais pas totalement, en soulignant leurs petites différences afin d’aboutir à la constitution de camps tranchés, opposés et irréconciliables. »

Schématiquement, lorsque deux acteurs sociaux se battent, il en existe un troisième, qui tire profit de cette confrontation qu’il a lui-même provoquée. Tel est le véritable enjeu du conflit identitaire qui a été induit artificiellement dans notre espace roumanophone.

Lorsque Lucien Cerise affirme fermement que son pays, la France, pour s’affranchir du statut de colonie, doit immédiatement sortir de l’Union Européenne, de la zone euro, de l’espace Schengen, de l’OTAN et de l’Organisation mondiale du commerce, afin de rétablir ses frontières en appliquant un protectionnisme économique sévère, un grand nombre de lecteurs pourraient subir un véritable choc. Et si oui, alors j’aimerais que ce livre soit considéré comme un traitement du type « thérapie de choc », si nécessaire à nos sociétés tellement déboussolées et intellectuellement colonisées. La fin des tabous sur ces sujets est le moyen le plus direct de retrouver notre santé mentale. Notre dé-provincialisation dépend de notre ouverture sur le monde, d’une capacité d’analyse supérieure, qui devrait dépasser celle des individus qui constitue la faune politique et leurs mercenaires des médias.

Il y a trois décennies, nous espérions nous débarrasser du communisme, perçu comme une malédiction historique. Il est temps aujourd’hui de s’engager activement dans la grande bataille contre le mondialisme. Dès que nous aurons assimilé la vérité soulignée par notre auteur selon laquelle le mondialisme, et non les gouvernements successifs, est la cause première de tous nos malheurs, nous ressentirons également le besoin urgent de faire partie de ce front planétaire de la nouvelle vague de décolonisation des peuples. La ruine économique que nous subissons, le chômage, l’exode massif de la population, le désastre démographique, la corruption, la dépravation morale et l’incapacité de l’État à résoudre les problèmes sociaux les plus élémentaires n’ont pas de causes majeures autres que celles décrites avec brio par Lucien Cerise.

L’auteur souligne que la principale cause de tous les maux est le capitalisme. Le lecteur pourrait se demander avec inquiétude : « Comment ? Allons-nous revenir au communisme ? » Non. Lucien Cerise explique à juste titre que les anciens systèmes politiques et idéologiques qui dominaient le XXème siècle n’ont aucun avenir. Ni le communisme, ni le nazisme ou le fascisme, ni même le capitalisme. C’est la clé ! Lucien Cerise propose une approche non idéologique, réaliste et de bon sens. Toute organisation sociale qui possède au moins une valeur supérieure à l’argent est meilleure que le capitalisme, dit-il. En effet, n’est-ce pas cet état de fait qui nous exaspère le plus ? N’est-il pas vrai que l’argent fait la loi dans tous les secteurs de la société ? Et quand nous nous révoltons contre les oligarques qui ont émergé après la chute du communisme, nous devons comprendre que les gangsters qui ont accumulé une richesse astronomique à Chișinău ou à Bucarest ne sont qu’une pâle émanation de l’oligarchie financière mondiale.

Penser globalement et agir localement, voici un autre principe précieux souligné par Lucien Cerise. La vraie reconquête de la souveraineté nationale, ou renationalisation de tous les pays ne peut advenir que par un nationalisme authentique, qu’il appelle « nationalisme permaculturel ». Je ne développerai pas ce concept inspiré de l’écologie, vous le trouverez dans le livre. Je tiens simplement à mentionner que j’ai eu l’agréable surprise de trouver des idées dans cet ouvrage que j’avais également soutenues ces dernières années pour la République de Moldavie. Ce genre de nationalisme n’a rien à voir avec l’exclusivisme ethnique. C’est un nationalisme qui ne sépare pas mais qui solidarise autour d’un projet concret consistant à « prendre soin » de la nation. Nous parlons essentiellement de nationalisme économique et de protection de notre peuple contre l’ouverture excessive, qui met toujours en péril les communautés à moyen et à long terme.

L’un des mérites incontestables de ce livre est que l’auteur ne s’arrête pas à la critique de la situation actuelle. Il offre des solutions pratiques pour engager le combat. Comme je l’ai dit, c’est une bataille d’idées, qui peut être pratiquée par tout le monde. Le terme utilisé par la nouvelle dissidence française est la réinformation. Autrement dit, chacun de nous peut contribuer à la désintoxication de son entourage et à l’amélioration intellectuelle de son environnement humain en démasquant les procédés de manipulation de masse. Comment ? En communiquant directement avec nos familles, amis et collègues, en utilisant les réseaux sociaux, en diffusant des informations concernant les sites, les textes et les vidéos qui rétablissent la vérité, en lisant et en popularisant des livres comme celui-ci.

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Je termine par une citation de Lucien Cerise, qui honorerait tout combattant, tout patriote, quels que soient le lieu et le moment historique où ces paroles sont prononcées : « Notre ennemi doit le savoir : nous allons nous battre. Cela tombe bien car nous aimons nous battre, nous adorons ça, nous n’aimons que ça, c’est le sens de notre vie, nous n’arrêterons donc jamais car la paix nous ennuie. Le combat, le polemos, c’est la vie, comme disait Héraclite. C’est dans le combat que nous nous sentons vivre et que nous sommes heureux. La perspective de l’affrontement nous remplis de bonheur, nous commençons à sourire, et nos yeux brillent quand l’heure de la bataille approche. Et nous ne sommes jamais fatigués, jamais découragés, et nous revenons toujours à l’assaut car la victoire n’est même pas le but, car nous aimons le combat pour le combat et qu’il est en lui-même la récompense. C’est ainsi que ceux qui aiment la vie en tant qu’elle est combat deviennent invincibles et ne peuvent que gagner. Car la victoire, c’est de se battre. »

J’ai trouvé dans ces lignes le même optimisme, le même courage, le même enthousiasme vigoureux que chez Radu Gyr, cet exceptionnel poète roumain, ancien prisonnier politique sous le régime communiste pendant 21 ans. Les deux écrivains procèdent différemment, l’un avec les moyens de la science, l’autre avec ceux de la poésie, mais ils convergent dans le même esprit et la même manière de comprendre les significations supérieures de la vie.

Iurie Roșca

Source

dimanche, 24 mars 2019

Conflit métallurgique mondial

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Conflit métallurgique mondial

par Georges FELTIN-TRACOL

Cérium, lanthane, europium, néodyme, terbium, yittrium, ruthénium, rhodium, vanadium, gallium, hafnium, non, il ne s’agit pas du nom de quelques maladies honteuses, ni des boîtes de nuit à la mode, mais la dénomination courante de métaux qui sont en train de bouleverser les rapports de forces géopolitiques, économiques et énergétiques planétaires selon Guillaume Pitron, auteur d’un très bon ouvrage qui ne sera pas le livre de chevet de Nicolas Hulot, du ministre fictif François de Rugy ou d’Emmanuel Macron, tous tenants d’un « développement durable » qui n’est concrètement que de la poudre de perlimpinpin médiatique et politicienne.

Avec La guerre des métaux rares, Guillaume Pitron, journaliste au Monde Diplomatique, au magazine Géo et à la revue National Geographic, jette un énorme pavé dans la mare en racontant « la face cachée de la transition énergétique et numérique ». Il estime en effet que « la prétendue marche heureuse vers l’âge de la dématérialisation n’est […] qu’une vaste tromperie, puisqu’elle génère, en réalité, un impact physique toujours plus considérable (p. 68) ». Il adresse un sévère réquisitoire contre l’hypocrisie bien occidentale d’un monde censément devenir plus « vert ».

La quête des métaux rares

Au terme d’une longue enquête sur tous les continents, Guillaume Pitron explique que les lampes LED à basse consommation d’énergie, les panneaux solaires, les pots catalytiques des véhicules, les voitures et batteries électriques, les éoliennes, les centrales nucléaires et les centrales thermiques au gaz ont besoin de métaux rares. Pourquoi ? « Une infime dose de ces métaux, une fois industrialisée, émet un champ magnétique qui permettra de produire davantage d’énergie que la même quantité de charbon ou de pétrole (p. 17). » Il précise que ces « métaux rares sont des concentrés parés de fantastiques propriétés (p. 16) ». De là un incroyable paradoxe. « Certaines technologies vertes lesquelles se fonde notre idéal de sobriété énergétique nécessitent en réalité, pour leur fabrication, davantage de matières premières que des technologies plus anciennes (p. 83) ». Ainsi souligne-t-il que « “ la seule fabrication d’une puce de deux grammes implique le rejet de deux kilogrammes de matériaux environ ”, soit un ratio de 1 à 1 000 entre la matière produite et les rejets générés (p. 66) ».

metauxrares.pngSon constat est édifiant : « L’extraction et le raffinage des terres rares sont très polluants (p. 94). » Pis, « la production de métaux indispensables à un monde plus propre est un processus polluant (p. 43) ». Cela n’empêche pas les États et les grandes entreprises multinationales de prospecter partout, y compris dans l’espace avec l’exploitation future des astéroïdes. Les États-Unis de Barack Obama ont déjà légiféré sur ce sujet particulier. Et ce n’est pas tout ! « La bataille des terres rares (et de la transition énergétique et numérique) est bel et bien en train de gagner le fond des mers (p. 242). » Deuxième domaine maritime mondial, la France détient des atouts stratégiques et économiques non négligeables avec son outre-mer océanien, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie (avec Clipperton) et Wallis-et-Futuna riches en terres rares sous-marines. L’auteur découvre la spécificité de cet archipel méconnu où règnent trois rois et où s’applique comme en Nouvelle-Calédonie « voisine » le droit coutumier dérogatoire des codes hexagonaux. Il garde sur ce point un regrad parisien et centralisateur obsolète.

La guerre des métaux rares montre la logique insidieuse des incantations officielles vertes en Occident autour des « deux domaines qui sont des piliers essentiels de la transition énergétique : les technologies que nous avons baptisées “ vertes ” et le numérique (p. 17) ». Or, les énergies dites « propres » ou « renouvelables » « se fondent sur l’exploitation de matières premières qui, elles, ne sont pas renouvelables (p. 81) ». Il est patent qu’« au XXIe siècle, nous ne savons même pas qu’un monde plus durable dépend en très grande partie de substances rocheuses nommées métaux rares (p. 15) ». « Pour dissocier les terres rares des autres métaux, les industriels doivent recourir à des techniques longues et coûteuses, employant force produits chimiques et énergie (p. 76). » Guillaume Pitron soulève un second paradoxe. « Les technologies dont de nombreux milieux écologistes vantent la capacité à nous sortir du nucléaire reposent sur des matériaux (les terres rares et le tantale) dont l’exploitation génère de la radioactivité (pp. 81 – 82). » Par conséquent, « notre quête d’un modèle de croissance plus écologique a plutôt conduit à l’exploitation intensifiée de l’écorce terrestre pour en extraire le principe actif, à savoir les métaux rares, avec des impacts environnementaux encore plus importants que ceux générés par l’extraction pétrolière (pp. 24 – 25) ».

L’impasse numérique

Cet ouvrage ébranle profondément bien des convictions écologistes, surtout quand on sait dorénavant que « si les technologies que nous utilisons au quotidien peuvent bien évoluer, le besoin primaire de ressources énergétiques, lui, demeure (p. 15) ». On veut « décarboner » au maximum l’économie et les transports, favoriser l’électrification de tous les vecteurs de mobilité, mais il leur faut une source d’énergie : l’électricité n’existe pas à l’état naturel. Quelle(s) source(s) alors ? Les hydrocarbures : ils polluent par le dioxyde de carbone ! Le nucléaire : il fabrique des déchets difficilement dégradables à l’échelle d’une vie humaine et dépend d’un minerai rare, l’uranium. Le Soleil et le vent ? La composition des appareils photovoltaïques et des éoliennes repose sur de nombreux métaux rares. « Le numérique est supposé atténuer l’impact carbone des activités humaines (p. 63). » Est-ce vraiment le cas ? La dématérialisation généralisée – la pièce jointe remplaçant la feuille de papier – ne serait-elle pas un facteur de « réchauffement climatique » ? Guillaume Pitron n’avance pas cette hypothèse osée. Et pourtant ! L’augmentation incessante des ondes dues à l’essor du numérique pourrait agir sur l’atmosphère comme un four à micro-ondes, ce qui expliquerait la fonte des glaciers et de la calotte glaciaire. Si cette hypothèse se vérifie dans les prochaines années, c’est-à-dire trop tard, la survie de l’écosphère passera sûrement par une décroissance radicale et draconienne et par l’abandon résolu des téléphones intelligents, des tablettes informatiques et autres réseaux sociaux virtuels. L’auteur profite aussi pour polémiquer avec l’économiste étatsunien Jeremy Rifkin lui aussi édité par Les Liens qui libèrent. Ambiance…

Entre aussi en jeu l’avenir des déchets. « Les autorités européennes estiment que jusqu’à 1,3 million de tonnes de déchets électroniques seraient exportées chaque année de notre continent vers l’Afrique et l’Asie (pp. 79 – 80). » « La mondialisation […] a rendu les pays occidentaux tellement prospères que nous sommes même devenus riches de nos déchets, qu’ils soient alimentaires, de maison, industriels, nucléaires ou électroniques (p. 71). » Faute d’investissements matériels, financiers et humains massifs, le recyclage n’arrivera jamais à suivre la croissance élevée de l’ensemble de ces déchets.

Guillaume Pitron entrevoit un monde nouveau. « Dans ce monde d’après, les grandes puissances minières ne seront pas les États qui concentreront les plus fabuleux gisements de minerais, mais ceux qui disposeront des poubelles les plus prestigieuses (p. 74). » Il se contredit toutefois puisqu’il pense ailleurs que « la géopolitique des métaux rares pourrait faire émerger de nouveaux acteurs prépondérants, souvent issus du monde de développement : le Chili, le Pérou et la Bolivie, grâce à leurs fabuleuses réserves de lithium et de cuivre; l’Inde, riche de son titane, de son acier et de son fer; la Guinée et l’Afrique australe, dont les sous-sols regorgent de bauxite, de chrome, de manganèse et de platine; le Brésil, où le bauxite et le fer abondent; la Nouvelle-Calédonie, grâce à ses prodigieux gisements de nickel (pp. 226 – 227) ». Ces données ne sont que de simples aperçus : la République démocratique du Congo produit 64 % du cobalt, l’Afrique du Sud contrôle 83 % du platine, de l’indinium et du ruthénium, le Brésil monopolise presque 90 % du niobium, les États-Unis 90 % du béryllium, la Russie dispose de 46 % des approvisionnements en palladium, la Turquie fournit 38 % du borate.

Ces métaux rares ne sont guère abordés, hormis en 2017 sous une forme romanesque avec le « successeur » de Gérard de Villiers, Alex de Brienne, auteur de la série publiée par Le Livre de Poche KO, initiales des prénoms respectifs des enfants Grant, Kali la baroudeuse et son frère jumeau, Odys, l’informaticien génial. En arrière-plan de l’intrigue du troisième tome de la série, Griffe du diable à Etosha, qui se déroule en Namibie, se profilent les Chinois… « La Chine […] s’arroge jusqu’à 99 % de la production mondiale de terres rares, le plus convoité des métaux rares ! (p. 122). » Guillaume Pitron s’en inquiète parce qu’il sait que « celui qui contrôle les minerais contrôle dorénavant l’industrie (p. 158) ». Circonstance aggravante pour les puissances occidentales, « nous avons confié à de potentiels rivaux un précieux monopole (p. 116) ».

L’essor chinois

À la fin de la Guerre froide au début des années 1990, pendant que l’Occident bradait ses stocks stratégiques de terres rares aux plus offrants, « Pékin poursuivait alors une stratégie inverse de constitution de réserves, et racheta une bonne partie de ces achalandages… (p. 107) » Il devient évident qu’« un État est en train d’asseoir sa domination sur l’exportation et la consommation des métaux rares. Cet État, c’est la Chine (p. 24) ». Anecdotique ? Non quand on découvre que « l’Empire du Milieu est aujourd’hui le premier producteur de 28 ressources minérales indispensables à nos économies avec souvent une part supérieure à 50 % de la production mondiale (p. 50) ».

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La Chine n’a pas adopté « la chimère selon laquelle les industries s’effaceraient derrière une économie largement dominée par les services (p. 149) ». Détenant un monopole de fait, Pékin décréta en septembre 2010 le premier embargo de terres rares en pleine transition énergétique et numérique à l’encontre du Japon à propos de l’archipel revendiqué à la fois par Tokyo et la Chine des Senkaku – Diaoyu en mer de Chine orientale. Parce que « technologies du numérique, économie de la connaissance, filière des énergies vertes, secteur de l’acheminement et du stockage de l’électricité, et dorénavant industries spatiales et de défense : nos besoins en métaux rares se diversifient et s’accroissent de façon exponentielle (p. 211) », « la Chine […] a compris : sa stratégie industrielle de métaux rares lui permet de miser fortement sur l’essor scientifique, d’encourager l’esprit créatif de son peuple – et de stimuler une offre civilisationnelle alternative aux références dictées par l’Occident (p. 167) ».

Non seulement « en 2015, la Chine est le pays qui a déposé le plus de brevets au monde, avec plus de 1,1 million de dépôts (pp. 174 – 175) », mais aussi elle « met sur pied une filière entièrement souveraine et intégrée, qui englobe aussi bien les mines nauséabondes arpentées par les gueules noires que les usines ultra-modernes peuplées d’ingénieurs surdiplômés (p. 155) ». Outre le recours à l’« “ innovation indigène ”, c’est-à-dire l’absorption, l’intériorisation des technologies étrangères (p. 169) », Pékin s’inspire ouvertement de la politique industrielle d’indépendance nationale de la France gaullienne. Résultat : la République populaire est première dans la production d’énergies vertes, éolienne et hydro-électrique, dans la fabrication d’équipements photovoltaïques ainsi que dans la réalisation de véhicules à énergie nouvelle. Le gouvernement a enfin favorisé l’émergence d’une centaine d’« écocités ». Dans le même temps, il dispose d’un avion de combat furtif plus perfectionné que son équivalent nippon, a mis sur orbite un satellite de communication quantique inviolable, souhaite que des « Fils du Ciel » foulent le sol lunaire, voire martien, et a conçu un super-ordinateur capable de résoudre en une seconde 93 millions de milliards d’opérations ! Dans ce nouveau contexte international, « un ordre industriel […] s’est naturellement imposé entre, pour simplifier, la Chine et l’Occident (p. 100) ». D’où de vives tensions commerciales entre Pékin et Washington. Bénéficiant du soutien des milieux d’affaires de la vieille industrie, Donald Trump a compris le jeu chinois et « préfère perpétuer un modèle énergétique pétrolier qui a consacré la toute-puissance des États-Unis au cours du XXe siècle plutôt que de s’engager dans la voie du tout-électrique dont il sait qu’elle pourrait être très douloureuse pour l’industrie américaine (pp. 181 – 182) » en termes d’emplois et de niveau de vie.

À l’heure du « Russiagate » et des accusations complotistes d’une ingérence russe fantasmée dans les élections présidentielles de 2016, Guillaume Pitron revient sur le « Chinagate » qui entacha, telle une quelconque robe de stagiaire, la réélection en 1996 de Bill Clinton. Frappés d’amnésie, les démocrates ne s’indignèrent pas des interférences chinoises dans le processus électoral en leur faveur. Sans développer, l’auteur offre en outre une brève explication au soudain rapprochement – réchauffement entre Washington et Pyongyang. « La Corée du Nord posséderait même certaines des plus grandes réserves de terres rares du monde (pp. 224 – 225). » Le président du Comité des affaires de l’État nord-coréen, Kim Jong Un, le sait et mise probablement sur cet avantage géologique pour briser le régime absurde les stupides sanctions internationales. L’entretien relève qu’avec l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, « les mesures protectionnistes se veulent donc une affirmation de puissance dans un monde qui se “ désoccidentalise ” (p. 136) ». Le temps est maintenant au nationalisme minier. Et la France ?

