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mercredi, 20 septembre 2023

Le méchant Poutine organise les Brics avant les Jeux olympiques de Macron

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Le méchant Poutine organise les Brics avant les Jeux olympiques de Macron

Ala de Granha

Source: https://electomagazine.it/il-cattivissimo-putin-organizza-i-giochi-dei-brics-prima-delle-olimpiadi-di-macron/

Stoltenberg, considéré comme un génie, passe à la télévision italienne et, au cours d'une interview embarrassante pour le journalisme italien, assure que la Russie est de plus en plus isolée. Qui sait ce que lui et l'interviewer faisaient au moment où les Brics (dont la Russie fait partie intégrante) s'ouvraient à d'autres pays, premiers d'une longue série de nouveaux membres. Ainsi, même si Stoltenberg et l'interviewer ne le savent pas, la majeure partie de la population mondiale est du côté de Poutine. Pas mal pour quelqu'un d'isolé.

Et voilà que le Kremlin a aussi décidé de se jouer des représentants pontifiants et ennuyeux de l'atlantisme le plus obtus. Ainsi, en accord avec l'Afrique du Sud, il a dévoilé le premier billet de la nouvelle monnaie des Brics. Une provocation et rien d'autre. Car la monnaie n'existe pas et, au mieux, il faudra plusieurs années pour qu'elle voie le jour. Mais en Afrique et en Russie, on s'amuse à faire peur aux atlantistes. Même avec des fake news. Cela garantit quelques fous rires.

En revanche, c'est Macron qui a ri de la nouvelle provocation du Kremlin: organiser les jeux des Brics l'année prochaine, avant l'ouverture des Jeux olympiques à Paris. Histoire de rendre la pareille aux incessantes manigances de Macron contre la Russie. Mais aussi pour montrer à quel point l'isolement de Moscou est faux. Après tout, le CIO a interdit aux Russes de participer aux Jeux olympiques et à divers autres événements sportifs. Et amener des dizaines de pays à rivaliser avec la Russie serait un camouflet non seulement pour le président français, mais aussi pour tous ceux qui veulent la mort civile des athlètes russes, de la littérature russe, du peuple russe.

Les "bons" ont également été snobés lors de la réunion cruciale à l'ONU où Tajani et Biden étaient présents, mais où tous les autres dirigeants des pays disposant d'un droit de veto manquaient à l'appel. Pas de Xi Jinping, pas de Poutine, pas de Macron et pas de Sunak. Même Modi n'était pas là, pour compléter le tableau du désintérêt pour l'ONU. Tajani et RimbanBiden, en revanche, étaient là. Mais peut-être n'étaient-ils pas assez nombreux...

samedi, 06 février 2021

Poutine et la guerre entre différents projets mondiaux

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Poutine et la guerre entre différents projets mondiaux

Mikhail Khazin

Traduction de Juan Gabriel Caro Rivera

Ex: https://www.geopolitica.ru

A propos du capitalisme « inclusif »

Je dois dire à tous ceux qui défendent les théories du complot qu'ils ne devraient pas lire ce texte : je n'écrirai rien qui ait un rapport avec la création du capitalisme inclusif qui est promu par le pape, les Rothschild et les Rockefeller (1). Pour cela, il vaut mieux lire la presse officielle.

Mais, et il est très important de le souligner, l'existence même d'un tel projet ne nous dit rien sur son propre contenu : les déclarations officielles sont souvent faites pour ne pas révéler la vérité et visent plutôt à cacher le contenu réel du projet.

Mais les gens sont très intéressés par ce sujet et écrivent beaucoup. Nous allons donc essayer de comprendre le problème en nous basant sur la façon dont nous comprenons nous-mêmes ce problème. Mais ce que nous écrivons ici est précisément une tentative et non une réponse à la question de savoir ce qui se passe. Notre perspective est donc la suivante : il existe un système de projets mondiaux, qui sont décrits de manière très détaillée dans notre livre Bridge to the Future. Nous avons fait valoir que face à ces projets mondiaux, il existe un certain nombre de projets civilisationnels qui n'ont pas encore atteint un niveau mondial, bien qu'ils tentent parfois de devenir une alternative.

Nous avons décrit ces six projets dans notre livre. Trois de ces projets sont mondiaux :

  • Le projet juif global (le "Plan Salomon", le "Nouveau Londres") ;
  • Le projet mondial "occidental" (également connu sous le nom de Finintern, dont le centre est à New York et dont le point focal est le FMI et Wall Street) ;
  • Le projet islamique mondial (aujourd'hui défendu par la Turquie).

Et les trois autres projets sont de nature civilisationnelle et visent à prendre le pouvoir ou à devenir des projets au niveau mondial. C'est le cas :

  • L'une d'elles est la relance du projet capitaliste classique qui est coordonné par le Vatican ("L'Internationale noire", l'aristocratie européenne, les francs-maçons, etc ;)
  • Le projet chinois qui a abandonné (peut-être temporairement) le projet global "Rouge" et qui est mené par une série de clans militaires ;
  • La Russie en tant que projet de civilisation qui hésite entre plusieurs options telles que l'"Internationale noire" (suivant l'idée que "Moscou est la troisième Rome"), le retour au projet global "Rouge" ou la création d'un centre de civilisation régional avec la Chine et est connu sous le nom de "Nouvelle Horde".

Par exemple, qu'est-ce que Brexit ? C'est une alternative à 1936 (lorsque le projet global "occidental" a réussi à remplacer le roi Edward VIII par le père de l'actuelle Reine et a ainsi vaincu les groupes qui appartenaient à l'élite dirigeante de l'Angleterre), c'est-à-dire au coup d'État que les banquiers ont fini par perdre.

Très probablement, jusqu'en 1936, Londres était dirigée par des représentants du projet juif (des représentants de "l'aristocratie noire" de Venise, qui, par l'intermédiaire de la Hollande, ont réussi à prendre le pouvoir en Grande-Bretagne pendant la "Glorieuse Révolution" de 1688). Cela explique le fait que tous les empires d'Europe continentale se sont effondrés à la suite de la Première Guerre mondiale et que les Britanniques sont les seuls à être restés intacts. Eh bien, Londres a toujours eu une relation difficile avec le Vatican.

Gardons à l'esprit que la "vieille" aristocratie (c'est-à-dire l’aristocratie continentale) d'Europe occidentale a tenté de se venger après la défaite de 1918 et pour cela, elle a soutenu Hitler, car elle considérait l'Angleterre comme son principal ennemi. Mais ils ont échoué et ont été contraints de se tourner vers l'Est et nous en connaissons les résultats. Soit dit en passant, toute la campagne antisémite que le NSDAP a encouragée à ses débuts visait à chasser les Juifs de Palestine, c'est-à-dire qu'elle était dirigée contre l'Angleterre elle-même.

Signalons quelque chose d'important. Depuis les années 1920, le projet juif se sent menacé par les banquiers, c'est-à-dire par l'élite du projet "occidental" qui, après la création du système de la Réserve fédérale aux États-Unis, a fini par s'installer dans ce pays. Et c'est pourquoi, depuis la fin des années 1920, ce projet a cherché à se connecter avec la NSDAP. Eh bien, à la suite de l'Holocauste, les principales victimes ont été les Juifs d'Europe de l'Est, dont une partie importante s’était installée sur ce territoire en provenance de l'ancienne Babylone et de la Khazarie. En d'autres termes, ils n'avaient rien à voir avec l'histoire de l'Empire romain et de l'Europe médiévale et, en général, étaient porteurs d'une notion du sacré complètement différente.

Au fait, le gendre de Trump représente les Hassidim, il a des ancêtres qui viennent de Khazarie. Cela nous permettrait d'approfondir l'histoire très complexe des relations que les Juifs du monde ont avec toutes les distinctions de la judaïté, et c'est un sujet que nous n'aborderons pas ici. Je ne tirerai qu'une seule conclusion de tout cela: en général, Trump, malgré son alliance avec le Vatican contre le projet global "occidental", ne constitue pas un tout en soi, lié au seul projet juif. Il est possible que si le projet de "Nouvelle Horde" (également connu sous le nom de "Grande Eurasie") réussit, Trump se joigne à ce projet, puisque la Khazaria fait partie de la zone des Grandes Steppes.

En ce moment, l'"Internationale noire" tente de mener sa deuxième revanche (elle a sa base d'opérations en Allemagne et a également un accord avec le Vatican), mais cette deuxième offensive a une faiblesse : il lui manque un modèle économique complet et cohérent qui lui donnerait les moyens nécessaires pour un projet de grande envergure. L'Allemagne et l'UE "vivent" aujourd'hui exclusivement sur le potentiel d'émission du dollar, qui est contrôlé par l'élite qui est à la tête du projet "occidental". Et comment agir dans une telle situation ? Les modèles économiques du projet capitaliste mondial sont désespérément dépassés et personne n'est capable de les adapter à la modernité : tous les experts sur lesquels ils comptent ont été formés selon les modèles du libéralisme. Le projet capitaliste est donc entré dans la phase de création d'un réseau et est principalement soutenu par les nationalistes. Et en Europe continentale, les nationalistes ne sont au pouvoir que dans quelques très petits pays.

Gardons à l'esprit que nous, les Russes, comprenons que ces ressources existent, mais que, de leur point de vue, nous devrions, au mieux, devenir un partenaire junior (et tout cela nous a été démontré de manière très dure par la Grande guerre patriotique). En Russie, la "cinquième" colonne se développe, mais pas la libérale, mais la "troisième colonne" comme le Tsarevich Hosha, toutes sortes de princes et autres marginaux que même pas 3% de la population soutient. Mais à mesure que la situation en Russie s'aggrave et, si aucune alternative n'est créée, ils finiront par accroître leur influence.

La situation à Londres s'est améliorée ! En fait, ils ont pu placer leur candidat aux Etats-Unis en 2016 (dans le cadre de la même logique nostalgique du "vieux" capitalisme), mais, l'important, c'est que maintenant il a perdu ! Le projet "occidental" a pris sa revanche sur les États-Unis et toutes les autres forces en présence doivent d'une manière ou d'une autre décider de ce qu'elles vont faire maintenant ! Gardons à l'esprit que le projet "occidental" a ses propres problèmes, tout d'abord : son principal outil, celui avec lequel ils ont pris le contrôle du monde entier à la fin des années 80, l'émission de dollars, a complètement épuisé son utilité. Mais, pour l'instant, les dollars peuvent être imprimés en n'importe quelle quantité et Trump n'est plus en mesure de l'empêcher.

Londres a donc recommencé à jouer. Ils ont un problème : le projet "occidental" domine dans l'UE, aux États-Unis et, de plus, on ne sait pas exactement quel rôle la Russie joue dans tout cela (car la Russie est sous le contrôle du projet "occidental" sur le plan financier et économique). La Russie a besoin de ressources propres (sa propre zone monétaire) dont elle ne dispose pas encore. Et Londres (sous le contrôle du projet juif) a commencé à promouvoir l'une des nombreuses factions qui existent dans le réseau du projet islamique mondial. Non pas Daesh, qui était auparavant promu par le projet "occidental", mais un autre, que l'on peut conditionnellement appeler le "califat rouge" dont le centre se trouve en Turquie (à Istanbul). L'objectif est de créer sur la base du monde arabe une zone monétaire avec Londres comme centre.

D'où, soit dit en passant, le conflit avec Israël. Londres n'a pas besoin d'Israël dans la nouvelle version du Moyen-Orient qu'elle crée (car Israël interfère avec son projet de califat rouge). Le projet "occidental" n'a pas non plus besoin d'Israël, car dans le cadre de cette confrontation interne entre Juifs, les sionistes ne sont pas en bons termes avec le secteur financier. Mais l'aristocratie européenne et le Vatican ont réellement besoin des Juifs (tant qu'Israël existera, les intérêts séculiers de l'État juif prévaudront sur les intérêts sacrés du projet  juif). À l'époque, Clinton était prêt à capituler devant Israël et Trump y était prêt aussi.

Eh bien, maintenant, comme promis, je vais parler un peu du capitalisme "inclusif". Le pape, comme on peut le constater, fait partie de l'"Internationale noire" et est l'un des éléments moteurs de ce projet de réseau capitaliste. Les Rothschild font partie du projet juif qui a pris le pouvoir à Londres, mais ils se trouvent dans une situation extrêmement précaire : la menace d'un nouveau Trump se profile à l'horizon.

Les Rockefeller sont la partie américaine du projet qui anime ce réseau capitaliste. Et qui est l'ennemi commun de tous ? L'élite à la tête du projet "occidental". Et pourquoi ont-ils besoin d'une alliance ? Selon la logique que nous avons exposée, la réponse est évidente : ils ont besoin d'un nouveau modèle de croissance économique qui soit différent de la question du dollar ! Ils doivent d'abord détruire le projet "occidental", puis s'occuper des autres projets. Et le projet "occidental" n'a pas encore été battu.

Notons que le Pape a longtemps essayé d'aller dans cette direction, il y a quelques années un fonds spécial d'environ 100 millions a été créé qui était censé financer un certain nombre de recherches pertinentes (j'ai même publié un document sur la création de ce fonds qui existe quelque part et était ouvert aux investissements) ... Mais l'astuce n'a pas fonctionné, ils n'ont pas trouvé de spécialistes capables de mettre en œuvre un tel programme. Et maintenant, ils font la deuxième tentative. La tâche principale de cette coopération est de trouver un mécanisme de développement qui permettra de vaincre enfin le projet global "occidental".

Et tous les autres projets, où en sont-ils ? La Chine s'attend à une crise inévitable, l'arrivée de Biden lui permet de retarder cet effondrement pour un certain temps, c'est-à-dire d'accumuler toutes sortes de réserves. Xi a déjà annoncé une transition pour lancer une série d'activités étatiques (sinon la Chine ne survivra pas du tout car elle ne pourra pas s'orienter vers le marché intérieur), mais il manque à la Chine un projet global ! La Chine est mal comprise au-delà de ses propres frontières, elle ne dispose pas de ce que l'on a récemment appelé le "soft power". Elle peut essayer de revenir au projet "Rouge", mais elle doit encore former un personnel important pour pouvoir le développer et la crise n'a pas encore commencé. Dans l'ensemble, ils ont encore des options, mais ils se trouvent dans un moment assez difficile.

Le projet juif a également été réactivé après le "Brexit", mais ils ont peu de ressources et sont confrontés à une inévitable guerre éclair. Soit ils remporteront une victoire rapide, soit ils subiront une défaite inévitable. Cela explique l'activité que Londres développe en Transcaucasie : elle a choisi la Turquie comme bélier et comme instrument, j'ai déjà écrit à ce sujet. Et ils doivent remporter une victoire rapide (c'est-à-dire qu'ils pourront former leur propre zone monétaire) ou la Grande-Bretagne, dans le cadre de l'histoire mondiale, cessera d'être considérée comme une grande puissance. Certes, le projet juif peut être relancé, mais la Grande-Bretagne va disparaître.

Le projet capitaliste a déjà perdu une de ses Blitzkriege et il lui est maintenant très difficile de manœuvrer politiquement, aussi espère-t-il, par ses récentes démarches politiques, s'allier à la Russie. Le seul obstacle sur son chemin est Poutine. C'est pourquoi une attaque très agressive contre Poutine se développe, qui est non seulement soutenue par le projet "occidental" (on comprend bien pourquoi l'élite de ce projet craint tant que Poutine n'entame une purge illibérale dans leur pays), mais qui trouve également un écho auprès de toute l'élite européenne. La seule différence est que les premiers détestent totalement la Russie (avec Poutine), tandis que les seconds sont tout à fait disposés à accepter la Russie, même en tant que partenaire junior, mais sans Poutine.

En fait, j'ai presque entièrement décrit le rapport de force. Seule la Russie a été exclue de ce scénario. Mais ici, je ne dirai rien pour l'instant, puisque Poutine n'a pas encore fait son choix. Plus précisément, je veux dire que la Russie manœuvre dans un scénario très difficile sans montrer à personne son véritable plan. Ici, comme lorsque l'on fait du vélo, il est beaucoup plus facile de rouler que d'être surpris par la façon dont on le fait. On ne peut donc qu'admirer le talent de Poutine, ce sera une autre affaire quand il prendra sa décision et il ne fait aucun doute qu'à ce moment-là, les partisans des autres projets finiront par détester cette décision.

Note :

  1. https://katehon.com/ru/article/zakulisa-snimaet-maski

dimanche, 09 février 2020

Russie. Alexandre Latsa analyse le « projet Poutine et Post Poutine » 2018-2024

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Russie. Alexandre Latsa analyse le «projet Poutine et Post Poutine» 2018-2024

Ex: https://www.breizh-info.com

En France, la presse mainstream est majoritairement « russo-sceptique » ou plutôt « Poutino-sceptique » et n’hésite pas à tacler fréquemment le maître du Kremlin. A contrario, dans la presse alternative, on trouve également bon nombre de sympathisants du régime russe, et notamment de Vladimir Poutine. C’est le cas d’Alexandre Latsa, qui ne s’en est d’ailleurs jamais caché (ce que font par contre allègrement en France des journalistes proches de Macron, de de Jean-Luc Mélenchon, mais qui ne s’assument pas).

Son analyse de la période 208-2024 à venir pour la Russie de Vladimir Poutine nous semblait intéressante à lire pour nos lecteurs, pour avoir un autre son de cloche sur la Russie que celui que nous avons dans la presse Mainstream.

L’année 2020 sera vraisemblablement, historiquement, l’année qui ouvrira le cycle d’après, celui d’une époque au sein de laquelle  Vladimir Poutine ne sera plus le président de la fédération de Russie. La nomination de Mikhail Michoustine est une illustration de l’avenir que Vladimir Poutine envisage pour la Russie et surtout des elites qu’il souhaite pour diriger le pays.

Un avenir bien différent de celui que nous promettait la grande majorite des commentateurs et soit disant spécialistes de la Russie de 2000 à 2020.

Ancien chef du Service fédéral des impôts depuis  2010, Mikhail Michoustine  est crédité d’avoir concu et réalisé l’extraordinaire numérisation des services fiscaux russes, permettant d’augmenter les recettes fiscales russes de 20 a 35% du produit intérieur brut et surtout de faire en sorte que « les impôts cessent d’être un problème pour les entreprises russes ».

Ingénieur de formation, il aurait de fortes connaissances sur les technologies importantes, telles que la blockchain et l’intelligence artificielle. Selon le PDG de Sberbank, German Gref, Mishustin serait rare, talentueux et polyvalent et l’un des managers les plus efficaces et les plus qualifiés du pays. Pour le chef de la Chambre des comptes, Alexei Kudrin,  Mishustin a le doigt sur le pouls de la numérisation.

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En plus d’ètre un conservateur sur le plan sociétal, c’est un musicien hors pair qui a concu certaines des chansons de Grigory Leps (ici et ici). Anecdocte, il n’avait pas de page Wikipedia avant sa nomination … La Kremlinologie est une science qui ne pardonne pas

Cette digititalisation de l’administration russe ne concerne pas que le Service fédéral des impôts mais l’ensemble des services administratifs. Conséquence, la capitale, ville pilote de cette digitatlisation est devenue aujourd’hui l’une des villes les plus connectées du monde, via notamment le travail de l’actuel maire de la Ville Serguey Sobyanine.

Depuis le début du redressement national, entame en 1999, Vladimir Poutine avait réussi la création d’un système politique de rassemblement, fédérant les clans et permettant un équilibre des intérêts. Comme l’a absolument parfaitement ecrit Jean Robert Raviot : « En menant, selon la tradition soviétique, une politique des cadres destinée à sélectionner les hommes les plus compétents, mais aussi les plus loyaux, le président russe cherche à consolider les bases du système corpocratique que d’aucun qualifieraient de «capitalisme d’état» — qu’il a instauré, système dont la pérennité lui importe sans doute davantage que son destin personnel après 2024. »

La résignation du gouvernement Medvedev, sanctionné pour n’avoir sans doute pas suffisamment initié les réformes permettant la réalisation de la stratégie 2020 est un signe qu’au Kremlin, on a compris, a un niveau élevé, le défaut de politique intérieure , mission du gouvernement russe. La figure de Medvedev et de son gouvernement, relativement impopulaire en Russie n’etait sans doute pas le meilleur binôme pour les prochaines élections législatives dans un contexte global qui voit un effritement de la confiance envers Russie Unie, sur fond de contestations principalement sociales. Pour autant, ami d’enfance du président et homme de première confiance, les nombreux commentateurs qui ont mis Dimitry Medvedev « au placard » font une grosse erreur d’analyse, le Poutinisme fonctionne en grande partie sur le binôme « : confiance / loyauté.

Fait par contre absolument impossible à envisager il y a même 5 ans : la Russie dispose d’un gouvernement dont la moyenne d’âge est de 45 ans, une génération de technocrates, moins politiques, une génération qui n’appartient pas à l’entourage historique du président russe, ni aux réseaux de « Leningrad ». Hormis Lavrov et Shoigou, hommes forts du précédent gouvernement et proches de Vladimir Poutine, seul l’ancien ministre des finances survit en tant que figure des « libéraux » kremlin-compatibles issus de la période Medvedev.

Fait encore plus incroyable : les modifications de la constitution que le président a initié verront l’obligation pour les fonctionnaires, ministres et candidats à la présidence russe l’obligation de n’avoir ni double nationalité, ni d’avoir résidé et obtenu à l’étranger un document de séjour ou résidence ; et surtout d’avoir vécu en Russie 25 ans, contre 10 ans aujourd’hui.

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Les enfants de la grande majorité de l’élite russe actuelle, qui étudient à l’étranger sont donc déjà hors-jeu des sphères de gouvernance de la Russie post-Poutine. Ne seront pas Tsars de Russie les enfants dont le logiciel mental aura été faconné à Yale, Stanford ou la Sorbonne, dieu merci pour la Russie ; exactement comme c’est le cas en Chine.

Une réelle transition, en profondeur, est en cours, scénario  qui va totalement à l’encontre du narratif prévu par le mainstream, pris une fois de plus de cours par la stratégie des élites russes dont on ne sait plus trop combien elles ont de coups d’avance.

Une autre chose importante est passé relativement inaperçue des commentateurs sur la Russie : les changements de la constitution comprennent un amendement qui affirme que désormais la loi nationale, russe est prééminente sur les décisions des stances juridiques internationales telles que la Cour européenne des droits de l’homme et du Conseil de l’Europe .

C’est une petite révolution qui ne fait que confirmer les tendances de fond initiées en 2014: le voyage épique de la Russie vers l’Europe a cessé et  les élites russes sont passés de la fascination à la compassion envers l’Occident et surtout l’Europe », comme l’a si magnifiquement écrit Vladislav Surkov en 2018

Sans surprise, les premières déclarations du nouveau premier ministre auront été tournées vers la nécessité de refaire augmenter le pouvoir d’achat des russes qui a baissé continuellement depuis 2014 et le début de l’ère des sanctions. Il faudra regarder si la tendance à la hausse constatée en fin d’année dernière pour la première fois depuis 2014 est une tendance lourde ou pas.

Les faibles revenus d’une part importante de la population sont un problème «particulièrement aigu» qui constitue une «menace directe» pour l’avenir démographique de la Russie en ne permettant pas aux familles de faire des enfants qu’elles souhaiteraient, a savoir 2,5 enfants / famille selon les études faites ; ceci explique la dimension absolument incroyable du volet social et démographique que les autorités russes vont déployer au cours des prochaines années.

Lors de son premier discours à la Douma, le nouveau Premier ministre a nommé six priorités pour son poste de premier ministre: le lancement d’un nouveau cycle d’investissement; utiliser efficacement les ressources allouées aux projets nationaux (que nous détaillons ci dessous); développer le complexe militaro-industriel; stimuler le développement technologique de l’économie; favoriser l’expansion du secteur agricole; et développer les infrastructures de transport pour réduire les disparités régionales.

3208909-ZVYGNJAL-6.jpgLa décision du Tsar Poutine de rompre l’architecture du Tandem  sous sa forme actuelle aura été une surprise pour tous les experts de la Russie et autres kremlinologues avertis ; on imagine ce qu’il en sera pour la succession, qui selon tout vraisemblance, est déjà organisée.

Le départ du président russe de sa fonction ne signifie sans doute pas pour autant son départ complet de la scène politique russe. S’il semble désormais quasi certain que Vladimir Poutine ne sera pas président de la Russie de 2024 à 2030 sauf force majeure ; il semble cependant plausible qu’il continuera à occuper une position dominante qu’elle soit au sein du conseil de sécurité, ou ailleurs.

Le Tandem « pourrait » se retrouver à diriger les deux conseils, de sécurité et d’état, afin d’ assurer un accompagnement de la nouvelle gouvernance présidentielle et législative qui émergera des législatives de 2021 et de la présidentielle de 2024.

La mission pour le Tsar sera sans doute ailleurs : assurer durant un laps de temps le bon fonctionnement de la transition, et plausiblement poser les derniers fondements nécessaire pour permettre au Poutinisme de survivre à Vladimir Poutine et ainsi permettre « à l’État, cette grande substance secrète de l’histoire russe qui en 1991 bascula dans le gouffre et fut réduite en cendres, de continuer a se relever, lentement, sûrement, de plus en plus rapidement, inébranlable et invincible dans son mouvement ascendant, car en lui, en l’État, agit le destin. Et cet État a choisi Poutine pour conduire le processus historique en Russie.
Ce n’est pas Poutine qui construit l’État, c’est l’État qui construit Poutine. »

Details des projets nationaux 2020 – 2024

Les projets nationaux sont un Grand Projet initié par le gouvernement russe en 2019, nouvelle version des projets prioritaires de 2005, et devant être réalisés durant la période 2019-2024 (soit au cours du dernier mandat de Vladimir Poutine) et pour la réalisation duquel a été attiibué 25 trilions de roubles soit 350 milliards d’euros au cours du 02 02 2020 sur 6 ans.

Les projets comprennent :

Le plus gros lot est celui des infrastructures « magistrales » notamment
– Les routes ;
– Les routes transfédérales notamment les autoroutes et les axes entre la Russie et la Chine ;
– Les ports ;
– La construction de 8 brise glaces ;
– La route maritime du nord et ses infrastructures ;
– Les voies férrées ;
– Les canaux ;
– Augmenter le transport de fret par 8 ;
– Augmenter de 50% la capacité globale de transport containers du pays ;
– Amélioration de l’indice de performance logistique du pays pour passer de la 75-ième à la 50-ième place mondiale ;
– Augmentation de 35% des vols domestiques pour que la Russie passe de 105 millions à  140 millions de passagers en 2024, depassant l’Allemagne et le Japon et arrivant au niveau de l’angleterre ; Augmenter de 50% le nombre de vols inter-régions ne passant pas par Moscou.
– Developper les infradtructures energetiques ;
– Installer une premiere centrale nucleaire flottante en chukotka ;
– Créer de nouveaux bouquets d’oléoducs et gazoducs

La démographie

Vladimir Poutine a annoncé la prolongation jusqu’en 2026 du programme de stimulation de la natalité appelé «Capital maternel», lancé en 2007 et qui devait à l’origine prendre fin en 2021.

L’objectif est de redresser le taux de natalité a 1,7 enfants / femmes (comme en 2016, contre 1,5 en 2019).

Le programme consistait en une dotation accordée à partir du deuxième enfant, mais les statistiques montrent que si le MatKapital a eu un effet tres positif sur la démographie au cours des 10 dernières années, désormais le problème n’est plus le second enfant, mais le premier. Le nombre de second, troisième, quatrième enfant augmente, mais le nombre de premier enfant lui diminue depuis 2017.

