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mercredi, 25 décembre 2019

La militarisation de l'espace

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La militarisation de l'espace

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Le 20 décembre 2019, Donald Trump a promulgué un « 2020 National Defense Authorization Act » qui crée une nouvelle force militaire, l'United States Space Force s'ajoutant à l'US Army, l' Air Force, la Navy, les Marines et les Coast Guards.

Il a expliqué ceci en disant que l'espace allait devenir un nouveau domaine d'affrontement entre puissances et que les Etats-Unis devaient y assurer une présence militaire adéquate. Il ne l'a pas dit expressément, mais il visait en particulier les présences dans l'espace de la Russie et de la Chine, voire prochainement celles de la Corée du Nord . 

Un article très détaillé de Wikipedia (sans doute inspiré officiellement par Washington), précise ce que seront les attributions et les moyens de cette Force Spatiale des Etats-Unis. On s'y reportera. Mais à quoi pourra servir en réalité cette nouvelle Force ?

L'espace est déjà abondamment pourvu en satellites militaires. On désigne de ce nom des satellites artificiels utilisés dans un objectif militaire, satellites de reconnaissance identifiant un territoire ennemi et les objectifs potentiels qui s'y trouvent, satellite d'alerte précoce permettant de détecter le lancement de missiles balistiques, satellites de télécommunications militaires, satellites de navigation sécurisés destinés à la marine et à l'aviation. Les satellites militaires les plus récents peuvent avoir un rôle antisatellite, emporter des armes antisatellites capables de troubler les communications des satellites ennemis ou le cas échéant les détruire par abordage. Il va de soi qu'ils peuvent porter des bombes dites orbitales, capables d'exploser dans l'espace et d'avoir un effet destructeur considérable sur les territoires ennemis.

Par ailleurs les satellites militaires sont commandés du sol par des équipes hautement spécialisées, opérant dans des espaces protégés. Il s'agit donc déjà d'une force militaire organisée, qui se distingue nécessairement des autres forces terrestres ou navales.

Il est donc légitime de se demander pour quelles raisons créer cette nouvelle force?  Le premier objectif doit être vraisemblablement, en l'officialisant et lui donnant un nom, d'augmenter les moyens budgétaires et en personnels déjà affectés à l'espace militaire. Mais il s'agit certainement aussi d'avertir la Russie et surtout la Chine que les Etats-Unis ne les laisseront pas développer de nouveaux moyens militaires dans l'espace sans réagir de la même façon. Pékin l'a d'ailleurs compris  en accusant les Etats-Unis de poursuivre et d'accélérer la transformation de l'espace en un futur champ de bataille.

On peut craindre que ceci ne se produise de toutes façons. En cas de conflit entre grandes puissances, l'espace et les moyens qu'il comporte seront nécessairement utilisés. De plus, il n'est pas exclu que ce soit aussi la Lune et ultérieurement Mars et ses satellites qui servent de terrains d'affrontement.

La Lune se trouvera ainsi divisée en territoires dont les grandes puissances spatiales se seront donné la propriété et dont elles voudront se réserver la jouissance, notamment en termes d'exploitation des ressources naturelles considérables qui s'y trouvent.

Elles y installeront des stations permanentes pouvant éventuellement être habitées par périodes, sinon en permanence. Il s'agira aussi de bases militaires.

On lira à ce sujet un article du général français Jean-Vincent Brisset dans Atlantico

 

Olivier Carré: "Sa demeure était l'éclair..."

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Olivier Carré: "Sa demeure était l'éclair..."

par Jean-François Gautier
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Les Amis d'Olivier Carré viennent de publier une superbe monographie intitulé Olivier Carré - Peintre et sculpteur 1954-1994. Un ouvrage indispensable pour découvrir l’œuvre de cet artiste puissant parti trop tôt...

L'ouvrage est dsiponible à la commande sur le site des Archives Olivier Carré.

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"Peintre et sculpteur, Olivier Carré laisse une œuvre dont les critères d’élaboration furent exclusivement esthétiques. Il se refusait lui-même à toute doctrine, et il serait hors de propos de vouloir lui en attribuer une. Mais s’il n’y a pas de philosophie d’Olivier Carré, il existe bien une philosophie de son œuvre, de ses choix, de ses efforts vers une certaine forme de vérité picturale. Elle se confond pour partie avec la quête continue d’une compréhension lucide de ce monde, mais selon des critères extrêmement exigeants : ne jamais illustrer un savoir ou une vérité préalables, et tenter tout ce qui pourrait servir d’outil pour devenir, sans compromis avec l’hostilité de l’époque, et sans renier non plus les formes du passé.

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L’une de ses premières toiles marquantes, Le Travailleur, condense déjà les principales lignes de force de son œuvre : la thématique de la technique vient interroger une part des revendications de l’époque et les conditions qu’elles fixent à l’épanouissement de la liberté, et le tableau lui-même est compris comme une sorte de locution interjective sur le mode du Qui vive ? Autant dire qu’on chercherait en vain dans ses toiles un accomplissement serein. Ce que disait d’Héraclite le poète René Char s’applique à son art : « Il savait que la vérité est noble et que l’image qui la révèle, c’est la tragédie. » Son domaine était celui d’une espérance sans foi, d’une conscience débarrassée de toute réponse complice qui, entre l’homme et l’homme, interposerait une doctrine et aliénerait la liberté. Peu d’artistes en ce siècle se sont ainsi exercés à la contestation constructive des dogmatiques convenues, sinon quelques surréalistes libres, Dali qui inspira ses premiers essais, ou Chirico qu’il admirait.

OC-2.jpgUne philosophie exigeante et ardue sourd de son œuvre, qu’aucun concept ne peut réduire tant ses tableaux étaient des incitations et non de quelconques solutions données à des problèmes qu’il aurait nettement formulés. Son Athéna nucléaire tout autant que quelques portraits de commandes privées montrent une expression de l’humain perçu comme une liberté à conquérir, une liberté qui doit être refusée si elle n’est qu’une permission donnée par d’autres, par la société, par quelques individus députés à cette fonction, ou par le monarque même ; la liberté telle que la comprenait esthétiquement Carré n’est pas même envisagée comme soumise à une volonté consciente, ni dépendante de la réalisation d’un projet calculé ou d’ordre politique ; elle doit sourdre de l’action, sortir d’elle comme sa principale conquête, quel que soit l’objectif pratique qui est visé. Le rôle social des individus, pour lui, importait peu ; seul l’attirait leur capacité à l’action novatrice et à la mise en œuvre d’une forme nouvelle et créatrice. Autant dire que, pour l’essentiel, Carré ne voyait autour de lui que des esclaves sans grande consistance, et s’amusait de leurs ballets. Il haïssait, pour les mêmes raisons, le circuit des galeristes et des critiques d’art.

Son étonnante faculté d’interrogation et de sollicitation apparaît aussi dans les Têtes qu’il fixa en différents endroits de la planète : face au siège de l’ONU à New York, sur une digue danoise, sur des blockhaus de la côte atlantique, sur une tour dominant les marais de Saintonge ou sur les quais de la Seine, notamment sept exemplaires aux pieds du palais du Louvre, apposés au cours d’une opération nocturne réglée comme une action de commando. Un visage cyclopéen, dépourvu de références anatomiques humaines, remugle darwinien tourné vers l’inconnu du devenir, incarne là une sommation à vivre debout qui vomit les conformismes.

Le personnage vivait de la même manière, interrogeant sans cesse, exigeant des réponses à ses questions, et les contestant aussitôt reçues, cherchant la matière de ses œuvres dans les interstices du savoir et de la volonté, dans les bizarreries de l’optique, dans le dénuement total de la conscience de soi confrontée au nocturne, aux rêves, à la lumières crue des projecteurs qui éclairaient son atelier.

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Il y avait là, sous une forme esthétique incomparable, une volonté décidée de ne pas séparer l’homme de son monde. Loin d’être un objet pour la connaissance objective, le monde était pour lui, d’abord, le sujet de l’action. S’il acceptait toutes les contraintes de lumières, de peintures, de sujets, de matières, de techniques, c’était sous la réserve d’un apprentissage préalable de leur domination.

Son œuvre laisse à ses spectateurs une interrogation toujours ouverte : le rêve moderne d’un homme dont la grandeur serait conditionnée par avance étant nul et non avenu pour cause de morale dévastatrice, il reste, pour chacun, à se placer dans l’exaltation de la liberté d’action et de jugement, dans l’absence de sécurité, dans la réclamation de la gloire ou le constat de l’échec ; mais de cela, précisément, qui est encore capable ?

OC-N.jpgDe quelque bord qu’on la prenne, l’époque se pâme devant les revendications. Mais elles sont toutes d’essence technique et attendent les projets ou les entreprises qui les mettent en œuvre et tentent de les satisfaire. Carré, quant à lui, construisait sa peinture comme un événement capable de regarder son spectateur depuis l’avenir. La négation déréalisante du présent et l’affirmation péremptoire d’un autre monde possible avaient chez lui, quitte à prendre la forme d’une provocation, la même vocation à la disponibilité, la même ouverture vers l’exigence de devenir. Son art ne revendiquait rien d’objectivable. Il traduisait, poussée à ses limites extrêmes, la conscience strictement poétique et généreuse que l’artiste n’a pas à nommer la réalité des choses mais à désigner l’étrangeté qu’elles recèlent, l’inaccompli qu’elles révèlent. L’énoncé conceptuel relève de la raison, qui peut opposer des thèses et leurs contraires puisqu’elle les élabore elle-même ; les facultés propres à un créateur comme Carré ont une autre vocation : lever le voile des vérités juvéniles, ne jamais en compromettre le mystère, ni interrompre la complexité du monde, attiser le feu chaque fois que possible, montrer le geste et habiter la foudre. Sa demeure était l’éclair.

Jean-François Gautier "

15:05 Publié dans art, Hommages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : olivier carré, peinture, art plastiue, art | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mardi, 24 décembre 2019

Yule & 2020

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Gelukkig Kerstfeest & Nieuwjaar 2020
Joyeux Noël & Bonne année 2020
Fröhliche Weihnachten & Glückliches Neujahr 2020
Merry Christmas & Happy New Year 2020
Feliz Navidad & Feliz Ano Nuevo 2020
Buon Natale & Felice Anno Nuovo 2020

17:10 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : noël, nouvel an, yule, tradition | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Sanctions américaines contre le gaz russe pour l’Europe

Vous pourrez voir et apprendre deux choses dans cet article de l’agence russe sputnik. D’abord que les Américains sont en guerre « économique » contre les gazoducs que la Russie tente de construire pour alimenter l’Europe.

La raison est simple. C’est une bataille pour l’énergie. Et l’Europe est un marché pour les gaz des schistes américains. Logiquement pour livrer le gaz américain, qui est plus cher, il faut faire en sorte de le rendre « rentable »… pour cela rien de mieux que de mettre des bâtons dans les roues de la Russie et la mettre dans l’impossibilité de livrer. Ils sont aimables nos amis les « zaméricains » surtout si on leur obéit bien.

Et justement à propos d’obéissance, cela nous amène à la deuxième chose que vous allez apprendre, ou ré-apprendre car vous avez déjà du croiser cette information, à savoir que le budget de la Défense pour l’année fiscale 2020, a éré voté par le Sénat américain au niveau de 738 milliards de dollars (soit plus de 660 milliards d’euros) !!

Oui je ne vous cache pas que si l’on utilisait qu’une seule année budgétaire de la défense américaine, il y aurait de quoi développer l’Afrique ou éradiquer la faim dans le monde, mais jouer avec des porte-avions c’est nettement plus rigolo, de même que bombarder à droite ou à gauche.

Cela en fait des sous n’est-ce pas !

Charles SANNAT

« Ceci est un article « presslib » et sans droit voisin, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Insolentiae.com est le site sur lequel Charles Sannat s’exprime quotidiennement et livre un décryptage impertinent et sans concession de l’actualité économique. Merci de visiter mon site. Vous pouvez vous abonner gratuitement à la lettre d’information quotidienne sur www.insolentiae.com. »

«Le meilleur cadeau de Noël»: la société gazière ukrainienne se réjouit des sanctions US contre Nord Stream 2

Les nouvelles sanctions américaines contre les gazoducs Nord Stream 2 et Turkish Stream sont entrées en vigueur, et la compagnie suisse Allseas, engagée par le russe Gazprom, a suspendu ses travaux. Le PDG de la société gazière ukrainienne Naftogaz, Andreï Kobolev, s’en est félicité sur sa page Facebook.

Donald Trump a signé vendredi 20 décembre un décret promulguant la loi sur le budget Défense pour l’année fiscale 2020, texte qui comprend l’instauration de sanctions contre les entreprises associées à la construction du gazoduc Nord Stream 2. Engagée par le russe Gazprom, la société suisse Allseas a déclaré avoir suspendu ses travaux, dans l’attente d’explications de la part de Washington sur la mise en application des sanctions évoquées.

«C’est le meilleur cadeau de Noël pour nous tous», a écrit sur sa page Facebook Andreï Kobolev, PDG de Naftogaz Ukrainy, en y ajoutant des captures d’écran de la signature par le Président des États-Unis du budget Défense américain 2020 ainsi que du communiqué d’Allseas.
Sanctions contre Nord Stream 2 et aide militaire à l’Ukraine vont de pair?
Le 17 décembre, le Sénat américain avait voté le budget Défense pour l’année fiscale 2020, au niveau de 738 milliards de dollars (soit plus de 660 milliards d’euros). Les sanctions contre le gazoduc Nord Stream 2 et une aide militaire à l’Ukraine font partie des sommes prévues.

Le gouvernement allemand s’est élevé contre les sanctions américaines visant Nord Stream 2, tout comme la France

Source Agence russe Sputnik.com ici

C’est l’empire étatsunien qui va s’écrouler, pas le pays lui-même

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C’est l’empire étatsunien qui va s’écrouler, pas le pays lui-même

Par Ulson Gunnar

New Eastern Outlook

L’effondrement d’une nation entière est aussi spectaculaire que rare. Pour qu’une nation cesse tout simplement d’exister, elle doit subir une défaite absolue dans tout l’éventail de ce qui constitue une nation, c’est-à-dire sur les plans économique, militaire, culturel, social et politique.

Ce qui est beaucoup plus courant, c’est le passage d’organisations socioéconomiques, politiques et militaires existants et dominants à de nouveaux ordres dirigés par des intérêts spéciaux nouveaux et émergents. Cela peut se produire rapidement et violemment, ou se dérouler sur le long terme, avec des hauts et des bas et des processus à la fois constructifs et destructeurs qui s’entremêlent.

Pour les États-Unis, un grand pays ayant la troisième population de la planète, la plus grande puissance militaire et encore aujourd’hui la plus grande économie, il est impossible qu’ils subissent une telle défaite, à tous les niveaux. Ce qui n’est par contre pas impossible, c’est que la petite poignée d’intérêts spéciaux qui dirigent actuellement la politique étrangère et intérieure des États-Unis se trouve renversée par un nouvel ordre composé d’intérêts spéciaux entièrement différents et, espérons-le, d’intérêts spéciaux qui refléteront mieux les intérêts des États-Unis dans leur ensemble et fonctionneront de manière plus durable au milieu des nations du reste du monde plutôt que de planer au-dessus d’elles.

C’est un processus qui est déjà en cours.

L’ordre dominant de l’Amérique est en train de s’estomper

Les intérêts particuliers qui animent actuellement la politique étrangère et intérieure des États-Unis sont centrés autour de Wall Street et de Washington et représentent un réseau de plus en plus irréaliste, insoutenable et archaïque, fondé sur des monopoles bancaires, énergétiques et industriels traditionnels.
Bon nombre des outils utilisés par ces groupes d’intérêts spéciaux pour maintenir et accroître leur pouvoir et leur influence, dont les médias de masse, le lobbying intensif, les réseaux voués à la subversion politique à l’étranger et les distractions politiques au pays, se révèlent de moins en moins efficaces à mesure que le peuple américain et les nations du monde entier se familiarisent avec ces méthodes et commencent à élaborer des contre-mesures efficaces.

Alors que les intérêts spéciaux américains consacrent un temps apparemment immense à contrer la « propagande russe ou chinoise », ce sont surtout les médias alternatifs aux États-Unis mêmes et dans les pays partenaires qui ont le plus fait pour dénoncer et diminuer l’influence injustifiée exercée par Wall Street et Washington. Wikileaks en est un excellent exemple.

Car pendant que l’élite américaine et ses réseaux s’affaiblissent, des alternatives continuent de se renforcer.

Un modèle socio-économique et politique insoutenable, associé à des campagnes militaires tout aussi insoutenables à l’étranger et à une stratégie politique et médiatique qui n’est plus du tout convaincante, même pour les observateurs occasionnels, marque le déclin irréversible de l’ordre dominant américain actuel.

L’élite américaine fait face à des défis provenant autant de l’intérieur que de l’extérieur

La question de la compétitivité des entreprises chinoises face aux monopoles américains établis de longue date est devenue un sujet de plus en plus fréquent dans les médias internationaux. C’est en effet ce processus qui a précipité la guerre commerciale, apparemment inutile et futile, menée par les États-Unis contre la Chine, et qui ne semble que mettre à nu le déclin de l’élite établie des États-Unis plutôt que de le redresser.

Des entreprises comme Huawei, bien qu’elles soient confrontées à de sérieux revers dus aux sanctions américaines et aux efforts visant à la miner, continuent d’aller de l’avant, tandis que leurs concurrents américains continuent à lutter. En effet, malgré les revers, Huawei s’appuie sur des fondamentaux économiques et commerciaux solides, tandis que ses homologues américains, malgré leurs avantages initiaux dus à un manque de concurrence, ont négligé et continuent de négliger ces fondamentaux.

Mais les entreprises chinoises ne sont pas les seules concurrentes de l’élite américaine.

Aux États-Unis mêmes, certaines des entreprises les plus innovantes et les plus perturbatrices au monde font leur apparition, défiant non seulement la concurrence étrangère, mais aussi les monopoles établis de longue date aux États-Unis.

Le constructeur de véhicules électriques Tesla en est un parfait exemple. Son rythme effréné d’innovation, ses succès retentissants et l’impact perturbateur qu’il a sur la construction automobile traditionnelle font reculer l’industrie automobile américaine. Il constitue également une menace sérieuse pour le modèle énergétique axé sur le pétrole que les États-Unis ont adopté et diffusé à l’échelle mondiale pendant plus d’un siècle.

