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jeudi, 09 mai 2024

Daria Douguina: Lumières et post-lumières : lumière ou ténèbres ?

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Lumières et post-lumières : lumière ou ténèbres ?

Daria Douguina

Source: https://www.geopolitika.ru/el/article/diafotismos-kai-meta-diafotismos-fos-i-skotadi

Le dialogue entre la postmodernité et la philosophie classique est aussi exotique et étrange que la postmodernité elle-même. Au cœur de la philosophie moderniste se trouve une stratégie étrange et complexe: il est nécessaire de démanteler complètement la modernité, en ne négligeant aucune pierre, mais en même temps, il est nécessaire de s'éloigner davantage de la tradition à laquelle la modernité s'est opposée et de poursuivre la cause du progrès.

L'ambition de devenir encore plus progressiste que les penseurs de la Modernité est généralement ce qui retient le plus l'attention. C'est comme si les modernistes ne faisaient que déplacer la Modernité à la place de la Tradition et se substituaient à la véritable avant-garde. C'est l'approche des « exotéristes de gauche » (Mark Fischer, Nick Srnicek, etc.).

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Pour eux, les classiques de la philosophie postmoderne, et en premier lieu Gilles Deleuze, ont quelque chose de « lumineux », de « libérateur » et de « révolutionnaire ».

Mais il y a aussi les « accélérationnistes de droite » (Nick Land, Reza Negarestani, etc.), qui comprennent toute l'ambivalence de la modernité et ne détournent pas leur regard de ses aspects les plus sombres - après tout, en écrasant la modernité, les modernistes jettent aussi le tabouret sous leurs propres pieds, quand ils sont accrochés à la potence, puisque le progressisme et la foi en un avenir meilleur n'ont plus de fondement.

Cela affecte également la lecture de Deleuze, dans laquelle les « Accélérationnistes de droite » commencent à discerner des côtés tout à fait sombres. C'est ainsi que naît la figure du « sombre Deleuze », dont le travail ouvertement destructeur de démantèlement des illusions du monde moderne (de la modernité) apparaît dans une perspective plutôt infernale. Bienvenue dans les « Lumières sombres ».

En tout état de cause, les modernistes de gauche comme de droite ne se tournent pas vers la Tradition, mais leur lecture de la Modernité elle-même est polaire. De même, l'attitude des modernes à l'égard des fondateurs de la philosophie de la modernité semble très différente.

J'essaierai d'examiner la relation entre deux figures emblématiques de la philosophie : Leibniz et Deleuze.

L'un a appartenu au début de la modernité, l'autre en a résumé les résultats et a marqué l'épanouissement de la postmodernité. Je ne porterai pas de jugement définitif sur la manière dont Deleuze doit être compris, qu'il s'agisse de l'ombre ou de la lumière. J'essaierai simplement de retracer ce que le système de Deleuze fait de la « monadologie ».

Extrait du livre : Optimisme eschatologique.

dimanche, 16 juillet 2023

Berlin rencontre l'Extrême-Orient - Rencontre entre le prussianisme, les Lumières berlinoises et la tradition chinoise

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Berlin rencontre l'Extrême-Orient - Rencontre entre le prussianisme, les Lumières berlinoises et la tradition chinoise

Michael Kumpmann

Source: https://www.geopolitika.ru/de/article/berlin-trifft-auf-fernost-begegnung-von-preussentum-berliner-aufklaerung-und-chinesischer

Les Lumières sont généralement considérées, à juste titre, comme un mouvement anti-traditionnel dans lequel, comme l'a bien décrit Soljenitsyne, l'homme a fini par "oublier Dieu" et s'est substitué à lui et l'a remplacé par sa technique [1]. Cette révolte "faustienne"/"satanique" contre Dieu a ensuite fait émerger les enfers totalitaires du 20ème siècle et la victoire de plus en plus forte de la conscience technique inhumaine (Gestell) sur l'âme humaine. La barbarie et la terreur anti-ecclésiastiques de la Révolution française n'étaient pas un accident regrettable mais ont traversé, par d'autres moyens, toute l'histoire de l'époque moderne.

Cependant, Douguine a bien décrit le fait que les tendances anti-modernes étaient minoritaires dans chacune des trois théories politiques de la modernité ("Voir Evola dans la Révolution conservatrice et Wirth dans la Troisième théorie politique"). Il est étonnant de constater qu'elles existaient aussi de manière isolée dans les Lumières elles-mêmes. Isaac Newton était un hermétiste dans la tradition de John Dee, qui recherchait les connaissances disparues des anciennes cultures et considérait que l'humanité occidentale était en déclin culturel. Pour lui, le siècle des Lumières avait précisément une mission spirituelle visant à stopper ce déclin intellectuel. La campagne de conquête de Napoléon était aussi en partie un mouvement de restauration de la monarchie et une tentative de création d'un grand empire monarchiste "eurasien" qui réunirait la France, l'Allemagne et la Russie, et lutterait contre les Anglo-Saxons [2]. L'idéalisme allemand, avec sa théorie du Weltgeist [3], réunissait des éléments traditionnels et modernes [4]. Lessing montrait également des éléments traditionnels dans ses œuvres [5].

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Statues chinoises à Sanssouci, construites à la demande de Frédéric II [6].

Un autre élément frappant est qu'il y a eu un fort engouement pour la Chine au début du siècle des Lumières allemand autour de Frédéric II, ce qui a conduit des philosophes comme Leibniz et Voltaire [7], ainsi que le roi Frédéric, à déclarer que la Chine antique était le modèle d'un "absolutisme éclairé". La Chine n'est en aucun cas antireligieuse, antitraditionnelle ou antispirituelle. Ce n'est pas pour rien qu'il existe un certain enthousiasme pour la Chine chez les théosophes. Le théosophe américain Edgar Cayce (photo, ci-dessous) a même prédit que la Chine s'élèverait, vaincrait les États-Unis (qu'il considérait comme le dernier vestige de l'Atlantide) et conduirait à une renaissance spirituelle/religieuse de l'humanité.

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Mais d'où vient cet enthousiasme éclairé pour la Chine ? Une cause importante est à rechercher dans la dichotomie entre Athènes et Jérusalem décrite par Leo Strauss. Alors que Jérusalem représente ici la religion populaire, qui est une chronique du peuple et de son histoire avec son dieu, le pôle d'Athènes est plutôt la variante d'une religion qui a été fondée et enseignée par un sage, qui est gourou/philosophe. Pythagore, Platon, Hermès Trismégiste et autres ne sont pas des prophètes envoyés par Dieu avec une vision, mais des hommes qui ont acquis des connaissances religieuses (par leur propre logique, par l'enseignement ou par d'autres moyens) et les ont transmises à leurs élèves. Le Christ a alors réuni dans sa position les pôles de la religion populaire (Jérusalem) et de la religion savante (Athènes).

Cependant, l'Église catholique a en partie réprimé et persécuté cette "théologie naturelle" et les vestiges du "pôle athénien" comme l'hermétisme, le gnosticisme ou des personnes comme Hypatie d'Alexandrie [8]. D'autre part, l'Église a intégré ces restes du pôle "Athènes" dans ses systèmes. L'exemple le plus connu est celui de Thomas d'Aquin et de la plupart des néoplatoniciens.

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Les pionniers des liens culturels entre l'Europe et la Chine, tous trois décédés et enterrés à Pékin: L'italien Matteo Ricci (1552-1610), qui fit connaître Confucius en Europe et démontra l'excellence de ce système politico-philosophique chinois; l'Allemand Johann Adam Schall von Bell (1592-1666), qui fut directeur du "Tribunal des Mathématiques", instance d'importance capitale dans le Céleste Empire et son successeur le Flamand Ferdinand Verbist (1623-1688).

Le résultat est que l'Église a créé une domination du pôle "Jérusalem" au détriment du pôle "Athènes". Des rapports de missionnaires jésuites ont donné à des philosophes européens comme Leibniz l'idée qu'une alliance avec la Chine pourrait corriger cette anomalie et la dépravation morale de la noblesse et du clergé au 18ème siècle [9] (Leibniz a écrit que pour sauver l'Europe, il devrait y avoir un échange missionnaire dans les deux sens. Les Européens devraient expliquer leur tradition aux Chinois et les Chinois devraient expliquer la leur aux Européens. A l'époque, les Lumières sous cette forme "berlinoise" n'étaient donc pas une idéologie définissant l'"Occident" comme une culture supérieure qui devrait civiliser le reste de l'humanité. Au lieu de cela, on considérait que l'Occident devait également apprendre de l'Asie) [10] [11].

On considérait en effet la Chine comme un parallèle au pôle athénien. Le taoïsme, le bouddhisme et le confucianisme étaient en effet plus comparables aux écoles des philosophes athéniens qu'aux religions monothéistes classiques et à leur "prétention à l'exclusivité". Non seulement parce que ces dernières ont été fondées par des philosophes, mais aussi parce qu'elles ont appris les unes des autres.

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Le I Ching (Yi Jing), par exemple, était une théorie confucianiste qui, parce qu'elle suppose que tous les signes peuvent être ramenés à deux symboles de base, a été adoptée par les taoïstes [12]. Le bouddhisme zen, quant à lui, a repris des idées des taoïstes.

Leibniz a d'abord utilisé le I Ching pour prouver l'existence de Dieu et a décrit que tous les nombres (et toute information) peuvent être déduits de zéro et de un. Leibniz a supposé que le zéro correspondrait au chaos de l'horloge du Tohuwabohu, et que le un correspondrait à Dieu. Par conséquent, tout ce qui peut être décrit mathématiquement le serait, contiendrait à la fois des traces du tohu-bohu et de Dieu et de son acte de création [13].

En outre, il y avait une raison plus spécifique à l'engouement pour la Chine: la Chine confucéenne a une culture de fonctionnaires qui étaient très respectés et qui pouvaient conseiller les empereurs. Pour devenir fonctionnaire, l'individu devait d'abord passer un grand examen de keju, où il était testé sur son intelligence et ses connaissances culturelles/traditionnelles. Comme ce poste de fonctionnaire était extrêmement prestigieux, un mouvement culturel s'est développé, grâce auquel les familles ont accordé une attention particulière à l'éducation et ont fait de gros efforts et dépenses pour donner à leurs enfants la meilleure éducation possible [14]. En même temps, l'empereur lui-même devait être un exemple fervent des vertus confucéennes (dont l'éducation est l'une des plus importantes) [15].

Leibniz, Voltaire [16] et d'autres "philosophes des Lumières berlinoises" voyaient dans cette culture la meilleure application pratique de l'État philosophe platonicien qui existait à leur époque. Les dirigeants européens comme Frédéric le Grand devaient essayer d'imiter ce modèle (C'est pourquoi le roi de Prusse rassemblait également des cercles d'intellectuels européens autour de sa cour).

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Wilhelm Leibniz (1646 - 1716)

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Voltaire (1694 - 1778)

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Christian Wolff (1679 - 1754)

Les philosophes des Lumières prussiens tels que Johann Heinrich Gottlob Justi et Christian Wolff [17] considéraient que l'idéal de l'éducation était plus proche de la réalité dans une monarchie traditionnelle avec une équipe de conseillers cultivés que dans une "démocratie libérale" où même le plus stupide peut participer aux décisions et où la voix de "l'idiot du village" a autant de poids que celle d'un professeur diplômé [18].

Leibniz et consorts n'étaient pas non plus anti-religieux, mais rêvaient plutôt d'une alliance entre le christianisme et l'enseignement confucéen. Voltaire était extrêmement anticlérical, mais même lui était contre l'athéisme.

Confucius et l'État fonctionnaire qu'il a inspiré ont également fourni la base de la théorie économique prussienne du caméralisme. Il convient de noter que le fondateur contemporain de l'école "néotraditionnelle" des libéraux, le NR/X, Mencius Moldbug, appelle sa théorie économique le "néocaméralisme". Ce n'est pas un hasard s'il a choisi le nom de plume de Mencius et si ce dernier a été le plus grand successeur de Confucius. Moldbug connaît donc parfaitement le lien entre le prussianisme et le confucianisme [19].

Alors qu'en France en particulier, les Lumières et la Révolution ont tenté de renverser la tradition, la Prusse a adopté une approche nettement plus intégrative et a conservé davantage d'éléments pré-modernes.

Aujourd'hui, la situation qui prévalait alors en Prusse s'est presque inversée. Aujourd'hui, ce sont les Japonais (l'école de Kyoto, dont les fondateurs ont étudié sous la direction de Heidegger à Fribourg) et les Chinois qui chérissent l'héritage intellectuel allemand autour de philosophes comme Heidegger, Carl Schmitt ou Leo Strauss, tandis que chez nous, les dirigeants woke considèrent notre héritage intellectuel européen comme politiquement incorrect et veulent donc l'éliminer [20].

En général, il est également frappant de constater que le PC chinois est composé d'un nombre étonnamment élevé de scientifiques et de personnes instruites, alors que chez nous, dans "l'Occident éclairé et démocratique", on trouve un nombre étonnamment élevé de ratés en matière d'éducation, en particulier chez les Verts. Il est donc possible que, ironiquement, la Chine, en revenant au confucianisme et à la tradition, ait mieux réalisé les idéaux politiques des Lumières que l'Occident démocratique et éclairé d'aujourd'hui, car chez nous, les Lumières tant vantées ont ironiquement conduit au triomphe des incultes.

Mais il faut bien sûr aussi dire que l'idée de "l'État fonctionnaire éclairé" constitue bien sûr aussi un germe de la technocratie comme objectif final et effrayant de la modernité. C'est pourquoi ce "confucianisme occidental" doit être considéré de manière ambiguë et, pour reprendre les termes d'Adorno, "dialectique". Il a été en grande partie une résurgence de la tradition platonicienne en Occident. Mais il a également jeté les bases de la "dictature des experts" de l'"UE-RSS", du régime médical inhumain de l'ère coronaviresque ("Ne réfléchissez pas par vous-même, faites confiance à la science !"), du Cybersyn chilien (un projet dans lequel l'économie nationale devait être contrôlée par un ordinateur central) et d'autres. Et même si la Chine a connu un renouveau confucianiste, elle est jusqu'à présent l'exemple de la première technocratie fonctionnelle au monde [21].

La science n'est jamais objective, comme on l'a vu ces dernières années, mais elle est elle-même soumise à des intérêts de pouvoir.

Il est possible que la religion puisse renverser cette dialectique. Il est possible que la religion soit précisément ce qui empêche un "règne des sages" de dériver vers une gestion scientifiquement planifiée de la "vie nue", et rappelle au sage qu'il y a plus dans la vie que des chiffres, des dates et la simple survie, mais que l'homme possède une dignité inhérente.

Notes:

[1] Robespierre a voulu se couronner lui-même dieu lors d'une cérémonie peu avant sa chute. Au 20ème siècle, les dirigeants de l'entreprise chimique IG Farben se seraient autoproclamés "Conseil des dieux", car ils pensaient avoir acquis un pouvoir "égal à celui d'un dieu" grâce à la science. Ce sont deux exemples de la façon dont l'esprit scientifique éclairé peut développer un élément "luciférien".

[2] D'une certaine manière, nous, Eurasistes, achevons ainsi le "travail" de Napoléon, qui avait lui-même repris la mission de Gengis Khan.

[3] Qui voyait Napoléon en partie comme l'incarnation de ce même esprit du monde (Nietzsche, qui a formé avec Schopenhauer l'autre grand courant "post-kantien" de la philosophie allemande et qui a fourni des bases non seulement à l'existentialisme, mais aussi au traditionalisme, voyait lui aussi Napoléon comme l'incarnation du surhomme).

[4] Voir à ce sujet ces deux articles de Douguine :

https://www.geopolitika.ru/en/article/hegel-and-platonic-jump-down

et https://www.geopolitika.ru/de/node/63972

9782713800450_1_75.jpg[5] Julius Evola a décrit dans "Le Mystère du Graal" qu'il existait une histoire parmi les croisés et les musulmans selon laquelle les deux groupes étaient à la recherche d'un anneau magique perdu. Et que cet anneau était en fait une métaphore du Saint Graal. Lessing, quant à lui, a écrit dans son livre "Nathan le sage" ce qu'il appelle la parabole de l'anneau, où le sultan musulman Saladin et le croisé Richard Cœur de Lion se disputent la possession d'un anneau magique. Les parallèles sont ici très frappants.

[6] Image de Deniz Yildiz. Publié sous licence Creative Commons Attribution Share Alike 4.0

https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Potsdam_Chinesisches_Teehaus_San...

[7] Voltaire doit cependant être critiqué pour avoir présenté le confucianisme de manière extrêmement erronée, faisant souvent comme s'il n'y avait pas d'éléments surnaturels ou de "vie après la mort". Ce n'est pas vrai. Certains rites confucéens, comme le fait de préparer de la nourriture en offrande pour les ancêtres décédés, n'auraient aucun sens si Voltaire avait raison.

[8] En ce qui concerne cette personne, il est intéressant de noter que Voltaire n'était pas le seul à la mettre en avant, Daria Douguina l'a également fait plus tard.

DzXT3MsWkAE9H2m.jpg[9] Au 20ème siècle, le baron Roman von Ungern Sternberg pensait également que la dépravation du clergé et de la noblesse européens (qui aurait contribué à la montée des communistes) pourrait être corrigée par une influence de la Chine et du Tibet.

[10] Une question intéressante serait de savoir si la Prusse a anticipé l'"approche asiatique" allemande, qui a été promue plus tard par le géostratège Karl Haushofer, entre autres (Qui a joué un rôle important dans l'alliance de l'Allemagne avec le Japon, par exemple). L'un de ses principaux domaines de recherche, outre la géopolitique, était la culture japonaise. Par ailleurs, selon des auteurs comme Jacques Bergier, Karl Haushofer était également en contact avec des bouddhistes tibétains.

Un autre parallèle est que les théories de Haushofer ont été en partie responsables du premier rapprochement existant entre le Troisième Reich et l'URSS (Pacte Molotov-Ribbentrop) et qu'il y avait également à l'époque un rapprochement diplomatique entre la Prusse et l'impératrice russe Catherine II.

[11] En ce qui concerne la Prusse et l'"Occident", il convient de noter qu'au début du 20ème siècle, Halford Mackinder considérait explicitement non seulement la Russie, mais aussi l'Empire wilhelminien marqué par la Prusse, comme un pôle opposé à la "communauté de valeurs occidentale". Ce n'est qu'après 1945 que les Allemands se sont considérés comme faisant partie de l'"Occident".

宋著作郎邵雍.jpg[12] Le philosophe Shao Yong a décrit que les deux symboles de base du I Ching (qui sont également une base de l'écriture chinoise) étaient également identiques aux nombres 1 et 0. Leibniz a repris cette théorie et a développé le système binaire à partir de là. Le système binaire a ensuite été combiné par George Boole avec la logique d'Aristote, de sorte que les énoncés logiques puissent être représentés en binaire. Ceci a servi de base à la théorie de l'information de Claude Elwood Shannon, qui présente le bit (une valeur de zéro ou de un) comme la base de toute information. Toute information est une déclaration selon laquelle, parmi plusieurs possibilités qui pourraient être vraies, l'une est correcte et toutes les autres sont fausses. Par conséquent, le bit (soit le un est faux et le zéro est vrai, soit l'inverse) est la base à partir de laquelle toutes les autres informations peuvent être décomposées.

C'est pourquoi la compréhension occidentale actuelle de ce que signifie la connaissance et l'information est basée sur des idées confucéennes anciennes.

[13] Là encore, Leibniz a probablement fait une erreur. En électronique, un système binaire (vecteur de bits ou de bits dans le langage de conception de puces informatiques VHDL) n'est en réalité pas un système à deux états, mais il existe un troisième état. Le premier état est 0, ce qui signifie que la ligne a moins de 5 volts. Un signifie que la ligne a plus de 5 volts. Il existe également un troisième état, qui signifie "erreur", ou plus spécifiquement qu'il n'est pas possible de déterminer si c'est zéro ou un. Il est probable que ce troisième état d'erreur soit plutôt le tohu-bohu.

Ironiquement, la loi de Moore (le nombre maximal de transistors d'un processeur double tous les deux ans) atteint maintenant sa limite, car les effets électromagnétiques des lignes plus proches rendent cet état d'erreur plus fréquent, ou un zéro peut se transformer spontanément en un et vice-versa.  Ce problème de chevauchement ou d'éclatement des états binaires dans les ordinateurs rappelle philosophiquement le concept du postmodernisme et sa résolution des "oppositions binaires". La dissolution du logos occidental dans le chaos, décrite par Douguine dans "la métaphysique du chaos", se produit donc déjà concrètement dans la technologie numérique.

images.jpg[14] Cela a conduit au cliché de la mère asiatique surmenée qui met la pression sur ses enfants pour qu'ils apprennent le plus possible. En Occident, ce cliché est surtout connu par Amy Chua et son concept de mère tigre, ainsi que par le personnage de Chichi dans le dessin animé Dragon Ball

(L'un des problèmes d'une telle éducation est bien sûr le risque de négliger des compétences concrètes, vitales et pratiques au profit de l'apprentissage de faits abstraits).

[15] En raison de cette philosophie, les rois prussiens se qualifiaient de "premiers serviteurs de l'État", ce qui impliquait également qu'ils devaient devenir en quelque sorte une incarnation de l'État, derrière laquelle leur personnalité humaine devait s'effacer. Dans Horizon of the Ideal Empire, Douguine décrit cela comme une caractéristique du "roi philosophe idéal" en référence à Platon :

http://www.4pt.su/en/content/horizon-ideal-empire

(Dans sa description, Douguine ne fait pas seulement référence aux idées platoniciennes, mais aussi et surtout à l'idée taoïste d'agir sans agir. Ergo : le souverain construit un ordre social qui fonctionne si bien qu'il n'y a pratiquement plus besoin d'interventions correctives de sa part. C'est l'opposé total du principe de gouvernance des démocraties libérales qui se résume à la réforme perpétuelle de ce qui a déjà été réformé plusieurs fois).

[16] Alors que Voltaire était plutôt anti-religieux, Catherine II en Russie avait remarquablement souvent impliqué l'Église orthodoxe dans ces "tâches de fonctionnaires éclairés".

C'est d'ailleurs plus logique, car un État fonctionnaire laïc risque de dégénérer en technocratie et en incarnation du Gestell. Le meilleur exemple à cet égard est l'UE et sa frénésie réglementaire excessive, qui veut même décider à quel point la courbe des concombres doit être courbée. Ou encore la faction des sociologues du genre qui veut planifier scientifiquement comment rééduquer les gens et les manipuler subtilement dans une certaine direction par le biais des médias.

[17] La philosophie de Wolff est devenue populaire auprès des catholiques, alors qu'elle était détestée par les protestants. Cela pourrait également être intéressant en ce qui concerne la manière dont le protestantisme et le catholicisme ont eu un impact différent sur le thème de la tradition et de la modernité. Les protestants sont plus enclins à la modernité et les catholiques à la tradition.

[18] Comme Evola l'a décrit, la Prusse a pu conserver une grande partie des structures féodales prémodernes malgré les Lumières (Ironiquement, mieux que la France absolutiste pré-éclairée, qui a introduit une centralisation extrême, au détriment des structures princières féodales).

[19] https://en.wikiversity.org/wiki/Neocameralism

[20] Voir également cette vidéo de Michael Millerman :

https://www.youtube.com/watch?v=mbC-k6sIuEE

[21] https://www.mpiwg-berlin.mpg.de/research/projects/technocracy-scientocra...

dimanche, 13 mars 2022

Penser de manière identitaire serait donc raciste ?

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Penser de manière identitaire serait donc raciste ?

Groupe de travail Feniks (Flandre)

À chaque prise de position critiquant la migration de masse, le reproche adressé par le centre politique et par les mouvements postmodernes extrêmement politiquement corrects surgit : le racisme. Le raisonnement est assez simple : quelqu'un qui ne veut pas voir la nouvelle réalité, soit un afflux de 160 millions de migrants en Europe d'ici 30 ans, le fait en fait par une sorte de racisme caché. Sans peut-être en être lui-même conscient, il se montrera haineux et xénophobe à l'égard des personnes d'origine culturelle différente. L'accusation de racisme s'efface de plus en plus à force de l'utiliser à tout bout de champ dans tous les débats. Une personne qui se rend coupable de racisme, délibérément ou non, n'est plus à prendre au sérieux et finit immédiatement dans la poubelle de l'extrême droite.

Nous allons commencer notre raisonnement là où se trouve la base de la pensée identitaire, ou du nationalisme, avec les Contre-Lumières. En réaction aux Lumières françaises, que nous connaissons grâce à de grands penseurs tels que Voltaire et Rousseau, un mouvement contre-Lumières a débuté en Allemagne, dans lequel le nationalisme populaire a trouvé sa base.

Le philosophe allemand Johan Herder considérait chaque "peuple" comme une unité liée par une langue, une culture et une histoire spécifiques. Il considérait que la plus grande menace à cette unicité de chaque peuple était les pensées impérialistes des Lumières françaises (ce que les campagnes de Napoléon Bonaparte ont également mis en évidence). Il existait au départ une relation amicale entre Rousseau et Herder, mais celle-ci a été mise à mal par le fait que Herder renonçait catégoriquement au racisme, alors que Rousseau et les penseurs des Lumières ne le faisaient pas. "Notre partie du monde ne pourrait pas être qualifiée de la plus raisonnable, mais de la plus arrogante, agressive par l'argent : ce qu'elle a donné à ces gens n'est pas la civilisation, mais la destruction des fondements de leur propre culture".
 
Est-ce que quelque chose a changé, alors ?

Bien sûr, beaucoup de choses ont changé au cours des 200 dernières années et il y a de nombreuses références aux guerres mondiales, mais nous y reviendrons plus tard. En termes de contenu, cependant, nous voyons aujourd'hui la même ligne de fracture entre les lumières et les contre-lumières sur la scène internationale. Récemment, Egbert Lachaert, figure de proue du libéralisme, a donné une interview dont le passage suivant mérite d'être mis en exergue : "Je pourrais être heureux n'importe où dans le monde, cela me donne la tranquillité d'esprit". Il a reçu de nombreuses critiques sur les médias sociaux, car il donne l'impression que, lorsque les choses vont mal en Europe occidentale, il peut, avec un peu plus de moyens que le citoyen lambda, déménager là où la situation serait meilleure qu'ici.

Il reflète la façon dont les "gens de Davos" pensent. Le "peuple de Davos" est un terme issu des travaux de Samuel Huntington, qui est connu pour son œuvre principale : Le choc des civilisations (1996). Il s'agit d'un club assez sélect de managers qui considèrent les nations comme obsolètes face à leurs ambitions mondiales, et voient les sociétés comme de grandes entreprises qui doivent avant tout gagner en efficacité. "Les gens de Davos ont peu besoin de ce facteur qu'est la loyauté nationale. Ils considèrent les frontières nationales comme des obstacles qui disparaitront bientôt. Ils considèrent les gouvernements nationaux comme des vestiges du passé. La seule fonction utile de ceux-ci, est de faciliter pour l'élite les opérations mondiales qu'elle entreprend".  Les libéraux, ici en Belgique, ont également réussi, ces dernières années, à obtenir des postes importants dans des institutions supranationales en bradant les intérêts de la nation. Il suffit de penser à Karel De Gucht, Guy Verhofstadt, Didier Reynders et Charles Michel. Culturellement, ils ne ressentent rien pour les nations, rien pour la culture. Dans la pensée libérale, il s'agit avant tout de quelque chose dont l'individu doit se libérer.

En substance, le libéralisme suppose une liberté négative, une liberté que vous gagnez en vous débarrassant, par exemple, de votre nation, de votre classe socio-économique et même, dernièrement, de votre propre sexe. La seule chose qui compte est l'individu fantasmé, qui se fait et se crée continuellement. Ce dernier est un mythe qui se perpétue.

L'individu reçoit en effet une série de bagages culturels et physiques avant même sa naissance, sans avoir le choix en la matière. C'était déjà la critique faite par Herder et Fichte, entre autres, aux Lumières françaises il y a 200 ans avec l'idée du contrat social. Le fait qu'ici, en Flandre, la langue de communication soit actuellement l'anglais, et que cette langue soit officieusement en deuxième position, est l'un des facteurs de notre Geworfenheit dans le monde, de notre "être-jeté-là" dans le monde (Heidegger).

Des civilisations en conflit

Aujourd'hui, nous pouvons aborder toute autre culture de deux manières. D'une part, nous pouvons attendre de notre culture qu'elle soit le modèle du monde et qu'elle s'applique universellement partout. C'est ce qui est généralement mis en avant, également et surtout dans le centre politique. Les valeurs des Lumières sont également considérées comme supérieures à toutes les autres cultures. Cela peut ou non créer intentionnellement la confusion qu'une supériorité technologique ou économique est également synonyme d'une valeur culturelle supérieure. Pour les penseurs libéraux, l'histoire du monde est également linéaire, et tôt ou tard, chaque nation devra s'adapter aux valeurs libérales et universelles formulées dans les Déclarations universelles des droits de l'homme. La déclaration de Gwendolyn Rutten, l'ancienne présidente de l'Open VLD (le parti libéral flamand - l'une des rares personnalités politiques à ne pas avoir réussi à obtenir un poste de premier plan dans une institution supranationale), par exemple, est révélatrice : Notre culture est supérieure aux autres cultures, et c'est quelque chose qui doit être dit. Une référence directe à la vision linéaire de l'histoire et au plan universel qui doit servir à la civilisation mondiale globale.

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Que des civilisations différentes peuvent coexister et négocier sur un pied d'égalité. Le fait qu'il existe plusieurs civilisations, plutôt qu'une seule universelle, remonte également à Oswald Spengler, qui a publié en 1918 et 1922 un énorme ouvrage : Untergang des Abendlandes, dans lequel il travaille avec une méthode comparative entre différentes civilisations à différentes époques. Il y arrive à la conclusion que l'histoire du monde n'est pas linéaire, comme le pensent encore les penseurs des Lumières. L'histoire de chaque civilisation passe par différentes étapes avec des hauts et des bas, et chaque civilisation ou culture possède ses propres caractéristiques qui la rendent unique. La civilisation occidentale, selon Spengler, était unique en raison d'un désir de connaissance et de contrôle, l'archétype de notre âme culturelle étant l'âme faustienne. Faust, qui a vendu son âme au diable en échange du savoir, dans l'œuvre de Goethe. Selon Spengler, c'était déjà notre perte à long terme, que nous essayions de tout calculer à l'excès, et ainsi de remplacer notre propre créativité culturelle par la culture et la production de masse.

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Aujourd'hui, d'ailleurs, une voie similaire est défendue sous une forme contemporaine par des penseurs tels qu'Alexandre Douguine dans la 4e théorie politique, à savoir en plaidant pour la multipolarité. Au lieu de plaider en faveur d'une seule civilisation mondiale universelle (qui a franchi ses barrières en 1991 selon Fukuyama), ces penseurs reconnaissent qu'il n'existe pas et ne doit pas exister une seule morale et une seule culture universellement valables. Chaque culture est culturellement équivalente selon ce principe, même si les cultures se trouvent à un stade de développement différent ou, par exemple, s'organisent selon des principes (par exemple religieux) complètement différents. "La mondialisation n'est donc rien d'autre qu'un modèle mondialement déployé d'ethnocentrisme ouest-européen, ou mieux, anglo-saxon, qui est la pure manifestation d'une idéologie raciste".

Et les marxistes culturels/postmodernistes ?

Les plus grands antiracistes de tous les temps se trouvent à l'extrême gauche. Ils vont même si loin dans leur antiracisme que les partis dits "écologistes" ne peuvent rien faire lorsque les musulmans demandent à pouvoir abattre sans anesthésie ici dans nos pays. Bien entendu, il s'agit d'une motivation électorale, d'une part, parce que les immigrants désignés comme victimes forment une grande réserve potentielle d'électeurs pour demeurer au-dessus du seuil électoral.

Le postmodernisme est quelque chose qui ne plaît pas vraiment à une grande partie de la population. D'autre part, ils puisent souvent leurs idées dans la déconstruction de Derrida ou de Foucault, deux penseurs français plus ou moins proches de l'école de Francfort et exposants de la French Theory, en vogue aux Etats-Unis.

Sans l'admettre eux-mêmes, ils sont les enfants philosophiques des libéraux, qui tentent de porter la libération négative de l'individu à un niveau supérieur. La philosophie moderne, disons la philosophie occidentale depuis le rationalisme de Descartes, est à l'origine de leurs excès durant la première moitié du 20e siècle. Pour cela, ils ont partiellement adopté les idées de philosophes conservateurs tels que Heidegger. Pour eux, l'Occident comportait des éléments susceptibles de conduire à de nouvelles poussées de totalitarisme, et chaque norme sociale (la nation, par exemple, ou le modèle familial) ne serait qu'une construction sociale servant à maintenir au pouvoir un patriarcat et une bourgeoisie.
 
Ce qu'ils négligent, c'est que leur philosophie poursuit la même liberté négative que le libéralisme qu'ils cherchent à critiquer. Comme en témoigne la violence de la cancel culture et la cultural approration, ils s'opposent explicitement aux derniers fondements de la culture occidentale tels que le nationalisme et la famille classique en tant qu'institution. Au centre de tout cela se trouve le sujet solitaire qui doit se composer une identité hybride par lui-même. Mark Elchardus l'a récemment bien résumé dans son ouvrage Reset - Over identiteit, gemeenschap en democratie (= Reset - Sur l'identité, la communauté et la démocratie). L'identité privée, comme celle du sexe (ou plutôt de l'un des 43 sexes) ou de la couleur de la peau, prime sur une forme générale de citoyenneté. De cette manière, ils sapent effectivement la civilisation occidentale, mais ils ne font que réaliser une étape nouvelle dans une évolution dont le libéralisme est le précurseur. L'individu en tant que sujet qui s'oppose aux grandes identités telles que la nation ou la religion.

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Cela ne concorde certainement pas avec le mental de la majorité des migrants ici en Europe occidentale, et encore moins avec le mental de ceux issus d'autres cultures dans leur pays d'origine. En clair, aucune partie significative de la population en Iran ou en Chine n'attendra une heure d'histoire à l'école, sur les drag queens ou une attitude générale anti-religieuse ou anti-nationaliste. C'est principalement dans l'esprit, oui, des enfants de la bourgeoisie et des classes moyennes supérieures de l'Occident même que germent ce genre de pensées. Il ne s'agit cependant pas d'une alternative globale fondée sur une nouvelle culture majoritaire.

En outre, la gauche radicale a également accepté le mondialisme depuis un certain temps. Alors que dans les années 1980, on trouvait encore sporadiquement des éléments altermondialistes dans la gauche radicale, ceux-ci ont maintenant été complètement absorbés par les mouvements à vocation internationale. Michael Hardt et Antonio Negri écrivaient déjà dans les années 1990 qu'une nouvelle forme de socialisme ne pouvait être réalisée qu'à travers "l'empire mondial". Nous nous demandons s'ils voient aujourd'hui leur rêve se réaliser avec la 4e révolution industrielle, ou vice versa ?

En tout cas, il n'y a malheureusement pas d'éléments dans la gauche radicale qui se réconcilient, par exemple, avec l'idée de la souveraineté nationale ou de l'individualité culturelle des Européens eux-mêmes. Au contraire, ils sont plutôt célébrés par des blogs sans intérêt qui diffusent toutes sortes de théories complotistes et rejouent une bataille fantasmée sur un nouveau type, calqué sur celui des années 1930, un combat fantasmagorique qui se déroulerait depuis les années 1970.

Conclusion

La philosophie moderne occidentale et la civilisation libérale comportent donc un élément culturel raciste, à cet égard, les postmodernistes ont raison. La pensée libérale suppose que la supériorité économique et technologique (temporaire) des sociétés libérales équivaut à une supériorité culturelle. Elle fournit souvent une excuse morale pour commencer à bombarder des pays sous le prétexte d'apporter notre démocratie libérale (cf. Syrie, Libye, Irak,...) ou de piller les matières premières d'autres pays pauvres. La meilleure réaction contre le racisme réside dans le corpus doctrinal des contre-lumières, et dans l'idée de la multipolarité.

10:04 Publié dans Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : identité, racisme, lumières, contre-lumières, flandre, feniks | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 10 mars 2022

Le côté obscur des Lumières

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Le côté obscur des Lumières

Yoram Hazony

Source: http://novaresistencia.org/2020/08/14/o-lado-sombrio-do-iluminismo/

Dans ce texte, Yoram Hazony, philosophe et président de la "Fondation Edmund Burke", remet en question plusieurs dogmes de la littérature dite des "néo-Lumières".

Sur la base d'éléments historiques et conceptuels, l'auteur démontre que les différents courants conservateurs ont développé leurs propres idées sur la raison, l'équilibre des pouvoirs et la liberté. Ainsi, le siècle des Lumières n'a "inventé" aucune de ces vertus civiques et les a même persécutées et censurées à plusieurs reprises

Actuellement, de nombreuses personnes font la promotion des Lumières. Après le vote du Brexit et l'élection du président Trump, David Brooks a publié une proposition pour le "projet des Lumières", le déclarant attaqué et demandant aux lecteurs de se "lever" et de le sauver. Le magazine Commentary m'a envoyé une lettre demandant un don pour fournir aux lecteurs "les lumières que nous désirons tous si désespérément". Et maintenant, il y a le nouveau livre impressionnant de Steven Pinker, Enlightenment Now, qui pourrait être la déclaration définitive du mouvement néo-Enlightenment qui lutte contre la marée de la pensée nationaliste en Amérique, en Grande-Bretagne et au-delà.

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Avons-nous tous la nostalgie des Lumières? Moi pas. J'aime et je respecte M. Pinker, M. Brooks et d'autres personnes de leur camp, mais la philosophie des Lumières n'a pas obtenu une fraction du bien qu'ils prétendent apporter et, au contraire, a causé beaucoup de mal.

Les boosters actuels des Lumières sont un cas intéressant. La science, la médecine, les institutions politiques libres, l'économie de marché - ces choses ont considérablement amélioré nos vies. Ils sont tous, écrit Pinker, le résultat "d'un processus initié par les Lumières à la fin du 18e siècle", lorsque les philosophes "ont remplacé le dogme, la tradition et l'autorité par la raison, le débat et les institutions qui se donnaient pour tâche de rechercher la vérité". Brooks est d'accord, assurant à ses lecteurs que "le projet des Lumières nous a donné le monde moderne". Remerciez donc "des penseurs comme John Locke et Emmanuel Kant, qui ont fait valoir que les gens devraient cesser de se soumettre aveuglément à l'autorité" et plutôt "réfléchir à partir de zéro".

Comme le résume Pinker, "le progrès est un cadeau des idéaux des Lumières et se poursuivra dans la mesure où nous nous consacrons à ces idéaux."

Très peu de cela est vrai. Considérez l'affirmation selon laquelle la Constitution américaine est un produit de la pensée des Lumières, issue du rejet des traditions politiques du passé et de l'application sans retenue de la raison humaine. Pour réfuter cette idée, il suffit de lire les auteurs antérieurs qui ont contribué à asseoir la constitution anglaise. Le traité largement diffusé du 15e siècle In Praise of the Laws of England, écrit par le juriste John Fortescue, explique clairement la procédure régulière de la loi et la théorie aujourd'hui appelée checks and balances. Fortescue écrit que la constitution anglaise établit la liberté personnelle et la prospérité économique en protégeant l'individu et ses biens du gouvernement. Les protections qui figurent dans la Déclaration des droits des États-Unis ont été établies principalement dans les années 1600 par ceux qui ont rédigé les documents constitutionnels de l'Angleterre - des hommes comme John Selden, Edward Hyde et Matthew Hale.

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Ces hommes d'État et philosophes ont formulé les principes du constitutionnalisme anglo-américain moderne des siècles avant la création des États-Unis. Cependant, ils n'étaient pas des hommes des Lumières. Ils étaient religieux, nationalistes anglais et conservateurs politiques. Ils connaissaient l'affirmation selon laquelle la raison sans restriction devait refaire la société, mais ils l'ont rejetée en faveur de l'élaboration d'une constitution traditionnelle qui a fait ses preuves. Lorsque Washington, Jay, Hamilton et Madison ont mis en place un gouvernement national pour les États-Unis, ils se sont principalement tournés vers cette tradition conservatrice, en l'adaptant aux conditions locales.

Il n'y a pas non plus beaucoup de vérité dans l'affirmation selon laquelle nous devons la science et la médecine modernes à la pensée des Lumières. Une revendication d'origine plus sérieuse peut être faite par la Renaissance, la période entre le 15e et le 17e siècle, principalement en Italie, en Hollande et en Angleterre. Les rois anglais, liés à la tradition, ont par exemple parrainé des institutions scientifiques innovantes, comme le Collège royal des médecins, fondé en 1518. L'un de ses membres, William Harvey, a découvert la circulation sanguine au début du 17e siècle. La Royal Society of London pour l'amélioration des connaissances naturelles, fondée en 1660, était dirigée par des hommes comme Robert Boyle et Isaac Newton, des figures décisives dans l'évolution de la science physique et de la chimie. Là encore, il s'agissait de personnalités politiquement et religieusement conservatrices. Ils connaissaient les arguments, plus tard associés aux Lumières, pour renverser la tradition politique, morale et religieuse, mais les ont fondamentalement rejetés.

En bref, les principales avancées que les enthousiastes des Lumières d'aujourd'hui veulent revendiquer ont été "déclenchées" bien plus tôt. Et il n'est pas certain que les Lumières aient été utiles lorsqu'elles sont arrivées sur l'avant-scène intellectuelle.

Qu'est-ce donc que les "Lumières" ? Ce terme a été promu pour la première fois par le philosophe Emmanuel Kant, à la fin du 18e siècle. Pinker ouvre son premier chapitre en souscrivant à l'affirmation de Kant selon laquelle la raison seule permet aux êtres humains de sortir de leur "immaturité auto-imposée" en mettant de côté les "dogmes et formules" de l'autorité et de la tradition.

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Pour Kant, la raison est universelle, infaillible et a priori - c'est-à-dire indépendante de l'expérience. En ce qui concerne la raison, il existe une réponse éternellement valable et inexactement correcte à toutes les questions de science, de moralité et de politique. L'homme n'est rationnel que dans la mesure où il le reconnaît et passe son temps à essayer d'arriver à cette réponse correcte.

Cette arrogance étonnante repose sur une idée-force : les mathématiques peuvent produire des vérités universelles en partant de prémisses évidentes - ou, comme l'avait dit René Descartes, "d'idées claires et distinctes" - puis en procédant par déductions infaillibles à ce que Kant appelait la "certitude apodictique". Puisque cette méthode fonctionnait en mathématiques, avait insisté Descartes, elle pouvait être appliquée à toutes les autres disciplines. Cette idée a ensuite été adoptée et affinée par Thomas Hobbes, Baruch Spinoza, John Locke et Jean-Jacques Rousseau, ainsi que par Kant.

Cette vision de la "raison" - et de son pouvoir, libérée des chaînes de l'histoire, de la tradition et de l'expérience - est ce que Kant a appelé les "Lumières". C'est complètement faux. La raison humaine est incapable d'atteindre des réponses universellement valides et inextricablement correctes aux problèmes de la science, de la morale et de la politique en appliquant les méthodes des mathématiques.

Le premier avertissement à ce sujet fut le magnum opus de Descartes en 1644, "Les principes de la philosophie", qui prétendait parvenir à une détermination finale de la nature de l'univers en passant des prémisses évidentes aux déductions infaillibles. Cet ouvrage volumineux est si outrageusement absurde qu'il n'existe aujourd'hui aucune version anglaise complète. Néanmoins, le chef-d'œuvre de Descartes a fait des ravages en Europe et a été pendant des décennies le principal manuel de l'école cartésienne des sciences. Kant a suivi cet exemple douteux avec ses "Fondements métaphysiques de la science naturelle" (1786), dans lesquels il prétendait avoir déduit les lois du mouvement de Newton en utilisant la raison pure, sans preuve empirique.

Il fut un temps où l'on comprenait bien qu'une grande partie du succès du monde moderne provenait de traditions conservatrices qui se méfiaient ouvertement de la raison. Lorsque j'étais étudiant diplômé à Rutgers dans les années 1980, le cours d'introduction à la théorie politique moderne comportait une section intitulée "Critiques des Lumières". Ces personnalités comprenaient des penseurs plus conservateurs tels que David Hume, Adam Smith et Edmund Burke. Ils ont souligné le manque de fiabilité du "raisonnement abstrait", qui, selon eux, pouvait finir par justifier pratiquement n'importe quelle idée, aussi déconnectée de la réalité soit-elle, tant qu'elle semblait évidemment vraie pour quelqu'un.

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L'un de ces mythes était l'affirmation de Locke selon laquelle l'État était fondé par un contrat entre des individus libres et égaux - une théorie que les critiques des Lumières considéraient comme historiquement fausse et dangereuse. Bien que la théorie ait fait relativement peu de dégâts dans la Grande-Bretagne plus traditionnelle, elle a entraîné une catastrophe en Europe. Importée en France par Rousseau, elle a rapidement renversé la monarchie et l'État, produisant une série de constitutions ratées, le règne de la Terreur et enfin les guerres napoléoniennes - tout cela au nom de la raison infaillible et universelle. Des millions de personnes sont mortes alors que les armées de Napoléon tentaient de détruire et de reconstruire tous les gouvernements d'Europe, selon la théorie politique jugée correcte et seule autorisée par la philosophie des Lumières. Cependant, Napoléon essayait simplement, selon l'expression de Brooks, de "penser les choses à partir de zéro".

Les défenseurs des Lumières ont tendance à sauter cette partie de l'histoire. Le livre de 450 pages de Pinker ne mentionne pas la Révolution française. Pinker cite Napoléon comme un "exposant de la gloire martiale" mais ne dit rien sur le lancement d'une guerre universelle au nom de la raison. Ces auteurs ont également tendance à transmettre la dette de Karl Marx envers les Lumières. Marx se voyait comme le promoteur de la raison universelle, prolongeant l'œuvre de la Révolution française, insistant pour que les travailleurs du monde cessent (toujours selon les mots de Brooks) de "se soumettre aveuglément à l'autorité". La science que Marx a développée "à partir de rien" a tué des dizaines de millions de personnes au 20e siècle.

Les Lumières ont également propagé le mythe selon lequel les seules obligations morales des gens sont celles qu'ils choisissent librement par le raisonnement. Cette théorie a dévasté la famille, une institution fondée sur des obligations morales que beaucoup de gens, semble-t-il, ne choisiront pas à moins d'être guidés par la tradition. Le livre de Pinker est rempli de graphiques montrant l'amélioration des conditions matérielles au cours des derniers siècles. Il ne nous offre aucun graphique décrivant l'effondrement du mariage ou l'augmentation des naissances hors mariage dans les sociétés des "Lumières". Il n'est pas non plus préoccupé par la destruction de la religion ou de l'État-nation. Kant estimait que les deux étaient en contradiction avec la raison, et Pinker ne voit aucune raison de ne pas être d'accord.

Ce qui nous amène au cœur de ce qui ne va pas avec le mouvement néo-lumières. Pinker fait l'éloge du scepticisme en tant que pierre angulaire du "paradigme des Lumières sur la manière d'obtenir des connaissances fiables", mais les figures de proue de la philosophie des Lumières n'étaient pas des sceptiques. Bien au contraire, leur objectif était de créer leur propre système de vérités universelles et certaines, et dans cette quête, ils étaient aussi rigides que les médiévistes les plus dogmatiques.