Le Matkapital (la dotation) sera désormais accessible dès le premier né et représentera dès janvier une somme de 466 617 roubles (6 820 euros) à laquelle seront ajoutés 150 000 roubles (2 192 euros) à la naissance du second. Les familles qui comprenaient déjà un enfant avant cette mesure et attendent la naissance d’un nouvel enfant percevront en une seule fois la somme cumulée pour les deux, soit près de 9 000 euros. Enfin, pour le troisième enfant, la législation russe continuera de proposer un remboursement des crédits immobiliers à hauteur de 450 000 roubles (6 577 euros), soit pour trois enfants jusqu’à un million de roubles de versements (un peu moins de 15 000 euros).
(source)

Il est également prévu d’augmenter les allocations familiales mensuelles par enfant qui n’étaient jusqu’ici versées que pour des enfants de moins de trois ans, l’âge d’éligibilité étant repoussé à sept ans. Ces allocations, qui devraient passer de 5 500 roubles en 2020 à 11 500 roubles en 2021, continueront toutefois d’être réservées aux familles dont le revenu ne dépasse pas le minimum vital fixé en 2019 à 11 000 roubles (160 euros) par mois et par personne. Ce montant varie en fonction des régions et de la situation socio-démographique (différents taux pour les enfants, les retraités et les personnes en âge de travailler).
(source)

Ce programme devrait concerner 1,3 milions  de familles.

En plus les allocations pour les familles avec un enfant handicapé passeront de 5.500 à 10.000 roubles par mois. L’allocation d’invalidité ne s’applique qu’aux familles dont le parent ne travaille pas. En moyenne, 470.000 personnes reçoivent ce paiement par an.

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Enfin les familles avec trois enfants ou plus bénéficieront désormais de déductions supplémentaires pour les taxes foncières et foncières ; Vladimir Poutine a également promis d’exempter les grandes familles de l’impôt foncier sur les parcelles allant jusqu’à six acres. Si une grande famille achète une parcelle de 10 acres, elle sera taxée comme si elle n’était que de quatre.

Ecologie
C’est le troisième lot le plus doté ; les objectifs principaux sont la mise en place d’un dispositif fédéral operationnel et fonctionnel de gestion, le traitement et tri des déchets ; la mise en place d’un programme d’amélioration de l’air ; de l’eau et acquisition de nouvelles technologies (eco-tech).


Route et sécurité routière

visant a la construction de nouvelles infrastructures ; réduire la mortalité sur la route par  3,5 afin de rendre la circulation routière en Russie plus sure qu’en Allemagne (!)
NDLA : voir les nouvelles lois TRES sévères visant à discipliner les comportements au volant.

Santé
visant à baisser de 25% les décès pour maladies cardiovasculaires ; baisser de 25% la mortalité infantile ; developper une production nationale d’équipement médical.

Education
avec en objectifs principaux : la digitalisation de l’enseignement ; multiplier par quatre le nombre de spécialistes de l’IT et que la Russie passe du 17-ième au 10-ième rang sur 500 des universités mondiales.

Culture
Visant au développement  des librairies et bibliothèques du pays.

Logement et environnement urbain :
Diminuer les taux d’interets pour l’acquisition immobilière a < 8% et developper des programmes d’aides pour l’acquisition de la propriete ; augmenter la construction d’immobilier de logement de 79 millions à 120 millions de mètres carrés ; Mise en place d’un programme pour rentre plus belles les villes et l’environnement urbain.

Science :
Faire entrer la Russie das le top 5 des nations en terme de publication d’articles dans les domaines scientifiques prioritaires (la Russie est aujourdhui 12-ième) ; tripler le nombre d’instituts scientifiques ; doubler le nombre de revues scientifiques et faire passer le pourcentage de chercheurs de moins de 39 ans de 43 à 5%.

Économie numérique et digitale
Augmenter les dépenses informatiques de 1,7% à 5,1% du PIB ; Augmenter l’accès Internet à haut débit de 73% à 97% des foyers russes (c’est-à-dire aux niveaux scandinaves les plus élevés du monde) ; assurer l’acces au tres haut débit à tous les objets d’infrastructure importants (hôpitaux, cliniques rurales, écoles, etc.) d’ici 2024 ; generaliser la 5G dans toutes les villes d’un million d’habitant ; Faire que la Russie passe de 1% à 5% de part de marché dans les technologies du cloud.

Business
Augmenter la part des entrepreneurs / petites et moyennes entreprises de 22,3% à 32,5% du PIB ; accroître l’accès au crédit pour les PME; créer des centres d’entrepreneuriat; etc.

Productivité
Eduquer le caital humain pour augmenter la productivité ;


Commerce international

Augmenter l’export de production nationale, notamment les machines, la production chimique, métallurgique, pharmaceutique, les services, l’agriculture et la production de bois.

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[cc] Breizh-info.com, 2020, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine 

mardi, 07 janvier 2020

De Byzance à Poutine : la grande stratégie russe et son incompréhension en Occident...

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De Byzance à Poutine : la grande stratégie russe et son incompréhension en Occident...

par Stéphane Audrand

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un texte de Stéphane Audrand, cueilli sur Theatrum Belli et consacré à la grande stratégie russe. Stéphane Audrand est consultant indépendant spécialiste de la maîtrise des risques en secteurs sensibles.

De Byzance à Poutine – Éléments de réflexions sur la grande stratégie russe et son incompréhension en Occident

La Russie effraye, fascine parfois, suscite peurs et antagonismes, mais le plus souvent dans l’incompréhension la plus totale et les clichés les plus simplistes. Son utilisation des instruments de puissance nous échappe, nous déconcerte, voire nous révulse, tant la pratique russe s’éloigne des codes occidentaux et notamment de la dichotomie « soft » et « hard » power.

Ainsi, l’incident en Mer d’Azov en 2018 ou les déclarations de Vladimir Poutine concernant la promesse du « paradis pour les Russes » en cas de guerre nucléaire ont attiré les réflexions les plus baroques [1]. C’est en vain que les commentateurs et les analystes tentent d’appliquer les grilles d’analyse occidentales à la situation russe. Leur inadéquation ne semble avoir pour conséquence que de disqualifier la Russie : ni « occidentale » ni « asiatique », l’espace russe semble failli, voué à l’échec et par conséquent stigmatisé. Par un ethnocentrisme qui serait comique s’il n’était porteur de risques, les Européens comme leurs alliés d’outre-Atlantique multiplient les représentations caricaturales de la politique de Vladimir Poutine, sans en percevoir la logique ou en la dénonçant comme intrinsèquement « mauvaise ». Ainsi, on souligne souvent l’incapacité de Moscou à « terminer » une guerre, citant les situations bloquées de longue date, du Haut-Karabagh à l’Ossétie, du Donbass à la Transnistrie. De même, on s’offusque des menées propagandistes, de l’instrumentalisation du droit international, du double discours, de la prétention russe (censément hypocrite) à négocier tout en bombardant… Comprendre l’autre, principe de base des relations internationales, semble bien difficile s’agissant de la Russie.

Les déterminants de la stratégie russe nous échappent, en grande partie parce qu’ils ne s’inscrivent pas dans notre héritage occidental de la guerre, dont le modèle mental est marqué par l’apport essentiel de deux auteurs : Saint Thomas d’Aquin et Carl von Clausewitz. Du premier nous avons hérité la propagation occidentale de la théorie de la guerre « juste », seule justification possible au déchaînement de la violence que la tradition romaine et chrétienne du droit ne peut considérer que comme une entorse au gouvernement des lois et à l’injonction de charité. D’où la limitation de la guerre à la puissance publique, au prix d’une cause juste et d’une intention bornée par l’intérêt général [2].

Au second nous devons la mystique de la guerre « totale », moment de la politique qui consiste en un acte de violence pour contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté [3]. Loin d’être antinomique, les deux approches se complètent et toute la théorie dominante moderne des conflits en Occident tourne autour de ces deux môles : il n’est de guerre possible que si elle est légitimée par le droit et la morale et il n’est de guerre envisageable que par la recherche de la victoire, moment politique par lequel le vaincu se soumet au vainqueur, à travers un ensemble de conditions – de capitulations – qui marquent la fin du « temps de guerre » et le retour au « temps de paix », au gouvernement par les lois. L’organisation même de la sécurité collective après 1945 autour de l’idée de l’Organisation des nations unies repose sur ces deux piliers de la guerre « juste » et de la guerre « politique » et marqua le triomphe mondial des conceptions occidentales : la Charte des Nations unies disqualifie la guerre comme « instrument » dans les mains du pouvoir, en dehors du rétablissement collectif de la sécurité ou de la légitime défense individuelle des Etats. Pour aller plus loin, on peut même penser que l’idée que le soft power puisse être décorrélé du hard power est une conséquence moderne de ce raisonnement : la puissance armée ne peut pas être « incluse » dans les autres pouvoirs, elle doit cohabiter « à côté » [4].

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À l’opposé, la pratique russe moderne s’inscrit dans une toute autre tradition épistémologique qui emprunte largement à un héritage byzantin dans lequel le strategikon de l’empereur Maurice remplacerait à la fois Thomas d’Aquin et Clausewitz et ferait figure de « code opérationnel », comme l’a remarqué Edward Luttwak [5]. L’héritage byzantin irrigue la tradition russe de l’usage de la force et de la puissance, et il a influencé à la fois la mystique du pouvoir (impérial ou étatique) et l’exercice de l’usage de la force, qu’elle soit armée ou non. D’une part, il n’y a pas forcément de recherche d’une « victoire » nette, car la perception de celle-ci est différente et car le continuum du pouvoir en action remplace la dichotomie « Guerre et Paix ». C’est l’ascendant qui compte. D’autre part, il n’y a pas la même obsession pour la justice de l’action car le gouvernement des lois n’est pas perçu comme prépondérant. C’est en Occident qu’a émergé l’idée que le princeps, le gouvernant, pourrait lui-même être soumis en temps ordinaire au droit, même lorsqu’il se trouve être le législateur unique [6].

L’Empire byzantin souffre d’une réputation peu flatteuse en Occident, entretenue par des siècles d’ignorance et d’approximations historiques dont la première est bien son qualificatif même. Jamais les habitants de cet empire ne se qualifièrent eux-mêmes de « Byzantins ». En leur temps, ils étaient appelés et se nommaient Romaioi, Romains, parce qu’ils furent d’abord et avant tout, non pas « les continuateurs » de l’Empire romain, mais bien l’empire romain lui-même. Il faut rappeler cette réalité : dans un environnement hostile, entouré d’ennemis, comptant bien peu d’alliés, faisant face aux Perses, aux Slaves, aux Arabes, Turcs et Latins, l’Empire romain d’Orient persista jusqu’en 1453 en tant qu’entité politique. Un empire de plus de mille ans ne peut être réduit à la vision qu’en colporte l’historiographie occidentale, mettant en avant « décadence », « querelles byzantines » et « duplicité » dans le sillage d’Edward Gibbon. Au contraire, il faut reconnaître sa capacité d’adaptation et de reconfiguration, pour tenir compte des affaiblissements qu’il dut affronter et admettre qu’il fut dirigé pendant longtemps par une élite éclairée et soucieuse du bien commun [7].

Le lien historique de Byzance avec la Russie s’est construit par la christianisation des Slaves, du IXe au XIe siècle. Alors que les principautés slaves demeurèrent morcelées jusqu’au XIIIe siècle, la foi orthodoxe fut un ciment certain d’unité sociale et culturelle, à l’image du catholicisme romain en Occident. Pour autant, ce n’est pas avant le XVIe siècle que le « messianisme russe » se développa, quelque soixante ans après la chute de Constantinople. L’idée centrale, mise à profit par l’État moscovite naissant, fait de Moscou la « troisième Rome », celle qui n’échouera pas, après que la première Rome soit tombée sous les coups barbares du fait de son hérésie et la deuxième, Constantinople, sous les coups des Turcs et par la trahison des Latins [8]. Ce messianisme moscovite servit tour à tour l’affirmation du pouvoir tsariste, l’idéologie panslaviste et même, plus tard, le marxisme soviétique. Il se cristallisait toujours autour de l’élection de Moscou comme axis mundi et de la responsabilité russe pour porter la seule civilisation de la « vraie foi » (qu’elle soit orthodoxe ou – momentanément – marxiste-léniniste) [9].

L’examen du « code opérationnel byzantin » et sa mise en regard avec les actions du Kremlin sur la scène mondiale montrent d’importantes corrélations qui s’expliquent par cette tradition de la littérature byzantine, comme si, après une parenthèse rationaliste et « occidentaliste » de quelques siècles ouverte par Pierre le Grand et refermée par Michael Gorbatchev, les Russes renouaient avec leur héritage épistémologique antique, héritage d’ailleurs revendiqué ouvertement par le Kremlin [10]. On voit s’inscrire dans cette tradition orientale une toute autre vision de l’exercice de la puissance, qui préside à la perpétuation d’un empire encerclé par des adversaires multiples et qui voit dans sa perpétuation même son ambition principale. Il faut durer en s’adaptant, malgré les faiblesses de l’Empire.

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Premières similitudes avec l’espace russe actuel, l’encerclement et la perception de menaces multiples, mais aussi l’idée que « vaincre est impossible ». L’Empire byzantin – conservons cette dénomination par commodité – ne pouvait pas compter sur un quelconque verrou territorial pour protéger une géographie exposée de toutes parts. Les Vandales, les Goths, Perses, Slaves, Arabes, Turcs, Latins… Les ennemis se succédèrent sans fin aux frontières de l’Empire et la disparition de l’un ne faisait que la place de l’autre, à l’image des barbares gothiques vaincus en Italie pendant la reconquête justinienne, et qui furent « remplacés » par les Lombards, ruinant les coûteux efforts de l’Empire [11].

Le fait que la Russie actuelle se perçoive comme menacée dans ses frontières continue d’échapper à la majorité des observateurs occidentaux, qui préfèrent mettre en avant l’expansionnisme russe et la menace qu’il représente pour ses anciens États « vassaux ». L’Europe a ainsi totalement épousé le point de vue des États de l’ancien Pacte de Varsovie, sans chercher à comprendre celui de Moscou. Envahie à trois reprises en moins de cinquante ans au début du XXe siècle [12], la Russie ne préserva son indépendance qu’au prix de millions de morts et de destructions d’une ampleur colossale. On peut comprendre que l’idée de l’invasion marqua les esprits et que le recul de la frontière « le plus loin à l’ouest possible » devint une obsession. Si le dénouement du second conflit mondial avait paru enfin donner à l’espace russe la profondeur stratégique nécessaire à sa protection, la liquidation à marche forcée de l’URSS fit reculer la frontière de positionnement des troupes de 1 300 km, de la frontière de l’ex « Allemagne de l’ouest » à celle de la Lettonie. La situation stratégique actuelle de la Russie est objectivement celle d’un empire certes encore puissant militairement, mais affaibli démographiquement, démembré et encerclé, et pas d’une puissance en expansion : les forces de l’OTAN sont à moins de 600 km de Moscou. Les trajectoires économiques et démographiques ont à ce point divergé depuis la chute du Mur de Berlin que la Russie, malgré son territoire et ses immenses ressources, ne dispose plus que de la population combinée de la France et de l’Allemagne et du PIB de l’Italie. Dans ces conditions, peut-on reprocher à Vladimir Poutine de se sentir « menacé » par l’OTAN qui agrège près d’un milliard d’habitants, avec un PIB vingt fois supérieur ? Bien entendu, cela ne doit pas conduire à négliger ou ignorer la menace qu’il peut représenter en retour, mais plutôt à la considérer comme une perception de sa propre faiblesse sur le long terme.

Le pouvoir moscovite est tout simplement conscient qu’il ne peut pas « gagner » face à l’Occident : son objectif de (re)sanctuariser la Russie tout en affaiblissant ses adversaires doit être compris dans ce contexte limité. Du reste, s’il est souhaitable que l’Europe soit faible militairement pour la Russie, elle demeure le client indispensable du gaz russe et se trouve ainsi liée dans une situation de dépendance. Encerclée, la Russie l’est aussi en Asie : le Japon et la Corée du Sud ne sont pas perçus autrement que comme des tremplins américains, tandis que la Chine, partenaire et allié de circonstance, constitue une menace de long terme perçue comme telle à Moscou. La relance favorable des négociations avec le Japon à propos des îles Kouriles est ainsi la concrétisation de cette crainte russe face à la Chine, qui justifie sur le moyen terme une tentative de rapprochement avec les adversaires potentiels de Pékin. Là encore on voit la marque byzantine d’une diplomatie à la fois opportuniste et dénuée d’aprioris moraux : seul compte l’intérêt de l’Empire et s’il est possible de diviser ses adversaires à peu de frais, c’est toujours souhaitable, même au prix de renversements apparents d’alliance. L’instrumentalisation des ventes d’armes à la Turquie est ainsi un bon exemple par lequel, à bon compte, Moscou accentue la division de l’OTAN [13].

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S’il y a utilisation récurrente de la force armée par Moscou depuis 2014 et l’annexion de la Crimée, c’est d’une part car elle constitue pour l’instant une des dernières cartes maîtresses de la Russie, et d’autre part car la situation russe n’est perçue fort justement que comme ne pouvant qu’inexorablement se dégrader : l’économie de rente reste tributaire du pétrole et du gaz dont les cours sont corrélés, la démographie est sinistrée et les tensions sociales sont à la hausse, ce qui justifie d’agir au plus tôt, l’attente n’étant porteuse que d’une détérioration de la situation globale et d’une réduction des options stratégiques. On évoque souvent les « succès » de Vladimir Poutine, mais on oublie aussi les limites de son action. Ainsi, si la Russie a occupé une place laissée vide au Proche Orient par le recentrage stratégique vers l’Asie voulu par Barack Obama, elle a été incapable de conserver son ancienne influence dans les Balkans, réduite à la Serbie, et dont l’évolution actuelle est beaucoup moins marquée par l’empreinte de Moscou qu’en 1999 pendant la crise du Kosovo. En outre, l’intervention en Syrie ne passionne plus les foules et le pouvoir se fait discret sur le sujet. En Afrique, la Russie a pu avancer, notamment via ses mercenaires et quelques ventes d’armes, comme en Centrafrique, là encore à la faveur du recul des occidentaux, mais la position reste opportuniste et fragile [14].

Cet opportunisme typiquement byzantin s’explique en partie par le manque de moyens, mais aussi par la perception de l’impossibilité pratique de la « victoire », voire de son inutilité : mieux vaut agir quand c’est possible, mais sans se laisser entraîner dans des conflits trop coûteux. Les Byzantins comprirent en effet, tout comme les Russes actuellement, que l’idée de victoire « totale » contre un adversaire puissant était un leurre et que la rechercher faisait courir le risque de la sur-expansion et de l’épuisement : vaincre totalement un adversaire absorbait d’énormes ressources matérielles, humaines et fiscales, usait l’Empire et n’aboutissait, au final, qu’à faire « de la place » pour qu’un nouvel adversaire face auquel la situation impériale serait compromise par l’épuisement. Loin de sécuriser l’Empire, l’anéantissement d’un adversaire était donc perçu comme trop coûteuse et contre-productive, un « paradoxe de la stratégie », compris comme tel, notamment par l’Empereur Isaac Comnène qui théorisait qu’en temps de faiblesse, « l’augmentation est une diminution » [15].

À l’anéantissement, les Byzantins préféraient l’affaiblissement de l’adversaire, en usant d’abord d’influence politique et diplomatique. Le recours à la force était toujours possible, mais ne devait pas placer l’Empire en position de s’épuiser. Cette approche, née dans la douleur face aux Perses, aboutit à la création de « conflits larvés » entre tierces parties, insolubles mais qui divisaient les adversaires tout en les maintenant fixés sur des enjeux mineurs. C’est une approche qui choque en Occident : d’une part nous avons tendance à considérer qu’il doit y avoir « un » adversaire principal (celui contre lequel s’exerce la violence de la guerre juste) et d’autre part qu’il doit être vaincu, totalement, pour résorber la tension morale que crée le conflit. D’où cette impression, absurde à l’échelle historique, que l’Histoire prenait fin en 1989 [16] : l’adversaire principal, l’URSS, s’étant effondré, la victoire mondiale de l’Occident et de son système politico-économique semblait évidente et définitive. Toute conflictualité devenait parfaitement secondaire en l’absence d’adversaire légitime à la démocratie libérale. On sait ce qu’il advint des dividendes de la paix, acquis sous forme de « subprimes »

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Dans l’approche russe, la conflictualité, loin de fragiliser la situation sécuritaire, y contribue dans un paradoxe orwellien qu’on pourrait résumer par « la guerre (larvée) c’est la sécurité ». Ainsi, l’abcès de Transnistrie s’insère comme un « coin » entre Ukraine et Moldavie. De même, l’Ossétie du Sud « fixe » la Géorgie sur le plan territorial, tout comme le séparatisme du Donbass contribue à affaiblir l’Ukraine et sécurise l’annexion de la Crimée : aucun besoin de « résoudre » ces conflits. Dans un cas comme dans l’autre, l’intérêt de Moscou est que cela continue [17]. Même l’intervention dans le conflit syrien doit se comprendre, en partie, comme une action de protection par fixation de l’adversaire aux frontières. Loin d’être une extravagante aventure ultramarine, l’intervention en Syrie en 2015 était perçue à Moscou comme l’impérieuse nécessité de protéger les marches du Caucase. On oublie facilement que la même distance sépare la Russie de la Syrie et Paris de Marseille : environ 650 km. Le containment puis la réduction, en Syrie, de l’enclave djihadiste répond ainsi à un objectif immédiat de protection du Caucase, qui explique notamment la facilitation au départ des djihadistes organisée en sous-main par les services russes, mais aussi le « redéploiement » des survivants en Ukraine après la chute de Daech [18].

Cette compréhension de l’instrumentalisation des conflits non comme un moteur de l’expansion territoriale massive mais plutôt comme une avancée prudente du glacis stratégique par la création d’un « tampon instable » permet ainsi d’analyser le comportement russe actuel. Ayant perdu des provinces perçues comme « historiquement russes » (la Biélorussie, l’Ukraine) ou « indispensables » à la sécurité (Pays Baltes, Géorgie), la Russie cherche à reconstituer un espace stratégique suffisant qui mette Moscou à l’abri de toute tentative étrangère. Ainsi, il ne faut pas tant craindre par exemple une invasion en bonne et due forme de la Pologne ou des Pays Baltes que des tentatives de déstabilisation et de neutralisation, par agitation de minorités, armées à peu de frais avec des surplus d’armements et encadrées par des supplétifs. Or face à ce genre de conflit, l’OTAN, pensé pour les guerres de haute intensité, est démuni. Quelle serait la réaction de l’alliance si la Lituanie ou la Géorgie – si elle finit par rejoindre l’Alliance – invoquaient l’article V du Traité de l’Atlantique nord face à des « bandes armées » ?

Prolongeant l’idée que la conflictualité puisse être contributive à la sécurité dans la durée, la Russie de Vladimir Poutine ne distingue pas « temps de guerre » et « temps de paix » et a une approche globale (on pourrait dire « systémique ») de la diplomatie. Même si les Russes, dans le triomphe rationaliste du XVIIIe siècle, ont pu se rallier, pour un temps au moins et partiellement, à la vision occidentale de la guerre, ils s’en sont éloignés de nouveau, depuis la chute de l’URSS. Ainsi on comprend mieux la stupeur outrée des observateurs qui frappent de duplicité Vladimir Poutine lorsqu’il prétend négocier la paix pendant que l’aviation russe bombarde la Syrie. De même, la volonté de Moscou de discuter en même temps des quotas de gaz transitant par l’Ukraine et du conflit au Donbass, alors que ni les Européens ni Kiev ne voient (ou ne veulent voir) le rapport suscite crispations et incompréhensions. Il ne s’agit là encore que d’un avatar de conceptions occidentales ethno-centrées. Au demeurant, l’idée qu’il y a un « temps pour la négociation » et un « temps pour les armes » qui seraient mutuellement exclusifs est récente et, au final, on peut s’interroger sur sa pertinence. Elle ne se justifiait guère que pendant le second conflit mondial, en raison de la dimension idéologique irréconciliable des forces en présence. Mais une étude de la conflictualité sur le long terme montre que, en Occident comme en Orient, la règle est que les diplomates continuent de se parler pendant les combats. On peut même considérer, comme le suggère Luttwak à propos des Byzantins, que la diplomatie est encore plus importante pendant la guerre car elle permet de recruter de nouveaux alliés tout en divisant les coalitions adverses. En allant plus loin, on peut s’étonner que l’OTAN ait, dans sa doctrine opérationnelle, une vision tout à fait systémique des crises, marquant un continuum du politique à l’économique et au militaire et qui prend en compte les aspects diplomatiques du centre de gravité, mais que les dirigeants de l’Alliance atlantique, eux, soient souvent incapables de s’approprier la vision « technique » de leurs propres états-majors [19].

L’influence et la parole sont également des points de convergence entre la pratique byzantine et russe. Déjà au Moyen-âge, les Latins dénonçaient la « duplicité des Grecs » et se plaignaient de leur manque de parole. L’attachement occidental à la notion de « Vérité » n’a fait que croître avec le triomphe du rationalisme, de la méthode scientifique et du gouvernement par les lois. À l’opposé, Byzantins comme Russes percevaient et perçoivent encore la nécessité de raconter des « histoires » adaptées à chaque situation. Au temps pour les fake news, l’important est pour Moscou d’occuper le terrain de la communication, y compris par la désinformation. La démoralisation de l’adversaire par la mise en avant de ses faiblesses compte plus d’ailleurs que la propagande valorisante et c’est la méthode que pratiquent, au quotidien, Russia Today ou Sputnik. C’est une évolution marquée depuis la chute de l’URSS : Moscou ne cherche plus à proposer un système de valeurs opposé à celui de l’Occident, mais plutôt à le discréditer afin de démoraliser les populations, spécifiquement en Europe, en construisant la prophétie (hélas assez auto-réalisatrice) d’Européens « condamnés car moralement faibles ». L’approche du domaine « cyber » diffère ainsi radicalement de celle de l’Occident, en ce qu’elle s’inscrit dans la continuité avec les sujets informationnels et médiatiques [20].

maskirovka.jpgLe recours à la désinformation d’ailleurs est un des points fondateurs de la « déception » (ruse, diversion, feinte) ou, dans le jargon militaire russe moderne, de la maskirovka. Si des historiens militaires modernes au nombre desquels David Glantz ou Jean Lopez ont exposé l’importance de l’art opératique soviétique et son apport à la pensée militaire moderne, ils sont également mis en exergue le rôle crucial de la déception et de la désinformation pendant l’accomplissement de la manœuvre de haute intensité [21]. Ici se dessine encore la continuité entre opérations armées, diplomatie et influence. Il n’y a pas de soft ou hard power, mais une puissance, que l’on exerce en même temps « par les arts, les armes et les lois ». La déception byzantine ou russe est tout à la fois un outil d’affaiblissement de l’adversaire, le démultiplicateur des forces par la surprise opérationnelle qu’elle permet et le garde du corps mensonger d’une vérité qui doit être gardée secrète : conscients de l’impossibilité de préserver les secrets de manière absolue, les Byzantins le rendaient invisible au milieu du mensonge. Dans ce domaine spécifique du renseignement on voit encore des similitudes frappantes avec la doctrine russe de préservation du secret par le doute et le flou, aux antipodes d’une conception occidentale de préservation du secret par la protection, le silence et la sécurisation d’un fait rationnel unique et univoque.

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Ainsi, la déception offre le bénéfice de créer de la confusion et d’affaiblir l’adversaire sans combat ou en préalable à celui-ci. Un des avantages conférés par la déception est l’économie des forces. Il s’agit là d’un point commun notable entre l’Empire Byzantin et la Russie actuelle : dans les deux cas, on est face à un ensemble impérial disposant de forces de grande qualité, mais coûteuses à reconstituer en cas de pertes. Il faut donc les utiliser avec parcimonie et ne pas hésiter à avoir recours à des alliés, des mercenaires ou des « proxies » qu’on ira chercher avant ou pendant le conflit pour limiter l’engagement des forces impériales. Bien qu’ayant été couramment pratiquée en Occident, la déception semble à la fois passée de mode et emprunte d’inefficacité et de disqualification morale. Sans doute est-ce un avatar de l’obsession de la guerre « juste » : la ruse, le mensonge sont par essence des comportements négatifs qu’un État agissant au nom d’une juste cause devrait se restreindre d’employer. Ainsi se creuse le fossé entre le monde du renseignement et celui des opérations, pour des raisons souvent plus idéologiques qu’organisationnelles [22].