Les monopoles américains de construction automobile ont passé des décennies à mettre au point un modèle d’obsolescence planifiée et des astuces de marketing comme substitut à la qualité et l’innovation. L’industrie est devenue un moyen de gagner le plus d’argent possible et d’augmenter ses profits chaque année, et « fabriquer des voitures » n’est que le moyen par lequel cet argent et l’influence qu’il achète s’accumulent.

Tesla connaît depuis des années une croissance tant au niveau des affaires qu’au niveau de l’influence sociopolitique. Les monopoles américains de la construction automobile ont tenté de reproduire les aspects les plus superficiels de l’attrait de Tesla, mais n’ont pas du tout examiné ou reproduit la substance qui est à la base du succès de cette nouvelle entreprise.

Tout comme l’élite américaine a tenté d’utiliser ce que l’on pourrait qualifier de « sales tours » plutôt qu’une saine concurrence pour traiter avec des concurrents comme Huawei à l’étranger, de tels « sales tours » ont été utilisés contre des entreprises innovantes, aux États-Unis mêmes, comme Tesla. Les tentatives faites par de faux syndicats pour compliquer le travail dans les usines américaines de Tesla en sont un exemple.

Le fabricant américain SpaceX est un autre exemple d’un concurrent américain qui conteste directement (et menace) des monopoles américains établis de longue date, en l’occurrence des monopoles aérospatiaux comme Lockheed Martin, Boeing et Northrop Grumman.

Non seulement SpaceX fait progresser l’innovation aérospatiale à une vitesse fulgurante, mais il fait aussi baisser le coût global de l’accès à l’espace. Il le fait à un rythme si impressionnant que des monopoles aérospatiaux comme Lockheed, Boeing et Northrop, même avec leurs immenses réseaux de lobbying, sont incapables de dissuader les clients de SpaceX (y compris le gouvernement américain lui-même) d’acheter des vols sur ses fusées.

Ces énormes monopoles, qui sont devenus trop dépendants du maintien des profits par le lobbying et les jeux politiques, ont peu de moyens de réformer leurs organisations massives face à la concurrence réelle qui s’installe. De ce fait, l’ordre dominant qui anime la politique américaine se heurte à un obstacle insurmontable qui semble déjà avoir entraîné un déclin terminal et un remplacement.

Ceux qui prennent la place doivent assumer leur position aux leviers de la puissance et de l’influence américaines, avec la possibilité de tracer une voie entièrement nouvelle pour l’avenir qui aura un impact fondamental à la fois sur la nation américaine et son peuple, et sur les nations du monde avec lesquelles elle sera en interaction.

Le nouvel ordre américain pourrait rechercher une véritable concurrence, mais aussi une collaboration

Tesla et SpaceX sont des exemples marquants, mais en aucun cas les seuls exemples de la transition en cours, qui est de plus en plus évidente en Amérique. Il y a des innovations et des entreprises émergentes qui menacent pratiquement tous les domaines dans lesquels l’élite américaine domine actuellement. De médias alternatifs ciblant les médias d’entreprise profondément enracinés de l’Amérique à un mouvement croissant d’agriculteurs biologiques locaux s’attaquant aux monopoles agricoles massifs de l’Amérique, il existe déjà de nombreux exemples tangibles d’une transition en cours ; une transition positive dans laquelle ceux qui s’intéressent vraiment à contrer les aspects négatifs du rôle actuel des États-Unis dans le monde pourraient investir ou contribuer.

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Un signe encourageant de la nouvelle Amérique qui pourrait émerger au fur et à mesure que ce processus se poursuit est le fait que des perturbateurs émergents comme Tesla n’ont pas peur de collaborer avec d’autres nations, cherchant simplement à faire des affaires plutôt que de construire un réseau mondial qui vise à dominer les autres. L’entrée en service de la mega-usine massive de Tesla à Shanghai, en Chine, a lieu alors que les États-Unis tentent d’empêcher la Chine de faire des affaires avec eux, tout cela pour un but purement politique et hégémonique.

Malgré les hostilités apparentes entre les États-Unis et des pays comme la Russie et la Chine, le consensus dans les pays ciblés par l’ordre dominant actuel de l’Amérique est simplement de vouloir faire des affaires sur un pied d’égalité.

Quelle que soit l’hostilité qui puisse exister, elle n’est pas réservée à l’Amérique en tant que nation ou peuple, mais à la poignée d’intérêts particuliers qui font obstacle à une concurrence et une collaboration constructives entre ces nations et les États-Unis.

Dans un proche ou moyen terme, ce processus continuera à ressembler à une lutte acharnée alors que les intérêts spéciaux américains tenteront de maintenir leur emprise sur le pouvoir, luttant contre leur déclin et leur inévitable remplacement, contre leurs concurrents à l’étranger et au sein même des États-Unis.

Mais à plus long terme, on pourrait entrevoir un avenir prometteur où les États-Unis seraient un membre constructif d’un monde multipolaire, en concurrence et en collaboration constructives avec les nations plutôt qu’en tentant de s’imposer à elles.

Pour cette raison, il est important que les nations et les peuples s’abstiennent d’hostilités inutiles et fassent plutôt preuve de patience face aux attaques actuelles émanant de Wall Street et de Washington. Il est important d’établir des liens et des relations avec des intérêts américains réellement intéressés par une véritable concurrence et une collaboration et qui représentent l’avenir de l’Amérique, et de les distinguer des intérêts américains profondément enracinés qui représentent le passé abusif de l’Amérique et qui sont responsables du déclin actuel du continent.

Les politiques étrangères de Moscou, de Pékin et même de nombreux pays émergents et en développement peuvent sembler trop passives ou apaisantes mais, dans ces capitales du monde, beaucoup sont conscients de la transition en cours en Amérique et tentent de se positionner avantageusement face à la chute de l’empire américain afin de pouvoir faire des affaires avec ceux qui auront bientôt le pouvoir aux États-Unis.

Gunnar Ulson

Traduit par Wayan, relu par San pour le Saker Francophone

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La stratégie US et ce que nous coûte la guerre des gazoducs

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La stratégie US et ce que nous coûte la guerre des gazoducs

par Manlio Dinucci

Ex: http://www.zejournal.mobi

 
 

Après avoir interdit de laisser le Chinois Huawei concourir aux appels d’offres pour la 5G, les États-Unis interdisent aux Européens d’accroitre leur approvisionnement en gaz russe. Si la première décision visait à maintenir la cohérence de l’Otan, la seconde ressort non pas d’une russophobie, mais de la « doctrine Wolfowitz » de 1992 : ne pas laisser l’UE devenir un compétiteur de « l’Empire américain ». Dans les deux cas, il s’agit d’infantiliser l’UE et de maintenir en situation de dépendance.

Alors qu’ils se battent dans un dur affrontement pour destituer le président Trump, Républicains et Démocrates déposent les armes pour voter au Sénat presque à l’unanimité l’imposition de lourdes sanctions contre les sociétés participant à la réalisation du North Stream 2, le doublement du gazoduc qui à travers la Baltique apporte le gaz russe en Allemagne. Sont touchées les sociétés européennes qui participent au projet de 11 milliards de dollars, désormais réalisé presque à 80 %, avec la société russe Gazprom, l’Autrichienne Omy, la Britannico-hollandaise Royal Dutch Shell, la Française Engie, les Allemandes Uniper et Wintershall, l’Italienne Saipem et la Suisse Allseas qui prennent part à la pose des conduites.

Le doublement du North Stream augmente la dépendance de l’Europe au gaz russe, avertissent les États-Unis. Ils sont surtout préoccupés par le fait que le gazoduc —en traversant la mer Baltique dans des eaux russes, finlandaises, suédoises et allemandes— contourne les Pays de Visegard (République Tchèque, Slovaquie, Pologne et Hongrie), les États baltes et l’Ukraine, c’est-à-dire les pays européens les plus liés à Washington par l’OTan (auxquels s’ajoute l’Italie).

La mise pour les États-Unis, plus qu’économique, est stratégique. Ce que con-firme le fait que les sanctions sur le North Stream 2 font partie du National Defense Authorization Act, l’acte législatif qui pour l’année fiscale 2020 fournit au Pentagone, pour de nouvelles guerres et nouvelles armes (y compris spatiales), la colossale somme de 738 milliards de dollars, auquel s’ajoutent d’autres postes portant la dépense militaire états-unienne à environ 1 000 milliards de dollars. Les sanctions économiques sur le North Stream 2 s’insèrent dans l’escalade politico-militaire contre la Russie.

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Une confirmation ultérieure se trouve dans le fait que le Congrès US a établi des sanctions non seulement contre le North Stream 2 mais aussi contre le Turk-Stream qui, en phase finale de réalisation, va apporter du gaz russe à travers la mer Noire jusqu’en Thrace orientale, la petite partie européenne de la Turquie. De là, par un autre gazoduc, le gaz russe devrait arriver en Bulgarie, en Serbie et dans d’autres pays européens. C’est la riposte russe au coup porté par les États-Unis, qui en 2014 réussirent à bloquer le gazoduc South Stream. Celui-ci aurait dû relier la Russie à l’Italie à travers la mer Noire et par la terre jusqu’à Tarvisio (Udine). L’Italie serait ainsi devenue une plate-forme d’aiguillage du gaz dans l’UE, avec de notables avantages économiques. L’administration Obama réussit à faire échouer le projet, avec la collaboration de l’Union européenne même.

La société Saipem (Groupe italien Eni), touchée à nouveau par les sanctions états-uniennes sur le North Stream 2, fut déjà lourdement touchée par le blocage du South Stream : elle perdit en 2014 des contrats d’une valeur de 2,4 milliards d’euros, auxquels se seraient ajoutés d’autres contrats si le projet avait continué. Mais personne à l’époque, ni en Italie ni dans l’UE, ne protesta contre l’enterrement du projet opéré par les États-Unis. Maintenant que sont en jeu les intérêts allemands, s’élèvent en Allemagne et dans l’Ue des voix critiques sur les sanctions US contre le North Stream 2.

On ne dit rien par contre sur le fait que l’Union européenne s’est engagée à importer des USA du gaz naturel liquéfié (GNL), extrait de schistes bitumineux par la destructrice technique de fracturation hydraulique. Washington, pour frapper la Russie, essaie de réduire son exportation de gaz vers l’UE, faisant payer les coûts aux consommateurs européens. Depuis que le président Donald Trump et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont signé à Washington en juillet 2018 la Déclaration conjointe sur la coopération stratégique USA-UE y compris le secteur énergétique, l’UE a doublé l’importation de GNL des USA, co-finançant les infrastructures avec une dépense spéciale initiale de 656 millions d’euros. Cela n’a cependant pas sauvé les sociétés européennes des sanctions USA.

Photo d'illustration: La chancelière allemande Angela Merkel et son ministre de l’Économie, Olaf Scholz, ont immédiatement dénoncé l’ingérence états-unienne.

Traduction Marie-Ange Patrizio

lundi, 23 décembre 2019

Le sommet musulman de Kuala Lumpur (Malaisie)

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Le sommet musulman de Kuala Lumpur (Malaisie)

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce sommet, du 19 au 21 décembre, a réuni des représentants, non seulement de la Malaisie mais de la Turquie, de l'Iran et du Qatar. Supposé rechercher le rassemblement mondial du monde musulman, il a surtout montré que celui-ci se divise actuellement en deux blocs.
 
Ont participé personnellement au sommet le président iranien Hassan Rohani, l'émir du Qatar cheikh Tamim, le président turc Recep Tayyip Erdogan et bien entendu le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad, tous à des titres divers opposés à l'Arabie saoudite. L'absence de celle-ci , bien que prévisible, a été très remarquée. Il faut rappeler que les alliés de l'Arabie saoudite regroupent la plupart des autres pays pays arabes, du Maghreb au Golfe Persique. La plupart d'entre eux, bien qu'invités n'étaient pas présents à Kuala Lumpur

L'Organisation de la Coopération Islamique (OCI), basée dans le port saoudien de Djeddah et généralement considérée comme la voix du monde islamique, a vivement critiqué la tenue de ce sommet. Elle a surtout exprimé en l'espèce la voix de l'Arabie saoudite. Le sommet de Kuala Lumpur a en effet été, que ce soit dans le monde arabe ou dans les pays occidentaux, considéré comme anti-saoudien.

Dans son discours d'ouverture, le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad a annoncé que le sommet visait à comprendre pourquoi l'islam et les pays musulmans étaient «en crise, sans espoir et indigne de cette grande religion». Mais d'emblée il est apparu que les pays musulmans resteraient divisés entre ceux de plus en plus proches de la Russie, à commencer par la Turquie et l'Iran, et ceux qui comme l'Arabie saoudite, restent malgré quelques dissensions de bons allées des Etats-Unis.

Cette division marque aussi l'incapacité de l'islam sunnite de s'entendre avec l'islam chiite, non seulement sur le plan religieux, mais dans de domaine géopolitique. La encore, on retrouve le poids de l'Arabie saoudite dont l'influence dans le monde tient à l'importance de ses réserves en pétrole et en gaz, au contraire des autres pays musulmans, à l'exception de l'Iran. Mais l'Iran, soumise aux sanctions américaines, peine à exporter son pétrole dans les pays arabes qui en auraient le plus grand besoin.

Le premier ministre iranien Hassan Rohani a dénoncé «la domination du dollar américain et du système financier américain». Le premier ministre turc Erdogan a confirmé qu'au lieu de commercer avec des devises étrangères, les pays arabes souhaiteraient commercer commercer avec des devises nationales. Ni l'un ni l'autre ne l'ont dit explicitement, mais cela signifierait pour eux s'affranchir de la domination américaine. Ce que l'Arabie saoudite est encore incapable de faire. 

Note

Pour plus de détails, voir un article de Hasan Alhasan dans Asia Times
https://www.asiatimes.com/2019/12/opinion/kuala-lumpur-summit-points-to-split-in-muslim-world/

Voir également MK Bhadrakumar
https://www.asiatimes.com/2019/12/article/kl-summit-shaken-by-imrans-absence-saudi-ire/

 

 

dimanche, 22 décembre 2019

Nouvelles routes de la soie, « La ceinture et la route »

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Nouvelles routes de la soie, « La ceinture et la route »

Intervention  de François-Bernard Huyghe à la 3° session du forum sur les enjeux technologiques des nouvelles routes de la soie  (19 décembre 2019,  Unesco)
 
Ex: http://www.huyghe.fr
 
D’une route l’autre : un étonnement de vingt-deux siècles

Pour parler des relations « technologiques » entre la Chine et l’Europe, il faudrait sans doute remonter avant notre ère, à l’ouverture historique de la route de la soie. L’Occident découvre alors un produit à la fois
- - hautement désirable (la vogue de la soie perturbe l’économie romaine dès avant l’ère chrétienne),
- - lié au secret (dans la mesure où les acheteurs finaux ne savent ni comment elle est fabriquée, ni comment atteindre directement le pays d’origine)
- - et dont l’exportation a été décidée- par l’Empire dans une stratégie de souveraineté.

Dans l’imaginaire, la Chine devient le pays des Sères (de la soie), mais l’itinéraire (par des pistes caravanières avec de rares abris ou par mer, de port en port et de cale en cale) est long, fractionné et aléatoire et l’information authentique se perd souvent en chemin. Ou laisse place à des légendes.
 

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Ces relations sont marquées pendant des siècles par une quasi ignorance (les choses circulent mieux que les connaissances), mais aussi par un rapport culturel ambigu. Ainsi, au fil des siècles, l’Europe s’étonnera à la fois de l’inventivité technologique de l’Empire, du fait que la maîtrise de techniques (comme l’imprimerie, la poudre ou la boussole) ne produisent pas les mêmes effets et ne débouchent pas sur l’équivalent de la Renaissance ou des grandes explorations. Ou encore de la faculté que possède l’Empire de se fermer brusquement au monde en dépit de sa capacité de l’explorer (comme après l’expédition de Zeng-He en 1433).

Ces trois questions que les Européens se sont posées pendant des siècles - technicité, territorialité et autorité: Comment ? D’où ou par où ? Et selon quelle norme ? - reviennent sous des formes très contemporaines. Comme celle d’une «ceinture économique de la route de la soie» («Silk Road Economic Belt», devenue la «Belt and Road Initiative», BRI).

Le projet des nouvelles routes de la soie vise à développer les infrastructures physiques (des routes, des rails, des tuyaux, des ports, etc.), retraçant et prolongeant les routes maritimes et terrestres séculaires des marchandises. Il nous interroge à neuf sur le rapport entre circulation des choses et des informations, mais aussi sur la relation de l’État avec l’économie. Nous parlons ici de la capacité qu’a Pékin de conserver à la fois ses frontières et de se projeter dans un temps long.

Lancé à un rythme étonnant après un discours de Xi Jinping en 2013, mais se projetant sur plusieurs décennies, le projet bientôt inscrit dans la constitution du parti prend valeur de proclamation solenelle d’une ère d’ouverture et d’accélération. Les moyens suivent : l’adjectif qui revient le plus souvent est celui de « pharaonique » pour désigner des budgets de milliards par an.

Évidemment c’est le caractère unidirectionnel de cette circulation (produits manufacturés, capitaux, transferts monétaires, entreprises mobilisées) qui fait problème. Il suscite une crainte du déséquilibre en termes de puissance et d’influence. D’où des réticences, notamment d’E. Macron, face à une « nouvelle hégémonie ». L’Europe se partage plutôt sur un axe Nord/Sud face au projet des Nouvelles Routes, tandis que s’affirme une contre stratégie américaine, puissance maritime s’inquiétant d’une puissance continentale qui la concurrence au-delà de ce qui était imaginable.

On mesurera aussi en cette occasion comment le politique peut utiliser l’obstacle des normes, l’argument de sécurité et confidentialité, les impératifs écologiques, etc., pour contrôler une montée en puissance politique et économique à la fois.
Vue de l’ouest ou vues de l’est, ces routes témoignent que nous nous sommes trop vite crus libérés des contraintes de la matérialité (l’économie ce sont d’abord des choses qui circulent et qui demandent des voies et des vecteurs) mais nous avons aussi cru trop tôt qu’un modèle technoéconomique unique s’imposait sans que les Nations puissent faire autre chose qu’accélérer ou retarder l’inévitable.
 

