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samedi, 25 septembre 2010

Un intellectuel turc casse le morceau

Un intellectuel turc casse le morceau

par Jean-Gilles Malliarakis

Ex: http://www.insolent.fr/

9782917329184-web1.jpgUne réforme constitutionnelle a été adoptée à Ankara par référendum, le 12 septembre. Victoire du gouvernement de l'AKP, approuvée par 59 % du corps électoral, elle relance une illusion.

L'occident pense en effet que la montée du pouvoir civil s'identifie à l'idée que nous nous faisons de la démocratie. Les partisans européens de l'adhésion à l'Union vont relancer ce mythe, en faisant totalement abstraction de l'opinion réelle et des objectifs nationaux des intéressés.

Ne dissimulons à cet égard ni le danger ni même peut-être le but, plus ou moins sournois. Car dans cette négociation factice, toute une campagne d'intoxication entoure cette opération truquée.

Il s'agit bel et bien d'imposer à l'Europe l'évacuation de toute référence identitaire. Par conséquent, on en vient à la priver de tout destin véritable.

Les pères fondateurs du traité de Rome de 1957 pensaient à la reconstruction de ce qui s'appelait autrefois la République chrétienne. D'autre part, leur système était fondé sur le libre-échange ; or, on tend désormais à lui substituer une conception sociale démocrate. C'est ainsi que deviennent objet de référence les pestilentielles formulations de la "charte des droits". Quoique rejetée par l'échec du référendum de 2005, celle-ci a été affirmée comme politique de l'Union par la misérable présidence Chirac en décembre 2000. Et, du fait de cette aberrante proclamation, elle est entrée dans la base doctrinale de la cour de Luxembourg supposée dire le droit communautaire.

Or un petit livre vient de paraître sous le titre "Turquie : le putsch permanent" (1) par Erol Özkoray. Je le trouve remarquable et d'une lecture agréable. Ceci me redonne le moral car, en tant qu'auteur moi-même d'un ouvrage où je cherche à donner quelques clefs sur "La Question turque et l'Europe" je me sens moins seul. (2)

Non que je me considère comme isolé, critiquant la perspective illusoire de l'adhésion d'Ankara : de nombreux Français croient s'opposer à cette candidature. Mais en réalité, ils ne font rien pour l'enrayer.

Le petit livre qui vient de paraître ne rejoint pas non plus ma conclusion. Du point de vue intérieur de son pays, en effet, le mirage de l'Union européenne sert aussi à promouvoir une certaine forme de libéralisation et de démocratisation.

Mais, partant de la réalité turque, l'auteur ne souhaite ni la victoire des forces islamistes, ni de la dictature silencieuse des réseaux kémalistes.

Voila en effet pour la première fois peut-être depuis 1919, du moins en langue française, un auteur issu de la Turquie qui montre clairement, explicitement, politiquement, socialement même, de quel mal il est atteint. Car ce pays souffre, beaucoup plus qu'on ne le croit, pris en étau entre l'héritage traumatisant du kémalisme et la menace de l'islamisme.

Jamais en effet le totalitarisme rampant dans lequel il baigne depuis la victoire de Kemal n'a été vraiment remis en cause. L'instauration artificielle du multipartisme en 1946 a juste permis la réislamisation.

L'auteur souligne la puissance de l'armée, et il semble considérer que les quatre républiques successives n'ont fait que permettre aux militaires de prendre plus de poids dans la société civile et dans l'économie.

Il évoque en exemple le rôle du groupe de presse quasi monopoliste Dogan (3). Celui-ci contrôle 70 % du tirage des grands journaux. Or il répercute systématiquement les mots d'ordre de l'État-major. Il parvient même à les diffuser en occident. Le gouvernement civil islamisant cherche à l'abaisser. Il a pour cela employé le moyen le plus rustique d'une énorme amende fiscale. Mais dans le meilleur des cas il ne fera que laisser la place à un concurrent aussi dangereux, celui des adeptes du mouvement Güllen, agent de la réislamisation du pays, sous les faux-nez de la modernisation.

Notre auteur révèle (page 24) surtout les "lignes rouges de la constitution secrète", soit "l'Acte politique de sécurité nationale", désigné en turc sous le sigle MGSB. Cette ligne se définit en 5 points :

"1° concernant le problème kurde, empêcher la fragmentation du pays ;
2° ne faire aucune concession sur le problème chypriote ;
3° rendre intouchable la laïcité de l'État ;
4° œuvrer contre l'Église orthodoxe dans le pays ;
5° ne jamais accepter le terme de génocide concernant la question arménienne."


Toutes les plus petites tentatives de rogner cette plateforme ont été démenties. Dernière en date : le projet d'une liturgie orthodoxe à Sainte-Sophie qui devait, avec l'accord initial des autorités, se dérouler le 17 septembre en présence de 200 pèlerins, a été annulé, à la dernière minute, comme s'il s'agissait d'une "provocation". En même temps on disserte à Bruxelles sur les libertés religieuses.

Je me séparerais éventuellement de l'auteur sur deux points.

Sa conclusion, très courte, à peine un quart de page, ne laisse pas beaucoup de place à l'espoir.

On se demande si sa conviction ne rejoint pas la prophétie très pessimiste, qu'il évoque, selon laquelle l'Asie mineure pourrait ainsi devenir la Yougoslavie du XXIe siècle. Or, à cette perspective catastrophique, l'armée offre aux puissances étrangères la seule illusion d'un rempart.

De manière ambiguë, d'autre part, les mêmes dernières lignes semblent confier à l'Union européenne le soin de guérir le patient.

Il souligne pourtant que cette nation (4), loin de correspondre à une mythique "race", assemble 36 ethnies et 7 religions. En cela, si deux ou trois groupes, aujourd'hui ultra-minoritaires peuvent s'identifier à la communauté européenne, il n'en va pas de même pour la nationalité supposée "centrale", celle des Turcs musulmans sunnites, ni non plus pour les Kurdes, pour les Alévis, pour les différents caucasiens, Tcherkesses ou Circassiens, pour les "dönmeh", pour les "nastouri", pour les Syriaques, ni enfin pour les descendants de gens ayant quitté notre continent après leur conversion à l'islam, etc. qui n'appartiennent de ce fait ni à l'Europe historique ni à l'Europe géographique.

Pourquoi laisse-t-il le lecteur imaginer dès lors que l'Union européenne pourrait résoudre les problèmes de ce pays ? Assemblage de gens qui en général ne connaissent rien ni au monde balkanique, ni à l'héritage ottoman, ses excellentes intentions tombent à côté. Personne ne lit les rapports de son administration de Bruxelles, pourtant clairs, sur l'impossibilité de l'intégration.

Il me semble revenir donc aux libéraux turcs de réformer leur pays, avec toute notre sympathie, et de tirer parti de la proposition franco-allemande d'un partenariat privilégié avec l'Europe.

On doit sans doute considérer la Turquie comme un pays estimable, riche de promesses, peut-être plein d'avenir, à l'instar de la Chine, de l'Inde, de la Corée ou du Japon. Mais pas plus que l'Empire du Milieu, il ne fait partie de notre famille de peuples.

Ne confondons pas voisin et cousin.
JG Malliarakis

Apostilles
  1. aux Éditions Sigest.
  2. aux Éditions du Trident.
  3. À ce sujet en laissons pas le lecteur dans l'ignorance que l'héritière de ce groupe, Mme Arzuhan Yalcındag préside la Tüsiad, c'est-à-dire le patronat turc. Elle fait évidemment partie du comité exécutif de cet "Institut du Bosphore" qui se présente comme "l'acteur incontournable du rapprochement franco-turc". On y retrouve Alexandre Adler et bien d'autres.
  4. Il donne à ce mot le sens très précis de la fameuse conférence de Renan de 1882.

Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique

sur le site de Lumière 101

mercredi, 04 août 2010

Les ennuis d'Erdogan

Bernhard TOMASCHITZ :

Les ennuis d’Erdogan

 

Le tribunal constitutionnel turc annule les projets de réforme constitutionnelle –

Le conflit avec les Kurdes mobilise les adversaires du Premier ministre turc

 

erdogan.jpgRecep Tayyip Erdogan vient d’encaisser une défaite. Le Tribunal constitutionnel turc vient de rejeter le projet du Premier Ministre de renforcer la position de son parti, l’AKP ou « Parti pour la Justice et la Prospérité », par le truchement d’une réforme constitutionnelle. Les juges suprêmes du Tribunal constitutionnel ont surtout estimé non recevables le projet d’instaurer de nouvelles procédures de nomination pour les juges constitutionnels et les plans visant à modifier le statut du « Haut Conseil des Juges et Avocats » (HCJA). A côté de l’armée, le Tribunal constitutionnel est la seule institution encore contrôlée par les kémalistes. C’est pour cette raison que le chef du gouvernement islamiste a cherché à s’assurer une majorité dans le HCJA, qui élit les membres du Conseil constitutionnel. Les limitations apportées aux compétences des tribunaux militaires sont restées telles quelles. Le 12 septembre prochain, un référendum aura lieu qui décidera des vingt modifications de la Constitution qui n’ont pas été acceptées.

 

Les milieux gouvernementaux n’épargnent pas leurs critiques acerbes à l’encontre des juges constitutionnels, après avoir voulu vendre leurs projets d’accroître le pouvoir des islamistes (aux dépens des laïques et des kémalistes) sous prétexte que les structures militarisées de l’Etat turc devaient être assouplies sinon supprimées pour que la Turquie puisse adhérer à l’UE. Le ministre de la justice Sadullah Ergin a déclaré, pour sa part, que le Tribunal constitutionnel avait outrepassé ses compétences et « commis une erreur ». Cependant l’opposition kémaliste n’est pas davantage satisfaite de la décision prise par les juges constitutionnels. Muharrem  Ince, du CHP (Parti Populaire Républicain), qui avait porté plainte auprès du Tribunal suprême d’Ankara contre la réforme proposée par Erdogan, a déclaré, lui aussi, « qu’il n’était personnellement pas satisfait ».

 

Mais Erdogan ne doit pas lutter que sur un seul front, celui où il s’oppose au Tribunal constitutionnel. Dans les régions kurdes, la situation est de plus en plus instable et agitée ; pratiquement tous les jours des combats éclatent entre des guérilleros du PKK (Parti Ouvrier Kurde) et des unités de l’armée turque ; au cours de ces quatre derniers mois, 130 insurgés kurdes ont été tués. Ensuite, l’armée turque ne cesse d’attaquer par les airs les positions kurdes dans le Nord de l’Irak, que le PKK utilise comme zone de repli. En arguant de la question kurde, les kémalistes cherchent à gagner la sympathie des électeurs et à contraindre le premier ministre à la défensive. Devler Bahceli, président du MHP (Parti du Mouvement National), vient de reprocher au gouvernement d’Erdogan « d’être en grande partie responsable de la montée du terrorisme et du séparatisme ». Propos similaires chez le nouveau chef de file du CHP, Kemal Kilicdaroglu, qui accuse l’AKP « d’avoir une grande part de responsabilité » dans la situation de quasi belligérance qui règne dans les régions kurdes.

 

Les critiques de la politique du gouvernement de l’AKP partagent l’avis que le procès intenté aux protagonistes du complot Ergenekon, à l’initiative d’Erdogan, a renforcé la rébellion kurde. L’ancien général Edip Baser, toujours influent, pense que les enquêtes judiciaires dans l’affaire Ergenekon, où même le Procureur général de l’Etat a croupi en détention préventive pendant plus de six mois, ont entravé considérablement le bon fonctionnement des services secrets. Il souligne surtout le fait qu’à l’époque où ces enquêtes étaient menées, tous les noms ont été publiés de ceux qui travaillaient dans les services secrets de l’armée, de la gendarmerie ou de la sûreté de l’Etat. Ces révélations ont littéralement décapité ces services et il faudra quelques années pour y remédier. Le premier ministre Erdogan est soupçonné d’avoir voulu éliminer certains de ses ennemis en lançant l’affaire Ergenekon. Lui voit les choses d’un autre œil. Selon Erdogan, la plainte contre les soi-disant comploteurs du réseau Ergenekon permet « de voir très clairement le lien entre les organisations terroristes et les bandes qui se sont incrustées dans le pays ».

 

Entretemps la question kurde devient de plus en plus pesante dans la région, ce qui inquiète bien entendu les milieux militaires. « L’Irak dispose d’un gouvernement central, qui doit exercer ses responsabilités. Ce gouvernement ne devrait pas donner refuge à des terroristes sur son territoire » a déclaré récemment le chef de l’état-major turc Ilker Basbug lors d’un entretien accordé à la télévision. Erdogan songe aussi à déclencher une attaque générale contre les zones du Nord de l’Irak, en prenant prétexte de la guerre globale contre le terrorisme. Toutefois Erdogan ne veut pas lancer seul cette attaque mais y impliquer ses partenaires de l’OTAN. Puisque l’un des objectifs principaux et déclarés de l’Alliance atlantique est de mener une guerre globale contre le terrorisme et puisque la Turquie mène déjà seule, dans son secteur, cette guerre contre les séparatistes kurdes campés comme « terroristes », « Les pays membres de l’OTAN », dixit Erdogan, «devraient apporter leur soutien dans cette lutte ». Erdogan a formulé cette demande fin juin dans un entretien qu’il a accordé à la chaine américaine PBS. A l’évidence, Erdogan veut obtenir cette participation de l’OTAN à la lutte contre les Kurdes pour, en échange, accroître la participation d’Ankara à la guerre américaine en Afghanistan. « Nous nous précipiterons vers Kaboul, dans la mesure où vous, vous vous précipiterez vers Kandil (une localité dans le Nord de l’Irak) ».

 

Vu le refroidissement évident des relations entre la Turquie et les Etats-Unis, à cause de la politique proche orientale du gouvernement Erdogan, et vu les difficultés qu’éprouvent les Etats-Unis en Afghanistan, il y a bien peu de chances que Washington réponde au souhait d’Erdogan. La proposition qu’a formulée ce dernier aux Américains a été passée sous silence en Europe et laisse entrevoir ce qui se passerait si la Turquie devenait membre à part entière de l’UE. Rien qu’à cause de l’obligation d’assistance, prévue par le Traité de Lisbonne, et vu la faiblesse politique de l’UE, l’Europe court le risque d’être entrainée dans les conflits du Proche et du Moyen Orient si jamais la Turquie réclamait à nos pays une assistance pareille à celle que vient de formuler Erdogan à l’adresse des Américains.

 

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°28-29/2010 ; http://www.zurzeit.at/ ).

 

 

mercredi, 07 juillet 2010

Le nationalisme des "Loups Gris"

Pietro FIOCCHI:

Le nationalisme des “Loups Gris”

Rapport d’un entretien avec Ihsan Barutçu, chef du MHP d’Istanbul

Graue-woelfe.jpgQuand on les voit de près, les “Loups” ne font pas peur. Le MHP (Milliyetçi Hareket Partisi), soit le “Parti du Mouvement National”, lors des législatives de 2007, avait obtenu 14% des voix et 71 sièges au parlement unicaméral turc, qui en compremd un total de 550. Nous avons donc affaire au troisième parti du pays, après l’AKP philo-islamiste, actuellement aux affaires, et le CHP social-démocrate, une organisation politique née plus ou moins en même temps que la république, au début des années 20.

Créé à la fin des années 60 par Alparslan Türkes, le MHP a suscité un intérêt croissant auprès des électeurs turcs depuis ces dernières décennies, à l’exception d’une brève stagnation en 2002. Le sommet fut atteint en 1999 avec son actuel leader Devlet Bahçeli, avec 18% des voix et 129 sièges. Ce parti ne relève donc pas du folklore mais constitue une réalité politique et sociale qui n’a rien de marginal comme on pourrait le croire. Malheureusement, son site officiel (www.mhp.org.tr) ne présente aucun texte en une autre langue que le turc. Ceux qui veulent glaner plus d’information sur ce mouvement doivent se rabattre sur Wikipedia ou sur des blogs qui, généralement, donnent de ce parti une description apocalyptique.

Nous, journalistes italiens du quotidien “Rinascita” (Rome), sommes toujours d’emblée sceptiques face aux étiquettes de tous genres et allergiques aux lieux communs; par conséquent, nous sommes allés trouver les hommes du MHP, qui furent, de leur côté, bien contents de susciter l’intérêt d’une fraction de la presse italienne. Nous avons été reçus avec tous les honneurs au bureau d’Istanbul pour avoir un long entretien avec le leader local, Ihsan Barutçu.

Nous n’avons attendu que quelques minutes dans l’antichambre: laps de temps pendant lequel, un fonctionnaire du parti a tenu à faire une précision. Cet homme était évidemment conscient du manque d’informations dont nous disposions sur son parti: il a tenu dès lors à souligner que les Européens avaient l’habitude de faire l’équation entre le nationalisme et le racisme. Il nous a alors donné deux exemples de leaders, que nous apprécions aussi: Hugo Chavez et Evo Morales, chez qui l’idée nationaliste n’a rien à voir avec le racisme mais s’exprime sous la forme d’un socialisme national qui, ajoutons-nous, a eu des effets bénéfiques sur leurs pays, le Venezuela et la Bolivie. Après cette précision, il nous a assuré que son parti n’avait pas de base ethnique mais était ouvert à tous les citoyens de Turquie, Kurdes compris.

