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mardi, 15 avril 2008

Kouchner: de Médecins du Monde à Militaires sans Frontières

Emmanuel Todd : « Kouchner est passé de Médecins du monde à Militaires sans frontières » Version imprimable Suggérer par mail
Emmanuel Todd : « Kouchner est passé de Médecins du monde à Militaires sans frontières »
Emmanuel Todd vient de publier, avec Youssef Courbage, un ouvrage, Le rendez-vous des civilisations (1), qui tord le cou à la thèse du choc des civilisations. Pour ces deux démographes, la montée de l'islam radical n'est que l'un des signes, nombreux, de la modernisation du monde musulman dont l'aspect démographique est d'ailleurs le plus éclatant. Les sociétés du monde musulman sont entrées dans une transition démographique qui voit progresser l'alphabétisation des hommes puis des femmes, avant que le nombre d'enfants par femme se rapproche de celui de l'occident. Tout cela évoque selon eux une montée de l'individualisme dans ces sociétés. L'analyse démographique les conduit ainsi à rejeter l'idée d'une différence de nature entre les sociétés anciennement chrétiennes et les sociétés musulmanes.


Que penser de la déclaration musclée de Bernard Kouchner sur l'Iran?
Emmanuel Todd : Son intervention ravive une interrogation personnelle qui date de la guerre d'Irak, où il s'était déjà prononcé en faveur de l'intervention américaine : quelle peut être la psychologie d'un médecin qui manifeste une préférence stable pour la guerre ? Nous passons trop vite de Médecins du monde à « Militaires sans frontières ».
Plus sérieusement Bernard Kouchner n'a fait qu'exprimer maladroitement la ligne Sarkozy, qui de fait est la ligne de Washington. Avant la présidentielle, j'avais suggéré que les Américains attendaient l'élection de Nicolas Sarkozy pour s'attaquer à l'Iran.

Le Quai d'Orsay propose une autre lecture de cette déclaration : il ne s'agirait pas, en fait, de menacer l'Iran mais de montrer à ses dirigeants actuels le coup économique de leur refus d'obtempérer aux recommandations de la communauté internationale.
On peut dire ce qu'on veut, mais le mot guerre a été prononcé, et le Quai d'Orsay apprendra d'autres nouvelles par la presse.

L'Iran inquiète davantage certains observateurs que l'Irak avant l'intervention américaine.
La question de l'Iran se présente sous la forme d'un flot d'images et de faits difficiles à interpréter vu de France. Il y a les propos absurdes du président Ahmadinejad, les images de femmes couvertes de noir, et l'islamophobie ambiante. Tout cela masque la réalité profonde de l'Iran : une société en développement culturel rapide, dans laquelle les femmes sont plus nombreuses que les hommes à l'université, un pays dans lequel la révolution démographique a ramené le nombre d'enfants par femme à deux, comme en France ou aux Etats-unis. L'Iran est en train de donner naissance à une démocratie pluraliste. C'est un pays où, certes, tout le monde ne peut pas se présenter aux élections, mais où l'on vote régulièrement et où les basculements d'opinion et de majorité sont fréquents. Comme la France, l'Angleterre ou les Etats-unis, l'Iran a vécu une révolution qui se stabilise et où un tempérament démocratique s'épanouit.
Tout cela est à mettre en rapport avec une matrice religieuse dans laquelle la variante chiite de l'islam valorise l'interprétation, le débat et, éventuellement, la révolte.

Pour un simple observateur occidental, l'assimilation du chiisme au protestantisme n'est pas une évidence qui tombe sous le sens.
Il serait absurde de pousser à l'extrême la comparaison. Mais il est clair que de même que le protestantisme a été, dans l'histoire européenne, un accélérateur de progrès et le catholicisme un frein, le chiisme apporte aujourd'hui une contribution positive au développement, notamment dans le domaine du contrôle des naissances : l'Azerbaïdjan, certes postcommuniste, mais également chiite, est à 1,7 de taux de fécondité, les régions alaouites de Syrie rattachées au chiisme, ont terminé leur transition démographique contrairement aux régions majoritairement sunnites. Au Liban, la communauté chiite, base sociale du Hezbollah, était en retard sur le plan éducatif et social, mais elle est en train de rattraper les autres communautés, comme on le voit dans l'évolution du taux de fécondité.
L'Iran est aussi une très grande nation qui manifeste une conscience réaliste de ses intérêts stratégiques dans une région où la majorité de ses voisins possède l'arme nucléaire : le Pakistan, l'Irak et l'Afganistan (via la présence de l'armée américaine), Isräel. Dans ce contexte, l'attitude européenne raisonnable serait d'accompagner l'Iran dans sa transition libérale et démocratique et de comprendre ses préoccupations de sécurité.

Dans votre livre, vous faites l'hypothèse tout à fait surprenante d'une possible laïcisation des sociétés musulmanes.
Dans la mesure où dans les mondes catholique, protestant, orthodoxe et bouddhiste, la baisse de la fécondité a toujours été précédée d'un affaiblissement de la pratique religieuse, on doit se demander si des pays musulmans dans lesquels le nombre d'enfants par femme est égal ou inférieur à 2 ne sont pas en train de vivre aussi, à notre insu – et peut-être même à l'insu de leurs dirigeants – un processus de laïcisation. C'est le cas de l'Iran.

Pourquoi les Américains et Sarkozy ont-ils adopté cette stratégie de confrontation avec l'Iran ?
Les services diplomatiques américains sont parfaitement au fait de la réalité iranienne, de la montée de la démocratie et de la modernisation du pays. Mais ils veulent abattre une puissance régionale qui menace leur contrôle de la zone pétrolière. C'est un pur cynisme utilisant l'incompréhension actuelle du monde musulman. Dans le cas de Sarkozy, je pencherais plus pour l'idée d'incompétence ou de sincère ignorance, qui le conduit néanmoins à amorcer une politique extérieure contraire à la morale et à l'intérêt de la France. D'éventuelles sanctions économiques françaises contre l'Iran feraient rire les Américains qui n'ont plus d'intérêts dans ce pays, et sourire les Allemands, qui ont comme nous en ont beaucoup, mais semblent pour le moment plus réalistes.

(1) Le rendez-vous des civilisations, Emmanuel Todd et Youssef Courbage, Le Seuil, 2007


Source :
http://www.marianne2.fr

dimanche, 13 avril 2008

E. Hermy: Recessie en Russische optie

Economische recessie en de Russische optie.

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In mijn betoog wil ik de correlatie aantonen tussen de neergang van een militaire en economische reus met name de Verenigde Staten, en de dreigende economische recessie die Europa zal treffen. Met dit referaat wil ik ook aantonen dat oorlogen en terreur niet noodzakelijk gewapende uiteenzettingen zijn maar dat de confrontatie zich meestal aandient via economische terreur en een economische oorlog.

De wereldmarkten en dus de economische macht zijn zich aan het verplaatsen. Als er economische machtsveranderingen zijn dan volgen ook de militaire machtsverhoudingen. Het één is gewoon het natuurlijke gevolg van het andere. De productie en afzetmarkten zijn na de verschillende delocalisatiegolven die teweeg werden gebracht door de globalisatie van het kapitalisme verschoven van Europa en de VS naar landen zoals Rusland, Brazilië, Zuid-Afrika, India en vooral naar China.

China heeft nu een groei van 8% op jaarbasis en is de belangrijkste groeimarkt van de wereld. Ter vergelijking: de VS hebben een voorspelde groei voor dit jaar van 0,1% tot 0,4% en Rusland zit China op de hielen met 6%. China heeft de VS ingehaald wat betreft het binnenhalen van buitenlandse investeringen. De volgende golf van globalisatie zal hoogwaardige producten van deze landen naar Amerika en Europa brengen omdat de groeilanden verplicht zijn om een grotere meerwaarde per product te realiseren om de eigen binnenlandse markten verder te kunnen laten groeien. Onze Europese economieën zullen nog onder zwaardere druk komen te staan dan nu al het geval is. Ook zal er een verdere delocalisering van arbeidsplaatsen plaatsvinden.

In India en China komen elk jaar meer dan 7 miljoen hooggeschoolde studenten op de arbeidsmarkt. Daarvan zijn ruim 600 000 architecten. In de VS zijn er dat 70 000 en in Europa zelf iets minder. Een gigantisch groeipotentieel en een gigantisch arsenaal aan intellectuele input. Het is nu niet meer nodig om deze mensen naar hier te halen om ons te beconcurreren want via de IT-revolutie kunnen zij onze middenkaders (en dus onze middenklasse) vanuit hun thuislanden uit de arbeidsmarkt duwen. Over de gehele wereld hebben de banken al 30% van hun banen uitbesteed aan die groeilanden. De verzekeringssector 20%. De boekhouding van 35% van de bedrijven word nu al gedaan in landen als India. Dit is nog maar een begin, de echte ‘boom’ moet nog komen zeggen alle analisten.

Alleen al in de VS zouden er zo 10 miljoen banen uitbesteed worden. Dat zou de werkeloosheid in de VS van 5% naar 11% omhoogstuwen. Voor Amerikanen is een overschrijding van de 5%-grens wat betreft werkeloosheid een ware nachtmerrie. Alles daarboven doet hen denken aan de grote depressie van de jaren ’20 tot aan het uitbreken van Wereldoorlog II in de vorige eeuw. Door de schaarste aan banen en de dreigende buitenlandse concurrentie zullen de lonen dalen. De mensen die nog een baan hebben zullen vrede moeten nemen met drastisch verlaagde inkomens. Men moet niet denken dat het alleen maar de laaggeschoolde banen zijn die daaronder zullen leiden. Computerprogrammeurs die in de VS een 100 000 Euro verdienden zijn buiten de deur gezet en vervangen door een bijna gratis model uit India, want die kost gemiddeld maar 20% van zijn Amerikaanse evenknie. Zo heeft het bedrijf 5 Indische programmeurs voor de prijs van een Amerikaan. Er zal een verschuiving zijn van de broodverdieners naar de rijstverdieners. En het brood zal schaarser worden …

Omdat we in Europa nog steeds totaal verbonden zijn met Amerika en met de dollar als betaalmiddel zullen die crisis en deze praktijken zich ook in Europa en in ons land manifesteren. Er staan al 10 000 Filippijnse IT-specialisten klaar om naar Europa te komen werken, waarvan er 1 000 voor de Belgische markt zijn bestemd.

Tegelijkertijd is er door de hypotheekcrisis in de VS een enorme financiële crash. Die hypotheekcrisis is het eindresultaat van het geven van leningen aan mensen die deze leningen nooit hadden mogen krijgen, omdat ze gewoon insolvabel waren. Er is een enorm wantrouwen gegroeid tussen de banken, en zo is de flux van cash aan reële marktrente gestremd geraakt (men is bang om aan elkaar te lenen). De nationale banken drukken echter massa’s geld bij en gooien dat op de markt en dit tegen lage rente. Een paar dagen geleden heeft de Federal Reserve, dat is de Amerikaanse Nationale Bank 200 miljard dollar in het systeem gepompt. Dit is al een eerste oorzaak van de geldontwaarding. Tegelijkertijd is er een enorme opstoot van de prijzen van energie en voedingsproducten die wordt voortgestuwd door de stijgende vraag vanuit de nieuwe groeimarkten en vooral dan door China. Deze factor die we allemaal kennen als inflatie tast de reële koopkracht aan van de mensen. Een combinatie van massaal goedkoop geld en van een groeiende vraag naar grondstoffen leidt tot deze inflatiespiraal. Om de inflatie te kunnen stoppen moet het geld duurder worden. Maar dan remt men de groei af en krijgt men een stagflatie. Dit is een nachtmerriescenario voor alle mensen en zeker voor de elite. Daarom moeten er nieuwe wegen worden gezocht om onze economie te reorganiseren

Op binnenlands en Europees vlak moeten er structurele economische en politieke veranderingen worden doorgevoerd. Op langere termijn moeten we zelf de Beurs en geldmarkt in vraag durven te stellen. Er moet een nationale revolutie in gang worden gezet die aan de dreigende economische achteruitgang van ons land en ons continent een halt wordt toegeroepen. Zeker in ons land en sommige andere Europese landen is de toestand dramatisch gezien het probleem van de vergrijzing. Maar ook de steeds meer falende scholingsgraad moet omhoog. Er moet een ander soort economie worden opgebouwd, waar innovatie en hoogtechnologische meerwaarde kunnen worden gerealiseerd. We moeten af van de productie van halffabricaten en lageloonbanen. We moeten een solidaristische volksgebonden economie naar voor schuiven. De interne klassenstrijd moet vervangen worden door de solidaire volksverbondenheid die het mogelijk moet maken om van onze Vlaamse economie een echte speerpunteconomie te maken. Een maatschappij waar tijdelijke opofferingen gecompenseerd worden door meer inspraak en macht in de bedrijven en in de economie. De economie en de politiek mogen niet in handen blijven van de huidige machtskaste. Ze moet worden overgedragen aan de nieuwe meritocratie die verantwoordelijkheid orde en tucht zal combineren met stijgende welvaart en welzijn. Daarom moeten op binnenlands vlak radicale economische en sociale hervormingen worden doorgevoerd.

