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vendredi, 22 mai 2009

Un seul peuple de frères - l'Etat dans la littérature

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SYNERGIES EUROPÉENNES - Juillet 1988

 

 

 

Un seul peuple de frères - L'Etat dans la littérature

 

 

Peter SCHNEIDER, ”... ein einzig Volk von Brüdern”. Der Staat in der Literatur,  Athenäum, Frankfurt a.M., 390 S., DM 48.

 

 

Le titre de cet ouvrage, c'est la formule du célèbre serment de Rütli, fondateur de la Confédération Helvétique. Etre un seul peuple de frères, tel est le vœu profond de toute nation qui veut for-mer un Etat de citoyens, un Etat fondé sur la volonté commune de tous les citoyens. Dans cette formule, la multiplicité sociale se voit sublimée, les oppositions et les clivages de toutes sortes s'évanouissent dans un néant idéal. Cette aspiration pluriséculaire, qui traverse toute l'histoire européenne, c'est davantage la littérature que la théorie politique qui s'en est fait le véhicule. Schiller, dans son Wilhelm Tell  (= Guillaume Tell) opère de manière optimale la fusion entre unité et pluralité au sein des corps politiques: l'individu-personne possède des droits mais de-meure responsable vis-à-vis du tout; ainsi, sans concept rigide, sans corset juridico-philosophique, dans une langue limpide, s'exprime, par le génie du poète, l'instinct politique européen, idéaliste et faisant ta-ble rase de toutes les corruptions. L'œuvre antonymique, c'est l'épopée médiévale de Reineke Fuchs (le Roman de Renard),  marquée d'esprit satirique. Aucune volonté communautaire, holiste, ne s'y manifeste et il n'y règne que la ruse et la violence. Si Wilhelm Tell  représente l'idéal pur de la psyché politique européenne, Reineke Fuchs  exprime sa désillusion, sublimée en satire. Entre ces deux pôles a émergé une quantité de variantes, démontre Schneider: chez Kafka, il perçoit une désillusion noire qui a la nostalgie de l'amitié, manifestation de pro-xi-mité humaine, et aspire à une nouvelle union de la ratio et de la voluntas.  Les réflexions de Schneider se poursuivent sur Jerry Cotton, James Bond, Ernst Jünger, Anna Seghers, Friedrich Dürrenmatt et Albert Camus (Robert STEUCKERS).

 

jeudi, 21 mai 2009

La littérature abolit le progrès

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La littérature abolit le progrès

 

Pierre Le Vigan / http://europemaxima.com/


Thierry Hentsch écrivait : « La mort est la grande affaire de l’homme. Elle est, qu’il le veuille ou non, le révélateur de sa vie, le suprême moment de vérité, l’échéance qui éclaire la vie de son inéluctable avènement. Vie, mort et vérité sont étroitement chevillées les unes aux autres, et la conscience n’échappe à la pensée de cette jonction qu’au prix de sa propre diminution. » Le récit n’est pas la vérité, mais, même quand il est mythique, il n’est pas le contraire non plus de la vérité. Il est un moyen de mieux se comprendre. Ceci a toujours été admis sauf avec le Nouveau Testament, le seul récit qui s’est voulu aussi La Vérité. « Le christianisme accomplit un incroyable exploit. Il réussit à imposer cette antinomie : un récit de vérité », note Thierry Hentsch. C’est le seul Grand Récit ancien qui ne s’est voulu susceptible de ne relever que d’une seule interprétation. Le Nouveau Testament représente ainsi la fin de la gratuité du récit, offert aux libres interprétations, et le début des mono-interprétations, donc des appauvrissements de l’imaginaire.

Il n’en était pas de même, à son origine, du grand récit scientifique. Kant avait écrit que la science ne nous donnait aucune certitude sur les choses en soi. La science a sauté au dessus de ce problème du vrai. Ce qui importe est ce qui est efficace, ce qui fonctionne. C’est ce qui fonctionne qui est vrai, et non ce qui est vrai qu’il importe de faire fonctionner. De cette conception découle une dévalorisation de la littérature, bien vue, par exemple, par Alain Finkielkraut. Car la logique de la littérature n’est pas l’efficacité, c’est le labourage, c’est le sarclage, c’est justement la culture. La littérature s’oppose à deux choses : à la science, et aussi à l’herméneutique. Le postulat de la littérature est que aucune érudition, aussi nécessaire soit-elle, ne confère une autorité en matière d’interprétation. C’est pourquoi, selon le mot de Thierry Hentsch, la littérature « nous délivre de l’idée de progrès » - et c’est d’ailleurs aussi pour cela, pour éviter cette délivrance funeste à notre « productivité » que la littérature tend à ne plus être enseignée. Heidegger n’est pas un « progrès » par rapport à Pascal ou à Montaigne. Ce point concerne aussi l’art, qui ne peut relever du progrès. Il serait insensé de dire que Van Dongen est un progrès par rapport à Lorenzo Veneziano. Si la littérature n’abolit pas le temps, elle abolit le progrès et c’est en cela qu’elle aide enfin chacun à se comprendre dans le temps.

Pierre Le Vigan

Note

1 : Thierry Hentsch, Raconter et mourir. Aux sources narratives de l’imaginaire occidental, Presses de l’Université de Montréal-Bréal, 2002, prix Louis-Pauwels 2003.

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mardi, 19 mai 2009

Espace et temps chez Ezra Pound

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Archives de "Synergies Européennes" - 1986

Vintilia Horia:

 

Espace et temps chez Ezra Pound

 

Pour avoir défendu une position similaire, pour s'être attaqué à l'usure comme procédé hétérodoxe dans le cadre de l'Eglise de son temps, Dante perdit sa patrie, fut condamné à mort et dut passer le reste de ses jours loin des siens. Au XXème siècle, Ezra Pound subit le même sort…

 

Ce qu'on pourrait appeler "le plan vital" dans la poésie d'Ezra POUND ne peut trouver qu'une seule comparaison, ancienne mais toujours valable: l'œuvre de DANTE. La poésie que ce grand Italien a produite ne se limite pas à La Divine Comédie mais comprend aussi De la Monarchie, œuvre en prose contenant le projet d'une société basée sur l'idée impériale. Cette idée recèle une transcendance que l'homme doit conquérir en subissant les épreuves de l'enfer, épreuves de la connaissance en profondeur; en tant qu'être inférieur, il doit surpasser les purifications du purgatoire afin de trouver, avec l'aide de l'amour, considéré comme possibilité maximale de sagesse, les dernières perfections du Paradis. Dans cette optique, la Vie serait un voyage, comme l'imaginaient les Romantiques ainsi que RILKE et JOYCE. Dans l'œuvre de POUND, ce qui nous rapproche de La Divine Comédie, ce sont les Cantos Pisans. Dans toute la poésie et la prose de POUND, comme dans tous les gestes de son existence, on repérera un souci quasi mondain de la perfection, confinant au métaphysique. L'homme, dans cette perspective, doit se perfectionner, non seulement sur le plan de la transcendance et de l'esprit, mais aussi dans le feu des affrontements momentanés qui composent sa vie de pauvre mortel. La perfection spirituelle dépend de l'héroïcité déployée dans le quotidien. "La lumière plane sur les ténèbres comme le soleil sur l'échine d'une bourrique".

 

Une révolte contre le monde moderne

 

Le pire, chez DANTE, l'ennemi qu'il combattit tout au long de sa vie d'exilé, fut la confusion consciente entre pouvoir temporel et pouvoir spirituel. La tâche du Pape, c'était de s'occuper de la santé et du salut des âmes. L'Empereur, lui, devait s'occuper du monde visible, sans jamais perdre de vue le but ultime. Le Souverain Pontife ne devait s'abstenir de lutter contre les maux du quotidien. L'homme est une combinaison d'antagonismes complémentaires. Sa complexe constitution psychosomatique révèle un désir d'harmonie finale, désir qui s'exprime sans cesse conformément à la "coincidentia opposi- torum". L'affrontement politique, qui caractérisa et marqua l'existence de DANTE, constitue finalement le sceau typique d'un être capable de vivre et d'assumer la même essence, tant dans sa trajectoire vitale que dans son œuvre; la marque de l'affrontement politique confèrera une aura tragique à POUND également. Cette similitude dévoile non seulement une certaine unité de destin commune aux deux poètes mais aussi l'immuabilité de la tragédie humaine, (de l'homme en tant que zoon politikon, NdT), à travers les siècles. Le poète nord-américain ne put échapper au XXème siècle à ce sort qui frappa le Florentin six cents ans plus tôt. On constate une relation perverse avec la politique qui affecte l'homme et  lui est dictée par le droit, ou plutôt le devoir, de se scruter sous l'angle du péché originel. La politique est le terrain où l'homme trouvera, avec le maximum de probabilités, une tribune pour se faire comprendre aisément et rendra ses pensers accessibles aux commentateurs.

 

La révolte de Pound contre le monde moderne est une attitude quasi générique, consubstantielle à sa génération. En effet, c'est cette lost generation nord-américaine qui abandonna sa patrie lorsque le puritanisme céda le pas au pragmatisme, dans un mouvement comparable à la révolte de KAFKA contre la technique considérée comme inhumaine. Mais ce n'est pas la technique qui définit le désastre. HEIDEGGER a consacré un essai entier à ce problème crucial et nous savons désormais combien les machines et leur développement peuvent être nocives et ceci seulement par le fait qu'il y a malignité chez ceux qui les manipulent. Le problème nous apparaît dès lors beaucoup plus profond. Il s'agit de l'homme lui-même et non des œuvres qu'il produit. Il s'agit de la cause, non de l'effet. Déjà les romanciers catholiques français de la fin du XIXème, tout comme le Russe DOSTOIEVSKI, avaient souligné ce fait. C'est le manque de foi, la perte du sens religieux qui octroye à l'homme des pouvoirs terrestres illimités.

 

Le problème n'est donc pas physique mais métaphysique. POUND n'est certes pas un poète catholique. C'est un homme soulevé par une religiosité profonde qui se situe dans une forme d'ésotérisme compris comme technique de la connaissance. Ce qui lui permet d'utiliser les mêmes sources et de chercher les mêmes fins que BERNANOS ou CLAUDEL. Il n'est donc pas difficile de rencontrer des points communs   -et d'impétueux déchaînements au départ d'une même exégèse-  entre POUND et l'auteur du Journal d'un curé de campagne, qui lança de terribles attaques contre notre monde actuel après la seconde guerre mondiale.

 

Le Mal, c'est l'usure

 

En conséquence, nous pouvons affirmer que, de son premier à son dernier bilan, POUND sait où se trouve le mal. Il le définit par le terme usure, tout en se proclamant combattant contre tout système voué à l'utiliser sous les formes de l'exploitation, de l'oppression ou de la dénaturation de l'être humain et contre toute Weltanschauung  ne se basant pas sur le spirituel. C'est là que les attaques de POUND contre l'usure, présentes dans les Cantos, trouvent leurs origines, ainsi que ses critiques d'un capitalisme exclusivement basé sur ce type d'exploitation et son désir de s'allier à une régime politique ressemblant à l'Empire défendu et illustré par DANTE.

 

Ses émissions de Radio-Rome dirigées contre ROOSEVELT durant les dernières années de la guerre sont, dans ce sens, à mettre en parallèle avec les meilleurs passages des Cantos. Pour avoir défendu une position similaire, pour s'être attaqué à l'usure comme procédé hétérodoxe dans le cadre de l'Eglise de son temps, DANTE perdit sa patrie, fut condamné à mort et dut passer le reste de ses jours loin des siens. Ezra POUND subit le même sort. Lorsque les troupes nord-américaines submergèrent l'Italie, POUND fut arrêté, moisit plusieurs mois en prison et, pour avoir manifesté son désaccord avec un régime d'usure, un tribunal le fit interner dans un asile d'aliénés mentaux. Son anti-conformisme fut taxé d'aliénation mentale. Cette leçon de cynisme brutal, d'autres défenseurs d'un régime d'usure, je veux dire de l'autre face de l'usure, celle de l'exploitation de l'homme en masse, l'apprendront. Cette usure-là engendre les mêmes résultats, en plus spectaculaire peut-être puisque le goulag concentre davantage d'anti-conformistes déclarés tels et condamnés en conséquence.

 

"L'usure tue l'enfant dans les entrailles de sa mère" déclare un des vers de la célèbre finale du Cantos XV. Cet enfant pourrait bien être le XXIème siècle, celui que POUND prépara avec tant de passion, avec un soin quasi paternel. Ce siècle à venir est déjà menacé de tous les vices prévus par le poète, contrairement à sa volonté et à ses jugements empreints de sagesse.

 

Vintilia HORIA.

 

(traduit de l'espagnol par Rogelio PETE, décembre 1985).

 

vendredi, 15 mai 2009

Cento anni Robert Brasillach

Cento anni Robert Brasillach

Tratto da http://www.ladestra.info/

Quando si dice Brasillach, di solito parte la retorica. È un vizio antico in uso dalle nostre parti. È morto giovane, d’accordo. Gli hanno fucilato l’animo di ragazzo, gonfio di romanticismi e sogni belli. Certamente. Ma oggi questo giovanotto di cent’anni è più vero di ieri. Nato nel 1909, morto nel 1945: si è risparmiato di scendere tutti i gradini della degradazione, all’opera nella vecchia Europa da allora in poi. Si è sottratto al destino di chi, come noi, è cresciuto nell’impenetrabile nebbione del mito mitizzato senza mai veramente conoscerlo, viverlo, vederlo a colori. La fortuna dei martiri è questa. Aver trovato qualcuno che ti fucila al momento giusto. E così ha mantenuto intatto l’alone di gloria, suo è l’esempio. Per sempre. Versato ad ammirare chiunque concepisca l’impegno come un ribollire di energia, Brasillach cantò la giovinezza in quanto contenitore naturale di forza e di tensione… e ad esempio di Codreanu richiamava lo spirito monastico e militare, la «poesia rude e piena di colore… lo stato di illuminazione collettiva…»; dei rexisti celebrava «l’elemento più spettacolare e più attraente del mondo nuovo: la giovinezza. L’universo fiammeggiava, l’universo cantava e si radunava…». Del Fascismo, dunque, coglieva non tanto le dottrine politiche, i corporativismi, le sociologie, ma soprattutto la capacità di radunare, animare e galvanizzare masse giovanili soffiando nei loro cuori uno spirito di vita… questo Fascismo-dio, che muove l’argilla e la rende carne pulsante, Brasillach lo volle vedere come il mito del secolo.

E disse cose inaudite per qualunque orecchio sordo e avvizzito. Pronunciò frasi sbalorditive per chiunque abbia venduto l’anima al perbenismo. Trinciò definizioni ingiuriose per tutti i preti laici del conformismo. Scrisse che «il fascismo è spirito. È uno spirito anticonformista in primo luogo, antiborghese e l’irriverenza vi aveva la sua parte. È uno spirito opposto ai pregiudizi, a quelli di classe come a tutti gli altri…». Che parole! E che sintesi! Che solenne poesia dello squadrismo, del darsi e del darsi altrimenti! Citò Sorel, e ne estrasse un programma politico ristretto in un’unica, brevissima frase: «…i miti non sono cabale astrologiche… Bisogna considerarli modi di agire sul presente». Come l’amore inetto e sterile, il mito mitizzato è funereo e castrante, immobilizza mentre è nato per sospingere. Il mito vivente deve dunque essere storia, società, uomo vero in carne e ossa. Dedichiamo la riflessione a quanti spesso hanno fatto di Brasillach, e di tutto quanto il Fascismo, la retorica degli imbelli e un cartone inanimato.

L’accademico di Francia Thierry Maulnier, nel 1964, paragonò la morte di Brasillach alla malattia del genio, quella che ne interrompe il volo, che inspiegabilmente spezza all’improvviso un destino attraverso la «stupida ferocia della storia». Come per Chénier o per Kleist, la morte per Brasillach è stata un annuncio: «attraverso la grazia e la tenerezza colma di tristezza del gesto con cui hanno accarezzato le forme visibili ed invisibili della vita: di quella vita che Robert amava troppo per rassegnarsi alla sua usura». Dunque il poeta Brasillach ha consapevolmente accettato la morte nel momento in cui si rese conto che, da un certo momento in poi, la sua vita si sarebbe logorata e sciupata. Lo si direbbe proprio un prescelto dagli dèi, che sono soliti infliggere ai sopravvissuti o ai posteri la condanna inespiabile di lunghe esistenze deprivate di grazia.

Le inquadrature da cui è possibile osservare oggi Brasillach sono quelle di un altorilievo neo-classico. Saint-Loup provò a sintetizzare: «Un essere tutto luce come lui non poteva sostenere il combattimento con armi comuni. Gliene occorrevano altre, più temprate di quelle degli Spartani che ammirava. Le ha trovate nel supplizio e la sua morte mira più alto della sua vita; il suo sacrificio conduce infinitamente più lontano della sua penna. Ha persino “trasfigurato” il fascismo che egli sosteneva». Una mistica di questo genere è il pane quotidiano per ogni religione. Perfino per quelle che predicano l’umiltà e sono tronfie, elogiano la povertà, ma vivono di sfarzo e di potere… Di mistica si nutrono i devoti, come dell’esempio cui rifarsi, del santo cui appellarsi. E poco importa se storicamente l’Idea ha prodotto contraddizioni, atroci disinganni, menzogne. Gli uomini vivono nel fango ma, ogni tanto, hanno bisogno di alzare lo sguardo e di pensare alto. Dura un attimo, ma conta. Come ogni religione che abbia mosso uomini alla milizia e al martirio di sé, anche il Fascismo ha i suoi santi. E Brasillach, mandato a morte mondo di peccato, conserva il suo alone di sorridente volontà di sacrificio. Non un “santino”, ma un uomo capace di assoluto. Giano Accame, invece, e con parole straordinariamente suggestive, ne fece un “inattuale”: «Perchè Drieu è attuale, Céline è ancora attuale, e Brasillach non lo è?». Scrisse che il suo ottimismo gli faceva un po’ pena, che le sue ingenue enfatizzazioni sul Fascismo e sul Nazionalsocialismo ne fecero un illuso. Un’anima semplice? Noi oggi, a tutto questo, vorremmo aggiungere l’elogio dell’ingenuo. Colui che rimane nel proprio gene. Che ne resta imbozzolato e non conosce l’altrove, bastando a se stesso. Wagner fece un poema dell’ingenuità di Sigfrido. E Parsifal non era forse un ingenuo? Quali figure, più di queste, richiamano alla mente la radicale opposizione col mondo moderno e con i suoi personaggi falsi, ottusi, materiali e gonfi di vuoto?

Brasillach ebbe la colpa di immaginare un mondo ribattezzato dal Fascismo come fosse una rivoluzione dello spirito, capace di rifare l’uomo dalla testa ai piedi. Parlando di Brasillach, Accame faceva del sarcasmo, alla sua maniera: «L’uomo nuovo che avevamo sognato non è diventato né migliore, come si sperava, né peggiore, come si temeva… abbiamo tirato fuori la testa dal disastro e ci siamo ritrovati adulti, sciatti, moralmente grigi, ma ben presto compiaciuti di noi stessi, dei nostri utensili, dei nostri guadagni, delle nostre ferie, sotto un cielo vuoto». Che terribile cantico al tracollo dello spirito poetico e che terribile denuncia circa il dilagare della più vile delle prose!

E poi è anche possibile che Brasillach fosse meno ingenuo di quanto pensiamo noi. Magari volle e si impose di essere poeta proprio perchè comprese alla perfezione che altrimenti sarebbe morto anche se avesse continuato a sopravvivere. Tra i non conformisti degli anni Trenta aleggiavano proiezioni e immaginative di cui noi oggi non possiamo comprendere che poche cose. Nella sua famosa Lettera a un soldato della classe ‘40, Brasillach in qualche modo ci spiega quanto poco fosse un illuso o un ingenuo. Il “caro ragazzo” a cui si rivolge è il giovane del dopoguerra e di tutti i dopoguerra. «Ti chiedo solo di non disprezzare le verità che noi abbiamo cercato, gli accordi che abbiamo sognato al di là di ogni disaccordo, e di conservare le due sole virtù alle quali io credo: la fierezza e la speranza».

Se pensiamo un attimo a quanto poco si aggirino per l’Europa mondializzata la fierezza e la speranza, si capisce che Brasillach non parlava il linguaggio etereo del metafisico con la testa tra le nuvole, ma quello concreto dell’uomo in cerca, sorretto dalla volontà di adornare l’esistenza di qualcosa, anche minima, per cui valga davvero la pena di essere vissuta. La fierezza e la speranza – ma non sarebbe un ottimo titolo per un libro postumo di Oriana Fallaci, certo ad altissima tiratura? - sono precisamente quelle cose di cui oggi manca completamente la povera Europa che ha fucilato Brasillach, colpendone ben più lo spirito che il corpo. Uomo tutt’altro che spaesato e abbandonato a sogni adolescenziali, Brasillach fu al contrario attento alla modernità, ne annusò certi segnali, ne apprezzò non poche manifestazioni, ne assaporò molti lati. Dal cinema alla musica jazz, al teatro, persino ai cartoni animati… e non gli fece difetto una “normalissima” inclinazione per la vita bella, suadente, rallegrante, esteticamente ricca e stimolante. E quando fu il momento, con la morte in faccia, mantenne quel sangue freddo che si addice più al navigato avventuriero che al semplice e al sognatore.

Noi gli perdoniamo facilmente di aver preso qualche memorabile “cantonata”. Non fu l’unico. Si tratta anzi di una regola storica. Rileggiamo volentieri le sue pagine visionarie, lisergiche, pregne di santa e sana allucinazione: via di fuga dalle miserie borghesi. Ripercorriamo insieme a lui l’arduo cammino di quanti furono per una lunga stagione al centro degli eventi e vi si tuffarono a capofitto secondo istinto. E confessiamo invidia per chi, come lui e molti della sua generazione, ha avuto in dono dal destino la possibilità di commettere anche grandi sbagli, potendosi dare l’aria di aver centrato il senso della storia. A noi è toccato in sorte di frugare tra gli avanzi degli altri, senza trovare nulla che non fosse avvilimento.
«Un accampamento di giovinezza nella notte, l’impressione di essere un tutt’uno con la propria Patria, il collegarsi ai santi e agli eroi del passato, una festa di popolo, ecco taluni elementi della poesia fascista, in cui è consistita la follia e la saggezza del nostro tempo. Ecco ciò, ne sono sicuro, cui la gioventù tra vent’anni, dimentica di tare e di errori, guarderà con oscura invidia e con inguaribile nostalgia…». Queste parole, effettivamente, nascondono un errore di valutazione. Ma non riguarda l’analisi del suo tempo, bensì la prognosi di quello a venire. Nessuno ha dimenticato le tare e gli errori, ma tutti ricordano soltanto quelli… e nessuno si azzarda a provare invidia o nostalgia per idee che, nel frattempo, lavorate a lungo da eserciti di termiti giganti, sono state ridotte a relitti terribili e a minacciose mostruosità.

Di Brasillach ci piacciono ancora e nonostante tutto e in faccia al mondo alcuni suoi fondamentali. L’Europa è uno di questi. Un asse latino-germanico, un pullulare di patrie e di identità rivendicate, un mito da agitare, e ancora oggi, e proprio nel momento in cui la parola “identità” è diventata una colpa e un insulto e al mito si affibbia la maschera tragica del delirio. Di Brasillach ci piace poi il suo anarchismo. La sua voglia mobile di raccontare storie di radicamento: «Voglio restare… restare nella tua ombra, ingannare l’attesa, il ricordo di avere atteso, sperare, attendere ancora…», fa dire a Berenice l’errante. Questo “restare” potrebbe diventare all’improvviso una parola d’ordine e un grido. Di pochi oppure magari di molti. Magnifica illusione o scelta pesante? Dopo tutto, lo aveva scritto ne I sette colori: «Ad altri gli entusiasmi della illusione, la certezza che mai ha dubitato di sé. Per noi, il nostro solo merito, in tutti i campi, è di esserci accettati, di avere scelto».

* * *

Tratto da Linea del 24 aprile 2009.

Luca Leonello Rimbotti

jeudi, 14 mai 2009

Jacques Ovadia: quand j'ai rencontré Céline

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SYNERGIES EUROPÉENNES -

VOULOIR (Bruxelles) - JANVIER 1994

Quand j'ai rencontré Céline

par Jacques OVADIA

Quand Louis-Ferdinand Céline m'a reçu chez lui, à Meudon, route des Gardes, il m'a demandé de lui parler d'Israël. Il a dit, après avoir écouté: "Ben voilà, un homme nouveau se fabrique là-bas... un bâtisseur... un cultivateur... un guerrier..." Devant la résistance victorieuse des forces juives contre les armées arabes pendant la Guerre d'Indépendance, l'écrivain avait adressé à l'hebdomadaire "France-Dimanche" un court article où il s'écriait d'emblée: "Vive les Juifs, bon Dieu!". Et cette exclamation avait fait la manchette de la "Une" de l'hebdo. Quand je l'ai vu, il était tassé sur son siège; visiblement, il souffrait des suites de ses blessures reçues au champ de bataille en 1914... Un bras fonctionnait mal, il avait été trépané et souffrait de terribles migraines. Je voyais maintenant un homme aigri, fatigué, mais n'ayant rien perdu de sa vivacité. Parlant littérature, il me disait: "Ecrire, c'est un travail de bagnard, il faut être très méticuleux, ne pas jouer avec la grammaire, revoir les phrases... Tenez, un de mes parents, Auguste il s'appelait, qui était employé aux écritures dans une sous-préfecture, était un maniaque de la virgule... elle devait être à sa place, toujours, 1a virgule... Et puis, il y a l'émotion, sans l'émotion, on ne peut pas vraiment écrire, l'émotion c'est le style... Lisez donc Rabelais dans le texte..." Parmi ses contemporains, peu trouvaient grâce. Proust avait tout en quelque sorte pour lui déplaire; juif, pédéraste. Mais c'était surtout le fait qu'il fût décadent qui le repoussait. Il s'opposait aussi à son style. "Moi, je suis un homme, j'écris comme un homme, disait-il. L'homme ne s'exprime pas comme Louis XIV". Par contre, il lui reconnaissait le talent de savoir "chier les phrases".

Avant de le voir, j'avais correspondu avec Louis-Ferdinand Céline. Parlant d'édition, il m'écrivait: "Pour être édité, il faut être académicien ou pédéraste fameux".