Dès que nous nous sommes trouvés face à face avec Ihsan Barutçu, en présence de ses collaborateurs Aydin Çetiner et Mert Toker, qui jouait le rôle d’interprète, notre première question fut spontanée: “Qu’est-ce que le MHP?”. La réponse fut concise: “Notre parti représente la tradition et l’avenir du pays”.

Justement, à props d’avenir, nous étions forcément intéressés de savoir comment ils voyaient le futur de la Turquie dans la perspective d’une adhésion à l’UE. Les membres du MHP sont convaincus que Bruxelles applique, à l’endroit d’Ankara, une politique de deux poids deux mesures, qui est somme toute une attitude dépourvue de clarté. Quant aux militants du MHP, ils demeurent intéressés à entrer dans l’Europe: l’adhésion est un pas qu’ils sont prêts à franchir mais uniquement s’ils peuvent conserver intactes leurs propres traditions, leur culture, leur unité et leur indépendance... Ce qui signifie, ajoutons-nous, adhérer à l’UE sans que Bruxelles ne leur impose trop de conditions? Exactement, nous répondent-ils. Même si l’adhésion est un objectif convoité par les Turcs, les “Loups gris” admettent qu’ils restent perplexes devant l’UE et émettent des doutes sur le mode d’économie qu’elle pratique: ils nous donnent les exemples emblématiques de la Grèce et du Portugal. L’assemblée européenne a toutes les allures d’un club de nations chrétiennes, alors que les Turcs sont musulmans et tiennent à le souligner, ce qui implique bien entendu qu’ils ont des traditions et des valeurs propres.

Dans ce cas, cherchons-nous à comprendre, pourquoi cette UE apparait-elle si importante aux yeux des Turcs? Ne vaudrait-il pas mieux qu’ils concentrent leurs efforts pour adhérer à une éventuelle union des pays turcophones? De fait, beaucoup, entre l’Anatolie et l’Asie centrale, ont entendu parler de cette hypothèse. La Turquie, nous disent nos interlocuteurs du MHP, est située entre l’Orient et l’Occident: elle doit donc regarder dans les deux directions.

Nous confrontons alors nos interlocuteurs du MHP au parcours d’obstacles qui les sépare du but, à commencer par deux cas difficiles: 1) la reconnaissance de ce que nous appelons en Europe le génocide arménien et 2) la question de Chypre et de la République turque du nord de l’île, que les Européens considèrent comme une zone occupée militairement et non pas comme une entité étatique normale. A la première question, nos interlocuteurs nous répondent comme le font généralement tous les Turcs, sans distinction d’obédience politique: “nous ne sommes pas responsables des événements survenus au cours de la première guerre mondiale et, dans tous les cas de figure, il n’y a pas eu de génocide”.

Que nous proposent-ils dès lors pour nous faire accepter leurs arguments? Ils nous expliquent qu’en Turquie vivent de nombreux Arméniens, dont beaucoup d’étudiants, et certains d’entre eux sont même candidats aux élections sur les listes du MHP. Ces Arméniens-là rejettent la théorie du génocide. Quoi qu’il en soit, il faut, disent-ils, qu’une commission d’historiens fasse les recherches adéquates et trouvent une solution. Ce n’est pas une tâche qui doit être dévolue aux membres du parlement. Pour le MHP, la question arménienne relève de mobiles politiques et ne se base pas sur des faits historiques.

 Sur Chypre également, la position du parti est celle que partage en général la plupart des Turcs: dans l’île vivent deux sociétés différentes, l’une est turque et l’autre est grecque; les uns comme les autres ont des droits égaux. L’UE ne peut affirmer que Chypre appartient aux seuls Grecs. Le MHP attend des Européens une politiques plus objective. Ils considèrent que l’intervention militaire turque de 1974 relève d’une mission légitime de pacification.

 Et le nucléaire iranien? Qu’en dit le MHP? La réponse est simple: si Téhéran a des visées belliqueuses, le parti s’oppose au nucléaire iranien car il est par définition hostile aux armes atomiques. Il suffit de se rappeler les tragédies d’Hiroshima et de Nagasaki. Si, en revanche, les Iraniens souhaitent utiliser l’atome à des fins civiles, le MHP ne formule aucune critique. Tous les pays ont le droit de développer l’énergie nucléaire comme ils l’entendent.

 Pour terminer l’entretien, nous demandons quelques explications sur ce qu’entendent les militants du MHP par “pantouranisme”. Nos interlocuteurs demeurent laconiques. C’est une longue histoire qui a ses origines dans la mythologie antique. Le thème du pantouranisme fera l’objet d’un futur débat à bâtons rompus.

 Pietro FIOCCHI.

( p.fiocchi@rinascita.eu ).

(article paru dans “Rinascita”, Rome, 15 juin 2010).

(Site de “Rinascita”: http://www.rinascita.eu ).

mardi, 06 juillet 2010

La Turquie tourne le dos à l'Occident

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Bernhard TOMASCHITZ:

La Turquie tourne le dos à l’Occident

L’amitié étroite entre la Turquie et Israël est un fait politique qui relève désormais du passé. Ankara envisage des sanctions contre l’Etat sioniste à la suite de l’attaque israélienne contre la flotille de la paix qui faisait route vers Gaza. Si Israël refuse de satisfaire à l’exigence turque de mettre en oeuvre une commission d’enquête internationale, le gouvernement turc songe à réduire voire à rompre les relations diplomatiques et les coopérations économiques et militaires. De même, la résistance turque au sein du Conseil de sécurité de l’ONU contre tout raffermissement des sanctions contre l’Iran a conduit à un refroidissement considérable du climat entre Ankara, d’une part, Jérusalem et Washington, d’autre part. Président de la commission de politique étrangère du Parlement turc, Murat Mercan explique ce soutien apporté à Téhéran: “La Turquie a des liens historiques, culturels et religieux d’une grande profondeur temporelle avec l’Iran. En d’autres mots: les Iraniens sont non seulement nos voisins mais aussi nos amis et nos frères”.

A Washington, la nouvelle orientation de la Turquie vers la Syrie et vers l’Iran (deux “Etats voyous selon les Etats-Unis) suscite une vigilance toute particulière. Car, en fin de compte, la Turquie est un allié particulièrement important des Etats-Unis pour assurer la pacification de l’Irak. Parce que le gouvernement turc a décidé de ne pas participer aux sanctions, Robert Gates, le ministre américain des affaires étrangères, s’est déclaré “déçu”. Gates avait toutefois une explication toute faite: c’est l’UE qui est responsable de cet état de choses, vu le gel des négociations entre l’Europe et la Turquie en vue de l’adhésion de ce pays à l’Union. Les Etats-Unis mettent une fois de plus la pression sur l’Union européenne pour qu’elle accepte le plus rapidement possible la Turquie en son sein. Et cette pression ira croissant pour autant qu’Ankara n’exagère pas dans son soutien à Téhéran. Au Congrès américain, nous entendons désormais des voix qui réclament une attitude de plus grande fermeté à l’encontre d’Ankara: “Il y aura un prix à payer si la Turquie maintient son attitude actuelle et se rapproche davantage de l’Iran, tout en se montrant hostile à Israël”, a menacé le Républicain Mike Pence. Quant à la Démocrate Shelley Berkley, elle s’est adressé aux Turcs en ces termes: “Ils ne méritent pas de devenir membres de l’UE, tant qu’ils ne commencent pas à se comporter comme les peuples européens et tant qu’ils ne cessent pas d’imiter l’Iran”.

Désormais, la Turquie tourne donc ses regards vers le Proche Orient. Mais l’adoption de cette politique n’est pas vraiment une surprise. De fait, le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan et son parti gouvernemental, l’AKP de tendance islamiste, se sentent plus proches du monde musulman que des Etats-Unis ou de l’Europe. A ce sentiment d’affinité s’ajoute le concept de “profondeur stratégique”, élaboré dès 2001 par l’actuel ministre turc des affaires étrangères, Ahmed Davutoglu. Selon ce concept, la Turquie doit retrouver sa propre “identité historique et géographique”, démarche où l’Empire ottoman constitue la principale référence. Davutoglu considère son pays, la Turquie, comme un “Etat clef”, situé sur le point de rencontre de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique car, en effet, la Turquie est tout à la fois partie des Balkans, du Caucase, de l’espace pontique (Mer Noire), du Proche Orient et de l’espace maritime du bassin oriental de la Méditerranée, ce qui implique, ipso facto, qu’elle doit s’efforcer d’entretenir un “rapport équilibré avec tous les acteurs globaux et régionaux”.

Cette notion de “rapport équilibré” est très visible dans les relations qu’entretient aujourd’hui la Turquie avec la Syrie. Ces relations se sont remarquablement détendues, depuis que la Turquie essaye de jouer un rôle médiateur dans le conflit israélo-syrien. Avant ce travail de médiation, on évoquait fort souvent une possible “guerre pour l’eau” entre les deux pays redevenus amis, parce que la Turquie contrôlait le cours supérieur de l’Euphrate.

Quant à la “profondeur stratégique”, elle constitue le pendant en politique étrangère de l’islamisation de la Turquie en politique intérieure. La notion de “profondeur stratégique” et l’islamisation constituent deux modes de rupture avec le kémalisme, idéologie déterminante de la Turquie depuis la fondation de la République en 1923. Heinz Kramer, politologue oeuvrant à la “Stiftung Wissenschaft und Politik” de Berlin (“Fondation Science et Politique”), évoque, dans l’une de ses études, la rupture fondamentale que cette idée de “profondeur stratégique” apporte dans la praxis turque en politique étrangère: “La domination mentale exercée jusqu’ici par l’exclusivité de l’orientation pro-occidentale, considérée comme l’un des piliers de l’identité républicaine en gestation, se trouve relativisée. La Turquie, dans cette perspective, ne se perçoit plus comme un Etat en marge du système européen mais comme le centre d’une ‘région spécifique’, pour l’ordre de laquelle Ankara doit assumer une responsabilité ou une co-responsabilité politique”.

Conséquence de cette nouvelle vision en politique étrangère et de cette nouvelle conscience politique: la Turquie essaye de se positionner comme un acteur plus déterminant qu’un simple pays assurant le transport d’énergie. En juillet 2009, la Turquie a signé l’accord sanctionnant la construction du gazoduc Nabucco qui devra acheminer le gaz naturel de la région caspienne ou de l’Iran vers l’Europe centrale: cette signature est un véritable coup de maître politique. Morton Abramowitz et Henri J. Barkey, tous deux actifs pour les “boîtes à penser” américaines, écrivent à ce propos dans la très influente revue “Foreign Affairs”: “Le gazoduc Nabucco sera-t-il un jour construit? On demeure dans l’incertitude. Tant le coût de son installation que la question de savoir s’il y aura suffisamment de gaz naturel à disposition pour le remplir, sont des éléments qui restent à élucider (...). Mais le projet de gazoduc a d’ores et déjà augmenté l’influence de la Turquie aux yeux des pays de l’UE, animés par une perpétuelle fringale d’énergie”. Avec la clef énergétique, la Turquie pourrait bien s’ouvrir la porte de l’UE.

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°25-26/2010; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

jeudi, 10 juin 2010

La Turquie s'éloigne de l'Occident, comme le reste du monde

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La Turquie s’éloigne de l’Occident, comme le reste du monde

La Turquie et toutes les nations émergentes, rendues confiantes par leurs succès économiques, s’émancipent d’une tutelle occidentale moralisatrice de plus en plus mal supportée, écrit l’éditorialiste Semih Idiz, dans le quotidien turc Hürriyet.

 

Le best-seller de Fareed Zakaria titré « Le monde post-américain et l’essor du reste du monde » est une lecture fascinante, un livre prémonitoire. La question de l’Iran s’inscrit parfaitement dans cette perspective. Le problème va bien au delà des actuelles ambitions nucléaires de Téhéran. Cette affaire est en train de se transformer en une impasse qui dessine une nouvelle division du monde.

Cette division peut être caractérisée ainsi : « L’Occident et le Reste du monde », pour reprendre l’expression de Zakaria. Le développement de pays comme l’Inde, la Chine, le Brésil et la Russie – en d’autres termes « le Reste » – dessine un nouveau paysage mondial qui ne répond pas aux vœux de l’Occident.

La Turquie, qui connait également une croissance rapide, montre des tendances plus en plus marquées en direction du « Reste », et moins vers « l’Occident ». Ceci est interprété comme par certains, en Europe et aux États-Unis, comme une « islamisation de la politique étrangère turque », mais cette évolution pointe vers quelque chose de bien plus significatif.

L’émergence de ce nouvel ordre mondial ne constitue bien évidemment pas une surprise. Il était prévu par ceux qui sont suffisamment compétents pour en déceler les signes avant-coureurs. Nombre d’historiens occidentaux, d’économistes, et des chercheurs en sciences humaines ont décrit ce processus depuis un certain temps.

Quelques noms viennent immédiatement à l’esprit, notamment ceux de Walter Laqueur (« Les derniers jours de l’Europe : une épitaphe pour le vieux continent »), Joseph E. Stiglitz (« La Grande Désillusion »), et Zakaria, mentionné ci-dessus.

Même un Timothy Garton Ash, apparemment optimiste dans « Monde Libre : l’Amérique, l’Europe et le futur inattendu de l’Occident », décrit ce qui se adviendra si le lien de transatlantique n’est pas renforcé dans toutes ses dimensions, ce qui est bien sûr plus facile à dire qu’à faire, comme l’admet l’auteur.

Dans le même temps, l’anti-occidentalisme en général et particulièrement l’anti-américanisme deviennent de plus en plus palpable chez les Turcs. Rester partisan de l’orientation occidentale de la Turquie dans ce climat devient un défi pour une élite minoritaire. Mais l’éloignement de la Turquie des États-Unis et de l’Europe n’est pas quelque chose qui inquiète les Turcs dans leur majorité.

Cette attitude à l’égard de l’Occident n’est à l’évidence pas spécifique aux Turcs. De la Russie à l’Inde, de la Chine à l’Afrique, on assiste à une réaction croissante et forte contre l’Occident. Certains parlent d’un retour de bâton « post-colonial. »

Roberto Fao, un doctorant à l’Université d’Harvard qui a écrit pour le Financial Times, a travaillé à la Banque Mondiale et été consultant pour des projets gouvernementaux, propose des vues intéressantes sur la question.

Dans une tribune publiée par EUobserver.com le 25 mai, M. Fao affirme que les Européens doivent aujourd’hui « se demander pourquoi ils provoquent si peu de respect dans le monde. » Il cite Kishore Mahbubani, le doyen de la Lee Kwan Yew School of International Affairs de Singapour, qui soutient que l’Europe ne comprend pas à « quel point elle devient peu pertinente pour le reste du monde. »

M. Fao rappelle également que Richard Haas, le président du Council on Foreign Relations, a déclaré publiquement « adieu à l’Europe en tant que puissance de haut rang. » M. Fao ne croit cependant pas que l’on puisse négliger cette situation, en n’y voyant qu’une simple « jalousie » de la part des non-européens.

« Au contraire », écrit-il, « j’y discerne une vérité plus dérangeante. Les pays du monde entier ne supportent plus depuis longtemps l’ingérence et les leçons de morale de l’Occident, et ont acquis assez de confiance pour parler haut face à une Europe dont l’influence mondiale n’est plus considérée comme assurée ».

Dans son livre, Zakaria parle de la même « confiance » que des nations ont gagnée face aux États-Unis, avec quelques raisons pour ce faire.

« Les plus grandes tours, les plus grands barrages, les films à succès, et les téléphones mobiles les plus sophistiqués sont tous réalisés désormais à l’extérieur de l’Europe et les États-Unis », note-t-il, en ajoutant que « les pays qui manquaient par le passé de confiance politique et de fierté nationale les acquièrent. »

A la suite du monde bipolaire, le monde unipolaire semble lui aussi en train de s’effondrer, donnant naissance à un monde multipolaire où les possibilités de « l’Occident » sont en déclin, tandis que celles du « Reste » augmentent progressivement.

De fait, si l’Iran doit bien sûr être empêché d’obtenir une arme nucléaire – tout comme Israël et tous les autres devraient être obligés de mettre fin à leurs programmes et d’abandonner leurs stocks d’armes nucléaires existants – l’enjeu va bien au-delà.

Il s’agit d’un nouvel ordre qui va exiger des réponses très différentes à ce que nous connaissons aujourd’hui, si l’on veut que les problèmes brûlants ne mènent pas à des affrontements dont personne ne sortira gagnant au bout du compte.

Article original en anglais : Hürriyet (Turquie)

Traduction française : ContreInfo

dimanche, 09 mai 2010

Nieuwe stap in hervorming van grondwet in Turkije

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Nieuwe stap in hervorming van grondwet in Turkije        

 

 

ANKARA 07/05 (AFP) = Het Turkse parlement heeft vrijdag een hervorming van de grondwet goedgekeurd die de weg opent naar een referendum over een pakket amendementen op de grondwet. Volgens de oppositie kan de islamgezinde regering meer macht verwerven met de amendementen.

De hervorming werd met 336 van de 550 stemmen goedgekeurd, meer dan de 330 stemmen die vereist waren, maar minder dan de tweederdemeerderheid die tot een definitieve goedkeuring zonder referendum had geleid.

