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jeudi, 09 avril 2020

Géopolitique du coronavirus: Entretien avec Robert Steuckers

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Géopolitique du coronavirus:

Entretien avec Robert Steuckers

Au cœur d’une crise mondiale inédite par son ampleur, Strategika vous propose l’éclairage d’analystes et de penseurs reconnus dans leur domaine d’expertise. Nous avons posé à chacun une série de questions qui portent sur les différents aspects de cette véritable crise de civilisation ainsi que sur ses répercussions politiques, géopolitiques et sociales.

C’est aujourd’hui Robert Steuckers qui nous répond.

82469796.jpgRobert Steuckers, né en 1956 à Uccle, est diplômé de l’Institut Maria Haps, lié à l’Université de Louvain, où il a obtenu le Master en langues anglaise et allemande. Il a dirigé un bureau de traduction à Bruxelles pendant vingt ans avant de se consacrer à diverses tâches d’enseignement des langues. Il avait créé le think tank “Synergies européennes” en 1994, qui a organisé des universités d’été en France, en Italie et en Allemagne. Il gère, avec d’autres, le site Euro-Synergies qui affiche près de 17.000 articles de fonds, consultables par tous. Il dispose également d’un compte Twitter Robert Steuckers (@RobertSteuckers) | Twitter alimenté chaque jour. Robert Steuckers est l’auteur de plusieurs livres et essais, notamment la trilogie Europa, véritable somme sur l’identité et l’histoire des peuples européens ainsi que La révolution conservatrice allemande et Sur et autour de Carl Schmitt.

Strategika – On lit beaucoup d’éléments contradictoires selon les différentes sources d’information disponibles ou selon les avis des professionnels de la santé. Quelle est la réalité effective de cette pandémie selon vous ?

On ne peut exclure une origine naturelle de la pandémie (bien que je reste sceptique à l’endroit de la fable de la manducation du pangolin ou de la chauve-souris) mais on doit aussi accepter de discuter une autre hypothèse : celle d’un acte de guerre bactériologique dirigé contre la Chine, l’Iran et l’Europe, les trois principaux foyers de la maladie. Le virus mutant, car il est mutant paraît-il, pourrait aussi s’être échappé d’un laboratoire chinois ou autre mais alors pourquoi frappe-t-il les principaux rivaux de l’hegemon, quasi à l’exclusion des autres régions du globe ? Si l’hypothèse d’une guerre bactériologique s’avère exacte, nous pourrions établir le scénario suivant : le centre névralgique de la Chine est frappé, son industrie boostée par les délocalisations néolibérales ailleurs dans le monde, surtout en Europe, est ralentie, ce qui a un effet sur sa monnaie, capable, à moyen terme, de supplanter le dollar. De plus, ce ralentissement ou ce sabotage freine la réalisation des fameuses « routes de la soie ». L’Iran, ennemi numéro un de certains cénacles néo-conservateurs, est frappé à son tour, alors qu’il pourrait aisément devenir le principal fournisseur d’hydrocarbures de la Chine et un partenaire commercial très important de l’Europe, comme à la fin du règne du dernier Shah, avec les accords EURATOM notamment. C’est la thèse de Houchang Nahavandi, ancien ministre du Shah et auteur de livres très importants sur l’histoire récente et ancienne de l’Iran, dont je conseille vivement la lecture.

9782825113110-200x303-1.jpgEn Europe, les calamités s’abattent sur les maillons les plus faibles et sur le moteur principal de l’économie européenne, l’Allemagne. La Grèce doit affronter la crise des réfugiés sur sa frontière thrace, alors que sa santé économique et financière est vacillante depuis une dizaine d’années, suite à la crise de 2008. Elle échappe encore en gros au coronavirus mais… Wait and see… L’Italie, rappelons-le, avait signé des accords spéciaux, faisant d’elle le tremplin de la Chine dans l’UE. L’Espagne a reçu également la crise de la pandémie de plein fouet parce qu’elle est aussi une économie fragilisée qui risque d’aboutir à la ruine du projet européen, favorisé par les Etats-Unis dans les années 1940 et 1950, puis jugé concurrentiel et posé, notamment par la doctrine Clinton, comme « alien », c’est-à-dire comme ennemi potentiel, sinon ennemi déclaré. La France est frappée elle aussi, même si, officiellement, elle est considérée comme alliée depuis Macron, président formaté intellectuellement par une école américaine. Elle est vidée progressivement de ses fleurons industriels (Alsthom, Latécoère,…) et lourdement infestée par le coronavirus, tout simplement parce que l’hyperlibéralisme qui l’anémie depuis la présidence de Sarközy, a sabré dans les secteurs non marchands, dont le secteur médical. Sans un secteur médical fort, bien charpenté, prévoyant toutes formes de pandémie, y compris celles qui pourraient être déclenchées par une frappe bactériologique, un pays est la cible idéale pour ce type d’opération.

La « dé-gaullisation » de la France, depuis Sarközy, constitue le démantèlement d’un Etat qui avait des réflexes clausewitziens, voulu par le militaire De Gaulle, du moins dans ses écrits théoriques, dans l’influence qu’avait exercé Raymond Aron, grand spécialiste du stratège allemand du 19ème siècle, dans sa praxis originale des années 60, laquelle pouvait être décrite comme un modèle de « troisième voie » entre les deux blocs de la guerre froide. C’était une réponse aux impérities de la 3ème République, fustigées par Simone Weil à Londres avant sa mort en 1943, et à la gabegie politicienne et vasouillante de la 4ème. Ces types de régime gèrent à la petite semaine et ne prévoient rien, ce qui entraîne l’incapacité de décider aux moments opportuns ou de faire face à des catastrophes imprévues, comme une pandémie. Le « suicide français », décrit par Eric Zemmour est justement ce démantèlement progressif de l’Etat clausewitzien  -avec tous ses dispositifs mis en place qui prévoyaient toujours le pire-  que voulait être la 5ème République dès sa proclamation et surtout dans les années 1963-69.

La morale de cela, c’est que tout Etat ou groupe d’Etats, doit impérativement, s’il veut survivre aux manigances de ses ennemis (car il y a toujours un ennemi, disait Julien Freund), conserver ses atouts industriels et refuser les délocalisations et les fusions avec des firmes étrangères, garder des infrastructures médicales solides et un système scolaire/universitaire performant.

En Allemagne, les dispositifs prévus pour une pandémie ont été conservés, ce qui explique une meilleure gestion de la crise du coronavirus. Cependant, l’avenir de l’Allemagne n’est pas rose : les flots de réfugiés qui se sont installés sur son territoire ruinent le système de sécurité sociale exemplaire qui y avait été instauré dans l’après-guerre et génèrent du désordre à n’en plus finir dans les rues des villes ; le partenaire principal de l’industrie allemande est la Chine aujourd’hui mais cette dépendance est fragile, les Chinois finissant toujours par produire eux-mêmes ce dont ils ont besoin, notamment des automobiles. L’industrie allemande a trop parié sur l’exportation de ses excellentes automobiles, sans imaginer que ce flux pourrait un jour se tarir. Par ailleurs, le tandem gazier germano-russe est dans le collimateur de l’hegemon : les entreprises européennes qui contribueraient à l’achèvement du gazoduc Nord Stream 2 sont directement menacées de procès par la « justice » américaine ou de confiscation de leurs avoirs dans les banques d’Outre-Atlantique. L’affaire Frédéric Pierucci, cadre d’Alsthom, illustre bien quel est ce risque, notamment dans le livre témoignage que ce cadre a rédigé après son emprisonnement aux Etats-Unis, Le piège américain.  

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Enfin, l’Allemagne connait une crise politique sans pareil dans son histoire d’après 1945. Les partis qui ont été les porteurs de la République Fédérale depuis le miracle économique et depuis la réunification suite à la disparition du Mur de Berlin, sont en chute libre. La SPD socialiste n’est plus que l’ombre d’elle-même ; la CDU, véritable pilier du pays, connaît des tassements problématiques et perd ses billes dans tous les Länder de l’ancienne RDA. Ce tassement ou ce déclin n’est pas une exception en Europe : les chrétiens-démocrates italiens ont disparu de la scène depuis longtemps déjà ; le PPE espagnol est en liquéfaction, ce qui permet aujourd’hui à une fausse gauche, en dépit des étiquettes, de mal gouverner le pays en crise et face à la pandémie ; les deux partis chrétiens-démocrates belges sont également en voie de disparition. Ces effacements démocrates-chrétiens et socialistes interpellent : une autre normalité politique est en voie de constitution mais on ne sait pas encore quels contours elle prendra. Seul Orban maintient sa forme hongroise de démocratie chrétienne en état de fonctionnement, obtenant simultanément un certain consensus dans son pays mais est fustigé voire ostracisé par les instances eurocratiques qui font pression pour qu’il soit exclu de tout.

Le déclin allemand est inéluctable, contrairement à ce que l’on croit généralement en France aujourd’hui, où certains cercles agitent à nouveau le spectre d’un pangermanisme offensif. Outre-Rhin, la littérature contestatrice du système est florissante et n’est plus réduite à des marges de gauche ou de droite mais provient désormais des plus hautes sphères économiques ou intellectuelles. Il faudra y revenir car les arguments avancés par ces contestataires se marieraient très bien avec les critiques de l’eurocratie en vogue en France. C’est un thème excellent pour Strategika !

Si la pandémie frappe depuis peu les Etats-Unis, dont le système hospitalier laisse beaucoup à désirer, on pourra arguer que l’hypothèse, qui n’est qu’une hypothèse, que j’ai esquissée ici est erronée puisque l’hegemon, accusé d’avoir déclenché une guerre bactériologique, serait exonéré de cette accusation, vu qu’il est lui-même frappé par la pandémie. Mais toute opération bactériologique a ceci de particulier, c’est que la première victime peut aisément renvoyer la balle et répandre l’agent perturbateur chez l’envoyeur.

Strategika – Cette pandémie précède-t-elle un effondrement économique et systémique ?

313UGyA8Z1L._SX346_BO1,204,203,200_.jpgJe le pense. D’abord, le confinement ralentit l’industrie dans un système qui ne tolère aucune pause. Pour Carl Schmitt, le monde globalisé par la volonté de Roosevelt dans les années 1930 et 1940, relève de l’élément « eau », puisque l’hegemon bâti par ce président américain est une thalassocratie idéologiquement libérale : nous naviguons donc sur cet immense océan symbolique et sur les flux de marchandises et de communications contrôlés au départ par la puissance navale américaine : qui fait du sur-place dans un tel contexte coule, tout simplement, écrivait Carl Schmitt dans son Glossarium (non encore traduit). Ensuite, j’ai toujours pensé que la crise de 2008, plus profonde qu’on ne l’a cru jusqu’ici, n’a pas vraiment été résolue : on a colmaté les brèches en permanence par toutes sortes d’artifices, on en a freiné les effets pendant douze ans. Ces manœuvres de rafistolage prennent fin. Et on va mettre sur le compte du virus l’implosion définitive du système pour que les peuples ne cherchent pas à désigner des coupables.

Strategika – Plus de 3 milliards de personnes sont appelées à se confiner dans le monde. Pour la première fois de son histoire, l’humanité semble réussir à se coordonner de manière unitaire face à un ennemi global commun. Que vous inspire cette situation ?

Cette situation est effrayante parce que si pandémie il y a, indubitablement, elle n’est pas beaucoup plus explosive, du moins jusqu’ici, que les grippes saisonnières habituelles. Le virus semble certes plus virulent que celui des autres grippes, plus résilient une fois expectoré hors d’un corps humain et plus agressif sur le système respiratoire des patients les plus faibles, dont le système immunitaire est fragilisé par d’autres pathologies. Nous sommes face à une situation comparable à celle de 1968 et 1969-70 où un virus grippal avait tué, à un certain moment, jusqu’à 4000 personnes par semaine rien qu’en France ! En 2018, du 26 février au 4 mars, 2.900 personnes décèdent de la grippe saisonnière en Belgique, en une seule petite semaine !

Les hypothèses qui disent que les cercles dominants orchestrent une panique pour installer un système dictatorial, panoptique, vecteur d’une surveillance universelle et ubiquitaire, sont à prendre au sérieux. Le comportement moutonnier des citoyens est ahurissant dans un tel contexte, alors qu’il est patent que les sphères dirigeantes ont intérêt à promouvoir un tel système : l’Italie de Salvini ou même l’Italie post-Salvini est un pays imprévisible qu’il faut mater ; la France des gilets jaunes qui refuse l’hyperlibéralisme qu’on veut lui imposer mérite, à leurs yeux, une punition sévère et l’Allemagne qui hue Merkel à chacune de ses apparitions publiques doit également être châtiée, d’autant plus qu’elle se chauffe au gaz russe et fait tourner son industrie, automobile et autre, avec ces mêmes hydrocarbures poutiniens.

Nous sommes arrivés à l’ère du « Surveiller et punir » planétaire dont l’Europe sera la principale victime car les Chinois et les Iraniens sont davantage prêts à accepter les coûts humains et possèdent des capacités de résilience supérieures aux nôtres, qu’ils puisent dans la religion chiite ou confucéenne ou dans l’idéologie communiste revue et corrigée, tant et si bien qu’elle ressemble davantage aux projets constructifs de Frédéric List au 19ème siècle et aux projets que celui-ci a inspirés aux idéologues du Kuo MinTang, militant d’une renaissance chinoise après le « siècle de la honte », où le Céleste Empire était tombé en une profonde déchéance.

Strategika – Cette pandémie va-t-elle forcer l’humanité à se doter d’un gouvernement mondial comme le préconisait Jacques Attali lors de la pandémie de grippe A en 2009 ?

Attali formule du moins le projet et il y a des traces de cette vision messianique dans bon nombre de ses écrits antérieurs. Par ailleurs, dans un ouvrage traitant du monde vu par la CIA, il y a une dizaine d’années, Alexandre Adler évoquait une pandémie comme accélératrice d’une mondialisation amplifiée sinon définitive. Je ne vois cependant pas la Chine de Xi Jinping et la Russie de Poutine s’embarquer dans un tel projet. Sans parler de l’Iran…

Strategika – En 2009 toujours, Jacques Attali expliquait que « l’Histoire nous apprend que l’humanité n’évolue significativement que lorsqu’elle a vraiment peur ». Que vous inspire cette idée ?    

Cette idée est une idée générale. Quasi une lapalissade. Mais si Attali, chantre du projet globalisateur en voie de réalisation, l’évoquait en 2009, c’est qu’une ingénierie sociale et médiatique bien orchestrée pouvait, le cas échéant, créer de la peur pour faire aboutir un projet tel celui dont il rêve depuis longtemps. Cette création d’une panique globale est ce à quoi nous assistons aujourd’hui. Mais Attali est désormais un vieux gourou, de l’âge de tous ceux à qui il souhaite la mort pour que les gouvernements hyperlibéraux n’aient pas à payer des retraites. Cependant, le nouveau gourou mondial s’appelle Yuval Noah Harari, célèbre pour deux bestsellers que l’on retrouve en toutes langues dans toutes les librairies du monde, surtout dans les grandes gares et dans les aéroports, là où passent ceux qui nomadisent à grande ou à petite échelle.

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Le 20 mars 2020, cet Harari publie un long article dans le Financial Times (https://amp.ft.com/ ), où le programme mondialisateur en cours est présenté sur un mode plaisant et attrayant, comme d’habitude : on ne peut reprocher ni à Attali ni à Harari d’avoir un style ennuyeux, incapable de capter l’attention de leurs lecteurs. Harari constate qu’avec le coronavirus, il y a urgence (emergency) et que toute urgence est « un processus historique accélérant ». Ensuite, je cite : « Les décisions en temps normaux, qui peuvent prendre des années de délibération, sont prises en quelques heures (…). Des technologies non encore entièrement développées voire dangereuses sont mises en œuvre, parce que les risques sont plus élevés si on ne fait rien (…). Des pays entiers servent de cobayes à grande échelle pour des expérimentations sociales ». Harari évoque alors un monde où il n’y aura plus que du télétravail et surtout du télé-enseignement: le confinement, que nous subissons, semble alors une étape préparatoire à cet avenir de réclusion complète, concocté dans les hautes sphères dominantes.  Harari évoque aussi le monitoring général de l’humanité, assorti de punitions pour les récalcitrants. Il est quelque peu lyrique en disant qu’aujourd’hui, les gouvernements sont plus forts que le KGB soviétique car ils disposent maintenant de « senseurs ubiquitaires et d’algorithmes puissants ». Le coronavirus, ajoute-t-il comme s’il voulait apporter de l’eau à notre moulin,  a d’ores et déjà permis de déployer un tel arsenal inédit dans l’histoire de l’humanité, notamment en Chine où l’Etat se manifeste en permanence à travers les smartphones de ses citoyens, utilise la reconnaissance faciale à très grande échelle et peut déterminer quel est l’état sanitaire de chaque Chinois par des appareils destinés à vérifier leur fièvre, que n’importe quel policier peut trimbaler et utiliser sur les voies publiques. L’étape suivante nous est également révélée par l’article d’Harari : les sentiments, comme la colère ou la joie, sont des phénomènes biologiques au même titre que la fièvre ou la toux : on peut donc les détecter et les manipuler au départ des mêmes instruments qui servent à repérer dans les rues de Chine les fiévreux potentiellement « coronavirusés ». Enfin, Harari dévoile l’objectif final, quasi messianique, bref la parousie enfin en advenance : la « coopération globale », seule planche de salut contre le virus qui doit nous induire tous à opter pour « un esprit globaliste », rendant inutile les réflexes locaux ou nationaux.

CLS.jpgEn d’autres termes, Harari opte pour une humanité radicalement différente de celle qu’avait préconisée en son temps Claude Lévi-Strauss : celui-ci voulait autant de modèles humains qu’il en existait encore sur la planète quand il s’adonnait à ses recherches en ethnologie, voulait promouvoir un « esprit ethnopluraliste » pour que l’homme ait à sa disposition de nombreux modèles possibles à imiter ou à assimiler en cas de blocage ou d’effondrement du modèle auquel il avait auparavant appartenu, dans lequel plusieurs générations de ses ancêtres avaient vécu. L’humanité devait être plurielle pour cet ethnopluralisme lévi-straussien. Pour Attali et Harari, cela ne semble pas être le cas. J’ai, je ne vous le cache pas, la nostalgie du projet de Lévi-Strauss. 

Strategika – Comment voyez-vous l’évolution de la pandémie et ses conséquences politiques et sociales dans les semaines à venir ?

Je pense que l’on suscitera la panique au moins jusqu’à la mi-mai, jusqu’au moment où le ralentissement des industries européennes aura des conséquences irréversibles et que la crise sera là, bien palpable, avec un nombre incalculable de faillites dans les PME (petites et moyennes entreprises). La crise sociale en France s’accentuera et le mouvement des gilets jaunes reprendra vigueur et de plus belle. Les autres pays européens suivront, Allemagne comprise. Ensuite, le confinement finira par agacer les plus patients d’entre les autochtones et par provoquer des émeutes dans les quartiers à risque car le Ramadan commence fin avril et s’étendra jusqu’à la fin du mois de mai. Il y a plus grave : le mondialisme globalitaire vise l’éradication de la culture européenne, dont le symbole le plus patent et le plus spectaculaire fut l’incendie de Notre-Dame de Paris. Le confinement a entraîné un premier sabotage de la liturgie implicite de notre civilisation : les vacances de Pâques et les festivités pascales, dont la semana santa espagnole, seront effacées pour la première fois depuis des siècles, de même que le cycle printanier de mai, avec les fêtes religieuses assorties des communions, prétextes à des fêtes de famille qui soudent la société. Suite à ce sacrilège, car il faut bien l’appeler ainsi, le cycle des vacances estivales sera très probablement bouleversé, alors qu’il est une tradition séculaire, ponctué de fêtes également. L’humanité de notre sous-continent sera perturbée en profondeur, ébranlée psychologiquement, avec effets somatiques et psychologiques. C’est là le risque le plus effrayant dans l’immédiat car, une fois enclenché le sacrilège de briser notre liturgie millénaire, il y aura en permanence le risque de le rééditer. Mais même la rupture du cycle rituel liturgique, hérité de Rome, pendant une année seulement est annonciatrice de catastrophes : jamais on avait osé cela.

Strategika – Existe-t-il une issue politique à la situation que vous venez de décrire et quelle forme pourrait-elle prendre selon vous ?

b2f8434b2865b541e9db2e207b87586a.jpgUne issue politique, véritablement politique au sens où l’entendaient Carl Schmitt et Julien Freund, n’est possible que par un coup de force, une épreuve cruellement conflictuelle. Par un bouleversement pareil à la révolution russe de 1917. Or nous ne sommes plus dans les années 1920 ou 1930 où des millions de soldats revenaient du front et n’avaient pas peur d’encaisser des coups ou de mourir face aux balles de régimistes ou d’adversaires politiques. Qui plus est, on ne brise plus un régime aujourd’hui avec de simples fusils, munis de baïonnettes. Les Etats sont dotés d’armes plus sophistiquées, que l’on ne peut pas acheter au magasin du coin, même aux Etats-Unis. Ils disposent de « senseurs ubiquitaires et d’algorithmes puissants », pour paraphraser Harari. De nos jours, il y a des drones, des caméras, des centres cachés si bien qu’il ne suffit pas de prendre la Grande Poste comme à Dublin en 1916, ou la radio à Moscou en 1993, face aux blindés d’Eltsine. Notre humanité est bien trop adoucie par des décennies de « libéralisme » (ou de festivisme) pour oser une telle aventure.

La seule forme qu’une réaction pourrait prendre serait un glissement vers l’illibéralisme à la Orban ou à la Poutine, sans répéter le stupide clivage gauche/droite car l’ennemi de tous est unique : il s’agit de l’hyperlibéralisme induit dans nos sociétés par le tandem Thatcher-Reagan à partir de 1979.  Or à gauche, on conserve de lourds réflexes hostiles au politique et, à droite, on a toujours tendance à sombrer dans une forme ou une autre de libéralisme. Ce sont là les écueils à éviter, en faisant appel à une imagination métapolitique qui fondrait les corpus opposés en une nouvelle synthèse, où les principes de la justice sociale et du suum cuique sont respectés.  

Strategika – Comment liez-vous la crise actuelle à votre domaine d’expertise et votre champ de recherche ?

Je ne suis pas un expert mais un observateur engagé. La crise actuelle, pour moi, est l’aboutissement de la crise freinée de 2008 et, mais je peux me tromper, un coup de force bien ciblé, perpétré par un acte de guerre bactériologique qui vise à anéantir la puissance économique européenne (le seul mode de puissance qui restait à notre sous-continent), le challengeur chinois,  à ruiner le projet des « routes de la soie », avec l’appui continu d’une orchestration médiatique planétaire. Nous sommes dans des guerres hybrides ou des guerres de quatrième génération, c’est-à-dire des guerres où l’on n’aligne plus des armées de chars et de fantassins mais où l’on applique savamment des stratégies indirectes. L’Europe, constataient déjà certains observateurs dans les années 1990 et 2000, était la moins bien préparée à manier les outils médiatiques et culturels de cette guerre de nouvelle dimension : c’était diantrement vrai et elle en paie lourdement les conséquences aujourd’hui. Si son projet avait été clausewitzien au lieu de néolibéral, elle n’en serait pas là…

Les leçons de la crise : la mise sous respiration artificielle de l’Europe...

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Les leçons de la crise : la mise sous respiration artificielle de l’Europe...

par Caroline Galactéros
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Caroline Galactéros, cueilli sur le site de Geopragma et consacré aux conséquences de la crise du Coronavirus en Europe. Docteur en science politique, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et de Vers un nouveau Yalta (Sigest, 2019). Elle a créé en 2017, avec Hervé Juvin, entre autres, Geopragma qui veut être un pôle français de géopolitique réaliste.

Les leçons de la crise : la mise sous respiration artificielle de l’Europe

Il ne s’agit pas, comme pour l’OTAN, d’une prétendue “mort cérébrale” mais d’une très concrète mise sous respiration artificielle de l’Europe. Sans garantie de survie. Le Covid-19 agit comme un triste révélateur de la vérité de ce qu’est l’UE : une vieille dame qui a “de beaux restes” mais ne sait plus ce que veut dire “se tenir”, être digne de soi ou de ce que l’on prétend être. Telle une ancienne gloire de la scène mondiale, elle vit tellement dans ses souvenirs et ses illusions qu’elle ne s’est pas rendu compte que le monde avait complètement changé et qu’on ne l’écoutait plus.

Les masques tombent

Cette pandémie révèle les meilleurs et les pires des comportements humains : les trafics, les pillages dans nos hypermarchés dégoulinants de nourriture, le mépris des consignes de confinement d’une partie de notre jeunesse en sécession, l’abandon de notre partenaire italien en pleine tragédie, comme d’ailleurs celui de la Grèce plus seule que jamais face aux migrants à l’assaut de ses frontières, les coups de poignard dans le dos entre Européens (comme ces douaniers Tchèques qui récupèrent l’aide chinoise d’urgence destinée à l’Italie et la distribuent dans leurs hôpitaux). Il y a aussi le meilleur : la solidarité active de tant de nos concitoyens et de nos entreprises qui fourmillent d’initiatives et d’empathie, les policiers qui travaillent nuit et jour pour sauver de leurs bourreaux domestiques femmes et enfants plus en danger encore que d’ordinaire, les pompiers, les personnels dévoués de nos maisons de retraite et même simplement les “mercis” chantés chaque soir pour les “soignants” qui ne démissionnent pas alors même que l’impéritie gouvernementale les fait depuis des semaines monter au front presque sans masques ni gants… Ne nous trompons pas toutefois. Le dévoiement de la sémantique guerrière est à mon sens ridicule et même contreproductif. Cette rhétorique martiale dessert l’image de nos “chefs de guerre” manifestement mal armés et peu décisifs aux premiers temps de l’épidémie. Les “soignants” ne font que leur devoir. Ils vivent leur vocation, celle qui a inspiré leur choix professionnel. Ce ne sont pas des “héros”, ni des victimes. Même s’il est vrai que, comme nos gendarmes, nos policiers, nos croquemorts et tant d’autres, ils montent au front de la pandémie depuis des semaines souvent sans armes et prennent des risques personnels insensés dans un pays qui se targuait hier encore d’avoir le meilleur système de soins au monde…

“Il est donc grand temps de redéfinir avec lucidité et ambition le périmètre du régalien”

Les masques sont donc tombés de ce nouveau village Potemkine français, la politique préventive de santé publique. Dieu merci, Hippocrate est encore vivant. Il faudra néanmoins sérieusement s’occuper de lui dès la crise passée et le soigner à son tour sans mégoter. Cette incurie sanitaire aux conséquences désastreuses rappelle celle du budget de la défense, allègrement raboté durant des décennies au nom des “dividendes de la paix” sans réfléchir même à préserver les capacités essentielles indépendantes pour faire face à de collectives calamités. Nous sommes là au cœur de la résilience d’une nation et même de sa survie. Quand la tempête sera passée, ces domaines, comme ceux de la sécurité ou de la justice, devront une fois pour toutes échapper à nos petits hauts fonctionnaires comptables ratiocineurs, qui trouvent toujours de l’argent pour remplir les tonneaux des Danaïdes de l’assistanat à visée électoraliste, mais laissent nos soldats et nos médecins en haillons au nom de la rationalité budgétaire en misant sur leur sens du devoir pour faire le job malgré tout si besoin était. Besoin est.

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Le besoin d'état

Il est donc grand temps de redéfinir avec lucidité et ambition le périmètre du régalien, qui dessine celui de notre souveraineté comme socle vital de la persistance dans l’être de la Nation. Temps aussi d’admettre que nous faisons face au grand retour des Etats dont il faut se réjouir au lieu de célébrer stupidement leur déliquescence comme un progrès.

Car nos peuples, tous les peuples ont besoin d’un Etat, et d’un Etat fort qui sache les protéger et décider dans l’incertitude au mieux de leurs intérêts physiques, matériels, et même immatériels. Les utopies fluides de la globalisation, de la délocalisation vertueuse des productions indispensables (des masques et respirateurs aux catapultes de nos avions de chasse, aux turbines de nos sous-marins en passant par notre alimentation, nos médicaments, etc…), celles de la virtualisation accélérée du monde viennent de se fracasser lamentablement devant un petit virus mutant, né de nos propres expérimentations, qui décime cet humain prétendument si proche de la vie éternelle et de l’humanité “augmentée”. Le COVID 19 vous terrasse comme la peste noire ou la grippe espagnole emportèrent en leur temps des centaines de milliers de malheureux. Nous ne sommes donc rien ou plutôt pas grand-chose ! Vanitas vanitatis, omnia est vanitas ! Il était temps de s’en souvenir. Pas de masque, pas de gants, une accolade de trop et hop ! Au trou ! Cette crise est une crise de l’Ubris occidental, gavé d’utopie technicienne au point de se croire invulnérable. On n’y croyait pas. Un peu comme les Américains avant le 11 septembre 2001, qui ne pouvaient seulement imaginer, en dépit de bien des signaux d’alarme, que leur territoire allait être magistralement désanctuarisé en son cœur même. Notre civilisation “post-moderne”, pétrie d’économisme triomphant, saisie du vertige transhumaniste et nos sociétés si sophistiquées qui pratiquent le trading haute fréquence et installent des millions de Kilomètres de câbles sous-marins pour gagner plus encore, en quasi totale décorrélation d’avec l’économie réelle comme du sort des populations ordinaires, avaient juste oublié qu’elles étaient mortelles. Paul Valery n’aurait sans doute pas imaginé pareille postérité à son prophétique propos.

“L’Etat tient” nous dit-on ! Encore heureux ! Mais pour combien de temps et surtout, saura-ton tirer profit de ce drame mondial pour prendre de la hauteur, revoir de fond en comble nos plans d’urgence, nos priorités, notre planification de crise, notre gouvernance et enfin définir ce que nous attendons de nous-mêmes en tant qu’Etat-nation digne de ce nom dans le monde tel qu’il est ? Cela nous permettrait de décider au passage ce que nous attendons de l’Europe et ce ne serait pas du luxe ! Quand on réalise le temps perdu à Bruxelles par nos eurocrates hors sol et pleins de certitudes à nous convaincre qu’il était urgent d’attendre, qu’il ne fallait surtout pas fermer les frontières nationales ni même celles de Schengen, encore moins contrôler systématiquement les entrants nationaux ou étrangers, car c’était là manquer à “l’esprit européen” de liberté et au sacro-saint dogme libre échangiste, on mesure la totale irresponsabilité de ceux qui prétendent savoir ce qu’il faut aux Européens pour vivre en paix et prospères. Il faut vivre tout court déjà !

Saura-t-on faire que cette crise soit le catalyseur d’une prise de conscience urgentissime de ce que la souveraineté nationale n’est pas une option mais une nécessité vitale pour chaque peuple sur cette planète ? Va-t-on en finir avec le conformisme intellectuel qui nous affaiblit collectivement en nous faisant faire l’autruche et tout comprendre en permanence de travers ? Saura-t-on voir que le sujet n’est pas le populisme ou je ne sais quelle lubie rétrograde, mais bien l’urgence de protéger concrètement nos peuples et notre civilisation contre divers périls, lutte à laquelle il faut affecter les moyens suffisants au lieu de fuir dans le ronron du productivisme en roue libre et de la morale en toc qui fait au loin des tombereaux de morts ?

Les conseilleurs n’étant pas les payeurs (quoiqu’en l’espèce un peu quand même), il serait évidemment malvenu de critiquer ceux qui dans la tempête, après l’avoir gravement sous-estimée, cherchent rames et écopes. Si cette pandémie rappelle le monde entier à son humaine condition et fait sonner à ses oreilles sidérées le même glas, on voit immédiatement que les pays sont tout sauf égaux devant elle, selon les « choix » de leurs gouvernants en matière de contrôle des frontières mais aussi de dépistage et de traitement. Le” pouvoir égalisateur ” du virus lui-même s’arrête à la décapitation de nos petites vanités dérisoires. Plus que jamais, les destinées collectives des peuples dépendent des forces morales, mentales comme de l’autorité de leurs dirigeants.

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L’état n'est plus stratège

En France, la stratégie adoptée de limiter les tests au maximum et de confiner l’ensemble de la population en mettant à l’arrêt la vie économique du pays au lieu de dépister massivement puis d’isoler les contaminés pour les traiter, n’a d’ailleurs pas été un arbitrage scientifique. Nous n’avions juste pas (plus) les moyens de faire autrement. Ce choix nous a été imposé par notre système sous-dimensionné de prise en charge de l’urgence sanitaire. Pourtant, le risque pandémique est un risque sanitaire majeur bien connu. Et depuis 15 ans, nous avons déjà connu les tragédies de la grippe aviaire et du virus H1N1…Mais nous n’en avons pas tiré les enseignements. Nous sommes passés à autre chose. Nous délocalisons toujours les productions pharmaceutiques et médicales et nos arbitrages sont idéologiques et d’opportunisme politique, nourris d’une confiance ingénue dans la supériorité de la liberté de circulation des individus sur la contagiosité extrême d’un virus. Dont acte.

Alors, on a différé, séquencé, délayé, et perdu un temps précieux au risque de bien des morts, et de devoir in fine, une fois le système saturé et les soignants éreintés, choisir ceux que l’on sauve et ceux que l’on sacrifie, écrémage pourtant politiquement suicidaire. Le gouvernement après quelques semaines d’atermoiements, parait désormais avoir pris la mesure du danger et de bonnes décisions. On peut tout de même remarquer que notre vaisseau prend l’eau de toutes parts, et qu’il faudrait voir à racheter une grand-voile au lieu de rapiécer sans cesse notre Tourmentin. Tout cette improvisation révèle une folle vanité et une désorientation plus vaste encore, qui font craindre pour la sécurité au sens le plus large que méritent nos compatriotes. Car, à moins que l’on ne cède au complotisme, ce virus n’a pas été intentionnellement lâché dans la nature. Le prochain le sera peut-être. La “guerre” bactériologique et chimique est aussi vieille que l’homme. Chinois comme Américains et Russes sont les meilleurs au monde en cette matière. Nous ne sommes pas mauvais non plus. C’est la massification de l’empoisonnement à l’ancienne, la strychnine à l’échelle industrielle. Alors l’économie mondiale s’enraye bien plus surement qu’avec un blackout venu du cyber-warfare ! Alors le pétrole plonge, les convoitises et les embuscades préparées de longue date contre des entreprises fragiles peuvent s’accélérer. Pékin est déjà en train de fondre sur des proies australiennes, et bien des entreprises européennes sont sur sa wish list… Cette crise est donc une répétition générale opportune pour une autre attaque probable lancée à des fins de déstabilisation offensive.

Face à ce type d’occurrence, il faut à nos démocraties molles des “chefs” politiques ayant des vertus particulières. Des hommes ayant le sens de l’Etat et de l’intérêt général, dotés une grande humanité mais insensibles et même réfractaires à l’air du temps, sachant définir un cap et s’y tenir, donner des ordres et se faire obéir. Des hommes surtout, qui arrêtent de bêler avec les autres européistes qui ont tué l’Europe des Nations à force de l’émasculer. Or, on a cassé le moule. Les gouvernants européens sont presque tous d’une autre eau. Pour eux, la guerre est un objet historique. Ils ne savent plus ce qu’elle exige d’anticipation austère et de sacrifices impopulaires. Ils sont sans boussole intérieure, historique et morale. Ils ne savent que “gérer” l’urgence dans l’urgence, sans jamais prendre le temps de s’y préparer sérieusement, à l’instar d’ailleurs de leur pratique politique générale, qui consiste à vouloir plaire à tout le monde, donc à personne. Pourquoi cette systématique indifférence à l’anticipation ? Sans doute parce qu’elle ne rapporte rien politiquement… sauf en cas de “surprise stratégique”. C’est un pari. Qu’ils ne font pas. Celui du service de l’intérêt national dont on ne vous saura peut-être jamais gré. Un pari à rebours de l’air du temps, qui requiert des mesures de protectionnisme économique, des nationalisations, la constitution de stocks et de champions nationaux, le maintien de capacités de production indépendantes multiples. Bref, cela coûte cher et ne rapporte rien, sauf si… Cela demande de croire à la souveraineté nationale, à l’intérêt et à la raison d’Etat et d’accepter leur coût politique et financier toujours exorbitant. Or, nous parlons d’Etat stratège sans jamais en accepter l’austérité et les exigences. Gouverner n’est pas glamour.

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Dieu merci, le cadavre européen bouge encore. Ou plutôt, sous l’effet de la gravité de la crise sanitaire qui cible les populations – première richesse d’une nation-, certains de ses “organes” (les Etats-membres) sortent de leur torpeur et reprennent leur vie propre. La Hongrie, l’Allemagne, l’Italie, la Grèce, la Pologne. On appelle cela avec dégoût le populisme, le souverainisme, et même “l’i-libéralisme”, alors que ce sont les systèmes immunitaires des peuples et nations qui se réveillent, non pas contre l’Europe mais pour elle, pour la faire sortir enfin de son enveloppe abstraite mortifère !

Caroline Galactéros (Geopragma, 4 avril 2020)

mercredi, 08 avril 2020

COVID-19 : Les chaines brisées de la transmission

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COVID-19 : Les chaines brisées de la transmission

Par Marc CHEVRIER

Ex: https://metainfos.fr

 Parmi les nombreuses manchettes affolées que la pandémie du covid19 a suscitées dans les médias, il en est une qui a capté à sa façon, par sa double signification, l’esprit particulier de notre époque. Elle coiffait un texte paru dans le New York Times qui appelait la jeunesse américaine à arrêter la chaîne de transmission. « You can help break the chain of transmission[1] ». Dans son sens premier, cette phrase exhorte la jeunesse à prendre conscience de ses responsabilités face à l’épidémie, elle lui parle dans un langage qu’elle peut comprendre et qui la flatte : vous avez ce pouvoir entre vos mains. Mais si on l’interprète plus largement, on y reconnaît aussi l’une des grandes passions de notre époque : vouloir à tout prix, pour flatter la présomption, l’outrecuidance, l’égoïsme, la vanité ou le mal-être des vivants, empêcher que leur existence accomplisse la transmission d’un héritage, d’une culture, d’une civilisation et même qu’elle cesse de transmettre la vie. Il s’agit alors de casser les chaînes de la transmission, ces chaînes devenues trop lourdes pour les vivants aux frêles épaules.

Par l’idée de transmission, nous exprimons des réalités de différents niveaux. La transmission vaut pour les virus et les infections de toutes sortes, dont on craint la propagation rapide dans les rapports humains et dont les épidémiologistes cartographient la chaîne. La transmission des données les plus rapides et les plus fiables nourrit l’une des obsessions de l’économie mondialisée. Les jeunes prenant le relais des plus vieux, la vie roule grâce à la transmission de patrimoines entre les générations. Depuis des temps immémoriaux, l’humanité est absorbée dans la naissance et l’éducation des enfants et tâche, depuis qu’elle a des écoles, de leur transmettre un bagage de connaissances adéquat et ce qui forme le socle commun d’une culture dans une société. Mais transmettre ne semble plus aller de soi aujourd’hui, notamment en raison de l’éloignement constaté entre les générations, qui évoluent maintenant dans leurs espaces parallèles et se tancent avec suspicion. Et comme l’a souligné le philosophe Pascal Bruckner au sujet du « jeunisme » dont se drape aujourd’hui la maturité : « Jadis, les gens vivaient la vie de leurs ancêtres, de génération en génération, désormais les ancêtres veulent vivre la vie de leurs descendants[2]. »

La transmission au temps des orgies flottantes

Une image qui restera longtemps attachée au souvenir de cette pandémie : tous ces navires de croisière amarrés de force et remplis de vacanciers mis en quarantaine dans leur cabine, souvent sans fenêtre, qui voient leurs vacances de rêve virer en cauchemars. La belle insouciance promise à bord, où la dolce vita berce les retraités pour tuer l’ennui ou pour cueillir les récompenses méritées d’une longue carrière travailleuse, avait, jusqu’à ces arraisonnements catastrophiques, fait prospérer une industrie qui ne craignait pas de mettre à flot des bateaux gigantesques comme des villes flottantes vouées au divertissement effréné et au remplissage des estomacs. Emblématique de l’économie mondialisée, l’industrie de la croisière de luxe révèle aussi le rapport nouveau à la transmission qui apparaît même chez les plus âgés. Aux anciennes générations qui voyaient dans le travail la valeur première et qui léguaient à leurs enfants un patrimoine après de grands sacrifices, ont succédé des « aînés » avides de profiter à plein de l’été indien de la vie — expression de Bruckner —, c’est-à-dire de ces années de loisir et de vitalité prolongée qui offrent désormais au « troisième âge » l’occasion de coûteuses récréations. Travailler consiste alors à différer une vive jouissance, celle qu’octroiera la retraite et qui, le temps de quelques jours ou quelques semaines, vous transporte dans la vie de grands seigneurs à bord d’un palace qui accoste aux rivages les plus enchanteurs.

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Représentation du navire de Caligula, qui y organisait des orgies

Les aristocrates anglais, semble-t-il, se seraient les premiers adonnés aux croisières, qui devinrent une activité de tourisme à la faveur du voyagiste Thomas Cook, lequel organisa des croisières sur le Nil après l’ouverture du canal de Suez en 1869. On observe que « [l]a liste des passagers est ouverte aux classes bourgeoises, aux employés de banque, aux commerçants ou à la profession libérale et [que] le décalage des standings nourrit les sarcasmes de la presse britannique, dont les caricatures ridiculisent les Cooks et Cookesses à la recherche éperdue des divas de l’aristocratie cosmopolite[3]. » On doit cependant remonter par-delà le Nil pour saisir l’esprit de la croisière. Dans ses Vies des douze Césars, l’historien romain Suétone rapporte que l’empereur Caligula fit construire de somptueuses galères qui longeaient les côtes de la Campanie et où l’on répandait les soins et les plaisirs les plus raffinés. Suétone écrit en effet : « il fit construire des galères liburniennes à dix rangs de rames, aux poupes ornées de pierres précieuses, aux voiles aux couleurs changeantes, où l’on trouvait des thermes, des portiques, des salles à manger d’une grande étendue, voire même diverses sortes de vignes et d’arbres fruitiers ; c’était pour y donner des festins, en plein jour, au milieu des danses et des concerts, en longeant les rivages de la Campanie[4]. »  Des fouilles archéologiques ont aussi découvert au fond d’un petit lac au pied des monts Albains, à trente kilomètres au sud-est de Rome, de grandes épaves ornées à leur poupe de tête, de lion et de léopard et qui devaient vraisemblablement être le théâtre, sous de riants décors, d’une « débauche de richesse, fêtes et orgies[5]. » 

navireorgierome.jpgLes analogies sont nombreuses entre les galères orgiaques de Caligula et les paquebots de croisière que rien n’arrête dans leurs circumnavigations, excepté un coronavirus. Ces galères et ces paquebots érigent aux excès du désir humain des temples flottants, coupés du monde, où une armée de serviteurs se dévoue aux lubies de passagers à peine remis de leur décalage horaire. Mais le paquebot qui mouille près des fjords de l’Alaska ou de Norvège ou qui fait escale à une île des Tropiques dépasse en dépense ce qu’aucune des débauches de Caligula n’eût jamais atteint. La barque joyeuse du lac Nemi paraît bien inoffensive aux côtés d’un paquebot-cité conçu pour divertir des milliers de personnes ; cet ogre énergétique vogue sur mer grâce à la consommation d’un fioul lourd à haute teneur en soufre, beaucoup plus polluant que le diesel utilisé par d’autres navires plus petits[6]. Chaque jour, chacun de ces navires produit une quantité énorme d’eaux usées et de rejets toxiques. De plus, si l’on compte tous les trajets aéroportés et autres déplacements faits par chacun des passagers pour monter à bord puis revenir dans son patelin, chaque croisière qui s’amuse déclenche une explosion orgiaque de dépense énergétique, dispersée à tout vent sur la crête des flots.

Dans l’histoire de l’humanité, aucune civilisation n’a réussi à pousser aussi loin la dissipation énergétique. Ces réserves ensommeillées d’énergie, enfouies dans les entrailles de la Terre, par compaction de la biomasse déposée aux fonds des océans et des deltas il y a de 20 à 350 millions d’années, remontent ainsi violemment à la surface et se consument dans un épisode aussi court qu’une pirouette de tango ou de salsa, exécutée sur une piste où des retraités repus croient renouer avec leurs élans de jeunesse. Cependant, le paquebot révèle l’aspect profondément aristocratique de la civilisation occidentale pétrolière. C’est Nietzsche lui-même qui voyait dans le gaspillage ostentatoire la marque de l’aristocratie : « L’expérience de l’histoire montre que les races fortes se déciment réciproquement : par les guerres, les désirs de puissance, les aventures, les fortes passions, le gaspillage — (on ne capitalise plus de forces et il se forme des troubles intellectuels par une tension exagérée). Leur existence est coûteuse, bref — elles s’usent les unes les autres[7]. » Il ajoute : « Les races fortes sont des races prodigues. » En somme, l’idéal aristocratique boit aux fontaines de l’abondance gaspilleuse et tapageuse.

Le monde capitaliste fonde ses hiérarchies sur un ordre énergétique. Aux richissimes l’accès à la grande consommation par le moyen des avions et des yachts privés, qui occupent le sommet de la dépense énergétique ; viennent ensuite les classes aisées supérieures qui les imitent en s’offrant la première classe dans les voyages aéroportés et nautiques ; puis les classes moyennes, qui essaient de faire de même, mais se contentent de la classe économique ou des cabines des ponts inférieurs ou sans hublots. Chaque paquebot recrée en son sein un microcosme stratifié entre diverses catégories de serviteurs de toutes nationalités, aux conditions de travail souvent précaires et médiocres. Le « tout-inclus » des vacanciers en croisière inclut d’être traités illusoirement en seigneurs par une domesticité besogneuse de majordomes, maîtres d’hôtel, agents de bord, préposés à l’entretien, maîtres queux et sauciers, masseurs, acuponcteurs, coiffeurs, manucures et pédicures, etc., recrutés sous le régime d’un droit du travail allégé, grâce à l’immatriculation de ces châteaux flottants dans des pays connus pour être des paradis fiscaux et légaux comme les Bermudes, le Panama et le Libéria. Ainsi, par la croisière de masse, l’opulence aristocratique se démocratise, sans remettre en cause les hiérarchies dans la consommation énergétique, l’ordre social et la division du travail entre les nations. 

