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lundi, 01 décembre 2014

Le pivot géographique de l'histoire

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Le pivot géographique de l’histoire

par Philippe Raggi

Ex: http://fortune.fdesouche.com

Pour saisir les enjeux actuels, un petit détour sur une des cartes de Halford J. Mackinder ne manque pas d’intérêt.
Quelques éléments d’explication : Mackinder nous dit : « La prise de contrôle de la région terrestre centrale par une nouvelle puissance se substituant à la Russie, ne tendrait nullement à réduire l’importance géographique de la position pivot ». (1)
Reprenant les mots de Mackinder et en poursuivant la logique de son propos à l’aune de la géopolitique récente et en cours, nous pourrions avancer ceci :
Si une puissance particulière parvenait à renverser la Russie, ou à la contrôler, celle-ci  pourrait constituer un péril menaçant la liberté du monde pour la seule raison qu’elle ajouterait une façade océanique aux ressources du Grand continent – un accès aux mers chaudes – avantage qui demeure jusqu’à présent interdit à l’occupant russe de la zone-pivot.

Pour trouver quelle est cette « puissance particulière », il suffit d’observer ce qui se passe dans le Rimland, cette ceinture de la zone-pivot (Heartland). Quelle est la puissance qui place ses pions dans presque tous les pays de cette zone ? Quelle est la puissance qui agit et resserre cette ceinture année après année ?

Cette « puissance particulière » tend, présentement, à contenir au plus serré la région-pivot, ne lui laissant plus aucune profondeur stratégique, plus aucune zone d’influence ; même immédiate. Les Russes n’auraient donc pas le droit à une Doctrine Monroe contrairement aux États-Unis qui seuls auraient ce privilège.
 
Ce serait donc, appliquée à l’échelle du monde, la fameuse « destinée manifeste », une sorte de droit moral des États-Unis à ce qui ne peut être qualifié autrement que… d’impérialisme. Ce serait même, à lire certains, une situation de fait mais opérée néanmoins contre son gré ! (2)
Halford J. Mackinder a défini dès l’orée du XXème siècle une constante de l’Histoire (3). Force est de constater que cette constante oriente de façon manifeste la politique des Etats-Unis sur le continent Euro-Asiatique depuis 1945. En observant aujourd’hui, avec recul, tant la stratégie de « Containment » de George Keenan, que celle du « Rollback » de John Foster Dulles, l’on s’aperçoit qu’elles ne visaient en fait pas tant l’Union Soviétique et son régime communiste (4) mais bien plutôt la Russie, en tant que terre de la zone-pivot.
 
Depuis 1992, en Europe, les États-Unis, via l’OTAN notamment, mais aussi par d’autres organismes (5), ont fait reculer vers l’Est les limites du Heartland ; il est à noter que les ex-républiques de l’Union Soviétique sont à présent quasiment toutes dans son escarcelle.
 
Dans ce mouvement vers l’Est, une de ces ex-Républiques est à cet égard cruciale : l’Ukraine. Celle-ci permet à la Russie un accès direct à la Méditerranée. Il en est de même de la Géorgie. Ainsi, ces deux pays ont-ils subi ou subissent des « soubresauts ». Et dans cette fermeture de la Méditerranée, en Asie mineure, il y a la Turquie, laquelle est déjà dans l’orbite de puissance étasunienne (OTAN et Union Européenne aux forceps).
 
En Asie centrale, l’Afghanistan a subi les affres de cette action de contention américaine vis-à-vis de la Russie et ce depuis 2001. Reste un autre pays crucial : l’Iran. Et si on lit bien les stratèges de Washington, l’action prônée pour ce pays n’est pas « directe » ; il ne s’agit pas d’affronter militairement Téhéran (hard power) mais bien plutôt de ménager les Ayatollahs et d’influer sur une population plus malléable (smart power) afin qu’un terrain d’entente puisse advenir (6).
 
En fin de boucle, en Extrême-Orient, le Japon demeure depuis 1945 une base militaire avancée des États-Unis dans la région. Quant à la Corée du Sud, elle reste encore sous orbite étasunienne, confortée par l’épouvantail que représente Pyongyang.
 
Toujours dans cette stratégie de puissance en action, dans ce mouvement pour la maîtrise du Heartland, il y a un écueil de taille : la Chine. Ce pays, nous dit Mackinder, serait à même de devenir un péril pour le monde (the yellow peril) si d’aventure il venait à dominer, à vassaliser la Russie. Mais Pékin a bien d’autres ambitions que de prendre le « chemin du Nord », au-delà de l’Amour, ce fleuve-frontière de 4 400 kilomètres.
 
La Chine a, en effet, d’autres préoccupations que de devenir, dans un futur proche, ce « péril jaune » dont parle Mackinder. Pékin se concentre plutôt sur :
- le contrôle à long terme de son pouvoir dans ses provinces (risque d’autonomie, de séparatismes),
- sa maîtrise de la zone des neuf points dans la Mer de Chine méridionale (risque de conflits avec ses voisins immédiats (vietnamiens, philippins, taïwanais, etc.),
- la conservation voire le développement de son collier de perles entre son territoire et les zones de production d’hydrocarbures,
- la mise en œuvre des retours sur ses investissements en Afrique.
 
La Chine représente donc malheureusement pour les États-Unis, une pièce non maîtrisée, non maîtrisable, une impasse ; elle doit être contournée, tout en étant maîtrisée indirectement via la politique de l’énergie hydrocarbure ; il s’agit de tenir les robinets…
 
Pour finir ces quelques réflexions et commentaires sur la carte de Halford J. Mackinder, rappelons sa formule ; une formule choc, une formule répétée à l’envie et qui résume notre propos ci-dessus : « Qui contrôle le cœur du monde (Heartland) commande à l’île du monde (Heartland + Rimland), qui contrôle l’île du monde commande au monde ». Cette carte de 1904 explique bien, par l’intégration du temps long de l’Histoire sur la géographie physique, les mouvements géopolitiques contemporains. Ainsi, les finalités de tel ou tel acteur géopolitique se découvrent-elles, naturellement.
 
Nonobstant, l’analyse géopolitique ne doit pas être un paraclet mais plutôt un levier pour une politique de puissance face à tel ou tel Hégemon du moment… Acteur ou sujet, victime ou bourreau, Ecce Stato.
 
Notes :
 
(1) Halford John Mackinder, The geographical pivot of History, paru dans The Geographical Journal, Vol. 23, n°4, p.437.
(2) Cf. les propos de Niall Ferguson sur les États-Unis comme « Empire malgré-lui ». Doté d’un esprit brillant, Ferguson, auteur entres autres livres de Colossus ; The price of America’s Empire, est somme toute bienveillant vis-à-vis des États-Unis ; ainsi l’excuse-t-il de ses méfaits commis à travers le monde. Ferguson est, faut-il le souligner, débiteur de Washington…
(3) On (re)lira, fort à propos, le livre d’Aymeric Chauprade intitulé « Géopolitique ; constantes et changements dans l’Histoire » paru aux Éditions Ellipses en 2000 et réédité plusieurs fois depuis. On pourra se documenter également avec le livre référence d’Alfred T. Mahan De l’influence de la puissance maritime dans l’Histoire 1660-1783 et particulièrement dans son introduction. Mahan y évoque justement la question des « constantes ».
(4) Ce fut, en définitive, un argument pour naïfs, un levier du « Softpower », une façon d’amener à soi une population d’Europe occidentale à juste titre effrayée, au sortir de la seconde guerre mondiale.
(5) L’Union Européenne, par exemple, mais aussi le FMI, etc.

(6) Cf. Joseph Nye, théoricien de cette analyse des stratégies de puissance ; stratégies mises en œuvre magistralement (il faut être juste et honnête) par les États-Unis.

Philippe Raggi

jeudi, 27 novembre 2014

L’Europe prendrait-elle ses distances vis-à-vis des États-Unis au sujet de la Russie ?

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L’Europe prendrait-elle ses distances vis-à-vis des États-Unis au sujet de la Russie ?

Auteur : Finian CUNNINGHAM
Ex: http://zejournal.mobi

On a failli attendre, mais mieux vaut tard que jamais : assisterions-nous à un rétropédalage de l’Europe face à l’agressivité des États-Unis envers la Russie ? La visite cette semaine à Moscou du Ministre des affaires étrangères allemand Frank-Walter Steinmeier, qui évoque plutôt à un voyage d’affaires, donne à penser que l’Europe reprend ses esprits et recherche une solution diplomatique à l’escalade des tensions autour de la crise ukrainienne, tensions qui pourraient conduire à une guerre continentale étendue, voire pire.

Steinmeier a rencontré son homologue russe Sergei Lavrov, et tous deux ont insisté sur la nécessité de trouver une issue politique à la violence en Ukraine. Le diplomate allemand, premier envoyé de l’Europe à Moscou depuis plusieurs mois, a également évoqué la normalisation des relations entre son pays et la Russie, ainsi que la nécessité de lever les sanctions économiques que Bruxelles a imposées à Moscou ces derniers mois.

Cette semaine, les ministres de l’UE à Bruxelles ont regimbé à l’idée d’imposer une quatrième série de sanctions, révélant un fossé qui ne cesse de s’élargir entre les politiques des différents gouvernements européens.

Relevons que M. Steinmeier a déclaré que sa visite dans la capitale russe faisait suite à des entretiens constructifs le week-end dernier avec le président Vladimir Poutine, au sommet du G20 en Australie. Le ministre des affaires étrangères allemand a déclaré qu’il s’agissait désormais d’empêcher une nouvelle spirale de la violence en Ukraine.

Sachant que l’Allemagne est la première puissance économique de l’Union Européenne, on peut affirmer sans crainte de se tromper que l’attitude politique de Berlin a de bonnes chances d’influer sur le reste du bloc.

D’ailleurs, le contraste entre l’attitude européenne incarnée cette semaine par M. Steinmeier et celle de Washington ne saurait être plus tranché.

Le Congrès, dominé par les Républicains, a fait adopter une résolution qui renforcera notablement le soutien militaire au régime de Kiev. La kabbale d’extrême-droite, malgré son revers électoral du mois dernier, n’a clairement manifesté aucun intérêt pour l’application du cessez-le-feu conclu le 5 septembre à Minsk, la capitale de la Biélorussie. Le nombre de victimes civiles ne cesse d’augmenter dans la population russophone de Donetsk et Lougansk, les forces militaires de Kiev poursuivant leurs bombardements aveugles de villes et de villages au moyen d’armes interdites telles que les bombes à fragmentation et les missiles balistiques non guidés.

Faisant fi des violations de l’accord de Minsk, l’offensive meurtrière de Kiev se traduit par une multitude de crimes de guerre.

Pourtant, cela ne désarme pas le Congrès américain qui, en fait, se prépare à légaliser une aide militaire massive à ce régime dont les dirigeants, notamment le président en titre Petro Porochenko, sont de plus en plus déchaînés, allant cette semaine jusqu’à déclarer « ne pas craindre une guerre totale avec la Russie ».

Le député Républicain Michael Burgess, auteur du manifeste au titre provocateur de Soutien à la loi Liberté pour l’Ukraine, a déclaré cette semaine : « L’Ukraine [sic] a besoin d’armes, de munitions, de gilets pare-balles et de moyens de communication. Certes, une aide financière est importante, mais pas autant que des armes et des munitions pour repousser les troupes russes qui ont envahi un pays souverain. »

Notez l’aplomb avec lequel il parle d’invasion russe sans se sentir la moindre obligation d’étayer son propos. Il a probablement entendu cela sur Fox News ou CNN et se sent libre de le régurgiter comme s’il s’agissait d’un fait indiscutable.

Le militarisme téméraire du régime de Kiev depuis sept mois a mis l’économie ukrainienne à genoux. Sa monnaie s’effondre et sa dette étrangère explose, le principal créancier étant justement la Russie. Pourtant, Washington considère que la priorité n’est pas tant une aide financière qu’un militarisme accru pour exacerber l’agressivité envers la Russie.

Suite à la victoire des Républicains à l’élection de mi-mandat au début du mois, il y a fort à parier que cette motion sera adoptée par le Congrès. Le gouvernement étatsunien aura ainsi les coudées franches pour fournir ouvertement du matériel de guerre, tel que des systèmes de défense antichars et aérienne, des lance-grenades, des mitrailleuses et des fusils pour tireurs d’élite. Cela constitue une escalade dangereuse de l’intervention militaire de Washington en Ukraine, qui a prétendu jusqu’ici apporter au régime de Kiev une « assistance pacifique ».

Et c’est précisément ce que les Républicains réclamaient à cor et à cri. La semaine dernière, un sénateur John McCain halluciné a déclaré : « Nous voulons donner aux Ukrainiens [sic] des armes pour se défendre contre les Russes, qui sont en train de démembrer leur pays. » McCain, encore un politicien qui répète comme un perroquet ce que dit Fox News, faisait partie des principaux sponsors internationaux des troupes de choc néo-nazies qui ont pris le pouvoir à Kiev au début de l’année et diabolisent aujourd’hui ouvertement leurs compatriotes ukrainiens dans les régions orientales, les traitant de « sous-hommes et de Moskals ».

Jusqu’à une date récente, Washington et Bruxelles ont entonné le même hymne de propagande que le régime de Kiev, qu’ils ont contribué à mettre au pouvoir en février dernier lors d’un coup d’état contre le gouvernement ukrainien élu. Dans une inversion stupéfiante des rôles, l’axe US-EU accuse la Russie d’avoir envahi et renversé l’Ukraine. Aucune preuve n’est apportée à ces allégations et le discours de Kiev, criminel, ouvertement hostile et haineux vis-à-vis des Russes, est considéré comme parole d’évangile.

Pour le moment, Bruxelles est sur la ligne de Washington, qui consiste à imposer des sanctions à la Russie pour avoir prétendument violé la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Le vote libre et massif du peuple de Crimée en faveur de la séparation vis-à-vis du régime de Kiev installé par l’Occident pour rejoindre la Fédération russe, suivi par des référendums similaires sur l’autonomie des régions orientales de Donetsk et de Lougansk, est attribué dans ce modèle de double langage à l’intervention de Moscou.

Cependant, suite aux sanctions occidentales et aux contre-sanctions russes qui frappent principalement une Europe déjà en pleine récession, la suspicion face à des mesures contre Moscou présentées comme la panacée est appelée à se développer. Pour Washington, tenir un discours ferme ne coûte pas cher, et peut même rapporter. Ce n’est pas le cas pour les Européens.

« Les exportations allemandes en Russie s’écroulent » titrait le Financial Times à la fin du mois dernier, par suite des distances prises avec Moscou, qui constituent la pire rupture dans les relations entre les deux pays depuis la fin officielle de la Guerre Froide il y a plus de vingt ans. Ailleurs, on signale que les industriels et les entreprises allemands se livrent à un lobbying fiévreux à Berlin en vue de revenir sur la politique de sanctions, qui menace des milliers d’emplois en Allemagne ainsi que le plus gros partenariat commercial bilatéral entre l’Europe et la Russie.

S’agissant de la locomotive économique de l’Europe, ce qui est mauvais pour l’Allemagne l’est automatiquement pour le reste de l’Europe.

La nouvelle responsable de la politique étrangère de l’UE Frederica Morgherini, précédemment ministre en Italie, a fait part dernièrement de ses doutes quant à l’efficacité des sanctions. Mme Morgherini a repris le poste de la Britannique Catherine Ashton, qui a joué un rôle déterminant dans le changement de régime à Kiev sous les auspices de l’Occident et affiché une servilité pitoyable vis-à-vis de Washington.

D’autres États européens se montrent également de plus en plus critiques envers de ce qu’ils considèrent comme une hostilité insensée et suicidaire envers la Russie.

« La Hongrie s’interroge sur les sanctions de l’UE à l’encontre de la Russie », signale le Financial Times le 16 octobre. La Slovaquie, la République Tchèque, la Roumanie, la Bulgarie et l’Autriche l’ont rejointe pour interroger la position officielle de l’axe Washington-Bruxelles, qui vise à isoler la Russie.

Le Premier Ministre de Serbie, Aleksandar Vucic, a déclaré hardiment que son pays n’appliquerait pas les sanctions de Bruxelles contre la Russie, faisant état de liens historiques et culturels solides avec Moscou, même si Belgrade a actuellement le statut de candidat à l’entrée dans l’UE. À cela s’ajoutent de fortes relations économiques et d’investissement entre la Russie et la Serbie.

Tous ces pays dissidents ont autant intérêt à voir se concrétiser le projet South Stream de pipeline de gaz géant en provenance de Russie qu’à entretenir des relations de bon voisinage, même de façade. Pour eux, les sanctions contre la Russie équivalent à se couper un bras.

Le discours de Vladimir Poutine et d’autres dirigeants russes commence peut-être à porter ses fruits en appelant à la raison et à l’évidence empirique, ou à son absence. Au Club de Valdaï à Sotchi, fin octobre, l’un des principaux éléments à retenir du discours de Poutine était que la politique US vise à enfoncer un coin entre l’Europe et la Russie pour défendre des intérêts américains égoïstes. La domination de l’énorme marché européen de l’énergie est un objectif évident, de même que la subordination de la politique économique européenne à Wall Street et à la Réserve Fédérale américaine. En bref, la subordination de l’Europe à l’hégémonie capitaliste américaine.

Le chef de cabinet du Kremlin Sergei Ivanov a déclaré récemment que le principal motif de l’hostilité américaine vis-à-vis de Moscou était le fait que « la Russie osait avoir une opinion » sur l’orientation future de l’évolution mondiale. Cette indépendance se manifeste, par exemple, dans la promotion par la Russie d’un système bancaire international alternatif au FMI dominé par Washington, ou dans un marché eurasiatique de l’énergie emblématique, où les paiements sont effectués dans les devises des pays signataires plutôt qu’en dollars.

Quiconque est doté d’un peu de bon sens peut voir que la politique russe est entièrement légitime, voire souhaitable pour une économie et une politique mondiales plus équilibrées. L’arrogante nation américaine, autoproclamée exceptionnelle, se couvre de ridicule en criminalisant la Russie pour de telles raisons. C’est d’ailleurs ce qui a incité Washington à exploiter la crise ukrainienne comme couverture pour des visées impérialistes inacceptables.

Les gouvernements européens seraient bien inspirés de réfléchir aux propos auto-accusateurs du vice-président étatsunien Joe Biden. Lors d’une réunion à l’université de Harvard le mois dernier, il a déclaré que les états européens étaient initialement réticents à adopter les sanctions américaines contre la Russie. « Le président Obama a dû pousser les dirigeants européens dans leurs retranchements », a-t-il déclaré avec une satisfaction à peine dissimulée quant à la capacité de Washington à rudoyer l’Europe. N’est-ce pas atroce ?

Washington a en effet tout à gagner en plongeant ses soi-disant alliés européens dans une nouvelle Guerre Froide avec la Russie. Et l’Europe a tout à y perdre.

Pourtant, il semble que des groupes de pression européens s’éveillent enfin pour se dresser contre la folie imposée à quelque 500 millions de citoyens par des marionnettes pro-américaines telles que Herman van Rompuy, José Manuel Barroso, David Cameron et Catherine Ashton. La chancelière allemande Angela Merkel ou le président français François Hollande auront-ils le courage de suivre la voie diplomatique défendue par plusieurs courageux états-membres dissidents de l’UE ?

Espérons que l’Europe prenne ses distances vis-à-vis des orientations US concernant la Russie, qui ne font que conduire au désastre.

Il ne fait aucun doute que le monde politique américain est le plus contrôlé par les grandes entreprises, celui où le lavage de cerveau est le plus flagrant, le plus creux intellectuellement et le plus dangereux que le monde ait jamais connu. L’achat des dernières élections au Congrès, financées à hauteur de 4 Md$ en fonds de campagne (autrement dit, en pots-de-vin) par les grandes entreprises, atteste que les États-Unis ne sont pas une démocratie, mais une ploutocratie. S’il reste aux Européens un soupçon d’indépendance démocratique et de pensée éclairée, ils doivent le retrouver et l’affirmer de toute urgence. L’Europe et la Russie sont des alliés beaucoup plus naturels que les dirigeants américains va-t-en-guerre le seront jamais.

mardi, 25 novembre 2014

Eurasian consolidation and India's policy

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Eurasian consolidation and India's policy

By Zorawar Daulet Singh

Ex: http://www;atimes.com

Speaking Freely is an Asia Times Online feature that allows guest writers to have their say. Please click here if you are interested in contributing.

Since English geographer and geopolitician Halford Mackinder's published a Russia containment strategy disguised as a grand theory in 1904, the Eurasian heartland has been perceived by the Anglo-American world as a threat to its global position.

Ironically, as Mackinder was writing his paper, the heartland power, czarist Russia, was in its death throes - Japan's 1904-1905 naval victories in the Pacific had removed all illusions about Russia's status as a first-rate power.

Yet, within three decades, a revolutionary and industrializing.

Russia was emerging as a potential superpower. Stalin's crushing, albeit costly, annihilation of Hitler's Third Reich established the Soviet Union as the second global pole. China's own revolution, inspired and financed by Stalin's Russia, produced the first major consolidation of the Eurasian heartland.

Led by America, the West initiated a sustained grand strategy of countering this new force in world politics. Nicholas Spykman offered a theoretical precursor to this strategy in his 1942 book, America's Strategy in World Politics, which argued for America to project its strategic influence on the "Rimland" regions around the Soviet periphery.

Middle powers like India located on the Eurasian Rimland, however, reacted differently and consciously chose an approach that sought to maintain friendly and constructive ties with both these formidable blocs.

Despite some material costs, the overall developmental and security advantages of such an independent approach has never been credibly challenged. Indeed, this notion of sustaining a balance between the Atlantic and Eurasian worlds became an ingrained feature of Indian thinking and foreign policy practice.

During the interlude between 1991 and the resurgence of the Eurasian powers in the last decade, any notion of a balance between the two worlds became irrelevant. But the dramatic revival of the Eurasian world, and, its ongoing second phase of consolidation since the 1940s and 1950s, has revived the logic of balance in global geopolitics.

How should India view the contemporary alignment of Russia and China?

First, US policies have played an important part in driving Russia away from the West. But China's new post-Dengist identity as a great power seeking to improve its own bargaining equation with the US is also a factor in Beijing's outreach to Moscow.

As Gilbert Rozman of Princeton University perceptively notes, "Moscow and Beijing have disagreements about the future order they envision for their regions. But they agree that the geopolitical order of the East should be in opposition to that of the West."

Unlike the US, India has absolutely no problem with a stronger Russia, and, a Moscow buttressing its Asian identity. A Moscow-Beijing alignment, however, poses some challenges - although not nearly as serious as this development is for America's global position.

What are the implications of this global triangular development for India?

A modicum of a balance of power is a positive development for the overall international system. The short history of unipolarity leaves no doubt about the adverse impact of an unrestrained superpower on the lesser powers. As Russian President Vladimir Putin recently remarked, "The very notion of 'national sovereignty' has become a relative value for most countries."

While India shares some values with the West, such as a commitment to democracy and a liberal vision of a rule-based system, it finds that many Western norms on global governance and managing international security often contradict that liberal vision.

A challenge to Western predominance, and, certainly against its most unilateralist impulses, is not unwelcomed by the Indian strategic elite.

At the regional level, the rise of China is producing a variety of challenges: some evident, others still in flux. For example, China's evolving role beyond its core focus on East Asia is bringing new forms of Sino-Indian strategic interactions, especially in states that overlap the peripheries of India and China. Just as India is discovering the logic of multipolarity, smaller states in Southeast and South Asia are also recognizing the virtues of multiple options to advance their developmental and security interests.

The foreign policies of Vietnam and Sri Lanka exemplify this. Both these states have lived under Chinese and Indian power for most of their existence and are seeking opportunities to make new friends.

In the Sri Lankan case, it is primarily Indian apathy and lack of statecraft that has enabled Colombo to acquire more than the usual maneuvering space. In Vietnam's case, it is the sheer consequence of China's growing power that is impelling Vietnam to pursue multiple strategic partnerships. Ironically, it is Moscow that has assumed the leading role in modernizing Vietnam's military capabilities. For both India and China, the challenge is to ensure that their smaller neighbors remain at the very least non-aligned and sensitive to their respective concerns. India needs to re-discover a rich tradition of statecraft that had got subsumed in domestic instability and parochialism in recent decades.

Globally, India is facing an interdependent world but with the Atlantic and Eurasian great powers intensifying their competition over many issues and regions. Dmitry Trenin argues that the "US-Russian crisis" will spill over into a struggle waged "in the realms of geoeconomics, information, culture, and cyberspace".

The US and China are also competing for the future of an East Asian order but the high economic interdependence between China and its neighbors, and, China and the US (two-way trade in 2013 was US$562 billion) has made the game assume a more complex shape. But with Moscow and Beijing coordinating and backing up each other's core interests, the US ability to divide the Eurasian world has become severely constrained.

While the instinct for a balanced posture comes naturally to Indian policymakers, the pursuit of India's own interests has invariably been a more challenging endeavor. Indeed, this was always the most powerful critique of non-alignment: India got the meta-vision right but struggled with the micromanagement of its own interests and role. Yet, rather than focus on defining Indian interests clearly and sensibly, the contemporary discourse around Indian foreign policy typically revolves around challenging the meta-vision - by posing absurd questions such as 'will India will swing west or east?' This is the wrong analytical level to advance a debate on India's foreign policy.

Only once Indian interests are defined can India pursue and defend these. On core frontier issues, India has recognized it needs to manage its disputes by itself. No great power can solve these questions for India. Fortunately, nuclear conditions have obviated several scenarios of conflict escalation on India's frontiers. As a territorial status quo power, India's future challenge is managing its stalemates with China and Pakistan, and, exercising political will if opportunities for genuine border settlements arise.