« Un géant minier en sommeil » ?

L’auteur semble s’inscrire dans une ligne politique plutôt productiviste, industrialiste et montebourgienne, en référence à Arnaud Montebourg, ministre de l’Économie, du Redressement productif et du Numérique (2012 – 2014), qui tenta sans grand succès du fait de l’atlantisme européiste dominant à l’Élysée et à Matignon de maintenir (et de relancer ?) un solide appareil industriel à haute portée stratégique. Pourtant, pour Guillaume Pitron, la France du fait de sa richesse géologique tant en métropole qu’en outre-mer, est « un géant minier en sommeil (p. 232) ». Ne faudrait-il pas relancer un plan général de prospection minière et préparer l’opinion à ouvrir (ou rouvrir) des mines ? Les associations de défense de l’environnement s’y opposeraient immédiatement. Or « les ONG écologistes font la preuve d’une certaine incohérence, puisqu’elles dénoncent les effets du nouveau monde plus durable qu’elles ont elles-mêmes appelé de leurs vœux (pp. 234 – 235) ». « N’y a-t-il pas une ironie tragique, dénonce Guillaume Pitron, à ce que la pollution qui n’est plus émise dans les agglomérations grâce aux voitures électriques soit simplement déplacée dans les zones minières où l’on extrait les ressources indispensables à la fabrication de ces dernières ? En ce sens, la transition énergétique et numérique est une transition pour les classes les plus aisées : elle dépollue les centres-villes, plus huppés, pour mieux lester de ses impacts réels les zones plus miséreuses et éloignés des regards (p. 81). » Vraie à l’échelle du monde, l’analyse se vérifie aussi dans l’espace français d’autant qu’elle recoupe les observations du géographe Christophe Guilluy.

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Les aires métropolitaines, niches à bobo et d’autres hipsters métrosexuels entrent en collision frontale avec la « France périphérique » péri-urbaine et rurale incapable de s’acheter de nouveaux produits aux normes écologiques sans s’endetter pour des dizaines d’années. Susciter l’endettement des populations fragiles (ou déclassées) constitue en terme d’élaboration sociale une mesure efficace de contrôle collectif. Guillaume Pitron ne pouvait pas imaginer le mouvement profond des « Gilets jaunes » quand il se montre très (trop ?) optimiste sur l’abnégation écologique des ménages français. « Peut-être abandonnerions-nous […] le sacro-saint dogme du pouvoir d’achat et accepterions-nous de dépenser quelques dizaines d’euros supplémentaires pour des téléphones un peu plus propres… (p. 237) » Cette intention louable ne peut ne pas être comprise par une population « périphérique » en souffrance, victime des politiques d’austérité financière mondialiste. Bien sûr, en relocalisant en France les systèmes industriels de recyclage et en renouant avec l’activité minière, les habitants prendraient « immédiatement conscience, effarés, de ce qu’il en coûte réellement de nous proclamer modernes, connectés et écolos (p. 236) ». Le redynamisme de certains territoires et la diminution réelle du chômage seraient indéniables au prix, il est vrai, d’un désastre paysager et écosystémique élevé.

En attendant des méthodes d’extraction et d’exploitation de minerais plus propres qui n’existent pas actuellement, force est de remarquer qu’aucune des solutions proposées n’est satisfaisante : toutes ont un coût écologique, économique, stratégique et sanitaire non négligeable. Quant à changer de modèle productif en promouvant la décroissance et la fin du développement chère à l’économiste hétérodoxe François Partant, cela reviendrait à renoncer à toute politique de puissance pour la France et l’Europe et à sortir de l’histoire. Sauf si le paradigme décroissant intègre finalement une dimension communautaire, autochtone et identitaire comme l’assure depuis bien des années le prophète finlandais de l’« écologie armée » Pentti Linkola.

Georges Feltin-Tracol

• Guillaume Pitron, La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique, préface d’Hubert Védrine, Éditions Les liens qui libèrent, 2018, 295 p., 20 €.

18:43 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, terres rares, géopolitique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

vendredi, 22 mars 2019

La Russie face au regime change

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La Russie face au regime change

Ex: http://www.dedefensa.org

D’abord, quelques mots sur l’éditeur du site Dances With Bears, qui pourrait être surnommé “l’homme qui en sait trop sur la Russie”. 

John Helmer est un des plus anciens “correspondants étrangers” couvrant la Russie à Moscou même, depuis 1989. Son statut, en principe de commentateur indépendant, recouvre de nombreuses sources et ramifications, qui font souvent des textes de Helmer (sur son site), outre leur intérêt propre toujours évident, également des rébus ou des puzzles que les initiés peuvent lire au moins “entre les lignes” et entre les sous-entendus. C’est un peu cela qu’on retrouve dans l’annonce par le site Russia Insider (RI), le 10 janvier 2019, de la publication d’un livre de mémoires d’Helmer au titre révélateur des choses qu’on peut révéler et d’autres qu’on ne peut pas révéler : The Man Who Knows Too Much About Russia. Le très court commentaire de RI qui accompagne l’annonce de la publication, en décembre 2018, de ces « fascinants mémoires » est lui-même dans le style rébus à lire “entre les lignes” :

« Ce n’est pas un hasard si, au même moment [où était publié le livre], l’Office for Foreign Assets Control (OFAC) du Trésor américain publiait sa décision de dé-sanctionner les principales sociétés d'Oleg Deripaska, Rusal, EN+ et Eurosibenergo, en les supprimant de la liste publiée huit mois plus tôt.

» Dans l'annonce initiale des sanctions contre Deripaska le 6 avril [2018] par l'OFAC, une tentative de meurtre avait été mentionnée, mais il ne s'agissait pas de la tentative de Deripaska contre Helmer. Hillary Clinton et son adjoint à l'État, William Burns, l’avait dissimulée. Le pot-de-vin d'un million de dollars des Clinton, le complot pour vendre la division Opel de General Motors à Deripaska, l'implication du gouvernement australien dans la tentative d'assassinat contre le journaliste pour protéger un commerce d'alumine de plusieurs milliards de dollars avec Deripaska, tout cela et plus encore se trouvent dans ce livre. »

Il faut savoir que Deripaska, cet oligarque russe extrêmement riche et douteux dont il est question dans la citation, est clairement mentionné par Helmer, dans son texte plus récent du 18 mars 2019 (20 mars 2019 sur RI) que nous publions ci-dessous, comme l’un des soutiens affichés de Alexei Koudrine. Cet Alexei Koudrine, ancien ministre des Finances, est le prétendant affiché d’un regime change à Moscou, si l’on veut le Juan Guaido russe, en un peu plus retors et expérimenté. Il nous semblerait bien, selon notre simple approche logique sans trop chercher les parties immergées de l’iceberg, que le Trésor n’était pas vraiment informé par le département d’État lorsqu’il a établi sa liste de proscrit en avril 2018, et qu’il a rectifié vite fait en décembre, notamment après lecture (ou en avant-lecture) du livre d’Helmer, sans doute sur conseil et reproche du département d’État. Les américanistes, dans les dédales ubuesques et kafkaïens de leur appareil d’occupation hégémonique du monde, sont coutumiers de ces accidents de circulation labyrinthiques.

Si John Helmer est un homme à multiples facettes, il l’est si l’on s’en tient aux textes qu’il publie, – ce qui est pour nous l’essentiel sinon l’exclusif, – essentiellement au service d’une cause sympathique : la lutte constante contre le parti des Atlanticistes, ou Occidentalistes, ou “libéraux” à la mode-salade-russe, qui tentent de déstabiliser Poutine type-regime change, ou de le faire basculer dans une politique d’accommodement complet, c’est-à-dire d’asservissement à peine tempéré vis-à-vis du bloc-BAO (des USA). L’une des têtes de Turc, ou tête de traître de Helmer est bien entendu Koudrine, incontestable leader institutionnel des “libéraux” qui continue son travail de propagande soutenu par des fonds non mentionnés, – sauf ceux du Camarade Deripaska, sanctionné puis précipitamment dé-sanctionné par l’imprudent Trésor washingtonien.

Le texte ci-dessous organise une confrontation informelle entre deux interventions séparées de quelques jours, celle de Koudrine proposant une capitulation à peine dissimulée comme moyen pour la Russie de “discuter” avec les USA, et celle du chef de l’État-major général, le Général Gerasimov, dont nous avons déjà longuement parlé le 5 mars 2019, où il affirme que la Russie est capable de se battre contre les USA sur tous les fronts et de l'emporter, – et que c'est cela qui doit être fait, si nécessaire. Selon notre point de vue et notre façon de voir, Helmer confirme, directement ou indirectement, au moins deux choses :

• La“5èmecolonne” est, en Russie, parfaitement identifiée et l’espèce de liberté à peine surveillée où elle se trouve, puisqu’après tout elle entretient des liens directs avec l’aile libérale du gouvernement (à partir de Medvedev et à “à l’Ouest” de Medvedev [plutôt qu’à gauche ou à droite, difficile de déterminer]), c’est-à-dire la liberté d’action dont elle dispose est à la fois un handicap et un avantage pour le camp souverainiste-nationaliste : un handicap, on comprend pourquoi, mais aussi un avantage parce qu’on peut suivre sans difficultés l’activisme de cette “5èmecolonne” et éviter dans nombre de cas d’être pris par surprise.

• L’antagonisme entre le bloc de la communauté de sécurité nationale, et notamment l’État-major général, et Koudrine est manifeste, et il nous paraît assez probable que cette force pèse d’un poids important sur Poutine pour maintenir la politique russe de sécurité nationale sur une voie de fermeté. Il est vrai que cette conférence de Gerasimov, qu’Helmer interprète comme une réponse à Koudrine, nous paraît constituer un événement important sur la voie de l’affirmation des forces armées et des milieux de sécurité nationale (les “Organes” aussi) dans la politique russe. Ainsi la partie des déclaration de Gerasimov donnant une nouvelle définition de la guerre, et y incluant, pour ce qui regarde les forces armées, les pratiques de regime change et d’“agression douce”, impliquent sans guère de doute que ces forces armées se jugent fondées à considérer que toute action de déstabilisation venant du groupe des “libéraux”-“5èmecolonne” les concerne directement, et qu’elles se jugent compétentes et autorisées, ces forces armées, à agir contre cela.

• Il est certain que les dernières actions militaires, notamment en Syrie, ainsi que l’équipement en armes très puissantes (missiles hypersoniques) qui assurent aux forces armées russes une supériorité stratégique qualitative sur les forces armées US, renforcent considérablement leur position politique dans l'équation du pouvoir à Moscou. Cette nouvelle posture implique une légitimité fortement renforcée de ces forces armées, et donc une plus grande liberté d’action politique.

(Le texte de John Helmer du 18 mars 2019 porte comme titre initial : « Alexei Koudrine propose d'offrir au gouvernement américain la moitié de la Crimée, la moitié du Donbass, la moitié des îles Kouriles, la moitié de la Syrie et la moitié du Venezuela – le général Gerasimov propose de combattre les USA sur tous les fronts ».)

dedefensa.org

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Gerasimov contre Koudrine et sa 5èmecolonne

Alexei Koudrine est le plus ancien candidat au changement de régime au Kremlin qui ne soit ni en prison, ni à l’étranger. « Nous avons besoin d'un environnement mondial amical », a-t-il déclaré lors d'une conférence commerciale à Moscou la semaine dernière. Actuellement président de la Chambre des Comptes, l’organisme de contrôle de l’État, Koudrine a expliqué que cela « n’est pas encore pleinement atteint en raison de désaccords géopolitiques mondiaux et des sanctions. La Russie devrait essayer de réduire ce facteur et d'atténuer les désaccords politiques et les sanctions par le biais de pourparlers et d'autres moyens. »

Le remède de Koudrine, a-t-il ajouté, est que la Russie et les États-Unis « doivent se rencontrer à mi-chemin ». On a demandé à Koudrine de préciser ce qu'il entendait par « à mi-chemin ».

Alexei_Kudrin.jpgKoudrine emploie des porte-parole à la Chambre des Comptes et dans une organisation politique qu’il entretient, le Comité d’Initiative Civile. Cette organisation, créée par Koudrine en 2012 à la suite de sa destitutiondu poste de ministre des Finances, se décrit elle-même comme « uni autour de l'idée de la modernisation du pays et du renforcement des institutions démocratiques ».  Chaque année, le Comité mène des enquêtes sur les conditions régionales, surveille la presse et organise des conférences des organisations politiques qui soutiennent Koudrine.  Le Comité décerne également des prix annuels en argent et une figurine, le Golden Sprout, à des militants locaux sélectionnés. C'est l’organisation permanente de la campagne de Koudrine. Elle ne divulgue pas ses sources de financement sauf pour le cas de Norilsk Nickel, contrôlée par Vladimir Potanine et Oleg Deripaska, à qui elle exprime une “gratitude spéciale”.

On a demandé à M. Koudrine ce qu’il voulait dire par sa référence aux désaccords géopolitiques. Quelle est sa proposition pour l'offre russe dans les pourparlers avec les États-Unis ? Qu'entend-il par « autres moyens » ? Et, concrètement, qu'entend-il par « se rencontrer à mi-chemin » – la moitié de la Crimée donnée à l’ Ukraine ? La moitié de la Syrie affectée à Israël et à la Turquie ? La moitié des îles Kouriles pour le Japon ?

Les bureaux de M. Koudrine à la Chambre et au Comité ont dit qu'il ne répondrait pas par téléphone et ont demandé des courriels. Les questions ont été envoyées. Par téléphone, les deux bureaux ont confirmé avoir reçu les courriels. Mais il n’y a pas eu de réponse de Koudrine.

Il y a un an, alors que M. Koudrine faisait publiquement pression sur le président Vladimir Poutine pour obtenir un poste au sein du nouveau gouvernement doté de pouvoirs spéciaux pour négocier avec les États-Unis, il a présenté un plan qui est une attaque frontale contre le ministère russe de la Défense et son état-major général, avec une réduction du budget militaire, de la capacité de défense et des engagements de la Russie envers la Crimée et le Donbass. On trouvait tous les détails dans des déclarations faites en son nom à un journal de Londres ; Koudrine a évité de le faire lui-même en Russie, pour le public russe. (Pour plus de détails, lisez ceci.)

En mai [2018], alors que sa campagne de promotion politique avait échoué, M. Koudrine s'est rétracté dans un discours à la Douma d’État afin d'obtenir des voix pour confirmer son poste à la Cour des Comptes. (Cliquez ici pour en savoir plus.)  Le vote contre Koudrine a été le plus élevé jamais enregistré contre un candidat à la présidence de la Chambre. Le classement de Koudrine dans les sondages d'opinion nationaux le place dans les dix politiciens les plus suspects et les moins aimés du pays. 

La principale cible de la campagne de Koudrine reste le commandement militaire russe. Le général Valery Gerasimov, chef d'état-major général, a répondu indirectement récemment en donnant un aperçu détaillé de la stratégie russe contre les États-Unis. Son discours intitulé « Vecteurs du développement de la stratégie militaire » a été prononcé à l'Académie des sciences militaires. (Le texte intégral peut être lu en russe ici et en anglais ici.) 

Gerasimov a identifié « les États-Unis et leurs alliés » comme étant engagés dans une guerre permanente de tous types, « Ils travaillent à des actions militaires offensives, telles que des frappes mondiales, une capacité de bataille dans plusieurs sphères, et également l’utilisation des techniques dite des ‘révolutions de couleur’ et de la guerre de communicationIls cherchent à éliminer les structures étatiques de ces pays qu’ils jugent hostiles, à saper leur souveraineté, à changer les organes légalement élus du pouvoir politique. C’était le cas en Irak, en Libye et en Ukraine. C’est actuellement le cas dans le processus en cours au Venezuela... Les résultats obtenus en Syrie nous ont permis d’identifier l’orientation à suivre pour l’utilisation des Forces armées dans le cadre de l’exécution des tâches de protection et de promotion des intérêts nationaux à l'extérieur du territoire national. »

C'est la première fois que l'État-major russe identifie explicitement le Venezuela aux côtés de l'Ukraine et de la Syrie comme une cible de la guerre américaine à laquelle il est dans l'intérêt stratégique de la Russie de s'opposer.

Gerasimov avait eu aussi un mot spécialement pour Koudrine. Dans son discours, Koudrine avait ignoré les militaires dans son idée d'un gouvernement russe coordonné. « Si le système d'application de la loi fonctionne selon son propre plan, alors que les institutions internationales et le ministère des Affaires étrangères agissent seuls et que le ministère du Développement économique essaie d'augmenter le taux de croissance de l’économie à la moyenne mondiale, alors exactement rien ne se passe. Ce devrait être une seule équipe, chacun devrait travailler pour un seul but commun. Toutes les agences gouvernementales devraient synchroniser leurs actions, y compris sous la forme d'un dialogue et d’une conciliation des tâches pour améliorer le climat d’investissement. »

La réponse de Gerasimov : « Le Pentagone a commencé à développer une stratégie de guerre fondamentalement nouvelle, qui a déjà été surnommée ‘Cheval de Troie’. Son essence réside dans l'utilisation active du potentiel de protestation de la ‘cinquième colonne’ pour déstabiliser une situation tout en attaquant les installations les plus importantes avec des armes de haute précision. »

La coordination des ressources de défense de la Russie, selon l'état-major général, exige que les mesures visant à contrer les sanctions économiques américaines, les médias et les cyber-opérations contre la Russie et ses alliés, y compris la subversion intérieure, soient dirigées par l'état-major général. 

« Je tiens à souligner, a déclaré Gerasimov, que la Fédération de Russie est prête à faire face à toutes les nouvelles stratégies : ces dernières années, des scientifiques militaires [russes], en collaboration avec l'état-major général, ont mis au point des approches conceptuelles pour neutraliser les actes d'agression des opposants potentiels. Le domaine de recherche de la stratégie militaire est la lutte armée, son niveau stratégique. Avec l'émergence de nouvelles zones d'affrontement dans les conflits modernes, les méthodes de lutte évoluent de plus en plus vers l'application intégrée de mesures politiques, économiques, d'information et autres mesures non militaires, mises en œuvre avec le soutien de la force militaire. »

La coordination des ressources de défense de la Russie, selon l'état-major général, exige que les mesures visant à contrer les sanctions économiques américaines, les médias et les cyber-opérations contre la Russie et ses alliés, y compris la subversion intérieure, soient dirigées par l'état-major général. 

