lundi, 21 février 2022
La crise en Ukraine ne concerne pas l'Ukraine. Il s'agit de l'Allemagne
La crise en Ukraine ne concerne pas l'Ukraine. Il s'agit de l'Allemagne
Mike Whitney
Source: https://www.unz.com/mwhitney/the-crisis-in-ukraine-is-not-about-ukraine-its-about-germany/
"L'intérêt primordial des États-Unis, pour lequel ils ont mené des guerres pendant des siècles - la Première, la Seconde et la Guerre froide - a été la relation entre l'Allemagne et la Russie, parce qu'unies, elles sont la seule force qui pourrait les menacer. Et nous devons nous assurer que cela ne se produise pas" (George Friedman, PDG de STRATFOR au Chicago Council on Foreign Affairs).
La crise ukrainienne n'a rien à voir avec l'Ukraine. Il s'agit de l'Allemagne et, en particulier, d'un gazoduc qui relie l'Allemagne à la Russie, appelé Nord Stream 2. Washington considère ce gazoduc comme une menace pour sa primauté en Europe et a tenté de saboter le projet à tout bout de champ. Malgré cela, le projet Nord Stream 2 est allé de l'avant et est maintenant entièrement opérationnel et prêt à être utilisé. Dès que les régulateurs allemands auront délivré la certification finale, les livraisons de gaz commenceront. Les propriétaires et les entreprises allemands disposeront d'une source fiable d'énergie propre et bon marché, tandis que la Russie verra ses revenus gaziers augmenter de manière significative. C'est une situation gagnant-gagnant pour les deux parties.
L'establishment de la politique étrangère américaine ne se réjouit pas de cette évolution. Ils ne veulent pas que l'Allemagne devienne plus dépendante du gaz russe, car le commerce crée la confiance et la confiance conduit à l'expansion du commerce. À mesure que les relations se réchauffent, les barrières commerciales sont levées, les réglementations sont assouplies, les voyages et le tourisme augmentent et une nouvelle architecture de sécurité se met en place. Dans un monde où l'Allemagne et la Russie sont des amis et des partenaires commerciaux, il n'y a plus besoin de bases militaires américaines, d'armes et de systèmes de missiles coûteux fabriqués aux États-Unis, ni de l'OTAN.
Il n'est pas non plus nécessaire de conclure des transactions énergétiques en dollars américains ou de stocker des bons du Trésor américain pour équilibrer les comptes. Les transactions entre partenaires commerciaux peuvent être effectuées dans leurs propres monnaies, ce qui ne manquera pas de précipiter une forte baisse de la valeur du dollar et un déplacement spectaculaire du pouvoir économique. C'est pourquoi l'administration Biden s'oppose au gazoduc Nord Stream 2.
Il ne s'agit pas seulement d'un gazoduc, mais d'une fenêtre sur l'avenir, un avenir dans lequel l'Europe et l'Asie se rapprochent dans une zone de libre-échange massive qui accroît leur puissance et leur prospérité mutuelles tout en laissant les États-Unis à l'écart. Le réchauffement des relations entre l'Allemagne et la Russie annonce la fin de l'ordre mondial "unipolaire" que les États-Unis ont supervisé au cours de ces 75 dernières années. Une alliance germano-russe menace de précipiter le déclin de la superpuissance qui se rapproche actuellement de l'abîme. C'est pourquoi Washington est déterminé à faire tout ce qu'il peut pour saboter Nord Stream 2 et maintenir l'Allemagne dans son orbite. C'est une question de survie.
C'est là que l'Ukraine entre en jeu. L'Ukraine est "l'arme de choix" de Washington pour torpiller Nord Stream 2 et créer un fossé entre l'Allemagne et la Russie. La stratégie est tirée de la première page du manuel de politique étrangère des États-Unis, sous la rubrique : Diviser pour mieux régner. Washington doit donner l'impression que la Russie représente une menace pour la sécurité de l'Europe. Tel est l'objectif. Ils doivent montrer que Poutine est un agresseur assoiffé de sang, au tempérament instable, à qui l'on ne peut faire confiance. À cette fin, les médias ont été chargés de répéter encore et encore que "la Russie prévoit d'envahir l'Ukraine".
Ce qui n'est pas dit, c'est que la Russie n'a envahi aucun pays depuis la dissolution de l'Union soviétique, que les États-Unis ont envahi ou renversé des régimes dans plus de 50 pays au cours de la même période et que les États-Unis maintiennent plus de 800 bases militaires dans le monde entier. Rien de tout cela n'est rapporté par les médias, au contraire, l'accent est mis sur le "méchant Poutine" qui a rassemblé environ 100.000 soldats le long de la frontière ukrainienne, menaçant de plonger toute l'Europe dans une nouvelle guerre sanglante.
Toute cette propagande de guerre hystérique est créée dans l'intention de fabriquer une crise qui puisse être utilisée pour isoler, diaboliser et, finalement, diviser la Russie en petites unités. La véritable cible, cependant, n'est pas la Russie, mais l'Allemagne. Regardez cet extrait d'un article de Michael Hudson sur The Unz Review :
"Le seul moyen qui reste aux diplomates américains pour bloquer les achats européens est de pousser la Russie à une réponse militaire, puis de prétendre que la vengeance qu'appelle cette réponse l'emporte sur tout intérêt économique purement national. Comme l'a expliqué la sous-secrétaire d'État aux affaires politiques, Victoria Nuland, lors d'un point de presse du département d'État le 27 janvier : "Si la Russie envahit l'Ukraine, d'une manière ou d'une autre, Nord Stream 2 n'avancera pas." ("America's Real Adversaries Are Its European and Other Allies", The Unz Review).
C'est écrit noir sur blanc. L'équipe Biden veut "pousser la Russie à une réponse militaire" afin de saboter Nord Stream 2. Cela implique qu'il y aura une sorte de provocation destinée à inciter Poutine à envoyer ses troupes de l'autre côté de la frontière pour défendre les Russes ethniques dans la partie orientale du pays. Si Poutine mord à l'hameçon, la réponse sera rapide et sévère. Les médias dénonceront cette action comme une menace pour toute l'Europe, tandis que les dirigeants du monde entier dénonceront Poutine comme le "nouvel Hitler". Voilà la stratégie de Washington en quelques mots, et toute la mise en scène est orchestrée dans un seul but : rendre politiquement impossible au chancelier allemand Olaf Scholz de faire passer Nord Stream 2 par la procédure d'approbation finale.
Compte tenu de ce que nous savons de l'opposition de Washington à Nord Stream 2, les lecteurs peuvent se demander pourquoi, plus tôt dans l'année, l'administration Biden a fait pression sur le Congrès pour qu'il n'impose pas davantage de sanctions au projet. La réponse à cette question est simple : la politique intérieure. L'Allemagne est en train de mettre hors service ses centrales nucléaires et a besoin de gaz naturel pour combler son déficit énergétique. En outre, la menace de sanctions économiques est un "repoussoir" pour les Allemands qui y voient un signe d'ingérence étrangère. "Pourquoi les États-Unis se mêlent-ils de nos décisions en matière d'énergie ?", demande l'Allemand moyen. "Washington devrait s'occuper de ses propres affaires et ne pas se mêler des nôtres". C'est précisément la réponse que l'on attendrait de toute personne raisonnable.
Ensuite, il y a cette déclaration d'Al Jazeera :
"Les Allemands dans leur majorité soutiennent le projet, ce ne sont que certaines parties de l'élite et des médias qui sont contre le gazoduc...".
"Plus les États-Unis parlent de sanctionner ou de critiquer le projet, plus il devient populaire dans la société allemande", a déclaré Stefan Meister, un expert de la Russie et de l'Europe de l'Est au Conseil allemand des relations étrangères." ("Nord Stream 2 : Why Russia's pipeline to Europe divides the West", AlJazeera)
L'opinion publique soutient donc fermement le Nord Stream 2, ce qui contribue à expliquer pourquoi Washington a opté pour une nouvelle approche. Les sanctions ne fonctionnant pas, l'Oncle Sam est passé au plan B : créer une menace extérieure suffisamment importante pour que l'Allemagne soit obligée de bloquer l'ouverture du gazoduc. Franchement, cette stratégie sent le désespoir, mais il faut être impressionné par la persévérance de Washington. Ils sont peut-être menés de 5 points dans la dernière ligne droite, mais ils n'ont pas encore jeté l'éponge. Ils vont se donner une dernière chance et voir s'ils peuvent faire des progrès.
Lundi, le président Biden a tenu sa première conférence de presse conjointe avec le chancelier allemand Olaf Scholz à la Maison Blanche. Le battage médiatique qui a entouré cet événement était tout simplement sans précédent. Tout a été orchestré pour fabriquer une "atmosphère de crise" que Biden a utilisée pour faire pression sur le chancelier dans le sens de la politique américaine. Plus tôt dans la semaine, la porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, a déclaré à plusieurs reprises qu'une "invasion russe était imminente". Ses commentaires ont été suivis par le porte-parole du département d'État, Nick Price, qui a déclaré que les agences de renseignement lui avaient fourni les détails d'une opération sous faux drapeau prétendument soutenue par la Russie, qui devrait avoir lieu dans un avenir proche dans l'est de l'Ukraine. L'avertissement de M. Price a été suivi dimanche matin par le conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan, qui a déclaré qu'une invasion russe pouvait se produire à tout moment, peut-être "même demain". Ceci quelques jours seulement après que l'agence Bloomberg News ait publié son titre sensationnel et totalement faux selon lequel "La Russie envahit l'Ukraine".
Pouvez-vous percevoir le schéma ici ? Pouvez-vous percevoir comment ces affirmations sans fondement ont toutes été utilisées pour faire pression sur le chancelier allemand, qui ne se doutait de rien et ne semblait pas conscient de la campagne qui le visait ?
Comme on pouvait s'y attendre, le coup de grâce a été porté par le président américain lui-même. Au cours de la conférence de presse, Biden a déclaré avec insistance que,
"Si la Russie nous envahit [...], il n'y aura plus [de] Nord Stream 2. Nous y mettrons fin".
Donc, maintenant, Washington décide de la politique de l'Allemagne ???
Quelle arrogance insupportable !
Le chancelier allemand a été décontenancé par les commentaires de Biden, qui ne faisaient manifestement pas partie du scénario initial. Malgré cela, Scholz n'a jamais accepté d'annuler Nord Stream 2 et a même refusé de mentionner le gazoduc par son nom. Si Biden pensait pouvoir intimider le dirigeant de la troisième plus grande économie du monde en le coinçant dans un forum public, il s'est trompé. L'Allemagne reste déterminée à lancer le projet Nord Stream 2, indépendamment d'éventuels embrasements dans la lointaine Ukraine. Mais cela pourrait changer à tout moment. Après tout, qui sait quelles incitations Washington pourrait préparer dans un avenir proche? Qui sait combien de vies ils sont prêts à sacrifier pour créer un fossé entre l'Allemagne et la Russie? Qui sait quels risques Biden est prêt à prendre pour ralentir le déclin de l'Amérique et empêcher l'émergence d'un nouvel ordre mondial "polycentrique"? Tout peut arriver dans les semaines à venir. Tout.
Pour l'instant, c'est l'Allemagne qui est sur la sellette. C'est à Scholz de décider comment l'affaire sera réglée. Va-t-il mettre en œuvre la politique qui sert le mieux les intérêts du peuple allemand ou va-t-il céder aux pressions incessantes de Biden? Tracera-t-il une nouvelle voie qui renforcera les nouvelles alliances dans le corridor eurasiatique en pleine effervescence ou soutiendra-t-il les folles ambitions géopolitiques de Washington? Acceptera-t-il le rôle central de l'Allemagne dans un nouvel ordre mondial - dans lequel de nombreux centres de pouvoir émergents partagent équitablement la gouvernance mondiale et où les dirigeants restent indéfectiblement engagés en faveur du multilatéralisme, du développement pacifique et de la sécurité pour tous - ou tentera-t-il de soutenir le système d'après-guerre en lambeaux qui a clairement dépassé sa durée de vie?
Une chose est sûre : quelle que soit la décision de l'Allemagne, elle nous affectera tous.
15:20 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, politique internationale, géopolitique, allemagne, ukraine, russie, états-unis, europe, affaires européennes, nord stream 2 | | del.icio.us | | Digg | Facebook
dimanche, 20 février 2022
Les véritables adversaires de l'Amérique sont ses alliés européens et autres
Les véritables adversaires de l'Amérique sont ses alliés européens et autres
L'objectif des États-Unis est de les empêcher de commercer avec la Chine et la Russie
Michael Hudson
Source: https://www.unz.com/mhudson/americas-real-adversaries-are-its-european-and-other-allies/
Le rideau de fer des années 1940 et 1950 était ostensiblement conçu pour isoler la Russie de l'Europe occidentale - pour empêcher l'idéologie communiste et la pénétration militaire. Aujourd'hui, le régime de sanctions est tourné vers l'intérieur, pour empêcher l'OTAN et les autres alliés occidentaux de l'Amérique de développer le commerce et les investissements avec la Russie et la Chine. L'objectif n'est pas tant d'isoler la Russie et la Chine que de maintenir fermement ces alliés dans l'orbite économique de l'Amérique. Les alliés doivent renoncer aux avantages liés à l'importation de gaz russe et de produits chinois et acheter du GNL et d'autres exportations américaines à des prix beaucoup plus élevés, le tout couronné par davantage d'armes américaines.
Les sanctions sur lesquelles les diplomates américains insistent tant pour que leurs alliés les imposent au détriment du commerce avec la Russie et la Chine visent ostensiblement à dissuader un renforcement militaire de ces deux puissances. Mais un tel renforcement ne peut pas vraiment être la principale préoccupation des Russes et des Chinois. Elles ont beaucoup plus à gagner en offrant des avantages économiques mutuels à l'Occident. La question sous-jacente est donc de savoir si l'Europe trouvera son avantage à remplacer les exportations américaines par des fournitures russes et chinoises et à promouvoir des liens économiques mutuels associés.
Ce qui inquiète les diplomates américains, c'est que l'Allemagne, les autres pays de l'OTAN et les pays situés le long de la route "Belt and Road" comprennent les gains qui peuvent être réalisés en ouvrant le commerce et les investissements de manière pacifique. S'il n'existe aucun plan russe ou chinois pour les envahir ou les bombarder, pourquoi l'OTAN est-elle nécessaire ? Pourquoi les riches alliés de l'Amérique achètent-ils autant de matériel militaire américain ? Et s'il n'y a pas de relation intrinsèquement conflictuelle, pourquoi les pays étrangers doivent-ils sacrifier leurs propres intérêts commerciaux et financiers en comptant exclusivement sur les exportateurs et les investisseurs américains ?
Ce sont ces préoccupations qui ont poussé le président français Macron à invoquer le fantôme de Charles de Gaulle et à exhorter l'Europe à se détourner de ce qu'il appelle la guerre froide "sans cervelle" de l'OTAN et à rompre avec les accords commerciaux pro-américains qui imposent des coûts croissants à l'Europe tout en la privant des gains potentiels du commerce avec l'Eurasie. Même l'Allemagne rechigne à l'idée de geler ses activités en mars prochain en se privant du gaz russe.
Au lieu d'une réelle menace militaire de la part de la Russie et de la Chine, le problème pour les stratèges américains est l'absence d'une telle menace. Tous les pays ont pris conscience que le monde a atteint un point où aucune économie industrielle n'a la main-d'œuvre et la capacité politique de mobiliser une armée permanente de la taille nécessaire pour envahir ou même livrer une bataille majeure contre un adversaire important. Ce coût politique fait qu'il n'est pas rentable pour la Russie de riposter à l'aventurisme de l'OTAN à sa frontière occidentale en essayant de susciter une réponse militaire. Cela ne vaut tout simplement pas la peine de s'emparer de l'Ukraine.
La pression croissante de l'Amérique sur ses alliés menace de les faire sortir de l'orbite américaine. Pendant plus de 75 ans, ils n'ont eu que peu d'alternatives pratiques à l'hégémonie américaine. Mais cela est en train de changer. L'Amérique ne dispose plus de la puissance monétaire et de l'excédent commercial et de la balance des paiements apparemment chronique qui lui ont permis d'élaborer les règles du commerce et de l'investissement dans le monde en 1944-45. La menace qui pèse sur la domination américaine est que la Chine, la Russie et le cœur de l'île-monde eurasienne de Mackinder offrent de meilleures opportunités de commerce et d'investissement que celles offertes par les États-Unis, qui demandent de plus en plus désespérément des sacrifices à leurs alliés de l'OTAN et autres.
L'exemple le plus flagrant est la volonté des États-Unis d'empêcher l'Allemagne d'autoriser la construction du gazoduc Nord Stream 2 afin d'obtenir du gaz russe pour les prochains froids. Angela Merkel s'est mise d'accord avec Donald Trump pour dépenser un milliard de dollars dans la construction d'un nouveau port GNL afin de devenir plus dépendante du GNL américain, dont le prix est élevé. (Le plan a été annulé après que les élections américaines et allemandes ont congédié les deux dirigeants). Mais l'Allemagne n'a pas d'autre moyen de chauffer un grand nombre de ses maisons et immeubles de bureaux (ou d'approvisionner ses entreprises d'engrais) que le gaz russe.
Le seul moyen qui reste aux diplomates américains pour bloquer les achats européens est d'inciter la Russie à une réponse militaire, puis de prétendre que la vengeance qu'appelle cette réponse l'emporte sur tout intérêt économique purement national. Comme l'a expliqué la sous-secrétaire d'État aux affaires politiques, Victoria Nuland, lors d'un point de presse du département d'État le 27 janvier : "Si la Russie envahit l'Ukraine, d'une manière ou d'une autre, Nord Stream 2 n'avancera pas" [1]. Le problème est de créer un incident suffisamment offensif et de dépeindre la Russie comme l'agresseur.
Nuland a exprimé succinctement qui dictait les politiques des membres de l'OTAN en 2014 : "J'emmerde l'UE" ("Fuck the EU"). Cela a été dit alors qu'elle disait à l'ambassadeur américain en Ukraine que le département d'État soutenait la marionnette Arseniy Yatsenyuk comme premier ministre ukrainien (destitué après deux ans dans un scandale de corruption), et que les agences politiques américaines soutenaient le massacre sanglant de Maidan qui a inauguré ce qui est maintenant huit ans de guerre civile. Le résultat a dévasté l'Ukraine comme la violence américaine l'avait fait en Syrie, en Irak et en Afghanistan. Ce n'est pas une politique de paix mondiale ou de démocratie que les électeurs européens approuvent.
Les sanctions commerciales imposées par les États-Unis à leurs alliés de l'OTAN s'étendent à tout le spectre commercial. La Lituanie, en proie à l'austérité, a renoncé à son fromage et à son marché agricole en Russie, et empêche son chemin de fer public de transporter de la potasse du Belarus vers le port balte de Klaipeda. Le propriétaire majoritaire du port s'est plaint que "la Lituanie perdra des centaines de millions de dollars en stoppant les exportations biélorusses via Klaipeda" et "pourrait faire face à des poursuites judiciaires de 15 milliards de dollars pour rupture de contrat" [2]. La Lituanie a même accepté de reconnaître Taïwan sous l'impulsion des États-Unis, ce qui a conduit la Chine à refuser d'importer des produits allemands ou autres comprenant des composants fabriqués en Lituanie.
L'Europe va imposer des sanctions, ce qui provoquera la hausse des prix de l'énergie et de l'agriculture en donnant la priorité aux importations en provenance des États-Unis et en renonçant aux liens avec la Russie, le Belarus et d'autres pays en dehors de la zone dollar. Comme le dit Sergey Lavrov: "Lorsque les États-Unis pensent que quelque chose sert leurs intérêts, ils peuvent trahir ceux avec qui ils étaient amis, avec qui ils ont coopéré et qui ont servi leurs positions dans le monde entier" [3].
Les sanctions imposées par l'Amérique à ses alliés nuisent à leurs propres économies, pas à celles de la Russie et de la Chine.
Ce qui semble ironique, c'est que ces sanctions contre la Russie et la Chine ont fini par aider ces deux puissances plutôt que de leur nuire. Mais l'objectif premier n'était ni de nuire ni d'aider les économies russe et chinoise. Après tout, il est évident que les sanctions obligent les pays visés à devenir plus autonomes. Privés de fromage lituanien, les producteurs russes ont produit le leur et n'ont plus besoin de l'importer des pays baltes. La rivalité économique sous-jacente de l'Amérique vise à maintenir les pays européens et ses alliés asiatiques dans son orbite économique de plus en plus protégée. On dit à l'Allemagne, à la Lituanie et à d'autres alliés d'imposer des sanctions dirigées contre leur propre bien-être économique en ne faisant pas de commerce avec des pays situés en dehors de l'orbite de la zone dollar des États-Unis.
Indépendamment de la menace d'une guerre réelle résultant du bellicisme des États-Unis, le coût pour les alliés de l'Amérique de se soumettre aux exigences américaines en matière de commerce et d'investissement devient si élevé qu'il est politiquement irréalisable. Depuis près d'un siècle, il n'y a guère eu d'autre choix que d'accepter des règles de commerce et d'investissement favorisant l'économie américaine pour bénéficier du soutien financier et commercial des États-Unis, voire de leur sécurité militaire. Mais une alternative menace aujourd'hui d'émerger - une alternative offrant les avantages de l'initiative "Belt and Road" de la Chine, et du désir de la Russie de bénéficier d'investissements étrangers pour l'aider à moderniser son organisation industrielle, comme cela semblait promis il y a trente ans, en 1991.
Depuis les dernières années de la Seconde Guerre mondiale, la diplomatie américaine a cherché à contraindre la Grande-Bretagne, la France et surtout l'Allemagne et le Japon vaincus à devenir des dépendances économiques et militaires des États-Unis. Comme je l'ai documenté dans Super Impérialism, les diplomates américains ont brisé l'Empire britannique et absorbé sa zone sterling par les conditions onéreuses imposées d'abord par le Prêt-Bail et ensuite par l'Accord de prêt anglo-américain de 1946. Les conditions de ce dernier obligeaient la Grande-Bretagne à renoncer à sa politique de préférence impériale et à débloquer les soldes en livres sterling que l'Inde et d'autres colonies avaient accumulés pour leurs exportations de matières premières pendant la guerre, ouvrant ainsi le Commonwealth britannique aux exportations américaines.
La Grande-Bretagne s'engage à ne pas récupérer ses marchés d'avant-guerre en dévaluant la livre sterling. Les diplomates américains créent alors le FMI et la Banque mondiale dans des conditions qui favorisent les marchés d'exportation américains et découragent la concurrence de la Grande-Bretagne et d'autres anciens rivaux. Les débats à la Chambre des Lords et à la Chambre des Communes ont montré que les politiciens britanniques reconnaissaient qu'ils étaient relégués à une position économique subalterne, mais qu'ils n'avaient pas d'autre choix. Et une fois qu'ils ont abandonné, les diplomates américains ont eu les coudées franches pour affronter le reste de l'Europe.
La puissance financière a permis à l'Amérique de continuer à dominer la diplomatie occidentale, bien qu'elle ait été contrainte de renoncer à l'or en 1971 en raison des coûts de balance des paiements de ses dépenses militaires à l'étranger. Au cours du dernier demi-siècle, les pays étrangers ont conservé leurs réserves monétaires internationales en dollars américains - principalement dans des titres du Trésor américain, des comptes bancaires américains et d'autres investissements financiers dans l'économie américaine. La norme des bons du Trésor oblige les banques centrales étrangères à financer le déficit de la balance des paiements de l'Amérique, basé sur l'armée - et par la même occasion, le déficit budgétaire du gouvernement national.
Les États-Unis n'ont pas besoin de ce recyclage pour créer de la monnaie. Le gouvernement peut simplement imprimer de la monnaie, comme l'a démontré le MMT. Mais les États-Unis ont besoin de ce recyclage des dollars des banques centrales étrangères pour équilibrer leurs paiements internationaux et soutenir le taux de change du dollar. Si le dollar devait baisser, les pays étrangers auraient beaucoup plus de facilité à payer leurs dettes internationales en dollars dans leur propre monnaie. Les prix des importations américaines augmenteraient, et il serait plus coûteux pour les investisseurs américains d'acheter des actifs étrangers. Et les étrangers perdraient de l'argent sur les actions et obligations américaines libellées dans leur propre monnaie, et les abandonneraient. Les banques centrales en particulier subiraient une perte sur les obligations du Trésor en dollars qu'elles détiennent dans leurs réserves monétaires - et trouveraient leur intérêt à sortir du dollar. Ainsi, la balance des paiements et le taux de change des États-Unis sont tous deux menacés par la belligérance et les dépenses militaires des États-Unis dans le monde entier - et pourtant, les diplomates américains tentent de stabiliser la situation en augmentant la menace militaire à des niveaux de crise.
La volonté des États-Unis de maintenir leurs protectorats européens et est-asiatiques enfermés dans leur propre sphère d'influence est menacée par l'émergence de la Chine et de la Russie indépendamment des États-Unis, tandis que l'économie américaine se désindustrialise en raison de ses propres choix politiques délibérés. La dynamique industrielle qui a rendu les Etats-Unis si dominants de la fin du 19ème siècle jusqu'aux années 1970 a laissé place à une financiarisation néolibérale évangélisatrice. C'est pourquoi les diplomates américains doivent faire un bras d'honneur à leurs alliés pour bloquer leurs relations économiques avec la Russie post-soviétique et la Chine socialiste, dont la croissance est supérieure à celle des États-Unis et dont les accords commerciaux offrent plus de possibilités de gains mutuels.
La question est de savoir combien de temps les États-Unis peuvent empêcher leurs alliés de profiter de la croissance économique de la Chine. L'Allemagne, la France et d'autres pays de l'OTAN vont-ils rechercher la prospérité pour eux-mêmes au lieu de laisser l'étalon dollar américain et les préférences commerciales siphonner leur excédent économique ?
La diplomatie pétrolière et le rêve américain pour la Russie post-soviétique
En 1991, Gorbatchev et d'autres responsables russes s'attendaient à ce que leur économie se tourne vers l'Ouest pour être réorganisée selon les principes qui avaient rendu les économies américaine, allemande et autres si prospères. L'attente mutuelle de la Russie et de l'Europe occidentale était que les investisseurs allemands, français et autres restructurent l'économie post-soviétique selon des principes plus efficaces.
Ce n'était pas le plan des États-Unis. Lorsque le sénateur John McCain a qualifié la Russie de "station-service avec des bombes atomiques", c'était le rêve des Américains de ce qu'ils voulaient que la Russie devienne - avec les compagnies de gaz russes passant sous le contrôle d'actionnaires américains, en commençant par le rachat prévu de Yukos tel qu'il a été arrangé avec Mikhail Khordokovsky. La dernière chose que les stratèges américains voulaient voir, c'était une Russie florissante et revivifiée. Les conseillers américains ont cherché à privatiser les ressources naturelles de la Russie et d'autres actifs non industriels, en les confiant à des kleptocrates qui ne pouvaient "encaisser" la valeur de ce qu'ils avaient privatisé qu'en le vendant aux investisseurs américains et étrangers contre des devises fortes. Le résultat a été un effondrement économique et démographique néolibéral dans tous les États post-soviétiques.
D'une certaine manière, l'Amérique s'est transformée en sa propre version d'une station-service avec des bombes atomiques (et des exportations d'armes). La diplomatie pétrolière américaine vise à contrôler le commerce mondial du pétrole afin que ses énormes profits reviennent aux grandes compagnies pétrolières américaines. C'est pour maintenir le pétrole iranien entre les mains de British Petroleum que Kermit Roosevelt, de la CIA, a collaboré avec l'Anglo-Persian Oil Company de British Petroleum pour renverser le dirigeant élu de l'Iran, Mohammed Mossadegh, en 1954, lorsque celui-ci a cherché à nationaliser la compagnie après qu'elle ait refusé, décennie après décennie, d'apporter les contributions promises à l'économie. Après avoir installé le Shah, dont la démocratie reposait sur un État policier vicieux, l'Iran a menacé une fois de plus d'agir en tant que maître de ses propres ressources pétrolières. Il a donc été une nouvelle fois confronté aux sanctions parrainées par les États-Unis, qui restent en vigueur aujourd'hui. L'objectif de ces sanctions est de maintenir le commerce mondial du pétrole fermement sous le contrôle des États-Unis, car le pétrole est une énergie et l'énergie est la clé de la productivité et du PIB réel.
Dans les cas où des gouvernements étrangers tels que l'Arabie saoudite et les pétro-monarchies arabes voisines ont pris le contrôle, les recettes d'exportation de leur pétrole doivent être déposées sur les marchés financiers américains pour soutenir le taux de change du dollar et la domination financière américaine. Lorsqu'ils ont quadruplé leurs prix du pétrole en 1973-74 (en réponse au quadruplement par les États-Unis des prix de leurs exportations de céréales), le Département d'État américain a fait la loi et a dit à l'Arabie saoudite qu'elle pouvait faire payer son pétrole autant qu'elle le voulait (augmentant ainsi le parapluie des prix pour les producteurs de pétrole américains), mais qu'elle devait se conformer à la loi des producteurs de pétrole américains), qu'elle devait recycler ses recettes d'exportation de pétrole aux États-Unis dans des titres libellés en dollars - principalement des titres du Trésor américain et des comptes bancaires américains, ainsi que quelques participations minoritaires dans des actions et obligations américaines (mais uniquement en tant qu'investisseurs passifs, sans utiliser ce pouvoir financier pour contrôler la politique des entreprises).
Le deuxième mode de recyclage des revenus de l'exportation du pétrole a consisté à acheter des exportations d'armes américaines, l'Arabie saoudite devenant l'un des plus gros clients du complexe militaro-industriel. En réalité, la production d'armes des États-Unis n'est pas principalement de nature militaire. Comme le monde entier le constate actuellement dans le tumulte autour de l'Ukraine, l'Amérique n'a pas d'armée de combat. Ce qu'elle a, c'est ce qu'on appelait autrefois une "armée alimentaire". La production d'armes aux États-Unis emploie de la main-d'œuvre et produit des armes qui sont une sorte de bien de prestige dont les gouvernements peuvent se vanter, et non des armes de combat. Comme la plupart des produits de luxe, la majoration est très élevée. C'est l'essence même de la haute couture et du style, après tout. Le MIC utilise ses bénéfices pour subventionner la production civile américaine d'une manière qui ne viole pas la lettre des lois commerciales internationales contre les subventions gouvernementales.
Parfois, bien sûr, la force militaire est effectivement utilisée. En Irak, George W. Bush puis Barack Obama ont utilisé l'armée pour s'emparer des réserves de pétrole du pays, ainsi que de celles de la Syrie et de la Libye. Le contrôle du pétrole mondial a été le pilier de la balance des paiements de l'Amérique. Malgré la volonté mondiale de ralentir le réchauffement de la planète, les responsables américains continuent de considérer le pétrole comme la clé de la suprématie économique des États-Unis. C'est la raison pour laquelle l'armée américaine refuse toujours d'obéir aux ordres de l'Irak de quitter son pays, y gardant ses troupes pour contrôler le pétrole irakien, et c'est aussi pourquoi elle a accepté avec les Français de détruire la Libye et a toujours des troupes dans les champs pétrolifères de la Syrie. Plus près de nous, le président Biden a approuvé le forage en mer et soutient l'expansion par le Canada de ses sables bitumineux de l'Athabasca, le pétrole le plus sale du monde sur le plan environnemental.
Outre les exportations de pétrole et de denrées alimentaires, les exportations d'armes soutiennent le financement par les bons du Trésor des dépenses militaires américaines dans ses 750 bases à l'étranger. Mais sans un ennemi permanent qui menace constamment aux portes, l'existence de l'OTAN s'effondre. Quel serait le besoin des pays d'acheter des sous-marins, des porte-avions, des avions, des chars, des missiles et autres armes ?
À mesure que les États-Unis se désindustrialisent, le déficit de leur commerce et de leur balance des paiements devient plus problématique. Ils ont besoin des ventes à l'exportation d'armes pour contribuer à réduire leur déficit commercial croissant et aussi pour subventionner leurs avions commerciaux et les secteurs civils connexes. Le défi consiste à maintenir sa prospérité et sa position dominante dans le monde alors qu'elle se désindustrialise et que la croissance économique s'accélère en Chine et maintenant en Russie.
L'Amérique a perdu son avantage en matière de coûts industriels en raison de la forte augmentation du coût de la vie et des affaires dans son économie rentière post-industrielle financiarisée. En outre, comme l'expliquait Seymour Melman dans les années 1970, le capitalisme du Pentagone repose sur des contrats à prix coûtant majoré : Plus le matériel militaire coûte cher, plus les fabricants en tirent profit. Les armes américaines sont donc sur-ingénieriées - d'où les sièges de toilettes à 500 dollars au lieu d'un modèle à 50 dollars. Après tout, le principal attrait des produits de luxe, y compris le matériel militaire, est leur prix élevé.
C'est dans ce contexte que s'inscrit la colère des États-Unis, qui n'ont pas réussi à s'emparer des ressources pétrolières de la Russie, et qui ont vu la Russie se libérer militairement pour créer ses propres exportations d'armes, qui sont aujourd'hui généralement meilleures et beaucoup moins coûteuses que celles des États-Unis. Non seulement ses ventes de pétrole rivalisent avec celles du GNL américain, mais la Russie garde ses recettes d'exportation de pétrole chez elle pour financer sa réindustrialisation, afin de reconstruire l'économie qui a été détruite par la "thérapie" de choc parrainée par les États-Unis dans les années 1990.
La ligne de moindre résistance pour la stratégie américaine qui cherche à maintenir le contrôle de l'approvisionnement mondial en pétrole tout en conservant son marché d'exportation d'armes de luxe via l'OTAN consiste à crier au loup et à insister sur le fait que la Russie est sur le point d'envahir l'Ukraine - comme si la Russie avait quelque chose à gagner d'une guerre de bourbier sur l'économie la plus pauvre et la moins productive d'Europe. L'hiver 2021-22 a été marqué par une longue tentative des États-Unis d'inciter l'OTAN et la Russie à se battre - sans succès.
Les États-Unis rêvent d'une Chine néolibéralisée comme filiale d'une entreprise américaine
L'Amérique s'est désindustrialisée par une politique délibérée de réduction des coûts de production, ses entreprises manufacturières recherchant une main-d'œuvre à bas salaire à l'étranger, notamment en Chine. Ce changement n'était pas une rivalité avec la Chine, mais était considéré comme un gain mutuel. Les banques et les investisseurs américains devaient s'assurer le contrôle et les profits de l'industrie chinoise au fur et à mesure de sa commercialisation. La rivalité opposait les employeurs américains aux travailleurs américains, et l'arme de la lutte des classes était la délocalisation et, dans le même temps, la réduction des dépenses sociales du gouvernement.
À l'instar de la Russie, qui cherche à obtenir du pétrole, des armes et du commerce agricole indépendamment du contrôle des États-Unis, l'offensive de la Chine consiste à garder les bénéfices de son industrialisation sur son territoire, à conserver la propriété publique d'importantes sociétés et, surtout, à conserver la création monétaire et la Banque de Chine en tant que service public pour financer sa propre formation de capital au lieu de laisser les banques et les maisons de courtage américaines fournir son financement et siphonner son excédent sous forme d'intérêts, de dividendes et de frais de gestion. La seule grâce à laquelle les planificateurs d'entreprise américains ont pu être sauvés a été le rôle de la Chine dans la dissuasion de l'augmentation des salaires américains en fournissant une source de main-d'œuvre à bas prix pour permettre aux fabricants américains de délocaliser et d'externaliser leur production.
La guerre de classe du parti démocrate contre les travailleurs syndiqués a commencé sous l'administration Carter et s'est considérablement accélérée lorsque Bill Clinton a ouvert la frontière sud avec l'ALENA. Une série de maquiladoras ont été créées le long de la frontière pour fournir une main-d'œuvre artisanale à bas prix. Ces maquiladoras sont devenues un centre de profit si prospère que Clinton a fait pression pour que la Chine soit admise au sein de l'Organisation mondiale du commerce en décembre 2001, au cours du dernier mois de son administration. Le rêve était que la Chine devienne un centre de profit pour les investisseurs américains, produisant pour les entreprises américaines et finançant ses investissements (ainsi que le logement et les dépenses publiques, espérait-on) en empruntant des dollars américains et en organisant son industrie dans un marché boursier qui, comme celui de la Russie en 1994-96, deviendrait un fournisseur de premier plan de financement et de gains en capital pour les investisseurs américains et étrangers.
Walmart, Apple et de nombreuses autres entreprises américaines ont organisé des sites de production en Chine, ce qui impliquait nécessairement des transferts de technologie et la création d'une infrastructure efficace pour le commerce d'exportation. Goldman Sachs a mené l'incursion financière et a contribué à l'envolée du marché boursier chinois. Tout cela, c'est ce que l'Amérique avait préconisé.
Où le rêve néolibéral américain de la guerre froide a-t-il échoué ? Pour commencer, la Chine n'a pas suivi la politique de la Banque mondiale consistant à inciter les gouvernements à emprunter en dollars pour engager des sociétés d'ingénierie américaines afin de fournir des infrastructures d'exportation. Elle s'est industrialisée à peu près de la même manière que les États-Unis et l'Allemagne à la fin du XIXe siècle : En investissant massivement dans les infrastructures pour fournir les besoins de base à des prix subventionnés ou gratuitement, des soins de santé à l'éducation, des transports aux communications, afin de minimiser le coût de la vie que les employeurs et les exportateurs devaient payer. Plus important encore, la Chine a évité le service de la dette extérieure en créant sa propre monnaie et en gardant les installations de production les plus importantes entre ses mains.
Les exigences des États-Unis poussent leurs alliés à quitter l'orbite commerciale et monétaire dollar-OTAN
Comme dans une tragédie grecque classique, la politique étrangère des États-Unis entraîne précisément le résultat qu'ils craignent le plus. En surjouant avec leurs propres alliés de l'OTAN, les diplomates américains sont en train de réaliser le scénario cauchemardesque de Kissinger, en rapprochant la Russie et la Chine. Alors que les alliés de l'Amérique doivent supporter les coûts des sanctions américaines, la Russie et la Chine en profitent en étant obligées de diversifier et de rendre leurs propres économies indépendantes de la dépendance des fournisseurs américains de nourriture et d'autres besoins fondamentaux. Surtout, ces deux pays créent leurs propres systèmes de crédit et de compensation bancaire dédollarisés, et détiennent leurs réserves monétaires internationales sous forme d'or, d'euros et de devises de l'autre pays pour mener leurs échanges et investissements mutuels.
Cette dédollarisation offre une alternative à la capacité unipolaire des États-Unis à obtenir des crédits étrangers gratuits via l'étalon des bons du Trésor américain pour les réserves monétaires mondiales. À mesure que les pays étrangers et leurs banques centrales dédollarisent, qu'est-ce qui soutiendra le dollar ? Sans la ligne de crédit gratuite fournie par les banques centrales qui recyclent automatiquement les dépenses militaires et autres dépenses étrangères de l'Amérique vers l'économie américaine (avec un rendement minime), comment les États-Unis peuvent-ils équilibrer leurs paiements internationaux face à leur désindustrialisation ?
Les États-Unis ne peuvent pas simplement inverser leur désindustrialisation et leur dépendance à l'égard de la main-d'œuvre chinoise et asiatique en rapatriant la production chez eux. Ils ont intégré des frais généraux de rente trop élevés dans leur économie pour que leur main-d'œuvre puisse être compétitive au niveau international, étant donné les exigences budgétaires des salariés américains pour payer les coûts élevés et croissants du logement et de l'éducation, le service de la dette et l'assurance maladie, ainsi que les services d'infrastructure privatisés.
La seule façon pour les États-Unis de maintenir leur équilibre financier international est de fixer un prix de monopole pour leurs exportations d'armes, de produits pharmaceutiques brevetés et de technologies de l'information, et d'acheter le contrôle des secteurs de production les plus lucratifs et potentiellement rentiers à l'étranger - en d'autres termes, de diffuser la politique économique néolibérale dans le monde entier d'une manière qui oblige les autres pays à dépendre des prêts et des investissements américains.
Ce n'est pas une façon pour les économies nationales de se développer. L'alternative à la doctrine néolibérale réside dans les politiques de croissance de la Chine, qui suivent la même logique industrielle de base que celle qui a permis à la Grande-Bretagne, aux États-Unis, à l'Allemagne et à la France d'accéder à la puissance industrielle lors de leurs propres décollages industriels, avec un soutien gouvernemental fort et des programmes de dépenses sociales.
Les États-Unis ont abandonné cette politique industrielle traditionnelle depuis les années 1980. Ils imposent à leur propre économie les politiques néolibérales qui ont désindustrialisé le Chili pinochetiste, la Grande-Bretagne thatchérienne et les anciennes républiques soviétiques post-industrielles, les pays baltes et l'Ukraine depuis 1991. Sa prospérité, fortement polarisée et endettée, repose sur le gonflement des prix de l'immobilier et des titres et sur la privatisation des infrastructures.
Ce néolibéralisme a été la voie suivie pour aboutir à une économie en faillite et, de fait, à un État en faillite, obligé de subir la déflation de la dette, l'augmentation des prix du logement et des loyers alors que le taux d'occupation par les propriétaires diminue, ainsi que des coûts médicaux et autres coûts exorbitants résultant de la privatisation de ce que d'autres pays fournissent gratuitement ou à des prix subventionnés en tant que droits de l'homme - soins de santé, éducation, assurance médicale et pensions.