La Russie est sortie des conceptions soviétiques qui prévoyaient l’engagement massif de grands corps blindés pour disloquer en profondeur l’adversaire [23]. L’armée russe rénovée par Vladimir Poutine depuis 2008 s’est reconstituée autour de « pointes de diamant » : des unités de choc équipées en matériel modernisé qui sont, certes, supérieures en effectifs aux forces de haute intensité européennes, mais qui ne peuvent plus compter comme dans les années 1970 sur une écrasante supériorité numérique. Le gros des effectifs demeure équipé d’armes anciennes et n’a qu’une aptitude douteuse à la manœuvre interarmées, tout en pouvant fournir utilement des contingents de blocage, d’occupation ou de disruption. Ainsi, à la manière des Byzantins, les Russes sont intervenus en Syrie de manière limitée, pour « encadrer » leurs alliés. Si l’effort russe, considérable au regard des moyens économiques disponibles, a fourni au régime syrien conseillers, appui aérien et d’artillerie, moyens logistiques, antiaériens et de renseignement, le gros du travail d’infanterie a été fait sur le terrain par les supplétifs de la nébuleuse iranienne, complétés de quelques forces spéciales [24]. L’ère n’est plus à la manœuvre des grands corps blindés de l’Armée Rouge, mais plutôt aux « coups de main » opportunistes, comme dans le Strategikon. La situation dans le Donbass est partiellement similaire. Certes on voit le retour de la « haute intensité » en périphérie de l’Europe avec des engagements de centaines de chars lourds, mais là encore en usant d’unités de supplétifs, de « volontaires » qui permettent de ne pas engager les unités de pointe du dispositif de choc, dont la vocation est à la fois d’impressionner, d’aider à la régénération organique et de constituer une réserve de dernier recours : la Russie n’a pas envie d’affronter l’Occident sur le terrain militaire [25].

Cette mise en perspective de quelques éléments saillants des similitudes entre l’art stratégique et opérationnel byzantin et les manœuvres de la Russie de 2018 permet de mieux cerner à la fois les méthodes de Vladimir Poutine, mais aussi ses limites et les raisons de notre propre incompréhension.

On pourrait objecter que la présence des arsenaux nucléaires rend invalide cette approche, par la transformation profonde de l’art de la guerre. Il n’en est rien. De fait, le paradoxe moderne de la dissuasion serait plus compréhensible pour un penseur byzantin que pour son homologue occidental. L’idée que des armes puissent avoir leur meilleure efficacité par leur inutilisation, tout comme celle que la sécurité puisse être fille de la terreur, sont au cœur du paradoxe de la stratégie, de la résolution du dilemme de la convergence des contraires [26]. Mais le dernier point, peut-être le plus important, dans lequel s’inscrit l’arme nucléaire, est celui que nous avons évoqué en introduction : l’idée de durer. L’arme nucléaire offre un sanctuaire temporel à la Russie. Cette sanctuarisation apparaît particulièrement importante en Orient, face à la poussée chinoise en Sibérie et à la très forte disproportion des forces qui serait celle d’un conflit le long de l’Amour.

Même si elle pourrait apparaître à un penseur marqué par l’idée occidentale de progrès, la perpétuation de la civilisation – russe ou byzantine – comme objectif fondamental de la grande stratégie est certainement un pivot épistémologique important, qui donne une résilience particulière à la société russe en période de crise. Et, au fond, il vaut mieux sans doute avoir un objectif clair mais peu séduisant sur le plan idéologique (celui de durer) que de chercher en circonvolutions quel pourrait bien être l’objectif commun de progrès en Europe, en dehors de l’approfondissement de l’efficacité des marchés et de la concurrence libre et non faussée…

Stéphane AUDRAND (Theatrum Belli, 17 décembre 2019)

Notes :

(1) https://www.dailymail.co.uk/news/article-6292049/Putin-sa...

(2) En toute rigueur, c’est à Cicéron que revient d’avoir formalisé le premier l’idée de la guerre juste, dans La République (II, 31 et III, 37). Repris par Saint Augustin qui y adjoint l’idée chrétienne de contribution au Salut, elle est ensuite formalisée par Thomas d’Aquin. Voir LEVILLAYER A. « Guerre juste et défense de la patrie dans l’Antiquité tardive », in Revue de l’histoire des religions, tome 3, 2010,  p. 317-334.

(3) Définition au chapitre 1 de « De la Guerre », paragraphe 2.

(4) Ce qui n’est finalement que la traduction du fameux « Cedant arma togae, concedat laurea linguae » de Cicéron.

(5) Une grande partie de cet article repose sur les analyses développées par EDWARD LUTTWAK dans son excellent ouvrage La Grande Stratégie de l’Empire byzantin, Paris, Odile Jacob, 2010 (édition originale anglaise 2009).

(6) Sur l’émergence du gouvernement des Lois on pourra se rapporter aux travaux d’Alain Supiot, La Gouvernance par les nombres, Cours au collège de France, 2012-2014, Paris, Fayard, 2015, 515 pages.

(7) NORWICH, J.J., A Short History of Byzantium, First Vintage Books, New York, 1982, 430 pages, pp. 382-383.

(8) Timothy Ware, L’orthodoxie, Bruges, 1968, DDB, 480 pages, p. 150-151.

(9) Spécifiquement sur le ce « messianisme » on pourra lire DUNCAN P.J.S., Russian Messianism, third Rome, revolution, communism and after, New York, Routledge, 2000.

(10) CHRISTOU T., The Byzantine history of Putin’s Russian empire, sur The Conversation – http://theconversation.com/the-byzantine-history-of-putin...

(11) DUCELLIER A., Byzance et le monde orthodoxe, Paris, Armand Colin, 1986, page 91. L’Empereur Maurice – l’auteur du Strategykon – tenta de se maintenir en Italie largement pour des questions de prestige, et on peut penser que les coûts de cette entreprise pesèrent dans sa réflexion stratégique.

(12) En 1914-17 et en 1941-45 par l’Allemagne et, on l’oublie souvent, en 1920 par la Pologne, dont les troupes s’emparèrent de Kiev et Minsk. L’intervention des puissances occidentales contre la Révolution marqua aussi les esprits car elle montra l’encerclement de l’espace russe, les alliés débarquant sur toutes les côtes de la future URSS.

(13) FACON. I., Export russe des systèmes anti-aériens S-400 : intentions stratégiques, atouts industriels et politiques, limites, Défense & Industrie n°13, juin 2019, 4 pages.

(14) « Russie Afrique : le retour » – Affaires Étrangères du 19 octobre 2019. https://www.franceculture.fr/emissions/affaires-etrangere...

(15) Cité par DUCELLIER A., op. cit, page 15.

(16) FUKUYAMA F., La Fin de l’histoire et le Dernier Homme, Paris, Flammarion, 1992. Faisons au moins justice à Francis Fukuyama en reconnaissant que son livre comporte bien plus de nuances et d’hésitations sur la validité de sa théorie que ne le suggèrent à la fois ses adversaires et ses thuriféraires.

(17) Autant de crises, dont les ferments étaient connus et documentés depuis la chute de l’URSS. Ainsi, pour le cas de l’Ukraine et de la Crimée, on pourra relire BREAULT Y., JOLICOEUR P. et LEVESQUE J., La Russie et son ex-empire, Paris, Presses de Science Po, 2003, pages 105-115.

(18) https://www.la-croix.com/Monde/Europe/djihadistes-Caucase...

(19) SHAPE, Allied Command Operations – Comprehensive Operations Planning Directive COPD, 2013, 444 pages, voir en particulier pages 21, 26, 63 et 88 à 91.

(20) CONNEL, M. et VOGLER, S., Russia’s Approach to Cyber Warfare, CAN, Washington, 2017, 38 pages, pp. 3-6.

(21) Voir GLANTZ D., Soviet Military Deception in the Second World War, New York, Routledge, 2006.

(22) KEEGAN J., dans son ouvrage Intelligence in War, Londres, Pimlico, 2004, réfléchit ainsi sur les limites du renseignement dans la conduite des opérations. Il s’inscrit plutôt dans le droit fil de Clausewitz pour lequel, face au brouillard de la guerre et aux forces de frictions, il est coûteux et peu efficace de rajouter de la confusion.

(23) Voir LOPEZ J., Berlin, Paris, Economica, 2010, pages 75-88 pour une brillante synthèse francophone de l’évolution doctrinale soviétique de la bataille en profondeur, manœuvre opérationnelle la plus aboutie sans doute de l’ère de la guerre mécanisée.

(24) KAINIKARU S., In the Bear’s Shadow: Russian Intervention in Syria, Air Power Development Centre, Canberra, 2018, 192 pages, pp. 81-96.

(25) Autour de 600 chars ukrainiens. Voir l’audition du général P. Facon par la commission de la défense nationale et des forces armées – CR74 du 25 septembre 2018. Le général Facon note d’ailleurs l’importance du déni d’accès dans l’approche russe, très byzantine : il ne s’agit pas tellement de rechercher la décision de manière immédiate par la manœuvre, le feu et le choc, mais d’entraver la capacité adverse à le faire par déni d’accès terrestre et/ou aérien.

(26) Sur le paradoxe de la stratégie et son prolongement nucléaire, voir LUTTWAK E. N., Le grand livre de la stratégie, Paris, Odile Jacob, 2001, pages 21-23 et 205-207.

samedi, 21 décembre 2019

The Real Code of Putinism

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The Real Code of Putinism

Ex: https://www.americanthinker.com

Today's Russia is in the most critical stage of its ideological design.  Its beginning was laid in the article by Vladislav Surkov (aide to the Russian president) under the symbolic title "Long-lasting state of Putin."  The piece was widely discussed by the expert community in Russia and abroad.  Many took this article as a signal that Putin was not going to leave after his presidential term's expiration in 2024 and was preparing his domestic public and international community for this through his éminence grise (as Surkov is often called).  However, with a detailed analysis of the processes that occur in modern Russia, one can come to deeper conclusions.

Vladimir Putin has ruled the country since 2000, and over these 19 years, influence groups around him have been fighting each other for a special position and status.  Unlike most of his associates, Putin is indeed an ideologically motivated leader who perceives himself not just as a politician and an official, but as a sovereign, such as Peter the Great and Alexander III — the beloved emperors of the current Russian leader.

Being aware of the internal construction of Putin's philosophical vision, various people were trying to form an ideological concept that would reflect the mission and goals of modern Russia.  Some wrote about the idea of a "special civilizational path."  It suggested that Moscow would not copy the Western model of development and would not declare itself a part of the Asian world as well.  Others sought to revive the long-forgotten formula "Moscow as the Third Rome" that in fact declared Russia the heir to the fallen Byzantine Empire.  Some suggested a consensus option to combine Western and Eastern civilization codes.  Undoubtedly, there are also groups that do not consider having any ideology important; they offer to copy certain points of the most successful government projects around the world.  However, there is no question of whether Russia needs an ideology or not because Putin is absolutely convinced of the vital necessity of its existence.

There are several reasons for this approach.  Firstly, the president understands that this is about his legacy.  For a psychological type of leader like Putin, the way history remembers him is crucial.  And it is not about love and admiration of the generations to come.  It is difficult to find a politician in Russian and world historiography who could be given an unambiguous assessment.  Discussions continue about everyone without exception, from Alexander the Great to Ronald Reagan.  The key fact is the transformation when a mortal politician becomes an immortal image and an object of constant study for future generations.  Secondly, the Russian leader is convinced that people who were born and raised in independent Russia should have clear guidelines in order to at least preserve the integrity of the country.  So far, Vladislav Surkov was the one who truly managed to systemize the views and ideas of the president.  Putin's aide divided the history of Russian statehood into four parts: the Rus' of Ivan the Third, the Russian Empire of Peter the Great, the Soviet Union of Vladimir Lenin, and the Russia of Vladimir Putin.

The new ideology that is called Putinism is uniting principles and foundations that have remained unchanged throughout all the historical stages of the development of Russia.  Its foundation is the concept of National Democracy.  It implies that the process of democratization and the formation of an active civil society is inevitable but it should not be carried out according to any foreign model.  The Russian nation, like any other, has its civilizational, social, and cultural features.  Today, 190 peoples live in Russia, and most of them retain their language, traditions, and mentality.  From this point of view, Moscow is always under the permanent threat of external forces using any interethnic disagreements for their purposes.  If, for example, a political decision was made to allow same-sex "marriage" in the deeply conservative regions of the North Caucasus, Tatarstan, and Siberia, riots would begin.  And they would lead to the most unpredictable consequences.  For a large part of the progressive West, this may sound wild.  Yet for Russia, it is a matter of national security.

 

It is important to understand that Russia is not limited to Moscow or Saint Petersburg.  These cities, like any major megalopolises, are centers of the dominance of progressive and liberal ideas.  No one will argue with the fact that the United States does not begin and end in New York and California; there are also Texas, Tennessee, Utah, and other states.  The victory of Donald Trump vividly demonstrated that it was conditional Texas and Kentucky that were the heart of America, not Massachusetts and Rhode Island.  The situation is similar in Russia: Putin is guided by the mood of the regional majority, not the liberal minority of the capital.  There are a lot of sensitive problems, and any Russian ruler has to maintain internal balance in order to keep the country's physical integrity.  This is an extremely difficult task.  At certain periods of time, Emperor Nicholas II, and then the last general secretary of the Central Committee of the CPSU, Mikhail Gorbachev, did not cope with this task.  This resulted in the collapse of the Russian Empire and the USSR, respectively.  Thus, the essence of Sovereign or National Democracy is in a banal formula: everything has its time.  In other words, Putinism advocates an evolutionary rather than a revolutionary model of development.

The next crucial element is the inviolability of the mission to maintain territorial integrity.  Why is this so important to Putin?  The answer lies in the dynamics of extension and contraction of Russian territory.  The Russian Empire was the third-largest ever-existing country after the British and Mongol Empires.  It included the Baltic states, part of Poland, Bessarabia, Finland.  Replacing the Empire, the Soviet Union became smaller, losing control of many territorial units.  Then the collapse of the USSR led to the formation of 15 independent republics.  Moreover, centrifugal processes were observed inside independent Russia in the '90s: two Chechen wars, separatist sentiments in Tatarstan, Siberia, and the Far East.  Given this, Moscow has to be sensitive to any threats to territorial integrity because the next collapse will actually mean the end of Russian history.  Based on this, the policy of territorial expansion (or "gathering lands") has strategic importance for Russia.

Most of the countries that were part of the Russian Empire and the Soviet Union performed two significant functions.  The first is an external security function — pushing the borders of the Empire along the entire perimeter, which was of fundamental importance while conducting defensive wars.  It is difficult to imagine how the results of the military campaigns of Napoléon Bonaparte in 1812 and Hitler's Germany in 1941–1945 would have developed without the factor of "deep borders."  The second is the internal defense or controlled decay function.  With the collapse of the Empire, countries located on the periphery and semi-periphery leave, and the core is retained — Russia itself with its internal subjects.

From here follows the next point of the concept of Putinism — returning the post-Soviet space to the sphere of strategic dominance of Moscow.  To achieve this goal, it is important for President Putin to solve two tasks: to provide closer geopolitical integration of Belarus with Russia and to develop high-quality mechanisms of influence on Ukraine.  The Russian leader is deeply convinced that Russians, Ukrainians, and Belarusians comprise a unified nation that should be gathered under the leadership of the Kremlin sooner or later.  This is how it was in the imperial and Soviet periods.  The third task is to prevent the entry of traditional post-Soviet countries (the Baltic countries are not considered) into the North Atlantic Alliance.

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In global politics, Putin sees his mission in revising the results of the Cold War.  He is convinced that the collapse of the Soviet Union was due to the weakening of the center's influence, the indecisiveness of the authorities and the internal intrigues of hostile agents of influence.  Putinism rejects any idea that Russia lost to the United States and should now forget about its geopolitical ambitions.  At the same time, being a pragmatist, Putin realizes that today Moscow does not have sufficient resources to claim world domination.  It is important for the Russian leader that the most powerful actors in the international community develop clear rules for the game.  For Putin, the ideal model combines past systems.  The basis should be sovereignty and the principle of non-interference in each other's internal affairs (Westphalian system), the balance of power (Vienna system), and separation of responsibilities (Yalta and Potsdam system).  From the standpoint of Putinism concept, such an architecture will return Russia the status of great power and force the rest of the countries to reckon with its opinion and interests.

The fundamental feature of the new ideology is that Russia does not regard the West as its enemy.  Moscow sees a certain way of the civilizational and political future of Europe where neoliberal philosophy has set the tone for the past twenty years.  Today, other trends are visible.  One of them is the strengthening of the right-wing conservative powers: Boris Johnson in Britain, the regime of Viktor Orbán in Hungary, the party of Sebastian Kurz in Austria, Euroskepticism in Italy, France, Greece, and Germany.  The basic request of the new generation of European politicians can be described simply: more sovereignty, less dependence.  Even leaders such as Emmanuel Macron state the need for an independent European security system.  This is exactly what Russia wants to see in Europe.  It is important for Putin that Europeans rely solely on their pragmatic interests in building a political and economic dialogue with Moscow.  This narrative is becoming more and more popular in the Old World.

Areg Galstyan, Ph.D. is a regular contributor to The National Interest, Forbes, and The American Thinker.

samedi, 26 octobre 2019

Moyen-Orient. Que contient le mémorandum d'accord Erdogan-Poutine ?

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Moyen-Orient. Que contient le mémorandum d'accord Erdogan-Poutine ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce mémorandum a été signé par les deux présidents lors de leur rencontre à Sotchi le 21 octobre. Son contenu vient d'être rendu public.

La rencontre a duré 7 heures, ce qui est considérable compte tenu du temps disponible pour les chefs d'Etat. A la fin de la rencontre ils ont signé un mémorandum conjoint dont le contenu est désormais connu. Dans ce document Recep Erdogan et Vladimir Poutine confirment leur plein accord à la nécessité de conserver l'unité politique et l'intégrité du territoire de la Syrie sous la présidence de Bashar al Assad, ainsi que leur volonté de conserver la sécurité au sein de la République turque.

Sur ce dernier point, ils ont confirmé leur détermination à combattre le terrorisme islamique et à ne pas accepter les prétentions de séparatistes visant à démembrer le territoire turc. Par le terme de séparatiste, ils désignent en particulier les mouvements kurdes visant à reconstituer un grand Kurdistan qui engloberait notamment le Kurdistan turc. 

Ils ont également assuré que le contrôle désormais assuré par la Turquie après son offensive militaire des derniers jours sur un couloir dit de sécurité long de 120 km et large de 32 située sur le territoire syrien ne sera pas remis en question. Il inclut les agglomérations de Tel Abyad et Ras Al Ayn. Ceci signifie concrètement que l'armée turque n'opérera plus désormais en dehors de cette zone. En revanche, la police militaire russe et les gardes-frontières syriens veilleront à ce que les unités militaires kurdes dites People's Protection Units (YPG) s'éloignent d'au moins 30 km de la bordure sud du couloir de sécurité. C

Ceci fait, fin octobre prochain, la zone sera contrôlée conjointement par des unités militaires russes et turques. Cependant, l'armée syrienne pour sa part conservera le contrôle des villes de Qamishly, Manbij et Tal Rifat.

Le mémorandum fait aussi des préconisations concernant la facilitation du retour des réfugiés ayant fui cette zone et la détection des terroristes pouvant s'y infiltrer, ainsi que ceux se trouvant dans des prisons kurdes au nord-est de la Syrie qui retrouveront la liberté. Selon certaines sources, ces terroristes mêlés de divers criminels pourraient être plus de 15.000. La plupart sont détenus dans les prisons kurdes de Shaddali, Hasakah et Allya. Ils se sont livrés à de nombreux crimes tels que décapiter les femmes kurdes et éventrer leurs enfants. Les Kurdes voudraient qu'ils soient jugés et punis en conséquence. Or le retrait précipité des YPG ne facilitera pas cette tâche, que les Russes n'auront certainement pas pour le moment les moyens de reprendre à leur compte. Le ministre de la défense russe Sergey Shoigu vient cependant de souligner l'importance de ce problème, ceci d'autant plus que ces terroristes proviennent de Russie et de divers pays européens et ne manqueront pas d'y retourner si leurs gardiens kurdes sont obligés d'abandonner leurs postes. rien n'est fait pour les en empêcher.

Lors de leur rencontre à Sotchi, ni Recep Erdogan ni Vladimir Poutine n'ont examiné ces questions essentielles à la sécurité de la région. Ils n'ont pas non plus abordé la question des 12.000 réfugiés vivant actuellement dans des camps dans les provinces de Al-Hasakah and Deir Ez-Zor. Certains de ces camps sont de très grande taille. Des dizaines de milliers de femmes, enfants et vieillards y vivent dans des conditions très précaires, manquant d'eau, de nourriture et de médicaments. Les maladies infectieuses s'y multiplient, notamment l'hépatite, les troubles intestinaux et la tuberculose. Nul parmi les ONG occidentales si promptes à dénoncer les atteintes aux droits de l'homme de Bashar al Assad n'évoque ces questions.

Un autre point n'a pas été abordé, malgré son importance. Il concerne le fait que les Américains, en dépit de leur retrait progressif de la région, conservent des contingents militaires importants pour protéger les gisements de pétrole appartenant aux compagnies pétrolières américaines ou convoités par elles. La récente rencontre du vice-président américain Mike Pence et de Recep Tayyip Erdogan à Ankara n'avait pas, comme l'on pouvait s'en douter, abordé cette question. La plupart des observateurs neutres constatent que les Américains ne sont pas venus au moyen orient en Iran pour combattre les djihadistes. Ils les auraient au contraire le plus souvent approvisionnés en armes et vivres. Ils sont venus pour y défendre leurs intérêts pétroliers. On imagine mal aujourd'hui qu'ils puissent cesser de le faire.

On notera que la Turquie, bien que membre de l'Otan et à cet égard alliée des Etats-Unis, confirme son statut d'allié de fait de la Russie. Washington laisse faire, compte tenu sans doute de l'importance géopolitique de ce pays;

Note au 26/10

On nous écrit: En France, un certain nombre de mouvements musulmans dits salafistes, c'est-à-dire encorageant le terrorisme, sont soutenus par le gouvernement turc. Beaucoup de mosquées sont directement fiancées par le Qatar, l'Arabie Saoudite, l'Algérie ou le Maroc. Nous sommes la proie d'un certain nombre de puissances étrangères qui veulent s'emparer de la France.

lundi, 18 mars 2019

Les sources philosophiques de Vladimir Poutine

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Les sources philosophiques de Vladimir Poutine

 
Par Xavier Moreau
commentaires ouverts sur ► http://stratpol.com/philosophie-poutine
 

jeudi, 12 juillet 2018

Sommet de l’OTAN et sommet Trump/Poutine : que faut-il en penser ?

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Sommet de l’OTAN et sommet Trump/Poutine : que faut-il en penser ?

Par Robert Steuckers

Script de l'entretien d'aujourd'hui, 11 juillet 2018, accordé à Channel 5 (Moscou), sous la houlette d'Alexandra Lusnikova

Le sommet de l’OTAN qui se tient aujourd’hui, 11 juillet 2018, et se poursuivra demain à Bruxelles, aura pour point principal à son ordre du jour la volonté affichée par Donald Trump d’obtenir de ses partenaires, plutôt de ses vassaux, européens ce qu’il appelle un « Fair Share », c’est-à-dire une participation financière accrue des petites puissances européennes dans le budget de l’OTAN. Pour Trump, les pays européens consacrent trop d’argent au « welfare » et pas assez à leurs armées. C’est une antienne que l’on entend depuis belle lurette de la part de tous les ténors américains de l’atlantisme. Ceux-ci veulent que tous les pays européens consacrent au moins 2% de leur PNB à la chose militaire. Les Etats-Unis, engagés sur de multiples fronts de belligérance, consacrent 3,58% de leur PIB à leurs dépenses militaires. En Europe, la Grèce (qui craint surtout son voisin turc et doit sécuriser les îles de l’archipel égéen), le Royaume-Uni, la Pologne, l’Estonie et la Roumanie dépassent ces 2% exigés par Trump. La France consacre 1,79% à ses forces armées ; l’Allemagne 1,22%. Evidemment, ces 1,22% du PIB allemand sont largement supérieurs aux 2% consacrés par des pays moins riches. Malgré les 3,58% dépensés par les Etats-Unis,  précisons toutefois que ce budget, certes énorme, est en constante diminution depuis quelques années.

L’exigence américaine se heurte à plusieurs réalités : d’abord, les Etats-Unis ont sans cesse, depuis la création de l’OTAN, empêché les pays européens de développer leurs aviations militaires, en mettant des bâtons dans les roues de Dassault, de Saab, de Fiat, etc. et en interdisant la renaissance des usines aéronautiques allemandes. Si l’Europe avait reçu de son « suzerain » le droit de développer ses propres usines aéronautiques, ses budgets militaires, même réduits en apparence, auraient permis de consolider sérieusement ses armées, tout en créant des emplois de qualité sur le marché du travail ; ensuite, certains chiffres parlent pour eux-mêmes : si l’on additionne les budgets militaires des principales puissances européennes de l’OTAN (Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Espagne), ceux-ci dépassent de loin le budget de la Russie, posée comme « ennemi majeur ». Le bugdet de l’OTAN, Etats-Unis compris, est donc pharamineux.

Bon nombre de voix estiment que cette problématique de « Fair Share » est le rideau de fumée qui masque le problème réel: celui de la guerre commerciale larvée entre l’Europe et les Etats-Unis. Le but réel de Trump et du « Deep State » américain est de réduire les importations européennes (et chinoises) vers les Etats-Unis. Le but de Trump, louable pour un Président des Etats-Unis, est de remettre l’industrie américaine sur pied, de manière à débarrasser la société américaine des affres qu’a laissées la désindustrialisation du pays. Pour Trump, mais aussi pour ses prédécesseurs, l’UE imposerait des barrières, en dépit de ses crédos néolibéraux, qui empêcheraient les Etats-Unis d’exporter sans freins leurs produits finis en Europe, comme ils le faisaient dans les deux décennies qui ont immédiatement suivi la seconde guerre mondiale. L’UE est un problème pour l’élite financière américaine, tout simplement parce qu’elle est largement (bien qu’incomplètement) autarcique. Trump estime que, dans les relations commerciales bilatérales, les pertes américaines, par manque à gagner, s'élèveraient à 151 milliards de dollars. Le déficit commercial entre l’UE et les Etats-Unis serait actuellement de 91 milliards de dollars, au détriment de Washington.

Autre point à l’agenda : les efforts qui vont devoir, selon l’OTAN, être déployés pour que la Géorgie puisse adhérer le plus rapidement possible à l’Alliance Atlantique. Dans l’ordre du jour du sommet d’aujourd’hui et de demain, ici à Bruxelles, la question géorgienne est évidemment le thème le plus intéressant à analyser. La stratégie habituelle des puissances maritimes, l’Angleterre au 19ième siècle et puis les Etats-Unis qui prennent son relais, est de contrôler les bras de mer ou les mers intérieures qui s’enfoncent le plus profondément à l’intérieur de la masse continentale eurasienne et africaine. L’historien des stratégies navales anglaises depuis le 17ième siècle, l’Amiral américain Mahan, s’intéressait déjà à la maîtrise de la Méditerranée où l’US Navy avait commis sa première intervention contre les pirates de Tripolitaine à la fin du 18ième siècle. Halford John Mackinder retrace aussi, dans ses principaux traités de géopolitique, l’histoire de la maîtrise anglaise de la Méditerranée. Dans le cadre des accords Sykes-Picot et de la Déclaration Balfour, les Anglais protestants, en imaginant être un « peuple biblique », accordent, contre l’avis de leurs compatriotes et contemporains conservateurs, un foyer en Palestine pour les émigrants de confession mosaïque. Le but, que reconnaissait pleinement le penseur sioniste Max Nordau, était de faire de cette entité juive la gardienne surarmée du Canal de Suez au bénéfice de l’Empire britannique et de créer un Etat-tampon entre l’Egypte et l’actuelle Turquie afin que l’Empire ottoman ne se ressoude jamais. Les guerres récentes dans le Golfe Persique participent d’une même stratégie de contrôle des mers intérieures. Aujourd’hui, les événements d’Ukraine et la volonté d’inclure la Géorgie dans le dispositif de l’OTAN, visent à parachever l’œuvre de Sykes et de Balfour en installant, cette fois au fond de la Mer Noire, un Etat, militairement consolidé, à la disposition des thalassocraties. Le fond du Golfe Persique, le fond de la Méditerranée et le fond de la Mer Noire seraient ainsi tous contrôlés au bénéfice de la politique globale atlantiste, contrôle qui serait encore renforcé par quelques nouvelles bases dans la Caspienne. Je pense vraiment que ce point à l’ordre du jour est bien plus important que les débats autour du « Fair Share » et de la balance commerciale déficitaire des Etats-Unis.

