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dimanche, 09 avril 2023

La revue de presse de CD - 09 avril 2023

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La revue de presse de CD

09 avril 2023

Revue de presse garantie sans aucune intervention d’intelligence artificielle

EN VEDETTE

MacGregor et Dénécé sur un même plateau dans Brochu en direct

Aujourd'hui, au Québec, le colonel US Douglas MacGregor et l'analyste français Éric Dénecé, fondateur et directeur du CF2R répondent successivement à cinq questions sur l'Ukraine dans une rencontre inédite sur un même plateau. Deux poids lourds de la géopolitique sur un même plateau, ça vaut le détour. Les réponses qui s'enchaînent sont très complémentaires.et s'accordent sur le fond. Merci au média québécois de nous proposer cet échange passionnant.

RadioInfoCite.com

https://www.youtube.com/watch?v=sX4aHlJLT98

ASIE

Climat, biodiversité, inégalités : pourquoi la Chine, l'Inde et l'Indonésie sont cruciales pour notre avenir

Environnement, climat, développement social… Les enjeux sont énormes pour les trois géants de l’Asie en développement. Ils vont déterminer l’avenir de ces trois pays et pour une bonne part, celui de la planète. Premier volet de cette comparaison entre Chine, Inde et Indonésie.

asialyst.com/fr

https://asialyst.com/fr/2023/01/14/climat-inegalites-biod...

AUSTRALIE

L'Australie n'est pas une nation, c'est une base militaire étatsunienne avec des kangourous

L'un des très nombreux signes montrant que l'Australie n'est rien d'autre qu'un atout pour l'armée et les services de renseignement étatsuniens est la façon dont son gouvernement a constamment refusé d'intervenir pour protéger le citoyen australien Julian Assange des persécutions politiques aux mains de l'empire étatsunien. Dans un nouvel article intitulé « Penny Wong s'efforce d'atténuer les espoirs de percée dans l'affaire Julian Assange », The Guardian cite la ministre australienne des affaires étrangères, qui a déclaré : « Nous faisons ce que nous pouvons, entre gouvernement et gouvernement, mais il y a des limites à ce que cette diplomatie peut accomplir ». Mme Wong a répondu à la question de savoir si le Premier ministre Anthony Albanese avait discuté de l'affaire de liberté de la presse la plus célèbre au monde avec le président étatsunien et le Premier ministre britannique lorsqu'il les a rencontrés ensemble il y a deux semaines.

le-blog-sam-la-touch

http://le-blog-sam-la-touch.over-blog.com/2023/04/l-austr...

CHINE

Sommes-nous proches d’une guerre dans le Pacifique entre les États-Unis et la Chine ?

Alors que tant Pékin que Washington en sont à envisager la possibilité d’un conflit au sujet de Taïwan, il est important de mesurer les conséquences probables d’un tel affrontement.

les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/sommes-nous-proches-d-une-guerr...

La Chine publie un rapport sur les innombrables violations des droits de l'homme aux États-Unis

Un rapport officiel de la Chine sur l’état de droit qui montre un durcissement très net des relations diplomatiques entre l’Empire du Milieu et l’Empire tout court.

lagazetteducitoyen.over-blog.com

http://lagazetteducitoyen.over-blog.com/2023/04/la-chine-...

COMPLOTISME (C’est-celui-qui-dit-qui-est !)

Royaume-Uni. Le ministre de l’Intérieur désigne les gangs de violeurs « pakistanais » ciblant les « jeunes filles anglaises blanches vulnérables » [Vidéo]

Annonçant la mise en œuvre d’un plan d’action contre les gangs de violeurs de femmes et d’enfants au Royaume-Uni, le Premier ministre britannique et son ministre de l’Intérieur n’ont pas hésité à pointer du doigt l’origine pakistanaise d’une grande partie de ces criminels.

breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2023/04/06/218221/uk-pakistan...

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DÉCONSTRUCTION/SCHIZOPHRÉNIE/DÉBILITÉ

Des associations écrivent à Pap Ndiaye pour dénoncer « de graves dérives lors de séances d’éducation à la sexualité dans une école française »

Deux associations, les Mamans louves et SOS Education, dénoncent dans un communiqué « de graves dérives lors de séances d’éducation à la sexualité dans une école française ». Et adressent une lettre à Pap Ndiaye au sujet de sa volonté de faire pénétrer l’éducation à la sexualité dans les écoles (et de manipuler les esprits de nos enfants). Voici ce communiqué.

breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2023/04/06/218157/des-associa...

DÉSINFORMATION/MÉDIAS/CORRUPTION/CENSURES

Écoles de journalisme : l’ESJ Lille, école supérieure de formatage

Nous commençons une série d’articles sur les 14 écoles de journalisme reconnues par la profession. À tout seigneur tout honneur, la première sera l’École Supérieure de Journalisme (ESJ) de Lille, une des plus sectaires. Fondée en 1924 par Paul Vershchave dans le giron des Facultés Catholiques, l’ESJ est aujourd’hui l’une des écoles de formation au journalisme les plus prestigieuses et « cotées » de France. Association à but non lucratif, reconnue par l’Etat, l’ESJ Lille est labellisée « Établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général » (EESPIG). On y accède par un concours de niveau bac +3 organisé conjointement avec l’Institut d’Études Politiques de Lille (Sciences Po Lille). L’ESJ fait partie des 14 écoles reconnues par la Commission paritaire nationale pour l’emploi des journalistes (CPNEJ), composée de représentants des patrons de presse et de syndicats professionnels.

ojim.fr

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La véritable histoire du Covid cachée par le secret-défense?

Pourquoi interdire aux médecins de traiter ? Pourquoi le secret-défense pour une épidémie ? Pourquoi vacciner des personnes qui n’ont rien à craindre d’une maladie ? Pourquoi décider d’interdire dès le premier jour des traitements sans vérifier avant s’ils pouvaient marcher ? Médecin, je n’ai pas compris, j’ai cherché à comprendre. Quel est le lien cohérent qui unit ces faits qui pris individuellement sont incohérents ?

francesoir

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Journalistes-conseils: une relation incestueuse?

Entretiennent-ils des relations incestueuses ? Certains journalistes de France Info se sont faits récemment épinglés pour cumuler des activités de conseils avec leur emploi de journaliste. Une double activité qui soulève la question de l’influence de certains de leurs clients sur leurs prises de position à l’antenne. Retour sur un problème épineux, et pas vraiment nouveau, dont la mise en lumière ne fait que commencer…

ojim.fr

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Les fake news de l’État profond : les manipulateurs du gouvernement contrôlent le cycle de l’information

« Nous, les Américains, sommes les ultimes innocents. Nous sommes toujours prêts à croire que, cette fois, le gouvernement nous dit la vérité », Sydney Schanberg, ancien journaliste du New York Times. Parlons de fake news, d’accord ? Il y a d’abord les « fake news » classiques, qui ne sont pas vraiment des « nouvelles », mais plutôt des informations titillantes, dignes d’un tabloïd, colportées par toute personne disposant d’un compte Twitter, d’une page Facebook et d’une imagination débordante. Ces histoires vont du ridicule et du clic évident à la satire et à la manipulation politique. Toute personne dotée d’un peu de bon sens et d’un accès à l’internet devrait être en mesure de démêler le vrai du faux dans ces histoires en effectuant quelques recherches élémentaires. Si ces histoires prospèrent, c’est en grande partie grâce à la crédulité générale, à la paresse et à l’analphabétisme médiatique du grand public, qui, par sa docte conformité, pose rarement des questions, remet en cause ou confronte. Il y a ensuite le type de nouvelles plus sournoises diffusées par l’un des plus grands propagateurs de fake news : le gouvernement américain. Au milieu de l’apoplexie soigneusement entretenue par le gouvernement et les médias d’entreprise sur les fake news, vous n’entendrez pas beaucoup parler du propre rôle du gouvernement dans la production, la plantation et le colportage de fake news axées sur la propagande – souvent avec l’aide des médias d’entreprise – parce que ce n’est pas comme ça que le jeu fonctionne.

aubedigitale.com

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Revue de presse RT du 26 mars au 1er avril 2023

Exercice hebdomadaire de ré/désinformation grâce à Russia Today. Au sommaire : test hypersonique américain raté ; Crédit Suisse et UBS face à de lourdes sanctions financières américaines ; le Sénat américain rejette l’abrogation de l’autorisation à faire la guerre ; l’armée danoise manque de soldats comme jamais ; TotalÉnergie accusé de produite du carburant pour des avions russes ; importations de poissons russes en hausse vers l’UE ; augmentation des investissements russes en Iran ; et aussi du diesel dans l’UE ; le Brésil et la Chine signent un pacte pour abandonner le dollar ; l’Arabie saoudite vers le bloc russo-chinois et rétablit ses relations avec la Syrie ; l’Ouganda très satisfait de la Russie ; le Tchad nationalise les actifs d’ExxonMobil ; où finit l’aide américain en Ukraine ; nouvelle déclaration de Seymour Hersh sur le sabotage de Nord Stream ; le Royaume-Uni promeut l’usage d’obus à l’uranium appauvri en Ukraine ; la Roumanie propose d’annexer un territoire « volé par l’URSS » ; des armes russes en Biélorussie ; le Conseil de sécurité des NU rejette une demande d’enquête sur le sabotage du Nord Stream.

lesakerfrancophone.fr

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ÉCOLOGIE (même si, parfois, il n’y a pas que des zozos !)

Van der Leyen et l’UE veulent tuer la propriété privée au nom de l’écologie

Cela vous a sans doute échappé, mais l’Union Européenne vient de voter un texte qui pose la question de la disparition de la propriété privée. Il s’agit d’une authentique révolution, motivée par un prétexte purement idéologique : la lutte pour le climat.

On notera juste au passage que cette théorie du réchauffement climatique est largement contestée. De multiples scientifiques remettent en cause cette théorie du GIEC, notamment parce que cet organisme a été pris la main dans le sac à plusieurs reprises à trafiquer les chiffres pour qu’ils disent ce que le GIEC prétend.

synthesenationale.hautetfort.com

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Retirons l'agriculture aux bourgeois et aux affairistes

Depuis les temps les plus reculés jusqu'à il y a quelques années, l'agriculture a certainement représenté le travail le plus important pour l'humanité en termes de communauté et de coexistence civilisée. Bien que l'homme ait pu survivre, et pendant longtemps, en tant que simple chasseur ou cueilleur de fruits sauvages, l'art de la vie en communauté n'a pu se développer jusqu'à l'épanouissement de civilisations impressionnantes qu'à travers l'exploitation de territoires où s'installer de façon permanente, en obtenant de la nourriture pour soi et sa famille/son clan/sa communauté et en créant un lien stable, sacré et de vénération, avec la terre où l'on vit.

euro-synergies.hautetfort.com

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ÉCONOMIE

In $ We Trust

Nota : Certains sujets abordés mériteraient de plus amples développements ou suscitent des questions qu’il n’était pas possible de traiter dans la présente note.

1/ Le dollar US est de loin la devise la plus utilisée dans les transactions internationales. Il est actuellement impliqué dans 88 % des transactions de change, contre seulement 31 % pour l’Euro et 7 % pour le Yuan. Il représente 60 % des réserves de change au niveau mondial. C’est la devise utilisée pour la quasi-totalité des mécanismes financiers internationaux, en particulier le système de règlement de paiements internationaux SWIFT. C’est vers le dollar que les investisseurs inquiets de la fragilité des établissements bancaires se sont récemment tournés, ce qui a obligé la banque centrale américaine à accélérer et amplifier ses procédures de swap de devises. Les cours mondiaux des matières premières sont évalués en dollars. La liste n’est pas exhaustive.

 Cette prépondérance a historiquement deux causes principales : l’écrasante supériorité économique de l’économie américaine après la seconde guerre mondiale et l’accord conclu entre les Etats-Unis et l’Arabie saoudite en 1979, après les chocs pétroliers de 1973 et1979 : l’Arabie s’est en effet engagée alors à ne vendre son pétrole qu’en dollars US – d’où le concept de « pétrodollars » – et à réinvestir ses dollars excédentaires en titres du Trésor américain ou d’entreprises américaines, en échange de quoi les Etats-Unis s’engageaient à protéger militairement le pays.

geopragma.fr

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Banques, finance et confusions

Beaucoup de crétineries se publient à propos des dérives du secteur bancaire, en particulier les critiques acerbes de ce qui mine Crédit Suisse depuis une trentaine d’année. Le problème que posent les banques débridées actuelles n’est ni de servir des clients privés et commerciaux, ni de s’occuper des finances des entreprises (corporate finance) mais bien celui du rôle qu’elles jouent dans les investissements qu’elles font pour elles-mêmes, notamment les « produits financiers (sic) » qu’elles mettent sur le marché dans cette seule intention.

Le blog de Michel de Rougemont

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ÉDUCATION

L'Éducation nationale incite-t-elle les collégiens à faire le ramadan ?

À l’école, il y a les notes que l’on rapporte et celles que l’on envoie. Les premières angoissent le quotidien des élèves, les secondes égayent la vie de l’administration. Sur le site Opinion internationale, Michel Taube fait sensation en publiant une note de l’Académie de Paris sur la « désinscription de la demi-pension pendant la période du ramadan ». On y voit une feuille certes déchirée et anonymisée mais dont le texte court est bien lisible. Il est daté du 6 février.

laselectiondujour.com

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ÉNERGIE

OPEP : Les Saoudiens n’ont plus peur des États-Unis

Le choc des réductions de la production de pétrole à partir du mois de mai présenté dimanche 2 avril par l’OPEP+ signifie essentiellement que huit pays clés de l’OPEP ont décidé de s’allier à la Russie pour réduire la production de pétrole, ce qui signifie que l’OPEP et l’OPEP+ reprennent le contrôle du marché pétrolier. Aucun pays producteur de pétrole ne joue ici le rôle de joueur de flûte. Le plus beau, c’est que l’Arabie saoudite et sept autres grands pays de l’OPEP ont décidé, contre toute attente, de soutenir les efforts de la Russie et de réduire unilatéralement la production. Alors que les huit pays de l’OPEP parlent d’une réduction d’un million de barils par jour de mai à la fin de l’année, la Russie prolongera de 500 000 barils, pour la même période, l’ajustement volontaire qu’elle a déjà entamé en mars.

Si l’on ajoute à cela les ajustements de production déjà décidés précédemment par l’OPEP+, le total des ajustements volontaires de production supplémentaires atteint le chiffre impressionnant de 1,6 million de barils par jour.

reseauinternational.net

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Un éminent scientifique d’Oxford affirme que l’énergie éolienne « est un échec absolu »

On pourrait affirmer qu’il est à la portée d’un enfant intelligent scolarisé en classe primaire de comprendre les mathématiques basiques qui démontrent que l’énergie éolienne constitue un désastre économique et sociétal en cours de préparation. Désormais, le professeur émérite Wade Allison, mathématicien et physicien pour l’Université d’Oxford, chercheur au CERN et membre du Keble College, a fait les calculs. Il conclut que le Royaume-Uni est confronté à la possibilité d’une rupture d’énergie électrique. Il affirme que « l’énergie éolienne est un échec absolu », et ajoute que les gouvernements font fi des « preuves écrasantes » de l’inadéquation de l’énergie éolienne, « et font appel aux fanfaronnades plutôt qu’à une analyse raisonnée. »

lesakerfrancophone.fr

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ÉTATS-UNIS

Les États-Unis se préparent aux élections dans une guerre civile non déclarée

Les trains déraillent, les usines explosent, les centrales électriques tombent en panne... L'actualité aux États-Unis ressemble à des bulletins de guerre. Plus précisément, à une chronique de guérilla.

observateurcontinental.fr

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La transformation idéologique cruciale de notre époque

La transformation régionale s’est produite parce que les États-Unis et leur doctrine toxique du « avec nous ou contre nous » ont été totalement exclus des négociations. Est-il possible de mieux comprendre la dynamique qui sous-tend la « transformation » russo-sino-orientale en visitant les points de l’ordre mondial occidental qui sont soumis à des tensions maximales ? Ces derniers arcs de tension placent-ils la métamorphose régionale du Moyen-Orient dans un contexte plus large ? Je pense que oui. Les États-Unis en sont un bon exemple : Pendant la plus grande partie de l’histoire récente, la démocratie libérale américaine était un projet protestant – comme l’écrit Ross Douthat. « Notre forme de gouvernement n’a aucun sens si elle n’est pas fondée sur une foi religieuse profondément ressentie », a déclaré Dwight Eisenhower en 1952. La Constitution et la Déclaration des droits sont le squelette protestant de cet état de conscience.

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Journaliste, espion ou guerrier sur le front cybernétique ?

Le 30 mars, les autorités russes ont arrêté un journaliste du Wall Street Journal, Evan Gershovitch : le Service fédéral de sécurité russe (FSB) a déclaré qu’il « agissait sur instruction de la partie américaine pour recueillir des informations sur les activités de l’une des entreprises du complexe militaro-industriel russe qui constituent un secret d’État ». Gershkovich, qui a été arrêté dans la ville d’Ekaterinbourg, dans la région de l’Oural, sera détenu au moins jusqu’au 29 mai, selon les autorités judiciaires russes. Le Wall Street Journal a déclaré qu’il « démentait avec véhémence » l’allégation et a demandé à la Russie de libérer Gershkovich, qui vit à Moscou depuis six ans et a été accrédité par le ministère russe des affaires étrangères. S’il est reconnu coupable, il risque jusqu’à 20 ans de prison.

lesakerfrancophone.fr

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FINLANDE

Tomi Huhtanen : « L’Europe du Nord se tourne vers le centre droit »

Entretien sur le résultat des élections générales en Finlande avec Tomi Huhtanen, le directeur exécutif du Wilfried Martens Centre for European Studies, le centre de réflexion du Parti Populaire Européen (PPE).

contrepoints.org

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FRANCE

La porte-parole de la Diplomatie russe dénonce les menaces de la France

La porte-parole de la Diplomatie russe, Maria Zakharova a dénoncé, mercredi 5 avril, les menaces qui seraient proférées par les autorités françaises à l’égard des partenaires de la Russie qui lui apporteraient un soutien dans la guerre en Ukraine. Interrogée par Anadolu sur les déclarations du président français, Emmanuel Macron, au cours de sa visite en cours en Chine, Zakharova a d’abord souligné que « le piège dans lequel tombent de nombreux pays de l’Union européenne est qu’eux-mêmes ne savent parfois pas à quel titre ils font leurs déclarations ». « Lorsqu’ils abordent des questions internationales, ils deviennent les otages de cette responsabilité mutuelle, qu’ils appellent « la politique étrangère commune de l’Union européenne », et qui n’est en fait qu’une sorte d’habitudes dictatoriales, car il leur est interdit de s’exprimer dans une capacité nationale », a estimé la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

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Du PCF à l'entretien avec Macron : Pif Gadget, 75 ans d’un journal très politique

En pleine contestation de la réforme des retraites, Emmanuel Macron a donc choisi de s’exprimer dans… Pif, le mag, la version moderne du célèbre magazine pour enfants. Autrefois dirigée par des proches du parti communiste, la revue possède une riche histoire politique.

marianne.net

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« Expliquer la levée de l'obligation vaccinale est un exercice délicat, qui pourrait ouvrir la boîte de Pandore ».

Jean-Louis est photographe. En octobre 2021, il fonde le collectif Les Essentiels, afin de venir en aide aux soignants et aux autres catégories de personnels qui ont refusé de se soumettre à l'obligation vaccinale contre la Covid-19. Suspendus en conséquence, parfois dès septembre 2021, privés de salaires, sans droits d'accès au chômage, sans ressources, ceux-ci ont été mis au ban de la société au nom d'une gestion de la crise sanitaire qui a privilégié le politique au sanitaire. Une doxa dont les méfaits allaient perdurer pendant plus de 500 jours, provoquant un désastre humain et social insoutenable. Alors que la Haute Autorité de Santé (HAS) vient de conseiller la fin de cette vaccination obligatoire expérimentale et laisse entrevoir la possibilité d'une réintégration des suspendus, Jean-Louis reste prudent : il pose la question de l'effet réel de l'annonce et s'interroge sur les conditions de ce revirement. Il dresse par ailleurs un constat implacable à propos de ce qui s'est déroulé au sein même de notre société, prise dans un cauchemar dénué de sens, fallacieusement justifié au nom de la science. Entretien avec Jean-Louis, du collectif « Les Essentiels »

francesoir.fr

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GAFAM/IA

Pourquoi l'Intelligence Artificielle ne remplace pas les discussions entre humains et le lien social informatif

Merci à France-Soir qui m'a permis de comprendre ce qui motive des personnalités, telles Elon Musk ou Yuval Noah Harari, à faire une pause urgente dans le développement et déploiement de l'IA (Intelligence Artificielle), bien que pour des raisons probablement différentes. En effet, l'IA permet de montrer les manquements et les mensonges des gouvernants sur des sujets d'actualité, ainsi que donner cours à des manipulations d'opinions ! À condition que des humains s'en aperçoivent et échangent à ce sujet. En voilà deux exemples concrets.

francesoir.fr

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L’élite européenne en marche pour contrôler nos vies et notre économie

Reconnaissance faciale, système d’intelligence artificielle et score social : la France s’engage-t-elle dans une surveillance de masse ?

contrepoints.org

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GÉOPOLITIQUE

Nouvelle Guerre froide et refus de la diplomatie : Un scénario perdant pour tout le monde

Les événements entourant le premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ont pris des allures de Guerre froide, avec l’Amérique et ses alliés alignés d’un côté et la Chine et la Russie de l’autre. Certains hommes politiques à Washington – et peut-être à Pékin – semblent à l’aise avec cette situation. Mais ils devraient être prudents. Il n’y a aucune raison de croire qu’une répétition de la guerre froide au XXIe siècle serait bénéfique pour qui que ce soit, surtout pour les États-Unis.

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Von der Leyen rencontrera Biden pour discuter d’une réponse commune à la menace chinoise. Soyez inquiets !

L’OTAN passe discrètement de l’Ukraine à la guerre froide contre la Chine, tandis que les États-Unis préparent une guerre froide fondée sur des sanctions et « sans précédent » contre Pékin. Lors d’une récente interview, Nicholas Burns, l’ambassadeur américain en Chine, après avoir qualifié la Chine de « menace » , a déclaré sans ambages :« Nous sommes le leader dans cette région [indo-pacifique]. [Et nous] restons ». L’interviewer, Mike Gallagher, membre du Congrès américain, a décrit la nouvelle guerre froide américaine comme n’étant pas un match de tennis poli, mais une lutte existentielle pour la vie au XXIe siècle. La tentative antérieure du président Xi de parvenir à une « nouvelle détente » avec les États-Unis lors du G20 de novembre à Bali (en fait une tentative d’explorer si un modus vivendi minimum avec les États-Unis était possible) est terminée. L’hystérie autour du ballon chinois, les preuves croissantes que l’Ukraine se transforme en débâcle pour l’administration Biden dans la région de Bakhmut et les menaces grossières de « conséquences » pour la Chine dans le cas où elle soutiendrait militairement la Russie (et au moment même où Washington promettait davantage d’armes pour Taïwan), ont été trop fortes pour Pékin. Loin de ses premiers essais de détente américaine, la Chine s’est depuis lors engagée dans la direction opposée. Elle s’est « recalibrée »

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IMMIGRATION/ISLAMISME/REMPLACEMENT

19 millions d’immigrés et descendants d’immigrés en France selon l’Insee

L’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a publié fin mars un dossier sur les « immigrés et descendants d’immigrés en France » (en lien ci-dessous) afin de donner des « informations objectives pour alimenter le débat ». Celui-ci paraît indispensable ! Cette étude de deux cents pages comportant de nombreux graphiques révèle en effet que la population française compte à présent (d’après une comptabilité arrêtée fin 2021) 6,9 millions d’immigrés « officiels » (personnes nées à l’étranger et résidant sur le territoire) sur 67,6 millions d’habitants, soit 10,3 % de la population. Cette proportion était de 6,5 % en 1968. Sur trois générations, l’immigration représente plus de 19 millions de personnes (7 millions d'immigrés, 7,3 millions de personnes ayant au moins un parent immigré, et 4,8 millions d'immigrés de troisième génération), soit un habitant sur trois. « Entre 1999 et 2021, le nombre d'immigrés a été multiplié par 1,6 tandis que la population totale a été multipliée par 1,1 », notent les auteurs de l'étude. 41% de ces émigrés récents viennent d’Afrique dont 21 % du Maghreb, 33 % d'Europe, 15 % d'Asie et 11 % d'Amérique et d'Océanie.

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« Envoyé spécial » Callac : sous Staline, Élise Lucet aurait fait merveille...

Jeudi 6 avril 2023, en début de soirée, la chaîne France2 diffusait dans l'émission « Envoyé spécial » un reportage sur Callac et sur St-Brévin. À Callac (2 200 habitants), le projet Horizon de la Fondation Merci prévoyait de faire venir 70 familles africaines, ce qui représentait environ 530 personnes, c’est à dire 25% de la population du village. Importer autant de personnes tellement différentes dans un petit village breton ne pouvait que créer une multitude de problèmes. Les promoteurs de ce projet refusaient de prendre en compte cette réalité. Face à cela, la population s’est mobilisée et a dit au maire :

  • Ce projet n’était pas dans votre programme électoral
  • Soit vous abandonnez le projet, soit vous faites un référendum

L’émission d’Élise Lucet n’en dira pas un mot. Aucun téléspectateur ne saura que ce maire de « gôche » refusa la consultation de sa population, déclarant en public sur le marché : « Je ne ferai pas de référendum parce que 80 % de la population est contre ».

synthesenationale.hautetfort.com

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L’attentat de la rue Copernic : une enquête polluée par l’instrumentalisation politique

Dans son dernier livre, Rue Copernic – L’enquête sabotée – 1980-2023 (Éditions L’Artilleur, 293 pages, 20 euros), le journaliste Clément Weill-Raynal, rendu célèbre pour avoir révélé au grand public le scandale du mur des cons, s’intéresse de façon minutieuse à une vieille affaire « ni résolue ni définitivement classée ». Le 3 octobre 1980, en fin d’après-midi, une bombe de très forte puissance explosait devant la synagogue de la rue Copernic, située dans le XVIe arrondissement à Paris. Quatre personnes furent tuées et une quarantaine de blessées. C’était la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale qu’un attentat visait la communauté juive en France. Selon l’auteur, l’instrumentalisation politique initiale de l’attentat et le « sabotage » de la longue enquête judiciaire ont contribué à retarder l’ouverture du procès qui ne s’ouvre qu’en ce mois d’avril 2023, plus de quarante ans après les faits.

polemia.com

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INDE

L’Inde : Le prochain front dans la guerre contre les BRICS

La guerre géopolitique multimodale actuelle ne se résume pas à ce qui se passe en Ukraine. Ce conflit a entraîné une myriade d’effets et de mouvements en aval qui sont tout aussi importants que ce que signifie l’encerclement de Bakhmut. Pendant des années, l’Inde a été le joker de l’alliance des BRICS. La rivalité de l’Inde avec la Chine, ainsi que ses relations compliquées avec la Russie et l’Occident, ont toujours servi à diviser l’alliance. Pendant les années Trump, le « I » des BRICS, l’Inde, s’est lentement frayé un chemin sous l’égide du Premier ministre Narendra Modi pour revenir dans l’orbite de l’Occident. Cela m’a amené à penser que ce « I » avait été remplacé par l’Iran, en particulier avant le COVID-19.

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ISRAËL

Fortes tensions autour de la réforme judiciaire en Israël : chronique d'une crise existentielle

Israël a-t-il atteint un moment de « crise existentielle », comme l’affirment de nombreux commentateurs suite aux protestations massives contre la réforme judiciaire proposée par le Premier ministre Benjamin Netanyahou ? Retour sur une semaine riche en événements et aux ramifications considérables, non seulement à l’intérieur d’un pays miné par des divisions de plus en plus intenses, mais aussi par l'état de ses relations avec ses alliés internationaux, les États-Unis en tête.

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LECTURE

L'actualité de Dino Buzzati, conservateur révolutionnaire

Comment ne pas penser, en relisant l'écrivain natif de Belluno en Vénétie, à notre époque où un peu tout est basé sur la vitesse, le mouvement, l'immersion dans un flux continu d'informations ?

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rencontre-avec-laureline-fontaine-pour-son-livre-la-constitution-maltraitee-6400d1bb5e69a_medium.png

La Constitution maltraitée : dans les failles du Conseil constitutionnel

Comment le Conseil constitutionnel protège-t-il réellement les droits et libertés en France ? Lauréline Fontaine lève le voile dans son dernier ouvrage, La Constitution maltraitée, anatomie du Conseil constitutionnel, (Paris, Amsterdam éditions, Paris 2023).

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Entretien avec Thorvald Ross, auteur d'un remarquable roman initiatique. Propos recueillis par Robert Steuckers

A propos d'une quête religieuse et philosophique de plus de quarante ans. « Je vous connaissais déjà lorsque vous publiez la revue Mjöllnir. Vous vouliez découvrir les racines nordiques (scandinaves) présentes de manière diffuse dans la culture néerlandaise (Nord et Sud confondus). Votre livre De laatste heiden (= Le dernier païen) est-il le témoignage de cette quête ? Et qu'en est-il de cet héritage nordique aujourd'hui ? »

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Jean Giono et le Contadour

Le terme écologie a certes été utilisé pour la première fois par Haeckel en 1866 dans sa Morphologie générale des organismes, mais c’est Giono qui en a été le chantre. Sa plume et la magie du verbe qu’elle engendre n’a pas fini de nous enchanter. L’homme a besoin de pain et d’eau pour nourrir son corps, mais il a aussi besoin de rêve, d’idéal et de poésie pour alimenter son âme. Giono à la recherche des vraies richesses explore un chemin qui peut nous conduire afin que notre joie demeure.

Que ma joie demeure de Jean Giono, paru en 1935 avait créé une effervescence dans l’Entre-Deux-Guerres parmi les jeunes, avides de découvrir « les vraies richesses » dont parle l’écrivain dans ses premières œuvres. Ils se retrouveront autour de lui pour vivre l’aventure poétique du Contadour jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. Les jeunes, à cette époque, sont à la recherche de vraies valeurs dans un monde qui a failli en 1914, puisqu’il a sombré dans l’abomination de la Première Guerre mondiale. Le retour à la terre, la célébration de la nature, la paix, la communion entre les êtres, toutes classes sociales, toutes nationalités confondues, la découverte de la mixité, de la camaraderie véritable incitent à vivre autrement, loin de la fureur et du bruit, de la course à l’argent, du nationalisme inquiétant qui gronde et menace.

Jean Giono et le Contadour. Un foyer de poésie vivante, 1935-1939, de Lucette Heller-Goldenberg. A commander chez Les amis de la culture européenne.

OTAN

L’expansionnisme de l’OTAN en Scandinavie aide les États-Unis, mais place la Finlande en ligne de mire

Il est évident que l’OTAN a toujours été une extension auxiliaire des États-Unis. C’est le cas depuis la création malheureuse de cette alliance belliqueuse il y a 74 ans. Ainsi, l’agression rampante de l’OTAN doit toujours être observée dans la perspective de l’expansionnisme des États-Unis, puisque la thalassocratie belliqueuse ne cesse de rapprocher son infrastructure militaire des frontières de ses adversaires géopolitiques. Cela a été le cas lors de la (première) guerre froide et ce n’est pas différent aujourd’hui, alors que les États-Unis poussent un pays européen après l’autre dans une coalition anti-russe plus large qui inclut désormais l’ensemble de l’Union européenne. Washington tente de faire de même en constituant une copie presque conforme de l’OTAN dans le Pacifique, dans une démarche pratiquement identique, uniquement dirigée contre la Chine.

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PARCE QUE ÇA FAIT DU BIEN RIRE !

Décoration diplomatique

De l’art de disposer ses interlocuteurs… où comment ravaler les supplétifs des États-Unis au bout de la table (3 photos).

kopylovakatya

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PROCHE-ORIENT

L’Arabie saoudite prend son virage eurasien

Les récentes réconciliations de l’Arabie saoudite avec l’Iran et la Syrie sous l’égide de la Chine et de la Russie sont perçues comme une étape vers la réduction de la dépendance de Riyad à l’égard des États-Unis, tout en faisant progresser l’influence politique et économique de Pékin et de Moscou en Asie occidentale. Le 6 mars 2023, les responsables iraniens et saoudiens ont tenu une réunion à Pékin au cours de laquelle ils ont convenu de rétablir les relations bilatérales. Cet accord est important non seulement pour la désescalade mutuelle des tensions en Asie occidentale, mais aussi pour l’importance croissante de l’Arabie saoudite dans le processus d’intégration eurasienne mené par la Chine et la Russie. En accueillant la médiation chinoise, le royaume s’est positionné comme un acteur indépendant capable d’ouvrir des portes à Pékin et à Moscou dans une région où ils ont traditionnellement été éclipsés par une grande puissance rivale, les États-Unis. Cette démarche renforce l’importance de l’Arabie saoudite dans le paysage géopolitique et consolide ses liens avec Pékin et Moscou.

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RÉFLEXIONS

Fraude électorale : Emmanuel Macron peut tout se permettre

On sait bien qu’au printemps 2017, la magistrature a mis en œuvre une opération judiciaire destinée à disqualifier politiquement le candidat de droite pourtant favori du scrutin présidentiel. Dernière partie de l’opération concoctée par la haute fonction publique et soutenue par l’oligarchie, elle a produit le résultat souhaité par ses instigateurs l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée. Lorsque l’on dit « la magistrature » c’est parce que si la procédure elle-même fut menée par une poignée de magistrats, ceux-là furent soutenus par la plus haute hiérarchie du corps et les organisations syndicales majoritaires. Ce soutien qui ne s’est jamais démenti à Emmanuel Macron, s’est caractérisé depuis six ans par un refus obstiné de s’attaquer aux locataires de l’Élysée et à son système. Dernier épisode en date, celui de l’aveu des protagonistes de la campagne présidentielle 2017 reconnaissant l’existence de fraudes. Celles-ci sont un serpent de mer qui vient de refaire surface. Cette fois-ci, c’est Radio France qui s’y colle et qui rapporte le témoignage de cadres de McKinsey qui décrivent explicitement : « des prestations qui auraient dû être facturées et déclarées dans les comptes du candidat Macron ». C’est à la fois un serpent de mer, mais aussi un secret de polichinelle. Quiconque s’est penché un peu sérieusement sur le déroulement de la campagne et sur les méthodes utilisées par l’équipe Macron sait à quoi s’en tenir. L’autre caractéristique est le refus obstiné de la justice de mettre son nez dans ce qui aurait dû aboutir dès ce moment-là à des poursuites pénales et à l’invalidation des comptes de campagne du candidat Macron. La justice française reste pourtant obstinément muette devant cette reconnaissance qui aurait dû justifier l’ouverture immédiate d’une information judiciaire, compte tenu du nombre d’infractions pénales qu’elle implique.

vududroit.com

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Que les autres vous permettent tout et que vous ne permettiez rien aux autres ?

Le stade le plus avancé des grands délirants Politiques, Médiatiques et Financiers. Jamais la civilisation n’a eu à subir une telle violence si concentrée (pour nous lovée autour de puérilités aussi insensées). Dernière fois : le nazisme ! Tant y est concentré d’enfantillages dissymétriques. Soit j’ai tous les droits et vous aucun. Cela ne vous dit rien ? Ce sont les pensées non inhibées de l’enfant entrant dans les apprentissages culturels. Pensées non inhibées de l’enfant qui ne les met pas en œuvre. Et qui ne sont connues que par les mots qu’ils babillent. Or, actuellement, au prétendu sommet de la société, nous avons de « faux adultes » enfants à vie qui n’ont plus aucune inhibition. Qui se prouvent surtout les pires barbares déguisés en costards cravates. Bien identifiés comme les pires « dangers publics » actuels - les flagrants Ennemis de la société… Voici comment ils se sont tous démasqués : ce qu’ils se permettent tout le temps ! Non non, ils ne le permettent pas aux autres. Parvenant ainsi aux sommets de toutes les déraisons tout le temps…

imagiter.fr

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RUSSIE

Les points clés de la nouvelle doctrine de politique étrangère russe

Pour donner un aperçu des priorités stratégiques de la nation au-delà de ses frontières, la Russie a publié, vendredi, sa doctrine de politique étrangère actualisée, signée par le président Vladimir Poutine. Ce document, qui a d’importantes répercussions sur les relations de Moscou avec des acteurs clés du monde entier, sera sans aucun doute examiné de près dans les semaines à venir. Poutine a expliqué que la nécessité de revoir le document était due à des « changements radicaux » dans le paysage international, notamment ce que Moscou a décrit comme une « guerre hybride » permanente menée par l’Occident contre la Russie en raison de ses actions en Ukraine.

lesakerfrancophone.fr

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L’arrestation de la terroriste qui a assassiné Vladlen Tatarski révèle la vraie nature de l’Occident

Le 3 avril 2023, la femme qui apporté le buste contenant l’engin explosif qui a tué le reporter de guerre Vladlen Tatarski, Daria Trepova, a été finalement arrêtée. La façon dont l’arrestation de cette femme et l’assassinat de Vladlen Tatarski ont été couverts par les médias et officiels occidentaux révèle la nature profondément terroriste des gouvernements occidentaux, de l’Ukraine et de leurs soutiens en Russie. Explications.

reseauinternational.net/

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SANTÉ

Rapport trimestriel de situation Covid planétaire du Samedi 1er avril 2023 0h00 GMT, par Dominique Delawarde

Ceux qui s’intéressent toujours à la crise sanitaire COVID qui se termine doucement trouveront mon premier rapport de situation 2023 qui sera désormais trimestriel. Ce rapport fait le bilan du premier trimestre 2023. Si le nombre de décès se réduit chaque jour un peu plus (134 400 au 1er trimestre 2023 sur l’ensemble de la planète), il est important de noter que sur ce premier trimestre 2023, les 30 pays de l’OTAN, très vaccinés, ont eu un taux moyen de mortalité COVID de 81,9 décès/million d’h, plus de 10 fois fois supérieur à celui du reste du monde pour la même période : 7,93 décès /million d’h. Cela veut clairement dire que ces pays se remettent moins vite de l’épisode Covid que le reste de la planète. Tous les pays de l’OTAN, sans aucune exception, ont un taux de mortalité par millions d’habitants supérieur à la moyenne du monde non otanien… ??? Bonne information alternative à tous et à chacun de se forger son opinion, bien sûr.