Les interruptions dans la transmission des patrimoines

Beaucoup de vacanciers croisiéristes se sont posé cette question : « Au soir de ma vie, suis-je en droit de me payer de folles escapades au bout du monde ou devrais-je en laisser un peu plus à mes enfants et petits-enfants ? » Ce genre de dilemme est devenu assez commun à l’ère du tourisme de masse, encore qu’il ne soit pas prouvé que beaucoup de retraités, par excès de tels scrupules, ont renoncé à leur croisière annuelle. Selon plusieurs experts en finances, nous assistons depuis plusieurs années à des transferts massifs de patrimoine ; les générations actuelles meurent plus riches que les précédentes, laissant des héritages sources de convoitises au sein des familles et dont certains défunts ont disposé avec une liberté parfois déconcertante. Chez nombre de baby-boomers s’est même développée l’idée que vivre en vue de laisser un héritage appartient à une autre époque et qu’il vaut mieux tout dépenser de son vivant, pour jouir au maximum de sa richesse accumulée. Un livre paru aux États-Unis en 1997, sous le titre Die Broke[8] (Mourir sans un rond), a popularisé l’idée que le meilleur plan de retraite consiste à quitter la scène sans même laisser assez d’argent au croquemort. Un autre livre, paru au Québec, entonne un refrain hédoniste clair : Arrêtez de planifier votre retraite, planifiez votre plaisir[9]. Un notaire de Québec a bien résumé dans une entrevue le nouvel esprit de transmission habitant cette génération : « Il y a 20 ans, les gens tenaient à pouvoir léguer un héritage, même modeste, après leur décès. Il y avait une sorte de fierté à pouvoir laisser quelque chose. Aujourd’hui, les gens accordent moins d’importance au fait de laisser un héritage. Ils veulent profiter de la vie. Et ils cherchent plus à analyser la situation dans son ensemble et visent une démarche qui commencerait avant leur décès et qui pourrait se poursuivre après[10]. » Bref, la transmission d’un héritage aux enfants a cessé d’être un automatisme social.

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Dans les sociétés européennes, les législateurs n’ont guère abandonné la transmission des patrimoines aux caprices des défunts ; ils ont imposé des règles, comme la réserve héréditaire, qui prévoit qu’une portion de l’héritage doit obligatoirement revenir aux membres de la famille immédiate du défunt. C’est le régime que suivent encore plusieurs pays comme la France, la Grèce, l’Espagne, l’Italie, mais aussi l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suède. Dans les pays anglo-saxons de common law, le droit successoral consacre en général la liberté de tester du défunt et n’impose pas de répartition obligatoire. Il n’empêche que le droit européen a contribué à affaiblir le système des réserves héréditaires usité dans les pays au droit de tradition romane, tant et si bien que depuis un règlement européen adopté en 2015, le citoyen d’un pays connaissant la réserve héréditaire peut néanmoins déshériter un des enfants en s’établissant dans un pays où une telle réserve n’existe pas[11]. On a vu se multiplier en France des sites de gestion de patrimoine indiquant comment déshériter ses enfants ou « sauter une génération » — donner à ses petits-enfants plutôt qu’à ses enfants. En Amérique, bien que le Conquérant anglais ait rétrocédé au Québec la jouissance de son droit civil français en 1774, il l’a depuis lors assujetti au régime de la liberté de tester à l’anglo-saxonne, principe que les juristes québécois ont naguère critiqué comme une atteinte à la protection économique du défunt survivant et des enfants, mais avec lequel beaucoup se sont ensuite réconciliés, au nom d’une vision individualiste de la propriété et du droit[12]. La liberté de tester pratiquée en pays de common law n’enlève toutefois pas au législateur la capacité de prescrire une répartition obligatoire en cas de succession sans testament, ab intestat. Dans le droit anglo-saxon, les défunts riches peuvent s’acheter une forme d’immortalité par la création de trusts — fiducies — qui affectent, pour une durée illimitée, le produit de leur fortune à des fins philanthropiques ou artistiques. Le trust est aussi utilisé pour contourner la dispersion des grandes fortunes et ainsi maintenir le lien dynastique dans la famille. À l’occasion de la réforme de son code civil, le Québec a introduit le trust dans son droit sous la forme de la fiducie, régie par des règles distinctes de son équivalent anglo-saxon.

La réception de l’héritage illustre un autre volet problématique de la transmission successorale. L’héritier n’est pas tenu de conserver le bien reçu, ni toujours d’en user conformément à sa destination première. On distingue chez certains héritiers la volonté d’en finir avec le bien reçu : il y a les « mangeurs d’héritage », qui le dilapident au plus vite, et les « donneurs d’héritages », qui s’en débarrassent par des dons pour ne compter que sur leurs seules ressources personnelles[13]. À cela s’ajoute la difficulté qu’éprouvent les dirigeants d’entreprises à trouver des successeurs dans leur progéniture et qui doivent envisager de vendre leur bien à un tiers ou même de cesser leurs opérations. Certains legs deviennent même embarrassants. Pensons au scandale qui éclata en Espagne quand la presse révéla à la mi-mars 2020 que le roi du pays, Philippe VI, devrait hériter des fonds aux origines obscures administrés dans une fondation étrangère au bénéfice de son père, le roi émérite Juan Carlos. Le fils régnant a décidé de renoncer solennellement à tout héritage qui pourrait provenir de son père et de lui couper l’allocation annuelle fournie par la maison royale[14]. C’est comme si un fils reniait son père encore vivant et renonçait à hériter quoi que ce soit de lui – à part bien sûr la Couronne, que le père avait déjà transmise à son fils par abdication en 2014.

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Outre les aspects individuel et intrafamilial de la succession, celle-ci comporte une dimension collective. Il est ainsi loisible à l’État de prélever ou non sa part dans la transmission des héritages. Historiquement, les États ont prélevé des impôts sur les successions pour notamment répartir la richesse. Or, en Occident, on constate un retrait ou une diminution généralisés des droits de succession. Alors qu’au Royaume-Uni jusqu’à 18 % des recettes fiscales, et aux États-Unis, jusqu’à 10 % de ces dernières, ont pu provenir de ce type d’impôt durant la première moitié du XXe siècle, les droits de succession représentent aujourd’hui à peine un peu moins de 1 % du PIB. Beaucoup de pays ont supprimé ces droits, à commencer par le Canada dès 1972, où notamment le Québec le fit en 1985. La Belgique et la France les prélèvent encore, bien que le pourcentage de ces droits dans les recettes fiscales atteigne seulement 1,3 % en France. Or, la réglementation et la taxation de l’héritage ont longtemps été considérées comme « un instrument clef de réforme sociale », tel qu’en témoignent les réflexions d’Alexis de Tocqueville et de John Stuart Mill à ce sujet ; on constate toutefois que les sciences sociales ont cessé de s’y intéresser et que la défaveur du public pour les impôts sur les héritages est allée croissant[15]. Selon l’économiste André Masson, le déclin des droits de succession s’expliquerait par l’action efficace d’une coalition de puissants intérêts prônant des philosophies compatibles. Ainsi se sont alliés de riches néo-libéraux et les « familialistes » qui ont réussi dans nombre de pays à décrier l’impôt successoral comme une façon de pénaliser « les fruits de travail et l’accumulation du capital » et de saper « les solidarités familiales »[16]. Dans son étude publiée en 2018, Masson soutient que « seul un choc de grande ampleur[17] » pourra fragiliser cette coalition redoutable ; des arguments théoriques n’y suffiront pas. Peut-être que la pandémie du covid19 sera de nature à secouer les esprits sur cette question fondamentale.

Du refus de transmettre un héritage culturel

Outre les biens matériels, la transmission de la culture est demeurée dans l’Occident gagné par le doute sur la valeur de sa tradition et de ses réalisations une autre question épineuse. Mais doit-on envisager la transmission de la culture comme celle du patrimoine matériel ? Pour le jeune philosophe François-Xavier Bellamy, c’est une erreur de penser que le partage de la culture consiste à séparer des portions d’une entité finie, comme on découpe une tarte ou des avoirs financiers. Il déclare : « Il y a cependant une singularité de la transmission quand elle concerne la culture : elle n’est plus un jeu à somme nulle, mais une multiplication créatrice. C’est ce qui la distingue, me semble-t-il, de la transmission matérielle[18]. » Beaucoup de sociologues, après les analyses célèbres de Pierre Bourdieu sur la transmission et la reproduction culturelles, ont popularisé l’idée que la culture, à l’instar des biens matériels, constitue un capital. Or, selon Bellamy, la culture, contrairement au capital économique, « s’accroît à mesure qu’elle est transmise. Lorsqu’un enseignant, par exemple, transmet un savoir, chacun des élèves peut le recevoir tout entier — et l’enseignant lui-même ne le perd pas ; au contraire, d’ailleurs : j’ai pu vérifier empiriquement moi-même que, comme le veut l’adage, on découvre mieux encore un sujet quand on est conduit à l’enseigner[19]. »

41sZH9U5CzL._SX296_BO1,204,203,200_.jpgLe philosophe croit que Descartes, Rousseau et Bourdieu ont par leurs écrits conforté le refus de transmettre un héritage, notamment dans les institutions éducatives rongées par toutes sortes de scrupules. Avec Descartes, le doute méthodique a délogé l’autorité du maître ou de la tradition. La philosophie éducative exprimée dans l’Émile de Rousseau dépeint la culture transmise par la société comme un étouffoir de la nature et de la spontanéité primordiales de l’individu ; enfin, avec Bourdieu, la culture, suspectée de servir des intérêts, établit des marques de distinction sociale qui profitent aux classes privilégiées et confortent leur domination. C’est d’ailleurs en se fondant sur les travaux de Bourdieu que l’écrivain équatorien Mario Campaña a soutenu dans un essai publié en 2017 que l’humanisme classique né de la culture gréco-romaine et que l’Europe, puis les Amériques ont longtemps enseigné dans leurs meilleures écoles, a promu une vision essentiellement aristocratique de l’homme, contraire aux idéaux démocratiques et qui suppose divers degrés d’humanité plus ou moins achevés[20]. Grâce aux grands idéaux classiques comme le mérite, l’excellence, le culte de la personnalité, la gloire, le culte du grand homme et de l’individualité, les familles patriciennes et bourgeoises se sont alliées en Europe comme dans les Amériques pour exercer une domination morale sur les plus humbles. Les soupçons à l’égard de la haute culture européenne, nés en Europe, ont donc aussi migré vers les Amériques.

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Mario Campana

Selon Bellamy, le désir de transmettre a ainsi disparu, mais « fort heureusement, la soif de recevoir demeure intacte. » Interrompre la transmission culturelle est même devenu un projet conscient, voire pour certains, un acte de libération ou de salubrité mentale. L’interruption dans la transmission peut se faire tout d’un coup, comme l’illustre la décision prise par l’université Yale en janvier 2020 de retirer un cours donné par un historien de l’art réputé prenant sa retraite, Vincent Scully; la raison invoquée : ce cours d’histoire de l’art de la Renaissance à nos jours mettait trop en valeur des hommes blancs, hétérosexuels et européens[21]. Cette volonté de purifier la culture occidentale ne semble pas propre qu’aux États-Unis. Dans une chronique publiée dans le quotidien montréalais Le Devoir, Christian Rioux est revenu sur l’abolition de ce cours à l’université Yale. Il y a vu à l’œuvre la puissance dogmatique de la rectitude politique qui réduit « le savoir, l’art et la littérature à des truismes de race et de sexe, d’identités de “genre” et d’orientations sexuelles », ce qui relève selon lui « d’une véritable entreprise d’autodestruction. » Mal lui en prit ! Quelques jours plus tard, une lettre d’une centaine de signataires issus de l’histoire de l’art et du milieu muséal l’accusa d’« automatisme pavlovien digne d’un animateur de radio-poubelle ». Quel fut le tort du journaliste ? Avoir osé mettre en doute la démarche intellectuelle qui a semblé motiver les professeurs de Yale dans le retrait du cours devenu polémique. Les signataires du texte ont ainsi appelé « élargissement des horizons » et « problématisation des idées reçues » la mise en évidence des éléments coloniaux, sexistes et condescendants pour les humbles dans les canons de l’art[22]. Dans sa réponse aux « pétitionnaires », Rioux demeure convaincu qu’ils cèdent à l’idéologie en voulant juger de l’histoire de l’art « en fonction de la morale du jour ».

Les interruptions dans la transmission culturelle proviennent souvent des révolutions ou des périodes de grandes mutations sociales. Pensons au Québec qui a décidé, à la fin des années 1960, de liquider la culture classique dispensée dans les collèges tenus par les congrégations religieuses en faveur d’un enseignement supérieur confié à des collèges publics où la philosophie et la littérature, dans les collèges francophones du moins, relaieraient les théories critiques, marxistes, féministes, anticolonialistes dont les intellectuels en Occident se sont engoués. Ce changement dans le cursus s’est accompagné d’un renouveau pédagogique radical, puisant aussi bien dans le personnalisme chrétien, comme chez l’éducateur Pierre Angers[23], que dans la théorie constructiviste de l’apprentissage développée chez Jean Piaget ou les théories socioconstructives, qui se concentrent sur les interactions de l’enfant avec les autres. Ce renouveau pédagogique a conduit à minimiser ou à nier l’importance de la transmission des connaissances au profit de l’acquisition de compétences par l’étudiant, considéré comme un « apprenant », un créateur de ses apprentissages sous le pilotage d’enseignants-animateurs aussi peu autoritaires que possible.

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Pierre Angers

Plusieurs pédagogues militants ont ainsi pris en horreur l’idée de transmettre quoi que ce soit, parce qu’elle vouait l’enfant à la passivité, au bourrage de crâne, au gobage de préjugés et de notions indémontrables, et parce qu’elle obligerait le maître lui-même à reconnaître que son jugement personnel doit s’incliner devant ceux que plusieurs générations de savants et de créateurs ont exprimés avant lui dans plusieurs disciplines selon des échelles graduant le vrai, le vraisemblable, l’utile, le juste, le beau et le bien, etc. L’accent mis sur les compétences qui engagent l’activité propre des apprenants en classe avait aussi l’avantage d’inféoder l’éducation aux nécessités de la société technique et capitaliste, incessamment à la recherche de travailleurs capables de s’adapter à ses exigences sans s’embarrasser d’un savoir « humaniste » ou « généraliste » jugé superflu. Cependant, l’éducation axée sur les compétences a fragilisé les transmetteurs eux-mêmes, c’est-à-dire les enseignants, puisque leur prestige en société et leur autorité en classe reposent moins sur la maîtrise des savoirs. S’en trouve aussi compromise la possibilité de dispenser un cursus véritablement commun au sein d’une nation ; en effet, les directives pointues sur les compétences à susciter en classe que les enseignants reçoivent les livrent à eux-mêmes pour le choix des œuvres ou des matières précises à enseigner. Des cohortes entières d’étudiants sont diplômés sans posséder de bagage culturel commun ; elles sont tiraillées entre les apprentissages formels de l’école et la propagande ensorceleuse de la publicité et des réseaux sociaux. Plusieurs professeurs pensent même que les écoles, les collèges (ou lycées en Europe) ainsi que les universités diplôment l’ignorance.

Parmi les inspirations philosophiques qui ont contribué à délégitimer la transmission des connaissances en éducation on peut compter assurément le postmodernisme, qui a fondé plusieurs intellectuels à relativiser l’idée du vrai, comme le rappelle le philosophe de l’éducation Normand Baillargeon :

Le vrai, qui est indépendant de nous, a été décrété par certains de ces maîtres à penser de la postmodernité n’être que la résultante provisoire d’un rapport de force au sein de ce que Foucault appelle un « régime de la vérité ». Ce vrai est donc variable en fonction de la perspective adoptée, du socle épistémique relatif au moment historique. Dans un constructivisme sans limites, le vrai, la science elle-même, tout cela n’est plus conçu que comme jeu de langage particulier, sans privilège épistémique. L’individu lui-même ne serait que le produit de ces rapports de pouvoir s’exerçant sur lui. L’éducation, dont on se demande dès lors comment on pourrait la penser en y faisant place au savoir, à l’autonomie, à la raison, à l’émancipation, se réduit à un exercice de pouvoir destiné à discipliner les corps et les esprits[24]. 

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Normand Baillargeon

Baillargeon aurait pu citer un autre de ces maîtres à penser, fort en vogue dans les « sciences de l’éducation », Gilles Deleuze, qui exerce encore une grande fascination[25]. Dans un livre publié en 1965 sur l’œuvre de Nietzsche, Deleuze résume en une phrase ce qui deviendra le programme de recherche d’une bonne partie des sciences sociales actuelles : « Toute interprétation est détermination du sens d’un phénomène. Le sens consiste précisément dans un rapport de forces, d’après lequel certaines agissent et d’autres réagissent dans un ensemble complexe et hiérarchisé[26]. » Dès lors, même les œuvres littéraires ou philosophiques, au même titre que la loi et la science, tendent des pièges de symboles grâce auxquels les plus forts se séparent des plus faibles et se grandissent dans leur différence par l’abaissement de ces derniers. Le professeur s’érige ainsi en inquisiteur ou en prophète qui démasque les rapports de pouvoir et les hiérarchies aliénatrices que renferment les œuvres ou le discours des détenteurs d’autorité ; il instruit en quelque sorte, contre des morts et des vivants qui n’ont reçu aucune citation à comparaître, des procès par contumace devant des étudiants envoûtés par la parole accusatrice d’un maître qui exécute lui-même ses sentences. Déconstruction et volonté de puissance semblent ainsi boire à la même eau. Plutôt que de chercher à comprendre les créations les plus accomplies du patrimoine humain, l’esprit justicier s’enivre à détricoter, dans un langage souvent jargonnant, les tapisseries finement tissées que l’histoire avait déroulées jusqu’aux abords du présent. Interrompre, découdre, déchirer deviennent plus exaltants que continuer. La récréation de l’esprit se métamorphose en création jubilatoire.

L’intransmission ou l’art de se supprimer soi-même

Dans les fragments posthumes de Nietzsche, on retrouve cette phrase significative : « Je veux enseigner la pensée qui donnera à beaucoup d’hommes le droit de se supprimer, — la grande pensée sélectrice[27]. » Les sociétés contemporaines semblent fascinées en effet par les possibilités techniques qu’offre la science médicale pour sélectionner la suppression de certains types d’êtres humains — par les solutions eugéniques de l’avortement préventif — ou pour permettre à un individu de hâter sa disparition sous la forme de l’euthanasie consentie, rebaptisée gentiment l’aide médicale à mourir. Autre phénomène d’intransmission volontaire, l’annonce faite par certaines personnes, souvent de manière tonitruante et répercutée dans les médias et les réseaux sociaux, de ne pas vouloir d’enfants, au point que le fait de se faire stériliser à moins de trente ans passe pour un acte d’héroïsme et de conscience sociale[28].

Le phénomène des adultes sans enfants n’a en soi rien de nouveau. Les célibataires et les couples sans enfants ont toujours existé, et la proportion des couples sans enfants reste encore moindre que celle qui a été observée au XIXe siècle dans certains pays comme les États-Unis et l’Australie[29]. Mais d’ordinaire les couples se gardaient bien de publiciser leur infécondité comme un exploit retentissant. De plus, les grandes religions comme le christianisme et le bouddhisme ont privilégié souvent le célibat comme voie d’accès à une vie spirituelle plus complète. Dans la tradition catholique, le célibat dégage le prêtre des attaches envers une seule personne pour mieux se consacrer à l’amour de Dieu et pour porter cet amour auprès des hommes ; il renonce à la fécondité biologique au profit d’une fécondité d’un autre niveau, spirituelle[30]. Les prêtres, selon le Code du droit canonique, « sont donc astreints au célibat, don particulier de Dieu par lequel les ministres sacrés peuvent s’unir plus facilement au Christ avec un cœur sans partage et s’adonner plus librement au service de Dieu et des hommes[31]. » L’infécondité maintenant assumée et proclamée par certains individus s’inscrit dans un autre registre : pour plusieurs féministes, le choix de ne pas avoir d’enfants est apparu comme une « ultime libération », après l’avènement de la contraception et de l’accès à l’avortement. Dès 1972 s’organisa en Californie une organisation de défense des parents sans enfants, la National Organization for Non-Parents, dont la fondatrice est restée célèbre pour un ouvrage intitulé The Baby Trap[32] (Le piège de l’enfant.) Ellen Peck y avance toutes sortes d’arguments pour détourner les adultes de la parenté obligatoire. Elle présente d’ailleurs déjà l’Homme comme une espèce qui, sous l’emprise sa culture, n’arrive pas à se fier aux mécanismes de la Nature pour juguler sa surpopulation. Elle écrit (traduction) :

51WzQNp6qFL._SX301_BO1,204,203,200_.jpgEt avec le progrès de la civilisation, qui, des forêts aux villes, s’éloigne de la Nature sur le chemin de l’évolution, la nécessité de la reproduction a certainement diminué. Notre société est urbaine et surpeuplée. Chez les espèces surpeuplées autres qu’humaine, la Nature réagit en déprimant le désir d’accouplement et le taux de reproduction. Mais la Nature ne fonctionne pas ainsi pour nous. Des facteurs simples, mais puissants qui incitent à la reproduction, ne donnent pas à la Nature une telle chance[33].

Outre la cause féministe, les sans-enfants arguent désormais de la volonté de « sauver la planète », en raison aussi de la nature déficiente de l’Homme. Ce sont maintenant les individus qui revendiquent pour eux-mêmes une politique de malthusianisme — de limitation des naissances — pour garder la terre des méfaits d’une espèce humaine devenue néfaste et trop nombreuse. Ce qui jette le doute sur la légitimité même des « sans-enfants » résolus de ne pas continuer l’espèce à travers leur existence. Si l’homo sapiens est si mauvais, en vertu de quoi un individu serait-il fondé à vivre pour lui-même — que ce soit, d’ailleurs, avec ou sans enfants ? Les anciennes aristocraties mettaient d’ordinaire un point d’honneur à se reproduire dans une lignée qui perpétue leur prestige, leur richesse et leurs qualités distinctives. Nous assistons peut-être aujourd’hui à la naissance d’une aristocratie qui agit par soustraction : convaincue de la perfection morale de son propre jugement, elle croit bon d’arrêter l’aventure humaine dans chaque être particulier qui défait la chaîne de la transmission.

1241505.jpgUne autre façon contemporaine d’entraver la transmission biologique consiste à éliminer l’un des transmetteurs, soit l’élément le plus fragile dans l’union d’une femme et d’un homme en vue d’enfanter. Gilles Deleuze et Félix Guattari ont déjà écrit que « l’inconscient est orphelin, et se produit lui-même dans l’identité de la nature et de l’homme » en reprochant à la psychanalyse de prendre « part à l’œuvre de répression bourgeoise la plus générale, celle qui a consisté à maintenir l’humanité européenne sous le joug de papa-maman, et à ne pas en finir avec ce problème-là[34]. » S’il est difficile de faire sauter tout entier le joug de papa-maman, il est devenu maintenant concevable, sur les plans clinique et légal, de se débarrasser du joug de papa, grâce à la procréation médicalement assistée, comme celle que la France s’apprête à autoriser, après d’âpres débats.

En vertu de ce nouveau régime procréatif instauré par une loi sur la bioéthique, il sera possible en France à un couple de lesbiennes et à une femme non mariée d’avoir accès à la procréation médicale assistée (PMA) pour mettre au monde un enfant, auquel l’état civil reconnaîtra soit deux mères, soit une mère seule. Le projet original prévoyait le remboursement des dépenses engagées pour la PMA par l’État, mais en février 2020, le Sénat a restreint par un amendement la portée du remboursement aux cas d’infertilité. Quoi qu’il advienne de cet amendement — l’Assemblée nationale a le dernier mot en France en matière législative —, on encadre donc légalement l’enfantement sans père, sans homme exerçant le rôle de parent, celui-ci étant réduit à un pourvoyeur anonyme de gamètes.

La France n’est pas la seule à choisir cette direction ; plusieurs pays d’Europe du Nord et du Sud autorisent la PMA pour les couples lesbiens et les femmes célibataires ; l’Autriche la permet pour les couples lesbiens seulement. Des pays de l’Europe de l’Est l’ont instituée pour les femmes célibataires seulement. (Au Québec, le législateur a « fait preuve d’audace, ou d’inconscience[35] », en réinventant la filiation, si bien que depuis 2002, les couples lesbiens ou les femmes seules peuvent se prévaloir de la procréation assistée, et que l’adoption est offerte aux couples homosexuels, féminins et masculins.) Les opposants à la PMA en France ont certes déploré l’effacement du père entériné par la PMA, comme la philosophe Chantal Delsol : « beaucoup de Français sont sensibles à la place du père : celui-ci doit-il disparaître de la parentalité ? Cet effacement du père est d’autant plus troublant que la parité entre les sexes est aujourd’hui célébrée[36]. » D’autres, marchant contre la PMA, ont dénoncé la bénédiction légale donnée à l’enfantement d’orphelins de père et la « marchandisation du vivant ».

Malgré ces protestations, la PMA, en France comme ailleurs en Europe, s’introduit dans les mœurs. Devenu une affaire strictement personnelle, qui regarde d’abord sinon exclusivement la femme, le désir d’enfant devient un projet pour soi, et non plus le croisement de deux désirs, l’enfant-pour-moi et l’enfant-de-toi. Cet enfant-là que je mets au monde sans la médiation embêtante, pesante et incontrôlable d’un homme postulant au rôle de père devient mon bébé à moi, mon prolongement, mon œuvre à laquelle peut certes participer une mère adoptive. Toutefois, la reproduction sexuée repose sur une altérité, une médiation, qui fait que l’enfant n’est ni sa mère, ni son père, ni même la simple sommation des deux et qu’il advient souvent — certes pas tout le temps — parce qu’une femme a eu envie d’avoir un enfant de son homme, et vice-versa. Par la « PMA pour toutes », on accentue l’inégalité naturelle entre femmes et hommes dans l’enfantement ; la maternité est consacrée première et indispensable ; la paternité, secondaire et facultative, compressible à la taille de spermatozoïdes congelés. Aux yeux des non-chrétiens et même des chrétiens dubitatifs, que Dieu le Père ait eu recours à la médiation d’une femme de chair pour donner à l’humanité son Fils a fait scandale[37]; aujourd’hui, en des temps moins chrétiens, le scandale s’est déplacé, et c’est le désir devenu sacré d’engendrer de la femme qui bute sur la médiation inopportune d’un homme charnel. Au fond, l’enfantement sans père participerait de ce fantasme qui travaille les individus contemporains, celui de l’Homme autoconstruit qui s’engendre lui-même, et qui, dans le cas de la PMA, se libère à la fois de la sexualité et du père, en faisant peser sur un seul sexe, à l’exclusion de l’autre, la transmission biologique[38].

***

Au bout du compte, les barques joyeuses de Caligula qui voguaient calmement sur le lac de Nemi nous fournissent une image qui restitue l’état d’esprit de l’homme contemporain occupé à briser les chaînes de la transmission. On l’imagine dansant, tournoyant sur un tapis de mosaïques déroulé au fond de la barque, qui elle-même accomplit de petits ronds, à la manière d’un gros nénuphar ondoyant où se complaît une grenouille lascive chauffée au soleil. Pendant que se succèdent les fêtes sous les hourras des convives qui jettent sur le noceur des regards familiers et approbateurs, défile sur les rivages la même succession de paysages, tel un film qu’on rejoue sans cesse au loin. Et puis, après des années de ce jeu fébrile, sans crier gare, la barque coule au fond, sur décision peut-être de son empereur, en engouffrant tout cet équipage sans rien laisser flotter à la surface, où l’éternel retour des saisons imprime ses reflets.

Dans Le gai savoir, Nietzsche évoque un lac aperçu dans le village alpestre de Sils-Maria en Suisse :

C’était ici que j’attendais, que j’attendais, n’attendant rien

Par-delà le bien et le mal, jouissant tantôt de la lumière

Tantôt de l’ombre, abstrait de moi, tout jeu, pur jeu,

Tout lac, tout midi, temps sans but[39].

Ce lac, pourrait-il être aussi celui de Nemi ?

Notes


[1] Siobhan Roberts, « You can help break the chain of transmission », The New York Times, 19 mars 2020.

[2] Pascal, Bruckner, « L’été indien de la vie », Le Débat, vol. 202, no. 5, 2018, p. 165.

[3] Sandrine Gamblin, « Thomas Cook en Égypte et à Louxor : l’invention du tourisme moderne au XXe siècle, Téoros, 2006, 25-6, par. 6. En ligne : https://journals.openedition.org/teoros/1476 ,

[4] Suétone, Vies des douze Césars, Paris, Gallimard, 1975, p. 245.

[5] Bernadette Arnaud, « Un troisième navire de Caligula repose-t-il au fond du lac Nemi? », Science et Avenir, 18 avril 2017, en ligne : https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/archeologie/... .

[6] Denis Fainsilber, « Pollution, la face cachée des paquebots », Les échos, 6 septembre 2018, en ligne : https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-trans...

[7] F. Nietzsche, Traduction par Henri Albert. Œuvres complètes de Nietzsche, Paris, Mercure de France, 1903, vol. 13, tome II, par. 386.

[8] Stephen Pollan et Marl Levine, Die Broke, New York, HarperBusiness, 1997.

[9] Dany Provost, Arrêter de planifier votre retraite, planifiez votre plaisir, Montréal, Éditions transcontinental, 2005.

[10] Éric Desrosiers, « Père gâté, fils fauché », Le Devoir, 13 octobre 2007, en ligne : https://www.ledevoir.com/economie/160427/pere-gate-fils-f... .

[11] Voir cette note publiée par le cabinet d’avocats Picovschi, « Déshériter : le droit français comparé au droit international », 14 février 2018, https://www.avocats-picovschi.com/desheriter-le-droit-fra... .

[12] Christine Morin, « La liberté de tester : évolution et révolution dans les représentations de la doctrine québécoise », R.D.U.S., 38, 2008, p. 339-384.

[13] André Masson. « L’impôt sur l’héritage. Débats philosophico-économiques et leçons de l’histoire », Revue de l’OFCE, vol. 156, no. 2, 2018, p. 123-174, voir par. 8.

[14] Mariángel Alcázar, « El Rey renuncia a la herencia de Juan Carlos I y le retira la asignación », La Vanguardia, 15 mars 2020.

[15] Masson, déjà cité, par. 40.

[16] Masson, déjà cité, par. 115.

[17] Masson, déjà cité, par. 124.

[18] Laurent Ottavi, entretien, François-Xavier Bellamy, « Le désir de transmettre a disparu, mais la soif de recevoir demeure intacte. », Revue des deux Mondes, 25 avril 2018. En ligne : https://www.revuedesdeuxmondes.fr/francois-xavier-bellamy... .

[19] Ibid.

[20] Mario Campaña, Una sociedad de señores, Mexico, Jus, 2017.

[21] Margaret Hedeman et Matt Kristoffersen, « Art history department to scrap survey course », 24 janvier 2020, Yale Daily News, en ligne : https://yaledailynews.com/blog/2020/01/24/art-history-dep... .

[22] Collectif d’auteurs, « L’art du passé nous parle souvent des enjeux du présent », Le Devoir, 5 mars 2020.

[23] Éric Bédard, « Les origines personnalistes du “renouveau pédagogique”, Pierre Angers s.j. et l’activité éducative », dans Marc Chevrier (dir.), Par-delà l’école-machine, Québec, 2010, p. 135-171.

[24] Normand Baillargeon, « Quelques vérités sur la post-vérité », Argument, vol. 20, no 2, été 2018, p. 20.

[25] Voir par exemple Yoann Barthod Malat, « Note : Deleuze et les sciences de l’éducation », Philosophique [en ligne], 19, 2016 ; Itay Snir, « Making sense in education: Deleuze on thinking against common sense, Educational Philosophy and Theory », 50, no. 3, 2018, p. 299-311; Inna Semetsky et Diana Masny, « The Untimely Deleuze : some implications for educational policy », Policy Futures in Education [en ligne], vol. 9, no. 4, 2011.

[26]Gilles Deleuze, Nietzsche, Éditions de Minuit, PUF, 1965, p. 23.

[27] F. Nietzsche, déjà cité, par. 377.

[28] Émilie Rivard-Boudreau, « Son combat pour une ligature des trompes à 28 ans », Journal de Montréal, 8 mars 2020, en ligne : https://www.journaldemontreal.com/2020/03/08/un-chemin-de... .

[29] Anne Gotman. « Le choix de ne pas avoir d’enfant, ultime libération ? », Travail, genre et sociétés, vol. 37, no. 1, 2017, p. 37-52.

[30] Voir la page « Le célibat des prêtres », Église catholique de France, https://eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/vivre-sa-... .

[31] Code de droit canonique, article 277, 1983, en ligne : http://www.vatican.va/archive/FRA0037/_INDEX.HTM .

[32] Ellen Peck, The Baby Trap, New York, Pinnacle Books, 1971.

[33] Ibid., p. 18.

[34] Gilles Deleuze et Félix Guattari, L’Anti-Œdipe, Paris, Éditions de Minuit, 1972/1973, p. 57 et 59.

[35] Marie Pratte, « La filiation réinventée : l’enfant menacé ? », R.G.D, 33, 2003, p. 560 ; voir aussi la Loi instituant l’union civile et établissant de nouvelles règles de filiation, Lois de l’état du Québec. 2002, c. 6.

[36] Vincent Tournier, entrevue avec Chantal Delsol, « Véritable résignation ou résignation ? Ce que révèle l’opinion des Français sur la PMA pour toutes », Atlantico, 24 septembre 2019, en ligne : https://www.atlantico.fr/decryptage/3579682/veritable-acc... .

[37] Voir cet essai oublié de Charles de Koninck, Le scandale de la médiation, Paris, Nouvelles éditions latines, 1962.

[38] Voir notamment Olivier Rey, Une folle solitude, Paris, Seuil, p. 193-202.

[39] Nietzsche, Le gai savoir, Paris, Éditions Gallimard, 1950, p. 376-377.

 

source : http://encyclopedie.homovivens.org/

La grande fête du confinement

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La grande fête du confinement

par Patrice-Hans Perrier
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

Dans leur incapacité presque absolue d’analyser, c’est-à-dire de critiquer, d’ironiser et de juger les événements qu’ils devraient en principe traiter, les journalistes confiturés, les scribes médiatiques et les malléables penseurs du temps comme il va n’ont plus que le mot « fête », en toute circonstance, quel que soit le sujet qu’ils traitent, et ils ne s’aperçoivent même pas de ce ressassement. Philippe Muray, dans Après l’histoire, 1998

Pour Lucien Cerise

De nos jours, en 2020, on pourrait remplacer le terme fête employé par Muray par celui de catastrophe. En effet, la pandémie de coronavirus représente une catastrophe qui tombe à pic pour alimenter le moulin à boniments de nos scribes stipendiés depuis que la fête s’est terminée aux alentours d’un 11 septembre 2001 qui venait clôturer de manière définitive la grande kermesse sociétale inaugurée sous le règne de Mai 68. Ainsi, de fil en aiguille, les campagnes d’ingénieries sociales auront fini par porter leurs fruits : la grande kermesse libérale-libertaire ayant servi à inoculer le virus du consentement. L’esprit critique anesthésié, la voie était pavée pour l’avènement d’une série de catastrophes providentielles.

La crise comme test in situ

Naomi Klein dans son célèbre essai The Shock Doctrine, publié en 2007, analyse le modus operandi de la crise comme moteur de changement entre les mains des « alchimistes » de l’ingénierie social. Commentant les conséquences des inondations causés par l’ouragan Katrina qui a frappé la Louisiane, en 2005, cette dernière cite un passage d’un éditorial écrit par Milton Friedman pour le Wall Street Journal. Faisant semblant de se désoler face au cataclysme, « Oncle Miltie » en profite pour y aller de ses prédictions : « La plupart des écoles de la Nouvelle-Orléans sont en ruines, tout comme les maisons des enfants qui les ont fréquentées. Les enfants sont maintenant dispersés dans tout le pays. C’est une tragédie. C’est aussi l’occasion de réformer radicalement le système éducatif ».

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Ainsi donc, de l’avis de l’économiste proche de la Société du Mont Pèlerin – toujours active dans les coulisses du Sommet de Davos – l’éparpillement des enfants des communautés touchées allait procurer au système éducatif privé une chance en or. Privés de leur communauté d’attache, ces rejetons des classes les moins fortunés devenaient des cobayes entre les mains des « éducateurs » d’un état surtout pas providentiel. En outre, l’état allait se désengager de l’effort de reconstruction des infrastructures éducatives louisianaises pour, a contrario, offrir des subventions aux familles impactées afin qu’elles puissent envoyer leur rejeton dans des institutions d’enseignement privées. Chemin faisant, si l’on suit le doigt Naomi Klein, le système privé tirait les marrons du feu en mettant en pratique le concept de la « socialisation des pertes et privatisation des profits ».

De la même manière, en 2020, certains intérêts pharmaceutiques auraient intérêt à profiter des mirifiques émoluments gouvernementaux dans un contexte où l’introduction d’un vaccin obligatoire pourrait générer un pactole historique pour ce complexe financier et industriel qui est proche de l’état profond. D’où l’intérêt de différer les recherches portant sur des antidotes plus faciles à produire et moins onéreux pour les dépenses publiques.

Toutefois, l’approche analytique de Klein nous laisse sur notre faim. S’il est évident que l’état profond, lié au cartel des grandes banques d’affaires, ambitionne depuis longtemps de privatiser une part croissante des activités de l’état, il n’entend pas pour autant démanteler cet « état providence » qui lui a rendu de si inestimables services depuis Roosevelt. Si les crises militaires ou humanitaires permettent aux grandes banques d’affaires – et aux trusts contrôlant la machine de production – d’être en mesure de générer toujours plus de dettes, il y a plus. L’état de crise – généré par des catastrophes, révolutions ou guerres – permet, aussi, aux alchimistes à la manœuvre de fragmenter le monde pour le réorganiser en fonction d’une doctrine qui est bien connue des initiés.

Ainsi, même si pour les théoriciens du néolibéralisme, dont Friedman est le prophète, l’école ne doit pas être gérée par les bureaucrates du secteur public, l’emprise de l’état ne doit surtout PAS se relâcher. Puisque, ne l’oublions pas, c’est l’état qui à travers sa dette qui représente toujours la plus formidable machine à ponctionner et contrôler le contribuable. Et, en temps de crise, surtout, l’état représente l’inévitable courroie de transmission qu’il convient de bien huiler afin d’éviter les débordements et pour être en mesure de faire tourner une économie qui repose essentiellement sur l’endettement collectif. Bien évidemment, nous ne sommes pas en train de prôner un désengagement de l’état, dans un contexte où nos contempteurs seraient trop heureux de nous qualifier de néolibéraux, d’anarchistes ou de suppôts d’un survivalisme de pacotille. Nous tentons, tout simplement, de profiter de l’état de choc actuel pour dessiller les yeux de nos contemporains.

Changer nos habitudes de vie

La grande bacchanale qui s’est déroulée dans le sillage du « coup d’état » de Mai 68 a été produite par les ingénieurs sociaux de certains instituts liés à l’état profond, tels que le Tavistock Institute of Human Relations en Angleterre. S’adressant à la jeunesse issue du baby-boom des années d’après-guerre, cette ambitieuse campagne d’ingénierie sociale ambitionnait de créer une commotion sur la base d’un Nouvel Âge présenté comme une nouvelle ère historique et cosmique. L’ère chrétienne du Poisson se terminant, l’ère du Verseau allait tous nous ramener aux fondamentaux néo-païens présentés comme une panacée face à une civilisation patriarcale occidentale en perte de vitesse.

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Les bouleversements historiques – peu importe l’effort de distorsion induit par des groupuscules proches du pouvoir – sont inévitables et font partie de la grande marche de l’humanité sur le chemin de sa transformation. Nul besoin d’être un kabbaliste pour reconnaître que les crises existentielles du genre humain agissent comme des agents de transformation qui ouvriront de nouveaux vecteurs, tout en obstruant certaines avenues. Il faut être apte à dépasser la stupéfaction provoquée lors d’un état de crise pour être en mesure de saisir les nouvelles avenues qui s’offrent à nous. Mais, certainement pas dans le sens où l’entendent les opportunistes de la même trempe que Friedman. Puisqu’il faut bien l’admettre, peu importe les ressorts naturels ou artificiels d’une crise, nous sommes placés devant l’obligation de devoir nous adapter aux événements en lice. Mais, pas forcément dans le sens où le souhaiteraient les « autorités compétentes » ou certains agents d’influences.

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Les prescripteurs de la révolution psychédélique prônaient l’évasion comme mode de transformation de la jeunesse. Expérimentant des drogues de synthèse – tels que le LSD fabriqué dans les laboratoires d’un géant pharmaceutique suisse – et s’abreuvant à des sources d’informations dites « alternatives », mais produites par les succursales nord-américaines des géants de l’édition, une partie de la génération des boomers fut prise en charge par les Spin Doctors de l’industrie du divertissement. L’infotainment était né et, avec lui, toutes une ribambelle de vecteurs de propagande instillés au sein d’une jeunesse coupée de sa famille et désertant l’école publique.

Nous avons, de notre vécu, été les spectateurs de ses violentes embardées qui auront contribué à disloquer les familles alors, qu’au même moment, le féminisme et les luttes minoritaires se mettaient de la partie pour que se répande une sorte de STASE, véritable état d’hypnose collective emportant tout sur son passage. La crise de 1981 agira comme un brutal coup de poing qui ralentira l’agitation de cette nef des fous, tout en prolongeant avec d’autres moyens moins ludiques l’effet de morcellement du ciment collectif et ses corollaires inévitables. N’importe quel observateur attentif aura compris la portée de cette approche anthropique : ouverture – fermeture – répétition du cycle de manière à toujours plus fragmenter la cohésion civilisationnelle. Bien évidemment, tous les intellectuels stipendiés par le grand capital vous diront qu’il n’y a plus de civilisation viable à l’heure où la dislocation de nos sociétés représenterait un phénomène inévitable dans la course de l’humanité vers … sa libération finale. Et, puisque nos civilisations sont périmées – et pourquoi pas – rien de mieux qu’une bonne dose de chaos, sorte de thérapie homéopathique collective qui utilise de faux antidotes pour nous faire miroiter une sortie élégante.

La fête est terminée

Tiens, ça fait près de deux décennies que les diverses souches de coronavirus sont étudiées par nos laboratoires pharmaceutiques ou gouvernementaux. Mais, il y a aussi les officines expérimentales affiliées aux services secrets des grandes puissances qui planchent sur l’affaire. Curieusement, après avoir faussement accusé le gouvernement syrien de mener une guerre bactériologique contre son propre peuple, c’est au tour de l’État profond occidental d’être tenté par le génie de la lampe. Quel intérêt y aurait-il à répandre un tel virus aux quatre coins du monde ?

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Le gouvernement Macron fait face à une incroyable pression de la rue, mais tout autant à une levée de boucliers en provenance des ­corps constitués de la nation et des résidus de la classe moyenne mourante. Plusieurs observateurs prévoyaient un 1er mai d’un genre nouveau, les syndicats gauchistes stipendiés et leurs milices antifas ne parvenant plus à monopoliser l’espace public dans un contexte où la majorité des contribuables pourrait être tentée d’y faire un tour. Cette pandémie tombe à pic en permettant à la Macronie de décréter un état d’urgence qui lui permet de suspendre les droits constitutionnels les plus élémentaires de ses sujets. Déclarant l’état de guerre au coronavirus, le président Macron annonce que la récréation a assez duré et on réalise qu’il a dorénavant toutes les cartes en main : suite au confinement des citoyens, c’est tout le processus des élections municipales qui a été chamboulé. Avec un taux de participation de moins de 20 % au premier tour, il est évident que les bobos supplétifs se sont déplacés en masse, habitant à proximité des bureaux de scrutin ou ayant les moyens de se mouvoir à leur guise. La géographie politique et l’analyse psychosociologique ont toujours démontré qu’un faible taux de participation avantageait inévitablement la classe politique aux manettes.

Les États-Unis ne sont pas en reste, alors que le président Trump et ses soutiens avaient le vent en poupe. Plusieurs observateurs sérieux de la scène politique américaine estiment que, si la pandémie risque d’avoir été jugulée d’ici novembre prochain, les contrecoups portés à l’économie pourraient faire en sorte qu’un nombre croissant de citoyens issus des classes populaires s’abstienne de voter. Connaissant la composition de l’électorat de l’actuel président, on peut facilement en déduire, à l’instar de la France, une défection du vote populaire qui pourrait mener à un changement de régime. Les classes populaires assignées à résidence, perdant leurs emplois par millions et n’ayant pas les moyens de se constituer d’importants stocks de denrées risquent fort de perdre le moral en fin de compte. Ainsi, l’état de crise actuel pourrait bien servir les intérêts globalistes, tout cela alors que certains analystes réputés patriotes se frottent les mains face à l’inévitable réhabilitation des frontières et de certaines fonctions régaliennes. Quoi qu’il en soit, il est difficile d’évaluer les chances de l’actuel POTUS de juguler un État profond qui n’hésitera pas à prendre tous les moyens pour arriver à ses fins.

Les infortunes de la vertu du confinement

Chez nous, au Canada et, plus particulièrement au Québec, plus d’un million de demandes ont été produites auprès du ministère qui administre l’assurance-emploi. Les Québécois se plient de bon cœur aux nouvelles mesures de confinement et les artères commerciales de Montréal sont désertes. Les regroupements ayant été interdits dans les lieux publics, les forces de police patrouillant aux quatre coins de la métropole afin de s’assurer que vous n’êtes pas en train d’entreprendre une marche de santé à plusieurs. De longues files d’attente s’étirent devant la devanture des échoppes alimentaires et le ravitaillement en denrées commence à souffrir de sérieuses lacunes. Le commun des mortels ne sait plus où donner de la tête afin de se procurer de l’eau de javel, de l’alcool pour nettoyer les surfaces à la maison ou des items de première nécessité. Les simples quidams expérimentent, pour la première fois de leur vie, une vraie situation de quasi-pénurie et la perspective effarante d’un effondrement économique à court ou moyen termes.

Le gouvernement canadien ayant annoncé qu’il serait prêt à investir des dizaines de milliards dans l’économie impactée, on comprendra que tous les efforts consentis afin d’atténuer l’impact de l’intérêt sur la dette auront été consentis en vain. Comme des veaux, nous sommes dépendants des pouvoirs publics afin d’investir massivement auprès des sans-emploi, mais aussi des entreprises et, bientôt, des institutions financières qui ont investi à perte les économies provenant des fonds de pension de la classe laborieuse. Comme si de rien n’était, avec notre consentement tacite, le garrot de l’endettement et la dépendance aux grandes banques d’affaires pourrait se resserrer de manière drastique.