John Helmer

lundi, 18 mars 2019

Le survivalisme et la “panne“ électrique au Venezuela

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Le survivalisme et la “panne“ électrique au Venezuela

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

 

A l’heure où j’écris cette note, la panne électrique qui affecte le Venezuela, probablement liée (en grande partie) à une succession d’attaques cybernétiques étatsuniennes, dure depuis un peu plus d’une centaine d’heures. Les conséquences à très court terme de cette panne qui a débutée le 07 mars à 20h50 doivent être analysées et nous servir d’avertissement. Il convient de noter, préalablement, que cette panne n’a jamais été totale. Caracas reste alimentée à 20 % environ et, entre deux attaques, le 09 mars, l’électricité a même été brièvement rétablie à 70% dans tout le pays.  Quoi qu’il en soit, le chaos semble aujourd’hui total :

  • L’eau ne coule plus au robinet. En effet, le système hydraulique en eau potable est actionné comme partout par des pompes qui fonctionnent électriquement. De nombreuses personnes sortent déjà des villes à la recherche de sources d’eau potable et font la queue pendant des heures pour remplir une bouteille ou un jerricane (photo).
  • Faute d’arrivée d’eau, les toilettes sont inutilisables. Dans les villes, il faut faire dans des récipients que l’on abandonne sur la voie publique, avec toutes les conséquences sanitaires que l’on peut supposer.
  • La nourriture entreposée dans les réfrigérateurs et les congélateurs des particuliers, des commerçants et des grandes surfaces, est désormais avariée. Il a suffi de trois jours pour qu’elle ne soit plus consommable.
  • Les paiements électroniques sont impossibles. De la même manière il n’est plus possible de retirer de l’argent liquide aux distributeurs ou à la banque, où les ordinateurs sont hors service. Il s’ensuit que les gens, à cours de liquidité, ne peuvent plus acheter de quoi se nourrir. Les commerçants baissent leur rideau de crainte des pillages.
  • Les pompes à essence elles-mêmes fonctionnent électriquement. Il n’est donc plus possible de faire le plein pour s’échapper, ni même d’emprunter métros et trains qui, pour la même raison, sont désormais à l’arrêt. Il est souvent impossible aussi d’aller travailler.
  • Le réseau téléphonique et internet ne fonctionne plus. Il est devenu très difficile, voire impossible, d’appeler des secours ou même de communiquer avec de la famille éloignée.
  • Dans les hôpitaux, les décès s’accumulent, même s’il est difficile de donner un chiffre. Un député vénézuélien avance le chiffre de 230 décès.
  • Dans les morgues, qui ne sont plus ni éclairées ni réfrigérées, les morts commencent à pourrir.
  • Les pillages ont commencé. Des bandes écument commerces et supermarchés. Le gouvernement demande aux habitants de ne pas sortir le soir. Certaines sources indiquent que les habitants de Caracas ne sortent plus après 17h30.

Il a suffi d’une coupure d’électricité de trois ou quatre jours pour que la population du Venezuela s’éclaire à la bougie, soit coupée du monde, ne puisse plus avoir accès à l’eau potable, ne puisse plus se nourrir, ne puisse plus se déplacer, ne puisse plus se soigner, ne puisse plus se laver, ne puisse plus évacuer ses besoins et soit exposée à la violence comme aux épidémies. Pourtant, la société vénézuélienne est une société depuis longtemps habituée aux pénuries. C’est une société qui a su mettre en place une certaine débrouille pour palier aux manques chroniques qui la contraignent. Ce n’est pas non plus une société complètement « dématérialisée » comme la nôtre. Qu’arriverait-il dans notre pays si une telle « panne » se produisait ? Combien de TGV pourrait-on faire rouler ? Combien de métros seraient à l’heure ? Combien de SMS pourrait-on envoyer ? Quel serait le débit en eau de nos robinets ? Combien de pleins pourrait-on faire ? Quelle quantité de nourriture pourrions-nous acheter avec nos CB ? Avec quels instruments s’organiseraient les « chaînes logistiques » nécessaires à tout ce que nous consommons ? Où allons-nous évacuer nos déjections quand nos seaux seront pleins ? Quel numéro faudra-t-il faire pour appeler la police, les pompiers ou le SAMU ? A quelle source un Parisien ira-t-il chercher son eau potable ? Qui nous défendra contre les pilleurs et les bandes ?

Ces questions sont légitimes au regard de ce que l’on constate au Venezuela. Chacun doit se les poser sans attendre, car l’expérience vénézuélienne nous indique que le chaos survient en moins de trois jours. Certains pensent que nous sommes plus intelligents ou mieux organisés que les vénézuéliens. C’est une erreur : les vénézuéliens sont habitués aux pénuries de toutes sortes, pas nous. Ils ont des solidarités familiales ou de quartier que nous n’avons plus depuis longtemps. Bref, ils sont plus résilients que nous. D’autres croient qu’une telle « panne » ne pourrait pas arriver en Europe. Qui en effet nous voudrait du mal ? L’entente entre les nations a-t-elle jamais été aussi cordiale ? Et puis on sait bien qu’une tempête solaire d’envergure, telle celle de 1859 qui ébranla tout le réseau de télégraphes électriques, n’est plus possible aujourd’hui !  

Chacun voit midi à sa porte, mais il me semble que dans de telles circonstances ces bizounours auraient une durée de vie très courte. Enfin, comme disait l’autre : « moi je dis ça, je dis rien… ».


Antonin Campana

Les sources philosophiques de Vladimir Poutine

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Les sources philosophiques de Vladimir Poutine

 
Par Xavier Moreau
commentaires ouverts sur ► http://stratpol.com/philosophie-poutine
 

samedi, 16 mars 2019

Colloque de RESISTANCE HELVETIQUE Discours de Robert Steuckers

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Genève, 9 mars 2019 – Colloque de RESISTANCE HELVETIQUE

Discours de Robert Steuckers

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, chers amis et camarades,

L’Europe, le réveil ou la mort, tel est l’intitulé du colloque d’aujourd’hui. L’Europe est, politiquement parlant, en dormition. Et en dormition profonde, alors que de multiples dangers et menaces se développent et s’amplifient, dangers et menaces qui sont autant de défis.

Il y a le danger démographique, avec une chute vertigineuse des natalités et un remplacement de population à une échelle inouïe. Sur ce sujet, je ne vous apprends rien. Ce danger démographique est assorti d’un basculement dans la multiculturalité qui fait de toutes les sociétés ouest-européennes des sociétés composites donc fragiles et déstabilisées en permanence, ruinant le principe antique, et toujours valable, de la politique selon Aristote : une Cité est d’autant plus harmonieuse et efficace qu’elle est homogène, qu’elle est gérée comme une famille biologique, comme un vaste réseau ethnique, tissé par d’innombrables liens de cousinage. Voilà pour l’idéal aristotélicien. Dans la pratique, en revanche, nous assistons à l’installation de réseaux mafieux diasporiques, favorisés par les regroupements familiaux et par la dissémination subséquente de communautés bien soudées dans quelques grands pôles urbains répartis dans plusieurs pays européens : le monde politique belge est tombé des nues, au cours de ces dernières semaines, en découvrant les ramifications complexes d’un clan araméen-chaldéen de double nationalité, turque au départ, belge à l’arrivée. Ces ramifications partaient du trafic de cocaïne à la constitution d’agences immobilières et de l’implantation de réseaux de bistrots à la vente de passeports, à la location d’automobiles de luxe et à la corruption concussionnaire au sein de la politique politicienne, le tout avec la bénédiction du prêtre de la communauté qui, dans son presbytère, faisait dans le recel de marchandises illicites ou de papiers compromettants.

Ce n’est qu’un exemple parmi beaucoup d’autres et, paradoxe de plus sur la place de Bruxelles, c’est la maison d’édition du parti néo-communiste qui dresse, dans un ouvrage copieux, le bilan historique complet des communautés qui se sont installées dans la capitale belge et européenne ; l’auteur clôture chaque chapitre en décrivant les types de criminalité qu’elles pratiquent chacune. Ce ne sont donc pas les populistes qui le disent mais ceux qui se proclament « antifa ». Nous sommes bel et bien face à l’imposture du vivre-ensemble car tout vivre-ensemble conduit inexorablement à juxtaposer, en une même agglomération urbaine de bonnes dimensions, des réseaux diasporiques d’économies parallèles, des formes nouvelles de criminalité, des trafics illicites et non pas à rassembler, toutes ethnies confondues, les amoureux de Victor Hugo dans les villes françaises ou de Goethe dans les villes allemandes.

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Il y a ensuite le danger du « figement politique », tant sur le plan théorique que sur le plan pratique. Sur le plan théorique, on nous prie, depuis plusieurs décennies, de vénérer un « patriotisme constitutionnel » qui fait fi de toutes les appartenances concrètes dont relevaient, dans les sociétés encore normales, les ressortissants d’un peuple, quel qu’il soit. Tout doit être gommé, effacé des mémoires, chez les autochtones comme chez les allochtones : les traditions, la culture, l’inné ethnique, l’acquis historique, les institutions nées des combats politiques pour ne laisser que des normes abstraites, posées comme immuables, et que l’on ne pourra enfreindre sans risquer les foudres des nouvelles inquisitions. En Allemagne, le politologue Hans Herbert von Arnim vient d’établir un bilan précis de la partitocratie allemande, soit le système qui a éloigné la sphère politicienne (car on ne peut plus parler de sphère politique !) des citoyens, créant une bulle parasitaire qui échappe à toutes les responsabilités réelles, combat tout challengeur potentiel, ruinant ainsi la mobilité démocratique inscrite dans les principes mêmes de toute bonne gouvernance, selon leur propre vulgate, s’entend. Le remède proposé par von Arnim est celui du référendum, que vous connaissez en Suisse pour le pratiquer à intervalles réguliers, et que réclament les Gilets Jaunes en France aujourd’hui. Nous voyons là se dessiner une convergence entre contestataires des désordres établis.

Le référendum a pour vertu politique principale de briser les routines que perpétuent les majorités ou les grandes coalitions qui, généralement, ne résolvent rien et laissent pourrir les problèmes. Le référendum permet de sauter au-delà des clivages gauche/droite ou majorité/opposition, au-delà des projets de lois concoctés par les tenants de diverses idéologies politiciennes, projets généralement loufoques et indécis que la « vox populi » peut alors jeter aux orties en toute légalité. Le résultat d’un référendum équivaut à une décision, à trancher sans tergiversations aucunes. Et, ainsi, à faire avancer la Cité dans un sens bien précis, dépourvu de toute ambigüité.

La partitocratie sans référendum conduit à l’absence de décisions claires en tous domaines. Les régimes qui s’y complaisent ne sont pas politiques mais impolitiques. Leur présence persistante dans la durée indique que la souveraineté n’est pas entre leurs mains mais entre celles d’un hegemon extérieur qui cherche, par ses propres décisions, à leur confisquer tout pouvoir réel sur la marche du monde ou à les plonger durablement dans le marasme.

Jurgen_Habermas.jpgLe danger du « patriotisme constitutionnel », théorisé par le grand gourou du système en Allemagne, Jürgen Habermas, est celui d’un état d’esprit qui vénère la norme, et rien que la norme, et évacue la force, et même et surtout la simple force des choses, écrit le politologue français d’origine libanaise Zaki Laïdi. En évacuant toute force et toute simple force des choses, le patriotisme constitutionnel, cher à Habermas et défendu avec jactance par Daniel Cohn-Bendit et Guy Verhofstadt, est un pur déni du réel, qui place l’Europe dans un état de faiblesse très inquiétant, tout en interdisant les remèdes, d’avance condamnés comme étant les expressions morbides du populisme, nouveau croquemitaine des intellocrates et des médiacrates, au service de la superclasse.

Il y a ensuite le danger américain, danger principal, qui est très divers dans ses manifestations mais dont je ne retiendrai que deux aspects particulièrement pernicieux aujourd’hui : 1) l’espionnage par satellites, patronné par la NSA, dénoncé naguère par Edward Snowden, et 2) l’usage offensif du droit pour torpiller l’élan de firmes étrangères, principalement européennes, à coups d’amendes pharamineuses et de sanctions vexatoires.

A la fin des années 1990, les révélations d’un journaliste écossais, Duncan Campbell, sur le système d’écoute ECHELON ont suscité quelques remous bien vite oubliés, alors que le rapport rédigé par les autorités de l’UE précisait bien que plusieurs entreprises de haute technologie en Europe, principalement en France et en Allemagne, avaient littéralement été pompées et que tout le fruit de leur R&D avait été exploité aux Etats-Unis puis largement commercialisé à un coût très bas puisqu’il n’y avait pas eu d’investissement. En 2013, les révélations du hacker Snowden, tout comme les fuites de Wikileaks diffusées par Assange, ont fait le buzz pendant quelques semaines avant que la pause estivale ne vienne recouvrir d’un pudique silence les rares voix qui s’étaient insurgées contre ces pratiques indignes d’un allié. D’un allié ? Non ! Les Etats-Unis n’ont plus d’alliés depuis la doctrine Clinton, élaborée pendant l’un des mandats de ce président démocrate. Face aux Etats-Unis, selon cette doctrine, il n’y a plus que des « alien audiences » pour lesquelles on ne doit pas entretenir trop de scrupules. Dont acte. L’UE et sa clique dirigeante n’ont pas bougé, n’ont pas élaboré une politique de défense des entreprises européennes. J’espère que l’histoire retiendra cette inactivité préjudiciable comme une haute trahison.

alilaidi-droit.jpgAprès le pompage des données sensibles de nos entreprises les plus performantes, qui se poursuit allègrement, sans rencontrer ni critiques ni résistances, une nouvelle arme a été sortie de la panoplie américaine : le droit. Depuis une dizaine d’années, depuis la crise de 2008, de grandes entreprises européennes subissent les foudres des procureurs du département de la Justice américaine et l’assaut des agences de régulations financières. Elles sont accusées de violer les embargos imposés à Cuba, à la Corée du Nord et surtout à l’Iran. Les amendes qu’on leur inflige montent à des millions voire des milliards de dollars. Tour à tour, Siemens, la banque ABN Amro, Technip, la BNP, Alstom, la Société Générale, etc. ont été dans le collimateur ; ces multinationales européennes figurent au top dix des plus lourdes sanctions imposées par Washington, en attendant d’être rejointes demain par Airbus ou de passer sous pavillon américain, écrit Ali Laïdi, chercheur auprès de l’IRIS et spécialiste des guerres économiques. Cette attaque systématique et continue contre nos entreprises est le résultat de la doctrine Clinton, car, depuis qu’elle a été énoncée, les Etats-Unis n’ont plus d’alliés mais se trouvent face à des « cibles étrangères » qu’il convient de viser et de frapper quand elles risquent de dépasser en ampleur leurs équivalentes américaines ou de développer des technologies supérieures à celles créées par leurs concurrentes d’Outre-Atlantique. Les attentats du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles à New York ont servi de prétexte, sous Bush II, pour planétariser des lois qui ne s’adressaient, jusqu’alors, qu’aux entreprises et aux citoyens américains. Les terroristes wahhabites ont bon dos : l’action terroriste spectaculaire qu’on leur attribue a permis de lancer une attaque systématique contre le véritable ennemi européen, dont il faut, par la coercition juridique, vassaliser les meilleures entreprises, surtout en Allemagne et en France.

La véritable guerre est là. L’ennemi numéro un de Washington, c’est l’Europe. Une Europe qui est tétanisée. En effet, au sein de l’UE, aucune majorité ne se dessine pour contrecarrer la législation extraterritoriale américaine. Les listes noires, établies à Washington, menacent les entreprises et leurs dirigeants de geler leurs avoirs aux Etats-Unis et de leur interdire toutes activités commerciales. L’Europe ne peut toutefois se passer du client iranien, le désordre établi dans ce pays depuis la fin des années 1970, par les agissements d’officines étrangères, ayant eu pour objectif stratégique de briser tous les tandems économico-industriels que le Shah d’Iran avait promu comme la coopération nucléaire avec la France et l’Allemagne, les importations d’acier wallon en Iran, etc. La création délibérée de l’Iran khomeyniste a servi à diaboliser le pays jusqu’à nos jours : l’objectif réel n’est donc pas de lutter contre un fondamentalisme islamique et chiite, que l’on a créé et soutenu dans un premier temps, mais de ruiner toute coopération irano-européenne ; d’ailleurs, comment ne pas s’apercevoir de la supercherie de cet anti-islamisme déployé contre Téhéran quand, par ailleurs, les mêmes services ont utilisé les fondamentalistes wahhabites pour lancer leurs guerres de basse intensité en Afghanistan, en Tchétchénie, au Daghestan, en Syrie et au Yémen ?

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Les fausses élites eurocratiques savent parfaitement que la politique anti-iranienne de Washington est en réalité une politique anti-européenne. Face à la virulence de l’offensive juridique, en cours depuis une bonne dizaine d’années, l’eurocratie vient timidement de contre-attaquer. En effet, le 25 septembre 2018, Federica Mogherini, cheffe de la diplomatie européenne, annonce, en pleine assemblée générale des Nations Unies, que l’Europe a trouvé une parade pour maintenir ses relations économiques avec l’Iran (Ali Laïdi, p. 309), en pratiquant une politique de transactions par troc ! Cette solution évite d’utiliser des devises donc le dollar, permettant ainsi d’échapper aux sanctions américaines. L’Iran échange son pétrole ou son gaz contre des produits finis, selon un modèle préconisé par la « diplomatie Goering » dans les années 1930, quand l’Allemagne achetait de la viande, des céréales et des légumes frais aux pays d’Europe centrale et orientale, en les troquant contre des machines ou des locomotives. Devant ce fait quasiment accompli, Mike Pompeo a promis de se venger. Et il le fera, à coup sûr, au risque de ruiner encore la réputation des Etats-Unis car, désormais, le rôle mondial du dollar est bel et bien sapé : tous s’en éloignent. Ali Laïdi rappelle quelques paroles étonnantes de Jean-Claude Juncker, tirées de son « Discours sur l’état de l’Union » de 2018 : « Il est aberrant que l’Europe règle 80% de sa facture d’importation d’énergie en dollars américains alors que 2% seulement de nos importations d’énergie nous proviennent des Etats-Unis. Il est aberrant que les compagnies européennes achètent des avions européens en dollars et non pas en euros ». Ces timides changements d’attitude et ces paroles qui sonnent enfin vrai ne sont que l’amorce d’un combat qui est loin d’être terminé. Un combat que Juncker et les siens ne mèneront évidemment pas et que nous devons, nous, préparer dès maintenant.

Examinons toutefois les contextes dans lesquels ce combat va se dérouler : celui de la dette abyssale des Etats-Unis et celui de l’abandon progressif du dollar par des puissances comme la Russie ou la Chine. Pour y voir clair, rien de tel que les analyses de la dissidence américaine, plus lucide et clairvoyante que les dissidences européennes, dont la nôtre, dans les domaines de la politique et de l’économie internationales. Barbara Boland, sur l’excellent site « The American Conservative », constate que le Congrès américain admet que la différence négative entre la dette et le PIB américain est aujourd’hui de 22.000 milliards de dollars. En 2000, cela faisait une différence de 33% ; en 2019, ils en sont à 78% ; en 2029, ce sera vraisemblablement 93%. Le déficit du budget fédéral américain est de 900 milliards de dollars/an aujourd’hui ; à partir de 2022, il sera de 1000 milliards de dollars par an. Ce qui est alarmant, comme partout dans la sphère occidentale, à laquelle nous ne nous identifions pas, c’est qu’aucun débat sérieux sur les dettes et leurs effets pernicieux n’anime plus les hémicycles parlementaires, y compris aux Etats-Unis où l’on discute du « Medicare » pour tous (soit !), du Mur de Trump et de sa justification morale ou, cerise sur le gâteau, du « Green New Deal » d’Alexandra Ocasio-Cortez ! Or, le déficit américain est essentiellement dû à l’hypertrophie impérialiste, aux immixtions incessantes commises dans des pays étrangers, hors de l’espace continental américain, où les budgets suivants ont été alloués l’an passé : 5,3 milliards pour Israël, l’Ukraine et la Jordanie ; 3,4 milliards pour les réfugiés fuyant les zones de combat (une augmentation de 74 millions par rapport à 2017) ; 4,4 milliards pour les catastrophes au niveau international ; 8,83 milliards pour les « Global Health Programs » ; 9 milliards pour la « Security Assistance ».