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SERBIE

« Zadušnice ». Un retour au Kosovo entre larmes et recueillement pour les familles Serbes

Des milliers de Serbes ont fui le Kosovo du fait des exactions des Albanais radicaux lors de la guerre de 1999 et ensuite durant les pogroms de 2004. Ils ont été contraints d’abandonner, souvent dans la précipitation, leurs villages, leurs maisons, leurs églises, leurs cimetières. En se réfugiant en Serbie centrale pour sauver leurs familles, les chrétiens ont dû laisser leurs ancêtres derrière eux. Un déchirement supplémentaire pour eux qui avaient déjà tout perdu. Solidarité Kosovo raconte cette épreuve et ce retour au pays, parfois douloureux. Les Serbes dont la tombe des parents et des proches se trouve au Kosovo s’y rendent sous escorte militaire lors des fêtes religieuses commémoratives, comme celle du « samedi des défunts », « Zadušnice », qui a lieu en février.

breizh-info.com

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UKRAINE

Guerre en Ukraine Vidéo n° 32

« Le Monde connaît un changement qui ne s’est pas produit depuis 100 ans. Et ce changement nous le conduirons ensemble ». C’est par cette phrase adressée à Vladimir Poutine que Xi Jiping lors de sa visite officielle à Moscou, a envoyé un message au Monde. Le nouvel ordre multipolaire est en marche. Pendant ce temps, l’Occident collectif avec ses États faillis continue à partir dans tous les sens et à se raconter des sornettes pour se rassurer. Vududroit qui ne saurait se réjouir de ce qui nous arrive, essaie de présenter le réel tel qu’il est. Cette fois-ci, il s’est adressé pour cela à un militaire de haut rang qui sait de quoi il parle. Et un économiste qui nous avertit que l’on n’est vraiment pas en grande forme. Plus de freins, plus d’airbag, des conducteurs débiles, et à fond vers le mur. La France est en train de démontrer qu’il faut regarder le Monde tel qu’il est, et qu’il est urgent de se débarrasser des imbéciles et des malfaisants.

Au sommaire de l’indispensable rendez-vous de Régis de Castelnau et Sylvain Ferreira :

Général Jean Pinatel

Olivier Delamarche

  • Brèves observations sur le sommet russo-chinois de Moscou : à 1 mn 08 s ;
  • Entretien avec le général Jean Pinatel : à 12 mns 18 s. Avec notamment un topo simple et passionnant sur la stratégie de la guerre nucléaire ;
  • Entretien avec l’économiste Olivier Delamarche : à 1 h 26 mns 34 s.

vududroit.com

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TURQUIE

Les relations Poutine-Erdogan

Le président turc Recep Erdogan a révélé que le président russe Vladimir Poutine pourrait assister à la cérémonie de chargement du combustible nucléaire le 27 avril à la centrale nucléaire d’Akkuyu. L’attaché de presse de Poutine, Dmitri Peskov, a habilement géré la bombe politique, choisissant de ne pas réfuter la déclaration d’Erdogan. Selon Erdogan, la participation de Poutine à la cérémonie pourrait faire partie d’une visite officielle. Les précédents engagements de Poutine concernant la centrale nucléaire d’Akkuyu se sont déroulés par vidéoconférence et lors de la cérémonie marquant le début des travaux de construction du prestigieux projet en avril 2018, il a promis d’assister à la cérémonie de lancement en 2023. Rosatom a tenu sa promesse de terminer le projet dans les délais, et c’est maintenant au tour de Poutine. De toute évidence, Erdogan se soucie beaucoup du récent « mandat d’arrêt » de la Cour pénale internationale contre Poutine. Le président chinois Xi Jinping a montré comment l’ignorer. La sherpa russe du G20, Svetlana Lukash, a déclaré vendredi que Poutine devrait se rendre en Inde deux fois cette année – le sommet du G20 en septembre et le sommet de l’OCS de 2023 plus tard.

brunobertez.com

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UNION EUROPÉENNE

Union Européenne et internet : arrive la loi du Digital Services Act ou DSA… censure et dictature sur mesure !

L’Ukraine et sept autres nations européennes tentent de museler toute information sur internet et les réseaux sociaux qui n’est pas conforme au narratif fantasque qui obscurcit la vérité sur la guerre en Ukraine. Le narratif guerrier de « l’occident collectif » est construit sur des mensonges, l’exagération, la propagande, des allégations et supputations non corroborées et des pirouettes de relations publiques fantasmagoriques du régime Zelensky.

resistance71.

https://resistance71.wordpress.com/2023/04/03/union-europ...

Le Parlement européen envisagerait de forcer les États membres à accueillir des migrants dans le cadre de leur répartition sur le territoire de l’UE. Un « Coordinateur de l’UE pour la relocalisation » serait responsable de cette répartition

La commission des libertés civiles a approuvé mardi 4 avril une nouvelle approche pour la gestion des flux d’asile et de migrations vers l’UE et des règles spécifiques pour faire face aux crises. Par 47 voix pour, 17 voix contre et 1 abstention, les députés ont adopté leur position sur la proposition de mise à jour du règlement de l’UE en matière d’asile et de gestion des migrations. Le texte adopté modifie les critères permettant de déterminer le pays de l’UE responsable de l’examen d’une demande de protection internationale (règles dites de Dublin), notamment si des liens familiaux ou éducatifs existent dans un État membre donné.

fdesouche.com

https://www.fdesouche.com/2023/04/06/le-parlement-europee...

 

De la dédollarisation à la yuanisation et à la monnaie des BRICS : la multipolarité des monnaies

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De la dédollarisation à la yuanisation et à la monnaie des BRICS : la multipolarité des monnaies

Par Alfredo Jalife Rahme

Source: https://noticiasholisticas.com.ar/de-la-desdolarizacion-a...

La dédollarisation est irréversible. Seuls sa vitesse et son calendrier posent question, alors que l'anglosphère prétend la faire traîner en longueur, tandis que le Sud s'est lancé vertigineusement dans l'adoption de la yuanisation et de la monnaie des BRICS.

Cyrus Janssen explique que "la Chine va vite ! Après avoir négocié le plus grand accord de paix au Moyen-Orient, elle accueille maintenant l'Arabie saoudite (AS) dans son alliance commerciale. Cette annonce a été faite quelques instants après que la Chine a conclu sa première transaction de GNL en renminbi avec les Émirats arabes unis (EAU). Les temps changent !" (https://bit.ly/3nzSala ).

Watcher.guru affirme que "AS a un partenariat commercial avec la Chine, la Russie, l'Inde, le Pakistan et quatre pays d'Asie centrale (http://bit.ly/42YbQzu )".

L'ambassade de Russie au Kenya a publié que "la Russie et l'Inde cherchent à briser le monopole du dollar et à dominer le marché eurasien. Un forum organisé à New Delhi a mis l'accent sur les principaux liens commerciaux à la veille du Forum économique international de Saint-Pétersbourg (https://bit.ly/40SqAOi )".

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Le président kenyan William Ruto a encouragé ses concitoyens à se séparer de leurs dollars (https://bit.ly/3lVTm1M ). Le Kenya a souffert d'une pénurie de dollars en raison de la dévaluation de sa monnaie, le shilling, qui a engendré une forte inflation, tandis que la Bolivie subit également les ravages d'une sécheresse de dollars en raison des importations d'hydrocarbures qu'elle paie avec des billets verts. C'est peut-être l'occasion pour la Bolivie de se débarrasser des chaînes de la dollarisation et d'adopter le yuan et/ou la roupie indienne et/ou la monnaie des Brics.

Bloomberg rapporte que "l'Inde proposera sa monnaie comme alternative pour commercer avec les pays confrontés à des pénuries de dollars (http://bit.ly/40OSsTF )".

Sharmine Narwani affirme : "TREMENDOUS : it's the most important global development in years. Si les pays de l'ANASE abandonnent le dollar pour leurs monnaies locales, le dollar est mort" (https://bit.ly/3K0TUvh ).

@runews commente que "les BRICS, l'AS, la Biélorussie et l'Iran développent une nouvelle monnaie" (https://bit.ly/3nEaSbc ).

Les 10 pays de l'ANASE (Asie du Sud-Est) discutent de l'abandon du dollar et de l'euro dans leurs échanges commerciaux et leur principale puissance géoéconomique, l'Indonésie (17ème au classement mondial du PIB), invite ses partenaires régionaux à ne plus utiliser les cartes de crédit Visa et MasterCard "pour éviter les répercussions des sanctions occidentales à l'encontre de la Russie" (http://bit.ly/3ZtAvsB ).

The Cradle affirme que "les pays du BRICS travaillent fondamentalement sur une nouvelle monnaie : la monnaie officielle russe". (https://bit.ly/3Km0rCi )

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L'analyste cité David Goldman affirme que "le désordre bancaire américain annonce la fin du système de réserve du dollar" car "la crise bancaire n'est pas un problème de qualité du crédit, mais découle de la tâche désormais impossible de financer la dette extérieure américaine qui ne cesse de croître" (http://bit.ly/3zG9SXb ).

Le Global Times chinois prévoit que "la dédollarisation est inévitable à mesure que l'utilisation d'autres monnaies s'accélère", comme cela vient d'être le cas avec l'accord conclu entre la Chine et le Brésil pour commercer dans leurs propres monnaies lorsque leurs échanges bilatéraux dépassent 150 milliards de dollars (http://bit.ly/3nCVP1J ).

Même la France a participé à un accord triangulé avec les Émirats arabes unis pour l'achat de gaz naturel liquéfié (GNL) avec la Chine en yuans (http://bit.ly/40LFiXo ).

Gillian Tett du Financial Times appelle à "se préparer à un monde multipolaire de monnaies" alors que "le dollar américain domine toujours les marchés de la dette, mais certaines données de niche suggèrent que les choses pourraient être en train de se retourner" (http://bit.ly/42UMKS0 ).

Par ailleurs, il y a 14 ans, j'affirmais que "le monde tend vers la multipolarité et la régionalisation des monnaies" (http://bit.ly/3ZyPx0n ). J'ai également proposé la monnaie des Brics (http://bit.ly/3zjVWlo ), qui est aujourd'hui sur le point d'être réalisée pour remplacer le dollar (http://bit.ly/3KonBry ). "CQFD.

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49-3 soutiens

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49-3 soutiens

par Georges FELTIN-TRACOL

À l’occasion de la calamiteuse réforme des retraites traitée dans l’excellente émission n°25 de L’Écho des Canuts mise en ligne sur Radio Méridien Zéro le 11 février 2023, l’Hexagone retombe dans une série de secousses collectives, de transes politiciennes et de spasmes sociaux dont il a le secret. On assiste à une pitoyable tragicomédie au scénario bouffon dans lequel des lycéens, par ailleurs grévistes du vendredi pour le climat, brûlent volontiers palettes et poubelles sans se soucier du bilan carbone défavorable qu’ils provoquent.

Outre le report de 62 à 64 ans de l’âge du départ de la vie active, les protestations concernent l’usage de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution. Cette crise adulescente qui s’apparente à une éruption urticante spontanée n’est pas nouvelle. La loi El Khomri sur le travail en 2016 avait déjà suscité un mécontentement semblable.

Les principaux contempteurs du 49-3 se trouvent dans les rangs de la gauche radicale. Ils rêvent du grand soir et ont la nostalgie du régime d’assemblée de la Convention nationale en 1793… Dans un pays où les six candidats de gauche (Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, Fabien Roussel, Anne Hidalgo, Philippe Poutou et Nathalie Arthaud) recueillent un total de 11.225.271 suffrages à l’élection présidentielle de l’an passé, il n’est pas illogique que deux à trois millions de Français affichent leur hostilité à cette loi. La forte contestation relevée dans la « France périphérique » montre aussi que cette stupide réforme cristallise une vive colère qui la transcende. Certains évoquent une continuité conflictuelle par-delà l’entracte covidesque – et peut-être à cause de lui – entre ces grandes mobilisations, les « Bonnets rouges » bretons de 2013 et les « Gilets jaunes » de 2018 – 2019.

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Bien des critiques proclament que le 49-3 serait anti-démocratique. Opinion grotesque ! Cette disposition inscrite dès l’origine dans la Constitution appartient à ce que les constitutionnalistes qualifient de « parlementarisme rationalisé ». Ses autres outils sont le 44-3 (pour le vote bloqué) et le 47-1 (la procédure d’accélération des débats législatifs dans le cadre des projets de loi des finances). Avant la funeste révision de 2008, le gouvernement bénéficiait de l’article 48, lui assurant la seule maîtrise de l’ordre du jour au Parlement. Le 49-3 correspond à la procédure habituelle en régime parlementaire de la question de confiance. Le gouvernement pose sa responsabilité sur un texte précis pour obtenir de l’Assemblée nationale un vote qu’il juge indispensable pour la poursuite de sa politique. Dans l’esprit des rédacteurs de la Constitution de la Ve République, Michel Debré en particulier, le 49-3 est une façon inédite de renforcer la stabilité du gouvernement, de discipliner une majorité parfois réticente et d’arrêter les manœuvres dilatoires de l’opposition.

Suite à une délibération du Conseil des ministres, le Premier ministre engage son maintien à propos d’un texte législatif. L’opposition peut alors déposer une motion de censure. Si elle n’est pas déposée ou si elle n’obtient pas la majorité absolue des inscrits, le gouvernement estime mériter la confiance des élus; il reste en fonction et le texte est entériné. Si la motion de censure est adoptée, le texte est rejeté et le gouvernement renversé; le Premier ministre doit alors présenter sa démission et celle de son équipe ministérielle au président de la République qui peut alors dissoudre l’Assemblée nationale, mais cette option n’est pas obligatoire.

La philosophie du 49-3 est limpide. Elle applique l’adage « Qui n’est pas contre moi est pour moi ». En effet, en s’abstenant, le député approuve in fine le texte et donc l’action du gouvernement. Le 20 mars dernier, il a manqué neuf voix pour entraîner la chute du gouvernement Borne. Parmi ce déficit de neuf voix, signalons les députés LR et la députée non-inscrite de l’Hérault, Emmanuelle Ménard, chroniqueuse au mensuel Causeur, et représentant avec son mari, l’édile de Béziers, d’un macronisme d’extrême droite.

L’article 49-3 si décrié se coule dans le strict mécanisme parlementaire qui laisse à l’Assemblée nationale la liberté de censurer le gouvernement sans toutefois susciter des majorités négatives de circonstance ou des alliances contre-nature. Cette procédure institutionnelle se rapproche en partie de la motion de censure constructive prévue dans la Loi fondamentale allemande de 1949 qui contraint les éventuels censeurs à s’accorder autour d’une personnalité susceptible de remplacer le chancelier en fonction.

La révision constitutionnelle du 28 juillet 2008 voulue par Nicolas Sarközy en a fortement réduit l’usage. Le 49-3 n’est maintenant possible que pour les lois de finance (le budget), les lois de financement de la Sécurité sociale et un seul projet de loi par session parlementaire. On ne peut que déplorer cet amoindrissement.

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Avec le projet de loi sur les retraites, le gouvernement recourt pour la centième fois au 49-3 depuis 1958. En dix mois, Élisabeth Borne l’a employé onze fois. Le socialiste Michel Rocard, entre 1988 et 1991, conserve encore le record avec vingt-huit utilisations consécutives. Ses successeurs immédiats, Édith Cresson (1991 – 1992) et Pierre Bérégovoy (1992 – 1993), l’ont utilisé respectivement huit et trois fois. L’Assemblée nationale élue en juin 1988 après une dissolution souhaitée par un François Mitterrand réélu ne donna qu’une majorité relative aux socialistes. Matignon dut composer pendant cinq ans entre les groupes communiste et centriste. À cette époque, le sénateur socialiste de l’Essonne de 1986 à 2000 et fervent mitterrandolâtre, Jean-Luc Mélenchon, approuvait son usage répété.

Le premier Premier ministre de la Ve République, Michel Debré (1958 – 1962), l’utilisa à quatre reprises. Les gaullistes n’avaient qu’une majorité relative. Plus tard, entre 1976 et 1981, le centriste Raymond Barre l’utilisa huit fois. Il lui fallait contenir l’animosité d’une partie de sa majorité, les députés chiraquiens du RPR, contre son gouvernement lié à Valéry Giscard d’Estaing. Malgré une large majorité à l’Assemblée, le socialiste Pierre Mauroy s’en servit à sept reprises. La première fois fut pour la loi d’amnistie des partisans de l’Algérie française exigée en 1982 par François Mitterrand lui-même en dépit des nombreuses réticences d’élus PS.

Il faut remarquer que des Premiers ministres n’y ont jamais eu recours. Jean Castex (2020 – 2022), mais aussi Maurice Couve de Murville (1968 – 1969), Jacques Chaban-Delmas (1969 – 1972), Pierre Messmer (1972 – 1974), Jacques Chirac (1974 – 1976), Lionel Jospin (1997 – 2002) bien que les socialistes fussent minoritaires au sein de la « gauche plurielle », François Fillon (2007 – 2012) et Bernard Cazeneuve (2016 – 2017). En moins de cinq mois, ce dernier a toutefois pris de nombreuses ordonnances, permettant le contournement du pouvoir législatif sans que cela n’offusque personne…

Le 49-3 contribue enfin à la réalisation de la « démocratie agonistique » théorisée par Chantal Mouffe. Pour la philosophe belge, porte-parole d’un populisme de gauche bien mal en point, il est contre-productif de rechercher le compromis et de travailler à un éventuel consensus. Le 49-3 empêche toutes ces turpitudes politiciennes. Il antagonise au contraire la société politique. Vouloir ainsi abolir le 49-3 serait une grave faute constitutionnelle. Ce moyen institutionnel a montré toute sa pertinence, même à mauvais escient.

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 68, mise en ligne le 4 avril 2023 sur Radio Méridien Zéro.

Points de vue chinois: l'adhésion de la Finlande à l'OTAN compromet la sécurité européenne

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Points de vue chinois: l'adhésion de la Finlande à l'OTAN compromet la sécurité européenne

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2023/04/05/kiinalaisnakemys-suomen-nato-jasenyys-heikentaa-euroopan-turvallisuutta/

En Chine aussi, le parcours de la Finlande vers l'adhésion à l'OTAN a été suivi, peut-être même avec une certaine surprise. Des publications internationales chinoises, comme le Global Times, ont demandé à des experts de la politique étrangère et de la sécurité de la République populaire de leur faire part de leurs commentaires.

czcuihenguj-hen-e1581953701350-360x360.jpgCui Heng (photo), chercheur assistant au Centre d'études russes de l'Université normale de Chine orientale, déclare, sur un ton légèrement sarcastique, que "pour les pays pris entre les grandes puissances, ne pas choisir son camp serait en fait un choix très rationnel".

Cependant, la Finlande de Niinistö n'a pas été en mesure de faire un choix aussi intelligent, et au lieu de cela, citant le conflit en Ukraine, le projet de l'OTAN, qui était en suspens depuis longtemps, a été précipitamment mis de côté. Bien entendu, du point de vue du parti de la coalition, la Finlande aurait dû demander à adhérer à l'alliance militaire occidentale dès l'effondrement de l'Union soviétique.

Selon les experts chinois, l'abandon de la politique de neutralité "pousse maintenant la Finlande en première ligne contre la Russie, ce qui rend la situation sécuritaire en Europe encore plus instable".

Le professeur Li Haidong, de l'Institut des relations internationales de l'Université chinoise des affaires étrangères, estime également que "la Finlande a perdu son rôle de bâtisseur de ponts entre la Russie et l'Europe". Selon lui, le choix de l'Occident montre que les décideurs finlandais manquent de "vision stratégique".

"La Russie a l'obligation de répondre à ces nouvelles préoccupations pour sa sécurité nationale", souligne M. Cui. Quelles contre-mesures le Kremlin va-t-il prendre pour assurer sa propre "sécurité tactique et stratégique" ?

Il y a environ un an, Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité russe et ancien président de la Russie, a clairement averti que si la Finlande ou la Suède rejoignaient l'OTAN, la Russie placerait des armes nucléaires à proximité des États baltes et de la Scandinavie, "et qu'il ne serait plus possible de parler d'une région de la mer Baltique dénucléarisée".

La confrontation militaire avec la Russie s'intensifiera avec l'élargissement de l'OTAN, qui, selon les experts chinois, portera atteinte à la sécurité de "tous les pays européens".

L'accumulation d'armes s'accélérera également : la Finlande partageant 1300 km de frontière avec la Russie, les forces de défense finlandaises, en tant que pays membre de l'OTAN, devront réaliser des investissements plus coûteux. Le rôle de la Finlande au sein de l'OTAN comprend également la défense de toute la région baltique, car un pays traumatisé comme l'Estonie, par exemple, n'a pas les ressources nécessaires pour le faire lui-même.

En rapprochant toujours plus les missiles de la Russie, l'Occident de l'OTAN oblige la Russie à recourir à la dissuasion nucléaire. D'ailleurs, la Russie a déjà accepté de placer des armes nucléaires tactiques sur le sol de son allié, le Belarus.

Selon M. Cui, la Russie peut répondre aux initiatives de l'OTAN "en intensifiant son offensive sur les champs de bataille de l'Ukraine, d'une part, et en continuant à renforcer ses armes nucléaires, d'autre part".

Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a quant à lui assuré que l'adhésion de la Finlande lui donnerait des "garanties de sécurité à toute épreuve". Que se passera-t-il le moment venu ? Les soldats finlandais seront-ils également impliqués dans les opérations américaines en mer de Chine méridionale, alors que la situation s'y réchauffe ?

Les dragons de l'OTAN : Le pacte sombre de la Finlande

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Les dragons de l'OTAN : Le pacte sombre de la Finlande

Constantin von Hoffmeister

Source: https://eurosiberia.substack.com/p/dragons-of-nato-finlands-dark-pact?utm_source=post-email-title&publication_id=1305515&post_id=112857424&isFreemail=true&utm_medium=email

Dans l'obscurité du Léviathan belliciste de l'OTAN, la Finlande est désormais prise au piège ! Un mardi fatidique, le royaume a brandi sa bannière blanche et bleue devant la forteresse militaire de Bruxelles, sous le regard de l'assemblée hétéroclite des sorciers politiques. Les terres germaniques étaient représentées par la magicienne Annalena Baerbock, qui a apparemment cautionné ce périlleux enchantement.

Aujourd'hui, l'insatiable hydre de l'OTAN compte 31 têtes venimeuses. Bien que ses légions armées ne semblent croître que modestement, la Finlande apporte 19.000 guerriers actifs, 238.000 réservistes prêts au combat et un système obscur de coffres-forts d'armes cachées et de bastions de guérilla. Poursuivant une militarisation implacable, la Finlande a maintenu ses coffres de guerre au-dessus de la barre des deux pour cent fixée par la cabale de l'OTAN, manie de redoutables chars de guerre Leopard 2, dont certains ont été envoyés en Ukraine, et s'apprête même à lâcher des destriers volants américains F-35. Alors que d'autres forces de l'OTAN n'ont pas encore débarqué sur les côtes finlandaises, la sombre alliance murmure de manière inquiétante que la Finlande pourrait les convoquer à tout moment.

L'adhésion de la Finlande sert principalement à renforcer la portée malveillante de l'OTAN, en jetant une ombre sur les royaumes septentrionaux de la Russie, y compris l'ancienne ville de Saint-Pétersbourg et les connexions vitales avec les citadelles navales de la mer de Barents. L'incantation trompeuse de l'OTAN, selon laquelle les vastes frontières russes de 24.000 kilomètres rendent sans conséquence un simple front de 1300 kilomètres dans le nord, est une déformation perfide de la réalité, car la plus grande étendue se trouve le long des terres gelées de la Sibérie.

Nous ne devons pas oublier les actes passés de cette hydre de l'OTAN, tels que le bombardement inacceptable des terres yougoslaves en 1999, un cataclysme qui a laissé d'innombrables innocents tués et la terre entière brisée. Cette alliance de bellicistes a déchaîné le feu du dragon et le sang au nom du salut ou de la protection, ne laissant que des ruines dans son sillage.

Les rites du pacte ténébreux de la Finlande avec l'OTAN, initié au mois de mai de l'année 2022, ont été accélérés par les convoitises des membres de l'alliance. La Suède, elle aussi, est attirée par le chant des sirènes de cette infâme confrérie, connue ces derniers temps pour avoir lâché des flots de ravages sur le peuple afghan. Pourtant, les émissaires de la Hongrie et de la Turquie cherchent encore à arracher des concessions aux émissaires suédois pour leurs propres machinations politiques avant de succomber inévitablement au chœur sanguinaire. Dans les coulisses du pouvoir, Jens Stoltenberg, le seigneur de l'ombre de l'OTAN, affiche une sinistre confiance en leur soumission finale.

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La directive de Douguine : un concept de politique étrangère comme apothéose de la multipolarité et catéchisme de la souveraineté

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La directive de Douguine : un concept de politique étrangère comme apothéose de la multipolarité et catéchisme de la souveraineté

par Alexandre Douguine

Source: https://tsargrad.tv/articles/direktiva-dugina-koncepcija-vneshnej-politiki-kak-apofeoz-mnogopoljarnosti-i-katehizis-suvereniteta_757277?fbclid=IwAR25RDpH_8x2cNryGFWV1OzQJd5dsYAVDkLegyaUFDqkFirSyeD0za8Qy1o

Le 31 mars, le président russe Vladimir Poutine a approuvé un nouveau concept de politique étrangère. On peut considérer qu'il s'agit de l'accord final dans les changements dans la conscience géopolitique et civilisationnelle des autorités russes, lesquels changement avaient commencé il y a 23 ans avec l'accession de Poutine au pouvoir. C'est seulement maintenant, dans cette version toute récente, que la doctrine de politique étrangère de la Russie prend un aspect nettement contrasté et désormais sans ambiguïté. Cette fois-ci, elle est vraiment dépourvue d'ambiguïtés et d'équivoques.

Il s'agit d'un programme d'action ouvert et complet d'une grande puissance continentale souveraine qui déclare sa vision de l'ordre mondial à venir, de ses paramètres et de ses fondements et qui exprime en même temps sa volonté de fer de construire une telle architecture en dépit de tout niveau de confrontation avec ceux qui essaieraient de l'empêcher de manière rigide et d'imposer un plan extérieur à la Russie, pouvant aller jusqu'à une frappe nucléaire préventive.

L'ossature d'une souveraineté stratégique à part entière

Le concept introduit et utilise tous les termes fondamentaux, cohérents et conformes à la théorie du monde multipolaire et à l'interprétation eurasienne de l'essence civilisationnelle de la Russie. Ainsi, la victoire des partisans de la voie souveraine de l'existence historique de la Russie a finalement été inscrite dans un document stratégique fondamental du programme. Cette clarté et cette cohérence totales et inhabituelles dans la formulation et les définitions sont certainement le résultat de la guerre avec l'Occident collectif, qui est entrée dans une forme directe et féroce, où l'existence même de la Russie est en jeu. Et il est tout simplement impossible de gagner, mais aussi de mener une telle guerre sans principes, règles et attitudes clairs.

Le nouveau concept énonce clairement les règles que la Russie accepte et auxquelles elle souscrit. En outre, elle les formule pour la première fois. Ces règles sont directement opposées à la stratégie mondialiste, à l'unipolarité et à la théorie libérale des relations internationales. Alors que la Russie essayait de trouver des formulations de compromis qui reflétaient à la fois la volonté de souveraineté et la recherche de compromis avec l'Occident, il en va différemment aujourd'hui : la Russie est un État mondial, un pays-continent qui est une civilisation indépendante - avec ses propres orientations, objectifs, origines, valeurs, avec son identité immuable qui ne dépend d'aucune force extérieure. Les Occidentaux et les libéraux russes ont eu beau se battre contre la "voie spéciale", celle-ci a été approuvée par la loi et constitue la principale disposition de la politique étrangère. Les dissidents devront soit l'accepter, soit s'y opposer ouvertement.

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Le 31 mars 2023, les patriotes, les Eurasiens et les partisans de la pleine souveraineté civilisationnelle ont probablement remporté la victoire la plus impressionnante et la plus visible de l'ère post-soviétique. L'idée d'une voie eurasienne russe dans la politique étrangère a triomphé. Le concept a été développé au ministère des affaires étrangères et signé par le président. C'est sur cet arc que le sujet russe - l'épine dorsale d'une souveraineté stratégique à part entière - est désormais situé.

L'adoption d'un concept aussi sérieux et cohérent sur le plan interne nécessitera des changements correspondants dans la doctrine militaire, ainsi qu'un énorme travail d'organisation pour aligner les institutions du pouvoir exécutif, ainsi que l'éducation et l'information, sur les lignes de force entièrement nouvelles. Le Conseil a également un rôle à jouer dans ce processus.

Si le pays ne se contente pas de suivre sa propre voie russe, mais qu'il l'affirme explicitement, tout change. Même flirter avec l'Occident, ses "règles" et ses "critères" n'a aucun sens. L'Occident libéral mondialiste a coupé la Russie d'elle-même et, de surcroît, est entré en confrontation militaire directe avec elle. Avec sa nouvelle doctrine de politique étrangère, la Russie ne fait que corriger cet état de fait.

Les masques sont tombés : nous sommes résolument pour un monde multipolaire, tandis que ceux qui s'y opposent, qui cherchent à préserver l'ordre mondial unipolaire à tout prix, ne sont pas appelés "partenaires", "collègues" ou "amis", mais des ennemis directs, contre lesquels la Russie est prête à lancer une frappe nucléaire préventive si nécessaire.

Ainsi, l'ensemble de la politique étrangère et des processus qui se déroulent sur la scène internationale ont été mis en lumière et sont devenus complètement symétriques. Les élites mondialistes de l'Occident moderne ne cachent pas leur intention de détruire la Russie, de renverser et de traduire en justice son dirigeant, d'anéantir toute initiative en faveur d'un monde multipolaire. Elles fournissent massivement des armes aux néonazis ukrainiens et fomentent partout la russophobie, s'attribuant le droit d'agir comme bon leur semble partout dans le monde.

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La Russie leur répond enfin de la même manière. Nous comprenons vos intentions et votre logique. Mais nous la rejetons totalement. Nous avons l'intention de défendre notre existence et notre souveraineté par tous les moyens, nous sommes prêts à nous battre pour cela et à payer n'importe quel prix.

Le concept de politique étrangère adopté repose sur une position fondamentale - la Russie est proclamée :

- "un État-civilisation distinctif",

- une vaste puissance eurasienne et euro-pacifique",

- un axe autour duquel "le peuple russe et les autres peuples se sont ralliés",

- le noyau d'une "communauté culturelle et civilisationnelle du monde russe".

Voilà l'essentiel. C'est la réponse à une question qui est loin d'être aussi simple qu'il y paraît : qui sommes-nous ? C'est de cette autodéfinition que découle la multipolarité sur laquelle tout le reste est construit. S'il s'agit d'une civilisation, elle ne peut pas faire partie d'une autre civilisation. Ainsi, la Russie ne fait pas partie de la civilisation occidentale (comme l'affirmaient les versions précédentes du concept de politique étrangère), mais d'une civilisation indépendante, souveraine et non occidentale, à savoir le monde russe. Tel est le principe fondamental sur lequel repose désormais la politique étrangère de la Russie.

Le long chemin vers une civilisation souveraine

Poutine a parcouru un long chemin en 23 ans, depuis les premières tentatives prudentes mais résolues de restaurer la souveraineté de la Russie en tant qu'État, presque entièrement perdue dans les années 1990, en reconnaissant que la Russie (bien que souveraine) fait partie du monde occidental, de l'Europe (de Lisbonne à Vladivostok) et partage généralement les valeurs, les règles et les attitudes de l'Occident, jusqu'à la confrontation frontale avec l'Occident collectif, en rejetant catégoriquement son hégémonie, en refusant de reconnaître ses valeurs, ses principes et ses règles comme étant universels et strictement acceptés par la Russie.

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La signature par Poutine, le 31 mars 2023, du nouveau concept de politique étrangère signifie que le chemin menant d'un État souverain dans le contexte d'une civilisation occidentale libérale mondialiste commune à une civilisation souveraine, au monde russe et à un pôle indépendant a été définitivement franchi. La Russie n'est plus l'Occident. L'Occident a été le premier à le proclamer, en lançant contre nous une guerre d'anéantissement. Après un an d'Opération militaire spéciale, nous l'affirmons à notre tour. Non pas avec regret, mais avec fierté.

La définition de la Russie présentée ci-dessus comporte quatre niveaux, dont chacun représente le concept le plus important de la politique étrangère.

    - L'affirmation selon laquelle la Russie est un État civilisationnel signifie que nous n'avons pas affaire à un simple État-nation selon la logique du système westphalien, mais à quelque chose de beaucoup plus grand. Si la Russie est un État-civilisation, elle ne doit pas être comparée à un pays occidental ou non occidental particulier, mais à l'Occident dans son ensemble, par exemple. Ou avec un autre État-civil, comme la Chine ou l'Inde. Ou simplement avec une civilisation représentée par de nombreux États (comme le monde islamique, l'Amérique latine ou l'Afrique). Un État-civilisation n'est pas seulement un très grand État, c'est, comme les anciens empires, les royaumes des royaumes, un État d'États. Au sein de l'État-civilisation, diverses entités politiques peuvent être situées et même être tout à fait autonomes. Selon K. Leontiev, il s'agit d'une complexité florissante, et non d'une unification linéaire, comme dans les États-nations ordinaires du Nouvel Âge.

    - Mais en même temps, la Russie est décrite comme une "vaste puissance eurasienne et euro-pacifique", c'est-à-dire un État souverain fort à l'échelle du continent. Les Eurasiens la qualifient d'"État continental". L'adjectif "vaste" n'est pas utilisé à titre purement descriptif. La véritable souveraineté ne peut être détenue que par des puissances "vastes". Il s'agit ici d'une référence directe à la notion de "vaste espace", qui est une composante nécessaire de la souveraineté stratégique à part entière. Une puissance qui ne répond pas à ces exigences ne peut être véritablement souveraine. Le caractère eurasien et euro-pacifique de la Russie renvoie directement à la pleine reconnaissance de la géopolitique eurasienne et de ses dispositions fondamentales. La Russie-Eurasie dans la philosophie eurasienne est un concept opposé à l'interprétation de la Russie comme l'un des pays européens. Le terme "puissance" lui-même doit être interprété comme un synonyme d'empire.

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La référence au peuple russe et aux autres peuples qui partagent avec les Russes leur destin historique, géopolitique et civilisationnel est très importante. Le peuple russe est devenu un peuple issu de diverses tribus slaves orientales, finno-ougriennes et turques, précisément dans le cadre du processus historique de construction d'une nation. En construisant un État, la nation s'est également construite elle-même. D'où le lien indissociable entre les Russes et leur statut d'État indépendant et souverain. Mais en même temps, cela indique aussi que l'État a été créé par le peuple russe, préservé et soutenu par lui.

    - L'introduction du concept de "monde russe" dans le concept de politique étrangère est très révélatrice. L'État ne coïncide jamais - à de rares exceptions près - avec les frontières de la civilisation. Autour de ses frontières établies, il y a toujours des zones d'influence intensive des débuts de la civilisation. Le monde russe est une zone historique et culturelle circonscrite, qui appartient certainement à la Russie en tant que civilisation, mais qui ne fait pas toujours partie du pouvoir russe. Dans certains cas, lorsque les relations entre les pays sont harmonieuses et amicales, le monde russe peut exister harmonieusement de part et d'autre de la frontière. Mais en présence de conflits interétatiques, l'État-civilisation qu'est la Russie (selon ce concept de politique étrangère) a toutes les raisons de défendre sa civilisation - et dans les cas les plus critiques, d'ignorer les frontières elles-mêmes. Ainsi, le concept de monde russe dans le contexte général de la définition de la Russie clarifie la logique de ses actions dans l'espace post-soviétique et, en particulier, donne à l'OTAN une légitimité doctrinale et une validité idéologique.