Maar ook op geopolitiek vlak moeten er veranderingen komen. Er moeten nieuwe bondgenoten worden gezocht. Die kunnen garant staan voor grondstoffenmarkten en afzetmarkten. Als je weet dat dit land nu al meer dan 13% van alle buiten-Europese handel realiseert via Rusland, dan is het duidelijk dat zelf de machtselite al op twee paarden is gaan het wedden. Terwijl de Europese dictatuur zijn steun betuigt aan Amerika en zweert dat ze dat bondgenootschap eeuwig trouw zal blijven, investeren de Europese bedrijven en banken massaal in Rusland. 70% van alle buitenlandse investeringen in Rusland komen nu al vanuit de Europese Unie. Dat is ook niet verwonderlijk. Rusland heeft de volgende drie jaar een groeiverwachting van 6%. Na 2009 zal Rusland op het niveau van 1989 staan. Dat is het ogenblik waarop de muur en het communisme in elkaar zijn gedonderd. Analisten voorspellen dat er na 2009 pas echt een groei-explosie zal plaatsvinden.

Ondanks het feit dat men in Europa en de VS het huidige regime in Rusland corruptie en slecht democratisch beheer aanwrijft is het toch maar een feit dat dit Rusland al zijn oliewinsten terug in de economie stopt. Miljarden dollars worden zo in de economie gepompt. Dat heeft geleid tot de opkomst van een Russische middenklasse. Deze beschikt over genoeg inkomen om verbruikgoederen te kopen en zo de algemene economie verder groeikansen te geven. Hier ligt uiteindelijk de opportuniteit voor Europa en zeker ook voor ons land. Wij moeten nog meer gaan participeren in de voormalige Oostbloklanden en vooral in Rusland. Het is voor ons van levensbelang dat we een uitvoermarkt voor onze producten veilig stellen. Maar ook, wat nog van groter belang zal zijn in de toekomst, is dat we gas en olie zullen kunnen invoeren en zo onze economische groei zullen kunnen garanderen. Onze corrupte elite wil echter van twee walletjes eten. Ze wil wel meeprofiteren van een economische groeimarkt zoals Rusland maar ze is tegelijkertijd doodsbang om de Amerikaanse alliantie te verbreken. Nochtans is die alliantie, zoals ik reeds eerder aantoonde, een verkeerde optie. Het is de alliantie van de verliezers en van de achteruitgang. Het is een verbond dat ons zal meesleuren in de ondergang van een voormalige grootmacht. Onze elite is schatplichtig aan de Amerikaanse elite. Ze is verslaaft geraakt aan de ‘American Dream’. Zelf als die droom langzaam een nachtmerrie aan het worden is, dan nog blijven onze elites star vasthouden aan die alliantie.

Onze elites willen geen verandering. Ze zijn doodsbang voor verandering. Ze denken dat ze onder de paraplu van de VS nog altijd aanspraak kunnen maken op grote economische macht en invloed. Maar het monster van de globalisering keert zich uiteindelijk tegen diegenen die dat monster hebben gecreëerd. De globalisering heeft nieuwe superstaten laten ontstaan en die zullen met de oude afrekenen. De huidige Europese machtselite doet er verkeerd aan om Oost-Europa te willen Balkaniseren. Ook het sturen van troepen om Amerikaanse belangen te gaan verdedigen is misdadig. Men probeert Rusland te isoleren en te omsingelen, kijk naar Afghanistan en kijk wat er gebeurt in de vroeger Sovjetrepublieken. Kijk naar de installatie van nieuwe raketsystemen in Europese landen. Zelfs het stichten van moslimenclaves worden als buffer tegen de Russische groei en economische machtsuitbreiding gebruikt. Etnische tegenstellingen worden aangewakkerd. Die tegenstellingen zullen in ons gezicht ontploffen, want ook wij zijn reeds etnisch geïnfiltreerd.

Wij, in Europa, moeten ons beschermen tegen de pletwals die de huidige militaire en economische macht Amerika zal doen botsen met de nieuwe opkomende macht China. Darfour, maar ook veel andere Afrikaanse landen worden nu al ingepalmd door China omwille van de grondstoffen. Dat is een voorbode van veel zwaardere conflicten om grondstoffen en afzetmarkten. Wij hebben nieuwe vrienden nodig, die Europa tegen China kunnen beschermen. Want de terreur tegen Europa en Rusland zal vroeg of laat uitmonden in een open oorlog. Dan zal niet alleen onze koopkracht en onze welvaart aangetast worden. Dan zullen de levens van u en uw kinderen in de weegschaal worden gelegd.

Voor het N-SA is het duidelijk. Wij moeten in de Europese ruimte komen tot een hergroepering van krachten. Als we dat willen realiseren is de As Europa-Rusland de meest zinnige optie. Daarom onze strijd. Een strijd tegen oorlog en terreur. Tegen economisch imperialisme. Deze strijd kan alleen maar slagen als we een vrije en solidaristische volksstaat uitbouwen!

Algemeen Coördinator Eddy Hermy.Toespraak namens de N-SA op het Dineerdebat van Euro-Rus.

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vendredi, 11 avril 2008

R. Steuckers: intervention au colloque d'Eurorus

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Intervention de Robert Steuckers lors du colloque « Euro-Rus » de Termonde, 15 mars 2008

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, chers amis et camarades,

Rassurez-vous, je ne serai pas long et je ne répéterai pas, en d’autres termes, les arguments et les faits qui ont été évoqués par mes prédécesseurs à cette tribune. En guise de préambule, je répondrai toutefois à la question récurrente qui nous est si souvent posée, lorsque nous évoquons la possibilité et la nécessité d’un tandem euro-russe sur l’échiquier international. Cette question récurrente est la suivante : Comment cela se fait-il que vous adoptiez cette position favorable à la Russie, alors que, naguère, cette option a généralement été celle des gauches, tandis que vous passez pour les héritiers de la « révolution conservatrice » ? Cette question, que je n’hésite pas à qualifier d’inepte, reflète la confusion incapacitante qui a été sciemment mise dans la tête des Européens de l’Ouest pendant les quatre décennies de la Guerre Froide. Avant cette parenthèse et avant celle du pouvoir bolchevique à partir de 1917, la Russie était considérée comme le bastion de la ‘réaction’ contre les idées de la révolution française en Europe, c’est-à-dire contre les effets dissolvants de l’idéologie libérale, y compris dans sa version anglo-saxonne, smithienne et manchesterienne. Arthur Moeller van den Bruck, figure de proue de la révolution conservatrice allemande après le Traité de Versailles de 1919, traducteur de Dostoïevski et partisan d’une alliance germano-russe suite aux accords de Rapallo entre Rathenau et Tchitchérine (1922), avait écrit que le bolchevisme, en dépit de ses aspects déplaisants, incarnait la même attitude anti-libérale que la Russie tsariste et traditionnelle, mais sous d’autres oripeaux. Ces oripeaux ont été réduits en lambeaux au fil de sept décennies de communisme, jetés aux orties sans état d’âme, si bien que la Russie est redevenue aujourd’hui un bastion de résistance contre l’idéologie libérale de l’américanosphère.

Pour venir au vif du sujet de cet après-midi, abordons maintenant la question du Sud-Est européen. Jean Parvulesco, au beau milieu de la crise balkanique de 1999, me disait que les régions sud-orientales de l’Asie et de l’Europe étaient vitales pour le développement de ces deux continents. L’Indochine, où les principaux fleuves venus du cœur de l’Asie himalayenne viennent se jeter dans l’Océan Pacifique, et les Balkans, entre le cours inférieur du Danube et l’Egée, sont des territoires tremplins, permettant à la principale puissance centre-européenne, comme hier l’Empire d’Alexandre, l’Empire romain, l’Autriche puis l’Allemagne, de se projeter, militairement ou pacifiquement, vers le Proche-Orient, le Golfe Persique, l’Egypte (et le Nil), la Mer Rouge et l’Océan Indien. Pour Parvulesco, il n’y a pas de développement naturel et harmonieux de l’Europe sans une maîtrise pleine et complète de l’espace balkanique, comme il ne pourrait y avoir d’indépendance asiatique réelle sans une maîtrise pleine et complète des cours inférieurs des fleuves qui jaillissent du flanc oriental de l’Himalaya, pour se jeter dans le Pacifique face à l’archipel indonésien, riche en caoutchouc et en pétrole et anti-chambre de l’Australie. Dans son langage vert et rabelaisien, Parvulesco disait textuellement : « S’ils tiennent le sud-est, ils nous tiennent par les couilles ! ». L’histoire nous l’enseigne : il n’y a pas d’Europe puissante possible si des « raumfremde Mächte », des puissances étrangères à notre espace, occupent ou contrôlent, directement ou indirectement, l’ensemble balkanique.

L’Empire ottoman a tenu l’Europe en échec aussi longtemps qu’il a tenu les Balkans. Mais l’occupation ottomane a eu au moins un mérite : celui de donner un sens et un objectif à l’Europe combattante. De Jean Sans Peur, Duc de Bourgogne et Comte de Flandre, aux nationalistes balkaniques des guerres de 1912 et 1913, en passant par le Prince Eugène de Savoie-Carignan, l’Europe, à l’exception de la France, a ressenti comme un devoir de croisade et de reconquista la nécessité de bouter l’Ottoman hors de la péninsule balkanique.

L’Empire ottoman considérait la maîtrise des Balkans comme une étape en vue de conquérir l’Europe entière, à commencer par la « Pomme d’Or », Vienne, que ses armées assiègeront deux fois, en 1529 et en 1683. En vain. Le sursaut, in extremis, a été chaque fois admirable et nous ne sommes pas devenus turcs. L’objectif ottoman était de remonter le Danube, de Belgrade à Budapest et de Budapest à Vienne, puis, sans doute, de Vienne à Linz et au cœur de la Bavière pour faire tomber l’ensemble de l’Europe dans son escarcelle. Aujourd’hui les Etats-Unis installent leur principale base militaire sur le site même de la victoire ottomane de 1389, soit au Kosovo, à partir duquel les Turcs avaient commencé leur conquête de l’Europe.

Les Balkans sont donc un tremplin géostratégique de première importance depuis le Macédonien Alexandre le Grand, depuis les Romains dans leur marche vers l’Anatolie, corps territorial constitutif majeur de l’actuelle Turquie. Dans la perspective actuelle, qui est toujours celle du géopolitologue britannique Halford John Mackinder, théorisée en 1904, la maîtrise des Balkans permet la maîtrise de l’Anatolie, qui permet à son tour de maîtriser le Croissant Fertile et, partant, le Golfe Persique et la Mer Rouge et d’obtenir ainsi une fenêtre de premier ordre sur l’Océan Indien. La maîtrise des Balkans équivaut de ce fait à joindre solidement la « Terre du Milieu » à l’ « Océan du Milieu ». Cette volonté, qui est aussi celle de joindre l’Europe romano-germanique, la Russie néo-byzantine, la Perse et l’Inde, dans un sorte de « chaîne d’Empires » sur le « rimland » méridional de l’Eurasie, a été l’objectif de toutes les « grandes politiques » de l’histoire européenne : de César, qui le théorise avant de succomber sous les coups des Sénateurs romains aux Ides de Mars de 44 av. J. C., de Trajan qui le concrétise près de deux siècles après, de Julien dit l’Apostat qui ira mourir au combat en Mésopotamie, aux Croisades d’Urbain II et Godefroy de Bouillon à l’idée secrète de l’Ordre de la Toison d’Or créé par Philippe le Bon.

A la fin du 19ième siècle, les Européens, dont les Serbes, triomphent enfin de la présence ottomane en Europe orientale. Malheureusement, bien vite, les vainqueurs se déchireront entre eux, créant des animosités inter-européennes qui n’ont cessé de perdurer et qu’exploiteront habilement tous ceux qui voudront contrôler les Balkans, après 1914. Quant aux Turcs, ils essaieront toujours de revenir dans les Balkans, par le biais de l’OTAN, en soutenant les minorités musulmanes de Bulgarie, de Bosnie, d’Albanie et du Kosovo, en créant, comme on l’apprend, des réseaux de lycées turcs en Bosnie. C’était le rêve de Türgüt Özal, qui voulait faire émerger un pôle panturc de l’Adriatique à la Muraille de Chine. C’est le rêve d’Erdogan qui cherche à réaliser les mêmes objectifs mais cette fois par le biais d’un panislamisme dominé par la Turquie. Son discours récent, en février 2008, à Cologne, est très révélateur des intentions d’Ankara. Ne confondons toutefois pas le kémalisme et le pantouranisme. Le Général Mustafa Kemal, que les Turcs surnommeront affectueusement « Atatürk », le « Père de tous les Turcs », se voulait, au départ, sincèrement Européen, dans la mesure où il voulait imposer un mythe hittite à la Turquie défaite et dépecée, qu’il souhaitait par ailleurs désislamiser et désarabiser. Ce mythe hittite faisait explicitement référence à un peuple indo-européen, ayant vécu à la charnière de la proto-histoire et de l’histoire, venu d’Europe, via les Balkans, pour faire face à un environnement non européen en Anatolie et pour pousser sa puissance en direction du ‘dos’ du Croissant Fertile, aux confins septentrionaux de l’actuelle Syrie. De ce mythe, il reste, à Ankara, un impressionnant « Musée hittite », fondé par Atatürk lui-même. Outre ce musée, le mythe hittite de Mustafa Kemal n’a laissé aucune trace dans les projets politiques et géopolitiques de la Turquie contemporaine.