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Barbara Boland note que ce ne sont pas les démocrates qui sont responsables de l’explosion de cette dette pharamineuse. Sous Bush, la dette avait atteint 10.000 milliards de dollars ; avec Obama, elle culminait à 20.000 milliards. La spirale avait été amorcée par des Républicains, notamment par Reagan.

Cette dette énorme est le talon d’Achille des Etats-Unis qui ne font rien pour la juguler sous Trump. Chris Hedges, autre dissident américain, estime, quant à lui, que l’accroissement de la dette sous Trump fait perdre toute confiance en l’Amérique et induit les autres grandes puissances à abandonner le dollar, ce qui aura pour corollaire de démanteler graduellement et tacitement les alliances, tout comme les harcèlements judiciaires américains ont fait fléchir, en septembre dernier,  Juncker et Mogherini, auparavant féaux sujets de l’hegemon, incapables d’imaginer un monde où celui-ci aurait été autre qu’hégémonique. La dette a des effets désastreux sur la politique intérieure américaine, ajoute Chris Hedges, car elle entraîne une inflation difficilement maîtrisable qui ne permet plus de financer les forces armées, dont le budget est colossal, comme on le faisait auparavant. Chris Hedges annonce ainsi la fin d’une impérialité de triple facture, athénienne, romaine et britannique, athénienne parce qu’elle tablait sur des alliés fiables et fidélisés, romaine parce qu’elle dispersait ses légions à bon escient aux endroits les plus stratégiques, britannique parce qu’elle visait un « système omni-englobant » reposant sur la culture, le commerce et les alliances.

Pour Hedges, la fracture est née en 2003 quand Bush a refusé d’écouter ses « alliés » européens. Elle sera confortée plus tard quand les Etats-Unis rejetteront justement les accords avec l’Iran, en menaçant leurs « alliés » de rétorsions s’ils persistaient à respecter ces accords ou à passer outre les injonctions américaines. La Turquie, depuis lors, a partiellement abandonné le dollar, l’Europe refuse de céder sur le gaz russe amené par le gazoduc Nord Stream 2, la Russie a échangé un stock de 100 milliards de dollars pour des yuan chinois, des yens japonais et des euro, l’Allemagne a demandé le retrait de son or de la « Federal Reserve » (300 tonnes), suivi par les Pays-Bas (100 tonnes). La dette, la défiance générale par rapport au dollar, sonne le glas du bellicisme néo-conservateur, incarné aujourd’hui par une nouvelle génération de faucons comme Mike Pompeo, John Bolton et Elliott Abrams.

Hedges base son analyse sur les travaux d’un historien anglais, Ronald Robinson, qui a étudié les mécanismes qui ont entraîné la disparition progressive de l’impérialité britannique. Celle-ci s’est effilochée quand elle n’a plus trouvé de collaborateurs indigènes et que ceux-ci, notamment sous l’impulsion de Gandhi, se sont mis à poursuivre des programmes autonomes. Pour ce qui concerne l’actuelle impérialité américaine, la perte de confiance due à la dette entraîne la perte de confiance dans les bons du trésor américain, même auprès du gouverneur de la Banque d’Angleterre Mark Carney qui a déclaré : « Nous avons désormais des devises de réserve autres que le dollar ». Cette perte de confiance s’observe très nettement depuis 2004 déjà, où les banques se sont appliquées à conserver moins de dollars dans leurs réserves. La tendance s’est accentuée jusqu’en 2015 où moins de paiements en dollars ont été effectués dans les transactions commerciales internationales. D’où la cote des Etats-Unis sur le total du commerce mondial n’est plus que de 10%, alors qu’elle dépassait les 50% dans l’immédiat après-guerre et au moment de la Guerre de Corée.

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Si rien ne change, le période de 2020 à 2030 sera catastrophique pour l’hegemon : l’augmentation des prix aux Etats-Unis ruinera encore davantage la pauvre classe moyenne, ou ce qu’il en reste, car les salaires stagneront. Pour Hedges, le dollar cessera définitivement d’être une monnaie de réserve mondiale vers 2030, obligeant le Pentagone à retirer ses troupes de partout ; le tourisme américain ne sera plus possible ni finançable pour les particuliers ; le recul de la puissance sur terre entraînera un recul dans l’espace et dans le « cyberspace », ce dont je doute et j’y reviens, provoquant sur le territoire américain lui-même des conflits internes que Hedges ne définit pas mais que les tenants de la fameuse « alt-right » qualifieront de « raciaux », ce qui est l’hypothèse effectivement la plus plausible.

Pourquoi ai-je émis un doute quant au recul des Etats-Unis dans le domaine du « cyberspace » ? Pour énoncer cette objection, je prends appui sur un document rédigé par Jean-Claude Empereur, vice-président de la « Convention pour l’Indépendance de l’Europe », un document qui a été préalablement publié dans la « Revue Politique et Parlementaire », dans son numéro d’avril-septembre 2018. Pour Empereur, nous sommes aujourd’hui, à l’échelle planétaire, face au « piège de Thucydide ». L’historien grec antique Thucydide, auteur de « La guerre du Péloponnèse », avait émis un axiome de la pensée politique qui disait que les grandes guerres se déclenchaient quand une puissance dominante était défiée par une puissance émergente et que la puissance dominante ne sortait pas nécessairement victorieuse du conflit ou en sortait en perdant des plumes.

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Aujourd’hui, le « piège de Thucydide » s’observe dans la confrontation Chine/Etats-Unis, où la Chine est une puissance tellurique et les Etats-Unis, facteur nouveau dans l’histoire, une puissance numérique. La Chine est qualifiable de puissance tellurique parce qu’elle vise à organiser territorialement le continent en créant de nouvelles voies terrestres ou des voies maritimes littorales en Eurasie, qui rappellent les antiques « routes de la soie ». Elle veut dont multiplier les infrastructures physiques sur une vaste masse continentale. Tandis que les Etats-Unis, par leur savoir-faire de pointe, veulent parfaire une puissance basée sur le virtuel, sur le « Big Data ». Le défi chinois, face à l’hégémonie réelle et actuelle des Etats-Unis, se matérialise surtout dans la tentative de se tailler un créneau dans la sphère du numérique en tablant sur la 5G. Car tel est bien le défi majeur. Je laisse aux spécialistes le soin d’expliquer en quoi consiste matériellement ce bond en avant du numérique. Je me contenterai d’en évoquer les retombées politiques. L’affaire Huawei, qui secoue aujourd’hui les relations sino-américaines, est la première manche dans cette cyber-guerre que mènent les deux protagonistes. La 5G, pour les Chinois, doit permettre de créer la ville du futur, testée en Chine à Xiongan qui recevra ses premiers habitants en 2020. La gestion numérique de cette ville, de cette smart city, devra servir de modèle aux acheteurs potentiels du système ailleurs dans le monde ; Xiongan est située à quelque 100 km de Beijing et est reliée à la capitale par un train à lévitation magnétique se déplaçant à 200 km/h. Les Chinois avaient déjà mis beaucoup de choses remarquables en œuvre pour la gestion des villes du futur et des aéroports tentaculaires des prochaines décennies. Xiongan doit être le couronnement de ces recherches, ponctuées désormais par la maîtrise de la 5G. L’exportation de ce modèle de ville, à des coûts concurrentiels, pourrait rapporter à la Chine autant que la maîtrise du numérique a rapporté aux Etats-Unis. Godfree Roberts écrit à ce propos : « Les Etats-Unis considèrent Huawei comme étant ‘dangereuse pour la sécurité’ parce que Huawei protège la confidentialité des communications des usagers », installant ainsi un barrage assez efficace contre toute intrusion des réseaux d’espionnage. La NSA a pourtant réussi à pénétrer les serveurs de la société Huawei et ne doit guère craindre ce bouclier vanté par les Chinois pour séduire les acheteurs de leurs produits, déjà très nombreux en Europe. On le voit, la guerre est ouverte et ce que craint Trump, par-dessus tout, c’est que les Etats-Unis accusent prochainement un retard de dix ans sur la Chine, sur la 5G et les technologies associées. Pire : ils se rendent compte que les Allemands, moteurs de l’Europe, ne peuvent renoncer à Huawei sans risquer le suicide économique. Un tandem sino-européen pointe à l’horizon, dont la Russie ne serait pas exclue. Une dynamique eurasienne se dessine, cauchemar des thalassocraties anglaise hier et américaine aujourd’hui.

piege-americain_0_400_642.jpgLe sort des cadres chinois de Huawei, poursuivis par la « justice » américaine, laisse préfigurer le pire aux Européens qui transgresseraient les interdits formulés par le Deep State américain. Le récit que vient de nous livrer Frédéric Pierucci dans son livre intitulé « Le piège américain » est affolant : ce cadre d’Alstom a été emprisonné pendant de longs mois aux Etats-Unis pour faire chanter les dirigeants de l’entreprise française qui ont fini par la céder à un consortium américain, avec toute la complaisance de Macron.

L’Europe, elle, est marginalisée par rapport à cet enjeu planétaire car elle n’a parié ni sur les infrastructures terrestres ni sur des voies maritimes littorales ni sur le numérique. Elle s’est voulue une « puissance de la norme » sans la force, obsédée par l’institutionnel et le normatif, qui, pour tout lecteur de Carl Schmitt, sont du vent, de la logorrhée, des vœux pieux, du « wishful thinking ». Le normativisme est une idéologie qui privilégie exclusivement les formes figées n’autorisant pas l’affrontement aux événements neufs, comme la révolution numérique en cours ou, sur le plan des relations internationales, le passage de la bipolarité de Yalta à l’unipolarité américano-centrée des années 1990, et de celle-ci à la multipolarité des BRICS. Il est proprement impossible de développer une stratégie, dans quelque domaine que ce soit, quand on adopte le normativisme car celui-ci fige tout une fois pour toutes et considère que toute action ou toute décision qui sortirait du cadre de la norme serait ipso facto une dangereuse transgression, assimilable au mal absolu et historique qui aurait secoué l’Europe il y a quatre-vingt ou septante ans. L’Europe de la norme sans force (Zaki Laïdi) donc du politiquement correct s’interdit toute audace innovante au risque de plonger toute sa population dans une régression calamiteuse. Inutile de vous préciser qu’il est minuit moins cinq !

La puissance numérique américaine repose donc sur une maîtrise ancienne des technologies informatiques et numériques, sachant que, selon la loi de Moore, la puissance des ordinateurs double tous les dix-huit à vingt-quatre mois. Les Etats-Unis ont donc bénéficié du développement exponentiel de leurs acquis en ce domaine, permettant de vastes avancées dans l’automation ou, par exemple, dans la nanotechnologie sans oublier les drones qui donnent de considérables avantages aux armées sur le terrain. Le déploiement des atouts numériques en sciences et en médecine est évidemment un acquis indispensable à tous les peuples du monde mais c’est aussi, dans le domaine de l’information et des médias, la possibilité de démultiplier l’impact du « soft power » américain, dont on connait déjà la redoutable efficacité. Le numérique, ainsi, permet des manipulations médiatiques à l’échelle planétaire comme l’atteste, par exemple, la mobilisation tous azimuts pour le climat qui jette aujourd’hui nos enfants dans les rues chaque jeudi pour des happenings saugrenus qui permettent surtout de détourner l’attention des problèmes réels. Jean-Claude Empereur écrit : « La puissance algorithmique d’un Etat devient ainsi un élément majeur de son influence géopolitique », puissance algorithmique que les Etats-Unis utilisent pour obtenir leur « full spectrum dominance ». Le colbertisme américain fait que l’armée, la défense, soutient toutes les initiatives de la Silicon Valley et des autres géants américains du numérique. Les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Youtube, etc.) réinvestissent leurs profits colossaux HORS du numérique : dans les projets spatiaux, le transport, le nucléaire, si bien qu’au soft power, décrit jadis par Joseph Nye, s’ajoute désormais un « digital power », aux potentialités quasi infinies. C’est là qu’il ne faut pas partager à 100% le pronostic de Hedges qui voit un recul des Etats-Unis dans le cyberspace.

Le dôme numérique américain surplombe donc le monde aujourd’hui, aplatissant la Terre, effaçant, au besoin par la force, toutes les différences inscrites dans le sol de la Terre au bénéfice de tout ce qui est « hors sol », dans le « cloud » comme la thalassocratie de Roosevelt avait arasé les résistances des adversaires des Etats-Unis. Cet arasement, vendu hier comme une « libération », est vendu aujourd’hui comme l’avènement sans heurts « d’un vivre-ensemble mondialisé, ignorant les rapports de force et les conflits territoriaux », soit une « géopolitique numérique du tendre » (« soft/smooth numerical geopolitics »). L’Amérique, qui avait exprimé son messianisme conquérant par un langage agressif du temps de Teddy Roosevelt, par un langage presbytérien et hypocrite avec Wilson, vient d’inventer le « messianisme bienveillant », et numérisé, un messianisme thérapeutique, mais cette bienveillance, vous en conviendrez, n’est qu’un masque. Que les cerveaux hardis de notre Europe en dormition ont pour mission d’arracher.

cloudnum.jpgFace à cette puissance numérique du tout-virtuel, du Big Data, du « hors sol » et du « cloud », la Chine –et je le dis avec amertume parce que j’aurais voulu que ce fut notre Europe qui le fasse-  formule le projet intéressant des « routes de la soie », propose ainsi une organisation continentale, celle des géomètres romains, aurait dit Carl Schmitt, renoue avec la pensée du développement chez Friedrich List, entend vertébrer le monde plutôt que le fluidifier et le sublimer dans le « cloud ». Elle parie pour le temps long. Face à cette tâche qu’elle aurait dû suggérer et entreprendre elle-même, l’Europe, dit Empereur, « a souscrit béatement au grand récit de la mondialisation heureuse et de la fin de l’histoire », annoncée au début des années 1990 par Francis Fukuyama. En souscrivant à ces fables sans consistance, elle a évité ainsi la pensée du long terme, que Chinois, sur le plan tellurique, et Américains, sur le plan numérique, ont pourtant toujours eu en tête. Le présentisme obtus des Européens est une erreur fatale. Ce « présent idéal », mais figé, correspondait peut-être à des temps désormais révolus, ceux de la coexistence pacifique qui édulcorait la guerre froide, ceux des Trente Glorieuses qui se sont muées en Trente Piteuses, ou encore ceux de la perestroïka de Gorbatchev. Or le monde est redevenu « normal », c’est-à-dire multipolaire et conflictuel, précise Empereur. Voilà pourquoi un projet de refondation est impératif pour l’UE, aujourd’hui, alors que les peuples renâclent : les Européens, en effet, ont le sentiment diffus que leurs institutions bruxelloises ne sont qu’un fatras technocratique oppressant qui s’auto-justifie par une idéologie vertuiste, tissée de repentance et de culpabilité. Les Européens, ajoute Empereur, « ne disposent ni de la puissance numérique actuellement dominée par les Américains et sans doute demain par les Chinois et sont coupés de toute profondeur stratégique non seulement par leur situation géographique de petit cap de l’Asie mais aussi par l’interdiction absolue qui leur est faite, par leurs alliés anglo-saxons, de s’entendre avec la Russie dans une perspective eurasiatique. (…). Cette stratégie d’interdiction géopolitique est totalement contraire aux intérêts européens ». Pire : ces dernières semaines, à l’occasion de la soixante-troisième conférence sur la sécurité à Munich, Mike Pence, porte-paroles du gouvernement américain, a tenté de forcer Merkel à refuser et à saborder le projet de gazoduc Nord Stream 2 et a déconseillé aux Européens de commercer avec l’Iran. Macron prendra le relais en répétant les admonestations de Pence, ruinant ainsi le binôme franco-allemand, reposant sur une volonté d’émancipation européenne. Sans le gaz russe, l’Europe germanique et bénéluxienne ne peut tout simplement pas survivre ; sans l’apport du commerce iranien, l’Europe est condamnée à la stagnation et à ne disposer que de fonds réduits pour ses « recherches et développements », alors que ceux-ci sont urgentissimes pour rattraper ses retards dans le numérique et dans d’autres domaines de pointe.

Pour échapper à l’étau que Pence, à Munich, a menacé de faire fonctionner, Empereur nous demande d’appuyer un projet de Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin qui est une extension du projet suggéré en 2003 par Henri de Grossouvre, c’est-dire non plus un Axe Paris-Berlin-Moscou mais un Axe Paris-Berlin-Moscou-Beijing qu’ils définissent tous deux comme « conforme aux exigences de la géographie ». Et Empereur conclut par ces paroles que je vous demande de méditer quand vous sortirez de cette salle : « Puisse la réflexion sur les grands espaces l’emporter sur celles de la gouvernance par les chiffres et les obsessions comptables d’une technocratie sans vision ».

Cette parole, qui conclut un article purement factuel sur l’affrontement sino-américain, a une portée philosophique profonde que j’ai retrouvée dans un long entretien que le philosophe Marcel Gauchet a accordé récemment au site français « Les Crises ». Pour Marcel Gauchet,   -qui, dans cet entretien, esquisse un bilan succinct, très didactique, visant l’essentiel-   la souveraineté, qui turlupine tant quelques nationalistes français qui imaginent échapper aux désastres qui s’annoncent en quittant l’UE, la souveraineté donc, dit Gauchet, est en baisse à tous les niveaux en Europe, tant à celui des Etats nationaux qu’à celui de l’UE. L’Europe, et chacun des Etats qui la compose, est anesthésiée : elle est devenue, pour Gauchet, une entité a-politique et a-stratégique. Le politique, au sens noble du terme, est évacué. La stratégie est absente. Or sans « politique politique », disait Julien Freund, il n’y a pas de souveraineté : rien que de la politicaille qui laisse tout aller, les héritages comme les traditions, tel un chien crevé au fil de l’eau.

RH-MG.jpgLes dépenses militaires américaines, surtout après l’aventure vietnamienne et après le projet de « guerre des étoiles » cher à Reagan, ont servi à lancer une industrie numérique qui assure la domination américaine sur la planète entière. Les Européens n’ont jamais eu le réflexe de coordonner leurs actions pour être à l’avant-garde des innovations scientifiques et technologiques.

Face à ce désastre, dont les effets se sont accumulés au fil des décennies, la riposte « néo-nationaliste », dit Gauchet, est seulement « affective ». En effet, on oppose à des faits évidents des affects incapacitants qui dédoublent le danger, dans la mesure où ils n’entament en rien la force de l’adversaire et où leurs actions risquent d’avoir un effet retardateur, justement celui qu’escompte faire advenir l’ennemi pour freiner nos élans. On ne répond pas à l’ennemi par des déclamations émotionnelles ou des affects sans pertinence. De même, on ne réplique pas, dit Gauchet, par des arguments relevant de la religion car le religieux, lui, est bel et bien mobilisé par et pour la majorité morale aux Etats-Unis, par les télé-évangélistes ou par les chrétiens sionistes. Pour Gauchet, nous sommes face à une eschatologie politique, face à une théologie politique américaine qui permet une forte mobilisation des électorats, puissance dont nous ne disposons plus en Europe. Mais, j’ajouterai à l’argument pertinent de Gauchet un élément qu’il ne cite pas : face à ce pandémonium théologico-messianique américain, l’Europe ne se pose pas non plus comme le katechon qui va arrêter le déclin, freiner la déliquescence et rétablir l’ordre traditionnel. Elle ne se donne aucun rôle valorisant sur l’échiquier global. On peut poser la question : Poutine, orthodoxe russe, est-il ce katechon ? Je laisse la question ouverte car c’est là un autre débat, celui de la théologie politique, thème extrêmement complexe.