De amendementen willen vooral de macht van de gerechtelijke hiërarchie en het leger inperken, twee instellingen die de regering vijandig gezind zijn. Ze zullen nu aan de president van de republiek worden voorgelegd, die wellicht spoedig een referendum zal aankondigen. De Turkse premier Recep Tayyip Erdogan had donderdag verklaard dat over de grondwetshervorming een volksraadpleging gehouden zou worden als ze geen tweederdemeerderheid in het parlement zou halen.
   

mardi, 04 mai 2010

L'UE et sa politique de deux poids deux mesures

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Andreas MÖLZER:

L’Union Européenne et sa politique des deux poids deux mesures

 

La Turquie est traitée avec tact tandis que la Serbie doit subir vexations et rigueur

 

Les ambitions européennes de la Serbie seraient en train de se concrétiser: le pays s’est excusé récemment, et de manière formelle, pour le massacre de Srebenica, attitude d’humilité et de contrition que l’on chercherait en vain chez cet autre pays candidat à l’adhésion qu’est la Turquie, mais dont la candidature est toutefois largement contestée. En Turquie, on est menacé de sanctions si l’on ose débattre du génocide arménien.

 

L’interprétation des critères de Copenhague est arbitraire: on reproche à Belgrade de ne pas coopérer suffisamment avec le Tribunal de La Haye tandis que les atteintes aux droits de l’homme à Ankara sont considérées comme des faits divers négligeables. Mais ce n’est pas une nouveauté, ce n’est pas la première fois que l’UE pratique une politique de deux poids deux mesures. En Bosnie, on veut contraindre plusieurs groupes ethniques à cohabiter au sein d’un même Etat multiculturel alors qu’au Kosovo l’UE trouve tout naturel et légitime qu’un groupe ethnique se sépare d’un autre Etat. Le délégué de l’UE au Kosovo s’aligne sur le Plan Ahtisaari, déjà mis ad acta, et se mêle des élections communales serbes: voilà qui s’avère hautement problématique et contredit le devoir de neutralité dont doit faire montre tout médiateur, rôle que l’UE a la prétension de tenir.

 

La Serbie, au contraire de la Turquie, est historiquement et culturellement  européenne et constitue un Etat appelé à jouer un rôle clef dans la sécurité de tous les Balkans. Bien sûr, on ne doit pas répéter l’erreur commise lors de l’adhésion trop précoce de la Bulgarie et de la Roumanie à l’Union: il faut désormais que tous les critères d’adhésion soient remplis sans exception.  Mais, en revanche, l’UE n’a pas le droit d’exiger de la Serbie, pour prix de sa préparation à une éventuelle  adhésion, qu’elle reconnaisse l’indépendance du Kosovo, obtenue au mépris du droit des gens.

 

Andreas MÖLZER.

(article paru dans ézur Zeit”, Vienne, n°16/2010; trad. franç.: Robert Steuckers). 

mercredi, 28 avril 2010

Turken herdenken massamoorden op Armeniërs

Turken herdenken voor de eerste keer massamoorden op Armeniërs        

ISTANBOEL 24/04 (AFP) - Mensenrechtenactivisten, intellectuelen en Turkse artiesten hebben zaterdag in Istanboel voor de eerste keer op publiekelijke wijze de massamoorden op Armeniërs (1915-17) herdacht. Hiermee wordt een belangrijk taboe in Turkije doorbroken.
   

Istanbul.jpgDe afdeling uit Istanboel van de Vereniging voor Mensenrechten (IHD) organiseerde een herdenking voor de razzia op 220 leden van de Armeense intellectuele elite op 24 april 1915, het begin van de massamoorden.

Honderden manifestanten trokken, onder de slogan "Nooit meer", naar het station van Haydarpasa, vanwaar de eerste deportaties plaatsvonden. De betogers, begeleid door politie en talloze camera's, droegen zwart-witfoto's van gedeporteerden waarvan het merendeel nooit meer gezien werd. Een groep tegenbetogers werd door de politie op voldoende afstand gehouden. Rond 18.00 uur vindt een tweede betoging plaats in het hart van het Europese deel van Istanboel.
   

Ook in de Armeense hoofdstad Erevan zijn zaterdag duizenden mensen op straat gekomen om de 95ste verjaardag van de massamoord op de Armeniërs te herdenken. Volgens Armenië zijn meer dan 1,5 miljoen mensen omgekomen tijdens de genocide, Turkije houdt het aantal op 300.000 à 500.000 slachtoffers. Volgens Ankara werden ze echter niet het slachtoffer van een genocide, maar kwamen ze om tijdens de chaos van de laatste jaren van het Ottomaanse rijk.

MPK/MPE/(PLS)/

samedi, 27 mars 2010

Young Turks - The Ally That Isn't

Srdja Trifkovic:

Young Turks

The Ally That Isn't

Ex: http://www.alternativeright.com/

erdogan%20gul.jpgInside the Beltway, the fact that Turkey is no longer an "ally" of the United States in any meaningful sense is still strenuously denied. We were reminded of the true score on March 9, however, when Saudi King Abdullah presented Turkish Prime Minister Recep Tayyip Erdogan with the Wahhabist kingdom's most prestigious prize for his "services to Islam." Erdogan earned the King Faisal Prize for having "rendered outstanding service to Islam by defending the causes of the Islamic nation, particularly the Palestinian cause," said Abd Allah al-Uthaimin of the prize-awarding group.

Services to the Ummah

Turkey under Erdogan's neo-Islamist AKP has rendered a host of other services to "the Islamic nation." In August 2008 Ankara welcomed Mahmoud Ahmadinejad for a formal state visit, and last year it announced that it would not join any sanctions aimed at preventing Iran from acquiring nuclear weapons. In the same spirit the AKP government repeatedly played host to Sudan's President Omer Hassan al-Bashir -- a nasty piece of jihadist work if there ever was one -- who stands accused of genocide against non-Muslims. Erdogan has barred Israel from annual military exercises on Turkey's soil, but his government signed a military pact with Syria last October and is conducting joint military exercise with the regime of Bashir al-Assad. Turkey's strident apologia of Hamas is more vehement than anything coming out of Cairo or Amman. (Talking of terrorists, Erdogan has stated, repeatedly, "I do not want to see the word 'Islam' or 'Islamist' in connection with the word 'terrorism'!")

Simultaneous pressure to conform to Islam at home has gathered pace over the past seven years, and is now relentless. Turkish businessmen will tell you privately that sipping a glass of raki in public may hurt their chances of landing government contracts; but it helps if their wives and daughters wear the hijab.

Ankara's continuing bid to join the European Union is running parallel with its openly neo-Ottoman policy of re-establishing an autonomous sphere of influence in the Balkans and in the former Soviet Central Asian republics. Turkey's EU candidacy is still on the agenda, but the character of the issue has evolved since Erdogan's AKP came to power in 2002.

When the government in Ankara started the process by signing an Association agreement with the EEC (as it was then) in 1963, its goal was to make Turkey more "European." This had been the objective of subsequent attempts at Euro-integration by other neo-Kemalist governments prior to Erdogan's election victory eight years ago, notably those of Turgut Ozal and Tansu Ciller in the 1990s. The secularists hoped to present Turkey's "European vocation" as an attractive domestic alternative to the growing influence of political Islam, and at the same time to use the threat of Islamism as a means of obtaining political and economic concessions and specific timetables from Brussels.

Erdogan and his personal friend and political ally Abdullah Gul, Turkey's president, still want the membership, but their motives are vastly different. Far from seeking to make Turkey more European, they want to make Europe more Turkish -- many German cities are well on the way -- and more Islamic, thus reversing the setback of 1683 without firing a shot.

The neo-Ottoman strategy was clearly indicated by the appointment of Ahmet Davutoglu as foreign minister almost a year ago. As Erdogan's long-term foreign policy advisor, he advocated diversifying Turkey's geopolitical options by creating exclusively Turkish zones of influence in the Balkans, the Caucasus, Central Asia, and the Middle East... including links with Khaled al-Mashal of Hamas. On the day of his appointment in May Davutoglu asserted that Turkey's influence in "its region" will continue to grow: Turkey had an "order-instituting role" in the Middle East, the Balkans and the Caucasus, he declared, quite apart from its links with the West. In his words, Turkish foreign policy has evolved from being "crisis-oriented" to being based on "vision": "Turkey is no longer a country which only reacts to crises, but notices the crises before their emergence and intervenes in the crises effectively, and gives shape to the order of its surrounding region." He openly asserted that Turkey had a "responsibility to help stability towards the countries and peoples of the regions which once had links with Turkey" -- thus explicitly referring to the Ottoman era, in a manner unimaginable only a decade ago: "Beyond representing the 70 million people of Turkey, we have a historic debt to those lands where there are Turks or which was related to our land in the past. We have to repay this debt in the best way."

This strategy is based on the assumption that growing Turkish clout in the old Ottoman lands -- a region in which the EU has vital energy and political interests -- may prompt President Sarkozy and Chancellor Merkel to drop their objections to Turkey's EU membership. If on the other hand the EU insists on Turkey's fulfillment of all 35 chapters of the acquis communautaire -- which Turkey cannot and does not want to complete -- then its huge autonomous sphere of influence in the old Ottoman domain can be developed into a major and potentially hostile counter-bloc to Brussels. Obama approved this strategy when he visited Ankara in April of last year, shortly after that notorious address to the Muslim world in Cairo.

Erdogan is no longer eager to minimize or deny his Islamic roots, but his old assurances to the contrary -- long belied by his actions -- are still being recycled in Washington, and treated as reality. This reflects the propensity of this administration, just like its predecessors, to cherish illusions about the nature and ambitions of our regional "allies," such as Saudi Arabia and Pakistan.

The implicit assumption in Washington -- that Turkey would remain "secular" and "pro-Western," come what may -- should have been reassessed already after the Army intervened to remove the previous pro-Islamic government in 1997. Since then the Army has been neutered, confirming the top brass old warning that "democratization" would mean Islamization. Dozens of generals and other senior ranks -- traditionally the guardians of Ataturk's legacy -- are being called one by one for questioning in a government-instigated political trial. To the dismay of its small Westernized secular elite, Turkey has reasserted its Asian and Muslim character with a vengeance.

Neo-Ottomanism

Washington's stubborn denial of Turkey's political, cultural and social reality goes hand in hand with an ongoing Western attempt to rehabilitate the Ottoman Empire, and to present it as almost a precursor of Europe's contemporary multiethnic, multicultural tolerance, diversity, etc, etc.

In reality, four salient features of the Ottoman state were institutionalized discrimination against non-Muslims, total personal insecurity of all its subjects, an unfriendly coexistence of its many races and creeds, and the absence of unifying state ideology. It was a sordid Hobbesian borderland with mosques.

An "Ottoman culture," defined by Constantinople and largely limited to its walls, did eventually emerge through the reluctant mixing of Turkish, Greek, Slavic, Jewish and other Levantine lifestyles and practices, each at its worst. The mix was impermanent, unattractive, and unable to forge identities or to command loyalties.

The Roman Empire could survive a string of cruel, inept or insane emperors because its bureaucratic and military machines were well developed and capable of functioning even when there was confusion at the core. The Ottoman state lacked such mechanisms. Devoid of administrative flair, the Turks used the services of educated Greeks and Jews and awarded them certain privileges. Their safety and long-term status were nevertheless not guaranteed, as witnessed by the hanging of the Greek Orthodox Patriarch on Easter Day 1822.

The Ottoman Empire gave up the ghost right after World War I, but long before that it had little interesting to say, or do, at least measured against the enormous cultural melting pot it had inherited and the splendid opportunities of sitting between the East and West. Not even a prime location at the crossroads of the world could prompt creativity. The degeneracy of the ruling class, blended with Islam's inherent tendency to the closing of the mind, proved insurmountable.

A century later the Turkish Republic is a populous, self-assertive nation-state of over 70 million. Ataturk hoped to impose a strictly secular concept of nationhood, but political Islam has reasserted itself. In any event the Kemalist dream of secularism had never penetrated beyond the military and a narrow stratum of the urban elite.

The near-impossible task facing Turkey's Westernized intelligentsia before Erdogan had been to break away from the lure of irredentism abroad, and at home to reform Islam into a matter of personal choice separated from the State and distinct from the society. Now we know that it could not be done. The Kemalist edifice, uneasily perched atop the simmering Islamic volcano, is by now an empty shell.

* * *

A new "Turkish" policy is long overdue in Washington. Turkey is not an "indispensable ally," as Paul Wolfowitz called her shortly before the war in Iraq, and as Obama repeated last April. It is no longer an ally at all. It may have been an ally in the darkest Cold War days, when it accommodated U.S. missiles aimed at Russia's heartland. Today it is just another Islamic country, a regional power of considerable importance to be sure, with interests and aspirations that no longer coincide with those of the United States.

Both Turkey and the rest of the Middle East matter far less to American interests than we are led to believe, and it is high time to demythologize America's special relationships throughout the region. Accepting that Mustafa Kemal's legacy is undone is the long-overdue first step.

Srdja Trifkovic

Srdja Trifkovic

Srdja (Serge) Trifkovic, historian and foreign affairs analyst, is the author of seven books -- including a best-seller, "The Sword of the Prophet" -- and former foreign affairs editor of "Chronicles" (1998-2009). He is a regular contributor to print and broadcast media outlets in Europe and all over the English-speaking world.

mercredi, 03 mars 2010

La OTAN le dicta a la Union Europea su relacion con Turquia

La OTAN le dicta a la Unión Europea su relación con Turquía

La UE debe suscribir un acuerdo bilateral en materia de seguridad, entre otros asuntos.- Catherine Ashton no asiste a la reunión

otan-turquie-copie.jpgEn materia de defensa, la OTAN -es decir, EE UU- sigue siendo quien manda. Así ha quedado de manifiesto en la reunión informal que los ministros de Defensa de la UE celebran en Palma de Mallorca. En ausencia de la Alta Representante para la Política Exterior y de Seguridad, Catherine Ashton, que ha preferido asistir a la toma de posesión del nuevo presidente ucranio, la estrella de la reunión ha sido el secretario general de la OTAN, Anders Fogh Rasmussen.

Su primera intervención en un encuentro de este tipo no se ha limitado, como se esperaba, a abordar las relaciones entre las dos organizaciones. Rasmussen se ha presentado ante los ministros europeos como el embajador de los intereses de Turquía y les ha dicho cómo deben tratar a este país islámico, miembro de la OTAN y eterno aspirante a entrar en la UE. A saber: la UE debe suscribir un acuerdo bilateral en materia de seguridad con Turquía; debe establecer mecanismos de cooperación entre Turquía y la Agencia Europea de Defensa (AED); y debe permitir que los países que participan en operaciones militares de la UE sin pertenecer a la misma intervengan en la toma de decisiones. Por si hubiera duda, ha aclarado que Turquía es el segundo contribuyente de la misión de la UE en Bosnia. Tras admitir que “se trata de un tema sensible”, ha agregado que ello “no debe servir como excusa”.


Rasmussen ha asegurado que la discusión con los ministros europeos ha sido “muy fructífera”, pero ha evitado responder si Chipre está dispuesta a dar un papel mayor en la Unión al país que ocupa el norte de su territorio desde 1974. Respecto a la ausencia de Asthon, ha asegurado que ya ha abordado este asunto con ella y que “está muy a favor de reforzar la cooperación con la OTAN”.

Preguntado por las declaraciones del jefe del Pentágono, Robert Gates, quien ha lamentado la “desmilitarización” de Europa, Rasmussen ha recordado que los europeos aportarán 10.000 soldados a Afganistán a petición de Obama, pero ha admitido que “hay un problema por la falta de capacidad [militar] en Europa”. Ha calificado de “éxito” la ofensiva en la provincia afgana de Helmand y ha dicho que “servirá como ejemplo para operaciones futuras”.

La reunión de Palma ha concluido sin que los siete países socios del avión de transporte europeo A400M (Alemania, Francia, Reino Unido, España, Turquía, Bélgica y Luxemburgo) certificaran el “principio de acuerdo” anunciado por la ministra española, Carme Chacón . El comunicado oficial es más cauto y sólo constata que se ha producido “un avance significativo en las conversaciones”. Lo cierto es que la empresa fabricante, EADS, ha aceptado la última oferta de los gobierno para compensarla por el sobrecoste del proyecto: 2.000 millones a fondo perdido y 1.500 en créditos. Aún quedan, sin embargo, notables flecos; como saber qué países participarán en el préstamo y en qué condiciones. Chacón subrayó la “voluntad inequívoca” y unánime de ir adelante con el A400M y su impresión de que “pronto” se cerrará el acuerdo.

Miguel González

Extraído de El País.

~ por LaBanderaNegra en Febrero 26, 2010.

mardi, 02 mars 2010

Six milliards d'euros pour la Turquie!

6 milliards d’euros pour la Turquie

Ex: http://fortune.fdesouche.com/

Subventions à la Turquie dans le cadre de sa “préadhésion” à l’Union européenne. Un coût de 6 milliards pour les contribuables européens.

Le logo ci-contre est celui du Secrétariat général pour les Affaires européennes (organisme du gouvernement turc chargé des négociations d’adhésion). La couronne d’étoiles européenne s’y transforme en croissant sous l’influence de la Turquie : tout un programme.

Le 13 janvier 2009, la Cour des comptes européenne (ECA) a rendu public un rapport, intitulé “La gestion, par la communauté européenne, de l’aide de préadhésion en faveur de la Turquie”.

Dans ce rapport, un chiffre explosif : la Commission européenne a versé 6 milliards d’euros à la Turquie dans le cadre de sa “préadhésion”.

La première période d’aide à la préadhésion (2002-2007) a vu l’Europe verser à la Turquie 1,249 milliard d’euros ; la seconde (2008 – 2013) prévoit le versement de 4,873 milliards d’euros.