Et, là, les oligarques qui dominent la partie risquent fort de jeter l’échiquier par-dessus bord en réclamant une réinitialisation de l’ordre économique et financier. Prétextant une situation de crise impossible à juguler, les instances qui dirigent les grandes manœuvres du Forum économique de Davos, qui tirent les ficelles de la Banque des règlements internationaux, toujours en Suisse, et qui dictent à l’ONU ses agendas en matière de politique de gestion des états tombés en désuétude prendront les devants pour décréter un état d’urgence mondial. L’OTAN prendra directement en charge les destinées d’une Union européenne chancelante et la sécurité intérieure du Canada pourrait être inféodée aux décisions américaines en vertu d’accords [ NORTHCOM ] qui dépassent les prérogatives habituelles du NORAD. In fine, l’Agenda ID2020, cette alliance de partenaires privés et publics, pourrait se voir accorder le feu vert pour ce qui est de la mise en place d’un programme d’identification numérique de la population, sous couvert de vaccination de masse.

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Au lieu de consulter leur horoscope et de lire les propos alarmistes des grands journaux, nos concitoyens devraient profiter de cette situation de confinement pour faire le point. Bien avant la crise du coronavirus, nous étions, déjà, confinés derrière nos écrans d’ordinateur ou devant nos téléphones dits intelligents. Marchant comme des somnambules dans la rue, nous étions incapables de voir les autres, ces infortunés concitoyen-somnambules qui nous fonçaient dessus. Aveugles, atones, prostrés dans le conformisme de notre misérable ego surdimensionné, nous avions l’habitude de tisser des relations intéressées avec d’autres esclaves de cette fuite en avant. Incapables de voir plus loin que le bout de notre nez, nous avons négligé nos proches, nos enfants et nous-mêmes au point que le tissu social finisse par se désintégrer. Sourds face aux injonctions des Gilets jaunes, ayant déjà oublié Julian Assange dans le fond de sa cellule d’isolement, nous avons suivi à la trace les petits cailloux mis sur notre chemin par toutes les Greta Thunberg de ce monde.

Tiens, Julien Assange vient tout juste d’avoir la permission de s’entretenir une dizaine de minutes avec un dénommé Yanis Varoufakis qui a transmis le libellé de cette conversation au site Réseau international. Ne s’avouant pas vaincu, celui qui a révélé la face la plus obscure de l’état profond américain, nous a rappelé que des organismes tels que Wikileaks et DiEM25 ont déjà eu le temps d’expérimenter des outils numériques qui permettent de mener des débats et d’organiser des campagnes en ligne qui ont le mérite de permettre à la société civile de se mobiliser avec efficacité. S’il se montre optimiste, Assange craint que le complexe de sécurité nationale des grandes puissances anglo-saxonnes soit « sur les dents » par les temps qui courent. On comprendra, dans de telles conditions, que nos garde-chiourmes ne prendront pas grand temps pour resserrer notre collier. Ce confinement bien involontaire pourrait se prolonger ad vitam aeternam. Dans de telles conditions, il n’y a pas que les biens de première nécessité qui disparaîtront des tablettes : la monnaie en espèce sonnante et trébuchante pourrait être retirée de la circulation et les communications électroniques des citoyens récalcitrants coupées sur commande. Combien d’entre-nous oseront briser l’isolement, une fois la quarantaine mise sur la pause, afin de tisser des communautés de résistance véritablement opérationnelles. Oubliez les survivalistes. Maintenant, tout le monde doit mettre l’épaule à la roue.

Patrice-Hans Perrier

Référence : The Shock Doctrine, The rise of disaster capitalism, Naomi Klein
 

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Alexis Arette: Du sacré et de la nature

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Du sacré et de la Nature

par Alexis Arette

Ex: Http://www.terreetpeuple.com

Citoyennes et citoyens,

        Avant d’entrer dans le sujet que l’on m’a demandé de traiter, peut-être faut-il que je me présente à votre attention suivant ce que je crois être.

       Je suis Béarnais, je me sens Français, je suis catholique et Nationaliste.

       C’est en tant que nationaliste tout a fait impénitent, malgré ce qu’en disent les immondes, que je prends la parole devant vous, car c’est en cette qualité que nous pouvons nous accorder, croyants divers ou incroyants, soucieux que nous sommes de défendre au mieux, les libertés des peuples qui habitent notre hexagone

       Je considère qu’il y a des échelons d’ordre dans la société. Premier échelon, la Famille qui assemble l’humanité de la Femme et de l’Homme. Deuxième échelon la patrie, la terre des Pères, qui réunit les familles qui partagent le même genre de vie et la  même culture.

       Troisième échelon, la Nation qui rassemble nos petites patries, suivant la terre et la loi qui veut que les moins différents s’unissent face aux plus différents.

      Historiquement, c’est ce qui a réuni Eudes d’Aquitaine et Charles Martel, qui jusqu’alors étaient adversaires, pour écraser les envahisseurs musulmans à Poitiers. C‘est peut-être là que la France a commencé !

      Il semble y avoir un autre échelon, mais infiniment moins naturel : Ce sont les empires, qui ne durent guère que le temps de leur promoteur : tel est le cas d’Alexandre, de Cyrus, de Charlemagne, et de Napoléon. Je ne le retiens pas comme une nécessité.

      J’ai servi ma famille en essayant de transmettre à mes fils, ce que j’avais reçu de mes parents. J’ai servi ma patrie en m’investissant sans cesse dans la défense de l’histoire locale, de la langue et des autres intérêts, comme président de la culture au Conseil Régional d’Aquitaine. J’ai servi la Nation comme combattant volontaire, ce qui m’a valu une balle communiste, que St Michel a dévié à quelques centimètres du cœur, Comme président National d’un Syndicat Agricole,  et comme prisonnier d’Algérie Française, dans les cachots de l’Anti France.

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     J’ai tenu 77 tribunes politiques de Lille à Bastia,  et publié une vingtaine d’ouvrages très engagés, de références culturelles ou politiques. Un dernier est actuellement à  l’édition chez Philippe Randa : C’est : «  la Bible en examen », ou je démontre les dangers de ce texte qui, lorsqu’il fut publié en langue populaire, fit s’écrier a Louis XI, qui pensait aux Chrétiens : « Ils vont perdre la foi !

       Que je vous dise en passant que nous n’en sommes plus là, depuis qu’en 1909 le Rabbin Léonard Lévy osait dire :

       « Autrefois, on croyait que chaque mot de la Bible, était la vérité absolue. Il n’en est plus ainsi. Le travail des chercheurs a établi que la Bible est un produit de l ‘intelligence humaine contenant certaines erreurs et certaines vues inexactes dues à la faillibilité de ses auteurs qui étaient des hommes ! »

       Et il a fallu attendre les années 60 et le concile pour que l’Eglise catholique reconnaisse timidement, qu’effectivement, le livre avait propagé quelques erreurs !

      Mais comme le Livre avait été tenu pendant 2000 ans pour sacré, nous en arrivons à notre propos du jour, puisque l’on m’a demandé de  traiter  du sacré et de la Nature ! Allons-y !

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A première vue, les termes paraissent antinomiques, comme si l’on traitait du matériel et du spirituel. Ce que ne touche pas  le sacré c’est le « profane » : Et le Christ en fait la distinction, quand il dit : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu! » L’impiété commence à ce que professe Clémenceau : « Il faut rendre à César ce qui est à César, et tout est à César ! ». Mais le poignard de Brutus, va prouver que tout n’était pas à César !

        Moi aujourd’hui, je vais tenter de vous prouver que la  connaissance de la Nature, doit conduire au sacré,  car la nature est un sacré qui s’ignore !  Mais que la « dénaturation »  de la nature, et la profanation du sacré, sont, au sens véritable du terme, « mortifères » pour la société ! Paul Valéry  à pu se plaindre ainsi : «Nous autres, Civilisations, nous  savons maintenant  que nous sommes Mortelles » ! Mais cela signifie que s’il y a des choses qui font mourir les sociétés, comme elles se continuent malgré tout, c’est qu’il y a des choses qui les font vivre !

        Et ce  qu’il nous importe de savoir, nous, combattants nationalistes, c’est évidemment ce qui fait vivre afin d’en informer la société. Mais puisque j’ai dit tout a l’heure qu’avec le même idéal civique, nous pouvions être croyants où incroyants, je voudrais préciser davantage.

       Les Croyants, comportent, les monothéistes qui adorent un seul Dieu, et les païens qui en adorent plusieurs. Mais actuellement, il y a un monothéisme ennemi de tous les autres : C’est l’Islam, avec ce qui est dit dans la sourate 5 : « La récompense de ceux qui font la guerre contre Allah, et son messager, c’est qu’ils soient tués ou crucifiés, ou qu’on leur coupe leur main et leur jambe opposée ! » Je n’en dis pas plus, car je sais que de cela vous êtes suffisamment instruits

       Chez les athées, il y a ceux qui ne se posent aucun problème  que celui d’exister aussi confortablement qu’il se peut. Mais Il y a aussi ceux qu’on appelait autrefois les « stoïciens », qui se font une morale de comportement pour éviter l’anarchie sociale : De Maurras à Onfray, ce sont les plus intéressants pour notre cause.

      Il y a aussi les hommes qui se veulent athées, peut-être parce que certains scandales religieux les ont détachés de la religion. Parfois on les voit tentés de meubler le néant : Ce sera le cas de Nietzsche, qui inventera une évolution de l’homme vers le surhomme. Nietzsche mourra fou, mais il aura une influence certaine sur Hitler.

      Et puis il y a ceux qui voudraient croire et qui ne peuvent pas ! Ce sera le cas du grand Biologiste Jean Rostand, qui dira à Gustave Thibon : « Vous avez de la chance vous Chrétiens ! Vous dites « Je crois en Dieu »,  et vous n’y pensez plus ! Et moi je n’y crois pas et j’y pense toujours ».

      Mais avant de croire ou de ne pas croire,  ce que l’homme perçoit en premier, c’est la nature des choses et sa propre nature ! Rien n’est plus émouvant qu’un bébé qui découvre ses mains et qu’il peut bouger les doigts. La nature s’identifie à ce que nous percevons par nos sens. Une confidence, quand après 6 mois de détention politique je suis sorti de la Prison de la santé, j’ai eu un véritable choc en revoyant la verdure, j’en avais oublié l’intensité. La nature en prison, ç’avait été des murs et des grilles ! C’est dire combien la nature est relative à ce que nous en percevons, et que nous croyons être la réalité

          La nature, c’est un « donné ». C’est ce que nos sens nous permettent de  saisir et d’apprécier. Mais le pouvoir de nos sens  est limité. Un aigle voit bien mieux  que nous. Un papillon perçoit l’odeur  d’une compagne à des km ! Un chien perçoit des infrasons que nous n’entendons pas. C’est à dire que nous ne percevons qu’une petite partie de la réalité, et nous ne pouvons élargir notre perception que par la science et les outils. Ainsi, notre ciel aujourd’hui n’est plus  cette sorte de couvercle  que nos anciens appelait la Voute céleste, avec des trous qui laissaient passer la lumière de l’au-delà mais nous sommes tellement conditionnés par le passé que nous continuons d’appeler « voute céleste » ce que nous savons être un abîme d’espace inouï. De même, nous savons bien depuis  Copernic et Galilée, que le soleil ne tourne pas autour de la terre, mais nous continuons à parler du lever et du coucher du soleil ! Voyez comme les apparences nous suivent…

         Nous percevons donc, des apparences de la Réalité, et nous appelons cela la Nature.

 Einstein qui a révolutionné le monde avec la découverte de la relativité, écrit :

         «  Nous devons nous souvenir que nous n’observons pas la nature, telle qu’elle est réellement, mais bien que cette nature se révèle à nous, conditionnée par nos moyens de perception. Ce que nous croyons la réalité est une illusion, même si c’est une illusion persistante ! »

          Bref, nos sens nous mentent !

         Et cela s’applique à nous-même, puisqu’on dit d’un homme qu’il est une « bonne » ou une mauvaise Nature, mais avec le temps, nous élargissons notre vision de la nature. Nous découvrons ! Par exemple de temps à autre nos savants voient de nouvelles étoiles s’allumer dans le Cosmos. En réalité, elles ne s’allument pas mais leur lumière qui était en route à 300 000KM  par seconde, ne nous parvient que maintenant après des milliards d’années de voyage. Elles étaient réelles avant que nous en ayons la preuve ! Nous sommes devant l’incommensurable, et nous ne savons même pas si l’univers est fini ou infini ! S’il est fini, il est contenu dans  quoi ? Dans un autre espace ? Mais cet autre espace, dans quoi serait-il contenu ? Dans  le Rien, dans le vide ? Mais le rien et le vide, c’est ce qui n’existe pas. Et l’univers ne peut s’étendre dans ce qui n’existe pas. De lui, nous ne pouvons dire qu’une chose : Il est ! Et quand les savants nous disent que l’Univers a commencé Il y a 14 milliards d’années lumières, non, ce n’est pas l’univers qui a commencé, c’est notre temps qui a commencé. Mais qu’est-ce ce qui l’a fait commencer ? Qu’y avait-il avant le temps puisqu’il ne peut  y avoir d’effet sans cause ?

       Et le temps obéit aussi à la loi de la relativité. La plus proche des étoiles, c’est « Proxima » du Centaure qui se trouve à  un peu plus de 4 années lumières de nous. C'est-à-dire que si nous allions à la vitesse de la lumière, Nous ne mettrions que 9 ans pour un aller et retour.

      Mais ces 9  ans dans le Cosmos correspondraient  à des centaines d’années sur la terre, de sorte que les cosmonautes ne retrouveraient plus rien de ce qui existait à leur départ, et peut-être même que la terre n’existerait plus !

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En sus, il est possible qu’aujourd’hui, nous voyons Proxima, alors qu’elle n’existe plus depuis 4 ans, car, si elle s’est éteinte depuis la lumière pour se retirer mettra autant de temps  qu’elle mettait  nous parvenir !

         Il nous faut donc admettre qu’il y a un état de la nature qui nous est totalement inconnu, et c’est quelque peu ironique que de citer la proposition de Socrate : « Connais-toi toi-même,  et tu  connaîtras l’univers et les Dieux ! » Qui d’entre-nous, n’est pas un inconnu pour lui-même ? Maurras, dans sa « Prière de la fin »  écrira : « Et je ne comprends rien à l’être de mon être, tant de Dieux ennemis se le sont disputé ! »  Et c’est  pourtant cet inconnu qui constitue une autre partie de la réalité,  et cette réalité inconnue exerce sa puissance sur notre environnement et sur nos personnes. Nous sommes entouré de puissances et constitués  de pouvoirs qui nous font exister, et c’est de ces puissances qui règnent sur nos conditions de vie, que va naître le sentiment de ce qui nous dépasse, une Surnature en quelque sorte, qui va constituer le sacré dont nous n’avons que le sentiment !

Le sacré se tient dans les forces qui nous font vivre et que nous ne connaissons pas !

        Et l’humanité va le personnaliser ce sacré  en baptisant ces puissances : les Dieux ! J’ai bien dit les Dieux et non pas Dieu : Pourquoi ?   

             Ce qu’il faut savoir d’abord,  c’est que, dans l’antiquité, on appelle Dieux tous les hommes puissants et quelque peu hors du commun. C’est ainsi que même dans la Bible Hébraïque, qui professe un seul Dieu créateur,  vous trouvez au livre de l’Exode, que le Dieu d’Israël  donne à Moïse l’ordre d’aller discuter avec  le roi d’Egypte. Et comme Moïse ne se sent pas capable de discuter,  avec un personnage aussi considérable, Dieu le rassure en lui disant : «  Je vais te faire un Dieu aux yeux de Pharaon ! »

     Voici à travers la Bible comment évolue la notion de Dieu. C’est d’abord le dieu que croit entendre Abraham, et Abraham en fait  le Dieu de sa famille, il  va devenir ensuite le dieu de son clan puis d’un peuple, celui d’Israël, mais il n’est encore qu’un Dieu parmi les autres. Mais un jour il se dira « le Dieu des dieux », le plus puissant parmi les autres, avant de devenir le Dieu Unique, le dieu Créateur  dont tous les autres dieux ne sont que des créatures. Ainsi,  dans la théologie Héliopolitaine, bien plus ancienne que la Bible  on trouve cet article de foi :

         71GYmRkkhdL._AC_SY879_.jpg« Il est le Grand Dieu qui a parlé ses membres ! Rà a fait de tous ses noms le cycle des Dieux. C’est Rà qui a créé ses membres  devenus des dieux par la suite » ! J’abrège, mais  non seulement les textes Egyptiens sont unanimes, mais les hindous diront la même chose de Brahma !

         Cette évolution est connue des religions polythéistes, c'est-à-dire celles qui adorent plusieurs dieux. Elles finissent par concevoir dans le peuple des dieux un Dieu supérieur à tous les autres, (c’est ce qu’on appelle, « L’Enothisme ») ce Dieu  sera DZeus, pour les Grecs et ce nom de Dieu vient d’un terme Indo-Européen : Dew, qui signifie a peu près : « Le ciel lumineux ! » Ce  sera Odin  pour les Germano-Scandinaves, et  Jupiter chez les Romains.   Jupiter,  signifie Le Dieu-Père ! Il correspond au nom du Dieu Sythique : « Papaïos » ! C'est-à-dire que 1000 ans peut—être avant que  le Christ annonce le Dieu comme Père, les païens en avaient déjà la notion d’une paternité sacrée!

         Je dois vous révéler ce que j’ai découvert  en étudiant les langues anciennes. C’est que les mots importants ont un endroit et un envers qui en prolongent le sens.  Prenons le nom  du Dieu créateur Toum ;  Et si vous inversez, TOUM,  vous obtenez MOUT, qui est le nom Egyptien  de la grande Déesse ! Ainsi le premier nom de la divinité, montre qu’elle est « Patermaternelle » Géniteur-Génitice. Et nous retrouvons ce qui est annoncé dans la genèse Hébraïque « Dieu créa l’homme à son image » ; Il le créa masculin-Féminin, et si l’on suit le texte de la Bible, en  Hébreu, ce sera Aish et Aisha, comme sont une quasi même chose, le Feu et la Flamme.  Ce dieu séparera ensuite les deux sexes, et cela cache un profond mystère : il y a eu quelque part un accident ! Et notre humanité actuelle n’est pas celle de la création, puisque les sexes sont séparés. Et Platon  attribuera à la méchanceté des hommes, que les sexes aient été séparés. Mais cette séparation ne peut être exécutée par un Dieu parfait  ,car la séparation semble s’être mal faite parfois, puisque certains hommes ont des tendances de femmes, et des femmes des tendances mâles ! Mais cela pose un problème pour une meilleure définition du sacré ! Si l’homme actuel est le résultat d’une faute,  il ne peut être totalement sacré ; le sacré ne peut se trouver que dans le « sans-faute », c'est-à-dire dans le créateur, le pouvoir inaccessible à la faute,  Avant la faute, la Nature de l’homme  correspondait donc au sacré.  Alors il faut admettre que la « faute » ou « l’accident » nous à dénaturés ! Nous ne  sommes pas  l’espèce que nous étions à l’origine ! Et pour tenter d’expliquer cette chute, les religions vont imaginer, un être méchant, un tentateur qui nous aurait voulu du mal.  . L’écrivain Vercors dans les années 60 a quelque peu abordé ce mystère dans : « Les animaux dénaturés ». Il posait des questions  auxquelles  on n’a pas trouvé de réponse…

      Les hommes de l’antiquité  ont estimé que le sacré était assimilé à la puissance et à la connaissance qui donnent l’autorité, et ils ont donc  considéré la puissance comme divine et le savoir comme divin. Car il semble qu’au début, les divinités que l’on imagine, n’ont rien de Moral. Ils font ce qui leur plait. Ainsi le Dieu Hébreu de la Genèse,  est jaloux, orgueilleux, inconstant, imprévoyant et il ne se distingue en rien des autres dieux du paganisme. Mais il est puissant ! On dit qu’il décide du mal comme du bien. Il n’est pas question de justice. Il veut être obéi aveuglement. C’est  le prophète Ezéchiel qui rapporte les paroles de ce Dieu qui ordonne de lui sacrifier les enfants premiers nés pour montrer sa puissance. Il n’a aucune ressemblance avec le Dieu-Père que fera connaitre  le Christ, et que bien des philosophes païens  découvriront par intelligence ! D’une certaine façon, le sacré inspiré par ces dieux est terrifiant ! Et par eux les hommes sont destinés aux enfers sans savoir pourquoi !

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  Il me parait important de vous faire remarquer ce qui montre la relativité des grands dieux du Paganisme. C’est que tous se présentent comme des fils qui ont volé leur trône à leur père ! Exemple : Le Dieu Zeus, s’est rebellé contre son père Cronos,  et l’a jeté dans le Tartare !  Mais Cronos déjà s’était révolté contre son Père Ouranos,  et lui avait coupé les génissoires !  Mais Ouranos avait succédé à son père Chaos dont on ne sait rien d’autre ! Les grecs ne faisaient pas remonter plus loin la généalogie de leurs Dieux…Il en est de même chez les Babyloniens : Leur grand dieu est Mardouk , mais si on en fait un Dieu créateur, il a cependant un Père, que l’on connait sous le nom d’Ea ou d’Enlil, mais lui-même est fils du grand Dieu An , mais An aurait aussi détrôné son Père Alallu dont on ne sait plus rien. C'est-à-dire que l’on ne sait rien  du Dieu Primordial, le véritable, le Dieu créateur ! Le Tout !

       Par contre les Egyptiens conçoivent le grand dieu « qui se crée lui-même », et dont la parole donnera les dieux subalternes, et il est très probable que la Genèse hébraïque leur empruntera ce Dieu créateur sous le nom d’Aelohim : C’est le seul nom connu qui est à la fois singulier  et Pluriel, et masculin et féminin. Je vous l’expliquerai si nous avions le temps.

       Logiquement, les anciens vont ensuite assimiler leurs Dieux aux puissances de la nature. C’est toujours la puissance qui sacre les Dieux. Prenons l’exemple du Paganisme Grec. Zeus est en premier lieu, le Dieu de la foudre. Poséidon, le dieu de l’océan, Eole, le Dieu des vents,  Hadès, le Dieu des enfers, Eros le Dieu de l’amour, Cérès la déesse des moissons,  etc,  et ils vont leur donner une existence semblable à ce qu’on constate de la nature, A savoir que la nature  semble mourir avec l’hiver, et ressusciter avec  le printemps.

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Ainsi tous les dieux «  mineurs » sont des dieux de la végétation qui ressuscite.  Même Zeus dit-on aurait eu sa tombe dans l’ile de Crête ! C’est Alexandre le grand qui va porter un coup fatal à la résurrection des dieux. Au cours de ses conquêtes il va  buter sur le tombeau de Melkart, le grand Dieu de Tyr, et il le fait ouvrir pour vérifier que le Dieu est bien ressuscité. Et l’on y trouve un grand Guerrier, baignant dans une huile d’embaumement, ce qui prouve que Melkart adoré comme un Dieu, n’était qu’un grand homme ! Et c’est ce que soutiendra le mythographe Evhémère ! Il déclara avoir découvert un texte qui révélait que les Dieux  n’étaient que de grands hommes divinisés. En fait, il semble qu’Evhémère ait été révulsé par la conduite immorale des prétendus Dieux Olympiens, qui avaient tous les défauts des hommes ! On l’a considéré comme un père de l’athéisme contemporain, alors qu’il a tiré des conclusions logiques du comportement des dieux Olympiens : Un Dieu Zeus  qui soulève toutes les jupes des nymphes qu’il trouve a son goût, ne peut pas être Dieu !

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Et  à notre Moyen Age, on trouvera une opinion semblable émise par Sturlusson le génie traducteur de la Mythologie  Germano-Scandinave laquelle  semble avoir inspiré la renaissance du paganisme contemporain. Dans ses commentaires sur « l’Edda » Strurlusson aurait soupçonné le Dieu Odin, d’être en réalité un grand chef de guerre Indo- Européen, pour ne pas dire Aryen, chassé du Caucase par une glaciation, et qui  aurait trouvé un territoire ou s’établir en Europe du nord. Il y a une relation certaine des « Edda », avec le « livre des Rois de Féridoun » qui retrace la mythologie persique. Je ne puis que signaler ici, le grand intérêt de cet ouvrage, autant pour les chrétiens que pour les païens qui sont en recherche !

     Rechercher, c’est être déjà religieux. Car on cherche la réalité à travers les apparences.

Et je voudrais revenir sur ce que je vous ai dit tout a l’heure des catégories que sont les croyants et les incroyants. Il y a deux incroyants qui me paraissent exemplaires dans leur catégorie. Le premier c’est Claude Allègre, un scientifique qui a quitté le parti socialiste  après avoir tenté de réformer en vain l’éducation nationale. A la fin d’un ouvrage ou il traitait de la science et de la foi,  il se mettait dans la peau d’un poète oriental qui aurait dit à peu près à la fin de sa vie : « Tout le monde sait que je n’ai jamais cru en dieu, mais tout le monde sait que je n’ai jamais menti. Alors, j’ai confiance ! »

         Cela me paraît remarquable, car dans la Bible Hébraïque, le mot qui recouvre la croyance, plus justement que le mot Foi,  c’est la confiance ! Si l’on ne peut croire par sentiment, peut-être est-il possible de croire « raisonnablement ». Car il est difficile d’admettre que nous ne servons à rien ! Et la confiance c’est  déjà l’espérance de découvrir que nous servons à quelque chose si nous sommes honnêtes avec nous-même !

        220px-Charles_Maurras_-_photographie_Frédéric_Boissonnas.jpg Le second personnage ce sera Charles Maurras, condamné comme « Collaborationniste », par la racaille Bolcho-Gaulliste, alors qu’il fut l’anti germaniste le plus virulent de son époque. ! Maurras était muré dans une surdité quasi-totale, ce qui lui avait donné une force de concentration extra-ordinaire. Philosophe de l’école très rationaliste d’ Auguste Conte ,  il n’avait jamais pu croire. Il était plutôt fervent de la sagesse Grecque, ce qui lui avait valu l’antipathie sectaire du Pape Pie XI. Quand il fut grabataire  en prison, et mourant,  il fut gracié par le président Auriol, et interrogé, il avoua même dans l’épreuve n’avoir pas pu faire un pas vers la religion, même après avoir fait une très belle prière poétique. Cependant sur le point de mourir, il accepta qu’un prêtre vienne l’assister, et il se produisit alors un fait extraordinaire. Alors que le prêtre montait l’escalier pour l’assister, Maurras se souleva sur son lit et il déclara : «  Pour la première fois, j’entends venir quelqu’un ! ».

      Moi, croyant, j’ai toujours pensé qu’il était aussi difficile de croire que de ne pas croire, car Dieu est invraisemblable ! Seulement voila, l’homme sans Dieu est encore plus invraisemblable ! Et nous en sommes là dans une réflexion sur le sacré et nous ne pouvons pas en dire grand-chose, puisque le sacré c’est ce que nous ne connaissons pas ! Et pourtant aujourd’hui l’avancée des sciences est un chemin d’accès. Depuis la découverte de la relativité par Einstein, qui ne pratiquait pas selon la synagogue, mais qui se disait croyant, la conception scientiste, c'est-à-dire la conception matérialiste de l’univers est révolue, elle n’est plus concevable par la raison et c’est sur cette note que je voudrais m’acheminer vers une conclusion ouverte.

      Je vais le simplifier au maximum.

      Les anciens  croyants ont cru, que la matière s’opposait à l’esprit. Et c’est ainsi qu’ils interprétaient abusivement la parole du Christ : « L’esprit est prompt et la chair est faible » ! On concevait que la matière était faite de sortes de briques solides, les cellules, elles-mêmes composées de briques plus petites, les atomes. Mais à partir du Microscope électronique, l’appareillage scientifique est devenu tel que l’on a pu constater, que les atomes étaient de petits univers avec des corpuscules en mouvement que l’on nomme  électrons, neutrons,  protons, Photons etc, on a même pu découvrir que les protons sont également composés que plus petites particules nommées les Quarks. Mais quand on veut fouiller les photons, on se rend compte qu’ils sont des grains de lumière, qu’ils ont une vitesse mais qu’ils n’ont pas de poids. Or la matière est composée d’un mouvement, qu’on appelle la Cinétique,  et d’une masse, le poids. Or les photons n’ont pas de poids, ils ne  sont que des points d’énergie lumineuse en mouvement, ils ne sont donc qu’une demi-matière, mais si deux photons se réunissent pour donner un électron, leur énergie donne un poids, c’est l’apparition de la matière. Et cela prouve que la matière nait de l’immatériel, que le visible nait de l’invisible, que la lumière est une énergie, que l’énergie est une pensée, et qu’à l’origine de la pensée il y a un penseur ! Et c’est ainsi qu’un grand Physicien Sir James Jean a pu dire : « L’univers ressemble de moins en moins à une grande mécanique, et de plus en plus à une grande pensée ! » :

          Il y a, dans le fatras de la Genèse Hébraïque une affirmation qui rejoint exactement, ce que je viens très mal de vous exposer. Que fait dire le livre au Dieu lorsqu’il lance la création : « Et Dieu dit : « Que la lumière soit, et la lumière fut ! » Et c’est cette lumière qui, première forme de l’énergie qui a commencé  de tisser  l’univers,  il y a près de 14 Milliards d’années. C’est ce que disent les savants. Pour la première fois, la science rejoint la révélation !

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Il y a 50 ans que j’ai entendu un physicien Français expliquer cela mieux que je ne le fais. J’écoutais la radio  tout en triant des feuilles de tabac, car j’étais planteur de tabac, et j’avais l’impression d’apprendre quelque chose de nouveau. Et voici qu’après avoir démontré que la matière  n’était qu’une apparence d’une certaine forme d’énergie, c'est-à-dire que la création était spirituelle, le savant concluait ainsi : «  Et oui, au terme de nos recherches, voici qu’il nous vient un mot que nous scientifiques pensions interdit, et ce mot est : Dieu ! »

      Quelles sont les conséquences logiques de cela ?  Plus la science  accroit nos connaissance, ce que nous trouvions mystérieux, soit le surnaturel, voila qu’il  devient naturel. Plus derrière les apparences nous découvrons une réalité,  et nous nous trouvons dans ce que Le Christ disait à ses Apôtres : « J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant ; mais quand l’Esprit de vérité sera venu, il vous mènera vers la Vérité toute entière ! » Et cela, à mon sens correspond,  au texte de Joël, un des petits prophètes d’Israël, qui fait dire à Dieu : «  Après cela, je répandrai mon esprit sur toute chair, vos fils et vos filles prophétiseront,  vos anciens auront des songes et vos jeunes gens des visions ! ». A mon sens, nous sommes entrés dans ce temps d’effusion, qui est lié au cycle du Verseau, qui était représenté par les grecs comme un jeune homme déversant sur terre les ondes de l’esprit, car le Verseau est un signe aérien. Einstein a dit plusieurs fois, « Il va falloir penser autrement ! » et c’est à nous tous qu’il parlait ! Et c’est une prodigieuse intellectuelle, d’origine juive : Raïssa Maritain, convertie avec son mari au Catholicisme, qui semble avoir donné le signal, du règne de l’Esprit qui est celui de l’intelligence en disant : « On a combattu la religion au titre de l’intelligence, c’est aujourd’hui au nom de l’intelligence qu’il faut la défendre ! » Or l’intelligence ne se fabrique pas ; elle peut être cultivée, mais elle  est d’abord donnée de diverses façons,  et nous abordons avec cela un autre mystère ! 

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 Quand Archimède  découvre d’un coup, une des grandes lois de la Physique, il s’écrie, tellement cela est sans palier de réflexion : « Euréka » (J’ai trouvé) ! Quand Paul de Tarse , qui vient de participer au massacre du Chrétien Etienne, est jeté à bas de son cheval par l’esprit si lumineux , on ne peut relever qu’ aveugle  ce n’est nullement sa réflexion qui le convertit, c’est l’intervention inexplicable de l’ailleurs ! Quand Norbert Wiéner Le mathématicien surdoué qui passe pour être l’inventeur de la Cybernétique,  lors d’un cours à ses élèves, s’interrompt brusquement, pour parler du pouvoir des démons dans le monde, qu’il a servi sans le savoir et qu’il veut désormais combattre, quand il s’exprime ainsi, alors qu’il était un juif parfaitement Athée, c’est sous le poids d’une intuition tellement brutale, qu’il faut bien admettre qu’il a été une cible de l’Esprit ! Il écrira ensuite :

        « La science est impossible sans la foi. Par ces mots, je ne veux pas dire que la foi dont dépend la science est religieuse, et implique l’acceptation de n’importe quel dogme de croyances religieuses ordinaires, mais que, si la foi manque en l’idée que la nature obéit à des  lois, il ne peut y avoir de science ! »

        Ainsi  Wiéner ne se relie pas encore à une religion existante, mais il admet, qu’il y a une législation qui tend à « Ordonner » le monde, ce qui suppose un législateur ! Et ce qui, pour une nation, demande des nationalistes.

       Exemple tout à fait différent, quand Françoise Vernay, peut-être la plus grande éditrice de l’époque, dans la logique d’une vie totalement dépravée se fait avorter, à peine aperçoit-elle le petit fœtus flottant dans la cuvette, qu’il lui est révélé qu’elle vient d’accomplir le crime des crimes, c'est-à-dire qu’elle s’est dénaturée : Et du jour au lendemain elle change de vie ; Elle écrira un livre sur le sujet qui vaut la peine d’être lu : « Dieu existe, je l’ai toujours trahi ! »

     André Frossard, lui aussi juif complètement athée, écrira : « Dieu existe, je l’ai rencontré » ! Et il conte comment, s’étant trompé d’adresse, il entre par hasard,  dans une chapelle  ou est exposé l’ostensoir qu’on appelle « le saint sacrement, et il est pénétré d’un coup, par une lumière qui n’est pas d’ordre physique, ce que l’on appelle la lumière « Nouménale » qui est avant la lumière Physique que l’on dit « phénoménale », et il sait d’un coup qu’il est en face du Dieu auquel il n’avait jamais cru !

      Et c’est  un phénomène presque semblable, que va subir un autre juif totalement athée,

A-1308308-1279791915.jpeg.jpgMax Jacob, artiste à la vie de Bohème, accro aux drogues dures et même homosexuel dit-on, à qui apparait l’image du Christ sur le mur de sa chambre ! Et le choc émotionne est tel, qu’immédiatement il se jure d’abandonner ses licences, et il tiendra parole !

      J’ai cité ces cas étranges qui semblent se relier à une façon de savoir qui ne doit rien à la réflexion ! Einstein en a traité  comme d’une donnée, qu’il appelle l’intuition. Et il écrit :

     «  L’intuition  a pour moi les traits d’une opération de  divination (remarquez que dans le mot divination, il y a le « divin ») et il poursuit : « Le plus bel exemple d’intuition, c’est la théorie de la relativité générale ! La seule chose qui vaille au monde, c’est l’intuition ! »

      Il fait savoir que  déjà en son temps le grand peintre, Giovanni Pannini ( 1691-1765) avait écrit : « Quiconque a quelque pratique de l’introspection spirituelle entend en lui des voix

qui ne semblent pas les siennes. Il entend le murmure des suggestions qui lui étaient inconnues plus tôt, des suggestions imprévisibles et incroyables ! Il est faux de dire que nous travaillons avec notre cerveau ! En réalité, nous nous limitons à écouter un inconnu qui nous parle à l’oreille »

       L’immense poète Rainer Maria Rilke ( 1875- 1926) disait dans le même esprit, qu’on lui faisait « don » de ses vers ! Président de la Commission culturelle du Conseil régional à Bordeaux, et ayant créé  et présidé « La renaissance Aquitaine » pendant plus de cinquante ans, je confirme ! Il y a la versification qui est une technique et une fabrication, et la poésie, qui est inspirée, de telle sorte que les anciens en disaient qu’elle était le langage des Dieux : Elle est dans notre nature, comme une descente  du sacré qui peut se présenter a chacun de vous sous une forme différente.  Et cela nous ramène au thème que je devais traiter.   

      Comment oser dire cela, alors que le monde est en crise, parce que toutes les religions sont en crise, et que toutes les formes politiques ont échoué à rendre les peuples heureux ? Et bien c’est parce que l’Apocalypse à laquelle on se réfère comme désignant  un temps d’extrême violence, signifie seulement : « Révélation » ! Et nous y sommes ! Il faut que notre effroyable temps, accouche de la révélation, et il est rare que les accouchements soient indolores. Mais  ils sont dans la nature des choses. L’accouchement est dans la nature des choses ! Ce qui n’est pas dans la nature des choses, c’est de tuer l’enfant que l’on a conçu.

       Lorsque Picasso avouait : «  Ce qui me sauve, c’est que je réussis chaque jour à faire plus laid ! », il avouait dénaturer cette aspiration  vers le beau que l’homme porte en soi ! Quand, la fille de Béria, le pire exécuteur des crimes staliniens, osait dire : « Mon père est un démon ! », et cela malgré qu’elle eut été élevée dans le matérialisme marxiste, elle  démontrait que cette inspiration vers le bien, peut subsister dans la nature humaine, comme déjà une disposition vers la surnature ! Les religieux ont prétendu souvent que l’homme avait  à choisir entre la route du bien, et la route du mal, et c’est faux, car il n’y a qu’une route,  celle qui conduit l’homme au « plus » qu’il n’est ! L’homme qui fait son devoir par  l’aide qu’il apporte aux autres, c’est un homme qui « devient » ! Au contraire l’homme qui se sert des autres, pour ne considérer que son plaisir, il ne s’achemine pas, il se détruit, et il n’a plus à la fin de sa  vie, que l’espérance du néant. Or le néant, c’est ce qui n’existe pas.

       Il y a un mot qui définit la plénitude de l’homme qui devient, c’est le mot « extase ». Il est tiré du Grec et in signifie « Sortir de soi ». C’est un état auquel parviennent de saints personnages, et qui constitue la vision spirituelle de la divinité. Cela peut arriver a certains mourants, qui n’en reviennent qu’un instant pour supplier qu’on les laisse partir pour ce qu’il ont vu de l’au-delà. J’ai connu deux femmes de mon village dans cet état. Le cas le plus célèbre et qui n’est guère connu, c’est celui de Saint Thomas d’Aquin, un des théologiens les plus abondants,  qui se rendant à un concile, tomba en extase pendant le voyage, et il n’en sortit que pour déclarer : « Tout  ce que j’ai écrit, c’est de la paille !» et il mourut sur cela. Et l’Eglise n’a pas commenté, car ç’aurait été avouer, qu’en recevant l’enseignement de St Thomas, elle avait peut-être mangé de la paille !

       Si nous réussissons à détruire l’Islam avant qu’il ne nous détruise, ce qui implique la destruction également de la Vième république complice, nous allons connaître une véritable explosion des sciences, et il semble bien que ce soit la science-fiction qui en a dépeint les possibilités ! Demain, sera en mesure de cloner l’homme, de réaliser l’homme bionique, et grâce à l’intelligence artificielle, d’éradiquer les maladies dès leur apparitions. Demain, le surhomme, pourra modifier le nombre atomique de sa substance, pour traverser les obstacles, comme passa le Christ a travers les portes fermées du cénacle ! Demain comme l’aurait découvert Anton-Parks sur quelques gravures pré sumériennes, il sera possible d’établir des couveuses artificielles, pour libérer la femme de ses grossesses, et pour modifier la génétique, en fonction des nécessités sociales.  Demain, à partir de la découverte du professeur Charon de l’absence de l’espace temps à l’intérieur de l’atome, il sera possible de découvrir dans le cosmos, des tunnels de « Non-Espace-temps » qui nous permettront le voyage intersidéral ! Bref nous deviendrons ce que les légendes antiques nous ont rapporté des dieux de l’antiquité…

         L’ennui, c’est que toutes ces légendes se rapportent à une immense « guerre des dieux » ! Alors allons-nous commettre les mêmes fautes, qui ont ramené ces « civilisations » jusqu’à ne laisser que les éclopés que nous sommes ?

        Je crois qu’il faut se souvenir de la parole du Christ : « Que vaut à l’homme de gagner l’univers s’il vient à perdre son âme ! »

  Et cependant en tant que  Nationaliste figurez-vous que j’ai confiance, car je sais que mon devoir aujourd’hui c’est seulement de sauver de l’infamie, cette terre qui nous a été donnée, pour y remplir notre vocation

     Mais j’ai confiance aussi parce que mon Seigneur a dit : « Allons, prend ton grabat et marche ! »

     Et ceci dit, je vous remercie de m’avoir écouté !

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Coronaviren: Hat Bill Gates alles schon vor Jahren gewusst?

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F. William Engdahl:

Coronaviren: Hat Bill Gates alles schon vor Jahren gewusst?

Ex: https://kopp-report.de

Wenn es darum geht, die weltweite Forschung an Impfstoffen gegen Coronaviren voranzutreiben und finanziell zu fördern, kann es wohl niemand mit Bill Gates und der Bill & Melinda Gates Foundation aufnehmen. Kaum bekannt: Wenige Wochen bevor der Ausbruch in Wuhan publik wurde, waren sie noch Sponsoren eines Planspiels einer globalen Coronavirus-Pandemie, außerdem haben sie zahlreiche Unternehmen dabei unterstützt, einen Impfstoff für das offenbar neuartige Virus zu entwickeln. Die Präsenz der Gates’ ist überall zu spüren. Aber was lässt sich daraus schließen?

Eines müssen wir zugeben: Bill Gates ist ein Prophet. Seit Jahren hat er behauptet, dass eine globale Killer-Pandemie über uns hereinbrechen wird und dass wir darauf nicht vorbereitet seien. Am 18. März 2015 hielt Gates in Vancouver einen TED-Talk zum Thema Epidemien.

Damals schrieb er in seinem Blog: »Habe gerade eine kurze Rede zu einem Thema gehalten, über das ich in letzter Zeit viel gelernt habe – Epidemien. Der Ebola-Ausbruch in Westafrika ist eine Tragödie – zum jetzigen Zeitpunkt sind über 10 000 Menschen gestorben.«

Und weiter hieß es: »So schlimm diese Epidemie auch war, die nächste könnte deutlich schlimmer ausfallen. Die Welt ist schlichtweg nicht darauf eingestellt, mit einer Krankheit umzugehen – beispielsweise einer besonders ansteckenden Grippe –, die sehr rasch große Mengen an Menschen infiziert. Unter all den Dingen, die 10 Millionen Menschen oder mehr töten könnten, ist die mit Abstand wahrscheinlichste eine Pandemie.«

Im selben Jahr schrieb Bill Gates einen Artikel für das New England Journal of Medicine. In dem Artikel mit der Überschrift »Die nächste Epidemie – Lehren aus Ebola« sprach er von einer besonderen Klasse von Medikamenten, bei denen es darum gehe, Patienten spezielle RNAbasierte Konstrukte zu verabreichen, die es ihnen ermöglichten, spezielle Proteine (darunter Antikörper) zu produzieren. »Es handelt sich um einen sehr neuen, aber sehr viel versprechenden Bereich, denn es ist möglich, dass eine sichere Therapieform ziemlich rasch entwickelt und in großem Stil produziert werden könnte. Mehr Grundlagenforschung sowie die Fortschritte von Unternehmen wie Moderna und CureVac könnten dazu führen, dass diese Vorgehensweise ein zentraler Baustein bei der Bekämpfung von Epidemien wird.« Aktuell werden Moderna und CureVac finanziell von der Gates Foundation unterstützt. Die Unternehmen sind führend beim Wettrennen darum, einen auf Boten-RNA (mRNA) basierenden Impfstoff für Covid-19 zu entwickeln.

Die Gründung von CEPI

Seit Jahren bereiten sich Gates und seine finanziell gut aufgestellte Stiftung auf eine globale grippeähnliche Pandemie vor. Beim Weltwirtschaftsforum 2017 in Davos rief Gates CEPI ins Leben, die »Coalition for Epidemic Preparedness Innovations«. Beteiligt sind auch die Regierungen von Norwegen, Indien, Japan und Deutschland sowie der britische Wellcome Trust. Die Aufgabe von CEPI besteht nach eigenen Angaben darin, die Entwicklung von Impfstoffen voranzutreiben, welche die Menschheit für die Eindämmung künftiger Epidemien benötigen wird. Gates erklärte damals:

»Ein vielversprechender Bereich der Impfstoffentwicklung ist es, die Fortschritte in der Genforschung zum Kartographieren der DNA und der RNA von Pathogenen zum Herstellen von Impfstoffen zu nutzen.«

Darauf gehen wir gleich noch einmal ein.

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»Event 201«

Spätestens 2019 gab es für Bill Gates und die Stiftung kein Halten mehr, was ihre Pandemie-Szenarien anbelangte. Gates produzierte für Netflix ein Video, in dem er ein auf unheimliche Weise imaginäres Szenario entwarf. In dem zur Explained-Serie gehörenden Video ist die Ausgangssituation ein Tiermarkt in China, auf dem sich lebende und geschlachtete Tiere stapeln.

Von diesem Markt breitet sich ein hochgradig tödliches Virus rund um den Globus aus. Gates erscheint in dem Video als Experte und warnt: »Wenn wir über Dinge nachdenken, die Millionen Menschenleben fordern könnten, dann stellt eine Pandemie unser größtes Risiko dar.« Wenn wir nichts unternähmen, um uns besser auf Pandemien vorzubereiten, werde der Zeitpunkt kommen, an dem die Welt zurückschauen und sich wünschen werde, mehr in mögliche Impfstoffe investiert zu haben. Das war Wochen bevor die Welt das erste Mal von Fledermäusen auf dem Tiermarkt im chinesischen Wuhan hörte. Im Oktober tat sich die Gates Foundation mit dem Weltwirtschaftsforum und dem Johns Hopkins Center for Health Security für eine – wie sie es nannten – »fiktive Simulation« zusammen.

An dem Planspiel waren einige der weltweit führenden Persönlichkeiten in Sachen öffentliche Gesundheit beteiligt. Der Name der Veranstaltung war »Event 201«.