Le pantouranisme exalte une autre orientation géostratégique, si bien qu’on ne peut du tout le confondre avec le kémalisme. Dans le mythe pantouranien, l’Etat turc n’est pas posé comme l’héritier des Hittites qui avancent de l’Egée vers le Croissant Fertile mais l’héritier des hordes seldjoukides venues du fin fond de l’Asie pour s’élancer vers l’Egée, l’Adriatique et le Danube. Le pantouranisme prend forme, au niveau intellectuel, dès le début du 20ième siècle mais atteint son apogée pendant la seconde guerre mondiale, en 1942, quand une large fraction de l’élite politique et militaire turque croit à une victoire prochaine de l’Allemagne hitlérienne en Russie, victoire qui apportera, croit-elle, l’indépendance aux peuples turcophones de l’Asie centrale soviétique. Parmi les jeunes officiers séduits à l’époque par ce pantouranisme ou panturquisme, nous trouvons le futur leader MHP, le Colonel Türkes, dit le « Bazboug », le chef. Les pantouraniens, qui plaçaient leurs espoirs en une victoire allemande, seront jugés en 1945, quand la Turquie, qui avait senti le vent tourner, s’alignait sur les Etats-Unis. Jugement purement formel : quelques semaines après leurs lourdes condamnations, les panturquistes rentrèrent au foyer.

Les mythes hittite et pantouranien ne sont pas des vues de l’esprit, des coquetteries intellectuelles sans grande consistance. Elles reflètent des intentions politiques et stratégiques essentielles, suivies d’effets toujours bien concrets. Ainsi, dans ses multiples ouvrages, essais et articles, Zbigniew Brzezinski, grand stratégiste américain contemporain, auteur du livre programmatique « Le Grand Echiquier », cherche à mâtiner l’idéal pantouranien et un idéal « mongoliste », où il maintient en quelque sorte deux fers au feu : il utilisera le pantouranisme pour séduire les Turcs et détacher le cœur central de l’Asie de l’hégémonie russe, de le balkaniser et de le satelliser pour séparer la Russie de l’Iran et de l’Inde, où pour créer une unité éphémère, ‘gengiskhanide’, toujours remise en question de par sa mobilité incessante et de par les querelles d’héritage, une unité fragile, plutôt une instabilité chronique, qui aurait eu pour fonction de neutraliser les anciens empires de la région, à commencer par le persan ; mais dans cet espace, ce ne sera ni un étatisme ottoman ni un étatisme kémaliste qui devra avoir, in fine, le dessus, mais un « mongolisme », non pas tant animé par la sagesse de Gengis Khan, mais à la façon très négative de Tamerlan, fossoyeur de la Perse si fascinante des 12ième, 13ième et 14ième siècles. L’Asie centrale, faute d’être pleinement satellisable par les Etats-Unis, devra devenir un espace de chaos, un espace « tamerlanisé » ad infinitum, déstructuré faute d’être structuré par une idée impériale solide, visant la durée, la pérennité, à la romaine ou à la persane, à la Witte ou à la Stolypine. C’est une façon de réactualiser les stratégies d’un Richelieu et d’un Vauban, qui avaient cherché tous deux à ‘démembrer’ les frontières de leurs adversaires impériaux ou espagnols ou à plonger ‘les Allemagnes’ dans le chaos, entre une France stabilisée d’une main de fer par le nouvel absolutisme, après la Fronde et la répression des révoltes populaires, et son allié ottoman, bien campé sur le cours du Danube. Dans la perspective actuelle, il s’agit de plonger dans le chaos un vaste espace, correspondant peu ou prou au territoires dominés jadis par Gengis Khan, entre une Union Européenne stable mais ouverte et pénétrée sur le plan commercial et une Chine mise dans l’impossibilité de se trouver des alliés sur la masse continentale eurasienne et prête, dès lors, à accepter à terme une ouverture au commerce américain (projet bien concocté depuis 1848, quand la guerre du Mexique laissait prévoir le statut bi-océanique des Etats-Unis, pierre angulaire de leur puissance planétaire).

A cette imitation, mutatis mutandis, de la stratégie ‘démembrante’ de Richelieu par Brzezinski en Asie centrale correspond la stratégie américaine équivalente dans les Balkans, à l’époque du tandem Clinton/Albright, qui ont créé de toutes pièces les questions bosniaque et kosovare ; cette dernière rebondit aujourd’hui avec la proclamation unilatérale d’indépendance de Thaçi à Pristina. Le Kosovo est la région qui se trouve exactement au milieu de l’ouest de la péninsule balkanique, à l’ouest du massif des Monts Rhodope ; plus exactement de l’ensemble formé par l’Albanie, la Serbie et le Monténégro ; qui tient cette région, comme les Ottomans l’ont tenue, tient l’ensemble de la péninsule et contrôle les routes qui mènent à Belgrade et au Danube, via les vallées de l’Ibar (à Mitrovica) et de la Morava, plus à l’est. Exactement comme la puissance qui tient sous sa coupe la Bosnie tient, à terme, la côte adriatique, qu’elle surplombe, menace l’Italie et domine le cours de la Save qui mène aux frontières de l’Autriche et de la Vénétie. La stratégie américaine a donc réussi à créer, en pariant sur le fondamentalisme musulman et sur certains réseaux mafieux albanais, deux entités politiques hostiles à  -et en marge de-  leur environnement slave, grec et chrétien-orthodoxe, deux entités à la dévotion des Etats-Unis, de la Turquie et de leurs financiers saoudiens. L’atout stratégique qu’aurait pu constituer des Balkans unis est ainsi perdu pour l’Europe, avec, rappelons-le, la bénédiction d’une intelligentsia médiacratique (et médiocratique…) parisienne, qui, à l’époque de la crise bosniaque, professait un multiculturalisme irréaliste en faveur d’une Bosnie pluri-confessionnelle, posé comme le futur modèle incontournable de l’Europe entière ; en débitant ces discours, cette brochette d’intellos creux camouflait le fait, pourtant patent pour qui sait déchiffrer la ‘novlangue’ des fabriques d’opinion, qu’elle prenait ses ordres, en réalité, de Washington, pour briser, par matraquage médiatique, la solidarité spontanée pour la Serbie qui aurait animée la France.

Dans le Kosovo, la firme Halliburton, où Dick Cheney a de solides intérêts, a construit la plus grande base américaine d’Europe, ce qui confirme bien la volonté américaine de s’y maintenir pendant longtemps. L’objectif est de contrôler les oléoducs et gazoducs qui transitent ou transiteront dans la région ou à proximité, en provenance des rives de la Mer Noire et en direction de l’Adriatique, donc de l’Italie, Etat fondateur de la CEE, pour que gaz et pétrole soient distribués partout dans l’UE. La coopération euro-russe en matière énergétique serait ainsi soumise à une épée de Damoclès permanente. Le Kosovo se trouve légèrement en surplomb par rapport à la vallée de la Morava, entre la ville serbe de Nis et la capitale macédonienne Skopje, à mi-chemin entre Belgrade sur le Danube et Thessalonique sur l’Egée. Les vallées de la Morava (de Skopje à Belgrade) et de l’Axios (de Skopje à Thessalonique) forment donc la voie terrestre la plus courte entre le Danube et l’Egée, donc entre la Méditerranée orientale et l’Europe centrale. Cette zone est donc de la plus haute importance stratégique : une puissance planétaire se doit dès lors de la contrôler pour tenir ses éventuels concurrents en échec. L’enjeu consiste donc à contrôler les oléoducs et les gazoducs et cette ligne Belgrade-Thessalonique, comme le firent les Ottomans dans les siècles passés. Ce n’est pas un hasard s’ils ont évacué cette ligne au tout dernier moment : en 1912 quand ils avaient affaire et aux peuples balkaniques et à l’Italie. Le double contrôle de la ligne des oléoducs et gazoducs et de la ligne Belgrade-Thessalonique : tels sont donc les buts réels. Et c’est justement dans les Balkans, donc en Europe et contre l’Europe, que les Etats-Unis enregistrent aujourd’hui le meilleur succès dans leurs stratégies, avec des alliés musulmans, alors que l’islam combattant est présenté partout ailleurs comme l’ennemi de l’Occident américanisé. Les naïfs, y compris dans certains mouvements identitaires, croient benoîtement, que le Kosovo musulman ne peut en aucun cas être téléguidé par les services américains puisqu’il est tout simplement musulman, donc posé erronément comme allié aux auteurs réels ou présumés des attentats du 11 septembre 2001 à New York. C’est cette fable que croient et ânonnent les canules atlantistes, grand Béotiens en matière d’histoire, laquelle est effacée de leurs têtes, et en géographie, car apparemment aucun d’entre eux n’est capable de déchiffrer une simple carte physique d’école primaire, contrairement à leurs maîtres américains.

Ailleurs, les Etats-Unis ne rencontrent pas le même franc succès. Dans cette Asie centrale que Brzezinski voulait satelliser et ‘tamerlaniser’, Russes et Chinois, qui ont clairement perçu le danger, ont mis sur pied le « Groupe de Shanghai », alternative heureuse au chaos artificiel qu’avaient espéré et programmé les experts du Pentagone. Le « Groupe de Shanghai » est aujourd’hui la principale entrave à l’expansion planétaire des projets de Washington. Il rend caduque la volonté de Brzezinski de plonger cet espace, occupé par les ex-républiques soviétiques à majorité musulmane, dans un chaos à la Tamerlan.

Dans le Caucase, la tentative de former une série de sécessions en chaîne n’a pas entièrement réussi, comme dans les Balkans, même si le problème tchétchène est loin d’être résolu, reste un abcès purulent collé au flanc caucasien de l’espace géopolitique russe. Si le Kosovo se trouve au milieu d’une péninsule située entre l’Adriatique et la Mer Noire, la Tchétchénie se trouve, elle, au milieu d’un large isthme, forcément à double littoral, entre la Mer Noire et la Caspienne, où doivent logiquement passer les oléoducs et gazoducs amenant le brut des gisements de Bakou en Azerbaïdjan et des nouveaux champs de pétrole et de gaz du pourtour de la Caspienne. Le sécessionnisme tchétchène, lit-on dans la presse, a été animé, dès son éclosion, par des nationalistes locaux mais aussi par un djihadiste venu de Jordanie. Pourquoi de Jordanie ? Parce que dans ce pays arabe vit depuis un exode de Tchétchènes, fuyant l’avance des armées russes au 19ième siècle, une forte minorité de ceux-ci, dite « circassienne », ayant conquis bon nombre de postes importants dans l’armée et l’administration du royaume hachémite, ancien satellite britannique. Ce djihadiste arabisé n’a fait qu’un retour au pays de ses aïeux, pour aller y pratiquer les habituelles « guerres de base intensité » ou « stratégies lawrenciennes »   -notamment celle qui a donné naissance au Royaume de Transjordanie-   dans les zones pétrolifères que souhaitent contrôler les « Sept Sœurs », soit les grands consortiums britanniques ou américains des hydocarbures (sur l’apport démographique tchétchène, lire : Yo’av Karny, « De Kaukasus », Uitgeverij Atlas, Amsterdam/Antwerpen, 2003-2005).

En conclusion, les entités étatiques « indépendantes », que veulent imposer à la communauté internationale les puissances thalassocratiques, financières et pétrolières anglo-saxonnes, en pariant sur tribus dissidentes, mafias locales, sécessionnistes douteux, zélotes religieux, etc., ne sont pas acceptables dans la situation actuelle, surtout qu’elles concourent à installer des abcès de fixation musulmans, des enclaves islamisées, au cœur de territoires européens, avec, qui pis est, une dimension mafieuse et narco-trafiquante, pourtant dûment dénoncée par bon nombre d’institutions internationales. Ces enclaves musulmanes ne peuvent qu’aviver ou conforter le « choc des civilisations », annoncé dès 1993 par Samuel Huntington. Comme le soulignait récemment le Dr. Koenraad Elst dans les colonnes de « ‘t Pallieterke », le Kosovo n’est jamais qu’un instrument des Américains, qui, in fine, contrôlent tout le processus indépendantiste, et des Wahhabites saoudiens, qui visent une reconquista de toutes les terres qui furent, à un moment ou un autre de l’histoire, islamisées. Ni l’une ni l’autre de ces options ne vont dans le sens des intérêts de l’Europe.