Le sommet Trump-Poutine

D’après maints observateurs, le sommet prochain entre Trump et Poutine à Helsinki en Finlande aurait pour objet principal de laisser la Syrie à la Russie, après les succès de l’armée régulière syrienne sur le terrain. Reste à savoir si la Syrie, laissée à Assad, sera une Syrie tronquée ou une Syrie entière, dans ses frontières d’avant l’horrible guerre civile qu’elle a subi depuis 2011. L’objectif des Etats-Unis et d’Israël semble être de vouloir tenir l’Iran, et son satellite le Hizbollah, hors de Syrie. Poutine, apparemment, y consentirai et offre d’ores et déjà une alternative à l’Iran qui, depuis les premiers empires perses de l’antiquité, souhaite obtenir une façade sur la Méditerranée, directement ou indirectement par tribus ou mouvements religieux interposés. Poutine offre à l’Iran la possibilité d’emprunter une voie par la Caspienne (d’où l’intérêt récent des Américains à avoir des bases dans cette mer intérieure et fermée), la Volga, le Canal Volga/Don, le Don (par Rostov), la Mer d’Azov, l’isthme de Crimée et la Mer Noire. L’Iran préfère évidemment la voie directe vers la Méditerranée, celle qui passe par la Syrie et la partie chiite de l’Irak. Mais si l’Iran doit renoncer à son fer de lance qu’est le Hizbollah, les Etats-Unis devraient renoncer, en toute réciprocité, à soutenir des mouvements protestataires, souvent farfelus, en Iran.

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Deuxième condition, pour que l’éviction hors de Syrie de l’Iran soit crédible, il faudrait aussi expurger définitivement la Syrie de toutes les séquelles du djihadisme salafiste ou wahhabite. Or, on observe, ces derniers mois, que ces forces djihadistes sont alimentés voire instruites au départ de la base américaine d’al-Tanf sur la frontière syro-irakienne. Question à l’ordre du jour : les Etats-Unis vont-ils quitter cette base terrestre entre la Méditerranée et le Golfe Persique ou y rester, en tolérant des poches de résistance djihadiste qu’ils alimenteront au gré de leurs intérêts ?

L’objectif des Russes, dans le cadre syrien, est de sauver la viabilité économique du pays, de rouvrir les grands axes de communication et de soustraire définitivement ceux-ci à toute forme de guerre de basse intensité (low intensity warfare), à toute stratégie lawrencienne modernisée. Pour y parvenir, Poutine et Lavrov suggèreront sans nul doute le rétablissement d’une Syrie souveraine dans ses frontières de 2011, ce qui implique de purger le pays de toutes les formes de djihadisme, portées par les « Frères Musulmans » ou par Daesh et de prier la Turquie d’évacuer les zones qu’elle occupe au Nord du pays, le long de sa frontière. Le Hizbollah, lui, a toujours promis d’évacuer les territoires syriens où il est présent, dès que les forces djihadistes sunnito-wahhabites en auront été éliminées.

Force est de constater que le projet russe correspond certes aux intérêts traditionnels de la Russie, tsariste, soviétique ou poutinienne, mais aussi aux intérêts des puissances ouest-européennes comme la France et l’Italie et même à une puissance germano-centrée ou austro-centrée qui aurait retrouvé sa pleine souveraineté dans le centre de la presqu’île européenne.

Le volet géorgien du sommet de l’OTAN et les futurs échanges sur la Syrie et la présence iranienne en Syrie, entre Trump et Poutine, me paraissent les enjeux les plus intéressants de l’actualité qui se fait et se fera, aujourd’hui et demain, ici à Bruxelles.

Robert Steuckers, Bruxelles, 11 juillet 2018.

vendredi, 16 mars 2018

Theresa May et la guerre contre la Russie

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Theresa May et la guerre contre la Russie

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Un jour après avoir publié un article qui apparaît aujourd'hui optimiste jusqu'à l'aveuglement, Le combat sans issue ni gloire de Theresa May, nous sommes obligés de revenir à plus de réalisme.

ttp://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=2953&...

D'une part, ce n'est pas de son seul chef que Theresa May exploite un attentat très vraisemblablement commis par les services secrets britanniques ou la CIA pour justifier une accélération de la guerre visant à détruire la Russie. Derrière elle en effet se tient la totalité du parti belliciste américain, complexe militaro industriel, Pentagone, CIA, qui n'existent que parce que la préparation de cette guerre justifie leur existence et leurs revenus.

D'autre part les gouvernements européens, loin de prendre leur distance avec ce montage, se hâtent de suivre Theresa May dans cette offensive contre la Russie. Ainsi Emmanuel Macron annonce-t-il le 15 mars qu'il ferait connaître « dans les prochains jours » les mesures qu'il compte prendre dans l'affaire de l'ex-espion russe empoisonné en Angleterre https://www.lesechos.fr/monde/europe/0301441854252-ex-esp...

Va-t-il lui aussi expulser des diplomates russes, faire fermer les comptes des entreprises russes en France, voire, pourquoi pas, annoncer des « mesures militaires » qui n'auraient évidemment aucun sens, sauf à prendre directement ses ordres au Pentagone? Il est très prévisible que Angela Merkel tiendra prochainement les mêmes propos.

Tout ceci montre que l'on se fait des illusions en ne prenant pas très au sérieux la préparation d'une guerre destinée à détruire la Russie, guerre que Washington prépare de plus en plus activement. Cette guerre pourrait ne pas dégénérer en conflit nucléaire si la Russie était par des frappes préventives sur les centres nerveux de sa défense désarmée très rapidement. Un article très récemment publié par des experts militaires américains détaille les nombreuses façons dont ceci pourrait être fait, en utilisant notamment la guerre électronique et spatiale. Voir Averting the US-Russia Warpath https://www.strategic-culture.org/news/2018/02/25/avertin...   traduction française http://lesakerfrancophone.fr/usa-russie-la-guerre-est-ell...

Pour le chroniqueur politique pacifiste américain très reconnu, Paul Craig Roberts, cette guerre paraît désormais inévitable, du fait de l'acharnement du complexe militaro-industriel américain, relayé désormais par la nomination de l'ancien directeur de la CIA comme Secrétaire d'Etat. L'auteur considère que la trop grande tolérance de Moscou à l'égard des initiatives bellicistes américaines en sera en partie responsable. Voir par exemple daté du 13 mars https://www.paulcraigroberts.org/2018/03/13/world-war-3-a...

Faut-il craindre que Washington ne lance très rapidement cette guerre, avant que la Russie ait mis en place et testé les armements révolutionnaires annoncés par Vladimir Poutine le 1er mars. Répondre par la négative serait à nouveau faire preuve d'un optimisme allant jusqu'à l'aveuglement;

Note

* Sur le novichok, voir 
L'histoire du novichok est une autre escroquerie du calibre des ADM de l'Irak
http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=22971

* Sur le fond de l'affaire, voir une analyse beaucoup plus approfondie de Stratediplo
La virulence des hostilités déclenchées par le Royaume-Uni contre la Russie semble dépasser l'entendement rationnel.
http://stratediplo.blogspot.fr/

 

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Le combat sans issue ni gloire de Theresa May

par Jean-Paul Baquiast

L'ultimatum lancé par la Première Ministre britannique Theresa May à la Russie est en train de tourner court. Mardi 12 à minuit, date au plus tard à laquelle Theresa May avait sommé la Russie de se disculper de sa prétendue responsabilité dans l'empoisonnement de Sergueï et Yulia Skripal, rien n'avait bougé. Sans surprise, la Russie n'a pas obéi aux injonctions du gouvernement britannique et a refusé de se justifier de l'accusation d'avoir fomenté cet attentat.

A Moscou, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, avait, dans la journée de mardi, catégoriquement refusé de collaborer à l'enquête, à moins que le Royaume-Uni ne lui transmette un échantillon de l'agent innervant pour «que nos experts l'analysent». Celui-ci n'avait évidemment pas rassemblé de preuves crédibles et n'a donc pas pu répondre à la demande de Moscou.

En conséquence de quoi Theresa May se prépare à annoncer une série de sanctions sur le plan domestique : expulsion de plusieurs des cinquante-huit diplomates russes présents à Londres, gel d'avoirs russes et interdiction de voyager pour certains individus. La Première ministre a également évoqué une cyber-attaque ou la remise en cause de la licence d'exploitation au Royaume-Uni de certains médias russes, comme la chaîne de télévision Russia Today. Le boycott de la coupe du monde de football prévue cet été en Russie a même été évoqué. On est loin des menaces d'intervention militaire contre la Russie dont Theresa May espérait voir ses alliés de l'Otan prendre le relais.

Bien évidemment la Russie n'a pas été impressionnée par ces représailles, qui sont monnaie courante dans les affrontements diplomatiques. Toute la journée du mardi, l'ambassade russe à Londres avait émis des messages ironiques, assortis de menaces de représailles de même nature.

 «L'ambassade a officiellement demandé des explications au Foreign Office sur les menaces de cyberattaques entendues au Parlement et dans les médias. La Russie prend très au sérieux les attaques contre sa cybersécurité». «Toute menace de mesures "punitives" contre la Russie recevra une réponse. La partie britannique devrait être consciente de cela».

Les autres gouvernements européens, notamment Emmanuel Macron en France dont Theresa May attendait un soutien enthousiaste, sont restés assez froids. Tout en assurant Londres de leur entière solidarité, ils ont dit eux aussi qu'ils attendaient davantage de preuves avant de s'engager dans des mesures punitives à l'encontre de la Russie . Ceux-ci en effet ruineraient leurs efforts pour reprendre avec ce pays des relations, sinon diplomatiques, du moins économiques, normales.

On peut penser que les membres de l'Union européenne ne sont pas fâchées de voir Theresa May s'embourber dans un imbroglio diplomatique. Elle aurait été plus écoutée, murmure-t-on, si la Grande Bretagne avec le Brexit n'avait pas manifesté sa volonté de faire cavalier seul.

Theresa May, qui suscite de plus en plus de critiques au regard de son incapacité à faire avancer les négociations de sortie, espérait retrouver une pleine légitimité européenne en prenant la tête d'une coalition des Etats-membres destinée à punir la Russie de sa « responsabilité » dans l'affaire de l'empoisonnement. Pour le moment elle en est pour ses frais.

Note
Sur ce sujet, voir un commentaire de la Moon of Alabama
http://www.moonofalabama.org/2018/03/theresa-mays-45-minu...

mardi, 11 octobre 2016

Alep. La France doit-elle compromettre définitivement ses relations avec la Russie?

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Alep. La France doit-elle compromettre définitivement ses relations avec la Russie?

par Jean Paul Baquiast
Ex: http://www.europesolidaire.eu
 
Malgré les objurgations de Jean-Marc Ayrault, devant le Conseil de Sécurité puis depuis dans tous les médias, selon lesquelles il faut radicalement condamner l'action russe à Alep, en soutien de l'offensive du régime contre les forces islamistes qui tiennent encore certains quartiers, l'on peut difficilement soutenir la position française.

Nous l'avons plusieurs fois montré, renoncer à évincer, pour des prétextes dits humanitaires, les djihadistes d'Alep signifierait dans l'immédiat une chute de Bashar al Assad et très vite ensuite l'éviction des Russes de leur bases en Syrie. Ceci est inenvisageable par Vladimir Poutine, au moment où il est en voie de rendre ces bases, notamment celle de Tartous, permanentes.

On peut se demander pourquoi la France, au plus haut niveau, continue à soutenir une exigence que même les Etats-Unis se trouvent obligés d'accepter. Un des arguments présentés est que détruire l'occupation par l'Etat islamique des zones qu'il contrôle à Alep reviendrait à libérer pour des actions terroristes en Europe les quelques centaines de « terroristes modérés » qu'il y entretient. Mais il en sera de même de la prise de Mossoul recherchée par la coalition américaine dont la France, avec ses Rafales, fait partie. Il en sera de même, plus généralement, de l'éviction des djihadistes de toute la Syrie, objectif auquel adhère la France, si l'on a bien compris;

Se protéger du terrorisme en France supposera des méthodes plus énergiques que celle consistant à en laisser quelques éléments prospérer à Alep. Ceci d'autant plus que ce terrorisme islamique apparaît comme de plus en plus endogène, en provenance de certaines banlieues et qu'il est par ailleurs lié à un narco-trafic devant lequel la République semble avoir définitivement capitulé. Ceci au grand découragement de la police qui y laissera de plus en plus de morts.

François Hollande prend actuellement le risque de rompre toute relations avec Vladimir Poutine, en refusant à propos d'Alep de le recevoir en France. Il ferait mieux de l'inviter officiellement à l'Elysée afin d'envisager en détail les actions communes à mener contre un terrorisme islamique et mafieux qui menace les deux pays.


vendredi, 23 septembre 2016

A propos des élections législatives russes

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Victoire de Putinus Augustus

A propos des élections législatives russes

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Le dépouillement s’étant arrêté à 99,5% des suffrages, mon analyse reposera sur ces chiffres provisoires, mais les chiffres définitifs ne devraient de toute façon différer que de manière extrêmement marginale. Le nombre d’élus de chaque parti est également connu.

united-russia.jpgAvec 54,2% des voix environ, le parti Russie Unie de Poutine et Medvedev s’impose largement, bien davantage que ce que prévoyaient les sondages, y compris ceux sortis des urnes, où le mouvement était plutôt annoncé aux alentours de 43% environ, alors qu’il est de dix points supérieurs au final. Cela alimentera toutes les spéculations, non sans raison, mais n’oublions pas qu’à l’époque d’Eltsine, les USA ne s’offusquaient pas de méthodes démocratiquement « particulières » lorsqu’il s’agissait de s’opposer aux communistes. Russie Unie obtient également 72% de la douma et 343 sièges, écrasant de tout son poids les trois formations politiques qui ont réussi à passer la barre fatidique nécessaire pour obtenir un groupe parlementaire.

Avec 13,4% et 13,2%, communistes du KPFR (Ziouganov) et nationalistes du LPDR (Jirinovski), deux formations qui existent au moins depuis 1993, les partis de l’opposition légale sont largement marginalisés. Les premiers obtiennent 42 sièges et les seconds 39 sièges. Ils auront chacun leur groupe parlementaire mais dont le poids ne sera pas déterminant pour influencer les grandes orientations décidées par Poutine. Enfin « Russie Juste », une sorte de sociale-démocratie à la russe, obtient 6,2% des voix et 23 sièges. Ces trois partis perdent en tout 108 sièges, diminuant en conséquence leurs moyens.

Les autres mouvements politiques sont très modestes. Yabloko, « La Pomme », un mouvement de centre-droit, n’obtient que 2% des voix, de même que le mouvement Parnas (0,73%), les Verts (0,76%), le Parti de la Croissance (1,29%) ou encore le Parti des Retraités pour la Justice (1,74%). L’extrême-gauche (« Communistes de Russie ») résiste mieux avec 2,3% des voix.

L’opposition modérée, patriote et/ou nationaliste, est également très affaiblie. Rodina, qui a perdu toutes ses figures marquantes, dont Rogozine et Glaziev, n’obtient qu’1,5% des voix, et encore faut-il préciser que ce mouvement est « poutinien » de fait. Patriotes de Russie obtiennent 0,59%.

Vladimir Poutine a donc largement gagné ces élections, une fois de plus, comme depuis 2000, et a même renforcé sa puissance politique, réduisant l’opposition modérée à une portion congrue, même si les communistes résistent encore, alors que certains sondages les annonçaient à 8% des voix.

La démocratie autoritaire mise en place par Poutine après l’effondrement du pays sous Eltsine ne se cache plus. Physiquement Poutine ressemble de plus en plus à Octavien, plus connu sous son nom d’Auguste. Tout comme Octavien paraissait bien timide lorsqu’il hérita de César, ce qui abusa Antoine, Poutine était un inconnu lorsqu’Eltsine le nomma premier ministre puis le choisit comme héritier politique après avoir décidé de démissionner. Il s’est révélé petit à petit à la tête du pays comme une personnalité hors norme, qui suscite à la fois crainte et respect. Son nom même peut lui paraître prédestiné.

En effet son prénom Vladimir signifie « maître du monde » ou « garant de la paix » et son nom Poutine signifie « l’homme du chemin », donc « celui qui indique le chemin ». En outre Vladimir Ier le Soleil Rouge fut le fondateur de la Rus’ de Kiev, dont la Russie est héritière au même titre que l’Ukraine, et le premier prince chrétien des Slaves de l’Est, converti en 988. Poutine dirige la Russie depuis plus de quinze ans sans discontinuité, ayant simplement laissé à son poulain Medvedev, un « homme-ours » là encore prédestiné par son nom même, un mandat présidentiel de transition.

Tout comme Octavien/Auguste, il œuvre sans relâche à la renaissance de la Russie et à son retour sur la scène internationale, à tout prix, même s’il subit des sanctions économiques de l’Occident en raison de son action supposée en Ukraine et notamment de l’annexion de la Crimée. Poutine a neutralisé les véléités séparatistes des Tchétchènes au prix d’une alliance avec Ramzan Kadyrov, qui tient cette région d’une main de fer et d’une bien insupportable main verte, qui plus est. Il a neutralisé le rapprochement de la Géorgie, de l’Ukraine et de la Moldavie en faveur de l’OTAN, et aussi en conséquence vis-à-vis de l’Union Européenne. C’est aussi pour cela que Poutine reste si populaire dans une Russie gardant la tête haute.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

samedi, 18 juin 2016

Poutine vs l’Occident. Un conflit essentiellement idéologique ?

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Poutine vs l’Occident. Un conflit essentiellement idéologique ?

Ex: http://www.breizh-info.com

L’opposition actuelle entre l’Occident (USA/Union européenne) et la Russie de Vladimir Poutine est autant, sinon plus, de nature idéologique que politique et géopolitique. Telle est la thèse développée par Mathieu Slama dans son remarquable essai La guerre des mondes – réflexion sur la croisade idéologique de Poutine contre l’Occident (Ed. de Fallois). Mathieu Slama intervient de façon régulière dans les médias sur les questions de politique internationale. Un des premiers en France à avoir décrypté la propagande de l’État islamique, il a publié plusieurs articles sur la stratégie de Poutine vis-à-vis de l’Europe et de l’Occident.

Entre Poutine et l’Europe, affirme Slama, ce sont deux conceptions, deux grammaires du monde et de l’homme – antagonistes et irréconciliables – qui s’opposent. Cet antagonisme a remplacé celui qui opposait l’Est à l’Ouest, et de façon plus radicale que celui qui opposait le communisme et la démocratie libérale, « car ces deux modèles partageaient une même vision matérialiste de l’homme, congédiant dans un même mouvement Dieu et la tradition, l’un au nom de l’égalité, l’autre au nom de la liberté. »

Quels sont les fondements de cette opposition radicale ? C’est chez l’intellectuel russe Alexandre Douguine,  nous dit Slama, que se trouve une partie de la réponse quand il écrit que « l’eurasisme est une vision du  monde qui se base sur la multipolarité. Nous rejetons l’universalisme du modèle occidental, protestons contre le racisme culturel européen et affirmons la pluralité des civilisations et des cultures. Pour nous, les droits de l’homme, la démocratie libérale, le libéralisme économique et le capitalisme sont seulement des valeurs occidentales. »

Mais plus que de Douguine, la doxa développée par Poutine procède pour l’essentiel de l’oeuvre d’Alexandre Soljenitsyne. « Des millions de gens dans le monde lient le nom et les œuvres d’Alexandre Soljenitsyne au sort de la Russie elle-même. Comme il l’a dit lui-même : la Russie, c’est nous-mêmes. Nous sommes sa chair et son  sang, son peuple. », dira Poutine lors de la remise du prix d’État à l’écrivain en 2007. L’Occident oublieux de ses racines chrétiennes, l’Occident matérialiste qui sacralise l’individu : ces thèmes chers à l’auteur de L’Archipel du Goulag, Poutine les a en effet fait siens.

VLADIMIR_PUTIN_AND_FRIENDS_KGB-CAREER_BY_ACHILLE_ZIBI_MAIN_BNR_01.jpgC’est à partir de 2012, à l’occasion de son second mandat, que Poutine a exprimé de façon aboutie et cohérente son conservatisme. Tout en précisant que  « nul ne peut dire, à l’écoute de Vladimir Poutine, ce qui relève de la sincérité ou de l’hypocrisie – voire du mensonge et de la propagande. », Mathieu Slama  observe que  « le discours de Poutine correspond aussi à un état d’esprit majoritaire en Russie, voire dans l’ensemble du monde non-occidental. Autrement dit, fut-il insincère, ce discours révèle une vérité irréductible à l’honnêteté ou non de celui qui le prononce. »

A l’universalisme sans frontières, à l’individualisme exacerbé, au refus de l’identité qui fondent la doxa de l’Union européenne, Poutine défend un type de société traditionnelle, qui prend ses sources dans l’histoire de la Russie et dans sa culture. Slama rappelle que l’hôte du Kremlin refuse l’assujettissement de la souveraineté nationale à « des règles de droit universelles qui font de chaque individu le membre d’une même humanité » énoncées au nom des droits de l’homme. Contrairement à ce qu’a affirmé à Moscou François Hollande – « Nous avons en commun une vision du monde » – la vision de Poutine se situe bien à l’opposé de celle du président français.

Cela explique, au passage, la hargne avec laquelle les médias occidentaux traitent Vladimir Poutine. « Dictateur », « tyran », « tricheur », « assassin », « voleur » etc., les qualificatifs attribués au président russe ne manquent pas. Jamais les hôtes du Kremlin durant la période de l’URSS n’ont été traités avec autant d’hostilité.

Et pourtant, malgré cela, Poutine semble rencontrer une audience croissante auprès de plus en plus d’Européens. La raison ? Pour Slama, « l’homme européen, confronté à ce qu’Heidegger appelait la fuite des  dieux vit une citoyenneté libre et émancipée mais pauvre en monde. (…) Seuls comptent dans la société technologique, le présent et l’avenir. Mais quel avenir ? (…) Confrontées  à la machinerie sans âme de l’Union européenne et à la dislocation de leur souveraineté, menacées en leur sein de ruptures culturelles sans précédent, les nations européennes naviguent à vue, reléguées derrière la grande puissance américaine, la Russie et les grandes nations émergentes. »

Finalement ce n’est pas tant la réussite du modèle poutinien qui fascine de plus en plus d’Européens mais le délitement du modèle occidental qu’il met par contraste en lumière. « Nous intéresser à ce que dit Poutine, c’est aussi nous confronter à nos propres errance et renoncements », prévient l’auteur. Car, rappelle-t-il, «la nation, en Europe n’existe plus que dans son rapport à l’universel et au droit et, par conséquent, c’est la question même de sa survie qui est posée.». Tout est dit.

PLG

La guerre des mondes – réflexion sur la croisade idéologique de Poutine contre l’Occident, Mathieu Slama, Editions de Fallois, 125 pages, 16€

lundi, 06 juin 2016

Turquie musulmane ou Russie chrétienne: l’heure du choix pour l’UE et l’OTAN

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Turquie musulmane ou Russie chrétienne: l’heure du choix pour l’UE et l’OTAN

par Roland Desjardins
Ex: http://www.lesobservateurs.ch

Résumé :

La politique étrangère américaine, centrée depuis la guerre froide sur une hostilité envers la Russie et une alliance contre-nature avec le monde musulman pour nuire à Moscou, se trouve de plus en plus malmenée par le retour en force d’une réalité millénaire et implacable: celle de l’affrontement entre les civilisations chrétienne et islamique. Depuis deux décennies, les évolutions en Turquie et en Russie ont contribué de manière décisive à dissoudre les fondements du modèle géopolitique conçu par Washington il y a septante ans et aujourd’hui caduc. La Turquie d’Erdogan assume à nouveau pleinement l’atavisme de l’hégémonie religieuse et territoriale ottomane. De son côté, la Russie de Poutine renoue avec son identité européenne et chrétienne tout en renonçant à ses ambitions impériales. La prise de conscience de ces profonds changements devrait permettre l’avènement d’un nouveau paradigme où la Russie combattrait à nos côtés la menace musulmane.

La Turquie négocie son entrée dans l’UE depuis onze ans

En 2005 démarraient officiellement les négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, lesquelles consacraient les efforts d’Ankara au cours des décennies précédentes pour se rapprocher des valeurs démocratiques, laïques et humanistes de l’UE. Cette année-là, la Turquie, déjà membre du Conseil de l’Europe depuis 1949, de l’OTAN depuis 1952 et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) depuis 1973, n’avait jamais été aussi proche du destin européen ardemment désiré et méthodiquement préparé par Atatürk.

ataturk-loc.jpgAtatürk voulait faire converger son pays vers le modèle européen

Mustafa Kemal – dit Atatürk – rêvait d’une Turquie moderne. Adepte du positivisme d’Auguste Comte, admirateur du modèle politique français et persuadé que l’islam était responsable du déclin de l’empire ottoman, il imposa à marche forcée la sécularisation et l’occidentalisation de son pays. Légitimé par ses victoires sur les troupes d’occupation européennes stationnées en Turquie depuis la fin de la première guerre mondiale, Atatürk entreprit dès son accession au pouvoir en 1920 des réformes visant à faire sortir son pays du sous-développement où l’avait conduit l’obscurantisme islamique. En 1922, il instaura la séparation entre pouvoir politique (Sultanat) et pouvoir religieux (Califat). L’année suivante, le Sultanat fut dissout et céda la place à la République de Turquie. En 1924, le Califat fut aboli ainsi que les tribunaux religieux. L’année 1926 vit l’adoption du Code civil suisse. En 1928, l’alphabet latin remplaça les caractères arabes. Les femmes accédèrent au droit de vote et à l’éligibilité en 1934. L’année 1937 marqua le point d’orgue de ces réformes : l’article de la première Constitution de 1923 qui proclamait l’islam religion d’Etat fut aboli. Atatürk mourut en 1938 avec la conviction du devoir de modernisation accompli, persuadé qu’en seulement dix-huit ans, il avait réussi à irrémédiablement faire évoluer l’identité turque d’islamique et impériale à laïque et nationale. Le désir obsessionnel d’associer le passé et l’avenir de son peuple à la civilisation européenne le poussa même à manipuler l’histoire : il décréta que les Hittites, peuple indo-européen ayant vécu en Anatolie au deuxième millénaire avant J.-C., étaient les ancêtres des Turcs, se démarquant ainsi de la vérité historique qui rattache ces derniers au groupe ethnique des Turco-mongols dont la lointaine origine se situe en Sibérie orientale.