Une autre fois, nous avons parlé du communisme. Céline avait dit: "L'idéal du communisme, c'est de jouir dix fois plus qu'un bourgeois". Il me parlait de l'URSS où il s'était rendu pour toucher ses droits d'auteur. Le "Voyage au bout de la nuit" avait été traduit en russe, c'était le livre de chevet de Staline... Il exprima sa grande déception, mentionna l'état déplorable des hôpitaux russes, ajoutant: "Le communiste est dans le fromage, il a la carte du Parti, il a des privilèges, il est à part, le communiste, ce n'est pas le peuple...". Il a terminé par cette phrase que je n'oublie pas: "L'homme enlèvera toute sa signification au communisme, c'est le peuple qui aura raison, un jour, vous verrez, il jettera le communisme aux. poubelles".

Louis-Ferdinand Céline voulait faire traduire le "Voyage" en hébreu, le faire paraître en hébreu. Je suis allé voir les éditeurs. Bien entendu, aucun n'a accepté. L'un d'eux, dans un modeste bureau de la rue Yavneh, à Tel-Aviv, a répondu que ce n'était pas le moment: "Un jour, peut-être".

Je me rappelle encore, quand je l'ai vu pour la première fois, son irritation: "Cessez de m'appeler "Maître", que les autres le fassent, pas vous... Si vous tenez tellement à me décorer d'un titre, appelez-moi "docteur". Il avait la voix éraillée, il était enveloppé dans ce que j'ai pris pour une grosse couverture verdâtre, c'était peut-être un macfarlane. A la fin, voyant ma curiosité, il m'a révélé qu'il se couvrait d'une houppelande de berger landais. Il est mort quelques heures après avoir achevé le manuscrit de son dernier ouvrage: "Rigodon". Je crois qu'il prévoyait sa mort. La seconde fois que je l'ai vu, il se plaignait de violents maux de tête. Je ne sais pourquoi nous avons parlé de la guerre. "On a gueulé que j'étais collaborateur... encore une insulte... je n'ai collaboré avec personne... et puis pour moi, les Allemands, c'était pas Hitler... Il y a une fameuse différence... Ah! On m'en a fait baver à ce propos... Dites, ça s'est amélioré après la guerre?... On m'a tout brûlé, tout saccagé... Les lendemains qui chantent? J'en ris, j'en ris jaune..." Je n'ai pas voulu lui parler du conflit israélo-arabe. Je crois qu'il n'avait pas envie d'en parler. Mais il tenait à me revoir, j'ai perdu les lettres de cette période. Ce qui l'intéressait, c'était surtout les nouvelles d'Israël. Il en avait des échos assez justes. "Israël est dirigé comme une communauté juive d'Europe Centrale. Vous avez un homme qui est un peu comme De Gaulle, qui connaît bien son peuple et qui veut que le peuple se dépasse, c'est Ben Gourion". Israël avait pour lui un très long chemin de sueur et de sang à accomplir avant de se retrouver libre. Il avait toujours eu en tête l'idée d'un homme libre, d'un homme très populaire et l'existence d'un Etat Juif lui avait ouvert les yeux.

Jacques OVADIA.

(extrait de la revue universitaire israëlienne Levant,  n°4, octobre 1991)

mercredi, 13 mai 2009

Gebet für Russland - Zwei Bücher von Alexander Solchenizyn

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Gebet für Rußland

Zwei Bücher von Alexander Solschenizyn

Alexander Solschenizyns: Zwischen zwei Mühlsteinen. Mein Leben im Exil. Herbig 2005.
Alexander Solschenizyn: Was geschieht mit der Seele während der Nacht? (Prosaminiaturen) Herbig 2006.
Ein Aufsatz von Martin Möller
Ex: http://www.monarchieliga.de/

Vorbemerkung: Diese Rezension schrieb ich für die Zeitung „Neue Ordnung“ des Leopold Stocker Verlags. Inhalt und Konzeption des Aufsatzes waren mit dem Verlagsleiter Mag. Stocker abgesprochen. Trotzdem weigerte sich Stocker den Aufsatz zu bringen, weil ich die „düsteren und kriminelle Aspekte“ der Demokratie benannte und weil ich zu Recht feststellte, daß Rußland durch die „Demokratisierung“ vom Regen in die Traufe geraten ist.


Bei Herbig sind zwei Bücher von Alexander Solschenizyn erschienen, „Zwischen zwei Mühlsteinen“, das in faszinierender und packender Weise die 30 Jahre eines Exils schildert, das Solschenizyn bekanntlich via Köln und Zürich nach Vermont, Usa führte, und das Bändchen „Was geschieht mit der Seele während der Nacht?“ mit Prosaminiaturen aus vierzig Jahren schriftstellerischen Schaffens.

Aus dem us-amerikanischen Exil kehrte Solschenizyn bekanntlich vor 12 Jahren nach Rußland zurück. Im Exil hatte er niemals die Verbindung zur russischen Heimat aufgegeben und stets an seinem Glauben an eine Wiedergeburt Rußlands festgehalten. Für diesen Glauben hatte er in Kauf genommen, im Westen als Reaktionär und im Osten als antikommunistischer Staatsfeind diffamiert zu werden. An der Zusammenarbeit von Ost und West, die sich oft genug in gemeinsamer Desinformation manifestierte, zerbrach Solschenizyn nicht, wie viele andere, die die Allianz von Kommunismus und Demokratie nicht verstehen konnten und sich in die Isolierung flüchteten.

In der Schweiz galt Solschenizyn im Gegensatz zu Millionen Asylanten als lästiger Ausländer und wurde von der Fremdenpolizei als politischer Agitator behelligt. Ironischer Weise geschah das, als Solschenizyn in den Schweizer Archiven erforschte, daß der Massenmörder Lenin während seines Schweizer „Asyls“ völlig unbehelligt seinen Vorbereitungen zum Umsturz der christlichen Ordnung nachgehen konnte. Im September 1915 hatten sich die europäischen Kommunisten bekanntlich in Zimmerwald im Kanton Bern getroffen, um die Durchsetzung des Bolschewismus, die Zerstörung der europäischen Staaten und die Beseitigung des Rechts zu bewerkstelligen. Diesen Prozeß förderte die Schweiz bis hin zum termingerechten Einschleusen Lenins in das wankende Rußland. Wäre Lenin 1916 und 1917 von der Schweiz so behandelt worden, wie Solschenizyn 1976 und 1977, dann hätte es wohl keine bolschewistische Revolution gegeben. Solschenizyn bedankte sich trotzdem höflich bei den Schweizern, hatte er hier doch die Lenin betreffenden Kapitel für das Rote Rad fertigstellen können, Kapitel, die auch als eigenständiges Buch Lenin in Zürich erschienen sind. Die weiteren Teile des Roten Rades schuf Solschenizyn dann in den Usa, weil er sich nur hier vor den Nachstellungen des KGB sicher fühlte. Von der Öffentlichkeit ließ sich Solschenizyn in seinem Exil sorgfältig abschirmen, da er sein Leben einzig dem schriftstellerischen Werk widmen wollte.

Bereits als Sowjetbürger hatte Solschenizyn die westliche Entspannungspolitik und die westliche Interpretation des Kommunismus kennengelernt. Dies geht auch aus einigen seiner vor 1975 erschienenen Schriften hervor. Was er dann im Westen und namentlich in den Usa der Präsidenten Ford und Carter erlebte, schockierte ihn jedoch und erfüllte ihn mit tiefer Besorgnis vor einem Endsieg des Kommunismus. Diese Sorge wurde noch verstärkt durch die Tatsache, daß der deutschjüdische Außenminister Kissinger die amerikanischen Rundfunkstationen anwies, keine Reden oder Kommentare Solschenizyns ins Ausland zu übertragen und daß zumindest bis zum Ende der Entspannungsära mit dem Amtsantritt Präsident Reagans im Jahre 1981 die Usa darum bemüht war, nicht etwa den Kommunismus, sondern das „Problem Solschenizyn“ einzudämmen.

Die Sorge vor einem weltweiten Erstarken des Kommunismus bewegte Solschenizyn dazu, den Essay „Warnung! Die tödliche Gefahr des Kommunismus“ zu verfassen, der 1980 in der Abenddämmerung der gescheiterten Entspannungspolitik erschien. Solschenizyn warf in dem Essay dem Westen zu Recht vor, daß er den Kommunismus von Anfang an unterstützt habe, obwohl sich 1917 das ganze russische Volk gegen den Kommunismus gestellt hatte. Diese Unterstützung des Westens wurde noch verstärkt, je mehr sich der Kommunismus in millionenfache Massenmorde und Verbrechen verstrickte, und kulminierte im 2. Weltkrieg, als der Westen ganze Völker und halbe Kontinente dem Sowjetkommunismus auslieferte. Der Westen gewann immer dann, wenn er sich zur Abwehr des Kommunismus entschloß, sei es bei der Blockade Berlins, sei es beim Koreakrieg. Anschließend fiel er leider wieder in den Anpassungskurs zurück, der dem Kommunismus Boden verschaffte. Bei der Interpretation des Kommunismus liebte der Westen die Oberflächlichkeit. Die Aggressivität des Kommunismus wurde im Westen mit Angst vor Angriff, Einkreisung und ähnlichem beschönigt. Und obwohl der Kommunismus weltweit wütete, sprach man von asiatischem Charakter des Sowjetsystems oder vom notorischen Russentums. Solschenizyns Analyse sah anders aus: Der Kommunismus ist ein destruktives, zerstörerisches soziales Krebsgeschwür, das nur besiegt werden kann, wenn es völlig vernichtet wird. Entspannungspolitik ist so sinnlos wie das Verharren eines Krebskranken in blinder Hoffnung auf Heilung. Solschenizyn weiß wovon er spricht, hat er doch in den 50er Jahren eine Krebserkrankung überwunden. Dem Roman „Krebsstation“ liegt der Heilungsprozeß zugrunde. In der Entspannungspolitik sieht Solschenizyn den „dritten Verrat des Westens“ - nach 1918 und 1945.

Solschenizyn belegt die furchtbare Zerstörung, die der Kommunismus am russischen Volk angerichtet hat. Er zeigt auf, wie das Russentum kurz vor der biologischen Vernichtung steht und er weist immer wieder hin auf die Denker und Priester, „die geistigen Lehrer des Volkes“, die die Kommunisten ermordet haben, Namen, die im Westen auch heute niemand kennt, einem Westen, der behauptet einen Kult des Gedenkens zu veranstalten, tatsächlich aber einen Exzeß an Gedächtnisverlust betreibt. Es ist wohl ein Wunder, daß sich das orthodoxe Priestertum angesichts des kommunistischen Massenmordes und der flankierenden Unterstützung der gesamten westlichen Linken, auch der deutschen und österreichischen Sozialdemokraten, überhaupt erhalten hat. Und man darf es wohl als namenlose Schande bezeichnen, daß Österreich die Symbole der Mörder noch im Staatswappen führt.

Als der Kommunismus in der Sowjetunion unter Gorbatschow zusammenbrach und sein Ende abzusehen war, wandte sich Solschenizyn im Sommer 1990 mit dem Buch Rußlands Weg aus der Krise an seine Landsleute. Solschenizyn ging es darum, praktische Vorschläge für ein zu erneuerndes Rußland zu machen. Dazu war es auch nötig, den territorialen Bestand Rußlands zu klären. Den Randrepubliken bis auf Kasachstan solle, so Solschenizyn, die Möglichkeit gegeben werden, sich bedingungslos von Rußland zu lösen. Die Grenzen der „Unionsrepubliken“ allerdings waren fast ausnahmslos von den Kommunisten ahistorisch und ohne Rücksicht auf Region und Bevölkerung gezogen. Deshalb gehörten riesige russische Gebiete zu fremden Unionsrepubliken. Dies betrifft vor allem die Republiken Ukraine und Kasachstan, aber auch andere Unionsrepubliken. Das Problem Rußland/Ukraine, das bekanntlich auch heute noch nicht gelöst ist, liegt Solschenizyn insofern am Herzen, als seine Mutter Ukrainerin war. Solschenizyn schlägt zur Lösung der Grenzfrage das Mittel der fairen Volksabstimmung vor, ähnlich den Grenzziehungen durch Abstimmung nach dem 1. Weltkrieg. Er erwähnt in diesem Zusammenhang die ukrainischen Gebiete, die bis 1918 österreichisch waren:

„In der österreichischen Monarchie nannten die Galizier im Jahre 1848 ihren Nationalrat noch nach altrussischem Brauch Golowna Russka Rada. Doch später entwickelte sich im von Rußland (!) abgetrennten Galizien unter dem österreichischen Übergewicht eine entstellte Sprache, die mit deutschen und polnischen Wörtern gespickt war. Es wurden Versuche unternommen, die Karpatorussen der russischen Sprache zu entfremden, man lockte mit einem gesamtukrainischen Separatismus, der sich bei den gegenwärtigen Führern der nationalistischen ukrainischen Emigration in volkstümelndem Obskurantismus äußert, etwa derart, daß Wladimir der Heilige Ukrainer gewesen sei. Diese Emigrantenführer versteigen sich schließlich zu dem Kampfruf: Der Kommunismus mag sein wie er will, wir müssen die „Moskowiter“ erledigen!“

Hier, wie in manch anderem Gedanken, dringt das russische Herz Solschenizyns durch und für die Feststellung, daß Galizien, Lodomerien, die Bukowina und die „Karpatoukraine“, also die Ostkarpaten, Teil der Habsburger Monarchie sind, könnte er wohl nur geringe Sympathien aufbringen.

Solschenizyn fordert weiterhin, daß die Menschen wieder lernen müssen zu arbeiten, ihr Schicksal selbst in die Hand zu nehmen. Er verlangt radikale Abrüstung und Marktwirtschaft. Die KPdSU muß vollständig enteignet und entmachtet, der Grund und Boden privatisiert werden, allerdings nur an Bauern! Vor einem kapitalistischem System der Bodenbearbeitung warnt Solschenizyn.

Die Aussagen Solschenizyns zur Frage der Staatsform sind zwiespältig zu beurteilen. Solschenizyn betont zwar mancherorts, daß es eine Obrigkeit geben muß, doch für eine Rückkehr des Hauses Romanow bricht er keine Lanze, ja er erwähnt das ja zweifellos auf göttlicher Vorsehung beruhende Zarentum des Hauses Romanow (bzw. Romanow-Holstein-Gottorp) nicht einmal. Dies ist um so rätselhafter, als er die Geschichte dieses Hauses ja kennt wie kaum ein zweiter. Die Einführung einer „Demokratie“, deren düstere und kriminelle Aspekte er ebenfalls genau kennt und in seinem Werk mancherorts ausführlich beschrieben hat, hielt er wohl schon 1990 für beschlossene Sache. Daß Rußland auf diesem Wege vom Regen in die Traufe gerät, hätte ihm klar sein müssen. Die Zeit seit 1990 hat das uneingeschränkt bestätigt. Auch Solschenizyn konstatiert 1999 das totale Scheitern des angeblichen „Neubeginns von 1990“. Warum hat er selbst damals die gleiche verführerische Demokratie-Melodie gespielt? Dies bleibt unverständlich und befremdlich.

Solschenizyn kennt die fundamentale Demokratiekritik durchaus und zitiert Tocqueville, Schumpeter und sogar Karl Woytila. Er nennt einige der bekannten Argumente gegen die Demokratie, zieht daraus jedoch überhaupt keine Konsequenzen. In den Usa hatte er sich mit seiner radikalen Zivilisationskritik wenig Freunde gemacht, da sie als antiamerikanisch empfunden wurde. Im legendären Jahr 1990 hielt er sich hingegen auffallend zurück. Dies war ein nicht wieder gutzumachender Fehler. Gerade für einen Mann wie Solschenizyn hätte die Tatsache, daß der „demokratische“ Weg in die Zerstörung hinein führt, vorhersehbar sein können und müssen. Die verschiedenen Vorschläge, die Solschenizyn zu Politik, Wahlsystem und Verwaltung vorträgt, machen dann auch einen eher belletristischen Eindruck und erschöpfen sich in Wunschvorstellungen. Ein „Semstwo“-System nach altrussischem Vorbild, wie es Solschenizyn beschreibt, kann ja überhaupt nur unter dem Schirm einer monarchischen Herrschaft und eines Reiches gedeihen und muß unter demokratischen Verhältnissen entarten, wenn es denn überhaupt eingeführt werden kann - was im Nachwenderußland nicht der Fall war.

Vier Jahre später veröffentlichte Solschenizyn das Buch „Die russische Frage am Ende des 20. Jahrhunderts.“ Hier handelt es sich um einen sehr ausführlichen historischer Abriß des Russentums, der die Geschichtssicht Solschenizyns darlegt. Es ist zum Teil amüsant zu lesen, wie Solschenizyn Deutschland und Österreich betreffende Ereignisse der russischen Politik beurteilt.

Solschenizyn ist russisch-orthodoxer Christ. Er fordert von der (russisch-orthodoxen) Kirche, daß sie sich vollständig vom Joch des Staates befreit und ganz mit der Seele des Volkes lebt. Sie möge nach dem Beispiel Christi Furchtlosigkeit zeigen. Solschenizyn mißtraut dem hohen Klerus und erhofft eine Evangelisierung Rußlands durch die Priester und das Christenvolk. Die orthodoxe Kirche soll keine Staatskirche mehr sein, doch stellt sich Solschenizyn vor, daß sie einen Einfluß ausübt, „wie ihn das Rabbinat in Israel hat“. Als verhängnisvoll für die russische Kirche nennt Solschenizyn das Schisma des 17. Jh. Diesem Schisma waren radikale Reformen der russischen Kirche vorausgegangen, mit dem Ziel, die russischen Liturgien den konstantinopolitanischen anzupassen. Die Reformen beinhalteten u.a. die Regel des dreifingerigen statt des zwei- und fünffingerigen Kreuzschlagens, ein dreifaches statt zweifachem Halleluja, die Schreibweise „Iisus“ statt „Isus“ für Jesus, die Vorschrift, die Prozessionen nach Sonnenaufgang statt nach Sonnenuntergang zu richten, sowie die Anpassung des Nizänums an den griechischen Text. Die Bewegung der bei den alten Sitten verbleibenden Altgläubigen, von den Gegnern „Raskolniki“ genannt, wurde für zwei Jahrhunderte blutig verfolgt, teils dezimierte sie sich auch in Massenselbstmorden.

Solschenizyn bemerkt, daß der Wille Zar Nikolaus II. einer durchgreifenden Erneuerung der Kirche vor 1917 im Wege gestanden habe. Die Revolution wurde daher von der Kirche zunächst als Befreiung empfunden, die ihr die von Gott geforderte Selbstbestimmung ermöglichte. Es sei daran erinnert, daß hier ein Prozeß begann, der in der katholischen Kirche bereits vor der Burg Canossa im 11. Jh. einsetzte! Alle Zaren des 19. Jh. hatten die russisch-orthodoxe Kirche durch einen Minister, den s.g. „hl. Synod“ regieren lassen und die Freiheit der Kirche gegen das göttliche Recht massiv beschnitten. Solschenizyn fordert eingedenk dieser Erfahrungen eine starke, unabhängige orthodoxe Kirche, die machtvoll ihr Wächteramt wahrnehmen kann. Doch ist dies angesichts der inneren Struktur der Orthodoxie und ihrer Trennung vom römischen Lehramt kaum möglich. Solschenizyn fordert ferner einen verständlichen und überzeugenden kirchlichen Unterricht für Kinder und Erwachsene, eine Modernisierung der Kirche ohne Verlust an Glaubenssubstanz, in diesem Zusammenhang Versöhnung mit den Altgläubigen (der sich allerdings noch schwieriger darstellen dürfte, als die Versöhnung der katholischen Tradition mit den Anhängern des „2. Vatikanum“.

Solschenizyn zeigt auf, daß auch im heutigen Rußland eine massiv kirchenfeindliche Propaganda lebendig ist. Diese korrespondiert mit der kirchlichen Erstarrung und nutzt diese rücksichtslos aus. Solschenizyn besteht aber darauf, daß es „der Geist der Orthodoxie ist und nicht die imperiale Macht, die den kulturellen russischen Typ herausgebildet hat. Die Orthodoxie, die wir in unseren Herzen tragen und die uns in unseren Sitten, unseren Haltungen erhalten hat, wird den geistigen Sinn in uns stärken, der höher steht als alle ethischen Erwägungen. Wenn wir in den uns bevorstehenden Jahrzehnten weiterhin mehr und mehr von unserer Bevölkerung, von den Territorien und schließlich sogar unsere Staatlichkeit verlieren - dann wird uns nur noch das eine Unvergängliche bleiben: der orthodoxe Glaube und das von ihm ausgehende Weltgefühl.“

Solschenizyn hat neben der großen Form des Romans und des historischen Epos auch stets die kleinen Formen des Gedichtes und der Prosaminiatur gepflegt. Vieles davon findet sich innerhalb der großen Werke, doch das Wertvollste hat Solschenizyn aufbewahrt. Diese Prosaminiaturen sind jetzt in einem Bändchen bei Herbig unter dem Titel „Was geschieht mit der Seele während der Nacht?“ erschienen. In zwei Abteilungen (1958-1963 und 1996-1999) gewährt Solschenizyn Einblick in die poetische Seite seines Schaffens.

Tief kann man, gerade auch als in der DDR geborener Deutscher, die Trauer nachempfinden, die Solschenizyn bei zugrunde gegangenen Dörfern empfindet, bei abgerissenen Kirchen und verschwundenen Klöstern. Das bis zur verbrecherischen Revolution blühende Leben wurde in ödeste Tristesse verwandelt und doch blieb ein Rest von Schönheit, ein Nachklang einstiger himmlischer Harmonie der christlichen Kultur: „Alle wurden von dem Gefühl einer Einheit ergriffen, die niemals sichtbar vor uns erschien, die langsam nach Sonnenuntergang vom Himmel herniederkam, sich in der Luft auflöste, durch die Fenster hereinfloß - jener tiefe Ernst des Lebens, der in der Hast des Tages nicht bemerkt wurde, sein vollständiger Sinn. Wir berührten ein schwindendes Geheimnis.“

Leider bedient sich der Verlag Langen Müller der Neuen Schlechtschreibung, was wohl kaum im Sinne des Dichters sein kann.

Annulation magique de la crise et "méthode physiognomique" chez Ernst Jünger

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Annulation magique de la crise et "méthode physiognomique" chez Ernst Jünger

 

par Robert Steuckers

Parmi les fidèles de l'idéologie marxiste, bien peu ont analysé la pensée de ceux qu'ils appellent les écrivains "pré-fascistes", ou carrément "fascistes", et dont Ernst Jünger, évidemment, serait une des figures de proue. Armin Steil est un des rares idéologues marxistes à avoir analysé avec pertinence et profondeur, et surtout avec clarté, les démarches de Georges Sorel, Carl Schmitt et Ernst Jünger, dans son ouvrage Die imaginäre Revolte. Untersuchungen zur faschistischen Ideologie und ihrer theoretischen Vorbereitung bei Georges Sorel, Carl Schmitt und Ernst Jünger (réf. infra; = La révolte imaginaire. Recherches sur l'idéologie fasciste et sur sa préparation chez GS, CS et EJ).

En se penchant sur Le Travailleur, Steil constate que la logique de Jünger, et partant de son "fascisme", ou, plus exactement, de son "conservatisme révolutionnaire", n'est pas une logique théorique, une logique construite, basée sur l'observation de causes et d'effets, mais une logique et un langage métaphoriques, poétiques, imagées. Face à une réalité socio-économique et politique chaotique, face à la crise de la société et de la cultures allemandes, Jünger veut maîtriser les effets pervers, les dysfonctionnements par l'esthétique: son "fascisme", son "conservatisme révolutionnaire", seraient donc essentiellement de nature esthétique, contrairement au marxisme qui se moulerait sur les réalités matérielles et résoudrait les crises en travaillant les matières socio-économiques elles-mêmes, sans recul idéaliste, sans recours à une transcendance ou à une esthétique. Steil conclut très justement: "Le livre [= Le Travailleur]  veut éduquer [les hommes] à avoir une attitude souveraine face aux processus sociaux". L'observation minutieuse, froide, dépassionnée, constituerait dont la "clef magique" qui permettrait à l'élite qui s'en sert de maîtriser les crises, de mettre un terme au chaos et aux disparités dissolvantes qui entravent le bon fonctionnement des sociétés qui les subissent.

Etre des yeux hyper-perceptifs

Les esprits volontaires qui souhaitent donc "prendre le taureau par les cornes", agir sur le terrain politique, lutter contre les crises et leurs effets, ne doivent donc pas s'atteler à construire un système mécanique d'idées toutes faites qui s'agencent et s'emboîtent parfaitement, mais être des "yeux" hyper-perceptifs, capables de décrire les phénomènes de la vie quotidienne: c'est ce que Jünger appelle la "méthode physiognomique". Elle permet de voir l'essence d'une chose dans sa simple apparence, de saisir l'unité de l'essence et de l'apparence, qui est la "forme" (die Gestalt), invisible pour tout observateur inattentif, distrait, non habitué à manier avec la dextérité voulue la "méthode physiognomique". Tout phénomène valable, fécond, porterait donc en lui une "forme", plus ou moins occultée, une force potentielle qu'il s'agit d'arraisonner et de mettre au service d'un projet politique ou historique. En revanche, tout phénomène qui n'apparaît que comme "normal" est, par conséquent, un phénomène sans plus de "forme", sans "force". En tant que tel ce phénomène serait un signe avant-coureur de la décadence, un signe indiquant qu'il y a redistribution des cartes, que des formes meurent, en obéissant ainsi à une logique cachée, qui, elle, prépare l'avènement de formes nouvelles, aux forces intactes.

L'observation des phénomènes de la vie courante, de détails de nos décors quotidiens, laisse entrevoir où se manifestent la chute et la mort des formes: les néons, les lumières tapageuses, criardes et artificielles des villes modernes, sont un indice patent de cette déperdition de forces, masquée par des couleurs et des intensités sans vie réelle. La circulation moderne dans les grandes villes houspille le piéton, seul être de chair dans cet univers de béton, d'asphalte et de métal, sur ces marges à peine tolérées que sont les trottoirs, pistes réservées à la "moindre vitesse".