Le succès de la politique industrielle de la Chine, avec une économie mixte et un contrôle étatique du système monétaire et de crédit, a conduit les stratèges américains à craindre que les économies d'Europe occidentale et d'Asie ne trouvent leur avantage dans une intégration plus étroite avec la Chine et la Russie. Les États-Unis ne semblent avoir aucune réponse à un tel rapprochement mondial avec la Chine et la Russie, si ce n'est des sanctions économiques et une belligérance militaire. Cette position de nouvelle guerre froide coûte cher, et d'autres pays rechignent à supporter le coût d'un conflit qui n'a aucun avantage pour eux et qui, en fait, menace de déstabiliser leur propre croissance économique et leur indépendance politique.
Sans subvention de la part de ces pays, d'autant plus que la Chine, la Russie et leurs voisins dédollarisent leurs économies, comment les États-Unis peuvent-ils maintenir les coûts de la balance des paiements de leurs dépenses militaires à l'étranger ? Réduire ces dépenses et retrouver une autonomie industrielle et une puissance économique compétitive nécessiterait une transformation de la politique américaine. Un tel changement semble improbable, mais sans lui, combien de temps l'économie rentière post-industrielle de l'Amérique pourra-t-elle réussir à forcer les autres pays à lui fournir l'affluence économique (littéralement un afflux) qu'elle ne produit plus chez elle ?
Notes
[1] https://www.state.gov/briefings/department-press-briefing-january-27-2022/ . Faisant fi des commentaires des journalistes selon lesquels "ce que les Allemands ont dit publiquement ne correspond pas à ce que vous dites exactement", elle a expliqué la tactique des États-Unis pour bloquer Nord Stream 2. Contrecarrant l'argument d'un journaliste selon lequel "tout ce qu'ils ont à faire est de l'allumer", elle a déclaré : "Comme le sénateur Cruz aime à le dire, c'est actuellement un morceau de métal au fond de l'océan. Il doit être testé. Il doit être certifié. Il doit avoir une approbation réglementaire." Pour un examen récent de la géopolitique de plus en plus tendue à l'œuvre, voir John Foster, "Pipeline Politics hits Multipolar Realities : Nord Stream 2 et la crise ukrainienne", Counterpunch, 3 février 2022.
[2] Andrew Higgins, "Fueling a Geopolitical Tussle in Eastern Europe : Fertilizer", The New York Times, 31 janvier 2022. Le propriétaire prévoit de poursuivre le gouvernement lituanien pour obtenir de lourds dommages et intérêts.
[3] Ministère russe des Affaires étrangères, "Réponses du ministre des Affaires étrangères Sergey Lavrov aux questions du programme Voskresnoye Vremya de Channel One", Moscou, 30 janvier 2022. Johnson's Russia List, 31 janvier 2022, n° 9.
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L'expansion de l'OTAN et la réponse possible de la Russie
L'expansion de l'OTAN et la réponse possible de la Russie
Par Leonid Savin*
Source: https://firmas.prensa-latina.cu/index.php?opcion=ver-article&cat=S&authorID=291&articleID=2920&SEO=savin-leonid-expansion-de-la-otan-y-posible-respuesta-de-rusia&fbclid=IwAR0PtPOLJnXBINm7CTjyHgKMoVp9BbpdDAv0Ql2F5c7iStkfC9HeFKPrcV8
La confrontation actuelle entre la Russie et l'Occident n'est pas le résultat d'un soudain concours de circonstances : les contradictions s'accumulent depuis des années et la question ne concerne plus seulement l'Ukraine, où un coup d'État soutenu par les États-Unis a eu lieu en 2014, mais cette confrontation porte sur des points de vue opposés quant à la politique mondiale.
Avant même l'effondrement de l'Union soviétique, Mikhaïl Gorbatchev a reçu l'assurance qu'après l'unification de l'Allemagne, l'alliance de l'Atlantique Nord ne s'étendrait pas vers l'est, puis tout cela a été complètement oublié.
Bien que l'Union soviétique ait été dissoute, la Russie est son successeur, les obligations devaient donc également être remplies envers la Russie. Le problème est qu'ils n'ont pas été mis par écrit. Il s'agissait d'une promesse verbale, bien que tous les mots en aient été codifiés.
C'est pourquoi les propositions de la Russie pour réorganiser la sécurité européenne et, plus largement, mondiale, prévoient l'obligation de formaliser tout cela par écrit. Mais même après la réponse officielle des États-Unis, le secrétaire d'État Antony Blinken a déclaré qu'ils préféraient discuter de tout en privé plutôt que de publier des documents.
Pourquoi est-il si secret - peut-être les États-Unis cachent-ils quelque chose à leurs partenaires de l'OTAN et de l'Ukraine ? C'est très probable. Car même au sein de l'OTAN, il existe des points de vue différents sur l'acceptation de nouveaux membres.
Et aux États-Unis, beaucoup s'opposent à l'expansion de l'OTAN. Samuel Charap de la Rand Corporation a écrit qu'en décembre 1996, "les alliés de l'OTAN ont déclaré qu'ils n'avaient aucune intention, aucun plan ni aucune raison de placer des armes nucléaires sur le territoire des nouveaux membres, ce qu'on appelle les Trois Non". Cette déclaration a été faite avant qu'aucun des nouveaux membres ne rejoigne l'alliance. S'il était acceptable que l'OTAN prenne un tel engagement d'autolimitation il y a 25 ans, alors cela devrait être acceptable aujourd'hui.
Je pense que c'est un commentaire assez juste sur l'inclusion éventuelle de l'Ukraine et de la Géorgie dans l'alliance.
Cependant, plusieurs structures proches du Département de la Défense américain et du complexe militaro-industriel font pression pour l'acceptation de nouveaux membres.
La crise artificielle autour de l'Ukraine
Mais la crise artificielle autour de l'Ukraine profite aux États-Unis en raison du contrôle qu'ils exercent sur les partenaires européens de l'OTAN, notamment par le déploiement de contingents militaires dans les pays d'Europe de l'Est. D'autre part, l'escalade a un côté économique, puisqu'elle permet de justifier l'imposition de sanctions à la Russie et d'entraver les relations commerciales de Moscou avec les pays européens.
L'exemple du gazoduc Nord Stream 2 en est la preuve : le blocage intentionnel a entraîné une pénurie de réserves de gaz pendant la saison hivernale dans les pays européens et une hausse des prix. Et les États-Unis en ont profité pour envoyer du gaz de schiste liquéfié en Europe. En conséquence, les consommateurs européens sont contraints de surpayer les services d'approvisionnement et les entreprises américaines réalisent des bénéfices.
Les États-Unis et leurs partenaires, notamment le Royaume-Uni, ont lancé des scénarios similaires dans d'autres domaines. Se cachant derrière le concept de "guerre hybride", que les États-Unis et l'UE attribuent à la Russie, ils la mènent eux-mêmes par d'autres moyens, violant le droit international et s'ingérant dans les affaires souveraines d'autres États.
La Russie après la fin de l'hégémonie unipolaire américaine
Cependant, il est évident que la Russie représente un état différent de celui d'il y a vingt ou trente ans. Il n'y a plus d'hégémonie unipolaire des États-Unis, ce que l'on peut constater à l'exemple de la montée en puissance de la Chine et des tentatives de plusieurs États, par exemple au Moyen-Orient, de suivre leur propre voie en matière de politique étrangère.
La Russie ne peut pas et ne veut pas suivre la dictature des États-Unis et de l'OTAN, mais continuera à chercher à former un ordre mondial multipolaire plus juste.
Bien entendu, compte tenu des déclarations et des intentions agressives des États-Unis et de l'OTAN, la Russie prend en compte le risque de confrontation militaire et développe des contre-mesures, notamment une stratégie de dissuasion.
Par conséquent, l'un des scénarios pourrait être la mise en œuvre du projet "Crise des Caraïbes-2". Au début des années 1960, le déploiement de missiles nucléaires à Cuba est dû au fait que les États-Unis ont été les premiers à déployer leurs missiles en Turquie.
Naturellement, la propagande occidentale passe ce fait sous silence et ne rappelle que l'initiative soviétique qui menaçait directement le territoire des États-Unis. Nous devons nous préparer à ce que toute opposition russe aux provocations et à l'expansion de l'OTAN soit interprétée de la même manière. Nous sommes habitués à ce que la Russie soit blâmée pour chaque problème.
Les droits appartiennent à et sont là pour tous
Si l'on se réfère aux propos du secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenbreg, selon lesquels il existe "le droit de chaque nation de choisir ses propres mesures de sécurité", il serait merveilleux que la Serbie profite de ce droit et invite les forces armées russes à l'aider à assurer sa propre sécurité (y compris le retour du contrôle du Kosovo-Metohija).
La question est la suivante : les dirigeants serbes, qui sont constamment sous la pression de l'Occident, feront-ils ce pas ? Cela vaut-il la peine de faire à Belgrade une offre qu'elle ne peut refuser ? La question des prix du gaz serait très utile, car les tarifs actuels ne seront en place que quelques mois avant les résultats de leurs prochaines élections en avril.
En outre, la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine a également besoin de l'aide de la Russie après la crise politique qui a débuté l'année dernière : la partie serbe n'a pas reconnu la nomination du Haut Représentant de l'UE en raison d'irrégularités de procédure. La Russie n'a pas non plus reconnu ce représentant.
Il est intéressant de noter que la Croatie s'est très récemment montrée solidaire de la Russie sur un certain nombre de questions, tant en Bosnie-Herzégovine, dans le but de maintenir le statu quo à l'égard de la population croate, qu'en ce qui concerne l'entrée de l'Ukraine dans l'OTAN.
Maintenant, à mon avis, ce ne sont pas les puissances européennes, mais les puissances eurasiennes qui pourraient aider à équilibrer la situation dans les Caraïbes et en Amérique latine dans son ensemble, ce sont donc la Russie et la Chine.
Le deuxième scénario est plus stratégique et à long terme. C'est la formation d'une alliance politico-militaire d'un collectif non-occidental. Idéalement, la Russie, la Chine et l'Iran seraient des acteurs clés. L'adhésion de la Syrie, du Belarus, du Venezuela, du Nicaragua et de Cuba donnerait une dimension latino-américaine et enverrait un signal sérieux aux États-Unis.
Il existe également plusieurs États importants en Afrique qui sont pro-russes, par exemple l'Algérie et l'Égypte. Un engagement plus actif des pays neutres peut produire des résultats à moyen et long terme. Une compréhension claire des besoins des partenaires potentiels et une volonté d'aider à y répondre sont également nécessaires.
En général, une plus grande interaction de tous les pays qui n'acceptent pas la dictature américaine et qui sont soumis à des sanctions ou à un blocus est vitale pour protéger leur souveraineté et une architecture mondiale plus équilibrée.
En outre, toute démarche visant à accroître les contradictions au sein de l'OTAN sera utile. Alors que Bruxelles accusera la Russie de mener une guerre hybride (ce qui est déjà le cas, indépendamment des actions ou omissions de Moscou), je pense qu'il est préférable pour la Russie d'adopter une position active plutôt que de rester les bras croisés.
Il existe de sérieuses frictions entre la Turquie et les membres européens de l'OTAN. Il existe même des conflits territoriaux entre les États-Unis et le Canada. Il est nécessaire de mettre ces contradictions en exergue et de développer des mécanismes pour accroître les différences existant entre les membres de l'alliance occidentale. En général, l'alliance occidentale est un conglomérat artificiel. Il est nécessaire de soutenir les aspirations de l'UE à l'autonomie européenne, une initiative stratégique que la France et l'Allemagne soutiennent tout particulièrement.
Renforcer les alliances existantes et en préconiser de nouvelles
Parallèlement, la Russie doit renforcer les initiatives régionales telles que l'Organisation du traité de sécurité collective et l'Union économique eurasienne.
Dans le cadre de l'OTSC, la puissance militaire doit être accrue, et dans l'Union économique eurasienne, la composante politique doit être renforcée. Dans la région de l'Amérique centrale et du Sud, il y a le renforcement de la CELAC et de l'intégration régionale, excluant l'influence des États-Unis. En effet, l'Union économique eurasienne et la CELAC interagissent. Ce processus doit être renforcé par diverses initiatives multilatérales.
À la fin du 19e siècle, le révolutionnaire cubain José Martí a parlé de l'importance de l'équilibre entre les forces mondiales dans le contexte de l'indépendance des Antilles vis-à-vis de l'Espagne. Pour un tel équilibre, la présence d'au moins deux puissances européennes dans la région était nécessaire. À l'époque, il voyait en l'Allemagne et l'Angleterre de tels garants qui freineraient également l'expansion des États-Unis dans les Caraïbes.
Maintenant, à mon avis, ce ne sont pas les puissances européennes, mais les puissances eurasiennes qui pourraient aider à équilibrer la situation dans les Caraïbes et en Amérique latine dans son ensemble, et ces puissances eurasiennes sont la Russie et la Chine.
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samedi, 19 février 2022
Guerre en mosaïque et opérations à tous les niveaux
Guerre en mosaïque et opérations à tous les niveaux
Leonid Savin
Source: https://www.geopolitica.ru/article/mozaichnaya-voyna-i-operacii-vo-vseh-sferah
Les doctrines militaires et les méthodes de guerre changent constamment et s'adaptent aux conditions actuelles et aux conflits futurs anticipés. Les États-Unis modernisent constamment leurs documents doctrinaux à cet égard.
Dans le présent document, nous mettons en lumière plusieurs concepts étroitement liés qui ont constitué des doctrines de travail dans l'armée américaine ces dernières années et qui visent à restructurer les capacités du Pentagone et des alliés.
Opérations multi-domaines
La première étape de l'examen sera le concept d'opérations multi-domaines (c'est-à-dire dans plusieurs domaines). Il est détaillé dans un document d'une centaine de pages publié en décembre 2018, intitulé U.S. Army Training and Doctrine Command [i]. L'avant-propos, rédigé par Mark Milley, président des chefs d'état-major interarmées des forces armées américaines, indique explicitement que "les concurrents stratégiques tels que la Russie et la Chine font la synthèse des nouvelles technologies avec leur analyse de la doctrine et des opérations militaires.
Ils déploient des capacités pour combattre les États-Unis à travers de multiples couches de confrontation dans tous les domaines - espace, cyber, air, mer et terre. "Le défi militaire auquel nous sommes confrontés, dit-il, consiste à surmonter les multiples couches de confrontation dans tous les domaines afin de maintenir la cohérence de nos opérations".
En fait, le Pentagone a identifié ses adversaires comme étant la Russie et la Chine. Alors que la Russie modernise ses forces armées à des fins défensives, les États-Unis l'envisagent avec leur propre logique et y voient la préparation d'un conflit militaire dans un avenir proche. D'où également les déclarations actuelles sur l'invasion imminente de l'Ukraine par Moscou.
Naturellement, la Russie ne va attaquer personne, mais les États-Unis se préparent déjà à briser la capacité de défense de notre pays par des moyens militaires, ce qui est l'un des objectifs pour lesquels cette charte a été émise. Il est souligné à plusieurs reprises que "en fin du présent document, la Russie est la menace principale" [ii].
Alors, que représente en théorie la conduite d'opérations multi-domaines ?
L'idée centrale est la suivante: c'est l'armée américaine, en tant qu'élément de la force interarmées, qui mène des opérations multi-domaines pour gagner la compétition ; si nécessaire, les unités de l'armée pénètrent et désactivent les systèmes anti-accès/déni de zone (A2/AD) de l'ennemi et utilisent la liberté de manœuvre qui en résulte pour atteindre les objectifs stratégiques (victoire) et ensuite forcer un retour à la compétition à des conditions plus favorables.
En d'autres termes, ils parlent de mener des opérations spéciales et de sabotage réellement derrière les lignes de l'ennemi ou dans un territoire sous son contrôle. Les États-Unis disposent d'un Commandement des opérations spéciales distinct, il est donc quelque peu étrange de voir leurs tâches prioritaires transférées à des unités de l'armée.
Le document indique que les principes des opérations multi-domaines reposent sur le principe selon lequel l'armée relève les défis posés par les opérations chinoises et russes dans le cadre de la concurrence et des conflits en appliquant trois principes interdépendants : la posture de force alignée, les formations multi-domaines et la convergence.
La posture de force alignée est une combinaison de la posture et de la capacité à manœuvrer sur des distances stratégiques. Les formations multi-domaines ont la capacité, l'aptitude et l'endurance nécessaires pour opérer dans plusieurs domaines dans des espaces contestés contre un adversaire presque égal.
La convergence est l'intégration rapide et continue des capacités à travers les domaines, le spectre électromagnétique et l'environnement d'information, qui optimise les effets pour une supériorité sur l'ennemi par une synergie inter-domaines et des formes d'attaque multiples, le tout rendu possible par un commandement de mission et une initiative disciplinée. Les trois principes de solution sont complémentaires et communs à toutes les opérations multi-domaines, même si la façon dont ils sont mis en œuvre varie d'un niveau à l'autre et dépend de la situation opérationnelle spécifique.
Les forces combinées, telles que conçues par les auteurs, sont destinées à vaincre les adversaires et à atteindre les objectifs stratégiques dans le cadre d'une compétition, d'un conflit armé et lors du retour à la compétition. Ce passage rappelle un ancien manuel de campagne de l'armée américaine, selon lequel la guerre n'est pas seulement menée pendant un conflit armé, mais aussi avant, en temps de paix et après le retour à la paix. Cela ne s'applique pas seulement aux ennemis, mais aussi aux alliés et aux forces neutres. Dans le nouveau document, l'état de paix est changé en état de concurrence.
La Russie est mentionnée 159 fois dans le document, tandis que la Chine est mentionnée 82 fois, c'est-à-dire deux fois moins. Pendant ce temps, d'autres pays que les analystes américains aiment lier à la présence ou aux intérêts russes, comme la Syrie et la Géorgie, sont utilisés une fois chacun, tandis que l'Ukraine l'est trois fois. Taiwan n'est pas du tout mentionné.
Cela suggère implicitement que la défense de l'Ukraine ou de la Géorgie (ainsi que de Taïwan) n'intéresse pas les États-Unis en tant que partenaires à aider. Le véritable objectif est de créer une force militaire si performante qu'elle puisse briser les défenses de la Russie et/ou de la Chine.
On y décrit de manière assez détaillée ce que la Russie fait et pourrait faire en cas de conflit armé. Il est noté que "le centre de gravité opérationnel des actions de la Russie dans une lutte concurrentielle est l'intégration étroite de la guerre de l'information, de la guerre non conventionnelle et des forces armées conventionnelles. La capacité d'utiliser tous les éléments de manière coordonnée offre à la Russie un avantage en matière d'escalade, dans lequel toute réponse amicale s'accompagne d'une réponse plus puissante.
Dans le cadre de la compétition, l'escalade la plus extrême est une transition vers un conflit armé qui favorise un adversaire ayant la capacité de mener une attaque devant le fait accompli avec ses forces armées conventionnelles. La capacité démontrée de mettre en œuvre le fait accompli donne de la crédibilité aux récits d'information russes.
La combinaison de la guerre de l'information, de la guerre non conventionnelle et des forces conventionnelles et nucléaires offre à la Russie une confrontation politique et militaire dans laquelle elle peut obtenir des objectifs stratégiques qui n'impliquent pas un conflit armé avec les États-Unis.
La guerre de l'information et la guerre non conventionnelle contribuent à déstabiliser la sécurité régionale, mais sont insuffisantes à elles seules pour atteindre tous les objectifs stratégiques de la Russie. Cet avantage dans l'escalade fourni par les forces conventionnelles complète la guerre de l'information et la guerre non conventionnelle, permettant à la Russie de conserver l'initiative dans la compétition" [iii].
La référence au fait accompli fait clairement référence aux événements de 2014 et au retour de la Crimée à la Russie. Et l'utilisation du terme "centre de gravité" suggère une continuation du discours caractéristique de la pensée stratégique militaire américaine des années 1990. Dans l'ensemble, la Russie a fait l'objet de nombreuses pages décrivant les capacités techniques, militaires et politiques du point de vue de l'armée américaine. Outre la Russie et la Chine, la Corée du Nord et l'Iran sont mentionnés comme des menaces.
Cependant, que suggèrent les concepteurs d'opérations multi-domaines pour un scénario de guerre hypothétique avec la Russie et la Chine ?
Tout d'abord, le besoin de manœuvrer de manière indépendante, tout en poursuivant les opérations dans un environnement de campagne de théâtre contesté. "Une manœuvre indépendante indique une formation ayant l'aptitude, la capacité et l'initiative d'opérer dans les contraintes de l'environnement opérationnel".
Les formations multi-domaines ont la capacité organique de se soutenir et de se défendre jusqu'à ce qu'elles reprennent contact avec les unités voisines et de soutien. Ils sont soutenus par des capacités telles que des signatures visuelles et électromagnétiques réduites, des canaux de communication redondants protégés du brouillage ennemi, des exigences logistiques réduites, un soutien médical amélioré, des réseaux de soutien multiples, des capacités robustes d'appui aux manœuvres et un camouflage multi-domaines.
Les brigades, les divisions et les corps d'armée, en particulier, ont besoin d'un commandement de mission organique, de reconnaissance et de reconnaissance ainsi que de la capacité de soutenir des opérations offensives sur plusieurs jours malgré des lignes de communication hautement contestées" (iv].
Le deuxième est le feu de combat inter-domaines. "La capacité de tir inter-domaines offre des options aux commandants et augmente la résilience au sein de la force interarmées pour surmonter la séparation fonctionnelle temporaire imposée par les systèmes de déni et de refus de zone de l'ennemi.
En plus des défenses aériennes et antimissiles modernisées et des capacités de tir au sol à longue portée, les formations multi-domaines fournissent des capacités de tir inter-domaines grâce à des systèmes aériens, des systèmes de défense avancés, une défense aérienne et une reconnaissance multicouches, des dispositifs EOD, des munitions multi-spectrales guidées par capteurs, des capacités liées à la cybernétique, à l'espace et à l'information.
Les tirs inter-domaines comprennent les capacités de renseignement et de reconnaissance nécessaires pour les exploiter, ce qui peut inclure une combinaison de capacités organiques et d'accès à des ressources externes. Les tirs interdomaines sont combinés aux progrès nécessaires en matière de mobilité et de létalité dans les futures plates-formes aériennes et terrestres, les réseaux de communication et le traitement des données (vitesse et volume) pour fournir une capacité de manœuvre interdomaines"[v].
Il est également question d'améliorer la qualité du personnel. Ici, il y a un parti pris clair en faveur des nouvelles technologies et un accent sur l'expertise requise dans la main-d'œuvre. "Les capteurs biotechniques qui surveillent la condition humaine et les changements de performance améliorent la compréhension que les commandants ont de leurs unités, éclairent les décisions concernant le rythme et l'intensité des opérations et aident les unités à maintenir et à rétablir leur force physique et psychologique.
Les interfaces homme-machine soutenues par l'intelligence artificielle et le traitement des données à grande vitesse augmentent la vitesse et la précision de la prise de décision humaine. L'utilisation de capacités multi-domaines exige de l'armée qu'elle attire, forme, retienne et recrute des chefs et des soldats qui possèdent collectivement une quantité et une profondeur importantes de connaissances techniques et professionnelles"[vi].
Le document s'appuie sur la convergence et les synergies inter-domaines, reflétant les stratégies de combat antérieures du département de la Défense des États-Unis.
"Le concept d'accès aux opérations interarmées (JOAC) repose sur la thèse de la synergie interdomaines - l'utilisation complémentaire ou simplement additive de capacités dans différents domaines de telle sorte que chacune renforce l'efficacité et compense les vulnérabilités des autres pour établir une supériorité dans une certaine combinaison de domaines qui fournira la liberté d'action nécessaire à l'exécution de la mission"[vii].
Le concept d'accès pour les opérations unifiées implique plus d'intégration entre les domaines et à des niveaux inférieurs que jamais auparavant.
L'utilisation de la synergie inter-domaines à des niveaux de plus en plus bas sera essentielle pour créer le tempo, qui est souvent crucial pour exploiter les capacités locales fugaces afin de perturber un système ennemi. Le JOAC envisage également une intégration plus poussée et plus souple que jamais des opérations dans l'espace et le cyberespace dans les espaces traditionnels de combat aérien, maritime et terrestre.
Ce concept, à son tour, s'appuie sur le précédent concept de pierre angulaire des opérations interarmées (CCJO)[viii].
Il décrit un futur environnement opérationnel caractérisé par l'incertitude, la complexité et le changement rapide. Comme solution à ces conditions, le CCJO propose un processus d'adaptation opérationnelle impliquant une combinaison dynamique de quatre grandes catégories d'activités militaires : le combat, la sécurité, l'engagement et les secours, et la récupération.
Les opérations de combat immédiat reposent sur la neutralisation des systèmes de combat à longue portée de l'ennemi (défenses aériennes, installations de missiles balistiques), le suivi des manœuvres des troupes, la collecte et le traitement rapides de données provenant de différentes zones, la frappe des capacités de renseignement de l'autre camp et l'attaque des cibles à partir de différentes sphères (c'est-à-dire l'utilisation synchrone de différents types de troupes et d'armes).
Le général de l'armée de terre à la retraite David Perkins, qui était à la tête du Training and Doctrine Command, a déclaré dans une interview que le concept de bataille multi-domaine était autrefois appelé "du vieux vin dans une nouvelle bouteille" ou "une bataille air-sol sur des stéroïdes".
Une doctrine assez proche est le Joint All-Domain Command and Control (JADC2), un concept du ministère américain de la Défense visant à connecter les capteurs de tous les services militaires - Air Force, Army, Marine Corps, Navy et Space Force - en un seul réseau. Traditionnellement, chacun des services militaires développait son propre réseau tactique qui était incompatible avec les réseaux des autres services (c'est-à-dire que les réseaux de l'armée de terre ne pouvaient pas communiquer avec les réseaux de la marine ou de l'armée de l'air).
Les responsables du DOD ont fait valoir que les conflits futurs pourraient exiger que les décisions soient prises en quelques heures, minutes ou potentiellement secondes, par rapport au processus actuel de plusieurs jours d'analyse de l'environnement opérationnel et d'émission de commandements. Ils ont également fait valoir que l'architecture actuelle de commandement et de contrôle du ministère est insuffisante pour répondre aux exigences de la stratégie de défense nationale.
L'étude du Congrès américain sur le sujet a cité la technologie du service de covoiturage d'Uber comme analogie. "Uber combine deux applications différentes - une pour les passagers et une pour les conducteurs. À partir de la position des utilisateurs respectifs, l'algorithme d'Uber détermine la meilleure correspondance en fonction de la distance, du temps de trajet et des passagers (entre autres variables).
L'application fournit ensuite facilement au conducteur les indications à suivre, conduisant le passager à sa destination. Uber s'appuie sur les réseaux cellulaires et Wi-Fi pour la transmission de données afin de faire correspondre les conducteurs et de fournir des instructions de conduite. "[ix]
Et les opérations unifiées tous domaines (JADO) sont une évolution du concept des opérations multi-domaines (MDO). Il est dit que "JADO incorpore l'énorme potentiel d'une force véritablement intégrée (le point central de MDO) et met à jour le concept pour inclure plusieurs aspects critiques de la façon dont l'OTAN cherche à conduire les opérations futures. Le JADO déplace le centre d'intérêt du "multi-domaine", dans lequel les services individuels ont opéré pendant des décennies, et le ramène à la résolution des défis des opérations interarmées.
En outre, étant donné la complexité des systèmes et des capacités interconnectées couvrant plusieurs domaines dans les forces armées d'aujourd'hui, on pourrait faire valoir que la structuration traditionnelle des services basée sur leur domaine opérationnel principal pourrait ne pas s'avérer très utile dans de nombreux scénarios futurs.
Il est probable que le vainqueur sera une force capable de manœuvrer facilement dans tous les domaines et de s'y déplacer de manière synchronisée à une vitesse que l'adversaire ne pourra pas égaler. Compte tenu de ces considérations, il est facile de conclure que le fait d'accorder trop d'importance au domaine réduit l'attention portée à la tâche conjointe de plusieurs services travaillant ensemble de manière transparente dans plusieurs domaines. "[x]
La guerre des mosaïques
En 2017, un nouveau concept de "guerre en mosaïque" a été annoncé aux États-Unis. Le terme a été inventé par Thomas J. Burns, ancien directeur de la Direction de la technologie stratégique de la DARPA, et son ancien adjoint Dan Patt.
Cette théorie est fondamentalement différente du modèle traditionnel des "systèmes de systèmes", que Burns et Patt considèrent comme défectueux car il limite souvent de manière inhérente l'adaptabilité, l'évolutivité et l'interopérabilité.
Dans une interview, Patt a déclaré : "Le terme "système de systèmes" est souvent utilisé pour décrire des capacités qui ont été conçues dès le départ pour travailler ensemble et fonctionner comme un tout, même s'il y a de nombreux composants - un peu comme le concept d'un puzzle, où de nombreuses pièces spécialement conçues s'emboîtent de manière unique pour former une image cohérente.
L'application des processus classiques de conception et de validation à un "système de systèmes" peut entraîner l'impossibilité d'apporter des modifications futures au système, car chaque pièce est conçue et intégrée de manière unique pour remplir un rôle particulier, et les longs délais de développement nécessaires pour examiner comment chaque modification affecte l'ensemble du système.
La guerre des mosaïques envisage la possibilité d'une composition ascendante, où des éléments individuels (systèmes existants ou nouveaux), comme les carreaux individuels d'une mosaïque, s'assemblent pour créer un effet d'une manière non envisagée auparavant, potentiellement de façon dynamique. Ce concept est conçu pour révolutionner les cycles temporels et l'adaptabilité des capacités militaires"[xi].
La clé sera de combiner les unités avec et sans équipage, de partager les capacités et de permettre aux commandants d'appeler à l'action de manière transparente depuis la mer, la terre ou les airs, selon la situation et quelle que soit la force armée qui fournit la capacité.
Un exemple dans l'aviation serait une série de drones accompagnant une formation de combat typique de quatre chasseurs. L'un des robots ailés pourrait être là uniquement pour brouiller les radars ou utiliser d'autres équipements de guerre électronique.
Un autre peut avoir une charge utile d'armes. Un troisième peut avoir un ensemble de capteurs et un quatrième peut agir comme un leurre. Au lieu de quatre points sur le radar, l'ennemi en voit huit, et il n'a aucune idée des capacités offertes par chacun d'eux[xii].
Dans un autre exemple, le groupe d'opérations spéciales A, derrière les lignes ennemies, découvre un lanceur de missiles sol-air inconnu jusqu'alors. Il a communiqué sa position par radio et le système de commande et de contrôle a automatiquement recherché le meilleur moyen de détruire la cible. Il peut s'agir d'une brigade de l'armée voisine, d'un sous-marin ou d'un avion de patrouille de chasse. Un ordre est envoyé et la meilleure plate-forme pour la mission est appelée à frapper.
Le problème est que chacune de ces plateformes est actuellement conçue pour sa propre mission spécifique. Un autre problème consiste à faire travailler ensemble un grand nombre d'éléments divers et flexibles.
Le concept lui-même semble être né des problèmes d'incompatibilité de certains équipements de combat aux États-Unis. Par exemple, le F-22 Raptor et le F-35 Joint Strike produits par la même société Lockheed Martin avaient des liaisons de données incompatibles.
Dans l'ensemble, la guerre mosaïque est similaire dans sa conception à d'autres concepts de guerre en vogue, tels que les "systèmes de systèmes" ou les opérations multi-domaines conjointes.
La voie de la confrontation
Dans l'ensemble, nous voyons des modèles assez similaires qui diffèrent dans certains détails. Comme l'indique une étude récente, "les concepts de guerre future tels que la mosaïque, le commandement et le contrôle unifiés tous domaines (JADC2) et le système avancé de gestion de la bataille (ABMS) reposeront sur des réseaux d'information et des programmes d'intégration avancés basés sur des logiciels comme base opérationnelle.
Le succès dans les conflits de demain dépendra largement de la façon dont les combattants seront capables d'utiliser et d'adapter tout, des systèmes de contrôle des avions aux ensembles de capteurs, en passant par les réseaux et les aides à la décision. Pour gagner dans un espace de combat dynamique et contesté, les combattants doivent être capables de reprogrammer et de reconfigurer leurs systèmes d'armes, leurs capteurs et leurs réseaux" [xiii].
Il est possible que ces doctrines et concepts soient transformés en quelque chose de nouveau dans un avenir proche. Le travail à ce sujet est déjà en cours. Une étude du Conseil atlantique (une organisation indésirable dans la Fédération de Russie), préparée en tant que projet pour une future stratégie de défense nationale américaine et publiée en décembre 2021, identifie quatre points clés qui, selon les auteurs, devraient être adoptés comme un impératif pour les États-Unis et les partenaires de l'OTAN.
"Le département de la défense doit désormais être compétitif et s'engager dans une guerre hybride offensive. Les États-Unis doivent réagir là où il y a une concurrence avec la Chine et la Russie aujourd'hui, principalement en jouant un rôle plus actif dans la concurrence en zone grise. En conséquence, le Pentagone devrait adopter le paradigme de la concurrence comme un continuum allant de la coopération au conflit armé en passant par la concurrence.
Mais embrasser le continuum n'est pas suffisant ; le ministère de la Défense, en collaboration avec des partenaires interagences le cas échéant, doit se défendre plus agressivement et prendre des mesures offensives dans la zone grise conformément aux valeurs américaines. Taking Advantage articule le concept du continuum de la concurrence et formule des recommandations à l'intention du ministère de la Défense pour façonner l'environnement informationnel et la concurrence dans le cyberespace.
- Les hostilités futures doivent être coopératives, combinées et englober tous les domaines. Les conflits futurs devraient exiger une meilleure intégration de tous les services militaires américains et se dérouleront sur terre, en mer, dans les airs, dans l'espace et le cyberespace, ainsi que sur l'ensemble du spectre électromagnétique.
Elle sera également menée en étroite coordination avec les alliés et les partenaires, qui constituent collectivement l'un des plus grands avantages des États-Unis par rapport à leurs principaux concurrents. Un nouveau concept opérationnel couvrant ce futur champ de bataille est nécessaire.
Tirer parti de l'avantage introduit le "concept de guerre combinée". Il s'agit d'un concept de guerre global, interarmées et combiné, qui englobe dès le départ le rôle, les capacités, ainsi que ceux des alliés et des partenaires.
- Le ministère de la Défense doit créer une force capable de dominer les conflits armés de l'avenir. Le futur champ de bataille sera axé sur les données, mis en réseau et évoluera rapidement. Tant les États-Unis que leurs concurrents stratégiques investissent activement dans des armes cinétiques et non cinétiques révolutionnaires, notamment les vecteurs hypersoniques, les systèmes de combat autonomes, l'énergie dirigée et les outils cybernétiques.
Si ces armes permettront de neutraliser ou de détruire plus facilement des cibles, trouver ces cibles sera un défi plus immédiat. Par conséquent, les guerres de l'avenir seront probablement remportées par le camp qui saura le mieux exploiter les données disponibles dans tous les domaines et priver un adversaire de la possibilité de faire de même. Saisir l'avantage articule des priorités d'investissement claires pour construire cette force - et des priorités d'aliénation pour se la permettre.
- Le ministère de la Défense doit équilibrer sa structure de forces en passant d'un commandement centralisé à un modèle plus orienté vers le monde. Alors que les États-Unis modifient leur orientation générale, passant du contre-terrorisme à la compétition stratégique, la structure de leurs forces mondiales doit changer en conséquence. L'ère des déploiements multiples et longs par rotation dans la zone de responsabilité du Commandement central est révolue.
Une autre solution consiste à tirer parti de l'introduction d'un modèle de posture équilibré, différencié et en "treillis" qui déplacerait les types d'actifs nécessaires vers l'Indo-Pacifique et l'Europe et s'appuierait sur une structure de défense plus étroitement alignée avec les alliés et les partenaires, réduisant ainsi les risques associés au rééquilibrage américain."[xiv]
En somme, si le réoutillage technique de l'armée américaine est une question de capacité de défense de routine qui dépend de nouveaux types d'armes, les accents géopolitiques sur le théâtre de guerre possible et les futurs adversaires sont un choix politique. Et les doctrines actuelles suggèrent que Washington s'est engagé sur la voie de la confrontation.
Notes:
[i] The U.S. Army in Multi-Domain Operations 2028. TRADOC Pamphlet 525-3-1. U.S. Army Training and Doctrine Command, December 6, 2018.
[ii] Ididem. Р. vi.
[iii] Ididem. Р. 11.
[iv] Ididem. Р. 19.
[v] Ididem.
[vi] Ididem. Р. 20.
[vii] Joint Operational Access Concept (JOAC). Departament of Defense, 17 January 2012. https://dod.defense.gov/Portals/1/Documents/pubs/JOAC_Jan...
[viii] Department of Defense, Capstone Concept for Joint Operations, v3.0, 15 Jan 2009.
[ix] Joint All-Domain Command and Control(JADC2). Congressional Research Service, July 1, 2021.
https://sgp.fas.org/crs/natsec/IF11493.pdf
[x] All-Domain Operations in a Combined Environment.
https://www.japcc.org/portfolio/all-domain-operations-in-...
[xi] Stew Magnuson. DARPA Pushes ‘Mosaic Warfare’ Concept // National Defense, 11/16/2018.
https://www.nationaldefensemagazine.org/articles/2018/11/...
[xii] Brad D. Williams. DARPA’s ‘mosaic warfare’ concept turns complexity into asymmetric advantage // Fifth Domain, August 14, 2017.
https://www.fifthdomain.com/dod/2017/08/14/darpas-mosaic-...
[xiii] David A. Deptula, Heather Penney. Speed is Life: Accelerating the Air Force’s Ability to Adapt and Win. Policy Paper, Vol. 28, July 2021. Р. 1.
[xiv] Clementine G. Starling, Lt Col Tyson K. Wetzel, and Christian S. Trotti. SEIZING THE ADVANTAGE: A Vision for the Next US National Defense Strategy. Washington: Atlantic Council. December 2021. Р. 21.
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mercredi, 16 février 2022
Martin Sellner: Paradoxes politiques
Paradoxes politiques
Martin Sellner
Ex: Sezession 79/août 2017 - https://sezession.de/sezession-79-august-2017
Martin Sellner est à la tête du mouvement identitaire autrichien.
La métapolitique est un chemin sur une ligne de crête étroite. Des deux côtés, des abîmes menacent. On ne peut avancer que sur une "voie médiane" et il faut constamment tâtonner. Il en résulte quelques paradoxes. J'aimerais en présenter deux dans ce texte.
Le premier est ce que l'on appelle le Political Identity Paradox et a été nommé et donc "découvert" pour la première fois par Jonathan Matthew Smucker, un étudiant d'extrême gauche de Berkeley. Il décrit une problématique fondamentale : chaque mouvement politique a besoin d'un noyau de militants idéalistes qui le portent sur le long terme. Si le mouvement est vraiment oppositionnel, c'est-à-dire dans une position marginale, il a un manque fondamental de masse, d'hommes et de matériel, que seul l'idéalisme peut combler.
Cet idéalisme, et avec lui le courage, la discipline et la fiabilité, nécessite une forte identité de groupe. Le sentiment du "nous" doit compenser les sacrifices que l'on doit faire. Une forte identité de groupe est toutefois - et c'est là que commence le paradoxe - toujours et nécessairement exclusive. L'"appartenance" à une clique, qu'il s'agisse d'un gang de motards, d'un groupe de hooligans ou d'un groupe antifasciste, s'avère justement si désirable parce que tout le monde ne peut pas en faire partie. L'habillement, le comportement et le jargon marquent une frontière nette entre la communauté élitiste et "les autres". Cette frontière crée la tension interne nécessaire à une forte identité de groupe et à un idéalisme durable.
Mais c'est justement cette forte identité de groupe qui conduit aussi à l'enfermement du mouvement. Pour un gang de motards ou un groupe antifasciste qui n'a pas d'objectifs ou de stratégies politiques concrets, cela ne pose pas de problème. En revanche, tout groupe métapolitique doit rester ouvert. Mais une forte identité de groupe réduit les possibilités de croissance, de formation d'alliances, de connexion et d'influence, ce qui contrecarre l'objectif politique du groupe. Ce dont le groupe a besoin pour tenir le coup conduit en même temps à son isolement. Ce qui fait son rayonnement et sa force d'attraction repousse en même temps ceux qui n'en font pas encore partie. C'est le paradoxe de l'identité politique.
Smucker cite comme exemple la désintégration de la grande organisation de masse SDS ("Students for a democratic society") dans les années 1960. Le vaste mouvement d'extrême gauche, basé sur des structures, a été démantelé par la fraction extrémiste et plus tard terroriste des "Weathermen". Le noyau élitiste s'était éloigné de ses propres membres, qu'il méprisait en raison de leur demi-mesure libérale.
Ce mépris s'est manifesté lors des "Days of Rage". Entre le 8 et le 11 octobre 1969, la faction élitiste-extrémiste a voulu "ramener la guerre à la maison" et a semé la désolation à Chicago. Mark Rudd, l'un des porte-parole radicaux, a annoncé dans un discours : "Le SDS n'est pas assez radical. Il doit mourir". Lui et un autre centriste allèrent même jusqu'à déverser tous les dossiers et les listes de membres du bureau du SDS à Chicago dans une décharge. Avec cette attitude élitiste et extrémiste, qui a logiquement mené au terrorisme, les "Weathermen" avaient, comme l'a noté avec délectation le FBI, "effrayé presque tous leurs partisans" et détruit leur véritable force de frappe.