Gauchet constate aussi la « déstabilisation identitaire » qui frappe principalement les pays d’Europe occidentale, Allemagne comprise. Les pays d’Europe centrale et orientale, notamment la Pologne et la Hongrie, en sont nettement moins affectés : les mésaventures très récentes d’Orban avec la direction du PPE l’attestent à l’évidence. Cette « déstabilisation identitaire », au cours de ces trois ou quatre dernières années, provient essentiellement du flot d’arrivants venus de tous les horizons possibles et imaginables, flot qui induit un processus de submersion démographique alarmant auquel l’UE n’apporte aucune réponse car elle est un ensemble, dit Gauchet, qui n’a aucun contrôle ni sur sa frontière sud ni sur son front intérieur, les émeutes qui ont ravagé Grenoble, tout près d’ici, tout près de Genève, au cours de la semaine écoulée en sont un exemple patent.

Cette « déstabilisation identitaire » et ces turbulences inquiétantes sur le front intérieur sont le fruit d’une absence totale de conscience politique, que constate également Gauchet. Il nous dit : « L’UE ne sait pratiquer qu’une POLITIQUE de la REGLE, alors que ce qui lui est demandé est une POLITIQUE de l’EVENEMENT ». Toute politique de l’événement postule de déployer méticuleusement une stratégie car une stratégie, explique Gauchet, « permet d’anticiper les événements et de parer à toute éventualité ». On retrouve là, en un langage plus serein et plus subtil, les visions de Carl Schmitt et de Clausewitz. Pour Schmitt, le fétichisme de la règle, ou de la norme, est un poison ankylosant qui ruine les Cités comme le venin du cobra coagule le sang de ses proies. Pour Clausewitz, la stratégie consiste à ne jamais rater une étape dans le développement des techniques civiles et militaires qui procurent la puissance économique ou guerrière.

Ce fétichisme de la règle, qui doit, selon les tenants du normativisme, s’imposer envers et contre le réel, qui est par définition fluctuant, entraîne aussi la haine de soi, l’oikophobie disent les identitaires néerlandais, qui se traduit par une critique acerbe et injustifiée des acquis de l’histoire européenne, répétée ad nauseam par les intellocrates mercenaires des médias et des officines téléguidées par la NSA. L’idéal des normativistes étant défini une fois pour toutes, tout recours à un passé différent ou tout projet de refondation, populiste ou autre, sont tabou, doivent être effacés des mémoires et des volontés, afin que l’on n’ait plus qu’une humanité de zombis amnésiques et apathiques. Gauchet critique le « refus des intellectuels de tout eurocentrisme » et ajoute : « les legs de notre histoire sont tout-à-fait avouables ». Il y a donc urgente nécessité à « nouer un rapport critique intelligent avec le passé ».

Gauchet dénonce là le dernier danger que je voulais évoquer avec vous aujourd’hui : le danger de l’amnésie, de l’amnésie volontaire dans laquelle les normativistes nous plongent parce qu’ils estiment avoir raison au-dessus du réel et parce qu’ils ne veulent pas que des exemples du passé ressurgissent dans les mémoires, ou s’y lovent, parce qu’ils seraient des reproches actifs et virulents face à leurs manigances. Ma position personnelle est de ne pas arrêter la marche de notre histoire, de ne pas étouffer le réel historique qui est notre socle irremplaçable et doit nous servir de table d’orientation en permanence (la « logique tacitiste ») ; en ce sens je suis peut-être plus continuitaire qu’identitaire. Mais c’est là une coquetterie de vocabulaire.

Il me reste à remercier les jeunes organisateurs de ce colloque genevois, qui, au nom de la mobilisation totale, ont mobilisé les sexagénaires en ce jour pour leur demander des recettes pour affronter ce que ce cher Guillaume Faye, qui vient, hélas, de nous quitter définitivement, appelait la « convergence des catastrophes ». L’impéritie des normativistes impolitiques a imposé aux Européens la négligence de leur passé mais a aussi anesthésié leurs volontés d’aller de l’avant, de chercher des alternatives à l’impasse où ils ont été enfermés. Les tâches ardues qui attendent la nouvelle génération de combattants politiques, en Suisse et, plus encore, ailleurs en Europe, seront immenses car il s’agira de restaurer une souveraineté contre les agissements de forces colossales, avec, à côté d’eux, un matériel humain, certes de notre souche, mais profondément abîmé, zombifié par la permissivité et le festivisme qui ont régné en Europe depuis un demi-siècle, où l’on a brisé sans pitié tous les instruments traditionnels de la transmission.

Malgré cela, je souhaite à tous de conserver un vibrant courage et je vous dis : « A bientôt ! ».

Robert Steuckers.

Sources:

- Hans Herbert von ARNIM, Die Hebel der Macht und wer sie bedient - Parteienherrschaft statt Volkssouveränität, Heyne, München, 2017.

- Barbara BOLAND, "Ignoring America's Abyss of Debt", https://www.theamaricanconservative.com , 15 février 2019.

- Jean-Claude EMPEREUR, "Washington, Pékin: hégémonie numérique contre hégémonie tellurique", http://euro-synergies.hautetfort.com , 9 février 2019.

- Uriel GADESSAUD & Pierre RAMOND, "Nous avons rencontré Marcel Gauchet", https://www.les-crises.fr , 11 février 2019.

- Jean-Louis GERGORIN & Léo ISAAC-DOGNIN, Cyber - la guerre permanente, Cerf, Paris, 2018.

- Chris HEDGES, "Goodbye al dollaro", https://www.ariannaeditrice.it , 11 février 2019.

- Ali LAÏDI, Le droit, nouvelle arme de guerre économique - Comment les Etats-Unis déstabilisent les entreprises européennes, Actes Sud, Paris, 2019.

- Zaki LAÏDI, La norme sans la force - l'énigme de la puissance européenne, Sciences Po, Paris, 2005.

- Godfree ROBERTS, "Huawei, la 5G et la quatrième révolution industrielle", http://lesakerfrancophone.fr , 29 janvier 2019.

- Leslie VARENNE, "Le piège américain", http://www.zejournal.mobi , 15 février 2019.

Articles anonymes:

"US-Vizepräsident aus der Münchner SiKo: Washington läuft weiter Sturm gegen 'Nord Stream 2'", http://zuerst.de , 18 février 2019.

 

vendredi, 15 mars 2019

Daniel Conversano : « La guerre que prédit Guillaume Faye sera civile et raciale »

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Daniel Conversano : « La guerre que prédit Guillaume Faye sera civile et raciale »

[Interview] 

Ex: https://www.breizh-infos.com 

« Guerre civile raciale ». Tel est le titre du dernier ouvrage de Guillaume Faye, qui vient de sortir quelques jours après sa mort. Un titre qui, c’est une habitude chez l’auteur, polémiste dans l’âme, ne fait pas dans la dentelle. C’est un autre polémiste et proche de Guillame Faye, Daniel Conversano, qui a édité ce dernier ouvrage.

Et à qui nous avons posé quelques questions, qui étaient adressées initialement à Guillaume Faye, son décès ayant rendu impossible cette interview. Daniel Conversano, son éditeur, répond donc à sa place. Attention, entretien choc, sans langue de bois.

fgcr.jpgPour commander le dernier livre de Guillaume Faye, c’est ici

Breizh-info.com : La guerre civile raciale, vingt ans après la colonisation de l’Europe… Nous y sommes donc vraiment ? Qu’entendait Guillaume Faye par guerre civile raciale d’ailleurs ?

Daniel Conversano : Le titre a surpris certains observateurs, parce qu’il semble en quelque sorte contradictoire. Nous avons tendance à nous représenter la guerre civile comme un affrontement fratricide entre individus provenant d’un même peuple, et la guerre raciale, à l’inverse, comme une guerre entre pays distincts, qui met dos à dos des populations très différentes (par exemple : les Croisades, qui furent des guerres religieuses et raciales). Cette perplexité face à la présence du mot « civil » en titre, vient d’une mauvaise compréhension du mot : une guerre civile est une guerre dont les acteurs principaux ne sont pas des soldats ou des officiels mais de simples citoyens. Or, la grande majorité des allogènes contre lesquels Faye pense que les Français devront lutter, sont eux-mêmes des Français de papier. La guerre que prédit Guillaume sera donc ET civile ET raciale, puisqu’elle opposera sur le sol français des civils de même nationalité, mais issus de groupes ethniques différents (essentiellement Européens, Maghrébins et Noirs).

Breizh-info.com : Pour faire une guerre, ne faut-il pas être deux camps actifs ? Le camp des autochtones, des Blancs, des Européens, semble particulièrement divisé, peu conscient de qui il est, loin d’être fédéré, et n’a pas la démographie pour lui. À moins que… l’imprévu dans l’histoire ?

Daniel Conversano : Tout à fait. À la fin du chapitre 2, Faye évoque les scénarios possibles pour l’avenir. L’un d’eux est la défaite pure et simple du camp autochtone. Et dans les raisons invoquées, il y a le manque de courage collectif, qui donne effectivement l’impression que si demain, une guerre raciale éclate en France, les Maghrébins islamisés et les Africains seront les seuls à donner les coups et donc, à l’emporter. Guillaume Faye est persuadé que les attentats vont reprendre et se multiplier en France, jusqu’à devenir quasiment quotidiens. La faiblesse encourage les musulmans radicalisés : de tous temps, elle leur a donné l’énergie d’aller plus loin et de soumettre complètement les territoires qu’ils occupaient. Ce n’est pas comme s’ils allaient tout à coup arrêter de nuire, si l’on continue en face à être « gentil » et à se battre à coups de bougies.

Mais Faye n’est pas dupe et estime qu’il y a une chance sur trois que les Français perdent sans lutter cette guerre raciale et territoriale. Une chance sur trois, c’est beaucoup.

Breizh-info.com : Guillaume Faye a été visionnaire avec la colonisation de l’Europe, ce qui lui a valu critiques, condamnations… Comment voyait-t-il l’Europe, la France, en 2030-2040 ?

Daniel Conversano :  Bonne question… Je partage l’avis de Guillaume sur le sujet. En fait, nous sommes pessimistes pour la France et optimistes pour l’Europe et le monde blanc. Le remplacement ethnique en France a atteint un stade très avancé, au point qu’il nous semble impossible (à moins de mener une politique qui ne respecterait pas les conventions de Genève… encore faut-il pour cela prendre le pouvoir de force) de reprendre le contrôle du pays et d’en refaire ce qu’il a pourtant toujours été : un pays de Blancs ! Guillaume est beaucoup plus confiant en ce qui concerne les peuples (nous disons bien les peuples) allemands, italiens, hongrois, polonais ou russes. Même s’il n’a pas confiance en la volonté réelle et la capacité d’un Salvini à entamer un processus de remigration, Guillaume Faye pense notamment que l’Italie s’en sortira parce que le logiciel des Italiens est et sera toujours identitaire : un Italien sait qu’il est Blanc, qu’un Marocain ou un Malien ne l’est pas, et ce que cela implique. À terme, ce « pouvoir » tout bête de savoir distinguer qui est quoi, sera un atout majeur dans le cadre d’affrontements contre les allogènes, et notamment ceux qui sont animés d’un sentiment de haine métaphysique envers nous, à travers l’islam. Selon Guillaume, et même s’il le déplore, la chute de la France (et l’Angleterre) créera un précédent historique qui alertera le reste des pays inquiétés avant qu’il ne soit trop tard – et ce, même si le poison du progressisme gauchiste commence doucement à atteindre les pays de l’Est. Le pari de Faye est que la France tombera dans la guerre et l’effroi avant que les pays préservés ne fassent les mêmes erreurs que nous, ce qui leur permettra d’en tirer les conclusions adéquates. Aussi, quand Guillaume Faye écrit dans le livre qu’il pense que nous gagnerons la guerre, le « nous » veut dire « les Blancs ». La France, seule, c’est moins sûr.

Breizh-info.com : Quelles seraient les mesures les plus urgentes, sur le plan politique, à mettre en place aujourd’hui ? Le souverainisme distillé un peu partout en Europe est-il une solution à la crise que traverse notre civilisation ?

Daniel Conversano : À la fin de sa vie, Guillaume Faye n’aimait plus répondre à ce genre de questions, car l’absence de perspectives claires pour obtenir le pouvoir lui donnait le sentiment qu’imaginer un programme que nous ne pourrions jamais appliquer était une perte de temps. Il faut aussi ajouter quelque chose qui n’est pas très « politiquement correct »… En fait, Guillaume ne cherche pas de solutions pour éviter la guerre civile, il souhaite que cette guerre ait lieu. Non par sadisme ou folie, mais parce qu’il pense qu’il n’y a que la guerre qui pourra permettre à la France de rebondir, et d’entamer le processus de démigration (mot qu’il utilise à la place de remigration), afin de retrouver sa grandeur. Position audacieuse, que d’aucuns jugeront immorale, mais qui me semble compréhensible. S’il existe encore des solutions politiques dans les pays où les autochtones ne votent pas fortement à gauche et où la proportion d’immigrés en rapport à la population générale est inférieure à 10-15 %, ce n’est plus le cas en France. Pour en avoir discuté avec lui souvent, le plus probable est que les Français de souche, de gauche comme de droite d’ailleurs, finiront par s’expatrier devant tant de haine et de violence infligées au quotidien. Le cœur de Guillaume voulait la guerre, sa raison penchait plutôt pour un « white flight » massif qui arrivera prochainement.

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Breizh-info.com : Guillaume Faye était très malade lorsque nous avons voulu l’interroger. Qu’aurait-il répondu selon vous à la question suivante : Que faire, pour demain, pour nos enfants et pour notre civilisation ?

Daniel Conversano : Guillaume Faye a compris fin novembre, quand on lui a annoncé un cancer généralisé, qu’il allait bientôt mourir. Pourtant, c’est un sujet que nous abordions peu. En pratique, et sans doute pour ne pas sombrer psychologiquement dans le désespoir, nous échangions en planchant sur ses prochains ouvrages comme si de rien n’était. C’est ainsi qu’il tenait le coup. Mais il y a eu tout de même quelques brefs moments où, de lui-même, Faye a évoqué avec moi sa fin proche. Notamment le soir de la Saint-Sylvestre. Je l’ai appelé à 23 h 50 pour lui souhaiter une bonne année, sur un coup de tête, car personne n’est censé appelé les patients aussi tard. Étonnamment, il ne dormait pas et m’a répondu. Quelque chose comme : « c’est mon dernier réveillon. J’en profite et j’écoute l’équipe médicale faire la fête en salle de pause. Je ne serai pas là pour le prochain réveillon… c’est une idée triste, n’est-ce pas, mon cher Daniel ? ». Ces mots m’ont énormément touché et j’y repense souvent. À la suite de cela, nous avons discuté d’un certain nombre de sujets. Et j’ai noté ceci : pour Guillaume, la clé est dans la compréhension par chaque Européen de la nature de leur âme. Faye était convaincu que tout s’écroule en Occident parce que plus rien n’est à sa place, et que les individus n’y arrivent plus à déterminer clairement qui ils sont. Les poètes et les artistes doivent créer des mythes qui encouragent la jeunesse à choisir la lutte et la survie (il n’aimait pas, par exemple, la mollesse dépressive des livres de Houellebecq, selon lui dangereuse) ; les courageux et ceux qui en ont la force doivent combattre, et ne plus se laisser faire face à la délinquance étrangère, tout en se vengeant en cas d’attaques adverses ; et les gens lambdas doivent, c’est le minimum, faire entre trois et quatre enfants pour assurer à notre pays une démographie autochtone de renouvellement des générations. Voilà ce qu’il m’a dit cette nuit-là, et répété souvent depuis. Il y a 3 catégories d’hommes européens, et chacun doit déterminer au cours de sa vie à laquelle il appartient. Père de famille, soldat, créateur. Faites votre choix.

Propos recueillis par YV


[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine – V

jeudi, 14 mars 2019

Faible participation, déconnexion : le premier bilan peu reluisant du grand débat national

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Faible participation, déconnexion : le premier bilan peu reluisant du grand débat national

par Bastien Gouly
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com 
 
L'initiative lancée il y a plusieurs mois par Emmanuel Macron pour contrer la mobilisation des Gilets jaunes a-t-elle convaincu ? Selon Le Parisien, les catégories sociales les plus défavorisées compteraient parmi les grands absents du débat. 

Les jeunes et les pauvres, exclus du grand débat national ? Dans une étude diffusée le 9 mars, Le Parisien explique avoir décortiqué les 334.000 propositions citoyennes enregistrées dans le cadre de l'initiative macronienne, qui touche à sa fin. Une bonne partie de celles-ci provient de la plateforme internet du grand débat, non protégée du parasitage des activistes, anonymes et autres trolls, comme avait pu le constater RT France.

«C’est une France urbaine, socialement favorisée et retraitée qui s’est exprimée, du moins sur internet», analyse pour le quotidien de la capitale Jérôme Fourquet, directeur du département opinion publique à l'institut de sondage Ifop. Plusieurs médias ont, eux aussi, noté la faible réactivité des jeunes face à l'initiative gouvernementale.

«La France qui a participé est celle qui a voté Macron»

«La France qui a participé à cette vaste enquête est celle qui a voté pour Emmanuel Macron au premier tour de l’élection présidentielle», ajoute d'ailleurs Jérôme Fourquet. Par voie de conséquence, il note des disparités entre la participation des départements les plus riches et celle des moins aisés. L'illustration est faite avec l'Ile-de-France, Paris et les Hauts-de-Seine, qui en sont à plus de six contributions en ligne pour 1 000 habitants, loin devant la Seine-Saint-Denis – où le taux de pauvreté est le plus élevé de France métropolitaine – avec moins de quatre contributions en ligne pour 1 000 habitants.

Aussi, le grand débat initié par Emmanuel Macron, et organisé par le gouvernement en dehors d'un cadre indépendant (comme le souhaitait à l'origine la Commission nationale du débat public) semble être, d'abord, une affaire macronienne.

«La carte des non-contributeurs correspond à celle du non à Maastricht», résume par ailleurs Jérôme Fourquet qui constate «une fracture civique et démocratique».

Moins de contributeurs que de Gilets jaunes ?

Le Parisien affirme en outre que seuls 160 000 internautes auraient répondu à un ou plusieurs des quatre formulaires sur le site internet. Peu flatteur pour une démarche qui souhaitait éteindre la contestation des Gilets jaunes. Les macroniens ou partisans d'Emmanuel Macron ont beau avoir fait part, dès le premier acte le 17 novembre, de leurs réserves quant à la réussite du mouvement citoyen, force est de constater que celui-ci avait réuni, selon les chiffres du ministre de l'Intérieur (source pourtant accusée par les manifestants de minimiser la mobilisation) plus de 280 000 manifestants. Une mobilisation bien supérieure sur une journée, au nombre de participants du grand débat en ligne sur près de trois mois.

Le député de La France insoumise (LFI) Eric Coquerel a de fait rappelé le 12 mars à l'Assemblée nationale que le grand débat n'avait mobilisé sur son site que «0.25% des Français [...] moins d'un adhérent sur deux revendiqué par En marche»«A croire que même vos fidèles n'en ont pas voulu, de votre grande propagande nationale», a ajouté l'élu LFI à l'attention du Premier ministre Edouard Philippe.

Pourtant, le gouvernement et les élus de La République en marche comptent bien s'appuyer sur certains chiffres, manipulables, pour montrer le succès de leur opération. Par exemple, la secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Emmanuelle Wargon, le ministre chargé des Collectivités territoriales Sébastien Lecornu ou la députée LREM d'Ille-et-Vilaine Laurence Maillart-Méhaignerie se félicitent en effet d'avoir obtenu environ 1,5 million de contributions individuelles sur la plateforme en ligne.

