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jeudi, 28 avril 2022

Le général de brigade à la retraite Erich Vad: il règle maintenant ses comptes avec les écolos fauteurs de guerre

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Le général de brigade à la retraite Erich Vad: il règle maintenant ses comptes avec les écolos fauteurs de guerre

Par Sven Reuth

Source: https://www.compact-online.de/brigadegeneral-a-d-erich-vad-jetzt-rechnet-er-mit-gruenen-kriegstreibern-ab/?mc_cid=3b95b79c94&mc_eid=128c71e308

Une escalade de la guerre en Ukraine comporte d'énormes risques pour l'Allemagne. C'est ce que le général de brigade à la retraite Erich Vad n'a cessé de rappeler ces dernières semaines. Il s'est exprimé clairement sur le bellicisme des Verts.

Erich Vad est un homme qui possède la plus grande expérience et a occupé les plus hauts postes de direction. De 2006 à 2013, il a été chef de groupe à la Chancellerie fédérale, secrétaire du Conseil fédéral de sécurité et conseiller en politique militaire de la chancelière Angela Merkel. Cette ascension a été possible malgré le fait que Vad ait donné en 2003 une conférence à l'Institut für Staatspolitik sur le thème "Le maintien de la paix et la géopolitique dans la pensée de Carl Schmitt". En 1996, Vad avait déjà publié le livre Stratégie et politique de sécurité. Perspectives dans l'œuvre de Carl Schmitt.

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"Nous n'avons pas besoin d'une guerre par procuration"

Il y a deux semaines à peine, Vad avait déjà provoqué un scandale selon l'ambassadeur ukrainien Melnyk parce que, dans une interview accordée à Die Welt, il ne voulait pas attribuer à Poutine une intention de bombarder une clinique et faisait en outre référence au nombre élevé de victimes que les guerres menées par l'Occident avaient fait au cours des dernières décennies. Son message principal à l'époque était le suivant:

    "Si nous ne voulons pas de la troisième guerre mondiale, nous devrons tôt ou tard sortir de cette logique d'escalade militaire et entamer des négociations".

Hier, dans le talk-show Maybritt Illner, Erich Vad a de nouveau suscité l'irritation en critiquant à la fois la ligne belliciste des Verts et l'attitude complètement naïve de la majorité de la société allemande face à une éventuelle escalade de la guerre en Ukraine. Son message de base était que l'établissement d'un cessez-le-feu rapide devrait être prioritaire par rapport à la question de savoir quel camp remporterait la victoire à la fin.

Vad a déclaré à ce sujet:

    "Nous n'avons pas besoin en Europe centrale d'une guerre par procuration pendant des années, qui a le potentiel de dégénérer en guerre nucléaire".

"Nous ne voulons pas d'une victoire de l'Ukraine"

Toute "rhétorique guerrière" devrait être évitée. Afin de montrer clairement que la négociation rapide d'un cessez-le-feu et la recherche d'une solution politique à long terme au conflit sont prioritaires, aussi le gouvernement allemand devrait enfin déclarer :

    "Nous ne voulons pas la victoire de l'Ukraine".

Il s'est montré particulièrement critique à l'égard du rôle actuel des Verts dans la politique fédérale. Il a déclaré à ce sujet :

    "Ce qui me dérange, c'est quand les politiciens des Verts présentent les solutions militaires comme l'objectif ultime. C'est complètement fou ! Ce sont des politiciens Verts qui ont refusé et condamné le service militaire à l'époque !"

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Vad avait déjà déclaré dans son interview à Die Welt qu'il estimait totalement erroné de dénier au président russe son humanité et de le qualifier de despote pathologique avec lequel personne ne peut plus parler. Après tout, il y a eu dans un passé récent d'autres guerres terribles et contraires au droit international, en Irak, en Syrie, en Libye et en Afghanistan, menées par des puissances occidentales.

Voici revenu le temps du nazisme

La bulle de gauche libérale et woke de Twitter est déjà en ébullition suite aux déclarations de Vad. On y fait notamment référence à un texte de Vad paru il y a 19 ans dans le magazine intellectuel de droite Sezession pour justifier l'interdiction imposée à cet expert patenté de participer à un talk-show. Si la campagne devait aboutir, l'un des rares critiques de la guerre encore en vie disparaîtrait de la scène publique.

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mardi, 26 avril 2022

Les risques pour la Finlande (et au-delà) d'abjurer la neutralité

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Les risques pour la Finlande (et au-delà) d'abjurer la neutralité

Les Finlandais, avec leurs grosses vieilles chaussures de paysans bien ancrées dans le sol, étaient autrefois politiquement concrets. Mais maintenant, ils continuent de répéter le mantra "la situation sécuritaire a changé". Ce qui n'est pas vrai du tout, car dans le quadrant nord de la Baltique, les Russes n'ont fait aucun mouvement dans cette délicate partie d'échecs avec l'OTAN ; au contraire, ils ont éloigné des troupes de la frontière finlandaise, probablement pour les envoyer en Ukraine.

par Luigi De Anna

Source: https://www.barbadillo.it/104133-i-rischi-per-la-finlandia-e-non-solo-che-abiura-la-neutralita/

HANNIBAL AD PORTAS... OU... DELENDA CARTHAGO ?

Observer une guerre de loin est déjà dramatique, mais l'avoir vraisemblablement à sa porte conduit au découragement. Découragement, pour l'essentiel, de la capacité des politiciens à concevoir une stratégie qui préserve les intérêts de l'Europe, et non ceux de son puissant allié, les États-Unis.

J'ai vécu en Finlande pendant plus de 50 ans. Lorsque je suis arrivé là-bas, la règle stricte de la "finlandisation" était en vigueur, c'est-à-dire que la Finlande restait un pays libre avec un système parlementaire de style occidental, mais n'interférait pas avec les intérêts de l'Union soviétique et, en tant que nation neutre, faisait office d'État tampon entre l'Est et l'Ouest. Il s'agissait de la ligne dite Paasikivi-Kekkonen, poursuivie ensuite de manière substantielle par Mauno Koivisto. Avec la chute de l'Union soviétique, la Finlande a commencé à regarder vers l'ouest, oubliant ce que le président Koivisto avait dit sur le danger de ce renversement de la politique étrangère, car "celui qui s'incline d'un côté montre son derriere à l'autre".

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Urho Kekkonen et Mauno Koivisto.

Le parti conservateur Kokoomus est au gouvernement depuis des années, et devrait revenir lors des prochaines élections. Le centre et la droite finlandais ont été anti-russes en raison de leur vocation naturelle à s'occidentaliser, mais aussi en raison de l'attrait génétique fort, presque inéluctable, qui pousse les peuples riverains de la Baltique à l'anti-russisme. Alors que l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie faisaient partie de l'Union soviétique, la Finlande, comme mentionné, avait conservé son indépendance.

Nous pourrions nous demander pourquoi. En 1944, Staline aurait pu pousser ses armées jusqu'à Helsinki et ne l'a pas fait. La version finlandaise pour expliquer cette décision est liée au mythe de l'héroïsme de ses soldats, né avec la soi-disant "guerre d'hiver", de novembre 1939 à mars 1940. Sans doute héroïque, mais pas suffisamment pour arrêter l'Armée rouge qui, après être arrivée à Berlin, aurait bien pu arriver à Helsinki. Staline n'a pas non plus réalisé en Finlande l'assimilation des pays que Yalta lui avait accordée, alors qu'il existait en Finlande un parti communiste fort qui aurait été bien adapté à cette tâche. Staline juge plus utile d'avoir une Finlande neutre, et surtout il ne veut pas risquer de pousser la Suède dans le camp occidental, ce qui aurait fermé la Baltique à sa flotte. La Finlande a payé les réparations de guerre, a jugé dans son propre petit Nuremberg (mais sans bourreaux américains ou soviétiques) les responsables de l'alliance avec l'Allemagne (mais pas le maréchal Mannerheim, probablement le principal architecte de l'accord avec Staline) et, année après année, a prospéré grâce au commerce avec sa voisine orientale.

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Carl-Gustav Emil Mannerheim.

Nous en arrivons à la crise ukrainienne: la Finlande s'aligne immédiatement sur le récit atlantiste. Les nouvelles sont pleines d'images larmoyantes, les (rares) talk-shows (les Finlandais sont notoirement peu loquaces) n'invitent que ceux qui accusent la Russie d'agression, de massacres, etc. etc., mais jamais quelqu'un qui, je ne dirai pas défend la Russie, mais qui explique ses raisons. Les plus modérés dans cette course à l'anti-russisme semblent être les militaires, invités en tant qu'experts, bien conscients de là où cela pourrait mener.

Sic fuit in votis. Hier, 13 avril, le gouvernement finlandais a présenté son Livre blanc sur la sécurité, ou plutôt sur les perspectives de cette crise internationale, qui recommande l'adhésion de la Finlande à l'OTAN.

Mais qui menace la Finlande ?

Personne. Et, chose intéressante, personne n'a posé cette question très simple. On ne fait que plaider... "si la Russie... si la situation... si un jour...". En finnois, il existe un verbe, "jossitella", qui indique précisément la futilité des hypothèses. Les Finlandais, avec leurs grosses vieilles chaussures de paysans bien ancrées dans le sol, étaient généralement politiquement concrets. Mais maintenant, ils continuent de répéter le mantra "la situation sécuritaire a changé". Ce qui n'est pas vrai du tout, car dans le quadrant nord de la Baltique, les Russes n'ont pas fait un geste dans cette délicate partie d'échecs avec l'OTAN; au contraire, ils ont déplacé des troupes de la frontière finlandaise, probablement pour les envoyer en Ukraine.

Oui... la frontière. Une frontière de près de 1300 km, qui passe non loin de Saint-Pétersbourg, la patrie de Vladimir Poutine, qui pourrait un jour voir de sa fenêtre, au-delà des dômes en bulbe de ses belles églises, les missiles nucléaires de l'OTAN. L'alliance atlantique s'étendrait pratiquement jusqu'à Mourmansk, la base navale la plus importante de la Russie, qui abrite sa flotte de sous-marins nucléaires. Et Mourmansk est la clé stratégique de la nouvelle route arctique qui s'ouvre, qui unira le commerce asiatique à l'Occident.

Comment Poutine pourrait-il laisser ces deux zones sensibles, le golfe de Finlande et la péninsule de Kola, être assiégées par l'OTAN ?

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L'absurdité est que la Finlande demande à rejoindre l'OTAN (sans doute le Parlement le proposera-t-il) pour éviter une éventuelle intervention russe et, ce faisant... ils la provoquent ! Vraiment brillant !

Les Finlandais, comme de bons vieux paysans, se croient malins: ils veulent rejoindre l'OTAN maintenant parce que la Russie n'a pas assez de soldats pour l'envahir... oui, c'est vrai, les soldats sont ailleurs, mais la Russie, ne pouvant utiliser de chars utiliserait... les sages dirigeants finlandais n'y pensent-ils pas? Les armes nucléaires tactiques de la Russie devraient les faire méditer. Les temps désespérés appellent des mesures désespérées, c'est peut-être aussi un dicton slave.

À la folie incontestable des dirigeants actuels de la Finlande, il faut cependant ajouter une autre motivation: faire plaisir aux États-Unis. La Finlande coopère militairement avec l'OTAN depuis longtemps, organisant des exercices militaires conjoints avec elle, tout récemment il y a quelques semaines en Norvège, manifestement en préparation de l'activation de l'offensive arctique. L'année dernière, la Finlande a acheté les F-35 dont elle avait besoin pour remplacer les vieux Hornets, mais ce sont des avions offensifs, alors pourquoi? Au lieu de se doter de systèmes de missiles défensifs, à la suggestion des Américains, ils ont opté pour des jets qui transportent une telle charge de missiles et de bombes ainsi que des équipements électroniques que... de temps en temps, ils tombent, comme nos Starfighters, appelés tombes volantes.

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Le Premier ministre finlandais, Sanna Marin (photo), a clairement indiqué avant-hier que des consultations avec les États-Unis sur cette possibilité de rejoindre l'OTAN sont en cours. Et voici la véritable raison pour laquelle le gouvernement de centre-gauche de Marin fait pression en faveur de l'OTAN: les États-Unis ont besoin d'un nouveau front sur lequel engager la Russie, en la détournant et en l'affaiblissant ainsi sur le front ukrainien. Sans aucun doute une stratégie intelligente et utile. Pour eux. Mais pas pour la Finlande, qui entre désormais allègrement dans la tanière de l'ours pour le réveiller. Une chose que les anciens chasseurs finlandais savaient être très risquée.

Mais il n'y a plus de vieux chasseurs en Finlande. Le pays est gouverné par une troïka de cinq secrétaires de parti, tous âgés d'une trentaine d'années. La nouvelle histoire nous a appris qu'il existe des composantes apparemment irrationnelles mais quantifiables dans l'histoire. Et sans doute le récit médiatique des enfants ukrainiens comme victimes de la guerre agit-il sur l'inconscient de ces jeunes mères. Mais les mères devraient aussi penser à leurs enfants plus âgés: ceux que la Finlande enverra inévitablement à la mort dans une guerre absurde et futile à venir.

Delenda Carthago... oui, mais quel Carthago ?

Luigi De Anna

Bombes de vérité : comment les Etats-Unis ont mis la main sur l'Ukraine

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Bombes de vérité : comment les Etats-Unis ont mis la main sur l'Ukraine

par Fabio Mini

Source : Il Fatto quotidiano & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/bombe-di-verita-cosi-gli-usa-hanno-messo-le-mani-sull-ucraina

Il y a quelques semaines, lors d'une apparition à la télévision américaine, la célèbre journaliste Lara Logan a lâché tant de "bombes de vérité" sur un public médusé que les présentateurs du programme ont dû supplier (sur des téléphones internes) pour une pause commerciale. Les "bombes" étaient en fait des choses que les soi-disant complotistes disaient au monde entier depuis longtemps, sauf aux Américains bien sûr.

Outre la rhétorique poutiniste, qui reflète la rhétorique anti-poutiniste, ce qui est étonnant, c'est la réaction du public: une avalanche de compliments pour les vérités non dites, quelques objections, de nombreuses expressions d'admiration pour le courage et tout autant de prières de la part de ceux qui craignent pour la vie de Lara.

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Lara Logan.

Même au pays de la liberté d'expression, si vous dites quelque chose qui dérange les pouvoirs en place, vous êtes mort. La tirade de Lara Logan est plus que cela: c'est un appel clair à la responsabilité du leadership américain dans ce qui se passe en Ukraine. Là-bas, la rhétorique des bons gars et des méchants voyous a explosé, tout comme au Vietnam, en Irak et en Afghanistan, mais pour les Américains qui se sont habitués à l'idée d'être les bons gars, c'est toujours une "découverte" saine mais traumatisante.

Rechercher des traces d'une implication directe des États-Unis dans cette guerre, présentée comme une question subalterne qui ne concerne que la Russie et l'Ukraine et tout au plus l'UE ou l'OTAN et la Russie, est moins difficile qu'il n'y paraît.

Les États-Unis sont présents en Ukraine depuis 1991 et n'en sont jamais repartis. Lorsque l'URSS s'est désintégrée, l'Ukraine s'est retrouvée avec le troisième arsenal nucléaire le plus puissant du monde, après les États-Unis et la Russie. Pas moins de 176 missiles intercontinentaux avec 1240 têtes nucléaires.

Plusieurs dizaines de bombardiers nucléaires stratégiques avec 600 missiles et bombes à gravité et 3000 dispositifs nucléaires tactiques. Les États-Unis et la Russie se sont mis d'accord sur une réduction de l'armement nucléaire et, avec l'idée que l'Ukraine serait toujours dans la sphère d'influence de la Russie, ont décidé d'éliminer tout l'armement nucléaire existant en Ukraine.

À partir de 1992, l'Ukraine a exploité la sensibilité de l'Occident à la question nucléaire et, jusqu'en 1994, elle a continué à gagner du temps et à marchander son adhésion au traité de non-prolifération et la ratification de START. Le démantèlement de chaque silo à missiles coûtait 1 million de dollars (à l'époque) et les États-Unis ont fourni 399,2 millions de dollars pour payer Bechtel Corp. afin de sous-traiter les travaux.

La dénucléarisation a été achevée, du moins sur le papier, en 1996, mais ce n'est qu'en 2000 que les bombardiers stratégiques ont été remis à la Russie en échange d'un allègement des dettes de gaz qui s'étaient accumulées. L'Ukraine a hérité d'environ 30 % de l'industrie militaire soviétique, qui représentait 50 à 60 % de toutes les entreprises ukrainiennes et employait 40 % de sa population active. L'armée ukrainienne a échangé des armes conventionnelles et signé des contrats avec des entreprises commerciales. Les premiers contrats de livraison d'armes à l'Iran, signés à la mi-1992, ont provoqué une réaction négative en Occident (surtout aux États-Unis). Depuis lors, l'Ukraine n'a cessé de produire des armes et de les vendre sur le marché noir à divers pays, toujours sous l'œil attentif des États-Unis, de la Russie et de leurs trafiquants et oligarques.

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Depuis la révolution orange de 2004, les États-Unis sont intervenus en Ukraine pour déstabiliser les relations avec la Russie. Les différentes tentatives se sont concrétisées dix ans plus tard avec les incidents de Maidan. L'ingérence est flagrante et il s'agit, en l'occurrence, de l'appel téléphonique de Victoria Nuland - "Fuck the EU !" - pour révéler qu'elle ne se contente pas de surveiller les événements, mais qu'elle assure une direction politique et opérationnelle. De 2014 à 2022, grâce aux sanctions et à l'aide militaire des États-Unis et de l'OTAN, l'armée a été restructurée, des milices paramilitaires ont été équipées et entraînées, et des laboratoires de recherche biologique ont été installés par des entreprises américaines. Dans une tentative grotesque de faire passer la question des laboratoires pour des fake news, l'équipe Vox Check écrit: "Des laboratoires biologiques américains secrets en Ukraine? Un mythe de la propagande russe. Rien ne prouve qu'il y en ait... Cependant, il existe une coopération entre les institutions ukrainiennes et américaines. Depuis 2005, les États-Unis ont aidé à moderniser les laboratoires ukrainiens, à mener des recherches et à améliorer la sécurité pour prévenir les épidémies de maladies infectieuses dangereuses par le biais du programme de réduction des menaces biologiques. Pendant toute la période de coopération, les États-Unis ont investi environ 200 millions de dollars dans le développement de 46 laboratoires et institutions médicales en Ukraine. Ces institutions ne sont pas impliquées dans le développement d'armes chimiques ou biologiques".

Et en effet, comme la mutuelle ukrainienne ne s'occupe pas de vaccins mais d'agents pathogènes à haut risque, l'Organisation mondiale de la santé a conseillé à l'Ukraine, le 11 mars dernier (source : Reuters), de détruire ces agents hébergés dans les laboratoires de santé publique du pays afin d'éviter "toute fuite potentielle" qui propagerait des maladies au sein de la population.

Mais la question est que "au contraire, les États-Unis ont lancé un programme visant à empêcher le développement de telles armes. L'Union soviétique avait son propre programme d'armes biologiques. Après l'effondrement, des matières biologiques dangereuses sont restées sur le territoire de l'Ukraine. Le programme américain vise à garantir que ces matériaux ne soient pas volés ou utilisés à des fins autres que la recherche. Jusqu'en 2014, le programme s'étendait également aux laboratoires russes".

Cependant, ces matériaux laissés par l'URSS soulèvent la question d'autres matériaux soviétiques en Ukraine. L'URSS disposait d'un stock de près de 40.000 tonnes d'agents chimiques neurotoxiques, vésicants et suffocants. Selon certains rapports, le stock total a dépassé 50.000 tonnes, avec un stock supplémentaire de 32.300 tonnes d'agents phosphorés. Quelle proportion de ce stock est restée en Ukraine?

Officiellement aucune, mais si les armes biologiques sont laissées, pourquoi ne pas laisser aussi les armes chimiques que la Russie et les États-Unis possèdent encore?

Les traces des États-Unis en Ukraine sont également présentes ici, ne serait-ce que parce qu'elles savent exactement où elles ont abouti. Si l'on devait mesurer l'implication américaine par le nombre de soldats américains sur le terrain, on peut se limiter à compter les soi-disant volontaires parmi les combattants et les contractants étrangers. Le président Zelensky a parlé d'environ 20.000 volontaires du monde entier (y compris des États-Unis).

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La "légion internationale" a été intégrée aux forces de défense de l'Ukraine, afin de ne pas tomber dans un vide juridique sur le statut des mercenaires. En fait, nombre d'entre eux sont payés avec des fonds donnés par les États-Unis et l'Europe, ainsi que par des "particuliers". Le commandant de la Légion géorgienne, M. Mamulashvili, procède depuis avril 2014 au recrutement et à la formation de bataillons composés de professionnels, principalement américains et britanniques. Eante a personnellement dirigé ses bataillons contre les Russes à l'aéroport d'Hostomel, dans la région de Kiev. Si l'on veut ensuite examiner le rôle des États-Unis dans la question ukrainienne à quelques pas de la frontière, on peut en déduire que la "défense" de l'OTAN est peu défensive et très provocatrice. Le Pentagone a repositionné ses troupes avant l'invasion russe. Les 160 hommes de la Garde nationale de Floride (instructeurs) ont été retirés d'Ukraine. Sur les quelque 40.000 soldats américains présents en Allemagne, plusieurs milliers ont été déployés dans les pays voisins de l'OTAN. L'OTAN a déployé 5000 soldats depuis 2014 dans les États baltes et les États-Unis ont envoyé 5000 autres soldats en Allemagne.

La présence américaine dans la cyberguerre est également ancienne. La dernière attaque russe contre le réseau ukrainien de contrôle de l'électricité (8 avril) a été miraculeusement évitée grâce à Microsoft et à la société slovaque Eset. Le collectif Anonymous a attaqué à plusieurs reprises la Russie et s'est entièrement rangé du côté de l'Ukraine. L'origine des membres éphémères du collectif est des plus variées et offre diverses possibilités aux agents de la cyberguerre de se déguiser derrière cette marque. La même opportunité est offerte aux sites anti-russes comme RURansom Wiper et à des dizaines d'autres plateformes formelles et informelles. Les grandes entreprises américaines sont toutes présentes en Ukraine et boycottent et censurent toute communication "indésirable". Il s'agit d'activités collatérales mais importantes.

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Cependant, l'implication la plus importante se situe avec et derrière l'envoi de fonds et d'armes. Le président Biden a porté la contribution américaine à 1 milliard de dollars en une semaine et à 2 milliards de dollars depuis son entrée en fonction. Les nouvelles armes envoyées comprennent des missiles Stinger (800), des missiles Javelin (2000) et des systèmes antichars (6000). Le transfert de véhicules blindés, de technologies et de drones d'autres pays vers l'Ukraine a été autorisé. Beaucoup de ces systèmes ont également besoin de leurs opérateurs et ceux-ci sont normalement fournis par des sociétés militaires privées, qui continuent à recruter du personnel spécialisé.

Avec tout cela, seul un pays délibérément laissé dans l'ignorance peut encore penser qu'il n'est pas impliqué et peut avoir une Pâques paisible.

Après la conquête de la mer d'Azov

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Après la conquête de la mer d'Azov

par Federico Dezzani

Source: https://www.ariannaeditrice.it/articoli/dopo-la-conquista-del-mare-di-azov & Federico Dezzani

Au 57e jour de la guerre russo-ukrainienne, le ministère russe de la Défense a annoncé la conquête de la ville de Marioupol. Il est temps d'analyser comment la campagne militaire a évolué au cours des deux derniers mois, comment elle pourrait évoluer dans un avenir proche et, surtout, quelles seront ses répercussions internationales: il est de plus en plus évident que les puissances anglo-saxonnes veulent utiliser le conflit pour affaiblir la Russie et, en même temps, déstabiliser l'Allemagne et l'Italie.

Une guerre par procuration tous azimuts

Un peu moins de deux mois après le début des hostilités russo-ukrainiennes, le ministère russe de la Défense a annoncé la conquête de la ville de Marioupol, qui compte environ 400.000 âmeset est située sur le littoral de la mer d'Azov: seul le grand complexe sidérurgique, qui fait partie du kombinat de l'acier construit dans le Donbass dans les années 1930, reste encore aux mains des troupes ukrainiennes désormais clairsemées, mais sa chute est une question de temps. La Russie a donc obtenu un premier résultat stratégique tangible: elle a recréé un pont terrestre avec la péninsule de Crimée (annexée en 2014) et transformé la mer d'Azov en un lac intérieur. Les frontières russes sont donc revenues, sur le front sud, à la conformation de la première moitié du XVIIIe siècle, lorsque l'empire tsariste a réussi à arracher la mer d'Azov aux Turcs et à entrer dans les mers chaudes.

Il est particulièrement utile de reconstituer comment la Russie est parvenue à ce résultat en l'espace de deux mois. Dans notre analyse effectuée au "jour -1", nous avions supposé une campagne militaire de grande envergure, d'une durée de 30 à 40 jours, qui conduirait les Russes jusqu'au Dniepr et à partir Odessa jusqu'au Dniestr. Les faits montrent toutefois que cette option, une campagne militaire de grande envergure sur le territoire ukrainien, n'a jamais été envisagée par les stratèges russes qui pensaient à tort pouvoir se limiter à une "opération militaire spéciale" aux fins éminemment politiques, à savoir le renversement du gouvernement Zelensky et l'avènement d'une junte militaire qui rétablirait la coopération traditionnelle entre la Russie et l'Ukraine. Appeler les opérations qui ont duré du 25 février au 31 mars la "bataille de Kiev" est erroné: on peut tout au plus parler d'une "intimidation de Kiev", car les Russes n'ont jamais envisagé de conquérir la ville dans cette phase de la guerre. La "première phase" de la campagne militaire peut être résumée par l'appel lancé par Poutine aux militaires ukrainiens le 26 février 2022 pour qu'ils prennent le pouvoir et se débarrassent de la "bande de drogués et de néonazis", facilitant ainsi le début des négociations.karte-meerenge-von-kertsch.jpg

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Ces calculs se sont révélés erronés, car Moscou a sous-estimé le degré de pénétration des puissances anglo-saxonnes dans l'appareil ukrainien: en huit ans (le temps écoulé entre la révolution colorée de 2014 et aujourd'hui), Londres et Washington ont eu les moyens de s'insinuer jusque dans le coin le plus caché de l'État et de l'armée ukrainiens, éliminant les éléments qui auraient pu accepter l'appel de Poutine et renverser Zelensky. À ce moment-là, les Russes se sont retrouvés dans une position militaire aussi inconfortable qu'improductive: une tête de pont autour de Kiev, alimentée avec de grandes difficultés logistiques par la Biélorussie et exposée à la guérilla des nationalistes ukrainiens. Tant qu'il y avait la possibilité d'un règlement politique du conflit (les négociations tenues en Biélorussie puis en Turquie), les Russes sont restés aux portes de Kiev. Une fois ce scénario écarté, ils se sont retirés en bon ordre du nord de l'Ukraine pour poursuivre des objectifs militaires plus concrets dans le sud-est de l'Ukraine: c'est la "phase deux", annoncée dans les derniers jours de mars. La nomination du général Aleksandr Dvornikov, déjà en charge des opérations militaires en Syrie, comme commandant unique du front ukrainien, annoncée le 9 avril, peut être considérée comme le tournant de la campagne, qui prend de moins en moins de connotations politiques et de plus en plus de connotations militaires. Il convient toutefois de noter que deux mois après l'ouverture du conflit, la Russie ne s'était pas encore lancée dans la destruction systématique des infrastructures ukrainiennes, qui, si une approche purement militaire avait été suivie, aurait dû avoir lieu dès les premières heures de la campagne.

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La conquête de Mariupol (avec ses aciéries, photo ci-dessus) annoncée le 21 avril, avec le déploiement consécutif des troupes engagées dans la ville, devrait être le prodrome de la déjà célèbre "bataille du Donbass", dont les Russes ont jeté les bases en conquérant, le 24 mars, le saillant d'Izyum: sur le papier, elle se préfigure ainsi comme une grande tenaille qui, partant du nord et du sud, devrait se refermer sur la ville de Kramatosk. Les avantages que pourraient obtenir les Russes seraient multiples: la destruction de l'armée ukrainienne concentrée depuis le début des hostilités dans le Donbass (estimée à environ 40.000-60.000 unités) et l'affinement des futures frontières, de manière à rendre compacte la région à annexer à la Russie. Quoi qu'il en soit, même en cas de défaite sévère de l'armée ukrainienne, il est peu probable que la "bataille du Donbass" marque la fin des hostilités.

Les puissances anglo-saxonnes ont intérêt à prolonger le conflit le plus longtemps possible et, à cette fin, s'apprêtent à déverser de plus en plus d'armes en Ukraine pour alimenter la "résistance". Le Royaume-Uni, en particulier, qui joue un rôle de premier plan en Ukraine, comme en témoigne le voyage de Johnson à Kiev le 9 avril, a promis d'envoyer des instructeurs, de l'artillerie, des missiles anti-navires Harpoon et même des véhicules blindés pour transporter les systèmes anti-aériens Starstreak. Cet activisme britannique s'explique par le fait que dans la "troisième guerre mondiale" menée par les puissances anglo-saxonnes contre les puissances continentales pour le contrôle du Rimland, le quadrant européen de l'Eurasie a été mis entre les mains de Londres, tandis que Washington et Canberra doivent se concentrer sur le Pacifique et la Chine.

Qu'est-ce que les puissances anglo-saxonnes espèrent gagner en prolongeant jusqu'au bout la guerre en Ukraine, à créer une nouvelle "Syrie" au cœur de l'Europe? Comme nous l'avons souligné à plusieurs reprises dans nos analyses, toute compréhension géopolitique des événements actuels doit englober l'Eurasie dans son ensemble et donc l'axe horizontal Chine-Russie-Allemagne (avec ses nombreuses branches verticales en Birmanie, au Pakistan, en Iran, en Italie, etc.). En prolongeant le conflit pour au moins toute l'année 2022, en jetant de plus en plus d'armes létales sur le théâtre ukrainien, les puissances maritimes anglo-saxonnes espèrent :

- affaiblir davantage la Russie, de manière à rendre possible la chute de Poutine et la relocalisation stratégique du pays dans une fonction anti-chinoise (ou du moins la disparition de la Russie en tant que facteur de puissance, dans le sillage d'une crise politique et d'un effondrement socio-économique) ;

- mener à bien la déstabilisation de l'Europe, en mettant un accent particulier sur l'Allemagne et l'Italie.

