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samedi, 21 juin 2008

Jean Mabire: artiste et partisan

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Artiste et partisan

Entretien avec Jean Mabire

Journaliste, historien, écrivain, Jean Mabire est un homme de style. Attaché à la civilisation européenne, dirigeant d' Europe Action et fondateur du GRECE, il a été de tous les combats identitaires. Critique littéraire à National Hebdo, membre du Comité de rédaction d' Eléments et du Comité de parrainage de Nouvelle Ecole, Jean Mabire nous a reçu pour parler en toute liberté du combat identitaire qui est le nôtre.

Q.: Pour vous quelle est la finalité du combat identi­taire?

Le véritable sens de notre lutte apparaît de plus en plus clairement: c'est la défense de l'individu contre les robots et, par conséquent, celle des patries contre le mondialis­me. Pour nous, chaque homme comme chaque nation pos­sè­de une personnalité irréductible. Aussi, je ne vois pas pour­quoi je devrais m'excuser de parler à la première per­sonne du singulier.

Q.: Et vous, comment participez-vous au mouvement identitaire?

Je ressens profondément la nécessité de concilier deux at­titudes, apparemment contradictoires: celle de l'artiste et celle du partisan. Cette rencontre est pour moi une que­stion de goût personnel. C'est aussi un problème de sens politique: je crois qu'on ne peut rien construire sans une certaine recherche esthétique. Mais celle-ci devient stérile sans une profonde rigueur doctrinale. Résultat pratique: je ne suis ni un bon écrivain ni un bon militant. Je triche un peu sur les deux attitudes. Mais elles remplissent tous mes jours et bien de mes nuits. Voici des images pour m'ex­pli­quer. Celle-ci, par exemple: il est des lieux où je me suis sen­ti parfaitement moi-même; dans le grand hall de la Bi­blio­thèque nationale et sur la place d'armes d'un Régiment parachutiste. Le vertige et la plénitude que m'offrent les li­vres ne sont pas si éloignés de ceux que m'apportaient les sauts. La pensée et l'action ont toujours pour moi marché cô­te à côte, au pas fiévreux de la recherche ou au pas tran­quille de la certitude.

Q.: Au fait, comment êtes-vous devenu écrivain?

On croit être né pour une carrière d'officier, d'architecte ou d'avocat (c'était bien porté dans ma famille). Et puis les ha­sards, les amis et les guerres vous lancent dans d'étranges batailles. J'ai commencé à écrire parce que je haïssais tout autant le silence que le bruit et que mon pays était devenu silencieux et bruyant. A la barre d'une revue culturelle: Wi­king; dans les soutes d'un quotidien départemental: La Presse de la Manche; sur le pont d'un journal politique: L'Es­prit public; ou au pied du mât avec mon livre sur Drieu.

Q.: Je reviens à ma question initiale: comment êtes-vous devenu écrivain?

Cela me fait souffrir quand on m'appelle écrivain. Ecrire pour moi n'est pas un plaisir ni un privilège. C'est un service comme un autre. Rédiger un article ou distribuer un tract sont des actes de même valeur. Chacun sert où il peut. C'est une question de tempérament et d'efficacité. Non de mérite, et encore moins de hiérarchie. Dans notre aristo­cratie militante, nous sommes parfaitement démocrates et même égalitaires. Nous ne sommes pas de ces intellectuels de gauche qui se sentent supérieurs aux employés, aux ouvriers ou aux paysans de leur propre peuple.

Q.: Pour vous, qu'est-ce que le nationalisme?

Le nationalisme, c'est d'abord reconnaître ce caractère sa­cré que possède chaque homme et chaque femme de notre pays et de notre sang. Notre amitié doit préfigurer cette unanimité populaire qui reste le but final de notre action, une prise de conscience de notre solidarité héréditaire et inaliénable. En quelque sorte, c'est une certaine forme de socialisme !

Q.: Il s'agit d'une véritable conception du monde...

J'espère être assez artiste pour exprimer d'une manière li­sible notre conception du monde et de la vie. Mais j'essaye d'être assez partisan pour ne pas transformer en jeu d'adresse et en exercice de sty1e ce qui demeure la chair et l'esprit de notre combat. Si je hais tout sectarisme, je n'en méconnais pas moins les nécessités de la discipline et même de la brutalité. Je sais qu'il est des dialogues qu'il faut clore et des amitiés qu'il faut briser. Les écrivains po­litiques doivent accepter ces injures qui font aussi mal que des coups. Je me bats avec les armes qui sont les miennes. Ce ne sont pas les seules. Nos ennemis se battent sur tous les fronts. Nous aussi, nous devons être partout. Dans la rue comme dans la presse.

Q.: Vous êtes direct…

Nous sommes des amants éperdus de la liberté.

Q.: Qui détestez vous le plus ?

Je déteste ces écrivains qui font un petit tour dans la poli­ti­que et se retirent à temps, lorsque leurs idées commen­cent à se transformer en actes entre des mains un peu é­ner­giques. Ils ne savent plus que dire: "Nous n'avions pas vou­lu cela!" Les belles âmes! Les salauds!

Q.: Ecrire peut être un jeu dangereux...

C'est la seule noblesse de l'écrivain, sa seule manière de participer aux luttes de la vie. L'écrivain politique ne peut se séparer du militant politique. Le penseur ne peut aban­donner le guerrier. Un certain nombre d'hommes de ce pays ont sauvé et l'honneur des lettres et l'honneur des armes. Ils ne furent pas tous du même camp, mais ils sont nos frè­res et nos exemples. Je pense à Saint-Exupéry, abattu au cours d'une mission aérienne; je pense à Robert Brasillach, fusillé à Montrouge; je pense à Drieu La Rochelle, acculé au suicide dans sa cachette parisienne; je pense à Jean Pré­vost exécuté dans le maquis du Vercors. Ceux-là n'ont pas triché. Ils n'ont pas abandonné les jeunes gens impatients et généreux qui leur avaient demandé des raisons de vivre et de mourir et qu'ils avaient engagés sur la voie étroite, rocailleuse et vertigineuse de l'honneur et de la fidélité. Au­jourd'hui, nous sommes là, avec nos certitudes et nos es­pérances.

(Propos recueillis par Xavier CHENESEAU).

mercredi, 18 juin 2008

J. Parvulsco parle à "Synthesis"

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Entretien avec Jean Parvulesco pour Synthesis, journal du “Cercle de la Rose Noire” (Angleterre)

Propos recueillis par Troy Southgate

 

Voudriez-vous bien parler à nos lecteurs de vo­tre vie en Roumanie et leur expliquer pour­quoi vous avez été contraint de quitter votre patrie?

 

A 70 ans passés, j'ai vécu au moins trois ou quatre vies entières, à la fois différentes et séparées, et que ne relient ensemble qu'une sorte d'auto-transmigration obscure, très obscure. Je n'ai plus aucun souvenir vivant de la Roumanie, c'est pour moi des temps infiniment lointains, comme s'il s'agissait de je ne sais quel XVIIIe siècle à la cour des Habsbourg, dans Vienne sous la neige. L'effort de la marche arrière m'est trop pénible, trop difficile, je n'y pense plus jamais. Mes plus proches souvenirs actuels, mais qui, eux aussi, se font déjà brumeux, sont ceux des temps de l'OAS dans Madrid ensoleillé par les certitudes agissantes du ré­gime politico-militaire franquiste au sommet de son pou­voir. Avant, c'est brusquement la nuit noire, la vie de quel­qu'un d'autre que moi, une sorte de théâtre d'ombres aux re­présentations illégales, effacées, oniriques. Vous m'en vo­yez donc bien désolé: ma réponse à la première de vos questions s'avère être en fait une non-réponse; poussée dans ses derniers retranchements, ma propre existence ap­pa­raît comme une non-réponse, ou plutôt comme une ré­pon­se dissimulée, comme une réponse codée. De par la si­tua­tion qui est à présent la mienne, je suis tenu de me re­garder moi-même comme à travers la grille secrète d'un co­dage en profondeur, agent confidentiel jusque par rapport à moi-même. Ce sont les temps qui l'exigent, ces temps de la subversion totale qui sont nôtres.

 

Vous avez connu Julius Evola personnelle­ment. Que pensez-vous de son œuvre? Et que pensez-vous de l'homme Julius Evola?

 

Je m'étais en effet senti fort proche de Julius Evola. Et cela pour une raison fort précise: tout comme Miguel Serrano, Julius Evola ne s'était pas vu arrêter dans son devenir in­té­rieur par la sombre défaite européenne de 1945. Tous les grands créateurs de culture européens —Ezra Pound, Knut Hamsun, Pierre Drieu la Rochelle, Louis-Ferdinand Céline, Raymond Abellio, Mircea Eliade, et tant d'autres—  s'étaient retrouvés, à la fin de la dernière guerre mondiale, comme dépossédés d'eux-mêmes, mortellement blessés par l'effon­drement apocalyptique de l'histoire européenne qu'il leur avait ainsi fallu connaître, et dont ils avaient intérieu­re­ment eu à éprouver le désastre irréversible. Ainsi que je viens de le dire, je n'ai connu, depuis, que seuls deux grands penseurs européens qui n'aient pas accepté cet effondrement et qui, au contraire, n'avaient fait que con­ti­nuer, avec le même acharnement héroïque, le même com­bat en continuation, le même combat ininterrompu: Julius Evola et Miguel Serrano.

 

Julius Evola: un être à contre-courant

 

Il y aurait bien sûr une infinité de choses importantes à dire sur Julius Evola. Je me contenterai de vous faire part, ici, de son extraordinaire charisme aristocratique, patricien, de la dépersonnalisation initiatique parfaitement atteinte et maîtrisée de son propre être, qui n'était déjà plus rien d'au­tre qu'un concept d'action engagé dans le devenir provi­den­tiel de la "grande histoire" en marche, dont tous les ef­forts combattants tentaient, pourtant, d'en renverser le cou­rant. Car Julius Evola était, en effet, un être à contre-courant, une négation ontologiquement active de l' actuel cours crépusculaire d'une histoire du monde devenue, fina­le­ment, en elle-même, une instance de la grande conspi­ration subversive du non-être au pouvoir. Je prétendrai donc qu'une certaine lumière émanait, supérieure, mais en même temps dissimulée de sa personne, et que le simple fait de fréquenter Julius Evola, de se trouver même indi­rec­tement sous son influence active, impliquait déjà un avan­cement spirituel significatif, majeur, voire secrè­te­ment transfigurant. Il était là, mais caché derrière sa pro­pre présence refermée sur elle-même, hors d'atteinte.

 

Et je pense qu'il me sera également permis d'affirmer que la vision doctrinale personnelle et ultime, secrète, de Ju­lius Evola, sa vision de ce monde et de l'action en ce mon­de, se trouvait polarisée sur les destinées suprahistoriques occultes de Rome, qu'il considérait, et cela jusque dans sa continuité historique actuelle  —j'entends jusque dans son actuelle identité catholique— comme le véritable centre spi­rituel impérial, polaire  —dans le visible et dans l'in­visible—  de l'actuel grand cycle historique finissant. Julius Evola ne s'était en effet jamais considéré lui-même que sous l'identité d'"agent secret", dans le siècle, de la Roma Ae­terna.

 

Je pourrais aussi livrer bien de révélations décisives —voire étourdissantes, en fin de compte— à partir de mes propres souvenirs des longs entretiens confidentiels que j'avais eu avec Julius Evola, à Rome, chez lui, Corso Vittorio Em­ma­nuele, l'été et l'automne de 1968. Mais je m'interdis de le faire dans la mesure où je n'ignore pas qu'un profond secret opératoire en recouvre encore le contenu, qu'il serait infi­ni­ment dangereux  —et à présent bien plus que pour le pas­sé— de porter abruptement à la lumière du jour. Car l'heu­re n'en est pas encore tout à fait venue pour cela.

 

La "centrale polaire" du Corso Vittorio Emmanuele

 

Je peux néanmoins vous signaler que dans mon roman Le gué des Louves, Paris 1995, pages 20-31, je m'étais quand même permis de faire certains aveux d'une extrême impor­tance, d'une haute gravité spirituelle et philosophique —je devrais sans doute dire "philosophale", comme la "pierre philosophale"— sur certains événements de mon séjour ro­main auprès de Julius Evola, en 1968, et sur mes fréquen­tations confidentielles d'une "centrale polaire" occulte, ou­verte toute la nuit, Corso Vittorio Emmanuele, presque en bas de chez Julius Evola, le Daponte Blu.

 

Les réverbérations encore souterrainement agissantes de la doc­trine traditionnelle de Julius Evola, ainsi que son en­sei­gnement politico-révolutionnaire à contre-courant, tracent derrière lui un profond sillon ardent, un sillon d'incan­des­cence vive auquel devraient s'abreuver ceux des nôtres qui portent cachée en eux une prédestination spéciale, qui ont accédé à la différence. Car Julius Evola avait lui-mê­me en quelque sorte dépassé la condition humaine, il avait fait émerger en lui le surhomme qui reste à venir. Loin d'être un homme du passé, Julius Evola était un hom­me de l'avenir d'au-delà du plus lointain avenir. L'homme de la surhumanité solaire du Regnus Novissimum qu'avait entrevu Virgile.

 

L'un de vos premiers romans était La Mi­sé­ri­cor­dieuse Couronne du Tantra. Pouvez-vous nous expliquer comment vous voyez le con­cept de Tantra?

 

La Miséricordieuse Couronne du Tantra n'était pas un ro­man, mais un recueil de poèmes initiatiquement opéra­toi­res. Le tantrisme  —ce que l'on devrait appeler l'Aedificium Tantricum— est un ensemble doctrinal comptant une série d'étagements intérieurs de plus en plus occultes, de plus en plus prohibés, visant à porter l'être humain à sa libération  —ou à sa délivrance— ultime par les moyens d'une certaine expérience personnelle intime du "mystère de l'amour", du mystère de l'Incendium Amoris.

 

Si la substance vivante du cosmos dans sa totalité ultime n'est constituée que du feu, que de l'embrasement amou­reux se retournant indéfiniment sur lui-même et surcentré, polarisé sur la relation nuptiale abyssale régnant à l'in­té­rieur de l'espace propre, de l'espace unitaire du Couple Di­vin, l'accélération intensificatrice, superactivante d'une cer­taine expérience amoureuse de limite, portée à ses états paroxystiques tout derniers, fait  —peut faire— qu'une identification à la fois symbolique en même temps qu'on­tologique avec le Couple Divin apparaisse —à la limite— possible, qui dépersonnalise, éveille et livre les pouvoirs su­pra­humains de celui-ci aux amants tantriquement en­ga­gés corps et âmes dans les voies dévastatrices de l'In­cen­dium Amoris.

 

Or ce sont précisément les traces encore brûlantes d'une ex­périence de pénétration clandestine du mystère de l'In­cen­dium Amoris que La Miséricordieuse Couronne du Tan­tra est appelé à livrer, à travers son témoignage chif­fré. Car c'est bien de cela qu'il s'agit: La Miséricordieuse Cou­ronne du Tantra, mon premier livre, portait déjà en lui, comme une annonciation chiffrée, les germes surac­ti­vés de ce qui, par la suite, allait devenir l'ensemble de mon œuvre et, dans ce sens-là, était un livre essentiellement prophétique  —ou auto-prophétique— tout comme l'avait été, pour l'ensemble de l'œuvre de Raymond Abellio, son premier essai, Pour un nouveau prophétisme. Il y avait eu comme cela des mystérieuses structures d'accointance entre l'œuvre de Raymond Abellio et la mienne, dont les si­gnifications ultimes resteraient encore éventuellement à élucider.

 

Parlez-nous donc de votre ami Raymond Abel­lio, sur qui vous avez écrit une biographie, intitulée Le soleil rouge de Raymond Abel­lio…

 

Dans Le soleil rouge de Raymond Abellio, j'avais essayé de rassembler les conclusions essentielles d'une approche en raccourci de l'ensemble de son œuvre et de sa propre vie, car l'œuvre de Raymond Abellio et sa vie ne font qu'un: il avait voulu vivre sa vie comme une œuvre, et son œuvre comme sa vraie vie.

 

En prise directe sur la "grande histoire" en marche

 

Cependant, au contraire d'un Julius Evola, d'un Miguel Ser­rano, Raymond Abellio avait eu à subir, lui, de plein fouet la catastrophe de la destitution politico-historique de l'Europe vouée, en 1945, ainsi que le Général de Gaulle l'avait alors compris sur le moment même, à la double do­mination antagoniste des Etats-Unis et de l'URSS. Desti­tu­tion dont, consciemment ou inconsciemment, Raymond Abellio avait porté en lui, jusqu'à la fin de sa vie, l'in­gué­rissable brûlure dévorante, la stupéfaction secrète, irrémé­diable. Et cela d'autant plus qu'il avait eu à connaître, pen­dant les années mêmes de la guerre l'expérience exaltante de l'action politico-révolutionnaire en prise directe sur la "grande histoire" en marche.

 

En effet, en tant que secrétaire général du "Mouvement Social Révolutionnaire" (MSR), Raymond Abellio se trouvait personnellement à l'origine de la première tentative de mi­se en chantier —en pleine guerre— du grand projet con­ti­nental européen de l'axe politico-stratégique Paris-Berlin-Moscou, qui, à l'heure actuelle, plus de cinquante ans a­près, redevient de la plus extrême actualité en tant que pre­mière étape du prochain avènement de l'"Empire Eura­siatique de la Fin" dont on sait que, suivant le "grand dessein" européen en cours, il va devoir procéder à l'inté­gra­tion finale de l'Europe de l'Ouest et de l'Est, de la Russie et de la Grande Sibérie, du Tibet, de l'Inde et du Japon. Une même histoire profonde, un même destin supratem­porel, une même civilisation et un même ethos nordique, un même sang et un même souffle de vie originelle, an­té­rieure, archaïque en train de revenir à son centre polaire de départ.

 

Lui-même détaché, après 1945, de la marche de l'histoire mondiale, l'œuvre philosophique et littéraire de Raymond Abellio tend précisément au dépassement de l'histoire en cours, qu'elle transcende par une prise de conscience supé­rieure de soi-même, extatique, la "conscience de la cons­cience" dira-t-il. Prise de conscience libératrice et qui, de par cela même, livrera en retour les clefs opératives d'une puissance absolue exercée sur la marche de l'histoire, la puissance opérative de la "conscience occidentale de la fin parvenue à l'occident de la conscience" devenant ainsi l'ar­me métastratégique suprême, l'arme de la "domination fi­na­le du monde". Ainsi l'"homme nouveau" de la révolution européenne grand-continentale, de la nouvelle Totale Welt­­revolution actuellement en cours d'affirmation clan­destine, sera-t-il l'homme du "soi libéré", instruit par Ray­mond Abellio, car c'est l'homme libéré de l'histoire qui fera l'"histoire d'après la fin de l'histoire". La conscience ainsi exhaussée au-dessus d'elle-même, dédoublée, parviendra donc à intervenir directement dans l'histoire.

 

Ainsi, de toutes les façons, Raymond Abellio sera-t-il donc présent au rendez-vous, sur la "ligne de passage" du grand cycle finissant et du grand cycle du renouveau.

 

Je voudrais que vous nous parliez de votre ro­man, L'étoile de l'Empire invisible, et du com­bat apocalyptique qui a lieu entre les forces du "Verseau" et celles de l'"Atlantis Mag­na"…

 

Je peux dire qu'à la parution de mon roman L'étoile de l'Empire Invisible, j'avais eu beaucoup de chance. Norma­lement, j'aurais dû avoir les pires ennuis, je pense même que j'avais bien risqué d'y laisser ma peau, et déjà à ce mo­ment-là je le sentais. Etais-je confidentiellement protégé, je n'en sais toujours rien. Mais il faudrait le croire. En ef­fet, ce qui dans L'étoile de l'Empire Invisible se dissi­mu­lait sous la double dénomination chiffrée de la conspiration du "Verseau" et de la contre-conspiration de l'"Atlantis Mag­na" n'était en réalité que la confrontatio, faisant s'opposer alors, au plus haut niveau suprahistorique, pour la domi­na­tion finale de la plus Grande Europe et des espaces d'in­fluen­ce de celle-ci, la conspiration mondialiste de la "Su­per­puissance Planétaire des Etats-Unis" et la contre-conspi­ration du Pôle Carolingien franco-allemand s'appuyant se­crètement sur l'URSS. Les fort dangereuses révélations, à pei­ne codées, qui s'y trouvaient faites à ce sujet dans L'é­toile de l'Empire Invisible eussent largement pu justifier le coup en retour de représailles extrêmes contre l'auteur de ce roman, révélations dont celui-ci portait l'entière res­ponsabilité.

 

Seul un petit nombre connaissait le dernier mot

 

J'avais estimé, quant à moi, qu'à travers un roman de l'im­portance de L'étoile de l'Empire Invisible, une prise de cons­cience en profondeur devait marquer, pour les plus avan­cés des nôtres, le tournant historique  ­—et suprahisto­rique— suprêmement décisif de la conjoncture du moment, où la confrontation de deux mondes irréductiblement anta­go­nistes s'apprêtait à trouver sa conclusion, qui s'avérera com­me totalement imprévue. Car c'est bien ce qui en vint alors à se faire, avec l'auto-dissolution politique de l'URSS, événement infiniment mystérieux, où des puissances abys­sales étaient occultement intervenues dans le jeu, d'une ma­nière tout à fait providentielle, et dont seul un petit nom­bre connaissait le dernier mot.

 

Aussi l'ossature fondationnelle de L'étoile de l'Empire In­visible  —la dialectique de sa démarche intérieure— cor­res­pond-elle entièrement à la réalité effective des situations qui s'y trouvent décrites, à la réalité des personnages en ac­tion, des tensions, des conflits et des passions, des se­crets à l'œuvre et des dessous conspirationnels et amou­reux, de la réalité précise des lieux et jusqu'à l'identité mê­me  —jusqu'aux noms propres, parfois—  de certains person­na­ges que j'ai tenu à utiliser sans ne rien y changer. Une mince part de fiction y fera fonction de liant, ou servira à des dissimulations nécessaires. Cette exhibition de la réa­lité des choses dans le corps littéraire d'un roman re­pré­sentera, au moment de la parution de ce livre, un pari des plus risqués, une assez dangereuse option de provo­cation à froid, dont on ne comprenait pas la raison. Mais tren­te ans sont passés depuis que ces événements étaient censés avoir eu lieu: bien de choses se sont effacées de­puis, les tensions à ce moment-là paroxystiques ne signi­fient à présent plus rien, ou presque plus rien. Le temps a totalement dévore la chair vivante des choses, desséché les souffles.

 

Imposer à la réalité un statut de rêve

 

Aujourd'hui, la réalité de toutes ces choses là a fini par devenir une fiction, tout comme, au moment de la parution de ce livre, c'est la fiction qui était en train de devenir réalité. Or c'est précisément ce double échange entre réa­lité et fiction, entre fiction et réalité que j'avais voulu or­ga­niser: m'introduire moi-même dans la réalité à travers le ro­man. Ayant imposé à la réalité un statut de rêve, j'avais fait que le rêve lui-même devienne réalité.

 

Et je viens ainsi de répondre à votre sixième question:

«Serait-il correct de dire que ce roman con­tient un élément de réalité?»   Votre septième question est la suivante:

Pensez-vous que ce livre puisse être comparé à d'autres romans conspirationnels comme celui de Robert Shea et de Robert Anton Wil­son, Illuminatus Trilogy, ou celui d'Umberto Eco, Le pendule de Foucault?

 

Non, je suis infiniment désolé, mais je ne connais pas le li­vre de Robert Shea et Robert Anton Wilson, Illuminatus Trilogy.

 

Quant à Umberto Eco, je le tiens, tout comme son compère Paulo Coelho, pour des faiseurs subalternes, dont les litté­ratures ne concernent que les minables petites convulsions pseudo-initiatiques du New Age: leurs tirages pharamineux ne font que dénoncer le degré de dégénérescence mentale qui est aujourd'hui celui des masses occidentales hébétées, menées, à demi-consentantes aux abattoirs clandestins de l'histoire dont on nous impose les dominations, et qui n'est pas notre histoire.

 

Quelles sont les visions que vous développez sur a) le marxisme et b) le fascisme?

 

L'humanité est divisée, d'après ce que je crois savoir sui­vant des sources certaines archaïques, légitimes, secrètes, en deux grandes parties: celle d'origine "animale" qui "des­cend des grands singes", correspondant plus ou moins aux doctrines soutenues par l'évolutionnisme darwinien, et la par­tie d'origine "divine", en provenance du "foyer ardent de l'Incendium Amoris", de la "planète Venus", constituée d'hom­mes éveillés, destinés à rejoindre, "à la fin de ces temps", la patrie de leurs origines sidérales, "métagalacti­ques".

 

Happée vers le bas, vers les régions ontologiques du non-être, par le matérialisme révolutionnaire marxiste, la part "animale", "bestiale", de l'humanité avait sombré dans le dé­lire sanglant de la "révolution mondiale du communisme" animée par l'URSS et exacerbée par le marxisme-léninisme et par le stalinisme. Alors que la partie "divine", "métaga­lactique" de l'humanité s'est trouvée spirituellement ex­haus­sée par ce qui, dans la première moitié du XX° siècle, avait donné naissance à la grande aventure révolutionnaire suprahistorique européenne connue sous la dénomination gé­nérique de "fascisme", qui, vers sa fin, avait subi des dé­viations aliénantes et que l'antihistoire des autres s'est char­gée d'anéantir.

 

Raymond Abellio fait dire à un de ses personnages de son ro­man Les yeux d'Ezéchiel sont ouverts: "Aujourd'hui je le sais. Aucun homme ayant un peu le goût de l'absolu ne peut plus s'accrocher à rien. La démocratie est un dévergondage sentimental, le fascisme un dévergondage passionnel, le com­munisme un dévergondage intellectuel. Aucun camp ne peut plus gagner. Il n'y a plus de victoire possible".

 

Il nous faudra donc qu'à partir de la ligne actuelle du néant, nous recommencions, à nouveau, tout, que nous re­mettions tout en branle par le miracle suprahistorique d'une nouvelle immaculée conception révolutionnaire. C'est la tâche secrète de nous autres.

 

Que pensez-vous de l'«eurasisme»? Est-ce une alternative viable et acceptable au "Nou­vel Ordre Mondial”?

 

La vision de l'unité géopolitique et de destin grand-con­ti­nental eurasiatique représente le stade décisif, fonda­men­tal, de la conscience historique impériale et révolution­nai­re des nôtres, l'accomplissement final de l'histoire et de la ci­vilisation européennes dans leur marche ininterrompue vers l'intégration de ses nations constitutives au sein de no­tre prochain "Empire Eurasiatique de la Fin".

 

Les actuelles doctrines impériales de l'intégration euro­péen­ne grand-continentale de la fin trouvent leurs origines à la fois dans la géopolitique combattante de Karl Hausho­fer, dont le concept de Kontinentalblock reste tout à fait pertinent, et dans les continuations présentes de celle-ci à travers les doctrines confidentielles du "grand gaullisme", ainsi qu'à travers les positions révolutionnaires de certains jeunes penseurs russes de la nouvelle génération poutinien­ne, dont le plus représentatif me paraît être très certai­ne­ment Alexandre Douguine.

 

Un grand dessein final qui nous mobilise totalement

 

 

C'est sur le concept géopolitique, sur la vision suprahisto­rique fondamentale de l'"Empire Eurasiatique de la Fin" que va donc devoir se constituer le grand mouvement révolu­tion­naire européen continental appelé à livrer les dernières batailles décisives du camp retranché de l'être contre l'en­cer­clement subversif de la conspiration mondialiste actuel­le du non-être. Et ce sera aussi la tâche révolutionnaire pro­pre de notre génération prédestinée que de pouvoir me­ner à son terme prévu ce "grand dessein final" qui nous ha­bite secrètement, qui nous mobilise, à nouveau, tota­le­ment. Comme avant.

 

Finalement, comme quelqu'un qui a vécu une longue vie féconde, quel conseil pourriez-vous offrir aux générations qui montent, aux jeu­nes gens qui viennent, pour qu'ils rejet­tent les pièges du libéralisme et de la société de masse?

 

Le conseil que vous voudriez que je puisse donner aux jeunes générations qui montent, ce serait alors le suivant: si au tréfonds de votre sang, vous sentez l'appel irrésistible des hauteurs enneigées de l'être, l'appel des "chemins galactiques de la Frontière Nord", n'hésitez pas un seul in­stant à y répondre, et que toute votre vie ne soit qu'un long engagement éveillé envers vos propres origines occultes, en­vers la part qui en vous n'est pas de ce monde.

 

Quant aux engagements politiques présents ou immé­diate­ment à venir qui se doivent d'être nôtres, tout, à mon avis, doit se trouver désormais polarisé, mobilisé incondition­nel­lement sur le concept géopolitique et suprahistorique révo­lu­tionnaire de l'unité impériale européenne grand-con­tinen­tale, concept révolutionnaire auquel l'émergence à terme d'une nouvelle superpuissance planétaire russe, la "Russie Nou­velle" de Vladimir Poutine  —car les profondes ou­ver­tures spirituelles, ainsi que les positions européennes grand-continentales de Vladimir Poutine sont à présent con­nues— vient d'assurer une base politique absolument dé­cisive, notre "dernière chance".

 

Pour la civilisation européenne, pour l'être et la conscience européennes du monde, la formidable montée en puissance actuelle de la conspiration mondialiste menée par la "su­perpuissance Planétaire des Etats-Unis" constitue, et dé­sor­mais à très brève échéance, un vrai danger de mort, une me­nace terrifiante, inqualifiable. Les groupements géopoli­tiques national-révolutionnaires agissant partout dans le mon­de, à demi clandestinement, doivent donc intensifier au maximum leur travail idéologique et d'unité, leur travail de terrain: c'est exclusivement sur l'action souterraine des nôtres que reposent les dernières chances de survie qui nous restent face au gigantesque bloc mondialiste que tient par en dessous l'ennemi ontologique de tout ce que nous sommes nous autres, les "derniers combattants de l'être" fa­ce à l'assaut final des puissances négatives du non-être et du chaos, face à l'Empire du Néant, face au mystérieux Im­perium Iniquitatis qui s'annonce à l'horizon assombri de no­tre plus proche avenir. L'heure de l'Imperium Iniquitatis sem­ble en effet être venue.

 

Le régisseur dans l'ombre du grand dessein en action de la subversion mondialiste actuellement en marche, se trouve à présent sur le point d'achever la mise en place de son dispositif planétaire d'ensemble: les mâchoires d'acier de l'inéluctable se referment sur nous, si nous n'agissons pas tout de suite, bientôt il n'y aura plus rien à faire. Les der­nières élections aux Etats-Unis en fournissent la preuve, tout est prêt pour que la trappe se referme. Nous autres, qui depuis toujours jouons la parti de l'invisible, nous n'at­ten­dons plus notre salut que de l'invisible. Attention.

 

Jean PARVULESCO, Paris, le 19 novembre 2000, in nomine Domini.

dimanche, 15 juin 2008

Le gaullisme de Dominique de Roux

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Le gaullisme de Dominique de Roux

 

«La réalité historique est que le temps travaille pour un autre homme, l'homme dune seule idée, celui qui se fout que la zone libre soit occupée ou non. Il n'aime pas les Français, il les trouve moyens, il n'aime que la France dont il a une certaine idée, une idée terminale qui ne s'embarrasse pas des péripéties.»

Pascal Jardin, La guerre à neuf ans.

 

Dominique de Roux s'était fait une certaine idée de de Gaulle comme de Gaulle (première phrase de ses Mé­moi­res) s'était toujours fait une certaine idée de la France. On était en 1967, la subversion ne s'affichait pas encore au grand jour, mais déjà l'on sentait sourdre la révolte sou­terraine, la faille entre les générations aller s'élar­gis­sant. L'Occident à deux têtes (libéral-capitaliste  à l'Ouest,  marxiste-léniniste à l'Est) paissait paisiblement, inconscient d'être bientôt débordé sur sa gauche par ses éléments bour­geois les plus nihilistes et, on ne s'en apercevra que plus tard, les plus réactionnaires. Dominique de Roux lui aussi cherchait l'alternative. La littérature jusqu'ici n'avait été qu'un appui-feu dans la lutte idéologique. Qu'à cela ne tienne, de Roux inventerait la littérature d'assaut, porteuse de sa propre justification révolutionnaire, la dé-poétisation du style en une mécanique dialectique offensive. Le sens plus que le plaisir des sens, la parole vivante plutôt que la lettre morte. De Roux, qui résumait crise du politique et cri­­se de la fiction en une seule et même crise de la poli­ti­que-fiction, avait lu en de Gaulle l'homme prédestiné par qui enfin le tragique allait resurgir sur le devant de la scè­ne historique après vingt ans d'éviction. Le cheminement de de Gaulle homme d'Etat tel qu'il était retracé dans ses Mémoires, n'indiquait-il pas «l'identification tragique de l'ac­tion rêvée et du rêve en action»? (1) .

 

Un message révolutionnaire qui fusionne et transcende Mao et Nehru, Tito et Nasser

 

En 67, de Roux publie L'écriture de Charles de Gaulle. L'es­sai, cent cinquante pages d'un texte difficile, lorgne osten­siblement vers le scénario. A rebours du mouvement géné­ral de lassitude qui s'esquisse, de l'extrême-droite à l'ex­trê­me-gauche de l'opinion, et qui aboutira dans quelques mois à la situation d'insurrection du pays qu'on connaît, Domi­ni­que de Roux veut croire en l'avenir planétaire du gaullisme. Ni Franco ni Salazar, ni l'équivalent d'un quelconque dicta­teur sud-américain, dont les régimes se caractérisent par leur repli quasi-autistique de la scène internationale et leur allégeance au géant américain, de Gaulle apporte au mon­de un message révolutionnaire qui, loin devant ceux de Mao, Nehru, Tito et Nasser, les fusionne et les transcende.

 

Révolutionnaire, de Gaulle l'est une première fois lorsqu'il ré­invente dans ses Mémoires le rapport entre les mots et la réa­lité historique. Sa tension dialectique intérieure, entre des­tinée gaullienne et vocation gaulliste, son être et sa cons­cience d'être, dédouble cette réalité par l'écriture, la mé­moire, la prophétie.

 

La volonté de puissance du génie prédestiné en butte aux vicissitudes historiques que sa prédestination exige et dont dépend la résolution tragique de l'Histoire, modifie sa rela­tion aux mots, libérant l'écriture du style, subordination ex­térieure au sens des mots, mécanique des choses dites qui l'en­ferme et contient sa charge explosive. Le discours n'est plus reproduction esthétisante, rétrécissement du champ de vision pour finir sclérose, mais expression et incarnation de la dialectique parole vivante et langage qui le porte.

 

«A une histoire vivante ne sied pas la lettre morte du style, mais les pouvoirs vivants de la réalité d'une écriture de la réalité agissante dans un but quelconque». Quand de Gaul­le parle, déjà il agit et fait agir l'Histoire. L'écriture devient ac­te politique. Ses mots charrient et ordonnent l'histoire en marche.

 

Point de théologie gaulliste mais la foi individuelle d'un homme seul

 

Qu'est-ce que le gaullisme dans ces conditions ? Réponse de Do­minique de Roux: «Le dialogue profond que de Gaulle pour­suit sans trêve avec l'histoire se nomme gaullisme, dès lors que d'autres veulent en faire leur propre destin.» Point de théologie gaulliste mais la foi individuelle d'un homme seul qui considère la France, non les Français, comme la finalité de son action. La rencontre de la France en tant qu'idée d'une nation métaphysique et transcendante, et de la parole vive de de Gaulle, intelligence de la grandeur d'âme chez Chateaubriand, de la vocation pour Malraux, doit déboucher sur l'idéal de la Pax Franca.

 

La dialectique gaulliste de l'histoire rejaillit sur la stratégie gaulliste de lutte contre tous les impérialismes, au nom de la prédestination intérieure qui fait de l'assomption de la France l'avènement de celle de l'Europe et au-delà de l'or­dre universel: la Pax Franca. «De Gaulle ne sert ni l'Eglise avec Bossuet, ni la Contre-Révolution avec Maurras, mais la monarchie universelle, cette monarchie temporelle, visible et invisible, qu'on appelle Empire. Dante exaltait dans son De Monarchia cette principauté unique s'étendant, avec le temps, avec les temps, sur toutes les personnes. Seul l'Em­pire universel une fois établi il y a la Paix universelle.»

 

Ainsi posée, la géopolitique gaulliste s'affirme pour ce qu'elle est, une géopolitique de la fin (l'Empire de la Fin énoncé par Moeller van den Bruck), dépassement de la géopolitique occidentale classique, de Haushofer, Mackin­der, contournement de la structure ternaire Europe-USA-URSS.

 

Pour être efficace, le projet gaulliste aura à cœur de trans­former la géopolitique terrienne en géopolitique transcen­dan­tale, «tâche politico-stratégique suprême de la France, plaque tournante, axe immobile et l'Empire du Milieu d'une unité géopolitique au-delà des frontières actuelles de notre déclin, unité dont les dimensions seraient à l'échelle de l'Occident total, dépassant et surpassant la division du mon­de blanc entre les Etats-Unis, l'Europe et l'Union sovié­tique.» Car la France est, selon le statut ontologique que de Gaulle lui fixe, accomplissement et mystère, l'incarna­tion vivante de la vérité, la vérité de l'histoire dans sa mar­che permanente.

 

La nouvelle révolution française menée par de Gaulle doit conduire à la révolution mondiale

 

Une révolution d'ordre spirituel autant que temporel ne se conçoit pas sans l'adhésion unilatérale du corps national. Toute révolution qui n'est que de classe ne peut concerner la totalité nationale. Toute révolution nationale doit penser à l'œcuménité sociale. La révolution, l'action révolutionnai­re totale enracinée dans une nation donnée, à l'intérieur d'une conjecture donnée, n'existe que si l'ensemble des struc­tures sociales de la nation s'implique. Là où le so­cia­lisme oublie le national, le nationalisme occulte le social sans lequel il n'y a pas de révolution nationale. De Gaulle annule cette dialectique par l'«idée capétienne», reprise à Michelet et Péguy, de nation vivante dans la société vivan­te. Le principe participatif doit accompagner le mouve­ment de libération des masses par la promotion historico-sociale du prolétariat. Ce faisant la révolution gaulliste, dans l'idée que s'en fait Dominique de Roux, supprime la théo­rie formulée par Spengler de guerre raciale destruc­trice de l'Occident. Car la nouvelle révolution française me­née par de Gaulle ne peut que conduire à la révolution mon­diale.

 

De Gaulle super-Mao

 

L'époque, estime Dominique de Roux, réclame un nouvel ap­pel du 18 juin, à résonance mondiale, anti-impérialiste, démocratique et internationaliste à destination de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique latine, dont la précédente déclaration de Brazzaville deviendrait, au regard de la postérité, l'annonce. Un tel acte placerait de Gaulle dans la position d'un super-Mao —ambition partagée pour lui par Malraux— seul en mesure d'ébranler la coalition nihiliste des impérialismes américano-soviétiques, matérialistes ab­solus sous leur apparence d'idéalisme. La grande mission pacificatrice historique de dimension universelle assignée à la France passe, en prévision d'une conflagration thermo­nuc­léaire mondiale alors imminente —la troisième guerre mon­diale—, par le lancement préventif d'une guerre révo­lutionnaire mondiale pour la Paix, vaste contre-stratégie visible et invisible, subversion pacifique qui neutraliserait ce risque par l'agitation révolutionnaire, la diplomatie sou­ter­raine, le chantage idéologique. L'objectif, d'envergure planétaire, réclame pour sa réalisation effective la mise en œuvre d'une vaste politique subversive de coalitions et de renversements d'alliances consistant à bloquer, dans une dou­ble logique de containment, la progression idéologico-territoriale des empires américain et soviétique sur les cinq continents.

 

Le plan d'ensemble du gaullisme géopolitique s'articule en cinq zones stratégiques plus une d'appui et de manœuvre, en place ou à créer:

-renforcement du bloc franco-allemand, selon la fidélité historique au devenir éternel de l'Europe;

-dégager le Sud-Est européen de l'empire soviétique, afin de stopper l'action de l'URSS sur son propre axe de clivage et l'obliger à composer pour se mouvoir stratégiquement;

-dégager le Sud-Est asiatique de l'empire américain, afin de stopper l'action des USA sur leur propre axe de clivage et les obliger à composer pour se mouvoir stratégiquement;

-faire jouer à l'Amérique latine le rôle de lien entre la conscience occidentale et le Tiers-Monde par l'action des for­ces révolutionnaires sur le terrain;

-empêcher que le Canada ne devienne une base impériale extérieure de rechange des USA;

-soutenir secrètement l'Inde contre la Chine pour des rai­sons d'ordre spirituel théurgique, la Chine représentant la matérialisation de l'esprit quand l'Inde incarne depuis tou­jours le primat du spirituel sur la matière.

 

La consolidation du front idéologique mondial lancé par le gaullisme requérant que soient attisés par ses agents le ma­ximum de foyers, il apparaît nécessaire dans un premier temps que partout où se trouvent les zones de con­fron­ta­tion idéologique et d'oppression des minorités, l'on sou­tien­ne la révolution au nom du troisième pôle gaulliste. Six zo­nes de friction retiennent l'attention de Dominique de Roux, en raison de leur idéal nationaliste-révolutionnaire con­forme aux aspirations gaullistes et pour leur situation géostratégique de déstabilisation des blocs (de Roux ne le sait pas encore, mais viendront bientôt s'ajouter à sa liste le Portugal et les possessions lusitaniennes d'Afrique: Ango­la, Guinée-Bissau, Mozambique):

«1) le combat pour la libération nationale et sociale de la Pa­lestine, clef de voûte de la paix au Moyen-Orient et de la présence pacifique de la France en Méditerranée.

2) la mise en marche immédiate de la Conférence Pan-eu­ro­péenne pour la Sécurité et la Coopération Continentale.

3) le combat pour la libération nationale et sociale de l'Ir­lande catholique.

4) la relance du soutien international aux combattants du Québec libre pour la sauvegarde de son être national pro­pre.

5) appui inconditionnel au Bangladesh.»

6) insistance sur la tâche prioritaire des enclaves de langue française comme relais de la subversion pacifique mondia­le.

 

Il conviendra donc d'intensifier les contacts avec toutes les forces révolutionnaires en présence sur le terrain. Ainsi seu­lement la vocation gaullienne accomplie rejoindra sa des­tinée, celle du libérateur contre les internationales exis­tantes —capitaliste et communiste, ouvertement impé­rialistes—, qui soutient et permet toutes les luttes de li­bération nationale et sociale, toutes les révolutions iden­titaires et économiques. «Aujourd'hui, la tâche révolution­naire d'avant-garde exige effectivement, la création de deux, trois quatre Vietnam gaullistes dans le monde.» (Ma­gazine Littéraire n°54, juillet 1971) Sa force contre les a priori idéologique, apporter une solution qui s'inspire de l'histoire, des traditions nationales de chaque pays, de sa spécificité sociale: socialisme arabe, troisième voie péru­vienne, participation gaulliste.

 

L'après-gaullisme représente l'échéance d'une ère

 

De Gaulle a mené un combat entre la vérité historique ulti­me et les circonstances historiques de cette vérité.

 

A l'époque, Jean-Jacques Servan-Schreiber a cherché à per­suader les Français que le républicanisme gaullien était un régime à peine plus propre que la Grèce des colonels. Puis vint mai 68. «Aujourd'hui, ce même grand capital, qui pour mater les syndicats permit (...) Mussolini (...), qui inventa le nazisme pour la mobilisation maoïste des ouvriers alle­mands en vue de l'expansion économique, qui donna sa pe­tite chance à Franco l'homme des banques anglaises, nous invente morceaux par morceaux la carrière française de Jean-Jacques Servan-Schreiber et les destinées euro­péen­nes du schreibérisme.» La vérité fut que de Gaulle, na­tionaliste et révolutionnaire, annula dialectiquement et re­jeta dos à dos Hitler et Staline. L'après-gaullisme repré­sente l'échéance d'une ère. L'avenir de l'Occident ne pourra plus se définir que par rapport à l'action personnelle de de Gaulle. Si le gaullisme est le fondement de l'histoire nou­velle, l'après-gaullisme est la période à partir de laquelle se confronteront ceux qui poursuivent son rêve et ses oppo­sants, ceux qui refusent sa vision. Pas d'après-gaullisme donc, seulement le face à face gaullistes contre anti-gaul­listes. «Il n'y a de gaullisme qu'en de Gaulle, de Gaulle lui-mê­me devient l'idée dans l'histoire vivante ou même au-de­là de l'histoire.» Pour préserver l'authenticité de la geste gaul­liste, il faut conserver le vocabulaire de l'efficacité gaul­lienne. «Qu'importe alors la défaite formelle du gaul­lisme en France et dans le monde, écrit Dominique de Roux dans Ouverture de la chasse en juillet 1968, si, à sa fin, le gaullisme a fini par l'emporter au nom de sa propre vérité in­térieure, à la fois sur l'histoire dans sa marche dialectique et sur la réalité même de l'histoire ?»

 

Dominique de Roux victime de sa vision ?

 

Trente ans après, quel crédit accorder aux spéculations géo-poétiques du barde impérial de Roux ? Lui-même re­con­naissait interpréter la pensée gaullienne, en révéler le sens occulte. Des réserves d'usage, vite balayées par les mi­rages d'un esprit d'abord littéraire (littérature d'abord), sujet aux divagations les plus intempestives. Exemple, la France, «pôle transhistorique du milieu» «dont Charles de Gaulle ne parle jamais, mais que son action et son écriture sous-entendent toujours.»

 

Quand il parle de la centrale d'action internationale gaul­liste, qu'il évoque en préambule du premier numéro d'une collection avortée qui devait s'intituler Internationale gaul­liste sa contribution à la propagation du message gaulliste, c'est un souhait ardent que de Roux émet avant d'être une réalité. De Roux victime de sa vision ?

 

Hier figure du gauchisme militaire, aujourd'hui intellectuel souverainiste, Régis Debray dans A demain de Gaulle fait le mea culpa de sa génération, la génération 68, coupable selon lui de n'avoir pas su estimer la puissance visionnaire du grand homme, dernier mythe politique qu'ait connu la France.

 

Au regard de l'Histoire dont il tenta sa vie durant de percer les arcanes, Dominique de Roux s'est peut-être moins four­voyé sur l'essentiel, qui est l'anti-destin, que la plupart des intellectuels de son temps. «Par l'acte plus encore que par la doctrine, Charles de Gaulle a amorcé une Révolution Mon­diale. Celle-ci, connue par lui à l'échelle du monde, ap­pelle ontologiquement une réponse mondiale.»

 

Dans Les chênes qu'on abat, Malraux fait dire à de Gaulle: «J'ai tenté de dresser la France contre la fin d'un monde. Ai-je échoué ? D'autres verront plus tard.»

 

De Gaulle, troisième homme, troisième César.

 

Laurent SCHANG.

 

Bibliographie:

 

De Dominique de Roux:

-Ouverture de la chasse, L'Age d'Homme, 1968.

-Contre Servan-Schreiber, Balland, 1970.

-Politique de Dominique de Roux, Portugal, Angola, In­ternationale gaulliste, Au signe de la Licorne, 1998.

-L'écriture de Charles de Gaulle, Editions du Rocher, 1999.

 

André Malraux, Les chênes qu'on abat, NRF Gallimard, 1971.

 

vendredi, 13 juin 2008

The Right Stuff (Drugs and Democracy)

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Chronicles of American Culture (October 1996)

The Right Stuff (Drugs and Democracy)

by Tomislav Sunic


Morphine is said to be good for people subject to severe depressions, or even pessimism. Although the drug first surfaced in a laboratory at the end of the last century, its basis, opium, had been used earlier by many aristocratic and reactionary thinkers. A young and secretive German romantic, Novalis, enjoyed eating and smoking opium juice, probably because he had always yearned to alleviate his nostalgia for death. Probably in order to write his poem Sehnsucht nach dem Tode. Early poets of Romanticism rejected the philosophy of rationalism and historical optimism. They turned inward to their irrational feelings, shrouding themselves in the pensive loneliness which opiates endlessly offer.

Once upon a distant time we met Homer's Odysseus, who was frequently nagged by the childish behavior of his pesky sailors. Somewhere along the shores of northern Africa, Odysseus and his sailors had strayed away into the mythical land of the lotus flower. As soon as his sailors began to eat the lotus plant, they sank into forgetfulness, and immediately forgot their history and their homeland. It was with great pain that Odysseus succeeded in extracting them from artificial paradises. What can be worse for a nation than to erase its past and lose its collective memory?

Unlike many modern wannabe conservatives and televangelists, Greeks and Romans were not hypocrites. They frankly acknowledged the pleasures of wine and women. Sine Cerere et Bacco friget Venus - without food and wine sexual life withers away, too.

The escape from industrial reality and the maddening crowd was one of the main motives for drug use among some reactionary poets and thinkers, who could not face the onset of mass society. The advent of early liberalism and socialism was accompanied not only by factory chimneys, but also by loneliness, decay, and decadence. If one could, therefore, not escape to the sunny Mediterranean, then one had to craft one's own artificial paradise in rainy and foggy London. The young English Tory Thomas De Quincey, in his essay Confessions of an English Opium Eater, relates his Soho escapades with a poor prostitute Anna, as well as his spiritual journeys in the aftertaste of opium. De Quincey has a feeling that one life-minute lasts a century, finally putting an end to the reckless flow of time.

The mystique of opium was also grasped by the mid-19th century French symbolist and poet Charles Baudelaire. He continued the aristo-nihilistic-revolutionary-conservative tradition of dope indulgence via the water pipe, i.e., the Pakistan huka. Similar to the lonely albatross, Baudelaire observes the decaying France in which the steamroller of coming liberalism and democratism mercilessly crushes all esthetics and all poetics.

When studying the escapism of postmodernity, it is impossible to circumvent the leftist subculture and its pseudo-intellectual sycophants of 1968. The so-called sixty-eighters hollered out not only for liberty from all political authority, but also for free sex and drugs. Are these leftist claims not part of the modern religion of human rights? At the beginning of the 60's, the musical alter egos of the Western left, the Rolling Stones and Bob Dylan, called out to millions of young people throughout America and Europe, telling intruders to "get off of my cloud" and concluding that "everybody must get stoned."

Predictably, the right-wing answer to the decadence of liberal democracy was nihilistic counterdecadence. The main difference, however, between these two is that reactionary and rightist addicts do drugs for elitist and esoteric purposes. By their temperament and literary style they reject all democracy- whether it is of a socialist or liberal brand. When in the 20th century the flow of history switched from first gear into fifth gear, many rightist poets and thinkers posed a question: What to do after the orgy? The French right-leaning author Jean Cocteau answered the question this way: "Everything that we do in our life, even when we love, we perform in a rapid train running to its death. Smoking opium means getting off the train."

Hashish and marijuana change the body language and enhance social philanthropy. Smoking joints triggers abnormal laughter. Therefore hashish may be described as a collectivistic drug custom-designed for individuals who by their lifestyle loathe solitude and who, like Dickens' proverbial Ms. Jellyby, indulge in vicarious humanism and unrepentant globalism. In today's age of promiscuous democracy, small wonder that marijuana is inhaled by countless young people all over liberalized Europe and America. In the permissive society of today, one is allowed to do everything-provided one does not rock the boat, i.e., "bogart" political correctness. Just as wine, over the last 2,000 years, has completely changed the political profile of the West, so has marijuana, over the last 30 years, completely ruined the future of Western youth. If Stalin had been a bit more intelligent he would have solemnly opened marijuana fields in his native Transcaucasia. Instead, communist tyrants resorted to the killing fields of the Gulag. The advantage of liberalism and social democracy is that via sex, drugs, and rock 'n' roll, by means of consumerism and hedonism, they function perfectly well; what communism was not able to achieve by means of the solid truncheon, liberalism has achieved by means of the solid joint. Indisputably, Western youth can be politically and correctly controlled when herded in techno-rap concerts and when welcomed in cafes in Holland, where one can freely buy marijuana as well as under-the-table "crack," "speedball," and "horse." Are these items not logical ingredients of the liberal theology of human rights?

Cocaine reportedly induces eroticism and enhances the sex act. The late French fascist dandy and novelist Pierre Drieu La Rochelle liked coke, desiring all possible drugs and all impossible women. The problem, however, is that the coke intaker often feels invisible bugs creeping from his ankles up to his knees, so that he may imagine himself sleeping not with a beautiful woman but with scary reptiles. In his autobiographical novels Le feu follet and L'homme couvert de femmes, La Rochelle's hero is constantly covered by women and veiled by opium and heroin sit-ins. In his long intellectual monologues, La Rochelle's hero says: "A Frenchwoman, be she a whore or not, likes to be held and taken care of; an American woman, unless she hunts for a husband, prefers a passing relationship... Drug users are mystics in a materialistic age. Given that they can no longer animate and embellish this world, they do it in a reverse manner on themselves." Indeed, La Rochelle's hero ends up in suicide-with heroin and revolver. In 1945, with the approaching victory of the Allies, and in the capacity of the intellectual leader of the defunct Eurofascist international, Pierre Drieu La Rochelle also opted for suicide.

The English conservative and aristocrat Aldous Huxley is unavoidable in studying communist pathology (Brave New World Revisited) and Marxist subintellectual schizophrenia (Grey Eminence). As a novelist and essayist his lifelong wish had been to break loose from the flow of time. Mexican mescaline and the artificial drug LSD enabled him new intellectual horizons for observing the end of his world and the beginning of a new, decadent one. Apparently mescaline is ideal for sensing the colors of late impressionist and pointillist painters. Every drop on Seurat's silent water, every touch on Dufy's leaf, or every stone on the still nature of old Vermeer, pours away into thousands of billions of new colors. In the essay The Doors of Perception, Huxley notes that "mescaline raises all colors to a higher power and makes the percipient aware of innumerable fine shades of difference, to which, at ordinary times, he is completely blind." His intellectual experiments with hallucinogenic drugs continued for years, and even on his deathbed in California in 1963, he asked for and was given LSD. Probably to depart more picturesquely into timeless infinity.

And what to say about the German centenarian, enigmatic essayist and novelist Ernst Jünger, whom the young Adolf Hitler in Weimar Germany also liked to read, and whom Dr. Joseph Goebbels wanted to lure into pro-Nazi collaboration? Yet Jünger, the aristocratic loner, refused all deals with the Nazis, preferring instead his martial travelogues. In his essay Annäherungen: Drogen and Rausch, Jünger describes his close encounters with drugs. He was also able to cut through the merciless wall of time and sneak into floating eternity. "Time slows down. . . . The river of life flows more gently... The banks are disappearing." While both the French president François Mitterrand and the German chancellor Helmut Kohl, in the interest of Franco-German reconciliation, liked meeting and reading the old Jünger, they shied away from his contacts with drugs.

Ernst Jünger's compatriot, the essayist, early expressionist, and medical doctor Gottfried Benn, also took drugs. His medical observations, which found their transfigurations in his poems "Kokain" and "Das Verlorene Ich," were collected by Benn as a doctor-mortician in Berlin of the liberal-Weimarian Germany in decay. He records in his poetry nameless human destinies stretched out dead on the tables of his mortuary. He describes the dead meat of prostitutes out of whose bellies crawl squeaking mice. A connoisseur of French culture and genetics, Benn was subsequently offered awards and political baits by the Nazis, which he refused to swallow. After the end of the war, like thousands of European artists, Benn sank into oblivion. Probably also because he once remarked that "mighty brains are strengthened not on milk but on alkaloids."

Modern psychiatrists, doctors, and sociologists are wrong in their diagnosis of drug addiction among large segments of Western youth. They fail to realize that to combat drug abuse one must prevent its social and political causes before attempting to cure its deadly consequences. Given that the crux of the modern liberal system is the dictatorship of well-being and the dogma of boundless economic growth, many disabused young people are led to believe that everybody is entitled to eternal fun. In a make-believe world of media signals, many take for granted instant gratification by projecting their faces on the characters of the prime-time soaps. Before they turn into drug addicts, they become dependent on the videospheric surreality of television, which in a refined manner tells them that everybody must be handsome, rich, and popular. In an age of TV-mimicry, headless young masses become, so to speak, the impresarios of their own narcissism. Such delusions can lead to severe depressions, which in turn can lead to drugs and suicide. Small wonder that in the most liberal countries of the West, notably California, Holland, and Denmark, there is also the highest correlation between drug addiction and suicide.

If drug abuse among some reactionary and conservative thinkers has always been an isolated and Promethean death wish to escape time, the same joint in leftist hands does more than burn the fingers of the individual: it poisons the entire society.


Tomislav Sunic is the author of Against Democracy and Equality; The European New Right (1990).

vendredi, 06 juin 2008

"Animal Farm" naar het boek van G. Orwell

Animal Farm naar het boek van George Orwell

De neo-Belgische (Vlaamse) regering heeft een werkstukje in pure Kafka-stijl opgesteld. Als trouwe uitvoerders van wetten die de Europese dictatuur ons via de plaatselijke elite (Vlaamse ministers) door de strot moet duwen hebben zij gemeend om de EU-richtlijnen inzake antidiscriminatie met de nodige onzin te moeten aanvullen. Het werkstuk is nu een complete operettetekst geworden die men zal kunnen gebruiken als burleske opvoering om de kruiperigheid van de kruideniers die zich Vlaamse staatslieden noemen aanschouwelijk weer te kunnen geven.

De gezamenlijke Vlaamse elite kruipt en wentelt zich in het stof om toch maar het predikaat van zuivere gelovige binnen te kunnen halen. De zuivere gelovigen van de non-discriminatie, welteverstaan. Waar de Europese volkscommissarissen in hun richtlijn alleen maar non-discriminatie in verband met werk en beroep voor ogen hadden en niet discriminatie op basis van leeftijd, godsdienst, overtuiging, taal, gezondheidstoestand en sociale positie, daar hebben de lolbroeken van de middenstandsregering Peeters nu nog een lijstje aan toegevoegd. De kruideniersmentaliteit en het paternalisme druipt van deze toevoegingen af, zoals stroop uit de handjes van een kleuter. Het is een vuile boel en het plakt geweldig. Maar toch moet je uiteindelijk in lachen uitbarsten, want kleuters die een plakboel van je huishouden maken blijven toch altijd kinderen. Zo ook de Vlaamse kleuterregering.

De non-discriminatie die de Vlaamse afdeling van de Belgische machtselite proclameert gaat zo ver en is zo ongelooflijk tegenstrijdig dat het eigenlijk zal uitdraaien op een groot speelplein voor pesttechnieken. Wat houden de Vlaamse decreten die discriminatie verbieden dan in?

Het is verboden te discrimineren in de gezondheidszorg;
Het is verboden te discrimineren in het onderwijs;
Het is verboden om mensen te discrimineren in verband met het leveren van goederen en diensten (deze vind ik persoonlijk de leukste);
Het is verboden te discrimineren op basis van bezit en kapitaal;
Het is verboden om mensen uit te sluiten van sociale voordelen.

Verder moet er voor iedereen toegang zijn tot economische, sociale culturele en politieke activiteiten.

Laat ons eens aftoetsen hoe we deze wonderbaarlijke wereld of - beter gezegd - de Vlaamse uitgave van The Animal Farm creatief kunnen toepassen. Iedereen moet gezondheidszorg kunnen krijgen ongeacht zijn status. Als je weet dat je nu al meer dan 25% van alle medische kosten uit eigen zak mag betalen, dan is de vraag maar hoe je de mensen die dat steeds minder kunnen ophoesten gaat tegemoetkomen. Als je nu naar een hospitaal of naar de dokter gaat, dan moet je eerst in dat hospitaal een voorschot geven en bij de dokter moet je zelf alles eerst voorschieten. Als het einde van de maand nadert, zullen de hospitalen en de dokters verplicht worden om je toch te verzorgen, zelfs zonder geld op zak. Anders is dat discriminatie tegenover mensen die wel kunnen betalen. De Witte Woede zal weer losbarsten!

In het onderwijs moet alles gratis zijn en als er toch kosten zijn voor het een of het ander, dan moeten de ouders van de kinderen die geld genoeg hebben maar betalen voor diegenen die geen geld meer hebben. Zullen die ouders leuk vinden! Lekkere antidiscriminatieblues op het schoolplein zal het gevolg zijn. Mijn voorkeurvoorstel van antidiscriminatie is het verbod op weigering van het leveren van goederen en diensten aan mensen. En het daarbij aansluitende verbod om mensen te discrimineren op basis van kapitaal. Hoe dat de volkscommissarissen van de Eurodictatuur daar niet zelf op gekomen zijn en deze primeur moeten laten aan de middenstandersregering van Vlaanderen is ronduit beschamend.

In de grond zijn deze twee antidiscriminatievoorstellen natuurlijk niet nieuw. In Brussel en in grote Vlaamse steden zijn er al hele groepen die zich kosteloos bedienen van goederen en diensten en andermans geld (die ambachtsgroep noemt men rondtrekkende dadergroepen). Sommigen hebben hier een permanente verblijfplaats (maar dat is een detail). Nu wil de Vlaamse regering dat institutionaliseren: als mensen goederen en diensten willen en ze kunnen dat niet betalen, dan mogen ze niet weerhouden worden om zich de begeerde goederen en diensten zelf te gaan halen. Anders is zoiets discriminatie. Gebeuren er in het vervolg inbraken of autodiefstallen in Vlaanderen, dan is dat het gevolg van het gratis leveren van goederen en diensten aan benadeelde medeburgers. Je hoeft dan niet bij de politie te gaan klagen (dat is ook niet nieuw), want dan kun je nog een discriminatieklacht aan je broek krijgen. De mensen die je spullen meenamen hadden dat immers nodig en konden zich dat niet zelf aanschaffen. Maar jij wel blijkbaar. Foei, foei van jou!

Hoe Peeters en zijn sinterklaasregering dat aan hun middenstandsachterban zullen verkopen dat mensen in winkels gewoon de boel meenemen zonder betaling, zal nog door een bevriend consultancybureau onderzocht moeten worden. Als iemand toch van plan is om zelf te gaan discrimineren, dan kunnen we enkele tips geven. Als je een homo discrimineert (door bijvoorbeeld te weigeren om op zijn avances in te gaan) en die pipo dient klacht tegen jou in, dan moet je als de bliksem klacht tegen hem indienen met als argument dat je een gelovige moslim bent en dat je geloof je verplicht om hem te discrimineren. Als je dat niet mag, dan discrimineert men jou en dat is verboden op grond van non-discriminatie op basis van geloof. Mooi toch? Als je een vreemdeling discrimineert of een vreemdeling discrimineert je vrouw of dochter door ze te verkrachten, dan kun je elkaar beschuldigen op basis van vrijheid van overtuiging. Jij vindt die allochtoon maar een kafir vanuit je overtuiging en hij vindt je vrouw of dochter maar een hoer op basis van zijn geloof. Er is geen discriminatie van één partij. Het is gewoon de werkelijke wereld zoals ze is! Als je baas of manager weer eens veel meer poen pakt dan jijzelf dan moet je hem aanklagen op grond van loondiscriminatie! Het is niet omdat je niet gestudeerd hebt of niet de moeite hebt genomen om zelf een bedrijf te starten dat je gediscrimineerd mag worden via je loon en loonverschillen. Als iemand ziek is op je werk en hij ontvangt een ziekte-uitkering en zelf heb je geen zin om elke dag naar je werk te komen, dan kun je klacht indienen tegen je baas. Het is discriminerend om alleen zieken thuis te laten en te betalen. Gezonde mensen hebben ook dat recht, want is het niet verboden om iemand te discrimineren op basis van zijn gezondheidstoestand.

Ach ja, je moet creatief zijn in die dingen. Ik zou nog een tijdje door kunnen gaan met goede raad te geven, maar het zal nu al duidelijk zijn voor iedereen dat de toekomst van Vlaanderen verzekerd is. Het is een “schitterende” toekomst. Jeronimus Bosch zou er nooit in geslaagd zijn om het geheel op doek te krijgen. En hij heeft veel gekken geschilderd in zijn tijd. Om de Vlaamse ministers te portretteren en hun maatregelen adequaat te schilderen heb je een geestesgestoorde nodig. Die zal de antidiscriminatielobby misschien in zijn volle waarde kunnen schilderen en portretteren. Nog een geluk dat onze ministers kunnen rekenen op de morele steun van AFF en Blokbuster. Zij kunnen dienen als ezels, zoals die op de schilderijen van Jeronimus veelvuldig voorkwamen. Een beetje “mismeesterd”, maar toch herkenbaar. Alle morele steun is welkom bij een acute geestesziekte en gedeelde pijn is halve pijn zegt een Vlaams spreekwoord.

E. Hermy
Algemene coördinator