Sur les réseaux sociaux, la députée LREM de l'Ain Olga Givernet se vante pour sa part d'une «importante participation avec 16 000 cahiers de doléances ouverts [et] 10 000 réunions d’initiatives locales».

La macronie est donc en rang serré, pour présenter le grand débat comme une réussite du quinquennat.

Que se passera-t-il dans les mois suivants ?

Après la fin de la récolte des contributions le 15 mars, l'exercice se poursuivra avec des conférences régionales de citoyens tirés au sort. Ils livreront leur diagnostic sur deux week-end, soit le 15-16 mars, soit le 22-23 mars selon les endroits.

Des débats au Sénat et à l'Assemblée nationale auront également lieu début avril sur les quatre thèmes (transition écologique, fiscalité et dépenses publiques, démocratie et citoyenneté, organisation de l'Etat et services publics). Selon une source parlementaire, contactée par l'AFP, le gouvernement devrait ensuite faire le 9 avril une déclaration devant l'Assemblée nationale, sans vote.

Sébastien Lecornu affirme d'ailleurs dans Le Journal du dimanche du 10 mars que des propositions se «déploieront jusqu'à l'été».

Le 12 mars devant le Conseil économique social et environnemental (Cese), Edouard Philippe annonce en outre que le grand débat devait aboutir sur plusieurs points à un «compromis démocratique». Cependant, difficile de rendre plausible cette éventualité lorsque, dans le même temps, La République en marche et son délégué général Stanislas Guerini confirment avoir pour proposition de faire travailler les salariés un jour supplémentaire, gratuitement, afin de financer la dépendance des personnes âgées. Il s'agirait d'une deuxième journée de solidarité après celle mise en place par le gouvernement Raffarin en 2004 pour financer... la dépendance.

Avant l'issue définitive du grand débat, la macronie n'est-elle pas déjà en train de jeter de l'huile sur les braises de l'actuelle contestation sociale ?

Bastien Gouly

mardi, 12 mars 2019

Manifeste pour une vraie renaissance européenne

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Manifeste pour une vraie renaissance européenne

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Prolégomènes.

Emmanuel Macron dans une tribune a évoqué une renaissance européenne. Pour qu’il faille une renaissance européenne, il faudrait déjà préciser en quoi il y a décadence. Or son propos passe sous silence tous les maux qui rongent l’Europe et tous les périls qui s’annoncent. Sa « renaissance » n’est qu’un linceul blanc posé sur le corps de l’Europe en voie d’agonie.

Les maux qui rongent l’Europe ? La dénatalité endémique qui ravage notre continent. Les flux migratoires de substitution, issus notamment des anciennes colonies et/ou des sociétés islamiques, qui la dénaturent, engendrant crise identitaire et crise sécuritaire sur le sol de l’Europe. Les périls qui s’annoncent ? Que les Européens (Russie incluse) finissent minoritaires sur leur propre sol au cours du XXIème siècle. Que leur civilisation s’éteigne. Quels autres maux ? La guerre froide larvée entre l’Europe et la Russie, par le biais de la stratégie américaine de division des Européens, jouant les uns contre les autres, et d’encerclement de la Russie par des états hostiles.

La tutelle américaine, par le biais de l’OTAN, par le biais aussi de son influence diplomatique et culturelle, et enfin par la menace de sanctions économiques contre nos entreprises si elles ne jouaient par son jeu, a même contraint les Européens à exercer des sanctions économiques contre la Russie. Pire, nos dirigeants vont encore plus loin dans la soumission aux USA, au point de souhaiter une domination encore plus forte en soutenant les interventionnistes du parti démocrate au lieu de préférer profiter de l’isolationnisme de Trump pour se libérer de leur tutelle.

Illusions et mensonges.

Lorsque ces périls ne sont pas purement et simplement niés par nos dirigeants, et même lorsqu’un constat honnête, comme la déclaration d’Angela Merkel sur l’échec de la société multiculturelle, est énoncé, qui n’est pas le moins du monde suivi d’actes ou qui est démenti dans les faits quelques mois après pour accueillir des centaines de milliers de migrants, ils sont ignorés. Dans la tribune d’Emmanuel Macron, pas un mot n’est consacré à l’immigration ou à l’islam.

Les mondialistes qui nous dirigent ne veulent rien changer à leur gouvernance mais ils veulent renforcer les moyens de museler l’opposition. Au nom des droits de l’homme, ils restreignent les libertés du peuple. Le projet Macron pour l’Europe se limite à créer des gadgets institutionnels supplémentaires, parfaitement inutiles et sans doute destinés à récompenser ses affidés en créant des postes bien rémunérés grâce à nos impôts. C’est l’Europe de l’impotence et de la stagnation. L’Europe politique est renvoyée aux calendes grecques. Aucune avancée significative n’est proposée. Il s’agit seulement de l’empêcher. Macron consolide ainsi l’aspect technocratique et mondialiste de l’Europe en créant des institutions parasitaires et en fermant l’horizon d’une véritable renaissance.

Les souverainistes en face, s’ils nient moins ces périls, les placent de toute façon au second plan au nom de leur obsession économique consistant à tout voir par ce seul prisme, rassurant car il ne demande pas le courage politique que serait celui consistant à dénoncer le péril migratoire. Le péril pour eux vient davantage du voisin européen qu’ils regarderont en chiens de faïence, que de l’immigration extracontinentale et de ses conséquences. Ils restent dans un cadre politique qui était celui d’une Europe qui pesait 25% de l’humanité et qui dominait les trois-quarts de la planète. Les temps ont changé mais ils ne veulent pas le voir, de peur de devoir franchir des Rubicons idéologiques qu’ils refusent par nostalgie incapacitante. Ils prêtent à une UE impuissante un pouvoir exorbitant, exonérant à bon compte les gouvernements de leurs responsabilités, et accusent l’euro de tous les maux. Que l’immigration post-coloniale ait été organisée en France depuis 1946, au Royaume-Uni depuis 1948 ou en Allemagne depuis 1963, sans le moindre rôle joué par la CEE puis par l’UE, ne les intéresse pas. Ils rêvent justement de renvoyer au voisin européen le dernier migrant entré.

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Notons enfin que l’émergence des populismes et des nationalismes centrifuges est d’abord un symptôme de l’échec de cette Union européenne là et des principes qui la président depuis l’origine. Il ne faut donc pas s’opposer à eux par principe mais prendre acte du fait que leur existence est le reflet de politiques désirées par les peuples européens et que l’oligarchie leur refuse par dogme mondialiste, et notamment du rejet croissant des flux migratoires par ces mêmes peuples, à qui les premiers flux de travail depuis les années 50 avaient été présentés comme temporaires et dont la pérennité n’a jamais été ni désirée ni acceptée.

Trois pactes pour le salut et l’avenir de l’Europe.

Au plus tôt…

Un pacte de liberté.

Un pacte pour finaliser la décolonisation et émanciper réellement les anciennes colonies. Commençons par émanciper complètement les départements et territoires d’outre-mer afin d’affirmer notre destin européen et de rendre la souveraineté à des peuples dont l’identité est autre.  Abandonnons le franc CFA et les politiques de francophonie, d’anglophonie et de lusophonie. Si l’identité de l’Europe nous importe, nous devons admettre que l’identité de l’Afrique importe aux Africains et la respecter.  Dans ce cadre, les pays émetteurs de flux migratoires de l’Afrique vers l’Europe doivent aussi respecter notre identité et encourager leurs ressortissants expatriés à retourner dans leur pays. Pour ce faire, il faut bien sûr que l’Europe agisse en cohérence en coupant l’appel d’air et en arrêtant les pompes aspirantes, en recentrant ses politiques publiques sur ses propres citoyens. L’Europe se désengagera totalement des affaires africaines et arrêtera d’influencer les politiques de ce continent.

L’avenir de l’Europe n’est pas lié à celui de l’Afrique et réciproquement. L’avenir des Européens est en Europe et l’avenir des Africains est en Afrique. Liberté pour les uns comme pour les autres de demeurer eux-mêmes sur la terre de leurs ancêtres.

Un pacte d’égalité.

Les Européens doivent assumer leur destin par eux-mêmes sans la tutelle d’une puissance étrangère qui se veut amie mais qui les oppresse notamment depuis la chute du bloc soviétique. L’OTAN aurait dû disparaître en 1991 au moment où l’URSS redevenait la Russie et où Gorbatchev proposait de faire de l’Europe une « maison commune ». Il est donc temps que l’Europe dénonce le traité de l’Atlantique-nord et bâtisse une véritable armée européenne indépendante. La présence des forces américaines en Europe, qui déstabilise notre relation avec la Russie et aliène notre souveraineté, doit cesser. A terme, cette armée européenne intégrera jusqu’à l’armée russe.

Ce pacte d’égalité, c’est que l’Europe sera respectée par les USA comme un égal, que les USA ne mèneront pas de rétorsions économiques contre l’Europe sans réponse en retour de sa part, qu’ils respecteront notre richesse culturelle, dont ils s’inspirent pour leur cinéma du fait de leurs origines européennes, et qu’un cinéma européen digne de ce nom, qui reste à rebâtir, sera accueilli aussi largement aux USA que le cinéma américain l’est en Europe.

Un pacte de fraternité.

Nous refusons cette guerre froide larvée entre l’Union européenne et la Russie qu’attisent tactiquement les USA. Nous proposerons donc un pacte de fraternité à l’ensemble des pays de l’Europe orientale et en particulier à la Russie. Mais nous tiendrons compte aussi des légitimes inquiétudes des pays d’Europe centrale qui ont subi jadis le joug du bolchevisme, qu’ils confondent à tort avec la Russie.

Il s’agira dans le cas des pays baltes de rassurer ces derniers sur leur identité en encourageant la Russie à faire revenir les russophones de ces pays, dont la présence trop forte attise une russophobie nocive, et dans ce cadre l’Union Européenne devra engager un plan d’investissement économique important en partenariat avec la Russie.

Toutes les sanctions économiques contre la Russie, qui en plus nuisent à l’économie ouest-européenne, seront levées et les visas entre l’Union Européenne et la Russie, comme avec l’Ukraine et le Belarus, seront levés. Une réconciliation Ukraine/Russie sous l’égide de l’Union européenne, à partir de la situation établie, sera engagée. Un plan européen d’action économique sur le Donbass, qui restera en Ukraine, sera mis en place.

A terme, l’intégration complète à une Union européenne refondée de manière simultanée de l’Ukraine, du Belarus et de la Russie, est envisagée comme un objectif fondamental. Nous n’avons pas à craindre l’élargissement de l’Union européenne à des pays européens, que ce soit ceux des Balkans occidentaux, Serbie en tête, ou que ce soit ceux de l’Europe orientale.

Une vraie ambition pour l’Europe.

A plus long terme…

Une Europe unie et démocratique.

L’Union européenne sera réorientée dans un sens démocratique et toutes les institutions non élues seront abrogées. Les deux conseils et la commission de Bruxelles seront supprimés. Le parlement européen de Strasbourg deviendra l’institution principale de cette Union refondée. A partir de lui, sera proposée une véritable constitution européenne aux citoyens d’Europe, qui permettra de doter le continent européen d’institutions démocratiques fortes.

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Cette Union européenne refondée sera une « nouvelle Athènes ». Une nationalité européenne définie par l’ascendance sera instituée afin de pérenniser l’identité native de l’Europe et de garantir un espace européen de libertés, de droits et de devoirs, entre personnes ayant un destin commun par leur origine commune. Une présidence élue au suffrage universel direct sera institué. Un sénat européen représentera les régions et les nations d’Europe.

L’euro deviendra la monnaie nationale de l’Union européenne puis de l’Europe unie. Il sera contrôlé par la Banque nationale européenne (ex-BCE) elle-même pilotée par le ministère européen des finances. Le budget européen se substituera intégralement aux anciens budgets nationaux, permettant ainsi une politique de meilleure répartition de la ressource en Europe et des économies d’échelle massives. La bonne gestion budgétaire impliquera un plan européen d’économies sur toutes les dépenses supplémentaires de nature « humanitariste » que l’Europe s’est imposée à elle-même pour plaire aux globalistes et sur toutes les dépenses liées à la question migratoire et qui n’auront plus lieu d’être.

Une Europe unie et identitaire.

Il s’agira d’affirmer le caractère européen de l’Europe et de toutes les nations et régions qui la composent, l’Europe elle-même étant considérée comme une nation par l’unité de peuplement et de civilisation qui la caractérise depuis des millénaires.

Il faudra également empêcher la propagande consistant à encourager l’aliénation et le remplacement de l’Europe, à laquelle on opposera une grande politique continentale de réaffirmation identitaire.

Par le biais de la nationalité européenne et des droits et devoirs exclusifs dont disposeront ses détenteurs, des politiques encourageant des logiques remigratoires seront mises en place afin de garantir le caractère européen de l’Europe pour l’avenir et démentir ainsi les prospectives sombres annoncées pour l’Europe au cours du XXIème siècle selon les paradigmes actuels.

Il s’agira enfin de relancer la natalité européenne et non d’encourager une natalité de substitution. La détention de la nationalité européenne conditionnera les aides sociales et les allocations en ce domaine, mais aussi dans le domaine de l’emploi et de l’éducation.

Une Europe unie et continentale.

L’objectif est que l’Europe soit unie, dotée de son Etat unitaire stratège et de son gouvernement légitime, sur un espace compris entre l’Islande et la Russie. Aucune nation d’Europe, aucun peuple d’Europe, ne sera laissé à nos portes.

En revanche, les pourparlers d’adhésion avec la Turquie, même s’ils sont actuellement au point mort, seront officiellement abandonnés.

Cet espace continental unitaire respectera les identités de chaque région et nation historique par l’adoption d’un principe de subsidiarité identitaire et si la liberté de circulation à l’intérieur de cet espace sera absolue, le droit d’installation en revanche sera conditionné à l’acceptation pleine et entière au préalable des habitants, au niveau de la cité ou de la région. Les cultures d’Europe n’ont pas vocation à disparaître par fusion mais au contraire à se renforcer mutuellement.

Conclusion.

Il est temps d’engager une véritable renaissance de l’Europe en osant doter cette dernière des institutions européennes puissantes et efficaces dont elle manque cruellement, et d’affirmer une souveraineté européenne réelle, qui ne se limite pas à des paroles mensongères de politiciens en berne dans les sondages.

Ce n’est pas par des petits pas ou par des déclarations que l’Europe s’unira mais par une volonté politique de fer, une vision d’avenir, et le soutien des Européens, alors réveillés et convaincus. Pour que l’Europe en 2050 soit toujours l’Europe, il faut l’unir mais sur les bonnes bases et la doter d’une tête et d’un cadre.

Pour l’Europe éternelle, pour l’Europe européenne, agissons et forgeons à nouveau notre destin en hommes libres, en Européens !

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

Meilleurs extraits de la revue de presse de Pierre Bérard (11 mars 2019)

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Meilleurs extraits de la revue de presse de Pierre Bérard (11 mars 2019)

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Au sommaire :

Selon Vincent Lapierre présent à Paris pour l’acte XIII des Gilets Jaunes il ne fait plus de doute que les casseurs, antifa et autres black-block présents depuis quelques semaines  dans toutes les manifestations ne sont là que pour pourrir le mouvement, lui donner une image violente dont les médias raffolent et accessoirement y exercer leur talents de kapo en en chassant tous ceux qui ont la réputation de nourrir des sympathies pour un « fascisme » imaginaire. Les quelques centaines de miliciens antifa se montrent ainsi des auxiliaire précieux de la police pour détruire un mouvement qui, surgi d’une France invisible jusqu’alors en dormition, n’a pas su se structurer afin d’éliminer de ses rangs un cancer qui risque d’en venir à bout :  

Vincent Lapierre à l’acte XIV des GJ perturbé par les ratonnades des antifa :
 
 
Autre reportage incisif au coeur de la manifestation parisienne des Gilets Jaunes pour l’acte XV. Il montre une réalité bien différente de celle qui à cours dans les médias de grand chemin :
 
 
La piste des « fascistes » semeurs de haine et de violence refuse de se démentir. Il est vrai qu'elle a tellement servi depuis des décennies quelle est devenue le réflexe conditionné des médias pavloviens autant que des politiques qu’on appelle non sans ironie « responsables ». C’est pourquoi cet article du Point se lit comme l’exception qui confirme la règle. Bon, il n’était pas très difficile de conclure comme le fait l’hebdomadaire à la culpabilité de l’extrême gauche puisque les antifa signent leurs forfaits avec, il faut bien le reconnaitre, une mansuétude des forces de police et de ceux qui les commandent qui ne doit étonner que les demeurés de la politique et de ses coups bas :
 
 

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Michel Drac trace à gros traits dans une courte vidéo les différences majeures entre la situation de la France en 1968 et en 2018, et les dissemblances qui s’ensuivent entre la révolte étudiante et celle des Gilets Jaunes. Il distingue cinq différences essentielles dont la plus importante lui parait être l’existence de l'euro qui nous interdit toute dévaluation alors qu’après les cadeaux offerts aux syndicats en juin 1968 Pompidou devenu président avait pu dévaluer fortement le franc :
 
 
Toujours dans Le Point, un article de Jérôme Fourquet intitulé « France, le grand bouleversement » qui annonce ce que des esprits affutés avaient révélé depuis une quarantaine d’années à savoir le grand remplacement en marche, vécu alors comme un succession de fake news tout juste bonnes pour les rustres amateur de conspirations :
 
 
Alain Finkielkraut témoignait sur Bfm-Tv au lendemain de l’incident auquel il a été confronté en marge du quatorzième acte de Gilets Jaunes. L’indignation justifiée qu’a soulevé cette agression verbale a constitué le point d’orgue d’une campagne contre l’antisémitisme qui prend des allures dantesques (alors que la hausse des actes réputés antisémites s’inscrit tendanciellement dans une baisse de 8,5% depuis 18 ans). On notera que le philosophe sait voir ce qu’il voit et le dit tranquillement : le petit groupe de manifestants qui s’en est pris à lui était constitué de salafistes fanatisés dont l’un au moins, le plus véhément, est connu du renseignement et a été arrêté depuis. Il fréquente la galaxie Milli Gorus, un réseau de mosquées turques. Contre cette montée de l’antisémitisme, surtout marquée par des graffitis de pissotière, la gauche divine, comme toujours a appelé à des manifestations qui mobilisent le banc et l’arrière banc des bonnes consciences « antifascistes ». Finkielkraut n’est pas dupe de cette récupération de la mémoire juive dans une démonstration au cours de laquelle il s’est agi d’accuser le Rassemblement National (alors que Marine Le Pen fut l’une des première à marquer sa solidarité avec l’académicien) et de refuser de comprendre d’où vient présentement l’essentiel du nouvel antisémitisme. Les organisateurs, intellectuellement déficients ou paresseux, présenteront cette nouvelle vague d’antisémitisme comme un avatar de celui des années trente qui était endogène contrairement à celui d’aujourd’hui qui est exogène et se présente sous les traits avantageux de l'antiracisme. Pour toutes ces raisons Alain Finkielkraut se montrait dubitatif  par rapport à cette manifestation qui rameutait dans le cortège des pleureuses nombre de maires de banlieue qui n’ont de cesse d’alimenter le clientélisme communautariste afin d’y gagner, espère-t-ils, leur réélection. Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes :
 
Alain Finkielkraut, extraits d’un entretien revigorant à Die Welt :
 

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Michel Onfray n’est pas dupe des manoeuvre et des coups bas qui accompagnent les insultes qu’a dû endurer Alain Finkielkraut lors de sa rencontre inopinée avec l’acte quatorze des Gilets Jaunes : 
 
 
L’historien israélien (de gauche) Shlomo Sand remet en place le président Macron concernant son amalgame entre « anti-sionisme » et « antisémitisme ». Texte de 2017 publié par Mediapart :  
 