La forte identité de groupe est nécessaire pour compenser l'absence habituelle de structures fixes, de hiérarchies et de salaires. Elle seule constitue une réassurance, renforce la confiance et crée la cohésion nécessaire à l'activisme politique. Et c'est ainsi que se forment des cercles fermés avec des rituels, un style de vie et des projets d'habitation. Mais ces cercles de politique préfigurative agissent souvent sur les nouveaux venus comme un "choc culturel". Ils compliquent définitivement l'entrée en matière, souvent ils échouent même, et le cercle des familiers ne s'agrandit pas, bien qu'il gémisse sous sa charge de travail. Pendant ce temps, les sympathisants ne sont pas pris en charge et restent inactifs sur le côté.
Smucker recommande un équilibre entre le bonding et le bridging. Sans un fort bonding et un sentiment de "nous", le groupe n'a pas la force nécessaire pour un activisme à long terme. Mais sans bridging, c'est-à-dire ouverture et capacité de connexion, le groupe se dégrade en une secte isolée dont le chemin peut aboutir à la violence et à la terreur.
Surmonter le Political Identity Paradox est donc l'une des grandes tâches des leaders de mouvements politiques. Ils doivent promouvoir l'identité du groupe, mais ne doivent jamais s'y fondre eux-mêmes. Le bonding se fait de lui-même lorsqu'on encourage les activités au-delà des actions. Le bridging, en revanche, nécessite une intervention ciblée. Le pont vers l'extérieur doit tenir, l'échelle doit freiner là où s'installe une envie élitiste de trop de "nous-mêmes".
Le numéro de Sezession d'où cet article de Martin Sellner est extrait.
Ce sont moins des codes extérieurs qu'un objectif commun et une volonté commune de changement politique qui doivent former l'esprit du groupe central. Un sentiment de "nous" affamé et politique, et non statique et sous-culturel, empêche l'isolement et le glissement vers l'autosuffisance politique. Le deuxième paradoxe ne concerne pas l'interne, mais l'activisme. Il s'agit du "paradoxe de la polarisation". Il décrit la nécessité pour un mouvement métapolitique de polariser la société dans la provocation, quitte parfois à froisser sa propre base de sympathisants. Comprendre cette dialectique est particulièrement important, car cela signifie également comprendre la différence entre un parti et un mouvement.
Commençons par une métaphore : le mouvement a la fonction de la hache, le parti celle de la charrue. Le mouvement défriche les terres métapolitiques et les rend cultivables. Il remue et est disruptif. Le parti exploite et travaille le terrain ainsi défriché. Alors qu'il se déplace toujours dans le cadre du possible et du praticable et qu'il cherche la position la plus proche par une habile "triangulation", le mouvement doit faire éclater le cadre.
La tâche du parti est de gagner du pouvoir politique réel en maximisant les voix. Le jour des élections, son succès est illustré par le pourcentage de voix obtenues, et il doit formuler ses revendications de la manière la plus cohérente possible. L'outil de la provocation doit être utilisé, si tant est qu'il le soit, pour attirer l'attention.
Le mouvement métapolitique, quant à lui, dépasse le cadre de la "normalité" dans lequel le parti cherche à s'intégrer. Pour l'élargir, il doit franchir régulièrement, de manière ciblée et contrôlée, les limites du dicible. Son élément est la provocation. Elle n'est efficace que si elle est perçue en masse. Le mouvement doit rassembler suffisamment d'activistes et de sympathisants pour pouvoir mettre en œuvre des stratégies de désobéissance civile à long terme et des campagnes contre les piliers de soutien (Gene Sharp) de l'idéologie dominante.
Cependant, il existe au centre de la société (en particulier à sa droite) une opposition de principe à l'activisme politique, indépendante de l'accord sur le contenu : plus un mouvement provoque et polarise, plus il perd sa capacité d'adhésion, dont il a à son tour besoin pour son efficacité métapolitique. Le paradoxe est ainsi mis en évidence. Deux tâches différentes s'y dessinent.
D'une part, il y a la fenêtre d'Overton. Il s'agit de l'espace du dicible, au milieu duquel la moyenne (de la population) s'oriente. Aujourd'hui, le souverain est celui qui décide du cadre de l'Overton window et qui impose le politiquement correct. Les partis populistes de droite doivent eux aussi s'adapter à ce comportement dans leur mission de maximisation des voix. Malheureusement, beaucoup "naturalisent" cette nécessité pragmatique et en font ainsi une vertu politique. Ils occultent le fait que l'ensemble du système de référence s'est déplacé vers la gauche depuis des décennies. Le fait qu'il soit soudain devenu "völkisch et raciste" de vouloir un pays homogène sur le plan ethnique et culturel, que la promotion des naissances soit automatiquement soupçonnée de vouloir ressusciter le "Lebensborn", que nous devions accepter le remplacement de population et le statut de "pays d'immigration" comme une normalité, que les monuments aux morts soient retirés et que l'idéologie du genre soit inscrite de plus en plus tôt dans les programmes scolaires - tout cela est le résultat du déplacement vers la gauche de l'Overton window.
Comment le parti et le mouvement peuvent-ils s'y opposer ? Comment déplacer cette fenêtre si l'on n'a pas de pouvoir d'interprétation ? Le moyen est la provocation planifiée et connectée. Le passage de la frontière par le bord de la fenêtre doit être régulièrement effectué, répété et établi par une avant-garde, et dans la mesure où ces passages de la frontière reçoivent les ressources centrales que sont l'attention et l'approbation de la masse, cette répétition mène à la normalisation et à l'établissement. Ce qui est considéré comme "trop extrême" est renégocié, et la fenêtre politique se déplace dans la direction opposée. Trois pas en avant et deux pas en arrière - telle était la tactique des Fundis de la gauche radicale et des Realos modérés de gauche. Entre chocs ciblés et confort conciliant, ils ont forcé le paysage métapolitique allemand vers la gauche.
La réponse nécessaire et attendue peut et doit utiliser les mêmes moyens. Les revendications pour la fermeture des frontières et la remigration, la préservation de notre identité ethnoculturelle et la fin de la censure doivent être répétées jusqu'à ce que l'Overton window soit replacé dans une position centrale saine. A cet égard, il faut savoir que les nombreuses petites avancées et provocations ne sont efficaces que si elles "entraînent" un grand groupe du camp de l'opposition. Si elles n'entraînent pas de sympathisants, elles n'ont aucun sens. Elles ne font alors que "jouer" avec l'existant, ce qui nourrit certes un homme (ou toute une rédaction), mais ne provoque pas le changement de situation nécessaire.
La "provocation connectée" est le moyen de sortir du paradoxe de la polarisation. Elle exige une sérénité provocatrice de la part du mouvement activiste. L'objectif ne peut pas être de plaire à tout le monde. Frances Fox Piven écrit dans son livre Challenging Authority : "Le conflit est le battement de cœur des mouvements sociaux". La polarisation "oblige les gens à se demander où ils se situent par rapport aux thèmes". Et plus encore:
"Les mouvements de protestation menacent de diviser les coalitions majoritaires que les politiques s'efforcent de maintenir ensemble. Pour stopper les éventuels sortants, les politiques prennent publiquement de nouvelles positions". C'est exactement ainsi qu'il faut comprendre la reprise des revendications de l'AfD et du FPÖ par la CDU et l'ÖVP. Elle n'est pas une raison de désespérer, mais pas non plus une raison de se réjouir, mais de renforcer la poussée contre le Overton window gauchiste.
Le phénomène selon lequel le camp de l'opposition sympathise certes avec les idées du mouvement, mais moins avec ses formes d'action, est aussi vieux que la résistance politique elle-même. Il ne faut pas avoir peur de récolter des critiques, même dans nos propres rangs, car nous sommes en bonne compagnie. Même les stratégies de polarisation réussies de Martin Luther King et du Mahatma Gandhi ont été considérées comme contre-productives par leurs amis contemporains.
C'est ce qui est arrivé à King après le fameux "Projet C", la tactique de confrontation ciblée dans l'un des bastions de l'apartheid, à savoir Birmingham. Des violences policières massives et des arrestations avaient été provoquées, et King lui-même avait été emprisonné pour avoir bravé une interdiction de rassemblement.
Lorsqu'il a écrit sa fameuse "lettre de prison", les critiques ont fusé, principalement de la part des libéraux blancs qui le soutenaient. "Nous comprenons l'impatience des gens qui ont le sentiment que leurs espoirs tardent à se concrétiser", écrivait un groupe de huit militants libéraux des droits civiques bien connus de l'Alabama, "mais nous sommes convaincus que ces manifestations sont imprudentes et n'arrivent pas au bon moment". King effraierait ainsi l'ensemble du "milieu de la société".
La résistance de Gandhi a également été considérée comme contre-productive par les opportunistes de son époque. Mais elle est tout aussi "contre-productive" que le contre au football qui affaiblit sa propre défense - donc contre-productive du point de vue du gardien de but. Le regard de l'entraîneur doit toutefois garder un œil sur l'ensemble et reconnaître où et quand la polarisation et le dépassement des limites de manière cohérente sont de mise.
Comprendre et maîtriser le paradoxe de l'identité politique et de la polarisation est une tâche quotidienne avec laquelle les "têtes pensantes" du nouveau mouvement patriotique se retrouvent généralement assez seules. Entre toutes les réflexions et pesées d'intérêts, un seul impératif clair se dégage : structure, ordre et discipline. Les différentes parties du camp peuvent fonctionner et interagir au mieux si elles comprennent leurs différentes tâches dans l'ensemble et reconnaissent ainsi la nécessité d'une séparation claire.
Le paradoxe de la polarisation, en particulier, n'en est pas vraiment un, mais se présente, d'un point de vue supérieur et stratégique, comme une attribution de différentes tâches. On ne peut pas être à la fois politicien de parti et militant d'un mouvement, pas plus qu'on ne peut être à la fois gardien de but et attaquant.
La provocation par le franchissement de l'Overton window et la conquête de la masse centrale s'excluent mutuellement, mais elles doivent agir ensemble. Personne ne reprochera au gardien de but de prendre le ballon en main, ni à l'attaquant de sortir de la surface de réparation. De même, personne ne pourra reprocher au mouvement de polariser, de construire une identité politique exclusive et une contre-culture provocatrice, alors que le parti a pour mission de former de nouvelles majorités dans le paysage politique ainsi assoupli et d'obtenir des succès en matière de Realpolitik.
La tâche des partis et des journaux et think tanks orientés vers le centre est de ne pas oublier la destination lors de leur nécessaire titillement du centre. Ils doivent reconnaître où et quand le cadre s'élargit et comment sécuriser et coloniser rapidement les zones ouvertes par le mouvement. Moins le parti et les journaux sont institutionnellement reliés à ce mouvement, plus cela est possible avec succès. La séparation claire et la répartition des tâches permettent une coopération métapolitique et une solidarité efficace en cas de diabolisation et de répression.
Martin Sellner et son épouse Brittany Pettibone.
Mais si le parti et ses collaborateurs se laissent prendre au piège du paradoxe de la polarisation, en utilisant l'effet dissuasif de la provocation comme une raison pour se rapprocher rapidement du centre, ils sont devenus des agents du glissement vers la gauche. Cette catastrophe ne peut être évitée que si les égoïstes à courte vue des deux camps, qui ne comprennent que leur rôle et non le jeu, n'ont rien à dire. L'ordre et la structure doivent être mis en place pour que le nouveau mouvement patriotique puisse naviguer dans le détroit des paradoxes politiques.
Ce n'est que lorsqu'une nouvelle élite métapolitique s'imposera dans tous les groupes, partis et mouvements et qu'elle détrônera à chaque fois les opportunistes et les extrémistes, les sans-vision et les anarchistes, que le grand œuvre pourra aboutir. Pour travailler ensemble à cet objectif, un échange intellectuel, au moins indirect, est nécessaire. Ma conviction est que celui-ci fonctionnera d'autant mieux que chacun sera clairement conscient de sa tâche et de sa fonction, bref, que le gardien de but sera le gardien de but et l'attaquant, l'attaquant.
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mardi, 15 février 2022
Alexander Dugin : Alors que les libéraux échouent, un nouveau monde dirigé par la Russie et la Chine a émergé
Alexander Dugin : Alors que les libéraux échouent, un nouveau monde dirigé par la Russie et la Chine émerge
亚历山大·杜金:自由主义者功败垂成,中俄引领的新世界已经出现了
Source : http://www.4pt.su/zh-hant/content/ya-li-shan-da-du-jin-zi-you-zhu-yi-zhe-gong-bai-chui-cheng-zhong-e-yin-ling-de-xin-shi-jie?fbclid=IwAR0yqNA0ZiutSxwwrO-dTLuUfIGHOgYboYcnO1ghUGKHWZPpHOAWMyiSrn4
La crise actuelle des relations de la Russie avec l'Occident n'a rien à voir avec le gaz, le pétrole, l'énergie ou l'économie en général. Les tentatives d'expliquer la politique en termes de théorie des "prix", comme le fait Daniel Yergin, sont futiles et superficielles. (Note : Daniel Yergin est un auteur américain qui a écrit un livre sur la relation entre le pétrole et le pouvoir et la richesse intitulé The Prize (= "Le Prix"). Nous avons affaire à des processus civilisationnels et géopolitiques dans lesquels les questions économiques et énergétiques sont secondaires, ce sont simplement des outils à emprunter.
D'un point de vue civilisationnel, tout est question d'idéologie, surtout sous l'administration démocrate de Biden. L'administration américaine actuelle est composée de mondialistes extrémistes, de néoconservateurs et de faucons libéraux. Ils observent que le monde unipolaire, l'idéologie libérale mondiale et l'hégémonie occidentale sont en train de s'effondrer, et ils sont prêts à tout - même à déclencher une troisième guerre mondiale - pour empêcher que cela ne se produise.
Les mondialistes ont de nombreux ennemis - l'islam, le populisme (y compris Trump), le conservatisme, l'islam politisé, etc. Mais seules deux puissances ont un réel potentiel pour défier cette hégémonie - la Russie et la Chine. La Russie est une puissance militaire, tandis que la Chine est une puissance économique.
Cela laisse de la place pour des manœuvres géopolitiques. Pour Biden, il était important de couper la Russie d'une Europe qui voulait son indépendance. Le problème de l'Ukraine est donc apparu et la crise du Donbass s'est aggravée. La Russie et Poutine ont été diabolisés et accusés de vouloir envahir un pays voisin. Bien que l'invasion n'ait pas vraiment eu lieu, Washington a agi comme si c'était le cas.
Il s'en est suivi des sanctions et même la possibilité de mesures militaires préventives dans la région du Donbass. Puisque tous les Occidentaux croient que la Russie va envahir le pays, toute action militaire des Ukrainiens dans le Donbass, soutenue par l'OTAN, sera considérée comme une "légitime défense". Dans le même temps, on estime également qu'une campagne médiatique contre la Russie empêchera toute réponse appropriée de la part de Moscou. Le conflit sur le gaz et Nord Stream 2 n'est qu'un outil technique pour une guerre de classement.
La situation est la même pour la Chine. Biden a déjà créé une coalition anti-chinoise avec l'accord AUKUS des pays anglo-saxons (Australie, Royaume-Uni) et le mécanisme QUAD des pays asiatiques (Japon, Inde). La pierre d'achoppement préparée pour la Chine cette fois-ci est Taïwan (comme l'Ukraine l'est pour la Russie). L'objectif ultime est de saper et d'empêcher l'"expansion économique" de la Chine qui y procède par le biais de l'initiative Belt and Road.
L'alliance entre la Russie et la Chine, combinée aux tentatives de la Russie de faire revivre la "Grande Profondeur" en associant l'initiative "Grande Eurasie" à l'initiative Belt and Road (comme annoncé par les dirigeants russes et chinois il y a quelques années). Une nouvelle "Grande Profondeur" signifierait la fin irréversible de l'hégémonie occidentale. La récente rencontre entre Vladimir Poutine et Xi Jinping montre sans aucun doute que le projet de "Grande Eurasie" est sérieux et poursuivi avec détermination. En conséquence, l'ultra-libéral et mondialiste Soros a lancé une attaque féroce contre la Chine.
Tout ceci est un cas classique de géopolitique, répétant le projet atlantiste qui va de Mackinder à Brzezinski, c'est-à-dire qu'il y a un duel entre la puissance maritime (libéraux, mondialistes) et la puissance terrestre (Eurasie).
Dans le même temps, la Russie et la Chine pourraient accueillir dans leur giron d'autres Etats prétendants participer à l'émergence d'un monde multipolaire.
- l'Amérique latine (comme l'a souligné le président argentin Albert Fernandez lors de sa visite à Moscou, et comme l'évoquera certainement le président brésilien Bolsonaro lors de sa visite en Russie).
- le monde islamique (qui rêve de se libérer du contrôle occidental - avec l'Iran, la Turquie et le Pakistan à l'avant-garde), et
- l'Afrique (où la Russie et la Chine ont commencé à purger les régimes fantoches mis en place et consolidés jusqu'ici par les Français),
- et, enfin, le continent européen lui-même (qui est de plus en plus fatigué de subir l'atlantisme et rêve de devenir lui-même un pôle - bien que l'élite libérale atlantiste soit toujours au pouvoir en France, en Allemagne, en Italie et en Espagne, ces idées sont de plus en plus populaires dans ces pays).
Seuls l'Inde (en raison de ses conflits avec la Chine et le Pakistan), le Japon (toujours sous le contrôle étroit des États-Unis) et certains États fantoches mondialistes restent du côté des perdants de toute évidence. C'est devenu une véritable honte d'être du côté des perdants.
Cela affecte également l'idéologie. Tous ceux qui s'opposent à l'hégémonie américaine et se désintéressent des tentatives de sauvetage du monde unipolaire par Biden (dans l'esprit de la "Ligue des démocraties") commencent également à prendre leurs distances avec les dogmes libéraux - surtout lorsqu'ils apparaissent sous leur forme actuelle, dégoûtante et pathologique (la légalisation de l'homosexualité, de la bisexualité, du transsexualisme, du mariage homosexuel et d'autres perversions, voire l'application totalitaire radicale de ces lois ; et l'autonomisation de l'intelligence artificielle conduisant à l'émergence des menaces très réelles que la promotion agressive du "post-humanisme" par les grandes entreprises technologiques a engendrées).
Si l'on ajoute à cela l'échec des politiques de prévention des épidémies, les vaccinations douteuses (dont l'épidémie Omicron a prouvé la totale inefficacité), les confinements irrationnels et mal organisés dans les villes, les nouvelles obligations de porter sur soi un passeport sanitaire et quasi biométrique selon les modèles totalitaires des dystopies, le tout assorti d'un système de surveillance totale, il est clair que l'effondrement du libéralisme est plus imminent que jamais. Le succès du groupe rebelle canadien des "Freedom Trucks", qui a forcé le mondialiste libéral Justin Trudeau à aller se cacher, et la popularité des candidats anti-Macron en France (de Zemmour et Marine Le Pen à Mélenchon, qui sont tous du côté anti-libéral et anti-OTAN) ne sont que quelques-uns des symptômes du processus de mondialisation. Ce ne sont là que quelques-uns des symptômes du processus de mondialisation qui annonce la fin de l'hégémonie atlantique.
Tensions à la frontière russo-ukrainienne
La Russie est maintenant confrontée directement à l'atlantisme, et la Russie devrait donc:
- opposer le globalisme à la multipolarité dans la perspective de la géopolitique eurasienne.
- s'opposer au libéralisme en poussant en avant des valeurs civilisationnelles traditionnelles, véritables alternatives constructives ; refuser les dérives LGBT et affirmer l'excellence et la préséance de la famille traditionnelle (inscrite dans la constitution) ; refuser l'individualisme méthodologique du néolibéralisme et affirmer l'État porteur d'une identité historique, etc.
La Chine soutient généralement cette approche tout comme Moscou. Pékin s'oppose également au mondialisme et à l'hégémonie occidentale, tout en défendant les valeurs traditionnelles chinoises.
Ces points de vue ont été clairement exprimés par Poutine et Xi Jinping lors de leur dernière rencontre.
- Moscou et Pékin entendent s'opposer à toute tentative de violation de leur souveraineté (et combattre jusqu'au bout l'hégémonie et le mondialisme).
- La Chine et la Russie ont pris en compte le fait que Biden veut créer un bloc anti-chinois et activer les mécanismes de l'OTAN en Europe de l'Est, et ont l'intention de s'opposer (ensemble) à ces actions.
- Les dirigeants des deux pays ont fait allusion au bioterrorisme américain (une menace connue sous le nom de "biologie militaire américaine"), ce qui signifie en fait que les deux pays pensent que c'est l'Occident (les États-Unis et le Royaume-Uni) qui a déclenché la pandémie du nouveau coronavirus.
- Pékin soutient Moscou en Europe orientale, Moscou soutient Pékin dans l'océan Indien et le Pacifique, et Poutine a explicitement déclaré que "Taïwan est aux Chinois".
- Les deux pays condamnent l'"Union des démocraties" (l'alliance visant à maintenir l'unipolarité) et s'engagent à préserver l'ordre mondial multipolaire (ce qui doit être interprété comme une déclaration visant à préserver le système de Yalta et l'ONU).
Le bloc eurasien russo-chinois a pris forme. Tous les autres pays doivent choisir - quel côté prendre.
- Se placer du côté de l'hégémonie américaine agressive et devenue complètement folle.
- ou travailler avec le groupe des pays visant l'avènement d'une réelle multipolarité (dont la Russie, la Chine, l'Iran, le Pakistan, le Belarus, la Corée du Nord, le Venezuela, Cuba, le Nicaragua, la Syrie, le Mali, la République centrafricaine, le Burkina Faso, la Guinée, et, pas encore totalement rejoints, la Turquie, l'Argentine et le Brésil) qui s'opposent aux États-Unis afin de préserver leur souveraineté nationale et leur identité culturelle.
L'avenir est définitivement multipolaire et le bloc eurasien doit donc l'emporter. Après l'effondrement de l'Union soviétique, le dernier effort pour construire un empire mondial a échoué parce que les libéraux n'ont pas été capables de consolider et de conserver leur succès, et un nouveau monde a émergé.
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Andrei Fursov et le monde post-capitaliste
Andrei Fursov et le monde post-capitaliste
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2022/02/08/andrei-fursov-ja-jalkikapitalistinen-maailma/
"Nous quittons le monde de l'après-guerre et entrons dans le monde post-capitaliste", déclare l'historien et spécialiste des sciences sociales russe Andrei Fursov.
Le monde que nous quittons est "le monde entre 1945 et 2020". Fursov trouve que c'est une étrange coïncidence que ce "capitalisme socialisé d'après-guerre ait existé pendant environ 74 ans, tout comme le système soviétique".
Le résultat des deux dernières années n'était pas le seul possible, bien sûr, mais il était "la conséquence logique du développement de l'ordre mondial d'après-guerre".
Selon Fursov, la préparation idéologique d'une technocratie biofasciste a commencé il y a longtemps. Le rapport du Club de Rome intitulé "Les limites de la croissance", qui préconisait des restrictions et une réduction de la consommation, a jeté les bases du mouvement environnemental et de la "transition verte" que les grandes entreprises encouragent aujourd'hui avec un enthousiasme suspect.
Dès 1971, Klaus Schwab a avancé l'idée du "capitalisme des parties prenantes", qui n'était pas du tout un capitalisme classique, mais tout le contraire, mettant l'accent non pas sur la propriété mais sur la "participation". Dans ce modèle aussi, tout est contrôlé par la "gouvernance mondiale" avec les cercles détenteurs de capitaux en arrière-plan.
Cette période a culminé en 1975 avec le rapport de la Commission trilatérale intitulé Crisis of Democracy, qui affirmait très clairement que la plus grande menace pour l'Occident n'était pas l'Union soviétique, mais "l'excès de démocratie en Occident".
Parallèlement, au milieu des années 1970, malgré la célèbre conférence d'Helsinki, l'Union soviétique a perdu son initiative historique et est passée d'une défense offensive à une défense stratégique, ce qui a conduit à l'éclatement de l'Union soviétique au début des années 1990.
Les mandataires de la Commission trilatérale et d'autres lobbies mondialistes ont commencé à accéder au pouvoir dans tous les grands pays occidentaux. Il s'agit donc de la victoire finale des trente premières années de l'après-guerre.
Les années 1990 ont vu le début d'une euphorie libérale, avec le philosophe de cour Francis Fukuyama proclamant "la fin de l'histoire" : la bataille entre les idéologies politiques s'était, selon lui, terminée par le triomphe de la démocratie libérale.
Fursov rappelle que le "pillage du camp socialiste" a commencé, notamment pendant "l'ère post-soviétique". De l'effondrement de l'Union soviétique en 1991 au milieu des années 1990, l'économie russe a connu une profonde récession. Le programme de privatisation aux temps d'Eltsine a donné naissance à un phénomène connu sous le nom de "capitalisme sauvage".
Mais la croissance industrielle a commencé à s'estomper ailleurs et les institutions modernes, surtout les États-nations, ont commencé à perdre leur pertinence. Au cœur du processus décisionnel mondial se trouvaient les fonds d'investissement transnationaux, qui reliaient les échelons supérieurs de l'économie mondiale, les familles aristocratiques de l'ancien argent et les représentants du "nouvel argent".
Dans le même temps, on a assisté à une dépolitisation de la société, au rétrécissement de la société civile et à son remplacement par les branches des structures financières, ce qui a entraîné une crise de toutes les identités traditionnelles au cours de cette période.
Les premières années du XXIe siècle ont montré que le monde exclusif avait ses faiblesses. Il est devenu évident qu'il fallait davantage de centres de pouvoir pour un développement rapide. C'est alors, lors de la crise économique de 2008, qui a dissipé les dernières illusions d'une "victoire du libéralisme", qu'est né le plan final de transition vers un monde post-capitaliste.
L'objectif de ce plan était de démanteler et d'exproprier la "classe moyenne" partout, tout en contrôlant et en dominant totalement la population mondiale. Tout cela devait se faire de manière évolutive, en "faisant bouillir la grenouille" lentement, sans se faire remarquer et sans manifestations de masse.
Puis est arrivé le "cygne noir", Donald Trump, qui représentait les groupes du système américain et mondial qui n'étaient pas satisfaits du scénario que nous décrivons ici. Avant Trump, un cygne noir plus petit, le Brexit, a émergé et la Grande-Bretagne a quitté l'Union européenne.
Ces deux événements ont fait dérailler le plan de développement pour une transition vers le post-capitalisme, en exploitant le potentiel des États-Unis. Une partie de l'establishment anglo-américain était derrière cette initiative. "Si la transition vers le post-capitalisme ne peut être réalisée de manière évolutive, elle doit l'être de manière révolutionnaire", affirme Fursov.
Dans une situation optimale, les problèmes auraient pu être résolus et l'ordre des choses serait resté plus ou moins le même. Dans la variante révolutionnaire, les problèmes de l'humanité et du pouvoir de l'argent seraient résolus plus violemment et un état qualitativement nouveau serait atteint.
L'option de transformation radicale des mondialistes aboutirait à deux espèces presque entièrement différentes de classes supérieures et inférieures. Il n'y aurait plus de "niveau intermédiaire". L'élite riche vivrait "de longues vies dans des zones écologiquement propres et profiterait de tous les avantages de la civilisation". Les classes inférieures vivraient "au fond" dans leurs ghettos-métropoles, "sous la pression des maladies et des épidémies, de la mauvaise alimentation et des pressions environnementales".
Moins la "base" avait à faire avec les classes supérieures "au sommet" et moins elle les connaissait, mieux c'était, pensaient les créateurs et les promoteurs de cette vision arrogante. Cela semble plutôt dystopique, mais nous en avons déjà eu un avant-goût.
Cela soulève la question de savoir comment cette transition sera initiée de manière à minimiser la résistance de la base ? En principe, de tels projets ont été réalisés plus d'une fois dans l'histoire du monde (Fursov donne l'exemple de la Révolution française).
Ces projets de changement social risqués ne sont pratiquement jamais mis en œuvre conformément au plan initial. Mais pour qu'une grande histoire se reproduise, il faut créer un déclencheur ou un événement.
La pandémie du coronavirus a été un tel événement déclencheur, initiant la transition vers un nouvel ordre mondial. Schwab, dans son livre Covid-19 : The Great Reset, écrit avec Thierry Malleret, a dit très directement et clairement que la pandémie était l'occasion d'un "grand redémarrage" touchant l'ensemble de l'humanité.
Toutefois, le succès de la réinitialisation exigeait certaines conditions préalables. Tout d'abord, il faudrait que l'événement soit universel. "Aucun grand pays, qu'il s'agisse des États-Unis, de la Chine, de la Russie ou de l'Inde, ne devrait être exclu, afin que tous se conforment à l'ordre de réinitialisation. Deuxièmement, le processus doit être rapide et irréversible, afin que personne n'ait le temps de réagir avant que tout le monde soit déjà vacciné", explique M. Fursov.
Mais le penseur russe estime que la relance selon Schwab a échoué et qu'il n'y a pas moyen d'éviter la controverse. L'élite russe a été empêchée de gagner de l'argent avec les vaccins, et les sanctions n'ont pas été levées. Les élites chinoises ont été menacées de revendications massives, évoquant le "virus de Wuhan". "Surtout, elles ont surestimé le degré de passivité de la population, notamment en Europe."
M. Fursov ne s'attendait pas à ce que trois cent mille personnes manifestent à Vienne, ni à ce que la même chose se produise à Bruxelles, Londres et Paris. Mais les personnes qui ont été marquées par les restrictions dues au coronavirus réagissaient à la perte de liberté qu'elles avaient subie. Une partie de l'élite a déjà tourné le dos au programme envisagé : Bill Gates a déclaré que la "phase aiguë" de l'épidémie prendrait fin en 2022, et The Economist, publié par les Rothschild, promet la même chose.
Le fait que la pandémie du coronavirus touche maintenant à sa fin n'arrêtera pas la montée du technoglobalisme transhumaniste. Fursov mentionne que le représentant de la Fédération de Russie aux Nations unies, Vasily Nebenzia, a au moins bloqué une initiative qui aurait défini le changement climatique comme une menace pour la sécurité, plaçant ainsi toutes les nations sous le talon de fer des écofascistes.
"Mais personne n'a réussi à renverser l'emprise du numérique", souligne M. Fursov. En d'autres termes, le processus peut ralentir, mais il ne s'arrêtera pas complètement. Si l'opération corona échoue, de "nouveaux virus plus dangereux et mortels" seront bientôt utilisés. "Ou une réalité différente sera créée pour nous."
Werner von Braun, concepteur de fusées pour l'Allemagne national-socialiste, qui a ensuite développé des missiles et le programme spatial de la NASA aux États-Unis, a déclaré à un assistant, six mois avant sa mort dans les années 1970, que la menace soviétique disparaîtrait un jour et que l'Occident inventerait un nouveau "croquemitaine", à savoir l'Islam.
Ensuite, il y a la menace climatique. Et lorsqu'on a demandé à von Braun ce qui se passerait si la menace climatique ne fonctionnait pas non plus, il a répondu la "menace extraterrestre" restante de l'espace. Le 25 juin 2021, la Nasa a publié une annonce officielle selon laquelle les ovnis, ou objets volants non identifiés, constituent une "menace sérieuse pour les États-Unis".
En d'autres termes, "on crée des signes pour l'avenir, on affine et on développe des technologies de réalité augmentée", laisse entendre M. Fursov. Autrefois surnommés "théories du complot", ces projets semblent se concrétiser les uns après les autres à l'ère moderne.
Le monde post-capitaliste devient déjà une réalité quotidienne, par exemple en Chine, affirme M. Fursov. Le même avenir autoritaire est aussi partiellement arrivé aux États-Unis, en Europe et ailleurs, au nom de la "pandémie" et de la "quatrième révolution industrielle".
Mais le plus dangereux est que "nous entrons dans un monde sans ordre ni chaos", une sorte d'inquiétant "juste milieu" - ou la "mosaïque du chaos" de Félix Guattari - "sans outils conceptuels et opérationnels adéquats pour étudier ces processus".
La science du XXe siècle n'a pas remis en question sa propre validité ; elle a découvert et façonné les lois de la nature, en d'autres termes, elle a exercé une fonction de pouvoir sur le monde qui l'entoure. Même le terme "statistiques", "statisticien", est dérivé du mot "état". Maintenant que les États disparaissent, nous n'avons plus qu'un "ordre conceptuel".
Les structures supranationales joueront un rôle crucial dans l'ordre futur. Pour M. Fursov, il ne s'agit pas seulement de grandes entreprises, mais de toutes sortes d'entités dotées d'un haut degré d'autonomie interne : on pourrait tout aussi bien prendre l'alliance des services de renseignement anglais "five eyes", par exemple, ou même les diverses organisations criminelles.
Les processus mondiaux en cours font de cette période une "ère de turbulence", où "un nouvel ordre est créé à partir du chaos". Qui seront les vrais gagnants au XXIe siècle, les technocrates élitistes ou les masses rebelles ? Est-ce que ce sera vraiment le cas que celui qui contrôle la technologie de l'IA contrôlera toujours le monde ?
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lundi, 14 février 2022
Duplicité britannique: Boris Johnson salue les vertus de la diplomatie tout en accentuant les tensions militaires avec la Russie
Duplicité britannique: Boris Johnson salue les vertus de la diplomatie tout en accentuant les tensions militaires avec la Russie
SOURCE : https://www.controinformazione.info/la-doppiezza-britannica-non-e-molto-piu-intensa-del-fatto-che-il-primo-ministro-boris-johnson-acclama-le-virtu-della-diplomazia-mentre-accumula-tensioni-militari-con-la-russia/
Cette semaine, M. Johnson a écrit un article d'opinion pour le journal Times dans lequel il se dit convaincu que "la diplomatie peut l'emporter" pour éviter que l'escalade des tensions autour de l'Ukraine ne dégénère en une guerre totale entre le bloc militaire USA-OTAN et la Russie.
M. Johnson a toutefois annoncé, quasi simultanément, que la Grande-Bretagne prévoyait de déployer davantage de marines, d'avions de chasse et de navires de guerre en Europe de l'Est. La Grande-Bretagne a déjà pris la tête des pays européens membres de l'OTAN en envoyant des armes et des forces spéciales en Ukraine, dans le cadre d'une défense contre l'"agression russe".
Ce que Johnson propose cette semaine, c'est le déploiement d'un plus grand nombre de forces britanniques en Pologne et dans les États baltes, dans ce qu'il appelle une démonstration du soutien "inébranlable" de la Grande-Bretagne à l'Europe. Il s'agit d'un prétexte cynique pour embellir l'image de la Grande-Bretagne comme une sorte de puissance animée de nobles sentiments.
Le président français Emmanuel Macron s'est rendu à Moscou cette semaine pour des discussions de fond avec le dirigeant russe Vladimir Poutine sur les efforts visant à apaiser les tensions concernant l'Ukraine. La semaine prochaine, le chancelier allemand Olaf Scholz se rendra également à Moscou pour des entretiens avec Poutine.
Ensuite, nous voyons Londres faire apparemment tout son possible pour que la diplomatie échoue en augmentant arbitrairement les tensions militaires avec la Russie.
M. Johnson et sa ministre des affaires étrangères, Liz Truss, se sont employés à mettre en garde la Russie contre un carnage sanglant si elle osait envahir l'Ukraine. Moscou a nié à plusieurs reprises avoir l'intention d'envahir le pays. Cependant, Mme Truss a été photographiée par les médias britanniques portant un gilet pare-balles de l'armée alors qu'elle était montée sur un char d'assaut. Elle doit se rendre à Moscou ces jours-ci pour des entretiens avec son homologue russe Sergei Lavrov. Cette rencontre promet d'être glaciale. On se demande pourquoi le Kremlin s'intéresse à un envoyé britannique aussi incompétent et malhonnête.
Londres, comme d'habitude, se plie aux exigences de Washington. Depuis que les États-Unis ont lancé, il y a près de trois mois, leur campagne de propagande accusant la Russie d'agression contre l'Ukraine, la Grande-Bretagne a explicitement amplifié le message de Washington sur la prétendue agression russe.
La propagande et les opérations médiatiques psychologiques sont un domaine dans lequel l'empire britannique décrépit conserve des compétences incontestables. On peut supposer que la prédominance des médias anglophones donne aux Britanniques un avantage inné.
Ce dont Londres semble profiter, c'est d'animer la russophobie inhérente à la Pologne et aux États baltes. Les récents déploiements militaires britanniques se sont concentrés dans ces États d'Europe de l'Est, ainsi qu'en Ukraine. Cette démarche a servi à gonfler l'hystérie quant à l'agression russe.
Fait significatif, Johnson était à Kiev la semaine dernière pour rencontrer le président ukrainien Vladimir Zelensky, le même jour que le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki. Morawiecki a été l'une des voix russophobes les plus véhémentes d'Europe de l'Est, appelant à des sanctions plus drastiques encore contre Moscou.
Johnson renforce ces appels à une position unifiée de l'OTAN et de l'Europe sur des sanctions préventives contre la Russie "si elle envahit l'Ukraine". M. Johnson a déclaré que les sanctions devraient être "prêtes à l'emploi" et devraient inclure l'arrêt du gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l'Union européenne.
Notamment, l'Allemagne et la France, les deux plus grandes économies de l'UE, sont réticentes à l'idée de parler de la fin de Nord Stream 2 si les tensions s'aggravent. Berlin et Paris sont manifestement plus disposés à trouver une issue diplomatique à l'impasse dans laquelle se trouve le bloc de l'OTAN dirigé par les États-Unis et la Russie.
Voici une ironie amère : la Grande-Bretagne a quitté l'Union européenne après le référendum sur le Brexit en 2016. Boris Johnson était une personnalité publique de premier plan qui a poussé au Brexit avec le mantra de la "reprise en main" de l'Union européenne.
Toutefois, si la Grande-Bretagne est désormais officiellement sortie du bloc européen, elle est toujours en mesure d'exercer une énorme influence sur l'UE dans ses relations avec la Russie. Londres mobilise un axe d'hostilité à l'égard de Moscou en militarisant les États russophobes d'Europe de l'Est, ainsi que l'Ukraine, et en imposant des sanctions visant à détruire le commerce énergétique stratégique avec la Russie.
En effet, la Grande-Bretagne gonfle probablement délibérément son importance internationale en alimentant de dangereuses tensions avec la Russie.
La crise de l'Ukraine a été artificiellement gonflée par Washington, avec l'aide et la complicité de Londres. Dicter l'énergie et les affaires étrangères de l'Europe à la Russie, voire à la Chine, est l'objectif non avoué de Washington et de son fidèle serviteur britannique. Et en accomplissant cet objectif, la Grande-Bretagne a cyniquement exploité la russophobie de l'Europe de l'Est pour obtenir un rôle surdimensionné dans l'ingérence dans les affaires de l'Union européenne, un bloc qu'elle a officiellement quitté après le Brexit.
Les préoccupations de la Russie en matière de sécurité doivent être négociées rationnellement et calmement par des moyens diplomatiques. Les objections de Moscou à l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN sont tout à fait raisonnables.
Mais il y a peu de chances que la diplomatie l'emporte lorsque des gens comme Boris Johnson et d'autres guerriers froids de Londres attisent les tensions guerrières par des livraisons d'armes provocantes à l'Europe de l'Est, dans un contexte de distorsions fantastiques sur l'"agression russe".
Une autre ironie amère est le rôle historique néfaste de la Grande-Bretagne dans l'incitation aux guerres en Europe. Contrairement à la version conventionnelle de la propagande de la Seconde Guerre mondiale, c'est Londres qui a secrètement mobilisé l'Allemagne nazie pour attaquer l'Union soviétique, sacrifiant ainsi son "allié" nominal, la Pologne et d'autres pays. Aujourd'hui, Londres proclame qu'elle défend l'Europe contre "l'agression russe" tout en préparant le terrain pour une guerre contre la Russie.
Source : Culture stratégique
Traduction : Luciano Lago
11:41 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, europe, ukraine, russie, grande-bretagne, royaume-uni, boris johnson, diplomatie, russophobie, politique internationale, géopolitique, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
dimanche, 13 février 2022
L'ennemi de l'Europe
L'ennemi de l'Europe
par Daniele Perra
Source : https://www.ariannaeditrice.it/articoli/il-nemico-dell-europa
Ces derniers jours, on a beaucoup parlé de la diatribe entre Meta (la société de Mark Zuckerberg à laquelle se réfèrent les plateformes sociales Facebook et Instagram) et l'Union européenne. L'objet du litige serait l'incompatibilité avec la réglementation européenne en matière de protection des données personnelles, qui empêcherait Meta de transférer ces données, tirées des utilisateurs européens, aux gestionnaires et archives nord-américains. Cette réglementation représenterait en effet une limitation majeure pour une entreprise géante dont l'activité et les bénéfices dépendent de sa capacité à envoyer aux utilisateurs des messages promotionnels, des publicités, des informations et des invitations ciblées. Plus précisément, le rapport de Meta indique : "Si nous ne sommes pas en mesure de transférer des données entre les pays et les régions dans lesquels nous opérons, ou si nous sommes empêchés de partager des données à travers nos produits et services, cela pourrait affecter notre capacité à fournir nos services, la façon dont nous fournissons ces services ou notre capacité à cibler les annonces" (1).
En outre, le rapport indique que Meta entend obtenir de nouveaux accords avec l'Union européenne d'ici 2022. Dans le cas contraire, elle sera contrainte de suspendre l'utilisation de ses produits en Europe.