L'Occident a perdu son droit moral au leadership

Tout le reste découle de la définition principale du statut de la Russie en tant que civilisation souveraine. Ne ressentant plus le besoin de se conformer à l'Occident global, Moscou, dans son nouveau concept de politique étrangère, attaque directement et durement l'eurocentrisme, rejette l'hégémonie occidentale et assimile la mondialisation à un nouveau cycle d'impérialisme et de colonialisme.

Le texte du concept affirme que le centre de l'humanité se déplace régulièrement vers des régions non occidentales de la planète - l'Asie, l'Eurasie, l'Afrique, l'Amérique latine.

Le modèle de développement mondial sans équilibre qui, pendant des siècles, a assuré une croissance économique supérieure à celle des puissances coloniales en s'appropriant les ressources des territoires et des États dépendants d'Asie, d'Afrique et de l'hémisphère occidental, est irrémédiablement en train de devenir une chose du passé. La souveraineté et les possibilités concurrentielles des puissances mondiales non occidentales et des dirigeants régionaux ont été renforcées.

C'est l'essence même de la multipolarité. L'Occident a non seulement perdu la capacité technique de rester l'hégémon mondial dans les domaines politique, économique et industriel, mais il a également perdu le droit moral de diriger.

L'humanité traverse une ère de changements révolutionnaires. La formation d'un monde plus juste et multipolaire se poursuit.

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Dans ce contexte, l'aspiration de la Russie à renforcer la multipolarité, à coopérer activement avec d'autres États de la civilisation (principalement la Chine et l'Inde) et à soutenir pleinement diverses alliances et associations d'intégration régionale est considérée comme un programme positif.

Afin de contribuer à adapter l'ordre mondial aux réalités d'un monde multipolaire, la Fédération de Russie entend donner la priorité (...) au renforcement du potentiel et à l'accroissement du rôle international de l'association interétatique BRICS, de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), de la Communauté des États indépendants (CEI), de l'Union économique eurasienne (UEE), de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), de la RIC (Russie, Inde, Chine) et d'autres associations interétatiques et organisations internationales, ainsi que de mécanismes impliquant de manière significative la RIC (Russie, Inde, Chine).

Le monde devient irréversiblement multipolaire, mais l'ancien ordre unipolaire n'est pas prêt à abandonner sans combattre. Telle est la principale contradiction de l'ère moderne. Elle explique la signification des principaux processus de la politique mondiale. Le fait est, explique le concept, que l'Occident libéral mondialiste, réalisant que les jours de son leadership sont comptés, n'est pas prêt à accepter les nouvelles réalités et, à l'agonie, commence à lutter désespérément pour la préservation de son hégémonie.

C'est ce qui explique la plupart des conflits dans le monde et, surtout, la politique hostile des élites occidentales à l'égard de la Russie, qui est objectivement devenue l'un des pôles les plus évidents et les plus cohérents de l'ordre multipolaire. C'est précisément parce que la Russie s'est déclarée État de civilisation, refusant de reconnaître l'universalité de l'ordre mondial occidental et de ses règles, c'est-à-dire le modèle unipolaire de l'ordre mondial, qu'elle est devenue l'objet des attaques de l'Occident, qui a constitué une vaste coalition de pays inamicaux contre la Russie et s'est directement fixé pour objectif de priver la Russie de sa souveraineté.

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Les États-Unis d'Amérique (USA) et leurs satellites, considérant le renforcement de la Russie comme l'un des principaux centres de développement du monde moderne et considérant sa politique étrangère indépendante comme une menace pour l'hégémonie occidentale, ont utilisé les mesures prises par la Fédération de Russie pour protéger ses intérêts vitaux en Ukraine comme prétexte pour aggraver leur politique anti-russe de longue date et ont déclenché un nouveau type de guerre hybride. Elle vise à affaiblir la Russie par tous les moyens possibles, notamment en sapant son rôle civilisationnel créatif, sa puissance, ses capacités économiques et technologiques, en limitant sa souveraineté en matière de politique étrangère et intérieure et en détruisant son intégrité territoriale. Cette ligne de conduite de l'Occident est devenue globale et est inscrite dans la doctrine.

Face à cette confrontation, qui constitue le contenu principal de la transition de l'unipolarité à la multipolarité, alors que l'Occident tente par tous les moyens de retarder ou d'interrompre cette transition, la Russie, en tant qu'État-civilisation souverain, en tant que pôle mondial multipolaire stable et fiable déjà établi, déclare sa ferme intention de ne pas s'écarter de la voie choisie, quel qu'en soit le prix.

En réponse aux actions inamicales de l'Occident, la Russie a l'intention de défendre son droit d'exister et de se développer librement par tous les moyens disponibles.

Cela inclut bien sûr le droit d'utiliser contre l'ennemi (qui, dans les circonstances actuelles, est l'Occident collectif qui cherche à maintenir l'unipolarité à tout prix et à étendre son hégémonie), en cas d'attaque directe et même à des fins préventives, n'importe quel type d'armes - jusqu'aux armes nucléaires et aux armes de pointe. Si l'existence même de la Russie souveraine et du monde russe est menacée d'un danger mortel, la Russie est prête à aller aussi loin que nécessaire dans ce cas.

Conditions de coopération

Le nouveau concept définit également les conditions d'une normalisation des relations avec les pays occidentaux. Les pays anglo-saxons, qui sont particulièrement hostiles à la Russie dans cette escalade, sont mis en évidence de manière particulière. Un partenariat renouvelé n'est possible que si les pays occidentaux hostiles et leurs satellites renoncent à la russophobie. En fait, il s'agit d'un ultimatum, exigeant de l'Occident qu'il accepte les conditions de la multipolarité, car l'essence de la russophobie dans le contexte géopolitique n'est rien d'autre que le refus obstiné des élites mondialistes occidentales de reconnaître le droit des États souverains et des civilisations à suivre leur propre voie. C'est la seule raison pour laquelle la Russie se bat aujourd'hui en Ukraine. Sans le contrôle de l'Ukraine, comme le sait tout géopoliticien, la Russie ne pourra pas jouir d'une pleine souveraineté géopolitique et civilisationnelle.

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C'est la signification du monde russe, qui ne coïncide pas avec les frontières des États nationaux, mais qui, lorsqu'il forme le pôle et la transition vers l'État-civilisation, ne peut rester sous le contrôle de structures géopolitiques hostiles. Amicales et neutres - oui (comme le montre l'exemple de l'Union biélorusse), mais leur souveraineté nationale n'est pas menacée. Au contraire, la Russie est prête à jouer le rôle de garant et à contribuer à leur renforcement par tous les moyens possibles - dans les domaines économique, politique et militaro-stratégique. Mais toute tentative visant à séparer la partie du monde russe de la Russie principale sera réprimée par tous les moyens. Et c'est exactement ce qui se passe actuellement.

Priorités, vecteurs et objectifs finaux

La deuxième partie du concept de politique étrangère présente des stratégies spécifiques pour développer les relations entre la Russie et les régions du monde : intégration eurasienne de l'espace post-soviétique, construction d'un partenariat prioritaire avec la Chine, l'Inde, le monde islamique, l'Afrique et l'Amérique latine. Dans chaque domaine, des priorités, des vecteurs et des finalités sont mis en évidence. L'adresse à l'Occident est discrète. Mais sous les formules diplomatiques lourdes, il est facile de lire ce qui suit :

Si les peuples occidentaux trouvent la force de se lever et de se débarrasser de la dictature d'une élite hégémonique maniaque qui mène la civilisation à l'abîme, de mettre en avant de vrais leaders et de porter au pouvoir les forces qui défendront réellement leurs intérêts nationaux, ils ne trouveront pas de meilleur ami et allié que la Russie. Toutefois, la Russie n'a pas l'intention d'apporter une aide active en s'ingérant dans les processus internes de la vie politique des pays hostiles et souligne son respect pour tout choix souverain des sociétés occidentales. La Russie dispose également d'une réponse décente en cas de confrontation directe avec des puissances hostiles, si celles-ci franchissent la ligne fatale. Mais il serait préférable que personne ne la franchisse.

La nouvelle version du concept de politique étrangère est un acte fondamental dans le processus de décolonisation de la Russie elle-même, sa libération du contrôle extérieur.

Si l'on veut que ses dispositions soient prises au sérieux, il faut déjà aligner les activités du ministère des affaires étrangères et des institutions éducatives de base (surtout le MGIMO, encore dominé par des paradigmes complètement différents), réformer Rossotrudnichestvo et Russian World, et promouvoir de nouveaux courants de diplomatie publique qui reconnaissent la Russie comme une civilisation souveraine, tels que le Mouvement russophile international (IRD).

Mais l'affirmation de la Russie en tant qu'État civilisé revêt également une importance considérable et décisive pour la politique intérieure. Après tout, on ne peut pas agir comme un État civilisé en matière de politique étrangère et continuer à faire partie d'un système libéral centré sur l'Occident, en partageant ses approches, ses valeurs et ses principes en matière de politique intérieure, même s'il s'agit d'un État souverain. La politique étrangère est toujours étroitement liée à la politique intérieure. Et c'est là que la Russie, pour défendre sa souveraineté, devra s'engager dans des réformes sérieuses et profondes dans un avenir très proche. Si nous avons, on peut le dire, une politique étrangère souveraine, la nécessité d'une politique intérieure souveraine n'a pas encore été bien comprise.

 

La dangereuse "pop science" de Yuval Harari

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La dangereuse "pop science" de Yuval Harari

Darshana Narayanan

Source: https://novaresistencia.org/2023/04/02/a-perigosa-pop-science-de-yuval-harari/

L'un des visages du mondialisme d'aujourd'hui est Yuval Noah Harari, un "penseur" et "diffuseur de science" qui préconise le contrôle génétique des êtres humains par une technocratie mondiale. Le problème est que les idées de Harari, en plus d'être pseudo-scientifiques, sont également dangereuses.

Regardez les vidéos de Yuval Noah Harari, l'auteur du livre à succès Sapiens: une brève histoire de l'humanité, et vous entendrez les questions les plus surprenantes qui lui sont posées.

    - "Dans cent ans, pensez-vous que nous nous soucierons encore d'être heureux ?" (Steve Paikin, journaliste canadien, dans "The Agenda with Steve Paikin").

    - "Ce que je fais est-il encore important et comment puis-je préparer mon avenir ?" (un étudiant en langues à l'université d'Anvers).

    - À la fin de Sapiens, j'ai dit que nous devrions nous poser la question suivante : "Que voulons-nous vouloir ? Eh bien, que pensez-vous que nous devrions vouloir ?" (un membre du public des TED Dialogues, Nationalisme vs. Globalisme : le nouveau clivage politique).

    - "Êtes-vous quelqu'un qui pratique Vipassana - cela vous aide-t-il à approcher la force ? Est-ce là que vous approchez la force ?" (le modérateur du Conclave India Today 2018).

Lors de ces rencontres, Harari s'exprime de manière douce, voire timide. Il dit parfois, avec bonne humeur, qu'il ne possède pas de pouvoirs divinatoires, puis il s'empresse de répondre à la question avec une autorité qui fait se demander si, en fait, il en possède. Dans cent ans, il est fort probable que les humains disparaîtront et que la Terre sera peuplée d'êtres très différents, tels que les cyborgs et l'intelligence artificielle (IA), a déclaré M. Harari à M. Paikin, ajoutant qu'il est difficile de prédire "quel type de vie émotionnelle ou mentale ces entités auront". Il a conseillé aux étudiants de se diversifier, car le marché de l'emploi de 2040 sera très volatile. Nous devrions "vouloir connaître la vérité", a-t-il annoncé lors de la conférence TED. "Je pratique la méditation Vipassana pour voir la réalité plus clairement", a déclaré Harari au Conclave India Today, sans même sourire de l'absurdité de la question. Quelques instants plus tard, il a précisé : "Si je ne peux pas observer la réalité de ma propre respiration pendant 10 secondes, comment puis-je espérer observer la réalité du système géopolitique ?"

Si vous ne vous sentez pas déjà mal à l'aise, considérez ceci : parmi les disciples de Harari se trouvent certaines des personnes les plus puissantes du monde, qui se pressent auprès de lui comme les rois de l'Antiquité auprès de leurs oracles. Mark Zuckerberg a demandé à Harari si l'humanité devenait plus unifiée ou plus fragmentée par la technologie. Le directeur général du Fonds monétaire international lui a demandé si les médecins s'appuieraient à l'avenir sur le revenu de base universel. Le PDG d'Axel Springer, l'un des plus grands éditeurs européens, a demandé à Harari ce que les éditeurs devraient faire pour réussir dans le monde numérique. Un interviewer de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) lui a demandé quel serait l'effet du COVID sur la coopération scientifique internationale. En faveur des décrets en demi-teinte de Harari, chacun a subverti sa propre autorité. Et ils l'ont fait non pas pour un expert dans l'un de leurs domaines, mais pour un historien qui est à bien des égards un imposteur, surtout lorsqu'il s'agit de science.

*

Les temps sont durs et nous cherchons tous des réponses à des questions qui sont littéralement des questions de vie ou de mort : les humains survivront-ils aux vagues de pandémies et au changement climatique qui s'annoncent ? Nos gènes détiennent-ils la clé pour comprendre tout ce qui nous concerne ? La technologie nous sauvera-t-elle ou nous détruira-t-elle ? Le désir d'un guide avisé, d'une sorte de prophète qui saute audacieusement d'une discipline à l'autre pour fournir des réponses simples, lisibles et fiables, tout en liant le tout dans un récit captivant, est compréhensible, mais est-il réaliste ?

Je suis effrayé par le fait que, pour beaucoup, cette question ne semble pas pertinente. Le best-seller de Harari, Sapiens : une brève histoire de l'humanité, est une vaste saga de l'espèce humaine, depuis nos humbles débuts en tant que singes jusqu'à un avenir dans lequel nous développerons les algorithmes qui nous détrôneront et nous domineront. Sapiens a été publié en anglais en 2014 et, en 2019, il avait été traduit dans plus de 50 langues et s'était vendu à plus de 13 millions d'exemplaires. En recommandant le livre sur CNN en 2016, le président Barack Obama a déclaré que Sapiens, tout comme les pyramides de Gizeh, lui donnait "un sens de la perspective" sur notre extraordinaire civilisation. Harari a publié deux autres best-sellers : Homo Deus : une brève histoire de demain (2017) et 21 leçons pour le XXIe siècle (2018). Au total, ses livres se sont vendus à plus de 23 millions d'exemplaires dans le monde. Il pourrait avoir le droit d'être l'intellectuel le plus recherché au monde, ornant les plateaux de tournage partout, gagnant des centaines de milliers de dollars pour chaque représentation.

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Nous avons été séduits par Harari par le pouvoir non pas de sa vérité ou de son érudition, mais de son récit. En tant que scientifique, je sais combien il est difficile de transformer des sujets complexes en récits convaincants et précis. Je sais aussi quand la science est sacrifiée au profit du sensationnalisme. Yuval Harari est ce que j'appelle un "populiste de la science" (Le psychologue clinicien canadien et gourou de YouTube Jordan Peterson en est un autre exemple). Les populistes de la science sont des conteurs doués qui tissent des récits sensationnalistes sur des "faits" scientifiques dans un langage simple et émotionnellement convaincant. Leurs récits sont largement dépourvus de nuances ou de doutes, ce qui leur donne un faux air d'autorité et rend leur message d'autant plus convaincant. Comme leurs homologues en politique, les populistes scientifiques sont des sources de désinformation. Ils promeuvent de fausses crises, tout en se présentant comme ayant les réponses. Ils comprennent la séduction d'une histoire bien racontée et cherchent sans relâche à élargir leur audience, même si la science sous-jacente est déformée dans la poursuite de la célébrité et de l'influence.

Aujourd'hui, raconter de bonnes histoires est plus nécessaire que jamais, mais aussi plus risqué, en particulier lorsqu'il s'agit de science. La science éclaire les décisions médicales, environnementales, juridiques et bien d'autres décisions publiques, ainsi que nos opinions personnelles sur ce dont nous devrions nous préoccuper et sur la manière dont nous menons notre vie. Des actions sociales et individuelles importantes dépendent de notre meilleure compréhension du monde qui nous entoure, aujourd'hui plus que jamais, avec la peste dans tous nos foyers et le pire à venir avec le changement climatique.

Il est temps de soumettre notre prophète populiste, et d'autres comme lui, à un examen sérieux.

Cela peut paraître surprenant, mais la validité factuelle du travail de Yuval Harari n'a guère été évaluée par les chercheurs ou les publications classiques. Le propre directeur de thèse de Harari, Steven Gunn, professeur à Oxford, qui a encadré la recherche de Harari sur "Les mémoires militaires de la Renaissance : guerre, histoire et identité, 1450-1600", a fait un aveu surprenant : son ancien étudiant a essentiellement réussi à esquiver le processus de vérification des faits. Dans le profil de Harari publié en 2020 dans le New Yorker, M. Gunn suppose que Harari, en particulier avec son livre Sapiens, a "contourné" la critique des experts "en disant : "Posons des questions si vastes que personne ne peut dire : "Nous pensons qu'il y a quelque chose qui ne va pas ici et quelque chose qui ne va pas là"... Personne n'est un expert de la signification de tout, ou de l'histoire de tout le monde, sur une longue période.

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Cependant, j'ai moi-même tenté ma chance en vérifiant les faits de Sapiens, le livre qui a tout déclenché. J'ai consulté des collègues de la communauté des neurosciences et de la biologie évolutive et j'ai constaté que les erreurs de Harari sont nombreuses et substantielles, et qu'elles ne peuvent pas être rejetées comme un exercice de ringardise. Bien qu'il se présente comme un auteur de non-fiction, certains de ses récits sont plus proches de la fiction que de la réalité - autant de signes d'un scientifique populiste.

Prenons l'exemple de la "Partie I : La révolution cognitive", dans laquelle Harari décrit le bond de notre espèce vers le sommet de la chaîne alimentaire, en dépassant, par exemple, les lions.

    - "La plupart des grands prédateurs de la planète sont des animaux majestueux. Des millions d'années de domination les ont remplis d'assurance. Sapiens, en revanche, ressemble davantage au dictateur d'une république bananière. Ayant été jusqu'à très récemment l'un des laissés-pour-compte de la savane, nous sommes remplis de craintes et d'anxiété quant à notre position, ce qui nous rend doublement cruels et dangereux".

Harari conclut que "de nombreuses calamités historiques, des guerres meurtrières aux catastrophes écologiques, ont résulté de ce saut très précipité".

En tant que biologiste évolutionniste, je dois dire que ce passage me hérisse le poil. Qu'est-ce qui permet à un lion de se sentir sûr de lui ? Un rugissement puissant ? Un groupe de lionnes ? Une poignée de main ferme? La conclusion de Harari repose-t-elle sur des observations de terrain ou des expériences en laboratoire (le texte ne contient aucun indice sur ses sources) ? L'anxiété rend-elle vraiment les humains cruels ? Laisse-t-il entendre que si nous avions pris le temps d'atteindre le sommet de la chaîne alimentaire, la planète n'aurait pas connu de guerres ni de changements climatiques provoqués par l'homme ?

Ce passage évoque des scènes du Roi Lion: le majestueux Mufasa regarde l'horizon et dit à Simba que tout ce que la lumière touche est son royaume. Le récit de Harari est vivant et captivant, mais dépourvu de science.

Prenons ensuite la question du langage. Harari affirme que "[de nombreux] animaux, y compris toutes les espèces de singes, ont un langage vocal.

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J'ai passé une dizaine d'années à étudier la communication vocale chez les ouistitis, un singe du Nouveau Monde (à l'occasion, leur communication avec moi consistait à pulvériser leur urine dans ma direction). À l'Institut des neurosciences de Princeton, où j'ai obtenu mon doctorat, nous avons étudié comment le comportement vocal émerge de l'interaction de phénomènes évolutifs, développementaux, neuronaux et biomécaniques. Nos travaux ont permis de briser le dogme selon lequel la communication des singes (par opposition à la communication humaine) est préprogrammée dans les codes neuronaux ou génétiques. En fait, nous avons découvert que les bébés singes apprennent à "parler", avec l'aide de leurs parents, de la même manière que les bébés humains.

Cependant, malgré toutes leurs similitudes avec les humains, on ne peut pas dire que les singes aient un "langage". Le langage est un système symbolique régi par des règles, dans lequel les symboles (mots, phrases, images, etc.) font référence à des personnes, des lieux, des événements et des relations dans le monde, mais évoquent également d'autres symboles au sein du même système (par exemple, des mots qui définissent d'autres mots) et s'y réfèrent. Les cris d'alarme des singes et les chants des oiseaux et des baleines peuvent transmettre des informations, mais nous vivons - comme l'a dit le philosophe allemand Ernst Cassirer - dans "une nouvelle dimension de la réalité" qui est rendue possible par l'acquisition d'un système symbolique.

Les scientifiques peuvent avoir des théories divergentes sur l'origine du langage, mais tous - des linguistes comme Noam Chomsky et Steven Pinker aux experts en communication comme Michael Tomasello et Asif Ghazanfar - s'accordent à dire que si des précurseurs peuvent être trouvés chez d'autres animaux, le langage est propre à l'homme. C'est une maxime qui est enseignée dans les cours de biologie de premier cycle partout dans le monde et que l'on peut trouver en effectuant une simple recherche sur Google.

Mes collègues scientifiques ne sont pas non plus d'accord avec Harari. Le biologiste Hjalmar Turesson souligne que l'affirmation de Harari selon laquelle les chimpanzés "chassent ensemble et se battent côte à côte contre les babouins, les guépards et les chimpanzés ennemis" ne peut être vraie, car les guépards et les chimpanzés ne vivent pas dans les mêmes régions d'Afrique. "Il est possible que Harari confonde les guépards avec les léopards", précise M. Turesson.

Peut-être qu'au fur et à mesure que les détails se dévoilent, la distinction entre guépards et léopards ne sera pas si importante. Après tout, Harari écrit l'histoire de l'homme. Mais, malheureusement, ses erreurs s'étendent aussi à notre espèce. Dans le chapitre de Sapiens intitulé "Une révolution permanente", dans la section "La paix à notre époque", Harari utilise l'exemple du peuple Waorani/Huaorani d'Équateur pour soutenir que, historiquement, "la réduction de la violence est due en grande partie à la montée de l'État". Il nous dit que les Waorani sont violents parce qu'ils "vivent au fin fond de la jungle amazonienne, sans armée, sans police, sans prison".

Il est vrai que les Waorani ont connu des taux d'homicide parmi les plus élevés au monde, mais ils vivent dans une paix relative depuis le début des années 1970. J'ai parlé à Anders Smolka, un phytogénéticien, qui a passé du temps avec les Waorani en 2015. Il m'a expliqué que la loi équatorienne ne s'appliquait pas dans la jungle et que les Waorani n'avaient ni police ni prison. "Si les lances avaient encore été un sujet de préoccupation, je suis absolument certain que j'en aurais entendu parler", dit-il. "J'étais là en tant que bénévole pour un projet d'écotourisme, et la sécurité de nos hôtes était donc une question très importante. Harari utilise ici un exemple extrêmement faible pour justifier la nécessité de notre fameux État policier.

Ces détails peuvent sembler sans importance, mais chacun d'entre eux est un bloc fracturé dans ce que Harari présente faussement comme une fondation inattaquable. Si une lecture superficielle révèle cette litanie d'erreurs fondamentales, je pense qu'un examen plus approfondi conduira à des rejets en bloc [1].

Souvent, Harari ne se contente pas de décrire notre passé, il fait des prédictions sur l'avenir de l'humanité. Bien entendu, tout le monde a le droit de spéculer sur notre avenir. Mais il est important de savoir si ces spéculations sont valables, surtout si une personne a accès à l'oreille de nos élites décisionnelles, comme c'est le cas de Harari. Les fausses projections ont des conséquences réelles. Elles peuvent induire en erreur des parents pleins d'espoir en leur faisant croire que le génie génétique permettra d'éradiquer l'autisme, conduire à l'investissement d'énormes sommes d'argent dans des projets sans avenir ou nous laisser terriblement mal préparés à faire face à des menaces telles que les pandémies.

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Voici ce que Harari a dit à propos des pandémies dans son livre Homo Deus: A Brief History of Tomorrow, publié en 2017.

    "Ainsi, dans la lutte contre les calamités naturelles comme le sida et Ebola, la balance penche en faveur de l'humanité (...) Il est donc probable qu'il y aura à l'avenir de grandes épidémies qui continueront à mettre l'humanité en danger, mais seulement si l'humanité elle-même les crée, au service d'une idéologie impitoyable. Le temps où l'humanité était sans défense contre les épidémies naturelles est probablement révolu. Mais il se peut que nous en venions à le regretter".

J'aurais aimé qu'il nous manque. Au lieu de cela, plus de 6 millions d'entre nous sont morts du COV ID selon les chiffres officiels, et certaines estimations situent le nombre réel entre 12 et 22 millions. Et que vous pensiez que le SRAS-CoV-2 - le virus responsable de la pandémie - est venu directement de la nature ou de l'Institut de virologie de Wuhan, nous pouvons tous convenir que la pandémie n'a pas été créée au "service d'une idéologie impitoyable".

Harari ne pouvait pas avoir plus tort ; cependant, en bon scientifique populiste, il a continué à offrir son statut d'expert supposé en apparaissant dans de nombreuses émissions pendant la pandémie. Il est intervenu sur la National Public Radio (NPR) pour expliquer "comment gérer à la fois l'épidémie et la crise économique qui en découle". Il est intervenu dans l'émission de Christiane Amanpour pour souligner les "questions clés soulevées par l'épidémie de coronavirus". Il est ensuite passé à l'émission Newsnight de la BBC, où il a présenté "une perspective historique sur le coronavirus". Il est ensuite passé au podcast de Sam Harris, où il nous a parlé des "implications futures" du CO VID. Harari a également trouvé le temps d'apparaître sur Iran International avec Sadeq Saba, sur India Today E-Conclave Corona Series et sur une multitude d'autres chaînes d'information à travers le monde.

Saisissant l'occasion de promouvoir une fausse crise - un autre trait essentiel du populiste scientifique - Harari a lancé des mises en garde contre la "surveillance sous la peau" (un concept inquiétant, il est vrai). "À titre d'expérience de pensée, il a déclaré : "Considérez un gouvernement hypothétique qui exige de chaque citoyen qu'il porte un bracelet biométrique qui surveille la température du corps et le rythme cardiaque 24 heures sur 24". L'avantage, selon lui, est qu'un tel gouvernement pourrait potentiellement utiliser ces informations pour stopper une épidémie en quelques jours. L'inconvénient est qu'il pourrait fournir au gouvernement un système de surveillance amélioré, car "si vous pouvez surveiller ce qui se passe au niveau de la température de mon corps, de ma tension artérielle et de mon rythme cardiaque pendant que je regarde une vidéo, vous pouvez savoir ce qui me fait rire, ce qui me fait pleurer et ce qui me met très, très en colère".

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Les émotions humaines, et l'expression des émotions, sont très subjectives et variables. Il existe des différences culturelles et individuelles dans la manière dont nous interprétons nos sensations. Nos émotions ne peuvent pas être déduites de mesures physiologiques dépourvues d'informations contextuelles (un vieil ennemi, un nouvel amant et la caféine peuvent faire battre notre cœur plus vite). Cela est vrai même lorsque l'on surveille des mesures physiologiques plus larges que la température corporelle, la pression artérielle et la fréquence cardiaque. C'est également le cas lorsque l'on observe les mouvements du visage. Des scientifiques comme la psychologue Lisa Feldman Barrett constatent que, contrairement à ce que l'on croyait depuis longtemps, même les émotions telles que la tristesse et la colère ne sont pas universelles. "Les mouvements faciaux n'ont pas de signification émotionnelle inhérente à lire comme des mots sur une page", explique Lisa Feldman Barrett. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas été en mesure de créer des systèmes technologiques capables de déduire ce que vous ou moi ressentons à un moment donné (et c'est pourquoi nous ne serons peut-être jamais en mesure de construire de tels systèmes omniscients).

Les émotions humaines, et l'expression de ces émotions, sont extrêmement subjectives et variables. Il existe des différences culturelles et individuelles dans la manière dont nous interprétons nos sensations. Nos émotions ne peuvent pas être déduites de mesures physiologiques dépourvues d'informations contextuelles (un vieil ennemi, un nouvel amant et la caféine peuvent faire battre notre cœur plus vite). Cela est vrai même lorsque l'on surveille des mesures physiologiques plus larges que la température corporelle, la pression artérielle et la fréquence cardiaque. C'est également le cas lorsque l'on observe les mouvements du visage. Des scientifiques comme la psychologue Lisa Feldman Barrett constatent que, contrairement à ce que l'on croyait depuis longtemps, même les émotions telles que la tristesse et la colère ne sont pas universelles. "Les mouvements faciaux n'ont pas de signification émotionnelle inhérente à lire comme des mots sur une page", explique Lisa Feldman Barrett. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas été en mesure de créer des systèmes technologiques capables de déduire ce que vous ou moi ressentons à tout moment (et c'est pourquoi nous ne serons peut-être jamais en mesure de construire de tels systèmes omniscients).

***

Les spéculations de Harari reposent systématiquement sur une mauvaise compréhension de la science. Ses prédictions sur notre avenir biologique, par exemple, reposent sur une vision de l'évolution centrée sur les gènes, une façon de penser qui a (malheureusement) dominé le discours public grâce à des personnalités comme lui. Un tel réductionnisme favorise une vision simpliste de la réalité et, pire encore, s'aventure dangereusement sur le terrain de l'eugénisme.

Dans le dernier chapitre de Sapiens, Harari écrit :

    "Pourquoi ne pas retourner à la planche à dessin de Dieu et concevoir un meilleur sapiens ? Les capacités, les besoins et les désirs de l'homo sapiens ont une base génétique, et le génome de sapiens n'est pas plus complexe que celui des souris et des rats (le génome du rat contient environ 2,5 milliards de nucléobases, celui de sapiens environ 2,9 milliards de bases ; autrement dit, ce dernier est 14 % plus grand que celui du rat) (...) Si le génie génétique peut créer des rats qui sont des génies, pourquoi ne pas créer des humains qui sont des génies ? Si nous pouvons créer des souris monogames, pourquoi pas des humains programmés pour rester fidèles à leur partenaire ?

Ce serait sans doute commode si le génie génétique était une baguette magique, dont les mouvements rapides transformeraient les coureurs de jupons en partenaires fidèles, et tout le monde en Einstein. Malheureusement, ce n'est pas le cas. Supposons que nous voulions devenir une espèce non violente. Les scientifiques ont découvert qu'une faible activité du gène de la monoamine oxydase-A (MAO-A) est liée à un comportement agressif et à des crimes violents, mais au cas où nous serions tentés de "retourner à la planche à dessin de Dieu et de dessiner un meilleur sapiens" (comme le dit Harari), toutes les personnes ayant une faible activité de la MAO-A ne sont pas violentes, et toutes les personnes ayant une forte activité de la MAO-A ne sont pas non plus non-violentes. Les personnes qui grandissent dans un environnement extrêmement violent deviennent souvent agressives ou violentes, indépendamment de leurs gènes. Une activité MAO-A élevée peut vous protéger de ce destin, mais ce n'est pas une évidence. En revanche, lorsque les enfants sont élevés dans un environnement aimant et encourageant, même ceux qui ont une faible activité MAO-A se développent souvent bien.

Nos gènes ne sont pas des marionnettistes qui tirent les bonnes ficelles au bon moment pour contrôler les événements qui nous créent. Lorsque Harari parle de modifier notre physiologie ou de "concevoir" des êtres humains pour qu'ils soient fidèles ou intelligents, il passe sous silence les nombreux mécanismes non génétiques qui nous façonnent.

Par exemple, même quelque chose d'apparemment programmé comme notre physiologie - des cellules qui se divisent, se déplacent, décident de leur destin et s'organisent en tissus et en organes - n'est pas conçu par les seuls gènes. Dans les années 1980, le scientifique J.L. Marx a mené une série d'expériences sur le Xénope (une grenouille aquatique originaire d'Afrique subsaharienne) et a découvert que des événements biophysiques "banals" (tels que les réactions chimiques dans les cellules, les pressions mécaniques dans et sur les cellules et la gravité) peuvent activer et désactiver des gènes, déterminant ainsi le destin des cellules. Il en a conclu que le corps des animaux est le résultat d'une danse complexe entre les gènes et les événements physiques et environnementaux changeants.

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Prenons l'exemple du goût. En lisant quelqu'un comme Harari, on pourrait penser que le comportement des nouveau-nés humains, par exemple, est dominé presque exclusivement par leurs gènes, puisque les bébés n'ont pratiquement aucune "nutrition" pertinente. Or, des recherches montrent que les bébés de six mois de femmes ayant bu beaucoup de jus de carotte au cours du dernier trimestre de leur grossesse apprécient davantage les céréales aromatisées à la carotte que les autres bébés. Si ces bébés aiment le goût des carottes, ce n'est pas en raison de gènes "carrot-loving". Lorsque les mères (biologiques ou adoptives) allaitent leurs bébés, les saveurs des aliments qu'elles ont consommés se reflètent dans leur lait maternel et leurs bébés développent une préférence pour ces aliments. Les bébés "héritent" des préférences alimentaires comportementales de leur mère.

Depuis des générations, on dit aux nouvelles mères coréennes de boire des bols de soupe aux algues, et les femmes chinoises mangent des pieds de porc cuits à l'étouffée avec du gingembre et du vinaigre peu de temps après l'accouchement. Les enfants coréens et chinois peuvent hériter de préférences gustatives spécifiques à leur culture sans qu'il soit nécessaire d'avoir des gènes "manger du gingembre" ou "avoir envie de vinaigre".

Dans notre monde moderne, où que nous vivions, nous consommons des sucres transformés. Une alimentation prolongée riche en sucre peut entraîner des comportements alimentaires anormaux et l'obésité. Les scientifiques ont utilisé des modèles animaux et ont découvert un mécanisme moléculaire à l'origine de ce phénomène. Les régimes riches en sucre activent un complexe protéique appelé PRC2.1, qui régule ensuite l'expression des gènes pour reprogrammer les neurones gustatifs et réduire la sensation de sucré, enfermant ainsi les animaux dans des schémas alimentaires inadaptés. Dans ce cas, les habitudes alimentaires modifient l'expression des gènes - un exemple de "reprogrammation épigénétique" - ce qui conduit à des choix alimentaires malsains.

La nutrition façonne la nature et la nature façonne la nutrition. Il ne s'agit pas d'une dualité, mais plutôt d'une bande de Moebius. La réalité de l'émergence des "capacités, besoins et désirs de l'Homo sapiens" est bien plus sophistiquée (et élégante !) que ce que dépeint Harari.

Les généticiens Eva Jablonka et Marion J. Lamb l'expliquent le mieux dans leur livre Evolution in Four Dimensions (L'évolution en quatre dimensions) :

    "L'idée qu'il existe un gène de l'aventure, des maladies cardiaques, de l'obésité, de la religiosité, de l'homosexualité, de la timidité, de la stupidité ou de tout autre aspect du corps ou de l'esprit n'a pas sa place dans le discours génétique. Bien que de nombreux psychiatres, biochimistes et autres scientifiques qui ne sont pas généticiens (mais qui s'expriment avec une aisance remarquable sur les questions génétiques) utilisent encore le langage des gènes comme de simples agents causaux et promettent à leur public des solutions rapides à toutes sortes de problèmes, ils ne sont rien d'autre que des propagandistes dont les connaissances ou les motivations devraient être suspectes".

Les motivations de Harari restent mystérieuses, mais ses descriptions de la biologie (et ses prédictions sur l'avenir) sont guidées par une idéologie répandue parmi les technologues de la Silicon Valley comme Larry Page, Bill Gates, Elon Musk et d'autres. Ils peuvent avoir des opinions différentes sur la question de savoir si les algorithmes nous sauveront ou nous détruiront. Mais ils croient néanmoins au pouvoir transcendant de l'informatique numérique. "Nous nous dirigeons vers une situation où l'IA sera beaucoup plus intelligente que l'homme, et je pense que cette échéance est dans moins de cinq ans", a déclaré Elon Musk dans une interview accordée au New York Times en 2020. Musk a tort. Les algorithmes ne feront pas tout notre travail, ne domineront pas le monde et ne mettront pas fin à l'humanité de sitôt (voire jamais). Comme le dit François Chollet, expert en IA, à propos de la possibilité pour les algorithmes d'atteindre l'autonomie cognitive, "aujourd'hui et dans un avenir proche, cela relève de la science-fiction". En se faisant l'écho des récits de la Silicon Valley, le scientifique populiste Harari promeut une fois de plus une fausse crise. Pire, il détourne notre attention des dégâts réels des algorithmes et du pouvoir débridé de l'industrie technologique.