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Les conservateurs anglo-écossais, de Richard Hooker et Selden à Smith et Burke, recherchaient quelque chose de très différent. Ils défendaient les coutumes nationales et religieuses tout en cultivant un "scepticisme modéré" - une combinaison que le monde anglophone appelle le "bon sens". Si les vieilles institutions n'ont pas besoin d'être réparées de manière évidente, le bon sens veut qu'on les laisse en l'état, car il y a toujours le risque d'aggraver la situation. Cependant, ils ont également vu le potentiel des tentatives d'amélioration des connaissances de l'humanité, tant que la faiblesse et le manque de fiabilité de la raison humaine étaient gardés en vue. Comme l'écrit Newton dans ses "Opticks" : "Argumenter à partir d'expériences et d'observations par induction n'est pas une démonstration de conclusions générales, mais c'est la meilleure façon d'argumenter ce que la nature des choses admet."

Je pense souvent à ces mots modérés et sceptiques ces jours-ci, alors que je suis la transformation politique et culturelle du monde anglophone. Les élites américaines et britanniques, autrefois attachées à un mélange de tradition et de scepticisme, réclament désormais les Lumières. Ils insistent sur le fait qu'ils ont atteint des certitudes universelles. Ils font preuve d'un mépris digne de Kant lui-même envers ceux qui refusent d'adopter leurs dogmes - les qualifiant de "non éclairés", "immatures", "illibéraux", "rétrospectifs", "déplorables", et pire encore.

Si ces élites avaient encore accès au bon sens, elles ne parleraient pas comme ça. L'excès de confiance dans les Lumières a suffisamment dérapé pour justifier de sérieux doutes sur les affirmations faites au nom de la raison - tout comme le doute est précieux pour aborder d'autres systèmes de dogmes. De tels doutes conseilleraient la tolérance à l'égard des différentes façons de penser. Les institutions nationales et religieuses ne correspondent peut-être pas au siècle des Lumières, mais elles peuvent néanmoins avoir des choses importantes à nous apprendre.

La vérité politique la plus importante de notre génération est peut-être celle-ci : vous ne pouvez pas avoir les Lumières et le scepticisme. Vous devez choisir l'un d'entre eux.

jeudi, 06 janvier 2022

Nick Land et la pertinence des "Lumières sombres"

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Nick Land et la pertinence des "Lumières sombres"

par Pietro Missiaggia

Le philosophe britannique Nick Land, né en 1962, connu comme le père de ce courant philosophique né dans les années 90, au moment de la crise des idéologies, et souvent appelé accélérationnisme, est peu connu en Italie et dans les pays de l'Europe méditerranéenne ; ce n'est que ces deux dernières années que deux de ses œuvres ont été traduites en italien Collasso. Scritti 1987-1994 édité par Luiss University Press, et L'Illuminismo Oscuro traduit et édité par Gog Edizioni. Nous voudrions analyser certains aspects de cette dernière œuvre, qui représentent les théories novatrices de Land et sont souvent utiles pour comprendre notre époque.

The_Dark_Enlightenment.jpgThe Dark Enlightenment est un texte publié par le penseur britannique en 2013 par "épisodes" dans l'un des nombreux blogs internet fréquentés par les membres de la "droite alternative" ou Alt-Right. Le livre de Land a souvent été défini, par de nombreux commentateurs plus ou moins ignorants, de bonne ou de mauvaise foi ou simplement politiquement corrects (une erreur également commise par les éditeurs de Gog), comme un texte inspirateur du suprémacisme blanc, fortement apologétique envers l'eugénisme et considéré comme la somme d'une pensée irrationnelle, agressive, anti-égalitaire et purement cérébrale. Dans ce court texte, nous analyserons des extraits du texte de Land pour essayer de comprendre objectivement sa pensée et ce qui peut être utile en elle pour notre époque, qui est une époque de dissolution.

Commençons par dire que Land est très critique à l'égard des mouvements qui se réfèrent au suprémacisme blanc, au suprémacisme noir, etc. et qui considèrent l'histoire comme un phénomène de lutte entre les races (racisme), tout comme il est critique à l'égard de la nostalgie fasciste et nationale-socialiste et des apologistes du politiquement correct. Selon le Land: "Il est extrêmement commode, lorsqu'on construit des structures pseudo-capitalistes dirigées par l'État, ouvertement corporatistes et à troisième voie, de détourner l'attention des expressions de colère de la paranoïa raciale blanche, surtout lorsque celles-ci sont décorées par des insignes nazis maladroitement modifiés, des casques à cornes, une esthétique à la Leni Rienfenstahl et des slogans empruntés généreusement à Mein Kampf. Aux États-Unis - et donc, avec un décalage réduit, également à l'échelle internationale -, des draps blancs aux divers titres pseudo-maçonniques, avec croix brûlantes et cordes de suspension, ils ont acquis une valeur théâtrale comparable" (op. cit., Roma 2021, p. 68).

Pour Land, la paranoïa raciale des suprématistes blancs est extrêmement nuisible non seulement à la création d'un système alternatif mais aussi à eux-mêmes ; en effet, pour l'auteur "l'Übermensch racial est un non-sens" (ibid., p. 130) et il ajoute que "aussi extrêmement fascinants que soient les nazis [...] ils posent une limite logique à la construction programmatique et à l'engagement de la politique identitaire blanche". Se tatouer une croix gammée sur le front ne change rien". (ibid). Les suprémacistes blancs du monde anglophone, même s'ils ne le réalisent pas, alimentent le système dans son idiotie et son théâtre en manquant d'une ligne politique cohérente et en étant destinés, pour Land, à succomber comme notre monde vers l'épuisement. Pour Land, comme il le précise à la page 129 de son manifeste, sacrifier la modernité au nom de la race revient à se démoder soi-même ; plus que se démoder, c'est faire le jeu de la modernité elle-même, en l'alimentant de ce qu'elle voudrait voir comme une paranoïa raciale, qui se traduit par deux formes doubles : la paranoïa raciale du suprémacisme et la paranoïa anti-raciale typique de la pensée politiquement correcte.

41ntp4UMRiL._SX351_BO1,204,203,200_.jpgPour Land, en effet, la référence constante à un croquemitaine qui voit dans le IIIe Reich le mal absolu est délétère, mais c'est aussi la force de la modernité qui, à partir de la seconde moitié du XXe siècle, fait "jaillir la force politique du monde globalisé exclusivement du cratère incinéré du IIIe Reich" (p. 72). Cette tendance conduit, pour notre auteur britannique, à délaisser la rationalité pour l'irrationalité ; cela n'a rien d'étonnant : les hommes rationnels sont rares, surtout à une époque comme la nôtre, caractérisée par l'émotivité et le manque d'analyse: "Toute tentative de nuance, d'équilibre et de proportion dans le cas moral contre Hitler revient à mal interpréter le phénomène " (p. 75). En effet, l'hitlérisme et le totalitarisme national-socialiste sont souvent interprétés non pas comme un phénomène politique lié à une période historique spécifique avec ses propres présupposés, mais comme quelque chose d'éternel aux accents religieux abrahamiques: l'antéchrist présentant le mal absolu. C'est ce que critique Land, comme en témoignent ses propos: "Si embrasser Hitler comme un Dieu est un signe de déplorable confusion politico-spirituelle (quand c'est bien), reconnaître sa singularité historique et sa signification sacrée est presque obligatoire, car tous les hommes de foi réfléchie le considèrent comme un complément précis du Dieu incarné - l'Anti-Messie détecté, l'Adversaire - et cette identification a la force d'une vérité évidente. (Quelqu'un s'est-il déjà demandé pourquoi le sophisme logique de la reductio ad Hitlerum fonctionne si bien ?)" (p. 77).

La critique par Nick Land du racisme biologique grossier et dépassé, typique de certains cercles de la droite alternative américaine et du monde anglophone en général, ainsi que des tendances à la reductio ad Hitlerum du politiquement correct sous toutes ses formes, est tout à fait claire ; il n'est pas nécessaire d'apporter d'autres précisions pour comprendre que Land critique sévèrement le racisme biologique ainsi que son opposé, l'antiracisme délirant.

Examinons maintenant ce que Land entend par "Lumières sombres" et pourquoi le concept qu'il propose peut être considéré comme profondément novateur. Land propose les Lumières comme le véritable nom de la modernité (p. 17) et considère implicitement comme son digne héritier les Lumières libérales qui, au cours du XXe siècle, ont triomphé des deux totalitarismes qui leur ont disputé la suprématie: le communisme/socialisme et le national-socialisme/fascisme, comme le dit aussi Alexandre Douguine dans sa Quatrième théorie politique (Nova Europa Edizioni, Rome 2018). Pour Land, "un Dark Enlightenment cohérent [est] dépourvu à ses débuts de tout enthousiasme rousseauiste pour l'expression populaire" (p. 23) et "Là où le progressive Enlightenment voit des idéaux politiques, le Dark Enlightenment voit des appétits" (ibid.).

Land considère la démocratie comme un cancer incurable, de même que l'expression populaire et les différents populismes. La démocratie n'est pas un idéal, c'est l'auge des politiciens. Pour Land, le modèle naturel serait un État qui permet une grande liberté économique et la gestion privée de sa propre vie, comme les technocraties asiatiques, avec une référence particulière à Hong Kong, Singapour, Taiwan, etc., où la démocratie est souvent absente et où ces États sont basés sur un modèle connu sous le nom de néo-caméralisme, l'État d'entreprise (Land définirait le modèle naturel de l'homme comme étant celui de l'Asie). Selon Land, dans le sillage de deux autres penseurs considérés comme des Américains libertaires (presque anarcho-capitalistes selon l'opinion populaire) : Hans Hermann Hoppe et Curtis Yarvin (alias Moldbug) (photo, ci-dessous) et dans le sillage du décisionnisme de Hobbes, il comprend que "l'État ne peut être supprimé mais il peut être guéri de la démocratie" (p. 27).

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Un véritable libertarianisme selon Land doit cependant proposer de mettre en évidence, dans le sillage typiquement anglo-saxon, la supériorité de la liberté sur la démocratie: il faut pouvoir opter pour une sortie libre. Quiconque le souhaite doit être libre de créer son propre système et d'être laissé tranquille, ce que la démocratie moderne ne fait pas, avec ses chasses aux sorcières et son politiquement correct, avec ses guerres humanitaires pour la démocratie et avec sa rhétorique sur les droits de l'homme. Des droits de l'homme qui ne sont même pas respectés par ces mêmes démocraties qui tonnent haut et fort la parodie de progressisme et de liberté... Alors que la seule liberté de la démocratie est celle de la voix, du vote, c'est-à-dire la protestation pour obtenir plus de droits et de pain, mais qui en réalité ne mène à rien. Pas de voix mais un discours libre, telle est la devise du Land. Que faire de la démocratie ? Pour notre auteur, il nourrit "une population largement infectée par le virus zombie qui titube vers un effondrement social cannibale, l'option privilégiée devrait être la quarantaine" (p. 39).

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Avant de conclure sur l'utilité de s'inspirer de la pensée de Land dans notre époque historique actuelle, il est nécessaire de préciser ce que notre auteur pense de l'eugénisme. Land définit l'homme comme inégal, dans le sens où chaque homme est différent et où l'égalité totale n'existera jamais, mais il ne faut pas y voir un phénomène négatif, ni une suprématie du fort sur le faible, mais plutôt, pour reprendre une formule marxiste telle que "chacun selon ses capacités et chacun selon ses besoins", l'idéal pour l'auteur britannique serait une société basée sur la hiérarchie. Cette hiérarchie, cependant, ne doit pas devenir, comme l'a dit Julius Evola, un hiérarchisme, même s'il partait de prémisses très différentes; elle doit consister en un soutien mutuel sur la base d'une sorte d'état organique. En fait, Land conclut son texte en affirmant que "les nationalistes raciaux s'inquiètent de voir leurs petits-enfants se ressembler" (p. 149) et que lorsque l'on voit la réalité "depuis l'horizon bionique, tout ce qui émerge de la dialectique de la terreur raciale devient la proie des banalités". Il est temps d'aller au-delà de cela" (p. 150). C'est-à-dire que pour le Land, il est nécessaire d'aller au-delà des moyens grossiers de l'eugénisme et du racisme biologique. Selon lui, il est nécessaire de créer une nouvelle élite, en utilisant également les moyens technologiques des machines, et à ses yeux, les anciens moyens sont banals et obsolètes, ainsi que synonymes de stupidité. Ce qui peut et doit être critiqué et réprimandé à Land, c'est que, en bon anglo-saxon, il prend en considération le QI comme synonyme de jugement, mais qu'en penseur objectif, il en reconnaît les limites.

Ayant clarifié la stupidité de juger Land comme un penseur raciste ou comme un idéologue de la soi-disant Alt-Right, passons à ce que l'on peut tirer de bon de Land. Tout d'abord, dans sa conclusion avec l'horizon bionique, il propose que la seule façon de chevaucher le tigre de la post-modernité est d'utiliser la même technique, mais en prenant soin de la contrôler, et comme Carl Schmitt l'a dit dans son Dialogue sur le pouvoir (Edizioni Adelphi), la technique n'est ni bonne ni mauvaise mais neutre. L'homme doit l'utiliser sans en perdre le contrôle, sinon, comme le dit également le bon Theodore Kaczynski dans son ouvrage Industrial Society and its Future, si l'homme ne contrôle pas la technologie et la technologie qui en découle, il sera totalement insatisfait et incapable de satisfaire ses besoins. C'est-à-dire qu'il ne se sentira pas satisfait de la technique et de la technologie qui en découle et de leurs conclusions, mais complètement et perpétuellement insatisfait, incapable et souvent frustré, ce qui le conduira à un état d'épuisement nerveux. 

Nick Land nous apprend à penser par nous-mêmes, à rejeter le style paranoïaque du système dans son ensemble, c'est-à-dire dans ses illusions, tant celles de ses ennemis qui ne font que l'alimenter que celles du système lui-même. C'est le sublime Trash, comme dirait le slovène Žižek. Que faire à la fin de nos jours ? Comme nous l'enseignent déjà Evola et le Jünger du Traité du Rebelle, nous devons nous y rendre pour nous défendre et attaquer selon la situation, en nous enracinant et en prenant des références stables dans le navire chancelant de la modernité qui s'approche de la postmodernité pour attendre une sortie libre espérée du système qui, comme l'espère Land, se produira parce que le système se nourrit jusqu'à l'éclatement non seulement à cause des problèmes générés par le substrat socio-économique mais surtout à cause de son éternelle idiotie, sa schizophrénie, en somme: par tous les déchets qu'elle produit. Le système, en bref, est un grand même. Land a déclaré : "Le même est mort. Vive le même!". A cela, nous devons répondre que le système n'est pas encore mort, mais qu'il va mourir et que nous ne nous soucions pas de savoir quand, nous vivons de notre libre individualité et de notre pouvoir parce que nous sommes simplement... 

samedi, 18 novembre 2017

Robert Steuckers : Discours de Rotterdam, 14 octobre 2017

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Robert Steuckers :

Discours de Rotterdam, 14 octobre 2017

Retrouver un âge d’or ?

Traduction française du script néerlandais

Si nous voulons, comme le titre de ce colloque l’indique, retrouver un âge d’or, ce sera bien entendu un âge d’or en concordance avec nos véritables racines et non pas un âge d’or qui serait le produit quelconque d’une forme ou une autre d’ingénierie sociale ; ce sera donc un âge d’or qui constituera un retour à des sources vives sans être simultanément un rejet du progrès technique et/ou scientifique, surtout pas sur le plan militaire. Ce retour sera donc bel et bien de facture « archéofuturiste » où l’avenir de nos peuples sera déterminé par des valeurs éternelles et impassables qui ne contrecarreront pas l’audace technicienne. Retourner à un âge d’or signifie donc réinsuffler de la vie à des valeurs-socles qui remontent au moins à la « période axiale de l’histoire » (ou « Moment Axial ») ou, même, qui remontent à plus loin dans le temps et ont façonné l’esprit d’ancêtres plus anciens encore.

On pourra appeler l’ensemble de ces valeurs « Tradition » ou non, elles constituent de toutes les façons, le fond propre de notre civilisation. On peut poser comme vrai qu’elles ont des racines plus profondes que les pseudo-valeurs des soi-disant Lumières, trop souvent insipides et devenues perverses au fil des décennies. Et si nous considérons les « Lumières » comme le véhicule intellectuel d’un flot de perversités, nous entendons désigner ainsi, avant tout, le progressisme actuel qui fonctionne comme un instrument et qui n’a plus qu’un seul but : éradiquer les valeurs anciennes, immémoriales, et les valeurs du « Moment Axial ». L’élimination de ces valeurs nous empêche d’avoir un avenir car, tout simplement, les peuples qui n’ont plus de valeurs en eux, en leur intériorité collective, errent et s’agitent totalement désorientés et perdent leurs capacités à façonner le politique (n’ont plus de Gestaltungskraft politique).

Pour paraphraser Arthur Moeller van den Bruck, qui écrivait dans les années 1920, je dirais que le libéralisme tue les peuples au bout de quelques décennies, s’ils suivent les règles que préconise cet ensemble de dispositifs idéologiques. Aujourd’hui, avec un vocabulaire nouveau, je dirais que toute idéologie reposant sur des simplifications exagérées tout en prétendant, de cette façon, avoir les « Lumières » comme source d’inspiration, étouffe la Gestaltungskraft politique des peuples. La France, l’Angleterre, partiellement les Etats-Unis et surtout l’Allemagne occidentalisée, sont aujourd’hui les exemples les plus emblématiques d’une involution de ce type.

Les Etats-Unis et l’Allemagne ont certes connu et connaissent encore un développement technique exceptionnel, ont atteint depuis la fin du 19ème siècle un niveau très élevé de technicité et de puissance technique mais, de nos jours, les indices s’accumulent pour montrer que leurs sociétés respectives vivent un déclin total et très préoccupant. En Allemagne, cette involution va de pair avec l’application systématique d’une stratégie bien précise, celle de la Vergangenheitsbewältigung, sorte de réécriture du passé où celui-ci est toujours décrit et considéré comme la source du mal absolu. Et cela ne vaut pas seulement pour le passé national-socialiste. Ce processus constant d’autodénigrement joue lourdement sur l’estime de soi nationale et induit une acceptation totale de toutes les pratiques politiques et sociales permettant de saborder définitivement la société. La politique d’accueil des réfugiés, qu’a imposée Madame Merkel peut être considérée comme le point culminant de cette pratique perverse de négation de soi. Une pratique que les pays du Groupe de Visegrad ne sont pas prêts d’accepter sans discuter.

En France, on observe un démantèlement graduel de l’Etat fort, jadis vénéré par des générations de Français, depuis Bodin, Louis XIV et Colbert. Un Etat fort que De Gaulle voulait maintenir. Eric Zemmour a esquissé récemment et avec brio une histoire du « suicide français ». Ce suicide a partiellement été induit par un livre du début des années 1980, lequel a joué un rôle particulièrement perfide dans l’émergence d’une Vergangenheitsbewältigung spécifiquement française. Ce livre a pour titre L’idéologie française et est issu de la plume du célèbre Bernard-Henri Lévy. Dans ce livre, tous les courants politiques non libéraux et non sociaux-démocrates sont estampillés « fascistes », y compris certains aspects importants du paléo-communisme français, du gaullisme en général et même du personnalisme chrétien d’un idéologue pusillanime comme Emmanuel Mounier. Dans ce livre de Lévy nous découvrons tous les instruments de ce qu’un politologue néerlandais, spécialiste des questions françaises, Luk de Middelaar, a appelé avec justesse le « politicide ».

Dans l’Allemagne d’après-guerre, les « Lumières » (Aufklärung) ont été posées comme le courant philosophique qui devait immuniser les Allemands et, dans la foulée, tous les autres Européens contre le mal politique en soi. Jürgen Habermas deviendra ainsi le théoricien par excellence de ces nouvelles Lumières ouest-allemandes qui devaient définitivement effacer les legs d’un mauvais passé.

Cependant, la vulgate des Lumières assénées par Habermas et traduites dans la pratique et le quotidien par une nuée de journalistes et de feuilletonistes zélés n’est jamais, finalement, qu’une vision tronquée des Lumières pour qui a réellement étudié l’histoire culturelle du 18ème siècle en Allemagne et en Europe. Le monde du 18ème et, a fortiori, celui que nous avons devant nous aujourd’hui, n’est pas aussi simpliste que le sieur Habermas et ses séides veulent bien l’admettre. Le « politiquement correct » fonctionne donc sur base d’une interprétation bâclée et bricolée de l’histoire des Lumières, lesquelles sont davantage plurielles.

Les Lumières, selon les adeptes de l’Ecole de Francfort et selon les fans de son élève modèle Habermas, sont certes un héritage plus ou moins légitime du 18ème siècle. Les Lumières, dans leur ensemble, ont cependant connu d’autres avatars, bien différents et bien plus féconds. Les Lumières d’aujourd’hui, politiquement correctes, ne sont finalement qu’une mauvaise combinaison de « blueprints » pour reprendre une expression de l’Anglais Edmund Burke lorsqu’il décrivait les dérives sanglantes de la révolution française. Burke n’est pourtant pas un obscurantiste ni l’adepte d’une scolastique vermoulue. Il critique la révolution française parce qu’elle articule une interprétation fausse des droits de l’homme. Il y a donc d’autres manières d’interpréter les droits de l’homme, surtout parce que l’Ancien Régime n’était pas un désert juridique et parce que les communautés concrètes y bénéficiaient de droits bien profilés.

Plus tard, dans les marges celtiques du Royaume-Uni, surtout dans la future République d’Irlande, émerge une interprétation particulière des droits de l’homme qui vise à offrir aux citoyens des droits, bien évidemment, sans nier l’esprit émancipateur des Lumières en général, mais sans pour autant renier les racines celtiques de la culture populaire. Dès lors, il s’agissait aussi de dégager les droits concrets des citoyens de tous les idéologèmes éradicateurs qui avaient vicié les Lumières et leur interprétation officielle dans notre Europe contemporaine. Après la seconde guerre mondiale, des juristes et des ministres irlandais ont fait condamner la République française en suivant tout à la fois les règles de l’ONU concernant les droits de l’homme et leurs propres réflexes panceltiques parce que Paris avait fait assassiner ou condamner des militants bretons. Ceux-ci avaient trouvé chez les Irlandais les avocats internationaux qu’il fallait. Remarquons au passage que le ministre McBride, qui fut l’un de ces avocats, est devenu ultérieurement le Président d’Amnesty International et Prix Nobel en 1974. La République qui, selon Lévy, est un système représentant la « rectitude politique » de la manière la plus emblématique, a donc été condamnée, dans les années 50, pour avoir foulé les droits de l’homme aux pieds !

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Les Lumières selon Johann Gottfried Herder

Ensuite, puisque le thème de ce colloque est de baliser le retour éventuel à un nouvel âge d’or, il nous faut impérativement évoquer un fait historique, philosophique et littéraire que l’on a eu tendance à oublier ici en Europe continentale : les Lumières ne sont pas seulement celles que veut imposer Lévy car il y a aussi celles de Johann Gottfried Herder qui opère aujourd’hui un discret mais significatif retour dans les colonnes des meilleurs sites conservateurs ou « altright » dans le monde anglo-saxon.

Selon Herder, l’homme qui incarne les Lumières allemandes du 18ème siècle, nous devons toujours et partout respecter deux principes, en faire nos fils d’Ariane : « Sapere Aude » (« Ose savoir ! ») et « Gnôthi seauton » (« Connais-toi toi-même »). Il ne peut y avoir de Lumières émancipatrices selon ce pasteur évangélique, venu de Riga en Lettonie actuelle, si l’on ne respecte pas ces deux principes. Si un mouvement politique et/ou philosophique, prétendant dériver des Lumières, n’accepte pas que l’on puisse, sans crainte, oser penser au-delà des lieux communs, qui tiennent le pouvoir et mènent les sociétés vers une dangereuse stagnation, alors les « Lumières » qu’il prétend incarner, ne sont pas de vraies et efficaces « Lumières » mais une panoplie d’instruments pour imposer une tyrannie. Un peuple doit donc se connaître, recourir sans cesse aux sources les plus anciennes de sa culture, pour être vraiment libre. Il n’existe pas de liberté s’il n’y a plus de mémoire. Travailler au réveil d’une mémoire endormie signifie dès lors poser le premier jalon vers la reconquête de la liberté et aussi, finalement, de la capacité à agir de manière libre et utile sur la scène internationale. Herder nous demande donc de retrouver les racines les plus anciennes et les plus vives de notre culture sans manifester une volonté perverse de vouloir les éradiquer.

Un âge d’or ne reviendra dans les sociétés européennes que si  -et seulement si-  les institutions politiques des « Lumières » fausses et superficielles, dont s’inspirent l’idéologie dominante et la « rectitude politique », seront remplacées par d’autres, inspirées cette fois de nouvelles et puissantes Lumières, telles que Herder les a théorisées. Heidegger ne dira pas autre chose même s’il a utilisé un autre langage, plus philosophique, plus ardu. Pour le philosophe de la Forêt Noire et du Pays Souabe, la civilisation européenne était victime de la « chienlit de la métaphysique occidentale », une chienlit qui devait être éliminée pour qu’une aurore nouvelle puisse se lever. Le vocabulaire utilisé par Heidegger est extrêmement compliqué pour le citoyen lambda. Un professeur américain de philosophie, Matthew B. Crawford, esquisse d’une manière brève et concise l’intention de Heidegger, dont il est l’un des disciples : pour ce Crawford, de la « Virginia University », la « métaphysique occidentale » que fustigeait le philosophe allemand est tout simplement le fatras dérivé des pseudo-Lumières telles qu’elles avaient été formulées par Locke et ses disciples, donc le fatras des pseudo-Lumières françaises et anglaises, parce que celles-ci ne veulent plus avoir aucun contact avec les réalités triviales de notre monde quotidien. Mieux : elles refusent toute approche du concret, posé comme indigne de l’attention du philosophe et de l’honnête homme. Il existe donc, à ce niveau-ci de ma démonstration aujourd’hui, deux courants des Lumières : le courant organique de Herder et le courant abstrait des autres, qui nient la réalité telle qu’elle est et nient aussi le passé réel des peuples.

Crawford revient au concret

Dans cette perspective, Crawford constate que toute société qui persiste à stagner dans un appareil idéologique dérivé de cette interprétation dominante et officielle des Lumières du 18ème, se condamne au déclin et se précipite vers une mort certaine. C’est la raison pour laquelle Crawford a décidé d’abandonner sa chaire et d’ouvrir un atelier de réparation de motos Harley Davidson pour pouvoir humer l’odeur bien réelle du cambouis, de l’essence et du cuir, pour pouvoir écouter la musique des outils heurtant le métal de manière rythmée. Nous avons là une bien singulière option pour un professeur de philosophie cherchant à retourner au concret. Soit. Mais son geste est significatif : en effet, il signifie, sur les plans politique, économique et social, que nous devons rejeter résolument l’« étrangéité au monde » du système actuel dans toutes ses facettes. C’est effectivement cela, et rien que cela, qui constitue notre tâche principale. Cela veut dire qu’il faut se battre pour sauver le concret. C’était aussi l’intention de Heidegger dans tous les aspects de son immense œuvre philosophique.

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Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille s’enthousiasmer pour un nouveau système totalitaire qu’il conviendrait de promouvoir avec une rage militante, ce qui fut peut-être le fait de Heidegger pendant un moment fiévreux, mais finalement très bref de sa trajectoire. Mais cela signifie à coup sûr une volonté ferme et bien établie de sauver et de défendre la liberté de nos concitoyens et de nos peuples contre un système qui est en train de devenir une véritable camisole de force. Outre Heidegger, qui était resté en Allemagne, il y avait dans le petit monde des philosophes reconnus un autre personnage important pour notre propos : son ancienne étudiante et maîtresse Hannah Arendt qui, dans sa nouvelle patrie américaine, n’a cessé de plaidé pour la liberté contre ce qu’elle appelait la banalité destructrice de nos sociétés libérales d’Occident et des sociétés du monde soviétisé. En effet, après la chute du communisme en Russie et en Europe orientale, les « Lumières » selon Habermas et ses disciples ont été imposées partout sans concurrence aucune, ce qui a eu pour conséquence une réduction absolue des libertés citoyennes dans presque tous les Etats d’Europe occidentale, tout simplement parce que, selon cette idéologie de pure fabrication et dépourvue de toute organicité, rien ne PEUT plus exister qui offrait jadis une épine dorsale à toutes nos sociétés. Au nom d’une notion de liberté qui est purement abstraite, étrangère à tout monde historique concret, les racines des sociétés européennes sont niées et détruites, ce qui achève de ruiner l’équation féconde entre liberté et identité.

Les Lumières des despotes éclairés

Il me paraît bon de rappeler, ici, qu’il existait au 18ème siècle d’autres Lumières encore, des troisièmes Lumières, en l’occurrence les Lumières des despotes éclairés qui ont modernisé leurs pays ou empires respectifs dans tous les domaines pratiques sans nullement annihiler les valeurs traditionnelles de leurs peuples. Pour les « despotes éclairés » comme Frédéric II de Prusse, Marie-Thérèse ou Joseph II d’Autriche, Catherine II de toutes les Russies ou Charles III d’Espagne, les Lumières sont un dispositif politique, idéologique et culturel permettant la modernisation technique des espaces politiques placés sous leur souveraineté. Il s’agit alors de construire des routes et des canaux, de lancer un urbanisme nouveau, de se doter d’un corps d’ingénieurs compétents au sein de leurs armées, etc. La toute première fonction d’un Etat, dans cette optique, est effectivement de se donner les moyens de procéder à de tels travaux et de maintenir les armées toujours prêtes à mener des opérations en cas d’urgence ou d’Ernstfall, selon l’adage latin, si vis pacem, para bellum.

L’évocation de ces Lumières-là nous ramène à notre époque : tous, dans cette salle, vous êtes bien conscients que la moindre tentative, fût-elle la plus innocente ou la plus inoffensive, de défendre notre identité sera considérée comme un crime par les chiens de garde du monde médiatique, avec, en corollaire, le risque d’être houspillé dans la géhenne des « bruns » ou des « rouges-bruns » ou des « populistes ». Nos contemporains sont toutefois bien moins conscients d’un autre danger mortel : le démantèlement systématique des branches les plus importantes de nos industries, partout en Europe, par le truchement d’un principe particulièrement pervers de l’idéologie néolibérale, celui de la délocalisation. Il faut savoir, en effet, que ce néolibéralisme est l’avatar le plus démentiel des Lumières dominantes, celles qui se placent aujourd’hui dans le sillage de Habermas. Délocaliser, cela signifie justement ruiner l’héritage des despotes éclairés qui ont donné à l’Europe son épine dorsale technique et matérielle. C’est aussi nier et ruiner l’œuvre pragmatique d’un ingénieur et économiste génial du 19ème siècle, Frédéric List (dont les principes de gestion de l’appareil technique, industriel et infrastructurel de tout Etat ne sont plus appliqués que par les Chinois, ce qui explique le formidable succès de Beijing aujourd’hui). De Gaulle, qui avait lu Clausewitz quand il était un jeune officier prisonnier des Allemands à Ingolstadt pendant la première guerre mondiale, était un adepte de ces deux penseurs pragmatiques de Prusse. Il a essayé, dans les années 60 du 20ème siècle, d’appliquer leurs principes de gestion en France. Et c’est justement cette France-là, ou les atouts de cette France-là, que l’on a démantelé petit à petit, selon Zemmour, dès l’accession de Pompidou au pouvoir : la vente, toute récente, de l’entreprise de haute technologie Alstom par Macron à des consortiums américains, allemands ou italiens sanctionne la fin du processus de détricotage industriel de la France. Celle-ci est désormais dépouillée, ne peut plus affirmer qu’elle est véritablement une grande puissance. De Gaulle doit se tourner et se retourner dans sa tombe, dans le petit village de Colombey-les-Deux-Eglises, où il s’était retiré.

Les fausses Lumières qui tiennent aujourd’hui le haut du pavé exigent donc, avec une rage têtue, deux victimes sacrificielles : d’une part, l’identité comme héritage spirituel, qui doit être totalement éradiquée et, d’autre part, la structure économique et industrielle de nos pays, qu’ils soient grandes puissances ou petites entités, qui doit être définitivement détruite. Cette idéologie est donc dangereuse en tous domaines du réel et devrait être effacée de nos horizons le plus vite possible. Et définitivement. Ce que les Américains appellent les « liberal democracies » risquent donc tôt ou tard de périr de la mort lente et peu glorieuse des cancéreux ou des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, tandis que les « illiberal democracies » à la Poutine ou à la Orban, ou à la mode polonaise, ou à la façon chinoise et confucéenne finiront par avoir le dessus et par connaître un développement harmonieux sur les plans social et économique. L’amnésie totale et le désarmement total que les Lumières à la Locke exigent de nous, ne nous garantissent qu’un seul sort : celui de crever lentement dans la honte, la pauvreté et la déchéance.

Le remède est donc simple et se résume en un mot magique, « archéofuturisme », naguère inventé par Guillaume Faye. Cela veut dire fédérer les atouts existants, issus des sources mentales de notre humanité européenne, celles que Herder nous demandait d’honorer, issus des idées clausewitziennes quant à l’organisation d’un Etat efficace, issus des principes économiques visant la création d’infrastructures comme le préconisait List.

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Crawford, le professeur devenu garagiste, dresse une liste plus exhaustive encore des dangers que recèle les Lumières anglaises de Locke. Cette version des Lumières a induit dans nos mentalités une attitude hostile au réel, hostile aux legs de l’histoire, ce que Heidegger nommera, plus tard, selon Crawford, la « métaphysique occidentale ». Aux yeux de ce philosophe allemand, qui oeuvrait retiré dans son chalet de Todtnauberg, cette métaphysique implique un rejet de toute réalité organique, un rejet de la vie tout court, au profit d’abstractions sèches et infécondes qui conduisent le monde, les sociétés et les Etats, qui ont préalablement cru à un rythme organique et ont graduellement oublié ou refoulé cette saine croyance, à une implosion inéluctable et à une mort assurée.

La question des droits de l’homme

Dans les cercles dits de « nouvelle droite », la critique des « Lumières » dominantes, dans une première étape, a pris la forme d’une critique de la nouvelle idéologie des droits de l’homme, née sous la présidence de Jimmy Carter à partir de 1976 afin de déployer une critique dissolvante du système soviétique, de troubler les relations avec l’URSS, de ruiner les ressorts de la « coexistence pacifique » et de torpiller la bonne organisation des Jeux Olympiques de Moscou. La nouvelle diplomatie des droits de l’homme, qui a émergé suite à ce discours, a été considérée, à juste titre, comme un déni de la diplomatie classique et de la Realpolitik de Kissinger. Pour promouvoir cette nouvelle idéologie dans les relations internationales, une véritable offensive métapolitique a eu lieu avec mobilisation de toutes les ressources du soft power américain, très expérimenté en ce domaine. Dans les officines des services secrets, on a alors forgé des instruments nouveaux, adaptés à chaque contexte national : en France, et pour l’environnement francophone, l’instrument s’est appelé la « nouvelle philosophie », avec des figures de proue comme Bernard-Henri Lévy et André Glucksmann. A partir de la fin des années 70, les idées grossièrement bricolées de Lévy ont toujours correspondu aux objectifs géopolitiques des Etats-Unis, jusqu’à la mort atroce du Colonel Khadafi en Libye, jusqu’au soutien qu’il apporte aujourd’hui aux Kurdes en Syrie et en Irak.

Face à ce formidable appareil relevant du soft power, la « nouvelle droite » avait peu de chance d’être réellement entendue. Et les arguments de ses porte-paroles, bien que justes en règle générale, étaient assez faibles sur le plan philosophique, presque aussi faibles, dirais-je aujourd’hui, que ceux de Lévy lui-même. La situation s’est modifiée depuis quelques années : l’idéologie bricolée des droits de l’homme et de la nouvelle diplomatie (au niveau international), qui en est un corollaire, ont conduit à une longue série de catastrophes belligènes et sanglantes. Elles sont soumises désormais à une critique pointue, au départ de tous les cénacles idéologiques. Deux professeurs de Bruxelles, issus pourtant de l’ULB, très à gauche, Justine Lacroix et Jean-Yves Pranchère, ont eu le mérite de rouvrir et de résumer le vieux dossier des droits de l’homme. L’idéologie des droits de l’homme a toujours été utilisée pour détruire et les institutions héritées du passé et les droits et libertés concrets, comme l’avait d’ailleurs constaté Burke immédiatement après leur proclamation au début de la révolution française. Burke était certes une figure du conservatisme britannique. Mais, plus tard, cette idéologie a également été critiquée par des figures du camp des gauches ou du camp libéral. Jeremy Bentham et Auguste Comte la considéraient comme un obstacle à l’« utilité sociale ». Marx estimait qu’elle était le noyau de l’idéologie bourgeoise et constituait donc un obstacle, cette fois contre l’émancipation des masses. Aujourd’hui, cependant, nous pourrions parfaitement critiquer cette idéologie des droits de l’homme en disant qu’elle est à la fois l’instrument efficace d’une grande puissance extérieure à l’Europe et l’instrument d’une subversion généralisée qui entend détruire aussi bien les institutions héritées du passé que les droits traditionnels des peuples. Pourtant, force est de constater que cette idéologie n’a plus aucune utilité sociale car, en tablant sur elle et sur ses éventuelles ressources, on ne peut plus résoudre aucun problème majeur de nos sociétés ; bien au contraire, en la conservant comme idole intangible, on ne cesse de créer et d’accumuler problèmes anciens et nouveaux. Devant ce constat, toutes les critiques formulées jadis et maintenant à l’encontre des dits « droits de l’homme » s’avèrent utiles pour former un vaste front contre les pesanteurs écrasantes du « politiquement correct ». La première étape, dans la formation de ce front, étant la volonté de remettre le droit (les droits), les sociétés et les économies dans leur cadres naturels, organiques et historiques, de les re-contextualiser.

Résultat : un déficit récurrent d’attention

tuercke.jpgPour Crawford, les Lumières dominantes et tous leurs avatars, dans ce qu’ils ont d’éminemment subversif, surtout dans la version « lockienne » qu’il critique tout particulièrement, conduisent à toutes les pathologies sociales et politiques que nous observons aujourd’hui, surtout dans le chef des enfants et des adolescents, notamment la perte de « cette antique capacité à être toujours attentifs à tout », ce que certains pédagogues allemands actuels, comme Christian Türcke (photo), appellent l’ « Aufmerksamkeitsdefizitkultur » (la « culture du déficit d’attention »). Nos jeunes contemporains sont donc les dernières victimes d’un long processus qui a connu ses débuts il y a deux ou trois siècles. Mais nous assistons aussi à la fin de ce processus subversif et « involutif » qui nous a menés à un « Kali Youga ». La mythologie indienne nous enseigne bel et bien qu’après ce « Kali Youga », un nouvel âge d’or commencera.

Dans les temps très sombres qui précèderont ce nouvel âge d’or, donc dans les temps que nous vivons maintenant, la première tâche de ceux qui, comme nous, sont conscients de notre déchéance, est de redevenir « hyper-attentifs » et de le rester. Si les Lumières anglo-saxonnes introduites jadis par Locke, si ce que Heidegger appelait la « métaphysique occidentale » nous décrivent le monde concret comme une malédiction qui ne mérite pas l’attention du philosophe ou de l’intellectuel, si cette version-là des Lumières voit la réalité comme un fatras misérable de choses sans valeur aucune, si l’idéologie des « droits de l’homme » considère que l’histoire et les réalisations de nos ancêtres sont dépourvues de valeur ou sont mêmes « criminelles », les Lumières, telles qu’elles ont été envisagées par Herder, bien au contraire, veulent l’inverse diamétral de cette posture. Les Lumières populaires, folcistes et organiques de Herder veulent justement promouvoir une attention constante à l’endroit des racines et des sources, de l’histoire, de la littérature et des traditions de nos peuples. Les véritables objectifs politiques et stratégiques, qu’ont déployé les « despotes éclairés » et les adeptes des théories pratiques de Friedrich List dans leurs Etats respectifs, exigent de tous responsables politiques une attention constante aux réalités physiques des pays qu’ils organisent, afin d’en exploiter les ressources naturelles ou afin de les façonner (« gestalten ») de manière telle qu’elles deviennent utiles aux peuples qui vivent sur leurs territoires. Revenir à un âge d’or signifie donc rejeter résolument toutes les idéologies qui ont détruit les « capacités d’attention » des générations successives jusqu’à la catastrophe anthropologique que nous vivons actuellement.

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Kairos

Si la volonté de concentrer à nouveau toutes les attentions sur la concrétude, qui nous entoure et nous englobe, sera un processus de longue durée, sortir de l’impasse et ré-inaugurer un éventuel âge d’or nécessite de saisir le moment kaïrologique, le moment du petit dieu Kairos. De quoi s’agit-il ? Kairos est le dieu grec des temps forts, des moments exceptionnels, tandis que Chronos est le dieu du temps banal, du temps que l’on peut mesurer, de la chronologie pesante et sans relief, de ce que Heidegger nommait la « quotidienneté » (l’Alltäglichkeit). L’écrivain néerlandaise Joke Hermsen a publié un livre capital sur Kairos et le temps kaïrologique, il y a trois ans. Le temps fort, que symbolisme le mythe de Kairos, est, politiquement parlant, le temps de la décision (Entscheidung) chez Heidegger, Jünger et Schmitt, le temps où, subitement, des hommes décidés osent l’histoire. Kairos est donc le dieu du « bon moment », lorsque des figures charismatiques, des éveilleurs de peuple (Mabire) chanceux se saisissent soudainement du destin (Schicksal). Les Grecs de l’antiquité représentaient Kairos comme un dieu jeune, la tête surmontée d’une petite touffe de cheveux au niveau du front. Le dompteur du destin est celui qui parvient à se saisir de cette touffe, tâche difficile que peu réussissent. Se saisir du destin, ou des cheveux de Kairos, n’est pas une tâche que l’on parachève en calculant posément, en planifiant minutieusement, trop lentement, mais quand elle s’accomplit, avec une flamboyante soudaineté, naissent des temps nouveaux, un nouvel âge d’or peut commencer. Car, de fait, amorcer de nouveaux commencements (Anfänge) est bien le destin des hommes authentiques selon Heidegger et Arendt.

Peut-être qu’en cette salle se trouve quelqu’un qui, un jour, saisira les cheveux de Kairos. C’est ce que j’ai voulu expliquer, ici, aujourd’hui.

Je vous remercie pour votre attention.

vendredi, 27 octobre 2017

R. Steuckers: Naar een nieuwe gouden eeuw?

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Naar een nieuwe gouden eeuw?

Interventie van Robert Steuckers 

Colloquium van de Studiegenootschap "Erkenbrand"

Rotterdam, 14 oktober 2017

Als we wensen terug te keren naar een gouden tijdperk, d. w. z. naar een gouden tijdperk dat in overeenstemming met onze echten “roots” is en dat zeker geen product van een soort sociaal engineering is, een gouden tijdperk dus dat wel een terugkeer naar bronnen betekent zonder tegelijkertijd een afkeer van wetenschappelijke of technische vooruitgang te zijn, en niet enkel op militair vlak, dan is deze terugkeer naar een gouden tijdperk een vorm van archeofuturisme waarbij de toekomst van onze volkeren door eeuwige en vaste waarden wordt bepaald. Een terugkeer naar een gouden tijdperk betekent weer leven te geven aan waarden die zeker in de Astijd der geschiedenis aanwezig waren of die nog eerder in een verder verleden de geest van onze voorouders hebben bepaald.

Men kan die waarden “traditie” noemen of niet, ze zijn wel de bakermat van onze beschaving die veel dieper wortelen dan de pseudo-waarden van een flauwe of pervers geworden Verlichting. En als wij de Verlichting beschouwen als een geestelijk voertuig van perversiteit, bedoelen we het huidige progressivisme dat werkt als een instrumentarium dat één enkel doel heeft: de oeroude waarden en de waarden van de Astijd der geschiedenis uit te schakelen. De uitschakeling van deze waarden belet ons een toekomst te hebben, want wie geen waarden meer in zich draagt loopt oriënteringsloos in de wereld rond en verliest zijn politieke “Gestaltungskraft”.

Om Arthur Moeller van den Bruck te parafraseren die dit in de jaren 20 van de vorige eeuw schreef; dat het liberalisme na een paar decennia de volkeren doodt die volgens zijn regels hun leven hebben bepaald. Vandaag, met een hernieuwde woordenschat, ben ik van mening dat ieder ultra-gesimplificeerde ideologie, die beweert de Verlichting als inspiratiebron te hebben, de “Gestaltungskraft” van de volkeren in de kiem smoort. Frankrijk, Engeland, gedeeltelijk de Verenigde Staten en voornamelijk het verwesterse Duitsland zijn vandaag de voorbeelden van zo’n dramatische “involutie”.

De Verenigde Staten en Duitsland mogen wel een uitstekende technische ontwikkeling hebben vertoond of nog altijd vertonen; of, beter gezegd, bezitten deze beide mogendheden vanaf het einde van de 19de eeuw een hoog technisch niveau, er zijn echter talrijke aanwijzingen die wijzen op een volledige verloedering van hun samenlevingen. In Duitsland gebeurt dat door de toepassing van een bewuste strategie, de zogenoemde strategie van de “Vergangenheitsbewältigung”, waardoor het verleden systematisch wordt beschreven en beschouwd als de bron van het absolute kwaad en dat geldt niet uitsluitend voor het nationaal-socialistisch verleden. Dit proces speelt in op de eigen nationale zelfwaardering en induceert een totale aanvaarding van alle mogelijke politieke of sociale praktijken die de samenleving definitief kelderen, waarbij de vluchtelingenpolitiek van mevrouw Merkel het summum betekent, een summum dat de buurlanden uit de Visegrad-Groep niet bereid zijn klakkeloos te accepteren.

In Frankrijk ziet men een aftakeling van de vroeger heilige sterke staat, die De Gaulle nog wou handhaven. Eric Zemmour heeft onlangs de geschiedenis van de “Franse zelfmoord” (le “Suicide français”) op een voortreffelijke manier geschetst. Daarbij mag nog gezegd worden dat een boek uit de vroege jaren 80 een perfide rol heeft gespeeld in het ontstaan van een eigen Franse “Vergangenheitsbewältigung”: dat boek heeft als titel “L’idéologie française” en werd neergepend door de beroemde Bernard-Henri Lévy. In dat boek worden alle niet-liberale en/of alle niet sociaal-democratische politieke strekkingen als fascistisch bestempeld, inclusief sommige belangrijke aspecten van het archaïstisch Franse communisme, van het gaullisme in het algemeen, en zelfs van het christelijke personalisme van een aarzelende ideoloog zoals Emmanuel Mounier. Juist in het boek van Lévy vinden we alle instrumenten van wat een Nederlander, namelijk de Frankrijk-specialist Luk de Middelaar, heel correct als “politicide” heeft omgeschreven.

In naoorlogs Duitsland werd de Verlichting als de filosofische strekking beschouwd die de Duitsers en de andere Europeanen immuun moest maken tegen het politieke kwaad. Jürgen Habermas zou dus heel snel de theoreticus par excellence worden van deze nieuwe West-Duitse Verlichting die het kwade verleden moest uitwissen.