Auf der begleitenden Website heißt es, bei »Event 201« simuliere man den Ausbruch eines »neuartigen Zoonose-Coronavirus, das von Fledermäusen über Schweine auf den Menschen übergeht und schließlich wirksam von Person auf Person übertragbar ist, was eine schwere Pandemie nach sich zieht. Der Erreger und die durch ihn verursachte Krankheit basieren größtenteils auf SARS, sind aber in der Gemeinschaft stärker durch Menschen mit leichten Symptomen übertragbar.«

Bei dem »Event 201«-Planspiel bricht die Krankheit auf einer Schweinefarm in Brasilien aus, breitet sich von dort in einkommensschwachen Regionen aus und explodiert schließlich zu einer Pandemie. Durch Flugreisen gelangt die Krankheit nach Portugal, in die USA und China und so weiter, bis schließlich kein Land mehr fähig ist, die Lage zu kontrollieren. Im Rahmen des Szenarios steht während des ersten Jahrs kein möglicher Impfstoff zur Verfügung. »Da die gesamte menschliche Bevölkerung anfällig ist, steigt die Zahl der Fälle während der ersten Monate der Pandemie exponentiell an und verdoppelt sich jede Woche.«

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Das Szenario endet nach 18 Monaten. In diesem Zeitraum hat das fiktive Coronavirus 65 Millionen Tote verursacht. »Die Pandemie beginnt, sich langsamer auszubreiten, da die Zahl der anfälligen Personen sinkt. Die Pandemie wird andauern, bis ein wirksamer Impfstoff gefunden wird oder 80 bis 90 Prozent der Weltbevölkerung mit dem Virus in Kontakt gekommen sind.«

Teilnehmer von »Event 201«

Die Weitsichtigkeit, die man beim von Gates und Johns Hopkins organisierten »Event 201« an den Tag legte, ist sehr interessant; aber genauso interessant sind die Personen, die eingeladen worden waren, um sich an der fiktiven weltweiten Reaktion zu beteiligen. Unter den handverlesenen »Spielern«, wie man sie nannte, war auch George Fu Gao. Professor Gao leitet seit 2017 das chinesische Zentrum für die Bekämpfung und Prävention von Krankheiten. Er ist unter anderem spezialisiert auf die Übertragung des Influenzavirus von Spezies zu Spezies und interessiert an Virusökologie, insbesondere an der Beziehung zwischen dem Influenzavirus und Zugvögeln oder Märkten mit Lebendgeflügel, an der Virusökologie von Viren, die von Fledermäusen stammen, und an Molekularbiologie.

Neben Professor Gao nahm unter anderem auch Avril Haines teil, unter Präsident Obama stellvertretende CIA-Chefin, Assistentin des Präsidenten und stellvertretende Beraterin zur nationalen Sicherheit. Ein weiterer Teilnehmer war Konteradmiral Stephen C. Redd, der bei der US-Gesundheitsbehörde CDC die Abteilung leitet, die dafür sorgen soll, dass das öffentliche Gesundheitssystem auf Krisen vorbereitet und reaktionsbereit ist.

Ebenfalls dabei war Adrian Thomas aus dem Management des skandalgebeutelten Pharmariesen Johnson & Johnson. Thomas ist bei dem Konzern verantwortlich für die Reaktion auf Pandemien. Dazu gehört die Entwicklung von Impfstoffen für Ebola, Denguefieber und HIV. All das zeigt, dass Bill Gates sich erstaunlich intensiv mit der Möglichkeit befasst hat, dass es zu einer globalen Pandemie kommt, von der er sagt, sie könne sogar noch schlimmer werden als die mysteriöse Spanische Grippe von 1918. Seit mindestens 5 Jahren, wenn nicht noch länger, warnt er vor diesem Szenario. Die Bill & Melinda Gates Foundation befasst sich aber nicht nur damit, sie finanziert auch die Entwicklung neuer Impfstoffe. Dabei kommt hochmoderne Technologie wie die Genschere CRISPR zum Einsatz.

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Coronavirus-Impfstoffe

Die Gates Foundation unterstützt die Impfstoffentwicklung an allen Ecken. Inovio Pharmaceuticals aus Pennsylvania beispielsweise erhielt von CEPI, der von Gates unterstützten Organisation »Coalition for Epidemic Preparedness Innovations«, 9 Millionen Dollar für die Entwicklung eines Impfstoffs. Dieser Impfstoff, INO-4800, soll ab April am Menschen getestet werden, was verdächtig rasch wäre. Zusätzlich hat die Gates Foundation dem Unternehmen gerade weitere 5 Millionen Dollar dafür gegeben, ein eigenes intelligentes Gerät zu entwickeln, das den neuen Impfstoff intradermal einspritzen kann.

Das Geld, das von der Gates Foundation über CEPI fließt, finanziert zudem die Entwicklung einer radikal neuen Impfstoffmethode, die auf der sogenannten Boten-RNA (mRNA) basiert.

Die Stiftung unterstützt zudem das Biotech-Unternehmen Moderna aus Cambridge, Massachusetts, bei der Forschung an einem Impfstoff gegen das neuartige Coronavirus aus Wuhan, das inzwischen als SARS-CoV-2 bezeichnet wird. Modernas anderer Partner ist das National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID), eine Unterabteilung der amerikanischen Gesundheitsbehörde National Institutes of Health (NIH). NIAID-Chef ist Dr. Anthony Fauci, über den auch die Notfallmaßnahmen der Regierung Trump in Bezug auf die Viruskrise laufen. Das Besondere an Modernas Coronavirus-Impfstoff mRNA-1273: Er wurde nicht innerhalb von Jahren, sondern innerhalb von Wochen entwickelt und ging am 24. Februar bereits direkt zu Faucis NIH. Dort wird der Impfstoff nun nicht, wie es normal wäre, an Mäusen getestet, sondern gleich an menschlichen Versuchskaninchen.

Interessant in diesem Zusammenhang ist der rechtliche Hinweis auf Modernas Website:

»Besonderer Hinweis bezüglich zukunftsbezogener Aussagen: … Zu diesen Risiken, Ungewissheiten und anderen Faktoren gehören: … die Tatsache, dass es nie zuvor ein kommerzielles Produkt gegeben hat, bei dem eine für die Nutzung zugelassene mRNA-Technologie zur Anwendung kam.«

Anders gesagt: Es ist völlig unbekannt, wie sicher das Ganze für die menschliche Gesundheit ist. Auch das deutsche Biotech-Unternehmen CureVac arbeitet mit der völlig unerprobten mRNA-Technologie, um einen Impfstoff für Covid-19 zu entwickeln. Seit 2015 erhält CureVac Geld von der Gates Foundation, um seine eigene mRNA-Technologie entwickeln zu können. Die Gates Foundation und angeschlossene Organisationen wie CEPI gehören zu den größten Geldgebern der öffentlich-privaten Weltgesundheitsorganisation WHO. Addieren wir all das, kommen wir zu dem Schluss, dass es rund um die aktuelle Coronavirus-Pandemie praktisch keinen Bereich gibt, in dem Gates nicht allgegenwärtig ist.

Dieser Beitrag ist zuerst in KOPP Exklusiv (Ausgabe 14/20) erschienen.

mardi, 07 avril 2020

Rome brûle, et demain sera un nouveau monde

Tancredi Scarpelli - Nero watching Rome burn - (MeisterDrucke-41875).jpg

Rome brûle, et demain sera un nouveau monde

par Luc Brunet
Ex: http://www.europesolidaire.eu
 
Cet article est de Luc Brunet, consultant à Moscou, et membre du comité de rédaction de Europe Solidaire. L'original est sur son blog, référencé ci-dessous

https://www.lbs-letter.com/

Rome brûle, et demain sera un nouveau monde

J'ai constaté une évolution étonnante dans la musique que j'écoute au cours des dernières semaines. Beaucoup de chansons et de groupes de la vague Punk sont revenus dans à mémoire et j'ai recommencé à les écouter, comme par exemple les Stranglers. Rome is burning, No Future, etc ... 

Ce retour de vieilles chansons est-il lié au COVID-19? Je pense que oui. Ce que nous voyons actuellement n'est pas simplement un virus qui se propage à travers le monde, sans etre vraiment un tueur en termes absolus. Au mieux, il tue les personnes âgées et les personnes ayant un problème de santé majeur existant. Dans une certaine mesure, quelque chose qui pourrait être bien accueilli par les gestionnaires de fonds de pension ou les eugénistes qui plaident pour une réduction de la population.

Si le monde ne comprenait que la Chine et la Corée du Sud, l'épidémie serait deja terminée, et des efforts futurs seraient faits pour trouver un remède suffisamment bon pour éviter une deuxième vague l'hiver prochain, et ce serait tout. Mais COVID-19 n'est pas seulement un virus. C'est un catalyseur social et économique qui nous ramènera dans les chansons des Stranglers - COVID-19 a mis le feu à Rome ou Milan, mais le sens est le même. L'empire occidental a commencé à brûler, et les virus sont les allumettes.

D'abord sur le front des virus, la Chine, le Japon, la Corée et Taïwan devraient maintenant être presque sortis de la crise et devraient maintenant se concentrer sur la recherche de moyens d'éviter une nouvelle infection, en particulier au début de l'hiver. On ne sait pas encore comment la Russie évoluera, mais le scénario le plus probable est une évolution comme le Japon, moins efficace qu'en Corée du Sud, mais en maintenant l'impact à un niveau acceptable. Malheureusement, je suis beaucoup moins positif à propos de l'Europe et des États-Unis, pour un certain nombre de raisons, dont certaines sont discutées plus loin dans cet article. L'Italie et l'Espagne ont déjà atteint un niveau dramatique en termes de morts, et en termes d'effondrement de leur système médical, qui n'a nullement la capacité de traiter toutes les personnes en situation critique. Plusieurs spécialistes ont déjà évoqué un possible chaos médical jusqu'au milieu ou à la fin de 2021, et je pense qu'ils ont raison, à moins qu'un remède efficace ne puisse être trouvé très rapidement. La désormais célèbre Chloroquine pourra-t-elle gagner rapidement contre le virus, personne ne le sait encore.

Donc, encore une fois si nous supposons qu'aucun remède n'est trouvé très rapidement, l'Europe et les États-Unis devront rester dans une situation sanitaire très difficile, et des frontières entre les pays, et en particulier entre les États-Unis / Europe (Ouest) d'un côté, et la Chine / Le Japon / Taïwan / Corée (Eurasie) de l'autre côté resteront fermées longtemps.

Une si longue période d'isolement international aura des implications énormes dans tous les domaines de la vie des gens, y compris la politique, l'économie et le comportement et les valeurs sociales. L'impact sur les sociétés occidentales sera beaucoup plus important que sur les sociétés eurasiennes. Au cours des dernières décennies, de nombreux déséquilibres sociaux et économiques se sont développés en Europe et aux États-Unis. Un écart plus large et toujours plus grand entre les riches et la masse de la population a créé des problèmes sociaux importants, qui n'ont jamais été résolus. La qualité de vie globale des plus pauvres et de la classe moyenne a baissé et de nombreux emplois ont été exportés vers d'autres pays, dans le cadre du processus de mondialisation. L'Europe et, dans une certaine mesure, les États-Unis ont subi de fortes pressions ces dernières années pour accepter de plus en plus de migrants, avec une situation proche de l'implosion juste avant le début de la crise COVID-19. Aux États-Unis, un profond fossé entre démocrates et républicains a amené la vie politique du pays dans une situation de conflit constant, et cela sur toutes les grandes questions sociales et économiques, de la législation sur les armes à feu aux toilettes transgenres.

Sur le plan économique, le niveau d'endettement de tous les pays occidentaux a atteint des niveaux incroyables, gonflés année après année depuis la crise financière de 2007/2008. Cette crise a été stoppée et l'effondrement total du système financier a été évité grâce à l'énorme injection d'argent des banques centrales, maintenant l'économie virtuelle (financière) sous respiration artificielle, comme de nombreuses victimes de COVID aujourd'hui. L'écart entre le secteur financier et l'économie réelle a également atteint une taille critique depuis 2007/2008 et tout aurait pu continuer à fonctionner de cette façon pendant encore des années, même si certains geneurs avaient prédit qu'un cygne noir déclencherait l'effondrement.

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Nous savons maintenant à quoi ressemble ce cygne noir.

Au contraire, les pays eurasiens sont tous beaucoup plus stables sur les plans social, économique et financier. Je n'entrerai pas dans les détails, mais par exemple, la Chine et la Russie ont un modèle politique très stable, peu de dettes, d'importantes réserves de devises et un contrôle sur des secteurs d'activité clés, comme le système médical ou la production de produits clés. Bien sûr, rien n'est idéal, mais ces pays peuvent 1) rassembler les énergies et obtenir une discipline adéquate de la population pour gagner contre les épidémies, 2) maintenir la paix sociale avec un réel soutien à la population et à l'économie réelle, le tout contrôlé par un leadership décisif.

Les pays occidentaux sont et seront cependant confrontés à de nombreux problèmes découlant de l'épidémie elle-même, car leurs sociétés fragilisees ne peuvent pas rassembler l'énergie et n'ont pas de loin le niveau de leadership nécessaire pour passer la tempête en bon ordre.

Beaucoup de choses, tout ou partie, peuvent mal tourner.

- Économie

Le principal danger à court terme est la bulle de la dette, proche de l'implosion depuis 2007. Les gouvernements et les banques centrales ont déjà commencé à injecter de l'argent dans le système financier, pour éviter un crash rapide des bourses et une ruée sur les banques. Cependant, la perspective est d'avoir un PNB en baisse de 10 ou 30%, pour être réaliste, et il est difficile de croire qu'aucun acteur majeur (Deutsche Bank par exemple mais il y a beaucoup d'autres candidats) n'évitera l'effondrement et l'effet domino tant redouté.

Parallèlement, les banques centrales et le gouvernement seront poussés par des populations impatientes à soutenir l'économie réelle - PME, secteur public, consommateurs - plutôt que de sauver les dinosaures financiers.

Il en résultera potentiellement que la dette elle-même sera en majorite reduite a zero apres des defauts en serie des entreprises et surtout des Etats. Cela signifie une énorme somme d'argent, et nous parlons ici de 250T $ (250 000 milliards de dollars), sans tenir compte des pertes provenant de la chute des bourses. La bonne nouvelle est cependant que cet argent evapore n'a que très peu à voir avec l'économie réelle et la vie de la population. Ce sera plutôt une «réinitialisation» de la richesse pour les plus riches, tout comme les guerres ou les épidémies au Moyen Âge ont regulierement créé une réinitialisation de la richesse pour les seigneurs locaux.

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Encore une fois, le virus jouera ici le rôle de catalyseur, car la destruction de cet argent virtuel, coeur et poumon du capitalisme financier, était due depuis 2008, et a été évitée depuis lors par la création d'argent ou le transfer de l'argent de l'economie réelle vers l'economie virtuelle.

- Société et politique

Ce n'est pas un fait nouveau qu'au moins une partie de la population occidentale a commencé à avoir des doutes sur la légitimité de leurs dirigeants, mais chaque fois, après une première vague de mécontentement, chacun est revenu a ses routines de travail et de divertissement, oubliant tout et se remettant a consommer.

La seule vague de protestation vraiment durable a été vue en France avec les Gilets Jaunes, un mouvement qui a permis à un grand nombre de personnes de mieux comprendre la situation actuelle. Le Corona jouera à nouveau ici le rôle de catalyseur et changera les règles du jeu.

Premièrement, la réponse de la plupart des gouvernements occidentaux à Corona a été au mieux lente et incompétente, au pire purement criminelle. Deuxièmement, une grande majorité de gens sont maintenant assis chez eux et ont une occasion unique de lire des médias indépendants et de discuter, non seulement des actions des dirigeants, mais aussi de les mettre en perspective.

La société était déjà malade, frappée pendant de nombreuses années par la destruction systématique de l'économie réelle locale, au profit d'une économie financière virtuelle et d'une mondialisation des moyens de production. Sur le plan psychologique, les sociétés ont également perdu leurs racines, subissant une soupe multiculturelle. Tout ce qui concernait les traditions, les racines, la souveraineté était considéré comme des idées obscènes à interdire par tous les moyens par la foule des personnalités des médias, des journalistes, des experts et autres. Les valeurs fondamentales comme la solidarité, l'empathie ou l'intérêt général ont également été systématiquement remplacées par la concurrence, la liberté individuelle ou la nécessité de permettre aux 'marchés' de se développer et de 'décider', tandis que la plupart des services publics étaient vendus à des intérêts privés.

Une forte opposition s'est développée dans la plupart des pays occidentaux entre les groupes sociaux, avec des tensions et des violences croissantes, verbales et parfois plus. Chaque pays est différent, mais pour n'en citer que quelques-uns:

Les États-Unis ont connu un niveau de conflit croissant entre les deux principaux partis politiques. Le spectacle des démocrates accusant Trump et des républicains accusant les démocrates de tous les maux possibles a été un divertissement pour beaucoup en Europe. Une Europe qui elle-même devenait divertissante pour les Américains, regardant les exploits de Boris Johnson et son pari sur le Brexit, ou comment l'UE et l'Allemagne ont pris un plaisir apparent à amener la nation grecque à une catastrophe sociale pour plaire aux gourous financiers de Francfort et éviter un effondrement de Banques européennes.

Une société malade frappée par une catastrophe sanitaire ne laisse pas beaucoup l'espoir d'une issue positive et pacifique. Rome s'effondre sous ses propres péchés et commence maintenant à brûler.

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À l'heure actuelle, le système médical dans plusieurs pays est totalement surchargé et proche de l'implosion, avec une grande partie du personnel médical infecté étape par étape. La situation ira de pire en pire. Beaucoup de gens mourront, bien que je ne pense pas que des millions de personnes mourront, mais beaucoup resteront handicapés (perdre 20% ou 30% de la fonction pulmonaire est un handicap, bien que non visible).

Une autre victime du Corona sera la confiance. La population avait une confiance limitée dans son élite et ses gouvernements, mais la crise ramène ce niveau à peu près à zéro. Trop d'erreurs ont ete faites et trop de mensonges ont ete dit.

Comment sera le monde après Corona? Très différent, et je risque quelques prévisions ci-dessous. Rien n'est sûr bien sûr, car les prévisions impliquent de nombreux aspects de la vie et de nombreuses géographies. Elles peuvent aussi être, comme toutes les prévisions, influencées par mes propres opinions. Prenez-les telles quelles sont et construisez votre propre vision!

Encore une fois, je crois que tous les aspects de notre vie seront modifiés, parfois radicalement, parfois légèrement.

En termes de valeurs, nous devrions voir un retour de valeurs comme l'empathie et le respect de l'intérêt commun de la communauté, en particulier au niveau local. Les gens qui ont chanté ensemble sur leur balcon en Italie verront leurs voisins différemment quand tout sera fini. L'attitude envers le personnel médical doit également changer. Pensez à votre propre communauté et je suis sûr que vous trouverez des tonnes d'autres exemples. Les crises sont aussi malheureusement des moments où les etres les plus detestables se révèlent. Les personnes qui ont profité de la situation devraient mieux garder un profil bas après la crise, comme celles en France qui écrirevent à leur voisine travaillant comme infirmière, lui demandant de déménager ailleurs, car elle représente un risque. De telles choses se sont déjà produites à quelques reprises et nous rappellent que des gens de la Seconde Guerre mondiale ont écrit de telles lettres à la police pour dénoncer des voisins juifs car ils pouvaient être 'un risque pour eux'. Bien sûr, le monde ne sera pas en un jour peuplé d'anges, mais la tendance sera là pour une pensée plus humaine et communautaire.

De la même manière, un retour à un sentiment plus positif pour les religions traditionnelles doit avoir lieu. Ne vous attendez pas à un retour au XVIIe siècle religieux, mais à un retour au respect supérieur des traditions religieuses et à une renaissance de ses valeurs.

En ce qui concerne la géopolitique, le tsunami peut être total et spectaculaire. L'absence totale d'action positive de l'UE la condamne à un effondrement, peut-être même pendant l'épidémie. Non seulement l'UE n'a pas aidé des pays désespérés comme l'Italie en mars, mais elle n'a pas trouvé gênant de punir d'amende ce pays alors que la situation y était déjà terrible. L'UE a démontré son inutilité, ainsi que son manque total d'intérêt pour la vie de ses citoyens. L'accord de Schengen bien sûr ne survivra pas, également pour des raisons de sécurité sanitaire.

Les pays verront également de grands changements à l'intérieur de leurs frontières et dans les relations entre eux. Pour en mentionner quelques-uns:

- La France, déjà dans une situation très tendue entre les élites parisiennes, les migrants et le noyau de la population va voir de grands changements. Fin mars, l'élite et les 'bobo' (voir ma récente lettre) sont très calmes et se cachent, les migrants refusent le confinement et envoient des pierres à la police, tandis que le noyau de la nation maintiennent le pays en marche, parfois au risque leur vie. De nombreuses personnes qui, au cours des derniers mois, n'ont pas rejoint les Gilets jaunes par inertie ou n'ont pas compris la raison de manifester, sont maintenant totalement bouleversées par la gestion désastreuse de la crise et demandent des têtes. On peut s'attendre egalement à des actions violentes de la part des migrants et le développement que j'ai prévu dans la lettre mentionnée ci-dessus se produira beaucoup plus tôt que prévu. La France est définitivement le pays le plus instable et le plus dangereux d'Europe a mon avis. L'élite présente (et pas seulement Macron) va sentir le vent du boulet.

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- les États-Unis sont également l'un des pays les plus divisés de l'Occident, et une crise aiguë, comme elle semble avoir commencé à se développer au cours des dernières semaines, déclenchera une réaction en chaîne, déclenchant des conflits endormis qui existent depuis la fin de la guerre civile. Personne ne peut prédire comment les événements se développeront, en particulier dans un pays où la plupart des gens ont au moins une arme à feu, mais le résultat sera, je crois, l'effondrement de la Fédération, tout comme l'effondrement de l'URSS au début des années 90, et une scission en plusieurs pays, essentiellement la côte ouest, gardant des liens plus étroits avec la Chine et le Japon, la côte est, et le centre / sud plus conservateur.

L'effondrement de l'UE et des États-Unis ouvrira la porte à un rééquilibrage complet des pouvoirs et à un passage à l'Eurasie. La Chine a commencé à aider de nombreux pays d'Europe et d'autres continents. Je crois que la Chine peut sortir de la crise dans la même position que les États-Unis après la Seconde Guerre mondiale, a la difference qu'elle n'aura pas de véritable concurrent comme l'URSS pour les États-Unis en 1948. L'aide apportée pour se débarrasser du virus et sauver des vies donnera une légitimité morale certaine à la Chine, combinée à une légitimité économique, qui jouera le même rôle que le plan Marshal à la fin des années 40.

- le retour de la fonction publique

Les privatisations de nombreux services publics dans le cadre de la période éco-libérale ont déjà fait l'objet de nombreuses critiques ces dernières années. Quelles que soient les tendances politiques qui survivent après la crise, il est très probable que de nombreuses branches de l'économie reviennent sous le contrôle de l'État, avec des segments clés comme:

. tous les transports, y compris les compagnies aériennes et les aéroports

. tout le système de santé, y compris les hôpitaux, les grandes sociétés pharmaceutiques et les laboratoires de recherche

- local contre mondial: une plus grande partie des biens de consommation et des aliments doit être produite localement, au moins pour les articles critiques comme les produits liés à la santé. Ce n'est pas la fin de la mondialisation, mais le début d'une nouvelle mondialisation, non motivée uniquement par l'optimisation du profit privé, mais celle de la chaîne d'approvisionnement et de production pour une plus grande efficacité.

- bien que le travail à domicile n'ait pas été largement accepté par le passe, nous verrons certainement une utilisation plus large de cette option, accompagnée par un certain temps de travail au bureau. L'occupation des centres d'affaires diminuera, ce qui sera un problème dans de nombreux pays où de nombreux bureaux sont déjà inutilisés.

- le développement des achats en ligne sera accéléré, car beaucoup préfèreront utiliser ce service plutôt que d'aller dans un magasin dans un centre commercial ou un supermarché bondé. Même chose pour la livraison de nourriture a la maison. Plus de restaurants virtuels s'ouvriront, offrant une nourriture de qualité à un prix raisonnable, libérée du coût de l'espace et du service d'un restaurant physique

- dans le paysage politique du pays, la plupart des anciens partis et structures de décision peuvent ne pas survivre, ayant souvent montré une incompétence totale dans la gestion de la crise. Les nouveaux dirigeants sortiront de la période de crise elle-même, en raison du rôle qu'ils ont joué dans la lutte contre Corona. Une gouvernance nettement plus 'populiste' et socialement orientée sera dominante, un peu comme en Chine ou en Russie aujourd'hui, mais bien sûr adaptée à la culture et aux traditions de chaque pays.

Peut-être que tout ce qui précède n'aura pas lieu, et il peut se produire des événements encore inattendus. Mais Rome brûle, et demain sera un nouveau monde.

Nous serons tous comme Alice et nous passons a travers le miroir MAINTENANT.

Luc Brunet

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Déconfinement par étapes : l’opposition politique au Système doit définir ses priorités et imposer son agenda

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Déconfinement par étapes : l’opposition politique au Système doit définir ses priorités et imposer son agenda

par le Dr. Dominique Baettig

Ex: http://www.lesobservateurs.ch

Plus la pandémie se développe et plus le questionnement légitime des citoyens se justifie. Si l’origine du virus, sa spécificité et sa dangerosité restent encore incertaines, l’instrumentalisation dans une tentative globaliste d’activer le passage à un stade supérieur de gestion et de contrôle de la population est nettement perceptible.

Soyons clair, le principe de précaution l’emporte dans de telles situations. Et seul l’Etat souverain national est encore en position de parer au plus pressé : fermeture des frontières, directives globales de précaution pour ne pas contaminer les groupes à risque, développement de structures médicales supplémentaires d’urgence, recours à l’armée, redéfinition des priorités hospitalières, mobilisation de ressources bénévoles. Il semble évident aujourd’hui que nos autorités fédérales, malgré le degré d’urgence, ont tergiversé par idéologie (le libre-échange et la libre circulation des biens et des personnes sont des valeurs saintes et intouchables) et aussi par peur des réactions internationales. Il n’est pas normal, dans ces conditions, que les citoyens soient punis après coup par de l’emprisonnement volontaire et l’arrêt d’activités économiques vitales. Sur une période limitée, dans le doute oui, mais pas dans l’incertitude, la prolongation sans limite des mesures liée aux décisions arbitraires, à la lecture de statistiques peu nuancées par les augures de l’OFSP qui n’oseront jamais desserrer le nœud coulant sans se coordonner avec nos voisins de l’Union européenne. Confinement avec exceptions, recommandations contradictoires et culpabilisantes, port de masques par la population recommandé mais sans moyens suffisants, découverte de la dépendance de l’acheminement de médicaments, masques, réactifs nécessaires au diagnostic qui viennent de Chine. Retour au chacun pour soi avec les pays voisins, culpabilisation de la population vecteur du virus qui aggraverait la vitesse de propagation si elle n’obéit pas aux injonctions (rester chez soi sauve des vies) mais il faut quand même soigner les malades, assurer la vente de denrées alimentaires, assurer la sécurité, produire des biens de première nécessité. C’est la porte ouverte à toutes sortes de revendications plus ou moins légitimes puisque les bobos disent que la santé vaut mieux que le profit…Mais l’économie doit continuer à fonctionner, pour garantir les prestations sociales, payer les salaires, dédommager ceux qui se trouvent privés de revenus. La vie associative est annulée, les parents contraints de s’occuper des devoirs scolaires de leurs enfants, on fait miroiter des prêts, des suspensions douteuses de loyers, un report des échéances, une suspension de la vie parlementaire.

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Il est très important que l’opposition antiglobaliste se mobilise et puisse imposer un agenda souverainiste au déconfinement :

a) Priorité à l’économie de proximité : maraîchers, paysans, travailleurs indépendants qui doivent reprendre leur activité, avec des précautions (masques, distance de protection)

b) Laisser faire la débrouille et auto-organisation citoyenne pour éviter le blocage complet de l’économie

c) Favoriser l’accès aux soins efficaces (hydroxycholoroquine et analogues) pour éviter le chantage à la priorité des soins aigus, avec le risque de saturation, pour les victimes majoritairement très âgées et vulnérables à l’épidémie.

d) Ne pas permettre aux problèmes induits par un confinement arbitraire et culpabilisant de s’accumuler : blocage de l’économie autonome, stress relationnel et violences induites du confinement, mise en attente d’interventions médicales qui exploseront dans un second temps.

e) Rapatrier les industries vitales pour l’économie : respirateurs, réactifs pour tests, masques recommandés pour tous, ouverture aux thérapies alternatives et locales (contre le diktat du pharmacologiquement correct et les exigences inappropriées de documentation de l’efficacité par des procédures bureaucratiques irréalistes dans un état d’urgence et de guerre).

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f) Ne pas laisser miroiter des solutions durables par la création de nouvelles dettes par les banques. La monnaie cash doit impérativement être sauvegardée

g) La fermeture des frontières et son contrôle peut durer, il n’est pas prioritaire d’y surseoir…

h) Favoriser les énergies non fossiles existantes, y compris le nucléaire, l’énergie hydraulique et géotherminque non profonde.

i) Ne pas laisser le contrôle social (par Internet, 5G, etc.) s’installer. Y préférer les solutions alternatives, les opinions critiques.

j) Reprendre le contrôle civique par les citoyens plutôt que la bureaucratie administrative médicale pilotée par l’OMS et les institutions centralisatrices globalistes. Le législatif doit impérativement fonctionner

k) Faire confiance au bon sens et à l’auto-organisation citoyenne. Non à l’isolement, non au gavage totalitaire d’informations catastrophistes qui empêchent toute critique et toute contestation.

l) La pandémie est la résultante d’un système dysfonctionnel (agriculture industrielle, médecine industrielle, libre circulation comme idéal, immigration systématique de remplacement ou de mélange imposé, dépendance de la distribution globale). Il ne faut pas continuer comme si de rien n’était mais organiser la souveraineté politique, économique, agricole. Revenir au local de manière prioritaire. Redimensionnement à échelon humain.

m) La décroissance qui s’annonce implique la fin de l’immigration sans limites et la préparation de la remigration indispensable, vu la surpopulation problématique sur les plans écologique, économique, social.

Le travail  le plus important arrive. Ne laissons pas ceux qui sont responsables de cette situation, par idéologie ou cynisme, ou instrumentalisation par propagande, profiter d’imposer leurs solutions.

Dominique Baettig, 05.04.2020

Semmelweis: pionnier de l'épidémiologie et héros de Céline

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Semmelweis: pionnier de l'épidémiologie et héros de Céline

Par Jacques DUFRESNE

Ex: https://metainfos.fr

Ignace Philippe Semmelweis (1818-1865). Voici le nom qui se présente avec le plus d’insistance à mon esprit dans le contexte des deux grands débats actuels : sur le virus covid-19 et sur la violence faite aux femmes. Il se trouve que ce «sauveur des mères» a eu un biographe de génie, lui aussi médecin des pauvres : Louis-Ferdinand Céline. Dans son Semmelweis, qui fut sa thèse de doctorat en médecine, soutenue en 1924, s’ébauche  un style qui s’accomplira huit ans plus tard dans le Voyage au bout la nuit, mais qui déjà, dans sa verdeur, transporte le lecteur dans une région de la vérité à laquelle aucun autre livre ne lui avait donné accès. Ce fut en tout cas mon expérience lors de ma première lecture à la fin de la décennie 1970. J’en suis à ma cinquième ou sixième lecture et je m’exclame de nouveau, avec plus d’enthousiasme encore que jadis : voici un livre qui devrait être une lecture obligatoire dans toutes les facultés de médecine !  J’ai lu quelques grandes biographies, parmi les œuvres de Plutarque, de Saint-Simon et de Stéphan Zweig notamment, aucune ne m’a donné autant que celle de Céline le sentiment de l’unité de l’auteur et de son sujet. Il m’est devenu impossible de les dissocier. Céline cite Semmelweis à quelques reprises, je me demande chaque fois s’Il s’agit vraiment d’une citation.

product_9782070755837_195x320.jpgJe n’hésite plus à mettre entre parenthèses tout ce qu’on sait au croit savoir sur l’antisémitisme de Céline, suivant en cela l’exemple de l’homme qui aurait eu le plus de raisons de jeter l’anathème sur lui, George Steiner, un juif bien formé et bien informé qui, au lieu de nier le génie là où il le voyait associé aux passions les plus funestes, s’inclinait devant le mystérieux scandale de leur coexistence dans un même être,  sans jamais exclure que, dans les mêmes circonstances , il aurait pu lui-même dériver vers les mêmes excès. Je reviens sur cette question dans un article distinct sur Steiner.

Semmelweis est celui qui, en 1848, quarante ans avant les découvertes de Pasteur sur l’infection par les microbes, a trouvé le remède à la plus tragique, la plus durable, la plus récurrente et la plus occultée des épidémies : celle qui, dans les grandes villes européennes du XIXème siècle notamment, frappaient les femmes pauvres réduites à accoucher dans les hôpitaux publics. Le taux de mortalité y était souvent de 40% et plus.

On ne sait plus qui de Socrate ou de Platon, il faut admirer le plus, tant le génie littéraire du second a contribué à la gloire du premier. Semmelweis a devant l’histoire la même dette à l’endroit de Céline que Socrate à l’endroit de Platon. Comparaison disproportionnée, m’objectera-t-on, l’œuvre de Platon est un sommet unique en son genre, tandis que la découverte de l’asepsie par Semmelweis, car c’est de cela qu’il s’agit, ne serait qu’un heureux événement parmi une foule d’autres semblables en médecine. Quand on a lu attentivement la thèse de Céline, on a au contraire et à jamais la conviction qu’il s’agit de deux plaidoyers en faveur de la même vérité, l’un au plus haut degré d’abstraction compatible avec la poésie, l’autre au ras du sol, comme dans les grands romans policiers mais jumelé à une poésie encore plus déchirante : celle de la compassion pour les malheureux.

« Semmelweis était issu d’un rêve d’espérance que l’ambiance constante de tant de misères atroces n’a jamais pu décourager, que toutes les adversités, bien au contraire, ont rendu triomphant. Il a vécu, lui si sensible, parmi des lamentations si pénétrantes que n’importe quel chien s’en fût enfui en hurlant. Mais, ainsi forcer son rêve à toutes les promiscuités, c’est vivre dans un monde de découvertes, c’est voir dans la nuit, c’est peut-être forcer le monde à entrer dans son rêve. Hanté par la souffrance des hommes, il écrivit au cours d’un de ces jours, si rares, où il pensait à lui-même : ‘’Mon cher Markusovsky, mon bon ami, mon doux soutien, je dois vous avouer que ma vie fut infernale, que toujours la pensée de la mort chez mes malades me fut insupportable, surtout quand elle se glisse entre les deux grandes joies de l’existence, celle d’être jeune et celle de donner la vie.’’ »[1]

Le Semmelweis de Céline est une chose unique dans l’histoire de la littérature. Tous les genres littéraires s’y entrelacent dans une harmonie impossible et pourtant bien atteinte : essai sur la méthode scientifique, roman policier, étude de caractères, évocation du génie des villes, histoire d’une époque et, à travers cette époque, témoignages saisissants sur la condition humaine. Quand on ferme le livre, on ne sait pas si l’on sort d’une fiction ailée ou d’un méticuleux rapport de laboratoire, d’une page de l’évangile ou d’une compilation de statistiques, mais on est sûr d’avoir fait quelque progrès dans l’inconnu de la vérité.

Semmelweis lui-même, comme Céline, est un être double, plein de compassion, mais aussi orgueilleux, intolérant et maladroit au point de nuire à ses propres recherches en se mettant inutilement à dos des collègues dont le soutien lui était nécessaire. Chercheurs du monde entier, en scaphandre, reliés par Internet et disposant d’ordinateurs tout puissants, la forme que prend aujourd’hui la recherche médicale, dans le cas des épidémies en particulier, rend très difficile pour nous de comprendre les génies solitaires du passé. Semmelweis fut peut-être le plus solitaire de tous. Et pour l’histoire des sciences telle qu’on la conçoit aujourd’hui, il n’a le mérite de la grandeur ni en tant que théoricien ni en tant que technicien : il ne fut qu’un observateur servi aussi bien par ses défauts, son orgueil, son entêtement que par ses qualités, son amour des vivants et son horreur de l’a peu près.

« L’ à peu près est la forme agréable de l’échec, consolation tentante…

Pour le franchir, l’ordinaire lucidité ne suffit pas, il faut alors au chercheur une puissance plus ardente, une lucidité pénétrante, sentimentale, comme celle de la jalousie. Les plus brillantes qualités de l’esprit sont impuissantes quand plus rien de ferme et d’acquis ne les soutient. Un talent seul ne saurait prétendre découvrir la véritable hypothèse, car il entre dans la nature du talent d’être plus ingénieux que véridique.

Nous avions pressenti, par d’autres vies médicales, que ces élévations sublimes vers les grandes vérités précises procédaient presque uniquement d’un enthousiasme bien plus poétique que la rigueur des méthodes expérimentales qu’on veut en général leur donner comme unique genèse.»[2]

De-Celine.jpgDans l’hôpital de Vienne où Semmelweis travaillait en tant qu’obstétricien, il y avait deux services de maternité, celui du professeur Bartch et celui du professeur Klin, dont il était l’adjoint. Après avoir éliminé une à une toutes les hypothèses, aussi farfelues les unes que les autres, rassemblées dans la littérature médicale de l’époque, il n’avait plus comme point de départ de son enquête qu’un seul fait : les femmes mouraient plus dans le service de Klin que dans celui de Bartch. Une différence entre les deux sautait aux yeux : dans le pavillon de Bartch le service était rendu par des sages-femmes, dans celui de Klin par des internes. Il a suffi à Semmelweis de signaler ce fait pour se mettre à dos et son patron et bon nombre de ses collègues. Il a en outre exigé avec une insistance incorrecte que les internes se lavent les mains entrant dans le pavillon de Klin; ce dernier, pour qui une telle précaution paraissait dénuée de tout fondement scientifique, le congédia. Les protecteurs de Semmelweis, car il en avait quelques-uns à Vienne, organisèrent pour lui un repos de deux mois à Venise, où il se rendit avec son ami Markusovsky. La merveille ici c’est la façon dont Céline, dans son roman biographique, raconte le séjour de Semmelweis et y voit le prélude à ses découvertes futures.

«Jamais Venise aux cent merveilles ne connut d’amoureux plus hâtif que lui. Et cependant, parmi tous ceux qui aimèrent cette cité du mirage, en fut-il un plus splendidement reconnaissant que lui ?

Après deux mois passés dans ce grand jardin de toutes les pierres précieuses, deux mois de beauté pénétrante, ils rentrent à Vienne. Quelques heures seulement se sont écoulées quand la nouvelle de la mort d’un ami frappe Semmelweis. Semblable cruauté du sort n’est-elle point normale dans sa vie ? »[3]

Le malheur n’a laissé aucun répit à Semmelweis. Il avait peu de temps auparavant perdu sa mère et son père. À son retour à Vienne, il apprend la mort de son meilleur ami, Kolletchka. Cette mort, comment se fait donc la science?  enfermait la preuve que cherchait Semmelweis. Kolletchka s’était blessé à un doigt en pratiquant une autopsie : la vérité se dévoilait tragiquement : une quelconque particule cadavérique avait contaminé le sang de cet homme. Les internes transportaient cette substance dans les entrailles des mères. Semmelweis eut droit à un nouveau poste à son hôpital, cette fois dans le service de Bartch. Dans le but de préciser le contour de sa preuve, il obtint de son patron que les sages-femmes soient remplacées par des internes le temps d’une expérience. Le taux de mortalité s’accrut immédiatement. Semmelweis appliqua alors la solution technique qu’il avait à l’esprit depuis un moment : avant chaque intervention, obliger les sages-femmes et les internes à se laver les mains avec une solution de chlorure de chaux. Le taux de mortalité descendit à son niveau actuel.

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Il existait toutefois d’autres causes d’infection que les particules cadavériques. Ces causes ne manquèrent pas de se manifester en certaines occasions. Les adversaires de Semmelweis les invoquèrent pour achever de discréditer leur collègue et l’empêcher de progresser dans la défense de sa thèse. Semmelweis devait tenter par la suite de rallier les plus grands médecins d’Europe à sa cause. Peine perdue, la plupart d’entre eux, y compris le grand Virchow, ne répondirent même pas à ses lettres.

Voici le diagnostic de Céline sur cette infection de la raison humaine par les passions. 

« ‘’S’il s’était trouvé que les vérités géométriques pussent gêner les hommes, il y a longtemps qu’on les aurait trouvées fausses.’’ (Stuart Mill)

Ce philosophe, tout absolu qu’il paraisse, demeure cependant bien au-dessous de la vérité, voici la preuve. La plus élémentaire raison ne voudrait-elle pas que l’humanité, guidée par des savants clairvoyants, se fût pour toujours débarrassée de toutes les infections qui la meurtrissaient, et tout au moins de la fièvre puerpérale, dès ce mois de juin 1848 ? Sans doute.

Mais, décidément, la Raison n’est qu’une toute petite force universelle, car il ne faudra pas moins de quarante ans pour que les meilleurs esprits admettent et appliquent enfin la découverte de Semmelweis.»

Déchiré par la contradiction entre l’amour de ses patientes et l’impuissance déraisonnable de sa profession, Semmelweis perdit le reste de prudence qu’il avait en réserve. Il tenta de dresser l’opinion publique contre ses collègues en les traitant de criminels sur des affiches. « Assassins ! je les appelle tous ceux qui s’élèvent contre les règles que j’ai prescrites pour éviter la fièvre puerpérale. »[4] Il sombra ensuite dans une démence aussi ardente que l’avait été son amour de la vérité et des mères : il fit un jour irruption dans une salle de dissection, s’empara d’un scalpel, trancha les chairs d’un cadavre et se blessa à une main. Il s’ensuivit une infection semblable à celle qui avait emporté Kolletchka, mais plus violente et plus longue.

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La démence de Semmelweis inspira à Céline, sur la maladie mentale, quelques pages qui portent la marque de son génie comme tant d’autres dans son livre.  Savoir raison garder ! La raison, qu’il assimile au bon sens, est cette limite, cette chaîne, qui tempère en nous une intelligence capable de toutes les démesures.

« Rapidement il devint le pantin de toutes ses facultés, autrefois si puissantes, à présent déchaînées dans l’absurde. Par le rire, par la vindicte, par la bonté, il fut possédé tour à tour, entièrement, sans ordre logique, chacun de ses sentiments l’agissant pour son compte, paraissant uniquement jaloux d’épuiser les forces du pauvre homme plus complètement que la frénésie précédente. Une personnalité s’écartèle aussi cruellement qu’un corps quand la folie tourne la roue de son supplice.[…] Semmelweis s’était évadé du chaud refuge de la Raison, où se retranche depuis toujours la puissance énorme et fragile de notre espèce dans l’univers hostile. Il errait avec les fous, dans l’absolu. »

Semmelweis avait participé dans une euphorie excessive et irresponsable à la révolution hongroise de 1848. Pensant aux poètes de la même époque, romantique, Céline rappelle ensuite les risques de la fuite dans l’irrationnel. « S’ils se doutaient, les téméraires, que l’enfer commence aux portes de notre Raison massive qu’ils déplorent, et contre lesquelles ils vont parfois, en révolte insensée, jusqu’à rompre leurs lyres ! S’ils savaient ! De quelle gratitude éperdue ne chanteraient-ils point la douce impuissance de nos esprits, cette heureuse prison des sens qui nous protège d’une intelligence infinie et dont notre lucidité la plus subtile n’est qu’un tout petit aperçu. »[5]

N’en faisons pas une théorie. Céline écrivain éclipse ici Céline psychiatre. Retenons toutefois qu’avant lui Platon et Aristote avaint rattaché l’idée de raison à celle de limite et à arrêtons-nous à la pertinence de ce livre dans le contexte actuel. Semmelweis était un solidaire. Modeste sur le plan théorique par rapport à celles de Pasteur et de Virchow plus tard dans le même siècle, sa découverte, celle de l’asepsie, n’en n’est pas moins l’une des plus importantes de l’histoire de la médecine et elle a l’avantage par rapport à la plupart des découvertes postérieures de donner lieu à des applications qui ne coûtent rien, qui présentent le meilleur rapport coût/efficacité dont on puisse rêver. Rappelons aussi que Semmelweis a jeté les bases de ce qu’on appellera un siècle plus tard la médecine basée sur les faits.

Le même chercheur solitaire aurait sans doute été heureux de disposer des technologies et des moyens de communications offerts aux chercheurs d’aujourd’hui, mais on peut aussi se demander si la médecine ne se prive pas d’occasions de grandes découvertes en misant trop exclusivement les technologies de pointe. Faut-il exclure qu’il y ait dans le cas du cancer, de la maladie d’Alzheimer ou de tel ou tel virus grippal des causes échappant aux radars les plus sophistiqués, des causes simples que seul pourrait découvrir un génie rassemblant tous les facteurs de réussite que Céline a su repérer dans la vie et le caractère de Semmelweis. C’est parce qu’Il se posait les mêmes questions que, dans un livre intitulé Chercher, René Dubos, celui à qui l’on doit la découverte du premier antibiotique, se prononça en faveur de la recherche dans les petites universités comme complément à la recherche dans les grands instituts. Voici ce qu’il a observé dans les petites universités du Middle West : « Ce qui m’impressionne, c’est le nombre de jeunes gens à l’esprit très ouvert de qui sortiront les idées les plus originales, les plus inattendues, alors que si vous allez à Harvard, ou à l’Institut Rockefeller, vous trouverez des gens admirables, mais qui se sont engagés dans une voie dont ils ne pourront pas sortir.»[6]


[1]Louis-Ferdinand Céline, Semmelweis, Gallimard, Paris 1990, p. 81-82.

[2] Ibid., p.80

[3] Ibid., p.74

[4] Ibid., p.111

[5] Ibid., P.121

[6] René Dubos, Jean-Paul Escande, Chercher, Éditions Stock, 1979, p.55

SOURCE : http://encyclopedie.homovivens.org/

Les États-Unis et la Chine sont-ils piégés dans une guerre hybride ?

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Les États-Unis et la Chine sont-ils piégés dans une guerre hybride ?

par Pepe Escobar

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

Les retombées de la pandémie du Covid-19 mettent les États-Unis et la Chine sur des trajectoires de collision

Parmi les innombrables effets géopolitiques bouleversants du coronavirus, l’un d’eux est déjà évident. La Chine s’est repositionnée. Pour la première fois depuis le début des réformes de Deng Xiaoping en 1978, Pékin considère ouvertement les États-Unis comme une menace, comme l’a déclaré il y a un mois le ministre des Affaires étrangères Wang Yi lors de la Conférence de Munich sur la sécurité pendant le pic de la lutte contre le coronavirus.