Si la Commission  européenne est responsable de la gestion des fonds , l’argent est confié à l’IAP,”Instrument d’aide de préadhésion” en grande partie géré par les autorités turques. Depuis 2002, l’aide de préadhésion en faveur de la Turquie permet de financer la mise en oeuvre de projets destinés à soutenir les efforts déployés par ce pays afin de remplir les conditions requises pour adhérer à l’Union européenne.

Les « documents stratégiques » fournis à la Cour par les autorités responsables démontrent que les aides de l’UE n’ont pas été affectées de manière cohérente « en fonction d’un ensemble d’objectifs réalisables ». La Cour déplore l’opacité – pour ne pas dire le gaspillage, voire la corruption pure et simple, selon Minute– des projets financés.

D’après le rapport de la Cour, « des projets bénéficient de subventions alors que la partenariat pour l’adhésion n’en mentionnait nullement l’utilité et, dans le même temps, plus de 100 autres priorités n’étaient au centre d’aucun des projets sélectionnés. Les objectifs et la portée de 4 autres projets audités ne concernaient pas directement les priorités figurant dans le partenariat pour l’adhésion”.

Observatoire des subventions

lundi, 01 mars 2010

On relance la candidature turque en pleine crise institutionnelle!

On relance la candidature de la Turquie
en pleine crise institutionnelle

par Jean-Gilles MALLIARAKIS / http://www.insolent.fr/

islatroie.jpgChef du gouvernement de Madrid, M. José-Luis Zapatero se croit autorisé à parler au nom de l'Espagne, et même de l'Europe. Les naïfs croyaient la présidence tournante de l'Union abolie par le traité de Lisbonne. Pour lui être agréable, on a accepté de maintenir cette fiction en sa faveur. De la sorte, il a proclamé, recevant son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan le 22 février (1), une nouvelle avancée des négociations d'adhésion de la Turquie, ouvrant le "plus grand nombre de chapitres" thématiques de discussions en vue de son intégration.

"L'Espagne est fermement partisane de l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Nous avons toujours maintenu fermement cette position. C'est le cas aujourd'hui et ce le sera demain".
Voilà donc relancée, de manière fort inquiétante et de mauvaise foi, un dossier essentiel pour notre identité, et auquel votre serviteur vient de consacrer un petit livre documenté. Dans cette présentation, l'auteur s'efforce d'expliquer au public francophone un certain nombre de contradictions de ce pays, candidat extra-communautaire malheureux depuis 1987.

Il se trouve aussi que celles-ci s'accroissent, se gonflent, de semaine en semaine, au point de paraître désormais explosives, à l'intérieur.

Ainsi ce 23 février, au lendemain même des embrassades de Séville, malencontreusement perturbées par un très méchant Kurde, très mal élevé (2) on procédait à Ankara, à Istanbul, à Bursa et à Izmir, à l'arrestation d’une cinquantaine d’officiers, dont 11 importants généraux à la retraite. Ceux-ci ont été gardés à vue et interrogés dans le cadre d'un nouveau dossier d'accusation de complot. Intitulé "Bayloz", les enquêteurs l'ont rattaché à l'interminable feuilleton judiciaire "Ergenekon". Le chef d'État major Illker Basbug, désormais sur la sellette, et dont certains demandent publiquement la destitution, doit annuler un déplacement officiel à l'étranger.

On ne peut pas tout de même pas tenir de tels développements pour d'anodines péripéties !

Parallèlement et paradoxalement l'environnement international accorde de plus en plus de créance au gouvernement des fameux "islamistes modérés" de l'AKP actuellement au pouvoir.

Les médiats de notre Hexagone pointent certes, de loin en loin, un certain nombre de problèmes. Ceux-ci nous sont même devenus presque familiers.

Ainsi la lancinante question des communautés d'origine et de langue kurdes a produit des milliers de morts dans l'affrontement du dernier quart de siècle. Assagie en partie seulement, depuis l'arrestation de son chef terroriste Ocalan en 1999, la révolte sanglante du PKK s'était transposée sur le plan légal. D'inspiration et de discours marxiste-léniniste, elle a généré un parti de gauche, le DTP, représenté à la Grande Assemblée nationale d'Ankara en dépit des filtres constitutionnels. Récemment dissous, il s'est aussitôt reconstitué, sous un autre nom.

Dans un autre ordre d'idées, la tension non résolue avec l'Arménie, comprenant la terrible question de la négation du génocide de 1915, se complique de l'imbroglio des relations avec l'Azerbaïdjan. On a donc communiqué à l'automne 2009, et Mme Clinton a cru triompher, sur un accord "réconciliateur" qui ne permettait même pas d'ouvrir les frontières entre les deux États.

D'autres exemples pourraient être donnés, que la presse parisienne laisse courageusement de côté. Ceux-là semblent suffire à édifier le lecteur quant aux difficultés générales que rencontre la ligne diplomatique annoncée par le ministre des Affaires étrangères apparu récemment M. Ahmet Davutoglou.

Sa formule a été énoncée en anglais de cuisine : "no problem with our neighbours". Or, cela peut se traduire en bon français par plusieurs formulations. Et, selon que l'on entendra "il n'existe aucun litige", ou au contraire "nous refusons de prendre en considération le moindre contentieux", ou enfin "qu'on cesse de nous enquiquiner avec les jérémiades de nos voisins", il ne s'agit plus de simples nuances dans l'interprétation.

Globalement une telle politique extérieure illustre l'adage "qui trop embrasse mal étreint".

Dans le sud-est européen, par exemple, Ankara prétend à la fois marquer en souplesse sa présence, affirmée comme traditionnelle, et souffler sur les braises des revendications de minorités islamiques, généralement slaves ou pomaques. Une idée nouvelle vient de germer – combien de temps durera-t-elle ? – celle de prendre appui sur la Serbie, vecteur improbable de la pénétration d'Ankara. Mais, quelques semaines auparavant, et plus naturellement, la Bosnie-Herzégovyne faisait l'objet de toutes les attentions, puis l'Albanie. Avec la Bulgarie et avec la Grèce on agite les droits des petites minorités musulmanes, etc. tout en prétendant, simultanément, aplanir la rugueuse relation turco-hellénique, "résoudre" le problème de Chypre, etc. Par ailleurs on laisse la presse gouvernementale comme elle le fait depuis plusieurs mois, révéler les manœuvres occultes de l'État-Major kémaliste. Et on les retrouve derrière toutes les provocations anti-grecques depuis 1955 jusqu'à celles des dernières années en Mer Égée, en passant par diverses affaires d'assassinats, comme celui du journaliste arménien Hrant Dink en janvier 2007, et d'attentats inexpliqués.

Car un aspect décisif de cette situation politique oppose deux tendances apparemment irréconciliables, au sein de la république post-kémaliste. Il ne s'agit pas seulement de deux secteurs de l'opinion, la gauche laïque et la droite islamisante, ou plus exactement confrérique. On doit constater aussi le conflit de plus en plus ouvert entre centres de pouvoirs institutionnels. Ils se combattent au nom de légitimités juridiques concurrentes. La constitution en vigueur depuis le référendum de 1982 a validé un rapport de force correspondant au coup d'État militaire dirigé par le général Evren en 1980. Plusieurs fois réformée depuis, elle a prévu en faveur de l'armée un certain nombre de prérogatives et de verrous. Au sein du pouvoir judiciaire, également, les forces laïques disposent de situations stratégiques, destinées à bloquer le retour en force de l'élément religieux. Chaque jour, de nouveaux épisodes, parfois tragiques, parfois savoureux, attisent les oppositions.

Or en même temps, la politique extérieure d'Ankara avance de plus en plus. Elle paraît prendre en main les revendications du Proche orient arabe. Elle tend à évincer progressivement l'influence du pays rival, l'Égypte.

Cela conduit cette diplomatie à s'exposer à des risques peut-être inconsidérés.

Lors de la dernière réunion, ce 29 janvier à Istanbul, des sociétés de pensées des 56 pays membres de l'Organisation de la Conférence islamique, s'est ainsi produit un événement bien significatif. L'assistance s'est levée, lors de l'intervention de Rachid Benaïssa (3), pour ovationner debout l’action pro-palestinienne du "nouvel empire ottoman" (4).

Cette popularité régionale de l'actuel gouvernement d'Ankara a pris son essor avec l'incident spectaculaire du 9 janvier 2009 à Davos entre le premier ministre turc Erdogan et Shimon Peres. Elle s'est vue confirmée par les nombreux déplacements des 3 principaux dirigeants dans divers pays arabes ces 12 derniers mois.

Inutile de dire qu'en contrepartie, la relation traditionnelle avec l'État d'Israël s'est dégradée d'autant. Avec les États-Unis, le refroidissement est devenu manifeste. Les choses vont beaucoup moins bien avec les alliés.

On peut certes se poser beaucoup de questions à propos de ce concept "néo-ottoman" dont les contours souffrent d'une absence de définition.

Il fait cependant son chemin. S'il s'agissait de reprendre la voie des réformes libérales de l'époque dite "Tanzimat", interrompues sous le règne d'Abdül Hamid, et plus encore par la seconde révolution jeune turque de 1909 (5), on pourrait se réjouïr.

En revanche il existe une différence de taille entre l'Histoire de cet Empire séculaire et le gouvernement de M. Erdogan apparu en 2003.

Historiquement, en effet, ni l'expansion de l'islam aux VIIe et VIIIe siècles, ni la pénétration seldjoucide en Asie mineure au XIe siècle, ni encore moins l'avènement de la maison d'Osman à partir du XIVe siècle ne se sont opérés contre l'élément militaire. Au contraire.

Tous les dirigeants politiques de ces différentes époques se sont affirmés comme chefs d'armées. Ils s'appuyaient, tous, sur une élite de cavaliers, dont ils ont fait des seigneurs territoriaux (6).

Imaginer un gouvernement islamique modéré, susceptible de changer de paradigme pour complaire à l'Europe des petits cochons roses, pour satisfaire au président universel Obama, et pour répondre aux rêves d'un monde sans conflit (7), peuplé de gentils bizounours et de schtroumpfs bleus, paraît donc un tant soit peu prématuré.
JG Malliarakis


Apostilles

 

  1. cf. Le Monde en ligne et AFP 22 février 2010 à 18h08
  2. Sur notre petite photo, on peut voir la remise du prix Nodo au premier ministre turc. Mais "Le passage du Premier ministre turc à Séville a été plus mouvementé que prévu. Recep Tayyip Erdogan était venu recevoir le prix Nodo, remis par la Fondation Séville aux personnalités qui œuvrent pour le dialogue entre les civilisations et les cultures. Une cérémonie feutrée dont le quotidien ABC raconte le déroulement... Mais, à la sortie de la mairie andalouse où se tenait cette soirée, il a été pris à partie par un manifestant qui lui a lancé une chaussure. Son geste s'est accompagné d'un slogan: "Vive les Kurdes, vive le Kurdistan!", lancé en espagnol, comme le montrent ces images de CNN." cf.le site de la Vigilance arménienne
  3. sur ce personnage franco-algérien qui fut fonctionnaire de l'UNESCO, on peut lire, avec les réserves d'usage la fiche wikipedia qu'il a peut-être rédigé lui-même
  4. cf. Think Tanks Of The Islamic Countries Come Together In Istanbul
  5. celle qui porte la responsabilité du génocide de 1915
  6. recourir au concept occidental de féodalité relève du contresens.
  7. annoncé par un faux prophète dans une conférence célèbre à Moscou en 1991.

samedi, 27 février 2010

Maniobras militares conjuntas entre Turquia e Israel

Maniobras militares conjuntas entre Turquía e Israel

Finalmente el ministro turco de defensa, Vecdi Gonül mencionó que después de la crisis del octubre de 2009 en las relaciones de este país y el régimen sionista, el ejército de este régimen ha participado dos veces en maniobras celebradas en el territorio de Turquía. El gobierno turco el mes de octubre de 2009 anuló el programa de la celebración de entrenamientos militares conjuntos con el régimen sionista en protesta a los crímenes de este régimen en la franja de Gaza.

Pero Vecdi Gonül finalmente frente las preguntas de los diputados de diferentes partidos en el parlamento, confesó que una de estas maniobras fue celebrada de forma trilateral entre Turquía, el régimen sionista y Jordania el mes de noviembre de 2009 en Ankara y la segunda en mes de diciembre en la misma ciudad.

Esta confesión de Gonül tuvo amplios ecos en los medios noticieros turcos, de forma que el diario Vakit publicado en Turquía escribió que el ejército de este país sigue actuando de forma obstinado y no acata plenamente al gobierno de este país.


Esto significa que el ejército de Turquía al contrario que los políticos de este país, persigue sus intereses en relaciones con el régimen sionista.

Al mismo tiempo algunos analistas no rechazan la posibilidad de que teniendo en cuanta las relaciones estratégicas de Turquía y el régimen sionista, haya un acuerdo entre el ejercito y el gobierno de Turquía de forma que los mandatarios de este país tomen postura contra el régimen sionista con el fin de responder las reclamaciones de la opinión publica del país ante los crímenes de este régimen en Gaza, y por otro lado, el ejercito mantenga sus relaciones militares con el régimen sionista.

De forma que algunos medios noticieros de Turquía anunciaron la ejecución del acuerdo de varios millones de dólares de este país y el régimen sionista para la compra de aviones no tripulados Heron el mes de marzo.
Otro punto de vista es que el ejército del régimen sionista, con el fin de destruir la posición y lugar del primer ministro de Turquía, Recep Tayyip Erdogan y separar este país del mundo islámico, insiste en mantener relaciones militares con Turquía.

Después de la fuerte disputa verbal el año pasado entre Erdogan y Simon Pérez, presidente del régimen sionista al margen del foro de Davos, los políticos israelíes incluso calificaron a Erdogan de anti judío.
Mientras tanto dirigente del partido Kadima del régimen sionista, Tzipi Livni, dijo de forma explicita que Turquía debe elegir entre el mundo islámico e Israel.

Parece que el Partido Republicano del Pueblo de Turquía como mas grande partido de oposición en el parlamento, teniendo en cuenta la sensibilidad de la opinión publica de la población musulmana de Turquía a la forma de la relación de su país con este régimen, intenta llevar bajo la tela de juicio la actuación del gobierno dirigido por Erdogan y aprovechar de ello a su favor en las próximas elecciones generales.

Extraído de IRIB.

~ por LaBanderaNegra en Febrero 20, 2010.

jeudi, 18 février 2010

Die Türkei und die angelsächsischen Mächte

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Robert Steuckers:

 

 

Die Türkei und die angelsächsischen Mächte

 

Geschichte der britischen und amerikanischen Einmischungen im Raum Mittel-Osten

 

Beziehungen mit der Türkei

 

Auszug aus einer Rede - Gehalten in Bayreuth für die Gesellschaft für Freie Publizistik (April 2006)

 

Wenn England 1759 Weltreich wird, nachdem Indien und Kanada völlig unter dessen Kontrolle kommen, galt von damals ab die Regel, die schwächste Macht Europas als Bundgenosse zu haben, um die Stärkste auszuschalten. Auch werden zu dieser Zeit die Landmassen zwischen den europäischen Hoheitsgebieten und Indien strategisch wichtig. Keine Macht sollte die beherrschen und somit Indien bedrohen. Nichts scheint zwischen 1759 und 1783 die Alleinherrschaft Englands in der Welt zu verhindern. Im Schicksalsjahr 1783 ändern sich die strategischen Gegebenheiten: Ludwig XVI. von Frankreich rächt sich für den Verlust Indiens und Kanadas, indem er als Ehemann der Kaiserschwester Marie-Antoinette und Bundgenosse des deutschen Kaisers, die britische Flotte in Yorktown während der amerikanischen Unabhängigkeitskrieg zerstört; zur gleichen Zeit eroberten die Armeen der russischen Kaiserin Katharina die Krim, die ein Stützpunkt im Schwarzen Meer wird, bloss sieben Jahre nachdem die russische Flotte im Mittelmeer 1779 erfolgreich die ottomanische bekämpft hatte. Zwei kontinentale Mächte behaupten sich so auf dem Meer. Die Antwort der Britten wurde 1791 dargestellt in einem anonymen Memorandum, das „Russian Armament“ als Titel trug. In diesem Dokument befanden sich schon alle Elemente und Kriterien des „containments“ Russlands. Dabei wurde das ottomanische Reich als ein Riegelterritorium gegen jede russische Ausdehnung in der Richtung des Mittelmeeres, Ägyptens, des persischen Golfes und des Indischen Ozeans betrachtet. Zehn Jahre später, im Jahre 1801, wenn der Zar Paul I. zusammen mit Napoleon eine Eroberung Indiens plant, bevor er mysteriös Opfer eines Mordes wurde, entwickelten die Londonschen Gremien die Strategie, alle mögliche Völker und Stämme des „rimlands“ als potentielle Verriegelungselemente zu benutzen, damit die Armeen des Zaren nie die Ufer des Indischen Ozeans erreichten. In 1828, wenn unter russischem Druck Griechenland unabhängig wurde, wird England systematisch die türkische Rechte auf den Seestrassen verteidigen und dabei für sich selbst das Recht, diese Seestrassen zu befahren, eisen. Wenn im gleichen Jahr Persien auch durch die russischen Armeen besiegt wurde, wurde die russische Gefahr noch grösser in den Augen Englands. Russland besetzte von jetzt ab Nord- und Südkaukasien und bedrohte damit sehr ernst die Integrität des ottomanischen Hoheitsgebietes, indem Russland sich als Aufgabe gab, die rechtsgläubige Christenheit vom türkischen Joch zu befreien. Der Krimkrieg war die Rache Englands und beim Pariser Vertrag von 1856 wurde Russland dazu behindert, seine Schiffe über die Meerstrassen fahren zu lassen. Im 1877-78, erreicht Russland einen militärischen Sieg nach einigen Feldzügen im Balkan aber eine diplomatische Niederlage in Berlin in 1878.