But on several other fronts, the opportunity for constructing issue-based partnerships, often with different great powers, is becoming logical. For example, on climate change, Suresh Prabhu, a newly inducted minister in the government of Prime Minister Narendra Modi, has expressed a new realistic position where India cannot secure its interests by riding Chinese coat-tails, because the latter's capacity to assume responsibilities outpaces India's.

Prabhu remarked, "India and China must cooperate. But we must remember that India's interests are not the same as China's. …There is no way India could be asked to take the same kind of climate actions as China."

On developing a framework for cyber governance, India does not agree with the US position. In the July BRICS summit at Fortaleza, Modi noted, "BRICS countries, should take the lead in preserving cyberspace, as a global common good." On terrorism, beneath the veneer of a global consensus, India has found its partners have fleeting attention when it comes to operationalizing a shared revulsion for cross-border terrorism. On global finance, the gradual trend line towards a multiple reserve currency system with an internationalizing yuan offers benefits in terms of a less imbalanced and thus stable system, and, access to diverse forms of international capital.

On the maritime commons, India has common interests with big trading nations such as US and China, who all seek security of shipping lanes, even as India simultaneously seeks to shape the geopolitics on its own maritime frontiers, which are in proximity to international sea lines of communication.

On energy security, India seeks to leverage Western technological advantages when it comes to tapping non-conventional hydrocarbons but also has more durable interests with the energy rich powers such as Russia, Iran and Saudi Arabia. On pursuing new lines of communication to Eurasia, India has a long-term common interest with Iran and Russia, the two leading powers with the keys to access that space.

Although the accompanying rhetoric is still measured by Cold War standards, world politics is at an inflexion point where the fierce competition between the Atlantic and Eurasian worlds could fuel more global instability. The competition is a manifestation of a post-unipolar power transition with the great powers disagreeing on both the path towards a new equilibrium or what should be the normative design of a future world order. As Putin remarked at the Valdai Forum in October, "The goal of reaching global equilibrium is turning into a fairly difficult puzzle, an equation with many unknowns."

India needs a more sophisticated outlook and domestic conversation on global and regional affairs, and, the skill and poise to work constructively with a variety of great powers who appear unlikely to get along with each other for the foreseeable future.

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Zorawar Daulet Singh is a research scholar at King's College London.

(Copyright 2014 Zorawar Daulet Singh)

lundi, 24 novembre 2014

Au coeur du nationalisme ukrainien

Jean-Luc Schaffhauser :

Au cœur du conflit ukrainien

sur

http://www.tvlibertes.com

mardi, 18 novembre 2014

Vidéos des "Rencontres eurasistes" de Bruxelles

 

eurasisme,russie,europe,affaires européennes,jean parvulesco,événement,bruxelles

Vidéos des

"Rencontres eurasistes"

de Bruxelles,

18 octobre 2014

 

Laurent James - Lecture du texte de Jean Parvulesco "Vladimir Poutine et l'Empire Eurasiatique de la Fin"

 

 

N. Pendragon - De la Quatrième théorie politique

 

Gandharian - Antitourisme, photos d'un voyageur en Eurasie

  Laurent James - L'Eurasie comme grande synergie métahistorique

 

 

Alexandre Douguine - Cyber-intervention depuis Moscou

 

 

 

Laurent James - Lecture d'une lettre de Jean Parvulesco à Robert Steuckers

 

 

 

Robert Steuckers - L'Eurasie depuis la proto-histoire : lignes de force d'une histoire méconnue

 

 

Constantin Parvulesco - La métapolitique eurasiste de Jean Parvulesco : de la prophétie à l'héritage

 

 

Roberts Steuckers - Question/Réponse

 

 

Laurent James - interlude

 

 

 

Allocution de son Altesse Royale Stanislas Ier , Roi eurasien du Royaume littéraire d'Araucanie et de Patagonie

 

 

 

 

mercredi, 05 novembre 2014

Het Eurazisme van Aleksandr Doegin

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Woensdag 12 november 2014, 19 uur!

El futuro de una alianza Beijing-Moscú-Berlín

por Pepe Escobar

Ex: http://paginatransversal.wordpress.com 

Introducción de Tomdispatch:

Nuevas rutas de la seda y un siglo euroasiatico alternativo

Durante la II Guerra de Iraq (2003-2011), solía yo imaginar que los líderes chinos se reunían semanalmente en las calles de la Ciudad Prohibida, cantando y bailando para celebrar la estupidez americana. Año tras año, cuando Estados Unidos hubiera podido enfrentarse a una China en ascenso, como les pedía el cuerpo a los líderes yanquis desde hacía años, el país se encontraba completamente distraído por la desastrosa invasión y ocupación de Iraq. No puedo dejar de pensar que, en unos momentos en que una campaña acelerada de bombardeos en Iraq y ahora Siria, con las botas de 1.600 militares cada vez más sobre el terreno y otras que parece que están por llegar, con una III Guerra de Iraq (2014 – fecha límite desconocida) los líderes chinos se están regocijando una vez más. A pesar de todo lo que se ha hablado en los últimos años acerca de “pivote asiático” militar del gobierno de Obama, no puede caber duda de que esta reciente campaña en Oriente Próximo va a poner piedras en el planeado engranaje de “contención” en el Pacífico.

Mientras tanto, el estado de ánimo de China ha cambiado, claramente. Como escribió Orville Schell recientemente después de una polémica visita a Beijing del viejo presidente Jimmy Carter (90 años), quien hace más de 30 años patrocinó un acercamiento a gran escala de Estados Unidos con la nueva versión capitalista de la China comunista :

“En pocas palabras, lo que solía ser conocido como ‘Occidente’ ahora se encuentra enfrentado a una posición cada vez más intrincada en la que el equilibrio de poder está cambiando, un hecho que pocos se han tomado la molestia de reconocer y mucho menos de tener en cuenta en las nuevas formulaciones de acercamiento a China. Seguimos teniendo nostalgia de aquellos tiempos pintorescos en que los líderes chinos seguían la consigna de Deng [Xiaoping] a su pueblo: “Esconder nuestras capacidades y esperar nuestro momento” (taoguang yanghui). Lo que quería decir con esta expresión (chengyu) no era que China tuviera que seguir eternamente contenida sino que el momento de manifestarse aún no había llegado. Ahora que es más fuerte, en cambio, sus líderes parecen creer que su momento ha llegado por fin y que ya no están ni siquiera dispuestos a ajustarse a la reconfortante idea de un “ascenso pacífico” (heping jueqi)”.

Por el momento, por supuesto, los chinos tienen sus propios problemas internos, que van desde una economía con tendencia a la creación de burbujas, a un movimiento separatista islámico en el interior de la provincia de Xinjiang y al reciente movimiento Occupy que está levantando olas en el moderno centro financiero asiático de Hong Kong. Sin embargo, si uno llega a Beijing el mundo parece un lugar diferente. Pepe Escobar, trotamundos peripatético de TomDispatch en el continente euroasiático, que él llama Pipelineistan, ha hecho justamente eso. Ha visitado también lugares situados a lo largo de las futuras “nuevas rutas de la seda” que China quiere establecer siguiendo el camino a Europa occidental. Escobar ofrece una visión de un mundo euroasiático diferente a la que reflejan los boletines de noticias de este país. Si usted desea entender el planeta en el que en realidad puede encontrarse viviendo en un futuro próximo, no podría ser más significativo asimilar dicha visión.

*** *** ***

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¿Pueden China y Rusia echar a Washington a empujones de Eurasia?

El futuro de una alianza Beijing-Moscú-Berlín

Un fantasma recorre el rápidamente envejecido “Nuevo Siglo Americano”: la posibilidad de una futura alianza comercial estratégica Beijing-Moscú-Berlín. Llamémosla BMB.

Su probabilidad está siendo analizada muy en serio en las más altas esferas de Beijing y Moscú, y observada con interés en Berlín, Nueva Delhi y Teherán. Pero no se les ocurra mencionarla dentro del circuito político –el Beltway– de Washington o en la sede de la OTAN en Bruselas. En estos lugares, la estrella del espectáculo de hoy y mañana es el nuevo Osama bin Laden: el Califa Ibrahim, alias Abu Bakr al-Baghdadi, el escurridizo y autoproclamado profeta y decapitador, jefe de un mini estado y un movimiento que ya nos ha deparado un festín de siglas –ISIS/ISIL/IS– a mayor gloria de la histeria reinante en Washington y otros lugares.

Sin embargo, al margen de cómo Washington nos depara con asiduidad nuevos remix de la Guerra Global contra el Terror, las placas tectónicas de la geopolítica euroasiática continúan en movimiento, y no van a dejar de hacerlo porque las elites estadounidenses se nieguen a aceptar que su históricamente breve “momento unipolar” está de capa caída. A ellos, el cierre de la era del “full spectrum dominance” (dominio de espectro completo), como el Pentágono le gusta llamarlo, les resulta inconcebible. Después de todo, la necesidad de que el país “indispensable” controle todo el espacio –militar, económico, cultural, cibernético y exterior– es poco menos que un dogma religioso. A los misioneros “excepcionalistas” no les va la igualdad. A lo sumo, aceptan “coaliciones de voluntarios” como la que amontona a “más de 40 países” para luchar contra ISIS/ISIL/IS, países que o bien aplauden (y maquinan) entre bambalinas o envían algún que otro avión a Iraq o Siria.

La OTAN, que a diferencia de parte de sus miembros no combatirá oficialmente en Jihadistan, sigue siendo un montaje vertical controlado desde la cúspide por Washington. Nunca se ha molestado en aceptar plenamente a la Unión Europea o permitir que Rusia se “sintiera” europea. En cuanto al Califa, se trata únicamente de una distracción menor. Un cínico postmoderno podría incluso afirmar que se trata de un emisario enviado al terreno de juego mundial por China y Rusia para que la hiperpotencia perdiera de vista la pelota.

Divide y aísla  

Así pues, ¿cómo se aplica la “dominación de espectro completo” cuando dos potencias competidoras reales –Rusia y China– comienzan a hacer sentir su presencia? El enfoque de Washington hacia cada una de ellas –en Ucrania y en los mares de Asia– podría considerarse como de dividir y aislar.

Con el fin de mantener el Océano Pacífico como un clásico “lago americano”, el gobierno de Obama ha estado “pivotando” de vuelta a Asia desde hace varios años. Esto ha implicado sólo movimientos militares modestos, sino también un poco modesto intento de enfrentar el nacionalismo chino contra la variante homóloga japonesa, mientras reforzaba sus alianzas y relaciones en todo el Sudeste asiático, con un enfoque en las disputas energéticas del Mar del Sur de China. Al tiempo que movía sus peones para cerrar un acuerdo comercial futuro, la Asociación Trans-Pacífico (TPP).

En las fronteras occidentales de Rusia, el gobierno de Obama (coreado por sus cheerleaders locales, Polonia y los países bálticos) ha avivado las brasas de un cambio de régimen en Kiev hasta hacerlas llamear y crear lo que Vladimir Putin y los líderes de Rusia perciben como una amenaza existencial para Moscú. A diferencia de EE.UU., cuya esfera de influencia (y sus bases militares) son globales, se trataba de que Rusia no tuviera ninguna influencia significativa en lo que fue su bloque cercano, el cual, en lo que respecta a Kiev, no es para la mayoría de los rusos en absoluto “extranjero”.

Para Moscú, pareciera que Washington y sus aliados de la OTAN estuvieran cada vez más interesados ​​en imponer un nuevo telón de acero a su país desde el Báltico hasta el Mar Negro, con Ucrania simplemente como punta de lanza. En términos de la alianza BMB, el nuevo telón se concibe como un intento de aislar a Rusia e imponer una nueva barrera a sus relaciones con Alemania. El objetivo final sería dividir Eurasia e impedir nuevos avances hacia una integración comercial futura a través de un proceso no controlado por Washington.

Desde el punto de vista de Beijing, la crisis de Ucrania ha sido un acontecimiento en el que Washington ha cruzado todas las líneas rojas imaginables para acosar y aislar a Rusia. Para sus líderes, pareciera un intento concertado de desestabilizar la región de manera favorable a los intereses estadounidenses, con el apoyo de toda la amplia gama de élites de Washington, desde los neoconservadores y “liberales” de la Guerra Fría hasta los intervencionistas humanitarios del tipo Susan Rice y Samantha Power. Por supuesto, si usted ha estado siguiendo la crisis de Ucrania desde Washington, esta perspectiva le parecerá tan extraña como la de un marciano cualquiera. Pero el mundo se ve de manera diferente desde el corazón de Eurasia, en particular a partir de una China en ascenso con su “sueño chino” (Zhongguo meng) de nuevo cuño.

 

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Según el presidente Xi Jinping, ese sueño incluiría una futura red de nuevas rutas de la seda, organizada por China, que crearía el equivalente de un Trans-Asian Express para el comercio euroasiático. Así que cuando Beijing, por ejemplo, siente la presión de Washington y Tokio en el frente marítimo, parte de su respuesta es un avance de tipo comercial en dos frentes a través de la masa terrestre de Eurasia, uno de ellos a través de Siberia y el otro a través de los “stans” de Asia Central.

En este sentido, aun que usted no lo sepa –si sólo sigue los medios estadounidenses o los “debates” en Washington– estamos entrando potencialmente en un nuevo mundo. No hace mucho tiempo, los líderes de Beijing coqueteaban con la idea de redefinir su juego geopolítico-económico codo con codo con EE.UU., mientras que el Moscú de Putin daba a entender la posibilidad de algún día unirse a la OTAN. Ya se acabó. Hoy en día, la parte de Occidente en que ambos están interesados ​​en un posible futuro es una Alemania ya no dominada por el poderío estadounidense y los deseos de Washington.

De hecho, Moscú lleva ya no menos de medio siglo de diálogo estratégico con Berlín que hoy día incluye la cooperación industrial y la interdependencia energética. En muchas partes del Sur global ya se está al corriente de ello, y Alemania está empezando a ser considerada como “la sexta potencia BRICS” (después de Brasil, Rusia, India, China y Sudáfrica).

En medio de unas crisis mundiales que van desde Siria a Ucrania, los intereses geoestratégicos de Berlín parecen ir divergiendo lentamente de los de Washington. Los industriales alemanes, en particular, parecen ansiosos por continuar con unos tratos comerciales con Rusia y China que no tienen límite. Estos podrían colocar al país en camino hacia un poderío mundial sin los límites de las fronteras de la UE y, a largo plazo, indicar el final de la era en la que Alemania, por mucha sutileza que se quisiera, era esencialmente un satélite estadounidense.

Será un camino largo y sinuoso. El Bundestag, el parlamento de Alemania, sigue dependiente de una agenda atlantista fuerte y de una obediencia preventiva a Washington. Y siguen habiendo decenas de miles de soldados estadounidenses en suelo alemán . Sin embargo, por primera vez, la canciller alemana Angela Merkel ha dudado a la hora de imponer sanciones más estrictas ​​a Rusia, por cuanto no menos de 300.000 puestos de trabajo alemanes dependen de las relaciones con este país. Los líderes industriales y el establishment financiero ya han dado la voz de alarma, temiendo que dichas sanciones sean totalmente contraproducentes.

El banquete de la Ruta de la Seda  china

El nuevo juego de poder geopolítico de China en Eurasia tiene pocos paralelos en la historia moderna. Los días en que el “pequeño timonel” Deng Xiaoping insistía en que el país debía mantener un perfil bajo en la escena mundial han desaparecido. Por supuesto, hay desacuerdos y estrategias en conflicto cuando se trata de la gestión de los puntos calientes del país: Taiwán, Hong Kong, Tíbet, Xinjiang, el Mar del Sur de China, los competidores India y Japón, y los aliados problemáticos como Corea del Norte y Pakistán. Y el descontento popular en algunas “periferias” dominadas por Beijing está creciendo hasta niveles incendiarios.

 

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La prioridad número uno del país sigue siendo llevar a cabo las reformas económicas del presidente Xi, al tiempo que se aumenta la “transparencia” y se lucha contra la corrupción en el seno del Partido Comunista gobernante. En un distante segundo lugar está el problema de cómo protegerse progresivamente contra los planes de “pivote” del Pentágono en la región –mediante el aumento del poderío militar de una flota de alta mar, submarinos nucleares y una fuerza aérea tecnológicamente avanzada– sin llegar a ser tan asertivo como para hacer entrar en pánico al establishment de Washington y su temida “amenaza amarilla”.

Mientras tanto, con una Marina estadounidense capaz de controlar las vías de comunicación globales marítimas en un futuro previsible, la planificación de las citadas rutas de la seda a través de Eurasia prosigue a buen ritmo. El resultado final podría ser un triunfo de las infraestructura integradas –carreteras, trenes de alta velocidad, oleoductos, puertos– que conectaría China a Europa Occidental y el Mediterráneo, el viejo Mare Nostrum imperial, en todas las formas imaginables.

En un viaje inverso al de Marco Polo, remixed para un mundo con Google, uno de los ramales claves de la Ruta de la Seda irá desde la antigua capital imperial Xi’an a Urumqi, en la provincia de Xinjiang, y luego, a través de Asia central, Irán, Iraq y la Anatolia turca, hasta terminar en Venecia. Otro será una ruta marítima de la seda a partir de la provincia de Fujian, pasando por el estrecho de Malaca, el Océano Índico, Nairobi, en Kenia, para finalmente continuar hasta el Mediterráneo a través del Canal de Suez. Tomados en conjunto, es a lo que Beijing se refiere como el Cinturón Económico de la Ruta de la Seda.

La estrategia de China es crear una red de interconexiones entre no menos de cinco zonas clave: Rusia (puente clave entre Asia y Europa), los “stans” de Asia Central, Asia del sureste (con importantes funciones para Irán, Iraq, Siria, Arabia Saudita y Turquía), el Cáucaso y Europa del Este (entre otros Belarús, Moldavia y, en función de su estabilidad, Ucrania). Y no se olviden de Afganistán, Pakistán y la India, en lo que podría ser considerado como una ruta de la seda plus.

Esta ruta plus conectaría el corredor económico Bangladesh-China-India-Myanmar con el corredor económico China-Pakistán, y podría ofrecer a Beijing un acceso privilegiado al Océano Índico. Una vez más, un paquete total –carreteras, trenes de alta velocidad, oleoductos y redes de fibra óptica– uniría la región con China.

 

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Xi en persona situó la conexión entre India y China como parte de un bien definido conjunto de imágenes en un artículo de fondo que publicó en el periódico The Hindu poco antes de su reciente visita a Nueva Delhi. “La combinación de la ‘fábrica del mundo’ y la ‘oficina administrativa del mundo’”, escribió, “dará como resultado la base productiva más competitiva y el mercado de consumo más atractivo”.

El núcleo central de la elaborada planificación china para el futuro euroasiático es Urumqi, capital de la provincia de Xinjiang y sede de la mayor feria comercial de Asia Central, la Feria de China-Eurasia. Desde el año 2000, una de las mayores prioridades de Beijing ha sido la urbanización de esta provincia, en gran parte desierta pero rica en petróleo, e industrializarla a toda costa. Lo que implica, en opinión de Beijing, la homologación de la región con China, con el corolario de la supresión de cualquier disidencia de la etnia uigur. Li Yazhou, general del Ejército Popular de Liberación describió Asia Central como “el más sutil pedazo de pastel donado por el cielo a la China moderna”.

La mayor parte de la visión de China de una nueva Eurasia conectada con Beijing por todo tipo de transporte y comunicación se detallaba claramente en el documento “Marching Westwards: The Rebalancing of China’s Geostrategy” (“Marchando hacia el oeste: el reequilibrio de la geoestrategia china”) un estudio de referencia publicado en 2012 por el académico Wang Jisi, del Centro de Estudios Internacionales y Estratégicos de la Universidad de Beijing. Como respuesta a este futuro entramado de conexiones de eurasiáticas, el mayor logro del gobierno de Obama ha sido a una versión de la contención naval desde el Océano Índico hasta el Mar del Sur de China, al tiempo que un agudizamiento de los conflictos y las alianzas estratégicas alrededor de China, de Japón a la India. (La OTAN se queda, por supuesto, con la tarea de contener a Rusia en Europa del Este).

Contra las rutas de la seda, telón de acero  

El “acuerdo de gas del siglo”, de 400.000 millones dólares, firmado por Putin y el presidente chino en mayo pasado, sentó las bases para la construcción del gasoducto Power of Siberia ya en construcción en Yakutsk, que hará llegar un diluvio de gas natural ruso al mercado chino. Está claro que sólo representa el comienzo de una alianza energética turboasistida entre los dos países. Entre tanto, los empresarios e industriales alemanes ya se han percatado de una nueva realidad: del mismo modo que el mercado final de los productos made-in-China que circularán por las futuras nuevas rutas de la seda será Europa, una circulación en sentido inverso es asimismo evidente. En un posible futuro comercial, China está destinada a convertirse en el principal socio comercial de Alemania para 2018, por delante tanto de EE.UU. como de Francia.

 

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Un posible obstáculo a esta evolución, grato a los ojos de Washington, es una Guerra Fría 2.0, que ya está desgarrando no la OTAN sino la Unión Europea. En la UE de este momento, el campo antirruso incluye Gran Bretaña, Suecia, Polonia, Rumanía y los países bálticos. Por otra parte, Italia y Hungría, pueden considerarse en el campo prorruso, mientras que una imprevisible Alemania sigue siendo la clave para saber si el futuro va a consistir en un nuevo telón de acero o en una nueva apertura al Este. Para ello, Ucrania sigue siendo la clave. Si se la consigue finlandizar con éxito (con una autonomía significativa para sus regiones), como ha propuesto Moscú –sugerencia que Washington rechaza de plano–, la vía hacia el Este seguirá abierta. Si no, la propuesta de una BMB tendrá un futuro incierto.

Cabe señalar que hay también otra visión del futuro económico euroasiático que asoma en el horizonte. Washington intenta imponer a Europa un Tratado Transatlántico de Comercio e Inversión (TTIP) y un tratado Transpacífico de Asociación similar (TPP) a Asia. Ambos favorecen a las corporaciones americanas globales y su objetivo evidente es el de impedir el ascenso de las economías de los países BRICS y el surgimiento de otros mercados emergentes, a la vez que da solidez a la hegemonía económica global estadounidense.

Dos hechos flagrantes, debidamente registrados en Moscú, Beijing y Berlín, indican cuál es el núcleo duro geopolítico detrás de estos dos pactos “comerciales”. El TPP excluye a China y el TTIP excluye a Rusia. Es decir, ambos representan las líneas de fuerza, apenas disimuladas, de una futura guerra comercial y monetaria. En mis propios viajes recientes, he oído una y otra vez de boca de productores agrícolas de calidad en España, Italia, y Francia que el TTIP es nada más que una versión económica de la OTAN, la alianza militar que el presidente chino Xi Jinping, llama, quizás un tanto ilusoriamente, una “estructura obsoleta”.

Hay una resistencia significativa al TTIP en muchos países de la UE (especialmente en los del Club Med de la Europa meridional), del mismo modo que la hay contra el TPP entre las naciones de Asia (especialmente Japón y Malasia). Es esto es lo que da a chinos y rusos esperanzas para sus nuevas rutas de la seda y para un nuevo tipo de comercio a través del corazón de Eurasia respaldado por una Unión Euroasiática apoyada en Rusia. A esta situación están prestando mucha atención figuras clave en los círculos empresariales e industriales alemanes para los que la relación con Rusia sigue siendo esencial.

 

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Después de todo, Berlín no ha mostrado una excesiva preocupación por el resto de una UE sumida en crisis (tres recesiones en cinco años). A través de una troika universalmente despreciada –Banco Central Europeo, Fondo Monetario Internacional y Comisión Europea– Berlín está ya a todos los efectos prácticos, al timón de Europa, prosperando y mirando al Este.

Hace tres meses, la canciller alemana Angela Merkel visitó Beijing. Apenas aparecieron en la prensa las conversaciones sobre la aceleración de un proyecto potencialmente revolucionario: una conexión ininterrumpida de ferrocarril de alta velocidad entre Beijing y Berlín. Su construcción será un imán para el transporte y el comercio entre decenas de países a lo largo de su ruta, de Asia a Europa. Pasando a través de Moscú, podría convertirse en el integrador definitivo de la Ruta de la Seda y quizás la pesadilla definitiva para Washington.

“Perder” Rusia

En medio de una gran atención de los medios, la reciente cumbre de la OTAN en Gales ha producido sólo una modesta “fuerza de reacción rápida” para su despliegue con vistas a cualquier situación futura tipo Ucrania. Mientras tanto, la creciente Organización de Cooperación de Shanghái (OCS), una posible contraparte asiática de la OTAN, se reunió en Duchanbé (Tayikistán). En Washington y Europa Occidental nadie pareció dar importancia al encuentro. Deberían haberlo hecho. Allí, China, Rusia y los cuatro “stans” de Asia Central acordaron incorporar a un impresionante conjunto de nuevos miembros: India, Pakistán e Irán. Las implicaciones pueden ser de largo alcance. Después de todo, India, con su primer ministro Narendra Modi, está ahora contemplando su propia interpretación de la Ruta de la Seda. Detrás de ella se encuentra la posibilidad de un acercamiento económico de “Chindia”, que podría cambiar el mapa geopolítico de Eurasia. Al mismo tiempo, Irán está también incorporándose al tejido de la red “Chindia”.

De este modo, lenta pero segura, la OCS se perfila como la principal organización internacional en Asia. Ya es evidente que uno de sus objetivos fundamental a largo plazo será el de dejar de operar en dólares, mientras avanza en el uso del petroyuan y el petrorrublo en el comercio de la energía. Y EE.UU., por supuesto, nunca será bien recibido en la Organización.