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Maar de gevulgariseerde Habermasiaanse Verlichting, toegepast door ijverige journalisten en feuilletonisten, is maar een “deelverlichting” voor eenieder die de culturele geschiedenis van de 18de eeuw nauwkeurig heeft bestudeerd. De wereld is inderdaad niet zo simpel als de heer Habermas en zijn schare volgelingen het wensen. De “political correctness” werkt dus op basis van een afgeroffelde en geknoeide interpretatie van wat eigenlijk in haar verscheidene aspecten de Verlichting was.

De Verlichting volgens de “Frankfurter Schule” en volgens haar “Musterschüler” Habermas, is misschien wel een min of meer legitieme erflating van de 18de eeuwse Verlichting, maar er zijn ook andere en vruchtbaardere onderdelen van de historische Verlichting. De huidige politiek correcte Verlichting is enkel een slechte combinatie van “blueprints”, om de uitdrukking van de Engelsman Edmund Burke over te nemen, toen hij de bloedige uitspattingen van de Franse revolutie beschreef. Burke is inderdaad geen obscurantist of een aanhanger van een oubollige scholastiek. Hij bekritiseert de Franse revolutie, omdat die een valse interpretatie van de rechten van de mens suggereert. Er zijn dus andere mogelijkheden om de rechten van de mens te interpreteren, eerst en vooral omdat het Ancien Régime geen juridisch woestijn was en omdat de concrete gemeenschappen wel goed geprofileerde rechten hadden.

Later ontstond er in de Keltisch-sprekende randgebieden van het Verenigd Koninkrijk en in het bijzonder in de Ierse Republiek een andere manier om aan de burgers rechten te garanderen zonder de verlichte geest van emancipatie te negeren en ook zonder de Keltische roots van Ierland te loochenen. Na de Tweede Wereldoorlog, hebben Ierse juristen en ministers, volgens het VN-boekje over de mensenrechten en volgens hun eigen Pankeltische ideologie, de Franse Republiek laten veroordelen nadat ze het onterecht veroordelen of vermoorden van Bretoense militanten had verdedigd. En, opgelet, deze Ierse minister McBride was de voorzitter van Amnesty International en werd later Nobelprijs winnaar in 1974. De Republiek, die Lévy beschouwt als een stelsel dat het summum van politieke correctheid zou belichamen, werd destijds veroordeeld wegens schending van de mensenrechten!

Verder, omdat wij het hier over een gouden tijdperk hebben, bestaat er ook zoiets dat jammer genoeg in vergetelheid is geraakt in continentaal Europa: de Verlichting volgens Johann Gottfried Herder, die gelukkig een soort bescheiden comeback kent in de Altright beweging in de Angelsaksische wereld.  

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Volgens Herder, als belichaming van de Duitse 18de eeuwse Verlichting, moeten wij twee principes respecteren en als leidende beginsels steeds gebruiken: “Sapere aude” (Durf te weten) en “Gnôthi seauton” (Ken jezelf). Er bestaat geen echte Verlichting, volgens deze Evangelische dominee uit Riga in het huidige Letland, zonder deze beide principes te vereren. Zou een filosofisch-politieke strekking beweren dat ze “verlicht” is zonder dat ze aanneemt dat men over de “Schablonen” of de gemeenplaatsen durft denken, die momenteel heersen en de samenleving tot een gevaarlijke stilstand leiden, dan is zulk een Verlichting geen reële en efficiënte Verlichting, maar een instrument om een dwingelandij op te leggen. Een volk moet dus zichzelf kennen, terug naar de oeroudste bronnen keren om werkelijk weer vrij te worden. Er bestaat geen vrijheid als er geen geheugen meer bestaat. Werken aan het opwaken van het slapende geheugen betekent aldus de allereerste stap naar de herovering van de vrijheid, en uiteindelijk van de capaciteit, vrij en nuttig te handelen op internationaal niveau. Herder vraagt ons dus om terug naar de bronnen van onze eigen cultuur te keren zonder de perverse wil om deze “roots” uit te wissen.

Een gouden tijdperk kan alleen in de Europese samenleving terugkeren als de politieke instellingen van de valse en oppervlakkige Verlichting en van de politieke correctheid door een nieuwe en krachtige Verlichting volgens de denkwegen van Herder wordt vervangen. Heidegger zou juist hetzelfde zeggen, maar wel in andere woorden: voor de filosoof van het Zwarte Woud en het “Schwabenland”, was de Europese beschaving slachtoffer van “het onkruid van de Westerse metafysiek”, welk onkruid opgeruimd moest worden, waarmee “een nieuwe dageraad kon ontstaan”. De woordenschat, die Heidegger gebruikte, is ongelofelijk moeilijk voor de gewone leek. De Amerikaanse docent filosofie Matthew B. Crawford schetst op een korte en bondige manier de bedoeling van Heidegger: voor Crawford van de Virginia University is de “Westerse metafysiek” van de Duitse filosoof eenvoudigweg de pseudo-verlichte janboel van Locke & Co, dus de Engelse of Franse Verlichting, die geen contact met de werkelijkheid meer heeft of beter gezegd geen contact met het concrete wil hebben. Er bestaan dus twee “Verlichtingen”, de organische van Herder en de abstracte van de anderen, die de werkelijkheid en het werkelijke verleden van de volkeren weigeren.

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In dit perspectief stelt Crawford vast, dat iedere samenleving, die onder de invloed van de officiële interpretatie van de Verlichting blijft stagneren, gedoemd is af te takelen en uiteindelijk te sterven. Daarom nam hij ooit afscheid van zijn katheder en ging een garage voor Harley-Davidson motorfietsen openen, om heel reëel de geur van olie, benzine en leder te genieten, om naar de muziek van het gereedschap op metaal te kunnen luisteren. Uiteraard hebben wij hier met een voor een docent filosofie zeldzame terugkeer naar het concrete van doen. Op politiek, maar ook op economisch en sociaal vlak betekent het, dat wij de wereldvreemdheid van het huidige systeem in al zijn facetten hardnekkig moeten verwerpen. Daar ligt inderdaad onze hoofdopdracht. Eigenlijk heet dat vechten om het concrete te redden, wat ook uiteindelijk de bedoeling van Heidegger in alle aspecten van zijn reusachtig filosofisch werk was. 

Dat betekent niet noodzakelijk een rage om een nieuw totalitair stelsel te promoten, wat misschien voor een tijdje de wens van Heidegger was, maar zeker en vast de wil om de vrijheid van de burgers en volkeren te redden tegen een systeem dat een werkelijke dwangbuis aan het worden is. Naast Heidegger, die in Duitsland was gebleven, is er ook in het wereldje der filosofen zijn vroegere studente en maîtresse Hannah Arendt, die meer bepaalt in haar nieuwe Amerikaanse vaderland voor de vrijheid heeft gepleit tegen de banaliteit van onze Westerse liberale samenlevingen en van het Sovjetcommunisme. En inderdaad, na de val van het communisme in Rusland en Oost-Europa, heeft de Verlichting van Habermas en zijn volgelingen tot een absolute beperking van de burgerlijke vrijheden in West-Europa geleid, heel eenvoudig omdat in de ogen van de machthebbers in bijna alle Europese staten niets meer MAG bestaan, dat vroeger een ruggengraat aan ieder welke samenleving gaf. In naam van een abstracte en wereldvreemde vrijheidsnotie worden de wortels van iedere samenleving afgekapt, waarmee men de verbintenis tussen identiteit en vrijheid negeert.

Er bestond in de 18de eeuw een nog andere Verlichting, een derde Verlichting, namelijk de Verlichting van de “verlichte despoten”, die hun landen hebben gemoderniseerd op alle praktische vlakken, zonder tegelijkertijd de traditionele waarden van hun volkeren te vernietigen. Voor de “verlichte despoten”, zoals Frederik van Pruisen, Maria-Theresa of Jozef II van Oostenrijk, Catharina II van Rusland of Karel III van Spanje, betekende Verlichting de technische modernisering van hun land, het bouwen van straten en kanalen, een moderne stedenbouw, een efficiënt corps van bekwame ingenieurs in hun legers, etc. De allereerste functie van een staat is inderdaad zulke werkzaamheden mogelijk te maken en het leger steeds paraat te houden voor iedere dreiging, volgens het Latijnse motto “Si vis pacem, para bellum”.

zemsui.jpgDit brengt ons weer naar onze huidige dagen: iedereen in deze zaal is zich wel bewust dat zelfs ieder onschuldige en ongevaarlijke poging onze identiteit te verdedigen door de wakende honden in het medialandschap als fout kan worden beschouwd, met het welbekende risico naar een bruin hoekje verbannen te worden. Maar onze tijdgenoten zijn zich minder van een ander dodelijk gevaar bewust: de aftakeling van industriebranches overal in Europa, dankzij het verfoeilijke neoliberale principe van delocalisatie, waarbij men moet weten dat het neoliberalisme de gekste gedaanteverwisseling van de heersende Verlichting is. Delocaliseren betekent juist de erfenis van de “verlichte despoten” te verloochenen, ofwel de ideeën van een geniale 19de-eeuwse economist en ingenieur zoals Friedrich List. (wiens principes nu uitsluitend door China worden uitgebaat, wat het succes van Beijing klaar en duidelijk kan uitleggen) De Gaulle, die Clausewitz als jonge gevangene officier in Ingolstadt gedurende de 1ste wereldoorlog volledig had doorgelezen, was een aanhanger van deze twee concrete Pruisische denkers. Hij trachtte in de jaren 60 van de vorige eeuw hun principes in Frankrijk te realiseren. Het is dit “verlicht” werk dat stap voor stap werd vernield, volgens Zemmour, zodra Pompidou aan de macht kwam: het heel recente verkoop van het hoogtechnologisch bedrijf Alstom door Macron aan Amerikaanse, Duitse, Italiaanse consortiums betekent bijna het einde van het proces: Frankrijk ligt nu bloot en kan niet meer beweren dat het nog een grootmacht is. De Gaulle draait zich om in zijn graf, in het afgelegen dorpje Colombey-les-deux-églises.

Dus de valse, heersende Verlichting eist bloeddorstig twee slachtoffers: de identiteit als geestelijke erfenis, die totaal uitgewist moet worden en de economisch-industriële structuur van ieder land, zij het van een grootmacht of een kleinere mogendheid, die vernield dient te worden. Deze ideologie is dus werkelijk gevaarlijk op alle vlakken en dient zo gauw mogelijk en definitief opzijgelegd te worden. De zogenaamde “liberal democracies” riskeren vroeg of laat een langzame dood als dat van een kanker- of Alzheimerpatiënt, terwijl de “illiberal democracies” à la Poetin of à la Orban, of op Poolse wijze, of het confuciaans Chinees systeem, stilaan en stilzwijgend de overhand krijgen en harmonieus bloeien op sociaal en economisch vlak. De totale amnesie en de totale ontwapening, die de Lockistische Verlichting van ons eist, verzekert ons van maar één lot: het uitsterven in schande, armoede en verloedering.

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Het geneesmiddel is heel duidelijk en laat zich in één toverwoord samenvatten, “archeofuturisme”, door Guillaume Faye ooit uitgedokterd: d. w. z. de troeven te bundelen die bestaan uit de bronnen die Herder eenmaal zong, de organisatie van de staat volgens Clausewitz, de organisatie van de economie en het bouwen van infrastructuren zoals List het preconiseerde. 

Crawford, de professor-garagehouder, stelt een nog veel langere lijst van gevaren vast, die voortvloeien uit wat hij het Engelse verlichte “Lockisme” noemt. Deze versie van de Verlichting heeft een wereldvreemde houding tegenover de geschiedenis en de algemene werkelijkheid laten ontstaan, wat Heidegger later, volgens Crawford, de “Westerse metafysiek” zal noemen. In de ogen van de eremiet van Todtnauberg betekent deze metafysiek een afkeer van de werkelijke en organische feiten, van het leven tout court, ten gunste van droge en onvruchtbare abstracties die de wereld en de organisch gegroeide samenlevingen en staten naar een zekere implosie en een zekere dood brengen.

In de zogenaamde “Nieuw Rechtse” kringen nam de kritiek van de Verlichting in een eerste stap de gedaante van een kritiek op de nieuwe ideologie van de “mensenrechten”, die onder President Carter vanaf 1976 ontstond om de betrekkingen met de Sovjetunie te vermoeilijken en de Olympische Spelen in Moskou te kelderen. De nieuwe diplomatie van de mensenrechten, die toen ontstond, werd terecht als breuk met de klassieke diplomatie en de realpolitik van Kissinger beschouwd. Om deze nieuwe ideologie in de internationale betrekkingen te promoten werd er een regelrecht, metapolitiek offensief gevoerd, met alle middelen van de ervaren Amerikaanse soft power. Er werden instrumenten in de heksenkeukens van de geheime diensten ontworpen, die aan ieder nationale context aangepast werden: in Frankrijk en voor de Franstalige omgeving was het instrument de zogenaamde “nouvelle philosophie” met figuren zoals Bernard-Henri Lévy en André Glucksmann. Vanaf het einde van de jaren 70 zijn de grof geknutselde standpunten van voornamelijk Lévy altijd overeengekomen met de geopolitieke doelen van de Verenigde Staten, tot en met de gruwelijke dood van Kolonel Khadafi in Libië en zijn huidige steun aan de Koerden in Irak en Syrië.

pranlac.jpgTegenover deze enorme middelen van de soft power, had Nieuw Rechts weinig kans om gehoor te krijgen. En de argumenten van zijn sprekers, alhoewel in het algemeen juist, waren tamelijk zwak op filosofisch vlak, even zwak kan ik nu zeggen als degenen van Lévy zelf. De toestand heeft zich sinds enkele jaren gewijzigd: de geknutselde ideologie van de mensenrechten en van de pseudo-diplomatie op internationaal niveau, die ze begeleiden en die tot een lange reeks rampzalige resultaten hebben geleid, ondergaan nu scherpe kritiek vanuit alle mogelijke ideologische hoeken. Twee Brusselse professoren, trouwens van de linkse Universiteit van Brussel, Justine Lacroix en Jean-Yves Pranchère, hebben het oude dossier van de mensenrechten klaar en duidelijk samengevat. De ideologie van de mensenrechten wordt steeds gebruikt om geërfde instellingen of zelfs rechten te kelderen, zoals Burke het onmiddellijk na de uitroeping ervan bij het begin van de Franse Revolutie kon observeren. Burke was een figuur van het Britse conservatisme. Later werd deze ideologie ook door linkse en liberale krachten bekritiseerd. Jeremy Bentham en Auguste Comte beschouwden ze als een hindernis voor het “algemeen belang”; Marx vond dat ze de kern van de burgerlijke ideologie waren en dus ook een hindernis, maar ditmaal tegen de emancipatie van de brede massa’s. Wij kunnen vandaag de dag deze ideologie evenwel als een instrument van een buiten-Europese mogendheid bekritiseren, maar ook als een instrument van de algemene subversiviteit die zowel geërfde instellingen als traditionele volkse rechten uitwissen wil. Deze ideologie heeft ook geen maatschappelijk nut meer, daar men ermee geen enkel probleem kan oplossen en zich er alleen maar nieuwe onoplosbare toestanden creëren. Dus zijn alle mogelijke kritieken op de mensenrechten nuttig om een breed front te laten ontstaan tegen de politieke correctheid, waarbij de eerste stap altijd de wil moet zijn, de rechten, de samenlevingen en de economie terug in hun organische en historische omgeving te brengen.

aufmerk.jpgVoor Crawford leiden de subversieve Verlichting à la Locke en haar talrijke avataren naar de hedendaagse ziekte, die in het bijzonder kinderen en jongeren treft: het verlies van de “capaciteit, steeds aandachtig te zijn” of wat Duitse pedagogen zoals Christoph Türcke de “Aufmerksamkeitsdefizitkultur” noemen. Onze jonge tijdgenoten zijn dus de laatste slachtoffers van een lang proces, die twee, drie eeuwen geleden, zijn aanvang kende. Maar dit is ook het einde van het subversieve en “involutieve” proces, dat ons naar een “Kali Yuga” heeft geleid. De mythologie vertelt ons dat na de Kali Yuga een nieuwe gouden tijdperk zal beginnen.

In de donkere tijden voor dit nieuwe gouden tijdperk, dus in de tijden die wij nu beleven, is de eerste taak van degenen die zich van deze verloedering bewust zijn, hyperaandachtig te zijn en te blijven. Als de Verlichting à la Locke of de “Westerse metaphysiek” ons de concrete wereld als een verdoemenis beschreef, die niet waardig was de aandacht van de filosoof of de intellectueel aan te trekken, als deze Verlichting de realiteit als een miserabele hoop onwaardige spullen zag, als de ideologie van de mensenrechten de geschiedenis en de realisaties van onze voorouders ook als onwaardig of zelfs als crimineel beschouwde, wil de Verlichting à la Herder juist het tegendeel. De volkse/organische Verlichting van Herder wil juist aandacht besteden aan “roots” en bronnen, aan geschiedenis, literatuur en volkse tradities. De echte politieke en strategische doelen, die de “verlichte despoten” en de aanhangers van Friedrich List in hun respectievelijke staten en samenlevingen ontplooien, eisen van de politieke verantwoordelijken een constante aandacht voor de fysieke werkelijkheden van hun landen, om ze te beheren of om ze zo te “gestalten” dat ze nuttig worden voor de volkeren die erin leven. Terug te keren naar een gouden tijdperk betekent dus afscheid te nemen van alle ideologieën, die de aandachtcapaciteit van de successieve generaties heeft vernietigd, tot de catastrofe die wij nu beleven.

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Maar als de wil de aandacht op het concrete terug te vestigen een langdurig proces is, zal er toch noodzakelijk een tijd voor de kairos moeten komen. Kairos is de Griekse god voor de sterke tijd, terwijl Chronos de god is van de meetbare tijd, van de saaie chronologie, van wat Heidegger de “Alltäglichkeit” noemde. De Nederlandse Joke Hermsen heeft drie jaar geleden een boek over de kairos geschreven: de sterke tijd, die hij mythisch belichaamt, is de tijd van de beslissing, van de conservatief-revolutionaire “Entscheidung” (bij Heidegger, Schmitt en Jünger), waar geschiedenis wordt gemaakt. Kairos is de god van “het goede moment”, wanneer kansrijke volkskapiteinen het lot, het “Schicksal”, letterlijk vastpakken. Kairos is een jonge god met een bosje haar op zijn voorhoofd. Dat bosje moet de gelukkige, die het lot zal bedwingen, vastpakken. Een daad die moeilijk is, ook niet door eenvoudige berekening te voorzien is, maar als het gebeurt worden nieuwe tijden geboren en kan een nieuw gouden tijdperk gestart worden. Omdat nieuwe “Anfänge” leiden de taak is van de authentieke mens, volgens Heidegger en Arendt.

Misschien is er hier iemand die vroeg of later het bosje haar van Kairos zal vastpakken. Daarom heb ik dat hier Diets willen maken.

Ik dank jullie voor jullie aandacht.

lundi, 04 septembre 2017

Le despotisme éclairé et ses avatars modernes

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Le despotisme éclairé et ses avatars modernes

Bernard Plouvier,

auteur, essayiste

Ex: https://metamag.fr

« Quant à moi, j’aime l’État plus que mon âme », Niccolo Machiavel

Qu’est-ce qui différencie le populisme du despotisme éclairé ? Le but ! Ce n’est pas le bien de la Nation qui est la cible visée par ce dernier système politique, mais la puissance et la grandeur de l’État. Machiavel, théoricien de ce type de gouvernement, pose en principe que le bon « Prince » dirige avec douceur quand il le peut, avec ruse le plus souvent, avec brutalité au besoin, mais toujours avec le souci de l’efficacité.

Les despotes éclairés sont les dévots de la raison d’État, réagissant en idéalistes pragmatiques, qui estiment que la fin justifie et ennoblit les moyens. Tout ce qui est profitable ou simplement utile à l’État devient, ipso facto, licite. Le succès fait disparaître jusqu’au souvenir des crimes qui ont paru nécessaires à l’obtention du résultat. Est beau, juste et noble ce qui a réussi. C’est un peu trop vite confondre l’État et le Bien commun. L’État n’est jamais qu’un moyen… il n’y a pas que les adeptes du despotisme éclairé qui oublient cette notion. C’est, en principe, le bien de la Nation qu’un bon gouvernement doit rechercher : c’est la définition du populisme !

Les despotes éclairés du XVIIIe siècle – Frédéric II de Prusse, Joseph II, antépénultième empereur romain de langue germanique, Pierre le Grand au début du siècle et Catherine II de Russie à la fin, Gustave III de Suède, le marquis de Pombal au Portugal ou Robert Turgot – réalisèrent des expériences politiques fort rationnelles, où un monarque héréditaire (ou un grand ministre agissant en son nom) luttait contre les féodalités nobiliaires, judiciaires et cléricales, en s’appuyant sur la fraction la plus dynamique du peuple aux plans économique et intellectuel, dans le but de moderniser l’État et d’en accroître la puissance et le prestige, voire l’étendue.

L’expression « despote éclairé » n’est pas « une création d’un historien allemand du XIXe siècle », comme l’a écrit un docte universitaire : sa sottise fut immédiatement reprise par ses confrères historiens. En réalité, on la trouve, dès 1758, sous la plume de l’ami de Diderot, Melchior von Grimm, dans sa Correspondance littéraire. On peut en faire remonter la préhistoire au cardinal de Richelieu, même si les historiens, recopiant les Mémoires de Frédéric II, en bornent l’ancienneté au règne personnel de Louis XIV, aidé de grands ministres (Colbert, Louvois et Vauban sont les plus connus) et de quelques littérateurs (‘’Molière’’, Boileau, Racine ou La Fontaine), utiles à la gloire de son règne.

Dans ce système, le monarque (ou son substitut) s’appuie sur des hommes de talent qui ont réussi dans les affaires (manufacturiers, négociants et armateurs, grands administrateurs) ou qui sont des penseurs originaux (les physiocrates français, ou la trinité enluminée : Montesquieu, ‘’Voltaire’’ et Diderot ; ailleurs : les idées de Thomas Hobbes ou les écrits et la personne de Julien Onfroy de La Mettrie). Ces hommes sont moins des conseillers que des incitateurs, remerciés avec plus ou moins de chaleur une fois que le maître a remporté ses premiers succès, dont il ne veut partager la gloire avec personne.

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Affirmer que le despote éclairé s’appuie sur la bourgeoisie pour contrer la noblesse et le haut-clergé, c’est faire preuve d’une grande simplicité et d’un défaut de documentation : tous les monarques médiévaux ont utilisé ce moyen pour asseoir leur pouvoir personnel et s’opposer aux grands prédateurs féodaux.

Certains appuis des monarques « éclairés » proviennent de milieu pauvre, de la caste nobiliaire ou du vivier clérical. Denis Diderot est issu du monde de l’artisanat peu aisé, ce qui ne l’empêche pas de conseiller Catherine II ; l’abbé Ferdinando Galiani et de nombreux aristocrates jouent un rôle de premier plan en Suède, en Autriche-Hongrie et surtout en Prusse et en Russie.

Seuls les corps constitués (assemblées du clergé, cour des pairs et parlements) sont repoussés par les monarques réformateurs qui veulent substituer au système des castes privilégiées le service de l’État, comme cela existe, depuis le XVe siècle, à Florence. Une bureaucratie zélée remplace les hiérarques traditionnels, avantageusement et à meilleur coût. Partout, le mot d’ordre est de laïciser, de moderniser, d’améliorer dans toutes les activités : de l’agriculture au commerce et aux manufactures, aussi bien qu’en matière de justice, d’enseignement, d’hygiène publique et d’art militaire ou de navigation. On casse les féodalités et l’on accroît les rentrées fiscales. Quand c’est possible, on étend le territoire.

Le despotisme éclairé, c’est le culte de l’État, fort, centralisé, uniformisé, ce qui fâche les membres des minorités ethniques qui veulent à toute force « cultiver leur différence », et de l’État moderne appliquant les innovations techniques et ne repoussant pas les idées originales, ce qui irrite les réactionnaires.

Le budget est maintenu en équilibre et la balance commerciale idéalement excédentaire, du moins en période de paix : c’est un héritage de Colbert. C’est ce qu’Antonio de Oliveira Salazar, à mi-chemin du populisme et du despotisme éclairé au XXe siècle, appelait « une politique nationale de vérité » : on règle ses dépenses sur ses recettes et l’on gère l’État comme le bon père de famille le fait (en principe) de son ménage.

Le menu peuple est protégé des fantaisies des nobles et du clergé ; il devient leur égal face à la Justice. En revanche, il doit travailler, obéir aux lois et fournir toujours plus de soldats et de marins, sans grogner et, si possible, avec enthousiasme. La promotion sociale des sujets de haute valeur est assurée : ce type de gouvernement modère les conséquences de la stratification en castes (liées à la naissance) et en classes (liées au niveau de fortune). De ce fait, il instaure un certain degré de méritocratie, du moins pour ceux qui se plient en tous points au monarque, qui, pour se vouloir éclairé par les lumières de la raison, n’en reste pas moins un despote ombrageux.

À la suite de Frédéric II, on a voulu définir ce régime par une phrase lapidaire autant que cynique : « Tout pour le peuple. Rien par le peuple » . En réalité, la formulation exacte serait : « Tout pour l’État », le monarque en étant le premier serviteur. Hegel l’a fort bien compris et en a formulé la théorie, vers 1820. Dans le despotisme éclairé, le souverain veut améliorer les conditions de vie de la majorité de ses sujets (idéalement, celle de tous), mais il ne demande nullement l’avis du peuple. Tout au plus, les élites sont-elles consultées de loin en loin, lorsque le monarque le décide.

L’armée n’intervient que pour défendre les frontières ou agrandir le territoire national : le despotisme éclairé n’a rien d’une dictature militaire. Même en Prusse, il existe beaucoup plus de fonctionnaires civils que d’officiers.

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Dans tous les cas, le despote éclairé ne sort pas du cadre de l’autocratie, de la monarchie absolue. De ce fait, les réformes sont abolies dès qu’au despote succède un monarque faible ou traditionaliste, trop facilement ému par les jérémiades ou les menaces des grands féodaux et du haut-clergé. Le système ne persiste qu’en Prusse où, un demi-siècle après le Grand Frédéric, Bismarck puis Guillaume II transcendent son œuvre, en y adjoignant une protection sociale, bien avant l’action des réformistes du XXe siècle.

Le despotisme éclairé est le système qui définit le moins mal le régime franquiste en Espagne qui ne fut pas une dictature populiste, ainsi que les expériences de divers Caudillos latino-américains durant le XIXe siècle : Simon Bolivar dans la fugace Grande-Colombie, Gabriel Moreno en Équateur, José Rodriguez de Francia au Paraguay, ou, au Mexique, le moderniste Porfirio Diaz, renversé par le  richissime socialiste, vaniteux et entouré d’affairistes, Francisco Madero, associé puis ennemi de l’Indien raciste et sanguinaire Emiliano Zapata, qui rêvait d’en revenir au mode de vie paléolithique des chasseurs-cueilleurs, ou encore la tentative du dernier Shah d’Iran, Mohamed Reza, de moderniser son État et sa Nation, en dépit d’un fanatisme religieux omniprésent et qui réussit à balayer son régime.

Les dictateurs « fous de dieu », qui furent si nombreux de la Renaissance du Quattrocento (Jérôme Savonarole) et de l’époque moderne (Oliver Cromwell) jusqu’à nos jours (les chefs d’État de l’islam djihadiste), sont généralement opposés aux riches (de nos jours : les grands capitalistes, les maîtres des multinationales) et aux rhéteurs ineptes des parlements, mais ce sont avant tout des théocrates hallucinés, des fanatiques, nullement des populistes, encore moins des individus éclairés par la raison. S’il leur arrive, inconstamment, d’entreprendre des réformes pour améliorer le sort de leur Nation, ce n’est nullement leur but premier : le triomphe de leur conception de la divinité est l’unique préoccupation de ces fous furieux.


Les sanglantes dictatures marxistes furent très exactement calquées sur ce fanatisme d’essence religieuse. L’athéisme ne fait rien à l’affaire : les sanguinaires disciples de Marx et d’Engels, qui avaient tous leur herméneutique très personnelle des textes sacrés de l’utopie communiste, voulaient imposer le bonheur sur Terre aux élus, issus d’un prolétariat de fantaisie. L’absurde berquinade dégénéra en génocides, en dantesques règlements de comptes avec les « ennemis de classes » et les « déviationnistes ». L’Inquisition catholique, même celle du marrane Thomas de Torquemada, ne fut qu’amusette comparée aux ignominies des polices politiques de chaque « paradis des travailleurs ».

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À l’opposé, les « révolutionnaires-conservateurs » européens, au XXe siècle, ne furent que des réactionnaires, issus de milieux fortunés et/ou cultivés, haïssant la plèbe et reprochant au IIIe Reich sa politique de fusion des castes et des classes sociales : Oswald Spengler, Ernst Jünger, Ernst von Salomon, Julius Evola n’en finissent pas d’agonir « l’aspect prolétarien et même vulgaire du national-socialisme ». Ce sont des nostalgiques du despotisme éclairé, mais nullement des héritiers de la centralisation jacobine de 1792-94 : le jacobinisme fut, avant tout, la mise en tutelle de l’Éxécutif par le Législatif.

Le mot d’ordre de ces esthètes a été donné en 1934 par l’un des précieux ridicules de la vie littéraire française, Abel Bonnard : « Une nation peut se sauver sans le secours d’un grand homme, elle ne le peut sans l’existence d’une élite ». C’est une phrase entièrement démentie par l’histoire des civilisations : tout système stable voit fleurir une élite d’administrateurs et de cadres, de scientifiques et de techniciens… quant à savoir si les purs intellectuels sont utiles à la Nation et à l’État, c’est une question qui risque de tourner à l’aporie.

Au XXe siècle, en Ibérie et en Amérique latine, les néo-despotes militaires se sont limités à réprimer l’agit-prop communiste, de façon d’ailleurs bien moins brutale que n’auraient agi les marxistes s’ils étaient parvenus au Pouvoir. L’opinion publique, désinformée par des clowns fort malhonnêtes, en a fait des monstres, alors qu’ils sont parvenus à éviter à leurs peuples la barbarie marxiste.

D’une manière générale, les nombreuses dictatures antimarxistes du XXe siècle, dites contre-révolutionnaires, comme celle des colonels grecs durant les années 1970 ou celle des généraux et amiraux chiliens ayant mis fin au règne chaotique de Salvator Allende, elles n’eurent rien de « populiste », étant l’expression de l’omnipotence du capitalisme cosmopolite, soutenu par la puissance de l’US-Army et de la ribambelle des services secrets des USA.

mardi, 07 juin 2016

Montesquieu van twaalf kanten belicht

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Boekrecensie

Door Paul Muys

Ex: http://www.doorbraak.be

Montesquieu van twaalf kanten belicht

Andreas Kinneging, Paul De Hert, Maarten Colette (red.)

Een vaak geciteerde denker waar toch veel misverstanden over bestaan

De wakkerste geesten onder u kennen baron de Montesquieu wel een beetje: de scheiding der machten, indertijd op school het obligate fragment uit de Lettres Persanes (Comment peut-on être Persan?) maar daar houdt het meestal bij op. Nu is er dit stevig gedocumenteerde werk waarin deze filosoof, voorloper van de Verlichting en grondlegger van de sociologie, vanuit diverse invalshoeken wordt bekeken.

Montesquieu_web.jpgHet onderwerp scheiding der machten is actueler dan ooit, nu dat kostbare beginsel weer moet worden verdedigd tegen de her en der dreigende sharia. In zijn hoofdwerk, De l’Esprit des Lois (Over de geest van de wetten) staat het bewuste principe centraal, net zoals dat van de checks and balances (zoiets als controles en waarborgen). Veelal getypeerd als een liberaal geeft Montesquieu in De l’Esprit aan dat hij na rijp beraad kiest voor een gematigde regering, gematigd door middel van de scheiding van de wetgevende, uitvoerende en rechterlijke macht. Liefst dan nog een regering waarin de adel een belangrijke rol vervult. Die machtenscheiding en de checks and balances liggen aan de basis van de Amerikaanse constitutie en die van een pak andere democratische landen, zonder die adel dan.

Ook al is Montesquieu zelf edelman, dat hij zo’n belangrijke rol toekent aan deze stand kan verbazen. Nog verbazender is het voor de leek dat hij een bewonderaar is van de staatsvorm zoals het middeleeuwse Frankrijk die kende. Dat heeft alles te maken met de evolutie die de monarchie onder de Franse koningen doormaakt: van een gematigd koningschap, getemperd door de tussenmacht van de adel, evolueert zij naar absolutisme en zelfs despotisme. Het is een impliciete kritiek op Lodewijk XIV (L’état, c’est moi).

Macht en tegenmacht. Machtsdeling voorkomt machtsmisbruik. Montesquieu is geen Verlichtingsdenker, hij is niet per se tegen de monarchie, noch tegen de republiek overigens, al vreest hij dat die laatste minder doelmatig zal zijn dan in de Romeinse oudheid. Evenmin heeft hij bezwaar tegen de standen, op voorwaarde dat ook zij gecontroleerd worden door een tegenmacht. Precies omdat het Engeland van na de Glorious Revolution dit in de praktijk brengt, geeft Montesquieu het als voorbeeld. Het tweekamerstelsel (Hoger en Lagerhuis), waarbij elke kamer een sociaal verschillende samenstelling heeft, verhindert dat de adel zich kan bevoordelen. ‘Essentieel is’, zo betoogt co-auteur Lukas van den Berge, ‘dat de dragers van de drie machten geen van alle een primaat opeisen. In plaats daarvan dienen zij zich elk afzonderlijk te voegen naar een onderling evenwicht waaraan zij zich niet kunnen onttrekken zonder de politieke vrijheid om zeep te helpen.’

Vrijheid is voor Montesquieu niet zozeer de mogelijkheid tot politieke participatie of zelfbestuur – wat wij in de 21ste eeuw voetstoots aannemen – ze zit veeleer in de bescherming van de privésfeer. Annelien de Dijn betoogt: ‘Vrijheid is niet de macht van het volk, maar de innerlijke vrede die ontstaat uit het besef dat men veiligheid geniet.’ Dit kan onder vele verschillende regeringsvormen, op voorwaarde dat machtsmisbruik geen kans krijgt. Overheden hebben zich niet te bemoeien met zaken die mensen als persoon treffen, en niet als burger. Wanneer zij de dominante gewoonten en overtuigingen krenken, voelen mensen zich aangetast in hun vrijheid en ervaren dit als tirannie, zo schrijft Montesquieu in zijn commentaar op de mislukte poging van tsaar Peter de Grote om mannen bij wet te verbieden hun baard te laten groeien. Hij beveelt de tsaar andere methoden aan om zijn doel te bereiken. Paul De Hert: ‘Montesquieu pleit niet voor het recht om een baard te dragen. Zijn sociologische methode leert ons niet wat vrijheid zou moeten zijn, wel hoe vrijheid in een gegeven context ervaren wordt, of juist niet.’ Wat zou de observateur Montesquieu trouwens van het dragen van hoofddoeken in scholen en openbare diensten gedacht hebben?

espritdeslois-f9b7b.jpgMontesquieu zet zijn lezers vaak op het verkeerde been. Allicht verwijst de kwalificatie ‘enigmatisch’ in de titel hiernaar. Zo lezen we in de bijdrage van Jean-Marc Piret dat Montesquieu best kan leven met cliëntelisme, het uitdelen van postjes, waarbij de uitvoerende macht steun zoekt tegen de wetgevende kamers in. Wie geen voordelen uit die hoek hoeft te verwachten, zal dan weer zijn hoop op één van beide kamers stellen. Risico is daarbij dat teleurstelling mensen kan doen overlopen naar de tegenpartij. Schaamteloos opportunisme ? Volgens Montesquieu, die zich geen illusies maakt over hoe het er in de politiek toegaat, is dit juist een teken van de ‘pluralistische vitaliteit van de maatschappij’.

Op zijn reizen stelt Montesquieu de achteruitgang vast van de Zeven Provinciën en van de republieken Venetië en Genua. Valt in Italië vooral corruptie op, in het achttiende-eeuwse Holland ziet hij alleen verval en kille zakelijkheid, sinds het land zich moest verweren tegen de invasie van Lodewijk XIV in 1672. De ooit zo bloeiende, creatieve koopmansstaat ziet zich verplicht een ruïneuze oorlog te voeren, die van de Hollanders een kil, berekenend, gesloten volk maakt, niet langer in staat tot grootse, creatieve daden. Het geweld is bovendien de grootste vijand van de eros, de humaniserende liefde zoals die groeide en bloeide ‘in het mediterrane land van wijn en olijven’, in Knidos in de Griekse oudheid (Le Temple de Gnide is een erotisch gedicht van Montesquieu naamloos uitgegeven in Amsterdam). Van de eros gesproken: Montesquieu is volgens een van de auteurs van dit boek, Ringo Ossewaarde, een liberaal ‘in de zin dat hij voor politieke en burgerlijke vrijheid staat, voor constitutionalisme, humanisme, tolerantie, matiging, internationalisme en machtsdeling en hij een afkeer heeft van absolutisme. Al deze aspecten zijn echter voor hem slechts voorwaarden voor een erotisch bestaan, voor humanisering, verfijning en verheffing.’

Als kind van zijn tijd kan Montesquieu bezwaarlijk een Europees federalist zijn, maar hij bepleit de humanisering van de verhouding tussen staten en bevolkingen en hecht daarbij veel belang aan vrijhandel en het machtsevenwicht tussen onderling afhankelijke staten. Dit kan een einde maken aan de permanente confrontatie, en de burger beschermen tegen misbruik van gezag, betoogt Frederik Dhondt in zijn bijdrage.

Zo biedt dit boek menig verrassend inzicht, waarop ik hier niet kan ingaan. Ook kan de lezer nader kennismaken met de fameuze Perzische Brieven, anoniem verschenen roman in briefvorm, een puntige satire op het absolutistische Frankrijk, die ook voor de hedendaagse lezer een eyeopener kan zijn. Montesquieu toont zich hier en elders een helder waarnemer, niet beïnvloed door modedenken, niet geneigd mee te huilen met de goegemeente, kritisch over de katholieke clerus, fel tegen de inquisitie en verwoed tegenstander van de slavernij.

Ten slotte: De l’Esprit kan niet begrepen worden zonder er de klimaattheorie van de auteur bij te betrekken. Het klimaat is voor Montesquieu en veel van zijn tijdgenoten namelijk de belangrijkste van alle invloeden op het leven van de mens. Maar diezelfde mens kan naar de overtuiging van de Franse denker door oordeelkundig handelen de invloed van het klimaat bijsturen, zo troost Patrick Stouthuysen de mogelijk verontruste lezer.

Beoordeling : * * * *
Titel boek : Montesquieu. Enigmatisch observateur
Subtitel boek :
Auteur : Maarten Colette, Frederik Dhondt, Annelien de Dijn, Paul De Hert, Michel Huysseune, Andreas Kinneging, Paul Pelckmans, Ringo Ossewaarde, Jean-Marc Piret, Alexander Roose, Patrick Stouthuysen, Lukas van den Berge
Uitgever : Uitgeverij Vrijdag, Antwerpen
Aantal pagina's : 353
Prijs : 29.99 €
ISBN nummer : 978 94 6001 472 7
Uitgavejaar : 2016

lundi, 08 février 2016

Door de Verlichting verblind

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Door de Verlichting verblind

Kan het liberalisme de islamisering nog stuiten?

Door Marcel Bas

"Een ander uitstekend middel is het zenden van kolonisten naar een of twee
plaatsen; de aldaar gestichte koloniën zijn als het ware de sleutels van de
nieuwe staat. Deze maatregel is noodzakelijk; anders toch moet men in het
nieuw veroverde land veel troepen op de been houden. Het stichten van
nederzettingen kost de vorst niet veel (...)"
– Niccolò Machiavelli, De Vorst, 1532


"Car il n'est pas intellectuellement élégant, intellectuellement chic d'admettre
que le fondement d'une civilisation est ethnique. J'évoquerai plus loin l'utopie de
cette vision communautariste ou intégrationniste de l'Europe, en défendant le
principe de l'unité ethnique et de l'ethnocentrisme contre l'ethnopluralisme. (...)
Le courage idéologique consiste aujourd'hui à défendre l'ethnocentrisme."
– Guillaume Faye, La Colonisation de l'Europe, 2000


"Das Volk hat das Vertrauen der Regierung verscherzt. Wäre es da nicht
doch einfacher, die Regierung löste das Volk auf und wählte ein anderes?"
– Bertolt Brecht, 1953


De aanhoudende groei van het aantal moslims in Noord- en West-Europa leidt tot de vrees dat de islam er een steeds grotere invloed zal verwerven. Onze Westerse, uit de Verlichting voortgekomen verworvenheden – variërend van homorechten tot de vrijheid van meningsuiting – zouden namelijk op gespannen voet staan met de islamitische leefregels. Politici en filosofen trachten die vrees te bezweren door de verlichtingswaarden als universele waarden te presenteren en te pleiten voor nog sterkere omarming ervan. Tegelijkertijd wordt christelijke Oost-Europese landen, die niets van massa-immigratie willen weten, door politici verweten "xenofoob" te zijn, en "nog niet multi-etnisch" te denken. Maar zijn onze verlichtingswaarden wel zo universeel? En in hoeverre zullen die nog in staat zijn ons voor verdere islamisering te behoeden? En kunnen wij juist niet veel leren van de Oost-Europeanen als het aankomt op het behoud van onze Europese beschaving?


De huidige politieke reactie

De massale toestroom van moslims in de afgelopen decennia, en vooral in 2015 en 2016, heeft in Noord- en West-Europa geleid tot de vestiging en groei van een islamitische zuil. Hier en daar doen zich hachelijke situaties voor, waar politici op hebben moeten reageren. Zo zijn er salafistische terreuraanslagen gepleegd, is er becijferd dat moslimmannen in Zweden zich tientallen malen meer aan Zweedse vrouwen vergrijpen dan Zweedse mannen dat doen, en blijkt dat in de Engelse stad Rotherham een moslimbende 1.400 overwegend autochtone meisjes heeft misbruikt, verkracht en vermoord.

Tijdens de beruchte jaarwisseling van 2015–2016 hadden moslimaanranders en -verkrachters het niet alleen in het Duitse Keulen, maar ook elders in Noord- en West-Europa op inheemse vrouwen gemunt. Het bleek dat zulke aberraties eigenlijk al jaren schering en inslag waren tijdens feestelijkheden in Duitsland en Scandinavië, waarbij vrouwen op grote schaal door moslims aangerand en verkracht werden.


" De Duitse en Zweedse overheden en media waren erin geslaagd deze feiten jarenlang onder de pet te houden. Pas nadat de wal het schip gekeerd had, gaven zij schoorvoetend toe dat zij er geen ruchtbaarheid aan wilden geven, uit angst om de daders te zeer als collectief voor te stellen en zo van discriminerend gedrag beticht te worden."

De Duitse en Zweedse overheden en media waren erin geslaagd deze feiten jarenlang onder de pet te houden. Pas nadat de wal het schip gekeerd had, gaven zij schoorvoetend toe dat zij er geen ruchtbaarheid aan wilden geven, uit angst om de daders te zeer als collectief voor te stellen en zo van discriminerend gedrag beticht te worden.

Niet alleen onze vrouwen worden belaagd: ook homo’s en joden worden door moslims uitgejouwd en belasterd. Hiertegenover stellen Noord- en West-Europese bewindslieden, zoals minister-president Mark Rutte (maar ook de meest conservatieve politici), dat er aan onze aan de Verlichting ontsproten waarden en verworvenheden niet getornd wordt. Rutte c.s. hebben meerdere malen verklaard dat die waarden de vrijheid garanderen waarmee vrouwen, homo's en joden zich op straat mogen vertonen. Wie die niet respecteert, hoort hier niet thuis. Eenieder kan zich de Verlichting eigen maken: in reactie op 'Keulen' verklaarde de Amerikaanse filosofe Susan Neiman dan ook hoopvol dat de Verlichting niet is beperkt tot één cultuur, maar dat het een universele beweging is die in Europa gewoon beter is gerealiseerd dan elders.

Voorvallen zoals in Keulen genereren veel media-aandacht. Die kunnen rekenen op kordate reacties van politici en meningsvormers. Er zijn echter kwesties die veel dieper en langduriger op onze cultuur zullen ingrijpen. Neem nu de strijd om groepsbelangen. Reeds nu krijgen wij te maken met islamitische eisen zoals het recht voor vrouwen – ongeacht hun functie – om overal islamitische doeken en versluieringen te dragen. En wat te denken van het verbannen van kerstbomen of andere christelijke symbolen uit openbare instellingen, het inruilen van christelijke feestdagen voor islamitische feestdagen, het recht om moskeeën en islamitische scholen te bouwen, het recht op halalvoedsel, het recht op gezinshereniging na gezinshereniging? Deze belangenstrijd zal de komende decennia in intensiteit toenemen en zal onze landen ingrijpend veranderen. Tenzij ook deze problematiek op een krachtig politiek-filosofisch weerwoord kan rekenen. Doch dat blijft uit.


Verlichting en liberalisme

Rutte c.s. noemen de Verlichting; uit deze filosofische stroming kwam het liberalisme voort. Het liberalisme is de politiek-maatschappelijke invulling van de Verlichting. Vooral na de ineenstorting van het fascisme en het communisme is het neoliberalisme in onze landen heersend. In Nederland en de oudere EU-lidstaten verkondigen bijna alle politieke partijen het liberale verhaal. Als een politicus of het Verdrag van Lissabon (artikel 1) Europese waarden verkondigen, dan worden daarmee de verlichtingswaarden van het neoliberalisme bedoeld.

Vrijheid, Gelijkheid en Broederschap

In de negentiende eeuw verbreidde het verlichte liberalisme zich door West-Europa onder de leuze Vrijheid, Gelijkheid en Broederschap: het gaat uit van de soevereiniteit van het individu en de rede. Het individu heeft de vrijheid te kiezen hoe hij zijn leven leidt: hij kan ervoor kiezen tot wel of geen gemeenschap te behoren, wel of geen religie aan te hangen, zijn identiteit aan zijn volksgenoten of aan het kopen van consumptiewaar te ontlenen, enzovoorts. De ooit onwrikbare drie G's – Gezin, Gemeenschap en Geloof – zijn vervolgens onderhandelbaar en relatief geworden. Collectieven zouden maar tot onderhorigheid en tweespalt leiden, maar eenmaal opgedeeld in individuen zal men ervoor kunnen kiezen zich gebroederlijk en rationeel gedragen, en een betere wereld te creëren.


"De Verlichting herdefinieert en deelt van alles op; het huwelijk en de kleinste natuurlijke gemeenschap, het gezin, incluis."

De Verlichting herdefinieert en deelt van alles op; het huwelijk en de kleinste natuurlijke gemeenschap, het gezin, incluis. Deze instituties zouden niet langer deel uitmaken van Gods orde. Niet langer is het huwelijk voorbehouden aan man en vrouw, of is het gezin het vanzelfsprekende nestje waarin kinderen geboren en opgevoed worden. De regulering en het causaal verband tussen seks en voortplanting zijn dan ook kwesties van eigen, individuele keuzen geworden. Dit is onlangs geculmineerd in het liberale verschijnsel waarbij paren van het gelijke geslacht ook mogen huwen. Zulke paren mogen zelfs kinderen hebben – al heeft de Voorzienigheid eigenlijk bepaald dat dit helemaal niet kan.

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Dit heeft ertoe geleid dat de vanzelfsprekende, organische aanvullendheid van man en vrouw betwijfeld wordt. Aangestuwd door LGTB-bewegingen heeft men nu in Zweden in officiële documenten het 'derde geslacht' geïntroduceerd, en zijn in Frankrijk de begrippen vader en moeder heel pragmatisch gewijzigd zijn in ouder 1 en ouder 2. Fysiek gezien zijn personen niet op te delen, maar volgens de Verlichting kan hun identiteit dus wel bijgesteld en geherdefinieerd worden. Er zijn nu, logischerwijze, individuen beschreven die met een boom willen huwen, of die beweren dat ze "in het verkeerde lichaam zitten" en eigenlijk een kat zijn. Vervolgens bekeren steeds meer onzekere Europese vrouwen zich tot de islam, waar ze de in het Westen gemiste geborgenheid en richtlijnen van de drie G's wél aantreffen.


Dit soort existentiële dissociatie maakt deel uit van de voortgaande individualisering van de maatschappij: het stokpaardje van het liberalisme.

Individualisme gaat ook hand in hand met de gedachte dat het ene collectief gelijk is aan het andere. De Nederlandse liberale Grondwet van 1848 was opgesteld om de godsdienststrijd tussen protestanten en katholieken te sussen. In de geest van die Grondwet is de ene religie niet meer waard dan de andere. Het maakt niet uit of de ene religie hier verworteld is en de andere niet. Er is dus bepaald dat er niet alleen vrijheid van religie is, maar ook gelijkheid van religies. Thans mag elke religie in Nederland haar eigen gebedshuizen en onderwijsinstellingen oprichten.

Thans mag elke religie in Nederland haar eigen gebedshuizen en onderwijsinstellingen oprichten.

Christelijke gezindten zijn gelijk aan elkaar, maar sinds de massa-immigratie is de islam dat nu ook aan het hier gegroeide en verwortelde christendom.

Etnische collectieven zijn volgens het liberalisme ook gelijk aan elkaar. De ene etnische groep beschikt immers niet over meer rechten ergens te wonen dan de andere. Anders zouden we discrimineren. Het enige dat boven alle twijfel verheven zou moeten zijn, is de liberale rechtsstaat met zijn vrijheden en parlementaire democratie. Mensen die het daar niet mee eens zijn, zijn niet vrij daarvoor uit te komen. Met name Westerse landen doen er veel aan de verworvenheden van de Verlichting te exporteren naar Centraal- en Oost-Europa, en naar moslimlanden.


Waarden en normen zijn volgens het liberalisme relatief en lokaal, behalve als zij zijn voortgekomen uit de kernwaarden van de Verlichting. Dan zijn zij ononderhandelbaar en universeel.


De nieuwe werkelijkheid

Nu hebben we te maken met aanhoudende massa-immigratie vanuit moslimlanden en een voortdurende aanwas van nieuwe generaties moslims in onze landen. En men vraagt zich af of de verworvenheden van de Verlichting nu onder druk staan. De vraag die ik echter zou willen stellen is: kunnen we met de kernwaarden van de Verlichting in de hand hier nog wel een dam opwerpen tegen de islam?

De volkeren van het Midden-Oosten


Laat ons daarvoor eerst bepalen met wie wij te maken hebben.

"Volkeren in het Midden-Oosten denken van nature collectivistisch en etnocentrisch. "

Volkeren in het Midden-Oosten denken van nature collectivistisch en etnocentrisch. Hun pastorale voorouders groepeerden zich in grote herdersfamilies en op evolutionair beslissende momenten moesten dit soort sibbegemeenschappen (clans) met elkaar concurreren. Zij werden patriarchaal geleid, d.w.z. (familie)leden waren gehoorzaam aan een mannelijke stamhouder, en de groep betrachtte een strijdvaardige houding tot andere groepen. Men bewaakte een duidelijke afbakening van de ingroup tegenover de outgroup.

Uitbreiding van de zo belangrijke, tot loyaliteit nopende onderlinge verwantschap, bijvoorbeeld door endogamie, uithuwelijking, polygynie en het verwekken van veel kinderen, vergrootte de invloed van de groep op de leefomgeving. Binnen de groep was er weinig ruimte voor individualisme en buiten de groep was er weinig ruimte voor altruïsme want collectieven waren niet gelijk aan elkaar. En iets was moreel juist zolang de groep ervan profiteerde.

De volkeren van Noord- en West-Europa


In het geval van zware beproevingen neigen ook wij tot tribalisme. Wij zijn dus wel collectivistisch aangelegd, maar kwalitatief minder dan de volkeren uit het Midden-Oosten. Onze voorouders zouden gedurende de laatste IJstijd een evolutionair belangrijke periode hebben doorgemaakt. Zij waren toen jagers-verzamelaars die zich vanwege het ruige klimaat groepeerden in vaak geïsoleerde, relatief kleine families waarbij de man de taak tot levensmiddelenverschaffer op zich nam. Isolement, kou en schaarste noopten tot monogamie, onderlinge affectie en relatieve gelijkheid tussen de seksen. Het aanhalen en versterken van bredere familiebanden leverden in onze wordingsgeschiedenis geen significante voordelen op, dus het zoeken van een partner gebeurde buiten de eigen verwanten (exogamie). Hierdoor was er ruimte voor meer individualisme en werd de groep nog minder gekenmerkt door sterk patriarchale verhoudingen.


" Dit verloop heeft de Noord- en West-Europese volkeren in zekere zin een goedmoedige, niet-etnocentrische, ontvankelijke doch individualistische inborst gegeven. "

 

Het contrast tussen ingroup en outgrouphoefde niet groot te zijn. Moraal was en is onder onze volkeren universeel: iets is moreel juist, ongeacht de vraag of het de groep ten goede komt. Vervolgens verleende het christendom ons het geloof in gelijkheid voor God, onder christenen. Dat raakte echter seculier en veralgemeniseerd tot de idee dat alle mensen, waar dan ook, aan elkaar gelijk zijn.

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Dit verloop heeft de Noord- en West-Europese volkeren in zekere zin een goedmoedige, niet-etnocentrische, ontvankelijke doch individualistische inborst gegeven. Het maakt aannemelijk dat de Verlichting hier in Noord- en West-Europa zo heeft kunnen aanslaan omdat wij over een primordiale geneigdheid tot openheid en individualisme beschikken.

We denken en hopen dat onze kernwaarden universeel zijn, en we gunnen de nieuwkomer dezelfde zegeningen. Maar die waarden zijn niet universeel. Het op zich heel legitieme en functionele waardenstelsel van de islam is daar een van de vele bewijzen voor.


Liberale uitholling van het volksbegrip

Een liberale overheid waakt over burgers, ongeacht of die wel of geen volk ofummah (de moslimgemeenschap) vormen. In onze samenleving is het etnische begrip volk steeds verder op de achtergrond geraakt en misschien zelfs lastig geworden, aangezien het Nederlands staatsburgerschap door de massa-immigratie steeds minder een zaak van het Nederlandse volk is geworden. Een volk vormt een eenheid op grond van onderlinge verwantschap en een gedeelde geschiedenis. Staatsburgerschap, daarentegen, kan hoofdzakelijk gebaseerd zijn op territorialiteit en nationaliteit: het is het gevolg van rationele en juridische overeenkomsten met de staat waarvoor eenieder kan kiezen die te onderschrijven of na te leven. Staatsburgerschap is dus, in beginsel, een open systeem. Volkswezen, daarentegen, vindt zijn oorsprong in de biologische, niet-rationele, collectivistische sfeer. Daar valt weinig in te kiezen. Het is, als het ware, aangeboren. Onder invloed van de rationele verlichtingskernwaarden is volkswezen dan ook omstreden geraakt.

Begrippen als volk en volkswezen "sluiten mensen uit", zoals dat tegenwoordig heet. Autochtonen die uit zelfbehoud een beroep doen op het collectivistische volksbegrip en die vervolgens, uit een gevoel van verbondenheid, het opnemen voor hun eigen mensen, zouden wel eens van discriminatie – een strafbare schending van artikel 1 van de Nederlandse Grondwet – kunnen worden beticht. Discriminatie is in het liberale Westen een nieuwe zonde. Ondertussen dendert het proces waarin autochtonen toenemend uit hun natuurlijke gemeenschappen losgeweekt raken, onverminderd voort, terwijl allochtonengemeenschappen groeien en zich collectief steeds effectiever organiseren.

In hun pogingen op te komen voor de belangen van de eigen groep in een door Westerlingen overheerste omgeving, organiseren moslims zich ongestoord langs etnisch-religieuze lijnen. Getuige de inmiddels vele onderscheidenlijk Turkse en Marokkaanse moskeeën en belangenorganisaties is de 'in ballingschap' verkerende ummah minder internationalistisch en veel etnocentrischer dan door Mohammed beoogd was. Er is niet veel wat ons op individualisme en vrije keuzen geënte bestel daartegen kan inbrengen. Behalve dan nog meer te hameren op verlichtingswaarden en autochtoon etnocentrisme af te straffen.


" Onze liberale Grondwet kwam tot stand in een autochtoon, christelijk Nederland. Maar nu draagt deze exponent van de Verlichting aan de ene kant bij tot verdere versterking van de islam in ons land, en aan de andere kant tot verzwakking van onze autochtone identiteit. "

Onze liberale Grondwet kwam tot stand in een autochtoon, christelijk Nederland. Maar nu draagt deze exponent van de Verlichting aan de ene kant bij tot verdere versterking van de islam in ons land, en aan de andere kant tot verzwakking van onze autochtone identiteit. Onze overheid is grondwettelijk gezien namelijk genoodzaakt het behoud van de islam te faciliteren door de bouw of oprichting van de moskeeën en islamitische scholen te ondersteunen.

Daarnaast voorziet de Grondwet in representatieve democratie. Ook deze is ooit in het leven geroepen onder de invloed van de Verlichting. Dit was haalbaar binnen die oude, autochtone, christelijke Nederlandse natie. Nederland was al geruime tijd een natiestaat; men deelde dezelfde waarden, christelijke ethiek, geschiedenis en etniciteit. Het electoraat vormde, kortom, een volk. Daarop kon het liberalisme gedijen, terwijl het de oude christelijk-sociale initiatieven en hiërarchieën afbrak. Maar hoe meer islamieten het Nederlands staatsburgerschap kunnen verwerven, hoe minder ons volk zich in zijn natiestaat zal kunnen herkennen. Ook democratie is inmiddels steeds minder een kwestie van het volk geworden. Bij voortduring kan dit proces ontaarden in een strijd om behartiging van tegengestelde, etnische belangen. Hier moeten wij op voorbereid zijn. Autochtonen zijn zich echter nog niet erg bewust van hun eigen etnische belangen. Allochtone minderheden, en inzonderheid moslims, zijn zich dat wel.


Paradoxen

Er voltrekt zich aldus een proces waar etnische minderheden onevenredig veel invloed verwerven in de Nederlandse en Westerse politiek en samenleving. De islamitische gemeenschap is groot, doch de inheemse Nederlanders zijn demografisch nog veruit in de meerderheid. Maar als die meerderheid zich de inschikkelijke rol van een minderheid aanmeet, bijvoorbeeld uit angst om te discrimineren of om haar individualistische kernwaarden te verloochenen, dan kent zij haar eigen collectieve belangen niet.
"Autochtonen zijn zich echter nog niet erg bewust van hun eigen etnische belangen. Allochtonen, en inzonderheid moslims, zijn zich dat wel. "

Tot nu toe schamen wij, niet de moslims, ons voor dit soort 'primitieve' belangen. Haast altruïstisch accepteren wij tijdens verkiezingen etnisch stemgedrag onder moslims, geven we kinderbijslag aan grote moslimgezinnen en willen we aanranders in Keulen niet collectief stigmatiseren.

Migranten uit de Oriënt beschouwen zich echter weldegelijk als een collectief. Juist in onze landen, dus eenmaal buiten de islamitische landen woonachtig, neigen zij als minderheid sterker naar de eigen ummahen/of de eigen etnische groep.

Hun religieus en etnocentrisch collectivisme, versterkt door primordiaal wantrouwen jegens de andere groep, druist juist in tegen de door onze politici gepropageerde liberale kernwaarden en verworvenheden van de Verlichting. De islam en de daaraan verbonden mentaliteit zijn ons dan ook wezensvreemd. De islam weerspiegelt de orde die binnen de sibbegemeenschap heerst: de overheid, het recht, het huwelijk, de verhoudingen tussen man en vrouw, het individu en de sibbegemeenschap zelf zijn er ondergeschikt aan Allah. In het Westen is echter alles, ook onze religie, onder invloed van de Verlichting ondergeschikt geraakt aan de door onszelf ingestelde overheid, die allen als gelijken dient te behandelen, maar die zelf, door het democratisch proces, ook onderhevig is aan verandering en bijstelling van onderaf.

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De paradox is nu dat 'onverlichte' waarden en overlevingsstrategieën van minderheden alhier kunnen gedijen dankzij de kernwaarden van de Verlichting. De paradox wordt groter als we zien dat het nut van deze waarden sterk tot voordeel van moslims strekt. Nóg groter is de paradox als we zien dat Noord- en West-Europeanen als reactie op de islamitische nieuwkomers tegenwoordig geneigd zijn die waarden te overdrijven. Een voorbeeld: in antwoord op islamitische homokritiek beschouwen wij het als iets typisch Nederlands om massaal op te komen voor homorechten zoals het zgn. homohuwelijk. Het ontgaat ons echter dat wij daarmee afbreuk doen aan het huwelijk als een door God gegeven verbintenis tussen man en vrouw, en als plek waar de toekomstige generaties van ons volk geboren zullen worden. Dit klimaat van autochtone ontwaarding van het huwelijk en het loskoppelen van seks en voortplanting hebben het aantal autochtone echtscheidingen ernstig doen stijgen en het aantal autochtone geboorten dramatisch doen dalen.

Maar hoezeer wij tegenwoordig ook beginnen te geloven dat de Verlichting ons ten overstaan van de islam een identiteit kan verschaffen, heeft diezelfde Verlichting ons geleerd dat het ene collectief niet beter is dan het andere. Men mag niet aan de fundamenten van de liberale rechtsstaat zagen, maar als wij afgeleerd hebben de ene cultuur als waardevoller in te schatten dan de andere, dan is er niet veel rationeels in te brengen tegen iets als het multiculturalisme of islamitische kritiek op de typisch Westerse Verlichting. Als onze cultuur niet geschikter of beter is om hier leidend te zijn, wie zijn wij dan om de toevloed van alloculturele migranten tegen te gaan? Wij moeten onze medemensen uit het Midden-Oosten en de Maghreb gewoon als individuen verwelkomen, de grenzen openzetten, en hun culturen hier naast de onze laten floreren.


Liberalisme schaft zichzelf af

Zulk cultuurrelativisme is een gevaarlijke gedachtegang. Wat ons onderscheidt van nieuwkomers is onze gemeenschappelijke herkomst, die wij als Europeanen, Nederlanders, delen. Die gemeenschappelijkheid zou ons ertoe in staat kunnen stellen onze eigenheid t.a.v. de islam te bewaren, en de aanvaardbaarheid van de islamitische identiteit hier te lande tegen te gaan. In onze reactie op de islam verdedigen wij nu echter nog edelmoedig de waarden van de Verlichting en het liberalisme als een oplossing.

Pegida, voluit Patriotische Europäer gegen die Islamisierung des Abendlandes, is een van de vele Duitse massabewegingen tegen het cultuurrelativisme

Het probleem met het liberalisme is dat het eindig is. Deze politiek-maatschappelijke invulling van de Verlichting slaagt er vooral in burgerschap en individualisme te propageren onder mensen die zich nog bewust zijn van hun collectieve belangen en wederkerigheid als volk, als christenen, als gezinnen, e.d. Maar na individualisering van de massa zal het liberalisme niet proberen dit oude collectivisme nieuw leven in te blazen.

Eenmaal consequent doorgevoerd, heft het verlichtingsproject van het liberalisme zichzelf op, omdat het alles opdeelt en gelijktrekt. Zichzelf incluis. Immers, de verlichte politieke praktijk kan enkel tot haar recht komen zolang de bevolkingsgroepen er belang bij hebben elkaar vanuit oude collectivistische structuren en identiteiten met wederzijds respect en wederzijdse afhankelijkheid tegemoet te treden. Die structuren en identiteiten zijn echter in wezen pre- of onliberaal, en derhalve problematisch en genomineerd om ontbonden te worden, aangezien zij 's mensen keuzevrijheid beperken.

Uiteindelijk heeft dit tot gevolg dat de collectivistische levenssappen waarmee het liberalisme zichzelf als 'neutraal' alternatief voor partijdig collectivisme heeft kunnen voeden, onder de individualiserende en centraliserende invloed van datzelfde liberalisme opgedroogd zullen raken.


"(...) ook het bij uitstek nominalistische liberalisme als beschavingsverschijnsel zal zelf geen verbanden met de realiteit meer blijken te hebben. "

Besef van de verbanden tussen individu, gezin, familie, gemeenschap, volk, natuur, cultuur, beschaving, gezag, geweten en metafysica zal geërodeerd zijn, en ook het bij uitstek nominalistische liberalisme als beschavingsverschijnsel zal zelf geen verbanden met de realiteit meer blijken te hebben. De geschiedenis van het liberalisme is het verhaal van afbraak van natuurlijke en lokale gemeenschappen, waarvan de vrijgekomen autoriteit en middelen gecentraliseerd en overgeheveld worden naar de staat of naar nog grotere bestuurslichamen zoals de Europese Unie. Individualisme raakt doorgeschoten. Dat houdt in dat de van hun sociaal-culturele netwerken 'bevrijde' individuen steeds afhankelijker van hun overheden raken en dat de staat en de supranationale verbanden (de EU) steeds machtiger worden.

Gesteld tegenover collectivistisch aangelegde, etnocentrische moslimgemeenschappen zal het liberalisme ons dus erg verzwakken. Waarschijnlijk komt er een tijd waarin de optimistische bevrijdingsboodschap van het liberalisme – nog steeds parasiterend op restanten van het geseculariseerde christendom – het individu enkel nog zou kunnen aanzetten tot ongeloof in alles, behalve in het eigen gelijk, in het recht op individueel genot, zolang de Staat maar zijn werk kan doen. Als de liberale agenda is volbracht, is er niets meer voor het individu van waaruit hij de 'vrijheid' tegemoet kan gaan. Het zal vooral de autochtone, door de Verlichting verblinde ik-mens verzwakken, en de allochtone wij-denker binnen zijn collectief versterken. Het is dan ook verstandig dat ook wij ons nu reeds meer collectief organiseren, om goed voorbereid te zijn op komende tijden van chaos. In tijden van crisis hebben we elkaar als collectief weer nodig.

In het licht van de door migratiestromen aangezette omvorming van Noord- en West-Europa heeft de verlichte, Duitse Willkommenskultur tegennatuurlijke trekken gekregen

De processen die we thans in Noord- en West-Europa zich zien voltrekken nopen ons ertoe het nut van de verworvenheden van de Verlichting opnieuw tegen het licht te houden. Nu het Avondland zo ingrijpend en mogelijk blijvend veranderd is, is de Verlichting nauwelijks nog een oplossing te noemen. De Verlichting is een deel van het probleem geworden. Doch zolang de versluierd aanwezige, oude, collectivistische structuren van de oorspronkelijke Europese bevolking nog aanwezig zijn, is er hoop. We moeten terug naar dit wij, en niet naar meer ik. Het gevoel van volkseenheid, de christelijke beschaving en de neiging je gemeenschappelijk te verzetten tegen migratie zijn voorbeelden van dit oude wij. En die treffen we nog volop aan in Oost-Europa. Voor een oplossing van ons probleem zouden wij daar te rade kunnen gaan.

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Balkanisering

Noord- en West-Europa ondergaan momenteel een proces van balkanisering – laat ons toch het beestje bij de naam noemen. Ergo, een cursus Europees collectivistisch denken is geboden. Die zou ons kunnen voorbereiden op een toekomst waarin collectivistische identiteit juist voor een demografische meerderheid als de onze een belangrijk, bestendigend machtsmiddel zal blijken te zijn. De tegen massa-moslimimmigratie gekante Oost-Europese EU-lidstaten laten ons tegenwoordig zien met welke levenshouding men volksbehoud vanuit de oude, Avondlandse beschaving zou kunnen bewerkstelligen.

Met name de Balkanvolkeren en -landen hebben zonder Verlichting eeuwen van islamitische aanwezigheid weten te doorstaan. Hongaren, Roemenen, Bulgaren en Serven zijn zich dan ook sterk bewust van hun christelijke en etnische identiteit. Tot ergernis van de verlichte EU zijn zij gekant tegen islamitische immigratie, simpelweg omdat zij het christelijke karakter van hun volkeren willen behouden.

Laat ons ons licht opsteken op de Balkan, bij de Roemenen en de Bulgaren: in september 2015, toen de migranteninvasie iedereen wakkerschudde, zegde Roemenië bij monde van premier Ponta met tegenzin toe om 1.500 migranten op te vangen (net zo veel als het het Nederlandse dorp Hilversum er toen wilde opnemen). Maar het land zwichtte later onder zware druk

Z.H. Patriarch Neofit van Bulgarije

van de EU. In diezelfde maand riep patriarch Neofit namens de Heilige Synode van de Bulgaars-orthodoxe Kerk de eigen regering op geen vluchtelingen meer toe te laten. Hij verklaarde dat het "moreel gezien verkeerd [is] om de Europese grenzen open te stellen voor alle economische migranten en vluchtelingen" en dat migratie vanuit het Midden-Oosten en Noord-Afrika naar Bulgarije vragen oproept over "de stabiliteit en het voortbestaan van de Bulgaarse staat in het algemeen". De kerkelijk leider vervolgde met de stelling dat het bestaande etnisch evenwicht "in ons vaderland Bulgarije, dat ons orthodoxe volk door God beschikt is om er te wonen" ingrijpend kan veranderen als er mensen worden opgenomen die in Europa een beter leven zoeken.

Wij kunnen echter ook ons licht noordelijker opsteken: bij de Polen, Slowaken en Tsjechen. Zij dreven in 2015-2016 de door DuitseWillkommenskultur gebonden EU tot razernij toen zij met Hongarije aangaven liever de grenzen gesloten te houden voor moslims. Het Hongarije van premier Viktor Orbán heeft de migratieroutes vanuit Servië zelfs met een lang grenshek versperd. Orbán denkt dat Europeanen een minderheid in eigen gebied zullen worden als de huidige migrantenstroom aanhoudt. Deze volkeren begrijpen het gevaar van niet alleen islamisering maar van massa-immigratie als geheel; niet enkel omdat zij tot een natiestaat behoren, en niet omdat hun waarden rationeel, inclusivistisch of verlicht zijn, maar omdat zij nog vitale christenen zijn.

Een belerende reactie van Westerse EU-politici hierop is dat de Oost-Europese volkeren "er nog aan moeten wennen multi-etnisch te denken". Die reactie getuigt van Westerse hybris en een beperkte kennis van de Europese geschiedenis. Het waren juist díe volkeren die onder het Habsburgse en het Ottomaanse Rijk moesten samenleven met talrijke etnische minderheden. Alleen al de Roemenen hebben eeuwenlang met Turken, Tataren, Saksen, Zwaben, Ländlers, Hongaren, Szeklers, Serven, Armeniërs, Joden en Zigeuners samengeleefd. Deze situatie duurt tot op heden voort, en men weet zich er etnisch-cultureel geruggensteund.


"Het is dus juist deze langdurige multiculturele toestand die de Oost-Europese volkeren het etnocentrisme heeft verschaft, waar wij lering uit kunnen trekken. "

Het is dus juist deze multiculturele toestand die de Oost-Europese volkeren het etnocentrisme heeft verschaft, waar wij lering uit kunnen trekken. Zij zijn ons voorgegaan in een langdurige staat van multicultuur, zonder de eigen identiteit te verliezen. Het zijn dus wij die nog niet multi-etnisch denken. Maar ook wij kunnen het leren, en wel van deze ervaren volkeren.

Met name de Balkanvolkeren hebben weliswaar Europese ideeën uit de negentiende en begin twintigste eeuw aangegrepen om zich in natiestaten te verenigen. Maar in tegenstelling tot in West-Europa geschiedde deze natievorming relatief onlangs (met de belangrijkste perioden tussen 1848 en 1946). Hun nationalisme was niet, zoals in de 'oude' natiestaten in West-Europa, hoofdzakelijk gebaseerd op de Verlichting (in Frankrijk: Vrijheid, Gelijkheid en Broederschap). Integendeel: Zuidoost-Europees nationalisme was niet rationeel, geseculariseerd, liberaal of burgerlijk. Zuidoost-Europees nationalisme was en is vooral geïnspireerd door de Romantiek (in zekere zin een reactie op de Verlichting) en derhalve gebaseerd op groepsidentiteiten, taal, religie, etniciteit, cultuur en de grond waar die op ontstaan zijn.

Balkanvolkeren voelen zich op allerlei vlakken van het volksleven vertegenwoordigd door hun orthodoxe kerken die zichgedecentraliseerd en langs etnisch-nationale lijnen organiseren, zonder te vervallen in de zonde van het fyletisme: zij zijn Roemeens-orthodox, Bulgaars-orthodox, Servisch-orthodox, Albanees-orthodox, Montenegrijns-orthodox, Grieks-orthodox en Macedonisch-orthodox. Verder is men Reformatus (etnische Hongaren) en buiten de Balkan ben je Pools 'dus' Katholiek, en Russisch 'dus' Russisch-orthodox. Hun nationalisme heeft derhalve een diepe etnisch-culturele en tevens transcedente basis. Zij gebruiken in hun weerwoord op de gevolgen van massa-immigratie niet de term Verlichting, maar wel het wij-woord; 'ons'. Zij beroepen zich op het volk, op de eigenheid, en op de drie G's die zij in het christendom vinden. Orthodoxie biedt richtlijnen; orthodoxe kerken en kloosters hebben op de Balkan door de eeuwen heen bewezen mede een reservoir te zijn voor folkore, nationaal zelfbewustzijn en een stimulans voor etnische trots.

Oost- en Zuidoost-Europeanen weten wat het is om te moeten opkomen voor je etnisch-culturele belangen. Hun geschiedenis zou wel eens ons voorland kunnen zijn. Ons tijdig bewust te zijn van de 'onverlichte', nuttige Oost-Europese groepsstrategieën zal onze volkeren wellicht ten goede kunnen komen.


Volksbehoud

Als er rechten zijn, dan is er wel het recht om over onze eigen toekomst te beschikken. Onze inheemse leefwijze, leefomgeving, cultuur en identiteit dienen in stand te blijven. Dat kunnen we bewerkstelligen door ons te groeperen op een manier die onze oostelijke mede-Europeanen al eeuwen gewoon zijn. Het is nog niet te laat: voor gezin, gemeenschap en geloof hoeven we ons niet tot de islam te richten, maar kunnen we nog terecht bij ons eigen christendom. Bij ons om de hoek, bij wijze van spreken. Volksbehoud is niet iets om ons voor te schamen, integendeel. Ieder ander volk zou zich, eenmaal onder druk gezet, inzetten voor het eigene.

"Onze inheemse leefwijze, leefomgeving, cultuur en identiteit dienen in stand te blijven. "

Ons door de Verlichting en het protestantisme ingegeven gelijkheidsdenken heeft ons uiteraard ook wel goeds gebracht. Andere verworvenheden van de Verlichting als wetenschap, nieuwsgierigheid, wijsbegeerte, vrijheid van meningsuiting en vrijheid van informatie worden terecht geprezen. Ons protestantse arbeidsethos en soberheid hebben onze beschaving tot grootse prestaties gebracht.

Daarentegen heeft het binnen onze oude natiestaten sterk ontwikkelde burgerschapsgevoel ons vertrouwen in de eigen overheden geschonken. Maar aangemoedigd door het verlichte liberalisme laten onze overheden ons nu toenemend in de steek, en beschamen zij ons vertrouwen. Zij dragen ongevraagd de door ons aan hen toegekende regeringsbevoegdheden over aan de Europese Unie. En langzaam maar zeker worden wij als volk vervangen door een nieuwe bevolking met steeds minder gedeelde referentiekaders en cultureel-etnische loyaliteiten. Hoe kunnen wij zonder de eenheid van weleer de komende demografische veranderingen het hoofd bieden? Hoe kunnen wij ons doeltreffend organiseren als we zo geïndividualiseerd zijn geraakt? Wij staan nu voor de keuze: bieden wij die veranderingen met meer of met minder Verlichting het hoofd? Door op liberale wijze de islam meer ruimte te geven, ons als volk te laten ontbinden en onze leefwijze, cultuur en volkswezen te verliezen, of door hen te behouden en te kijken naar de vitale, waakzame, minder verlichte kennis van Oost- en Zuidoost-Europa?

Besluit

De Verlichting verlamt ons op dit ogenblik omdat het ons op de ingezette vervanging van onze volkeren geen ander antwoord verschaft, dan een tegennatuurlijke acceptatie en machtsverlies. Ons liberale bestel redeneert vanuit een oude luxepositie. Het is dus verouderd en boeit ons aan handen en voeten. We moeten af van het idee dat de islam hier dezelfde rechten als het christendom toebedeeld moet krijgen, of dat niet-Europese culturen binnen Nederland gelijk zouden zijn aan inheemse, verwortelde Europese culturen. Dat zijn ze niet. De inzet van elk maatschappelijk debat over de islam moet dan ook zijn dat de islam uit Noordwest-Europa zal moeten verdwijnen en dat moslimimmigratie moet stoppen. Dat moge illiberaal zijn, maar de tekenen des tijds roepen om een krachtdadig signaal: onze inheemse cultuur is weldegelijk te verkiezen boven de uitheemse. De wrijvingen die de multicultuur alhier veroorzaakt bewijzen dat er maar een cultuur leidend en blijvend kan zijn.


" De Verlichting is niet universeel; de aangeboren neiging tot groepsbehoud is dat wel. "

Dezer dagen zien we een vergrote, hernieuwde waardering voor onze eigen folklore, eigen identiteit, geschiedenis en lokale stabiliteit. De massale volkswoede die de afschaffing van de folklorefiguur Zwarte Piet en de vestiging van asielzoekerscentra genereren zijn hoopvolle tekenen. We zien een neiging die weliswaar niet op 'universaliteit' gericht is, maar die wel universeel is, namelijk de reflex tot zelfbehoud onder zelfbewuste gemeenschappen die weten wat ze te verliezen hebben. De Verlichting is niet universeel; die aangeboren neiging tot groepsbehoud – noem het tribalisme of etnocentrisme – is dat wel. Ze biedt ons een sterke, lokale basis die tot voordeel van onze eigen beschaving zal strekken. Wij moeten die tijdig met beide handen aangrijpen, want ze zal met het oog op de voortgaande multiculturalisering ongetwijfeld in intensiteit en belangrijkheid toenemen, en zich een uitingsvorm zoeken.

Het Avondland is ons te zeer 'universeel' en waardenvrij geworden om ons nog lang op de Verlichting en haar politieke exponent, het liberalisme, blind te staren. Immigratie en multiculturalisme zijn geen opties meer, want wij willen nog lang kunnen functioneren op de manier die wij, de meerderheid van dit werelddeel, ons wensen. Nieuwe tijden breken aan. Met of zonder Verlichting.

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Geraadpleegde en aanbevolen literatuur

Enkele zaken die ik hierboven heb beschreven zijn ontleend aan boeken, waarvan ik U hieronder graag de titels geef. Zij kunnen ons gedachten aan de hand doen voor het behoud van onze eigen culturele identiteit.


• Elst, Koenraad (1997). De Islam voor Ongelovigen. Wijnegem, België: Deltapers.

• Faye, Guillaume (1998). L'Archéofuturisme. Parijs, Frankrijk: Éditions Æncre. (In 2010 ook in het Engels uitgegeven als Archeofuturism: European Visions of the Post-Catastrophic Age. Verenigd Koninkrijk: Arktos Media Ltd.)

• Faye, Guillaume (2000). La Colonisation de l'Europe: Discours vrai sur l'immigration et l'islam. Parijs, Frankrijk: Éditions Æncre.

• Goudsblom, Johan (1960). Nihilisme en Cultuur. Amsterdam, Nederland: Arbeiderspers.

• Hitchins, Keith (2009). The Identity of Romania. Boekarest, Roemenië: Editura Enciclopedică.

• Hösch, Edgar (2002). Geschichte der Balkanländer: Von der Frühzeit bis zur Gegenwart. München, Bondsrepubliek Duitsland: Verlag C.H. Beck.

• Hupchick, Dennis (2004). The Balkans: From Constantinople to Communism. New York, Verenigde Staten: Palgrave Macmillan.

• MacDonald, Kevin (2007). Cultural Insurrections: Essays on Western Civilization. Verenigde Staten: Occidental Press.

• Scruton, Roger (2010). Het Nut van Pessimisme en de Gevaren van Valse Hoop. Amsterdam, Nederland: Uitgeverij Nieuw Amsterdam.

• Scruton, Roger (2003). Het Westen en de Islam. Antwerpen, België: Uitgeverij Houtekiet.

• Smith, Anthony (1998). Nationalism and Modernism. Londen, Verenigd Koninkrijk: Routledge.

• Tocqueville, Alexis de (2011). Over de Democratie in Amerika (oorspr. 1840). Rotterdam, Nederland: Lemniscaat Uitgeverij.

lundi, 19 mai 2014

Marion Sigaut - les Lumières: un antihumanisme...


Marion Sigaut - les lumières: un antihumanisme...

par ERTV

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lundi, 20 mai 2013

The Enlightenment from a New Right Perspective

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The Enlightenment from a New Right Perspective

 

By Domitius Corbulo

Ex: http://www.counter-currents.com/

“When Kant philosophizes, say on ethical ideas, he maintains the validity of his theses for men of all times and places. He does not say this in so many words, for, for himself and his readers, it is something that goes without saying. In his aesthetics he formulates the principles, not of Phidias’s art, of Rembrandt’s art, but of Art generally. But what he poses as necessary forms of thought are in reality only necessary forms of Western thought.” — Oswald Spengler 

“Humanity exists in its greatest perfection in the white race.” — Immanuel Kant

Every one either praises or blames the Enlightenment for the enshrinement of equality and cosmopolitanism as the moral pillars of our times. This is wrong. Enlightenment thinkers were racists who believe that only white Europeans could be fully rational, good citizens, and true cosmopolitans.

Leftists have brought attention to some racist beliefs among Enlightenment thinkers, but they have not successfully shown that racism was an integral part of Enlightenment philosophy, and their intention has been to denigrate the Enlightenment for representing the parochial values of European males. I argue here that they were the first to introduce a scientific conception of human nature structured by racial classifications. This conception culminated in Immanuel Kant’s anthropological justification of the superior/inferior classification of “races of men” and his “critical” argument that only European peoples were capable of becoming rational and free legislators of their own actions. The Enlightenment is a celebration of white reason and morality; therefore, it belongs to the New Right.

In an essay [2] in the New York Times (February 10, 2013), Justin Smith, another leftist with a grand title, Professeur des Universités, Département d’Histoire et Philosophie des Sciences, Université Paris Diderot – Paris VII, contrasted the intellectual “legacy” of Anton Wilhelm Amo, a West African student and former slave who defended a philosophy dissertation at the University of Halle in Saxony in 1734, with the “fundamentally racist” legacy of Enlightenment thinkers. Smith observed that a dedicatory letter was attached to Amo’s dissertation from the rector of the University of Wittenberg, Johannes Kraus, praising the “natural genius” of Africa and its “inestimable contribution to the knowledge of human affairs.” Smith juxtaposed Kraus’s broad-mindedness to the prevailing Enlightenment view “lazily echoed by Hume, Kant, and so many contemporaries” according to which Africans were naturally inferior to whites and beyond the pale of modernity.

Smith questioned “the supposedly universal aspiration to liberty, equality and fraternity” of Enlightenment thought. These values were “only ever conceived” for a European people deemed to be superior and therefore more equal than non-whites. He cited Hume: “I am apt to suspect the Negroes, and in general all other species of men to be naturally inferior to the whites.” He also cited Kant’s dismissal of a report of something intelligent that had once been uttered by an African: “this fellow was quite black from head to toe, a clear proof that what he said was stupid.” Smith asserted that it was counter-Enlightenment thinkers, such as Johann Herder, who would formulate anti-racist views in favor of human diversity. In the rest of his essay, Smith pondered why Westerners today “have chosen to stick with categories inherited from the century of the so-called Enlightenment” even though “since the mid-20th century no mainstream scientist has considered race a biologically significant category; no scientist believes any longer that ‘negroid,’ ‘caucasoid,’ and so on represent real natural kinds.” We should stop using labels that merely capture “something as trivial as skin color” and instead appreciate the legacy of Amo as much as that of any other European in a colorblind manner.

Smith’s article, which brought some 370 comments, a number from Steve Sailer, was challenged a few days later by Kenan Malik, ardent defender of the Enlightenment, in his blog Pandaemonium [3]. Malik’s argument that Enlightenment thinkers “were largely hostile to the idea of racial categorization” represents the general consensus on this question. Malik is an Indian-born English citizen, regular broadcaster at BBC, and noted writer for The GuardianFinancial TimesThe Independent, Sunday Times, New StatesmanProspectTLSThe Times Higher Education Supplement, and other venues. Once a Marxist, Malik is today a firm defender of the “universalist ideas of the Enlightenment,” freedom of speech, secularism, and scientific rationalism. He is best known for his strong opposition to multiculturalism.

Yet this staunch opponent of multiculturalism is a stauncher advocate of open door policies on immigration [4]. In one of his TV documentaries, tellingly titled Let ‘Em All In (2005), he demanded that Britain’s borders be opened to the world without restrictions. In response to a report published during the post-Olympic euphoria in Britain, “The Melting Pot Generation: How Britain became more relaxed about race [5],” he wrote: “news that those of mixed ethnicity are among the fastest-growing groups in the population is clearly to be welcomed [6].” He added that much work remains to be done “to change social perceptions of race.”

This work includes fighting against any immigration objection even from someone like David Goodhart, director of the left think tank Demos, whose just released book, The British Dream [7], modestly made the observation that immigration is eroding traditional identities and creating an England “increasingly full of mysterious and unfamiliar worlds.” In his review (The Independent [8], April 19, 2013) Malik insisted that not enough was being done to wear down the traditional identities of everyone including the native British. The solution is more immigration coupled with acculturation to the universal values of the Enlightenment. “I am hostile to multiculturalism not because I worry about immigration but because I welcome it.” The citizens of Britain must be asked to give up their ethnic and cultural individuality and make themselves into universal beings with rights equal to every newcomer.

It is essential, then, for Malik to disassociate the Enlightenment with any racist undertones. This may not seem difficult since the Enlightenment has consistently come to be seen — by all political ideologies from Left to Right — as the source of freedom, equality, and rationality against the “unreasonable and unnatural” prejudices of particular cultural groups. Malik acknowledges that in recent years some (he mentions George Mosse, Emmanuel Chuckwude Eze, and David Theo Goldberg) have blamed Enlightenment thinkers for articulating the modern idea of race and projecting a view of Europe as both culturally and racially superior. By and large, however, Malik manages (superficially speaking) to win the day arguing that the racist statements one encounters in some Enlightenment thinkers were marginally related to their overall philosophies.

A number of thinkers within the mainstream of the Enlightenment . . . dabbled with ideas of innate differences between human groups . . . Yet, with one or two exceptions, they did so only diffidently or in passing.

The botanist Carolus Linnaeus exhibited the cultural prejudices of his time when he described Europeans as “serious, very smart, inventive” and Africans as “impassive, lazy, ruled by caprice.” But let’s us not forget, Malik reasons, that Linnaeus’ Systema Naturae “is one of the landmarks of scientific thought,” the first “distinctly modern” classification of plants and animals, and of humans in rational and empirical terms as part of the natural order. The implication is that Linnaeus could not have offered a scientific classification of nature while seriously believing in racial differences. Science and race are incompatible.

Soon the more progressive ideas of Johann Blumenbach came; he complained about the prejudices of Linnaeus’ categories and called for a more objective differentiation between human groups based on skull shape and size. It is true that out of Blumenbach’s five-fold taxonomy (Caucasians, Mongolians, Ethiopians, Americans and Malays) the categories of race later emerged. But Malik insists that “it was in the 19th, not 18th, century that a racial view of the world took hold in Europe.”

Malik mentions Jonathan Israel’s argument that there were two Enlightenments, a mainstream one coming from Kant, Locke, Voltaire and Hume, and a radical one coming from “lesser known figures such as d’Holbach, Diderot, Condorcet and Spinoza.” This latter group pushed the ideas of reason, universality, and democracy “to their logical conclusion,” nurturing a radical egalitarianism extending across class, gender, and race. But, in a rather confusing way and possibly because he could not find any discussions of race in the radical group to back up his argument, Malik relies on the mainstream group. He cites David Hume: “It is universally acknowledged that there is a great uniformity among the acts of men, in all nations and ages, and that human nature remains the same in its principles and operations.” And George-Louis Buffon, the French naturalist: “Every circumstance concurs in proving that mankind is not composed of species essentially different from each other.” While Enlightenment thinkers asked why there was so much cultural variety across the globe, Malik explains, “the answer was rarely that human groups were racially distinct . . . environmental differences and accidents of history had shaped societies in different ways.” Remedying these differences and contingencies was what the Enlightenment was about; as Diderot wrote, “everywhere a people should be educated, free, and virtuous.”

Malik’s essay is pedestrian, somewhat disorganized, but in tune with the established literature, and therefore seen by the public as a compilation of truisms against marginal complaints about racism in the Enlightenment. Almost all the books on the Enlightenment have either ignored this issue or addressed it as a peripheral theme. The emphasis has been, rather, on the Enlightenment’s promotion of universal values for the peoples of the world. Let me offer some examples. Leonard Krieger’s King and Philosopher, 1689–1789 (1970) highlights the way the Enlightenment produced “works in which the universal principles of reason were invoked to order vast reaches of the human experience,” Rousseau’s “anthropological history of the human species,” Hume’s “quest for uniform principles of human nature,” “the various tendencies of the philosophes’ thinking — skepticism, rationalism, humanism, and materialism” (152-207). Peter Gay’s The Enlightenment: An Interpretation (1966) is altogether about how “the men of the Enlightenment united on . . . a program of secularism, humanity, cosmopolitanism, and freedom . . . In 1784, when the Enlightenment had done most of its work, Kant defined it as man’s emergence from his self-imposed tutelage, and offered as its motto: Dare to know” (3). Norman Hampson’s The Enlightenment (1968) spends more time on the proponents of modern classifications of nature, particularly Buffon’s Natural History, but makes no mention of racial classifications or arguments opposing any notion of a common humanity.

kant.jpgRecent books are hardly different. Louis Dupre’s The Enlightenment and the Intellectual Foundations of Modern Culture (2004), traces our current critically progressive attitudes back to the Enlightenment “ideal of human emancipation.” Dupré argues (from a perspective influenced by Jurgen Habermas) that the original project of the Enlightenment is linked to “emancipatory action” today (335). Gertrude Himmelfarb’s The Roads to Modernity: The British, French, and American Enlightenments (2004), offers a neoconservative perspective of the British and the American “Enlightenments” contrasted to the more radical ideas of human perfectibility and the equality of mankind found in the French philosophes. She brings up Jefferson’s hope that in the future whites would “blend together, intermix” and become one people with the Indians (221). She quotes Madison on the “unnatural traffic” of slavery and its possible termination, and also Jefferson’s proposal that the slaves should be freed and sent abroad to colonize other lands as “free and independent people.” She implies that Jefferson thought that sending blacks abroad was the most humane solution given the “deep-rooted prejudices of whites and the memories of blacks of the injuries they had sustained” (224).

Dorinda Outram’s, The Enlightenment (1995) brings up directly the way Enlightenment thinkers responded to their encounters with very different cultures in an age characterized by extraordinary expeditions throughout the globe. She notes there “was no consensus in the Enlightenment on the definition of the races of man,” but, in a rather conjectural manner, maintains that “the idea of a universal human subject . . . could not be reconciled with seeing Negroes as inferior.” Buffon, we are safely informed, “argued that the human race was a unity.” Linnaeus divided humanity into different classificatory groups, but did so as members of the same human race, although he “was unsure whether pigmies qualified for membership of the human race.” Turgot and Condorcet believed that “human beings, by virtue of their common humanity, would all possess reason, and would gradually discard irrational superstitions” (55-8). Outram’s conclusion on this topic is typical: “The Enlightenment was trying to conceive a universal human subject, one possessed of rationality,” accordingly, it cannot be seen as a movement that stood against racial divisions (74). Roy Porter, in his exhaustively documented and opulent narrative, Enlightenment: Britain and the Creation of the Modern World (2000), dedicates less than one page of his 600+ page book to discourses on “racial differentiation.” He mentions Lord Kames as “one of many who wrestled with the evidence of human variety . . . hinting that blacks might be related to orang-utans and similar great apes.” Apart from this quaint passage, there is only this: “debate was heated and unresolved, and there was no single Enlightenment party line” (357).

In my essay, “Enlightenment and Global History [9],” I mentioned a number of other books which view the Enlightenment as a European phenomenon and, for this reason, have been the subject of criticism by current multicultural historians who feel that this movement needs to be seen as global in origins. I defended the Eurocentrism of these books while suggesting that their view of the Enlightenment as an acclamation of universal values (comprehensible and extendable outside the European ethnic homeland) was itself accountable for the idea that its origins must not be restricted to Europe. Multicultural historians have merely carried to their logical conclusion the allegedly universal ideals of the Enlightenment. The standard interpretations of Tzvetan Todorov’s In Defence of the Enlightenment (2009), Stephen Bronner’s Reclaiming the Enlightenment (2004), and Robert Louden’s, The World We Want: How and Why the Ideals of the Enlightenment Still Eludes Us (2007), equally neglect the intense interest Enlightenment thinkers showed in the division of humanity into races. They similarly pretend that, insomuch as these thinkers spoke of “reason,” “humanity,” and “equality,” they were thinking outside or above the European experience and intellectual ancestry.

What about Justin Smith, or, since he has not published in this field, the left liberal authors on this topic? There is not that much; the two best known sources are two anthologies of writings on race, namely, Race and the Enlightenment: A Reader (1997), edited by Emmanuel Chukwudi Eze; and The Idea of Race (2000), edited by Robert Bernasconi and Tommy Lott. Eze’s book gathers into a short book the most provocative writings on race by some Enlightenment thinkers (Hume, Linnaeus, Kant, Buffon, Blumenbach, Jefferson and Cuvier). This anthology, valuable as it is, is intended for effect, to show how offensively racist these thinkers were. Eze does not disprove the commonly accepted idea that Enlightenment thinkers were proponents of a universal ethos (although, as we will see below, Eze does offer elsewhere a rather acute analysis of Kant’s racism). Bernasconi’s The Idea of Race is mostly a collection of nineteenth and 20th century writings, with short excerpts from Francois Bernier, Voltaire, Kant, and Blumenbach. The books that Malik mentions (see above) which connect the Enlightenment to racism are also insufficient: George Mosse’s Toward the Final Solution: A History of European Racism (1985) is just another book about European anti-Semitism, which directs culpability to the Enlightenment for carrying classifications and measurements of racial groups. David Goldberg’s Racist Culture (1993) is a study of the normalization of racialized discourses in the modern West in the 20th century.

There are, as we will see later, other publications which address in varying ways this topic, but, on the whole, the Enlightenment is normally seen as the most critical epoch in “mankind’s march” towards universal brotherhood. The leftist discussion of racist statements relies on the universal principles of the Enlightenment. Its goal is to uncover and challenge any idea among 18th century thinkers standing in the way of a future universal civilization. Leftist critics enjoy “exposing” white European males as racists and thereby re-appropriate the Enlightenment as their own from a cultural Marxist perspective. But what if we were to approach the racism and universalism of the Enlightenment from a New Right perspective that acknowledges straightaway the particular origins of the Enlightenment in a continent founded by Indo-European [10] speakers?

This would involve denying the automatic assumption that the ideas of the philosophes were articulated by mankind and commonly true for every culture. How can the ideas of the Enlightenment be seen as universal, representing the essence of humanity, if they were expressed only by European men? The Enlightenment is a product of Europe alone, and this fact alone contradicts its universality. Enlightenment thinkers are themselves to blame for this dilemma expressing their ideas as if “for men of all times and places.” Johann Gottfried Herder (1744–1803), writing at the same time as Kant, did question the notion of a cosmopolitan world based on generic human values. He saw in the world the greatest possible variety of historical humans in different regions of the earth, in time and space. He formulated arguments against racial rankings not by questioning their scientific merits as much as their reduction of the diversity of humans to one matrix of measurement and judgment. It was illusory to postulate a universal philosophy for humanity in which the national character of peoples would disappear and each human on earth would “love each other and every one . . . being all equally polite, well-mannered and even-tempered . . . all philanthropic citizens of the world.”[1] Contrary to some interpretations, Herder was not rejecting the Enlightenment but subjecting it to critical evaluation from his own cosmopolitan education in the history and customs of the peoples of the earth. “Herder was among the men of the Enlightenment who were critical in their search for self-understanding; in short, he was part of the self-enlightening Enlightenment.”[2] He proposed a different universalism based on the actual variety and unique historical experiences and trajectories of each people (Volk). Every people had their own particular language, religion, songs, gestures, legends and customs. There was no common humanity but a division of peoples into language and ethnic groups. Each people were capable of achieving education and progress in its own way from its own cultural sources.

From this standpoint, the Enlightenment should be seen as an expression of a specific people, Europeans, made up of various nationalities but nevertheless in habitants of a common civilization who were actually conceiving the possibility of becoming good citizens of Europe at large. In the words of Edward Gibbon, Enlightenment philosophers were enlarging their views beyond their respective native countries “to consider Europe as a great republic, whose various inhabitants have attained almost the same level of politeness and cultivation” (in Gay, 13).

Beyond Herder, we also need to acknowledge that the Enlightenment inaugurated the study of race from a rational, empirical, and secular perspective consistent with its own principles. No one has been willing to admit this because this entire debate has been marred by the irrational, anti-Enlightenment dogma that race is a construct and that the postulation of a common humanity amounts to a view of human nature without racial distinctions. Contrary to Roy Porter, there was a party line, or, to be more precise, a consistently racial approach among Enlightenment thinkers. The same philosophes who announced that human nature was uniform everywhere, and united mankind as a subject capable of enlightenment, argued “in text after text . . . in the works of Hume, Diderot, Montesquieu, Kant, and many lesser lights” that men “are not uniform but are divided up into sexes, races, national characters . . . and many other categories” (Garret 2006). But because we have been approaching Enlightenment racism under the tutelage of our current belief that race is “a social myth” and that any division of mankind into races is based on malevolent “presumptions unsupported by available evidence [11],” we have failed to appreciate that this subject was part and parcel of what the philosophes meant by “enlightenment.” Why it is so difficult to accept the possibility that 18th century talk about “human nature” and the “unity of mankind” was less a political program for a universal civilization than a scientific program for the study of man in a way that was systematic in intent and universal in scope? It is quite legitimate, from a scientific point, to treat humans everywhere as uniformly constituted members of the same species while recognizing their racial and cultural variety across the world. Women were considered to be intrinsically different from men at the same time that they were considered to be human.

Not being an expert on the Enlightenment I found recently a book chapter titled “Human Nature” by Aaron Garrett in a two volume work, The Cambridge History of Eighteenth-Century Philosophy [12] (2006). There is a section in this chapter dealing with “race and natural character”; it is short, 20 pages in a 1400 page work, but it is nevertheless well researched with close to 80 footnotes of mostly primary sources. One learns from these few pages that “in text after text” Enlightenment thinkers proposed a hierarchical view of the races. Mind you, Garrett is stereotypically liberal and thus writes of “the 18th century’s dubious contributions to the discussion of race,” startled by “the virulent denigrations of blacks . . . found in the works of Franklin, Raynal, Voltaire, Forster, and many others.” He also playacts the racial ideas of these works as if they were inconsistent with the scientific method, and makes the very unscientific error of assuming that there was an “apparent contradiction” with the Enlightenment’s notion of a hierarchy of races and its “vigorous attacks on the slave trade in the name of humanity.”

Just because most Enlightenment thinkers rejected polygenecism and asserted the fundamental (species) equality of humankind, it does not mean that they could not believe consistently in the hierarchical nature of the human races. There were polygenecists like Charles White who argued that blacks formed a race different from whites, and Voltaire who took some pleasure lampooning the vanity of the unity of mankind. But the prevailing view was that all races were members of the same human species, as all humans were capable of creating fertile offspring. Buffon, Cornelius de Pauw, Linnaeus, Blumenbach, Kant and others endorsed this view, and yet they distinctly ranked whites above other races.

Liberals have deliberately employed this view on the species unity of humanity in order to separate, misleadingly, the Enlightenment from any racial connotations. But Linnaeus did rank the races in their behavioral proclivities; and Buffon did argue that all the races descended from an original pair of whites, and that American Indians and Africans were degraded by their respective environmental habitats. De Pauw did say that Africans had been enfeebled in their intelligence and “disfigured” by their environment. Samuel Soemmering did conclude that blacks were intellectually inferior; Peter Camper and John Hunter did rank races in terms of their facial physiognomy. Blumenbach did emphasize the symmetrical balance of Caucasian skull features as the “most perfect.” Nevertheless, in accordance with the evidence collected at the time, all these scholars asserted the fundamental unity of mankind, monogenism, or the idea that all races have a common origin.

Garrett, seemingly unable to accept his own “in text after text” observation, repeats the standard line that Buffon’s and Blumenbach’s view, for example, on “the unity and structural similarity of races” precluded a racial conception. He generally evades racist phrases and arguments from Enlightenment thinkers, such as this one from Blumenbach: “I have allotted the first place to the Caucasian because this stock displays the most beautiful race of men” (Eze, 1997: 79). He makes no mention or almost ignores a number of other racialists [13]: Locke, Georges Cuvier, Johann Winckelmann, Diderot, Maupertuis, and Montesquieu. In the case of Kant, he says it would be “absurd” to take some “isolated remarks” he made about race as if they stood for his whole work. Kant “distinguish between character, temperament, and race in order to avoid biological determinism” for the sake of the “moral potential of the human race as a whole.”

kant-german-philosopher-from.jpgActually, Kant, the greatest thinker of the Enlightenment, “produced the most profound raciological thought of the 18th century.” These words come from Earl W. Count’s book This is Race, cited by Emmanuel Chukwudi Eze in what is a rather good analysis of Kant’s racism showing that it was not marginal but deeply embedded in his philosophy. Eze’s analysis comes in a chapter, “The Color of Reason: The Idea of ‘Race’ in Kant’s Anthropology [14]” (1997). We learn that Kant elaborated his racial thinking in his Anthropology from a Pragmatic Point of View [15] (1798); he introduced anthropology as a branch of study to the German universities together with the study of geography, and that through his career Kant offered 72 courses in Anthropology and/or Geography, more than in logic, metaphysics and moral philosophy. Although various scholars have shown interest in Kant’s anthropology, they have neglected its relation to Kant’s “pure philosophy.”

For Kant, anthropology and geography were inseparable; geography was the study of the natural conditions of the earth and of man’s physical attributes and location as part of this earth; whereas anthropology was the study of man’s soul, his psychological and moral character, as exhibited in different places on earth. In his geography Kant addressed racial classifications on the basis of physical traits such as skin color; in his anthropology he studied the internal structures of human psychology and the manner in which these internal attributes conditioned humans as moral and rational beings.

Kant believed that human beings were different from other natural beings in their capacity for consciousness and agency. Humans were naturally capable of experiencing themselves as self-reflecting egos capable of acting morally on the basis of their own self-generated norms (beyond the determinism which conditioned all other beings in the universe). It is part of our internal human nature to think and will as persons with moral agency. This uniquely human attribute is what allows humans to transcend the dictates of nature insofar as they are able to articulate norms as commandments for their own actions freed from unconscious physical contingencies and particular customs. As rational beings, humans are capable of creating a realm of ends, and these ends are a priori principles derived not from the study of geography and anthropology but from the internal structures of the mind, transcendental reason. What Kant means by “critical reason” is the ability of humans through the use of their minds to subject everything (bodily desires, empirical reality, and customs) to the judgments of values generated by the mind, such that the mind (reason) is the author of its own moral actions.

However, it was Kant’s estimation that his geographical and anthropological studies gave his moral philosophy an empirical grounding. This grounding consisted in the acquisition of knowledge about human beings “throughout the world,” to use Kant’s words, “from the point of view of the variety of their natural properties and the differences in that feature of the human which is moral in character.”[3] [16] Kant was the first thinker to sketch out a geographical and psychological (or anthropological) classification of humans. He classified humans naturally and racially into white (European), yellow (Asians), black (Africans) and red (American Indians). He also classified them psychologically and morally in terms of the mores, customs and aesthetic feelings held collectively by each of the races. Non-Europeans held unreflective mores and customs devoid of critical examination “because these people,” in the words of Eze, “lack the capacity for development of ‘character,’ and they lack character presumably because they lack adequate self-consciousness and rational will.” Within Kant’s psychological classification, non-Europeans “appear to be incapable of moral maturity because they lack ‘talent,’ which is a ‘gift’ of nature.” Eze quotes Kant: “the difference in natural gifts between various nations cannot be completely explained by means of causal [external, physical, climatic] causes but rather must lie in the [moral] nature of man.” The differences among races are permanent and transcend environmental factors. “The race of the American cannot be educated. It has no motivating force; for it lacks affect and passion . . . They hardly speak, do not caress each other, care about nothing and are lazy.” “The race of the Negroes . . .  is completely the opposite of the Americans; they are full of affect and passion, very lively, talkative and vain. They can be educated but only as servants . . . ” The Hindus “have a strong degree of passivity and all look like philosophers. They thus can be educated to the highest degree but only in the arts and not in the sciences. They can never arise to the level of abstract concepts . . . The Hindus always stay the way they are, they can never advance, although they began their education much earlier.”

Eze then explains that for Kant only “white” Europeans are educable and capable of progress in the arts and sciences. They are the “ideal model of universal humanity.” In other words, only the European exhibits the distinctly human capacity to behave as a rational creature in terms of “what he himself is willing to make himself” through his own ends. He is the only moral character consciously free to choose his own ends over and above the determinism of external nature and of unreflectively held customs. Eze, a Nigerian born academic, obviously criticizes Kant’s racism, citing and analyzing additional passages, including ones in which Kant states that non-Europeans lack “true” aesthetic feelings. He claims that Kant transcendentally hypostasized his concept of race simply on the basis of his belief that skin color by itself stands for the presence or absence of the natural ‘gift’ of talent and moral ‘character’. He says that Kant’s sources of information on non-European customs were travel books and stories he heard in Konigsberg, which was a bustling international seaport. Yet, this does not mean that he was simply “recycling ethnic stereotypes and prejudices.” Kant was, in Eze’s estimation, seriously proposing an anthropological and a geographical knowledge of the world as the empirical presupposition of his critical philosophy.

With the publication of this paper (and others in recent times) it has become ever harder to designate Kant’s thinking on race as marginal. Thomas Hill and Bernard Boxill dedicated a chapter, “Kant and Race [17],” to Eze’s paper in which they not only accepted that Kant expressed racist beliefs, but also that Eze was successful “in showing that Kant saw his racial theory as a serious philosophical project.” But Hill and Boxill counter that Kant’s philosophy should not be seen to be inherently “infected with racism . . . provided it is suitably supplemented with realistic awareness of the facts about racism and purged from association with certain false empirical beliefs.” These two liberals, however, think they have no obligation to provide their readers with one single fact proving that the races are equal. They don’t even mention a source in their favor such as Stephen J. Gould [18]. They take it as a given that no one has seriously challenged the liberal view of race but indeed assume that such a challenge would be racist ipso facto and therefore empirically unacceptable. They then excuse Kant on grounds that the evidence available in his time supported his claims; but that it would be racist today to make his claims for one would be “culpable” of neglecting the evidence that now disproves racial classifications. What evidence [19]?

They then argue that “racist attitudes are incompatible with Kant’s basic principle of respect for humanity in each person,” and in this vein refer to Kant’s denunciation, in his words, of the “wars, famine, insurrection, treachery and the whole litany of evils” which afflicted the peoples of the world who experience the “great injustice of the European powers in their conquests.” But why do liberals always assume that claims about racial differences constitute a call for the conquest and enslavement of non-whites? They forget the 100 million killed in Russia and China, or, conversely, the fact that most Enlightenment racists were opponents of the slave trade. The bottom logic of the Hill-Boxill counterargument is that Kant’s critical philosophy was/is intrinsically incompatible with any racial hierarchies which violate the principles of human freedom and dignity, even if his racism was deeply embedded in his philosophy. But it is not; and may well be the other way around; Kant’s belief in human perfectibility, the complete development of moral agency and rational freedom, may be seen as intrinsically in favor of a hierarchical way of thinking in terms of which race is the standard bearer of the ideal of a free and rational humanity.

It is quite revealing that an expert like Garrett, and the standard interpreters of the Enlightenment generally, including your highness Doctor Habermas, would ignore Kant’s anthropology. A recent essay by Stuart Elden, “Reassessing Kant’s geography [20]” (2009), examines the state of this debate, noting that Kant’s geography and anthropology are still glaringly neglected in most newer works on Kant. One reason for this, Elden believes, “is that philosophers have, by and large, not known what to make of the works.” I would specify that they don’t know what to make of Kant’s racism in light of the widely accepted view that he was a liberal progenitor of human equality and cosmopolitanism. Even Elden does not know what to make of this racism, though he brings attention to some recent efforts to incorporate fully Kant’s anthropology/geography into his overall philosophy, works by Robert Louden, Kant’s Impure Ethics (2000); John Zammito, Kant, Herder, and the Birth of Anthropology (2002), and Holly Wilson, Kant’s Pragmatic Anthropology (2006). Elden pairs off these standard (pro-Enlightenment, pro-Kant) works against the writings of leftist critics who have shown less misgivings designating Kant a racist. All of these works (leftists as well) are tainted by their unenlightened acceptance of human equality and universalism. They cannot come to terms with a Kant who proposed a critical philosophy only for the European race.

There is no space here for details; some of the main points these authors make are: Kant’s anthropology and geography lectures were part of Kant’s critical philosophy, “devoted to trying to enlighten his students more about the people and world around them in order that they might live (pragmatically as well as morally) better lives” (Louden, p. 65). The aim of these lectures, says Wilson, on the cultures and geography of the world was “to civilize young students to become ‘citizens of the world’” (p. 8). Kant was a humane teacher who cared for his students and expected them to become cognizant of the world and in this way acquire prudence and wisdom. “Kant explicitly argues that the anthropology is a type of cosmopolitan philosophy,” writes Wilson, intended to educate students to develop their rational powers so they could think for themselves and thus be free to actualize their full human potentiality (5, 115). This sounds very pleasant yet based on the infantile notion that knowledge of the world and cosmopolitanism, wisdom and prudence, are incompatible with a racial understanding. To the contrary, if Kant’s racial observations were consistent with the available evidence at the time, and if masses of new evidence have accumulated since validating his views, then a critical and worldly philosophy would require us to show understanding towards Kant’s racism, which does not mean one has to accept the subjective impressionistic descriptions Kant uses. Hiding from students the research of Philippe Rushton, Richard Lynn, Charles Murray, Arthur Jensen, among others, would negate their ability to become free enlightened thinkers.

Elden brings the writings of Bernasconi and David Harvey, agreeing with them that Kant played “a crucial role in establishing the term ‘race’ as the currency within which discussions of human variety would be conducted in the 19th century.” He agrees too that Kant’s racism is “deeply problematic” to his cosmopolitanism, and that earlier responses by Kantians to swept aside his racism as “irrelevant” or “not to be taken seriously” are inadequate. Elden thinks however that scholars like Louden and Wilson have risen to the leftist challenge. But what we get from Louden is the same supposition that Kant’s philosophy can be made to meet the requirements of humanitarianism and egalitarianism simply by discarding the racist components. This constitutes a confounding of the actual Enlightenment (and the authentic Kant) with our current cultural Marxist wish to create a progressive global civilization. Louden even makes the rather doleful argument that Kant’s monogenetic view of the races, the idea that all humans originated from a common ancestor, “help us reach our collective destiny.” Kant’s monogenetic view is not an adequate way to show that he believed in a common humanity. The monogenetic view is not only consistent with the eventual differentiation of this common species into unequal races due to migration to different environments, but it is also the case that Kant specifically rejected Buffon’s claim that racial differences could be reversed with the eventual adaptation of “inferior” races to climates and environments that would induce “superior” traits; Kant insisted that the differences among races were fixed and irreversible regardless of future adaptations to different environmental settings. Louden’s additional defense of Kant by noting that he believed that all members of the human species can cultivate, civilize, and moralize themselves does not invalidate Kant’s view that whites are the model of a universal humanity.

So many otherwise intelligent scholars have willfully misled themselves into believing that Enlightenment thinkers were promoters of egalitarianism and a race-less cosmopolitan public sphere. We do live in a time of major deceptions at the highest levels of Western intellectual culture. We are continually reminded that the central idea in Kant’s conception of enlightenment is that of “submitting all claims to authority to the free examination of reason.”[4] [21] Yet the very ideals of the Enlightenment have been misused to preclude anyone from examining freely and rationally the question of race differences even to the point that admirers of the Enlightenment have been engaged in a ubiquitous campaign to hide, twist beyond clarity, and confound what Enlightenment thinkers themselves said about such differences. White nationalists should no longer accept the standard interpretation of the Enlightenment. They should embrace the Enlightenment and Kant as their own.

Notes

[1] Gurutz Jáuregui Bereciartu, Decline of the Nation State (1986), p. 26.

[2] Hans Adler and Ernest Menze, Eds. “Introduction,” in On World History, Johan Gottfried Herder: An Anthology (1997): p. 5

[3] These words are cited in Stuart Elden’s “Reassessing Kant’s geography,” Journal of Historical Geography (2009), a paper I discuss later.

[4] Perpetual Peace. Essays on Kant’s Cosmopolitan Ideal, eds. Johan Bohman and Mathias Lutz Bachman. The MIT Press, 1997.

 


 

Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com

 

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[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2010/09/Kant_Portrait.jpeg

[2] essay: http://opinionator.blogs.nytimes.com/2013/02/10/why-has-race-survived/

[3] Pandaemonium: http://kenanmalik.wordpress.com/2013/02/13/on-the-enlightenments-race-problem/

[4] open door policies on immigration: http://en.wikipedia.org/wiki/Kenan_Malik

[5] The Melting Pot Generation: How Britain became more relaxed about race: http://www.britishfuture.org/wp-content/uploads/2012/12/The-melting-pot-generation.pdf

[6] welcomed: http://www.britishfuture.org/blog/mixed-britain-will-the-census-results-change-the-way-we-think-and-talk-about-race/

[7] The British Dream: http://www.amazon.co.uk/gp/product/1843548054/ref=as_li_qf_sp_asin_il_tl?ie=UTF8&camp=1634&creative=6738&creativeASIN=1843548054&linkCode=as2&tag=kenanmalikcom-21

[8] The Independent: http://www.independent.co.uk/arts-entertainment/books/reviews/the-british-dream-by-david-goodhart-8578883.html

[9] Enlightenment and Global History: http://www.counter-currents.com/2013/04/enlightenment-and-global-history/

[10] Indo-European: http://www.theoccidentalobserver.net/2012/12/where-is-the-historical-west-part-1-of-5/

[11] presumptions unsupported by available evidence: http://en.wikipedia.org/wiki/Scientific_racism

[12] The Cambridge History of Eighteenth-Century Philosophy: http://www.amazon.com/Cambridge-History-Eighteenth-Century-Philosophy-Haakonssen/dp/0521418542

[13] other racialists: http://www.quodlibet.net/articles/foutz-racism.shtml

[14] The Color of Reason: The Idea of ‘Race’ in Kant’s Anthropology: http://books.google.ca/books?id=moH_07971gwC&pg=PA200&lpg=PA200&dq=%E2%80%9CThe+Color+of+Reason:+The+Idea+of+%E2%80%98Race%E2%80%99+in+Kant%E2%80%99s+Anthropology%E2%80%9D&source=bl&ots=Q9-oKv3Wks&sig=QDcpHumNboU6TrfmWYfZCdjPyss&hl=en&sa=X&ei=rHSOUbebCNWz4AP87YCwDA&sqi=2&ved=0CDEQ6AEwAQ#v=onepage&q=%E2%80%9CThe%20Color%20of%20Reason%3A%20The%20Idea%20of%20%E2%80%98Race%E2%80%99%20in%20Kant%E2%80%99s%20Anthropology%E2%80%9D&f=false

[15] Anthropology from a Pragmatic Point of View: http://books.google.ca/books/about/Kant_Anthropology_from_a_Pragmatic_Point.html?id=MuS6WI_7xeYC&redir_esc=y

[16] [3]: http://www.counter-currents.comfile:///C:/Users/Owner/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.IE5/F9Q4VNXE/The%20Enlightenment%20from%20a%20New%20Right%20Perspective%20(1).rtf#_ftn3

[17] Kant and Race: http://www.faculty.umb.edu/lawrence_blum/courses/465_11/readings/Race_and_Racism.pdf

[18] Stephen J. Gould: http://menghusblog.wordpress.com/2012/05/08/stephen-jay-gould-myth-and-fraud/

[19] What evidence: http://www.jehsmith.com/philosophy/2008/09/phil-498629-rac.html

[20] Reassessing Kant’s geography: http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0305748808000613

[21] [4]: http://www.counter-currents.comfile:///C:/Users/Owner/AppData/Local/Microsoft/Windows/Temporary%20Internet%20Files/Content.IE5/F9Q4VNXE/The%20Enlightenment%20from%20a%20New%20Right%20Perspective%20(1).rtf#_ftn4

 

mardi, 13 décembre 2011

Lumière de Herder

Lumière de Herder

En cette période de montée des nationalismes – voire des « ethnicismes » – en Europe comme ailleurs, les ethnologues, qui redoutaient naguère d’être considérés comme des suppôts du colonialisme, éprouvent souvent aujourd’hui, à l’inverse, l’angoisse d’être, malgré eux, de par la nature et l’objet même de leur discipline, des apôtres du tribalisme, des défenseurs inconscients d’un romantisme contre-révolutionnaire exaltant les valeurs particularistes contre l’universalisme des Droits de l’homme et du citoyen.

En penseur, qu’on a pris récemment, un peu rapidement, pour l’emblème même de ce tribalisme (1), semble, au contraire, être un de ceux dont l’œuvre peut aider à lever cette angoisse, en ouvrant le chemin à un rationalisme rénové, apte à comprendre le lien qui, à l’est de l’Europe en particulier, mais à l’ouest parfois aussi, unit nationalisme et recherche de la démocratie. Ce penseur, c’est Johann Gottfried Herder.

 

Herder et l’Aufklärung

 

Herder, honni par Joseph de Maistre (2) et vénéré, au contraire, par Edgar Quinet, Thomas Mazaryk et d’autres grandes figures de la démocratie européenne et américaine, est un héritier éclatant de la pensée des Lumières, de l’Aufklärung du XVIIe siècle, même s’il la critique parfois. En fait cette critique est une critique « de gauche », dirait-on aujourd’hui, et non « de droite », comme celle de Maistre ou Bonald. Comme l’a écrit Ernst Cassirer, en Herder, la philosophie des Lumières se dépasse elle-même et atteint son « sommet spirituel » (Cassirer 1970 : 237).

 

Effectivement, il n’est guère de thèmes fondamentaux de sa pensée, du relativisme à la philosophie de l’histoire, du naturalisme au déisme, etc., dont on ne retrouve les antécédents, au XVIIe et au XVIIIe siècle, chez les meilleurs représentants de la philosophie des Lumières, qu’il s’agisse de Saint-Evremont ou de Voltaire, de l’abbé Du Bos ou de David Hume, d’Adam Fergusson ou de D. Diderot. Y compris le thème du Nationalgeist. Y compris celui du relativisme (je préférerais dire « perspectivisme »).

 

Ce n’est pas Herder, mais Hume qui, dans ses Essais de morale, écrit : « Vous n’avez point eu assez d’égard aux mœurs et aux usages de différents siècles. Voudriez-vous juger un Grec ou un Romain d’après les lois d’Angleterre ? Écoutez-les se défendre par leurs propres maximes, vous vous prononcerez ensuite. Il n’y a pas de mœurs, quelque innocentes et quelque raisonnables qu’elles soient, que l’on ne puisse rendre odieuses ou ridicules lorsqu’on les jugera d’après un modèle inconnu aux auteurs » (Hume 1947 : 192). Il est vrai que ce souci d’équité ethnologique ne signifie pas, pour Hume, qu’il ne faut pas souhaiter l’effacement de différences nationales. Mais, dans l’idéal, Herder le souhaite pareillement. S’il lui arrive de faire l’éloge des « préjugés », c’est-à-dire des présupposés culturels attachés à telle ou telle nation ou civilisation, c’est uniquement dans la mesure où cela peut donner aux pensées la force et l’effectivité qui risquent de leur manquer lorsqu’elles s’efforcent d’atteindre l’humain et l’universel seulement par un refus abstrait du particulier. L’idée est d’ailleurs dans Rousseau. Elle n’empêche pas de poser que « l’amour de l’humanité est véritablement plus que l’amour de la patrie et de la cité » (Herder 1964 : 327).

 

Quant au Nationalgeist, Montesquieu le nomme « esprit du peuple », « caractère de la nation ». Même chez Voltaire on trouve les notions de « génie d’une langue » et de « génie national » (3). Il est vrai que, chez eux, ce ne sont sans doute pas des principes originels, mais qu’ils dépendent d’autres facteurs historiques. Cependant, il n’en est pas autrement chez Herder. En fait, Herder voit dans le peuple ou la nation un effet statistique, produit par un ensemble de particularités individuelles, modelées par un même milieu, un même climat, des circonstances historiques communes, des emprunts similaires à d’autres peuples et la tradition qui en résulte. La nation n’apparaît comme une entité substantielle qu’à un regard éloigné, qu’à une vue d’ensemble. Herder est, au fond, sur le plan de la théorie sociale, comme il l’est d’ailleurs sur le plan éthique, un individualiste (4). La primauté de la société ne signifie rien d’autre, chez Herder, que l’idée que l’histoire ne peut être que celle des peuples, celle du peuple, et non celle des rois et de leurs ministres ; elle ne peut être que celle de la civilisation. Et, de ce point de vue, Herder est un voltairien qui ne s’ignore pas…

 

Une anthropologie de la diversité

 

Il y a cependant deux sources majeures de la pensée de Herder, sans lesquelles il n’est pas facile de la comprendre, et toutes deux ont eu une énorme influence sur l’Aufklärung allemande : ce sont l’œuvre de Leibniz et celle de Rousseau.

 

Sans Rousseau, il n’est pas possible de comprendre la logique qui unit le rationalisme de Herder à son anthropologie de la diversité. C’est Rousseau qui, le premier sans doute, nous a fait comprendre que la raison et la liberté étaient une seule et même chose. Herder lui emboîte le pas. Précurseur de Bolk et de Géza Roheim (5), théoricien de l’immaturité essentielle de l’homme ou, tout au moins, de son indétermination, qui fait sa liberté, mais qui est également la raison même de sa raison, Herder montre clairement que la diversité des cultures est la conséquence directe de l’existence de cette raison, qui n’est pas une faculté distincte, mais, en quelque sorte, l’être même de l’homme. La différence entre l’homme et l’animal n’est pas une différence de facultés, mais, comme il le dit dans le Traité sur l’origine de la langue, une différence totale de direction et de développement de toutes ses facultés (1977 : 71).

 

Mais si la raison n’est pas une faculté séparée et isolée, elle est présente dès l’enfance, dès l’origine, dans le moindre effort de langage. La raison herderienne est une raison du sens, non une raison du calcul, une raison vichienne, non une raison cartésienne, mais c’est une raison tout de même. Et fort importante, puisque la seconde ne va pas sans la première ; et puis parce que la raison cartésienne ne fonde ni morale ni droit.

 

Herder, comme Vico, a pressenti à quoi conduisait un certain cartésianisme. S’il n’existe pas un trésor de sens, où chacun puisse puiser ce qui le fait cet être unique et, en même temps, de part en part dicible (donc, par là même, en qui subsiste toujours du non-dit), qu’est un être humain, alors on parvient rapidement à l’humpty-dumptisme, qui est la pire des tyrannies. Chacun va décréter le sens des mots dans la mesure du pouvoir dont il dispose. Il n’y aura plus aucun contrat possible, aucune entente, sinon par le pouvoir despotique de quelque Léviathan. La politique de Descartes, ce ne pourrait être, effectivement, dans ces conditions, que le monstre froid que décrit Hobbes et où c’est, effectivement, le souverain qui décide du sens des mots. C’est bien ce monstre que les grands hommes d’Etat du XVIIe siècle cherchent à réaliser, à commencer par le cardinal de Richelieu. Cela aboutit finalement à la fameuse « langue de bois », même si cela ne commence que par d’apparemment innocentes académies.

 

Un eudémonisme relativiste

 

L’idée de l’essentielle variabilité humaine conduit à une éthique d’une grande souplesse, puisque, pour Herder, la raison est d’abord inhérente à la sensibilité ; et donnant pour fin à l’homme le bonheur, elle en modèle la figure idéale en fonction de la diversité des besoins et des sentiments. L’infinie variété des circonstances produit aussi une infinie variété des aspirations et le bonheur, qui est le but de notre existence, ne peut être atteint partout de la même façon : « Même l’image de la félicité change avec chaque état de choses et chaque climat – car qu’est-elle, sinon la somme de satisfactions de désirs, réalisations de buts et de doux triomphes des besoins qui tous se modèlent d’après le pays, l’époque, le lieu ? » C’est que « la nature humaine… n’est pas un vaisseau capable de contenir une félicité absolue…, elle n’en absorbe pas moins partout autant de félicité qu’elle le peut : argile ductile, prenant selon les situations, les besoins et les oppressions les plus diverses, des formes également diverses » (Herder 1964 : 183).

 

Il y a donc chez Herder une sorte d’eudémonisme relativiste que Kant ne pourra supporter, et qui signifie que, pour Herder, l’individu n’est pas fait pour l’État ni, d’ailleurs, pour l’espèce. Les générations antérieures ne sont pas faites pour les dernières venues, ni les dernières venues pour les futures. Ainsi le sens de la vie humaine n’est pas dans le progrès de l’espèce, mais dans la possibilité pour chacun, à toute époque, de réaliser son humanité, quelle que soit la société dans laquelle il vit et la culture propre à cette société. Il y a là un humanisme qui s’oppose à celui de Kant, pour qui nous devons accepter que les générations antérieures sacrifient leur bonheur aux générations ultérieures ; celles-ci, seules, pourront en jouir. Herder, au contraire, pense que chaque époque a son bonheur propre ; chaque époque, chaque peuple et même chaque individu. Car chaque période, mais aussi chaque individu forme, pour ainsi dire, un tout qui a sa fin en soi. C’est pourquoi Herder en vient même à récuser tout finalisme dans l’explication historique, de peur d’avoir à subordonner le destin des individus au cours de l’histoire globale. Dieu n’agit dans l’histoire que par des lois générales naturelles, non téléologiques, et par l’effet de notre propre liberté.

 

Des monades dans l’histoire

 

Mais Herder est aussi un leibnizien. C’est dire que son individualisme n’est pas atomistique, mais monadique ; ce qui signifie qu’il a un caractère dynamique et que l’individu y intègre l’universel qui est dans la totalité organique de l’histoire.

 

Ce que dit Ernst Cassirer de la conception leibnizienne de l’individuel éclaire la conception herderienne :

 

« Chaque substance individuelle, au sein du système leibnizien, est, non pas seulement une partie, un fragment, un morceau de l’univers, mais cet univers même, vu d’un certain lieu et dans une perspective particulière… toute substance, tout en conservant sa propre permanence et en développant ses représentations selon sa propre loi, se rapporte cependant, dans le cours même de cette création individuelle, à la totalité des autres et s’accorde en quelque façon avec elle » (Cassirer 1970 : 65).

 

Pourtant, il y a, dans Une autre philosophie de l’histoire (Auch eine Philosophie der Geschichte), un passage où Herder semble nous dénier la possibilité d’être, comme il dit, « la quintessence de tous les temps et de tous les peuples ». En fait, il admet que nous avons en nous toutes les dispositions, toutes les aptitudes, toutes les potentialités qui se sont manifestées comme réalités achevées dans les diverses civilisations du passé. De ce point de vue, il y a, en chacun de nous une égale quantité de forces et un même dosage de ces forces. Mais un leibnizien ne sépare pas l’individualité des circonstances qui modèlent son développement. L’individualité est dans la continuité d’un développement qui intègre les circonstances qui permettent à cette individualité de se manifester.

 

Or chaque civilisation, chaque culture réalise un des possibles de l’humain et en occulte d’autres (6). Au cours de l’histoire, il se peut donc que l’ensemble des virtualités de la nature humaine se trouvent réalisées, mais tour à tour, non simultanément. Chaque moment, cependant, fruit d’une égale nécessité, possède un égal mérite. Cela ne contredit pas l’idée d’un progrès d’ensemble, mais va contre un évolutionnisme pour lequel l’humain ne se réalise pleinement qu’au terme de l’histoire (ou de la préhistoire, pour parler le langage d’un certain marxisme).

 

Herder utilise, au fond, le principe auquel Haeckel donnera son nom en le formulant en termes biologiques, mais qui est aussi la maxime d’une vieille métaphore : la phylogénèse se retrouve dans l’ontogénèse ; et on comprend à partir de là comment il peut concilier progression – Fortgang – et égalité de valeur. L’enfance vaut par elle-même, elle a ses propres valeurs, son propre bonheur ; l’adolescence, de même. Mais c’est quand même l’adulte qui est l’homme achevé, l’homme dans sa maturité.

 

Mais, mieux encore, l’égalité herderienne des cultures et des époques trouve sa justification dans ce que Michel Serres (1968 : 265) appelle, chez Leibniz, « la notion d’altérité qualitative dans une stabilité des degrés » : « En passant du plaisir de la musique à celui de la peinture, dit Leibniz, le degré des plaisirs pourra être le même, sans que le dernier ait pour lui d’autre avantage que celui de la nouveauté… Ainsi le meilleur peut être changé en un autre qui ne lui cède point, et qui ne le surpasse point. » Il n’en reste pas moins qu’« il y aura toujours entre eux un ordre, et le meilleur ordre qui soit possible ». S’il est vrai qu’« une partie de la suite peut être égalée par une autre partie de la même suite », néanmoins « prenant toute la suite des choses, le meilleur n’a point d’égal (7) ». Mais on peut aller beaucoup plus loin, et dire que, de même qu’il y a équipotence entre, non seulement la suite des nombres pairs et la suite des carrés, mais la suite des carrés, par exemple, et la suite des entiers, le meilleur a même puissance dans une partie de la suite et dans l’ordre du tout.

 

Chez Herder, il se peut donc que chaque phase ou chaque époque soit la meilleure, que chaque culture soit la meilleure, mais qu’il y ait, en plus, un meilleur dans l’ordre de succession, c’est-à-dire un ordre progressif, où le meilleur n’est atteint que dans le progrès même, en tant que succession bien ordonnée. Au-delà, on peut dire aussi que l’universel – un universel dynamique, celui de l’histoire comme totalité non fermée – est présent dans la singularité des cultures et des individus.

 

Inversement, d’ailleurs, l’universel n’existe qu’incarné dans des singularités historiques. C’est le cas, par exemple, du christianisme, religion universelle par excellence, mais qui n’existe que sous telle ou telle forme, particulière à telle ou telle époque, à telle ou telle civilisation : « Il était radicalement impossible que cette odeur délicate pût exister, être appliquée, sans se mêler à des matières plus terrestres dont elle a besoin pour lui servir en quelque sorte de véhicule. Tels furent naturellement la tournure d’esprit de chaque peuple, ses mœurs et ses lois, ses penchants et ses facultés… plus le parfum est subtil, plus il tendrait par lui-même à se volatiliser, plus aussi il faut le mélanger pour l’utiliser » (Herder 1964 : 209-211).

 

Un patriotisme cosmopolite

 

La présence de l’universel dans le singulier et le fait que le singulier et l’universel ne puissent être séparés rend compte de la possibilité, pour Herder, d’être à la fois cosmopolite et patriote, comme le furent ultérieurement quelques-uns de ses grands disciples. Le cosmopolite selon Herder n’est donc pas l’adepte d’un cosmopolitisme abstrait qui s’étonne de ne pas retrouver en chacun l’homme universel qu’il prétend lui-même incarner. Le cosmopolitisme de Herder est un cosmopolitisme de la compréhension entre les peuples et entre les cultures, c’est un cosmopolitisme « dialogique ».

 

De 1765 (année où il prononce à Riga son discours, Avons-nous encore un public et une patrie commune comme les Anciens ?) jusqu’à la fin de sa vie, Herder gardera cette position humaniste, hostile au particularisme aveugle, favorable seulement à un patriotisme qui ouvre sur l’universel. Herder récuse le patriotisme exclusif des anciens, qui regarde l’étranger comme un ennemi. Il veut, quant à lui, voir et aimer tous les peuples en l’humanité, dont il dit qu’elle est notre seule vraie patrie.

 

Il est vrai que cette vertu d’humanité, il pensera finalement que le peuple allemand sera, dans la période de l’histoire qui vient, celui qui l’incarnera probablement le mieux et que son aptitude à la philosophie en fait un excellent porteur d’universalité ; ce qui n’est pas si mal vu, si l’on pense à l’éclatante lignée de penseurs que l’Allemagne produira, de Kant à Marx et au-delà. De Lessing, Herder et Kant, avec Schiller et Goethe, Herzen (1843) dira que leur but commun fut de « développer les caractères nationaux pour leur donner un sens universel ».

 

On pourrait en dire autant de la génération suivante, celle des romantiques, pour laquelle on affiche quelquefois en France un bien curieux mépris. De Tieck, Novalis, Achim von Arnim, Clemens Brentano, Lucien Lévy-Bruhl (1890 : 336) écrivait : « Ce n’est pas un sentiment de patriotisme qui poussait ces écrivains à exhumer les trésors de l’Allemagne du Moyen Age. Le contraire est plutôt vrai : ce fut l’Allemagne du Moyen Age, retrouvée et passionnément aimée, qui réveilla en eux le patriotisme. Encore n’arrivèrent-ils à l’Allemagne que par un long et capricieux circuit, en faisant le tour du monde. Ils se seraient reproché, sans nul doute, de s’enfermer dans l’étude des antiquités germaniques. Elle eût offert à elle seule un champ de travail assez vaste ; mais les Romantiques ne s’y attardèrent point. Ils le parcoururent un peu, comme on l’a dit, en chevaliers errants. Leur humeur vagabonde, d’accord avec leur cosmopolitisme, les emportait bientôt ailleurs. »

 

Herder est préromantique dans la mesure où il y a, dans le romantisme, une sorte d’universalisme du populaire, où l’universalisme se concilie fort bien avec le pluralisme. En fait, ce qu’on retrouve dans le pluralisme littéraire de Goethe, de Herder et des romantiques d’Allemagne et d’ailleurs, c’est la volonté de réhabiliter le sensible et de fonder une esthétique, au sens large et au sens étroit. Peut-être même faut-il dire que le romantisme est là d’abord, et, de ce point de vue, il est déjà chez le Kant de la Critique du jugement, voire même chez Leibniz.

 

Mais cette réhabilitation du sensible est, en même temps et du même coup, une réhabilitation du sens, c’est-à-dire de la langue. Tout part de là chez Herder et tout y aboutit ; chez Herder comme aussi, par exemple chez Schlegel. Il s’agit d’édifier une science où l’on puisse vivre. Mais cette science est déjà présente dans la culture populaire, dans les cultures populaires. Cette réhabilitation du sensible s’intéresse donc au « populaire » en général, à l’« ethnique » si l’on veut, mais aussi à autrui, à l’autre en tant que tel, car autrui, c’est d’abord du sensible et il n’y a pas de monde sensible sans autrui. Autrui n’est accessible que comme sensible, et ce sensible ne peut être réduit. Feuerbach, de ce point de vue, est dans la postérité du romantisme, et le romantisme est peut-être ce qui a rendu possible l’ethnologie.

 

Herder « gauchiste »

 

Herder, cependant, reste un Aufklärer, mais, nous l’avons dit, un Aufklärer de gauche ; de gauche, et même d’extrême gauche. Et c’est la raison pour laquelle certains croient voir en lui un adversaire des Lumières, voire même un contre-révolutionnaire, ce qui constitue un assez joli contresens.

 

Il y a une autre raison de cette méprise, chez les auteurs français tout au moins : c’est que Herder se réclame du christianisme. C’est même un homme d’Église, un pasteur ; à l’époque (1784) où il écrit les Ideen (Herder 1962), il est évêque de Weimar. Or les Français pensent généralement que les Lumières sont nécessairement antichrétiennes, ce qui est une grave erreur historique, surtout en ce qui concerne l’Allemagne. Herder, en fait, est dans la tradition allemande de la Guerre des paysans, au temps de la Réforme, guerre dont l’idéologie fut celle d’un protestantisme populaire, millénariste et extrêmement avancé sur le plan social. C’est de Herder que Goethe tire l’idée de Goetz von Berlichingen. Mais on retrouve la même attitude chez le Herder tardif des Ideen, lorsqu’il fait l’éloge des hussites, de anabaptistes, des mennonites, etc., après avoir fait celui des bogomiles et des cathares pour les mêmes raisons. On le voit bien, dans ce chapitre des Ideen, où il se situe (Herder 1962 : 483-489). Cette position « gauchiste » de Herder aboutit effectivement à une critique de la philosophie des Lumières sur un certain nombre de points : théorie mystificatrice du contrat social, goût du despotisme « éclairé », tolérance envers l’esclavagisme et l’exploitation coloniale, avec sa brutalité destructrice, racisme, etc. Il s’agit bien d’une critique « de gauche », dont nous avons déjà vu une manifestation dans le refus de soumettre les individus aux « fins de l’histoire ».

 

En ce qui concerne la doctrine du contrat social, il ne faut pas oublier qu’elle a pris diverses formes et que chez certains de ses plus illustres défenseurs, elle aboutit à une légitimation de l’absolutisme. C’est le cas non seulement de la doctrine de Hobbes, mais de celles de Grotius et de Pufendorf. On oublie généralement le côté par où la théorie du contrat prétend engendrer la cité en engendrant le gouvernement de la cité. Hormis Rousseau, c’est le cas de nombre de ses adeptes. Et, dans ces conditions, ils admettront souvent que le gouvernement de la cité, quelles que soient sa nature et son origine de fait (y compris la conquête), existe par contrat tacite, ce qui n’est en fait, la plupart du temps, qu’une légitimation a posteriori de la force. C’est ce côté de la doctrine du contrat qu’attaque Herder, le côté par où, par une série de confusions, entre gouvernement et État, puis entre État et société, elle risque d’aboutir à l’absolutisme.

 

Herder est, avant tout, un adversaire du « despotisme éclairé », à la manière de Frédéric II et de quelques autres. Son soutien à ce que nous appellerions peut-être aujourd’hui des « ethnies » a principalement ce fondement. A tort ou à raison, il pense que la diversité ethnique, comme la multiplicité des corps intermédiaires (communautés diverses, villes-cités, etc.) est un puissant contrepoids à la force niveleuse du despotisme.

 

L’envers de cette haine du despotisme sous toutes ses formes, y compris le prétendu despotisme éclairé, c’est l’esprit démocratique. En dénonçant le nationalisme de Herder, on oublie que son nationalisme est lié à cet esprit démocratique. Les sujets d’un monarque n’ont pas de patrie. Le despotisme a aussi pour effet de freiner le développement des sciences et des arts. La culture, qui est créativité et non réception passive d’une tradition, est démocratique et nationale, tout à la fois et indissolublement.

 

Un nationalisme anarchiste

 

A vrai dire, Herder est non seulement antiabsolutiste, mais antiétatiste, contre l’État, anarchiste en ce sens-là. Contrairement à beaucoup de penseurs des Lumières, il soutient que l’État est, en lui-même, plutôt contraire au bonheur de l’individu que l’agent principal de ce bonheur. C’est un point important parce qu’il est à rattaché à cette méprise qui fait dire à Herder, par des citations isolées de leur contexte, qu’il est contre le mélange des nations et des cultures. Il n’est pas contre le mélange (8), il est contre l’État conquérant et impérialiste, qui groupe sous sa domination une foule de peuples divers dont il étouffe la diversité. C’est ce mélange-là que Herder repousse.

 

Herder est pour les peuples parce qu’il est pour le peuple, et il est pour le peuple parce qu’il est contre l’État, contre toute forme étatique, contre l’absurdité de la monarchie héréditaire (et la tradition, pour lui, sur le plan politique en tout cas, ne légitime rien du tout), contre la tyrannie des aristocraties, contre le Léviathan démocratique, dans la mesure où la démocratie reste un État, dans la mesure où elle est toujours cratie, même si elle est démo. Herder est aussi contre les classes sociales, qui vont contre la nature parce qu’elles ne sont établies que par la tradition, encore une fois – ce qui montre que Herder n’a rien d’un traditionaliste !

 

Pour Herder, tous les gouvernements éduquent les hommes pour les laisser dans l’état de minorité, dans une détresse infantile qui permet de mieux les dominer. Et, de ce point de vue, Herder retourne l’Aufklärung kantienne contre elle-même. Car c’est à Kant qu’il faut attribuer le principe cité par Herder dans les Ideen : « L’homme est un animal qui a besoin d’un maître et attend de ce maître ou d’un groupe de maîtres le bonheur de sa destination finale. » C’est un résumé de la position kantienne telle qu’elle est exprimée dans l’Idée d’une histoire universelle du point de vue cosmopolitique (Kant 1947 : 67 et sq.). Herder réplique : « L’homme qui a besoin d’un maître est une bête ; dès qu’il devient homme, il n’a plus besoin d’un maître à proprement parler… La notion d’être humain n’inclut pas celle d’un despote qui lui soit nécessaire et qui serait lui aussi un homme » (Herder 1962 : 157). Kant le prendra assez mal, mais c’est bien lui qui, dans sa philosophie de l’histoire prend position contre l’autonomie, et c’est Herder qui la défend.

 

L’antiétatisme de Herder est à relier à son antiartificialisme, à son antimécanicisme, et à cet organicisme dont on ne voit pas que, loin de subordonner l’individu aux finalités du tout, comme une pièce de la machine au fonctionnement de la mécanique entière, lui confère, au contraire, l’activité d’un organe sans lequel le tout ne pourrait s’animer. Il y a du Herder chez Stein, le ministre libéral de Frédéric-Guillaume IV, lorsqu’il soutient que l’Etat doit être non une machine, mais un organisme. Cette idée, précisément, est au fondement du libéralisme de Stein. Elle signifie que les sujets ne doivent pas être des instruments passifs aux mains de l’État, mais des organes actifs, capables d’initiatives.

 

L’antimilitarisme de Herder, sa polémique contre le principe de l’équilibre européen, invoqué par les princes pour mener leurs sujets au combat, sont à rattacher au même état d’esprit. La guerre est un instrument du totalitarisme de l’Etat monarchique, où personne « n’a plus le droit de savoir… ce que c’est que la dignité personnelle et la libre disposition de soi » (ibid. : 277), où le grain de sable qu’est l’individu ne pèse rien dans la machine (ibid. : 279).

 

Anticolonialisme

 

Mais Herder va plus loin dans le refus de certaines conséquences de la philosophie des Lumières, philosophie qui prône les vertus du commerce et de l’économie marchande. Dans une des pages les plus saisissantes de Une autre philosophie de l’histoire, il dénonce, avec une ironie voltairienne, les dévastations que fait subir à l’humanité la prédominance de cette économie marchande. C’est là une des clés de la pensée de Herder, qui a fort bien vu le lien étroit qu’il y a entre la colonisation « extérieure » et la colonisation « intérieure ».

 

Encore une fois, le point de vue de Herder est celui de la révolution paysanne. Herder est issu d’une famille de paysans pauvres et il a vécu à Riga, qui fut touchée par la révolte des anabaptistes au XVIe siècle. On peut peut-être rendre compte de son attitude à partir de là.

 

Il écrit donc : « Où ne parviennent pas, et où ne parviendront pas à s’établir des colonies européennes ! Partout les sauvages, plus ils prennent goût à notre eau-de-vie et à notre opulence, deviennent mûrs pour nos efforts de conversion ! Se rapprochent partout, surtout à l’aide de l’eau-de-vie et de l’opulence, de notre civilisation – seront bientôt, avec l’aide de Dieu, tous des hommes comme nous ! Des hommes bons, forts, heureux.

 

« Commerce et papauté, combien avez-vous déjà contribué à cette grande entreprise ! » Plus loin, il poursuit : « Si cela marche dans les autres continents, pourquoi pas en Europe ? C’est une honte pour l’Angleterre que l’Irlande soit si longtemps restée sauvage et barbare : elle est policée et heureuse. ».

 

Herder fait ensuite allusion au sort de l’Écosse. Mais il n’y en a pas que pour l’Angleterre ; la France n’est pas oubliée : « Quel royaume en notre siècle n’est devenu grand et heureux par la culture ! Il n’y en avait qu’un qui s’étalait au beau milieu, à la honte de l’humanité, sans académies ni sociétés d’agriculture, portant des moustaches et nourrissant par suite des régicides. Et vois tout ce que la France généreuse, à elle seule, a déjà fait de la Corse sauvage ! Ce fut l’œuvre de trois… moustaches : en faire des hommes comme nous ! des hommes bons, forts, heureux ! »

 

« L’unique ressort de nos États : la crainte et l’argent ; sans avoir aucunement besoin de la religion (ce ressort enfantin !), de l’honneur et de la liberté d’âme et de la félicité humaine. Comme nous savons bien saisir par surprise, comme un second Protée, le dieu unique de tous les dieux : Mammon ! et le métamorphoser ! et obtenir de lui par force tout ce que nous voulons ! Suprême et bienheureuse politique ! » (Herder 1964 : 271-273).

 

Plus loin encore, il récidivera, mettant cette fois en cause ce qu’il appelle le « système du commerce », et qui embrasse, semble-t-il, à la fois l’idéologie sous-jacente à la science économique et le capitalisme commercial, industriel et agraire : « Notre système commercial ! Peut-on rien imaginer qui surpasse le raffinement de cette science qui embrasse tout ? … En Europe, l’esclavage est aboli parce qu’on a calculé combien ces esclaves coûteraient davantage et rapporteraient moins que des hommes libres ; il n’y a qu’une chose que nous nous soyons permise : utiliser comme esclaves trois continents, en trafiquer, les exiler dans les mines d’argent et les sucreries – mais ce ne sont pas des Européens, pas des chrétiens, et en retour nous avons de l’argent et des pierres précieuses, des épices, du sucre, et… des maladies intimes ! Cela à cause du commerce, et pour une aide fraternelle réciproque et la communauté des nations ! « Système du commerce. » Ce qu’il y a de grand et d’unique dans cette organisation est manifeste : trois continents dévastés et policés par nous, et nous, par eux, dépeuplés, émasculés, plongés dans l’opulence, l’exploitation honteuse de l’humanité et la mort : voilà qui est s’enrichir et trouver son bonheur dans le commerce » (ibid. : 279-281).

 

On a rarement dénoncé avec autant de véhémence les ravages qui ont rendu possible l’édification de notre « économie-monde ». Herder a fort bien vu que l’entreprise, malgré « l’humanisme » de ses hérauts et thuriféraires, prenait volontiers appui sur un racisme ordinaire ou extraordinaire.

 

Antiracisme

 

Herder a fort bien vu aussi ce que la notion même de race, appliquée au genre humain, comporte de racisme implicite, dans la mesure où elle suppose, en fait, un polygénisme. Ceux qui, comme Buffon ou Kant se veulent monogénistes, mais parlent néanmoins de races humaines, sont donc, au moins, inconséquents. Herder est, lui, résolument monogéniste, contrairement à Voltaire, par exemple, qui pensait que « les Blancs et les Nègres, et les Rouges, et les Lapons et les Samoyèdes et les Albinos ne viennent certainement pas du même sol. La différence entre toutes ces espèces est aussi marquée qu’entre les chevaux et les chameaux »… Le monogénisme chrétien est donc à rejeter : « Il n’y a… qu’un brahmane mal instruit et entêté qui puisse prétendre que tous les hommes descendent de l’Indien Damo et de sa femme (9). »

 

Herder croit à la profonde unité de l’espèce humaine parce qu’il croit à la profonde unité des traditions. L’apparente diversité de ce qu’on appelle les races humaines n’est qu’un effet de la diversité des climats qui ne peut, tout au plus, produire que des variétés, mais qui ne pourrait, en aucun cas, engendrer des espèces. Cette diversité n’est donc pas un fait d’histoire naturelle, mais plutôt, pourrait-on dire, de géographie historique ou d’histoire géographique ; histoire qui témoigne, en tout cas, de la souplesse d’organisation de l’espèce humaine, c’est-à-dire de sa raison. Chez Herder, l’universalité de la raison prend appui non seulement sur la diversité des cultures, mais même sur la diversité d’apparence physique, de race, si l’on veut.

 

Selon lui, on perd le fil de l’histoire quand on a une prédilection pour une race quelconque et qu’on méprise tout ce qui n’est pas elle. L’historien de l’humanité doit être impartial et sans passion, comme le naturaliste, qui donne une valeur égale à la rose et au chardon, au ver de terre et à l’éléphant. La nature fait lever tous les genres possibles selon le lieu, le temps, la force. Conformément à l’inspiration leibnizienne de la pensée de Herder, « les nations se modifient selon le lieu, le temps et leur caractère interne », mais « chacune porte en elle l’harmonie de sa perfection, non comparable à d’autres » (Herder 1962 : 275). On retrouve ici ce que nous avons développé plus haut.

 

Herder est donc opposé également au racisme d’un Buffon, chez qui le racisme ou, comme dit Todorov, le « racialisme », entraîne la justification de l’esclavage et, bien entendu et a fortiori, de la colonisation et de la conquête (10). Mais il est probable qu’il ne pouvait non plus approuver Kant, pour qui, certes, même chez les Lapons, les Groenlandais, les Samoyèdes, même les « indigènes des mers du Sud » dont il est question dans les Fondements de la métaphysique des mœurs (1957 : 141) ont droit à notre respect, mais qui n’en sont pas moins à considérer comme moralement condamnables : en premier lieu parce qu’ils n’ont pas su constituer d’État. Or l’État est la condition pour que nous ayons quelque chance d’atteindre à la moralité. En second lieu, et surtout, parce qu’ils ne s’appliquent pas à développer leurs aptitudes par le travail, bref, parce qu’ils n’ont pas notre culture. Plaçant le droit, le droit « rationnel » moderne au-dessus du bonheur et, avec le droit, le travail, l’activité productive qui éveille en l’homme l’idée de la supériorité de la raison sur les sens, Kant aboutit en fait à un naïf européocentrisme, peu en accord avec la philosophie de Herder.

 

Un nouveau Vico

 

En Europe même, la prétention à se faire l’éducateur du genre humain risque d’aboutir à une dictature platonicienne des « spécialistes de l’universel ». L’anthropologie herderienne nous propose une conception de la culture qui relativise par avance l’opposition : culture (au singulier) / cultures (au pluriel) ou, plus clairement, l’opposition pensée / culture (au sens de l’anthropologie). Que les cultures, au pluriel, ne contiennent aucune pensée active, aucune créativité, n’est vrai que dans la mesure où « les cultures » ont été écrasées, tronçonnées, émiettées, ôtées à leurs courants d’échange « naturels », mais cela se révèle faux partout où on les laisse s’épanouir normalement.

 

Herder est un nouveau Vico, qui a compris qu’une éducation purement cartésienne, une éducation de la « table rase », laisse l’homme désemparé, privé de tout repère moral et politique, arraché aux dimensions sociales de son être. L’éducation de la pure pensée doit se compléter d’une éducation des sens et des sentiments, d’une éducation « humaniste » qui fasse place aux certitudes morales, c’est-à-dire au plus probable. Les arts du langage y doivent tenir leur rang, trop souvent méconnu : l’art du discours et des lettres, l’art de la traduction également, nécessaire à la connaissance morale d’autrui, et sans lequel on conçoit mal que puisse se constituer une raison « dialogique ».

 

Cette raison a besoin aussi de connaissances ethnologiques et historiques, elle a besoin de ce décentrement de la pensée qu’elles procurent, et sans lequel il n’y a point de reconnaissance d’autrui. L’histoire anthropologique, à la manière de Vico ou de Herder réunit ces deux types de connaissances. Elle préfigure l’histoire telle qu’elle a été pratiquée de nos jours, depuis Fustel de Coulanges jusqu’à Michel Foucault, en passant par l’école des Annales. Conformément à l’esprit herderien, cette histoire est, non plus histoire des gouvernants et des hommes de guerre, mais histoire des peuples, histoire des gens, histoire de tous. L’histoire continuiste, dont certains ont la nostalgie, c’est la mythologie du pouvoir, de ce pouvoir qui est, d’ailleurs, souvent responsable précisément des coupures, des cassures dans l’histoire des simples gens et de leurs mentalités, comme il est responsable de l’enfermement des ethnies en elles-mêmes, de leur emprisonnement dans des frontières fermées, bloquant les échanges spontanés entre cultures.

 

Ce que dit Giuseppe Cocchiara (1981 : 21) de Gian Battista Vico, à savoir qu’avec lui, les traditions populaires entrent, de manière décisive, dans l’histoire, qu’avec lui aussi, les peuples dits « primitifs » sont appelés à faire partie de l’histoire de l’humanité et qu’à ce titre, il est un précurseur des méthodes de l’ethnologie, on pourrait le redire de Herder. Il n’y a pas de peuple qui ne soit dans l’histoire. L’égalité des peuples, c’est aussi cela, c’est l’égale vocation à entrer dans l’histoire et c’est l’égale sympathie que doit leur vouer l’historien. Les insuffisances de l’Aufklärung sur ce point ont persisté souvent jusqu’à nos jours.

 

Conclusions

 

Si nous ne perdons pas de vue que la culture allemande des XVIIIe et XIXe siècles a apporté beaucoup à celle de l’Est européen, en Russie même et chez les nations qui connaissent aujourd’hui un réveil démocratique, l’importance de Herder, qui y fut souvent lu et apprécié, n’échappera à personne.

 

Bien loin d’être un danger pour la démocratie, l’esprit herderien peut être un facteur qui permette d’exorciser les fantômes d’un nationalisme rétrograde et agressif, et d’intégrer les valeurs ethniques et nationales à un esprit démocratique rénové, où l’individualisme ne fasse pas obstacle au sens de la communauté et la recherche du bien-être à la créativité culturelle.

 

Mais pour que cela soit possible, il ne faut pas caricaturer la pensée de Herder et dévaloriser systématiquement l’une des conquêtes les plus précieuses de l’esprit scientifique, à savoir le perspectivisme, dans la mesure même où il nous permet de rendre justice à toutes les formes d’humanité.

 

En fait, il est paradoxal que l’on trouve aujourd’hui, du côté des philosophes et des spécialistes des sciences humaines, une remise en cause du perspectivisme et du particularisme linguistique et culturel, à un moment précisément où, à l’inverse, les spécialistes des sciences « dures » et des techniques haut de gamme en viennent au perspectivisme eux aussi – consciemment, car ils l’ont toujours pratiqué en fait – et, dans le travail même de la recherche et de l’invention technique et scientifique, vantent les mérites de la tradition culturelle et son potentiel de créativité.

 

L’utilisation de l’ordinateur va elle-même dans le sens du perspectivisme. Presque toujours l’ordinateur calcule faux, et il faut trouver son chemin dans le brouillard des erreurs. Or il y a plusieurs chemins possibles…

 

Dans la physique moderne, l’absence d’ambiguïté et le caractère prédictible des phénomènes a disparu, du fait, en particulier, de l’absence de simplicité du point de départ de la ligne d’événements à prévoir. Comme l’écrit l’épistémologue italien Tito Arecchi (1989), « l’existence d’un point de vue privilégié pour effectuer la mesure, sur laquelle tous les physiciens étaient d’accord, est tombée en disgrâce ». C’est du sein même de la théorie et de la pratique expérimentale physiciennes que surgit le perspectivisme.

 

Mais il y a un point sur lequel des physiciens et des techniciens se retrouvent pour rapprocher la science moderne des savoirs anciens : dans la recherche de la créativité, l’étude de la dynamique de l’invention scientifique et technique fait ressortir l’importance de l’oral, de l’expression parlée, dans la science et, par conséquent, l’importance de la langue et de l’enracinement de cette langue dans un terreau culturel particulier. Ce sont les physiciens et les technologues, aujourd’hui, qui deviennent herderiens. Je cite Jean-Marc Lévy-Leblond (1990 : 25-26), physicien théoricien : « On peut… tranquillement affirmer que la science, en France, est faite de beaucoup plus de mots français (parlés) qu’anglais (écrits). Qu’il soit nécessaire de rappeler cette évidence montre à quel point le débat est faussé par une grave erreur de conception sur la nature de la recherche scientifique, identifiée à son produit final (les publications), plutôt qu’à son activité réelle. Or cette vitalité de la langue naturelle dans la science est utile et féconde. La science se fait comme elle se parle. A s’énoncer, donc à se penser, dans une langue autre que la langue ambiante, elle perdrait son enracinement dans le terreau culturel commun et serait ipso facto privée d’une source essentielle, même si elle est souvent invisible, de sa dynamique. Les mots ne sont pas des habits neutres pour les idées : c’est souvent par leur jeu libre et inattendu que se fait l’émergence des idées neuves… Et cela est encore plus vrai si l’on considère l’autre versant de la recherche scientifique, celui non de la création novatrice, mais de la réflexion critique. »

 

Et André-Yves Portnoff, directeur délégué de Science et technologie, va dans le même sens. Avec David Landes, il regrette que beaucoup de responsables du tiers monde « cultivent l’illusion de moderniser leur pays en faisant table rase de leur héritage historique », alors qu’« aujourd’hui, la créativité technologique et industrielle, comme la créativité artistique, fait appel à l’imaginaire », et que, de ce point de vue, « chaque langue, dans toute son épaisseur historique, avec toutes ses strates de mémoire collective, constitue un instrument d’une richesse indispensable » (1990 : 26).

 

A entendre de tels propos, l’ombre de Herder frémirait d’aise dans l’au-delà. Mais à propos de Herder faut-il parler d’ombre ? Ou de lumière ? Nous optons pour la lumière.

 

Max Caisson,

« Lumière de Herder », Terrain, numero-17 – En Europe, les nations (octobre 1991)

 

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Bibliographie :
Arecchi T., 1989. « Chaos et complexité », Le Monde/Liber, n° 1, oct.
Cassirer E., 1970. La philosophie des Lumières, Paris, Fayard (Die Philosophie der Aufklärung, Tübingen, 1932).
Cocchiara G., 1981. Storia del folklore in Italia, Palerme, Sellerio.
Finkielkraut A., 1987. La défaite de la pensée, Paris, Gallimard.
Herder J. G., 1977. Traité sur l’origine de la langue, Paris, Aubier (Abhändlung über den Ursprung der Sprache, 1770).
1964. Une autre philosophie de l’histoire, Paris, Aubier (Auch eine Philosophie der Geschichte, 1774).
1962. Idées pour la philosophie de l’histoire de l’humanité, Paris, Aubier (Ideen zur Philosophie der Geschichte der Menschheit, 1784).
Herzen A. I., 1843. « Le dilettantisme dans la science », Annales de la patrie.
Hume D., 1947 (1751). Essai de morale, in Enquête sur les principes de la morale, trad. de A. Leroy, Paris, Aubier.
Kant E., 1947. Philosophie de l’Histoire (Opuscules), trad. de St. Piobetta, Paris, Aubier.
1957 (1797). Fondements de la métaphysique des mœurs, trad. de V. Delbos, Paris, Delagrave.
Lévi-Bruhl L., 1890. L’Allemagne depuis Leibniz, Paris, Hachette.
Lévy-Leblond J.-M., 1990. « Une recherche qui se fait comme elle se parle… », Le Monde diplomatique, janv.
Portnoff A.-Y., 1990. « La créativité victime des jargons », Le monde diplomatique, janv.
Roheim G., 1972. Origine et fonction de la culture, Paris, Gallimard.
Serres M., 1968. Le système de Leibniz et ses modèles mathématiques, I, Paris, PUF.
Todorov T., 1989. Nous et les autres, Paris, Le Seuil.

 

———————–
Notes :
1 – Cf. Finkielkraut (1987).
2 – J. de Maistre appelle Herder « l’honnête comédien qui enseignait l’Evangile en chaire et le panthéisme dans ses écrits ». C’est dire la sympathie qu’il éprouvait pour lui…
3 – Cf. l’article « Français » dans l’Encyclopédie.
4 – En ce qui concerne l’éthique herderienne, voir, dans le présent article, le paragraphe intitulé « Un eudémonisme relativiste. ».
5 – Voir notamment Roheim 1972.
6 – On pourrait, sur ce point, comparer la pensée de Herder avec certaines thèses de Cl. Lévi-Strauss.
7 – Leibniz, 1710. Essais de Théodicée : paragraphe 202.
8 – La preuve est que, pour lui, la prééminence actuelle de l’Europe est due, pour une part, à l’extraordinaire mélange de populations et de cultures qui la caractérise : « En aucun continent les peuples ne se sont autant mélangés qu’en Europe ; en aucun autre ils n’ont si radicalement et si souvent changé de résidences, et avec celles-ci de mode de vie et de mœurs… fusion sans laquelle l’esprit général européen aurait difficilement pu s’éveiller » (Herder 1962 : 309).
9 – Voltaire, Essai sur l’histoire générale et l’esprit des nations depuis Charlemagne jusqu’à nos jours, ch. III.
10 – Voir particulièrement le chapitre intitulé « Les voies du racialisme » dans l’ouvrage de Todorov (1989 : 179 et sq.).

 

dimanche, 05 décembre 2010

Ilustracion y progresismo

Ilustración y progresismo

 

Alberto Buela (*)

 

lumieres.jpgSigue siendo el trabajo del filósofo alemán Emanuel Kant (1724-1804) Was ist Aufklärung?(1784) quien mejor ha definido qué es la Ilustración cuando afirmaba: “es la liberación del hombre de su culpable minoría de edad”. Es decir, de su incapacidad de servirse sólo de la razón sin depender de otra tutela, como lo fue la teología para la Edad Media, donde se afirmaba: philosophia ancilla teologíae= la filosofía es sierva de la teología.

El lema de la Ilustración fue el Sapere aude, el atrévete a saber sirviéndote de tu propia razón.

Pero la Ilustración buscando la emancipación del hombre de la teología, los prejuicios y las supersticiones, terminó endiosando a “La Razón” y sus productos: la técnica y el cálculo cuyas consecuencias fueron contradictorias, pues su opera magna fue la bomba atómica de Hiroshima y Nagasaky.

Luego de tamaño zafarrancho volvió el hombre a ser considerado una isla racional pero rodeado de un mar de irracionalidades. La sabiduría premoderna volvió a ser considerada. Lentamente se van teniendo en cuenta aspectos fundamentales del ser humano que habían sido dejados de lado por la Ilustración y sus seguidores, y que pertenecían a la demonizada Edad Media. El hombre postmoderno vuelve a zambullirse en las aguas de los problemas eternos. Pero, claro está, con una diferencia abismal: es un hombre sin fe, desesperanzado, nihilista. Nace así il pensiero débole. Pensamiento débil que puede dar razones del estado actual del ser humano pero que no puede dar sentido a las acciones a seguir para salir del actual atolladero.

Sin embargo, gran parte del mundo intelectual de postguerra sobre todo el vinculado al marxismo, al comunismo y al socialismo continuó en la vía ilustrada, incluso como la Escuela de Frankfurt, quintaesencia del pensamiento judío contemporáneo( Weil, Lukacs, Grünberg, Horkheimer, Adorno, Marcuse, Fromm, Haberlas et alii) que sostuvo en síntesis que estábamos mal no porque los productos del racionalismo ilustrado habían mostrado sus contradicciones flagrantes provocando el mal en el inocente como sucedió con los miles de japoneses nacidos radioactivos y condenados de antemano, sino porque no se habían podido llevar a cabo plenamente los postulados de la Ilustración.

Los vencedores de la segunda guerra mundial adoptan, con variantes socialdemócratas o neoliberales, el remanente del pensamiento ilustrado pasado por las aguas del Jordán de la Escuela de Frankfurt, poseedora del úcase cultural de nuestro tiempo. Así, su producto más logrado es el actual progresismo.

 

Es por esta razón afirma un buen colega nuestro, que “Quizá sea correcto afirmar que el progresismo es lo que queda del marxismo después de su fracaso histórico como opción política, económica y social y su transitoria (¿o definitiva?) resignación al triunfo del capitalismo. Una suerte de retorno, saltando hacia atrás por encima del bolcheviquismo, al reformismo de la socialdemocracia” [1]. El progresismo ha adoptado como lema “no ser antiguo y estar siempre a la vanguardia”. Como vemos, la resonancia con la Ilustración es evidente.

Qué comparte, a su vez, el progresismo con el neoliberalismo: 1) La adopción a raja tabla de la democracia liberal, rebautizada como discursiva, de consenso, inclusiva, de derechos humanos, etc. 2) la economía de mercado, a pesar de su discurso en contra de los grupos concentrados, y c) la homogeneización cultural planetaria, más allá de su discurso sobre el multiculturalismo.

El progresismo es tal, en definitiva porque cree en la idea de progreso. En realidad el progresismo no es una ideología sino mas bien una creencia, porque como gustaba decir Ortega y Gasset las ideas se tienen y las creencias nos sostienen, pues en las creencias “se está”. Y los progresistas “están creídos” que el hombre, el mundo y sus problemas van en la dirección que ellos van. De ahí, que cualquier contradictor a sus creencias es tomado por “un enemigo”. Es que el progresista al ser un creyente no acepta aprehender, y la única enseñanza que acepta, porque su imposición se le torna incuestionable, es la pedagogía de la catástrofe. Así descubre que hay miles de pobres y desocupados cuando se produce una inundación y que las promocionadas computadoras no funcionan porque en las escuelas rurales no hay electricidad o no hay señal. Una vez más, las catorce cuadras iluminadas por Bernardino Rivadavia, nuestro primer ilustrado presidente (1826), terminaban en el fangal de la cuadra quince donde las jaurías de perros cimarrones devoraban a los caminantes.

En resumen, el progresismo y la Ilustración comparten la creencia que la realidad es lo que ellos piensa que es la realidad y no, que la realidad es la verdad de la cosa o del asunto.

El gran contradictor del progresismo es el denominado realismo político (R.Neibuhr, J.Freund, C.Schmitt, R.Aron, H. Morgenthau, G. Miglio) que asume con escepticismo los proyectos teóricos que formulan la posibilidad de una paz perpetua, una organización perfecta de la sociedad en el marco de un progreso ilimitado. Y entiende la historia como el resultado de una tendencia natural del hombre a codiciar el poder y la dominación de los otros.

El realismo político viene a reemplazar al homo homini sacra res= el hombre es algo sagrado para el hombre, de los ilustrados que tomaron de Séneca por el homo homini lupus= el hombre es lobo del hombre de Hobbes, que tomó de Plauto.

El realismo político viene a sostener que se debe trabajar sobre la base de los materiales que se tienen y la realidad es lo que es más lo que puede ser,  en tanto que el progresismo afirma que se debe trabajar en lo que se cree pues las ideas en definitiva se imponen a la realidad.

 

(*) alberto.buela@gmail.com

UTN (universidad tecnológica nacional) 

 



[1] Maresca, Silvio: El retorno del progresismo,(2006) en internet.

vendredi, 01 octobre 2010

Gerd Bergfleth: critique des Lumières palabrantes

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1986

 

Gerd Bergfleth: critique des Lumières palabrantes

 

Drei-Schwaetzer-a17821823.jpgLes essais et articles de Gerd BERGFLETH, philosophe et penseur d'avant-garde qui vit à Tübingen, méritent une ample attention. Quand on les lit, quand on y réfléchit, on admettra qu'ils nous offrent une réelle expérience euphorique et euphorisante. Ces textes constituent une véritable déclaration de guerre à l'Aufklärung vulgaire qui a stérélisé la pensée allemande de notre après-guerre.

 

Comme Jean BAUDRILLARD à Paris, BERGFLETH (qui à préfacé et explicité l'édition allemande de L'échange symbolique et la mort, livre paru chez Gallimard en 1976) tente de sortir de l'impasse où nous a égaré cette pensée dominante marquée du sceau de la raison raisonnante. BERGFLETH veut des thèmes nouveaux. Il résume sa pensée iconoclaste en dix thèses qu'il baptise "Dix thèses pour une critique de la Raison". Il y constate la faillite de la Raison en tant qu'instance dominante de la philosophie et proclame le divorce entre sa vision personnelle et l'Aufklärung de la gauche de facture habermasienne. BERGFLETH s'insurge contre cette pensée propre à la gauche libérale des années 70 et croit pouvoir annoncer la fin de l'alliance entre la Raison, couplée à ses interdits, et le pouvoir, porté par les technocrates. Il écrit: "Décisive est la Subversion de la domination de la Raison et de la Raison de la domination par la nature humaine". Il faut pour cela redécouvrir le rêve et la folie, l'érotisme et les passions. En bref, ce qu'il faut retrouver, c'est la plénitude totale de notre nature humaine, que l'industrie de la consommation et la bourgeoisie ont domestiquée.

 

BERGFLETH va encore plus loin: "La Vie ne se réduit pas à la pensée mais nous avons tout de même besoin de la clarté passionnée de la pensée, si nous voulons retrouver une Vie de passions". Gerd BERGFLETH se permet une révolte, s'offre le luxe d'une révolte. Tous ceux qui sentent qu'un tel destin de révolté leur est propre l'accompagneront sur la barricade qu'il dresse. L'enjeu: l'intensité sacrée de la Vie. Les réflexions de BERGFLETH montrent qu'une nouvelle culture est possible. Mieux: qu'une nouvelle culture est nécessaire.

 

Deux essais de BERGFLETH méritent le détour: 1)Der geschundene Marsyas qui évoque les voies qui conduiront, au-delà de la crise des valeurs, à la réconciliation entre la Raison et la Nature et 2) Über linke Ironie, ensemble de réflexions qui, par leur pertinence incisive ébranlent les idées les plus chères à la gauche philosophique, libérale, propagandiste et superficielle. Mais pour les victimes de cet assaut conceptuel, il reste une vigoureuse introduction à Nietzsche, une introduction pour débutants dont les ingrédients proviennent de France. Dans Die zynische Aufklärung BERGFLETH règle ses comptes avec les dogmes et les traditions de cette gauche libérale qui a règné en dictateur impavide depuis la "reeducation" imposée à l'Allemagne vaincue par les armées yankees. L'individuel s'est évanoui dans le néant, telle est la caractéristique la plus méprisable de notre dernière décennie. Idem pour l'idée d'égalité qui a présidé au processus de "démocratisation", au perfectionnement, au nivellement et à l'uniformisation. Citons BERGFLETH: "Dans la notion d'égalité, on trouve entière la tendence à aplatir et araser qui est inhérente à tout universalisme abstrait, dont le propre est d'exterminer toute espèce de différences". Ou encore: "Car la domination de l'égalité équivaut à la domination de la terreur".

 

BERGFLETH le sage, BERGFLETH l'homme qui sait, n'ignore pas, bien sûr, de quel complexe souffre la nation allemande; il écrit à ce propos: "Car sans Heimat personne ne peut vivre, pas même l'homme de gauche; le bourgeoisisme planétaire trouve son pendant dans l'apatridisme, l'Heimatlosigkeit ". Le misérabilisme spirituel de la Bundes- republik méritait d'être agressé et secoué. BERGFLETH s'est chargé de ce boulot salutaire . C'est son grand et immense mérite. Il est devenu un homme dont il faudra tenir compte.

 

Martin Werner KAMP.

 

Gerd BERGFLETH et al., Zur Kritik der palavernden Aufklärung, Matthes & Seitz Verlag, München, 1984, 200 S., 19,80 DM.

samedi, 06 février 2010

Das Wesen der Aufklärung

Das Wesen der Aufklärung

MOD_LUM_000.jpgEx: http://rezistant.blogspot.com/
Bar jedes historischen Rechtsempfindens ist das Vernunftrecht der Aufklärung. Als Naturrecht ist es eine Verstandeskonstruktion, die nicht mehr, wie das mittelalterliche Naturrecht, aus dem Ordo des Seins erfragt, was rechtens ist. Die Toleranz der Aufklärung entsprang einer Vergleichgültigung der religiösen Wahrheit, die ihre Vernunftreligion in allen Religionen der Erde als allgemein-menschliche moralische Überzeugungen finden wollte. Ihre Humanität hatte ein Auge nur für dieses Allgemeinmenschlich-Kosmopolitische der Menschenwürde, aber nicht für dessen besondere Ausfaltung zu persönlicher Individualität und zu geschichtlich-volkhafter Prägung. Ihre Geschichtsauffassung war, dem entsprechend, nur an dem allen Gemeinsamen interessiert, an der einen Vernunft und der überall gleichen Vernunftmoralität. Und so war die Aufklärung trotz historisch-kritischen Blicks und trotz mancher historischer Leistung auf dem Gebiet der Profan- und Kirchengeschichte im tiefsten Grunde unhistorisch. Ihr philanthropisches Streben nach Allgemeinbildung war einseitig intellektualistisch, nur auf Aufnehmen und Lernen von Wissensstoff gerichtet. Ihre Menschlichkeit im Strafrecht übersah, da ihrem Nutzdenken die Strafe zu allererst nur Besserungsmittel war, den tieferen Sinn im inneren Zusammenhang von Schuld und Sühne. Und ihre kirchlichen Reformen, die in katholisches und protestantisches Christentum tief eingriffen, waren, ihrem Intellektualismus gemäss, von allzu wenig Ehrfurcht vor dem undurchdringlichen Mysterium im Kult und vor der göttlichen Autorität im Glauben getragen. Vernunft und Moral - das war im Grunde das eins und alles der Aufklärung. Das war ihr Dogma und ihre Religion. Es war ein hoher, grosser Glaube, dem all diese Vernünftigkeit entsprang: Glaube eben an die Vernunft im Menschen, Glaube an den Menschen selbst und seine Eigenkraft und Autonomie in Selbsteinsicht und Selbstleistung. Es war ein neuer Pelagianismus im Christentum, der mit der Aufklärung einsetzte, wie ja Pelagius in der antiken Kirche der autonome Stoiker, und die Stoa Vernunftzuversicht und humane Menschenliebe, Philanthropie, gewesen war.

[...]

Und selbst die Moral, dieses Urgebiet der Freiheit, soll ein "Gesetz" der Freiheit finden, das moralische Gesetz in mir, in Parallele zu dem Gesetz der Himmelsmechanik, dem gestirnten Himmel über mir, das Gesetz: allgemeingültig zu handeln, wie Kants kategorischer Imperativ es fordert.

Dieses Gesetzesdenken will etwas. Alle Aufklärung ist zweckhaft. Es will herrschen. Erkenntnis ist nicht mehr Staunen und Betroffensein vom Seienden und seiner Fülle, wie es die griechische "Theorie" gewesen war, ujnd wie sie das gesamte abendländische Denken bisher vertreten hatte. Das aufgeklärte Wissen will rechnen ujnd darin absehen von allen qualitativen Gehalten, die man ja nicht errechnen kann. Es will nicht mehr Substanz, es will Funktion, Regel, Verbindung immer gleichen Geschehens, das man in Quantität, in Zahl und mathematischer Formel ausdrücken kann. Und es will - so sagt Kant äusserst charakteristisch - der Natur als der uns Menschen erkennbaren Erscheinungswelt ihre Gesetze, ihre Regelhaftigkeit in Gemässheit unseres Denkens über sie "vorschreiben". Es will verfügen, gebieten, ordnen und verwerten. Es will herrschen gemäss dem praktischen Sinn aller Aufklärung: es will die Welt gestalten gemäss der Einsicht in ihre Gesetzlichkeit. Und eben da schlägt die Geburtsstunde unserer modernen Technik. Sie ist das legitime Kind der Aufklärung, ihr Erbe an das 19. Jahrhundert und nicht zuletzt auch uns selbst. Verwertung der Naturgesetze zur Lebensgestaltung: das ist der Wille der aufgeklärten Wissenschaft von der Natur.

Theodor Steinbüchel, Zerfall des christlichen Ethos im XIX. Jahrhundert. Josef Knecht, Frankfurt am Main 1951.

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mercredi, 16 septembre 2009

Hamann: le Mage du Nord, critique des Lumières

Hamann.jpg

 

 

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

HAMANN: le Mage du Nord, critique des Lumières

 

Spécialiste de la philosophie des Lumières, du Romantisme et du nationalisme allemand, Isaiah Berlin a publié une bonne étude sur Le Mage du Nord critique des Lumières, J. G. Hamann 1730-1788. Il écrit: «Hamann mérite d'être étudié, car il est l'un des rares critiques vraiment originaux des temps modernes. Apparemment, sans rien devoir à personne, il attaque l'orthodoxie dominante avec des armes dont certaines sont obsolètes et d'autres inefficaces ou absurdes; mais il le fait avec assez de force pour gêner la marche de l'ennemi, pour attirer des alliés sous sa propre bannière réactionnaire et pour initier, si l'on peut dire que quelqu'un a commencé, la résistance séculaire à la marche des Lumières et de la raison au XVIIIième siècle; cette résistance qui, à son heure, déboucha dans le Romantisme, l'obscurantisme et la réaction politique, dans un très important renouveau des formes artistiques et qui, finalement, provoqua des dégâts permanents dans la vie politique et sociale des hommes. Un tel personnage demande à coup sûr quelque attention. Hamann est le pionnier de l'antirationalisme dans tous les domaines. Ni Rousseau, ni Burke, ses contemporains, ne méritent cette dénomination car les idées purement politiques de Rousseau sont classiques dans leur rationalisme, tandis que Burke en appelle au tranquille bon sens des hommes raisonnables, même s'il dénonce les théories fondées sur des abstractions. Hamann rejetait tout cela; partout où l'hydre de la raison, de la théorie, de la généralisation relève l'une de ses horribles têtes, il frappe. Il fournit un arsenal dans lequel des romantiques plus modérés puisèrent certaines de leurs armes les plus efficaces  —tels Herder, même une tête froide comme le jeune Goethe, même Hegel qui écrivit un long et peu aimable compte-rendu de ses œuvres, même Humboldt le pondéré et ses compagnons libéraux. Il est la source oubliée d'un mouvement qui, finalement, engloutit toute la culture européenne» (P. MONTHÉLIE).

 

Isaiah BERLIN, Le Mage du Nord critique des Lumières. J. G. Hamann 1730-1788, PUF, 1997,150 pages, 138 FF.

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jeudi, 19 mars 2009

Une "nouvelle gauche" contre la vulgate des Lumières

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

 

Une “nouvelle gauche” contre la vulgate des Lumières

 

Nous assistons à l'avènement d'une gauche inattendue. Elle s'oppose à la vulgate des Lumières, base de la “political correctness”, elle s'insurge contre l'emprise étouffante de l'économisme, elle est “contextualiste” dans le sens où elle ne rejette pas nécessairement tous les nationalismes, elle est résolument “communautaire”, elle fait recours aux traditions, même, parfois, sous leurs aspects ésotériques.

 

Il y a déjà quelque temps qu'une certaine gauche (spécialement en France), que certains intellectuels déçus de leur parcours politico-philosophique marxiste et social-démocrate sont partis en quête d'arguments nouveaux, vers d'autres horizons spirituels. Ils ont toutefois gardé le meilleur de leur ancienne vision-du-monde: une aversion à l'égard de la culture libérale, fondée sur l'individualisme. Mais ils ont abandonné les recettes collectivistes et préfèrent le “communautaire” qu'ils avaient pourtant abjuré comme un “irrationalisme”. Aujourd'hui, ils affirment et démontrent que toute intégration sociale est déterminée par des valeurs spirituelles. C'est-à-dire que toute intégration est “holiste” et nullement “contractualiste”. On préfère désormais Ferdinand Tönnies à Jean-Jacques Rousseau.

 

Vu ces glissements et ces évolutions, le dialogue est donc possible avec ces intellectuels de gauche qui ont désormais des références fécondes. Ces cénacles et ces hommes courageux ne poussent toutefois pas l'audace trop loin: ils restent sur des positions égalitaristes, nivelleuses, qui ne permettent pas aux communautés, qu'ils rêvent de rétablir dans leur plénitude conviviale, de retrouver une véritable articulation organique. Des communautés non hiérarchisées, sans épine dorsale hiérarchique, risquent d'être des communautés figées, répétitives, sans vie intérieure. Lugubre perspective! Qui ne distinguera pas ce “communautarisme” de la massification actuelle, où les individus ne sont plus que de petits rouages. Autre obstacle que ces nouvelles gauches ne peuvent franchir: elles sont incapables, semble-t-il, de formuler une critique définitive des racines de la modernité mercantiliste.

 

Mais voici le catalogue des “nouveaux hérétiques”.

 

Les néo-tribalistes

 

“Le temps des tribus” est le titre d'un essai de 1989, qui n'est pas passé inaperçu. L'auteur en est le sociologue de gauche Michel Maffesoli, un des plus ardents théoriciens du nouveau communautarisme, des petites agrégations, comme les bandes de jeunes par exemple. Au contractualisme qui est un lien très faible, trop faible, Maffesoli oppose une sorte d'“élan vital” bergsonien, force irrationnelle d'intégration sociale: c'est ce qu'il appelle aussi le solidarisme orgiaque, où corps et âmes s'attirent et fusionnent. Maffesoli semble s'inspirer davantage d'une catégorie de Pareto, celle des “résidus”, voire celle des “actions non-logiques” que du concept de “Gemeinschaft” chez Tönnies.

 

Autre théoricien “communautariste”: Pietro Barcellona, ex-député du PCI. Dans ses écrits, l'anti-individualisme sort carrément des canons de l'idéologie des Lumières. La modernité et ses dérivés sociaux d'inspiration économiciste (le communisme par exemple) n'ont pas ressenti de culpabilité pour avoir fait disparaître les valeurs cimentant la solidarité. Ç'aurait été, explique le juriste Barcellona, une position “trop nostalgique et réductrice”. Barcellona n'épargne cependant pas le mercantilisme et le consumérisme. Et cet ancien député du PCI écrit, dans L'individualismo proprietario: «Le travailleur évolue désormais dans un monde de consommation à la recherche du succès personnel qui lui permettra de se présenter comme acquéreur dans des super-marchés fantasmagoriques, où le pur décor se substitue à la dignité et à l'orgueil de classe».

 

Les anti-occidentaux

 

Serge Latouche défend les positions les plus radicales en ce qui concerne la contestation du modèle occidental de vie et de développement. Dans L'occidentalisation du monde, il démasque purement et simplement le projet impérialiste et libéral-capitaliste qui éradique à coup de télévision les valeurs spirituelles résiduaires dans les pays du tiers-monde. Ainsi disparaissent chez ces peuples leur raison de vivre. L'Occident pour Latouche est une anti-culture: «Il donne des droits aux citoyens les plus efficaces. Il est tout le contraire d'une culture impliquant une dimension holiste qui procure une solution au défi de l'existence à tous ses membres». Que faire, dès lors, pour sortir de l'homogénéisation? Repartir, affirme l'ancien gauchiste, des micro-communautés, y compris les micro-communautés ethniques, qui ont été expulsées du marché.

 

Anti-occidentaliste encore plus farouche que Latouche: le linguiste américain Noam Chomsky, philosophe favori des gauches dures aux Etats-Unis. «Qui connaît les décisions les plus importantes prises lors des négociations du GATT ou du FMI, et qui ont pourtant un impact certain au niveau du monde entier? Et qui connaît les décisions des grandes multinationales, ou des banques internationales, ou des sociétés d'investissement qui régulent la production, le commerce et la vie de tant de pays?». Chomsky estime que cette opacité est la tare majeure du libéral-capitalisme, avec la globalisation de l'économie et l'impérialisme militaire sous la bannière Stars and Stripes. C'est contre cet expansionisme militaire américain que Chomsky a consacré son dernier livre 501: la conquête continue.

 

Les anti-scientistes

 

Il a rompu avec le communisme dans les années 50. Mais cette rupture ne l'a pas empêché de rêver à un “nouveau départ”, au-delà des “thérapies” du libéral-capitalisme. Nous voulons parler d'Edgar Morin, qui, dans un de ses derniers essais, nous met en garde contre le péril du scientisme, derrière lequel se profile une ombre totalitaire. En 1992, Morin déclarait: «Je crains un système qui puisse contrôler la population. Je pense aux manipulations génétiques et aux manipulations cérébrales. Une certaine fanta-science pourrait se transformer en science appliquée». Edgar Morin va bien au-delà d'une simple démolition du dogme scientiste: il en arrive à augurer une véritable révolution conservatrice: «Aujourd'hui, il nous faut associer deux notions opposées, celles de conservation et de révolution. Nous devons également nous abreuver aux sources du passé: Homère, Platon et Bouddha sont encore radiactifs».

 

Les “archaïsants” de la gauche

 

Il y a tout juste un an, à l'âge de 61 ans, mourrait l'historien américain Christopher Lasch. Il avait été un mythe pour la gauche italienne jusqu'il y a peu d'années. Lui aussi, comme Caillé, Morin, Maffesoli et Latouche, avait abandonné les canons de l'idéologie des Lumières et les idéologèmes économicistes, pour partir à la recherche des fondements de la solidarité, de ses principes spirituels. Aucun “pacte social” n'a jamais pu pallier aux réalités d'ordre communautaire telles la famille, la nation, le sens du devoir, toutes rejetées par les gauches sous prétexte qu'elles étaient “réactionnaires” ou “petites-bourgeoises”. La position de Lasch pourrait se définir comme étant une sorte de “radicalisme populiste”. Face à ce “communautarisme” prémoderne, le sociologue français Alain Caillé cultive un nostalgisme à peine voilé, tout en restant bien campé sur des positions égalitaires, typiques de la gauche. Il est un théoricien de l'anti-utilitarisme, le chef de file du MAUSS (Mouvement Anti-Utilitariste dans les Sciences Sociales). Depuis quelques années, il a ouvert un dialogue avec Alain de Benoist et la “Nuova Destra” italienne [tandis que le secrétaire d'Alain de Benoist, Charles Champetier, déploie mille et une astuces pour l'imiter et le paraphraser]. Dans l'orbite du MAUSS, on trouve également, outre Caillé, Latouche et Morin. Dans son essai le plus important, ce sociologue français condamne la logique du “donner-pour-avoir” et exalte, en contrepartie, la logique archaïque du don, ce qui lui permet, ou l'oblige, à réévaluer le rôle des cultures traditionnelles où «l'on se préoccupe davantage de la cohésion que du profit».

 

Les solidaristes du travail

 

Le capitalisme contre le capitalisme. Le modèle anglo-saxon des Etats-Unis contre le modèle rhénan nord-européen. L'individualisme du boursicotier contre le communautarisme des entreprises. Le sociologue Michel Albert, au départ de ses positions sociales-démocrates, explique dans son best-seller Capitalisme contre capitalisme  les raisons de la supériorité sociale et économique du modèle “communautaire” allemand face au modèle ultra-libériste qui ne considère l'entreprise que comme une simple “commodité”, comme un bien vendable et interchangeable. La supériorité sociale du “modèle rhénan” réside dans sa capacité d'opérer une médiation entre biens spirituels (fidélité, amitié, communauté, honneur, générosité) et biens de marché, exclusivement commercialisables. Michel Albert donne un exemple: «Les religions en Allemagne sont des institutions non commerciales. Aux Etats-Unis, elles font recours à des formes de plus en plus sophistiquées de publicité et de marketing».

 

«Le travail à temps plein est terminé»: cette phrase programmatique figure dans l'introduction de Lavorare meno per lavorare tutti (Travailler moins pour que tous puissent travailler) de Guy Aznar, beaucoup lu à gauche aujourd'hui. Aznar est heureux de saluer la restitution à l'individu d'une portion de sa vie où il peut appartenir à ses amis, pratiquer la coopération libre et gratuite, s'adonner à des activités échappant à la logique de l'argent et du marché. Aznar suggère une sortie hors de l'emprise totale du travail à temps plein avec ses dégénérescences (utilitarisme, mercantilisme, efficacité à tout prix, massification, déracinement total). Dans cette optique, suggérer la réduction des horaires de travail n'est pas seulement une mesure pour lutter contre le chômage.

 

Les “nationaux-communautaires” scandaleux

 

Hans Magnus Enzensberger est l'un des intellectuels historiques de la gauche allemande. Il est aujourd'hui en rupture de ban avec ses anciens camarades, parce qu'il ne cesse plus de lancer des affirmations en faveur de l'identité nationale. Ses théories ont fini, en Allemagne, par être mises directement en accusation sous prétexte qu'elles cautionnaient des “filons philosophico-idéologiques” marginalisés par les bien-pensant: idéologues de na “nouvelle droite”, positions politiques d'un Ernst Nolte. Mais un interview accordé au Spiegel a fait un scandale encore plus retentissant. Dans cet interview, Botho Strauss, dramaturge de l'école fondée jadis par Adorno, souligne la nécessité de forger en Allemagne une “nouvelle droite” non libérale et conservatrice, attentive aux thèmes “communautaires”.

 

Les “ésotériques”

 

Dans l'archipel de la culture de gauche, on a vu émerger une petite île et on tente déjà d'en interdire l'accès. Tant elle recèle de l'hérésie. Mais elle est pourtant bien inaccessible à la majorité des post-communistes et néo-communistes qui demeurent tous de formation étroitement laïque, fidèles à l'idéologie des Lumières et au scientisme. Dans cette “île”, on peut professer des idées issues des traditions ésotériques, alchimiques, gnostiques. Inouï! Deux auteurs sont particulièrement sensibles à ces thématiques. Le premier, c'est Attilio Mangano, un ancien communiste ultra, attiré désormais par le mythe, les religions et la spiritualité des cultures centre-européennes (Mitteleuropa). Mangano est un partisan fermement convaincu du retour aux valeurs communautaires pré-modernes: ou, plus exactement, aux aspects ludiques de la fête, aux liens magiques qui lient les personnes à la nature, à l'orgiaque. L'autre auteur sensible aux thèmes ésotériques est Luciano Parinetto. Il a étudié l'alchimie (ses principaux écrits sont: Alchimia e utopia et Solilunio)  et s'est réfugié dans cette discipline traditionnelle pour sortir de l'aliénation née de la modernité. Mais cette démarche nous semble tout de même un peu “forcée”, dans la mesure où il nous semble bien difficile de concilier l'utopisme marxiste anti-spirituel et anti-initiatique avec l'ars regia.

 

Les théologiens

 

Les théologiens de la nouvelle gauche hérétiques sont deux, et ils sont très différents l'un de l'autre. Le philosophe Massimo Cacciari, communiste et bourgmestre de Venise, a courageusement dépassé les clivages culturels. Au-delà du marxisme, au-delà des dogmes de l'idéologie des Lumières, Cacciari propose un itinéraire post-nihiliste nous permettant de sortir à la fois de la pensée négative et de nous ouvrir à la théologie et à la mystique.

 

C'est une façon de pousser la philosophie plus en avant, de la faire aller au-delà de l'orbite qui lui est généralement assignée. Dans ce cas, on pourrait effectivement hasarder des parallèles originaux. En sortant la mystique de son isolement, on retourne au néo-platonisme. En voulant dépasser le seuil de la philosophie, on revient en quelque sorte à l'idéalisme magique de Julius Evola.

 

Un autre intellectuel de la gauche italienne, Carlo Formenti, veut replacer les fondements de la philosophie dans leur dimension théologique.

 

Les anti-racistes différentialistes

 

Intellectuel français manifestant des sympathies pour le PS, Pierre-André Taguieff mène depuis longtemps déjà une bataille contre les insuffisances révélatrices du discours anti-raciste. Outre le racisme “mixophobe”, Taguieff dénonce le racisme “universaliste”, qui procède à l'arasement de toutes les différences. L'universalisme est raciste, en somme, parce qu'il projette d'imposer par voie d'impérialisme, un modèle unique. Il est en ce sens l'anti-chambre culturelle du colonialisme.

 

Francesco COLOTTA.

(texte tiré de Linea, II, 4, mai 1995; adresse: Via Federico Confalonieri 7, I-00.195 Roma; abonnement annuel: 30.000 Lire; trad. franç.: Robert Steuckers).

mardi, 17 février 2009

Leibnis, Herder, la tradition romantique

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1985 

Notions philosophiques de base.


La leçon de Leibniz; les monades:


Prédécesseur de Leibniz, Christian Thomasius (1655-1728), fondateur de l'Université de Halle, développe un sys­tème éthique/philosophique, selon lequel nos croyances doivent être sanctionnées à partir de notre seule intério­rité et non à partir d'une autorité extérieure. L'individu, dans ce système fondé par Thomasius, doit être capable (et donc s'efforcer) de suivre sa propre lumière, sa propre "raison". De cette vision de la nature et de l'agir humains, dé­coule automatiquement un relativisme, donc une acception des différences qui constituent la trame du monde, une acception inconditionnelle du pluriel, de la diversité. Pour Thomasius, son système et ses retombées, comme tout autre espèce de savoir, doit déboucher sur des applications pratiques in vita civilis . Cette figure de l'histoire des idées philosophiques, dont la personne constitue le lien entre la Renaissance et les Lumières, nous lègue ici des principes clairs, une éthique de l'action: la diversité est telle et l'on ne saurait la contourner. De ce fait, nos juge­ments doivent se laisser diriger par une approche relativiste, non mutilante et non réductionniste du monde et des hommes. Ce relativisme doit déboucher ensuite sur un agir respectueux de ces différences qui font le monde. Indubitablement, notre volonté de donner un autre visage à l'Europe, s'inspire de cette démarche vieille de presque trois siècles. Dans notre optique, les Lumières ne constituent nullement un programme rigide, un catéchisme stéré­lisateur, une religion sèche de la Raison (comme avaient voulu l'instaurer les Jacobins français) mais bien plutôt l'attention au monde, le respect des créations spontanées de l'esprit et de l'histoire, la sagesse du jardinier qui har­monise, dans ses parterres, les fleurs les plus diverses... Mais cette attention doit être couplée à une vigilance, une milice spirituelle qui veille à ce que les mutilateurs de toutes obédiences, les réductionnistes de tous acabits ne viennent troubler cette splendide harmonie du monde.


Avec Leibniz, les intuitions de Thomasius, les prolégomènes que ce fondateur de l'Université de Halle a posés, s'affineront. L'orientation rationaliste de sa pensée ne l'a nullement empêché de jeter les bases de la grande syn­thèse organiciste que furent le Sturm und Drang et le Romantisme. Le rationalsime cartésien et spinozien descen­dent, chez Leibniz, au niveau des monades. Celles-ci sont chacune différente: il n'y en a pas deux d'identiques. Et chacune de ces monades acquiert continuellement un "état" nouveau. Leibniz découvre ainsi un devenir constant, un développement incessant de forces et d'énergies intérieures, une continuité ininterrompue. L'état présent d'une monade est le résultat d'un état antérieur et, par suite, tout état présent est gros de son avenir. L'univers de Leibniz, contrairement à celui de Descartes, n'est plus une somme de parties, mais un tout qui déploie ses divers aspects . Le concert international, pour nous, est également une globalité politique qui déploie, sous l'impulsion d'agirs hu­mains, des perspectives, des possibles divers. Cette variété infinie constitue une richesse et notre humanisme veillera à ce que cette richesse ne s'épuise pas. C'est là que s'inscrit la liberté: dans la capacité de déployer collecti­vement un possible original, d'inscrire dans l'histoire une geste unique à côté d'autres gestes uniques. In vita civi­lis , pour reprendre l'expression latine de Thomasius, cette vision implique l'organisation fédéraliste des grands ensembles civilisationnels (chaque monade peut ainsi assumer son devenir sans contraintes extérieures) et le dia­logue fraternel entre les diverses civilisations du globe. Dialogue d'attention et non de prosélytisme mutilant...


Herder: des monades aux peuples


Herder va dépasser Leibniz. De l'œuvre de ce dernier, Herder avait retenu l'énergie interne des monades, génératrice de devenirs spécifiques. Mais, pour Leibniz, chaque monade, activée de l'intérieur, n'avait aucune "fenêtre" exté­rieure, aucune ouverture sur le monde. Leibniz dépassait certes l'atomisme qui voyait des particules sans énergie in­térieure, mais ne concevait pas encore des monades en interaction les unes avec les autres. Cet isolement des mo­nades disparaît chez Herder. Dans sa vision philosophique, chaque unité (un individu ou un peuple) entre en interac­tion avec d'autres unités. Toute individualité singulière ou collective, loin d'être renfermée sur elle-même, dérive la conscience intérieure qu'elle possède d'elle-même de l'extérieur, c'est-à-dire du contact d'avec le monde qui l'entoure. Si ce monde était absent, cette conscience ne pourrait jamais s'éveiller. Herder nous propose ainsi une image du monde où les diverses parties constituantes sont toutes activement liées les unes aux autres au sein d'un réseau dynamique de réciprocité. Cela signifie qu'aucune individualité ne peut, dans l'univers, ni exister indépen­demment du contexte de ses inter-relations ni être comprise comme en dehors de celles-ci. En restant au niveau de développement conceptuel de Leibniz, on risquait de concevoir le concert international comme un ensemble de na­tions repliées sur elles-mêmes et jalouses de leurs petites particularités. On risquait l'albanisation ou, pire, l'incompréhension réciproque. On risquait d'asseoir une image du monde justifiant les nationalismes ou les particu­larismes d'exclusion, les réflexes identitaires de rejet. Et, donc, les bellicismes stériles... Avec Herder, ce risque s'évanouit, dans le sens où la diversité est production hétérogène et incessante d'un fond de monde, rationnelle­ment indéfinissable. Les éléments divers ont pour tâche de mettre en exergue le maximum de possibles, de "colorier" sans relâche le monde, d'échapper sans cesse à la grisaille de l'uniformité. Le respect des identités pos­tule la solidarité et la réciprocité. En termes politiques actualisés, nous dirions que la défense des identités régio­nales, nationales, culturelles, civilisationnelles, etc. exige comme indispensable corollaire la solidarité inter-ré­gionale, internationale, inter-culturelle, inter-civilisationnelle, etc.

L'objectif d'une Europe alternative serait donc de valoriser les peuples avec les productions littéraires, culturelles et politiques qu'ils forgent et de lutter contre l'arasement des spécificités qu'entament automatiquement les sys­tèmes niveleurs, en tout temps et en tout lieu, quelle que soient d'ailleurs leurs orgines et leurs référentiels philo­sophiques ou idéologiques.

La tradition romantique


Le système philosophique de Herder constitue indubitablement une réaction à l'encontre d'un certain despotisme éclairé, qui ne se donnait plus pour objet, comme dans le chef d'un Frédéric II, de défendre un pays en tant que havre de liberté religieuse par tous les moyens militaires modernes, mais un despotisme éclairé, transformé par l'érosion du temps en fonctionnarisme uniformisant, en praxis de mise au pas des libertés locales. Ce despotisme, perçu sous l'angle d'une praxis générale et définitive et non plus comme praxis postulée par l'Ernstfall permanent que vit une société contestataire (la Prusse de Frédéric était le havre des Huguenots et des Protestants de Salzbourg, de bon nombre de "non conformists" britanniques et d'Israëlites, de piétistes) menacée par ses voisines conservatrices, renforce l'autocratie au lieu de l'assouplir et la justifie, en dernière instance, au nom du progrès ou de la raison, se donnant, dans la foulée, l'aura d'un "humanisme". La vision organique de Herder génère, elle, un humanisme radica­lement autre. Le peuple, la population, le paysannat, chez Herder, n'est pas le "cheptel" taillable et corvéable à merci d'une machine étatique, d'un appareil de pouvoir, qui justifie son fonctionnement par référence à la raison mécaniste. L'humanisme herdérien ne nie pas la vie intérieure, le devenir créatif, de cette population, de ce peuple. La substance populaire n'est pas déterminée, dans cette optique, par des ukases venus d'en-haut, promulgués par le pouvoir de l'autocrate ou d'une oligarchie détachée du gros de la population, mais se justifie d'en-bas, c'est-à-dire au départ des phénomènes de créativité littéraire ou scientifique, économique ou religieux que suscite la collectivité, le peuple. En un mot: c'est le Travail global du peuple qui justifie, doit ou devrait justifier, son existence politique ainsi que le mode de fonctionnement qui régirait cette même existence politique.


La tradition romantique procède donc d'un recentrement ontologique, écrit le grand spécialiste français du roman­tisme allemand, Georges Gusdorf. Ce recentrement, Thomasius l'avait déjà tenté, en réfutant toute détermination venue de l'extérieur. Le message démocratique et identitaire du romantisme postule ipso facto un système de repré­sentation impliquant, comme en Suisse, le référendum, la participation directe des citoyens à la défense de la Cité, l'autonomie locale (cantonale, en l'occurrence) et la neutralité armée. Ces pratiques politiques et administratives éliminent les despotismes autocratiques, oligarchiques et partitocratiques, tout en tarissant à la source les vélléités impérialistes, les visées hégémoniques et les chimères conquérantes. En outre, le recentrement ontologique ro­mantique, in vita civilis et à l'âge de l'économisme, signifie une protection du travail local, national (au sens de confédéral) contre les manipulations et les fluctuations des marchés extérieurs. La tradition romantique nous lègue un réflexe d'auto-défense serein et harmonieux qu'oublient, nient et boycottent les idéologies missionnaires et prosélytes qui régentent le monde d'aujourd'hui et colonisent les médias, dans l'espoir d'uniformiser le monde sous prétexte de l'humaniser selon les critères de l'humanisme mécanique. La soif d'alternative passe inmanquablement par un nouveau choix d'humanisme qui, à l'absence de sens observable à notre époque de désenchantement post-moderne (c'est-à-dire postérieur aux séductions actives de l'humanisme mécaniste), reconférera au monde une sura­bondance de sens. Au niveau des individus comme au niveau des individualités collectives que sont les peuples, l'existence n'a de sens que si elle permet le déploiement d'une spécificité ou, mieux, une participation active, con­crète et tangible à la geste humaine totale.

Robert Steuckers.



 

jeudi, 29 janvier 2009

The Reluctant Pluralism of J. G. Herder

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The Reluctant Pluralism of J. G. Herder

Damon Linker

According to Isaiah Berlin's influential interpretation, J. G. Herder (1744-1803) deserves to be recognized as the first cultural pluralist in Europe, and thus also as an important historical source of the pluralistic ideas espoused by increasing numbers of political theorists today. Herder's importance actually lies in the ambivalent stance he takes toward his own pluralistic insights. That is, convinced that it is impossible to adhere to a completely pluralistic view of the world, Herder sets out to combine pluralism and its theoretical opposite ("monism") into a novel theory of historical progress according to which history reaches its culmination in the realization of a purified form of Christianity. Contemporary pluralists have much to learn--both historically and theoretically--from Herder's confrontation with his pluralism.

Recent thinking about politics has taken a pluralistic turn. Following a path first marked out in the writings of the late Isaiah Berlin, a number of theorists have begun to base their political reflections on the assumption that "values are not universal"-- that "every human society, every people, indeed every age and civilization, possesses its own unique ideals, standards, way of living and thought and action." [1] In contrast to the "monism" typical of so much of Western thought--according to which all legitimate questions have one true answer, and those answers are knowable through reason and compatible with one another--the pluralist claims that "there are many objective ends, ultimate values, some incompatible with others, pursued by different societies at various times." [2] Although the claim that "ends [and] moral principles are many" has repeatedly led critics to suspect pluralists of relativism, pluralists themselves vehemently deny the charge. As Berlin writes, "the fact that the values of one c ulture may be incompatible with those of another...does not entail relativism of values, only the notion of a plurality of values not structured hierarchically." [3] That is, according to the pluralist, each value or end is "objective" for the particular culture that holds it, even if it is not recognized as such by the members of other cultures, each of which must be understood to have its own, presumably very different, objectively valid values or ends. [4] Thus refusing to impose supposedly artificial and arbitrary standards on the manifest diversity of ways of life (while simultaneously managing to avoid the pitfalls of relativism), pluralism seeks to respect and affirm the irreducible and ineradicable particularism characteristic of human social and political life.

Along with the recent Berlin-inspired turn toward pluralism in political theory has gone a growing awareness of the historical and philosophical importance of J. G. Herder, a thinker once dismissed as being of little more than historical interest, as a source of ideas that went on to influence the development of nineteenth-century nationalist thought. In a series of essays published over the last few decades, [5] Berlin has made the case that Herder is better understood as a thinker who consistently exhibited a pluralistic approach to understanding the world--an approach that anticipated and even exercised an indirect (but nonetheless decisive) influence on today's philosophical critics of monism. Like today's pluralists, Herder held that "there are no immutable, universal, eternal rules or criteria of judgment in terms of which different cultures and nations can be graded in some single order of excellence. ... Every society, every age, has its own cultural horizons. ... Every age, every society, differs in its goals and habits and values from every other." [6] It is for this reason that Berlin has passionately argued that it is high time Herder's importance be recognized, for "all regionalists, all defenders of the local against the universal, all champions of deeply rooted forms of life, both reactionary and progressive ... owe something, whether they know it or not, to the doctrines which Herder ... introduced into European thought." [7] It should therefore come as no surprise that a number of Berlin's most accomplished students and admirers have followed him in turning to Herder, both to learn more about an important historical precursor to their own positions, as well as to plumb the theoretical depths of pluralism with a veritable pioneer as their guide. [8]

But is Herder the right man to be leading such an expedition? It will be the contention of this article that a careful examination of Herder's works reveals a thinker far more ambivalent toward pluralism than the erudite essays of Berlin and his admirers lead one to believe. It is not that Herder is the rabid nationalist he was once dismissed as being; on the contrary, Berlin was right to find the seeds of a genuinely humane and tolerant pluralism in Herder's writings. But that is far from being the end of the story. Read in the context of the works in which they are found, Herder's most pluralistic pronouncements can be seen to be inextricably tied to a larger project: namely, the construction of a teleological philosophy of world history whose aim is to mediate between the extremes of complete pluralistic diversity and homogeneous monism. [9] Moreover, when we refrain from beginning our study of Herder with the assumption that his pluralism is the "wheat" that can and should be separated from the "chaff" th at surrounds it (to employ one of Berlin's favorite expressions), we discover a thinker who viewed this attempt at mediation as a necessary supplement to his pluralistic insights, without which he believed they would be far more likely to become a source of psychological torment and theoretical confusion than a guarantor of tolerance for diversity or an opportunity for Western man to liberate himself from monistic prejudices.

Why did Herder come to this conclusion? What assumptions about human nature led him to it? How did his philosophy of history propose to accomplish the mediation between pluralism and monism? What might Herder's views on these matters have to teach today's pluralists? This article will seek to answer these and related questions. In doing so, it will make contributions to the history of political theory as well as to contemporary theoretical debates. It will contribute to the former by painting a more accurate view of Herder, and thus the development of pluralistic ideas in the West, than can be found in Berlin's influential writings. As for the latter, by examining Herder's reasons for seeking to unify pluralism and monism as well as the means whereby he tried to attain this goal, this article will hopefully prepare the way for a widening of the terms of debate among and about today's pluralists. [10]

 

Herder's Pluralism and Its Discontents

Reading selected passages of Herder's works in isolation can certainly lead one to conclude that he was an unambiguous pluralist writing 200 years before his time. To begin with, Herder was indeed concerned that much of the scholarship and theoretical speculation of his century had engaged in over-generalization-- that a discursive, logical approach to studying human phenomena Had prevented historians and philosophers from understanding and grasping its remarkable diversity and variety. [11] Herder frequently expressed his deep-seated conviction that human beings can only find their moral and intellecutal orientation within the "whole" (Ganze), the closed "horizon" (Horizont) of particular cultures, not in the cosmos or in principles generated by a universal faculty of reason. [12] Passages abound in which Herder writes of each "nation" or "people" in history having its own standard of goodness and perfection. [13] As he writes in a characteristic statement, "Every nation has its center of happiness within it self, just as every shpere has its own center of gravity!" [14] According to Herder, each culture is a kind of self-contained, monistic whole unto itself.

In making these claims, Herder does indeed seem to hold to the central tenet of pluralism-namely, that there are many objectively valid ends and ways of life that men can pursue, no one of which can be ranked as intrinsically better or worse for mankind as such. Each is an "expression" ([ddot{A}}Berung) of a people living a particular time and place, and each springs from its whole "form of life" (Lebensart). [15] When not invoking parallels between cultures and the family or a plant, [16] Herder uses medieval images of the "ship of state" to describe it, [17] or claims that the "harmony" and "nobility" of a "field army" is the "archetype of human society," since both of these images capture the closed and unified purposiveness that is characteristic of human cultural existence. [18] Hence, what Herder writes about literary figures and political actors is true for all human beings and practices: "Shakespeare was no Sophocles, Milton no Homer, Bolingbroke no Pericles: yet they were in their kind and in their s ituation what those were in theirs." [19] We need not--and moreover, cannot--rank them according to some standard that is valid in itself for all times and places; each cultural expression can be said to be good or bad, but only within the context in which it arose.

But things are not so simple. For when these and similar passages are read in the context of the works in which they were written, one discovers that, in addition to holding that each culture has its own standard of goodness within itself, Herder also maintains that each of these cultures must be understood as contributing to the realization of a higher good that comes to light in the whole of world history. In other words, Herder views the plurality of norms, practices, and beliefs in human history as constituting a larger, purposive whole, with each of those norms, practices, and beliefs serving as a means to realizing a divinely ordained end. Why did Herder maintain this view? Because he was convinced that a complete pluralism teaches a truth about mankind and the world that is incompatible with the necessary conditions of human happiness as he understands them. [20] For Herder, man can only experience happiness when he understands himself to exist within a unified, monistic whole, a cultural constellatio n of norms, practices, and beliefs in which he can find meaning and purpose. [21] Moreover, in order to confer that meaning and purpose on the individual, those norms, practices and beliefs must be understood by the individual to be true or accurate reflections of the world as it is in itself. Herder's pluralism describes a world in which this is the natural state of affairs, with each particular culture happily believing in the truth of its own meaningful and purposive norms, practices, and beliefs. But there is a problem with this way of conceiving of the human situation, for it creates a seemingly unbridgeable gap between the way Herder understands the meaningful and purposive experience of particular cultures and the way meaning and purpose are experienced by actual members of particular cultures. Although, according to Herder's pluralism, someone who lives his life entirely within his culture's closed horizon will experience his norms, practices, and beliefs to be true-in-themselves (and thus capable of making it possible for him to experience happiness), viewed from the external perspective occupied by Herder himself, any given culture's norms, practices, and beliefs appear to be merely relatively true or true-for-them; they are an expression of its overall form-of-life at a particular age of its development in history, not a reflection of the world as it is in itself.

This tension can be illustrated with the following example. As Herder describes it, a member of a given culture would not understand his gods to be merely "his," equal in ontological status to the gods of a neighboring nation. On the contrary, he would understand his gods to be the real or true gods and those of his neighbor to be untrue or false ones--and, according to Herder, it is this conviction that makes it possible for this hypothetical man to experience happiness. However, in the very act of recognizing this to be the case for all members of particular cultures, Herder manages to alienate himself from believing in the truth of any culture's norms, practices, and beliefs, including his own; for in contrast to the experience of our hypothetical member of a given culture, the pluralist understands his own culture's stories about the gods to be merely "his." Hence, for Herder, pluralism implies relativism, if not logically, then psychologically. And this is no mere academic point for Herder, since it mea ns nothing less than that the truth of pluralism is an obstacle in the way of the satisfaction of the most profound human longing.

But Herder does not simply maintain that adhering to a pure form of pluralism would make it impossible for one who holds it to believe in the simple truth of any particular culture's norms, practices, and beliefs. He also thinks that it would imply a positive teaching about man and the world that differs radically from what that very pluralism teaches about the monistic content of every culture: the most profound lesson of pluralism, according to Herder, is that human life is fundamentally grounded in finitude and arbitrariness. Although all cultures in human history have viewed themselves as static and permanent entities oriented toward fixed ends, pluralism teaches that the deepest truth of things is that nothing is eternal. As Herder writes, when the history of the world is viewed from a pluralistic standpoint, we see that,

no people remained or could have remained as it was for a length of time; that everything--like every art and science, and what in the world does not?--has its period of growth, flourishing, and decline; that each of these changes only lasted precisely as long as could have been given to them on the wheel of human fate; and that, finally, no two moments in the world are the same. [22]

For Herder, a truly consistent pluralism would have the effect of showing that each culture lacks a larger whole to bestow meaning and purpose upon it--something that, if true, would undermine the necessary conditions of human happiness. [23]

Some of the most haunting passages in Herder's corpus can be found at those places in which he confronts what he believes to be the devastating psychological implications of what his own pluralistic insights show him about man and the world. According to Herder, each human life, which seems so laden with significance when viewed within the context of a particular culture, appears to be a mere "comma" or "dash" in the "book of the world" when it is seen from the perspective of the pure pluralist. [24] From this standpoint, it appears that "the whole world is an abyss--an abyss in which I stand entirely lost!" [25] For the pluralist, each man is nothing more than an "insect perched on a clod of earth," who cannot help but feel that "I am nothing." [26] In these and similar passages, all of the meaning and purpose that prevails within the horizon of particular cultures has vanished. In its place, Herder invokes metaphors of desolation. First man is pictured to be wandering in a "desert," searching for an "ideal istic spring" that will quench his thirst by showing him that a "plan" (Plan) exists beneath the superficial "chaos" (Verwirrung) that reigns throughout the "ruins of history" (tr[ddot{u}]mmervollen Geschichte). [27] Next, Herder adopts a different image, describing man as a creature lost on a vast and stormy sea, shrouded in fog and deceived by illusory lights that falsely lead him to believe he is close to the safety of the shoreline. [28] At times, Herder even shows signs of contempt for people who live entirely within the closed horizon of a particular culture, "as if their anthill were the universe." [29] Apparently he resents the fact that they never confront the "melancholy prospect" of having "to see in the revolutions of the earth nothing but ruins upon ruins, eternal beginnings without end, upheavals of fate without any lasting purpose." [30]

One could say that Herder thinks that, experienced in and of itself, pluralism leads to a psychological abyss. Convinced that the happiness of mankind depends upon him feeling himself to exist within precisely the kind of extracultural whole that pluralism emphatically denies (at least at the level of particular cultures), Herder sets out to develop a philosophy of history that would show that each particular culture exists as a part in larger meaningful and purposive whole while still recognizing the distinct individuality of each of those parts. Herder was convinced that only by combining his pluralistic insights with a modified form of monism could the apparent arbitrariness of history be redeemed and happiness be possible for the pluralist, because only the existence of such a trans-cultural whole could show that the events of history take place for a reason--as a means to fulfilling a higher purpose. [31]

 

Humanity's Prophet: Multiplicity in Unity

In Herder's first attempt to write a philosophy of history that would mediate between pluralism and monism (the Yet Another Philosophy of History of the Education of the Human Race of 1774 (Auch eine Philosophie der Geschichte zur Bildung der Menschheit)), he fastened on two possible principles of unity in the world as it exists in itself, outside of any particular culture: God's providence and the historical process independent of God's will. With regard to the issue of providence, any theory Herder proposed would have to be different than the traditional theological ones found in the writings of such authors as Eusebius and Bossuet: it could not be tied to any particular culture, as had all others in history (including Christian accounts). For despite the fact that each culture in history claims that its notion of providence is true-in-itself, Herder's pluralism shows that every one of those notions is actually an expression of culturally rooted norms, practices, and beliefs, rather than genuine reflection s of the world as it is in itself. One indication of the culturally relative status of all prior providential accounts of the world is the fact that the gods of each particular culture always seem to favor that culture over others and often at the expense of others. An account of a transcultural whole modeled on such an arrangement would thus be one characterized by partiality rather than genuine holism. [32] Hence any notion of providence invoked by Herder would have to be radically reconceived--it would have to be thoroughly compatible with the universal and egalitarian implications of his pluralism. That is, it would somehow have to show that the good of each particular community is compatible with the good of every other one, and thus also with the good of the whole. [33]

Another model of transcultural unity--one that at first sight seems to avoid the problems of providential favoritism--was proposed by some representatives of the Enlightenment: a vision of moral and material progress over time. But Herder judged this kind of account to be thoroughly unacceptable for his own project, since, like traditional notions of providence, it favored some communities in history over others and thus showed that it was meant to justify and defend the norms, practices, and beliefs of particular cultures--specifically, those of modern, enlightened Europe. Moreover, if this narrative of progress were true, it would affirm that an underlying arbitrariness and injustice reigns in human history, since the possibility of individuals attaining happiness would be contingent upon when and where they happened to have been born; for example, according to the progressive historiography favored by some in Herder's time, [34] an inhabitant of eighteenth-century Paris would be more capable of being happ y than someone who found himself in the so-called dark ages of medieval Europe, let alone in less "civilized" regions of the world. But this was unacceptable to Herder. In contrast, then, any vision of progress would have to be compatible with the view that Herder consistently expressed throughout his career: each culture in history has to have its own standard of happiness within itself--it has to be an end in itself, in addition to being a means to a higher end. Only in this way could the world outside of any particular culture be thought of as a whole that balanced and synthesized monistic and pluralistic elements. [35] Herder's entire philosophy of history must be understood as an extraordinarily ambitious attempt to show that the world is, in fact, such a whole of multiplicity in unity. [36]

In the 1774 Philosophy of History, Herder moved in the direction of developing a theory of progress that met this demand by appealing to an analogy of organic growth [37]--the idea that the history of the human race as a whole is analogous to the life of an individual human being. This theory went a significant way toward overcoming the problems with more straightforward theories of progress discussed above, but Herder never worked out its details or their implications in a philosophically satisfying way in this early work. However, by the time Herder came to write his mature philosophy of history in the Outlines for a Philosophy of History of the Human Race of 1784-91 (Ideen zur Philosophie der Geschichte der Menschheit), he had developed a highly unusual and complex theory of progressive providentialism. An examination of how the "fingers of divinity" operate in human history, the Outlines seeks to show that it is possible to "wander through the labyrinth of history to perceive everywhere harmonious, divin e order." [38] Herder believes that detecting divine meaning and purpose in history will show us that even in the those most extreme cases in which "the history of miscarriages, wastes, and monstrosities" leads us to believe that "the laws of nature seem to be upset through alien causes," the apparent disturbance can be explained. For, according to Herder, "even in the seemingly greatest chaos" one can find "constant nature, that is to say, immutable laws of a highest necessity, goodness, and wisdom" that are oriented toward the realization of a divinely ordained end in the historical process as a whole. Herder comes to describe this end as "Humanity" [39] and to see it as the task of a "genuine philosophy of man" to detect and trace its development as it is progressively realized over time in the cultural norms, practices, and beliefs that prevail within history. [40]

As did his 1774 Philosophy of History, Herder's mature theory of human historical development begins with his attempt to identify an aspect of human existence that is common to each and every particular community and that can also provide a sign or indication of the end toward which history as a whole can be said to be developing. How does our Humanity manifest itself in history, according to Herder? What is the concrete norm, practice, or belief in which the end of history can be seen? Herder claims to find such a sign in man's practice of and belief in religion--not in the norms, practices, and beliefs of this or that particular religion, but rather in what he takes to be the transhistorical essence of religion as such. [41]

Unlike such modern critics of religion as Hobbes and Hume, Herder asserts that religion is as coeval with man as language and reason, and that it comes about as a means both of explaining events within the world and of giving them meaning and purpose: it is "the instructor of man, his comforter and guide through the dark and dangerous mazes of life." [42] One could say that, for Herder, God made man in such a way that he would develop diverse religious norms, practices, and beliefs through the use of his language and reason--and that, in doing so, he would contribute to the formation of a "Godlike Humanity" (Gott[ddot{a}]hnliche Humanit[ddot{u}]t) that will eventually come to fruition at the end of the historical process. [43] As he writes, "religion, considered merely as an exercise of the understanding, is the highest Humanity, the most sublime blossom of the human mind." [44]

Now, Herder does not mean by this statement that man's end is the simple and continuing development of the diverse religious norms, practices, and beliefs that prevail within particular communities in history. But neither does he mean to suggest that the members of particular communities must explicitly reject their own particularistic religious views; as Berlin has ably shown, Herder never relented in his scorn for the kind of cosmopolitanism that tries to create a cultureless citizen of the world. [45] Instead, Herder held that those particularistic religious norms, practices, and beliefs must be given a new interpretation according to which the mark of their divinity is contained, not primarily within themselves, but rather in their contribution to the formation of the new, trans-cultural religion of Humanity.

This new humanitarian religion would be characterized by peace, love, and mutual sympathy among members of different cultures. [46] But once again, this religion would neither require nor assume an abandonment of particularistic norms, practices, and beliefs on the part of members of those cultures. For want of a better term, they would be (to invoke a Hegelian concept) "sublated" (aufgehoben)--that is, the meaning and purposiveness contained within each community's norms, practices, and beliefs would be canceled, transcended, and yet also preserved in the new religion of Humanity. So, for example, the world that Herder prophesies at the end of history would be one in which Muslims, Jews, and Buddhists from nations throughout the world simultaneously affirm their own religious standpoints and, at the same time, love, respect, and sympathize with those of the others in the knowledge that, despite (or rather, because of) the differences between them, each of their communities is a part in a larger whole of Hum anity which is comprised of them all. In other words, the religion of humanity that Herder claims lies at the end of human historical-cultural development is one in which the greatest degree of diversity or difference is combined with the greatest degree of unity. It would be a form of monism that has learned the lesson of pluralism.

But has there ever been anything like such a religion? Is there any model, any indication of what one might look like? Or does Herder understand his prophecy to be entirely without precedent in the annals of human history? There is certainly ample reason to think that it would have to be entirely novel, for all prior religions have been radically exclusionary in character. Not only have they been hostile to outsiders, but they have persecuted dissenters within their own boundaries. That is, every historical religion has upheld particular dogmas and punished those within its ranks who strayed from its official teaching. Hence, to the extent that Herder's new religion resembles actually existing religions, it will tend toward homogeneity (i.e., it will seek actively to minimize particularistic differences within itself as much as possible), and thus not be based on the love and mutual respect of cultural difference as he claims it must be. But on the other hand, if Herder's humanitarian religion does allow for genuine differences, it would seem to have little in common with monistic religion as it has historically been understood; it would thus be far from clear how it could provide the meaning and purpose he thinks it must in order to make it possible for pluralistic man to be happy.

[The Review of Politics, Spring 2000 v62 i2 p268]

lundi, 26 janvier 2009

Herder's Critique of the Enlightenment: Cultural Community versus Cosmopolitan Rationalism

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Herder's Critique of the Enlightenment: Cultural Community versus Cosmopolitan Rationalism

Brian J. Whitton

Recent continental social theory has seen the emergence of a body of literature which represents a radical challenge to the primary concerns and assumptions of traditional Western social and political thought. While this challenge involves a number of aspects and embraces a heterogeneous group of thinkers, one theme common to them all is their opposition to the attempts of traditional scientific, social, and political disciplines to construct general theoretical programs as aguides to the practical actualization of a rational order within human society, however defined. What is most objectionable about this general project for such thinkers, included among them figures like Foucault, Lyotard and Derrida, is its implicit assumption of the possibility of establishing a hierarchy in the forms of knowledge - an ordering of discourses in accordance with theri relative approximation to the objetive principles of an ultimate discourse of reason or truth. Their special sensivity to language, and their shared belief in the infinite creative potencial of human linguistic activity, led these thinkers to arrack such "totalizing" rationalist discourses as legitimating forms of exclusionary practices which repress the full diversity of discursive interpretations of the real implicit in human linguistic activity in favor of one dominant, repressive discourse. Far from being unique to the postmodernist writters of the late twentieth century, however, this type of relativistic critique of totalizing discourses has some notable antecedents in modern social thought. The purpose of this article is to examine one such precursor of this form of critique presented in the writtings of the eighteenth century theorist, Johann Gottfried von Herder.

In his theory of history Herder presents a radical critique of the rationalist discourse of cosmopolitan human development advanced by the Enlightenment thinkers of his day, one wich is predicated upon a profound sentitivity to the importance of language in the process of historical human development. In the first part of this article I will outline Herder's critique of the Enlightenment perspective and the main features of the particularistic conception of human cultural community which he develops in opposition to it. In so doing I will suggest some interesting parallels wich can be drawn between Herder's relativistic conception of cultural community and the ideas on language abd human cultural development presented in the recent writtings of the postmodernist, Francois Lyotard. I then proceed to advance certain criticisms of the relativistic vision of human cultural development and community advanced in Herder's thought.

I

Before considering Herder's thought in detail, I will briefly outline some of the main themes of Lyotard's recent book, The Postmodern Condition. This will provide the basis for a comparison of the theories of Herder and Lyotard later in the paper. Central to an understanding of Lyotard's work is his view of language games as the defining aspect of any social system. He argues that:

"language games are the minimun relation required for society to exist; even before he is born . . . the human child is already positioned as the referent in the story recounted by those around him, in relation to which he will inveitably char his course . . . the question of social bond is itself a language game."

According to Lyotard each culture is constituted by such language games and it is the knowledge forms to which these give rise which govern the life of the culture. In his work he distinguishes two major knowledge forms arising from these language games in the course of human history. These are, first, the traditional popular narrative form and, second, the modern scientific form. Narrative knowledges, identified as synonymous with traditional tribal cultures, are distinguished by their inmmediacy with the life of the culture and the spontaneous manner by which they legitimate its institutions of authority. As the determinant of criteria of social competence and how those criteria are applied, of "what has the right to be said and done in the culture," such narrative knowledge forms are integral to the culture, "legitimated by the simple fact that they do what they do." Popular narrative kwoledge, Lyotard notes, "does not give priority to the question of its own legitimation. . . . It certifies itself in the pragmatics of its own transmission without havin recourse to argumentation and proof."

This traditional knowledge form is in direct contrast to the scientific form of modern Western culture. What sets the latter apart first and foremost according to Lyotard is its claim to objective legitimation, its supposed capacity to establish the truth of its propositions through the objetive processes of verification and falsification. In accordance with this claim to objective legitimation, it is only those discourses capable of objective validation which are appropriated into the corpus of acceptable knowledge withon the modern cultural order. Here Lyotard discerns the inherent hegemonic tendency of the scientific knowledge form. He notes that "scientific knowledge requires that one language game, denotation, be retained and all other excluded. [For this knowledge form] a statement's truth-value is the criterion determining its acceptability. This principle renders problematic the status of the traditional narrative form of knowledge within modern society.

"The scientist questions the validity of narrative statements and concludes that they are never subject to argumentation or proof. He classifies them as belonging to a different mentality: savage, primitive, underdeveloped, backward. . . .At best, attempts are made to throw some rays of light into this obscurantism, to civilize, educate, develop."

According to Lyotard, where the traditional knowledge form of popular narrative lends itself to the expression of a diversity of narrative discourses or different narrative understandings of the world, the modern scientific form is, by its very nature,  exclusionary of discursive diversity.

It is at this point that Lyotard notes the paradoxical nature of the scientific knowledge form upon which Western culture is predicated. For the latter, he argues, is itself dependet upon a form of narrative for its ultimate legitimacy.

"Scientific knowledge cannot know and make know that it is true knowledge without resorting to the other, narrative kind of knowledge, which from its point of view is no knowledge at all. Without such recourse it would be in the position of presupposing its own validity . . . [of] proceeding on prejudice."

The main forms which this recourse to narrative assumes is the appeal to the meta-narrative - the legitimating story of the subject wich unforlds itself in the process of history to discover its being in the knowledge of science. Only through the invocation of this epic story of the self-realizing subject, in its dual forms of the unfolding of the absolute idea (Hegel) and the emancipation of the concrete subject of humanity (the Enlightenment), has the culturally limited language game of modern science succeeded in sustaining its claim to superiority over other knowledge forms in modern society.

However, for Lyotard the advend of the present postmodern condition spells the death of this legitimating metanarrative within the represive dominance of the scientific knowledge form. The processes of delegitimation associated with the emerging postmodern era have, he maintains, seen the decline of the unifying power of the grand narrative and the violence it has visited upon the plurarity of language games. In place of the old "objetivizing" pragmatics of modern science, Lyotard notes the beginnins of the development of a new social pragmatics within postmodern society containing the possibility for a new relativistic idea and practice of justice -- one bases upon a "recognition of the hereromorphous nature of language games . . . [and] a renunciation of terror, which assumes that they are isomorphic and tries to make them so." 

 

II

The broad themes elaborated above which preoccupy the thought of Lyotard bear a marked similarity to the idea implicit in Herder's philosophy of history. The emphasis upon the essentially pluralistic nature of cultural forms of knowledge, the critique of the universal narrative as the legitimating form a particular, hegemonic cultural discourse which obstructs the free expression of alternative cultural discourses -- these are central features of the particularistic conception of cultural development which Herder elaborates within the broader context of his critical encounter with the Enlightenment conception of history dominant in his day. In turning now to examine Herder's thought, I shall first provide a brief account of the Enlightenment conception of history which forms the focus of Herder's criticisms. I then proceed to outline Herder's theory of the historical development of the Volk or nation as it emerges from his critique of the rationalist, cosmopolitan perspective of the philosophes. Having done this I shall be in a position to indicate the similarities in the work of Herder and Lyotard and to offer some criticisms of the relativistic conception of historical human development which Herder advances as the basic alternative to the Enlightenment perspective.

In the writings of some prominent thinkers of the French Enlightenment, we find articulared a highly optimistic view of human history as the linear progression of humanity towards a condition of inevitable perfectibility. For thinkers like Condorcet and Turgot, history is understood as the story of the progressive advancement of humanity towards an enlightened condition of human association ultimately embracing the whole of humankind, based upon the principles of reason. Of particular importance for our concerns are those more basic assumptions upon which this cosmopolitan conception of history rested. Underlying this optimistic view of human history is the distinctive rationalist conception of human nature characterizing the philosophy of the Enlightenment. According to this view, human beings have access to certain timeless, immutable principles or laws intrinsic to their nature. Moreover, as Becker notes, it was thought that, by the use of their natural reason, these principles could be grasped by people and applied to human affairs enabling them to "bring ther ideas and conduct and hence the institutions by which they lived, into harmony with the universal, natural order." On this view, then, human history involved the progressive apprehension of these constant and universal principles of human nature previously obscured by superstition and custom by which the affairs of all people may be rationally organized.

A logical corollary of this rationalist conception of history as the inexorable progression of humandkind to a cosmopolitan condition of rational perfectibility was the tendency of Enlightenment philosophers to demean or deride those cultures, past and present, which lacked consciousness of the principles of the enlightened reason. Such cultures tended to be seen as lesser stages in the development towards this enlightened perfect end. Hence, in the view of Condorcet, it was the good fortune of the barbarous, unenlightened cultures of his day that they could acquire these rational principles of Enlightenment directly from the enlightened culture of European society. "The progress of these peoples [he notes] is likely to be more rapid and certain because they can receive from us . . . these simple truths and infallible methods which we have acquired only after long error."

In elaborating this theory of history as the evolution of the Volk community, Herder presents a thoroughgoing critique of the basic assumptions of this Enlightenment conception of history. At the heart of this critique is Herder's opposition to the way this rationalist perspective abstracts historical human development from all connection with the contingent elements fo human historical linguistic and cultural practice. Against the static, ahistorical concepction of human nature espoused by the philosophy of the Enlightenment, Herder opposes a radical new development account of human nature and reason. Here the notion of human nature as something existing apriori, independient of contigent historical circumstances, is rejected. Human nature, Herder argues, is "not the vessell of an absolute, unchanging happiness as the defined by the philosophers; everywhere it attracts the measure of happiness of which it is capable; it is a pliant clay which assumes a different shape under different . . . circumstances." Human nature is an ever-changing, constantly developing substance altering in response to diverse historical needs and circumstances.

In terms of this new, dinamic historical conception of human development, Herder stresses the historical specificity of the human condition. Humans must develop through struggle within their natural and social environment. Among the influences affecting their development, Herder identifies climate, or their geographical location, which exercises a definite influence on their conscious development. "The spirit has varied in direct proportion to climate and its effects."

But by far the most crucial element for Herder in this dynamic process of human historical transformation is language. He notes that "the whole structure of man's humanity is connected by a spiritual genesis," a connection which takes the form of the elaboration of the uniquely human capacity for speech. As an attribute specific to human beings, language is seen by Herder as the central expression of a uniquely human, reflective consciousness. In developing their language, individuals give shape to their inner conscious nature, formulating their ideas and preconceptions through reflection on their experiences of the external world. Hence

"the more experience man gains, the more he learns to know diverse things from diverse aspects, he richer grow his language. The more he repeats what he has learnt and the words he has gained in doing so, the more permanent and fluent his language becomes. The more the differentiates and classifies the more it becomes organizes."

According to Herder, the process of conscious linguistic development outlined here, the elaboration of the unique human power of conscious discourse, is conceivable only as a social process. The conscious development of the individual is part and parcel of his inclusion in a broader linguistic community, and inherited stream of words and images which he must accept on trust. The ideational form of language constitutes the natural force integrating people within a dynamic historical community of cultural development which Herder identifies as the Volk o nation. Moreover, rather than a substantive stucture standing over and above the individual, the Volk community forms a spiritual unity whose historical evolution  involves the conscious integration of the individual and the social in the progresive expression of a unique national, cultural consciousness embodied in the linguistic products of the nation.

What are the specific features of this conception of cultural community which Herder develops in opposition to the Enlightenment theory of cosmopolitanism and, in particular, what are the specific processes by which the cultural personality of the Volk community is historically actualized? Here Herder stress social education, understood in broad terms as the molding process of socialization and tradition. In the course of assimilating their language during everyday social activity, individuals incorporate their cultural heritage. They are brought into connection with the history, poetry, and religion of the nation and the social wisdom embodied in these cultural forms. The famliy unit assumes a vital role in this educational process. Acording to Herder, paternal love makes possible an education which is social and continuous, acting as a major instrument for the transmission of the values and prejudicesof succesive generations. The parent, herder argues, is the natural instructor of the child. "Each individual is son or daughter. . . . He or she receives from the earliest moments of life part of the cultural treasures of ancestral heritage. . . [which he or she] in turn passes on." Through parental instruction the individual is brought into communion with the "ways of feeling and thinking of his progenitors. . . . He repeats, with every newly acquired word, not only sounds but certain ways of looking at the world."

By virtue of this process of social education borne by family, teachers, and friends, there is established through the successive generations of the Vold community a "chain of unity and continuity in which each link . . . [receives and transmits] the cultural heritage of the Volk [in a process which entails] language and its continuous growth". The national language, as the medium of the transmission of the cultural spirit of the Volk, connects its members in a organic community embracing the ideas, wisdom, and values of past, present, and future generations. Moreover, this historical transmission of the cultural heritage of the Volk community involves a definite dialectical dimension in its operation. Herder notes that parents "never teach their children language without the concurrent inventive activity of the child." The process of cultural education is a complex one wherein each generation, in receiving the prejudices of the Volk language, subjects them to reappraisal and re-evalutation in accordance with its own historical needs and circumstances. "The generations renew themselves in a continuous flux . . . . In spite of the linear, prescriptive tendencies of tradition, each son continues to write in his own particular way." It is through this historical transformation of the Volk language that traditional conceptions and beliefs are continually synthesized with those of the new generations. "The opposites assist and promote one another . . . [and] by their reconciliation there emerges a new world." Thus the national language forms the living, psycological medium within which the national culture is perpetuated, transformed, and reiched over time. As such it constitutes the central agency in the historical extension of the creative powers of humans as conscious, self-constitutive members of the Volk.  

There are a number of points arising from this highly original account of human cultural development which it is important to note here. The first of these is Herder's emphasis upon the natural, internally generated nature of this dynamic condition of cultural community. The historical transmission of the national culture is both genetic and organic in nature, "genetic by virtue of the manner in which the transmission takes place [that is, through paternal instruction] and organic by virtue of the [dialectical] manner in which that which is being transmitted is assimilated and applied." The primary agents of national development (notably the national languague and the powers of the synthesizing mind) represent for Herder naturally evolving forces developing within  abd through the members of the Volk as opposed to what he considers the artificial, externally imposed economic and political forces operating on and uniting people from without. Indeed it is a basic tenet of Herder's thought that human communities, if they are to be effective and lasting in nature, must be predicated upon these natural, immediate cultural forces which link "minds through ideas, hearts through inclinations and impulses . . . and generations through examples, modes of living and education."

A second major aspecto of Herder's theory flowing from its naturalistic cultural conception of human community is his stress upon the essential plurality of human values and their relativity to specific nationa, historical communities. For Herder each distinct nation contains within itself ots own perfection independent of comparation with that of other cultures, a standard defined in accordance with its specific cultural traditions and values. Further, the image of what is morally right or wrong varies frpm cultura to culture, making all comparison between different cultures unprofitable. In his view:

"when the inner sense of happiness has altered, this or that attitude has changed; when the external circumstances . . . fashion and fortify this new sentiment, who can then compare the different forms of satisfaction perceived by different senses in different worlds. . . .Each nation has its own centre of happiness within itself, just as every sphere has its own centre gravity."