Dans le dernier chapitre d'Homo Deus, Harari nous parle d'une nouvelle religion, "la religion des données". Les adeptes de cette religion - les "dataistes", comme il les appelle - perçoivent l'univers entier comme des flux de données. Ils considèrent tous les organismes comme des processeurs de données biochimiques et croient que la "vocation cosmique" de l'humanité est de créer un processeur de données omniscient et tout-puissant qui nous comprend mieux que nous ne nous comprenons nous-mêmes. La conclusion logique de cette saga, prédit Harari, est que les algorithmes prendront le pouvoir sur tous les aspects de notre vie : ils décideront qui nous épouserons, quelles carrières nous poursuivrons et comment nous serons gouvernés (la Silicon Valley, comme vous pouvez l'imaginer, est un centre de la religion des données).

"L'homo sapiens est un algorithme obsolète", déclare Harari, paraphrasant les adeptes des données.

    "En fin de compte, quel est l'avantage des humains sur les poulets ? Tout simplement que l'information circule selon des schémas beaucoup plus complexes chez les humains que chez les poulets. Les humains absorbent plus de données et les traitent à l'aide de meilleurs algorithmes (...) Eh bien, si nous pouvions créer un système de traitement des données qui absorbe encore plus de données qu'un humain et les traite encore plus efficacement, ce système ne serait-il pas supérieur à l'humain exactement de la même manière qu'un humain est supérieur à un poulet ?"

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Mais un humain n'est pas un poulet amélioré, et il n'est pas non plus nécessairement supérieur en tous points à un poulet. En fait, les poulets peuvent "absorber plus de données" que les humains et les "traiter mieux", du moins dans le domaine de la vision. La rétine humaine possède des cellules photoréceptrices sensibles aux longueurs d'onde rouges, bleues et vertes. La rétine des poulets possède ces mêmes cellules, ainsi que des cellules coniques pour les longueurs d'onde violettes (y compris certains ultraviolets), et des récepteurs spécialisés qui peuvent les aider à mieux suivre les mouvements. Leur cerveau est équipé pour traiter toutes ces informations supplémentaires. Le monde des poulets est une extravagance technicolor que nous ne pouvons même pas imaginer. Mon propos n'est pas de dire qu'un poulet est meilleur qu'un humain - il ne s'agit pas d'une compétition - mais que les poulets sont uniquement "poulets" de la même manière que nous sommes uniquement "humains".

Ni les poulets ni les humains ne sont de simples algorithmes. Notre cerveau a un corps, et ce corps est situé dans un monde. Nos comportements découlent de nos activités corporelles et mondiales. Les êtres vivants ne se contentent pas d'absorber et de traiter des flux de données provenant de notre environnement ; nous modifions et créons continuellement notre propre environnement et celui des autres, un processus appelé "construction de niche" en biologie évolutive. Lorsqu'un castor construit un barrage sur un cours d'eau, il crée un lac, et tous les autres organismes doivent désormais vivre dans un monde où il y a un lac. Les castors peuvent créer des zones humides qui persistent pendant des siècles, modifiant ainsi les pressions de sélection auxquelles leur progéniture est exposée, ce qui pourrait entraîner un changement dans le processus d'évolution. L'Homo sapiens est d'une flexibilité inégalée ; nous avons une capacité extraordinaire à nous adapter à notre environnement, ainsi qu'à le modifier. Nos actes de vie ne nous différencient pas seulement des algorithmes ; ils rendent presque impossible pour les algorithmes de prédire avec précision nos comportements sociaux, tels que la personne que nous aimerons, notre réussite dans nos futurs emplois [3], ou si nous sommes susceptibles de commettre un crime.

Harari prend soin de se présenter comme un scribe objectif. Il prend soin de nous dire qu'il présente la vision du monde des Dataïstes, et non la sienne. Mais il fait ensuite quelque chose de très intelligent. La vision des dataïstes "peut sembler une idée excentrique et marginale", dit-il, "mais elle a en fait conquis la plupart des échelons supérieurs de la science". En présentant la vision du monde des données comme concluante (ayant "conquis la plupart des échelons supérieurs de la science"), il nous dit qu'il est "objectivement" vrai que les humains sont des algorithmes, et que notre marche vers l'obsolescence - en tant que destinataires passifs de décisions prises par de meilleurs algorithmes - est inéluctable parce qu'elle est intégralement liée à notre humanité. En revenant à la note de bas de page à l'appui de cette affirmation radicale, nous constatons que sur les quatre livres qu'il cite, trois ont été écrits par des non-scientifiques : un publiciste musical, un créateur de tendances et un éditeur de magazines [4].

Le destin de l'humanité n'est pas prédéterminé. Notre autonomie est érodée non pas par le karma cosmique, mais par un nouveau modèle économique inventé par Google et perfectionné par Facebook, une forme de capitalisme qui a trouvé le moyen de nous manipuler pour gagner de l'argent. La sociologue Shoshana Zuboff a donné à ce modèle économique le nom de "capitalisme de surveillance". Les entreprises du capitalisme de surveillance - Google, Facebook, Amazon, Microsoft et d'autres - construisent les plateformes numériques dont nous dépendons de plus en plus pour vivre, travailler et nous divertir. Elles surveillent nos activités en ligne dans les moindres détails et utilisent ces informations pour influencer nos comportements et maximiser leurs profits. En conséquence, leurs plateformes numériques ont contribué à créer des chambres d'écho qui se traduisent par un déni généralisé du climat, un scepticisme scientifique et une polarisation politique. En nommant l'ennemi et en le caractérisant comme une invention de l'homme - et non comme un fait de la nature ou une fatalité technologique - Zuboff nous fournit un moyen de le combattre. Comme on peut l'imaginer, Zuboff, contrairement à Harari, n'est pas une figure bien-aimée de la Silicon Valley.

***

En octobre 2021, Harari a publié le volume 2 de l'adaptation sous la forme d'une histoire graphique de Sapiens. Il s'ensuit un livre pour enfants sur Sapiens, Unstoppable, une expérience immersive, ainsi qu'une série télévisée de plusieurs saisons inspirée de Sapiens. Notre prophète populiste est implacable dans sa quête de nouveaux adeptes et, avec eux, de nouveaux sommets de gloire et d'influence.

Harari nous a séduits par son talent de conteur, mais un examen attentif de son parcours montre qu'il sacrifie la science au sensationnalisme, qu'il commet souvent de graves erreurs factuelles et qu'il présente comme vrai ce qui devrait être spéculatif. La base sur laquelle il fonde ses affirmations est obscure, car il fournit rarement des notes de bas de page ou des références adéquates et se montre remarquablement avare de reconnaître les penseurs qui ont formulé les idées qu'il présente comme les siennes [5]. Le plus dangereux est de renforcer les récits des capitalistes de la surveillance, en leur donnant carte blanche pour manipuler nos comportements en fonction de leurs intérêts commerciaux. Pour nous sauver de la crise actuelle et de celles à venir, nous devons rejeter vigoureusement la dangereuse science populiste de Yuval Noah Harari.

Notes:

[1] Mes préoccupations quant à la validité factuelle du travail de Harari font écho à une critique d'un autre livre à succès, Crisis, Jared Diamond, par l'auteur Anand Giridharadas. Giridharadas demande à Diamond : "Si nous ne pouvons pas vous faire confiance pour les petites et moyennes choses, comment pouvons-nous vous faire confiance là où les auteurs de livres de 10 kilomètres de haut ont vraiment besoin de notre confiance, pour les grandes choses difficiles à vérifier ? Giridharadas souligne également la nécessité d'une vérification professionnelle des faits pour les ouvrages non fictionnels, ce qui, à ma grande surprise, n'est pas la norme.

[2) Un extrait similaire du livre de Harari publié en 2017, Homo Deus : A Brief History of Tomorrow : "Une fois qu'il sera possible de réparer les gènes létaux, pourquoi s'embêter à insérer de l'ADN étranger quand on peut simplement réécrire le code et transformer un gène mutant dangereux en sa version bénigne ? Nous pourrons alors commencer à utiliser le même mécanisme pour réparer non seulement les gènes létaux, mais aussi ceux qui sont responsables de maladies moins mortelles, de l'autisme, de la stupidité et de l'obésité".

[3) Il n'existe aucune preuve, évaluée par des pairs, que les algorithmes peuvent prédire les performances professionnelles, même si des millions de personnes sont sélectionnées par des algorithmes pour des emplois dans des entreprises telles que McDonald's, Kraft-Heinz, Boston Consulting Group et Swarovski. L'informaticien de Princeton Arvind Narayanan a publiquement critiqué les entreprises proposant des services de sélection d'emploi par algorithme (HireVue et Pymetrics étant les deux principales) pour avoir "vendu de l'huile de serpent"[4].

[4] Les ouvrages cités par Harari : Kevin Kelly, What Technology Wants (New York : Viking Press, 2010) ; César Hidalgo, Why Information Grows : The Evolution of Order, from Atoms to Economies (Nueva York : Basic Books, 2015) ; Howard Bloom, Global Brain : The Evolution of Mass Mind from the Big Bang to the 21st Century (Hoboken : Wiley, 2001) ; Shawn DuBravac, Digital Destiny (Washington : Regnery Publishing, 2015).

[5] Un lecteur occasionnel qui lirait les écrits de Harari penserait que toutes les idées viennent de lui seul, mais les structures de pensée de Harari rappellent souvent celles d'autres auteurs qui l'ont précédé. Par exemple : sa comparaison des idéologies religieuses et séculières à un jeu de Pokémon Go est étonnamment similaire à une comparaison antérieure faite par le philosophe slovène Slavoj Zizek, dans son livre de 2017 Incontinence of the Void, et discutée précédemment lors de conférences. Dans son livre Homo Deus de 2017, Harari consacre un chapitre entier au "dataïsme", mais ne remercie pas les journalistes David Brooks (qui a inventé le terme dataïsme) ou Steve Lohr (qui a publié un livre en 2015 intitulé Dataism).

Source : Conversacion sobre Historia

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L'idéologie du genre est une bénédiction pour Big Pharma et une menace pour les droits des parents

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L'idéologie du genre est une bénédiction pour Big Pharma et une menace pour les droits des parents

Pedro L. Gonzalez

Source: https://novaresistencia.org/2023/04/03/ideologia-de-genero-e-uma-bencao-para-a-big-pharma-e-uma-ameaca-aos-direitos-dos-pais/

Une analyse de la manière dont l'industrie pharmaceutique fonctionne et tire profit de la mise en œuvre de l'idéologie du genre, et de la manière dont elle opère en menaçant les droits des parents sur leurs enfants.

Partout aux États-Unis, les parents sont confrontés à une nouvelle menace pour leurs enfants : le complexe industriel transgenre. Pour des raisons différentes, mais qui se recoupent parfois, l'establishment médical, l'industrie pharmaceutique, l'industrie culturelle et les agences gouvernementales conduisent nos enfants sur la voie de la "transition", que les parents le veuillent ou non.

Pour les acteurs de l'économie privée, en particulier, la diffusion de l'idéologie du genre est une aubaine pour leurs caisses.

Certes, les personnes souffrant de dysphorie de genre méritent d'être soignées avec compassion. Mais ce n'est pas du tout la même chose que de permettre à des mineurs, dans un état d'esprit vulnérable en ces temps de confusion sexuelle, de modifier leur corps de manière irréversible grâce aux dernières avancées de la science médicale et pharmaceutique.

En fait, la partie concernant les dernières découvertes scientifiques n'est pas correcte. L'acétate de médroxyprogestérone, un médicament couramment utilisé dans les "thérapies d'affirmation du genre", est depuis longtemps utilisé pour castrer chimiquement les délinquants sexuels.

Un autre médicament largement utilisé est le Lupron, un bloqueur d'hormones controversé. Le Lupron a été initialement développé pour abaisser les niveaux de testostérone chez les hommes atteints d'un cancer de la prostate, les castrant ainsi chimiquement. Il est désormais utilisé comme bloqueur de la puberté dans le secteur en plein essor de la "transition" des enfants.

AbbVie, fabricant du Lupron, a gagné 726 millions de dollars rien qu'avec ce médicament en 2018. AbbVie a rejoint d'autres grandes sociétés pharmaceutiques pour faire pression afin de maintenir les prix des médicaments à un niveau élevé tout en affichant des vertus en matière de diversité et d'inclusion.

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Les personnes transgenres ont besoin d'un soutien médical à vie, ce qui en fait des clients idéaux pour l'industrie des soins de santé, et le phénomène bien documenté de la "contagion par les pairs" - les enfants faisant pression les uns sur les autres pour qu'ils pensent qu'ils sont tous transgenres - garantit une réserve inépuisable de consommateurs.

Lisa Littman, médecin et scientifique à l'université de Brown, a mis en lumière ce phénomène social. Les recherches de Lisa Littman ont permis d'identifier un modèle : les enfants ont tendance à éprouver une "dysphorie de genre rapide" après avoir été exposés à l'idéologie transgenre par l'intermédiaire de leurs pairs ou des médias.

Son étude a suscité de vives réactions, ce qui est ironique car la contagion par les pairs est une autre façon de décrire le succès de la culture dans la normalisation de ces idées pour les enfants. Les critiques ont essentiellement crié : "Ce n'est pas vrai, et c'est tant mieux".

C'est pourtant ce qui se passe. Une chaîne new-yorkaise affiliée à PBS a récemment présenté une drag queen qui voulait que les enfants "expérimentent la magie de la drague et s'exercent à se déhancher ou à secouer les épaules pour apprendre à quel point nous pouvons nous sentir fabuleux dans notre propre corps".

L'émission s'adressait à des enfants âgés de 3 à 8 ans. "Gardez la "perversion/tara" dans les défilés de la "fierté LGBT" pour le bien de nos enfants", a écrit Lauren Rowello dans un article du Washington Post en juin. Rowello s'est réjouie de montrer des scènes d'hommes portant des lanières de cuir et se frappant les uns les autres "par jeu" avec des coups de fouet. "Ces personnes sont des membres de notre communauté qui célèbrent ce qu'ils sont et ce qu'ils aiment faire", a déclaré Lauren Rowello à ses enfants.

Ce message non seulement normalise les concepts hypersexualisés pour les enfants, mais les exalte également comme un bien positif ; penser ou agir autrement est donc cruel, lâche, conformiste. L'establishment médical est d'accord.

L'Association médicale américaine a annoncé que le sexe devrait être supprimé en tant que désignation légale dans la partie publique des certificats de naissance. Dans les écoles de médecine du pays, les aspirants médecins réprimandent leurs professeurs qui insistent encore sur la nature corporelle du sexe.

Dans un cas précis, un immigrant pakistanais et musulman fervent, Ahmed, a admis son fils adolescent autiste dans un hôpital de Seattle après qu'il ait lutté contre une grave dépression. En raison d'une politique COVID-19, Ahmed n'a pas pu rester avec son fils. En son absence, le personnel de l'hôpital et les travailleurs sociaux ont manipulé le garçon en lui faisant croire que ses problèmes provenaient du fait qu'il était une fille enfermée dans le corps d'un garçon.

À Washington, les mineurs peuvent consentir à une "thérapie d'affirmation de genre" à partir de l'âge de 13 ans. Sachant que les travailleurs sociaux prendraient les protestations pour des abus, Ahmed a juré de participer au jeu de la transition, a pris son fils et a fui l'État avec sa famille ; le fils d'Ahmed vit désormais heureux dans son genre naturel, en tant que garçon.

Au Pakistan, les gens fuient les terroristes ; aux États-Unis, ils fuient les travailleurs sociaux.

Dans notre meilleur des mondes, une culture de la dépravation s'attaque aux enfants. Cette culture insiste pour que l'État et les professionnels de la santé révoquent la tutelle des adultes desquels les enfants sont nés "accidentellement". Les conséquences sont désastreuses, mais aucun parti politique ne semble avoir le courage de défendre la santé mentale et la sécurité des familles américaines. Pendant ce temps, Big Pharma en profite largement.

Source : New York Post

samedi, 08 avril 2023

Le crépuscule de la doctrine Monroe : comment la Chine et la Russie empiètent sur l'Amérique

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Le crépuscule de la doctrine Monroe: comment la Chine et la Russie empiètent sur l'Amérique

Emanuel Pietrobon

Source: https://it.insideover.com/politica/tramonto-dottrina-monroe-cina-russia-sconfinano-america.html

Selon Phil Kelly, géopolitologue non conventionnel, les États-Unis sont le "Heartland" dont parlait Halford Mackinder dans ses ouvrages. Étendus sur une prairie extraordinairement fertile, dotés d'un sol et d'un sous-sol riches en ressources naturelles, des hydrocarbures à l'or bleu, et protégés par deux océans, ils jouissent d'un isolement géostratégique qui leur a permis de se développer presque sans être dérangés.

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Ce n'est pas entre le Turkestan et l'Altaï que se trouve le cœur de la Terre, dit Kelly, mais quelque part entre les Appalaches et le bassin du Mississippi. Et ce n'est pas de l'Eurafrasie, fragmentée, vulnérable aux divisions des thalassocraties et en guerre perpétuelle avec elle-même, que naîtra l'hyperpuissance qui trônera sur le monde. Car cette dernière appartient à ceux qui détiennent le pouvoir sur le cœur de la terre, à savoir les États-Unis.

L'hétérodoxe Kelly a produit une oeuvre dont la lecture est nécessaire pour qui veut se plonger dans les fondements de la puissance américaine, qui ne pourrait exister sans le contrôle des grandes routes commerciales maritimes mondiales - un fardeau hérité de l'Empire britannique -, sans le confinement dans une dimension tellurique des quatre cavaliers eurasiens de l'Apocalypse - Chine, Allemagne, Inde, Russie - et, surtout, sans le maintien dans un état de subalternité des acteurs clés de l'hémisphère occidental, la Doctrine Monroe.

Une doctrine Monroe que les aspirants à l'hégémonie mondiale ont toujours contestée, à commencer par la France de Napoléon III et l'Allemagne wilhelminienne, et qui est aujourd'hui assiégée par deux des quatre cavaliers eurasiens de l'Apocalypse, la Chine et la Russie, et par une constellation de forces régionales et extrarégionales. La guerre mondiale se déroule aussi en Amérique latine.

L'Amérique latine, chaudron du monde

De la préservation et de la protection de la doctrine Monroe dépendent l'existence et la survie du système hégémonique mondial construit par les États-Unis. La remettre en cause revient à se frapper la cage thoracique. Le défier, c'est ouvrir une brèche en direction du cœur de la terre, en sachant que la réaction de l'aigle blessé pourrait être imprévisible. Heartland pour Heartland et le monde devient aveugle.

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C'est la doctrine Monroe qui a fait des États-Unis un empire hémisphérique, les protégeant des menaces de l'Eurafrasie, et c'est pourquoi ils ont fait l'objet d'une attention particulière de la part des aspirants à l'hégémonie mondiale à toutes les époques: la France de Napoléon III, l'Allemagne de Guillaume II et d'Adolf Hitler, l'Union soviétique et, aujourd'hui, la Russie et la République populaire de Chine. Mais sur son endurance, les affronts systémiques mis à part, pèse aussi l'arrivée en Amérique latine d'une série de tournois de l'ombre mûris en Eurasie.

La fin de la guerre froide n'a pas signifié le triomphe de la paix dans les veines ouvertes et saignantes de l'Amérique latine, mais la poursuite de la piraterie dans les Caraïbes, la continuation des guerres civiles éternelles dans la Mésoamérique jamais apaisée et la prolifération d'un nouvel anti-américanisme dans le cône sud. La situation s'est aggravée au fil des ans, parallèlement à l'aggravation de la concurrence entre les grandes puissances, ce qui a entraîné l'entrée des plus importantes rivalités eurasiennes dans le grand chaudron ibéro-américain.

Les Iraniens et les Israéliens s'affrontent dans tout le cône sud, de la Guyane à l'Argentine, se faisant les protagonistes d'attaques flagrantes et d'opérations de blanchiment. Leur rivalité a fait plus de 130 morts et plus de 500 blessés entre Buenos Aires et Panama - le torpillage oublié du vol 901 d'Alas Chiricanas - auquel il faut ajouter l'assassinat du procureur argentin Alberto Nisman. Leur rivalité est le contexte dans lequel il faut lire l'interdiction du Hezbollah dans le sous-continent. Dans leur rivalité entrent en jeu ces forces anti-étatiques que sont les cartels de la drogue latino-américains, avec lesquels le Hezbollah trafique des stupéfiants, blanchit de l'argent et par lesquels il entre en contact avec la politique.

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Iraniens, Turcs et Saoudiens rivalisent pour l'hégémonisation de l'umma latino-américaine, en finançant des campagnes de prosélytisme, en inaugurant des mosquées, des écoles coraniques et des centres culturels, et en créant, dans la mesure du possible, des enclaves religieuses imperméables utiles à la collecte de renseignements et à la conduite du commerce gris. Ils sont suivis de près, pour des raisons similaires mais avec des méthodes et des résultats différents, par les capitaines de l'Internationale djihadiste, d'Al-Qāʿida à l'État islamique, qui sont présents de Mexico à la Triple Frontière.

Primakov contre Monroe

La Russie n'aurait pu réécrire la fin de la guerre froide, retrouver une place honorable à la table des grands de ce monde, qu'en (re)tournant son regard vers le Sud global et en travaillant avec lui pour dépasser le moment unipolaire. Telle était la conviction d'Evgenij Primakov, le théoricien de la transition multipolaire, dont Vladimir Poutine a puisé la richesse des idées et des visions à l'aube de l'an 2000.

Écrire sur la Russie dans l'hémisphère occidental revient à parler de Primakov. L'éminence grise en devenir de Boris Eltsine, torpillée par la suite lors de la crise yougoslave de 1999, qui a conçu et dirigé en 1997 une tournée en Amérique latine - la première d'un gouvernement russe depuis la fin de la guerre froide - dans le but de réaffirmer la présence de Moscou dans le jardin de Washington. Une réponse, pour Primakov, à la présence "des Américains dans la Caspienne, en Asie centrale et dans la Communauté des États indépendants".

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Avec la fin prématurée de l'ère Eltsine, Primakov fut pré-retraité par l'Etat profond mais redécouvert au dernier soir de 1999 et c'est Poutine qui reprendra le dossier latino-américain selon le contenu de la "doctrine Primakov". Mots d'ordre, au moins dans un premier temps - en raison de la priorité donnée au rétablissement des relations avec l'Occident -, modération et proportionnalité.

Le pivotement vers l'Amérique latine de la présidence Poutine a été inspiré par les idées de Primakov, mais aidé par les héritages matériels et immatériels de l'ère soviétique: des avant-postes pro-russes à Cuba et au Nicaragua à l'enracinement de l'anti-américanisme dans de larges segments de la société, de la politique et de l'armée. Des héritages qui ont été nourris et ont conduit à la formation d'axes résistants aux pressions de la superstructure - la doctrine Monroe -, comme avec l'Argentine, le Brésil et le Venezuela, et à la conduite d'interventions hybrides, comme l'envoi de spécialistes de la contre-insurrection à Daniel Ortega et Nicolás Maduro au plus fort des manifestations télécommandées qui menaçaient de les submerger.

Le temps a largement remboursé l'investissement du Kremlin dans le jardin de la Maison Blanche. Les rêves néo-bolivaristes sont morts avec Hugo Chávez, mais le nouvel ordre vénézuélien a survécu à son fondateur et il y a des signes d'une possible rupture du cordon sanitaire dans le cône sud. Le format des Brics a surmonté l'absence du PdL au Brésil, il est en train de s'étendre à l'Argentine et à la Bolivie, où les pro-Morales sont de retour au pouvoir après le coup d'État pro-américain de 2019, et s'efforce de faire une percée dans la dédollarisation du commerce international et intra-américain.

L'histoire a donné raison à Primakov. Car ce que la Russie de l'ère Poutine, exportatrice majeure de produits militaires - périodiquement en tête du classement des principaux fournisseurs d'armes de la région -, gardienne de gouvernements fantoches et propriétaire de bases de collecte de renseignements - au Nicaragua, au Venezuela et à Cuba, où la rumeur court depuis le début de l'année 2000 d'une remise en service de la base de Lourdes - a réalisé là est une démonstration plastique de la lente liquéfaction de la doctrine Monroe.

L'état de crise de la doctrine Monroe, jamais totalement remis des traumatismes de la guerre froide - la grande guerre civile méso-américaine, la saison des dictatures militaires, des morts et des disparus -, a été reconfirmé lors de la guerre en Ukraine, lorsque le jardin par excellence de Washington a refusé en bloc d'envoyer des armes à Kiev, d'appliquer des sanctions à Moscou et s'est révélé, selon les enquêtes de l'OSINT, l'une des régions du Sud global les plus sympathiques au récit russe.

L'Amérique latine, périphérie de la Terre du Milieu

Une menace hémisphérique et un concurrent stratégique. La domination commerciale, les acquisitions stratégiques, le contrôle des infrastructures vitales et les objectifs à long terme font de la République populaire de Chine, aux yeux des États-Unis, une menace hémisphérique et un concurrent stratégique - deux définitions inventées et utilisées dans les cercles politico-militaires.

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Les chiffres de l'agenda latino-américain de Pékin suggèrent en effet l'existence d'un défi sans précédent à la domination hégémonique établie de Washington :

    - Les échanges entre la Chine et l'Amérique latine sont passés de 12 milliards de dollars en 2000 à 450 milliards de dollars en 2021 ; des chiffres qui, en 2022, feraient de la Chine le deuxième partenaire commercial de toute la région, mais le premier de neuf pays et du cône sud ;

    - Trois pays d'Amérique latine ont conclu des accords de libre-échange avec la Chine ;

    - Sept pays d'Amérique latine ont conclu des partenariats stratégiques globaux avec la Chine ;

    - Onze visites officielles de Xi Jinping dans la région entre 2013 et 2021 ;

    - Vingt-et-un pays d'Amérique latine ont signé des documents d'adhésion et/ou de coopération dans le cadre de la mise en œuvre de l'initiative "la Ceinture et la Route" ;

    - 137 milliards de dollars prêtés aux gouvernements latino-américains sur la période 2005-2020 par la Banque de développement de Chine et la Banque chinoise d'import-export ;

Les chiffres ci-dessus, ainsi qu'une menace hémisphérique, parlent de la Chine comme d'une puissance extrarégionale qui, selon le Centre d'études du Liechtenstein, disposerait de ressources suffisantes pour modifier de manière permanente le cadre géoéconomique et géopolitique de l'Amérique latine, dans lequel, à condition qu'il y ait une volonté politique exprimée de la part du PCC, elle pourrait façonner une coexistence compétitive avec les États-Unis.

Le fait que Pékin, malgré l'opposition de Washington, soit devenu une puissance extrarégionale ayant un intérêt (permanent ?) pour la région est également démontré par le fait que, hormis les chiffres du commerce et de l'investissement, il a rejoint les conseils d'administration de la Banque interaméricaine de développement et de la Banque de développement des Caraïbes en tant que membre votant.

L'économie pour influencer la politique. La politique pour remettre en cause la doctrine Monroe et la doctrine des deux Chine. L'investissement dans les infrastructures stratégiques et l'exploitation des métaux précieux et rares pour saper l'hégémonie mondiale des États-Unis. La patience stratégique de l'homo sinicus et la myopie distraite de l'homo americanus sont les meilleurs amis de l'Amérique latine et de la Chine.

L'incrustation et la constance ont récompensé la grande stratégie de la Chine dans l'hémisphère occidental. La légitimité internationale de Taïwan ne tient qu'à un fil, que la pluie de désaveux des pays d'Amérique latine a contribué à raccourcir considérablement et qui pourrait être à nouveau coupé - huit des 14 pays qui reconnaissent encore Taipei se trouvent sur le sous-continent, dont l'un a entamé les démarches administratives pour la transition vers une seule Chine en mars 2023, le Honduras, tandis que les sept autres sont tentés par des promesses d'aide, de commerce, d'investissement et de prêts.

La concurrence sino-américaine sévit dans les mines de métaux précieux et de terres rares et sur les chantiers de grands travaux et d'infrastructures stratégiques, mais la pression des Etats-Unis n'a pas toujours, mais alors pas du tout, l'effet escompté. Car s'il est vrai que le Chili a abandonné l'idée du câble sous-marin Valparaiso-Shanghai, il est tout aussi vrai que le Brésil a été le premier bénéficiaire des investissements directs étrangers de la Chine en 2021 et qu'il est le hub régional de Huawei, que le Pérou a vendu sa plus grande compagnie nationale d'électricité à des acheteurs chinois en 2020, et que dans le Triangle du lithium, on parle de plus en plus le mandarin et de moins en moins l'anglais.

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La doctrine Monroe à l'épreuve du 21ème siècle

L'offre d'une large gamme de produits à bas prix, l'utilisation intelligente du financement humanitaire et de la coopération au développement, ainsi que les stratégies de projection du soft power ont permis à Pékin de se présenter comme une alternative viable aux yeux des Latino-Américains. Les résultats, visibles, tangibles et quantifiables, ont été une avalanche de transitions vers la politique d'une seule Chine, l'entrée dans des secteurs sensibles de la sécurité nationale américaine - tels que les ports stratégiques en Méso-Amérique -, la longévité accrue des gouvernements anti-américains et l'ouverture de centres de collecte de données à potentiel militaire, dont deux au Chili et en Argentine.

La Russie a capitalisé sur l'héritage soviétique de puissance prolétarienne et anticoloniale et a investi dans la projection de puissance douce, trouvant un soutien clé en Chine et réussissant à magnétiser dans la coalition anti-hégémonique l'Église catholique postérieure à Jean-Paul II qui, désillusionnée par les États-Unis en raison de son rôle dans la protestantisation de l'Amérique latine, se trouve aujourd'hui à l'avant-garde du boycott des forces politiques qui sont l'expression des évangéliques et des pentecôtistes, des électeurs obstinément proaméricains. La rencontre entre les deux éminences à La Havane en 2016 comme acte fondateur de l'Entente russo-romaine pour la transition multipolaire.

Anarchie productive - comme au Nicaragua et au Venezuela -, coups d'État - comme en Bolivie 2019 -, sédition - comme au Brésil 2023 -, réouverture de différends territoriaux non résolus - comme dans les Malvinas/Falklands - ; tout est à lire et à encadrer dans la compétition entre grandes puissances, dont l'un des chapitres les plus importants est l'Amérique latine comme en témoignent les nombreux aspects de son sous-sol fertile: la Grande Dépression américaine alimentée par le PCC, les Triades et les Narcos mexicains, l'encerclement diplomatique accru de Taïwan, la non-participation à la guerre en Ukraine, l'adhésion à la lutte contre le dollar et la lente expansion des avant-postes militaires, de Managua à Ushuaia.

La guerre mondiale actuelle se déroule aussi en Amérique latine. Le désir de Washington de regagner une influence décroissante dans l'hémisphère occidental sera susceptible de produire des coups d'État doux ou durs, une anarchie productive, des insurrections, des révolutions colorées, des interférences électorales et, en dernier recours, des interventions militaires chirurgicales de type Urgent Fury. Les réactions de l'axe Moscou-Beijing seront égales et opposées, allant d'opérations de déstabilisation hybrides à des initiatives diplomatiques (l'arrivée de la Pax Sinica dans le sous-continent ?), en passant par des poussées de dédollarisation et des accords militaires. La doctrine Monroe à l'épreuve du XXIe siècle.

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vendredi, 07 avril 2023

La guerre de Crimée (1853-1856) et la russophobie à travers les âges

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La guerre de Crimée (1853-1856) et la russophobie à travers les âges

Nicolas Bonnal

J’ai plusieurs fois évoqué la russophobie dans mon livre sur Dostoïevski ou dans mes textes publiés dans les médias russes (voir liens) ; elle est européenne cette russophobie, elle n’a pas attendu les Américains et elle est solidement enracinée. On peut dire qu’elle s’exprime une première fois dans la conquête de la Russie par Napoléon qui est ainsi décrit par Tolstoï dans Guerre et paix: c’est l’Europe et non la France (40% de la soldatesque) qui se jette à la gorge de la Russie. Chateaubriand (voyez mon texte) est totalement isolé quinze ans plus tard quand il demande à la diplomatie française de se rapprocher de la Russie et d’éviter les ombrageuses Autriche et Angleterre qui déclencheront les conflits qui en terminèrent avec notre civilisation (elle est morte notre civilisation à l’époque de Zweig ou Valéry, c’est son cadavre qui pue en ce moment).

La guerre de Crimée (1853-56, un million de victimes, de faim, de froid, de maladie, etc.), permet à l’Europe presque entière de se défouler. La France (comme toujours bonapartiste, militariste, autoritaire et humanitaire, lisez mon Exception française), l’Angleterre qui sacrifia tous les chrétiens (obsessionnelle habitude) d’Orient pour protéger son adorable empire ottoman (qu’elle sacrifia ensuite avec Lawrence et les sionistes), mais aussi la Sardaigne du très opportuniste Cavour, l’Autriche très ingrate (sauvée par Nicolas en 1848, mais qui mobilisa cent mille hommes) et d’une demi-douzaine d’autres nations font directement et indirectement la guerre à la Russie POUR DEFENDRE L’EMPIRE OTTOMAN. Le contrat chrétien est rompu par les Occidentaux, et la Grande Catherine s’en plaignait déjà.

Ici ce qui m’intéresse c’est de rappeler que tous les gouvernements de ce continent zombi approuvent systématiquement ce que font les Américains. Les Américains ont droit de vie et de mort sur toute cette planète et tout le monde est content en Europe. Vers 1850 c’est l’Europe occidentale – le couple franco-britannique - qui a ce droit (et refusera de le partager avec l’Allemagne) et qui, avant les USA, s’estime le messie des nations sur cette pauvre terre - pour la piller ou la détruire ou la moderniser...

Un historien russe de cette déjà triste époque s’en est rendu compte et il écrit au tzar Nicolas ; je traduis de Wikipédia anglais (tout arrive) :

« Mikhaïl Pogodin, professeur d'histoire à l'Université de Moscou, avait donné à Nicolas un résumé de la politique de la Russie envers les Slaves pendant la guerre. La réponse de Nicolas était remplie de griefs contre l'Occident. Nicolas partageait le sentiment de Pogodine que le rôle de la Russie en tant que protecteur des chrétiens orthodoxes dans l'Empire ottoman n'était pas compris et que la Russie était injustement traitée par l'Occident. Nicolas avait particulièrement approuvé le passage suivant:

« La France prend l'Algérie à la Turquie, et presque chaque année l'Angleterre annexe une autre principauté indienne : rien de tout cela ne perturbe l'équilibre des forces ; mais lorsque la Russie occupe la Moldavie et la Valachie, ne serait-ce que temporairement, cela perturbe l'équilibre des forces. La France occupe Rome et y séjourne plusieurs années en temps de paix : ce n'est rien ; mais la Russie ne songe qu'à occuper Constantinople, et la paix de l'Europe est menacée. Les Anglais déclarent la guerre aux Chinois, qui les ont, semble-t-il, offensés: personne n'a le droit d'intervenir; mais la Russie est obligée de demander la permission à l'Europe si elle se querelle avec son voisin. L'Angleterre menace la Grèce de soutenir les fausses prétentions d'un misérable Juif et brûle sa flotte: c'est une action licite; mais la Russie exige un traité pour protéger des millions de chrétiens, et cela est censé renforcer sa position à l'Est au détriment de l'équilibre des forces. On ne peut rien attendre de l'Occident que de la haine aveugle et de la méchanceté... (Commentaire en marge de Nicolas Ier : « C'est tout l'enjeu »).

C’est tiré du Mémorandum de Mikhail Pogodin à Nicolas Ier, 1853.

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Je ne vais pas trop commenter : l’Occident a tous les droits, la Russie – ou qui que ce soit d’ailleurs – n’en a aucun. Le résultat désastreux de cette guerre mena ensuite où l’on sait. Et il faut comprendre une deuxième évidence : même faible, même risible, l’Occident a la rage et ne s’arrête jamais. Lisez notre livre de prières publié en 1852 par A. Stourdza : parce qu’à part les missiles rien ne peut arrêter ces imbéciles. Ces siècles de la Fin pour reprendre Bernanos sont les siècles de la colère des imbéciles fabriqués à la chaîne (télé ou autre) en Occident depuis l’invention d’un certain Gutenberg. Leur guerre n’en finira pas car elle n’a jamais cessé.

Sources principales :

https://www.dedefensa.org/article/de-gaulle-et-chateaubri...

https://en.wikipedia.org/wiki/Crimean_War

https://en.wikipedia.org/wiki/Mikhail_Pogodin

https://lesakerfrancophone.fr/custine-et-les-racines-du-c...

https://lesakerfrancophone.fr/de-leffondrement-de-la-russ...

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Pourquoi lire Wilbur Smith?

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Pourquoi lire Wilbur Smith?