La première étape d’une révolution métapolitique, qui ouvrirait les yeux des Européens afin qu’ils se rendent compte des manipulations médiatiques orchestrées depuis quantité d’officines d’Outre Atlantique (le « soft power »), serait de se doter d’une élite capable de lire des cartes et d’utiliser des atlas historiques (comme ceux de l’Ecossais Colin McEvedy). Cette lecture de carte, permettant de saisir d’un simple coup d’œil, les dynamiques de l’histoire, toujours récurrentes, a été l’un des objectifs de « Synergies Européennes ». J’invite tout un chacun à poursuivre ce travail, pour donner vigueur à toutes nos initiatives européistes et identitaires.

Robert Steuckers.  

 

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mercredi, 09 avril 2008

USA et Afro-Maghrébins de France

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NOVOPRESS - C’est un fait nouveau, mais d’autant plus inquiétant pour les européens de souche : les Etats-Unis cherchent à former et à tisser des liens avec les “futurs leaders noirs et arabes “en Europe et particulièrement en France. Cette information a été rapportée par le journal Suisse “L’Hebdo” et mis en ligne sur le site très politiquement correct Bondy Blog.

Le gouvernement des Etats-Unis cherche à tisser depuis quelques années des “liens étroits avec les minorités musulmanes en Europe”. (…) Chaque ambassade américaine sur le Vieux Continent compte au moins un collaborateur dévolu à cette mission.“La France, avec un pourcentage de sa population estimée à 10 % de confession qui se déclare musulmane (voire 30 % chez les moins de 15 ans), retient l’attention du département d’Etat de Condoleezza Rice. Le responsable du programme créé en 2005, Dan Fried, directeur des Affaires européennes au Département d’Etat, a profité de la visite de Nicolas Sarközy aux USA en novembre dernier, pour rencontrer une délégation essentiellement composée de maghrébins et de noirs de France à l’ambassade des Etats-Unis à Paris. Parmi les présents, Ali Laïdi, spécialiste du renseignement économique et du terrorisme islamique à l’IRIS (Institut des relations internationales et stratégiques), Saïd Branine, responsable du site Internet musulman oumma.com, Hervé Mbouguen, également animateur d’un site Web, grioo.com, dédié aux Noirs, Fayçal Douhane, du conseil national du Parti socialiste, en charge des questions de diversité et un membre du BondyBlog.

Le but est clair, comme le confie James L. Bullock, ministre conseiller aux Affaires publiques de l’ambassade américaine, “c’est notre intérêt que ça se passe bien ici. Nous voulons aider les Français à trouver une voie paisible pour leurs minorités “. L’ambassade américaine à Paris n’a pas attendu les émeutes de 2005 pour approcher les minorités françaises. Selon le journal suisse l’Hebod,” il y a trois ans et demi, le cap a été mis sur la banlieue, avec l’envie de « comprendre »“. Comme le confirme Laura Berg, attachée culturelle de l’ambassade des Etats-Unis, au journaliste de l’Hebdo, l’ambassade des USA dispose d’un budget annuel pour aider des projets culturels ou sociaux menés dans les banlieues françaises avec la bienveillance du gouvernement français. L’ambassade a ainsi apporté un soutien financier au Festival Blues sur Seine de Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. Laura Berg préfère taire les noms des associations aidées par les Etats-Unis, certaines œuvrant au dialogue judéo-musulman.

L’Amérique ne se contente pas d’aller dans les banlieues françaises. Elle invite aussi des acteurs de la diversité à se rendre chez elle. En trois ans, une cinquantaine d’entre eux, conviés par le Département d’Etat, ont eu droit à cette forme de reconnaissance. Cette année, Fayçal Douhane, Amirouche Laïdi, le président du Club Averroes qui milite pour la diversité dans les médias, et Stéphane Pocrain, ex-porte-parole des Verts, s’y sont rendus. Ali Laïdi, frère d’Amirouche, en revient. En avril 2008, Mohamed Hamidi, du Bondy Blog, et Karim Zéribi, homme politique et responsable associatif de Marseille, y effectueront un voyage de trois semaines. De même que Patrick Lozès, le président du CRAN (Conseil représentatif des associations noires), un groupe de pression mis en relation avec son grand frère américain, le NAACP, grâce aux bons soins de l’ambassade US à Paris.

Cette ouverture vers les futurs leaders africains de la France, du fait de la substitution de population que connait l’Hexagone, est un condensé de la politique américaine : objectifs économiques, protection de ses intérêts et messianisme religieux. Comme le confiera Laura Berg, attachée culturelle de l’ambassade des Etats-Unis, au journaliste suisse de l’Hebdo : “Nous les juifs, dit-elle en parlant aussi de Dan Fried, avons le devoir, durant notre passage sur terre, de rendre le monde meilleur. Il est absurde de penser que les juifs, qui sont eux-mêmes une minorité, veulent écraser les autres minorités. Je suis mariée à un Tunisien musulman. Je crois qu’il y a de l’altruisme dans le gouvernement américain. Mais cela ne veut pas dire que nous prenions toujours les bonnes décisions. En France, nous voulons promouvoir une vision positive de la diversité.”

[cc] Novopress.info, 2006, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine [http://lyon.novopress.info/]

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mardi, 01 avril 2008

A. Ivanov: trois Europe, trois pays

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Anatoly IVANOV :

Trois Europe, trois pays

 

Sur plus d’un point, je marque mon accord avec mon ami français Guillaume Faye. Nous avons effectivement besoin d’une utopie positive, d’autant plus que la définition de celle-ci correspond à celle du mythe, telle qu’elle nous a été léguée par Georges Sorel: le mythe est le but des efforts déployés. Le mythe est réalisable mais sa réalisation est difficile et exige beaucoup d’efforts pour arriver au succès dans la lutte, exige aussi le sacrifice de soi mais non pas avec cette joie triste des chrétiens dévorés par les lions, plutôt avec l’extase dionysiaque. Le mythe est une projection du pouvoir, générée par des hommes rares qui forgent une conception de l’avenir. Avant de vouloir, il faut créer un projet, susciter l’émergence d’une vision du monde.

 

Le mythe est donc un bon atout. Les sceptiques nous diront cependant que nos mythes n’inspirent plus que nous-mêmes. Et parmi ces mythes, il y a la conception fausse d’une Europe unie.

 

Il y a un siècle et demi, Nikolaï Danilevski, principal idéologue du slavisme russe, défendait, dans son ouvrage célèbre, « La Russie et l’Europe », une double thèse : Russie et Europe sont deux mondes différents et l’Europe ne connaît pas la Russie, ne peut pas la connaître et ne veut pas la connaître.

 

Sa thèse de la méconnaissance de la Russie par l’Europe reste actuelle. Pavel Toulaev a participé, en novembre l’année dernière (ndt : en 2006), à une conférence internationale à Madrid, d’où il nous a rapporté une affiche titrant « Ellos guian nuestra Europa » (« Ils guident notre Europe »). L’affiche reproduisait en outre trente portraits de penseurs ou d’écrivains : parmi eux, je n’ai trouvé aucun Russe, sans parler des Slaves en général. Conclusion : devons-nous distinguer ainsi LEUR Europe de NOTRE Europe ?

 

La seconde thèse de Nikolaï Danilevski ne correspond pas à la vérité. La présence de délégués européens à notre colloque précédent, et à celui d’aujourd’hui, prouve le contraire. S’ils peuvent et veulent nous connaître ? L’avenir le montrera.

 

Mais l’Europe de Danilevski est, elle aussi, une abstraction. Plekhanov ironisait à ce sujet, en disant qu’il ressemblait au gamin juif d’un récit qui divisait le monde en deux parties : la Russie et l’étranger. Il y a quatre ans, à l’époque où l’Irak était agressé, les Américains, mécontents de la position prise alors par la France et l’Allemagne, ont forgé une nouvelle dichotomie, en opposant les pays dits « énergiques » aux pays dits « passifs », ce qui me rappelle la classification raciale d’un savant allemand, Klemm, qui posait, lui aussi, une dichotomie entre races actives et races passives. Il tenait, bien évidemment dans le contexte de son époque, les Slaves pour les représentants d’une race « passive ».

 

Les considérations des Américains actuels ne sont pas aussi généralisantes : quelques pays slaves ont récolté leurs compliments, surtout la Pologne. Les Américains ont utilisé celle-ci pour enfoncer un coin dans l’Axe Paris-Berlin-Moscou. Il faut dire, avec regret, que cet Axe, en lequel Jean Parvulesco et d’autres ont placé de grandes espérances ne fut qu’une vision éphémère. Le changement de gouvernement en Allemagne l’a brisé et, après l’élection en France du russophobe Sarközy, il ne reste de cet Axe que des débris.

 

Mais il ne faut pas confondre les Etats et les peuples. Charles Maurras, qu’on a parfois appelé le « Marx de la Droite » affirme qu’il n’existe pas seulement un « pays légal », c’est-à-dire un pays officiel, mais aussi un « pays réel », ce que l’on appelle aujourd’hui la « majorité silencieuse ». Maurras a cru que cette majorité silencieuse pensait comme lui, qu’elle était au fond royaliste et catholique. Il s’est trompé : son « pays réel », en effet, était plutôt irréel, imaginé.

 

On peut idéaliser son peuple ; ou, au contraire, on peut désespérer de ses possibilités, de son avenir. Un exemple classique nous en est fournit par la discussion entre Tchernytchevski et Dobrolioubov.

 

Cette discussion nous est livrée par le roman « Le Prologue », où l’auteur s’est représenté, lui et son ami, sous les noms de ‘Volguine’ et ‘Levitski’. Dobrolioubov n’était pas d’accord avec son interlocuteur qui disait : « Le peuple est mauvais et bas dans la même mesure que le monde est beau ». Et Tchernytchevski racontait par dérision que les artisans chantaient, fin saouls : « Nous ne sommes ni voleurs ni brigands, nous sommes ouvriers de Stenka Razine ! ». Mais après le premier cri d’un policier, ces « anciens ouvriers de Razine » se dispersent tout de suite, en remerciant Dieu qu’ils ont rencontré un bon policier.

 

On cite souvent la piètre estime dans laquelle est tenue le peuple russe dans ce roman : « C’est une nation misérable, tous sont des esclaves, du haut en bas ». Comment cette nation, à son avis ‘misérable’ a pu vaincre Napoléon ou, du vivant même de l’auteur, libérer la Bulgarie du joug turc, ce démocrate-révolutionnaire n’a pas pu nous l’expliquer.

 

Nekrassov doutait aussi des capacités du peuple russe :

« Si tu te réveilleras, plein de forces…

Ou si tu as déjà fait tout ce que tu as pu :

As-tu créé une chanson qui ressemble à un gémissement

Pour t’endormir ensuite pour toujours ? ».

 

L’activité politique est sans aucun doute l’indice le plus important pour juger des ressources en énergie d’une nation, mais elle n’est pas le seul indice. Il y en a au moins un autre : c’est la capacité à construire un Etat. Mais un Etat qui ne doit pas se substituer au peuple. L’écrivain français Georges Bernanos écrivait dans son « Journal », au début de la seconde guerre mondiale, encore avant la défaite de la France : « On a volé la France aux Français, depuis qu’on leur a mis dans la tête que la France était uniquement l’œuvre de l’Etat, non la leur ». Et : « On a substitué au sentiment de la patrie la notion juridique de l’Etat ». Et voilà le résultat, ajoutait-il, « les Français n’ont plus de patrie » (cf. « Les enfants humiliés »). Les fruits d’une telle substitution sont toujours d’abord la stagnation, et puis l’effondrement.

 

L’Etat soviétique fut très fort mais tout le monde sait, aujourd’hui, quelle fut sa triste fin. Je note avec inquiétude tous les signes d’engourdissement de notre Etat et j’observe avec envie la vie politique orageuse, tempétueuse, de l’Europe orientale : Pologne, Roumanie, Ukraine. Vraiment, il y a deux Europe. La première est celle des pays où les sentiments nationaux demeurent aigus, où l’énergie non épuisée des peuples trouve à se manifester vers l’extérieur. Et puis, il y a celle où les sentiments sont émoussés, où règne l’apathie, l’indifférence et le je-m’en-fichisme.

 

Alors, et la dichotomie de départ ? Russie et Europe ? Il y a la Russie et les deux Europe. Où la Russie et la troisième Europe, différentes des deux précédentes mais néanmoins aussi l’Europe.

 

Vous dites, chers interlocuteurs, qu’il n’y en a que deux, la Russie et l’Union Européenne ? Mais l’élargissement de l’UE fait de celle-ci une instance de plus en plus instable. Perle parmi les nouvelles acquisitions de l’UE est la Pologne qui, fidèle à ses traditions, utilise son « liberum veto » envers et contre l’avis de toute l’Europe, médusée. Mais quelle raison les Européens ont-ils de s’étonner ? Il faut se souvenir de l’histoire.

 

La Pologne se pose comme obstacle au rapprochement mutuel entre l’UE et la Russie. Mais quelle Pologne : la Pologne légale ou la Pologne réelle ? Nous savons, par exemple, que malgré les affects anti-russes traditionnels des Polonais, plus de la moitié de la population polonaise s’oppose à l’installation des bases militaires américaines sur le territoire de sa patrie. Mais que faire, si ton peuple se tait, s’il est privé de la possibilité d’exprimer son opinion, si les autorités ‘légales’ ne s’intéressent pas à cette opinion, se contentant de ‘sondages’ falsifiés à plaisir ?