Le "Travailleur" utilise la "méthode physiognomique"

Le "Travailleur" est donc la figure qui fait usage de la "méthode physiognomique", observe, déchiffre, plonge dans cet univers d'artifice à la recherce des forces encore enfouies, pour les mobiliser en vue d'un projet purement imaginé, explique Steil, "utopique" au sens marxien et engelsien du terme. Ce recours à l'imaginaire, explique le marxiste Steil, procède d'une logique du doute, qui veut à tout prix donner du sens à ce qui n'en a pas. Qui veut se persuader que, derrière, les phénomènes de déclin, de dévitalisation, se profilent un "Ordre" et des lois, qui sont des avatars du Dieu unique refusé par les tenants du matérialisme historique. Cet "Ordre", cette "Gestalt", cette "forme", sont intégrateurs de la diversité infinie des observations posées par les personnes, mais ne sont pas, comme dans le cas du matérialisme historique, un reflet des rapports sociaux, mais une vision totalisante, intuitive, allant directement à l'essentiel, c'est-à-dire à la forme originelle. Ce n'est pas l'énumération objective et positive des causes et des effets qui permet de décider et d'agir, mais, au contraire, un regard perçant qui permet de voir et de saisir le monde comme le théâtre où s'affrontent et coopèrent les formes.

Le "Travailleur" est précisément celui qui possède un tel "regard perçant", et qui remplacera le "bourgeois", raisonnant étroitement sur les simples causes et effets. Steil constate le hiatus entre cette vision du "Travailleur" et celle, marxiste et empirique, du "Prolétaire": la figure forgée par Jünger se place très haut au-dessus des contingences socio-économiques; le prolétaire conscient de sa déréliction, lui, travaille au c¦ur même de ces contingences, sans prendre aucune distance, sans détachement. Le "haut vol" du "Travailleur", sa perspective aquiline, lui procure un masque: métallique ou cosmétique, masque à gaz du combattant, masque du coureur automobile chez les hommes, fard chez les femmes. Les traits individuels disparaissent derrière ces masques, comme doivent disparaître les imperfections individuelles des hommes humains, trop humains. Les figures du Travailleur sont des figures certes imaginaires, idéalisées à outrance, dés-individualisées et apurées: elles fonctionnent comme des soldats prussiens de l'ère frédéricienne à l'exercice. En suivant leurs chefs, ces moindres (mais néanmoins nécessaires) avatars du "Travailleur" et des soldats prussiens de la guerre en dentelle, perdent certes les imperfections de leur individualité, mais abandonnent aussi leurs doutes et leurs désorientements: les règles et l'Ordre sont des ancres de sauvetage offertes par la nouvelle communauté élitaire des "Travailleurs", virtuoses de la "méthode physiognomique".

L'indépendance apparente du prolétaire

L'Ordre, comme projection imaginaire, et la "méthode physiognomique" sont des instruments contre la notion empirique et marxiste de "lutte des classes", proteste Steil, avant de donner très clairement la version de Jünger: laisser le travailleur, l'ouvrier, dans les contingences socio-économiques, c'est le laisser dans un monde entièrement déterminé par la bourgeoisie, issu d'elle et contrôlé en dernière instance par elle. En occupant une place désignée dans l'ordre bourgeois, l'ouvrier ne jouit que d'une indépendance apparente; il n'a là aucune autonomie. Toute attaque lancée contre l'ordre bourgeois au départ de cette position apparente n'est elle aussi qu'apparente, appelée à être récupérée et à renforcer l'établissement. "Tout mouvement s'effectue théoriquement dans le cadre d'une utopie sociale et humaine vieillie, en pratique elle hisse toujours au pouvoir la figure de l'affairiste rusé, dont l'art consiste à négocier et à trafiquer", écrit Jünger. Pour Steil, cette définition radicalise la vision sorélienne du socialisme, qui voulait transformer la politique en pur moyen, sans objectif limitant, inscrit dans les contingences.

Restaurer l'oeuvre "auratique"

Un marxiste verra, dans cet idéalisme et dans cette épure du politique comme pur moyen, une élimination de la politique, une volonté de mettre un terme à la violence destructrice de la politique, qui est seulement, pour le regard marxiste, "lutte des classes". Mais la technique en marche qui balaie les formes mortes pour rétablir de nouvelles formes à la suite d'un affrontement planétaire des formes subsistantes, encore dotées de forces plus ou moins intactes. La technique détruit donc les formes résiduaires et caduques, elle planétarise et gigantise la guerre permanente des formes, mais le "Travailleur", en instrumentalisant froidement la "méthode physiognomique", donnera une forme finale à la technique (voeu qui ne s'est jamais réalisé!!). Cette forme finale sera artistique et le beau qui s'en dégagera aura une fonction magique et "sacrale", comme dans les sociétés dites "primitives". La rénovation de ces formes, écrit Steil, se fera par la restauration de l'oeuvre "auratique", éclipsée par la sérialisation technique. L'Aura, expression impalpable de la forme, de l'essence du phénomène représenté, restitue la dimension sacrée, proclame le retour d'un culte du beau, en remplacement qualitatif des religiosités mortes au cours de l'ère bourgeoise.

Le "réalisme héroïque", assise du nouvel Ordre socio-politique, sera porté par une caste dominatrice exerçant simultanément trois fonctions: celle de détenteur du savoir, celle du guerrier nouveau forgé au cours des batailles de matériel de la Grande Guerre, et celle du producteur d'une nouvelle esthétique, medium intégrateur des différences sociales.

Armin Steil, dans sa critique marxiste du "pré-fascisme" des Sorel, Jünger et Schmitt, dégage clairement l'essentiel d'une oeuvre aussi capitale que Le Travailleur, où la manie de fabriquer des systèmes est réfutée au bénéfice de grandes affirmations idéales, dégagées des trop lourdes contingences de la société bourgeoise et de la misère prolétarienne. La démarche jüngerienne, dans cette optique, apparaît comme un dégagement de la cangue du concret, comme un retrait hautain conduisant in fine  à une domination totale mais extérieure de cette concrétude. Mais le regard perçant, réclamé par la méthodologie physiognomique, n'est-il pas, au contraire, un instrument de pénétration de la concrétude, bien plus subtil que les simples prises en compte de la surface des phénomènes?

Référence: Armin STEIL, Die imaginäre Revolte. Untersuchungen zur faschistischen Ideologie und ihrer theoretischen Vorbereitung bei Georges Sorel, Carl Schmitt und Ernst Jünger, Verlag Arbeiterbewegung und Gesellschaftswissenschaft, Marburg, 1984, ISBN 3-921630-39-8.
 

[Synergies Européennes, Vouloir, Juillet, 1995]

mardi, 12 mai 2009

Pierre Drieu la Rochelle: Melancholy Rebel

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PIERRE DRIEU LA ROCHELLE -Melancholy Rebel

 

by Radbod - http://www.geocities.com/integral_tradition/

Pierre Drieu La Rochelle (1893-1945) was born into a middle class, politically conservative, Catholic family. Drieus childhood seems to have been particularly unpleasant, for he feared and hated his father, an unsuccessful lawyer, who constantly ridiculed him for any displays of weakness or cowardice. Drieu loved his mother dearly, but she often neglected him in the pursuit of her active social life. Consequently, Drieu spent much of his childhood immersed in books and daydreams about Napoleonic grandeur, military heroism, and colonial adventure, which he readily contrasted with his own familys decadent and pusillanimous bourgeois lifestyle. Drieu was very conscious of his familys social status, especially after his fathers shady financial dealings had resulted in a sharp decline in the familys economic status while Drieu was an adolescent. Drieu confessed that "family life offered me nothing but repugnant trials, I lived between a father and a mother who were torn apart by adultery, jealousy and financial troubles."

Drieu was able to separate himself from the negative influence of his early family life and began to assert himself in both the upper-bourgeois Catholic collége and the École des Sciences Politiques. He enjoyed the "group experience" of his school days, but was often wary of his inferior social position. While he was invited into the upper-class homes of his friends, he often assumed an air of intellectual superiority to compensate for his sense of class inferiority.


Drieu was heavily influenced by his trip to England at the age of fifteen, where he first cultivated a life-long love for all things English. He discovered there an energy and dynamism, evident in the British love for physical sports, which he readily contrasted against his view of France as a weak and decadent country. It was in England that Drieu first discovered the work of Nietzsche, which further reinforced his growing interest in the role of power and responsibility of the individual will and the man of action in society. Drieu reports that his intellectual awakening came at the rebellious age of seventeen when:


Drieu was fervently drawn to the call of the nationalistic writers of the older generation, particularly the novelist and political thinker, Maurice Barrès. He admired the Barrèsian emphasis on the individual will, the "Self," which stressed the union of the intellectual life with the life of action and political "engagement." Drieu was inspired by the Barrèsian cult of national energy that glorified "eternal France," but never truly subscribed to the Barrèsian idea of "integral nationalism" which celebrated the intrinsic and native-born qualities of all Frenchmen. He was also drawn to some of the ideas of Charles Maurras and Georges Sorel. For a time between 1911 and 1914, Drieu was a member of the Cercle Proudhon, an antidemocratic, nationalistic, monarchist organization of young right-wing students, many of whom attended the prestigious École des Sciences Politiques with Drieu. Founded in 1911, it sought to revitalize the nation according to the "best" in French tradition, including the ideas of Proudhon, Maurras, and Sorel. Like many of his generation, Drieu was drawn to a rightist stance in reaction to the liberalism, democracy, pacifism, positivism, and narrow rationalism of the older generation. Drieus membership in the Cercle Proudhon exposed him to elitist ideas concerning the virility of youth, the value of hierarchy, and the preservation of order and tradition. Looking back on the period immediately prior to the First World War in 1936, Drieu La Rochelle recalled: "One sees that certain elements of a fascist atmosphere came together in France around 1913, before they did elsewhere. There were young people from various classes of society who were filled with a love of heroism and violence, and who dreamed of fighting what they called the evil on two fronts: capitalism and parliamentary socialism, and who were similarly disposed toward both. There were, I think, people in Lyons who called themselves socialist-royalists or something of that nature. A marriage of nationalism and socialism was already being envisaged. Yes, in France, in the groups surrounding Action Française and Péguy, there was already a nebulous form of fascism." For Drieu, intellectual and political initiations seemed to have come less from proper bourgeois institutions of learning than from the wealth of literature and ideas fermenting in the prewar years. Both would draw on these ideas in the formation of their intellectual and political revolt against the bourgeois values of their youth. "
I am a fascist because I have measured the progress of decadence in Europe. I saw in fascism the only means of containing and reducing that decadence, and moreover, scarcely believing in the political resources of France, I saw no other recourse than that of the genius of Hitler and Hitlerism." "With a dull nonchalance, I turned back upon myself and plunged into melancholy. Timid and mistrustful, I did not dare to go out into the world. At last, as I swore to kill myself before I was twenty-five if I had not loved a beautiful woman, written a beautiful book and accomplished a beautiful action, I learned...that war had broken out."
Like so many, Drieu longed for the "realism" of direct energetic action and the glamour of war. Certainly the war helped to intensify many of Drieus beliefs concerning the decline of Western civilization, yet there is evidence that his fascist roots pre-dated 1914. Drieu was drafted in 1913 at the age of twenty and spent the next few months tied to the routines of barracks life, until war was declared in 1914. "What had I felt when war had been declared? Liberation from the barracks, the end of the old laws, the arrival of possibilities for me, for life, for new laws, young laws, bold and surprising." Free from the stifling bourgeois conventions of his family, Drieu rejoiced in the "savage liberty" that military service promised from "social convention, preparations for life, for a career, and for the distant future."
Drieus romantic notion of war soon changed on the battlefield of Charleroi, where Drieu mused, "war today means being prostrate, wallowing in the mud flattened. Before, war meant men standing upright. War today means every possible position of shame." While Drieu got to know the discomforts and horrors of war, he also discovered its ability to liberate the most primal, virile, and "noble" instincts in man. Achieving the rank of sergeant and serving as a platoon leader, Drieu received three battle wounds in the course of his distinguished service at Charleroi, the Marne, Artois, Verdun, and the Dardenelles. He would always remember fondly the exhilaration of a bayonet charge that he had led in 1914 at Charleroi, where "all of a sudden, I found myself, I found my life. This was now me, this strong man, this free man, this hero. So, this was my life, this sudden joyous surge that would never ever stop." Drieu emerged from the war acutely aware of his own courage and virility, and was determination to find a means of expression that would communcate the intensity of his wartime experiences.
Recovering in a hospital from battle wounds, Drieu discovered the work of the poet Paul Claudel and developed a taste for more "modern" styles of literature. He was done with flowery bourgeois literary styles, and adopted a more direct, abrupt approach: "I had some urgent things to cry about the war, about man in war, about the confrontation of life and death, and it was absolutely necessary that I find a means that measures up to the violence of my cry."
Drieus first collection of poems, Interrogation, was published in 1917 and was very favorably received. Drieu was soon being touted as one of Frances most versatile young writers. His early writings revealed a discreet but passionate "cult of France," and a sense of fraternity or love for his comrades in the trenches, the death of whom solidified and internalized his love for his country. Drieu had high expectations for the regeneration of France by the new generation of youth tempered by war and ready to seize political power. He was convinced that his generation had proven itself superior to the older one, for they had held at Verdun and the Marne, while their elders had lost at Sedan. He believed that "now we have the right to speak . . . strong from thousands and thousands of energetic acts . . . and our elders have only to keep quiet."
However, for most veterans, energetic acts had been exhausted on the battlefield. While enough veterans were elected to the Chamber in 1919 to dub it the "blue horizon chamber" after the color of the French army uniform, the victory of the rightist Bloc national marked a return to traditional democratic conservatism. Drieu had hoped that his generation would seize power, "[b]ut no. We allowed them to continue and keep their places. The veterans had let themselves be totally frustrated." Drieu was disgusted with the inability of his generation to act, and continued to look for a group dynamic enough to transform French society. Drieu became thoroughly disenchanted with the condition in which they found post-war France, and decided that politically, morally, and intellectually, French society was bankrupt. Drieu La Rochelle was also disappointed by the failure of his generation to take action, and was disgusted with a post-war France that was all too identical to pre-war France. In 1922 he wrote that while France had won the war: "It took half the world to contain a people that my people, alone, had tread on with ease for centuries. . . . On our soil, our flesh no longer held its place. . . . Behind us in each house in the place of those who were dead or of those who had not yet been born there was a foreigner. He was alone with our women. . . . We did not go to bed alone with Victory." Drieu was disgusted with Frances declining population growth, which was made shockingly apparent by the war. He also was ashamed at French weakness in the face of stronger powers and resented the influx of foreign labor following the war. Drieu was sickened by what he saw as the decadence of French society, for he believed that sterility, onanism, [and] homosexuality are spiritual maladies. Alcoholism, drugs are the first steps that lead to this failing of the imagination, to this decadence of the creative spirit, when men prefer to submit rather than to assert themselves. Thoroughly disgusted with the bankrupt society which sent them off to a war that had accomplished so little, Drieu declared war on the decadence that had created it. He proposed to initiate a thorough regeneration of France and Western society through force and violence, by first wiping the slate clean and starting anew.
Drieus search for a group that would transform society with "thousands of energetic acts" led him to the early Dada and later Surrealist group of André Breton. Having found a group of young men with whom he could relate, Drieu La Rochelle began to identify with the early Surrealists urge to destroy bourgeois society. Having befriended Louis Aragon in 1916, Drieu was introduced to the Dada group after the war. He was impressed not only by the groups literary boldness, but also by their youthful energy and independence, their antirationalism, their internationalist opposition to xenophobic nationalism, and hostility towards the older decadent generation. Drieu later wrote that his period with the Dadaists/ Surrealists was one of great pleasure, as he believed that this prodigious troop of young men and poets, I firmly believe, are the most alive group in the world today. . . . This encounter has been for me an enormous event."
The role that Drieu played in the group is sketchy and it is unclear to what extent he participated in Dada and later Surrealist group activities. While he lent his name to a number of Dada/Surrealist documents, Drieu did not always feel comfortable in the group, for he was often torn between both revolutionary and reactionary rebellion. When the Dadaists held a mock trial of Barrès in 1921, Drieu was reluctant to participate. The Dadaists abhorred Barrès as the symbol of stagnant cultural traditionalism and rabid nationalism, yet Drieu was unwilling to denounce his idol. When bluntly prodded by André Breton to confess whether or not he still found Barrès appealing, Drieu replied evasively that he retained a sense of respect for Barrès. For the time being however, he had found a much needed friendship and camaraderie with the Dada/Surrealist group--a sense of attachment and belonging that he had craved since his days in the trenches.
He also expressed the belief that the old order had to be eliminated before a regeneration could begin. Drieu was no stranger to the idea of violence, for even before his days with the Dadaists, he had been drawn to the philosophical language of violence preached by Nietzsche, Barrès, Péguy, Maurras, and Sorel, the renowned author of Réflexions sur la Violence (1908). Drieu marvelled that "all of them sang to me of violence. Without doubt I was born to reverberate to this call rather than to some other." Drieus notion of violence saw no exceptions in its need to destroy traditional society, and often directed itself towards the old order as it was defined through its art and culture: "We will destroy. . . . With a bitter joy, we will strike down this civilization. . . . What will remain of beauty? Of that which our ancestors brought into the world? . . . We will put that beauty to the torch in the houses of the rich where its presence for us is a malediction. Too bad if the flames do not stop, too bad if they consume everything." Drieu cherished his bonds of friendship with the Surrealists and admitted that "I found among you a nourishment more substantial than ever before." However, while Drieu was not a monarchist or a racist, he was also attracted in the early 1920s to the friendship offered by the Action Française on the extreme Right. Drieu was torn between two poles: "I have been solicited by the only two groups that exist in France in our time, where one can think and where one can act passionately." He rightly feared that fully embracing one would irrevocably alienate him from the other. However, Drieu realized that the two were incompatible, and regretted that "I can no longer hold them in balance."
In many ways the Surrealists made his choice for him when they embraced communism in 1925. Drieu was too much a man of his class and was repulsed by communism which he regarded as too materialistic, rational, egalitarian, and non-European. He believed that communism promoted intellectual and artistic mediocrity and stressed a naive collectivity that denied the value of the individual will. Interestingly, he established his political position in response to the leftist turn of the Surrealists: "I called myself a man of the Right, by a scruple that, not without irony, imitated your inconsiderate dash towards communism. . . . [T]he moment that I was not communist, I was against communism, and therefore a man of the Right."
However, Drieus notion of the Right evidently did not include the Action Française, for he found it and other right-wing groups too nationalistic, monarchist, and decadent. In addition, the threat from the extreme Left seemed reduced since the return to moderate policies after the fall of the Cartel des Gauches in 1926. Having left the Surrealists, Drieu announced in an open letter to them that he had taken a political stand "equal distance between M. Bainville [of the Action Française] and M. Francois Poncet [Radical Party politician]." He proclaimed himself a "national republican" with an eye towards the "elegant possibilities of a modern conservatism." In reality, Drieu was disenchanted with parties on both the Left and Right, and was more confused than firmly committed. Drieu began to formulate his own political position after 1925 which would take nearly a decade to materialize into his own brand of fascism.
So Drieu La Rochelle moved from an interest in Communism in 1917 to an admiration for fascism in the interwar period (publishing Socialisme fasciste in 1934). His 1922 novel, Mesure de la France, explored the disillusionment of French youth after the First World War. He sided with the Nazis after France's defeat (he was a friend of the German ambassador, Otto Abetz) and became editor of La Nouvelle Revue française.
Drieu wanted to rejuvenate and reinvigorate France, a task accomplished only by joining in federation with all of Europe to resist outside threats posed by expanding foreign empires. Drieu saw fascism as the only way to impose this new strength upon a weak and decadent France. He was drawn to the notion of Spartan sacrifice entailed in fascism. He believed that "fascism facilitates the open recognition of one fact: universal impoverishment, the necessary reduction of the universal standard of living," for he felt that there was "at the basis of the moral force in all fascism, a disposition for sacrifice, a willingness to fight." In the mid 1930s, Drieu observed this propensity for sacrifice and deprivation in totalitarian Germany and wondered "if the poverty that shows itself in Germany does not hide a moral richness," for he believed that the only real hope for Europe could be found "under the sign of stoicism."
Drieu became a proponent of violent rebellion based on vigorous action, change, and renewal. He was more concerned with a "spiritual" revolution than a material one--placing morals, aesthetics, and ideals above economics, finance, and production. Determined to pursue his own political ideology, Drieu founded in 1927 with his friend Emmanuel Berl, the journal Les Derniers Jours (The Last Days). Drieu hoped to save France from sinking into utter decadence by cutting across traditional party lines in creating an amalgamation of the best in capitalism and communism to achieve a political monopoly by the big capitalists of the upper bourgeoisie. Political control in the hands of big capitalist cartels would lead to greater European unity, perhaps a United States of Europe, which would abolish in turn the evils of parliamentary democracy, petit bourgeois capitalism, and chauvinistic nationalism.
Finally, in 1934, Drieu abandoned all reservations towards fascism following the nights of bloody rioting in Paris from 6-12 February which arose out of the Stavisky scandal. Drieu was exhilarated by the apparent solidarity between communists and fascist leagues fighting together in the streets against the corrupt liberal Third Republic: "And then all at once there was fascism. Everything was possible again. Oh, how my heart soared!" Drieu believed that he had finally found the means to combat decadence and to propel France towards spiritual regeneration.
Drieu ultimately conceived of revolution in "spiritual" terms and had "spiritual" conceptions of a future re-generated society that would give birth to new conceptions of man himself. Once Drieu accepted fascism in 1934, he promptly presented his political position as "fascist socialism." While his political position was fascist, it was nevertheless one of his own invention and was socially and economically quite conservative. Drieu generally believed in a social revolution of the petite bourgeoisie, for he saw the modern French proletariat as too decadent and oppressed to act heroically as a revolutionary force. He believed that Marx' faith in a revolutionary proletariat was based on an obsolete nineteenth-century class of artisans and peasants rather than an actual urban proletariat. Drieu also rejected the Marxist view of class struggle as the real inspiration for historical change. Refuting the very idea of a proletarian class, he also denied the existence of a bourgeois ruling class, for he saw a clear separation between political power (controlled by a political elite), and economic power (controlled by the bourgeoisie). Against the Marxist view, Drieu proposed a fascist revolution by an elite drawn from the petite bourgeoisie and peasantry. Drieu saw these groups, threatened with extinction by big capitalism above and marxism below, as receptive to revolutionary action leading to a return to a "heroic" vision of nineteenth-century artisan and peasant society. Political power would be more "elitist" than democratic, residing in the natural leaders of society (an elitism in keeping with the Maurrasian tradition), motivated by noblesse oblige rather than democratic electoral politics. The upper bourgeoisie and aristocracy, who controlled big business, would retain their economic hegemony, but political power would be relinquished to the fascist elite of the petite bourgeoisie. In his article "The Young Man and the Older Man," written in 1935, Drieu revealed through the young man that: "Fascism will be nothing other than a new Radicalism, . . . a new movement of the petite bourgeoisie, disciplined and organized in a party that inserts itself between Big Capitalism, the peasantry, and the proletariat, and that, through terror and authority, imposes on these different interest groups an old charter under a renovated form. But this new charter instead of being liberal, will this time be socialist."
Drieus concept of "socialism" was political rather than economic, meaning an authoritarianism imposed by the petite bourgeoisie rather than a socialism of humanitarian concerns, social reforms, or working class interests. This socialism was also in many ways nationalist, in that it did not serve the interests of foreign powers such as the Soviet Union, as Drieu believed international socialism and communism did.
While Drieus economic and social views were reactionary, his political and cultural conceptions were radical. Economic systems were less to blame for present conditions than the bodies and minds of Frenchmen that had grown soft and decadent. Drieu now saw fascism not only as the best way to combat decadence, but also as a way to reconcile and elevate both the physical body and the spiritual mind: "The deepest definition of Fascism is this: it is the political movement which leads most frankly, most radically towards the restoration of the body--health, dignity, fullness, heroism--towards the defense of man against the large town and the machine." Drieu saw the need for the emergence of a "new man" created from the ground up, a man able to combine political idealism and physical strength, both a militant and an athlete. Drieu hoped fascism would produce a man of a new "virile disposition" who would only reach his fullest potential by acquiring the courage "to have advanced his body to reach the point to which he has advanced his thought."
Drieu was like many fascist writers who expected the creation of a fascist state to bring about a new breed of man, the homo fascista, a "complete" man overcoming the fragmenting forces of mass society and industrialization. Standing triumphant in a Darwinian world where might always makes right, he was to be a man of energy, virility, force, and action--a hero, yet an individual who recognized the value and strength of the cohesive group, of order, discipline, and authority.
Drieus conception of the "new man" first found its concrete form in the person of his friend, André Malraux. In 1930, Drieu had published "Malraux, the New Man," praising Malraux for boldly addressing the most fundamental problems of the times. Malrauxs leftist leanings did not initially bother Drieu, because he saw in him the "raw man" who had found the perfect union of a life of vigorous action with a life of intense thought, which gave his writing the force and conviction of reality.
By the late 1930s, Drieu seemed to think Jacques Doriot of the Parti Populaire Française (PPF) was also an embodiment of this "new man." Doriot had been a communist mayor of Saint-Denis, but had been expelled from the party due to conflicts with Party discipline. Formed in 1936 in reaction to the leftist Popular Front government, the PPF was an amalgamation of rightist ideology and communist organizational structures which drew from both Right and Left. Drieu was inspired by Doriots physical vigor and athletic appearance, and rejoiced that Doriot "stands before France not as a fat-bellied intellectual of the last century watching his sick mother and puffing at his radical pipe, but as an athlete squeezing this debilitated body, breathing his own health into its mouth."
With the failure of the PPF or any other French fascist party to seize power, along with French appeasement of Hitler in 1938, Drieu realized that "in France, a revolution instituted by Frenchmen was impossible. A revolution could come only from outside." No longer believing in the political resources of France or England, and fearing the intrusion of foreign empires such as the United States and the Soviet Union, Drieu lamented that "I have seen no other recourse than in the genius of Hitler and Hitlerism. . . . Hitlerism appeared to me more than ever as the last rampart of any liberty in Europe." Drieu had visited Nazi Germany in 1934 and had attended the Nuremberg rallies. Visiting again in 1936, he was impressed by the fascists ability to galvanize and remold the state and inject it with a sense of rediscovered spiritual values. Drieu believed that the German fascists were moving towards a "spiritual" and aesthetic conception of society.
Drieu had now put his faith in "Hitlerian man", a new breed of German youth--tough, athletic, and Spartan. He believed that Germany had produced legions of this new prototype which had surpassed the physically and morally inferior Anglo-Saxon man. He conjured up images of a German "wolf-man" from ancient German lore, but this time clad in black leather and armed with American gangster machine guns. While Germany had succeeded in cultivating this "new man," Drieu also pictured various antecedents, such as the Christian crusader, the Spanish conquistador, the colonial adventurer of the nineteenth century, and the American gangster of the 1920s.
With the fall of France in 1940, Drieu had thrown in his lot with the Nazis as the greatest possibility for the political federation of Europe and the spiritual regeneration of Frenchmen. By the end of 1940 Drieu was the editor of the collaborationist Nouvelle Revue française in Paris and the close friend of Otto Abetz, the German ambassador to France. Drieu never saw his collaboration as treason, for he believed that France had to be radically transformed by the violent revolution of an outside force in order to survive. In 1945 he explained, "I have always been a nationalist and an internationalist at the same time." He argued that "ever since my first poems written in the trenches and the hospitals in 1915 and 1916, I have aligned myself as a French patriot and a European patriot," and that even "after the First World war, I continued to concern myself with France, her survival, herpride." Drieu claimed to be devoted to France, but as Grover points out, his passion had the characteristics of an illness, as his concern for France was often expressed in anxiety, spite, and even hatred.
Drieus hatred was at times directed against his own countrymen. As his collaboration deepened, he accepted and supported the anti-Semitic policies of the Nazis. He identified Jews with a decadence that he had previously blamed on all Frenchmen. Despite his acceptance of racial theories in the abstract, Drieu did use his influence to save several Jewish friends, including his first wife, from the hands of the Gestapo. In Fascist Intellectual Drieu La Rochelle, Robert Soucy points out that Drieus acceptance of racism contradicted basic conceptions of man and nationalism that he had embraced most of his life. The late adoption of anti-Semitism seems to have been a reflection of personal weakness in failing to resist adherence to the "intellectual vogue" of the Nazi ideology of the 1940s.
By 1942 the Allies had turned the tide of the war by landing in North Africa and Hitler had been put on the defensive. Drieu now expressed disgust with the Nazis for failing to bring about social revolution, European unity, or spiritual regeneration. While many collaborators were withdrawing their support from Hitler after 1942, Drieu increased his by rejoining the PPF, by now one of the most committed collaborationist organizations.
Yet, in the face of such trying times, Drieu lamented that he had not remained outside of political affairs. In his diary of 1944-45, Drieu revealed that "politics were only really a source of curiosity for me and the object of distant speculation. I have a horror of everyday affairs and men quickly disgust or bore me." Had he afforded himself the luxury, Drieu might have lived his life in utter detachment from political affairs. Yet, in addition to rejoining the PPF, Drieu also claimed in the last weeks of his life to support Stalin as the last hope for Europe. The eleventh-hour conversion to these positions was most likely an act of exasperation and a parting shot at his critics, as he once told a friend that he just wanted to give his many enemies a good reason for loathing and killing him. He also realized that upon the liberation of France, the Resistance, including many communists, would instigate a bloody purge of all collaborators. Drieu turned down chances to seek asylum in Spain, Argentina, England, or Switzerland and decided to stay in France to face defeat. In his Exorde (Final reckoning), he presented a hypothetical trial defense in which he explained his duty as an intellectual to take risks, to act outside of the crowd, as a Europeanist, not just a nationalist; yet in the end he insisted on perishing with his cause by demanding that his jurors: "Be true to the pride of the Resistance as I am true to the pride of the Collaborators. . . . [W]e played and I lost. I demand the death penalty." Rather than facing a real trial, Drieu played the part of his own executioner by taking fatal doses of poison on 15 March 1945. Drieus commitment to his cause and acceptance of death reveals that to Drieu, fascism as he knew it was much more than a political expedient, but a way of life based on heroism, risk, and ultimately, sacrifice.
In seeking to understand the political and intellectual evolution of Drieu La Rochelle, one must examine the forces that turned Drieu towards fascism, and when exactly he can be said to have become fascist. Drieu had been hesitant about fascism before 1934, as fascism was not as prevalent in France as it was in Germany and Italy. However, he became convinced of the dynamic and virile possibilities of fascism after the 1934 Paris riots. While Drieu may not have fully realized his fascistic tendencies until 1934, Frederic Grover argues that Drieu was fascist ever since the Great War. Grover notes that a number of Drieus wartime writings, such as Interrogation (1917) and La Comédie de Charleroi (1934), reflected an underlying fascism. Grover notes that these works emphasized such themes as an antibourgeois sentiment, hatred of the old generation, a general antirationalism, a preoccupation with death, a sense of social elitism, and a clear hierarchical sense of the leader/follower relationship. In La Comédie de Charleroi, Drieu depicted his fellow soldiers as "mediocre" and weak, and boasted of the courage and social position that allowed him to rise in the heat of battle to assert his natural leadership abilities. Having proven himself a leader, he believed that men "would be unable to refuse me anything I might ask from them. . . . [D]eep down . . . they were only waiting to be called." Indeed, Drieu later wrote in 1934 that "In my first civilian suit, holding the passionate ideas of Interrogation, the collection of my war poems, I was entirely fascist without being aware of it."