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Parallèlement, la façon dont la Chine est devenue une cyberpuissance fut une autre surprise historique. La numérisation du pays montre aussi comment l’État peut
- favoriser l’émergence d’équivalents des GAFAM, mais sans leur accorder d’autonomie géopolitique,
- se protéger des influences extérieures, notamment derrière sa « grande muraille de feu » (un dispositif logiciel qui lui permet de s’isoler comme un Intranet mais à l’échelle de la première population du monde),
- redéfinir les règles de la cyberstratégie internationale, etc.

Le tout concrétise la maîtrise chinoise dans les trois couches du cyberespace, physique (serveurs, câbles, stockage), logique ou logicielle (non dépendance des algorithmes, normes et plateformes made in USA) et enfin sémantique (au sens du contenu des messages accessibles à sa population).

Sans compter le démenti apporté à la thèse qui prédisait que l’Internet menait irréversiblement, sinon vers un cyberespace émancipé du politique, du moins vers l’adoption d’un régime à l’occidentale ou de ses valeurs culturelles. La Chine n’a pas imité le modèle « californien» cher à la Silicon Valley, ni son type de start-up et son mode de conquête des marchés. En cherchant l’explication technique d’un rattrapage surprenant, mais avec d’autres codes, on constate une adaptation culturelle du capitalisme chinois high tech, des rapports étroits avec l’autorité politique, l’exploitation des effets d’échelle (notamment du plus grand gisement de données potentiel de la planète), l’évolution culturelle de la population, l’hyperréactivité au programme étatique d’innovation systématique, l’intégration des services numériques aux modes de vie...

Là aussi se pose la question des supports et infrastructures. Ainsi dans le domaine de la 5G où l’avance de Huawei suscite des réactions à l’énormité de ses investissements en recherche et à ses ambitions. Mais aussi à des soupçons de cyberespionnage. On voit ainsi la Chine protéger à la fois sa « muraille » (en conservant ses données, en se préservant du pouvoir des GAFAM, en contrôlant les contenus) et exporter ses matériels et réseaux. Toujours le va-et-vient entre la connaissance numérique (des données qui peuvent être dérobées ou protégées, des inventions qui peuvent être reproduites) et le support ou le dispositif physique.

D’où les tenttives d’exclusion de leurs marchés de pays se réclamant pourtant du libéralisme : le politique (USA, Australie, Allemagne) redevient interventionnistes lorsqu’il s’agit de protéger son économie d’une influence qui passerait aussi par les infrastructures numériques. Voir l’obligation faite aux appareils Huawei de se passer de la technologie Android Google. La perspective que les écosystèmes numériques puissent littéralement divorcer et se séparer, chose impensable il y a trois ans, s’impose.

Sans doute en réponse, en Chine, une directive gouvernementale dite « 3-5-2 » joue l’autarcie technologique à long terme : elle exige le remplacement des matériels et logiciels informatiques dans l’administration. Ce qui représente un marché gigantesque. Dans le contexte de ce que l’on a surnommé la balkanisation d’Internet, il faut renoncer à la notion que la technologie est sans frontières et le politique impuissant.

La Chine dans le cadre d’un plan « Made in China 2025 » prévoit de relancer largement l’industrie par des investissements publics dans la recherche et de s’émanciper de plus en plus de la technologie étrangère. Mais aussi d’être un grand pays maritime, en pointe dans l’espace, grand exportateur, etc. Cela fait le lien avec sa défense par une éventuelle « guerre des intelligences » qui exploiterait militairement les technologies sophistiquées émergentes (dans le prolongement de la « guerre hors limites » théorisée dès les années 90). Mais en même temps la coopération civilo-militaire, public-privé,central-régional contribue à l’objectif de faire de la Chine un pays qui investit énormément dans la recherche de pointe...

Enfin, l’Intelligence Artificielle (nous aurions aussi bien pu parler de l’espace, des drones, des robots, des objets connectés etc., tout étant lié) est un domaine où s’est engagée une autre course Chine / USA. Il révèle aussi le rapport entre ambition géopolitique et technologie. Suivant la version la plus souvent rapportée, après la défaire du plus grand maître de Go face à un algorithme en 2016, la Chine aurait décidé d’emporter la compétition plus générale pour l’IA.Et notamment dans le domaine de l’IA dite perceptive (qui reconnaît des visages, des mots, un environnement) ou de son intégration aux usages quotidiens.
Là encore il y a des explications à chercher dans le pragmatisme, dans l’échelle de la mutation, dans l’acceptation de la population, dans les interactions entre le pouvoir politique et l’économie...
Tout ceci confère un avantage, si l’on admet qu’à ce stade, les deux principales fonctions de l’IA sont d’imiter ou de remplacer le comportement humain (par un calcul plus complet et des instructions plus adaptées) mais aussi d’anticiper ledit comportement et les interactions avec l’environnement pour une meilleure gestion de notre activité. Éventuellement couplée à des objets connectés ou dispositifs, l’IA devient capable non seulement de présenter la meilleure solution en fonction des règles préétablies, mais aussi de s’adapter à chaque situation et de la modifier.

Là encore, l’IA chinoise est partie tard, mais aussi sans avoir connu les « hivers », les phases de blocage de la recherche (et son financement) depuis les années 50. Elle ambitionne de devenir la première au monde à l’horizon de quelques décennies.
Ce processus repose sur la synergie entre l’autorité politique et les milieux économiques et universitaires, sur l’échelle de la population qui permet l’exploitation de toute innovation mais aussi sur le contrôle de la population. Ainsi le système dit de crédit social, basé sur l’omniprésence des systèmes de surveillance. En attendant en 2020 le crédit social « corporate » pour les entreprises.

Le hardware et le soft, la route et la muraille, le numérique et le tangible, la souveraineté et le négoce, la copie et l’invention... tout nous semble reposer sur des équilibres et des contrôles, dont rien ne garantit d’ailleurs qu’ils dureront éternellement. Ni qu’ils soient adaptables chez nous ou que de soit souhaitable. Mais qui enseignent au moins aux Européens que l’absence de volontarisme politique et la confiance dans les mécanismes technoéconomiques étaient des erreurs.

Géopolitique européenne et accès aux métaux rares

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Géopolitique européenne et accès aux métaux rares 

par Jean-Paul Baquiast
Ex: http://www.europesolidaire.eu
 
Nous recevons cet article d'un correspondant qui préfère rester anonyme compte tenu de ses activités professionnelles.

L'Europe ne contrôle pas son approvisionnement en matières premières stratégiques, qui dépend d'un petit nombre d'acteurs étrangers

Prenons quelques exemples :

l'antimoine, 

l'application majeure de l'antimoine , c''est un retardateur de flamme, on va le retrouver dans des tissus , tissus d'ameublement, tissus dans les voitures, tissus dans les transports. La Chine a la plus grande réserve d'antimoine, donc contrôler les risque d'approvisionnement, en prix , en quantité et le recyclage est quasiment impossible. On n'a même pas le début d'une démarche de recherches sur les retardateurs de flamme  pour trouver un substitut à l'antimoine.

Le gallium et le germanium, 

Le gallium est utilisé en microélectronique, en télécommunication, et on l'utilise également pour faire les diodes électroluminescentes. Les ampoules à basse consommation du futur, sont à base de diodes électroluminesentes, donc à base de gallium. Il y en a beaucoup en Chine, 75 %,des réserves mondiales , un peu en Russie et en Afrique du Sud. Il n'est pas possible de le recycler.

Le germanium est utilisé dans les fibres optiques ,destinées aux signaux en télécommunications et en informations.. 71 % des réserves sont situées en Chine.

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L'indium. (sous produit de la production de plomb et de zinc.)

Tous les écrans plats ont une couche d'un oxyde mixte, d'indium et d'étain, qui s'appelle ITO, à la fois conducteur, et surtout, transparent.

 L'indium aujourd'hui est utilisé pour les écrans plats, les diodes électroluminescentes, les brasures , les pare-brise des voitures , certaines cellules photovoltaiques. Il y a beaucoup de recherches sur des substituts, pour trouver des oxydes conducteurs et transparents, mais ceci sans résultats notoires. On en trouve beaucoup en Chine , un peu en Belgique.

le selenium

Il est utilisé dans les diodes électroluminescentes, notamment pour du stockage de données dans des disques blu-ray, et du photovoltaïque. On en trouve en Europe , en Allemagne, en Italie et en Tchéquie;

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Les terres rares.

 Celles-ci sont fondamentales en terme de magnétisme, en terme d'interaction avec la lumière. Elles servent notamment dans le  secteur des aimants  permanents ayant comme but des économies d'énergie avec des diodes électroluminescentes, éoliennes, voitures électriques, piles à combustible et supraconducteurs.  la Chine détient 97 % de la production mondiale.

L'Europe est dépendante de la Chine pour tous ces domaines. Dans ces conditions comment se préparer au mieux aux défis de la prochaine révolution industrielle ?

 

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RIP: Vladimir Bukovsky, the Defiant

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RIP: Vladimir Bukovsky, the Defiant

Ex: https://www.americanthinker.com
 

One of the first things famous Soviet dissident Vladimir Bukovsky (1942–2019) told me about himself was that his roots were Polish.  After the crushing of the Kościuszko Insurrection of 1794, his ancestor, Pan Bukowski, was taken prisoner by the Muscovites and shipped off to Siberia.  This was a harsh introduction to Russian living for the family.  Vladimir would continue into the footsteps of his forefathers.

Vladimir was born in the matrix of the Soviet Union, but as a teenager, he self-liberated.  At 14, he heard about communist leader Nikita Khrushchev's secret speech blaming Stalin for slaughtering millions.  Soon after, he rooted for the Hungarian freedom fighters in 1956.  He started asking questions.  He challenged the system.  Upon his first arrest in 1959, the youngster refused to become a snitch for the Soviet secret police.  And the KGB judged him, partly with rigid annoyance and partly with grudging admiration, unfit for recruitment.

In 1963, Vladimir was arrested, tried, and sentenced to two years for anti-Soviet agitation.  They locked him up in a psychiatric ward (psikhushka), where he was "diagnosed" with "symptomless schizophrenia."  According to Soviet "science," anyone opposing communism had to be a schizophrenic, even when he did not display any symptoms.  He was medicated forcibly.  Bukovsky told me that the trick was to learn how to regurgitate the psychotropic drugs so the hospital wardens and nurses would not notice.

After getting out in 1965, the intrepid dissident plunged right back into anti-communist activities.  He co-organized a demonstration and a petition drive in solidarity with other Soviet dissidents.  For this he was rearrested and thrown back into the red looney bin.  Now things turned tougher.  The KGB wanted to turn their prisoner into a vegetable.  Forcible administration of drugs and their doses increased.  Luckily, the regurgitation trick continued to serve the dissident.  Vladimir endured half a year of this but was unexpectedly released after half a year in mid-1966.  

Six months later, Bukovsky joined a demonstration in defense of other nonviolent protesters who were on trial or under lock and key, only to be seized himself and tried for violating a ban on public protest.  In his defense, he invoked Soviet law, which Soviet judges and secret policemen were apparently violating.  Because Vladimir refused to express remorse for demonstrating, he was sent to the Gulag — a penal colony with a forced labor regime in Bor in the Voronezh region.  His sentence was three years.  He got out in 1970.

Drawing on his experiences in the Gulag and, in particular, in psychiatric wards, the dissident began compiling a record of the Soviet abuse of psychiatry.  To add insult to injury, he discovered that some of the communist psychiatrists who worked hand in glove with the KGB were treated cordially in the West and even invited to scholarly conferences at some of the leading institutions.  The work of the medical monsters who facilitated the torture of political prisoners was treated seriously by some in the West.  Bukovsky resolved to expose it.  He managed to get his report smuggled out to the West.

Consequently, a veritable storm broke out among French, British, and other psychiatrists, some of whom demanded transparency from their Soviet colleagues and believed the dissident accounts of abuse.  For this Vladimir found himself under pre-trial detention in isolation and almost a year later received a sentence of 12 years for "slandering Soviet science."  While serving his sentence, he secretly co-authored a manual on how to beat the Soviet system of interrogation to avoid being accused of insanity.  The manual eventually found its way to the West, where it was widely disseminated.

Bukovsky became a cause célèbre.  The KGB was livid.  In 1976, at the height of détente, the Kremlin decided to further burnish its "liberal" credentials.  Thus, Moscow agreed to swap the perky freedom-fighter for the head of the communist party of Chile, Luis Corvalán, who was incarcerated following a successful military coup to thwart a red revolution in that country.  Compliments of General Augusto Pinochet, Vladimir was thrown out of the USSR and landed in the West.

He settled in England, where he successfully pursued a degree in biology at Cambridge University, where he settled permanently.  Further, he trained as a neuropsychologist and continued his career as a writer and a human rights campaigner.  He published prodigiously.  Vladimir exposed communist crimes globally as well as Western naïveté regarding the Soviet Union.  He joined numerous initiatives championing freedom.  Among others, Bukovsky animated the American Foundation for Resistance International, which aspired to coordinate all anti-communist activities by the captive people in all countries afflicted by Marxism-Leninism.  At the height of Gorbymania in the West, Vladimir and his associates dared to question the sincerity of secretary general of the Communist Party of the USSR Mikhail Gorbachev.  They pointed out quite correctly that the Soviet leader wanted to save communism, not to destroy it.

In 1992, at the invitation of Russia's president, Boris Yeltsin, Bukovsky returned to Moscow.  The Kremlin solicited his assistance in putting together evidence for the public trial of the Communist Party for its crimes.  Yeltsin eventually scrapped the idea, but not before Bukovsky was able to copy over a million pages of secret documents from Stalin's archives.  While Vladimir scanned away right in front of their noses, the KGB guardians of the documentary treasure trove had no idea what either a scanner or a laptop was, so, while watching him curiously, they never interrupted him.  Later, to his own great surprise, the former dissident was permitted to fly out of Moscow undisturbed with his computer full of archival goodies.

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In 1995, Bukovsky's magnum opus, Judgment in Moscow, emerged from this research trip.  Published in several languages, sadly, it had to wait nearly 25 years for an English translation and publication.  Because we failed to smash communism after it tripped, he warned us about the resurgence of post-communism and its threat of metastasizing in the West in the form of political correctness and socialist étatism.  Vladimir further cautioned everyone about the European integration and its totalitarian potential.  He was always full of unorthodox ideas.  Arguably the most shocking to us was his opinion about the Muscovite state and its successors.  Bukovsky told Dr. Sommer explicitly: "It is not my fault that I was born in the Soviet Union.  Why should I harbor any sentiment to that entity?  And Russia was a logical way to the USSR, even if many fabulous people lived there. ... Therefore, as long as Russia does not fall apart into several entities, it will remain dangerous.  A divided Russia is in the interest of the world, just as a united central Europe is in the interest of the world. ... This is not a question of nationalism and resentment, but of physics and balance.  Big and demoralized Russia will always harm her smaller neighbors.  Only its dividing and balancing can eliminate the danger, although not completely because Russia is a universe of slavery."

At the end, Vladimir had the last laugh: he was buried a hundred yards away from the grave of Karl Marx at Highgate Cemetery in London.  Non-conformist, defiant, and free, Vladimir Bukovsky, RIP.

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samedi, 21 décembre 2019

The Real Code of Putinism

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The Real Code of Putinism

Ex: https://www.americanthinker.com

Today's Russia is in the most critical stage of its ideological design.  Its beginning was laid in the article by Vladislav Surkov (aide to the Russian president) under the symbolic title "Long-lasting state of Putin."  The piece was widely discussed by the expert community in Russia and abroad.  Many took this article as a signal that Putin was not going to leave after his presidential term's expiration in 2024 and was preparing his domestic public and international community for this through his éminence grise (as Surkov is often called).  However, with a detailed analysis of the processes that occur in modern Russia, one can come to deeper conclusions.

Vladimir Putin has ruled the country since 2000, and over these 19 years, influence groups around him have been fighting each other for a special position and status.  Unlike most of his associates, Putin is indeed an ideologically motivated leader who perceives himself not just as a politician and an official, but as a sovereign, such as Peter the Great and Alexander III — the beloved emperors of the current Russian leader.

Being aware of the internal construction of Putin's philosophical vision, various people were trying to form an ideological concept that would reflect the mission and goals of modern Russia.  Some wrote about the idea of a "special civilizational path."  It suggested that Moscow would not copy the Western model of development and would not declare itself a part of the Asian world as well.  Others sought to revive the long-forgotten formula "Moscow as the Third Rome" that in fact declared Russia the heir to the fallen Byzantine Empire.  Some suggested a consensus option to combine Western and Eastern civilization codes.  Undoubtedly, there are also groups that do not consider having any ideology important; they offer to copy certain points of the most successful government projects around the world.  However, there is no question of whether Russia needs an ideology or not because Putin is absolutely convinced of the vital necessity of its existence.

There are several reasons for this approach.  Firstly, the president understands that this is about his legacy.  For a psychological type of leader like Putin, the way history remembers him is crucial.  And it is not about love and admiration of the generations to come.  It is difficult to find a politician in Russian and world historiography who could be given an unambiguous assessment.  Discussions continue about everyone without exception, from Alexander the Great to Ronald Reagan.  The key fact is the transformation when a mortal politician becomes an immortal image and an object of constant study for future generations.  Secondly, the Russian leader is convinced that people who were born and raised in independent Russia should have clear guidelines in order to at least preserve the integrity of the country.  So far, Vladislav Surkov was the one who truly managed to systemize the views and ideas of the president.  Putin's aide divided the history of Russian statehood into four parts: the Rus' of Ivan the Third, the Russian Empire of Peter the Great, the Soviet Union of Vladimir Lenin, and the Russia of Vladimir Putin.

The new ideology that is called Putinism is uniting principles and foundations that have remained unchanged throughout all the historical stages of the development of Russia.  Its foundation is the concept of National Democracy.  It implies that the process of democratization and the formation of an active civil society is inevitable but it should not be carried out according to any foreign model.  The Russian nation, like any other, has its civilizational, social, and cultural features.  Today, 190 peoples live in Russia, and most of them retain their language, traditions, and mentality.  From this point of view, Moscow is always under the permanent threat of external forces using any interethnic disagreements for their purposes.  If, for example, a political decision was made to allow same-sex "marriage" in the deeply conservative regions of the North Caucasus, Tatarstan, and Siberia, riots would begin.  And they would lead to the most unpredictable consequences.  For a large part of the progressive West, this may sound wild.  Yet for Russia, it is a matter of national security.