 

On peut imaginer que le peuple se tait à l’unisson avec toi, à la Maurras ; on peut désespérer du peuple, à la Tchernytchevski. Mais se dernier ne se perdait pas en conjonctures pour deviner comment se transformerait le peuple, seize ans après sa mort.

 

A part les deux pays de Maurras, le légal et le réel, il y en a encore un troisième, que j’appellerai le ‘peuple potentiel’. Nietzsche le devinait quand il disait : « Aimez le pays de vos enfants ». S. Morozov, dont je cite constamment le livre « La conspiration actuelle contre les peuples de Russie », affirme que nous traversons une période transitoire, où la vieille nation russe n’existe plus et la nouvelle nation n’existe pas encore. Mais l’image de cette nouvelle nation reste vague, y compris pour l’auteur du livre lui-même.

 

L’image de l’Euro-Russie, évoquée dans les milieux amis d’Europe occidentale, est encore plus vague. Gabriele Adinolfi, rédacteur auprès de la revue italienne « Orion », a prononcé un discours très important, qui est publié dans la revue espagnole « Tierra y Pueblo » (septembre 2006). Dans ce discours, Adinolfi exprime sa crainte : « Plus nous sommes immergés dans la réalité, plus nous la reflétons. Plus la sphère de notre imagination est vaste, plus ses contours seront indéfinis et nous ne pourrons les dessiner ». L’hypothèse de l’Euro-Sibérie ne se base, à son avis, que sur un espoir mal fondé. Nos pensées planent dans le domaine de la politique extérieure. Nous transférons nos propres vœux aux pays exotiques, que nous ne connaissons pas pratiquement. Cette Euro-Sibérie désirée, conclut Adinolfi, pourra s’avérer un mirage dans le désert.

 

Je voudrais ajouter une observation, tiré de mon expérience vitale. Quand il pleut, il semble toujours que le trottoir d’en face est plus sec, mais quand on traverse la rue, on s’aperçoit qu’il est mouillé dans la même mesure. Il y a vingt ans, Guillaume Faye plaçait ses espérances dans un réveil de l’Allemagne. En vain. Aujourd’hui, il les place dans une renaissance de la Russie. Et demain ?

 

Les catégories de pensée que sont l’Empire, l’Etat, etc. ne sont pas destinées à nous. Si nous sommes incapables de récolter suffisamment d’argent pour payer un billet d’avion Moscou/Paris ou pour louer une salle, nos affaires sont posément désastreuses. Mais, dans le même temps, nous songeons à construire l’Empire !

 

Gabriele Adinolfi compare notre situation à celle des premiers chrétiens dans l’Empire romain. A mon avis, c’est la seule comparaison adéquate, mais il saute, en la posant, par-dessus une grande étape historique nécessaire, parce qu’il nous parle des chrétiens, qui avaient déjà un canon et des structures bien organisées. Nous, nous n’avons rien.

 

Les chrétiens ne rêvaient pas de l’Empire, au contraire, ils le tenaient pour un ennemi. Ils cherchaient le Royaume de Dieu et on sait que ce Royaume n’est pas d’ici ou de là, il est « dedans de nous », ou, en d’autres mots, « au centre de nous-mêmes ».

 

Il me paraît curieux que Gabriele Adinolfi prêche la même chose. Il croit, par exemple, que le fameux choc des civilisations a lieu au-dedans de nous et que nous devons mettre en ordre notre monde intérieur avant de résoudre les problèmes mondiaux. Il doute ensuite de l’existence réelle d’une communauté spirituelle qui nous serait propre et dont les membres pourraient se référer à un « nous ». Je partage ses doutes, parce que quand on me suggère une ‘synthèse organique’ qui serait un mélange étrange de Gengis Khan et des saints chrétiens, je le dis sans circonlocutions inutiles : je ne ferai jamais partie d’un tel « nous » !

 

Existons-nous ? Non. Pour le moment. Mais je suis convaincu que nous existerons.

 

Anatoly IVANOV.

 

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lundi, 31 mars 2008

A. Mölzer: sur le Kosovo

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Andreas MÖLZER :

Réflexions sur la proclamation unilatérale d’indépendance au Kosovo

Cette manière de procéder  -de proclamer unilatéralement son indépendance-  peut avoir de terribles conséquences pour l’Europe, du moins pour sa portion située entre les Pays Baltes et les Balkans. Si l’on suit cette logique, la plupart des Etats doivent se dissoudre. Pourquoi les Hongrois de Transylvanie ou du sud de la Slovaquie, pourquoi les Russes des Pays Baltes, pourquoi les Allemands de Haute Silésie (actuellement polonaise) devraient-ils renoncer à cette autodétermination que s’accordent les Kosovars ? Vu sous cet angle, nous avons, en reconnaissant le Kosovo, ouvert une véritable boîte de Pandore. Les groupes ethniques, nés au cours de l’histoire, qui se sont développés sur un territoire précis pendant plusieurs siècles successifs, ont bien davantage le droit de revendiquer leur indépendance politique que les Kosovars, qui ne sont jamais qu’une nation d’immigrants.

Vu la nature explosive que revêt l’idée du droit des peuples à l’autodétermination dans ces régions multi-ethniques et bigarrées et vu les conséquences que cela pourrait entraîner, la seule alternative viable aurait été d’européaniser ces territoires. L’imbroglio ethnique et culturel que l’on retrouve en Europe orientale, et surtout dans les Balkans, et qui forme la trame de ces régions, ne peut trouver de solution pacifique que sous un baldaquin supra-national, comme au temps de la monarchie des Habsbourgs. Une perspective européenne pour l’ensemble des Balkans occidentaux serait effectivement une solution envisageable. Lorsque tous les Etats qui ont émergé de l’ancienne Yougoslavie seront devenus membres de l’UE, lorsque les marchandises circuleront librement dans un territoire sans frontières, les conflits de nationalités pourront de fait être définitivement surmontés.

Mais la situation actuelle ne nous permet pas d’être optimistes : les Balkans, semble-t-il, resteront un baril de poudre en Europe, pendant quelques générations encore. La fierté de la nation serbe a été bafouée ; l’orgeuil nationaliste des Albanais a été galvanisé ; les Croates de Bosnie n’ont trouvé aucune solution à leurs problèmes ; plus généralement, ces Etats nés de la dissolution de la Yougoslavie ne sont pas viables économiquement, ce qui rajoute encore de la poudre au baril déjà plein à ras bord.

Les autres Etats européens ne semblent pas réellement conscients de la situation : ils ne suggèrent aucune politique intelligente pour enrayer ce processus calamiteux. Dans le cas du Kosovo, ils ont aggravé la situation en voulant l’améliorer, n’ont pas contribué à apporter une solution durable. Nous réclamons une politique qui aille dans le sens des intérêts de l’Europe toute entière !

Andreas MÖLZER.

(Extrait d’un long article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; trad. fran9. : Robert Steuckers).

 

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dimanche, 30 mars 2008

Du précédent bosniaque à la crise du Kosovo

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Andreas MÖLZER :

Du précédent bosniaque à la crise du Kosovo

A coup sûr, nous pouvons dire que la création de la Bosnie a constitué le premier péché originel de la communauté internationale et de l’Union Européenne. Dans leurs efforts pour imposer le dogme de la viabilité et de l’excellence des entités étatiques multi-ethniques et muti-culturelles, elles ont cru, jusque aujourd’hui, qu’en Bosnie comme au Kosovo elles allaient pouvoir neutraliser les vieilles haines nationales et apaiser définitivement les conflits entre peuples qui en découlaient.

Dans le cas de la Bosnie, elles ont commencé par reconnaître, à côté des habituelles catégories ethniques, des identités religieuses. Serbes et Croates vivent là-bas dans des communautés imbriquées les unes dans les autres sur un même territoire, ce qui rendait la situation déjà extrêmement compliquée. Or, par-dessus cet imbroglio ethnique, les instances internationales n’ont rien trouvé de mieux que d’y superposer un niveau identitaire supplémentaire, d’ordre religieux et culturel, en mettant les Musulmans de Bosnie sur le même pied que les identités serbe et croate : le champ de la problématique en est devenu encore plus complexe. Le Kosovo s’ajoute aujourd’hui à un Etat bosniaque à dominante musulmane sur le sol européen, un Etat kosovar dont l’islam s’est considérablement radicalisé au cours des conflits de ces vingt dernières années. Des influences venues du Proche Orient et l’arrivée de moudjahiddins flanqués d’imams militants ont contribué à rendre fondamentaliste un islam albanais qui s’était fortement laïcisé au fil du temps. On ne s’étonnera pas, dès lors, d’apprendre que la Turquie fut le premier Etat à reconnaître le Kosovo indépendant, en y mettant beaucoup d’emphase.

Conséquence immédiate de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo : les Serbes de Bosnie, ceux de la « Republika srpska », réclament, en même temps que les Serbes du Kosovo, que leurs zones de peuplement soient détachées des nouveaux Etats à dominante musulmane pour être rattachés à la Serbie. Quels arguments la communauté internationale et surtout l’Union Européenne pourraient-elles bien avancer pour rejeter cette requête ? Après qu’elles aient reconnu le Kosovo, mystère et boule de gomme !

Le projet imaginé et mis au point, il y a une bonne décennie, par le chef d’Etat serbe Milosevic et son homologue croate Tudjman, apparaît rétrospectivement bien réaliste, lui qui prévoyait, dans les zones de peuplement où Serbes et Croates vivaient imbriqués, une « épuration ethnique pacifique ». Ce projet rappelait certes les accords entre Hitler et Mussolini pendant la seconde guerre mondiale au Tyrol méridional et dans la zone du « Kanaltal » en Carinthie. Tudjman et Milosevic voulaient « désimbriquer » les zones mixtes de manière pacifique sans tenir compte du facteur islamo-bosniaque et arrondir à terme les territoires de la Croatie et de la Serbie. Mais ce projet n’a pu se réaliser. L’intervention américaine et la volonté de l’UE d’imposer son dogme de l’absolue nécessité d’Etats multi-ethniques s’y sont opposés.

Dorénavant, les frontières d’Etat pourront donc être révisées par des déclarations unilatérales d’indépendance et ces révisions seront automatiquement reconnues par la communauté internationale. Pour les Balkans, il conviendra d’imaginer et d’élaborer des projets viables sur le long terme et réellement générateurs de paix. Dans ce cas, le droit des peuples à la pleine autodétermination devra s’appliquer de manière radicale et complète. Il faudra organiser des referenda et votations populaires, ensuite procéder au détricotage des zones ethniquement bigarrées sur base du droit privé, dans la mesure où il faudra liquider et vendre des biens immeubles et mettre en œuvre le déménagement volontaire des populations qui ne veulent pas vivre sous la domination d’autres ethnies. Dans la logique qui vient de s’imposer, on devra envisager l’émergence d’un Etat pan-albanais, qui regroupera tous les territoires peuplés d’Albanais, c’est-à-dire l’Albanie, le Kosovo et les parties de la Macédoine et de la Bosnie où ils sont majoritaires. Mais ce qui est vrai pour les Albanais, doit être vrai pour les Serbes : ceux-ci doivent recevoir le droit de décider par consultation populaire, dans tous les Etats nés du démantèlement de l’ancienne Yougoslavie, s’ils veulent vivre ensemble dans un grand Etat serbe ou séparés dans plusieurs Etats. Il faudra ensuite vérifier dans quelle mesure les Monténégrins et les Macédoniens constituent ou non de véritables ethnies, avec une langue et une culture particulières, et dans quelle mesure ils sont encore ou non animés par le désir de posséder leur propre Etat.

Andreas MÖLZER.

(extrait d’un article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; trad. franç. : Robert Steuckers).

 

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jeudi, 27 mars 2008

Kosovo: nouveau protectorat américain?

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Safet BABIC :

 

Le Kosovo : nouveau protectorat américain ?

 

Le Kosovo, que les Allemands nomment aussi l’Amselfeld, le « Champ des Merles », est une région au centre de la péninsule balkanique, dont les frontières touchent au sud-ouest l’Albanie, au nord-ouest le Monténégro, au nord et à l’est la Serbie aujourd’hui réduite et, au sud-est, la Macédoine. Après la guerre de 1999, le Kosovo a reçu, par le truchement de la résolution 1244 des Nations Unies, le statut d’un territoire autonome à l’intérieur de la Serbie et a été placé sous l’administration de l’ONU.