 

Die zweite Politik der Türkei gegenüber

 

Nachdem das ottomanische Reich ab ungefähr 1890 zusammen mit den II. Reich eine gemeinsame Politik rund der Bagdad-Bahn zu entwickeln begann, fingen die Londonschen Gremien an, eine neue türkische Politik zu entwickeln, nämlich eine, die die Zerstückelung des ottomanischen Reichsgebietes vorsah. Das Hauptinstrument, das in diesem Sinn geschmiedet wurde, war die Schaffung eines anti-türkischen arabischen Nationalismus. Die englische Unterstützung des arabischen Nationalismus entfaltete sich in zwei Stufen :  In der ersten dieser Stufen unterstützten protestantische angelsächsische Institute oder Stiftungen einen liberal-verwestlichen Arabismus, den die Türken schnell grausam niederhalten werden, mit öffentlichen Hinrichtungen von liberalen Intellektuellen in Beirut und Damas. Nach dem Scheitern dieses Versuches, wobei festgestellt musste, dass der Liberalismus überhaupt keine Anziehungskraft im arabischen Raum hatte, brauchte dringend eine neue Strategie geschmiedet zu werden. Die Stämme Arabiens sollten dann „bearbeitet“ werden und dabei ihre beduinische Identität bewahren, damit sie als „nützliche“ Barbaren der Peripherie gegen das Zentrum oder zumindest gegen Zentren des ottomanischen Reiches am rechten Zeitpunkt gebraucht werden könnten. Aber die Stämme waren gegeneinander tief befeindet seit den blutigen Ereignissen des 19. Jahrhunderts : im Norden herrschte Hussein über die Hedschas-Stämme und etwa südlicher, herrschte Saud im Neschd. Die strategischen Schwierigkeiten, die die Briten zu lösen hatten, waren hauptsächlich dazu orientiert, es zu vermeiden, dass die südlichsten Stämme als Rückenbundgenossen der Türken eventuell funktionieren könnten. Aber die wahhabitischen Neschd-Stämme waren seit der grausamen Repression von Mehmet Ali und Ibrahim Pascha von einem zu tiefen Hass den Ottomanen und Ägyptern gegenüber belebt, um sich instrumentalisieren zu können.  Hussein im Hedschas war am Anfang eher dazu geneigt, die Türken zu Hilfe zu können; Die diplomatische Fähigkeiten des Lawrences und seine guten Kenntnisse des arabischen Stammessystems erlaubten es, Hussein für die Sache der Briten zu gewinnen. So entstand was man heute wieder die „Insurgency-Strategie“ nennt; die wurde nochmals kürzlich im Afghanistan angewendet. Türken und Deutschen werden trotzdem aber erfolglos Rückenbundgenossen haben : die Schiiten des Jemens und die Senussisten entlang der ägyptisch-libyschen Grenze. Die Jemeniten werden eigentlich nicht viele britische Truppen festhalten. Die Senussisten werden „raids“ bis tief in der südalgerischen Wüste veranstalten, die dann eine Revolte im marokkanischen berbersprechenden Mittelatlas-Gebirge entzündet haben. Dort werden wohl viele französische Regimenter festgehalten.

 

Echtes Ziel der britischen Tätigkeiten in der arabischen Halbinsel war selbstverständlich, die Ölfelder zu kontrollieren und, nach der Ausschaltung der mit dem Reich befreundeten Türkei und des jungtürkischen Regimes, eine Türkei ohne Öl zu schaffen. Kennzeichnet für diesen Prozess ist die Mossul-Frage; Das an Ölfelder reiche Mossul-Gebiet im nördlichen kurdischsprechenden Teil des heutigen Iraks gehörte dem Ottomanischen Reich, wurde Frankreich im Text der 1916 Sykes-Picot-Agreements versprochen und, nach späteren Nachkriegsdiskussionen rasch dem englischen Protektorat Irak angeschlossen, weil dort umfangreiche Ölreserven von britischen Geologen entdeckt wurden. So wurden zwei Fliegen in einer Klappe erledigt: sowohl Frankreich als die neue Türkei blieben manipulierbare ölarme Mächte, die keine eventuelle Herausforderungen stellen konnten.

 

In der Zwischenkriegszeit, schlug die Stunde des Ibn Sauds. Nach langen Kämpfen und mit Hilfe der Ichwan-Bewegung, befestigte er seine Macht über das heutige Saudi-Arabien, nur mit der Ausnahme des Südens unter britischer Obhut.

 

Die Politik der Türkei gegenüber nach 1945

 

Nach der deutschen Niederlage in Europa 1945, erhielt die Türkei wieder ihre Rolle als Riegelterritorium wie zur Zeit Napoleons. In 1942 hatten die pantürkischen Nationalisten auf einem deutschen Sieg gesetzt, in der Hoffnung im Kaukasus unter den dort lebenden Türkenvölker erneut Einfluss zu gewinnen. In einem Schauprozess, unmittelbar bevor die Türkei rein formell Deutschland den Krieg 1945 erklärte, wurden die Pantürkisten zu langen Haftstrafen verurteilt aber nach ein Paar Wochen oder Monate wieder freigelassen. 1949 trat die Türkei die NATO bei, wobei die Armee die Hüterin des Laizismus und des Verwestlichungsprozesses wurde. Der Blutzoll als Eintrittspreis zahlte diese Armee während des Koreakrieges. Aber wenn der Ministerpräsident Menderes 1960 für eine lockere Haltung der Religion gegenüber plädierte, wurde er rasch durch einen Armeeputsch gestürzt, und nach einem kurzen Verfahren öffentlich gehenkt (Bild hierunten). So wurde der Türkei die am meist geliebte verbündete Macht bis Bush Junior.

 

menderes.jpgInteressant ist es, die Clintonsche Politik der Türkei gegenüber zu analysieren: der amerikanische Präsident versprach, unter anderem während eines offiziellen Besuchs in Istanbul und Ankara, die Türkei wieder eine Rolle im Balkan nach der Unabhängigkeit Bosniens spielen zu lassen, die EG-Kandidatur der Türkei zu unterstützen, eine Schlüsselrolle in der Ausschaltung des Iraks mitspielen zu lassen, und ihr eine getarnte und faktische Anwesenheit im ölreichen nordirakischen ethnisch-kurdischen Mossul-Gebiet zu garantieren.  So hätte die Türkei als Preis einer Intervention an der Seite der US-Amerikaner eine Teilnahme in der Ölförderung in diesem kurdischen Gebiet gewonnen.

 

Die Verwaltung des Bush Juniors hat diese Lösung abgelehnt, was die Beziehungen zwischen Washington und Ankara stark gekühlt hat. Zeichen dieser Verschlechterung sind die Bücher von jungen türkischen Autoren wie Burak Turna und Orkun Ucar. In einem Roman, der einen Riesenerfolg in der heutigen Türkei gekannt hat und dessen Titel „Metal Firtina“ (d. h. „Metallsturm“) ist, erwähnen einen künftigen Krieg gegen die Türkei, die am Ende durch eine deutsch-französisch-russische Allianz gerettet wird. Ein anderer Roman fantasiert über einen Bündnis zwischen Russland und der Türkei, der Europa erobert und es von der amerikanischen Einflusssphäre befreit. Die Enttäuschung in der Türkei ist sehr gross, seitdem die US-Amerikaner der Clintonschen Politik nicht gefolgt haben. Die Türkei bleibt ein ölarmes Land und gewinnt keine Ausdehnungsmöglichkeit mehr. Die Lage ist heute interessant zu beobachten. Die grösste strategische Dummheit der neokonservativen Bush-Gremien ist eben, den Verlust der türkischen Bundgenossenschaft ausgelockt zu haben.

 

(weitere Auszüge dieser Rede folgen).

 

 

mercredi, 27 janvier 2010

La Turquie inonde l'Europe d'immigrés clandestins

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La Turquie inonde l’Europe d’immigrés clandestins

 

ANKARA (NOVOpress) – Eric Besson, ministre de l’immigration, était hier à Tolède (Espagne) dans le cadre d’une réunion avec ses homologues de l’Union européenne (UE). Pour le ministre français, l’immigration clandestine en provenance notamment de Turquie devient incontrôlable. « Un sujet prioritaire dans les relations entre l’Union européenne et la Turquie. La situation dans la mer Egée est devenue intenable. Les Grecs sont soumis à une pression intolérable. La Turquie est de toute évidence devenue un pays de transit et nous avons besoin qu’elle joue le jeu ».

Cette question est tellement brûlante qu’Eric Besson évoque une « exigence ». Mais pas question de froisser les Turcs. Les enjeux économiques planent sur les relations franco-turques à trois heures de vol de Paris, la France étant le deuxième investisseur étranger du pays… Ainsi, Jacques Barrot, commissaire européen en charge de la Justice et de la Sécurité, ne veut surtout pas « stigmatiser » la Turquie qui « doit être considérée comme un grand partenaire. Elle a un rôle à jouer dans la région et il faut la laisser décider de sa relation avec l’UE. En tout état de cause, il faut lui ouvrir le choix vers un partenariat très fort ».

Déjà une voie royale pour l’afflux de migrants afghans en Europe, avec des pays limitrophes aussi instables que l’Iran et l’Irak : outre ses propres ressortissants, la Turquie expédierait cette fois sur le continent européen des centaines de milliers d’immigrés extra-européens chaque année si elle devait intégrer l’Union européenne, véritable passoire en matière de lutte contre l’immigration massive.


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samedi, 26 décembre 2009

Réflexions sur l'interdiction du parti kurde DTP

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Andreas Mölzer :

Réflexions sur l’interdiction du parti kurde DTP

 

Une fois de plus, les provinces kurdes de l’Est de l’Anatolie sont entrées en ébullition. Le motif de cette agitation est l’interdiction du parti kurde DTP, qui était pourtant représenté au parlement d’Ankara. Ainsi en a décidé la Cour constitutionnelle turque. Le verdict des juges de cette Cour constitutionnelle nous montre, encore une fois, que la Turquie, pays d’Asie Mineure, est bien éloignée de l’Europe. D’abord, il faut rappeler que le parti kurde a été interdit uniquement parce qu’il était un parti qui défendait une minorité, opprimée depuis des siècles, et qu’une telle démarche est impensable en Europe. Ensuite, force est de constater que la lutte pour le pouvoir entre islamistes et kémalistes revient tout à l’avant-plan de la politique intérieure turque. La Cour constitutionnelle est, avec l’armée, le dernier bastion kémaliste : elle a donc tenté d’indiquer au gouvernement d’Erdogan quelles limites il ne pouvait pas franchir, en interdisant le DTP.

 

Tous ces événements récents sont symptomatiques de l’état actuel de la Turquie. On y fait de temps en temps un tout petit pas en avant, qui est bien vite suivi d’un grand pas en arrière. Dans un premier temps, le Premier Ministre Erdogan avait annoncé, en grande pompe, en faisant sonner trompettes et buccins, son plan en quinze points pour résoudre la question kurde et voilà que maintenant la plus grande minorité ethnique du pays se voit confisquer toute représentation politique ! D’abord, ce jeu du chat et de la souris au détriment des Kurdes est indigne, ensuite, cette interdiction du DTP démontre que la Turquie n’est pas un Etat européen.

 

Dans ce jeu, la « communauté des valeurs » qu’entend être l’Union Européenne, joue un bien triste rôle. Parce que des forces politiques importantes et dominantes veulent absolument faire adhérer la Turquie à l’UE, Euro-Bruxelles se dissimule lâchement derrière les belles paroles diplomatiques habituelles et exprime son « souci »… Le comportement inacceptable de la Turquie n’amène pas les responsables de l’UE à tirer les conclusions qui s’imposent : l’interdiction du DTP aurait dû conduire à une rupture immédiate de toutes les négociations en vue de l’adhésion turque. Mais pour oser cela, il manque à l’UE, qui rêve pourtant de devenir un « acteur global », une solide dose de courage.

 

Mais il n’y a pas que l’interdiction du DTP kurde : il y aurait encore beaucoup d’autres raisons pour mettre un terme rapidement à cette folie de vouloir élargir l’Europe en direction de l’Orient : ne mentionnons, à titre d’exemple, que les discriminations auxquelles les chrétiens de Turquie sont soumis, ou encore le refus d’Ankara de reconnaître Chypre, Etat membre de l’UE, ou, enfin, les nombreuses entorses à la liberté d’opinion que commet l’Etat turc.

 

Andres MÖLZER.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°51/2009)

vendredi, 25 décembre 2009

La nouvelle feinte d'Erdogan

moelzer_fabry.jpgAndreas Mölzer:

 

La nouvelle feinte d’Erdogan

 

Début novembre 2009, le Premier Ministre turc Erdogan a présenté son plan en quinze points pour résoudre la question kurde. Parmi ces quinze points, nous découvrons qu’il serait dorénavant permis d’enseigner la langue kurde dans les écoles, à titre de branche en option. Les villages recevraient à nouveau leurs anciens noms kurdes. Toutes choses qui devraient pourtant être évidentes. Le plan d’Erdogan prouve une chose: que la Turquie, jusqu’ici, a foulé aux pieds les droits les plus élémentaires de la principale de ses minorités ethniques.

 

Mais ce plan ne s’adresse pas en premier lieu aux Kurdes, mais à l’Union Européenne. En donnant le plus grand impact médiatique à son plan, Erdogan cherche à gruger les eurocrates bruxellois, à leur jeter de la poudre aux yeux, pour qu’ils ne voient plus les vices de fonctionnement de l’Etat turc, qui s’étalent pourtant au grand jour. La petite minorité chrétienne qui subsiste dans le pays subit toujours autant de discriminations et rien, dans le plan du premier ministre islamiste, ne laisse entrevoir que leur sort sera amélioré. En outre sur le plan des droits de l’homme, surtout au niveau de la liberté d’opinion et de la liberté de la presse, la situation demeure déplorable; ensuite, Ankara refuse toujours, avec un entêtement consommé, de reconnaître un Etat membre de l’UE: Chypre.

 

En gros, on peut se poser la question: les discriminations subies par la minorité kurde en Turquie prendront-elles véritablement fin? A l’évidence, on peut annoncer beaucoup de choses mais ce qui importe, en ultime instance, c’est la traduction des promesses dans les faits. Le meilleur exemple que l’on puisse citer est le rapprochement avec l’Arménie, qu’avait promis, il y a peu, le gouvernement turc actuel. Rappelons-nous: il y a quelques semaines, l’annonce de ce rapprochement avait fait la une des quotidiens et des agences de presse dans le monde entier. Aujourd’hui, au bout de quelques semaines seulement, nous constatons que la reprise des relations diplomatiques entre Ankara et Erivan sont loin d’être devenues une réalité. La Turquie tente, par tous les moyens, de dicter ses conditions à l’Arménie, et, au Parlement d’Ankara, une résistance virulente se constitue contre la signature de tout traité avec l’Arménie voisine.

 

Il y a tout lieu de croire que le nouveau plan d’Erdogan s’enlisera de la même façon, car le chef du gouvernement turc sait trop bien quelles oppositions il suscitera en politique intérieure. Car, d’une part, les partis d’opposition en Turquie entrent en ébullition chaque fois qu’il est question d’élargir la palette des droits pour les Kurdes et, d’autre part, le gouvernement d’Erdogan n’a plus le vent en poupe, au contraire, il bat de l’aile. Les sondages lui attribuent 32%, ce qui constitue 15% de moins que lors de la victoire électorale qui l’a porté au pouvoir, il y a deux ans. Si cette tendance persistait et si l’opposition en venait encore à gagner du terrain, alors Erdogan n’aura aucun scrupule à lâcher les Kurdes.

 

Andreas MÖLZER.

(article paru dans “zur Zeit”, n°47-48/2009).

 

mardi, 03 novembre 2009

Les refus récurrents et rédhibitoires de la Turquie

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Andreas MÖLZER:

 

Les refus récurrents et rédhibitoires de la Turquie

 

C’est par des louanges exagérées que l’on a célébré récemment la signature de deux protocoles, où la Turquie déclare vouloir améliorer, en toute apparence mais en apparence seulement, ses relations avec l’Arménie. Très peu de temps après la signature de ces protocoles, le Premier Ministre turc Erdogan a émis une restriction: Ankara ne fera aucun pas en direction de sa voisine mal aimée, tant que l’Arménie ne  retire pas ses troupes du Haut-Karabakh, région montagneuse qui appartient de jure à l’Azerbaïdjan. Il appert donc que, pour la Turquie, la protection qu’elle entend offrir au peuple frère azéri est plus importante que l’entretien permanent de bonnes relations de voisinage avec l’Arménie, comme en entretiennent entre eux les peuples d’Europe. En émettant cette restriction par la voix de son Premier Ministre, la Turquie, faut-il l’ajouter, exprime une conception fondamentale: elle se profile, par la définition qu’elle se donne d’elle-même, comme un Etat non européen et comme la puissance d’avant-garde des peuples turcophones, dont l’aire de peuplement s’étend très profondément en Asie centrale.