Ankara incitée par les USA à rejoindre l’OTAN pour contrer l’URSS

Quand le processus de rapprochement entre la Turquie et l’Europe démarre à la fin des années 1940, la guerre froide vient d’éclater. L’objectif prioritaire des Américains est alors de chercher de nouveaux alliés permettant d’élargir l’endiguement de Moscou. La Turquie qui contrôle le détroit du Bosphore est particulièrement indiquée pour renforcer l’alliance antisoviétique. Ce détroit a en effet une grande valeur stratégique : son blocage permet d’interdire le passage en Méditerranée de la flotte militaire russe la plus dangereuse : celle de la Mer Noire qui est stationnée dans le port de Sébastopol dont les eaux ne sont pas gelées en hiver.

refah.jpgPremiers succès politiques des islamistes turcs dans les années 1990

La candidature de la Turquie à l’UE date de 1987 mais ce n’est qu’en 1999 que Bruxelles reconnait l’éligibilité du pays à l’adhésion. Ni le premier succès retentissant des islamistes du Refah Partisi aux élections municipales d’Istanbul en 1994, qui permet à Erdogan de devenir maire de la ville, ni les législatives de 1996 que ces mêmes fondamentalistes remportent également, n’auront inquiété l’UE. Certes, le Refah Partisi a pour projet d’abattre la laïcité et de renouer avec les lois coraniques du temps du Califat. Cependant, les militaires qui au seuil du nouveau millénaire défendent efficacement la laïcité, l’ont contraint à abandonner le pouvoir en 1997. Et ils ont le soutien de la Cour constitutionnelle qui dissout ce parti en 1998 pour atteinte à la laïcité. Un an plus tard, quand la candidature de la Turquie est finalement acceptée par Bruxelles, c’est un rassurant parti de centre-gauche qui dirige le pays. L’UE se dit alors que la poussée électorale islamiste n’aura été qu’un contretemps dans l’inexorable processus de convergence d’Ankara vers le modèle politique européen. Que la Turquie ne soit pas un pays européen du point de vue de la géographie ou de la civilisation ne choque nullement Bruxelles car l’idéologie universaliste hors-sol s’y est alors solidement établie. Comme nous l’avons écrit dans un précédent article, l’UE essaie de construire depuis plusieurs décennies une identité post-historique à partir de dogmes mondialistes détachés de notre héritage européen. Son idéologie prétend dépasser non seulement l’histoire et la personnalité de chacun des pays la composant, mais également la civilisation européenne. La prétention à l’universalité de l’UE va au-delà des frontières européennes. L’UE se conçoit comme un modèle de gouvernance pour le monde entier, et ambitionne d’accueillir en son sein des pays non européens afin d’authentifier son discours.

Erdogan a brisé le rêve laïc de Kemal

Cependant, beaucoup de choses ont changé en Turquie depuis 1999. Tout d’abord le pays est dirigé depuis 2002 par l’AKP, le parti islamiste créé en 2001 par Erdogan et qui prit la suite du Refah Partisi. Quatorze ans après son accession au sommet de l’Etat, l’AKP a déjà défait l’essentiel du travail de laïcisation de Mustafa Kemal. Son fondateur et leader avait pourtant, dans son fameux discours de Siirt de 1999, clairement annoncé ses intentions en reprenant l’appel au djihad du poète Ziya Gökalp : « Les minarets sont nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées seront nos casernes et les croyants nos soldats ! ». Atatürk est très probablement le personnage politique le plus détesté d’Erdogan : le « père des Turcs » n’était pas seulement athée, il méprisait l’islam comme en témoigne cette citation sans appel : « [...] les règles et les théories d'un vieux cheikh arabe, et les interprétations abusives de générations de prêtres crasseux et ignares ont fixé, en Turquie, tous les détails de la loi civile et pénale. Elles ont réglé la forme de la Constitution, les moindres faits et gestes de la vie de chaque citoyen, sa nourriture, ses heures de veille et de sommeil, la coupe de ses vêtements, ce qu'il apprend à l'école, ses coutumes, ses habitudes et jusqu'à ses pensées les plus intimes. L'islam, cette théologie absurde d'un Bédouin immoral, est un cadavre putréfié qui empoisonne nos vies ». Malheureusement, la Turquie du Frère musulman Erdogan-- lequel n’hésite pas à exhiber dans son bureau la main de Tamkine, symbole de la confrérie -- renoue avec l’obsession islamique et les lois liberticides du Califat ottoman. Elle s’est considérablement éloignée des règles européennes en matière de séparation entre Etat et religion, de droits des femmes et des minorités, de pluralisme politique et de liberté d’expression (avec notamment 90% du temps de parole politique à la TV réservé à l’AKP, le pays se classe 151e sur 180 d’après l’étude 2016 de Reporters sans frontières sur la liberté de la presse). Concernant la place des femmes dans la société, le dévot mahométan Erdogan ne peut concevoir qu’elle aille au-delà de la maternité et de l’éducation des enfants. Force est de constater que ce pays n’a plus rien à voir avec celui qui fit sa demande d’adhésion à l’UE en 1987.

Turquie-OTAN-daech-470x331.jpgLa Turquie n’a rien à faire ni dans l’UE ni dans l’OTAN

Sous l’impulsion d’Erdogan et de l’AKP, la Turquie a retrouvé son vrai visage, celui d’une puissance islamique totalitaire aux visées hégémoniques sur les plans territorial et religieux, qui détruisit l’empire byzantin, qui est l’ennemie jurée de la civilisation européenne et cherche à lui nuire par tous les moyens. Comment expliquer autrement qu’Ankara laisse autant de migrants quitter son territoire afin de rejoindre l’UE par mer ou par terre ? Son intention n’est-elle pas de plonger l’Europe dans le chaos en y laissant pénétrer une multitude de jeunes hommes musulmans méprisant les valeurs européennes, et pressés d’y répliquer par l’intimidation et la violence le modèle sociétal islamique ? Par ailleurs, le secret de Polichinelle que constitue l’aide tous azimuts d’Erdogan à l’Etat Islamique dans les domaines logistiques, commerciaux, militaires et du renseignement, ainsi que sa tolérance pour l’ignoble trafic de femmes pratiqué entre l’EI et les proxénètes turcs 1, montrent à quel point Ankara s’est éloignée des valeurs européennes de respect de la personne humaine. Pour renouer avec l’influence de jadis de La Sublime Porte au Proche et Moyen Orient et affaiblir les minorités kurdes, chiites et chrétiennes de la région, les successeurs de Mehmed II collaborent aujourd’hui activement avec la théocratie inhumaine de Daesh. L’appartenance de la Turquie à l’OTAN et son maintien dans un processus d’adhésion à l’UE ne sont plus simplement incongrus, ce sont de véritables scandales.

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Russie et Europe ont vocation à se rapprocher

La Russie, elle aussi, a connu de profonds bouleversements depuis l’écroulement de l’empire soviétique en 1989. Ses ambitions internationales ont été revues nettement à la baisse. Elle n’est plus un empire aux visées mondiales. Ses objectifs stratégiques sont très majoritairement régionaux et centrés sur la défense du territoire national. Son intervention en Syrie est exceptionnelle et ne marque pas un retour à des ambitions planétaires. Pour Poutine, le but de sa campagne militaire dans ce pays est d’y éradiquer par des bombardements intensifs les nombreux groupes islamistes armés et financés par les pays du Golfe, d’Al-Qaïda à l’Etat Islamique en passant par le Front Islamique et le Front Ansar Dine, qui menacent le régime laïque d’Assad, à présent seul allié de Moscou dans le monde arabe. En s’en prenant à tous les djihadistes, Poutine a montré qu’il avait le sens des responsabilités, au contraire des USA, de la France et de la Grande Bretagne qui en soutiennent une partie. De plus, la Russie revendique à nouveau fortement son héritage culturel européen et chrétien, ne menace plus l’Europe et souhaiterait s’en rapprocher si cette dernière prenait son indépendante vis-à-vis des USA.

Les USA prisonniers d’une grille d’analyse géopolitique dépassée

Vingt-sept ans après la chute du mur de Berlin et la fin de l’Union Soviétique, les Américains, architectes et maîtres de l’OTAN, considèrent toujours la Russie comme leur principale rivale. Ils persistent à contrecarrer Moscou par tous les moyens. Il leur a non seulement échappé que la Russie a vraiment changé, mais également qu’un ennemi plus dangereux pour eux et pour tout le camp occidental se renforce : l’islam. Malgré les attentats spectaculaires perpétués par Al-Qaïda sur le sol américain en 2001, en Espagne en 2004, en Grande-Bretagne en 2005. En dépit des récentes attaques terroristes d’envergure perpétrées par l’EI et Al-Qaïda en France et en Belgique.

Washington tarde à saisir qu’une nouvelle ligne de fracture géopolitique se met en place depuis plusieurs décennies : celle qui oppose le monde musulman au monde issu de la civilisation chrétienne. Il faut dire que les Etats-Unis se sont lourdement compromis avec les islamistes qu’ils ont activement utilisés pour contrer les Russes depuis la guerre d’Afghanistan en finançant et armant les Talibans. Leur soutien aux musulmans bosniaques et kosovars pendant la guerre civile yougoslave des années 1990 était aussi une conséquence de leur volonté de nuire indirectement à la Russie en affaiblissant la Serbie, vieille alliée de Moscou. L’aide apportée aux islamistes tchétchènes indépendantistes jusqu’au début des années 2000 participait de la même logique. Tous ces soutiens ont été de graves erreurs car ils ont affaibli la Russie et nourri chez elle une méfiance à l’égard de l’Occident dont elle aurait pu se rapprocher après la désastreuse expérience soviétique. Ils ont de plus renforcé le camp islamique en donnant un nouvel élan au djihad pour des générations de jeunes musulmans en mal de réalisation identitaire. La déstabilisation des régimes laïques par les Américains en Irak, en Lybie et en Syrie a également contribué au renforcement des islamistes les plus violents et à l’essor de l’EI qui a su profiter du chaos pour prendre pied dans ces trois pays.

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Les Européens à la merci d’Erdogan

Comment expliquer que c’est précisément au moment où la collusion entre Erdogan et l’EI est révélée, où le voile se lève sur l’orchestration par Ankara de la crise des migrants en Europe, où s’accentue la répression contre les démocrates laïcs turcs, où Erdogan a l’outrecuidance de vanter le modèle d’organisation politique de l’Allemagne national-socialiste, bref au moment où il y a accumulation de preuves accablantes de l’incompatibilité totale de la Turquie avec les valeurs de l’UE, que Bruxelles décide de reprendre les négociations d’adhésion, d’accorder aux Turcs la libre circulation dans l’espace Schengen, et de verser plusieurs milliards d’euro d’aide supplémentaire à Ankara en contrepartie de son engagement à protéger les frontières orientales de l’UE contre le flot incontrôlé des migrants? Confier la défense des frontières européennes en mer Egée et en Thrace orientale à la Turquie, c’est mettre sa tête dans la gueule du loup. Ankara va bénéficier des milliards de l’UE mais n’a aucun intérêt à ce que le flux des migrants se relâche durablement. La menace de l’irruption massive et continue de nouveaux clandestins doit rester réelle afin de pouvoir être utilisée pour faire chanter l’Europe. La Turquie gère très habilement la crise des migrants afin d’obtenir le silence de l’UE sur l’islamisation à marche forcée des institutions séculières turques, la régression des libertés et l’oppression des minorités, mais aussi pour gagner en influence en Europe tout en la déstabilisant et en l’islamisant.

Par ailleurs, l’accès imminent à l’espace Schengen accordé aux détenteurs de passeports turcs va aggraver les désordres migratoires et augmenter le risque d’infiltration de terroristes en Europe. Tout d’abord, la fin des visas signifie que l’émigration d’authentiques Turcs souhaitant s’implanter en Europe pour y bénéficier de meilleurs salaires et d’aides sociales généreuses va s’accélérer. Ensuite, l’émigration illégale vers l’UE de personnes qui ne sont pas d’origine turque mais établies en Turquie ou transitant par ce pays va aussi s’intensifier. En effet, d’après les spécialistes de l’antiterrorisme, les passeports turcs peuvent être aisément obtenus et falsifiés par les réseaux du crime organisé 2. Enfin, le manque de fiabilité des passeports turcs permettra à de nombreux islamistes terroristes de pénétrer sans encombre dans Schengen.

La Turquie a toujours été l’ennemie de la civilisation européenne

Enfermés dans un schéma géopolitique dépassé, accrochés à leur vision d’une Turquie laïque qui n’existe plus, les dirigeants des USA et de l’UE, en s’obstinant à traiter le nouveau sultanat ottoman en pays ami, se décrédibilisent et mettent l’Europe en péril. La Turquie d’Erdogan est notre ennemi. La Turquie a toujours été l’adversaire du camp occidental depuis le XIe siècle. Il faut se rendre à l’évidence : avec Erdogan, lequel vient de se faire construire le plus grand palais jamais bâti et de fêter en grande pompe entouré de centaines de milliers de compatriotes le 563ème anniversaire de la prise de Constantinople, elle vient de renouer avec son esprit de conquête qui en fit le fer de lance de l’impérialisme musulman et l’empire le plus puissant du monde du XVe au XVIIe siècle.

Américains et Européens doivent impérativement tirer les conséquences de la duplicité et de la dangerosité d’Erdogan. La Turquie de 2016 est entrée dans une nouvelle phase de son histoire. La parenthèse kémaliste est bien refermée. Ce pays est redevenu une force islamiste hostile à notre civilisation qui fait tout ce qu’elle peut pour affaiblir et subjuguer l’Europe.

Un nouveau paradigme géopolitique mûrit sa formation et devrait bientôt survenir

Aujourd’hui, il y a concordance entre ce que l’histoire de la longue durée nous enseigne sur la vocation des Turcs à travers le temps, à savoir l’impérialisme territorial et religieux, et l’observation des agissements d’Ankara depuis l’avènement du néo-sultan Erdogan. Le manque de clairvoyance des dirigeants actuels de l’UE et de l’OTAN confine à la sottise. Les négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE sont insensées et doivent être annulées. La candidature d’Ankara doit être rejetée pour incompatibilité civilisationnelle radicale. La Turquie doit également être expulsée de l’OTAN avant que ses provocations de l’armée russe en Syrie ne déclenchent un affrontement contre-nature entre l’OTAN et la Russie.

Quant aux relations entre l’Occident et la Russie, elles doivent être, à l’initiative des Européens, repensées en profondeur. Ces derniers, qui ont le plus à perdre du statu quo actuel, doivent impérativement se libérer de l’absurde russophobie imposée par Washington qui les conduit à percevoir Moscou comme un ennemi héréditaire et non comme un allié potentiel contre l’adversaire commun qu’est l’islam conquérant.

Ces décisions lucides et courageuses devront être prises par une nouvelle génération de responsables politiques en Europe et aux USA. Elles permettront au nouveau paradigme géopolitique en cours de maturation de finalement s’imposer dans un éclair au terme du long processus d’émiettement progressif de l’ancien ordre mondial hérité de la guerre froide. Seul un tel basculement pourra empêcher la Turquie de devenir sur le long terme la puissance démographique et politique dominante au sein de l’UE, ce qui lui permettrait alors de réaliser son objectif ancestral de soumettre l’Europe et de lui imposer l’islam.

Roland Desjardins (nom connu de la rédaction), 2 juin 2016

1 : L’Etat Islamique, Samuel Laurent, éditions du Seuil, 2014

2 : Valeurs Actuelles, No 4147 du 19 au 25 mai 2016

samedi, 04 juin 2016

Athos and Russia: Byzantine Symphony on the Holy Mountain

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Poutine au Mont Athos

Athos and Russia: Byzantine Symphony on the Holy Mountain

Ex: http://ww.katehon.com

The special status

Mount Athos has a special status within the Orthodox world. Under the Byzantine Emperor Alexius Comnenus, the Athos monastic republic gained autonomy from the Patriarchate of Constantinople. Athos enjoyed self-rule even under the Ottomans. In modern Greece, Athos, as the "Autonomous monastic state of the Holy Mountain", also enjoys a special status. Athos, from a geopolitical point of view, is a unique state-like entity that does not fit in the territorial order of national states of the modern era. For traditional society, the special self-governing status of the holy places, marked by the special presence of the sacred, is a rather normative phenomenon. Modernity takes the issue differently. It unifies polity and deprives everything connected to religion of special status. It is called securitization. Even the ultra-religious Saudi Arabian Mecca, the holy city of Muslims, is devoid of autonomous status under the control of the Hashemite clan, which it enjoyed for more than 700 years. Athos is still a state within a state.

In the period between the First Balkan War of 1912-1913 and the signing of the Lausanne Peace Treaty of 1921, which recognized the sovereignty of Greece on the Athos peninsula, the transformation of Mount Athos in the territory under the control of all the Orthodox nations was actively discussed. The main engine of this idea was Russia. The fact that special attention was paid to Athos by the Russian Empire until 1917 is no accident, as well as the increased interest of the Russian authorities to the Holy Mountain after Vladimir Putin became Russian President.

Empire of the spirit

The legal specialness of Athos is a phenomenon unique in the modern world, reflecting its spiritual nature. Athos is important as the center of Orthodox spirituality and the region, which is under the direct control of God. This place brings together earthly and heavenly dimensions. From the point of view of secular geography - it's just a mountainous peninsula in northern Greece, but for the orthodox believers all over the world - this place has a universal, ecumenical significance. Athos is the universal Orthodox monastic republic. On its territory you can meet representatives of all the Orthodox nations: Russian, Greeks, Romanians, Serbs, Bulgarians, Arabs, Albanians, Macedonians, as well as who took the Orthodox representatives of other nations and cultures and visit Russian, Serbian, Bulgarian, and Georgian monasteries.

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The peninsula is under the omophorion of the Patriarchate of Constantinople, but is autonomous from it and condemns all its recent ecumenical innovations. Athos is a republic of the monks, as it is often called, and at the same time it is the universal Orthodox spiritual empire in miniature form. In this comparison there is nothing paradoxical, as the Byzantines inherited the Roman Empire and the Roman Republic, and at least formally retained some of the attributes of the former republican Rome. Getting to Mount Athos and becoming a monk, monastery worker, pilgrim, or a novice does not lose its former ethnic and national identity, but acquires a new, Byzantine one - universal and imperial. Athos is an orthodox empire of the spirit, which further contrasts against the background of the small peninsula, the symbol and embodiment of universal Orthodox spiritual unity.

This explains why so much attention was paid to Athos by sovereigns of countries applying for continuity of Byzantium, fallen under the blows of the Turks in 1453. Moldavian and Wallachian princes and rulers in Moscow sent rich gifts. But only the last, in the end, won the right to the Byzantine imperial status. Vladimir Putin was the first Russian ruler who visited Athos in history in 2005, thereby restoring the interrupted communication not only with the Russian imperial past, but also with the Byzantine heritage. The Russian President and the Patriarch’s joint visit to Athos demonstrates its Katehonical nature as a force orientated to the preservation of the Christian faith and Christian values in a godless world in the face of impending apostasy. Can you imagine that Western, nominally Christian leaders can undertake something like that?

Athos and Katehon

Russia since its Christianization has always been closely connected with the spiritual life of Athos. The founder of Russian monasticism in Russia and the first monastery of Kiev Pechersk Lavra, Anthony of the Caves, for a long time lived on the Holy Mountain. From there the Athos tradition of eldership and tacit prayer spread throughout Russia. Its relationship with Russia Athos, as Ivan Kontsevich in his famous work "The acquisition of the Holy Spirit in the ways of ancient Rus' noted, was a fruitful source of spiritual activity in Russian monasteries themselves. The times when this relationship was weakened (XVII-XVIII), was characterized by religious discord in Russia itself (but not without the influence of the Greek and the participation of some afonites).

At the time when in Russia there was high a risk the emasculation of the inner spiritual essence of Orthodoxy, the substitution of Hesychasm by the purely external ritual side of Church life, or even secularization of Church and empire ascetics like the Nile of Sora and later Paisius Velichkovsky, associated with the Athos, restored delicate balance between the internal and external imperial power of the state, and the wealth of the church and the living experience of Orthodoxy, the epitome of which was the institution of eldership. St. Paisius’ threads of spiritual succession are already drawn to the Elders of Optina and St. Seraphim of Sarov. Thus, if we recognize that Russia was (and still is) Katechon, the force holding the world from the coming of the Antichrist, the Athos performed a Katehonical function in relation to Russia preserving the inner prayer of heart as a core and essence of Orthodoxy.

Athos and Russian Logos

The flowering of Russian monasticism on Mount Athos began since the second half of the 19th century, and peaked during the reign of the last Russian Tsar. It is significant that disputes on the place of worship were at that time the focus of public attention, and even issue of the state policy. The "gunboat diplomacy", solution to the complex theological issue may be not the best method, however, it demonstrated the seriousness of the problem for the whole Russian society at the time - that Russia lived in religious philosophy, and Russian Athos lived in it. This Russian Athos, among other things, gave us a the wonderful Saint Silouan the Athonite and many other devotees, such as Archimandrite Sophronius Sakharov or Elder Tikhon (Golenkov), and mentor Saint Paisius Athonite. Spiritual activity in Russian Athos continued during the Bolshevik persecutions in Russia. Thus, Athos for modern Russia is a link with its own history, culture, and spirituality. Unlike most of us, Athos is not post-Soviet, it is namely Russian.

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The geopolitical significance of the Russian president and Patriarch of the Russian Orthodox Church’s visit to Mount Athos lies not in the strengthening of Russian presence on Athos, but in the imparting of an explicitly imperial, Orthodox, and Byzantine meaning to foreign state and Church policy, and the acceptance of the Athonite imperial mission and Athonite zeal in faith in opposition to Western liberalism and lukewarm ecumenism. The joint symphonical Byzantine visits of the head of the Russian state and the Patriarch symbolically steers the movement in this direction.

jeudi, 31 mars 2016

Hungría y Rusia en la defensa de la Civilización europea en el siglo XXI

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Las dos caras de Jano. Hungría y Rusia en la defensa de la Civilización europea en el siglo XXI

por Sergio Fernández Riquelme

Ex: http://paginatransversal.wordpress.com

La soberanía nacional, la Familia natural, el Estado firme. A uno y otro lado de la frontera entre la Europa comunitaria y el proyecto euroasiático [1], dos naciones (Hungría y Rusia) compartían, junto a intereses geoeconómicos comunes, estos valores que enarbolaban como las claves de la identidad de la Civilización europea; identidad ligada a la llamada “modernización conservadora”, paradigma que explicaba la capacidad del Viejo continente de aunar tradición e innovación con garantías de éxito social y cultural ante las mutaciones geopolíticas de la globalización [2]. Las dos caras de Jano. Como señalaba Plutarco, ese equilibrio entre el caos y la civilización, ese genio capaz de adaptarse al mundo cambiante, un rostro que miraba a Oriente y otro que observaba a Occidente:

“porque de Jano en lo antiguo, ora fuese genio, ora fuese rey, se dice haber sido político y popular, y que indujo mudanza en el modo de vivir fiero y silvestre: y por esta razón lo pintan con dos caras, como que pasó la vida de los hombres de una forma y disposición a otra” [3].

En plena crisis entre el Occidente europeo y la Federación rusa, a raíz de la crisis de Ucrania (de la anexión de la península de Crimea al apoyo a los separatistas pro-rusos de Lugansk y Donetsk), Orbán y Putin se reunieron en febrero de 2016 en la residencia de Novo-Ogaryovo (Moscú). Hungría, el otrora alumno ejemplar del proceso de integración europea de los antiguos países comunistas, bajo el gobierno de Viktor Orbán y Fidesz, criticado desde sus inicios por la burocracia de Bruselas, y especialmente durante la crisis de refugiados en 2015, aparecía públicamente como la nación más cercana a los intereses y posiciones geopolíticas del gobierno de Vladimir Putin.

Desde el inicio del citado conflicto, el gobierno húngaro fue el principal adalid de no imponer sanciones financieras y diplomáticas a Rusia, y posteriormente defendió en todos los foros comunitarios eliminarlas inmediatamente. Pero detrás de esta posición aparentemente circunstancial (ligada a proyectos energéticos y comerciales comunes) se situaban afinidades ideológicas y políticas entre ambos regímenes, cifradas en términos de valores civilizatorios: las raíces cristianas, la protección moral y familiar, la soberanía económica, y el Estado iliberal [4].

Primera afinidad: las raíces cristiana de Europa.

Orbán, desde su vuelta al poder en la nación magiar en 2010, reivindicó su misión de defensa de los valores morales tradicionales inscritos en la identidad europea [5]. Hungría debía ser el modelo a seguir por países (de Polonia a Eslovaquia), a su juicio, amenazados en su realidad identitaria histórica por el impacto en la Unión europea de la neocolonización norteamericana, el secularismo nórdico y la inmigración multicultural. A ello respondió su pionera Constitución de 2011, que en su famoso Preámbulo significaba el ascendiente cristiano (multiconfesional) en el nacimiento de la nación magiar, ya que como señalaba Orbán [6]:

“El cristianismo no es sólo una religión; es también una cultura sobre la cual hemos construido toda una civilización. No hay elección posible, se trata de un hecho”. Por eso era injustificable el insuficiente reconocimiento de las raíces, las tradiciones y el sentido cristiano de la vida en las instituciones de la UE, que alejaba sigue hiriendo al día de hoy a millones de europeos” [7].

Similar posición a la expresada por Putin y su gobierno en numerosas ocasiones y actos públicos, desde el apoyo a las actividades de la Iglesia Ortodoxa rusa (IOR) y las excelentes relaciones con el Patriarca de Moscú (así como con el resto de confesiones tradicionales, del budismo al islam ruso), hasta la aprobación de leyes de defensa de la religión ante las ofensas públicas (2013) o de los textos sagrados (de la Biblia al Corán) ante difamaciones o acusaciones de extremismo (2015). Así señaló en 2007:

“Primero y ante todo debemos ser regida por el sentido común. Pero el sentido común debe estar basada en principios morales en primer lugar. Y no es posible hoy en día tienen la moral separada de los valores religiosos” [8].

Segunda afinidad: la protección de la moral y la Familia natural.

La citada nueva Constitución húngara, así como la posterior Ley de Familia, protegía la concepción natural del matrimonio y la Familia, y la necesidad de una política de desarrollo demográfico paralela, subrayando que “(1) Hungría protegerá la institución del matrimonio como la unión de un hombre y una mujer establecida por la decisión voluntaria, y la familia como base de la supervivencia de la nación. Los lazos familiares se basan en el matrimonio y / o la relación entre padres e hijos. (2) Hungría fomentará el compromiso de tener hijos” (Artículo L).

Concepción ligada a la necesidad objetiva del renacimiento demográfico de una Europa envejecida, sin niños, solo sostenida momentáneamente por la emigración. El futuro social de Europa pasaba, para Orbán, por identificarse, como Hungría y otros muchos países “con el sentido cristiano de la familia”, respetando otras formas de convivencia pero afirmando “que en la Europa cristiana la familia es la unión de un hombre y una mujer”. Así afirmaba que:

“La gran mayoría de personas en Europa respeta la familia y se niega a reconocer – como yo mismo hago–, la relativización y la extensión de la noción de familia, a la que de esta forma se resta significado e incluso se la ridiculiza. Este es el motivo por el que hemos aprobado en Hungría una ley especial para la protección de las familias” [9].

Orbán señalaba, a diferencia del mundo occidental, que “la inmigración masiva no es la solución al problema demográfico de Europa”, sino un sistema social y fiscal basado en la Familia natural y en su protección jurídica:“La historia ha demostrado que las civilizaciones que no son biológicamente capaces de perpetuarse a sí mismas están destinadas a desaparecer y desaparecen. Nuestra civilización, Europa, hoy no es capaz de hacerlo. La inmigración masiva, que muchos propone como remedio, provoca tensiones que conducen a más conflictos y terremotos políticos, debido a las diferencias culturales, religiosas y de estilo de vida. El sentido común dicta que Europa en el futuro debe hacer frente a sus problemas demográficos por una vía natural, respetando y protegiendo la familia y la paternidad” [10]. Y a finales de 2015 reiteraba esta máxima de restricción de la inmigración y apoyo a la Familia nacional ante el fenómeno de llegada masiva de refugiados sirios y afganos, común a su juicio al Este de Europa (Polonia, Eslovaquia, Eslovenia o la República checa):

“Al oeste de esta línea hay países que ya han renunciado a la protección de las familias, pero al Este de esta línea todos tenemos políticas favorables a la familia, y el cambio del matrimonio no es aceptado en cualquiera de estos países. En esta parte de Europa todo el mundo también entiende que no podemos permitir a esta las masas de personas, cuya verdadera identidad e intenciones son desconocidas. Esto no es entendido en el Oeste, donde están a favor de la política de inclusión, y donde esto va a provocar graves problemas” [11].