Ce qui pourrait sembler être une simple confrontation entre une entreprise privée et des institutions politiques (une confrontation qui se résoudra probablement par une énième capitulation européenne face aux diktats de l'outre-mer), cache en réalité quelque chose de bien plus pertinent sur le plan géopolitique. En fait, il convient de rappeler que les États-Unis ont réussi à faire du monde une "colonie économique américaine" grâce à deux technologies principales : la technologie financière et la technologie de l'information. Les premières, avec l'aide des secondes, comme le disait l'ancien général de l'armée de l'air chinoise Qiao Liang, ont favorisé la mondialisation du dollar américain en construisant un empire financier d'une ampleur sans précédent [2]. Si le premier a permis l'hégémonie du dollar, le second a été crucial en termes de gestion de l'information, de propagande et de "construction de l'ennemi" [3] : par exemple le terrorisme islamique, les " États voyous ", l'autoritarisme russe ou chinois, ou plus récemment le virus.
Aujourd'hui, certaines personnes continuent à hausser les épaules quand on parle de l'empire mondial nord-américain. Plus que toute autre chose, cette attitude repose sur le désir mal dissimulé de nier l'évidence ou avec une intention politique précise de détourner/d'orienter l'attention de l'opinion publique sur des questions qui sont absolument consubstantielles au système et pas du tout nuisibles pour lui. La dichotomie souverainisme/mondialisme, par exemple, évolue à l'intérieur du système, et non à l'extérieur. Il en va de même pour la controverse novax/provax, largement alimentée par le système lui-même afin de dissimuler les résultats les plus néfastes de la crise pandémique : les profits excessifs des multinationales occidentales du médicament, le renforcement des structures du capitalisme de surveillance (exploitation des données et des informations privées des citoyens pour des raisons commerciales et de sécurité), l'atteinte aux biens communs mondiaux dissimulée derrière les mesures de lutte contre la crise elle-même. En effet, les gouvernements collaborationnistes de l'Occident ont ouvert la course des fonds d'investissement aux biens indispensables à la vie : l'eau, la mer, la terre (parcs naturels et archéologiques), l'espace autour de la terre et l'espace dit numérique.
Ce n'est pas par hasard qu'il a été fait référence ci-dessus au "profit disproportionné" que les multinationales occidentales du médicament ont tiré de la crise de la pandémie (malgré la rhétorique mielleuse du "bienfait mondial du vaccin" colportée par certaines institutions politiques). Ceci, en plus de mettre en évidence le fait que la géopolitique de la vaccination a été utilisée comme un instrument de césure entre l'Occident et l'Orient [4], nécessite une brève réflexion à la lumière du fait que le prix Genesis (le "Nobel juif") a été attribué au PDG de Pfizer Albert Bourla, et à la lumière du fait que certains pays européens (l'Italie in primis) ont choisi (ou c'est plus probablement ce qui leur a été imposé) de suivre le modèle israélien pour faire face à l'épidémie de Covid-19. Ce prix (l'équivalent d'un million de dollars qui est habituellement attribué à d'autres fondations juives) est décerné chaque année à des personnalités qui se sont distinguées en tant qu'"expressions exceptionnelles des valeurs juives et pour des services rendus à l'État d'Israël". La motivation du choix de Bourla (un juif séfarade originaire de Thessalonique) semble être le fait que celui-ci, méprisant la bureaucratie, a pris les risques (on ne sait pas exactement lesquels, étant donné la protection garantie par les gouvernements occidentaux contre d'éventuelles demandes de dommages et intérêts) de produire un vaccin le plus rapidement possible. Sans mâcher les mots, le véritable mérite aurait été que Pfizer gagne plus de 30 milliards de dollars en un an.
Cela demande toutefois un autre type de raisonnement, qui s'inscrit parfaitement dans l'idée exprimée par Qiao Liang, selon laquelle le modèle impérialiste américain est basé sur la technologie de la finance et de l'information. Et ce raisonnement peut partir de quelques considérations de Karl Marx tirées de l'écrit Sur la question juive écrit en réponse à certaines thèses du philosophe hégélien Bruno Bauer. Marx écrit : "Quel est le dieu terrestre du Juif ? L'argent. Le Juif s'est émancipé d'une manière juive non seulement dans la mesure où il s'est approprié le pouvoir de l'argent, mais aussi dans la mesure où l'argent, à travers lui et sans lui, est devenu une puissance mondiale, et l'esprit pratique du Juif, l'esprit pratique des peuples chrétiens" [5].
La réflexion du penseur de Trèves se prête involontairement à la géopolitique. La crise géopolitique (conflit militaire ou crise pandémique), en effet, est souvent et volontairement utilisée pour créer une situation favorable à la monnaie : dans ce cas, au dollar américain. Ainsi, une autre caractéristique du pouvoir mondial nord-américain est le fait que la géopolitique a été subordonnée (est devenue instrumentale) à la politique monétaire. Pour profiter de l'hégémonie financière, les États-Unis doivent contrôler les flux de capitaux, et pour contrôler les flux de capitaux, ils doivent contrôler les centres commerciaux les plus importants de la planète : en termes géopolitiques, "les Méditerranées de l'Eurasie" (l'ancienne Mare Nostrum et la mer de Chine méridionale).
Maintenant, pour être plus précis, les États-Unis ont pu développer leur puissance mondiale à la fois par les formes coloniales classiques et par le système de domination financière, informatique et informationnelle. Les États-Unis ont leurs territoires d'outre-mer : Guam, les îles Vierges américaines, Porto Rico, etc. Leurs bases militaires dans le monde sont régies par le droit américain. Et même les crimes commis par des représentants de l'armée américaine semblent échapper à la juridiction du "pays/colonie hôte" (le massacre de Cermis, par exemple). De plus, depuis leurs bases, ils projettent une influence politique et économique sur l'État vassal. Et la force militaire ouvre la voie aux multinationales qui se consacrent à l'exploitation des ressources locales.
L'interventionnisme militaire au-delà des frontières se fait au nom de la "destinée manifeste", d'un nouveau pacte avec Dieu qui a permis à l'Amérique, incarnation d'une forme typiquement moderne de messianisme, de changer le monde à son image et à sa ressemblance. Cependant, la politique étrangère de cet État impérialiste, érigé depuis les années 1970 en technostructure financière et informatique, est axée sur la sauvegarde exclusive de ses propres intérêts. Les intérêts des alliés/vassaux ne sont pris en compte que s'ils coïncident (très rarement, d'ailleurs) avec ceux du centre impérialiste. Sinon, ils ne sont absolument pas pertinents. Au contraire, le territoire des vassaux eux-mêmes est utilisé comme un théâtre de guerre potentiel contre d'éventuels rivaux (l'arsenal nucléaire américain en Europe a précisément pour rôle d'empêcher le territoire nord-américain de devenir la cible de représailles nucléaires).
Au sujet des intérêts non-contigus entre le centre impérialiste et les vassaux, on peut mentionner le retrait unilatéral des États-Unis de l'accord nucléaire avec l'Iran. Le choix de la présidence Trump, en effet, est intervenu à un moment où Washington s'est rendu compte que la suppression progressive du régime de sanctions contre l'Iran favorisait une "connexion eurasienne dangereuse" mutuellement bénéfique. L'Union européenne, en fait, grâce au choix des États-Unis, a perdu pas mal de commandes commerciales avec Téhéran (l'Italie seule a perdu des commandes commerciales pour environ 30 milliards d'euros) [6].
De plus, la "destinée manifeste" est le seul ciment idéologique d'une construction étatique fondée sur le génocide, les préjugés raciaux et les immenses différences sociales. La "destinée manifeste", en fait, est ce qui permet de décharger la violence cachée en dehors des frontières américaines. La violence elle-même devient une forme d'"agrégation nationaliste" [7], déclare le général Fabio Mini dans la préface du texte précité de Qiao Liang, L'Arc de l'Empire.
La guerre est une nécessité, et même lorsque l'opération militaire s'avère être un échec, un succès financier et/ou stratégique se cache derrière elle (les guerres de Corée et du Vietnam, destinées à empêcher toute coopération entre l'espace eurasien et les "satellites" qui l'entourent, comme le Japon, ou les agressions contre l'Irak et l'Afghanistan). Cela explique les 452 interventions américaines à l'étranger depuis 1780, dont 184 au cours des vingt dernières années : c'est-à-dire à un moment où les États-Unis ont pleinement assumé le rôle de gendarme du monde et où les aventures militaires ont été justifiées sur la base de l'ingérence humanitaire (du Kosovo à la Libye). Dans ce cas, "le colonialisme est camouflé en hégémonie" [8]. Le colonialisme, en effet, c'est aussi la capacité de faire combattre ses vassaux pour son propre compte (pensez au rôle que les États-Unis réservent à l'Australie et à la Grande-Bretagne sur le théâtre indo-pacifique) tout en faisant semblant de les considérer comme des alliés (aussi l'Italie au Kosovo, en Irak et en Afghanistan).
Le rôle de l'OTAN, en ce sens, est emblématique. L'Alliance atlantique est en fait une alliance non-égale. C'est un instrument coercitif contre l'Europe pour l'empêcher d'être indépendante, véritablement unie, et pour l'empêcher de se tourner vers l'Est. Ce n'est pas un hasard si, selon Brzezinski, l'expansion de l'OTAN vers l'est aurait élargi la zone d'influence des États-Unis en Europe et créé une union européenne aussi vaste qu'unie et, par conséquent, facilement contrôlée par la puissance hégémonique.
La guerre au Kosovo s'inscrit dans cette perspective. L'un des événements les plus importants de 1999 a été le lancement officiel de l'euro, initialement adopté dans 11 pays. Porter la guerre au cœur de l'Europe sur la base d'accusations contre la Serbie qui se sont avérées sans fondement avait précisément pour but d'affaiblir la monnaie unique européenne par rapport au dollar au moment même de sa naissance. La guerre américaine en Europe avait donc pour but de polluer le climat d'investissement sur le "Vieux Continent". Et la même chose pourrait facilement être appliquée à la crise de la dette grecque, qui a été conçue pour montrer la faiblesse structurelle de l'euro et pour mettre en évidence le problème de l'excédent commercial allemand (ce n'est pas une coïncidence si le protagoniste de la "boucherie sociale" grecque était le référent le plus important de l'atlantisme dans les institutions européennes, l'actuel Premier ministre italien Mario Draghi).
Le sujet de l'excédent commercial allemand mérite d'être approfondi car la monnaie unique a également été conçue comme un système visant à empêcher un renforcement excessif du mark. Le problème (nord-américain) est que les États-Unis sont le plus grand débiteur du monde. La dette publique américaine a atteint 132,8 % du PIB en 2021 ; la dette extérieure nette est passée à 109 % du PIB. Les pays ayant une position financière internationale nette positive sont le Japon, l'Allemagne, la Chine, Hong Kong (qui fait désormais partie intégrante de la Chine) et Taïwan (considérée par la Chine elle-même comme une "province sécessionniste"). Le "problème fondamental" est que ces pays sont excédentaires principalement au niveau de leur balance commerciale avec les États-Unis. En 2019, le solde pour la Chine était de +345 milliards, pour le Japon +69 milliards, +67 pour l'Allemagne, +26 et +23 respectivement pour Hong Kong et Taïwan.
Or, sans tenir compte du fait qu'une éventuelle réunification de Taïwan avec la Chine non seulement augmenterait de manière exponentielle la capacité industrielle du pays asiatique, mais renforcerait également sa position de crédit vis-à-vis des Etats-Unis (c'est pourquoi cette éventualité doit absolument être évitée par Washington) et sans tenir compte du fait que le Japon a déjà été victime de guerres commerciales dans les années 1980, la position allemande mérite une attention particulière.
Le coup d'État atlantiste en Ukraine en 2014 visait spécifiquement à anéantir toute coopération possible entre l'Allemagne (et au sens large l'Union européenne, dont Berlin, qu'on l'accepte ou non, est le moteur) et la Russie. La recrudescence actuelle des provocations de l'OTAN en Ukraine a exactement le même objectif, auquel s'ajoute la volonté de forcer l'Europe (déguisée en "diversification") à acheter du GNL (gaz naturel liquéfié) nord-américain. L'Europe et la Russie, dit Qiao Liang, sont des géants, surtout si elles unissent leurs atouts. L'Europe a le pouvoir économique. La Russie, qui fait elle-même partie de l'Europe, dispose de la puissance militaire. Unis, ils seraient un géant de toute grande envergure. Quelque chose que les États-Unis ne pourraient jamais tolérer. C'est pourquoi le véritable ennemi du Vieux Continent ne se trouve pas à l'Est mais à l'Ouest.
NOTES
[1] Mark Zuckerberg et son équipe envisagent de fermer Facebook et Instagram en Europe si Meta ne peut pas traiter les données des Européens dans des serveurs américains, www.cityam.com.
[2] Qiao Liang, L’arco dell’impero con la Cina e gli Stati Uniti alle sue estremità, Editions LEG, Gorizia 2021, p. 59.
[3] Prenons par exemple le cas emblématique de l'Italie et du groupe GEDI en particulier. En 2020, au plus fort de la crise pandémique, M. Molinari (une personne en "excellentes relations" avec le groupe américain Stratfor Enterprise) est devenu le directeur du quotidien Repubblica (le principal journal du groupe éditorial lié au groupe Bilderberg, l'avant-garde politique et financière de l'atlantisme créée par la CIA et le MI6). Stratfor se définit comme une "plateforme d'intelligence géopolitique". Le groupe a été fondé par le juif hongrois (fils de survivants de l'Holocauste) George Friedman, aujourd'hui à la tête de Geopolitical Futures, et par certaines personnalités directement liées au Pentagone, comme l'ancien officier du US Special Operations Command, Bret Boyd. Stratfor est considéré comme une "CIA de l'ombre" et entretient des liens étroits avec l'industrie de l'armement Lockheed Martin (la même industrie qui, par l'intermédiaire du "think tank" Projet 2049 de Randall Schriver, le protégé de Steve Bannon, fait pression pour la vente constante d'armes à Taïwan), Goldman Sachs (la même banque où travaillait le Premier ministre italien Mario Draghi), Bank of America et Coca Cola. Les Agnelli-Elkann (propriétaires du groupe GEDI) sont également cités par le magazine britannique The Economist qui, sans surprise, a déclaré Mario Draghi "homme de l'année".
[4] Voir D. Perra, "Geopolitica e diplomazia dei vaccini", Eurasia. Rivista di studi geopolitici, vol. LXV, 1/2022.
[5] K. Marx, Sulla questione ebraica, Bompiani, Milano 2007, p. 99.
[6] Voir "L’uscita degli USA dall’accordo sul nucleare iraniano: conseguenze e implicazione per l’Italia", Osservatorio di Politica Internazionale, n. 139 settembre 2018.
[7] F. Mini, Introduzione a L’arco dell’impero, ivi cit., p. 22.
[8] Ibid, p. 23.
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La revue de presse de CD - 13 février 2022
La revue de presse de CD
13 février 2022
EN VEDETTE
" La plaidoirie de la déficience intellectuelle aggravée est la seule à pouvoir vous tirer d’affaire "
LETTRE OUVERTE : Chères et chers membres de l’Académie Nationale de Médecine, Votre réputation n’est plus à faire. C’est vous qui avez, il y a déjà plus d’un an, prescrit à la population de remettre son masque entre deux bouchées pendant les repas, ou de ne pas parler dans les transports en commun, derrière les mêmes masques, pour limiter la transmission du virus, et autres conseils frappés au sceau du bon sens et de la rationalité…
Francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/opinions-tribunes/mehdi-belhaj-...
AFRIQUE
La dérive anti-française en Afrique, comment Paris risque de perdre le Sahel
Le Mali, dans la zone francophone du Sahel, a toujours été un pays plutôt "rebelle" par rapport à Paris. En 1962, Bamako décide même d'imprimer sa propre monnaie au lieu du franc Cfa, celui qui est actuellement en vigueur dans la plupart des anciennes colonies françaises d'Afrique de l'Ouest. Le pays a réintégré le groupe en 1984, mais aujourd'hui encore, le débat sur la monnaie est source d'âpres controverses. Même l'un des imams les plus en vue de Bamako, le très populaire Mahmoud Dicko, a, ces dernières années, soulevé les foules en qualifiant le franc Cfa d'outil colonial. Mais c'est dans tous les pays d'Afrique subsaharienne que ces questions trouvent un large écho.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/02/03/l...
DÉSINFORMATION/CORRUPTION
Guerre médiatique contre les camionneurs
Un caricaturiste du Washington Post a dépeint le convoi de camionneurs comme l’image du fascisme incarné, tandis qu’une autre colonne du même journal a tourné en dérision le « convoi toxique de la liberté« . Toute personne qui résiste à un ordre du gouvernement est apparemment devenue un ennemi public. La protestation des camionneurs a été motivée par le pass vaccinal imposé par le gouvernement canadien. De nombreux camionneurs estiment que les risques du vaccin sont supérieurs à ses avantages et, surtout, qu’ils ont le droit de contrôler leur propre corps.
Contrepoints.org
https://www.contrepoints.org/2022/02/08/421013-guerre-med...
Enquête sur SOS Racisme
Dans cette vidéo d’une dizaine de minutes, SOS Racisme est parfaitement expliqué en trois points : Qui sont-ils ? Leur engagement politique. Et leur financement. Et ce n’est vraiment pas triste : pas de militants, mais de très grosses subventions…
L’Incorrect
https://www.youtube.com/watch?v=t5uPpCW6XOE&t=470s
ÉCONOMIE
Politique & Eco n°329 – Olivier Delamarche met Macron et Le Maire en « PLS »
Aux déclarations injurieuses du chef de l’Etat contre les non-vaccinés, l’économiste dénonce les propos d’un ado pas fini qui provoque comme dans une cour de récréation et que les Français finiront peut-être par aller chercher par la peau du dos comme il les a déjà invités à le faire. Quant au ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, pour qui la France a retrouvé son niveau de croissance des Trente Glorieuses, Olivier Delamarche évoque l’arnaque du PIB comme ceux du chômage qui sont des chiffres politiques : une arnaque totale !
Tvlibertes.com
https://www.tvlibertes.com/politique-eco-n329-olivier-del...
ÉNERGIE
L’industrie pétro-gazière en mains de l’oligopole de la haute finance. Cartellisation par le capital.
On a beau faire croire à toutes sortes de sources d’énergie alternative, le pétrole reste et restera un moteur indispensable pour ce qui restera de l’économie lorsque les oligarques de la haute finance auront appuyé sur le bouton du Great reset.
Afin de démontrer la cartellisation des acteurs du secteur du pétrole et du gaz, je vous invite à prendre connaissance de la capitalisation boursière des compagnies.
Le blog de Lilian Held Khawam
https://lilianeheldkhawam.com/2022/02/05/lindustrie-petro...
ESPIONNAGE
Iran et Israël : les guerres d'espionnage
La confrontation en matière d'espionnage entre Israël et l'Iran est l'une des batailles de renseignement les plus spectaculaires depuis la fin de la guerre froide.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/02/04/i...
ÉTATS-UNIS
Comment les espions américains couvrent-ils leurs traces ?
Dans l’émission « Le désordre mondial », une interview passionnante d’Éric Denécé qui explique comment les espions américains couvrent leurs traces. Il met en exergue le rôle de la DIA qui emploie environ 60.000 personnes et invente la légende de ses espions militaires dans plus de 170 pays à travers des sociétés fictives et/ou réelles et grâce à des hackers qui créent des fausses vies pour de vrais espions.
CF2R
https://www.youtube.com/watch?v=Sgh7rZWCPuI
Irak, Syrie : Sans mission claire, les troupes américaines doivent se retirer
De temps en temps, on nous rappelle que les troupes américaines se trouvent encore dans des endroits où elles ont soi-disant cessé de participer aux « guerres éternelles ». En général, ce rappel prend la forme d’attaques contre ces troupes. Même si la description officielle des membres des services est qu’ils ne sont pas engagés dans un combat, ils se font néanmoins tirer dessus. C’est le cas d’une série d’attaques récentes contre des installations habitées par les 2 500 soldats américains en Irak et les près de 1 000 en Syrie.
Les-crises.fr
https://www.les-crises.fr/irak-syrie-sans-mission-claire-...
FRANCE
Après l’enfumeur, le totalitarisme du gouvernement
Il s’agit bien d’une dislocation sociale que nous vivons aujourd’hui sur tous les plans. Une situation qui nous rapproche du totalitarisme.
Contrepoints
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Fabien Roussel : ne pas se raconter d’histoires
On prête à Georges Clemenceau la phrase suivante quand il était au pouvoir: «l’opposition m’approuve, j’ai dû dire une connerie ». Les acclamations dont fait l’objet aujourd’hui de la part du système politique et médiatique élitaire, devrait peut-être inciter à un peu de retenue et éviter de se raconter des histoires. Surtout que la percée médiatique de Fabien Roussel démontre une fois de plus que les adversaires stupides font les meilleurs agents électoraux.
Vu du Droit
https://www.vududroit.com/2022/02/fabien-roussel-ne-pas-s...
GAFAM
Censure ou mensonge organisé, l’AFP, Google et la bande des 17
Ce pourrait être un conte revisité de Perrault : Google jouerait le rôle de l’ogre, l’AFP celui de la sorcière et les 17 médias qui les suivent, ceux de leurs enfants ou des nains, au choix. Bienvenue chez « Objectif désinfox », un outil de période électorale.
OJIM
https://www.ojim.fr/censure-afp-google-17-medias/?utm_sou...
Meta fait pression sur l’Europe sur le transfert des données
Meta, dans son rapport annuel à la Securities and exchange commission (SEC), le gendarme de la bourse américain, menace de suspendre ses services Facebook et Instagram de l’Union européenne. Dans ce texte publié le 3 février et repéré par City A.M., le groupe reproche au Vieux Continent sa réglementation trop stricte sur les transferts de données vers les États-Unis.
siecledigital.fr
https://siecledigital.fr/2022/02/07/meta-fait-pression-su...
GÉOPOLITIQUE
La révision des frontières en Europe : l’ultime tabou ?
La guerre du Donbass, région orientale d’Ukraine peuplée de Russes, a déjà fait plus de 14 000 morts et près d’un million de déplacés, pour un conflit engendré par d’anciennes frontières internes à l’URSS et par les soubresauts de l’Histoire. Au sortir de la Première Guerre mondiale, l’anarchie crée par la révolution bolchévique eut pour résultat l’instauration de deux gouvernements ukrainiens en 1918 : l’un pro-soviétique à Donetsk, l’autre pro occidental à Kiev.
Geopragma
https://geopragma.fr/la-revision-des-frontieres-en-europe...
Alexandre Douguine: Prévisions pour 2022
Un renforcement du monde multipolaire est très probable en 2022, car les politiques de la Russie et de la Chine seront de plus en plus claires. Les deux nations continueront à renforcer leurs liens. Par conséquent, il est très probable qu'un club de puissances multipolaires émerge autour de ces deux acteurs (tandis que les pays qui reconnaissent encore la légitimité de l'unipolarité américaine s'organiseront autour de la "Ligue démocratique"). En outre, les "Grands Espaces" comme l'UE, l'Inde ou les pays islamiques affirmeront également leur souveraineté. Cependant, il est très probable que la tripolarité restera la norme, car ni l'Inde ni l'UE ne sont capables de devenir des sujets autonomes pour de nombreuses raisons : élites libérales, manque de conscience de soi, influence directe des puissances mondialistes, absence d'idée d'unité, etc.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/02/05/a...
PROCHE-ORIENT
Les Kurdes et le Moyen-Orient
Une compréhension adéquate des processus politiques au Moyen-Orient nécessite une connaissance détaillée du facteur kurde. Ce peuple indo-européen joue un rôle important dans la région qui englobe l'Anatolie orientale, la zone septentrionale de la Mésopotamie et le nord-ouest de l'Iran, une région précédemment peuplée par les Hourrites, qui se sont ensuite déplacés vers le nord dans le Caucase.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/02/04/l...
RUSSIE
« Nous avons été humiliés » : le discours du Kremlin sur les années 1990 et la crise russo-ukrainienne
L’élargissement de l’Alliance atlantique à l’Est (14 pays d’Europe centrale et orientale ont adhéré entre 1999 et 2020) représente, pour le pouvoir russe, un symbole traumatisant de la débâcle de l’URSS à la fin de la guerre froide et de l’effondrement de l’influence de Moscou sur ces territoires qui ont, des décennies durant, relevé de son pré carré. Cette dimension symbolique joue indubitablement un rôle dans la crise actuelle. En bonus dans cette remarquable analyse, la vidéo de Nicolas Sarkozy, sonné comme un boxeur à la sortie de son entrevue avec Vladimir poutine en 2007.
The Conversation
SANTÉ/MENSONGES/LIBERTÉ
Crise coronavirale : entretien (1) avec le toxicologue Jean-Paul Bourdineaud
Dans cet entretien, le toxicologue Jean-Paul Bourdineaud conteste la supposée toxicité de l’hydroxychloroquine et de l’ivermectine, explique la raison de leur bannissement, et développe la notion de controverse scientifique ; il met en lumière le rôle des conflits d’intérêts et le problème de l’évaluation des risques par les agences de régulation, qui ont abouti à l’unique solution vaccinale.
Le blog de Laurent Mucchielli
https://blogs.mediapart.fr/laurent-mucchielli/blog/300921...
Pass vaccinal : Véran nous la joue Tartuffe et Diafoirus
Le pass sanitaire puis vaccinal aura été une farce de bout en bout.
Farce – le terme sera sans doute jugé trop faible compte tenu de l’atteinte aux libertés que cet « outil » organise depuis plus de six mois pour un bénéfice sanitaire dont tout le monde sait à présent qu’il est parfaitement nul. Rappelons que le 8 décembre dernier, avant même que la vague omicron annoncée ne vienne amplement confirmer l’analyse, le Pr Jean-François Delfraissy (qui préside le Conseil scientifique) a en quelque sorte « officialisé » son inutilité pour circonscrire la circulation du virus devant la très respectable Commission des affaires sociales du Sénat.
Contrepoints
https://www.contrepoints.org/2022/02/06/421056-pass-vacci...
Laurent Montesino : "Je suis là pour dire aux patients et aux médecins : réveillez-vous ! "
Accès aux traitements précoces empêchés, controverses à propos de certains compléments alimentaires, vaccination généralisée, absence de soin, Covid long, tels sont les grands thèmes abordés par Laurent Montesino, médecin réanimateur suspendu depuis l’obligation vaccinale, devenu médecin bénévole au sein de l’ONG suisse « Soigner heureux ».
Francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/videos-pause-interview/laurent-...
Laurent Toubiana : une autre vision de l’épidémie du cond-19
Invité d’Yvan Rioufol sur Cnews, le chercheur en épidémiologie Laurent Toubiana révèle les vrais chiffres de la pseudo-épidémie. Vidéo
Cnews
https://www.youtube.com/watch?v=9VHaA4iN3hk
UNION EUROPÉENNE
Internet : l’incroyable autoritarisme de la Commission européenne
Dans un entretien aux Échos, le directeur général de l’ICANN révèle que la Commission européenne travaille à réguler les serveurs informatiques à la base du réseau. Un projet jamais entrepris même par les États les plus autoritaires.
Contrepoints.org
https://www.contrepoints.org/2022/02/08/421192-internet-l...
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samedi, 12 février 2022
Les vérités du professeur Perronne
Les vérités du professeur Perronne
par Georges FELTIN-TRACOL
Spécialiste français de la maladie de Lyme, le professeur Christian Perronne a fondé la fédération française de cette maladie dont il fut le vice-président et le responsable du conseil scientifique. Président de la commission des maladies transmissibles de 2001 à 2006 au Conseil supérieur d’hygiène publique de France entre-temps devenu le Haut-Conseil de la santé publique, ce médecin participe dans le cadre de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) entre 2007 et 2016 au groupe d’experts sur la politique vaccinale en Europe. Il a enfin été chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches. Sommité en matière d’épidémie, il se fait connaître du grand public à l’occasion de la pandémie coronavirale.
En juin 2020, il publie chez Albin Michel Y a-t-il une erreur qu’ILS n’ont pas commise ?, un réquisitoire nuancé et argumenté contre la gestion gouvernementale de l’actuelle crise virale. Cet ouvrage aurait dû susciter le débat si une chape de plomb médiatique ne l’avait pas recouvert. Pis, le professeur Perronne a perdu sa responsabilité de chef de service. Pour quelle faute professionnelle gravissime ? Ne pas souscrire à la narration officielle du covid-19 et pratiquer le doute systématique. On aura tout vu en Macronie !
Avec Décidément, ILS n’ont toujours rien compris ! (Albin Michel, 2021, 280 p., 17,90 €), Christian Perronne sort l’artillerie et arrose d’une ironie grinçante et d’un sarcasme de bon aloi les dirigeants et les sachants qui empoisonnent la vie des Français sous prétexte de combattre le covid, le variant Delta et Omicron. Ses accusations se fondent sur des faits précis, référencés et faciles d’accès pour tout chercheur intéressé. Cette catégorie ne concerne bien sûr pas les plumitifs à la solde du Régime.
Sa démarche irrite. Christian Perronne est le premier à le reconnaître. « J’ai d’abord été baptisé critique, puis dissident, mais aujourd’hui c’est fait, je suis chef de service du Complotisme ! » Dommage qu’il ne montre pas que ses contradicteurs inversent volontiers la charge de la preuve. Parce qu’il s’interroge sur les conséquences politiques, sociales, économiques, environnementales et psychologiques de la pandémie, et qu’il donne son point de vue, divergent par rapport au discours des autorités répercuté par des radios et des télévisions complaisantes, il subit des persécutions.
Le 10 décembre 2021, après l’avoir harcelé à deux reprises, le Conseil national de l’Ordre des médecins porte plainte contre lui et le professeur Didier Raoult pour de supposés « propos controversés ». Quelques semaines auparavant, le tristement célèbre CSA (Censure sociétaliste de l’audio-visuel) adressait à RMC (Radio Monte-Carlo) une mise en demeure pour « non-maîtrise de l’antenne ». En effet, le 31 août dernier, lors de son passage à l’émission « Les Grandes Gueules », Christian Perronne ne mâchait pas ses mots. Le CSA aurait-il une quelconque compétence médicale ? Christian Perronne sera-t-il la première victime d’une prochaine loi liberticide condamnant le « covidoscepticisme » et toute « contestation virologique » ? Il n’est pas le seul. L’hebdomadaire des Monts du Lyonnais, Le Pays du 20 janvier 2022, rapporte qu’un pompier d’une trentaine d’années, par ailleurs conseiller municipal de la commune de Saint-Symphorien-sur-Coise dans le Rhône, a été suspendu en septembre dernier avant que le conseil de discipline lui inflige un mois d’exclusion dont quinze jours avec sursis. Dans une vidéo mise en ligne sur les réseaux sociaux, il établissait un lien entre le vaccin anti-covid et les risques d’AVC ! N’est-ce pas insupportable ? Remarquons cependant que les sanctions ne sont pas pénales. L’éventualité d’un procès pour des « propos controversés » doit en tout cas intriguer tous les avocats inquiets de l’étiolement accéléré de la liberté d’expression et de l’évaporation de la liberté de réflexion. Soulignons que les habituelles associations subventionnées toujours prêtes à dénigrer la Hongrie, la Pologne ou le Bélarus ne réagissent pas…
Bien plus percutant que le précédent, l’ouvrage de Christian Perronne explique pourquoi l’hydroxychloroquine, l’azithromycine, l’ivermectine, l’Artemisia annua, la nigelle (ou cumin noir) appartiennent aux « traitements qui marchent » si le malade en reçoit dans les premières heures de l’infection et non au stade terminal comme le prescrit le protocole officiel. Leur mise à l’écart médiatique s’explique par le poids massif du « pantouflage », c’est-à-dire « le fait de bosser pour l’État, puis pour une boîte privée, puis à nouveau pour l’État, puis encore dans le privé, etc. ». Cette connivence légale engendre d’inévitables conflits d’intérêts et encourage une large corruption. Un rapport de l’ONU signale que le domaine de la santé est l’un des secteurs les plus corrompus au monde. Envisager la vaccination de tous comme un facteur de grande rentabilité financière ne relève pas du complotisme. N’y a-t-il pas à ce sujet un véritable problème de déontologie quand 86 % des fonds de l’Agence européenne du médicament (EMA en anglais) proviennent de Big Pharma ? Plus sensationnelle que les costumes de François Fillon, cette information ne fait pas les gros titres. On se demande bien pourquoi…
Christian Perronne dénonce le déséquilibre structurel de la gestion sanitaire de crise. D’un côté, « on a un président de la République et 2 ministres plus 13 conseils, agences ou organismes existants spécialistes de la santé, note-t-il. On en met 10 de plus, et une conseillère ». De l’autre, la loi de financement de la Sécurité sociale « prévoit 900 millions d’euros d’économies dans les hôpitaux en 2021 ». La crise sanitaire n’empêche pas les coupes budgétaires, le rationnement des soins, la réduction du nombre de lits et la compression du personnel hospitalier. La république macronienne est avare, chaotique et sur-administrée… pour un résultat minable. Or, on peut mobiliser des ressources financières importantes. Pour preuve, depuis le 1er février 2021, la dotation matérielle allouée aux députés a été augmentée pour atteindre un supplément annuel de 2842,50 € ! Que les élus de la majorité ne se plaignent pas ensuite d’être détestés et de recevoir quelques baffes…
Le covid-19 sert enfin de justification anxiogène pour museler et domestiquer les « Gaulois réfractaires ». Peu de temps avant de trépasser, Axel Kahn déclarait sur France Culture, le 6 octobre 2021, que « face à une pandémie, c’est un inconvénient d’être dans une démocratie ». Et face à une immigration allogène de peuplement ? Le professeur Perronne ne s’attarde pas malheureusement sur l’origine véritable de l’« Absurdistan sanitaire hexagonal ». Emmanuel Macron ne pardonnera jamais à la population d’avoir largement soutenu le mouvement des « Gilets jaunes » qui aurait dû emporter sa funeste présidence. Il se venge méthodiquement depuis bientôt deux ans. Il soumet le pays à un sadisme consommé et facilite l’hystérie médiatique. Gare presque à celui qui se mouche en public, il risque le lynchage !
L’ouvrage du professeur Christian Perronne contribue au combat contre le despotisme sanitaire et l’apartheid vaccinal qui en découle. Il dévoile les interactions profondes entre les entreprises audio-visuelles et le pouvoir. Ce livre fait l’objet d’une relative conspiration du silence. Par les exemples donnés, c’est pourtant une œuvre salutaire qui risque, un beau matin, de se retrouver par inadvertance « tolérante et démocratique » brûlée en place publique pour « crime de vérité ».
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 19, mise en ligne le 8 février 2022 sur Radio Méridien Zéro.
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L'OTAN dans l'espace
L'OTAN dans l'espace
Leonid Savin
Source: https://www.geopolitica.ru/article/nato-vyhodit-v-kosmos
Le 17 janvier, l'Alliance de l'Atlantique Nord a publié sa doctrine politique sur l'espace.
Le texte de ce document indique que "les adversaires potentiels augmentent leur propre utilisation de l'espace, renforçant ainsi leur capacité à transmettre de la puissance sur de longues distances avec plus de précision, de rapidité et d'efficacité. Ils utilisent également les capacités spatiales pour suivre les forces, les exercices et les autres activités de l'OTAN et des Alliés. La navigation par satellite et les services commerciaux sont également utilisés pour la planification et le ciblage par des adversaires potentiels, y compris des acteurs non étatiques. Les capacités développées par des adversaires potentiels peuvent être utilisées contre l'Alliance pour, entre autres :
- Mettre en danger les moyens spatiaux, ce qui complique l'aptitude de l'OTAN à prendre des mesures décisives en cas de crise ou de conflit ;
- Empêcher ou dégrader les capacités spatiales des Alliés et de l'OTAN qui sont essentielles à la gestion de l'espace de bataille et à la connaissance de la situation, ainsi qu'à l'aptitude à agir efficacement en cas de crise ou de conflit ;
- Créer des impacts sur les systèmes spatiaux alliés qui endommagent ou perturbent la vie économique ou sociale et violent le principe de la libre utilisation de l'espace, mais se situent en deçà des seuils de menace de force, de recours à la force, d'attaque armée ou d'agression".
Il ne dit pas exactement quel type d'adversaires l'OTAN pourrait avoir, mais il est évident que la Russie est impliquée en premier lieu, puisque la Chine est loin. Il ne mentionne pas que la Russie a toujours été contre la militarisation de l'espace et a proposé un accord sur la question.
La nouvelle stratégie nous apprend que l'approche de l'OTAN vis-à-vis de l'espace sera axée sur les rôles clés suivants :
- Intégrer les considérations spatiales et liées à l'espace dans les tâches essentielles de l'OTAN : défense collective, gestion des crises et, si nécessaire, sécurité coopérative ;
- Création d'un forum pour la consultation politico-militaire et le partage d'informations sur les développements spatiaux pertinents liés à la dissuasion et à la défense afin d'informer l'Alliance sur la connaissance de la situation, la prise de décision, l'état de préparation et la gestion de la posture dans tout le spectre des conflits. Ces consultations pourraient porter sur les menaces, les défis, les vulnérabilités et les opportunités, ainsi que sur la prise en compte des évolutions juridiques et comportementales dans d'autres enceintes ;
- Veiller à la fourniture efficace d'un soutien spatial et à son impact sur les opérations, missions et autres activités de l'Alliance ;
- Promouvoir l'interopérabilité et, plus précisément, l'interopérabilité entre les services, produits et capacités spatiaux alliés.
L'espace doit être considéré comme faisant partie intégrante de l'approche globale de l'Alliance en matière de dissuasion et de défense, en utilisant tous les outils dont dispose l'OTAN pour doter l'Alliance d'un large éventail de capacités permettant de répondre à toute menace, où qu'elle se présente.
Pour atteindre cet objectif, l'OTAN prévoit les actions suivantes :
- Envisager une série d'options potentielles à soumettre à l'approbation du Conseil, dans tout l'éventail des conflits, afin de dissuader et de se défendre contre les menaces ou les attaques visant les systèmes spatiaux alliés, selon les besoins et conformément aux principes énoncés dans la présente politique ;
- Développer une compréhension commune de concepts tels que le rôle de l'espace dans les crises ou les conflits ;
- Dans le cadre des efforts visant à renforcer l'état de préparation et la capacité de l'Alliance à agir de manière décisive dans tous les domaines opérationnels (terre, mer, air et cybernétique), il sera dûment tenu compte du rôle de l'espace en tant que contributeur essentiel aux domaines opérationnels ainsi qu'à la défense aérienne et antimissile intégrée de l'OTAN et, pour les Alliés intéressés, à la dissuasion nucléaire ;
- Si la résilience et la capacité de survie des systèmes spatiaux alliés relèvent de la responsabilité des pays, l'OTAN étudiera les moyens de renforcer la résilience dans l'ensemble de l'Alliance, notamment en partageant les meilleures pratiques et en utilisant les capacités spatiales excédentaires appartenant aux Alliés pour renforcer les forces ;
- Élaborer des lignes directrices sur la manière de sécuriser et de garantir l'accès de l'OTAN aux données, produits, services et capacités spatiaux.
Il est probable que la prochaine étape pour l'OTAN sera la militarisation obligatoire de l'espace. Cette opération se déroulera probablement dans le secret et sera connue après coup.
L'une des raisons pour lesquelles les alliés ont été réticents à discuter publiquement des questions spatio-militaires est que, à l'exception de la France et du Royaume-Uni, de nombreux pays européens ont traditionnellement été soit profondément mal à l'aise, soit carrément opposés au concept de guerre spatiale - en particulier aux actions offensives. En effet, dans son discours d'août 2019, le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a jugé nécessaire de déclarer que la déclaration par l'OTAN de l'espace comme domaine opérationnel allié "n'a rien à voir avec la militarisation de l'espace".
Il est donc probable que la France et le Royaume-Uni seront le fer de lance d'une stratégie spatiale plus agressive au sein du bloc européen de l'OTAN. Un rôle allemand est également possible.
La France a rejoint l'initiative américaine d'opérations spatiales combinées au début de 2020 et l'Allemagne à la fin de 2019. Cette initiative a été lancée par le Pentagone en 2014 et a été reprise par l'US Space Force après sa création. En fait, il s'agissait d'une expansion de la communauté de renseignement Five Eyes, comme les médias américains l'ont ouvertement écrit il y a quelques années.
En novembre 2019, l'OTAN a déclaré que l'espace était une zone opérationnelle, ce qui contribuera à garantir une approche cohérente de l'intégration de l'espace dans la stratégie globale de dissuasion et de défense de l'OTAN. Et en octobre 2020, l'OTAN a créé le Centre spatial de l'OTAN au Commandement aérien allié à Rammstein, en Allemagne. Un centre d'excellence spatial de l'OTAN est également en cours de création à Toulouse, en France.
La France a organisé son premier exercice militaire spatial multinational avec l'Allemagne, l'Italie et les États-Unis en 2021, marquant l'effort du pays pour réarmer ses forces et ses opérations afin de contrer les menaces du XXIe siècle.
Cet exercice marque l'intention du gouvernement français de se placer sur une "orbite" plus élevée en tant qu'État souverain afin de pouvoir faire face à tout futur conflit spatial. Jusqu'à présent, Paris a participé aux jeux de guerre spatiale dirigés par les États-Unis.
L'exercice ASTERX s'est déroulé à Toulouse du 8 au 12 mars. Ils ont été décrits par le général Michel Friedling, chef du commandement spatial français, comme un "test de résistance" pour les processus et systèmes de commandement spatial du pays. Exercice tactique conçu pour éduquer et former les combattants de l'espace, ASTERX a simulé une crise internationale impliquant pas moins de 18 événements et scénarios spatiaux différents, allant d'une attaque sur un satellite français à des débris spatiaux menaçant des civils et des interférences avec les communications par satellite des alliés.