Pékin façonne avec soin, et progressivement, le récit selon lequel, dès le début de l’attaque du coronavirus, les dirigeants savaient que c’était une attaque de guerre hybride. La terminologie de Xi est un indice majeur. Il a dit, pour le compte rendu, que c’était la guerre. Et, en contre-attaque, une «guerre populaire» devait être lancée.

De plus, il a décrit le virus comme un démon ou un diable. Xi est confucianiste. Contrairement à certains autres penseurs chinois anciens, Confucius répugnait à discuter des forces surnaturelles et du jugement dans l’au-delà. Cependant, dans un contexte culturel chinois, diable signifie «diables blancs» ou «diables étrangers» : guailo en mandarin, gweilo en cantonais. C’était Xi délivrant une puissante déclaration codée. 
 
Note d'un lecteur du Saker Francophone : Pepe Escobar commet ici une erreur sémantique majeure lorsqu'il extrapole l'utilisation faite par Xi Jinping du mot "devil" pour définir le coronavirus, et nommer, à couvert, d'hypothétiques responsables américains (hypothèse par ailleurs tout à fait plausible). Le terme péjoratif pour nommer un "étranger" en cantonais est effectivement "gweilo" ("diable d'étranger"), mais en aucun cas "guailo" (qui devrait en plus s'écrire "lao"), terme qui n'existe pas en mandarin. Le terme employé dans toute la Chine hors de la province du Guangdong, où se trouvent Canton et Hong kong, est "laowai", mot au contraire respectueux qui veut dire "l'étranger" (venu de l'extérieur). Xi Jinping ne parle pas le cantonais, la langue officielle de la Chine est le mandarin, et aucun président de la république de Chine, fut-il cantonais, ne se hasarderait à prononcer un discours officiel dans un dialecte régional. Laurent Schiaparelli

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La délégation américaine aux Jeux militaires de Wuhan, 2019

Lorsque Zhao Lijian, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a exprimé dans un tweet incandescent la possibilité que «ce pourrait être l’armée américaine qui a apporté l’épidémie à Wuhan» – la première diatribe à ce sujet provenant d’un haut fonctionnaire -, Pékin envoyait ainsi un ballon d’essai signalant que les gants étaient enfin retirés. Zhao Lijian a établi un lien direct avec les Jeux militaires de Wuhan en octobre 2019, qui comprenaient une délégation de 300 athlètes militaires américains.

Il a directement cité le directeur américain des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies – Centers for Disease Control and Prevention ou CDC –, Robert Redfield, qui, interrogé la semaine dernière sur la découverte à titre posthume de décès par coronavirus aux États-Unis, a répondu que «certains cas ont été diagnostiqués de cette manière aux États-Unis aujourd’hui».

La conclusion explosive de Zhao est que le Covid-19 était déjà actif aux États-Unis avant d’être identifié à Wuhan – en raison de l’incapacité désormais pleinement documentée des États-Unis de tester et de vérifier les différences par rapport à la grippe.

Ajoutant tout cela au fait que les variantes du génome des coronavirus en Iran et en Italie ont été séquencées et qu’il a été révélé qu’elles n’appartiennent pas à la variété qui a infecté Wuhan, les médias chinois posent maintenant ouvertement des questions en établissant un lien entre la fermeture en août de l’année dernière du laboratoire d’armes biologiques «dangereux» à Fort Detrick, les Jeux militaires, et l’épidémie de Wuhan. Certaines de ces questions ont été posées – sans réponse – aux États-Unis eux-mêmes.

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Des questions supplémentaires persistent sur l’opacité de Event 201 à New York le 18 octobre 2019 : une simulation de pandémie mondiale causée par un virus mortel – qui se trouvait être un coronavirus. Cette merveilleuse coïncidence s’est produite un mois avant le déclenchement de l’épidémie à Wuhan.

Event 201 a été parrainé par la Fondation Bill & Melinda Gates, le Forum économique mondial (WEF), la CIA, Bloomberg, la Fondation John Hopkins et l’ONU. Les Jeux militaires mondiaux se sont ouverts à Wuhan exactement le même jour.

Quelle que soit son origine, qui n’est pas encore établie de manière concluante, alors que Trump tweete sur le «virus chinois», Covid-19 pose déjà des questions extrêmement sérieuses sur la biopolitique – où est Michel Foucault quand on a besoin de lui ? Et la bio-terreur.

L’hypothèse de travail du coronavirus en tant que bio-arme très puissante, mais ne provoquant pas l’Armageddon, le désigne comme le véhicule parfait pour un contrôle social généralisé – à l’échelle mondiale.

Cuba devient une puissance biotechnologique

Tout comme un Xi, entièrement masqué, visitant la ligne de front de Wuhan la semaine dernière a été une démonstration médiatique à toute la planète que la Chine, avec d’immenses sacrifices, gagne la «guerre du peuple» contre le Covid-19, la Russie, dans un mouvement vis-à-vis de Riyad qui serait certainement apprécié par Sun Tzu, a provoqué une chute radicale du prix du baril de pétrole, aidant, à toutes fins utiles, à relancer l’inévitable reprise de l’économie chinoise. Voilà comment fonctionne un partenariat stratégique.

La disposition de l’échiquier change à une vitesse vertigineuse. Une fois que Pékin a identifié le coronavirus comme une attaque par arme biologique, la «guerre du peuple» a été lancée avec toute la puissance de l’État. Méthodiquement. Sur la base de «quoi qu’il en coûte». Nous entrons maintenant dans une nouvelle étape, qui sera utilisée par Pékin pour réviser considérablement son interaction avec l’Occident, et dans des cadres très différents en ce qui concerne les États-Unis et l’UE.

La puissance douce est primordiale. Pékin a envoyé un vol d’Air China en Italie, transportant 2 300 grands cartons remplis de masques portant l’inscription «Nous sommes des vagues de la même mer, des feuilles du même arbre, des fleurs du même jardin». La Chine a également envoyé un lourd colis humanitaire à l’Iran, à bord de huit vols assurés par Mahan Air – une compagnie aérienne soumise à des sanctions illégales et unilatérales de l’administration Trump.

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Le président serbe Aleksandar Vucic n’aurait pas pu être plus explicite : «Le seul pays qui peut nous aider est la Chine. À ce jour, vous avez tous compris que la solidarité européenne n’existe pas. C’était un conte de fées sur le papier. »

Soumis à des sanctions sévères et diabolisé depuis toujours, Cuba est encore en mesure de réaliser des percées – même en biotechnologie. L’anti-viral Heberon – ou Interféron Alpha 2b – un thérapeutique, pas un vaccin, a été utilisé avec grand succès dans le traitement du coronavirus. Une coentreprise en Chine produit une version à inhaler, et au moins 15 pays sont déjà intéressés à importer le produit thérapeutique.

Comparez maintenant tout cela avec l’administration Trump offrant 1 milliard de dollars pour braconner des scientifiques allemands travaillant dans la société de biotechnologie Curevac, basée en Thuringe, sur un vaccin expérimental contre le Covid-19, pour l’utiliser comme vaccin « uniquement pour les États-Unis ».

Psy-op d’ingénierie sociale ?

Sandro Mezzadra, co-auteur avec Brett Neilson du livre fondateur The Politics of Operations : Excavating Contemporary Capitalism, essaie déjà de conceptualiser notre attitude actuelle en termes de lutte contre Covid-19.

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Nous sommes confrontés à un choix entre un volet malthusien – inspiré du darwinisme social – «dirigé par l’axe Johnson-Trump-Bolsonaro» [et Macron ? oublié ? NdT] d’une part, et de l’autre, un volet proposant la «requalification de la santé publique en tant qu’outil fondamental» incarné par la Chine, la Corée du Sud et l’Italie. Il y a des leçons majeures à tirer de la Corée du Sud, de Taïwan et de Singapour.

L’alternative forte, note Mezzadra, se situe entre une «sélection naturelle de la population», avec des milliers de morts, et «la défense de la société» en employant «des degrés variables d’autoritarisme et de contrôle social». Il est facile d’imaginer qui bénéficiera de cette reconstruction sociale, un remix, au XXIe siècle, du Masque de la Mort Rouge de Poe.

Au milieu de tant de pessimisme, comptez sur l’Italie pour nous offrir des nuances de lumière de style Tiepolo. L’Italie a choisi l’option Wuhan, avec des conséquences extrêmement graves pour son économie déjà fragile. Les Italiens en quarantaine ont remarquablement réagi en chantant sur leurs balcons : un véritable acte de révolte métaphysique.

Même les milliers de milliards de dollars, tombant du ciel par un acte de miséricorde divine de la Fed, n’ont pu guérir du Covid-19. Les «dirigeants» du G-7 ont dû recourir à une vidéoconférence pour réaliser à quel point ils étaient ignorants – alors même que la lutte de la Chine contre le coronavirus donnait à l’Occident une longueur d’avance de plusieurs semaines [pour se préparer].

Le Dr Zhang Wenhong, basé à Shanghai, l’un des meilleurs experts chinois en matière de maladies infectieuses, dont les analyses ont été pertinentes jusqu’à présent, affirme maintenant que la Chine est sortie des jours les plus sombres de la «guerre populaire» contre le Covid-19. Mais il ne pense pas que ce sera fini d’ici l’été. Maintenant extrapolez au monde occidental ce qu’il dit pour la Chine.

Ce n’est même pas encore le printemps, et nous savons déjà qu’il faut un virus pour briser sans pitié la Déesse du Marché. Vendredi dernier, Goldman Sachs a déclaré à pas moins de 1.500 sociétés qu’il n’y avait pas de risque systémique. C’était faux.

Des sources bancaires new-yorkaises m’ont dit la vérité : le risque systémique est devenu beaucoup plus grave en 2020 qu’en 1979, 1987 ou 2008 en raison du danger extrêmement accru de l’effondrement du marché des dérivés de 1,5 quadrillion de dollars (1,5×10^24).

Comme le disent les sources, l’histoire n’avait jamais rien vu de tel que l’intervention de la Fed via son élimination, peu comprise, des réserves obligatoires des banques commerciales, déclenchant une expansion potentiellement illimitée du crédit pour éviter une implosion du marché des produits financiers dérivés résultant d’un effondrement total des matières premières et des marchés boursiers à travers le monde.

Ces banquiers pensaient que cela fonctionnerait, mais comme nous le savons maintenant, tout ce bruit et cette fureur ne signifiaient rien. Le fantôme d’une implosion des produits dérivés – en l’occurrence non causée par la possibilité précédente de la fermeture du détroit d’Ormuz – demeure.

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Nous commençons à peine à comprendre les conséquences du Covid-19 pour l’avenir du turbo-capitalisme néolibéral. Ce qui est certain, c’est que toute l’économie mondiale a été arrêtée par un disjoncteur insidieux, littéralement invisible. Ce n’est peut-être qu’une «coïncidence». Ou cela peut faire partie, comme certains le soutiennent hardiment, d’une possible psy-op massive créant l’environnement géopolitique et l’ingénierie sociale parfaite pour une domination tous azimuts.

De plus, avec un travail harassant le long du chemin, et d’immenses sacrifices humains et économiques, avec ou sans redémarrage du système mondial, une question plus urgente demeure : les élites impériales globalisées choisiront-elles toujours de continuer leur guerre hybride totale contre la Chine pour la domination tous azimuts ?

Pepe Escobar

Traduit par jj, relu par Marcel pour le Saker Francophone

lundi, 06 avril 2020

Pandémie et post-démocratie Entretien avec Slobodan Despot

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Pandémie et post-démocratie

Entretien avec Slobodan Despot

Ex: https://strategika.fr

Slobodan Despot est un écrivain suisse d’origine serbe. Il est entre autres l’auteur de La Signification du Kosovo dans l’histoire du peuple serbe, de Valais Mystique et des romans Le Miel et Le Rayon bleu, les deux aux éditions Gallimard. Il est aussi le traducteur de la remarquable étude d’Alexandre Zinoviev sur le globalisme politique intitulée La Grande Rupture. Ami et confident du célèbre dissident soviétique, il restera marqué par sa philosophie. Un héritage qui éclaire la compréhension des temps étranges que nous traversons. Slobodan Despot est le cofondateur et le directeur des éditions Xenia. Depuis fin 2015, il publie chaque dimanche une lettre d’information numérique intitulée Antipresse. Une source d’information attentivement scrutée par la rédaction de Strategika.

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Strategika — On lit beaucoup d’éléments contradictoires selon les différentes sources d’information disponibles ou selon les avis des professionnels de la santé. Quelle est la réalité effective de cette pandémie selon vous?

Slobodan Despot – Qu’est-ce que la réalité effective d’un phénomène et comment la saisir dans cette confusion? On connaît très bien le paradoxe des guerres: le soldat en première ligne ne voit que ses cent mètres de front. Il ne sait pas s’il s’agit d’une bataille dantesque ou d’une escarmouche, sinon par les nouvelles que lui transmet sa hiérarchie. Laquelle ne lui transmet que qu’elle a besoin qu’il sache.

Nous nous trouvons dans la situation de ce soldat, à une nuance près: l’état-major, en théorie, est aussi exposé que nous (même s’il a des brancardiers de piquet dans le couloir), et il n’est pas sûr qu’il ait une meilleure vision du front. Plus exactement, on est fondé à penser que sa vision est brouillée par la superposition de deux angles de vue qui se déforment mutuellement: d’une part, le tableau de l’épidémie en soi; de l’autre, sa projection utilitaire.

De même que les guerres servent souvent à régler des problèmes de politique intérieure au prix de vies cyniquement sacrifiées, de même cette épidémie tombe à pic comme alibi d’un faisceau de mesures suspendues en l’air et qui attendaient leur heure. Faisceau (je n’utilise pas le mot au hasard) qu’on peut ramener à un constat simple: la parenthèse démocratique est terminée!

Ce brouillage, aggravé par le bombardement émotionnel, est si généralisé qu’on est tout étonné de voir passer encore des analyses strictement ancrées dans la réalité de la chose. Ainsi le pathologiste britannique John Lee, dans une remarquable tribune du Spectator (à paraître en traduction française ce dimanche dans l’Antipresse) s’interroge sur la létalité réelle du coronavirus, une fois dégagée de la dramatisation médiatique et — hypothétiquement — isolée du «parasitage» statistique des morts de la grippe, de pathologies diverses ou simplement… de vieillesse. En un mot: dans quelle mesure meurt-on du coronavirus, dans quelle mesure meurt-on avec? Tant qu’on n’aura pas un aperçu de ces données de base, nous serons dans la manipulation de la peur:

«Une grande partie de la réaction à Covid–19 semble s’expliquer par le fait que nous surveillons ce virus d’une manière qui n’a jamais été observée auparavant. Les scènes des hôpitaux italiens ont été choquantes, et font de la télévision un lieu sinistre. Mais la télévision n’est pas une science.»

1461005_medium.jpgNous avons observé un phénomène d’ampleur équivalente, mais de bien moindre intensité, avec la grippe A (H1N1). Au printemps 2009, j’avais repéré sur Agoravox les chroniques d’un pharmacologue français, Bernard Dugué, qui relevait les incohérences de la communication officielle — OMS comprise — sur cette épidémie naissante qui, déjà, promettait de faucher le quart de l’humanité. Si elle est si terrible, observait Dugué, pourquoi n’entreprend-on aucune des mesures connues et établies pour l’endiguer? De cette chronique, nous avons fait un livre. A la rentrée 2009, H1N1, la pandémie de la peur était l’unique ouvrage, sur les 38 titres consacrés à ce sujet dans l’édition française, à dédramatiser la pandémie. Pour ma part, j’étais intuitivement et rationnellement convaincu de l’issue et mon comportement libre, à l’époque, avait suscité des réactions d’une surprenante agressivité (mais qui, du moins, ne pouvaient encore s’adosser à un dispositif policier).

Dugué avait évidemment raison au vu des résultats, pratiquement indiscernables dans le tableau général de la mortalité en 2009–2010. Personne ne l’en a remercié, bien entendu. On avait l’impression que l’issue relativement bénigne de cette pandémie avait déçu bien du monde. La «soif d’apocalypse», ai-je pu observer alors comme aujourd’hui, imbibe l’inconscient collectif de notre temps.

Comparaison n’est pas raison, le COVID_19 semble plus vicieux et plus insaisissable à la fois, mais les parallèles demeurent et ils sont éclairants. Pourquoi cette antinomie, dans les gouvernements occidentaux, entre d’une part la propagation de la panique et l’intimidation martiale, et d’autre part la cautèle, la lenteur et l’ineptie dans le traitement concret? L’affaire Didier Raoult en est un exemple éclatant.

On a l’impression que H1N1 fut, en effet, un ballon d’essai, mais qui aura surtout servi à… ne rien entreprendre. Sinon à peaufiner la communication et affaiblir les structures de défense collectives au profit du seul pharma-business.

ay.jpgStrategika — Cette pandémie précède-t-elle un effondrement économique et systémique?

Slobodan Despot – Je ne suis pas économiste, mais je dirais plutôt qu’elle l’accompagne ou qu’elle le camoufle. De bulle en bulle, ce système en était arrivé à de telles tensions, à un tel écart entre la réalité concrète et ses représentations, qu’un effondrement était inéluctable. D’une certaine façon, nous assistons à l’aboutissement global d’une expérience initiée simultanément, voici un demi-siècle, des deux côtés du Rideau de Fer et qui s’est brutalement arrêtée à l’Est voici trente ans avec l’effondrement de l’URSS. C’est ce dédoublement de la réalité en simulacre total et conscient que l’anthropologue Alexei Yourtchak (photo) a appelé l’hypernormalisation — concept dont le cinéaste britannique Adam Curtis a tiré un film documentaire saisissant. Pour faire court, les élites dirigeantes, ayant compris que le système était inéluctablement voué à la désagrégation, n’ont pas eu la force ou le courage d’essayer de le réformer, mais se sont uniquement soucié de prolonger le statu quo. Pour s’acheter ce sursis, elles ont construit un monde parallèle, un immense «village Potemkine» à vocation sédative.

«Politiques, financiers et utopistes technologiques, résume Curtis, plutôt que de faire face aux complexités du monde, ont battu en retraite. Au lieu d’affronter la réalité, ils ont construit une version plus simple du monde.» L’intelligentsia «créative» — média, art, cinéma — leur a emboîté le pas et l’alliance du pouvoir financier avec l’utopie informatique a rapidement fourni à cet hologramme des moyens techniques et matériels illimités. On allait presque oublier que ce monde idéal, gouverné par les bonnes intentions et la bien-pensance, où des minorités infimes de population reçoivent davantage d’attention et de protection que la majorité laborieuse, ne pouvait rester en lévitation indéfiniment.

Nous ne sommes pas loin du scénario de Matrix, sauf qu’ici les protagonistes sont bien réels. On croise d’ailleurs, à l’aube même de cette vaste falsification un jeune requin de l’immobilier new-yorkais du nom de Donald Trump. Mais voyez plutôt le film.[1]

Strategika — Plus de 3 milliards de personnes sont appelées à se confiner dans le monde. Pour la première fois de son histoire, l’humanité semble réussir à se coordonner de manière unitaire face à un ennemi global commun. Que vous inspire cette situation?

Slobodan Despot – Elle évoque bien entendu le souvenir de tous ces films de science-fiction où seule une invasion venue de l’espace, ou la menace d’un astéroïde géant, parvient à nous faire surmonter nos divisions et à faire front commun. On peut aussi dire, d’un point de vue moins romancé, que la suprasociété globale est de plus en plus homogène. Il ne se trouve aucune autorité, dans aucun pays, à évaluer par exemple cette épidémie à l’aune de ses problèmes sociaux et sanitaires prioritaires et à intégrer le risque qu’elle représente dans un tableau global de la mortalité non naturelle. Dans un pays comme l’Inde où les vieux et les malades meurent dans les rues des grandes villes sans que personne ne s’en soucie, voici qu’on réprime les infractions à la «distanciation sociale» avec la dernière rigueur. Même en Syrie, on verra les hommes en treillis s’entremitrailler avec des masques sur le nez.

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Tout cela a quelque chose d’irréel, comme si l’humanité entière jouait une pièce sur la pandémie. Tous les pouvoirs, quels qu’ils soient, se sentent tenus de payer leur dîme à la narration imposée, quitte à la contourner ou la détourner selon leurs intérêts locaux. La nature stéréotypée de la réaction montre que ces pouvoirs sont très largement unifiés à l’échelle globale. Les exceptions sont rarissimes. Par exemple, certaines Églises orthodoxes rappelant que les nourritures consacrées de la communion ne peuvent par définition être porteuses de maladies. Dans le climat actuel, une telle hérésie risque de leur valoir le bûcher.

Strategika — Cette pandémie va-t-elle forcer l’humanité à se doter d’un gouvernement mondial comme le préconisait Jacques Attali lors de la pandémie de grippe A en 2009?

SB – La réponse est dans la question. «L’humanité», tout d’abord, qui est-ce? Que veut-elle? Si vous imaginez un référendum sur la question en temps normal à l’échelle des quatre milliards de citoyens en âge de voter, la réponse sera certainement cacophonique. Aujourd’hui, si vous leur posez la question de manière adéquate — par exemple: «Acceptez-vous un gouvernement mondial qui organise une lutte efficace contre la pandémie et vous assure une levée du confinement sous deux semaines», vous aurez 99 % d’adhésion. Pour ceux qui ne pensent qu’à ça, qui n’œuvrent qu’à ça et qui y voient un intérêt concret, c’est la meilleure fenêtre de tir depuis la Grande Peste.

Concrètement, l’ensemble de l’humanité se retrouve aujourd’hui en Corée du Nord, à obéir du matin au soir sans rien attendre en retour que la miséricorde d’une simple survie. La population de Corée du Nord est-elle en mesure de «se doter» de quoi que ce soit qui ne lui soit pas imposé?

Strategika — En 2009 toujours, Jacques Attali expliquait que «l’Histoire nous apprend que l’humanité n’évolue significativement que lorsqu’elle a vraiment peur». Que vous inspire cette idée?

SB – Il a raison. La masse effrayée court effectivement bien plus vite que des individus prévenus et sceptiques. La question est de savoir vers quoi. Nous avons l’exemple édifiant des lemmings.

Strategika — Comment voyez-vous l’évolution de la pandémie et ses conséquences politiques et sociales dans les semaines à venir?

SB – Tout dépend des pays. En France ou en Suisse, je vois une levée du confinement au plus tard début mai, faute de quoi c’est une pandémie plus grave — violences, dépressions, suicides et troubles sociaux — qui prendra la relève. Les gens préféreront affronter le virus que la famine ou l’extermination conjugale. En Suisse, où les milieux économiques ont manifestement (quoiqu’en coulisses) pris en main les rênes, je pense que l’instant du «break even» sera rapidement déterminé et qu’on tentera une sortie «en douceur», par exemple en filtrant la population et déconsignant les valides, immunisés ou testés négatifs. En France, l’ineptie du pouvoir et l’existence de «zones de non droit» me font penser que l’issue sera plus aléatoire. Il est beaucoup plus aisé de prononcer le confinement que de le lever. Il suffit d’un coup d’œil sur les réseaux sociaux pour entendre gronder la colère, souvent irrationnelle, contre les autorités. Si vous enfermez votre meute dans un chenil, que vous l’affolez de peur et que vous ne lui accordez pas les soins minimaux, il vous faudra tirer la clenche du portail avec une très longue ficelle.

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D’un autre côté, si la pandémie ne tient pas ses horrifiques «promesses», je pense que cette mesure extrêmement brutale qu’est le confinement ne tiendra pas. L’été arrive. L’humain fera n’importe quoi pour accéder à l’air libre. Même à Londres sous les V2, la vie continuait. Mais peut-être essaie-t-on justement de remplacer cet animal trop dégourdi et trop gourmand en espace vital par une espèce mieux calibrée? Pour cela, il faudra accélérer la fabrication de drones et de dobermans robotiques pour remplacer les garde-chiourme encore trop humains. Méditons sur l’ultime mise en garde de Julian Assange parlant d’une «vile poussière intelligente» imprégnant toute notre vie grâce aux nanotechnologies (relayées demain par la 5G et l’«internet des objets»). C’était son dernier message d’homme presque libre, juste avant qu’on lui coupe l’internet.

Strategika — Existe-t-il une issue politique à la situation que vous venez de décrire et quelle forme pourrait-elle prendre selon vous?

SB – Je pense, et j’espère, qu’il n’existe pas une issue politique à cette crise, mais une palette d’issues, déterminées selon les circonstances locales et les rapports gouvernants-gouvernés locaux. La seule issue unique consisterait en ce fameux gouvernement mondial que la suprasociété appelle de ses vœux. Et encore, à voir comment les instances supranationales «gèrent» les crises, on peut se demander en quoi cette concentration de pouvoirs serait plus salutaire que les piteux gouvernements en place.

J’observerai, ceci dit, que la notion même de politique implique un substrat humain et social en tout point opposé à l’ingénierie sociale que la crise actuelle cherche à imposer. Depuis la Deuxième guerre mondiale, comme l’a montré un Pierre Legendre, la société technologique globale évolue vers un «Empire du management» où la politique ne joue plus qu’un rôle ornemental. Toutes les contraintes environnementales, climatiques, «sociétales» et «genderiques» qu’on nous impose ces dernières années achèvent de transférer des pans entiers du champ ouvert de la politique vers la zone fermée et intangible de la nécessité et du tabou moral. Le bac à sable de la politique, dans le monde d’avant le confinement, se résumait à de vaines querelles de personnes et à des enjeux subalternes, avec un personnel d’une sidérante petitesse. Comment pouvait-on à la fois se laisser acheter pour deux costumes et prétendre manier le feu nucléaire? Dans bien des cas, la «carrière» politique était devenue l’équivalent social de l’entrée dans les ordres sous l’Ancien régime: une voie de garage pour les cadets de famille, les veules et les surnuméraires. Il n’est qu’à voir la morgue avec laquelle les ingénieurs (managers, financiers, technologues et juristes) considèrent les «politiques» pour comprendre le divorce de ces deux castes et la dégénérescence qu’il recouvre.

Strategika — Comment liez-vous la crise actuelle à votre domaine d’expertise et votre champ de recherche?

SB – D’une certaine manière, la crise est mon domaine d’expertise et de préoccupation, que ce soit en tant qu’éditeur et journaliste ou en tant qu’écrivain. Le choc de l’éclatement provoqué de mon pays natal, la Yougoslavie, a changé le cours de mes études, l’orientation de mes pensées et de manière générale toute ma vie.

Mon premier roman, Le Miel, a pour théâtre les décombres encore fumants de la Yougoslavie. Le deuxième, Le Rayon bleu, traite de la rarissime prise de conscience effective de la menace d’une extinction nucléaire. La crise actuelle n’est que l’aboutissement inéluctable de processus connus et amplement décrits. D’un point de vue spirituel, elle est inscrite de toute éternité — disons pour simplifier comme une des étapes finales du Kali Yuga, cet âge de fer où le monde se vide littéralement de sa substance comme par une blessure ouverte pour succomber au règne morbide de la quantité.

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L’âge où nous sommes n’a été capté dans son essence que par les visionnaires et par ces médiums sociaux que sont les grands écrivains. De même que Dostoïevski avait décrit le bolchevisme dans sa nature démoniaque un demi-siècle avant la Révolution d’octobre — et un bon siècle avant que le rideau de cette colossale illusion finisse par se déchirer —, de même un C. S. Lewis avait dépeint avec minutie la simplification mécaniste de l’humain et le putsch des gestionnaires dans sa Trilogie cosmique (1938–1945), en particulier dans sa dernière partie, Cette hideuse puissance. Sans oublier sa prophétie très précise de l’Abolition de l’Homme non par des régimes totalitaires, ni par des cataclysmes, mais par des messages anodins diffusés par d’insipides manuels scolaires qui, goutte à goutte, subliminalement, en «déconstruisant» nos mythes et notre «irrationalité», ont fait de nous ces êtres frémissants tapis au fond de leurs clapiers et mendiant la survie. L’homme se distingue justement du bétail en ceci qu’il refuse la survie à n’importe quel prix.

Je n’ai pas de domaine d’expertise. Je dirais même qu’au stade où nous en sommes l’expertise nous égare alors que la conscience universelle nous sauve. Nous avons besoin de connaissance, toujours, mais aujourd’hui nous avons surtout besoin d’âme et de cœur, autrement dit de vertu au sens antique. Si nous rampons vers la termitière, ce n’est pas seulement qu’on nous y pousse: c’est que nous sommes des termites.

Mon champ de recherche s’apparente à la déambulation de Diogène avec sa lanterne. Je traque l’homme derrière l’«individu» et le «citoyen», je l’interroge et le provoque, et je l’encourage à se hisser au-dessus des rôles qu’on lui fait endosser. C’est tout le sens de l’Antipresse, ce projet qui m’occupe depuis quatre ans, et qui n’est rien d’autre qu’une messagerie où les humains parlent aux humains.


[1] Pour plus de détails, je renvoie à mes textes «Pourquoi il ne se passe rien (1/2)», Antipresse 101 | 05/11/2017, «Pourquoi il ne se passe rien (2/2)», Antipresse 102 | 12/11/2017.

Géopolitique du coronavirus - Entretien avec Pierre Le Vigan

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Géopolitique du coronavirus

Entretien avec Pierre Le Vigan

Ex: https://strategika.fr

Au cœur d’une crise mondiale inédite par son ampleur, Strategika vous propose l’éclairage d’analystes et de penseurs reconnus dans leur domaine d’expertise. Nous avons posé à chacun une série de questions qui portent sur les différents aspects de cette véritable crise de civilisation ainsi que sur ses répercussions politiques, géopolitiques et sociales.

Nous poursuivons cette série d’entretiens avec Pierre Le Vigan

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Pierre Le Vigan est urbaniste. DESS d’urbanisme, DEA de l’EHESS, CEA d’école d’architecture, maitrise d’AES, licence d’histoire, DESU de psychopathologie, licence de philosophie. Collaborateur de nombreuses revues depuis des décennies, il a donné des cours (économie, droit public, politiques urbaines) aux universités d’Orsay, Créteil et Bobigny–Villetaneuse. Il a publié quelque 800 articles sur des sujets de sciences humaines et une quinzaine de livres. Ses derniers ouvrages sont Le malaise est dans l’homme, Ecrire contre la modernité, La banlieue contre la ville, Soudain la postmodernité, Métamorphoses de la ville (édition revue et augmentée en mars 2020), Achever le nihilisme (Sigest, 2020), Le grand empêchement. Comment le libéralisme entrave les peuples (ed. Perspectives Libres/Cercle Aristote), Avez-vous compris les philosophes ? 3 volumes parus (éditions la barque d’or). Ses livres ont été salués pour leur finesse, leur profondeur de vue, et leur rigueur.

Strategika – On lit beaucoup d’éléments contradictoires selon les différentes sources d’information disponibles ou selon les avis des professionnels de la santé. Quelle est la réalité effective de cette pandémie selon vous ?

Merci à votre société de pensée de mener cette enquête,  nécessaire pour y voir clair. L’obscurcissement des enjeux est en effet un élément de la guerre idéologique – et cette guerre est menée, n’en doutons pas, par le pouvoir.

On parle de pandémie à propos du Covid-19 parce que c’est une épidémie de masse, mondiale. Elle est tout simplement mondiale parce que nous vivons dans un monde… mondialisé. Plus de 3 % de la population mondiale émigre chaque année, et ce pourcentage est en augmentation depuis des décennies. En France, près de 400 000 immigrés (nous ne parlons que des légaux) s‘installent tous les ans, la plupart durablement, voire définitivement, et en y fondant une famille ou en en faisant venir une. Mais il n’y a pas que l’immigration. Il y a le tourisme.

Le nombre de touristes a doublé en 30 ans et représente environ 900 millions de personnes, soit 12 % de la population mondiale. 12 %  de la population mondiale qui fait des voyages internationaux. Nous ne parlons pas de voyages de Romorantin à Vendôme… Ainsi, la France a accueilli en 2018  le chiffre délirant de prés de 90 millions de visiteurs étrangers, plus que sa population (69 millions). Le tourisme devient le contraire du voyage. Il devient la prostitution généralisée des lieux d’histoire, de culture, de culte, d’identité. Le tourisme « disneylandise » le monde. Il le muséifie. Il le réifie. Il participe au système à tuer les peuples. Il amène à ce que Rodolphe Christin appelle « l’usure du monde ».

Bien sûr, il ne faut pas supprimer l’hospitalité, qu’elle concerne le tourisme ou l’immigration, mais il faut qu’elle soit choisie par les accueillants, et sans culpabilisation aucune en cas de refus de leur part. Il faut rompre avec la logique de ce que  Crawford Brough Macpherson a appelé dès 1962 « l’individualisme possessif ». C’est cet individualisme de propriétaire qui fait que nous raisonnons en termes de « porteur de droits », que nous emmenons partout avec nous, alors qu’il s’agit, dans une société saine, d’élaborer en commun, sur un territoire donné, le droit qui s’impose à tous.  Rompre avec l’individualisme possessif, c’est considérer que l’individu n’est pas propriétaire de lui-même,  qu’il n’est justement pas un individu, mais un membre d’une communauté politique qui l’oblige et en même temps lui fait une place. C’est cette rupture qui est nécessaire. Une rupture avec la vision du monde individualiste.

Compte tenu de cette « touristisation » du monde, encore plus importante que les migrations, le virus Covid-19 se répand facilement partout. Certes, il y avait dèjà des épidémies au Moyen Age, et d’ampleur européenne (la Grande Peste dite Peste noire de 1346-52), une Europe où on voyageait, ce qu’on oublie trop souvent, mais l’ampleur de la propagation du virus est maintenant multipliée par la vitesse et l’ampleur des déplacements actuels. De continentale, une épidémie devient vite mondiale avec les voyages en avion et les transports massifs de marchandises, et c’est alors une pandémie.  

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Quant à son degré de gravité, on peut voir les choses sous des angles qui le font apparaitre très différemment. Le 2 avril, on comptait 45 000 morts dans le monde (35 000 le 30 mars, ce qui montre une progression rapide mais qui est en fait très différenciée). Localement, il y a des disparités : des pays où l’épidémie régresse (Chine), d’autres où elle progresse (France, Italie, Espagne, quoique l’Italie semble proche du point d’inflexion, à confirmer). Pour une population de près de 8 milliards d’habitants, c’est très peu (mais nous n’en sommes pas au bout), sachant que tous les ans, quelques 60 millions de personnes décèdent dans le monde (toutes causes confondues).

En France, nous en sommes à 4 000 morts le 2 avril (3000 le 30 mars). Sur 600 000 décès annuel, dans un pays de 69 millions d’habitants, c’est 0,5 % de la mortalité normale.  Moins que le nombre de morts d’accidents de la route (environ 4 500).  

Voyons les choses d’une autre façon. Regardons l’Italie. Le nombre de morts y a dépassé celui de la Chine. Et nous sommes dans un pays de 60 millions d’habitants, et pas 1,4 milliard comme la Chine.  Mais le plus inquiétant n’est pas là. L’inquiétant est la tendance : 1000 morts par jour le 27 mars, et le nombre de mort, depuis février, a doublé tous les 3 jours. Même en restant à 1000 morts par jour,  si cela durait, nous aurions en Italie 365 000 morts de plus par an, soit 1 000 000 morts au lieu de 650 000. Vu sous cet angle, l’épidémie apparait très inquiétante. Donc, deux angles de vue existent. A l’échelle de la planète, le problème parait un problème parmi d’autres, et un des plus mineurs.  A l’échelle de nos pays européens à la démographie faible, voire négative, et vieillissante, le problème apparait considérable. Entre ces deux visions laquelle choisir ?  La moins catastrophique s’impose.

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Dr. Bruno Lina

Le virologue Bruno Lina explique : “Les tailles moyennes [il veut parler des durées] des épidémies sont de deux à trois mois”. Mais il précise qu’il “peut y avoir plusieurs vagues”. En 1920, avec la grippe espagnole, il faut savoir que c’est la 2e vague qui fut la plus meurtrière. Comment allons-nous en sortir ? Par une régulation naturelle, disent la plupart des épidémiologistes. “Il va y avoir des infectés, ils vont guérir et devenir immunisés. Cette immunité va freiner la diffusion du virus, voire arrêter l’épidémie si elle est couplée à des mesures d’hygiène et des mesures barrières.”  (Bruno Lina, 4 mars 2020). De fait, il y a deux façons d’être immunisé : l’une est d’avoir contracté le virus et d’en être guéri, l’autre est d’être vacciné, ce qui ne concerne pour l’instant personne en France, le vaccin n’étant qu’à l’étude. C’est bien pour cela que certains Etats (la Grande- Bretagne) ont opté dans un premier temps pour une immunisation collective, c’est-à-dire pour ne rien faire, avant de se rallier à des mesures de distanciation sociale limitant le choc de la propagation du virus.

Vaccin ou guérison. Tel est donc l’alternative officielle. Bien entendu tout le monde ne va pas guérir : 97 à 98 % des détectés positifs détectés au Covid-19 guérissent. Pas les autres. Et bien sûr le pourcentage de ceux qui ne guérissent pas est beaucoup fois plus grand chez les personnes âgées et chez les malades, que chez les moins de 60 ans. Il faut donc prendre cette épidémie très au sérieux, mais bien voir que ce n’est sans doute pas le problème majeur de la santé publique, par rapport au cannabis (5 millions de consommateurs en France, dont 700 000 usagers quotidiens), voire par rapport aux usages toxicomaniaques de cartouches de gaz (on trouve dans chaque rue de banlieues populaires des dizaines de cartouches par terre qui indiquent le développement de cette drogue comme une trainée de poudre), par rapport aux cancers dus à la mal bouffe et au stress de la vie moderne, « cet univers de camelote qui est le monde moderne » (Drieu La Rochelle), etc. Bref, par rapport à toutes les autres causes de fragilité de la santé.

* * *

Evidemment, la fin de l’épidémie peut être facilitée ou retardée en fonction de notre comportement collectif. Le non rapprochement évite, ou limite, les risques de transmission du virus. Reste à savoir si le maintien de distances entre les gens nécessite le confinement tel qu’il est pratiqué. D’autres pays ont compris que la nécessaire distanciation sociale n’est pas la même chose que le confinement.

On peut remarquer plusieurs incohérences dans le confinement strict et sans nuance tel qu’il est édicté et, plus ou moins pratiqué chez nous.  Le vélo est interdit pour l’activité « exercice physique », admise dans le formulaire d’auto-dérogation de sortie. Or, il ne peut pas se pratiquer en étant collé l’un à l’autre. Le vélo implique une distance d’au moins un mètre – qui suffit à se protéger mutuellement. Le vélo implique donc la distanciation sociale. De même, les promenades en forêt, ou sur le bord des fleuves sont interdites. Or, si les promenades en groupe, et les pique niques collés sont évidemment à éviter, une promenade dans un endroit aéré en gardant une distance d’un mètre ne présente pas de danger. A fortiori une promenade solitaire… qui est pourtant interdite.

Par ailleurs, le confinement amène d’autres pathologies, collectives  et personnelles, ou les aggravent, et devrait être mis en perspective et en balance avec celles-ci. On observe l’augmentation des violences conjugales. Quand un couple tient parce qu’on se voit peu, comment résister  en période de confinement ?

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Il y a aussi les conséquences sociales. Un exemple : dans l’Aisne, on compte 31 morts (30 mars) et, dans le même temps, un millier de demandes de chômage partiel qui concernent 10 000 salariés. Derrière cela, et partout ailleurs, des angoisses, des dépressions, voire des suicides. Dans ce même département, le préfet avait envisagé, avant de reculer, d’interdire la vente d’alcool. Dans une petite ville du midi (Var), un maire interdit… tout déplacement à plus de 10 mètres du domicile. Il interdit la vente de baguette à l’unité. Il faut en acheter plusieurs à la fois, de façon à ne sortir qu’une fois ou deux par semaine (il a dû revenir sur cette mesure). Une véritable hystérie s’empare de certains élus et fonctionnaires tandis que, dans le même temps, des consignes de souplesse dans l’application du confinement sont données pour les « quartiers sensibles » des banlieues. Quartiers dans lesquelles agressions de pompiers et de policiers se poursuivent.

Chacun sait que, plutôt que un confinement de tous, un confinement des personnes à risques (personnes âgées, et porteurs de virus) aurait été moins déstabilisant pour la société tout entière. Mais cela eu nécessité que nous ayons des tests en quantité. La rigueur uniforme et absurde du confinement (l’interdiction de se promener même seul en forêt ou au bord d‘un fleuve est emblématique) est stupide, mais elle est surtout proportionnelle à l’imprévoyance de nos dirigeants, et, en conséquence, au manque de masques, de tests, de respirateurs. 

Didier Raoult, de l’IHU de Marseille – La Timone, propose justement de multiplier les tests de dépistage. Il y a et il y eut à l’évidence une rivalité, et de probables conflits d’intérêts, entre des institutions centrales, liées au pouvoir macronien, avec Agnès Buzyn, son mari Yves Lévy (directeur de l’Inserm jusqu’en 2019), et le « cousin de province », selon l’expression de Michel Onfray, qu’est Didier Raoult. En même temps, il faut souligner qu’il peut y avoir des questions scientifiques débattues de bonne foi sur les effets secondaires de la chloroquine (dite encore cloroquinine), molécule qui, certes, existe et est administrée depuis 40 ans, mais comme traitement contre le paludisme, non contre le Covid-19 (on désigne par ce mot la maladie du coronavirus). Est-ce cela qui guide les pouvoirs publics ? Leur préoccupation principale n’est-elle pas de faire de ce virus une occasion de profits, ce que ne permettrait pas l’hydroxychloroquine, associée à un antibiotique, proposée par le professeur Raoult, avec des résultats, d’après ce qui nous est communiqué, très supérieurs à tous les autres traitements ? Un autre traitement ? Un vaccin ? Sur lequel on aura de toute façon beaucoup moins de recul que sur la chloroquine ? Pour quoi faire, sinon pour faire des profits privés sur le dos de la Sécurité sociale, c’est-à-dire sur le dos des Français ? 

En fait, le Covid-19 montre l’état déficient de notre système de santé. Nous manquons de lits de soins intensifs. Nous en avons 4 fois moins que les Allemands. Nous manquons de masques. Nous en produisons 8 millions par semaine. Taiwan, petit pays de 23 millions d’habitants,  en a produit 10 millions par jour. Notre désindustrialisation se paie au prix fort. Notre économie externalisée montre sa faiblesse ; La France 6e puissance économique mondiale ? C’est en fait un village Potemkine. Le roi est nu. Nous dépendons de l’étranger pour tout, et surtout pour nos médicaments.  C’est le virus du libéralisme qui permet la propagation du Covid-19. Cela amène à redéfinir le souverainisme. Un souverainisme purement juridique ne servirait à rien. Il n’y a de vraie souveraineté qu’avec une autonomie économique, avec une certaine capacité d’autarcie. C’est désormais la question majeure qui se pose.

Il faut souligner d’autres aspects, non pas du virus lui-même, mais de la réponse apportée à la pandémie. A savoir le confinement. Cela soulève des questions philosophiques et anthropologiques. Il y a d’autres moyens que le confinement pour connaitre les vertus de la « demeure », selon l’expression de François–Xavier Bellamy (c’est le sujet de son beau livre éponyme). Le confinement rajoute du non-sens à une vie urbaine déjà largement dénuée de sens : « un monde, dit Lewis Mumford, qui de plus en plus échappe au contrôle des hommes, et qui, pour l’humanité, a de moins en moins de sens. » C’est un mode contrôlé, digitalisé par des processus technologiques mis en place par des instances de contrôle social total.  “Grâce à cette nouvelle ‘mégatechnologie’, la minorité dominante créera une structure uniforme, supraplanétaire » ? disait déjà Lewis Mumford (Le mythe de la machine, 1967). Préscience d’un gouvernement mondial.

Ce n’est pas être complotiste (encore que, sachons-le, de vrais complots existent) que de constater que les gouvernements, et le nôtre en tête, tirent parti d’une crise qu’il n’ont pas su ou pas voulu anticiper pour faire avancer l’idée de règles mondiales, c’est-à-dire pour renforcer le pouvoir de la superclasse mondialiste, affairiste et ploutocratique (rappelons que cela veut dire tout simplement pouvoir de l’argent, gouvernement des plus riches). En vérité, il est sidérant de voir à quel point des privations essentielles de libertés sont passées avec fort peu de résistances. Dans une « société » (à défaut de dire une nation, car sommes-nous encore une nation ?) dans laquelle le libéralisme a voulu nous libérer de toute contrainte, quand une certaine discipline est nécessaire – et elle l’est avec ce virus – il n’y a plus d’autre solution que la privation des libertés les plus élémentaires. Que beaucoup se résignent à une telle privation de libertés est très inquiétant. D’autant que cela s’accompagne d’un contrôle social, d’un traçage des faits, gestes et déplacement qui est tout simplement  un totalitarisme accompli.  Quel Albert Camus nous en dira le haut le cœur ressenti par tout honnête homme ?

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Dans le même temps, des camionnettes passent dans les rues, appelant au confinement, avec des mots d’ordre en langue de bois : gestes barrière, etc. Un conditionnement social s’installe avec une force inouïe : c’est « une journée particulière » comme celle d’Ettore Scola, mais étendue à des semaines et à des mois. Face au virus, il nous faut croire qu’ « il n’y a qu’une seule politique possible ». De même, face à la destruction du monde par le capitalisme et le productivisme, il nous faut croire qu’il n’y a qu’une analyse possible, la théorie officielle du réchauffement climatique édictée par le GIEC, organisme intergouvernemental, et une seule réponse possible, le « développement durable », doctrine officielle de toutes les grandes métropoles et de tous les ministères. Et il nous faut fermer les yeux sur tout ce qui relève de la destruction de la terre sans relever forcément du réchauffement climatique.

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Lewis Mumford écrivait encore, il y a 50 ans : « La société des grandes métropoles est particulièrement bien outillée pour éliminer les initiatives spontanées et l’indépendance de l’esprit…Par l’antenne de la radio et de la télévision, un très petits nombre d’individus interprètent à notre place, avec une adresse toute professionnelle, les mouvements d’opinion et les événements quotidiens. Ainsi les occupations les plus naturelles, les actes les plus spontanés sont l’objet d’une surveillance professionnelle et soumis à un contrôle centralisé. Des moyens de diffusion, aussi puissants que variés, donnent aux plus éphémères et aux plus médiocres ouvrages un éclat et une résonance qui dépassent de loin leurs mérites. » (La cité à travers l’histoire, 1966).  Le contrôle social a fait depuis des « progrès » énormes. Il les a faits par l’extension continue de la ville capitaliste, et de l’Etat tentaculaire à son service. Un véritable processus de sidération collective est en place, avec les médias télévisuels en boucle (et le faible nombre de kiosque à journaux). De plus en plus de gens vivent dans un monde de plus en plus artificiel, « un monde de murs vitrés, de plexiglass, de cellophane, qui les isole de leur peine et des mortifications de la vie, – monde d’illusionnistes professionnels entourés de leurs dupes crédules », écrit encore Lewis Mumford.