 

It is important to understand that Russia is not limited to Moscow or Saint Petersburg.  These cities, like any major megalopolises, are centers of the dominance of progressive and liberal ideas.  No one will argue with the fact that the United States does not begin and end in New York and California; there are also Texas, Tennessee, Utah, and other states.  The victory of Donald Trump vividly demonstrated that it was conditional Texas and Kentucky that were the heart of America, not Massachusetts and Rhode Island.  The situation is similar in Russia: Putin is guided by the mood of the regional majority, not the liberal minority of the capital.  There are a lot of sensitive problems, and any Russian ruler has to maintain internal balance in order to keep the country's physical integrity.  This is an extremely difficult task.  At certain periods of time, Emperor Nicholas II, and then the last general secretary of the Central Committee of the CPSU, Mikhail Gorbachev, did not cope with this task.  This resulted in the collapse of the Russian Empire and the USSR, respectively.  Thus, the essence of Sovereign or National Democracy is in a banal formula: everything has its time.  In other words, Putinism advocates an evolutionary rather than a revolutionary model of development.

The next crucial element is the inviolability of the mission to maintain territorial integrity.  Why is this so important to Putin?  The answer lies in the dynamics of extension and contraction of Russian territory.  The Russian Empire was the third-largest ever-existing country after the British and Mongol Empires.  It included the Baltic states, part of Poland, Bessarabia, Finland.  Replacing the Empire, the Soviet Union became smaller, losing control of many territorial units.  Then the collapse of the USSR led to the formation of 15 independent republics.  Moreover, centrifugal processes were observed inside independent Russia in the '90s: two Chechen wars, separatist sentiments in Tatarstan, Siberia, and the Far East.  Given this, Moscow has to be sensitive to any threats to territorial integrity because the next collapse will actually mean the end of Russian history.  Based on this, the policy of territorial expansion (or "gathering lands") has strategic importance for Russia.

Most of the countries that were part of the Russian Empire and the Soviet Union performed two significant functions.  The first is an external security function — pushing the borders of the Empire along the entire perimeter, which was of fundamental importance while conducting defensive wars.  It is difficult to imagine how the results of the military campaigns of Napoléon Bonaparte in 1812 and Hitler's Germany in 1941–1945 would have developed without the factor of "deep borders."  The second is the internal defense or controlled decay function.  With the collapse of the Empire, countries located on the periphery and semi-periphery leave, and the core is retained — Russia itself with its internal subjects.

From here follows the next point of the concept of Putinism — returning the post-Soviet space to the sphere of strategic dominance of Moscow.  To achieve this goal, it is important for President Putin to solve two tasks: to provide closer geopolitical integration of Belarus with Russia and to develop high-quality mechanisms of influence on Ukraine.  The Russian leader is deeply convinced that Russians, Ukrainians, and Belarusians comprise a unified nation that should be gathered under the leadership of the Kremlin sooner or later.  This is how it was in the imperial and Soviet periods.  The third task is to prevent the entry of traditional post-Soviet countries (the Baltic countries are not considered) into the North Atlantic Alliance.

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In global politics, Putin sees his mission in revising the results of the Cold War.  He is convinced that the collapse of the Soviet Union was due to the weakening of the center's influence, the indecisiveness of the authorities and the internal intrigues of hostile agents of influence.  Putinism rejects any idea that Russia lost to the United States and should now forget about its geopolitical ambitions.  At the same time, being a pragmatist, Putin realizes that today Moscow does not have sufficient resources to claim world domination.  It is important for the Russian leader that the most powerful actors in the international community develop clear rules for the game.  For Putin, the ideal model combines past systems.  The basis should be sovereignty and the principle of non-interference in each other's internal affairs (Westphalian system), the balance of power (Vienna system), and separation of responsibilities (Yalta and Potsdam system).  From the standpoint of Putinism concept, such an architecture will return Russia the status of great power and force the rest of the countries to reckon with its opinion and interests.

The fundamental feature of the new ideology is that Russia does not regard the West as its enemy.  Moscow sees a certain way of the civilizational and political future of Europe where neoliberal philosophy has set the tone for the past twenty years.  Today, other trends are visible.  One of them is the strengthening of the right-wing conservative powers: Boris Johnson in Britain, the regime of Viktor Orbán in Hungary, the party of Sebastian Kurz in Austria, Euroskepticism in Italy, France, Greece, and Germany.  The basic request of the new generation of European politicians can be described simply: more sovereignty, less dependence.  Even leaders such as Emmanuel Macron state the need for an independent European security system.  This is exactly what Russia wants to see in Europe.  It is important for Putin that Europeans rely solely on their pragmatic interests in building a political and economic dialogue with Moscow.  This narrative is becoming more and more popular in the Old World.

Areg Galstyan, Ph.D. is a regular contributor to The National Interest, Forbes, and The American Thinker.

John J. Mearsheimer, “The False Promise of Liberal Hegemony”

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John J. Mearsheimer, “The False Promise of Liberal Hegemony”

 
 
 
Henry L. Stimson Lectures on World Affairs. John J. Mearsheimer, R. Wendell Harrison Distinguished Service Professor of Political Science and the co-director of the Program on International Security Policy at the University of Chicago, gave a series of three lectures in November on “Liberal Ideals & International Realities” for the Henry L. Stimson Lectures on World Affairs at the Whitney and Betty MacMillan Center for International and Area Studies at Yale.  
 
“The Roots of Liberal Hegemony,” November 13, 2017  https://youtu.be/bSj__Vo1pOU
 
“The False Promise of Liberal Hegemony,” November 15, 2017  https://youtu.be/ESwIVY2oimI
 
“The Case for Restraint,” on November 16, 2017  https://youtu.be/TsonzzAW3Mk  
 
Sponsored by the Whitney and Betty MacMillan Center for International and Area Studies and the Yale University Press.
 

Review: “The Dawn of Eurasia: On the Trail of the New World Order” by Bruno Maçães

Review: “The Dawn of Eurasia: On the Trail of the New World Order” by Bruno Maçães

Ex: https://asianreviewofbooks.com

Some international relations scholars and commentators are rediscovering that Eurasia is a geopolitical unit, a “supercontinent”, in the words of Bruno Maçães in his interesting new book The Dawn of Eurasia. Maçães traces the origins of the term Eurasia to Austrian geologist Eduard Suess in 1885, but the idea that Eurasia should be viewed as a single geopolitical unit is traceable to the great British geopolitical theorist Sir Halford Mackinder in a little-remembered article in 1890 entitled “The Physical Basis of Political Geography”.

Mackinder in that article subdivided Eurasia into the “Gulf Stream Region” (Europe) and the “Indo-Chinese” or “Monsoon” region (East, Central and South Asia) where two-thirds of the world’s population lived, and noted both the Silk Road and seafaring trade routes that linked Europe and Asia. In the early 20th century, Mackinder further developed the notion of Eurasia as the world’s dominant landmass and as a potential seat of a world empire.

Maçães, who is currently a Senior Advisor at Flint Global in London, a Senior Fellow at Renmin University in Beijing and the Hudson Institute in Washington, and a former Portuguese Europe Minister, calls the political world of the 21st century the “new Eurasian world”, but, as noted above, there is really nothing “new” about it, at least in a geographical sense. Indeed, history’s greatest land empires—the Mongols, Napoleonic France, Nazi Germany, and the Soviet Union—were Eurasian. And, as Maçães notes, “[t]he border between Europe and Asia was always unstable, untenable and, for the most part, illusory.”

What then is “new” about the Eurasia of the 21st century that is resulting in a “new world order?”

What’s new is a shift in power from West to East.

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The Dawn of Eurasia: On the Trail of the New World Order, Bruno Macaes (Penguin, January 2019; Yale University Press, August 2018 )

What’s new, according to Maçães, is a shift in power—economic and political—from West to East. It is a shift in power from the western part of Eurasia to its eastern part. But it is also a shift in power from non-Eurasian powers—Britain and the United States—to Eurasian powers—especially China and India. This shift occurred, he believes, because Asia caught up with Europe and the West with respect to science, technology, and innovation; in a word, modernization. Maçães explains:

That the Europeans found themselves in a position to control practically the whole world was a direct result of a series of revolutions in science, economic production and political society whose underlying theme was the systematic exploration of alternative possibilities, different and until then unknown ways of doing things.

Asia embarked on a “fast embrace of modernity” such that modernization has become universal.

Maçães is quick to point out, however, that universal modernization is not equal in all societies and that there are “different models of modern society”. This is especially the case with respect to political models. Asian modernization does not mean that Asian nations will follow the liberal democratic path of Europe and the West. So while economic, scientific, and technological modernization is universal, political systems will remain different. Parag Khanna in his new book The Future is Asian urges Asian powers to reject Western liberal democracy in favor of what he calls “technocratic governance”, which he describes as a form of democratic-authoritarian government similar to Singapore’s.

The new world order flowing from universal modernization among rival nation-states will be characterized, writes Maçães, by “a struggle for mastery in Eurasia”. Again, there is nothing “new” about this, except some of the players. China and India are the most conspicuous rising powers, but Russia has staked its claim in the struggle, too.

The Belt and Road Initiative is “a race for power at the heart of the greatest landmass on earth.”

Maçães writes about his “six-month journey along the historical and cultural borders between Europe and Asia” to show that the borders are not real. He traveled to Azerbaijan, the Caucasus, and other places in the region between the Black and Caspian Seas. He highlights the growing importance of Caspian energy resources to Europe, China and Russia, and the growth of Central Asian cities that lie along the path of China’s new Silk Road. He describes China’s plan for a “new network of railways, roads, and energy and digital infrastructure linking Europe and China.” The Belt and Road Initiative, Maçães writes,has the ambition of creating the world’s longest economic corridor, linking the Asia-Pacific economic pole at the eastern end of Eurasia, and the European pole at its western end.

The land component of this initiative is complemented by the “Maritime Silk Road” that connects China to Europe via the South China Sea, the South Pacific and the Indian Ocean. “Together”, he writes, “the land and sea components will strive to connect about sixty-five countries.”

Maçães views China’s Belt and Road Initiative as more than an economic corridor. It risks, he writes, upsetting old geographical realities and evoking a nineteenth-century world of great-power rivalry, a race for power at the heart of the greatest landmass on earth.

Maçães believes that in the struggle for mastery of Eurasia, Russia is an important variable, and that the Trump administration recognizes this. While President Obama rhetorically pivoted to Asia, Maçães explains, President Trump is seeking to pivot to Eurasia. Trump, he writes, views Eurasia in Kissingerian terms—the United States should have better relations with China and Russia than they have with each other. Trump’s strategy, he believes, “would use closer relations with Russia to limit China’s growing power and influence.”

That is a very 19th-century view of the world, but it makes eminent geopolitical sense in the 21st century. Indeed, in Mackinder’s last article on the subject in 1943 in Foreign Affairs, he envisioned a global geopolitical balance between the North Atlantic nations (the US, Canada, and Western Europe), Russia, and the populous lands of South and East Asia. The result, he hoped, would be “[a] balanced globe of human beings.”


Francis P Sempa is the author of Geopolitics: From the Cold War to the 21st Century and America’s Global Role: Essays and Reviews on National Security, Geopolitics and War. His writings appear in The Diplomat, Joint Force Quarterly, the University Bookman and other publications. He is an attorney and an adjunct professor of political science at Wilkes University.

vendredi, 20 décembre 2019

The 3,000-Year-Old European Social and Moral Code

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The 3,000-Year-Old European Social and Moral Code

The Iliad and the Odyssey can be read as a guide to common sense as well as a guide to cultural assimilation.

homere-buste.JPGEuropean culture formally began with the books of Homer. These European cultural stories were popularized in Europe approximately 3,000 years ago and then written down by the poet Homer about 2,700 years ago. One of the major themes in Homer is the concept of Xenia. Xenia defines the behavior expected from local European residents toward travelers, strangers, and even immigrants. Xenia also defines the behavior that is expected in return from these guests, these strangers in a strange land. The concepts presented in the Iliad and the Odyssey are considered the foundation of the European cultural tradition termed the code of hospitality or the code of courtesy.

The European tradition of Xenia was incorporated into the emerging Christian traditions in the 1st through 4th centuries. The tradition of Xenia has lasted far better in Eastern Orthodox European cultures than in Western Europe and the English speaking colonial nations. The Eastern Orthodox Church and the countries of Eastern Europe have struggled against many invasions by strangers for over a thousand years. There was the Tartar invasions, Muslim invasions, Roman Catholic inspired invasions and even Communist invasions inspired by the western banking cartels. Xenia remains an important cultural touchstone that is a useful tool in the preservation of European cultural norms. Nowhere in the study of Xenia does the concept of Xenophobia arise. There was no fear of the stranger. Strangers were expected to abide by the European social code defined by Xenia or they could expect to be beaten senselessly or simply killed for their transgressions.

The Iliad and the Odyssey can be read as a guide to common sense as well as a guide to cultural assimilation. In the Iliad we have the hubris and errors of youth presented that destroy great families and great nations. In the Odyssey similar subjects are presented on a more personal level. Odysseus, King of Ithaca, offended the Gods and found himself on a journey for ten years trying to get back home. The better part of the Odyssey can be seen as a study of good Xenia Vs. bad Xenia. The moral lesson of the Odyssey is don’t offend God and practice good hospitality.

So what is Xenia? Good Xenia is to treat a traveler as a guest and give them food, warm clothing if needed, sleeping quarters, protection, entertainment and perhaps a ride home. The guest is expected to return gratitude, courtesy, loyalty, an appropriate gift and then tell their story and revel who they are. It is considered in bad form to lie to make your story sound more impressive.

After the host has provided the guest with hospitality he may reasonably ask the guest who he/she is and what is the nature of their business. The general theory is that the guest could be God in disguise. God could be testing the character of the host to see if he/she has good moral character. If a person is a good host he/she avoids sinning and the resulting punishment and potential retribution of God.

A guest must never overstay their welcome or eat up all the food, or take advantage of the host, or be disloyal. The guest must not be violent or force sex upon women. The reward for bad Xenia is a severe beating or death. Generally speaking, any display of hubris will result in punishment from God. One of the worst things that can happen to anyone is to have the wrath of God fall upon him or her.

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In Eastern Europe these traditions of Xenia are less formal today than they were in earlier centuries, but they are still very much a part of the cultural norm. If you plan on visiting Eastern Europe or doing business there, it is important to study up on Xenia and to follow the general formula of Xenia. Some common traditions are to never eat the last piece of food. Never drink the last of the wine or beer or coffee. It is considered rude. If your host is poor it may place a hardship upon them. If you do business in Eastern Europe, put all your cards on the table. Always bring people appropriate gifts and bring food and drink to meetings. Always buy them the best meal you can reasonably afford.

If you think that you can behave in Eastern Europe like people do in New York City, guess again. If you think that cheating people proves what a cleaver businessman you are, you may get exactly what you deserve. Consider yourself fortunate if they only act like “thugs” and beat you up. You may well succeed in getting the best of an Eastern European in a business deal, but it is unlikely you will live to enjoy it. The reason can be explained in the 3000-year-old cultural tradition of Xenia. Western Europeans would be well advised to dust off their copies of Homer.

The New Nihilists: Political Nihilism and the Progressive Movement in America

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The New Nihilists: Political Nihilism and the Progressive Movement in America

Ex: https://www.americanthinker.com

During the dark days of the Second World War, Helmut Thielicke experienced the horrors of National Socialism on a daily basis.  Due to his standing as a Lutheran minister, professor of philosophy, and doctor of theology, he became a person of interest to the Gestapo, who kept him under constant surveillance and frequently hauled him in for interrogation.  After the war, he lectured and wrote extensively about his experiences, and when asked how a country that produced such luminaries as Bach and Beethoven could also produce an Adolf Hitler, he initially blamed the usual suspects: the Treaty of Versailles, the Great Depression, economic instability, and social unrest — but he did not leave it there.  Instead, he did the unthinkable and placed some of the blame on his fellow Germans for their uncritical acceptance of Hitler's promises — a point he emphasized in his book, Between Heaven and Earth.  "Hitler," he said, "knew how to dissemble, and one had to look very closely, and read his terrible book Mein Kampf very carefully, to see the cloven hoof beneath the angel's luminous robes." 

Thielicke's words closely mirrored those of the Apostle Paul, who warned the Corinthian church that "Satan himself masquerades as an angel of light."  Whether the warning is from Thielicke or Paul, it reminds us that duplicitous people always disguise their true intentions by appropriating warm, smooth, and soothing words before repurposing them to fit their carefully crafted agenda.  These warnings did not come with a use-by date, and their potency has not gone stale with the passage of time.  To the contrary, in today's hyper-partisan political environment, where Diogenes's lantern has run out of oil, it is imperative that the words and actions of those who shape public policy be put to the test.  This is especially true with respect to progressivism, an Americanized form of socialism that seemingly arose out of nowhere and seized control of the Democratic Party.  This perspective, however, is an illusion, for, like most political movements, progressivism's rise has been slow but persistent, and the brightness of its star has waxed and waned along with the influence of those who have guided it along — from Teddy Roosevelt to Barack Obama.

Although progressivism began during the McKinley administration, its development took place under the watchful eye of Teddy Roosevelt, whose views seemed somewhat unsettled at times.  He was for law and order but insisted that it was the people, not the courts, who are entitled to say what the Constitution means.  His life epitomized rugged individualism, but he was a collectivist who believed that the welfare of the one depended on the welfare of the many.  He promoted hard work and success but wanted to penalize excessive earnings by the creation of a heavy progressive income and inheritance tax.  He opposed state ownership of businesses but argued for complete governmental control of their affairs, including how they spent their profits.  Then, after almost two terms in office, Roosevelt put politics aside until 1910, when he delivered his defining speech, The New Nationalism, which was, in fact, a Progressive manifesto.

We grudge no man a fortune in civil life if it is honorably obtained and well used.  It is not even enough that it should have been gained without doing damage to the community.  We should permit it to be gained only so long as the gaining represents benefit to the community.  This, I know, implies a policy of a far more active governmental interference with social and economic conditions in this country than we have yet had, but I think we have got to face the fact that such an increase in governmental control is now necessary.

Having solidified his belief that a controlling central government was the essence of progressivism, Roosevelt ran as a third-party candidate against Woodrow Wilson in the presidential election of 1912, where he headed up the newly minted Progressive Party.  The election was lost, and the party died, but its sprit, like an ancient demon released from the abyss, took possession of the body politic, filled it with a thirst for power, and freed it from its constitutional chains.  Progressivism had become a viable force in American politics.