 

Les frontières occidentales et méridionales du Kosovo sont constituées de zones montagneuses. Au centre de cette cuvette, nous trouvons deux plaines : celle du Champ des Merles, avec Pristina pour capitale, et la Métochie à l’Ouest, dont le centre est Prizren. Les deux plaines sont séparées par une zone de collines, semi-montragneuse. Le Kosovo, avec ses 10.877 km², a une superficie a peu près égale au tiers de celle de la Belgique. Sa densité démographique de 175 habitants par km² en fait un territoire à la population relativement dense. On estime que la population du Kosovo est d’environ 1,9 million d’habitants. Cette population est très jeune : 33% a moins de quinze ans ; 6% seulement a plus de 65 ans. Entre 350.000 et 400.000 Kosovars vivent à l’étranger, surtout en Allemagne, en Autriche et en Suisse. D’après des estimations récentes de l’OSCE, 91% de la population du Kosovo est albanaise, 5% est serbe et les derniers 4% sont constitués d’autres minorités, surtout des Tziganes et des Turcs. A la suite des élections parlementaires du 17 novembre 2007, que les Serbes ont boycottées, le PDK, ou « Parti Démocratique du Kosovo », formation du chef de l’opposition Hashim Thaçi, est devenu la principale force politique du pays. Une semaine après ces élections, ont commencé les ultimes négociations entre Serbes et Albanais du Kosovo à Baden près de Vienne. Elles se sont terminées le 28 novembre 2007 sans qu’un accord n’ait été conclu. Après cet échec, le Président Sejdiu a exclu toute poursuite des négociations avec la Serbie et a annoncé que la seule alternative serait de proclamer bien vite l’indépendance du Kosovo.

 

C’est ainsi que l’indépendance du Kosovo est devenue une probabilité toujours plus grande, même si la Serbie, et son allié traditionnel, la Russie, ont annoncé que ce ne serait pas sans conséquences. Les Albanais du Kosovo reçoivent le soutien des Etats-Unis et de l’Union Européenne. Même l’ancien ministre allemand des affaires étrangères, l’écologiste Fischer, n’hésite pas à transgresser certaines règles diplomatiques et à propager l’idée d’un Kosovo indépendant. Mais l’histoire nous enseigne toutefois que le Kosovo est le cœur même de la Serbie.

 

Une histoire sanglante

 

Ce n’est pas sans raison qu’un homme politique macédonien, il y a quelques années, qualifiait les Balkans de « débris d’empires ». Longtemps peuplé de populations de souche illyrienne, le Kosovo est devenu la patrie des Serbes, une population slave méridionale. Au départ, le Kosovo a été le centre de la Serbie médiévale. Le biographe de Charlemagne, Eginhard, mentionne déjà la Serbie en 822. L’Albanie n’apparaîtra dans les textes médiévaux qu’en 1272, après qu’elle eût été fondée par Charles d’Anjou. Avant l’occupation ottomane à la suite de la défaite serbe du Champ des Merles en 1389, aucune chronique n’évoque d’Albanais en Serbie. Ce n’est qu’après l’occupation complète de la Serbie par les Turcs musulmans que les Albanais pénètrent dans cette région située au nord de leur zone de peuplement, après avoir adhéré en masse à la religion islamique. Les historiens albanais voient dans les Albanais des descendants des Illyriens, ce qui est cependant contesté. Les Serbes quittent le pays par vagues, ce qui diminue leur pourcentage au sein de la nouvelle population.

 

A la suite des avancées des troupes du Prince Eugène de Savoie-Carignan, qui battent les Turcs, les Serbes se soulèvent au Kosovo et font payer cher aux occupants ottomans les avanies que ceux-ci leur avaient fait subir. La « Grande Migration » de 1690 mena beaucoup de Serbes sur le territoire de l’actuelle Croatie, où les souverains autrichiens les utilisèrent comme paysans-colons et garde-frontières, dotés de privilèges, le long de la frontière militaire austro-ottomane, afin de prévenir et contenir toute nouvelle invasion turque.

 

En 1871, le rapport était de 318.000 Serbes pour 161.000 Albanais au Kosovo. Tandis que la Serbie était devenue complètement indépendante en 1878, la domination turque au Kosovo ne se termina qu’en 1912. Dans les dernières années de l’occupation ottomane, la terreur anti-serbe alla crescendo, tant et si bien que peu avant que n’éclate la première guerre mondiale en 1914, il n’y avait plus que 90.000 Serbes dans la région. Pendant la seconde guerre mondiale, la Kosovo appartenait à l’Albanie qui était protectorat italien. Tandis que les Serbes sont demeurés jusqu’à nos jours assez germanophobes, l’Allemagne était généralement adulée chez les Albanais. Il y eut même une division de Waffen-SS constituée de volontaires albanais (la Division « Skanderbeg »).

 

Après 1945, le chef de la nouvelle Yougoslavie communiste, Tito, interdit aux Serbes de revenir sur le territoire du Kosovo, alors qu’il laissait les frontières entre la Serbie et l’Albanie ouvertes, ce qui entraîna l’immigration de 100.000 Albanais sur le territoire kosovar, sous souveraineté yougoslave. Sous Tito régnait un véritable embargo sur toutes les informations en provenance du Kosovo. Finalement, la minorité serbe subit ouvertement attaque sur attaque, ce qui, d’après des sources américaines, a entraîné l’exode hors du Kosovo de quelque 60.000 Serbes entre 1972 et 1982. En 1974, le régime titiste accorde une autonomie élargie aux Albanais du Kosovo. Cette autonomie fut annulée en 1989 après l’énorme vague d’indignation qui secoua la Yougoslavie après que les Albanais eurent commis des viols en masse et des voies de fait contre des concitoyens non albanais au Kosovo.

 

Dans les années 90, l’UçK se constitue grâce aux appuis que lui procurent les services secrets américains. L’UçK entendait systématiser la terreur pour parvenir à un Kosovo indépendant. L’appareil policier serbe riposta, avec toute la rigueur voulue, en 1999. L’exode des Albanais du Kosovo vers l’Albanie fut le prétexte saisi par l’OTAN pour intervenir militairement contre la Serbie. En Allemagne, le gouvernement rouge-vert de l’époque participa allègrement à cette violation flagrante du droit des gens, déguisée en « action de représailles », alors qu’un pays de l’OTAN comme la Grèce a eu le courage d’exprimer à l’égard de la Serbie sa « solidarité orthodoxe » et de rester neutre. Depuis 1999, 16.000 soldats de la KFOR, sous le commandement de l’OTAN, sont stationnés au Kosovo, dont 3500 militaires de la Bundeswehr allemande. Malgré cette présence, personne ne s’attend à une relance économique de la province, vu le taux de chômage de 70% qui y règne.

 

Aujourd’hui, on parle d’installer au Kosovo un protectorat américain supplémentaire, après que l’expérience bosniaque se soit, elle aussi, avéré un fiasco total. Dans le nouveau cabinet kosovar, on constate, par exemple, que le ministère de l’énergie sera confié à l’économiste Justina Pula-Shikora, qui avait travaillé jusqu’ici à la fameuse Fondation Soros à Pristina. L’Etat du Kosovo ne sera donc jamais qu’une marionnette aux mains de Washington. Pour amadouer le gouvernement de Belgrade, on promet aux Serbes qu’ils pourront adhérer à l’UE. Le contribuable allemand ira bien entendu de sa poche pour financer ce marché de dupes.

 

Un avenir sanglant ?

 

Il serait tout à fait incongru d’appliquer des critères centre-européens dans une région comme les Balkans. Sur le plan historique, le Kosovo a appartenu politiquement, depuis toujours, à la Serbie. Mais la Voïvodine, très fertile sur le plan agricole, appartenait jadis ethniquement à la Hongrie et est aujourd’hui peuplée majoritairement de Serbes. Quant aux Serbes de Bosnie, qui menacent de proclamer leur propre Etat indépendant sur le territoire bosniaque, ils ne sont arrivés là qu’à partir du 16ième siècle. Beaucoup d’entre eux venaient d’ailleurs du Kosovo. Il faut aussi se rappeler qu’une grande partie des 600.000 Serbes qui ont vécu pendant plusieurs siècles en Krajina, un territoire croate, ont quitté la Croatie après l’opération « Tempête » du Général Ante Gotovina en 1995.

 

Le mieux, à l’évidence, est de trouver des solutions pacifiques à cet imbroglio, prévoyant des entités ethniquement homogènes et cohérentes sur le plan territorial. On pourrait éventuellement procéder à des « échanges territoriaux » et à des compensations matérielles. Or ce sont précisément des solutions pacifiques de ce type-là que l’Occident, avec les Etats-Unis en tête, a sans cesse torpillé. Car finalement l’existence d’entités étatiques fragiles sert l’hégémonisme global. Les faiblesses intérieures entraînent la dépendance en politique extérieure. Cette réalité vaut sur le plan de la domination culturelle comme sur celui de la domination économique, ce que démontrent notamment les privatisations au profit de consortiums étrangers en Bosnie et au Kosovo. Ce dernier détient, soulignons-le, les plus grandes ressources en minerais divers d’Europe. Les Balkans ont toujours eu une grande importance géopolitique et, au beau milieu de ceux-ci, le Kosovo réunit à lui seul tous les atouts stratégiques de la péninsule. Il est à la croisée des voies de communications, à cheval sur les lignes de fracture de demain, quand il s’agira de maîtriser les sphères d’influence politiques et les réserves de matières premières.

 

L’offre serbe d’accorder une très large autonomie au Kosovo, d’accepter que se constitue une équipe de football kosovar indépendante et que la province aujourd’hui majoritairement albanophone dispose de représentations diplomatiques a été une offre correcte, une ouverture au dialogue intelligente et posée. Mais les Kosovars, excités par les Américains, ont exigé l’indépendance totale. Même si l’on raisonne en termes d’ethnies, de patries charnelles ou d’appartenance linguistique, on doit alors partir du principe minimal d’une partition possible et nécessaire du Kosovo entre la Serbie et l’Albanie. En effet, au nord de la rivière Ibar, la majorité de la population est serbe. En revanche, si l’on raisonne en termes d’histoire et de culture, cette partition est impensable pour les Serbes car la plupart des monuments religieux et des monastères serbes se situent au-delà de la rive sud de l’Ibar.

 

Si d’aventure le Kosovo devenait définitivement indépendant, les mouvements sécessionnistes auraient le vent en poupe dans le monde entier, ce qui constituerait un désavantage évident pour la Russie, principal adversaire géopolitique des Etats-Unis. La problématique du Kosovo montre, de manière exemplaire, que tout assemblage étatique multiculturel est, à terme, menacé d’éclatement et, qu’en fin de compte, seules les puissances extérieures à l’espace (« raumfremde Mächte ») profitent de leurs tensions intérieures. La protection qu’accordent les Etats-Unis aux Albanais musulmans du Kosovo ne tiendra qu’aussi longtemps que cela conviendra aux intérêts des cénacles dominants de New York et Washington. Si, un jour, les Albanais du Kosovo décidaient de mener leur politique à leur guise, ils devront vite déchanter et il ne leur resterait plus qu’à méditer un adage jadis forgé par Ernst Niekisch : « Celui qui a l’Amérique pour amie, n’a plus besoin d’ennemis ! ».

 

Safet BABIC.

(article paru dans « Deutsche Stimme », février 2008 ; cf. http://www.deutsche-stimme.de ; trad. franç. : Robert Steuckers).

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mardi, 25 mars 2008

Eurasia come destino

Eurasia come destino

Luca Leonello Rimbotti

Aleksandr Dughin, Eurasia. La rivoluzione conservatrice in Russia Quello che ci domina non è un Impero. L’America ha un esercito e un’industria molto forti: ed è tutto. Le sue multinazionali - assai più agevolmente dei suoi eserciti - occupano qua e là nazioni e intere aree. Poi, però, l’America perde sempre la pace. Contrariamente a quanto ne pensano Luttwak, il geostratega dei finanzieri, oppure Toni Negri, il parafilosofo della borghesia parassita, gli USA non sono affatto un Impero, ma la sua grottesca parodia: non un segno di interiore potenza, non un cenno di superiore civiltà, nessun grandioso disegno valoriale, che non sia l’ottusa ripetizione di una vuota parola, in cui non crede più nessuno: democrazia, solo e sempre lo stesso logoro slogan.

Il disegno politico di opporre al Nulla planetario la sostanza di un vero Impero portatore di tradizione culturale, di civiltà e di autentico potere di popolo ha i confini precisi dell’Eurasia. In quello spazio geostorico che va da Lisbona a Vladivostok - l’Europa decenni or sono indicata da Jean Thiriart - numerose intelligenze politiche europee dell’ultimo secolo hanno visto la giusta risposta agli interrogativi posti dalla moderna politica mondiale. Se proprio quest’anno si ricordano i cento anni della conferenza londinese in cui Sir Halford Mackinder gettò le prime basi della moderna geopolitica, è proprio per rammentare che fin da allora l’Eurasismo poté dirsi una via ideologica e politica prettamente europea. Si voleva la risposta del blocco di terraferma nei confronti della talassocrazia mercantilista anglo-americana, già allora ben delineata. Behemoth contro Leviathan. La schmittiana, solida e immutabile Terra, contro il liquido, infido e mutevole Mare. Oppure, per dirla con le parole antiche di Pound: contadini radicati al suolo contro usurai apolidi. L’Eurasismo è il disegno geopolitico di assicurare l’Asia centrale all’Europa, per farne un blocco in grado di reggere la contrapposizione con il mondo occidentale-atlantico.