* * *

On nous dit que le confinement est nécessaire pour sauver des vies. Non, la vie n’est pas la valeur suprême, la valeur suprême, c’est la vie libre qui est la valeur suprême. C’est cela qui fait que les Espagnols ont résisté à Napoléon en 1808, c’est cela qui fait qu’il y a eu des Résistants, ou des gens qui ont risqué leur peau, dans un camp ou dans un autre, à toutes les époques, pour leurs idées, ou pour une certaine conception qu’ils avaient de l’honneur, etc. Or, la facilité avec laquelle les libertés les plus élémentaires ont été supprimées laisse pantois. Ces libertés seront-elles toutes rétablies après la crise du coronavirus ? Ce n’est pas du tout certain. L’état d’urgence (un mot bien facile), ici l’urgence sanitaire, l’état d’exception peut être appliqué à bien d’autres domaines. En outre, on constate que le confinement est proportionnel à l’impuissance et à l’imprévoyance de notre Etat. En Allemagne, pays moins imprévoyant, il n’y a pas de confinement. Il  y a simplement une interdiction de sortir à plus de deux. C’est la distanciation sociale. Il est possible de voyager, d’aller d’une vile à une autre. Nous sommes à mille lieux de la situation française.

Nous avons donc les inconvénients d’une société policière, alors que nous avons depuis des décennies tous les inconvénients d’une société ouverte. La cause en est que, en dernière instance, ce qui détermine les choix de nos dirigeants, c’est le profit, c’est la course en avant dite « croissance », c’est la mondialisation spatiale – dont la limite sera la consommation de toute la terre et de toutes ses ressources – et la marchandisation de toutes les tranches de la vie de l’homme, avec la numérisation intégrale de nos vies. 

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Si certains voient des vertus au confinement, je n’en vois guère. Le confinement permettrait le retour à soi ? Voire. Le confinement n’est pas forcément l’isolement. Il peut même être son contraire : il peut être l’entassement dans un petit logement.  Et il y n’y a jamais eu besoin de confinement, en clair, d’assignation à résidence, pour trouver la solitude. « Qui cherche l’exil le trouve », disait Montherlant.

Le confinement, c’est, par contre, une accoutumance à l’emprisonnement et à la domestication de l’homme. Chacun s’autorise à sortir dans certaines conditions. Chacun devient le gardien de soi-même en attendant d’être peut-être le délateur de ses voisins. Il y a bien sûr une discipline à observer et des précautions à prendre, pour soi et pour les autres. Mais il y a quelque chose de profondément malsain dans la situation actuelle. Il y a un évident abus de pouvoir de l’Etat. Il y a, normalement, trois instances anthropologiques de régulation d’une société : le commun, le public, l’étatique. Le commun n’est pas forcément le public, et le public n’est pas forcément l’Etat. Or, avec le libéralisme et l’individualisme qui va avec, le commun n’a plus de place, et le public est de plus en plus démantelé. Quand il subsiste, il est entièrement asservi à l’Etat, c’est-à-dire à ses hauts fonctionnaires, eux-mêmes très liés au monde économique et volontaires pour en rajouter dans tous les crétinismes à la mode (telle l’écriture inclusive, qui aurait bien fait rire Jean de la Fontaine). Sous couvert d’expertise c’est l’argent, c’est la profitabilité qui est souvent l’arbitre. Nous en sommes au point où le libéralisme entraine l’étatisme, et le pire de celui-ci.

En outre, la nouvelle phase du libéralisme est anti-conservatrice, elle ne s’appuie plus sur l’idée d’un ordre naturel – ce qu’elle faisait auparavant d’une manière abusive en réduisant la nature de l’homme à la recherche de son intérêt –, mais elle prétend désormais que la nature de l’homme, c’est de ne pas en avoir, c’est la plasticité absolue. Qu’est-ce que l’homme du point de vue libéral ? Un matériau façonnable à merci, interchangeable sans limite, substituable facilement par un autre homme. Ou par une « intelligence » artificielle. Un robot. Et quand cette plasticité absolue ne se constate pas, le libéralisme l’impose. C’est cela le « néo » libéralisme : le projet d’imposer un homme nouveau, au-delà des peuples, au-delà des races, au-delà des catégories du masculin et du féminin.  Un homme digitalisé, au-delà même de l’humain. La manipulation des mots est un des aspects de ce projet totalitaire : Macron, dans un de ses discours répète six fois « nous sommes en guerre ».  La fausseté de ce propos est totale. Un virus, un cancer, une maladie n’est pas une guerre. C’est un drame, c’est tragique, comme bien des choses dans la vie, mais tout drame n’est pas une guerre. « Le vocabulaire de guerre laisse entendre ‘’silence dans les rangs’’ », souligne Jean-Luc Mélenchon. Or, « le covid-19 n’est pas un ennemi, c’est juste un virus », dit-il avec justesse.

Mais depuis Sarkozy et Hollande, nos présidents ne savent plus ce qu’est une guerre, comme Chirac le savait, comme Giscard le savait, comme Chevènement le savait.  Ils ne le savent plus – et personne ne songe à leur reprocher de ne pas les avoir vécues – mais ils ne le sentent pas non plus. Ils sont les complices, mais aussi les victimes d’un monde post-national. Nos dirigeants croient que l’échange marchand permet de sortir de l’histoire. Ils veulent un monde post-national, mais sont prêts à le faire accoucher au forceps. Guerre à la guerre, donc guerre aux nations. Mais le réel fait de la résistance. Les peuples ne veulent pas mourir. La France ne veut pas mourir.

Dés lors, les mots de M. Macron sont vides. Son verbiage  souligne la désertion du sens. Mais le gouvernement ne perd pas de vue ses objectifs de toujours : démembrer l’Etat protecteur.  Du reste, au même moment où M. Macron explique que, désormais, le marché ne doit pas imposer sa loi partout, un rapport de la CDC prône, sans originalité, comme solution aux problèmes de l’hôpital, sa… privatisation (Marianne, 2 avril 2020).

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La crise sanitaire est l’occasion pour le gouvernement d’accentuer la domination de la société par l’expertocratie (dont je trace la genèse dans Le grand empêchement). Le gouvernement se réfugie, face au virus et à la nécessité de décider, derrière un Comité scientifique. Or, la science ne pense pas. Les scientifiques peuvent penser, mais ils ne sont pas là pour décider. La décision est un choix politique. En outre, les scientifiques ne sont pas tous d’accord entre eux, sur la nature d’une épidémie, sur sa portée, sur les traitements, et ils ne sont pas là pour édicter des priorités. Faut-il sauver en priorité un immigré sans papier qui n’a jamais cotisé, ou un vieux Français qui a cotisé toute sa vie ? S’il faut choisir – et il faut espérer que non, mais la réalité nous oblige à constater que des choix sont faits – ce choix est éminemment politique.  

Bien entendu, on a pu remarquer que le confinement oblige certains à prendre du recul. « Nombreux sont les bourgeois qui fuient dans l’affairement leur vide intérieur », remarquait Finkielkraut. Et pour cela, le confinement peut être l’occasion d’une prise de distance par rapport au quotidien. Mais pour d’autres ? Pour des travailleurs immigrés hébergés dans un foyer, dans des chambres de 7 m2 ? Quelle est la qualité de leur confinement, moins confortable que celui de tel terroriste bénéficiant d’une salle de sport privative ?

Le confinement : moyen de se retrouver, de se « donner rendez-vous avec soi-même », comme dit Henri Michaux ? L’idée peut séduire les niais, ceux qui font l’impasse sur les réalités de classe. Mais quand une famille est confinée dans un HLM, comment cela peut-il être possible ?  Comment l’enfant peut-il « être seul comme l’enfant est seul, quand les grandes personnes vont et viennent », comme le dit Rainer Maria Rilke, quand tous sont confinés dans un petit logement ? En outre, a-t-on remarqué que l’injonction de « bouger » perdure plus que jamais ? Le jooging est autorisé, mais la promenade est à peine tolérée. Il est interdit de s’asseoir sur un banc, même seul, même à 10 mètres de toute personne. Les policiers vous interpellent immédiatement : « Circulez », disent-ils. Il faut bouger, même sur place. Surtout sur place. En singeant le gouvernement. Même confiné, il faut remuer, se bouger. Le banlieusard est réduit à la triste fréquentation des centres commerciaux encore ouverts. Car quand on cherche les permanences de nos sociétés, ce qui demeure en période de confinement,  on ne trouve plus qu’eux. « Dans le système capitaliste, la permanence n’a pas droit de cité, ou plutôt les seuls éléments stables qui s’y retrouvent de façon constante sont l’avarice, la cupidité et l’orgueilleuse volonté de puissance » (Lewis Mumford).

Des vérifications de sac de courses sont pratiquées, abusives, mais difficiles à contester ensuite, quand elles ont donné lieu à une verbalisation, de 135 €, soit une semaine de courses pour bien des familles populaires.  Disons-le d’un mot : le confinement ne guérit pas nos pathologies sociales. Il les souligne. Ce confinement aboutit du reste à des situations ubuesques, mais surtout très inquiétantes. Des récidivistes du non-respect du confinement sont condamnés à de la prison ferme… alors que le ministère de la justice libère en masse des prisonniers de droit commun, sans parler des terroristes lâchés dans la nature, dont la libération était déjà programmée.

Strategika – Cette pandémie précède-t-elle un effondrement économique et systémique ?

Je crains que non. Les optimistes attendent trop des catastrophes. Et à l’échelle de l’histoire, c’est une toute petite catastrophe. De 1994 à 1999, on estime le nombre d’enfants irakiens morts du fait du blocus américain à 500 000. Il est vrai que « cela en valait la peine », disait Madeleine Albright.  Ce qui est par contre très frappant, c’est l’effet idéologique de la crise sanitaire et donc économique. De même qu’en 2008, Nicolas Sarkozy avait expliqué que le capitalisme libéral et le tout marché, c’était fini, et que le temps était au retour de la puissance publique, de l’Etat, voire du Plan gaullien, sans que cela soit suivi d’effet, M. Macron nous a expliqué que rien ne serait plus comme avant, que l’on dépenserait « tout ce qu’il fallait sans compter », et que le tout marché, et la mondialisation de tout, c’était fini. « Déléguer notre alimentation, notre capacité à soigner à d’autres, c’est une folie ». Macron pour la  relocalisation ? Macron pour la démondialisation ? Mais M. Macron est un homme de la finance et de la communication, mais il n’est que cela.  Il est plus que probable que, de même qu’avec Sarkozy, nous n’avons pas vu d’actes suivre ces bonnes paroles, nous ne verrons pas non plus, avec M. Macron, d’actes suivre durablement ses propos. Tout à coup, on découvre que les 3 % de déficit public par rapport au PIB à ne pas dépasser, ne sont plus un critère, et que le rapport dette/PIB limité à 60 % n’est plus indispensable (nous en étions de toute façon à 100 %). Il est bien évident que le virus symbolise les faiblesses de la mondialisation et de la logique du marché. Soyons plus précis : il montre que nous abordons la mondialisation en telle position de faiblesse qu’elle fait de nous un pays vaincu. La mondialisation est le prétexte trouvé par nos « élites » pour, précisément, ne pas assumer leur rôle de protection du peuple, pour, précisément, s’enrichir au détriment du peuple, en se déconnectant de ce peuple, décidément encombrant et bien moisi.

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Dans un monde où tout circule, Il n’y a plus de petite crise localisée. Une épidémie locale peut vite devenir une pandémie. « Le virus n’a pas de passeport », dit M. Macron.  La remarque est trompeuse. C’est parce que les porteurs de virus passent, touristes, immigrés, commerçants sans cesse les frontières que le virus se déploie aussi rapidement.  On sait que, en Italie, un des principaux foyers du virus a été le secteur de la mode, dans lequel les Chinois sont très présents.  Donc, il y a bien un effet idéologique du virus. Il affaiblit la doctrine de la globalisation et renforce le camp des partisans des frontières, et des partisans de la relocalisation, des partisans de l’enracinement contre  ceux du nomadisme, des gens qui sont « de quelque part » contre ceux qui sont « de nulle part » (David Goodhart, Les deux clans. La nouvelle fracture mondiale, 2019).  

Mais, après cette crise sanitaire, le libéralisme mondialisé reprendra sa marche en avant, qui est sans doute une marche à l’abime, vers toujours plus de concurrence, toujours plus de recherche de croissance. La perte d’emplois et de richesses sera néanmoins sans doute considérable pour certains pays et c’est tout un rapport de force mondial qui sera bouleversé. Il est possible que cela soit au bénéfice de la Chine car celle-ci, touchée la première, a réagi la première, et avec force. Mais il y a bien des incertitudes. Les épidémiologiques indiquent que dans une épidémie comme le Covid-19, il y aura une deuxième vague. Est-elle anticipée par les Chinois ? Et par nous ?   La Chine est déjà la 2e économie du monde en nominal, et la première en parité de pouvoir d’achat (PPA – c’est-à-dire en corrigeant la sous-évaluation du yen), soit 16% du PIB mondial en nominal, 29 % en PPA. Devant les EUA. Il n’est pas impossible qu’elle prenne l’avantage, même en nominal.

Pour nous, Français, et pour nous, Européens, la crise sanitaire est une alerte. Elle nous montre que la voie que nous suivons, celle de la mondialisation sans frontières, et de la société ouverte à tout et à tous, est pleine de risques. Quant à la prétendue « Union européenne », elle ne sert à rien. L’Italie, la Serbie, bien d’autres pays reçoivent l’aide… de la Chine et de Cuba. Bien joué.  Les pays européens concernés s’en souviendront. La structure parasitaire de Bruxelles ne leur a pas tendu la main. Aucune subsidiarité n’a fonctionné.

C’est une occasion de réfléchir, et peut-être, de changer de cap. Comme le dit Falk van Gaver, « soit nous profitons de ce ralentissement pour remettre en cause l’obsession de la croissance, soit au contraire nous cédons aux injonctions à faire redémarrer l’économie. Pression déjà à l’œuvre par la propagande culpabilisatrice en vue de la mobilisation totale. » C’est bien vu. Le discours du gouvernement sur les sacrifices (supplémentaire) qu’il va falloir faire, sur la pente (économique)  qu’il va falloir remonter laisse penser que le productivisme forcené est à l’horizon de la sortie de crise sanitaire.

Strategika – Plus de 3 milliards de personnes sont appelées à se confiner dans le monde. Pour la première fois de son histoire, l’humanité semble réussir à se coordonner de manière unitaire face à un ennemi global commun. Que vous inspire cette situation ? Cette pandémie va-t-elle forcer l’humanité à se doter d’un gouvernement mondial comme le préconisait Jacques Attali lors de la pandémie de grippe A en 2009 ? 

Près de la moitié de la population mondiale est confinée. Mais cela relève en fait de situations extrêmement différentes. Donnons un seul exemple. Avant d’être confinés, beaucoup de gens doivent rentrer chez eux. Quand ils ont un « chez eux ». Des dizaines de millions de gens habitent en effet dans des bidonvilles. En Inde, les travailleurs pauvres qui rentrent chez eux, dans leur province, mis au chômage suite au Covid-19, le font souvent à pied, ils sont aspergés par les forces de l’ « ordre » d’eau javellisée pour les désinfecter. Telle est la réalité, loin de l’idéologue du « care » (prendre soin). Il n’y a pas dans le monde de réponses uniformes au virus. Le cadre national reste celui qui détermine la réponse même s’il y a bien sur des effets de mimétisme.

Le confinement est plus rigoureux dans les pays hyper-connectés comme la France ou la Chine que dans des pays restés plus ruraux. Mais en Chine et dans les pays asiatiques, c’est le confinement plus l’action (tests, isolement des infectés, soins rapides, construction éclair d’hôpitaux). En France, c’est le confinement parce que nos dirigeants ne savent rien faire d’autre.  Ils se sont rendus illégitimes comme les responsables de la défaite de 1940. Qui a songé à remettre Albert Lebrun à la présidence de la République en 1945 ?  Passé un bref moment d’émotion et de communion nationale, le peuple rejettera – il a commencé à le faire avec les Gilets jaunes – les médiocres prétentieux qui nous gouvernent, bien souvent vendus aux puissances d’argent (à quelques exceptions près). 

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Effectivement, la crise sanitaire réveille les grands fantasmes d’Etat mondial.  Macron partage ce fantasme, en « monomaniaque de l’Etat universel », comme dit Michel Onfray. Mais y croit-il vraiment ? Macron pense souhaitable cet Etat mondial. Mais ce qui existe, ce n’est pas un Etat universel, contradictoire dans les termes, car, comme l’avait démontré Carl Schmitt, un Etat suppose d’autres Etats. Un Etat universel ne peut être un Etat. Ce peut, par contre,  être un pouvoir mondial. Et ce pouvoir existe, il n’est pas tout puissant, il se heurte aux peuples, mais il est très puissant. C’est le pouvoir de l’hyperclasse mondiale, ou de la  « superclasse mondiale » comme dit Michel Geoffroy.

S’il y a gouvernement mondial, il faut bien comprendre qu’il ne sera en rien démocratique. Cela signifiera au contraire la fin de toute démocratie. Seule la relocalisation de l’économie, et des populations, est compatible avec la démocratie. Celle-ci est avant tout une question de taille. La démocratie n’est possible qu’en étant subsidiaire. Le niveau supérieur ne peut être, au mieux, qu’une unité de civilisation, ou une parenté de civilisation. Si on va vers un « gouvernement mondial », ce ne sera que le nom plus ou moins acceptable pour les peuples de la domination oligarchique de la superclasse mondiale (et dit comme cela, c’est nettement moins acceptable et cela sera moins accepté). Ce que veulent les peuples, c’est être maitre chez eux. « Citoyen du monde » est une antinomie. Cela ne veut rien dire. Seule une minorité de « bobos » hors sol veulent un Etat mondial. Ils croient aimer la diversité du monde parce qu’ils usent et abusent des vols long courrier et fréquentent les aéroports.

Toutefois, cette question du gouvernement mondial n’est pas simple. Ce n’est pas seulement le peuple contre les élites. Il y a des conflits à l’intérieur même des classes dirigeantes des grands pays. Il y a dans les classes dirigeantes, qui elles-mêmes ne sont pas immuables, des fractions patriotes. Et il y a des fractions mondialistes. Le problème est qu’il est plus facile de s’unir sur les objectifs mondialistes de l’hyperclasse (renforcer le pouvoir du Capital et son emprise sur toute la société) que sur une internationale des patriotes. Le patriotisme présente toujours le risque de dégénérer en nationalisme opposé à d’autres nationalismes (Grèce vs Turquie, Croatie vs Serbie, etc). L’intérêt des grands pays est toutefois très clairement un monde multipolaire. Je ne crois donc pas du tout au triomphe final d’un gouvernement mondial. C’est une menace, et il faut y faire face, mais je crois que la tendance historique est à un monde multipolaire. Chine, Brésil même, Iran, Turquie, Russie, Inde : tous ces pays réagissent en fait de manière spécifique à la crise sanitaire.

Quant à l’ébauche d’un gouvernement mondial qu’est devenu l’Union dite européenne, elle montre – nous l’avons vu  – dans la crise sa parfaite impuissante, sauf quand elle renie ses principes pour lâcher 750 milliards, mais il s’agit, une fois de plus, de donner de l’argent aux banques et non aux Etats. L’UE est bel et bien une structure parasitaire dont la fonction est de perpétuer le pouvoir de la finance et de rendre les Etats de plus en plus impuissants et dépendants des banques. Face à une crise importante, le cadre de l’UE craque et les Etats font retour. La question est que le retour des Etats se fait, en France, sur des bases de plus en plus liberticides, avec notamment des mesures qui cassent plus que jamais le droit du travail, et reviennent sur plus de 100 ans d’acquis sociaux.

En tout état de cause, les oppositions entre grandes aires géopolitiques sont telles, les rivalités si fortes   qu’un gouvernement mondial ne pourrait être que le cache sexe d’une grande puissance qui aurait triomphé des autres. Or, je ne vois ni la Chine, ni les EUA, ni la Russie baisser les bras, et mettre fin à une rivalité qui n’a pas dit son dernier mot.

Strategika – En 2009 toujours, Jacques Attali expliquait que « l’Histoire nous apprend que l’humanité n’évolue significativement que lorsqu’elle a vraiment peur ». Que vous inspire cette idée ?    

jatt.jpgCe n’est pas faux, et ce ne sera ni la première fois, ni la dernière que nous remarquerons que Jacques Attali dit des choses intelligentes. Oui, la peur fait évoluer, mais dans quel sens ? Deux exemples : la peur de perdre la guerre a accéléré le massacre des Juifs par les nazis. La même peur (mais pas chez les mêmes) a amené, en 1941-42, Staline à redonner une place à la religion orthodoxe en Russie. La peur qu’a eu M. Macron face aux Gilets jaunes l’amène, en ce moment, à lancer une contre-révolution antisociale, et à édicter des mesures « provisoires », privatrices des libertés, dont l’expérience nous montre, avec les mesures antiterroristes, qu’elles finissent par  être intégrées dans la loi ordinaire. Les restrictions provisoires des libertés sont, dans leur immense majorité, un pas vers des restrictions définitives : telle est la leçon des dernières décennies.  Et il serait bon de s’en inquiéter.

Strategika – Comment voyez-vous l’évolution de la pandémie et ses conséquences politiques et sociales dans les semaines à venir ? Existe-t-il une issue politique à la situation que vous venez de décrire et quelle forme pourrait-elle prendre selon vous ?

La pandémie peut avoir des conséquences très fortes en termes d’accroissement de la misère dans le monde. Et donc en secousses sociales. Le contraire serait même étonnant. Les gouvernements vont essayer d’en profiter pour développer la lutte de classes des très riches contre les classes populaires et moyennes, cette lutte de classe qu’ils ont gagné (Warren Buffett). « C’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre, et qui est en train de la gagner », disait-il il y a quelques années. Cette guerre sociale, celle des très riches contre le peuple, M. Macron la mène comme fondé de pouvoir de la fraction française de la superclasse mondiale.

Mais Warren Buffett (l’homme ne manque pas de finesse)  disait aussi : « Si jamais vous vous retrouvez dans un bateau qui coule, l’énergie pour changer de bateau est plus productive que l’énergie pour colmater les trous. » En d’autres termes, nous en conclurons qu’il ne faut pas réformer le mondialisme mais qu’il faut en sortir. Il faut reconstruire à côté. Comment ? Par la relocalisation. La relocalisation de tout : économie, politique, démographie, démocratie, imaginaires.

Strategika – Comment liez-vous la crise actuelle à votre domaine d’expertise et votre champ de recherche ?

Le virus est une « altérité invisible », c’est « un autre absolu », disait Jean Baudrillard. Le virus, c’est l’Etranger, c’est le Grand Autre. Et nous donnons asile à cet inconnu. Nous devenons l’hôte du virus malgré nous. Il est vrai que du point de vue libéral, notre pays n’est pas autre chose qu’ »un hôtel, qui doit être attractif et compétitif. Et puisque l’heure est à l’antispécisme, il n’est pas très étonnant que le virus s’invite chez nous via le pangolin et la chauve-souris. Serge Latouche a rappelé (Remember Baudrillard) que ce thème du virus peut s’appliquer à bien des domaines (électronique, idéologique, etc). C’est ce qui échappe au contrôle, quand bien même tel laboratoire de recherche biologique à Wuhan serait classé Haute sécurité.  

Ayant souvent écrit sur les questions de psychopathologie, je constate que le virus a ce point commun avec le monde moderne qu’il est un ennemi intérieur, et qu’il est transmis par ce qui nous est le plus proche.  

La Sainte-Alliance de 1815, un projet européen

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La Sainte-Alliance de 1815, un projet européen

Par Matthias Hellner

Après les longues guerres provoquées par les révolutionnaires français, qui avaient bouleversé la carte politique de l’Europe, les puissances de notre continent, après la paix de Paris, décident de se réunir à Vienne pour forger un ordre post bellum, durable et solide. Le Congrès n’avait cessé de danser quand Napoléon, qui avait marqué l’histoire européenne plus que tout autre au cours des décennies précédentes, revenait à la charge pour les Cent Jours : les puissances devaient reprendre les armes pour l’arrêter définitivement. Le 18 juin 1815, l’Empereur des Français est battu par les Britanniques et les Prussiens. Blücher avait nommé cette bataille du nom de l’auberge où le Corse avait établi son quartier général : la bataille de Belle-Alliance.

Il fallait un instrument accepté à l’unisson pour garantir  la viabilité des décisions du Congrès, c’est-à-dire pour rétablir l’équilibre européen d’avant la révolution française et l’autorité du principe monarchique d’abord, pour mater les idées libérales, révolutionnaires et nationalistes, ensuite.

Pour y parvenir, Metternich reprend une idée du Tsar Alexandre I, influencé par la mystique Juliane de Krüdener et par les idées maçonniques. Cette idée est celle d’une Sainte-Alliance, qui assurerait la paix dans le monde. Le 26 septembre 1815 nait alors la Sainte Alliance du Tsar orthodoxe, du roi protestant de Prusse et de l’Empereur catholique d’Autriche. Dans l’acte de fondation de cette alliance, les trois monarques posent la religion chrétienne comme le fondement de leur politique commune. « Ils déclarent, en grande pompe, que, face au monde entier, le présent acte et leur inébranlable décision n’ont pour but que de maintenir et promouvoir la sainte religion, d’en faire le fil conducteur de leurs gouvernements intérieurs et extérieurs, d’appliquer les principes de la justice, de l’amour et de la paix, lesquels ne sont pas des valeurs exclusivement destinées à la vie privée mais doivent, bien plutôt, donner assise aux décisions des princes, et les influencer, pour consolider tous leurs projets, ainsi que constituer un moyen pour fortifier la conscience humaine et sanctifier son incomplétude ».

Toutefois, l’Alliance, qui comprenait aussi le Saint Siège, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande ainsi que toutes les autres puissances européennes, se plaçait sous l’égide de Metternich ; elle a servi, pour l’essentiel, à réprimer les idées révolutionnaires. Ainsi, chaque fois que la légitimité des princes semblait être en danger, comme en Espagne, au Royaume de Naples et des Deux-Siciles ou encore au Portugal, où l’Alliance a décidé d’intervenir et de mater, par la violence et la coercition, les soulèvements populaires.

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En 1822, lors du Congrès de Vérone, on a pu voir que cette Sainte Alliance se disloquait inexorablement parce que les puissances européennes étaient animées par des visions politiques divergentes. La lutte des Grecs pour l’indépendance et la liberté a provoqué une césure dans l’Alliance. Metternich était opposé à ce combat hellénique contre l’Empire ottoman, alors que la Russie y était favorable pour des motifs panorthodoxes. L’Italie, elle aussi, constituait une pomme de discorde entre les puissances plutôt libérales comme l’Angleterre et la France, d’une part, et la Prusse, l’Autriche et la Russie, toutes trois conservatrices. Sur le plan de la politique intérieure, l’Alliance fonctionnait mieux car elle réprimait les mouvements et les idées nationales et libérales, notamment en préconisant la persécution des « démagogues » et la répression des révolutions de 1848/49. Mais, quelques années plus tard, la Sainte Alliance passe littéralement de vie à trépas, dès que se déclenche la Guerre de Crimée.

Matthias Hellner.

(Article paru dans l’hebdomadaire zur Zeit, Vienne, n°27-28/2014).  

„Das Corona-Virus kann uns wirklich den Buckl runterrutschen“

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„Das Corona-Virus kann uns wirklich den Buckl runterrutschen“ 

Helmut Müller

Ex: https://helmutmueller.wordpress.com

Es bedarf keines Verstandes, um alle Meinungen und Kommentare in Politik und Medien für bare Münze zu nehmen, aber es bedarf  – Aug´ in Aug´ mit der veröffentlichten Meinung – anscheinend eines großen, um die dahinter liegenden Ungereimtheiten und Halbwahrheiten  zu erkennen. Das war schon bei der derzeit in der Pause sich befindlichen Anti-CO2-Kampagne  so und ist erst recht so bei der aktuell inszinierten Corona-Hysterie. Gewiss, so ein Virus ist gefährlich, aber das ist der jährlich in neuem „Outfit“ auftretende Influenza-Virus ja auch. Wie kommt es dann, daß man demselben, der immerhin jedes Mal tausende Opfer fordert, nicht mit ähnlichen, aber hoffentlich weniger überschiessenden Maßnahmen als jetzt begegnet?

Ja, es ist, auch aus anderen Gründen, etwas faul an der ganzen Corona-Geschichte, weshalb immer mehr von Konzernen, finanziellen Zuwendungen oder Preisen unabhängige Ärzte und Wissenschaftler sich zu Wort melden und mit ihrer ehrlichen Meinung nicht hinter dem Berg halten. Ist es denn nicht so, dass es Zustände und Krankheiten gibt, welche zu gewissen Zeiten durch verordnete Maßnahmen und Mittel verschlimmert werden? Genau das passiert jetzt, in Spitälern, Altenheimen und Betrieben, nicht zuletzt im eigenen Heim. Viele werden später Bilanz ziehen und erkennen, dass man fahrlässig gehandelt und über das Ziel geschossen hat. Aber hätte man denn, auf Österreich bezogen, von dieser an Lebens- und/oder  Berufserfahrung eher spärlich ausgestatteten Regierungsspitze mehr erwarten können? Eher schon anmaßend-gönnerhafte  Sager wie:  „Wollen hier jetzt großzügig sein“ .(Finanzminister Blümel zur Milliardenhilfe).

coronavirus-oesterreich-350x227.jpgWenn die österreichische Regierungsspitze, dabei sich selbst lobend, jetzt betont, man möchte keine Zustände wie in Italien, nun gut. Aber was läuft dort wirklich? Hören wir doch was die italienische Virologin Prof.Marita Rita Gismondo in einem dramatischen Appell an den Gesundheitsdienst ihres Landes uns verrät: „Ich rufe Sie dazu auf, keine Zahlen über Sars-CoV-2 Infizierte und Tote zu veröffentlichen. Diese Daten sind aus wissenschaftlicher Sicht falsch.“ So, und nur weil wir keine italienischen Zustände haben, sind die „Fakten“ unserer oder auch der deutschen  Bundesregierung deshalb alle richtig? Da bekomme ich gleich einen Lachanfall, könnte aber auch gleich grantig werden, wenn ich an gewise Lobbyarbeiten dahinter denke, und richtig böse, wenn ich die die seelischen, sozialen und ökonomischen Folgen der Panikmache für abertausende Menschen vor mir sehe.

Stellen wir noch einer Panik machenden Einschätzung von Österreichs erfolgreichsten Studienabbrecher, Sebastian Kurz, die da lautet „Bald kennt jeder wen, der am Virus gestorben ist“ , jene eines gestandenen Mannes und verdienten Arztes, des von mir geschätzten ehemaligen Leiters für Tropenmedizin und Immunolgie des Allgemeinen Krankenhauses in Wien, Professor Wolfgang Graninger, gegenüber: „Das Corona-Virus kann uns wirklich den Buckl runter rutschen. Es hat keine klinische Konsequenz. Die Grippe ist viel wichtiger.“ Prächtig gesagt. Doch unsere Politiker reagieren – auf welche befugten oder nicht befugten Zurufe und Ratschläge auch immer – wie Angsthasen und Dilettanten, und so wird am Ende auch das Ergebnis ihrer Politik aussehen. Und trotzdem könnten sie noch eine Weile als Gewinner aussteigen, solange der Masse die Angst im Nacken sitzt (und diese geschürt wird).

Um nun noch größeren Schaden von Land und Bevölkerung abzuwenden, fordert jetzt die Initiative Heimat und Umwelt  in einerm Aufruf eine Beendigung aller Zwangsmaßnahmen, wobei natürlich nicht allgemeine, vernünftige Vorsichtsmaßnahmen, wie sie auch in normalen Grippezeiten angebracht wären, gemeint sind. Siehe: https://www.ots.at/presseaussendung/OTS_20200325_OTS0110/... und auch https://www.youtube.com/watch?v=xpI3IbmmUww&feature=y...

Besonders interessant und wichtig die nachfolgenden Stellungnahmen, die mehr Licht in das Dunkel bringen:

Aufklärer https://youtu.be/PtzHH8DhgZM 

Kritiker  https://youtu.be/ga-y4Uc5EjU 

Erhellend https://youtu.be/zqYNvm0K-N8 

Aufdecker https://www.youtube.com/watch?v=gSn_YaOYYcY

Was meine Person betrifft, so möchte ich damit das Kapitel Corona erst einmal beenden, nicht ohne abschließend noch einen libertären sloewenischen Blogger, Marko Marjanovic, zu dem Thema zu Wort kommen zu lassen.

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Die große Hysterie-Pandemie

Von Marko Marjanovic*

Was für ein unglaublich nützlicher kleiner Virus das für die Machtelite gewesen ist Anstatt die Schuld für den globalen Wirtschaftscrash zu übernehmen, dürfen sie das Kriegsrecht spielen. Ich sage nicht, dass es eine Verschwörung ist. Aber wenn ja, was wäre anders?

Weihnachten kam für unsere Herrscher, die Machtelite, in diesem Jahr früh. Zählen wir alle „Goodies“ auf, die die Covid-Pandemie-Hysterie  mit sich bringt:

> Sie können Hunderte von Milliarden, sogar Billionen von Dollar, Euro und Pfund unter ihren Freunden verteilen, um eine wirtschaftliche Abkühlung inmitten von Virus-Ausbrüchen und Gegenmaßnahmen auszugleichen.                                                                    > Sie können sich als entscheidende Männer des Augenblicks positionieren, die drastische Maßnahmen ergreifen, wenn die Umstände dies erfordern. Und wenn sich die Frühlingssonne wie jedes Jahr um die Viren kümmert, können sie sich als unsere Retter positionieren.                                                                                                                                          > Sie dürfen uns von der Straße in unsere Häuser drängen. Vergessen Sie Kim Jong-il, Stalin oder das afrikanische Kriegsrecht, das ist der wahre Deal. Es ist ein Maß an Unterdrückung, mit dem selbst Nordkorea nicht durchkommen könnte. Es dient dazu, die populistische Revolte zu entlasten und möglicherweise zu brechen (Gilet jaunes oder sonst irgendjemand?), Aber mehr als das vergessen Sie nicht die unkomplizierte Freude, die diese Menschen daran haben, Macht auszuüben und sich wichtig zu fühlen.                           

> Sie können sich vor der Schuld für den bevorstehenden wirtschaftlichen Zusammenbruch drücken. Ein Zusammenbruch, der ohnehin bald geschehen sollte, da das eine oder andere die globale Schuldenblase, die ihre Zentralbanken und ihre Geldpolitik zum Platzen gebracht hatte, zum Platzen bringen sollte, was nun aber dem Corona angelastet werden soll. Was für ein Ausweichmanöver!

Diese Hysterie-Pandemie war für sie ein Glücksfall. So sehr, dass ich, wenn ich an ihrer Stelle wäre, versuchen würde, sie so lange wie möglich zu verlängern. Ich würde sicherstellen, dass jeder, der starb, während er an Coronavirus litt, als Opfer gezählt wird. Und ich würde das Land mit Corona-Tests überschwemmen (wen interessiert es, wie sie so schnell als zuverlässig zugelassen wurden), um sicherzustellen, dass die Anzahl der Infizierten so lange wie möglich steigt, indem ein immer größerer Anteil der üblichen saisonalen Patienten mit grippeähnlichen Symptomen mit dem gefürchteten Covid-19 identifiziert wird.

Wenn Trump klug ist, wird er die USA nach Vorbild Europas unter ein  Kriegsrecht  stellen, um die Krise zu verlängern. Je größer die Virushysterie und je größer die Auswirkungen von Antivirenmaßnahmen sind, desto glaubwürdiger wird seine Behauptung im November sein, dass es bis zum unglücklichen Akt der Natur / Gottes eine großartige Wirtschaft war.

dimanche, 05 avril 2020

RIP, Référendum d’Initiative Populaire

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RIP, Référendum d’Initiative Populaire

Quand l’idée de cet article m’est venue, la révolte des gilets jaunes n’avait pas encore commencé. J’essayais de trouver des arguments pour convaincre que la démocratie directe à la Suisse était la meilleure voie pour gouverner un pays en lui assurant justice, calme et stabilité.

La démocratie représentative fut un grand pas en avant, en tous cas pour nombre de pays qui vivaient, auparavant, sous des régimes totalitaires. Si l’on considère que la politique est la façon non-violente de résoudre les conflits, on ne peut que se féliciter de voir s’opposer des gens raisonnables dans des débats d’idées, avec fougue, et même avec rage, mais toujours en-deçà de toute violence physique.

Mais aujourd’hui, la démocratie représentative arrive à bout de souffle : elle a été dévoyée et dans beaucoup de pays, des dysfonctions graves empêchent l’exercice serein de cette forme de politique. Qu’est-il donc arrivé pour que ces systèmes de démocratie en arrivent là ? Certains leaders, sans aucune expérience, sans aucun sens pratique, sans aucune considération pour les aspirations du peuple, sans aucune vision ni aucun sens de l’anticipation, sont parvenus au pouvoir et gouvernent uniquement selon l’idéologie dont ils sont pétris.

La désinvolture avec laquelle un Chef d’Etat se croit autorisé à prendre toutes sortes de décisions sans consultation du peuple ne peut que pousser les gens à désirer un système dans lequel ils ont leur mot à dire, c’est-à-dire un système de démocratie directe à travers le référendum, pas le référendum déclenché depuis le haut par la seule volonté du président, mais par le référendum d’initiative populaire déclenché par le bas.

Ceux qui s’opposent au référendum sont pour leur part favorables à une dictature de minorités, partis, groupes, clans, cliques, syndicats, qui cherchent à pérenniser leurs intérêts. Or le référendum est la piqûre de rappel nécessaire à celui qui a tendance à oublier qu’il n’est où il est que pour servir les autres. Car le Chef d’Etat n’est là que pour le bien être de son peuple et ce dernier a le droit de le lui rappeler et doit avoir le moyen de le lui imposer.

Pour que le peuple garde constamment à l’esprit ce qui doit être sa priorité, il lui faut adopter un moyen visible dans toutes les manifestations : un signe comme un badge, un emblème, une cocarde, un écusson, un ruban, en tout cas une marque bien reconnaissable avec, en son centre, sur fond clair, se détachant en sombre les trois lettres suivantes : RIP (pour Référendum d’Initiative Populaire) ou RIC (pour Référendum d’Initiative Citoyenne).

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Partout où des rassemblements importants ont lieu (dans les stades, dans les manifestations sur la voie publique quelles qu’elles soient, dans les déplacements du chef de l’Etat ou des ses ministres, dans les apparitions publiques des représentants de l’état et des députés, dans les marches, manifestations, grèves, etc.), que partout on voit s’agiter une forêt des signes estampillés RIP ! Si nous voulons une société où règne la vraie justice, il faut instaurer le RIP.

Mais diront certains : la majorité n’a pas toujours raison. A cet argument qui ne peut être contredit complètement, j’en opposerai deux autres : d’une part, la minorité n’a pas toujours raison non plus. D’autre part, si l’on analyse l’état des rares pays qui pratiquent le RIP aujourd’hui, leur situation est en général plus qu’enviable. La Suisse en est le symbole éclatant. Quand le référendum a parlé, les tensions baissent car le résultat est accepté et les polémiques se taisent jusqu’au prochain référendum. La Suisse est le cas d’école à étudier. Pourquoi l’Europe ne tirerait-t-elle pas profit de l’expérience helvétique ? La Suisse pourrait devenir un phare pour le continent tout entier.

Et pas question de faire une sarkozerie en faisant annuler le résultat d’un référendum par un tour de passe-passe (en 2007, Sarkozy utilise la voie parlementaire pour ratifier le Traité de Lisbonne, annulant du même coup le non massif du peuple français à la Constitution européenne en 2005). Il faut cadenasser le système contre de tels coups de force en instaurant une clause qui stipule qu’un résultat de référendum ne peut être annulé ou amendé que par un autre référendum. Qu’un Sarkozy décide unilatéralement contre 55 % des Français est un exemple flagrant d’une minorité qui n’écoute pas ce que veut le peuple.

Un Chef d’Etat est élu pour défendre son pays et protéger son peuple. Toutes les grandes questions concernant le pays doivent être soumises à référendum : immigration, sécurité, réforme des retraites, réforme du chômage, réforme de l’impôt, questions sociétales, pouvoir d’achat, etc. Tant que l’exécutif n’aura pas accepté cela, il gouvernera à contre-courant et fera montre d’autoritarisme le rapprochant des régimes totalitaires. A moins que les Gilets jaunes …

Sur le revers de la veste,

sur mes cahiers d’école,

sur les portes des mairies,

sur le sable et sur la neige,

sur les murs des Préfectures,

sur la pluie épaisse et fade,

sur les murs des Conseils régionaux,

sur chaque main qui se tend,

sur les tableaux de classe,

sur la vérité physique,

sur les marches de l’Assemblée nationale,

sur chaque bouffée d’aurore,

sur l’avenue des Champs-Elysées,

sur les marches de la mort,

sur les grilles de l’Elysée,

J’écris ton nom,

 

Référendum

Bertrand Hourcade, avril 2020

Six choses que vous ignorez sur George Orwell et 1984

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Six choses que vous ignorez sur George Orwell et 1984

Ex: https://www.actualitte.com

Le 8 juin 1949 était publié ce qui reste aujourd'hui le plus influent des romans de SF. Une chose est sûre : 1984 nous triture encore les méninges, surtout au regard des inquiétudes de la société actuelle vis-à-vis de la surveillance et de la manipulation dont sont capables les gouvernements. Le combat de Winston Smith contre la répression qu'exerce Big Brother fait froid dans le dos. Génie visionnaire, George Orwell ? En tout cas, voilà une dystopie auréolée de mystères... et de sympathiques anecdotes. 

1. 1984 ne devait pas s'appeler 1984

C'est un tout autre titre qu'avait en tête George Orwell à l'époque. Le livre devait s'intituler The Last Man in Europe (Le dernier homme d'Europe), en référence à la solitude que ressentait l'écrivain, isolé sur l'île du Jura, en Écosse. Finalement, son éditeur le convainquit d'adopter un titre plus commercial... En revanche, contrairement à ce que suggèrent la plupart des éditions étrangères du roman (dont la version française), le titre exact choisi par Orwell ne s'écrit pas en chiffres mais bien en lettres : Nineteen Eighty-Four.

2. L'intrigue de 1984 est fortement inspirée d'un roman russe

George Orwell l'a toujours nié, mais les spécialistes du genre sont formels : l'histoire, les personnages, le contexte futuriste de 1984 ont été repris d'un roman écrit par Ievgueni Zamiatine et intitulé Nous autres. Sorti en 1920, le livre relate les réflexions d'un homme du futur sur la liberté, et sa remise en question du conditionnement dans lequel l'État unique enferme la société. L'ironie étant qu'Orwell, s'il a démenti avoir puisé son inspiration dans l'œuvre de Zamiatine, a néanmoins rétorqué qu'Aldous Huxley ne s'en était pas privé pour Le Meilleur des mondes...

3. Avant de mourir, Orwell nous avait lancé un dernier avertissement

SI l'écrivain n'hésitait pas à qualifier son œuvre de parodique, il ne se faisait néanmoins pas d'idées sur la déchéance à laquelle semble voué notre monde. 6 semaines avant son décès, il profita d'une interview de la BBC pour mettre les spectateurs en garde contre « l'intoxication du pouvoir ». Bien entendu, nul n'aurait pu discerner à l'époque l'inquiétant réalisme dont faisait preuve l'auteur dans son avertissement. C'est sur ces mots qu'il concluera sa diatribe : « Ne laissez pas cela se produire. Tout dépend de vous. »
 


4. David Bowie voulait adapter 1984 en comédie musicale

Farfelu ? Génial ? On se demande ce que ça aurait pu donner, mais le projet n'a (malheureusement ?) jamais abouti... La faute à Mme Orwell, qui lui a refusé ce droit. Toujours est-il que l'album Diamond Dogs sorti en 1973 contient quelques-uns des titres qui ont été inspirés à Bowie par le roman de George Orwell, dont « 1984 », « Big Brother » ou encore « We Are Dead ».
 


5. George Orwell est un pseudonyme


Le romancier avait déjà plusieurs travaux derrière lui avant la publication de 1984, dont certains écrits sous le nom d'Eric Blair... George Orwell n'est en fait qu'un pseudonyme, qui lui avait été conseillé pour plusieurs raisons : tout d'abord parce que Blair était un nom bien trop commun, qui manquait de punch et que l'on oubliait facilement ; ensuite, parce qu'Eric Blair s'était bâti une réputation... plus que médiocre. Et finalement, George Orwell s'en est bien mieux tiré que Blair.

6. Apple s'est basée sur 1984 pour une publicité choc


Le premier ordinateur MacIntosh s'était démarqué avant même sa sortie grâce à la publicité conceptuelle que lui avait offerte Apple. Diffusé lors de la finale du Superbowl en 1984, le spot réalisé par Ridley Scott lui-même mettait en avant une sorte de Big Brother asseyant sa domination sur la société et défiée par une héroïne libératrice... Le tout, sans présenter le produit de Steve Jobs. Une curieuse manière de promouvoir le premier Mac, d'ailleurs incomprise à l'époque ; aujourd'hui, la publicité est devenue culte. Et ne vous méprenez pas : c'est sans aucun doute la figure « libératrice » qu'était censé représenter Apple, et pas le Big Brother... 
 
 
« De tous les carrefours importants, le visage à la moustache noire vous fixait du regard. BIG BROTHER VOUS REGARDE, répétait la légende, tandis que le regard des yeux noirs pénétrait les yeux de Winston... Au loin, un hélicoptère glissa entre les toits, plana un moment, telle une mouche bleue, puis repartit comme une flèche, dans un vol courbe. C'était une patrouille qui venait mettre le nez aux fenêtres des gens. Mais les patrouilles n'avaient pas d'importance. Seule comptait la Police de la Pensée. »
 

Belgique: après le confinement policier, l''éveil des consciences ?

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Belgique: après le confinement policier, l''éveil des consciences ?