The rise of progressivism had a lasting effect on the nation, as president after president followed Teddy's lead and sought to expand the power and scope of the federal government.  Wilson, who advocated a Darwinian approach to the Declaration of Independence and the Constitution, gave us the progressive income and estate tax.  FDR instituted the New Deal, and LBJ advanced the Great Society, waged the War on Poverty, and launched Medicare.  Not to be outdone, Bill Clinton signed the job-killing North American Free Trade Agreement; Richard Nixon established the EPA and OSHA; Jimmy Carter developed the Departments of Education and Energy; and George W. Bush created Homeland Security, the Transportation Safety Administration, and No Child Left Behind.  Change was now the amrita of presidential politics, but just as the gods knew that churning for amrita would produce poison, so politicians knew that pushing for an overtly aggressive agenda would produce defeat, and no one understood that better than the Democratic Party's rising star: Senator Barack Obama.   

Like many of his predecessors, Obama projected a carefully crafted image while in the public eye.  As the keynote speaker for the 2004 Democratic convention, Obama mesmerized the audience with his soaring rhetoric, heaping praise on America while railing against "those who are preparing to divide us, the spin masters, the negative ad peddlers who embrace the politics of anything goes."  There is not, he insisted, "a liberal America and a conservative America, there is the United States of America.  There is not a black America and a white America and Latino America and Asian America – there's the United States of America."  But it was all a bright, shining lie, and those who had examined his life, and read his books Dreams from My Father and The Audacity of Hope very carefully, were not deceived.  They knew that Obama's mission was to boldly go where no progressive had gone before: into the uncharted universe of political nihilism.

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To the philosopher, nihilism means that nothing in the universe matters or has any significance.  Political nihilism takes the philosopher's theorem and applies it to existing social and political institutions, thereby clearing the way for their replacement.  Surprisingly, Obama openly embraced political nihilism during an October 31, 2008 speech at the University of Missouri, when he abandoned his message of "hope and change you can believe in" and declared, "We are five days away from fundamentally transforming the United States of America."

Although this random act of honesty galvanized Obama's base and helped secure his election, it also turned his declaration of intent and the oath of office into contranyms.  To resolve this dilemma, Obama the fundamental transformer recast himself as Obama the true blue American, and reaffirmed his fidelity to the Constitutional Republic during his first inaugural address.   

Forty-four Americans have now taken the presidential oath. The words have been spoken during rising tides of prosperity and the still waters of peace. Yet, every so often, the oath is taken amidst gathering clouds and raging storms. At these moments, America has carried on not simply because of the skill or vision of those in high office, but because we, the people, have remained faithful to the ideals of our forebears and true to our founding documents. So it has been; so it must be with this generation of Americans.

Today I say to you that the challenges we face are real. They are serious and they are many. They will not be met easily or in a short span of time. But know this America: They will be met.

To Obama, this maneuver was a tactical withdrawal, not a retreat.  He knew that the fundamental transformation of America would be a long and time-consuming process, so he asked his followers to be patient.  The gambit paid off, and Obama fundamentally changed the country's direction, but the next Republican president could easily undo the means he used, such as executive orders, presidential memos, and simple agreements instead of ratified treaties.  This possibility haunted Obama, and, as Election Day drew near, he pleaded with the voters to elect Hillary Clinton because "all the work we've done over the last eight years is on the ballot."  In spite of his efforts, Hillary lost, and President Trump began unwinding Obama's legacy.

In the end, Obama's above-the-fray, laissez-faire approach to leadership was a mistake — a mistake that today's progressives will not repeat.  They are the new nihilists, activists openly calling for the destruction of America's existing social and political institutions so that new, progressive ones can arise from the rubble.  No more electoral college, no more borders, no more constitutional restrictions is their cry, and all the Democratic Party's presidential hopefuls say amen.

In the movie Field of Dreams, Terrance Mann opined that "America has rolled by like an army of steamrollers.  It's been erased like a blackboard, rebuilt, and erased again."  Although Mann will never be among the world's greatest historians or grammarians, his place as a prognosticator of America's future is secure — if the new nihilists ever get their way.

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Georges Valois pour penser le "grand empêchement" contemporain?

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Georges Valois pour penser le "grand empêchement" contemporain?

Ecouter:
https://soundcloud.com/patrick-p-h-le/georges-valois-pour-penser-le-grand-empechement-contemporain

Avec:

Guillaume Travers, journaliste à la revue "éléments"
Pierre Le Vigan, essayiste (en photo)

Thème : « Georges Valois, pour penser le « grand empêchement » contemporain ? »

Pour écouter (URL):

https://soundcloud.com/patrick-p-h-le/georges-valois-pour-penser-le-grand-empechement-contemporain

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L’écriture inclusive exclut-elle quelque chose ?

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L’écriture inclusive exclut-elle quelque chose ?


Image: © Pierre Ballouhey

Sauf à revenir d’une mission de longue durée sur Mars, vous ne pouvez pas ignorer que la langue française a développé ces dernières années une série de symptômes inquiétants, sous forme de boutons se multipliant rapidement, associés à une prolifération inhabituelle de la lettre e, voire de groupes de lettres apparemment anarchiques.

La maladie touche principalement la communication institutionnelle, surtout celle se prétendant “de gauche”, “progressiste” ou “syndicale”, mais n’épargne pas pour autant les milieux cultivés, puisqu’elle se répand même dans les départements de lettres des universités. En voici quelques échantillons in vivo :

Cher·e·s collègues,
Nous vous proposons l’actualité syndicale récente, …

Cher·e·s collègues,
Le site du Forum 2020 est désormais ouvert pour la soumission des résumés…

Jusqu’à présent le modèle officiel de l’inspection individuel [sic] rabat l’évaluation des pratiques professionnelles des enseignant·e·s sur l’observation d’une heure de cours, la consultation des documents et affichages pédagogiques des professeur·e·s, de copies corrigées et des supports des élèves. Un entretien porte ensuite le plus souvent sur ces seuls éléments même si de nombreux·ses inspecteur·trice·s en élargissent le spectre.

Les gardiens de la langue – qui peuvent être des femmes – ont eu beau alerter sur la dangerosité de l’épidémie, il semble que la maladie n’ait pas encore pu être enrayée. Peut-être parce que le diagnostic n’est pas le bon ? Se pourrait-il que cette écriture se voulant inclusive – par opposition à l’écriture habituelle qui, elle, pratiquerait l’exclusion de certaines catégories de personnes, et notamment des femmes – soit en réalité terriblement exclusive de quelque chose ?

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La première chose qui vient à l’esprit, c’est le caractère imprononçable du texte ainsi “inclusifié”. Pour une langue vivante, c’est gênant. Pour des enfants apprenant à écrire, c’est dramatique. Pour ceux d’entre eux qui souffrent le plus – en temps normal – de cet apprentissage, c’est cruel, et n’arrangera certainement pas leur progression. L’écriture inclusive est donc déjà, de fait, terriblement exclusive envers les moins performants dans l’acquisition du langage, comme elle est exclusive de l’harmonie et de la cohérence de la langue, qui se voit scindée en deux langues différentes, une que l’on peut écrire mais pas prononcer, et l’autre prononcer mais pas écrire.

Mais il y a peut-être pire. La maladie se propage en se prétendant guérisseuse : elle voudrait éradiquer de la langue le fléau de l’oppression patriarcale millénaire, celle qui maintient les femmes en esclavage depuis des siècles et des siècles (amen). C’est en tout cas la justification qui est donnée au charcutage de la vieille langue, apprise de la même façon depuis des générations à quelques variations près, mais qui serait porteuse d’une insupportable violence envers le sexe féminin, impitoyablement écrasé par la règle du “c’est le masculin qui l’emporte”, et qu’il serait donc urgent de remplacer par une langue neuve et inclusive. Exemple d’injustice : “999 femmes et 1 homme se sont précipités au centre commercial pour l’ouverture des soldes”.

Mais est-on bien sûr que cette règle grammaticale relève de la domination patriarcale délibérée ? Quand on hésite sur la validité ou l’étendue du domaine d’application d’une loi, en sciences, il peut être utile de transposer cette loi à un domaine légèrement différent de celui où on la teste. Par exemple, pour savoir si la verticale est une seule et même direction, dotée d’un sens qui indique vers où tombent les objets, si l’on sait que la Terre est (à peu près) ronde, on peut se demander si les Néo-Zélandais vivent la tête en bas en marchant sur les pieds ou la tête en haut en marchant sur les mains1.

Dans le cas de l’écriture inclusive, il peut être tentant d’examiner les règles d’accord de genre dans les versions traditionnelles d’autres langues de pays à la culture proche, par exemple l’allemand. Cette langue a de plus l’avantage, par rapport au français, de disposer de trois genres : le féminin, le masculin et le neutre. Certains puristes rétorqueront que le français dispose en réalité d’un genre neutre (alors que certaines veulent en créer un de toutes pièces…), mais comme il s’écrit en pratique de façon identique au masculin, l’allemand permet de clarifier les raisonnements.

Prenons donc quelques exemples : l’automobile (féminin en français) se dit das Auto (neutre) en allemand. Ou encore der Wagen (masculin) d’où nous vient la marque Volkswagen, “voiture du peuple”, un projet industriel d’envergure qui a contribué à la popularité d’un petit brun à moustache ridicule dans les années 30 du siècle dernier. La femme se dit die Frau (féminin, on s’en doute) ; il y a donc trois articles définis au singulier en allemand : das (neutre), der (masculin) et die (féminin). En français nous n’avons que le et la, respectivement pour le masculin et le féminin.

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Et comment se dit “les”, l’article défini pluriel, en allemand ? Die, soit exactement la même forme que l’article défini féminin singulier. Les automobiles : die Autos. Les voitures : die Wagen2. Il semble donc que la règle (mnémotechnique) soit plutôt ici “c’est le féminin qui l’emporte”…

Qu’en est-il maintenant de l’accord de l’adjectif, ou du participe passé, suivant le genre en allemand ? Le pluriel est-il “dominé” par le féminin ou le masculin ?

La déclinaison de l’adjectif se subdivise en trois cas : déclinaison faible avec article défini, déclinaison mixte avec article indéfini, ou déclinaison forte en l’absence d’article. Seuls les premier et dernier ont une forme plurielle permettant de savoir si c’est “le masculin qui l’emporte” ou “le féminin qui l’emporte”, puisque l’article indéfini pluriel (“des” en français) n’existe pas en allemand. Or, aucune règle de “domination masculine” ne peut être tirée des déclinaisons faibles ou fortes, comme on pourra le constater à la lecture des tableaux : en déclinaison faible, la forme plurielle est certes similaire au masculin singulier pour l’accusatif, mais ce n’est pas vrai pour les trois autres cas, où le pluriel a soit sa propre terminaison, soit une terminaison commune avec les trois genres singuliers. Et en déclinaison forte, à l’exception du datif, ce serait plutôt encore “le féminin qui l’emporte” – simple observation à but mnémotechnique, sans considération sur les causes profondes – puisque la terminaison -e ou -er se retrouve à la fois au féminin singulier et au pluriel.

Quant au participe passé, c’est bien simple : il ne s’accorde pas, sauf à être traité comme un adjectif (die geliebte Mutter : la mère bien-aimée… comme der geliebte Vater pour le père bien-aimé !).

Peut-on déduire de ces constatations linguistiques que la société allemande est plutôt sous domination matriarcale, et qu’il serait donc urgent d’inclusifier la langue3 en y rajoutant du masculin4 afin que les hommes se sentent moins outrageusement rabaissés à leur condition de sous-femmes qu’ils ne le sont actuellement par la faute des règles de grammaire allemandes ? Pas vraiment, et ce pour au moins deux raisons : d’une part, il existe bien des cas où “le masculin l’emporte” au pluriel des noms, comme “l’étudiant / l’étudiante / les étudiants” qui se traduit par “der Student / die Studentin / die Studenten” (“les étudiants” se disant  “die Studenten” que l’assemblée soit mâle ou mixte, comme en français), mais aussi parce que la société allemande n’accorde pas une place particulièrement “plus égale” aux femmes que la société française, ce serait même plutôt l’inverse. Bien sûr, on y trouve aujourd’hui comme ailleurs des féministes à divers degrés, mais une “bonne Allemande” reste encore, majoritairement, une femme qui prend soin de son foyer et de l’éducation de ses enfants, plutôt qu’une femme “qui réussit” en faisant “une carrière prestigieuse”. Le modèle scolaire allemand, souvent cité en exemple – avec raison – parce qu’il sait ne pas trop mettre sous pression les enfants tout en leur donnant une bonne éducation et la possibilité de s’épanouir dans des activités annexes (musique, sport…), doit aussi son succès à la disponibilité des parents, qui sont souvent des mères, pour être à la disposition de leur progéniture quand l’école termine entre 12h et 15h… difficile à faire quand les deux membres du couple travaillent.

Bref, comme tant de revendications prétendument progressistes, celle de l’écriture inclusive commence par exclure… une connaissance minimale de la langue et de ses subtilités, ou par sanctuariser l’ignorance, comme on voudra. D’autres exemples de “rectifications” de pratiques “réactionnaires” ont par le passé laissé des arrière-goûts amers comme, par exemple, le fait de décréter égaux les douze degrés de la gamme chromatique, alors que la musique “réactionnaire” tonale s’y refusait… et qu’une étude minimale des bases physiques de la musique – voire une simple écoute donnant la priorité aux sens plutôt qu’à une prétention intellectuelle – permet d’en saisir le bien-fondé.

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Contrôler les masses en s’appuyant sur leur ignorance est évidemment plus facile que les élever dans la connaissance, c’est pourquoi de tous temps des volontés politiques hégémoniques ont tenté de détruire préalablement le substrat commun des peuples, “ce qui reste quand on a tout oublié”, afin de pouvoir construire un “homme nouveau” et malléable sur une base vierge. Le langage, dont l’évolution progressive au cours des siècles obéit à des règles extrêmement subtiles et non aux schémas paranoïaques – oserons-nous dire complotistes ? – de domination patriarcale évoqués par certain(e)s, fait évidemment partie de ce socle commun, au niveau le plus profond puisqu’il conditionne la communication entre les êtres. Mais l’écriture “inclusive” a toutefois un avantage : permettre d’éliminer rapidement les discours sans intérêt. Lorsqu’un texte commence de la sorte, on sait qu’il est inutile de lire la suite.

Bonus :

Je laisse mes lecteurs méditer sur ces autres trouvailles récentes de la langue française :

  • Hauts-de-France, nom de la région “nouvelle” qui est venue englober le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie : sachant que son altitude moyenne est de 98 mètres, et que tout élève de primaire se faisait traiter de cancre lorsqu’il disait que Lille était “en haut” de la France ou Perpignan “en bas” à l’époque où j’y étais, que peut-on en déduire du niveau intellectuel des “décideurs” politiques ?
  • féminicide, venu “enrichir” le vocabulaire afin de “rééquilibrer” l’usage d’homicide : sachant que le nom homme prend deux m, et que homosexuel(le) se décline aussi bien au masculin qu’au féminin, que peut-on en déduire de la connaissance de l’étymologie par certain(e)s “féministes” ?
 
  1. 1) Certains résolvent le problème en disant que la Terre est plate, mais c’est une réponse qui soulève bien d’autres questions.
  2. 2) L’allemand étant une langue à déclinaisons, je simplifie ici en donnant seulement le nominatif. Toutefois, pour l’article défini, la règle de l’identité entre le féminin singulier et le pluriel reste valable aussi pour l’accusatif et le génitif, seul le datif ayant une forme propre au pluriel. Voir ici le détail.
  3. 3) Langage inclusif (ou épicène) se dit geschlechtergerechte Sprache en allemand. À vos souhaits.
  4. 4) Certaines universités allemandes ont commencé à le faire… en rajoutant du féminin.

jeudi, 19 décembre 2019

Hommage à Michel Mohrt

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Hommage à Michel Mohrt

par Christopher Gérard

Ex: http://archaion.hautetfort.com

Je suis très ému ce soir de rendre hommage à Michel Mohrt,  écrivain que j’ai découvert, jeune étudiant, au début des années 80, par le truchement, en quelque sorte, de son, aîné Pierre Drieu la Rochelle, dont la figure me fascinait déjà.

MM-prison.jpgEn effet, dans deux de ses romans, Mon Royaume pour un cheval et La Guerre civile, Mohrt évoque à la fois Drieu, qu’il avait  rencontré dans le Paris de la fin de l’Occupation, et surtout Bassompierre, son camarade aux Chasseurs alpins sur le front italien, devenu Bargemont dans plusieurs de ses romans, condamné à mort après la Libération et fusillé, malgré l’intervention de grands résistants, pour son engagement sur le front russe. Singulière figure que celle de Bassompierre, qui incarne les déchirements d’une certaine France et dont le tragique destin a profondément marqué Mohrt : une partie importante de son œuvre témoigne de son inconsolable tristesse.

Michel Mohrt, qui mourut presque centenaire (1914-2011) aura connu le terrible XXème siècle dans sa totalité ; il aura vu son existence brisée à jamais par la défaite de 1940. Dans La Campagne d’Italie, merveilleux roman stendhalien sur les illusions perdues d’une jeune guerrier frustré de sa victoire, il fait dire à son double romanesque, Talbot : « on ne s’en remettra jamais ».

Mohrt rejoint son cadet Michel Déon (1919-2016), qui lui aussi, ne se remit jamais de la débâcle. Il existe d’ailleurs entre ces deux maîtres des connivences, un dialogue, qui témoignent d’une forme de mélancolie bien française, toute en retenue, mais déchirante. Comme l’a bien remarqué Marcel Schneider : « Mohrt est de ceux qui n’ont jamais pu accepter ni même comprendre la débâcle. Elle est pour eux comme la blessure d’Amfortas, qui saigne toujours sans pouvoir se guérir ». Cette plaie béante fut rendue plus douloureuse encore par les règlements de compte de la Libération.

mm-italie.jpgEcoutons Mohrt évoquer ce jeune officier démobilisé après une campagne bien courte qui, contrairement à celle du jeune Stendhal, ne fit pas de lui ce dragon victorieux entrant dans Milan pour occuper - en vainqueur - une loge à la Scala  : « Je n’avais plus confiance en moi, parce que j’avais perdu confiance en mon pays. Comme lui, je le sentais vaincu. Je passais mon temps à ruminer la défaite, cherchant à en préciser les causes, si évidentes pour moi ». C’est à ce moment que cet avocat réfugié en zone libre se met à lire les auteurs qui, après la défaite de 1870, proposent une réforme intellectuelle et morale qui ne viendra pas. Même espoir chez Mohrt d’un relèvement, même hantise de la guerre civile - qui viendra, car aux massacres de la Commune succèdent ceux de l’Occupation et de la Libération. Mohrt a dit et répété qu’il avait l’impression d’assister, « à la naissance d’une vérité officielle qui contredisait tout ce que j’avais vu ou cru voir ». Les années d’après la défaite, il les vécut « en somnambule » et dans l’amertume.