Pero todo esto es hablar del futuro. En la actualidad, el Kremlin sigue enviando señales de que quiere empezar a hablar de nuevo con Washington, mientras que Beijing nunca ha querido dejar de hacerlo. Sin embargo, la administración Obama sigue miope, enfrascada en su propia versión de un juego de suma cero, confiando en su fuerza tecnológica y militar para mantener una posición ventajosa en Eurasia. Beijing, sin embargo, tiene acceso a los mercados y un montón de dinero en efectivo, mientras que Moscú tiene un montón de energía. Una cooperación triangular entre Washington, Beijing y Moscú sería sin duda –como dirían los chinos– un juego en el que todos saldrían ganando… pero no contengan la respiración por el momento.

 

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En cambio, es de esperar que China y Rusia profundicen su asociación estratégica, al tiempo que atraen a otras potencias regionales euroasiáticas. Beijing ha apostado el resto a que el enfrentamiento entre EEUU/OTAN y Rusia por Ucrania hará que Vladimir Putin gire hacia el Este. Al mismo tiempo, Moscú está calibrando cuidadosamente lo que su presente reorientación hacia un gigante económico así puede significar. Algún día, es posible que algunas voces de cordura en Washington se pregunten en voz alta cómo fue que EE.UU. “perdió” Rusia en beneficio de China.

Mientras tanto, podemos pensar en China como un imán en el nuevo orden mundial de un futuro siglo euroasiático. El mismo proceso de integración que realiza Rusia, por ejemplo, parece cada vez más el de India y otras naciones de Eurasia, y, posiblemente, tarde o temprano también el de una Alemania neutral. En el juego final de un proceso así, EE.UU. podría verse progresivamente expulsado ​​de Eurasia, y el eje BMB podría aparecer como un factor de cambio de juego. Hagan sus apuestas, pronto. El resultado para el año 2025.

*Pepe Escobar es el corresponsal itinerante de Asia Times/Hong Kong, analista de RT y colaborador habitual de TomDispatch. Su nuevo libro, Empire of Chaos, se publicará en noviembre por Nimble Books. Sigalo en Facebook.

(Traducido para Rebelión por S. Seguí)

Fuente: http://www.tomdispatch.com/blog/175903/

Extraído de: Rebelión

mercredi, 29 octobre 2014

Water Pressures in Central Asia

Water Pressures in Central Asia

International Crisis Group

Ex: http://moderntokyotimes.com

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EXECUTIVE SUMMARY AND RECOMMENDATIONS

Water has long been a major cause of conflict in Central Asia. Two states – Kyrgyzstan and Tajikistan – have a surplus; the other three say they do not get their share from the region’s great rivers, the Syr Darya and Amu Darya, which slice across it from the Tien Shan, Pamir Mountains, and the Hindu Kush to the Aral Sea’s remains. Pressures are mounting, especially in Kyrgyzstan, Tajikistan and Uzbekistan. The population in Central Asia has increased by almost ten million since 2000, and limited arable land is being depleted by over-use and outdated farming methods. Extensive corruption and failing infrastructure take further toll, while climate change is likely to have long-term negative consequences. As economies become weaker and states more fragile, heightened nationalism, border disputes, and regional tensions complicate the search for a mutually acceptable solution to the region’s water needs. A new approach that addresses water and related issues through an interlocking set of individually more modest bilateral agreements instead of the chimera of a single comprehensive one is urgently needed.

The root of the problem is the disintegration of the resource-sharing system the Soviet Union imposed on the region until its collapse in 1991. Kyrgyzstan and Tajikistan provided water to Kazakhstan, Turkmenistan and Uzbekistan in summer and received Kazakh, Turkmen and Uzbek coal, gas and electricity in winter. The system had broken down by the late-1990s, and a plethora of bilateral and regional agreements and resolutions concluded in that decade failed to fix it. The concerns Crisis Group identified in 2002 – inadequate infrastructure, poor water management and outdated irrigation methods – remain unaddressed, while the security environment is bleaker.

Regional leaders seem disinclined to cooperate on any of their main problems. Suspicion is growing between the most directly affected countries, Kyrgyzstan, Tajikistan and Uzbekistan. Personal relations between Tajik President Emomali Rahmon and Uzbek President Islam Karimov have been icy for years, and Karimov and his ministers are increasingly prone to make bellicose statements. International partners, including Russia, the European Union (EU) and the U.S., say they can do little if the countries remain fixated on a narrow interpretation of national interests. Differences over upstream hydropower projects require intensive, high-level resolution. Though some localised efforts to improve water supply have worked, usually with donor aid, corruption has undermined more ambitious ones. Yet, the failure of the Kyrgyz, Tajik and Uzbek governments to modernise water-dependent sectors such as energy and agriculture increases their mutual dependence.

For all its complexity, the water issue is probably the one that offers some opportunity for solution. As a Swiss water specialist observed, “water can be a driver of conflict but it can also be a driver of peace”. It is an objective problem, and equitable distribution and a concomitant energy exchange would produce tangible benefits for all. Removal of the water factor from the more intractable problems of borders and enclaves, meanwhile, might mitigate conflicts and perhaps even help solve them. Improved water infrastructure and management projects could thus be crucial for building peace and political stability, while promoting development and economic growth.

Attempts at comprehensive regional solutions have foundered on mistrust. Kyrgyzstan, Tajikistan and Uzbekistan (and their international backers) should act now in the border areas of the Ferghana Valley to end the annual cycle of competition and conflict over water by dividing the water issue into more manageable portions – seeking gradual, step-by-step solutions along conceptual and geographical lines rather than one all-inclusive resource settlement. If Uzbekistan will not participate, Kyrgyzstan and Tajikistan should work bilaterally. Meanwhile, high-level mediation should be sought to address Uzbekistan’s objections to upstream hydropower projects.

There is no guarantee this would work, but it could give these three states an opportunity to modernise infrastructure and the management of water resources as well as train a new generation of technical specialists. The agreements would also set a modest precedent for other spheres in which cooperation is sorely needed and might help defuse tensions in the region, while improving the grim living conditions of most of its population.

RECOMMENDATIONS

To develop a modern, corruption-free, and efficient water management system in the region firewalled from other disputes between Kyrgyzstan, Tajikistan and Uzbekistan

To the governments of Kyrgyzstan, Tajikistan and Uzbekistan, the UN and the donor community, including Russia, the European Union (EU) and China:

  1. Recognise that the Syr Darya and Amu Darya rivers should be the subject of separate water-sharing agreements.
  2. Promote and mediate individual bilateral water and energy sharing agreements between Kyrgyzstan and Uzbekistan and Uzbekistan and Tajikistan, pending a comprehensive agreement on their management.

To the donor community, including Russia, the EU and China:

  1. Expand infrastructure modernisation programs:
  2. a) in urban areas regarding water meters and improved sanitation; and
  3. b) in agricultural areas regarding modern techniques such as drip irrigation.
  4. Prioritise water issues at the highest levels of engagement with the Kyrgyz, Tajik and Uzbek governments and use international and local media to publicise the need for progress.
  5. Work with the smallest units of government, or directly with local communities, to mitigate corruption; and make further funding conditional on the implementation of anti-corruption measures.
  6. Build energy sector reform, including anti-corruption measures, into financing plans for large hydropower projects.

To the governments of Kyrgyzstan, Tajikistan and Uzbekistan:

  1. Commit to resolving border demarcation problems without using water or energy as a coercive factor; facilitate cross-border cooperation between police forces and form a tripartite intra-regional council to oversee day-to-day management of water and land resources parallel to high-level border delimitation negotiations.
  2. Investigate and prosecute corruption and misuse of donor money.
  3. Embark on large-scale public education programs highlighting the extent of water wastage.
  4. Ask donors to design and implement cross-border economic development projects focusing on border and enclave issues, including the management and maintenance of shared water resources for agriculture.

Bishkek/Brussels, 11 September 2014

Europe and Central Asia Report N°233

The International Crisis Group kindly allows Modern Tokyo Times to publish their esteemed articles based on important research. Please check the website of this highly valued international organization at http://www.crisisgroup.org/

https://twitter.com/CrisisGroup International Crisis Group on twitter

http://www.crisisgroup.org/en/regions/asia/central-asia/233-water-pressures-in-central-asia.aspx

Asia, Energy Issues, Geopolitics

mardi, 21 octobre 2014

"Fondements et perspectives du royaume Eurasien" par Laurent James

 

"Fondements et perspectives du royaume Eurasien"

par Laurent James 

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lundi, 13 octobre 2014

Route de l'arctique, route de la soie et euroBRICS

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Route de l'arctique, route de la soie et euroBRICS

par Jean Paul Baquiast
 
Dans un excellent article que vient de publier Agoravox , Romaric Thomas, un jeune politologue qu'à notre grande honte nous ne connaissions pas assez, « L'arctique, une question de sécurité nationale pour la Russie », expose les nombreuses raisons pour lesquelles la Russie s'intéresse à l'arctique. Ceci est connu, mais mérite d'être clairement résumé, comme le fait cet auteur.

La Russie ne s'intéresse pas seulement à l'arctique et au pôle dans la perspective de développer les ressources considérables et très diverses que le réchauffement climatique offrira à ses territoires du Nord comme aux eaux territoriales adjacentes. Elle s'y intéresse aussi au regard des futures liaisons régulières (bientôt sans brise-glaces en été) que la « Route maritimes du Nord » lui permettra d'assurer avec l'Asie et notamment la Chine.

Enfin, en matière de défense, comme le pôle nord et les 5 pays par entourant la zone, Russie, Etats-Unis (par l'Alaska) le Canada la Norvège et le Danemark se sont vu reconnaître par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, une souveraineté sur les 200 milles marins prolongeant leurs côtes, la Russie a tout intérêt, non seulement à défendre sa propre zone économique exclusive, mais à démontrer que celle-ci, au vu d'études récentes sur la prolongation vers le pôle du plateau continental russe, serait beaucoup plus étendue que jusqu'ici admis.

Or, les Etats-Unis et le Canada voient ceci d'un très mauvais oeil. Ils feront tout leur possible, y compris par des moyens militaires, pour empêcher la Russie d'étendre ainsi son influence. C'est ainsi que l'Amérique développe de plus en plus de moyens militaires, navals, balistiques et anti-balistiques, pour menacer la Russie dans les régions polaires et sub-polaires. Celle-ci ne peut pas ne pas s'en inquiéter, et préparer des contre-mesures.

Nous avions pour notre part rappelé que dans la perspective d'une éventuelle alliance stratégique entre l'Europe et la Russie (non à exclure à terme, malgré les apparences), les pays européens, France et Allemagne notamment, auraient le plus grand intérêt à s'entendre avec la Russie pour la mise en valeur des ressources de l'océan arctique – sans exclure des moyens conjoints pour protéger des milieux naturels très fragiles. Il semble que le gouvernement russe actuel verrait avec faveur cette perspective. Les Etats-Unis s'y opposeraient par tous les moyens. Or ils disposent encore de nombreux arguments frappants pour ce faire.

La Chine

Dans un non moins bon texte dont le saker.fr vient de publier la traduction, l'essayiste Pepe Escobar vient parallèlement de rappeler en quoi pourrait consister le projet de route de la soie proposé par la Chine. Il s'agirait de deux ensembles de liaisons maritimes, terrestres, électroniques (voir notre article référencé ci-dessous) reliant la Chine avec l'Europe, en mettant en relation sur cette route les différents pays géographiquement traversés ou voisins.

Il est évident que ces pays verront initialement avec méfiance un tel projet, qui mettrait leurs économies déjà fragiles en concurrence directe avec le milliard de producteurs chinois ne se satisfaisant plus d'étendre leur influence aux économies européennes et africaines qu'ils ont déjà pénétrées. Mais la Chine, et pourquoi pas ne pas retenir cette vue optimiste, fait valoir que les avantages seraient dans les deux sens, les pays terminaux et les pays traversés pouvant eux aussi profiter des échanges réciproques facilités par ces deux routes de la soie.

Pépé Escobar va plus loin. Comme l'indique le titre de son article, il voit s'esquisser pour les années (ou décennies à venir) un véritable nouvel axe de puissance, associant non seulement la Chine et la Russie, mais l'Allemagne. Celle-ci, une des premières nations industrielles et un peu à l'étroit dans le cadre européen, pourrait vraiment s'affirmer comme une authentique puissance politique mondiale, à l'instar de la Russie, la Chine mais aussi les Etats-Unis. Les cendres de Bismark et de Adolf Hitler, où qu'elles soient, devraient ainsi en tressaillir d'aise. Pepe Escobar ne l'écrit pas clairement mais il le laisse entendre. Pour lui, les autres nations européennes, dont la France, n'auraient pas leur mot à dire et rien à faire dans cette perspective, vu leur insignifiance économique et leur soumission transatlantique à Washington.

EuroBRICS

Nous pensons que les deux articles présentés ici oublient un point essentiel, au moins aux yeux de ceux qui comme nous ici défendent le concept d'EuroBRICS. Il s'agit de la coopération stratégique pouvant s'établir, dans le cadre d'une telle alliance, entre les pays européens, dotés de nombreuses ressources notamment scientifiques et technologiques, et ceux du BRICS, sans exclure évidemment l'Inde.

D'ores et déjà, ces pays européens, dont évidemment la France, devraient s'efforcer de ne pas se faire exclure des grands projets du BRICS et de l'OCS, désormais décidés. Il s'agira non seulement de mettre en place un nouveau Fonds monétaire, une nouvelle banque mondiale, une monnaie harmonisée voire commune entre ces pays, mais de lancer de grands programmes de développement et de lutte contre les destructions de l'environnement. De tels programmes, en cas de succès, intéresseront, rappelons le, approximativement les 3/5 de la population mondiale. L'avenir de l'Europe, comme nous l'avons souvent rappelé, reposera sur sa volonté de participer à un tel ensemble, même si cette démarche impose de résoudre un grand nombre de difficultés politiques et économiques.

Dans l'immédiat, la plus grande des difficultés sera pour l'Europe d'échapper à l'emprise que les Etats-unis ont sur elle depuis la dernière guerre mondiale, et qu'ils cherchent à rendre définitive par les traités de libre-échange transatlantique et transpacifique. Mais on peut espérer que les difficultés s'accumulant pour une Union européenne trop soumise à Washington, des intérêts européens plus réalistes, et pas seulement allemands, réussiront dans un avenir pas trop lointain à se faire entendre.

Références

L'arctique, une question de « sécurité nationale » pour la Russie, de Romaric Thomas, 07/10/2014
http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/l-arctique-une-question-de-157729

La future Route de la soie envisagée par la Chine,  de Jean Paul Baquiast 10/05/2014 http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1329&r_id=

Alliance Pékin-Moscou-Berlin. Extirper Washington de l'Eurasie? de Pepe Escobar, 09/10/2014
http://www.vineyardsaker.fr/2014/10/09/loeil-itinerant-alliance-beijing-moscou-berlin-chine-russie-peuvent-extirper-washington-leurasie/

BRICS + SCO: un défi à la domination américaine? de Jean Paul Baquiast 11/08/2014
http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1448&r_id=

Wikipedia. Revendications territoriales en Arctique http://fr.wikipedia.org/wiki/Revendications_territoriales_en_Arctique

Le conflit Euro-Russe vu comme le résultat d’un chevauchement entre deux unions économiques

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Le conflit Euro-Russe vu comme le résultat d’un chevauchement entre deux unions économiques : leçons à tirer pour un monde multipolaire naissant

Ex: http://www.leap2020.net

Le projet Euro-BRICS croit fermement au fait que l’émergence d’un monde multipolaire est une tendance forte qu’il faut accueillir et encadrer plutôt que craindre et endiguer. En effet, LEAP base son travail sur une méthode de prospective originale – l’Anticipation Politique[1]- qui se donne pour mission de contribuer à détecter les tendances irrésistibles, d’identifier les chemins porteurs d’avenir parmi ces tendances et de définir les stratégies d’adaptation permettant aux entités de trouver leur voie vers ces avenirs positifs. L’un de nos prédicats est que tenter de contenir les tendances lourdes aboutir à la violence, qu’elle soit économique sociale ou militaire.

LEAP, et que le projet Euro-Brics, considère la crise Ukrainienne comme un événement briseur de tendance lourde, perturbant l’émergence pacifique et organisée d’un monde multipolaire, et entraînant brusquement l’Europe et la planète vers une polarisation conflictuelle entre Ouest et Est, entre anciens leaders mondiaux et puissances émergentes, et à terme entre Etats-Unis et Chine.

C’est pour cette raison que le LEAP et le projet Euro-BRICS tentent de comprendre les dynamiques à l’?uvre derrière cette crise. Ainsi, une première discussion en ligne a eu lieu en Mai, réunissant les universitaires du réseau Euro-BRICS et donnant lieu à deux résultats :

  • la publication d’une déclaration conjointe visant à promouvoir les idées 1/ d’un partage de responsabilités de la crise entre l’Europe et la Russie, 2/ comme condition préalable à la reprise de négociations constructives entre  Européens et  Russes, et entre pro-Européens et pro-russes en Ukraine, 3/ en utilisant le cadre Euro-BRICS comme facilitateur diplomatique (cf  les trois propositions stratégiques de notre déclaration conjointe)
  • la compréhension du conflit Euro-Russe sur l’Ukraine comme résultat d’un chevauchement entre deux unions économiques, et la nécessité d’analyser plus en détail cette caractéristique de la crise Ukrainienne.

La crise Ukrainienne est née d’une gestion catastrophique des négociations d’accords de  libre-échange entre l’Ukraine et la Russie d’une part, et entre l’Ukraine et l’Europe d’autre part. La double-offre simultanée s’est transformée en une prise de décision impossible pour l’Ukraine, et cela pour deux raisons :

  • Le marché proposé par l’Europe était exclusif : si l’Ukraine signait avec l’Europe, elle n’était plus autorisée à signer avec la Russie[2]
  • En novembre 2013, l’Europe rejetait la proposition de l’Ukraine de procéder à des négociations trilatérales (Ukraine, Europe, Russie) dans le but de rendre les deux offres compatibles et bénéfiques à toutes les parties en jeu[3].

Ce comportement de la part de l’Europe met en exergue un trait caractéristique de cette crise : il s’agit d’un conflit territorial entre deux voisins. D’un côté, l’Union Européenne, une zone de libre-échange engagée dans un processus critiquable d’extension sans fin[4]. De l’autre côté, le projet Union Economique Eurasiatique de la Russie, entrant subitement en compétition avec le précédent.

D’autant plus que l’offre russe est devenue un vrai compétiteur comme en témoignent les pays candidats qui ont finalement préféré le deal Russe au deal Européen. En effet, au cours des mois précédant l’éruption de la crise Ukrainienne, d’autres pays auxquels avaient été proposés les deux marchés, ont choisi l’option russe, au plus grand désarroi de l’Europe : l’Arménie en particulier[5], mais aussi la Biélorussie en plein milieu de la crise Ukrainienne[6].

Le fait est que l’Union  Economique Eurasiatique de la Russie est construite sur la base, non seulement de l’ex-URSS, mais aussi de la Communauté des Etats Indépendants librement co-créée après l’effondrement de l’Union Soviétique. La tentative de l’Europe de détourner l’Ukraine, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie et la Moldavie de cette évolution constitue inévitablement une source de conflit dans lesquels les droits de trois parties au moins sont remis en question :

  • Le droit des Européens à l’auto-détermination en ce qui concerne les limites de leur union est ignoré (il a été régulièrement demandé par une grande partie des acteurs civils et politiques  que tout nouvel élargissement soit soumis à un référendum)
  • Le droit des Ukrainiens à rester unis et indépendants dans le cadre de partenariats équilibrés et synergiques entre ses deux voisins (étant donnée la double nature de l’Ukraine, l’accord exclusif vers lequel l’Europe poussait l’Ukraine ne pouvait aboutir qu’à la division ou à la guerre civile)
  • Le droit des Russes à créer les conditions de leur sécurité et de leur prospérité par l’intégration à-l’européenne de leur voisinage géographique, historique et culturel.

Il ne s’agit bien sûr pas d’être naïf. Il est légitime que le développement d’une union économique centrée sur la Russe suscite quelques inquiétudes du côté de ses voisins frontaliers – que ce soit l’Europe ou la Chine d’ailleurs. Mais le droit de la Russie à s’organiser suivant ces logiques doit être affirmé pour permettre à cette évolution d’être encadrée par des négociations constructives afin d’obtenir une configuration mutuellement bénéfique et porteuse de paix.

Le monde multipolaire est constitué de telles régions  et le défi consiste à admettre le droit de ces régions à exister et à construire les outils de leur pérennité, mais aussi la nécessaire invention du cadre global susceptible de garantir la coexistence pacifique de ces régions. De grandes questions se posent : Comment définir les limites de chaque région ? Ces limites devraient-elles prendre en compte les zones « tampons » (comme l’Ukraine aurait dû le rester), dans quels cas et pourquoi ? Comment organiser les relations pacifiques trans-régionales ? Les accords de libre-échange ne devraient-ils pas être réservés aux relations économiques intra-régionales ? A quoi peuvent servir les organisations de l’ancien système international  (par exemple l’OMC qui a réellement besoin de reconsidérer les principes du système économique mondial du 21ème siècle[7] ) ?…

La crise Ukrainienne, si elle n’est pas correctement résolue, est de bien mauvais augure pour l’avenir des interactions entre unions régionales. Qu’en sera-t-il du chevauchement potentiel entre Mercosur et ALENA ? ALENA et Union Européenne ? etc… Le monde se dirige-t-il aveuglement vers une situation de type pré-1ère guerre mondiale ? Ou l’Europe et la Russie, accompagnées des acteurs principaux du monde multipolaire émergent – les BRICS, peuvent-elles tirer parti  de leur expérience historique douloureuse et commune afin d’éviter un nouveau scénario tragique ?

Il est dommage que la fondatrice de la méthode d’intégration régionale, l’Europe, n’ait pas  été capable d’anticiper, ou au moins de gérer de façon rationnelle, cette inévitable confrontation. Aujourd’hui, il appartient à l’Europe et aux BRICS de réfléchir ensemble aux principes et aux outils pouvant engendrer un monde multipolaire harmonieusement articulé, respectant le droit de chaque région à son union économique (et politique). Les BRICS, de leur côté, peuvent évidemment travailler sur ces  thèmes, mais tant qu’au moins la moitié du monde occidental (Europe) sera en désaccord avec les nouveaux principes et règles qu’ils mettront en place, les tensions augmenteront entre les anciennes et les nouvelles puissances mondiales.

Voilà  quelques unes des questions dont nous souhaitons débattre au cours de notre prochaine réunion Euro-BRICS en ligne.

 
Notes

[1]
                  Le concept d’Anticipation Politique a été inventé par Franck Biancheri, notre très regretté directeur des études, élaboré gdans le cadre d’un partenariat avec la Sorbonne en 2009, formalisé par Marie-Hélène Caillol dans son Manuel d’Anticipation Politique, pour être désormais enseigné par la  FEFAP

[2]
                 « De nombreux décideurs estiment que l’UE doit redoubler d’efforts pour coopérer avec la Russie dans la région au lieu de proposer aux pays du Partenariat oriental des accords commerciaux mutuellement exclusifs qui créent un sentiment de rivalité entre Bruxelles et Moscou ». Source : Council on Foreign Relations, 14/03/2014

[3]
                  « Le 21 novembre 2013,… un décret du gouvernement ukrainien a suspendu les préparations à la signature de l’accord d’association; à la place, il proposait de créer un comité commercial tripartite entre l’Ukraine, l’UE et le Russie qui résoudrait les questions commerciales entre les différentes parties. Le Premier Ministre Mykola Azarov a publié ce décret pour “garantir la sécurité nationale de l’Ukraine” et en tenant compte des possible ramifications commerciales avec la Russie (et d’autres pays de la CEI) si l’accord était signé au Sommet de Vilnius des 28-29 novembre… L’UE a rejeté les négociations trilatérales et a demandé à Yanoukovitch de s’engager à signer l’Accord d’Association, ce qu’il a alors refusé ». Source : Ukraine-European Union Association Agreement, Wikipedia

[4]
                   L’élargissement aux pays d’Europe orientale dans la foulée de la chute du Mur de Berlin était légitime mais a été mené trop vite et trop loin. Il a nuit à la fois au processus d’intégration politique de l’UE (révélé par l’extrème faiblesse de l’Europe dans la gestion des conséquences de la crise actuelle) et à la bonne intégration des pays d’Europe orientale (révélé par les taux de participation affligeants de ces pays aux dernières élections euopéennes). Suite à l’extension accélérée aux pays de l’ex-URSS dans les années 90, la perspective d’un élargissement déraisonnable (vers l’Ukraine et la Turquie en particulier) a contribué au rejet par les français et les néerlandais du Traité constitutionnel en 2005. Le message a été entendu à l’époque et tout processus d’élargissement stoppé… Mais seulement pour quelques temps : en effet, les accords de libre-écxhange négociés avec l’Ukraine et autres, par une Europe qui se résume finalement elle-même à une zone de libre-échange, correspondent en fait à de l’élargissement caché.

[5]
                  Source : EUObserver, 04/09/2013

[6]
                  Source : Wall Street Journal, 29/05/2014… dans lequel le traitement de l’information est particulièrement révélateur.

[7]
                   Surtout depuis que l’Inde a mis son veto à l’Accord sur la facilitation des échanges mondiaux, ce qui a mis fin au processus de globalisation tel que nous le connaissions. Source : The Guardian, 22/08/2014

 

 

samedi, 11 octobre 2014

LA RUSSIA PONTE TRA EUROPA E ASIA

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“RUSSIAN EURASIATISM”

LA RUSSIA PONTE TRA EUROPA E ASIA

Luca Siniscalco

Ex: http://news.russia.it

Una analisi del nostro collaboratore Luca Siniscalco del complesso fenomeno culturale dell'Eurasiatismo, una delle correnti che ha attraversato la storia recente della Russia superando le barriere crono-ideologiche poste dal 1917 e dal 1989 

Per comprendere la Russia contemporanea è necessario affrontare le componenti principali del dibattito culturale, politico e ideologico che attraversa il Paese, senza trascurare le correnti minoritarie sotto un profilo esclusivamente elettorale. E questo non soltanto in virtù di una consapevolezza critica del dato  delle urne, ma soprattutto considerando le potenzialità di influenza effettiva che alcuni circoli intellettuali possono esercitare sugli organismi governativi

 Lo mostra efficacemente un saggio di Marlène Laruelle, Russian Eurasianism: an ideology of empire, pubblicato per i tipi della Woodrow Wilson Center Press, “emanazione” editoriale del Woodrow Wilson International Center for Scholars, prestigioso centro di ricerca statunitense. Il testo, scritto fra il 2005 e il 2006, non è pubblicato in lingua italiana, tuttavia Laruelle viene citata nel volume di recente pubblicazione Eurasia. Vladimir Putin e la Grande Politica (Controcorrente, Napoli 2014) come una delle principali studiose dell'Eurasiatismo.