 
Alors que l’on s’interroge en haut lieu sur les accointances supposées entre anti-sionisme et antisémitisme, un article de l’historien Henry Laurens vient justement montrer que de 1933 à1939 les sionistes n’hésitèrent pas à « collaborer » avec l’Allemagne nazie au grand dam de ceux qui mettaient en avant la lutte contre l’antisémitisme du national-socialisme par l’arme du boycott. Le travail d’historien pratiqué scrupuleusement montre une fois de plus que la réalité des faits se distancie grandement des schémas manichéens qui ont cours dans notre bel aujourd'hui  :
 
 
Une revue de presse consacrée à l’antisémitisme par l’OJIM. L’ensemble des articles collationnés mettent en cause le RN et LFI alors que la totalité des homicides judéophobes relevés en France depuis une dizaine d’années désigne des criminels issus de l’immigration arabo-musulmane. De même le lien entre islamisme et antisémitisme est passé sous silence. Comment résoudre un problème grave si l’on ne sait ou l’on ne veut pas en poser correctement toutes les données ? :
 
 
Du RIFifi à la Nouvelle Librairie, tel est le titre de la très récente émission produite par Radio Méridien Zéro. Avec François Bousquet qui explique parfaitement le projet de ZAR (zone à reconquérir) que constitue pour lui la librairie et l’ensemble des initiatives qui s’articulent à elle (les 34 premières minutes de l’émission). Xavier Eman ensuite. Il anime la revue papier de Zentropa, un fanzine paraissant tous les deux mois. Il publie par ailleurs un deuxième livre Terminus pour le hussard (éd Auda Isarn) et en dehors de sa chronique régulière dans Éléments co-dirige l'excellente revue Livr’arbrites dont la dernière livraison est consacrée à Ernst Jünger. Thierry Bouzard conclut l'émission avec une réflexion sur le Rock Identitaire Français :
 
 

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Concernant Ernst Jünger on peut lire également une étude de la germaniste Isabelle Grazioli-Rozet parue sur le site Philitt et consacrée à la rencontre intellectuelle entre Jünger et Mircea Eliade. Rencontre qui aboutit à la création de la revue Antaios, première version. Une deuxième version paru plus tardivement dans les années 90, dirigée par Chritopher  (deux parties) :
 
 
 
Michel Drac présente La doctrine du fascisme publiée en 1932. Ce livre écrit partiellement par le philosophe Giovanni Gentile et signé de Benito Mussolini condense la vision du monde telle que la percevait le Duce une dizaine d’années après la marche sur Rome. Le résumé qu’en fait Drac est concret, précis et objectif et nous éloigne très rapidement des simplifications polémiques dont les discours contemporains sur le fascisme se sont gavés. Les clichés dont témoignent ces lieux communs doivent beaucoup à la réthorique stalinienne des années trente. Leur persistance est une des marques du succès de la stratégie gramsciste mise en œuvre dès cette époque par l’internationale communiste. Ce compte rendu lumineux signale aussi bien les insuffisances que les réussites de ce régime qui prétendait soumettre l’individu à l’État. Il souligne également la résurgence païenne que représentait cette conception du monde, pour aussi bizarre et inattendue que cela paraisse. Pour Drac elle fut incubée tout au long de l’existence du Saint Empire Romain Germanique qui comprenait une large partie de l’Italie contemporaine. Pour terminer Michel Drac se livre à un exercice amusant, celui de fachomètre  consistant à classer les forces politiques françaises en fonction de leur facho attitude.  
Macron s’en sort premier de la liste, ce qui n’étonnera personne :
 
 
Pourquoi Viktor Orban mène-t-il une politique résolument nataliste ? :
 
 
La social-démocrate Annika Strandhäll, ministre suédoise de la Sécurité sociale, a déclaré dans un tweet que la politique nataliste hongroise mise en place par le gouvernement Orban « ressemblait aux années 30 ». « Ce qui se passe en Hongrie est alarmant. Orban souhaite que davantage d’ « authentiques » enfants hongrois naissent. Cette politique ressemble à celle des années des années trente ». Afin d’en juger plus objectivement, ce qui n’est pas difficile, voici le discours sur l’état de la nation hongroise prononcé au mois de février de cette année où Orban détaille les mesures prises pour réveiller la natalité hongroise. Un crime odieux, apparemment, pour les tenants de l’idéologie libérale-libertaire qui recourent sans mesure à la reductio ad hitlerum
 
 

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La machine politique russe en quête de « volonté longue ». Une étude magistrale de Vladislav Surkov, l’un des conseillers de Poutine, qui s’exprime avec un sens accompli des réalités présentes :
 
 
Excellente critique par la démographe Michèle Tribalat  du livre de Paul Collier Exodus. Immigration et multiculturalisme au XXI siècle qui vient d’être traduit de l’Américain aux éditions de L'artilleur :
 

Pour Paul-Francois Schira, juriste et énarque : « Il n’y a pas de destin commun sans enracinement ». Interview accordée au Figaro Vox à l’occasion de la sortie de son dernier essai La demeure des hommes paru chez Tallandier. Dans ce très intéressant entretien qui s’articule autour d’une citation empruntée à Polybe « Aucune civilisation ne cède à une agression extérieure si elle n’a pas d’abord développé un mal qui l’a rongée de l’intérieur » l’auteur instruit intelligemment le procès du libéralisme et de l’individualisme :
 
 

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Point de vue d'Hervé Juvin sur l’idéologie du progrès qui se place au coeur de la doctrine politique d’Emmanuel Macron qui s’en veut le représentant exclusif face aux forces « obscurantistes » du conservatisme et du nationalisme. « L’avenir tel que la République en Marche veut y conduire la France a été écrit en 1990, explique Juvin. Libre échange, entreprises mondiales, sociétés multiculturelles, règne du droit et uniformisation du monde sur le modèle américain ». Aucune des promesses énoncées dans les années 90 par ce programme n’ont été tenues, et Juvin en tire lucidement les leçons argumentées. Selon lui, le globalisme c’est le passé, et le localisme l'avenir :
 
 
Jean-Paul Demoule qui avait connu il y a quelques années un relatif succès de librairie en publiant Mais où sont passés les Indo-européens se voit aujourd’hui « corrigé »  par trois linguistes spécialisés dans l’étude des langues indo-européennes. La thèse centrale soutenue par Demoule suggérait que les Indo-européens étaient une vue de l’esprit essentiellement soutenue par les cerveaux maniaques du nazisme. Cette politisation outrancière d’une question historique très mal comprise lui vaut cette fois un blâme bien mérité. Article difficile qui pour être pleinement savouré exige que l’on appréhende les bases de la linguistique :
 
 
L’étonnant parcours de la jeune militante écologiste suédoise Greta Thunberg, coqueluche internationale de l’environnement (et de la société multiculturelle). Une fabrication du capitalisme vert bien décidé à ne pas renoncer à la « croissance ». Elle sert ainsi de label aux spin-doctor d'un réseau créé par le Forum économique mondial en 2011. Les jeunes qu’elle embrigade savent-ils qu’ils marchent pour la davocratie ? :
 
 

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Richard Labévière spécialiste du Proche-Orient était l’invité d’Élise Blaise sur le plateau  de Samedi Politique (TVL). Il rend compte de la situation militaire en Syrie et explique pourquoi la diplomatie française vidée de tous ses experts en islamologie et d’arabisants s’est mise à la remorque d’idéologues néo-conservateurs qui obéissent d’abord aux intérêts américains au dépens de nos propres atouts dans la région. La France a eu tout faux depuis les débuts de la crise en 2011 et se trouve désormais exclue du jeu (première référence). Il est largement question dans cette vidéo de l’article du colonel Legrier qui commandait l’artillerie française dans la zone Irakienne. Cet article qui a fait l’objet d’un interdit du gouvernement Macron constitue la seconde référence  :
 
 
 
Entretien de Thibault Isabel avec le philosophe et mathématicien Olivier Rey sur Pasolini à propos de l’ouvrage de ce dernier intitulé « Le chaos. Contre la terreur » dont il a écrit la préface. Le livre est édité chez RN  :
 
 
Toujours sur le même site un article plus ancien de Falk van Gaver sur l’effondrement à venir. De manière générale les dizaines d’articles publiés sur L’inactuelle sont très intéressants et apportent un complément 
de réflexion à une revue comme Krisis :
 
 
L’une des plus récentes interviews de L’inactuelle est celle de l'excellent Dany-Robert Dufour, spécialiste de la critique du libéralisme. Il aborde ici la notion de peuple et la difficulté de le représenter. Il décrypte également l’anthropologie libérale toute entière fondée sur le paradigme de l’agent individuel cherchant en permanence à maximiser son meilleur intérêt. Ce modèle apparait pour le première fois chez le penseur anglais du XVIII siècle Mandeville, auteur de La Fable des abeilles (« les vices privés fondent l’harmonie sociale »). Une telle approche ne peut déboucher que sur la généralisation de la pléonexie que l’on voit s’étaler partout de nos jours. Dufour vient de publier Le code Jupiter. Philosophie de la ruse et de la démesure aux éditions des Equateurs, sous le pseudonyme de Démosthène : 
 
 

lundi, 11 mars 2019

Le Président des ultra-riches. Chronique du mépris de classe dans la politique d’Emmanuel Macron

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Le Président des ultra-riches Chronique du mépris de classe dans la politique d’Emmanuel Macron

par Frédéric Stévenot

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

« Macron, c’est moi en mieux », confiait Nicolas Sarkozy en juin 2017. En pire, rectifient Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot. Huit ans après Le Président des riches, les sociologues de la grande bourgeoisie poursuivent leur travail d’enquête sur la dérive oligarchique du pouvoir en France.

Au-delà du mépris social évident dont témoignent les petites phrases du président sur « ceux qui ne sont rien », les auteurs documentent la réalité d’un projet politique profondément inégalitaire. Loin d’avoir été un candidat hors système, Emmanuel Macron est un enfant du sérail, adoubé par les puissants, financé par de généreux donateurs, conseillé par des économistes libéraux. Depuis son arrivée au palais, ce président mal élu a multiplié les cadeaux aux plus riches : suppression de l’ISF, flat tax sur les revenus du capital, suppression de l’exit tax, pérennisation du crédit d’impôt pour les entreprises… Autant de mesures en faveur des privilégiés qui coûtent un « pognon de dingue » alors même que les classes populaires paient la facture sur fond de privatisation plus ou moins rampante des services publics et de faux-semblant en matière de politique écologique.
Mettant en série les faits, arpentant les lieux du pouvoir, brossant le portrait de l’entourage, ce livre fait la chronique édifiante d’une guerre de classe menée depuis le cœur de ce qui s’apparente de plus en plus à une monarchie présidentielle ».

Si le titre de l’ouvrage évoque à dessein l’une des précédentes publications des « Pinçon-Charlot »[1] , l’attention du lecteur doit se concentrer sur le sous-titre. Car le projet du livre y est défini très clairement. Le couple de sociologues utilise les connaissances acquises au cours de leurs nombreuses enquêtes au sein des élites pour analyser le parcours de l’actuel président de la République, mais aussi les mesures prises en l’espace d’une année et demie.

Les cent-soixante seize pages de cet ouvrage se lisent sans aucune difficulté, l’humour n’y étant pas pour rien. Les mieux informés ne trouveront pas de révélations inédites sur le personnage du président de la République, ce qui n’est d’ailleurs pas l’objectif des auteurs. En revanche, ils nous offrent une synthèse qui permet de mettre en relation tout ce que l’on sait sur lui, très précisément informée. Encore s’agit-il d’une analyse de type sociologique bâtie autour d’une problématique : en quoi E. Macron est-il représentatif de la classe sociale dont il est issu et dont il porte les intérêts ?

Si l’on se fie à ce que les auteurs disent en préambule, leur « Président des ultra-riches » est une réponse au défi lancé implicitement par E. Macron, dont les propos avaient été rapportés par Le Canard Enchaîné, à l’automne 2017. Il réfutait le fait qu’on puisse le qualifier de « président des riches », comme l’avait été N. Sarkozy : « personne ne peut me relier à cette image ». À défaut de cela, les sociologues devaient pouvoir démontrer facilement le mépris et la condescendance exprimés par le candidat puis par le président, en s’appuyant sur les premières mesures qui venaient appuyer les « macronades ». Ils rappellent toutefois les conditions de son élection : 24 % des votes exprimés, mais seulement 18,2 % des inscrits au premier tour, soit le plus mauvais résultat de toute la Cinquième République. Ce qui inciterait à la modestie laisse au contraire place à l’arrogance, au nom de la légitimité sortie des urnes. Ils rappellent également les conditions de la campagne électorale, et la construction d’un candidat « hors système », alors que son parcours démontre à l’envi qu’il se place parfaitement dans le système. On se dit alors que, finalement, avec une base populaire aussi restreinte, les mesures prises par le nouveau président sont en parfait accord avec ceux qui le soutiennent réellement. C’est justement la conclusion à laquelle parvient les Pinçon-Charlot, « en croisant le contenu de sa politique sociale et économique avec sa trajectoire sociobiographique et le maillage oligarchique de son pouvoir » (p. 155).

Quand la rédaction du livre s’est achevé, le mouvement des « gilets jaunes » avait commencé. La reprise de deux récits publiés dans L’Humanité (26 nov. et 11 déc. 2018) s’imposait pour confirmer le bien-fondé du propos du livre. En effet, l’un des thèmes exprimés par les manifestants concernait sinon la personne du président de la République, au moins le mépris de classe qu’il n’avait cessé d’exprimer.

Frédéric Stévenot, pour Les Clionautes

[1] Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, Le Président des riches. Enquête sur l’oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy, La Découverte, coll. « Zones », 2010, rééd. La Découverte, coll. « Poches/Essais », 2011.
 

vendredi, 08 mars 2019

Intelligence artificielle. Bluff technologique ou Game Over ?

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Intelligence artificielle. Bluff technologique ou Game Over ?

par Thierry DUROLLE

« Créer une intelligence artificielle serait le plus grand événement de l’histoire humaine. Malheureusement, ce pourrait être le dernier, à moins que nous découvrions comment éviter les risques. » Stephen Hawking résume ici toute l’envergure d’un processus prométhéen qui pose nombre de questions. Mise au point.

Principes de base de l’intelligence artificielle

Dans les années 90, on assiste à l’essor du Machine Learning (ou « apprentissage automatique »). Les programmes informatiques fonctionnent grâce à des configurations bien précises qui forment des cadres dont il est impossible de s’extirper, bien que certains cas l’exigeraient. Le programme devrait être capable de prendre des mesures par lui-même. Pour cela, il a besoin de nouveaux algorithmes qui lui permettront d’apprendre en l’alimentant avec des données, puis, en lui permettant de les classer ou de faire des associations. Il s’agit ni plus ni moins que d’une imitation du mode d’apprentissage des enfants : on désigne un chien du doigt et on nomme ce que l’on vient de lui montrer. L’une des clés pour comprendre l’IA (intelligence artificielle) réside justement dans ce mimétisme de l’humain (et plus généralement du vivant) où la pensée mécaniste sert de passerelle entre le monde de la nature et celui de la machine. Cela explique sans doute pourquoi l’on peut rapprocher l’intelligence artificielle et le transhumanisme, tout deux faisant partie d’un élan prométhéen à tendance bio-mécanique.

La neuro-informatique, par exemple, élabore un système inspiré de notre réseau neuronal dans son principe de fonctionnement, à l’exception que les neurones sont ici remplacés par des algorithmes nommés perceptrons. C’est la base du Deep Learning (« apprentissage approfondi »), une version beaucoup plus élaborée du Machine Learning, développé par le chercheur français Yann Lecun et rendu possible par l’évolution des ordinateurs et par le Big Data. Pour le moment, la machine ne peut pas rivaliser avec l’homme puisque contrairement à celle-ci nous avons, en plus de nos connaissances, tout un tas d’expériences devant nous, de facultés tenant de l’innée, de sensations et d’émotions. Autrement dit, nous avons nos cinq sens pour connaître et explorer le monde, pour faire nos propres expériences et nos propres choix; la machine n’a rien de semblable – d’où l’utilité des données pour palier à tout ce qui est du domaine de l’empirique.

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État des lieux de l’intelligence artificielle

La bonne nouvelle est que le scénario Terminator attendra encore pas mal de temps avant de pouvoir se réaliser. Néanmoins, et cela n’est pas pour autant très rassurant, l’IA est devenu une composante de nos vies sans forcément que nous nous en rendions compte. Lorsque vous naviguez sur le fil d’actualité d’un célèbre réseau social, les informations qui apparaissent sont sélectionnées via des algorithmes usant de procédés d’intelligence artificielle (par un décorticage de vos data). Il en va de même pour tout un tas de gadgets devenus des outils du quotidien pour un grand nombre de personnes, comme les traducteurs de langues, les reconnaissances vocale et faciale. Les domaines d’application sont nombreux : finance, médecine, armée ou encore jeux vidéos.

Les avancés en la matière sont objectivement prometteuses, notamment dans le domaine médical où l’intelligence artificielle permettra d’analyser à une vitesse fulgurante des données médicales, des radiographies pour repérer des anomalies difficiles à détecter à l’œil nu. L’IA se révèle extrêmement efficace dans le traitement et l’analyse des données. En fait, contrairement aux êtres humains, celle-ci s’avère efficace uniquement dans un domaine particulier pour une tâche elle-même extrêmement précise. Un bon exemple est le programme AlphaGo. Conçu pour le jeu de go, celui-ci a battu Lee Sidol, le meilleur joueur au monde, le 15 mars 2016. En revanche, ne demandez pas à AlphaGo de jouer aux échecs car il en est incapable. Ce à quoi il faut s’attendre en réalité s’apparente à « l’émergence d’une technologie de l’intégral » pour reprendre l’expression d’Éric Sadin, c’est-à-dire à la multiplicité d’applications ayant recours à l’IA dans notre quotidien. L’humanité enclenche le pilotage automatique.

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Utopie technicienne ou scénario Terminator ?

L’IA, qui n’est en définitive qu’une technique, nous est promu comme LA solution à nos problèmes, ce en quoi elle serait plus performante que son créateur pour certaines tâches spécifiques. L’homme ne serait en fin de compte perfectible qu’au-delà de sa condition biologique. Cette technique sera mise à toutes les sauces en terme de résolution collectives : fin des problèmes de chômage, d’économie, de politique, d’écologie, etc. D’ailleurs le monde économique se frotte les mains à l’idée d’usines entièrement robotisées.

Pour l’instant nous ne sommes qu’au commencement de ce que les chantres de l’IA appelle une révolution. Si ces derniers comprennent le mot révolution comme une subversion, ils ont sans doute raison, mais, quid de l’ampleur de cette révolution ? Ne s’agit-il pas en fin de compte d’un bluff technologique, pour emprunter l’expression de Jacques Ellul ? Ou alors, à l’opposé, avons-nous ouvert une boite de Pandore débouchant sur le scénario Terminator ? Les défenseurs de l’IA répondront que la machine n’a pas de volonté propre si ce n’est celle qui lui a été insufflée. Par conséquent, si l’on ne programme pas la possibilité pour un robot de faire le mal, celui-ci ne pourra pas s’exécuter. La machine peut-elle échapper à notre contrôle ? En août 2017, des chercheurs du Facebook Artificial Intelligence Research (FAIR) publient une étude dans laquelle ils expliquent que deux robots communicatifs programmés pour la négociation, appelés chatbots, ont inventé leur propre langage. Les chercheurs disent avoir arrêté le programme qui « ne fonctionnait pas comme prévu »…

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Après Prométhée, faire face à notre destin

Le véritable risque réside en fait dans cette emprise du technologisme sur nos vies (via et pour le plus grand bonheur du techno-capitalisme). Il suffit de voir les habitants des villes, mais aussi parfois des campagnes, le nez collé à leurs smartphones, la montre connectée vissée au poignet, pour se convaincre de la domination de la technique sur une partie de l’humanité. Déformé neurologiquement, mentalement et physiquement, le dos courbé pour être toujours plus près de l’écran du smartphone, les yeux fatigués par la lueur de celui-ci : voilà les techno-zombies, mus par des applications Androïd qui leur indiquent le grammage adéquat de nourriture qu’ils doivent ingérer pour continuer à exister, et qui les préviendront bientôt quand ils devront aller à la selle et comment s’accoupler récréativement. Parler d’accoutumance, voire carrément de dépendance, n’est donc pas exagéré. Tablettes, GPS, biométrie, réseau sociaux : ce que l’on gagne en côté pratique, en utilité, on le perd en indépendance, c’est-à-dire, en fin de compte, en liberté.