Antica idea russa, questa. I Russi avevano - (hanno?) - come una doppia anima: temono l’Asia (specialmente l’Asia gialla), ma ne amano il mistero, gli spazi. Dostoewskij ben rappresenta quest’angoscia russa. Maksim Gorkij, ad esempio, che pure stava dalla parte dei bolscevichi, era terrorizzato dalla possibile mongolizzazione della Russia bianca. Savickij invece, uno dei primi “eurasisti”, proclamava l’Oriente come fatale terra del destino europeo. Per parte sua, Karl Haushofer - lo studioso tedesco che con Ratzel fu il vero fondatore della geopolitica - aveva un’idea ben chiara: “Europa alleata della Russia contro l’America”. Intorno a questa nuova scienza - la geopolitica - da lui energicamente divulgata, si ritrovarono in molti.

L’Eurasismo come movimento politico storico fu cosa effimera: nato nel 1921 a Sofia per iniziativa di alcuni russi fuggiti dalla rivoluzione, si diceva erede dei vecchi slavofili: sognavano una grande Russia eurasiatica avversa all’Occidente. Cristiani ortodossi, alla maniera di Spengler pensavano che l’Occidente stesse tramontando e che al suo posto dovesse sorgere la “terza Roma” moscovita. Ma già nel 1927 l’organizzazione, infiltrata dai bolscevichi, sparì dalla scena. Ma non le sue idee. Che l’Europa dovesse sottrarsi all’egemonia anglosassone e al crescente predominio americano, appoggiandosi invece alla Russia e al suo prolungamento asiatico, rimase una convinzione diffusa. Il nazional-bolscevismo fu una viva espressione di questa tendenza, soprattutto nella Germania di Weimar, ma anche nell’URSS. Furono in diversi - a cominciare da Ernst Niekitsch - a pensare a una forma di comunismo nazionale e a un asse Berlino-Mosca, per creare una nuova forma di politica europea macro-continentale. E persino Alfred Rosenberg rifletté su un blocco russo-germanico. Erano orientamenti politici, ma al di sotto si animavano forti suggestioni culturali. L’Asia centrale, il Tibet, la Mongolia: realtà mitiche e mistiche, di cui alcuni personaggi subivano uno strano fascino. Era la terra magica del “Re del Mondo”, una specie di ombelico terrestre che si diceva racchiudesse tradizioni, saperi, occulte potenze. Questo mito era alimentato da figure al limite del fantastico: Roman Ungern-Sternberg, ad esempio. Detto Ungern Khan, questo bizzarro barone baltico combatté l’Armata rossa in Asia centrale, organizzò un esercito di cosacchi, mongoli, tibetani, siberiani, puntando all’erezione di un Impero teocratico di tipo lamaista in Eurasia. Claudio Mutti riporta che egli avrebbe ereditato, come potente talismano, nientemeno che il misterioso anello con la svastica che era stato di Gengis Khan.

Ma ci furono anche eminenti studiosi che videro nell’Asia centrale il fulcro di una forza che l’Europa avrebbe fatto bene ad assicurarsi. Giuseppe Tucci, grande orientalista, promosse studi, viaggi, contatti, fondò istituti e riviste, si disse convinto che il patrimonio di conoscenze esoteriche di cui l’Asia è detentrice dovesse far parte della nostra cultura: “Io non parlo mai di Europa e di Asia, ma di Eurasia”. Ma si può ricordare anche l’etnologo e geografo svedese Sven Hedin - tra l’altro, noto ammiratore di Hitler - che vagò per tutta la vita nell’Asia centrale alla ricerca delle sue più arcane tradizioni. E sulle tracce di un Tibet lontano padre del mondo ariano si misero, in quegli stessi anni, anche studiosi e ricercatori delle SS. A tutto questo si intrecciano interi brani di quella cultura alternativa, animata dall’esoterismo tradizionalista, che può riassumersi negli studi in materia portati avanti da Guénon o da Evola. E per molti decenni fu Lev Gumilëv, storico dei popoli della steppa, a lungo perseguitato dai sovietici, a elaborare il modello eurasiatico e a rilanciarlo anche in epoca post-comunista. Ma la geopolitica, erede della “geografia sacra” e così ricca di retroterra sapienziale, è soprattutto realtà. E’ la scienza che lega economia, storia e geografia: i popoli devono seguire le vie della loro collocazione, non quelle degli interessi dettati dall’internazionalismo finanziario. La geografia è quella: immutabile nei secoli, e i bisogni dei popoli ne sono la diretta conseguenza.

Da un po’ di tempo, sotto la spinta negativa dell’espansionismo americano-atlantista, si è avuto un ritorno della concezione geopolitica e, di conseguenza, dell’Eurasismo. Nella Russia post-comunista, una forma di Eurasismo è rinata per iniziativa di Aleksandr Dughin, che nel 1992 fondò la rivista “Elementy”, recante il sottotitolo “rassegna eurasista”. E tuttavia, il suo è un Eurasismo differente da quello religioso e conservatore degli anni venti. Dughin si è rifatto alla Rivoluzione Conservatrice tedesca - di cui Karl Haushofer era stato leader in materia di geopolitica - oppure a quell’ambiente della Nuova Destra europea (De Benoist, Steuckers) che ha fatto della scelta europeista anti-americana un suo cardine: rompere con l’atlantismo filo-americano, che sta portando i popoli alla rovina. Guardare invece a est, alla Russia, e a tutto quell’enorme bacino centroasiatico, dalle cui potenzialità ancora inespresse potrebbe partire un progetto di antagonismo politico di portata mondiale.

L’Eurasia non è una trovata dell’ultima ora. Quella di guardare alla Scizia, al Caucaso o addirittura alle Indie è un’antica nostalgia europea. Oggi la geopolitica ci ricorda che i bisogni, la collocazione e la terra dei nostri popoli europei sono i medesimi di duemilacinquecento anni fa. Solo che, nel frattempo, e in nome di interessi estranei, lontani e pericolosi, la nostra identità viene per la prima volta nella storia minacciata molto da vicino. La geopolitica e l’Eurasismo servono a ricordarci che l’Europa ha in mano la possibilità di gestire uno spazio imperiale omogeneo territorialmente e culturalmente, bene in grado di fronteggiare l’imperialismo atlantista-occidentale, e che questo grande spazio aspetta solo di essere organizzato da una volontà politica. Poiché l’Europa si merita un destino europeo.

* * *

Tratto da Linea del 4 Luglio 2004.

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samedi, 22 mars 2008

Guerres latentes et stratégie des "Contras"

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Guerres latentes et stratégie américaine des "Contras"

Parmi les éléments clefs de la doctrine de Reagan, intro­dui­te au début des années 80, il y avait l'application de la tac­tique de la guerre indirecte, par le truchement de groupes criminels, agissant au titre de marionnettes (cf. les termes "War by proxy", guerre par procuration, et "Contras strategy", stratégie des contras). Cette stratégie a été ap­pliquée à grande échelle au Nicaragua, un pays qui, pen­dant plusieurs années consécutives, a subi une attaque de la part des Etats-Unis, par le biais d'unités composées de ban­dits (les "Contras"), entièrement financées, armées et en­traînées par les Etats-Unis.

La Cour de La Haye avait condamné les stratégies américaines

En vue d'examiner la stratégie américaine consistant à me­ner des guerres indirectes (la "stratégie des Contras") à la lu­mière de la législation internationale positive, il faut préalablement se référer à la décision de la Cour Inter­na­tio­nale de La Haye, qui constitue un précédent valable. En 1986, cette Cour a condamné les actes de terrorisme in­ter­national, tels qu'ils avaient été mis en forme par la politi­que étrangère américaine à la suite de la "Doctrine Rea­gan". Au cours du procès "Nicaragua against the US", la Cour internationale a dit que les Etats-Unis avaient violé la lé­gi­slation internationale, à la suite d'actes d'agression prou­vés. La sentence de la Cour a été énoncée comme suit:

«(3) Considérant que les Etats-Unis, en entraînant, fournis­sant, finançant, équipant et armant les forces des Contras, et également en encourageant, maintenant et organisant des opérations militaires et para-militaires contre le Nica­ra­gua et sur le territoire de ce pays, ont agi contre la Répu­blique du Nicaragua, en contrevenant de manière flagrante les normes de la législation internationale communément acceptée, en intervenant dans les affaires intérieures d'au­tres pays.

(4) [La Cour] estime dès lors que les Etats-Unis d'Amérique ont commis des attaques armées contre Puerto Sandino le 13 septembre et le 14 octobre 1983, et ont également com­mis d'autres actes d'intervention, tels que mentionnés dans le paragraphe 3 de la présente sentence, y compris l'usage de la force militaire contre la République du Nicaragua, en contrevenant de manière flagrante les normes de la législa­tion internationale communément acceptée, qui rejettent les interventions dans les affaires intérieures d'autres pays» (1).

«L'élément, la composante, de violence est particulière­ment évidente dans le cas d'une intervention soutenue par l'usage de la force - dans sa forme ouverte, par un usage di­rect de la force militaire, ou dans sa forme latente, par le soutien apporté aux actions terroristes et subversives se déroulant sur le territoire d'un autre Etat» (3).

En outre, il nous semble bon de rappeler ici que, durant les sessions du Premier Tribunal Russell International, qui examinait les crimes de l'armée américaine au Vietnam, le célèbre philosophe britannique Lord Bertrand Russell, de con­cert avec Jean-Paul Sartre, a déclaré, en tant que re­pré­sentant principal de ce Tribunal, que "les Etats-Unis con­sidéraient le Vietnam de la même façon que Hitler avait considéré l'Espagne". Si Lord Russell était toujours vivant, il ajouterait aujourd'hui que les Etats-Unis considèrent la You­goslavie comme Hitler considérait l'Espagne.

Dans son message adressé au Second Tribunal Russell In­ter­national, qui examinait les crimes contre la paix et contre l'hu­manité, ainsi que les crimes de guerre américains en A­mérique latine, Lord Russell a déclaré: «Les formes moder­nes d'agression internationale consistent à établir des régi­mes marionnettes, servant les intérêts d'Etats étrangers. La caractéristique principale de ces régimes marionnettes ré­si­de dans leur fonction, qui est de garantir la continuité des investissements étrangers (soit l'expansionnisme géopoliti­que étranger). Ces gouvernements marionnettes liquident bru­talement tous les opposants politiques qui osent dé­non­cer le comportement collaborationniste de ces marionnet­tes… Les Etats-Unis emploient la CIA dans ce sens et dépen­sent des millions de dollars pour acheter, tuer ou renverser les gouvernements qui résistent à l'impérialisme américain" (4).

Détruire tout Etat souverain existant et le transformer en marionnette obéissante

L'établissement de régimes marionnettes est historique­ment l'une des méthodes traditionnelles, bien éprouvée, de la politique américaine pour détruire la souveraineté des pays et pour réduire les peuples en esclavage. Dans cette optique, il est désormais nécessaire de considérer ces mé­tho­des comme des actes d'agression, relevant de tribunaux internationaux. Ce type d'agression a été baptisé "guerre la­tente" (5), qui se présente assez souvent comme des for­mes de conflits internes ou de guerres civiles, qui sont, en coulisses, et à tous les niveaux pratiques, dirigés par des hommes de l'Amérique ou par des marionnettes. Le but d'une "guerre latente" et des politiques de coercition me­nées par les Etats-Unis est "de détruire tout Etat souverain existant ou de le transformer en une marionnette obéissan­te" (6). La condamnation de la doctrine Reagan, telle qu'el­le a été formulée par le Tribunal international de La Haye, n'a pas eu le moindre effet sur la logique terroriste de la politique internationale des Etats-Unis. Aspirant à exercer une domination absolue sur la planète entière, guidés par une idéologie impérialiste et par un nihilisme et un révi­sion­nisme en matière de droit international, les Etats-Unis, après la désintégration de l'Union Soviétique, sont enclins à mettre en œuvre des tactiques voire à déclencher une guer­re indirecte même en Europe: ce fut le cas en Bosnie et au Kosovo.

D'après les témoignages recueillis par le Tribunal Interna­tio­nal chargé d'investiguer les crimes de guerre américains en Yougoslavie, et dirigé par l'ancien Ministre américain de la Justice, Ramsey Clarke, il appert clairement que la CIA a créé, armé et financé de toutes pièces un gang de terro­ristes albanais (la soi-disant "Armée de Libération du Koso­vo", ALK, ou, en albanais, UCK) en Yougoslavie. Dans le but de financer cette ALK, la CIA a installé partout en Europe des structures criminelles et mafieuses, très bien orga­ni­sées sur le plan de la contrebande de stupéfiants et du nar­co-trafic.