 

Mais il y a un autre comportement de l’Etat turc qui prouve son immaturité à adhérer à l’UE; il a été soumis à débat vers la mi-octobre 2009 dans la Commission des affaires étrangères du parlement européen. La Turquie refuse toujours obstinément d’appliquer le protocole dit d’Ankara, qui prévoyait l’ouverture des ports et aéroports turcs aux navires et avions grecs-cypriotes, ce qui impliquait aussi de reconnaître  indirectement Chypre, Etat membre de l’UE. Cette situation a provoqué de nombreuses critiques au sein de la Commission des affaires étrangères du parlement européen. On sait que la question cypriote, depuis la fin de l’année 2006, a entraîné le gel de huit chapitres relatifs aux négociations quant à l’adhésion turque: les Turcs ont été invités à attendre et à reconsidérer leur attitude. Depuis lors, effectivement, Ankara n’a pas avancé d’un millimètre, attitude de refus pour laquelle il convient désormais de tirer les conséquences. Finalement, c’est la Turquie qui est demanderesse pour entrer dans l’UE et non le contraire. Par ailleurs, il n’est pas question d’accepter que la Turquie, comme elle le croit en apparence, dicte à Bruxelles ses conditions.

 

Fin octobre 2009, lors du Sommet de l’UE, nous aurons enfin la chance de rompre les négociations en vue de l’adhésion turque. C’est le chef des socialistes autrichiens et président de la république autrichienne, Faymann, qui devra agir. Avec ses amis rouges du parti socialiste, il a toujours promis aux Autrichiens qu’ils pourront décider par référendum s’ils acceptent ou non la candidature turque, une fois les négociations achevées. Une question demeure toutefois ouverte: pourquoi Faymann attendrait-il encore de  nombreuses années, alors que l’écrasante majorité de nos concitoyens autrichiens rejettent absolument l’adhésion turque?

 

Andreas MÖLZER.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°43-44/2009).

vendredi, 30 octobre 2009

The Ankara candidacy

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The Ankara candidacy

A translation by Fred Scrooby / http://majorityrights.com/  

The following article, which appeared at the end of September at Robert Steuckers’ Euro-synergies, was written by Jean-Gilles Malliarakis, a well-known commentator in radical-right circles in France.

THERE’S NO LACK OF RATIONAL ARGUMENTS FOR DRAWING CONCLUSIONS ABOUT ANKARA’S CANDIDACY

Today I close the dossier on the Turkish question, my small book, a little heavier than anticipated.

As I write this, intending to get it finished, seemingly unbeknown to the Europeans important changes are shaking up debate in Turkey itself.  Involved are probably real developments, in part.  The current majority party, AKP, and the alliance of forces which it represents, are making their moves for essentially national reasons.  But the program for reform was developed at the end of June with the candidacy for membership in the European Union explicitly in mind, with a view to making it presentable.  This was repeated by Prime Minister Erdogan and Abdullah Gül, President of Turkey. 

Thus did we see a diplomatic offensive aimed at the Armenians, promising them the future reopening of a border whose shutting has completely closed off their country.  There’s been vague talk of normalizing the status of religious minorities (the latter are so small in number, one wonders how they could possibly be a threat to touchy Turkish Jacobinism) — thus are their representatives taken hostage to use as agents of Turkish diplomacy, in the tradition of totalitarian countries.

The most important advance is said to have been proposed to the Kurds.  After the head of government had received certain Kurdish leaders, from August 25 to September 22 there is said to have been considerable antagonism between the political leaders and the Chief of Staff of the Turkish Army, General Basbug.  In August Gen. Basbug had stated that the Army could not accept, and would therefore oppose, any plan that was in violation of Article 3 of the Constitution which declared that Turkey was a single and indivisible state and its language was Turkish.  The Kemalist and nationalist opposition joined in chorus to decry government betrayal.  There could be no clearer threat of a coup d’état as has been a recurrent event in this country’s political life since the 1946 adoption of democratic pluralism.

In less than a month, and despite Ramadan, the head of government and of the AKP Party went on television to deny all rumors of genuinely radical reform, and finally on September 22 at Mardin, Gen Basbug declared he had obtained what he wanted and there was no longer cause for concern.  The officers should no longer even watch the false, depressing news being broadcast by their beautiful country’s television networks.  There would be no real linguistic or institutional concessions made to the Kurds.  The Army hadn’t even needed to take the steps it took in the winter of 1996-7 when it forced the government to resign.  The Army considered it had won, and contented itself at summer’s end with giving stern looks.

This whole affair had been part of an effort to put on a good face for the encounters in Brussels with very representative individuals like Emma Bonino, Michel Rocard and other spiritual guides who relay the propaganda of our dear friends.  The promised reforms will remain cosmetic or they won’t even materialize.  But that will be enough to make some European negotiators proclaim new “hopes,” hypothetical “expected agreements,” supposed “progress made in negotiations,” as false as in the past.

And frankly, when over a period of years one obliges oneself to follow the progress of Ankara’s candidacy for E.U. membership, one experiences real difficulty understanding the logic of those who persist.  These fishermen can call that fish all the tender names they want, they won’t succeed in getting the poor thing to swim close by them, and they’ve been trying for 20 years.  With all their lying, however, they’ll finally appear convincing, and victory will seem a good bet.

Turgut Özal submitted his dossier in 1987, almost a quarter-century after the first trade agreement in 1963.  At that time, as designated prime minister of a dictatorship, he reassured business interests and set in motion the transition to a civilian régime that would be in conformity with the conditions stipulated by the military coup d’état of September, 1980.  General Evren ran the country in his capacity as president appointed by the Army General Staff.  The aim was to normalize the appearance of political life but also the country’s international image.  At that time almost no one in Europe could really believe in this Turkish candidacy to join Europe.  In Brussels they were asking themselves, “How do we get out of this without creating ill feeling?”

Özal initiated this request at a time when the Delors Commission was preparing to take the first steps toward E.U. political construction, prolonging the economic community of the first treaties.  This evolution would bring about the European Union that was agreed on in Maastricht in 1991.  Now, Turkey was then finagling to become the thirteenth member of a community still only 12 members strong.  Today the number of countries has reached 27.  Other new applications for membership (Croatia, Iceland for example) are viewed as more likely and more prepared than that of the pillar of NATO.

To tell the truth, considering all the problems, the State Department in Washington would seem to be the only bureaucracy that has always believed — or pretended to — in this country joining Europe.  And because they’ve never paid a price for doing so, U.S. presidents have regularly repeated, when meeting with their Turkish counterparts, conventional expressions of support, to the great satisfaction of Istanbul’s media. 

But overestimating the importance of such diplomatic statements tends to mask the culpability of the idiotic European Union, because at the same time, in the halls of Brussels, the project continues quietly to advance.  It proceeds at a snail’s pace, to be sure.  It disregards all questions of likelihood, to be sure.  It wends its way in the most complete opaqueness, to be sure.  In 2007 a candidate for the French presidency got elected in part by promising to oppose Turkey’s request for membership, to be sure.  Nevertheless in 2008 a wide-ranging constitutional reform, passed at Versailles, allowed the suppression, without informing the citizens, of the stipulations introduced by the short-lived Article 88-5.  That article had been touted as the supreme guarantee against unpopular expansion of the E.U.  According to the old 1958 amendment to the Constitution, any treaty of this kind must be submitted for ratification to the French people in the form of a referendum.  But alas, nothing guaranteed the guarantee!  It was deep-sixed a year after the election victory. 

In addition, “topics for negotiation” keep opening one by one, like a chocolate bar nibbled bit by bit before disappearing:  35 topics, then ratification.  Has anyone ever seen a thing so extraordinary as a last piece of chocolate, the 36th, remaining stoically, chastely uneaten, abandoned in its foil wrapper, after 35 of its mates have vanished? 

What they’re going to try to do, then, is use force to overcome the natural resistance of systems of law, of politicians, and of citizens, for imaginary geo-strategic motives dreamed up in sterilized bureaus totally cut off from every flesh-and-blood European reality.  Then they’re going to hand down their orders of the day through all their footsoldiers of the politically correct world.

Every one of us has encountered one of these fine thinkers.  Though docile, they believe in their unproven but peremptory astrology as firmly as a steel trap, as if it’s been handed down since Antiquity thanks to the Wise Men of Chaldea or Ancient Persia.  They press us to bypass a stage they themselves have doubtless never even reached, that of possessing a national, ethno-racial, or European consciousness; to hear them talk, “we must look higher and further into the future of humanity than that.” The weight of Geography means nothing to them.  The Tragedy of History escapes them.  All that matters is their desire to seem intelligent, and if that illusion proves impossible they want at least to be in step with the latest fashion. 

Now, the idea of considering Turks Europeans would rather merit standing out for its ineptitude, its contradiction, and even, when you get down to it, its ridiculousness. 

We can cite the rational arguments one by one.  There’s no lack of them. […]

Let’s summarize them, to serve as sort of a spark:

1) Geographic argument: This country is simply not situated in Europe.  It therefore has no more reason for participating in the confederation of our continent than France’s possession of French Guiana has to make France part of South America.

2) Memorial argument: Rationally one will doubtless admit that, even if the leaders in Ankara agreed to recognize the Armenian Genocide, that still wouldn’t move the seat of their government from Asia to Europe.  But that this state obstinately denies the crimes committed by its 1915 predecessor because they involved the Young Turk government and the Ottoman Empire speaks volumes about the difference in mentality between the present-day government of this country and those of the nations of Europe.

3) Linguistic argument: Turkish isn’t a European language.  The culture it represents comes from Central Asia, mixed over the course of history with influences from other Oriental cultures, Persian and Arabic.

4) Social violence argument: Turkish society is based on the permanent acceptance of a violence from which Europe has been free for several centuries.

5) Justice system argument: Several times since the XIXth Century, first the Ottoman Empire then the Kemalist Republic have sought to import “on paper” the West’s judicial principles and practice.  But the legal system there is very far from having transformed itself.  A number of laws considerably hinder freedom of expression, private property rights, etc.  The importation of 85,000 pages of E.U. rules and regulations will prove inapplicable and illusory.

6) Economy argument: The overlapping of national economies is something we often hear invoked.  In reality the decisive step, taken in 1993 under pressure from the president of France with influence coming from Messrs. Balladur and Juppé, compelling the European Parliament to ratify the Customs Union, created a paradoxical situation.  Serving as an industrial sub-contractor for Europe is helping develop Turkey’s economy based on the fact that Turkey is not a member of the Eurozone or subject to regulation by Brussels.  It’s the same with some other developing countries:  China is in a comparable situation.  This form of economic cooperation rules out any judicial, monetary, social, or political integration. 

7) Cost argument: The agricultural politics and all the subsidies and varieties of redistribution which Europe practices couldn’t be adapted to this immense country, Turkey, with its considerable needs, in less than decades given present community budgets, without drastic modification of the financing capabilities of Brussels.  It will be noted, for example, that Turkey’s gross fixed capital formation is barely greater than that of Greece which has one-seventh the population.  Europe still must make great changes before it will be able to completely integrate countries of the East.  Who is going to pay?

8) Historic argument: Certainly most European nations have been in conflict with or alliances against one another.  The only common enemy of Europeans since the XVth Century has been Turkey.  Never has a Turkish princess married a single European king.

9) Argument of criminal realities: Though it never in the past sent Europe its princesses, this country sends Europe its mafiosi, its drug traffickers, its illegal immigration networks, its huge counterfeiting of our product brands, etc.  That’s called being “a great, friendly nation.”

10) Argument of European homogeneity: Clearly, this intrusion would rupture all perspective on creating a European society, all natural evolution of the European Union toward confederation first, then federation.  One understands better why advocates of “A Europe of States,” called “intergovernmental,” who are passionate opponents of any federalism because they are opponents of Europe, push this candidacy.  [Scroob note:  I don’t see how this is true:  plenty of opponents of European integration whether “federal” or “confederal” oppose Turkey’s addmission to the E.U.  He’s got this wrong.]

11) Argument of the size and power of institutions: Inserted in democratic Europe, Turkey would become, thanks to its population alone, the principal state, it would have the most European Parliament members, etc. 

12) Democratic argument: The people don’t want it.  That should suffice for our rulers.

Finally, an argument that must be considered separately is that of Europe’s Christian roots.  The faithful of the various Churches are legitimately concerned, and this has been mentioned by John Paul II and Benedict XVI.  This can’t just be ignored.  One can also state that there are European roots of Christianity:  Plato influenced the Church Fathers; Aristotle can be found in St. Thomas Aquinas; etc., manifesting as a mutual impregnation of the two realities.  But one also sees this invoked especially a contrario by those who claim they “don’t want to offend Moslems,” who want to “keep Europe from being a Christian club.” But strictly no one has ever proposed such a thing.  One wonders finally whether their argument consists in considering the real reason, the best justification for this exotic country’s entering the European Family, to be the fact that it’s never been part if it.  One wonders if it’s a question of wanting more than anything this country’s entry, of supporting contrary to all reason this burdensome candidacy, precisely because it is Moslem.

Biographical Note

Jean-Gilles Malliarakis was born in Paris in 1944, son of a well-known French artist of Greek and French extraction.  At one time a member of the movement “Occident,” which he left in 1967, he founded his own movement, ”l’Action nationaliste”, when he was a student at l’Institut d’Études Politiques in Paris.  In 1976 Malliarakis bought a Paris publisher and bookstore, La Librairie française, which became a meeting place in Paris for activists of what today’s controlled media refer to as the political “far-right” (but which is, of course, merely the political center seeking to re-establish sanity, and opposed by an entrenched extreme-left-radical fringe which has usurped hegemony and now masquerades as the “center”).  Very interested in economic questions, Malliarakis was at the time a critic of liberalism and planned to found an organization devoted to the analysis of economic theory and economic reality (S.P.A.R.T.E), but this project was not realized.  He was director of several organisations:  the ”Mouvement nationaliste révolutionnaire” (MNR), then ”Troisième Voie”, a movement opposed to both capitalism and communism.  Following 1991’s eruption of the Third Way onto the scene, he collaborated with Christian Poucet, president of ”CDCA Européen” (European Federation for the Protection of Small Businessmen, Tradesmen, and Artisans), until Poucet’s still unsolved 2001 murder.  Long considering himself a “neofascist” and admirer of Mussolini, Malliarakis evolved over the years toward classical liberalism.  Closing his bookstore, he became the director of a small publishing house, ”les Éditions du Trident,” and concerned himself with political and economic commentary.  Every other week he was host of the program ”Libre Journal” on Radio Courtoisie in Paris, until he left this position in 2007 as a result of disagreements with the station’s new directors.  He began doing internet audio commentary, called Lumière 101, that same year.

Jean-Gilles Malliarakis is the author of several books.

samedi, 29 août 2009

Turquie: l'affrontement entre islamistes et laïcistes

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Andreas MÖLZER:

 

 

Turquie: l’affrontement entre islamistes et laïcistes

 

Fin juillet 2009, deux anciens généraux, très haut placés dans la hiérarchie militaire, quelques journalistes et quelques hommes d’affaires comparaissent devant le tribunal en Turquie. Le procureur général de la République leur reproche d’être membres d’une société secrète de droite, l’Ergenekon, et d’avoir, à ce titre, comploté contre le premier ministre islamiste Erdogan. Outre ce procès, qui vient de  commencer, d’autres procédures judiciaires sont en cours contre de présumés membres de l’Ergenekon, qui ont tous, à un moment ou un autre de leur existence, occupé des positions influentes au sein de l’Etat turc.

 

Ces procédures judiciaires n’ont pas pour objectif de vérifier si oui ou non les accusés ont réellement comploté contre Erdogan. Il s’agit plutôt d’un épisode supplémentaire dans la lutte qui oppose en Turquie les islamistes aux laïcistes. Cela démontre que la Turquie est profondément divisée entre ces deux camps. Dans les cercles laïcistes turcs, on entend apparemment résister à outrance aux mesures d’islamisation préconisées par le gouvernement d’Erdogan. Une petite étincelle suffirait pour faire exploser le baril de poudre. Les procès contre l’Ergenekon recouvrent la Turquie d’un nuage sombre, alors que les fanatiques de l’élargissement, qui pontifient à Bruxelles, veulent faire adhérer ce pays d’Asie Mineure à l’UE sans délais ni débats. Erdogan n’a pas pu balayer le soupçon qui pèse sur lui: ces procès n’ont pas tant pour objectif de poursuivre des comploteurs présumés mais bien plutôt, comme le pensent bon nombre d’observateurs turcs, de faire taire des voix critiques dérangeantes. En effet, c’est un secret de polichinelle à Ankara que le chef du gouvernement entretient des relations plutôt conflictuelles avec l’opposition laïque.

 

Par ailleurs, la position extraordinairement forte qu’occupent les forces armées dans l’appareil de l’Etat en Turquie démontre clairement que ce pays ne fait pas partie de l’Europe, n’en possède pas la culture politique. Si le soupçon des juges se confirmait, si, de fait, des militaires de haut rang et des personnalités importantes issues des sphères politique et économique considéraient que le putsch était un moyen comme un autre de modifier la donne politique, alors les choses seraient claires: on verrait enfin que la Turquie demeure ancrée dans les traditions et les modes de pensée de l’Orient. Ensuite, le silence de l’UE face aux événements d’Ankara est totalement incompréhensible. La Turquie, tout simplement, n’est pas un pays européen et ne le deviendra pas. Voilà pourquoi il faut abandonner toutes les négociations visant son adhésion à l’UE, dès aujourd’hui, sans attendre demain.