Desde Rusia se compartía esta posición; pero sin los frenos ideológicos de la UE, su defensa y promoción se tradujo en el apoyo económico directo a las familias para impulsar la natalidad (tras la grave crisis demográfica de finales del siglo XX); la restricción progresiva del aborto; la aprobación de la famosa Ley de protección moral de los menores ante las relaciones no tradicionales (2013) que, en suma, prohibía toda información y manifestación de concepciones ajenas a la familia natural rusa (adoptadas igualmente en Crimea, Donetsk y Lugansk en 2015); normas de prohibición de las ofensas religiosas o el lenguaje soez o insultante en los medios de comunicación; y la polémica Legislación que impedían a estas relaciones adoptar menores (2014). Limitación de la propaganda social y familiar no tradicional valorada por el alcalde de Budapest István Tarlós (criticando los desfiles considerados amorales en 2015) o por el mismo Orbán:

Hungría es un país serio. Se basa fundamentalmente en los valores tradicionales. Hungría es una nación tolerante. La tolerancia, sin embargo, no significa que se aplicarán las mismas reglas para las personas cuyo estilo de vida es diferente del nuestro. Podemos diferenciar entre ellos y nosotros. La tolerancia significa la paciencia, la tolerancia es la capacidad para convivir, y es la base de la Constitución húngara que diferencia claramente entre la relación matrimonial entre un hombre y una mujer y otras diferentes formas de convivencia” [12].

Tercera afinidad: la soberanía económica.

Orbán, desafiando a la elite liberal-social europea, apostaba por reconstruir un Estado fuerte que garantizara la independencia económica nacional y el bienestar ciudadano, especialmente ante las graves consecuencias de deuda y pobreza provocadas la crisis del neoliberalismo internacional desde 2008. Para el premier magiar, ésta era una cuestión urgente al definir el futuro mismo de la Unión Europea, ya que “aquí no podemos afrontar el vivir a cuenta del dinero de los otros” y “tarde o temprano tenemos que trabajar para ganar y devolver cada euro que gastemos”. Ante esta situación de dependencia, todos los Estados miembros debían hacer sus propios deberes y alcanzar su soberanía económica como Hungría, que “devolvió antes de su vencimiento el préstamo del FMI concedido para resolver su crisis financiera”, introduciendo en la Constitución un límite de endeudamiento público y reduciendo sistemáticamente la deuda nacional [13].

Soberanía que en “Europa sólo puede prevalecer y prosperar a través del trabajo”, proclamaba Orbán, mostrando su concepción de una “sociedad basada en el trabajo” apoyando el empleo en vez de subvenciones, y restaurando la dignidad del trabajo manual. “Hungría y Europa serán fuertes si todo el mundo que puede y quiere trabajar tiene un puesto de trabajo”. Pero “como el sector privado no era capaz de dar a todos un puesto de trabajo, como es el caso actual en Europa”, debía implantarse el “workfare state” (“el Estado del trabajo”), intervención razonable del Estado en búsqueda del pleno empleo. Una autoridad pública que respondía a la falta de competitividad de la neoliberal Europa ante el empuje de las áreas americanas y asiáticas, con menor precio de la mano de obra, más flexibilidad laboral, mayor acceso a una financiación barata, la estabilidad regulatoria o el entorno propicio para el emprendimiento empresarial, y especialmente con mejores precio de la energía [14].

Esta soberanía económica, nacía pues de una económica basada en valores, con una intervención pública centralizada y responsable, que llevó al control directo del Estado del sistema bancario buscando restringir los poderes facticos ajenos a la supervisión política; con un crecimiento económico sostenido en plena época de crisis, manteniendo un alto nivel de Bienestar de la ciudadanía (crecimiento del PIB un 3,7% en 2014); con la independencia comercial y financiara, manteniendo estrechas relaciones con sus socios comunitarios (especialmente los países del grupo de Visegrado) pero abriendo importantes acuerdos con los países euroasiáticos, de Asia Central y del Lejano Oriente (con estrecha relación con Turquía y Azerbayán); y con el respeto de los derechos laborales y de los valores morales, llegando incluso a la casi total limitación de la libertad de los comercios de abrir los domingos, respetando así el descanso de los trabajadores y sus familias (2014).

En Rusia, esta soberanía iba un paso más allá, configurando un auténtico “capitalismo de Estado”, donde la primacía de lo público sobre los sectores estratégicos y la gran iniciativa privada era fundamental. Este modelo, pese a las limitaciones el uso y abuso de los recursos naturales (especialmente los hidrocarburos) como principal fuente de financiación, se demostró exitoso desde su configuración a inicios del siglo XXI. Durante el amplio mandato de Putin y su equipo, entre 2000 y 2014, el crecimiento del PIB nacional llegó al 5,2% de media, ligada a la explotación intensiva de las enormes fuentes energéticas y a la aún limitada diversificación productiva. De esta manera, Rusia volvió situarse en el 9º puesto de la lista mundial de PIB nominal en 2014 (2.057.000 millones de dólares) [15] y en el sexto del PIB PPA (3,564.5 millones) [16]. Datos macroeconómicos que se reflejaron en una mejora sustancial de la calidad de vida de los ciudadanos rusos, frenada ante las sanciones occidentales y la caída del precio del petróleo entre 2015 y 2016. Así, el empleo se mantuvo en notables y estables cifras en el último lustro: tasa de paro en 5,9% (2015) y tasa de ocupación del 71,6%. En cuanto a los salarios, pasaron de los 10351 RUB/Mes a finales del siglo XXI a los 32508 de marzo de 2015; mientras, el salario mínimo creció de los 1100 RUB/Mes de 2006 a los 5965 de 2014, y la productividad aumentó hasta los 201 puntos desde los 150 de 2006 [17]. Por ello la tasa de pobreza en Rusia descendió del 40% del año 1999 al 13,1% de 2010, creciendo el PIB per cápita entre esos años de 4200 a 17000 RUB/Mes.

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Cuarta y última afinidad: el Estado iliberal.

Llegaba un tiempo histórico donde “Oriente” era alternativa soberana al mundo occidental. Y en él, Hungría debía encontrar su propio camino, su modelo de desarrollo, construir su propio Estado nacional, al contemplar como otros modelos políticos y económicos (en China, Rusia, Singapur o Corea del Sur) se presentaban como opciones viables (y en algunos puntos exitosas) pese a evidentes diferencias culturales, “a un método europeo occidental que está perdiendo claramente sus reservas, y tal vez ya se les ha agotado”; y que demostraban que había vida más allá de la prototípica democracia liberal de mímesis anglosajona.

Por ello, Orbán subrayaba que “los húngaros tenemos una cultura fundamentalmente cristiana y estamos motivados por la libertad, por lo que debemos construir nuestro propio sistema con respecto a la economía y la política“, y para construir este camino, se inició en 2010 una revolución nacional gracias a la “victoria electoral de dos tercios[18]. Así, y tras su posterior y abrumadora reelección en 2014 comenzó la siguiente fase del proceso [19], que apareció en las primeras planas de la prensa internacional. Llegaba la hora de un nuevo tipo de democracia en Europa, lejos de la que denunciaba como ineficiente y corrupta estructura liberal, y por encima de un subvencionado e insostenible socialismo del Bienestar; y en esa hora Hungría, para Orbán, sería la vanguardia europea de un fenómeno postliberal en germen en medio mundo.

La líneas maestras de su propuestas aparecieron dibujadas en su polémico discurso La era del Estado basado en el trabajo se está acercando, pronunciado en Tusnádfürdő (Rumanía) el 29 de julio de 2014, en la vigésima quinta edición de la Universidad libre de Transilvania (Campus de Verano “Balvanyos”). Viktor Orbán esbozó en él las ideas del futuro Estado nacional húngaro frente a un auditorio de incondicionales: las minorías húngaras en Rumanía, que habían apoyado abrumadoramente al gobierno entre Fidesz y KNDP [20].

En primer lugar “la base del Estado húngaro recién organizado es una sociedad basada en el trabajo que no es liberal en su naturaleza, a partir de poderes políticos civiles cristianos y nacionales que rigen el país tras ganar las elecciones con dos tercios de los votos”. Esta victoria mayoritaria era la manifestación del “equilibrio moral” en el país frente aquellas fuerzas que habían votado en contra de la readmisión de los húngaros que viven más allá de las fronteras del país en diciembre de 2004; habían “recibido su justa recompensa” como resultado del hecho de que la alianza Fidesz-KNDP logró su espectacular resultado con la ayuda de los votos de los húngaros transfronterizos [21].

Una nueva era en Hungría emergía, construida tras la reestructuración de la economía mundial y el cambio en la potencia mundial que se hizo evidente en 2008. La generación que él encabezaba desde la recuperación de la democracia en 1898, debía ahora hacer frente a los “cambios que se producen en la actualidad” en “un mundo radicalmente diferente”. Y en este novedoso escenario histórico el Primer Ministro declaró que:

hay una carrera mundial para inventar un Estado que sea más adecuado para lograr el éxito de la nación. Hoy en día, el mundo está tratando de entender los sistemas que no son no occidentales, liberales, tal vez ni siquiera las democracias, pero no obstante, son un éxito, y las estrellas de los analistas son Singapur, China, India, Rusia y Turquía” [22].

Por ello, “a pesar de la ruptura con los dogmas e ideologías que se han adoptado por parte de Occidente”, en Hungría “estamos tratando de encontrar la forma de organización de la comunidad, el nuevo Estado húngaro, que es capaz de hacer de nuestra comunidad competitiva en la gran carrera mundial en las próximas décadas”. Así, para edificar ese nuevo Estado el gobierno húngaro, alternativo al caduco modelo norteamericano para Tamás Fricz (investigador senior en su Instituto de Ciencias Políticas y profesor en la Universidad de Miskolc), se comprometió a “romper con los principios y métodos liberales de organización social”, ya que el anterior Estado liberal en manos socialistas no protegió a la comunidad nacional ante la crisis económica y moral sufrida, ignorando que “los húngaros que viven en todo el mundo son parte de Estado húngaro y no impidió que el país caiga en deuda o no protegió a las familias de la esclavitud de esa deuda“. Este Estado del bienestar se había alejado de la “raíz de la nación-estado”, y debía ser sustituido por “el enfoque de un Estado basado en el trabajo”. Por ello proclamaba que:

Los ciudadanos húngaros esperan que los líderes de Hungría desarrollen un nuevo tipo de organización estatal que, después de la era de la organización liberal del Estado, una vez más, hace que la comunidad húngara competitivo, respetando el cristianismo, la libertad y los derechos humanos[23].

Esta reorganización del Estado húngaro, iniciada en 2010 y refrendada por la población en las urnas en 2014, era un imperativo histórico obligatorio. “La nación húngara no es simplemente un grupo de individuos, sino una comunidad que debe ser organizada, reforzada y construida” y ​ en este sentido “el nuevo estado que se ha construido en Hungría no es un modelo liberal”, recogiendo los anhelos de la misma sociedad civil. Una sociedad orgullosa de su pasado, fraternalmente unida más allá de las fronteras actuales, enemiga de la “dictadura de la deuda” impuesta por los organismos liberales internacionales y de las injerencias de los países extranjeros occidentales. Así subrayaba la actuación del gobierno ante los intentos del activismo político liberal en el país, como por ejemplo la financiación de Noruega a organismos no gubernamentales apoyados por los partidos políticos de la oposición, o la adquisición pública del Banco MKB a los accionistas alemanes (con ello, la relación de la propiedad nacional de Hungría dentro del sistema bancario del país superaba el 50 por ciento) [24].

Las críticas no tardaron, de nuevo, en llegar. La oposición lo comparó con el mismo Putin [25]. La prensa liberal anglosajona denominaba la organización desarrollada por Orbán como “Estado iliberal[26] y a su propia figura como la de un nuevo Mussolini [27] o un “mini-Putin” por ser el único gobernante de la UE en bloquear a Jean-Claude Junker como nuevo presidente de la Comisión, por apoyar económica y políticamente a Rusia en la crisis de Ucrania (considerando injustas y contraproducentes las sanciones), y desarrollar políticas internas consideradas como autoritarias [28].

Se concretaba la misión histórica de Orbán: una gran Hungría sobre un nuevo Estado construido desde el patriotismo económico (capitalismo de Estado), la democracia dirigida (posiblemente presidencialista) y las raíces cristianas (y sus valores sociales intrínsecos). Ante “los problema sistémicos” de la democracia liberal-capitalista y su Estado del Bienestar subvencionado, esta emergente organización político-social húngara sería un ejemplo de la alternativa histórica al liberalismo “cínico, neocolonial casi feudal” de los EEUU y sus vasallos en la UE; un modelo hegemónico agotado por la “corrupción, la ilegalidad, el sexo y las drogas” en su seno, y que había engañado por última vez al pueblo húngaro [29].

Los húngaros son un pueblo de luchadores por la libertad” proclamó el primer ministro Viktor Orbán en el 25 aniversario del picnic paneuropeo en Sopron, una manifestación pacífica que condujo a la caída de la “Cortina de Hierro” en 1989. La transición poscomunista había aumentado el nivel de libertad ampliamente, pero en los últimos años se había resentido ante el crecimiento de la inflación, la corrupción, la deuda pública y el desempleo. Los éxitos de la transición política debían ser preservados, mientras que la evolución desfavorable tenía que ser cambiada, señalaba Orbán, especialmente ante una Europa occidental vulnerable económica y políticamente. “Hoy, el conjunto de Europa occidental está llamando para la renovación” concluyó. Y a finales de 2015 veía confirmados su anuncio y su propuesta. El mundo occidental debía hacer frente a un cambio geopolítico histórico que ponía en cuestión su hegemonía y su propio modelo político-social, posibilitando la diversidad de sistemas democráticos acordes con las exigencias que ponían en cuestión el éxito de la civilización europea y el mismo proceso de integración comunitaria:

“Europa está buscando su lugar en un mundo cambiante. Estamos viviendo en tiempos en que la jerarquía de los países está cambiando, y están surgiendo nuevos centros militares, geopolíticos y económicos. Debemos enfrentar el hecho de que China va a ser la primera potencia económica del mundo en el futuro cercano. En pocos años, también será la primera fuerza militar. ¿Alguien sabe qué tipo de mundo va a ser? ¿Qué será de nuestro mundo cuando se evapore el dominio Anglo-Sajón dominio?” [30].

Y para Orbán, Rusia había reaccionado. Es este tiempo de cambio trascendental “Rusia – un país con un enorme territorio y poder militar – ya no volverá a los tiempos de Yeltsin – la era de la desintegración de Rusia –; los Rusos han aprendido su lección” [31]. Bajo el gobierno de Putin habían reconstruido la posición soberana y competitiva de su nación, de manera cercana a su propuesta de “Estado basado en el trabajo“, frente a las políticas liberales de los Estados del bienestar, basadas en la mera subvención. La democracia soberana rusa respondía, según Orbán, a este esquema.

Rusia era un Estado iliberal, soberano e independiente, respetuoso de sus tradiciones y abierto a la modernidad, que adaptaba el modelo político-social a sus particularidades nacionales, y lo compartía en su “espacio vital” euroasiático. Por ello, Rusia no solo era un socio económico al que defender: “la Unión Europea se está moviendo más lejos de Rusia todos los días, lo cual es malo no sólo para Hungría, sino para toda la UE[32]; era también un modelo a seguir, en su caso en clave “imperial” [33], con amplio apoyo ciudadano (en 2015 un 89,9% de aprobación del presidente [34]): defensa de los nacionales étnicos (en las ex-repúblicas soviéticas), continuidad histórica de la patria (del Imperio zarista al legado soviético), la recuperación demográfica (más de 146 millones y medio de habitantes en 2016), la mirada al Oriente (pactos económicos con China o Irán desde 2014, y creación de la ЕАЭС o Unión económica euroasiática con Armenia, Bielorrusia, Kazajistán y Kirguizistán), y por supuesto, el conservadurismo social, que Vladimir Putin, siguiendo a Nicolai Berdaiev, resumía en este análisis:

“Hoy en día, muchos países están revisando sus valores morales y normas éticas, erosionando las tradiciones étnicas y las diferencias entre pueblos y culturas. Ahora la sociedad requiere no sólo reconocer el derecho de toda persona a la libertad de conciencia, la opinión política y la vida privada, sino también a aceptar, sin cuestionar, la igualdad de los conceptos del bien y del mal, por extraño que parezca, que son opuestos en su significado. Esta destrucción de los valores tradicionales desde lo alto, no sólo tiene consecuencias negativas para la sociedad, sino también es esencialmente antidemocrática, ya que se lleva a cabo sobre la base de ideas abstractas y especulativas, en contra de la voluntad de la mayoría, que no acepta los cambios que se producen o la propuesta de revisión de los valores. Sabemos que hay más y más personas en el mundo que apoyan nuestra posición sobre la defensa de los valores tradicionales que han constituido la base espiritual y moral de la civilización en cada nación hace miles de años: los valores de la familia tradicional, la vida humana real, incluyendo la vida religiosa, no sólo la existencia material, sino también la espiritualidad, los valores del humanismo y de la diversidad global. Por supuesto, ésta es una posición conservadora” [35].

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Por ello, Hungría, como Rusia, debía construir su propio modelo democrático, cuidando a los compatriotas húngaros de otros países (las seculares minorías en Eslovaquia, Rumania y Serbia), protegiendo sus fronteras de la que denominaba como “invasión” alentada por ciertos países europeos (en especial la política de asilo indiscriminada de Alemania), reivindicando la identidad original del pueblo magiar (de una lengua única y un etnia diferente), y proclamando sus raíces cristianas y la moral asociada (estricta para un viejo calvinista como él, rememorando la trascendental conversión de San Esteban, patrón húngaro).

Así pues, para Orbán cada modelo político o económico estaba determinado (y debía estarlo para su propia supervivencia) por la cultura nacional de origen (ancestral o diversa), “por lo que en Europa no se puede seguir un modelo que no se base en el cristianismo”. Rusia lo había construido, frente a los enemigos de Occidente y frente a los monstruos de su pasado; la primera cara de Jano. Llegaba el turno de la Hungría proyectada por Viktor Orbán; la segunda cara de Jano.

[1] Aleksander Duguin, “Putin y la revolución conservadora”. Katehon, 18/02/2016.

[2] Jordi Garriga, “Apuntes de Geopolítica I”. Katehon, 25/02/2016.

[3] Plutarco, Vidas paralelas. Tomo I.

[4] Sergio Fernández Riquelme, “Hungría y las raíces históricas de Europa”. La Razón histórica, nº 27, 2014, pp. 26-50.

[5] En noviembre de 2011 Orbán pronunció su primer gran discurso en el extranjero. En la London School of Economics describió la victoria de Fidesz en 2010 como la máxima expresión de un deseo de los ciudadanos húngaros de un liderazgo fuerte capaz de cerrar la transición post-comunista, y la necesidad de una nueva Constitución que recuperara la identidad nacional del país centroeuropeo, que podía ser ejemplo para la construcción de la UE en los tiempos de crisis y globalización. Véase United front against Viktor Orban, the Catholic conservative”. Vatican Insider, 03/13/2012.

[6] Silvia Blanco, “El primer ministro húngaro difunde en España sus polémicos mensajes”. El País, 16/04/2013.

[7] Ídem.

[8] Time, 2007.

[9] Ídem.

[10] Ídem.

[11] Magyar Idők, 25/12/2016.

[12] Hungarian Spectrum, 22/05/2015.

[13] ´ Silvia Blanco, op.cit.

[14] Ídem.

[15] CIA World Factbook. June 2, 2012.

[16] Report for Selected Country Groups and Subjects (PPP valuation of country GDP). IMF, 2015.

[17] La productividad en Rusia es analizada por el Vienna Institute for International Economic Studies (wiiw).

[18] Viktor Orban, “Los húngaros son luchadores por la libertad”. Kormany, 22/08/2014.

[19] Silvia Blanco, “Un enérgico cruzado del populismo. Orbán, que luchó contra el comunismo en Hungría hace 25 años, acapara el poder en todos los ámbitos con un mensaje nacionalista, conservador y cristiano”. El País, 6/04/2014.

[20] Discurso completo en la página del Gobierno húngaro: http://www.kormany.hu/en

[21] Igor Janke, Hajrá magyarok! – Az Orbán Viktor-sztori egy lengyel újságíró szemével. Rézbong Kiadó, Budapest, 2013.

[22] Viktor Orbán, “The era of the work-based state is approaching”. Kormany, 20/07/2014.

[23] Ídem.

[24] Al final de su discurso, el primer ministro proclamaba que “aunque vivimos en un mundo en el que cualquier cosa puede suceder” y donde “hay razones para temer un futuro incierto”, el futuro mostraba que también tiene una gran cantidad de posibilidades y oportunidades para el desarrollo de la nación húngara: “En lugar de miedo, aislamiento y retraimiento, recomiendo coraje, pensando en el futuro y la acción racional, siendo valientes para la comunidad húngara de la Cuenca de los Cárpatos, y de hecho para la comunidad húngara en todo el mundo. Dado que cualquier cosa puede suceder, que fácilmente podría ser el caso de que vendrá nuestro tiempo”. Ídem.

[25] Free Hungary, 27/07/2014.

[26] “Viktor Orban’s illiberal world”. Financial Times, 30/07/2014

[27] Damien Sharkov, “Hungary’s Mussolini’ Vows to Make the EU Member an ‘Illiberal State’”. Newsweek, 30/07/2014.

[28] Matt Chorley, “Cameron’s ally in EU jobs battle Viktor Orban announces he wants to ‘build an illiberal new state’ in Hungary”. Daily mail, 30/07/2014.

[29] Para Orbán, después de la Primera Guerra Mundial las potencias occidentales victoriosas, encabezadas por el presidente Woodrow Wilson, robaron a Hungría dos tercios de su territorio; tras la Segunda Guerra Mundial, en Yalta la nación fue vendida gratis a los comunistas; en plena revolución de 1956 Occidente no ayudó a los sublevados contra sus dominadores soviéticos; y desde la caída del comunismo, la UE y las organizaciones no gubernamentales occidentales (en especial la Fundación Soros) habían buscado tratado de restar al país su soberanía, pero se había acabado el tiempo de servidumbre y humillación para Hungría.

[30] Magyar Idők, 25/12/2016.

[31] Ídem.

[32] Viktor Orbán, “Reunión anual de Embajadores de Hungría”. Kormany, 26/08/2014.

[33] Sergio Fernández Riquelme, Rusia como Imperio. Murcia: Colección La Razón Histórica, 2014.

[34] Centro de Opinión pública rusa, Octubre de 2015.

[35] “Discurso ante la Asamblea nacional”. La Razón histórica, nº26, 2014.

Fuente: Katehon.

mercredi, 23 décembre 2015

La Russie de Poutine: notre seul allié sérieux

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La Russie de Poutine: notre seul allié sérieux

par Guillaume Faye

Ex: http://www.gfaye.com

La politique de Vladimir Poutine serait-elle la seule chance pour la France et l’Europe ? Contre le chaos. Que ce soit au Moyen Orient ou dans les solutions qu’il faudrait apporter au sein de nos sociétés ? L’axe choisi par la nouvelle Russie post-soviétique et post-eltsinienne, tant décrié, ne pourrait-il pas être un modèle ? La position russe semble être la plus sage et la plus forte, comme le révèle la victoire de la diplomatie russe au Conseil de Sécurité de l’ONU le 18 décembre.

La stratégie russe est pensée, celle de l’Occident est improvisée

Pour le politologue Fedor Loukianov, président du Conseil pour la Politique étrangère et la politique de Défense de Russie, l’engagement de la Russie en Syrie « a porté un coup inattendu au monopole des États–Unis dans leur rôle de ”gendarme du monde”. Monopole que Washington détient depuis 25ans. Dans un monde unipolaire, les guerres ”au nom de la paix” ne sont menées que par les États–Unis soutenus par leurs alliés. En intervenant militairement, Moscou a rebattu les cartes d’un conflit international majeur  ». (Rossiyskaya Gazeta)

  1. Poutine et son gouvernement ont entrepris en Syrie plus que la lutte contre Dae’ch et le terrorisme islamique et l’interdiction du renversement du régime d’Assad qui mènerait à un chaos encore pire qu’aujourd’hui ; ils ont voulu, par une intervention beaucoup plus musclée et efficace que celle de la coalition occidentale, mettre un terme à l’unilatéralisme américain et montrer que la Russie redevenait une grande puissance, notamment militaire et diplomatique, avec laquelle il faudra compter.

Au Moyen Orient, les buts géopolitiques de la Russie de Poutine sont aussi : faire une prudente alliance régionale avec l’Iran chiite, sans se faire manipuler par lui comme les Américains le sont par l’Arabie saoudite ; maintenir une stabilité et une présence militaire russe permanente dans la Syrie utile côtière ; contrôler une zone historiquement explosive et instable qui est assez proche des frontières de la Russie méridionale. La Russie, par l’emploi de la force intelligente, veut restabiliser une région que les Américains ont déstabilisée.

Les frappes aériennes françaises (ou britanniques, très faibles) n’ont aucune efficacité militaire. Elles ne sont qu’un moyen de politique intérieure et n’ont aucune dimension stratégique. C’est de la communication. À l’inverse des Russes, nous n’avons pas d’objectifs efficaces et réfléchis. On fait du spectacle. Les Rafales et les Super Étendards qui décollent du porte-avion nucléaire Charles de Gaulle, c’est de la vidéo, pas de la stratégie.     

La politique tordue et dangereuse de l’administration US

Au Moyen-Orient, face à la montée de l’islamisme, vis-à-vis de l’Europe et de la Russie, la politique de Washington n’est pas claire et ambiguë. L’ensemble du jeu est très trouble.

Le premier objectif de Washington est de neutraliser et de dominer par une ”alliance” de dupes l’Union européenne ; le second est d’encercler, d’affaiblir et de contenir la Russie pour l’empêcher de redevenir un rival de type URSS. La crise ukrainienne et les ”sanctions ”économiques anti-russes en sont des épisodes.

Le troisième objectif est de jouer un double jeu avec l’islamisme, par l’intermédiaire de la Turquie d’Erdogan (membre de l’OTAN) et du vieil allié depuis 1945, l’Arabie saoudite. Mais le but principal de Washington n’est pas l’élimination de Dae’ch, d’autant que c’est sa créature indirecte, résultat de l’invasion et de la destruction de l’Irak. L’Arabie saoudite (ainsi que le Qatar, ce bon ami de la France) est à l’origine de l’idéologie wahhabite fondamentaliste de retour aux sources islamiques , qui a donné le djihad soufiste qu’appliquent Dae’ch, Al–Qaida , AQMI, Al-Nosra et Boko-Aram en Afrique noire. L’Arabie finance en sourdine et inspire les mouvements islamiques terroristes. Quant à la Turquie du sultan islamiste ”modéré” Erdogan, elle aide objectivement Dae’ch (trafic de pétrole, aides logistiques, frappes anti-Kurdes, etc.). (1) Ses deux ennemis principaux sont l’Europe (le régime d’Erdogan veut entrer dans l’UE pour la détruire de l’intérieur) et la Russie : son aviation a abattu un appareil russe, sans se préoccuper des sévères sanctions économiques de Moscou.

L’Arabie a aussi provoqué, par une politique cynique de surproduction pétrolière au moment même de l’affaiblissement de la demande chinoise, un effondrement du prix des hydrocarbures – divisé par deux. Cette politique lui a été suggérée par Washington afin de faire gravement chuter les recettes pétro-gazières de la Russie. En échange, l’Arabie a exigé de Washington que l’administration US ferme les yeux sur son aide internationale à l’islamisme. La Russie était déjà handicapée par les sanctions économiques (illégales) suite à la crise ukrainienne.(2) On cherche donc à créer une crise économique, financière et budgétaire en Russie afin de casser ses efforts pour redevenir une grande puissance, notamment militaire.   

Comme toujours, la politique étrangère US est déstabilisatrice et très dangereuse, y compris pour les États–Unis eux-mêmes. Dans ce noeud de vipères, elle joue un jeu trouble, Mais dans tous les cas, la Russie est considérée par Washington, la Turquie et l’Arabie (qui déteste l’Iran, Assad, etc.) comme une puissance hostile. La russophobie est ce qui les rassemble. Les Européens sont hors jeu. On dirait qu’ils adorent sortir de l’histoire.