Narco-trafiquants tchétchènes et albanais: héritiers des Contras du Nicaragua

Quand on lit les témoignages apportés à ce Tribunal Inter­na­tional et concernant l'organisation par les Etats-Unis de bandes criminelles armées sur le territoire de la Yougo­sla­vie, on peut aisément tracer un parallèle avec les bandes similaires de Tchétchénie. Dès 1995, des informations di­verses permettaient d'attester que les bandits guerilleros sé­paratistes de Dudaïev avaient été entraînés dans des camps de la CIA au Pakistan et en Turquie. Désormais plus aucun observateur sérieux ne peut infirmer que les terro­ris­tes guerilleros tchétchènes sont les équivalents des Contras du Nicaragua ou que les combattants de l'UCK (ALK) du Ko­sovo actuel.

Le ministre russe de la défense, le Maréchal Igor Sergueïev, a déclaré à juste titre que les Etats-Unis visent à "établir un contrôle complet sur le Caucase du Nord", d'où le conflit qui oppose l'armée russe aux gangs tchétchène, qui sont un pion dans les manipulations géopolitiques des Etats-Unis.

Le Maréchal Igor Sergueïev observe ensuite que le conflit militaire de Tchétchénie est une forme intermédiaire d'a­gres­sion militaire américaine contre la Russie. Les troupes russes qui luttent contre les gangs tchétchènes, résistent en fait contre une attaque de l'expansionnisme américain, visant à installer l'hégémonie des Etats-Unis dans le Cau­ca­se.

Nikolaï von KREITOR.

(Texte russe: http://lieber-engel.virtualave.net/vk-6.htm... )

Notes:

(1)     "Nicaragua vs. The United States of America" [1986, I.C.J., June 27, 1986 / Opinion de la Court]; cf. également Michael Riesman & Chris Antonius, The Laws of War, Vintage Books, New York, 1994, pp. 17-18.

(2)     Ibid., p. 98 (§205).

(3)     Ibid., p. 98 (§205), p. 99 (§209); cf. également Antonio Cassese, Violence, War and the Rule of Law in the Inter­national Community, in: David Held (ed.), Political Theory To­day, Stanford University Press, Stanford, 1991, p. 269.

(4)     Message de Bertrand Russell au "Tribunal contre le Crime du Si­­lence", in: Proceedings of the International War Crimes Tri­bunal, Clarion Books, Simon & Schuster, New York, 1970, p. 38.

(5)     Harry Magdoff, The Age of Imperialism, Monthly Review Press, New York, 1969; voir également, International Security - The Mi­litary Aspect, Report of Panel II of the Special Studies Pro­ject of Rockefeller Brothers Fund, Doubleday and Co., New York, 1958, p. 24.

(6)     Antonio CASSESE, id., p. 267; Tom Farer, «Political and Eco­no­mic Coercion in Contemporary International Law», in: Ame­ri­can Journal of International Law, 79, 1985, p. 408.

 

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jeudi, 20 mars 2008

R. Steuckers : inleiding tot spreekbeurt op colloquium v. Eurorus (Dendermonde)

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Robert Steuckers : Geopolitieke implicatie van de conflicten in de Kaukasus en de Balkan

 

Al de conflicten, die voor 1914 ontstonden, werden na de ineenstorting van de Sovjetunie gereactiveerd. Alle mogelijke separatistische pogingen werden cynisch uitgebuit; niet meer door Europese mogendheden maar wel door de Verenigde Staten, die de beroemde Brzezinski-doctrine hebben aangewend; daarmee mikten ze op het fragmenteren van het oude Russische Rijk, van de Oekraïne tot aan de Chinese grens. Voor Brzezinski was het voor Amerika noodzakelijk een permanente chaos langs de vroegere Zijde-Route te creëren. De Verenigde Staten moesten daarbij de Soenni Islam, het Saoedisch-Wahhabitische geld en het Turkse pantoeranisme als instrumenten hanteren. Naast deze zuiver geostrategische wilskracht, die Brzezinski klaar heeft getheoretiseerd en geuit, moet men de eeuwige oliepolitiek van de Verenigde Staten in al onze strategische redeneringen bijvoegen: de conflicten in de Kaukasus, in Tsjetsjenië en in Daghestan, en in de Balkan met Kosovo, zijn ontstaan op de huidige of toekomstige routes van de olie- en gaspijplijnen, die de koolwaterstoffen naar Europa brengen of zullen brengen. Het doel van Washington mikt niet op de bevrijding van onderdrukte volkeren maar op de oprichting van vazalstaten die ter gelegenheid de transit van koolwaterstoffen naar Europa zouden kunnen blokkeren. Tegelijkertijd, willen de Verenigde Staten kleinschalige Staten creëren juist in het midden van landzones tussen hoog strategische zeegebieden, zoals tussen de Adriatische Zee en de Zwarte Zee, en simultaan tussen de grote waterweg Donau en de Egeïsche Zee, wat Kosovo betreft, en tussen de Zwarte Zee en de Kaspische Zee, wat Tsjetsjenië betreft. De grootste gemene deler van deze politiek is de volgende: ieder machtprojectie van Europa te beletten in de richting van de belangrijkste strategische zones van de wereld.

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R. Steuckers: résumé de l'intervention au colloque d'Eurorus de Termonde

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Robert Steuckers : Implications géopolitiques des conflits caucasiens et balkaniques

Tous les conflits antérieurs à 1914 ont été réactivés après l’effondrement de l’Union Soviétique. Les potentialités de séparatisme ont été exploités, non plus par des puissances européennes, mais par les Etats-Unis, qui ont ainsi appliqué la fameuse doctrine Brzezinski, visant la fragmentation de l’ancien Imperium russe, de l’Ukraine à la frontière chinoise. Pour Brzezinski, il fallait créer le chaos sur le tracé de l’ancienne « Route de la Soie » en se servant de l’islam sunnite, de l’argent saoudien wahhabite et du pantouranisme turc comme instruments, afin de contourner l’obligation de faire voter des budgets à un Congrès animé de velléités isolationnistes. A cette volonté purement géostratégique, théorisée par Brzezinski, s’ajoute l’éternelle politique pétrolière des Etats-Unis : les conflits du Caucase, en Tchétchénie et au Daghestan, et des Balkans, avec le Kosovo, se situent sur les tracés actuels ou futurs des oléoducs et gazoducs amenant les hydrocarbures en Europe. L’objectif de Washington n’est nullement d’aider à la libération de peuples opprimés, mais de créer des Etats vassaux capables de bloquer l’acheminement d’hydrocarbures vers l’Europe, si le besoin s’en fait sentir. Il s’agit, par la même occasion, de créer des micro-Etats au centre de territoires situés entre deux zones maritimes hautement stratégiques, entre l’Adriatique et la Mer Noire, et entre le Danube et l’Egée, pour le Kosovo, entre la Mer Noire et la Caspienne, pour la Tchétchénie. Le dénominateur commun de cette politique est d’entraver toute projection de la puissance européenne vers les zones stratégiques clefs de la planète.

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mardi, 11 mars 2008

Prof. Dr. P. Bachmeier : sur la politique étrangère de la Russie actuelle

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Réflexions générales sur la politique étrangère actuelle de la Russie

Entretien avec le Professeur Peter BACHMEIER

Le Professeur Dr. Peter Bachmeier est né à Vienne en 1940. Après des études à Graz, Belgrade et Moscou, il a acquis les diplômes d’historien et de politologue, spécialisé dans les questions est-européennes. De 1972 à 2005, il fut collaborateur du célèbre Institut autrichien d’Europe orientale et méridionale, où il dirigea un département. Il enseigna également à l’Institut des Sciences politiques de l’Université de Vienne. Les propos que nous avons traduits ici ont été recueillis par deux journalistes de l’hebdomadaire « zur Zeit », Walter Tributsch et Dimitrij Grieb.

Q. : Vu les rapports tendus entre l’Ukraine actuelle et la Russie de Poutine, serait-il invraisemblable d’imaginer que tôt ou tard l’Ukraine se divisera en deux parties ? Les faits parlent pour eux-mêmes : on sait qu’il existe une Ukraine orientale favorable à la Russie et une Ukraine occidentale tournée vers l’Occident, division sanctionnée de surcroît par des faits géographiques incontournables…

PB : Si vous ne tenez compte que de facteurs purement statistiques ou si vous mettez exclusivement l’accent sur cette césure objective de nature géographique, vous pourriez effectivement penser que cette division est susceptible de devenir tôt ou tard réalité. Mais je ne pense pas qu’on en arrivera là. Je pense plutôt que la population ukrainienne refusera une adhésion à l’OTAN, y compris en Ukraine occidentale, même si certains sondages nous disent le contraire aujourd’hui. Je pense donc que la population ukrainienne dans son ensemble rejettera l’adhésion à l’OTAN. De surcroît, au sein même de l’OTAN, les opinions divergent quant à l’opportunité d’une adhésion ukrainienne.

Q. : Il semble de plus en plus patent que, sur l’échiquier international, la Russie et la Chine marchent main dans la main. Nous le voyons dans l’affaire du Kosovo, où les deux puissances ont clairement articulé leur refus d’une indépendance kosovar. Nous le voyons aussi dans le cas de l’Iran, où Russes et Chinois s’opposent à tout projet d’agression américaine. Sont-ce là les contours d’une politique durable ou n’est-ce que l’indice d’une communauté d’intérêts passagère ?

PB : Je pense qu’il existe un réel partenariat stratégique entre la Russie, la Chine, l’Inde, l’Iran et quelques autres pays qui leur sont associés. Ils ont, me semble-t-il, l’intention d’unir leurs efforts sur le long terme, non seulement sur les plans diplomatique et militaire, mais aussi dans les grands projets d’infrastructure comme par exemple, la création d’une nouvelle « Route de la Soie » qui se concrétiserait par une vision eurasienne commune : telle me semble la priorité première de la Russie actuelle.

Q. : Lorsqu’il s’est agi de reconnaître l’indépendance du Kosovo, on a assisté, comme il fallait s’y attendre, à des divergences au sein de l’Union Européenne. Pensez-vous que les mêmes divergences se manifesteront lorsqu’il s’agira d’opter pour une coopération plus étroite avec la Russie ?

PB : Au cours de ces dernières années et surtout au cours des derniers mois de l’année 2007, nous avons pu observer un retour de la Russie dans les Balkans. Et pas seulement en rapport avec la Serbie, qui, comme tous le savent, est protégée par la Russie. Depuis juillet 2007, on planifie, dans les Balkans, l’installation d’un nouveau gazoduc, qui passera par la Mer Noire, la Bulgarie et la Serbie pour aboutir en Autriche. En janvier, Poutine s’est rendu en Bulgarie et y a suggéré la participation à un projet gigantesque, justement celui du gazoduc « South Stream », plus la construction d’une nouvelle centrale nucléaire. Le projet était si formidable que le gouvernement bulgare en a perdu la voix ! Mais il a signé l’accord proposé. La presse n’en a soufflé mot. L’an passé, Poutine se trouvait à Zagreb pour le sommet des pays est-européens et, à tous les pays représentés, il a fait d’alléchantes propositions en matière de fourniture d’énergie. C’est surtout par le truchement de cette politique énergétique que la Russie est revenue dans les Balkans.

Q. : En observant ce retour, les gens vont évidemment se dire que le but de la Russie de Poutine est de récupérer ses anciennes sphères d’influence… Est-ce le cas ?

PB : Peut-être mais certainement pas dans le sens que l’on donnait jadis à la notion de « sphère d’influence ». Je ne crois pas que la Russie cherche à établir des bases militaires dans les Balkans. Si la Russie revient dans les sphères d’influence dont elle disposait jadis, ce n’est pas sur le plan militaire qu’elle entame cette démarche mais par le biais de projets économiques. Simultanément, la Russie ne cesse de suggérer des projets nouveaux et alternatifs à l’UE. Elle n’a donc pas l’intention de raviver la Guerre Froide au sens ancien du terme. Bien au contraire. Elle ne cesse de proclamer qu’elle veut coopérer de manière optimale avec l’UE. Cette option est bien entendu en contradiction avec l’échec du sommet UE-Russie de Samara l’an passé. Mais cet échec n’est pas imputable à la Russie. C’est la Chancelière et Présidente du Conseil de l’UE, Angela Merkel, qui en porte la responsabilité.

Q. : La question est donc la suivante : dans quelle mesure l’Europe, ou l’UE, est-elle prête à reconnaître que son meilleur allié potentiel se trouve à l’Est plutôt qu’à l’Ouest ?

PB : Sur le plan économique, les choses sont claires : l’UE est le plus important partenaire de la Russie. En tant qu’Etat, l’Allemagne est le plus grand partenaire commercial de la Russie. La Russie, quant à elle, est le plus grand marché potentiel pour l’Allemagne. 40% du gaz naturel consommé en Allemagne vient de Russie et les intérêts du monde économique allemand sont encore et toujours fixés en priorité sur la Russie.

Q. : Certes, mais aussi sur l’Amérique…

PB : Bien sûr, aussi sur l’Amérique. Quoi qu’il en soit, je ne pense pas que cela soit une contradiction que la politique allemande soit très dépendante de l’Amérique.

(extrait d’un entretien paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; traduction franç. : Robert Steuckers).

 

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