"On the eve of my baccalaureate exam . . . [a]bruptly I discovered reactionary thought. Thereafter it was Maurras, the Action française, [Jacques] Bainville, Georges Sorel, and by way of them I linked myself to a long chain of French reactionaries. . . . All had the effect of multiplying the formidable blow that I had received at Oxford when I was sixteen: Nietzsche."

 

Drieu la Rochelle ou la révolution conservatrice française

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Drieu la Rochelle (1893-1945)

... ou la révolution conservatrice française ...


Ex: http://www.europelibre.com/

En attendant d'en savoir (toujours) plus sur le prétendu « cerveau des Barbares », nous pourrions nous demander ce qu'il en a été au cours du XXe siècle de la « Barbarie sans cerveau ».

Certains voudraient croire que la chute du mur de Berlin en 1989 et l'effondrement du système soviétique en 1991 ont mis un terme au totalitarisme moderne. Hélas, la machine à broyer l'homme a continué ses ravages, comme elle avait survécu à 1945. Et il nous semble aujourd'hui, plus urgent que jamais d'explorer les courants d'idées susceptibles de sauver les individus et les communautés, dans leurs richesses et leurs libertés.

Si l'on admet que le propre de la barbarie sans cerveau c'est d'appliquer le vrai mot d'ordre du nihilisme européen « point de berger, un seul troupeau », il est grand temps de revisiter les courants d'idées qui ont cherché à y répondre, sans accepter les diktats totalitaires.

Ce courant secret a parcouru, en effet, tout au long du XXe siècle les esprits européens. Il porte un nom : c’est la révolution conservatrice. Il a pris des formes et des visages bien différents selon les pays, au point par exemple que son représentant allemand le mieux connu en France, Ernst Jünger aura été finalement moins visible, beaucoup plus discuté dans son propre pays.

La France, comme souvent, fait bande à part.

D’une certaine façon l’école d’Action Française préfigurait, dans sa démarche et dans nombre de ses choix, l’ensemble des courants "révolutionnaires conservateurs" européens. De la sorte, elle a pu s’en tenir à l’écart, évoquant sa propre antériorité, son originalité. Même s’agissant de Nietzsche, dont l’influence « vitaliste » est ici essentielle, un Charles Maurras pourra nier, dans des textes antérieurs à 1914, toute filiation.

Or, de tous les auteurs de la droite radicale française, Drieu la Rochelle fait sur ce point exception. Il se réclamera, ainsi, en 1934, de « Nietzsche contre Marx ». Et, tout au long de son œuvre, il exprime une façon originale de voir le monde, de repenser la modernité, de vouloir réconcilier le corps et l’esprit.

Il se trouve, hélas, que cette partie essentielle de sa pensée demeure la moins connue. On retient un aspect différent, et d'ailleurs mouvant, celui de ses prises de positions politiques, qui permettent de le connoter, de l'exclure, de l'étiquetter et de le stigmatiser. La dernière mauvaise action de ce point de vue fut de prétendre, il y a quelques années, publier un « Journal » qui eût, de toutes manières mérité de demeurer inédit.

Plusieurs essais, plusieurs recueils d’articles et de « Chroniques politiques » ont développé certes ses tentatives de réponse, au quotidien à la décadence. Mais en dehors de son premier livre d’idées « Mesure de la France » qui, dès 1922, en appelle à l’unité des Européens, tous ont été frappés de cet opprobre lié au fait que Drieu la Rochelle, dans l’opposition internationale entre (prétendus) « fascistes » et communistes, apparaît comme l’un des méchants du film. Son ex-ami Aragon eut plus de chance. Il y aurait évidemment beaucoup à dire sur les approximations ayant conduit Drieu à écrire en 1934 son « Socialisme fasciste », — étant rappelé par exemple qu'il refusa de se rallier en 1938 aux accords de Münich.

Ainsi, pour d'excellentes raisons, il a donc été jugé par les amis et les admirateurs de Drieu la Rochelle eux-mêmes, plus utile à sa mémoire, et plus urgent, jusqu'aux années récentes de faire valoir l’œuvre littéraire considérable du romancier plutôt que la pensée, supposée pestiférée, de l'essayiste. Deux magnifiques romans, « Une Femme à sa fenêtre » et « Le Feu follet » ont été portés à l'écran : le reste demeure encore occulté.

Il est également vrai que les différents essais de Drieu reflètent un parcours de recherche, entre gauche et droite, et au-delà du nationalisme classique.

On doit bien comprendre que, dans la France des années 1930, en dehors de quelques très rares esprits personne ne croit plus ni à l'économie libérale (saluons de ce point de vue la lucidité d'un Jacques Rueff) ni même à ses fondements individualistes.

Ainsi, les « personnalistes chrétiens », contrairement à l’étiquette trompeuse dont ils recouvrent leur pensée, tournent précisément le dos à la valeur sacrée de l’individu pour adhérer successivement à toutes les utopies totalisantes.

Quand Drieu publie donc en 1941 ses « Notes pour comprendre le siècle », il a l’immense mérite de poser le problème de manière doublement courageuse.

Il s’écarte d'abord d’un conformisme officieux dominant. Celui-ci tendait à ne rechercher à la situation dramatique et à l’effondrement de la France que des responsabilités superficielles et strictement institutionnelles.

D'autre part, il se sépare aussi de cet ersatz d’anticonformisme dit « des années 1930 ».

On soulignera aussi, au besoin, que le rapport des « Notes pour comprendre le siècle » au christianisme et au Moyen Âge, pas éloigné de celui d'un Berdiaeff par exemple, l'écarte tout à fait des interprétations abusives.

Le conformisme des uns comme le faux anticonformisme des autres conduisaient et aboutirent effectivement aux dévoiements technocratiques du Front Populaire en 1936, de Vichy en 1941 ou des diverses formules de l’immédiat après-guerre entre 1944 et 1947.

Bien avant les soixante-huitards, et à l’opposé des revanchards, Drieu la Rochelle pose dans ces « Notes pour comprendre le siècle », d’abord, la question culturelle du déclin.

Il ne prétend pas le faire d’une façon péremptoire et définitive : il adopte donc une écriture souple, incitant le lecteur à prolonger lui-même des pistes où chacun retrouve sa propre part d’« Interrogations », et de « Fonds de cantine ».

Oui, « Notes pour comprendre le siècle », ce petit livre discret de Drieu la Rochelle, témoigne d'une grandeur, d'une sérénité et même d'une étonnante fraîcheur. Il nous réconcilierait presque avec un genre aussi discutable que la critique littéraire, à laquelle il donnerait ici des lettres de noblesse, si tant est qu’il lui soit apparenté.

Réconcilier l’âme et le corps : n’est ce pas une voie royale pour découvrir et réhabiliter l’individu ?

JG Malliarakis
©L'Insolent

lundi, 11 mai 2009

Karl Kraus

Ellen KOSITZA - http://www.sezession.de

Karl Kraus

Karl Kraus

Eins meiner Steckenpferde, die Physiognomik, wird heute gemeinhin zu den „Pseudowissenschaften“ gezählt. Das kann ruhig stimmen, auch wenn die Liste von Vertretern des phsysiognomischen Zugriffs lang und prominent ist – von der Antike ganz abgesehen, bedienten sich später Albertus Magnus, Dürer, Galen und ungezählte andere solcher Herangehensweise an den Menschen.

 Man mag sie als obskure Geheimwissenschaft apostrophieren oder als „Schädelkunde“ diskreditieren – ich nenne sie die Lehre vom Antlitz.

Wer sich der Physiognomik in abwertender Absicht bedient, der mag sich in halb-rassistische Gefilde begeben – anders, wenn man sie als Menschenkenntnis und erweiterte Seh-Schule begreift. Wer mir eine Bilder-Liste von, sagen wir, Mitgliedern des deutschen Bundestags vorlegt, dem sag ich, wer Sozialdemokrat, wer liberal und wer grün ist: Die Trefferquote dürfte bei 90% liegen.

 Wenn ich den Prototyp jener Klientel zeichnen (kann ich nicht: also als Phantombild am Polizeirechner basteln) müßte, die auf unserem Rittergut den Veranstaltungen des Instituts für Staatspolitik beiwohnt, käme ungefähr die Erscheinung heraus, die hier links oben Karl Kraus zeigt.

 Ob Karl Kraus dabei gewesen wäre? Eine Anmaßung, logisch. Heute dürfen wir den 135. Geburtstag feiern – der 110. Geburtstag seines publizistischen Kindes, „Die Fackel“ liegt übrigens nur ein paar Tage zurück. Wikipedia schreibt:

Unter dem Motto Was wir umbringen, das er dem reißerischen Motto Was wir bringen der Zeitungen entgegenhielt, sagte er der Welt, vor allem der der Schriftsteller und Journalisten, den Kampf gegen die Phrase an und entwickelte sich zum wohl bedeutendsten Vorkämpfer gegen die Verwahrlosung der deutschen Sprache.

Dieser Karl Kraus, wortgewaltiger Satiriker, Misanthrop, zum Katholizismus konvertierter Jude, wechselweise Anhänger von Sozialdemokratie, dann Franz Ferdinand, zuletzt von Engelbert Dollfuß, ist einer unserer ganz Großen. Viel Feind – viel Ehr, hier trifft’s den Nagel auf den Kopf. Geblieben ist von dem mit Prozessen überzogenen Publizisten und Dramaturgen (Die letzten Tage der Menschheit), wie so oft, ein gewaltiger Nachruhm.

Presse und Phrase galten ihm als ein Begriff, auf ihn dürfte das Schmähwort „Journaille“ zurückgehen. Ob’s heute einen Spruch-Kalender ohne Karl-Kraus-Aphorismen gibt?
Nehmen wir den:

Ein Historiker ist nicht immer ein rückwärts gekehrter Prophet, aber der Journalist immer einer, der nachher alles vorher gewußt hat.

Oder den:

Die deutsche Sprache ist die tiefste, die deutsche Rede die seichteste.

Und, wunderschön aus pazifistischen Munde:

Sollte man, bangend in der Schlachtordnung des bürgerlichen Lebens, nicht die Gelegenheit ergreifen und in den Krieg desertieren?

mercredi, 06 mai 2009

Bulletin célinien n°308

Bulletin Célinien n° 308

Sortie du Bulletin célinien n°308 consacré à Jacques d'Arribehaude.

Au sommaire :
- Bloc Notes de Marc Laudelout
- Exit Jacques d'Arribehaude ou la mort d'un gentilhomme par C. Gérard
- Bibliographie de J.d'Arribehaude
- Jacques d'Arribehaude, ce cher Picaro! par C. Dedet
- Une telle liberté par P.-V. Guitard
- King Lear, route des Gardes, extrait du journal de J.d'Arribehaude
- Propos recueillis à Meudon
- Article de J.d'Arribehaude (octobre 1987) consacré à la nouvelle édition de Essai de situation des pamphlets de LFC d'Eric Séebold.

Le Bulletin célinien
BP 70
B1000 Bruxelles 22


celinebc@skynet.be
http://louisferdinandceline.free.fr

mardi, 05 mai 2009

Littérature de la jeunesse

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1988

 

Littérature de la jeunesse

Ulrich NASSEN, Jugend, Buch und Konjunktur, 1933-1945. Studien zum Ideologiepotential des ge­nuin nationalsozialistischen und des konjonkturellen "Jugendschriftums",  Wilhelm Fink Verlag, Mün­chen, 1987, 135 S., DM 38.

 

Etude très intéressante sur la littérature de jeunesse pendant le IIIème Reich en Allemagne. Nassen nous y apprend que le na­tio­nal-socialisme se présentait à la jeunesse comme un mouve­ment sous le patronage de la figure de Siegfried, figure qui dit «oui» au combat éternel (Kampfbejahung)  et symbolise le ra­jeu­nissement, l'affirmation de la Vie et de la totalité vitale. Le mou­vement politique, qui doit entraîner la jeunesse dans son sil­lage, se place résolument sous le signe de l'affirmation, du «oui» créateur et s'instaure comme le barrage le plus efficace con­tre les négateurs. L'image mythologique de Siegfried, puisée dans la passé lointain de l'Allemagne, est couplée sans problè­me, par exemple, à l'objet moderne et technique qu'est la moto, qui permet de sentir physiquement la vitesse et le dynamisme. Le national-socialisme reprend ainsi la vieille protestation li­ber­taire du mouvement de jeunesse (Wandervogel),  expression su­blime du conflit entre les générations. Mais son apport spé­ci­fique est plus politique, plus directement lié à l'aventure et à l'installation au pouvoir d'un parti révolutionnaire: la littérature destinée à la jeunesse sera truffée de thèmes comme celui du «Füh­rer», «Sauveur» et nouvelle «image du père», celui du «mi­litant martyr», celui de la «jeunesse, phalange du NS». Seront ainsi exaltés l'esprit de camaraderie, la camp comme forme de vie et aventure planifiée, le «service» comme «sens» de l'exis­ten­ce et comme mode d'harmonisation entre les diverses strates so­ciales. Des valeurs et des mœurs nouvelles sont injectées dans le corps social allemand par l'intermédiaire de la mobili­sa­tion de la jeunesse dans le parti: l'hygiène corporelle, la diété­ti­que, l'eugénisme à connotation raciale, le sport comme pro­ces­sus de maximisation des énergies du corps et donc comme mode d'accroissement de la productivité industrielle et agricole.

 

Nassen, fidèle à quelques critiques énoncées par l'Ecole de Franc­fort, perçoit une certaine esthétique de la destruction dans l'exaltation de la guerre, conçue comme «travail», comme «aven­ture de la technique», comme «initiation». Dans ce cha­pitre, Nassen critique le calcul «fasciste» qui consiste à parier sur le sang versé et refuse d'économiser celui-ci, se mettant en fait en contradiction avec son culte du sang précieux, appelé à re­vigorer l'Europe. Un sixième chapitre de l'ouvrage aborde une question cruciale du national-socialisme, encore trop peu explo­rée en dehors de l'Allemagne: la question de l'histoire et de la pré­histoire. Ces sciences devaient être mobilisées pour donner une image plus exaltante du plus lointain passé européen et pour procurer aux contemporains, secoués par la Grande Guerre, les crises économiques, la déchéance sociale du prolétariat, une ima­ge idéaltypique de ce à quoi doit tendre la mobilisation NS des foules, c'est-à-dire une humanité germanique épurée de tous apports non européens et comparable à l'idéal que Tacite, dans sa Germania,  avait suggéré aux Romains décadants. Pour véhi­cu­ler cet idéal, le régime a fait appel à une imagerie (gravures, chromos, etc.) que Nassen qualifie de «kitsch» NS.

Le livre de Nassen est une petite mine d'informations qu'il se­rait sot de négliger. Qui plus est, elle ouvre des perspectives nou­velles au chercheur et offre une bonne et utile classification des thématiques NS, tout en ayant constamment recours aux tex­tes de l'époque (Robert Steuckers°.

samedi, 02 mai 2009

Portret C. S. Lewis (1898-1963)

Portret C.S. Lewis (1898-1963)

C.S. LEWIS

door Bart Jan Spruyt - http://bitterlemon.eu/

 

"Do not be scared by the word authority. Believing things on authority only means believing them because you have been told by someone you think trustworthy. Ninety-nine per cent of the things you believe are believed on authority. I believe there is such a place as New York. I have not seen it myself. I could not prove by abstract reasoning that there must be a place. I believe it because reliable people have told me so. The ordinary man believes in the Solar System, atoms, evolution, and the circulation of the blood on authoritybecause the scientists say so. (...) A man who jibbed at authority in other things as some people do in religion would have to be content to know nothing all his life."

Clive Staples Lewis werd op 29 november 1898 in Belfast geboren uit ouders die nominaal lid waren van de Anglicaanse Kerk. Zijn vader, waarmee Lewis een groot deel van zijn leven een problematische verhouding had, was advocaat en stamde uit een sociaal geëmancipeerd Engels arbeidersmilieu. Zijn moeder was van vaders kant afkomstig uit een Schots-Iers predikantengezin en van moeders kant stamde zij uit een oud Anglo-Normandisch geslacht dat zich onder Hendrik II in Ierland gevestigd had. Op dat laatste was Lewis als jongeman erg trots.

Samen met zijn drie jaar oudere broer Warren beleefde hij een gelukkige kindertijd. Centraal in hun bestaan stond een fantasiewereld, uitgedrukt in zelf geschreven sprookjes, tekeningen en sILLEtjes, al snel mede gevoed uit de omvangrijke ouderlijke boekerij waar de kinderen onbeperkte toegang toe hadden. Zo vermeldde Lewis als tienjarige in zijn dagboek: “Paradise Lost gelezen, erover nagedacht.” Daar is hij nog vele jaren mee doorgegaan, getuige het in 1942 verschenen A Preface to Paradise Lost. Aan deze gelukkige periode kwam abrupt een einde door de vroege dood van zijn moeder. Vervolgens bracht hij enkele jaren door op twee Engelse kostscholen die hem tot laat in zijn leven depressief makende herinneringen opleverden. In zijn autobiografie Surprised by Joy (1955) heeft hij maar liefst zeven hoofdstukken nodig om dit liefdeloze en intellectueel afstompende milieu te beschrijven.

In 1916 won Lewis een beurs voor University College in Oxford, maar moest al spoedig zijn studie afbreken om als negentienjarige officier zijn land te dienen in de Noord-Franse loopgraven. In april 1918 kwam er een eind aan zijn oorlogservaringen door een ernstige granaatwond die hij opliep tijdens de Slag bij Arras. Na de oorlog hervatte hij zijn studie in Oxford. Hij studeerde er cum laude af in de klassieke talen, in de klassieke filosofie en in de Engelse taal- en letterkunde. Vanaf 1925 was hij als fellow in de Engelse taal- en leterkunde verbonden aan Magdalen College. Nadat hij gedurende zijn jeugd langere tijd van het christendom vervreemd was geraakt, begon rond die tijd ook een proces van religieuze heroriëntatie. Onder andere onder invloed van de dood van zijn vader en als gevolg van gesprekken met gelovige collega's als J.R.R. Tolkien en Hugo Dyson bekeerde hij zich tot het christendom. Zoals hij later in Surprised by Joy zou beschrijven vond de eigenlijke bekering plaats op 22 september 1931 tijdens een tochtje in de zijspan van de motorfiets van zijn broer. Als eerste literaire neerslag van zijn bekering publiceerde hij The Pilgrim's Regress (1932), een geestrijke allegorie naar het model van John Bunyan's boek.

Een nationaal bekend figuur zou Lewis pas tijdens de Tweede Wereldoorlog worden. Die bekendheid kreeg hij enerzijds door een aantal druk beluisterde lezingen over filosofische en religieuze onderwerpen voor de BBC-microfoon. Een aantal van die lezingen werden later gebundeld onder de titel Mere Christianity (1952), nog steeds een van zijn meest gelezen boeken. Daarnaast verscheen in 1942 het eerste publiekssucces, The Screwtape Letters, dat in het eerste jaar negen drukken kende en een jaar later eenzelfde succes kende in de Verenigde Staten.

Tot 1954 werkte hij onafgebroken in Oxford. In dat jaar werd hij in Cambridge benoemd op een speciaal voor hem ingestelde leerstoel voor letterkunde. In 1956 trouwde hij met de Amerikaanse Joy Davidham Gresham, een gescheiden voormalige communiste die zich onder invloed van Lewis’ boeken tot het christendom bekeerd had. Vier jaar later al stierf zij. In een van zijn laatste boeken, A Grief Observed (1961), dat onder het pseudoniem N.W. Clerk verscheen, probeerde hij verslag te doen van dit verschrikkelijke verlies. C.S. Lewis stierf op 22 november 1963, de dag dat John F. Kennedy in Dallas werd neergeschoten. Hij ligt begraven op het kerkhof van de Holy Trinity Church in Headington, Oxford.

Volgens zijn levenslange vriend Owen Barfield zijn er in zekere zin drie “C.S. Lewissen” geweest. Tijdens zijn leven heeft Lewis aan drie verschillende roepingen succesvol beantwoord. Op de eerste plaats was daar de gerespecteerde Oxford-docent, literatuurgeleerde en literair criticus. Daarnaast de schrijver van romans en kinderboeken. En ten slotte was er de populaire en invloedrijke apologeet, filosoof en volkstheoloog die veel lezers (opnieuw) op een verfrissende wijze het christendom binnen leidde. Daarbij geldt echter ook dat in veel van zijn werk filosofie, theologie, literatuur en fictie niet scherp te scheiden zijn.

In 1936 publiceerde Lewis zijn baanbrekende The Allegory of Love. Lewis beschrijft in dit boek hoe in de vroege middeleeuwen de klassieke goden in allegorische vorm weer het christelijk denken binnenkomen. Streden de goden vroeger tegen elkaar, nu worden het personificaties van krachten in de mens zelf. In de loop van de eeuwen begint de kracht van de allegorie echter te verzwakken. Dit wordt veroorzaakt door het verzwakkende besef dat de stoffelijke wereld primair een afspiegeling is van de bovennatuur. Steeds meer gaan elementen als satire, alledaagsheid en liefdesperikelen overheersen en daarmee verdwijnt de kracht van de allegorie in de westerse literatuur. Een ander levenswerk op het gebied van de literatuurgeschiedenis was zijn English Literature in the Sixteenth Century (1954) dat als deel III verscheen van The Oxford History of English Literature.