Il valore del saggio conferma l'indicazione di De Benoist: si tratta indubbiamente di uno degli studi più approfonditi sull'argomento. Laruelle ricostruisce con precisione scientifica un percorso ideologico lungo, stratificato e proteiforme, avvalendosi di una lettura puntuale delle fonti originali e insieme delineando un'ermeneutica del fenomeno, che viene inserito in uno studio di storia delle idee. Russian Eurasianism diviene quindi un utile strumento di demistificazione intellettuale, in quanto chiarisce il nucleo ideologico, il contesto culturale e le diverse – talvolta persino antitetiche – evoluzioni di un concetto, quello di Eurasia, spesso abusato o mal compreso dalla pubblicistica estera. L'autrice cerca di offrire un punto di vista critico ma il più possibile oggettivo, rilevando nell'Eurasiatismo contraddizioni e pericoli teorici, senza tuttavia esprimere preferenze politiche o giudizi morali. Il parere critico di Laruelle traspare inevitabilmente tra le righe del testo, il cui merito maggiore è tuttavia a nostro avviso riposto nella presentazione di una preziosissima e ingente quantità di dati perlopiù obliati al lettore non russo, nonché di un'ottima sintesi del pensiero e delle opere dei principali teorici eurasiatisti.

Il saggio prende le mosse da una descrizione delle radici del pensiero eurasiatista, di cui una versione ante litteram è parzialmente rappresentata dalla corrente slavofila, per passare a considerare l'Eurasiatismo degli anni '20/'30 del secolo scorso. Peculiarità teorica essenziale del movimento è la visione della Russia come centro di un vasto spazio politico e culturale, un ponte fra l'Europa e l'Asia proiettato come comunità di destino verso l'Est, la cui stimata superiorità è fondata su un terzomondismo avant la lettre. La speculazione eurasiatista, sorta in un contesto di esilio durante il periodo bolscevico e di fede nella natura di “grande potenza” (derzhava) della Russia, risulta in palese contrasto rispetto alla profonda influenza della speculazione occidentale –  nelle espressioni del Neoplatonismo, del Romanticismo tedesco, della Naturphilosophie, della filosofia della storia hegeliana, della Rivoluzione Conservatrice, della filosofia politica moderna, insieme pragmatica e utopista – esercitata sul loro stesso pensiero. Tale aporia risulta paradossalmente l'elemento più interessante del primo Eurasiatismo, la cui indubbia levatura culturale pone questo movimento nel novero delle avanguardie intellettuali dell'epoca. Savitsky, Trubetzkoy, Jakobson e Vernadsky sono solo alcuni dei principali esponenti di un movimento vitale, attivo con numerose pubblicazioni, indirizzato verso la creazione di un'ideologia totale, capace di abbracciare geografia, economia, etnografia, linguistica, filosofia, storia, religione e studi orientali. Ambiguità verso il regime comunista dell'Urrs, “culturalismo” quale unione mistica fra territorio e cultura, attenzione per il mondo slavo e turanico, culto del nomadismo e dell'Impero Mongolo di Gengis Khan, adesione al cristianesimo ortodosso, tensione fra idealismo e realismo: queste le principali caratteristiche di un movimento articolato e plurale, pertanto destinato a sfaldarsi di fronte alla radicalizzazione dello scontro politico degli anni '30.

Il saggio prosegue presentando la figura e il pensiero di Lev Gumilëv, studioso di etnologia celeberrimo nella Russia contemporanea, prossimo all'Eurasiatismo più per l'interesse nutrito verso la storiografia delle steppe che per una integrale adesione ideologica al movimento. I testi principali di Gumilëv, pubblicati negli anni '70 ed ispirati a un radicale determinismo etnico, in sintonia con il meccanicismo sovietico, costituiscono la cerniera – peraltro dubbia e controversa – fra il primo Eurasiatismo e la sua rinascita negli anni '90, in seguito al crollo dell'Urss.

Marlène Laruelle dedica quindi due capitoli del proprio saggio ai principali teorici contemporanei del Neoeurasiatismo: Aleksandr Panarin – ingiustamente sconosciuto in Europa, e a cui ci ripromettiamo di dare spazio in un successivo articolo – e Aleksandr Dugin, che, successivamente alla morte di Panarin, è diventato il leader senza rivali del movimento. Laruelle ricostruisce attentamente la speculazione dei due teorici, non limitandosi soltanto al pensiero strettamente geopolitico, bensì approfondendo la loro Weltanschauung con riferimenti puntuali alla totalità delle loro pubblicazioni. Un grande merito, questo, se si considera che in Italia Dugin è notissimo per i suoi interventi in ambito geopolitico, ma è pressoché sconosciuto quale studioso di filosofia ed esoterismo, campi nei quali ha svolto riflessioni di grande interesse, soprattutto, a nostro avviso, per quanto concerne il tentativo di superare la modernità conciliando tradizionalismo e postmodernismo.

Chiudono il volume due sezioni dedicate all'Eurasiatismo non russo, specialmente in relazione alla tradizione islamica e alle esperienze politiche governative – in Kazakhistan – e movimentistiche – in Turchia. Il rapporto contrastato fra Islam, Ortodossia e governo diventa centrale nel dispiegarsi dell'Eurasiatismo contemporaneo.

Dalla genealogia del concetto si passa quindi all'attualità di un'idea capace di influenzare radicalmente la cultura di massa e l'immaginario russi, al di là dell'effettiva adesione all'Eurasiatismo quale movimento: un segno concreto che l'unipolarismo, prim'ancora che politicamente, ha fallito culturalmente. Le civiltà rinascono, la ricerca spirituale si staglia innanzi all'annuncio della morte di Dio e il “culturalismo” emerge fra i rami secchi dell'internazionalismo marxista e del mondialismo capitalista: in Russia si prospetta così un nazionalismo nuovo, pluralista, comunitarista e organicista, “illuminato” per dirla con Dugin. L'ideologia eurasiatista non coincide con le politiche di governo, più moderate su multi punti e molto attive nel contesto europeo, ma costituisce un'utopia – talora molto profonda, talora più ingenua – adeguata a offrire un orizzonte “altro”, aperto a contaminazioni teoriche e spirituali che arricchiscono l'edificazione dell'autocoscienza russa.

 

Luca Siniscalco

vendredi, 10 octobre 2014

Prof. B. de Cordier: Doegin en het projekt "Groot-Eurazië"

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mercredi, 08 octobre 2014

Robert Steuckers:De quelques questions géopolitiques inhabituelles

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Robert Steuckers:

De quelques questions géopolitiques inhabituelles

 

Entretien accordé à J. P. Zúquete, dans le cadre d’un mémoire universitaire

 

Acceptez-vous l’étiquette de “nouvelle droite”?

 

Personne dans la “nouvelle droite” ou en marge de celle-ci n’a jamais accepté l’étiquette, inventée par les journalistes dénonciateurs du Nouvel Observateur de Paris en 1979. Seul peut-être Jean-Claude Valla, aujourd’hui décédé, a-t-il profité de ce label pour ancrer son équipe dans le paysage journalistique français, à une époque où elle investissait le Figaro Magazine. Dans le cadre de ce nouvel hebdomadaire à succès, dirigé par Louis Pauwels, cette étiquette pouvait séduire. Aujourd’hui, il convient de dire tranquillement qu’elle n’est plus de mise, qu’elle est une sorte de vocable-reliquat, de joujou idéologique pour faire mousser les dinosaures d’une gauche hystérique et groupusculaire, généralement utilisée par les services pour perpétrer des “coups tordus”. L’évolution ultérieure de quasi tous les animateurs du “Groupe de Recherche et d’Etudes pour la Civilisation Européenne” (ou GRECE) et, même, du “Club de l’Horloge” (qui en était distinct à partir de la fin des années 70), a amené leurs réflexions bien au-delà de l’ensemble circonscrit des droites françaises, sans pour autant nier certaines bases théoriques qui sont soit conservatrices au sens le plus général du terme, soit nationalistes-révolutionnaires, au sens proudhonien du terme ou au sens du non-conformisme des années 30. Alain de Benoist, qui aime qu’on écrive de lui qu’il est une “figure de proue” de ce mouvement dont il récuse pourtant l’étiquette, ne peut plus, aujourd’hui, être considéré comme appartenant au champ des droites françaises, vu qu’il s’est très nettement démarqué de l’actuelle idéologie dominante, le néo-libéralisme, flanqué de son cortège d’idéologèmes boiteux et de nuisances idéologiques que l’on appelle le “politiquement correct”.

 

Les animateurs de la “nouvelle droite” (selon l’étiquette forgée par le Nouvel Observateur) n’ont donc pas adopté les schèmes du néo-libéralisme, toutes variantes confondues, et n’ont jamais embrayé sur la vague néo-atlantiste que l’on observe en France depuis l’arrivée de Mitterrand au pouvoir en 1981, vague qui s’est renforcée et a submergé les ultimes redoutes du gaullisme de tierce voie. En critiquant le néo-libéralisme, comme nouvelle idéologie nuisible et posée par ses thuriféraires comme universaliste, et en refusant la logique atlantiste, ces animateurs dits “néo-droitistes” ont forcément emprunté des formes critiques auparavant ancrées à gauche de l’échiquier idéologique français et abandonné l’anti-gaullisme des vieilles droites françaises pour opter en faveur d’une sorte de néo-gaullisme, hostile aux politiques suggérées par l’hegemon américain depuis Carter et Reagan. La critique du néo-libéralisme (toutefois assez insuffisante au sein de l’actuelle “post-nouvelle-droite” quant au nombre de textes fondateurs) et le rejet de l’atlantisme des post-gaullistes et des socialistes font que les avatars actuels de la “nouvelle droite” —fustigée par les journalistes du Nouvel Observateur en 1979— sont l’expression d’une fusion originale d’éléments auparavant (et apparemment) hétérogènes. Par rapport à ce qu’elle a pu être éventuellement dans sa préhistoire (années 60 et première moitié des années 70) ou à ce qu’elle était quand une partie de ses animateurs investissait avec Jean-Claude Valla le Figaro Magazine de Louis Pauwels, le mouvement pluriel (à têtes multiples) que l’on appelle toujours par convention et par paresse intellectuelle la “nouvelle droite” constitue aujourd’hui une synthèse nouvelle, qui opère des convergences, mais toujours partiellement, avec des mouvements issus de milieux complètement différents, ancrés ailleurs avant 1979 ou nés de circonstances nouvelles, propre aux années 90 du 20ème siècle ou aux quinze premières années du 21ème.

 

Reste aussi à signaler que les rangs de la génération fondatrice se sont éclaircis, par la force des choses, et que les réflexes politiques et les sentiments de ces anciens ne sont plus nécessairement partagés par des générations nouvelles (moins nombreuses toutefois) qui, sociologiquement parlant, ont eu d’autres jeux, d’autres distractions, vécu au sein d’un système scolaire différent (et surtout déliquescent), se sont plongées dans l’univers de l’informatique puis du multimédia, n’ont plus que de vagues souvenirs des réalités si pesantes, si déterminantes, d’avant 1989 (guerre d’Algérie, décolonisation, Rideau de Fer, bloc soviétique, etc.).

 

J’appartiens évidemment à une fournée tardive qui s’est forgé dès la prime adolescence une vision du monde alternative, disons, à partir de l’année 1970, où j’avais quatorze ans. La période de maturation première et confuse s’est déroulée jusqu’en 1974, année où j’achève mes secondaires et où je rentre à l’université. Dès 1974, ma vision philosophique et politique se précise grâce à des amis comme Bernard Garcet, Frédéric Beerens, Alain Derriks, etc. Ces citoyens belges ne sont évidemment pas marqués par les événements d’Algérie, comme leurs contemporains français, et ne raisonnent jamais selon les clivages habituels du monde politique français, en dépit de la très forte influence de la presse et des médias français sur la partie francophone de la Belgique (j’étais le seul qui lisait en néerlandais et en allemand, vu que j’étudiais les langues). Garcet s’intéressait surtout à l’école italienne (Mosca, Pareto), Beerens aux sciences de la vie (Konrad Lorenz, Robert Ardrey), Derriks, journaliste de formation, aux idéologies politiques, à l’actualité la plus brûlante. C’est dans nos échanges hebdomadaires, ou au cours de voyages, où nous commentions nos lectures et l’actualité, que mes options personnelles se sont consolidées entre 1974 et 1980, années où, justement, la géopolitique revient à l’avant-plan, surtout parce que depuis le coup de Kissinger, qui parvient en 1972 à s’allier à la Chine maoïste, on s’aperçoit, d’abord timidement, que les critères géopolitiques pèsent plus lourd que les positions idéologiques. Derriks et moi potasserons —suite à un article de la revue évolienne et “traditionaliste-révolutionnaire” Totalité, animée par Georges Gondinet, Philippe Baillet et Daniel Cologne— le travail du général italien Guido Giannettini (Dientre la Granda Muraglie) qui fut quasiment le premier à préconiser un renversement d’alliance pour l’Europe: si les Etats-Unis, sous l’impulsion de Kissinger et de Nixon, s’alliaient à la Chine pour faire pression sur l’Union Soviétique et pour se maintenir par la même occasion en Europe occidentale, il fallait, sans adopter nécessairement le système économique communiste, s’allier à Moscou pour fédérer les peuples de souche européenne dans la partie septentrionale de l’Eurasie. Jean Parvulesco et Jean Thiriart emboîteront le pas. Par ailleurs, Alexander Yanov, un dissident libéral soviétique exilé en Californie, hostile au néo-slavisme officiel en plein développement dans l’URSS d’alors, démontrait que la néoslavophilie du régime et de la dissidence enracinée s’opposait à un occidentalisme russe présent dans la dissidence (Sakarov) et dans le PCUS au pouvoir. Notre position face à cette première définition par le libéral-occidentaliste Yanov de la “Russian New Right” (1): soutenir la néo-slavophilie dans le régime et dans la dissidence, chez Valentin Raspoutine, primé en URSS, et chez Soljénitsyne, exilé dans le Vermont. Position implicitement partagée par de Benoist (qui recense l’ouvrage de Yanov dans les colonnes du Figaro Magazine) et par l’observateur du monde slave dans la presse non conformiste allemande de l’époque, Wolfgang Strauss, ancien déporté du Goulag de Vorkhuta, qui n’a cessé de plaider pour une alliance de tous les slavophiles.

 

Les travaux géopolitiques de Jean Thiriart ont-ils influencé vos thèses sur l’Europe?

 

robert steuckers, entretien, géopolitique, politique internationale, nouvelle droite, synergies européennes, jean thiriart, ayméric chauprade, front national, eurasisme, eurasie, brics, Jean Thiriart n’a pas, à proprement parlé, rédigé de travaux spécifiquement géopolitiques. Dans les années 60, à l’apogée de son engagement politique sur la petite scène belge (assurément trop étroite pour lui!), il a cependant montré qu’il avait du flair en la matière. Dans l’espace de plus en plus réduit de ceux qui déploraient la défaite européenne (et non pas seulement allemande) de 1945, Thiriart, qui avait horreur des nostalgies qu’il considérait comme des anachronismes incapacitants, voulait réconcilier les volontés, de gauche comme de droite, rejetées dans les marges de nos mondes politiques au moment où se déployait la société de consommation, celle “du frigidaire et du Coca-Cola de Tokyo à San Francisco”. On peut évidemment affirmer que Thiriart opte pour cette position —celle de réconcilier les volontés apparemment hétérogènes sur le plan idéologique— afin d’adopter un discours de “libération continentale”, de dégager l’Europe de l’Ouest et l’Europe de l’Est de la bipolarité instaurée à Yalta en 1945, parce qu’il est lucide et rationnel et sent bien que cette césure au beau milieu du continent entraîne, sur le long terme, la déchéance de notre espace civilisationnel. De fait, Thiriart vouait aux gémonies les irrationalismes politiques, ce qu’il appelait les “romantismes incapacitants”, les délires du “zoo politique” et du “racisme des sexuellement impuissants” relevant, selon lui, psychanalyste amateur à ses heures, de la psycho-pathologie et non de la “politique politique”, selon l’expression de Julien Freund, autre pourfendeur des “impolitismes”. Thiriart ne mâchait jamais ses mots, il avait la parole dure, il nous engueulait copieusement et c’est surtout pour cela que je me souviens de lui avec grande tendresse, notamment en circulant dans le quartier que nous habitions tous deux et où je le vois encore promener son chien noir ou embarquer dans son mobile-home, monté sur 4X4 Toyota. Cependant —et nous ne le devinions que vaguement— Thiriart était tributaire d’un contexte idéologique d’avant-guerre, aujourd’hui exploré pour la première fois scientifiquement, et de manière exhaustive.

 

robert steuckers, entretien, géopolitique, politique internationale, nouvelle droite, synergies européennes, jean thiriart, ayméric chauprade, front national, eurasisme, eurasie, brics, En effet, il existait un “européisme” belge avant 1940, qui avait pris son envol au lendemain de la première guerre mondiale. Docteur en histoire à l’Université catholique de Louvain, Geneviève Duchenne a systématiquement cartographié ces “esquisses d’une Europe nouvelle” (2), où les adversaires de toute réédition de la Grande Guerre évoquaient les possibilités de transcender les inimitiés létales qui avait fait déchoir l’Europe face, notamment, aux Etats-Unis montants ou face, déjà, à une URSS qui se targuait de forger un modèle de société indépassable, annonçant au forceps “la fin heureuse de l’histoire”. Parmi ces mouvements européistes, ou paneuropéens (Coudenhove-Kalergi), il y eut le “Bloc d’Action européenne”, qui a émergé dans les milieux d’une gauche très non conformiste, sympathique et anarchisante, “Le Rouge et le Noir”, où officiait Pierre Fontaine qui, après 1945, évoluera vers une “droite” représentée par l’hebdomadaire Europe magazine (première mouture); ensuite, ce “Bloc d’Action”, qui a oeuvré de 1931 à 1933, fut suivi d’un “Front européen” (1932-1933), animé par des diamantaires juifs d’Anvers et par des Flamands francophones, plutôt catholiques, actifs dans la biscuiterie, se réclamant de l’idéologie briandiste, fustigée par les nationalistes d’Action française. De 1932 à 1940, se crée l’”Union Jeune Europe” (UJE), dont l’inspiration initiale sera “helvétisante” —on veut une Europe démocratique selon le modèle suisse—, comme l’attestent ses premiers bulletins Agir puis Jeune Europe. L’UJE plaide pour un recentrage continental européen, jugé plus efficace que la fédération universelle qu’entendait incarner la SdN. Le mouvement cherchera, sous la bannière du briandisme, à parfaire une réconciliation belgo-allemande, à purger les discours politiques de toutes les scories de germanophobie, en vigueur depuis le viol de la neutralité belge en août 1914. Il finira germanophile au nom d’un pacifisme intereuropéen. Il est difficile de dire, aujourd’hui, quels sont les ingrédients de ces discours briandistes et paneuropéens, plus ou moins germanophiles, qui ont influencé le jeune Thiriart entre, disons, 1937 et 1940. Il est toutefois évident que les strates pensantes de la société belge d’avant-guerre, à gauche comme à droite de l’échiquier politique, optent pour une carte européiste, qui pourra éventuellement déboucher sur une forme ou une autre de collaboration pendant la seconde guerre mondiale. Après 1945, les factions non collaboratrices reprendront les aspects les plus “démocratiques” de ce briando-européisme et l’appliqueront au processus de construction européenne, comme le démontre l’historienne flamande Els Witte (VUB) (3), qui constate aussi, par ailleurs, que les historiens qui ont plaidé pour ces formes “démocratiques” (néo-briandistes, sociales-démocrates et maritainistes/démocrates-chrétiennes), entendaient se débarrasser de “tout finalisme belgiciste”, c’est-à-dire de tout finalisme “petit-nationaliste”, comme le dira Thiriart, en fustigeant les éléments nationalistes et “belgicistes” de droite, présents dans son propre mouvement “Jeune Europe” au début des années 60.

 

Je ne pense pas que l’on puisse encore penser l’originalité marginale du mouvement “Jeune Europe” de Thiriart sans prendre en compte le contexte fort vaste de l’européisme belge de l’entre-deux-guerres, cartographié par Geneviève Duchenne. En résumé, pour Thiriart, avatar tardif et résilient de cet européisme d’avant 1940, il faut faire l’Europe en réconciliant les Européens, en créant les conditions pour qu’ils ne se fassent plus la guerre, et mettre un terme à toutes les formes non impériales de petit nationalisme diviseur. Vers 1968-69, Thiriart constate, avec grande amertume, que ce projet européiste, qu’il a cultivé, en lisant Pareto, Freund, Machiavel, Hobbes, etc., ne peut pas se concrétiser au départ d’une petite structure militante, en marge du monde politique officiel, parce que de telles structures n’attirent que des marginaux, des délirants ou des frustrés (“Je ne veux plus voir tous ces tocards...”, me dira-t-il à bord de son voilier, un jour très froid de printemps, au large de Nieuport). Il abandonne la politique et ne reviendra sur scène qu’à la fin de l’année 1981, où, comme Giannettini et Parvulesco, il opte pour un projet “euro-soviétique”, affirmant par la même occasion que l’Europe ne peut se libérer du joug américain —de plus en plus pesant au fur et à mesure que l’URSS déclinait— qu’en regroupant ses forces contestatrices du statu quo autour d’une structure comparable au PCUS et à un avatar réactualisé du “Komintern”. Thiriart, bien qu’assez libéral sur le plan économico-social, opte pour une logique néo-totalitaire, pour un communisme rénové et mâtiné de nietzschéisme. Quand s’effondre l’Union Soviétique et que la Russie tombe dans la déchéance eltsinienne, il fait connaissance avec Alexandre Douguine, lui rend visite à Moscou et espère que les forces patriotiques et néo-communistes russes vont renverser Eltsine, transformer la nouvelle Russie en un “Piémont” capable d’unir l’Europe et l’Eurasie sous l’égide d’une idéologie néo-communiste nietzschéanisée (Thiriart lisait le seul exégète soviétique de Nietzsche, un certain Odouev). Deux mois après être revenu de sa tournée moscovite, dont il était très heureux, Thiriart meurt d’un malaise cardiaque dans son chalet ardennais, en novembre 1992.

 

J’ai été tributaire de l’européisme de Thiriart parce que j’avais découvert un exemplaire de son ouvrage 400 millions d’Européens chez un bouquiniste, plusieurs années avant de le rencontrer personnellement dans son magasin d’optique, avenue Louise à Bruxelles. Nous avons échangé de nombreuses impressions, par lettres et de vive voix, entre 1981 et sa mort, en novembre 1992.

 

Croyez-vous possible un front commun eurasiatique contre le “nouvel ordre mondial” américain?

 

Ce front commun existe déjà, dans le chef du Groupe dit de Shanghaï et dans le BRICS, qui s’étend à l’Amérique latine, avec le Brésil et, partiellement, l’Argentine, et à l’Afrique avec la République sud-africaine. Ce groupe vise la “dé-dollarisation”, qui ne prendra pas effet tout de suite mais érodera lentement la domination de la monnaie américaine dans le domaine des échanges commerciaux internationaux. Ensuite, le centre de la masse continentale eurasiatique sera unifié par le réseau des gazoducs et oléoducs qui amèneront les hydrocarbures vers l’Ouest, c’est-à-dire la Russie (et éventuellement l’Europe si elle s’abstient de maintenir les sanctions exigées par les Etats-Unis), et vers l’Est, c’est-à-dire la Chine et l’Inde. Ce réseau est dans l’espace-noyau eurasien, celui qui était à l’abri des canons des “dreadnoughts” britanniques, et qui ne peut être conquis au départ du “rimland” littoral, seulement bouleversé par des guerres de basse intensité, menée par des fondamentalistes fous. Par ailleurs, la Chine a déjà, fin des années 90, exigé que l’interprétation des “droits de l’homme” par le Président américain Carter et ses successeurs soit contre-balancée par des éléments éthiques issus d’autres civilisations que l’occidentale, notamment des éléments bouddhistes, taoïstes et confucéens, et que ces “droits de l’homme” ne puissent jamais plus servir de prétexte pour s’immiscer dans les affaires intérieures d’un pays ou y générer du désordre. Le front uni eurasiatique, s’il veut exister un jour comme facteur incontournable sur l’échiquier planétaire, doit donc agir sur trois fronts: celui de la dé-dollarisation, celui de l’aménagement du réseau des oléoducs et gazoducs sur la masse continentale eurasiatique, celui du principe sino-confucéen de la non-immixtion, assorti d’une diversification éthique et philosophique de l’interprétation des “droits de l’homme”.

 

Quelles sont les différences pour vous entre Eurosibérie et Eurasie?