A plusieurs reprises, en effet, il a été souligné que les objectifs anglo-saxons de la guerre en Ukraine se situaient sur deux fronts: le russe et l'allemand. Les invectives de plus en plus violentes de Zelensky à l'encontre des dirigeants allemands, coupables de ne pas fournir suffisamment d'armes et de faire obstacle à l'embargo total sur la Russie, illustrent bien ce phénomène. En exacerbant le conflit en Ukraine et en le faisant traîner jusqu'à l'automne prochain, les Anglo-Américains espèrent imposer le blocus convoité sur les approvisionnements énergétiques en provenance de Russie, plongeant ainsi l'Allemagne et l'Italie, qui sont les plus dépendantes du gaz russe, dans une récession économique grave et prolongée. À ce moment-là, l'"axe médian" de l'Europe, qui a son prolongement naturel en Algérie et qui tend naturellement à converger vers la Russie et la Chine, serait jeté dans le chaos ou, du moins, sérieusement affaibli, également parce que les Anglo-Saxons travaillent activement à faire de la terre brûlée partout où les Italiens et les Allemands peuvent s'approvisionner, en Libye comme en Angola. Chaque missile Starstreak envoyé par les Britanniques en Ukraine est un missile visant à laisser l'Allemagne et l'Italie sans énergie: tout porte à croire que l'automne 2022 sera l'un des plus difficiles de mémoire d'homme.

lundi, 25 avril 2022

Nord Stream 2, une des clés de la guerre en Ukraine

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Nord Stream 2, une des clés de la guerre en Ukraine

Daniel Miguel López Rodríguez

Source: https://posmodernia.com/nord-stream-2-una-de-las-claves-de-la-guerra-de-ucrania/ 

Le flux du Nord

Le sous-sol ukrainien contient un réseau de gazoducs par lequel passe une partie de l'approvisionnement russe vers l'Europe. Entre 2004 et 2005, 80 % du gaz russe destiné à l'Europe a transité par le sous-sol ukrainien. Lorsque Gazprom (le géant russe de l'énergie appartenant à l'État) a interrompu l'approvisionnement des Ukrainiens en janvier 2006 et en janvier 2009, ces derniers ont saisi le gaz destiné à l'Europe, ce qui a entraîné des pertes énormes pour ces pays, qui sont très dépendants du gaz russe, et a jeté un sérieux discrédit sur la Russie en tant que fournisseur.

Afin d'éviter ce transit ukrainien, les Russes ont décidé de construire deux nouveaux gazoducs. Gazprom a fait valoir que le fait de relier un gazoduc directement à l'Allemagne sans avoir besoin de passer par des pays de transit permettrait d'éviter que les exportations de gaz russe vers l'Europe occidentale ne soient coupées, comme cela s'est produit deux fois auparavant. C'est ainsi qu'est né le projet Nord Stream (Севеверный поток), un gazoduc qui relierait la Russie à l'Europe (directement à l'Allemagne via la mer Baltique) sans devoir passer par l'Ukraine ou la Biélorussie.

En avril 2006 déjà, le ministre polonais de la défense, Radek Sikorski, comparait les accords sur la construction d'un gazoduc au pacte de non-agression germano-soviétique, le pacte Ribbentrop-Molotov signé aux premières heures du 24 août 1939, car la Pologne est particulièrement sensible aux accords passés par-dessus sa tête (https://www.voanews.com/a/a-13-polish-defense-minister-pi... ). Tout pacte conclu par la Russie et l'Allemagne y fera penser et sera diabolisé (telle est la simplicité de la propagande, mais elle est tout aussi efficace non pas en raison du mérite des propagandistes mais du démérite du vulgaire ignorant, qui abonde). 

Le ministre suédois de la défense, Mikael Odenberg, a indiqué que le projet constituait un danger pour la politique de sécurité de la Suède, car le gazoduc traversant la Baltique entraînerait la présence de la marine russe dans la zone économique de la Suède, ce que les Russes utiliseraient au profit de leurs renseignements militaires. En fait, Poutine justifierait la présence de la marine russe pour assurer la sécurité écologique.

L'hebdomadaire allemand Stern a émis l'hypothèse que le câble à fibre optique et les stations relais le long du gazoduc pourraient être utilisés pour l'espionnage russe, mais Nord Stream AG (le constructeur du gazoduc) a répondu en arguant qu'un câble de contrôle à fibre optique n'était pas nécessaire et n'avait même pas été prévu. Le vice-président du conseil d'administration de Gazprom, Alexander Medvedev, minimise la question en soulignant que "certaines objections sont soulevées qui sont risibles : politiques, militaires ou liées à l'espionnage. C'est vraiment surprenant car dans le monde moderne, il est ridicule de dire qu'un gazoduc est une arme dans une guerre d'espionnage" (https://web.archive.org/web/20070927201444/ et http://www.upstreamonline.com/live/article138001.ece ). Où que soient les Russes, on craint toujours les espions (on ne se méfie pas autant des Ricains, malgré les révélations d'Edward Snowden : l'enfer, c'est toujours les autres).

Le Rockefellerien Greenpeace se plaindrait également de la construction du gazoduc, car il traverserait plusieurs zones classées comme aires marines de conservation. 

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Le 13 juin 2007, face aux préoccupations écologiques, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Lavrov, a déclaré que "la Russie respecte pleinement le désir d'assurer la durabilité environnementale à 100 % du projet et soutient entièrement cette approche, et toutes les préoccupations environnementales seront traitées dans le cadre du processus d'évaluation de l'impact environnemental" (https://www.upstreamonline.com/online/russia-backs-green-... ).

Le gazoduc devait être inauguré le 8 novembre 2011 lors d'une cérémonie dans la municipalité de Lubmin (Mecklembourg-Poméranie occidentale) par la chancelière Angela Merkel et le président russe Dmitri Medvedev ; étaient également présents le Premier ministre français François Fillon et le Premier ministre néerlandais Mark Rutte.

Il était également prévu de construire South Stream, un gazoduc qui devait relier la Russie à la Bulgarie en traversant la mer Noire jusqu'à la Grèce et l'Italie. Mais il a finalement été annulé au profit de Blue Stream, qui transporte du gaz naturel du sud de la Russie vers la Turquie via la mer Noire. Grâce à ce gazoduc, la Turquie est le deuxième plus grand importateur de gaz russe, juste derrière l'Allemagne.

Alors que l'Allemagne a pu réaliser le projet Nord Stream 1, la Grèce et l'Italie ont vu leur projet South Stream mis au rebut. C'est un signe de qui a le plus de pouvoir dans la prétentieuse Union européenne. Mais Nord Stream 2 n'est pas allé aussi loin et - comme nous le verrons - les Allemands se sont pliés aux diktats des Américains.

Nord Stream 1 se compose de deux pipelines allant de Vyborg (nord-ouest de la Russie) à Greifswald (nord-est de l'Allemagne). Il a la capacité de transporter 55 milliards de mètres cubes par an, même si en 2021, il était capable de transporter 59,2 milliards de mètres cubes. Il s'agit du gazoduc par lequel transite le plus grand volume de gaz à destination de l'UE. 

Les travaux sur le gazoduc Nord Stream 2 ont duré de 2018 à 2021, et on estime que le matériau du gazoduc peut durer environ 50 ans. Le pipeline part de la station de compression Slavyanskaya, près du port d'Ust-Luga (dans le district Kingiseppsky de l'Oblast de Leningrad), et va jusqu'à Greifswald (Poméranie occidentale). En 2019, la société suisse Allsea, qui était chargée de poser le gazoduc, a abandonné le projet et Gazprom a dû le mener à bien par ses propres moyens. La première ligne a été achevée en juin 2021 et la seconde en septembre. Son ouverture était prévue pour le milieu de l'année 2022, ce qui devait permettre de doubler le gaz transporté pour atteindre 110 milliards de mètres cubes par an. Outre Gazprom, les partenaires pour la construction de Nord Stream 2 ont été Uniper, Wintershall, OMV, Engie et Shell plc.

Le gouvernement allemand a approuvé le projet en mars 2018, afin d'éloigner l'Allemagne du nucléaire et du charbon (c'est-à-dire pour des raisons environnementales, toujours aussi sensibles en Allemagne, déjà depuis des temps pas particulièrement démocratiques). Les coûts du gazoduc sont estimés à 9,9 milliards d'euros, Gazprom apportant 4,75 milliards d'euros et ses partenaires le reste.  

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Nord Stream 2 aurait complété les troisième et quatrième lignes (par rapport aux première et deuxième lignes de Nord Stream 1). À travers la Baltique, Nord Stream 1 et 2 suivent fondamentalement le même itinéraire. Les deux pipelines tirent leur gaz des gisements de la péninsule de Yamal et des baies d'Ob et de Taz. Avec ces deux gazoducs (avec quatre lignes au total), l'Allemagne fournirait du gaz russe à d'autres pays, ce qui améliorerait sans aucun doute la situation sur le marché européen et permettrait de surmonter la crise énergétique. Les Allemands sont allés jusqu'à affirmer que le Nord Stream 2 serait plus rentable que les livraisons terrestres via l'Europe de l'Est. La Russie a fourni 35,4 % du gaz arrivant en Allemagne (et avec Nord Stream 2, elle aurait doublé cette quantité) et 34 % du pétrole.

Les principaux opposants à Nord Stream 2 ont été les pays baltes, la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie ( ?), la Roumanie, la Croatie, la Moldavie et principalement la Pologne et l'Ukraine, tous soutenus par la Commission européenne et les États-Unis. Ces pays se sont opposés à Nord Stream 2 au motif qu'un gazoduc direct vers l'Allemagne pourrait entraîner l'arrêt de leur approvisionnement en énergie et les priver des lucratifs frais de transit.

Chronologie de la politique américaine contre Nord Stream 2

Les plaintes américaines contre le gazoduc ne sont pas propres à l'administration Biden (qui a subi la pression de ses collègues démocrates pour adopter une ligne dure contre la Russie, qualifiant ainsi Poutine de "meurtrier" - comme si l'administration Obama dont il était le vice-président n'avait pas commis d'innombrables crimes de guerre, bien plus que la Russie ne l'a jamais fait : mais le premier président afro-américain est un démon qui "ne sent pas le soufre"). Déjà sous Obama, les protestations ont commencé alors que le projet n'avait pas encore totalement pris forme (l'idée du projet a commencé à prendre forme en octobre 2012).

Sous l'administration Trump, les plaintes se sont poursuivies et n'ont jamais cessé, même si Trump a d'abord affirmé qu'il n'appliquerait pas la loi contre les ennemis de l'Amérique par le biais de sanctions sur les exportations énergétiques russes, mais il a rapidement changé d'avis. M. Trump a même menacé d'imposer des droits de douane aux pays de l'UE et a proposé de rouvrir les négociations en vue de conclure un accord commercial entre les États-Unis et l'UE si le projet était annulé.

Le 27 janvier 2018, coïncidant avec le 73e anniversaire de la libération du camp de concentration d'Auschwitz, le secrétaire d'État Rex Tillerson (un ancien PDG d'Exxon Mobil, c'est-à-dire un homme de Rockefeller infiltré dans l'administration Trump, qui sera finalement évincé par le plus loyal Mike Pompeo) a fait valoir que les États-Unis et la Pologne s'opposaient à Nord Stream 2 en raison du danger qu'il représente pour la sécurité et la stabilité énergétiques de l'Europe, "tout en donnant à la Russie un outil supplémentaire pour politiser le secteur de l'énergie" ( https://www.expansion.com/economia/politica/2018/01/27/5a... ).

Les sénateurs américains des deux partis se sont inquiétés en mars 2018, lorsque le gouvernement allemand a approuvé le projet, et ont écrit que "en contournant l'Ukraine, Nord Stream II éliminera l'une des principales raisons pour lesquelles la Russie évite un conflit à grande échelle dans l'est de l'Ukraine, comme le Kremlin le sait bien" (https://www.cfr.org/in-brief/nord-stream-2-germany-captiv... ).

Le transit ukrainien fournissait autrefois 44 % du gaz russe à l'UE, ce qui permettait aux caisses de l'État (de plus en plus corrompu) d'empocher quelque 3 milliards de dollars par mois. Mais avec Nord Stream 2, cela devait changer et le transit par le sous-sol ukrainien devait être encore décuplé. Cela aurait fait perdre à l'Ukraine 3 % de son PIB. L'Ukraine y voyait une atteinte à sa souveraineté, mais aussi à la sécurité énergétique collective de l'Europe dans son ensemble, car le transit du gaz par l'Ukraine dissuade l'agression russe. L'ouverture de Nord Stream 2, qui aurait fait de l'Allemagne la première plaque tournante du gaz en Europe, aurait mis fin à cette situation.  

En janvier 2019, l'ambassadeur américain en Allemagne, Richard Grenell, a envoyé une lettre aux entreprises qui construisent le gazoduc, les exhortant à abandonner le projet et les menaçant de sanctions si elles le poursuivent. En décembre de la même année, les sénateurs républicains Ted Cruz et Ron Johnson ont également fait pression sur les entreprises impliquées dans le projet.

Le président du Conseil européen Donald Tusk, le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki et le ministre britannique des Affaires étrangères de l'époque Boris Johnson ont protesté contre la construction de Nord Stream 2. Tusk a clairement indiqué que le gazoduc n'était pas dans l'intérêt de l'Union européenne. Les fonctionnaires de la Commission européenne ont déclaré que "Nord Stream 2 n'améliore pas la sécurité énergétique [de l'UE]" (https://euobserver.com/world/141584 ).

Nord Stream 2 est quelque chose qui a divisé l'UE. Bien que lorsque Donald Trump était dans le bureau ovale de la Maison Blanche, le projet ne semblait pas si mauvais, et la France, l'Autriche et l'Allemagne, plus la Commission européenne, ont critiqué les États-Unis (c'est-à-dire l'administration Trump) pour les nouvelles sanctions contre la Russie au sujet du pipeline, se plaignant que les États-Unis menaçaient l'approvisionnement énergétique de l'Europe.

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Le chancelier autrichien Christian Kern et le ministre allemand des Affaires étrangères Sigman Gabriel se sont plaints dans une déclaration commune : "L'approvisionnement énergétique de l'Europe est l'affaire de l'Europe, pas celle des États-Unis d'Amérique" (https://www.usnews.com/news/business/articles/2017-06-15/... ). Et ils ajoutent : "Menacer les entreprises d'Allemagne, d'Autriche et d'autres États européens de sanctions sur le marché américain si elles participent ou financent des projets de gaz naturel comme Nord Stream 2 avec la Russie introduit une qualité complètement nouvelle et très négative dans les relations entre l'Europe et les États-Unis" (https://www.politico.eu/article/germany-and-austria-warn-... ). Mais - comme nous le verrons - les politiciens allemands, avec un gouvernement social-démocrate, n'ont pas été aussi audacieux avec l'administration Biden.

Isabelle Kocher, PDG du groupe ENGIE (un groupe local français qui distribue de l'électricité, du gaz naturel, du pétrole et des énergies renouvelables), a critiqué les sanctions américaines et a affirmé qu'elles tentaient de promouvoir le gaz américain en Europe (ce qui est la clé de toute l'affaire). Olaf Scholz, lorsqu'il était ministre des finances dans le gouvernement de coalition dirigé par Merkel, a rejeté les sanctions comme "une intervention sévère dans les affaires intérieures allemandes et européennes". Un porte-parole de l'UE a critiqué "l'imposition de sanctions contre des entreprises de l'UE faisant des affaires légitimes" (https://www.dw.com/en/germany-eu-decry-us-nord-stream-san... ).

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Mass, a déclaré sur Twitter que "la politique énergétique européenne se décide en Europe, pas aux États-Unis". M. Lavrov a affirmé que le Congrès américain "est littéralement submergé par le désir de tout faire pour détruire" les relations avec la Russie (https://www.cnbc.com/2019/12/16/ukraine-and-russia-look-t... ). Toutefois, il convient de noter que l'Allemagne a fortement soutenu les sanctions contre la Russie suite à l'annexion de la Crimée en 2014.

L'Association allemande des entreprises orientales a déclaré dans un communiqué que "les États-Unis veulent vendre leur gaz liquéfié en Europe, pour lequel l'Allemagne construit des terminaux. Si nous arrivons à la conclusion que les sanctions américaines visent à chasser les concurrents du marché européen, notre enthousiasme pour les projets bilatéraux avec les États-Unis se refroidira considérablement" (https://www.dw.com/en/nord-stream-2-gas-pipeline-faces-sa... ).

Le 21 décembre 2019, Trump a signé une loi imposant des sanctions aux entreprises ayant contribué à la construction de l'oléoduc, qui a été interrompue après la signature de Trump, mais reprendrait en décembre 2020, après l'élection de Joe Biden à la présidence. Mais immédiatement, le 1er janvier 2021, un projet de loi annuel sur la politique de défense adopté par le Congrès américain prévoyait des sanctions pour les entreprises travaillant sur le pipeline ou le sécurisant. Le 26 janvier, la Maison Blanche a annoncé que le nouveau président estime également que "Nord Stream 2 est une mauvaise affaire pour l'Europe", et que son administration va donc "revoir" les nouvelles sanctions (https://www.reuters.com/article/us-usa-biden-nord-stream-... ).

Ainsi, le bipartisme au Capitole s'est prononcé contre l'achèvement du gazoduc Nord Stream 2, non pas parce que c'est "une mauvaise affaire pour l'Europe", mais parce que c'est une mauvaise affaire pour les États-Unis. Sur ce point, les "mondialistes" et les "patriotes" sont d'accord.

Le 30 juillet 2020, le secrétaire d'État Mike Pompeo s'est adressé au Sénat en critiquant la construction de Nord Stream 2 : "Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que ce gazoduc ne menace pas l'Europe. Nous voulons que l'Europe dispose de ressources énergétiques réelles, sûres, stables, sûres et non convertibles". C'est comme s'il disait : "Nous ferons tout ce que nous pouvons pour nous assurer que ce pipeline ne menace pas les États-Unis. Nous voulons que l'Europe dispose de ressources énergétiques qu'elle achète aux États-Unis". Il a ajouté que le département d'État et le département du Trésor "ont très clairement indiqué, dans nos conversations avec ceux qui ont des équipes sur place, la menace expresse que représente pour eux la poursuite des travaux d'achèvement du pipeline" (https://www.rferl.org/a/pompeo-u-s-will-do-everything-to-... ).

Le 20 avril 2021, on pouvait lire sur le site Web du Conseil européen des relations étrangères (think tank de Soros) : "Ce serait mauvais pour l'Europe si la pression américaine devait forcer l'annulation du gazoduc et laisser l'Allemagne et les autres États membres dont les entreprises participent à sa construction amers et meurtris. Ce serait également mauvais pour l'Europe si le gazoduc finissait par balayer les réticences de la Pologne et par dépeindre l'Allemagne comme un acteur égoïste qui ne se soucie pas de ses partenaires. L'un ou l'autre résultat affaiblirait également l'alliance transatlantique et, plus ou moins directement, profiterait à Moscou... si Washington arrête le projet, Moscou trouvera une autre raison de rejeter l'Europe comme un acteur politique qui manque de crédibilité. Bien sûr, cela ne doit pas signifier que l'Europe doit sauver Nord Stream 2 juste pour impressionner la Russie. Le raisonnement de l'UE devrait avoir des racines plus profondes que cela". Il s'agit donc d'un "problème de gestion des relations" (https://ecfr.eu/article/the-nord-stream-2-dispute-and-the... ). 

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Cependant, le 19 mai 2021, le gouvernement américain a levé les sanctions contre Nord Stream AG, mais a imposé des sanctions contre quatre banques russes et cinq sociétés russes. Sergueï Ryabkov, vice-ministre russe des Affaires étrangères, a salué cette démarche et y a vu "une opportunité pour une transition progressive vers la normalisation de nos liens bilatéraux" (https://www.bbc.com/news/world-us-canada-57180674 ).

Le sénateur républicain Jim Risch a déclaré qu'une telle démarche était "un cadeau à Poutine et ne fera qu'affaiblir les États-Unis" (https://www.reuters.com/business/energy/us-waive-sanction...).

Yurity Vitrenko de Naftogaz (la compagnie pétrolière et gazière d'État ukrainienne) s'opposerait à cette démarche et affirmerait que l'Ukraine fait pression sur les États-Unis pour qu'ils réimposent des sanctions afin d'empêcher l'ouverture du pipeline. Biden prétendrait qu'il a mis fin aux sanctions parce que le pipeline était presque terminé et parce que les sanctions avaient nui aux relations entre les États-Unis et l'Union européenne.

Le président ukrainien, alors inconnu en Occident, Volodymyr Zelensky, s'est dit "surpris et déçu" par la décision de l'administration Biden, qui a également refusé de sanctionner le PDG de Nord Stream AG, Mathias Warning, un allié de Poutine.

Cependant, en juin 2021, la pose des deux lignes de pipelines a été entièrement achevée. Le 20 juillet 2021, Biden et une Angela Merkel sortante ont convenu que les États-Unis pourraient sanctionner la Russie si elle utilisait Nord Stream 2 comme une "arme politique", dans le but d'empêcher la Pologne et l'Ukraine de manquer de gaz russe.

Mme Merkel est une atlantiste avouée et n'était pas exactement enthousiaste à l'égard du projet Nord Stream 2, mais elle ne voyait aucun moyen de faire marche arrière. Pour elle, c'était une situation très délicate.

L'Ukraine obtiendrait un prêt de 50 millions de dollars pour investir dans les technologies vertes jusqu'en 2024, et l'Allemagne créerait un fonds d'un milliard de dollars pour la transition de l'Ukraine vers l'énergie verte, afin de compenser la perte de droits de douane due au fait que tout le gaz russe qui devait passer par le gazoduc Nord Stream 2 ne passerait pas par son sous-sol.

Après cette étrange hésitation, le département d'État américain prendra une décision complète et imposera, en novembre 2021, de nouvelles sanctions financières aux entreprises russes liées à Nord Stream 2.

Le 9 décembre 2021, le Premier ministre polonais Mateusz Marawiecki a fait pression sur le nouveau chancelier allemand, le social-démocrate Olaf Scholz, pour qu'il n'inaugure pas le Nord Stream 2 et ne cède pas à la pression russe, et donc "ne permette pas que le Nord Stream 2 soit utilisé comme un instrument de chantage contre l'Ukraine, comme un instrument de chantage contre la Pologne, comme un instrument de chantage contre l'Union européenne" (https://www.metro.us/polish-pm-tells-germanys/ ).

Après avoir détecté des troupes russes à la frontière orientale de l'Ukraine, le secrétaire d'État Antony Blinken a annoncé de nouvelles sanctions le 23 décembre.

Olaf Scholz serait pressé d'arrêter l'ouverture du pipeline lors du sommet de l'UE. Le 7 février 2022, il rencontrera Biden à la Maison Blanche et, lors de la conférence de presse, il déclarera que les États-Unis et l'Allemagne sont "absolument unis et nous ne prendrons pas de mesures différentes". Nous prendrons les mêmes mesures et elles seront très, très dures pour la Russie et ils doivent le comprendre. Toutes les mesures que nous prendrons, nous les prendrons ensemble. Comme l'a dit le président [Biden], nous nous y préparons. Vous pouvez comprendre et vous pouvez être absolument sûrs que l'Allemagne sera de concert avec tous ses alliés et surtout les États-Unis, que nous prendrons les mêmes mesures. Il n'y aura aucune différence dans cette situation. Je dis à nos amis américains que nous serons unis. Nous agirons ensemble et nous prendrons toutes les mesures nécessaires et toutes les mesures nécessaires que nous prendrons ensemble" (https://edition.cnn.com/2022/02/07/politics/biden-scholz-... ).

On peut voir qu'il ne se plaignait plus de l'intervention des États-Unis "dans les affaires intérieures allemandes et européennes", comme on l'a vu dire lorsqu'il était ministre des finances dans le gouvernement de coalition avec Merkel, alors que Trump était à la Maison Blanche.

Pour sa part, Joe Biden a averti que si la Russie envahit l'Ukraine, avec "des chars et des troupes", comme cela finirait par arriver, "alors il n'y aura plus de Nord Stream 2 : nous y mettrons fin" (https://edition.cnn.com/2022/02/07/politics/biden-scholz-... ).

Face aux menaces de Biden envers la Russie, Scholz a gardé un silence timide, ne disant absolument rien sur l'ingérence flagrante des États-Unis dans les relations économiques de l'Allemagne avec la Russie. Il s'est plié aux diktats de Washington. 

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Le 15 février, Scholz devait rencontrer Poutine à Moscou, où le dirigeant russe a affirmé que le gazoduc renforcerait la sécurité énergétique européenne et qu'il s'agissait d'une question "purement commerciale" (https://www.reuters.com/business/energy/putin-says-nord-s... ). Comme si l'économie n'était pas une économie-politique et une question géopolitique de la plus haute importance et, comme nous l'avons vu, d'une transcendance vitale.

Scholz a affirmé que les négociations avaient été intenses mais confiantes et a supplié la Russie d'éviter toute interprétation dans le conflit avec l'Ukraine.

Lors de la conférence de presse, Poutine est allé jusqu'à dire : "L'Allemagne est l'un des principaux partenaires de la Russie. Nous nous sommes toujours efforcés de favoriser l'interaction entre nos États. L'Allemagne est le deuxième partenaire commercial extérieur de la Russie, après la Chine. Malgré la situation difficile causée par la pandémie de coronavirus et la volatilité des marchés mondiaux, à la fin de 2021, les échanges mutuels ont augmenté de 36 % et ont atteint près de 57 milliards. Dans les années 1970, nos pays ont mis en œuvre avec succès un projet historique. Il s'appelait "Gaz pour les tuyaux". Et depuis lors, les consommateurs allemands et européens sont approvisionnés en gaz russe de manière fiable et sans interruption. Aujourd'hui, la Russie satisfait plus d'un tiers des besoins de l'Allemagne en matière de transport d'énergie" (https://1prime.ru/exclusive/20220220/836108179.html ).

Le projet "Gaz pour les pipelines" a été possible malgré la guerre froide. Les États-Unis ont tenté d'empêcher la construction du gazoduc Urengoy-Pomary-Uzhgorod et ont également essayé d'empêcher les entrepreneurs allemands de participer au projet, bien qu'il ait finalement été construit en 1982-1984 et officiellement ouvert en France, complétant le système de transport transcontinental de gaz Sibérie occidentale-Europe occidentale qui était en place depuis 1973. Ce gazoduc traverse l'Ukraine, pompant du gaz vers la Slovaquie, la Hongrie et la Roumanie. À cette époque, l'URSS n'avait pas la capacité de produire les pipelines nécessaires. Après la construction, d'importantes livraisons de gaz en provenance de Russie ont commencé, depuis le gigantesque champ de Vengoyskoye vers l'Allemagne et d'autres pays européens. Les conséquences d'une telle quantité de gaz ont été le remplacement du charbon américain sur le marché européen, et la RFA a bénéficié d'un énorme élan économique. Nous constatons que les accords gaziers entre la Russie et l'Europe (alors l'URSS) n'ont pas profité aux États-Unis, où ils en prendraient acte.  

Scholz a ensuite rencontré Zelensky, accusé d'avoir utilisé le "livre de jeu de Merkel" en évitant les questions sur le gazoduc lors de la conférence de presse qu'il a donnée avec le président ukrainien (https://www.telegraph.co.uk/news/2022/02/14/olaf-scholz-f... ).

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a affirmé que l'avenir du pipeline dépendrait du comportement de la Russie en Ukraine. Le 19 février, elle a déclaré à la Conférence sur la sécurité de Munich que l'Europe ne pouvait pas être aussi dépendante de la Russie pour ses besoins énergétiques (peut-être veut-elle qu'elle soit dépendante des États-Unis, et pas seulement sur le plan énergétique mais aussi sur le plan géopolitique, ce qui est la conséquence logique). "Une Union européenne forte ne peut pas être aussi dépendante d'un fournisseur d'énergie qui menace de déclencher une guerre sur notre continent. Nous pouvons imposer des coûts élevés et des conséquences graves sur les intérêts économiques de Moscou. La pensée bizarre du Kremlin, qui découle directement d'un passé sombre, pourrait coûter à la Russie un avenir prospère. Nous espérons encore que la diplomatie n'a pas dit son dernier mot" (https://www.dw.com/en/natos-jens-stoltenberg-urges-russia... ).

Le 22 février, le lendemain de la reconnaissance par la Russie des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, Olaf Scholz, qui a toujours été favorable au projet mais qui venait de voir Biden (alors qu'il devait rendre visite à Poutine immédiatement après), a suspendu la certification de Nord Stream 2. <...> Il s'agit d'une étape nécessaire pour que la certification du pipeline ne puisse avoir lieu maintenant. Sans cette certification, Nord Stream 2 ne peut être lancé" (https://www.vedomosti.ru/economics/articles/2022/02/22/91... ). La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Berbock, a déclaré aux journalistes que le gouvernement allemand avait "gelé" le projet.

Le 23 février, M. Biden a ordonné des sanctions contre l'exploitant du gazoduc, Nord Stream 2 AG, ainsi que contre des responsables de la société. "Ces mesures sont une autre partie de notre tranche initiale de sanctions en réponse aux actions de la Russie en Ukraine. Comme je l'ai dit clairement, nous n'hésiterons pas à prendre de nouvelles mesures si la Russie poursuit l'escalade." Ces sanctions ont été imposées après des "consultations étroites" entre les gouvernements américain et allemand. Et il a remercié Scholz pour son "étroite coopération et son engagement inébranlable à tenir la Russie responsable de ses actions" ; en d'autres termes, il l'a remercié pour sa soumission aux États-Unis. En reconnaissant les républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, Poutine, a déclaré Biden, "a donné au monde une incitation irrésistible à abandonner le gaz russe et à passer à d'autres formes d'énergie" (https://www.rbc.ru/politics/23/02/2022/621684c49a794730b4... ). 

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Le jour suivant, la Russie commencera une "opération militaire spéciale" en Ukraine. Les États-Unis avaient donc déjà la guerre qu'il leur fallait pour empêcher l'ouverture du gazoduc Nord Stream 2 et la rupture des relations germano-russes ; même si Nord Stream 1 continuerait à transporter du gaz vers l'Allemagne, fonctionnant comme les autres gazoducs approvisionnant l'Europe, dont la Russie empoche quelque 800 millions d'euros par jour, plus 260 millions d'euros pour l'exportation de pétrole.

Le 8 mars, les États-Unis ont interdit toute importation de pétrole et de gaz en provenance de Russie, établissant un record historique pour le prix de l'essence (7 % du pétrole consommé aux États-Unis est russe).

Le 9 mars, le secrétaire de presse du président russe, Dmitry Preskov, a répondu à la sous-secrétaire d'État américaine aux affaires politiques, Victoria Nuland - la femme qui a dit "fuck the EU" (https://www.youtube.com/watch?v=dO80WVMy5E4&ab_channe...  ), en déclarant que Nord Stream 2 est "mort et ne sera pas ressuscité" (un jour plus tôt, devant le Congrès américain, elle avait déclaré que le gazoduc n'est qu'"un tas de métal au fond de la mer") - en lui disant que le gazoduc est prêt à être utilisé, en ajoutant que les États-Unis déclarent la guerre économique à la Russie.

Un différend géo-économique et donc géopolitique

Plutôt qu'un projet d'infrastructure dans le pouvoir fédérateur (ou le commerce international) des couches corticales des États concernés, Nord Stream 2 ressemble davantage à un symbole de discorde dans le pouvoir diplomatique, voire militaire, que l'on observe en Ukraine. Il ne fait aucun doute que Nord Stream 2 et tous les gazoducs et oléoducs entraînent des problèmes géopolitiques, car les ressources de base sont intégrées dans les problèmes corticaux de la dialectique des États (l'économie est toujours l'économie-politique ; c'est-à-dire que les deux ne peuvent être compris comme des sphères mégaréales mais comme des concepts conjugués : conceptuellement dissociables, existentiellement inséparables).

Sans aucun doute, comme on l'accuse à juste titre, la Russie utilise sa puissance énergétique comme une arme géopolitique et géostratégique, tout comme les États-Unis. En effet, cette puissance russe est énorme. En additionnant les exportations de pétrole, de gaz et de charbon, la Russie serait le premier exportateur mondial de ces produits.

Si Nord Stream 2 avait été mis en œuvre, les États-Unis auraient perdu leur influence sur l'UE et aussi sur l'Ukraine. Cela rendrait les pays européens, notamment l'Allemagne, encore plus dépendants des ressources énergétiques russes. Certains de ces pays et bien sûr le meneur de la bande, les États-Unis, ont pris position contre la construction de ce pipeline. L'Ukraine est considérée comme l'une des économies les plus touchées si le Nord Stream 2 est mis en service, car une grande quantité de matières premières en provenance de Russie ne passerait plus par son sous-sol (bien que cela affecte également le Belarus, allié plutôt vassal de la Russie).

Les Russes affirment qu'avec Nord Stream 2, le prix du gaz baisserait, car quelque 55 milliards de mètres cubes de gaz seraient transportés par an (plus ou moins la même quantité que Nord Stream 1). Il ne faut pas oublier qu'un peu plus d'un tiers du gaz qui atteint l'Europe provient de Russie.

En Espagne, seulement 10 % du gaz que nous recevons est russe. L'Algérie (alliée historique de la Russie) est notre principal exportateur de gaz (30 % de son gaz finit en Espagne), et le gouvernement de Pedro Sánchez ne fait pas vraiment preuve de tact diplomatique avec ce pays ; il le traite même avec une extrême insouciance, cédant le Sahara au Maroc (abandonnant pour la deuxième fois les pauvres Sahraouis). C'est peut-être la récompense que le sultanat a reçue pour avoir reconnu Israël. Mais puisqu'en Espagne, depuis plusieurs décennies, la politique étrangère est une trahison continue plutôt qu'une politique étrangère ?

Regardez ce que dit le rapport 2019 de l'important groupe de réflexion américain RAND Corporation : "Augmenter la capacité de l'Europe à importer du gaz de fournisseurs autres que la Russie pourrait étirer la Russie sur le plan économique et protéger l'Europe de la coercition énergétique russe. L'Europe avance lentement dans cette direction en construisant des usines de regazéification de gaz naturel liquéfié (GNL). Mais pour être vraiment efficace, cette option nécessiterait que les marchés mondiaux du GNL deviennent plus flexibles qu'ils ne le sont déjà et que le GNL devienne plus compétitif en termes de prix par rapport au gaz russe" (https://www.rand.org/pubs/research_briefs/RB10014.html ).

L'Allemagne verrait sa sécurité énergétique menacée si Nord Stream 2 n'est pas mis en service. Et il ne faut pas oublier que ce projet a été construit à l'initiative de Berlin et non de Moscou. Et pourtant, l'Allemagne s'est rangée du côté de l'Ukraine (se pliant ainsi aux diktats de l'empire de Washington).

Mais il faut garder à l'esprit qu'avec Nord Stream 2, la relation entre la Russie et l'Allemagne ne serait pas exclusivement une relation de dépendance de la seconde vis-à-vis de la première, puisque la Russie dépendrait également de l'Allemagne, c'est-à-dire qu'une relation de coopération serait établie, ce que les États-Unis ne veulent pas. Et l'Allemagne distribuerait à son tour le gaz qui arrive de Russie aux autres pays. 

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Le problème serait que si ce gazoduc commence à pomper du gaz, les États-Unis pourraient alors perdre la vassalité de l'Allemagne et d'autres pays européens. Les États-Unis ont toujours essayé d'empêcher les relations commerciales entre l'Allemagne et la Russie de s'épanouir (comme ils l'ont fait lorsqu'il s'agissait de la RFA et de l'URSS, comme nous l'avons vu).

D'où les plaintes de Biden (ainsi que celles de Trump, et déjà celles d'Obama), car les États-Unis veulent à tout prix empêcher l'ouverture de Nord Stream 2. Ce gazoduc n'aiderait-il pas la Russie à consolider le leadership allemand dans l'UE ? Bien qu'historiquement, malgré Napoléon, la Russie a eu de meilleures relations avec la France. Et les Russes n'oublient certainement pas les deux guerres mondiales, en particulier la Grande Guerre patriotique.

L'Allemagne a fait valoir que Nord Stream 1 n'empêchait pas le Reich d'adopter une ligne dure contre l'expansionnisme russe. Et, élément crucial, que les États-Unis se sont opposés au projet parce qu'ils voulaient vendre davantage de gaz naturel liquéfié sur les marchés européens (cela résume l'intrigue). 

Près d'un quart de la consommation énergétique de l'UE est constituée de gaz naturel, dont un tiers provient de Russie, les pays de l'Est étant évidemment plus dépendants de ce gaz. L'UE obtient 40 % de son gaz de la Russie, ainsi que 27 % de son pétrole. Les États-Unis ne reçoivent pas de gaz russe, bien que - comme nous l'avons déjà dit - ils reçoivent 7 % de leur pétrole (qu'ils ont maintenant l'intention de remplacer par du pétrole vénézuélien). Le 25 mars 2022, l'UE a signé un accord dans lequel les États-Unis fourniront 15 milliards de mètres cubes de gaz liquéfié au marché européen cette année. Et entre maintenant et 2030. Mission accomplie : l'Europe courbe la tête devant son serviteur.

Et comment les États-Unis peuvent-ils se permettre de freiner un projet entre deux nations souveraines derrière un chantier pharaonique à des milliers de kilomètres de distance ? Se pourrait-il que l'Allemagne, qui avec la France dirige l'UE, ne soit rien d'autre qu'un vassal des États-Unis, même si elle a maintenant l'intention de se réarmer ? Et si l'axe franco-allemand est un vassal des États-Unis, l'Espagne, l'Espagne délaissée, ne sera-t-elle pas un vassal des vassaux ? Quoi qu'il en soit, les États-Unis se sont comportés envers l'Allemagne comme le gangster extorqueur : celui qui oblige les commerçants sous la menace d'une arme à acheter ses marchandises. Puis, armés d'un visage en diborure de titane, ils appellent cela un "marché libre".

Selon un rapport de la Commission européenne intitulé "EU-US LNG trade", en 2021, le record d'approvisionnement en gaz naturel liquéfié (GNL) des États-Unis vers l'UE a été battu, dépassant les 22 milliards de mètres cubes. En janvier 2022, elle a déjà atteint 4,4 milliards de mètres cubes (si elle continue à ce rythme, elle atteindra plus de 50 milliards). Mais cela ne suffit pas pour les États-Unis. Bien que la Commission européenne soit favorable à ce que les Yankees soient les principaux fournisseurs de gaz naturel sur le marché européen.

Au vu de tout cela, on pourrait dire que les États-Unis ont fomenté une guerre en Ukraine afin de restreindre la coopération économique de l'UE avec la Russie, ce qui va à l'encontre des intérêts de l'Union, qui s'est comportée dans cette crise comme un ensemble d'États vassaux de Washington ; ce qui est le cas depuis longtemps, pratiquement depuis la Seconde Guerre mondiale, sauf que cela apparaît maintenant de manière embarrassante. 

Dans une interview avec Jacques Baud, colonel de l'armée suisse, expert en renseignement militaire et député à l'OTAN et à l'ONU, il a déclaré : "Je suis sûr que Poutine ne voulait pas attaquer l'Ukraine, il l'a dit à plusieurs reprises. De toute évidence, les États-Unis ont exercé des pressions pour déclencher la guerre. Les États-Unis ont peu d'intérêt pour l'Ukraine elle-même. Ce qu'ils voulaient, c'était augmenter la pression sur l'Allemagne pour qu'elle ferme Nord Stream II. Ils voulaient que l'Ukraine provoque la Russie, et si la Russie réagissait, Nord Stream II serait gelé" (https://www.lahaine.org/mundo.php/militar-suizo-experto-d... ).

Le Royaume-Uni semble également devoir bénéficier de son statut de pays de "transit" pour l'approvisionnement en gaz naturel de l'Europe, via le gazoduc traversant la Belgique et les Pays-Bas, qui tentera de se sevrer de sa dépendance au gaz russe, comme le prévoit pour cet été le seul opérateur énergétique britannique qui collecte le gaz de la mer du Nord en Norvège : National Grid. Selon le Daily Telegraph, National Grid pense pouvoir exporter environ 5,1 milliards de m3 vers l'Europe cet été. Elle envisage également d'importer du gaz liquéfié des États-Unis au Royaume-Uni pour le transformer en gaz normal et l'exporter en Europe.

En raison de l'opération militaire russe dans la marine des pays de l'OTAN (pas tous) en Ukraine, la non-ouverture de Nord Stream 2 n'a pas divisé les pays européens, comme ce fut le cas en 2003 avec la guerre en Irak, même si le Royaume-Uni a quitté l'UE. Il semble y avoir un consensus anti-russe (la Hongrie anti-sorosienne est peut-être l'exception, quoique de manière ambiguë).

Pour gagner l'alliance de la Russie contre la Chine, ni l'administration Trump (ce qui était son intention) ni l'administration Biden (qui a montré au monde sa russophobie exacerbée, dans la lignée du trilatéraliste-rockefellerien polonais et américain Zbigniew Brzezinski) n'ont su agir avec tact diplomatique. Et ils devraient savoir que les alliances sont aussi importantes que les forces elles-mêmes. C'est pourquoi la Russie a conquis l'allié chinois, mais toujours avec la crainte que ce dernier ne l'absorbe ou ne la trahisse à un moment donné (l'hypocrisie est notre pain quotidien dans les relations internationales).

L'humiliation du président allemand par Zelensky

Pendant des années, le président allemand Frank-Walter Steinmeier a entretenu une relation cordiale avec Vladimir Poutine, dont il a fait l'éloge en tant que chancelier sous Gerhard Schröder, puis en tant que ministre des affaires étrangères sous Angela Merkel. Et il a également montré son plus grand soutien au projet Nord Stream 2 pendant ces années, jusqu'à juste avant la guerre, ce que, après l'entrée des troupes russes en Ukraine, le chef d'État allemand a admis comme une "erreur manifeste". Une erreur qu'il a entretenue pendant des années, presque une décennie ? Après la diffusion sur Twitter de photos de M. Steinmeier embrassant le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, le président a exprimé ses remords. Pour cela, il ne serait pas le bienvenu à Kiev, et a dû annuler sa visite : "Il semble que ma présence ne soit pas souhaitée" (https://www.elmundo.es/internacional/2022/04/12/6255a91f2... ).  "Nous n'avons pas réussi à créer une maison européenne commune qui inclut la Russie. Nous n'avons pas réussi à inclure la Russie dans l'architecture de sécurité globale. Nous nous sommes accrochés à des ponts auxquels la Russie ne croyait plus, comme nos partenaires nous en avaient avertis" (https://ria.ru/20220404/evropa-1781787894.html ). Tout cela montre la honteuse servilité de l'Allemagne envers les États-Unis.

L'ambassadeur ukrainien à Berlin, Andriy Melnyk, poursuit en soulignant que l'Allemagne a "trop d'intérêts particuliers" en Russie et que Steinmeier est en grande partie à blâmer, car il a passé des décennies à tisser une toile d'araignée de contacts avec la Russie (tout comme Merkel, avec qui Poutine a parlé en russe et en allemand). "Beaucoup de ceux qui sont maintenant en charge dans la coalition (allemande) sont impliqués dans cette affaire" (https://www.elmundo.es/internacional/2022/04/12/6255a91f2... ).

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Le porte-parole adjoint du gouvernement allemand, Wolfgang Büchner, a calmé les esprits en comprenant "la situation exceptionnelle" que traverse l'Ukraine. Il a déclaré que "l'Allemagne a été et est l'un des plus ardents défenseurs de l'Ukraine... et continuera de l'être. Le président a une position claire et sans équivoque en faveur de l'Ukraine" (https://www.elespanol.com/mundo/europa/20220413/zelenski-... ).

Dans le magazine allemand Spiegel, Steinmeier a rappelé qu'en 2001, Poutine avait prononcé un discours en allemand au Bundestag même : "Le Poutine de 2001 n'a rien à voir avec le Poutine de 2022, que nous voyons maintenant comme un fauteur de guerre brutal et retranché" (https://www.elespanol.com/mundo/europa/20220413/zelenski-... ). Et qu'il attendait toujours "un reste de rationalité de la part de Vladimir Poutine" (https://www.spiegel.de/politik/frank-walter-steinmeier-ue... ).

Mais nous avons déjà montré de manière assez puissante dans les pages du Postmodernisme, en réfléchissant contre l'hystérie des politiciens et des journalistes, que Poutine n'est pas fou : https://posmodernia.com/putin-esta-loco/ .    

Signe des temps: l’hystérie électoraliste

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Signe des temps: l’hystérie électoraliste

par Pierre-Emile Blairon 

Elle ne semble pas naturelle, même si elle constitue comme un dernier appel au secours - un appel de détresse -  du peuple français pour sauver notre pays en danger de mort; mais cette injonction d’appeler à voter à tout prix vient après toute une série d’autres mots d’ordre issus des instances étatiques et mondialistes comme, entre autres: le « je suis Charlie », le « plus jamais ça », le droits-de-l’hommisme, l’antiracisme, le « Black lives matter », le covidisme, le « wokisme » et le dernier en date, l’ukrainisme, selon le bon mot de Michel Maffesoli.

L’originalité de cette hystérie électoraliste est qu’elle n’a pas été insufflée, comme les autres, par le Système, mais par une bouffée de démocratisme qui est venue submerger les milieux traditionnels.

Les esprits encore éveillés ont constaté avec effarement cette soudaine ferveur républicaine manifestée par un camp qui nous avait habitué à plus de circonspection dans ce domaine.

Il faut constater que le formatage des esprits depuis des siècles a bien fonctionné à tel point qu’il a pu influencer des esprits dont l’idéologie de base va exactement dans le sens contraire de cet endoctrinement.

Le fait est d’autant plus navrant que le système électoral, depuis surtout l’avènement au pouvoir du représentant attitré de l’Ordre mondial, n’a rien de très fiable et qu’il est fort possible que les résultats de ce premier tour de scrutin soient aussi truqués que ceux des sondages, et que ceux du deuxième le soient aussi, avec ou sans la complicité des autres candidats à la présidentielle.

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Démocratie et aristocratie

En effet, malgré tout ce qu’on a pu nous en dire, la démocratie « républicaine » n’est pas la « souveraineté du peuple »  tel qu’on peut le constater aujourd’hui: c’est le pouvoir du vulgaire, de l’argent, de la trahison, du mensonge, de la corruption, de la bêtise, de la brutalité.

L’inverse de la démocratie, comme système de gouvernement, c’est l’aristocratie, du grec aristos: le meilleur, et kratos: le pouvoir; aristocratie signifie donc  le pouvoir des meilleurs.

L’aristocratie et la démocratie sont tout à fait incompatibles pour la bonne raison que le supérieur ne peut émaner de l’inférieur.

A l’origine, au temps où ce que les historiens conventionnels appellent la préhistoire, un roi ne peut être élu mais il se dégage lui-même du peuple par intuition de sa charge – par désignation divine - qui est acte de sacrifice et d’abnégation au service de son peuple, de son sang et de son sol. Nous sommes donc loin de la sinécure et de la recherche de profits égoïstes.

L’aristocratie n’est pas une caste de nantis privilégiés comme les bons instituteurs socialistes nous l’ont appris dès l’enfance. La noblesse, avec laquelle on confond l’aristocrate, est celle de l’esprit, du coeur et de l’âme, le fort au service du faible, les valeurs millénaires de la chevalerie.

L’aristocrate a pour devise « noblesse oblige » qui signifie : ma noblesse m’oblige à venir en aide aux autres et à respecter les valeurs de loyauté, de courage, de justice, d’humilité, d’équité, etc.

L’aristocrate, dans le sens originel du mot, se sacrifie et meurt pour défendre les valeurs qui font la grandeur d’un peuple, d’une nation ou d’un empire.

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Les valeurs de la République

Que je sache, depuis la main-mise de la crapule républicaine sur le destin de la France en 1789, ces valeurs aristocratiques n’ont jamais pu être restaurées, même s’il y eut quelques tentatives après l’accession au pouvoir de Napoléon.

Les valeurs de la République se sont confondues avec celles de la démocratie telles que je les ai énoncées au début du paragraphe précédent, en y ajoutant des symboles exécrables tels que l’usage de la guillotine ou le génocide des Vendéens.

Depuis la mise en place qui semble définitive du système républicain, quelques soubresauts glorieux ont marqué certaines périodes de son histoire, si l’on excepte les guerres européennes qui ont vu sacrifier sur l’autel des intérêts financiers et déjà mondialistes nos paysans (l’âme de notre peuple) en 14-18 et la fine fleur de notre élite en 39-45.

Ainsi, la fin de l’empire colonial français a pu révéler, telle une résurgence du plus lointain passé de notre pays, l’éclosion d’actes de chevalerie et de grandeur accomplis par des hommes et des femmes qui avaient hérité de cette profonde mémoire; on doit se souvenir de ceux qui ont sauté sur Dien-Bien-Phu alors que tout était perdu et de ceux qui ont sacrifié leur vie à l’Algérie française pour défendre l’honneur de l’armée et l’intégrité du territoire  français.

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Ces glorieux combattants ne sont pas morts pour défendre le « pouvoir d’achat », la retraite à 60 ans ou la question de savoir si le voile peut être porté ou non dans l’espace public français.

Leur héritage a donné lieu à la création des mouvements nationalistes après la guerre d’Algérie, qui ont eux -mêmes donné le jour à l’accession de la famille Le Pen à la tête de l’opposition aux partis de « pouvoir ».

Gilets jaunes et résistants à la dictature sanitaire : deux mouvements révolutionnaires passés inaperçus

Depuis, ces militants dits « nationalistes » (dont je faisais alors partie) ont vieilli, se sont embourgeoisés et n’ont pas su assurer une relève efficace.

Pourtant, deux mouvements de nature authentiquement révolutionnaire sont nés dans l’indifférence quasi-générale de la mouvance qu’on nommera, faute de mieux, traditionnelle.

Le premier de ces mouvements, celui qu’on a appelé des « Gilets jaunes » à cause de la tenue que ses militants arboraient, est né le 17 novembre 2018 pour des raisons d’abord d’ordre utilitaire mais a réuni, dès ses premiers rassemblements, toute une frange du peuple français qui a manifesté pour protester essentiellement contre la disparition des valeurs traditionnelles qui structuraient la base même de la nation française; le mouvement a été ensuite rapidement récupéré par l’extrême-gauche au service du pouvoir en place.

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J’ai participé aux premières manifestations de ce mouvement où j’ai pu rencontrer des Français de tous horizons sociaux dont la principale préoccupation était d’ordre patriotique, si ce n’est spirituelle.

Je n’ai rencontré, au cours de ces différentes manifestations, aucun membre de la mouvance traditionnelle.

Le second mouvement a été constitué par l’ensemble des résistants à la pseudo-pandémie inventée par le système mondialiste pour soumettre par la peur la population planétaire.

Ce mouvement de résistance à Big Brother a été initié par quelques lanceurs d’alerte lucides, par d’éminents professeurs du domaine médical, par les soignants empêchés d’exercer leur métier et par quelques très rares hommes politiques, à la tête desquels s’est distingué en France Florian Philippot qui a méthodiquement organisé les manifestations réunissant chaque samedi des dizaines de milliers d’opposants à cette dictature sous couvert sanitaire.

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J’ai essayé en vain de rallier à cette cause la mouvance traditionnelle; je n’ai pas eu plus de succès que pour les Gilets jaunes.               

Faux rebelles confits dans leur confort

Ainsi donc, nationalistes, souverainistes, régionalistes, intellectualistes gravitant dans l’orbite traditionnelle supposée être antimondialiste se sont bien gardés, hormis quelques individualités, de participer à quelque action que ce soit qui pouvait laisser entrevoir qu’ils se révoltaient contre le système. Masqués, vaccinés, respectant scrupuleusement les gestes-barrières, faux rebelles confits dans leur confort, ces personnes me faisaient remarquer qu’il ne servait à rien de descendre dans la rue parce que le pouvoir ne tenait aucun compte de nos manifestations et de nos revendications.

Ce sont les mêmes qui viennent maintenant me donner des leçons de démocratie me faisant comprendre que je serais un mauvais citoyen si je n’allais pas mettre un bulletin dans l’urne alors que pas une seule fois depuis les débuts de cette sinistre mascarade républicaine (plus de deux cents ans), le peuple n’a pu avoir gain de cause et que, donc, le vote, masqué et truqué, encore moins que les manifestations, ne sert non plus à rien.

Un peuple digne et fier n’attend pas que des racailles à col blanc lui octroient quelques bribes de liberté ; il la prend et toute entière ; s’il ne peut pas le faire, c’est qu’il est déjà mort.

Pierre-Emile Blairon.

 

dimanche, 24 avril 2022

Jeffrey Sachs : l'arrêt de l'élargissement de l'OTAN est le chemin vers la paix

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Jeffrey Sachs : l'arrêt de l'élargissement de l'OTAN est le chemin vers la paix

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2022/04/21/jeffrey-sachs-naton-laajentumisen-pysayttaminen-tie-rauhaan/

On observe un changement intéressant parmi les universitaires américains: alors qu'auparavant, seuls les réalistes (comme le politologue John Mearsheimer) tenaient l'OTAN pour responsable de la crise actuelle en Ukraine, désormais, même les mondialistes comme Jeffrey Sachs reconnaissent que c'est exactement le cas. Sachs explique son point de vue dans un éditorial pour CNN.

Sachs estime que la stratégie américaine "visant à aider l'Ukraine à vaincre l'agression russe en imposant des sanctions sévères et en fournissant à l'armée ukrainienne des armes de pointe" a peu de chances de réussir.

L'économiste américain estime que la seule solution est un accord de paix négocié. "Toutefois, pour parvenir à un accord, les États-Unis devraient faire des compromis sur l'OTAN, ce que Washington a rejeté jusqu'à présent."

Selon la Russie, les négociations sont dans l'impasse. Avant de lancer son opération militaire, Poutine a présenté à l'Occident une liste de demandes, dont notamment "l'arrêt de l'expansion de l'OTAN". Les États-Unis n'ont pas voulu s'engager dans cette voie, mais M. Sachs estime que le moment est venu de "revoir cette politique".

Sachs se rapproche de la position des réalistes en matière de politique étrangère et de sécurité. Selon lui, "l'approche américaine en matière de transferts d'armes et de sanctions" peut sembler convaincante "dans la chambre d'écho de l'opinion publique américaine, mais elle ne fonctionne pas sur la scène mondiale". Selon M. Sachs, même aux États-Unis et en Europe, les sanctions bénéficient d'un "faible soutien" et un "retour de bâton politique" pourrait encore se produire.

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En Occident, il a été considéré comme acquis que l'action militaire en Ukraine mettrait la Russie dans la position d'un pion exclu. Selon Sachs, ce n'est pas le cas : les pays émergents en particulier ont refusé de se joindre à la campagne de l'Occident visant à isoler la Russie.

Cet échec s'est traduit tout récemment par le vote dirigé par les États-Unis visant à exclure la Russie du Conseil des droits de l'homme de l'ONU. "Il est vrai que 93 pays ont soutenu la démarche, mais 100 autres ne l'ont pas fait (24 se sont opposés, 58 se sont abstenus et 18 n'ont pas voté du tout). Plus important encore, 76 % de la population mondiale vit dans ces 100 pays".

La politique de sanctions américaines présente une "myriade de problèmes", selon l'économiste.

La première est que "si les sanctions causeront des difficultés économiques en Russie, il est peu probable qu'elles modifient la politique russe de manière décisive".

"Pensez aux sanctions sévères imposées par les États-Unis au Venezuela, à l'Iran et à la Corée du Nord", suggère Sachs. "Ils ont affaibli l'économie de ces pays, mais n'ont pas modifié leurs politiques de la manière souhaitée."

Deuxièmement, "les sanctions sont faciles à contourner, du moins en partie, et d'autres contournements sont susceptibles d'apparaître au fil du temps". Les sanctions américaines s'appliquent le plus efficacement aux "transactions en dollars impliquant le système bancaire américain".

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Les pays qui cherchent à contourner les sanctions trouveront des moyens de faire des affaires par des moyens autres que la banque ou le dollar. "Nous pouvons nous attendre à voir une augmentation du nombre de transactions en roubles, roupies, renminbis et non-dollars avec la Russie", prédit Sachs.

Le troisième problème, selon Sachs, est que la majeure partie du monde ne croit pas aux sanctions. "Lorsque vous additionnez tous les pays et territoires qui ont imposé des sanctions à la Russie - les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Union européenne, le Japon, Singapour, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et quelques autres pays - leur population combinée ne représente que 14 % de la population mondiale."

Le quatrième problème est "l'effet boomerang". Les sanctions à l'encontre de la Russie ne feront pas seulement du tort à la Russie, mais à l'ensemble de l'économie mondiale, entraînant une augmentation des perturbations de la chaîne d'approvisionnement, de l'inflation et des pénuries alimentaires. C'est pourquoi de nombreux pays européens continuent d'importer du gaz et du pétrole de Russie. "L'effet boomerang est également susceptible de nuire aux démocrates lors des élections de mi-mandat de novembre, car l'inflation ronge les revenus réels des électeurs", estime Sachs.

Un cinquième problème est "la demande inélastique et sensible aux prix des exportations russes d'énergie et de céréales". La chute des exportations russes entraînera une hausse des prix mondiaux de ces matières premières. La Russie pourrait se retrouver avec des volumes d'exportation plus faibles mais des revenus d'exportation presque identiques, voire plus élevés.

Le sixième problème énuméré par Sachs est - surprise, surprise - géopolitique. "D'autres pays - et surtout la Chine - voient la guerre Russie-Ukraine au moins en partie comme une guerre dans laquelle la Russie s'oppose à l'expansion de l'OTAN en Ukraine. C'est pourquoi la Chine soutient sans cesse que la guerre concerne les intérêts légitimes de la Russie en matière de sécurité", explique Sachs.

Les États-Unis aiment dire que l'OTAN est une "alliance purement défensive", mais la Russie, la Chine et bien d'autres pays ne sont pas d'accord. Sachs sait pourquoi. "Ils sont sceptiques quant aux bombardements de l'OTAN en Serbie en 1999, aux forces de l'OTAN en Afghanistan pendant 20 ans après le 11 septembre et aux bombardements de l'OTAN en Libye en 2011, lorsque Mouammar Kadhafi a été renversé."

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Les dirigeants russes s'opposent à l'expansion de l'OTAN vers l'est depuis qu'elle a commencé au milieu des années 90 avec la République tchèque, la Hongrie et la Pologne. De façon remarquable, lorsque Poutine a demandé à l'OTAN de mettre fin à son expansion en Ukraine, Biden a refusé catégoriquement de négocier avec la Russie.

De nombreux pays dans le monde, y compris une Chine montante, ne soutiennent pas une pression sur la Russie qui pourrait conduire à une expansion de l'OTAN. "Le reste du monde veut la paix, pas la victoire des États-Unis ou de l'OTAN dans une lutte de pouvoir avec la Russie", affirme Sachs.

Les États-Unis aimeraient voir Poutine vaincu militairement, mais il est peu probable que la Russie accepte la défaite et se retire. Les armes des États-Unis et de l'OTAN peuvent imposer des coûts énormes à la Russie, mais elles ne peuvent pas sauver l'Ukraine, qui sera détruite dans le processus, d'autant plus que l'Occident prolonge la crise.

Sachs affirme que l'approche actuelle "sape la stabilité économique et politique dans le monde et peut diviser le monde en camps pro-OTAN et anti-OTAN, ce qui est profondément dommageable à long terme, y compris pour les États-Unis eux-mêmes".

La diplomatie américaine punit donc la Russie, mais a peu de chances de réussir réellement en Ukraine, "en termes d'avancement des intérêts américains". Le véritable succès serait que les troupes russes rentrent chez elles et que la situation en Ukraine se stabilise. Ces résultats peuvent être obtenus à la table des négociations.

L'étape la plus importante, selon Saschi, serait que "les États-Unis, les alliés de l'OTAN et l'Ukraine fassent clairement savoir que l'OTAN ne s'étendra pas en Ukraine". Ensuite, les pays alignés sur Poutine et ceux qui ne prennent aucun parti diraient que "puisque Poutine a arrêté l'expansion de l'OTAN, il est maintenant temps pour la Russie de quitter le champ de bataille et de rentrer chez elle".

Sachs est convaincu que le discours musclé de Biden sur "le retrait de Poutine du pouvoir, le génocide et les crimes de guerre" ne sauvera pas l'Ukraine. "En donnant la priorité à la paix plutôt qu'à l'expansion de l'OTAN, les États-Unis gagneraient le soutien d'une plus grande partie du monde et contribueraient ainsi à apporter la paix en Ukraine et la stabilité dans le monde", estime-t-il.

Pour l'instant du moins, Washington ne partage pas l'avis de Sachs, mais un "soutien militaire plus direct" - artillerie lourde et drones - est toujours prévu pour l'Ukraine. Pendant ce temps, les Russes ont complètement encerclé les forces ukrainiennes dans la ville de Mariupol, dans la zone de l'usine Azovstal. Un tournant décisif sera-t-il bientôt atteint ?

Maurizio Murelli, éditeur de Douguine : "Voilà ce qui se cache derrière le conflit en Ukraine"

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Maurizio Murelli, éditeur de Douguine : "Voilà ce qui se cache derrière le conflit en Ukraine"

Propos recueillis par Umberto Baccolo

Source: https://www.spraynews.it/post/maurizio-murelli-editore-di-dugin-ecco-cosa-c-%C3%A8-dietro-al-conflitto-in-ucraina?fbclid=IwAR3bLG15a2tRE_RNlg0NHY8oM4EZH7Nvz88psQF6NvhLZ5qntYwkEytwa1w

Maurizio Murelli est un homme qui a le courage de ses idées, aussi impopulaires soient-elles et quel que soit le prix à payer, et depuis les années 1980, il mène une bataille culturelle et politique pour les diffuser. Anti-libéral, anti-américain, il est issu de la droite radicale, un milieu dans lequel il jouit encore d'un grand crédit, mais qu'il a depuis longtemps abandonné pour d'autres rivages : en particulier, la Quatrième théorie politique d'Alexandre Douguine, le philosophe et politologue russe que Murelli invite à parler en Italie depuis le début des années 1990 et qu'il traduit et publie ici. Il l'a d'abord fait avec sa propre Società Editrice Barbarossa et le magazine associé Orion, et maintenant avec AGA Editrice, qui a pris leur place.

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Murelli, comme Douguine, est l'un des rares intellectuels qui, dans ce conflit en Ukraine, se range ouvertement du côté des Russes, sans demi-mesure ni circonlocutions verbales. Dans cette longue interview, il explique en détail pourquoi, racontant ce qu'il n'a pas eu le temps d'expliquer complètement lorsqu'il était récemment invité à la télévision en prime time sur Rete4. Si, après avoir lu l'interview, vous êtes curieux de connaître sa figure atypique, je vous renvoie au film documentaire "Maurizio Murelli - Non siamo caduti d'autunno", que j'ai réalisé en 2020 et qui peut être visionné gratuitement sur YouTube, une chaîne où il a enregistré un certain nombre de visites.

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Dans votre analyse très suivie sur Facebook, vous expliquez que la vraie guerre n'est pas celle de l'Ukraine, car elle n'est qu'un front dans un affrontement plus vaste. Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là et quels sont les véritables éléments en jeu ?

L'Ukraine est un champ de bataille de la Grande Guerre mondiale à laquelle les États-Unis ont donné un nouvel élan et une accélération dans les années 1990 afin d'imposer leur ordre mondial au monde, se concevant, depuis leur naissance, comme la véritable Jérusalem terrestre, leur peuple comme le véritable "peuple élu" dont la mission messianique est de racheter toute l'humanité. Cette vision qui est la leur est bien expliquée par John Kleeves dans le livre "A Dangerous Country" qu'en tant qu'éditeur j'ai publié pour la première fois en 1998 et ai réédité chez AGA Editrice en 2017. Pour être plus précis, la Grande Guerre mondiale pour la conquête du monde a commencé bien avant les années 1990, lorsque - faisant passer la doctrine Monroe d'une échelle continentale à une échelle mondiale - ils sont intervenus en Europe pendant la Première Guerre mondiale, ce qui a permis aux États-Unis d'être décisifs dans la rédaction du traité de Versailles avec lequel ils ont élaboré une première ébauche du nouvel ordre mondial redessinant, de mèche avec les Britanniques, la géographie de l'Europe et aussi de l'Afrique. Ils ont franchi une nouvelle étape avec la Seconde Guerre mondiale, dans laquelle ils sont intervenus via le Pacifique. À cette époque, leur principal intérêt était d'établir leur propre domination dans la zone Pacifique en désintégrant le Japon. La dynamique liée au jeu des alliances a amené les États-Unis sur le théâtre de guerre européen qu'ils ont colonisé à la fin de la guerre. Et voici le Pacte deYalta, qui constitue pour les États-Unis une sorte d'"image fixe" dans leur progression vers l'établissement de leur propre domination mondiale. Les États-Unis se sont retrouvés libérés du pacte de Yalta à la fin des années 1980 avec l'implosion de l'URSS et après avoir réduit le Panama, qui voulait nationaliser le canal, à une peau de chagrin en arrêtant et traînant le président Noriega enchaîné dans sa propre prison ; ils ont commencé leurs guerres au Moyen-Orient, d'abord en parrainant la guerre contre l'Iran, puis en intervenant directement en Irak, puis en Syrie, en Somalie, en Libye et même en Europe contre la Serbie. Tous ces États étaient, avant les années 1990, alliés ou sous le parapluie protecteur de l'URSS. Ils ont promu la guerre de vingt ans contre l'Afghanistan tandis que, par diverses flatteries, ils ont incorporé dans l'OTAN - la feuille de vigne de l'armée américaine - plus ou moins tous les pays de l'ancien Pacte de Varsovie. L'Ukraine est restée à l'extérieur. Par le biais de diverses "révolutions colorées", ils ont tenté de miner de l'intérieur tous les autres États qui n'avaient pas encore été subjugués, jusqu'au coup d'État de Maidan en Ukraine. Il faudrait être myope ou de mauvaise foi, mais il faudrait aussi être un idiot cognitif, pour ne pas voir le schéma global de cette guerre mondiale, asymétrique et menée aussi avec des armes commerciales et des sanctions, souvent contre les Etats les plus faibles, comme ceux d'Afrique, où les Américains se présentent avec le Colt et le chéquier, pour les soumettre, d'une manière ou d'une autre, à leur propre domination. C'est dans ce cadre, certainement décliné en complot par les pontes, que je soutiens que l'Ukraine n'est qu'un des nombreux champs de bataille de la grande guerre biséculaire.    

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Vous avez longtemps pris vos distances avec la zone dite de la droite radicale, mais il est intéressant de noter que, tout comme dans la gauche radicale, cette situation a produit la plus violente fracture interne depuis longtemps. À votre avis, quelle en est la raison, car cette même crise russo-ukrainienne a créé des divisions aussi nettes et féroces entre les héritiers des idéologies du 20e siècle ?

Tant la "droite radicale" que la "gauche radicale" ne sont que les déchets des orthodoxies idéologiques de la première moitié du 20e siècle, des résidus humains qui vivent depuis des décennies sur des malentendus et des illusions. Tant la "droite" que la "gauche" ne sont pas les antagonistes du libéralisme, mais en sont l'expression directe. Ils sont progressivement conquis et enivrés par les valeurs libérales et à la fin, rayés de la carte, ils rivalisent entre eux pour être plus libéraux que les libéraux déclarés. La gauche vit un véritable psychodrame. La Russie, berceau du communisme inversé, a brisé la propre certitude centrée sur l'inéluctabilité du cours historique tel que conçu par la gauche. Dans leur album de famille, il y a l'oncle Lénine qui est renié et reste seul comme une momie emblématique sur la Place Rouge. Pour eux, il était inéluctable que le Quatrième État, celui du prolétariat, batte le Troisième État, celui de la bourgeoisie et du capitalisme. C'est le contraire qui s'est produit. Pour l'essentiel, l'aile gauche a d'abord répudié le communisme, puis a recherché de nouvelles échelles de valeurs progressistes, toutes raffinées et essentiellement individualistes. Au point que si vous mettez une centaine de gauchistes devant vous, il n'y en a pas deux qui puissent se superposer, c'est-à-dire qu'ils auraient la même idée de comment être de gauche. Et en fait, ils sont tous en conflit les uns avec les autres pour revendiquer l'authentique "forme de la gauche". Mais je dois m'arrêter ici, car toute la question serait trop longue à expliquer. Les événements en cours en Ukraine obligent la "droite" et la "gauche" à prendre parti, tout en restant discrets sur la question. Et si la "droite" et donc les divers néo-fascismes s'enlisent sur un terrain romantique en étant fascinés par les runes et les croix gammées dextrogyres, la gauche, et même ceux qui se sont déclarés communistes, deviennent des serviteurs objectifs de l'impérialisme atlantiste qu'ils ne reconnaissent pas comme tel, tandis qu'en définissant la Fédération de Russie comme un empire, ils ne l'acceptent pas comme tel. Il y a aussi une sorte de ressentiment irrépressible envers la Russie pour la façon dont elle est passée du communisme à autre chose. Et ils sont fascinés par l'idée de résistance et autres bêtises du genre. Je salue avec un énorme plaisir cette désintégration idéologique de la droite et de la gauche, du communisme et du fascisme. Le champ des malentendus est en train d'être nettoyé. Je suis heureux de les voir se tenir côte à côte sur le même front pour défendre les valeurs libérales, l'atlantisme et l'impérialisme atlantique. En restant sur cette position, ils débarrassent le champ des cadavres idéologiques en faveur de ceux qui se sont depuis longtemps libérés des malentendus, en faveur de ceux qui adoptent aujourd'hui une véritable position révolutionnaire et donc une fonction antilibérale.

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Pour en revenir à la question précédente, j'ai l'impression que beaucoup de gens, à commencer par Poutine lui-même et même Douguine qui parle de nazis et de dénazification, ont tendance à vouloir adapter cette situation à un affrontement entre les anciennes idéologies, où l'on ne sait plus très bien qui sont les nazis et qui sont les communistes. Je pense que cette façon de voir les choses est vieille et inefficace, cependant, que ce qui est en jeu n'est pas le fascisme et le communisme, qu'en pensez-vous ?

Tout d'abord, il faut partir du fait que les terminologies, et donc les langues, utilisées en Occident et celles utilisées en Orient, ce qui vaut également pour la Chine, l'Inde, etc., ne sont pas superposables car elles sont différentes. Pour les détenteurs du pouvoir, les terminologies doivent agir sur ce qu'on appelle l'imaginaire collectif, et les imaginaires en Orient sont différents de ceux qui circulent en Occident. Dans l'imaginaire collectif russe, le nazisme est l'idéologie qui a tenté d'anéantir l'identité russe et qui a fait 26 millions de victimes russes. La Seconde Guerre mondiale se décline en guerre patriotique, c'est-à-dire en guerre pour la défense de l'identité russe que les nazis voulaient nier. Ainsi, en se mettant au service de l'atlantisme, les Ukrainiens ont en fait sublimé les nazis en niant l'identité russe. Il faut garder à l'esprit que non seulement il y a eu huit ans de guerre dans le Donbass pour éradiquer les russophones et les russophiles, mais que durant ces mêmes huit années, il y a eu une répression meurtrière à l'intérieur de l'Ukraine, qui a pris la forme d'une persécution de la culture russe, d'une interdiction de l'utilisation de la langue russe, de la mise hors la loi des partis russophones et d'une série d'assassinats ciblés, de persécutions physiques et d'emprisonnements, des faits dont personne ne parle mais qui sont pourtant bien documentés. Poutine voit dans tout cela une action nazie. Personnellement, je pense que l'adoption par Poutine du concept de "dénazification" a également une valeur tactique: il voulait anticiper l'utilisation de l'épithète "nazi" à son encontre, car c'est ce que fait l'Occident lorsqu'il veut objectiver comme un mal absolu ceux qui sont ses ennemis; il l'a également fait avec Saddam, Assad, Milosevic, etc. Quant à Douguine, il sait très bien que le nazisme en circulation aujourd'hui n'a rien à voir avec le nazisme historique (quoi qu'on pense du nazisme) et l'identifie comme un néo-produit du libéralisme, un faux nazisme créé en "laboratoire" par ceux qui n'ont aucun problème à l'exploiter de diverses manières, selon leur convenance, en la désignant comme un danger dans certains contextes, à d'autres moments, dans d'autres contextes - comme dans le cas de l'Ukraine ou, pour ne citer qu'un exemple, comme au Chili dans les années 1970 - comme quelque chose de bénéfique. Selon Aleksandr Douguine, donc, le nazisme, le fascisme et le communisme étaient une réponse au libéralisme tout au long de la Modernité. Sa position nous place au-delà de la post-modernité (celle dans laquelle nous vivons aujourd'hui) et de la modernité, celle dans laquelle nous vivons hier, et se situe précisément dans la pré-modernité, c'est-à-dire dans le monde de la Tradition. Par conséquent, en ce sens, il est anti-nazi. Il faut également admettre que la remise en jeu du nazisme par Poutine est l'une des causes du court-circuit déterminé dans la "droite" et la "gauche" et que, par conséquent, dans la perspective de leur désintégration, il s'agissait d'une remise en jeu efficace et bénéfique".

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D'autre part, en parlant du monde de l'information, vous dénoncez - en apportant beaucoup de vidéos et de témoignages et de preuves à l'appui - que les médias sont très partiaux et ne font que de la propagande, nous abreuvant de beaucoup de mensonges, afin de pousser les gens à accepter les conséquences économiques d'une crise avec les Russes, en les mettant en exergue et en exaltant les Ukrainiens. Cependant, une chose doit être dite: dans nos talk-shows et nos journaux, une large place est accordée à ceux qui théorisent que les Ukrainiens doivent se rendre, que nous ne devons pas intervenir, et que Poutine a ses nombreuses bonnes raisons: outre les divers Orsini et Canfora, intellectuels de gauche respectés, et l'ANPI de Pagliarulo, nous avons même trouvé beaucoup de place pour Douguine et aussi pour vous, des figures souvent diabolisées... Comment voyez-vous cela ? S'agit-il d'une question de respect du pluralisme ou d'autre chose ?

Il y a un cas d'école que personne ne mentionne. En 1990, une femme s'est présentée au Congrès américain en tant qu'infirmière réfugiée du Koweït, racontant des horreurs indicibles commises par les troupes irakiennes, telles que des enfants jetés sur des baïonnettes, des viols et des massacres généralisés, un récit qui a été immédiatement soutenu même par Amnesty International, ainsi que par tous les médias occidentaux. Le témoignage de l'infirmière autoproclamée a déclenché l'indignation qui a conduit à l'opération "Tempête du désert", la première guerre du Golfe en Irak.

Cependant, le témoignage de l'infirmière Nayirah était un mensonge colossal, à commencer par le nom avec lequel elle s'est présentée. Son vrai nom était, en fait, Saud al Sabath, et elle n'était ni une réfugiée ni une infirmière pauvre, mais la très riche fille de l'ambassadeur du Koweït aux États-Unis. Il a fallu attendre 1992 pour découvrir la vérité révélée par le New York Times, qui a également documenté la façon dont le canular a été conçu par une agence de publicité, Hill & Knowlton (le lavage de conscience médiatique posthume typique: jamais la dénonciation du bobard n'a lieu alors que le mensonge est flagrant). Ce faux témoignage repris sans critique par les médias occidentaux a servi à galvaniser et à pousser les masses à donner leur consentement à la guerre d'invasion de l'Irak. Une "petite guerre" qui a coûté la vie à 100.000 Irakiens, dont 2300 civils. Plus célèbre est le canular utilisé comme casus belli pour la deuxième guerre du Golfe, l'exposition par Colin Powell à l'ONU de la fameuse fiole qui, selon le général qui s'était recyclé dans la politique, contenait suffisamment d'anthrax pour exterminer la population d'une grande ville. Cet autre canular, qui, comme le premier, a galvanisé les Occidentaux, a coûté une "petite guerre" qui a duré huit ans et fait 63.000 victimes civiles plus environ 8.000 militaires. C'est plus ou moins le même schéma qui est utilisé en Ukraine, avec une méthode beaucoup plus harcelante, la quasi-totalité des soi-disant correspondants de guerre se faisant passer pour des témoins oculaires et se laissant mener par les milices ukrainiennes qui leur montrent ce qu'ils veulent voir et leur disent ce qui leur convient le mieux. Si l'un de ces correspondants essayait de dire aux Ukrainiens quelque chose qu'ils n'aiment pas, nous verrions combien de minutes il lui faudrait pour recevoir un ordre de quitter le territoire. Il y a trois ou quatre correspondants de guerre occidentaux sur le front russe. Il faut aller sur les télévisions russes, chinoises, arabes, indiennes et africaines, ainsi que sur les chaînes Telegram pour voir une réalité totalement différente. J'ai archivé une centaine de films du front russe, réalisés par des journalistes indépendants, dont aucun ne sera jamais diffusé à la télévision grand public. "Une large place est accordée dans les talk-shows à ceux qui avancent des points de vue opposés à ceux des pro-Ukraine" dites-vous ? Je suis plus ou moins tous ces talk-shows où ceux qui s'expriment contre le récit atlantiste sont mis devant une sorte de peloton d'exécution; des duels à un contre dix, où l'animateur interrompt avec ses remarques souvent déplacées afin de frustrer le récit du dissident, puis, fatalement, diffuse les publicités quand il a l'intention de faire taire le récit qui est désagréable pour lui. Au fait, si, au moment de la soi-disant urgence sanitaire pandémique, quiconque passait à la télévision et s'écartait du récit de Speranza & C. devait faire précéder sa déclaration de: "Je suis vacciné et sur-vacciné mais, en ce qui concerne.... Je ne suis pas d'accord", ici chacun doit d'abord faire profession d'amour inconditionnel pour l'atlantisme, dire que la Russie est un envahisseur et l'Ukraine une victime, que Poutine est un monstre, etc. Bien sûr, ils doivent soutenir qu'en Italie il y a une information pluraliste et pour cette raison ils donnent un peu d'espace à ceux qui ont des positions légèrement différentes. Sauf à les massacrer et à les obliger à s'exprimer entre un film horrible et larmoyant et un autre. Chaque jour, je reçois des demandes pour passer à la télévision ou pour favoriser la présence de Douguine. Je n'ai accepté qu'une seule fois, et Aleksandr Douguine que je protège, en dictant les conditions de l'émission. Quand ils n'acceptent pas et sont intelligents, malgré les supplications, Douguine ne passe pas à la télévision. Laissez-les faire leur propre petit théâtre.   

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Enfin, vous êtes doué pour faire des prédictions. Selon vous, quelles seront les conséquences à court, moyen et long terme de ce conflit pour l'Italie ? Et comment pensez-vous que le conflit va se poursuivre ?

Pour l'Italie, à court et moyen terme, elles seront catastrophiques. Ce n'est pas moi qui le dis, mais divers analystes universitaires du domaine économico-financier, sans exclure ceux de la Confindustria, qui le disent. Il est prévu qu'aux alentours de juin-juillet, 570.000 travailleurs seront licenciés et mis à pied, et que 26.000 entreprises fermeront. Il y aura une pénurie de tous les métaux et "terres rares" nécessaires au fonctionnement de certaines entreprises, des engrais, de la farine pour les pâtes et le pain, etc. L'inflation (qui pour un citoyen devient une surcharge) devrait atteindre 8%. Pour se passer du gaz russe que nous allons quémander en Afrique dans des pays qui sont tout sauf stables, nous devrons payer au moins trois fois plus... et de toute façon nous ne pourrons jamais remplacer les 29 milliards de mètres cubes de gaz que nous prenons en Russie, quoi qu'en dise le trio Conte-Cingolani-Di Maio. Avec les sanctions, nous allons détruire des milliers d'entreprises italiennes qui font du commerce avec la Russie, nous allons perdre les revenus du tourisme russe..... À long terme, ce sera encore pire. Nous entrerons en récession avec les autres pays européens. En dernière analyse, il s'agit d'une guerre américaine contre l'Europe, que les Américains ont forcée à se priver du poumon primaire russe et, en perspective, du poumon secondaire chinois. Compte tenu de ce scénario, il est facile de comprendre l'action meurtrière consistant à évoquer la monstruosité russe. Les citoyens doivent être convaincus que la Russie est objectivement responsable de la misère à laquelle ils devront faire face. Cependant, la Russie s'en sortira bien, bloquant avec la Chine cette partie du monde où il y a plus de trois milliards de nouveaux consommateurs potentiels, où il y a ceux qui aspirent à passer de la bicyclette à la moto et ceux qui aspirent à passer de la moto à la voiture. Un marché énorme.

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Dernière chose : les erreurs de notre gouvernement. À votre avis, quels étaient les plus graves et comment le gouvernement aurait-il dû agir dans ces cas-là pour protéger les intérêts des citoyens ?

Nous n'avons pas de gouvernants. Nous avons des serveurs, des serviteurs inconscients qui ne veulent que faire plaisir à leurs maîtres d'outre-mer. Draghi, d'ailleurs, bien soutenu à la fois par la coalition qui le soutient et par la pseudo-opposition de Meloni, est parmi les serviteurs imbéciles des USA, le faucon, celui qui a suggéré, par exemple, de stériliser la banque centrale russe. Cette masse de serviteurs du gouvernement est incapable de protéger les intérêts des citoyens. J'espère que, le moment venu, ils ne resteront pas impunis et qu'ils seront appelés à rendre compte du désastre qu'ils ont préparé. Une chose me console: historiquement, l'Italie est sortie d'un conflit en tant qu'alliée de ceux qui étaient ses ennemis au début du conflit, et ceux avec qui elle est entrée en conflit sont sortis de ce même conflit en tant que perdants. Je ne suis pas de ceux qui croient en la vertu théologique chrétienne de l'"espérance", mais faisant une exception pour une fois, j'espère et donc je souhaite que d'une certaine manière, à la fin de cette phase de la Grande Guerre, les alliés actuels de l'Italie sortent vaincus et que d'une certaine manière l'Italie se retrouve au moins réconciliée avec la Russie, un pays avec lequel nous avons de grandes affinités électives, artistiques, culturelles, métaphysiques, par opposition à ce que nous partageons avec l'Empire du Mal, les États-Unis, qui nous accable de valeurs décadentes. Tôt ou tard, quelqu'un devra se demander pourquoi aux Etats-Unis, tous les deux jours, un psychopathe entre dans une école, un supermarché, un bâtiment administratif et tue comme si de rien n'était. Une nation de psychopathes qui nous contamine depuis des décennies et avec laquelle, en tant que vrais Européens, nous n'avons rien à faire. Entre autres choses, ils sont comme un arbre sans racines qui a grandi en se nourrissant du massacre et du meurtre de peuples, à commencer par les Amérindiens. L'Europe a de nombreuses racines et si certaines se sont taries, d'autres fonctionnent encore. C'est la nourriture qui monte à l'arbre à partir de ces racines qui rachètera l'Europe et la réconciliera avec sa composante géopolitique à l'Est.

Par Umberto Baccolo.

La revue de presse de CD - 24 avril 2022

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La revue de presse de CD

24 avril 2022

EN VEDETTE

Harari et "l'homme numérique de demain" : les projets inquiétants du Forum de Davos

Certains le connaissent, d’autres pas. Pourtant, son rôle est majeur au sein du Forum économique mondial, puisqu’il en est le conseiller principal. Yuval Noah Harari est un écrivain et historien israélien, auteur du best-seller "Sapiens", ouvrage qui ajoute la science à l'histoire de notre humanité entière. En 2018 déjà, avant la pandémie mondiale, il évoquait les concepts de l’homme numérique de demain. Cet homme serait celui que l’on pourrait "pirater", pour lequel la vie n’aurait plus de sens réel. Les dirigeants devraient alors tout mettre en œuvre pour remédier à cela, notamment grâce aux jeux vidéos et aux médicaments. Le bras droit de Klaus Schwab s’est également fait connaître avec son second tome : "Homo Deus".

Francesoir.com

https://www.francesoir.fr/societe-science-tech/yuval-hara...

DÉSINFORMATION/CORRUPTION

L’Observatoire des sources, reflet direct de l’idéologie Wikipédia

Wikipédia promettait le règne de la foule éclairée, il est en réalité celui de minorités militantes. L’encyclopédie reflète l’activisme subversif de la gauche de la gauche libérale libertaire. Dernier exemple en date : l’Observatoire des sources de la communauté Wikipédia. Ce nouvel outil permet de perpétuer les préjugés dominants et d’excommunier les sources alternatives.

Ojim.fr

https://www.ojim.fr/observatoire-des-sources-wikipedia/

Macron aime tendrement l’internet très régulé

Pour Macron, Internet, c’est très mignon, mais ce serait nettement mieux sans anonymat et avec des réseaux sociaux à la botte du pouvoir.

contrepoints.org

https://www.contrepoints.org/2022/04/20/425648-macron-aim...

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ÉCOLOGIE

La nouvelle place des émotions dans le militantisme écologiste

Interpeller à tout prix. Voici sans doute le mot d’ordre des actions de désobéissance civile d’Extinction Rebellion pendant ce week-end de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle 2022. La radicalité de leur militantisme écologiste est symptomatique de la manière dont le dérèglement climatique n’est plus seulement une question politique, mais existentielle, intime. L’angoisse parsème les conclusions apocalyptiques du dernier rapport du GIEC. Longtemps délégitimées, à cause de leur éloignement d’une raison cartésienne objective, les émotions sont aujourd’hui largement reconsidérées, voire revalorisées, en (science) politique. Dans la sphère écologique, la frontière entre objectivité et subjectivité n’en donc que plus ténue, des militants aux chercheurs eux-mêmes.

Theconversation.com

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ÉCONOMIE

Qui est isolé ? La guerre en Ukraine dans son contexte géoéconomique, par Jacques Sapir

La guerre entre la Russie et l’Ukraine a mis en évidence une profonde fracture entre le monde « occidental » » et le reste du monde. Cette fracture survient dans un contexte de démondialisation accélérée. Cette dernière est devenue une évidence depuis la crise des subprime de 2008-2010 qui n’a jamais été surmonté complètement. Elle s’est accentuée avec l’épidémie de la Covid-19 et, aujourd’hui, avec les conséquences de la guerre résultant de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Se réveillent alors de vieilles peurs. Et si cette démondialisation annonçait le retour au temps des guerres ?

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/qui-est-isole-la-guerre-en-ukra...

ÉNERGIES

Le cas de guerre économique Nord Stream 2

La guerre en Ukraine donne un éclairage particulier sur les enjeux énergétiques sous-jacents à ce conflit. La remise en question du projet de gazoduc Nord Stream 2 éclaire d’une part sur la manière dont la France a été indirectement visée et le risque encourus pour des entreprises françaises tout au long d’un imbroglio de sanctions.

Ege.fr

https://www.ege.fr/infoguerre/le-cas-de-guerre-economique...

Compensation des exportations boycottées de pétrole russe. L'Opep dit : niet !

L'Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés n'ouvriront pas davantage leurs vannes pour suppléer les barils russes menacés d'embargo par l'Union européenne.

Lexpressiondz.com

https://www.lexpressiondz.com/economie/l-opep-dit-niet-35...

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ÉTATS-UNIS

Popularité en vrille d'un Joe Biden lâché par les sénateurs démocrates

Arrivé au pouvoir avec 81,2 millions de voix, le vote le plus plébiscitaire de l’histoire américaine fomenté par le mot d’ordre de barrage à Donald Trump, Joe Biden ne jouit désormais en avril 2022, à mi-terme de son mandat, que d’approximativement 40 % de taux d’approbation, selon toutes les études. Le taux le plus bas de l’histoire contemporaine américaine, après Jimmy Carter.

Francesoir.fr

https://www.francesoir.fr/politique-monde/popularite-en-v...

Madeleine Albright était une impérialiste meurtrière

Madeleine Albright est morte à 84 ans. Pionnière de l’impérialisme, elle prônait avec passion un recours accru à la violence meurtrière dans la poursuite d’un ordre mondial post-Guerre froide dominé par les États-Unis – et a tué de très nombreuses personnes dans le cadre de ce processus.

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/madeleine-albright-etait-une-im...

Yémen : les attaques saoudiennes se sont multipliées après le nouveau soutien des États-Unis

Les chiffres ne mentent pas : les attaques saoudiennes contre le Yémen se sont multipliées après le nouveau soutien des États-Unis. Cela fait déjà sept ans, mais l’administration Biden semble moins susceptible que jamais de tenir sa promesse de contribuer à mettre fin à la guerre.

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/yemen-les-attaques-saoudiennes-...

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L’Oncle Sam, grand gagnant de la guerre en Ukraine

On ne compte plus les perdants de la guerre en Ukraine : l’Ukraine, la Russie, les pays européens et nombre de pays dépendant des céréales importées de Russie et d’Ukraine, telle l’Égypte. En revanche, les États-Unis tirent d’ores et déjà de la guerre des profits substantiels. Bien que partiel, l’embargo sur les sources d’énergie russes non seulement favorise les États-Unis, mais divise l’Union européenne, constate le New-York Times (14 avril, en lien ci-dessous). Cela n’a évidemment pas échappé à Vladimir Poutine qui annonce une perturbation majeure de l'économie mondiale si les pays occidentaux décidaient de proscrire totalement l’importation de pétrole et de gaz russes.

laselectiondujour.com

https://www.laselectiondujour.com/loncle-sam-grand-gagnan...

11 Septembre : Nouvelles preuves de l’implication saoudienne, et tout le monde s’en moque

Le FBI a discrètement révélé de nouvelles preuves de la complicité du gouvernement saoudien dans les attentats du 11 Septembre – et rien ne s’est passé.

les-crises.fr

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FRANCE

Après la fin de Barkhane, le Sahel à l’épreuve du conflit en Ukraine

Au Sahel central, l’annonce du retrait partiel de l’opération militaire française Barkhane laisse la région face à des défis sécuritaires majeurs dans le contexte d’une progression des groupes armés terroristes dans la région et d’une recrudescence des attaques. À ces incertitudes s’ajoutent les possibles répercussions dans la région de la récente offensive russe en Ukraine, l’attention de la France et de ses alliés européens ayant pivoté vers l’est de l’Europe au détriment de l’Afrique. Importateur de matières premières agricoles et énergétiques, le Sahel subit en outre une hausse des prix importante avec un risque de contestation sociale et de détérioration sécuritaire à la clé.

Revueconflits.com

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Macron supprime le corps diplomatique entre les deux tours

En plein dimanche pascal, ce 17 avril 2022, un décret est passé en catimini au Journal officiel. Il annonce la « mise en extinction », d'ici à 2023, des conseillers des affaires étrangères et des ministres plénipotentiaires. Concrètement, au lieu de disposer de cadres de la haute fonction publique, formés tout exprès à représenter les intérêts de la France à l'étranger, c'est un « vivier » de cadres dits « de catégorie A+ » qui pourront être employés, indifféremment, comme diplomates, tout comme ils auraient pu être inspecteurs des finances ou sous-préfets.

bvoltaire.fr

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GAFAM

L’Europe renforce sa législation sur le numérique, Apple double ses dépenses en lobbying à Bruxelles

Tentatives pour améliorer leur image en Europe, rencontres entre les membres de la direction de la Commission européenne et les représentants des leaders du numérique (américain d’abord, mais aussi chinois), tentatives pour diluer les textes… Autant d’actions mises en œuvre par les GAFAM à la Commission européenne entre 2021 et 2022 alors que l’agenda législatif européen a été plus chargé que jamais, en particulier dans le secteur du numérique, actions qui se traduisent par une explosion des dépenses en lobbying du géant du secteur. 

Portail-ie.fr

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GÉOPOLITIQUE

La crise ukrainienne à travers les yeux du monde arabe

En Asie de l'Ouest (le "Moyen-Orient" en termes occidentaux), l'opération spéciale de la Russie est très présente dans les médias sociaux de la région. Les analystes locaux surveillent également la façon dont l'Internet réagit à ces événements et leurs implications dans différents domaines de la vie et de la politique.

Euro-synergies.hautetfort.com

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Les retombées géopolitiques de la guerre en Ukraine

Les conséquences de la guerre des Russes en Ukraine sont innombrables : si les pays européens ont unanimement condamné l’intervention russe en Ukraine, il n’en est pas de même pour la plupart des pays du Moyen-Orient et de la sphère eurasiatique … Après le refus de la Chine et de l’Inde de condamner l’opération militaire russe en Ukraine, il semblerait que les pays du Moyen-Orient tentent d’éviter une brouille avec la Russie.

geopragma.fr

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La-Litterature-a-balles-reelles.png

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LECTURE

Titre :

La littérature à balles réelles, de Bruno Lafourcade. Jean Dézert éditeur ; 2021.

Auteur :

Romancier et essayiste, collaborateur notamment à la revue Éléments, Bruno Lafourcade est un écrivain sévèrement burné ! « Cash », comme écrivent les journalistes d’aujourd’hui dans leur blougi bougla sirupeux qu’il exècre.

Présentation :

Un abécédaire dont « la jalousie m’a dicté ces pages : auteur sans lecteurs, souvent sans éditeur, l’échec m’a aigri ; […} » Un humour qui tue ; une méchanceté qui ravit : Lafourcade est notre Lucky Luke de la littérature contemporaine. Il tire plus vite qu’il ne lit. Il a raison. Le temps est trop précieux pour le gâcher. Il nous venge de toutes les conneries que, parfois, nous subissons malgré nous. Grâce lui soit rendue.

Extraits :

L’autofiction : « […] on n’a jamais écrit et pensé qu’en ‘’faisant des amalgames’’. On n’écrit pas La pauvreté et ses conséquences à Paris du 22 au 25 février 1848 : on écrit L’Éducation sentimentale. ».

Frédéric Beigbeder : « L’insignifiance a rarement l’ambition de se limiter à elle-même : elle poussa Beigbeder dans la presse, à la télévision, au cinéma, toujours avec le même succès, et le même malheur, car c’est en un d’être Beigbeder quand on sait que l’on ne sera jamais que cela : un noceur et non un poète, un publicitaire du roman et non le romancier de la publicité, un chroniqueur de cette province américaine qu’est devenue la France et non l’écrivain de l’Amérique. Il ne sniffe pour rien d’autre. »

Renaud Camus : « On sait qu’un brelan de branleurs fait à Renaud Camus depuis des années une réputation de phobique multisphérique – je n’y reviens pas ici, tant tout cela est lassant. Je précise toutefois que par branleur je désigne la machine. Exactement la branleuse, qui en imprimerie sert, ou servait, à égaliser les feuilles après les avoir passées au massicot : ceux dont je parle, les as de la branleuse, massicotent les opinions et els égalisent. C’est une profession, c’est une ambition ; il y a des gens qui rêvent d’être Vidocq ou Vinteuil ; et d’autres de branler et massicoter aux Inrockuptibles.  Chacun sa vocation. »

Cinéma. « C’est quand un écrivain réalise un film que l’on sent le mieux qu’il est un mauvais écrivain. »

Collusion. « Olivier Adam, sur Europe 1, dénonce ‘’un milieu littéraire où il y a beaucoup d’entre soi, de collusion et de coups bas’’, car c’est sans collusion ni entre soi que l’on obtient, comme lui, le prix Goncourt de la nouvelle, le prix France Télévisions, le prix RTL-Lire, et que l’on est sélectionné pour le Goncourt ; que l’on obtient une chronique mensuelle dans Libération, que l’on est nommé chevalier des arts et des lettres, que l’on se retrouve à la Villa Kujoyama. Les collusions et l’entre soi, il ,e sait même pas ce que c’est, Olivier Adam, il est trop modeste, trop pur, trop moral, trop peu compromis, ni les coups bas, sauf quand il faut se mettre, à cent contre un, pour obtenir la tête de Millet, en signant la lettre-pétition d’Ernaux. »

Croissance ? « Livres Hebdo vient de publier la liste des dix éditeurs ‘’qui ont connu la plus forte croissance de 2017 à 2018’’. Panini France, le fabricant d’albums d’images autocollantes. »

Écologie. « A côté de la petite troupe des écrivains polluants, il y a l’énorme masse des écrivains zéro-carbone, les sauveurs de planète et de migrants, qui se battent contre la souffrance animale, la fonte des glaciers et les naufrages de la Méduse. Ils écrivent sans sucre, sans graisse, sans gluten, sans viande et sans CO2, mais avec beaucoup d’ouverturozôtres. Alors, évidemment, leur littérature-quinoa, elle est assez fade. C’est pour ça qu’ils sont obligés d’y mettre du souchien fasciste ; ça épice. »

David Foenkinos. « Sa Délicatesse est bouleversante de niaiserie, sa Charlotte poignante de platitude ; l’ensemble ignoble à force d’être soumis à une modestie de façade. Foenkinos est traduit dans le monde entier ; dans un monde juste, il le serait devant les tribunaux. »

Générations. « C’est la génération qui les précède née au milieu des années soixante, qui pourrait bien surprendre tout le monde. Il faut dire qu’on ne l’attendait plus. Longtemps ignorée, étouffée, réduite aux mêmes et pénibles têtes de gondole, elle commence à donner – avec Patrice Jean, Matthieu Jung, Olivier Maulin, Nicolas Fargues, d’autres encore – des fleurs qui s’épanouissent dans le refus de l’époque. »

Bruno Lafourcade (lui-même). « Il fait penser à un maître d’école qui ferait payer à ses élèves ses échecs répétés à l’agrégation : quand il malmène un auteur, c’est sa propre faillite qu’il se reproche – et doublement : en ne renonçant pas tout à fait à écrire, il a même raté son ratage. »

Yann Moix. « En passant d’un roman d’amour à celui d’un sosie de Claude François, de la vie d’un chanteur américain à celle d’une sainte morte à Auschwitz, il offre une cohérence dans l’obscénité qui fait froid dans le dos. »

Plagiaires. « Il y a deux catégories de plagiaires, et ils ont tous pourtant des points communs : jamais leurs pillages ne les ont discrédités ; ne les ont contraints, sauf Gilles Bernheim, à démissionner des fonctions qu’ils occupent dans les chaînes et les journaux ; ne les ont empêchés de publier, et d’en appeler à la ‘’moralisation de la vie publique’’. Leur cynisme n’a pas plus de limite connue que leur impunité. ‘’Je ne compte pas mes emprunts, a dit un jour Jacques Attali, je les pèse.’’ »

« Ce qui constitue le mauvais écrivain, c’est de croire, par un automatisme putassier, qu’il faut se montrer ému pour émouvoir. »

indexsendixm.jpgRÉFLEXION

Xénophon, les Dix-Mille

Les Dix-Mille de Xénophon est republié chez Phébus dans une édition établie par Pascal Charvet et Annie Collognat. C’est un livre qui raconte notre présent et qui dit les enjeux géopolitiques qui sont les nôtres. Un livre qui raconte l’histoire des Grecs et qui dit aussi notre histoire.

Revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/xenophon-les-dix-mille/?utm...

SANTÉ/MENSONGES/LIBERTÉ

Médecine et totalitarisme (1/5)

Cet écrit fait suite à une lettre ouverte adressée à trois confrères du conseil de l’Ordre des médecins, restée sans réponse. Il s’agit d’une réflexion sur la responsabilité des médecins dans ce que je pense être le plus grand désastre sanitaire, à savoir l’injection généralisée d’un produit expérimental à base d’ARNm de la protéine spike du Sars-CoV-2.

lesakerfrancophone

https://lesakerfrancophone.fr/medecine-et-totalitarisme-1-5

Covid dans les médias : en parle-t-on toujours autant ?

Tagaday, a observé et mesuré l’évolution médiatique du Covid-19 dans les médias français depuis le début de la pandémie. Entre janvier et février 2020, aux prémices de la pandémie, le Covid faisait l’objet de 880 articles par jour en moyenne « seulement », moins de 1% des sujets traités dans les médias français. Le 20 mars 2020, quatre jours après l’annonce du 1er confinement, le sujet dépassait tous les records avec 19 187 citations sur une seule et même journée. 25 mois plus tard, alors que le conflit ukrainien et l’élection présidentielle accaparent les esprits, qu’en est-il de la couverture médiatique réelle du Covid sur l’ensemble de cette longue période ?

breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2022/04/21/185420/covid-dans-...

Comment-fonctionne-la-reconnaissance-faciale-1000.jpgUNION EUROPÉENNE

L'UE se prépare à construire un énorme système international de reconnaissance faciale

Au cours des 15 dernières années, les forces de police à la recherche de criminels en Europe ont pu partager entre elles des empreintes digitales, des données ADN et des informations sur les propriétaires de véhicules. Si les autorités françaises soupçonnent que quelqu'un qu'elles recherchent se trouve en Espagne, elles peuvent demander aux autorités espagnoles de vérifier les empreintes digitales dans leur base de données. Désormais, les législateurs européens sont sur le point d'inclure des millions de photos de visages dans ce système et de permettre l'utilisation de la reconnaissance faciale à une échelle sans précédent. L'expansion de la reconnaissance faciale à travers l'Europe est incluse dans des plans plus larges de « modernisation » des services de police à travers le continent, et elle relève des propositions de partage de données Prüm II.

Intelligence-artificielle.developpez.com

https://intelligence-artificielle.developpez.com/actu/332...

Agressions sexuelles à Milan par une meute d’étrangers

Une eurodéputée (ID) demande à la Commission si ce phénomène qui se propage en Europe a été étudié et s’il sera combattu. Réponse : cela n’a pas de rapport avec l’immigration.

fdesouche.com

https://www.fdesouche.com/2022/04/22/agressions-sexuelles...

samedi, 23 avril 2022

Macron-Le Pen: un dialogue entre sourds qui oublient le sens des mots

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Macron-Le Pen: un dialogue entre sourds qui oublient le sens des mots
 
par Frédéric Andreu

Les dialogue de sourds sont souvent les plus bruyants. Emmanuel Macron et Marine Le Pen viennent d'en donner une démonstration éclatante ce jeudi 21 avril 2022 à la faveur du traditionnel débat de l'entre-deux tours des élections présidentielles. Au cours du débat télévisé, le premier accusa la seconde de "nationalisme étroit", tandis que la seconde le qualifia d'"euro-mondialiste" et d'"incompétent", autant de noms d'oiseaux qui ne volèrent pas très haut.

"Incompétent" n'est d'ailleurs pas le mot que j'aurai personnellement choisi pour qualifier la politique du capitaine Macron au gouvernail de la France depuis cinq ans. Cela tombe bien, je ne fus pas convié au débat. Je dirai même que le Young Leader applique son plan politique avec une redoutable efficacité.
 
L'équation politique que veut résoudre Macron peut se résumer en ceci : créer les conditions d'une souveraineté européenne dans le cadre d'une Europe basée sur des valeurs qui ne sont pas européennes. Le comble est qu'il veut résoudre cette équation à partir d'un pays européen - la France - qui n'a plus de souveraineté depuis 200 ans, depuis le soir de la bataille de Waterloo pour être précis.

Mais ne rentrons pas dans un débat entre historiens qui nous obligerait à choisir entre gentils droits-de-l'hommistes et méchants complotistes. Ce débat-là ne nous intéresse pas.
 
Soulignons plutôt la perte totale des repères sémantiques des deux finalistes à la Présidentielle, leur discours truffé de statistiques et d'(im)postures verbales et non verbales, le manque de hauteur de vue, et l'ignorance crasse de l'Histoire.

Rappelons quelques faits. L'élection du Président de la République n'a été instauré en France que pour le maintien au pouvoir des vainqueurs de 1789. Elle est typique des fausses libertés imaginées par le pays légal pour contrer le pays réel. Elle fut instaurée, à la fin du XIXème siècle, pour rendre impossible le retour des Bourbons (le comte de Chambord) sur le trône de France. En plus de la valeur symbolique du nombre sept, le septennat fut imaginé en rapport au calcul de l'espérance de vie du dît comte de Chambord. On considérait que dans sept ans, il serait mort et que la république serait donc sauvée.

Au-delà de cette petite piqûre de rappel de faits historiques tombés dans les oubliettes, les deux candidats à la présidentielle 2022, semblent souffrir d'une autre maladie très française: la perte du sens des mots et des métaphores. Le terme "démocratie" martelé comme autant de clous dans un pays qui bat tous les records de consommation de tranquillisants, est révélateur. Répéter à longueur d'onde médiatique des mots tels que "démocratie", "racisme", "antisémitisme", c'est leur effacer tous sens et les remplacer par des clous de propagande.
 
Rappelons le sens d'un de ces mots cloutés en nous: "Démocratie". Ce mot provient de l'assemblage de deux mots grecs, "Démos et "Cratos": le "pouvoir par le peuple". Il fut forgé dans l'Athènes d'avant l'ère chrétienne, en un temps où le pays ne connaissait ni nation ni smartphone ni monothéisme. Pour les Grecs de l'époque, parler de "Demos" sans 'Ethnos" n'avait pas grand sens. Cette Ethnos est précisément ce que le système en place depuis 200 ans dans le monde et particulièrement en France cherche à transformer, voire à faire disparaître. On a même l'impression que plus l'Ethnos disparaît plus leur Demos est prospère. Pour couper court à toutes spéculations historiques, je propose à nos chers élites parisiennes qui se succèdent au pouvoir en France depuis 1789 - par la magie de l'entre-soi et des loges d'obédience diverses - d'acheter un billet de train Paris-Genève. Qu'ils descendent à la gare Cornavin, marchent dans les rues de la vieille ville, discutent avec les commerçants, les passants. Ils feront l'expérience non pas de la démocratie grecque mais de la "démocratie" moderne dans un pays européen. Ils feront l'expérience d'un espace citoyen circonscrit dans l'espace, où on prend le temps de respirer et de parler entre voisins et où le peuple a encore l'impression d'être souverain.

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Ces élites parisiennes seront peut être surpris de voir trois drapeaux flotter dans les places et les rues de Genève. Un drapeau de commune, un autre du canton, et un troisième plus connu, le fameux drapeau helvétique frappé de la croix blanche. Trois drapeaux pour trois niveaux de souveraineté, chacun étant organiquement lié au deux autres. Un détail ne leur apparaîtra pas à première vue: le drapeau de la confédération helvétique est le seul drapeau au monde de forme carrée. Quant à la République de Genève, elle ne dépasse pas la taille du canton éponyme et n'a aucune prétention à l'universalisme. A Lausanne prévalent d'autres lois, d'autres parlers, d'autres moeurs...

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En prenant un peu de hauteur, grâce notamment à la lecture de Denis de Rougemont, les cantons suisses organiquement liés entre eux, pourraient même leur apparaître comme une union européenne en petit. Les relations à la fois tendues et solidaires entre cantons pouvant être perçues comme un résumé des relations entre nations. Bref, nos élites rentreront sans doute peinés de ce voyage laborieux pour leur bonne conscience républicaine en revenant la tête pleine et les poches vides.
Les poches vides? En effet. Non pas que le prix du Vitell Fraise soit plus élevé à Genève qu'à Paris, mais parce que les "patriotes" qui gouvernent la France depuis Paris ont une fâcheuse tendance à laisser des sommes d'argent assez importantes dans les banques suisses...

Frédéric Andreu
Contact : fredericandreu@yahoo.fr 

vendredi, 22 avril 2022

Le débat Macron-Le Pen et la France sans vision

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Le débat Macron-Le Pen et la France sans vision

Le président s'est imposé grâce à son bagage technico-économique tandis que le "nouveau" leader patriotique vise l'électorat frontalier

par Gennaro Malgieri

Source: https://www.barbadillo.it/104085-il-dibattito-macron-le-per-e-la-francia-senza-visione/

Le débat télévisé Macron-Le Pen

Le dernier débat de la campagne électorale a montré qu'aucun des candidats n'a la stature des anciens présidents. Comme l'écrit Le Figaro, s'il est vrai que chaque camp a trouvé ses raisons, il est également vrai que Macron et Le Pen ont donné l'impression que "leur" France manque de vision politique et est donc incapable de jouer un rôle de premier plan sur la scène européenne.

Les deux prétendants ont trouvé des moyens et des mots pour être satisfaits du débat qu'ils ont animé. Tant Emmanuel Macron que Marine Le Pen ont couvert les domaines qui leur sont les plus favorables: l'économie, la finance et le développement pour le premier; l'identité française, l'Europe des nations, la controverse sur le quinquennat pour la seconde. Ni l'un ni l'autre n'a fait chavirer le cœur des Français. Les rabâchages et les vieux gags politiques n'ont pas fait rire les téléspectateurs, dont beaucoup ont dit s'ennuyer.

Justifiés par une situation interne et externe difficile, sur laquelle ni Macron ni Le Pen n'ont porté de coups décisifs, s'en tenant plus ou moins aux généralités, ils ont donné lieu à un affrontement sans âme. Dans lequel le pragmatisme du président est apparu grâce à son bagage technico-économique et à sa solide expérience gouvernementale. La "nouvelle" Le Pen, pour tenter de séduire l'électorat frontiste, s'est présentée comme rassurante, calme, pacifiante et a jeté aux orties les thèmes classiques de la droite française pour ne pas paraître excessivement répétitive. Bref, la leader du Rassemblement national a offert une image d'elle-même bien éloignée du cliché habituel qui l'a jusqu'ici "diabolisée": une modérée pour qui - c'est du moins ce que nous avons compris - l'euro et l'islam ne sont plus les principaux "dangers" qu'elle craignait il y a cinq ans.

Dans les derniers jours de la campagne électorale, il faudra voir quel effet aura le nouveau look politique de Le Pen, tandis qu'en face, on trinque presque déjà à la victoire car, objectivement, malgré les nombreuses erreurs qu'il a commises, Macron semble avoir, plus par le rôle qu'il a joué que par les intentions qu'il a exprimées, une plus grande maîtrise de ce qu'attendent les Français, c'est-à-dire une action sur les impôts, la sécurité, plus en rapport avec les préoccupations des citoyens qu'avec une Europe que lui et ses autres collègues sont incapables de gouverner.

Mme Le Pen a frappé son meilleur coup lorsqu'elle a déclaré, non sans l'approbation des téléspectateurs, du moins selon les opinions exprimées immédiatement après le débat, qu'elle voulait être "le président de la vie quotidienne, de la vraie vie", suscitant une réponse furieuse de M. Macron qui a déclaré "nous sommes tous dans la vraie vie". Mais ce n'est pas le cas, car la plupart des Français le perçoivent encore comme "le président des riches", la figure de proue de l'establishment, le candidat de l'élite. Mais cela ne suffit pas si, comme le montre un sondage Ipsos publié par Le Monde, 29% des 45% de l'électorat de Jean-Luc Mélenchon, leader de la France Insoumise, voteront pour Macron, tandis que les 16% restants convergeront vers Le Pen.

En bref, l'absence du Front républicain a été remplacée par la gauche afin de construire une barrière contre la montée de la candidate de droite : maigre consolation pour Mélenchon et les écologistes qui apportent à Macron en dot tout ce pour quoi la gauche l'a contesté, et en particulier une bonne partie de cette bourgeoisie conformiste déterminée à ne jamais changer au prix de devenir l'agneau sacrificiel des politiques sociales du président sortant.

Avoir "inventé" les gilets jaunes malgré lui, avoir humilié la France profonde avec ses politiques sociales, ne pas avoir tendu la main aux classes les plus modestes pour résoudre leurs problèmes, avoir utilisé la rhétorique écologique comme un attrape-votes, fait de Macron un heureux élu pour le préjugé anti-système (et même pas tant que ça) que Le Pen a continué, bien que comme "modérée", à poursuivre dans cette campagne électorale.

S'il est vrai qu'il existe un écart de dix points entre les deux, comme l'affirme Le Monde, qui rapporte toujours les données d'un sondage Ipsos, cela signifie que la France ne veut pas changer. Et les "candidats à la présidence" qui l'ont compris ne dépassent pas leurs frontières et ne tentent pas de rassembler tout ce qui est à leur portée. Macron parviendra probablement à l'emporter avec l'apport décisif de la gauche, ce qui le rend faible devant son propre électorat; Marine Le Pen perdra pour la deuxième fois pour le simple fait qu'en cinq ans elle n'a pas su construire une droite à la hauteur de ses ambitions, favorisant la naissance de Reconquête de l'antagoniste Éric Zemmour. La droite française n'a jamais été aussi divisée. Et cela est incroyable si l'on considère l'effondrement du parti inspiré de De Gaulle, évoqué par Le Pen, qui, avec les deux formations, ou du moins une partie d'entre elles, aurait pu changer le sort de la compétition.

Le dernier débat de la campagne électorale a montré qu'aucun des concurrents n'a la stature des anciens présidents (sauf Hollande, bien sûr). Comme l'écrit Le Figaro ce matin, s'il est vrai que chaque camp a trouvé ses raisons, il est également vrai que Macron et Le Pen ont donné l'impression que "leur" France manque de vision politique et est donc incapable de jouer un rôle de premier plan sur la scène européenne.

On s'attend à ce que Macron gagne, mais l'enjeu ne sera pas uniquement le sien. Il y aura un peu moins de la moitié de la France qui le regardera avec suspicion et, comme par le passé, ne l'aimera pas. Il deviendra président parce que ses adversaires n'ont pas été capables de le défier sur son terrain et d'appeler les Français à reprendre ce que la haute finance, le "système", leur a pris. En commençant par la fierté et une certaine idée de la grandeur qu'aucun président avant le vieux garçon d'Amiens n'avait jamais abandonnée.

@barbadilloit
Gennaro Malgieri

L'impact de la coopération énergétique stratégique entre les États-Unis et l'Union européenne

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L'impact de la coopération énergétique stratégique entre les États-Unis et l'Union européenne

par Giulio Chinappi, Ding Yifan & Shi Junqi

Source: https://www.ideeazione.com/limpatto-della-cooperazione-strategica-usa-ue-sullenergia/

Ding Yifan et Shi Junqi, chercheurs à l'Institut Taihe de Pékin, ont publié un article analysant la dépendance énergétique de l'Europe et, en particulier, la coopération énergétique entre les États-Unis et l'UE à la lumière des récents événements en Ukraine. Vous trouverez ci-dessous une traduction de l'article.

Introduction

Lors du voyage du président américain Joe Biden en Europe, les États-Unis et la Commission européenne ont conclu un accord pour mener une coopération stratégique en matière d'énergie visant à atteindre l'indépendance vis-à-vis des combustibles fossiles russes, et un groupe de travail conjoint sur la sécurité énergétique a été créé pour définir les paramètres de la coopération. La coopération stratégique actuelle entre les États-Unis et l'Union européenne dans le domaine de l'énergie est encore entravée par des facteurs tels que l'inertie du commerce du gaz naturel, la capacité américaine de produire du gaz naturel liquéfié (GNL) et les différences au sein des États membres de l'UE. Cependant, la volonté politique affichée par les États-Unis et la Commission européenne a déstabilisé la coopération énergétique entre l'UE et la Russie et a créé des implications de grande envergure pour les stratégies énergétiques, industrielles et monétaires de l'UE.

L'UE pourrait devenir dépendante de l'énergie américaine

Après la fin de la guerre froide, l'UE a pris l'initiative d'entamer une coopération énergétique avec la Russie. Derrière cette démarche se cachait une politique rationnelle en matière d'énergie et de sécurité: l'UE était déjà le plus grand importateur d'énergie de la Russie et celle-ci ne menaçait donc pas la sécurité de l'UE. En conséquence, les éventuelles menaces de sécurité provenant de l'Est ont été davantage atténuées et l'UE a pu allouer d'importantes dépenses financières, autrement utilisées pour la défense nationale, à la poursuite du développement économique.

Contrairement aux importations en provenance du Moyen-Orient, les importations d'énergie russe offraient à la fois des coûts inférieurs et une meilleure stabilité de l'approvisionnement, ce qui a renforcé la compétitivité internationale de l'économie européenne. En d'autres termes, la coopération énergétique entre l'UE et la Russie a contribué à jeter les bases de l'autonomie stratégique de l'UE. Malgré la pression américaine, l'ancienne chancelière allemande Angela Merkel a fait avancer le projet de gazoduc Nord Stream 2 afin d'augmenter l'approvisionnement stable en gaz naturel directement depuis la Russie et de contourner la Pologne et l'Ukraine, toutes deux sensibles à l'influence américaine.

Non seulement les États-Unis ont désapprouvé la mise en œuvre de l'autonomie stratégique par l'UE, mais ils ont activement cherché des occasions de perturber la coopération énergétique UE-Russie. Ces dernières années, les États-Unis ont vendu du pétrole et du gaz de schiste à l'UE sous le couvert du "renforcement de la sécurité énergétique européenne", occultant ainsi leur véritable agenda qui consiste à forcer l'énergie russe à quitter le marché européen.

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Actuellement, l'énergie russe détient une part de marché plus importante que l'énergie américaine sur le marché de l'UE. En 2021, l'UE avait importé 155 milliards de mètres cubes de gaz naturel de Russie, dont 140 milliards de mètres cubes de gaz naturel par gazoduc et 15 milliards de mètres cubes de GNL, soit 45 % de ses importations totales de gaz naturel. Bien que le volume total des exportations américaines de GNL vers l'UE ait atteint un nouveau record au cours de la même période, avec un total de 22 milliards de m3, cela ne représentait que 6 % des importations totales de gaz naturel de l'UE.

Cependant, le 25 mars 2022, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le président américain, Joe Biden, ont publié une déclaration commune sur la sécurité énergétique européenne, qui a démontré la volonté politique de la Commission européenne de déplacer sa dépendance énergétique de la Russie vers les États-Unis.

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Le nouvel accord énergétique entre les États-Unis et l'Union européenne verra les États-Unis s'engager à garantir des volumes supplémentaires de gaz naturel liquéfié (GNL) pour le marché européen d'au moins 15 milliards de mètres cubes en 2022, avec d'autres augmentations prévues au fil du temps. Ainsi, les États-Unis ont pratiquement déclaré qu'ils remplaceraient toutes les commandes de GNL russe auprès de l'UE, qui s'élevaient également à 15 milliards de m3 de GNL en 2021. En effet, un haut fonctionnaire du gouvernement américain a déclaré publiquement que le pacte énergétique entre les États-Unis et l'UE "visait à rendre l'UE indépendante du GNL russe dans un délai très court".

Outre les accords susmentionnés, la Commission européenne a indiqué qu'elle travaillerait avec les États membres de l'UE pour garantir une demande stable de GNL américain supplémentaire d'environ 50 milliards de mètres cubes par an jusqu'en 2030 au moins. Dans le plan REPowerEU dévoilé le 8 mars, la Commission européenne a proposé que l'UE importe chaque année 50 milliards de mètres cubes supplémentaires de GNL en provenance du Qatar, des États-Unis, d'Égypte, d'Afrique occidentale et d'ailleurs. Selon la déclaration commune, la Commission européenne semble avoir attribué l'intégralité du "quota" d'importations supplémentaires de GNL aux États-Unis. Si le plan ci-dessus est mis en œuvre et que l'UE parvient à réduire sa demande de gaz naturel de 100 milliards de m3 d'ici 2030, le GNL américain pourrait représenter environ 30 % des importations totales de gaz naturel de l'UE à ce moment-là.

Les deux parties ont également confirmé leur détermination commune à mettre fin à la dépendance de l'UE vis-à-vis des combustibles fossiles russes d'ici 2027. Cela a interrompu la stratégie de longue date de l'UE visant à atteindre l'"indépendance énergétique" grâce à la coopération énergétique entre l'UE et la Russie au cours des trois dernières décennies et a considérablement augmenté la susceptibilité de l'UE à être "manipulée" par les États-Unis dans les domaines de l'énergie et de la finance.

La compétitivité des industries européennes pourrait diminuer

Ces dernières années, et surtout après l'apparition de la pandémie covidienne, les États-Unis et l'UE ont pris conscience de l'importance de la réindustrialisation. Bien qu'ils restent de fidèles partenaires d'alliance, les États-Unis et l'UE sont désormais engagés dans le jeu à somme nulle de la concurrence pour attirer les entreprises industrielles sur leurs marchés intérieurs respectifs. Les États-Unis se sont transformés en exportateurs d'énergie et éclipsent l'UE en termes de puissance financière. Toutefois, l'ampleur de l'évidement de la chaîne industrielle américaine est bien plus grave que celle de l'UE. C'est pourquoi l'accès à un approvisionnement énergétique stable et abordable est devenu un domaine clé pour les deux parties qui s'affrontent dans le processus de réindustrialisation.

En tant qu'importateur d'énergie, l'UE est dans une position relativement désavantageuse. Le graphique ci-dessus montre qu'après la déclaration États-Unis-UE de juillet 2018, lorsque le GNL américain est entré pour la première fois sur le marché européen, le prix moyen du gaz naturel exporté par Gazprom vers l'Europe était relativement élevé. En 2019, l'Espagne, la France et les Pays-Bas, positionnés le long de la côte atlantique, sont devenus les trois premiers acheteurs de GNL américain au sein de l'UE, position qu'ils conservent aujourd'hui (NB : les Pays-Bas ont acheté plus que la France en 2021).

Au milieu de l'année 2021, l'UE a commencé à promouvoir le paquet Fit-for-55 et le mécanisme d'ajustement à la frontière du carbone (CBAM), dans le but d'appliquer le gaz naturel importé par la Russie à bas prix à partir de 2020 comme un "antidouleur" industriel pendant sa transition vers une économie verte. Depuis sa transition, l'UE a imposé d'énormes tarifs carbone aux pays exportateurs d'énergie, ce qui a contraint le prix moyen du GNL de Gazprom à dépasser celui du GNL américain exporté vers l'Espagne, les Pays-Bas et la France. En tant que tel, le passage de la Commission européenne au GNL américain a une certaine justification économique mais ne compense pas le risque significatif d'une dépendance accrue à l'énergie américaine.

Plus important encore, une fois que les États-Unis et l'Europe auront établi une relation stable entre l'offre et la demande de GNL, l'économie de l'UE sera très probablement confrontée à la situation difficile de coûts de production plus élevés et d'une compétitivité industrielle plus faible que celle des États-Unis. Après tout, le prix moyen du gaz naturel sur le marché industriel intérieur américain est bien inférieur à celui du GNL exporté des États-Unis vers l'Espagne, les Pays-Bas et la France. Contrairement au gazoduc russe, qui a déjà bénéficié de l'investissement initial dans l'infrastructure, les importations de GNL par l'UE impliquent des frais de transport maritime et des coûts de construction et d'exploitation des terminaux GNL. Depuis le déclenchement du conflit entre la Russie et l'Ukraine, le coût de la construction du terminal GNL de Brunsbuttel en Allemagne est passé à plus d'un milliard d'euros, dépassant de loin les 450 millions d'euros précédemment estimés.

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En outre, le prix de l'énergie a entraîné une baisse de la compétitivité industrielle de l'UE, et les risques de sécurité posés par le conflit entre la Russie et l'Ukraine ont augmenté la probabilité que l'industrie des pays en développement gravite vers les États-Unis plutôt que vers l'UE. Cela ne désavantagera pas seulement l'UE dans la compétition pour la réindustrialisation avec les États-Unis, mais aura un impact considérable sur l'économie de l'UE. La combinaison de l'affaiblissement de la réindustrialisation de l'UE, des hausses de taux d'intérêt plus élevées que prévu par la Réserve fédérale américaine et de la fuite des capitaux de l'UE causée par le conflit entre la Russie et l'Ukraine pourrait encore affaiblir l'effet stimulant des investissements dans l'économie européenne. Ainsi, l'impact de l'inflation élevée dans la zone euro, qui a atteint 7,5 % en mars 2022, indique que les États membres de l'UE risquent de répéter les erreurs commises par d'autres pays développés au début du siècle dernier et de tomber dans la stagflation où l'intervention du gouvernement ne parvient pas à inverser la contraction économique.

La domination du dollar sur l'euro pourrait encore se consolider

Depuis son introduction, l'euro a contesté la domination du dollar. Le mode de règlement des transactions sur les marchandises, que ce soit en dollars ou en euros, affecte directement la proportion et le statut de la monnaie dans le système de paiement international. Étant donné que les échanges entre l'UE et la Russie peuvent être réglés en euros, la coopération énergétique entre l'UE et la Russie a non seulement accru l'utilisation de l'euro dans la communauté internationale, mais a également réduit les réserves en dollars des États membres de l'UE pour les achats d'énergie. Récemment, le chancelier allemand Olaf Scholz a réaffirmé que l'Allemagne refuse d'acheter du gaz naturel à la Russie en roubles, soulignant que la plupart des contrats d'approvisionnement en gaz naturel allemand prévoient un paiement en euros, une petite partie seulement étant libellée en dollars.

À la suite du conflit russo-ukrainien, l'Allemagne a non seulement suspendu le processus de certification du projet germano-russe Nord Stream 2, mais a également décidé de construire un nouveau terminal GNL à Brunsbuttel d'une capacité de 8 milliards de mètres cubes par an, destiné à soutenir la nouvelle demande énorme d'importations de GNL en provenance de pays autres que la Russie. Si la déclaration commune des États-Unis et de la Commission européenne du 25 mars est mise en œuvre, les deux parties pourraient avoir des commandes supplémentaires de GNL allant jusqu'à 15 milliards de mètres cubes en 2022, pouvant atteindre 50 milliards de mètres cubes par an jusqu'en 2030 au moins. Ces commandes de GNL seront très probablement réglées en dollars plutôt qu'en euros, ce qui aura un impact majeur sur le statut international de l'euro.

Publié sur World Politcs Blog

jeudi, 21 avril 2022

Le brouillard de la guerre et le changement de paradigme mondial

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Le brouillard de la guerre et le changement de paradigme mondial

Fabio Reis Vianna*

Source: http://www.elespiadigital.com/index.php/tribuna-libre/37413-la-niebla-de-la-guerra-y-el-cambio-de-paradigma-global

La maxime du penseur brésilien José Luís Fiori selon laquelle "l'expansionnisme et la guerre sont deux parties essentielles de la machine à produire du pouvoir et de la richesse dans le système interétatique" n'a peut-être jamais été aussi pertinente et semble se confirmer dans le moment historique exact auquel nous assistons.

Les événements extraordinaires résultant de l'intervention russe en Ukraine, qui a débuté le 24 février, laissent des traces indélébiles et confirment certaines des perceptions que nous avons déjà mentionnées dans d'autres de nos articles.

L'ordre international dirigé par l'Occident est clairement remis en question dans sa hiérarchie de pouvoir, et la guerre en Ukraine est un symptôme clair de ce défi.

Ce qui est vraiment frappant, cependant, c'est la perception que cette guerre pointe vers quelque chose de beaucoup plus grand qu'il n'y paraît à première vue, car il ne s'agirait pas d'une guerre régionale, mais d'une guerre aux proportions mondiales: une guerre hégémonique.

Le changement de paradigme représenté par l'intervention de la Russie en Ukraine consolide ainsi la voie d'un nouveau système international plus fragmenté, dans lequel la puissance occidentale est affaiblie. Dans ce scénario, les plaques tectoniques du système international se déplacent lentement face au monde nouveau et sans précédent qui s'ouvre.

Par conséquent, qu'on le veuille ou non, les élites de pays comme le Brésil, si inféodées à la stratégie de sécurité américaine, sont poussées vers une solution consensuelle en direction de l'expérience eurasienne par le biais des BRICS. Ainsi, les militaires brésiliens, si réactionnaires et obéissants à Washington, sont confrontés à un nouveau monde, apparemment déjà compris par la tradition diplomatique de l'"Itamaraty"(palais du ministère des affaires étrangères au Brésil - photo, ci-dessous), et même par le puissant lobby brésilien de l'agrobusiness.

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Le palais d'Itamaraty à Brasilia, oeuvre de l'architecte Oscar Niedermeyer.

A l'inverse, l'aveuglement des élites européennes provoque la stupeur en alimentant un jeu qui plonge l'Europe dans ce qu'elle a toujours été: la grande arène de la compétition militaire interétatique depuis 500 ans.

Par conséquent, en tenant compte de cette terrible prémisse, l'armistice qui a rendu possible la création de l'Union européenne, ainsi que la monnaie commune, n'aurait été qu'un simple interrègne de paix, jusqu'à la prochaine guerre.

Reprenant sa place tragique dans le système international classique, l'Europe est à nouveau la scène du vieux théâtre de la mort, et la maxime selon laquelle "la paix est presque toujours une trêve qui dure le temps imposé par la contrainte expansive des vainqueurs et le besoin de vengeance des perdants" n'a jamais été aussi appropriée.

Dans ce contexte, l'humiliation allemande suite au veto américain à l'encontre du gazoduc Nord Stream 2 est paradigmatique. Le 7 février, en pleine Maison Blanche, et avant même l'intervention russe en Ukraine, Joe Biden désavoue publiquement le nouveau chancelier allemand Olaf Scholz, en déclarant catégoriquement que le gazoduc Nord Stream 2 sera arrêté.

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Cela pourrait être considéré comme le déclencheur de l'intervention russe et l'ouverture de la boîte de Pandore pour le nouveau monde qui s'ouvre. En plus de représenter, en termes symboliques, l'humiliation de l'Allemagne en tant que pays souverain, il consolide le "coup d'État" définitif dans le projet d'intégration européenne.

Le président ukrainien Vladimir Zelensky étant une sorte de porte-parole d'un scénario écrit à Washington - ou, qui sait, à Hollywood - les attaques répétées contre les dirigeants européens qui ont travaillé si dur pour normaliser les relations russo-européennes, comme la récente attaque contre l'ancienne chancelière Angela Merkel, indiquent que les instruments de la guerre de quatrième génération, déjà utilisés par les États-Unis dans d'autres régions de la planète, s'intensifient au sein de l'alliance occidentale.

Non seulement le maintien, mais l'approfondissement de la reproduction et de l'expansion continues et illimitées de l'empire militaire américain est une réalité qui est devenue encore plus claire après l'entrée du premier char russe sur le territoire ukrainien, quitte à déstabiliser, voire à détruire des alliés fidèles et de longue date.

En ce sens, le vieux postulat soutenu par de nombreux spécialistes de l'école "réaliste" des relations internationales, ainsi que par les grands penseurs du Système mondial, selon lequel la concentration du pouvoir mondial dans un seul État serait une condition essentielle à une paix mondiale durable, tombe à l'eau.

Le "Paradoxe de l'hyperpuissance" est confirmé comme une gifle au visage de l'énorme consensus théorique développé depuis le milieu des années 1970.

En d'autres termes, depuis la première minute du bombardement américain de l'Irak en 1991, qui a précédé les 48 interventions militaires des années 1990, et les 24 interventions des deux premières décennies du XXIe siècle, qui ont à leur tour abouti à 100.000 bombardements dans le monde - le système international est plongé dans un sinistre processus de guerre permanente, ou infinie, qui contredit l'utopie kantienne de la paix perpétuelle reflétée dans l'idée de stabilité hégémonique.

Ainsi, c'était une erreur de considérer que la puissance mondiale unipolaire qui a émergé avec la victoire de la guerre froide pouvait exercer son hégémonie au nom de la paix et de la stabilité mondiale, assumant ainsi un leadership responsable et au nom de la grande gouvernance.

Au lieu de cela, ce à quoi nous avons assisté au cours des 30 dernières années, c'est à l'escalade de la concurrence interétatique, les autres États réagissant au processus insensé et sans conséquence d'expansion du pouvoir de l'empire militaire américain.

En conséquence, nous sommes confrontés à un monde qui semblait n'appartenir qu'aux livres d'histoire ; où les intérêts nationaux des grandes puissances reviennent avec la force que, finalement, ils n'ont jamais cessé d'avoir, mais qui est seulement restée en sommeil.

Cette nouvelle (ancienne) géopolitique des nations laisse donc sa marque la plus nette avec ce que la Russie impose dans son intervention en Ukraine: la remise en cause du primat selon lequel seuls les Occidentaux ont la légitimité d'imposer leur volonté par la guerre.

C'est la nouveauté qui ébranle les structures du système international.

Face à cette guerre imminente aux proportions mondiales, résultant de la défiance russe et de l'intensification de la course aux armements - avec le retour alarmant de l'Allemagne et du Japon dans le jeu - nous nous dirigeons inexorablement vers une aggravation du chaos systémique interétatique, ainsi que vers l'escalade du conflit social systémique, notamment en Europe.

Comme à d'autres moments de l'histoire du système mondial, l'Europe est à nouveau le centre névralgique de la lutte mondiale pour le pouvoir. Et comme dans d'autres moments tragiques de l'histoire, le comportement des dirigeants européens est une fois de plus irrationnel; au milieu d'un jeu à somme négative. Les Européens sont largement perdants.

* LL.B., étudiant en master de relations internationales à l'Université d'Évora (Portugal), écrivain et analyste géopolitique.

mercredi, 20 avril 2022

De la création d'une technocratie souveraine

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De la création d'une technocratie souveraine

Alexandre Douguine

Source: http://www.elespiadigital.com/index.php/tribuna-libre/37294-2022-04-03-12-58-15

Je pense que l'un des graves problèmes que nous rencontrons actuellement est que nous continuons à nous accrocher à de vieilles attitudes et à de vieux schémas de pensée à un moment où les conditions objectives ont changé, notamment parce que nous continuons à croire, ici en Russie, que le gouvernement russe est divisé en deux camps: l'un composé de libéraux au sein du système (6e colonne) et l'autre composé de patriotes.

Dans un état normal, ce serait une attitude valable pour les patriotes de rester enfermés dans leurs foyers, mais puisque nous sommes entrés dans un état d'urgence, il est préférable de soutenir le gouvernement. Il semblerait qu'une lutte mortelle soit menée entre les deux camps en ce moment, même si, par ailleurs, nous sommes en pleine guerre en Ukraine.

Cependant, nous devons garder à l'esprit que cette guerre a complètement détruit les chances du libéralisme de revenir en Russie (que ce soit celui de la 5e colonne, qui a pratiquement disparu, ou celui de la 6e colonne, qui continue à se manifester par intermittence). Dès que l'Occident a déconnecté la Russie de la mondialisation, la 6e colonne a commencé à se désintégrer d'elle-même.

Il semble parfois que les libéraux attendent le moment de riposter (ou de contre-attaquer) aussi désespérément que les nazis du bataillon Azov de Mariupol (une organisation interdite en Russie).

Les civils, les volontaires et les soldats qui se battent et meurent en Nouvelle Russie (Novorossiya) sont outrés, déconcertés et horrifiés d'entendre les points convenus lors des négociations entre Medinsky et Abramovich à Istanbul. Kadyrov, qui est devenu la quintessence de la voix du monde russe, a ouvertement exprimé son rejet. Bien sûr, il est naturel que ces déclarations aient suscité le mécontentement et les autorités en sont conscientes. À cela s'ajoutent les succès des opérations militaires et les premières attaques ukrainiennes sur notre territoire (les attaques de Belgorod, etc.). Tout cela a déclenché des signaux d'alarme, à juste titre.

Cependant, lorsque les stratèges de Moscou ont lancé cette opération spéciale, ils savaient qu'ils n'avaient pas d'autre choix que de vaincre l'ennemi et d'atteindre leurs objectifs: la démilitarisation et la dénazification de l'Ukraine. Il ne suffit pas de libérer la Novorossiya ou le Donbass, il faut aller plus loin. Bien sûr, Kiev n'acceptera jamais nos propositions de plein gré, et s'il le fait, il se contentera de renier ce qui a été convenu. Poutine le comprend mieux que quiconque, c'est pourquoi il sait que le lancement de l'opération spéciale est le point de non-retour.

C'est pour cette raison que la bataille féroce entre la 6ème colonne et les patriotes n'est qu'un spectre qui continue à nous hanter après le lancement de l'opération spéciale du 22 février 2022. Les choses ont définitivement changé : nous ne pouvons plus penser que maintenant les patriotes sont les seuls à faire quelque chose pendant que les libéraux sabotent tout. Je crois que nous assistons à la naissance d'une "technocratie souveraine", car dans les conditions actuelles, la seule chose qui compte est l'efficacité dans la réalisation d'un seul objectif: contribuer activement à la réalisation de la Victoire. Dans un état d'urgence, l'idéologie de l'individu n'est plus pertinente: un patriote qui ne fait que se plaindre et crier n'est pas une figure nécessaire dans le jeu qui se déroule. En revanche, un "libéral" qui se bat aujourd'hui pour le pays, l'armée et le peuple est digne de soutien et de confiance. Nos critères doivent être adaptés aux événements actuels.

C'est pourquoi l'émergence d'une technocratie souveraine deviendra l'objectif principal de notre gouvernement. Si cela se produit, alors les vieilles querelles idéologiques en Russie appartiendront au passé. Si des gauchistes, des patriotes ou des libéraux collaborent en versant leur sang pour notre Victoire, cela signifie que nous sommes tous unis pour le plus grand bien. Pendant l'état d'urgence, nous devons mettre de côté toute forme de controverse idéologique. Notre seul code doit être le "code de la victoire" et cela signifie ne pas tirer sur les nôtres. Notre soutien doit viser à étayer la victoire de Poutine, de la Russie et de l'opération Z, car l'important est d'être utile à la patrie à un moment critique.

C'est un moment de vie et de mort. Bien sûr, tout libéral qui s'oppose à l'opération Z est un traître. Il n'y a aucun doute là-dessus, car ils travaillent pour l'ennemi: il n'y a pas d'argumentation à développer ici. Mais lorsque les patriotes et les gauchistes critiquent à l'excès les autorités - nous aimerions tous que cela se termine le plus rapidement possible, mais de telles opérations prennent du temps - nous n'apportons plus rien. Il n'est pas non plus acceptable que d'anciens libéraux, qui prétendent maintenant être des patriotes, utilisent leurs ressources pour persécuter leurs anciens détracteurs.

Cependant, notre seul mot d'ordre doit désormais être de remporter la victoire. D'où la question: y avons-nous contribué et comment? La victoire est bien plus importante que les "erreurs" commises par le gouvernement: le code du samouraï dit qu'un seigneur est bon dans la mesure où il est servi par un bon samouraï. C'est précisément ce bon service qui rend le seigneur bon, et non l'inverse. La "technocratie souveraine" doit faire tout ce qu'elle peut pour la Grande Russie, notre Patrie, et, au moment décisif, n'importe lequel d'entre nous peut être la paille qui permet de remporter enfin la Victoire.

Nous devons faire face à deux problèmes : les disputes idéologiques au sein du gouvernement et notre méfiance parfois très marquée envers les autorités. Tous ces problèmes remontent aux luttes d'avant l'opération Z et sont devenus une sorte d'auto-sabotage. Nous ne sommes pas en mesure de nous battre pour le pouvoir et un conflit débridé entre nous pourrait nous conduire à tout perdre. Notre victoire dépend de la consolidation de notre souveraineté et de notre unité. D'où le vieux dicton : "mieux vaut travailler, mon frère". Frères et non pas carriéristes ou critiques exacerbés.

Pourquoi le Français va réélire Macron à hauteur de 60% (écrit avec Edouard Drumont)

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Pourquoi le Français va réélire Macron à hauteur de 60% (écrit avec Edouard Drumont)

Nicolas Bonnal

On va citer son testament à Edouard Drumont. Notre journaliste-penseur, maître de Bernanos, honni par nos flics de la pensée, ne se fait plus d’illusion sur ses compatriotes petit-bourgeois et laïcards apprivoisés à l’orée des années 1890; il observe que l’électorat parisien déjà adore réélire de banals conseillers municipaux ripoux:

« …Les Parisiens ont réélu la plupart des conseillers municipaux convaincus d'avoir trempé dans ces malpropretés. Ils les ont réélus très librement, avec des urnes très surveillées par des représentants de tous les partis,  par des gens de comités experts dans toutes les roueries électorales et qu'on ne met pas facilement dedans. »

Et de chercher une explication: l’ataraxie. Mieux même, la prostration.

« Tout vient se briser contre une indifférence absolue, contre une sorte d'ataraxie, d'impassibilité générale, qui n'est point l'ataraxie stoïque dont parle Proudhon, mais plutôt une inertie maladive, une prostration sur laquelle rien n'agit. »

Le cœur ne bouge plus trop :

« Les physiologistes connaissent bien ces phases passagères où le cœur est inexcitable. L'organe où l'humanité puise sa flamme a soudain des moments de repos, d'hébétude, de torpeur après lesquels il reprend son fonctionnement… A l'heure actuelle, malheureusement, ce n'est plus par saccades, c'est toujours que le cœur ne répond plus  aux excitants. Et comme ce bourdon, qui rythme nos artères, nos expansions et nos violences, dépend lui-même du cerveau, c'est toujours au cerveau qu'il faut chercher la cause des défaillances et des sommeils. »

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Et Drumont de s’interroger :

« Comment s'étonner alors que la lassitude saisisse ces entendements secoués, non plus la saine lassitude du travail, où se puisent des forces nouvelles, mais la dépression atonique où l’on a l’illusion de la vigueur ? »

Le monde moderne est là et son absence de réaction (sauf pour aller se vacciner ou pester contre le fascisme ou la Russie – toujours par conformisme et conditionnement):

« La Mort gagne le monde par l’insensibilité, par l’anesthésie. Cette anesthésie sociale, que l’on appelle l’ataraxie, envahit les masses, comme sa sœur envahit les êtres. Elle débute d'ici, de là, par plaques qui se rejoignent et couvrent bientôt le corps tout entier. Certaines régions intermédiaires jouissent d'une fausse excitation que l’on retrouve avant tous les désastres. Celui qu'attend la congestion bâtit des projets bienheureux. »

Le temps est à l’optimisme paresseux:

«Nous autres, au bord du gouffre, nous affirmons le Progrès indéfini, une ère joyeuse et libre. Au fond, nous ne croyons même pas à Demain, et nous nous en occupons très peu.»

Nous sommes entourés de frivoles en effet:

« Les frivoles rient jusqu'à la mort; les esprits moins légers, ceux qui réfléchissent sur les spectacles que la vie déroule devant eux et qui s'irritent de ce qu'elle leur cache, ne peuvent se défendre de la tristesse qui se dégage de tout... Cor sapientium ubi tristitîa...»

On chasse le pessimisme (pas de grand remplacement, pas de gouvernance mondiale, pas de dictature sanitaire, pas de complots…):

« Les Français modernes n'ont rien de tout cela. Les troublantes théories de Schopenhauer comme les belles désespérances de Tolstoï, vastes et désolées comme des steppes, les laissent parfaitement indifférents. Intellectuellement, c'est trop fort pour eux, trop étendu d'horizon, trop intense de pensée; cela les  obligerait à trop de méditation ».

Et on se contente de peu intellectuellement et moralement et spirituellement :

« La conception que les Français contemporains ont de la vie n'a d'analogue dans aucun temps, elle est tout à fait particulière à notre époque. Notons tout d'abord que si la vie moderne s'est compliquée au point de vue des faux besoins et des raffinements du bien-être, elle s'est singulièrement simplifiée au point de vue moral; comme une espèce de Peau de chagrin, elle se rétrécit tous les jours sous ce rapport. »

Le monde moderne a créé son homme en France, pays de la Révolution (voyez nos textes sur Cochin) et du bourgeois (Taine) :

« Le régime moderne a créé, on peut le dire, un type d'être spécial que l'on serait tenté d'appeler le contribuable; car, en réalité, si on demandait à beaucoup d'hommes de ce temps pourquoi ils sont sur la terre, ils seraient bien embarrassés de répondre et finiraient  par vous dire:

— Ma foi, pour faire notre service militaire, pour acquitter nos contributions et pour payer notre terme ».

S’ensuit une belle comparaison animale :

« Les Français sont admirablement dressés à toute cette organisation fiscale; ils sont comme les méharis qui s'agenouillent pour qu'on puisse les charger plus facilement, ou comme les chevaux de renfort d'omnibus qui, leur besogne faite, vont tout seuls rejoindre leur place au bas de la montée et attendent là qu'on les attelle de nouveau… »

Sources :

Drumont, Testament, III, 1, p.171-172 (archive.org).

https://archive.org/details/letestamentduna01drumgoog

https://www.revuemethode.org/m101828.html

https://strategika.fr/2020/07/19/augustin-cochin-et-le-pi...

https://strategika.fr/2021/08/01/pass-sanitaire-biopoliti...

https://reseauinternational.net/terreur-republicaine-et-d...

 

mardi, 19 avril 2022

Unipolarité, bipolarité, multipolarité et la guerre d'Ukraine

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Unipolarité, bipolarité, multipolarité et la guerre d'Ukraine

Vers une multipolarité de plus en plus complexe: scénario pour l'avenir

Enric Ravello Barber

Source: https://www.enricravellobarber.eu/2022/04/unipolaridad-bipolaridad-multipolaridad.html#.Yl5zFNPP2Uk

Derrière la prétendue fin de l'histoire proclamée par le publiciste du Pentagone Francis Fukuyama, se cachait une aberration philosophique : sortir l'homme de son habitat, celui de l'Histoire, entendue comme son "faire-dans-le-monde", et ouvrir la porte au post-humanisme qui nous apparaît déjà aujourd'hui comme une réalité de fait. Cette entorse à l'histoire a signifié la mise en œuvre urbi et orbi de ce que les occupants successifs de la Maison Blanche, sans la moindre dissimulation, ont appelé le Nouvel Ordre Mondial - nous insistons sur le mot "Monde" - : c'est-à-dire l'unification du monde sous la direction des Etats-Unis, ou, en d'autres termes, un monde unipolaire, c'est-à-dire avec un seul centre de pouvoir : Washington.

Les erreurs stratégiques des administrations américaines successives, toujours sous inspiration néo-con unipolaire, ont donné à la Russie le temps nécessaire pour se reconstruire en tant que puissance militaire et la Chine a émergé comme une puissance mondiale de premier ordre, non seulement en tant que puissance militaire mais aussi en tant que puissance globale (économique, stratégique, industrielle, technologique et diplomatique).

La Chine est devenue le principal acteur de la deuxième vague de mondialisation. Ce n'était qu'une contradiction apparente pour une puissance communiste de prôner la réduction de tous les obstacles au commerce mondial, puisque la vente de ses produits manufacturés sur les marchés mondiaux était la principale cause de sa croissance en tant que puissance.

L'essor de la Chine annonce en quelque sorte la fin du rêve unipolaire des Etats-Unis et montre une nouvelle réalité bipolaire. Quelques décennies après la chute de l'URSS, le monde vit à nouveau la lutte pour l'hégémonie planétaire entre deux puissances: les États-Unis et la Chine.

La Russie, devenue le troisième acteur mondial, propose un pas en avant, une nouvelle correction au Nouvel Ordre Mondial de Washington: le monde multipolaire. La Russie constituerait un troisième pôle géopolitique, une situation qui se conjuguerait également avec l'émergence de puissances régionales qui fragmenteraient davantage le plan de domination mondiale de la Maison Blanche: la Turquie, l'Iran et l'Inde joueraient ce rôle.

Dans cette réalité, l'Europe, le non-sujet géopolitique par excellence, pourrait cependant jouer un rôle décisif - comme l'ont constaté certains de ses dirigeants. Dans ce contexte multipolaire, l'Europe devrait s'émanciper de sa soumission aux États-Unis et devenir un autre centre de pouvoir, capable d'agir sur la scène internationale selon ses propres dynamiques et intérêts, de plus en plus opposés et divergents de ceux de la métropole colonisatrice Stars and Stripes. Et pour cela, l'une des conditions nécessaires - de la culture à l'énergie - serait une synergie entre l'Europe et la Russie, qui renforcerait le rôle de ces deux réalités et, partant, remettrait en question et diminuerait celui des États-Unis.

Aujourd'hui, tous ces scénarios sont en jeu dans la guerre d'Ukraine. Les États-Unis, qui provoquent depuis des années des situations inacceptables pour Moscou, voient dans cette guerre la possibilité ultime de couper le rapprochement et la collaboration croissante entre la Russie et l'Allemagne - dont le gaz est l'un des éléments clés - et de détruire ainsi l'option de ce troisième pôle et la construction d'un monde multipolaire: son premier objectif est d'isoler Moscou de ses partenaires géopolitiques potentiels, le second est de détruire la Russie en tant que puissance et de réduire encore l'UE au statut de colonie. C'est pourquoi elle est aujourd'hui la principale intéressée à prolonger la guerre en Ukraine, afin que Washington regagne du terrain dans une logique unipolaire. La Chine joue une fois de plus son grand atout diplomatique, la patience, l'objectif est aussi un affaiblissement progressif de la Russie et son éloignement de l'Europe, une Russie faible et isolée dépendrait de plus en plus de sa relation avec Pékin, ce qui ferait de la Chine à nouveau la seule puissance disputant la domination du monde aux Etats-Unis (logique bipolaire). Une Russie renforcée, confortée dans son prestige diplomatique et militaire, renforcerait la logique multipolaire, une logique que certains dirigeants européens tentent de soutenir dans le peu de marge de manœuvre dont ils disposent ; le refus d'inclure le gaz et l'énergie dans les sanctions contre la Russie est la preuve de cette réalité.

En bref, l'issue finale de la guerre en Ukraine marquera le scénario mondial des prochaines décennies, et surtout pour les Européens. Deux options s'offrent à eux : soit la non-existence géopolitique et la soumission absolue à l'atlantisme américain, soit l'émancipation géopolitique et l'articulation en tant qu'acteur international dans une réalité multipolaire, et nous le répétons, cette dernière pour une synergie - et non une soumission - avec une Russie puissante et antagoniste à l'unipolarisme de Washington et au bipolarisme de Pékin.

dimanche, 17 avril 2022

Le corridor de transport nord-sud (NSTC) est un projet d'intégration trans-civilisationnelle

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Le corridor de transport nord-sud (NSTC) est un projet d'intégration trans-civilisationnelle

Andrew Korybko

Source: https://katehon.com/en/article/north-south-transport-corridor-trans-civilizational-integration-project

Le NSTC représente la convergence physique des grands plans stratégiques de la Russie, axés sur le sud, qui visent à équilibrer les ancrages irano-pakistanais de son pivot de l'Oumma dans cette partie particulière du supercontinent avec le Néo-NAM qu'elle poursuit conjointement avec l'Inde. L'optique trans-civilisationnelle est extrêmement importante car elle montre que la prédiction du soi-disant "choc des civilisations" de Huntington n'était qu'un exemple de vœu pieux mal intentionné (si ce n'est une proposition politique provocante) et qu'elle a été incontestablement remise en question par la convergence des civilisations entre le christianisme oriental, l'islam et l'hindouisme incarnée par le NSTC.

L'émergence de l'ordre mondial multipolaire (ou "nouvel ordre mondial" comme l'appelle le président américain Joe Biden) a été accélérée par les conséquences induites par la réponse sans précédent et dûment planifiée depuis longtemps par l'Occident dirigé par les États-Unis dès qu'a commencé l'opération militaire spéciale en cours de la Russie en Ukraine, que l'Amérique a elle-même provoquée. L'une des tendances les plus importantes de cette transition systémique mondiale est la montée des civilisations en tant qu'acteurs internationaux, qui a été prédite en détail par l'universitaire russe Leonid Savin dans son livre de 2020 Ordo Pluriversalis : The End Of Pax Americana And The Rise Of Multipolarity que l'auteur a chroniqué ici peu après sa sortie. Le corridor de transport nord-sud (NSTC) entre la Russie, l'Azerbaïdjan, l'Iran et l'Inde - et qui peut aussi facilement s'étendre au Pakistan voisin pour renforcer le commerce bilatéral croissant avec la Russie - jouera un rôle irremplaçable à cet égard.

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Ce projet ambitieux relie la civilisation chrétienne orthodoxe orientale de la Russie aux civilisations musulmanes de l'Azerbaïdjan, de l'Iran et du Pakistan, ainsi qu'à la civilisation majoritairement hindoue de l'Inde. Étant donné que l'Inde, l'Iran et le Pakistan sont devenus plus importants que jamais pour la Russie en raison de leur neutralité de principe qui leur permet de lui servir de soupape de pression économique stratégique, il ne fait aucun doute que le NSTC, auquel les deux premiers pays participent et le troisième pourrait éventuellement le faire aussi, deviendra un projet phare multipolaire aux côtés du gazoduc Pakistan Stream (PSGP) et du PAKAFUZ. Ce que tous ces projets ont en commun, c'est qu'il s'agit de projets de connectivité Nord-Sud, ce qui prouve que la grande réorientation stratégique de la Russie vers le Sud après 2014 n'était pas purement axée sur la Chine comme beaucoup le pensaient, mais que Moscou a équilibré son "pivot vers l'Oumma" et sa vision "néo-NAMienne" avec l'Inde.

Cela ne veut pas dire que la Chine ne joue pas un rôle crucial dans la grande stratégie russe - en vérité, ces deux grandes puissances servent de double moteur à l'ordre mondial multipolaire émergent - mais simplement que le Kremlin a sagement cherché à éviter de manière préventive toute dépendance disproportionnée potentielle vis-à-vis de la République populaire par le biais de ces initiatives complémentaires axées sur le Sud. Le "pivot de l'Oumma" fait référence à la priorité qu'il accorde à des partenaires non traditionnels à majorité musulmane comme l'Iran et le Pakistan, tandis que le Neo-NAM est le plan officieux des relations russo-indiennes, par lequel ces deux pays cherchent conjointement à créer un troisième pôle d'influence dans la phase de transition bimultipolaire entre unipolarité et multipolarité. Le Pivot de l'Oumma et le Néo-NAM s'équilibrent l'un l'autre, ce qui équilibre à son tour la Chine dans cette grande stratégie kissingerienne post-moderne poursuivie par la Grande Puissance eurasienne.

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Le NSTC représente la convergence physique des plans stratégiques de la Russie axés sur le sud, qui visent à équilibrer les ancrages irano-pakistanais de son pivot de l'Oumma dans cette partie particulière du supercontinent avec le Néo-NAM qu'elle poursuit conjointement avec l'Inde. L'optique trans-civilisationnelle est extrêmement importante car elle montre que la prédiction du soi-disant "choc des civilisations" de Huntington n'était qu'un exemple de vœu pieux mal intentionné (si ce n'est une proposition politique provocante) et a été indiscutablement remise en question par la convergence des civilisations entre le christianisme oriental, l'islam et l'hindouisme incarnée par le NSTC. Cela constitue un exemple puissant pour la communauté internationale (qui, dans ce contexte, fait également référence à la société civile mondiale) à deux égards : premièrement, cela réfute l'"inévitabilité" du choc des civilisations ; et deuxièmement, cela montre que la Chine n'en a pas le monopole.

Pour développer ce dernier point, on a considéré jusqu'à présent que l'initiative Belt & Road (BRI) de la Chine était le seul moyen physique de rassembler diverses civilisations à travers l'objectif commun d'un commerce, d'un investissement et d'un développement socio-économique mutuellement bénéfiques, mais l'existence même du NSTC montre que la Russie et ses partenaires azerbaïdjanais, iraniens, indiens et peut-être même bientôt pakistanais peuvent tous s'unir pour poursuivre ce même objectif. En fait, la Chine a également un rôle crucial à jouer dans le NSTC puisque le pacte de partenariat stratégique conclu au printemps dernier avec l'Iran aurait vu la République populaire accepter d'investir plus de 400 milliards de dollars dans la République islamique au cours du prochain quart de siècle, ce qui se traduira probablement par des investissements impressionnants dans les infrastructures pour faciliter le NSTC à certains égards, notamment en termes de connectivité irano-pakistanaise du fait que ce dernier accueille le CPEC.

"La quête de souveraineté économique de la Russie n'est pas synonyme d'isolationnisme", contrairement à ce que certains observateurs occidentaux ont faussement prétendu, car personne ne peut nier la vision transcivilisationnelle et transcontinentale avancée par le NSTC dans lequel Moscou joue un rôle clé. "Le coup de judo géo-économique de Poutine vient de renverser les tables financières de l'Occident" après que le dirigeant russe a décrété que tous les contrats de gaz avec les pays nouvellement conçus comme inamicaux, tels que ceux de l'UE, doivent être payés en roubles, ce qui aura pour conséquence soit de soutenir le rouble s'ils s'y conforment, soit de risquer une crise économique totale en Occident s'ils refusent, les deux résultats étant bénéfiques à Moscou à leur manière. Dans le contexte de la présente analyse, ces derniers développements signifient que l'importance stratégique du NSTC va continuer à augmenter pour toutes ses parties prenantes, qui pourraient prospectivement s'étendre pour inclure également leurs autres partenaires du Sud.

La fin de la domination mondiale des États-Unis & Ce qui est en jeu

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La fin de la domination mondiale des États-Unis & Ce qui est en jeu

Karl Richter

Source: https://www.facebook.com/karl.richter.798

Depuis quelques heures, nous y voyons plus clair. Les pièces du puzzle s'assemblent pour nous former une image globale. Le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov a annoncé cet après-midi sur la chaîne de télévision russe "Russia 24", à la surprise générale, un autre objectif de guerre de la Russie en Ukraine, sans que les médias occidentaux n'en soufflent un mot : "Notre opération spéciale doit mettre fin à l'expansion inconsidérée, à la domination totale des Etats-Unis dans le monde, une domination qui s'accompagne de violations du droit international". (Source : https://m.ura.news/news/1052544901 )

Lavrov a cité les actions américaines au Kosovo et en Irak comme exemples de telles violations du droit international par les Etats-Unis.

Les cartes sont désormais sur la table et chacun sait désormais de quel côté il faudra se situer. Chacun doit assumer la responsabilité de ses choix et de leurs conséquences. Nous assistons actuellement à la poursuite de l’objectif poursuivi suite à la crise sanitaire : si quelqu'un se fait piquouzer, sans que l’on ait à demander le pourquoi, on en concluera que chacun décide lui-même et en assume également les conséquences. Je vous renvoie à mon post d'hier ("Ce qui est en jeu", cf. infra). Depuis cet après-midi, c'est officiel et plus personne ne peut se soustraire à la décision : soit on est du côté de l’instance criminelle mondiale qu'est l'Amérique, soit on ne l'est pas. Il n'est plus nécessaire d'en débattre.

***

Ce qui est en jeu

Ces dernières semaines, des militants bien intentionnés ne cessent de répéter que la guerre en Ukraine n'est pas la nôtre et que nous devrions plutôt nous occuper de l'Allemagne. Mais ce n'est pas suffisant.

En Ukraine, c'est l'avenir du monde qui est en jeu, indépendamment de la durée de la guerre et de la possibilité qu'elle se termine par une solution négociée qui ne ferait que retarder le conflit en soi. Mais les "masterminds", qu'ils s'appellent Alexandre Douguine ou Francis Fukuyama, sont tout à fait d'accord sur le fait que l'issue du conflit ukrainien sera déterminante pour l'orientation future de la situation mondiale. Soit l'Occident l'emporte, soit ce n'est pas le cas : la Russie, la Chine et l'Eurasie en formation auront alors acquis la maîtrise de la situation. Dans ce sens, l'issue de la guerre est très importante pour notre propre avenir. Comme l'Allemagne n'a actuellement ni les moyens ni même la volonté d'adopter une position neutre, elle participe inévitablement à la confrontation entre les blocs et en subira les conséquences, dans un sens ou dans l'autre. Face à cela, chacun devra d'une manière ou d'une autre se positionner et expliquer quelles sont les conséquences du jeu en acte qu'il préfère et quelles sont celles qu'il préfère épargner à notre pays.

Celui qui ne fait rien - de même que celui qui soutient l'Ukraine - soutient la poursuite de l'hégémonie américaine, des "valeurs dites occidentales", du pillage du monde par Big Money. Il soutient le fait que l'Allemagne reste une plaque tournante pour les guerres d'agression américaines dans le monde entier et devienne la cible d'éventuelles attaques militaires de toute partie adverse. Il soutient aussi le suicide économique de l'Europe qui a soutenu une politique énergétique délirante et des sanctions absurdes. Il soutient le programme satanique des élites occidentales, qui se résume à la destruction de la famille, à la destruction de notre santé et de notre intégrité physique, à l'effacement de l'identité personnelle (via le transhumanisme !).

En supposant que la Russie ne fasse PAS partie du Great Reset : la Russie, la Chine et l'Eurasie représentent au contraire la fin de la domination mondiale du dollar américain, l'avènement d'un véritable ordre mondial multipolaire, le respect des valeurs traditionnelles telles que la famille, la patrie et l'identité, et le rejet de toutes les formes de décadence libérale occidentale, qui est de facto une "culture de mort". Au printemps 2020, Poutine a déclaré que tant qu'il serait au pouvoir, il n'y aurait pas de "mariage homosexuel" en Russie - une déclaration parmi d'autres.

Oui, il y a des nuances de gris et des nuances intermédiaires : des pays comme la Russie et la Hongrie ont également mis en œuvre cette mise en scène mondiale que fut le « confinement sanitaire », parfois en adoptant des mesures drastiques ; la Chine l’a pratiqué de manière encore plus coercitive. La Chine en particulier, avec son système de crédit social et l'un des régimes sanitaires les plus rigides au monde, et, là, ce n'est pas nécessairement un modèle pour nous. Personne ne devrait non plus être naïf en ce qui concerne la Russie : personne ne s'attend à ce que la Russie nous "libère". Mais si elle poussait les Américains hors d'Europe, ce serait déjà un saut quantique pour notre partie du monde, dont les conséquences seraient difficilement prévisibles ; encore plus pour la répartition globale du pouvoir.

Au fond, c'est très simple. Les Américains ont encore du mal à accepter le fait qu'ils ne jouent plus dans la cour des grands. La Chine a remplacé les Etats-Unis en tant que championne du monde des exportations, le dollar perd du terrain à grande échelle (ce qui explique la course folle à la guerre de l'Occident, qui utilisent les malheureux Ukrainiens pour arriver à ses fins) ; l'Inde et l'Arabie saoudite sont en train de passer au paiement en roubles, et en Europe, Orbán fait ses premiers pas en ce sens. Et, enfin, la Russie et la Chine disposent d'armes hypersoniques, mais non les Américains. Ce qui signifie que les Américains sont en train de passer en deuxième division. Pour l'instant, ils ont encore du mal à l'accepter. Quelques coups sensibles, de nature militaire mais aussi monétaire, pourraient éventuellement leur faire comprendre qu'ils n'ont plus rien à faire en Europe. Biden ne sera pas assez fou pour risquer une guerre nucléaire à cause de l'Ukraine - ce qui ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'utilisation d'armes nucléaires tactiques en Europe.

L'Europe, l'UE, va passer à l'état de décomposition active dans les prochains mois, dans un an ou dans trois ans au maximum. Poutine n'a même pas encore commencé à fermer le robinet du gaz et tend toujours la main à l'Occident. L’eurocratie de Bruxelles est assez folle pour se tirer une balle dans le pied. L'Europe s'apprête à vivre un interrègne sanglant et agité : elle pourrait échanger un hégémon contre un autre, et le retour à sa propre force est loin d'être visible. Mais la catastrophe peut ouvrir de nouvelles voies qui ne sont pas encore perceptibles aujourd'hui. En attendant, il se peut que les valeurs de l'Europe - les vraies - soient mieux conservées à Moscou qu'à Bruxelles et à Washington.

La revue de presse de CD 17 avril 2022

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La revue de presse de CD

17 avril 2022

EN VEDETTE

Outil de travail, un annuaire de six clubs d’influence

N’en déplaise aux esprits simples il n’existe pas de « grand complot mondial » avec une salle obscure ornée de flambeaux, où de petits hommes gris (vous pouvez changer la couleur selon vos goûts) se réunissent à 7, 10 ou 12 pour décider du sort du monde. Mais il existe bien des cercles d’influence dont une partie au moins des activités sont publiques et les autres privées, dans des proportions variables. Un de nos lecteurs (que nous remercions) s’est livré à une compilation des membres de certains d’entre eux. Il obtient un tableau à près de 1200 entrées dont de nombreux journalistes, certains noms peuvent se retrouver plusieurs fois s’ils appartiennent à plusieurs cercles. Nous conseillons à nos lecteurs de télécharger cette base de données qui constitue un instrument de travail parmi d’autres. Notre lecteur s’est intéressé à six cercles d’influence dont au moins quatre sont dans l’orbite du soft power américain.

Ojim.fr

https://www.ojim.fr/outil-de-travail-un-annuaire-de-six-c...

CHINE

Entre influence et reconnaissance : la Chine dans l’Afghanistan des talibans

La Chine presse discrètement ses interlocuteurs talibans de veiller à ce que ses intérêts et ses investissements en Afghanistan fassent l’objet d’un soin particulier. Et surtout que le territoire afghan se garde d’accueillir à nouveau tout membre de la minorité musulmane chinoise ouïghoure du Xinjiang, hostile au gouvernement de Pékin. Quoique les autorités chinoises se gardent officiellement d’un tel projet, ce lobbying assumé par Pékin s’apparente de plus en plus à une entreprise réfléchie de reconnaissance internationale progressive de l’Émirat islamique d’Afghanistan.

Asialyst.com

https://asialyst.com/fr/2022/04/09/chine-afghanistan-tali...

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DÉSINFORMATION/CORRUPTION

Nils Melzer, rapporteur de l’ONU sur la torture : « Journalistes, l’affaire Assange vous concerne »

Nils Melzer (photo), rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, avait refusé de rendre visite à Julian Assange avant 2019. Il était totalement d’accord avec la version des médias, jusqu’à ce qu’il commence à y regarder de plus près, à lire les rapports et rende visite à Assange. Trois ans plus tard, il écrit The Trial of Julian Assange: A Story of Persecution (Le procès de Julian Assange: L’histoire d’une persécution), un appel urgent à tous les journalistes. « Ce qui arrive à Assange vous concerne tous ».

Lecridespeuples.fr

https://lecridespeuples.fr/2022/04/09/nils-melzer-rapport...

L’Affaire des caricatures publiées par l’ambassade de Russie en France

L’ambassadeur de Russie a été convoqué par Jean-Yves Le Drian après avoir publié deux caricatures sur son compte twitter. Retour sur les pratiques de la caricature et la liberté d’expression à géométrie variable.

lesakerfrancophone.fr

https://lesakerfrancophone.fr/laffaire-des-caricatures-pu...

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Le déclin de la presse papier en chiffres

Dans le cadre de la commission d’enquête du Sénat sur la concentration des médias, où un certain nombre d’industriels (Niel, Arnault, Lagardère, Bolloré) ont été entendus, la Direction des médias et des industries culturelles (DGMIC) a publié le 7 avril 2022 son rapport sur l’évolution de la presse papier 2010/2019 et ils ne sont pas réjouissants.

ojim.fr

https://www.ojim.fr/le-declin-de-la-presse-papier-en-chif...

ÉCONOMIE

L’économie néolibérale nous rend complètement cinglés

L’économie néolibérale était censée apporter un ordre mondial utopique. Au lieu de cela, elle nous a condamnés à un stress psychologique handicapant et à un effondrement social. Comment pourrons-nous jamais nous en remettre ?

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/l-economie-neoliberale-nous-ren...

ÉNERGIES

L’Arabie saoudite dévoile ses ambitions dans l’hydrogène

Le Royaume saoudien a récemment débuté la construction de sa première unité de production d’hydrogène vert. Ce projet, qui porte le nom d’Hélios, développé par un consortium américano-saoudien, permet aux autorités saoudiennes de dévoiler leurs ambitions dans l’hydrogène, afin de devenir rapidement l’un des plus gros producteurs au monde. Cette volonté sert deux objectifs pour l’Arabie saoudite : rester un leader de premier plan sur la scène énergétique mondial et produire une énergie plus verte et décarbonée pour répondre aux enjeux climatiques. Toutefois, ce projet n’est pas le premier, l’Arabie saoudite étant déjà un exportateur d’hydrogène bleu.

Revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/larabie-saoudite-devoile-se...

FRANCE

Présidentielle : voter avec les classes populaires et battre Macron

Je ne pensais quand même pas devoir assister en rage, au nouveau déploiement du grand barnum destiné à animer l’entre deux tours de la présidentielle. « La grande quinzaine antifasciste à nouveau dans votre ville ! » Je me trompais, ils sont tous là, les petits marquis, les profiteurs, les obligés, les corrompus, les « artistes » subventionnés, les sportifs ingrats, les faux intellectuels, ceux qui veulent aller à la soupe, ceux qui veulent la garder, les comiques officiels, les journalistes sans morale, les fonctionnaires dévoyés, tous ceux qui portent leur « antifascisme » à la boutonnière, comme un signe extérieur de richesse. Toutes les tribunes leur sont ouvertes, car notre oligarchie devenue ploutocratie a ses méthodes : le rouleau compresseur de ses médias, les pressions et l’intimidation pour les récalcitrants, on ne veut voir qu’une tête et l’entendre clamer tout unimement : « no pasaran ! »

Vududroit.com

https://www.vududroit.com/2022/04/presidentielle-voter-av...

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Corse : les paradoxes d’une île nationaliste qui vote Le Pen/Zemmour

Comment expliquer que la Corse a placé Marine Le Pen en tête des suffrages ce dimanche soir (25,58%) tout en réservant un score élevé à Eric Zemmour (12,80%) alors même que les nationalistes sont désormais hégémoniques aux élections locales ?

Breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2022/04/13/184998/corse-les-p...

Emmanuel Macron, une comète dans la galaxie Soros ?

Quelle est la proximité idéologique entre le président de la République française, Emmanuel Macron et le milliardaire américain George Soros ? Si cette question mérite d’être posée, c’est parce que certains faits mis en lumière par l’Observatoire du journalisme en avril 2021 sont pour le moins troublants. D’un côté, un milliardaire qui ne cache pas sa stratégie d’influence libérale libertaire. De l’autre, un président de la République française qui partage de nombreuses convictions de George Soros et les met en application. Il nous a paru important de sortir de l’oubli deux articles de l’OJIM publiés l’année dernière, quelque peu remaniés, consacrés à cette question.

polemia.com

https://www.polemia.com/emmanuel-macron-une-comete-dans-l...

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GAFAM

Guerre en Ukraine : Chris Hedges censuré par YouTube

« Je n’ai reçu aucune question ni avis de la part de YouTube. J’ai tout simplement disparu. Dans les systèmes totalitaires, on existe, puis on n’existe plus. Je suppose que cela a été fait au nom de la censure à l’encontre de la propagande russe, bien que j’aie du mal à voir comment une étude détaillée de « Ulysses » ou des biographies de Susan Sontag et de J. Robert Oppenheimer peuvent avoir un quelconque rapport avec Vladimir Poutine aux yeux des censeurs les plus obtus de la Silicon Valley.

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/guerre-en-ukraine-chris-hedges-...

GÉOPOLITIQUE

Iran, le conflit ukrainien bouscule la donne. Entretien avec Thomas Flichy de La Neuville

Comprendre la guerre en Ukraine sans prendre en compte l’Iran serait occulter une partie du problème. Il se pourrait bien que les États-Unis changent en effet de stratégie vis-à-vis de la République islamique dans le but de freiner les exportations gazières russes. Dans cette soudaine recomposition géopolitique, le Professeur Thomas Flichy de La Neuville analyse dans quelle mesure le conflit ukrainien pourrait profiter à une nouvelle et inattendue émergence iranienne.

Revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/iran-le-conflit-ukrainien-b...

Ukraine : le manichéisme contre le réalisme géopolitique

Dans les années 1930, a-t-on négocié avec Hitler ? Si la réponse la plus évidente, la moins simpliste et donc par définition la moins séduisante sera l’affirmative pour ceux qui se souviennent des funestes accords de Munich, la pique adressée cette semaine par le Premier ministre polonais Mateuz Morawiecki à un président français qui ne s’est pas privé de répondre avec une saillie qui n’honore pas sa fonction montre l’incroyable manichéisme dans lequel se noie désormais la géopolitique mondiale relativement au conflit russo-ukrainien. Un manichéisme totalement contraire à l’esprit même des relations internationales.

contrepoints.org

https://www.contrepoints.org/2022/04/11/425180-ukraine-le...

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LECTURE

Titre :

Le crépuscule du monde, de Werner Herzog. Séguier, 2022.

51g2svCJI6L._SX195_.jpgPrésentation :

« Soudain, trouant le silence, une voix me demanda : ‘’Si vous ne souhaitez pas voir l’empereur, qui d’autre pourriez-vous avoir envie de rencontrer au Japon ?’’ » A cette question, Werner Herzog répondit sans hésiter : ‘’Onoda’’. Le nom, à lui seul, à l’apparence d’une énigme. En 1945, lorsque le Japon capitule, Hiroo Onod est un soldat de l’armée impériale à qui l’on a confié la défense d’une petite île des Philippines. Ignorant la défaire de son pays, retranché dans la jungle, il continuera pendant près de trente ans une guerre imaginaire où les véritables ennemis sont moins les troupes américaines qu’une nature hostile… et ses propres démons. »

Auteur :

Werner Herzog est l’un des tous derniers grands metteurs en scène vivant. Créateur d’une œuvre cinématographique immense et sans égal – Aguirre, la colère de Dieu, Fitzcarraldo, L’énigme de Kaspar Hauser, Nosferatu, fantôme de la nuit, Grizzly Man - , mélange fascinant de fiction et de documentaire, il est aussi auteur de deux livres passionnants, un récit, Sur le chemin des glaces (POL, 1988) et un entretien, Manuel de survie (Capricci, 2008)).

Extraits :

« - Vous êtes ici le seul homme à avoir été entraîné à la guerre secrète et aux

tactiques de guérilla.

  • Affirmatif, major.
  • Voici l’ordre, dit Taniguchi. Dès que nos troupes auront quitté Lubang, vous aurez pour mission de continuer à occuper cette île jusqu’au retour de l’armée impériale. Vous défendrez ce territoire selon les principes de la guérilla, quoi qu’il en coûte. Toutes les décisions, vous le prendrez seul. Vous ne serez aux ordres de personnes. Vous êtes livré à vous-même. A compter de maintenant, il n’existe plus de règles. C’est vous qui décidez des règles.

Onoda reste de marbre.

  • Oui major, affirmatif.
  • - A l’exception d’une seule règle, précise Tanigucchi. Il ne vous est pas permis de porter la main sur votre propre personne. Si vous deviez être fait prisonnier, vous vous chargerez plutôt de livrer à l’ennemi toute une série d’informations erronées. »

« La guerre de Onoda n’a aucune importance pour le cosmos, le destin des peuples, le déroulement du conflit. La guerre de Onoda est composée à partir de l’union d’un néant imaginaire et d’un rêve, mais la guerre de Onoda, conçue à partir de rien, est un événement transcendant, un de ceux qui sont extorqués à éternité. »

«  A compter de maintenant et pour deux – ou quelques instants – Onoda est une partie de la jungle en mouvement. Lorsque, une fois, il réalise qu’il ne va pas pouvoir éviter une petite troupe de soldats de l’armée philippine en train d’avancer, il s’enfouit à la dernière minute sous une couche de feuillages. Dans sa précipitation, un retardataire de la troupe lui marche sur la main sans le remarquer. »

RÉFLEXION

Les jeunes, la consommation, la mondialisation : une question d'identité

Il est très difficile de prévoir comment les jeunes vont réagir à leur crise d'identité. Comment vont-ils s'orienter ? Préféreront-ils s'abandonner au vide existentiel des temps modernes ou feront-ils de la question de l'identité le pilier de leur rédemption ?

Euro-synergies.hautefort.com

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/04/08/l...

SANTÉ/MENSONGES/LIBERTÉ

Investigations et Expertises

Je vous mets à disposition ici les résultats de mes investigations et expertises, des liens sur les documents source des essais cliniques : Vous y trouverez mon « Evaluation des pratiques méthodologiques mises en œuvre dans les essais Pfizer dans le développement de son vaccin ARN-messager contre la COVID-19 en regard des Bonnes Pratiques Cliniques » Ce rapport met en évidence les multiples biais méthodologiques invalidant les résultats de l’essai clinique de phase 3 ayant donné lieu à l’utilisation du vaccin Comirnaty ® en vie réelle.
Mes conclusions expliquent notre réalité d’aujourd’hui :
– efficacité médiocre du vaccin,
– durée de la protection de 4 mois
– effets secondaires graves nombreux et inquiétants.

Le Blog de Christine-Cotton

https://christine-cotton.1ere-page.fr/

La Doxa du Covid : récit clinique d’une manipulation

Cet essai de Laurent Mucchielli est clair, net et précis : critique et clinique ! Pas de fioritures : du concret, des faits, rien que du concret. À chaque page, trois ou quatre notes de bas de page qui viennent prouver le dire du chercheur, via un panoramique assez impressionnant de ce qui s’est publié depuis une dizaine d’années en général, et ces deux dernières en particulier, dans les journaux scientifiques et ceux de sociologie sur la santé publique.

francesoir.fr

https://www.francesoir.fr/opinions-tribunes/la-doxa-du-co...

samedi, 16 avril 2022

La crise ukrainienne à travers les yeux du monde arabe

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La crise ukrainienne à travers les yeux du monde arabe

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2022/04/15/ukrainan-kriisi-arabimaailman-silmin/

En Finlande et dans d'autres pays de l'UE, les événements en Ukraine sont suivis de près par les journalistes des médias grand public et les émissions d'information. La couverture officielle de YLE (la radio-télévision publique en Finlande) est d'un ton monocorde et recycle principalement la propagande produite par l'Occident et le régime ukrainien.

En Asie de l'Ouest (le "Moyen-Orient" en termes occidentaux), l'opération spéciale de la Russie est également très présente dans les médias sociaux de la région. Les analystes locaux surveillent également la façon dont l'Internet réagit à ces événements et leurs implications dans différents domaines de la vie et de la politique.

Cependant, le mélange de préférences et d'opinions politiques et idéologiques est différent de celui de l'Occident. Les accusations critiquant les événements en Ukraine sont davantage dirigées contre les États-Unis et leurs alliés que contre la Russie.

"Il y a plusieurs raisons à ce ton", explique le chercheur Yuri Zinin. "L'une des plus importantes est que la perception de la réalité actuelle par les gens est influencée par leurs souvenirs de la domination passée de l'Occident sur la région arabe. Les communautés locales en ont fait l'amère expérience, ce qui, d'une manière ou d'une autre, alimente des blessures qui n'ont jamais guéri."

L'"anti-occidentalisme" qui s'est accumulé au fil des décennies prend un nouveau sens. C'est pourquoi "beaucoup dans le monde arabe n'acceptent pas la rhétorique américaine sur le droit international et la souveraineté des États à la lumière des événements en Ukraine", suggère Zinin. Les violations de la souveraineté et des droits nationaux en Palestine, en Irak et en Libye sont souvent citées comme point de comparaison.

Le régime actuel de Kiev a également tenté de rejoindre l'Occident dirigé par les États-Unis. Même le vocabulaire du régime ukrainien est "emprunté aux ennemis de la Russie". Les personnes qui suivent le conflit dans le monde arabe se demandent donc "si les nationalistes ukrainiens combattent la Russie pour se défendre ou s'ils se précipitent simplement au secours des États-Unis et de l'OTAN".

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Dans les médias sociaux du monde arabe, les événements en Ukraine et les réactions de l'Occident sont également comparés aux conflits dans leur propre région, qui n'ont pas reçu la même réponse internationale, et les Occidentaux ne sont pas aussi réceptifs aux victimes de conflits plus éloignés, voire pas du tout.

"La vaste campagne médiatique menée par l'Occident en faveur du gouvernement de Kiev suscite des doutes chez les Arabes quant à sa base morale", déclare Zinin. "Les documents et les reportages télévisés qui poussent la souffrance des Ukrainiens afin de susciter la sympathie du public sont si agressifs qu'ils créent l'effet et la réaction exactement opposés parmi les utilisateurs des médias sociaux."

Selon les utilisateurs des médias sociaux, les médias mondiaux et le cyberespace font beaucoup de bruit autour de la guerre en Ukraine, mais ce qui se passe réellement est bien plus réduit au silence et dissimulé. La compréhension des internautes est largement colorée par la production des désinformateurs et falsificateurs ukrainiens et occidentaux.

Le site arabe Misbar, qui depuis 2019 s'est spécialisé dans la recherche et la dénonciation de faux fichiers dans les communautés en ligne, a été actif à cet égard. Ces dernières semaines, elle a enquêté et découvert un certain nombre de cas de ce type en Ukraine, sur la base de sources documentaires vérifiées.

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Il s'agit notamment d'images publiées de maisons incendiées par l'armée russe dans la ville de Sumy, au nord-est de l'Ukraine. Selon Misbar, ce ne sont rien d'autre que des photos de presse prises le 2 février 2020 après un incendie dans la ville d'Irshava, dans la région de Taka-Karpattia, en Ukraine occidentale.

Un autre exemple est une vidéo de prétendues attaques ukrainiennes sur des véhicules blindés russes à Kiev. Là encore, il s'agissait d'un faux : il s'agissait d'images de manifestants ukrainiens lançant des cocktails Molotov sur les troupes ukrainiennes lors de manifestations en 2014.

La publication émiratie fait référence au président ukrainien qui, avec le soutien de l'équipe occidentale, a gonflé le nombre de victimes civiles de l'opération russe. Il a également été établi que de nombreuses photographies citées comme preuves de "crimes de guerre" sont des montages, c'est-à-dire des prises de vue successives d'une même situation. Le journal algérien Le Jeune Indépendant a qualifié le massacre de Boutcha de "nouveau mensonge des atlantistes pour dénigrer la Russie".

Le monde arabe exprime ainsi "sa méfiance à l'égard du système international, qui a contribué à la crise dans la région et s'est précipité au secours de l'Ukraine, tout en ignorant les choses négatives qui se sont produites ou se produisent encore dans de nombreux pays arabes".

Selon le journal saoudien Okaz, les Arabes et leurs élites culturelles penchent vers la Russie sur la question ukrainienne. Toutefois, j'estimerais personnellement que leur attitude est également une indication de la réussite du Kremlin dans l'établissement de relations avec ses partenaires arabes au cours de la dernière décennie.

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Moscou entretient des relations particulièrement étroites avec les EAU et les deux pays coopèrent dans le cadre de jeux à l'étranger en Afrique et en Asie occidentale. Dans le même temps, les relations entre les Émirats et d'autres pays de la région et les États-Unis ont été tendues par les récents changements de politique sous Biden et l'administration précédente.

Les pays arabes considèrent la détérioration de leurs relations avec l'Occident comme une tendance plutôt que comme une série de décisions et d'événements individuels. La Russie est considérée comme un partenaire plus durable et plus fiable à long terme que les États-Unis.

"L'opération de la Russie en Ukraine est un cas particulier", déclare un écrivain arabe. Il est devenu "l'étincelle tant attendue qui contribuera au processus de sortie de l'ère d'incertitude ou de volatilité politique que le monde a connue toutes ces années".

L'ère américaine s'est caractérisée par "un Occident collectif poursuivant des politiques hégémoniques, pillant les biens nationaux et écrasant la volonté des nations par ses sanctions, et d'autres pôles qui ont peu à peu construit leurs économies et leurs institutions pour prendre leur place dans l'équilibre international des forces en fonction de leur potentiel croissant".

Cependant, ces nouveaux pôles géopolitiques se sont heurtés à chaque fois à la détermination de l'Occident à maintenir le statu quo et à conserver son propre ordre comme seul centre de pouvoir dans le monde, au lieu d'un système plus pluraliste et équitable.

"Le fait que les relations se soient maintenant envenimées et soient devenues plus turbulentes dans d'autres parties du monde que la seule Ukraine est un signe de changements imminents pour corriger les dysfonctionnements du système dans lequel le monde a vécu ces dernières décennies", prédit Zinin.

***

France. La somme ne fait pas le total

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France. La somme ne fait pas le total

par Roberto Pecchioli

Source: https://www.ideeazione.com/francia-la-somma-non-fa-il-totale/

Le premier tour des élections présidentielles françaises évoque un vers du comique italien Totò (1898-1967) : c'est la somme qui fait le total. Dans ce cas, par la négative ; la somme ne fait pas le total, car une fois de plus, une anomalie des démocraties libérales autoproclamées s'est manifestée : la majorité des citoyens a voté contre le système, mais le système a gagné. Le 24 avril, cette vérité sera confirmée par le second tour entre Emmanuel Macron, le président en exercice, jeune gentleman de l'écurie Rothschild prêté à la politique, et Marine Le Pen, son adversaire, décrite comme une représentante de l'extrême droite.

Le schéma est le même que lors des élections précédentes et le résultat sera le même, même s'il est certain que la différence de voix entre l'homme de l'oligarchie et la femme de l'opposition sera beaucoup plus faible qu'en 2017, lorsque le schéma classique de la politique - pas seulement française - a fonctionné à la perfection, à savoir la conventio ad excludendum, le cordon sanitaire contre Le Pen, qui avait déjà été testé jadis contre son père Jean Marie.

Un coup d'œil aux chiffres : Macron a obtenu un peu plus de 27%, Le Pen plus de 23%, dépassant le troisième venu, Jean Luc Mélenchon, champion de la gauche sociale, d'environ un demi-million de voix. La défaite des partis politiques qui ont dominé la scène transalpine pendant des décennies a été dévastatrice : un humiliant 4,7 % pour la représentante de la droite modérée, Valérie Pecresse, et même 1,7 % pour Anne Hidalgo, la maire socialiste de Paris. Les résultats des écologistes et du candidat communiste, fidèle allié des socialistes, ont été très modestes. En revanche, le résultat du candidat rural conservateur, Jean Lassalle, est flatteur, avec un score peu impressionnant de 3 % des voix. Les 7 % recueillis par le polémiste d'extrême droite Eric Zemmour, un juif d'origine maghrébine, qui a mobilisé un nombre considérable de jeunes et imposé plusieurs thèmes de campagne, sont contradictoires.

Les deux candidats ultra-communistes ont fait chou blanc, avec un résidu de 2% pour le souverainiste Dupont Aignan, le seul à s'être rangé du côté de Marine Le Pen au second tour il y a cinq ans. Le taux d'abstention a été intéressant, atteignant 28% - un record - auquel il faut ajouter un nombre ostensible de citoyens non inscrits sur les listes électorales, une mesure préventive que la France partage avec les Etats-Unis.

Un Français sur trois n'a pas voté, et bien plus de 50% (Le Pen, Mélenchon, Lassalle, Dupont Aignan, l'ultra-gauche, certains partisans de Zemmour et les communistes "officiels") sont allés aux forces anti-establishment. Cependant, ceux-ci perdront, car la somme ne fait pas le total, c'est-à-dire qu'il est impensable que les opposants à Macron et à l'establishment convergent massivement vers la candidature de Le Pen. Au contraire, le réflexe conditionné de barrer la route à l'extrême droite a déterminé - alors que le dépouillement est encore en cours - le déploiement unanime des communistes, des socialistes, des écologistes et de la droite modérée et étourdie en faveur de Macron. Le soutien attendu de l'ancien président Sarkozy à son successeur est également arrivé.

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De manière cryptique, Mélenchon a exhorté les gens à ne pas voter pour Marine Le Pen, mais a évité de prendre le parti de Macron. Il semble que beaucoup ne l'écouteront pas: un tiers de ses électeurs serait prêt à voter pour Le Pen. Quoi qu'il en soit, la victoire de Macron ne fait aucun doute, même si l'écart ne sera pas énorme. Le système de pouvoir gagnera malgré le fait qu'il soit manifestement minoritaire parmi les citoyens. Un scénario similaire à celui de l'Italie, ressemblant de plus en plus à celui de l'Espagne et de l'Allemagne. Les anciennes "grandes" familles politiques du vingtième siècle qui se partageaient le pouvoir en faisant semblant de se le disputer (socialistes, popularistes démocrates-chrétiens, libéraux) ont de moins en moins d'audience dans l'opinion publique, mais elles parviennent à maintenir leur emprise sur la société parce que leurs adversaires sont politiquement incompatibles, querelleurs, en proie à des conflits passés et à des idiosyncrasies rédhibitoires. Diviser pour mieux régner, la plus ancienne leçon de pouvoir.

L'addition ne fait pas le compte et des millions de personnes, en France, en Italie et partout ailleurs, se réfugient dans l'abstention, dans l'indifférence rancunière, dans la radicalisation verbeuse. Pensons, en clé italienne, à l'immense déception de la grillina, qui a rassemblé en 2018 un électeur sur trois et a été instantanément apprivoisée et cooptée dans les mécanismes du pouvoir. Le sort de la Ligue, devenue l'alliée du gouvernement Draghi, le vice-roi des puissances fortes dont le métier est de liquider ce qui reste de la souveraineté, de l'économie et de la nation, n'est pas différent.

Les réactions italiennes au résultat des élections sont significatives : seul Salvini est favorable à Le Pen, tandis que Berlusconi fait l'éloge du "libéral et modéré" Macron et que Giorgia Meloni se déclare neutre, attendant le parti de Zemmour et la minorité gaulliste anti-Macron. Un intellectuel conservateur, Marco Gervasoni, souhaite la victoire de Macron parce qu'il est de droite.  Regardons les choses en face : il a raison. L'ancien fonctionnaire de Rothschild et ancien ministre socialiste est le produit d'une intuition de Giovanni Agnelli : la meilleure droite est le centre-gauche. Le droit de l'argent et la gauche de la morale se rencontrent au centre pour les affaires, comme l'a écrit un intellectuel socialiste, Jean-Claude Michéa. Macron est le croisement parfait entre la riche gauche "progressiste" - caviar, dit-on en France - et la vraie droite - libérale, atlantiste, mercatiste.

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Il est désormais inconvenant de considérer Marine Le Pen comme "d'extrême droite". Elle est la favorite des ouvriers français et des classes populaires: son programme social est tout sauf libéral, et ses mots d'ordre très clairs sur l'immigration et la culture de l'effacement sont moins radicaux que ceux de Zemmour, dont la base électorale est constituée des classes moyennes supérieures. Le schéma déjà vécu en Amérique se répète: Trump représente les valeurs morales traditionnelles et les grands secteurs territoriaux et sociaux des perdants de la mondialisation; les Démocrates représentent les classes supérieures urbaines et le radicalisme sur les questions éthiques et sociales.

Le 10 avril 2022, la France a montré que le schéma gauche-droite ne signifie presque plus rien. Elle est utilisée par le pouvoir en place pour se maintenir en place tout en diabolisant l'adversaire, en exerçant un chantage et en ralliant à lui les milieux et les classes dont les intérêts divergent des politiques concrètes mises en œuvre par les groupes dirigeants, qu'ils soient de centre-gauche ou de centre-droit. Le système de parti unique l'emporte en raison de l'incapacité persistante à trouver un terrain d'entente pour une vaste opposition à la fois politique, sociale, éthique et fondée sur des valeurs.

Le schéma est évident pour toute personne qui observe la réalité sans œillères: pas de droite/gauche, mais du haut/bas, centre/périphérie, exclus/gratifiés, villes/campagnes et banlieues, gagnants/perdants de la mondialisation, mondialistes/souverainistes et identitaires. En ce sens, les électeurs de Macron seront principalement des fonctionnaires, des professions libérales, des travailleurs de haut niveau dans les nouvelles technologies, des employés des secteurs économiques "forts" et des grandes villes. Le reste de la société est déjà son ennemi, comme le montre la révolte des gilets jaunes, les vagues de grèves et de manifestations populaires, l'opposition farouche à l'augmentation de l'âge de la retraite.

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Chaque nuit, la France est secouée par des émeutes, tandis que dans au moins sept ou huit cents quartiers (les banlieues), la police n'entre plus, soustraite de fait à l'autorité de la fière République. La nuit des élections a vu la dévastation de plusieurs villes, démontrant comment le modèle jacobin d'assimilation de grandes masses non-européennes a échoué de manière retentissante, tout comme les tentatives d'intégration. La France est aujourd'hui ce que l'Italie sera très bientôt.

La géopolitique joue un rôle important. La France aime se considérer comme une grande puissance sans en être une, mais elle conserve un certain degré d'indépendance internationale. Macron n'a pas épousé sans critique la ligne américaine sur le conflit ukrainien et a besoin d'accords avec l'avancée de l'axe russo-chinois en Afrique, où les intérêts français dans les pays dont la monnaie est encore le franc colonial émis par Paris sont énormes. Marine Le Pen interprète un sentiment répandu en promettant, en cas de victoire, de sortir le pays du commandement intégré de l'OTAN, une position gaulliste.

Cependant, la question à se poser est autre: la chef du Rassemblement national peut-elle vraiment devenir président ? La réponse est non. L'Europe, le système atlantique, l'oligarchie non élue de l'Occident peut tolérer - avec un agacement croissant - la petite faction hongroise, supporter l'anomalie polonaise dans une clé anti-russe, mais elle ne peut accepter une France désalignée, souverainiste et protagoniste de politiques migratoires, financières et sociales qui ne sont pas conformes à ses intérêts d'oligarchie. Une victoire de Le Pen plongerait probablement la France dans un climat insurrectionnel dont le feu serait attisé par les puissances financières, économiques et militaires mondialistes.

Cela signifie que la France, même fière, est un pays à souveraineté limitée et que la démocratie - c'est-à-dire la participation et la décision du peuple sur son propre destin - n'est qu'un vain mot. Cela fonctionne tant que celui qui leur plaît gagne, cela devient de l'extrémisme, du populisme et tout court du fascisme ou du communisme si un peuple décide d'une manière qui diffère de la volonté de ceux qui dominent le monde et contrôlent la presse, l'économie, la culture, la finance et la politique. Sous Macron, le fonds géant Black Rock a pénétré en France avec un succès retentissant, tout comme un géant du conseil, McKinsey.

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Déjà soupçonné d'avoir piloté la campagne présidentielle de 2017 en fonction des intérêts américains, le groupe a remporté des contrats d'une valeur de 2,3 milliards d'euros pour travailler sur des questions allant de la réforme des retraites à la numérisation. Malgré la force et la qualité traditionnelles des cadres supérieurs français, Macron a privatisé les grands choix, qui plus est à une société étrangère. Mc Kinsey est également accusé de ne pas avoir payé un centime d'impôt en France: c'est probable, car les sociétés de services - déterritorialisées comme les Gafam - parviennent à échapper à l'impôt partout, avec un réseau de sociétés, de facturation carrousel et de bureaux fictifs dans les paradis fiscaux. Selon le politologue français Thierry Meyssan, "le groupe McKinsey a réalisé un véritable exploit en élisant à la présidence un homme politique inexpérimenté afin de détruire la société française".

McKinsey et le Boston Consulting Group sont devenus les conseillers du gouvernement en matière de politique de défense, de climat et de migration, ainsi que dans le développement de stratégies épidémiques. Il y en aurait assez pour évincer le président, qui est également soupçonné d'évasion fiscale pendant les périodes où il a travaillé comme intermédiaire d'affaires de haut niveau. Des rumeurs, des soupçons, peut-être, qui s'abattraient pourtant comme des rochers sur le candidat Macron s'il n'était pas l'élu du système. En 2017, un scandale a été monté contre son adversaire le plus accrédité, le gaulliste François Fillon, qui n'a abouti à rien, l'accusation d'avoir employé sa femme comme eurodéputée avec un salaire de commis. La route était pavée pour l'enfant prodige.

Croyons-nous encore à la volonté du peuple, à la régularité matérielle des élections, à la possibilité réelle que les demandes du peuple l'emportent, quelles qu'elles soient ?  Si l'alternative n'est pas au goût des échelons supérieurs, ils organisent une campagne de diabolisation. Cela a fonctionné pendant des années, cela fonctionnera également au second tour entre Macron et Le Pen. Une fois encore, la somme ne s'additionnera pas. Mais c'est peut-être la dernière fois : bientôt la vague, d'où qu'elle vienne, qui l'incarne, ne pourra plus l'arrêter. Ou ils suspendront les délais inutiles, les procédures fatiguées de "leur" démocratie. En Italie, ils l'ont déjà fait.

vendredi, 15 avril 2022

La voie verte vers la Troisième Guerre mondiale

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La voie verte vers la Troisième Guerre mondiale

Par Willy Wimmer

Source: https://www.world-economy.eu/nachrichten/detail/der-gruen...

Les cartes sont sur la table. Les États-Unis veulent une prise de contrôle hostile de la Russie. La Russie ne veut pas être poussée hors d'Europe et veut vivre dans des frontières sûres. Nous, Européens, sommes confrontés à la question de savoir si nous allons survivre à cette lutte ? Un regard en arrière apparaît utile. Il montre clairement où a été donné le coup d'envoi de l'évolution actuelle, d'une guerre au milieu de nous. C'était assez inattendu lorsqu'il y a presque un an, le nouveau président américain Biden a parlé du président russe Poutine comme d'un "tueur". Jusqu'à cette interview, le monde pensait que la Chine et l'Occident étaient sur le point de s'affronter par armes interposées à propos de Taïwan, des Ouïghours ou de quoi que ce soit d'autre. Avec l'interview évoquant le "tueur", les choses ont basculé. Il y a quelques semaines, Klaus von Dohnanyi a donné l'impression, lors d'un débat sur ZDF-Illner, que l'OTAN avait pris la décision unanime, au niveau des chefs d'État et de gouvernement, le 14 juin 2021, de faire entrer l'Ukraine dans l'OTAN. Tout le monde savait en quoi consistait la décision de l'OTAN de Bucarest en 2008, à l'instigation de la France et de l'Allemagne, sur cette question: l'Ukraine ne devait pas devenir la pierre angulaire d'une nouvelle confrontation entre l'Occident et Moscou. Au lieu de cela, une nouvelle architecture de sécurité devait être créée en Europe.

Les Américains s'en moquaient. Ils s'en sont tenus à leur ligne politique, mise en œuvre depuis 1917, qui consiste à façonner le continent européen selon leurs idées. Pour ce faire, l'Allemagne a tout d'abord été mise en coupe réglée par la Première Guerre mondiale et Versailles. Ce qu'il en restait a été instrumentalisé contre l'Union soviétique par Adolf Hitler, à tel point que jusqu'à la réunification allemande en 1990, les dommages de guerre résultant de la Seconde Guerre mondiale n'avaient pas été réparés en Union soviétique. L'année dernière, lors de la visite à Moscou de la sous-secrétaire d'État américaine, Mme Nuland, au début du mois d'octobre 2021, la Russie actuelle était encore soucieuse de son autonomie et de sa sécurité. Pour les États-Unis, il s'agissait et il s'agit toujours du plus grand échec supposé de la politique depuis 1917. Il fallait y remédier, tout comme la coopération économique fructueuse entre la Russie actuelle et l'Allemagne actuelle, malgré deux guerres mondiales.

Certes, le début de la guerre en Ukraine, avec l'attaque massive des forces ukrainiennes contre les "régions mentionnées dans les accords de Minsk", celles de Lougansk et de Donetsk, remonte déjà à des semaines terribles et meurtrières, le 17 février 2022. Mais avec les sanctions imposées à l'initiative des États-Unis, il ne reste presque plus rien de la coopération économique fructueuse entre la Russie et l'UE, dont la France et l'Allemagne, comme premier objectif de guerre dans la lutte contre la Russie. Le reste fait l'objet d'une campagne d'intimidation telle que nous, Allemands, l'avions vécue pour la première fois dans le feu roulant de la propagande franco-britannique contre l'empereur Guillaume II. Depuis l'inclusion frauduleuse des "quatorze points" de Wilson dans le traité d'armistice de novembre 1918, une phrase détermine cette forme de politique : c'est la parole non tenue qui prévaut. C'est comme l'élargissement à l'Est de l'OTAN.

Avec l'attaque ukrainienne contre Lougansk et Donetsk, il était clair pour tout le monde qu'il s'agissait de mettre en œuvre la ligne Zelensky pour la reconquête de Donetsk, de Lougansk et de la Crimée. Cela devait rendre caduques les dispositions du traité de l'OTAN selon lesquelles aucun État ne doit être admis dans l'OTAN s'il a des problèmes de frontières avec d'autres et donc des questions frontalières non résolues. Quelques jours après le 17 février 2022, les forces armées russes ont envahi l'Ukraine, 23 ans après la guerre d'agression de l'OTAN contre la Yougoslavie, que le département d'État américain avait classée au regard du droit international et de l'histoire lors de la conférence de Bratislava au printemps 2000. La réaction occidentale à l'invasion russe a reflété toute l'étendue de la politique occidentale vis-à-vis ou en rapport avec le rôle assigné à l'Ukraine.

Le peuple ukrainien doit voir son pays réduit en miettes pour des raisons géostratégiques, pour voir les aspects cités au début décidés du côté américain et russe. L'Europe de l'UE, mise au pas à l'instigation notamment des "Verts" politiques européens, veut que la décision soit prise sur le champ de bataille, comme le manifeste la Commission européenne. Aucune trace d'efforts de paix, on est devenu bien trop partisan pour cela. Il règne dans l'Europe de l'UE une atmosphère qui ne recule devant aucune diabolisation. Des armes sont livrées les yeux fermés, et il ne dépend plus de nous de savoir si nous avons franchi le seuil de la troisième guerre mondiale. Ce ne sont pas les godillots mais les talons aiguilles qui, cette fois-ci, martèlent sur le pavé le chemin de la perdition. 

L'opinion de l'auteur/interlocuteur peut différer de celle de la rédaction. Loi fondamentale Article 5, paragraphes 1 et 3 (1) "Chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, l'écrit et l'image et de s'informer sans entrave à partir de sources généralement accessibles. La liberté de la presse et la liberté d'information par la radio et le cinéma sont garanties. Il n'y a pas de censure".

jeudi, 14 avril 2022

La guerre en Ukraine, la myopie eurocentrique et le reste du monde

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La guerre en Ukraine, la myopie eurocentrique et le reste du monde. "Quelque chose" ne colle pas...

par Clement Ultimo

Source: https://www.destra.it/home/la-guerra-ducraina-la-miopia-delleurocentrismo-e-il-resto-del-mondo-qualcosa-non-torna/

La guerre en Ukraine est-elle un problème mondial ou européen ? Une question apparemment superflue, étant donné que les implications de la crise actuelle se font sentir à l'échelle planétaire, mais peut-être moins superflue qu'il n'y paraît à première vue, surtout si vous lisez des opinions et des considérations provenant de sources non euro-occidentales.

Si la guerre russo-ukrainienne est présentée aux opinions publiques européennes et occidentales comme un conflit total entre des visions opposées du monde et de l'histoire (une réédition actualisée et corrigée de l'affrontement entre le "monde libre" et le "monde socialiste" auquel les médias se sont généreusement prêtés avec une voix presque unanime), donc comme un conflit qui, pour sa portée "idéologique" - la démocratie contre l'autoritarisme - ne peut être confiné à une zone géographique spécifique, l'appréciation que le reste du monde porte sur l'affaire est tout autre.

La question des sanctions a clairement montré comment l'unanimité dans la marginalisation de la Russie dans le domaine économique n'est vraie que si l'on se réfère aux pays européens et à ceux du bloc atlantique (USA, évidemment, Australie, Japon, Corée du Sud). Plus de la moitié du monde n'adopte aucune mesure pour bloquer les échanges économiques avec la Russie, et parmi les nations qui refusent les sanctions, on trouve non seulement des pays marginaux - en termes de poids politique et économique, évidemment - mais aussi les économies émergentes des BRICS. Et s'il est trop facile pour la Chine d'expliquer son non-alignement sur les souhaits de Washington, il est plus complexe de le faire pour la "plus grande démocratie du monde", comme s'appelle avec emphase l'Inde, ou pour le Brésil ou l'Afrique du Sud.

Sont-ils tous des "États voyous", amis du "fou" Poutine ? De toute évidence, non. La guerre en Ukraine peut donc être présentée non pas comme un affrontement mondial, mais plutôt comme la nécessité de trouver "des solutions européennes à des problèmes européens", comme le souligne l'universitaire kenyane Martha Bakwesegha-Osula dans son article pour le magazine allemand Internationale Politik und Gesellschaft.

Une thèse développée et relancée dans les pages de la revue italienne de géopolitique Limes par Hu Chunchun, selon qui: "D'une part, l'Europe se dresse comme un phare de la civilisation moderne ; d'autre part, elle a à plusieurs reprises amené l'humanité au bord de la ruine et de la destruction. La culture européenne moderne semble donc posséder les traits d'un Janus à deux visages: un visage hideux de barbarie, masqué par une façade sacrée de valeurs et d'idées absolues. Dans l'histoire européenne, il est rare que nous acceptions les critiques non européennes de notre propre sens inébranlable du messianisme universel. En tant qu'universitaire qui, bien qu'enraciné dans la culture chinoise, a toujours admiré la grande entreprise de civilisation européenne, permettez-moi de lancer un appel à l'Europe. Le conflit actuel ne concerne pas la liberté contre la répression et la tyrannie; il s'agit de la perpétuation d'une logique historique intrinsèque à l'Europe moderne. Il est temps pour les citoyens européens de mettre un terme à ce jeu insensé à somme nulle, qui est perçu avec angoisse et horreur par les cultures hors d'Europe. Après un siècle de catastrophes, le Vieux Continent n'a pas le droit de forcer le monde entier à choisir une fois de plus entre la guerre et la paix, entre la destruction et la survie".

En bref, le moment est peut-être vraiment venu pour l'Europe d'essayer de regarder la réalité historique avec des yeux différents. Non seulement parce que la "fin de l'histoire" hypothéquée par Fukuyama n'était qu'une confortable illusion dans laquelle les sociétés européennes - sénescentes et incapables de projection extra-domestique - se sont bercées depuis des décennies, mais surtout parce que, aujourd'hui plus que jamais, une vision strictement occidentalo-centrée (l'eurocentrisme est un fantôme depuis au moins 80 ans) est irréaliste et trompeuse. Elle est donc un signe avant-coureur de problèmes.

lundi, 11 avril 2022

La Chine et la Russie, une menace pour la suprématie financière américaine

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La Chine et la Russie, une menace pour la suprématie financière américaine

par Sherish Khan

Source: https://www.ideeazione.com/cina-e-russia-una-minaccia-per-la-supremazia-finanziaria-americana/

Le système financier mondial est actuellement sous pression sous différents angles. La structure du commerce mondial est compliquée. L'une des principales raisons est que les intérêts des États-Unis et de l'Europe ont été gravement endommagés. En termes de commerce, la Chine a dépassé ces deux régions du monde. Les Chinois en sont convaincus et sont par ailleurs habitués à la production de masse. La Chine dans son ensemble est également appelée "l'usine du monde". La capacité à concurrencer la Chine dans le processus de production n'est actuellement pas possible pour les États-Unis et l'Europe. L'une des principales raisons est que la Chine a fait des efforts systématiques pour se procurer des matières premières dans différentes régions du globe ; elle importe de grandes quantités de matières premières d'Afrique, d'Asie et d'autres régions. Ce processus a renforcé non seulement son statut économique, mais aussi son statut politique et social. Les États-Unis sont actuellement préoccupés par la manière de maintenir leur domination sur la politique et l'économie mondiales, notamment dans le domaine de la finance. La Chine et la Russie deviennent une menace pour la suprématie financière des États-Unis.

La Russie a tiré la plus retentissante sonnette d'alarme pour le système financier mondial contrôlé par l'Occident. Les États-Unis et l'Europe ont tenté de renforcer leur position en imposant des sanctions économiques à la Russie en riposte à une intervention militaire russe en Ukraine. La Russie a été exclue du système de paiement international Swift. Dans ce système, tous les paiements sont effectués en dollars et en euros. Les États-Unis ont déclaré que la Russie ne pouvait plus mener ses affaires financières en dollars. L'exclusion de Swift signifie qu'aucune entreprise russe ne peut percevoir de quelqu'un un paiement quelconque en dollars ou payer quelqu'un en dollars. Dans ce cas, quelle option a la Russie ? Que peut-elle faire pour briser le monopole du dollar ? La Russie est un exportateur majeur. Ses exportations comprennent l'aluminium, le palladium, le nickel et d'autres métaux, le pétrole brut, le gaz, les diamants, le charbon et de nombreuses autres matières premières importantes. La part de la Russie dans le commerce mondial est d'environ 22%. Un pays dont le statut commercial est aussi important ne peut être facilement négligé. Maintenant, la Chine parle de conclure des accords pétroliers avec la Russie en roubles. D'autre part, l'Arabie saoudite, dans certains cas, semble être jalouse d'une configuration comme Swift, et si la Russie commençait à faire tout son commerce en roubles ? La position mondiale du dollar serait affaiblie. Si la Russie réussit, d'autres pays devront également commercer dans leur propre monnaie. Les plus grands exportateurs de pétrole brut sont l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Que se passerait-il s'ils décidaient de vendre leur pétrole dans leur propre monnaie ?

Tout comme la Chine a accepté de commercer avec la Russie en roubles et en yuans. Si deux ou trois autres pays agissent de la sorte, il sera très dangereux pour le dollar de monter. Au moment de l'invasion russe de l'Ukraine, le monde entier avait l'impression qu'un nouveau bloc était sur le point d'émerger, qui serait anti-occidental et donnerait du fil à retordre à l'Occident. Le monde musulman, y compris le Pakistan, est très important à cet égard, car c'est sur la base de nos décisions que les caractéristiques de ce bloc deviendront claires. Il importe peu que l'Inde ne soit pas d'accord. Beaucoup de choses changeront si la plupart des pays du monde musulman se rangent du côté de la Chine et de la Russie. Dans ce cas, les États-Unis ne seront pas en mesure de maintenir leur position dans la politique et l'économie mondiales. La véritable préoccupation pour les États-Unis et l'Europe est que la Russie et la Chine détiennent toutes deux une part importante du commerce mondial. En tant que plus grand moteur manufacturier du monde, la Chine et, à côté d'elle, la Russie se démarquent des États-Unis et de l'Europe.

La question clé est maintenant de savoir ce que veulent les États-Unis et l'Europe. Sont-ils prêts à faire des concessions au reste du monde ? Le monde occidental est-il prêt à impliquer d'autres puissances émergentes dans la politique et l'économie mondiales ? La tête de cet Occident global n'a pas l'air d'y penser. L'attitude des superpuissances à chaque époque est la même que celle des États-Unis et de l'Union européenne. Tous deux ne sont pas prêts à reculer. Les États-Unis ne sont pas favorables à l'idée de céder la place à la Chine et à la Russie ; cela ne signifie pas que leur puissance est intacte, même s'il y a eu un déclin de la puissance, ils ne veulent pas donner l'impression qu'ils s'affaiblissent. Si la Chine et la Russie devaient mettre de côté le système de paiement international actuel et développer un système alternatif pour elles-mêmes, la supériorité financière des États-Unis et de l'Europe serait gravement affectée. Si les États arabes ou du Golfe sont également intéressés par l'adoption de ce système alternatif, beaucoup de choses seront inversées. La Russie parle depuis longtemps de rétablir le système de troc, c'est-à-dire de remplacer les marchandises par des produits de base. Si un tel système est introduit, la position décisive du dollar sera gravement compromise.

 

L'auto-sabotage de l'Union européenne en 8 points

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L'auto-sabotage de l'Union européenne en 8 points

Source: https://jornalpurosangue.com/2022/03/13/a-autossabotagem-da-uniao-europeia-em-8-pontos/

De GPOShorts

Ce court article examine les perspectives immédiates de l'Europe en huit points, à la lumière de l'opération spéciale de la Russie en Ukraine.

1) Tout événement majeur provoque des spasmes dans le monde entier ; les événements actuels en Europe provoquent des ravages sur tous les marchés mondiaux. Sans surprise, c'est en Europe que les conséquences de l'action du Kremlin se font le plus sentir et ce, pour une multitude de raisons. Confrontée à la flambée des prix du carburant, à un tsunami d'immigrants et à un nouveau rideau de fer, l'Europe est au cœur des plus grandes transformations depuis 70 ans. Malgré toute la sympathie que l'on peut avoir à première vue, un regard sur l'histoire récente nous aide à comprendre comment les événements mondiaux ont amené la situation là où elle est aujourd'hui.

2) Autant le conflit qui balaie actuellement ce qui était il y a quelques décennies la puissance industrielle et agricole du sud de l'Union soviétique est le résultat de la malfaisance des États-Unis et de l'Ukraine, autant il est aussi en partie la faute de l'Europe occidentale. Un coup d'État mené par les États-Unis et huit années de guerre ont été largement ignorés par les gouvernements européens et leurs peuples, étant perçus comme "la guerre des autres", mais cela signifiait simplement que, pour l'essentiel, les États-Unis, Bruxelles et les autres centres politiques fermaient les yeux sur un problème croissant à leurs frontières. Le fait que les faits connus aient été ignorés au profit des relations avec Washington s'est avéré être une très mauvaise décision géopolitique, mais malgré toutes les preuves, les dirigeants européens ont continué non seulement à soutenir aveuglément huit années de "fausse paix", mais aussi à supprimer toute voix qui remettait en question leur soutien continu non seulement à un gouvernement fantoche, mais aussi à tout ce qu'il représente.

3) Cet article ne porte pas sur le contrôle de la politique européenne par Washington, mais on ne peut ignorer le fait que les Européens restent absolument à l'écoute des États-Unis, à leur détriment absolu. En 2002, des centaines de millions d'Européens ont subi un bouleversement majeur lorsque l'Union européenne a mis en place l'euro à la place des monnaies nationales, mais 20 ans plus tard, au lieu d'utiliser l'euro, le bloc européen négocie toujours en dollars. Cette situation n'ayant pas été assez mauvaise, elle permet encore à la Maison Blanche et à l'OTAN de dicter la politique étrangère de toute nation qui finit par irriter Washington, ce qui a culminé avec la guerre qui ravage actuellement l'Ukraine. Alors qu'aux États-Unis, les répercussions de la guerre poussent les automobilistes américains à se plaindre des prix de l'essence, en Europe, elles représentent un véritable tsunami, les prix des carburants augmentant aussi vite que le nombre d'immigrants. Il est connu que beaucoup de ceux qui ont conduit l'Europe sur cette voie ont des affiliations étroites avec "l'establishment" du continent, mais les questions quant à savoir où cette voie mènera sont actuellement sans réponse. Cette absence de réponses entraîne toutefois une nouvelle vague de questions très urgentes, des questions auxquelles l'Europe occidentale doit répondre le plus rapidement possible.

4) Pendant près d'une décennie, l'Europe occidentale a soutenu les États-Unis dans leurs efforts pour tenir tête aux Russes, mais contrairement à l'affirmation de John McCain selon laquelle la Russie n'est que la "station-service d'un pays", une rupture soudaine des relations Ouest-Est s'avère être un véritable casse-tête pour les Occidentaux à bien des égards. Nous savons tous à quel point la Fédération de Russie joue un rôle important sur le marché mondial de l'énergie, mais comme elle est aussi (et surtout) un grand exportateur agricole, les prix d'un certain nombre de produits alimentaires importants vont également monter en flèche dans les mois à venir. En soi, ce n'est pas un problème si grave, car les nations occidentales sont capables d'adapter leurs propres industries agricoles pour compenser, du moins en partie, le déficit. Ce qui est grave, en revanche, c'est que la Russie est également un acteur clé du marché mondial des engrais. Même si l'Occident devait restructurer son secteur agricole, il a toujours besoin de matières premières, en l'occurrence des engrais, pour le faire et les prix élevés des engrais aggravent considérablement une situation déjà assez mauvaise. Cerise sur le gâteau, avec la pénurie mondiale, la Russie pourra toujours vendre ce qu'elle peut produire, mais à des prix beaucoup plus élevés. Washington voit peut-être la Russie comme la station-service du monde, mais les dirigeants européens sauront-ils calmer l'ire de leurs consommateurs face à l'explosion des prix et au début d'une période de stagflation ?

5) Comme nous l'avons examiné précédemment, la situation des matières premières devient beaucoup plus aiguë d'un côté de l'Atlantique que de l'autre, mais malgré cela, les figures de proue de Bruxelles veulent restreindre davantage leurs échanges avec la Russie. Outre le carburant, les denrées alimentaires et les engrais, la Russie est également un acteur majeur dans le domaine des minéraux. Le fer, le nickel et le titane sont plus importants en tant que matières premières pour l'Occident qu'en tant qu'exportations pour la Russie, mais l'UE a tout fait pour rendre de plus en plus difficile l'accès aux biens requis par ses industries nationales. Bien que les économies européennes soient différentes, la fabrication de produits finis de qualité est importante dans plusieurs États membres de l'UE et les pénuries de matériaux pourraient à terme entraîner la disparition de nombreuses entreprises. La raison pour laquelle Bruxelles voudrait se tirer une balle dans le pied est une question sans réponse, mais il est certain que cette démarche fait le bonheur de nombreuses personnes à Washington.

6) Il ne fait aucun doute que les mesures actuelles appliquées contre la Russie affectent l'Europe beaucoup plus profondément que les États-Unis, ce qui est reconnu depuis longtemps par les experts en affaires mondiales. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis représentaient plus de la moitié des exportations mondiales, mais au cours des huit dernières décennies, la Chine et l'Europe ont érodé l'avantage antérieur de Washington, la "ceinture d'acier" des États-Unis ayant rouillé, obligeant l'Oncle Sam à compter sur d'autres pays pour fournir une grande partie de ce qui est consommé dans le pays. La rivalité entre Washington et Pékin n'est pas examinée ici, mais la situation actuelle, si elle ne favorise pas Washington, a certainement un effet très négatif sur l'Europe, ce n'est pas la première fois que les États-Unis tentent de prendre le dessus en repoussant les autres. Pour toutes les affaires entre Washington et Bruxelles, et entre l'Est et l'Ouest, il y a néanmoins un assez gros éléphant - soit un problème délibérément ignoré en dépit de sa lourde évidence-  dans la pièce qui ne fera que grossir en raison des circonstances actuelles.

7) Alors que les Occidentaux se plaignent de la Russie en Ukraine, la véritable douleur économique est encore à venir. Sauf, bien sûr, en Chine, où des contrats à long terme entre Moscou et Pékin permettront de minimiser les pics de courant. Les relations entre Moscou et Pékin ayant atteint un sommet historique, le commerce entre les deux se poursuivra sans entrave. Les contrats précédemment conclus sur toute une série de matières premières sont toujours en vigueur, mais si la Chine a besoin de plus, elle sera certainement gratifiée. Le gouvernement chinois payant les prix convenus pour tout cela, la Chine se trouve désormais dans une position très avantageuse par rapport au commerce mondial, les économies liées au marché occidental voyant leurs prix s'envoler. Avec cette alliance qui se renforce d'année en année, l'amitié mutuelle signifie à son tour un avenir mutuellement assuré, et dans le climat actuel, à des prix qui n'ont jamais été aussi compétitifs. N'oubliez jamais que si cela favorise l'Est d'une manière jamais vue auparavant, cette situation est absolument un produit de la politique occidentale.

8) Malgré toutes les jérémiades des Occidentaux, le conflit en Ukraine et ses conséquences dans le monde entier ont été créés par ce même Occident. Une décennie à essayer de mettre le plus grand pays d'Europe hors jeu en faveur des intérêts américains aboutit à une situation de plus en plus désagréable pour le monde occidental. Avec la coupure de tous les approvisionnements en carburant vers l'Europe, Bruxelles fait face au canon d'un pistolet économique avec son propre doigt sur la gâchette. Si la situation devait encore se détériorer, la Russie pourrait bien fermer le Nord Stream 1, ce qui aggraverait encore une situation déjà désespérée. Malgré toute l'ampleur des mesures prises contre Moscou, la Russie a prouvé qu'elle avait un éventail tout aussi large d'exportations à proposer sur le marché international. Le fait que le jeu de Washington nuit à l'Europe autant qu'à la Russie n'est pas passé inaperçu pour certains, mais tant que les consommateurs européens ne s'en rendront pas compte, il faudra s'attendre à peu de changements. En attendant, le soleil de l'Est semble effectivement se raffermir dans le ciel, les économies chinoise et russe se réjouissant des conditions imposées par Washington. Il est fort probable qu'à l'avenir, l'Europe se rende enfin compte qu'elle a été manipulée pour se saboter elle-même.