Billet d'humeur de Philippe Marczewski

Je ne parviens plus à regarder le journal télévisé de la RTBF, et surtout le déshonorant quart d'heure qui suit, confié aux bons soins de La Voix de son Maître, relais béat des éléments de langage gouvernementaux (et cela dit sans offense pour les scientifiques interrogés qui font ce qu'ils peuvent). Hier, pas un mot sur le scandale de la gestion des stocks et commandes de masques par Maggie De Block. Pas un mot depuis un mois sur des années d'austérité et de choix criminels de politiques économique et sociale.


La mise en scène de la crise et sa transformation en spectacle hypnotique et anesthésiant est insupportable. Insupportable le décompte quotidien des malades et des morts. Insupportable de le faire suivre d'une justification de la police d'exception, pour aussitôt laisser entendre que les indisciplinés auront des morts sur la conscience. Insupportable les vidéos où les Belges prêts à tout pour passer à la télé se transforment en clowns d'intérieur. Insupportable cette visite guidée quotidienne des meilleurs applaudissements, à 20 heures, dramaturgie obscène de l'abandon des soignants à leur propre sort, seulement destinée à nous donner bonne conscience à bon compte et célébrer la caricature émotionnelle de la solidarité plutôt que la solidarité elle-même. Insupportable de se glorifier d'applaudir aux fenêtres à heure fixe pour oublier qu'on a laissé prospérer, voire soutenu, des politiques de mise à sac des services publics, au premier rang desquels les hôpitaux. 


Cette émission, sous couvert d'informer le peuple et de répondre aux questions qu'il se pose, aux peurs qui l'agitent, n'est qu'une nouvelle variation de la stratégie de la tension — tenir l'anxiété en laisse mais aboyante, sans muselière, et la surveiller comme le lait sur le feu. Chaude elle est utile mais que jamais elle ne déborde. 
Le taureau qui se débat pour sa vie dans l'arène et réussit à renverser son tueur, on le détourne de sa cible par de grands mouvements, et quand il comprend que le matador s'est relevé il est trop tard : voici son échine percée de banderilles.


Voilà où nous en sommes. Voilà le brouet qu'on veut nous faire avaler. 


Les louanges adressées à la Première Ministre et à son gouvernement, ou à tout le moins le silence sur la terrible responsabilité des partis politiques impliqués d'une manière ou d'une autre dans ce fiasco, c'est tout de même un des plus beaux syndromes de Stockholm jamais observé à grande échelle.


Je fais partie de ceux pour qui ce confinement n'est pas une épreuve. Je peux travailler. Ici nous avons de l'espace. Un jardin. Du confort. Je ne suis pas dans la rue. Je ne suis pas en prison. Je ne suis pas dans un mouroir. Je ne suis pas dans un centre fermé ou dans le parc Maximilien. Je pourrais facilement me contenter d'en rire (et j'en ris, d'ailleurs, ça n'empêche pas). Mais tout ça finira. Ce qui nous attend, après, risque bien d'être terrible. Il suffit de lire sur twitter les dégoutants petits prurits du président du MR, pour qui cette crise n'appelle pas de remise en question de nos systèmes, pour savoir qu'ils n'ont aucune intention de lâcher prise. Je n'ai vraiment pas de goût pour la révolution, ni pour le militantisme, ni pour l'activisme petit-bourgeois. Mais quand nous sortirons de là, il faudra aller dans les bars, sur les places, dans les rues. En Belgique, en France, en Espagne, en Italie, en Hongrie. Partout. Le premier soir nous nous saoulerons. Mais dès le lendemain matin nous devrons être les uns pour les autres contagieux. Virulents. Il va falloir parler, écrire et lire. Il va falloir détruire dans l’œuf leurs nouveaux jouets de contrôle. Il va falloir trouver les conditions pour gagner le rapport de force.

Philippe Marczewski.

Un Anglais chez Mussolini: James Strachey Barnes

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Un Anglais chez Mussolini: James Strachey Barnes

par Christophe Dolbeau

            À propos du fascisme britannique, on connaît surtout la célèbre British Union of Fascists ainsi que la figure majeure de son chef, Sir Oswald Mosley (1896-1980)-(1). On connaît beaucoup moins, en revanche, le personnage de James Strachey Barnes, un intellectuel anglais qui joua un certain rôle dans l’Italie fasciste. Beaucoup plus discret et moins scabreux que John Amery (2) ou William Joyce (3), Barnes fut, dès la fin des années 1920 et jusqu’au milieu des années 1950, l’un des grands thuriféraires anglo-saxons du fascisme et de Mussolini, ce qui mérite bien un petit coup de projecteur.

Un gentleman complet

            Fils de Sir Hugh Shakespear Barnes (1853-1940), haut-commissaire britannique au Baloutchistan, et de Winifred Strachey, James (ou Jim) Strachey Barnes voit le jour le 7 septembre 1890 à Shimla, dans le nord-ouest de l’Inde. Il a une sœur aînée, Mary, et il est le cousin du futur grand écrivain et critique Giles Lytton Strachey (1880-1932). Très tôt orphelins de mère, les enfants Barnes ne restent pas longtemps dans le Raj : en 1892, ils partent en effet pour Florence où résident leurs grands-parents qui vont les élever. À l’issue de cette première phase italienne, Jim est envoyé en Angleterre pour y être scolarisé. Il fréquente d’abord l’école préparatoire St Aubyns, à Rottingdean, puis entre, en 1904, au très chic collège de Eton. De là, il rejoint ensuite l’académie militaire de Sandhurst (1909), avant de voyager un peu (dans les Balkans notamment) et d’intégrer King’s College, à Cambridge, pour y étudier l’arabe. En fait, son père souhaiterait le voir faire carrière dans l’administration anglo-égyptienne, alors que Jim s’intéresse bien plus à l’économie et à la philosophie…

            De toute manière, ce cursus incertain s’interrompt brutalement en août 1914 avec le début de la Première Guerre mondiale. D’abord mobilisé dans un régiment de cavalerie de la Garde, Jim rejoint peu après le Royal Flying Corps, ancêtre de la RAF, où il sert comme pilote. C’est en cette qualité qu’il prend part à la bataille de la Somme (juillet-novembre 1916), puis à la bataille de Passchendaele (juillet-novembre 1917), et enfin à celle de Vittorio Veneto (octobre-novembre 1918). Vers la fin du conflit, il est commandant et assure la liaison entre les aviations britannique et italienne ; efficace et parfaitement bilingue, ses services sont appréciés, au point que l’ambassadeur d’Italie à Londres suggère même que lui soit décerné l’Ordre de la Couronne d’Italie. De ces quatre ans de guerre, qui furent pour lui « une grande aventure chevaleresque et individuelle », Barnes conserve, en tout cas, un souvenir plutôt positif. Dans le premier volume de ses Mémoires (4), il parle d’une vie quelque peu dissolue, ponctuée de blagues, de libations, de parties de cartes et de grivoiseries. Il raconte aussi qu’en guise de porte-bonheur, il emmenait toujours avec lui un bouchon de Veuve Cliquot 1904, et qu’au terme de certaines missions réussies, il arrivait à son copilote et observateur, Munro, de faire le vol de retour, allongé tout nu sur une aile de leur aéronef ! (5)

            Au lendemain de l’armistice, Jim s’intéresse sérieusement à la politique étrangère, notamment à la zone des Balkans et à l’Albanie. Il donne quelques conférences sur ce pays à la Royal Geographical Society, ce qui lui vaut d’intégrer la délégation du Foreign Office qui participe à la Conférence de la Paix (Paris, 1919). Son intérêt pour le pays des aigles ne se dément pas ; au début des années 1920, il s’implique d’ailleurs activement dans le développement économique du petit État dont il devient l’un des conseillers officiels. À l’en croire, on lui en aurait même offert le trône… (6) Grâce à sa sœur, Mary Hutchinson (7), proche du groupe de Bloomsbury, il fréquente aussi, durant un temps, l’avant-garde littéraire : en 1909, il rencontre Virginia Woolf, puis, en janvier 1914, D. H. Lawrence auquel il rend visite à Viareggio, en compagnie d’Edward Marsh (8). À la fin des années 1920, il se lie également avec T. S. Eliot (9), Max Beerbohm (1872-1956) et le peintre gallois Augustus John (1878-1961).

Catho-fascisme

            Rien de particulier ne le retenant en Grande-Bretagne, Jim repart en Italie, en 1924 : il y est à la fois employé de l’Anglo-Persian Oil Company (dont son père est l’un des dirigeants) et correspondant du Financial Times. Lorsqu’il arrive, Mussolini est au pouvoir depuis deux ans (30 octobre 1922) et le jeune Anglais s’enthousiasme pour le nouveau régime. Malgré la fâcheuse affaire Matteoti (10 juin 1924), il se fait dès lors l’éloquent avocat du fascisme. À vrai dire, il n’est pas le seul Britannique à subir la séduction du Duce. Dès le mois de mai 1923, le général Blakeney (10) et Miss Rotha Lintorn-Orman (11) ont fondé le mouvement des British Fascisti qui attire pas mal de beau monde (12). Chez les intellectuels, notamment catholiques, le fascisme suscite également un vif engouement. Apôtre du distributisme, Hilaire Belloc (1870-1953) ne se cache pas d’y être favorable, tout comme Sir Charles Petrie (1895-1977)-(13) ou encore Douglas Francis Jerrold (1893-1964)-(14), Christopher Hollis (1902-1977)-(15), Michael de la Bédoyère (1900-1973)-(16) et Douglas Woodruff (1897-1978)-(17). Le 25 novembre 1924, Jim publie, dans les colonnes du Times, une longue apologie du fascisme qui ne passe pas inaperçue (« The Fascist Regime : Aims and Achievements »). Deux ans plus tard, en janvier 1926, c’est à la tribune du Royal Institute of International Affairs et sous un angle fort bienveillant qu’il présente la doctrine fasciste, dans une conférence dont le texte (« The Doctrines and Aims of Fascism ») sera ultérieurement publié par la National Review (18).

            Issu d’une famille anglicane mais converti au catholicisme en juin 1914, Jim restera sa vie durant très attaché aux valeurs spirituelles chrétiennes. En 1925-26, il suit d’ailleurs certains enseignements dispensés par le Pontificio Collegio Beda, une institution du Vatican qui accueille les anciens clercs de l’Église d’Angleterre. Promu camérier de cape et d’épée du Pape Pie XI, il se veut proche de la hiérarchie ecclésiastique, au point même de demander la permission explicite du cardinal Francis Bourne avant de continuer à lire l’Action française que le Saint-Office vient de mettre à l’index. À la même époque (1927), il devient également membre honoraire du Parti national fasciste et accède au poste de secrétaire-général du Centre international d’études sur le fascisme (CINEF). Basé à Lausanne et fondé par le paléographe helvético-néerlandais Herman de Vries de Heekelingen (19), ce centre est surtout un véhicule de propagande. On y croise diverses personnalités européennes telles que le philosophe Giovanni Gentile (20), le comte Pál Teleki (21), les professeurs Walter Starkie (22) et Edmund Gardner (23), Lord Sydenham of Combe (24) et l’écrivain français Marcel Boulenger (25). Déjà associé à la rédaction des annuaires du CINEF, Barnes se lance alors dans un ambitieux projet d’exégèse de la pensée mussolinienne. En 1928, il publie The Universal Aspects of Fascism (Londres, William & Norgate Ltd), un ouvrage qui a pour but « d’offrir un exposé précis de la doctrine fasciste telle que la prônent les créateurs et les chefs du mouvement en Italie » (p. 239-240). Dédié à Sir John Barnes, le grand-père de Jim, le livre bénéficie d’une préface de Mussolini lui-même. Laudatif, ce dernier y qualifie l’auteur de « penseur anglais avisé, qui connaît parfaitement l’Italie et les Italiens, et tout aussi bien le fascisme » (p. XVII). Ce mouvement, précise ensuite le Duce, « est un phénomène purement italien dans son expression, mais dont les postulats doctrinaux possèdent un caractère universel » (p. XIX) – affirmation bien faite pour plaire à un Jim Barnes très imprégné d’universalisme chrétien. Pour l’Anglais, le fascisme – « seule idéologie politique capable de vaincre les forces de l’’agnosticisme’ libéral et de l’’athéisme’ communiste » (p. 7) – vient restaurer ou renforcer l’autorité sacrée de l’Église. « En règle général », affirme-t-il, « on peut définir le fascisme comme un mouvement politique et social qui a pour but de restaurer un ordre politique et social basé sur le principal courant des traditions qui ont façonné notre civilisation européenne, traditions créées par Rome, d’abord par l’Empire, puis par l’Église Catholique » (p. 35). En guise d’épilogue, Barnes adresse aux sympathisants fascistes du monde entier un pertinent conseil que nombre d’entre eux auront beaucoup de mal à suivre : « Ceux qui adhèrent à cette doctrine », écrit-il, « doivent trouver leur propre voie afin d’être en harmonie avec les conditions du pays dont ils sont les citoyens ; et dans un vieux pays comme la Grande-Bretagne, doté d’une longue histoire et tradition nationale, la voie constitutionnelle est incontestablement celle qu’ils doivent suivre (…) Les fascistes de chaque pays doivent faire du fascisme leur propre mouvement national, en adoptant des symboles et des tactiques qui correspondent aux traditions, à la psychologie et aux inclinations de leur propre nation » (p. 239-240). Le livre obtiendra une bonne critique de T. S. Eliot dans The Criterion (26).

            9781472505828.jpgLe 27 septembre 1930, Jim Barnes, qui a tout de même quarante ans, épouse Buona Pia Felice Guidotti, la fille d’un général italien ; le couple (qui a reçu les félicitations de Mussolini et du Pape) aura un fils, Adriano, dit « Job », qui naît l’année suivante (27). Les activités du CINEF étant sur le déclin, Jim travaille désormais comme directeur des ventes chez Vickers Aviation, ce qui ne l’empêche aucunement de poursuivre son activité éditoriale. Toujours soucieux de mieux faire connaître au public anglophone la doctrine mussolinienne, il publie, en 1931, Fascism (Londres, Thornton Buttersworth Ltd), un petit livre qui connaîtra plusieurs rééditions. Fidèle à ses convictions spirituelles, c’est une interprétation très chrétienne du fascisme que Jim offre à ses lecteurs. Pour lui, le saint-patron du fascisme n’est autre que François d’Assise, et quant à son modèle absolu, c’est Ignace de Loyola : « Jamais peut-être n’a existé un homme associant aussi parfaitement, et en un seul individu, la pensée et l’action », affirme-t-il. «  Il fut à la fois un philosophe, un soldat et un mystique. Il connaissait la valeur de la discipline et de l’autorité » (p. 76). Le fascisme, précise-t-il aussi, est « une force positive dont le but est de promouvoir la vertu » ; ce « n’est pas seulement un système politique ou social (…) mais une philosophie globale de la vie, une religion » (p. 18). Pour Jim, le fascisme « est une vigoureuse révolte contre le matérialisme, c’est à dire contre toutes les façons d’interpréter le monde d’un point de vue purement naturaliste et individualiste » (p. 43). Et « un gouvernement fondé sur le principe [autoritaire fasciste] », tranche-t-il, « serait en parfaite symbiose avec la tradition romaine » (p. 113). Le fascisme, c’est également un mouvement qui « fait tout ce qu’il peut pour éduquer les gens, pas seulement dans la perspective d’augmenter leurs connaissances, mais bien dans celle de forger les caractères, de promouvoir le jugement intuitif (jusqu’alors très négligé) et de développer le civisme et le sens moral » (p. 114). « Le fascisme », proclame-t-il enfin, « est décidé à faire des jeunes une génération d’individus qui croient à la Providence Divine, les hérauts d’un âge de foi ; à faire des jeunes une génération qui, grâce à sa foi, ne connaît pas la peur, va galvaniser l’esprit de sacrifice, affronter gaiement tous les dangers, soutenir la bonne cause, et subir le martyre avec le sourire » (p. 50). On voit que le disciple anglais du Duce ne manque pas de ferveur !

Propagandiste zélé

            En 1933, Barnes est embauché par l’agence Reuters pour couvrir l’actualité sur le sous-continent indien. La famille embarque donc pour Delhi, mais avant de partir, Jim prend tout de même le temps de faire paraître Half a Life (Londres, Eyre & Spottiswoode), le premier volume de ses Mémoires (le second, Half a Life Left, suivra quatre ans plus tard, chez le même éditeur). À côté de multiples anecdotes sur sa jeunesse, il y exprime une vive nostalgie du passé : « Tout ce que j’aimais en Angleterre », avoue-t-il, « semblait appartenir à une époque antérieure – les jolis villages d’antan qui incarnaient une prospère économie rurale, les belles cathédrales anciennes et les antiques temples du savoir que les catholiques avaient édifiés avant la Réforme, les élégantes demeures d’une aristocratie qui florissait avant l’avènement des nouveaux riches, tout ce qu’il subsistait d’un artisanat raffiné, dans le délicat mobilier et les ustensiles domestiques des siècles ayant précédé l’ère industrielle » (p. 42). Le séjour indien des Barnes sera relativement bref car en octobre 1935, Jim est mandaté par Reuters pour suivre les troupes italiennes qui se battent en Abyssinie. La famille regagne par conséquent l’Italie, tandis que lui-même rejoint l’Éthiopie. Il recevra plus tard (1938) la médaille d’argent de la valeur militaire pour sa belle conduite durant cette campagne. Ses reportages ayant toutefois été jugés trop partiaux et ouvertement favorables à l’Italie, l’agence Reuters mettra un terme à son contrat en 1937.

            Pour Jim, cette rupture n’est pas un drame puisqu’il se voit aussitôt chargé par le gouvernement fasciste d’entreprendre une tournée de promotion aux Etats-Unis. Il va y rester un peu plus d’un an, multipliant conférences et interviews dans la plupart des grandes métropoles du pays. À titre personnel, ce long séjour lui permet de prendre langue avec la National Union for Social Justice, le mouvement crypto-fasciste du père Charles Edward Coughlin (28). Rentré en Italie en 1939, c’est d’ailleurs dans les colonnes de Social Justice (un journal qui tire à un million d’exemplaires) que Jim va désormais s’exprimer. En accord avec les nouvelles orientations de Rome, il y prône un certain antisémitisme (29) et suggère notamment qu’il faudrait expulser tous les Juifs d’Europe. Selon lui, c’est à la Grande-Bretagne qu’il incombe de leur trouver un foyer : pas en Palestine, mais en Rhodésie du Nord (actuelle Zambie). Ce transfert, assure-t-il, « serait une gloire pour notre civilisation et une réalisation qui nous apporterait de nouveaux espoirs et nous redonnerait confiance en l’avenir du monde civilisé » (30). Dans un autre article, il accuse carrément les Juifs de vouloir construire, sur les ruines de la Chrétienté, une nouvelle Jérusalem, « un ordre universel dominé par leur propre communauté internationale, compacte, raciale et ésotérique » (31). Sur un tout autre plan, il souligne par ailleurs l’incompatibilité existant entre libéralisme (« une vile perversion » selon le Pape Léon XIII) et catholicisme, et rappelle aux chrétiens qu’il n’est d’autre choix pour eux que celui du fascisme. À l’occasion, il vante aussi les attraits du corporatisme, solution catholique au conflit capital-travail. Convaincu que les régimes italien, espagnol et portugais sont supérieurs au nazisme car clairement catholiques, il explique ensuite aux Yankees que l’influence de Mussolini finira bientôt par amener l’Allemagne à se corriger. Dans l’immédiat, et malgré sa sympathie pour la Pologne catholique, il lui paraît que le nazisme est néanmoins un instrument efficace pour défendre l’Europe contre le bolchevisme. Considérant que la guerre qui s’annonce doit se percevoir comme un conflit entre « l’Église du Christ (…) et les loges de Lucifer en révolte contre Dieu » (32), il estime enfin que l’avenir du continent repose sur une renaissance de l’Europe catholique. « L’Italie », déclare-t-il à ses lecteurs d’outre-Atlantique, « est l’espoir de l’Europe – c’est à dire de l’Europe civilisée et chrétienne. Et l’Espagne catholique agit en étroite coopération avec elle. Par conséquent, de cette guerre naîtra peut-être une ère nouvelle et plus glorieuse. Si tel est le cas, cela viendra d’un regain de vitalité de la conception romaine de la religion et de l’État que l’Italie, terre des Césars et patrie des Papes, aura rendu possible » (33). Cette ère nouvelle sera celle des États-Unis d’Europe – parmi lesquels il inclut aussi l’Irlande, la France, la Pologne et la Hongrie – qui seront enfin délivrés à jamais de la finance, de l’usure et de l’esprit néo-judaïque (34).

Un ami loyal

            Fidèle au fascisme, Jim Barnes est également très attaché à sa patrie d’adoption, comme il en témoigne noir sur blanc dans Io amo l’Italia : memorie di un giornalista inglese (Milan, Garzanti), un petit livre qu’il publie en 1939, à son retour d’Amérique. À la même époque, il rejoint le Ministère de la Culture Populaire (MinCulPop) où on lui offre un poste de speaker à la radio nationale. Avec l’entrée en guerre de l’Italie (juin 1940), cet emploi de propagandiste est tout sauf anodin. Habile causeur et possédant un gros réseau de relations qui lui fournissent de précieuses informations, Jim se fait vite apprécier de ses employeurs. On lui confie souvent le micro car il se révèle percutant dans ses caricatures de Churchill et Eden. C’est ainsi qu’entre décembre 1940 et septembre 1941, soit en neuf mois à peine, il ne réalise pas moins de 170 émissions (35). Cette activité radiophonique l’amène à faire la connaissance d’un autre speaker de prestige, le poète américain Ezra Loomis Pound (36), avec lequel il sympathise tout de suite. Les deux hommes collaborent sur divers projets communs, et lorsque Pound séjourne à Rome, il est souvent reçu chez les Barnes. Jim et le poète sont également passionnés d’économie : tous deux partagent le même intérêt pour le distributisme et le créditisme, ainsi qu’une même haine de l’usure. En 1943, c’est Jim qui s’efforcera de procurer un faux passeport à Ezra Pound, et c’est encore lui qui convaincra l’Américain de reprendre ses causeries à la radio de la République Sociale Italienne.

            En ce qui le concerne, Jim se trouve dans une situation tout aussi délicate que celle de Pound. Il a demandé la nationalité italienne en 1940, mais les choses ont traîné ; en 1943, il a enfin obtenu une réponse favorable mais le débarquement des Alliés (juillet-août) et l’armistice (8 septembre) sont venus à nouveau perturber le processus, et il n’a pu prêter serment dans les délais impartis. Il est donc encore britannique et figure en tête de la liste des traîtres, ce qui pourrait lui valoir la potence… Inquiet, il a rencontré le Pape Pie XII qui a confié au cardinal Montini (futur Paul VI) le soin de veiller à la sécurité de la famille. Le 12 septembre, il obtient des faux papiers grace auxquels il envisage de trouver asile en Suisse ; sur les conseils de ses amis Raimundo Fernández Cuesta (37), ambassadeur d’Espagne à Rome, et Luigi Lojacono, ambassadeur d’Italie à Madrid, il a un temps songé à émigrer en Espagne. De leur côté, les Allemands voudraient bien le récupérer pour la Reichsrundfunk, ce qui achèverait de le compromettre. Au final, les Barnes quittent la capitale le 21 septembre en direction de Venise où ils arrivent le 7 octobre. De là, Jim rallie son ministère qui s’est replié à Salò, sur le lac de Garde.

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Rita Zucca

Libéré par les Allemands (12 septembre 1943) et réinstallé au pouvoir, Mussolini réorganise ses forces. À compter du 1er décembre, son centre de propagande radiophonique est à nouveau opérationnel et Jim reprend ses interventions, depuis les studios de Milan. Avec Ezra Pound et la célèbre Rita Zucca (38), il animera notamment, en 1944, l’émission « Jerry’s Front Calling ». Outre cette présence sur les ondes, il signe une brochure, Giustizia Sociale : attraverso la riforma monetaria (La justice sociale : grâce à la réforme monétaire) qui paraît à Venise (39). « Il ne suffit pas », y affirme-t-il, « de sauver l’indépendance économique de l’Europe, mais encore faut-il aussi, à l’intérieur de cette Europe, éradiquer le système financier, monétaire et bancaire de type anglo-saxon et hébraïque, car tant qu’il persistera (et entre nous, il est encore loin d’être détruit), il rendra impossible l’instauration d’un véritable régime de justice sociale » (p. 11). Plutôt favorable aux ultras du régime (dont le fort peu clérical Farinacci), il donne régulièrement des articles à Croaciata Italica, le journal catho-fasciste que rédigent, entre autres, les prêtres Don Tullio Calcagno (40), Don Edmondo De Amicis (41), Don Antonio Padoan (42) et le capucin Fra Ginepro da Pompeiana (43). Loyal jusqu’au bout au régime qu’il sert depuis vingt ans, il s’entretient une dernière fois avec Mussolini le 9 avril 1945, avant de prendre, avec les siens, le chemin de Mérano.

           9780300192308_p0_v1_s550x406.jpg C’est donc au Tyrol du Sud qu’il apprend la mort du Duce (28 avril 1945), un drame qu’il n’hésite pas à qualifier de « plus grand crime depuis la crucifixion ». Activement recherché par les services secrets et la police militaire britanniques, Jim plonge dès lors dans la clandestinité la plus stricte. Son épouse demeure à Mérano, sans se cacher, mais lui-même disparaît totalement de la circulation. On le croit au Vatican, hébergé au Collège Pontifical Saint-Bede que l’on surveille en vain durant plusieurs mois. En fait, le fugitif est parti pour Bergame puis a trouvé refuge dans un couvent sicilien où il va séjourner jusqu’en août 1947. Pour quelqu’un d’aussi pieux que lui, cette réclusion monacale n’est pas un problème. À la fin de l’occupation britannique, il prolonge d’ailleurs sa retraite – on n’est jamais trop prudent – et continue à bénéficier de l’hospitalité de divers monastères, dans le Latium et le Piémont. Ce n’est qu’en septembre 1949 qu’il réapparaît au grand jour et retrouve les siens à Rome. Quatre ans ont passé, on est en pleine guerre froide et Londres ne s’intéresse plus du tout à lui. Barnes n’a renoncé à aucune de ses convictions mais la page du fascisme semble désormais tournée. Employé par une compagnie pétrolière, il garde le contact avec quelques vétérans de l’épopée mussolinienne mais n’a plus vraiment d’activité politique. Il correspond toutefois, de temps en temps, avec Ezra Pound et adresse même une lettre à Churchill pour lui demander d’intercéder en faveur du poète qui se morfond toujours à l’hôpital St Elizabeths, à Washington. En 1953 et avec dix ans de retard, Jim connaît enfin l’immense satisfaction d’être officiellement naturalisé italien. Il devient définitivement Giacomo Barnes, identité sous laquelle il succombe le 25 août 1955, et qui figure sur sa tombe au cimetière romain du Verano. « Aucun Italien digne de ce nom » affirmera l’historien et diplomate Luigi Villari (1876-1959), « n’oubliera jamais ce cher Jim, ses sacrifices pour la cause italienne, et les risques qu’il a courus pour la servir ».

 

                                                                                                          Christophe Dolbeau

Notes:

(1) Voy. R. Skidelsky, Oswald Mosley, Londres, Macmillan, 1975 ; C. Dolbeau, Les Parias, Lyon, Irminsul, 2001, pp. 93-110 ; R. Tremblay, Oswald Mosley – L’Union fasciste britannique, Paris, Synthèse nationale, Cahiers d’histoire du nationalisme, n° 14, 2018.

(2) Voy. Adrian Weale, Patriot Traitors, Londres, Viking, 2001 ; Josh Ireland, The Traitors, Londres, John Murray, 2017.

(3) Voy. W. Cole, Lord Haw-Haw and William Joyce, Londres, Faber & Faber, 1964 ; F. Selwyn, Hitler’s Englishman, Londres, Routledge & Kegan, 1987 ; C. Dolbeau, op. cit., pp. 81-91.

(4) J. S. Barnes, Half a Life, Londres, Eyre & Spottiswoode, 1933, pp. 230, 233, 234.

(5) Voy. T. Villis, British Catholics and Fascism : Religious Identity and Political Extremism, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2013, p. 21.

(6) Ce pays avait bien eu pour monarque, en 1914, le prince allemand Guillaume de Wied, alias Vilhelm Vidi (1876-1945)…

(7) Nouvelliste de talent, Mary Hutchinson (1889-1977) fut la grande amie du critique Clive Bell, de Aldous Huxley, Georges Duthuit, Samuel Becket et Virgina Woolf.

(8) Edward Marsh (1872-1953) était un célèbre traducteur et protecteur des arts. Il fut en outre le chef de cabinet de W. Churchill et de Lord Asquith.

(9) qui parle de lui à son frère aîné, Henry Ware Eliot (1879-1947), en 1937, et le qualifie à cette occasion de « drôle d’oiseau » ou queer bird

(10) R. B. D. Blakeney (1872-1952) est un officier du génie qui a servi au Soudan et en Afrique du Sud, avant de diriger les chemins de fer égyptiens (1906-1923).

(11) Rotha Lintorn-Orman (1895-1935) est la petite-fille du maréchal Lintorn Simmons. Infirmière durant la Première Guerre mondiale et décorée deux fois de la Croix de la Charité pour son rôle au cours du grand incendie de Salonique (1917), elle dirige après-guerre l’auto-école de la Croix Rouge britannique. Voy. R. Thurlow, Fascism in Britain – A History, 1918-1985, Oxford, Basil Blackwell, 1987, pp. 51-57.

(12) Notamment les généraux Sir Ormonde Winter (ancien directeur adjoint de la police et du renseignement en Irlande) et T. Erskine Tulloch, le colonel et député Sir Charles Burn, l’amiral John Armstrong, ainsi que plusieurs membres de l’aristocratie terrienne, comme Lord Garvagh, Lord Ernest Hamilton, le marquis de Ailesbury et Sir Arthur Hardinge, ancien ambassadeur de Grande-Bretagne en Espagne. Voy. Martin Pugh, ‘Hurrah for the Blackshirts !’, Londres, Pimlico, 2006, p. 52.

(13) Historien, Sir Charles Petrie signe en 1931 Mussolini (Londres, Holme Press), une biographie très flatteuse du Duce. Il sera l’un des principaux soutiens du général Franco au Royaume-Uni.

(14) Éditeur de l’English Review, Douglas Francis Jerrold sera mêlé de très près, en juillet 1936, à l’envoi d’un avion et de deux pilotes pour transporter le général Franco des Canaries au Maroc. En 1930, il avait publié Storm Over Europe (Londres, Ernest Benn), un roman très favorable à l’idéologie fasciste où il se référait à une conception catholique et traditionaliste de l’histoire.

(15) En 1941, Christopher Hollis publiera un ouvrage, Italy in Africa (Londres, Hamish Hamilton), très favorable à l’action de l’Italie fasciste en Afrique.

(16) Entre 1934 et 1962, Michael de la Bédoyère sera le rédacteur en chef du Catholic Herald.

(17) Entre 1936 et 1967, Douglas Woodruff sera le rédacteur en chef de l’hebdomadaire catholique The Tablet.

(18) N° 87 (1926), pp. 568-586.

(19) Néerlandais de naissance mais naturalisé suisse, Herman de Vries de Heekelingen (1880-1942) fut professeur de paléographie à l’Université de Nimègue. Fondateur du Centre International d’Études sur le Fascisme (CINEF), il a également créé le Centre International de Documentation sur les Organisations Politiques. Admirateur du national-socialisme, il a écrit plusieurs ouvrages antisémites dont Israël. Son passé. Son avenir (1937), L’orgueil juif (1938), Le Talmud et le non-juif (1938) et L’Antisémitisme italien (1940), livres ayant tous connu de nombreuses traductions.

(20) Philosophe et pédagogue, Giovanni Gentile (1875-1944) sera président de l’Institut National fasciste de Culture et de l’Académie d’Italie ; ministre de l’Instruction publique (1922-1924), il sera également directeur scientifique de l’Encyclopédie Italienne (1925-1938). Il sera assassiné, le 15 avril 1944, à Florence, par des partisans communistes.

(21) Géographe et membre de l’Académie hongroise des sciences, Pál Teleki (1879-1941) a été à deux reprises Premier ministre du Royaume de Hongrie.

(22) Walter Starkie (1894-1976) est un hispaniste irlandais, musicien et spécialiste du peuple rom. Il sera le fondateur et premier directeur de l’Institut Britannique de Madrid.

(23) Edmund G. Gardner (1869-1935) est professeur de langue et littérature italienne, spécialiste de Dante. Membre des universités de Londres et Manchester, il siège à l’Académie britannique.

(24) Ancien colonel du génie, Lord Sydenham of Combe (1848-1933) a été gouverneur de l’État de Victoria (1901-1903), en Australie, puis gouverneur de Bombay (1907-1913).

(25) Ancien escrimeur olympique et romancier, Marcel Boulenger (1873-1932) est également un collaborateur de l’Action française et de la Revue des deux Mondes.

(26) The Criterion, n° 8 (1928), pp. 280-290 (« The Literature of Fascism »)

(27) Il décèdera en 1987.

(28) Américano-canadien, Charles Edward Coughlin (1891-1979) est un prêtre catholique et animateur de radio. Favorable à une réforme monétaire, antisémite et favorable au fascisme, il se verra contraint par sa hiérarchie, en 1942, de mettre fin à son action politique.

(29) À la fin de l’été et à l’automne 1938, Mussolini prend une série de lois raciales et antisémites.

(30) Voy. « The Jewish Problem – and a Solution », Social Justice du 17 avril 1939.

(31) Social Justice du 14 août 1939.

(32) Social Justice du 24 juillet 1939 (« Tragedy of Chamberlain »).

(33) Social Justice du 11 décembre 1939.

(34) On retrouve là les thèmes chers à son ami Ezra Pound.

(35) Dont voici certains titres : « Glané dans la presse britannique », « Merci mon Dieu pour les erreurs de nos ennemis », « Les vrais maîtres de l’Inde », « La ploutocratie britannique », « Le salut de la civilisation européenne », « Résister ou mourir », « La réponse au traître De Gaulle », « Une réplique à Churchill », etc.

(36) Sur Ezra Loomis Pound (1885-1972), voy. Les Cahiers de l’Herne, n° 6 et 7, 1965 (Ezra Pound 1 et 2) ; Noel Stock, The Life of Ezra Pound, Harmondsworth, 1970 ; John Tytell, Ezra Pound – Le volcan solitaire, Paris, Seghers, 1990 ; C. Dolbeau, op. cit., pp. 259-267.

(37) Raimundo Fernández Cuesta (1896-1992) était l’un des fondateurs de la Phalange dont il fut longtemps le secrétaire général. Après la Seconde Guerre mondiale, il sera ministre de la Justice.

(38) Rita Zucca (1912-1998) était une Italo-Américaine, originaire de New York, qui s’exprimait sur les ondes de la radio italienne. Naturalisé italienne, elle ne fut pas poursuivie par la justice américaine mais écopa néanmoins, devant un tribunal militaire italien, de quelques mois de prison.

(39) Cette brochure a été rééditée en 1995 par Barbarossa (Milan).

(40) Excommunié (24 mars 1945), Don Tullio Calcagno (1899-1945) sera arrêté, à Crema, par des partisans communistes (24 avril 1945), transféré à Milan, condamné à mort et exécuté, en compagnie de l’aveugle de guerre et médaille d’or de la valeur militaire Carlo Borsani. D’abord jetés dans une benne à ordures, leurs corps seront ensuite inhumés dans une tombe anonyme.

(41) Aumônier militaire et vétéran des campagnes d’Afrique, Don Edmondo de Amicis (1885-1945) s’exprimait régulièrement au micro de la radio fasciste. Victime le 24 avril 1945 d’un attentat communiste, il décède de ses blessures deux jours plus tard.

(42) Curé de Castelvittorio, Don Antonio Padoan sera assassiné le 8 mai 1944 par des partisans communistes. Son nom sera donné à la XXXIIe Brigade noire.

(43) Aumônier militaire et vétéran des campagnes d’Ethiopie et d’Albanie, le capucin Ginepro da Pompeiana (1903-1962) sera incarcéré à Gênes en 1945. 

Bibliographie:

– James S. Barnes, The Universal Aspects of Fascism, Londres, William & Norgate Ltd, 1928 ; id., Fascism, Londres, Thornton Buttersworth Limited, 1931 ; id., Half a Life, Londres, Eyre & Spottiswoode, 1933 ; id., Io amo l’Italia : memorie di un giornalista inglese, Milan, Garzanti, 1939 ; id. A British Fascist in the Second World War – The Italian War Diary of James Strachey Barnes, 1943-45, Londres, Bloomsbury Academic, 2014.

– Giacomo Barnes, Giustizia Sociale : attraverso la riforma monetaria, Milan, Barbarossa, 1995.

– R. Thurlow, Fascism in Britain – A History, 1918-1985, Oxford, Basil Blackwell, 1987.

– T. Linehan, British Fascism, 1918-39 : Parties, Ideology and Culture, Manchester, Manchester University Press, 2000.

– Martin Pugh, ‘Hurrah for the Blackshirts !’ – Fascists and Fascism in Britain between the Wars, Londres, Pimlico, 2006.

– David Bradshaw et James Smith, « Ezra Pound, James Strachey Barnes (‘The Italian Lord Haw-Haw’) and Italian Fascism », Review of English Studies, n° 64 (266), 2013, pp. 672-693.

– T. Villis, British Catholics and Fascism : Religious Identity and Political Extremism, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2013.

– Paul Jackson, « James Strachey Barnes and the Fascist Revolution : Catholicism, Anti-Semitism and the International New order », dans Modernism, Christianity and Apocalypse (sous la direction de Erik Tonning), Leyde, Brill, 2014, pp. 187-205.

samedi, 04 avril 2020

Géopolitique du coronavirus II - Entretien avec Jean-François Susbielle

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Géopolitique du coronavirus II

Entretien avec Jean-François Susbielle

Ex: https://stategika.fr

Au cœur d’une crise mondiale inédite par son ampleur, Strategika vous propose l’éclairage d’analystes et de penseurs reconnus dans leur domaine d’expertise. Nous avons posé à chacun une série de questions qui portent sur les différents aspects de cette véritable crise de civilisation ainsi que sur ses répercussions politiques, géopolitiques et sociales.

Nous poursuivons cette série d’entretiens avec Jean-François Susbielle.

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Jean-François Susbielle est Ingénieur Civil des Mines et diplômé de Sciences Po en relations internationales. Spécialiste de l’Internet, il a écrit plusieurs ouvrages techniques aux éditions Eyrolles. Depuis plus de 10 ans, il enseigne la géopolitique à Sciences Po Paris puis à Grenoble Ecole de Management. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages centrés sur les relations Chine-USA dont un thriller, “la morsure du dragon” (First Editions)

morsure.jpgStrategika – On lit beaucoup d’éléments contradictoires selon les différentes sources d’information disponibles ou selon les avis des professionnels de la santé. Quelle est la réalité effective de cette pandémie selon vous ?

La pandémie est bien réelle puisque le COVID-19 affecte aujourd’hui la quasi totalité de la planète. Par contre, l’OMS en a certainement surestimé le taux de létalité en avançant le chiffre de 3,5%. Sans doute supérieure à la grippe saisonnière, la létalité reste en deçà de 1% des personnes infectées (et non pas des seuls cas déclarés.)

D’après l’université de Stanford, la létalité du COVID-19 se situerait autour de 0,4%, d’autres l’estiment entre 0,1% et 0,3%.

Par contre, le COVID-19 est selon les spécialistes, de 2 à 3 fois plus contagieux que la grippe et lorsqu’elles surviennent, les complications pulmonaires peuvent être beaucoup plus sérieuses et nécessiter une hospitalisation en soins intensifs.

Strategika – Cette pandémie précède-t-elle un effondrement économique et systémique selon vous ?

Ce n’est pas tant le volet sanitaire de la pandémie que le confinement adopté pour la combattre, qui aura les conséquences les plus désastreuses. La mise au ralenti – sinon à l’arrêt – de l’activité économique pendant plusieurs mois (au moins 6 mois dit-on au Royaume Unis), la fermeture des frontières au tourisme, auront des conséquences cataclysmiques, en particuliers pour les pays les plus faibles. Ce sera darwinien, les plus vulnérables ne sortiront pas indemnes. L’Allemagne l’a bien compris qui tente de mitiger ces conséquences dévastatrices en évitant un confinement intégral.

9782754003346.jpgEn Asie, le Japon, Taiwan, Singapour ou la Corée ont montré qu’il était possible de gérer la pandémie de manière différente et moins destructrice en évitant d’éteindre le moteur de l’activité comme on le fait en France. L’Allemagne tente de suivre ce modèle. 

Mais chacun pressent que l’après COVID-19, s’il y a un après, sera très différent du monde que nous quittons.

Strategika – Plus de 3 milliards de personnes sont appelées à se confiner dans le monde. Pour la première fois de son histoire, l’Humanité semble réussir à se coordonner de manière unitaire face à un ennemi global commun. Que vous inspire cette situation ? Cette pandémie va-t-elle forcer l’humanité à se doter d’un gouvernement mondial comme le préconisait Jacques Attali lors de la pandémie de grippe A en 2009 ? 

Nous n’en prenons pas le chemin. Bien au contraire, la pandémie accélère la dé-mondialisation initiée par D. Trump, réintroduit les frontières entre les États et consacre plus que jamais le chacun pour soi.

Le 12 mars, les USA claquaient la porte au nez des européens sans la moindre concertation, alors que le 15 mars, l’Allemagne fermait de manière unilatérale sa frontière avec la France ! 

Pour le moment, le volet sanitaire de la pandémie montre que chaque pays joue pour son propre compte et on ne distingue pas l’amorce du début du commencement d’une coordination, prélude à ce fameux “gouvernement mondial”.

Certes nous n’en sommes qu’au début et il faut attendre le volet économique de la séquence en cours, la dépression avec son cortège de faillites, de chômage de masse et de destruction du tissu industriel et social. Chacun voudra sortir de cette pandémie dans un état de délabrement moindre que ses rivaux.

41ww3hMYBQL._SX319_BO1,204,203,200_.jpgMais ce n’est pas tout ! Un cataclysme de cette ampleur représente une opportunité unique pour les nouveaux venus (je pense à la Chine) de rebattre les cartes au niveaux mondial et d’acquérir de la puissance au dépend des autres.   

Et puis, s’il y a dans les sphères mondialistes américaines un projet de gouvernement mondial, Donald Trump en est aujourd’hui le rempart.

Strategika – En 2009 toujours, Jacques Attali expliquait que « l’Histoire nous apprend que l’humanité n’évolue significativement que lorsqu’elle a vraiment peur ». Que vous inspire cette idée ?    

Je vois mal à quoi Monsieur Attali fait allusion. Pour moi, l’humanité évolue grâce au progrès technique et aux révolutions industrielles.

Pense-t-il aux institutions internationales nées dans l’immédiate après-guerre, ONU, FMI, Banque Mondiale ? Ce n’est pas tant la peur d’une nouvelle guerre qui a présidé à leur création que la volonté de domination du vainqueur américain.

Aujourd’hui, après 40 ans de mondialisation débridée, plus de la moitié de la richesse mondiale se concentre entre les mains des 0,1% les plus riches, ceux que M. Attali appelle “l’hyper classe”.  C’est peut-être de leur côté qu’il faut chercher les projets d’avenir pour notre pauvre humanité, entre transhumanisme et esclavage. La période de confinement et de peur que nous connaissons offre une fenêtre de moindre résistance dans la population, propice à toute sorte d’évolutions.

Strategika – Comment voyez-vous l’évolution de la pandémie et ses conséquences politiques et sociales dans les semaines à venir ? Existe-t-il une issue politique à la situation que vous venez de décrire et quelle forme pourrait-elle prendre selon vous ?

On espère ardemment que notre pays puisse panser ses plaies et trouve suffisamment de forces pour remonter la pente. Mais chacun pressent que cette crise ne permettra pas un retour à l’état précédent comme ce fut le cas avec les crises des cinquante dernières années, qu’elles soient pétrolières ou monétaires, ou qu’elles résultent de l’éclatement des bulles de l’Internet ou des subprimes.

Il est bien trop tôt pour envisager le monde de l’après COVID-19. La dépression risque d’être si profonde que tous les scénarios sont possibles. Pour en avoir un avant-goût, il suffit de se rendre dans une librairie (en ligne) au rayon science-fiction, catégorie dystopie…

Geistiger Bürgerkrieg: Die Sprache muss zurückgewonnen werden!

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Torsten Groß:

Geistiger Bürgerkrieg: Die Sprache muss zurückgewonnen werden!

Ex: https://kopp-report.de

Das linksgewirkte Establishment will durch die »Disziplinierung von Sprache« und Begriffsumdeutungen Sprechverbote und Gedankenbarrieren in Deutschland errichten. Wir befinden uns in einem geistigen Bürgerkrieg, den die freiheitlichen Kräfte nur gewinnen können, wenn sie die Herrschaft über ihre Sprache zurückgewinnen.

In einer repräsentativen Umfrage gaben 2019 knapp 80 Prozent der Deutschen an, sie würden es außerhalb des engeren persönlichen Umfeldes vermeiden, sich zu bestimmten Themen frei zu äußern. Ein erschreckendes Ergebnis, das für totalitäre Staaten wie die untergegangenen DDR oder Kuba erwartbar ist, nicht aber für das laut Grundgesetz freiheitliche Deutschland.

Doch leider gibt es hierzulande längst informelle Sprechverbote, die im Namen der politischen Korrektheit auf eine Uniformierung der öffentlichen Meinung hinauslaufen. Viele Menschen empfinden geradezu physisches Unwohlsein, wenn sie faktisch zutreffende Aussagen zu »heiklen« gesellschaftspolitischen Fragen wie Zuwanderung, Kriminalität oder Islam machen. Dahinter steckt die unterschwellige Angst, für seine Äußerungen an den Pranger gestellt und sozial geächtet zu werden, bis hin zu Rufmordkampagnen und dem Verlust der bürgerlichen Existenz.

Diese »Schere im Kopf« wird in der real existierenden Bundesrepublik mit sehr viel subtileren Methoden erzeugt, als das in der DDR der Fall war, wobei das wichtigste Instrument die »Disziplinierung der Sprache« (Bundespräsident Steinmeier) ist. Durch die Skandalisierung und Tabuisierung bestimmter Begriffe und Wortfelder soll die sprachliche Bandbreite beschnitten werden. Man will die Menschen davon abhalten, so zu reden, wie ihnen der Schnabel gewachsen ist, um ihren Empfindungen über gesellschaftliche Missstände Ausdruck zu verleihen.