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/02/17/bs-perche-leggere-wilbur-smith/

par Cippa

Si, comme moi, vous avez à peine vu l'Afrique en photo, vous devez vous fier à ceux qui y sont allés pour dire que Wilbur Smith la décrit minutieusement et vous la fait savourer dans ses romans. Il y est né et y a vécu jusqu'à sa mort récente et en a parlé dans ses romans, de l'Égypte ancienne au colonialisme européen. Ce sont des romans d'aventure, mais ils nous donnent une vision et une compréhension profondes de ce continent, qui est un monde vraiment étranger pour nous. Mes rencontres avec un homme qui a versé son sang sur cette terre m'ont confirmé que les sensations que l'on éprouve en lisant ces romans sont un avant-goût, un amuse-gueule des expériences réelles vécues là-bas par ceux qui n'y sont jamais allés. Pour ceux qui, comme lui, ont arrosé son sol de sang vermeil, ce sont des photographies d'un passé tumultueux.

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Connaître l'histoire de l'Afrique, c'est aussi connaître l'histoire de l'Europe pendant quelques siècles: l'histoire du colonialisme et des aventures qui y ont conduit nos ancêtres. Il ne s'agit pas de romans historiques, mais de traces du passé d'une réalité historique indéniable, de témoignages d'un Anglais né et élevé en Afrique du Sud dans les années 1900, qui a reconstruit un passé et une histoire récente que lui et ses ancêtres ont vécus de première main. À cet égard, je vous recommande les cycles Courteney et Ballantyne, deux familles anglaises parties en Afrique pour la sanglante chasse aux diamants et qui s'y sont installées au milieu de mille péripéties.

Le travail magistral de l'auteur réside également dans la caractérisation des personnages et de leurs relations : par exemple, la symbiose entre les Blancs et les peuples indigènes. Elle peut aider à surmonter certains mensonges du monde moderne sur l'homme blanc en Afrique ; il est nécessaire de comprendre pleinement le lien qui s'est créé entre deux personnes très différentes, qui ont pris une valeur nécessaire l'une envers l'autre afin d'affronter les risques de ce mystérieux et formidable Continent Noir. Il est très important, surtout dans notre environnement, de connaître ces réalités afin d'affronter en toute conscience les accusations qui sont portées contre nous.

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En conclusion, un roman d'aventures peut également être apprécié pour sa valeur en tant que littérature d'évasion. La lecture des romans de Wilbur Smith est un grand passe-temps : on est fasciné aussi bien par la narration chargée de pathos que par la description placide des moments calmes de la vie quotidienne, des navigations tumultueuses aux récits mystérieux d'une spiritualité et d'une magie si éloignées de nous. Par rapport à de nombreux textes peu profonds qui relèvent du genre, notamment dans la littérature de consommation qui s'est récemment dépeuplée pour des raisons évidentes, notre auteur fait voyager notre esprit avec efficacité et une habileté surprenante, nous gardant accrochés, chapitre après chapitre, à ses lignes.

jeudi, 06 avril 2023

Nazisme WOK/NAFO

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Nazisme WOKE/NAFO

Lucas Leiroz

Source: https://novaresistencia.org/2023/03/30/o-nazismo-woke-nafo/

Le monde avale sans broncher le discours selon lequel les pensées ordinaires de la plupart des gens, imprégnées de conservatisme, de patriotisme et de religion, seraient une quelconque "menace néo-nazie". Mais ils se trompent. La menace est de l'autre côté. Nashville le montre.

La gauche des pays du centre a passé des années à promouvoir la chasse aux sorcières contre les groupes conservateurs et nationalistes pour avoir soi-disant identifié en eux une "menace fasciste". Aujourd'hui, il en va tout autrement.

Le seul régime ouvertement néonazi au monde n'a rien de conservateur. Il est absolument intégré dans l'agenda libéral "woke" et les principes "démocratiques" européens.

En fait, l'Ukraine va jusqu'à promouvoir des défilés de la fierté LGBT au milieu du champ de bataille lorsqu'elle conquiert un territoire sur la domination russe - sans parler de la coopération ouverte entre les groupes LGBT, le mouvement antifa et d'autres collectifs identitaires avec les néo-nazis d'Azov et compagnie.

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Et les partisans de ce régime vont dans la même direction. Nombreux sont ceux qui pensaient qu'il s'agissait d'une exagération et qui voient maintenant la réalité en face que fut la fusillade de Nashville, où un massacre scolaire a été perpétré par un tireur transgenre membre de la NAFO - une organisation cyberterroriste décentralisée dont le travail consiste à promouvoir la déstabilisation des cyberréseaux pro-russes par le biais de fausses accusations, d'attaques de pirates informatiques, de dénonciations de masse et de "trolling" organisé.

Et ce n'est pas tout : un prétendu manifeste a été laissé par l'auteur de l'attaque et, "pour une raison quelconque", a été censuré par les autorités américaines.

Au cours des dernières heures, des secteurs conservateurs de la société américaine ont lancé une campagne de masse pour exiger la publication de ce manifeste. Je pense que c'est tout à fait juste. Le contenu doit être rendu public, notamment pour attirer l'attention de l'opinion publique sur le type d'idées défendues par le tireur, ce qui contribuera à prévenir d'autres attaques.

Mais apparemment, l'idée de prévenir de nouveaux massacres ne semble pas suffire à convaincre les autorités américaines de rendre public le contenu du manifeste - ce qui nous amène à penser que les propos qui y figurent pourraient être quelque peu... compromettants.

Sachant que les collectifs LGBT et les mouvements "identitaires" font pression pour empêcher la publication du manifeste, je ne peux que spéculer sur le fait que son contenu pourrait mettre en évidence le profond niveau d'intégration idéologique entre l'agenda "woke" et le néo-nazisme atteint ces dernières années - de manière particulièrement intense après le début de l'opération russe en Ukraine.

La vérité est une : Kiev est devenue l'excuse parfaite pour réunir deux camps apparemment opposés de l'idéologie misanthrope et transhumaniste - d'un côté les activistes pro-mutilation des enfants, de l'autre les racistes ouverts qui veulent l'extermination des peuples jugés "inférieurs".

Ce n'est pas un hasard si les habitants de pays contre-hégémoniques axiologiquement archaïques comme la Russie et la Chine deviennent les principales cibles d'une campagne ouvertement génocidaire. Le plus grand problème est que cela ne s'arrête pas là. Elle a commencé par des agressions physiques contre les Russes dans les rues et en est déjà à un degré plus élevé de mélange d'idées subversives et de troubles mentaux, culminant avec les massacres dans les écoles.

En d'autres termes, les mouvements de gauche et les autorités américaines, soumises au gouvernement ultra "woke" de Joe Biden, veulent éviter la publication du manifeste parce qu'il révélerait que le plus grand repaire de néo-nazisme, de racisme, de misanthropie et d'autres maux idéologico-moraux dans la société contemporaine ne se trouve pas dans les secteurs conservateurs et nationalistes, mais dans les groupes qui promeuvent des agendas identitaires radicaux.

Comme tout ce qui se passe au Brésil est en retard sur les pays du centre, je pense que, malheureusement, nous verrons également les membres de l'OPANO (qui prolifèrent déjà en langue portugaise) et les identitaires massacrer des enfants dans un avenir proche.

Nos autorités ont avalé sans broncher le discours selon lequel les pensées ordinaires de la plupart des gens, imprégnées de conservatisme, de patriotisme et de religion, seraient une "menace néo-nazie". Mais ils se trompent. La menace est de l'autre côté. Nashville le montre.

20:23 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : nashville, nafo, actualité, états-unis | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Des héros et des saints

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Des héros et des saints

par Pierre-Emile Blairon

Certains vont trouver incongru qu’un article traite de deux grandes figures humaines telles que notre civilisation « occidentale » n’en a plus engendrées depuis bien longtemps du fait de son pourrissement qui atteint de nos jours son apogée.

Ces deux personnages d’exception sont morts un mois de Mars ; on pourra toujours dire que c’est un hasard mais il s’agit de deux hommes qui avaient choisi le métier des armes ; c’est au mois qui porte son nom que le dieu de la guerre a choisi de les rappeler à lui ; aucun de ces deux militaires n’aurait voulu être placé sous sa tutelle : ils étaient l’un et l’autre profondément chrétiens ; l’un et l’autre sont morts en combattant contre un ennemi islamiste, en voulant préserver des Français d’un ennemi islamiste, même si l’un des deux est mort sous des balles françaises. Ils avaient encore un point commun : ils étaient tous deux colonels.

Ils s’appelaient Arnaud Beltrame et Jean-Marie Bastien-Thiry ; L’un a placé sa foi avant son devoir ; l’autre a placé son devoir avant sa foi. Lequel est le saint et lequel est le héros ? 

Tout être humain vient sur Terre pour accomplir une mission ou, au moins, pour tenir un rôle qui dépasse la simple survie, dans ce grand théâtre de la vie ; dans la majorité des cas, il ne le sait pas ; chacun a un poste qui lui est dévolu et qu’il doit assumer ; le fait d’en être conscient expose l’individu plus lucide que les autres à une plus grande responsabilité et, souvent, à une plus grande souffrance. Le héros et le saint sont des êtres humains qui se distinguent des autres par leur sens de l’abnégation, du sacrifice, du dévouement. « Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer » : la devise de Guillaume d’Orange, qui évoque le sens du devoir,  s’adapte fort bien à cette conduite, qui définit l’excellence de la condition humaine[1].

Les caractères du saint et du héros sont, sous certains aspects, très proches.

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Le héros

Le héros ne se réfère habituellement pas à sa foi si tant est qu’il en ait une ; il se retrouve essentiellement dans la fonction guerrière ; le héros agit par devoir, parce qu’il possède au plus haut point le sens de la responsabilité, de l’honneur et du respect de la parole donnée ; il applique à la lettre les règles de chevalerie telles qu’elles ont été codifiées au Moyen-âge mais découvertes et respectées bien avant cette période dans toutes les sociétés traditionnelles[2]. Le héros est avant tout un aristocrate, ce mot pris dans son sens spirituel : noblesse des sentiments et des actions. Il est prêt à se sacrifier pour la cause qu’il défend si ce sacrifice est nécessaire à cette cause. Selon l’encyclopédie Universalis, « le héros se met au service d'une cause qui le dépasse et l'entraîne à se dépasser lui-même. Il se distingue par la force d’âme, c'est-à-dire l'énergie du caractère, mais aussi la grandeur, la noblesse dans le choix des visées. »

Les héros peuvent agir seuls ou en groupe. Seuls, ils sont légion, à commencer par les héros de l’Antiquité jusqu’à nos jours ; en groupe, on se souvient des volontaires parachutistes qui ont sauté sur Dien-Bien-Phu alors qu’ils savaient que tout était perdu et de la geste magnifique à Camerone de la Légion étrangère dont la devise est : honneur et fidélité.

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Le saint

Il faut revenir aux origines du christianisme pour comprendre que la démarche du saint va à l’inverse de celle du héros ; le saint ne se sacrifie pas pour sa foi et pour ses semblables en dernière extrémité, quand il ne reste plus d’autre solution ; au contraire, il recherche d’abord ce sacrifice pour accéder à la plénitude spirituelle ; les premiers saints ont été des martyrs et c’est ce martyre qui les a sanctifiés, puis c’est l’Eglise qui a légitimé cette sanctification ; le chrétien aspire à la rédemption en imitant le martyre du Christ ; en l’absence de véritable bourreau, c’est lui-même qui s’infligera des souffrances dans ce but. Par exemple, le port du cilice (tunique d’étoffe rude) ou de chaînes, couplé souvent avec une abstinence (le jeûne par exemple) permet mortification et pénitence.

Les deux personnages qui nous intéressent procédaient de l’une et de l’autre catégorie, à des degrés divers, selon la sensibilité de chacun, l’archétype de ce comportement, profondément ancré dans la légende française, restant Jeanne d’Arc.

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Jean-Marie Bastien-Thiry

Le colonel Bastien-Thiry (10 octobre 1927-11 mars 1963) était l’héritier d’une très longue (trois cents ans) lignée de tradition militaire ; polytechnicien, il deviendra ingénieur militaire en chef de l’Air ; il aura conçu notamment le missile sol-sol SS.10 et 11. Marié, il a eu trois filles de Geneviève Lamirand ; il aura été le dernier condamné à mort fusillé en France à l’âge de 35 ans pour avoir organisé un attentat contre le chef de l’État sans faire de victimes ; De Gaulle créera une juridiction spéciale à sa botte, totalement illégale, dans le seul but de faire condamner à mort celui qui aura osé attenter à sa vie.

Nous n’allons pas refaire ici l’histoire de la guerre d’Algérie dont l’issue dramatique et les centaines de milliers de morts, souvent dans des conditions épouvantables, ont été causés uniquement par l’attitude déloyale de De Gaulle que les Pieds-Noirs avaient installé au pouvoir, croyant qu’il serait à même de combattre l’insurrection islamiste, dénommée FLN, parti à ce point minoritaire qu’il ne comptait prendre le pouvoir qu’en exerçant une  terreur sans nom sur la grande majorité des musulmans fidèles à la France et sur le million d’Européens d’Algérie ; ces derniers, pour la plupart modestes travailleurs, vivaient chichement, mais heureux, sur une terre qu’ils avaient péniblement valorisée pendant les 130 années de leur présence et qu’ils aimaient passionnément. On pourra se reporter utilement au reportage en note ci-dessous[3].

L’engagement de Jean-Marie Bastien-Thiry contre le général De Gaulle tient à la personnalité de ce dernier et à ses revirements brutaux. De Gaulle se révèle rassembler tous les éléments de caractère qui vont exactement à l’encontre de toutes les valeurs dans lesquelles a été élevé Bastien-Thiry, pour lesquelles il s’est toujours battu et qui forment exactement le corpus du héros tel que nous l’avons défini plus haut.

Les Américains se sont intéressés très tôt à la guerre d’Algérie ; ils ne supportaient pas l’indécision constante des hommes politiques de la quatrième République française qui les empêchait, dans cette « zone », de mener à bien leur projet de remodelage permanent du monde à leur profit, qui est leur marque de fabrique. Ont-ils manœuvré pour placer à la tête de la France un homme « de poigne » qui correspondrait plus à leurs intérêts [4] ? De Gaulle savait-il déjà, à son accession au pouvoir, qu’il ne garderait pas l’Algérie à la France ?

De Gaulle montra, dans cette affaire algérienne, au fil des mois, son véritable visage : un homme imbu de sa personne, fourbe, machiavélique, menteur cynique et imposteur, plein de mépris pour ce petit peuple pied-noir qui l’avait porté au pouvoir, sans aucune empathie pour tous ces braves musulmans qui avaient cru en lui qui représentait la France, et qui allaient mourir par sa faute par dizaines de milliers dans des conditions atroces[5].

Il semble logique qu’un homme comme Bastien-Thiry ait tenté de supprimer un tel monstre. Le colonel Bastien-Thiry mourra comme un brave, dans la dignité, consacrant ses derniers moments au rituel de sa foi ; les témoins qui ont assisté à ses derniers instants ont laissé des pages bouleversantes[6].

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L’exécution du dernier des justes de cette guerre qui ne voulut pas dire son nom ne souleva pas la moindre indignation des Français qui n’étaient plus concernés par le destin de leur pays, bien contents de s’être débarrassés de cette France pourtant pas si lointaine et de ceux qui l’habitaient ; d’une pierre, deux coups. Dans bien des cas, Ils accueillirent ces gens qui regagnaient ce qu’ils croyaient être la Mère patrie et qui se prétendaient Français - c’est-à-dire comme eux, quelle arrogance ! - avec une méchanceté qui n’eut d’égale que leur profonde bêtise.

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Arnaud Beltrame

Le colonel Arnaud Beltrame (18 avril 1973-23 mars 2018). Il affirme sa vocation des armes en intégrant le lycée militaire de saint-Cyr-l’Ecole à l’âge de 18 ans.

Sa carrière le mènera au grade de lieutenant-colonel alors qu’il est confronté le 23 mars 2018 à une prise d’otages au Supermarché U de Trèbes, près de Carcassonne. Selon Gendinfo, l’organe de presse de la gendarmerie nationale, daté du 23 mars 2023, « Ce jour-là, alors officier adjoint commandement du groupement de gendarmerie départementale de l’Aude, ce dernier se projette sur les lieux afin de coordonner les opérations. Faisant preuve d’un sang-froid exceptionnel, il se substitue au dernier otage retenu dans le supermarché, permettant ainsi sa libération, avant d’être abattu de plusieurs balles par le terroriste. »  C’est une version édulcorée des faits et un mensonge par omission. Selon La Dépêche du 25 mars 2018, « L’autopsie réalisée sur le corps d’Arnaud Beltrame a révélé "une plaie gravissime de la trachée et du larynx par arme blanche", qui a causé la mort du gendarme et des lésions par balles non létales. Son assassin, Radouane Lakdim, le djihadiste âgé de 25 ans auteur des attentats mortels de Trèbes, l’a donc poignardé avant de lui tirer dessus. »

Qu’est-ce qui a poussé Beltrame à se constituer prisonnier auprès du preneur d’otages ? Est-ce le rôle d’un officier de gendarmerie chargé de diriger une opération anti-terroriste ? N’a-t-il pas, de ce fait, mis en danger la vie de plusieurs personnes, en plus de celles des otages, se neutralisant lui-même volontairement au lieu de neutraliser l’islamiste ? Certaines voix se sont élevées alors pour dénoncer son attitude et l’unanimisme politico-médiatique qui en faisait un héros [7].

Quelques faits majeurs qui ont ponctué sa vie quelques temps avant son sacrifice peuvent être troublants, sans que nous puissions en conclure quelque motivation à son acte.

 - Selon le prêtre qui devait le marier religieusement à sa femme Marielle (après le mariage civil), Beltrame était un nouveau converti au catholicisme à l’âge de 33 ans ( Le Figaro du 25 mars 2018).

- Dix ans auparavant, il devenait franc-maçon de la Grande Loge de France, élevé au grade de maître en avril 2012. Il n’avait pas rompu avec ses attaches maçonniques au moment de sa mort.

- Une semaine avant sa mort, il avait enterré son père, dont le corps avait été retrouvé dans un filet de pêche après son suicide. Il s’était jeté de son bateau au large de Port-Camargue.

De tout ce qu’il ressort, nous pouvons dire qu’Arnaud Beltrame pourrait être considéré comme un saint, tel que nous l’avons défini plus haut, plus que comme un héros ; il appartient donc à l’Église d’accréditer cette hypothèse.

Revenons sur cette curieuse omission concernant les circonstances dans lesquelles Beltrame fut occis : «  une plaie gravissime de la trachée et du larynx par arme blanche » ; cette description n’est rien d’autre qu’un euphémisme alambiqué pour égorgement, perpétré en l’occurrence à l’aide d’un couteau de chasse ; cet euphémisme soi-disant pour ne pas se faire complice de l’un des buts recherchés par les terroristes qui est de marquer les opinions.

Occulter les actes de barbarie des terroristes ne revient-il pas à leur accorder des circonstances atténuantes ? Cette hypothèse est aggravée par le fait que, sur la plaque commémorative dédiée à Arnaud Beltrame dans le jardin qui porte son nom à Paris, est gravée cette expression pour le moins ambiguë : « Victime de son héroïsme ». Ne pas désigner l’ennemi ne revient-il pas à avouer son impuissance ?

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Les Français ont-ils voulu en savoir plus ? Surtout pas ; comme dans le cas de la condamnation à mort de Bastien-Thiry, ils n’ont rien fait d’autre que de rester précautionneusement dans leur zone de confort et même grâce à l’action de ces deux êtres extraordinaires, s’acheter à bas prix une bonne conscience ; en quelque sorte, nous revenons au domaine religieux pour envisager la place que ces deux hommes ont tenu dans l’esprit des Français décadents : celle de bouc émissaire.

Du psychopathe De Gaulle au psychopathe Macron, de renoncement en renoncement, de lâcheté en lâcheté, les Français, repliés dans leur égoïsme forcené – après moi, le déluge -, continueront imperturbablement à voter pour des Présidents de plus en plus lamentables à chaque élection jusqu’au désastre actuel. Impossible n’est pas français, dit le dicton. On dit aussi que celui qui représente une nation est à l’image du peuple qu’il dirige. A moins d’un miracle, nous sommes assurés que le « génie » français saura, la prochaine fois, nous dénicher un Président encore plus catastrophique que celui actuellement en place.

L’ère des héros et des saints semble bien révolue. C’est le peuple français lui-même qui a décidé de leur disparition.

Pierre-Emile Blairon

Notes:                                                            

[1]. Cette devise est à rapprocher de celle de la franc-maçonnerie : Fais ce que dois, advienne que pourra ; nous verrons que ce rapprochement a son utilité en ce qui concerne  le personnage d’Arnaud Beltrame.

[2]. Voir l’article Evola et la Tradition primordiale : une autre vision de l’Histoire sur ce même site.

[3]. https://www.lesalonbeige.fr/60e-anniversaire-de-lexecution-de-jean-bastien-thiry/

[4]. https://algeria-watch.org/?p=62483

[5]. http://www.psy-luxeuil.fr/2015/04/8-signes-pour-detecter-....

A la lecture de ce portrait, on peut penser à celui d’un autre Président de la République, tout aussi psychopathe, mais qui adopte un style bien différent, plus moderne, plus décadent.

[6]. https://www.bastien-thiry.fr/-Temoignages-

[7]. https://archive.org/details/youtube-DrK_HH8Az-Y

 

Parution du numéro 460 du Bulletin célinien

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Parution du numéro 460 du Bulletin célinien

2023-03-BC-Cover.jpgSommaire :

Céline et “Le Livre de Poche”

Du nouveau sur Abel Bonnard ?

Normance vu par Kléber Haedens (1954)

Paul Valéry dans Londres

Louis Bertrand, précurseur de Bagatelles ?

Rencontre à Bikobimbo.

Année faste

Nul doute que, pour les céliniens, cette année 2023 sera aussi faste que la précédente. Ces jours-ci paraît La Nouvelle Revue française (n° 655) avec un copieux dossier consacré à Céline. Au sommaire : la nouvelle « La vieille dégoûtante » (l’un des inédits retrouvés) complétée par plusieurs études sur les textes déjà publiés. Ils sont signés Philippe Bordas, Alban Cerisier, Yves Pagès et Javier Santiso. Fin avril paraîtra La Volonté du Roi Krogold, la légende gaélique à laquelle l’écrivain attachait tant de prix. Elle est proposée en deux versions : celle intitulée “La Légende du roi René” datant de la première moitié des années trente, et le texte portant le titre définitif écrit ultérieurement. En mai sortira un nouvel Album Céline (la première édition remonte à 1977),  avec une nouvelle iconographie et un texte dû, cette fois, à Frédéric Vitoux. Suivront, prenant en compte les inédits retrouvés, les quatre éditions, revues et augmentées, des romans dans la “Bibliothèque de la Pléiade”.

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Lors d’une conférence qui eut lieu le mois passé à Enghien-les-Bains, François Gibault a révélé qu’une adaptation cinématographique de Voyage au bout de la nuit pourrait apparaître sur le grand écran dans deux ou trois ans. Si le contrat n’est pas encore signé, le projet est en bonne voie, d’autant que l’ayant droit a été approché par une importante société cinématographique ayant les moyens financiers de le concrétiser. Par ailleurs, le biographe de Céline a indiqué que Gallimard n’a nullement renoncé à une réédition des pamphlets, et ce avant 2032 qui verra l’œuvre tomber dans le domaine public. François Gibault précise qu’Antoine Gallimard a sollicité « des personnalités du monde juif » pour participer à cette réédition.

On se souvient qu’il y a quatre ans, lors du dîner annuel du CRIF, le président de la République avait déclaré qu’il n’était pas nécessaire, selon lui, de republier ces textes. Il avait, en revanche, regretté que Charles Maurras eût été retiré du livret des “Commémorations nationales”, estimant qu’il ne faut pas occulter la figure du fondateur de l’Action Française : « Nous devons la regarder comme faisant partie de l’histoire de France, l’occulter c’est vouloir reconstruire une autre forme de refoulé post-mémoriel et post-historique et cela dit quelque chose de nos propres faiblesses. » Ce qui vaut pour l’antisémite Maurras ne vaut donc pas pour l’antisémite Céline. On peut légitimement se demander si c’est le rôle de la plus haute autorité de l’État de dire quels textes doivent être réédités et ceux qui ne le doivent pas. Décidant récemment de la dissolution d’un groupuscule nationaliste (qui rendait notamment hommage à Robert Brasillach et aux morts du 6 février 1934), le gouvernement a, entre autres raisons, justifié cet acte en relevant « que le mois de février est traditionnellement marqué par les hommages rendus aux morts des émeutes du 6 février 1934 et à Robert Brasillach, condamné pour intelligence avec l’ennemi, fusillé le 6 février 1945 et qualifié de “poète” par ces nationalistes ». Ce décret, signé par le Ministre de l’Intérieur, est cosigné par la Première Ministre et le Président de la République. Serait-il défendu de rendre hommage à ces morts et de qualifier ainsi  l’auteur des Poèmes de Fresnes,  quelque opinion que l’on ait sur la valeur de ceux-ci  ?

  1. (1) En janvier 2018, Antoine Gallimard avait déclaré ceci : « Au nom de ma liberté d’éditeur et de ma sensibilité à mon époque, je suspends ce projet, jugeant que les conditions méthodologiques et mémorielles ne sont pas réunies pour l’envisager sereinement.» (Communiqué à l’A.F.P., 11 janvier 2018).
  2. (2) “Décret du 1er février 2023 portant dissolution d’un groupement de fait”, Journal Officiel, n° 0028, 2 février 2023.

Pasolini, Salo et l'incompréhension de la violence

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Pasolini, Salo et l'incompréhension de la violence

par Michele

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/02/16/bs-pasolini-salo-e-l-incomprensione-della-violenza/

S'il est un intellectuel bon pour toutes les saisons, c'est bien Pier Paolo Pasolini. De tous et d'aucun, le Frioulan est un cas étrange de convenance irrégulière. Une somme de contradictions jamais résolues le rend attirant pour la plupart, mais sans le confiner dans un seul domaine. Pour certains, il va de soi qu'il appartient à une gauche idéale, au mouvement étudiant de 68 et aux manies de la liberté sexuelle. Le type parfait de l'intellectuel engagé avec ses fragments de critique sociale et son regard penché sur le dernier en date (qui n'est pourtant jamais le dernier). Au contraire, il y a ceux qui voudraient l'enrôler dans une sorte de droite souterraine et éternelle, prenant ses coups de gueule contre la société comme l'expression d'une authentique pensée antimoderne, soulignant son "catholicisme intime, profond, archaïque", et s'accrochant à chacun de ses mots lorsqu'il fait dire à un Orson Wells dans La ricotta, jouant presque le rôle de son alter ego et citant des lignes de Mamma Roma : "Je suis une force du passé. Mon amour n'est que dans la tradition".

Paradoxalement, le réactionnaire Pasolini est aimé pour la même raison que le progressiste. C'est finalement son provincialisme qui domine, c'est le sentiment de perte face à un monde rural et populaire fait de petites choses qui ne suit pas la marche de la modernité. Cela est vrai aussi bien si l'on considère cette dernière comme un mal du capital que comme une perversion des derniers temps.

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Et puis il y a le scandaleux Pasolini, ce qui le rend d'autant plus controversé et apparemment isolé qu'il est apprécié rétrospectivement. C'est le scandale de ses vexations profanatrices et de sa sexualité vécue presque comme une descente dans l'obscurité (pas tant que ça et pas seulement à cause de son homosexualité). Mais c'est aussi le scandale de certaines de ses prises de position, comme celle, célèbre, du poème Valle Giulia, où il défend les forces de l'ordre "parce que les policiers sont des enfants de pauvres" et reproche aux manifestants de n'être que des "enfants à papa". Cela témoigne d'ailleurs d'une ambivalence et d'une inconséquence généralisées de l'intelligentsia italienne à l'égard des angoisses révolutionnaires, comme en témoigne la Storia di un impiegato de De Andrè ("Pour ce que vous avez fait/Pour la façon dont vous l'avez renouvelé/Le pouvoir vous est reconnaissant", c'est ainsi que le jury s'exprime à l'égard du Bombarolo dans Sogno numero due).

En effet, le scandale est une dimension qu'il recherche consciemment : "Je pense que scandaliser est un droit, être scandalisé un plaisir. Celui qui refuse le plaisir d'être scandalisé est un moraliste, c'est le soi-disant moraliste". Et si l'on parle de scandale, le dernier film de Pasolini ne peut que venir à l'esprit : Salò ou les 120 jours de Sodome.

Le film a connu une histoire mouvementée: vol des bobines pendant la production, accusations d'obscénité, et surtout la mort de Pasolini lui-même peu avant la sortie du film. Basé sur le roman inachevé du Marquis de Sade intitulé Les 120 journées de Sodome, le film est probablement connu de la plupart des spectateurs comme une sorte de film maudit, difficile à regarder et à digérer, une épreuve de courage pour les plus sensibles, moins pour son contenu. Le principe: quatre personnages représentant grosso modo le pouvoir politique, religieux et judiciaire s'entendent pour donner libre cours à leurs vices et dépravations, kidnappent un nombre suffisant de jeunes hommes et de jeunes femmes, se réunissent dans un lieu caché et, inspirés par les récits scabreux de quatre narratrices, donnent libre cours à leurs perversions en violant leurs victimes.

Dans Sade, c'est une structure rigoureuse, géométrique, presque redondante, qui prévaut, où la trame du roman alterne avec les nombreux récits des narrateurs, d'abord avec une prose riche et surabondante, puis avec une énumération presque mécanique dans les parties restées inachevées par l'écrivain. Pasolini s'appuie plutôt sur une division dantesque en Antinferno, Girone delle manie, Girone della merda, et enfin Girone del sangue. Mais le changement le plus important concerne le décor: pour Sade, il s'agit d'un château dans la forêt à l'époque de Louis XIV, tandis que pour Pasolini, il s'agit de la République sociale à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cela confère au film un sous-texte politique particulier, ouvertement antifasciste. C'est là que réside toute l'incompréhension de Pasolini à l'égard de Sade, du fascisme et de la violence.

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Avec l'œuvre de Sade en tête, celle de Pasolini semble être l'œuvre d'une écolière. Mais cette descente aux enfers ne se résume pas à une différence de degré. Il n'y a pas le ton intellectualiste de Pasolini. Au contraire, il y a une ironie marquée dans la subversion de la vertu par le vice, ce dernier n'étant qu'une pulsion naturelle. Avec un certain pessimisme, la finalité de la nature est la mort, la destruction, l'homme doit donc s'y adonner par le crime, le meurtre, l'écrasement du faible par le fort: "Vous devez comprendre, petite créature, que nous nous sommes amusés de votre personne, par la raison simple et naturelle qui porte la force à abuser de la faiblesse". Sade insiste sur la rationalité de cette logique de dissipation et de domination: "Hâtons-nous de nous revêtir du manteau de la philosophie: il sera bientôt celui de tous les vices".

Dans l'exagération et la répétition des horreurs, il y a quelque chose de comique, comme quelqu'un qui veut toujours s'amuser, ce qui correspond bien à Sade lui-même qui, emprisonné à Vincennes puis à la Bastille pour une broutille, joue l'imbécile, le pleurnichard, celui qui a été berné. En revenant au noyau conceptuel sadien, on s'aperçoit qu'il est en quelque sorte l'exaspération de certains thèmes des Lumières. Les personnages de Sade montrent jusqu'où peut aller l'individu livré à lui-même et libéré de tout dogme. Sans autres leviers que leur raison et leur égoïsme, ils trouvent dans la jouissance le seul but raisonnable, mais cela débouche sur le vice et l'oppression. En dehors de l'individu, il n'y a rien, l'autre n'est qu'un moyen.

Pasolini réduit tout cela à une critique du pouvoir. Son Salò décrit son horreur, son ambivalence en raison de la facilité avec laquelle nous le subissons mais y participons, et enfin son châtiment. Tout cela dans un mouvement cyclique et apparemment absurde. C'est la re-proposition, dans une tonalité décadente, de la dialectique hégélienne serviteur/maître. Dans cette sorte de rencontre a-historique dont parle le philosophe allemand dans la Phénoménologie de l'Esprit, nous avons deux hommes qui s'engagent dans une lutte mortelle, dont l'un cède et, par peur de la mort, se laisse réduire en esclavage. L'autre, contraint au travail par son maître, entretient un rapport plus authentique avec le monde, précisément parce qu'il agit sur lui par le biais du travail. C'est cette plus grande conscience de soi qui renverse les rapports de force et libère le serviteur.

L'inavouable, c'est que dans cette optique, toute relation d'homme à homme finit par se transformer en relation de pouvoir, donc de domination. La relation sujet/sujet est impossible, mais elle se donne toujours comme sujet/objet, mais l'autre, précisément en tant qu'objet qui ne se donne pas totalement au sujet et reste opaque, est ce qui objective le moi. À cet égard, le film de Pasolini est la réalisation du thème sartrien: "L'enfer, c'est les autres". Cela explique aussi sa représentation du pouvoir, si éloignée de la conception du pouvoir dans le fascisme, qu'elle devient une projection de Pasolini lui-même au point qu'il est capable d'y voir presque une forme de libération et dont il a une fascination secrète: "Rien n'est plus anarchique que le pouvoir. Le pouvoir fait pratiquement ce qu'il veut". Comme le note très justement Adriano Scianca dans Riprendersi tutto: "Le fasciste sadique, capricieux et oligarchique des films de Pasolini ne reflète rien d'autre que les fantômes intérieurs et les obsessions secrètes de ceux qui ont fait et applaudi ces films".

Ce qui manque dans cette dialectique avec l'autre de Pasolini, comme chez la plupart des intellectuels de son époque, c'est la dimension de la conflictualité. Il n'y a pas de reconnaissance de l'adversaire dans sa réciprocité, la dialectique serviteur/maître exclut toute égalité entre les deux prétendants. On retrouve ainsi la négation de la lutte. La peur de la mort ne fait que rendre possible un rapport de domination et d'exploitation qui s'établit comme une relation fondamentalement asymétrique. Il n'y a aucune trace de cette agonalité, de cet esprit chevaleresque, de ce penchant guerrier qui permet la confrontation et la reconnaissance mutuelle. La distance et l'incompréhension avec le fascisme, qui se fonde précisément sur cette dimension conflictuelle, ne sauraient être plus grandes. Nous pouvons citer à titre d'exemple l'ouvrage de Filippo Tommaso Marinetti, Necessità e bellezza della violenza (= Nécessité et beauté de la violence), qui nous offre une description parfaite: "Ce n'est que par la violence que l'on peut ramener l'idée de justice, non pas à celle, fatale, qui consiste dans le droit du plus fort, mais à celle, saine et hygiénique, qui consiste dans le droit du plus courageux et du plus désintéressé, c'est-à-dire dans l'héroïsme".

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mercredi, 05 avril 2023

Rudi Dutschke : front transversal avec l'ennemi juré

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Rudi Dutschke: front transversal avec l'ennemi juré

Par Federico Bischoff

Source: https://www.compact-online.de/rudi-dutschke-querfront-mit-dem-todfeind/?mc_cid=f559a662f7&mc_eid=128c71e308

Bien que Rudi Dutschke soit toujours vénéré en tant que personne par ses héritiers rouges et verts, son profil politique s'est estompé. Il y a de bonnes raisons à cela : tout ce que le rebelle représentait est en contradiction avec l'idéologie de la gauche actuelle - et favoriserait la stratégie d'un éventuel front transversal. Ici, un extrait du numéro d'avril de COMPACT, tout juste sorti de presse (cf. infra).

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Rudi Dutschke était "le" visage du mouvement de 68 en RFA - les biographes ultérieurs en ont fait un "Che Guevara allemand" ou une version politique de James Dean. Il est vrai qu'à l'instar de ces derniers, c'est surtout en tant qu'icône qu'il a eu un impact sur les masses : lorsqu'il faisait de l'agitation lors de débats publics, ses phrases alambiquées, sinueuses, touffues, surchargées de mots étrangers, étaient difficilement compréhensibles, même pour de nombreux universitaires.

Mais le staccato de sa rhétorique, son blouson de cuir et ses yeux noirs brûlants sur son visage ascétique et mal rasé montraient que c'était un intransigeant, un honnête homme qui parlait. Et un modeste qui, en tant qu'intellectuel, n'était pas dévoré par l'orgueil et la vanité. En 1968, il écrivit à l'ouvrier Josef Bachmann (nous en reparlerons plus loin): "Pour nous, les étudiants ne valent quelque chose que s'ils retournent enfin dans le peuple. Les intellectuels et les artistes doivent enfin aussi lier fermement leur imagination créatrice à la vie du peuple, travailler avec lui, le soutenir, changer, le changer et le transformer".

Contre les États-Unis et l'OTAN

Dutschke, né en 1940, a grandi à Luckenwalde en RDA et a rejoint les Jeunesses du Parti est-allemand (FDJ) en 1956. L'écrasement de la révolte hongroise la même année a fait de lui un critique de ce socialisme réel. Il appelle à refuser de servir dans la NVA ("Nationale Volksarmee"), s'installe à Berlin-Ouest en 1961, juste avant la construction du mur, et commence des études à l'Université libre de la ville.