In zijn zeven kinderboeken (The Chronicles of Narmia) en drie science fiction romans verwerkte Lewis ook tal van theologische en filosofische ideeën. Zo vindt men in de roman That Hideous Strength talloze ideeën in literaire vorm die men in The Abolition of Man (1943) in filosofische vorm uitgewerkt vindt. Zijn beroemdste literaire werk is ongetwijfeld het al eerder genoemde The Screwtape Letters. In dit boek schrijft een oudere duivel eenendertig brieven aan een jongere collega met talloze adviezen hoe een jonge gelovige het best verleid kan worden. Het boek weerspreekt het binnen de hedendaagse Nederlandse intelligentsia wijd verbreide vooroordeel dat christendom en humor elkaar niet verdragen.

C.S. Lewis vormde de belichaming van een natuurlijk soort conservatisme. In zijn levensstijl (zo weigerde hij pubs te betreden waar de radio aan stond), in zijn literaire opvattingen (pas heel laat kwam hij tot waardering voor het werk van T.S. Eliot) en in zijn politieke opvattingen was Lewis een conservatief pur sang. Voor wat betreft de politiek moet daarbij wel vermeld worden dat Lewis een groot scepticus was ten aanzien van politici en partijpolitiek. Winston Churchill bewonderde hij overigens zeer, maar dat verhinderde hem in 1951 niet de minister-president te laten weten dat hij afzag van een hem aangeboden titel. Lewis was bang dat zijn critici zo'n adellijke titel als bewijs zouden opvatten dat zijn religieus werk slechts verholen anti-progressieve propaganda was. Zijn onverschilligheid inzake de dagelijkse politiek weerhield hem er niet van over een breed scala aan politieke onderwerpen te schrijven: misdaad, censuur, pacifisme, doodstraf, dienstplicht, vivisectie enzovoorts. Ook over de verzorgingsstaat had hij uitgesproken opvattingen. In een artikel in The Observer schreef hij in 1958:

"The modern State exists not to protect our rights, but to do us good or make us good — anyway, to do something to us or to make us something. Hence the new name ‘leaders’ for those who were once ‘rulers’. We are less their subjects than their wards, pupils, or domestic animals. There is nothing left of which we can say to them, ‘mind your own business.’ Our whole lives are their business."

De staat kan ervoor zorgen dat mensen zich gedragen, maar uiteindelijk kan hij de mens niet goed maken. Deugd veronderstelt vrije keuze. Lewis was er vooral bang voor dat de verzorgingsstaat zich verder zou ontwikkelen tot een technocratie van het soort dat hij al in romanvorm had beschreven in That Hideous Strength.

Veel conservatieven zien in The Abolition of Man zijn belangrijkste filosofische werk. In dit werk geeft Lewis een zeer originele verdediging van de natuurrechtsleer. De meeste beschavingen, religies en denksystemen gingen in het verleden van dezelfde morele codex uit. Wanneer men die codex analyseert komt men vanzelf uit bij de bekende deugden als Rechtvaardigheid, Eerlijkheid, Bramhartigheid en Voorzichtigheid. Hij laat zien wat de consequenties zijn wanneer de moderne cultuur het idee van een objectieve morele orde verwerpt.

Lewis is in Nederland een bekend auteur. Een aantal belangrijke boeken van hem is vertaald en leverbaar.

Literatuur

Er is zoveel over Lewis geschreven dat het hier slechts mogelijk is een bescheiden selectie te geven.

Een mooie biografie werd geschreven door Roger Lancelyn Green en Walter Hooper: C.S. Lewis: A Biography (A Harvest Book).

De biografie Jack: A Life of C.S. Lewis van George Sayer werd ook in het Nederlands vertaald (Crossway Books).

In de bundel Ontijdige bespiegelingen van Robert Lemm is een korte lezenswaardige inleiding in het werk van Lewis opgenomen (Kok Agora).

Een interessante visie op het conservatieve mens- en geschiedbeeld van Lewis vindt men in het door Peter Kreeft geschreven C.S. Lewis for the Third Millennium. Six essays on the Abolition of Man (Ignatius Press).

Een kort essay over de politieke opvatingen van Lewis werd geschreven door John G. West, Jr.: Public Life in the Shadowlands. What C.S. Lewis Teach Us About Politics (Acton Institute), met een geannoteerde bibliografie van de boeken en essays van Lewis die handelen over politieke thema's.

vendredi, 01 mai 2009

Rencontre avec François Gibault

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Rencontre avec François Gibault

 

Avec son affabilité coutumière, François Gibault nous reçoit chez lui, au premier étage de ce bel hôtel particulier jouxtant le cinéma « La Pagode ». Étonnant personnage que ce libertaire de droite, catholique, colonel de réserve, amateur éclairé de peinture moderne et d’art lyrique.  Pénaliste réputé, il cumule deux passions : Céline (le biographe est devenu président de la Société des Études céliniennes) et Dubuffet (il en administre la Fondation). Il vient de terminer son troisième roman, Un nuage après l’autre, et prépare l’édition de la correspondance de Céline au pasteur Löchen.

 

Comment se porte la Société des Études céliniennes ?

 

Elle se porte bien. Comme vous le savez, l’essentiel de nos activités, ce sont les colloques qui se tiennent tous les deux ans et qui sont une grosse machine à organiser intellectuellement et matériellement. Ensuite, l’année suivante, c’est la publication des Actes. Le colloque de l’année dernière a été un beau succès, une réunion extrêmement fructueuse pour tout le monde. Nous étions, comme d’habitude, une quarantaine venus, sinon de tous les pays, du moins de tous les continents. Cela avait été remarquablement organisé par l’Institut français de Budapest, et les débats furent passionnants. Il faut dire que le thème était, je crois, très bien choisi : « Céline et la médecine ». Thème double puisque c’était à la fois « Céline médecin » et « La médecine dans l’œuvre ». Les actes viennent d’être publiés ¹. Maintenant, nous travaillons sur le prochain colloque qui aura lieu en France, dans un an, puisque l’usage est l’alternance. Ce sera sans doute Paris, et nous aurions voulu que ce soit au Val de Grâce, mais cette administration vient de refuser pour les raisons que vous imaginez. Le thème en sera « Céline et la guerre » comme cela a été décidé lors de l’assemblée de juillet dernier.

 

En tant que représentant de l’ayant droit, pouvez-vous susciter d’autres manifestations, telle une grande exposition Céline à la Bibliothèque nationale ?

 

C’est envisageable, mais il y a des réticences : les pouvoirs publics ne sont pas très chauds pour organiser quelque chose sur Céline. Ou alors il faudrait un grand événement. Il aurait fallu faire cela au moment du centenaire de la naissance de l’écrivain, mais vous savez que cet anniversaire n’a même pas été mentionné dans la brochure des commémorations éditée chaque année par le Ministère des Affaires culturelles.

 

Beaucoup de céliniens regrettent que les trois entretiens filmés de Céline ne soient pas commercialisés sous la forme de DVD.

 

Ça, c’est tout à fait envisageable, d’autant que Frémeaux vient de publier, sous la forme de disques compact, une lecture intégrale du Voyage au bout de la nuit ². C’est une idée excellente et cela pourrait être une action possible de la société. Par ailleurs, il existe un projet cinématographique d’adaptation du Voyage. Cette fois-ci, ça a l’air sérieux, le contrat est signé mais je n’ai pas encore pu rencontrer le réalisateur François Dupeyron qui est en train de travailler sur le scénario. Vu l’importance de l’œuvre, je crois qu’il envisage de faire un film en deux épisodes. Étant donné son intérêt pour la Première guerre mondiale, je crois qu’il va s’attacher surtout à la première partie du livre, nous verrons bien...  Quoiqu’il en soit, je dois le rencontrer pour veiller au respect du droit moral (vous savez qu’il y a plusieurs manières d’adapter une œuvre), et pour veiller aussi au choix des acteurs... Mais je le crois soucieux d’être très fidèle à l’esprit de l’œuvre, et je ne me fais guère de souci à ce sujet.

 

Comment se porte l’œuvre de Céline en librairie ?

 

Elle se porte admirablement. Le meilleur indicateur, c’est précisément le nombre d’exemplaires de Voyage par an vendus en poche, car vous savez qu’on ne vend plus qu’en poche pratiquement — et en Pléiade, mais ça c’est un autre public. Le grand public, lui, n’achète plus qu’en poche. On ne vend presque plus d’exemplaires en collection « Blanche ». On vend plus de 40.000 exemplaires par an, ce qui est énorme. On en a vendu un peu plus l’année où le manuscrit de Voyage s’est vendu aux enchères publiques : là, il y a eu une espèce de rebond. Il s’en est vendu plus de 50.000 exemplaires. Je pense que Voyage est une des œuvres classiques qui se vend le mieux. Plus de 70 ans après sa parution, il n’a pas pris une ride et c’est encore un best-seller. À titre de comparaison, Mort à crédit se vend à 10.000 exemplaires environ chaque année.

 

Quid d’une édition scientifique des pamphlets ?

 

C’est le serpent de mer, ça revient toujours, on en parle tout le temps, mais vous savez que Madame Destouches est opposée à cette réédition, sinon ça serait fait depuis longtemps. En tout cas, il n’y a pas de projet précis. Compte tenu du climat actuel, je crois que cela serait très mal vu et même considéré comme une sorte de provocation. Céline, de son vivant, ne voulait pas cette réédition, et Madame Destouches ne fait que respecter les intentions de son mari.

 

Avec tout de même une exception : Mea culpa.

 

Mea culpa, c’est autre chose. C’est un texte très court, très élaboré et aussi anticommuniste. Longtemps, elle s’est opposée à cette réédition. Je l’ai beaucoup incitée à accepter une nouvelle publication.

Par ailleurs, on pourrait envisager une réédition partielle des pamphlets. Je n’aime pas beaucoup cela car c’est une façon de trahir l’auteur. Cela étant, j’avais comme idée de republier la fin de Bagatelles (la partie qui concerne l’URSS) avec Mea culpa. On pouvait faire un très beau livre.

De toute façon, le livre n’est pas interdit puisqu’on peut le trouver notamment sur les quais, souvent en édition pirate. Ce livre est en circulation : les éditions originales ne sont pas interdites de vente.

 

N’y a-t-il pas  un  manque  de cohérence de la part de l’ayant droit qui  interdit  certaines  choses et en autorise d’autres (les lettres aux journaux de l’Occupation, la préface de L’École des cadavres, etc.) ?

 

J’ai toujours poussé Madame Destouches à accepter un maximum de choses, y compris les adaptations, bonnes ou mauvaises, car c’est intéressant de faire vivre une œuvre. On a laissé passer un certain nombre de choses y compris les abus de citation. Madame Céline laisse faire. On ferme un peu les yeux. Les pamphlets, cela fait partie de l’œuvre. Ce sont des textes extrêmement violents, mais ils sont intéressants du point de vue de la langue et du style. Il y a de très belles pages et puis aussi, il faut le dire, des pages beaucoup plus faibles. Mais il y a des envolées extraordinaires, ce n’est pas contestable.

 

Quand paraîtra la correspondance de Céline au Pasteur Löchen ?

 

Tout est prêt depuis longtemps, sauf la préface. Entre-temps, le pasteur Löchen est décédé, comme vous le savez ³. J’étais devenu très proche de lui, et sa disparition m’a fait beaucoup de peine. Ce fut affreux, d’autant qu’il est mort avant sa femme qui était grabataire. C’est lui qui s’en occupait. Ils n’avaient qu’un seul désir : c’était de mourir ensemble. Il est mort un mois avant sa femme. À sa demande, je suis allé le voir à Metz, une semaine exactement avant sa mort. C’est là qu’il m’a demandé de prendre la parole lors de son enterrement pour dire quel avait été son rôle dans la défense de Céline, ce que j’ai fait, bien évidemment.

Chaque fois qu’il y a des vacances judiciaires, je me dis que je vais les utiliser à rédiger cette préface. Je dois aussi classer les lettres par ordre chronologique. Au début, les lettres sont datées ou faciles à dater car elles se rapportent à des événements. Ensuite les lettres sont très difficiles à dater, car elles ne comportent aucun repère permettant de les situer dans le temps.

Il s’agit d’une correspondance très intéressante, car on y voit le changement de ton. Au début, les lettres sont respectueuses (« vous homme de Dieu, moi mécréant »), puis elles deviennent plus débridées et plus cordiales. Il est amusant de voir l’évolution de cette correspondance.

 

Y a-t-il d’autres projets ?

 

J’ai un projet personnel : j’aimerais faire quelque chose sur Céline et Dubuffet. Comme vous le savez, j’ai l’honneur de défendre deux œuvres : Céline en littérature, Dubuffet en peinture, puisque je suis Président de la Fondation Dubuffet.  Dubuffet était un homme aux talents multiples : peintre, lithographe, sculpteur, graveur, mais c’était aussi un grand écrivain, ce qu’on oublie souvent. Je ne désespère pas un jour de le faire entrer dans la Bibliothèque de la Pléiade. C’est une autre affaire. Il y a de vraies correspondances entre les deux hommes. Il y a des fils secrets entre ces deux êtres : ils étaient libres et ont travaillé seuls, ne subissant aucune influence et n’ayant pas de suiveurs. Ils sont aussi créateurs d’un style, ce qui est rare, se moquant de l’opinion qu’on avait d’eux. Ils ont aussi chacun commencé très tard avec une première vie professionnelle : l’un comme médecin, l’autre comme marchand de vins. Dubuffet a commencé son œuvre à plus de 40 ans et Céline a publié Voyage alors qu’il avait à peu près cet âge. Leurs parcours sont assez comparables. J’avais pensé intituler ma biographie « Céline, cavalier seul ». Cette appellation peut également convenir à Dubuffet. En fait, ce sont deux anarchistes très partisans de l’ordre. La seule différence, c’est que si Dubuffet avait une grande admiration pour Céline, l’inverse n’était pas vrai. Que ce soit en peinture, en littérature ou en musique, Céline avait, comme vous le savez, des goûts classiques. Cela étant, on trouve dans leur œuvre des propos comparables quant à l’aspect révolutionnaire de l’art. Dans Asphyxiante culture 4, Dubuffet affirme que l’artiste doit être un révolutionnaire, qu’il est là pour faire avancer les choses, pour chambouler ce qui existe. On trouve une idée comparable dans Voyage au bout de la nuit. Ils ont aussi en commun un côté viscéralement français et, bien entendu, le génie car Dubuffet, lui aussi, était un génie. Un jour, je ferai une communication sur Céline-Dubuffet lors d’un colloque.

 

Votre confrère Jacques Vergès a écrit : « Admirer  Céline  à une époque où règne  la  pensée unique et le  terrorisme intellectuel est  presqu’un  délit ».  Le  fait de vous  être  intéressé de  près à Céline vous a-t-il valu des inimitiés, notamment dans le monde judiciaire ?

 

Absolument pas. Cela tient au fait que je crois avoir écrit une biographie objective de Céline, ne dissimulant aucun des documents que j’ai découverts lors de mes recherches. Ainsi, l’Ordre des médecins des Yvelines m’a donné connaissance du dossier de Louis Destouches. J’y ai trouvé une lettre qui n’est pas à la gloire de Céline et que j’ai reproduite dans le deuxième tome de ma biographie, alors que personne ne la connaissait et que j’aurais pu la passer sous silence 5. On m’a souvent dit qu’il s’agissait d’une biographie à l’anglaise ou à l’américaine. Les gens qui auraient pu me reprocher de m’occuper de Céline me rendent justice. J’ai essayé de montrer Céline tel que je le voyais et, je le pense, tel qu’il était.

 

N’avez-vous pas l’impression que la condamnation morale de Céline est paradoxalement  plus  forte aujourd’hui que dans les années d’après-guerre ?

 

C’est un peu normal : pendant les années d’après-guerre, on ne n’est pas beaucoup occupé de cet aspect de la Seconde guerre mondiale. C’est ensuite que les historiens s’en sont occupés.

Nul doute que sa responsabilité est engagée : il faut reconnaître que certaines phrases de Bagatelles pour un massacre sont insoutenables. Cela étant, quand on fait un livre en ne citant que ces phrases là et en gommant tout le reste, comme l’a fait M. Rossel-Kirschen 6, on arrive à faire de Céline une espèce de monstre. Sur le plan intellectuel, la méthode est inacceptable et condamnable.

 

Dans la préface des Lettres de prison, vous écrivez : « Céline, mieux que  tout  autre, savait  qu’il  n’avait pas voulu l’holocauste  et  qu’il n’en avait pas même été l’involontaire instrument. Il savait aussi qu’il n’avait en rien collaboré ». D’autres biographes de Céline estiment, au contraire, qu’il a collaboré. Tout dépend évidemment de ce que l’on entend par « collaboration »...

 

Évidemment. Céline a « collaboré » comme d’autres écrivains français qui ont fini à l’Académie. Ceci dit, son dossier de collaboration n’est guère consistant. Outre certaines lettres aux journaux (surtout celles écrites en 1942 et 1943), ce qu’on peut surtout lui reprocher c’est d’avoir permis la republication des pamphlets sous l’Occupation. Et on ne peut pas uniquement imputer cela à son éditeur, Robert Denoël. On connaît la lettre de Céline à Karl Epting réclamant du papier pour permettre la réédition de ces textes. Ceci, à une époque où la rafle du Vel’ d’Hiv avait eu lieu. Les déportations étaient connues, même si le sort réel des déportés, lui, ne l’était pas.

 

Ainsi,  vous pouvez donc comprendre que vous choquez certaines personnes lorsque vous écrivez : « Céline apparaît fragile, sensible comme un enfant, souffrant de toutes les misères, tragique et désespéré. »

 

Oui, j’en ai pris, pardonnez-moi l’expression, plein la gueule lorsque, sur un plateau de télévision, j’ai dit que Céline était un humaniste 7. Or, Voyage au bout de la nuit est bien le livre d’un humaniste, c’est évident. Céline était un être très contradictoire :  avare et généreux, anarchiste et homme d’ordre, pour ne citer que ces deux aspects.

 

À cet égard, vous vous êtes d’ailleurs trouvé des points communs avec lui.

 

En effet, je suis bourgeois et anarchiste. Et surtout un émotif rentré, si je peux m’exprimer ainsi. Lorsque j’étais enfant, j’étais d’une extrême sensibilité. Comme Céline, j’ai compris que c’était un immense défaut et qu’il fallait rentrer tout cela, ne pas le montrer, se durcir pour ne pas être vulnérable et prendre tous les mauvais coups. Cela étant, il faut se garder, lorsqu’on est biographe, de se laisser aveugler par les points communs et éviter de faire une sorte d’autoportrait.

 

Comment voyez-vous le petit monde des céliniens ? Il est pour le moins pittoresque, non ?

En effet, mais je crois qu’il en est ainsi dans d’autres sociétés littéraires où l’on trouve également ces aspects de jalousie, de compétition, des petites chapelles, etc. En ce qui me concerne, j’ai un avantage : je suis bien avec tout le monde, que ce soit avec vous, avec Philippe Alméras, ou avec Henri Godard. Et je laisse chacun s’exprimer. Je pense que c’est une condition absolue pour être président de la Société des Études céliniennes. Je m’efforce de ne rentrer dans aucune bagarre. Je ne suis même pas arbitre :  je suis au-dessus de toutes ces querelles.

Quant à mon admiration pour Céline, je puis vous dire qu’elle va en grandissant. Chaque fois que je relis Voyage, je découvre des choses nouvelles. Ainsi, j’ai un exemplaire où je souligne les passages qui suscitent mon admiration. Tout le livre va finir par être souligné !  Vous savez que j’ai enterré récemment mon confrère Jean-Marc Varaut. Peu de temps avant sa mort, il m’avait demandé de lui faire la lecture car il ne pouvait plus tenir un livre. Au téléphone, je lui ai dit : « Je vais te lire des passages de Voyage au bout de la nuit ». Il était réticent. J’ai insisté, et je lui ai lu des passages choisis (la guerre, l’Afrique et un passage sur l’Amérique). Il écoutait, manifestement bouleversé. Et, à la fin, il m’a dit : « Comme je regrette d’être passé à côté de cette œuvre ! » C’était extrêmement émouvant pour moi.

 

Pour conclure, j’aimerais vous demander des nouvelles de Madame Destouches...

 

Vous savez qu’elle a 93 ans. Mais je puis vous assurer qu’elle est très présente, magnifique, ayant même « rajeuni » ces dernières années. Elle avait connu un passage difficile, une sorte de dépression.  Aujourd’hui, elle sort à nouveau. Elle a passé quelques jours l’été dernier dans la suite « Marcel Proust » à Cabourg. Elle va à des expositions, des spectacles de ballets, dîne au restaurant ou chez des amis. Elle fait des choses qu’elle avait vraiment cessé de faire, ce dont je me réjouis.

Propos recueillis par Marc LAUDELOUT

Notes

 

1. Actes du Quinzième colloque international Louis-Ferdinand Céline. Médecine (Budapest, 9-11 juillet 2004), Société d’études céliniennes, 2005, 270 pages, couverture illustrée. Tirage limité à 150 exemplaires. Disponible auprès du Bulletin célinien. Prix : 73 euros, frais de port inclus. Couverture reproduite en dernière page.

2. Voyage au bout de la nuit. Texte intégral interprété par Denis Podalydès, coffret de 16 CD édité par Frémeaux et Associés, 2003.

3. Voir M. Laudelout, « In memoriam François Löchen », in Le Bulletin célinien, n° 252, avril 2004, pp. 9-13.

4. Jean Dubuffet, Asphyxiante culture, Éditions de Minuit, 1986 (la première édition date de 1968).

5. Cette lettre a été reproduite, page 223, dans le deuxième tome de la biographie de Céline (Délires et persécutions, 1932-1944) par François Gibault, publiée en 1985 au Mercure de France.

6. André Rossel-Kirschen, Céline et le grand mensonge, Éd. Mille et une nuits, 2004.

7. Allusion au débat qui l’opposa à Guy Konopnicki dans l’émission Rive droite, rive gauche de Thierry Ardisson sur la chaîne Paris-Première, le 15 octobre 1997. La transcription de ce débat a paru  dans Le Bulletin célinien, n° 182, décembre 1997, pp. 11-15 ; 17 et 19.

 

 

mercredi, 29 avril 2009

Hommage à Jacques d'Arribehaude

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Hommage à Jacques d’Arribehaude

 

Le mois passé, j’évoquais le souvenir de Pierre Monnier mort à Nice le 27 mars 2006. Par une douloureuse coïncidence, peu de temps après avoir bouclé ce numéro, j’apprenais le décès de Jacques d’Arribehaude survenu le… 27 mars dans cette même ville où il s’était retiré depuis quelques années. Encore un témoin qui s’en va – et non des moindres. Au début des années soixante, il avait – lui et son complice Jean Guenot – rencontré Céline à Meudon. Ils lui posèrent des questions pertinentes auxquelles les journalistes ne l’avaient guère habitué. Témoignage d’autant plus précieux qu’il fit l’objet d’un enregistrement ¹.

Mais la figure de Jacques d’Arribehaude ne se limite pas, loin s’en faut, à cela. Il nous laisse, en outre, un récit de qualité (Adieu Néri, Prix Cazes 1978) et surtout un journal dont je ne suis pas le seul à penser qu’il restera. La dernière lettre que j’ai reçue de lui date de décembre dernier. Il me remerciait précisément pour le compte rendu du dernier opus de son journal ² : « Je suis très touché par ce magnifique et généreux article. Votre mise en parallèle avec Léautaud est un superbe hommage, non seulement à S’en fout, mais à la poignée de lecteurs pour lesquels j’existe et qui me sont attachés. Et c’est très justement que vous rappelez l’importance capitale que n’a jamais cessé d’avoir Céline dans les méandres de l’existence. J’aimerais bien connaître avant de disparaître la reconnaissance qu’a connu Léautaud in extremis, et qui en fait une captivante Mémoire littéraire du siècle dernier, mais je n’y compte guère. Si la planète tourne encore, peut-être dans un siècle ou deux, pour peu qu’il existe encore quelques chercheurs et lecteurs. Comme disait Balzac, notre Shakespeare, “ Tout a toujours été de mal en pire” »

 

Pessimiste gai, Jacques m’a toujours frappé par son élégance morale. Jamais je ne l’ai entendu se plaindre, même lorsqu’il fut hospitalisé pour une grave opération au Val de Grâce où nous allâmes, Éric Mazet et moi, lui rendre visite. Au contraire : c’est là qu’il nous lut des pages extraites de son journal,  pleines  de cette roborative alacrité qui était la sienne. Si ses livres ne connurent jamais le succès public, au moins son talent fut-il reconnu par ses pairs : Pol Vandromme, Christian Dedet, Philippe Sénart ou Jean-Louis Curtis. Engagé dans les Forces françaises libres à dix-huit ans, décoré comme il se doit de ce qu’il appelait comiquement ses « bananes patriotiques » ³, Jacques d’Arribehaude estimait  que son passé l’autorisait à commenter librement les aléas de l’histoire et de la politique. Et il ne s’en privait pas, ni dans son journal, ni dans les articles qu’il a écrits ici et là. C’était un homme d’une liberté sans faille qui ne craignait pas de tout dire, au risque de voir ses livres ne recevoir quasi aucun écho dans la grande presse, ce qui fut effectivement le cas.

 

Ce numéro entend rendre l’hommage qui lui est dû ; j’ai bien conscience qu’il est utopique d’évoquer ici toutes les facettes de cette riche personnalité. Grand diariste certes mais aussi voyageur-ethnologue, amoureux de peinture (il avait lui-même un joli talent d’aquarelliste), polémiste, fou de littérature et surtout homme attachant, fidèle en amitié et au jeune homme intrépide qu’il fut.

 

Marc LAUDELOUT

 

1. Céline à Meudon, 4 cassettes disponibles auprès de Jean Guenot, B.P. 40101, 92216 Saint-Cloud (90 € franco).

2. Marc Laudelout, « Le retour de Jacques d’Arribehaude », Le Bulletin célinien, n° 302, novembre 2008.

3. Médaille des Évadés, Croix du combattant volontaire de la Résistance, Croix des services volontaires dans la France libre, Croix du combattant 39-45, Chevalier de la Légion d’honneur.