 

Le terme d’Eurosibérie a été forgé dans les milieux “post-néo-droitistes” par Guillaume Faye, sans doute la figure historique de la dite “nouvelle droite” qui était la plus proche, par la pensée, de Jean Thiriart: même intérêt pour les questions géopolitiques, même aversion pour les fanatismes religieux, même engouement pour la pensée politique pure (Hobbes, Machiavel, Pareto, Freund, Schmitt, etc.). Historiquement, le concept d’Eurosibérie nous vient de Youri Semionov (Juri Semjonow), un Russe blanc de l’entre-deux-guerres, qui deviendra professeur de géographie à Stockholm en Suède. Dans son Sibirien – Schatzkammer des Ostens, dont la dernière version allemande date de 1975, Semionov démontre que l’Europe a perdu, avec la guerre de 1914 et la révolution bolchevique qui s’ensuivit, ses principales réserves de minerais et de matières premières, dont elle bénéficiait entre la Sainte-Alliance de 1815 et la première guerre mondiale. Semionov pariait, comme Faye et Thiriart, pour une rentabilisation de la Sibérie par le truchement d’un nouveau Transsibérien, le BAM, réactualisation des projets de Witte dans la première décennie du 20ème siècle. Le concept d’Eurosibérie est avant tout un projet économique et technique, comme le souligne Semionov. Thiriart a dû glaner des éléments de la démonstration de Semionov via des travaux analogues d’Anton Zischka, un auteur allemand qu’il appréciait grandement et qui était beaucoup plus lu en traduction française ou néerlandaise en Belgique qu’en France.

 

Le concept d’Eurasie vient tout droit de la littérature russe: avant 1914, la Russie se voulait européenne et craignait, par la voix de bon nombre de ses écrivains, l’“enchinoisement” des âmes, soit l’endormissement des énergies vitales propres à la civilisation grecque et européenne au bénéfice d’une massification prêtée, par les idées de l’époque, à la civilisation chinoise, alors en plein déclin. Avec la révolution bolchevique, certains intellectuels soviétisés adoptent des positions eurasistes, en se réclamant des Scythes, peuple cavalier et nomade, des steppes d’Ukraine au Kazakhstan et au plateau iranien, puis d’une idéologie russo-touranienne, rêvant d’une fusion nouvelle des peuples turco-mongols et slaves, capable de balayer un Occident vermoulu. L’eurasisme actuel s’inspire de cette vision fusionniste et quelque peu apocalyptique. Il existe aussi un eurasisme impérial, qui prend forme concrètement dès les conquêtes par les armées d’un Tsar moderne, Alexandre II, qui s’empare, au grand dam des Britanniques de tous les sultanats centre-asiatiques jusqu’aux frontières de la Perse et de l’Afghanistan, menaçant potentiellement les Indes sous souveraineté anglaise. Ici l’eurasisme est l’expression d’un hégémonisme russe sur l’Europe (ou sur la partie d’Europe dévolue à la Russie) et sur l’Asie centrale, coeur du continent, avec projection possible vers le sous-continent indien.

 

Dans un débat amical, qui a eu lieu en Flandre, Pavel Toulaev et Guillaume Faye ont confronté leurs idées quant à l’Eurosibérie et l’Eurorussie. Toulaev estimait, à juste titre —et Faye l’a reconnu— que la Sibérie n’était pas un sujet de l’histoire, ne l’avait jamais été. Le sujet de l’histoire dans l’espace eurasien et eurosibérien a été la Russie, d’Ivan le Terrible à Poutine. C’est la raison pour laquelle on parle davantage d’Eurorussie dans nos régions que d’eurasisme.

 

Finalement, croyez-vous que le Front National français devient russophile?

 

robert steuckers, entretien, géopolitique, politique internationale, nouvelle droite, synergies européennes, jean thiriart, ayméric chauprade, front national, eurasisme, eurasie, brics, Ma réponse ne sera pas très utile, d’abord parce que je ne suis pas français même si j’utilise le plus souvent la langue française. Je n’ai guère d’affinités, comme la plupart de mes compatriotes, avec la pensée politique française, très éloignée de nos modes d’action et de nos préoccupations idéologiques et politiques. Sur l’Europe et sur la Russie, les Français ont toujours eu dans l’histoire des visions totalement différentes des nôtres. On nous enseignait que le modèle indépassable pour l’Europe était la vision lotharingienne de Charles dit le Téméraire (nous devions dire: “Charles ou Karle le Hardi”, le terme “téméraire” étant jugé injurieux et de fabrication française), la Grande Alliance forgée par l’Empereur Maximilien I entre l’héritage des Bourguignons et des Habsbourgs et celui de la Castille-Aragon par le mariage de son fils Philippe et de la princesse Jeanne, l’Empire universel de Charles-Quint, toutes formes politiques respectables que d’affreux personnages, disaient nos instituteurs, comme Louis XI (“l’Universelle Aragne”) ou le félon François I avaient délibérément saboté en s’alliant aux Ottomans. Je vous passe les descriptions très négatives que l’on nous donnait de Louis XIV, des sans-culottes et des jacobins ou encore de Napoléon III. Ce dernier a notamment participé à la première guerre, fomentée par les Britanniques, contre la Russie tsariste, la Guerre de Crimée, une fois de plus avec le concours des Ottomans, tandis que la Belgique, à l’époque, était plutôt pro-russe, à l’instar de Bismarck. Le communisme a connu des succès retentissants en France, en s’alliant avec le vieux fonds criminel jacobin, tandis qu’en Belgique le communisme a toujours été très marginal, n’a pas connu des figures avides de sang comme en URSS ou en France.

 

Je ne peux pas me représenter ce que ressentirait un adepte du nouveau FN de Marine Le Pen face à la Russie actuelle. Je pense que l’électorat français de base —du FN ou de tout autre parti— ne sait guère ce que représente la Russie sur le plan géopolitique. Il est donc inutile pour un parti, quel qu’il soit, de faire de la géopolitique, pro-russe ou anti-russe, pro-américaine ou anti-américaine, pro-arabe ou anti-arabe, pro-israélienne ou anti-israélienne, etc. Ce n’est pas sa tâche et, s’il en fait sa tâche, il finira par commettre des bêtises, comme le constatait d’ailleurs une figure tragique de la première moitié du 20ème siècle, l’officier, diplomate et explorateur allemand von Niedermeyer, face aux interventions insuffisantes et ineptes des partis politiques de la République de Weimar en matières de politique étrangère. Les interventions des sociaux-démocrates pour contrer les politiques de coopération avec la jeune URSS étaient l’objet des colères de von Niedermeyer. Le personnel politique de base est généralement trop inculte pour aborder raisonnablement ces questions.

 

Ceci dit, le FN, qu’on le veuille ou non, que l’on l’accepte ou que l’on ne l’accepte pas, remplit deux vides dans la politique française: il a recueilli énormément de voix communistes, celles d’un populisme de gauche, russophile parce qu’anciennement soviétophile, et, par voie de conséquence, des sentiments favorables à la Russie, dont son arithmétique électorale prospective doit dorénavant tenir compte; ensuite, deuxième vide, dû aux politiques successives de l’atlantiste Sarközy et du social-démocrate filandreux Hollande; tous deux ont effacé de l’horizon politique français les dernières traces du gaullisme non-aligné et, en vertu de ce non-alignement, hostile à toute prépondérance de l’hegemon américain. Le FN recueille donc, actuellement (provisoirement? définitivement?), en son sein, les résidus de russophilie communiste et les résidus du gaullisme assassiné une bonne fois pour toutes par Sarközy.

 

Les orientations apparemment pro-russes du nouveau FN de Marine Le Pen sont également un résultat de la fameuse affaire Chauprade. Le professeur Ayméric Chauprade, qui enseignait il y a quelques brèves années à l’école de guerre de Paris, développait une vision nationale-française et para-gaullienne dans des ouvrages de référence absolument incontournables pour tous ceux qui s’intéressent à la géopolitique comme science et comme pratique. Pour Chauprade, la France avait sur la scène internationale et en vertu de son droit de veto à l’ONU une mission anti-impériale à parfaire, en se distanciant autant que possible des projets imposés par Washington. Bref, Chauprade était une sorte de maurassien moderne, gaullien en sus. Position intéressante sauf qu’elle était justifiée par une revalorisation scandaleuse de la figure de François I, ennemi de Charles-Quint, position absolument inacceptable pour vous, Espagnol, et pour moi, Impérial. Son précis de géopolitique est toutefois indispensable pour son interprétation originale et gaullienne des stratégies anglo-saxonnes dérivées de la géopolitique de Sir Halford John Mackinder et de ses disciples. Encore plus intéressant a été le livre de Chauprade sur le choc des civilisations, où ne transparaissait heureusement plus cette apologie indécente du stato-nationalisme avant la lettre de François I (le “petit-nationalisme” fustigé par Thiriart!). Inutile de vous dire que ces deux ouvrages trônent en bonne place dans ma bibliothèque, à côté de ceux d’autres géopolitologues français: ceux de l’homme de gauche Yves Lacoste et ceux du directeur des collections “Major” des “Presses Universitaires de France”, Pascal Gauchon, qui vient de fonder la revue “Conflits” ainsi que ceux du très regretté Hervé Couteau-Bégarie, prématurément décédé. Sarközy a commis l’indicible infâmie de casser la carrière de Chauprade à l’école de guerre, sous prétexte que ce géopolitologue hors pair ne développait pas des thèses atlantistes, pareilles sans doute à celles, fumeuses et hystériques, de l’insupportable sycophante Bernard-Henry Lévy, dont les délires ont conduit à l’anéantissement de la Libye et à l’horrible guerre civile et fratricide qui n’est pas encore terminée là-bas.

 

robert steuckers, entretien, géopolitique, politique internationale, nouvelle droite, synergies européennes, jean thiriart, ayméric chauprade, front national, eurasisme, eurasie, brics, A mon très grand étonnement, Chauprade, n’a pas fait front commun avec Gauchon, par exemple, en prenant la plume pour fustiger l’abandon de toutes les positions gaulliennes par les affaires étrangères françaises, en organisant des colloques avec des sceptiques de gauche comme Jacques Julliard ou Jacques Sapir. Au lieu de tout cela, au lieu de toutes ces bonnes actions potentielles, il a adhéré au FN, ce qui n’est pas une bonne idée pour défendre sur le long terme ses positions sans risquer les entraves politiciennes que peut subir, tout d’un coup et le cas échéant, tout intellectuel pointu et pertinent qui s’embarque dans une aventure politique. Car la politique, en toute période triviale de l’histoire comme la nôtre, est un espace irrationnel, flou, imprécis, soumis à toutes les variations possibles et imaginables. Celles-ci, d’ailleurs, ne se sont pas fait attendre: hostile à la géopolitique de l’hegemon américain dans ses excellents ouvrages de référence, Chauprade, par compromis politicien, aligne ses positions de militant FN néophyte sur la nouvelle politique d’Obama face à l’EIIL, alors que ce sont les Etats-Unis, l’Arabie Saoudite et le Qatar qui sont responsables de l’émergence de ce djihadisme virulent et du chaos indescriptible qu’il a provoqué en Syrie, au détriment du régime baathiste et en Irak au détriment de la majorité chiite et de la minorité kurde (dans une moindre mesure). Une position vraiment non alignée, gaullienne, aurait été de dire: “nous refusons de participer au nettoyage du Levant et de l’Irak, réclamé par Obama —les Américains et leurs alliés pétro-monarchistes y ont créé le chaos et les Européens doivent maintenant payer pour réparer les dégâts!— car notre seule politique est de vouloir le retour au statu quo ante dans la région, car ce statu quo ante évitait la présence belligène d’éléments fondamentalistes incontrôlables et créait la paix civile par l’imposition d’un système militaro-politique moderne et syncrétique, seul apte à gérer les diversités et divergences effervescentes de cette zone-clef de la géostratégie internationale; de plus, le prix à payer pour ce travail de nettoyage est trop élevé pour une Europe encore fragilisée par la crise de l’automne 2008: cet argent doit servir exclusivement à nos infrastructures hospitalières, à nos écoles, à nos départements de recherche et développement, au sauvetage de notre sécurité sociale”. Chauprade vient d’ailleurs d’être mis sur la sellette dans les colonnes du mensuel Le Causeur (octobre 2014), où on l’appelle à justifier ses positions actuelles, parfois contradictoires par rapport à ses écrits scientifiques antérieurs.

 

Seules les visites de Chauprade à Moscou, où il plaide en faveur de la politique familiale du Président Poutine, permettent de conclure à une néo-russophilie non communiste au sein du FN, puisque, désormais, le géopolitologue, chassé de sa chaire par Sarközy, en fait partie. Ce soutien à la politique familiale n’est pas exclusivement géopolitique: la France profonde —avec le mouvement “Manif’ pour tous”, téléguidé entre autres par “Civitas”— entend défendre la famille contre les politiques socialistes et sociétalistes (comme on se plait à le souligner maintenant par le biais de ce néologisme) du gouvernement de François Hollande au point que même l’électorat catholique de la France profonde préfère la politique familiale du président russe, en dépit d’une indécrottable russophobie occidentale, qui marquait aussi la France non communiste, et que dénonce avec brio l’éditeur Slobodan Despot, installé sur les rives du Lac Léman.

 

(Forest-Flotzenberg, octobre 2014).

 

Notes:

(1)   Alexander Yanov, Alexander YANOV, “The Russian New Right – Right-Wing Ideologies in the Contemporary USSR”, Institute of International Studies, University of California, Berkley, 1978.

(2)   Geneviève DUCHENNE, Esquisses d’une Europe nouvelle – L’européisme dans la Belgique de l’entre-deux-guerres (1919-1939), P.I.E. Peter Lang, Bruxelles, 2008.

(3)   Els WITTE, Voor vrede, democratie, wereldburgerschap en Europa – Belgische historici en de naoorlogse politiek-ideologische projecten (1944-1956), Uitgeverij Pelckmans, Antwerpen, 2009.

 

mercredi, 01 octobre 2014

Rencontres eurasistes

Rencontres Eurasistes 

le 18 Octobre à Bruxelles

Pour les réservations : rencontreseurasistes@gmail.com

Veuillez, s'il vous plait, indiquer vos noms et prénoms, l'adresse sera communiquée aux inscrits, merci!

 

vendredi, 26 septembre 2014

Sur la sainte Russie, l'idéologie eurasiste et le Général Wrangel

Général Wrangel

par Christopher Gérard

Ex: http://archaion.hautetfort.com

 

Wrangel_Pyot.jpgSpécialiste de l’histoire russe, N. Ross a notamment publié un essai sur Nicolas II (La Mort du dernier tsar, la fin du mystère, L’Age d’Homme). Il nous livre aujourd’hui un essai d’une grande clarté, illustré de photos inédites, sur l’état russe de Crimée, dirigé par le général Piotr Nikolaievitch Wrangel (1878-1928), dernier commandant en chef des Armées blanches et chef spirituel de l’émigration russe jusqu’à sa mort à Bruxelles, sans doute à la suite de l’inoculation par un agent soviétique du bacille de Koch. Issu d’une lignée germano-balte, le baron Wrangel, glorieux officier de la Garde, lutta dès le début contre les Rouges et, à partir du moment où il remplaça, en 1920, le général Dénikine à la tête de la résistance antibolchévique, fit preuve d’un sens de l’organisation et de visions politiques d’une rare ampleur, puisqu’il comptait reconstruire la Russie par le bas. Pragmatique, Wrangel tenta de développer un projet global pour une Russie libérée, notamment par le biais de réformes agraires et institutionnelles. L’état russe de Crimée (ou gouvernement de Tauride), qui fut de facto reconnu par la France, donne une idée d’un autre destin pour l’empire : presse libre, refus de l’antisémitisme, liberté religieuse… L’essai de N. Ross retrace tous les aspects de l’action du général Wrangel : opérations militaires, affaires économiques, réflexion spirituelle et politique (à laquelle prirent part B. Souvarine, S. Boulgakov et G. Vernadsky - futur théoricien de l’eurasisme). Wrangel parvint enfin à assurer l’exode de près de 150.000 réfugiés, civils et militaires, qui échappèrent ainsi au massacre.

Christopher Gérard 

Nicolas Ross, La Crimée blanche du général Wrangel, Editions des Syrtes, 224 pages, 15€

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Sainte Russie

Pour célébrer le 90ème anniversaire de la révolution russe, les éditions du Rocher proposent une réédition augmentée de Les Blancs et les Rouges. Histoire de la guerre civile russe (1917-1921), passionnant essai que Dominique Venner, directeur de la Nouvelle Revue d’Histoire, a naguère consacré à un cataclysme qui engendra le plus terrifiant régime des temps modernes. D’une précision militaire, son récit de l’atroce guerre civile, des mutineries de 1917 aux ultimes révoltes populaires au bolchevisme, permet de comprendre à quel point « un soulèvement de millions de croquants hérissés de baïonnettes, conduits par une petite meute de fanatiques binoclards » fut la matrice d’un siècle de fer. Car la terreur instaurée par Lénine et Staline frappa durablement les esprits de l’époque par sa brutalité même et fut, plus tard, l’une des causes de l’avènement des dictatures mussolinienne et hitlérienne. Outre ce regard dans une perspective large, l’originalité de l’ouvrage réside dans l’étude comparée des Rouges et des Blancs : portraits et récits de campagnes alternent, illustrés par de nombreux témoignages à chaud longtemps occultés par une historiographie marxisante. De même, les insuffisances et les points forts de chaque camp sont analysés avec finesse : les Blancs comptèrent de valeureux chefs (Dénikine, Koltchak, sans oublier Wrangel, mort en exil à Bruxelles); quant aux Rouges, ils ne furent pas partout vainqueurs (Pologne, Finlande, Etats baltes). Bien des dogmes sont ainsi pulvérisés, notamment celui de « l’humanisme » de Lénine, qui ordonne sans hésiter des massacres d’une effroyable ampleur, ou celui du sens de l’histoire : en 1919 encore, les jeux n’étaient pas faits.

Après la prise du pouvoir par les bolcheviques, deux millions de Russes fuirent une Russie martyrisée. Dix mille d'entre eux trouvèrent refuge dans notre pays. C'est leur histoire, celle de l'émigration russe en Belgique durant l'Interbellum, qu'un jeune chercheur de l’Université de Louvain et du FNRS, W. Coudenys, a étudiée avec une minutie exemplaire (Leven voor de Tsaar. Russische ballingen, samenzweerders en collaborateurs in België,Davidsfonds). Tous ces exilés n'étaient pas nobles comme le général baron Wrangel, dernier chef des Armées blanches, mort (empoisonné?) à Uccle en 1928, mais nombre d 'officiers purent survivre grâce à l'aide de la Belgique, qui participa à l'intervention alliée contre les Rouges (voir les témoignages de l’écrivain belge Marcel Thiry). Le Roi Albert n'avait-il pas caché à l'époque son hostilité aux Soviets? W. Coudenys a dépouillé une masse impressionnante d'archives inédites - journaux de l'émigration, dossiers de la Sûreté, etc. - et nous offre ainsi un tableau très vivant de cette Russie de l'exil, tiraillée entre la fidélité et l'adaptation à un monde en crise. L'aspect culturel n'est pas négligé: cercles littéraires et groupes musicaux, sans oublier ce singulier courant eurasiste qui tint son premier congrès international à Bruxelles. Le rôle de l'épiscopat belge, comme celui de l'Université de Louvain, qui forma de nombreux cadres d'origine russe, bref, toute la vie d'un milieu caractérisé par une grande dignité, est retracée avec une précision d'entomologiste. L'émigration blanche étant un rarissime exemple d'armée en exil (pendant vingt ans), le chercheur s'est également penché sur les nombreuses associations militaires, surveillées et infiltrées avec une rare maestria par les services soviétiques. Voilà donc un éclairage fort utile sur l'histoire belge de l'entre-deux-guerres et de l'occupation, car une poignée de Blancs reprit le combat sous l'uniforme feldgrau, avec les déconvenues que l'on devine. Sur l’émigration russe, il faut remarquer que le dernier film d'E. Rohmer, Triple agent  (lire aussi Eric Rohmer, Triple agent, Petite bibliothèque des cahiers du cinéma), un chef-d'œuvre d'intimisme, narre l'histoire d'une trahison dans le Paris des Russes blancs, celle du colonel Skobline. Enfin, sur les associations militaires, lire, de Paul Robinson, The White Russian Army in Exile 1920-1941(Oxford University Press).

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Zinaïda Hippius

Personnage clef du monde littéraire pétersbourgeois et figure éminente avec son mari l’écrivain Dimitri Merejkovski du symbolisme russe, Zinaïda Hippius (1869-1945) assista à la chute du tsarisme et à l’avènement du bolchevisme, après l’intermède Kerenski. Son  journal des années 1914-1920 (Journal sous la Terreur, Collection Anatolia, éditions du Rocher), en grande partie occulté par le régime soviétique durant 70 ans, paraît enfin, livrant un témoignage accablant sur l’asservissement de la Russie à une clique d’idéologues barbares. Aux insuffisances des élites traditionnelles, à l’aveuglement des intellectuels répondent la brutalité sans complexe des Rouges qui, en quelques jours, s’emparent du pouvoir à la pointe des baïonnettes. Les étapes de ce processus infernal sont décrites au jour le jour avec une effrayante lucidité : qu’elle évoque le musellement de la presse, les arrestations (« Chaque jour, on fusille quelqu’un dans chaque soviet d’arrondissement ») et les viols, l’esclavage déguisé et le marché noir, les rafles de « bourgeois » et la délation généralisée, les pillages et les soûleries, les retournements de veste ou les fuites sans gloire, Hippius se hausse au niveau des grands historiens romains. Nous assistons éberlués à la fin d’un monde certes imparfait mais civilisé, et à la naissance d’une tyrannie : « tout le monde meurt (sauf les commissaires, leurs valets et les bandits). Plus ou moins vite. »

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Idéologie eurasiste & "mythe aryen"

laruellle9782.gifSpécialiste des courants nationalistes russes, Marlène Laruelle s’était fait remarquer par une brillante thèse sur l’eurasisme (L’idéologie eurasiste russe ou comment penser l’Empire, L’Harmattan, 1999). Elle s’attaque dans Mythe aryen et rêve impérial dans la Russie du XIXème siècle, (CNRS éditions), au mythe aryen dans l’aire culturelle russe. Définissant ce mythe comme « une recherche romantique des origines » ou comme « mode de lecture du monde », M. Laruelle montre que, au contraire de l’allemand, l’aryanisme russe fut toujours étranger au racialisme. Il convient donc de distinguer l’aryanisme, fils du romantisme européen, du racialisme, fruit monstrueux du scientisme. Le premier n’est nullement prédestiné à devenir ce qu’il fut de 1933 à 1945. De même, la diabolisation des courants romantiques, présentés comme menant fatalement au nazisme, devient intenable, puisque la quête identitaire russe, ignorant l’antisémitisme et en fait tout racisme, cette quête impériale plutôt que nationale, fascinée par l’Asie blanche tout en affirmant une européanité plus complète, se distingue radicalement de l’allemande. Laruelle montre avec brio que l’aryophilie russe fut pensée comme une réconciliation de l’occidentalisme et du slavophilisme. La Russie comme autre Europe. Sa thèse étudie également l’instrumentalisation du mythe aryen par la politique tsariste  en Asie centrale : à l’époque du Grand Jeu (Kipling), les Slaves considéraient leur expansion dans ces régions stratégiques comme le « juste retour » des Aryens dans leur patrie originelle. Une thèse passionnante sur un sujet sensible, traité avec autant de tact que de probité.

 

dimanche, 21 septembre 2014

Casse-tête et conséquences des sanctions anti-russes

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Casse-tête et conséquences des sanctions anti-russes
Traduction : Daniel pour Vineyardsaker

Tout ce que fait la Russie ne laisse pas de place au doute. On rapplique avec des sanctions. Nous y voilà encore. La dernière série de sanctions imposées par le département du Trésor américain et l'Union européenne vise le système bancaire russe, le secteur de l'énergie et l'industrie de la défense.

Les sanctions sont cruelles. Les sanctions sont désagréables. Il n'y a pas d'euphémisme pour les décrire. Ce n'est rien de moins qu'une déclaration de guerre économique.

Sberbank, la plus grande banque de Russie, n'aura plus accès aux marchés des capitaux occidentaux pour obtenir du financement à long terme, y compris toute forme d'emprunt s'étalant sur plus de 30 jours. En outre, cette nouvelle série de sanctions a ramené de 90 à 30 jours l'échéance maximale des prêts imposée à six autres grandes banques russes lors de la série de sanctions précédente.

Sur le front énergétique, ce que les États-Unis et l'Union européenne veulent, c'est la mise au rancart des nouveaux projets d'exploration russes en Sibérie et dans l'Arctique, en interdisant aux grandes pétrolières occidentales de vendre de l'équipement et de la technologie aux projets extracôtiers et en eau profonde, ainsi qu'aux projets d'exploitation du gaz de schiste.

Cela veut dire que les sociétés Exxon et Shell, par exemple, doivent mettre un frein à leurs activités avec cinq grandes sociétés russes dans le secteur du pétrole, du gaz naturel et du pipeline : Gazprom, Gazprom Neft, Lukoil, Surgutneftegaz et Rosneft.

Personne n'a jamais perdu d'argent en misant sur la stupidité des sempiternels « hauts responsables américains » anonymes, qui répètent inlassablement que la dernière série de sanctions vise à obliger Moscou à « respecter le droit international et la souveraineté de l'État ». Un examen rapide des données historiques nous autorise à rire aux éclats en lisant ce passage.

Pour sa part, David Cohen, sous-secrétaire chargé du terrorisme et du renseignement financier au département du Trésor américain, insiste pour dire que la série de sanctions va « isoler » la Russie du système financier mondial.

Les médias institutionnels occidentaux ont aussi qualifié la série de sanctions comme susceptible de « causer une agitation sur les marchés financiers déjà nerveux ». Comme « agitation », on a déjà vu pire. En Russie, les titres des sociétés visées par les sanctions ont monté. Aux États-Unis, les titres énergétiques ont fléchi. Bref, les marchés « agités » ont interprété la dernière série de sanctions comme un autre tir dans les pieds de Washington et de Bruxelles.