 

Andreas MÖLZER.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°31-32/2009; trad. franç.: Robert Steuckers).

La chauve-souris turque, sa propagande, sa diplomatie

La chauve-souris turque, sa propagande et sa diplomatie

du pacte germano-soviétique jusqu'à nos jours

090823a090823090823b"Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats". (La Fontaine, fable "La Chauve-souris et les deux Belettes")

D'un naturel optimiste, on imagine volontiers, écrivant à la veille du 70e anniversaire du pacte germano-soviétique, toutes les vérités que nos médiats ne manqueront pas de rappeler autour de ce 23 août 1939. On pense donc aux innombrables et chaleureuses recensions qu'aurait méritées le film de Wajda "Katyn". N'ayant pas été écrites, encore moins publiées par les gros journaux parisiens, elles demeurent en réserve pour cette occasion. Au talent près du cinéaste, l'information de base ne diffère pas.

Quant à moi, m'étant exprimé sur le partage soviéto-hitlérien de la Pologne de 1939, je ne puis ici que renvoyer à l'expression précédente de mes sentiments invariants. (1)

Les lignes qui suivent chercheront seulement à compléter, aujourd'hui, tant soit peu l'information de mes lecteurs, auditeurs, amis et concitoyens, autour d'un aspect particulier de cette fresque tragique de la Seconde guerre mondiale, au travers de la diplomatie turque, et de l'étonnante complaisance de l'occident à son égard. On peut admirer techniquement la continuité de cet État oriental (2).

En occident, il existe une abondante documentation sur tous les événements que nous évoquerons. Physiquement libres d'y recourir, généralement capables de la comprendre, les historiens et commentateurs agréés ne méritent aucune excuse, deux générations plus tard, quand ils se refusent à tenir compte des faits. La nullité intrinsèque des gens qui se disent journalistes ne saurait, non plus, tenir lieu de justification à leur silence servile. Car, en somme, pour eux, dans sa froideur impavide et sélective, la méthode de l'Histoire de la Seconde guerre mondiale de Sir Basil Lidell Hart, monumentale mais partiale et partielle (3), continue de faire secrètement autorité. Voilà un domaine où les choix arbitraires ne se discutent pas.

Pour les bons esprits, l'alliance entre l'occident et l'URSS paraît aller rétrospectivement de soi, et tous les incidents de parcours n'en demeurent que points de détail.

Commençons donc par rappeler que l'alliance initiale entre cette même Union Soviétique, dirigée par Staline, et l'Allemagne nazie a bel et bien fonctionné, à balles réelles, à chaud et à sable, entre 1939 et 1941.

Rendant possible la mainmise de Hitler sur la moitié du continent, elle porte la responsabilité de toutes les conséquences qu'elle a entraînées. Évoquons notamment l'horreur la plus couramment citée : la déportation et l'extermination des Juifs de l'Europe occupée. Tautologie à mémoriser : sans cette occupation, rendue elle-même possible par l'alliance de Staline, le génocide n'aurait jamais eu lieu sur une telle échelle. Souvenons-nous bien aussi qu'on ne sache pas que le mouvement communiste international ait rompu le 22 juin 1941 l'accord de 1939 scrupuleusement respecté par lui. Mais, à la grande surprise du secrétaire général du parti le génial Staline, son déloyal partenaire déclencha l'Opération Barbarossa. On n'est jamais trahi que par les siens.

On ne doit donc pas s'étonner, la réalité globale de cette alliance étant systématiquement occultée, que ni ses causes lointaines, ni ses conséquences particulières ne soient ordinairement tenues pour dignes d'intérêt. Ainsi, devant la rareté des commentaires sur le film Katyn, sachant le silence étouffant le souvenir de l'héroïque guerre d'hiver des Finlandais, mesurant la réprobation dont une propagande post-soviétique continue de poursuivre la résistance au stalinisme de peuples entiers, comment s'étonner de l'obscurité qui entoure, aujourd'hui encore la ligne suivie par le gouvernement turc pendant la Seconde guerre mondiale. Ceux-là même qui feignent de le considérer comme européen, s'obstinent paradoxalement, à ne rien vouloir connaître de l'Histoire contemporaine de cet État.

Ce 19 septembre, on pourra commémorer le 70e anniversaire de la jonction entre les armées  de Staline et de Hitler à Brest-Litovsk. Gageons que l'on demeurera généralement plutôt sobre sur ce point oublié.

Les événements périphériques n'en passeront que plus aisément à la trappe.

Varsovie tombe le 27 septembre. Le 28 septembre est signé le traité d'amitié germano-soviétique scellant le partage de la Pologne entre hitlériens et staliniens.

Il se trouve que le même jour exactement on paraphait le traité anglo-franco-turc d'Ankara.

Or les historiens ont pris l'habitude de dater du 19 octobre cet accord tripartite: mais il s'agit de la date de ratification du document. La négociation, préparée de longtemps par les trois diplomaties, se déroule en fait exactement entre la signature de l'alliance entre l'URSS et le Reich, et la prise de la capitale polonaise.

Les papiers Hoppenot (4) en fournissent l'avancée en détail, mais on peut aussi trouver les reflets de la face émergée de cet iceberg dans n'importe quelle collection de l'Illustration, avec photo pleine page du plénipotentiaire français, le général Weygand. On voit jour après jour la progression des tractations. Le légendaire "sauveur de la Pologne" en 1920 (5), se trouve à Ankara en septembre 1939.

À ce même moment la diplomatie turque est dirigée par un personnage essentiel de l'Histoire contemporaine de son pays, Mehmet Sükrü Saradjoglou (6). En juillet 1942, au décès du président du conseil, le Dr Refik Saydam, il prendra les rênes du gouvernement. Et il les conservera jusqu'en août 1946. Les curieux trouveront en annexe (7) de cette chronique le texte publié en 1946 du rapport secret de Von Papen à la Wilhelmstraße relatant leur entretien à Ankara en août 1942.

Le comportement de la Turquie s'est fondé, pendant toute la durée de la guerre, sur une pratique de la "neutralité active" qui se nomme aussi "double jeu".

Dans la fable de La Fontaine "La Chauve-souris et les deux Belettes" la première déclare ainsi : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats".

Or, à la différence du théoricien et praticien français oublié de ce même "double jeu", Marcel Bucard, qui sera fusillé en 1945, la mémoire de l'habile Saradjoglou s'immortalise dans la pierre, ou plutôt dans le béton précontraint du stade de 50 000 places qui porte son nom et accueille à Istanbul l'équipe de podosphère de Fenerbahce. En effet, dès le 23 février 1945, 10 jours après le bombardement de Dresde et appliquant les dispositions du traité signé en 1939 avec la France et la Grande-Bretagne son gouvernement déclara courageusement la guerre à ce qui restait des puissances de l'Axe.

Qu'on ne se méprenne pas cependant : si Saradjoglou a pu chercher à tromper les Allemands, et notamment l'ambassadeur Von Papen, son propos reposait sur la volonté d'observer la ligne constante du kémalisme. Le fondement en est posé par l'accord soviéto-turc de 1921. Celui-ci avait été théorisé au sein de l'Internationale communiste dès 1920 par Radek et par la conférence de Bakou. Dans la pratique, le soutien léniniste avait permis la victoire définitive de Mustafa Kémal en 1922. Les communistes s'étaient partagé l'Asie mineure et le Caucase avec les kémalistes en 1920-1922 comme ils se partageront l'Europe orientale avec les hitlériens en 1939-1940. Aujourd'hui encore dans la Mémoire officielle de l'État turc on appelle cela guerre de libération. Il s'agit du premier acte du tiers-mondisme.

Ainsi avaient été détruits en 1921 les trois États indépendants du Sud Caucase : l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Géorgie. Le 31 mai, l’Azerbaïdjan est occupé par la 11e Armée rouge. Quatre mois plus tard, l’Arménie doit céder la moitié de son territoire à l’envahisseur turc, le reste passant sous le contrôle de l’Armée rouge. Quant au dernier pays, la Géorgie, bastion occidental entre kémalistes et soviétiques, il tombe à son tour face au projet soviéto-turc pour le Caucase. Les populations grecques d'Asie mineure (Smyrne et son hinterland, Trébizonde et la république du Pont) seront symétriquement éliminées par la "grande catastrophe" de 1922. Au cours de la même année les 3 pays sud-caucasiens sont inclus dans une prétendue "République socialiste fédérative soviétique de Transcaucasie".

Certes, tant qu'il demeura partagé entre l'influence des deux régimes totalitaires de Berlin et de Moscou, le gouvernement Saradjoglou saura faire preuve d'éclectisme. Ainsi au premier il empruntera un souci de liquidation des minorités auquel il ajoutera une notion fiscale inscrite dans la loi 4305 du 12 novembre 1942 établissant un impôt exceptionnel sur le capital au taux différencié selon la religion des contribuables : les musulmans (groupe M) payeront 5 % ; les juifs "dönmeh" convertis à l'islam (groupe D) 20 % ; les chrétiens et les non-musulmans (groupe G comme "giaours" infidèles) 50 % et jusqu'à 236 %; les 8 000 personnes qui ne purent payer furent envoyées en camp de travail près d'Erzurum. On n'a jamais entendu dire ni que le gouvernement d'Ankara ait jamais fait repentance de cette législation discriminatire, ni qu'il ait accepté d'en dédommager les victimes, ni que l'on envisage de débaptiser le stade Saradjoglou. Les critères de Copenhague ne posent d'ailleurs aucune de ces conditions.

En feuilletant les papiers jaunis de septembre 1939, on découvre que Saradjoglou s'était rendu en URSS pour examiner les conséquences du pacte Molotov-Ribbentrop. Il publia une déclaration datée d'Odessa le 24 septembre. À cette date Weygand se trouvait en Turquie, représentant la IIIe république. Une chose préoccupait Saradjoglou. En son absence, mais en son nom, on allait traiter avec les occidentaux. Cet accord devait se révéler extrêmement profitable pour son pays. Le projet comportait l'obligation future d'entrer en guerre (ce que la Turquie fit, en février 1945 comme indiqué plus haut). Mais il fallait ne pas contrarier en quoi que ce soit les accords fondamentaux soviéto-turcs de 1921. Or cette position ne résultait aucunement du secret diplomatique : on la trouve clairement exposée dans "l'Illustration" qui n'y voit rien à redire, lors même que l'URSS s'apprête à dépecer la Pologne, liée à la France et à l'Angleterre, mais aussi la Roumanie, liée à Ankara par les fragiles et incompréhensibles accords balkaniques.

Or on doit se représenter que l'entrée en guerre, contre l'Allemagne mais très tardivement, s'échangeait contre l'annexion par la république kémaliste d'un territoire appelé depuis septembre 1938 république du Hatay. La France avait accepté en juin de le céder aux Turcs comme gage unilatéral d'amitié. Simplement cette actuelle province turque avait, jusqu'en 1936, fait partie de la Syrie confiée à la France puissance mandataire au lendemain de la première guerre mondiale sous le nom de sandjak d'Alexandrette. Cette province constitue aujourd'hui encore une pièce du contentieux turco-syrien. À l'époque, le recensement français donnait sur 220 000 habitants, seulement 85 000 Turcs contre 108 000 Syriens (62 000 alaouites, 24 000 chrétiens et 22 000 sunnites), plus 25 000 Arméniens, 5 000 Kurdes et 1 000 Circassiens. Ce petit district allait donc être abandonné, au mépris du droit des gens, contre l'avis de ses habitants dans le but de faire de la Turquie une alliée.

Or, cette générosité, à sens unique, si bien conseillée par l'Empire britannique, qui lui-même ne cédait rien, se révélait aussi illusoire que déshonorante. La diplomatie turque de la chauve-souris disait aux démocrates occidentaux : "je partage vos valeurs" ; aux puissances totalitaires elle déclarait admirer leurs belles réussites. Toujours : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats"…

Aujourd'hui elle tient le même discours à l'Union européenne et à l'Organisation de la Conférence islamique auxquelles elle prétend appartenir simultanément. Encore et toujours : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats".

Car la recette constante de la politique extérieure d'Ankara plus encore que celle de la Sublime Porte, consiste à ne jamais contracter quelque chose qui ressemble à une alliance permanente et générale. Elle ne conclut que des accords ponctuels, limités dans le temps. Strictement souverainiste et jacobine, elle ne peut donc s'identifier à une communauté supranationale, à l'Europe moins qu'aucune autre. Pour cette raison et pour un certain nombre d'autres, on ne peut que récuser la candidature de ce pays à l'Union européenne.

Apostilles

  1. cf L'Insolent des 8 avril Katyn un film magnifique de Wajda et 9 avril Katyn le poids historique du mensonge et du crime.
  2. Soulignons qu'il dispose de traditions diplomatiques plus anciennement ininterrompues que celles de l'Angleterre. Ce qui, chez celle-ci remonte à Élizabeth Ire et surtout à Cromwell (XVIIe siècle) s'enracine en Turquie dans un tuf déjà riche et puissant à l'époque de la prise de Constantinople (XVe siècle) dont la Sublime Porte n'a jamais dédaigné non plus de gérer, en partie, l'héritage. À côté de cela, la France, dont chacune des ruptures historiques successives, en 1792, en 1815, en 1879, en 1944, et enfin la décolonisation, a lobotomisé l'intelligence officielle, fait figure d'une enfant naïve et docile.Il devrait aller de soi que la Chine, autrement dit la "république populaire" fondée en 1949, souvent présentée pour État millénaire, supporte encore moins la comparaison : ses élites n'ont de l'Étranger qu'une vision complètement caricaturale et une information à peine supérieure à celle de l'Américain moyen.
  3. Ce qui figure dans les 729 pages lumineuses de l'édition française passionnera certainement le lecteur mais on s'étonnera aussi de ce à quoi l'auteur ne consacre pas une seule ligne.
  4. Henri Hoppenot, diplomate français qui rallia la France libre, fit don en 1978 de ses dossiers aux Archives Diplomatiques où ils sont classés à la rubrique "Papiers d'envoyés".
  5. Le général Weygand fut, entre les deux guerres, considéré comme le "sauveur de la Pologne" par les Français, aux yeux des Polonais le vainqueur de la guerre polono-soviétique s'appelait Pilsudski.
  6. Mehmet Sükrü Saradjoglou (1887-1953) ancien cadre jeune-turc, siégea dans tous les gouvernements kémalistes de 1924 à 1946. Il présidera jusqu'en 1950 le club de Fenerbahce, et mourra dans son lit en 1953. On orthographiera de préférence à l'ancienne manière, puisqu'elle existe, car elle se révèle plus proche en français de la prononciation du phonème turc. La graphie "Saracoglu", agrémentée de signes diacritiques inconnus de l'orthographe française, prête trop à confusion.
  7. cf. texte du Rapport secret de Von Papen publié en 1946.

JG Malliarakis

lundi, 27 juillet 2009

Le dilemme turc

Le dilemme turc

Ex: http://www.insolent.fr

lundi, 29 juin 2009

J. J. Bachofen, Il popolo licio

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J. J. Bachofen, Il popolo licio

Prefazione a
J. J. Bachofen, Il popolo licio, Napoli 2009

di Claudio Mutti*



L'indeuropeista danese Holger Pedersen (1867-1953), autore della monumentale Vergleichende Grammatik der keltischen Sprachen (Göttingen 1909-1913), si occupò anche, tra l'altro, di albanese, di armeno, di lingue balto-slave, di tocario e di ittita. A quest'ultima lingua Pedersen dedicò un lavoro intitolato Hittitisch und die anderen indoeuropäischen Sprachen (København 1938), nel quale affermò che l'ittita, per quanto lontano sia dal tipo indeuropeo, è per certe sue caratteristiche "così arcaico che, per l'aspetto generale della famiglia linguistica, è altrettanto importante quanto l'antico indiano e il greco" (p. 191).

Fra il 1879 e il 1902, insieme coi norvegesi Sophus Bugge (1833-1907) ed Alf Torp (1853-1916), Holger Pedersen sostenne il carattere indeuropeo del licio e del lidio, due lingue parlate nell'Anatolia occidentale nel I millennio a. C. A quell'epoca si conoscevano soltanto circa 150 iscrizioni licie, risalenti ai secc. V e IV a. C., ma non erano ancora note le lingue anatoliche del II millennio, sicché l'ipotesi dei glottologi nordici non poté scuotere l'autorità della teoria allora dominante, secondo cui la popolazione pregreca dell'Asia Minore non sarebbe appartenuta alla famiglia indeuropea.

Sul finire del XIX secolo alcuni linguisti avevano infatti formulato la teoria secondo cui la lingua dei Lici e le altre antiche lingue dell'Asia Minore (misio, lidio, cario ecc.) sarebbero appartenute ad una famiglia diversa sia da quella indeuropea sia da quella semitica. Faceva eccezione il frigio, ritenuto lingua indeuropea per via dei numerosi elementi lessicali assai simili al greco contenuti nelle iscrizioni frigie. Fu così che nacque l'ipotesi di un'affinità delle lingue egeo-microasiatiche con quelle caucasiche.