Les États-Unis profitent de cette évolution. Après tout, les accusations de militarisation de l'espace s'appliqueront désormais aussi aux membres de l'OTAN, même si seuls quelques pays poussent dans ce sens. Et Bruxelles esquivera la nécessité d'améliorer la défense collective et de se protéger des adversaires potentiels.
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Du Grand Reset à la grande claque économique occidentale
Du Grand Reset à la grande claque économique occidentale
par Nicolas Bonnal
Les élites occidentales sont folles, c’est entendu. Elles veulent à la fois détruire/transformer leur population par les injections et la dictature sanitaire, le passeport vaccinal ou le délire vert. En même temps elles sont coincées du fait de l’effondrement rapide de leurs économies : Snyder parlait de trois millions d’emplois disparus cet hiver en Amérique, données trafiquées par les « données corrigées de variations saisonnières ». En Espagne nous avons eu une augmentation de la facture énergétique de 60% l’an dernier, et cette année on parle de 70% d’augmentation des prix de l’électricité en Grande-Bretagne qui veut en même temps livrer une guerre nucléaire à la Russie (l’Allemagne veut la guerre et le gaz…). Les prix alimentaires ont aussi monté de 20 à 30%. Comme on sait l’inflation est niée par le pouvoir comme les effets des vaccins du démentiel duo Bourla-Bancel. Les banques centrales, avant de créer leur euro numérique et de tout confisquer sur ordre de papa Schwab, font si j’ose dire « bonne impression » pour acheter des voix et enrichir un peu plus nos oligarques : c’est ainsi que Bernard Arnault pèse mille milliards de francs (oui, oui, 190 milliards de dollars)… pour vendre des sacs à main produits par des ouvrières payées par exemple en Bourgogne 1400 euros par mois (info de première main, la femme d’un lecteur y travaille). Mais cette fortune virtuelle ne pèsera pas cher le jour du grand effondrement.
Il est alors impressionnant de voir pourquoi la Russie les exaspère : excédent commercial prodigieux (le troisième du monde), économie matérielle et réelle, autarcie à volonté, excédent budgétaire, faible dette, bref tout ce qui peut « exaspérer les imbéciles » (Léon Bloy), sans LGBTQ ou autres ; les sociaux-démocrates et autres keynésiens qui dévastent l’économie occidentale depuis un demi-siècle maintenant, voient avec leur cerveau de chien Ran-Tan-Plan (« je sens confusément quelque chose ») qu’ils sont arrivés à un point de rupture. La plaisanterie est en train d’avoir assez duré. Le blanc occidental arrogant progressiste et raciste (racisme renforcé par son pathologique caquetage antiraciste) est en train de dérouiller sur le plan intellectuel et matériel, comme je le montrais déjà dans ma Lettre ouverte il y a dix ans. Il ne lui reste plus que la péroraison où il a toujours excellé depuis les vieux orateurs gréco-romains et les théologiens baroques.
Xavier Moreau a expliqué pourquoi le criminel et débile Zelensky a dû se calmer dans ses ardeurs guerrières : il était en train de ruiner l’économie de son pays déjà bien mal en point, et la baisse trimestrielle du PNB va sans doute être de 10%. S’il peut toujours écouter les conseils de l’infatigable BHL (qui propose aussi de coffrer les non vaccinés factieux en France), il n’a pas les moyens de faire sa guerre ni sur le plan militaire ni sur le plan économique. Nos abrutis ici aussi sont en train d’être rattrapés par la réalité : voir les rayons vides dans les supermarchés américains, l’explosion des prix de la bouffe (alimentaire, mon cher Watson !), l’inflation à deux chiffres pour les logements ou les automobiles, et en France cette donnée intéressante : 55% des bagnoles roulent encore au Diesel et Macron, auteur du plus fantastique déficit commercial de l’histoire de… l’Europe (on nous l’a vendu comme génie économique) veut les INTERDIRE. On ne peut que se réjouir quand on apprend en même temps qu’1% des bagnoles sont électriques, et que ces bagnoles ne marchent pas ou presque (essayez une longue distance pour rire). Dans le même temps le sinistre et prétentieux rêve nucléaire français prend fin faute d’uranium ou d’entretien ou de savoir-faire et nos centrales connaissent un sort proche de celle de Tchernobyl (souvenez-vous comme on s’en gaussa alors).
Le futur (le présent) de l’Occident, c’est donc la déglingue, comme disait Lucien Cerise. Pas de chance pour nous, nous sommes mal tombés. Cette déglingue est folle, est provoquée par la politique (les banquiers Draghi-Macron sont de furieux destructeurs) mais pas seulement : l’écroulement face à la pénurie énergétique qu’on a trop longtemps masqué derrière l’écologie et le « réchauffement climatique » se produit sous nos yeux et nous allons tous en pâtir plus, alors que la Chine comme la Russie, pour des raisons communes et complémentaires (espace ; énergie ; savoir-faire ; discipline des populations et compétence de la classe dirigeante) se préparent un siècle à leur mesure – mais qui ne sera pas long si la crise démographique persiste.
Car s’il faut se réjouir de l’effondrement US ou européen, vu ce que ces épaves morales et culturelles sont devenues, il ne faut pas non plus trop trompeter. « Le destin du Spectacle n’est pas de finir en despotisme éclairé », disait Guy Debord, qui pressentait sans doute ce mixte de déglingue et d’atroce tyrannie. De toute manière leur destructeur monde moderne créé par la consommation effrénée des énergies fossiles était bien condamné. Je citerai pour finir cette belle envolée de Drieu la Rochelle écrite au lendemain de l’ignoble Guerre de 14-18 :
« Tous se promènent satisfaits dans cet enfer incroyable, cette illusion énorme, cet univers de camelote qui est le monde moderne où bientôt plus une lueur spirituelle ne pénétrera…Il n'y a plus de partis dans les classes plus de classes dans les nations, et demain il n'y aura plus de nations, plus rien qu'une immense chose inconsciente, uniforme et obscure, la civilisation mondiale, de modèle européen. »
Reste à savoir maintenant si la grande claque économique nous évitera la dictature des Schwab-Gates-v. d. Leyen…
16:44 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : grand reset, actualité, occident, nicolas bonnal | | del.icio.us | | Digg | Facebook
vendredi, 11 février 2022
La guerre au Mali, la raison des discussions Poutine-Macron
La guerre au Mali, la raison des discussions Poutine-Macron
John Helmer
Ex: http://aurorasito.altervista.org/?p=22543
Les dommages que les empires européens ont causés à l'Afrique, en particulier les Britanniques, les Français et les Italiens, ont toujours été mis en accusation publique à Moscou: depuis la politique des tsars russes à l'Union soviétique et au président Vladimir Poutine. C'est lors de la conférence des Alliés à Potsdam, en juillet 1945, que le dirigeant soviétique Josef Staline a pris la peine de dire au président américain Harry Truman, ainsi qu'au premier ministre britannique Winston Churchill, que l'Union soviétique voulait prendre en charge la tutelle de la Libye sous le protectorat de l'ONU, et ainsi assurer la protection des Libyens contre le retour de la domination coloniale italienne. Churchill voulait le retour des Italiens ; le département d'État de Truman voulait la même chose, mais ne semblait pas trahir publiquement la promesse faite par Washington en temps de guerre, à savoir que la Libye, où les armées alliées ont vaincu les armées italiennes et allemandes au prix de très nombreuses vies libyennes et de la destruction d'une quantité de biens libyens, deviendrait indépendante.
La politique soviétique en Afrique n'a pas empêché l'US Air Force de transformer la Libye en une base nucléaire contre l'URSS. Mais le 1er septembre 1969, lorsque Mouammar Kadhafi a destitué le roi de Libye, son gouvernement et la base aérienne de Wheelus, une force navale soviétique de soixante-dix navires, dont le porte-avions Moskva, a occupé la mer entre la Crète et la côte libyenne, protégeant Kadhafi de l'intervention américaine et britannique. Depuis la reprise de l'intervention nord-américaine, française et britannique en Libye en 2011, et l'assassinat de Kadhafi en octobre de la même année, M. Poutine a publiquement répété qu'il regrettait l'inaction du président de l'époque, Dmitri Medvedev, qui s'était opposé à ces deux événements. Ce qui a suivi en Libye, a répété M. Poutine, a conduit à des guerres désastreuses dans les États africains au sud de la Libye, notamment au Mali, et à un afflux de réfugiés africains de la Libye vers l'Europe.
Les organes de propagande anglo-américains et européens accusent désormais le Kremlin d'intervenir militairement au Mali et dans d'autres États africains avec les opérations du Groupe Wagner. Cette question est apparue directement lors des six heures d'entretien de M. Poutine avec le président Emmanuel Macron au Kremlin. Il en a été ouvertement question lors de la conférence de presse qui a suivi.
La guerre au Mali n'a pas été identifiée comme une question importante dans les déclarations à la presse préparées par Poutine ou Macron.
Au lieu de cela, lors de la séance de questions-réponses, un journaliste français a demandé à Poutine : "Quant au Mali, pouvez-vous dire que votre gouvernement n'est en aucun cas lié aux mercenaires du Mali ?" Poutine a répondu : "Tout d'abord à propos du Mali. Le président Macron a soulevé cette question à plusieurs reprises, nous en avons discuté avec lui et le président Macron connaît notre position. Le gouvernement russe, l'État russe n'ont rien à voir avec les entreprises qui travaillent au Mali. Pour autant que nous le sachions, les dirigeants maliens n'ont pas à se plaindre des activités commerciales de ces entreprises". "Suivant la logique qui peut être appliquée à l'OTAN, aux États membres actuels et aux membres potentiels, si le Mali a choisi de travailler avec nos entreprises, il a le droit de le faire. Mais je tiens à souligner, j'en parlerai au président Macron après cette conférence de presse, je tiens à souligner que l'État russe n'a rien à voir avec ces entreprises. C'est lié aux intérêts commerciaux de nos entreprises, qui coordonnent leurs activités avec les autorités locales. Nous allons y jeter un coup d'œil, mais nous n'avons rien à voir avec cela. C'est le premier point".
Macron n'a pas fait de commentaire.
Macron et Poutine ont de nouveau été invités par un journaliste français à aborder la question du Mali. "M. Macron, pourriez-vous également répondre à la question concernant la présence de PMC Wagner et si la Russie est impliquée de quelque manière que ce soit ?" Poutine a répondu: "J'ai déjà traité cette question. J'ai déjà précisé que l'État russe n'a rien à voir avec cela. Je dis cela de manière tout à fait responsable, sans aucune intention cachée. Les autorités locales les invitent au niveau de l'État, les remercient pour leur travail, etc."
Macron a déclaré: "En ce qui concerne le groupe Wagner, la réponse du président est très claire. La France ne reconnaît que les États et la lutte contre le terrorisme. Par conséquent, nous prenons des décisions en matière de lutte contre le terrorisme à l'égard des États souverains et en étroite coordination avec la région. Dans ce cas, nous consultons la CEDEAO et l'Union africaine".
Le lendemain des négociations du Kremlin, un article détaillé sur les opérations françaises au Mali et l'implication du groupe Wagner a été publié dans la publication moscovite Vzgljad ("Point de vue"). En raison de la qualité de l'analyse des arguments stratégiques et des sources, Vzgljad peut être interprété comme reflétant les évaluations des services de renseignement russes. Cette évaluation de la guerre au Mali, qui replace dans leur contexte les commentaires de Poutine et de Macron au Kremlin, a été rédigée par le journaliste de Vzgljad Evgenij Krutikov. Et il n'a cité aucune source.
Comme la Russie a humilié la France en Afrique, les combats dans le désert ont leurs propres caractéristiques
Evgenij Krutikov
Ces dernières années, l'Afrique occidentale est devenue une région où la France a rapidement perdu son ancienne influence. Mais là-bas, on entend parfois exprimer de la gratitude envers les citoyens russes, et cela rend Paris très nerveux. Pourquoi ce qui se passe place-t-il la France dans une position extrêmement inconfortable, et comment la Russie y est-elle parvenue ?
Outre la situation en Ukraine, la situation en Afrique de l'Ouest a également été évoquée lors de la rencontre entre Vladimir Poutine et Emmanuel Macron. Ce qui se passe à Paris est perçu de manière extrêmement douloureuse et, après tout, des citoyens russes y participent également. Une situation particulière s'est développée au Mali, où les nouveaux dirigeants militaires ont expulsé l'ambassadeur français après que Paris a commencé à la qualifier de "junte illégitime". Selon diverses sources, plusieurs centaines de Russes étaient arrivés au Mali, vraisemblablement par le biais de sociétés militaires privées.
Au cours de la rencontre, Vladimir Poutine a expliqué à Emmanuel Macron la situation de l'implication russe au Mali. Concernant le Mali, M. le Président [de la France] a soulevé cette question à plusieurs reprises, nous en avons discuté et il connaît notre position. Le gouvernement russe, l'État russe n'a rien à voir avec les entreprises opérant au Mali. Selon la logique générale relative à [la politique de] l'OTAN et des membres de l'alliance, si le Mali fait le choix de travailler avec nos entreprises, il a le droit de le faire. L'État russe n'a rien à voir avec cela", a souligné une nouvelle fois M. Poutine.
Dans ce contexte, la République centrafricaine (RCA) a une nouvelle fois évoqué le rôle positif des instructeurs militaires russes. La Russie a aidé les autorités de la RCA à rétablir l'ordre dans le pays en l'espace d'un an, alors que l'Occident n'a pas réussi à le faire pendant des décennies. C'est ce qu'a déclaré l'ambassadeur de la RCA auprès de la Fédération de Russie, Leon Dodon-Punagaza, comme le rapporte RIA-Novosti. Avec les Français, les Nord-Américains et les autres, combien d'années avons-nous été amis et qu'ont-ils fait ? De tels groupes militaires n'ont pas apporté la paix à la République centrafricaine depuis des années", a noté le diplomate. Il a remercié Moscou pour son aide et a noté que la situation dans la république avait été terrible. D'un point de vue militaire, la situation au Mali est radicalement différente de celle de la RCA. En Afrique centrale, il y avait un enchevêtrement de conflits internes. Au Mali et dans certains pays voisins (Burkina Faso, Niger), on assiste à une invasion de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et à l'État islamique.
La majeure partie du territoire malien est semi-désertique (Sahel) ou désertique sableux ; les forêts tropicales n'occupent qu'une petite partie du pays, au sud. En conséquence, la population du Mali est composée d'une proportion inégale de deux groupes ethniques non apparentés : les Noirs (Mandika, Fulbe, Bambara et autres) dans le sud et le centre du pays, et les Touaregs dans le désert du nord. Plus de la moitié de la population malienne vit dans la partie sud du pays, tandis que les Touaregs (environ 10% de la population) occupent formellement une grande partie du Sahel et du désert. Les Touaregs ont longtemps réclamé l'indépendance, puis l'autonomie et enfin des révoltes armées. Mais ces dernières années, la menace extérieure commune, sous la forme de djihadistes venus du territoire voisin de la Libye détruite, a uni les groupes ethniques du Mali. Les chefs touaregs ont officiellement abandonné le conflit avec le gouvernement central du Mali et ont demandé de l'aide contre les djihadistes. Nous parlons donc exclusivement de la lutte contre le terrorisme dans sa tournure djihadiste classique. En outre, les Touaregs étaient extrêmement effrayés par le comportement des djihadistes : la destruction de célèbres monuments historiques à Tombouctou et les exécutions publiques selon la charia. Les combats se sont déroulés dans le semi-désert et le désert. Les détachements djihadistes utilisent des tactiques de raid classiques, se retirant périodiquement dans le Sahara libyen où il est presque impossible de les atteindre. De plus, les djihadistes tendent régulièrement des embuscades sur la seule route menant au Diré et à Tombouctou.
Dans une telle situation, il ne vaut pas la peine d'attendre un effet rapide ("le garde forestier russe est arrivé et a dispersé tout le monde"), comme ce fut le cas, par exemple, en RCA. Ces attentes sont gonflées par le comportement passif des Français et des petits contingents européens qui les ont rejoints dans le cadre des opérations Serval et Barkhane (par exemple, la Lettonie a héroïquement envoyé quatre soldats au Mali).
Qu'est-ce qui a marché et qu'est-ce qui n'a pas marché avec les Français ? Lors de la première phase de l'opération Serval en janvier 2013, les Français utilisaient activement des avions de combat Mirage et Rafale pour bombarder tout ce qui bougeait dans le nord-est du Mali. Ils ont ensuite envoyé 500 parachutistes et toute l'armée malienne à Tombouctou. Les djihadistes n'ont pas pu résister et, en février, les Français ont occupé Tombouctou. Et là, ils ont construit une base, maintenant occupée par les Russes. C'est un succès incontestable, car les Maliens ne pouvaient pas faire face aux djihadistes par eux-mêmes. Il ne faut donc pas croire que les Français ont toujours été inactifs. De plus, les Français ont fait face à une forte résistance inattendue et ont décidé de se réorganiser. Ils ont eu la révélation que les barbus enturbannés de Libye étaient bien entraînés, qu'ils disposaient d'armes modernes et qu'ils étaient prêts à résister jusqu'au bout.
Lors de la " bataille pour la ville de Kona ", mi-janvier 2013, les Français ont perdu un hélicoptère et son équipage, abattus par des djihadistes. Cela a rendu les Français très tendus. Le résultat est la nouvelle opération "Barkhane". Selon l'idée de Paris, il s'agissait d'entourer le semi-désert d'un réseau de bases militaires au Tchad, au Mali, au Burkina Faso, en Mauritanie, au Sénégal et en Côte d'Ivoire et d'étrangler les djihadistes en les privant de ravitaillement. À partir de ce moment, le comportement des Français et des alliés (50 soldats sont envoyés par un autre guerrier nordique épique, l'Estonie ; plusieurs centaines sont envoyés par l'Allemagne) devient exceptionnellement passif.
L'objectif était d'utiliser des hélicoptères (britanniques et allemands) pour détruire les caravanes des djihadistes dans le désert et mener des opérations d'assaut ciblées. Mais il est vite apparu que les hélicoptères livrés au Mali n'étaient pas adaptés aux opérations dans le désert et que leur blindage était insatisfaisant, même pour les tirs d'armes légères depuis le sol. Les hélicoptères sont inutilisables, ce qui rend l'opération Barkhane inutile, car la pénétration dans le désert devient techniquement impossible. Au moindre contact avec le feu terrestre, les Français se cachent dans leurs bases. Le commandant de l'opération, le général Pierre de Villiers, a interrogé Paris sur l'élargissement de l'opération et le changement de tactique, mais n'a reçu aucun soutien et a démissionné. Le conflit entre un représentant de l'une des plus anciennes familles aristocratiques de France et le président Macron en est venu à ce que ce dernier renvoie de Villiers de l'armée.
En novembre 2019, les Français ont tenté de mener une opération d'envergure au carrefour de trois frontières - Mali, Burkina Faso et Niger. Mais dans une tempête de sable, les hélicoptères ont été perdus ; deux sont entrés en collision et 13 soldats français sont morts. Par la suite, l'opération Barkhane a été réduite à des opérations de routine. Les Français ont commencé à accuser ouvertement les FAMA, l'armée malienne, et non eux-mêmes, d'inaction. Dans le même temps, ils n'ont même pas levé le petit doigt pour renforcer la FAMA ; au contraire, ils l'ont traitée comme un auxiliaire. Et ce, malgré le fait que les Maliens avaient subi de lourdes pertes dans des batailles terrestres que les Français évitaient traditionnellement. Cela a irrité les Maliens et créé un contexte émotionnel négatif pour les Français, car leur comportement rappelait une relation coloniale et non un partenariat égalitaire.
Avec les Russes, c'est le contraire. Au départ, il avait été annoncé qu'ils ne participeraient pas aux combats mais qu'ils formeraient les Maliens. Les premiers instructeurs de l'ancienne base française de Tombouctou ont été engagés dans la formation du personnel. Mais dans le même temps, les estimations occidentales du nombre de Russes variaient considérablement. Par appréhension, leur nombre a été exagéré à 500. Selon des estimations plus modestes, ils seraient entre 200 et 300. Tout a commencé avec quatre instructeurs. Leurs photos ont été activement publiées dans les médias français. Sur le plan purement militaire, il s'agit pour l'instant d'établir un contrôle total de l'autoroute Bamako-Timbuktu (Tombouctou). C'est là qu'a eu lieu le premier affrontement, auquel, vraisemblablement, les Russes ont pris part. Un convoi de l'armée malienne est tombé dans une embuscade près de Bandiagara, dans le centre du pays. Il a été rapporté qu'un véhicule blindé de transport de troupes avait sauté par-dessus une mine, après quoi une fusillade a eu lieu et l'un des Russes aurait été blessé. On parle de plusieurs djihadistes tués au Mali, mais ce qui est absolument certain, c'est qu'il n'y avait pas de "prisonniers" parmi les Russes.
Des sources françaises insistent sur le fait que la nouvelle direction militaire du Mali mène délibérément une opération visant à chasser la France de la région et coordonne virtuellement cette ligne avec plusieurs pays voisins. Après l'expulsion démonstrative de l'ambassadeur de France de Bamako, voici ce qu'il en est à Paris. Aujourd'hui, le quartier général de l'opération militaire française (si on peut encore l'appeler ainsi) est transféré en Côte d'Ivoire, fidèle à Paris, dans la plus grande ville de ce pays : Abidjan. Les Français s'enlisent. D'une part, l'opération militaire en Afrique de l'Ouest a effectivement échoué. D'autre part, d'une certaine manière, il ne faut pas l'admettre. Mettre fin à l'opération Barkhane et s'envoler, c'est perdre la face et, de plus, admettre que les tactiques russes se sont avérées plus efficaces.
Pour être tout à fait honnête, il n'est toujours pas clair dans quelle mesure les Russes sont plus efficaces au Mali que les Français qui avancent péniblement dans les dunes depuis des décennies. Il ne sera possible de fournir des estimations précises qu'à la fin de cette année, lorsqu'il sera possible de former quelque chose de prêt au combat dans les FAMA, comme cela a été fait en RCA. Quoi qu'il en soit, la situation en Afrique de l'Ouest a radicalement changé, mais pas en faveur de la France, et ce avec l'aide de centaines de Russes (le fameux "garde forestier"). Si cette tendance se poursuit, les perspectives de sauver la face pour Paris seront de plus en plus minces".
Traduction par Alessandro Lattanzio
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mercredi, 09 février 2022
L'Asie centrale devient une plateforme de coopération entre la Russie, l'Inde et la Chine
L'Asie centrale devient une plateforme de coopération entre la Russie, l'Inde et la Chine
Vladimir Platov
Source: http://aurorasito.altervista.org/?p=22414
L'Asie centrale (AC), en raison de sa position géostratégique au carrefour de l'Europe et de l'Asie, de sa proximité avec les principaux acteurs internationaux tels que la Russie et la Chine, de sa richesse en ressources naturelles et des opportunités commerciales et économiques qui n'ont pas encore été pleinement exploitées, a récemment suscité un intérêt croissant de la part des acteurs internationaux. Afin de créer une position stable dans la région et de rompre les liens traditionnels de longue date des pays d'Asie centrale avec la Russie et la Chine, les États-Unis et leurs alliés de l'OTAN préfèrent recourir à la politique de provocation et à l'activité accrue des services de renseignement occidentaux. Ils appliquent notamment le soft power ou lancent des attaques avec l'aide de terroristes spécialement formés (comme cela s'est produit notamment lors des événements au Kazakhstan), et incitent aux conflits ethniques, comme l'escalade à la frontière entre le Kirghizistan et le Tadjikistan. La Russie, la Chine et, dernièrement, l'Inde agissent différemment en Asie centrale : elles cherchent à renforcer la coopération culturelle, commerciale, économique et politique fondée sur la responsabilité partagée de la sécurité et du développement harmonieux de la région, à laquelle ces trois États sont le plus étroitement liés.
Pour Pékin, la région d'Asie centrale est particulièrement importante, notamment pour empêcher le fondamentalisme islamique de pénétrer dans ces pays et de déborder sur la RPC. Il est également important pour Pékin de créer une infrastructure fiable en Asie centrale pour l'envoi de marchandises chinoises à l'étranger et pour assurer la sécurité énergétique de la Chine : c'est en Asie centrale que Pékin achète de grandes quantités de gaz, de pétrole et d'uranium. Les échanges commerciaux de la Chine avec les cinq pays d'Asie centrale ont atteint 40 milliards de dollars en 2018. Le 25 janvier, le président Xi Jinping a présidé une réunion en ligne avec les dirigeants d'Asie centrale pour célébrer le 30e anniversaire des relations diplomatiques entre les pays d'Asie centrale et la Chine et a promis d'importer davantage de produits agricoles et d'autres biens de haute qualité, de porter le commerce bilatéral avec la région à 70 milliards de dollars d'ici 2030, de fournir 500 millions de dollars d'aide, 50 millions de doses de vaccins et 1200 bourses d'études aux étudiants. Le dirigeant chinois a également évoqué plusieurs projets communs d'importance stratégique : le gazoduc Chine-Asie centrale, l'oléoduc Chine-Kazakhstan, l'autoroute Chine-Kirghizistan-Ouzbékistan et l'autoroute Chine-Tadjikistan.
Après Xi Jinping, le Premier ministre Narendra Modi a également organisé un sommet en ligne le 27 janvier pour marquer le 30e anniversaire des relations diplomatiques avec les pays de l'AC, qui a également été célébré en Inde. Les résultats, ainsi que l'importance du développement et de l'approfondissement des relations avec les pays d'Asie centrale pour New Delhi, ont été largement repris dans les médias indiens. En particulier, il a été noté que New Delhi avait établi des liens spéciaux avec certains pays d'Asie centrale au cours des dernières années. Par exemple, des troupes kazakhes font partie du bataillon indien de maintien de la paix des Nations unies au Liban. Au Kirghizstan, l'Inde a construit cinq centres de télémédecine, a accordé des prêts d'un montant de 200 millions de dollars, organise l'exercice militaire annuel de Khanjar et compte une communauté de 15.000 étudiants. Avec le Tadjikistan, New Delhi coopère étroitement dans le domaine de la défense. L'Inde a prêté 1 milliard de dollars à l'Ouzbékistan, a approuvé quatre projets d'une valeur de 450 millions de dollars et investit 50 millions de dollars dans la création d'une usine pharmaceutique. Au Turkménistan, l'Inde a construit un centre informatique. Avant cela, l'Inde avait signé un accord de défense et de technologie militaire avec le Kazakhstan, mis en place une équipe conjointe de lutte contre le terrorisme avec l'Ouzbékistan et conclu des accords de coopération militaire avec le Kirghizstan et le Turkménistan. En développant la coopération en matière de défense avec la région, l'Inde vise clairement à devenir un fournisseur d'armes pour cette partie du monde, dans l'espoir qu'en utilisant des armes russes, les pays de la CA achèteront des pièces de rechange et des composants que l'Inde produit.
Le sommet s'est concentré sur des propositions visant à accroître les échanges, les liens commerciaux, la coopération culturelle et, bien entendu, à contrer la menace du terrorisme, qui s'est intensifiée depuis le retrait des États-Unis d'Afghanistan. Narendra Modi a noté que ces événements ont montré la nécessité d'une plus grande interaction. Les médias indiens ont rappelé que le ministre en chef indien avait visité les républiques de la région en 2015. Et en décembre 2021, un dialogue a eu lieu au niveau du ministère des affaires étrangères entre les cinq pays et l'Inde, axé sur l'Afghanistan, la pandémie et les relations mutuelles. New Delhi se positionne comme un acteur majeur en Afghanistan et en Asie centrale, en s'appuyant sur l'accès aux ressources énergétiques, conformément à la déclaration faite il y a 30 ans. New Delhi espérait activer un corridor de transport à partir du port de Chabahar en Iran, puis à travers l'Afghanistan. Cependant, en 2019, l'Inde s'est rangée du côté des États-Unis dans le différend entre l'Iran et les États-Unis en adhérant aux sanctions américaines, l'Iran ayant un avis contraire et certains projets, notamment le port de Chabahar, étant gelés. Comme la Chine, l'Inde ne souhaite raisonnablement pas que la région d'Asie centrale devienne un refuge pour les islamistes. Elle craignait également la formation d'un bloc de pays musulmans en Asie centrale, en Afghanistan, au Pakistan et en Turquie, dont New Delhi était convaincu qu'il aurait un parti pris anti-indien. Elle a donc agi de manière décisive, en essayant d'obtenir une base aérienne au Tadjikistan et en envoyant des conseillers militaires en Afghanistan.
Selon les rapports officiels de New Delhi, l'un des principaux résultats du sommet en ligne lancé par Modi le 27 janvier a été un accord entre les dirigeants de l'Inde et des pays d'Asie centrale pour tenir des sommets tous les deux ans, faisant de l'Asie centrale le point culminant de l'engagement diplomatique de New Delhi avec tous les pays de la région ces dernières années, selon le ministère indien des affaires étrangères. Le sommet a accueilli favorablement la proposition de l'Inde de créer un centre Inde-Asie centrale à New Delhi, qui servira de secrétariat aux réunions du sommet, selon la déclaration de Delhi adoptée à l'issue du sommet. En outre, les parties ont noté l'importance de l'idée de créer un forum parlementaire Inde-Asie centrale. Le sommet en ligne a soutenu la proposition de l'Inde d'inclure le port iranien de Chabahar dans la structure du corridor de transport international Nord-Sud, ainsi que l'initiative du Turkménistan d'inclure également le port de Turkmenbashi. En outre, la partie indienne a salué l'intérêt des dirigeants d'Asie centrale pour l'utilisation du terminal Shahid Beheshti du port de Chabahar, dans le golfe d'Oman, qui est en cours de construction avec la participation active d'investisseurs indiens, facilitant ainsi les échanges avec l'Inde et d'autres marchés. En particulier, les États du Golfe expédiant des marchandises vers l'Europe occidentale et septentrionale à partir de l'Iran, de l'Azerbaïdjan et de la Russie, le fait de relier les chemins de fer des trois pays réduira le délai de livraison des marchandises de deux à trois fois grâce à l'utilisation de ce corridor.
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Les Kurdes et le Moyen-Orient
Les Kurdes et le Moyen-Orient
Source: https://katehon.com/ru/article/kurdy-i-blizhniy-vostok
Une compréhension adéquate des processus politiques au Moyen-Orient nécessite une connaissance détaillée du facteur kurde.
Ethnies et tribus kurdes
Les Kurdes sont un peuple indo-européen qui, à partir d'un certain moment, a commencé à jouer un rôle important dans la région qui englobe l'Anatolie orientale, la zone septentrionale de la Mésopotamie et le nord-ouest de l'Iran, une région précédemment peuplée par les Hourrites, qui se sont ensuite déplacés vers le nord dans le Caucase.
Les Kurdes sont les descendants des Mèdes, tribus iraniennes nomades, qui sont arrivés à la fin du IIe - début du Ier millénaire au nord-ouest de l'Iran moderne, où ils ont fondé un État appelé Mèdie. Au VIIe siècle avant J.-C., ils ont créé un immense empire, qui comprenait de nombreux peuples, territoires et langues. Le noyau des Mèdes est resté dans les mêmes territoires qui sont devenus le pôle initial de leur expansion, où se trouvait également leur capitale Ekbatana (la ville iranienne moderne de Hamadan). Les descendants directs des Mèdes, outre les Kurdes, sont les peuples caucasiens des Talyches et des Tats (qu'il convient de séparer strictement des Juifs des montagnes).
Comme les Kurdes vivaient sur le territoire des anciens Hourrites et Urartéens, qui étaient également des Arméniens et des Kartvéliens assimilés, on peut supposer qu'il y avait une composante hourrite dans leur ethnogenèse. Parallèlement, des populations captives des Guties (Tochars), des Kassirs et des Lullubéens, que certains historiens considèrent comme des Indo-Européens, vivent depuis des temps immémoriaux dans les montagnes du Zagros, au nord-ouest de l'Iran. Ils peuvent également avoir participé à l'ethnogenèse des Mèdes et des Kurdes. Le nom ancien des Kurdes était "kurtii", en grec Κύρτιοι, et des références à eux en tant que peuple habitant les régions de l'Atropatène (Azerbaïdjan) et du nord de la Mésopotamie ont survécu dans les sources anciennes.
Dans les chroniques persanes, le terme "kurt" (kwrt) désigne les tribus iraniennes nomades habitant le nord-ouest de l'Iran, ce qui permet d'inclure les Kurdes dans la typologie des sociétés touraniennes.
En haut, Mèdes; montagnes du Zagros en Iran.
On peut distinguer plusieurs groupes parmi les Kurdes :
- Les Kurdes du nord, qui forment la base du peuple kurde actuel - les Kurmanji (kurmancî), dont le nom - kur mancî - est interprété comme "fils du peuple de Midian/Mèdie" ;
- La partie sud des Kurdes de Kurmanji est désignée par l'ethnonyme iranien Sorani ;
- Un groupe distinct est constitué par les Kurdes de Zaza, qui se nomment eux-mêmes dımli, dymli, et sont les descendants des peuples du nord de l'Iran qui vivaient autrefois dans la région de Dailam, au sud de la mer Caspienne (ces peuples étaient appelés "kaspiens") ;
- Le peuple kurde Ghurani, qui a également habité la région de Daylam mais a ensuite migré plus au sud que les Kurdes de Zaza, a la même origine ;
- Les plus méridionaux sont les Kurdes Kelhuri, ainsi que les tribus Feili et Laki, dont la situation est similaire,
- Auparavant, les Luriens qui vivaient dans le sud-ouest de l'Iran étaient comptés parmi les Kurdes, et aujourd'hui ils sont communément appelés Iraniens.
Il existe également une hypothèse selon laquelle les Kurdes et les Baloutches seraient apparentés.
Contrairement aux autres peuples iraniens, les Kurdes ont longtemps conservé un mode de vie nomade, ce qui, combiné à leur habitat montagneux, leur a permis de garder intactes de nombreuses caractéristiques archaïques, entretenant ainsi un lien continu avec la culture turque.
Les Kurdes constituent aujourd'hui un peuple important (plus de 40.000.000) qui vit sur le territoire de quatre États - la Turquie, l'Irak, la Syrie et l'Iran - mais ne dispose pas de son propre statut d'État. C'est aussi un indicateur de la préservation par les Kurdes d'une société traditionnelle, moins touchée par la modernisation que les peuples parmi lesquels les Kurdes vivent. Cependant, les processus de modernisation les atteignent également, ce qui a créé un "problème kurde" au siècle dernier, c'est-à-dire qu'il a soulevé la question de la création d'un État kurde séparé, car dans la Modernité politique, on ne peut pas penser à un peuple en dehors de l'État, c'est-à-dire à une nation politique.
"Midia" et les polities kurdes médiévales
Dans la tradition kurde, il y a l'idée de leur lien avec l'Arche de Noé. Parce que les Kurdes vivaient dans les régions adjacentes au mont Ararat, ils se considèrent comme les descendants directs des habitants du village situé à son pied, que Noé a fondé lorsqu'il est descendu dans la vallée à la fin du Déluge. Cette même légende d'une présence autochtone et originelle dans les zones situées entre la mer Noire et la mer Caspienne, dans la région du mont Ararat, se retrouve chez d'autres peuples caucasiens - notamment les Arméniens, les Géorgiens et les Tchétchènes, qui - chacun selon sa logique ethnocentrique - y trouvent un certain nombre de preuves symboliques. Les Kurdes du XXe siècle justifient cela par leur descendance des Urartéens et des Hourrites, ce qui est pourtant généralement vrai des Arméniens, des Kartveliens et des Vainakhs, dont l'ethnogenèse - bien qu'à des degrés divers - inclut les Hourrites. Cependant, l'identité kurde proprement dite est touranienne (tribus nomades indo-européennes) et plus spécifiquement "midienne".
Si l'on admet un lien génétique direct entre Kurdes et Moussiens [1], on peut les considérer comme porteurs d'une tradition étatique ancienne, antérieure à la Perse et revendiquant la succession à l'empire mondial après la prise conjointe de l'Assyrie avec les Chaldéens de la Nouvelle Babylone. Mais aux époques suivantes, à partir des Achéménides, l'Iran était aux mains des Perses, qui habitaient les territoires du sud de l'Iran, et les terres de Midia, ainsi que l'Arménie et d'autres territoires, n'étaient que des provinces iraniennes.
À une certaine époque - après la mort d'Alexandre le Grand - les tribus nomades (touraniennes) des Parthes qui ont fondé la dynastie parthe sont également devenues les maîtresses de l'Iran, mais la base culturelle reste toujours les traditions spécifiquement persanes, ce qui devient encore plus prononcé à l'époque sassanide. Néanmoins, il existe une théorie, partagée par de nombreux historiens, selon laquelle les Parthes et les Kurdes sont apparentés, car tous deux habitaient les territoires du nord de l'Iran et appartenaient à des peuples indo-européens nomades. Par la suite, les peuples du nord de l'Iran et de l'Atropatène (Azerbaïdjan) se retrouvent à la périphérie de ce processus, et lors de la vague suivante de création d'un État iranien, venant tout juste du nord sous les Safavides, les Turcs iraniens (chiites-kizilbashi) s'avèrent être la base de l'élite politique. Les Kurdes ne jouent pas un rôle majeur dans ce processus.
Historiquement, les Kurdes, descendants des Mèdes, étaient zoroastriens, et la religion zoroastrienne de l'Iran sassanide était traditionnelle pour eux.
Dès le premier siècle de notre ère, le christianisme a commencé à être prêché parmi les Kurdes. Eusèbe de Césarée rapporte que Thomas l'Apôtre a prêché parmi les Midians et les Parthes. Comme les Kurdes chrétiens vivaient dans les régions orientales, le nestorianisme s'est ensuite répandu parmi eux, ce qui les a intégrés à l'Église iranienne. Il y avait de nombreux centres influents de la religion nestorienne au Kurdistan, qui ont joué un rôle important à cette époque - le centre d'Erbil au 16ème siècle, Jezir au 17ème siècle, quant à la ville kurde de Kujan est devenue le centre d'un diocèse nestorien au 19ème siècle [2]. Le miaphysisme se répand également (cette fois sous l'influence des Arméniens).
À partir du VIIe siècle de notre ère, lorsque l'Iran a été envahi par les Arabes, qui ont atteint le Caucase et le sud de la mer Caspienne, c'est-à-dire ont occupé tout le territoire historiquement habité par les Kurdes, ces derniers se sont retrouvés sous l'autorité du califat arabe et, respectivement, sous l'influence islamique [3]. Ainsi, les Kurdes ont d'abord opposé une résistance farouche aux Arabes lors de la conquête de Holwan, Tikrit, Mossoul, Jizra et de l'Arménie du Sud, puis ils ont constamment pris part aux révoltes anti-arabes. Petit à petit, cependant, les Kurdes eux-mêmes ont commencé à se convertir à l'Islam. Parmi eux, l'islam sunnite du mazkhab shafiite est le plus répandu, ce qui les rapproche des musulmans du Daghestan et du Caucase du Nord dans son ensemble. Une petite minorité de Kurdes pratique le chiisme. À l'époque de la propagation du soufisme (IXe siècle), les Kurdes ont volontiers accepté ses enseignements, et le soufisme, dans ses deux principales versions, naqshbandiya et kadyriya, est devenu partie intégrante de l'islam kurde. Cependant, le soufisme ne s'est pas répandu avant le XVIe siècle.
À certaines périodes, les Kurdes ont créé des formations politiques de grande envergure et fondé des dynasties dirigeantes. L'une de ces dynasties kurdes était les Shaddadides, qui ont établi un État indépendant sur le territoire de l'Albanie caucasienne aux XIe et XIIe siècles. Les Saddadides pratiquaient l'islam sunnite et se présentaient comme des adeptes de l'islam, contrairement à la Géorgie et à l'Arménie chrétiennes. En 1072, la dynastie se divise en deux branches : Ganja et Ani. La population des émirats de Ganja et d'Ani était majoritairement arménienne et la culture majoritairement persane.
Les Shaddadides ont régné jusqu'à la fin du XIIe siècle. Plus tard, les Kurdes ont reconnu la domination des Seldjoukides, avec lesquels ils étaient alliés, et ont obtenu le droit de créer une autre entité vassale, l'émirat d'Ani.
Une autre dynastie kurde a été fondée dans la province du Jebel en 959 par le chef kurde de la tribu des Barzikan, Hasanwayhid bin Hasan, qui a été renversé par les Bouyides.
Une autre dynastie, la plus célèbre, fut celle des Mervanides (de 990 à 1096). Cette dynastie kurde a été fondée par Abu Ali bin Mervan bin Dustak.
Salah ad-Din (1138 - 1193), le plus grand chef militaire du XIIe siècle, qui était d'origine kurde et appartenait à la même tribu Ravadi, que le fondateur de la dynastie des Shaddadides - Mohammed Shaddad ben Kartu devrait être mentionné séparément.
Salah ad-Din dépose le dernier souverain chiite de l'État fatimide, élimine le califat fatimide, conquiert face aux croisés d'immenses territoires du Moyen-Orient, dont la Terre sainte, et devient le sultan d'Égypte, d'Irak, du Hedjaz, de Syrie, du Kurdistan, du Yémen, de Palestine et de Libye, établissant la dynastie ayyoubide, qui existera jusqu'en 1250. Mais Salah ad-Din, dans ses exploits, ne parle pas au nom des Kurdes en tant que communauté, mais au nom des Seldjoukides, au service desquels il était et sur l'armée desquels il comptait.