Quittant une France qui l’ulcérait, Mohrt, tel un Emigré de 1792, mit le cap à l’ouest : l’Amérique, thème fondamental de son œuvre, fut le refuge qu’il a décrit avec sympathie dans nombre de ses romans, par exemple dans L’Ours des Adirondacks ou dans Les Nomades ; une Amérique sudiste et anglomane qui ne doit plus guère exister. Une Amérique qui fait songer à celle d’André Fraigneau dans Les Etonnements de Guillaume Francoeur, encore un livre pour happy few. Une Amérique cosmopolite au meilleur sens du mot, c’est-à-dire vieil-européenne, encore francophile, aux campus pareils à des oasis de culture dans un monde barbare : « cette vie studieuse, à la fois austère et confortable, me convenait à merveille. Je me sentais protégé par le gothique, par la tasse de thé de cinq heures, par le silence de la bibliothèque, par l’horaire des cours comme, neuf ans plus tôt, je m’étais senti protégé par les servitudes et les plaisirs de la vie militaire.  J’oubliais Paris, mon amertume, mes déconvenues, j’avais enfin l’impression d’avoir trouvé ma vraie vocation, un havre de paix où me livrer en toute tranquillité à ce qui aurait toujours été la plus grande joie de ma vie, mon recours dans les épreuves, mon vice impuni : la lecture ».

mm-guerre.jpgPeu d’écrivains français peuvent se vanter d’avoir enseigné aux prestigieuses universités de Yale ou de Californie ; très peu nombreux sont ceux qui reçurent en outre la proposition d’intégrer le corps professoral de Princeton. Paradoxe pour ce chouan nourri de Maistre et de Maurras, et qui fut, des décennies durant, l’un des principaux passeurs en France - chez Gallimard - des plus grands écrivains américains du siècle vingtième : qui se souvient que c’est Mohrt qui introduisit Roth et Kerouac chez Gallimard ? Sans oublier son travail en faveur de Faulkner , à qui le liait une sensibilité commune : « Les hommes de l’Ouest ont entre eux bien des ressemblances. Nous étions un peu chouans. Avec M. de Charrette, nous serions allés « chasser la perdrix », nous étions sudistes ».

Toute une sensibilité se révèle, par exemple dans cet entretien avec Bruno de Cessole, où Mohrt se livre : « L’écho romanesque d’un traditionalisme, un refus du moderne qui trouve ses répondants chez Maistre, Baudelaire, Maurras et qu’ont incarné en ce siècle T.S. Eliot et Ezra Pound ».

Dans Vers l’Ouest et Ma Vie à la NRF, Mohrt évoque son « exil » au Canada (transfiguré dans son roman Mon Royaume pour un cheval) et surtout, pendant six ou sept ans aux States, comme visiting professor. L’ancien lieutenant de Chasseurs alpins, décoré de la Croix de Guerre, y initie ses étudiants aux œuvres de Morand, Drieu, Jouhandeau, alors indésirables dans les Lettres françaises.

Mohrt a aussi chanté les marins et les navires, la mer et sa Bretagne natale, pour laquelle il prit, tout jeune, quelques risques : son grand roman La Prison maritime narre en effet les tribulations - et l’initiation amoureuse - d’un jeune Breton d’avant-guerre mêlé à de mystérieux trafics d’armes avec l’Irlande.

Enfin, dernier thème que je voudrais évoquer, c’est celui de Venise, que Mohrt a bien connue et peinte - car il était aussi peintre et dessinateur. Dimanches de Venise est un livre délicieux sur la Sérénissime, où l’auteur mettait ses pas dans ceux de Barrès, de Morand évidemment et de Fraigneau. Très longtemps, le jeune juriste, le jeune officier de chasseurs alpins, l’homme d’affaires et l’avocat captif dans la France occupée avait rêvé de l’Italie, qu’il ne découvrit qu’à près de quarante ans, après sept ans en Amérique.

Nice en 1939, Little Italy à la fin des 40’ lui en donnèrent un avant-goût, mais c’est à la maturité qu’il put enfin fouler le sol italien, et découvrir Venise, ville maritime qui ne pouvait que plaire à ce Breton, et qu’il vit avec le regard du peintre : « Venise, dit-il, n’est pas pour moi un devoir de français, mais l’atelier qui me manque à Paris ». Après Paul Morand, Mohrt « change l’eau de la lagune en encre », ou plutôt en aquarelle : « Venise a été pour moi la preuve aveuglante que c’est par les sens que nous faisons l’expérience du monde, non par l’idée ».

Ecrivain solitaire, austère et raffiné, peintre du dimanche, Michel Mohrt incarna le Chouan, le Sudiste tiré à quatre épingles, qui nous manque. Il est vrai que son élégance, son choix parfait de cravates en tricot, ses tweeds, ses chemises Brooks Brothers au col boutonné, cette dégaine d’officier en retraite me séduisirent d’emblée.

Un dernier mot : reprenant mes notes et ouvrant dans le désordre ses livres (lus il y a parfois vingt ou trente ans), je me rends compte à quel point Mohrt est tout sauf un écrivain mineur. Ses livres continuent de faire rêver ; ils n’ont guère vieillis (contrairement, par exemple, aux romans de Nimier) ; ils constituent des talismans que je suis heureux, que nous sommes heureux, mes confères et moi-même, de vous transmettre ce soir.

Ce trésor de votre littérature, prenez-en soin !

Christopher Gérard

Le 8 novembre MMXIX

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America's real disease is toxic ignorance

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America's real disease is toxic ignorance

Ex: https://www.americanthinker.com

The new favorite adjective of the unguided left is "toxic."  Toxic masculinity, toxic racism, toxic this, toxic that.  The real problem today is toxic ignorance.

Lack of education, lack of facts, lack of tolerance, and lack of grounding principles have weakened the immune system of society and made it vulnerable to the ravages of toxic ignorance.  It's easy to call screaming throngs "stupid," but their stupid conduct has at its source ignorance — lack of information combined with lack of perspective.

Many factors have combined over the last 50 years to remove the moral scaffolding into which we fit incoming information and prioritize it.  Judeo-Christian values have been demonized and replaced with relativism.  Relativism implies that nothing is all good or all bad, all wrong or all right.  There are no justified priorities.  Live and let live.  Once this took hold, toxic education stepped into the breach and indoctrinated students with substitutes for what used to be "right" and "wrong."  The only truth is your own personal well-being.  So teachers set about redefining history and interpreting ideas with which the left disagrees as harm to one's person.

This makes it a small step to say "speech is violence."  Golly, I might get hurt!  That milestone has long passed, and added to it is "silence is violence."  Wow, maybe I'm being hurt and I don't even know it! 

Actual history is being replaced by dopey but powerful ideas.  Today's teachers tell our youths that America was full of noble savages living in peace before Europeans came and annihilated them.  A moment's thought to the idea would suggest that if those people hadn't come here, what do you think would have happened?  A little more thought might point out that we didn't invent local traditions such as scalping.

There are an alarming number of issues like this that have been weaponized and used as cudgels on the common sense of our young people.  Those people are now coming into leadership positions in our society.  When their malleability encounters ambition, they dive full speed ahead into their notion of success.  They say the same things over and over, treating the public as they have been treated.  The more mature public sees them as the ranting roosters they are and doesn't believe them.  This sends them into a state of hysteria.  "I said this five times — why don't you get it?"  When they use their accumulated bum dope to draw conclusions, we adults know better.  No, we don't want to pay more taxes so you can retrofit buildings to be "greener" and create more bird-dicing wind farms and bird-incinerating solar farms.

Ignorance, lack of critical thinking ability, and narcissism have led people to do things that are incredibly short-sighted.  They put listening devices in their homes that listen to everything they say, waiting for the word "Alexa."  They put cameras and microphones into the rooms of their children.  They turn social media facsimiles of people into their best friends — all the while forgetting how valuable all this access and gathered data is to those who wish to do harm to them or simply to make profit from them.  If something is free, you are the product.  If you can remotely unlock your door, so can someone else.

There is an antidote to chronic ignorance: factual information.  The four-year university degree paradigm meant something when there were few books and fewer scholars.  Now it's just a way to prostitute heritage and make money.  Now anyone can educate himself — there is no excuse for ignorance.

How much time do our future leaders spend educating themselves?  When someone states a questionable "fact," do they stop and check it out in a couple of ways, or do they just believe what someone who is a "professor" professes?  Congressman Nadler certainly hopes it's the latter.

Toxic ignorance has weakened the last two generations of new adults.  It has made them vulnerable to manipulation by the better informed.  In the absence of perspective, their anger is easily invoked and, sadly, easily metastasized into hatred.  Hatred is the most toxic sentiment a human heart can harbor.  The half-life of hatred is far longer that the life expectancy of any of us.

Take the cure for toxic ignorance: man up and educate yourself.

 

Des fake news à l’obscurantisme - Crises de croyance

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Des fake news à l’obscurantisme

Crises de croyance

par François-Bernard Huyghe
 
Ex: https://www.huyghe.fr

L’empire du faux attaque les sciences : doute et croyances alternatives

Après la peur des fake news, du complotisme et du populisme, voici dénoncée la remontée de l’obscurantisme. La contestation de ce qui est scientifiquement démontré monte en proportion inverse de l’adhésion à des explications improbables portant sur le monde, la nature, et souvent la santé.

Voir le succès en ligne de considérations sur la platitude de la Terre, des réfutations de l’évolution, les effets du karma sur nos morphologies, et des cosmologies bizarres. Ces croyances générales relèvent souvent d’une révélation. Mais d’autres théories à succès ne prétendent pas bouleverser les principes généraux de la science, ni attester de pseudo-miracles ; elles jouent des témoignages, des statistiques et des corrélations : A est-il cancérigène ? Quel rapport entre l’exposition à B et le développement de cette maladie ? Tel risque de santé est-il démultiplié par le facteur C ? Manipulations des experts pour déguiser une responsabilité en accident ? De quoi faut-il avoir peur, de quoi s’indigner, que dénoncer ? Que nous cache-t-on qui affecte notre santé, notre équilibre,la planète ?

Le scepticisme monte avec le refus de l’autorité et de la preuve : ce qu’affirment les autorités scientifiques, sanitaires ou autres rencontre une méfiance croissante, comme envers les médias et la classe politique.  Mais le vide du doute appelle le plein d'une croyance alternative. Ainsi, la conviction qu’un péril, onde, produit chimique ou flux d’énergie, jusque là non décelé menace, qu’une solution médicale inédite est apparue, donc qu’une révision de nos notions ou un contrôle s’imposent.

Au-delà de l’effet rumeur ou des croyances « archaïques », des gens qui ont un bon niveau culturel adhérent à des discours sur des risques cachés, sur une corrélation transformée en causalité ou sur de futures catastrophes notamment sanitaires, assurés que la science officielle nous dissimule l’effroyable réalité.

Au fil de l’actualité, on apprend ainsi que nos compatriotes sont les plus sceptiques sur la nécessité des vaccins, qu’une dame gourou Vandana Shida expose les thèses anti-science à sciences po, qu’il faut se méfier des compteurs Linky et de la 5G, que 86% des jeunes français pensent que le nucléaire participe fortement au réchauffement climatique et émet du co2, qu’il y aurait un lien prouvé entre les pesticides et le cancer du sein. Sans parler de l’efficacité de l’homéopathie ou des listes de produits, glyphosate, qui ont d’indéniables dangers, mais dont le risque, notion tout à fait différente du danger aux doses où on les rencontre, déclenche des passions.

On peut s’étonner d’une crise du consensus de cette ampleur et du succès de tout ce qui dénonce, souvent avec des relents anti-modernistes, naturalistes, catastrophistes, science et médecine. Souvent en se réclamant d’une autre plus authentique qui trouverait des causes cachées et des effets occultés par le « discours officiel ».

Comme en politique, on peut mettre en cause des changements de mentalité : ère de la post-vérité, réceptivité au bullshit, le grand n’importe quoi. On peut chercher des causes rhétoriques ou épistémologiques : les charlatans sont convaincants - par exemple ils « jouent des peurs » -et les gentils ne saisissent pas les finesses du raisonnement notamment statistique. Certes. On peut aussi chercher des coupables d’une sorte de subversion du vrai (Russes et les démagogues en politique, collapsologues et anti-science en médecine), et pointer les intérêts matériels des vendeurs d’espérance ou des capteurs de clics : raconter une carabistouillle attire vers une publication ou un site où la seconde d’attention du cerveau humain est renvendue à un publicitaire. Et sans négliger non plus l’arrière-fond idéologique d’opposition à la science comme domination de la nature et au développement comme agression.

Mais ces polémiques ont aussi une dimension médiologique : le marché intellectuel du doute, la prime à la théorie venant de gens « authentiques », l’explosion de l’argumentation, chacun pouvant émettre, relayer, discuter, juger, s’indigner, soutenir, etc. tout cela fleurit d’abord sur les réseaux sociaux. Le numérique est d’autant plus favorable à la contre-information et à la contradiction que chacun étant ce censé pouvoir aller aux sources et aux témoignages comme en direct d’égaux présumés sincères. Les algorithmes privilégient tout ce qui fait buzz, polémique et mobilisation.Ceci vaut particulièrement dans le domaine de la santé qui est celui de l’intime, de ce qui pourrait m’arriver à moi ou mes proches. S’ajoutent des techniques de captation de l’attention, de production de faux partisans, qui donnent des armes à la mésinformation au détriment des affirmations accréditées de façon hiérarchique et traditionnelle.

Les réseaux sont le lieu de l’alerte incessante - gluten, ondes, glyphosates, vaccins, lactose, nouveau produit cancérigène... - la où la peur vaut autorité, et bien que nous vivions dans des sociétés où le souci de protection est infiniment supérieur à ce qu’il fut jamais.
 
Certes le remède est souvent près du poison et, sur les mêmes réseaux, fleurissent les vidéos de démontage ou les analyses des biais cognitifs, les déconstructeurs de fariboles, les sources primaires et les idées tertiaires...

Mais nous subissons la terrible loi dite de Brandolini « La quantité d'énergie nécessaire pour réfuter du baratin est beaucoup plus importante que celle qui a permis de le créer".

Russie - La tentation néolibérale

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Russie - La tentation néolibérale

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.com

Cet ouvrage est de Karine Bechet Golovko. Il été publié par l'Harmattan le 31/01/2018. Il avait peu attiré l'attention à l'époque, mais il conserve une actualité suffisante pour que nous le présentions ici.

Karine Bechet Golovko se décrit elle-même ainsi 
Habitant à Moscou depuis une quinzaine d'années, j'observe avec une passion toujours renouvelée les élans de ce pays complexe. Par des articles dans la presse, des publications scientifiques et des ouvrages je tente de vous faire partager une certaine vision d'un monde qui se renouvelle en permanence sous nos yeux.
« L'autorité des décisions de la CEDH à l'égard des juges constitutionnels », Revue Est-Europa, 2016, N°1
« De l'instrumentalisation du droit et des Etats : constitutions et révolutions dans l'espace post-soviétique », in « Les Constitutions, des révolutions à l'épreuve du temps », sous la dir. M.-E/ Baudoin et M. Bothom, LGDJ Lextenso, 2016
« Russie : la complexification des rapports entre l'Etat et la société civile », Revue d'études Est-européennes, 2014, N°1 spécial
« La dyarchie de l'exécutif en Russie », RDP, 2013, N°2
« Les présidentielles russes : les acteurs face à un choix de société », revue Politeia, n° 22 (2012)
« Les élections parlementaires russes : la fin d'une époque ou juste un sursaut ? », Revue Politeia, n° 20 (2012)
« Que reste-t-il du concept de « souveraineté » ? A l'occasion de la décision du Conseil constitutionnel sur le Traité de Lisbonne », Revue Politeia n°13 (2008)

Présentation par l'éditeur

La vague néolibérale mondiale a-t-elle échoué à atteindre la Russie ? Le calme de façade de la politique intérieure du pays couvre des turbulences que nous ne soupçonnons pas. Derrière la personnalité de V. Poutine, ce sont des clans néolibéraux et conservateurs qui s'affrontent à travers les organes de pouvoir, font passer des réformes, lancent des contre-réformes. Cette gouvernance russe s'est ouverte aux modalités néolibérales et revendique sa place dans la mondialisation.

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Notre commentaire au 17/12/2019

Depuis que s'est constitué un bloc géopolitique qualifié de BRIC, unissant notamment la Russie et la Chine, la question souvent posée est de savoir jusqu'à quel point ce bloc s'opposera aux offensives permanentes menées par les Etats-Unis contre la Russie. Aux yeux du Pentagone, la Russie a le tort immense de disposer d'une puissance nucléaire et spatiale seule capable aujourd'hui de tenir tête à l'Empire américain. Même si cela n'est pas dit clairement, elle doit disparaître en tant que super-puissance.

Vladimir Poutine a depuis les origines compris qu'il devait motiver suffisamment la société russe pour qu'elle accepte les sacrifices économiques que suppose la résistance à cette entreprise. Ceux-ci supposent une opposition permanente au capitalisme financier américain, dit aussi néolibéral, au lieu de coopérer avec lui pour exploiter le reste du monde. La question est donc posée de savoir jusqu'à quand les détenteurs russes du pouvoir économique et financier accepteront-ils ces sacrifices. Les services de renseignements américains ont depuis longtemps identifiés des intérêts sociaux-politiques qui en Russie pourraient être suffisamment corrompus par l'attrait des dollars pour renverser Vladimir Poutine afin de coopérer avec Wall Street au lieu de s'en tenir à distance.