Louis-Ferdinand Céline - Jacques d'Arribehaude

Louis-Ferdinand Céline - Jacques D'Arribehaude

Souvenirs
J'ai connu Céline l'hiver 59-60 et je l'ai revu plusieurs fois chez lui à Meudon. Notre dernière rencontre se situe peu avant sa mort. Je voulais surtout réaliser avec lui, sur le décor où il vivait, sur son personnage, un document filmé de 16 mm, mais il se refusait farouchement à « paraître », et je n'ai jamais pu le persuader de la valeur et de l'intérêt que pouvait avoir un tel document. Cependant il me recevait avec amitié et je gardais l'espoir d'arriver un jour à mes fins. Il tournait le dos au monde mais sa curiosité restait inépuisable et rien ne lui échappait. De ses épreuves, il gardait une amertume presque résignée, et il était impossible de le voir, de l'entendre sans être ému. Je le faisais souvent parler de son enfance, des véritables sources de Mort à crédit, qui l'expliquait tout entier. Il pouvait être, dans la conversation un mime irrésistiblement cocasse, d'une férocité aiguë lorsqu'il imitait, en particulier, les gens du monde, les snobs. Tout ce qui était taux, chiqué, enflé, prétentieux, il mettait une verve fantastique et extraordinairement tonique à le démolir.

À quoi donc restait-il attaché et de quelles valeurs gardait-il la nostalgie ? je remarquais que ce monde d'avant 14 où il était né et qu'il haïssait à bien des égards, lui laissait des souvenirs très contradictoires. Après un demi-siècle, son horreur de la société et des conditions d'exploitation de la Belle époque, restait intact, mais il s'y mêlait un respect profond pour la laborieuse honnêteté, la modestie patiente, humble et discrète, des petites gens d'alors, et que sa mère représentait parfaitement à ses yeux.

L'évolution du monde lui paraissait soumise à d'impitoyables lois biologiques, et les discours, les professions de toi idéologiques, les concerts de l'O.N.U. lui faisaient hausser les épaules. Pour lui, le blanc était « un fond de teint » appelé à se modifier. Il ne prétendait pas que le monde à venir serait meilleur ou pire, simplement ce monde-là ne le concernait plus, ne l'intéressait plus.

À la fin de sa vie, assez curieusement, il rendait hommage à Proust, bien loin de lui sans doute, mais fossoyeur génial, tout comme lui, d'un monde pourri.

Jacques d'Arribehaude
(Lomé, 26 octobre 1962)

Extrait du "Cahier de l'Herne Louis-Ferdinand Céline", 1963, volume I.

Source

L'uomo che piantava gli alberi

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L’uomo che piantava gli alberi.

Elzélard Bouffier, il solitario che amava la terra

  

Giovedì 9 Aprile 2009 – Jean Giono - Ex: http://www.rinascita.info/

  



Perché la personalità di un uomo riveli qualità veramente eccezionali, bisogna avere la fortuna di poter osservare la sua azione nel corso di lunghi anni. Se tale azione è priva di ogni egoismo, se l’idea che la dirige è di una generosità senza pari, se con assoluta certezza non ha mai ricercato alcuna ricompensa e per di più ha lasciato sul mondo tracce visibili, ci troviamo allora, senza rischio d’errore, di fronte a una personalità indimenticabile.

Una quarantina circa di anni fa, stavo facendo una lunga camminata, tra cime assolutamente sconosciute ai turisti, in quella antica regione delle Alpi che penetra in Provenza. Questa regione è delimitata a sud-est e a sud dal corso medio della Durance, tra Sisteron e Mirabeau; a nord dal corso superiore della Dràme, dalla sorgente fino a Die; a ovest dalle pianure del Comtat Venaissin e i contrafforti del Monte Ventoux. Essa comprende tutta la parte settentrionale del dipartimento delle Basse Alpi, il sud della Dràme e una piccola enclave della Valchiusa. Si trattava, quando intrapresi la mia lunga passeggiata in quel deserto, di lande nude e monotone, tra i milledue e i milletrecento metri di altitudine. L’unica vegetazione che vi cresceva era la lavanda selvatica. Attraverso la regione per la sua massima larghezza e, dopo tre giorni di marcia, mi trovavo in mezzo a una desolazione senza pari. Mi accampai di fianco allo scheletro di un villaggio abbandonato. Non avevo più acqua dal giorno prima e avevo necessità di trovarne. Quell’agglomerato di case, benché in rovina, simile a un vecchio alveare, mi fece pensare che dovevano esserci stati, una volta, una fonte o un pozzo. C’era difatti una fonte, ma secca. Le cinque o sei case senza tetto, corrose dal vento e dalla pioggia, e la piccola cappella col campanile crollato erano disposte come le case e le cappelle dei villaggi abitati, ma la vita era scomparsa. Era una bella giornata di giugno, molto assolata ma, su quelle terre senza riparo e alte nel cielo, il vento soffiava con brutalità insopportabile. I suoi ruggiti nelle carcasse delle case erano quelli d’una belva molestata durante il pasto. Dovetti riprendere la marcia. Cinque ore più tardi, non avevo ancora trovato acqua e nulla mi dava speranza di trovarne. Dappertutto la stessa aridità, le stesse erbacce legnose. Mi parve di scorgere in lontananza una piccola sagoma nera, in piedi. La presi per il tronco di un albero solitario. A ogni modo mi avvicinai. Era un pastore. Una trentina di pecore sdraiate sulla terra cocente si riposavano accanto a lui. Mi fece bere dalla sua borraccia e, poco più tardi, mi portò nel suo ovile, in una ondulazione del pianoro. Tirava su l’acqua, ottima, da un foro naturale molto profondo, al di sopra del quale aveva installato un rudimentale verricello. L’uomo parlava poco, com’è nella natura dei solitari, ma lo si sentiva sicuro di sé e confidente in quella sicurezza. Era una presenza insolita in quella regione spogliata di tutto. Non abitava in una capanna ma in una vera casa di pietra, ed era evidente come il suo lavoro personale avesse rappezzato la rovina che aveva trovato al suo arrivo. Il tetto era solido e stagno. Il vento che lo batteva faceva sulla tegole il rumore del mare sulla spiaggia. La casa era in ordine, i piatti lavati, il pavimento di legno spazzato, il fucile ingrassato; la minestra bolliva sul fuoco. Notai che anche l’uomo era rasato di fresco, che tutti i suoi bottoni erano solidamente cuciti, che i suoi vestiti erano rammendati con la cura minuziosa che rende i rammendi invisibili. Divise con me la minestra e, quando gli offrii la borsa del tabacco, mi rispose che non fumava. Il suo cane, silenzioso come lui, era affettuoso senza bassezza. Era rimasto subito inteso che avrei passato la notte da lui: il villaggio più vicino era a più di un giorno e mezzo di cammino. E, oltretutto conoscevo perfettamente il carattere dei rari villaggi di quella regione. Ce ne sono quattro o cinque sparsi lontani gli uni dagli altri sulle pendici di quelle cime, nei boschi di querce al fondo estremo delle strade carrozzabili. Sono abitati da boscaioli che producono carbone di legno. Sono posti dove si vive male. Le famiglie, serrate l’una contro l’altra in quel clima di una rudezza eccessiva, d’estate come d’inverno, esasperano il proprio egoismo sotto vuoto. L’ambizione irragionevole si sviluppa senza misura, nel desiderio di sfuggire a quei luoghi. Gli uomini portano il carbone in città con i camion, poi tornano. Le più solide qualità scricchiolano sotto questa perpetua doccia scozzese. Le donne covano rancori. C’è concorrenza su tutto. Per la vendita del carbone come per il banco di chiesa, per le virtù che lottano tra loro e per il miscuglio generale dei vizi e delle virtù senza posa. Per sovrappiù il vento altrettanto senza posa irrita i nervi. Ci sono epidemie di suicidi e numerosi casi di follia, quasi sempre assassina. Il pastore che non fumava prese un sacco e rovesciò sul tavolo un mucchio di ghiande. Si mise a esaminarle l’una dopo l’altra con grande attenzione, separando le buone dalle guaste. Io fumavo la pipa. Gli proposi di aiutarlo. Mi rispose che era affar suo. In effetti: vista la cura che metteva in quel lavoro, non insistetti. Fu tutta la nostra conversazione. Quando ebbe messo dalla parte delle buone un mucchio abbastanza grosso di ghiande, le divise in mucchietti da dieci. Così facendo, eliminò ancora i frutti piccoli o quelli leggermente screpolati, poiché li esaminava molto da vicino. Quando infine ebbe davanti a sé cento ghiande perfette, si fermò e andammo a dormire. La società di quell’uomo dava pace. Gli domandai l’indomani il permesso di riposarmi l’intera giornata da lui. Lo trovò del tutto naturale o, più esattamente, mi diede l’impressione che nulla potesse disturbarlo. Quel riposo non mi era affatto necessario, ma ero intrigato e ne volevo sapere di più. Il pastore fece uscire il suo gregge e lo portò al pascolo. Prima di uscire, bagnò in un secchio d’acqua il sacco in cui aveva messo le ghiande meticolosamente scelte e contate. Notai che in guisa di bastone portava un’asta di ferro della grossezza di un pollice e lunga un metro e mezzo. Feci mostra di voler fare una passeggiata di riposo e seguii una strada parallela alla sua. Il pascolo delle bestie era in un avvallamento. Lasciò il piccolo gregge in guardia al cane e salì verso di me. Temetti che venisse per rimproverarmi della mia indiscrezione ma niente affatto, quella era la strada che doveva fare e m’invitò ad accompagnarlo se non avevo nulla di meglio. Andava a duecento metri da là, più a monte. Arrivato dove desiderava, cominciò a piantare la sua asta di ferro in terra. Faceva così un buco nel quale depositava una ghianda, dopo di che turava di nuovo il buco. Piantava querce. Gli domandai se quella terra gli apparteneva. Mi rispose di no. Sapeva di chi era? Non lo sapeva. Supponeva che fosse una terra comunale, o forse proprietà di gente che non se ne curava? Non gli interessava conoscerne i proprietari. Piantò così le cento ghiande con estrema cura. Dopo il pranzo di mezzogiorno, ricominciò a scegliere le ghiande. Misi, credo, sufficiente insistenza nelle mie domande, perché mi rispose. Da tre anni piantava alberi in quella solitudine. Ne aveva piantati centomila. Di centomila ne erano spuntati ventimila. Di quei ventimila, contava di perderne ancora la metà, a causa dei roditori o di tutto quello che c’è di imprevedibile nei disegni della Provvidenza. Restavano diecimila querce che sarebbero cresciute in quel posto dove prima non c’era nulla. Fu a quel momento che mi interessai dell’età di quell’uomo. Aveva evidentemente più di cinquant’anni. Cinquantacinque, mi disse lui. Si chiamava Elzéard Bouffier. Aveva posseduto una fattoria in pianura. Aveva vissuto la sua vita. Aveva perso il figlio unico, poi la moglie. S’era ritirato nella solitudine dove trovava piacere a vivere lentamente, con le pecore e il cane. Aveva pensato che quel paese sarebbe morto per mancanza di alberi. Aggiunse che, non avendo altre occupazioni più importanti, s’era risolto a rimediare a quello stato di cose. Poiché conducevo anch’io in quel momento, malgrado la giovane età, una vita solitaria, sapevo toccare con delicatezza l’anima dei solitari. Tuttavia, commisi un errore. La mia giovane età, appunto, mi portava a immaginare l’avvenire in funzione di me stesso e di una qual certa ricerca di felicità. Dissi che, nel giro di trent’anni, quelle diecimila querce sarebbero state magnifiche. Mi rispose con gran semplicità che, se Dio gli avesse prestato vita, nel giro di trent’anni ne avrebbe piantate tante altre che quelle diecimila sarebbero state come una goccia nel mare. Stava già studiando, d’altra parte, la riproduzione dei faggi e aveva accanto alla casa un vivaio generato dalle faggine. I soggetti, che aveva protetto dalle pecore con una barriera di rete metallica, erano di grande bellezza. Pensava inoltre alle betulle per i terreni dove, mi diceva, una certa umidità dormiva a qualche metro dalla superficie del suolo. Ci separammo il giorno dopo.
L’anno seguente, ci fu la guerra del ‘14, che mi impegnò per cinque anni. Un soldato di fanteria non poteva pensare agli alberi. A dir la verità, la cosa non mi era nemmeno rimasta impressa; l’avevo considerata come un passatempo, una collezione di francobolli, e dimenticata. Finita la guerra, mi trovai con un’indennità di congedo minuscola ma con il grande desiderio di respirare un po’ di aria pura. Senza idee preconcette, quindi, tranne quella, ripresi la strada di quelle contrade deserte. Il paese non era cambiato. Tuttavia, oltre il villaggio abbandonato, scorsi in lontananza una specie di nebbia grigia che ricopriva le cime come un tappeto. Dalla vigilia, m’ero rimesso a pensare a quel pastore che piantava gli alberi. Diecimila querce mi dicevo, occupano davvero un grande spazio. Avevo visto morire troppa gente in cinque anni per non immaginarmi facilmente anche la morte di Elzélard Bouffier, tanto più che, quando si ha vent’anni, si considerano le persone di cinquanta come dei vecchi a cui resta soltanto da morire. Non era morto. Era anzi in ottima forma. Aveva cambiato mestiere. Gli erano rimaste solo quattro pecore ma, in cambio, possedeva un centinaio di alveari. Si era sbarazzato delle bestie che mettevano in pericolo i suoi alberi. Perché, mi disse (e lo constatai), non s’era per nulla curato della guerra.
Aveva continuato imperturbabilmente a piantarle. Le querce del 1910 avevano adesso dieci anni ed erano più alte di me e di lui. Lo spettacolo era impressionante. Ero letteralmente ammutolito e, poiché lui non parlava, passammo l’intera giornata a passeggiare in silenzio per la sua foresta. Misurava, in tre tronconi, undici chilometri nella sua lunghezza massima. Se si teneva a mente che era tutto scaturito dalle mani e dall’anima di quell’uomo, senza mezzi tecnici, si comprendeva come gli uomini potrebbero essere altrettanto efficaci di Dio in altri campi oltre alla distruzione. Aveva seguito la sua idea, e i faggi che mi arrivavano alle spalle, sparsi a perdita d’occhio, ne erano la prova. Le querce erano fitte e avevano passata l’età in cui potevano essere alla mercé dei roditori; quanto ai disegni della Provvidenza stessa per distruggere l’opera creata, avrebbe dovuto ormai ricorrere ai cicloni. Bouffier mi mostrò dei mirabili boschetti di betulle che datavano a cinque anni prima, cioè 1915, l’epoca in cui io combattevo a Verdun. Le aveva piantate in tutti i terreni in cui sospettava, a ragione, che ci fosse l’umidità quasi a fior di terra.
Erano tenere come delle adolescenti e molto decise. Il processo aveva l’aria, d’altra parte, di funzionare a catena. Lui non se ne curava; perseguiva ostinatamente il proprio compito, molto semplice. Ma, ridiscendendo al villaggio, vidi scorrere dell’acqua in ruscelli che, a memoria d’uomo, erano sempre stati secchi. Era la più straordinaria forma di reazione che abbia mai avuto modo di vedere. Quei ruscelli avevano già portato dell’acqua, in tempi molto antichi. Alcuni dei tristi villaggi di cui ho parlato all’inizio del mio racconto sorgevano su siti di antichi villaggi gallo-romani di cui restavano ancora le vestigia, nelle quali gli archeologi avevano scavato, trovando ami in posti dove nel ventesimo secolo si doveva far ricorso alle cisterne per avere un po’ d’acqua. Anche il vento disperdeva certi semi. Con l’acqua erano riapparsi anche i salici, i giunchi, i prati, i giardini, i fiori e una certa ragione di vivere. Ma la trasformazione avveniva così lentamente che entrava nell’abitudine senza provocare stupore. I cacciatori che salivano in quelle solitudini seguendo le lepri o i cinghiali s’erano accorti del rigoglio di alberelli, ma l’avevano messo in conto alle malizie naturali della terra. Perciò nessuno disturbava l’opera di quell’uomo. Se l’avessero sospettato, l’avrebbero ostacolato. Era insospettabile. Chi avrebbe potuto immaginare, nei villaggi e nelle amministrazioni, una tale ostinazione nella più magnifica generosità?
A partire dal 1920, non ho mai lasciato passare più d’un anno senza andare a trovare Elzélard Bouffier. Non l’ho mai visto cedere o dubitare. Eppure, Dio solo sa di averlo messo alla prova! Non ho fatto il conto delle sue delusioni. E’ facile immaginarsi tuttavia che, per una simile riuscita, sia stato necessario vincere le avversità; che, per assicurare la vittoria di tanta passione, sia stato necessario lottar contro lo sconforto. Bouffier aveva piantato, un anno, più di diecimila aceri. Morirono tutti. L’anno dopo, abbandonò gli aceri per riprendere i faggi che riuscirono ancora meglio delle querce. Per farsi un’idea precisa di quell’eccezionale carattere, non bisogna dimenticare che operava in una solitudine totale; al punto che, verso la fine della sua vita, aveva perso del tutto l’abitudine a parlare. O, forse, non ne vedeva la necessità. Nel 1933, ricevette la visita di una guardia forestale sbalordita. Il funzionario gli intimò l’ordine di non accendere fuochi all’aperto, per non mettere in pericolo la crescita di quella foresta naturale. Era la prima volta, gli spiegò quell’uomo ingenuo, che si vedeva una foresta spuntare da sola. A quell’epoca, Bouffier andava a piantare faggi a dodici chilometri da casa. Per evitare il viaggio di andata e ritorno, poiché aveva ormai settantacinque anni, stava considerando la possibilità di costruirsi una casupola di pietra sul luogo stesso dove piantava. Ciò che fece l’anno seguente. Nel 1935, una vera e propria delegazione governativa venne a esaminare la foresta naturale. C’erano un pezzo grosso delle Acque e Foreste, un deputato, dei tecnici. Fu deciso di fare qualcosa e, fortunatamente, non si fece nulla, tranne l’unica cosa utile: mettere la foresta sotto tutela dello Stato e proibire che si venisse a farne carbone. Perché era impossibile non restare soggiogati dalla bellezza di quei giovani alberi in piena salute. Esercitò il proprio potere di seduzione persino sul deputato. Un capitano forestale mio amico faceva parte della delegazione. Gli spiegai il mistero.
Un giorno della settimana seguente, andammo insieme a cercare Elzélard Bouffier. Lo trovammo in pieno lavoro, a venti chilometri da dove aveva avuto luogo l’ispezione. Quel capitano forestale non era mio amico per nulla. Conosceva il valore delle cose. Seppe restare in silenzio. Offrii le uova che avevo portato in regalo. Dividemmo il nostro spuntino in tre e restammo qualche ora nella muta contemplazione del paesaggio. La costa che avevamo percorso era coperta di alberi che andavano da sei a otto metri di altezza. Mi ricordavo l’aspetto di quelle terre nel 1913, il deserto. Il lavoro calmo e regolare, l’aria viva d’altura, la frugalità e soprattutto la serenità dell’anima avevano conferito a quel vecchio una salute quasi solenne. Era un atleta di dio. Mi domandavo quanti altri ettari avrebbe coperto d’alberi. Prima di partire, il mio amico azzardò soltanto qualche suggerimento a proposito di certe essenze alle quali il terreno sembrava adattarsi. Non insistette. ‘Per la semplice ragione’, mi spiegò poi, ‘che quel signore ne sa più di me. Dopo un’ora di cammino, dopo che l’idea aveva progredito in lui, aggiunse: ‘Ne sa di più di tutti. Ha trovato un bel modo di essere felice!
E’ grazie a quel capitano che, non solo la foresta, ma anche la felicità di quell’uomo furono protette. Fece nominare tre guardie forestali per quella protezione e le terrorizzò a tal punto che rimasero sempre insensibili alle mazzette offerte dai boscaioli. L’opera corse un grave rischio solo durante la guerra del 1939. Poiché le automobili andavano allora a gasogeno, non c’era mai abbastanza legna. Cominciarono a tagliare le querce del 1910, ma l’area era talmente lontana da tutte le reti stradali che l’impresa si rivelò fallimentare dal punto di vista finanziario. Fu abbandonata. Il pastore non aveva visto nulla. Era a trenta chilometri di distanza, e continuava pacificamente il proprio lavoro, ignorando la guerra del ‘39 come aveva ignorato quella del ‘14.
Ho visto Elzélard Bouffier per l’ultima volta nel giugno del 1945. Aveva ottantasette anni. Avevo ripreso la strada del deserto, ma adesso, nonostante la rovina in cui la guerra aveva lasciato il paese, c’era una corriera che faceva servizio tra la valle della Durance e la montagna. Misi sul conto di quel mezzo di trasporto relativamente rapido il fatto che non riconoscessi più i luoghi delle mie prime passeggiate. Mi parve anche che l’itinerario mi facesse passare in posti nuovi. Ebbi bisogno del nome di un villaggio per concludere che invece mi trovavo proprio in quella zona un tempo in rovina e desolata. La corriera mi depositò a Vergons. Nel 1913, quella frazione di una dozzina di case contava tre abitanti. Erano dei selvaggi, si odiavano, vivevano di caccia con le trappole; più o meno erano nello stato fisico e morale degli uomini preistorici. Le ortiche divoravano attorno a loro le case abbandonate. Ora tutto era cambiato. L’aria stessa. Invece delle bufere secche e brutali che mi avevano accolto un tempo, soffiava una brezza docile carica di odori. Un rumore simile a quello dell’acqua veniva dalla cima delle montagne: era il vento della foresta. Infine, cosa più sorprendente, udii il vero rumore dell’acqua scrosciante in una vasca. Vidi che avevano costruito una fontana; l’acqua vi era abbondante e, ciò che soprattutto mi commosse, vidi che vicino ad essa avevano piantato un tiglio di forse quattro anni, già rigoglioso, simbolo incontestabile di una resurrezione. In generale, Vergons portava i segni di un lavoro per la cui impresa era necessaria la speranza. La speranza era dunque tornata. Avevano sgomberato le rovine, abbattuto i muri crollati e ricostruito cinque case. La frazione contava ormai ventotto abitanti, tra cui quattro giovani famiglie. Le case nuove, intonacate di fresco, erano circondate da orti in cui crescevano, mescolati ma allineati, verdure e fiori, cavoli e rose, porre e bocche di leone, sedani e anemoni. Era ormai un posto dove si aveva voglia di abitare.
Da lì proseguii a piedi. La guerra da cui eravamo appena usciti non aveva consentito il rifiorire completo della vita, ma Lazzaro era ormai uscito dalla tomba. Sulle pendici più basse della montagna, vedevo i campielli di orzo e segale in erba; in fondo alle strette vallate, qualche prateria verdeggiava.
Sono bastati gli otto anni che ci separano da quell’epoca perché tutta la zona risplenda di salute e felicità. Dove nel 1913 avevo visto solo rovine, sorgono ormai fattorie pulite, ben intonacate, che denotano una vita lieta e comoda. Le vecchie fonti, alimentate dalle piogge e le nevi che la foresta ritiene, hanno ripreso a scorrere. Le acque sono state canalizzate. A lato di ogni fattoria, in mezzo a boschetti di aceri, le vasche delle fontane lasciano debordare l’acqua su tappeti di menta. I villaggi si sono ricostruiti poco a poco. Una popolazione venuta dalle pianure, dove la terra costa cara, si è stabilita qui, portando gioventù movimento, spirito d’avventura. S’incontrano per le strade uomini e donne ben nutriti, ragazzi e ragazze che sanno ridere e hanno ripreso il gusto per le feste campestri. Se si conta la vecchia popolazione, irriconoscibile da quando vive nell’armonia, e i nuovi venuti, più di diecimila persone devono la loro felicità a Elzélard Bouffier.
Quando penso che un uomo solo, ridotto alle proprie semplici risorse fisiche e morali, è bastato a far uscire dal deserto quel paese di Canaan, trovo che, malgrado tutto, la condizione umana sia ammirevole. Ma, se metto in conto quanto c’è voluto di costanza nella grandezza d’animo e d’accanimento nella generosità per ottenere questo risultato, l’anima mi si riempie d’un enorme rispetto per quel vecchio contadino senza cultura che ha saputo portare a buon fine un’opera degna di Dio. Elzélard Bouffier è morto serenamente nel 1947, all’ospizio di Banon.

Traduzione e note a cura di Harm Wulf

Un ouvrage sur les Pays Baltes

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Un ouvrage sur les Pays Baltes

 

 

Le conformisme intellectuel de ces cinquante dernières années nous a empêché de juger avec sérénité une personnalité centrale du panorama culturel italien du 20ième siècle : Alessandro Pavolini. Il nous paraît injuste de limiter sa notoriété aux deux fonctions qu’il a occupées dans l’Italie de Mussolini, celle de Ministre de la Culture et celle de Secrétaire du Parti fasciste républicain. En réalité, Pavolini a d’abord été un journaliste de très grand talent et un intellectuel raffiné. Sa mort violente et prématurée est survenue le 28 avril 1945 sur la rive du Lac de Côme, où il a été abattu par les partisans communistes italiens avec le gros du dernier gouvernement fasciste. Pavolini avait voulu suivre Mussolini jusqu’au bout. Cette fin tragique oblitère sa biographie antérieure, nous empêche de comprendre l’itinéraire de cette personnalité peu commune. Dans les années qui ont immédiatement précédé l’épisode sanglant et mouvementé de la République Sociale, Pavolini avait élaboré une grandiose synthèse révolutionnaire, un existentialisme politique et révolutionnaire qui l’a conduit à chercher la « belle mort », quand s’effondrait définitivement le front germano-italien en Lombardie en avril 1945. Pavolini, avant d’être capturé, avait résisté seul ; il avait été pris prisonnier, à moitié exsangue et inconscient, blessé au visage et au bras, serrant son arme dans la ferme intention de continuer le combat. C’est dans cet état que les partisans l’ont traîné sur la rive du Lac de Côme pour le fusiller. Il est mort comme son poète préféré, l’Espagnol Garcia Lorca.