L’IA conçue comme une extension-outil de nous-même, indispensable à notre bon fonctionnement, voilà le danger ! En tant que partisan d’un monde organique, du Kosmos, de la saine mesure autrefois prônée par les Grecs anciens, lutter contre l’atomisation, la rationalisation fanatique et le mécanicisme cartésien devient, jours après jours, un impératif de survie. Nous sommes en train de faire face à un défi technique, économique, écologique, civilisationnel, et spirituel. Soyons lucide sur la situation, nous nous dirigeons tout droit sur un chemin hasardeux où les périls ne manquent pas. L’idéologie du Progrès nous amène peut-être à marche forcée vers la fin de l’Histoire… Alors, à l’heure où paraît enfin La perfection de la technique de Friedrich-Georg Jünger, et où l’on redécouvre l’œuvre de Bernard Charbonneau, résonne dans notre esprit un seul mot d’ordre : « Décélérons ! »

Thierry Durolle

mercredi, 06 mars 2019

Italie - Fractures en Jaune et Vert

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Italie

Fractures en Jaune et Vert

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Le partage du pouvoir entre le Mouvement 5 Étoiles (M5S) et la Ligue n’est pas de tout repos. Malgré l’approbation d’un contrat de gouvernement tant par les « Verts » lighistes que par les « Jaune » grillinistes, de nombreuses crispations autour de sujets souvent cruciaux pour l’avenir de l’Italie parcourent l’équipe ministérielle de Paolo Conte.

La déflagration aurait pu provenir du Diciotti, ce navire qui ne fit pas débarquer des étrangers clandestins sur l’injonction du ministre de l’Intérieur Matteo Salvini. Le parquet d’Agrigente lança aussitôt une information judiciaire contre le ministre et son chef de cabinet pour « abus de pouvoir et séquestration ». L’enquête requiert la levée de l’immunité parlementaire de Matteo Salvini par le Sénat. La perspective de ce vote plonge les sénateurs du M5S et, plus généralement, les militants dans une grande perplexité. En effet, le M5S combat la corruption politique, dénonce l’emprise de la Mafia et soutient les magistrats. Ses règles sont claires : l’inculpation de tout élu du M5S entraîne sa démission immédiate. Or Matteo Salvini a pris cette décision régalienne en concertation avec le président du Conseil et l’autre vice-président du gouvernement, le chef politique du grillinisme, Luigi Di Maio. Ses membres viennent de trancher par référendum électronique sur la plateforme Rousseau. 59 % rejettent la levée de l’immunité de Salvini. Dans la logique de démocratie impérative propre au M5S, ses sénateurs doivent s’y conformer, sinon ce sera une crise gouvernementale majeure.

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Un autre motif de tension entre partenaires gouvernementaux concerne la ligne à grande vitesse Lyon – Turin (ou TAV) et, plus généralement, la politique de relance de grands travaux d’infrastructures de circulation. Hostile à ces projets propices aux fausses factures et aux rétrocommissions, et au nom d’une vision écologique décroissante, le M5S s’oppose dès l’origine avec l’ultra-gauche à un Lyon – Turin indispensable pour l’essor économique de l’Italie du Nord riche en PME, base électorale de la Lega. Un abandon du TAV mécontenterait l’aile libérale, pro-européenne et régionaliste de la Ligue qui n’apprécie guère l’alliance avec les Cinq Étoiles du Sudiste Di Maio. Celui-ci serait-il cependant prêt à renoncer à un point phare de son programme après la transformation du « revenu de citoyenneté » promis en un RSA à la sauce transalpine ?

Le dernier gros contentieux se rapporte à la diplomatie. Sous la triple attraction de Viktor Orban, de Donald Trump et de Steve Bannon, la Lega a pris des positions eurosceptiques, néo-atlantistes et pro-sionistes. Elle considère le Hamas palestinien et le Hezbollah libanais comme des formations terroristes, exige le désarmement nucléaire unilatéral de l’Iran et conteste la légitimité du président vénézuélien Nicolas Maduro. Pour le M5S, Nicolas Maduro demeure le président légitime; le Hamas et le Hezbollah sont des mouvements combattants; l’Iran est la victime de l’hégémonie belliqueuse de la Maison Blanche. Cette pondération diplomatique s’explique par l’influence toujours forte de son fondateur, le comique Beppe Grillo, dont la seconde épouse est d’origine iranienne.

Ces frictions fragilisent l’actuelle coalition. Les récentes élections régionales dans les Abruzzes donnent l’avantage à la Ligue qui récolte maintenant trente années de militantisme sur le terrain tandis que le M5S ne dispose que d’un très faible maillage territorial militant. Il est dorénavant évident que les élections européennes de mai prochain établiront de nouveaux rapports de forces internes. Les grillinistes, élus, militants et sympathisants, seraient-ils prêts à rompre avec la Ligue au risque de déclencher de nouvelles élections législatives et la reconstitution autour de la personne de Salvini d’une union de toutes les droites ? Suivons donc avec attention tout ce qui va se passer dans les prochains mois au-delà des Alpes.

Georges Feltin-Tracol.

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 114, mise en ligne sur TV Libertés, le 25 février 2019.

dimanche, 03 mars 2019

La Chine devient un arbitre mondial incontournable

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La Chine devient un arbitre mondial incontournable

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

A la fin du 20e siècle, c'était l'Amérique qui s'était imposée dans ce rôle. Des aujourd'hui et dans les prochaines décennies ce sera la Chine. De plus si l'Amérique avait pu acquérir ce rôle, c'était essentiellement grâce à sa puissance militaire. Aujourd'hui la Chine le devient grâce à son habilité diplomatique.

L'incapacité manifestée le 31 janvier par Donald Trump pour faire céder le leader nord-coréen Kim Jong Un dans l'affaire du désarmement nucléaire vient d'en donner un exemple éclatant. Cet épisode a certes mis en valeur le manque de réalisme et l'immense maladresse de Trump lui-même. Mais elle a surtout montré qu'une Amérique considérée encore comme la première puissance mondiale n'avait plus désormais, sauf à déclencher une guerre nucléaire, la capacité de faire céder un petit Etat asiatique.

Dans cette affaire, la Chine est intervenue discrètement, autant que l'on sache, pour rappeler à Kim que si elle le soutenait politiquement, il ne devait pas abuser de ce soutien et qu'il devait en particulier tenir le plus grand compte des intérêts de la Corée du Sud et des autres Etats de la région. Comme la Chine est voisine de la Corée du Nord et que celle-ci avait toujours bénéficié de son aide, PyongYang n'est pas en mesure de refuser son arbitrage.

Sur de nombreux autres théâtres de confrontation entre les Etats-Unis et la Russie, le président chinois Xi Jinping, sans s'opposer directement au positions de son allié Vladimir Poutine, joue là aussi un rôle d'apaisement permettant de calmer l'hystérie anti-russe que Washington s'efforce de propager dans l'ensemble du monde occidental. Au Venezuela, la Chine et la Russie se sont opposées jusqu'ici avec succès aux efforts de Donald Trump pour renverser Nicolas Maduro. Plus généralement, la Chine qui a de plus en plus d'investissements en Amérique Latine, fera tout son possible pour éviter des tensions entre les pays de ce continent. Il en sera de même en Afrique.

Dans le début de guerre entre Inde et Pakistan, la Chine alliée de ce dernier pays, s'efforce actuellement d'éviter qu'une guerre de grande ampleur n'éclate entre Delhi et Islamabad. Ses intérêts, notamment dans le cadre de l'Obor, en seraient directement affectés. Mais elle veut également maintenir de bonnes relations avec l'Inde avec qui elle cohabite dans le cadre du Brics. On peut espérer que son intermédiation ramènera à la raison les deux adversaires.

Au Moyen-Orient, il semble bien que la diplomatie chinoise intervienne pour détendre les relations entre l'Iran, l'Irak et la Syrie.

La Chine dispose d'atouts importants pour se faire prendre au sérieux par les autres grandes puissances. Le milliard de chinois sont désormais réputés pour jouer la carte d'un développement mondial pacifique. On ne peut en dire autant du milliard d'hindous qui restent pénétrés d'un hindouisme religieux militant qui les pousse à s'opposer au reste du monde. Sur le plan des industries numériques et de la recherche scientifique avancée, la Chine est en voie de rattraper le retard qu'elle avait pris sur les Etats-Unis. Elle dispose par ailleurs d'un élément essentiel pour ce faire, les très nombreux chercheurs chinois qui travaillent dans les laboratoires américains et pourraient si consigne leur en était donnée, rejoindre rapidement leur pays d'origine. Concernant les industries spatiales et l'exploration de l'espace, si elle reste encore inférieure aux Etats-Unis, cette infériorité ne durera pas, car les crédits publics ne manquent pas. Ce qui n'est plus le cas désormais dans le spatial américain non militaire.

Inutile d'ajouter que l'Europe, et plus particulièrement la France, qui auraient pu également jouer ce rôle d'arbitre, en accord avec la Chine, ne le feront pas car elles sont et demeureront des american puppets.

Note. Sur la Chine, voir cet article se voulant rassurant de Bruno Guiguez https://francais.rt.com/opinions/59011-chine-sans-oeiller...

 

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vendredi, 01 mars 2019

La Géopolitique, c’est la Vie !...

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La Géopolitique, c’est la Vie !...

par Ghislain de Castelbajac

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de Ghislain de Castelbajac cueilli sur Geopragma et consacré à la géopolitique comme enjeu dans la vie des citoyens. Après avoir débuté sa carrière au SGDN, Ghislain de Castelbajac est désormais conseil en stratégie.

La Géopolitique, c’est la Vie !

Le président d’une grande puissance serre frénétiquement la main d’un dictateur en col Mao à 10 000 kilomètres de Paris. Des banquiers centraux se réunissent en secret au fin fond des Etats-Unis, et des personnalités politiques en vue se mêlent dans une station de montagne surprotégée (voir #BDL du 4 février 2019). Un puissant décide d’un conflit, d’un changement de frontières. D’autres le punissent par un boycott, dont des agriculteurs et éleveurs en Bretagne et en Picardie subissent les conséquences.

La géopolitique n’est-elle qu’un théâtre d’ombres, un billard feutré à bandes multiples joué par une poignée d’hommes de pouvoir cyniques et manipulateurs ? Les colloques d’universitaires décortiquant cette science pour d’autres universitaires préconditionnés ou des diplomates en roue libre sont-ils la seule voie possible de la géopolitique vers l’agora ?

Bien sûr, de grands reporters font un travail remarquable en zone de conflit, mais les audiences de ces médias sont si faibles que beaucoup jettent l’éponge. Les peuples seraient-ils trop bêtes pour s’intéresser à autre chose qu’à des ragots de caniveau où à la vitesse de leur diesel ?

Jean-Baptiste Duroselle nous a montré le contraire en théorisant, à la Braudel ou Renouvin, un modèle quasi sériel de la géopolitique dans son magistral ouvrage « Tout Empire périra, théorie des relations internationales » publié en 1981. Duroselle y dénonce déjà la tendance des penseurs et intellectuels à enfermer la géopolitique dans une discipline déconnectée de la vie des hommes.

Pour Duroselle, la politique étrangère doit englober tant les « relations internationales » (l’Etat comme acteur dans le Système), que « la vie internationale » (l’individu comme acteur dans le Système). Le liant entre ces acteurs est constitué par ce qu’il appelle les « groupes réels » qui assurent le relai entre les aspirations des individus et les politiques d’Etat.

Mais si la géopolitique est perçue comme un jeu d’illusion, renforcé par un certain angle médiatique enclin à ne traiter qu’en surface un enjeu stratégique, un sommet ou une rencontre bilatérale, elle est en fait un rapport de force, non entre puissants, mais entre ce que Duroselle appelle les forces profondes et les forces organisées, c’est-à-dire entre les « groupes réels » et les Etats.

Cette analyse permet de mettre en perspective les rapports de forces géopolitiques sur un angle de l’événement, du slogan, de l’action et donc de « l’acceptable qui devient inacceptable ».

Le développement actuel des nouveaux médias, réseaux sociaux et divers groupes d’influence donne bien entendu raison à Jean-Baptiste Duroselle, et les « groupes réels » possèdent aujourd‘hui une force décuplée, qui risque parfois de mettre en péril cet équilibre des forces, non entre les Etats, ni même entre les Etats et les peuples, mais bien entre les Etats et ces groupes que l’on pourrait aujourd’hui définir comme des « influenceurs », groupes de pression, groupes d’intérêts ou communautés.

Théorie des systèmes et centres de gravité

Bien entendu nos Etats, fondés eux aussi sur un contrat social ou une communauté de destin, déploient des contre-pouvoirs et des défenses, mais le concept d’Empire est aujourd’hui à prendre au sens d’organisation étatique ou inter-étatique, et celui de « groupes réels » comme agents d’influence ou d’action de plus en plus puissants. Le tout constituant le destin national.

Si l’on calque sur cette vision historique celle de l’analyse systémique, ou théorie des systèmes de Morton Kaplan, l’on obtient un rapport de forces générateur d’événements accumulateurs ou destructeurs, basés sur des « centres de gravité ».

Le colonel américain John Warden III théorisa avec « The Enemy as a system » l’analyse systémique appliquée aux conflits pour une nouvelle forme de rapport de forces. L’influence, ou la guerre psychologique étant l’un des effets de leviers les plus efficaces pour agir sur les centres de gravités de l’ennemi.

Si l’approche historique nous enseigne de manière empirique les évolutions et les régularités des événements et des conflits internationaux, l’approche systémique nous en donne les moteurs et leviers d’actions autres que purement militaires.

Le sédiment nourricier de l’action géopolitique est défini par la géographie. Elle est en quelque sorte la mère de la géopolitique, elle définit le « théâtre », le champ des intérêts et des projections.

Mais la prédictivité du conflit ou de l’événement international est peut-être à prendre du côté des sociologues et démographes. Des points de rupture dans la société, tels qu’une transition démographique achevée, une pyramide des âges vieillissante, une transhumance de fond (gentrification des villes, migrations de masse…), une structure familiale particulière (patrilocale, nucléaire, communautaire…), tous ces éléments liés à la structure de la société et à leur évolution permettent de poser le champ de projection, d’action, voire de manipulation si le système analysé est adversaire, des « forces profondes » constituant les groupes d’individus.

Une révolution dans un pays donné à un instant donné ne prendra donc corps que si les éléments démographiques et sociologiques y permettent son développement, même si ladite révolution est téléguidée de l’extérieur.

C’est alors que la géopolitique prend tout son sens social, dans la mesure où l’événement générant le fait géopolitique ne peut plus être uniquement Clausewitzien, mais bien basé sur des tendances lourdes liées à l’évolution des sociétés et à leurs capacités à se mobiliser sur des sujets ou des thèmes dont les enjeux portent les conséquences concrètes sur les populations.

Aujourd’hui dans nos sociétés occidentales et particulièrement en France, différents groupes de pression, plus ou moins spontanés, plus ou moins téléguidés, occupent le nouveau champ médiatique sur des sujets internationaux et offrent une grille de lecture de plus en plus concrète en termes d’effet de levier entre l’action, au sens d’activisme, et le résultat attendu.

Des référendums ?

Les récents événements en France ayant abouti à la mise en place d’un « Grand débat national » par le gouvernement permettent aux Français de s’exprimer sur divers sujets, dont l’organisation des institutions. La pression de la rue et plusieurs partis politiques d’opposition, font valoir la revendication de la mise en place d’un Referendum d’Initiative Citoyenne (« RIC ») sur le modèle helvétique.

La réticence du pouvoir et de certains intellectuels à mettre en place un tel mécanisme en France est mû par l’inadaptation de certains thèmes, des questions graves et stratégiques, à une question simple, voire simpliste et binaire.

Verrait-on un jour un référendum en France dont la question serait « souhaitez-vous que la France participe à une coalition armée pour changer le pouvoir en place en Syrie par la force ? », ceci juste après la manipulation, maintenant avérée, de l’attaque chimique en Ghouta ? Il est vrai que dans ce cas précis, le peuple français aurait sans doute été bien plus sage que les dirigeants de l’époque si la question leur avait été posée ainsi…

Pourtant, la géopolitique comme la définition de la politique étrangère de la France et de sa stratégie méritent certainement un traitement bien plus direct entre les forces profondes et les forces organisées, dans le cas de la France contemporaine, entre l’Etat et son peuple.

Un nouveau pacte d’action et de projection de la France à l’étranger pourrait, être mis en place dans le cadre du Grand débat. Notre cohésion nationale, la crédibilité politique et le niveau d’adhésion démocratique aux choix de nos gouvernants en sortiraient renforcées.

Si le gouvernement et les institutions décidaient de le mettre en place, la perspective d’un RIC n’aurait de sens que si les questions posées l’étaient dans un débat dénué d’influence extérieure et d’immédiateté, et si les Français avaient toutes les cartes en main pour un éclairage de leurs choix et de leurs convictions.

Un référendum aurait par exemple dû se tenir en France sur le rôle de notre pays dans l’OTAN lorsque qu’il fut décidé d’en réintégrer le commandement militaire sans consultation démocratique préalable.

De la même façon, il serait éclairant de connaitre le résultat d’une question posée sur l’intérêt de maintenir des sanctions économiques contre la Russie après 5 ans d’un entêtement qui n’a abouti qu’à développer l’agriculture russe et a fortement handicapé les agriculteurs et éleveurs français. Sans même parler de l’intérêt géopolitique, quel intérêt économique la France y trouve-t-elle ? Nul doute que ces questions concrètes préoccupent en Picardie ou en Bretagne et ont fait l’objet de débats au sein du mouvement des gilets jaunes, mais pas seulement.

Geopragma peut, par les travaux et débats organisés en son sein, être l’un des facilitateurs de cette mise en lien des enjeux géopolitiques avec ceux – économiques, culturels et sociétaux – qui touchent nos concitoyens au quotidien.  En permettant de dégager du manichéisme ambiant une grille de lecture à froid, loin de la doxa officielle comme des influences extérieures, Geopragma aspire à incarner ce lien entre « les relations internationales » et « la vie internationale » qui ne serait plus seulement subie par les Français, mais éclairée lucidement et pragmatiquement par la présentation du champ des possibles et des dangers d’influence et de manipulation.

Plus que jamais, le champ géopolitique fait partie de la vie des citoyens. Il est donc temps d’apporter aux forces profondes et aux forces organisées de notre pays les outils d’analyse qui leurs permettront d’éclairer leurs choix.

Ghislain de Castelbajac (Geopragma, 18 février 2019)

NAVES EN LLAMAS Nº5 Las nuevas derechas sacuden Europa

 

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