Or à cet égard les candidats potentiels ne manquent pas. Le dernier ouvrage de Karine Bechet Golovko essaye d'en faire l'inventaire. Ces intérêts russes sont soumis en permanence à ce que son livre appelle la tentation néolibérale. Sur le plan intérieur, selon elle, ceci se traduit par la formation de mouvements qui s'affrontent afin de mettre le pouvoir (celui de Poutine et des militaires) au service de leurs intérêts. Mais ceux-ci sont souvent contradictoires, ce qui explique selon nous qu'il n'aient pas pu jusque ici mettre le gouvernement central, souvent désigné du terme de Kremlin, à leur service. Cependant, si l'on en croit les analyses de l'auteure, ceci ne saurait durer. A ce titre, l'ouvrage, même si ce n'est pas son ambition première, peut avoir pour effet de donner de l'espoir à ceux qui, à l'intérieur comme à l'extérieur, veulent renverser Vladimir Poutine, afin de rentrer dans ce qu'elle nomme le jeu de la mondialisation.

Nous pensons cependant que dans cette description, elle n'a pas su observer les sentiments nationalistes dits-aussi pro-russes qui ont toujours permis à la Russie de se défendre dès les guerres napoléoniennes contre les offensives européennes. Ils lui ont en dernier lieu donné la possibilité de s'inscrire parmi les vainqueurs de la seconde guerre mondiale, après avoir accepté des millions de morts parmi ses forces armées. Aujourd'hui, si les Etats-Unis ne peuvent être comparés à l'hitlérisme qui voulait conquérir et détruire Moscou, il est aisé de montrer qu'ils peuvent facilement lui être assimilés. Il s'agit une nouvelle fois se détruire la Russie en tant que puissance indépendante. Le nationalisme pro-russe saura l'emporter sur l'appât des profits immédiats quand il s'agira de faire des choix géostratégiques importants. Concrètement, ceci veut dire que Moscou, avec ou sans Poutine, ne refusera pas de continuer à jouer un rôle éminent au sein du BRIC. Autrement dit, la Fédération de Russie ne capitulera pas devant les intérêts dits néo-libéraux, même s'ils sont bien représentés en son sein.

La même observation pourrait être faite concernant la Chine. De nombreuses analyses montrent que les intérêts dits néolibéraux y sont très puissants et recherchent en permanence une ouverture à l'ouest. Mais l'expérience montre également que si cette dernière devait se payer par l'abandon de la résistance aux Etats-Unis, notamment dans le Pacifique sud , les intérêts néo-libéraux chinois sauraient s'effacer devant un sentiment national défendu aujourd'hui par le Parti Communiste Chinois et le président Xi Jinping.

 

mercredi, 18 décembre 2019

Pamir Highway: the Road on the Roof of the World

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Pamir Highway: the Road on the Roof of the World
Photo, above: Chinese container cargo trucks after crossing the Kulma pass at the Tajik-China border. Photo: Pepe Escobar / Asia Times

This is arguably the ultimate road trip on earth. Marco Polo did it. All the legendary Silk Road explorers did it. Traveling the Pamir Highway back to back, as a harsh winter approaches, able to appreciate it in full, in silence and solitude, offers not only a historical plunge into the intricacies of the ancient Silk Road but a glimpse of what the future may bring in the form of the New Silk Roads.

This is a trip steeped in magic ancient history. Tajiks trace their roots back to tribes of Sogdians, Bactrians and Parthians. Indo-Iranians lived in Bactria (“a country of a thousand towns”) and Sogdiana from the 6-7th centuries BC to the 8th century AD Tajiks make up 80% of the republic’s population, very proud of their Persian cultural heritage, and kin to Tajik-speaking peoples in northern Afghanistan and the region around Tashkurgan in Xinjiang.

Proto-Tajiks and beyond were always at the fringe of countless empires – from the Achaemenids, Kushan and Sogdians to the Greco-Bactrians, the Bukhara emirate and even the USSR. Today many Tajiks live in neighboring Uzbekistan – which is now experiencing an economic boom. Due to Stalin’s demented border designs, fabled Bukhara and Samarkand – quintessential Tajik cities – have become “Uzbek.”

Bactria’s territory included what are today northern Afghanistan, southern Tajikistan and southern Uzbekistan. The capital was fabled Balkh, as named by the Greeks, carrying the informal title of “mother of all cities.”

Sogdiana was named by the Greeks and Romans as Transoxiana: between the rivers, the Amu-Darya and the Syr-Darya. Sogdians practiced Zoroastrianism and lived by arable agriculture based on artificial irrigation.

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Western Pamirs: Road upgrade by China, Pyanj River, Tajikistan to the left, Afghanistan to the right, Hindu Kush in the background. Photo: Pepe Escobar

We all remember that Alexander the Great invaded Central Asia in 329 B.C. After he conquered Kabul, he marched north and crossed the Amu-Darya. Two years later he defeated the Sogdians. Among the captured prisoners was a Bactrian nobleman, Oxyartes, and his family.

Alexander married Oxyartes’s daughter, the ravishing Roxanne, the most beautiful woman in Central Asia. Then he founded the city of Alexandria Eskhata (“The Farthest”) which is today’s Kojand, in northern Tajikistan. In Sogdiana and Bactria, he built as many as 12 Alexandrias, including Aryan Alexandria (today’s Herat, in Afghanistan) and Marghian Alexandria (today’s Mary, formerly Merv, in Turkmenistan).

By the middle of the 6th century, all these lands had been divided among the Turkic Kaghans, the Sassanian Empire and a coalition of Indian kings. What always remained unchanged was the emphasis on agriculture, town planning, crafts, trade, blacksmithing, pottery, manufacture of copper and mining.

The caravan route across the Pamirs – from Badakshan to Tashkurgan – is the stuff of legend in the West. Marco Polo described it as “the highest place in the world.” Indeed: the Pamirs were known by the Persians as Bam-i-Dunya (translated, appropriately, as “roof of the world”).

The highest peaks in the world may be in the Himalayas. But the Pamirs are something unique: the top orographic crux in Asia from which all the highest mountain ranges in the world radiate: the Hindu Kush to the northwest, the Tian Shan to the northeast, and the Karakoram and the Himalayas to the southeast.

Ultimate imperial crossroads

The Pamirs are the southern boundary of Central Asia. And let’s cut to the chase, the most fascinating region in the whole of Eurasia: as wild as it gets, crammed with breathtaking peaks, snow-capped spires, rivers ragged with crevasses, huge glaciers – a larger-than-life spectacle of white and blue with overtones of stony gray.

This is also the quintessential crossroad of empires – including the fabled Russo-British 19th century Great Game. No wonder: picture a high crossroads between Xinjiang, the Wakhan Corridor in Afghanistan and Chitral in Pakistan. Pamir may mean a “high rolling valley.” But the bare Eastern Pamirs might as well be on the moon – traversed less by humans than curly-horned Marco Polo sheep, ibex and yaks.

Countless trade caravans, military units, missionaries and religious pilgrims also made the Pamir Silk Road known as “road of Ideologies.” British explorers like Francis Younghusband and George Curzon hit the upper Oxus and mapped high passes into British India. Russian explorers such as Kostenko and Fedchenko tracked the Alai and the great peaks of the northern Pamir. The first Russian expedition arrived in the Pamirs in 1866, led by Fedchenko, who discovered and lent his name to an immense glacier, one of the largest in the world. Trekking toward it is impossible as winter approaches.

And then there were the legendary Silk Road explorers Sven Hedin (in 1894-5) and Aurel Stein (1915), who explored its historical heritage.

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Chinese container cargo trucks negotiate the Western Pamirs. Photo: Pepe Escobar

The Pamir Highway version of the Silk Road was actually built by the Soviet Union between 1934 and 1940, predictably following ancient caravan tracks. The name of the region remains Soviet: the Gorno-Badakhshan Autonomous Oblast (GBAO). To travel the highway, one needs a GBAO permit.

For no less than 2,000 years – from 500 B.C. to the early 16th century – camel caravans carried not only silk from East to West, but goods made of bronze, porcelain, wool and cobalt, also from West to East. There are no fewer than four different branches of the Silk Road in Tajikistan. The ancient Silk Roads were an apotheosis of connectivity: ideas, technology, art, religion, mutual cultural enrichment. The Chinese, with a keen historical eye, not by accident identified “common legacy of mankind” as the conceptual/philosophical base for the Chinese-led New Silk Roads, or Belt and Road Initiative.

Have China upgrade, will travel

In villages in Gorno-Badakhshan, stretched out along stunning river valleys, life for centuries has been about irrigation farming and seasonal-pasture cattle farming. As we progress toward the barren Eastern Pamirs, the story mutates into an epic: how mountain people eventually adapted to living at altitudes as high as 4,500 meters.

In the Western Pamirs, the current road upgrade was by – who else? – China. The quality is equivalent to the northern Karakoram Highway. Chinese building companies are slowly working their way towards the Eastern Pamirs – but repaving the whole highway may take years.

The Pyanj river draws a sort of huge arc around the border of Badakhshan in Afghanistan. We see absolutely amazing villages perched on the hills across the river, including some nice houses and owners with an SUV instead of a donkey or a bike. Now there are quite a few bridges over the Pyanj, financed by the Aga Khan foundation, instead of previous planks jammed with stones suspended above vertiginous cliffs.

From Qalaykhumb to Khorog and then all the way to Ishkoshim, the Pyanj river establishes the Afghan border for hundreds of kilometers – traversing poplar trees and impeccably-tended fields. Then we enter the legendary Wakhan valley: a major – barren – branch of the Ancient Silk Road, with the spectacular snow-capped peaks of the Hindu Kush in the background. Farther south, a trek of only a few dozen kilometers of trekking, it’s Chitral and Gilgit-Baltistan in Pakistan.

The Wakhan could not be more strategic – contested, over time, by Pamiris, Afghans, Kyrgyz and Chinese, peppered with qalas (fortresses) that protected and taxed the Silk Road trade caravans.

The star of the qalas is the 3rd century B.C. Yamchun fortress – a textbook medieval castle, originally 900 meters long and 400 meters wide, set in a virtually inaccessible rocky slope, protected by two river canyons, with 40 towers and a citadel. Legendary Silk Road explorer Aurel Stein, who was here in 1906, on the way to China, was gobsmacked.The fortress is locally known as the “Castle of the Fire Worshippers”.

Pre-Islamic Badakhshan was Zoroastrian, worshipping fire, the sun and spirits of ancestors and at the same time practicing a distinct Badakhshani version of Buddhism. In fact, in Vrang, we find the remains of 7th-8th century Buddhist man-made caves that could have also been a Zoroastrian site in the past. The early Tang dynasty wandering monk Xuanzang was here, in the 7th century. He described the monasteries and, tellingly, took notice of a Buddhist inscription: “Narayana, win.”

Ishkoshim, which Marco Polo crossed in 1271 on the way to the upper Wakhan, is the only border crossing in the Pamirs into Afghanistan open to foreigners. To talk of “roads” on the Afghan side is audacious. But old Silk Road tracks remain, negotiable only with a study Russian jeep, delving into Faizabad and farther into Mazar-i-Sharif.

Here are the parts the 18-year-long, trillion-dollar, Hindu Kush-of-lies-told American war on Afghanistan never reaches. The only “America” available is Hollywood blockbusters on DVDs at 30 cents apiece.

I was very fortunate to spot the real deal: a camel caravan, straight from the ancient Silk Road, following a track on the Afghan side of the Wakhan. They were Kyrgyz nomads. There are roughly 3,000 Kyrgyz nomads in the Wakhan, who would like to resettle back in their homeland. But they are lost in a bureaucratic maze – even assuming they secure Afghan passports.

These are the ancient Silk Roads the Taliban will never be able to reach.

Traveling the Pamir Highway, we’re not only facing a geological marvel and a magic trip into ancient history and customs. It’s also a privileged window on a trade revival that will be at the heart of the expansion of the New Silk Roads.

Khorog is the only town in the Pamirs – its cultural, economic and educational center, the site of the multi-campus University of Central Asia, financed by the Agha Khan foundation. Ismailis place tremendous importance on education.

Badakhshan was always world-famous for lapis lazuli and rubies. The Kuh-i-Lal ruby mine, south of Khorog, was legendary. Marco Polo wrote that in “Syghinan” (he was referring to the historical district of Shughnan) “the stones are dug on the king’s account, and no one else dares dig in that mountain on pain of forfeiture of life”.

Shughnan worshipped the sun, building circular structures with the corresponding solar symbolism. This is what we see in Saka graves in the Eastern Pamir. As we keep moving east, the settled Pamiri culture, with its profusion of orchards of apricots, apples and mulberries, gives way to semi-nomadic Kyrgyz life and irrigated villages are replaced by seasonal yurt camps (not at this time of the year though, because of the bitter cold.)

At Langar, the last village of the Wakhan, rock paintings depict mountain goats, caravans, horse riders with banners, and the Ismaili symbol of a palm with five fingers. Archeologist A. Zelenski, in fascination, called the historical monuments of the Wakhan “the Great Pamir Route.” Aurel Stein stressed this was the main connection between Europe and Asia, thus between the whole classical world and East Asia, with Central Asia in between. We are at the heart of the Heartland.

Last stop before Xinjiang

Following the Wakhan all the way would lead us to Tashkurgan, in Xinjiang. The Pakistani border, close to the Karakoram Highway, is only 15 km to 65 km away, across forbidding Afghan territory.

It’s the Koyzetek pass (4,271 meters) that finally leads to the Eastern Pamir plateau, which the Chinese called Tsunlin and Ptolomy called Iamus, shaped like a giant shallow dish with mountain ranges at the edges and lakes at record altitudes. Marco Polo wrote, “The land is called Pamier, and you ride across it for twelve days together, finding nothing but a desert without habitations or any green thing, so that travelers are obliged to carry with them whatever they need. The region is so lofty and cold that you don’t even see any birds flying. And I must notice also that because of this great cold, fire does not burn so brightly and give out so much heat as usual, not does it cook effectually.”

Murghab, peopled by Kyrgyz – whose summers are spent in very remote herding camps – revolves around a mini-bazaar in containers. If we follow the Aksu river – once considered the source of both the water and the name of the Oxus – we reach the ultimate, remote corner of Central Asia: Shaymak – only 80 km from the tri-border of Afghanistan, Pakistan and China.

The Little Pamirs are to the south. As I reported for Asia Times way back in 2001, it was in this area, crammed with the most important Silk Roads passes of both China and Pakistan, that Osama bin Laden might have been hiding, before he moved to Tora Bora.

From Murghab, I had to inspect the Kulma pass (4,362 meters high), a New Silk Road border. The road – made by China – is impeccable. I found lonely Chinese container truck drivers and businessmen from Kashgar driving made-in-China minivans across the Pamirs to be sold in Dushanbe.

On the High Pamirs we find around 800 ancient lakes created by earthquakes, tectonic activity and glaciers. Yashilkul lake (“Blue Water”), at 3,734 meters frozen this time of the year, sits in a plateau scouted by Stone Age hunters. Tajik archeologist V. Ranov found rock paintings of horses and carts, attributes of Mitra, the Persian god of the Sun. During the 10th to 3rd centuries B.C, the plateau was inhabited by nomadic tribes of the Persian-speaking Sakas.

From Shughnan to Ishkoshim, here we are in what the ancients called “The country of the Sakas.”

From Scythians to containers

The vast Scythian steppes that range from the Danube all the way to China were inhabited by a vast confederation of tribes. Then, in the 2nd to 1st centuries B.C., the tribes started moving to the east of the Greco-Bactrian state. Some of them settled in the Pamirs and became the ethno-genetic component of the Pamiri ethnicity. Alex, my driver, is a true Pamiri from Khorog. He’s also the real Pamir Highway Star with his badass black Land Cruiser. (“It’s a killing machine/ it’s got everything,” as Deep Purple immortalized it.)

The highlight of the Eastern Pamirs is the spectacular blue inland, saltwater Karakul Lake, formed 10 million years ago by a meteor. Under the sun, it’s a radiant turquoise; this time of the year, I saw it deep, deep blue, not really the “Black Lake” that its name implies. Karakul because of its slight salinity was not frozen. This is chong (big) Karakul, the older brother of the kichi (small) Karakul across the border in Xinjiang, which I had the pleasure of visiting in my Karakoram Highway travels.

The High Pamirs are right behind Karakul, concealing the 77-km-long Fedchenko glacier. East of the lake, if you could survive a trek in Arctic conditions, is Xinjiang. The early Tang dynasty wandering monk Xuanzang was here in 642 (he thought the lake was people by dragons). Marco Polo was here in 1274.

Our base to explore Yashilkul and later Karakul was Bulungkul – this time of the year a sort of Arctic station, with only 40 houses served by solar panels in the middle of nowhere, and temperatures hovering around minus 22 Celsius. It’s the toughest of lives. They told me that in winter the temperature drops to -63C.

Farther down the road, I took a diversion east to observe the Kulma pass, at 4,363 meters the official Tajik border with China, reached by a – what else? – made-by-China road, opened in 2004 following the ancient Silk Road.

The Tajik-Kyrgyz border at the Kyzyl-Art pass looked like a scene from Tarkovsky’s Stalker, utterly Soviet-style desolate except for a shared taxi loaded with Kyrgyz going to Khorog. From there, it’s a spectacular drive all the way to the crossroads of Sary Tash, and through the head-spinning, 3,615 meter-high Taldyk pass, towards Osh, the gateway to the Ferghana valley.

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The Taldyk pass in southern Kyrgyzstan, all the way to Osh. Photo: Pepe Escobar / Asia Times

All across this mesmerizing Central Asia/Heartland journey, especially in the bazaars, we see in detail the crossroads of pastoral nomadism and irrigation culture, fertilized century after century by cross-cultural Silk Road trade involving herders, farmers, merchants, all of them part of commodity trading and provisioning for the caravans.

We delve into the vortex of immensely rich social, religious, scientific, aesthetic and ideological influences – especially from Persia, India, China and Iran. The shift from overland to sea trade in the 16th century – the start of European world domination – in fact never erased the traditional routes to India via Afghanistan, China via Xinjiang and Europe via Iran. Trade remains the top factor in Central Asian life.

Today the Pamir Highway is a privileged microcosm of what is slowly but surely evolving as the intersection between the New Silk Roads and Greater Eurasia – with its main hubs configured by Russia, China, Iran, Pakistan and – it may be hoped – India.

The ultimate crossroads of civilizations, the Heartland, is back – once again at the heart of history.