Le réveil russe est fondamental pour l’Europe

Pourtant la Russie, restaurée par Vladimir Poutine depuis 15 ans, devrait présenter pour les Européens un facteur de stabilité, d’alliance et d’exemple. Mais elle est détestée par l’oligarchie et son idéologie dominante (mais très minoritaire numériquement), parce que le régime de Poutine ne correspond pas à ses dogmes. Comparé aux chefs d’État et dirigeants de l’UE – qui ne sont que des politiciens, des businessmen de la politique – Vladimir Poutine est le seul à posséder une vision à long terme pour son pays et pour l’Europe (3), le seul à envisager une géostratégie, le seul homme politique au sens aristotélicien.       

La stratégie de Poutine, qui a été parfaitement comprise et décrite par Frédéric Pons, journaliste et grand reporter à Valeurs actuelles et auteur d’un livre intitulé « Poutine », pourrait se résumer ainsi.

Comme Napoléon ou De Gaulle, Poutine veut faire la synthèse entre plusieurs traditions politiques russes, en conservant les meilleurs aspects de chacune. Le traiter de ”nouveau Tzar” est faux puisqu’il a été démocratiquement élu à la tête d’un régime présidentiel de type démocratique. Il est apprécié dans les sondages et les suffrages par une proportion de citoyens qui font pâlir les dirigeants occidentaux.

En rupture complète avec l’idéologie marxiste–léniniste et trotskiste, utopique et totalitaire , comme avec l’anarchie de la parenthèse Eltsine, le nouveau régime russe opère une ” révolution conservatrice nationale et démocratique ”. Entente avec l’Église orthodoxe, respect des traditions, défense de la famille traditionnelle et naturelle, encouragement de la natalité, patriotisme. Toutes ces valeurs vitales sont partagées par 90% des peuples du monde mais sont détestées par les intellocrates occidentaux qui monopolisent les médias. Les Russes, avec bon sens, les plébiscitent.

La Russie, difficilement restaurée dans sa puissance et ses valeurs par le régime de Vladimir Poutine, affronte évidemment d’énormes problèmes internes à résoudre. Tout le monde en a. Mais, sur le plan de la politique étrangère, de la coopération militaire, stratégique, commerciale et technologique, l’Europe et surtout la France auraient tout intérêt, dans un monde de tempêtes, à considérer la Russie comme notre allié principal.

Victoire de la diplomatie russe et suggestions

Le 18 décembre, au Conseil de Sécurité de l’ONU, la proposition russe sur la Syrie a été admise à l’unanimité. Il s’agit d’un texte de compromis pour un règlement politique du conflit. L’hypothèse dangereuse et stupide de l’éviction inconditionnelle d’Assad a été rejetée. Les Etats-Unis et la France ont cédé face au bon sens en béton de M. Lavrov  et face à la force des faits; la reculade de MM. Kerry et Fabius signifie que la Russie à repris la main dans le poker international. La Russie, en dépit de toutes ses faiblesses internes, est en train de redevenir un acteur majeur de la sécurité et des équilibres internationaux.

La ”menace russe” imaginaire sur l’Europe de l’Est (Pologne, pays baltes, etc.) est un point clé de la propagande occidentale – décidée à Washington – contre Moscou ; c’est un fantasme entretenu qui fait des dégâts dans les opinions publiques des pays anciennement membres du Pacte de Varsovie, afin d’entretenir la peur et la russophobie. Ce mensonge, d’une stupidité déconcertante, laisse entendre que la Russie de M. Poutine risque d’attaquer l’Europe orientale. C’est pourquoi il faudrait que le gouvernement et la diplomatie russes s’emploient à contrer, à déconstruire cette propagande. Ce devrait être une priorité pour le Kremlin.

Notes:

(1) Erdogan, héritier de l’idéologie islamo-ottomane, vise à détruire l’héritage d’ Ataturk qui voulait européaniser la Turquie.

(2) Ces sanctions, comme les mesures commerciales de rétorsions russes, ne nuisent qu’aux économies européennes.

(3) La Russie est plus européenne qu’asiatique. Les Russes ont conquis une partie de l’Asie (Sibérie) mais la culture russe est fondamentalement européenne.

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mardi, 08 décembre 2015

En sortant du dollar, la Russie franchit une autre étape majeure

En sortant du dollar, la Russie franchit une autre étape majeure

par F. William Engdahl
Ex: http://resistanceauthentique.wordpress.com
 

dollarpoutine645740.jpgDepuis quelques temps, la Chine et la Fédération de Russie ont compris comme d’autres nations que le rôle de principale monnaie de réserve mondiale du dollar est leur talon d’Achille économique. Tant que Washington et Wall Street contrôleront le dollar, et aussi longtemps que la majeure partie du commerce mondial sera réglée en dollars, les banques centrales comme celles de Russie et de Chine seront obligées de stocker des dollars sous la forme de dette « sûre » du Trésor US. En effet, cette réserve de devises protège les économies de la sorte de guerre des devises qu’a connue la Russie à la fin de 2014. À l’époque, Wall Street et le bien nommé Bureau de Renseignement sur la Finance et le Terrorisme du Trésor US, se sont délestés de leurs roubles lors d’un accord US-saoudien visant à faire s’effondrer les prix mondiaux du pétrole. Désormais, Russie et Chine se dirigent sans bruit vers la porte de sortie du dollar.

Le budget de l’État russe dépend fortement du bénéfice en dollars de l’exportation d’hydrocarbures. Paradoxalement, à cause du rôle du dollar, obligées d’acheter de la dette de son Trésor, les banques centrales de Chine, Russie, Brésil, et d’autres pays diamétralement opposés à la politique étrangère US, financent de facto les guerres que Washington mène contre eux.

Cette situation change silencieusement. En 2014, la Russie et la Chine ont signé deux énormes contrats de 30 ans sur le gaz russe pour la Chine. Ces contrats précisaient que l’échange se ferait en yuans et roubles russes, pas en dollars. C’était le début du processus de dé-dollarisation qui est en train de s’accélérer aujourd’hui.

Yuan dans les réserves russes

Le 27 novembre, la Banque centrale de Russie a annoncé pour la première fois avoir intégré le yuan chinois dans ses réserves officielles. Au 31 décembre 2014, les réserves officielles de la Banque centrale de Russie se composaient de 44% de dollars et de 42% d’euros avec un peu plus de 9% de livre sterling. La décision d’inclure le yuan dans les réserves officielles russes, développera son usage au détriment du dollar sur les marchés financiers russes.

Même si elle n’est pas encore totalement convertible en d’autres devises, le négoce de la monnaie yuan a démarré à la Bourse de Moscou en 2010. Depuis lors, le volume d’échanges yuan/rouble s’est énormément développé. En août 2015, les cambistes et les compagnies russes ont acheté pour le nombre record de 18 milliards de yuans, soit environ 3 milliards de dollars, une hausse de 400% par rapport à l’année précédente.

Le rouble d’or arrive

Mais les démarches russes et chinoises pour remplacer le dollar en tant que monnaie intermédiaire dans leur commerce commun, un commerce dont le volume s’est accru considérablement depuis les sanctions des USA et de l’UE en mars 2014, n’en reste pas là.

Pour la première fois depuis août 1971, moment où Washington a unilatéralement déchiré le Traité de Bretton Woods, l’or est sur le point de faire un retour spectaculaire sur la scène monétaire mondiale. À cette époque, conseillé par le délégué personnel de David Rockefeller au Trésor, Paul Volcker, Niixon a annoncé que Washington refuse d’honorer l’obligation de son accord de rachat des dollars détenus à l’étranger contre de l’or de la Banque centrale US.

Des rumeurs persistantes racontent depuis cette époque que les chambres fortes de Fort Knox sont en réalité vides de tout or, un fait qui, s’il était avéré, signifierait que le dollar est cuit en tant que monnaie de réserve.

Washington s’en tient inflexiblement à son histoire, sa Réserve fédérale couverait une réserve de 8133 tonnes d’or. Si c’était vrai, ça dépasserait de loin le deuxième, l’Allemagne, dont les avoirs d’or officiels sont enregistrés par le FMI à 3381 tonnes.

Un bizarre événement apparu en 2014, a nourri des doutes quant aux statistiques officielles sur l’or US. En 2012, le gouvernement allemand a demandé à la Réserve fédérale de renvoyer à la Bundesbank l’or gardé pour elle par la Fed. Choquant le monde, sous le prétexte fallacieux que la Réserve fédérale « n’avait pas la possibilité de différencier les lingots d’or allemands de l’or US … », la Fed a refusé de rendre l’or à l’Allemagne. Peut-être devons-nous croire que les vérificateurs des comptes de la Réserve d’or fédérale US ont été foutus à la porte avec les compressions budgétaires ?

En 2013, dans le scandale qui a suivi, les USA ont rapatrié cinq misérables tonnes de l’or allemand à Francfort, et ont fait savoir qu’il leur faudrait jusqu’à 2020 pour compléter le rapatriement des 300 tonnes demandées. La méfiance envers la banque centrale US grandissant, d’autres banques centrales européennes ont commencé à réclamer leur or à la Fed.

Dans cette dynamique, la banque centrale russe a considérablement agrandi ses réserves d’or officielles ces dernières années. Depuis, la cadence de la poussée d’hostilité de Washington s’est beaucoup accélérée. Depuis janvier 2013, la réserve d’or officielle de Russie a pris 129%, passant à 1352 tonnes le 30 septembre 2015. En 2000, au terme des dix années de pillage de la Fédération de Russie parrainé par les USA dans les sombres années Eltsine de la décennie 1990, la Russie avait 343 tonnes d’or dans ses réserves.

Les chambres fortes de la Banque centrale de Russie qui en 1991, au moment de la chute de l’Union Soviétique, contenaient officiellement quelque 2000 tonnes d’or, avaient été dévalisées au cours du mandat controversé du directeur de la Gosbank, Viktor Gerachtchenko, qui devant la Douma, s’est dit alarmé de ne pouvoir rendre compte du lieu précis où se trouvait l’or russe.

L’époque est certes différente aujourd’hui. En matière de tonnage annuel d’or extrait des mines, la Russie a de loin détrôné l’Afrique du Sud de la troisième place de plus grand pays producteur d’or du monde. La Chine est devenue le numéro un.

Les médias occidentaux ont fait grand cas du fait que depuis les sanctions financières manigancées par les USA, les réserves en dollars de la banque centrale russe ont nettement fondu. Ce qu’ils ne signalent pas, c’est que dans le même temps, la banque centrale de Russie a acheté de l’or, beaucoup d’or. Récemment, sous les sanctions, parallèlement à la chute de 50% du prix en dollars des hydrocarbures, les réserves totales en dollars de la Russie ont baissé de quelque 140 milliards de dollars par rapport à 2014, mais d’après ce qui est constaté, les avoirs d’or ont grossi depuis lors de 30%. La Russie stocke à présent autant d’onces d’or que de fonds négociés en bourse. Selonseekingalpha.com, rien qu’en juin, elle s’est renchérie de l’équivalent de 12% de la production mondiale annuelle d’or.

Le gouvernement russe a adopté la proposition très raisonnable de Sergueï Glaziev, économiste russe et conseiller de Poutine, à savoir que la Banque centrale de Russie achète chaque once d’or extraite des mines russes à un prix attrayant garanti en rouble, afin de gonfler les avoirs d’or de l’État. Cela évitera même à la Banque centrale de devoir acheter de l’or sur les marchés internationaux avec des dollars.

Puissance hégémonique en banqueroute

Au terme des années 1980, voyant aux USA la grave crise bancaire associée à leur déclin évident dans le rôle d’après-guerre de premier pays industriel du monde, au moment où les multinationales US s’externalisaient vers des pays à bas salaires, comme le Mexique et plus tard la Chine, les Européens ont commencé à envisager une nouvelle monnaie pour remplacer le dollar-réserve, et la création des États-Unis d’Europe afin de rivaliser avec l’hégémonie US. La réaction européenne consista à pondre le traité de Maastricht au moment de la réunification de l’Allemagne, au début des années 1990. Il en a résulté la Banque centrale européenne et plus tard l’euro, un édifice terriblement bancal du toit aux fondations. En 1992, grâce aux milliards du fond spéculatif new-yorkais de George Soros, un pari suspect contre la Banque d’Angleterre et la parité de la livre réussit à écarter le Royaume-Uni et la City de Londres de l’alternative au dollar envisagée par l’UE. Pour certains de ces mêmes fonds spéculatifs, en 2010, il y avait de quoi s’enrichir facilement à déchirer l’euro à l’endroit des coutures, en s’en prenant à son talon d’Achille, la Grèce, suivie par le Portugal, l’Irlande, l’Italie, l’Espagne. Depuis lors, l’UE, qui est aussi liée à Washington par l’intermédiaire des chaînes de l’OTAN, n’a guère présenté de menace pour l’hégémonie US.

Or, de plus en plus depuis 2010, tandis que Washington tentait d’imposer la domination totale du Pentagone sur le monde à l’aide des soi-disant printemps arabes truqués, visant à changer les régimes de la Tunisie à l’Égypte, en passant par la Libye et à présent de Syrie, avec de maigres résultats, la Chine et la Russie ont été poussées toutes deux dans les bras l’une de l’autre. Une alternative au dollar russo-chinoise, sous la forme d’un rouble et d’un yuan adossés tous deux à l’or, pourrait déclencher la sortie précipitée du dollar, et avec elle, une grave perte de la capacité des USA à dévoyer le rôle de réserve du dollar pour financer leurs guerres avec l’argent des autres peuples. Privilège colossal par rapport à l’état de guerre de l’hégémonie perdue des USA, cela pourrait juste donner de l’engouement envers un monde en paix.

  1. William Engdahl est consultant en risques stratégiques et conférencier. Titulaire d’un diplôme en politique de l’université de Princeton, il est auteur de best-sellers sur le pétrole et la géopolitique, en exclusivité pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook ».

NEO, F. William Engdahl

Original : journal-neo.org/2015/12/05/russias-dollar-exit-takes-majo...
Traduction Petrus Lombard

source

dimanche, 15 novembre 2015

Effroyable prédiction de Poutine concernant l’Europe et la crise des migrants

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Effroyable prédiction de Poutine concernant l’Europe et la crise des migrants

Vladimir Poutine a présenté le 25 septembre dernier deux voies possibles pour l’Union Européenne par rapport à la crise des migrants.

L’une d’elle serait de défendre par la force physique et l’armée les frontières de Schengen, la deuxième serait de laisser venir les migrants clandestins et avec eux des terroristes, ce serait alors la fin de l’Union Européenne ce qui pourrait induire/amener la troisième guerre mondiale et même un nouvel holocauste.

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Selon le président russe, le plus important serait d’en finir avec l’arrivée des migrants au sein de l’UE et de dire clairement aux migrants, par les dirigeants de l’UE, de cesser de venir en Europe car ils seront rejetés.

« Si les politiciens de l’UE ne se réveillent pas à temps, en moins d’une année l’enfer se déchaînera en Europe

Pour les migrants qui fuient la guerre, ils devront être gardés dans des camps de réfugiés en Turquie jusqu’à ce que la guerre soit finie Syrie.

Selon Poutine, si les politiciens de l’UE ne se réveillent pas à temps, en moins d’une année l’enfer se déchaînera en Europe.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Plj Kandel pour Dreuz.info.

source: hirek.in

jeudi, 12 novembre 2015

Moscou ou la technique du rhinocéros

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Moscou ou la technique du rhinocéros

Ex: http://leblancetlenoir.com

Faire la guerre pour dicter la paix. Cette maxime très XVIIème siècle est constitutive de la politique que Vladimir Poutine, westphalien dans l'âme, applique à la Syrie. Autant l'âme russe peut connaître de violentes sautes d'humeur quand il s'agit d'art, de révolution ou de fête, autant la pensée russe en matière de stratégie extérieure fait penser au rhinocéros, avançant lentement mais fermement, inexorablement, et finissant par mettre tout le monde d'accord.

La Syrie est un cas d'école. Que disait Moscou avant l'intervention ? Nous allons repousser les terroristes, rétablir le gouvernement légal et sauvegarder l'intégrité de la Syrie tout en favorisant un consensus national. Petit à petit, les pièces se mettent en place et c'est exactement ce à quoi nous commençons à assister, à la virgule près. Quel changement par rapport aux simagrées occidentales où les effets de communication font maintenant office de politique...

Les groupes djihadistes, petits chéris de l'Occident pétromonarchisé, sont clairement sur le reculoir, comme le montre leur nouvelle tactique : enfermer des prisonniers dans des cages comme boucliers humains afin de dissuader les bombardements soutenant l'avancée des forces loyalistes. Ne cherchez évidemment pas l'info dans notre presse démocratique... Tandis que le rythme des frappes russes s'accélère, la bataille d'Alep est engagée où les forces syro-hezbollahi-iraniennes sont en train de diviser les positions rebelles :

On n'insiste pas assez sur le terrible revers que constituerait la perte d'Alep pour les "terroristes modérés" (© CIA). Une fois les grandes villes de la Syrie utile contrôlées par le régime, et ça en prend le chemin, la guerre totale contre l'EI pourra être engagée.

Parallèlement, Moscou saucissonne l'opposition à Assad. L'état-major russe a mené 24 raids sur des sites terroristes indiqués par des groupes anti-régime. Sont-ce les quelques rares bataillons modérés encore présents sur le terrain ou l'opposition en exil ? Peu importe au fond. Ils seront inclus dans le dialogue de réconciliation nationale sous les auspices de Moscou. Laissons la parole au général Kartapolo, de l'état-major : "Malgré leur lutte depuis quatre ans contre le gouvernement, ces groupes patriotiques sont prêts à faire passer leurs ambitions politiques après la nécessité de préserver l'intégrité et l'unité de la Syrie face à l'Etat Islamique et autres organisations terroristes. Nous espérons que cela sera un vecteur pour le règlement du conflit syrien".

De même, des représentants de la Coalition Nationale Syrienne, si chère aux Occidentaux mais à peu près inexistante sur le terrain, ont été invités en Russie pour des discussions, peut-être même avec des envoyés de Damas. Moscou prend peu de risque si Assad "négocie" avec ce mouvement virtuel sans aucun pouvoir, mais cela apporte une caution au consensus national que Poutine prépare pour la Syrie.

Tout comme Moscou ne prend pas de risque en répétant jusqu'à plus soif que le futur d'Assad doit être décidé par et seulement par les Syriens, notamment au moyen d'élections. L'Occident pétromonarchisé a bien été obligé d'accepter l'idée lors des pourparlers de Vienne même si ça le gêne terriblement, la probabilité d'une victoire d'Assad étant relativement élevée. Pendant que Paris, Washington et Londres sont en retard d'une guerre, les Russes concoctent déjà l'après-conflit...

Et en passant, ils en profitent bien entendu pour détacher les pays de la région de Washington ou renforcer leurs alliances. L'Irak est maintenant à peu près dans leur poche, Moscou ayant d'ailleurs insisté pour que les diplomates irakiens soient présent à Vienne. De même pour l'Egypte. La Jordanie a retourné son keffieh à la vitesse du vent. Quant aux relations avec l'Iran, qui prend d'ailleurs de plus en plus d'assurance vis-à-vis de l'Arabie bensaoudite, elles confinent à l'idylle.

Un rhinocéros qui dit ce qu'il fait et fait ce qu'il dit, qui avance inexorablement, sans grandes annonces mais d'un pas sûr. D'accord ou pas, Américains, Saoudiens, Turcs, Français et Qataris vont devoir s'y plier...

http://www.chroniquesdugrandjeu.com/2015/11/moscou-ou-la-...

samedi, 10 octobre 2015

Les rapports Turquie-Russie à la lumière de Daesh

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Les rapports Turquie-Russie à la lumière de Daesh
 
Ex: http://www.dedefensa.org

Le chroniqueur indien MK Bhadrakumar est un fin connaisseur de deux pays, où il a été ambassadeur de l’Inde : la Turquie et la Russie. Son avis sur les “tensions” entre ces deux pays, dans le cadre de l’intervention russe en Syrie est nécessairement intéressant, et il donne une image pondérée des “gesticulations” qui ont accompagné quelques incidents à la fin de la semaine dernière entre avions russes et avions turcs autour de la frontière syrienne. Les susdites gesticulation viennent en petite partie d’une tactique propre à Erdogan et n’engageant nullement sa stratégie, et en très grande partie de l’OTAN (dont fait partie la Turquie) qui tient un rôle confus et désorienté, et fort marginal, dans cette crise où elle n’a aucune stratégie ; l'OTAN a cru, avec cette incident russo-turc, retrouver une voix au chapitre et a surtout montré la faiblesse dériosoire de sa position. (L’OTAN est poussée dans cette voie, où elle dramatise sans grand effet ni risque un faux antagonisme turco-russe, par les USA qui sont grands adeptes de la confusion et de la désorientation pour eux-mêmes, et eux-mêmes relégués à un rôle mineur dans la crise.)

Dans un texte du 6 octobre sur son blog (Indian PunchLine), Bhadrakumar minimise la gravité que la communication a voulu donner à ces incidents. Il pense que les Turcs ont un rôle important à jouer dans la crise parce qu’ils en sont les protagonistes obligés ; ils auraient les moyens de transformer l’engagement russe en un bourbier type-Vietnam mais ils s’abstiendront au bout du compte à tenter de mettre les Russes, qui détiennent la “carte kurde”, en difficultés. Il pense que le but des Russes, avec ces incidents, est d’indiquer à la Turquie, comme ils le font avec Israël avec d’autres moyens, qu’il y a désormais de nouvelles règles en Syrie et que les interventions turques et israéliennes impunies en territoire syrien pour soutenir tel ou tel groupe font désormais partie du passé. Pour le reste, conclut Bhadrakumar, les rapports importants entre la Russie et la Turquie, symbolisés par les relations personnelles entre Erdogan et Poutine, ne seront pas affectés.

« The Turkish dictum had enabled Ankara up until now to ensure that the Syrian rebels could operate with impunity in a significant belt in northern Syria without fear of air attacks by Damascus. Russia is summarily terminating that privilege Ankara enjoyed. Russia is also simultaneously strengthening Syria’s air defence system and a point is reaching when the Turkish air force cannot any longer operate inside the Syrian airspace. In short, the weekend’s incidents have forced Ankara to contend with the new reality that its continued violations of Syria’s territorial integrity will come at a heavy price.

» By the way, Israel also is traveling in the same boat as Turkey – clandestinely supporting al-Qaeda affiliates operating in Syria, launching wanton air attacks on targets deep inside Syria, and systematically wearing down the Syrian state and its sovereignty. Israel too is livid that Russia will apply ‘red lines’ in Syria aimed at squashing Israeli interference in Syrian affairs. Israel is furious with Moscow – like Turkey – but has no option but to fall in line with the Russian ground rules. [...]

» In sum, an Afghanistan-type quagmire scenario is unlikely to develop in Syria for the Russians. During the Cold War, US brilliantly succeeded in pitting radical Islam against communism. Today, however, Russia enjoys diversified ties with the Muslim Middle East. The Russian diplomacy has been particularly active in Saudi Arabia and the UAE in the Gulf region as well as in Cairo and Amman. Egypt and Jordan have distinctly edged closer to Russia on the Syrian question.

» Conversely, Moscow’s close ties with the Syrian Kurdish leadership (which supports the PKK’s separatist movement inside Turkey) will act as a deterrent against Ankara setting up a bear trap in Syria. Suffice it to say, fueling insurgency is a game that both Turkey and Russia can play. [...] Simply put, if yet another Kurdistan takes shape in Syria (alongside the one already existing in northern Iraq), it would inevitably blur the sanctity and inviolability of Turkey’s established borders to the south and make them look somewhat like the Durand Line separating Pakistan from Afghanistan – a lawless no-man’s land that is condemned to remain a dagger forever aimed at Turkey’s heart.

» Erdogan’s priority will be to ensure that Turkey regains a place at the high table if a Syrian peace process picks up. Erdogan will try its best to forestall the emergence of yet another Kurdish entity in its neighborhood, which is a fast-emerging scenario already. Ankara’s main challenge lies in persuading Russia and the US to rein in the aspirations of the Syrian Kurds for regional autonomy in northern Syria as quid pro quo for their robust participation as Washington and Moscow’s foot soldiers in the war against the IS.

» At the end of the day, therefore, Erdogan will begin talking with the Kremlin. Actually, the conversation never really ended. His equation with the Russian leader at the personal level is something he can still count on. Vladimir Putin too has taken great pains to encourage Erdogan’s ‘Look East’ policies. Unlike the western powers, Russia has never been prescriptive about Turkey’s domestic politics. If Erdogan manages to win the November election and succeeds in switching Turkey to a presidential system, Putin will only congratulate him and possibly even draw satisfaction that he has a friend in Ankara who is likely to be a life-time executive president with whom he can do business to great mutual benefit. »

mercredi, 07 octobre 2015

Putin Moves His Rook Into Syria

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Putin Moves His Rook Into Syria

By

Ex: http://www.lewrockwell.com

Frankfurt, Germany –Could anyone in the Obama administration have been so slow-witted to imagine that Russia wouldn’t move hard to counter US efforts to overthrow Moscow’s  ally, Syria?

The Syrian war began almost five years ago by the US, France, Britain and Saudi Arabia  to overthrow Syria’s Iranian and Russian-backed government. The result so far:  250,000 dead, 9.5 million refugees flooding Europe and  Syria shattered.

This is nothing new: the first CIA coup attempt to overthrow a Syrian ruler Gen. Husni Zaim was in 1949.

A combination of imperial hubris and ignorance has led Washington to believe it could overthrow any government that was disobedient or uncooperative.  Syria was chosen as the latest target of regime change because  the Assad regime – a recognized, legitimate government and UN member –was a close ally of America’s Great Satan, Iran.  Formerly it had been cooperating with Washington.

After watching Syria be slowly destroyed, Russia’s President, Vladimir Putin, moved his rook onto the Syrian chessboard.  For the first time since 1991, Moscow sent a small expeditionary  unit of 50 warplanes to Syria both to shore up the Assad regime and to reaffirm that  Russia has long-standing strategic interests in Syria.

Few of the  administration’s bumbling amateur strategists likely knew that Russia claimed during the 19th century to be the rightful protector of Mideast Christians.  Russia watched in dismay the destruction of Iraq’s ancient Christian communities caused by the overthrow of their protector, President Saddam Hussein.  Moscow has vowed not to let a similar crime happen again to Syria’s Christians.

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Russia is also clearly reasserting a degree of her former Mideast influence.  In 1970, Russian pilots tangled with Israeli warplanes over the Suez Canal during the “War of Attrition.”  The flying time from Moscow to Damascus is about the same as New York City to Miami. Syria is in Russia’s backyard, not America’s.

A highly effective propaganda war waged against Syria and Russia by the US, French and British media has so demonized Syria’s President Assad that Washington will find it very difficult to negotiate or include him in a peace deal.  The US made the same stupid mistake with Afghanistan’s Taliban and now is paying the price.

President Bashar Assad is no Great Satan. He was a British-trained eye specialist forced into the dynastic leadership of Syria by the car crash that killed his elder brother.  The Assad regime has plenty of nasty officials but in my long regional experience Syria is no worse than such brutal US allies as Egypt, Saudi Arabia, Morocco or Uzbekistan.

President Putin has long been calling for a negotiated settlement to end this destructive conflict that is quickly resembling Lebanon’s ghastly civil war from 1975-1990 whose horrors I saw firsthand.

Who rules Syria is not worth one more death or refugee.  Sadly, Syria may be beyond repair.  The crazies we created are now running large parts of Iraq and Syria.  Russia mutters about going into Iraq.

Vlad Putin keeps his game tightly under control.  I’m not so sure about the Obama White House and its confused advisors.  Better make a deal with Assad, a natural US ally, and end this crazy war before Sen. John McCain and his  Republican crusader pals really do start World War III.

Washington refuses Russia any legitimate sphere of influence in Syria, though Moscow has had a small base in Tartus on the coast for over 40 years.  This Russian logistics base is now being expanded and guarded by a ground force estimated at a reinforced company.

This week came reports that modest numbers of Iranian infantry have entered war-torn Syria.  Lebanon’s tough Hezbollah fighters are also in action in Syria.

Opposing them are a mixed bag of irregular forces and heavily armed religious fanatics trained and armed by US, French and British intelligence and financed by Washington and the Saudis.  This writer believes small numbers of US and French Special Forces and  British SAS are also aiding anti-Assad forces.