 

Alessandro Pavolini avait hérité de son père, premier traducteur italien de l’épopée du Kalevala, la passion des mondes finnois et balte. Il avait voyagé dans les Pays Baltes dans les années 20 et 30 et rapporté un volume de notes et d’impressions, intitulé Nuovo Baltico. Massimiliano Soldani, premier éditeur de ce volume, avait écrit : « Dans Nuovo Baltico, on découvre les futurs traits politiques qui, arrivés à maturité, feront de l’ancien « Fédéral » de Florence le plus pur théoricien d’un fascisme nouveau, ou mieux, d’un parti entièrement rénové (…). Après la lecture de Nuovo Baltico, j’ai pu reconstituer et mettre en exergue, avec une méthode de recherche plus précise, le rôle particulier qu’a joué Pavolini (surtout entre 1938 et 1940) et son influence sur le monde varié de la culture des jeunes de son époque et sur la vie intérieure du parti.

 

Quand Mussolini décide de l’appeler pour diriger le Ministère de la Culture Populaire en 1939, le Duce connaissait certainement les caractéristiques principales de ses projets rénovateurs. Volontairement, le chef de l’Italie fasciste l’a imposé au système ou, mieux, aux compromis que le système avait générés (…) ». Aujourd’hui, la deuxième édition de Nuovo Baltico est assurée et préfacée par Luigi De Anna, un professeur italien qui enseigne à Türkü en Finlande, une université qui dispose encore d’un « Fonds Pavolini », dans le département de philologie finnoise et concernant le père du Ministre fasciste de la Culture. En postface, nous trouvons un témoignage de Maria Vittoria Pavolini, fille d’Alessandro Pavolini. Cette nouvelle édition nous permet d’explorer plus profondément ce courant fécond de la gauche fasciste, trop longtemps oubliée et ignorée.

 

Alessandro PAVOLINI, Nuovo Baltico, a cura di Massimiliano Soldani, con una introduzione di Luigi De Anna e uno scritto di Maria Vittoria Pavolini, Società Editrice Barbarossa, Milan, 1998, Lire 18.000 (disponible auprès de notre service librairie).

 

mardi, 28 avril 2009

Jean Giono e "Le Chant du Monde"

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Jean Giono e “Le Chant du Monde”

  

Giovedì 16 Aprile 2009 – 16:06 – Rinascita - http://www.rinascita.info/

  
 

Il paganesimo di Jean Giono (foto) è stato ben identificato da Thierry Maulnier, che scriveva nel 1943, nella sua rubrica del quotidiano “Laction française”: “Il signor Giono è uno di quei rari artisti per i quali il grande Pan non è morto e non è ancora pronto a morire”. Punto di vista rafforzato da quello di Henry Miller: “Nell’opera di Giono chiunque possiede una dose sufficiente di vitalità e di sensibilità, riconosce subito ‘le chant du monde’. Secondo me questo canto, di cui egli ci dà con ogni nuovo libro delle variazioni senza fine, è molto più prezioso, più commovente, più poetico del Cantico delle creature”. (The books in my life, 1951). Non si saprebbe spiegare meglio quale abisso separi il mondo biblico dall’universo di Giono.
Questo universo è bagnato di sole, di profumo di timo e lavanda, di canti di cicale. Figlio della Provenza, la sua patria, con la quale ha un profondo legame carnale, Jean Giono è nato a Manosque il 30 marzo 1895. Suo padre, calzolaio, era anche un po’ guaritore. Jean ne erediterà senza dubbio il gusto di guarire gli animi, e si cimenterà in ciò nel Contadour. Si ricorderà per tutta la vita del saggio consiglio paterno: “Diffida della ragione”. Quanto al nonno, era un carbonaro, come Angelo dell’ “Hussard sur le toit” (L’Ussaro sul tetto)... Bella eredità.
La sua infanzia, che egli descrive in “Jean le bleu”, è il momento di una scoperta meravigliata del mondo. Lui che diventerà, grazie ai suoi testi, un incantatore, è prima incantato, vale a dire è sensibile, intuitivamente, sensualmente, all’incanto del mondo. Il canto del mondo lo porta prima di tutto in se stesso.
C’è qualche merito: avendo deciso a sedici anni di lavorare per aiutare i genitori, entra come “sbriga-faccende” al Banco Nazionale di Sconto di Manosque, ove doveva restare per diciotto anni. Per evadere da questo grigiore divora in continuazione e in modo disordinato: “Il libro della giungla”, Omero, Virgilio, Stendhal, Dostoevskij, Shakespeare, i poeti tragici greci in edizione molto popolare a 50 centesimi il volume. Questa copiosa iniziazione alla letteratura gli apre il cammino verso l’universo magico della scrittura.
Ma il destino ha preparato per lui, come per quelli della sua generazione, la prova più tragica tra tutte: a venti anni conosce, durante quattro interminabili anni, l’inferno dei campi di battaglia, da Eparges a Verdun (solo undici sono i superstiti della sua compagnia), da Chemin des Dames alla 
Somme. Egli esorcizzerà questo bagno di sangue dipingendo in “Le grand truopeau” il quadro più terribile, tra quelli che conosco, delle carneficine del 1914-1918.
Dal suo matrimonio nel 1920 nasceranno Aline nel 1926 e Sylvie nel 1934. Saranno loro le custodi benevole ma tenaci del rifugio dello scrittore, che è la sua casa, poi, più tardi, della sua memoria. Ritrovando, dopo l’incubo, la sua Provenza, Giono si purifica camminando zaino in spalla sui sentieri degli altipiani spazzati dal vento e si siede, al crepuscolo, davanti al fuoco dei pastori, con i quali parla molto e dei quali saprà raccontare con fervore l’antica e semplice saggezza.
Nel 1924 inizia, a dire il vero modestamente, la sua carriera letteraria: il suo amico Lucine Jacques pubblica a proprie spese dei poemi in prosa intitolati “Accompagnés de la flute”, stampati in 300 esemplari dei quali solo 30 furono venduti. Tuttavia qui si ritrova tutto Giono: “Il silenzio a denti 
stretti cammina, a piedi nudi, lungo i sentieri”.
Nel 1927, Giono scrive “Nascita dell’Odissea” (decisamente questo provenzale si sente molto vicino a “nostra madre la Grecia”), testo rifiutato da Grasset. che si precipiterà a pubblicarlo nel 1930, perché nel frattempo Giono si è fatto conoscere. Grazie a Gide, che ha diffuso a Parigi tutte le opinioni positive che ha di questo sconosciuto nella rivista “Commerce” (che ha lanciato, pensate un po’, Fargue, Valéry, Joyce), egli ha pubblicato nel 1929 “Colline”, il cui tema è il ritorno del “Grande Pan”. Lo stesso paganesimo, campestre e gioioso, si esprime in “Un de Baumugnes”, pubblicato anch’esso nel 1929, poi, l’anno successivo, con “Regain”. Seguono a raffica: 
“Solitude de la pitié”, “Présentation de Pan”, “Manosque des plateaux” e “Le serpent d’étoiles” (1933), “Le chant du monde” (1934), “Que ma joie demeure” (1935). Ecco un autore inesauribile. Ma il fatto è che lui canta, in ogni libro, il suo Paese, la Haute Provence, questa terra di montagne aspre ove bruciano il sole e le erbe aromatiche.
Un Paese di grande tradizione 
pastorale e poetica, dove la montagna realizza, nel suo silenzio e nella sua nudità, l’unione dell’uomo con l’Universo. “La montagna è mia madre” dichiara Giono in “Voyage en Italie” (1953).
Lassù, sulle rocce, tra i cespugli secchi odorosi o nelle foreste e nell’erba alta, la vita è potente e semplice, il ritmo dei giorni è lo stesso ritmo della natura. I venti avvolgono tutto. Gli alti pianori sono luoghi d’esaltazione, di comunione, agitati da un fremito continuo, da un linguaggio, come le querce di Dodona. Perché la natura parla a quelli che sanno ascoltarla (gli incantatori lo sanno, e Giono è un incantatore). E questo linguaggio afferma che tutto è vita: desiderio, piacere, dolore, crescita, scambio. La natura è vita. Il contadino di “Colline” lo sa bene: “Egli pensa che uccide quando taglia un albero. Uccide quando falcia. Ogni cosa è dunque vivente? Tutto, bestie, piante, e chi lo sa? Forse anche le pietre”. Questo è, dalla Grecia antica, il messaggio panteista che, camminando attraverso il tempo, è giunto fino a noi, grazie ad una catena di messaggeri, e Giono ne è evidentemente un anello fondamentale. Perché i personaggi di Giono camminano in mezzo all’ “immensa folla degli dei”. Dove sono questi dei? “Sono nell’animo e nella bellezza degli alberi, succo e cuore brillante dei vegetali, istinto di battersi e di amare delle giovani bestie, dolcezza feconda delle donne”. Tutto è un segno. Bobi, in “Que ma joie demeure” è affascinato dalle costellazioni, che sono altrettanti messaggi nel cielo: “Guarda i segni”. E “Jean le bleu”, cominciando la sua vita di uomo, afferma: “Ogni parola mi diceva l’importanza del sangue”.
L’uomo e gli alberi appartengono allo stesso mondo: “Gli alberi avevano l’odore penetrante di quando sono in amore”. E aggiunge: “L’uomo è come il fogliame attraverso il quale bisogna che passi il vento perché questo canti”. Il panteismo è la comunione con l’Universo, consiste nel collegarsi al divino dappertutto presente nel mondo, poiché il mondo è divino, e Giono lo sa bene: “I temporali, il vento, la pioggia, non ne gioisco più come un uomo, ma sono io il temporale, il vento, la pioggia”.
Bisogna qui metter fine allo stupido controsenso operato da Claudine Chonez (Giono, 1956, Le Seuil) quando afferma perentoria: “Non c’è religione in Giono”. Due possibilità: o lei non ha letto veramente Giono o confonde (ma non è la sola, perché duemila anni di condizionamento mentale hanno avuto la stessa difficoltà a distinguerli) religione e monoteismo.
Sicuramente lo stesso Giono può aumentare la confusione quando dichiara a Jean Carrière (Giono, La Manufacture, 1985): “Ammetto di non essere adatto per Dio”. Ma è un errore precisare che il dio biblico e gli Dei non solo non sono la stessa cosa, ma che sono anche, senza possibilità d’errore, due concezioni 
perfettamente e irrimediabilmente incompatibili.
D’altronde ogni ambiguità sparisce quando Giono si prende la pena di demolire la truffa intellettuale che è la confusione tra ateismo e paganesimo. Egli spiega il suo punto di vista, ed in maniera insistente, dialogando con Christian Michelfelder (Jean Giono et les religions de la terre, 1938, Gallimard): “L’affermazione dell’uomo libero si esprimerà sempre in una sorta di paganesimo molto colorato d’umanesimo. E questo è il motivo per cui sarà un paganesimo umano a salvarci. L’ateo dice no, si accontenta di rifiutare.
Ma il pagano desidera, vuole, e quindi distrugge e ricostruisce. Il vero mondo sarà un mondo di pagani. L’umanesimo pagano è la grande affermazione dell’uomo pieno di vita. Resta nell’ateismo qualcosa dell’atmosfera triste delle religioni spiritualiste. Bisogna tuttavia mettere da parte i mistici. Ma il paganesimo libera veramente”.
Gran lettore di Omero, di Eschilo, di Sofocle, Giono afferma un paganesimo vitale e cosmico per mezzo di numerosi suoi testi. Perché là sono le vere ricchezze (Les vraies richesses, 1937): “Noi siamo degli elementi cosmici”.
Questa comunione con il cosmo è il messaggio che predica il patriarca di Contadour, in questa comunità fervente e calorosa che ha raggruppato in un luogo solitario una cinquantina di persone tra il 1935 e il 1939. Con la pubblicazione dei “Cahiers de Contadour”, ai quali ha collaborato un certo Marc Augier, sedotto dal carattere fortemente influenzato da Nietzsche di un Giono che insegna, come Zarathustra, ai suoi ascoltatori - discepoli: “La soluzione è attuabile attraverso ciascuno”.
Il divino, Giono lo percepisce nelle stelle (Le serpent d’étoiles), nell’acqua (Colline), nella terra (Que ma joie demeure), questa terra materna e dura, amara e dolce. Ma anche negli animali, questi intermediari tra l’uomo e l’inanimato (o almeno che ha l’aspetto dell’inanimato). Tutto è vita: “Tutti gli errori dell’uomo derivano dal fatto che egli immagina di camminare su una cosa morta mentre i suoi passi s’imprimono in una carne piena di grande volontà”.
Giono è un autore che scuote dal torpore (alcuni direbbero un iniziato ma è la stessa cosa). Egli ha in effetti la capacità rara di risvegliare il lettore, di farlo passare dall’altro lato dello specchio, con poche parole molto semplici.
Lo testimonia Jean Carrière: “Avevo quattordici anni quando 
ho letto il primo libro di Giono, ‘Que ma joie demeure’. La prima frase resterà per me la chiave di volta della magia, ‘Era una notte straordinaria’. Ogni volta che rileggo quella frase passa in me la stessa piccola scossa, quella di un bambino meravigliato dal respiro delle foreste. La magia funziona ancora oggi. Divento di nuovo lo stesso bambino meravigliato”.
Stupore: la capacità di stupire è una qualità rara, una ricchezza che proviene dall’infanzia e che pochi hanno la fortuna (o la volontà) di conservare e che provoca la presa in giro delle “persone serie”, vale a dire vecchie (perché l’età non centra niente, nel caso specifico molti sono vecchi a vent’anni: poveri loro). Stupore davanti al mondo, davanti alla vita, questo miracolo, perché al contrario di ciò che dice “L’Ecclesiaste” (“Vanità delle vanità, tutto è vanità” Bibbia, Libro dell’Ecclesiaste, Prologo 1,2-11), Giono afferma che “Rien n’est vanità” (inedito, presentato da Christian Michelfelder): “Guarda come tutto conta, come tutto prende posto. Perché ci si è lasciati dire che tutto è vanità? L’acqua, e il prato, e il vento, e Yvonne. Colui che è solo, in piedi nella notte, canta come un albero ed è tutto sconvolto dalla canzone della sua carne. Sono sempre gli stessi che si stupiscono di San Francesco che parla agli uccelli”.
Perché la vita è un’acqua di sorgente che cola tra le dita. Bisogna vivere ogni istante come se dovesse essere l’ultimo. In Svizzera, spellando un camoscio, Giono medita: “Qui è il mistero della vita e del mondo. E un po’ di succo verde, come una pania tra le mie dita. Ciò che sarò un giorno io stesso nel corso della mia trasformazione tra carne e pianta, tra pianta e pietra, tra pietra e cielo, tra polvere di stella e spermatozoo in cammino nelle spine dorsali”. Ecco sorto il tema dell’eterno ritorno, della ruota che gira senza fine, la ruota solare che è simbolo di ogni vita. Una vita 
che non ha bisogno di giustificazioni, che basta a se stessa come portatrice di senso in sé: “Noi abbiamo dimenticato che il nostro solo scopo è quello di vivere e che, vivere, noi lo facciamo ogni giorno e tutti i giorni e che a tutte le ore del giorno noi raggiungiamo il nostro vero scopo se viviamo”. (Rondeur des Jours, 1937).
Apollineo per molti tratti della sua opera, Giono è anche, profondamente, dionisiaco, come l’ha ben compreso Christian Michelfelder sottolineando che uno degli obiettivi dello scrittore è quello di “rimettere l’uomo nel seguito di Dioniso”.
L’eremita di Manosque, del resto, spiega lui stesso ciò 
attraverso certe immagini evocatrici. Per esempio, per descrivere nella prefazione delle “Vraies richesses” (1936) la montagna, la sua montagna di Lure, dice: “Questa montagna di Lure, che si alza nel cielo non come un picco ma come il dorso mostruoso del toro di Dioniso”. Davanti a questa montagna l’uomo si sente messo di fronte alla terra”.
Si ritrova qui l’influenza di Virgilio, già manifesta dagli “Accompagnés de la flute”: “Sia che discenda nel mezzo dei fiumi del frutteto, o che s’insinui nel canneto, questo respiro che tu credi essere il vento è esalato dal dio seduto lassù sulla collina, in mezzo alle piante di salvia del cielo”. Si pensa all’Eneide, libro VIII: “Su questa collina dalla cima verdeggiante, un dio, quale non si sa, sì, un dio risiede qui”. E, dice Giono, bisogna tendere l’orecchio: “E vedi, sotto la sua voce musicale, che goccia a goccia questa sera cola attraverso i pini, commuoversi le piccole gole bianche di questo caprifoglio, ed alzarsi l’onda silenziosa degli ulivi argentati”.
Giono il meditativo è anche un uomo impegnato civilmente. Fa parte di quelli che, avendo vissuto sulla loro pelle il 14-18, non vogliono veder tornare la carneficina stupida e fratricida. E in prima fila nella lotta dei pacifisti quando firma un telegramma intimidatorio a Daladier e Chamberlain, in data 11 settembre 1938. Per questo è arrestato e rinchiuso nel forte di Saint-Nicolas a Marsiglia, il 3 settembre 1939. Nonostante le proteste di qualche coraggioso, tra cui Gide, ci resta fino a novembre. Durante la guerra conduce una vita ritirata scrivendo poco. Ma commette un errore fatale facendo pubblicare una novella sul giornale “La Gerbe” (1). Questo lo porta ad essere arrestato nel 1944 per collaborazionismo da giustizieri improvvisati, e messo in prigione per sette mesi, nel forte di Saint-Vincent, nelle Hautes Alpes. Il comitato centrale degli scrittori, controllato dai comunisti, lo iscrive, naturalmente, nella sua lista nera, destinata ad impedire di esprimersi ormai ad un gran numero di scrittori, tra i quali figurano i più grandi nomi della letteratura contemporanea. Ciò si chiama epurazione. Il crimine di Giono? Tutta la sua opera lo dice: avrebbe potuto essere l’autore della famosa formula “maréchaliste” (del Maresciallo Petain), “la terra non mente”.
Si capisce di colpo perché egli abbia potuto essere considerato da alcuni come un elemento particolarmente perverso e pericoloso.
Disincantato, Giono si volta verso una nuova tappa della sua opera. I suoi romanzi, che conosceranno un grande successo, sono ormai sprovvisti di ogni aspetto militante. Ma lo fanno affermare definitivamente come un grandissimo scrittore, riconosciuto come tale durante la sua elezione nel 1954 all’Accademia Goncourt (e, segno degli dei, per occupare il posto di Colette). Quindi fa l’esperienza dell’avventura cinematografica, realizzando nel 1960 il suo “Crésus”, impersonato da Fernandel. Il mondo del cinema gli affida la presidenza della giuria del Festival di Cannes nel 1961. Giono non è più un maledetto, perché il suo genio ha vinto i mediocri. Dopo la sua morte a Manosque nella notte tra l’8 e il 9 ottobre 1970, la Pléiade gli rende molto in fretta un giusto riconoscimento pubblicando in sei volumi la sua opera romanzesca, tra il 1971 e il 1983.
Noi conserviamo nel cuore l’immagine di colui che ci ha risvegliato al canto del mondo. Colui che diceva: “Il poeta deve essere un professore di speranza”. E nell’ultima frase dei “Grands Chemins” ci dà la ricetta della speranza: “Il sole non è mai così bello come il giorno in cui ci si mette in cammino”.
Allora mettiamoci in cammino. Sappiamo che Jean Giono camminerà al nostro fianco.

Pierre Vial

nota
(Tratto dal libro di Pierre Vial “Anthologie payenne”, Les Editions de la Forèt, Solstizio d’estate 2757 Ab Urbe Condita (2004) 308 pagine, formato 210 x 140, ISBN: 2-9516812-3-2, 23 euro.
Richiedere a: Les Editions de la Forèt 87, Monte des Grapilleurs, F 69380 Saint Jean des Vignes
France o all’indirizzo www.terreetpeuple.com
E-mail:contact@terreetpeuple.com

A lungo si rinfaccerà a Giono la pubblicazione di Deux cavaliers de lorage nella rivista La Gerbe (1), e  Description de Marseille le 16 octobre 1939 ne La Nouvelle revue française (2) di Drieu La Rochelle, ed un reportage fotografico su di lui apparso su Signal (edizione francese del periodico tedesco). A lui sarà imputata anche una certa vicinanza alle idee del regime di Vichy (ritorno alla terra e all’artigianato, esaltazione della giovinezza), idee che Giono veicolava da molti anni. Le idee di Giono si riaffermano nella nuova edizione del 1941 del Triomphe de la vie. Il libro, assai ben accolto dalla stampa della collaborazione, sarà uno dei capi d’accusa per lo scrittore al termine della guerra. Nel 1943 Giono pubblica L’eau vive e Fragments d’un paradis.
(1) La Gerbe, fondato e diretto da Alphonse de Chàteaubriant l’11 luglio 1940 reca come sottotitolo “Settimanale della volontà francese”. Con tiratura di 140.000 copie, dopo, “Je suis partout”, è la pubblicazione collaborazionista più seguita. I suoi principali redattori sono il corrispondente di guerra Marc Augier, più prossimo al direttore e noto in seguito come Saint-loup, il cattolico monarchico Bernard Fay, l’ex comunista poi doriotista Camille Fègy, e diversi altri, tra i quali Alfred Canton, Luois-Charles Lecoc, Louis Thomas, Michèle Lapierre, Jean Passere, Maurice Morel, Aimé Cassar, André Castelot, Claude Cabry. Tra i collaboratori del giornale figura inoltre il quasi intero Gotha della Collaborazione: Jacques Benoist-Méchin, Abel Bonnard, Georges Montandon, Pierre Drieu La Rochelle, Jacques de Lesdain, Ramon Fernandez, Jean Hérold-Paquis, il nipote di Gobineau Clément Serpeille, Armand Petitjean e ancora Jean Anouilh, Henry de Montherlant, Paul Morand, Jean-Pierre Maxence, Marcel Aymé, Dominique Sordet, Pierre Mac Orlan, Maurice Rostand, Jean Giono, Jean de La Varende.Da Moreno Marchi ‘I duri di Parigi. L’ideologia, le riviste, i libri’, Ed. Settimo Sigillo, 1997, pag. 67.
“L’antesignano Giono, piuttosto prossimo al governo del Maresciallo”, (pag.13) Al di là dei suoi atteggiamenti intransigenti, o forse proprio per questo, collaborano a “Je suis partout”, molti tra i maggiori intellettuali dell’epoca, tra i quali Pierre Drieu La Rochelle, Jean Anouilh, Marcel Aymé, Jean Goino, Pierre Mac Orlan, André Fraigneau, Jean de La Varende, Abel Bonnard. Vi compaiono inoltre alcune lettere di Louis-Ferdinand Céline, secondo la sua abitudine di mantenere rapporti con i giornali solo a livello epistolare, e addirittura, 11 agosto 1941, un racconto Mort subite, dell’italiano Alberto Moravia. Ma sapeva quest’ultimo che si trattava di una pubblicazione antisemita? E, di converso, sapeva la redazione che si trattava di uno scrittore per metà ebreo?’, Moreno Marchi “I duri di Parigi. L’ideologia, le riviste, i libri”, Ed. Settimo Sigillo, 1997, pag. 65.
(2) “La Nouvelle revue française” è una prestigiosa rivista letteraria mensile fondata nel 1909 da Gaston Gallimard. Dopo aver interrotto le pubblicazioni per motivi bellici nel luglio del 1940, La Nouvelle revue française ricompare nel successivo dicembre, per volontà e sotto gli auspici dell’ambasciatore ed alto commissario tedesco a Parigi Otto Abetz. La dirige Pierre Drieu La Rochelle. (...) Lo stesso fatto di scrivere o meni sulla NRF rappresenta un termometro della popolarità alla quale è difficile rinunciare. Ecco così che tra scrittori ed intellettuali direttamente impegnati nella politica di collaborazione ed altri, che non lo sono o che vi discordano, su la Nouvelle revue française si ritrova alfine quasi l’intero l’empireo delle lettere francesi: André Gide, Paul Valere, Henry de Montherlant, Paul Léautaud, Marcel Aymé, Paul Morand, Abel Bonnard, Paul Eluard, Marcel Jouhandeau, Jean Giono, Ramon Fernandez, Alfred Fabre-Luce, Jacques Chardonne, Marcel Arland, AndrÀ© Fraigneau. Moreno Marchi “I duri di Parigi. L’ideologia, le riviste, i libri”, Ed. Settimo Sigillo, 1997, pag. 76

Bibliografia italiana:
Lettera ai contadini sulla povertà e la pace, Ed. Ponte alle grazie, 2004; Note su Machiavelli. Con uno scritto su Firenze, Medusa Edizioni, 2004; Due cavalieri nella tempesta, Ed. Guanda, 2003; L’uomo che piantava gli alberi, Edizioni Angolo Manzoni, 2003; L’affare Dominaci, Ed. Sellerio, 2002; Angelo, Ed. Tea, 2002; Il serpente di stelle, Ed. Guanda, 2002; Morte di un personaggio, Ed. Passigli, 2001; Un re senza distrazioni, Ed. Guanda, 2001; L’ussaro sul tetto, Ed. Corbaccio, 2001; Il bambino che sognava l’infinito, Ed. Salani, 2000; La menzogna di Ulisse, Ed. Robin, 2000; Una pazza felicitÀ , Ed. Tea, 200°; Il ragazzo celeste, Ed. Guanda, 1999; Collina, Ed. Guanda, 1998; Risveglio, Ed. Passigli 1997; La fine degli eroi, Ed. Sellerio, 1996; Il disertore, Ed. Guanda,

Traduzione, note, bibliografia e iconografia a cura di
Harm Wulf

dimanche, 26 avril 2009

"Ramon" de Dominique Fernandez

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“Ramon” de Dominique Fernandez

 

Dominique Fernandez est un écrivain, un traducteur, un critique littéraire et un journaliste de grande notoriété. Pendant de longues années, il collabora à l’hebdomadaire “le Nouvel Observateur”. Ce spécialiste de l’Italie et de la Russie a terminé ses études à l’Ecole Normale Supérieure; il a reçu le Prix Médicis en 1974 pour son roman “Porporino ou les mystères de Naples”. Huit ans plus tard, il obtint le Goncourt pour “Dans la main de l’Ange”. Depuis deux ans, il est membre de l’Académie française. Cette année, Dominique Fernandez fêtera ses 80 ans  mais l’essai biographique de 800 pages que vient de publier cet auteur de gauche est indubitablement le livre le plus personnel de toute son oeuvre, pourtant si riche et bigarrée. Ces huit cent pages sont consacrées à un autre critique littéraire chevronné. Huit cent pages sur la vie d’un contemporain et ami de Proust, Mauriac, Gide, Bernanos et d’autres coryphées de l’entre-deux-guerres. Huit cent pages sur un socialiste qui cultivait des sympathies communistes. Huit cent pages sur l’un des fondateurs du fameux “Comité de vigilance des intellectuels anti-fascistes” qui a vu le jour en 1934.