Néanmoins, le fait même de l'existence de dynasties kurdes confirme le modèle classique des débuts turaniens : les nomades indo-européens belliqueux sont souvent devenus les fondateurs de dynasties ou l'élite militaro-politique d'États sédentaires.
La région habitée par les Kurdes jusqu'au XIIIe siècle était appelée "Jebel" par les Arabes. (littéralement, "Hautes Terres"), plus tard, il sera connu sous le nom de "Kurdistan". Au début du XVIe siècle, il existait de petites principautés ou émirats kurdes au Kurdistan : Jazire, Hakari, Imadia, Hasankayf, Ardelan (au Kurdistan iranien), Soran et Baban. En plus de ceux-ci, il y avait des fiefs plus petits. En outre, depuis le début du Moyen Âge (de 1236 à 1832), les Kurdes yézidis possédaient un petit émirat dans le nord de la Mésopotamie, le Sheikhan. L'"État idéal" des Yazidis, en partie politique et administratif, en partie ethno-religieux, comprenait Sheikhan et Sinjar, ainsi que la vallée sacrée de Lalesh, où se trouve le principal sanctuaire yazidi - la tombe de Sheikh Adi, le fondateur de la religion kurde du yazidisme [4].
Après l'établissement de la dynastie safavide, les Iraniens ont commencé à détruire délibérément l'indépendance des principautés kurdes. Le souvenir de la résistance héroïque des Kurdes est conservé dans les légendes kurdes sur la défense de la forteresse de Dymdim. Après la défaite du Shah par les Ottomans de Selim Ier, la majeure partie du Kurdistan est passée sous l'autorité des Turcs, qui ont également commencé à abolir les principautés kurdes autonomes.
Au cours des conquêtes mongoles, la plupart des régions peuplées de Kurdes sont passées sous la domination des Halaguidés, et après l'écrasement de la résistance kurde, de nombreuses tribus kurdes ont quitté les plaines pour les régions montagneuses, reproduisant en partie le scénario de civilisation des peuples caucasiens, dont les Kurdes étaient très proches à bien des égards. Certains Kurdes se sont également installés dans le Caucase.
Plus tard, les territoires kurdes se sont retrouvés dans la zone frontalière entre la Turquie ottomane et l'Iran [5], ce qui a eu un effet douloureux sur la rupture de l'horizon culturel unique et a donné une dimension tragique au Dasein kurde [6]. Les descendants directs des grands Midi/Mèdes, qui ont dirigé l'empire mondial, ont été privés du pouvoir politique et déchirés entre deux empires en guerre, dont aucun n'a été favorable aux Kurdes jusqu'à la fin du leur. Avec les Iraniens, ils étaient liés par leur ascendance indo-européenne, leurs anciennes racines zoroastriennes et la proximité de leur langue, et avec les Turcs par le sunnisme et un lien commun de "guerrièrisme" nomade, ce qui en faisait des alliés même à l'époque seldjoukide.
Le yazidisme et ses strates
La plupart des Kurdes appartiennent à l'islam sunnite, mais dans tous les cas, les Kurdes ressentent vivement leur différence par rapport aux autres peuples, gardant leur identité inchangée. Cette identité est l'horizon kurde, qui depuis des siècles est étroitement lié aux montagnes et au paysage d'accueil montagneux. Comme les Kalash et les Nuristanis, les Kurdes ont conservé de nombreux traits archaïques des peuples indo-européens du Touran, et ne se sont jamais complètement mélangés avec les Perses sédentaires (majoritairement chiites) ou les Turcs sunnites, malgré des contacts culturels étroits et de longue date avec les uns et les autres.
Cette identité kurde s'exprime le plus clairement dans le phénomène hétérodoxe (d'un point de vue islamique) du yézidisme, un mouvement religieux particulier et unique parmi la branche nord des Kurdes, les Kurmanju. Ce courant est lui-même apparu comme une ramification du soufisme au XIIe siècle, sur la base des enseignements du cheikh soufi Adi ibn Musafir (1072 - 1162), venu au Kurdistan irakien de la région de Balbek au Liban. Le cheikh Adi connaissait des figures majeures du soufisme comme al-Ghazali et Abdul-Qadir al-Gilani, le fondateur de la tariqat qadiriyyah. Les Yazidis eux-mêmes croient que Sheikh Adi, qu'ils révèrent comme l'incarnation de la divinité, n'a fait que réformer et renouveler conformément au mandat divin l'ancienne foi, qu'ils appellent "Sharfadin".
Les enseignements des Yazidis ne sont pratiquement pas étudiés en raison de la nature fermée de ce groupe religieux, qui se tient à l'écart non seulement des autres confessions et peuples, mais aussi de la majorité des Kurdes, et qui est très réticent à communiquer les fondements de sa foi. Une légende veut que les Yazidis possèdent des collections de textes sacrés, que les représentants des castes supérieures - les cheikhs et les pirs - cachent soigneusement aux autres. Seuls deux de ces textes - manifestement fragmentaires et composés d'éléments hétérogènes - ont été connus et traduits dans les langues européennes : le " Livre des Révélations " (Kitab-ol-Jilwa) et le " Livre noir " (Mashaf-Resh). Ils ont été publiés en anglais en 1919 [7], et en russe leur compte rendu est paru en 1929 [8]. Dans l'ensemble, cependant, la religion yazidie est restée pratiquement inconnue jusqu'à aujourd'hui.
Certains détails de la théologie religieuse yézidie ont donné aux peuples environnants, notamment aux musulmans, l'impression que le culte yézidi vénère Shaitan (le diable chrétien). Cependant, cette tradition est certainement quelque chose de plus complexe, bien qu'elle se distingue nettement de l'Islam - même dans sa forme soufie.
Il existe plusieurs versions de l'origine de la religion yazidie, qui peuvent être considérées non pas comme mutuellement exclusives, mais comme correspondant à différentes couches de cette tradition.
La couche la plus profonde est le zoroastrisme, qui se manifeste dans la doctrine des sept archanges (Amesha Spenta du mazdéisme), dans le culte du feu, dans le culte du soleil, et même le principal symbole des Yezidis - le grand paon, parfois représenté simplement par un oiseau (les Yezidis dans le "Livre noir" s'appellent Angar) - peut être une version de l'image de l'oiseau sacré zoroastrien Simurg. Tous les Kurdes en général (y compris les Yezidis) admettent qu'avant l'adoption de l'Islam ils pratiquaient la religion zoroastrienne, donc ilspréservaient dans les montagnes indo-européennes des fragments de l'ancienne foi, ce qui semble tout à fait naturel. Les vêtements sacrés des Yézidis sont également proches de la tenue zoroastrienne : une chemise blanche (kras) avec un col spécial brodé (toka yezid ou grivan) et une longue ceinture sacrée en laine (banne pshte), appelée "kusti" par les Zoroastriens.
Le nom Yezid est dérivé du fils du premier calife omeyyade, Muwiya I Yazid. Les Yazidis eux-mêmes soulignent parfois que le réformateur (ou fondateur) de leurs enseignements, Sheikh Adi, était lui-même un descendant de Muawiya par Yazid. Yazid était un adversaire majeur de l'Imam Ali et de sa famille et est considéré comme responsable de la mort de l'Imam Hussein. Pour cette raison, il n'est pas très populaire auprès des musulmans, et les chiites le détestent ouvertement et avec véhémence. En même temps, les traces du Yazid historique ont été presque complètement effacées par les Yazidis, le pathos anti-chiite est absent, et Yazid ou Yazid lui-même est considéré comme une divinité céleste (peut-être la plus haute). En effet, l'étymologie iranienne interprète le mot Yazid ou Yezid comme un mot moyen persan yazad ou yazd (de la base iranienne ancienne *yazatah"), signifiant "divinité", "ange", "être digne de culte". Par conséquent, le nom même de "Yazidis" peut être interprété comme "peuple des anges" ou "peuple du culte", mais aussi comme "peuple de Yazd", c'est-à-dire "peuple de Dieu".
Mais la trace la plus frappante du zoroastrisme est la fermeture complète de la communauté yézidie, fondée sur les castes. Elle est strictement divisée en trois castes - deux sacerdotales (cheikhs et pirs) et une séculière (mrid), bien que la caste séculière, à laquelle appartiennent la plupart des Yezidis, représente par définition les adeptes des maîtres spirituels et soit la plus étroitement liée aux deux plus hautes. Ainsi, chaque mrid (simple yazid) doit avoir un "frère dans l'au-delà", qui ne peut être qu'un membre de la caste des cheikhs et des piers. Le "frère dans l'au-delà" est censé aider le yézid décédé à franchir le pont mince (l'équivalent direct du pont Chinwat zoroastrien) pour entrer au paradis. Les castes sont strictement endogènes, et il est strictement interdit à tous les Yazidis de se marier ou même d'avoir des relations extraconjugales avec des membres d'une autre caste. Cela se justifie par le fait que les Yezidis appartiennent à un type spécial de personnes, radicalement - ontologiquement - différent du reste. La légende yézidie raconte que les premiers êtres humains Adam et Eve, qui ne connaissaient pas le mariage, ont essayé de produire une descendance à partir de leurs propres graines en les plaçant dans deux jarres. Après 9 mois, des bébés mâles et femelles sont apparus dans la cruche d'Adam à partir de sa semence, et dans la cruche d'Eve à partir de sa "semence", des vers puants sont apparus. Les Yezidis croient qu'ils continuent la lignée de ces enfants d'Adam créés sans femelles. Le reste du peuple est issu des enfants ultérieurs d'Adam, déjà conçus par Eve. On retrouve ici le motif zoroastrien classique de la pureté sacrée des enfants de la Lumière, qui ne doivent en aucun cas se mêler aux enfants des Ténèbres. D'où l'endogamie rigide des castes.
La première des trois règles principales de la religion yazidie est l'interdiction du mélange des castes. La deuxième règle est l'interdiction de changer de religion. La troisième est l'interdiction de la désobéissance aux prêtres et plus encore de la violence à l'encontre des membres du Sheikh et des castes de fétiches.
Tous ces éléments, qui sont essentiels et fondamentaux pour la religion yézidie et son organisation ethno-politique, remontent directement au zoroastrisme classique.
En même temps, il y a un trait curieux dans les mythes et légendes des Yezidis qui a, cette fois, des racines touraniennes. Elle concerne l'interdiction des cultures céréalières. La chute même d'Adam n'est pas décrite comme une conséquence de la consommation d'une pomme, mais comme une conséquence de la consommation de céréales interdites par Dieu. Il s'agit d'une caractéristique classique de la société nomade, qui percevait les céréales - partie intégrante de la culture agricole - comme un domaine interdit, une sorte d'"enfer pour le nomade". Pour un porteur d'une culture purement touranienne, manger du pain est un péché. La même parcelle a été préservée chez le peuple indo-européen Talyche, proche des Kurdes par la langue et la culture, mais contrairement aux Kurdes (principalement du sud - Zaza et Gurani), les Talyches n'ont pas quitté leurs territoires et ne se sont pas déplacés de la mer Caspienne vers la Mésopotamie, l'Anatolie et le Moyen-Orient, restant sur la terre d'Azerbaïdjan. Ainsi, une trace touranienne prononcée s'ajoute au zoroastrisme classique dans le yézidisme kurde.
On peut en outre distinguer certains éléments de l'iranisme hétérodoxe combinés à des motifs judéo-chrétiens. Les courants judéo-chrétiens sont proches de l'iranisme tant au niveau génétique que conceptuel dans leur structure. Inversement, les sectes judéo-chrétiennes ont eu une grande influence sur le manichéisme. Nous voyons des traces du judéo-christianisme chez les Yezidis dans les rites préservés du baptême et de la communion avec le vin lors d'un repas sacré. En outre, les Yezidis pratiquent la circoncision, qui correspond également au cycle judéo-chrétien. Le fait que le principal sanctuaire yézidi de Lalesh était autrefois un monastère nestorien s'inscrit donc bien dans cette séquence. Ces mêmes courants hétérodoxes irano-chrétiens (comme les Mandéens, les Sabéens, etc.) étaient également caractérisés par des motifs gnostiques, que l'on retrouve en abondance chez les Yézidis. Cette couche a, cette fois, une origine moyen-orientale et se superpose à une identité tourano-iranienne plus ancienne.
Enfin, les influences islamiques proprement dites constituent la dernière couche de la religion complexe des Yézidis. On retrouve ici les traditions soufie et chiite. La pratique même de l'adoration du Sheikh en tant que kutb, le poteau, est associée au soufisme. Un rôle majeur dans la métaphysique yazidi est joué par l'image de la perle blanche, dans laquelle l'essence divine s'est incarnée avant même le début de la création. Ce thème est central dans l'ontologie soufie, développant la thèse du hadith selon lequel "Dieu était un trésor caché (la perle) mais voulait être connu". Cette image joue un rôle majeur dans les enseignements du Shi'ite Nusayri. L'islam chiite est également associé à la notion d'importance particulière du premier cercle des disciples du cheikh, qui, dans l'islam chiite, a été transféré à la famille de Mahomet et surtout à la famille de l'imam Ali.
Dans les enseignements des Yazidis, une attention particulière est portée à l'ambiguïté du principal gestalt sacré, l'Ange-Paulin (Malaki-Ta'uz), identifié à l'ange juif Azazil. Dans la Kabbale juive, le même nom (Aza, Azazil) est utilisé pour le démon de la mort. Les textes yézidis soulignent que dans les autres religions, qui ont pour origine Adam et Eve et pas seulement Adam, comme les Yézidis eux-mêmes, l'ange-Paulin est mal compris comme un "ange déchu". C'est l'aspect le plus inquiétant de la religion yézidie, qui a conduit d'autres cultures à les considérer comme des adorateurs du diable. D'une part, l'oiseau primordial peut être rattaché à la tradition indo-européenne, aux oiseaux sacrés des Scythes, au Garuda des Hindous, au Simurg des Perses et à l'aigle de Zeus des Hellènes. Mais nulle part cette image ne souffre de la moindre ambiguïté et est considérée comme un attribut de la plus haute divinité céleste.
Mais nous rencontrons la diabolisation de l'aigle en dehors du contexte indo-européen chez les peuples adyguéens et abkhazes du Caucase, où l'aigle de fer du dieu maléfique Paco devient la victime du héros "positif" Bataraz, et où il existe une image encore plus expressive de la "Tha des oiseaux de proie", à l'image de laquelle apparaît la tête des anges déchus. La proximité géographique des Caucasiens et des Kurdes, et les liens communs avec le substrat hourrite, suggèrent une autre dimension de la religion kurde yazidie responsable de ses aspects " sombres " ou du moins ambigus.
A cette ambiguïté s'ajoute la subtile dialectique de la métaphysique soufie d'al-Khallaj, qui contient une sorte de justification d'Iblis (le Diable), qui a refusé de se prosterner devant Adam non par orgueil, mais par Amour absolu pour Dieu qui ne permet aucun intermédiaire. Ce thème est en accord avec les motifs gnostiques de la Sophia déchue. Bien que chez les Yezidis ce thème ne soit pas directement souligné, la structure gnostique de leur tradition et certaines allusions antinomiennes - par exemple, l'intrigue du Livre noir des Yezidis, où c'est Malaki-Ta'uz qui encourage Adam à violer l'interdiction divine de manger du grain - permettent une telle interprétation.
Dans l'ensemble, la religion des Yezidis reflète une identité kurde profonde qui remonte au fond des âges. L'analyse de ce que les critiques extérieurs reprochent aux Yazidis et de ce qui constitue des aspects ambigus de leur religion repose en grande partie sur une mauvaise compréhension de sa structure interne, ainsi que sur une mauvaise interprétation des figures et des images individuelles, ce qui est exacerbé par une nature véritablement syncrétiste et fermée des Yazidis, rendant difficile la compréhension de la morphologie intégrale de leurs enseignements.
Les Kurdes chiites
L'identité kurde se manifeste de manière tout à fait différente à l'autre extrémité du spectre religieux - chez les Kurdes chiites. Il convient ici de distinguer deux courants : les Kurdes alévis, les plus nombreux parmi l'ethnie Zaza (mais aussi parmi les Kurdes du nord - les Kurmanji), et les Kurdes partageant la doctrine des Ahli Haq (littéralement, "peuple de la vérité").
Les Alévis sont un ordre chiite-soufi qui est apparu au XIIIe siècle dans le sud-est de l'Anatolie, à proximité de l'école fondée par Hadji Bektash et qui est devenue par la suite la base religieuse de la "nouvelle armée" des sultans ottomans - les janissaires. Les Alévis ont poursuivi la tradition du soufisme iranien extrême (Gulat), centrée sur la vénération d'Ali et des Imams, et de Salman Fars en tant que figure clé particulière de la gnose lumineuse iranocentrique.
Plus tard, aux quinzième et seizième siècles, les Alévis ont été rejoints par les branches turques des Qizil Bash, qui sont devenues le fondement de la dynastie safavide d'Iran, mais dans les territoires turcs sous contrôle sunnite, ils ont dû s'adapter à des conditions hostiles et dissimuler leur identité. De même, les Kurdes ont vu dans l'alévisme la possibilité de rester dans la société ottomane, où un islam zahirite agressif et plutôt intolérant est devenu la force dominante après Sélim Ier, car l'alévisme était respecté par les dirigeants ottomans - en tant qu'idéologie religieuse originelle des premiers dirigeants ottomans et base spirituelle de la plus importante institution militaro-politique et religieuse de l'Empire ottoman - l'armée des janissaires et l'ordre bektashi.
D'autre part, les Kurdes voyaient dans l'alévisme de nombreux traits proches de la tradition zoroastrienne, ce qui rendait leur participation à ce courant justifiée en termes de préservation de leur identité indo-européenne originelle. Un certain nombre de caractéristiques rituelles rapprochent les Alévis kurdes des Yazidis. Parmi elles, on trouve par exemple le principe de l'endogamie stricte - les Kurdes alévis ont le droit de n'épouser que des membres de la communauté alévie, préservant ainsi la pureté des "enfants de la Lumière" sur laquelle se fondent la tradition mazdéenne et diverses versions ultérieures de l'iranisme.
Un autre courant du shi'isme radical (gulat) est l'Ahli Haqq, fondé par le sultan Sahak à la fin du quatorzième siècle. Cette tendance s'est répandue parmi les Kurdes du sud et surtout parmi les Kurdes d'Iran. La plupart d'entre eux appartiennent à l'ethnie Goran, mais il y a aussi des groupes importants d'Ahli Haqq dans les peuples kurdes de Kelhuri et de Lur. Un autre nom pour cette doctrine est Yarsan (Yâresân - littéralement, "communauté d'amoureux" ou "communauté d'amis").
La doctrine du mouvement Ahli Haqq est sensiblement la même que celle du yézidisme. Il affirme également l'idée de l'incarnation d'êtres supérieurs (Dieu ou les anges) dans une chaîne de sept messagers choisis. Ce thème est un classique de la prophéologie judéo-chrétienne et du manichéisme. Elle est également assez caractéristique du chiisme - en particulier du chiisme radical, où les membres de la famille de Mahomet et du clan de l'imam Ali sont considérés comme de telles incarnations. Les membres de l'Ahli-Haqq reconnaissent sept de ces incarnations successives, dont la deuxième et la troisième coïncident avec la lignée des séminaristes chiites, Ali et Hasan ("Shah Khoshen"). En général, il est facile d'identifier l'influence ismaélienne dans les enseignements d'Ahli Haqq (par exemple, la mention de Sheikh Nusayr parmi les assistants d'Ali). La première incarnation, cependant, est Havangdagar, par laquelle les membres de l'Ahli Haqq font référence à la divinité suprême elle-même. Chaque incarnation est accompagnée de quatre "anges amis" ou "anges aides" (yārsān-i malak), d'où le nom de toute la communauté Yarsan. La cinquième "aide" est l'ange féminin, une figure classique du zoroastrisme (fravarti). L'Ahli Haqq partage la doctrine soufie traditionnelle des quatre étapes de la connaissance de la vérité - shariah, tarikat, marifat et haqiqat, et des étapes du développement spirituel de l'âme respectivement. Les adeptes de cette école de pensée pratiquent le zikr soufi traditionnel.
Un trait irano-zoroastrien est l'idée de la dualité d'origine de l'humanité, qui rapproche également l'Ahli Haqq des Yazidis. Selon leur doctrine, les membres de la communauté Ahli-hakk ont été créés à l'origine à partir de "l'argile jaune" (zarda-gel), tandis que le reste de l'humanité est issu de la "terre noire" (ḵāk-e sīāh).
L'eschatologie d'Ahli Haqq reproduit généralement le chiisme classique : les élus attendent la venue de l'Homme du Temps, le Mahdi. Mais selon Ahli Haqq, le Mahdi doit apparaître parmi les Kurdes - dans la région kurde de Sultaniyah (province iranienne de Zanjan) ou à Shahrazur, la ville qui, selon les légendes kurdes, a été fondée par le roi Dayok (ou Dayukku), considéré comme le fondateur d'une dynastie de rois midiens. Ce détail souligne le caractère ethnocentrique de l'eschatologie kurde.
En même temps, comme chez les Yezidis, on constate l'influence des groupes judéo-chrétiens - on reconnaît notamment l'immaculée conception du fondateur (ou réformateur) de cette doctrine, le sultan Sahak, dont la tombe dans la ville de Perdivar est un centre de pèlerinage.
À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, l'un des chefs spirituels de l'Ahli Haqq, Hajj Nematallah, a beaucoup fait pour activer ce groupe, en publiant un certain nombre de textes religieux et poétiques, qui ont joui d'une grande popularité parmi les Kurdes - surtout le Shah-name-i haqiqat (Le livre de la vérité du roi).
Les Kurdes : identité et État
Bien que leurs origines remontent aux musulmans qui ont fondé le puissant Empire, et bien qu'ils aient parfois été les ancêtres de puissantes dynasties (comme les Ayubides), les Kurdes n'ont pas été en mesure de construire un État propre jusqu'à aujourd'hui.
Ils ont cependant apporté une contribution significative à la culture du Moyen Âge islamique, notamment dans le domaine de la poésie. Le premier poète kurde est considéré comme Piré Sharir, qui a vécu au 10e siècle et a laissé un corpus de courts poèmes aphoristiques, extrêmement populaires parmi les Kurdes. Un autre des premiers poètes kurdes est Ali Hariri (1009-1079). La première grammaire de la langue kurde a été compilée aux Xe et XIe siècles par un contemporain d'Ali Hariri, le poète Termuqi, qui a été le premier à écrire des poèmes en kurmanji. L'une des œuvres de Termuqi porte le même nom que la célèbre pièce de Calderon "La vie, en effet, est un rêve".
Plus tard au XVIe siècle, Mela Jeziri, un éminent poète kurde, a jeté les bases d'un courant soufi dans la poésie kurde, devenant un modèle pour les générations successives de poètes soufis kurdes. Dans toutes les élites intellectuelles kurdes, un accent particulier sur l'identité kurde est évident dès les premiers poètes. Au XVIIe siècle, un autre poète soufi kurde, Faqi Tayran (1590 - 1660), également appelé "Mir Mehmet", a rassemblé de nombreux contes populaires kurdes dans un recueil intitulé "Contes du cheval noir" (Kewlê Hespê Reş). Il est le premier à faire l'éloge de la défense héroïque de la forteresse de Dymdım en 1609-1610.
Les représentants de l'élite kurde commencent peu à peu à se rendre compte de l'anomalie - le fossé entre la grande histoire des Kurdes, le niveau de conscience de leur identité unique, leur militantisme et leur héroïsme d'une part, et la position subordonnée au sein d'autres empires - d'abord le califat arabe, puis la Turquie ottomane et l'Iran séfévide.
Ainsi, le plus grand poète kurde, Ahmed Khani (1650-1708) (tableau, ci-contre), auteur du célèbre poème épique des Kurdes, sur l'histoire d'amour tragique "Mam et Zin", est plein de tristesse pour l'État kurde disparu et de nostalgie pour la grandeur passée [9]. Ahmed Khani est considéré comme l'un des premiers idéologues du renouveau kurde et est connu comme un combattant de l'identité kurde, préparant la prochaine étape de l'éveil de la conscience nationale. Un autre grand poète kurde, Hadji Qadir Koy (1816-1894), a poursuivi cette tendance. Dans son œuvre, le désir de libération des Kurdes et d'établissement de leur propre État est encore plus contrasté et sans ambiguïté.
Au XIXe siècle, lorsque l'Empire ottoman a commencé à s'affaiblir et que nombre des peuples qui le composaient (Arabes, Grecs, Slaves, etc.) ont commencé à élaborer des projets d'indépendance, des sentiments similaires sont apparus chez les Kurdes. En 1898, le premier journal en kurde, Kurdistan, est publié au Caire. Plus tard, le journal Kurdish Day (rebaptisé plus tard Kurdish Sun) commence à être imprimé à Istanbul. Un magazine appelé Jin (Vie) est publié en turc, qui proclame ouvertement la volonté de créer un État kurde indépendant.
À la fin du XIXe siècle, les Kurdes soulèvent de plus en plus de soulèvements anti-turcs (par exemple, en 1891 à Dersim).
Les Kurdes ont d'abord soutenu les Jeunes Turcs et l'arrivée au pouvoir de Kemal Ataturk, y voyant l'espoir de mettre fin à l'oppression de l'administration ottomane. Les Alévis ont même reconnu en Ataturk le Mahdi, une figure eschatologique destinée à libérer les peuples de l'oppression et de l'injustice : c'est ainsi que la conscience religieuse a interprété la fin de l'ère de la domination du zahirisme sunnite rigide, qui, depuis l'époque de Selim Ier et de Soliman le Magnifique, avait remplacé une religion entièrement différente - spirituelle et de style iranien - des premiers dirigeants ottomans, inextricablement liée au soufisme ardent du cheikh Haji-Bektaş, de Yunus Emre et de Jalaladdin Rumi et comportant de nombreux thèmes chiites.
Cependant, les Kurdes n'ont pas obtenu ce qu'ils voulaient lors de l'effondrement de l'Empire ottoman. Une partie du Kurdistan est restée dans le nouvel État turc, une autre partie a été incorporée à l'Irak par l'administration d'occupation britannique, la troisième a été cédée à la Syrie et la quatrième est restée en Iran. Ainsi, une immense nation de quarante millions de personnes a été divisée en quatre parties, comprenant deux puissances coloniales, où le nationalisme arabe est devenu l'idéologie dominante (Syrie et Irak), la Turquie, où s'est affirmé le nationalisme turc sous une nouvelle forme - laïque, et l'Iran, où le chiisme dominant et l'identité persane en douze points servaient également de dénominateur commun à l'État, sans accorder aux Kurdes une place particulière, sans toutefois les opprimer autant qu'en Irak, en Syrie et en Turquie.
Le vingtième siècle n'a donc pas été l'occasion pour les Kurdes d'établir leur propre État, et la question a été reportée à un avenir incertain. En même temps, il n'y avait pas de consensus clair parmi les Kurdes sur le type d'État kurde qu'il devait être et sur quelle base idéologique il devait être fondé. De plus, il n'y avait pas non plus de consensus entre les dirigeants.
Ainsi, dans chacun des pays où vivaient les Kurdes, les forces suivantes ont pris forme.
En Turquie, l'organisation de gauche fondée sur les principes socialistes (communistes) - le Parti des travailleurs du Kurdistan - est devenu l'expression politique de la lutte des Kurdes pour l'autonomie et, à la limite, l'indépendance. Depuis le milieu des années 40, l'Union soviétique apporte un soutien militaire et politique aux Kurdes afin de contrer les intérêts des pays occidentaux au Moyen-Orient. Ainsi, le leader des Kurdes irakiens Mustafa Barzani (1903 - 1979) s'est enfui vers le territoire soviétique après avoir été vaincu par les Irakiens lors de l'affaire de de la République kurde de Mehabad, où il a été accueilli, soutenu, puis à nouveau envoyé en Irak. Pour les Kurdes, l'URSS était donc considérée comme un point d'appui géopolitique, qui prédéterminait dans une large mesure l'orientation idéologique des Kurdes - en particulier des Turcs.
Chez les Kurdes vivant dans une société traditionnelle, le communisme était difficilement compréhensible et nullement attrayant, de sorte que ce choix a très probablement été déterminé par des considérations pragmatiques. En outre, les Kurdes irakiens se sont heurtés à plusieurs reprises aux Britanniques (le premier soulèvement anti-anglais a été soulevé par Ahmed, le frère de Mustafa Barzani, en 1919), au cours duquel les Britanniques ont mené des opérations punitives contre les Kurdes, détruisant tout sur leur passage, mais les Britanniques étaient des ennemis de l'URSS.
Le chef du Parti des travailleurs du Kurdistan était Abdullah Öçalan, qui a dirigé le mouvement d'insurrection armée kurde, proclamant en 1984 le début de la lutte armée pour l'établissement d'un Kurdistan indépendant. L'aile militaire du parti est constituée des Forces d'autodéfense du peuple. Öçalan est actuellement emprisonné en Turquie, après avoir été condamné à la prison à vie.
Le Parti des travailleurs du Kurdistan lui-même est considéré comme une "organisation terroriste" dans de nombreux pays. En fait, le Parti de la paix et de la démocratie, issu du Parti de la société démocratique, interdit en 2009, agit désormais au nom des Kurdes de Turquie. Mais pour toutes ces structures, la tradition des idées socialistes et sociales-démocratiques de gauche parmi les Kurdes turcs est maintenue.
Les Kurdes irakiens sont réunis au sein du Parti démocratique du Kurdistan, formé par Mustafa Barzani, qui, comme nous l'avons vu, était également tourné vers l'URSS et bénéficiait de son soutien. L'aile militaire du parti est devenue l'armée kurde - les Peshmerga (Pêşmerge littéralement, "ceux qui regardent la mort en face"), qui est apparue à la fin du XIXe siècle pendant la lutte des Kurdes irakiens pour l'indépendance.
Il y a eu une confrontation précoce entre les deux leaders à la tête du Parti démocratique du Kurdistan, reflétant les intérêts de deux unités tribales kurdes - les Barzani [10], basés à Bahdinan, et les Kurdes Sorani, basés à Sulaymaniya.
La tribu Barzani était représentée par Mustafa Barzani, le héros de la lutte pour l'indépendance du Kurdistan, dont la cause, après sa mort, a été dirigée par son fils Masoud Barzani, l'ancien président du Kurdistan irakien pendant la période critique pour l'Irak de 2005 à 2017. Masoud Barzani participait depuis 16 ans à des opérations militaires avec les unités kurdes peshmerga. Après que Massoud Barzani a quitté la présidence, son neveu, le petit-fils de Mustafa Barzani, Nechirvan Idris Barzani, a repris le poste.
L'alliance tribale opposée après 1991 était représentée par la figure flamboyante de Jalal Talabani, qui a été président de l'Irak de 2005 à 2014....
Après la défaite des forces de Saddam Hussein par les forces de la coalition occidentale, Masoud Barzani et Jalal Talabani ont travaillé ensemble pour établir un contrôle militaire et politique sur les territoires du Kurdistan irakien. Toutefois, les contradictions entre les dirigeants se sont traduites par la division effective du Kurdistan irakien en deux parties : la partie orientale (Sulaymaniyah, district de Soran, du nom de la tribu kurde des Sorani), patrie de Talabani, où sa position était la plus forte, et la partie nord-ouest (Bahdania), patrie de Barzani, où ses partisans l'emportaient.
Ce dualisme relatif parmi les Kurdes irakiens a persisté jusqu'à aujourd'hui. Dans certaines situations, les dirigeants des deux entités tribales forment des alliances entre eux. Dans d'autres, la coopération fait place à la rivalité.
En Syrie, le Parti démocratique kurde de Syrie peut être considéré comme la principale organisation kurde. Actuellement, pendant la guerre civile syrienne, il y a aussi le Conseil national syrien, qui comprend d'autres forces. Les Kurdes syriens n'avaient pas de personnalités aussi brillantes que Barzani, Talabani ou Öçalan, et leurs idées et structures ont donc été fortement influencées par les structures kurdes turques ou irakiennes, où dans les deux cas les tendances gauchistes étaient fortes.
En Iran, les Kurdes vivent dans quatre provinces - Kurdistan, Kermanshah, Azerbaïdjan occidental et Ilam. Les Kurdes iraniens ont historiquement montré moins de volonté d'établir un statut d'État indépendant et n'ont pas organisé de structures politiques autonomes centralisées.
En 2012, deux partis, le Parti démocratique du Kurdistan iranien et Komala (Parti révolutionnaire des travailleurs du Kurdistan), ont fait une offre pour une telle unification.
Notes:
[1] Les peuples voisins appellent les musulmans "Mar". Les Kurdes estiment que ce nom doit être attribué à leurs ancêtres directs et suggèrent que le "Mars" soit identifié aux Kurdes.
[2] Le célèbre temple yazidi de Lalesh, où se trouve la tombe du cheikh Adi ibn Musafir, vénéré par les Kurdes, faisait autrefois partie du monastère nestorien de l'apôtre Thomas. Dans la période pré-chrétienne, le même complexe sacré était un temple du Soleil.
[3] Selon une légende, le premier Kurde à avoir accepté le Silam était un compagnon de Mohammad (sahib), Jaban al-Kurdi, qui retourna au Kurdistan après la mort de Mohammad et y prêcha l'islam.
[4] Spät E., Les Yezidis. Londres : Saqi, 2005.
[5] Pendant une courte période, à la fin du XVIIIe siècle, la dynastie kurde des Zend s'est établie en Iran, avec à sa tête Kerim-khan Zend. Il est révélateur que les Kurdes manquaient tellement de solidarité ethnique que les Qajars, adversaires des Zends, se sont appuyés sur les tribus des Kurdes - Mukri, Ardelan, etc.
[6) Cela rapproche les Kurdes des Arméniens, qui ont subi un sort similaire.
[7] Joseph I. Devil Worship: The Sacred Books and Traditions of the Yezidiz.Boston : R.G. Badger, 1919.
[8] Semenov A.A. Le culte de Satan chez les Kurdes Yezidiz// Bulletin de l'Université d'État d'Asie centrale, 1927, № 16.
[9] Rudenko M. B. Texte critique, traduction, avant-propos et index du poème d'Ahmad Hani Mam et Zin. M. : ANS SSR, 1962.
[10] La tribu Barzan est une confédération de plusieurs tribus kurdes, unies au XIXe siècle, sous la direction de cheikhs soufis Naqshbandi. Cela a eu lieu pour la première fois sous le Cheikh Abdel-Salam I. Le cheikh Abd-al-Salam II lui succède. Il prend part aux rébellions anti-turques, se cache ensuite en Russie et, après son retour au Kurdistan iranien, est extradé vers les Turcs et exécuté à Mossoul. Abdel-Salam II était le frère d'Ahmed Barzani et de Mustafa Barzani.
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Totalitarisme français : les prophéties de Tocqueville et Marx
Totalitarisme français : les prophéties de Tocqueville et Marx
par Nicolas Bonnal
Nous affrontons en France et en Europe la pire vague de terrorisme sanitaire, économique et politique de toute notre histoire. Le totalitarisme s’est imposé et va encore progresser avec le code QR plus qu’avec le vaccin et nous allons pouvoir dire adieu à toutes les dernières libertés, y compris comme en Italie celle de bouffer.
La situation est plus grave qu’en 1940. Il y avait défaite militaire. Le nazisme avait gagné une guerre pour imposer son système : ici nous imposons un système que nous avons fabriqué nous-mêmes avec des élites folles et pourries et des populations avilies et abruties (le « citoyen superflu » de Zarathoustra, que Kissinger veut éliminer). Ce n’est pas la même chose et c’est plus grave. Le révérend Schwab et sa meute affairiste vont nous laisser quelques semaines de répit grâce à Omicron et aux routiers (qui à terme seront manipulés et utilisés, s’ils ne le sont déjà), ensuite ils repasseront à l’attaque. Rappelez-vous la tactique nazie : une dose, une pause, comme disait Stefan Zweig rappelé par mes soins. Certaines personnes n’avaient plus le droit de s’asseoir sur un banc. Les autres se sont habituées : mais pourquoi tu sors ?
Malheureusement tout cela vient de loin, l’administration pléthorique, l’Etat républicain-moderne tout-puissant et sa population dégradée.
Lisons et relisons ces lignes, presque sans rien commenter :
« Il semble que si le despotisme venait à s’établir chez les nations démocratiques de nos jours, il aurait d’autres caractères : il serait plus étendu et plus doux, et il dégraderait les hommes sans les tourmenter. »
Tocqueville dit même :
« Je pense donc que l’espèce d’oppression dont les peuples démocratiques sont menacés ne ressemblera à rien de ce qui l’a précédée dans le monde. »
L’ère des masses (voyez mes textes sur Le Bon et Ortega y Gasset) arrive déjà, vers 1840 (voyez aussi l’Homme des foules de Poe, texte d’une portée hypnotique) :
« Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde : je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux, qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils remplissent leur âme. »
Au-dessus de cette masse le Moloch :
« Au-dessus de ceux-là, s’élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leurs jouissances, et de veiller sur leur sort. Il est absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux.
Il ressemblerait à la puissance paternelle, si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril ; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance ; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages ; que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ? ».
Ces lignes ont été écrites pour Attali : nous ôter la peine de vivre ! Tocqueville n’avait pas évoqué l’alliance des milliardaires avec ce socialisme du super-Etat totalitaire mondialiste. London la décrira plus tard (voyez mon texte sur le Talon de fer). Tocqueville trouve le mot clé : on nous retire l’usage de nous-même. Et ça donne :
« C’est ainsi que tous les jours il rend moins utile et plus rare l’emploi du libre arbitre ; qu’il renferme l’action de la volonté dans un plus petit espace, et dérobe peu à peu à chaque citoyen jusqu’à l’usage de lui-même. L’égalité a préparé les hommes à toutes ces choses ; elle les a disposés à les souffrir et souvent même à les regarder comme un bienfait. »
Après on multiplie les petites règles compliquées (avec le Covid on a beaucoup progressé et la masse a beaucoup accepté) :
« Après avoir pris ainsi tour à tour dans ses puissantes mains chaque individu, et l’avoir pétri à sa guise, le souverain étend ses bras sur la société tout entière ; il en couvre la surface d’un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient se faire jour pour dépasser la foule ; il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige ; il force rarement d’agir, mais il s’oppose sans cesse à ce qu’on agisse ; il ne détruit point, il empêche de naître ; il ne tyrannise point, il gêne, il comprime, il énerve, il éteint, il hébète, et il réduit enfin chaque nation à n’être plus qu’un troupeau d’animaux timides et industrieux, dont le gouvernement est le berger. »
Paul Virilio dont j’ai parlé aussi (au point d’être repris par son éditeur) a dit que nous étions une société de dissuadés. Avec son accumulation (gêne, comprime, éteint, hébète…), Tocqueville décrit le même superbe résultat. Pour une poignée de routiers qui ont garé leurs camions combien de résistants ?
Tocqueville rappelle que tout repose sur l’illusion électorale. Nous croyons être maîtres de notre destin alors que nous ne faisons que nous livrer à un autre tyran (c’est ce que disait Rousseau d’ailleurs) :
« Ils imaginent un pouvoir unique, tutélaire, tout puissant, mais élu par les citoyens. Ils combinent la centralisation et la souveraineté du peuple. Cela leur donne quelque relâche. Ils se consolent d’être en tutelle, en songeant qu’ils ont eux-mêmes choisi leurs tuteurs. Chaque individu souffre qu’on l’attache, parce qu’il voit que ce n’est pas un homme ni une classe, mais le peuple lui-même qui tient le bout de la chaîne. Dans ce système, les citoyens sortent un moment de la dépendance pour indiquer leur maître, et y rentrent. »
Ce qui gêne Tocqueville ?