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En 1962, il fonde avec Bernd Rabehl un groupe local d'Action subversive, originairement basé à Munich. Au cours des deux années suivantes, cette troupe du chaos fait parler d'elle en organisant des happenings contre les autorités de l'ère Adenauer et en fustigeant la "terreur consumériste". En 1964/65, ils rejoignent le Sozialistischer Deutscher Studentenbund (SDS). Ce dernier était à l'origine l'organisation étudiante de la SPD sociale-démocrate, mais avait été excommunié en 1961 en raison de ses tendances gauchistes. (...)

Lettres à l'assassin

Quelques semaines plus tard, les ferments de la haine ont été semés. Le matin du 11 avril 1968, l'ouvrier Josef Bachmann arrive à la gare Zoo de Berlin-Ouest par le train interzones en provenance de Munich. Il porte un pistolet en bandoulière et en a caché un second dans ses bagages. Après des recherches confuses, le jeune homme pâle et presque imberbe trouve sa cible: à proximité des bureaux du SDS sur le Kurfürstendamm, Bachmann reconnaît Dutschke, l'insulte de "sale porc communiste" et l'abat de trois coups de feu. (...)

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Dutschke ne voyait pas en son assassin raté un ennemi, mais une victime du système capitaliste (...). Le fait que Dutschke ait tenté de rallier son assassin à la gauche en dit long sur la grandeur de l'homme. Il a écrit à Bachmann en prison: "Tu voulais m'achever. Mais même si tu avais réussi, la clique dirigeante (...) t'aurait achevé. (...) Pourquoi (...) t'exploiter, et avec toi les masses dépendantes de notre peuple, détruire ton imagination, détruire la possibilité de ton développement. (...) Alors ne nous tirons pas dessus, luttons pour nous et notre classe".

Ce passage est également typique : "Pour les porcs des institutions dirigeantes, pour les représentants du capital, pour les partis et les syndicats, pour les agents de la machine de guerre et des "médias" dirigés contre le peuple, pour les fascistes des partis coalisés contre les masses, qui se trouvent partout, tu peux trimer tous les jours. (...) Cesse tes tentatives de suicide, le socialisme anti-autoritaire est toujours là pour toi". (...)

Rolf Stolz, un camarade du SDS de Dutschke à l'époque, a commenté l'échange de ces lettres en 2015 dans le magazine COMPACT : "N'est-ce pas du populisme pur et dur, n'est-ce pas là un front transversal au carré ? Que peuvent bien dire les antifascistes d'aujourd'hui de l'offre de Dutschke à un "néonazi méprisant" - tout en méprisant les "institutions démocratiques librement élues" ? (...) Ils hurleraient sans doute et s'apprêteraient à leur tour à attaquer violemment Dutschke" (...)".

L'article complet est à lire dans le numéro d'avril de COMPACT-Magazin, dont le thème principal est "Querfront - Wie Rechte und Linke die Kriegstreiber stoppen können" ("Front transversal  Comment la droite et la gauche peuvent, ensemble, arrêter les fauteurs de guerre"). Vous trouverez ici le sommaire complet de ce numéro ainsi que la possibilité de le commander:  https://www.compact-shop.de/shop/compact-magazin/compact-4-2023-querfront/

 

La propagande dans la culture populaire

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La propagande dans la culture populaire

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/02/21/bs-la-propaganda-nella-cultura-popolare/

par Saturno

Dans une société où presque tout le monde a accès à internet et à des produits de divertissement tels que les films, les livres, les jeux vidéo et les bandes dessinées, il était inévitable qu'une relation se crée entre la culture de masse, l'identité nationale, la politique et la géopolitique. Pour comprendre cela, je prendrai l'exemple du célèbre personnage de bande dessinée américain Captain America.

Le concept d'hégémonie culturelle théorisé par Antonio Gramsci, intellectuel marxiste, consiste à voir la société divisée en classes mais avec une seule d'entre elles (la bourgeoisie), placée au sommet, qui ne détient pas le pouvoir par la seule force, mais surtout par le consensus. Cela est possible, selon Gramsci, parce que la classe dirigeante contrôle totalement les moyens d'influencer la culture populaire (école, journaux, religion, etc.) et, par conséquent, la façon dont les gens pensent. Les détenteurs de l'hégémonie culturelle peuvent créer un récit et des sentiments partagés par l'ensemble de la société, en diffusant des valeurs qui font que la domination de la classe actuellement au sommet semble également favorable aux classes subordonnées.

Laissant de côté le discours sur la véracité de la rhétorique marxiste (surtout aujourd'hui) selon laquelle la société est rigidement divisée en classes en lutte, ce concept d'hégémonie culturelle peut être utilisé pour diffuser des sentiments et des modes de pensée qui n'ont rien à voir avec la "lutte des classes", par exemple pour construire artificiellement des récits visant à former des identités nationales grâce à l'influence exercée par des choses triviales telles que les produits de divertissement : films, romans, chansons et bandes dessinées (comme Captain America), qui semblent apolitiques mais contiennent en fait des messages politiques qui influencent la société.

Cela a été particulièrement commode pour les États-Unis, car ils n'ont pas, contrairement aux États européens, des millénaires de civilisation derrière eux pour diffuser une identité nationale qui agit comme un ciment entre des personnes extrêmement différentes (les États-Unis sont ethniquement très peu homogènes). La culture populaire est un outil parfait pour diffuser des sentiments communs, car elle est conçue pour les masses et non pour de petites élites.

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Captain America est un produit de divertissement apparemment apolitique, mais qui remplit néanmoins cette fonction. En tant que personnage de bande dessinée, il est destiné à un public très jeune. Il est présenté comme le héros typique que les enfants rêvent de devenir [1], et c'est précisément le fait qu'il soit destiné aux jeunes qui lui a permis d'influencer plus facilement la société, car les jeunes sont la partie de la population la plus influente sur le plan idéologique et culturel, qui, lorsqu'ils grandissent, apportent avec eux les valeurs, les concepts et la façon de penser qu'ils ont appris pendant l'enfance et l'adolescence.

Captain America n'est pas seulement présenté comme un banal "bon super-héros combattant les méchants", mais comme la personnification de la nation américaine. Le nom même du héros (Captain AMERICA) et sa tenue vestimentaire (son costume et son bouclier rappellent le style et les couleurs du drapeau américain) en témoignent [2].

Créée en 1940 pendant la Seconde Guerre mondiale (mais avant l'entrée en guerre des États-Unis), la bande dessinée Captain America raconte à l'origine l'histoire d'une "Amérique pacifique" menacée par les "bellicistes sans scrupules d'Europe". De jeunes hommes sont appelés à prendre les armes pour défendre leur pays et l'un d'entre eux se voit injecter un sérum qui le transforme en un super-soldat doté d'une grande force, qui deviendra plus tard Captain America.

Par conséquent, ceux qui (surtout les jeunes) apprécient cette bande dessinée associent inconsciemment le concept de l'Amérique à celui d'un héros juste et courageux qui combat les méchants. Les personnes influencées par Captain America et d'autres produits de divertissement véhiculant des messages similaires finissent donc par voir le monde de la même manière que ces produits. La vision d'une Amérique bonne, prospère et libre, menacée par des ennemis extérieurs, au point de justifier une confrontation violente avec eux, est normalisée dans l'esprit des Américains. Mais cette vision des États-Unis dépasse également les frontières nationales, les États-Unis ayant fortement influencé la culture populaire dans tout l'Occident.

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La façon de voir le monde et ses espaces est donc déformée dans une fonction américano-centrée, il y a les États-Unis (les "bons" par excellence), les pays pro-américains ("bons" seulement en tant qu'amis des États-Unis) et les "mauvais" pays qui sont trop différents et hostiles (ou perçus comme tels) à l'Amérique, contre lesquels il est juste de mener des guerres.

En fait, cette rhétorique fortement américaniste de Captain America est très courante dans les produits de divertissement américains, par exemple dans les films hollywoodiens, les États-Unis sont souvent présentés comme les "bons" qui sauvent quelqu'un ou quelque chose (comme le monde entier), et ce n'est pas un hasard, puisque les films qui montrent une image positive des États-Unis sont souvent financés par le gouvernement américain lui-même. Pour ne citer qu'un exemple, le gouvernement américain a contribué au tournage de la série Transformers, un film racoleur mettant en scène des robots géants se battant les uns contre les autres, car il présentait l'armée américaine sous un jour favorable.

Les bandes dessinées, les jeux vidéo, les séries télévisées et les films anodins sont ainsi transformés en outils politiques et géopolitiques par les États-Unis, qui y insèrent les concepts de la dite "destinée manifeste" et de l'"exceptionnalisme américain" afin de les naturaliser et de les rendre "normaux" au sein de la culture populaire américaine et occidentale. C'est l'une des raisons pour lesquelles, par exemple, le fait que les États-Unis bombardent un endroit du monde en tuant des civils est un fait ignoré parce qu'il est perçu comme normal, alors que si d'autres États font la même chose, cela suscite l'indignation populaire.

En bref, ce sont ceux qui dirigent la culture qui gouvernent la société, car ce sont ceux qui tiennent les rênes de la culture qui peuvent propager dans le peuple la conviction de ce qui est acceptable et de ce qui ne l'est pas, de ce qui est bon et de ce qui est mauvais, de ce qui est bien et de ce qui est mal.

Le fait que Captain America n'ait pas de super-pouvoirs étranges tels que des rayons laser tirés de ses yeux, mais une "simple" super force (due à la croissance de la masse musculaire) ainsi qu'un grand courage et un sens du devoir que toute personne peut aspirer à atteindre, contribue certainement à l'identification de l'enfant à la lecture de ces bandes dessinées [2].

Ce type de symbolisme américain incarné par quelqu'un est aujourd'hui courant dans la culture populaire américaine, non seulement grâce à Captain America, mais aussi à d'autres produits de divertissement tels que la lutte télévisée. La World Wrestling Federation (aujourd'hui W.W.E.), véritable phénomène de masse, a créé de nombreux personnages qui s'inspirent de ce symbolisme, dont les plus célèbres sont certainement Hulk Hogan et John Cena.

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Retirons l'agriculture aux bourgeois et aux affairistes

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Retirons l'agriculture aux bourgeois et aux affairistes

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/02/27/bs-togliamo-l-agricoltura-a-borghesi-ed-affaristi/

par Bologne

Depuis les temps les plus reculés jusqu'à il y a quelques années, l'agriculture a certainement représenté le travail le plus important pour l'humanité en termes de communauté et de coexistence civilisée. Bien que l'homme ait pu survivre, et pendant longtemps, en tant que simple chasseur ou cueilleur de fruits sauvages, l'art de la vie en communauté n'a pu se développer jusqu'à l'épanouissement de civilisations impressionnantes qu'à travers l'exploitation de territoires où s'installer de façon permanente, en obtenant de la nourriture pour soi et sa famille/son clan/sa communauté et en créant un lien stable, sacré et de vénération, avec la terre où l'on vit.

Même les civilisations les plus indomptables et guerrières ont su reconnaître la valeur intrinsèque du travail des champs et de l'entretien de la terre, qui n'est pas par hasard divinement associée à la fertilité. Au Japon, c'est la déesse Inari, kami du riz, de la fertilité et de l'agriculture; dans l'ancienne Germanie, c'est plutôt Nerthus, la dame de la terre fertile; pour les peuples italiques, on ne peut pas ne pas mentionner Cérès, avec sa tête entourée d'épis de blé, dont l'héritage se reflète encore aujourd'hui dans ce que nous appelons les céréales.

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L'agriculture est donc un travail sacré depuis la nuit des temps, souvent associé à une condition indispensable pour être un homme libre. Si, lorsqu'on parle de l'évolution de l'histoire européenne, il ne faut pas oublier les grands hommes, les chefs explorateurs et les scientifiques, il ne faut pas non plus oublier que notre civilisation s'est toujours appuyée sur la figure de l'agriculteur-soldat.

Pensons aux Spartiates, ces guerriers féroces rendus célèbres par l'épopée des Thermopyles, et considérons que chacun de ces nobles guerriers se voyait attribuer par la Polis une ferme et un espace cultivable, qu'il fallait mettre à profit pour que la cité soit autosuffisante. Mais sans s'embarquer pour la Grèce, il suffit de penser à la Res Publica romaine, fondée sur la charrue et l'épée de ses légionnaires qui, jusqu'aux réformes du premier siècle avant J.-C., étaient toujours aussi des agriculteurs. L'épisode du grand politicien Cincinnatus, homme clé de la politique républicaine, est emblématique : joint par les sénateurs qui l'implorent d'assumer le titre de dictateur pour renverser le cours de la guerre, ils le trouvent en train de cultiver ses propres champs !

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Avec la révolution industrielle et la diffusion de la mentalité capitaliste, la conception sacrée du travail agricole s'est très vite perdue. À partir des grandes innovations technologiques anglaises, qui se sont ensuite répandues comme une traînée de poudre en Europe et dans le monde, la terre cultivée n'a plus été considérée comme une réalité communautaire à sauvegarder avec respect, humilité et dévouement, mais plutôt comme un espace à pressurer pour en tirer toujours plus de profit.

Cette mentalité perdure malheureusement encore aujourd'hui dans la conception occidentale de l'agriculture.

Dans "Nous, les Fascistes", Léon Degrelle constate avec réalisme que "les paysans, si favorisés par les fascismes, ont partout été relégués au second plan". Or, ce sont précisément les fascismes qui ont redonné de la dignité à la paysannerie, au travail agricole dans une grande partie de l'Europe, une dignité qui n'était pas du tout en contradiction avec les profondes réformes technologiques et industrielles que ces gouvernements poursuivaient avec la même ferveur. La politique d'assainissement des marais Pontins en Italie, projet monumental si souvent ridiculisé par les ignorants en matière économique et agraire, avait pour pivot central la création de domaines rationnellement divisés et attribués à des familles paysannes principalement originaires de Vénétie et de la région de Ferrara: une véritable restauration de cette classe de petits et moyens paysans libres, à l'époque éteinte par les pratiques serviles.

Mais pensons aussi à la forte influence de Walther Darré pour obtenir du national-socialisme allemand le consentement des paysans, loin d'être acquis dans l'Allemagne de l'après-guerre. C'est lui qui a élaboré un programme de politique agricole pour le Troisième Reich et qui l'a mis en œuvre en tant que ministre de l'agriculture. Dans "La nouvelle noblesse de sang et du sol", Darré avait déjà théorisé, avant même son accession au pouvoir, que la meilleure jeunesse dirigeante allemande serait précisément issue de ces familles paysannes libres, soustraites à l'exploitation latifundiaire d'une noblesse désormais largement mêlée matrimonialement à la bourgeoisie. Cette conviction du penseur allemand s'accompagne d'une fine analyse politique et historique, qui s'inscrit en fait dans la droite ligne des actions fascistes dans les campagnes pontines.

Aujourd'hui, l'agriculture est en effet revenue à une mentalité totalement commerciale de profit à tout prix. Même les agriculteurs que nous voyons travailler avec amour sur leurs terres sont souvent pris au piège de la logique du marché et de l'exploitation de la main-d'œuvre par les multinationales de la consommation, qui contrôlent en fait la main-d'œuvre agricole dans le monde entier.

C'est normal et parfaitement conforme à l'esprit de notre époque, mais nous ne devons pas permettre à cette mentalité de prévaloir même dans le travail de la terre, qui, comme nous l'avons vu, a des racines spirituelles beaucoup plus anciennes et plus profondes.

La tâche de notre jeunesse est de tout reprendre : les batailles environnementales, le respect de la terre et aussi la dignité du travail agricole, en l'enlevant une fois pour toutes aux bourgeois et aux hommes d'affaires.

18:03 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, agriculture, paysannat, paysannerie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Entretien avec Thorvald Ross, auteur d'un remarquable roman initiatique

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Entretien avec Thorvald Ross, auteur d'un remarquable roman initiatique

A propos d'une quête religieuse et philosophique de plus de quarante ans

Propos recueillis par Robert Steuckers

1.

Je vous connaissais déjà lorsque vous publiez la revue Mjöllnir. Vous vouliez découvrir les racines nordiques (scandinaves) présentes de manière diffuse dans la culture néerlandaise (Nord et Sud confondus). Votre livre De laatsten heiden (= Les derniers païens) est-il le témoignage de cette quête ? Et qu'en est-il de cet héritage nordique aujourd'hui ?

Mon expérience "païenne" ne s'est pas faite du jour au lendemain. Il s'agit d'une quête sans fin qui a mis du temps à arriver à maturité. Avant la publication de Mjöllnir, j'avais pris contact avec des organisations "païennes" à l'étranger et j'avais lu avec avidité leurs revues, principalement des publications allemandes, anglaises, irlandaises, françaises et scandinaves. Ces publications étaient fortement teintées de romantisme, d'occultisme et de libre-pensée, mais elles cherchaient aussi parfois à revendiquer politiquement l'héritage "païen". On pourrait donc dire qu'il ne s'agissait pas vraiment d'études scientifiques, mais plutôt de visions nostalgiques qui cherchaient une certaine légitimité dans ce "paganisme". Néanmoins, cela m'a donné envie de creuser davantage. La revue Mjöllnir a suivi à la fin des années 1980. Il s'agissait d'un mélange d'occultisme, d'une certaine forme d'ésotérisme, des premiers balbutiements de la recherche de sources et d'une étude plus large de la symbolologie.

Cela correspondait parfaitement à la phase suivante de mon itinéraire, à savoir la fondation de la Société Herman Wirth. Le travail de pionnier effectué par cette société était basé sur les écrits de Herman Wirth Roeper Bosch (1885-1985): j'en possédais déjà un grand nombre à l'époque. Der Aufgang der Menschheit et Die Heilige Urschrift der Menschheit ont été pour moi des ouvrages révolutionnaires. Ils m'ont encouragé à partir à la recherche des vestiges de notre héritage préchrétien dans les Pays-Bas, c'est-à-dire à travailler sur le terrain. Muni de mon appareil photo, je suis parti de village en village, dans les cimetières, sur les maisons, dans l'art populaire, les coutumes, les chansons, etc. pour redécouvrir le symbolisme ancien, l'enregistrer pour la postérité et l'interpréter de manière adéquate.

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Le résultat: la publication de mon premier livre: Tussen Hamer en Staf - Voorchristelijke symboliek in de Nederlanden en elders in Europa (= Entre le Marteau et la Crosse - Symbolisme pré-chrétiendans les Bas Pays et ailleurs en Europe). Entre-temps, j'étais entré en contact avec des personnes en Flandre qui cherchaient une interprétation spirituelle et une véritable expérience de nos propres traditions.

C'est ainsi qu'est né, dans les années 1990, le Werkgroep Traditie, toujours actif aujourd'hui. La différence avec toutes les initiatives "païennes" précédentes était que la nouvelle organisation ne se basait pas sur l'interprétation völkisch du mot tradition, mais sur le concept établi par Julius Evola dans Les Hommes au milieu des Ruines, à savoir :  "Dans sa véritable essence, la Tradition ne représente pas un conformisme passif à l'égard de ce qui a existé, ni la continuation inerte du passé dans le présent. La Tradition est, par essence, une réalité à la fois métahistorique et dynamique : elle est une force générale d'ordonnancement, obéissant à des principes qui visent une légitimité supérieure. On pourrait également dire qu'elle s'aligne sur les principes d'en haut. C'est une force qui est une dans l'esprit et dans l'inspiration - une force qui exerce son influence à travers les générations en servant les institutions, les lois et les organisations dans la plus grande variété. Cependant, ce serait un malentendu d'identifier certaines de ces formes, appartenant à un passé plus ou moins lointain, avec la Tradition en tant que telle".

Mon souci était de commencer à voir notre Tradition non plus comme une simple transmission horizontale (dans le temps), mais de la voir, en plus, comme une force verticale (transcendante) ordonnatrice, métaphysique. Cela était nécessaire pour se libérer de l'amateurisme et s'élever à un niveau véritablement spirituel. Ce n'est qu'alors que notre tradition (avec un petit t) deviendrait viable et ferait véritablement partie de la Tradition (avec un grand T). Sinon, elle ne serait qu'un saupoudrage incohérent de vestiges d'un passé plus ou moins lointain, tout au plus bon à exposer dans un musée.

Cette vision traditionaliste était également notre approche en tant que cofondateurs du Congrès mondial des religions ethniques (fondé par Jonas Trinkunas, avec des réunions à Vilnius, Athènes, Delhi, Anvers et Rome). Nous avons ainsi pu établir des liens avec des formes encore vivantes de "paganisme" indo-européen.

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J'ai quitté ce groupe de travail sur la tradition au début des années 2000, en partie parce que certains membres trouvaient difficile de s'engager dans cette vision métaphysique fondamentale. À cette époque, j'avais déjà publié un certain nombre d'ouvrages, dont De Graal - tussen heidense en christelijke erfenis (= Le Graal - Entre héritage païen et chrétien) sera probablement considéré comme l'un des plus importants. Des articles pour les revues Vers la Tradition, Ars Macionica, Tradition,... indiquent clairement où battait mon cœur. Je me suis plongé de plus en plus profondément dans les auteurs traditionalistes tels que René Guénon, Julius Evola, Ananda K. Coomaraswamy, Frithjof Shuon, Titus Burkhardt, Christophe Levalois, j'ai parcouru des ouvrages savants de Dumézil, De Vries, Guyonvarc'h, Widengren, Gimbutas... et je suis retourné aux sources pour vérifier les choses.

En outre, j'étais particulièrement actif dans la franc-maçonnerie traditionnelle depuis le début des années 1990. Par conséquent, ma connaissance des mystères n'était pas purement académique, mais reposait sur une expérience concrète. Dans l'Ordre, je m'étais consacré à l'enseignement des Frères : exposés sur les principes métaphysiques, recherche de symboles, techniques pratiques, instructions, aphorismes, poèmes et, enfin, pièces littéraires. J'ai pris conscience que la manière dont les choses sont mises en place contribue à déterminer l'impact du contenu. C'est pourquoi, des années plus tard, je me suis aventuré dans la littérature, d'abord la poésie, puis le roman. Le roman est un excellent outil pour faire connaître la pensée traditionnelle au grand public. C'est ainsi qu'est né De laatste heiden (= Les derniers païens). Bien que cette histoire soit basée sur la mythologie nordique, le drame a été complètement transposé à notre époque. Il a constitué la base de mon réalisme magique.

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Certains se demandent si, avec De Zwerver, j'ai dit adieu à la pensée nordique. À cela, je réponds résolument : non ! Je place maintenant mon expérience dans un contexte indo-européen plus large, car je pense que les points de vue nordique et indien sont très similaires. Ce n'est que dans la forme qu'elles sont relativement différentes. En fait, l'imagerie nordique reste bien présente dans De Zwerver : par exemple, le pont à la fin du livre (cf. Bifröst), l'entrelacement des mondes (cf. Nevelland), les trois classes (cf. Scuola Sapientia),... Ces thèmes ne sont pas typiquement nordiques, ils sont indo-européens. Ce sont ces grandes lignes indo-européennes que je veux mettre en évidence dans le patrimoine matériel et immatériel de nos Pays-Bas. Soyez assurés que sous la surface, beaucoup de choses sont encore présentes dans nos régions: dans l'étymologie, dans diverses expressions, dans des chansons, dans les coutumes populaires, dans les symboles, dans les structures, dans la législation.

2.

On a dit que votre nouvelle œuvre était d'inspiration néoplatonicienne. Après la mort tragique de Darja Douguina qui, après des études en Russie et en France, défendait une vision traditionaliste marquée par le néo-platonisme, vous semblez vous aussi emprunter la voie du néo-platonisme dans un contexte plus apaisé ? Quel est donc le néo-platonisme de votre héros et comment le néo-platonisme s'inscrit-il dans le paysage intellectuel néerlandais d'hier et d'aujourd'hui ?

C'est effectivement ce que l'ondit. Il existe en effet d'autres systèmes qui présentent une certaine parenté avec le platonisme: l'hermétisme, la kabbale, le gnosticisme, l'advaitisme,... Cependant, cette perception n'est que partiellement vraie. Certes, j'accorde une grande importance à Platon, mais ma vision du monde n'est pas statique. Elle est dynamique, presque taoïste ou héraclitéenne. Tout s'enchaîne dans une sorte de dynamisme tourbillonnant. Cela n'est possible que s'il existe un pivot qui maintient cette confluence. C'est là que réside la tension entre Vishnu et Maya (Mahadêvi/Shakti), qui permet à la manifestation dynamique de prendre forme.

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Il est clair que la contemplation est primordiale pour moi, mais cela n'exclut pas l'action (tragique). Je préconise une manière d'être quasi stoïcienne, en gardant toujours à l'esprit les principes métaphysiques et en essayant d'agir en accord avec l'être humain authentique. Concrètement, il s'agit d'abandonner toute forme de morale et de culpabilité. Il s'agit d'une attitude "Jenseits von Gute und Böse". Tout est ce qu'il est. Pour beaucoup, cela semble être une voie sans cœur (on m'en fait parfois le reproche). De l'extérieur, c'est le cas. Mais pour l'essentiel, cette voie est beaucoup plus humaine et élevée. C'est une vision sobre qui perçoit le monde avec détachement. C'est précisément par ce biais que se réalise l'être humain le plus proche (homogène), physiquement, psychiquement et métaphysiquement. Donc pas de rejet de la matière, pas de mépris du corps, pas de mépris du terrestre, mais une acceptation totale de celui-ci, quelles qu'en soient les conséquences. En ce sens, je ne suis guère platonicien - ou du moins pas de la manière dont certains modernistes pensent qu'il faut expliquer Platon. Ma vision est l'extension radicale de ce que Ruusbroec appelle la "sur-image". Il désigne par là une attitude de base qui se situe au-delà des images, mais qui est néanmoins ancrée dans l'ici et le maintenant. Une attitude qui ne se laisse pas emporter par le tourbillon du monde, mais qui s'enracine dans l'origine de toute chose.

La voie active de Daria Douguina et de son père Alexander Douguine, je peux la suivre et la défendre dans une certaine mesure. L'objectif ultime est d'élever le niveau local en un royaume global, c'est-à-dire non seulement dans le cadre d'un ordre administratif, mais aussi dans une structure dotée d'une cohérence spirituelle. Au sein du royaume spirituel, tout groupe organique - de toute culture, religion, ethnie - est assuré d'être lui-même et d'être inclus dans un récit supérieur. Ainsi, la composante populaire est transcendée et liée à un niveau d'être au niveau de l'État - un niveau greffé sur des valeurs spirituelles. Il me semble que c'est là la véritable signification de l'idée d'État, telle que nous l'avons vue s'établir autour de la chrétienté au Moyen-Âge, entre autres.

Là où je m'écarte de l'idée russe, c'est dans la méthode. L'empire n'est pas contraignant. Il doit agir comme un aimant organisationnel qui attire les peuples à lui en faisant rayonner l'autorité. L'autorité (auctoritas) n'est pas la même chose que la force. Cette dernière est l'exercice forcé du pouvoir par la force. Une telle chose ne peut jamais conduire à la stabilité. L'auctoritas représente la dignité, le prestige, l'influence, l'élévation. C'est ce qu'une personne "regarde vers le haut".

Le paysage intellectuel néerlandais actuel est celui du nihilisme, du relativisme, du je m'en foutisme. Peut-être un peu court sur le plan de la substance, il est vrai. Mais c'est bien de cela qu'il s'agit. Tout est remis en question, il ne nous reste que la trivialité, la banalité de notre existence. Pourtant, il existe des écrivains qui parviennent à transcender cette situation et qui jouissent d'une certaine notoriété dans le paysage culturel néerlandais: il suffit de penser à Albert Verwey, Martinus Nijhoff, Pieter Cornelis Boutens, Hubert Lampo, Harry Mulish, Pol le Roy. Il convient toutefois de faire preuve de prudence dans ce domaine également. Dès qu'une interprétation spirituelle est repérée, les gens pensent qu'ils doivent immédiatement invoquer Platon.

Quoi qu'il en soit, j'ai l'intention d'initier une nouvelle profondeur et un nouveau dynamisme dans cette vie, en partant des valeurs traditionnelles qui forment la communauté (horizontalement), mais qui construisent également le pont vers une ouverture transcendante. Dans cette optique, le séculier est intégré dans une histoire plus vaste, une histoire de pouvoirs et de forces cosmiques à l'œuvre ici et maintenant.

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3.

Le Zwerver est un personnage "qui part en quête". La quête n'est-elle pas l'essence même de l'homme ? Et en quoi la quête de l'Errant est-elle caractérisée par la Tradition au sens le plus élevé du terme ?

Il est logique que la queste, la quête, le pèlerinage, l'imramma,... soit le fondement de l'existence. C'est aussi vieux que le monde. Nous sommes ici en transit à la recherche de quelque chose que nous avons perdu: notre origine, notre être, notre essence, notre patrie, une petite perle, un mot, une félicité... La quête renvoie à l'aliénation, à un état dégénéré. Mais ne vous y trompez pas: la plupart des gens - malgré le parcours de leur vie - ne s'y attardent pas. Ils se contentent de flotter sur les eaux et, parfois, ils sont engloutis par les eaux, engloutis tout entiers. Ils sont habités par la dynamique de l'agitation. Ils ne contrôlent pas la vie, ou plutôt: ils ne la vivent pas ! C'est là que réside le problème. Mon personnage principal, en revanche, fait tout ce qu'il peut pour échapper à ce qui conditionne les humains. Il va même jusqu'à se sacrifier - encore et encore - pour échapper à la mort par la mort. Cela lui permet d'atteindre les limites du concevable. Même si tout s'y effondre, tout y repart à zéro. Finalement, le chemin devient le but.

4.

Le Zwerver se retrouve dans une ville idéale. N'est-ce pas une utopie ? Quelle est la différence entre cette petite ville idéale italienne et l'Utopie de Thomas More ou entre cette ville et les utopies modernes qui veulent effacer le passé ?

Sans aucun doute, Civitas Ludum est une utopie au sens propre du terme: un non-lieu (ou-topos). Elle constitue une sorte de société juste dans laquelle le jeu joue un rôle crucial. Le maire, et ce n'est pas une coïncidence, est Prospero, le magicien philosophe de La Tempête de Shakespeare. Et oui, il existe des similitudes (involontaires) entre l'Utopie de Thomas More et la Civitas Ludum dans mon roman De Zwerver. Les deux représentent une société inspirée par la philosophie. Pourtant, dans Civitas Ludum, aucun jugement n'est porté sur la propriété, ni sur l'esclavage, aucun État-providence n'est mis en place, aucune nouvelle forme de socialisme n'est introduite, aucune idée sur la fonction de la religion n'est proposée.

Civitas Ludum fait référence au stade de l'enfance dans la vie humaine. Elle est utilisée pour réfléchir à l'importance du jeu, à l'enthousiasme avec lequel on s'absorbe dans le jeu, en se perdant dans le rôle que l'on joue. En ce sens, le jeu est une métaphore de la vie elle-même : "All the world's a stage, And all the men and women merely players" (As You Like It, Shakespeare, II, scène 7). Mais il y a plus: dans Civitas Ludum, chacun a des cartes à jouer différentes, et ces cartes déterminent le caractère, les forces et les faiblesses, les sensibilités... C'est avec cela que l'on joue la vie. Non pas une perfection idéale, mais une perfection dans les limites imparties. De plus, dans cette vision, l'individualité n'est pas détruite, mais embrassée. Il ne s'agit pas d'un effacement de ce que l'on a été, ni d'une incompréhension de toute la culture, mais d'une acceptation totale de ce qui est imparfait et de ce qui est prometteur. En jouant, l'homme authentique prend vie, sans affectation, sans mentalité factice, mais tel qu'il est vraiment. Et par le jeu, l'homme s'élève dans cette authenticité. Il apprend à découvrir les qualités qui lui permettent de se réaliser. Le jeu est donc à la base de la civilisation, du rituel, de la danse, du développement. Sa discussion critique ébranle la vision moderne du travail. Si le travail était vécu comme un enthousiasme intact, comme l'est le jeu, alors la vie, le jeu et le travail coïncideraient et engendreraient une expérience totalement différente : une expérience de bonheur.

5.

Existe-t-il une analogie entre cette petite ville magnifique et le labyrinthe du monde de Jan Amos Comenius ? Pouvez-vous l'expliquer ?

Bien sûr, on ne peut pas l'éviter. Chez Comenius, il s'agit d'un lieu en forme de labyrinthe où le personnage - le pèlerin - part à la recherche de la profession qui lui convient le mieux. Chez moi, il s'agit d'une ville à triple enceinte où, dans chacun des quatre quartiers (qui relèvent d'une sorte de jeu de cartes), tel ou tel personnage coïncide avec un état spécifique. Le bord extérieur est dominé par la danse itinérante. La foule y est presque magiquement forcée de danser la roue de Fortuna. Elle subit simplement la vie. Entre les deux se trouve le champ de travail, le lieu où l'homme lutte avec lui-même pour s'affiner et coïncider avec l'homme authentique. L'homme authentique devient rempli d'un Amour supérieur. Tout ce qu'il fait sert un but plus élevé. Tout ce que l'homme fait sien remonte à la surface dans la ville. Ainsi, mon personnage principal est particulièrement enclin à la vanité, qui est induite par l'ego et renforcée par l'orgueil.

6.

Le Zwerver, dans les faubourgs de cette ville où se trouve une école de pensée, avoue ses erreurs. S'agit-il de vos propres erreurs de jeunesse que vous confessez là, à l'âge où vous entrez dans le "troisième âge" ?

Oh, vous savez, un roman est toujours en partie autobiographique. J'ai certainement commis des erreurs dans ma vie. Il est important de le reconnaître. Mais - et les gens l'oublient trop souvent - ce n'est pas une raison pour commencer à se plaindre et à s'en vouloir. Ce genre de culpabilité et de moralisation du comportement m'est étranger. J'accepte tout, mais vraiment tout, ce que j'ai fait ou n'ai pas fait dans le passé. C'est précisément ce qui a fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Je n'ai plus 20 ans. Chaque âge a ses charmes et ses défis. Mais l'enthousiasme de la jeunesse m'a conféré une maturité somptueuse que je chéris aujourd'hui. La folie téméraire (et je le dis expressément ici en faisant référence à der reine Tor de Parzifal) avec laquelle j'ai longtemps lutté s'est finalement avérée être l'atout qui m'a permis de gagner la bataille. Sans cette folie, sans ce coin perdu, sans cette naïveté, le processus d'apprentissage aurait été complètement différent. Peut-être n'aurais-je pas écrit de livres, peut-être serais-je devenu un grand industriel ne pensant qu'au profit. Mais je me suis engagé dans cette voie sans plan sophistiqué. J'ai suivi cette voie avec honnêteté et constance, et voilà que des miracles apparaissent parfois sur votre chemin.

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7.

La promotion de votre livre parle d'une influence secrète d'Apulée et de Dante. Que devrait retenir le traditionaliste anticonformiste contemporain de ces auteurs anciens et médiévaux ?

Ceux qui me connaissent savent à quel point l'Antiquité et le Moyen Âge sont importants pour moi. Dans mon œuvre, Pythagore, Platon, Origène, Apulée, Dante, Shakespeare, Rabelais, ... sont imbriqués dans des noms, des formes de pensée, des symboles, .... En ce sens, mon livre peut également être lu comme un voyage à travers les penseurs qui ont contribué à façonner mes pensées et que j'ai englobés dans la toile du roman. Apulée fait partie de ces grands qui ont su faire passer le message des mystères de manière magistrale - avec l'humour nécessaire - sans en trahir aucun aspect. Logique que j'exploite son âne. Il y a tant à dire sur Dante qu'il est presque impossible d'exposer son influence en toute finesse. En tant que Gibelin, il a conservé la finesse du discours spirituel en s'engageant avec les Fidele d'Amore. La façon dont il joue si subtilement des aspects de l'imagerie secrète entourant la Dame dans La Vita Nuova est tout simplement grandiose. En outre, il est l'un des écrivains médiévaux qui ont joué un rôle politique important en transmettant l'héritage spirituel des chevaliers du Temple. Mais ce que j'admire par-dessus tout, c'est l'image globale qu'il donne des affaires du monde en relation avec le plus haut niveau. C'est tout simplement grandiose. Je suis envieux quand je vois à quels géants nous avions affaire. Ce que nous, écrivains contemporains, pouvons encore faire, c'est bricoler dans les marges. Nous ne pouvons plus créer une image globale, une image plus grande, une vision cosmique. C'est donc là que commence le travail du traditionaliste, c'est là qu'il doit restaurer, c'est là qu'est sa tâche.

mardi, 04 avril 2023

Roald Dahl: une nouvelle victime du politiquement correct

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Roald Dahl: une nouvelle victime du politiquement correct

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/03/10/bs-roald-dahl-ennesima-vittima-del-politicamente-corretto/

Par Chiara

Même les œuvres de Roald Dahl, le célèbre écrivain britannique, n'échappent pas à la révision langagière dictée par le politiquement correct.

Après 007 et Blanche-Neige, c'est au tour de "La chocolaterie" d'être frappée par le couperet de la pensée unique, dans le but d'éliminer tous les termes et expressions considérés comme "non inclusifs".