Divisons l'Eurasie

« L'isolement » de la Russie, c'est l'empêcher d'accéder à des « sources importantes de financement libellé en dollars », pour reprendre le jargon de Washington et de Wall-Street, baptisées par euphémisme « capitaux occidentaux ». Il est question ici de dollars américains et d'euros. Mais quiconque suit les mesures qui se superposent en faveur d'un monde multipolaire sait que la Russie n'a pas besoin de se procurer plus de dollars américains et d'euros.

Moscou pourrait se servir de ces deux devises pour des achats croisés de biens et services avec les États-Unis et l'Union européenne. Sauf qu'il peut se procurer ces biens et services ailleurs dans le monde. Pour ce faire, les « capitaux occidentaux » sont inutiles et Moscou favorise de plus en plus l'utilisation d'autres devises avec ses autres partenaires commerciaux. Le gang des atlantistes tient pour acquis que Moscou a bien plus besoin de biens et services des États-Unis et de l'Union européenne que l'inverse. Il se met le doigt dans l'œil.

La Russie peut vendre ses ressources énergétiques abondantes en n'importe quelle devise autre que le dollar américain et l'euro. La Russie peut acheter tous les vêtements qu'il lui faut en Asie et en Amérique du Sud. Dans le secteur de l'électronique et de la haute technologie, pratiquement tout est fabriqué en Chine de toute façon.

Un aspect crucial se joue sur le front énergétique. Il sera palpitant de suivre l'Union européenne - qui n'a même pas encore adopté de politique énergétique commune - dans sa recherche de fournisseurs de remplacement. Pour un certain nombre de raisons complexes (quantité insuffisante de gaz promise, absence de pipeline), l'Azerbaïdjan, le Turkménistan et le Qatar ne font pas partie du lot.

Ce n'est pas pour demain non plus que l'administration Obama autorisera l'Union européenne à importer de l'énergie de l'Iran, et ce, même si l'accord sur le nucléaire iranien (qui bat de l'aile) était signé d'ici la fin de 2014, ouvrant sans doute la voie à la levée des sanctions.

Les marchés « irrationnels » voient ce qui se passe vraiment. Loin d'être « irrationnels », ils fluctuent en fonction des profits à tirer de la realpolitik.

Tout ceci se passe avant même que Moscou n'ait donné la réplique. Le coup pourrait être fatal, s'il vise les exportateurs de l'Union européenne vers la Russie et même l'approvisionnement en énergie de la Russie. L'Union européenne va ensuite riposter, puis la Russie rappliquera. C'est exactement ce que souhaite Washington : une guerre commerciale et économique ravageant et divisant l'Eurasie.

Et ces vingt mille milliards de dollars ?

Sur le plan politique, l'Ukraine et l'Union européenne avaient initialement convenu de « repousser à la fin de 2016 l'entrée en vigueur de l'accord d'association avec l'Union européenne ». Ça ne s'invente pas. C'est exactement ce qu'a fait Victor Ianoukovytch en novembre dernier, car il savait que l'Ukraine ne pouvait se permettre de perdre un partenariat commercial certifié avec la Russie en faveur d'un vague « libre échange » avec l'Union européenne. Cette décision de « repousser » l'accord a été supervisée par ce parangon de médiocrité qu'est José Manuel Barroso, le président sortant de la Commission européenne.

Lors d'une séance plénière, le Parlement européen à Strasbourg s'est empressé de ratifier l'accord d'association avec l'Ukraine [1], au moment même où le président Petro Porochenko le déposait au Parlement ukrainien. Ce qui ne veut pas dire que l'accord entre immédiatement en vigueur. « L'intégration » économique avec l'Union européenne, l'euphémisme utilisé pour nommer l'invasion à sens unique de produits de l'Union européenne en Ukraine, ne débutera qu'en janvier 2016. Il ne faut pas s'attendre non plus à ce que l'Union européenne, frappée par la crise, accueille l'Ukraine en son sein prochainement (si elle le fait).

Ce jeudi, Porochenko va rencontrer son maître, le président des États-Unis Barack Obama, et prendra la parole au cours d'une séance conjointe des deux chambres du Congrès américain. Attendez-vous à de la rhétorique concernant « l'empire du mal » aux proportions intersidérales.

Mais c'est samedi à Berlin que les vraies choses vont se jouer, pendant les négociations sur l'énergie entre la Russie, l'Union européenne et l'Ukraine. Inutile de rappeler que Moscou a toutes les principales cartes dans son jeu.

La dette colossale de Washington a pratiquement atteint vingt mille milliards de dollars, et continue de grossir. Avec une crise monstrueuse qui s'approche comme un tsunami infernal, il ne faut pas s'étonner que Washington ait recours à la tactique de diversion parfaite : le retour de « l'empire du mal ». Les écoles d'études politiques s'inspirant des Marvel Comics ont de nouveau la cote, semble-t-il.

La Russie possède un énorme surplus de capitaux étrangers et est en mesure d'affronter la tempête. Par contre, la première économie de l'Union européenne qu'est l'Allemagne souffre déjà. Elle a déjà une croissance négative s'établissant à -0,2 %. C'est dans cette direction que le vent de l'imposition hystérique de sanctions souffle, en faisant dérailler davantage les économies de l'UE. Mais personne n'est prêt à parier que l'Union européenne aura le cran nécessaire pour résister à Washington. Surtout pas à Bruxelles, où les vassaux sont légion.

vendredi, 19 septembre 2014

Russland schmiedet Asien-Partnerschaft mit Wirtschaftsmacht Indien

Russland schmiedet Asien-Partnerschaft mit Wirtschaftsmacht Indien

 
VladPout.jpgDer Gipfel der Shanghaier Organisation für Zusammenarbeit (SOZ) in der tadschikischen Hauptstadt Duschanbe hatte ein zentrales Thema: die Sanktionspolitik der USA und der EU gegen Russland wegen des Ukraine-Konflikts. Der russische Staatspräsident Wladimir Putin nutzte den Gipfel, um weitere Verbündete für eine weltweite Gegenstrategie gegen den Wirtschaftskrieg des Westens zu gewinnen.

Russland wird 2015 statutenmäßig den SOZ-Vorsitz übernehmen und will dies für einen weiteren Aufbau dieser Organisation nutzen. Aktuell gehören der Organisation die Volksrepublik China, Russland, Usbekistan, Kasachstan, Kirgisistan und Tadschikistan an.

Indien soll als neues SOZ-Mitglied gewonnen werden

In der Vergangenheit scheiterte eine Aufnahme der Wirtschaftsmacht Indien an schwelenden Grenzkonflikten mit China. Diese Konflikte sollen nun unter Vermittlung Russlands ausgeräumt werden. Moskau und Peking haben große Pläne mit der Organisation: Neben einer SOZ-Entwicklungsstrategie bis 2025 sollen ein Regierungsabkommen über die Förderung der internationalen Frachttransporte von Fahrzeugen sowie die Gründung einer SOZ-Bank auf Basis der Eurasischen Entwicklungsbank vorangetrieben werden.

Bereits jetzt arbeiten China und Indien im Rahmen der BRICS-Staaten an einer alternativen Weltwirtschaftsordnung als Gegengewicht zu den USA und haben dazu bereits Mitte Juli eine „alternative Weltbank“ mitbegründet. 

dimanche, 14 septembre 2014

Henry Corbin: Eurasia como concepto espiritual

Henry Corbin: Eurasia como concepto espiritual

Ex: http://culturatransversal.wordpress.com 

Por Claudio Mutti*

Desde Irlanda a Japón

corbin.jpg“Subrayar y enfatizar las conexiones, las líneas de fuerza en las que se sustenta la trama del concepto espiritual de Eurasia, desde Irlanda a Japón” (1): a esta preocupación de P. Masson Oursel, que se inspira en un programa esbozado en 1923 en la Philosophie comparée y proseguido en 1948 en La Philosophie en Orient (2), Henry Corbin (1903-1978) le atribuye un “valor especial” (3). Trascendiendo el nivel de las determinaciones geográficas e históricas, el concepto de Eurasia viene a constituir “la metáfora de la unidad espiritual y cultural que recompondrá al final de la era cristiana en vista de la superación de los resultados de ésta” (4). Estas son, al menos, las conclusiones de un estudioso que en la obra corbiniana ha descubierto las indicaciones idóneas para fundar: “aquella gran operación de hermenéutica espiritual comparada, que es la búsqueda de una filosofía – o mejor dicho: de una sabiduría – eurasiática” (5). En otras palabras, la misma categoría geofísica de “Eurasia” no es más que la proyección de una realidad geosófica vinculada a la  Unidad originaria, puesto que “Eurasia” es, en la percepción interior, en el paisaje del alma o Xvarnah (“Luz de Gloria”, en el léxico mazdeo), la Cognitio Angelorum, la operación  autológica del Anthropos Téleios, o incluso, por último, la unidad entre el Lumen Naturae y la Lumen Gloriae.   De aquí la posibilidad de acercar a Eurasia con el conocimiento imaginal de la Tierra como un Ángel” (6).

Es el mismo Henry Corbin quien evoca la experiencia visionaria del filósofo alemán Gustav Theodor Fechner, que identificó con la figura de un Ángel el rostro de la tierra envuelta de luz gloriosa, y para citar el pasaje concordante de un ritual avéstico: “Celebramos esta liturgia en honor de la Tierra, que es un ángel ” (7). De hecho, según la doctrina mazdeísta, a la Tierra se la percibe en la “persona” de su Ángel, cuando el alma, proyectando la imagen de sí misma, crea una Imago Terrae que la refleja. La angelología mazdeísta traduce el misterio de esta proyección de la siguiente manera: Spenta Armaiti, Arcángel femenino de la existencia terrenal, es la madre de Daena, el Ángel femenino que sustancia a la Alma caelestis,  el Cuerpo de Resurrección.  De esta manera, “la formulación misma de la categoría geofísica de “Eurasia” pertenece al proceso de palingenesia, que es la Resurrección a la luz de la Transfiguración ” (8).

La geosofía mazdeísta, íntimamente vinculada con la esencial característica sofiánica de Spenta Armaiti , se refiere principalmente a una Tierra celeste; aplicada al espacio terrestre, se nos presenta un kyklos, un orbis, similar a lo que Homero ha simbolizado en el escudo de Aquiles y Virgilio en el de Eneas (9), es decir, para permanecer en el ámbito iránico, con ese atributo del Hombre Universal (insân-e kâmil) que es la Copa de Jamshid.  En esta representación, la Tierra está rodeada del océano cósmico y dividida en siete zonas (Keshvar) (10); en el centro de la zona central, llamada Xvaniratha (“rueda luminosa”), “se encuentra Airyanem Vaejah (pahlavi Erân-Vêj), la cuna o germen de los Arios (= Iránicos).  Es allí donde se crearon los Kayanidi, los héroes legendarios; es ahí donde fue fundada la religión mazdeísta, desde donde se difunden a los otros Keshvar; es allí donde nacerá el último de los Saoshyant quién reducirá a Ahriman a la impotencia y llevará a cabo la resurrección y la existencia venidera”(11).  Situado al centro de la superficie de la tierra, Irán se nos presenta por lo tanto, como “bisagra, no sólo geográfica, sino también y sobre todo espiritual” (12), de la ecúmene eurasiática.

La representación mazdeísta, posteriormente reelaborada, pasó a formar parte del legado cultural que Irán le trasmitió al Islam.  En el Kitab al-Tafhîm de Abû Rayhân Mohammad ibn Ahmad Bîrûnî (362 / 973 – 421 / 1030) (13) se encuentra un esquema en el cual el círculo central, Irán, está rodeado de otros seis círculos, tangentes entre sí, que corresponden a otras tantas regiones: India, Arabia y Abisinia, Siria y Egipto, la zona bizantino-eslava, el Turquestán, China y el Tíbet.

Oriente y Occidente

 

Según la perspectiva islámica, el centro del mundo terrestre se encuentra en la Kaaba, el más antiguo de los templos de Dios, inicialmente construido en la época de Adán, después edificado por Abraham en su forma actual. En la planta y la estructura de este santuario primordial y central meditó Qâzî Sa‘îd Qommî (1042/1633 – 1103/1691- 92) en el primer capítulo de la Kitâb asrâr al-Hajj (“El sentido esotérico de la Peregrinación”), que constituye el objeto de un minucioso estudio de Henry Corbin (14). “Siempre entra en juego – dice éste último – el mismo principio: las formas de luz (sowar nûrîya), las figuras superiores se imprimen en las realidades de abajo que son sus espejos (subrayemos que, geométricamente las consideraciones elaboradas aquí seguirían siendo válidas sí se tomara como objeto de meditación la forma del templo griego)” (15). Ahora, en el plano superior de las Realidades-arquetipos […] encontramos cuatro “límites metafísicos” (16), dos de las cuales (la Inteligencia Universal y el Alma Universal) se encuentran al este de la realidad ideal, mientras que las otras dos (la Naturaleza Universal y la Materia Universal) se encuentran hacia el oeste. La ley rigurosa de las correspondencias exige que en el plano de la Ka’ba terrestre, los ángulos estén igualmente dispuestos según el mismo orden de relación: “Dos de estos ángulos están hacia el oriente: el ángulo en el que está encajada la Piedra Negra (el ángulo iraquí) y el ángulo yemenita; los otros dos están al occidente: el ángulo occidental y el ángulo sirio “(17).  Son estos dos orientes (mashriqayni) y los dos occidentes (maghribayni) los que alude el versículo 17 de la sura del Misericordioso, puntualmente citado por Corbin.

El versículo coránico llama a otro, el que comienza con las palabras: “A Dios pertenece el Oriente y el Occidente” (sura de la Vaca, 115).  “Gottes ist der Orient! – Gottes ist der Okzident!”: es la forma en que la reconstruye Wolfgang Goethe, a quien Corbin nos muestra más de una vez la convergencia con la sabiduría islámica.  Pero la pareja “Oriente-Occidente ” retorna en el versículo de la Luz, en parte reportado en el epígrafe al primer capítulo de su estudio sobre El hombre de luz en el sufismo iranio: ”… una lámpara que arde con un aceite de olivo que no es ni de Oriente ni Occidente, inflamándose sin necesidad siquiera de que el fuego la toque… Y es luz sobre luz.

“Entre Oriente y Occidente, como entre Norte y Sur, recorren líneas ideales de las cuales dependen no sólo la orientación geográfica, sino también la categoría antropológica. En la perspectiva del simbolismo espiritual, estas direcciones horizontales asumen un sentido en base al modo en que el ser humano experimenta la dimensión vertical de su presencia en el espacio y en el tiempo; y es una orientación de este género lo que constituirá uno de los principales temas del sufismo iranio: “es la búsqueda de Oriente, pero se nos advierte, por si acaso no lo comprendamos desde el primer momento, que se trata de un Oriente que no se encuentra en nuestros mapas geográficos ni puede ser situado en ellos. Este Oriente no está incluido en ninguno de los siete climas (los keshvar); es, de hecho, el octavo clima. Y la dirección en que este “octavo clima” debe ser buscado no está en la horizontal sino en la vertical. Este Oriente místico suprasensible, lugar del Origen y el Retorno, objeto de la búsqueda eterna, está en el polo celeste; es el Polo, un extremo norte, tan extremo como el umbral de la dimensión del más allá” (18).  La geografía sagrada de Irán hace corresponder a este Polo celeste a la montaña cósmica de Qâf, donde comienza aquel mundo de Hûrqalyâ que es iluminado por el sol de medianoche. Es la tierra de los Hiperbóreos (19), los cuales “simbolizan al hombre cuya alma ha alcanzado tal perfección y armonía que está libre de negatividad y de sombra; no es ni de Oriente ni de Occidente” (20).

Ishraq, nombre verbal, que en árabe significa el irradiar del sol desde el punto del cual surge, es un término peculiar de la sabiduría islámica de Irán.  Ishrâqîyûn o Mashriqîyûn (“Orientales”) son los sabios de la antigua Persia, llamados así “ciertamente no sólo por su ubicación geográfica, sino porque su conocimiento era oriental, en el sentido que se fundamentaba sobre la revelación interior (kashf) y la visión mística (moshâhadat) “(21).  Sin embargo, el significado del Oriente como un Oriente iluminativo, dirección que conduce al Polo espiritual, no es un concepto que caracteriza exclusivamente al pensamiento tradicional iranio. “Esta orientación se daba ya a los mistagogos del orfismo. Se la encuentra en el poema de Parménides donde, guiado por las hijas del sol, el poeta emprende un viaje hacia Oriente. El sentido de las dos direcciones, derecha e izquierda, Oriente y Occidente del cosmos, es fundamental en la gnosis valentiniana. (…) Ibn ‘Arabi (1240) eleva a símbolo su propia partida a Oriente; del viaje que de Andalucía le lleva hacia La Meca y Jerusalén hace su Isra’, homologándolo a un ékstasis que repite la ascensión del Profeta de cielo en cielo hasta el “Loto del límite”. Aquí el Oriente geográfico, “literal”, se convierte en símbolo del Oriente “real”, el polo celeste” (22).

Umbilicus Terrae

En la geografía sagrada resultante de las exploraciones espirituales de Henry Corbin, el extremo occidental de Eurasia está representado por las Islas Británicas. Aquí los fieles de la iglesia celta primitiva fueron designados en irlandés como céle Dé: denominación que equivale a Amici Dei, “se encuentra en la gnosis islámica (Awliyâ’ Allâh) y en la mística renana (Gottesfreunde)” (23).  Estos Coli Dei, “establecidos en York (Inglaterra), en Iona (Escocia), en el país de Gales y en  Irlanda, su símbolo fundamental era la paloma, como símbolo femenino del Espíritu Santo.  Desde esta perspectiva, no resulta extraño encontrar el druidismo mezclado a su tradición y los poemas de Taliesin integrados a sus corpus.  Igualmente, la epopeya de la Mesa Redonda y la Demanda del Santo Graal han sido también interpretadas en relación con los ritos de los Coli Dei” (24). A esta misma hermandad espiritual es reconducida la existencia del santuario de Kilwinning, sobre la montaña de Heredom, desde donde se irradió aquel Orden Real por el cual el rey Robert I Bruce se habría afiliado a los Templarios, realizando la convergencia entre el celtismo y el templarismo.

En la otra extremidad de Eurasia se extiende la China “el límite del mundo humano, del mundo que puede ser explorado por el hombre en las condiciones de la conciencia común” (25).  Por otra parte, influencias taoístas se habrían ejercido sobre la hierocosmologia del sufismo centroasiático y sobre algunas técnicas de recitación del dhikr adoptadas por la escuela de Najm Kobra (26). Entre los templos que se levantan en los confines de China hay uno, descrito en el siglo X por el historiador árabe Mas‘ûdî (27), que en su estructura obedece al paradigma arquitectónico de los templos sabeos; el mismo Mas‘ûdî había visto aquel de Harrán (la antigua Carrhae), y pudo todavía leer en el umbral la inscripción de tenor platónico: “Aquél que se conoce a sí mismo es deificado” (Man ‘arafa nafsahu ta’allaha). “Inscripción de tenor platónico” (28), cierto, en el que “el término técnico árabe es el equivalente de la theosis de los místicos bizantinos” (29), pero también la explicación del precepto délfico, que finalmente será validado en el hadîth qudsî: “Quién se conoce a sí mismo conoce a su Señor ” (Man ‘arafa nafsahu ‘arafa rabbahu). Mientras tanto, los hermetistas sabeos de Harrán aportarán en dote al Islam su herencia, derivada de una antigua sabiduría siríaca o siriobabiloniense reinterpretada a la luz del neoplatonismo.

Equidistante de Escocia y China está Al-Quds, “la ciudad santa” por antonomasia. En el lugar donde inició la Asunción el Mensajero de Dios – según Corbin un verdadero Umbilicus Terrae – “asume ahí una función homóloga a la de la Piedra Negra en el templo de la Ka’ba” (30), la Cúpula de la Roca (Qubbat al-Sakhrat). Este edificio, comúnmente llamado la Mezquita de Omar, “tiene la forma de un octógono regular culminado por una cúpula; fue el prototipo de las iglesias templarias construidas en Europa, y la cúpula fue el símbolo de la Orden y figuraba en el sello del Gran Maestre” (31). Este entrelazamiento de líneas espirituales diferentes hace de Jerusalén el simbólico edificio microcósmico, en el que se refleja la multiplicidad tradicional del macrocosmos eurasiático, aquella multiplicidad de formas que Henry Corbin nos presenta en su unidad esencial.

La oposición radical entre Jerusalén y Atenas, identificadas como polos emblemáticos respectivamente del monoteísmo y el politeísmo, es el punto donde convergen entre ellos los zelotas de las supuestas “raíces judeo-cristianas” de Europa y algunos defensores de un malentendido “paganismo” griego.  Sostener una posición de este tipo, queriendo reducirle a un esquema ideológico a una relación más bien profunda, compleja y articulada de cuanto no se imaginan los “judeo-cristianos” y “neopaganos”, significa ignorar cómo la más rigurosa doctrina metafísica de la Unidad (el Tawhid integral de la metafísica islámica) no excluye de hecho la multiplicidad relacionada a la jerarquía de los Nombres Divinos. Entre los que han entendido perfectamente lo anterior, está justamente Henry Corbin, quien, mediante el establecimiento de una ideal “comparación, por una parte entre Ibn ‘Arabî  (…) y Proclo, por otra” (32) y recordando el comentario del jefe de escuela de Atenas al Parménides platónico, evoca el encuentro de los físicos de la escuela jónica con los metafísicos de la Escuela Itálica, unos y otros se encuentran en la ciudad-símbolo de Atenas para participar en las Panateneas. “Celebrar esta fiesta – él escribe- es encontrar en la escuela ática de Sócrates y Platón la mediación que eleva los dos extremos a un nivel superior” (33).

 

1. Henry Corbin, L’Iran e la filosofia, Guida, Napoli 1992, p. 62.

2. P. Masson-Oursel, La Philosophie en Orient, in Histoire de la philosophie, a cura di É. Bréhier, Paris 1948, 1° fasc. suppl.

3. Henry Corbin, L’Iran e la filosofia, cit., ibidem.

4. Glauco Giuliano, Nitartha. Saggi per un pensiero eurasiatico, La Finestra, Lavis 2004, p. 14

5. Glauco Giuliano, Nitartha, cit., p. 221

6. Glauco Giuliano, Nitartha, cit., p. 16.

7. Sîrôza, vigésimo octavo día, op. cit.: Henry Corbin, Cuerpo espiritual y Tierra Celeste. Del Irán mazdeísta al Irán chiíta, Ediciones Siruela, Madrid, 1996, p. 37.

8. Glauco Giuliano, Nitartha, cit., p. 16, n. 25.

9. Ilíada, XVIII, 478-608; Eneida, VIII, 626-728.

10. La división septenaria del espacio terrestre que se repite en otras culturas tradicionales: cf. Claudio Mutti, Gentes. Popoli, territori, miti, Effepi, Genova 2010, pp. 19-20.

11. Henry Corbin, Cuerpo espiritual y Tierra Celeste, cit., p. 51.

12. Glauco Giuliano, Nitartha, cit., p. 22.

13. Henry Corbin, Historia de la Filosofía. Del mundo romano al Islam Medieval, vol. 3. Siglo veintiuno editores, México DF, 1990, pp 307-308.

14. Henry Corbin, Templo y contemplación, Editorial Trotta, Madrid, 2003, pp. 181-257.   Sobre Qâzî Sa’îd Qommî, cf. Henry Corbin, Historia de la Filosofía. La Filosofía en Oriente, vol. 11. Siglo veintiuno editores, México DF, 1990, p. 154-157

15. Henry Corbin, Templo y contemplación cit., p. 206.

16. Henry Corbin, Templo y contemplación cit., p. 207.

17. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 207.

18. Henry Corbin, El hombre de luz en el sufismo iranio, Ediciones Siruela, Madrid, 2000, p. 20.

19. Sobre la Hiperbórea y similares representaciones tradicionales de la septentrional “Tierra de luz”, cf. Claudio Mutti, op. cit., pp 15-23.

20. Henry Corbin, El hombre de luz en el sufismo iranio, cit., p. 56.

21. Henry Corbin, Storia della filosofia islamica, cit., p. 211.

22. Henry Corbin, El hombre de luz en el sufismo iranio, cit., págs. 73-74.

23. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 342 n. 217.

24. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 342.

25. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 132.

26. Henry Corbin, El hombre de luz en el sufismo iranio, cit., pp. 72 y 77 y ss.

27. Mas’ûdî, Les prairies d’or, ed. e trad. Barbier de Maynard, Paris 1914, vol. IV, p. 52.

28. Henry Corbin, Templo y contemplación,  cit., p. 133.

29. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 133, n 7.

30. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 351.

31. Henry Corbin, Templo y contemplación, cit., p. 334.

32. Henry Corbin, La paradoja del monoteísmo, Editorial Losada, Madrid, 2003, p. 22.

33. Henry Corbin, La paradoja del monoteísmo, cit., p. 30.

 

* Claudio Mutti es licenciado en Filología Finohúngara por la Universidad de Bolonia. Se ha ocupado del área cárpato-danubiana desde un perfil histórico (A oriente di Roma e di Berlino, Effepi, Genova 2003), etnográfico (Storie e leggende della Transilvania, Oscar Mondadori, Milano 1997) y cultural (Le penne dell’Arcangelo. Intellettuali e Guardia di Ferro, Società Editrice Barbarossa, Milano 1994; Eliade, Vâlsan, Geticus e gli altri. La fortuna di Guénon tra i Romeni, Edizioni all’insegna del Veltro, Parma 1999). Entre sus últimas publicaciones están Gentes. Popoli, territori, miti, (Effepi, Genova 2010), L’unità dell’Eurasia (Effepi, Genova 2008), Imperium. Epifanie dell’idea di Impero (Effepi, Genova 2005).

vendredi, 05 septembre 2014

India and Japan must propel the Eurasian juggernaut

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Railway highways in Eurasia

India and Japan must propel the Eurasian juggernaut

 

By Atul BHARDWAJ (India)

Ex: http://orientalreview.org

The breakup of Sino- Soviet ideological alliance was Kissinger’s unkindest cut of the Cold War. A strong socialist consolidation could have offered a vigorous challenge to transatlantic hegemony. Not only did Kissinger create schisms within the communist ranks, he also made sure that India and Japan, the Asian giants, disenchanted with the West, were kept away from the probable Eurasian formation. The death of Stalin and the Japanese and the Indian elite joining the American’s anti-communist war, made China feel isolated and vulnerable. In early 1970s, China formally abandoned the communist bloc to become partners with capitalist America.