« La nature du maître m’importe bien moins que l’obéissance. »
De toute manière on perd la faculté de penser, de sentir et d’agir ; et c’est avant la télé, avant le smartphone…
« En vain chargerez-vous ces mêmes citoyens que vous avez rendus si dépendants du pouvoir central de choisir de temps à autre les représentants de ce pouvoir, cet usage si important, mais si court et si rare de leur libre arbitre n’empêchera pas qu’ils ne perdent peu à peu la faculté de penser, de sentir et d’agir par eux-mêmes, et qu’ils ne tombent ainsi graduellement au-dessous du niveau de l’humanité. »
Tocqueville aussi décrit la fin : le chaos, la tyrannie absolue (Macron réélu puis président à vie) ou la révolte (on peut toujours rêver) :
« Les vices des gouvernants et l’imbécillité des gouvernés ne tarderaient pas à en amener la ruine ; et le peuple, fatigué de ses représentants et de lui-même, créerait des institutions plus libres, ou retournerait bientôt s’étendre aux pieds d’un seul maître. »
Quelques années après on a la Révolution de 1848, suivie de la dictature la plus rude de notre histoire (on ne pouvait écrire ni parler ni penser) : c’est le Second Empire dont j’ai parlé ici il y a cinq ans en évoquant la figure du prince-président. Et cette fois c’est Marx qui écrit, et qui ne rate au passage ni la France ni sa prospère administration :
« On se rend compte immédiatement que, dans un pays comme la France, où le pouvoir exécutif dispose d’une armée de fonctionnaires de plus d’un demi-million de personnes et tient, par conséquent, constamment sous sa dépendance la plus absolue une quantité énorme d’intérêts et d’existences, où l’État enserre contrôle, réglemente, surveille et tient en tutelle la société civile, depuis ses manifestations d’existence les plus vastes jusqu’à ses mouvements les plus infimes, de ses modes d’existence les plus généraux jusqu’à la vie privée des individus, où ce corps parasite, grâce à la centralisation la plus extraordinaire, acquiert une omniprésence, une omniscience une plus rapide capacité de mouvement et un ressort, qui n’ont d’analogues que l’état de dépendance absolue, la difformité incohérente du corps social, on comprend donc que, dans un tel pays, l’Assemblée nationale, en perdant le droit de disposer des postes ministériels, perdait également toute influence réelle. »
Classe a priori régnante au sens kantien, la bourgeoisie en France suit Macron comme elle suivit Bonaparte et nos différents militaires. Marx explique pourquoi :
« Mais l’intérêt matériel de la bourgeoisie française est précisément lié de façon très intime au maintien de cette machine gouvernementale vaste et compliquée. C’est là qu’elle case sa population superflue et complète sous forme d’appointements ce qu’elle ne peut encaisser sous forme de profits, d’intérêts, de rentes et d’honoraires. D’autre part, son intérêt politique l’obligeait à aggraver de jour en jour la répression, et, par conséquent, à augmenter les moyens et le personnel du pouvoir gouvernemental, tandis qu’en même temps il lui fallait mener une guerre ininterrompue contre l’opinion publique, mutiler et paralyser jalousement les organes moteurs indépendants de la société, là où elle ne réussissait pas à les amputer complètement. »
Le parlement comme toujours en France ne sert à rien (l’obscène cinquième république l’a avili depuis longtemps) :
« C’est ainsi que la bourgeoisie française était obligée, par sa situation de classe, d’une part, d’anéantir les conditions d’existence de tout pouvoir parlementaire et, par conséquent aussi, du sien même, et, d’autre part, de donner une force irrésistible au pouvoir exécutif qui lui était hostile. »
Avec tous ces bons rappels je nous garantis peu de chances. Et pour ceux qui voudraient comprendre pourquoi la France et l’Italie sont les pays plus tyranniques du monde, je rappellerai ces lignes de Debord :
« La place prédominante qu’ont tenue la Russie et l’Allemagne dans la formation du spectaculaire concentré, et les États-Unis dans celle du spectaculaire diffus, semble avoir appartenu à la France et à l’Italie au moment de la mise en place du spectaculaire intégré, par le jeu d’une série de facteurs historiques communs : rôle important des parti et syndicat staliniens dans la vie politique et intellectuelle, faible tradition démocratique, longue monopolisation du pouvoir par un seul parti de gouvernement, nécessité d’en finir avec une contestation révolutionnaire apparue par surprise. »
Gare aux putschs à venir, celui de Trudeau, celui de Biden (qui a déjà frappé une fois), ou celui à venir de Macron. Debord encore :
« …Et pourtant Marx est malheureusement resté trop longtemps actuel, qui évoque dans le même livre ce gouvernement « qui ne prend pas la nuit des décisions qu’il veut exécuter dans la journée, mais décide le jour et exécute la nuit ».
Sources principales :
http://classiques.uqac.ca/classiques/Marx_karl/18_brumain...
https://www.institutcoppet.org/wp-content/uploads/2012/01...
http://achard.info/debord/CommentairesSurLaSocieteDuSpect...
https://www.dedefensa.org/article/ortega-y-gasset-et-la-m...
https://strategika.fr/2021/08/01/pass-sanitaire-biopoliti...
https://strategika.fr/2021/04/26/psychologie-des-foules-e...
http://www.bibebook.com/files/ebook/libre/V2/poe_edgar_al...
https://www.dedefensa.org/article/karl-marx-et-le-prince-...
https://leblogalupus.com/2019/08/02/rappel-jack-london-et...
09:11 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, france, europe, affaires européennes, totalitarisme, alexis de tocqueville, karl marx, guy debord | | del.icio.us | | Digg | Facebook
mardi, 08 février 2022
Entretien avec Sergio Fernández Riquelme sur la pandémie postmoderne
Entretien épistolaire avec Sergio Fernández Riquelme sur la pandémie postmoderne
Propos recueillis par José Miguel Gala
Source: https://miscorreoscongenteinquietante.blogspot.com/search/label/Sergio%20Fern%C3%A1ndez%20Riquelme
Professeur à l'Université de Murcie, historien et docteur en sociologie, ainsi que principal promoteur du projet La Razón Hispánica, Sergio Fernández Riquelme a récemment publié un de ces livres qui ne paraîtront jamais dans les suppléments culturels de la presse "Blackrock", comme Babelia. Pandemia posmoderna : Historia de la crisis del coronavirus en España, comme s'intitule le livre, mérite ma petite et humble reconnaissance. Notre conversation a tourné autour du transhumanisme, de Fabio Vighi ou de Macron ; on ne peut pas faire plus inquiétant.
- Vous avez très récemment publié un livre très courageux sur la soi-disant "crise du coronavirus". Il est notoire que toute remise en cause du discours officiel est très misérablement condamnée comme "négationniste", c'est pourquoi aujourd'hui plus que jamais il est nécessaire de lire des livres comme le vôtre, intitulé Pandemia posmoderna: Historia de la crisis del coronavirus en España. Comment s'est déroulé le processus d'écriture de ce livre ? À quel moment de la soi-disant "pandémie" avez-vous décidé de commencer à rassembler des informations et à commencer à écrire ?
Je crois que l'histoire est une science humaine et sociale nécessaire pour le temps présent (magistra vitae), et j'ai voulu écrire une chronique de la crise du Coronavirus au-delà du journalisme, de la politique ou des réseaux sociaux. Celles-ci racontent l'actualité en une sorte de photo fixe, mais l'histoire apporte une dimension diachronique qui permet de voir, dans le récit, l'évolution de la crise, de ses causes à ses conséquences. Ainsi, dans la revue La Razón Histórica, je publie cette chronique par phases depuis mars 2020, et ces phases ont servi de base au livre Pandemia posmoderna. Un livre très différent de presque tout ce qui a été écrit sur le sujet car, premièrement, il relate presque en direct l'impact du coronavirus en Espagne (à partir de sources académiques et journalistiques) ; deuxièmement, il aborde systématiquement les mesures et les réactions que nous avons connues en Espagne avec les noms et les prénoms, en recueillant à la fois le discours officiel et les interprétations dissidentes ; et, troisièmement, il fait une Histoire à partir de l'Histoire, c'est-à-dire qu'il utilise des sources historiographiques modernes et classiques (Hérodote, Tite-Live, Ranke, Hegel...). .) pour comprendre et comparer cette crise avec d'autres crises plus graves survenues dans le passé, en constatant le changement et la continuité qui existent dans notre évolution.
- Selon la version officielle de la pandémie, tout commence à Wuhan, avec cette première épidémie en décembre 2019. Plus de deux ans se sont écoulés depuis, et j'ai le sentiment que cette crise va durer bien plus longtemps que la mal nommée "grippe espagnole" de 1918, si nous ne faisons pas attention. A mon avis, le but de ce que nous vivons est la mise en œuvre du modèle chinois en Occident, à travers la standardisation du "passeport covid". Quelle est votre opinion sur ce passeport ?
À mon humble avis, ce passeport, comme le montre cette histoire, est un autre instrument créé et utilisé en désespoir de cause par les gouvernements et les élites (confinements, couvre-feux, restrictions de mobilité, masques et vaccinations), éventuellement en violation des droits fondamentaux, qui ne savent pas comment agir face à un phénomène qui leur est tombé dessus de manière inattendue ou qui est devenu incontrôlable. Ils l'utilisent pour contenir quelque chose qui, comme nous l'avons vu avec la variante Omicron, semble impossible à contenir par des moyens qui seraient strictement de santé publique ou par une simple volonté politique. Parce que ce virus est plus qu'une simple maladie ; c'est une pandémie typique de la société post-moderne, qui ne comprend ni ne tolère la douleur et la souffrance (qui nous coule ou nous sauve) ; et surtout qui accepte, entre nécessité médicale et propagande idéologique, un moyen de contrôle qui, pour certains auteurs et commentateurs, évolue, semble-t-il, vers un outil de contrôle socio-politique accepté par la majorité de notre génération, soit par paresse, soit par conformité.
- Pour approfondir le sujet du passeport ou "covid check", j'ai pu constater très récemment, de visu, que son utilisation est totalement régularisée et répandue au Luxembourg, et d'après ce que l'on m'a dit, la situation est la même dans des pays voisins comme la Hollande ou l'Allemagne. Il est décourageant de voir comment des centaines de personnes font la queue pendant des kilomètres pour entrer dans un marché de Noël en plein air, ce qui m'amène à penser que cette crise sera retardée aussi longtemps que nécessaire jusqu'à ce que la transition vers la soi-disant "nouvelle normalité" soit réussie... Quand pensez-vous que tout cela se terminera, si jamais ? Avez-vous lu Fabio Vighi, et sa théorie sur la simulation des pandémies et la crise du capitalisme ? Selon Vighi, elle est prolongée artificiellement, car le capitalisme actuel est totalement fictif, et est l'otage de la dette, de l'impression monétaire constante et de l'inflation artificielle des actifs financiers.
Je pense que l'analyse de Vighi -et d'autres intellectuels qui voient la pandémie au-delà de la réalité socio-sanitaire- est très nécessaire. La critique et le débat sont fondamentaux et très sains dans les sociétés démocratiques. Dans cette histoire que je raconte, je parle donc d'une "pandémie postmoderne" qui est une conséquence du monde globalisé, supposé sans frontières et sans patries, où les maux se répandent également : des maladies mondiales aux migrations incontrôlables, des délocalisations locales à la pollution massive, du consumérisme de masse à la dépression généralisée.
Et le coronavirus a démontré la nécessité de la souveraineté et des stratégies identitaires des nations qui contrôlent leurs frontières, qui s'occupent d'abord de leurs citoyens, et qui s'unissent à l'intérieur dans des missions communes de solidarité. Car le "capitalisme inclusif" ou "capitalisme de nouvelle génération" ("turbo-capitalisme" pour Diego Fusaro), profite des bons et des mauvais côtés de cette mondialisation détournée par sa ploutocratie pour étendre son pouvoir en période de prospérité, et le renforcer en période de crise. Je ne sais pas avec certitude si cette pandémie est fictive ou non, mais ce que j'ai étudié, c'est que la ploutocratie et ses partenaires locaux profitent des restrictions et de la dette publique pour soumettre directement les gouvernements (qui dépendent de leur financement, de plus en plus, pour survivre) et pour endoctriner encore plus les citoyens dans leurs idées transhumanistes qui les empêchent de penser et les obligent à ne pas être récalcitrants. Comme toujours, même dans les pays dits "démocratiques", les élites utilisent le pouvoir et la "violence", réelle ou symbolique, légitime ou illégitime, pour imposer leurs plans et imposer leur idéologie. C'est ainsi que la politique est grossière, comme nous l'ont appris Weber, Schmitt ou Freund.
- Il y a quelque chose de très obscur dans le discours que des gens comme Trudeau, Macron ou Draghi lancent, à l'unisson et en coordination. Dans le cas de Macron, peut-être le plus belliqueux de tous, une idée très dangereuse est lancée : le statut de "citoyen" ne dépend plus que du statut vaccinal : pour Macron, quelqu'un qui ne reçoit pas de rappel n'est plus un citoyen, et doit être pénalisé. Que pensez-vous des déclarations de Macron ? Peut-être sait-il qu'il a été rayé de la carte, politiquement parlant, ou est-il prêt à aller jusqu'au bout ?
Les déclarations de Macron ou de Trudeau reflètent ce que sont les vassaux exécutifs du système mondialiste et comment ils pensent. De gré ou de force, même dans une soi-disant "démocratie libérale-progressiste", il semble que les citoyens soient obligés de croire et d'agir comme le dit le gouvernement, puisque leurs dirigeants ne pensent soi-disant "qu'à" leur santé, leur bien-être et leur bonheur. Pour la santé publique ou la "santé démocratique", ces dirigeants se sentent légitimés, en tant que vrais et seuls démocrates (par opposition à ceux qu'ils accusent d'être des extrémistes, des négationnistes, etc.), à insulter, diffamer, caricaturer, étiqueter, censurer ou "annuler" le dissident dans son opinion ou dans son erreur ; or, l'une des grandes conquêtes de la démocratie, même si elle peut paraître mensongère à la "science officielle", c'est que nous avons le droit souverain de "nous tromper" ou de dire n'importe quelle bêtise, s'il y en a une, qui nous plaît. Vous pouvez perdre votre emploi ou ne pas progresser dans celui-ci, être bloqué sur les réseaux sociaux ou stigmatisé dans les médias, être exclu de certains services ou condamné à différentes amendes si vous ne respectez pas des règles dont la légalité est parfois très douteuse (comme l'a jugé, bien que tardivement, le Tribunal constitutionnel espagnol dans l'affaire "État d'alerte").
Les gouvernements qui se préoccupent aujourd'hui, pour certains de manière excessive, de sauver nos vies et d'éliminer tout "négationnisme", sont les mêmes qui ont initialement sous-estimé la menace venant de Chine, qui ont affirmé que la pandémie "ne serait que de quelques cas", qui se sont contredits quotidiennement sur l'utilisation des masques ou des tests antigéniques, ou qui, avec de très mauvaises données sur les infections, ne réimposent pas les confinements qui étaient auparavant essentiels. Parce qu'ils semblent n'être, en définitive, qu'une simple courroie de transmission "partitocratique" de la grande ploutocratie mondiale, qui impose un discours et des pratiques "politiquement corrects" même en pleine pandémie, et que les hommes et les femmes doivent accepter sans doute et sans discussion (au-delà des mesures hygiéniques et sanitaires logiques) malgré leurs propres croyances, leurs doutes obligatoires ou leurs libertés non négociables. Mais je l'ai déjà dit : la politique est vraiment très brutale, même si elle se présente comme tolérante ou démocratique.
15:17 Publié dans Actualité, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sergio fernandez riquelme, entretien, actualité, pandémie, répression | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Le sinistre luna park syrien, avec un œil sur Kiev
Le sinistre luna park syrien, avec un œil sur Kiev
par Alberto Negri
Source : The Manifesto & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/il-lugubre-luna-park-siriano-con-l-occhio-a-kiev
L'histoire de Qurayshi est emblématique de l'ambiguïté américaine. Il a vécu pendant quelques années tranquillement en Turquie où il a recruté des djihadistes qui affluaient du monde arabe. Les États-Unis étaient parfaitement au courant de la situation puisque la secrétaire d'État américaine de l'époque, Hillary Clinton, a encouragé Erdogan à utiliser les djihadistes contre Damas.
En Afghanistan, cela s'est terminé par un désastre, mais les Américains, avec l'aide de la Turquie, continuent à "exporter la démocratie", dissimulant ainsi leur véritable politique étrangère et les dommages collatéraux. Biden a annoncé que le chef d'Isis, Al-Hashimi al-Qurayshi, était mort dans le nord de la Syrie.
Al-Qurayshi se serait fait exploser lors du raid. Le chef d'Isis "n'a pas combattu bien qu'on lui ait offert la possibilité de se rendre". La bombe a également tué sa femme et ses deux enfants. Biden a qualifié cet acte de "lâcheté désespérée".
Soit Biden est très confus et pense que nous sommes naïfs ici, soit il veut envoyer un signal sur la crise ukrainienne. Hier, Michele Giorgio nous a informés que sur les réseaux sociaux, il y a des photos de la maison du chef d'Isis à Idlib et de son corps non déchiqueté par l'explosion et le trou d'une balle à l'arrière de la tête.
Le style de l'opération est celui qui a conduit à l'élimination de Ben Laden au Pakistan et du premier chef d'Isis, Al Baghdadi, qui a été libéré par les États-Unis des prisons irakiennes, à la frontière entre la Syrie et la Turquie.
Depuis plus de 20 ans, les Américains nous prennent pour des imbéciles, même nos généraux en ont assez : ils font la guerre en Afghanistan puis la rendent aux talibans, ils continuent en Irak en 2003 et plongent le pays dans un chaos sans fin, ils tuent Kadhafi en 2011 et la Libye est toujours dans le chaos. Ils prétendent combattre Isis, mais avec les djihadistes, ils visaient à renverser Assad. Maintenant, ils voudraient peut-être faire la guerre en Europe en exploitant la crise ukrainienne.
Dans son livre Fuga da Kabul (Évasion de Kaboul), le général Giorgio Battisti, commandant en Afghanistan, en Somalie, en Bosnie et de la force de réaction rapide de l'OTAN, écrit : "Le retrait de la coalition a été décidé par le gouvernement américain et, par conséquent, subi par les pays de l'Alliance atlantique".
Ce désastre, poursuit-il, est "pire que celui de Saigon parce qu'à l'époque, les États-Unis étaient les seuls responsables, aujourd'hui, c'est l'ensemble de la communauté internationale : l'OTAN, l'ONU, l'UE". Et maintenant les Américains, conclut le général, vont chercher à se venger", alors que, comme le dit Mattarella, "il n'y a même pas le prétexte d'une compétition entre différents systèmes politiques et économiques".
L'opération Idlib a été menée avec l'aide de la Turquie d'Erdogan, qui contrôle la zone où vivent depuis des années plus de 40.000 djihadistes et leurs familles. Poutine, qui est intervenu en 2015 aux côtés du régime Assad, a demandé à plusieurs reprises à la Turquie de les démobiliser, mais Erdogan s'y est toujours opposé.
Il a besoin des djihadistes pour ses guerres, même celles qui arrangent Washington : il les utilise contre les Kurdes aux frontières de la Syrie, il les a utilisés en Libye et probablement aussi en Azerbaïdjan. En 2019, lorsque les États-Unis se sont retirés du nord de la Syrie, Trump était conscient qu'il abandonnait les Kurdes au massacre d'Ankara et de ses alliés égorgeurs.
Le véritable chef des djihadistes aujourd'hui est Erdogan, pas un Arabe peu connu. Il les accueille et décide de ce qu'il faut en faire. Et de temps en temps, il sert la tête de l'un d'entre eux sur l'assiette de propagande américaine pour satisfaire la "mission civilisatrice" de Washington.
Mais si cela n'avait tenu qu'aux États-Unis, Isis aurait conquis Bagdad en 2014 et Damas aussi : ce ne sont pas les Américains qui ont arrêté les djihadistes mais les Pasdarans iraniens, le Hezbollah libanais, les milices chiites et, depuis 2015, la Russie qui ont sauvé le désastre américain en Syrie.
Les États-Unis d'Obama ont effectivement abandonné l'Irak, tout comme l'Afghanistan. En Italie et en Europe, tout est fait pour occulter la réalité malgré les effrayantes attaques djihadistes de ces dernières années au cœur du continent.
En réalité, l'OTAN, financée à 80 % par les États-Unis, est un instrument américain, pas une alliance. Comme l'a dit Frank Zappa : "La politique aux États-Unis est la section divertissement de l'appareil militaro-industriel", dont l'OTAN est un appendice.
Le général Austin, aujourd'hui chef du Pentagone, est une sorte de parodie du système : il a inventé une armée anti-ISIS de milliers d'hommes et après avoir dépensé des milliards, on a découvert qu'ils n'étaient que quelques dizaines. Aujourd'hui, lui aussi ramène chez lui la tête d'un djihadiste d'Isis, comme s'il se trouvait au polygone d'un lugubre parc d'attractions.
La parabole de Qurayshi est emblématique de l'ambiguïté américaine. Il a vécu pendant quelques années tranquillement en Turquie - membre de l'OTAN depuis les années 1950 - où il a recruté des djihadistes qui affluaient du monde arabe. Dans une interview en prison, l'"ambassadeur" du califat en Turquie, Abou Mansour al Maghrabi, a déclaré qu'il avait rencontré directement le MIT, les services militaires turcs, et qu'Ankara protégeait les arrières d'Isis sur 300 kilomètres aux frontières avec la Syrie et l'Irak.
Les États-Unis étaient parfaitement au courant de la situation puisque la secrétaire d'État américaine de l'époque, Hillary Clinton, a encouragé Erdogan à utiliser les djihadistes contre Damas.
Aujourd'hui, la Syrie reste sous sanctions, aucune ambassade occidentale n'est ouverte, à l'exception de celle du Vatican, et le pays est toujours occupé par des troupes turques, américaines et israéliennes. Un morceau de l'OTAN, un morceau du pacte abrahamique, un morceau de la Russie, une part pour les Kurdes et une part pour les djihadistes d'Idlib : voilà comment le gâteau syrien est tristement divisé.
12:47 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, syrie, levant, proche-orient, géopolitique, politique internationale | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Metaverse : Une analyse géostratégique de ce nouvel univers virtuel
Metaverse : Une analyse géostratégique de ce nouvel univers virtuel
Les PDG des grandes entreprises technologiques du monde entier se rendent compte que les êtres humains vivent déjà dans une culture largement numérisée, un phénomène que Meta entend approfondir. Quels sont les défis et les clés que nous, êtres humains, devons surmonter et exécuter dans cette nouvelle étape du monde virtuel ? Dans ce texte, l'auteur et commentateur Mario Ramón Duarte propose une telle réflexion.
Par Mario Ramón Duarte
Source: http://novaresistencia.org/2022/02/04/13019/
Alors que nous pensions avoir tout vu avec l'arrivée exponentielle et disruptive de la quatrième révolution industrielle, plus connue sous le nom d'ère de la numérisation et de la vitesse, qui fait irruption dans cette nouvelle étape du système mondial à travers de nouvelles technologies telles que la réalité virtuelle, l' "IoT ", l'automatisation, l'intelligence artificielle, la réalité augmentée (à travers des lunettes intelligentes), le monde virtuel 3D, les hologrammes, entre autres, eh bien, dans ce contexte, le PDG de la marque Facebook, Marc Zuckerberg, a annoncé au monde entier, le 28 octobre dernier, le changement de nom du conglomérat d'entreprises qu'il possède : Facebook, Instagram, WhatsApp, Messenger, Oculus, Worldplace, entre autres, par le nom META, qui gère déjà une communauté d'environ trois milliards d'utilisateurs dans le monde, soit le double de la population de la Chine, le pays ayant la plus forte densité de population et comptant également plus d'habitants que certains des continents de notre planète.
Maintenant, pour continuer avec le thème proposé, et pour démêler la complexité et les défis que ce monde virtuel nous propose jour après jour, sous le nom de META, une nouvelle étape commence sans doute dans la multinationale américaine qui non seulement maintiendra sa famille d'applications mentionnées ci-dessus, y compris Facebook, mais se concentrera principalement sur une nouvelle ligne d'affaires qui développera des plateformes de réalité virtuelle. Bien que Marck Zuckerberg estime que le Metaverse est la nouvelle version d'internet, une plateforme que nous utiliserons de plus en plus souvent pour simuler une présence, rencontrer des gens et vivre des expériences jamais connues auparavant, de nombreux experts affirment également que c'est une obsession de Zuckerberg : vous pouvez obtenir votre propre Metaverse, grâce à META.
Mais au-delà de tout ce qui précède, en guise d'introduction, quel est le sens de Metaverse ? Le PDG de Facebook est-il le propriétaire du Metaverse ? Quand ce mot est-il entré en vogue dans le monde d'aujourd'hui ? Y a-t-il d'autres entreprises ou PDG qui se battent pour la domination technologique dans le fameux Metaverse ? De nombreuses questions se posent autour de ce phénomène que Zuckemberg a installé dans l'agenda mondial. Le niveau des grandes technologies, reléguant encore plus les états et les organismes multilatéraux qui jusqu'à aujourd'hui sont encore les grands responsables de l'absence impérieuse d'une régulation du cyberespace, que j'ai mis en garde depuis presque une décennie dans plusieurs médias internationaux, et que j'ai aussi reflété comme un thème urgent dans mon travail bibliographique intitulé : "Quatrième révolution industrielle : analyse stratégique".
Pour continuer et passer directement au dévoilement du phénomène du Metaverse, nous devons d'abord savoir quelle est sa véritable signification, et la réalité nous dit que le terme Metaverse ou "Meta-univers" (acronyme de Meta qui signifie généralement quelque chose comme "au-delà" et "-vers" de "univers" font la fusion pour le nom actuel). Il s'agit d'un concept désignant la prochaine génération de l'internet, qu'il décrit comme une expérience immersive et multisensorielle appliquée à l'utilisation de divers dispositifs et développements technologiques sur l'internet. Bien que ce terme soit en vogue ces derniers temps, il ne s'agit pas d'une création de Facebook, car ce concept est apparu en 1992 dans le livre de science-fiction Snow Crash de l'auteur Neal Stephenson.
À travers l'évolution de l'histoire, le Metaverse est un monde virtuel en 3D peuplé d'avatars de personnes comme nous, interagissant avec différents types d'expériences ; d'où l'origine du terme et de ses principales idées, dont aujourd'hui le PDG de Facebook a pris la tête devant d'autres entreprises technologiques comme Nvidia, qui mise tout sur le Metaverse, mais avec le nom qu'ils lui donnent : l'"Omnivers", comme l'a confirmé son PDG, Jensen Huang, lors de l'événement GTC 2021, ajoutant que l'Omnivers est plus concret et prédictif que le Metaverse de Facebook. Pour en revenir au thème central, un autre regard plus qu'intéressant, mais d'un point de vue philosophique, nous fait voir et comprendre ce que Stephenson a dit et pour ceux qui l'ont vu, la référence la plus proche de cette réalité est le monde vu dans Ready Player One, le film de Spielberg où les gens, pour échapper à la vie décadente de leurs quartiers marginaux, se plongent dans un monde virtuel dans lequel ils participent à des activités de divertissement et de travail.
Rien de plus proche de la réalité, si vous voulez, bien qu'il y ait certaines analyses et de nombreuses demandes pour trouver la vérité de tout ce qui précède. Quant à ma vision personnelle, je crois et je veux comprendre que, suivant les expressions du Pape François, la technologie est bonne et positive, mais que nous ne pouvons pas continuer à tout laisser pour "l'amour de Dieu", car de là découlent de nombreuses questions inachevées auxquelles il faudra répondre tôt ou tard et, je le répète, c'est sans aucun doute une grande dette des États et des organismes multilatéraux qui doivent apporter des solutions et des réponses en fonction de l'époque dans laquelle nous vivons, parce que le progrès technologique va continuer et que des régions comme la nôtre (l'Amérique latine) sont vraiment en retard sur de nombreux aspects, coexistant simultanément dans trois siècles différents, où une éducation sociale technologique est plus que nécessaire, changeant la réalité qui nous entoure, où les "techno-zombies" abondent au contraire des véritables techno-formats. Ainsi, nous prendrons les premières mesures pour éradiquer ce grand problème de "l'industrie 4.0" qui est une distraction massive pour les jeunes et aussi pour tous les âges avec des heures et des heures dans l'appareil technologique, ce problème de ce qu'on appelle l'obésité technologique.
Mais face à ces affirmations préliminaires, mais réelles, logiques et percutantes, que l'être humain souffre, nous devons aussi nous demander : le monde réel est-il prêt à embrasser définitivement le monde virtuel proposé par le Metaverse ? Je crois personnellement que ces questions et peut-être d'autres encore ne peuvent être posées avec clarté ou ne sont pas encore totalement claires, la plus certaine étant que les promesses du futur virtuel ne convainquent même pas la majorité des êtres humains, et son avancée vertigineuse ne contribue en rien à convaincre les utilisateurs, sans règles du jeu claires.
Mais ce que nous ne pouvons pas nier, c'est que ce nouveau changement d'ère, aggravé par la pandémie de COVID-19 et les changements accélérés qui se sont produits en particulier dans des domaines très sensibles tels que le lieu de travail, l'éducation, que la plupart d'entre nous ont vécu au cours de la dernière année et demie, nous donne la certitude que nous sommes confrontés à une "nouvelle normalité". Au-delà de tout cela, ceux qui semblent convaincus de ce passage au Metaverse sont les grands PDG, pour qui, par exemple, un rapport du prestigieux cabinet britannique PwC prévoit en 2020 que d'ici à 2030, quelque 23,5 millions d'emplois utiliseront la réalité virtuelle et aussi la réalité augmentée pour des tâches telles que la formation, les réunions et le service à la clientèle, censées donner aux internautes un autre pas de qualité dans le monde virtuel.
En bref, les PDG des grandes entreprises technologiques du monde entier se rendent compte que les humains vivent déjà dans une culture largement numérisée. Le pape François l'a également exprimé depuis l'Académie pontificale des sciences sociales du Vatican. Nous continuons dans le présent et en vue de l'avenir sans règles claires, précises, éthiques, morales, sociales, politiques et économiques, dans ce monde largement numérisé, ajouté à l'avancée sans précédent de l'Intelligence Artificielle qui inquiète aujourd'hui le monde entier, mais observe de manière paralysée ce phénomène qui inquiète sans doute la majorité de la population mondiale. Nous nous inquiétons également lorsque nous constatons que notre vie privée et l'identité de ceux qui prennent soin de nos données ne sont pas respectées et que la souveraineté des États n'est pas respectée, que nos frontières cybernétiques sont totalement vulnérables et que l'interdépendance en matière cybernétique n'est pas garantie.
Enfin, il convient de rappeler que, bien que l'utilisation du Metaverse ne fasse que commencer et que dans les prochains mois, de plus en plus d'entreprises se joindront à la lutte pour la domination de ce nouvel univers que beaucoup appellent l'avenir du nouvel internet, il sera vital pour les utilisateurs qui évoluent quotidiennement dans ce nouvel environnement dont nous faisons déjà partie, des activités domestiques aux questions les plus délicates du monde financier, des entreprises et même d'un État souverain, de lutter contre les fléaux, comme celui qui continuera à s'occuper de nos données, lorsque l'éthique et le respect de votre vie privée commenceront à être appliqués, mais par une véritable régulation du cyberespace, où tous les pays sont de véritables acteurs et non de purs décors comme actuellement, où l'on respire encore et où de grands doutes subsistent, si le but ultime du PDG de Facebook à travers META n'est pas d'échapper aux fameux scandales de Cambridge Analitycs et de la vente des données des utilisateurs qui ont été reconnues par lui-même devant le Congrès américain pour bénéficier à un certain politicien ou parti politique, affaiblissant et endommageant la démocratie de ces pays, où même l'Argentine n'était pas à l'abri de cette manœuvre.
Si cela est réellement poursuivi avec des critères qui conduisent à des règles claires ou au moins ajustables dans ce monde parallèle qu'est internet, en observant et en analysant la géostratégie, pour naviguer en toute sécurité et calmement, l'expérience commencera à être plus que positive en matière de cybersécurité. Comme nous l'observons actuellement dans des domaines tels que le "commerce électronique", dont l'objectif est de relier le monde virtuel au monde physique. Un grand défi stratégique est posé malgré l'avancée vertigineuse de la technologie, et ce sont les êtres humains qui doivent être les architectes de leur propre destin, en ayant toujours comme prémisse l'homme comme centre et axe de l'humanité et de la Nature elle-même, tout comme la création. "Une vie parallèle dans un monde parallèle, ou une sorte de film de science-fiction transformé en réalité comme une action scientifique ?", nous devrions donner la réponse nous-mêmes et le plus tôt possible, comme une vertu qui va "au-delà", ce qui est soulevé ici.
Source : Metaverse : análisis geoestrategico de este nuevo universo virtual
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lundi, 07 février 2022
Le Tiers-Monde sur la Canebière
Le Tiers-Monde sur la Canebière
par Georges FELTIN-TRACOL
Pour la troisième fois en cinq mois, les poubelles débordent sur les trottoirs de Marseille. Rats et autres sympathiques bestioles prolifèrent dans le nouvel écosystème créé par cette grève à l’initiative du syndicat FO majoritaire chez les éboueurs. Français ou étrangers, tous décrivent une ville sale, en dehors de quelques coins touristiques préservés, qui ne fonctionne pas. S’ils étaient médecins, les urbanistes les plus lucides parleraient de thrombose persistante…
Le conflit autour du ramassage des déchets ménagers n’est qu’un problème supplémentaire dans une cité qui les additionne. Déjà en proie aux fusillades mortelles répétées qui donnent aux quartiers Nord une notoriété internationale et à la multiplication, y compris en journée et à la vue de tout le monde, des « charbons » (les points de vente de drogue), la deuxième commune la plus peuplée de France avec plus de 870.000 habitants souffre d’un environnement immobilier fortement dégradé. En novembre 2018, dans le quartier de Noailles non loin du centre historique s’effondrent deux immeubles vétustes, rue d’Aubagne, faisant huit morts. Deux ans auparavant, un rapport officiel estimait à cent mille le nombre de résidents dans des logements insalubres. Or, la liaison ferroviaire à grande vitesse qui relie Marseille à Lyon, Paris et Bruxelles attire de jeunes ménages à hauts revenus. Leur venue explique la hausse des prix sur le marché de l’immobilier. Cette situation encourage la construction de tours à bureaux aux dépens de la rénovation de l’habitat.
La question du logement est essentielle dans un espace relativement étroit coincé entre le littoral méditerranéen et les collines abruptes des Alpilles qui ceinturent la ville. On ignore trop que Marseille s’étend sur plus de 240 km² alors que la capitale n’a qu’une superficie de 105 km² en y incluant les bois de Boulogne et de Vincennes. Au cours de son histoire, la cité phocéenne s’est étendue en annexant de nombreux villages au point que les plus anciens la surnomment la « ville aux cent dix quartiers ». Leur toponymie fleure bon la France de Marcel Pagnol et de René Coty : Saint-Louis, les Trois-Lucs, le Redon, Saint-Mitre, le Merlan, etc.
À l’instar de Paris et de Lyon, une loi de décembre 1982 régit Marseille. Dans le cadre de la décentralisation administrative décidée par François Mitterrand, son ministre de l’Intérieur, Gaston Defferre, par ailleurs maire de Marseille dès 1953, accorde un statut communal particulier aux trois plus grandes municipalités de l’Hexagone. La capitale française et la capitale des Gaules se composent de plusieurs arrondissements dotés de leurs propres mairies, même si leurs attributions demeurent restreintes par rapport à leur mairie centrale toute-puissante. Craignant de perdre son fauteuil en 1983, Defferre réalise une magouille légale. Il réunit les seize arrondissements en huit secteurs. Malgré un nombre inférieur de votes par rapport à son adversaire de droite, « Gastounet » reste maire jusqu’à sa mort en 1986. Un an plus tard, la loi Pasqua de juillet 1987 redessine les secteurs marseillais. Deux arrondissements regroupés constituent un secteur. Ainsi le 1er secteur rassemble-t-il les Ier et VIIe arrondissements.
À cet empilement de mairies de secteur et d’une mairie centrale s’ajoutent, d’une part, les cantons départementaux et, d’autre part, la nouvelle structure intercommunale appelée Marseille – Aix – Provence Métropole, qui inclut deux tiers du département des Bouches-du-Rhône. Il faut savoir que la présidente de cette métropole est Martine Vassal, aussi présidente Les Républicains du conseil départemental. Cette sur-administration n’empêche pas au quotidien une incurie et un désordre permanents.
Souvent en grève, avec des arrêts mal desservis et une lenteur dans le déplacement due à une circulation automobile chaotique, - le respect du code de la route est en option sur la Canebière ! -, l’état des transports publics dénote pour une ville aussi étendue d’un sous-développement patent. Les deux lignes de métro ne cumulent qu’une vingtaine de kilomètres. Les trois lignes de tramway ne forment qu’un ensemble de seize kilomètres. À titre de comparaison, le réseau du métro lyonnais représente trente-deux kilomètres de lignes et celui des tram soixante-seize kilomètres !
Le manque d’investissements dans le maillage des transports en commun et l’absence de réhabilitation des immeubles rendent visibles des décennies d’impéritie municipale. Patron de la puissante fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, Gaston Defferre ne veut plus que « sa » ville soit gérée par les communistes comme en 1946 – 1947, ni par les gaullistes entre 1947 et 1953. Pour contrer l’influence considérable des dockers cégétistes, il s’entend avec FO et lui offre une large autonomie dans les structures municipales. L’actuelle grève de la collecte des ordures se fait pour le maintien du « fini parti », cette possibilité donnée aux éboueurs d’exercer plus ou moins légalement un second boulot.
Les successeurs de Defferre, le socialiste Robert Vigouroux (1986 – 1995) et le giscardien Jean-Claude Gaudin (1995 – 2020), poursuivent à leur avantage immédiat les habitudes claniques et clientélistes. La libéralisation du ramassage des déchets domestiques a fait le bonheur des frères Guérini, proches du PS, avant leur condamnation par le tribunal. Des entreprises privées se partagent les poubelles avec le public. Le fonctionnement est digne du roi Ubu puisque les camions-bennes privés ne doivent pas prendre les déchets de telle rue dans tel arrondissement.
Reconnaissons que passer d’une rue à une autre devient de plus en plus difficile. La montée de l’insécurité cristallise dans les quartiers Sud et Est le phénomène de « communautés fermées et gardées ». Des barrières coupent de nombreuses rues transformées en impasses. Les riverains peuvent protester; l’inaction est flagrante. Le géographe Christophe Guilluy écrit dans ses différents essais que les banlieues constituent le sas d’entrée de la mondialisation via l’immigration. Les immigrés les plus récents y remplacent les vagues précédentes. C’est le cas à Marseille dont un habitant sur dix est originaire des Comores (dont Mayotte).
Le caractère multiculturaliste de la ville facilite le clientélisme à travers le vote communautaire ciblé et des méthodes électorales éprouvées. La manipulation des bulletins le jour des élections y reste un exercice courant. Les bouffons de l’OSCE auraient tout intérêt d’y envoyer des observateurs expérimentés. Ces derniers découvriraient de nombreux trucages employés pour empêcher la victoire du moindre candidat de l’Opposition nationale et populaire.
La démagogie politicienne tue Marseille. Ne serait-il pas approprié d’y proclamer un état d’exception général et de dissoudre pour une durée indéterminée toutes les mairies de secteur, la mairie centrale, la métropole, voire le conseil départemental ? Un gouvernement national de salut public y désignerait un représentant spécial doté des pleins pouvoirs. Ce ne serait pas une nouveauté.
En 1938, un terrible incendie ravage les Nouvelles Galeries, non loin du Vieux-Port, et fait soixante-treize morts. Présent sur place pour un congrès radical et radical-socialiste, le président du Conseil Édouard Daladier assiste à un manque complet de coordination entre les secours. Rentré à Paris, le « Taureau du Vaucluse » place Marseille sous tutelle gouvernementale, nomme un administrateur extraordinaire et écarte le maire socialiste Henri Tasso de toute gestion. Cette situation perdure jusqu’en 1946.
En janvier 1943, les Allemands se piquent de rénovation urbaine. Situé à proximité du Vieux-Port, le quartier du Panier est historiquement un coin interlope. Sous l’Occupation, la pègre y devient résistante. Désireux d’en finir avec ce nid séditieux, les forces d’occupation expulsent en quelques heures une grande partie de la population et arasent à coups d’explosif une partie du quartier. Ne faudrait-il pas renouveler aujourd’hui cette expérience urbanistique radicale dans les quartiers Nord ? Ne serait-ce pas toute la cité qui se tiers-mondise avec l’adulation du foot et la vénération exagérée pour un affairiste défunt, à raser ?
Le philosophe Coluche pensait que Marseille fût la première ville africaine traversée par les compétiteurs du Paris – Dakar. Il ignorait qu’elle deviendrait un Brésil en miniature. La cité phocéenne préfigure l’avenir tiers-mondisé de l’Hexagone. Pourquoi diable la tribu celto-ligure des Ségobriges a-t-elle permis le mariage de Gyptis avec le Grec Protis? Ne savait-elle pas que les histoires d’amour finissent toujours mal ?
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 18, mise en ligne le 2 février 2022 sur Radio Méridien Zéro.
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Russie/Ukraine: les divisions au sein de l'OTAN et les habituels bellicistes (Royaume-Uni et États-Unis)
Russie/Ukraine: les divisions au sein de l'OTAN et les habituels bellicistes (Royaume-Uni et États-Unis)
Sawako Utsumi et Lee Jay Walker
Une analyse du Modern Tokyo Times
Ex: http://moderntokyotimes.com/nato-divisions-and-usual-warmongers-uk-and-us-russia-and-ukraine/
Les États-Unis (US) et le Royaume-Uni (RU) se sont impliqués dans la déstabilisation de nombreux pays - avec d'autres puissances de l'OTAN (la France en Libye et la Turquie en Syrie) - depuis de nombreuses décennies. Ainsi, du soutien au démembrement de la Yougoslavie puis de la Serbie (avec la création du Kosovo) - aux intrigues en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Syrie et en d'autres conflits - une immigration massive a été déclenchée. Ceci est lié aux États faillis, au chaos, au terrorisme, à la persécution ethnique et à d'autres facteurs négatifs.
En Amérique, vous avez 100.000 décès dus aux opioïdes, une frontière qui reste non viable et des divisions sociales et politiques croissantes. De même, au Royaume-Uni, où la statue de Winston Churchill a dû être protégée récemment contre des individus qui détestent les traditions de ce pays. En outre, les deux nations sont marquées par la criminalité, les guerres d'identité entre les sexes, le racisme et l'absence d'orientation ferme pour l'avenir. Cependant, lorsqu'il s'agit d'intrigues anti-chinoises et antirusses, les élites politiques du Royaume-Uni et des États-Unis cherchent toujours à semer davantage de chaos international.
La crise en Ukraine est extrêmement délicate vu les changements survenus après l'effondrement de l'Union soviétique et vu l'expansion croissante de l'OTAN vers l'est. Ainsi, les élites politiques de Moscou veulent un respect des accords géopolitiques alors que l'OTAN et la Fédération de Russie ont des intérêts divergents liés justement à la géopolitique. Par conséquent, tout comme la crise entre la Chine et Taïwan, qui est encouragée par les États-Unis et le Royaume-Uni (ainsi que par le Japon ces derniers temps), les mêmes forces (à l'exception du Japon) dans les couloirs du pouvoir à Londres et à Washington font monter les enchères en Ukraine en visant la Fédération de Russie.