C'est le cas de mots comme "gros", "laid" et "nain" : les "Oompa Loompas", célèbres pour leur stature, auparavant définis comme de "petits hommes", sont devenus de "petites personnes", au nom de l'égalité des sexes et du body-positive.

Dans d'autres livres, comme le roman "Les sorcières", des phrases entières ont été modifiées parce qu'elles étaient jugées sexistes.

Même la vie de l'auteur lui-même n'a pas été sauvée du révisionnisme et du jugement stérile d'un comité dirigé par une "fille" qui se décrivait comme anarchique, non binaire, asexuelle et polyamoureuse, en raison de ses opinions politiques considérées comme antisémites et anti-israéliennes.

Il s'agit d'une tendance qui découle d'une idée fausse selon laquelle il est possible et admissible d'évaluer les œuvres de Dante Alighieri et de Shakespeare avec les yeux d'aujourd'hui. C'est l'expression ultime d'une très faible conscience culturelle et d'une ignorance croissante qui, à ce rythme, peut difficilement être éradiquée ou du moins diminuée.

Il s'agit d'un phénomène de plus en plus dangereux, qui vise à imposer des normes délétères et à mettre de plus en plus en danger la liberté d'expression : une autre forme de révision déguisée en protection des catégories "sensibles".

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Ainsi, pour éviter les critiques stériles et la censure, les auteurs, réalisateurs et autres membres de l'industrie du divertissement se sentent obligés d'inclure les Noirs et les homosexuels dans chacun de leurs films ou de leurs livres, au point de les retrouver dans des œuvres où ils n'étaient pas envisagés à l'origine.

Au Royaume-Uni, une commission nationale pour la prévention de l'extrémisme a rendu publique une liste dans laquelle elle cite la lecture de certains classiques de la littérature anglaise (par exemple Shakespeare, Tolkien et Orwell) comme de possibles "signaux d'alarme" indiquant des positions liées à l'extrémisme de droite.

Ils n'ont probablement pas réalisé qu'un tel travail n'est rien d'autre que la réalisation de ce que George Orwell lui-même avait prédit dans "1984".

Plusieurs intellectuels de premier plan, tels que Salman Rushdie et Francis Fukuyama, se sont prononcés publiquement contre la "cancel culture", la qualifiant d'ensemble rigide "de normes morales et d'alignements politiques qui tendent à saper le débat ouvert au profit d'une conformité idéologique".

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D'autres intellectuels, en revanche, relégués dans une certaine idéologie, soutiennent cette tendance délétère et ont une forte emprise sur le public, comme dans le cas de phénomènes tels que les communautés Black Lives Matter et LGBT, sans l'approbation desquelles il semble qu'il soit devenu impossible de s'exprimer.

En conclusion, on constate que le révisionnisme culturel n'est rien d'autre qu'une énième tentative de modifier le passé en fonction des tendances et des modes du présent, sans tenir compte des différences culturelles et sociales entre les différentes périodes historiques ; les vraies victimes sont les esprits mitraillés par des informations de plus en plus marquées par l'uniformisation de la pensée.

La cancel culture n'est rien d'autre que l'enfant du conformisme qui caractérise la société d'aujourd'hui.

Vers où se déplace l'axe du monde?

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Vers où se déplace l'axe du monde?

par Sembe

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2023/03/18/bs-dove-si-sta-spostando-lasse-del-mondo/

L'accord entre l'Arabie saoudite et l'Iran conduisant à la réouverture de leurs ambassades respectives dans les deux pays date de quelques semaines. Les deux plus grandes puissances musulmanes du Moyen-Orient, l'une référence du courant chiite, l'autre du courant sunnite, l'une alliée de l'Occident, l'autre alliée des puissances " multipolaires ".

Après huit ans de guerre froide, qui s'est d'ailleurs déroulée sur plusieurs fronts régionaux comme le Liban et le Yémen, cet accord est une véritable surprise. Mais la véritable surprise réside dans le lieu où il a été conclu: à Pékin.

Oui, le vieux maître américain qui, ces dernières années, a mis fin à 20 ans de domination militaire au Moyen-Orient, laisse la région "ouverte" aux tentacules d'autres superpuissances, en l'occurrence la Chine, qui révèle toute sa nouvelle importance dans le scénario international.

Avec son arme acérée qu'est la diplomatie, la Chine avance là où l'Occident a échoué, comme en Afrique où les Européens reculent, les États africains préférant faire des affaires avec les Chinois puisqu'ils n'ont pas, à leur avantage, la prétention morale moderne de l'Occident.

Il faut ajouter que l'Arabie Saoudite, allié historique de l'Amérique depuis les années 1990 avec l'invasion du Koweït, a récemment manifesté son intérêt pour rejoindre les BRICS (pacte économique des pays en voie de développement). 

En résumé, il ne faut pas se laisser séduire par "l'avancée" des puissances non-européennes en pensant qu'elles vont nous libérer du carcan de Washington.

Voir en la Chine un nouveau pôle auquel se raccrocher reviendrait à passer d'un maître hypercapitaliste à un autre maître hypercapitaliste, où, pour l'amour du ciel, il n'y aurait peut-être pas de propagande Lgbt. La civilisation européenne ne peut et ne doit pas finir entre les mains de l'Asie.

Aujourd'hui comme en 1945, notre continent continue d'être aux prises avec ses ennemis sur tous les fronts, il nous appartient de construire son avenir de manière à faire enfin de l'Europe un acteur géopolitique majeur sans avoir à la reléguer au rang de partenaire de soutien de la Russie, des États-Unis, de la Chine ou de toute autre puissance aléatoire à votre guise.

Géopolitique des infrastructures 

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Géopolitique des infrastructures 

Source: https://katehon.com/ru/article/infrastrukturnaya-geopolitika

Plusieurs pays tentent d'utiliser les projets d'infrastructure pour exercer leur influence géopolitique. Les initiatives récentes les plus importantes sont celles de la Chine, des États-Unis et de l'Union européenne.

Projet américain Build Back Better

Le plan Build Back Better est un cadre législatif proposé par le président américain Joe Biden entre 2020 et 2021. Il est considéré comme un projet ambitieux par sa taille et sa portée. Il vise à réaliser le plus grand investissement public à l'échelle nationale dans des projets sociaux et d'infrastructure, ainsi qu'à s'appuyer sur des programmes environnementaux qui existent depuis la Grande Dépression.

Si une grande partie du public sait que Build Back Better a les objectifs les plus vastes, tels que la décarbonisation nationale et la réduction des coûts des médicaments, les analystes estiment que le plan constitue également une étape importante dans le développement de l'infrastructure américaine. M. Ricketts, chercheur au Center for American Progress, a expliqué à CNBC que le plan Build Back Better s'appuie sur un projet de loi bipartisan sur les infrastructures d'un montant de 1000 milliards de dollars, que M. Biden a promulgué en novembre 2021.

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Ce projet de loi bipartisan compense le manque d'investissements durables dans les infrastructures traditionnelles des États-Unis: autoroutes, routes et ponts, lignes électriques, infrastructures hydrauliques. Les responsables affirment que "Build Back Better" est un projet de loi sur les infrastructures non seulement pour le 21ème siècle, mais aussi pour l'avenir.

"Nous avons besoin d'un réseau électrique stable et fiable. Mais nous avons également besoin d'un réseau électrique stable, sûr et propre pour éviter les pires effets du changement climatique et construire une véritable économie de l'énergie propre au 21ème siècle, et non l'économie polluante des combustibles fossiles du siècle dernier", a déclaré M. Ricketts.

Les fabricants américains doivent poser des centaines de kilomètres de nouvelles lignes électriques et les producteurs d'énergie doivent repenser leurs modèles économiques pour se concentrer sur les batteries et le lithium. Les sociétés d'ingénierie doivent également tenir compte de l'élévation du niveau de la mer et de l'érosion lorsqu'elles décident de l'endroit où construire des infrastructures de transport plus efficaces.

Pour Wall Street, tout cela signifie plus de revenus, d'emplois et de profits pour les entreprises qui construisent les infrastructures.

Bien que le projet de loi soit susceptible d'être modifié, l'une des principales dispositions de l'actuel projet "Build Back Better" est un ensemble de crédits d'impôt et de réductions d'environ 300 milliards de dollars en faveur de l'énergie propre, des voitures électriques, des bâtiments propres et de la décarbonisation.

Selon la Maison Blanche, une telle structure permettrait, par exemple, de réduire d'environ 30 % le coût de l'installation de panneaux solaires sur le toit d'une maison et de réduire de 12.500 dollars le coût d'une voiture électrique fabriquée aux États-Unis, avec des matériaux américains et une main-d'œuvre syndiquée.

Malgré la surenchère qui règne au Capitole, les investisseurs ne s'inquiètent pas des perspectives du projet de loi et de son potentiel pour les fabricants et les entreprises de construction américains. Les économistes américains divergent dans leurs prévisions du prix final de Build Back Better.

"Le Sénat a toujours été le plus grand obstacle à la législation BBB, et nous nous attendons à ce que la législation soit modifiée avant de passer à la Chambre", a écrit Jan Hatzius, économiste en chef chez Goldman Sachs.

Feroli, de JP Morgan, s'attend à ce que le Build Back Better soit de l'ordre de 1000 à 1500 milliards de dollars. Il a également déclaré que l'impact des événements récents serait plus étendu que les mesures d'urgence prises pour lutter contre le Covid-19 (en référence à la loi CARES et au plan de sauvetage américain).

Mais tout n'est pas rose. Les analystes estiment que les consommateurs sont plus susceptibles de tolérer l'impact de la prolongation du crédit d'impôt pour enfants de l'année prochaine que de rendre les routes plus fluides ou d'augmenter le nombre de stations de recharge pour les voitures électriques. Il pourrait s'écouler des années avant que la plupart des Américains ordinaires ne conduisent des voitures électriques.

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Une ceinture, une route

La première route de la soie a vu le jour lors de l'expansion vers l'ouest de la dynastie chinoise Han (206 av. J.-C. - 220 apr. J.-C.), qui a établi des réseaux commerciaux à travers l'Asie centrale actuelle (Afghanistan, Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan), ainsi qu'à travers l'Inde et le Pakistan actuels au sud. Ces routes s'étendaient sur plus de quatre mille kilomètres jusqu'en Europe.

Le président Xi a annoncé cette initiative lors de ses visites officielles au Kazakhstan et en Indonésie en 2013. Le plan se compose de deux parties: la ceinture économique terrestre de la route de la soie et la route de la soie maritime. Les deux projets ont d'abord été désignés sous le nom d'initiative "Une ceinture, une route", avant de devenir l'initiative "La ceinture et la route".

La vision de M. Xi prévoyait un vaste réseau de chemins de fer, de pipelines énergétiques, d'autoroutes et de passages frontaliers ordonnés, à la fois vers l'ouest - à travers les anciennes républiques soviétiques montagneuses - et vers le sud, en direction du Pakistan, de l'Inde et du reste de l'Asie du Sud-Est. Selon M. Xi, un tel réseau permettrait d'étendre l'utilisation internationale de la monnaie chinoise, le yuan, et de "supprimer le goulet d'étranglement de la connectivité asiatique".

Les motivations de la Chine pour cette initiative sont à la fois géopolitiques et économiques. Xi a promu l'idée d'une Chine plus affirmée, à un moment où le ralentissement de la croissance et les relations commerciales difficiles avec les États-Unis ont contraint les dirigeants du pays à ouvrir de nouveaux marchés pour leurs produits.

Dans le même temps, la Chine souhaite renforcer les liens économiques mondiaux avec ses régions occidentales, qui ont été historiquement négligées. La promotion du développement économique dans la province occidentale du Xinjiang, où un mouvement séparatiste est en plein essor, est une priorité absolue, tout comme la sécurisation des approvisionnements énergétiques à long terme en provenance d'Asie centrale et du Moyen-Orient, en particulier via des routes que l'armée américaine ne peut pas bloquer.

L'initiative "Une ceinture, une route" a également suscité de l'opposition. Pour certains pays qui s'endettent lourdement pour financer la modernisation de leurs infrastructures, l'argent investi dans le projet est perçu comme un potentiel cadeau empoisonné. Selon certains experts, le recours à des prêts à faible taux d'intérêt plutôt qu'à des subventions est une opération trop risquée. Certains investissements dans le projet ont fait l'objet d'appels d'offres non transparents et ont nécessité la participation d'entreprises chinoises. En conséquence, les entrepreneurs ont gonflé les coûts, ce qui a conduit à l'annulation de projets et à des réactions politiques négatives.

Les États-Unis partagent les inquiétudes de certains pays quant aux intentions de la Chine. Le développement des économies de l'Asie du Sud et de l'Asie centrale est un objectif de longue date des États-Unis, qui s'est intensifié depuis le début de la guerre menée par les États-Unis en Afghanistan et le pivot vers l'Asie du président Barack Obama.

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L'Inde a tenté de convaincre les pays que le JCPOA est un plan de domination en Asie, mettant en garde contre ce que certains analystes ont appelé la stratégie géoéconomique du "collier de perles", selon laquelle la Chine crée un fardeau de dettes insoutenable pour ses voisins de l'océan Indien afin de prendre le contrôle de la région. 

Tokyo poursuit une stratégie similaire, en conciliant son intérêt pour le développement des infrastructures régionales et ses soupçons de longue date à l'égard de la Chine.

Plusieurs pays d'Europe centrale et orientale financent l'OSDP, et des États d'Europe occidentale comme l'Italie, le Luxembourg et le Portugal ont même signé des accords de coopération préliminaires sur des projets de l'OSDP. Leurs dirigeants considèrent la coopération comme un moyen d'attirer les investissements chinois et d'améliorer potentiellement la qualité des offres de construction compétitives des entreprises européennes et américaines.

D'autres pays non membres de l'UE sont d'accord avec cette politique. Le président français Emmanuel Macron a appelé à la prudence, déclarant lors d'un voyage en Chine en 2018 que l'OPOP pourrait faire des pays partenaires des "États vassaux".

Moscou est devenu l'un des partenaires les plus enthousiastes de l'OPOP, bien qu'il ait initialement réagi avec prudence à la déclaration de Xi, craignant que les plans de Pékin n'éclipsent la vision de Moscou d'une "Union économique eurasienne" et n'empiètent sur sa sphère d'influence traditionnelle.

Toutefois, les relations de la Russie avec l'Occident s'étant détériorées, le président Vladimir Poutine a décidé, selon les analystes, de lier sa vision eurasienne à l'initiative chinoise.

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L'Europe unie

Le réseau transeuropéen de transport (RTE-T) est un réseau de routes, de voies ferrées, d'aéroports et d'infrastructures hydrauliques dans l'Union européenne. Le RTE-T fait partie d'un réseau transeuropéen (RTE) plus vaste, comprenant le réseau de télécommunications (eTEN) et le projet de réseau énergétique (RTE-E ou Ten-Energy).

Les orientations du RTE-T ont été initialement adoptées le 23 juillet 1996 par la décision n°1692/96/CE du Parlement européen et du Conseil de la Communauté sur les orientations pour le développement d'un réseau transeuropéen de transport. En mai 2001, le Parlement européen et le Conseil ont adopté la décision n°1346/2001/CE modifiant les orientations RTE-T pour les ports maritimes et intérieurs.

En avril 2004, le Parlement européen et le Conseil ont adopté la décision n°884/2004/CE modifiant la décision n°1692/96/CE sur les orientations communautaires pour le développement du réseau transeuropéen de transport. La révision d'avril 2004 a constitué un changement plus fondamental dans la politique du RTE-T, conçu pour prendre en compte l'élargissement de l'UE et les changements subséquents dans les flux de transport.

En 2017, il a été décidé que les réseaux transeuropéens de transport seraient étendus à l'Europe de l'Est pour inclure les États membres du partenariat oriental. L'extension la plus à l'est du réseau transeuropéen de transport atteindra l'Arménie en février 2019.

Axes prioritaires et projets de développement:

Corridor Baltique-Adriatique (Pologne-République tchèque/Slovaquie-Autriche-Italie) ;

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Corridor nordique-baltique (Finlande-Estonie-Lettonie-Lituanie-Pologne-Allemagne-Pays-Bas/Belgique) ;

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Corridor méditerranéen (Espagne-France-Italie du Nord-Slovaquie-Croatie-Hongrie) ;

Corridor Est/Est-Méditerranéen (Allemagne-République Tchèque-Hongrie-Roumanie-Bulgarie-Grèce-Chypre) ;

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Corridor Scandinavie-Méditerranée (Finlande-Suède-Danemark-Allemagne-Autriche-Italie) ;

Corridor rhénan-alpin (Pays-Bas/Belgique-Allemagne-Suisse-Italie) ;

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Corridor Lisbonne-Strasbourg (Portugal-Espagne-France) ;

Corridor mer du Nord-Méditerranée (Irlande-Royaume-Uni-Pays-Bas-Belgique-Luxembourg-Sud de la France, transformé en Irlande-Belgique-Pays-Bas et Irlande-France en raison du Brexit) ;

Corridor Rhin-Danube (Allemagne-Autriche-Slovaquie-Hongrie-Roumanie, axe de la voie navigable) ;

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Corridor Strasbourg-Danube (Strasbourg-Mannheim-Francfort-Würzburg-Nürnberg-Regensburg-Passau-Wels/ Linz-Vienne-Budapest-Arad-Brasov-Bucharest-Constanta-Sulina).

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Le RTE-T comprend deux niveaux : un réseau global et un réseau central. Le réseau central doit être achevé au plus tard en 2030, et le réseau global en 2050.

Dix corridors ont été identifiés comme étant le réseau central, reflétant les principaux itinéraires interurbains du marché national. Six de ces corridors traversent l'Allemagne. Ils sont multimodaux par nature et sont conçus, entre autres, pour renforcer les liaisons transfrontalières au sein de l'Union.

Le réseau global comprend l'infrastructure ferroviaire, l'infrastructure fluviale, l'infrastructure de transport routier, l'infrastructure maritime et les autoroutes, l'infrastructure de transport aérien ainsi que l'infrastructure de transport multimodal. Le réseau central fait partie du réseau global et contient ses nœuds et connexions les plus importants d'un point de vue stratégique. L'ensemble du réseau de voies navigables fait partie du réseau central.

Conformément au règlement RTE, chaque corridor se voit attribuer un coordinateur de l'UE. Il existe en outre des coordinateurs pour les autoroutes de la mer et le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS). En consultation avec les États membres, les coordinateurs élaborent des plans de travail pour les corridors et contrôlent leur mise en œuvre.

Le nouveau règlement (CE) n°2021/1153 du Connecting Europe Facility (CEF2), adopté le 7 juillet 2021, définit le niveau de financement de certaines mesures/projets. Dans certains États, comme l'Allemagne, le financement peut couvrir jusqu'à 50% des coûts.

Toutefois, les récents développements liés à la crise croissante de l'économie de l'UE ont quelque peu modifié ces plans ambitieux.

L'occidentalisme, maladie de la civilisation russe 

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L'occidentalisme, maladie de la civilisation russe 

Arkadiy Minakov

Source: https://katehon.com/en/article/westernism-disease-russian-civilization

Septième session du Conseil philosophique, Historiosophie de la Voie russe

Tout récemment, sur la chaîne de télévision Spas, deux personnes très intelligentes discutaient ensemble - le prédicateur Andrei Tkatchev et l'historien et publiciste Felix Razumovsky. Au cours de cette conversation, la thèse suivante a été avancée: malheureusement, les Russes modernes ont détruit leur identité nationale. Celle-ci s'est perdue dans les bouleversements et les catastrophes du 20ème siècle. Aujourd'hui, nous pouvons parler non pas tant d'une conscience nationale que d'une subconscience : quelque chose relevant du réflexe, semblable au mouvement des bras et des jambes d'un bébé, à son babillage, etc. Il me semble que c'est une métaphore qui fonctionne, et je vais essayer d'expliquer pourquoi.

Il n'y a pas si longtemps, j'ai organisé un séminaire sur l'occidentalisme avec un groupe de jeunes gens intéressés, très actifs et qui réfléchissaient. J'ai essayé de sélectionner pour eux des articles plus ou moins "digestes" d'auteurs modernes - des années 1990, du début des années 2000, peut-être des années 2010 - qui traitent de ce sujet, mais d'une manière critique. La base de données électronique la plus réputée, E-library, m'a fourni plusieurs centaines de titres. Imaginez mon étonnement lorsque j'ai découvert que ces centaines d'articles étaient rédigés dans des perspectives absolument non patriotiques. Cela signifie que les représentants de la communauté universitaire, qui sont censés être les sujets les plus conscients dans la formation de la conscience nationale, constituent à cet égard une aire sociale absolument occidentalisée. Je me suis rendu compte que notre société traite l'occidentalisme de manière très, très léthargique lorsque j'ai commencé à compiler une revue historiographique. À proprement parler, l'attitude critique à l'égard de l'occidentalisme n'existe que chez les publicistes, tandis que la classe universitaire est dominée par un discours absolument occidentalisé. J'avais l'intention d'écrire un essai sur ce que l'occidentalisme signifiait en Russie et avant en Rus', et sur ce qu'il avait de négatif. J'aimerais partager ces réflexions avec vous. Encore une fois, il n'existe pratiquement aucune recherche critique moderne sur l'occidentalisme russe.

Commençons par le 17ème siècle. Dans son traité intitulé "La politique", Yuriy Krizhanich - un catholique, un Croate, un partisan de l'unité slave, l'un des premiers panslavistes - introduit et définit le concept d'"extranéité" (de xénomanie). "La xénomanie - l'extranéité - est un amour frénétique pour les choses et les peuples autres, une confiance excessive et frénétique dans les étrangers. Ce fléau mortel a infecté tous nos peuples". Il s'agit évidemment des Slaves du 17ème siècle, mais aussi des Russes. En d'autres termes, les contacts plutôt intensifs entre le sommet de la strate dirigeante et les représentants d'États étrangers au 17ème siècle ont entraîné un affaiblissement considérable des réactions défensives, en premier lieu, du pouvoir suprême. Le même Krizhanich écrit : "Il n'est pas surprenant que l'extranéité de tant de nos dirigeants les ait rendus fous et les ait trompés". Selon lui, les intérêts, les idéologies et les coutumes de l'étranger sont devenus plus importants pour les Russes que les leurs. Je citerai Krizhanich: "Nous octrouons le plus grand honneur et les plus grands revenus aux étrangers... En nous aidant, ils nous ruinent... Ils sèment la discorde... Ils nous offensent par leur commerce... Ils concluent des accords frauduleux... Ils trompent par des cadeaux... Les avantages sont faux, coûteux, malveillants... Les marchands nous poussent à la pauvreté... Ils nous font honte par leurs moqueries et leurs abus... Ils sèment la confusion et l'hérésie et font de nous des esclaves... Ils jouissent d'une vie tranquille, nous laissant l'esclavage et le travail... Vaincus par les armes, ils gagnent par les discours... Ils concluent des alliances qui nous nuisent... Ils concluent avec nous des traités clownesques et ridicules... Ils se moquent de notre amour et de notre humanité... Ils nous trompent sous couvert de médiation... À notre grande honte, ils acceptent notre citoyenneté... Ils enseignent le luxe, les vices, les péchés et les superstitions... Ils nous séduisent par des enseignements vains et faux... Les hérétiques, pour discréditer la vraie foi, blasphèment notre peuple et exagèrent ses péchés..." Comme on peut le constater, la situation n'a guère évolué depuis la seconde moitié du 17ème siècle. Au contraire, on peut dire qu'elle s'est considérablement détériorée.

L'époque de Pierre le Grand. Quelques décennies après La politique de Krizhanich, Pierre Ier, selon la légende, a formulé l'objectif de ses réformes comme suit: "Nous avons besoin de l'Europe pendant plusieurs décennies, puis nous devons lui tourner le dos". Aujourd'hui, on peut dire très clairement qu'il s'agissait d'une déclaration vide et abstraite. En réalité, la passion de Pierre pour les "curiosités" étrangères (selon l'expression de Klioutchevsky) s'est révélée être non seulement un emprunt d'innovations indéniablement nécessaires pour la Russie - science européenne, marine, organisation de l'armée, etc. - mais aussi une augmentation spectaculaire du rôle des étrangers à la cour de Russie. La perte d'une compréhension sobre des intérêts nationaux de la Russie dans la politique étrangère, qui s'est avérée être largement subordonnée aux intérêts des États étrangers pendant une longue période. L'abolition des traditions religieuses et culturelles. L'asservissement de la paysannerie à une échelle sans précédent. Et, surtout, la création d'une classe influente de personnes instruites dont l'objectif principal était de transplanter le modèle européen de civilisation sur le sol culturel et historique russe. D'une certaine manière, on peut parler d'une obsession de l'Occident au sens propre. "L'étranger est devenu une constante de la vie russe".

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Un siècle après le début de la transformation du pays par Pierre le Grand, les premières réactions à ce phénomène ont commencé à se manifester. Dans sa célèbre Note sur la vieille et la nouvelle Russie, Nikolaï Karamzine critique l'activité de Pierre. Karamzin commence à parler du fait que Pierre détruit les coutumes, de l'imitation de Pierre, du cosmopolitisme, du manque d'éducation nationale et de la mauvaise influence de l'environnement étranger. Les réformes de Pierre sont considérées par Karamzin comme le fruit de l'imagination débordante d'un homme qui, ayant vu l'Europe, veut faire de la Russie une Hollande. Karamzin a également noté des éléments tels que la voie violente de l'européanisation - la torture et les exécutions, qui ont servi de moyen de transformation de notre État. En même temps, Karamzin a été l'un des premiers conservateurs russes à souligner qu'un État devait emprunter des informations utiles à un autre et ne pas, en principe, suivre ses coutumes. Il ne comprenait pas comment les vêtements, la nourriture et la barbe des Russes pouvaient interférer avec la création d'écoles, et reprochait même à Pierre la division fatale du peuple entre la classe la plus élevée, celle des "étrangers", et la classe la plus basse, celle des gens du peuple. Il écrit : "Depuis l'époque de Pierre le Grand, les classes sociales supérieures se sont séparées des classes inférieures. Le paysan, le philistin et le marchand russes voyaient les Allemands dans les nobles russes, au détriment de l'unanimité fraternelle de la société". Karamzin a été l'un des premiers à dire que l'abolition du patriarcat et le rejet de leurs propres traditions étaient au cœur de tous ces phénomènes négatifs.

Sous le règne de Nicolas Ier, cet argument a été repris par les slavophiles. Il est intéressant de noter qu'aucun d'entre eux n'a nié la nécessité de cet apprentissage de l'Occident; ils n'ont condamné que l'"extranéité" qui a conduit à la division du monde russe, à la destruction des traditions culturelles russes et à la dégradation morale. Ils ont constaté que le revers de ce phénomène était, comme on dit aujourd'hui, la russophobie interne. Une partie de la classe cultivée s'est mise à haïr les siens et à aimer tous les étrangers.

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C'est en 1812 qu'eut lieu le premier grand essor de la pensée nationale russe. À cette époque, les conservateurs qui ont lutté contre la gallomanie ont été les vainqueurs. Le "Parti russe" a contribué à une puissante vague d'énergie nationale. Des personnalités telles que l'amiral Alexander Chichkov et le général Fiodor Rostopchine ont joué un rôle exceptionnel dans la guerre patriotique de 1812. La pensée russe commence à réfléchir intensément à l'identité russe, aux particularités qui la distinguent de l'Europe. Métaphoriquement, l'Europe et la Russie commencent à être considérées comme des parties d'une galaxie chrétienne autrefois unie, mais qui commence à s'éloigner l'une de l'autre. La thèse selon laquelle "la Russie n'est pas l'Europe" gagne du terrain dans la pensée russe. C'est l'historien Mikhaïl Pogodine qui en a jeté les bases. Il s'agit d'une proclamation du début d'une étape fondamentalement nouvelle dans l'histoire russe, d'un signe de la supériorité de la Russie sur l'Occident. Je dois dire que non seulement les idéologues officiels comme Sergei Uvarov ou Stepan Chevyrev étaient d'accord avec Pogodine, mais aussi de nombreux représentants de la couche intellectuelle libre comme Lioubomoudrov, Venevitinov, Odoïevsky, le Pouchkine de la maturité, Gogol, Tioutchev et les Slavophiles le soutenaient également. La question des différences entre l'histoire russe et l'histoire de l'Europe occidentale a été soulevée clairement et sans équivoque. Tous participent activement à la russification de la culture. C'est l'époque du passage massif de l'élite du français au russe. L'ère de l'apprentissage et de l'imitation a pris fin dans une certaine mesure, et la science et la culture russes ont commencé à porter des fruits assez mûrs.

La vie russe au milieu du 19ème siècle est marquée par la lutte entre deux processus diamétralement opposés : la prise de conscience et la maturation de la civilisation russe originale et la négation de la tradition et de l'héritage culturel russes. Le premier se manifeste dans diverses sphères publiques, culturelles et gouvernementales. La culture russe s'est retournée vers l'héritage patristique byzantin, après ce que Florovsky a appelé la "captivité occidentale". Le phénomène du désert d'Optina, les œuvres de la maturité de Pouchkine, Gogol, Dostoïevski, les slavophiles (Danilevski, Leontiev, etc.), la formation d'une pensée religieuse et philosophique russe originale, la création d'un style russe, et bien d'autres choses encore ont contribué à ce processus. Tout cela est resté en suspens en 1917, parce qu'au même moment, un processus fondamentalement différent était en cours. Au sein des diverses tendances de l'occidentalisme (que j'ai appelées gallomanie, mais il y avait d'autres formes d'"extranéité" radicale), une sorte d'anti-système s'est développé, qui niait tout ce qui était lié aux traditions russes. Au cours de ce processus, les sentiments et les idées qui considéraient la Russie historique comme un objet de destruction inconditionnelle, ou du moins de transformation radicale, ont pris le dessus. Les partisans de ce point de vue soulignent le retard de la Russie par rapport à la civilisation occidentale de référence.

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La première lettre philosophique de Tchaadaïev est le premier manifeste de ce type d'attitude. Si l'on considère ce document indépendamment de l'œuvre principale de Tchaadaïev, qui n'a été connue que dans les années 30 du 20ème siècle, on peut être d'accord avec l'historien de la deuxième vague d'émigration Nikolai Oulianov, qui donne son interprétation de cette lettre philosophique. Il écrit : "La Russie est un bâtard de naissance, elle est un sous-homme parmi les peuples. Quiconque n'a pas remarqué ces déclarations n'a rien compris au sujet des "lettres philosophiques". La conscience nationale russe, dans le processus d'amélioration de soi, a subi, et continuera probablement à subir, la plus grande abnégation, mais passer par là ne signifie pas perdre toute conscience de soi...". Pardonnez à Oulianov son ignorance des lettres ultérieures de Tchaadaïev. Il parle de la perception de la première lettre philosophique par les élites "éduquées" de l'époque. Elles l'ont perçue comme un renoncement national, qui s'est avéré être l'alpha et l'oméga de l'occidentalisation. On peut également rappeler la formule poétique blasphématoire de l'un des non-retournés du royaume de Nicolas, devenu moine catholique, Vladimir Petcherine: "Qu'il est doux de haïr sa terre natale, // Et d'attendre avec impatience sa destruction ! // Et de discerner dans sa ruine // L'aube d'une nouvelle vie pour le monde".

À ces sentiments se sont ajoutées les idées socialistes, qui ont commencé à pénétrer activement en Russie dans les années 40 du 19ème siècle et qui supposaient l'élimination non seulement de la propriété privée, mais aussi de l'État national, de la religion, de la famille et de l'individualité. Un mélange combustible a été créé, une "concoction" idéologique extrêmement dangereuse qui a été perçue sans aucun esprit critique. La mise en œuvre de ces idées sur le sol russe devait conduire à une sorte de semblant de Royaume de Dieu sur terre. On peut dire qu'au cours de la seconde moitié du 19ème siècle et au début du 20ème siècle, les idéologies de nature et de genèse résolument occidentales, à savoir le libéralisme, le marxisme, le populisme, etc. ont dominé. Elles ont monopolisé le discours public. Les médias ont également soutenu ces idées. La situation était similaire dans de nombreux départements universitaires. Les publications conservatrices qui tentaient de défendre ce qu'elles appelaient les intérêts nationaux et appelaient au développement créatif de la tradition nationale, à de rares exceptions près, menaient une existence misérable, étaient soumises à la déformation, à la terreur morale et au harcèlement, et étaient en fait largement marginalisées. Bien sûr, il s'agissait d'une crise.

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L'État monarchique russe n'était en rien distinctif, conservateur, etc. Les conservateurs n'ont eu qu'un impact épisodique sur la politique de l'État, mais il ne faut pas en exagérer l'importance. En 1917, ce qui devait arriver arriva. Divers partis et mouvements politiques d'orientation occidentale ont bénéficié d'une occasion sans précédent de mettre en œuvre leurs projets en Russie avec le soutien des forces politiques occidentales. Les mois de février et d'octobre 1917 marquent la réalisation de ces projets. On peut dire que tous les aspects négatifs des événements de 1917-1953 sont largement dus à cette circonstance.

Il convient de noter que depuis les années 1930, une sorte de coup d'État pseudo-conservateur et traditionaliste s'est produit au sein du système lui-même. Après la destruction politique puis physique d'une partie importante de la gauche, le patriotisme soviétique, les appels (notamment dans la propagande militaire) aux faits du passé historique, d'une part, et aux images des grands ducs, des tsars et des généraux (censurées par le parti dans une certaine mesure), d'autre part, sont devenus des éléments importants du pseudo-conservatisme conjoncturel de l'époque. Néanmoins, le déni d'un certain nombre de valeurs fondamentales, classiques et traditionnelles prévalait toujours. Par exemple, les droits de propriété et l'État de droit ont été niés ; il y a eu une lutte constante contre la religion ; le principe de l'internationalisme a été proclamé, etc.

D'une manière ou d'une autre, ces processus se sont approfondis. Dans les années 1960, une réaction traditionaliste a vu le jour. Le parti russe qui met au premier plan la protection des droits du peuple russe, des traditions et de la culture, la primauté des intérêts nationaux sur les intérêts internationaux, etc. est apparu. Les écrivains russes glorifient la campagne russe. La partie illégale du parti russe fait appel à la tradition culturelle, intellectuelle et religieuse russe prérévolutionnaire. Toutefois, ces tendances n'ont eu aucune chance de se concrétiser dans la sphère politique et ont fait l'objet de persécutions à la fin du règne de Youri Andropov. Le terrain était préparé pour la mise en œuvre d'un autre projet occidental.

Le triomphe d'un projet libéral-occidental, mondialiste de surcroît, c'est ce qui s'est passé en 1991. Il y a eu un autre désastre, une fracture civilisationnelle. Le peuple russe, dont une grande partie se trouvait en dehors de la Fédération de Russie, a été divisé. En conséquence, un changement d'identité s'est produit pendant la période soviétique, une partie très importante des Russes vivant sur le territoire de l'Ukraine et de la Biélorussie.

Nous pouvons constater que le plus grand danger actuel est cette maladie de la nation russe qu'est l'"ukrainisme". Mais il s'agit également d'une sorte d'occidentalisme "paysan" vulgaire qui s'est radicalement éloigné de ce qui développait l'identité du monde russe et s'est appuyé sur le choix européen, la russophobie radicale et la pratique des collaborateurs nazis. Maintenant que l'Ukraine est devenue anti-russe, c'est ce que nous voyons.

Le phénomène que j'ai tenté de décrire s'est inscrit dans une tradition politique et culturelle. C'est l'occidentalisme qui produit les formes les plus dangereuses et les plus stimulantes d'"extranéité" politique et culturelle et de conflits, qui ne sont que partiellement contenus pour le moment. On peut dire que pour la classe créative au pouvoir aujourd'hui, les leçons d'histoire sont pour l'avenir en raison de leurs intérêts existentiels vitaux. C'est pourquoi nous devons nous concentrer sur la compréhension de ce phénomène. En tant qu'historien, je peux dire qu'il n'existe pas une seule monographie, pas une seule collection moderne satisfaisante d'articles dans lesquels l'occidentalisme est analysé de manière critique. Il n'y a pas d'histoire cohérente de ce phénomène. Je voudrais souligner une évidence : il est impossible de remettre en question la nécessité même d'étudier les réalisations de l'Occident et de s'en inspirer. Ce sont des procédures absolument nécessaires et normales. Sans elles, une grande partie de l'humanité ne pourrait pas vivre. La Russie, comme tout autre pays, doit beaucoup à l'apprentissage, mais il est également évident que les emprunts dans les domaines scientifique, technique et culturel doivent avant tout renforcer la Russie et sa civilisation, et non l'affaiblir et la diviser dans l'intérêt de rivaux géopolitiques. Seule une bonne compréhension de ce phénomène nous permettra de formuler une stratégie claire de développement de la Russie dans tous les domaines vitaux. C'est l'une des principales tâches de notre communauté intellectuelle moderne.