Israel and Turkey, hopping to profit from a possible break-up of Syria,  are also discreetly aiding the anti-Assad forces that include al-Qaida and everyone’s favorite bogeyman,  Islamic State.

Howls of protest are coming from Washington and its allies over Russia’s military intervention.  Don’t we hate it when others do exactly what we do.  The US has over 800 bases around the globe.  French troops operate in parts of Africa.  Both nations stage military interventions when they see fit.

Washington accuses Moscow of imperialism as 10,000 US troops, fleets of warplanes and 35,000 US mercenaries fight nationalist forces in Afghanistan.  Iraq remains a semi-US colony. Russia withdrew all of its 350,000 troops stationed in Germany in 1991; US bases still cover Germany and, most lately, Romania.

lundi, 05 octobre 2015

Putin Lives in the Real World, Obama Lives in a Fantasyland

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Putin Lives in the Real World, Obama Lives in a Fantasyland

by Steven MacMillan

Ex: http://journal-neo.org

Listening to the speeches of the Russian President, Vladimir Putin, and the President of the United States, Barack Obama, at the United Nations General Assembly in New York on Monday, one is instantly struck by the polarization of the leader’s interpretation of world events. It is obvious that one leader resides in real world, whilst the other appears to live in a deluded fantasy.

You can understand why US Secretary of State, John Kerry, starts yawning 2 minutes and 47 seconds into Obama’s speech, as the US President’s delivery was completely devoid of vigour, spirit or honesty. An empty suit hypnotically going through the motions and reciting the usual propagated slogans, the US President spends as much time pausing as he does reading off his trusted teleprompter. 

Unsurprisingly, Obama promulgated the usual slogans in relation to Ukraine and Syria. The US President referred to the Syrian president Bashar al-Assad as a tyrant “who drops barrel bombs to massacre innocent children”, then moved on to deceptively describe how the Syrian conflict started in addition to reiterating once again that Assad must go:

“Let’s remember how this started. Assad reacted to peaceful protests, by escalating repression and killing, and in turn created the environment for the current strife… Realism also requires a managed transition away from Assad and to a new leader.”

A declassified intelligence report from the Defense Intelligence Agency (DIA) in 2012, a year after the violence erupted, completely contradicts the notion that the protests were “peaceful”, as the report documents that “the Salafists, the Muslim Brotherhood and AQI [Al-Qaeda in Iraq], are the major forces driving the insurgency in Syria.”

In addition, an evil dictator slaughtering peaceful protestors is the exact same propaganda the West used in order to demonize Muammar al-Qaddafi in Libya, even though the Libyan leader just like the Syrian leader was reacting to violent protests. Associate Professor of Public Affairs at the University of Texas, Alan J. Kuperman, wrote a policy brief in 2013, titled: Lessons from Libya: How not to Intervenein which he dispels the false narrative that Qaddafi instigated the violence:

“Contrary to Western media reports, Qaddafi did not initiate Libya’s violence by targeting peaceful protesters. The United Nations and Amnesty International have documented that in all four Libyan cities initially consumed by civil conflict in mid-February 2011—Benghazi, Al Bayda, Tripoli, and Misurata—violence was actually initiated by the protesters. The government responded to the rebels militarily but never intentionally targeted civilians or resorted to “indiscriminate” force, as Western media claimed.” 

Obama on Ukraine

Obama’s comments on the crisis in Ukraine were factually inaccurate and frankly absurd, although it is the type of rhetoric incessantly spouted by Western officials. The US President said:

“Consider Russia’s annexation of Crimea and further aggression in Eastern Ukraine. America has few economic interests in Ukraine, we recognise the deep and complex history between Russia and Ukraine, but we cannot stand by when the sovereignty and territorial integrity of a nation is flagrantly violated. If that happens without consequence in Ukraine, it could happen to any nation here today.”

So the US apparently “cannot stand by when the sovereignty and territorial integrity of a nation is flagrantly violated”, at the same time the US is leading a coalition in Syria which violates international law and violates Syria’s “sovereignty and territorial integrity”.

Secondly, there was a referendum in Crimea and the majority voted to rejoin Russia, Moscow did not coercively and aggressively force the Crimean people into the decision.

Western Aggression 

Thirdly, it was the West that overthrew the Ukrainian government, not Russia, a reality that even Foreign Affairs admits in an article written by the Professor of Political Science at the University of Chicago, John J. Mearsheimer, titled:  Why the Ukraine crisis is the West’s fault:

“The United States and its European allies share most of the responsibility for the crisis. The taproot of the trouble is NATO enlargement, the central element of a larger strategy to move Ukraine out of Russia’s orbit and integrate it into the West. At the same time, the EU’s expansion eastward and the West’s backing of the pro-democracy movement in Ukraine — beginning with the Orange Revolution in 2004 — were critical elements, too.”

Mearsheimer continues:

“Although the full extent of U.S. involvement has not yet come to light, it is clear that Washington backed the coup…The United States and its allies should abandon their plan to Westernize Ukraine and instead aim to make it a neutral buffer….. It is time to put an end to Western support for another Orange Revolution…..The result is that the United States and its allies unknowingly provoked a major crisis over Ukraine.”

Fourthly, how can Obama say “America has few economic interests in Ukraine”, when Hunter Biden, the son of the US Vice President, Joe Biden, joined the Board of Directors of one of the largest gas company’s in Ukraine following the coup?

A rare truth in Obama’s speech was when he called on Muslims to continue to reject “those who distort Islam to preach intolerance and promote violence”, adding that people that are not Muslim should reject “the ignorance that equates Islam with terror.” I completely agree with this statement. What Obama omits however, is that the majority of the radical Islamic terror groups that distort Islam are created and supported by Western intelligence agencies and regional allies in the first place.

Another microcosm of truth in Obama’s speech was not anything Obama actually said, but the response by the Russian Foreign Minister, Sergey Lavrov, to the US President’s fallacious words. Even though the US has played a pivotal role in directly causing the Syrian crisis – by funding ISIS and al-Qaeda to overthrow the Syrian government – in addition to being hostile to any serious dialogue with Russia and Iran, it still didn’t stop Obama falsely claiming “the United States is prepared to work with any nation, including Russia and Iran, to resolve the [Syrian] conflict.” Lavrov’s response to the comment was a frustrated shake of the head, and a look of disbelief that someone can lie so blatantly to the world (I suggest you watch that part, it’s quite amusing – from 26.15 into the speech).

Hopefully however, the US will eventually come to their senses and engage seriously with key players around the world to end conflicts they played a major role in creating – I wouldn’t hold your breath though.

Putin: The Voice of Reason 

Putin’s speech was the antithesis of Obama’s – insightful, honest, constructive and statesman-like. The Russian President’s analysis of the major geopolitical issues of our time was outstanding, with many practical, viable solutions to these issues provided. I highly recommend readers listen to the full speech as it is filled with critical and pertinent information, and I can’t include it all in this article. (Please not the quotes from Putin below are based on the Russian to English translation of his speech featured in this RT article)

Putin stressed that some nations “after the end of the cold war” considered themselves “so strong and exceptional” that they thought “they knew better than others”. The Russian President asserted that it is “extremely dangerous” for states to attempt to “undermine the legitimacy of the United Nations”:

“Russia stands ready to work together with its partners on the basis of broad consensus, but we consider the attempts to undermine the legitimacy of the United Nations as extremely dangerous. They could lead to the collapse of the architecture of international relations, and then there would be no other rules left but the rule of force. We would get a world dominated by selfishness, rather than collective work. A world increasingly characterized by dictates, rather than equality. There would be less genuine democracy and freedom, and there would be a world where true independent states would be replaced by an ever growing number of de facto protectorates and externally controlled territories.”

Speaking about the turmoil in the Middle East, the Russian leader correctly denounces “aggressive foreign interference” as a destructive force which has only brought chaos, not democracy:

“But how did it actually turn out? Rather than bringing about reforms, aggressive foreign interference has resulted in the destruction of national institutions and the lifestyle itself. Instead of the triumph of democracy and progress, we got violence, poverty and social disaster, and nobody cares a bit about human rights – including, the right to life. I cannot help asking those who have caused this situation: do you realize now what you have done?  But I am afraid that no one is going to answer that. Indeed, policies based on self-conceit and belief in ones exceptionality and impunity, have never been abandoned.” 

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NATO’s “Gross Violation” of UNSC Resolution 1973 

Putin specifically pinpoints Libya as a major recruiting ground for the so-called Islamic State (ISIS) – after NATO destroyed the North African nation in 2011, adding that Western supported rebels in Syria often defect to ISIS:

“Many recruits also come from Libya, a country whose statehood was destroyed as a result of a gross violation of the UN Security Council Resolution 1973. And now the ranks of radicals are being joined by the members of the so-called moderate Syrian opposition, [which is] supported by the Western countries. First they are armed and trained, and then they defect to the so-called Islamic State.”

Reports of US trained “moderate” fighters defecting to ISIS are ubiquitous. One example was when approximately 3,000 rebels from the Free Syrian Army defected to ISIS earlier this year. Interestingly, Putin also points out that ISIS did not just magically appear out of thin air, but the group was “forged as a tool against undesirable regimes”: 

“Besides, the Islamic State itself did not just come from nowhere; it was also initially forged as a tool against undesirable secular regimes.”  

This thesis is further confirmed by the 2012 declassified report from the DIA, which reveals that the powers supporting the Syrian opposition – “Western countries, the Gulf states and Turkey” – wanted to create a “Salafist principality in Eastern Syria in order to isolate the Syrian regime”:

“Opposition forces are trying to control the Eastern areas (Hasaka and Der Zor), adjacent to the Western Iraqi provinces (Mosul and Anbar), in addition to neighbouring Turkish borders. Western countries, the Gulf states and Turkey are supporting these efforts… If the situation unravels there is the possibility of establishing a declared or undeclared Salafist principality in Eastern Syria (Hasaka and Der Zor), and this is exactly what the supporting powers to the opposition want, in order to isolate the Syrian regime, which is considered the strategic depth of the Shia expansion (Iraq and Iran).” (p.5)

The former head of the DIA, Michael T. Flynn, also recently admitted that the Obama administration took the “willful decision” to support the rise of ISIS.

Don’t Play with Fire

Putin then goes on to issue a stark warning to the nefarious forces who have been using radical groups as geopolitical tools:

“It is hypocritical and irresponsible to make loud declarations about the threat of international terrorism, while turning a blind-eye to the channels of financing… It would be equally irresponsible to try to manipulate extremist groups and place them at one’s service in order to achieve one’s own political goals, in the hope of later dealing with them. To those who do so, I would like to say: Dear sirs, no doubt you are dealing with rough and cruel people, but they are [not] primitive or silly, they are just as clever as you are, and you never know who is manipulating whom… We believe that any attempts to play games with terrorists, let alone to arm them, are not just short-sighted but fire hazardous.” 

ISIS “desecrates one of the greatest world religions by its bloody crimes”, Russia’s leader said, adding: “The ideology of militants makes a mockery of Islam and perverts it true humanistic values.”

Defeating ISIS

As ISIS continues to expand its influence, it is increasingly becoming a national security threat for numerous countries outside of the Middle East, and “Russia is not an exception”.  Putin stated that “we cannot allow these criminals who have already tasted blood to return back home and continue their evil doings… Russia has always been consistently fighting against terrorism in all its forms. Today, we provide military and technical assistance both to Iraq and Syria and many other countries of the region who are fighting terrorist groups. We think it is an enormous mistake to refuse to cooperate with the Syrian government and its armed forces, who are valiantly fighting terrorism face to face. We should finally acknowledge that no one but President Assad’s armed forces and Kurdish militia are truly fighting Islamic State and other terrorist organizations in Syria

The Russia President stated the solution to the scourge of ISIS is to “create a genuinely broad international coalition against terrorism” in accordance with “international law”, which “similar to the anti-Hitler coalition, could unite a broad range of forces”.

“The desire to explore new geopolitical areas is still present among some of our colleagues,” Putin said. “First they continued their policy of expanding NATO,” he said, following the collapse of the Soviet Union, “they offered post-Soviet countries a false choice – either to be with the West or with the East. Sooner or later this logic of confrontation was bound to spark off a grave geopolitical crisis. This is exactly what happened in Ukraine where the discontent of the population with the current authorities was used and a military coup was orchestrated from outside that triggered civil war as a result.”

Russia’s leader maintained that the solution to the Ukrainian crisis is “through the full and faithful implementation of the Minsk accords”:

“We are confident that only through full and faithful implementation of the Minsk agreements of February 12th2015, can we put an end to the bloodshed and find a way out of the deadlock. Ukraine’s territorial integrity cannot be ensured by threats and the force of arms. What is needed is a genuine consideration of the interests and rights of people in the Donbass region, and respect for their choice.” 

What is blatantly clear from listening to both leaders’ speeches is that the moral leader of the world resides in Russia.

Steven MacMillan is an independent writer, researcher, geopolitical analyst and editor of  The Analyst Report, especially for the online magazine “New Eastern Outlook”.

mercredi, 30 septembre 2015

Perché Putin ha vinto il duello con Obama all’Onu

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Perché Putin ha vinto il duello con Obama all’Onu

Il presidente russo ha diviso l'Europa dagli Usa e ha messo in secondo piano la crisi ucraina

di Eugenio Cipolla

Ex: http://www.lantidiplomatico.it

«Il colloquio con Obama è stato sorprendentemente franco, costruttivo. Possiamo lavorare insieme. Eventi come questi sono utili, informali e produttivi». Vladimir Putin ha scelto queste parole, chiaramente di cortesia, per commentare il vertice con il presidente Usa Barack Obama, a margine dell’Assemblea generale delle Nazioni Unite. Novantacinque minuti di incontro a porte chiuse che hanno sancito la vittoria del leader del Cremlino sull’ex senatore dell’Illinois, mai percepito così debole e senza idee dall’inizio del suo secondo mandato. Non sono le opinioni di un tifoso, ma la constatazione della realtà, fatta di alcune considerazioni importanti dalle quali non si può prescindere per fare un’analisi seria dello scontro tra Mosca e Washington sulla crisi siriana e la guerra in Ucraina, le due spine più dolorose nei rapporti diplomatici tra i due paesi.
 
Stamattina diversi quotidiani italiani e internazionali parlavano di un avvicinamento, di un accordo, di una strategia comune tra i due dopo mesi di gelo e silenzio. Non è così. Non lo è per il semplice fatto che, al di là dei retroscena giornalistici, non è stato messo nero su bianco proprio nulla. E questo concede a Putin il vantaggio di poter continuare a proteggere l’alleato Assad, fornendo protezione diplomatica, armi e truppe. In sostanza si andrà avanti come prima, ognuno per conto proprio, ognuno con la sola preoccupazione di non creare incidenti tra le due superpotenze. Insomma, non è cambiato nulla e questo agli occhi dei russi è una cosa positiva, perché il loro presidente è uscito dalla trincea, ha sfidato il mondo intero e non si è fatto piegare dalla politica espansionistica dell’occidente, dal minaccioso Obama, difendendo gli interessi nazionali della propria gente. Al contrario, per gli americani questo nulla di fatto è un duro colpo, una sconfitta bruciante per un presidente, Obama, che in vista delle prossime presidenziali ha poco e nulla da dare.
 
Geopoliticamente, poi, il “capolavoro” di Putin è piuttosto evidente. Gli Usa, dopo le cosiddette “Primavere arabe”, hanno lasciato in Medio Oriente un vuoto che il presidente russo si è deciso ad occupare con astuzia, aumentando la propria influenza su una regione strategica. Così, oltre la Siria, considerato un vitale avamposto per impedire l’avanzata “imperialista” degli Usa, Putin si sta premurando di stringere accordi e rapporti con i maggiori paesi di quell’area, come Egitto, Iran, Turchia, Arabia Saudita, continuando peraltro a gridare al mondo che Isis e religione musulmana sono due cose distinte e separate, che il vero Islam è altra cosa (in Russia ci sono oltre 20 milioni di musulmani e questo rappresenta anche un messaggio in chiave elettorale con il fine di allargare il proprio gradimento tra i cittadini russi).
 
Ma il vero scacco matto è stato un altro. Anzi, sono due in realtà. Il primo è l’aver diviso l’Europa dagli Usa, con i capi di stato del vecchio continente, a parte l’eccezione francese, molto più disposti a questo punto a tenersi Assad pur di mettere fine all’immensa ondata migratoria che sta investendo l’Ue. Il secondo, invece, è l’aver messo in secondo piano la crisi ucraina, riuscendo de facto a congelarla, dimostrando di essere lui a muovere i fili della politica e della diplomazia in quello che considera il giardino di casa sua. 

mardi, 09 juin 2015

Giscard et Poutine commentés par Chateaubriand

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Giscard et Poutine commentés par Chateaubriand
 
La sagesse a toujours plaidé pour un rapprochement franco-russe!
 
Ecrivain
Ex: http://www.bvoltaire.fr
 

J’ai indiqué déjà combien notre ancien Président (quelque reproche lointain qu’on puisse encore lui faire…) a soutenu Poutine dans le bras de fer grotesque et dangereux que lui ont imposé Obama, Merkel et quelques autres. Mais la colère, comme dit l’apôtre, finira par les atteindre.

J’avais été frappé, il y a quelques années, par une remarque de Valéry Giscard d’Estaing sur La Chaîne parlementaire, lorsqu’il évoquait avec émotion et sensibilité l’héroïsme et la furia guerrière de nos soldats français aux temps d’Austerlitz et des guerres napoléoniennes. C’était la France d’avant l’ère du vide ou du bide, comme on voudra.

En 2012, notre nostalgique s’était rendu aux célébrations de la bataille de Borodino. Enchanté, Vladimir Poutine lui avait tenu à peu près ce langage : « Toute la population s’est élevée contre les envahisseurs. Son héroïsme sans précédent, sa force spirituelle et son attachement profond à sa terre ont donné à notre pays une immense force qui n’avait jamais été observée auparavant. »

On comparera avec le langage des roquets de Bruxelles !

Et notre homme d’État « le plus puissant du monde » (dixit les médias yankee) d’ajouter : « La France et la Russie ont été du même côté pendant les deux guerres mondiales… On a passé plus de temps ensemble qu’à se faire la guerre », car « la France avait presque toujours été un partenaire stratégique de la Russie ».

La sagesse a toujours plaidé pour un rapprochement franco-russe, en effet. Et notre rapprochement avec les Anglo-Saxons, cultivé par les élites colonialistes et bourgeoises du XIXe siècle, ne nous aura amené que des défaites ou des humiliations. Ils nous demandent de nous faire trouer la poitrine pour leur démocratie, écrivait Bernanos, puis ils nous tendent la note pour les trous dans les uniformes.

L’ineptie de notre politique actuelle ferait ainsi bien de s’inspirer de ces lignes admirables écrites par Chateaubriand au tome III de ses Mémoires (L29 Chapitre 13) :

« Il y a sympathie entre la Russie et la France ; la dernière a presque civilisé la première dans les classes élevées de la société ; elle lui a donné sa langue et ses mœurs. Placées aux deux extrémités de l’Europe, la France et la Russie ne se touchent point par leurs frontières, elles n’ont point de champ de bataille où elles puissent se rencontrer ; elles n’ont aucune rivalité de commerce, et les ennemis naturels de la Russie (les Anglais et les Autrichiens) sont aussi les ennemis naturels de la France. En temps de paix, que le cabinet des Tuileries reste l’allié du cabinet de Saint−Pétersbourg, et rien ne peut bouger en Europe. En temps de guerre, l’union des deux cabinets dictera des lois au monde. »

Mais c’est, sans doute, trop demander à nos politiciens et à leurs électeurs, qui s’en tiendront à la coutumière propagande anti-tsariste de nos bons vieux médias.

On saluera, en passant, le passage de Marine Le Pen à Moscou. À défaut de grandir la France, il exaspérera Juppé ou BHL.

dimanche, 07 juin 2015

La victoire diplomatique de Vladimir Poutine

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La victoire diplomatique de Vladimir Poutine

Auteur : Alfredo Jalife-Rahme-La Jornada
Ex: http://zejournal.mobi

« Qui trop embrasse mal étreint », dit-on. À vouloir à la fois négocier avec l’Iran, détruire le « Moyen-Orient élargi » et l’Ukraine, ruiner la Russie, encercler et menacer la Chine tout en préparant de nouvelles guerres en Amérique latine, les États-Unis ont dû se résoudre à faire quelques pas en arrière. Pour calmer ses vassaux européens, l’Empereur Obama a dépêché son fidèle Kerry à Sotchi reprendre langue avec le chef rebelle Poutine auquel il refusait d’adresser un regard depuis un an. Il fut convenu de reprendre les affaires (et d’abroger les sanctions européennes lorsque les multinationales US auront été servies), de laisser la Novorossia tranquille, et de former un gouvernement de transition en Syrie.

Le New York Times est le seul média docile à la férule israelo-anglo saxonne à avoir osé rendre compte de la victoire diplomatique de la Russie, quatre jours après la visite inopinée de John Kerry à Sotchi, la ville chère à Poutine, Sotchi, la base touristique sur la Mer Noire où le tsar Poutine a investi plus de 50 milliards de dollars pour les Jeux olympiques. Tout un symbole.

D’après David Herszenhorn, la visite de Kerry a été interprétée partout comme le signe de la reddition des États-Unis. Je m’étais exprimé dans le même sens quatre jours plus tôt.

Impossible d’ignorer quelque chose d’aussi grandiose !

On est loin de l’apothéose d’Obama quand il se vantait d’avoir fait plier l’économie russe et son « dirigeant vaniteux » (sic) en faisant chuter le prix du pétrole, entraînant la fuite des capitaux, la dévaluation du rouble et les sanctions européennes.

Blabla et compagnie, aujourd’hui Poutine n’est plus le Hitler d’Hillary, et dans les termes d’Obama, le troisième danger pour l’humanité après ebola et les djihadistes.

Kerry n’a pas osé aborder le contentieux de la presqu’île éminemment stratégique de Crimée, qui a tout l’air d’avoir été bel et bien cédée à son propriétaire historique. 

Va-t-on vers l’abandon de la partie occidentale de l’Ukraine usurpée par le coup d’État de Victoria Nuland, la belliqueuse sous-secrétaire d’État israélo-américaine ?

Obama qui voulait isoler tout le monde s’est retrouvé bien isolé, avec la parade militaire somptueuse qui a mis en scène l’association stratégique (à distinguer d’une alliance militaire) entre la Chine et la Russie, sans perdre de vue l’Inde et deux puissances moyenne qui comptent dans la géostratégie : le Khazakstan et l’Égypte.

Selon David Herszenhorn, Obama avait pris la tête de la charge occidentale pour punir Poutine de son intervention en Ukraine, et avait expulsé la Russie du G8.

Dans son meilleur style de judoka ceinture noire, et de grand joueur d’échecs, on a vu Vlady déjouer olympiquement les attaques des USA et de leurs alliés européens, et prouver qu’il comptait vraiment, sur la scène globale.

À la mi-décembre, les États-Unis ont lancé leur machine financiériste pour mettre à genoux la Russie et sa devise, le rouble, mais sous la table ce sont les finances colossales de la Chine qui ont rattrapé le coup, d’après ce qu’a laissé fuiter le britannique Alastair Crooke, membre du think tank Conflicts Forum.

La Russie a suggéré de faire plier le dollar, de le replonger dans la grave crise de 2008, mais la Chine n’a pas donné suite. Ce qui indique que Pékin ne souhaite pas se mettre à dos Washington, dans cette étape tripolaire, et alors que les Chinois se posent en émergents triomphants.

Toujours selon David Herszenhorn, le « dirigeant suprême » (sic) Poutine, a confondu constamment ses adversaires, étrangers ou internes, et une fois de plus il semble se dresser, dans sa dernière confrontation avec l’Occident, au moins comme un héros national, droit dans ses bottes, aux commandes, et sans avoir cédé d’un pouce, surtout en Crimée, le joyau de la couronne. Et il n’est pas loin d’être le champion gagnant aussi dans la confrontation avec l’Occident.

Notre journaliste cite le russophobe Mathew Rojansky, directeur de l’Institut Kennan –lequel à mon avis, n’a hérité en rien de la légendaire sagesse de de George Kennan–, à Washington, qui insiste pour souligner que le renforcement de Poutine peut être illusoire, parce que l’économie russe est en récession et reste dangereusement dépendante de son approvisionnement en énergie au moment même où la plupart des analystes considère que les perspectives à long terme pour les prix du gaz et du pétrole sont désastreuses.

Wishful thinking, vulgaire réductionnisme financiériste d’économistes prenant leurs désirs pour des réalités…

À mon avis, les géostratèges US, fort novices, ont bien trop misé sur la guerre financiériste, qui aurait pu pulvériser une république bananière, mais non la Russie, superpuissance nucléaire.

Comment se fait-il que le New York Times admette que les sanctions occidentales semblent avoir échoué ?

Serait-ce que Kerry a devancé une fronde de l’Union européenne, pressée d’en finir avec des sanctions contreproductives ?

Chronos et Icare, celui qui défiait les lois de la gravité depuis la Crète, ont fait alliance en Ukraine occidentale et ont mis au bord de la débâcle le régime putschiste néonazi de Kiev incarné par le duo Petro Poroshenko le marchand de chocolat (ça ne s’invente pas) installé dans la place par l’Allemagne, et son Premier ministre puéril Arseni Iatseniouk, pantin manipulé par l’amazone Victoria Nuland, qui s’était quelque peu trompée dans ses calculs puisque la guerre financière contre la Russie a commencé par ruiner l’Ukraine.

Du point de vue de David Herszenhorn, le virage subtil d’Obama vaut reconnaissance pragmatique du fait que la politique consistant à isoler la Russie économiquement et diplomatiquement, est un échec. Il cite Viktor A. Kremenyuk, vice directeur du think tank Institut US-Canada, lié à la prestigieuse Académie des sciences de Russie, qui admet que le Kremlin a résisté aux sanctions et introduit des contre-sanctions.

Tout cela alors que Poutine n’a jamais cessé de coopérer avec les USA dans les contentieux pressants concernant la Syrie, l’Iran, la Corée du Nord et le Yémen, se bornant à quelques menaces de se retirer des négociations sur l’armement nucléaire ou conventionnel, que Kerry utilise comme feuille de vigne pour justifier sa visite à Sotchi.

Paul Craig Roberts, assistant jadis au secrétariat au Trésor sous Ronald Reagan, dit que les États-Unis ont envoyé John Kerry en Russie en position de suppliant.

Or donc, si Obama a lâché l’Ukraine, c’est en échange de quoi ? Qu’en est-il de la France et de l’Allemagne reléguées par les États-Unis de Minsk II à Sotchi ?

David Herszenhorn ne lit même pas son propre journal ; il n’est pas au courant de l’avertissement donné par Vlady lors de sa conférence historique à Munich, il y a huit ans.

Il avait annoncé l’échec de toute la politique d’amateurs de l’administration Obama, alors que le meilleur géostratège de tous les temps pour les US, Georges Kennan, avait prévenu que c’était une grave erreur d’asphyxier la Russie, super puissance nucléaire.

À mon avis, le problème des USA vient de ce que leur politique étrangère est entre les mains de néophytes portés sur les bravades de bistrot, parce que la génération précédente est en voie de disparition : Kissinger a 91 ans, Brent Scowcroft 90, Brzezinski 87, et le Texan James Baker III 86. Et le plus imprudent parmi eux est le russophobe Brzezinski.

Aujourd’hui la politique étrangère des USA se trouve prise en otage par les multimédias israélo-anglosaxons et leurs clowns nocturnes et bavards, qui sévissent dans les talk shows et ne savent même pas ce qu’est une multi ogive nucléaire placée dans un missile intercontinental russe Topol M, qui couperait toute envie de rire à l’humanité.

À Moscou, on ne doit pas être rassuré par la retraite tactique des États-Unis d’Ukraine, alors que les alliés de Vicky Nuland dans les Balkans, avec à leur tête le méga-spéculateur George Soros – pantin présumé des banquiers esclavagistes Rothschild, poussent à la révolte islamique en Macédoine : c’est le nouveau front israélo-anglo-saxon contre la Russie.