Soltanto nel 1936 un professore di glottologia dell'Università di Pavia, Piero Meriggi (1899-1982), decifratore dell'ittita geroglifico, rilanciò i risultati delle ricerche compiute da Pedersen, Bugge e Torp, rafforzandoli con nuove argomentazioni. Da parte sua, basandosi su alcune analogie morfologiche nella declinazione e nella coniugazione e sulla presenza di un gruppo di elementi lessicali comuni, Pedersen metteva in luce la vicinanza del licio e dell'ittita, affermando in particolare che il licio rappresenta un più tarda fase di sviluppo del luvio: "In gewissen Beziehungen würde das Luwische sich besser als Stammutter des Lykischen empfehlen" (Lykisch und Hittitisch, Kopenhagen 1949). Tali vedute furono confermate alla fine degli anni Cinquanta dalla Comparaison du louvite et du lycien (“Bulletin de la Société de Linguistique de Paris”, 55, pp. 155-185 e 62, pp. 46-66) del francese Emmanuel Laroche (1914-1991), il quale mostrò la corrispondenza del termine ittita per 'Licia' (Lukka) con il luvio Lui-, da un più antico *Luki-, donde l'identità dei nomi Luwiya e Lykìa.

Dal fatto che nelle iscrizioni licie siano individuabili alcuni elementi tipici di una lingua satem l'indeuropeista bulgaro Vladimir Ivanov Georgiev conclude che nel licio sarebbero presenti due componenti: "la prima è probabilmente il licio, successore del luvio (e vicino all'ittita), la seconda è probabilmente il termilico, successore del pelasgico" (Vladimir I. Georgiev, Introduzione alla storia delle lingue indeuropee, Roma 1966, p. 233), sicché la lingua licia del I millennio costituirebbe il risultato della mescolanza di queste due lingue.

Siamo dunque in presenza di un caso che giustifica la nozione di "peri-indeuropeo", in quanto nel licio, come nel lidio, gli elementi indeuropei sono innegabili, però "è difficile considerare queste lingue sullo stesso piano delle lingue indeuropee normali" (Giacomo Devoto, Origini indeuropee, Padova 2005, p. 206). Così il Devoto, per il quale il licio e il lidio, assieme alle altre lingue anatoliche più o meno vicine all'ittita, "completano l'imagine di una complessità linguistica accanto ad una etnica, intorno alla nozione etnico-linguistica ben definita dagli Ittiti" (op. cit., p. 426).

Alla componente etnolinguistica indeuropea corrisponde, nella cultura politica del popolo licio, un caratteristico "tratto delle vecchie radici indoeuropee, [ossia] che le città licie erano governate da consiglieri anziani (senati)" (Francisco Villar, Gli Indoeuropei e le origini dell'Europa. Lingua e storia, Bologna 2008, pp. 352-353), mentre dal sostrato preindeuropeo proviene quell'aspetto matriarcale che non era sfuggito all'osservazione di Erodoto. "Solo questo uso è loro proprio - scrive il padre della storia - e in ciò non assomigliano a nessun altro popolo: prendono il nome dalle madri e non dai padri. Se uno chiede al vicino chi egli sia, questi si dichiarerà secondo la linea materna (metròthen) e menzionerà le antenate della madre. E qualora una donna di città sposi uno schiavo, i figli sono considerati nobili; qualora invece un uomo di città, anche il primo di loro, abbia una moglie straniera o una concubina, i figli sono perdono ogni diritto" (I, 173, 4-5).

Già in Omero, d'altronde, è attestato il singolare costume licio della discendenza matrilineare: Bellerofonte, scelto dal re di Licia come genero e reso partecipe di metà del potere regale, rappresenta una "eccezione ai normali costumi matrimoniali attestati nel mondo omerico" (Maria Serena Mirto, Commento a: Omero, Iliade, Einaudi-Gallimard, Torino 1997, p. 970); tra i suoi nipoti, l'erede del potere regale e il comandante supremo dei Lici nella guerra di Troia non è Glauco, "lo splendido figlio di Ippoloco" (Iliade, VI, 144), bensì Sarpedonte, figlio di Laodamia: "Accanto a Laodamia giacque il saggio Zeus, - ed essa generò Sarpedonte dall'elmo di bronzo, pari agli dèi" (Iliade, VI, 198-199).

Questa storia viene presa in considerazione da Bachofen nelle pagine introduttive al Mutterrecht: "Accanto ad una testimonianza assolutamente storica di Erodoto, la storia mitica del re presenta un caso di trasmissione ereditaria matrilineare. Non i figli maschi di Sarpedone [Sic. "Sarpedone" in luogo di "Bellerofonte" è ovviamente una svista del traduttore], ma Laodamia, la figlia, è l'erede legittima, e questa cede il regno a suo figlio, il quale esclude gli zii. (...) La preferenza data a Laodamia nei confronti dei suoi fratelli conduce Eustazio all'osservazione che un tale trattamento di favore della figlia rispetto ai figli maschi contraddice interamente le concezioni elleniche" (Johann Jakob Bachofen, Introduzione al "Diritto materno", a cura di Eva Cantarella, Editori Riuniti, Roma 1983, pp. 44-45).

Nel 1862, un anno dopo la pubblicazione del Mutterrecht, Bachofen riprende l'argomento con Das lykische Volk und seine Bedeutung für die Entwicklung des Altertums, Freiburg im Breisgau. Ne esistono due traduzioni italiane: quella di Alberto Maffi (Il popolo licio e la sua importanza per lo sviluppo dell'antichità, in: Il potere femminile. Storia e teoria, a cura di Eva Cantarella, Il Saggiatore, Milano 1977) e quella ormai irreperibile del latinista E. Giovannetti (Il popolo licio, Sansoni, Firenze 1944, che viene riproposta nel presente fascicolo.


*Claudio Mutti, redattore di "
Eurasia. Rivista di studi geopolitici", è laureato in Filologia Ugrofinnica all’Università di Bologna. Si è occupato dell’area carpatico-danubiana sotto il profilo storico (A oriente di Roma e di Berlino, Effepi, Genova 2003), etnografico (Storie e leggende della Transilvania, Oscar Mondadori, Milano 1997) e culturale (Le penne dell'Arcangelo. Intellettuali e Guardia di Ferro, Società Editrice Barbarossa, Milano 1994; Eliade, Vâlsan, Geticus e gli altri. La fortuna di Guénon tra i Romeni, Edizioni all'insegna del Veltro, Parma 1999).
Tra le pubblicazioni più recenti, citiamo: Imperium. Epifanie dell'idea di impero, Effepi, Genova 2005; L'unità dell'Eurasia, Effepi, Genova 2008.
(Per ulteriori dati bibliografici, si veda il sito informatico
www.claudiomutti.com).


lundi, 11 mai 2009

Islam et laïcité: la naissance de la Turquie moderne

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1989

Islam et laïcité: la naissance de la Turquie moderne

Bernard LEWIS, Islam et laïcité, la nais­sance de la Turquie moderne,  Fa­yard, Paris, 1988, 520 pages, 195 FF.

 

La Turquie est beaucoup de choses à la fois, des choses étroitement mêlées et imbriquées les unes dans les autres. L'enquête historique de Bernard Lewis commence d'ailleurs par nous signaler les différences entre les termes «turc/Turquie» et «ottoman». Le terme «turc» désigne une popu­la­tion ethniquement distincte, de langue turque, installée en Anatolie. Le terme «ottoman» n'a qu'une signification dynastique. Il existe donc une ethnie turque distincte mais non une ethnie ottomane. Le principe turc est un principe eth­nique; le principe ottoman, un principe politique, dé­taché de toute ethnicité concrète. La turcologie euro­péenne du XIXième siècle redonnera aux Turcs d'Anatolie le goût de leur passé, qu'ils avaient aban­donné pour servir l'Islam ou la machine politique ot­tomane. Mais malgré ce re­niement de la turcicité pré-islamique, les racines turques reviendront à la surface, bien que ca­mouflées, dès l'expansion au XVIième siècle des Osmanlis. Ceux-ci se donnaient une gé­néa­logie mythique et prétendaient descendre d'une tribu turque, les Oguz. Mais les ethnies turques no­mades, réservoir démographique de l'Empire Ottoman qui reprend l'héritage byzantin, sont regardées avec méfiance voire avec mépris par le pouvoir qui voit en elles des bandes non po­licées, susceptibles de boule­verser l'ordre im­périal. «Turc» est même, à cet époque, un terme injurieux, signifiant «rustaud», «abruti» ou «grossier».

Quant à l'Islam, troisième élément déterminant de l'histoire turque après le prin­cipe impérial et les facteurs ethniques, c'est un Islam accepté de plein gré, qui n'est pas le fruit d'une conversion. Moins prosélyte et plus tolérant, l'Islam turc n'a pas cherché à convertir de force chrétiens (grecs) ou juifs mais a pratiqué à leur égard une sorte d'apartheid rigoureux, si bien que les Grecs et les Juifs d'Istanbul ne parlaient pas turc. L'Islam turc est aussi plus varié que l'Islam arabo-sémitique: des élé­ments de chamanisme, de bouddhisme centre-asia­tique, de manichéisme et de christianisme offre une palette de syncrétismes, rassemblés dans des ordres religieux, les tarikat, toujours soupçonnés par le pou­voir parce que susceptibles de subversion. Quatrième élément, enfin, c'est le «choc de l'Occident», l'influence des Lumières, surtout françaises, et des doctrines politiques libérales et étatiques. Bernard Lewis analyse méthodique­ment les influences occi­dentales, depuis 1718, année du Traité de Passaro­witch, sanctionnant une défaite cuisante que les Otto­mans venaient de subir sous les assauts austro-hon­grois. La Porte constate alors son infériorité technique et militaire et décide d'étudier les aspects pratiques de la civilisation européenne et d'en imiter les structures d'enseignement. Cette politique durera jusqu'au début de notre siècle, avec l'aventure des Jeunes Turcs puis avec la République de Mustafa Kemal. B. Lewis re­trace la quête des étu­diants et des hommes politiques turcs dans les universités européennes. Le travail de cette poignée d'érudits ne suffit pas à redonner à l'Empire ottoman son lustre d'antan. Russes, Fran­çais, Britanniques et Néerlandais soumettent les Etats musulmans les uns après les autres à leur domination.

Dans un autre chapitre, B. Lewis montre comment le nationalisme à l'eu­ropéenne s'est implanté en Tur­quie. Deux termes signifient «nation» en turc: vatan,  qui corres­pond à la patrie charnelle, à la Heimat   des Alle­mands (cf. watan  chez les Arabes) et millet,  qui désigne la communauté islamique (cf. milla  en arabe). Namik Kemal, théoricien du natio­na­lis­me ot­toman, constate, explique Lewis, qu'une doctrine po­litique trop axée sur le vatan  provo­querait la disloca­tion de l'ensemble ottoman multinational. Mais cette diversité ne risque pas d'éclater à cause du caractère fédérateur du millet  islamique: on voit tout de suite comment oscille l'esprit turc entre les deux pôles de l'ethnicité particulariste et de la religion universaliste. Deux idéologies naîtront de cette distinction entre va­tan  et millet:  le panislamisme et le turquisme. Le tur­quisme procède d'une politisation des re­cher­ches eth­nologiques, archéologiques et linguisti­ques sur le passé des peuples turcs, surtout avant l'islamisation. Il se manifeste par un retour à la langue turque rurale (Mehmed Emin), par une exaltation de la patrie origi­nelle commune de tous les peuples turcophones, le pays de Touran.

De là proviennent les autres appella­tions du turquisme: le touranisme et le pantouranisme. Ce mouvement sera renforcé par les réfugiés turco­phones des régions conquises par les Russes: ceux-ci sont rompus aux disciplines philolo­giques russes et appliquent au touranisme les principes que les Russes appliquent au pan­sla­visme. Le programme politique qui découle de cet engouement littéraire et archéolo­gique vise à unir sous une même autorité politique les Turcs d'Anatolie (Turquie), de l'Empire russe, de Chi­­ne (Sin-Kiang), de Perse et d'Afghanistan. L'é­chec du panislamisme et du pantouranisme, après la Première guerre mondiale, conduisent les partisans de Mustafa Kemal à reconnaître les limites de la puis­sance turque (discours du 1 dé­cembre 1921) circons­crite dans l'espace ana­tolien, désormais baptisé Tür­kiye.  Ce sera un Etat laïc, calqué sur le modèle fran­çais, une «patrie anatolienne». L'ouvrage de Lewis est indispensable pour pouvoir juger la Turquie mo­derne, qui frappe à la porte de la CEE (Robert Steuckers).

mercredi, 01 avril 2009

Le mythe de la "respectabilité" turque

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

 

Le mythe de la “respectabilité” turque

 

Faut-il considérer la Turquie comme une alliée de l'Occident ou un danger pour l'Europe? Voilà une ques­tion à laquelle les Européens du Sud-Est, ceux qu'on imagine discréditer ou disqualifier en les nommant “Balkaniques”, connaissent la réponse, comme sans doute dans les villes allemandes, ou dans certains faubourgs de Belgique ou d'Alsace, on commence à la découvrir. Mais en Europe, d'une manière géné­rale, on prétend ne pas se préoccuper de ce que sont les populations turques, dont on découvre, pour la circonstance, qu'elles comprennent des Kurdes, et dont on nous apprend, par exemple, que les 1,8 mil­lion de Turcs recensés comme vivant, officiellement, en Allemagne, 400.000 seraient des Kurdes. On pré­tend ne vouloir considérer que la respectabilité d'unb Etat via l'apparence de sa diplomatie.

 

Or, la première chose que les Européens doivent comprendre, c'est le cynisme incroyable dont font preuve, en toutes circonstances, les diplomates turcs.

 

Je prendrai un simple exemple qui remonte au 1er mars dernier. Ce jour-là, la Turquie rejetait, par la voix de M. Ferhat Ataman, les accusations selon lesquelles elle violerait l'embargo international imposé à l'Irak par l'ONU, après l'occupation du Koweit par les troupes de Bagdad en août 1990. Embargo que nous con­sidérons comme parfaitement injuste désormais, et même fondamentalement abject. Mais en “allié de l'Occident”, et des émirs, le gouvernement turc, non seulement s'était déclaré du côté de la coalition, mais avait, on s'en souvient, ou on devrait s'en souvenir, demandé la protection de l'OTAN contre la me­nace que lui faisait courir l'Irak expansionniste de Saddam Hussein...

 

Le porte-parole de la diplomatie turque jura alors ses grands dieux que «toutes les thèses selon les­quelles la Turquie adopterait une position qui violerait l'embargo sur l'Irak sont erronées. Celles-ci sont inadmissibles pour la Turquie. Elle respecte entièrement l'embargo».

 

Or il ne s'agissait là que de répondre à une question, apparemment anodine, et sur laquelle, répétons-le, nous sommes particulièrement dépassionnés  —sur le commerce frontalier entre la Turquie et l'Irak du Nord. Ce commerce consiste en l'importation par les camionneurs turcs du mazout irakien dans des ré­servoirs spécialement montés sur leurs véhicules—  pour revendre moins cher que le mazout vendu sur le marché turc en échange du transport vers le Nord de l'Irak de produits alimentaires.

 

M. Ataman répondait par conséquent que «le commerce des camions turcs en direction de l'Irak du Nord est destiné à satisfaire les beoins du peuple de la région menacé de famine. Ils importent du pétrole en petites quantités mais cela ne signifie aucunement la violation de l'embargo».  Et il ajoutait, sans sourcil­ler, cette réflexion dont on appréciera le réalisme que «les camionneurs turcs doivent avoir un bénéfice pour se rendre en Irak du Nord». Voilà sur de petits faits comment la Turquie conçoit son rôle de défen­seur de la démocratie et de la légalité internationale au Proche-Orient, rôle que depuis des dizaines d'années les dirigeants de l'Occident prennent très au sérieux. Aucune autre pays dans le monde ne pourrait se permettre la même désinvolture vis-à-vis de ses propres contrebandiers. Est-il besoin de dire qu'au-delà de ce petit dossier, le petit cynisme et le petit mensonge de la Turquie devient d'autant plus grand que ses interlocuteurs sont lâches ou volontairement myopes.

 

Chaque fois qu'un attentat endeuille un pays occidental les téléscripteurs des agences de presse crépi­tent des communiqués de condoléances de la présidence de l'Etat turc et des ambassades turques. Ainsi lors de l'attentat du RER à Paris cette semaine... Ainsi lors de l'attentat d'Oklahoma City, bien entendu aucun mauvais esprit ne vient trouver cette diligence suspecte et personne ne parle jamais de “piste turque”...  Au contraire l'image de respectabilité de ce pays en est largement propagée... Or cette image et cette respectabilité sont totalement factices. Mais il s'agit d'habituer les Européens à l'idée que la Turquie fait partie de la famille et ceci, notamment, en perspective du grand affrontement qui se dessinera en Asie centrale dans le XXIième siècle, autour notamment des pays musulmans de l'ex-Union Soviétique, pays dont on voudrait, à Washington, faire des satellites directs de la Turquie  —en imaginant que, de la sorte, ils seraient des satellites indirects des grandes compagnies américaines, de Coca-Cola, de CNN et de la General Motors. Tout cela coûtera très cher en déconvenues comme les paris insencés de la France vont bientôt hélas coûter très cher à son industrie, à son complexe militaro-industriel, ceci pour ne rien dire de son honneur  — ou de ce qui en tient lieu sous les auspices de M. Juppé.

 

Jean-Gilles Malliarakis.

00:05 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, turquie, proche orient, asie mineure | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook