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mardi, 28 janvier 2020

La coopération stratégique entre la Russie et le Japon se précise

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La coopération stratégique entre la Russie et le Japon se précise

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Il est généralement admis que le Japon est un fidèle auxiliaire de Washington dans sa lutte contre Moscou et Pékin. Il est très proche des Etats-Unis dans le domaine technologique et commerciale. Il ne paraît pas prêt à compromettre ces rapports.

De plus, sa proximité géographique avec la Russie et la Chine est généralement considérée à Tokyo comme une faiblesse. On compte sur la Flotte américaine du Pacifique pour aider éventuellement à la protection des côtes.

Cependant, durant un débat au Parlement le 22 janvier 2020, le Premier ministre japonais Shinzo Abe a indiqué que les relations de coopération entre la Russie et le Japon avaient pris une importance encore jamais vue. Il a fait allusion à des projets économiques conjoints dans les Iles Kouriles méridionales, jusqu'à présent des territoires revendiqués respectivement par chacun des Etats. En novembre 2018, Vladimir Poutine et Shinzo Abe avaient annoncé qu'ils travaillaient ensemble à la définition d'un traité de paix à ce sujet.

Par ailleurs, les 20 et 21 janvier 2020, des manœuvres aéro-navales communes ont été organisées entre la Flotte Russe de la Baltique et la force japonaise d'auto-défense (Japanese Maritime Self-Defence Fleet) en Mer d'Arabie, visant à réprimer les activités de piratages très nombreuses dans ces eaux.

Dans le même temps, le 21 janvier, l'ambassadeur russe en Corée du Nord a discuté des possibilités de coopération avec les autorités de ce pays dans le domaine de l'aviation civile et de la dénucléarisation. Ceci a été bien accueilli au Japon qui redoute de voir la Corée du Nord se doter de nouveaux armements dont le Japon aurait pu être la première cible. Ultérieurement, le Japon pourrait participer activement au grand projet de coopération ferroviaire et commerciale associant la Corée du Sud, la Corée du Nord, la Russie, la Chine et la Mongolie dans le cadre du programme initialisé par le Chine dit des Nouvelles Routes de la Soie.

Il ne s'agit pas encore d'un traité de coopération formelle entre le Japon et la Russie. Mais avec le rejet de plus en plus marqué des Etats-Unis dans la région, ce Traité pourrait être recherché activement par Tokyo.

How Doggerland Sank Beneath The Waves (500,000-4000 BC)

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How Doggerland Sank Beneath The Waves (500,000-4000 BC)

Prehistoric Europe Documentary

 
 
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00:10 Publié dans archéologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : doggerland, mer du nord, archéologie, préhistoire, europe | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 27 janvier 2020

Radicalisation : mot piégé

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Radicalisation : mot piégé

par François-Bernard Huyghe

Ex: http://www.huyghe.fr

Article publié sur < ahref= https://www.marianne.net/debattons/les-mediologues >Marianne

Les médiologues

La récente libération d’un jihadiste parti en Syrie dès 2012, puis d’un islamiste, chef de Forzane Aliza, leur peine purgée, rappelle que, dans un État de droit, même les gens qui le combattent, finissent en liberté. Et, comme d’autres jihadistes relâchés avant eux, ils sembleraient avoir gardé leurs convictions. Cela n’étonnera que ceux qui pensent que l’institution pénitentiaire peut sauver les âmes ou ramener les égarés.

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La formule rituelle est : « ils ne se sont pas déradicalisés ». Cette terminologie devenue quasi officielle suggère un mécanisme psychique, peut-être réversible. Cela donna d’ailleurs lieu à un business de la déradicalisation maintenant plus contesté.

Étymologiquement, la radicalité est le fait de retourner aux racines de sa foi. Un salafiste, par définition littéraliste et fondamentaliste, ne devrait pas se sentir offensé par le mot. Mais le problème est le suffixe : « ation » qui suppose une action subie. D’autant que les médias parlent parallèlement de radicalisation du débat d’idées (dérivant trop à droite ou à gauche), de radicalisation du mouvement social qui se durcit ou de gilets jaunes radicalisés, ceux qui imiteraient les black blocs dans les manifestations. Initialement « normal », on pourrait donc se radicaliser, voire se déradicaliser.

Cette phraséologie entretient trois ambiguïtés :

- Le flou sur la différence entre une idée et un acte. Entre mauvaises pensée et actions brutales, contamination et brutalisaton. Selon F. Khosrokavar auteur de Radicalisation, ce serait le « processus par lequel un individu ou un groupe adopte une forme violente d'action, directement liée à une idéologie extrémiste à contenu politique, social ou religieux qui conteste l'ordre établi...». Cela suppose que le sujet soit sous influence ; la captation par l’idée pousse-au-crime pourrait se détecter, voire se corriger. L’idéologie est ce qui s’attrape (ou qui vous attrape) et change vos codes pour faire obéir et haïr. Le mystère de la violence ainsi renvoyé à l’énigme de la croyance - du moins celle qui est contraire à nos valeurs - soulève un paradoxe. Les radicalisés nous considèrent nous, les « normaux », comme les endoctrinés qui agressons. Et toute lutte idéologique suppose de proclamer que l’adversaire est un fanatique destructeur.

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- La frontière se confond entre une croyance et une volonté. Les jihadistes sont hyperdogmatiques et, même si nous ne cessons de leur répéter que « ce n’est pas le vrai islam », ils ne font rien qu’ils ne justifient par une sourate ou un hadith. Le principe de soumission au commandement divin - qui les conduit à refuser toute démocratie, Dieu devant commander et non le peuple - suppose le projet de vivre leur foi dans une communauté pure. Donc de combattre tout ce qui s’oppose au triomphe de l’Oumma. Donc l’obligation de la lutte. L’horrible cohérence du raisonnement rend douteuse la comparaison avec les gens qui tombent dans la drogue, l’alcoolisme ou la délinquance.

- La tension entre une passion et un dogme. On a beaucoup débattu (Roy vs Keppel) si un désir de radicalité cherchait prétexte ou direction dans le jihadisme ou l’inverse. Ou bien une force,- certes liée à des facteurs économiques, sociologiques ou culturels -, comme un désir de mort, trouve à se décharger dans l’engagement islamiste (mais pourquoi sous cette forme là ?). Ou bien une idéologie éveille les pulsions les plus guerrières (mais pourquoi avec une pareille efficacité rhétorique ?). Tout au long de l’Histoire les idées qui voulaient changer le monde ont rencontré des colères qui mobilisaient des gens. Entre les deux, des communautés, des groupes organisés, des outils pour convaincre et rassembler. C’est, d’ailleurs, ce dont s’occupe souvent la médiologie.

La notion de radicalisation réduit les rapports entre violence, révolte, soumission et idéologie à une dérive psychologique, crise ou anomalie sociale.

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Outre qu’elle n’explique guère, elle nie deux dimensions du jihadisme. Fait religieux, il suppose une communauté qui se rassemble par le haut. Fait politique, il implique une instance qui se proclame notre ennemie et nous traite comme tels. Là où nous pensons dysfonctionnements et thérapie, ils pensent affrontement final et jugement des âmes. Nier que l’autre pense n’a jamais aidé à le vaincre.
 

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Die Konstanten Ernst von Salomons

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Markus Klein:

Die Konstanten Ernst von Salomons

Ex: https://www.wir-selbst.com

Kadett, Freikorpskämpfer, Nationalist, Friedenskämpfer und Schriftsteller

Es gibt wenige Personen in der deutschen Geschichte des 20. Jahrhunderts‚ die während ihres gesamten Lebens solch unterschiedlichen und wechselhaften Beurteilungen von sämtlichen Seiten und Parteiungen unterworfen waren‚ wie Ernst von Salomon‚ der doch immer explizit für sich in Anspruch nahm‚ als „Deutscher“ zu handeln und zu schreiben. Die Spannweite der Urteile über ihn reicht von „literarisch hochbegabter Chronist‚ ein Verschwörer aus Veranlagung‚ ein moderner Landsknecht aus Neigung“ über „preußischer Rebell“ und „Edelfaschist“ bis zu „die begabteste und für die Geschichte des Jahrhunderts zwischen 1920 und 1930 vielleicht wesentlichste Erscheinung“. Damit sind noch längst nicht alle Urteile erfaßt.

Ohne daß vorab geklärt wurde‚ ob er denn überhaupt ein „politischer“ Mensch war‚ scheiden und schieden sich an ihm die Geister‚ entzündeten sich an seiner Person und seinen Handlungen und Stellungnahmen scharfe Konflikte bis hin zur Polarisation‚ und das selbst innerhalb nach außen homogen erscheinenden politischen Parteiungen. Mit wechselnden Vorzeichen‚ jedoch ununterbrochen‚ berief sich die eine oder andere Seite auf ihn als Kronzeugen‚ als Mitstreiter‚ oder verdammte ihn und seine Handlungen als „Opportunismus“‚ „Katzenjammer“‚ „Romantik“‚ „Naivität“‚ „Unverbesserlichkeit“‚ „Nihilismus“‚ „Verharmlosung“‚ „Kommunismus“ oder „Nationalsozialismus“. Die einen erklären ihn zum „German enemy of Germany“‚ andere gestehen ihm „Läuterung“ zu‚ mal bezeichnet man ihn als Wegbereiter des Dritten Reiches‚ und dann widmen ihm ehemalige Lagerinsassen von Buchenwald einen dankbaren Nachruf. Anscheinend nirgendwo auf Dauer hingehörend – zumal politisch –‚ aber immer Stellung beziehend‚ scheint sein Leben‚ das die ersten siebzig Jahre des 20. Jahrhunderts begleitet hat‚ unbegreiflich‚ wechselhaft‚ standortlos. Und dennoch: niemals scheint seine Person uninteressant‚ belang- oder wertlos‚ niemals wurde sie von allen Seiten zugleich ignoriert. Immer stritt man sich über ihn und mit ihm‚ verdammte ihn oder erklärte ihn gar für gefährlich; und durchgehend nahm er für sich in Anspruch‚ als Deutscher zu sprechen und zu handeln. Das scheint die einzige Konstante seines Lebens zu sein.

51CsGiF4ziL._SX322_BO1,204,203,200_.jpgErnst von Salomon ist in Deutschland erstmals unrühmlich bekannt geworden durch seine Teilnahme am Attentat auf den damaligen Reichsaußenminister Walther Rathenau im Sommer 1922. Nach Verbüßung seiner Zuchthausstrafe trat er für eine große Öffentlichkeit erneut in Erscheinung‚ als er im Januar 1930 bei Ernst Rowohlt sein literarisches Erstlingswerk „Die Geächteten“ veröffentlichte. Dieses stark autobiographisch geprägte Buch hatte im wesentlichen eben diesen Mord an Walther Rathenau zum Inhalt‚ durch den Ernst von Salomon als Figur der damaligen unmittelbaren Zeitgeschichte überhaupt interessant geworden war. Fortan galt er neben Ernst Jünger‚ Franz Schauwecker‚ Albrecht Erich Günther‚ Ernst Niekisch und Friedrich Hielscher als eine der Hauptfiguren des in der Literatur und der Publizistik jener Jahre vor dem Ende der Weimarer Republik wuchernden „Neuen Nationalismus“‚ wie sie selbst sich nannten. In dieser Zeit blühten in der geistigen Szene der Republik die literarischen Wortmeldungen der heute sogenannten „Konservativen Revolution“. In allen Veröffentlichungen zu diesem für die Geschichte und das Scheitern der Weimarer Republik so wichtigen Thema taucht immer wieder der Name Ernst von Salomons auf‚ ohne daß indes weiter auf ihn eingegangen wird. Nach der Katastrophe des Zweiten Weltkrieges sollte er sich erneut durch einen in der damaligen politischen Lage der Deutschen hochbrisanten Bestseller bemerkbar machen‚ der zum ersten Buchverkaufserfolg der neu entstandenen Republik wurde: „Der Fragebogen“. Die als Folge dieser Veröffentlichung aufeinanderprallenden Meinungen ließen erahnen‚ inwieweit Ernst von Salomon abermals mit seiner „Provokation“ in ein politisches Wespennest gestochen hatte. In weiten Kreisen der publizistischen Öffentlichkeit galt er nun als unverantwortlicher „Weißwäscher“ des Dritten Reiches‚ seiner Vorgeschichte und seiner Greuel. Zumal seine bitterböse Polemik gegen die amerikanische Besatzungsmacht polarisierte seine Leser. Und ein weiteres Mal in seinem Leben sollte er mit großer Resonanz in der Öffentlichkeit erscheinen. Ende der fünfziger und Anfang der sechziger Jahre engagierte sich der bis dahin als einschlägiger Propagandist des Soldatentums und des deutschen Nationalismus bekannt gewordene Ernst von Salomon publikumswirksam gegen die Wiederbewaffnung und die atomare Rüstung‚ nahm demonstrativ an den entstehenden Ostermärschen teil und ergriff Partei für als „kommunistisch“ bekannte oder benannte Organisationen und Parteien. Erstaunt und befremdet nahm die bundesdeutsche Öffentlichkeit zur Kenntnis‚ daß er einen Bogen vom „Rechts“-extremisten zum „Links“-extremisten geschlagen zu haben schien. Darin unterschied er sich eindeutig von den Verhaltensmustern der ansonsten als ehemalige „Nationalrevolutionäre“ bekannten Personen wie beispielsweise Ernst Jünger. Umgekehrt wiederum ist er in seinem Hausverlag‚ in dem die weitaus meisten Wortführer jener frühen Friedensbewegung zu Worte kamen‚ posthum wegen seiner nationalistischen Vergangenheit zur persona non grata erklärt worden. Das Andenken an ihn besteht dort ledglich in der Weitervermarktung seiner auflagenstärksten Bücher.

So scheint das Leben Ernst von Salomons durch einen Bruch gekennzeichnet‚ der ihn von allen anderen ehemaligen Vertretern der „Konservativen Revolution“ abhebt. Das allein sollte schon Anlaß genug sein‚ seiner Vita und den Bedingungen solcher Paradigmenwechsel nachzuspüren. Sofern man der „Konservativen Revolution“ und ihren Vertretern eine Relevanz in der deutschen Zeitgeschichte beimißt – was aufgrund der anscheinenden geistigen Verwandtschaft mit dem Nationalsozialismus naheliegt –‚ muß sich die Beschäftigung mit Ernst von Salomon als Subjekt solcher Forschungen geradezu aufdrängen. Über die anderen Vertreter dieses Forschungsthemas hinaus weist Ernst von Salomon neben dem obigen „Frontenwechsel“ noch ein besonderes Phänomen auf: er war vor seiner literarischen Laufbahn zunächst als Täter in Erscheinung getreten. Das wiederum sichert ihm eine herausragende Position innerhalb der „Konservativen Revolution“‚ die sich ansonsten primär im Literarischen abgespielt hat. Als Ansatz zur Aufhellung des Phänomens der „Konservativen Revolution“ ist seine Person somit vor jeder anderen geeignet.

Geschichte ist letzten Endes von Personen geprägt. Was immer die treibende Kraft der Geschichte sein mag‚ Utopie‚ Gewalt oder Mythos‚ was immer als Anlaß dahinterstehen mag‚ soziale‚ wirtschaftliche oder politische Konstanten der jeweiligen Gesellschaften‚ handeln tun Personen‚ und sei es auch kollektiv. Theodor Lessing hat deshalb wohl recht‚ wenn er bemerkt‚ daß die Biographie „nicht nur die lauteste‚ sondern auch die aufschlußreichste Quelle von Geschichte zu sein“ scheint. Über die Biographien der einzelnen Personen‚ ihre geistigen Hintergründe‚ Handlungen und Wirklungen auf ihre Umwelt‚ lassen sich Steinchen zu einem Gesamtbild der Geschichte zusammentragen. Für die Frage‚ wie und warum unsere deutsche Geschichte im 20. Jahrhundert so verlaufen ist‚ wie sie sich uns heute präsentiert‚ ist eine Beschäftigung mit Personen vom Range eines Ernst von Salomon unerläßlich. Sie haben aktiv und passiv in das Geschehen in jenem Jahrhundert direkt und indirekt eingegriffen und somit die deutsche Geschichte mitgeprägt. Ernst von Salomon hat darüberhinaus ein stark autobiographisch gepägtes Schrifttum hinterlassen‚ das nach wie vor zu entschiedensten Stellungnahmen herausfordert. Eine Auseinandersetzung mit seinem literarischen Erbe bedeutet gleichzeitig immer auch eine Auseinandersetzung mit der Geschichte und dem heutigen geistigen und politischen Gesicht Deutschlands. Andererseits prägt seine Hinterlassenschaft paradoxerweise auf französischer Seite gerade bei den dortigen Publizisten und Intellektuellen ein als positiv wahrgenommenes Bild von Deutschland und den Deutschen. Dieses Bild entspricht in keinster Weise den heutigen Gegebenheiten in Deutschland und wird umgekehrt von den Deutschen selbst als Schreckbild für unsere europäischen Nachbarn eingeschätzt. So stellt sich die Frage‚ wer dieser Ernst von Salomon war‚ woher und von wem seine weltanschaulichen und politischen Prägungen stammten‚ was er warum gewollt und unternommen hat‚ und was die Bedingungen waren‚ die seine „Konversionen“ herbeiführten – wenn es denn welche waren. Vielleicht nämlich war es ja auch nicht die Person von Salomon‚ deren Grundmuster sich änderten‚ sondern der politische Bedingungsrahmen nebst seinen Bewertungsmaßstäben‚ in dem die Deutschen fundamentale Wechsel zu vollziehen hatten.

515QHaZTS1L._SX306_BO1,204,203,200_.jpgDie Frage nach den Konstanten im Denken und Handeln Ernst von Salomons, aus denen sich eventuell eine politische Zuordnung ableiten ließe, die sein ganzes Leben erfaßt, läßt sich wohl nur dann beantworten, wenn man systematisch sein politisches Weltbild zusammenträgt. Dies soll hier geschehen.

Staat und Bürgerkrieg

Der Staat war in Ernst von Salomons Vorstellung zunächst einmal der Gegenbegriff zum Bürgerkrieg. Dies war ein Rückgriff auf den Staatsbegriff der frühen Neuzeit, als die entstehenden Staaten zu Instrumenten der Überwindung der konfessionellen Bürgerkriege wurden. Damit einher ging der zugehörige Begriff der Souveränität, wie er auch von Ernst von Salomon in Anspruch genommen wurde. Die Idee von der Souveränität des Staates verstand er in dem Sinne, den Thomas Hobbes ihr gegeben hatte: die von Natur aus ungeselligen Menschen werden erst durch die Macht des souveränen Staates zusammengezwungen und somit dem Staatszweck dienbar gemacht. Zur Souveränität in diesem Staatsverständnis gehörte ebenso, daß der Staat auf der einen Seite frei von universalistischen Interessen, andererseits frei von allen partikulären Interessen sei, die sich auf gesellschaftlicher Ebene finden. Das bedeutete zum einen, daß keine auf Utopien oder Geschichtsphilosophien gründende Ideologie zur Legitimationsgrundlage des Staates werden durfte, zum anderen, daß Staat und Gesellschaft keinesfalls miteinander zur Deckung kommen durften. Jeder Einfluß universalistischer oder partikulärer Interessen auf den Staat bedeutete nach diesem Staatsverständnis eine Negation der Souveränität. Durch eine solche Negation wiederum würde der Staat seine Funktion und seinen Sinn verlieren. So erklärt sich Ernst von Salomons grundsätzliche Ablehnung der pluralistischen Republik mit ihren Parteiungen und Einflußgruppen. Ein Staat unter dem bestimmenden Zugriff einer Partei war nach diesem Verständnis die Aufhebung des Staates selbst zurück zum Bürgerkrieg. Der Bürgerkrieg nach diesen Kategorien mußte nicht unbedingt offene Formen von Straßenschlachten oder ähnliches annehmen. Seine Existenz bewies sich bei solchem Staatsverständnis schon wesentlich sublimer: durch Identifizierung des Gegners mit dem Verbrecher, durch gleichzeitige Behauptung und Verneinung von Rechtsordnungen durch verschiedene Parteien, und durch exklusive Ideologiesierung des politischen Wettstreites.

Dieses Staatsverständnis findet sich bei Ernst von Salomons durch seine gesamte Vita. Es war in weiterem Sinne die staatstragende Grundlage des „Vernunftsstaates“ Preußen gewesen, wie er seit der napoleonischen Besatzungszeit, spätestens aber seit der Reichsgründung nicht mehr bestand. Überlebt hatte diese Vorstellung indes in einigen preußischen Adelsfamilien, deren ganze Daseinsberechtigung in der stillschweigenden Voraussetzung bestand, daß eben ein solcher Staat weiterbestände. Überlebt hatte dieses Bild vom Staat indes auch in den preußischen Kadettenanstalten und dem aus ihm hervorgegangenen Offizierskorps. Hier wurde ein anachronistisches Staatsbild in einer anachronistischen Institution weitergelebt und weitergegeben, für das es im Deutschen Reich keine Entsprechung mehr gab. So wurde Ernst von Salomon auf dieses Staatsbild hin geprägt. Es beeinflußte sein negatives Bild von der sich im Pluralismus auflösenden Weimarer Republik wie es seine Ablehnung des nationalsozialistischen Reiches prägte, in dem er vordergründig dessen Charakter als ideologische Bürgerkriegspartei erkannte. Und die aus diesem Verständnis sich ergebene Souveränität war es auch, die Ernst von Salomon nach dem Zweiten Weltkrieg für die Deutschen forderte, die er erneut, und diesmal sogar noch faktisch, ideologisch getrennt sah. Sein Rekurs auf sein idealistische Preußenbild zu jener Zeit bedeutete nichts anderes, als die Forderung nach einem deutschen Staat, der solch tiefgreifende Parteien kraft seiner Souveränität in sich aufzulösen vermöchte. Solange das nicht geschehen war, konnte für Ernst von Salomon auch keiner der deutschen Teilstaaten mit Recht die Qualität eines Staates für sich beanspruchen.

md30031759834.jpgAndererseits bedingte dieses Staatsverständnis aber auch zum Teil zumindest seinen aktivistischen Widerstand gegen die Weimarer Republik mit. Aus der dem Staat zugedachten Funktion heraus glaubte Ernst von Salomon, daß es für ihn auch eine „Pflicht zum Staate“ gäbe, d.h. daß er durch seinen Kampf gegen die Republik, der er ihr Staatssein in diesem Sinne absprach, eben die Vorraussetzungen schaffen würde, erneut einen Staat zu begründen. Hierbei taucht eine in seiner vita immer wiederkehrende Widersprüchlichkeit auf, die nur dadurch zu erklären scheint, daß Ernst von Salomon damals noch nicht begriffen hatte, daß dieser preußische souveräne Staat längst nicht mehr bestand, daß er auch nicht erst mit der Gründung der Republik verschwunden war, sondern weit vorher schon. Als seine Erziehung abgeschlossen war und er Kenntnis von politischen Erscheinungen nahm, war unglücklicherweise just jener Augenblick, in dem nach vierjähriger Kriegswirtschaft die Republik ausgerufen wurde. So machte er die Staatsform der Republik für etwas verantwortlich, was schon seit Jahrzehnten vorhanden war, und so kam er nicht auf den Gedanken, daß er selbst ein Relikt mit anachronistischem Staatsverständnis darstellt.

Armee und Krieg

Das Staatsverständnis, das Ernst von Salomon in den Kadettenanstalten vermittelt bekommen hatte, bedingte zwangsläufig auch sein anachronistisches Bild vom Charakter des Krieges. Der Staat als Gegenbegriff zum Bürgerkrieg hatte nicht nur das Recht zur Gewaltanwendung im Inneren bei sich monopolisiert, sondern vor allem auch das zum Krieg nach außen. Daraus war der Kriegsbegriff des gehegten europäischen Staatenkrieges entstanden. Diesem Kriegsbegriff entsprach das Verständnis von der Rolle der Armee. Die Armee konnte nach diesem Staatsverständnis allein Repräsentantin des souveränen Staates sein, wie auch der Staat sich in seiner Armee spiegelte. So erklärt sich seine trügerische Hoffnung von Ende 1918, mit der Rückkehr der Fronttruppen ins Reich werde automatisch die Einheit der Staatsbürger wiederhergestellt. Indes erklärt es auch, warum er sich gegen eine Wiederbewaffnung nach 1945 aussprach. Da eine Armee nur eine staatliche sein könne, weder die Bundesrepublik noch die DDR aber aufgrund der Teilung Staatscharakter in diesem Sinne hätten, durfte es auch keine Bewaffnung der beiden geben, die im Endeffekt nach seiner Bürgerkriegsoptik antagonistisch gegeneinander stehen mußten. Der hier bezüglich seiner eigenen Teilnahme an den partisanenähnlichen Freikorpstruppen in den Jahren 1919-21 auftauchende Widerspruch in seiner vita hängt erneut mit dem oben schon angesprochenen Problem zusammen. Zur damaligen Zeit führte in seinem Verständnis die Vorstellung noch die Optik, daß staatliche Regularität im Sinne seines Staatsverständnisses vorhanden sei. So konnte zunächst der bürgerkriegsähnliche Charakter der Freikorps nicht in sein Bewußtsein dringen. Nachdem die Armee sich gegen die Dynastie und für die Republik entschieden hatte, in dem pragmatischen Bewußtsein, damit eher dem Staat zu dienen als wenn er zur Disposition der Spartakisten stände, konnte für Ernst von Salomon aufgrund seines Verständnisses von Staat und Armee die Frage nach dem Charakter seines Einsatzes zunächst nicht auftauchen. Er glaubte sich in seinem Wollen identisch mit den Notwendigkeiten zum Staatserhalt. Seine Motivation, in den Freikorps zu dienen, entsprang also dem Willen, wie er es selbst nachher erkannte, „der staatlichen Idee, der staatlichen Aufgabe“ zu dienen. Erste Zweifel stellten sich allerdings ein, als er zu Polizeimaßnahmen eingesetzt wurde, was seinem Verständnis von der Rolle der Armee eines souveränen Staates diametral entgegengesetzt war. Darum auch drängte es ihn an die im Baltikum noch vorhandene Frontlinie, an der er staatserhaltende Entscheidungen anstehen sah. Sein Glaube, dort in Übereinstimmung mit den staatlichen Interessen des Reiches zu kämpfen, bewirkte in ihm den grundsätzlichen Bruch mit der Republik, als diese die Freikorpskämpfer aus dem Baltikum zurückrief. Doch auch der Kapp-Putsch ließ ihn nicht erkennen, daß er damit nicht mehr in Übereinstimmung mit seiner Vorstellung von der Armee handelte. Darum auch ließ er sich gleich anschließend als Zeitfreiwilliger für den Ruhrkampf werben.

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Zu Beginn des Zweiten Weltkrieges bewirkte sein Glaube an die weitere Gültigkeit des gehegten Krieges des ius publicum europaeum, daß er dessen durch die herrschende Ideologie des Nationalsozialismus zwangsläufig von Beginn an potentiell vorhandenen tatsächlichen Charakter nicht erkannte. Das Bewußtsein, daß schon seit dem Zeitalter des europäischen Imperialismus die Periode des gehegten Krieges vorbei war, daß Krieg und Bürgerkrieg nicht mehr voneinander zu trennen waren, stellte sich bei ihm erst im Verlauf dieses Krieges ein. Ab dann begriff er den Krieg und den folgenden „Kalten Krieg“ tatsächlich als ideologische Bürgerkriege. Ob er allerdings daraus auch die unabdingbar entstehende Schlußfolgerung erkannt hat, daß es den Staat in seinem Verständnis nicht mehr geben konnte, seit Kriege den Charakter von Bürgerkriegen angenommen hatten, ist zweifelhaft.

Kollektivzuordnungen

Das Staatsverständnis vom souveränen Staat als Gegenbegriff zum Bürgerkrieg hatte eigentlich nichts mit dem französischen Nationsbegriff gemein, der Staatsvolk und Nation gleichsetzt. Auch Preußen, dessen Bild für Ernst von Salomon zum Staatsbegriff wurde, war kein Nationalstaat gewesen und wollte es auch nicht sein. So wollte es Ernst von Salomon auch verstanden wissen, als er nach 1945 sein Modell „Preußen“ für eine europäische Einheit propagierte. Zur Zeit seiner Kadettenausbildung und vor allem in den Jahren danach sah dies noch anders aus. Neben der anachronistischen preußischen Staatsüberlieferung, die in den Kadettenanstalten und in der Armee vorherrschten, traten auch bei ihnen – ihre Staatsvorstellung verfremdend – die im Reich umgehenden nationalstaatlichen und deutsch-völkischen Ideen und damit zusammenhängend spezielle Formen des Antisemitismus. Vermischt mit der als Folge der Französischen Revolution aus Frankreich stammenden Idee vom Nationalstaat, führte dies in Deutschland, wo der Begriff der Nation mit einer Vorstellung von einer Volkszugehörigkeit einherlief, zu einer begrifflich unklaren Zweigleisigkeit. Dieser Dualismus, den weder Ernst von Salomon noch die anderen Kadetten und Freikorpskämpfer zu jener Zeit erkannten, drückt er später zur Zeit des rassenideologischen Nationalsozialismus in seinem Kadetten-Buch aus. Dort erklärt er, er habe am Beispiel seines Kameraden Bachelin erfahren, „wie sich die Fremdheit des Blutes sehr wohl in deutsche Anschauung sublimieren konnte …“ Zu seiner Kadettenzeit jedoch war ihm dies nicht bewußt geworden, und so erklärt sich der Widerspruch zwischen seiner ihn bestimmenden Staatsanschauung und den völkischen Ideen, die ihn vor allem nach dem Einsatz in Oberschlesien umtrieben, und die auch beim Rathenau-Attentat eine maßgebliche Rolle spielten. Völkisch-romantische Gedanken – wenn auch anderer Art – waren es auch, die ihn noch zur Zeit seiner Teilnahme am Landvolkkampf bewegten. Endgültig abgelegt zu haben scheint er sie erst während seiner Selbstreflexion in Frankreich, als er erstmals im Ausland weilte und dabei sich auch über die ins Extrem getriebenen Ideen der Nationalsozialisten klar zu werden versuchte.

818hoOGmTbL.jpgWas die unentwirrbare Vermischung solcher Gedanken noch verstärkte, war, daß Ernst von Salomon im Verlaufe seiner aktivistischen Phase über den souveränen Staat und das Volk hinweg noch eine dritte Solidarisierungsebene fand, die weder mit dem einen noch mit dem anderen etwas zu tun hatte. Dies war das frontenübergreifende Gemeinschaftsgefühl des sogenannten „Frontsozialismus“. Aus allen Kreisen und Schichten stammend, lag ihrem Empfinden und ihrem Verhalten, ebenso wie dem ihrer Jahrgangskameraden, die den entgegengesetzten Weg in die kommunistischen Truppen einschlugen, ein gemeinsames Generationserlebnis zugrunde. Dies war das Empfinden, daß mit dem Ausbruch des Krieges 1914 eine Epoche ihren Abschluß gefunden hätte, ähnlich wie dies auch bei den vergleichbaren Generationen in den anderen beteiligten Ländern begriffen wurde. Der Krieg bewirkte ein Gefühl der Auflösung sämtlicher Entzweiungen und des Durchbruchs zu einem neuen Prinzip des nationalen Zusammenlebens, was sich in dem Empfinden der Frontsoldaten noch unmittelbarer Ausdruck verschaffte. Das wurde begriffen als eine Antwort auf die Fragestellungen der vorherigen Epoche, die die Ausweichmöglichkeiten, vor allem die Jugendbewegung und der Expressionismus, nur unzureichend hatten verdrängen können. Und wo diese Fragestellungen nicht so prägnant oder auch überhaupt nicht vorhanden gewesen waren, der grenzenlose Krieg mußte sie zwangsläufig hervorrufen, denn „das Meer des vergossenen Blutes“, wie Ernst Niekisch schrieb, war nur zu ertragen, wenn sich die Aussicht auf eine neue, „höhere und `bessere΄ Ordnungswelt“ eröffnete. Um die Opfer des Krieges nicht als gänzlich sinnlos erscheinen zu lassen, mußte also ein Sinn dahinter gefunden werden, mußte am Ende all dieser Opfer stehen, und wo er es nicht tat, da war der Abgrund schier bodenlos, in den der Geist stürzte. Als aber am Ende des Krieges keine Wandlung eintrat, als die bürgerliche Ordnung weiterbestand und gar „den Sieg als Bestätigung ihrer selbst ausdeutete und feierte“, da öffnete sich eben dieser befürchtete Abgrund vor den Frontsoldaten wie vor den Kadetten, die in einem entsprechenden Geist erzogen worden waren und sich deshalb so nahtlos unter erstere einreihen konnten: „Das Ende des Krieges hat keinerlei eindeutige Lösung erbracht, hat keine Antwort gegeben, sondern hat nur die Fragestellung verschärft.“ Solche Ideen wiederum führten in Verbindung mit einer Enttäuschung über den angeblich „materialistischen“ Charakter der „Revolution“ von 1918/19 zu einer arroganten Position gegenüber den „Massen“, die doch andererseits das „Volk“ waren, das in seinen völkisch-nationalen Vorstellungen eine Rolle spielte. Und dieses elitäre Bewußtsein meinte eine Kategorie Menschen, die aktivistisch, idealistisch und „unbedingt“ handeln würden, im Gegensatz zum „bourgeoisen“ Bürger. Dieses Verbundenheitsgefühl aber bezog sich nicht ausschließlich auf deutsch Mitstreiter, sondern – auf einer gänzlich anderen Ebene – auf jeden Menschen, der dazugehören würde.

Diese völlige Vermischung unausgegorener Kollektivvorstellungen und ‑zuordnungen aber bedingte die romantischen Ideen von einer zunächst „völkischen“, dann „nationalen“ Revolution, die im Grunde nichts anderes bewiesen, als daß Ernst von Salomon zeitlebens massive (kollektive) Identitätsprobleme hatte. Das hat Wolfgang Herrmann schon 1933 und als bisher einziger richtig erkannt, der Ernst von Salomon als den Vertreter des romantischen Nationalismus innerhalb der „Konservativen Revolution“ betrachtete: „Ganz im Subjektiven wurzelnd, sucht er im Grunde nicht die Nation, sondern sich selbst.“ Das Wesen dieser politischen Romantik bestand gerade darin, daß seine Vertreter, die „ein höheres Drittes“ zu erstreben dachten, Opfer ihrer völligen Individualisierung waren. Diesem eklatanten Widerspruch unterlag auch Ernst von Salomon.

Geschichtsverständnis

Obwohl Ernst von Salomon Nominalist war, jede eschatologische Geschichtsphilosophie und die daraus folgenden Ideologien grundsätzlich abgelehnt hat, und obwohl er Spengler ausgiebig rezipiert hat, auch hinsichtlich des Kulturpessimismus, so ging ihm als Romantiker doch dessen zyklisches Geschichtsverständnis vollkommen ab. Auch er glaubte an eine „Fortentwicklung“ der Geschichte hin zu etwas „Höherem“. Deshalb galt es seinem Geschichtsverständnis nach, unbedingt im Sinne dieses „Höheren“ sich fortzuentwicklen und „Geschichte zu machen“. Das bedingte wiederum auch sein „preußisches“ Staatsverständnis und verfälschte es um ein weiteres Moment: Der Staat durfte ihm nichts statisch Seiendes sein, sondern mußte über eine Aufhebung des Bürgerkrieges hinaus seine Existenz in staatlicher Lebensäußerung und in Dynamik rechtfertigen. Dies vermischte Ernst von Salomon dabei ausgiebig mit den Volksvorstellungen, wie sie von Herder geprägt waren: die in ihrer politischen Form, dem Staat, angetretenen Völker waren ihm in Richtung eines „Höheren“ sich entwickelnde organische Individualitäten mit jeweils eigenen Anlagen, die die jeweils eigenen Aufgaben in der Weltgeschichte bestimmten.

Aus diesem Glauben an die Notwendigkeit einer normativen „Fortenwicklung“ der Geschichte entstand auch sein unbedingter Drang, „tätig“ (im Sinne von Hannah Arendts „Vom tätigen Leben“) zu sein, sich gegen den „bourgeoisen“ Stillstand des ausschließlichen Konsums zu wehren. Es war dies die Wurzel für seinen aktivistischen Idealismus. Gleichzeitig war es aber auch der tiefere Grund, der hinter Ernst von Salomons Kampf gegen die Bedrohung durch die Atombombe stand. Denn die Atombombe bedrohte nach seiner Geschichtsauffassung nicht nur die Leben der Menschen, sondern brachte durch ihr bedrohendes Dasein die Geschichte überhaupt zum Stillstand. Das aber durfte im Sinne einer solchen nicht-eschatologischen, gleichwohl aber linearen Geschichtsbetrachtung auf keinen Fall sein. Wie konnte da der Weg der Menschheit nach „höherer Humanität“ fortgesetzt werden?

csm_1742_189010ed1a.jpgSozialismus und Liberalismus

Weder der ideologische Sozialismus noch der Liberalismus waren für Ernst von Salomon eine relevante Bezuggröße. Unter beiden verstand er eschatologische und vor allem internationalistische Ideologien, die für ihn völlig undenkbar waren. Den Liberalismus verachtete er darüber hinaus zutiefst, da er die unter seiner Verbindlichkeit lebenden Menschen „korrumpieren“ würde: statt tätigem Idealismus und „Leben“ gelte für sie nur noch eine Bezugsgröße, die des Geldes und des Konsums. In seiner geschichtsphilosophischen Terminologie würde der Liberalismus, der für Ernst von Salomon unweigerlich mit dem Kapitalismus einherging, das „Leben“ des Menschen selbst unterbinden und durch ein bloß konsumierendens Vegetieren ersetzten. Da der Liberalismus durch eine völlige Individualisierung der Menschen zudem den Staat auflösen würde, er also der Existenz des Staates per definitionem feindlich sei, würde er obendrein die Teilnahme der betreffenden Staaten an dem Fortgang der Geschichte in dem Sinne, den Ernst von Salomon ihr beimaß, unterbinden. So aber müsse der notwendige Beitrag einzelner Völker zur „Beförderung der Humanität“ entfallen. Ähnliches konstatierte er auch für den ideologischen Sozialismus. Der korrumpiere die Menschen zwar nicht hin zu einem bloßen „Vegetieren“, da er einen ihm eigenen Idealismus mit sich bringe, doch führten dessen inhärente Tendenzen zum Internationalismus ebenfalls zu Konsequenzen für die Fortentwicklung der Geschichte. Da nach seiner Geschichtsauffassung jedes Volk je einen eigenen und nur bei ihm zu erwartenden Beitrag zur Fortentwicklung der Geschichte leisten konnte, mußten diese zwangsläufig durch eine volksübergreifende Internationalisierung aufgelöst und damit der Menschheit zu deren Schaden vorenthalten werden. Gleichwohl erkannte er im Sozialismus – zurückgreifend auf sein untergründiges Staatsverständnis – immer noch eine „staatsnähere“ Ideologie als im Liberalismus, da der Sozialismus hinsichtlich der Pluralisierung der Gesellschaft gegenteilige Interessen verfolge. Verbunden mit der Ausrufung des „Großen Vaterländischen Krieges“ ist dies auch ein Grund dafür, warum Ernst von Salomon Stalin als „Staatsmann“ Achtung erwies.

Interessanterweise nahm Ernst von Salomon dennoch den Begriff des „Sozialismus“ für sich in Anspruch, doch meinte er damit etwas völlig anderes. Was er damit für sich in Anspruch nahm und was er im Sinne einer staatsverbindlichen Idee anstrebte, war der von Arthur Moeller van den Bruck und von Oswald Spengler formulierte und propagierte „dritte Weg“ eines sogenannten „Preußischen Sozialismus“. Der sollte, auch in der Vorstellung Ernst von Salomons, frei von jeder Idee des Marxismus und des Internationalismus, den von ihnen idealisierten preußischen Staatsgedanken mit den aus dem „Frontsozialismus“ hervorgegangenen Ideen verbinden. In einen solchen „Sozialismus“ sollten „natürliche Ordnungen“ herrschen statt „bürgerlicher Organisation“, und in einem dadurch bestimmten Staat sollte es allein darauf ankommen, den Willen seiner Untertanen zu richten auf daß ihr Wollen dem Sollen entsprach. Das Sollen wiederum bedeutete, in einer organischen Gestaltung der Gesellschaft nach Rang und Wert der Persönlichkeit (=Ordnung), daß jeder nach Können, Rang und Wert seine Kraft dem Staate zur Verfügung stellte, und zwar im aktiven Sinne.

Bewertung

Die begrifflich durchgehend unscharfen Ideen und Vorstellungen und ihre gleichzeitige Vermischung, die hinter Ernst von Salomons Weltanschauung liegen, lassen unweigerlich nur den Schluß zu, daß Ernst von Salomon alles andere als ein methodischer Denker war. Das heißt gleichwohl nicht, daß er unbedingt unsystematisch im Verlaufe seines Lebens gehandelt und seine eigenen Positionen aufgegeben hat. Teilweise abgesehen von seiner frühen aktivistischen und völlig verworrenen Phase der Jahre 1919 bis 1922, worunter die Freikorpskämpfe und das Attentat auf Walther Rathenau fallen, ist er sich den danach für sich als bindend erkannten Prinzipien und Vorstellungen treu geblieben. Der Mangel an begrifflicher Klarheit oder eindeutiger politischer wie geistesgeschichtlicher Einordbarkeit steht dem nicht entgegen. So entspringen seine über sein Leben verteilten Handlungen, die von dritter Seite den widersprüchlichsten Bewertungen unterliegen, zumindest ab dem Zeitpunkt seiner Haftentlassung zu Weihnachten 1927 einer Kontinuität, die zwar Ernst von Salomon, nicht jedoch den jeweiligen politischen Rahmenbedingungen eigen war. Durchgehende Konstanten, die hinter seinen Handlungen und Verlautbarungen standen, war der im Rahmen seiner Geschichtsphilosophie liegende Glaube an die Nationen als unabdingbar die Fortentwicklung der Geschichte beeinflussende Subjekte. Dazu gehörte auch sein unbedingtes Streben nach „Staatlichkeit“ im souveränen Sinne, sowie umgekehrt seine völlige Ablehnung jedes Internationalismus und jeder eschatologischen und auf anderer Bezugsebene denn der Nation und ihrer Organisation liegenden Ideologie.

Jede Qualifizierung innerhalb der von ihm abgelehnten Begriffssysteme kann Ernst von Salomon nur schwerlich gerecht werden. Man kann ihn deshalb weder in einem Spannungsfeld zwischen Sozialismus, Liberalismus und Nationalsozialismus einordnen noch eines – von welcher der vorgenannten Seiten wie auch immer bewerteten – Opportunismus zeihen. Sofern man unbedingt eine einordnende Bewertung über Ernst von Salomon fällen will, wird man ihm mit seiner Selbstverortung als „Preuße“ in dem von ihm gemeinten und idealisierten Sinne wohl am gerechtesten.

Markus Klein

Nach dem Studium der Politischen Wissenschaften, der Neueren und Neuesten Geschichte, der Philosophie und der Rechtswissenschaften an den Universitäten Heidelberg, Kiel, Köln, Leipzig, München und Siena mit abschließender Promotion zum Dr. phil. sowie nach ersten Jahren Berufserfahrung als geisteswissenschaftlicher Verleger und Publizist schloß Markus Klein ein Nachdiplomstudium Marketing & Betriebswirtschaft als «Master of Marketing» am Wirtschaftswissenschaftlichen Zentrum der Universität Basel ab, später nochmals ergänzt um ein Leadership Excellence Program an der ESMT European School of Management and Technology in Berlin.

Quelles sont les dix avancées scientifiques et technologiques qui ont marqué 2019?

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Quelles sont les dix avancées scientifiques et technologiques qui ont marqué 2019?

Nous rééditons ici, pour accroître sa diffusion, un éditorial sur ce thème scientifique du sénateur honoraire René Trégouët, repris du site http://www.europesolidaire.eu . Les intertitres sont de ce site.

https://www.rtflash.fr/quelles-sont-dix-avancees-scientifiques-et-technologiques-qui-ont-marque-2019/article

Cette semaine, il m'apparaît intéressant, comme je le fais chaque début d'année, de parcourir la presse scientifique française et anglo-saxonne pour essayer d'en extraire les grandes avancées scientifiques qui ont marqué l'année 2019. Après avoir consulté de nombreuses publications, parmi lesquels « La Recherche », mais également la revue du MIT, ou encore « Technowise, « The Scientist » ou « Science News », nous avons finalement retenu dix découvertes ou ruptures technologiques, mais également sociétales, qui nous paraissent particulièrement importantes.

Photo d'un trou noir

La première découverte qui a marqué l'année 2019, et a été largement reprise par l'ensemble de la presse scientifique internationale, est la première photographie jamais réalisée d'un trou noir.  Celui-ci est un véritable monstre, situé au cœur de la galaxie Messier 87, à 55 millions d'années-lumière de notre Terre. Sa taille défie l'entendement, puisqu'il est 6,5 milliards de fois plus massif que notre étoile, le soleil. Quant à son diamètre, il atteint les 48 milliards de km, soit neuf fois celui de l'orbite de Pluton... (Voir NASA).

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Pour parvenir à réaliser ce premier cliché d'un trou noir, les scientifiques ont dû déployer des trésors d'ingéniosité et ont réussi à surmonter d'immenses difficultés techniques. Ils ont notamment dû synchroniser avec une extrême précision et combiner une multitude de signaux reçus simultanément par plusieurs instruments situés dans différentes régions du globe.

Au terme de deux années de travail, d'analyse et de traitement informatique de quantités gigantesques de données, astrophysiciens et informaticiens ont finalement réussi à produire cette première photo historique d'un trou noir, un simple cercle orangé, sur fond noir, qui ne semble pas très spectaculaire, mais qui ne représente pas moins une avancée décisive dans la connaissance de l'Univers. Cette première image d'un trou noir confirme en effet définitivement l'existence de ces objets tout à fait fascinants dont la réalité a été mise en doute pendant des décennies par de nombreux scientifiques. Cette photographie historique confirme également la théorie de la relativité générale d'Albert Einstein qui explique le rôle fondamental de la force gravitationnelle (l'une des quatre interactions fondamentales de l'Univers) dans la structure de l'espace-temps et l'évolution du Cosmos.

Prédécesseurs de l'homo sapiens

Les deux découvertes suivantes que nous avons retenues concernent la connaissance de nos origines et de nos lointains ancêtres. On savait déjà, grâce à de récents travaux d'analyse de l'ADN de spécimens fossiles d'Homo sapiens, d'Homme de Neandertal et d'Homme de Denisova, que ce dernier et l'Homme de Neandertal avaient un ancêtre commun remontant à environ 450 000 ans, et que tous deux partageaient avec Homo sapiens un ancêtre commun remontant à environ 660 000 ans.

De nouvelles découvertes faites en 2019 confirment qu'il y a bien eu croisement et coexistence entre ces Dénisoviens, les Neandertal et les Sapiens. Certaines des populations d'Asie et d'Océanie en portent d'ailleurs encore la trace puisqu'on trouve, dans leur génome, des traces tout à fait identifiables de gènes de Dénisoviens. On sait en outre aujourd'hui que ce cousin de Neandertal et d'Homo sapiens a colonisé une large partie de l'Asie, qu'il s'est alors divisé entre au moins trois groupes distincts d'hominidés et qu'il s'est notamment adapté, bien avant Sapiens, à la vie à très haute altitude dans les montagnes de l'Himalaya (Voir Nature).

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Une autre découverte majeure, révélée également en 2019 par une étude publiée par le paléoanthropologue Florent Détroit (Muséum d'Histoire naturelle de Paris), confirme par ailleurs l'existence d'une nouvelle espèce humaine, Homo luzonenesis, qui vivait sur l'île de Luçon aux Philippines, il y 60 000 ans, ce qui porte à au moins cinq groupes les hominiens qui peuplaient déjà la Terre il y a 100 000 ans : les Homo Sapiens, en Afrique, les Neandertal en Europe, les Denisoviens en Asie, les Hommes de florès, en Indonésie et enfin les hommes de Luçon aux Philippines.

Avec ses caractéristiques anatomiques et morphologiques tout à fait particulières, mélange surprenant de traits archaïques et plus modernes, cet homme de Luçon était probablement à la fois bipède et arboricole. Ces découvertes remarquables concernant les Denisoviens et l'homme de Luçon bouleversent le schéma de l'évolution humaine et montrent clairement que celle-ci n'a pas été linéaire mais arborescente et foisonnante.

Sciences de la vie

Trois découvertes suivantes s'inscrivent dans le champ des sciences de la vie, de la médecine et des technologies de la santé. La première concerne la fascinante et subtile connexion entre les cellules cancéreuses et le système nerveux ; viennent ensuite les premières cultures de cerveau humain et l'arrivée des premières pilules ingérables téléguidées.

Aussi étrange que cela puisse paraître, une équipe de recherches françaises, du laboratoire cancer environnement (Inserm-CEA) à Fontenay-aux-Roses, a découvert l'an dernier que le cerveau produit des cellules-souches neuronales qui, franchissant la barrière hématoencéphalique – l'enveloppe du cerveau pourtant réputée infranchissable – sont transportées par le sang et vont aller infiltrer des tumeurs cancéreuses en formation, notamment dans la prostate (voir article RT Flash).

Cette équipe, dirigée par Claire Magnon, a travaillé sur les tumeurs de 52 patients atteints de cancer de la prostate. Ces recherches ont permis de découvrir une nouvelle catégorie de cellules, appelées « cellules progénitrices neuronales », que l'on trouve en principe uniquement au cours du développement embryonnaire, dans deux aires du cerveau, l'hippocampe et la zone sous-ventriculaire. Ce très beau travail scientifique a également permis de montrer qu'il existait une relation très forte entre le nombre de ces « cellules vagabondes » et l'agressivité du cancer étudié.

Cette découverte fondamentale est extrêmement importante car elle ouvre une voie thérapeutique tout à fait nouvelle pour combattre les cancers. De récentes observations cliniques ont notamment déjà pu montrer le meilleur taux de survie chez certains patients atteints de cancer de la prostate qui prenaient régulièrement des bêtabloquants (substances qui bloquent les récepteurs de l'adrénaline).

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Il faut également souligner que l'observation des fibres nerveuses à l'intérieur des tumeurs s'est étendue à d'autres types de cancer : côlon, pancréas, mélanome. Plusieurs essais cliniques sont d'ailleurs actuellement en cours aux États-Unis pour évaluer l'efficacité de bêtabloquants sur différentes tumeurs. L'idée est qu'en bloquant les récepteurs adrénaline et en empêchant l'adrénaline d'accéder aux cellules du trauma, il est peut-être possible d'entraver le développement de la tumeur.

Une autre avancée assez extraordinaire de sciences de la vie est celle qui concerne la production en laboratoire des premiers organoïdes de cerveaux. Ces mini cerveaux ont été créés par une équipe de recherche de l'Université de Californie-San Diego et, contre toute attente, ces organoïdes ont produit des neurones qui se sont peu à peu synchronisés sur différentes fréquences, comme le fait le cerveau d'un embryon, jusqu'au huitième mois de développement. Bien que ces organoïdes demeurent des structures beaucoup plus simples de cerveau humain, leur utilisation ouvre d'immenses perspectives, tant pour progresser dans la connaissance fondamentale du fonctionnement cérébral que pour expérimenter de nouveaux traitements contre les nombreuses pathologies qui peuvent affecter le cerveau, qu'il s'agisse de troubles, tels que l'autisme, ou de maladies neurodégénératives comme Alzheimer ou Parkinson (Voir Science Direct).

Dernière avancée retenue dans le domaine médical, la pilule intelligente et téléguidée, capable de réaliser des prélèvements à l'intérieur du corps, de filmer en haute définition l'intérieur des organes et, dans certains cas, d'acheminer et de délivrer « sur site » des médicaments, de manière programmable.

Depuis une dizaine d'années, la capsule endoscopique a pris une place majeure dans l'arsenal du diagnostic et ses moyens d'explorations de l'intestin grêle ont révolutionné les pratiques médicales. Il est aujourd'hui possible, à l'aide de ces petites capsules, d'explorer avec une grande précision l'estomac, le côlon ou l'intestin grêle, afin d'y déceler d'éventuelles lésions.

Aux Etats-Unis, Guillermo Tearney, pathologiste et ingénieur au Massachusetts General Hospital (MGH) à Boston, développe de petites pilules ingérables qui peuvent être utilisées pour inspecter l'intestin à la recherche de signes de dysfonctionnement entérique environnemental (EED) et même obtenir des biopsies tissulaires. Ce nouvel outil s'avère particulièrement efficace et précieux dans les pays en voie de développement où il permet de réaliser des examens et investigations fiables, rapides et peu onéreuses pour prendre en charge de manière précoce la dysfonction entérique de l'environnement, un trouble de l'inflammation intestinale très répandue dans les pays pauvres, notamment en Asie...

L'an dernier, une équipe d'ingénieurs du MIT a présenté un nouveau type de capsule ingérable, fabriqué en impression 3D et conçu pour demeurer un mois dans l'estomac avant de se dissoudre. Au cours de ces quatre semaines cette capsule transmet par Bluetooth une multitude d'informations. Cette capsule peut également délivrer plusieurs médicaments à libération prolongée et traiter de manière précise certaines infections.

Dans les années à venir, ces pilules et capsules intelligentes et téléguidées vont encore progresser en miniaturisation, en capacité de calcul et d'analyse et en autonomie. À terme, ces outils extraordinaires deviendront des auxiliaires indispensables en matière d'investigation et de soins et seront capables d'explorer la totalité du corps humain avec une précision inégalée.

Technologies numériques

Nous quittons à présent les sciences de la vie pour arriver dans le domaine des technologies numériques. Ce champ de recherche a fait l'objet l'an dernier d'une avancée qui n'a pas forcément eu la couverture médiatique qu'elle méritait, sans doute parce qu'il est assez difficile de l'expliquer simplement et d'en mesurer les immenses retombées. Il s'agit de l'annonce faite par Google, en octobre dernier, concernant la maîtrise du premier niveau de « suprématie quantique », un stade que les spécialistes appellent NISQ (Technologies Quantiques Bruitées d'Echelle Intermédiaire), qui désigne des calculateurs quantiques comptant 50 à 100 qubits, dépourvues de systèmes de correction d'erreur les mettant à l'abri du bruit. Bien qu'IBM conteste cette notion de "suprématie quantique" qui aurait été atteinte par Google, nous devons reconnaître qu'un pas important a été franchi.

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Ces machines, bien qu'elles ne soient pas encore capables d'effectuer tous les types de calculs très variés que sait faire un ordinateur classique, sont déjà en mesure, pour certains types de calculs particuliers, d'atteindre des performances inimaginables, en comparaison avec nos ordinateurs binaires. En l'occurrence, Google, grâce à sa puce quantique Sycamore, qui compte 53 qubits, est parvenu à réaliser en seulement trois minutes et demi un calcul très particulier (tâches l'échantillonnage des circuits quantiques aléatoire ou RCS) qui aurait pris plus de 10 000 ans en utilisant les plus gros supercalculateurs actuels, selon les allégations de Google.

La prochaine étape, qui devrait prendre entre 5 et 10 ans, sera celle de la mise au point d'un ordinateur quantique universel, entièrement opérationnel et capable de réaliser tous les types d'opérations. Il faudra pour cela concevoir des machines qui réunissent environ 1000 qbits, un objectif que les scientifiques considèrent à présent comme atteignable. Personne aujourd'hui ne peut prévoir ce que de telles machines, qui auront une puissance de calcul plusieurs millions de fois supérieures à celles de nos ordinateurs actuels, seront capables de faire. Mais il est certain que ces ordinateurs quantiques révolutionneront l'ensemble des disciplines scientifiques et bouleverseront nos sociétés.

L'autre avancée retenue en matière de technologies numériques est beaucoup moins réjouissante que la précédente : il s'agit de la technologie « Deepfake ». Ce redoutable outil, qui utilise toutes les ressources de l'intelligence artificielle, permet à présent de produire ou de modifier de manière quasi parfaite de fausses séquences vidéo, afin d'effacer ou de modifier certaines réalités ou certains faits gênants, ou, au contraire, d'inventer de toutes pièces des faits et situations qui n'ont pas eu lieu...

Les responsables politiques des Démocraties mais aussi les militaires américains considèrent que la technologie Deepfake constitue désormais une grave menace pour la sécurité nationale, et plus largement un grave danger pour le fonctionnement des démocraties. Bien sûr, cette technologie extrêmement puissante peut être utilisée de façon tout à fait légale dans de nombreux domaines, cinéma, divertissement, industrie, médecine, aménagement du territoire... Mais un tel outil peut également faire des ravages dans les mains d'organisations criminelles ou terroristes, ou de régimes politiques autoritaires. Face à cette technologie démiurgique, nos sociétés démocratiques vont donc devoir mettre en place des cadres légaux et éthiques tout à fait nouveaux, destinés à prévenir et à réprimer sans faiblesse les utilisations dévoyées et criminelles de cette technologie qui permet de modifier la réalité et de réécrire l'histoire.

Changement climatique

Les deux dernières avancées remarquables concernent la question absolument essentielle du changement climatique en cours, et plus précisément les technologies de captage du CO2 atmosphérique, qui seront nécessaires, en plus des efforts mondiaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre, pour parvenir à limiter les effets désastreux du réchauffement climatique en cours. Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a rappelé à cet égard que ces technologies devront être capables de soustraire jusqu'à un milliard de tonnes de CO2 par an de l'atmosphère, au cours de ce siècle, si l'humanité veut limiter le réchauffement climatique en cours à moins de 2°.

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Pour parvenir à extraire ce CO2 de l'air à un coût compétitif, la société canadienne Carbon Engineering, soutenue par Bill Gates, a développé un réacteur géant, capable de capturer le dioxyde de carbone présent dans l'atmosphère. Par un procédé chimique complexe, cette « technologie à émissions négatives » attire les particules de CO2 dans le réacteur, où elles sont stockées. Dénommé « Direct Air Capture »le procédé, qui reviendrait à moins de 100 $ par tonne de CO2 traitée, est testé depuis quelques mois à Squamish, une ville du sud-ouest du Canada. Carbon Engineering affirme qu'avec environ un millier de centrales d'une surface de 30 ha chacune, il serait possible de retirer de l'atmosphère une gigatonne de CO2 par an. Ce CO2 pourrait ensuite être valorisé, en étant retransformé en carburants utilisables par les véhicules thermiques, ou définitivement stocké dans le sous-sol, sous forme de carbonate de calcium.

En Suisse, une autre société basée à Zurich, Climeworks AG, a développé pour sa part un procédé qui permet d'aspirer directement le dioxyde de carbone de l'air. Chaque unité peut capter environ 900 tonnes de CO2 par an, et le CO2 ainsi récupéré pourra être utilisé pour améliorer certaines productions agricoles, produire des carburants ou certains matériaux industriels.

Enfin, la 10e et dernière avancée, mais non la moindre, concerne la prise de conscience mondiale du changement climatique en cours. En 2019, on le sait, les températures estivales ont battu des centaines de records historiques, partout dans le monde, entraînant une fonte des glaces sans précédent au Groenland et au Pôle Nord et contribuant à alimenter les incendies de forêt qui ont fait rage dans différentes régions du monde.

Mais 2019 a également connu un niveau sans précédent d'activisme climatique (Voir Science News), dont se félicitent scientifiques et climatologues. « Je n'ai jamais vu autant de protestations », explique le glaciologue Eric Rignot de l'Université de Californie à Irvine. Il fait référence aux marches climatiques qui ont eu lieu partout dans le monde et qui ont culminé lors du Sommet des Nations Unies sur l'action pour le climat en septembre à New York, avec 7,5 millions de personnes participant à une grève climatique mondiale.

De mai à août 2019, près de 400 records de températures record ont été enregistrés dans 29 pays de l'hémisphère Nord. Tout le monde a encore en mémoire les deux vagues de canicules sans précédent qui ont déferlé sur l'Europe et la France, mais également les vagues de chaleur et de sécheresse qui ont frappé l'Inde et le Pakistan, ainsi que la canicule qui a touché le Japon, envoyant plus de 18 000 personnes à l'hôpital en une semaine. Globalement, juillet 2019 a été le mois le plus chaud en 140 ans de tenue de registres, selon la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis.

Face à la violence du réel et à l'accélération de la fréquence de ces événements extrêmes et dévastateurs, les thèses climatosceptiques reculent partout dans le monde, y compris aux États-Unis (sauf l'opinion personnelle du Président des Etats-Unis telle qu'exprimée ces jours derniers à Davos), et l'opinion publique mondiale place désormais la question du réchauffement climatique en tête de ses préoccupations et de ses inquiétudes. Nous pouvons d'ailleurs faire le pari que les prochains scrutins qui auront lieu, tant en France que dans les autres pays du monde, vont se traduire par une confirmation de cette inquiétude climatique grandissante, et de cette attente de plus en plus forte de mesures économiques politiques et sociales destinées à faire de la lutte contre le changement climatique la priorité absolue.

On voit donc à travers ces dix grandes avancées scientifiques de 2019 que les scientifiques et chercheurs, loin de se contenter d'apporter des réponses aux questions essentielles de nos origines, du fonctionnement du vivant ou encore de la nature de notre Univers, ont également tenu à manifester leur engagement et à apporter leur contribution sur la question politique, démocratique et éthique fondamentale de l'avenir de notre espèce, confrontée à une menace climatique sans précédent qu'elle a elle-même provoquée.

Souhaitons que nos responsables économiques et politiques aient la lucidité, le courage et la sagesse, d'entendre les avertissements et les recommandations de la communauté scientifique et prennent enfin à bras-le-corps ce défi nullement insurmontable du changement climatique, en jetant les bases d'un nouveau développement économique, plus humain et plus juste, qui sache faire confiance au génie et à la créativité de l'homme et nous réconcilie avec le nature dont nous nous sommes peu à peu coupés, mais dont nous sommes pourtant issus...

René TRÉGOUËT
Sénateur honoraire
Fondateur du Groupe de Prospective du Sénat

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La double machine américaine à fabriquer un chaos mondial

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La double machine américaine à fabriquer un chaos mondial

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Nous prendrons ici le terme de chaos en son sens originel: désordre, puis déstructuration et finalement effondrement. C'est un tel sort qui menace actuellement le monde soumis au pouvoir américain.

La première machine à chaos américaine est l'appareil militaire tel qu'il est employé par le Pentagone dans le monde depuis 2001. Celui-ci repose sur ce que l'on nomme pour simplifier le complexe militaro-industriel américain. Il faut entendre par là l'ensemble des industries militaires américaines. Celles-ci consomment les trois quarts du budget de défense américain, soit plus de 700 milliards de dollars en 2018, en produisant des systèmes d'armements aussi coûteux qu'inutilisables dans le monde actuel. 

Sur ce total, mentionnons les systèmes d'armes aériens qui représentent 55,7 milliards (22,5 %), les systèmes navals 34,7 milliards (14 %), les missiles et munitions 21,6 milliards (8,7 %), les armements terrestres 14,6 milliards (5,9 %), les sciences & technologies 14,1 milliards (5,7 %), les systèmes basés sur les technologies numériques (montant non disponible).

En exemple de ces dépenses inutiles, on peut citer le porte-avions USS Gerald R.Ford qui vient d'être livré à la marine américaine, pour un prix au bas mot de 13 milliards. Or les stratèges en défense des Etats-Unis viennent de découvrir qu'un seul des nouveaux missiles hypersoniques russes, bien placé, pourrait le rendre non manœuvrable, voire l'envoyer par le fond. Dans le même temps, même si l'économie américaine paraît prospère, elle produit bien plus que dans le reste du monde occidental, un nombre considérables d'emplois temporaires mal rémunérés, d'hôpitaux mal équipés et débordés, de logements insalubres.

La machine à chaos américaine représentée par le complexe militaro-industriel s'étend à l'ensemble des Etats du monde, alliés consentants ou forcés des Etats-Unis. Ceux-ci sont obligés par Washington à s'engager dans des dépenses militaires destinées, comme c'est le but actuellement recherché au sein de l'Otan, à prendre le relais de l'armée américaine dans certain nombre domaines, en particulier aujourd'hui au Moyen-Orient. Moins favorisés économiquement que les Etats-Unis, ils s'épuisent à les suivre.

Accélérer la fin du monde

La seconde machine à chaos américaine, sans doute plus efficace à court terme que la première, découle des croyances religieuses inspirant un fort pourcentage des Américains. Ainsi il apparaît que les évangélistes-chrétiens américains d'aujourd'hui veulent délibérément provoquer la Fin des Temps ou Apocalypse telle qu'annoncée par les textes bibliques. Celle-ci devrait permettre la disparition du monde matériel au profit d'un monde spirituel où le peuple de Dieu, c'est-à-dire les Croyants, pourrait enfin, après la Grande Epreuve ou Tribulation, retrouver la divinité et devenir divin à son tour. Il est difficile de croire que de telles légendes puissent pousser des hommes d'Etat responsables à détruire le monde actuel pour accéder à Dieu. Mais dans le domaine des superstitions mortifères, cela n'a rien de surprenant.

De fait, aujourd'hui, il apparaît que le secrétaire d'Etat Mike Pompeo et le vice-président Mike Pence considèrent le Moyen-Orient comme le terrain de la fin du monde selon la vision chrétienne-évangéliste. En conséquence, il ne faut rien faire pour éviter la Grande Epreuve. Il ne faut pas notamment renoncer à y mener des guerres destructrices – destructrices d'un monde ancien qu'il convient d'aider à disparaître. Dans ces conditions, provoquer une guerre avec l'Iran, qui entraînerait nécessairement une guerre nucléaire avec la Russie, serait faire œuvre pieuse.

On peut croire que Donald Trump est trop préoccupé de ses propres intérêts pour jouer le rôle de l'Antéchrist qui selon les évangélistes accélérerait  le passage à l'Apocalypse. Mais comme Trump semble devenu désormais, quelles qu'aient été ses opinions antérieures, un exécutant dévoué des instructions que lui communiquent Mike Pompeo et Mike Pence, le pire est à craindre

dimanche, 26 janvier 2020

Des chercheurs pris dans la guerre biologique

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Des chercheurs pris dans la guerre biologique

par Etienne Aucouturier

Ex: http://www.geopolintel.fr

Que feriez-vous si le gouvernement vous demandait d’effectuer des recherches visant à défendre les populations contre des épidémies intentionnelles ? Au cours du XXe siècle, nombre de chimistes et biologistes civils, confrontés à cette question, ont accepté de collaborer secrètement, même si cela signifiait souvent aussi développer et produire les armes biologiques à combattre.

En janvier dernier, le virologue David Evans et son équipe de l’université d’Alberta, au Canada, indiquaient, dans la revue PLoS One, qu’ils avaient réussi à produire, à petit budget, une variante du virus de la variole. Conçue sur la base de séquences d’ADN trouvées sur Internet – qui provenaient du virus responsable de la forme chevaline de la variole –, l’initiative visait à produire un vaccin plus efficace contre cette maladie. Six mois plus tôt, la revue Science mettait déjà en garde contre cette recherche, alors en cours, qui pouvait donner l’occasion à des terroristes de produire à peu de frais des armes biologiques.

De fait, depuis que la période de l’après-Guerre froide a sonné le glas de la bipolarité politique du monde, ce que l’on nomme aujourd’hui le bioterrorisme préoccupe les États, particulièrement depuis l’épisode dit des « lettres à l’anthrax », au cours duquel, en octobre 2001, diverses institutions, dont des rédactions de journaux, avaient reçu des lettres contenant des bacilles de la maladie du charbon.

Certes, dès les premières décennies du xxe siècle, les États qui en avaient les capacités s’étaient lancés dans une course aux armements biologique et chimique, mais de nos jours, un nouvel aspect est venu renforcer l’inquiétude des dirigeants à ce sujet : la crainte de voir émerger des capacités de destruction sortant du cadre étatique. Le très grand nombre de canulars et les tentatives avérées de bioterrorisme des trente dernières années – dont celles des sectes Rajneesh à The Dalles, dans l’Oregon, en 1984 et Aum à Kameido, au Japon, en 1993 –, conjointement avec la fin de la Guerre froide et l’avènement d’Internet, laissent penser que l’arme biologique, l’arme atomique du pauvre comme la surnomment souvent les militaires, représenterait une menace sans précédent.

Le fait qu’une revue scientifique alerte sur les risques bioterroristes liés à une étude montre que le monde scientifique a fait siennes ces craintes. Mais cela n’a pas toujours été le cas. Si dès les années 1950, profondément marqués par l’emploi de la bombe atomique, les physiciens du domaine ont pris acte des enjeux éthiques et politiques de leurs recherches, pendant ce temps, les chimistes, biologistes et médecins concernés par l’usage militaire de leurs travaux ne dénonçaient que marginalement les recherches sur les armes biologiques et chimiques, sans doute à cause de leur caractère plus secret et des usages moins catastrophiques ou spectaculaires qui en étaient faits.

Pourtant, ces armes ont été développées et utilisées dès le début du xxe siècle, soit bien avant l’arme nucléaire, et ce grâce à l’expertise scientifique et médicale de nombre d’entre eux. Un minutieux travail de recherche dans les archives militaires françaises, mais aussi dans d’autres fonds comme les archives de la direction de l’institut Pasteur, nous a en effet récemment permis de montrer que, en France, ces armes ont fait l’objet d’une collaboration continue des militaires avec des scientifiques et médecins civils, membres d’institutions de premier plan.

Du roquefort aux nuages artificiels

at.jpgLa France a été pionnière dans le domaine des armes biologiques et chimiques. Dès la première décennie du XXe siècle, un chimiste français renommé, Auguste Trillat, inventeur du formol quelques années auparavant, brevetait certes un procédé de fabrication industrielle du roquefort, mais posait aussi les bases de la production intentionnelle d’épidémies à l’aide de nuages artificiels microbiens.

Bien avant la Première Guerre mondiale, le pays avait entrepris des recherches à visée militaire sur les armes chimiques. Mais c’est pendant cette guerre que les Français, puis les Allemands, firent pour la première fois usage de gaz de combat. Les armes dites biologiques furent elles aussi utilisées, mais de façon marginale, plutôt en tant que moyens de sabotage (pour tuer du bétail ou des animaux de transport) qu’en tant qu’armes de destruction massive, ou visant massivement les humains. Néanmoins, la menace de guerre bactériologique que ces attaques rendaient plus tangible fit avancer les recherches sur les méthodes de désinfection et de prophylaxie (l’ensemble des mesures à prendre pour prévenir les maladies). Trillat, devenu en 1905 chef du service des recherches appliquées à l’hygiène de l’institut Pasteur, à Paris, joua ainsi un rôle fondamental dans la création du programme français d’armement biologique et chimique après la Première Guerre mondiale.

En 1922, lui qui avait été pionnier tant dans la production de nuages artificiels déclencheurs d’épidémies, pour lesquelles il avait étudié les conditions atmosphériques propices à leur développement, que dans la recherche de méthodes de désinfection chimique à grande échelle, fut sollicité pour donner les lignes directrices de ce nouveau programme, sous la forme d’un rapport commandé l’année précédente par le ministère de la Guerre. Dès lors s’installa une collaboration continue entre institutions de recherche civiles et militaires. Les recherches sur les armes chimiques et biologiques requérant des compétences et des équipements similaires, les institutions et chercheurs mobilisés travaillaient en commun sur les deux systèmes, qu’il s’agisse de la recherche, du développement ou de la production.

L’institut Pasteur, ainsi que de nombreuses institutions scientifiques et médicales françaises de premier plan, dont le Muséum national d’histoire naturelle et le Collège de France, participèrent à ce programme par l’intermédiaire de certains de leurs membres éminents, comme les chimistes Charles Moureu (Collège de France), Marcel Delépine (faculté de pharmacie) et André Job (Conservatoire national des arts et métiers), travaillant sous contrats secrets avec la sphère militaire.

Dans le monde, la crainte que les guerres du futur voient s’amplifier le caractère de guerre totale qu’avait pris la Grande Guerre conduisit les principales nations occidentales, mais aussi le Japon, à préparer en temps de paix, dès l’entre-deux-guerres, les moyens de défendre – et d’attaquer – non plus seulement les combattants, mais les populations de nations entières. À cette même époque, des rumeurs issues de la presse britannique sur des essais secrets de dispersion d’agents biologiques effectués par des agents secrets allemands dans le métro parisien achevèrent de convaincre l’opinion publique et l’État français de la nécessité de prendre au sérieux cette menace. La réorganisation de la France en nation armée, souhaitée au plus haut niveau de l’État, conduisit à la production de moyens offensifs et défensifs de guerre chimique, biologique, puis, après la Seconde Guerre mondiale, nucléaire.

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L’activité secrète de la poudrerie du Bouchet

La poudrerie du Bouchet, à Vert-le-Petit, au sud de Paris dans l’actuelle Essonne, devint graduellement le centre névralgique d’un réseau de recherche et développement d’armes biologiques et chimiques, incluant d’autres institutions civiles et militaires. Elle demeure de nos jours, sous le nom de Centre d’études du Bouchet, le centre du ministère des Armées dédié à la défense contre les menaces biologiques et chimiques, et l’un des rares sites en France (et dans le monde) à disposer d’un laboratoire de niveau de sécurité P4. Peu à peu, la France rassembla ainsi secrètement, sous l’appellation d’armes spéciales, un arsenal de nouveaux moyens offensifs et défensifs, étudiés et développés avec l’apport constant de l’expertise scientifique et médicale civile.

En 1947, une Commission médicale de défense contre la guerre moderne vit le jour afin de mieux centraliser les études relatives aux armes spéciales, de reconstruire une défense nationale incluant ces armes et de tirer parti des recherches scientifiques civiles ainsi que des renseignements issus des réseaux scientifiques internationaux de chercheurs. Mixte, cette commission était composée de militaires et de savants de premier plan, pour beaucoup médecins des facultés de médecine ou chercheurs de l’institut Pasteur. Entre autres membres, Léon Binet, doyen de la faculté de médecine de Paris, Robert Debré, président de l’Institut national d’hygiène, ou Jacques Tréfouël, directeur de l’institut Pasteur, prenaient part aux discussions secrètes de la commission et répondaient secrètement à diverses commandes militaires. Les laboratoires civils entreprirent ainsi une grande diversité d’études sur, par exemple, le mode d’action des trilons (les gaz neurotoxiques Sarin, Tabun et Soman), la possibilité de vacciner contre la radioactivité ou encore celle de potentialiser les effets délétères d’aérosols de bacilles du charbon en les combinant avec des métaux lourds.

Les décennies suivantes, l’ouverture à la sphère civile des recherches sur les armes spéciales se referma partiellement, le gouvernement préférant concentrer ses forces sur l’arme nucléaire. Mais de nombreux chercheurs continuèrent de travailler sur financement militaire, à des fins prophylactiques ou non, leur expertise demeurant indispensable, s’agissant par exemple des études sur la polyvaccination. À titre indicatif, en 1967, le nombre d’animaux de laboratoire destinés en France à l’expérimentation d’agents chimiques et biologiques de guerre (20 000 souris, 20 000 rats, 5 000 cobayes, 2 000 lapins et 50 singes) représentait 10 % de l’utilisation actuelle par an d’animaux à des fins scientifiques.

Outre la motivation patriotique mise en avant par certains scientifiques pour justifier leur collaboration à ces programmes, la relation mutuellement bénéficiaire entre l’armée et les hommes de science en France explique sa pérennité. Ainsi, en 1972, Jacques Monod, alors directeur de l’institut Pasteur, écrivait au ministre de la Défense nationale Michel Debré qu’il serait souhaitable de renforcer et formaliser les liens entre l’armée et l’institut Pasteur, qui formait alors selon lui « la quasi-totalité des médecins-biologistes de l’armée ».

Des essais mystérieux en Algérie

Les armes testées au moins depuis les années 1930 à l’ouest du Sahara algérien (ainsi que dans certains centres d’expérimentation métropolitains, notamment près de Bourges) continuèrent de l’être jusqu’à la fin des années 1970. Notamment, on fit exploser des obus, roquettes et grenades chargés en agents biologiques ou chimiques pour mesurer leurs effets en situation réelle. La nature exacte et l’étendue des essais effectués secrètement en Algérie dans les deux décennies qui suivirent les accords d’Évian (1962) demeurent à ce jour peu connues et font donc régulièrement l’objet de spéculations légitimes de la part des populations concernées, craignant que les sites n’aient pas été parfaitement dépollués. Néanmoins ces essais ont eu lieu et ont participé de l’expertise française dans le domaine des armes chimiques et biologiques.

Ainsi, de l’aube du xxe siècle au début des années 1970, la France a développé et produit, à des échelles variables selon les époques et les priorités politico-militaires, des poisons synthétiques ou non, destinés, d’une part, à être utilisés en temps de guerre contre les hommes, les animaux et les plantes, mais aussi, d’autre part, à tester leurs effets à grande échelle pour mieux s’en prémunir en situation opérationnelle.

Les autres nations développées n’ont pas été en reste au cours du xxe siècle. Le Royaume-Uni, le Japon, les États-Unis, l’URSS, le Canada, les Pays-Bas, Israël, l’Afrique du Sud et d’autres ont aussi eu, à des fins diverses et des échelles variables, leur programme de guerre biologique et chimique. Le Japon, lorsqu’il occupait la Mandchourie avant la Seconde Guerre mondiale, a par exemple effectué de cruels essais sur les populations chinoises locales. Les États-Unis ont, à l’issue de cette guerre, secrètement récupéré les données que les Japonais avaient récoltées. Et, dans le cadre de la Guerre froide, l’URSS serait aussi entrée en lice avec son ambitieux programme Biopreparat, selon des transfuges russes tels que Ken Alibek ou Vladimir Pasechnik.

Parmi les scientifiques, mais aussi les militaires, il semble qu’un consensus ait perduré quant à la nécessité de maintenir une forme de politique de santé publique secrète pour défendre les populations contre les armes biologiques et chimiques. En France comme ailleurs, cependant, cette dimension avouable de leur action était contrebalancée par une contribution simultanée à des programmes souvent offensifs. Cette forme de politique de « santé publique inversée » – selon l’expression d’un de ses critiques de la fin des années 1960, le Britannique Robin Clarke – a placé les scientifiques et médecins devant un dilemme moral : collaborer secrètement avec les armées de leur pays pour prémunir des populations civiles contre des épidémies intentionnelles, au risque de contribuer en même temps à les doter de moyens offensifs en pratiquant des recherches non divulguées sur des agents pathogènes naturels ou synthétiques. Il semblait ainsi irresponsable de refuser cette collaboration autant qu’il l’était de l’accepter, et tout aussi irresponsable de publier les résultats des recherches comme de ne pas les publier. La réponse récurrente des scientifiques à ce dilemme, en France au moins, a majoritairement consisté à jouer le jeu du secret.

JBS-Haldane.jpgDe même, rares ont été les avocats de l’usage des sciences biomédicales pour la guerre. Si quelques scientifiques comme le généticien britannique John Burdon Sanderson Haldane (photo), dans les années 1920, ou des militaires tels que le brigadier général Jacquard Hirshorn Rothschild, après la Seconde Guerre mondiale, ont entrevu dans l’utilisation des connaissances en physiologie un moyen de rendre la guerre plus humaine (en introduisant la possibilité d’utiliser des agents non létaux plutôt que des armes conventionnelles aux effets moins prévisibles, comme les explosifs), la sélection précise des effets physiologiques des armes est demeurée une inclusion contre-nature de la science et de la médecine dans la guerre (tandis que des armes conventionnelles aux effets moins prévisibles sont restées autorisées).

Aujourd’hui, les armes biologiques et chimiques continuent de faire l’objet d’un dilemme moral récurrent pour la biomédecine. On ne s’improvise pas savant militaire : les chercheurs se lancent rarement dans une carrière médicale ou scientifique en vue de produire des systèmes d’arme ou de prémunir les populations nationalescontre des armes biologiques et chimiques. Aussi la sphère militaire a-t-elle toujours besoin de l’expertise de chercheurs civils et continue-t-elle, selon les périodes, à les inclure secrètement dans des programmes militaires ou à financer des travaux d’intérêt militaire.

La responsabilité des chercheurs civils est d’autant plus grande que sans expertise physiologique, la distinction entre les agents chimiques ou biologiques bénins et malins est impossible. La connaissance précise du fonctionnement du corps (humain, mais aussi d’autres animaux ou de végétaux) et de ses interactions avec des substances ou agents exogènes est essentielle pour caractériser une substance ou un agent comme un poison. À tel point que les armes biologiques et chimiques devraient être rassemblées sous un même terme, « armes physiologiques », qui insisterait plus sur la sélectivité de leurs effets que sur le moyen utilisé pour les obtenir.

Et demain ?

Sauf à adopter une anthropologie optimiste fondée sur une confiance universelle, il semble difficilement pensable qu’un État soucieux de la sécurité de sa population et du droit humanitaire international ne cherche pas à mobiliser ses scientifiques en vue de secrètement préparer sa défense, donc en effectuant des recherches sur un maximum d’agents malins et sur leurs antidotes. Il résulte de cette tension entre la vocation universaliste de la science et les circonstances politiques qu’il reste difficile de nos jours de distinguer les recherches à vocation défensive de celles à vocation offensive : se défendre contre des poisons implique en effet d’en disposer afin de trouver des antidotes. Et par conséquent d’anticiper les menaces en maintenant une recherche biomédicale et militaire de pointe. Si le cadre législatif international tend à préserver un statu quo entre les États, comme c’est le cas de la dissuasion nucléaire, le cadre géopolitique de l’après-Guerre froide tend quant à lui à laisser planer la menace d’une utilisation moins prévisible ou identifiable de ces armes empoisonnantes par des groupes privés ou non étatiques.

Cela d’autant que les avancées scientifiques et techniques des dernières décennies – notamment Internet, les nanotechnologies et l’utilisation des big data en médecine – sont susceptibles de conférer à des États comme à des entités privées des moyens de guerre biologique sans précédent, en accroissant la possibilité de sélectionner précisément les effets physiologiques ainsi que les éventuelles populations cibles.

Par exemple, nombre d’hôpitaux sont aujourd’hui dotés de biobanques où sont stockées et parfois partagées à grande échelle les données de patients consentants (notamment génétiques) et leurs échantillons biomédicaux. Ces biobanques constituent une avancée considérable pour la recherche biomédicale. Néanmoins, elles présentent aussi le risque qu’à la faveur d’une instabilité politique d’un État y ayant accès ou d’une privatisation de leur gestion (que l’OCDE préconise depuis 2001), le rêve d’un partage global des progrès de la biomédecine ne se transforme en un cauchemar militaro-industriel. Il est donc plus que jamais nécessaire que les citoyens s’emparent de la question de la guerre biologique, dont les enjeux relèvent tant de la sécurité militaire que des sécurités sanitaire et alimentaire.

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Armes chimiques et armes « bio »

Aujourd’hui, la terminologie militaire établit une distinction entre les armes chimiques et les armes biologiques, fondée sur les substances utilisées. Cette distinction à des visées juridiques et tactiques. Les deux types d’armes ne sont pas interdits de la même manière ni depuis la même époque, et leur usage diffère. Pourtant, ils n’ont pas toujours été dissociés.

Parmi les textes de loi emblématiques à ce sujet, au milieu du xixe siècle, pendant la guerre de Sécession, fut adopté le code Lieber (1863) qui interdit, entre autres pratiques cruelles, l’usage de poisons dans la guerre. Mais à l’issue de la Première Guerre mondiale, une légère nuance est apparue dans le Protocole de Genève (1925) : il spécifia qu’il était interdit d’utiliser des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et des moyens bactériologiques. Cette dissociation juridique en germe devint effective dans la seconde moitié du XXe siècle, avec la signature en 1972 de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction. Les armes chimiques sont ainsi demeurées sans interdiction spécifique autre que celle du Protocole de Genève jusqu’en 1993, lorsque la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l’usage des armes chimiques et sur leur destruction fut adoptée.

Qu’est-ce qui distingue fondamentalement ces deux types d’armes ? Les toxines biologiques (la ricine, par exemple) étant fonctionnellement équivalentes à des armes chimiques, la distinction juridique est faite en vertu de leur origine. Les toxines biologiques sont ainsi qualifiées de biologiques en ce qu’elles ne sont pas des produits de la synthèse chimique, mais sont trouvées telles quelles dans la nature. Elles sont issues du vivant. Il en est de même des autres agents biologiques : bactéries, virus, champignons, et autres agents pathogènes non synthétiques sont inclus dans la catégorie des armes de guerre biologique. D’un point de vue juridique, les armes biologiques sont donc comparables… aux produits alimentaires dits « issus de l’agriculture biologique ». En revanche, toute reproduction de toxine biologique par chimie de synthèse relève du droit des armes chimiques…

Ainsi, la subdivision juridique des poisons prévus pour un usage guerrier est discutable à bien des égards. Elle a vraisemblablement eu pour fonction de permettre aux États concernés, dans la seconde moitié du XXe siècle, de poursuivre des recherches, développements et productions d’armes chimiques en toute liberté.

Etienne Aucouturier​​​​​​​

 

Walther Darré: écologie, agriculture et national-socialisme

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Walther Darré: écologie, agriculture et national-socialisme

 

Offre de souscription à tarif avantageux pour un ouvrage très attendu ; celui du Dr. Anna Bramwell intitulé Walther Darré, le Blut und Boden et l’écologie hitlérienne :

 

Ricardo Walther Darré, Ministre de l’Agriculture et Chef Paysan de 1933 à 1942, mit sur le devant de la scène les vertus écologiques dans l’Allemagne nationale-socialiste avec souvent la même sémantique utilisée actuellement par ceux qui se posent comme les seuls défenseurs de la planète.

 

blood-and-soil.jpgAcquis au racialisme scientifique, il popularisa le concept du Blut und Boden (Sang et Sol), espérant abolir une société industrielle fermée au monde des affaires afin de la remplacer par une société organique prenant sa base sur un système de nobilité agreste héréditaire.

 

Condamnant l’incorporation au Reich de la Bohême et de la Moravie et décrivant Himmler comme étant « un jésuite chargé de garde prétorienne », il fut désavoué par Hitler entre 1940 et 1942. Dès lors, son rêve nourri par l’idée d’une nation constituée de petits fermiers semblait appartenir au passé.

 

Peut-on accorder crédit et sérieux à un ministre du IIIème Reich, qui plus est racialiste ? Cela ne rend-t-il pas ses idées inacceptables ? Quels sont les liens entre le « parti écologiste » d’Hitler et la popularité des politiques écologiques aujourd’hui ?

 

Cet essai de grande valeur, tant par la méthode de recherche approfondie que par une forte opinion indépendante, quoique mesurée, de l’auteur doit être lu au XXIe siècle.

 

Quiconque souhaite s’informer convenablement sur l’agriculture, la politique et l’écologie à notre époque ne peut faire l’économie d’ignorer les découvertes du Dr. Bramwell.

 

Inédit en langue française !

 

Jusqu’au 14 février 2020cet ouvrage avec cahier-photos central vous est proposé au prix exceptionnel de 26 euros au lieu de 32 qui sera son prix public lors de sa sortie le 15 février prochain.


ATTENTION : cette offre de souscription est valable pour les 100 premières commandes seulement ! 

Réservez sans plus tarder vos exemplaires au lien ci-dessous :

http://www.ladiffusiondulore.fr/home/793-walther-darre-le-blut-und-boden-et-l-ecologie-hitlerienne.html

 

0aaf7cf1d630fa7c40cf324e3f11197a.jpgMost widely held works

by Anna Bramwell

Ecology in the 20th century : a history by Anna Bramwell( Book )

28 editions published between 1988 and 1992 in 3 languages and held by 901 WorldCat member libraries worldwide

The fading of the Greens : the decline of environmental politics in the West by Anna Bramwell( Book )

13 editions published in 1994 in English and Italian and held by 617 WorldCat member libraries worldwide

The book traces how Green consciousness became skewed in political practice, preventing it from attracting support commensurate with popular feeling. Bramwell tracks this mismatch largely in relation to the dominance of the German Greens and their specific and untypical characteristics. Environmental consciousness, she argues, is undoubtedly here to stay, yet, 'in the process of rationalising environmentalism, of costing it, of playing trade wars with it, our concern for the intangible beauties of the natural world may go by the board'. The result of the manifest integrity and courage of Green activists may, ironically, be a West further impoverished by attempts to meet the demands of the developing world. But only the maligned West has the money and will to conserve the environment
 
Refugees in the age of total war( Book )

9 editions published in 1988 in English and held by 255 WorldCat member libraries worldwide

(Book )

13 editions published in 1985 in English and held by 229 WorldCat member libraries worldwide

A political biography of Darre, appointed National Peasant Leader and Minister of Food and Agriculture in 1933. Argues that his ecological ideas are still worthy of attention despite his racism. Although he believed in eugenics and Nordic racism, he did not emphasize their antisemitic aspect until after joining the Nazi Party in 1930, when he began to speak of the Jews as leaders of the capitalist urban threat to rural Germany and of an international Jewish conspiracy. He opposed anti-Jewish boycotts and delayed the Aryanization of Jewish land until 1940, not wanting his land reform program to be controlled by Nazi antisemitism. Although he was excluded from policy decisions after 1939, and dismissed in 1942, Darre was tried as a war criminal in 1949 and found guilty of participation in the Aryanization program and of expropriation of Polish and Jewish farmlands during the resettlement of ethnic Germans.
 
Ecologia e società nella Germania nazista : Walther Darré e il partito dei verdi di Hitler by Anna Bramwell( Book )

1 edition published in 1988 in Italian and held by 9 WorldCat member libraries worldwide

National Socialist agrarian theory and practice : with special reference to Darre and the settlement movement by Anna Bramwell( Book )

6 editions published between 1982 and 1983 in English and held by 6 WorldCat member libraries worldwide

Sangre y suelo el partido verde de Hilter : Walther Darré y la ecología nacional-socialista by Anna Bramwell( Book )

3 editions published in 2011 in Spanish and held by 2 WorldCat member libraries worldwide

Ecology in the 20th century a history by Anna Bramwell( Recording )

1 edition published in 2003 in English and held by 1 WorldCat member library worldwide

Anton Mirko Koktanek: Oswald Spengler. Leben und Werk

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Anton Mirko Koktanek: Oswald Spengler. Leben und Werk

Sehr geehrte Damen und Herren,

nach umfangreichen Vorarbeiten können wir nun endlich die schon lange geplante Neuauflage der großen Spengler-Biographie von Koktanek für den 17. Februar 2020 ankündigen.

Bitte nehmen Sie diese herausragende Biographie des bedeutenden Philosophen in Ihren Vertrieb auf.

Im Anhang finden Sie das Inhaltsverzeichnis sowie eine Titelabbildung.


Anton Mirko Koktanek

Oswald Spengler. Leben und Werk
Eine Biographie
ISBN 978-3-938176-15-3
560 Seiten + 16 Bilderseiten, Paperback, Preis: 34,00 Euro
Erscheinungstermin: 17. Februar 2020

Oswald Spengler (geb. 29.5.1880, gest. 8.5.1936) war einer der wirkungsvollsten und zugleich umstrittensten Denker des 20. Jahrhunderts. Mit seinem Hauptwerk „Der Untergang des Abendlandes“, dessen erster Band im Frühjahr 1918 erschien, beanspruchte Spengler, eine kopernikanische Wende in der Geschichtsphilosophie einzuleiten. Seine Kernthese lautete, daß die Weltgeschichte die Abfolge von verschiedenen Kulturen darstelle, die von Gesetzmäßigkeiten determiniert sei: „Jede Kultur durchläuft die Altersstufen des einzelnen Menschen. Jede hat ihre Kindheit, ihre Jugend, ihre Männlichkeit und ihr Greisentum.“ In „Zivilisationen“ sah Spengler die Spätzeiten der einzelnen Kulturen, deren Erlöschen und Untergang wie bei alternden Organismen bevorstehe. Dem gegen Ende des Ersten Weltkrieges ins Zerfallsstadium eintretenden Abendland prophezeite er ein bevorstehendes Zeitalter der Diktaturen und des Imperialismus.

Anton Mirko Koktanek, Philosoph und Nachlaßverwalter Oswald Spenglers, konnte für seine große Spengler-Biographie zahlreiche unveröffentlichte Zeugnisse verwenden, darunter auch dichterische Entwürfe Spenglers, Tagebuchnotizen seiner Schwester und nicht zuletzt seine Selbstbetrachtungen, die er als Gedächtnisstützen für die von ihm geplante, jedoch nicht geschriebene Autobiographie verfaßte. So entstand eine außerordentlich kenntnisreiche Lebens- und Werkbeschreibung des Geschichtsphilosophen Spengler, die zugleich einen Schlüssel zum Verständnis der Krisen, Kriege und Revolutionen und der Tragödie der deutschen Geschichte im 20. Jahrhundert bietet.

Mit freundlichen Grüßen

Heiderose Weigel
Lindenbaum Verlag GmbH
Bergstr. 11, 56290 Beltheim-Schnellbach

Tel. 06746 / 730047
E-Brief: lindenbaum-verlag@web.de
Internetseite: www.lindenbaum-verlag.de

Le rêve des uns et le cauchemar des autres

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Le rêve des uns et le cauchemar des autres

 
 
par Michel Raimbaud
Ex: http://www.zejournal.mobi

Il est dans l’air du temps de considérer les épisodes troubles que nous vivons aujourd’hui comme une réplique à ce que furent hier les « années folles » de l’entre-deux guerres. Ce n’est pas une perspective encourageante, car cet entracte convulsif de vingt ans tout juste (1919/1939), loin d’être seulement une explosion des libertés, un foisonnement des innovations, une envolée du progrès, allait déboucher sur le festival de boucherie et d’horreur que nous savons, suite logique de son échec. Peut-on recréer un ordre universel, alors que la moitié de la planète reste sous le joug colonial ? Rétablir la stabilité alors que quatre empires viennent de disparaître, deux d’entre eux, Russie et Allemagne, ne se voyant nullement comme des vaincus, et que le statut des deux «superpuissances» coloniales est ébranlé par l’ascension de l’Amérique* ? Quand cette dernière refuse d’adhérer à la Société des Nations qu’elle a patronnée, comment donc garantir la paix ?

Folles ou non, les présentes années sont écervelées, ou décervelées. Mais en 2020, l’heure n’est plus à renifler un séisme attendu, car celui-ci gronde déjà de toutes parts. Pourtant, si le monde revisité est bien devenu universel, l’Occident préfère s’identifier à une « communauté internationale » qui ne l’est pas. Le refus de prendre en compte cette « fracture » est à l’origine de la rage et/ou de la démence de ses élites pensantes, dirigeantes et rugissantes.

Pour ne parler que de nos bons maîtres, nous dispensant ainsi de parler de ses vassaux, aimeriez-vous rencontrer au fond d’une ruelle John Bolton, le schtroumpf grognon, partir en croisière avec Pompeo, le père fouettard de la diplomatie étatsunienne, discuter des droits de l’homme avec Nikkie Halley, la harpie du Conseil de Sécurité ? Que feriez-vous si Trump vous proposait de parler dans un coin tranquille de la gestion de votre plan d’épargne ? Ou d’écrire l’histoire du Moyen-Orient avec Wolfowitz ? Auriez-vous envie d’évoquer l’Irak avec Mme Albright ou Dick Cheney, ou la Palestine avec Jared Kushner ?

Pour comprendre comment on en est arrivé à cette folie, il est essentiel de répondre, quitte à enfoncer les portes ouvertes, à l’interrogation historique du génie qui savait poser les bonnes questions, ce George W. Bush, qui allait imprimer sa marque indélébile à la Maison-Blanche, de 2001 à 2009.

Tandis que Bill, son frivole prédécesseur, avait fait du bureau ovale un jardin secret, et que Barack allait en faire une chaire d’où il prêcherait la paix des Nobel tout en faisant la guerre – par derrière – mieux que quiconque, notre Debeliou (c’est le nom de scène de Bush fils) transformera les lieux en oratoire où l’on marmonne entre bigots de pieuses oraisons avant de prendre les décisions mettant à sac la planète. Bien qu’il n’ait ni découvert l’Amérique ni inventé la poudre, il endossera la géostratégie néoconservatrice du début de millénaire, et le rôle de chef de file des « grandes démocraties ».

Rattrapé sur ses vieux jours par Alzheimer, Ronald Reagan, premier à déclarer « la guerre contre la terreur », ne se souvenait plus avoir été Président. Retiré dans son ranch, Debeliou, lui, consacre ses loisirs à peindre de blancs moutons. C’est un sain divertissement, dont le choix témoigne d’une heureuse nature. Ce « good guy » a manifestement la conscience tranquille : n’a-t-il pas accompli la mission qui lui avait été confiée par le Ciel de guider l’Axe du Bien au milieu de la cohorte des « parias » ? Dans son cocon paisible, comment aurait-il pris la mesure des crimes qu’il a ordonnés et couverts, à l’abri de toute poursuite de la Cour Pénale Internationale ou de ses avatars, le « monde civilisé » et ses succursales n’étant pas de leur compétence. ? Il n’aura jamais soupçonné, même en cauchemar, la haine dont son Amérique est l’objet, de l’arrière-cour latino-américaine à l’Asie éternelle, en passant par la complaisante Europe et ce Grand-Moyen-Orient qui s’étend désormais de la Mauritanie au Pacifique et du sud de la Moscovie à l’équateur africain ? Il mourra sans savoir que l’Amérique est devenue sous son règne l’Etat-voyou par excellence avant de sombrer dans le banditisme « from behind » d’Obama, puis carrément dans le gangstérisme international de l’oncle Donald.

Notre propos d’aujourd’hui n’est pas de faire, comme le veut la mode, une lettre ouverte qu’ils ne liront pas à G. W. Bush et ses ex-acolytes, ses prédécesseurs ou ses successeurs. Il n’est même pas de passer en revue les fioretti du pape de l’Axe du Bien et les florilèges de ses conseillers neocons, dont le cynisme et l’arrogance dépassent l’entendement. Laissant Debeliou à ses petits moutons, on essaiera de répondre in absentia à l’angoisse métaphysique qui le tenaille en 2001 alors qu’il s’apprête à venger les attentats du 11 septembre en semant mort, destruction et chaos dans les sept pays programmés :l’Irak ; la Syrie, le Liban, la Libye, la Somalie, l’Afghanistan, le Soudan.

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C’est durant cette phase particulièrement fébrile de sa vie intellectuelle, le 20 septembre 2001, que Debeliou, s’adressant au Congrès sérieux comme un Pape, lance à la ville et au monde la question « des Américains » : « Pourquoi des gens peuvent-ils nous haïr, alors que nous sommes si bons ? ». Il fallait y penser et aussi l’oser, mais l’on sait depuis Audiard que c’est à cela que l’on reconnaît les gens que rien n’arrête. Puisqu’aux Etats-Unis on est démocrate même quand on est républicain, car c’est à peu près la même chose, notre tribun répond, sûr de son fait : « Ils haïssent ce qu’ils voient dans cette salle : un gouvernement élu démocratiquement. Leurs chefs sont auto-désignés. Ils haïssent nos libertés, de religion, d’expression, notre droit de voter, de nous rassembler et d’exprimer nos désaccords ».

Sans queue ni tête, cet amalgame entre les «terroristes» du 11 septembre (saoudiens pour la plupart) et les sept pays précédemment mentionnés, est évidemment arbitraire, visant à justifier la « pensée stratégique » qui va inspirer Debeliou dans sa « guerre contre la terreur ». On peut toutefois se demander si, visant les « Etats préoccupants », il n’est pas en train de dénoncer ses propres impostures :

« Nous ne sommes pas dupes de leur feinte piété (…). Ce sont les héritiers de toutes les idéologies sanglantes du XXème siècle. (…) Ils marchent dans la foulée du fascisme, du nazisme et du totalitarisme. Ils suivront ce chemin jusqu’à sa fin, dans la tombe anonyme des mensonges répudiés de l’Histoire ».

Ne dirait-on pas une condamnation des menées néoconservatrices, dont la ceinture verte arabo-musulmane est le théâtre privilégié depuis un quart de siècle ? Signe des temps et du ciel, des Israéliens se poseront la même question, comme Rishon Lezion dans le Yediot Aharonot du 26 juillet 2006 : Pourquoi nous haïssent-ils tant ?

On ne peut s’empêcher de rappeler l’anecdote rapportée en 2007 à la revue Democracy Now par le Général Wesley Clark, ex-commandant en chef des troupes de l’Otan en 1999 en Yougoslavie, lors de la dislocation de celle-ci par les Occidentaux. Quelques jours après le 11 septembre, ce haut responsable se rend au Pentagone, où sévissent alors Donald Rumsfeld et Paul Wolfowitz. Il rapporte un intéressant et surprenant dialogue :

  • –  Nous avons décidé de partir en guerre contre l’Irak, lui dit-on.
  • –  En guerre contre l’Irak, mais pourquoi ? demande W. Clark
  • –  Je ne sais pas. Je pense qu’ils ne savent pas quoi faire d’autre.
  • –  A-t-on trouvé un lien entre Saddam et Al Qaeda ?
  • –  Non…Rien de neuf…Ils ont juste pris la décision de faire la guerre contre l’Irak. Sans doute parce qu’on ne sait pas quoi faire des terroristes. Mais nous avons de bons militaires et nous pouvons renverser des gouvernements…

Trois semaines après, on bombarde l’Afghanistan, et le dialogue reprend : Toujours une guerre en Irak ? Réplique : C’est bien pire que ça. Voici un papier expliquant comment nous allons nous emparer de sept pays en cinq ans, l’Irak d’abord, puis la Syrie, le Liban, la Libye, la Somalie, le Soudan et, pour finir, l’Iran. C’est ce programme qui est suivi depuis vingt ans.

polkreyg.jpgPaul Craig Roberts, journaliste, ancien Secrétaire-adjoint au Trésor de Ronald Reagan, économiste inventeur de la Reaganomics, l’affirme en janvier 2016 : « Le gouvernement des Etats-Unis est l’organisation criminelle la plus achevée de l’histoire humaine». Robert Mac Namara parlera d’un «Etat voyou »…Par leur présence militaire (de 750 à 1200 bases dans tous les recoins du monde), leurs implications officielles passées (en Corée, au Vietnam, enYougoslavie, en Afghanistan, en Irak) ou présentes (Irak, Afghanistan, Pakistan, Somalie, Yémen, Syrie), par leurs ingérences et leurs intimidations secrètes ou avouées (au Moyen-Orient, en Amérique Latine, en Europe, en Asie), ils constituent la plus grande menace contre la paix et la sécurité. Sous laprésidence de G. W. Bush, les forces d’opérations spéciales sévissaient dans 66 pays. En 2010, ce nombre était passé à 75 selon le Washington Post, et à 120 en 2011, selon le Commandement de ces forces. En 2013, on en comptait 134, hormis les guerres conventionnelles et les opérations par drones (de plus en plus fréquentes), le pacifique Obama ayant à son actif une progression de 123%. En 2019/2020, les dépenses militaires US devraient friser les 750 milliards de dollars, soit environ 37 % du total mondial : énorme mais, comme dirait Picsou, « des cacahuètes » pour un pays qui imprime lui-même ses billets !

Les opérations ne sont pas forcément défensives (face à des menaces contre la présence et les intérêts de l’Amérique), ou ponctuellement offensives (pour le contrôle du pouvoir et l’accès gratuit ou bon marché aux ressources, pétrole en premier). Il s’agit de plus en plus souvent, au Grand Moyen-Orient notamment, de plans d’action préventive, mis en œuvre avec la couverture de médias aux ordres qui se chargent de justifier des crimes de guerre dûment programmés en servant des narratives ad hoc et des infos truquées. Ajoutons à ce bilan les « sanctions » qui arrosent tous les « régimes » qui déplaisent à Washington, soit environ 120 pays de la « communauté internationale ». C’est beaucoup pour un axe du Bien.

Des millions de victimes, de blessés, de réfugiés et déplacés, des trillions de dollars dépensés pour tuer ou détruire, le résultat est accablant, mais il permet de répondre à la question surréaliste de Debeliou. Voilà pourquoi ils vous haïssent tant, Mr Bush and Co.

L’invention de l’Amérique

C’est par hasard que Christophe Colomb débarque le 12 octobre 1492 sur une plage des Caraïbes (dans les actuelles Bahamas, paradis fiscal et centre de blanchiments divers). Il pense être aux Indes, mais on dira après coup qu’il a découvert l’Amérique. Or, c’est déjà fait, des Vikings ayant abordé et exploré ses marges nordiques sept ou huit siècles plus tôt. Et ce « nouveau monde » est loin d’avoir une population clairsemée ou d’implantation récente. Les Amérindiens ont pour ancêtres des vagues de migrants venus d’Asie… quelques dizaines de millénaires plus tôt. Il faudra attendre le 20ème siècle pour que l’on admette qu’à la fin du 15ème les Amériques comptent entre 45 et 80 millions d’habitants, autant que l’Europe (environ 15% du total mondial). Les autochtones seront moins de cinq millions un siècle plus tard, rhume de cerveau et varicelle ayant le dos très large. Qu’est-ce donc si ce n’est pas un génocide, le plus grand de l’histoire ? Centre et sud confondus, c’est mal parti pour les Amérindiens. Avant de n’y voir qu’une lointaine réminiscence, il faudrait interroger les descendants des survivants, là où ils sont encore en nombres conséquents, demander par exemple à Evo Morales ce qu’il en pense…

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On dira « oui mais le Nord, ce n’est pas pareil ». En fait un bon siècle plus tard, ce sera le même scénario. Lorsque le « Mayflower » et 120 colons guidés par les « Pères pèlerins » venus d’Europe y touchent terre en novembre 1620, le territoire est habité. Si la prise de contact est pacifique, la prise de possession ressemblera assez vite à un western grandeur nature, où le tir à l’indien sera le sport favori des « gardiens de vaches », pour la distraction des générations futures. Qui d’entre nous, tapi dans l’anonymat des salles obscures, n’a pas applaudi frénétiquement les courageux cow-boys quand ils abattaient à la chaîne des Indiens emplumés tournicotant autour de leurs chariots ?

Indomptables ou denrée rare, les aborigènes seront bientôt remplacés par des esclaves venus d’Afrique. Pour ces derniers, les décennies de supplice seront oubliées sinon absoutes, grâce à la case de l’Oncle Tom et au rêve de Martin Luther King. La ségrégation est-elle pourtant si ancienne qu’il faille l’oublier ?

Bref, le « rêve américain » des immigrants européens se traduira par un cauchemar pour les Amérindiens comme pour les Africains asservis. L’Amérique n’existerait pas sans ce double cauchemar.

Le rêve américain et le mythe de l’Amérique si bonne

Intervenue dans le cadre du rezzou de l’Occident sur la planète, l’ascension irrésistible de l’Amérique, dont le nom usuel illustre l’annexion intellectuelle de deux continents, a fait oublier qu’elle devait son existence au génocide et à la spoliation des Amérindiens, sa prospérité en partie à l’esclavage, puis au pillage des ressources d’autrui. Qu’ils remontent à quatre siècles ou à quarante ans, ces « souvenirs » ne sont plus guère rappelés. Classés parmi les faits accomplis selon la volonté divine ou les miracles de la civilisation européenne, il ne fait pas bon les mentionner, sous peine d’être tenu pour un redoutable pisse-vinaigre.

La diffusion invasive du « rêve américain », génération après génération, est l’un des résultats de l’accession de cette fille de l’Europe au rang de puissance dès la grande guerre. Dans la mythologie, sinon dans la réalité, et à en croire certains historiens, l’intervention de l’Amérique aurait été décisive dans la victoire de 1918, puis dans l’organisation de la paix, avec la création en 1920 de la Société des Nations, ancêtre de l’ONU, grâce au Président Woodrow Wilson.

Mais c’est surtout à la faveur du second conflit mondial que les Etats-Unis sont promus au rang de superpuissance, libératrice, amicale, ouverte et généreuse. Ce cliché aura la vie dure, jusqu’à aujourd’hui, bien qu’il soit battu en brèche. Il fera oublier ce qui doit l’être :

-L’Amérique bonne et pacifique reste le seul pays à avoir trucidé à l’arme atomique trois centaines de milliers de civils, japonais en l’occurrence.

-Elle a une tendance fâcheuse à bombarder avant de libérer ou vice- versa, qu’il s’agisse de l’Allemagne nazie ou des pays amis comme la France.

-Elle est impitoyable pour les vaincus ou ceux tenus comme tels, voués à devenir des AMGOT (Territoires Occupés par le Gouvernement Américain). Notre pays devra au Général De Gaulle d’avoir échappé à ce statut peu flatteur.

-Elle est volontiers hégémonique : après l’Amérique (de l’Alaska à la Terre de Feu) aux Américains de Monroe, ce sera bientôt le Plan Marshall de l’après-guerre, qui impose la suzeraineté de Washington sur l’Europe occidentale. Au prétexte d’aider à la reconstruction, des armées de fonctionnaires US établiront une tutelle de facto sur l’ensemble des administrations du vieux continent. L’euphorie de l’époque et la crainte du communisme feront gober cette sujétion à notre Quatrième République…

Bien qu’elle se soit présentée comme vertueuse et protectrice face à l’URSS et au bloc communiste, l’Amérique de la guerre froide avait pourtant dévoilé certains faux-semblants, une démocratie en trompe-l’œil malgré les alternances, blanc bonnet et bonnet blanc, autoritaire, oppressive et répressive,n’ayant pas d’amis mais des intérêts, pas de partenaires mais des vassaux, une Amérique qui considère le monde comme son arrière-cour. Mais elle préservait l’essentiel de son aura, ses défaillances restant des tabous.

L’accession à l’hyper-puissance en 1991, à la fin de la guerre froide, allait tétaniser la planète, contraignant peuples et Etats à un « choix » lapidaire entre la soumission ou la destruction, la prétention à l’hégémonie globale débouchant sur un cauchemar pour ceux qui refuseraient l’ordre imposé par Washington et ses alliés…Voici donc le « moment unipolaire américain » qui durant vingt ans repoussera les limites de l’arrogance et du cynisme.

51PaFCg7i5L.jpgDès la chute de l’URSS, on ne peut que noter ce mépris croissant des institutions internationales, du multilatéralisme, des compromis, et cette tendance à peine voilée à faire prévaloir la constitution et les lois étatsuniennes sur la légalité onusienne, des comportements tels qu’on les dénonce sur les rives du Potomac. Le vocabulaire travestissant les mots et les concepts, les narratives contrefaisant systématiquement faits et réalités achèveront de rendre tout dialogue insensé et toute diplomatie illusoire. Simple exemple parmi d’autres, la notion de Rogue State qui, selon Avraham Shlaim, l’un des « nouveaux historiens » israéliens, professeur à l’Université d’Oxford, se définit par les trois critères suivants : (1) Violer régulièrement la légalité internationale, (2) Détenir des armes de destruction massive, (3) Utiliser le terrorisme pour terroriser les populations civiles. Destiné à cibler Moscou ou Téhéran ou Damas, ce logiciel dévoyé ne conduirait-il pas à Washington, à Tel-Aviv, ou à telle capitale « civilisée » ?

Dès la seconde guerre d’Irak, les « grandes démocraties » entameront leur longue dérive vers une diplomatie du mensonge de plus en plus insolente, prenant des libertés avec règles et principes, en osmose avec leur idole américaine et son cœur battant israélien. Merci pour ce moment, dirait un auteur contemporain.

Pourtant, à ce stade, la pétulance de Bill, la pieuse candeur de Debeliou, l’élégance nobélienne de Barack ont un effet anesthésiant sur les partenaires occidentaux ou autres, réticents à voir de la vilénie dans les postures de leur bon suzerain. L’Amérique, Etat mafieux, comploteur, peu fiable ? Tout mais pas ça…On a pu se leurrer quant à l’ADN du système américain, où se côtoient l’esprit pionnier, la culture cow-boy, le messianisme militant, le culte de la réussite, les néoconservateurs américano-israéliens étant les gâte-sauces de ce cocktail détonnant, degré zéro de la politique et de la diplomatie. L’arrivée de l’oncle Picsou aux affaires a eu le mérite de lever le masque.

Pour l’Amérique first, tout se vend tout s’achète, rien n’est gratuit. Plus de désinvolture, plus de discours bien balancés, plus d’invocations célestes. Mais des décisions brutales, un mépris total de ce qui est autre, une ignorance crasse des réalités du monde, une approche éléphantesque, plus de circonlocutions diplomatiques, plus d’engagements internationaux, plus de traités, mais des tweets provocateurs, des pluies de menaces, des sanctions à tous vents, des insultes à tout va.

Plus rien à attendre de bon de l’Amérique si bonne. Nixon doit se retourner dans sa tombe : la théorie du fou est mise en pratique, non plus comme un leurre, mais comme une politique en soi, imprévisible, insensée, violente, brutale. Ce n’est plus un simple Etat sans-gêne, avec des manières de mauvais garçons, mais un Etat gangster, d’autant plus brutal et menaçant qu’il n’a plus la maitrise des situations. Chahuté et contesté, le maître du monde ne sait plus où donner de la tête, de la Syrie à l’Irak et l’Iran et à la Russie, à la Chine, du Venezuela à la Corée du Nord, de la Turquie à l’Arabie et au Yémen.

Sommes-nous tous des Américains ?

Raison de plus pour apostropher les innombrables propagandistes du « rêve américain », pour interpeller les multiples adeptes et apôtres de cette « dame bêtise », Mère des gens sans inquiétude, Mère de ceux que l’on dit forts, Mère des saintes habitudes, Princesse des gens sans remords, que stigmatise Jacques Brel : Salut à toi Dame bêtise, toi dont le règne est méconnu, Mais dis- le moi, comment fais-tu, Pour avoir tant d’amants, et tant de fiancés, Tant de représentants et tant de prisonniers, Pour tisser de tes mains tant de malentendus, et faire croire aux crétins que nous sommes vaincus.

On n’arrête pas ce qui est en marche, qu’il s’agisse de la république ou de la civilisation. Cinq siècles et des poussières après la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, un certain Colombani allait découvrir que « nous sommes tous des Américains », assertion relevant de la méthode Coué, aurait-on dit jadis. Il n’en est rien. Malgré les efforts ardents des beautiful people qui gouvernent notre vieux pays, c’est toujours du wishful thinking…

D’ailleurs, serait-il vraiment sage pour un pays aussi cartésien que la France de faire comme si nous étions tous des compatriotes de Debeliou, de Donald Trump, John Bolton, Rumsfeld, Pence ou Pompeo ? Si tel n’est pas le cas, quoi qu’en pensent nos élites vol-au-vent, de quel droit un gouvernement s’engage-t-il au nom du peuple français, mais sans son accord, dans des aventures dangereuses. Pourquoi s’enferre-t-il sur des positions injustes et illégales, au mépris du droit international, des principes de la charte onusienne, violant les principes dont notre pays, membre permanent du Conseil de Sécurité, est censé être le gardien ?

Est-il nécessaire de manifester une solidarité sans faille aux pays agresseurs, l’Amérique et ses complices orientaux, adeptes des «frappes punitives», des crimes de guerre, des occupations illégales de territoires (syriens, irakiens ou autres), des sanctions inhumaines ? Est-il compréhensible que, dans l’affrontement actuel entre Washington et Téhéran, l’on choisisse d’appeler à la retenue et au retour à la négociation la partie, déjà sous blocus et sous sanctions, dont un officiel vient d’être assassiné ? Est-il honorable que l’on marque sa solidarité avec un Etat qui viole systématiquement lois internationales et souverainetés, vole ouvertement le pétrole syrien et pratique l’assassinat ciblé au nom d’une « doctrine Bethlehem d’autodéfense préventive » ?

Non, décidément, face aux évènements dramatiques qui menacent à tout instant de faire exploser la poudrière du Moyen-Orient, mettant en péril une paix mondiale plus fragile que jamais, la France n’a rien à gagner à s’aligner systématiquement sur des gouvernements sans foi ni loi ni vergogne. Vingt ans après la question idiote de Debeliou, dans nos pays où l’on s’arroge « le droit de dire le droit », tout se passe comme si penseurs et décideurs n’avaient pas encore saisi « pourquoi ils nous haïssent tant ». A l’heure de tous les dangers, ne serait-il pas urgent d’accélérer la réflexion et surtout d’en tirer les leçons ?

* L’Auteur utilise le mot Amérique pour désigner les États-Unis d’Amérique.

samedi, 25 janvier 2020

L’Iran, le pétrole et la guerre : la fin de la doctrine Carter ?

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L’Iran, le pétrole et la guerre : la fin de la doctrine Carter ?

par Ugo Bardi

Article original de Ugo Bardi , publié le 11 janvier 2020 sur le site CassandraLegacy
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr

Illustration: Le « corridor pétrolier », où se trouvent les plus grandes ressources pétrolières du monde.
 
Il a été généré par des événements qui ont eu lieu pendant la période jurassique. Ces événements ne peuvent pas être affectés par la politique, mais ils peuvent affecter la politique.

Pendant un certain temps, la situation de l’impasse entre les États-Unis et l’Iran a ressemblé à une scène d’un vieux western : deux hommes armés et ivres se faisant face dans un saloon. Heureusement, les choses se sont calmées et, pour cette fois, il semble qu’aucune guerre contre l’Iran ne soit en vue, du moins à court terme. Peut-être avons-nous eu de la chance, peut-être qu’une divinité bienveillante s’est occupée de la situation, ou peut-être y a-t-il une logique dans ces événements.

L’histoire se déroule souvent selon le caprice des dirigeants, mais même les dirigeants fous doivent tenir compte de la réalité. Et il semble que ce soit ce qui s’est passé dans ce cas. Il est possible que nous voyions la fin de la « Doctrine Carter » qui a été énoncée en 1980. L’idée était, et elle l’est encore aujourd’hui, que le contrôle du Moyen-Orient est d’un « intérêt vital » pour les États-Unis. Elle était basée sur la réalité telle qu’elle était en 1980, maintenant la réalité est différente et il y a donc une raison pour ce changement. Mais voyons toute l’histoire depuis le début.

Tout a commencé il y a longtemps, pendant la période jurassique, lorsque la lente sédimentation d’une mer ancienne a créé une bande de champs pétrolifères qui va du Caucase et de la mer Caspienne, en Eurasie centrale, jusqu’au Yémen, en traversant l’Iran, l’Irak, l’Arabie Saoudite et d’autres États de la région. C’est là que se trouve la plus grande partie du pétrole du monde. Plus de 20 % de tout le pétrole produit aujourd’hui passe par l’étroit détroit d’Ormuz, un point critique de la carte géopolitique mondiale.

Ainsi, au début des années 1980, les États-Unis avaient été la puissance mondiale dominante pendant près de quatre décennies après la victoire lors de la Seconde Guerre mondiale. Comme d’habitude, la géographie est la mère des empires, et c’est grâce à ses vastes ressources pétrolières nationales que les États-Unis ont pu en venir à jouer ce rôle. Mais la production pétrolière des États-Unis avait atteint son maximum en 1970 et était en déclin. Pas de pétrole, pas d’Empire. Il fallait trouver de nouvelles ressources et la région du Moyen-Orient était la plus riche du monde. Une cible naturelle.

La lutte pour le pétrole du Moyen-Orient avait déjà commencé dans les années 1950, lorsque le Premier ministre iranien, Mohamed Mossadegh, fut renversé en 1953 par un coup d’État orchestré par les États-Unis. Ensuite, il y a eu la période où les États-Unis ont plus ou moins contrôlé le gouvernement iranien en utilisant le Shah comme mandataire. Puis, il y a eu la révolution iranienne en 1978-79 dont le résultat a été le renversement du Shah. À ce moment-là, en 1980, le président Carter a énoncé sa « doctrine » – en fait, rien de plus qu’une description de ce qui s’était passé jusqu’alors.

Vous connaissez l’histoire troublée du Moyen-Orient dans les années qui ont suivi avec la désastreuse guerre Iran-Irak (1980 – 1988). Les États-Unis ont commencé à « mettre des hommes sur le terrain », d’abord au Koweït en 1991, puis ont envahi l’Irak en 2003. A cette époque (et aussi plus tard), il était à la mode de dire que « les garçons peuvent aller à Bagdad, mais les vrais hommes veulent aller à Téhéran ». C’était peut-être une blague, mais ça aurait pu être mortellement sérieux. Cela fait partie de la logique d’expansion des empires.

Finalement, l’invasion de l’Iran n’a jamais eu lieu et il semble qu’elle n’aura jamais lieu. C’est, encore une fois, la façon dont les empires fonctionnent. Ils sont comme une marée, ils vont et viennent. L’Empire américain a coulé en Irak, maintenant il reflue. La plupart des commentateurs des récents événements s’accordent à dire que nous assistons aux premières étapes du retour des troupes américaines au pays. Cela prendra du temps, mais c’est écrit sur les murs du Monument aux martyrs à Bagdad.

Outre les pitreries des fous au pouvoir, il est logique que les États-Unis abandonnent l’Irak. Quelqu’un, quelque part à Washington D.C., a dû poser la question : « Pourquoi exactement gardons-nous des troupes en Irak ? » Oui, pourquoi ? La réponse typique jusqu’à il y a peu aurait été « pour sécuriser le pétrole ». Mais les choses ont changé. Les ressources pétrolières autrefois très abondantes du Moyen-Orient sont inévitablement en train de s’épuiser.

Certains producteurs, la Syrie et le Yémen, sont déjà en déclin terminal. Parmi les autres, aucun n’a la capacité d’augmenter la production de manière significative et tous devraient connaître un déclin dans les années à venir (vous avez peut-être entendu parler de la récente découverte de « 53 milliards de barils » de pétrole en Iran. Oui, et ils ont aussi trouvé un pot d’or au pied de l’arc-en-ciel).

En même temps, les États-Unis ont vraiment trouvé un pot d’or noir avec le pétrole de schiste, au point qu’au cours des dernières années, ils ont réussi à augmenter leur production de pétrole à des niveaux plus élevés que le pic précédent de 1970. Le fait que le pétrole de schiste soit une bonne affaire en termes économiques est pour le moins discutable. Mais les élites américaines ont acquis la conviction non seulement qu’elles sont réellement autosuffisantes en termes d’énergie, mais aussi que cette autosuffisance se poursuivra dans un avenir prévisible, peut-être pour toujours, car le pétrole de schiste est considéré comme une ressource pratiquement infinie. Et ils voient le pétrole de schiste comme une arme de domination stratégique.
 

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A ce stade, beaucoup de choses commencent à avoir un sens : le pétrole du Moyen-Orient n’est plus un « intérêt vital » pour les États-Unis comme c’était le cas à l’époque de Jimmy Carter. Alors, pourquoi payer cher pour y maintenir des troupes ? Ces troupes ne sont utiles qu’à ces Européens sans scrupules qui dépendent encore des importations de pétrole, mais pourquoi l’Amérique devrait-elle payer ? De plus, dans la situation actuelle, les troupes américaines ne sont que des cibles faciles en attendant la prochaine pluie de missiles de ces barbus fanatiques. Alors, ramenons les troupes à la maison. Ensuite, nous pourrons assassiner n’importe qui dans la région sans craindre de représailles.

Et c’est ce qui semble se passer pour l’instant, à moins que quelqu’un ne fasse une erreur et que le feu d’artifice ne reprenne. Mais cela confirme que c’est la géographie qui crée des empires et, aussi, que la géographie du pétrole ne cesse de changer. Nous verrons d’autres changements dans le futur, la seule chose sûre est que, contrairement à ce que certains croient , le pétrole n’est pas une ressource infinie.

Ugo Bardi enseigne la chimie physique à l’Université de Florence, en Italie, et il est également membre du Club de Rome. Il s’intéresse à l’épuisement des ressources, à la modélisation de la dynamique des systèmes, aux sciences climatiques et aux énergies renouvelables.

Note du traducteur

Ugo ne peut pas ne pas savoir qu'il y a un autre acteur clé dans la région, Israël, qui veut le maintien des troupes américaines pour sécuriser sa position et a visiblement les moyens de dicter sa politique. Étonnant cette auto-censure, ou alors il y a un message subliminal.

Dossier Strategika : Notre-Dame, Al Aqsa et le troisième Temple. La géopolitique des religions

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Dossier Strategika : Notre-Dame, Al Aqsa et le troisième Temple. La géopolitique des religions

Dossier exclusif (60 pages)

« Je présente mes condoléances à l'Imam caché », c’est ainsi que l’Ayatollah Khamenei, Guide suprême de la Révolution islamique, s’adressait à la nation iranienne au moment de rendre hommage au général Qassem Soleimani tué le 3 janvier dernier par un raid américain.[1] De son côté, le secrétaire d'État des États-Unis Mike Pompeo emploie régulièrement des images bibliques pour illustrer l’action de son administration, comparant par exemple Donald Trump à une nouvelle Esther venu délivrer le peuple juif de Haman, ce Vizir de l'Empire perse. Un ennemi antique des juifs qui renvoie dans la mémoire collective juive à l’Iran actuel.[2] Benjamin Netanyahu évoquait à son tour ces références vétéro-testamentaires lors d’une déclaration conjointe avec le secrétaire d'État américain Mike Pompeo en mars 2019 : « Nous célébrons Pourim, quand, il y a 2500 ans, d’autres Perses, menés par Haman, ont tenté de détruire le peuple Juif. Ils ont échoué ; et aujourd'hui, 2 500 ans plus tard, une nouvelle fois, les Perses dirigés par Khamenei tentent de détruire le peuple Juif et l'État Juif. »[3]

Pour cette longue mémoire juive qui traverse l’Histoire, la reconstruction du Temple de Jérusalem et la reprise des sacrifices à Yahvé en son sein constituent des éléments clefs du projet géopolitique de la droite religieuse israélienne. La reconquête du mont du Temple obsède et galvanise l’aile la plus religieuse du sionisme religieux depuis la guerre des Six Jours en 1967 mais constitue le cœur de son agenda théopolitique depuis bien plus longtemps.

Pour le chercheur occidental contemporain le phénomène religieux est généralement considéré comme un élément possible du bilan géopolitique (de par l'étude des représentations idéologiques des acteurs géostratégiques) mais rarement comme un élément central de l'analyse des rapports de force entre les puissances. Pourtant des penseurs politiques de la hauteur de vue d’un Carl Schmitt ont montré de quelle manière les conceptions politiques découlent généralement de concepts et de notions religieuses plus anciennes. C'est le domaine de la théopolitique ; domaine qui est un champ du savoir essentiel pour appréhender la nature profonde des conflits qui déchirent l'humanité contemporaine.

Toutes les puissances suivent et instrumentent un agenda religieux. La République française elle-même possède son propre fond religieux si l’on se réfère aux déclarations d’un Vincent Peillon qui affirme :

« L’idée que la République est areligieuse est une idée fausse. Très tôt après l’échec de la Constitution civile du clergé, votée en juin 1790, les jacobins, inquiets du mouvement des prêtres réfractaires et de l’importance, en vis-à-vis, du mouvement anticlérical, ont mis en œuvre l’idée d’un ‘‘culte civique’’[4] et d’une “religion de l’avenir” », et il ajoute que « La Révolution est en elle-même un projet de régénération. Avec ce projet de régénération, on fait émerger dans l’histoire profane une conception empruntée au vocabulaire religieux, qui désigne tantôt la naissance spirituelle du baptême, tantôt la nouvelle vie qui doit suivre la résurrection générale. La révolution de 1848 mais aussi la Commune utiliseront à nouveau ce vocabulaire. L’évêque constitutionnel de Lyon, Lamourette, ne s’y était pas trompé, lorsqu’il interprétait déjà la Révolution comme opérant une régénération christique des cœurs ».[5]

Emmanuel Macron fera lui aussi référence à plusieurs reprises à des éléments de langage religieux, évoquant une « transcendance » qui « nous dépasse et qui restera ». Transcendance en laquelle il dit croire même s’il ne croit pas au dieu personnel chrétien : « Je ne suis plus sûr de croire en un Dieu. Oui, je crois en la transcendance. (…) J'assume la dimension de verticalité et de transcendance, et en même temps elle doit s'accrocher à de l'immanence complète, à du matériel. Je ne crois pas à une transcendance éthérée. ».[6] C’est justement à cette transcendance immanente que le régime républicain aura recours pour tenter de juguler symboliquement le soulèvement populaire le plus long de l'histoire de France contemporaine : la révolte des Gilets jaunes.  

En partant de l’exemple de l’incendie de Notre-Dame et de ses suites, la présente étude traite des manipulations politiques du sacré au cours de l’histoire récente. Au travers d’exemples historiques divers, ce dossier montre comment un pouvoir politique qui persécute une religion peut, lorsqu’il s’agit de conjurer une menace mortelle, réactiver ponctuellement et se réapproprier la charge sacrée de la religion qu’il entend par ailleurs soumettre voire éradiquer. Ainsi, l’incendie de Notre-Dame a permis de resacraliser la fonction présidentielle dans un moment de crise existentielle de la République et de pousser une partie importante des électeurs de droite à voter pour son parti lors des élections européennes de 2019 qui se tinrent un mois après l’incendie de Notre-Dame.

Cette étude éclaire aussi l’exacerbation des tensions actuelles et la montée aux extrêmes des USA et d’Israël face à l’Iran. Y est notamment exposée l’influence des courants millénaristes évangélistes qui viennent empêcher les tentatives d’isolationnisme et de réalisme politique de l’administration Trump. Des courants qui poussent celle-ci à la guerre avec l’Iran au nom de conceptions issues d’interprétations littéralistes de l’Ancien Testament.

Enfin, la dernière partie de cette étude trace la généalogie, sur la longue durée, de ce véritable judéo-évangélisme qui tente aujourd’hui d’inclure toute la chrétienté au sein d’un judéo-christianisme pan-occidental et qui cherche à faire épouser l’agenda géostratégique et théopolitique des États-Unis et d’Israël à l’ensemble des nations historiquement chrétiennes.

Ce dossier contient un article co-écrit par les deux auteurs au moment de l'incendie de Notre-Dame, texte fondu dans la présente étude qui fait désormais 60 pages.

La rédaction de strategika.fr

Plan et contenu du dossier :

Notre-Dame, Al Aqsa et le troisième Temple :
La géopolitique des religions

Pierre-Antoine PLAQUEVENT
Youssef HINDI

 I - L’incendie de Notre-Dame et la crise de la République 

  • Incohérences techniques et projet de remodelage de l’île de la Cité
  • Une diversion politique en pleine révolte populaire ?
  • Quelques parallèles historiques
  • Persécution de la religion et manipulation du sacré : l’exemple soviétique
  • La destruction du catholicisme et des églises : une tradition républicaine
  • Subvertir l’Église pour mieux la faire haïr
  • Le sacrifice propitiatoire de Notre-Dame pour régénérer la République
  • Destruction de la cathédrale et construction d’un temple maçonnique

 II - De la destruction de Notre-Dame à la reconstruction du Temple de Jérusalem

  • L’incendie de Notre-Dame, un châtiment divin contre le christianisme ?
  • L’incendie de la Mosquée d’Al Aqsa et le Troisième Temple de Jérusalem
  • L’Évangélisme sioniste et la fin de l’Histoire
  • Le Troisième Temple et la guerre mondiale des religions

III - Les étapes du judéo-christianisme, du Moyen-Âge à nos jours

  • Quand l’Église réhabilite les pharisiens, ennemis du Christ
  • La kabbale chrétienne, une arme de subversion contre l’Eglise
  • Un kabbaliste au Vatican
  • Le frankisme comme prolongement de la kabbale chrétienne
  • De Jacob Frank à Jean-Paul II via Adam Mickiewicz
  • La Franc-Maçonnerie et l’Église conciliaire
  • Vatican II et le judéo-christianisme
  • Jésus et la Vierge Marie dans la littérature juive et le Talmud
  • Jésus et la Vierge Marie dans le Coran
  • Jésus et les pharisiens dans les Évangiles

[1] http://french.presstv.com/Detail/2020/01/03/615234/Notre-... 
[2] https://www.washingtonpost.com/religion/2019/03/22/pompeo...
[3] https://embassies.gov.il/paris/NewsAndEvents/Pages/Declar...
[4] Albert Mathiez, Les Origines des cultes révolutionnaires, 1789- 1792, Genève, Slatkine, 1977, p. 14.
[5] Vincent Peillon, Une religion pour la République, 2010, Seuil, pp. 65-66.

Sur la généalogie de la religion de la République, voir : Youssef Hindi, La Mystique de la Laïcité : Généalogie de la religion républicaine, 2017, Sigest.
[6] https://www.lejdd.fr/Politique/macron-ce-que-lon-sait-de-...
Voir aussi : https://www.youtube.com/watch?v=WVg2iqTfnus

 

Carl Schmitt and Leo Strauss in the Chinese-Speaking World

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Carl Schmitt and Leo Strauss in the Chinese-Speaking World

by Dongxian Jiang

 Ex: https://www.voegelinview.com

Carl Schmitt and Leo Strauss in the Chinese-Speaking World: Reorienting the Political, Kai Marchal and Carl K.Y. Shaw, eds. Lanham, Lexington Books, 2017.

51SaQUAXfmL._SX331_BO1204203200_-e1527628158686.jpgCarl Schmitt and Leo Strauss are extremely popular in China, especially in Mainland China—this is no longer a secret in the Western academia. As early as 2003, Stanley Rosen had already told the Boston Globe that “A very, very significant circle of Strauss admirers has sprung up, of all places, China.”[1] Then, in 2010, Mark Lilla, after returning from a visit to Chinese universities, published a widely-circulated article in the New Republic, reporting that there was a “strange taste in Western philosophers” among Chinese scholars and college students, i.e. their strange obsession with Leo Strauss and Carl Schmitt.[2] A 2015 article published on “The China Story” website by Flora Sapio further described the reception of Carl Schmitt by China’s New Left intellectuals and showed the author’s concern with the potential danger of Schmitt’s legal and political theory.[3] Schmitt and Strauss have become philosophical and political stars in China is well-known in the Western world. The question that still puzzles people is—Why?

It is in line with this growing visibility of China’s “Schmitt-Strauss fever” that Kai Marchal and Carl K.Y. Shaw edited this current volume on Carl Schmitt and Leo Strauss in the Chinese-speaking World, a long-waited contribution to the decoding of and engagement with this enigmatic intellectual phenomenon. The greatest virtue of this volume is, as the two editors say in the Introduction, that “while individual authors may differ in their evaluation of the nature of this reception and its possible implications,” they all agree that this intellectual phenomenon should be treated in a serious way (p. 13). Taken as a whole, this volume is currently the most in-depth discussion in the entire world of the Chinese receptions of Schmitt and Strauss, and should be recommended to anyone who is interested in Chinese intellectual history in the post-Mao era.

Readers who are intrigued by the Schmitt-Strauss fever in the Sinophone world would naturally ask three questions, and they expect that this volume would answer them from different angles. First, why are Schmitt and Strauss so popular in China (the “Why” question)? Second, how do Chinese intellectuals use Schmitt’s and Strauss’s political thought to participate in China’s political debates? And third, how can liberals respond to these Chinese Schmittians and Straussians, if they are using Schmitt’s and Strauss’s “illiberal” thought to express their discontent with the Western modernity? The contributors in this volume aim to do all these jobs, but as I shall demonstrate, several drawbacks of the book might have made it unsuccessful to fulfill readers’ expectations. Specifically, I shall argue, while the volume contains detailed answers to the second question, it does not provide persuasive and sufficient accounts of the “Why” question. In addition, though the volume aims to engage with the Chinese Schmittians and Straussians, the strategies that some contributors use may not be promising in the Chinese context.

As a book dealing with the Chinese reception of Schmitt and Strauss, several chapters are devoted to the analysis of the writings of Chinese Schmittians and Straussians, with a focus on how they use Schmitt’s and Strauss’s ideas to address distinctively Chinese issues. The chapters by Shaw, Marchal and Nadon are especially helpful for readers to know who the Schmittians and Straussians are in China and how they are politically motivated to invoke Schmitt’s and Strauss’s authorities. These close analyses, based on first-hand textual evidence, provide solid bases for the contributors in this volume to engage with the Chinese thinkers, and to show what they are getting right and where they are going wrong.

In terms of the historical accounts of China’s reception of Schmitt and Strauss, contributors have made significant efforts in reconstructing the historical context of China’s post-Mao period and in explaining why certain Schmittian and Straussian ideas have resonance in this particular circumstance. For example, Shaw is very successful in providing “a contextual and immanent analysis which demonstrates the rationale of the receptions, the inner logic of the theoretical reconstructions, and their relevance for contemporary Chinese intellectual debates” (p. 40). Similarly, Charlotte Kroll reconstructs the legal and political issues that Chinese intellectuals cared about when Schmitt was introduced, and connects Schmitt fever with what Jan-Werner Mueller calls “Schmitt’s globalization” in the 1990s. Before unfolding his engagement with and critique of Liu Xiaofeng’s interpretation and application of Strauss’s political thought in the Chinese context, Marchal presents an overview of the intellectual trajectories of China’s leading Straussians and briefly explains why Strauss is attractive to scholars who are concerned with the “nihilism” issue in the post-Maoist China.

However, as the Schmitt-Strauss fever is the most enigmatic, even “strange” intellectual phenomenon in contemporary China, this volume should have devoted more efforts to the investigations into the “Why” question. A reasonable account of this phenomenon must answer 1) why it is in this particular historical moment that Schmitt and Strauss become authoritative for many Chinese intellectuals, and 2) why it is Schmitt and Strauss, not other critics of Western modernity and liberal democracy, that especially attract the attentions of Chinese intellectuals. In the 1980s and 90s, for example, one of the most fashionable things to do among China’s leading intellectuals was to discuss Nietzsche, Heidegger, Sartre, and Foucault. Why these critics of modernity and liberal democracy, either from the Left or the Right, did not trigger a similar wave of anti-liberalism in China is a question that all scholars interested in Chinese political thought should painstakingly think about. Therefore, a contextualized account of the Schmitt-Strauss fever is not complete if there lacks a comprehensive investigation of China’s reception of Western thought in general, and of China’s reception of anti-Enlightenment and illiberal thought in particular. This, I admit, is not an easy task, but is worth doing if we really take the Schmitt-Strauss fever in China seriously.

Another thing that this volume should have done is an excavation of the pre-Schmittian and pre-Straussian writings of intellectuals like Liu Xiaofeng and Gan Yang, to name a few, because these writings may provide some clues for explaining their intellectual transformations. Contributors like Marchal and Nadon have mentioned that Liu and Gan were not Schmittians and Straussians from the very beginning of their academic lives, but what they have not fully elaborated is that these two figures were active liberals before encountering Schmitt and Strauss. In the 1980s and early 90s, Liu was a “cultural Christian” advocating for China’s radical transformation from “traditional culture” to Christianity, but his political position was by and large liberal. Gan asked Confucianism to modernize itself in order to embrace modern values such as individual rights, equality, pluralism, and democracy. Before their encounter with Schmitt and Strauss, they were obsessed by various “illiberal” or “anti-liberal” philosophers in the West, such as Nietzsche, Heidegger and Sartre, but this obsession did not prevent them from appreciating Berlin, Habermas and Rawls. Just one year before Liu Xiaofeng’s open conversion to Strauss’s political thought and his embrace of illiberalism, he was using public reason liberalism to criticize Charles Taylor and his Chinese followers who wanted to use communitarian insights to fight for the Confucian causes.

After his Straussian turn, however, Liu has been increasingly intolerant of liberal political theory, thinking that a return to the “classical mentality” is incompatible with the pursuit of liberal reform in China. A detailed description of Liu’s “liberal years” may make his sudden but whole-hearted conversion to Schmitt and Strauss more enigmatic, but may also provide hints about whether his particular and idiosyncratic conception of liberalism actually paved way for his later conversion to anti-liberalism. For example, a close reading of his early works shows that the pursuit of an “absolute value” is a constant theme in his liberal years, and that his discomfort with value pluralism to some extent foreshadows his embrace of Strauss’s political thought.

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The absence of detailed and sound explanations of the Schmitt-Strauss fever may be remedied if the Chinese Schmittians and Straussians in this volume could take this opportunity to explain why they think that China needs Schmitt and Strauss for imagining its political future. Readers may have the expectation to look for direct articulations and defenses of their motivations for invoking the authority of Schmitt and Strauss. The volume contains three articles written by Mainland Chinese and Taiwanese scholars who are sympathetic toward Schmitt and Strauss.

Among them, however, only Chuan-Wei Hu’s is a straightforward defense of Strauss in the Taiwanese context and an articulation of why Strauss matters for Taiwan’s democracy. The other two “Mainland” pieces, surprisingly, refrain from providing any direct answers to the “Why” question, and thus miss the opportunity for Mainland Chinese Schmittians and Straussians to make a case for themselves. Han Liu’s chapter, which argues that the global diffusion of constitutionalism and judicial guardianship is a bad thing, does not provide any positive proposals for China to design an alternative legal system in accordance with Schmittian insights, despite his merely one-paragraph assertion that “China should pay attention to its own political culture, however defined, to ground a firm constitutional authority” (pp. 134-5).

The chapter by Jianhong Chen, a leading Mainland Straussian, provides an excellent reinterpretation of Strauss’s political thought, and he argues, against various Western scholars, that Strauss should not be understood as a conservative thinker merely defending the status quo, because political philosophy as Strauss understands is still a radical “negation” of actual politics, thus preserving a utopian and normative dimension. By claiming that Heinrich Meier’s interpretation of Strauss is a myth (pp. 197-8), Chen hints that Liu Xiaofeng’s reception of Strauss might also be mistaken, because Liu encountered Strauss largely through Meier’s secondary literature. But, again, Chen does not elaborate the possible implications of his understanding of Strauss, such as whether Strauss can be used in a way to challenge the political status quo in China. If readers who are not able to read Chinese want to understand why Schmitt and Strauss are important for China from an indigenous perspective, they can read Wang Tao’s article published in the Claremont Review of Books, in which he provides an explanation and justification of China’s reverence for Strauss.[4]

Lastly, the most significant accomplishment that this volume has achieved is a theoretical engagement with the Chinese Schmittians and Straussians. The contributors believe that this wave of anti-liberalism in China inspired by Schmitt and Strauss should be taken seriously, and this volume is a valuable addition to the intercultural conversation in the burgeoning field of comparative political theory. Chapters written by Shaw, Wenning, Nadon and Marchal are recommended for readers who are looking for evaluations of the Schmitt-Strauss fever. Among these four chapters, Shaw and Marchal are generally critical of the Chinese Straussians, arguing that they either fail to grasp Strauss’s true spirit or distort his key teachings. Wenning has a similar critical attitude toward Chinese Schmittians and claims that these scholars have not recognized the “internal complexity” (p. 82) of Schmitt’s thought. Based on his discussion of Schmitt’s later writings, to which few Schmitt scholars have paid adequate attention, Wenning shows how this underappreciated dimension of Schmitt’s political thought might have the potential to overcome the one-sidedness of the current Chinese reception of Schmitt. In contrast, Nadon provides the most positive evaluation of the Chinese reception of Strauss, and contends that Liu Xiaofeng may ultimately “articulate a new and inspiring vision of what Chinese civilization could be” (p. 12).

A theme that unifies many contributors in this volume is their worry that some leading Chinese intellectuals in this fever, most notably Liu Xiaofeng, have an extremely hostile attitude toward liberalism and liberal democracy. While their discontent with Western cultural hegemony should be sympathized, contributors still feel that liberalism as a universal value should be defended in the Chinese context. As Marchal and Wenning have exemplified, one strategy to criticize Chinese Schmittians and Straussians is to show that they are misinterpreting Strauss and neglecting the internal richness of Schmitt. However, I wonder whether this is a promising strategy for engaging with these anti-liberal scholars.

Take Marchal’s chapter as an example, the underlying logic of his strategy is that if Chinese intellectuals get Strauss correctly, then they should have used Strauss for different purposes, rather than merely justifying China’s particular tradition and extant authoritarian regime. Based on his comparison of Strauss and Liu Xiaofeng, he argues that Liu’s use of Strauss “leads to a number of fundamental distortions” of Strauss’s claims in On Tyranny, that “instead of having discerned Strauss’s esoteric messages, Liu may thus have misunderstood his teacher” (p. 184), and that “Liu Xiaofeng’s project is being played out according to a very different agenda than Strauss’s original project,” which Strauss “likely never anticipated” (p. 181). In a word, “It is quite remarkable that the Chinese Straussian Liu Xiaofeng can relate to Strauss’s critique of liberal democracy without further ado in a non-liberal, non-democratic society (which China undoubtedly still is)” (p. 186).

However, what makes Marchal’s comparison of Strauss and Liu problematic is that he applies a double standard when interpreting Strauss’s and Liu’s works respectively. In terms of Strauss, Marchal is fully aware that his works are notoriously enigmatic, and recognizes that reconstructing a “real Strauss” is extremely difficult, so he carefully chooses what he thinks the “more convincing and theoretically plausible” secondary literature, and based on these, provides a charitable reading of Strauss’s political philosophy, i.e., Strauss as an eternal sceptic and critical friend of liberal democracy. When it comes to Liu, he chooses Liu’s most “Straussian book” to date, Republic and Statecraft, as a target for criticism, because he thinks that Liu misapplies Strauss’s teachings in On Tyranny in this book. However, the problem with his reading of Liu is that he does not attempt to use the same method to decode Strauss’s and Liu’s writings, thus making his understanding of Liu dubious and uncharitable.

As Liu himself claims in the afterword of this book, Republic and Statecraft is an expansion of his reading notes of Xiong Shili’s lengthy letter to Mao Zedong.[5] In this book, there is no place where Liu openly articulates his own positions, and, like Strauss, he hides his own ideas behind his textual analysis of Xiong’s letter. Xiong was a well-known New Confucian philosopher in twentieth century China who claimed that modern values such as equality and democracy could be interpreted from the Confucian canons. When the CCP came to power in 1949, Xiong decided to stay in the Mainland, and wrote a series of letters to Mao to make a plea for the protection of China’s traditional culture by arguing that the revolutionary spirit was compatible with Confucianism. In one letter, Xiong expressed his admiration of Mao by claiming that Mao was a modern reincarnation of the ancient sage-king, and that his authoritarian rule was necessary for China to realize freedom and democracy. Liu finds this letter extremely interesting, and uses a Straussian hermeneutics to interpret Xiong’s thought.

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Marchal is aware that Liu is practicing Straussian hermeneutics in this book, but surprisingly, he unreflectively presumes that Liu affirms and praises Xiong’s ideas. Without presenting any quotations from this book, Marchal argues that “[Liu’s] argumentation in Republic and Statecraft strongly suggests that Liu regards Xiong Shili’s attempt to ground Mao’s revolution in the horizon of traditional Chinese culture as meaningful” (p. 188). It is true that Liu does admire Mao in recent years, but this does not necessarily mean that Liu expresses his admiration in a way similar to Xiong’s. His other Straussian writings show his disapproval of the attempt in the twentieth century to develop modern values from within the Confucian tradition, because the Straussian teaching of “transcending the modern horizon” inspires him to praise classical Confucianism, in which, according to him, moral and political hierarchy is the core of the authentic Confucian spirit. As Xiong belongs to the New Confucian school and speaks highly of equality and democracy, it is highly probable that Liu, in his Republic and Statecraft, fundamentally disagrees with Xiong’s ideas. Therefore, while reading Strauss in a charitable way, Marchal to a large degree provides an uncharitable reading of Liu. This double standard fatally discredits his claim that Liu distorts Strauss’s thought, as Liu may easily retort that Marchal is distorting Liu’s thought in the first place.

However, even if Marchal could distribute his charity evenly to Strauss and Liu, the effectiveness of his strategy in combating Chinese anti-liberalism is still doubtful. After all, to what extent is Liu distorting Strauss is a highly contestable issue, as Strauss himself is an extremely enigmatic political thinker. For Marchal, the “real Strauss” he identifies is a Strauss constantly skeptical about Western modernity but never attempts to offer any positive account of a radical alternative, not to mention actively pursues such an alternative in political actions (p. 176). In contrast, Liu distorts Strauss in the sense that he wants to craft a concrete alternative based on the Chinese tradition, and tends to put this project into action.

Were Marchal to do a close analysis of Liu’s interpretations of Strauss, he would quickly find that Liu is almost familiar with Strauss’s entire corpus, and it is extremely difficult to claim that Liu distorts Strauss without going through all his quotations of Strauss’s original texts. In particular, what Marchal does not mention in this chapter is that Liu is especially interested in Strauss’s “theologico-political predicament,” i.e., the tension between the philosopher and the political society. According to Strauss, it is the philosopher’s virtue to constrain its eagerness to challenge the conventions, customs, moral codes, religions, superstitions, laws, and political authorities of the political society, because a replacement of these nomoi with pure reason will lead to the very disintegration of the political society. Therefore, the philosopher should uphold and gently improve the nomoi in his exoteric teachings, while conceal his true philosophical teachings in his esoteric writings.

What Liu takes from Strauss is that a philosopher in the Chinese context should do the same thing, but this leads him to protect the extant values and political authority which Chinese people have inherited from the ancient times, against the encroachment of Enlightenment thought from the modern West. Liu’s construction of the Chinese nomoi might be wrong and politically motivated, as Marchal shows in his chapter, but this does not mean that Liu’s understanding of Strauss per se is also mistaken. After all, Strauss never anticipated that his thought would be applied someday in a non-Western society, so he did not set a rule for approvable applications, despite his criticism of totalitarianism and communism. Therefore, instead of “distorting” Strauss, one might say that Liu is “extending” Strauss in the Chinese context.

Therefore, if Marchal really wants to criticize Chinese Straussianism and defend liberal principles, his call for a correct understanding and application of Strauss in Mainland China may not work well. Even if there is a correct understanding of Strauss, the application of Strauss might be “beyond right and wrong,” and Marchal actually accepts that “[Strauss’s] writings encourage alternative readings in the context of non-Western intellectual traditions” (p. 174). In the “Conclusion” of his chapter, Marchal hopes that “it may be possible that other forms of Chinese Straussianism may preserve a genuinely critical, zetetic force,” a “more balanced understanding of the cultural differences between East and West,” and a less nationalist defense of the authoritarian regime (p. 191).

However, if Marchal really wants to achieve these goals and give liberalism a try in China, one may wonder whether Strauss is the “Mr Right”—Why not drop Strauss and resort to other liberal thinkers in the West for intellectual resources? After all, as primarily a critic of modernity and liberal democracy, Strauss not only upsets liberals in China but also liberals in the Western world. His mystical genre and his unwillingness to engage in public dialogues make him unfit for defending liberalism, let alone defending liberalism in the Chinese context. As the prospect of liberalism in China has been increasingly bleak in recent years, the need for a straightforward defense of basic liberal principles is needed. Building a liberal-friendly team of Straussianism in China as Marchal hopes is not impossible if some scholars can do what American Straussians did after 2001, i.e., defending Strauss while reconciling him with liberal democracy, but people caring about the future of Chinese liberalism may wonder whether Strauss is really an indispensable intellectual authority at all. After all, why should liberals play the game whose rules are one-sidedly settled by their rivals, instead of opening a new field to play?

Finally, at the end of my review, I should point out that even if the volume offers a variety of insights, it should have had some stylistic improvements for readers to have a better reading experience. Key arguments should be presented clearly in the beginning of each chapter, and convoluted expressions should be avoided. Therefore, readers interested in the Chinese reception of Schmitt and Strauss can start from this volume, but they have good reasons to wait for better works on this subject to be done.

Notes

[1] Jeet Heer, “The Philosopher the Late Leo Strauss has Emerged as the Thinker of the Moment in Washington, but His Ideas Remain Mysterious. Was He an Ardent Opponent of Tyranny, or an Apologist for the Abuse of Power?” Boston Globe, May 11, 2003.

[2] Mark Lilla, “Reading Strauss in Beijing,” New Republic, 2010, http://www.newrepublic.com/article/magazine/79747/reading-leo-strauss-in-beijing-china-marx#, accessed March 19, 2014.

[3] Flora Sapio, “Carl Schmitt in China,” The China Story, Oct 7, 2015, https://www.thechinastory.org/2015/10/carl-schmitt-in-china/, accessed March 31, 2018.

[4] Wang Tao, “Leo Strauss in China,” Claremont Review of Books, Spring 2012, accessed March 19, 2014, http://www.claremont.org/publications/crb/id.1955/article_detail.asp.

[5] Liu Xiaofeng, Gonghe yu jinglun 共和与经纶 (Republic and Statecraft), Beijing, Sanlian chubanshe, 2012, 303-4.

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Dongxian Jiang

Dongxian Jiang is a Ph.D. Candidate in Political Theory at Princeton University where he is also the Laurance S. Rockefeller Graduate Prize Fellow at Princeton’s University Center for Human Values. He is working on a dissertation justifying liberal principles in the Chinese context.

Pour une boussole métapolitique

Entretien avec Jean-Patrick Arteault, auteur de Pour une boussole métapolitique aux Éditions de la Forêt

(propos recueillis par Fabrice Dutilleul)

Ex: http://eurolibertes.com

Jean-Patrick Arteault, qu’est-ce qu’une « Boussole Métapolitique » ?

Sans filer trop loin la métaphore, on rappellera que la boussole est un petit instrument, dont l’aiguille aimantée vers le nord (magnétique) sert, le plus souvent associé à une carte, à s’orienter au cours d’un périple. Dans la brochure éponyme, qui tient d’ailleurs autant de la boussole que de la carte, j’ai surtout voulu rappeler un certain nombre de repères qui m’ont paru utiles quand on est engagé dans le type d’action qu’on associe au mot « métapolitique ».

Vous posez, au départ, une identité albo-Européenne « gentille ». Pouvez-vous en dire plus ?

En Europe, où s’accumulent des populations d’origines, de religions, de cultures disparates, les identités nationales de « papiers » ne veulent plus dire grand-chose. Donc je propose de s’en tenir à des identités plus fondamentales, non solubles dans le cosmopolitisme ambiant. Pour ce qui me concerne, je me définis comme un Albo-Européen Gentil Autochtone. C’est-à-dire un Blanc d’Europe, de tradition spirituelle indo-européenne ou boréenne (comme eut dit Dominique Venner), originaire par voie ancestrale de cette terre d’Europe. Je pourrais ajouter que je suis aussi de langue et de culture française. D’une manière générale, par opposition à la confusion contemporaine des notions et des concepts, je crois à la nécessité de créer et d’user d’un vocabulaire précis, non récupérable. Je crois aussi à la nécessité de se définir de manière positive, par rapport à soi, et non par opposition à ce contre quoi l’on serait.

Logo-fleur.jpgVous insistez beaucoup, pour l’efficacité de l’action métapolitique, sur la compréhension d’un contexte fait de l’emboîtement de trois éléments : l’Occident, le Système et le Régime. En quelques mots, que voulez-vous dire par là ?

D’une certaine manière cela retrace une histoire de longue durée. L’Occident est la matrice culturelle et idéologique de notre Système oligarchique dont chaque Régime est l’adaptation contextualisée à l’une des nations de l’Occident géopolitique. L’Occident s’est construit par strates successives, parfois en oppositions dialectiques entre elles, depuis l’irruption du judéo-christianisme dans l’Europe antique jusqu’à l’actuelle hégémonie conjointe et conflictuelle à la fois du gauchisme culturel et du sans frontiérisme ultralibéral. Le Système oligarchique occidental est un système de pouvoir et de domination, issu de la montée en puissance progressive des marchands financiers depuis le XVIIe siècle et dont le principal centre se situe dans le monde anglo-saxon. Aujourd’hui, l’Amérique du Nord, l’ensemble de l’Europe (exceptée la Russie) et une partie de l’Asie se trouvent sous son emprise. La question qui reste ouverte est de savoir s’il est entré en crise au début du XXIe siècle ou s’il est en train de parfaire une domination absolue. Chaque nation a produit un Régime (qui évolue aussi dans le temps) qui est l’adaptation du Système global aux données particulières d’une histoire et d’un système juridique et politique. En ce sens, le « Régime de Macron » d’aujourd’hui est à la fois le produit de l’évolution endogène du Régime républicain occidentaliste né du choc de la Révolution de 1789 et le produit de l’évolution des influences du Système occidental global. C’est dans ce cadre particulier qu’un travail métapolitique dissident peut se mener en tenant compte de sa réalité concrète.

Vous ne semblez pas croire beaucoup à la démocratie ou au populisme…

En réalité, j’aimerais croire en la possibilité du gouvernement du peuple par le peuple, pour le peuple ! Ma formation d’historien m’a convaincu de la « loi d’airain » des oligarchies, c’est-à-dire de l’inéluctabilité du gouvernement des grands nombres par les petits nombres quels que soient les temps, les races et les sociétés. C’est dur à entendre aujourd’hui, y compris par les populistes patriotes qui ont, par ailleurs, toute ma sympathie. Mais c’est un fait. La démocratie moderne a été mise en place, à partir du XIXe siècle, comme le moyen le plus souple et le plus léger pour contrôler le « parc humain » grâce une ingénierie sociale et culturelle devenue de plus en plus scientifique. Il fallait que « tout change, pour que rien ne change », comme dit Tancrède dans Le Guépard de Lampedusa. Dans le meilleur des cas, nous aurons une oligarchie issue du peuple dont les valeurs, à l’opposé de celles de la caste marchande et financière actuelle, seront celles de l’enracinement autochtone et de la spiritualité aristocratique. Mais nous ne nous passerons pas d’oligarchie.

Jean-Patrick Arteault, Pour une boussole métapolitique, Les Éditions de la Forêt, Le Mas Fougères – 04300 Forcalquier, 33 p., 9 €.

vendredi, 24 janvier 2020

Le premier Carl Schmitt

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Le premier Carl Schmitt

En cette rentrée où nous n’avons pas beaucoup de traductions de grands textes de sciences sociales à nous mettre sous la dent, on peut se réjouir que les Éditions de l’EHESS nous offrent l’accès à un texte clé d’un auteur dont le soupçon qui l’entoure, à juste titre au vu de son engagement nazi, nous fait trop oublier qu’il a été un très grand juriste : Carl Schmitt, qui publia Loi et jugement en 1912.


Carl Schmitt, Loi et jugement. Une enquête sur le problème de la pratique du droit. Trad. de l’allemand et présenté par Rainer Maria Kiesow. EHESS, 167 p., 22 €


Loi-et-jugement.jpgDe l’œuvre proprement juridique du jeune Carl Schmitt, disons de celle d’avant 1933, nous possédons en français Théorie de la constitution (1928, PUF 1993), La valeur de l’État et la signification de l’individu (1914, Droz 2003), mais il nous manquait jusqu’aujourd’hui un petit ouvrage de 1912 intitulé Loi et jugement, qu’Olivier Beaud, dans sa préface à l’édition française de Théorie de la constitution, qualifie de « véritable recherche de théorie du droit abordant les questions les plus fondamentales ».

Carl Schmitt a vingt-trois ans en 1912 et ce qui fascine dans ce texte, de jeunesse mais déjà très maîtrisé, c’est, avec la rigueur du questionnement, le souci constant d’éviter l’amalgame, la confusion et le malentendu ; l’éclairage qu’il jette sur la notion de décision telle que l’entendra l’auteur de la Théologie politique tout au long de sa vie. Rééditant Gesetz und Urteil en 1969, Carl Schmitt met lui-même en perspective son travail, en souligne les enjeux pour la pratique du droit d’abord, et laisse entendre toutes les conséquences que « l’autonomie de la décision », qu’il cherche à dégager, peut avoir sur la doctrine de l’État et de la souveraineté. Et il prévient qu’une « polémique farouche » a voulu travestir sa conception de la décision en « un acte fantastique de l’arbitraire ». Nous voilà avertis : si nous voulons évaluer l’œuvre de Schmitt, nous ne pouvons pas nous priver de lire Loi et jugement, car s’y trouve le « sens originel » dans sa « simplicité » de ce que signifie décider.

Alors que fleurissent les doctrines du droit dans le monde germanique de l’époque, mais aussi dans l’ensemble de l’Europe, Schmitt s’intéresse à la pratique. Mais il ne va pas le faire en sociologue, sa confrontation avec Marx et Weber n’a pas encore eu lieu, encore moins en psychologue – sans cesse dans l’ouvrage, Schmitt cherche à se démarquer de la psychologie et en particulier de celle du juge –, mais en restant à l’intérieur du droit, cherchant à élaborer une sorte de théorie de la pratique du droit possédant – l’auteur tient à éviter le terme d’autonomie – un « critère autochtone » par rapport au théorique. Hans Kelsen, le père de la Théorie pure du droit, n’a encore publié en 1912 que ses Problèmes fondamentaux de la doctrine du droit constitutionnel, mais il représente déjà le positivisme normatif que Schmitt s’emploie à disqualifier.

Le point de départ est une question (bien entendu elle-même « décisive », puisqu’elle décide déjà de ce qu’est l’ordre juridique ; en même temps, comme le dit Schmitt dans son avant-propos, elle « est décidée » par la pratique) : « quand une décision judiciaire est-elle correcte ? ». Commence alors un extraordinaire cernement de la question qui rappelle la méthode débouchant sur la définition du critère, et donc de l’essence, pour Schmitt, du politique. Ce n’est ni le comment on décide, ni les statistiques de décisions correctes, ni les diverses opinions sur leur correction ; la question n’interroge pas non plus l’histoire de la pratique, ni l’évolution historique des idéaux, mais « le critère de rectitude qui est spécifique à la pratique du droit ».

Une fois ce que l’on recherche déterminé, Schmitt se livre à la réfutation de différentes thèses : celle de la rectitude d’une décision par sa « conformité à la loi » ou à la « volonté du législateur » qui au mieux transforme le jugement en opération logique (« logicisme de la justice ») de subsomption du cas particulier sous la norme générale, au pire réduit le juge à un « automate ». De ce point de vue, Schmitt se démarque aussi bien de l’herméneutique jurisprudentielle, identifiant interprétation correcte et décision correcte, que du mouvement connu sous le nom d’« école libre du droit » (Freirechtsschule) qui cherchait à élargir de manière extra-juridique (jugements moraux, culture) le concept de loi et de norme et auquel Schmitt reproche d’être incapable à la fin de dégager un critère de rectitude autre que celui du normativisme juridique (la conformité à la loi).

Pour découvrir ce critère de rectitude spécifique, il faut d’abord bien distinguer la doctrine du droit et la pratique du droit, ce que Schmitt appelle sa « détermination » (Rechtsbestimmtheit ; à ce point central du texte, le traducteur fait opportunément remarquer que le terme de Besttimmtheit vient de la logique de Hegel, mais il ne va pas malheureusement plus loin dans son commentaire), autrement dit le moment où le juge statue sur un cas, dit le droit (iurisdictio ou iurisfactio), énonce, en le créant ainsi dans sa détermination hic et nunc, le to dikaion (le juste). Le résultat de cette opération ne peut être déduit, son caractère aléatoire et risqué ne peut être effacé. La motivation du jugement ne peut se superposer parfaitement à la décision. La pratique découvre là son autonomie, le droit statué n’existe pas avant le jugement, comme une pure et simple application. Il est produit. Ce qui ne fait pas pour autant du juge un législateur.

À la fin, quel est ce critère de rectitude appartenant de « manière autochtone à la pratique du droit » ? Une décision judiciaire est correcte si « l’on peut admettre qu’un autre juge aurait décidé de la même manière ». C’est ici que le décisionnisme du jeune Schmitt, mais il nous a prévenus que la polémique ultérieure avait défiguré son concept, doit devenir l’objet de toutes les attentions. Invoquer « l’autre juge », c’est introduire une collégialité, la position collective de gens de métier ; au-delà, c’est faire appel à une sorte de sensus judiciarii d’une société, d’une époque, bref, c’est réintroduire l’histoire et la sociologie, là où pourtant Schmitt voulait les écarter.

Mais introduire le tiers, c’est aussi consacrer un mouvement constant dans l’histoire moderne du droit, celui de la hiérarchisation des juridictions et de la complexité des relations entre les différentes cours. Surtout, en appeler à « l’autre juge » consiste à circonscrire le jugement dans la « prévisibilité » et la « calculabilité », même dans le cas où un jugement serait rendu contra legem. Ceux qui ont lu Derrida, et le Derrida lecteur de Schmitt pour qui l’expression schmittienne de « décision calculable » serait un oxymore, seront surpris par cette reprise (en main ?) soudaine du concept de décision, tout à coup arraché à l’indétermination (et pour cause puisque Schmitt parle de « détermination du droit ») au risque, au saut, à l’incommensurabilité des motifs et de l’acte de jugement. Mais on comprend que tous ces points qui caractérisent la rectitude de la décision autorisent Schmitt à penser qu’ainsi il échappe au « fantastique de l’arbitraire ».

L’auteur d’Ex captivitate salus ne réécrit pas en 1969 son texte de 1912 sous le coup de la querelle. Encore une fois, il nous indique que sa réflexion sur l’autonomie de la décision n’est pas restée sans conséquences sur la définition de la souveraineté étatique. En 1912, il cherche à isoler le propre de la pratique correcte du droit et veut en discerner le critère déterminant, et l’on découvre que ce n’est pas tant la décision qui l’intéresse que la mise au jour du degré d’autochtonie de la pratique du droit par rapport à la doctrine, et la définition de ce qu’est l’ordre juridique.

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Peut-on affirmer que Schmitt, pour le politique, va suivre le même cheminement, guidé par la même préoccupation ? Répondre à cette question permettrait, non pas d’oublier son engagement nazi, mais de savoir si nous pouvons conserver la recherche du critère du politique (sans conserver la différence ami/ennemi) sans forcément se focaliser sur la souveraineté (est souverain celui qui décide) mais au contraire, comme semble s’y essayer en ce moment même Bruno Latour, sur l’autonomie de la pratique politique.

R. R. Reno’s Return of the Strong Gods

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R. R. Reno’s Return of the Strong Gods

StrongGods-197x300.jpgR. R. Reno
Return of the Strong Gods: Nationalism, Populism, and the Future of the West
Washington, DC: Regnery Gateway, 2019

Most of the people who come to the Dissident Right do so in spite of the Dissident Right. It is a common experience for those who become red-pilled to discover that the hatred they have experienced from the Establishment for the “sins” of being white or heterosexual or male is matched in vehemence by the hatred exhibited by many on the Dissident Right for those whose “sins” consist of having been born between the years of 1946 and 1964 or for being believing Christians. I know that there are many “silent” members of the Dissident Right whose views are not even expressed anonymously, but who have decided to remained cloistered—not out of fear of being doxxed—but out of a desire to limit the explicit hatred they endure to that from just those whose politics they oppose.[1] [2]

I have argued in these pages and elsewhere that the Dissident Right only exists as an intellectual movement. It has been, and continues to be, completely bereft of any political leadership. Indeed, before it can even begin to entertain the idea of engaging in real political activity, the Dissident Right must learn how to educate and persuade white people of the rightness of our cause. This will involve engagement with caucasians of all stripes, including Baby Boomers and Christians.[2] [3]

R. R. Reno’s Return of the Strong Gods: Nationalism, Populism, and the Future of the West is an important book and one that needs to be taken very seriously by the Dissident Right. The author demonstrates that the origin of our current situation is much more complex than that put forward by the standard Dissident Right narrative. Furthermore, he presents a critique of laissez-faire capitalism, globalism, and radical individualism from a Christian standpoint that is as withering as anything emanating from the pagan Dissident Right.

Reno is a former Episcopalian who converted to Catholicism. He received a doctorate in theology from Yale and taught theology at Creighton University for twenty years. Currently, he is the editor of the Catholic journal First Things, which is gradually coming over to an editorial stance that is receptive to many of the ideas of the Dissident Right.

Reno’s thesis is that the generation that experienced the horrors of World War II came through that conflict with an understandable desire to prevent such a cataclysm from ever occurring again. With the best of intentions, they created a postwar consensus that sought to downplay what Reno calls the “strong gods,” that is, “the objects of men’s love and devotion, the sources of the passions and loyalties that unite societies” (p. xii). This movement was heavily influenced by Karl Popper’s book The Open Society and Its Enemies (1945)—a book that was an expansion upon Max Weber’s concept of “disenchantment”—in which Popper argued that to avoid another world war it was necessary to “open up” society by emphasizing the individual over group solidarity. As Reno explains it, this can be summarized as the abandonment of the “strong god” of truth for the “weak god” of meaning. In Dissident Right terms, we would most likely refer to this shift as the abandonment of the biological imperative for the caprices of self-actualization.

The proponents of the postwar consensus believed that they were creating a post-ideological polity, one based entirely on the empirical results of social science research. Reno acknowledges that Popper himself was aware of the paradox that his position creates an ideology that is ultimately inflexible and hostile to dissent:

As Popper makes clear, pragmatism in politics—the end of strong truth-claims in public life—produces paradoxically powerful political and cultural imperatives. It requires denying principled political arguments and policies. Championing authenticity in personal life demands rejecting the authority of traditional moral norms. (p. 13, italics in original)

Reno then shows that the influence of two other books, Friedrich Hayek’s The Road to Serfdom (1944) and T. W. Adorno and Max Horkheimer’s The Authoritarian Personality (1950) contributed heavily to the process of “weakening” and “disenchantment” that has brought Western Civilization to its current predicament. In the former book, man is reduced by laissez-faire capitalism to the status of an atomized economic unit in which economic rights and individual economic freedom obviate the need for moral normativity. In the latter book by the two doyens of the Frankfurt School, any type of patriarchal family is a breeding ground for fascism and must be opposed.

While the pagan Dissident Right often talks about the Faustian nature of the white race (and very correctly, I believe) in which exploration, creativity, and an aristocratic disdain for the quotidian predominate, and in which the pursuit of truth and excellence results in an acknowledgement and celebration of true difference, Reno rephrases this pursuit of truth and excellence as the search for the transcendent. Here is an important nexus between the pagan and the Christian Dissident Right. Whether one aspires to the condition of the Übermensch or to eternal salvation, the Dissident Right is ultimately concerned with something beyond the self. The individual is not an atomized economic unit, and identity is not endlessly malleable.

In the very excellent chapter entitled “Therapies of Disenchantment,” Reno explains that postwar educators sought to keep the traditions of Western Civilization and liberal education but to reduce their authority by “shifting from truth to meaning, from conviction to critical questioning” (p. 38, italics in original). As Reno quotes from The Open Society, Popper states:

If in this book harsh words are spoken about some of the greatest among the intellectual leaders of mankind, my motive is not, I hope, the wish to belittle them. It springs rather from my conviction that if we wish our civilization to survive we must break from the habit of deference to great men. (p. 39)

Of course, if there is no authority, and education is no longer a pursuit of truth, but is rather a process of critique, what is the goal of all of this? As Reno explains, the goal is the production of “meaning,” that is, to deny truth and to demonstrate that institutions, ideas, works of art, and historical events are products of economic, racial, social, and cultural conditions and have no intrinsic merit. For example, Mozart’s 40th Symphony is not one of the greatest instrumental works in Western history; it is, instead, a product of a class-ridden, racist, and misogynistic society in which similarly great symphonies by female, non-cisgendered, and persons of color were not allowed to be composed. By this logic, anything that attracts our interest, our admiration, and our loyalty must be “problematized” so that the process of disenchantment can never be abated. The Cold War mitigated to a certain extent the ever-downward course of this process of disenchantment; however, as the author points out, once begun, the weakening forces of disenchantment “tended toward pure negation, leaving us a utopian dream of politics without transcendence, peace without unity, and justice without virtue” (p. 75).

The tragedy of liberalism as described by Reno is its “smallness,” its rejection of greatness and transcendence, its celebration of diversity without difference, its abhorrence of any form of discrimination including discriminating taste. As the author so eloquently phrases it:

A society lives on answers, not merely questions. The political and cultural crisis of the West today is the result of our refusal—perhaps incapacity—to honor the strong gods that stiffen the spine and inspire loyalty. (p. 95)

What then, is to be done? According to Reno, what will not work is “never-ending critique, the spontaneous order of the free market, technocratic management of utilities, and other therapies of weakening” (p. 140), because “the actual problems we face—atomization, dissolving communal bonds, disintegrating family ties, and a nihilistic culture of limitless self-definition—go unaddressed” (p. 144). Reno proposes:

  • Greater economic solidarity between labor and capital
  • Strong families
  • An educational system based on truth instead of critique
  • Return to a belief in the transcendent
  • A respect for communities of identity

Reno is not completely red-pilled. He is still too much of a civic nationalist for my taste, but his intellectual evolution has been remarkable, especially for one who only four years ago was a never-Trumper. His book strengthens and gives greater insight into the standard Dissident Right narrative of how we got to the current year. He explains the intellectual history of the postwar era in a way that is accessible and appealing to intelligent normies and can help to move them ever so closer to our side. And for that he deserves our praise and gratitude.

Notes

[1] [4] For instance, a friend of mine — who is a DBB (Dreaded Baby Boomer), an evangelical Christian, and a high-ranking official in my state’s GOP, and who has no idea of my involvement in the Dissident Right — last year attempted to red pill me and gave me a list of websites I should peruse, one of which was Counter-Currents. My friend even goes to the trouble of using anonymous means of contributing to a number of Dissident Right entities, a wise idea given her position. She does express some trepidation about the Dissident Right’s hostility to Christianity, but takes it in stride as just one more cross to bear. Wouldn’t it be nice, though, if the Dissident Right actually created a welcoming environment for those who share our beliefs?

[2] [5] The Charlottesville incident has had the salutary effect of eliminating or marginalizing the influence on the Dissident Right of the SS-wannabes with mother-in-law fetishes, the vulgarians with daddy issues, and the upper-class twits with trust funds. As the eminent blogger The Z-Man so eloquently put it in a recent podcast: “No one is going to buy Richard Spencer 2.0.” All of this has allowed gifted communicators for the cause of Caucasians to come to the fore — including No White Guilt, The Great Order, and the Z-Man himself among others — who are not overtly hostile to white Baby Boomers (whose votes and $7 trillion in assets could prove to be very useful in the coming struggle) and white Christians (who engage in the type of family formation that is essential for the survival of the white race).

 

Article printed from Counter-Currents Publishing: https://www.counter-currents.com

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[2] [1]: #_edn1

[3] [2]: #_edn2

[4] [1]: #_ednref1

[5] [2]: #_ednref2

René Cagnat : L'Eurasie et l'Europe face aux superpuissances et à l'islam

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René Cagnat : L'Eurasie et l'Europe face aux superpuissances et à l'islam

 
Véritable pivot stratégique, cette région lui sert de prisme géopolitique pour aborder les points brûlants d’aujourd’hui. De la guerre civile tadjike, afghane, pakistanaise, mais aussi yougoslave, à la résistance au contrôle des grandes puissances, en passant par le réveil de l’islam, les hauts et les bas de l’engagement américain, les avatars du triangle Washington-Moscou-Pékin, les migrations présentes et futures ou encore la condition féminine en tant qu’élément de renouveau et de résilience : c’est une image incandescente des incendies planétaires qu’il présente. On trouvera dans cet ouvrage la synthèse d’une réflexion ethnologique étalée sur un demi-siècle, mais aussi la description vivante et aimante, et poétique, des populations centrasiatiques, Afghans et Ouïghours compris. Ancien colonel, docteur en sciences politiques, spécialiste du renseignement et de la réflexion géostratégique, René Cagnat s’est retiré en Asie centrale pour mieux l’expliquer. Il est notamment l’auteur de La Rumeur des Steppes, et Du Djihad aux larmes d’Allah, les sept piliers de la bêtise.
 
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Un numéro de la revue Europe sur Joseph Roth - Loyalität zu Joseph Roth

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Un numéro de la revue Europe sur Joseph Roth

Loyalität zu Joseph Roth

par Christopher Gérard

Ex: http://archaion.hautetfort.com

empire austro-hongrois,joseph roth,autriche,mitteleuropa,europe centrale,vienne,littérature allemande,littérature,lettres,lettres allemandesIl y a quatre-vingt ans, mourait en exil à Paris, à l’Hôpital Necker, l’un des plus grands écrivains de l’ancienne Double Monarchie austro-hongroise, Joseph Roth (1894-1939). Issu d’une famille juive des confins galiciens de l’Empire, Roth se convertit au catholicisme et passa du socialisme utopique au monarchisme nostalgique. Il fut, avec ses superbes romans La Marche de Radetzky et La Crypte des Capucins, le mémorialiste d’un empire disparu et le théoricien d’un conservatisme éclairé, celui des Habsbourg. Deux excellentes raisons de le lire !

Écrivain et chroniqueur, notamment pour le Frankfurter Zeitung dont il fut le correspondant à Berlin dans les années 20, Roth voyait tout, surtout ce que les autres ignoraient : la sombre poésie de deux mégalopoles, Berlin et aussi sa chère Vienne), en pleine métamorphose et livrées à une guerre civile larvée (« Maintenant, on chante à gauche l’Internationale et, à droite, le Deutschland über Alles. Simultanément, alors qu’il serait plus raisonnable de chanter ces hymnes l’un après l’autre. »)

Lucide, Roth y décelait les symptômes d’une crise qui emporta ce qui, après le funeste Traité de Versailles, restait de la Vieille Europe : en 1933, n’écrivait-il pas à son ami Stefan Zweig : « C’est l’Enfer qui prend le pouvoir » ?

Le promeneur Roth décrivait sans illusions un monde qui basculait à l’aide d’images puissantes et originales, qui sont d’un poète menacé par des « orang-outang mécanisés », les mêmes qui brûlèrent ses livres et le chassèrent de sa patrie.

Pour saluer ce grand écrivain un moment oublié après la guerre, la vénérable revue Europe lui consacre une splendide livraison de près de deux cents pages tour à tour sensibles et pointues, et ce à l’occasion d’un double anniversaire, le cent vingt-cinquième de sa naissance en Galicie et le quatre-vingtième de son suicide au Pernod.

3219330321.jpgComme l’écrit justement Claudio Magris, qui a tant fait pour le ressusciter, Joseph Roth incarna bien « l’aède du crépuscule de la vieille Europe et de l’identité individuelle », quels que fussent ses masques qu’il porta avec une sorte de dandysme narquois, celui du juif galicien converti au catholicisme autrichien ou celui du caporal qui se prétendit officier de l’Armée impériale et royale. Désespéré par la perte de sa patrie, réduit à une misère noire que son ami Zweig, entre autres bienfaiteurs, tenta d’atténuer, Roth finit ses jours dans deux endroit mythiques de la Rive gauche, tous deux situés en face l’un de l’autre  à l’ombre du Sénat, l’Hôtel Foyot, où logèrent Joseph II et Rilke, détruit en 1938 au moment de l’Anschluss, et le Café Tournon, demeuré intact, où je me rends en pèlerinage à chacun de mes passages parisiens, seul ou en compagnie de l’un ou l’autre confrère. J’aime à y rêver à ces émigrés monarchistes devant un verre de bourgogne.

Oui, un bien beau numéro d’Europe, revue qui publia déjà Roth de son vivant et que se procureront tous ses amis.

Christopher Gérard

Europe 1087-1088, hiver 2019, Joseph Roth, 366 pages, 20€

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jeudi, 23 janvier 2020

Violence « inouïe » ? Violence permanente ?

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Violence « inouïe » ? Violence permanente ?

par François-Bernard Huyghe

Ex: http://www.huyghe.fr

Vivons-nous ces jours derniers une violence inouïe ou insupportable comme le proclame une rhétorique médiatique ? la démocratie est-elle menacée par quelques lazzis devant un théâtre ou par l’invasion d’un hall d’immeuble syndical ? Par la violence policière dont s’étalent des preuves quotidiennes sur les réseaux sociaux, répondent les autres. Comparée aux années 70 avec leurs manifestations dures ou aux années 80 avec leurs attentats à la bombe ou au pistolet..., la chose est toute relative. Mais comparaison n’est pas raison.

La violence politique a deux dimensions : dommages matériels (destructions,blessures, morts) et impacts symboliques.
Que les manifs depuis un an et demi s’accompagnent régulièrement de casse et de blessures, nul ne le nie. Bien que (ou parce que) vigoureusement réprimée au moment des Gilets jaunes (328 blessures à la tête, 25 yeux crevés, 5 mains arrachés...), la protestation vire à l’émeute sur rendez-vous. Il y a une raison quasi mécanique : le nombre d’heures où les protestataires se trouvent face-à-face avec les forces de l’ordre. Voire une dimension éthologique : quand des groupes luttent pour des territoires dans la rue et la prééminence, l’affrontement devient probable, rituel et régulier. S’ajoutent des facteurs politiques et stratégiques : la méthode de maintien de l’ordre et la présence mal contrôlée, pour dire le moins, de black blocs.

D’où une routine de la confrontation : tous les samedis nous nous sommes habitués à voir sur nos écrans - réseaux sociaux et télévision- des poubelles qui brûlent, des casques et des foules sous les lacrymogènes. La théâtralisation par l’image (62 semaines de duels maintenant conventionnels) a en arrière-plan, les fractures sociales et identitaires sur lesquelles beaucoup ont écrit. Mais aussi avec une constance dans le besoin de s’exprimer et une convergence dans l’objet de la colère : Macron.

À côté de cette incontestable violence, naissent de nouvelles formes d’affrontement plus symboliques : jeter sa blouse, sa robe d’avocat, sa savate ou un vieux manuel. Huer le président partout où il passe, tourner le dos, se coucher par terre... Chahuter et bloquer. Il s’agit chaque fois, avec un objet ou une attitude, de refuser ostensiblement le respect.
 

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À chaque démonstration, une autorité, à commencer par celle du plus autoritaire, Macron, est défiée. Même si l’on reste dans l’incident, la rentabilité de ces actions menées par des minorités - que certains qualifieront de radicalisées ou de commandos - ont un impact sans commune mesure avec leur gravité objective. On commentera en boucle l’offense au président, au préfet, etc., tant qu’une mise en scène mobilisant finalement peu de monde tournera en boucle sur les réseaux sociaux et les télévisions. En soi, ce n’est pas nouveau, et il existe de véritables manuels pour activistes qui recommandent cette démarche depuis des années. Ce qui est significatif, c’est que chaque jour une nouvelle catégorie invente sa dramaturgie de la colère. Dont certaines (avocats, pompiers,scientifiques de la police, petits rats de l’opéra) peu connues pour leur tradition de radicalisation.

Quand il y a escalade physique et symbolique, plane l’ombre du terrorisme qui est destiné à porter un message de rupture par un acte de force extrême (propagande par le fait). Nous n’en sommes pas là. Même s’il se révélait demain que l’incendie de la Rotonde fut bien un attentat contre le café du Président ou le bistrot des riches. Mais...

Une crise qui dure ainsi, avec un épisode qui repart quand on croit l’autre fini, syndicats après Gilets jaunes, peut-elle devenir un guerre de position -certes très clivante : bloc élitaire contre bloc populiste - mais une guerre qui s’enlise ?
C’est la seule vraie question.

00:56 Publié dans Définitions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : violence, françois-bernard huyghe | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Pour un progressisme de droite

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Pour un progressisme de droite

Par Romain d’Aspremont,

auteur de « Penser l’Homme nouveau : Pourquoi la droite perd la bataille des idées »

Ex: http://www.rage-culture.com

Si la droite perd, c’est qu’elle évolue au sein d’un logiciel chrétien. Les sociétés occidentales sont fondamentalement marquées par la morale chrétienne ; il n’est pas étonnant que l’idéologie gauchiste s’y épanouisse – et, sur le temps, ne cesse de gagner du terrain – tandis que les droitistes doivent perpétuellement batailler pour paraître fréquentables. C’est le principe même du Bien qui doit basculer de l’égalitarisme vers l’élitisme, et du pacifisme vers la compétition et la lutte.

41-KRsa2LPL.jpgLa seconde raison de la défaite perpétuelle de la droite, c’est son conservatisme. Les réaco-conservateurs assimilent trop souvent l’avenir à un déploiement inéluctable des forces progressistes. Ils en viennent à prendre l’objet (l’avenir) façonné par le sujet (la gauche) pour le sujet lui-même. Le futur étant devenu synonyme d’avancées « progressistes », l’unique remède ne pourrait être que son contraire – le passé – plutôt qu’un avenir alternatif. Or il y a là une forme de défaitisme, comme si la droite assimilait sa propre déconfiture, ratifiant le monopole de la gauche sur l’avenir. Puisque l’Histoire n’est qu’une longue série de victoires progressistes, c’est l’avenir lui-même qu’il faudrait brider, plutôt que les acteurs qui le façonnent. Ralentir le temps et sanctuariser certaines institutions apparaît alors comme la solution par défaut.

Cette analyse, plus ou moins consciente, est une variante de la croyance en un progrès linéaire : l’avenir n’est plus une irrésistible ascension, mais une lente décadence. Ainsi, tout en ridiculisant l’idée d’un « sens de l’Histoire », les réaco-conservateurs considèrent implicitement que le temps fait le jeu de la gauche. S’il leur arrive – du bout des lèvres – de se satisfaire d’une nouveauté, ils n’iront jamais jusqu’à batailler pour la faire advenir, non plus qu’ils ne mobiliseront leur énergie intellectuelle pour concevoir un nouveau « de droite ». Leurs forces sont toutes entières consacrées à faire l’éloge du passé. 

Le progressisme au sens strict repose sur des postulats infirmés par l’Histoire. Le pacifiste et le jouisseur finissent toujours par se soumettre au guerrier. Mais le conservatisme lui-même n’en repose pas moins sur des présupposés erronés, car les projets d’Homme nouveau, loin de se réduire à des utopies illusoires, sont un des moteurs de l’Histoire. 

 La posture d’un Schopenhauer, qui écrit « le progrès, c’est là votre chimère, il est du rêve du XIXème siècle comme la résurrection des morts était celui du Xème, chaque âge a le sien », n’est plus tenable. La véritable erreur, c’est de croire que les chimères sont sans prise sur le réel – surtout quand ces chimères peuplent les cerveaux des élites. Chaque époque a sa conception particulière du progrès, et ceux qui se refusent à proposer la leur doivent renoncer à écrire l’Histoire. De même, Nietzsche peut bien déclarer que le Progrès est « une idée fausse », il n’empêche que sa philosophie du surhomme est progressiste – progressiste de droite.

Notre ennemi ne doit pas être le progressisme au sens large, mais uniquement le progressisme de gauche. Non pas l’idée de progrès, mais la direction que veulent lui faire prendre nos adversaires. Car « l’idée de progrès constitue moins une idéologie que la présupposition de toutes les idéologies, systèmes de représentations et de croyances proprement modernes ». C’est pourquoi la droite doit développer son propre progressisme, qui doit viser la réunification de l’Occident (plutôt que la défense des Etats-nations) et encourager l’évolution anthropologique (plutôt que sanctifier la tradition). Par définition, le futur a toujours raison du passé. Aussi, le duel du Passé et de l’Avenir doit s’effacer au profit d’un choc entre un avenir de gauche et un avenir de droite.

Notre progressisme doit promouvoir une exigence de dépassement, sur tous les plans, y compris moral. Cette morale sera « vitaliste » : valorisant tout ce qui élève l’espèce et combattant ce qui la bride, l’affaiblit et la mutile. Appliquée aux débats sociétaux qui suscitent le plus de crispations, son verdict sera différent de celui des réaco-conservateurs. Ainsi, la PMA et la GPA sont souhaitables dans la mesure où elles élèvent le capital biologique et intellectuel des Occidentaux (ingénierie génétique).

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Romain d'Aspremont

Un progressisme de droite ne doit pas borner son horizon au domaine anthropologique (entreprise de création d’un homme nouveau) ; il doit l’étendre au domaine institutionnel et étatique. Faute de proposer une vision de l’Europe qui soit autre chose qu’un simple retour à l’ère gaullienne – « l’Europe des nations » – les souverainistes se privent du formidable potentiel mobilisateur propre à tout idéal nouveau. Philippe de Villiers explique que ceux qui ont affronté le traité de Maastricht ont cru combattre un super-État (une entité politique susceptible d’incarner une Europe-puissance, pesant en propre sur la scène internationale), pour ensuite découvrir que le projet européen n’a jamais été de bâtir les Etats-Unis d’Europe, mais de substituer l’économique (le marché) au politique.

En fait, les souverainistes ont bien fait de s’opposer à Maastricht, mais pour de mauvaises raisons. En effet, le dépassement des nations et l’unification de l’Europe ne sont pas des idées condamnables en soi ; elles méritent d’être évaluées à l’aune de l’idéal qui les porte. Le malheur n’est pas que l’Europe soit gouvernée par un « despotisme doux et éclairé » (Jacques Delors), mais que ce despotisme soit anti-européen dans l’âme. Or, par une ruse de l’Histoire, les Européistes nous ont offert le cadre institutionnel et administratif pouvant servir notre vision de l’Europe : plutôt que de détruire ces leviers de pouvoir, emparons-nous-en afin d’impulser une renaissance civilisationnelle, qui passe par la création des Etats-Unis d’Europe, puis des Etats-Unis d’Occident (Etats-Unis d’Amérique, Russie, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande compris).

Les souverainistes ne jurent que par l’État-nation et le retour à l’ordre ancien. Dans de nombreux domaines (immigration, éducation, justice), ce retour est vital, mais il faut se rappeler que les États-nations sont eux-mêmes issus de l’effondrement de l’Empire romain christianisé. Ils sont la conséquence lointaine des invasions barbares du Ve siècle, et une fragmentation de l’unité politique de la chrétienté. Car enfin, l’âme européenne vaut plus que le respect tatillon de la souveraineté des États-nations. Ne confondons pas le moyen – les institutions – et la fin – la pérennité des cultures nationales et de la civilisation européenne. À ceux qui prétendent que cette dernière est un fantasme, et que seules existent les cultures nationales, qu’ils parcourent donc le monde et ils distingueront sans peine ce qui relève de la nuance (les différentes cultures européennes) de ce qui relève de la différence essentielle (les civilisations).

Notre projet doit être la restauration de l’Europe unie, plutôt que le combat acharné pour la pérennité de son éclatement. Il ne s’agit pas de pratiquer une fuite en avant vers le dépassement des États-nations mais, puisque ce dépassement se fera, avec ou sans nous, il nous faut en avoir la maîtrise. Trop longtemps, les défenseurs de l’âme européenne ont laissé aux européistes le monopole de l’idéal européen. Les souverainistes se cantonnent soit à une négation (NON à l’Europe fédérale), soit à une nostalgie gaulliste (OUI à l’Europe des nations). Il nous faut penser un horizon nouveau, sans quoi l’histoire du continent sera écrite par nos adversaires, notre rôle se limitant à celui de retardateur, grippant provisoirement l’engrenage de la déconstruction civilisationnelle.

L’Europe des nations, les souverainistes vous le répètent, c’est l’Europe du « bon sens ». Mais l’homme n’est pas qu’un être de raison. Pour Carl Gustav Jung, l’homme a un besoin de sacré. Mais il a également un besoin d’idéal et d’utopie. S’il est disposé à se sacrifier pour fonder une nation, il ne l’est plus quand il s’agit de la rafistoler. L’Europe des nations est un conservatisme ; il lui manque la force du nouveau. Or le Neuf est souvent nécessaire à la sauvegarde de l’Ancien.

Nous sommes tellement habitués à voir le pouvoir politique européen déconstruire notre civilisation et nos identités nationales, que nous réagissons avec hostilité à toute idée de pouvoir européen, que nous assimilons à l’idéologie remplaciste. Or, le lieu du pouvoir ne préjuge pas de son contenu ; à nous d’en édifier un qui œuvre à notre renaissance civilisationnelle. 

Nietzsche écrit ainsi: « Ce qui m’importe […] c’est l’Europe unie. Pour tous les esprits vastes et profonds du siècle, la tâche où ils ont mis toute leur âme a été de préparer cette synthèse nouvelle et d’anticiper à titre d’essai l’« Européen » de l’avenir.  Aux heures de faiblesse seulement, ou quand ils vieillissaient, ils retombaient dans les perspectives étroites de leurs patries ».

Nous vous conseillons de lire également « Pour un transhumanisme de Droite » du même auteur

Références :
 1. F. Nietzsche, L’Antéchrist, § 4, Oeuvres philosophiques complètes, Paris, Gallimard, 1974, t. VIII, p. 162.
2. Pierre-André Taguieff, Les contre-réactionnaires, Le progressisme entre illusion et imposture, Denoël, 2007, p. 243.
3.  Philippe de Villiers, Le moment est venu de dire ce que j’ai vu, Albin Michel, 2015.
4.  Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome II, Gallimard. p. 293. 

Et si on revenait sur le corporatisme?

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Et si on revenait sur le corporatisme?

Suite à l’excellent texte sur le corporatisme de Franck Buleux qui a d’ailleurs été remarqué par de nombreux sites (https://metainfos.fr/2020/01/05/la-voie-du-corporatisme/) , nous publions en complément cette

Brève introduction à l’économie corporatiste

« L’État, arbitre du jeu social, a pour rôle de préparer l’avenir tout en rendant le présent supportable »

Jean Meyer, Le poids de l’État, 1983.

L’État corporatiste a pour unique but de gérer le Bien commun aussi correctement que possible, compte tenu de circonstances difficiles : état de guerre, population globalement assoupie qu’il convient d’adapter à un rythme de travail moderne, progrès à réaliser en matière de productivité et de rationalisation de la production et de la distribution, ou encore crise économique internationale, voire mondiale, induite par des psychopathes spéculateurs dont aucun ne sera jamais puni pour ses agissements qui auront ruiné la vie de dizaines de millions de chômeurs et de leurs familles, sans oublier que ces agissements antisociaux conduisent volontiers à une guerre.

Le corporatisme est né d’une réflexion sur le travail, sur les motivations des travailleurs et sur l’optimisation de l’économie à l’échelle d’un pays. Ce type de régime politico-social a pour buts de « socialiser les prix » de vente, en annihilant le parasitisme induit par un trop grand nombre d’intermédiaires entre producteurs et consommateurs, de fixer le plus juste prix pour ne léser personne, enfin de contrôler la qualité de la production. On y reconnaît les dominantes de l’économie de l’Occident médiéval… « Rien de nouveau sous le soleil » !

Le corporatisme moderne, né au XXe siècle, a également pour but de susciter un grand élan collectif national, en luttant contre l’individualisme égoïste, héritage des penseurs européens des XVIe–XVIIIe siècles et de leurs « droits de l’homme » acquis par simple naissance, et contre la stérile poursuite des biens matériels, héritage du « sot XIXe siècle ». Dans l’optique corporatiste moderne, le travail doit devenir une bataille pour la prospérité de la patrie et celle de chaque famille de travailleur (pour amateur : longues digressions métaphysiques in Louis Rosenstock-« Franck », 1934). De façon simple, le travail, manuel, intellectuel ou technique doit être considéré à la fois « un droit et un devoir ».

md30337424503.jpgLes organisations professionnelles sont composées de représentants élus et de véritables experts désignés par l’État : elles renferment, en proportions à déterminer par une loi, des chefs d’entreprise, des cadres, des employés et des ouvriers, de l’industrie et de l’artisanat, de l’agriculture, de la pêche et des transports, des professions libérales et d’employés de l’État. Elles ont pour rôles de régler les conditions de travail et de rémunération, d’organiser la formation initiale des apprentis et la formation continue des travailleurs, voire de présider au regroupement des petites entreprises pour en accroître la rentabilité, économiser des matières premières et standardiser la production (Dauphin-Meunier, 1941 ; Denis, 1941 ; Bouvier-Ajam, 1943). C’est un régime particulièrement adapté à la gestion des crises économiques et sociales.

Même en dehors d’une période de crise, le corporatisme a son utilité : les chambres économiques doivent superviser, coordonner, dynamiser ou moderniser les parties les moins performantes de l’économie nationale. Selon les cas, il peut s’agir d’extraction minière, de production agricole, d’actions sur les eaux et forêts ou l’urbanisme, mais aussi de regroupement d’entreprises industrielles trop peu rentables

L’organisation corporatiste a bien évidemment dans ses attributions le règlement à l’amiable et par négociations directes des conflits du travail, avec recours, en cas d’échec, à une Cour des corporations. Ce régime rend inutiles les grèves des salariés et le lock-out patronal, authentiques « crimes collectifs », privant des familles entières de leur gagne-pain. Benito Mussolini, homme de grand bon sens, les considérait de ce fait « plus graves, par leurs conséquences, que les crimes individuels » (Marlio, 1938).

Les organisations professionnelles règlementent les questions d’hygiène sur les lieux de travail et surveillent l’organisation du tourisme, des activités sportives et culturelles, notamment pour détecter et punir les escrocs, qui détournent à des fins personnelles des crédits aux affectations trop vagues.

Le Parlement ne doit plus être composé de rhéteurs n’ayant aucune expérience réelle du travail effectif, mais être une Chambre des Corporations, où les députés sont élus par les employeurs, les salariés et les retraités. Les chômeurs sont provisoirement exclus du corps électoral.

La chambre des Corporations et les organisations professionnelles désignent les administrateurs des régimes d’assurance-vieillesse, d’assurance-maternité, d’assurance-invalidité et la réparation des accidents du travail.

Le régime corporatiste élabore, tout naturellement, une Charte du Travail, qui fixe la journée de travail, identique pour les salariés du privé et pour les fonctionnaires, réduits en nombre au minimum incompressible, étant entendu que la durée légale du travail hebdomadaire peut varier selon les emplois. Le travail de nuit doit être interdit aux femmes (sauf dans les professions de santé) et aux moins de 18 ans.

Elle doit introduire les notions de juste rémunération du travail – en se référant au salaire réel et au pouvoir d’achat et non à une valeur absolue. Des primes de rendement, d’efficacité et de fidélité à l’entreprise doivent moduler le salaire en fonction de l’activité réelle des salariés : il n’existe pas plus d’égalité dans la quantité et la qualité de travail que d’égalité des capacités physiques, intellectuelles et morales entre travailleurs. Le principe de la participation de tous les travailleurs aux bénéfices de leur entreprise est une mesure de justice sociale tellement évidente qu’on est étonné de ne pas le voir appliqué en tout pays.

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Enfin, par cette Charte du travail, la politique et la lutte des classes sont interdites dans les entreprises. Le système corporatiste est financé par une cotisation sur les salaires : la Chambre des Corporations fixe les quotas demandés aux employeurs et aux salariés.

C’est à l’État et aux corporations qu’il revient de réduire le nombre des intermédiaires dans le circuit économique et de comprimer à un niveau raisonnable les marges bénéficiaires des producteurs, transporteurs et détaillants.

L’État joue son rôle en matière d’imposition et de taxations. Idéalement, l’on doit réduire les taxes à la consommation, qui touchent les familles les plus nombreuses (en Italie fasciste, elles furent ramenées entre 2 et 3% ad valorem selon les marchandises) ; l’impôt progressif sur tous les revenus est équitable, à condition que les tranches supérieures ne soient pas tellement élevées que les travailleurs les mieux payés en viennent à réduire leur activité.

Les droits de succession en ligne directe et entre époux devraient être réduits, pour améliorer la transmission des biens agricoles, des petits commerces et des petites entreprises. Enfin, la taxation des bénéfices industriels et commerciaux doit être telle qu’elle encourage les administrateurs à préférer l’autofinancement à la répartition des bénéfices entre gros actionnaires. L’impôt doit frapper durement l’agiotage boursier, la propriété des titres devant être nominative, tandis qu’une provision de 25% doit être exigée pour tout ordre d’achat à terme. La haine des spéculateurs pour un régime économique est un excellent reflet de son équité.

De même, l’État doit aider les exportations et interdire les ententes monopolistes visant à maintenir de hauts prix de vente pour les produits indispensables à la vie courante.

En cas de guerre ou de crise économique internationale, l’État se doit d’intervenir pour protéger la production nationale de façon à éviter un chômage de masse, pour contingenter les importations – surtout celles qui représentent une concurrence déloyale de la part de pays ne respectant pas la protection des brevets, tolérant l’emploi de quasi-esclaves ou mettant sur le marché des objets de pacotille… de nos jours, les archétypes de pays malhonnête sont la Chine et quelques pays d’Orient extrême ou moyen, généralement à majorité mahométane… c’est un fait reconnu que l’islam encourage l’esclavage des non-mahométans, même s’il est devenu politiquement incorrect d’affirmer cette évidence !

En cas de crise grave, l’État doit plus que jamais combattre les intermédiaires, en faisant disparaître ceux dont l’activité est de type parasitaire, et doit impérativement renvoyer dans leurs pays d’origine les immigrés inutiles. Il doit injecter une part du produit des impôts dans de grands travaux visant à créer des infrastructures d’utilité publique.

En résumé, le rôle de l’État est d’encadrer, de réguler l’activité économique, qui doit rester privée, car nul n’aime travailler efficacement et beaucoup, s’il n’a l’espoir d’en tirer un bénéfice, pour lui-même et pour sa famille. De ce fait, les dirigeants de l’État doivent refuser la solution de facilité à court terme, inefficace et stérilisante à moyen et long termes : celle des nationalisations qui feraient de chaque corporation la propriétaire des établissements industriels.

s-l300.jpgL’économie corporatiste fut la solution adoptée par les populistes du XXe siècle. Comme l’a très justement écrit Hilaire Belloc (in L’État servile, de 1912) : « Le contrôle de la production des richesses revient, en définitive, à contrôler la vie humaine ».

Bibliographie

H. Belloc : The servile state, Foulis, Londres, 1912 (disponible sur le Net)

M. Bouvier-Ajam : La doctrine corporative, SIREY, 1943

A. Dauphin-Meunier : Produire pour l’homme, Plon, 1941

H. Denis : La corporation, P.U.F., 1941

L. R. Franck (le R. désigne le vrai patronyme de l’auteur : Rosenstock) : L’économie corporative fasciste en doctrine et en fait. Ses origines historiques et son évolution, Librairie Universitaire Gamber, 1934 (digression métaphysique sur l’économie politique)

L. Marlio : Le sort du capitalisme, Flammarion, 1938

J. Meyer : Le poids de l’État, P.U.F., 1983

Groot keerpunt bereikt in Armstrongs bijzonder nauwkeurige Economic Confidence Model

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Groot keerpunt bereikt in Armstrongs bijzonder nauwkeurige Economic Confidence Model

Ex: https://www.xandernieuws.net

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18/19 januari 2020 begin van fase naar monetaire crisis in maart 2022 – ‘Confrontatie tussen links en rechts zal gewelddadiger worden. Iedere hoop op een verantwoordelijke overheid is nu uitgewist’

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De reden dat wij al jarenlang regelmatig artikelen schrijven op basis van de informatie van de Amerikaanse topeconoom Martin Armstrong is omdat zijn unieke Economic Confidence Model al ruim 40 jaar verbazingwekkend accuraat is gebleken, een aantal keer zelfs tot op de dag nauwkeurig, zoals 9/11/2001. Armstrong: ‘Veel mensen die dit afwijzen kunnen maar niet begrijpen dat de opkomst en ondergang van beschavingen al duizenden jaren lang de handelscyclus volgt. Wij zijn niet almachtig en kunnen niet, door het enkel te willen, een Utopia en een perfecte toekomst creëren… Er zijn mensen die het ECM gewoon haten en het wanhopig proberen af te wijzen, omdat het bevestigt dat elke poging van socialisten om de economie te manipuleren, altijd zal mislukken.’

‘Alle imperiums in gemeenschappelijk graf begraven’

De mensheid blijkt door de hele geschiedenis heen een zich almaar herhalend economisch en geopolitiek patroon te volgen. Volgens Armstrong wordt dit patroon door de meesten niet (h)erkend omdat ‘de gemiddelde persoon altijd probeert alles reduceren tot een enkele oorzaak-en-gevolg. Wat ze niet kunnen bevatten is de mate van complexiteit waar het weer, oorlog, innovatie, bevolkingsveranderingen, migratie en economieën op de hele aarde onderdeel van zijn.’

Het financiële centrum van de wereld heeft zich na bepaalde tijd altijd verplaatst. ‘Daarom zijn alle imperiums, naties en stadsstaten in een gemeenschappelijk graf begraven. Wij kunnen allemaal denken dat wij de uitzondering in de geschiedenis zijn, maar de menselijke natuur zorgt ervoor dat corruptie altijd toeneemt, waardoor zelfs de beste opgestelde plannen van iedere groep worden verijdeld.’

In het Westen zien we die corruptie aan beide kanten van de oceaan, inclusief ons eigen land, hand over hand toeneemt. Onze soevereiniteit en onafhankelijkheid zijn inmiddels uit handen gegeven; 80% van ons beleid en onze wetten komt uit de kokers van het Marxistische ‘Politburo’ in Brussel. Tevens zijn bijna alle mainstream media in handen gekomen van een handjevol extreemlinkse, indirect door de EU gefinancierde globalisten. Ook de gerechtelijke macht neemt inmiddels politieke besluiten die enkel links beleid faciliteren, en het rechtse tegengeluid juist monddood proberen te maken. De rechtsstaat bestaat feitelijk niet meer.

Zeer nauwkeurige voorspellingen

Armstrongs ECM voorspelde tot op de dag nauwkeurig (2001.695) een belangrijk keerpunt op 11 september 2001, toen de aanslagen op het WTC in New York plaatsvonden. ‘Niet alle oorlog beginnen exact volgens het model. Het kan ook een combinatie van trends weergeven die leiden tot het besluit om een oorlog te beginnen. Die kan maanden of zelfs jaren later uitbreken. Het is lastig om het exacte besluit te bepalen, maar het is duidelijk dat oorlog ontstaat als het resultaat van een eerder in gang gezette trend.’

De Griekse crisis, en daarmee het begin van de schuldencrisis in de eurozone, werd eveneens op de dag nauwkeurig door het ECM voorspeld. Hetzelfde geldt voor de beurscrash van 1987 en de piek van de Amerikaanse aandelenmarkt in 1998, die vanaf september in dat jaar begon in te storten.

Exact op 2015.75 kwamen Russische troepen in Syrië aan, en kwam de migrantenvloedgolf naar Europa op gang. De Washington Times schreef op 10 september 2015 dat ‘Angela Merkel vluchtelingen in Duitsland verwelkomt, ondanks de groeiende anti-immigratie beweging.’ Armstrong: ‘Haar besluit onderstreepte dat één enkele leider de koers van Europa kan veranderen door iedereen het recht te ontzeggen om zelfs maar over haar beleid te stemmen.’

Het keerpunt van 2016.825 viel enkele dagen voor de verkiezing van Donald Trump. ‘De meeste mensen begrijpen nog steeds niet waarom hij werd gekozen. Trump versloeg alle carrière politici, waarmee hij onze (in 1985 gedane) voorspellingen van het model dat in 2016 voor het eerst een ‘derde partij’ in het Witte Huis zou komen, vervulde.’ 2016 was tevens het jaar van het belangrijke Brexit referendum.

‘Ontkenners van cyclus doorgaans pro-overheid, tegen het volk’

Een piek in het model –hetzij omhoog, hetzij omlaag- is dus niet altijd gelijk een crash of een oorlog, maar kan ook een andere geopolitieke of economische gebeurtenis zijn die –meestal binnen enkele maanden of jaren – tot zo’n crash of oorlog zal leiden. ‘Iedereen die argumenten tegen het bestaan van handelscyclussen probeert in te brengen is doorgaans iemand die op ware Marxistische wijze de overheid steunt tegen het volk,’ vervolgt Armstrong.

Inmiddels grijpt de nooit opgeloste schuldencrisis verder om zich heen. In Europa moet ongeveer de helft van alle gemeenten door de overheid worden gered. Overheden, bedrijven en burgers zitten tot over hun oren in de schulden. Pensioenen worden gekort en in Europa met negatieve rente leeggeroofd. Met het wegzuigen van spaargeld is het laatste restje gezond financieel-economisch verstand in het riool gespoeld.

Opheffen contant geld, inbeslagname crypto’s, bitter koud klimaat?

Het keerpunt van dit weekend, 18/19 januari 2020, wordt gekenmerkt door het begin van het impeachment proces in de Senaat tegen president Trump, en mogelijk een grote false flag operatie op (of rond) maandag (zie vorige artikel van vandaag) Om misverstanden te voorkomen benadrukken we maar weer eens dat dit eerdere artikel géén voorspelling is, maar enkel weergeeft wat op dit moment de headlines in de grootste alternatieve Amerikaanse media zijn).

De vragen die volgens Armstrong de komende dikke 2 jaar beantwoord zullen worden: ‘Heeft de aandelenmarkt een tijdelijk hoogtepunt bereikt? Gaan we het opheffen van (cash) geld meemaken ten gunste van elektronisch (geld), om bankruns te voorkomen? Zullen overheden crypto valuta in beslag gaan nemen? Zullen ze ons gaan dwingen dit geld naar hun eigen crypto munt over te hevelen? Zal het klimaat bitter koud worden nu de volgende zonnecyclus in 2020 begint, waardoor we voedseltekorten krijgen, en basisproducten duurder zullen worden?’

‘Ernstige monetaire crisis in 2022’

ECM-golf nummer 935 is hoe dan ook begonnen. In maart 2022 volgt een zeer belangrijk keerpunt in de vorm van ‘een ernstige monetaire crisis’, aldus de topeconoom. ‘Vanaf hier zal de confrontatie in de overheid tussen links en rechts intensiveren. De retoriek en het geweld zullen toenemen. Iedere hoop op een verantwoordelijke regering is nu uitgewist.’ Dat geldt niet alleen voor de Verenigde Staten, maar overduidelijk ook voor de Europese Unie en Nederland. Al is er hier in 2021 nog een aller-aller-allerlaatste kans om met verkiezingen het roer om te gooien.

De aanstormende (systeem)crisis in de VS wordt getriggerd door de Democraten, die weten dat ze Trump nooit op eerlijke wijze kunnen verslaan, en daarom alle denkbare vuile trucs, zoals het fake impeachment proces, eventueel false flag geweld en mogelijk zelfs het opzettelijk laten crashen van de economie zullen gebruiken om de macht in Amerika te grijpen. In de EU heeft zo’n Marxistische staatsgreep al op ‘softe’ wijze plaatsgevonden, doordat alle parlementen, ook de Tweede Kamer, de macht en zeggenschap over ons land aan Brussel hebben overgedragen.