Valery Gerasimov, chef de l'état-major général russe, a déclaré : "Les livraisons d'hélicoptères, de drones et d'avions à l'Ukraine poussent les autorités ukrainiennes à prendre des mesures abruptes et dangereuses. Kiev ne respecte pas les accords de Minsk. Les forces armées ukrainiennes se vantent d'avoir commencé à utiliser des systèmes de missiles antichars Javelin fournis par les États-Unis dans le Donbass et d'utiliser également des drones turcs de reconnaissance et de frappe. En conséquence, la situation déjà tendue dans l'est de ce pays se détériore encore davantage".
Alexander Lukashevich, représentant permanent de la Russie auprès de l'OSCE, "Nous sommes alarmés par les informations selon lesquelles certains pays membres de l'OTAN ont intensifié le déploiement d'armes létales et de personnel militaire en Ukraine. Rien que cette semaine, plusieurs avions militaires britanniques transportant des systèmes de missiles guidés ont atterri à Kiev".
Selon TASS News, "le diplomate russe a souligné que les avions militaires de transport et de reconnaissance américains apparaissaient de plus en plus souvent dans le ciel ukrainien et que les États-Unis avaient levé les obstacles à la réexportation de leurs systèmes de missiles et d'autres armes des pays baltes vers l'Ukraine".
Contrairement au Royaume-Uni et aux États-Unis, l'Allemagne tient bon en adoptant une approche plus nuancée. Annalena Baerbock, la ministre allemande des Affaires étrangères, a déclaré : "Nous sommes prêts à avoir un dialogue sérieux avec la Russie pour désamorcer la situation extrêmement dangereuse qui prévaut actuellement, car la diplomatie est la seule voie viable".
Le Modern Tokyo Times a récemment déclaré : "Ainsi, du point de vue de la Fédération de Russie, le renforcement militaire en cours des forces ukrainiennes dans les environs de la région du Donbass entraîne une certaine nervosité. Après tout, étant donné la nature nationaliste des forces politiques en Ukraine occidentale et leur hostilité à l'égard de la population russe, il est inconcevable que la Fédération de Russie reste les bras croisés en regardant des compatriotes russes se faire tuer".
Le Council on Foreign Relations rapporte que "les spécialistes occidentaux sont quelque peu en désaccord sur les motivations de l'agression de la Russie en Ukraine. Certains mettent l'accent sur l'élargissement de l'OTAN après la guerre froide, que la Russie considère avec une inquiétude croissante. En 2004, l'OTAN a ajouté sept membres, sa cinquième expansion et la plus importante à ce jour, dont les anciennes républiques baltes soviétiques, l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie. Quatre ans plus tard, lorsque l'OTAN a déclaré son intention de faire entrer l'Ukraine et la Géorgie dans le giron de l'Alliance à un moment donné, la Russie a clairement indiqué qu'une ligne rouge avait été franchie".
Le Guardian (par la plume de Simon Jenkins), à propos du regretté Boris Eltsine plaidant auprès des puissances de l'OTAN pour qu'elles ne se déplacent pas jusqu'aux frontières de la Russie, rapporte : "L'Occident a ouvertement tourné cette requête en dérision. Les dirigeants de l'OTAN ont savouré leur victoire, recrutant des membres à l'est, en passant par la Pologne, la République tchèque, la Hongrie et les États baltes. Les supplications des modérés russes ont été ignorées, tandis que Londres ouvrait ses portes aux richesses volées de la Russie. Le résultat était prévisible. En 1999, Vladimir Poutine a pris le pouvoir sur un programme populiste et patriotique. Pour l'ancien ambassadeur britannique à Moscou, Rodric Braithwaite, Poutine est passé maître dans l'art d'exprimer "le sentiment d'humiliation ressenti par les Russes après l'effondrement de l'Union soviétique". Il a exploité l'expansionnisme agressif de l'OTAN pour ce qu'il valait. Lorsqu'en 2008, l'Américain George W. Bush a apporté son soutien à l'extension de l'OTAN par l'adhésion de la Géorgie et de l'Ukraine (une décision à laquelle l'Allemagne et la France ont opposé leur veto), Poutine s'est emparé de territoires dans ces deux pays".
L'Ukraine et la Fédération de Russie doivent rechercher une solution, au moins là où le "conflit est gelé", soit dans la région de Donbass - jusqu'à ce qu'une solution politique plus générale puisse être trouvée. Les courtiers honnêtes au sein de l'OTAN - notamment l'Allemagne et l'Italie - devraient également rechercher des compromis de toutes parts. Après tout, les Ukrainiens, de tous les côtés des barrières ethnique, politique et religieuse, sont pris en otage par les politiques expansionnistes de l'OTAN.
L'ingérence du Royaume-Uni, des États-Unis et d'autres pays, dont le Canada, ne se terminera pas bien, compte tenu de l'histoire récente.
Sources:
https://www.theguardian.com/commentisfree/2022/jan/20/britain-russia-ukraine-border-dispute
https://tass.com/politics/1391077
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Iran et Israël : les guerres d'espionnage
Iran et Israël : les guerres d'espionnage
Source: https://katehon.com/ru/article/iran-i-izrail-shpionskie-voyny
La confrontation en matière d'espionnage entre Israël et l'Iran est l'une des batailles de renseignement les plus spectaculaires depuis la fin de la guerre froide.
Le début de l'année 2022 a vu un important scandale d'espionnage en Israël. Les services de renseignement du pays ont arrêté quatre femmes et un homme accusés d'espionnage pour le compte de l'Iran. Selon les responsables des services de renseignement israéliens, ils ont tous été recrutés via les médias sociaux par un homme qui se faisait appeler "Ramboud Namdar". Le porte-parole iranien a communiqué avec ses agents via Facebook et WhatsApp.
La résidente de Holon, arrêtée, âgée de 40 ans, était en correspondance avec Namdar depuis quatre ans. Pendant cette période, elle a envoyé à son correspondant des photos de l'ambassade des États-Unis et du centre commercial local, ainsi que des détails sur les mesures de sécurité en place. Bien que la femme soupçonne Namdar d'espionnage, elle n'a pas cessé sa correspondance avec lui.
Une autre espionne, une habitante de Beit Shemesh, âgée de 57 ans, a photographié le nouveau bâtiment de l'ambassade américaine à Jérusalem et a également persuadé son fils de rejoindre une unité militaire d'élite secrète, après quoi elle a donné aux Iraniens des photos de sa carte d'identité militaire et de son médaillon de soldat. Elle a été payée 5000 $ pour ces services.
Le réseau de Rambouda Namdar comprenait deux autres femmes, une résidente de 47 ans de Kfar Saba et une résidente de 50 ans de Jérusalem. Les médias israéliens ont jusqu'à présent gardé le silence sur l'étendue de leurs activités d'espionnage.
Yossi Melman, chroniqueur pour le journal israélien HaAretz, note que bien que la plupart des personnes arrêtées soient des "petits poissons", l'incident en lui-même est troublant.
Tout d'abord, l'histoire de Ramboud Namdar a montré que des Israéliens coopèrent facilement avec les services de renseignement iraniens, même pour une très faible récompense en argent liquide. Deuxièmement, les services de renseignement iraniens sont prêts à planifier des opérations complexes et pluriannuelles visant à infiltrer la société israélienne. Troisièmement, il n'y a pas lieu d'ironiser sur les missions confiées aux agents. Obtenir des photos d'une ambassade, d'un supermarché ou d'un bâtiment de l'Institut national d'assurance peut être possible grâce à Google, mais la réalisation de telles "missions vierges" permet de tester l'aptitude des nouveaux agents à accomplir des tâches. Après un certain temps, les tâches simples peuvent être remplacées par des tâches plus complexes. L'agence de contre-espionnage israélienne "Shabak" affirme que les Iraniens prévoyaient de créer une organisation de descendants juifs d'Iran, et cherchaient également à les relier à Kathy Shitrit, membre de la Knesset.
Ce dernier scandale est loin d'être la première histoire impliquant des tentatives des services de renseignement iraniens d'accéder à des secrets de l'État sioniste. En novembre 2021, la police israélienne et le service de sécurité interne Shabak ont arrêté Omri Goren, qui travaillait comme homme de ménage dans la maison du ministre de la Défense Beni Gantz. Goren avait contacté de manière proactive les services de renseignement iraniens via les médias sociaux et leur avait proposé sa coopération. Comme preuve de son sérieux, le concierge-espion a envoyé aux Iraniens des photographies de pièces de la maison du ministre, y compris un cliché de l'ordinateur de Gantz, et sa volonté d'installer un logiciel espion sur l'ordinateur du ministre.
En 1995, un Israélien d'origine iranienne, Herzl Rudd, s'est présenté au consulat d'Iran à Istanbul et a exprimé sa volonté de travailler contre Israël. Rudd a été transféré en Iran, où il a donné des détails sur sa vie en Israël et son service militaire. Après sa formation, Rudd a rejoint les services de renseignement iraniens et a été envoyé en Israël pour une mission d'infiltration des bases militaires des FDI. Pour cela, on lui a promis une récompense de 10.000 dollars. Finalement, Hertzel Rudd a été arrêté par les Israéliens (probablement avec l'aide des services de renseignement turcs) et condamné à trois ans de prison.
Toutefois, les services de renseignement iraniens ont obtenu des résultats plus importants. En 2012, elle a recruté l'ancien ministre israélien et membre de la Knesset Gonen Segev (photo, ci-dessus). Ce digne politicien avait été condamné à une peine de prison en 2005 pour trafic de drogue. En 2018, il a été enlevé par les services de renseignement israéliens en Guinée équatoriale. L'enquête a révélé que M. Segev était relié à Téhéran et restait ensuite en contact avec son supérieur hiérarchique iranien par le biais d'un canal de communication codé. L'ancien ministre a pu transmettre aux Iraniens des informations sur les bases militaires, les sites stratégiques et les hauts responsables du gouvernement et de la sécurité. Segev a également aidé les Iraniens à identifier les Israéliens occupant des postes à responsabilité. Il a présenté les agents iraniens comme des partenaires commerciaux et des hommes d'affaires étrangers.
Aujourd'hui, Gonen Segev purge une peine de 11 ans de prison. Nahum Manbar, un homme d'affaires qui a vendu des matériaux et des préparations pour la production d'armes chimiques à la République islamique, est également détenu dans une prison israélienne.
L'Iran mène des activités de renseignement contre Israël depuis plus de 30 ans. Les agences de renseignement de Téhéran utilisent activement les Juifs iraniens qui ont émigré en Israël à cette fin. Beaucoup de ces personnes se rendent souvent dans leur pays d'origine, de manière illégale, pour rencontrer leur famille et leurs amis. Tant les Iraniens que les Israéliens ferment les yeux sur ces visites, mais tentent d'utiliser les Juifs iraniens à leurs propres fins.
L'une des bases des services de renseignement iraniens travaillant contre Israël se trouve en Turquie. Des agents des services de renseignement iraniens travaillent à Istanbul et à Ankara. Les Iraniens utilisent également les connexions du Hamas pour recruter des Arabes israéliens. Une unité du ministère iranien du renseignement et de la défense (MOIS) est chargée de contrer Tel Aviv. Les méthodes des services secrets iraniens comprennent la cyberguerre, les activités sur les médias sociaux et le contact humain direct. Les Iraniens cherchent à obtenir des informations sur les cibles militaires et stratégiques susceptibles d'être attaquées, ainsi que des informations sur les politiciens et le personnel militaire israéliens susceptibles d'être recrutés, enlevés ou éliminés.
La principale cible des cyberattaques iraniennes est constituée par les entreprises privées, dont les défenses sont très inférieures à celles des institutions gouvernementales. Les experts israéliens définissent les cyberdéfenses des entreprises comme le "ventre mou" des systèmes de sécurité israéliens. L'objectif des cyberattaques iraniennes est d'infliger des dommages matériels, de faire pression sur l'opinion publique et de "riposter" après les actes de cyberterrorisme israéliens.
Selon l'ancien général israélien Yaakov Amidror, l'Iran cherche à entourer Israël de positions pour lancer des missiles et des drones capables de frapper des cibles stratégiques à l'intérieur de l'État sioniste. Dans ce cas, la tâche des services de renseignements iraniens est d'identifier les cibles de ces armes.
Cependant, les agences de renseignement israéliennes ne sont pas non plus en reste. Comme l'a déclaré l'année dernière l'ancien ministre iranien du renseignement Ali Yunesi, des agents israéliens ont infiltré de nombreuses institutions de la République islamique - et aucun responsable gouvernemental ne peut se sentir en sécurité. M. Yunesi a imputé aux services de renseignement iraniens la responsabilité des succès israéliens sur les "institutions de sécurité parallèles" de l'Iran qui, au lieu d'attraper les espions, perturbent les citoyens ordinaires. L'ancien président Mahmoud Ahmadinejad est d'accord avec lui : "Ce gang corrompu devrait révéler son rôle dans l'assassinat de scientifiques nucléaires et le bombardement de l'usine d'enrichissement d'uranium de Natanz. Ils ont volé des documents importants de Torkuzabad et de l'Agence spatiale iranienne. Ce n'est pas une blague ! Des documents extrêmement importants ont été volés et la sécurité du pays a été compromise !".
La profondeur de l'infiltration israélienne en Iran a également été confirmée par l'ancien chef du Mossad, Yossi Cohen, dans une interview accordée aux médias israéliens en 2021. Il affirme qu'en 2018, des agents de Tel Aviv ont infiltré les archives iraniennes et ont volé des dizaines de milliers de documents liés au programme nucléaire de Téhéran. Selon Cohen, 20 agents du Mossad qui n'étaient pas des ressortissants israéliens ont participé à l'opération. Il existe également des preuves indirectes de l'implication d'Israël dans l'attaque de Natanz, l'installation d'enrichissement de l'uranium, et l'assassinat du physicien nucléaire Mohsen Fakhrizadeh. "Si cet homme est une figure qui représente un danger pour les citoyens d'Israël, il doit cesser d'exister", a déclaré Cohen.
À propos de l'attaque de Natanz, les responsables israéliens affirment avoir réussi à recruter dix scientifiques iraniens qui avaient accès au coffre-fort. On leur a dit qu'ils allaient travailler pour les dissidents. Selon une source israélienne, "ils avaient tous des motivations différentes, le Mossad a découvert ce qu'ils voulaient vraiment dans leur vie et le leur a offert. Il y avait un cercle interne d'universitaires qui en savait plus sur l'opération et un cercle externe qui facilitait mais avait moins d'informations".
Outre les incidents susmentionnés, des dizaines d'attaques ont été menées contre les infrastructures iraniennes tout au long de la période 2020-2021. Les plus importants ont été le bombardement de l'usine Sepahan Boresh dans la ville de Baqershar, l'incendie de l'usine pétrochimique Shahid Todgooyan, le bombardement du chantier naval de Bushehr, etc. Tout au long de l'année 2021, des pétroliers iraniens transportant du pétrole vers le Liban et la Syrie ont été attaqués.
Si une part importante de ces incidents semble être le résultat de cyberattaques, les experts notent que leur fort impact n'aurait pu être atteint sans un réseau d'agents opérant en dehors du territoire iranien. Là encore, les agents pourraient être des Juifs iraniens qui se sont installés en Israël ou des exilés iraniens.
Outre la collecte de renseignements, comme le montrent les faits ci-dessus, une grande partie de l'effort des services de renseignement israéliens sur le territoire de l'Iran se limite à des activités purement terroristes visant à saper le potentiel militaire, scientifique et économique de la République islamique.
L'un des objectifs de cette activité est de perturber les éventuels accords entre l'Occident et Téhéran, le fameux "accord nucléaire". Le Premier ministre israélien Naftali Bennett, s'exprimant lors d'une réunion de l'état-major de Tsahal, a déclaré que la mission principale de Tel-Aviv était de causer de sérieux dommages à la République islamique ainsi qu'à ses alliés, le Hezbollah et le Hamas, rapporte le site Mideast Monitor. Le dirigeant israélien a également déclaré que si des accords étaient conclus lors des pourparlers de Vienne entre l'Occident et l'Iran, Israël n'avait pas l'intention de s'y conformer et conservait sa liberté d'action.
L'impasse en matière d'espionnage entre Israël et l'Iran est l'une des batailles de renseignement les plus spectaculaires depuis la fin de la guerre froide. Sans surprise, le sujet a déjà trouvé un écho dans l'industrie cinématographique. En 2014, des cinéastes iraniens ont réalisé un film, Fox, sur l'espionnage nucléaire israélien en Iran. En 2020, la première saison de la série télévisée israélienne Téhéran est sortie, centrée sur les tentatives des hackers israéliens et de leurs agents locaux d'infiltrer les installations secrètes de l'Iran.
Bibliographie
(1) Yossi Milman, "Ne minimisez pas la gravité de l'affaire d'espionnage iranien, c'est ainsi que fonctionne l'espionnage" (en hébreu), HaAretz, 13.01.2022, https://www.haaretz.co.il/blogs/yossimelman/BLOG-1.10535402?utm_source=Push_Notification&utm_medium=web_push&utm_campaign=General&fbclid=IwAR0-pdS4aqEjJcApjEYsdcTngo7tmAc4dGBsw5YU6nfoGKrWfeT67EHszz8.
(2) "Le concierge de la maison du ministre de la Défense israélien est soupçonné d'espionner pour l'Iran", RIA, 18.11.2021, https://ria.ru/20211118/izrail-1759649784.html.
(3) Ami Rokhas, " 'Shabak' a exposé le réseau d'espionnage iranien composé de citoyens israéliens juifs ", ISRAELDEFENCE, 12.01.2022, https://www.israeldefense.co.il/node/53317.
(4) Subbotin I., "Les services de renseignement israéliens ont pris racine en Iran", Nezavisimaya Gazeta, 04.07.2021, https://www.ng.ru/world/2021-07-04/2_8189_iran.html.
(5) Israel ex-top spy reveals Mossad operations against Iran, BBC, 11.06.2021, https://www.bbc.com/news/world-middle-east-57440430
(6) Exiting Mossad boss urges expansion of activity against Iran, Time of Israel, 31.05. 2021, https://www.timesofisrael.com/exiting-mossad-boss-urges-expansion-of-activity-against-iran/
(7) Яков Амидрор, «Иран как военно-политический вызов для Израиля» (ивр.), «Ба-Махане», https://www.idf.il/
(8) Boaz Dolev, "Iranian Cyber Attacks Against Israel" (Heb), Institute for Strategic Security Studies, 02.01.2022, https://www.inss.org.il/he/publication/cyber-iran/.
(9) Jake Wallis Simons, "Drones, bombes, espions - inside Israel's cunning plan to stop Iran's nukes", New-York Post, 06.12.2021, https://nypost.com/2021/12/06/drones-bombs-spies-inside-israels-cunning-plan-to-stop-irans-nukes/.
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Reformater le Moyen-Orient
Reformater le Moyen-Orient
Par Vyacheslav Matuzov
Source: https://katehon.com/ru/article/pereformatirovanie-blizhnego-vostoka
L'orientaliste et diplomate russe décrit, dans l'optique de son pays, les principales tendances du monde arabe pour la nouvelle année.
Tendances générales : facteur chinois
Les objectifs stratégiques, géopolitiques et politiques des États arabes devraient être reformatés.
La Chine, qui a été de plus en plus active au Moyen-Orient ces dernières années, jouera sans doute un rôle croissant dans la région en 2022.
Le développement des relations des pays arabes avec la Chine, à la lumière de l'intensification de la crise économique mondiale, sera sans aucun doute le facteur dominant dans les années à venir.
Les États-Unis conserveront sans aucun doute leurs liens traditionnels avec la région, tels qu'ils ont évolué au fil des décennies.
Mais parmi les facteurs importants des temps nouveaux, il y a le fait que la Chine s'engage sérieusement et à long terme au Moyen-Orient. Cela se voit également dans ses relations avec les pays du Golfe, qui ouvrent la porte à ses projets d'investissement, tout en maintenant leurs liens traditionnels avec les États-Unis et leurs alliés européens.
Un autre élément qui caractérise le Moyen-Orient est la relation de la Chine avec Israël, son allié le plus proche et le plus stratégique, qui tourne également les yeux vers la RPC (ce sont les investissements chinois croissants que nous voyons aujourd'hui - dans la reconstruction des ports maritimes, dans la sphère militaro-technique et autres).
Nous devons nous attendre à ce que le rôle croissant de la Chine soit l'une des évolutions significatives au Proche et au Moyen-Orient, ainsi qu'en Asie centrale.
L'OTAN contre la Russie
Quant à la Russie, ici, bien sûr, étant donné la politique intransigeante des États-Unis, nous marcherons dans le même couloir que la Chine. Les relations russo-chinoises peuvent, à condition que la situation économique de notre pays reste stable, contribuer dans une certaine mesure à renforcer la position de la Russie dans le monde arabe.
Mais cela se fera au prix d'une légère confrontation avec les pays occidentaux - surtout avec les pays de l'OTAN, notamment les États-Unis. Il ne s'agira pas de conflits militaires, mais les problèmes seront résolus principalement dans les sphères économique, informationnelle et technologique. Nous devons être préparés technologiquement à ces changements à venir.
Je ne suis pas sûr que, du point de vue économique, nous soyons aujourd'hui pleinement prêts à accepter et à relever ces défis. Il me semble que ce qu'il faut ici, c'est un traitement plus détaillé et plus attentif de ces alliés traditionnels du Moyen-Orient avec lesquels nous avons eu des interactions au cours des années précédentes et que nous devons préserver.
Même si certains aspects de cette relation nécessiteront sans doute des ajustements. La nature de la coopération économique semble devoir être revue, en donnant la priorité aux objectifs stratégiques de notre politique étrangère et pas seulement à la rentabilité des projets auxquels nous participons.
Cela concerne tout d'abord la coopération avec la Turquie, en tenant compte d'un certain nombre de points de sa politique étrangère à l'égard de la Russie. Notre politique n'est pas toujours claire et axée sur les questions stratégiques. En règle générale, elle se limite à la sphère militaire. Dans les domaines économique et technologique, nous sommes perdus entre les Arabes et Israël, entre les opportunités du monde arabe et notre capacité technologique à coopérer avec eux.
Nous devons nous concentrer davantage sur les relations avec des pays comme le nouvel Afghanistan, l'Iran, le Pakistan. Des changements sont susceptibles de se produire ici aussi. Un événement marquant a été le retrait des troupes américaines d'Afghanistan. Les changements à venir pourraient affecter le statut des troupes américaines en Irak. La présence américaine en Syrie s'annonce tout aussi sombre.
Le manque d'activité de la Russie en Libye s'inscrit également dans un contexte de "suractivité" des Américains, des Européens et des Turcs.
Réalignement mondial
L'année 2022 marque le début de la révision de l'ensemble du système de relations internationales établi après la Seconde Guerre mondiale, avec l'élaboration de nouvelles formes d'équilibre des pouvoirs au niveau mondial.
Ce facteur, bien sûr, sera étroitement lié au réalignement mondial auquel nous sommes déjà confrontés aujourd'hui (par exemple, dans les pourparlers russo-américains à Genève, les pourparlers Russie-OTAN à Bruxelles, avec les Européens au sein de l'OSCE). Ces trois voies de négociation influenceront inévitablement les processus au Moyen-Orient et s'y refléteront.
Le changement est inévitable.
Notre point de vue n'est pas perçu par l'Occident, et à cet égard, bien sûr, l'impasse est évidente. Les négociations l'ont montré clairement : nous avons présenté à l'Occident des exigences évidentes et incontestables - respecter notre position, nos intérêts nationaux - ce que l'Occident a jusqu'à présent catégoriquement refusé de faire.
Nous attendons la prochaine étape de la politique étrangère russe - la prochaine visite de M. Poutine en Chine en février - qui clôturera ce cycle de négociation, qui a commencé par la rencontre entre M. Poutine et M. Biden à Genève et leurs entretiens en ligne.
Il ne faut pas oublier ici que les mondialistes tentent d'imposer leur programme au monde par le biais de négociations politiques, afin de reformater toutes les relations internationales au niveau mondial.
Ils ont eu quelques succès - prenez, par exemple, la pandémie de Covid-19. Cela pourrait bien être considéré comme une forme de guerre hybride, un moyen de lutte évident des mondialistes pour remodeler le monde et établir leur hégémonie sur tous les pays. Nous pouvons constater que de nombreux pays du globe succombent à cette pression. Les mesures sévères prises pour lutter contre le coronavirus (vaccinations obligatoires, restrictions, etc.) signifient, en fait, qu'elles fonctionnent comme un outil pour reconfigurer l'ensemble de l'ordre mondial. Au Moyen-Orient, cela se reflétera également dans l'évolution de l'équilibre et de la balance du pouvoir politique dans les pays de la région.
Deux facteurs sont illustratifs : la position d'Israël et des pays du Golfe (tous alliés des États-Unis) vis-à-vis de la Chine.
Le Liban comme test décisif
Il est peu probable que l'évolution de la situation au Liban ait un impact significatif sur l'évolution de la situation dans l'ensemble de la région du Moyen-Orient. Le Liban est un pays trop petit pour avoir un impact significatif sur les processus politiques. Mais la situation, là-bas, peut servir de test décisif pour les processus en cours dans la région.
C'est au Liban que deux courants du monde islamique, chiite et sunnite, se heurtent, reflétant la tension entre l'Iran et l'Arabie saoudite. Le fait que le pays ait connu de telles difficultés pendant une longue période indique qu'il existe également un conflit féroce entre les intérêts américains et iraniens, une tentative des États-Unis de soumettre les pays de la région du Proche et du Moyen-Orient au sens large. Le voisin israélien joue un rôle important dans la déstabilisation du Liban et encourage ses alliés américains à exiger la fin des activités du Hezbollah dans le pays. C'est pourquoi la situation au Liban est directement liée aux luttes qui se déroulent aux niveaux régional et mondial.
Provocations contre l'Iran
Les Américains sont ouvertement à l'origine de l'escalade des relations des pays arabes avec l'Iran. La Russie tente de désamorcer les tensions, tandis que les États-Unis prennent des mesures dans la direction opposée. Les tentatives de boycott de la mise en œuvre de l'accord 5+1 sur le programme nucléaire iranien sont l'une des façons dont ils créent des tensions en utilisant l'animosité entre les pays du Golfe pour leur imposer leurs objectifs stratégiques.
Les tentatives de la Russie pour amener les pays à la table des négociations lors de la Conférence internationale sur la stabilité et la sécurité régionales, avec la participation des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies et des pays de la région (les pays arabes ainsi que l'Iran) se sont heurtées principalement à l'opposition des États-Unis, qui conservent actuellement une influence considérable dans le monde arabe.
Irak : une tentative de rétablissement de l'État
En ce qui concerne l'Irak, je n'insisterais pas sur la contradiction entre sunnites et chiites. Il faut s'attendre à ce que l'avenir de l'Irak, quelle que soit sa variante, soit construit sur des bases traditionnelles, où sunnites et chiites trouveront des solutions communes sur les questions fondamentales de l'État. Sinon, c'est une voie vers la division, ce que les Américains poussent l'Irak à faire.
Il est plus probable qu'il y aura des forces saines dans le pays, et que l'Irak rétablira son statut d'État, qui a été violé par l'agression américaine en 2003, et restaurera pleinement sa souveraineté et son indépendance.
Dans le cadre des processus qui se déroulent dans les pays arabes, avec la dynamique actuelle des événements, on assiste à une révision de nombreuses positions sur leur orientation politique, en tenant compte des changements au niveau mondial. L'Irak est loin d'être une exception. Mais le destin de l'Irak n'est pas simplement une lutte entre sunnites ou chiites, mais le désir du peuple de trouver un terrain d'entente entre les positions des deux communautés. Ce n'est pas facile, mais les Irakiens comprennent l'importance de préserver l'État et la nécessité de contrer les milieux extrémistes, qui, à mon avis, sont clairement provoqués par les Américains. L'extrémisme en Irak des deux côtés n'est pas soutenu par le courant dominant des deux branches de l'Islam.
Les Kurdes
Le problème kurde, qui a reçu un nouvel élan au cours des dix dernières années de la part des Américains, qui ont transféré aux autorités syriennes la responsabilité de s'opposer aux Kurdes, est également un problème grave pour les quatre États - Turquie, Iran, Irak et Syrie. Les projets de solution, décrits dans les célèbres cartes du colonel Ralph Peters, ne peuvent être mis en œuvre dans la pratique en raison de leur caractère inacceptable pour tous les pays mentionnés, et ne sont utilisés par les Américains que comme un facteur temporaire pour faire pression sur ces États. Le jeu de "poker politique" en Syrie, joué par les Américains et les Israéliens avec le désir du peuple kurde d'avoir son propre État indépendant, n'a pas vraiment de perspective de réalisation dans les circonstances actuelles.
À ce stade historique, la question kurde ne peut être résolue qu'à l'intérieur des frontières existantes et sur la base des constitutions existantes dans ces pays.
Selon différentes sources, le nombre de Kurdes dans cette région dépasse les 50 millions de personnes. L'absence d'un État propre à la population est sans aucun doute un facteur d'instabilité. Mais elle est causée par le mauvais héritage des puissances coloniales que sont la Grande-Bretagne et la France au début du XIXe siècle.
Pays du Golfe Persique
Il est peu probable que la tâche des pays du Golfe soit de se retirer de la sphère occidentale. Tâche peu probable car ces pays sont trop dépendants des Américains et de l'Occident. Mais c'est une chose de poursuivre une voie indépendante, et une autre d'avoir des relations économiques, politiques et diplomatiques normales avec l'Occident. Pousser ces pays à rompre avec l'Occident est improductif, et ne devrait probablement même pas être fait dans notre intérêt national. La stabilité du développement de la région est plus importante.
Par ailleurs, l'Occident ne devrait pas utiliser cette région comme un instrument de lutte contre la Russie, la Chine et d'autres pays, compte tenu notamment de son expérience en matière de soutien aux groupes radicaux "islamiques" qu'il crée pour saper la stabilité politique interne de la Russie.
Aujourd'hui, nous constatons que ces pays agissent déjà essentiellement comme des États indépendants dans leurs relations avec la Russie. C'est une grande réussite de ces 30 dernières années, lorsqu'après l'effondrement de l'URSS, un pas colossal a été franchi. Regardez les relations avec le Qatar, par exemple, ou les relations très développées et mutuellement bénéfiques avec l'Arabie saoudite, et il n'y a rien à dire sur les EAU.
Par conséquent, nous devons nous attendre à ce que les relations de ces pays avec l'Occident aient été, soient et restent. Quant à nos relations, elles devraient être développées par d'autres moyens - économiquement, diplomatiquement. Je ne vois aucun préjugé à notre égard aujourd'hui en raison de nos relations particulières avec les États-Unis.
La Libye
La Libye est la question la plus difficile. Il y a des forces concentrées et opérant en Libye, si bien qu'il sera très difficile de changer de position. Tout d'abord, nous parlons de la Turquie dans les affaires libyennes - le pays a des positions assez sérieuses là-bas, tant sur le plan économique que politique. Les tentatives de leurs adversaires de desserrer leurs liens sont exploitées par les États-Unis. La Turquie n'aurait pas pu s'y comporter aussi librement si elle ne bénéficiait pas du soutien total des États-Unis en secret.
Il suffit de regarder les activités de Stephanie Williams, conseillère spéciale du secrétaire général des Nations unies. Hier, elle était représentante du Département d'État, aujourd'hui elle représente le Secrétaire général des Nations unies. Sa position est répugnante pour une certaine partie des Libyens. Comment la question des élections peut-elle être résolue dans ces circonstances ? Sans consulter les forces politiques libyennes, Williams annonce que les élections n'auront pas lieu avant juin. Mais est-il dans la fonction du représentant du Secrétaire général de l'ONU de s'ingérer dans les affaires intérieures ? La fonction du représentant du Secrétaire général des Nations unies est d'aider à trouver des solutions politiques internes en Libye, et non de les dicter. Si elle commence à mener des politiques qui profitent à la Turquie, elle provoquera immédiatement des réactions négatives de la part des forces qui s'opposent à elle. Des solutions de compromis doivent être trouvées. Jusqu'à présent, je ne vois pas de progrès vers un compromis.
Les Libyens trouveront toujours un terrain d'entente entre eux si on les laisse tranquilles. Mais le problème est qu'ils sont empêchés de le faire. Cette circonstance - l'interférence de forces extérieures - sera le principal obstacle à la solution du problème libyen. Et la principale force qui cherche à imposer des solutions externes à la Libye, ce sont les États-Unis. Il y a là un agenda américain dans son ensemble, qui est poursuivi non seulement par Stephen Townsend, le chef du commandement américain pour l'Afrique, non seulement par l'ambassadeur américain Nuland, mais aussi par Stephanie Williams, la représentante du secrétaire général des Nations unies.
Lorsque l'on examine les acteurs de la scène politique libyenne, ce qui frappe, c'est l'absence pratique de la Russie et le rôle apparemment invisible des États européens, qui, en principe, devraient être les plus intéressés par la résolution des problèmes de la Libye. Les Américains règnent en maîtres. Il est trop optimiste d'espérer un changement là-bas, à moins que les Américains ne changent de stratégie. Sur la base des résultats des pourparlers de Genève et de Bruxelles, il est impossible d'envisager des perspectives positives sur la plate-forme libyenne, car les Américains maintiennent une ligne dure et mettent l'accent sur la résolution de tous les problèmes mondiaux et régionaux par la force.
Les Américains perdent leur crédibilité et leur influence dans la région
Malgré la vigueur qu'ils affichent, les Américains sont manifestement en train de perdre leur emprise sur la situation : le rôle de l'Amérique dans les affaires internationales en général est, à mon avis, loin d'être incontesté par les dirigeants de nombreux pays de la région, et donc fragile et instable.
L'influence, bien sûr, persiste - mais principalement en raison de facteurs économiques, et ne s'accompagne plus d'une confiance politique et morale. Les pays arabes le ressentent bien, et c'est l'une des raisons pour lesquelles ils penchent en faveur d'autres pays qui se sentent plus sûrs d'eux sur le plan économique et militaire (Chine, Russie).
Les plans américains pour un Grand Moyen-Orient font partie d'un programme plus large. Même en ce qui concerne le redécoupage des frontières des États sur la carte politique, que nous avons vu dans les plans américains (y compris les cartes des "frontières sanglantes" de Ralph Peters), les États-Unis ne se limitent pas seulement le Moyen-Orient et l'Asie centrale (Arabie saoudite, Jordanie, Syrie, Iran, Afghanistan, Pakistan, etc). Les idées visant à modifier le paysage politique de la région ne sont pas toujours reflétées dans les médias, mais le département d'État, l'administration américaine et le Pentagone ont ces plans. Ils ont des plans similaires pour la réorganisation géopolitique du monde en Afrique, en Europe et dans le sud-est asiatique. Il faut toujours en tenir compte.
Ce qui s'est passé au Kazakhstan, par exemple, n'est pas seulement un élément de dissension interne entre clans, mais s'inscrit pleinement dans la stratégie des Américains. Il semblerait que Nazarbayev avait une plateforme apparemment positive - c'était un homme de formation soviétique, un ancien membre de la direction du PCUS, qui dirigeait l'URSS - mais il est maintenant évident que tout en se cachant publiquement derrière le désir de développer des relations avec la Russie, il construisait des liens économiques et politiques denses avec l'Occident, principalement avec les Américains et les Britanniques, au détriment des liens avec la Russie et en violant les droits souverains de la population de son propre pays.
12:54 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : moyen-orient, russie, actualité, politique internationale, géopolitique, libyen liban, irak, émirats arabes unis, kurdes, kurdistan | | del.icio.us | | Digg | Facebook
dimanche, 06 février 2022
Un entretien entre Carlos X. Blanco et Max Otte
Un entretien entre Carlos X. Blanco et Max Otte
Le philosophe asturien Carlos X.Blanco, connu pour ses études sur Karl Marx, Oswald Spengler et Diego Fusaro, s'entretient avec le célèbre économiste allemand Dr Max Otte, l'un des critiques les plus virulents de l'euro et candidat à la présidence sous les recommandations de l'Alternative für Deutschland.
"Nous devons trouver un moyen de revenir aux traditions qui ont fait notre grandeur".
Merci beaucoup, Dr. Otte, d'avoir accepté de répondre à nos questions. Vous êtes connu dans le monde entier, en particulier dans le domaine de la finance. Vous avez écrit de nombreux livres dans ce domaine, dont vous êtes un spécialiste ; certains de vos livres ont été traduits en espagnol.
Avec toutes vos expériences, tant dans l'économie académique que dans le domaine du conseil financier public et privé, qu'est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans la politique ?
Je suis financièrement indépendant et je suis très préoccupé par l'évolution de l'Europe. C'est là que j'ai voulu faire quelque chose. Toutefois, je suis toujours resté dans le domaine pré-politique ou proche de la politique - d'abord en tant que président du conseil d'administration de la fondation Desiderius-Erasmus, puis en tant que président de la Werteunion. Aujourd'hui, je suis candidat au poste de président fédéral. Cette fonction se place au-dessus de la politique des partis.
Les lecteurs hispanophones ne savent peut-être pas que vous étiez jusqu'à présent lié à la CDU, bien que vous ayez beaucoup critiqué sa présidente, Angela Merkel. Comment en êtes-vous arrivé à accepter récemment la candidature à la présidence d'un autre parti politique, Alternative für Deutschland ?
Je me présente en tant que personne privée, en tant que Max Otte, à une fonction non partisane, et pas "pour" un parti, mais sur proposition d'un parti. Seuls le caractère, les valeurs et les qualifications devraient compter. J'espère bien sûr que cela sera un signe pour une politique conservatrice en Allemagne.
Comment vos relations avec ces formations politiques ont-elles évolué lorsque vous avez accepté la candidature d'un autre parti, Alternative für Deutschland ? Y a-t-il eu des exclusions ?
Mon parti, la CDU, n'était pas content, car il existe une "décision d'incompatibilité" qui exclut toute collaboration avec l'AfD. Mais je ne considère pas comme une collaboration le fait d'être candidat à un poste non partisan sur proposition d'un parti. On peut accepter ou refuser une proposition.
Qu'est-ce que l'Alternative für Deutschland apporte à votre pays et à l'Union européenne? Que pouvez-vous apporter personnellement?
Vous comprendrez que je ne commente pas la politique des différents partis pendant ma candidature. Je m'engage pour les valeurs de l'Occident chrétien, l'éducation, l'État de droit, une économie performante avec une composante sociale - bref, pour ce qui constitue l'Europe à mes yeux.
Vous avez toujours été très critique à l'égard de l'euro. Devrions-nous supprimer cette monnaie commune? Devrions-nous changer son utilisation ou peut-être la rendre compatible avec les monnaies nationales? Est-elle mauvaise pour l'Allemagne?
Je pense que l'euro est une grande erreur. Il a d'abord déclenché une conjoncture spéciale malsaine en Espagne et dans d'autres pays du Sud dans les années 2000, notamment dans le secteur de la construction, et a ensuite conduit à une grande crise. Depuis de nombreuses années, le chômage est élevé dans le Sud et les jeunes sont contraints de partir vers le Nord. Ce n'est pas ainsi que nous voulions construire notre Europe unie.
En tant que l'un des principaux promoteurs de la Société internationale Oswald-Spengler, avec le professeur David Engels, un auteur très lu dans notre journal et avec lequel il collabore, je me sens obligé de vous demander: est-il vrai que l'Europe est en déclin, exactement comme le philosophe l'a décrit et prédit il y a un siècle ? Allons-nous vers une ère de "césarisme" ?
Certains signes de déclin social et économique ainsi que de brutalité politique ne peuvent être ignorés.
Comment pouvons-nous combiner le renforcement de l'autorité, de la tradition et des "bonnes mœurs" avec la tradition économique et politique libérale des Européens? Croyez-vous à un conservatisme libéral pour l'Europe?
Ce n'est pas une question de foi. Nous devons trouver le moyen de retrouver nos racines et les traditions qui ont fait notre grandeur. En ce moment, c'est comme si un grand aimant exerçait une attraction sur le disque dur de notre culture et qu'il effaçait tout. Cela ne doit pas se produire - nous avons un riche trésor culturel dans lequel nous pouvons puiser.
Quel avenir voyez-vous pour l'Union européenne à court terme ?
On assiste à une course entre des distorsions économiques toujours plus grandes et une intervention toujours plus forte de l'État dans l'économie ainsi qu'une répression politique accrue. Nous sommes à la croisée des chemins: soit une nouvelle décentralisation pour tenir compte des multiples atouts et traditions de l'Europe, soit un centralisme bruxellois de plus en plus autoritaire.
L'interdépendance entre l'économie espagnole et l'économie allemande est très grande. Quel sera l'impact sur l'Allemagne et l'Union européenne de la grave crise de la société et des institutions en Espagne, associée à son économie en difficulté ?
Presque toute l'Europe est confrontée à une crise grave d'une manière ou d'une autre. Nous avons besoin de toute urgence de nouvelles solutions ; nous devons nous éloigner du centralisme de Bruxelles et de la Banque centrale européenne.
Merci beaucoup pour vos réponses.
Source: https://latribunadelpaisvasco.com/art/16246/max-otte-tenemos-que-encontrar-la-manera-de-volver-a-nuestras-raices-y-a-las-tradiciones-que-nos-hicieron-grandes
14:44 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : europe, actualité, affaires européennes, max otte, alternative für deutschland, allemagne, afd | | del.icio.us | | Digg | Facebook