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dimanche, 02 avril 2023

La leçon géopolitique de l'Alaska dans les relations russo-américaines

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La leçon géopolitique de l'Alaska dans les relations russo-américaines

Par Emanuel Pietrobon (2021)

Source: https://osservatorioglobalizzazione.it/osservatorio/la-lezione-geopolitica-dellalaska/

Il fut un temps, lointain, où l'on parlait russe en Alaska. Tout a pris fin lorsque les Romanov, convaincus que cette région était dépourvue de ressources, ont décidé de la vendre aux États-Unis pour un prix ridicule. Ils étaient loin de se douter que cette transaction changerait à jamais le cours de l'histoire, au détriment de la Russie et en faveur des États-Unis.

Entre 1830 et 1835, le sociologue français Alexis de Tocqueville a publié "De la démocratie en Amérique", un essai en deux volumes visant à expliquer les raisons de l'enracinement de la culture démocratique aux États-Unis. Tocqueville est allé bien au-delà d'une simple analyse de la société américaine, car dans ses conclusions, il a consacré des pages à des prédictions personnelles sur les tendances futures aux États-Unis et dans les relations internationales. Selon lui, les États-Unis et la Russie, bien que géographiquement éloignés l'un de l'autre et jusqu'à présent en bons termes, rivaliseront à l'avenir pour "le destin du monde" en raison de leur étendue territoriale, de leurs ambitions intrinsèquement antithétiques et de leurs identités aux antipodes l'une de l'autre.

Le livre fut un succès, mais la prophétie fut ignorée et oubliée pendant un siècle. Elle n'a été récupérée et popularisée qu'après la Seconde Guerre mondiale, avec l'émergence de la guerre froide, la confrontation globale entre le monde dit libre, dirigé par les États-Unis, et l'empire communiste, dirigé par l'Union soviétique. La rivalité géopolitique russo-américaine a ensuite progressivement réapparu vingt ans après la fin de la guerre froide, prenant la forme d'une véritable guerre froide 2.0 au tournant de la fin des années 2010 et du début des années 2020.

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Pourtant, les relations entre la Russie et les États-Unis n'ont pas toujours été caractérisées par des sentiments mutuels de méfiance et de défiance, comme le montre bien la vente de l'Amérique russe (Russkaya Amyerika), ou de l'actuel Alaska. Ce que le tsar considérait à l'époque comme une affaire commode et prévoyante pour la Russie est aujourd'hui lue et jugée par nous, la postérité, pour ce qu'elle a réellement été : la pire transaction de l'histoire. Un mauvais accord dicté par une combinaison d'intérêts contingents et d'erreurs de calcul qui a privé la Russie non seulement d'un territoire riche en ressources naturelles, mais aussi d'un avant-poste géostratégique qui allait s'avérer crucial, dans les années à venir, pour exercer une pression sur les États-Unis et, sans doute, changer le cours de l'histoire.

L'étude de l'affaire de l'Alaska est indispensable pour tous ceux qui entendent raisonner en termes géopolitiques. En effet, il s'agit d'une source d'apprentissage précieuse et inépuisable qui, si elle est correctement exploitée, peut aider les stratèges et les géopoliticiens à ne pas agir en fonction des impulsions et des circonstances, mais selon un autre critère: la rentabilité à long terme.

L'histoire de l'Amérique russe est la suivante: la première colonie a été installée en 1784 et a servi de tête de pont à la Compagnie russo-américaine (RAC) pour établir des comptoirs commerciaux dans les îles Aléoutiennes, dans le Pacifique et sur la côte ouest. Seuls les explorateurs-colonisateurs de la RAC semblaient conscients du potentiel de l'expansion impériale extra-asiatique, c'est-à-dire dans le Pacifique et les Amériques. Les tsars Alexandre Ier et Nicolas Ier sont respectivement à l'origine du retrait d'Hawaï en 1817 et de la vente de Fort Ross (en Californie) en 1841. Deux actions dictées par le désir de se lier d'amitié avec les États-Unis et qui, loin d'améliorer l'image de la Russie à leurs yeux, produisirent l'effet inverse: les Américains y virent l'occasion d'exploiter l'attitude docile de la famille impériale pour expulser définitivement les Russes du continent américain. C'est ainsi qu'en 1857, malgré l'opposition de la RAC, les diplomaties secrètes des deux empires se mettent au travail pour discuter de la question de l'Alaska.

Les négociations ont duré une décennie et se sont terminées le 30 mars 1867. Ce jour-là, l'ambassadeur russe Eduard de Stoeckl et le secrétaire d'État américain William Seward signent le document qui sanctionne le transfert de propriété de l'Alaska pour 7,2 millions de dollars de l'époque, soit environ 121 millions de dollars d'aujourd'hui. Un chiffre risible, aujourd'hui comme à l'époque: 2 cents par acre, 4 dollars par kilomètre carré. En Russie, malgré le caractère manifestement frauduleux de l'accord de cession, l'événement est célébré comme un succès diplomatique qui apportera d'énormes bénéfices: l'argent américain améliorera le budget public, le Kremlin pourra consacrer davantage de ressources (humaines et économiques) aux campagnes expansionnistes en Europe et en Asie, et, de plus, il s'est libéré d'un territoire, l'Alaska, considéré comme aussi stérile que dépourvu de ressources naturelles. Enfin, il y avait l'espoir (mal placé) qu'un tel geste conduirait à la naissance d'une amitié durable avec les Etats-Unis, peut-être dans une tonalité anti-britannique.

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En réalité, la vente de l'Alaska n'a produit ni nourri aucun des avantages annoncés :

    - Le budget du gouvernement et la situation économique dans son ensemble ont continué à se détériorer au cours des décennies suivantes, donnant lieu à une vague de protestations anti-tsaristes et de soulèvements populaires dont l'aboutissement ultime a été la révolution d'octobre. Pour comprendre pourquoi l'Alaska n'a pu améliorer son budget de quelque manière que ce soit, il suffit de regarder les chiffres: le budget impérial de l'époque était d'environ 500 millions de roubles, avec une dette de 1,5 milliard, et le montant reçu était l'équivalent d'environ 10 millions de roubles.

    - Dix ans après l'achat, les colons américains ont découvert les premiers immenses gisements de ressources naturelles, comme le pétrole, l'or et d'autres métaux précieux. Cette découverte a démenti la fausse croyance selon laquelle ils avaient vendu une terre stérile et dépourvue de ressources.

    - La thèse selon laquelle la cession de l'Amérique russe libérerait les ressources humaines et économiques nécessaires aux campagnes en Europe de l'Est, en Asie centrale et en Sibérie est également fausse. Tout d'abord, les coûts d'entretien de la colonie sont supportés par la RAC. Ensuite, sur les 40.000 personnes vivant en Alaska à l'époque de l'accord, la grande majorité était des Amérindiens.

    - Enfin, l'histoire allait rapidement démentir le motif principal de l'opération en Alaska : pas d'alliance entre les deux empires, mais une plus grande discorde.

Le retrait d'Hawaï est, si possible, encore plus grave que l'affaire de l'Alaska: la Seconde Guerre mondiale a montré l'importance de l'archipel pour l'hégémonie militaire sur le Pacifique et l'Extrême-Orient. Si l'Empire russe avait conservé le contrôle d'Hawaï, sans céder l'Alaska, le cours de l'histoire aurait été différent. Imaginer cette uchronie n'est pas difficile :

    - La crise des missiles ne serait pas née à Cuba, mais en Alaska.

    - Les États-Unis n'auraient pas pu prétendre à une quelconque position hégémonique dans le Pacifique.

    - Ils n'auraient pas eu accès à l'Arctique, avec toutes ses implications et conséquences.

    - La qualité de l'endiguement antisoviétique en Eurasie aurait souffert du facteur Alaska, car le Kremlin aurait pu mettre en œuvre un contre-endiguement efficace et étouffant via l'Alaska, Cuba, Hawaï, avec pour résultat final et global la création d'un cordon d'encerclement autour des États-Unis.

L'Alaska nous enseigne que même des territoires apparemment sans importance d'un point de vue stratégique au cours de la première période peuvent s'avérer cruciaux pour perturber et déterminer la structure du pouvoir au cours de la deuxième période. Les conserver à tout prix est donc un impératif stratégique. Comment la connaissance d'une zone peut-elle s'avérer utile tôt ou tard ? Il est vrai que l'avenir est imprévisible et qu'un océan sépare la prévoyance de la clairvoyance, mais certaines tendances peuvent être décryptées : Tocqueville docet.

L'Alaska enseigne aussi que les coûts du maintien d'une sphère hégémonique, d'un espace vital, aussi élevés soient-ils, sont toujours récompensés à moyen et long terme. Les disparités négatives entre les coûts et les bénéfices sont en effet typiques et physiologiques à court terme et tendent à s'estomper progressivement, bien sûr, au fur et à mesure que les bénéfices se répercutent à moyen et long terme dans les dimensions diplomatiques, économiques, géopolitiques et militaires. Dans le cas qui nous occupe, considérez le fait que les États-Unis ont récupéré la totalité des sommes dépensées en Alaska en moins de 20 ans, gagnant cent fois plus que l'argent déboursé en 1867 - grâce à l'exploitation des ressources naturelles - et que, grâce à l'expulsion totale des puissances européennes du continent, ils ont pu concentrer toutes les ressources sur l'hégémonisation de l'Amérique latine.  

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Si les Russes étaient restés en Alaska, les Américains n'auraient pas pu s'étendre avec la même rapidité dans le sous-continent ibéro-américain. Ils auraient dû prêter attention, encore et encore, au front nord. De plus, l'Alaska garantissait aux Etats-Unis un avant-poste dans l'Arctique, un balcon sur le stratégique détroit de Béring, légitimant leurs prétentions et leurs ambitions hégémoniques au pôle Nord - qui prendra de plus en plus d'importance dans les années à venir, changement climatique oblige. L'affaire de l'Alaska a finalement aidé les États-Unis à devenir la première puissance mondiale, leur permettant d'ériger une barrière de protection pour défendre les Amériques, tout en emprisonnant la Russie en Eurasie, en la figeant dans une dimension continentale, dans un état tellurocratique, et en permettant son encerclement multifrontal. Toute puissance, comme la Russie en son temps, est contrainte de faire des choix difficiles concernant le sort de territoires apparemment sans importance. Dans le cadre de la prise de décision, afin d'éviter de commettre des erreurs fatales, il est impératif de se rappeler que l'avenir est aussi imprévisible que l'histoire est sévère. Et s'il est vrai que Historia magistra vitae est, comme le disait Cicéron, alors il y aura toujours quelque chose à apprendre de l'Alaska.

À propos de l'auteur / Emanuel Pietrobon

Né en 1992, Emanuel Pietrobon est diplômé en sciences internationales, du développement et de la coopération à l'université de Turin, avec une thèse expérimentale intitulée "The Art of Covert Warfare", axée sur la création d'un chaos contrôlé et la défense contre celui-ci. Au sein de la même université, il se spécialise dans les études régionales et globales pour la coopération au développement - Focus former Soviet World. Ses principaux domaines d'intérêt sont la géopolitique de la religion, les guerres hybrides et le monde russe, ce qui l'a amené à étudier, travailler et faire de la recherche en Pologne, en Roumanie et en Russie. Il écrit et collabore avec plusieurs publications, dont Inside Over, Opinio Juris - Law & Political Review, Vision and Global Trends, ASRIE, Geopolitical News. Ses analyses ont été traduites et publiées à l'étranger, notamment en Bulgarie, en Allemagne, en Roumanie et en Russie.

Censure: la métaphysique de la culture souveraine

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Censure: la métaphysique de la culture souveraine

Alexandre Douguine

Source: https://katehon.com/ru/article/cenzura-metafizika-suverennoy-kultury

La censure libérale dans l'Occident moderne

Le thème de la censure n'est pas seulement d'une grande actualité pour notre société (surtout dans le contexte de l'Opération militaire spéciale en Ukraine), il est aussi philosophiquement fondamental. La culture occidentale contemporaine recourt de plus en plus fréquemment à la censure, bien qu'elle tente de présenter le libéralisme comme abolissant tout critère de censure. En réalité, qu'est-ce que la censure [1] si ce n'est la forme la plus radicale de censurer toute idée, image, doctrine, œuvre ou pensée qui ne rentre pas dans le dogme étroit et de plus en plus exclusiviste de la "société ouverte"? Aujourd'hui encore, au Festival de Cannes et dans d'autres lieux prestigieux contrôlés par l'Occident, il est impossible de passer sans une panoplie idéologico-délirante minimale nécessaire - soit des formes non traditionnelles d'identité sexuelle, de diversité raciale, de discours anticolonial (et en fait néocolonial libéral), et ainsi de suite. Qu'est d'autre qu'une censure totalitaire et pandémique, que le wokisme (2), c'est-à-dire un appel à tous les citoyens à être "éveillés" et à signaler immédiatement aux autorités compétentes tout soupçon de déviation par rapport aux anti-valeurs libérales - le racisme (la russophobie étant une exception, ici, car la Russie n'est pas politiquement correcte), le "sexisme", le "patriotisme" (là encore, le nazisme ukrainien est une exception; il est le bienvenu car il s'agit d'une lutte contre les "Russes"), l'inégalité entre les sexes (par exemple, la protection de la famille traditionnelle normale)? Et le fameux "politiquement correct" [3], qui nous oblige, avec insistance et sous la menace d'un ostracisme total, à éviter certains termes, expressions, citations, formulations susceptibles d'affecter les sensibilités de la société libérale, n'est-ce pas une censure? Dans l'Occident d'aujourd'hui, nous avons affaire à une véritable floraison de la censure. C'est un fait indéniable, quels que soient les synonymes que l'on puisse inventer pour désigner cette censure.

La Russie est condamnée à la censure aussi bien si elle suit l'Occident que si, au contraire, elle remet en cause, voire rejette directement ses normes et ses règles. Nous sommes déjà entrés dans l'ère de la censure et il nous reste à comprendre véritablement ce qu'elle est.

Le sens de la métaphore

Commençons notre examen de ce sujet important par une métaphore élémentaire (4); soulignons que, même dans les sciences naturelles, telles que la physique, la chimie, la biologie, etc., la construction d'une théorie scientifique commence par une métaphore sensuelle, parfois purement poétique. Sans métaphore, il n'y aurait pas eu l'idée des atomes, des états de la matière, du plasma, des fluides, de la matière elle-même. Il est donc légitime de se poser la question de l'image du censeur et de la censure en tant que telle.

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Généralement, nous avons l'image d'un fonctionnaire limité et méchant, totalement dépourvu de talent et de créativité, qui déteste délibérément l'élément même du talent, la recherche vivante, envie les créateurs et les génies et tente de soumettre tout le monde à la même règle; cette image apparaît immédiatement à l'esprit. Une telle image suscite le rejet et toute discussion ultérieure sur le thème de la nécessité ou non de la censure dans la société car elle est construite autour de cette horrible caricature - un personnage inférieur, bas et vulgaire. Voulons-nous une telle censure et une telle censure? Toute personne sensée répondrait "non", "en aucun cas". La suite de la discussion est claire dès le départ. Certains s'en indigneront sincèrement, d'autres défendront désespérément l'image et son utilité pratique au motif que, sans elle, les choses seraient encore pires. Mais si nous sommes d'accord avec une telle métaphore de départ, nous avons sciemment perdu. Nous ne pourrons pas défendre la censure, ce qui signifie que les libéraux les plus doués pour la polémique et la rhétorique imposeront simplement leur censure à la société - plus élégamment encadrée et couplée à d'autres images clés - les femmes souffrant de l'arbitraire du patriarcat, les minorités ethniques et sexuelles opprimées, les migrants illégaux sans papiers parleront pour ceux qui imposeront d'autres règles de censure. Les victimes - ou plutôt les images artificielles des victimes, les hologrammes soigneusement fabriqués - parleront désormais au nom des juges et même des bourreaux. Et le public ne s'apercevra pas qu'en luttant contre la censure, il s'est retrouvé sous la coupe de censeurs totalitaires, cruels et inébranlables. Ceux-ci ont simplement changé d'image et ne s'appellent plus ainsi. Mais cela ne change pas l'essence de ce qu'ils font et de ce qu'ils imposent à la société.

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Si nous poursuivons la logique de Gaston Bachelard, nous devrions changer l'image du censeur et nous obtiendrons une image tout à fait différente. Imaginons que le censeur soit Michelangelo Buanarotti, sculptant son chef-d'œuvre immortel, la Pietà, dans le marbre. Ce chef-d'œuvre absolu, dans tous les sens du terme, se trouve dans la basilique Saint-Pierre au Vatican. 

Une autre métaphore similaire - peut-être à plus grande échelle, mais moins raffinée et expressive pour l'esprit chrétien - est le Sphinx égyptien, sculpté au milieu du troisième millénaire avant J.-C. à Gizeh, à côté du complexe pyramidal [5].

Si le censeur incarne l'image de Michel-Ange ou celle du Sphinx égyptien, sa fonction est de sculpter dans le potentiel créatif de la société, comme dans un rocher, une image sacrée raffinée et sophistiquée qui corresponde le mieux possible à l'identité collective historique. En d'autres termes, le censeur est une sorte de macro-démiurge dont le matériau (le marbre ou le granit) est la totalité des capacités créatives et des quêtes créatives du peuple. De la roche, le censeur coupe ce qui est superflu et laisse ce qui est nécessaire. Car une grande statue élégante, pleine d'esprit, de sens et d'une énorme vie intérieure créative, émerge ainsi: en coupant le superflu.  Cette élimination, même si elle est douloureuse pour le marbre lui-même, pour la chair du rocher, est un acte de création supérieure. Enlever le superflu signifie laisser le superflu, et le superflu signifie le fondamental, l'essentiel, ce qui était secrètement caché dans le granit, ce qui a été deviné et reconnu en lui, et à partir de là, éventuellement, a été déduit. Le censeur, comme Michel-Ange, est celui qui, dans le bloc de marbre informe, voit la Pietà, c'est-à-dire le Christ et la Mère de Dieu tenant son saint corps dans ses bras. Et en la voyant, il coupe souverainement et librement le superflu qui empêche l'image de pénétrer dans l'élément obscur du minéral.  De même, les anciens Égyptiens de l'époque du pharaon Chephren, en regardant la roche calcaire solide, reconnaissent la figure majestueuse et mystérieuse du Sphinx, celui de leur panthéon, prototype des chérubins célestes, qui combine les caractéristiques animales et humaines dans une synthèse transcendantale inégalable.

Le censeur crée la culture, et pour cela il doit posséder le plus haut degré de souveraineté. Il sait à la fois ce qu'il doit éliminer et ce qu'il doit laisser derrière lui. En fait, le censeur est un créateur, un artiste, mais il n'agit qu'au niveau de toute la société, de tout le peuple. Sa qualité est donc plus importante que celle d'un créateur ordinaire. Un créateur a le droit à l'erreur, à l'expérimentation, à l'échec, à l'insuccès. Le censeur n'a pas ce droit. Il est chargé par la société de ciseler une image que la société, les gens portent dans leur cœur, dans leur âme. Cette image, dont le peuple est porteur, est lourde de dangers. Il n'a pas le droit à l'erreur.

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Le censeur n'est pas un artiste

Il existe une autre différence entre le censeur et l'artiste. Le censeur supprime ce qui n'est pas nécessaire. Il ne remplace pas l'artiste, il n'est pas porteur d'énergie créatrice. Si le censeur était un créateur, il identifierait simplement son travail à celui de la société. Mais c'est un chemin vicieux. Il ferme les directions qui peuvent aller vers l'image recherchée par d'autres voies. Le censeur se distingue de Michel-Ange en ce qu'il ne laisse pas sa signature sous l'œuvre - ainsi que Michel-Ange lui-même sous la Pietà. Il n'est pas un artiste parmi les artistes. C'est un ascète, qui abandonne volontairement son propre potentiel créatif, sa propre volonté, au profit d'une œuvre collective, toute publique, universelle. Il ne crée pas tant qu'il ne laisse les autres créer, mais seulement ceux qu'il identifie lui-même comme les créateurs de la Pietà, et non comme de simples morceaux de matière noire souhaitant être reconnus comme une œuvre d'art. Il élimine les bavures et affine les formes délicates, mais il ne les crée pas lui-même. C'est le travail d'un sculpteur, pas celui d'un peintre ou d'un poète.

Le censeur doit donc être le gardien de l'art et non son créateur spontané. En ce sens, une série de définitions et de formulations de Martin Heidegger dans son ouvrage fondamental De l'origine de l'œuvre d'art est plus que jamais d'actualité.

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Il est révélateur que nous ne connaissions pas le nom des auteurs de l'ancien sphinx égyptien, qui ont reconnu ses traits dans la roche. Ils restent aussi mystérieux que le sphinx lui-même. D'une certaine manière, le censeur-gardien devrait leur ressembler - son anonymat fait partie de son pouvoir souverain.

Le censeur définit les limites, les frontières de ce qui est de l'art et de ce qui n'est que du marbre. Pour ce faire, il doit être lui-même profondément lié à sa culture, comprendre sa logique, son vecteur historiosophique, ses orientations, sa structure. Et pour cela, il doit être complètement et totalement souverain.

Le censeur comme souverain

Il est important de le dire tout de suite : le censeur n'est pas une fonction de l'État. Il ne peut pas être un simple fonctionnaire qui exécute les ordres de quelqu'un. Dans ce cas, nous n'avons pas affaire au censeur, mais à un représentant du censeur, son héraut, son messager, son annonciateur, et la figure du véritable censeur nous est tout simplement cachée dans l'ombre. Le censeur est porteur d'une souveraineté absolue. Il n'est pas engagé par le pouvoir et ne le sert pas, il est une partie de ce pouvoir, son aspect organique orienté vers le domaine de la culture. Les autres aspects du pouvoir souverain s'adressent à d'autres domaines - l'économie, la politique étrangère, la défense, la sphère sociale. Le censeur porte le fardeau de la souveraineté culturelle. Et dans ce domaine, il n'a pas d'autorité supérieure. Qui peut dicter à Michel-Ange ce que doit être la Pietà ou aux Egyptiens anonymes ce à quoi doit ressembler le Sphinx ? Michel-Ange l'a conçue, il l'a créée à partir d'un rocher de marbre. Les Égyptiens ont sculpté le Sphinx dans du calcaire.

Mais bien sûr, Michel-Ange lui-même et les architectes égyptiens ne vivaient pas en vase clos. Michel-Ange faisait partie de la civilisation catholique, véritable fils de la Florence de la Renaissance, porteur d'un esprit historique et géographique très particulier, d'une identité particulière. Quoi qu'il ait créé, il l'a créé au sein du christianisme. Et son œuvre est jugée de cette manière et dans cette optique. La Pietà est plus haute que Michel-Ange, mais dans la conceptualisation et la présentation de la Pietà, il est plus haut que tous les autres. Il est souverain dans un contexte spirituel particulier. Ici, il est complètement libre. Mais il n'est pas libre du contexte lui-même.

Cela apparaît encore plus clairement chez les créateurs du Sphinx. Ils sont la chair et le sang de la tradition sacerdotale égyptienne, ils sont les porteurs d'une sacralité très particulière. Si leur regard reconnaît dans un bloc de pierre informe la figure d'un être du monde spirituel, c'est que le regard lui-même est fondamentalement structuré, éduqué et saturé par les images qu'il capte de l'environnement extérieur. Les Égyptiens portent le Sphinx dans leur âme, au plus profond d'eux-mêmes. Ce Sphinx entretient une relation privilégiée avec leur identité. 

De même, le censeur reflète le destin de son peuple, de sa société, précisément au tournant de l'histoire où il se trouve. L'ayant compris et reconnu, il est par ailleurs libre. Mais il n'en est pas libre. Non seulement le censeur n'est pas libre du pays, de son histoire, de l'identité et du destin du peuple, mais il en est plus dépendant que n'importe quel créateur. Les créateurs peuvent essayer de créer n'importe quoi. Ils ne sont certainement pas exempts de contenu historique et social, mais ils se comportent comme s'ils étaient totalement libres. Leur liberté est limitée par un censeur qui est beaucoup plus responsable de l'histoire qu'eux. Mais lui aussi est limité, mais d'une manière différente. Non pas par le pouvoir, mais par l'être, en le comprenant, en découvrant sa structure, son destin.

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La censure comme institution de justice

Abordons maintenant, avec un peu de retard, l'étymologie et la genèse de la notion de censure, de censeur. Le mot vient du latin censeo - "définir", "évaluer", "donner un sens", ainsi que "penser", "supposer". La racine indo-européenne *kens- "déclarer" en est à l'origine.

Historiquement, l'institut des censeurs est apparu dans la Rome antique et était indépendant des autres branches du gouvernement, qui étaient appelées à donner une évaluation objective de l'état matériel, de l'état des travaux publics et du fonctionnement des institutions publiques, ainsi qu'à contrôler le respect de la moralité. Par essence, le censeur est celui qui est responsable de la justice, de la correspondance entre les normes déclarées de la société et l'état réel des choses. Il s'agit d'un contrôle spirituel du comportement des différentes autorités et instances, fondé sur le fait que les règles et les normes de principe doivent être respectées par tous, qu'ils soient supérieurs ou inférieurs.

En d'autres termes, la censure est un appareil qui garantit la justice. Si une société s'engage à respecter certains idéaux, elle doit les suivre. Et il y a des censeurs pour le faire.

La censure n'est donc pas un instrument de pouvoir dirigé contre les masses, mais une instance transcendante chargée de surveiller la justice à tous les niveaux, au sommet comme à la base, et habilitée à demander des comptes aux uns et aux autres.

Le terme censeo ne signifie donc pas simplement "évaluation", mais précisément une évaluation juste basée sur ce qu'il est, et non sur ce à quoi il ressemble. Il s'agit d'une vérification de l'état réel des choses, indépendamment de la manière dont chacun - jusqu'aux cercles les plus élevés - voudrait le présenter. Si l'on cherche des analogies modernes, la censure au sens romain correspond à la notion moderne d'"audit", c'est-à-dire de vérification objective et impartiale de l'état réel des choses - dans une entreprise, une société, une organisation à quelque échelle que ce soit.

Mais pour garantir l'équité, pour déclarer la valeur réelle, il faut savoir ce qui est juste. Cela suppose que le censeur appartienne à une instance très élevée, qui peut se permettre d'être indépendante du sénat et des magistrats (si l'on prend Rome et son système), c'est-à-dire de toutes les branches et de tous les niveaux du pouvoir. Cette souveraineté ne peut être détenue que par les philosophes qui sont, selon Platon, les gardiens, les "gardiens de l'être", ajoute Heidegger. La censure est donc avant tout l'affaire de la philosophie souveraine.

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La censure transcendantale de Lucian Blaga

La référence de la censure à la philosophie nous oblige à examiner de plus près le contenu métaphysique du concept. Pour ce faire, nous pouvons nous tourner vers le philosophe roumain Lucian Blaga, qui a introduit le concept de "censure transcendantale".

Pour comprendre ce que Lucian Blaga entend par "censure transcendantale", nous devons dire quelques mots sur sa théorie philosophique en général. Blaga commence par dire que l'Être suprême - l'Absolu et le créateur du monde - est le "Grand Anonyme" [7]. Diverses épithètes élogieuses peuvent raisonnablement être appliquées au Grand Anonyme - "Grand", "Puissant", "Un", "Le plus sage", "Éternel", etc., mais une seule est d'une incommensurable pertinence: "Celui qui proclame la Vérité", "le Vrai". Pour Descartes, il est évident que Dieu ne peut pas mentir. Lucian Blaga a tendance à dire le contraire: si le Grand Anonyme révélait la vérité, sa puissance créatrice créerait immédiatement son doublet absolu, ce qui court-circuiterait son plérôme. Il est donc contraint de dire, sinon un mensonge pur et simple, du moins pas toute la vérité, et plus précisément encore, il introduit une censure transcendantale - mais encore une fois non pas dans l'énoncé, mais dans la possibilité fondamentale de son interprétation adéquate. Il peut révéler toute la sagesse, mais il prive d'abord celui à qui il la révèle de la capacité de la comprendre. C'est le sens de la "censure transcendantale". Si Dieu (le Grand Anonyme) créait une création vraiment parfaite et vraie, il se répéterait tout simplement. Mais c'est impossible, car il ne peut y avoir deux "dieux" totalement identiques. Ainsi, selon Lucian Blaga, pour que la création émerge, Dieu doit s'autocensurer. Cette censure consiste à dissimuler certains aspects - supérieurs - de la structure de la réalité.

Blaga introduit les concepts de "conscience paradisiaque" et de "conscience luciférienne" [8]. La première considère Dieu et la réalité dans son ensemble comme un triangle continu. Elle ne saisit pas la présence d'une censure transcendantale et pense l'existence comme si elle n'existait pas. Le second, au contraire, reconnaît la prise, mais se rebelle contre la "censure transcendantale" et cherche à la fissurer (à "devenir Dieu").

Cette ligne de réalité qui sépare la partie positivement accessible de l'être de la partie soumise à la censure transcendantale est ce que Blaga appelle l'"horizon mystérieux". La conscience paradisiaque pense que l'ascension de l'échelle des marches de l'être est ininterrompue, et elle ne remarque pas l'horizon mystérieux, c'est-à-dire le point où la continuité s'interrompt.

La conscience luciférienne est consciente de l'horizon mystérieux et tente avec insistance de décrire cette partie de l'être qui est cachée derrière le voile censuré, en utilisant les mêmes termes et approches que la réalité située sous l'horizon mystérieux. Il en résulte une collision dont nous pouvons clairement voir les échos dans l'état de la civilisation occidentale moderne, qui est devenue sans équivoque luciférienne et cherche à percer les voiles naturels du mystère - déchiffrage du génome, création de l'IA, etc. Le schéma de Lucian Blaga peut être reflété dans la figure suivante.

Blaga lui-même appelle à une troisième voie: ne pas tomber dans la naïveté d'une conscience paradisiaque qui ignore la fissure fondamentale dans la structure de la réalité, mais ne pas non plus se laisser capturer par la rébellion luciférienne. Il faut se concentrer sur l'horizon du mystère, en acceptant le mystère, le sacrement comme quelque chose d'autosuffisant. Oui, Dieu n'est pas connaissable, et la vérité qu'il nous donne ne peut jamais être complète. Il y aura toujours quelque chose qui nous sera caché par un voile impénétrable. Quelque chose sera toujours censuré et nous ne le saurons jamais.

Mais c'est la liberté de créer. Nous sommes libres d'imaginer ce qui se trouve au-delà de l'horizon du mystère, comme bon nous semble. Non pas la science (luciférisme), mais la culture [9], c'est ce que Dieu veut que nous fassions, ce qu'Il nous permet de faire, ce qu'Il nous encourage à faire.

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Dans une telle situation, le censeur prend une signification particulière. Il veille sur l'horizon du mystère pour le préserver de l'orgueil satanique, pour en maintenir l'imprenabilité. La création est libre tant qu'elle respecte le censeur transcendantal. Et le censeur se trouve dans la position de quelqu'un qui est investi d'une mission supérieure: maintenir les proportions de l'être telles qu'elles devraient être pour que le monde existe - exactement dans cet état intermédiaire qui n'est possible que lorsque la vérité est dialectiquement imbriquée dans la non-vérité et jusqu'à la fin, où l'une finit et où l'autre commence, personne ne le saura jamais. Jusqu'à la fin du monde.

La censure en Russie et la Russie

Au-delà de la figure caricaturale du censeur et compte tenu de la charge métaphysique de la "censure transcendantale" dans la philosophie de Lucian Blaga, nous pouvons porter un regard différent sur les faits bien connus qui décrivent l'état de la censure dans l'histoire de la Russie ancienne et plus tard de la Russie impériale. Ainsi, les listes de livres abjurés dans les "Izbornik de 1073" ne sont pas seulement une liste d'hérésies et d'interdictions, mais contiennent également des documents détaillés et bien plus détaillés provenant du saint héritage patristique, qui devraient être pris comme norme et standard. Ici, la description des hérésies sert à former une image plus contrastée de ce qui est convenable et correct. "L'Izbornik sculpte une Pietà ou un Sphinx - décrivant clairement l'image elle-même et contrastant avec les fragments de roche marbrière ou les voies déviantes indues à couper. La négation est inextricablement liée à l'affirmation et, en général, il s'agit de révéler l'image - la vision chrétienne orthodoxe complète de la vérité, de la beauté et de la bonté. En même temps, les profondeurs de la contemplation spirituelle monastique restent cachées. Elles ont leur place dans le domaine de l'horizon des mystères, que l'orthodoxie observe sans tenter de l'envahir ou de la critiquer directement.

Les réformes séculières sous Pierre et ses successeurs ont séparé la censure spirituelle de la censure séculière. Jusqu'au milieu du 18ème siècle, la source de la censure séculière était le tsar lui-même [10] (rappelons ici ce que nous avons dit sur la souveraineté suprême du censeur). Plus tard, les tsars russes ont délégué ce droit à diverses instances - le Sénat, l'Académie des sciences, le ministère de l'éducation publique, le ministère de l'intérieur [11], etc. Mais il s'agit toujours d'une délégation purement "comminatoire" de certains pouvoirs purement souverains du tsar. Il s'agit d'une extension du pouvoir souverain, et non de quelque chose d'indépendant et de particulier.

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Une figure marquante de la censure au 19ème siècle a été le comte Serguei Semionovitch Uvarov, qui a adapté le principe slavophile "Orthodoxie, Autocratie, Nationalité" à l'ensemble du système épistémologique de l'Empire - à la culture, à l'éducation, à la politique, etc. Le monarque a soutenu cette reconnaissance de la justesse slavophile, mais il n'a pas tant formulé le contenu du code de censure suprême qu'il n'a confirmé de son autorité suprême la version proposée. C'est Uvarov lui-même qui joue le rôle de censeur, de gardien de l'horizon mystérieux de la culture russe du 19ème siècle.

Les démocrates révolutionnaires et les bolcheviks, qui se moquaient autant qu'ils le pouvaient de la censure tsariste, ont pris le pouvoir en 1917 et ont suivi exactement la même voie, en introduisant un code de censure strict, mais uniquement sur la base de leur propre idéologie. Au lieu d'une absence de censure (ce qui est tout à fait impossible), les bolcheviks ont introduit leurs paramètres et les ont appliqués de manière beaucoup plus agressive, intolérante et radicale que les censeurs de l'époque tsariste.

Les libéraux contemporains, qu'ils soient russes ou occidentaux, font preuve d'une attitude similaire. Critiquant et ridiculisant sans pitié la censure dans les sociétés et les régimes qu'ils n'aiment pas, ils imposent, dès qu'ils accèdent au pouvoir, leurs propres règles de censure, encore plus dures et intolérantes, répressives et restrictives. Le piratage luciférien de l'horizon des mystères ne conduit pas à la libération de la censure, mais à une véritable dictature, bien que la rébellion elle-même commence par une demande de liberté sans restriction.

Conclusion

La censure existe bel et bien dans la Russie contemporaine. Il n'y a pas de société qui n'en ait pas. Cependant, elle est toujours appliquée par les libéraux en raison de l'inertie des années 90. Ce sont eux qui, ayant usurpé ce droit et n'ayant aucune intention de l'abandonner même dans les nouvelles conditions, continuent à détenir le monopole de la censure dans la Fédération de Russie. Les conditions nouvelles, découlant de l'Opération militaire spéciale, exigent de nouvelles actions, lignes directrices et méthodes de la part des autorités, mais jusqu'à présent, les libéraux y ont fait face par des moyens purement techniques. Le libéralisme, bien qu'associé à la notion de souveraineté, reste le code de la censure. En général, l'élite - y compris, surtout, l'élite épistémologique - est solidaire du code culturel occidental et bloque obstinément le code patriotique - slavophile, orthodoxe. D'où les contradictions avec la logique de censure: tout ce qui correspond avant tout à l'attitude libérale est accepté et soutenu dans la culture, mais associé à la loyauté envers le régime et - même si ce n'est pas le cas - à la reconnaissance de la souveraineté de la Russie. Tout le reste est rejeté. Le censeur souverain du pouvoir ne sculpte toujours pas une image orthodoxe de la société russe, mais un hybride postmoderne de "capitalisme souverain".

Il est évident que nous avons besoin d'un autre censeur et d'une autre censure.

Notes:

[1] Norris P.  Cancel Culture : Myth or Reality // Political Studies. 71. 11 août 2021. P.145-174.

[2] McCutcheon Ch. Speaking Politics word of the week : woke"// The Christian Science Monitor. 25 juillet 2016.

[3] Bernstein D. Vous ne pouvez pas dire ça ! The Growing Threat to Civil Liberties from Antidiscrimination Laws (La menace croissante des lois antidiscriminatoires pour les libertés civiles). Washington : Cato Institute, 2003.

[4] Bachelard G. Le nouveau rationalisme. Moscou : Progress, 1987.

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[7] Blaga L. Les differreentielles divines. P. : Librairie du savoir, 1990.

[8] Blaga L. Trilogie de la connaissance. P. : Librairie du savoir, 1992.

[9] Blaga L. Trilogie de la culture. P. : Librairie du savoir, 1995.

[10] Tex Ch. M. L'Empire au-delà de la barrière. Histoire de la censure dans la Russie tsariste. Moscou : Rudomino, 2002.

[11] Zhirkov G. V. Histoire de la censure en Russie XIXe-XXe siècles. Aspect-Press, 2001.

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