 

Almost 25 years after the end of Cold War, the specter of a budding Sino-Russian alliance is once again giving America sleepless nights. America is palpably worried because the post cold war Russia-China alliance is not standing on ‘love and fresh air’ of ideology. This new Eurasian ties are being built on strong fundamentals – Chinese economic and financial might combined with Russian resolve and military power. It is built on the common belief, that “unipolarity is pernicious” and needs to be challenged.

 

The formation of the BRICS bank – China’s proposal of a new “economic Silk Road” linking Germany, Russia and China coupled with the Russian Defence Minister Sergei Shoigu’s announcement of the prospects of extending the Siberia railway line through Western Mongolia to Urumxi, China, and from there to Pakistan and India are not just bold but path breaking moves.

 

The year 2014 is fast turning out to be a year where the discourse is increasingly veering towards currency swap and connectivity corridors. Neither the Silk Road nor the currency swaps ideas are new. However, the current Chinese economic diplomacy overtures have gained greater salience due the fact that Russia, with hydrocarbon trade estimated at approximately a trillion dollars per year has abandoned the “petro-dollar” as the trading unit for oil and gas transactions. Coupled to this development is the fact that China, the second biggest economy in the world and a top importer of oil is inching closer to Russia and earnestly “seeking oil trading arrangements with its major suppliers, including Russia, Saudi Arabia, Iran and Venezuela, based on exchange of national currencies.” It is reported that by 2018 Russia would be pumping into China 38 billion cubic meters of natural gas per year with “transactions to be valued in the Russian ruble, Chinese yuan or possibly in gold.”

 

These developments have already caused jitters in the U.S. stock markets and rising levels of global skepticism related to the future of dollar as a reserve currency. Tensions are also building up in the Black Sea where it was recently reported that the American warship are unnecessarily loitering around with a hope to threaten President Putin. Russia is well versed with this futility inherent in the American gunboat diplomacy. Such maneuvers on the high seas were common during the Cold War, when the Soviet and the US warships, bound by the rules of engagement, used to engage in a peaceful duel, with both just engaging in harassing each other by showing off ship handling skills or by training the missiles from left to right.

 

The question is will the churning in the global political economy lead to increased muscle flexing and gunboat diplomacy by the US or will the dwindling dollar usher in a new era of genuine multi-polarity in the international order. However, before we move further, it must be clarified that the decline of the US in the 21st century is not absolute. It is merely relative to the remarkable growth of China. What is happening today is not the liquidation of the US Empire but the shaking of its foundation? The rise of China from a state of poverty and Russia from a state of strategic dormancy does open up the international order, offering more choices to emerging economies like India.

 

This time India should not fall into the American trap and betray the BRICS and thus the emerging Eurasian formulation. This is probably the world’s best chance to tame Western hegemony. India along with Japan should not fretter away this opportunity merely because of a tiny Senkaku island and Shinzo Abe’s fetish to turn Tokyo into a military garrison.

 

It is high time that the proposal of a new “maritime silk road” is not seen as Chinese stratagem, a devious scheme to deceive the region and establish hegemony, but a broader strategy to enhance connectivity across Asia, offering a fresh model to catapult the region out of the territorial trap. The Russo-Chinese baby steps to move out of the U.S. underwritten system of dollar dominance, and perpetual insecurity to chart a new world order.

 

The writer is a senior fellow of the Indian Council of Social Science Research, Institute of Chinese Studies. He is an alumnus of King’s College, London.

mardi, 02 septembre 2014

Russian-Iranian Relations Strengthen Amidst International Sanctions

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Author: Steven MacMillan

Ex: http://journal-neo.org

Russian-Iranian Relations Strengthen Amidst International Sanctions

As the sanctions against the Russian government continue to be implemented by western nations, Moscow has been forced to look to Asia for economic and strategic partnerships. The Kremlin has been negotiating significant trade deals with two giants in the region for years now, with the prospect of a new geopolitical reality emerging if Russia, Iran and China continue to forge stronger ties into the future.

At the beginning of August, Russia and Iran signed a historic $20 billion oil deal which will see the two nations enhancing cooperation within the “oil and gas industry”, in addition to strengthening economic collaboration. The deal proposes that Russia will assist Tehran in developing its energy infrastructure along with purchasing Iranian oil, in exchange for Iran importing consumer goods and agriculture products including wheat, leather, pulses and meat. Further talks are set to take place at the Russia-Iran intergovernmental commission meeting in Tehran on September 9-10, which will see the details of the deal cemented.

Relations between the two nations are complex and have ranged from collaborative to hostile in the last few decades, with a degree of tension existing between Moscow and Tehran over many issues today. The Caspian Sea is one dispute that has strained relations between the five bordering countries since the collapse of the Soviet Union in the early 1990’s. Russia, Iran, Kazakhstan, Azerbaijan and Turkmenistan are unable to agree on the legal portion owned by each state, in a sea which is home to vast deposits of oil and gas. Iran has also been displeased by Russia’s support of United Nations Security Council Resolutions which haveimposed sanctions on Iran over the past decade, stunting the development of the Iranian economy.

Yet the two nations have increasingly found themselves sharing the same geostrategic interests, especially in their support of Bashar al-Assad in his fight against western sponsored proxy forces in Syria. A closer strategic alliance with Iran could also benefit Russia through Tehran providing regional assistance to help stabilise the Caucasus and Central Asia. A vast amount of terrorist cells – which have close links to the CIA - have been active in the Caucasus for years now, in an effort to destabilise the underbelly of the Russia Federation.

A Resource Rich Alliance

The strength of Iran and Russia is underpinned by the two powers holding considerable deposits of oil and gas, and an increase in cooperation between Tehran and Moscow could be mutually beneficial considering the sanctions imposed on each state. Iran is a natural dominant player in the Middle East as it has the “fourth-largest proved crude oil reserves” on earth, along with the “world’s second-largest natural gas reserves”, in addition to having the 3rd largest population in the region – of over 80 million. Russia holds the largest natural gas reserves in the world along with the eighth largest proved crude oil reserves.

Moscow could be an essential importer of Iranian oil as the latest round of sanctions, imposed by the United States (US) and the European Union (EU) in 2011/2012, have had a sizable affect on the production and revenues received from the Iranian energy sector. Export revenues from oil and gas have plunged by47% in the fiscal year 2012/2013 to $63 billion, according to the IMF, compared to an export revenue of $118 billion the previous year. Russia has also announced it will build a rail line in the North of Iran, running from the city of Rasht on the Caspian Sea to Astara on the Azerbaijan border.

The decision by western leaders to impose sanctions on Russia in March has pushed Moscow closer to Iran and China, as well as strengthening the BRICS group and the Eurasian Economic Community. In May, Russia and China agreed what was hailed by many analysts as the ‘deal of the decade’; when the two powers signed a 30 year gas deal totalling $400 billion. China and Iran also plan to boost trade over the next 10 years by a factor of 5, with trade expected to reach $200 billion by 2024, compared to $40 billion in 2013. Iran is a major supplier of crude oil to China with demand set to remain high as Beijing is now the largest net importer of crude oil, surpassing the US in September of last year.

If the trend continues into the future, the emergence of a Russian-Iranian-Sino alliance would come to dominate the continent of Asia, and if truly independent of western influence, would seriously challenge the Anglo-American international order.

Steven MacMillan is an independent writer, researcher, geopolitical analyst and editor of  The Analyst Report, especially for the online magazine “New Eastern Outlook”.

samedi, 30 août 2014

Vladimir Poutine plaide toujours pour une grande alliance européenne

Vladimir Poutine plaide toujours pour une grande alliance européenne

Baudouin Lefranc.

jeudi, 24 juillet 2014

Russian Nationalism and Eurasianism

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Russian Nationalism and Eurasianism

 
 

The recent flurry of writing on Russian politics, nationalism and Alexander Dugin shows the contemptible inability of western savants to apprehend any idea beyond the cliche's of stagnant neo-liberalism. Worse, “Russia specialists” in academia are now tripping over themselves trying to “analyze” Dugin and the Eurasianist idea. Bereft of the vocabulary to understand the concept, they merely apply fashionable labels from western political thought onto Russia in a pathetic and pretentious attempt to show how “dangerous” such ideas are to “European values.”

Reading A. Toynbee, especially Volumes IV-VI of his Study of History, lead one to question both the “civilizational” fundament and, later, his “higher religion.” The problems are not that, at such a level of analysis, he is inaccurate. Such an epic level of perspective cannot be held to the sharp standards of accuracy that a study of, say, the state of New Hampshire might be subject. The very nature of such a sweeping history means that, in the main, he might be seen as “more or less” on the right track. That is as far as one can go. However, that begs the question, since the very concept of such an epic orientation is open to doubt.
 
Equally sweeping is the general criticism of P. Sorokin and others, namely, that such a view of history is problematic because it isolates a few variables from the rest, making them extremely important. This means that others are minimized. This criticism gains force to the extent that one sees the knowledge required for any epic vista of history to work at all. One cannot know that much about global history to come to such conclusions. Those specializing in an element of a civilization (such as Hellenistic aesthetics) will easily annihilate sweeping generalizations. Hegel's desire to label entire epochs of history with one word means that such an approach cannot be true; unless one is willing to reduce epochs of civilization to slogans about them.
 
In the case of this present author, the concern has been to refuse such grand historical panoramas and focus instead on a single nation, or elements within a nation that lend themselves to detailed study. There, the actual living conditions of real people can be analyzed. The sweep of Toynbee, Hegel or Marx is interesting, but if the result is to then force all societies to follow that general model, then they should be left unread. Few deny the ability of Eric Voegelin, but again, outside of specialized studies on Plato or Marx, Voegelin's sweep is such as to make it interesting, but a fatal temptation to the study of actual historical life.
 
This preface is needed because the Eurasians fall into the same problem. They too, deal in civilizational norms, though their interest is very specific: defining the Atlantian civilization as against the Russian one. At the level of elite society, this is useful. Western elites, generally speaking, are of one mind in their commitment to science, secularism, individualism (in theory), capitalism, positivism and empire. There is nothing strange about this. Toynbee, in areas in which he is well schooled (such as Greek antiquity), becomes extremely important. When he generalizes this experience to medieval Hindustan, however, he becomes less tenable.
 
Identity and foreign policy go hand in hand. Domestic and foreign policies are closely linked. In Russia's case, her sense of corporate selfhood has changed radically since the fall of the Marxist empire in the early 1990s. Russia's foreign policy has changed as her global status has changed, and the debate among the different factions of Russian life has dominated her foreign policy. The purpose in this paper is to define, in specific terms, the nature of a Russian, Eurasianist foreign policy. Eurasianism is a popular foreign policy idea in elite Russian circles and therefore, must be taken very seriously by scholars (Shlapentokh, 2007).
 
Russia is a state and nation. It is also a broader based civilization taking in many ethnic groups to herself. This means that its values and virtues are far more than the result of specific historical conditions, but are, in some sense, eternal virtues that give life meaning. There are “civilizational” values that take what is crucial in those nations the civilization encompasses. These are not ethnic groups (which are much smaller) but refer to “imperial” ideologies that can rule many different groups and are formulated precisely to justify the rule of a large and diverse policy. Examples of such civilizations might be Chinese, Indian or African. These go beyond historical experience and are supposed to contain greater truths.
 
The concept of a “Russian civilization” undergirds the vision of the Russian Eurasianists. This is both a political theory and a source of foreign policy decisions. The “imperial mission” of a society is not about local values, but cosmic ideas. In politics, these “imperial ideologies” serve as the foundation of global rule.
 
Eurasianism as foreign policy refers to Russian geopolitical space. Russia is a “cosmos,” it takes smaller “solar systems” under its wing to create a loose federation of allied nations and states. In some instances, it rejects the very notion of “nation-statism” in that a true civilization can be only a federation, not a state. 
 
I. Ideological History of Eurasianism
 
Prior to the well known Alexander Dugin, Eurasianism has a rich ideological heritage unknown to those who cannot read Russian. PM Bitsilli (1953) took a broad look at global history. “Rhythm” is specific to a people. It is dialectical both in that it is becoming (rather than being) and takes the familiar trinity as undifferentiated unity – fragmentation – reflective unity. This also was essential to the metaphysics of Karsavin. Rhythms differ radically, but they still partake of the same formula.
 
Finally, inertia is the third element. Dialectic, rhythm and inertia govern the historical process. Tribal life is unreflective, yet, historical forces and local conditions force a chaotic mixing of tribes that are more or less compatible. Finally, in the construction of the ethnos, a reflective unity is created as conditions now exist for reason, thought and the development of the historical person.
 
In his “Tragedy of Russian Culture,” Bitsilli takes the common Eurasian position that “progress” and “history” are both loaded and ideological terms which contrast all existence with that of the west. That is to say, the lineal development of mechanized and commercial capitalism is the standard of global development. For Bitsilli, culture is the “self-disclosure” of the personality en masse. It is an overcoming of history in the sense that this self persists through time. 
 
PN Savitsky (1968) focused his research on the primordial argument for national, that is, ethnic development. Tribes mix together to form ethnicities. This mixing is not arbitrary, but can only take place among groups who share significant elements in common. This mixing, further, is also not arbitrary due to its context. As is common in this doctrine, climate, topography and local resources are extremely significant in the development of a decentralized tribal life into early forms of ethnic groups. Organizations of peoples, as they come out of their tribal background, take from local conditions. Thus, territory is significant and becomes a part of the development of the national unit. 
 
The soil literally is incorporated into the flesh of the people. Local resources, soil conditions and the general environment become a part of the physical makeup of ethnicities. Soil conditions are aspects of topography in that they are dependent on it. The ethnic group then becomes like its surroundings: an organic whole.
 
Ethnicities developing near the shoreline, all other things equal, develop into mercantile states. They think globally in terms of markets and resources.  Russia, on the other hand, is a land and forest based community and does not, as a result, develop the trading ethic to the extent that the Greeks or Phoenician have. This is not to argue that these conditions determine outcomes. They only provide dispositions.
 
Savitsky stresses that the Mongol occupation was not destructive for Russia, but quite the opposite. The Horde was a culturally advanced people who protected Russia from the inroads of western religious ideology. All occupied lands, so Savitsky and Most Eurasians would argue, did well under Mongol administration. 
 
In terms of politics, Savitsky argues that linear progress is a myth. Social organisms run in cycles, repeating some basic institutions but adding and subtracting others. The state, in the sense of its Cultural Constitution, requires a unity of religion and basic moral foundations in order to carry out even minimal tasks. The cultural and religious unity obviates the need for a strong state, administratively speaking.
 
Most importantly, Savitsky argued as early as 1928 that the future belongs to Asia. After World War I and storm clouds brewing over Europe, this was not a ludicrous idea. It is even more significant now. The simple idea that can be drawn from the prophetic words of Savitsky is that Europe destroyed itself in two world wars, went broke during the “Cold War” and, as of 2014, has little to offer the east. To reject “Europe” is to make a realistic judgment about the state of their finances, elites and economic foundations.
 
Of course, the most significant Eurasianist, and the most verbose, is Alexander Dugin. His work is generally more esoteric than the rest, arguing that the ancient symbolism of east and west points to two sorts of civilization: the sea based and the land based. What makes Dugin attractive to those who can read the language is his use of Plato to ground a new vision of the nation and its context, the civilization.
 
What the west lacks is the concept of higher meanings. Nominalism and positivism, the two official ideologies of western thought (in general) see objects per se. Nominalism argues that there are no necessary connections among things in society or nature, there are merely individual acts, people or institutions. Dugin, using Plato, argues that the “object” is merely phenomenal, not real. “Realism” is the view, assumed by positivism and nominalism, that there are two entities only: the observer and the observed. This is naive because there can be no way to prove the existence of actual objects solely based on perception.
 
The nominal has no purpose. They are random individual things that might form a system for “mutual advantage.” Its social applications are obvious. However, to oversimplify, objects and particulars exist only in a context, and that context soon becomes the All, or the single set of relations that make up the cosmos. Each is dependent on all. Dugin's critique of the west, given this simplistic model, is that western man has been trained to see objects as “facts,” brute givens that are only provided with meaning by man, and that usually refers to a political or scientific elite. All is reduced to the “practical,” and as a result, all meaning is lost.
 
The west replaced natural law with markets. Markets took science and make it an appendage of commercial dominance. The concept of pure mechanism, the product of the Renaissance, was to create a world, one imposed upon the real one, that reduced matter to a machine that can be taken apart and put back together in the form of man-made technology. This is the essence of capitalism (and has no relation to the market model). Capitalism is based on egocentricity, the denial of private property except for the few, and, perhaps most important, that morals and culture have no place in “rational” economics.
 
Socialism is quite similar. It is obsessed with technology, science and production as ends in themselves. Power may be reached by different means, but it all comes down to economics. Capitalism and socialism depend, not on intelligence, but on deviousness. The Marxist critique of capital is correct as far as it goes. Economics is inherently historical, egocentrism can never create stability and capital functions by using labor as a tool.
 
These are not the only options. Eurasianism, as economics, is based on the concept that economics is not a field in itself. It may not make its own rules, but is subordinated to the common good of the community. Competition always has a place, but so does cooperation. Production is culturally specific in nearly every way, only that globalization has gone very far in standardizing its methods.
 
Nations exist. They create states. However, with the possible exception of great states such as Russia and China, autarky is not rational. Regionalism is the response. For Dugin, several civilizational spaces exist: Eurasia, Africa, the Far East and Europe. These are now the actors in history. Nations retain their autonomy within their civilizational space, but the regionalism of Dugin seeks to retain the gains made by globalization while retaining local and regional sovereignty. The result is a multipolar world.
 
Globalization is western ideology and scientific culture masquerading as “reason” itself; as science per se. It is the rebirth of Atlantis, the necropolis, the world of Twilight, or unreality. Both Dostoevsky and Gogol used these metaphors to describe St. Petersburg. Atlantis lives on, deriving from the Phoenicians, and leading to the ruse of Venice in the High Middle Ages, then concluding with the English and institutionalized as a “global ideology” under the US. 
 
II. Basic Concepts of Eurasianism and the West
 
The discussion above does not even scratch the surface of the richness of Eurasian thought. It is a summary of some of the Russian-language literature. In a more understandable way, much of the Eurasian idea can be summarized in these points:
 
1.Communitarianism against nominalism. Identities are necessarily collective.
2.Non-alignment in global affairs.
3.Eurasianism holds that while nations exist, they are not self-contained. The political unit is the civilization, which is a federation of complimentary nations.
4.Culture is the essential tie among people in a nation or civilization. The quantifiable aspects of rule are highly limited and secondary. 
5.Russians are not Europeans, or at least not entirely European. Russians are mixtures of Slav, Mongol and Turkish blood that help inform their genetics. This means that Russians are genetically related to the Caucasian and some Central Asian peoples. In addition, this “third world” blood makes the Russians an ideal intermediary between Asia and Europe, or even Europe and the third world. (cf. Shlapentokh, 2007 for greater detail) 
6.The state (in its true sense as the cultural collective) should put its stamp on the economy. In general, public-private ownership mixes are essential for larger and strategic industry, while private ownership remains for small business. 
 
The Eurasian idea is one that both defines those within it as well as excludes those without. In this case, the “other” is the “West.” In the broadest of terms, the cardinal ideas of the West are these:
 
1.Egocentrism manifest as abstract rights rather than function, station or vocation. Rights are more rhetorical and strategic than real.
2.Democracy as necessarily proceeding from nominalism. This is not merely a “procedure” but a state of affairs. Democracy exists when liberalism does.
3.Materialism and secularism in public and economic life. In general, since rights have no discernible origin, utilitarianism becomes the official ideology by default. 
4.Liberal Messianism is crucial: liberalism needs to be imposed by force.
5.The west defines “state” as that which is bureaucratic and administrative.  
6.Liberal rhetoric sounds merely procedural. This is to mask the ideological core of liberalism which is essentially totalitarianism.
7.Politicians serve as window dressing for economic elites. When the economy fails, the politicians, who control nothing, are said to be at fault.
8.Evolution is part of the west's official ideology. It serves to a) secularize society, but more importantly, b) justify colonialism, industrial capitalism and “competition.”
9.“Rationality” is defined in purely economic terms.
10.“Science” and the “scientific establishment” are treated as identical. Science is defined as that which deals with formal and quantitative properties. This, in turn, is identical with the concept of “intelligibility.”
11.Liberalism rejects the “nation” as fiction, yet, holds formal quantity, the “international community,” and the isolated ego as palpable realities. 
 
These two views of the world are antithetical. The west views itself as the apex of human liberty while seeing the east as in need of western assistance.  Evolution is leading the world to the western idea, which was the purpose of the Darwinian system from the beginning. It is no accident that this view of the world arose from the height of English colonial rule and industrial development. Capitalism sees the world merely as a series of markets or resource bases to control. Peoples are treated in purely quantitative terms. 
 
Representative government, which is radically distinct from “democracy,”is an important factor in Eurasianist thought. The Eurasianist movement evaluates the “democracy” ethic as being a mask for economic power. Elections are competitive races among economic factions speaking for “the people,” a collective abstraction that does not exist.  A strong Russian executive can help filter the demands of the monied class and seek the common good. Putin's approach has mirrored this demand (Shlapentokh, 2007).
 
“Russian pluralism” is a vision that motivates Russian domestic policy (Tolz, 1998). Eurasianism as a political theory revolves around the concept of civilization over ethnos. A pluralist society would imitate the look of a federation, using the most significant elements of nationalism without its tribal negatives. A Russian Eurasianism stresses the fundamental autonomy of these ethnic groups within a broader state, and these different groups would maintain a large degree of independence.
 
Russia under Vladimir Putin has been a strong supporter of the non-aligned movement. This movement seeks to improve the condition of the third world and build a global society based on the independence of nation states. This idea is a direct attack on westernism. At the same time, larger states that are in various stages of development have taken the lead from one time to another, including Indonesia, Russia and India. This just means that these countries on the periphery of development have the size and potency to wring concessions from the central states such as England or Japan (Shulman, 2005). in Russian Eurasianism, the main foreign element is the “multipolar” world shared by the non-aligned movement and its dedication to alter global capitalism and westernism.
 
This “non-aligned” idea is central to Eurasianism in that the west, given their “New World Order” and “End of history” rhetoric, is implying that it and it alone has the right to shape the rules of the political game. It is not so much that these rules have been deduced from democratic elections and hence enforced, they are the rules that govern elections. Eurasianists make quite a bit of fuss about this distinction. Democracy is just as much a set of results as a set of processes (Nikitin, 2005). Russian Eurasianism and the non-aligned movement are closely related.
 
Russia cannot be considered as a “developed” or “developing” country since those terms imply an absolute standard.  The Soviet use of domestic force to rapidly develop heavy industry (that may or may not have been appropriate for the time) makes her a developed country, though one that did not develop according to the typical pattern of European states. In fact, Russia's industrialization drive in the 1960s and 1970s might (with some adjustments) be a model for the third would that wants to see a great state presence in the economy rather than just profit-seeking businessmen. Since Russia can be seen as the “periphery” of the European Union, she shares some elements in common with the third world.
 
In the (2010) work of Kazakh President Narsultan Nazarbayev, the above concepts are restated in a way more congenial to the development of Central Asia. His essential political theory can be summarized in five points:
1.A strong, independent state is required for both development and sovereignty over resources. “Self-regulated” development is part of the concept of independence, since anything else would give development priorities to others. The public good should always take precedence over private profit.
2.Within any Eurasian Union, a specific Central Asian bloc needs to be formed to focus on issues concerning this region. This is a part of Nazarbayev's emphasis on Eurasianism being practical and loose rather than federative (see below).
3.Free trade should focus on regions and culturally similar peoples. Central Asia is a good example. Free trade should be pursued with common policies on substantial economic issues. Its purpose is to keep foreign forces out of the area. In areas where Central Asia is impacted the most, even other members of the union, such as Russia, should stand aside.
4.Any decision made by the Central Asian Union, as well as, presumably, any Eurasian Union including Russia, will require a 4/5 vote. 
5.Slowly, regional groupings will consolidate basic laws on development policy. 
 
Nazarbayev's main concern is a practical one: the modernization of the Central Asian states with no reciprocal duties in any specific direction. His view is guarded and cautious due to his concern for Kazakh independence as well as its stress on modernization. In fact, convergence is not an issue here except as a matter of fiscal law, and he goes out of his way to stress that there is no single ideology nor any sense of unitarism. While this is consistent with Eurasianism, Nazarbayev's emphasis on practical economic programs aimed at modernization is not.
 
Even more, he stresses that, in terms of basic policy, each state within the union should retain the option to remove itself from any law it deems problematic. At best, The Kazakh program is based on a loose structure. Since there is no “doctrine” of Eurasianism on these matters, it remains an open question. In general, Eurasianists remain national in their focus.
 
The problem which Nazarbayev points out is that the states to be a part of this Union are far from homogeneous, and remain at different levels of development. Hindrances to any union he sees as primarily based on a lack of strategy. There is no method of dispute resolution, nor does there seem to be any connection among ministers dealing with these issues and their own governments. 
 