To engage in the critical judgment of past cultures in terms of the ideals and values of one's own time, as the Enlightenment historians tended to do, is, on this view, fundamentally problematic. According to Herder each historical culture represents a distinctive and unique manifestation of that which is specifically human. "From the shapeless rocks with which the Chinese ornaments his garden, to the . . .  ideal beauty of Greece, the plan of a reflective human understanding is everywhere observable."

In accordance with this pluralistic, culture-relative conception of human values, Herder stresses the necessity for any adequate understanding of the diverse cultures of human history to grasp the distinctive assumptions and prejudices implicit in the cultural consciousness of any given national community. However, such knowledge is not easily acquired, as Herder was well aware. Historical understanding of this type required the cultivation of one's capacity for sympathetic identification with the culture under consideration. Individuals must

"enter into the spirit of a nation before . . . [they] can share even one of its thoughts or deeds. . . . [They] must penetrate deeply into this century, this reigion, this entire history and feel it inside  . . . [themselves] - then only will . . . [they] be in a position to understand."

Only by entering into the life of a culture, its beliefs and prejudices expressed in its cultural products, Herder maintained, can its intrinsic value and historical significance be grasped.

Lacking this capacity for sympathetic identification with the cultural consciousness of civilizations other than their own, the philosophes are criticized for their fundamental insensitivity to these crucial elements of human cultural community. Instead they are seen to engage in a mechanized form of thinking which abstracts human development and community form its life blood: the sensuous world of human cultural diversity. For Herder the inevitable consequence of this simplistic historical perspective is the creation of an abstract cosmopolitanism, a "paper culture" predicated upon an idealized conception of eighteenth-century European cultural life. He notes how

"the general philosophical, philanthropic tone of our century wishes to extend our own ideal of virtue and happiness to each distant nation, to even the remotest age of history. . . . [It] has taken words for works, enlightenment for happiness, greater sophistication for virtue and, in this way, invented the fiction of the general amelioration of the world."

This condition, the philosophes believed, would ultimately embrace all of mankind with the progress of enlightenment.

From Herder's standpoint, however, the actualization of a general philosophy of this kind, with its "rational axioms of human behaviour, . . .   commonplaces about what is right and good; views of all times and all peoples for all times and all peoples," could only have disastrous consequences. Such a cosmopolitan condition, he believed, could take no other form than subjection of the great diversity of national cultures to the limited cultural standards of European society. Herder is particulary sensitive to the way in which such abstract, rationalist principles as equality, liberty, and fraternity may be invoked to justify a condition of manifest domination of one culture over the many. "The garment of generalities which characterize our [enlightened] philosophy can conceal oppressions and infringements of the . . . freedom of men and countries, of citizens and peoples." A cosmopolitan world of the type proposed by the philosophes would, Herder believed, be a world where all spontaneous, creative drives of the different cultural communities would be stifled in favor of an externally imposed European cultural ideal and human life reduced to a dull, routine existence. Within this artificial condition where the internal cultural ties binding people in a dynamic creative unity are suppressed, the natural basis of conscious human creativity would cease to exit and all meaningful human development be excluded. For Herder, a cosmopolitan society would be no more than a patched up fragile structure wholly devoid of life whose component parts would be conected through mechanical contrivances instead of bonds of human sentiment.

Herder's own particularistic conception of a cultural community as we have presented it, with its emphasis upon the naturally generated character of the Volk as an organic condition of cultural beloging, represents his humanistic alternative to the "inhuman" implications perceived as implict in the abstract cosmopolitan perspective. In opposition to the philosophes' belief in the infinite perfectibility of human nature Herder asserts the naturally limited potential of human beings for meaningful associations and creative interaction.

"Neither our head nor our heart is formed for an infinitely increasing store of thougths and feelings. . . .That mind which embraces much within its sphere of activity as part of itself achieves happiness whilst one which over-extends its feelings is bound to dissipate them into mere words and reaps nothing by misery."

Only when people possess this feeling of oneness with the national group do they feel at ease and free to develop their creative powers. Once they lose this sense of communion with the Volk community, human beings become alienated and are no longer able to act in an unself-conscious creative manner. Hence, to attempt to extend the realms of human socialization beyond the organic, cultural unity of the Volk is to overstep the natural limits constraining the development of conscious affinity among people.

This conception of the natural human condition as one of conscious integration in the cultural life of the Volk, o nation, was to form an important influence upon the later development of the political ideology of nationalism through its incorporation in the theorical writings of such later German thinkers as Fitche, Jahn and Arndt. However, as it is outlined in Herder's theory of cultural community this notion of cultural nationality is an essentially tolerant one, free of the aggressive tendencies of later political versions. In effect Herder's theory of cultural nationality is, first and foremost, a theory of freedom of all national groups to express their cultural identities to the fullest extent. Against the Enlightenment preocupation with the prospective emergence of a unified, integrated world predicated upon a single set of universal laws, Herder look a world of infinite cultural diversity and his writings represent a celebration of cultural divesity as the source of all that is rich and progressive in human life.

Viewed from this perspective Herder's acount of the historical development of the Volk community forms part of a larger vision within his thought involving a process of spiritual evolution which embraces humankind as a whole. The essence of his larger dimension of Herder's work is captured in his notion of Humanität --- the common human essence manifest iin the cultural forms of each national community. Herder observes that, while human cultural existence may be modified in a thousand different ways, "within itself a unique variation on the theme of humanity and corresponding tendency to develop this variant to its fullest extent. Thus, despite the vast panorama of cultural change and diversity in human history, Herder contends that the divine mind has everywere combined the greatest possible multiplicity with unity. Humanität has been dispersed all over the earth. 

"Since one form of mankind and one region could no encompass it, it has been distributed in a thousand forms, changing shape like an eternal Proteus throughout the continents and centuries. And even it it does no strive towards the greater hapiness of the individual. . . nonetheless a plan of progresive endeavour becomes apparent."

The progresive unfolding of this common human essence would appear to involve a seemingly unending process as, with each new national community, there emerge new and unique expressions of Humanität. Ultimately, then, within Herder's relativistic cultural perspective the historical elaboration of the diverse cultural forms constitutes and endless drama, "God's epic throught all the centuries . . . a fable with a thousand variations full of meaning."

 

III

The preceding analisis brings out clearly the nature of Herder's arguments against the universalistic claims and assumptions of the Enlightement conception of history, rooted as they are in a profound belief in the intrinsic value of human cultural diversity. I want now to indicate more explicitly the important areas of commonality between the theory of cultural community presented above and the relativistic conception of human cultural development formulated by Lyotard.

What both Herder and Lyotard are attacking in ther writtings, albeit at very different stages of its historical development, is the paradigm of cultural knowledge arising from the philosophy of the Enlightenment. Moreover, despite the important differences in their historical backgrounds, the basic character and aims of their critiques of the Enlightenment paradigm of knowledge are remarkably similar. At the core of both critiques is a rejection of the pretensions to objectivity of this paradigm and, consequent upon this, its claim to constitute a higher form of knowledge than those cultural forms of knowledge differing from it by virtue of its capacity for rational legitimation. Proceeding from a view of the inherently relative, pluralistic nature of human cultural knowledge as an arbitrary linguistic construct, both Herder and Lyotard reject such claims to objectivity as based upon an artificial reification of a particular, limited cultural form to the status of universality.

In Herder's theory, this claim to epistemological superiority advanced by the Enlightenment philosophers is seen to be based on their erroneous belief in the existence of a set of eternal, abstract rational principles inherent in human nature, existing independently of the contingent, formative processes of history. As conceived by the critical reason of the philosophes, these rational principles were thought to transcend the superstitions and myths of earlier ages, forming the measure against which earlier, unenlightened cultures were judged and ultimately found wanting. In elaborating his historical, culture-relative conception of human development, Herder seeks to expose the contingent nature of the claims of this Enlightenment culture to universal validity and, in so doing, to reveal the true basis of this "universalistic" discourse in the reified categories of a limited European culture.

Similarly, in Lyotard's theory the claim of the modern scientific knowledge form to epistemological superiority is predicated upon the purported ability of the scientific language game to verify its knowledge claims by reference to objective principles of verification or proof. Moreover, it is their inability to stand up to the rigors of objective testing based on these scientific principles which determines the inadmissibility of the knowledge forms of traditional cultures to the body of knowledge accepted as legitimate and meaningful by the modern scientific culture. However, in a manner similar to Herder, Lyotard emphasizes the perilous nature of the claims of the modern scientific discourse to universal objectivity. As only one of many knowledge forms historically generated within the arbitrary language games of human cultures the modern scientific knowledge form is ultimately unable to validate its claims to objectivity in its own terms. Rather, its claims to epistemological superiory are seen to rely upon an appeal to a more fundamental, legitimating discourse of the same narrative form which its own denotative paradigm specifically excludes. This legitimating discourse turns out to be the meta-narrative of the historical emancipation of the rational human subject-- the same universalistic discourse of the Enlightenment which is the focus of Herder's critique.

For both Herder and Lyotard then, the success of the claims of the Enlightenment knowledge form to objective legitimation is made possible only through its reification, by its abstraction from the reality of its origins in those constitutive processes of linguistic cultural practice which represent the common source of all forms of knowledge. The hegemonic status of this modern cultural discourse is sustainable only insofar as it suppresses its own contingent, culture-relative nature -- an act of denial which inevitably entails the repression of those other, historically diverse cultural forms which present to it the true face of its own limited arbitrary nature. It is only with the demise of this modern rationalist cultural form, they believe, that the opressive implications of the demand for the objective validation of knowledge threatening the perpetuation of diverse cultural perspectives will be overcome.

While their critiques of the Enlightenment paradigm of knowledge thus exhibit remarkable similarities, it is also important to note the significant differences in the perspectives of Herder an Lyotard -- differences which emerge most clearly in theier respective views concerning the process of the breakdown of this hegemonic cultural discourse and the nature of the relativistic world deriving drom this disintegrative process. In outlining these points of divergence in their thought, some consideration needs to be given to the very different cultural milieux within which the basic conceptions of language and culture embraced by these two thinkers are formed. For it is the manner in which these contemporary influences shape their understanding of language and culture as the central medium of creative human development which acounts, in large part, fot the differences alluded to here.

In Herder's case the critique which he directs against the cultural knowledge form of the Enlightenment is properly situated as part of a larger current of German intellectual thought of the time, centering around the radical ideas of the Sturm und Drang. This movement of literary and artistic criticism, which included among its number figures like the young Goethe and Schiller, was to prove the source of some of the central ideas associated with the German Romantic movement. But, as Taylor has observed, its most distinctive characteristic eas the overriding aspiration of the Sturmer und Dranger to recapture the fundamental unity of human experience rent asunder by the dichotomizing reason of the Enlightenment. In opposition to the latter's "artificial" bifurcation of human experience into the antithetical categories of thought and feelings, reason and emotions, and humanity and nature, they aspired to an ideal conception of life as the harmonious unity of humans with themselves (their spiritual nature) and their larger natural and social world. The attainment of this unity with one's world was of foremost importance for the Sturmer insofar as it constituted the indispensable condition for human spiritual self expression --- the essential requirement for the realization of humans' authentic being. Moreover, it was language and the cultural creations generated by human linguistic activity which were identified as the essential medium whereby this creative, expresive unity achieved its actualization. In the natural creations of human language, the Sturmer believed, one could discern the aesthetic expression of the harmonious community of people with the greater spiritual whole which formed their world.

Through their personal literary creatuibs the different members of the Sturm und Drang sought to articulate their profound sense of the contemporary fragmentation of this creative, spiritual unity of human existence consequent upon the impact of the culture of the Enlightenment upon the existing social order. This pessimistic assessment of the character of contemporary cultural life also encouraged a more general tendency among many of the Sturmer to identify with the traditional life forms of the lower orders of German society as the embodiment of their ideal. The social world of the German peasants, farmers, and crafts-people, their customs and cultural traditions deriving from a simple life of interaction with nature largely untouched by the "artificiality" affecting the higher social orders of German society, seemed to epitomize, for many of thr Sturmer, that harmonious, spiritually fulfilling existence to which they themselves aspired. Accordingly, in their writtings, we find the first expression of the idealized conception of the common people o Volk and the celebration of German folklore and language which were to become dominant themes of the later German Romantic movement.

These general themes of the Sturm und Drang received powerful expression in Herder's thought. We have seen how he constructs a distinctive philosophy of history which identifies the natural organic unity of the individual and the larger cultural community as the essential condition for the realization of those creative, spiritual powers distinguishing humans as conscious linguistic beings. Moreover, for Herder, the perpetuation of this process of creative cultural development presupposes the preservation of that immediate, spontaneous unity of human beings with the Volk and its traditional cultural forms facilitated by the cohering, integrative power of the naturally evolving national language. Insofar as it threatens to fragment this natural, harmonious unity the artificial Enlightenment knowledge form can have no place within this historical proccess of cultural development. By eroding the organically evolved customs and traditions underpinning the historical process of cultural development, this divisive knowledge form would effectively destroy the foundations upon which the continued expression of the diverse cultural life forms of the species is dependent. Accordingly, Herder is uncompromising in his total rejection of the "unnatural" cultural paradigm of the Enlightenment in favor of the preservation of a prerationalistic world in which the multiplicity of traditionally evolved cultures receives full expression.

Writing at a much later stage in the development of the Enlightenment knowledge form and responding to very different cultural  influences, Lyotard's vision of a evolving, relativistic, postmodern condition of cultural diversity contrasts markedly with Herder's perspective. In his writtings we find no notion of a possible return a premodern, nonscientific order embracing the traditional cultures of narrative knowledge. In fact, Lyotard's is a more dialectical approach, one shaped by his sensitivity to the impact of the information revolution upon contemporary Western society. It is his assessment of the latter's implications for the nature of life within modern society -- an assessment strongly colored by the Nietzschean influences pervading his thought -- which is the major factor shaping his conception of this emerging postmodern world.

[History and Theory, Vol. 27, No. 2 (May, 1988) , pp. 146-168]

mardi, 13 janvier 2009

Remembering Johann Herder

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Remembering Johann Herder

M. Raphael Johnson

Surprisingly, very few of those who call themselves ethnic-nationalist know anything of its history and development. Johann Herder, writing in the early 19th century, is largely considered the major founder of nationalist theory in western Europe. A pro-Slavic German, Herder laid out a vision of the cultural order where the globe was made of innumerable ethnic groups, united by culture and language, each with its own purpose and “genius.” These were all to be self-governing, as the state was to have a minimal role, leaving actual governance to local institutions and tradition. Of all the nationalist theorists of history, Herder is likely the most widely read today, and is even given a modicum of respect within academic intellectual history and political science. 

Ethno-nationalism, in spite of the myths pouring out of the academic presses, is a rejection of the gnostic-Enlightenment view of man, morality and epistemology. Unless one understands this negative connection, one cannot understand the moral and historical and moral basis of nationalism and the ethno-community. Therefore, it is absolutely central that the work of Johann Herder be dealt with, for, in many respects, the revolt against Enlightenment "liberalism" and "practical" conservatism comes from him rather than from Burke, whose theoretical prowess has been overestimated in many respects.

Herder's critique of the Enlightenment rests on one major proposition: that the study of man is radically different from the study of nature. In other words, the object with which any specific community or civilization provides the "social scientist" with does not bear the same marks as an object as in the natural sciences. The sciences themselves impose an ideological and a priori grid upon nature, the quantitative measures to which science reduces all visible phenomena. To treat man as an object of science is to standardize him, to standardize him is to reject all that is human about him, to reduce him to a mechanical being, a being easily manipulated from outside; the esoteria of the social sciences. In other words, this sort of standardization is to reduce civilization -- for Herder the ethno-nation -- to a set of material causes and effects which ensures that only the most formal and formalizable aspects of the people under study will be understood. Even here, though, precisely because that which is formal (or formalizable) is removed from the rest, that then is misunderstood. Peoples are distorted if they are a priori standardized in a quantitative formula. This is the central proposition of Herder's social theory, and, importantly, the starting point for the countercritique of Enlightenment mythology.

Herder, as nearly all anti-Enlightenment thinkers, rejected the intellectually vapid notion of a "social contract." If such contracting individuals were to exist to enter into some contractual obligations, then the contract would have already been settled. In other words, the civilizational apparatus that would allow a scholar to even conceive of a "contract" is already in existence as the contracting parties are coming together. "Social contract" theory is an intellectually dishonest slight of hand: its primary purpose is to reject all aspects of history, civilization and nationhood in order to rebuild the society on the demands of the contracting parties. These, as always, mean the wealthy and powerful who demand the institutionalization of their own interests and call them "universal human rights."

Communities derive primarily from the fact that men are born radically helpless and dependent, not free and equal. Only the existence of the community ensures that human beings exist at all. Therefore, all arts and sciences derive from this natural, communal union, and exist as a product of the communal mind, rather than specifically the minds of great men. In other words, that the man of genius, undoubtedly a reality in human history, should be demystified in that his genius has been nurtured by the community around him. The books he has read, lectures attended, apprenticeships, language, education, in short, everything necessary to develop the talents of genius are communally created, not individually created. Therefore, the proper study of human society is not the "great man" but rather the community, the nation, the ethnos. This is the proper unit of history, and it is it that works through the great men, economic institutions, armies and books that a historian might study. Genius exists, as do classes or great ideas, but they do not come into existence in isolation.

What Herder and his followers revolted against is the mechanization of nature and human societies, the dominance of methodology over mankind and the idea that various nations and cultures are commensurate with the newest conceptual apparatus of modern science. On the contrary, Herder believed that nations and cultures were basically incommensurable, and that, in order to understand any one, they needed to be understood from the point of view of how they understood themselves. Modern historical theorizing generally judges historical societies to the extent they have manifested the much more contemporary ideas of liberalism and secularism. Of course, such a method is not history, but a crude ideological polemic that passes for erudition in American universities. A nation is not "successful" if it is wealthy, if indeed, wealth is not a mark of success. American historians will prattle on about the wealth, freedom or repression in a certain historical culture, without bothering to inquire whether or not such things were considered important, or if the average person considered liberal ideas of jurisprudence to be wise or not. Herder fought this trend in his own day, and the battle seems still to be lost.

The basic epistemological idea here is that, in order to understand anything, the conceptualization of the data (always incomplete) must come a posteriori. Objects can only be understood within and through the group mind of the ethno-community. Contemporary scientific methods take an a priori notion of conceptualization such as "rational choice" theory or a class- or "gender"-based analysis, for example, and impose it upon any society or group whatever. In political science, so it is regularly claimed, any data set whatsoever can easily be quantified and placed within a regression model. The connection between the real, concrete data and its quantification and analysis is rarely questioned. Everything is standardized and everything follows the same crass laws of cause and effect, even man.

For Herder and so many others, what must come first is first-hand, lived experience with the data, with a concrete sense of what an object is, as defined by the specific community under question. Rejecting qualities as "accidents" or "residuals" is an epistemological error, for it rejects what is a part of the object under study, part of what makes it unique and thus worth studying in the first place. In other words, for Herder, any object needs to be understood in the sense of its value or lack of it within the culture which it is found. Epistemology is intensely social, and to divorce it from social life and the development of national consciousness (and therefore language) is to divorce knowledge from reality. Reality, for the analytic philosopher, is a set of concepts expressed in words, not actual objects; and actual objects, to be thus, are always a product of culture, traditions or traditional norms. Objects only become so in the nexus of national and cultural tradition, or they are not objects at all.

For the Enlightenment, the notion of "progress" has been an allegedly continuous move from "myth" to "fact;" myth is the sensuous and concrete aestheticization of nature and mankind into something socially recognizable and intelligible. Progress has its esoteric side of being the "demystification" or "unmasking" of such concrete realities into the abstractions of modern scientific and moral ideology. For Herder, this is a regress. Modern scientific methodology has eliminated the concrete object in favor of a sterile concept. The older idea of myth was not falsehood in any sense, but is a key to the heart and mind of a specific people and civilization. To aestheticize nature is to imprint the "general will" upon it, to provide it with cultural reality by integrating it into the vortex of the nation. The nation, then, seeks to unify all things to itself: nature, technics and economics. These are provided with the imprint of the historical memory of a people. Nothing is strange, everything becomes recognizable.

While it might be true that technics derives from a certain conceptualization of matter, it does no follow that the mythos, or the aestheticization of matter is therefore "backward" or "false." The notion of myth, however conceived, is a means whereby objects of nature and art are brought into the cultural gestalt of the community, the nation. To render objects as mere concepts is to destroy them; it is, in a magical and occult sense, to recreate them in the image of man. In turn, they are taken out of the realm of experience and exist solely in the realm of ideas to then be renamed and reconceptualized by those with the power to perform such magic community-wide. It is a dangerous form of alienation that removes the individual from the realm of the concrete, the realm of reality, or real consequences and the real personal identity, into the realm of ideas, of the realm of images that can easily be transformed by the wishes of those who control the vocabulary and projection of images in modern life. Myth therefore, is not falsity, but it is something integrative and gives nature the stamp of nationhood, or the identity of the collective self.

More importantly for mankind, what is important is a view towards what the various communities and nations deem important or worthy in life. The "idea of order" that animates the community carved out of what ordinarily would be chaos is what needs to be analyzed, not, on the other hand, that strictly modern sense of placing a stylized pattern of "rational choice," "utility maximization," structural-functionalism, psychoanalysis, or whatever and placing it over every and any people. Such modern methods are not based on "science," but on a set of axiomatic assumptions that cannot be proven, namely, that stripping away the cultural "accretions" of a people leads to their "essence," their "demystification." The proposition: "all peoples function according to strict rational choice and utility maximization models," is a completely nonscientific statement. It is an non-provable assumption, made more dangerous that it must be taken on faith, a priori, and merely applied. One then assumes that the product of such analysis actually reflects the "real world" of things.

The vapidity and coldness of analytic methods do, in fact, communicate true cultural life: they are not the universal truths of the faculty lounge dreamers, but rather that of the emptiness of modern western life, where "tradition" and "culture" are largely non-existent, completely administered by the handful of families that control the flow of images and the resultant stimulus. Analytic philosophy, indeed, far from being the search for the universal inherent in the text under study, is nothing more than a brutalization of the texts of western philosophy, the imposition of the mindlessness of Anglo-American liberalism and nihilism upon texts the authors of which could never understand.

For Herder, and for ethno-nationalism in general, one approaches an artifact of a culture, of a nation, precisely as that. Something that reflects, not the specific idiosyncrasies of the artist, craftsman or writer, but of a whole people. Any artifact contains within itself the soul of an ethno-nation and a civilization, of the folk. it reflects years of development long before the object ever came into existence, and a set of influences so nuanced, and going back so far into history that it radically resists any form of quantification, or even of understanding except in the most pedestrian of senses.

In other words, objects of a culture are "organic." That word is used over and over again, and only in the rarest of papers it it ever defined. The best and most meaningful use of the word is that the whole is manifest in the part. That is, each object manifests the whole in which it has been created. Because each man, no matter how much an "individualist" he might delude himself into thinking he is, is the product of time, culture (or lack of it), language and national and communal history that defines the fears and hopes of society at large. Because of the intrinsic connection between human development and one's immersion into a national tradition and self-identification, it follows that the acts of such an individual are, in fact, acts of the nation, of the people.  

The notion of "organic," (or, "integral," for that matter) then, refers to the fact that it is not proper to split off the disciplines from one another: morality is dependent upon an understanding of history, philosophy on culture, culture on language, etc. Each is necessary to reinforce the other, and any specific text of a culture, therefore, contains all of them, to one extent or another, however ultimately distorted. To remove moral views from historical development or epistemology or language is to completely distort the actual historical process of these things coming into existence and taking hold over a people.  

Hence every nationality must be considered solely in its place with everything that it is and has; deliberate isolation, rejection of individual phases and customs will not result in history. To gather such collections one steps into a charnel-house, into a lumber room and wardrobe of the nationalities, but not into the living creature, into that great garden in which the nationalities grow like plants and of which they are a part; in which everything -- air, earth, water, sun, light, even the caterpillar which crawls upon the plants an the worm which destroys them -- belong to it. (xviii 248) 

For Herder, as for nationalism properly understood, nationalities are not states, nor do they need them. States are the creation of men, the ruling classes; nations, on the other hand, are creations of nature, creatures of the dependence and weakness of the individual alone against the elements. Herder writes in a celebrated passage: 

Millions of people on the globe live without states....Father and mother, man and wife, child and brother, friend and man -- these are natural relationships through which we become happy; what the state can give us is an artificial contrivance; unfortunately it can also deprive us of something far more essential -- rob us of ourselves. (xiii 341) 

One of the most significant difficulties in the American literature on nationalism is the extent to which the state is confused with the nation. However, it is understandable, for the dominance of analytic methods in the social sciences has extreme difficulty dealing with the unquantifiable and complex set of nuances and subtle folkways that are actually the stuff of nationality. The state, with its conveniently arranged bureaucratic offices, numbers of soldiers and massive budgets, is a far more amenable object of study. Unsurprisingly, the nation became synonymous with the development of the state administration. The development of nationalist thinking under Herder was completely lost as the social sciences found the state far more amendable to their careers and intellects.

One of the central aspects of Herder's vision for the development of counterrevolutionary thinking is just this distinction between culture and law, between the ethnos and the state. If culture is strong and vibrant, passed down from the church and family unit, then the arm of the state is unnecessary. The Russian Old Believers, Serbia under Dushan or the feudal West are examples of "states" whose constitution consisted of autonomous communities where the state was very weak or non-existent except in the realm of foreign policy and general taxation. Under the medieval royal systems, each community was self-governing under only those laws necessary to the proper functioning of each autonomous institution. The culture, found in the Church and its myriad manifestations, maintained the identity and order of each community, each with its own specific mission and sense of self. As later as nineteenth century Russia, the rural commune was self governing, and the state's presence in rural life was nearly non-existent. The liberalism of Alexander II and his serf emancipation served one purpose: to allow the state to enter into the formerly self-governing sphere of commune-landlord relations and impose a more centralized regime. In other words, either in the Germano-Latin, Polish, Serbian or Russian cultural milieu in the middle ages, the state's power was not conceived of in a liberal and centralized fashion of an "administration," but the nation -- the ethno-cultural community -- was given free reign to rule and maintain order.

Very much like the Russian Slavophiles of the 1840's, Herder did reject the "consent" theory of government. Custom, tradition and nationality are not things that one consents to: they are the conditions for one to consent to anything. When one, in a purely theoretical way, "consents" to become a citizen of a certain polity, one already must have a rather well developed sense of moral life, culture and self in order to make such a decision. The idea of liberal "consent" is a fraud, for no one has ever consented to be ruled by a certain ruling class, but the idea of 'consent" is intrinsically connected to the lie of "contract theory."

If custom and national tradition has its place, providing the natural and organic sources of authority that one comes to understand from one's birth, then the state or any external authority become unnecessary. The medieval state was a distant entity, an object of veneration because of its function as the protector of the real, that is, the protector of the church and tradition. A monarch or great general is an object of veneration, a bureaucrat is not. The extent to which the state becomes a set of neatly organized bureaucratic offices, distanced and often contemptuous of the communal locality, it ceases to be representative. The modern notion of "representation" is just another of the contemporary frauds that masquerade as "political theory" in the halls of academia. The extent to which the state is consolidated, centralized and self-interested (defined as the bureaucratic regime developing its own corporate interests), it automatically becomes non-representative. This has nothing to do with campaigns or elections, for the bureaucracy in every "advanced" western society, along with the courts, economic centers and mass media, hold real cultural and therefore social power. The destruction of communal cultural unity is always to the benefit of the bureaucratic regime and its demand for neat organization, conceptualization and standardization. Herder writes: 

The most natural state is one naturally with one national character. This it retains for ages and this is most naturally formed when it is the object of its native genius for a nationality is as much a plant with nature as a family, only with more branches. nothing appears so indirectly opposite to the end of government as the unnatural enlargement of states, the wild mixing of all kinds of people and nationalities under one scepter....Glued together indeed they may be into a fragile machine, termed a machine of state, but it will be destitute of inner life and mutual sympathy of the parts. (xiii 384) 

This may well be termed, as well as the political vision the work as attempted to put forth, a vision of ethno-national anarchism. That is, the lack of state power means the proportionate growth of a local patriotism, a local ethno-traditionalism and a local cultural nationalism that provides for the loyalty of healthy citizens far more than the recruiting sergeant or revenue director. Bureaucracy cannot be separated from a epistemological methodology that demands all data be standardized, conceptualized and subject to the same testing. An epistemology that refuses to see the uniqueness of objects, but rather, for the sake of communicability and neatness of presentation, reduces all objects of whatever kind to their definitional "essences," becomes whatever the powerful in any society want them to be. Herder refused to make the common distinctions between reason and imagination, or sensate experience and culture, all were intimately bound together. One cannot remove the feeling of romance from reason, for it is precisely these feeling that provides for the continued interest in the world. The spirit of loyalty and ethnic tradition is what maintains loyalty, not mathematical equations. One has never done statistical analyses to figure out whether or not one loves his family or native village. These relations are immediate, and they are immediate because it is these that make conceptual mediation (i.e. reason) possible in the first place. Post-modernism is easily predicted when the cultural bases of reason (making reason contingent rather than culture) disappear. When this happens, reason takes a back seat to the "will to power." Without ethno-nationalism, reason dies.

The nature of this tradition, if one is forced to"conceptualize" it, is language. For Herder, language was the primary ingredient in nationality. Words represent the "common symbolism" of memory, the basic structure of which is traditional praxis. It is not surprising that Herder believed words to be ideas, and ideas, words. There is no such thing as an abstract thought that then finds a linguistic outer coating, called a "word." All thought is done through language and therefore, language precedes conceptualization. If language precedes conceptualization, and language is the "concretization" of historical memory or tradition, then reason, a certain structure of thought, is based ultimately on tradition. The basic philosophical distinction between self, idea, word and world is for Herder completely false. Each of these is to be found in the others and is intimated and suggested by the others. Tradition, self, ideas and language are basically one and the same concept; complex to be sure, but related in such a way as to make their arbitrary analytic separation impossible or unintelligible.

The self is not sui generis -- to put this more simply -- but rather the product of the cultural milieu in which it was created: the language, customs, hopes, memories and fears which nurture the self from infancy into adulthood. Only when the culture breaks down through alien peoples and ideas (including the state) does this connection become severed, and the most horrid of situations, alienation, becomes a social reality, leading to social pathology and ultimately, social death.

Man is shaped by his association with others. This association is governed, indeed made possible at all, though similarity -- language, concepts, morality and historical experience. When this memory become clouded -- as in the present day -- though outside intervention of self-interested self-deception then the basic nature of the association is destroyed. The abstractions of liberalism or neo-conservatism cannot rescue it, but are the very products of this decay.

For Herder, nations are formed by various variables, which are primarily climate, basic physical environment, relations with others (or lack of them) and heredity. They develop slowly, but have as their primary goal the binding of strangers into a unity. For Herder, nations in the modern sense are the most holistic form of community: small enough to maintain a basic linguistic and cultural commonality, but large enough to be self defending and economically secure. Obviously the Greek city state was extremely vulnerable, as the large empires were bereft of any ordering principle, as they were made of myriad religions, ethnic groups and languages. For Herder, the very subject of history is the development, thriving and demise of these various nations. Or, put differently, history is the story of how specific peoples controlled and directed the potentially infinite human impulses. Without harmonization, the human will will seek its own pleasure an domination. Culture and historical memory serve to direct the will into a unity of form and function, initiating the man into a world of order in a chaotic and fallen nature.

There can be no doubt that the notion of the cultural community, that is, nationality, for Herder was the primary method of actual and real representation. For him, the nation was the collective consciousness of the people who composed it. In a certain sense, the Rousseauian notion of a general will makes a bit of sense. Now, Rousseau cannot be the ground for nationalism of the Herderian stripe, but there is a sense in which that the idea of a selfless will, dedicated to the common good, can meet in time through historical memory and customary fears and hopes, all expressed a common language that embodies these. This idea of cultural unity is a manifestation of the general will, and is a far more interesting use of the phrase than that "insane Socrates." Herder made a careful distinction between the people, that is, the true representatives of the nation, the folk, and the "rabble," or the frenzied mobs of alienated and acultural "societies" (such as in the modern era) that have only their anger and bitterness to unite them. That there is an "idea" of order that the imagination can partly grasp for Herder is central to their being a nation or a national character at all.

"Progress," one of the phony buzzwords of Enlightenment mythology, is also something that comes to make sense only in a national context. The idea of order that makes sense out of an association, and is developed by it, is what produces the various goals and strivings of a people. Therefore "progress" as an ethical notion can only begin there. The constant uses of the terms "backward" or "progressive" are non-universal, and can only be utilized in the context of the communal structures of a specific nation. What is valued and respected by the community is the extent to which something is progressive or not. To the extent that policy moves towards what is valued versus something else is the proper use of the terms "backward." A "progressive" society, therefore, is one that continually improves its manifestation of its idea of order, or that "general will" that truly represents the historical memory of a people. A "regressive" society is one that moves away from it. "Injustice" comes to be the introduction of policy that rejects the communal consciousness of a people, and therefore, the people's inherent sense of propriety.

Johann Herder is at present, a threat to the modern world and its academic establishment. He is a living refutation of their ideas of progress and conceptual uniformity. He is a danger for he has the potential to unite the anarchists of the "left" with the ethno-nationalist of the "right" against the demands of Enlightenment, empirico-capitalism, in both its vapid liberal and conservative forms. His battle was primarily against the notion of cosmopolitanism, or the idea that man's faculties are sui generis, and therefore owing no loyalty to any specific community. Such a person is barely human, living accordingly only to his desires and impulses: he is inherently sociopathic. The proof of Herder's ideas here is evident in the present day. Herder writes, mocking the pretensions of the modern cosmopolitan spirit: 

All national characters, thank God, have become extinct; we all love one another ,or, rather no one feels the need of loving anyone else. We all associate with one another, all are completely equal -- cultured, polite, very happy; we have, it is true no fatherland, no one for whom we live; but we are philanthropists and citizens of the world. most of the rulers already speak French, and soon we all shall do so. And then -- bliss! The golden era is dawning again when all the world has one tongue and one language; there shall be one flock and one shepherd! (v, 550) 

Therefore, Herder is forgotten, but is is equally clear that the building upon the ruins of the plastic liberal/conservative divide will need his services once more.

[The Idyllic, August 9, 2003]

samedi, 03 janvier 2009

La faute à Rousseau...

 

 

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SYNERGIES EUROPÉENNES - VOULOIR (Bruxelles) - JANVIER 1986

 

La faute à Rousseau...

L'occident vit aujourd'hui, qu'il le veuille ou non, autour des grandes questions lancées au XVIIIème siècle par le philosophe genèvois Jean Jacques Rousseau. Le génie de cet homme réside non seulement dans la variété des thèmes de sa réflexions (de l'histoire au droit constitutionnel, en passant par l'art et la psychologie des cultures) mais aussi et surtout dans la nombreuse postérité que nous pouvons encore observer de nos jours, de la gauche socialiste à la droite libérale. Au fond, personne ne peut faire sérieusement l'impasse sur les grandes valeurs idéologiques du rousseauisme. Pour ou contre, mais jamais indifférent...  

L'ouvrage de Jacques JULLIARD, historien, éditorialiste au Nouvel Observateur et directeur à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, tombe à pic à une période où le retour des valeurs libérales et les prédictions répétées d'une "fin des idéologies" semblent converger vers une normalisation terrifiante des cerveaux européens. La nombreuse et souvente divergente descendance des lecteurs de ROUSSEAU retient pourtant que la part du politique et des valeurs qui organisent la cité ne sont ni neutres ni scientifiques mais idéologiques et arbitraires. Ce que ces thuriféraires ou ses critiques ont fort bien reconnus.

Le discours rousseauiste charrie en effet un certain nombre de valeurs aussi fondamentales dans les débats politiques du XIXème et du XXème siècle que l'idéologie du contrat social, la notion de souveraineté du peuple, l'omnicompétence du politique et le rôle actif et volontariste de l'Etat dans la vie des nations...

Toutes ces valeurs furent à la source d'idéologies très contradictoires les unes par rapport aux autres. JULLIARD analyse chacune d'entre elles avec précision et objectivité. Du jacobinisme au libéralisme bourgeois de BASTIAT et Benjamin CONSTANT, du socialisme étatique et terroriste de BLANQUI au socialisme mutuelliste des Proudhoniens de la fin du XIXème siècle, de nombreux courants de pensée se sont plus ou moins explicitement référés à l'oeuvre de Jean-Jacques ROUSSEAU. JULLIARD intègre même dans cette postérité une partie non négligeable de la pensée traditionaliste et contre-révolutionnaire de LAMENNAIS à BONALD. Il est intéressant de noter que, quelque soit par ailleurs les critiques féroces de ce dernier à l'égard de ROUSSEAU, considéré par les monarchistes comme le père spirituel de la Révolution de 1789, il y a chez eux deux attitudes marquées par un intérêt certain pour le discours de l'auteur du Contrat Social. D'ailleurs cette attitude ambigüe s'appuie aussi pour une bonne part sur l'aspect protéiforme de la pensée du citoyen genèvois. Ces contradictions dans le discours rousseauiste furent d'ailleurs parfaitement intégrées dans sa pensée, toute mouvante et évolutive. En fait, ROUSSEAU fut en permanence soucieux de tenir un compte exact des réalités historiques et géographiques propres à chaque peuple pris en soi. Si MONTESQUIEU tenait pour déterminant dans le mode d'organisation politique d'un peuple le critère du climat, ROUSSEAU fut le premier à conceptualiser avec intelligence le critère démographique. Ne croyant pas un instant à l'obligation, pour un mode d'organisation politique, de se ranger dans une des trois catégories fondamentales définies par ARISTOTE, il tenait un compte aussi rigoureux que précis des déterminants (relatifs) de la géographie, du nombre des citoyens installés sur le territoire national et des traditions locales propres à cette communauté étudiée. Les projets de constitution pour la Corse et la Pologne reflètent ce souci.

La fécondité de la pensée rousseauiste, trop souvent schématisée par ses pseudo-partisans républicains et ses adversaires réactionnaires (l'école contre-révolutionnaire du XIXème sicèle et les intellectuels maurrassiens du XXème), explique aussi pour une part l'influence de cette pensée dans la genèse idéologique du jacobinisme.

Parce que le jacobinisme constitue l'essence même de la révolution politique de 1789, on ne peut pas faire l'impasse de ses racines idéologiques. L'Occident moderne est un avatar monstrueux du jacobinisme, issu lui-même pour une part de l'esprit du classicisme français. Le discours rousseauiste, en particulier sa référence constante à la notion de volonté générale et à la souveraineté populaire qui en est le corollaire, a inspiré la création de ce modèle typique du régime moderne.   

Pourtant, on ne peut attribuer la totale paternité de ce modèle à Jean-Jacques ROUSSEAU. La notion de communauté populaire que le jacobinisme a extrait des principes rousseauistes pouvait évoluer dans des directions fort contradictoires. 1° Une évolution totalitaire, où le peuple apparaît comme une collection arithmétique d'individus doués de raison. Le jacobinisme, appuyé sur une conception rationnelle et atomisante du citoyen, où la volonté générale ne tolère aucune forme d'association entre ces derniers. L'Etat face à l'individu-citoyen. 2° Une évolution démocratiqu, notamment sous sa forme bourgeoise, où la souveraineté du peuple est déléguée à une minorité représentative. Il s'agit du modèle de démocratie représentative que les jacobins (à l'exception de la constitution de 1793 jamais appliquée) favorisèrent tout au long du XIXème siècle. Enfin, 3° la démocratie dite directe, considérée par les mêmes jacobins comme anormale et historiquement condamnée. Autant de conceptions qui sont toutes issues de la matrice rousseauiste. Le jacobin, magnifiquement décrit par l'historien Hippolyte TAINE dans ses Origines de la France contemporaine, crée alors le suffrage censitaire, interdit toute association professionnelle, combat comme obscuran- tistes les cultures provinciales. Tous ces actes ayant pour finalité la création d'un "homme nouveau", d'un homme sans racines, formé selon la pédagogie idéologique de l'école républicaine; en somme, l'homme de la modernité...

Jacques JULLIARD a su avec beaucoup de clarté et de références nous décrire cette descendance de Jean-Jacques ROUSSEAU. Nous pouvons pourtant regretter une conclusion peu explicite. La problématique de la représentation est très légèrement abordée. Evoquer les blocages face aux formes traditionnelles de la représentation (parlementaire, syndicale, etc.) ne résout en rien la question. Il manque un discours global et cohérent sur les structures nécessaires et historiques d'une nouvelle démocratie, une démocratie organique qui prendrait en compte et la dimension communautaire nationale et la dimension intra-communautaire. Le livre de JULLIARD peut nous aider à y réfléchir.

Ange SAMPIERU.

Jacques JULLIARD, La faute à Rousseau, Seuil, Paris, 1985, 85 FF.

 

samedi, 22 novembre 2008

L'idée de perfectibilité infinie

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L'idée de perfectibilité infinie: noyau de la pensée révolutionnaire et libérale

 

 

Le Professeur Ernst Behler, qui enseigne à Seattle aux Etats-Unis, grand spécialiste de Friedrich Schlegel, sommité interna­tio­nale, vient de se pencher sur ce rêve optimiste de la perfecti­bi­lité absolue du genre humain, rêve sous-tendant toute l'aven­ture illuministe et révolutionnaire qui s'est enclenchée au XVIIIiè­me siècle. Ce rêve, qui est le noyau de la modernité, se repère dès la fameuse «querelle des anciens et des modernes», dans l'Aufklärung  allemand, chez l'Anglais Godwin, chez Con­dorcet (de loin le plus représentatif de la version «illuministe» de ce rêve), Mme de Staël, Constant, les Roman­tiques anglais (Words­worth, Coleridge) et aux débuts du roman­tisme allemand (Novalis, Schlegel). L'évolution de cette pensée de la perfecti­bi­lité, aux sinuosités multiples depuis l'Aufklärung  jusqu'au ro­man­tisme de Novalis et Schlegel, a été appréhendée en trois éta­pes, nous explique Ernst Behler dans son livre

 

Ernst BEHLER, Unendliche Perfektibilität. Euro­päische Romantik und Französische Revolution, Fer­dinand Schöningh, Paderborn, 1989, 320 S., DM 48,- (ISBN-3-506-70707-8).

 

La première étape s'étend de 1850 à 1870, et constitue une réac­tion négative à l'endroit du romantisme. La deuxième étape, de 1920 à 1950, est marquée par trois personnalités: Carl Schmitt, Alfred Bäumler et Georg Lukacs. La troisième étape, non encore close, est celle des interprétations contemporaines du complexe Aufklärung/Romantisme. A nos yeux, il est évident que les in­terprétations de la deuxième étape sont les plus denses tout en étant les plus claires. Pour Carl Schmitt, le romantisme, par son subjectivisme, est délétère par essence, même si, en sa phase tar­dive, avec un Adam Müller, il adhère partiellement à la poli­tique de restauration metternichienne. Face à ce romantisme ger­ma­nique dissolvant, aux discours chavirant rapidement dans l'in­si­gnifiance, Carl Schmitt oppose les philosophes politiques Bo­nald, de Maistre et Donoso Cortés, dont les idées permettent des décisions concrètes, tranchées et nettes. A l'occasionalisme (ter­mi­nologie reprise à Malebranche) des Romantiques et à leur frei­schwebende Intelligenz  (leur intellect vagabond et planant), Schmitt oppose l'ancrage dans les traditions politiques données.

 

Alfred Bäumler, le célèbre adversaire de Heidegger, l'apologiste de Hitler et le grand spécialiste de Bachofen, pour sa part, dis­tingue une Frühromantik  dissolvante (romantisme d'Iéna) qui se­rait l'«euthanasie du rococo», le suicide des idées du XVIIIiè­me. Cette mort était nécessaire pour déblayer le terrain et inau­gurer le XIXième, avec le romantisme véritable, fondateur de la philologie germanique, rénovateur des sciences de l'Antiquité, pro­moteur de l'historiographie rankienne, avec des figures com­me Görres, les frères Grimm et Ranke. Avec ces deux phases du romantisme, se pose la problématique de l'irrationalisme, affirme Bäumler. L'irrationalisme procède du constat de faillite des grands systèmes de la Raison et de l'Aufklärung.  Cette faillite est suivie d'un engouement pour l'esthétisme, où, au monde réel de chair et de sang, la pensée op­pose un monde parfait «de bon goût», échappant par là même à toute responsabilité historique. Nous pourrions dire qu'en cette phase, il s'agit d'une irrationalité timide, soft,  irresponsable, désincarnée: le modèle de cette na­tu­re, qui n'est plus tout à fait rationnelle mais n'est pas du tout charnelle, c'est celui que sug­gère Schelling. Parallèlement à cette nature parfaite, à laquelle doit finir par correspondre l'homme, lequel est donc perfectible à l'infini, se développe via le Sturm und Drang,  puis le roman­tisme de Heidelberg, une appréhension graduelle des valeurs tel­luriques, somatiques, charnelles. A la théo­rie de la perfectibilité succède une théorie de la fécondi­té/fé­condation (Theorie der Zeu­gung).  A l'âge «des idées et de l'hu­manité» succède l'âge «de la Terre et des nationalités». La Nature n'est plus esthétisée et su­blimée: elle apparaît comme une mère, comme un giron fécond, grouillant, «enfanteur». Et Bäumler de trouver la formule: «C'est la femme (das Weib) qui peut enfan­ter, pas l'"Homme" (der Mensch);  mieux: l'"Homme" (der Mensch)  pense, mais l'homme (der Mann)  féconde».

 

Georg Lukacs, pourfendeur au nom du marxisme des irrationa­lismes (in Der Zerstörung der Vernunft),  voit dans la Frühro­mantik  d'Iéna, non pas comme Bäumler l'«euthanasie du ro­coco», mais l'enterrement, la mise en terre de la Raison, l'ou­verture de la fosse commune, où iront se décomposer la rai­son et les valeurs qu'elle propage. Comme Schmitt, qui voit dans tous les romantismes des ferments de décomposition, et contrairement à Bäumler, qui opère une distinction entre les Romantismes d'Ié­na et de Heidelberg, Lukacs juge l'ère roman­tique comme dan­gereusement délétère. Schmitt pose son affirma­tion au nom du conservatisme. Lukacs la pose au nom du marxisme. Mais leurs jugements se rejoignent encore pour dire, qu'au moment où s'effondre la Prusse frédéricienne à Iéna en 1806, les intellectuels allemands, pourris par l'irresponsabilité propre aux romantismes, sont incapables de justifier une action cohérente. Le conservateur et le marxiste admettent que le sub­jectivisme exclut toute forme de décision politique. Cette triple lecture, conservatrice, natio­na­liste et marxiste, suggérée par Beh­ler, permet une appréhension plus complète de l'histoire des idées et, surtout, une historio­gra­phie nouvelle qui procèdera do­rénavant par combinaison d'élé­ments issus de corpus considérés jusqu'ici comme antagonistes.

 

Dans le livre de Behler, il faut lire aussi les pages qu'il consacre à la vision du monde de Condorcet (très bonne exposition de l'idée même de «perfectibilité infinie») et aux linéaments de per­fec­ti­bilité infinie chez les Romantiques anglais Wordsworth et Coleridge. Un travail qu'il faudra lire en même temps que ceux, magistraux, de ce grand Alsacien biculturel (allemand/français) qu'est Georges Gusdorf, spécialiste et des Lumières et du Ro­man­tisme.

 

Robert STEUCKERS.