Beschavingscrisis in 2032-2033?

Het in 1979 opgestelde model is dus verbazingwekkend accuraat gebleken, en eindigt met een absolute piek op 2032.95 (december 2032), met een ongekende wereldwijde crisis die hoogstwaarschijnlijk gepaard zal gaan met enorme economische, maatschappelijke en geopolitieke omwentelingen, waaronder mogelijk een nieuwe Wereldoorlog. Of de menselijke beschaving daar nog van kan herstellen is, gezien het bestaan van zoveel technologische middelen om elkaar totaal te vernietigen, nog maar de vraag.

Samenvattend kan worden gesteld dat de mensheid op basis van alle historische trends gedoemd is dezelfde fouten te blijven herhalen. Steeds weer ontstaat er het streven naar ‘superstaat’ achtige imperiums, zoals die van Napoleon en Hitler, en nu de EU en op wereldschaal de VN. Steeds weer staat er een elitair 1%-10% groepje op dat de vrijheid misbruikt om alle macht en rijkdom naar zich toe te trekken, en dat de verleiding om de andere 90%-99% totaal te willen controleren niet kan weerstaan.

Steeds weer nemen socialistische krachten de samenleving stapsgewijs over, corrumperen alle instituten en bestaande normen en waarden, en denken altijd dat ‘ons deze keer wèl gaat lukken’. Steeds weer steken de meeste gewone mensen hun kop in het zand door de vele signalen en waarschuwingen af te doen als negatief complot- of doemdenken, en anderen en zichzelf te blijven wijsmaken dat ‘alles wel weer goed komt’. Dat maakt de uitkomst van Armstrongs ECM model even onontkoombaar als beangstigend.  

Xander

(1) Armstrong Economics
(2) Armstrong Economics
(3) Armstrong Economics

Zie ook o.a.:

18-01: Vijf indicaties van een aanstaande grote false flag operatie in de VS
15-01: Val Romeinse Rijk op herhaling: ‘Green Deal zal Europese Unie doen instorten’
12-01: Transport Coalitie VS waarschuwt voor grootschalige rellen, bevoorradingscrisis en burgeroorlog
05-01: Council on Foreign Relations: ‘De wereld zal een slagveld worden’

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mercredi, 22 janvier 2020

Remembering Christopher Tolkien, 1924–2020

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Remembering Christopher Tolkien, 1924–2020

J. R. R. Tolkien’s youngest son, Christopher, died on January 15 at the age of 95. Even in old age, Christopher cut a striking scholarly figure, sitting as he did in a green cardigan before a log fire. His reedy voice, occasionally crackling like the dry wood in the stone hearth at his feet, carrying with it subtle wisps of academic gravitas, as smoky shadows curled like grey-blue snakes around a towering bookcase filled with leather-bound tomes looming like Orthanc over his shoulder. Shelves stacked with studies of ancient texts like the Ancrene Wisse and the Ormulum. The whole scene — a sequence from a documentary entitled J.R.R.T: A Film Portrait of J.R.R. Tolkien (1996) — is somewhat reminiscent of the ominous expository chapter “The Shadow of The Past” from Tolkien’s magnum opus. A prescient image, given Christopher’s filial crusade to preserve the integrity of his father’s work and bring unpublished manuscripts like The Silmarillion (1977) and Unfinished Tales (1980) to light.

Christopher, born in Leeds while his father tutored at University there and later educated at Oxford’s famous Dragon School, joined the Royal Air Force and served in South Africa before lecturing at New College Oxford from 1964 to 1975 and publishing his own translation of The Saga of King Heidrek the Wise (1960). Described by his father as his “chief critic and collaborator,” he was warmly welcomed by such intellectual giants as C. S. Lewis, Charles Williams, Owen Barfield, Warren Lewis, and Nevill Coghill, as a junior member of the famed Inklings group that met at the Eagle and Child Inn on St Giles, Oxford.

Christopher only left his role at the thirteenth-century cloistered college to work on his recently deceased father’s papers in the mid-1970s. It was a decades-long and painstakingly laborious task that he maintained, with great stamina and energy right up until the end of his life. Christopher diligently edited the 12 volume History of Middle Earth, The Children of Hurin (2007), The Legend of Sigurd and Gudrun (2009), The Fall of Arthur (2013), Beowulf: A Translation and Commentary (2014), Beren and Luthien (2017), and The Fall of Gondolin (2018).

Sadly, Christopher’s was unable to ensure the fidelity of Peter Jackson film versions of both The Lord of the Rings and The Hobbit. Speaking to Le Monde from his villa in the South of France in 2012, Christopher accused Jackson of having “eviscerated the book by making it an action movie for young people aged 15 to 25.” He continued:

Tolkien has become a monster, devoured by his own popularity and absorbed by the absurdity of our time . . . the chasm between the beauty and seriousness of the work, and what it has become, has gone too far for me. Such commercialization has reduced the aesthetic and philosophical impact of this creation to nothing. There is only one solution for me: turning my head away.

And indeed, that is exactly what he did by also refuting the recent and rather underwhelming Tolkien biopic starring Nicholas Hoult and Lilly Collins — a lead I shall follow when the Amazon serialization of the prequel to The Lord of the Rings hits the screens, a televisual spectacular allegedly focusing on the Second Age of Middle Earth and starring the Iranian Nazanin Boniadi and Puerto Rican Ismael Cruz Cordova, a somewhat incongruous piece of casting which will no doubt be supplemented by various south-east Asians and Africans over the course of the plot. Perhaps it is best that Christopher did not live to see his efforts sullied by such Hollywood virtue signaling.

So as per Bilbo’s Last Song, I say adieu to a great man who fulfilled the wishes of all Tolkien purists and hope that he may rest in the knowledge that his endeavors were not in vain.

Day is ended, dim my eyes,
but journey long before me lies.
Farewell, friends! I hear the call.
The ship’s beside the stony wall.
Foam is white and waves are grey;
beyond the sunset leads my way.
Foam is salt, the wind is free;
I hear the rising of the Sea.

Farewell, friends! The sails are set,
the wind is east, the moorings fret.
Shadows long before me lie,
beneath the ever-bending sky,
but islands lie behind the Sun
that I shall raise ere all is done;
lands there are to west of West,
where night is quiet and sleep is rest.

Guided by the Lonely Star,
beyond the utmost harbour-bar,
I’ll find the heavens fair and free,
and beaches of the Starlit Sea.
Ship, my ship! I seek the West,
and fields and mountains ever blest.
Farewell to Middle-earth at last.
I see the Star above my mast!

 

Article printed from Counter-Currents Publishing: https://www.counter-currents.com

URL to article: https://www.counter-currents.com/2020/01/remembering-christopher-tolkien-1924-2020/

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[1] Image: https://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2020/01/Christopher-Tolkien.jpg

Guy Debord et la médiocrité postmoderne

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Guy Debord et la médiocrité postmoderne

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org  

Le pouvoir socialiste-mondialiste a honteusement, répétitivement tenté de récupérer ou de diaboliser Guy Debord (méprisant, macho, nostalgique…), mais le message du maître des rebelles demeure puissant et dur. On ne saurait trop recommander la vision du film In girum imus nocte et consumimur igni (superbe titre palindrome), qui va plus loin que la Société du Spectacle, étant moins marxiste et plus guénonien en quelque sorte (le monde moderne comme hallucination industrielle et collective). Le virage élitiste et ésotérique de ce marxisme pointu défait par la médiocrité du progrès nous a toujours étonnés et enchantés. Georges Sorel en parlait dès 1890 dans ses Illusions du progrès :

« La grande erreur de Marx a été de ne pas se rendre compte du pouvoir énorme qui appartient à la médiocrité dans l'histoire ; il ne s'est pas douté que le sentiment socialiste (tel qu'il le concevait) est extrêmement artificiel ; aujourd'hui, nous assistons à une crise qui menace de ruiner tous les mouvements qui ont pu être rattachés idéologiquement au marxisme… »

Debord tape sur cette classe moyenne dont nous faisons partie et dont certains font mine de regretter la disparition alors qu’elle pullule partout, à Téhéran, Macao comme à Moscou !… Je le répète, Guy Debord n’est pas moins dur que René Guénon sur cette classe dite moyenne/médiocre et petite-bourgeoise dont le sadisme des représentants s’exprime aujourd’hui par la guerre (Venezuela, Syrie, Libye en attendant mieux) et la répression sociale la plus brute (les gilets jaunes) :

« …ce public si parfaitement privé de liberté, et qui a tout supporté, mérite moins que tout autre d’être ménagé. Les manipulateurs de la publicité, avec le cynisme traditionnel de ceux qui savent que les gens sont portés à justifier les affronts dont ils ne se vengent pas, lui annoncent aujourd’hui tranquillement que « quand on aime la vie, on va au cinéma ». 

Puis de dénoncer les cinéphiles alors omniprésents et les amateurs de cinéma, tous socialement « agents spécialisés des services » :

« Le public de cinéma, qui n’a jamais été très bourgeois et qui n’est presque plus populaire, est désormais presque entièrement recruté dans une seule couche sociale, du reste devenue large : celle des petits agents spécialisés dans les divers emplois de ces « services » dont le système productif actuel a si impérieusement besoin : gestion, contrôle, entretien, recherche, enseignement, propagande, amusement et pseudo-critique. C’est là suffisamment dire ce qu’ils sont. Il faut compter aussi, bien sûr, dans ce public qui va encore au cinéma, la même espèce quand, plus jeune, elle n’en est qu’au stade d’un apprentissage sommaire de ces diverses tâches d’encadrement. »

Et après notre antisystème radical se déchaîne sur ces bobos de la première génération (voyez l’Amour l’après-midi d’Eric Rohmer, qui en dressait un portrait acide) :

« Ce sont des salariés pauvres qui se croient des propriétaires, des ignorants mystifiés qui se croient instruits, et des morts qui croient voter.

Certains diront que Debord exagère (l’attaque universitaire se développe)... Ce n’est pas notre cas, et ce n’est pas une raison pour ne pas le relire :

« Comme le mode de production moderne les a durement traités ! De progrès en promotions, ils ont perdu le peu qu’ils avaient, et gagné ce dont personne ne voulait. Ils collectionnent les misères et les humiliations de tous les systèmes d’exploitation du passé ; ils n’en ignorent que la révolte. Ils ressemblent beaucoup aux esclaves, parce qu’ils sont parqués en masse, et à l’étroit, dans de mauvaises bâtisses malsaines et lugubres ; mal nourris d’une alimentation polluée et sans goût ; mal soignés dans leurs maladies toujours renouvelées ; continuellement et mesquinement surveillés ; entretenus dans l’analphabétisme modernisé et les superstitions spectaculaires qui correspondent aux intérêts de leurs maîtres. »

OpvCeGkO_400x400.jpgOn parle de grand remplacement. Comme je l’ai montré avec Don Siegel et ses gentils profanateurs, il s’agit surtout d’un remplacement moral et spirituel. Mais il y a aussi le grand déplacement, qui ne date pas d’hier (voyez mon texte sur Baudelaire et la conspiration géographique). Dans n’importe quel bled la moitié des gens viennent d’ailleurs. Debord :

« Ils sont transplantés loin de leurs provinces ou de leurs quartiers, dans un paysage nouveau et hostile, suivant les convenances concentrationnaires de l’industrie présente. Ils ne sont que des chiffres dans des graphiques que dressent des imbéciles. »

Debord, qui évoque aussi le grand remplacement du vieux peuple rebelle parisien, écrit ensuite sur nos pandémies (on est dans les années 70, quand seize mille Français meurent par an sur les routes) :

« Ils meurent par séries sur les routes, à chaque épidémie de grippe, à chaque vague de chaleur, à chaque erreur de ceux qui falsifient leurs aliments, à chaque innovation technique profitable aux multiples entrepreneurs d’un décor dont ils essuient les plâtres. Leurs éprouvantes conditions d’existence entraînent leur dégénérescence physique, intellectuelle, mentale. »

Debord explique pourquoi Paris est la ville qui dort de Georges Pérec :

« On n’en avait pas encore chassé et dispersé les habitants. Il y restait un peuple, qui avait dix fois barricadé ses rues et mis en fuite ses rois. C’était un peuple qui ne se payait pas d’images. »

Debord qui se réclame des cinéastes Raoul Walsh et de Marcel Carné (il aime le général Custer, le Lacenaire des Enfants du Paradis, le Jules Berry des Visiteurs…) ajoute :

« Paris n’existe plus. La destruction de Paris n’est qu’une illustration exemplaire de la mortelle maladie qui emporte en ce moment toutes les grandes villes, et cette maladie n’est elle-même qu’un des nombreux symptômes de la décadence matérielle d’une société. Mais Paris avait plus à perdre qu’aucune autre. C’est une grande chance que d’avoir été jeune dans cette ville quand, pour la dernière fois, elle a brillé d’un feu si intense. » 

Le feu pourtant se porte bien, et les sponsors qui vont restructurer cette mégapole nécrosée aussi. Passons.

Conditionné par sa consommation et la propagande, le néo-citoyen adore sa servitude. Debord évoque ici les grandes pages de Céline (voyez mon livre) sur le conditionnement médiatique :

« On leur parle toujours comme à des enfants obéissants, à qui il suffit de dire : « il faut », et ils veulent bien le croire. Mais surtout on les traite comme des enfants stupides, devant qui bafouillent et délirent des dizaines de spécialisations paternalistes, improvisées de la veille, leur faisant admettre n’importe quoi en le leur disant n’importe comment ; et aussi bien le contraire le lendemain. »

Tocqueville annonçait que le monde du citoyen démocratique se limiterait à sa famille :

 « Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et, s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie. »

 Cette page est tournée. La famille a été passée à la moulinette comme le reste, et Debord l’a parfaitement compris dès les années soixante-dix, quand le néocapitalisme devenu « société liquide » de Bauman liquide tout, c’est le cas de le dire :

« Séparés entre eux par la perte générale de tout langage adéquat aux faits, perte qui leur interdit le moindre dialogue ; séparés par leur incessante concurrence, toujours pressée par le fouet, dans la consommation ostentatoire du néant, et donc séparés par l’envie la moins fondée et la moins capable de trouver quelque satisfaction, ils sont même séparés de leur propres enfants, naguère encore la seule propriété de ceux qui n’ont rien. On leur enlève, en bas âge, le contrôle de ces enfants, déjà leurs rivaux, qui n’écoutent plus du tout les opinions informes de leurs parents, et sourient de leur échec flagrant ; méprisent non sans raison leur origine, et se sentent bien davantage les fils du spectacle régnant que de ceux de ses domestiques qui les ont par hasard engendrés : ils se rêvent les métis de ces nègres-là. »

La facticité/frugalité a gagné tous les domaines de la vie postmoderne et ce qui avait été accordé/promis par peur du communisme et durant l’existence de l’U.R.S.S a vite été confisqué. Comme disait Bourdieu, on restaure. Et on revient donc aux temps bénis de la première révolution industrielle quand une poignée de lords, de financiers et d’industriels détient tout le pactole. Le reste a intérêt à se terrer et à se taire.

51mTK-NPXkL._SX302_BO1,204,203,200_.jpgJ’évoque souvent le problème du logement qui m’a contraint à l’exil. Debord en parle souvent et il cite le jeune Marx. D’un ton magnifique et eschatologique, Marx écrit à la même époque que Tocqueville sur ce logement devenu impossible :

« Même le besoin de grand air cesse d'être un besoin pour l'ouvrier; l'homme retourne à sa tanière, mais elle est maintenant empestée par le souffle pestilentiel et méphitique de la civilisation et il ne l'habite plus que d'une façon précaire, comme une puissance étrangère qui peut chaque jour se dérober à lui, dont il peut chaque jour être expulsé s'il ne paie pas. Cette maison de mort, il faut qu'il la paie. »

Avis à ceux paient partout quarante euros du mètre pour « se loger ». Après, et sans évoquer nos épatantes statistiques modernes, Debord ajoute :

« Derrière la façade du ravissement simulé, dans ces couples comme entre eux et leur progéniture, on n’échange que des regards de haine. »

Une vie de serf en circuit attend nos yuppies :

« Cependant, ces travailleurs privilégiés de la société marchande accomplie ne ressemblent pas aux esclaves en ce sens qu’ils doivent pourvoir eux-mêmes à leur entretien. Leur statut peut être plutôt comparé au servage, parce qu’ils sont exclusivement attachés à une entreprise et à sa bonne marche, quoique sans réciprocité en leur faveur, et surtout parce qu’ils sont étroitement astreints à résider dans un espace unique, le même circuit des domiciles, bureaux, autoroutes, vacances et aéroports toujours identiques. »

On manque d’argent ? Rien de nouveau sous le sommeil :

« Mais où pourtant leur situation économique s’apparente plus précisément au système particulier du péonage, c’est en ceci que, cet argent autour duquel tourne toute leur activité, on ne leur en laisse même plus le maniement momentané. Ils ne peuvent évidemment que le dépenser, le recevant en trop petite quantité pour l’accumuler, mais ils se voient en fin de compte obligés de consommer à crédit, et l’on retient sur leur salaire le crédit qui leur est consenti, dont ils auront à se libérer en travaillant encore. »

Et après, on rationne :

« Comme toute l’organisation de la distribution des biens est liée à celle de la production et de l’État, on rogne sans gêne sur toute leur ration, de nourriture comme d’espace, en quantité et en qualité. Quoi que restant formellement des travailleurs et des consommateurs libres, ils ne peuvent s’adresser ailleurs, car c’est partout que l’on se moque d’eux. »

Puis Debord nuance à nouveau son propos (la litote est en général un trope ironique pour ce rare type d’esprit) :

« Je ne tomberai pas dans l’erreur simplificatrice d’identifier entièrement la condition de ces salariés du premier rang à des formes antérieures d’oppression socio-économique. Tout d’abord parce que, si l’on met de côté leur surplus de fausse conscience et leur participation double ou triple à l’achat des pacotilles désolantes qui recouvrent la presque totalité du marché, on voit bien qu’ils ne font que partager la triste vie de la grande masse des salariés d’aujourd’hui. »

Un clin d’œil aux petits enfants du tiers-monde dont la misère complexe depuis des lustres les micro-bourgeois humanitaires catho-modernisés :

« C’est d’ailleurs dans l’intention naïve de faire perdre de vue cette enrageante trivialité que beaucoup assurent qu’ils se sentent gênés de vivre parmi les délices alors que le dénuement accable des peuples lointains. » 

Uniquement lointains…

Et voici un passage stratégique : Guy Debord se demande où gît la nouveauté dans le sort de nos péons postmodernes ?

« Pour la première fois dans l’histoire, voilà des agents économiques hautement spécialisés qui, en dehors de leur travail, doivent faire tout eux-mêmes. Ils conduisent eux-mêmes leur voiture, et commencent à pomper eux-mêmes leur essence, ils font eux-mêmes leurs achats ou ce qu’ils appellent de la cuisine, ils se servent eux-mêmes dans les supermarchés comme dans ce qui a remplacé les wagons-restaurants. »

Une belle formule sur notre existence de zombi, renforcée depuis (fin médiatisée du sexe pour les jeunes, du travail, du logement, des voyages, de l’éducation ou des soins gratuits, etc.) :

« Notre époque n’en est pas encore venue à dépasser la famille, l’argent, la division du travail. Et pourtant, on peut dire que, pour ceux-là, déjà, la réalité effective s’en est presque entièrement dissoute dans la simple dépossession. Ceux qui n’avaient jamais eu de proie l’ont lâchée pour l’ombre. »

Debord reprend la thématique de l’illusion et de l’hallucination :

« Le caractère illusoire des richesses que prétend distribuer la société actuelle, s’il n’avait pas été reconnu en toutes les autres matières, serait suffisamment démontré par cette seule observation que c’est la première fois qu’un système de tyrannie entretient aussi mal ses familiers, ses experts, ses bouffons. Serviteurs surmenés du vide, le vide les gratifie en monnaie à son effigie. »

Une formule assassine :

« Autrement dit, c’est la première fois que des pauvres croient faire partie d’une élite économique malgré l’évidence contraire. »

Le pire est que nos générations d’hommes creux, pour reprendre le poème d’Eliot subrepticement cité dans Apocalypse now, ne laissent depuis longtemps rien derrière eux :

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« Non seulement ils travaillent, ces malheureux spectateurs, mais personne ne travaille pour eux, et moins que personne les gens qu’ils paient, car leurs fournisseurs même se considèrent plutôt comme leurs contremaîtres, jugeant s’ils sont venus assez vaillamment au ramassage des ersatz qu’ils ont le devoir d’acheter. Rien ne saurait cacher l’usure véloce qui est intégrée dès la source, non seulement pour chaque objet matériel, mais jusque sur le plan juridique, dans leurs rares propriétés. De même qu’ils n’ont pas reçu d’héritage, ils n’en laisseront pas. »

On avait compris…

Sources

Guy Debord, In girum imus nocte et consumimur igni ; La Société du Spectacle…

René Guénon, Initiation et réalisation, spirituelle, XXVIII

Alexis de Tocqueville, De la Démocratie…, II, p.363

Georges Sorel, les Illusions du progrès, p.353

Marx, Manuscrits de 1844, p. 93

La laïcité, un obscurantisme qui détruit les sociétés

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La laïcité, un obscurantisme qui détruit les sociétés

par Antonin Campana

Ex: https://www.autochtonisme.com

 

Au commencement était l’idéal cosmopolite. La laïcité a été imaginée par des gens qui ont cru que des hommes de toutes les origines pourraient paisiblement cohabiter si l’on expulsait de la société civile le religieux, et par extension tout ce qui distingue les hommes entre eux. Cette croyance était absurde, les frères Kouachi en témoignent.

« Croyance » ? Vincent Peillon, ancien ministre de l’Education ne le cache pas : « La  laïcité est une religion républicaine », dit-il. « Le Serpent », pour reprendre un surnom que lui donnait François Hollande, raconte (voyez cette courte vidéo) que la République avait besoin de « former sa propre religion » afin de saper l’Eglise catholique. Il s’est donc constitué une « alliance religieuse universelle » explique Peillon, alliance dans laquelle on trouvera des « catholiques libéraux, des protestants libéraux, des juifs libéraux, des athées et des matérialistes », qui portera, toujours selon Peillon, « un projet de religion universelle », une religion que les « croyants » ont appelé « la laïcité » (sic !). 

Pour résumer le propos de Peillon, on dira que la laïcité, comme religion universelle s’adressant à tous les hommes, a expulsé de la sphère publique la religion ancienne pour s’installer à sa place. Les normes et les principes de la religion ancienne, sur lesquels était en partie fondé l’ordre social traditionnel, ont ainsi été remplacés par les normes et les principes d’une nouvelle religion. L’objectif de cette nouvelle religion était d’installer un ordre social qui permette de faire vivre ensemble tous les hommes, quelle que soit leur origine : un ordre social aussi universel que l’était cette religion !  

On définit habituellement la laïcité comme le « principe de séparation dans l’Etat de la société civile et de la société religieuse » (CNTRL). Si l’on s’en tient à cette définition, il est impossible de définir l’Etat républicain comme un Etat « laïc ». La société civile est bien séparée de l’ancienne religion (le catholicisme) mais a été complètement investie par la nouvelle (la « religion laïque »). Cependant, si l’on veut absolument définir l’Etat républicain comme un Etat « laïc », alors la laïcité devra plutôt être définie de cette manière : « laïcité : principe de fusion dans l’Etat de la société civile et de la religion universelle ».

Mais en quoi la laïcité est-elle une « croyance », une « religion », bref, pour reprendre le vocabulaire républicain, un « obscurantisme » ?

Tout d’abord, il faut bien comprendre que la laïcité repose sur une vérité révélée. Cette vérité révélée a ses propres prophètes : les philosophes du XVIIIe siècle. Ceux-ci ont reçu la Lumière et cette Lumière leur a enseigné que la Nature accordait généreusement des « droits naturels » à l’Homme : la liberté, l’égalité, la sûreté, le droit à la propriété et même, parfois, le droit de résister à l’oppression. Ce droit naturel est un droit universel qui bénéficie à tous les hommes sans distinction. Un « contrat social », par lequel les hommes formeront une société parfaite (une « république » en langage philosophiste), peut donc s’établir sur la base de ce droit.

En d’autres termes, l’idée qu’un corps politique pourrait fonctionner harmonieusement sur la base de lois traduisant les droits naturels, ou au-moins ne les contredisant pas, germe dans l’esprit des philosophes et des républicains qui s’inspirent des écrits de ces derniers. Rien de plus logique en effet : une société qui s’organiserait et fonctionnerait selon des valeurs et des principes qui découleraient de la nature de l’Homme, de tous les hommes donc, ne pourrait heurter les sentiments d’aucun d’entre eux et pourrait alors s’épanouir pacifiquement (au contraire des sociétés fondées sur des traditions, des Eglises ou des cultures spécifiques, qui heurteront la sensibilité de ceux qui leur sont étrangers et empêcheront ainsi le vivre-tous-ensemble).

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A départ de la « religion universelle laïque », il y a donc une « révélation » : l’Homme a des « droits naturels ». De cette révélation émerge une croyance : une société humaine pourrait s’organiser sur la base de ces droits universels et s’ouvrir ainsi à tout le genre humain… à condition d’expulser de la société civile tout ce qui ne découle pas de ces droits et empêche le vivre-tous-ensemble, telles les religions par exemple (et pour commencer !). La laïcité exprime cette croyance et la met en œuvre. C’est une praxis, ou si l’on préfère une méthode pour transformer la société dans le sens voulu par la croyance (Manuel Valls, août 2014 : « La laïcité n’est pas un obstacle. Elle est une méthode »). Elle manifeste un Acte de foi totalement irrationnel en la Révélation et en la possibilité de bâtir un ordre social multiethnique sur la base du droit révélé. Prendre le risque de faire vivre ensemble ceux que l’Histoire a séparé demande en effet une foi totale et intransigeante. Car si par malheur la croyance ne tient pas ses promesses, alors les croyants en la laïcité seront accusés d’avoir transformé une société paisible en baril de poudre.  

Aujourd’hui, les illusions ne sont plus permises. Croire aux vertus de la laïcité est d’autant plus absurde et incompréhensible que les faits ont déjà, et depuis longtemps, ravalé cette croyance au rang d’un simple boniment de charlatan. Depuis au-moins les Minguettes (1983), l’échec de la « méthode » est indiscutable. La constitution de zones de non droit (ou de droit islamique), la formation de sociétés parallèles et la prolifération d’économies parallèles, les émeutes ethniques, le racisme anti-français (anijaphétisme), la délinquance immigrée, les multiples et récurrentes  « pannes de l’intégration », le communautarisme, les séparatismes ethniques, le terrorisme islamique… ont posé comme un fait que tous les hommes ne trouvent pas acceptables les valeurs et les principes découlant des droits naturels et de la religion laïque. En d’autres termes, la laïcité, en tant que méthode, a fait la preuve de sa faillite : elle n’est pas en capacité de faire vivre ensemble des hommes de toutes les origines ! La croyance en cette capacité s’est fracassée sur le mur des réalités, la foi en la laïcité est devenue totalement déplacée et irresponsable. Les républicains ne peuvent plus faire comme si rien ne s’était passé depuis 1983. Pour la plupart, d’ailleurs, croire en la laïcité relève maintenant du simulacre et d’une posture politique hypocrite. La vérité est que la République n’a aucun moyen de faire vivre ensemble des gens de diverses origines ! Vue ses conséquences passées et à venir, l’entreprise républicaine qui a consisté à ignorer les faits pour passer outre les nécessaires séparations entre les hommes doit être considérée comme un crime contre l’humanité.

 Nous disions en titre que la laïcité était un « obscurantisme ». Pour Wikipedia, « un obscurantiste prône et défend une attitude de négation du savoir. Il refuse de reconnaître pour vraies des choses démontrées ». La foi persistante en la laïcité, réelle ou simulée, relève donc de l’obscurantisme, puisque la faillite de la laïcité en tant que méthode est démontrée. Néanmoins, malgré les faits, l’obscurantisme républicain ne s’avoue pas vaincu. Déjà, nous pouvons observer une volonté de faire glisser le concept de laïcité du domaine religieux au domaine culturel. La laïcité culturelle consiste à rendre la sphère publique culturellement universelle. Concrètement, cela signifie que les principes culturels européens qui norment notre société doivent à leur tour et progressivement rejoindre la sphère privée pour ne pas heurter les immigrés. Ceux qui croient en la religion universelle dont parle Peillon, s’imaginent encore pouvoir gagner la bataille de l’intégration et du vivre-tous-ensemble en effaçant « laïquement » notre culture. L’objectif est de réduire l’Homme au Consommateur. Bien sûr, une nouvelle fois, les républicains se trompent (pour contrer ce processus, nous avons posé le droit autochtone à une « culture sociétale » - voyez ici ou ici).

De ce qui précède, il faut retenir, d’une part, que la référence à la laïcité comme moyen de construire, de faire tenir ou de restaurer l’Etat républicain exprime une croyance irraisonnée et en aucun cas une pensée rationnelle. Et, d’autre part, que la référence à la laïcité manifeste explicitement la fidélité à la République, c’est-à-dire le ralliement à une Eglise qui s’est servie de cette croyance pour justifier son projet de construction d’un ordre multiethnique viable.

On ne peut donc aujourd’hui invoquer la laïcité et récuser cet ordre multiethnique. C’est pourtant ce que font des personnalités comme Marine Le Pen ou Eric Zemmour (au contraire d’un Peillon). Nous leur renvoyons à ce propos cette citation de Bossuet, qu’eux-mêmes évoquent souvent : « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes » !

Bien sûr, on nous opposera qu’on ne peut plus faire autrement, aujourd’hui, que de parier, en croisant les doigts, sur la réussite miraculeuse d’une laïcité que l’on sait pourtant irrémédiablement condamnée. Vue la situation, ce pari est absurde : plus rien n’empêchera l’effondrement de cette société. Il est déjà trop tard...

Et puis, modestement, ce blog ne propose-t-il pas une autre voie ?

Antonin Campana