(Republished from Asia Times by permission of author or representative)

Clint Eastwood's Richard Jewell is a masterpiece

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Clint Eastwood's Richard Jewell is a masterpiece

Ex: https://www.americanthinker.com
 

Richard Jewell, the film, is a perfect analogy for what the FBI and DOJ have done to President Trump, Michael Flynn, Carter Page, George Papadopoulos, and the American people.

Clint Eastwood's new film is the true story of how the FBI destroyed the lives of Richard Jewell and his mother after the 1996 bombing at Centennial Park in Atlanta during the summer Olympics.  Jewell was a security guard at the park who noticed an unattended backpack under a bench.  He alerted other police on the scene, who determined that it was indeed a bomb.  Jewell and the other police immediately began moving people away from the scene.  The bomb did explode; two people were killed and many were injured, but Jewell's actions saved many lives.

For a few days, he was a hero, but then the FBI began to focus on Jewell as the perpetrator because he "fit the profile."  He lived with his mother, wanted to be a policeman, and had lost several security jobs for various reasons, including once for impersonating a police officer.  That is all they had, all they needed — not a shred of real evidence beyond their conviction that he must be guilty because he fit the profile.

And based on the FBI's certainty that he was guilty and an inelegant leak to an Atlanta Journal-Constitution reporter, the media mob ran with the story in the cruelest of ways.  There is a scene in the film in which a room full of reporters at the AJC are laughing and applauding three days after the bombing because they were the paper to first print the news that the FBI was focusing on Jewell.  If this scene is an accurate representation, then journalists are even more cold-blooded than previously known.  It appears they can easily revel in a tragedy if they are first to report it.

It is a heart-wrenching film on every level.  It is also a perfect analogy for what our current federal law enforcement agencies have done to President Trump, Michael Flynn, Carter Page, George Papadopoulos, and numerous others if they were in any way useful for their desired ends.  The FBI agents in the film skirt the law over and over again in their zeal to indict Jewell.  They lie, trick, bug his home without a warrant, invade his apartment and nearly strip it bare.  They attempt to entrap him over and over again.

Watching the film, it is impossible not to think that this is exactly what the FBI under Obama did to Flynn, Page, et al.  The only difference is that the agents in the film torture Jewell because they mistakenly concluded that he must be guilty even though they had no evidence, no trace evidence; nothing connected Jewell to the crime.  The FBI agents who persecuted Flynn, Page, and Papadopoulos knew up front that none of them was guilty of anything.  They were just pawns in the plot to frame candidate Trump in order to ensure that Hillary won.  What they did was not only despicable, but blatantly unconstitutional.

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Once Robert Mueller was appointed special counsel, they doubled down on their evil plan.  The I.G. report has confirmed what millions of us have known for at least two years: that the Steele dossier was a ridiculous hoax from the outset, a collection of nonsense paid for by Hillary Clinton.

All those craven television journalists who swore that it had been confirmed and corroborated owe their viewers a thousand apologies.  It is quite likely that none of them asserting its truthfulness had bothered to read it.  If any of them had, one would assume that even they would have realized that it was just "bar talk," as the I.G. report relates what the sub-source called it.  Our media have learned nothing since the Olympic bombing fiasco — not one thing. 

The villains in the film, aside from the actual bomber, who was caught six years later, are the FBI and the media.  The parallels to what we have seen over the last three years from the senior leadership of the FBI under Comey, McCabe, and their willing flunkies and the Obama DOJ's Holder, Lynch, and Rosenstein have certainly not been lost on Clint Eastwood.  They are obvious and undeniable.  Our premier law enforcement and intelligence agencies, including Brennan's CIA, ceased to be about our First and Fourth Amendment rights long ago, let alone national security.  They became, at the top, imperious; they came to see themselves as above the law. 

Lately, all these not-witnesses the Democrats have paraded in front of their silly impeachment committees are feigning allegiance to the Constitution when we all know they hate the limitations it places on them.  If what the FBI did to Richard Jewell as depicted in the film is true, it would seem that the FBI gave up abiding by the constraints of the Constitution long ago.

As we now know from the Horowitz report, those involved in the Russia and Ukraine hoaxes were completely untethered to any legal constraints at all. They knew from the outset that the Steele dossier was phonied-up nonsense but they ran with it. That is how stupid they all assume we deplorables are. We are so dumb, in their minds, that there is no need to obey the law, to be honest or fair. They have long been confident that they will never be caught or punished for their lies and crimes. We know that many of the perpetrators of the Russia hoax still have their jobs. If they have not aged out, the agents that framed Richard Jewell are probably still on the job or getting their pensions.

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If there is a sentient person on the planet that does not know the mainstream media is not only corrupt but that it has nothing whatever to do with news reporting, he or she must live in a cave. The only real journalists are not on CNN, MSNBC, ABC, CBS (except for Catherine Herridge) or NBC. If there is even one at the NYT or WaPo, it would be good to know. The real journalists are well outside of the mainstream: John Solomon, Andrew McCarthy (no relation), Sara Carter, Eric Felten, Lee Smith, Gregg Jarrett, Dan Bongino, Jeff Carlson, and everyone at the Federalist. There are many more, all available online. These are the people who have done the heavy lifting and informed the public. What is astonishing is the fact that the mainstream network and print people ignore what all these actual journalists report. They assume that because they are not a member of their elite club, they are illegitimate. Chuck Todd, for example, is oblivious to the fact that Ukraine meddled in the 2016 election for Hillary!

These folks don't know half of what those of us who pay attention to all those people who are real investigative reporters know. Our oh-so-self-important media elites are willfully ignorant. Just like the FBI agents that railroaded Richard Jewell, the mainstream media has developed a narrative and they are sticking to it, no matter how seriously the actual facts undermine and discredit it.

Eastwood's film is a masterpiece. He has exposed the perfidy of the FBI and the media in 1996 and at the same time shown us that the culture of the higher-ups at the FBI had not changed one bit when they decided to stage a coup against a presidential candidate they did not like. Once Trump won, they doubled-down on their betrayal of the American people and the Constitution. Do not for one minute take seriously their sudden respect for our founding document. A truth Dennis Prager often proclaims, "The left is the enemy of America." The FBI under Comey, the DOJ under Obama and the mainstream print and digital media are the public face of that enemy. Do not miss this film. Paul Walter Hauser as Jewell deserves an Oscar for his very fine performance. 

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Avec Bruno Favrit

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Avec Bruno Favrit

par Christopher Gérard

Ex: http://archaion.hautetfort.com

Biographe de Nietzsche et grand lecteur de Giono, Ramuz et Tesson, Bruno Favrit est l’auteur d’une œuvre secrète, qu’il dissimule non sans une hautaine jubilation. Il livre aujourd’hui la suite de Midi à la source (voir ma notule du 26 mai 2013, sur le présent site), ses carnets intimes, et qui couvrent cette fois les années 2012 à 2018.

J’y retrouve bien des leitmotive d’une œuvre que je suis depuis plus de quinze ans : une vision spartiate du monde, le recours aux montagnes et aux forêts, vécues comme des organismes vivants et vues comme des refuges contre un monde de plus en plus massifié, l’appel des sommets tant physiques (l’escalade et la randonnée à fortes doses) que psychiques (l’introspection quotidienne et la fortification de l’âme), la fréquentation des écrivains singuliers et des philosophes libertaires, le mépris pour les tricheurs et les perroquets, le dégoût des villes (où Favrit déjeune et dîne pourtant en excellente compagnie), le refus passionné de toute médiocrité, fût-elle cachée au plus profond de soi.

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Comme je l’ai déjà écrit, il y a du Cathare chez Favrit, avec, d’une part, des exigences et des tourments qui sont ceux d’une âme noble, et de l’autre des vitupérations qui, si elles sont rarement infondées, montrent son peu de détachement pour une époque il est vrai peu séduisante.

Mais l’amour du vin d’un fier disciple de Dionysos, celui des fromages chez ce passionné, comme Gabriel Matzneff, de diététique. La volonté de réenchanter le monde, la méfiance pour les mirages.

Bref, le portrait d’un « humaniste misanthrope » comme il se définit lui-même, d’un hors-la-loi fasciné par le mythe du surhomme.

Christopher Gérard

Bruno Favrit, Dans les vapeurs du labyrinthe. Carnets 2012-2018, Ed. Auda Isarn, 320 pages, 23€

Chroniques du Cinquième Quartier

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Chroniques du Cinquième Quartier

par Georges FELTIN-TRACOL

Le nouvel ouvrage de Laurent Binet qui vient d’obtenir le Grand Prix du roman de l’Académie française, se démarque avec brio de l’ensemble des titres proposés en cette rentrée littéraire. Le Goncourt du premier roman 2010 pour HhhH et l’Interallié 2015 pour La septième fonction du langage commet avec Civilizations (on déplorera le recours à l’anglais) une plaisante uchronie : la conquête de l’Europe au XVIe siècle par les Incas, puis par les Aztèques.

Par quelles heureuses circonstances les peuples précolombiens arrivent-ils à subjuguer d’un continent où règnent alors Charles Quint, François Premier, Henry VIII d’Angleterre et Soliman le Magnifique ? On sait que les Incas et les Aztèques ignorent l’usage de la roue, ne connaissent ni le fer ni le cheval, et seront bientôt les victimes des « chocs viraux » (la grippe par exemple) apportés par les Européens. Laurent Binet introduit dans son histoire trois divergences uchroniques. La mineure se rapporte à Christophe Colomb. Il a bien « découvert » les Antilles, mais il n’a pas pu rejoindre l’Espagne. Prisonnier des Taïnos, il continue la rédaction de son journal de bord et enseigne le castillan à Higuénamota, la petite princesse de la tribu. Comme Christophe Colomb « n’était jamais rentré, […] personne, par la suite, ne s’était plus risqué à essayer de franchir la mer Océane ».

Les tournants uchroniques

Laurent Binet ne s’avance pas sur les conséquences géopolitiques de cet échec. En dehors de prouver la véracité que la Terre est ronde, les « Grandes Découvertes » de la Renaissance avaient pour objectif principal le rétablissement des échanges commerciaux fructueux avec la Chine, l’Inde et le Japon interrompus par le blocus de l’Empire ottoman. Si les Espagnols renoncent à traverser l’Atlantique, on peut supposer que les Portugais intensifient leur présence tout au long de la côte africaine. Ils renforcent la surveillance de la voie stratégique vers les Indes trouvée en 1498 par Vasco de Gama qui contourne les pressions mahométanes. L’autre répercussion omise par l’auteur de la non-découverte des Amériques est la poursuite au-delà de Gibraltar vers le Sud de la Reconquista. Les royaumes coordonnés de Castille et d’Aragon massent toutes leurs forces vers 1493 – 1494 et débarquent en Afrique du Nord avec l’espoir de ré-évangéliser la terre natale de Saint Augustin… La mobilisation considérable des moyens matériels et humains nullement détournés par l’exploration des « Indes Occidentales » permet l’occupation espagnole du littoral rifain et oranais.

Les deux majeurs sont plus complexes. Laurent Binet suppose que la guerre civile entre Atahualpa et Huascar est un désastre pour le premier. Dans notre histoire, Atahualpa remporte le conflit sur son demi-frère. L’auteur imagine au contraire que la fortune des armes l’abandonne. Soucieux d’échapper à une destruction complète, lui et les siens franchissent la Cordillère des Andes, traversent l’isthme de Panama et se réfugient aux Antilles où ils se lient avec des Indiens métissés de Vikings. Car le tournant uchronique déterminant remonte en fait à des événements historiques très antérieurs.

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Laurent Binet les désigne en tant que « Saga de Freydis Eriksdottir ». Fille du Viking Erik le Rouge, Freydis est une femme énergique au mauvais caractère qui voyage à l’Ouest du Groenland et visite le Vinland, les côtes de l’actuel Canada. Elle n’hésite pas avec son équipage à combattre les Skraelings, les autochtones de ces lieux. Elle continue son périple toujours plus au Sud. Son navire atteint Cuba. Les Vikings apportent des vaches, des chevaux, le maniement du fer et… des maladies contagieuses.

En dépit des épidémies, des relations se nouent entre Vikings et Skraelings. « Les deux groupes se mélangèrent si bien que d’autres enfants naquirent. Certains avaient les cheveux noirs, d’autres les cheveux blonds ou rouges. Ils entendaient les deux langues de leurs parents. » Malgré l’insularité, les innovations vikings parviennent jusqu’à la terre ferme continentale. Les Skraelings polythéistes intègrent dans leur panthéon le redoutable dieu du tonnerre Thor.

Résurgence d’une histoire hérétique

L’apport décisif des Vikings aux « Amérindiens » que décrit Laurent Binet rappelle furieusement la fameuse thèse iconoclaste de Jacques de Mahieu (1915 – 1990) exposé dans Le grand voyage du dieu-soleil (1971), L’Agonie du Dieu Soleil. Les Vikings en Amérique du Sud (1974), Drakkars sur l’Amazone (1977) et Les Templiers en Amérique (1980). Pour cet historien hérétique français exilé en Argentine après 1945 dont les travaux érudits demeurent bien trop méconnus ou, plus exactement, ont été écartés par les coteries universitaires déliquescentes, les civilisations précolombiennes les plus avancées (aztèque et inca) seraient d’origine nordique. Vers l’An mil, les « drakkars » les plus téméraires auraient caboté jusqu’au delta géant de l’Amazone. Leurs marins auraient ensuite remonté les sources du fleuve géant et y auraient rencontré des tribus qui, quelques générations plus tard, auraient donné les souverains incas. Des Vikings revenus d’au-delà de l’Océan en auraient parlé à des marins byzantins, turcs et portugais ainsi qu’aux Templiers. Ces derniers auraient dès lors franchi à leur tour l’Atlantique, rencontré les ancêtres des Incas et ainsi contribué à l’émergence de la puissance aztèque en Amérique centrale. Laurent Binet a-t-il eu l’occasion de lire l’œuvre magistrale de Jacques de Mahieu ? Difficile de répondre à cette interrogation.

L’Inca Atahualpa et les siens s’emparent donc par inadvertance d’un empire en Europe qui prend le nom de « Cinquième Quartier ». Charles Quint décède au cours d’une tentative d’évasion. Son fils et héritier, le jeune Philippe II, meurt quant à lui noyé sur ordre implicite de l’Inca. Bien que baptisé, Atahualpa conserve le culte du Soleil ou « indisme ». Ce nouveau culte qui permet la polygamie chez les souverains incite Henry VIII d’Angleterre à rompre avec le catholicisme, à avoir deux épouses simultanées (Catherine d’Aragon et Anne Boleyn) et à fonder la variante anglaise de la religion du Soleil !

L’étonnante réussite politique d’Atahualpa en Europe s’explique aussi par le ralliement autour de lui des marginalités politiques et religieuses. En Espagne, ce lecteur attentif de Machiavel interdit l’Inquisition, promulgue à Séville un édit de tolérance religieuse et s’assure de la fidélité des Morisques musulmans et des marranes (juifs convertis au christianisme). Dans le Saint Empire romain germanique divisé entre catholiques et protestants luthériens, l’introduction officielle du culte solaire et l’application d’une réforme agraire déjà en vigueur en Espagne et aux Pays-Bas attirent vers lui les anciens rebelles paysans de Thomas Müntzer et des anabaptistes vaincus.

Atahualpa envoie un message à son frère ennemi Huascar. Il le reconnaît comme le seul monarque de l’« Empire des Quatre Quartiers » ou Tahuantinsuyu. En contrepartie, il lui annonce avoir fondé un nouvel empire et lui demande de lui livrer d’énormes quantités d’or et d’argent. Son règne européen est néanmoins marqué par l’invasion de la France par les Aztèques alliés aux Anglais. Les Anglo-Aztèques tuent François Premier, sacrifient les Fils de France et pillent les villes françaises. Atahualpa est contraint de partager le « Levant (l’Europe) » avec cet ennemi redoutable.

Un XVIe siècle bouleversé

La dernière partie du livre se déroule une génération plus tard. Elle relate les péripéties malencontreuses de Miguel de Cervantès. Dans une vie pleine de désagréments, il est un temps hébergé par Michel de Montaigne. L’irruption des peuples précolombiens bouleverse la physionomie de l’Europe. Le roi de France est « Chimalpopoca, fils de Cuhautémoc et de Marguerite de France. […] Le roi de Navarre Tupac Henri Amaru, fils de Jeanne d’Albret et de Manco Inca, le duc de Romagne Enrico Yupanqui et ses huit frères et sœurs, fils et filles de Catherine de Médicis et du général Quizquiz, sont aussi français ou italiens qu’ils sont incas ou mexicains ». Quant au futur empereur – roi, l’infant Philippe Viracocha, il est le « fils de Charles Capac et de Marguerite Duchicela ».

Cervantès participe à la bataille navale de Lépante, quelque temps après que le pape s’est placé à Athènes sous la protection de la Sublime Porte. « D’un côté, l’armada turque du kapitan pacha, la flotte vénitienne du vieux Sebastiano Venier, les forces austro-croates, auxquelles s’étaient adjoints les contingents d’Espagnols et de Romains en exil, emmenés respectivement par le fougueux marquis de Santa Cruz Alvaro de Bazan et Marc-Antoine Colonna. De l’autre, l’armada hispano-inca dirigée par Inca Juan Maldonalo, appuyée par la flotte portugaise, par les galères génoises de l’ingénieux Jean-André Doria, neveu du grand amiral, par celles toscanes de Philippe Strozzi, et surtout par les redoutables corsaires barbaresques du terrible Uchali Fartax, le Renégat teigneux. En tout, près de conq cents bâtiments, dont six galéasses vénitiennes, forteresses flottantes à la puissance de feu sans égal. »

Auteur très politiquement correct, Laurent Binet écrit son utopie, une véritable apologie du métissage et du multiculturalisme. Cependant, la conception sacrale du pouvoir selon Atahualpa correspond à la pratique traditionnelle. Le souverain inca de l’Europe accepte les anciennes religions monothéistes mais, à l’instar du culte civique de l’empereur romain dans l’Antiquité, il fait du rite solaire le ciment politique d’une société politique ethniquement et spirituellement bigarrée. Une leçon pertinente à méditer en ces temps de discours déplacés en faveur d’une laïcité plus que jamais faisandée.

Georges Feltin-Tracol

• Laurent Binet, Civilizations, Grasset, 2019, 381 p., 22 €.