Relative to currency, the President argues that it needs to be based explicitly on production and the development needs of the societies involved. While it should be kept out of the hands of private bankers, no specific state should control it either. He advocates that all branches of government be involved in currency decisions, since these are so essential to economics and development. Keeping the currency out of the hands of speculators seems to imply that he wants the regional currency non-convertible.
 
III. Concepts in Eurasian Foreign Policy
 
In the work of Professor Vera Tolz, there are three basic concepts of Russian Eurasianism that can serve as the basis of foreign policy. In all cases, the idea of the USSR lies at the root. The USSR was an empire promising basic independence for each of its republics. In other words, the official position was that all ethnic organizations under the Soviet system were to be permitted autonomy within the broader society. This approach, thought honored only in the breach, is very close to Eurasianism. These views Tolz calls “revisionist” in that they seek to challenge the west and its increasing hegemony in various ways:
 
1.The USSR was a noble enterprise that went awry. This was because the Bolsheviks thought they could run the country from a central source. This was incorrect and led to tremendous distortions in the economy. The USSR needs to be reborn, but on a far more decentralized and humanitarian basis.
2.Russian civilization can develop along the lines of a limited federation of Russia, Ukraine and Belarus. 
3.The third concept is traditional ethno-nationalism, where the state develops to incorporate all Russian speakers contiguous to her borders. 
 
Dugin, in his essay on Nikolai Trubetskoy, argues that both the tsarist and liberal approaches to the USSR are incorrect. He argues that Bolshevism derives directly from the revolutionary state pioneered by Peter I, and the Petrograd bureaucracy that failed to connect with the broader population. They accepted Bolshevism because it was a “vague, unconscious, blind and desperate desire to return to Old Russia, prior to the 'Romano-German yoke.” At the same time, the Eurasian idea rejects this movement as secular and anti-traditionalist. It was the westernization of the Russian elite, rather than any alien imposition on society, that served as the model for the revolution. In other words, the alien regime existed from the early 18th century onward.
 
Trubetskoy saw the USSR as a basically positive phenomenon because it unified the Eurasian plain and maintained a multinational state dedicated to a unified economic end.  In addition, in doing battle with western imperialism, it served to weaken the west's stranglehold over most of the planet. Finally, in protecting Russians against the west, the USSR, despite itself, preserved much of Old Russia.
 
While often not mentioned in English, the Eurasian idea derives from the Old Belief. As this writer has also written, the Old Rite is representative of pre-Petrine Russia, and this state, given its limited resources, made war on the church no less systematically than the Bolsheviks. After Nikon, the close association of the church with the bureaucracy made the love of Orthodoxy dependent on the love of the state. 
 
While exaggerated, this is essentially true; the deposition of Nikon left Alexis in charge, only very soon after to permit Peter and the Germanic ruling class later to purge all national elements of the church. The followers of Alexis saw the Old Rite as ignorant fanatics and themselves, increasingly, as Enlightened westerners. The fact that the atheist and materialist Theophan Prokopovytch was placed in charge of reorganizing the Russian church under Peter shows just how far this process went.
 
These three visions are about recreating Russia as a powerful civilization on the ruins on both the USSR and the democratic capitalism of Yeltsin. These three concepts are different ways of making it legitimate. All three of these are anti-western in that they reject the liberal cosmopolitanism that serves to justify western expansion. None of these three are specifically economic, but use culture and political to situate economic development. Economics for the Eurasianist is but an aspect of the broader political idea (Tolz, 1998).
 
In a recent review of Empire (2000), by A. Negri and M. Hardt, Alexander Dugin remarks:
 
The essence of empire is corruption. Corruption, as destruction, is the antithesis of construction; it is a usurper. Empire is the perennial contagion in world history; it destroys life, but it does so through a highly complex and subtle system of control based on man's base desires, individuality and freedom. As intellectual work is today crucial, the nature of production has changed. If the mind is the main means of production, then the machine and the brain slowly merge. On the other hand, new technologies such as the computerization of technique, have become an indispensable aspect of the human body, and soon, these two will also merge. . . Empires are not imposed from without, but they slowly create mental dependencies that tie man into their networks. These gradually serve as our sources of information that integrate ourselves economically, legally and psychologically. This implies a total loss of identity. 
 
The connection between the physical world and the its mental analogue is common enough in western criticism, most famously in the early 20th century work of Bernard Bosanquet. Contrary to a naive realism, structures of social life and the means of their justification soon become organizing principles in the mind. This is the problem with recent work on Dugin and Eurasianism, these structures cannot manage the nature of the Eurasian critique of the western world.
 
IV. Eurasianism and Domestic Policy
 
Building a new Russian nation with its own specific interests in the world requires a strong civil society. This concept, which has become cliche over time, primarily deals with the institutions necessary for the functioning of a state, any state. Even a state that uses the most strict criterion of ethnicity must maintain a civil society that undergirds that idea. All states and governments must, in some way, provide the population with institutions that give regularity and law to social forces regardless of their origin.
 
The great issue in building the new Russia is membership. In Ukraine, for example, the proverbial distinction between east and west Ukraine has almost torn the country apart. Western Ukraine is seen as pro-western,. Eastern Ukraine seen as pro-Russian. In Russia's case, the Eurasianists do not normally use an ethnic criterion of membership, but would rebuild Russia as a federation of ethnic groups that can serve to check and balance each other (Sengupta, 2009).
 
Even if Russian foreign policy were to center around gathering all Russian speaking areas under Moscow, this would not free the state from the rule of law or basic representative institutions. There is no clear connection between liberalism and representation, that is, there is no reason to believe that a democratic government is necessarily a representative government. The Russian nationalist movement  in general, and Eurasianists in particular, normally holds that liberalism is about ideology and the interests of capital, not the protection of rights. A state can be highly representative without being a democracy, and a democracy can enshrine an oligarchy rather than “the people.” The Eurasianists are fairly cynical about western claims to tolerance and “universal values.”
 
Representation, at its root, is the “matching” of a constitution to domestic ideas of justice. A constitution is more than a scrap of paper. It is a living mode of thought that is meant to bind a community together in a world of shared ideas. Laws cannot come from mere self-interest or utility, but must be representative of the popular will. Popular wills are not necessarily manifest in elections, but show the broader contours of social life over time. The General Will is the public good, and its differs, as in the work of Rousseau, from the mere counting of votes and might even be opposed to it.
 
Even more, a strong, new Russia requires an educational system that creates a firm foundation to the constitutional order. Education in the Eurasianist case should be tilted towards that which is useful for the society as a whole, rather than the liberal arts as a broad category of “classics.” The idea is that education brings students into the constitutional order and both, taken together, form a strong sense of national identity; a linguistic and cultural bond that brings people together in shared responsibility rather than abstract rights.
 
This concept of constitution is central to foreign policy because when “Russia” acts on the world stage, there must be some important and significant entity that is called “Russia.” The Eurasianist looks askance at the United States acting on the world stage for democracy and human rights. These are abstractions. For the Russian Eurasianist in 2012, the U.S. acts for the interest of the corporate bodies who control her (Sengupta, 2009).
 
Dugin, in his article on National Bolshevism, reduces the Eurasian-socialist idea to three:
1.For development according to Russian tradition, socialism, ethnic roots and a adhesion to the constants in Russian history. These include the mir, sobornost', a rejection of utility, universalism and the imperial idea.
2.Towards the restoration of the values of Old Russia, traditional spiritual culture and the doctrine of “The Third Rome.”
3.To build a society without classes, toward brotherhood, equality, solidarity and justice. It is a combination of the social ideals of the populists, communists, socialists, and the national anarchist revolutionary tradition (Dugin, 2004).
 
V. Regionalism and Democracy
 
Regionalism is significant for Russia given her immense geographic distinctions. Eurasianism usually supports a strong sense of regional identity to balance centralized institutions. Regionalism for Russia has been an important problem since the Yeltsin administration because these were considered the more corrupt parts of the Russian polity. Regional governments were (and are) seen as the weak spots on the Russian body politic because of the older, clan-based models of both patronage and rent-seeking.
 
In the work of professors Phyllis Dininio and Robert Ortung, regional corruption has been the Achilles heel of Russia as a polity. In their 2005 article on the subject, there are two overpowering variables dealing with the regional idea: first, the size of the government and, second, the level of economic development. If Eurasianism is to enshrine regionalism as an essential part of its doctrine, then the problems of regional corruption need to be faced. While Putin has long promises to deal strongly with corruption, regional elites have been dug in through control over patronage and raw materials. In fact, the Dininio and Ortung thesis is that rent seeking increases in areas of great raw material production.
 
Corruption provides a great incentive to develop central institutions. The typical Eurasianist view is that internal moral virtues are just as important as external institutions. The “spiritual bonds” that the Eurasianist movement harps on continually is about the ability of local institutions to form virtuous citizens. A virtuous public would do well under even the worst form of government. In Russia's case, internal virtue is needed to rebuild institutions since the decay of the state in the early 1990s. 
 
Corrupt regions in Russia can be traced to large bureaucracies, tightly centralized, that can serve as rent protection for raw materials. The basic corrupt practice is that the bureaucrats use their access to the halls of power to charge a premium for those wishing to exploit or profit from it. This, in turn, strengthens the forces of disintegration and weakens the forces of the national will. While regionalism is important to the Eurasianist movement, it can never be the “cover” for an elite seeking to profit at the expense of the broader economy (Dininio and Ortung, 2005).
 
Regional corruption is an ideological issue for both the Eurasianists and the Putin government because both share the sense of a strong central authority that represents a well integrated regional identity. Regional identity and proper central representation are not opposites, but rather require each other to function. Putin's 2005 attempt to appoint certain regional leaders was seen as a way to correct this imbalance, yet, for the most part, American media treatment of the move was negative (Robertson, 2009)
 
Another reason why the regional idea is important is because it connects Russia to its “near abroad.” In a real sense, these can be called “regions” since—at least—they contain a certain proportion of Russian speakers. Ukraine is a powerful case in point. Ukraine was the center of the older Imperial state because her fertility fed the rest of Russia. To destabilize Ukraine and force it away from Russia is to wound Moscow tremendously. Ukraine is a region in the eyes of the Eurasianist, a region with legitimate cultural aspirations. Yet, there is no reason why she should remove herself from the Russian embrace and become the main agricultural supplier to the EU as a regional dependency (Shulman, 2005 and Bukkvoll, 1997).
 
Ukraine and other “regions” of the Russian near abroad show the significance of regionalism for Russian foreign policy. Eurasianism — and to a great extent the Putin presidency — wants to see a different sort of sovereignty. The Ukrainian national idea saw the world in black and while: either independence or empire. The Eurasianist sees it differently. As there is a “third way” in economics, there is also a third way in sovereignty, one that does not posit independence and empire as opposites, but rather as counterparts. In this case, a federative Russia sees Ukraine and Belarus retain basic control over internal cultural policy while serving a loose confederation of independent powers. Basic legislation is in the hands of regional elites, while foreign policy is maintained in Moscow. These federative concepts are a crucial element of Eurasian foreign policy, especially since both Ukraine and Russia have an active role in the Caucuses mountains. In both cases, the Slavic and Turkic connection is clear – the Slavs will be dealing with Asians as equal partners within a single “civilizational space” (Sangupta, 2009)
 
Ukrainian foreign policy as compared with the Russia shows many areas of overlap that display the significance of Eurasianism even for Kiev. Ukraine sees Russia the way the Eurasianists do – as a powerful empire and civilization more than a nation state. On the other hand, Kiev sees itself as a “central European” state using and manifesting certain parts of Russian Slavdom for its own purposes. Ukrainian foreign policy centers around making sense out of the competing demands of Moscow and the western powers, whether in Washington or Brussels. The seemingly unending recession and depression since 2007 is making the western option that much less appealing. 
 
The Eurasianist—naturally—sees southern and eastern Asia to be the future. If Ukraine s to “turn to the west,” she might be turning to a moribund body too indebted to help her development. Eurasianists can easily point to the apparently terminal stage of western capitalism and seek compensation in Asia (MacFarlane, 2006).
 
Ukraine and Russia both need to deal with regions. In Ukraine, the far Eastern coal and steel areas remain staunch Russian supporters and, to a great extent, neo-communists. These do not want a recreation of the Russian empire, but seek an independent Ukraine in fraternal union with Belarus and Russia, creating a Slavic colossus and trading empire the west must respect on the world stage. 
 
Ukraine and Belarus, in the Eurasian idea, are integral parts of a broader Russian federation. Such a federation is based on spiritual bonds and cultural history rather than economic self interest. Abstractions like rights and fraternity make no sense unless the spiritual bonds of the whole can be found in them. The concept of “home and hearth” is far more than a mere slogan of the bankrupt, but is crucial for any functional policy. Political debate implies a great level of commitment and consensus. Foundational issues must be settled before there can be any common ground to debate. 
 
VI. Conclusions
 
The Eurasian idea is central to Russian politics. While still only partially digested by western writers, Russians have been concerned with rebuilding. From the dust and ashes of an old empire a new identity is being forged, and, judging by the popularity of Vladimir Putin, the basic elements of Eurasianism seem to be significant (Kullberg and Zimmerman, 1999). The slavish imitation of the west is not an option, nor is going back to some kind of central control. The non-aligned movement, regionalism and the battles against corruption are but three pillars in a basic domestic and foreign policy that is to institutionalized many Eurasianist concepts. 
 
In conclusion, we can see several things developing:
 
1.Russia will not copy the west. The Yeltsin administration saw a huge proportion of the Russian economy shipped to foreign bank accounts and be taken over by those who had no hand in creating it. Democracy can be a dirty word in Russia since it is the system partially imposed by Boris Yeltsin. It just meant that the well connected were able to take advantage of the vacuum in both political and economic power.
2.Eurasianism is a popular and coherent option. Russia increasingly sees the west to be bankrupt, both literally and figuratively. The rebuilding process itself—similar to the 1960s decolonization movement in Africa—requires both a strong state and a significant sense of membership.
3.The state will continue to be an important part of the national economy. This is especially the case in areas such as oil and natural gas. The state will continue to own enterprises and can compete with cooperative and private ownership. Simple economic self-interest can never be the foundation of a national economy. The common good (represented y the state, albeit imperfectly) is equally as important as efficiency.
4.The west is in trouble, and is likely to continue in trouble. Her debt is massive, and her dependence on foreign oil equally so. Increasingly large trade deficits with China are the price she has paid for her retail prosperity. To think that the “western option” is an obvious or automatic one for Russia is absurd. The Eurasianists have a point when they stress the significance of the east in terms of economic potential. 
 
The shocking ignorance of American intellectuals trying to grapple with Eurasian concepts they do not understand underscores Dugin's main concerns. The US does not have the conceptual apparatus to properly understand the sweeping ontology of Eurasianiam. Western and westernized writers, such as Gene Veith, Doug Sanders, Anton Barbashin, Hannah Thoburn, and Anton Shekhovtsov display a disgraceful ignorance born of two things: first, their utter lack of intellectual preparation for the ontology and metaphysics of Dugin or anyone else outside of the western mainstream, and just as importantly, the fact that few of their readers know any better. This latter problem is everywhere, and gives the above a license to write as they please. This both frees them from actual understanding and insulates them from serious criticism. 
 
Since Eurasianism does not proceed from familiar journalistic cliches and pseudo-academic pretension, they do not have a framework to understand – let alone criticize – any of the views laid out. It shows the total collapse of serious thought in the pursuit of recognition as an “intellectual.” These are the residue of mass society and the collapse of intellectual honesty.

Bibliography:

Dininio, Phyllis and Robert Ortung. Explaining Patterns of Corruption in the Russian Regions. World Politics 57, 2005 500-529

Bukkvoll, Tor. Ukraine and European Security. Continuum Publishing 1997

Kullberg, Judity and William Zimmerman. Liberal Elites, Socialist masses and the Problem of Russian Democracy. World Politics 51 1999 323-358

MacFarlane, S. Niel. Is Russia an Emerging Power? International Affairs 82, 2006 41-57

Nikitin, Alexander. Russian Eurasianism and American Exceptionalism. Eurasia: A New Peace Agenda, Michael Intrilligator, et al (eds). Emerald Group Publishing, 2005, pps 157-170

Robertson, Graeme. Managing Society: Protest, Civil Society and Regime in Putin's Russia. Slavic Review 68, 2009 528-547

Sengupta, Anita. Heartlands of Eurasia: the Geopolitics of Political Space. Lexington Books, 2009

Shlapentokh, Dmitry. Russia between East and West: Scholarly Debates on Eurasianism. Brill, 2007

Shulman, Steven. National Identity and Public Support for Political and Economic Reform in Ukraine. Slavic Review 64, 2005 pps 59-87

Tolz, Vera. Conflicting Homeland Myths and Nation-State building in Postcommunist Russia. Slavic Review 57, 1998 267-294

Sorokin, P. A Survey of the Cyclical Conceptions of Social and Historical Process. Social Forces, 6(1), 1927: 28-40

Nazarbayev, Nursultan (2010). Eurasian Doctrine (Евразийская доктрина Нурсултана Назарбаева). Almaty: Institute for Philosophy

Dugin, A. Overcoming the West: An Essay on Nikolai Trubetskoy. эссе о Николае Сергеевиче Трубецком Arktogye, Eurasian Portal of A. Dugin, 2003

 The New National-Bolshevik Order. Arktugye, 2004

Eurasian Triumph: Essay on PN Savitsky.  Arktugye, 2000

Николай Алексеев: Теория евразийского государства. Eurasian Portal, 1999

http://evrazia.info/article/197

Ustrialov, N. Национал-большевизм. (Reprinted on the Site Russian Literature, first compied 1926)

http://www.rulit.net/books/nacional-bolshevizm-read-252152-136.html

About Trubetskoy. Eurasian Portal, 1997 (earlier version of the article above)

http://evrazia.org/modules.php?name=News&file=article&sid=109

Nikitch, E. «Классовая борьба» (Widerstand, Berlin, 1932)

Ernst Niekisch: Europäische Bilanz, Potsdam: Rütten & Loening 1951

Ustrialov Nikolai. Понятие государства. «Сменовехизм» («Новости Жизни», 1925)

Alexeev, N. (1935) Теория государства: Теоретическое государствоведение, государственное устройство, государственный идеал. (Prague, 1935)

Alexeev, N. (1934)Об идее философии и её общественной миссии. (Put', Путь, 1934, no 44)

Alexeyev, N (1935) The Spiritual Background of Eurasian Culture. Trans, M. Johnson, Young Eurasia (originally published in the Eurasian Chronicle, Berlin, 1935)

http://yeurasia.org/library/classical_eurasianism/николай-алексеев-духовные-предпосыл/

 

vendredi, 18 juillet 2014

A. Douguine: union économique eurasienne, alliance UE/Russie, hégémonisme américain

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Entretien avec Alexandre Douguine

Sur l'Union économique eurasienne, sur la nécessité d'une alliance UE/Russie, sur l'hégémonisme américain en Europe

 

Propos recueillis par Bernard Tomaschitz

 

Professeur Douguine, le 1 janvier 2015, l'Union Economique Eurasienne deviendra une réalité. Quel potentiel détient cette nouvelle organisation internationale?

 

AD: L'histoire nous enseigne que toute forme d'intégration économique précède une unification politique et surtout géopolitique. C'est là la thèse principale du théoricien de l'économie allemand, Friedrich List, impulseur du Zollverein (de l'Union douanière) allemand dans la première moitié du 19ème siècle. Le dépassement du "petit-étatisme" allemand et la création d'un espace économique unitaire, qui, plus tard, en vient à s'unifier, est toujours, aujourd'hui, un modèle efficace que cherchent à suivre bon nombre de pays. La création de l'Union Economique Eurasienne entraînera à son tour un processus de convergence politique. Si nous posons nos regards sur l'exemple allemand, nous pouvons dire que l'unification du pays a été un succès complet: l'Empire allemand s'est développé très rapidement et est devenu la principale puissance économique européenne. Si nous portons nos regards sur l'Union Economique Eurasienne, on peut s'attendre à un développement analogue. L'espace économique eurasien s'harmonisera et déploiera toute sa force. Les potentialités sont gigantesques.

 

Toutefois, après le putsch de Kiev, l'Ukraine n'y adhèrera pas. Que signifie cette non-adhésion pour l'Union Economique Eurasienne? Sera-t-elle dès lors incomplète?

 

AD: Sans l'Est et le Sud de l'Ukraine, cette union économique sera effectivement incomplète. Je suis d'accord avec vous.

 

Pourquoi l'Est et le Sud?

 

AD: Pour la constitution d'une Union Economique Eurasienne, les parties économiquement les plus importantes de l'Ukraine se situent effectivement dans l'Est et le Sud du pays. Il y a toutefois un fait dont il faut tenir compte: l'Ukraine, en tant qu'Etat, a cessé d'exister dans ses frontières anciennes.

 

Que voulez-vous dire?

 

AD: Nous avons aujourd'hui deux entités sur le territoire de l'Ukraine, dont les frontières passent exactement entre les grandes sphères d'influence géopolitique. L'Est et le Sud s'orientent vers la Russie, l'Ouest s'oriente nettement vers l'Europe. Ainsi, les choses sont dans l'ordre et personne ne conteste ces faits géopolitiques. Je pars personnellement du principe que nous n'attendrons pas longtemps, avant de voir ce Sud et cet Est ukrainiens, la "nouvelle Russie", faire définitivement sécession et s'intégrer dans l'espace économique eurasien. L'Ouest, lui, se tournera vers l'Union Européenne et s'intégrera au système de Bruxelles. L'Etat ukrainien, avec ses contradictions internes, cessera pratiquement d'exister. Dès ce moment, la situation politique s'apaisera.

 

Si, outre le Kazakhstan, d'autres Etats centrasiatiques adhèrent à l'Union Economique Eurasienne et que tous entretiennent de bonnes relations avec la Chine, un puissant bloc eurasien continental verra le jour: ce sera un défi géopolitique considérable pour les Etats-Unis, plus considérable encore que ne le fut jamais l'URSS…

 

AD: Non. Je ne crois pas que l'on puisse comparer les deux situations. Nous n'aurons plus affaire à deux blocs idéologiquement opposés comme dans l'après-guerre. L'idéologie ne joue aucun rôle dans la formation de cette Union Economique Eurasienne. Au contraire: pour l'Europe occidentale, cet immense espace économique sera un partenaire stratégique très attirant. L'Europe est en mesure d'offrir tout ce dont la Russie a besoin et, en échange, la Russie dispose de toutes les matières premières, dont l'Europe a besoin. Les deux partenaires se complètent parfaitement, profiteraient à merveille d'une alliance stratégique.

 

A Bruxelles, en revanche, on voit les choses de manière bien différente… On y voit Moscou et les efforts de convergence eurasiens comme une "menace". On utilise un vocabulaire qui rappelle furieusement la Guerre froide…

 

AD:  Pour que l'alliance stratégique, que je viens d'esquisser, puisse fonctionner, l'Europe doit d'abord s'auto-libérer.

 

Se libérer de quoi?

 

AD: De la domination américaine. L'UE actuelle est bel et bien dominée par Washington. D'un point de vue historique, c'est intéressant: les Européens ont commencé par coloniser le continent américain et, aujourd'hui, par une sorte de retour de manivelle, les Américains colonisent l'Europe. Pour que l'Europe puisse récupérer ses marges de manœuvre, elle doit se libérer de l'hégémonisme américain. Le continent européen doit retrouver un sens de l'identité européenne, de manière à ce qu'il puisse agir en toute autonomie, en faveur de ses propres intérêts. Si les Européens se libèrent de la tutelle américaine, ils reconnaîtront bien vite que la Russie est leur partenaire stratégique naturel.

 

La crise ukrainienne et les sanctions contre la Russie, auxquelles participent aussi l'UE, révèlent combien l'Europe est sous l'influence de Washington. Pensez-vous vraiment que l'UE est capable de s'émanciper des Etats-Unis sur le plan de la défense et de la sécurité?

 

AD: Absolument. Aujourd'hui, l'Europe se comporte comme si elle était une entreprise américaine en franchise. Les sanctions contre la Russie ne correspondent en aucune façon aux intérêts économiques et stratégiques de l'Europe. Les sphères économiques européennes le savent bien car elles ne cessent de protester contre cette politique des sanctions. Cependant, une grande partie de l'élite politique européenne est absolument inféodée aux Etats-Unis. Pour elle, la voix de Washington est plus importante à écouter que les plaintes de ses propres ressortissants. Il est intéressant de noter aussi que la grande majorité des Européens, au contraire de l'élite politique, est critique à l'égard des Etats-Unis et est, dans le fond, pro-européenne au meilleur sens du terme. Une confrontation politique adviendra en Europe, c'est quasi préprogrammé. Ce sera une sorte de révolution. Il suffit d'attendre.

 

En mai, le traité sur les livraisons de gaz entre la Russie et la Chine a été conclu: ce traité prévoit que les factures seront établies en roubles ou en renminbi. Peut-on dès lors prévoir la fin de l'hégémonie du dollar, si cet exemple est suivi par d'autres?

 

AD: Par cet accord, la Russie et la Chine cherchent de concert à imposer un ordre mondial multipolaire. Ce sera une multipolarité en tous domaines: économique, stratégique, militaire, politique et idéologique. En Occident, on croit toujours à la pérennité d'un modèle unipolaire, dominé par les Etats-Unis. L'accord sino-russe de mai dernier marque cependant la fin de ce modèle prisé à l'Ouest. Quelle en sera la conséquence? Les Etats-Unis deviendront une puissance régionale et ne seront plus une puissance globale. Mais la Russie et la Chine, elles aussi, demeureront des puissances régionales, de même que l'Europe qui se sera libérée. Le monde multipolaire de demain sera un monde de puissances régionales. L'architecture du monde en sera changée.

 

(Entretien paru dans zur Zeit, Vienne, n°27-28/2014; http://www.zurzeit.at ).

 

samedi, 28 juin 2014

Conférence à Marseille

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