Unbequeme Sachverhalte dürfen nicht mehr offen beim Namen genannt, sondern müssen sprachlich verbrämt werden, um sie zu verschleiern. Linksgewickelte Politiker gehen dabei mit »gutem Beispiel« voran, etwa Kölns Oberbürgermeisterin Henriette Reker. Die empfahl Frauen nach den sexuellen Übergriffen von Migranten in der Silvesternacht 2015/2016:

»von sich aus (…) keine große Nähe (zu) suchen zu Menschen, die einem fremd sind (…) und eine Armlänge Abstand zu halten«.

Diese Wortwahl suggeriert, dass es die Geschädigten selbst waren, die sich an die Täter herangemacht hätten und die Notzucht-Attacken der zumeist aus Nordafrika stammenden Männer zu verhindern gewesen wären, hätten die betroffenen Frauen nur mehr Abstand gehalten. Indirekt wird den Opfern also unterstellt, dass sie wegen ihres angeblich »unpassenden« Verhaltens eine Mitschuld für das erlittene Unrecht trügen.

Eine zentrale Rolle bei der Maskierung und Zerstörung von Sprache spielen die Medien. Sie sind es, die in unserer Demokratie maßgeblichen Einfluss auf die politische Willensbildung ausüben. Um die Massen in die gewünschte politische Richtung zu lenken, wird die Realität so lange entstellt, bis sie in das von linksgrünem Mainstream vorgegebene ideologische »Wahrheitssystem« passt. In seinem gerade veröffentlichten Buch Das Wörterbuch der Lügenpresse schreibt Bestsellerautor Thor Kunkel:

»Die von den staatstragenden Medien vorangetriebene Infantilisierung der deutschen Sprache (einst eine der präzisesten Sprachen der Welt) hat inzwischen groteske Ausmaße erreicht. Ein Blick in die deutschen Gazetten zeigt: Sie quellen über von Worthülsen, Täuschwörtern (im Sinne von Begriffsumdeutungen), halbwahren Floskeln, Meliorationen, wohlfeilen Mustersätzen, linguistischen Simplifizierungen, Kampfbegriffen und ewig gleichen, ‚linkspädagogischen‘ Argumentationsmustern, die das Denken der Menschen ‚normieren‘, ja ausschalten sollen.«

Neusprechvokabeln, die den gesunden Menschenverstand eliminieren und Gedankenblockaden errichten sollen, finden sich in den Medien zuhauf: Da werden Wirtschafts- und Armutsmigranten, die Monat für Monat zu Tausenden illegal nach Deutschland strömen, zu »Flüchtlingen« oder »Geflüchteten« umgelogen. »Weltoffenheit« wird zum Synonym für »offene Grenzen«, ein verslumtes Mietshaus als »Problemimmobilie“ beschönigt. Und No-Go-Areas sind jetzt »Gebiete mit erhöhtem Aufmerksamkeitsbedarf« oder »sensible Wohngegenden«. Die Liste der Begriffsumdeutungen zur ideologisch gelenkten Manipulation der Öffentlichkeit ließe sich beliebig fortsetzen.

Thor-Kunkel_L-GENPRESSE_720x600.jpgWer sich das Denken nicht verbieten lässt und seine Meinung abweichend vom linken Mainstream äußert, wird mit Holzhammerbegriffen wie rassistisch, sexistisch, islamophob oder rechtspopulistisch belegt. Ziel der inflationären Verwendung solcher und ähnlicher Verbalinjurien ist es, Andersdenkende zu diskreditieren und jeden inhaltlichen Diskurs über ihre Argumente abzuwürgen. Eine neuere Entwicklung in der Medienlandschaft ist der verstärkte Einsatz von Pejorativen, also die Abwertung ursprünglich positiver oder neutral besetzter Begrifflichkeiten. Man denke etwa an die Wendung »alter, weißer Mann«, die heute negativ konnotiert ist und als Synonym für Menschen steht, die sich gegen den von linker Seite betriebenen »gesellschaftlichen Wandel« stellen.

Wir befinden uns mitten in einem geistigen Bürgerkrieg, wie es Thor Kunkel in seinem neuen Buch Das Wörterbuch der Lügenpresse ausdrückt. Diesen Kampf wird das freiheitliche Lager nur gewinnen können, wenn es gelingt, die Deutungshoheit über die Begriffe und damit die Herrschaft über die Sprache zurückzugewinnen. Viel Zeit bleibt dafür nicht mehr!

Bestellinformationen:

» Thor Kunkel: Das Wörterbuch der Lügenpresse, 383 Seiten, 22,99 Euro – hier bestellen!

Freitag, 03.04.2020

Le déploiement des nouvelles technologies pour lutter contre le coronavirus menace-t-il nos libertés individuelles ?

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Le déploiement des nouvelles technologies pour lutter contre le coronavirus menace-t-il nos libertés individuelles ?

Ex: https://www.iris-france.org


Pour lutter efficacement contre la pandémie de Covid-19, certains États comme la Corée du Sud et la Chine ont choisi de mettre à contribution les nouvelles technologies pour mieux cibler le virus et localiser les individus contaminés. Si certaines mesures commencent à inspirer d’autres États, cette traque de l’information pose un certain nombre de questions quant aux libertés individuelles et la protection des données. Entretien avec Charles Thibout, chercheur associé à l’IRIS.

Afin de lutter contre le coronavirus, la Corée du Sud a notamment mis en place un traçage des individus via internet, leur carte bancaire et leur portable. En Chine, les individus doivent, notamment via l’application Alipay, renseigner un questionnaire à propos de leur santé. Si ces mesures semblent faire leur preuve quant au confinement du virus, que doit-on penser de ces mesures sanitaires qui priment sur la protection de la vie privée ? Doit-on craindre que cela devienne une tendance lourde de nos sociétés à venir ?

Il faut insister sur l’incommensurabilité des cas cités. D’un côté, la Corée du Sud, une démocratie libérale, fût-elle imparfaite, fonde la légitimité d’une action publique restrictive des libertés individuelles sur un système électoral modérément pluraliste ; de l’autre, la Chine, un régime totalitaire où l’effectivité du pouvoir émane du Comité permanent du Parti communiste chinois, voire de Xi Jinping lui-même, et où le peuple n’a pas voix au chapitre.

Par ailleurs, nous avons affaire à des cultures très différentes de la nôtre, marquées par le confucianisme qui, au fil des siècles, manié par les autorités à leur guise, en est venu à promouvoir le strict respect de l’autorité et la mise en sommeil des intérêts individuels au profit du groupe, puis de la nation. Cette conception de la société a été réactivée avec force par le régime chinois, ces dernières années, et s’est matérialisée par l’extension de dispositifs de surveillance à toute la société, fondés en particulier sur les technologies de traitement de données, dont les systèmes d’intelligence artificielle. Pour une raison simple : Pékin craint plus que tout l’« instabilité sociale ». Le fait qu’Alipay, filiale d’Alibaba, concourt à la surveillance de la population en temps d’épidémie n’a rien d’étonnant. Les firmes numériques chinoises sont étroitement liées à la politique de contrôle social du régime, qui se manifeste déjà « en temps normal » par la lutte contre les opposants politiques, la répression des minorités ethniques, en particulier les minorités musulmanes de la province du Xinjiang, et, plus largement, par la mise en place des systèmes de crédit social.

Mais ce type d’utilisation des technologies émergentes est-elle réservée à ces seuls États ? Non, bien entendu. Chacun se souvient des révélations d’Edward Snowden quant aux programmes de surveillance de masse, menés par la NSA aux États-Unis, et dans le monde. La tendance naturelle d’un État ou de tout système de gouvernement, a fortiori lorsque son personnel politique et administratif pâtit d’un manque de légitimité et de représentativité, est d’employer tous les moyens à sa disposition pour se perpétuer. Il existe certes des garde-fous, mais ils sont régulièrement outrepassés et les périodes de crise sont des moments propices en la matière. La politique de surveillance de masse des autorités américaines, à l’endroit de leur propre population, s’est ainsi particulièrement intensifiée au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, avec le Patriot Act. La surveillance de la population est une caractéristique intrinsèque de l’État ; les nouvelles technologies de traitement de données viennent simplement renforcer son arsenal.

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Thierry Breton a également annoncé vouloir exploiter les données mobiles des Européens pour mieux lutter contre l’expansion du Covid-19. Ces mesures vous semblent-elles justifiées ? Cela n’ouvre-t-il pas la voie d’une utilisation systématique des données à l’avenir ?

Ces annonces posent beaucoup de questions. Qui récolte ces données ? Dans quelles conditions ? Sont-elles centralisées ou non ? Qui les gère : l’État, une entreprise européenne, américaine, chinoise ? Seront-elles détruites ? Au bout de combien temps ? Les réponses se font attendre. En tout cas, ce n’est pas le Règlement général sur la protection des données (RGPD) [] qui viendra contrecarrer les objectifs du commissaire, puisqu’il permet déjà de déroger au principe de consentement à des fins de protection de la santé publique (art. 9-2 i), y compris en cas d’épidémie (point 46). De plus, si Thierry Breton affirme que ces données seront anonymisées, il faut tout de suite ajouter que les méthodes d’anonymisation sont très médiocres, comme l’ont montré des chercheurs de l’Imperial College London et de l’Université catholique de Louvain, dans une étude parue dans la revue Nature Communications, en parvenant à réaliser correctement un traçage inversé de données anonymisées dans 99,98 % des cas.

Par ailleurs, le traitement plus que contestable des données personnelles des Européens par les pouvoirs publics n’est pas une nouveauté. Les différentes législations antiterroristes sont venues renforcer l’arsenal sécuritaire des États européens au fil des années, comme en Chine ou aux États-Unis, où les mesures de surveillance fondées sur le traitement des données personnelles ont presque toujours été justifiées de cette manière. Il est normal que les autorités prennent les dispositions nécessaires à la sécurité des populations. Mais il est tout aussi nécessaire de rappeler que les restrictions de liberté et les dispositifs de surveillance, toujours plus intrusifs, qui se sont multipliés depuis le début des années 2000, d’abord censés répondre à des crises sécuritaires majeures, ont fini inlassablement par entrer dans le droit commun et s’appliquer à des situations fort éloignées de leur but initial.

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Cette crise du coronavirus ne signe-t-elle pas encore davantage notre dépendance aux nouvelles technologies et à l’intelligence artificielle, à l’heure où notamment les réseaux se retrouvent saturés en raison du confinement ?

Elle signe surtout une tendance lourde dans l’histoire contemporaine – même si l’on en retrouve les origines aux XVIIe et XVIIIe siècle – de volonté de rationalisation scientifique et technique de l’action publique. En postulant la capacité des technologies de traitement de données et, notamment, de l’intelligence artificielle – qui en dernière analyse est un ensemble d’outils statistiques et probabilistes – à traiter des quantités phénoménales de données, avec une rapidité et un niveau de précision sans équivalent, le personnel politique des principales puissances se considère en mesure de gouverner scientifiquement les populations, dans la longue tradition de l’« administration technicienne » (Michel Antoine). L’idée est d’extraire de ces technologies des instruments de gouvernementalité, qui permettraient de prévoir l’évolution future des comportements individuels et collectifs, et d’en inférer logiquement les politiques publiques adéquates.

C’est l’accomplissement de ce que Stanley Hoffmann appelle la « pensée experte » ou de ce que le chercheur américano-biélorusse Evgeny Morozov qualifie de « solutionnisme technologique » : la technique, en l’occurrence les technologies de traitement de données, est vue non seulement comme un instrument efficace de résolution des problèmes sociaux, mais elle instille également, dans l’esprit des décideurs politiques, l’idée suivant laquelle tous les problèmes afférents à l’activité humaine seraient réductibles, en dernière instance, à un dysfonctionnement, à un grippage dans la mécanique sociale, conçue sur le mode d’une harmonie préétablie qu’il conviendrait de faire advenir à nouveau. Là où l’intelligence humaine du personnel politique atteint ses limites, la machine viendrait ainsi suppléer à ses défaillances.

Ce tropisme techniciste n’est évidemment pas sans poser de difficultés. D’abord, il suggère la possibilité d’ériger le gouvernement des Hommes au rang de science, débarrassé des oripeaux de la confrontation idéologique, pourtant centrale dans une démocratie. Ensuite, l’usage extensif de ces technologies ouvre la voie à une délégitimation complète du politique, puisque face à la parfaite « rationalité » de la machine, ses émotions et ses affects ne peuvent qu’être considérés comme des faiblesses. Enfin, par conséquent, il accentue en retour la légitimité des principaux acteurs technoscientifiques à prendre une part plus importante dans la gestion des affaires publiques. Or, il se trouve que ces acteurs sont essentiellement étrangers, chinois et surtout américains. La gestion technophile de la crise sanitaire nous conduit donc à reposer, à nouveaux frais, la question de notre régime politique et de sa capacité ou non à combiner une action publique efficace, démocratiquement légitime et – donc – souveraine.

Germanisation de l'Europe ou européanisation de l'Allemagne ? Le Covid-19 comme incubateur stratégique

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Germanisation de l'Europe ou européanisation de l'Allemagne ?

Le Covid-19 comme incubateur stratégique

Irnerio Seminatore

La peur, le pouvoir et le statu-quo

Comme la peste d'Athènes (429 a.C), ou celle de l'Europe du Moyen Age (1347) et de la Renaissance (1720), ou encore la "grippe espagnole" de 1918, la pandémie du "COVID", si quotidien, fait de ce fléau dévorant un compagnon familier, silencieux et inconnu, qui suscite angoisse et exclusion.


Ceux qui déclarent qu'un état de guerre est en cours (Macron, Guterres, le Pape François), feignent d'oublier que la guerre présuppose un ennemi désigné, un état d'hostilité, un affrontement sanglant et des théâtres de combat furieux, où règnent les derniers tourments de la vie, car la guerre est un "acte de violence, qui vise à soumettre la volonté de l'autre" (Clausewitz). Or, cette pandémie démontre qu'il s'agit là d'une fausse rhétorique et que nous sommes en présence d'une "surprise stratégique".

Celle-ci n'est pas à résoudre par des moyens militaires et dont les éléments-clés sont d'ordre politique et civil et se caractérisent par l'ampleur, l'allure, l'impréparation politique, l'état d'urgence, la remise en cause de la stabilité et de l'ordre public, ainsi que l'extrême vulnérabilité du corps politique.

En effet, nos avenues sont désertes et nos ennemis absents et une coalition de forces et d'intérêts, invisibles, prétendent aider, intervenir et gouverner, liés à double fil par le cynisme, l'empathie et la colère.

Ce qui occupe les esprits de nos jours, ce sont les répercussions profondes et durables de la souffrance, de l'angoisse et de l'inconnu.

Ce qui règne en souveraine est la peur, le premier sentiment de l'homme qui est à l'origine, selon Thomas Hobbes, de la religion et de l’État.

La peur, qui se recèle dans l'âme du vivant, comme le fantasme anticipateur de la mort ne change en rien le psychisme de l'homme, ni l'organisation de la société.

Au contraire, elle renforce le pouvoir des Princes, par l'intimidation, la soumission et le désespoir, un cumul de passions bien humaines, suivies de vagues de malheurs sociaux, la faim, l'errance, le vagabondage, la fuite, le sentiment de faillite et la révolte, libératoire, colérique et inhumaine.

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Ce qui se recèle dans l'âme de l'homme qui a peur, est une ferveur religieuse soudaine, méconnue, qui découvre  le divin et l'implore.

Ce qui, dans le  sous-sol du monde rationnel, inflige une douleur moderne, de nature obsessionnelle, est l'impact économique de la situation, la raréfaction des biens et des activités, la stagnation des salaires, le chômage de masse, l'insécurité dans les villes, la révolte des affamés et des démunis, la crise d'autorité des pouvoirs et l'apparition de révoltés et d"émeutiers, qui apparaissent bien venus, généreux et justifiés.

Révoltes qui traversent la société selon des clivages ethniques et religieux, d'autant plus intenses et profonds, que la société est communautaire et tribale, bref, multiculturelle et pré-moderne.

Or la misère divise et l'autorité unit et protège, car la peur grandit le pouvoir et lui accorde générosité, grandeur et piété, la somme des sentiments humains les plus élevés, soutenus par la force physique.

La pandémie engendre effondrement, politique et moral, mais elle n'affaiblit pas l'esprit de lucre, elle le suscite et lui donne une justification nouvelle.

Par ailleurs, les pandémies légitiment le pouvoir et le renforcent, car le besoin de protection est une constante psycho-politique dans l'Histoire.

L'ampleur de la pandémie est aujourd'hui aussi profonde et cache une vulnérabilité stratégique face à des "competitors", tentés par des armes biologiques.

Le confinement de masse, l'effondrement des économies
et les politiques budgétaires des principaux pays


Le confinement de masse, exigé par les autorités publiques, engendre un effondrement des économies nationales en Europe.

La protection sanitaire a un coût, l'arrêt de la consommation et celui de la production.

La dissolution du corps politique d'une société montre, dans les situations de crise aiguë, les limites d'un modèle économique et social, qui ouvre sur un scénario catastrophe, celui de l'après pandémie.

L'imprévisibilité générale sur le vieux continent suscite deux réactions conjointes, l'absence de coordination commune sur les politiques sanitaires, et la divergence sur le mode de financement des politiques budgétaires des principaux pays.

En France, le désarroi sur les conflits d'intérêts a concerné le choix des politique sanitaires et a opposé Mr. Lévy, ancien Directeur de l'Iserm et A. Buzyn, ancienne ministre de la Santé, au Professeur Raoult, éminente virologue de Marseille et pourtant dénigré, ainsi qu'une mobilisation des média mainstream, pour encourager une réaction, tournée vers la résilience, la coopération et la solidarité.

Au même temps, les effets d'annonce des différents gouvernements, concernant les promesses de soutien budgétaire de la part des principaux pays, ont impliqué l'Union européenne et suscité divisions et dissonances graves, entre Italie, Pays-Bas et Allemagne, sur l'utilisation des instruments communs (aides d’État ou euro-bonds). 
La couverture des difficultés exceptionnelles, en termes de coûts sanitaires et de relance de grandes infrastructures, a été l'occasion d'un contraste de lecture et de vision entre le premier Ministre Italien G. Conte, la Chancelière allemande A. Merkel et le premier Ministre hollandais, Marc Rutte, aboutissant à une interprétation divergente des traités européens, prévus en leurs temps pour des situations de gouvernance courante et non exceptionnelle. Suite à cette entorse de la solidarité une question de fond s'affirme et peut se formuler ainsi:

"L'Europe existe-t-elle encore?"

"Veut-elle encore s'aider elle-même, ou s'imaginer, à tort, d'aider ses États-membres, sans en avoir la légitimité institutionnelle?"

La rapidité de décision et le caractère massif des interventions étatiques dans le monde, montre aux opinions l'efficacité et la réactivité des différents pays et leur souci de ne pas rater la reprise, en l'encourageant sans répit. 

Au sein de l'Union européenne, par contre, une loi spéciale, votée et ratifiée le 11 mars, sur "l'état de danger" du pays, par le Parlement hongrois, permet désormais au premier Ministre V. Orban de gouverner par ordonnance et pour une durée indéterminée.

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Le jour après, Ursula von der Leyen, aussi absente et tardive dans l'urgence sanitaire de l'Union, a rappelé à l'ordre Budapest et mis en garde les 27 sur les mesures urgentes décrétées en Hongrie et sur les dérives autoritaires supposées de la part de V. Orban, ouvrant la voie à une dictature présumée.

Ce qui dicte la priorité idéologique d'Ursula von der Leyen est moins la santé publique ou la sortie de la pandémie, que la surveillance intrusive de la Commission sur un État membre dissident et le respect d'un statu quo de vide stratégique existant et pré-existant

En termes de promesses de soutien à l'économie, voici quelques rappels en chiffres, concernant:

- les États-Unis, 2000 milliards de dollars + 1000 dollars par citoyen et 500 pour chaque enfant

- Allemagne, 1100 milliards d'euros

- France, 300 milliards d'euros

- Italie, 50 milliards d'euros

- BCE, émission d'eurobonds pour 750 milliards (quantitative easing - plan d'urgence de rachat de la dette publique et privée)

- les autres pays de l'UE, selon des quantités décroissantes.

Les besoins ne seront pas comblés par ces mesures, mais les mesures annoncées sont à interpréter comme des signaux d'inversion des tendances.

Le confinement et la peur ouvrent en France plusieurs fronts de combats, familiaux et civiques (mésententes conjugales, divorces). Si les premiers concernent les psychopathologies individuelles, les secondes, qui touchent au statut des banlieues, rouvrent la page, jamais fermée, de la sécurité collective ainsi que le destin unitaire ou sécessionniste de la nation.

En effet, ici la guerre n'est pas que micro-biologique, mais identitaire, constitutionnelle et raciale et les accrochages se multiplient avec la police, dans "plusieurs poches de résistance". Dans ces zones explosives (Seine Saint Denis et autres), le relâchement par la Chancellerie de caïds, tenus jusqu'ici en prison, fait reprendre, dans ce vieux no-man's land, la rançon des stups et de l'économie illicite, ainsi que  la gestion chaotique de l'ordre.

Le COVID, incubateur stratégique d'une option de fond: germanisation de l'Europe ou européanisation de l'Allemagne

Deux indicateurs institutionnels sont à considérer comme décisifs du bras de fer stratégique que se joue actuellement en Europe:

- La divergence de lecture des traités européens, conçus pour des conjonctures de gouvernance ordinaire entre l'Italie d'une part et l'Allemagne et les Pays-Bas de l'autre sur la manière de subvenir aux coûts sanitaires et de soutenir l'économie en vue de l'après coronavirus. Vis-à-vis de la rigidité d'interprétation des traités, l'Italie soutient la thèse de réécrire Lisbonne et Maastricht, afin de penser l'exception (ou la souveraineté) dans l'exercice de la gouvernance des pays-membres. Un pas, très contrasté, vers l'indépendance politique de l'Union, revendiquée par Macron.

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- Le gouvernement par ordonnance et à durée indéterminée, voté par le parlement hongrois en faveur d'Orban, qui représente l'hérésie de principe et donc la dérive absolue des "valeurs démocratiques" et de l’État de Droit, surveillée rigoureusement par la Commission et par la Cour européenne de Justice, chargée de soumettre la politique au judiciarisme des magistrats. Ce contrôle a soulevé immédiatement une mise en garde de la part de Mme von der Leyen à Budapest, comme la déviance absolue, en situation d'urgence, portant atteinte à l'unité de l'Union, dans cette phase, très délicate, du post-Brexit.

Ce double confinement de deux États-membres, par le bloc intransigeant des pays nordiques, sous direction allemande, fragmente politiquement l'Union européenne et freine ou retarde toute tendance à l'autonomisation et à la liberté de conduite des pays-membres, corsetés par le statu-quo et le vide stratégique de l'Union. Celle-ci vit par ailleurs, politiquement, une conjoncture internationale indécise et d'hésitation hégémonique, interne et internationale.


En effet, la pandémie en cours affecte à des degrés divers les pays européens et les pays-tiers asiatiques et les transforme en "acteurs-proie" de la scène internationale, dépourvus de capacité de réactivité sur le plan stratégique, productif et logistique, ce qui se répercute sur les alliances militaires et sur leur opérationnalité.

C'est à ce titre que le COVID  devient un incubateur stratégique de l'ennemi interne et du conflit de demain, tant à l'échelle européenne qu'au niveau international et que l'Europe ne peut compter que sur ses peuples, devenus, comme toujours,  "l'ultima ratio regum".


Bruxelles, le 2 avril 2020

vendredi, 03 avril 2020

Eric Werner: La liberté, malgré les urgences !...

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La liberté, malgré les urgences !...

par Eric Werner

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Eric Werner, cueilli sur le site d'Antipresse et consacré au recul progressif de la liberté en Europe, et en particulier en France.

Penseur important et trop peu connu, Eric Werner est l'auteur de plusieurs essais marquants comme L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015), De l'extermination (Xénia, 2013), ou Un air de guerre (Xénia, 2017), et de recueils de courtes chroniques comme Ne vous approchez pas des fenêtres (Xénia, 2008) et Le début de la fin et autres causeries crépusculaires (Xénia, 2012). Il vient de publier dernièrement Légitimité de l'autodéfense (Xénia, 2019).

La liberté, malgré les urgences !

Les sociétés européennes se trouvent aujourd’hui confrontées à de tels défis qu’il peut apparaître étrange, pour ne pas dire inactuel, de s’interroger sur ce que devient aujourd’hui la liberté en Europe. Ce n’est à coup sûr pas une priorité. Et pourtant c’est ce qu’on va essayer ici de faire malgré le couvre-feu matériel et mental imposé par la lutte contre le Coronavirus.

Il est beaucoup aujourd’hui question de «dérive autoritaire» en Europe. C’est évidemment un euphémisme. La vraie question, en fait, qui se pose (au-delà même de celle consistant à se demander si nous sommes encore en démocratie) est celle de l’État de droit. Que subsiste-t-il aujourd’hui encore dans nos pays de l’État de droit?

Je dis «nos pays», car la question ne se pose pas seulement dans certains d’entre eux à l’exclusion d’autres hypothétiquement mieux favorisés, mais peu ou prou partout. Un pays comme la France est évidemment en première ligne. Il serait fastidieux de dresser la liste de toutes les atteintes à l’État de droit survenues en France au cours de la période récente, en lien ou non avec l’épisode des Gilets jaunes. Ces atteintes sont graves et n’ont pas leur équivalent ailleurs. Mais il ne faut pas se faire d’illusions. On est certainement légitimé à insister sur la singularité française. Mais, d’une part, cette singularité n’est que relative, et d’autre part la France ne fait que précéder les autres pays dans une évolution d’ensemble n’épargnant, en fait, aucun pays. Elle a simplement une longueur d’avance.

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Le problème doit donc être abordé à l’échelle du continent dans son ensemble. On admettra sans peine par exemple que les violences policières constatées ces derniers mois en France n’ont pas leur équivalent en Suisse. Mais divers scandales survenus récemment à Genève, ville frontalière, montrent que la Suisse n’est pas a priori à l’abri de tels débordements (1). D’autres exemples pourraient être cités, notamment un, il y a deux ans, dans le canton de Berne. L’affaire avait débouché dans une interpellation au Grand Conseil bernois. Les violences policières sont encore en Suisse l’exception. Mais il ne faut pas dire qu’elles n’existent pas.

Par ailleurs, les violences policières n’épuisent pas le problème. Ainsi, toujours en Suisse, le Parlement s’apprête à adopter un projet de loi sur les mesures policières de lutte contre le terrorisme, projet de loi entérinant le principe selon lequel de telles mesures pourraient être prises en dehors de tout contrôle judiciaire. Il ne faut pas idéaliser la justice, ni bien sûr non plus surestimer son aptitude à protéger les libertés fondamentales (la violence judiciaire n’est pas un vain mot, elle n’a souvent rien à envier à la violence policière proprement dite), mais le contrôle judiciaire n’en est pas moins préférable à pas de contrôle du tout. Un tel contrôle ne garantit assurément pas en lui-même la survie des libertés fondamentales, mais peut en revanche, dans une certaine mesure au moins, la favoriser. Alors qu’avec sa suppression une telle survie devient hautement improbable, pour ne pas dire désespérée.

Le modèle français

La Suisse se borne ici à suivre l’exemple français, puisqu’en 2017 déjà le Parlement français avait décidé de transférer dans le droit ordinaire certaines dispositions de l’état d’urgence, au nombre desquelles, justement, l’abolition du contrôle judiciaire sur les actes des autorités en lien avec la lutte contre le «terrorisme». On met ici le mot «terrorisme» entre guillemets, car les autorités françaises ont tendance à user et abuser de cette notion en en donnant une interprétation très extensive. On est très vite aujourd’hui en France traité de «terroriste».

On pourrait aussi parler des atteintes croissantes à la liberté de parole et de critique, qui font qu’il devient de plus en plus risqué aujourd’hui d’aborder certains sujets jugés sensibles. Il n’y a pas encore à l’heure actuelle en Suisse de loi Avia, mais il est évident qu’un jour ou l’autre il y en aura une, car on voit mal la Suisse ne pas s’aligner sur ce qui se fait ailleurs en ce domaine. Ce ne sera au reste pas très compliqué. Il suffira de compléter l’article 261 bis du Code pénal, par simple adjonction d’un ou deux alinéas, comme cela vient de se faire pour la pénalisation de l’homophobie. Il faut en tenir compte quand on dit que la liberté d’expression est aujourd’hui mieux garantie en Suisse qu’en France. C’est certainement vrai en soi, mais encore une fois, c’est le mouvement d’ensemble qui compte.

Et ainsi de suite. En France toujours, un décret du 20 février dernier légalise le fichage généralisé des individus, au travers d’une nouvelle application numérique dénommée GendNotes. Les gendarmes sont encouragés désormais à collecter des données à caractère personnel (y compris celles relatives aux opinions philosophiques et politiques). Ils l’ont naturellement toujours fait dans le passé, mais c’est maintenant légalisé. On peut bien, si l’on y tient, parler ici de «dérive autoritaire», mais chacun admettra qu’il s’agit de tout autre chose. On assiste en fait à la mise en place d’un régime de type orwellien inaugurant une nouvelle espèce de totalitarisme. La généralisation à tous les coins de rue de la reconnaissance faciale s’inscrit également dans ce contexte.

Insistons au passage sur le fait qu’avec l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), les choses se font en quelque sorte toutes seules. C’est une opportunité qui s’offre à l’État, et celui-ci, tout naturellement, en profite.

L’humain rapetissé

On est dès lors amené à se poser cette question: comment se fait-il que personne ne réagisse? En fait, ne se révolte? Car, effectivement, les gens ne révoltent pas. On pourrait dire que la non-révolte est chose normale: plus normale, en tout cas, que la révolte. On ne se révolte qu’exceptionnellement. Les gens ne se rendent pas non plus toujours compte à quels risques ils s’exposent en ne se révoltant pas. Ou quand ils s’en rendent compte, il est déjà trop tard. Ils cèdent également volontiers à la peur. Etc. Tout cela étant admis, on n’en reste pas moins surpris de la passivité et de l’absence de réaction des citoyens. Ils donnent l’impression d’être comme tétanisés. Il y a certes eu l’épisode des Gilets jaunes. Mais leurs revendications étaient d’ordre surtout économique.

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C’est un sujet complexe, on ne va bien sûr pas ici en faire le tour, juste développer une ou deux remarques. On s’inspirera ici du dernier livre d’Emmanuel Todd, Les Luttes de classes en France au XXIe siècle (2), qui aborde le problème sous l’angle anthropologique. Prenant le contre-pied d’une thématique aujourd’hui ressassée, celle de «l’homme augmenté», Todd dit que l’homme contemporain est au contraire extrêmement «diminué». L’individu n’est pas devenu aujourd’hui «plus grand», comme on le prétend parfois, mais au contraire «plus petit». Todd se réfère à certains travaux récents sur la dépression et la fatigue mentale des individus à notre époque. Il insiste également sur le fait que les dernières décennies ont été marquées par un double effondrement religieux et moral, double effondrement qui n’est évidemment pas resté sans effet sur la psyché individuelle. L’ancienne religion s’est effondrée, et avec elle l’ensemble des croyances et points de repère qui contribuaient jusqu’à une date encore récente à «encadrer» l’individu et par là même à le renforcer, à lui donner confiance en lui-même: on pense en particulier au cadre national. L’individu est aujourd’hui très largement abandonné à lui-même. Et donc, tout naturellement, tend à «s’affaisser», à se rapetisser.

C’est un début de réponse. La fatigue, en elle-même, n’est pas nécessairement incompatible avec la révolte, il y a des gens fatigués qui pourtant se révoltent. Mais ce n’est pas le cas le plus fréquent. Ce que la fatigue nourrit plutôt, c’est le renoncement, la passivité. Mais on pourrait dire autre chose encore. Qu’ils soient ou non fatigués, les gens, en règle générale, se révoltent quand ils ont faim. Encore une fois, il faut citer les Gilets jaunes. Or être privé de liberté, ce n’est pas exactement mourir de faim. La liberté n’est pas un bien matériel, mais immatériel. On croise ici Dostoïevski et sa légende du Grand Inquisiteur. Le Christ dit au Grand inquisiteur: l’homme ne vit pas seulement de pain. Soit, mais la plupart de nos contemporains sont aujourd’hui sincèrement convaincus du contraire: l’homme ne vit que de pain. Pourquoi dès lors le fait d’être privé de liberté les conduiraient-il à se révolter?

On retrouve ici l’effondrement religieux. Avec raison, Emmanuel Todd, met la fatigue en lien avec l’effondrement religieux. L’effondrement religieux conduit à la fatigue, qui elle-même conduit à la non-révolte. Sauf que ce passage par la fatigue n’est que facultatif. La non-révolte se laisse aussi penser comme un produit direct de l’effondrement religieux.

Eric Werner (Antipresse n°226, 29 mars 2020)

Notes :
  1. 1) Voir Slobodan Despot: « L’affaire Simon Brandt, un “signal faible” — mais assourdissant! », Antipresse 219 | 09/02/2020.

  2. 2) Seuil, 2020. Cf. en particulier le chapitre V (pp. 127-153).

Le coronavirus ravive le fantasme de la surveillance générale et du contrôle total

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Le coronavirus ravive le fantasme de la surveillance générale et du contrôle total

 
 
Auteur : Karine Bechet-Golovko
Ex: http://www.zejournal.mobi

Les effets politico-sociaux du coronavirus dépassent largement ses conséquences sanitaires. La communication autour de cette crise, qui n’est ni la première ni la dernière, place les populations dans une ambiance mortifère, renforce la massification de la personnalité, diluée dans la catégorie des malades potentiels ou des malades confirmés. Puisque l’homme a disparu derrière le malade, qui est devenu la forme d’existence sociale, que la forme d’existence individuelle est bannie car considérée et montrée comme dangereuse, les pouvoirs nationaux ont les mains libres pour tenter de réaliser l’éternel fantasme de la surveillance générale et s’engager sur la voie du contrôle total. Le rêve totalitaire réalisé sur la demande provoquée d’une population conditionnée. Quelques voix s’élèvent pour dénoncer les dangers d’un remède pire que le mal et qui lui survivra indubitablement. Snowden est de ceux-là.

La technologie de la gestion de la crise du coronavirus est aussi globale que le mal, produit de cette globalisation du monde. L’un des effets est la remise au goût du jour du fantasme, ancien et récurrent, de la surveillance générale. Ce spasme des sociétés, dans lesquelles les hommes, l’espace d’un instant, ont détourné le regard, pour finalement baisser les yeux.

Toute société repose sur l’équilibre fragile et instable d’un compromis entre la liberté et la sécurité, ce qui détermine la place de l’homme et le rôle de l’État. Une liberté absolue ne conduisant qu’au chaos et donc au pouvoir du plus fort, la présence de l’État est fondamentale, justement pour garantir les libertés réelles. Mais tout rapport de pouvoir, le pouvoir populaire vs. celui de l’État, implique pour éviter d’une part le chaos (pouvoir populaire total) et d’autre part la dictature (pouvoir total de l’État), que chacune des deux parties remplisse ses fonctions, ne les abdique pas. Or, la situation aujourd’hui est particulièrement déstabilisée. D’une part, les États ont abdiqué leur pouvoir au profit de structures globales et se sont transformées en organes d’exécution protégeant des intérêts qui les dépassent et divergent de ceux de leur propre population. D’autre part, terrifiées, les populations ont abdiqué leur pouvoir à l’État, pour les sauver d’un danger devenu mystique – État, qui a lui-même abdiqué. Les structures du monde globaliste se trouvent ainsi en situation de monopole du pouvoir., sans véritables contre-pouvoirs puisque les oppositions politiques sont inexistantes et les médias dociles.

Le coronavirus est l’occasion rêvée. Et les pays, les uns après les autres, se lancent dans une course à la surveillance et au contrôle total, donnant corps à Big Brother. Le virus est porté par l’homme. Donc l’homme est dangereux. Finalement, le danger vient bien plus de l’homme que du virus. Il faut le surveiller et le contrôler.

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En Russie, le maire de Moscou espère pouvoir tracer toute la population de la ville d’ici la fin de la semaine, grâce à l’obligation de sortir avec un QR code, sur le mode chinois. En Allemagne, les opérateurs de téléphonie partagent des millions de données avec les instances publiques, afin de suivre le déplacement des masses. Mais, pour l’instant, ces informations ne sont pas nominatives. L’Espagne se prépare à utiliser les données de géolocalisation des citoyens. Car n’oublions pas que tout citoyen est un malade potentiel, c’est le seul paradigme aujourd’hui d’existence sociale. Mais il faut aussi prévenir et savoir avant l’individu concerné s’il est en voie d’être malade ou pas, une application est donc en préparation pour que ces informations soient immédiatement transmises. Car, évidemment, en dehors du coronavirus, toutes les autres maladies ont été vaincues.

L’UE a validé ces pratiques :

Un traçage ouvertement accepté par le Comité européen de la protection des données (CEPD). Dans un communiqué du 19 mars, il indique que « le RGPD permet aux autorités sanitaires compétentes de traiter des données personnelles dans le contexte d’une épidémie ». Il est donc possible de traiter les informations anonymisées liées à la location des téléphones, par exemple.

La France planche aussi sur la réalisation technique du traçage de ses citoyens, conjugué avec les données personnelles sur la santé :

Dans le cas de la France, il n’est pas seulement question d’analyser des données de flux. L’Élysée réfléchit à l’opportunité « d’identifier les personnes en contact avec celles infectées par le virus du Covid-19 » grâce au numérique. « Mais si on doit savoir qui a été en contact avec des gens porteurs du virus, cela implique forcément que l’on utilise, en plus des données de géolocalisation, des données de santé ».

Les questions éthiques ont été rapidement écartées : la fin justifie les moyens. L’État de droit est mort. Les décisions liberticides sont formellement légitimées post-factum par des lois de complaisance, qui ne sont pas discutées au fond, mais uniquement sur la forme. Les mesures d’exception sont entrées dans la législation de droit commun, car le pouvoir se refuse de manière assez surprenante à déclarer les circonstances exceptionnelles. Si la situation est grave au point de devoir mettre les pays en quarantaine, de mettre les populations en résidence surveillée, l’économie en berne, il est impératif de déclarer ces régimes d’exception, qui permettent justement de prendre, temporairement, c’est-à-dire le temps que dure le danger exceptionnel, des mesures hors du commun. Et cela avec un système institutionnel de contrôle et de garanties. Mais nos dirigeants ont préféré une autre voie, celle de la normalisation d’une situation anormale, mettant par là même l’état de droit en danger. Et quand, comme en Hongrie, le Président pousse la logique à son terme, demande au Parlement de prolonger la loi sur l’état d’urgence, toute la bonne société globale s’indigne. Ce qui montre bien la dimension politique de cette crise.

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Cela souligne bien que les mesures extraordinaires de surveillance et de contrôle total ne sont pas envisagées comme des mesures temporaires. Elles doivent permettre de créer les bases d’une nouvelle réalité sociale, d’une nouvelle réalité politique. Quand les citoyens seront autorisés, sous certaines conditions, à sortir de chez eux.

Ce danger a été partiuclièrement bien pointé par Edward Snowden. Pas moins de 11 pays ont déjà mis en place des mesures de surveillance globale, scanner thermique, reconnaissance faciale, etc. Il craint qu’y prenant goût, les pouvoirs ne trouvent pas la force de revenir à la normale à la fin de la crise.  Crainte justifiée. Toute la question est celle de l’équilibre entre les mesures prises et les risques réels.

« Ils savent déjà ce que vous regardez sur Internet. Ils savent déjà où se situe votre téléphone. Maintenant, ils connaissent aussi votre rythme cardiaque et votre pouls. Qu’est-ce qui arrive si on ajoute l’intelligence artificielle dans le lot ? »

L’autre question est celle de la durée de ces mesures :

« Lorsque nous voyons les mesures d’urgence adoptées, en particulier aujourd’hui, elles ont tendance à être figées dans le temps. (…) L’urgence a tendance à s’étendre. Ensuite, les autorités se sentent à l’aise avec un nouveau pouvoir. Elles commencent à aimer ça (…). Les services de sécurité trouveront bientôt de nouvelles utilisations à cette technologie. Et lorsque la crise sera passée, les gouvernements pourront imposer de nouvelles lois qui rendront permanentes les règles d’urgence ».

Abdiquer ses libertés à un pouvoir sans contrôle et hors cadre juridique ne permettra pas de régler plus rapidement ni plus efficacement la crise sanitaire. Laisser les hommes enfermés à domicile ne les rendra ni immortels, ni invulnérables. Incorporer dans le droit commun des mesures d’exception ne permettra pas une meilleure gestion politique des crises. Cela pourrait même devenir une norme : à chaque apparition d’un virus, et ils apparaissent chaque année, ces mesures vont se répéter ? Puisqu’ils apparaissent à rythme régulier, cela vaut-il même la peine de revenir à la normale ?

En revanche, cela permet d’imposer par la force une nouvelle société, post-moderne, post-humaine, post-démocratique, qu’il fut impossible de totalement implanter par l’incitation.

PS : « La voix du télécran qui criaillait dans son oreille l’empêcha de suivre plus loin le fil de sa pensée. Il porta une cigarette à sa bouche. La moitié du tabac lui tomba tout de suite sur la langue. C’était une poussière amère qu’il eut du mal à recracher. Le visage de Big Brother se glissa dans son esprit, effaçant celui d’O’Brien. Comme il l’avait fait quelques jours plus tôt, il tira une pièce de monnaie de sa poche et la regarda. Dans le visage lourd, calme, protecteur, les yeux regardaient Winston. Mais quelle sorte de sourire se cachait sous la moustache noire ? Comme le battement lourd d’un glas, les mots de la devise lui revinrent :

« LA GUERRE C’EST LA PAIX 

LA LIBERTE C’EST L’ESCLAVAGE

L’IGNORANCE CEST LA FORCE »

George Orwell, 1984

Lire aussi:

- Selon Edward Snowden, le Covid-19 pourrait conduire à une surveillance étatique étendue et durable

- Géolocalisation, traçabilité et drones face au Covid-19 : Jacques Toubon donne l'alerte

 

Manoeuvres stratégiques derrière la crise du Coronavirus

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Manoeuvres stratégiques derrière la crise du Coronavirus

 
 
Auteur : Manlio Dinucci 
Ex: http://www.zejournal.mobi

Tandis que la crise du Coronavirus paralyse des sociétés entières, de puissantes forces sont à l’oeuvre pour tirer l’avantage maximal de la situation. Le 27 mars l’OTAN sous commandement USA s’est élargie de 29 à 30 membres, en englobant la Macédoine du Nord. Le jour suivant -alors que se poursuivait l’exercice USA “Défenseur de l’Europe 2020”, avec moins de soldats mais plus de bombardiers nucléaires- a commencé en Écosse l’exercice aéronaval OTAN Joint Warrior avec des forces US, britanniques, allemandes et autres, qui durera jusqu’au 10 avril y compris avec des opérations terrestres. 

En attendant, les pays européens de l’OTAN sont avertis par Washington que, malgré les pertes économiques provoquées par le Coronavirus, ils doivent continuer à augmenter leurs budgets militaires pour “conserver la capacité de se défendre”, évidemment de l’”agression russe”.

À la Conférence de Munich, le 15 février, le secrétaire d’état Mike Pompeo a annoncé que les États-Unis ont sollicité les alliés à débourser 400 milliards de dollars de plus pour augmenter la dépense militaire de l’OTAN, qui dépasse déjà amplement les 1.000 milliards annuels. L’Italie doit ainsi augmenter sa propre défense militaire, qui se monte déjà à plus de 26 milliards d’euros annuels, c’est-à-dire plus que le Parlement n’a autorisé à débourser ponctuellement pour l’urgence Coronavirus (25 milliards).  

L’OTAN gagne ainsi du terrain dans une Europe largement paralysée par le virus, où les USA, aujourd’hui plus que jamais, peuvent faire ce qu’ils veulent. À la Conférence de Munich Mike Pompeo a violemment attaqué non seulement la Russie mais aussi la Chine, en l’accusant d’utiliser Huawei et d’autres compagnies comme “cheval de Troie de l’intelligence”, c’est-à-dire comme outils d’espionnage. Ce faisant les États-Unis accroissent leur pression sur les pays européens pour qu’ils rompent aussi les accords économiques avec Russie et Chine et renforcent les sanctions contre la Russie.

Que devrait faire l’Italie, si elle avait un gouvernement qui veuille défendre nos réels intérêts nationaux ? 

Elle devrait avant tout refuser d’augmenter notre dépense militaire, artificiellement gonflée avec la fake news de l’”agression russe”, et la soumettre à une révision radicale pour réduire le gaspillage d’argent public dans des systèmes d’arme comme le chasseur USA F-35. Elle devrait immédiatement supprimer les sanctions contre la Russie, en développant au maximum l’échange avec elle. Elle devrait adhérer à la requête -présentée le 26 mars à l’ONU par la Chine, la Russie, l’Iran, la Syrie, le Venezuela, le Nicaragua, Cuba et la Corée du Nord- que les Nations Unies fassent pression sur Washington pour abolir toutes les sanctions, particulièrement nocives au moment où les pays qui les subissent sont touchés par le Coronavirus. De l’abolition des sanctions contre l’Iran dériveraient aussi des avantages économiques pour l’Italie, dont les échanges avec ce pays ont été pratiquement bloqués par les sanctions USA. Ces mesures et d’autres donneraient de l’oxygène surtout aux petites et moyennes entreprises étouffées par la fermeture forcée, rendraient disponibles des fonds à destiner pour l’urgence, en faveur surtout des couches les moins défavorisées, sans pour cela s’endetter.

Le plus grand risque est celui de sortir de la crise en ayant au cou le noeud coulant d’une dette extérieure qui pourrait réduire l’Italie aux conditions de la Grèce. Plus puissantes que les forces militaires, et qui ont aussi en main les leviers décisionnels du complexe militaro-industriel, sont les forces de la grande finance internationale, qui sont en train d’utiliser le Coronavirus pour une offensive à l’échelle mondiale avec les armes les plus sophistiquées de la spéculation. Ce sont elles qui peuvent porter à la ruine des millions de petits épargnants, et qui peuvent utiliser la dette pour s’approprier des secteurs économiques entiers. 

Dans cette situation décisif est l’exercice de la souveraineté nationale, pas celle de la réthorique politique mais celle, réelle, qui, garantit notre Constitution, appartient au peuple.

Traduction par Marie-Ange Patrizio