 

Huit cent ! Huit cent pages consacrées à un traître qui, après la victoire du Front populaire des gauches en 1936, s’en va rejoindre le nouveau “Parti Populaire Français” (PPF) de Jacques Doriot, exclu du parti communiste et rival de Thorez qui évoluera rapidement dans le sens du fascisme puis de la collaboration. Dominique Fernandez consacre donc huit cent pages à un tel personnage. Le romancier de gauche Dominique Fernandez écrit huit cent pages sur Ramon Fernandez, son père, qu’il a à peine connu. “Je suis né de ce traître, il m’a légué son nom, son oeuvre, sa honte...”. Ce n’est qu’à la page 424 de son essai (auto)biographique sobrement intitulé “Ramon”, que nous apprenons pourquoi Dominique Fernandez a couché sur le papier  cette histoire de la vie de son père. Il affirme avoir voulu savoir pourquoi cet amoureux si raffiné de la littérature, qui se trouvait encore en 1934 sur la barricade de l’anti-fascisme, a pu se laisser embrigader dans le parti fascisant de Doriot et s’est finalement retrouver en 1942, en compagnie de quelques autres écrivains collaborationnistes français, en visite chez Goebbels, tout en prêtant sa plume aux principales revues de la collaboration. Ramon Fernandez n’a jamais pu l’expliquer lui-même. Il est mort en août 1944, quelques jours avant la libération: il avait cinquante ans. Il a ainsi échappé aux griffes de l’épuration. Le fils Fernandez connait certainement aujourd’hui l’étude très vivante que Simon Epstein a consacré l’an passé au phénomène: “Un paradoxe français – antiracistes  dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance” (Grasset, mars 2008, 613 pages, 28 Euro). Dans cet ouvrage, le professeur israélien montre combien d’intellectuels de gauche de l’entre-deux-guerres ont fini par adhérer à l’idéal collaborationniste et combien de figures de l’extrême droite d’avant-guerre ont atterri  dans la Résistance, en contradiction avec ce que l’on pourrait penser à première vue. Dominique Fernandez donne une explication personnelle au “péché” de son père: il va la chercher dans le mariage difficile de ce playboy mexicain, amoureux de la dive bouteille, avec sa mère, Liliane Chomette, femme sévère et femme d’intérieur. Dominique Fernandez cite abondamment des passages du journal intime de sa mère, véritable chronique d’un divorce annoncé. 

 

Mais ce journal est également la chronique d’une rupture politique. Dominique Fernandez cite les belles paroles que Marguerite Duras  —qui était pendant la guerre une voisine et une amie de  son père—  a écrites dans son roman autobiographique en 1984, quand elle cherchait elle-même à expliquer son engagement communiste d’alors: “Collaborateurs, les Fernandez. Et moi, deux  ans après la guerre, membre du PCF. L’équivalence est absolue, définitive. C’est la même chose, la même pitié, le même appel au secours, la même débilité du jugement, la même superstition  disons, qui consiste à croire à la solution politique du problème personnel”.

 

“On ne devient pas communiste ou fasciste par conviction idéologique”, écrit Dominique Fernandez, le fils du collabo Ramon, mais pour guérir d’un mal personnel. Le ton employé par Dominique Fernandez peut paraître fort critique à l’endroit de son géniteur, il n’empêche que ces huit cent pages constituent l’hommage le plus pénétrant d’un fils à son père que j’ai jamais eu l’occasion de lire. Mais je dois m’empresser d’ajouter que Dominique Fernandez n’est pas juste. Mais dans cette injustice, je ne repère pas la plume du rédacteur du “Nouvel Observateur”. Il cherche parfois des circonstances atténuantes où il n’y en a pas. Il cherche à trouver de l’ironie dans les articles de son père, alors que toute ironie y est absente, tout cela pour plaider son acquittement. Pire encore, et là on ne peut pas lui laisser seul la parole: il injurie d’autre écrivains collaborationnistes (Drieu, Brasillach,...) pour défendre son père, alors, qu’en fin de compte, Ramon Fernandez fut le seul, parmi ces intellectuels, à avoir porté un uniforme pendant l’occupation. Quoi qu’il en soit, “Ramon”, en tant que “document humain”, mérite une bonne place dans la tribune d’honneur. Sans doute, Dominique Fernandez, avec ce livre consacré à son père, a voulu écrire son testament politique.

 

“Guitry”/”’t Pallieterke”.

(article paru dans  “’t Pallieterke”, Anvers, 15 avril 2009, trad. franç.: Robert Steuckers).

 

Source:

Dominique Fernandez, “Ramon”, Grasset, 807 pages, 24,90 Euro.

 

 

vendredi, 24 avril 2009

Drieu on the Failure of the Third Reich

 

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Drieu on the Failure of the Third Reich

 

by Michael O’Meara

TRANSLATOR’S NOTE:  The powers threatening our people became hegemonic in May 1945, when the liberal-Communist coalition known as the “United Nations” imposed its dictatorship on defeated Germany. This dictatorship — whose defining characteristic, East and West, is its techno-economic worship of the Jewish Moloch — was subsequently imposed on the rest of Europe and, in the form of globalization, now holds the whole world in its grip. For white nationalists, the defeat of National Socialist Germany is both the pivotal event of the 20th century and the origin of their own movement. Opposing the powers which are one generation away from exterminating their race, white nationalists resume, in effect, the struggle of the defeated Germans. But they do so not uncritically.

As an idea and a movement, National Socialism (like Fascism) was a product of the late 19th-century political convergence that brought together elements from the revolutionary anti-liberal wing of the labor movement and elements from the revolutionary anti-liberal wing of the nationalist right.  Hitler’s NSDAP was the most imposing historical offshoot of this anti-liberal convergence, but one not always faithful to its origins — which bears on the fact
that Hitler shares at least part of the responsibility for the most devastating defeat ever experienced by the white race. 

It is not enough, then, for the present generation of white nationalists to honor his heroic resistance to the anti-Aryan forces.  Of greater need, it seems to me, is to identify and come to terms with his failings, for these, more than his triumphs, now weigh on our survival as a people.

The following is an excerpt from a piece that Pierre Drieu La Rochelle wrote in the dark days after August 1944, after the so-called “Liberation” of Paris and before the suicide that “saved” him from De Gaulle’s hangman.  It was written in haste, on the run, and never completed, but is nevertheless an illuminating examination of Hitler’s shortcomings (even where incorrect).

The central point of Drieu’s piece (and it should be remembered that he, like many of France’s most talented thinkers and artists, collaborated with the Germans in the hope of creating a new European order) is that Germany alone was no match for the combined powers of the British Empire, the United States, and the Soviet Union.  Only a Europe recast on the basis of National Socialist principles, he believed, could triumph against the Jew inspired coalition.   Hitler’s petty bourgeois nationalism, critiqued here by Drieu, prevented him from mobilizing the various national families of Europe in a common front, proving that his distillation of the anti-liberal project was inadequate to the great tasks facing the white man in this period.

*

From Drieu’s “NOTES SUR L’ALLEMAGNE:” 

I was shocked by the extreme political incompetence of the Germans in 1939, ‘40, and ‘41, after the victories [which made them Europe's master].  It was in this period that their political failings sealed the fate of their future military defeat.

These failings seem even greater than those committed under Napoleon [in the period 1799-1815, when the French had mastered Europe]. The Germans obviously drew none of the lessons from the Napoleonic adventure.

Was German incompetence the incompetence of fascism in general?  This is the question.

The imbecilic maxim guiding Hitler was: “First, wage and win the war; then, reorganize Europe.”  This maxim contradicted all the lessons of history, all the teachings of Europe’s greatest statesmen, particularly those of the Germans, like Frederick and Bismarck.  It was Clausewitz who said war is only the extension of politics.

But even if one accepts Hitler’s maxim, the German dictator committed a number of military mistakes:

1. Why did he wait six months between the Polish campaign and the French campaign?

2. Why did he squander another ten months after the French campaign?

3. Why in late 1940 did he wage a futile aerial assault on England, instead of striking the British Empire at its most accessible point, Gibraltar?

After July 1940 [when no European power opposed him on the continent], he could have crossed Spain, destroyed the [English] naval base at Gibraltar, and closed off the Mediterranean.

The armistice with Pétain [which led to the establishment of the Vichy regime] was [another] German disaster.  If the French had followed [Paul] Reynaud [the last Premier of the Third Republic who advocated continued resistance from France's North African colonies], the Germans would have been forced to do what was [militarily] necessary to win the war.  For once master of Gibraltar, Hitler would have rendered [the English base at] Malta useless, avoided the Italian folly in the Balkans [which doomed Operation Barbarosa in Russia], and assured the possibility of an immediate and relatively uncostly campaign against [English occupied] Egypt.  Rather than bombing London, he should, instead, have seized Alexandria, Cairo, and Suez.  This would have settled the peace in the Balkans, avoiding the exhausting occupations of Greece and Yugoslavia, [it would have cut England off from her overseas empire, and guaranteed Europe's Middle Eastern energy sources].

These military failings followed from Hitler’s total lack of imagination outside of Germany.  He was [essentially] a German politician; good for Germany, but only there.  Lacking political culture, education, and a larger tradition, having never traveled, being a xenophobe like many popular demagogues, he did not possess an understanding of what was necessary to make his strategy and diplomacy work outside Germany.  All his dreams, all his talents, were devoted to winning the war of 1914, as if conditions [in 1940] were still those of 1914. . .  He thus underestimated Russian developments and totally ignored American power, which had already made itself felt in 1914.

He did understand the importance of the tank and the airplane [whose military possibility came into their own after 1918], but not in relationship to the enormous industrial potential of Russia and America. He neglected [the role of] artillery, which was a step back from 1916-1918.  He is least reproachable in his estimation of submarine warfare, whose significance was already evident in the Great War.  But even here, the Anglo-Saxons [i.e., the Anglo-Americans] deployed their maritime genius in a way difficult for a European continental to anticipate.

Hitler’s political errors [, however,]  were far worse and more thorough-going than his military errors.  He hardly comprehended the problem, seeing it in terms of 1914 — in terms of diplomacy, national states, cabinet politics, and [rival] chancelleries.  His understanding of Europe did not even measure up to that of old aristocrats like Bismarck and Wilhelm II, who never forgot the traditions of solidarity that united Europe’s dynasties, courts, and nobilities. . .

It is curious that this man who knew how to inspire the masses in his own country, who always maintained the closest contact with his people, never, not for a second, thought of extending his [successful] German policies to the rest of Europe.  He [simply] did not understand the necessity of forging a policy to address Europe domestically and not just internationally.  Diplomats and ambassadors had lost command of the stage — it was now in the hands of political leaders capable of winning the masses with the kind of social policies that had succeeded in Germany and could succeed elsewhere.

Hitler didn’t understand this.  After his armies invaded Poland, France, and elsewhere, he never thought of implementing the social and political practices that had worked in Germany . . .  He never thought of carrying out policies that would have forged bonds of solidarity between the occupied and the occupiers. . .

These failures lead me to suspect that the Germans’ political stupidity . . . owed something to fascism — that political and social system awkwardly situated between liberal democracy and Communist totalitarianism.

In the fascist system there was something of the “juste milieu” that could not but lead to the Germans’ miserable failure.  [A French term meaning a "golden mean" or a "happy medium," "juste milieu" is historically associated with the moderate centrist politics (or anti-politics) of bourgeois constitutionalists -- first exemplified by France's July Monarchy (1830-48) and subsequently perfected in the American party system].

The Germans have no political tradition.  For centuries, most of them inhabited small principalities or cities where larger political forces had no part to play.  There was, however, Vienna and Berlin.  In these two capitals, politics was the province of a small [aristocratic] caste.  The events of 1918 [i.e., the liberal revolutions that led to the Weimar and Viennese republics] abruptly dislodged this caste, severing its ties from the new governing class.

Everything that has transpired in the last few years suggests that Germany remains what it was in the 18th century . . . a land unable to anchor its warrior virtues in politically sound principles . . .

[Part of this is due to the fact that] the German is no psychologist.  He is too much a theoretician, too intellectually speculative, for that.  He lacks psychology in the way a mathematician or metaphysician does.  German literature is rarely psychological; it develops ideas, not characters.  The sole German psychologist is Nietzsche [and] he was basically one of a kind. . .  Politically, the Germans [like the French] are less subtle and plastic than the English or the Russian, who have the best psychological literature and hence the best diplomacy and politics.

Hitler’s behavior reflected the backward state of German, and beyond that, European attitudes.  This son of an Austrian custom official inherited all the prejudices of his father’s generation (as had Napoleon).  And like every German nationalist of Austrian extraction, he had an unshakable respect for the German Army and the Prussian aristocracy.  Despite everything that disposed him against it, he remained the loyal Reichwehr agent he was in Munich [in 1919]. . . If he subsequently became a member of a socialist party [Anton Drexler's German Workers' Party] — of which he promptly became the leader — it was above all because this party was a nationalist one. Nationalism was always more important to him than socialism — even if his early years should have inclined him to think otherwise . . .

Like Mussolini, Hitler had no heartfelt commitment to socialism.  [Drieu refers here not to the Semitic socialism of Marx, with its materialism, collectivism, and internationalism, but rather to the older European tradition of corporate socialism, which privileges the needs of family, community, and nation over those of the economy] . . . That’s why he so readily sacrificed the [socialist] dynamism of his movement for the sake of what the Wehrmacht aristocracy and the barons of heavy industry were willing to concede.  He thought these alone would suffice in furnishing him with what was needed for his war of European conquest. . .

Fascism failed to organize Europe because it was essentially a system of the “juste milieu” — a system seeking a middle way between communism and capitalism. . .

Fascism failed because it did not become explicitly socialist.  The narrowness of its nationalist base prevented it from becoming a European socialism . . .  Action and reaction: On the one side, the weakness of Hitlerian and Mussolinian socialism prevented it from crossing national borders and becoming a European nationalism; on the other, the narrowness of Mussolinian and Hitlerian nationalism stifled its socialism, reducing it to a form of military statism. . .

Source: Pierre Drieu La Rochelle.  Textes retrouvées.
Paris: Eds. du Rocher, 1992.

jeudi, 23 avril 2009

Mishima: l'homme, l'oeuvre, la mort

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

 

MISHIMA: L'HOMME, L'ŒUVRE, LA MORT

 

Dans son autobiographie Le Soleil et l'Acier, Kimitake Hiraoka, bien plus connu sous le pseudonyme qui le révèlera à l'humanité, Mishima Yukio, confessait son irréfragable désir d'assouvissement tragique par ces quelques mots, jetés en une fausse interrogation, et alors fort peu écoutés: «Qu'est-ce qui distingue une mort héroïque d'une mort décadente? (...) Résister à la mort et à l'oubli». Cette phrase, le 25 novembre 1970 consommé, personne ne devait plus l'oublier. De fait, pacte suicidaire du plus célèbre des auteurs japonais marque au­jourd'hui encore les esprits à un point tel qu'elle recouvre d'ombre sa pourtant foisonnante et géniale œuvre littéraire. La biographie recomplétée de son ami journaliste Henry Scott-Stokes est éclairante en la matière, qui lui consacre près de 400 pages à décortiquer la troublante personnalité du dernier samouraï nippon, rejetant l'étude de ses textes à une simple énumération-explicitation insipide et sans profondeur aucune.

 

Etonnante inconséquence bien ancrée à “droite” également, pour qui le seppuku du Grand Quartier Général de Tokyo, plus coup d'éclat que coup d'état, est devenu un évènement prépondérant sa mythologie, qu'il est inutile ici d'évoquer à nouveau, tant il l'a déjà à maintes reprises été: «Yukio Mishima choisit d'être le dernier samourai. Sa sortie fulgurante hors d'un monde qu'il abhorrait se camoufle sous une tentative de putsch. Mais un putsch à la nip­pone, voué à l'échec, ayant pour seul dessein de mettre en scène un évènement inou­bliable» (Jean Mabire). Pourtant, un rapide retour sur ses écrits jette un éclairage nouveau et bien plus instructif que tous les cours de psychologie ou études de philosophie orientale (sa vie durant, il restera sceptique à l'égard du bouddhisme et du shintoïsme institutionnels) que depuis vingt-sept ans littérateurs, critiques journalistiques ou prétendus exégètes nip­pophiles s'acharnent à plaquer sur la personne de Mishima pour en finir avec son geste fa­tal.

 

Tout dans ses romans, nouvelles, essais et recueils autobiographiques annonçaient par la plume ce que leur auteur allait bientôt sceller par le sang. L'idée précède l'action, l'action la complète. Le mot, trompeur, factice transposition scripturale du fatum humain, pallié, trans­cendé par l'action elle-même. Et si Mishima nous paraît si proche, c'est que derrière le vernis de l'artiste insulaire imprégné de culture sino-nippone se profile, tantôt en filigrane, tantôt frappant d'évidence, l'écrivain baigné de littérature européenne, de philosophie allemande, de mythologie hellénique. Ceux qui l'ont connu ou approché s'accordent tous à le recon­naître: sa maison, délirant bâtiment baroque mariant avec plus ou moins bon goût pilastres massifs, fioritures et plâtres moulés de statues de l'antiquité et de la renaissance, sa passion pour la Grèce, son culte de l'haltérophilie, son goût immodéré pour Thomas Mann et Friedrich Nietzsche, le philosophe au marteau, attestent de son regard tourné vers le berceau de la tragédie. «Il faut ne jamais s'être ménagé soi-même, il faut avoir fait de la dureté une habitude pour rester serein et de bonne humeur parmi de dures vérités», quelle meil­leure traduction que cet aphorisme nietzschéen tiré d'Ecce Homo pourrait mieux percer à jour la complexité de Mishima, sa pensée profonde et la vision unique qui guida sa vie, son œuvre, et, point d'orgue terrible, sa mort par suicide.

 

Mishima, d'abord un écrivain européen? Perspective ambitieuse certes, mais qui s'appuie sur des faits et des écrits-mêmes de Mishima qu'il serait navrant de vouloir oblitérer, au titre fallacieux d'une compréhension plus aisée d'un auteur ultra-nationaliste et impérialiste en rup­ture de ban. En un dernier aveu au monde qu'il allait définitivement quitter, il laissait sur son bureau, accompagnant la dernière partie manuscrite de sa tetralogie La Mer de la Fertilité, ce billet, disant «La vie est brève, mais je voudrais vivre toujours». Espoir d'éternité concrétisé certes par sa postérite littéraire, que confirme la récente sortie dans la prestigieuse collection NRF-Gallimard du Pélerinage aux Trois Montagnes, mais qui, s'il n'avait été qu'un «quelconque» écrivain de talent, lui aurait au contraire évité sa mort volontaire et prématurée. Son acte, s'il reste nimbé de mystère, doit sa raison d'être à une toute autre inspiration, divine ou classique, indubitablement tragique, nourrie de références européennes, classiques grecs, littérature du «Grand Siècle» et bréviaires sils-mariens, juste retour des choses pour un Nietzsche volontiers «schopenhaueriennement» vulgarisateur du bouddhisme. Mishima, le plus occidental des écrivains asiatiques, tellement opposé au précepte Zen «Aller droit de­vant soi, sans se retourner et sans se poser aucune question».

 

*

«L'homme qui sait mourir ne sera jamais esclave» prêchait déjà Sénèque, conseiller de l'Empereur Néron et maître de la Rome stoïcienne, pour qui la vie, ascèse virile et souverai­neté aristocratique sur ses pulsions tendues vers la LIBERTE absolue de l'Etre, trouvait sa conclusion la plus pure et olympienne dans son propre abandon volontaire. Mais se sacrifier sous le coup de la passion, preuve de son inaptitude à s'affirmer contre le monde, ne saurait mériter que mépris et déshonneur. Or, c'est bien dans ce sens qu'abonde Henry Scott-Stokes quand il affirme péremptoirement que le suicide de Mishima ne fut jamais que shinju, double suicide amoureux en compagnie de son prétendu amant et second au sein de la Tatenokai;  Morita Masakatsu, connotant l'acte d'une homosexualité sado-masochiste honteuse qui ne résiste pas devant l'examen des faits. Quand meurt Mishima, il y a long­temps qu'il s'est défait de ses oripeaux romantiques. Son passage à la Bungei Bunka, asso­ciation militariste de littérateurs nationalistes et son appartenance au mouvement Nippon Roman-Ha («les Romantiques japonais») regroupés derrière la figure du romancier Yasuda Yajura remonte aux dernières années du second conflit mondial.

 

Glorifiant la «guerre sainte» et prônant la valeur salvatrice du sacrifice et de l'autodestruction du peuple japonais guidé par l'infaillabilité de son Empereur-thaumaturge, seul aux yeux de ce cercle avait droit de cité l'exploit intrinsèque, la défaite et la mort, inéluctables, magnifiant comble du romantique la plus belle des victoires, d'ores et déjà acquise par le seul fait que le Japon, peuple à la supériorité divine, ait osé lever le sabre sur l'Asie et s'aliéner la haine de l'Occident. Profondément influencé en ses jeunes années par l'école néo-confucéenne Wang-Yang-Ming  du Dr Inoue Tetsujuio («La mort du corps n'est rien face à la mort de l'esprit»), Mishima confiera bien plus tard, dans Le Soleil et l'Acier  (1968), son progressif changement d'orientation: «L'élan romantique, à partir de l'adolescence, avait toujours été en moi une veine cachée, n'ayant de signification qu'en tant que destruction de la perfection classique (...) En l'espèce, je chérissais un élan romantique vers la mort, tout en exigeant en même temps comme véhicule un corps strictement classique (...). Me manquaient, en bref, les muscles qui convenaient à une mort tragique».

 

Le grand bouleversement de sa vie a lieu en 1952, lorsque Mishima, alors tout jeune ro­mancier mondialement célébré pour Confession d'un Masque  (1949) met le pied en Grèce. Lecteur assidu d'Homère, Eschyle et Sophocle, des classiques grecs et du «Grand Siècle», cas rarissime dans le Japon post-1945, il «tombe amoureux des mers bleues et des ciels vifs de cette terre classique» et echafaude une théorie pour sublimer son Voyage à Sparte:  dans les temps anciens, la spiritualité («cette excroissance grotesque du christia­nisme»), inexistante, était palliée par un équilibre précaire entre le corps et l'esprit nécessitant un effort constant pour le préserver, que les Grecs sublimèrent dans la beauté et la tragédie, punition infligée aux hommes par les dieux pour leur arrogance. «Mon interprétation était peut-être fausse, mais telle était la Grèce dont j'avais besoin». Aristote ne disait-il pas qu'un «beau pied est l'indice d'une belle âme»?

 

A travers cette nouvelle grille de lecture éthique, le jeune et chétif écrivain désapprend la soli­tude, la haine de soi et découvre la beauté du corps travaillé, sculpté par l'exercice. A son re­tour au Japon, dégoûté du romantisme, «caractéristique typiquement bourgeoise (...) fa­daises poétiques, héroïsmes mélodramatiques, pathétiques complications d'amour» (dixit Julius Evola), il décide que l'heure est venue pour lui désormais d'écrire des «œuvres clas­siques», et, en corollaire, autre lecon rapportée de l'Hellade, de s'adonner au culturisme. «Le bon endroit, c'est le corps, l'apparence physique, le régime, la physiologie -et le reste  suit de lui-même (...) c'est pourquoi les Grecs constituent toujours le premier évènement capital de la culture de l'humanité. Ils savaient -et ils faisaient-, ce qu'il fallait». (Nietzsche in Crépuscule des Idoles).

 

La mort, qui jusque là n'était que trouble nihilisme destructeur, et attrait morbide pour la souf­france («Le penchant de mon cœur vers la mort, la nuit et le sang était indéniable» notera-t-il à l'occasion de la publication de Confession pour un Masque)  se voit rehaussé au rang d'idéal, de suprême geste de domination, de puissance et de liberté. Patet Exitus:  «Lorsque vous ne voulez plus combattre, il vous est toujours possible de vous retirer. Rien ne vous est plus facile que de mourir» (Sénèque). Chacune des œuvres qui paveront le panthéon de sa gloire littéraire sera dorénavant un pas supplémentaire dans son approche définitive du néant.

 

En 1951 puis 1953 paraissent deux versions de Couleurs Interdites, évocation de la société homosexuelle de Tokyo et des relations tumultueuses qui unissent le vieil écrivain Shinsuke et le bel éphèbe ingrat Yuichi, conclue par la mort par injection de drogue du vieillard, au terme d'un sermon inutile. Saisissante préfiguration de ce qui allait attendre Mishima... Cette même année 1953 sort La Mort en été, roman qui conte l'histoire d'une femme déses­pérée après la noyade accidentelle de ses deux enfants. Se profile à nouveau l'étude d'une âme en proie au chaos existentiel, qui lutte pour sa dignité dans le dépassement de ses sen­timents. Définissant sa perception de la tragédie classique, Mishima écrit, toujours dans Le Soleil et l'Acier:  «Selon ma définition de la tragédie, le pathos  tragique naît lorsqu'une sen­sibilité parfaitement moyenne assume pour un temps une noblesse privilégiée qui tient les autres à distance, et non pas quand un type particulier de sensibilité émet des prétentions particulières (...). Pour que, parfois, un individu touche au divin, il faut dans des conditions normales, qu'il ne soit lui-même ni divin ni rien qui en approche. C'est seulement lorsque, à mon tour, je vis le ciel bleu, étrange et divin, uniquement perçu par ce type d'individu, qu'enfin j'eus confiance en l'universalité de ma propre sensibilité, que je pus étancher ma soif et que fut dissipée ma foi aveugle et maladive dans les mots. A cet instant, je participai à la tra­gédie de tout être».

 

La parution du Pavillon d'Or en 1956, qui confère définitivement à Mishima le rang d'écrivain à la renommée mondiale, entérine son rejet viscéral de la laideur physique et mentale, son mépris pour ce qu'incarne ici le personnage de Kashiwagi, être vil dont les pieds bots ne sont qu'extériorisation corporelle de sa bassesse intérieure, dans la formule toute kantienne «le beau est le symbole du bien moral»: «Il avait pour marque particulière deux pieds aussi bots que pieds peuvent l'être et une démarche extrêmement étudiée. Il avait toujours l'air de mar­cher dans la boue: lorsqu'une jambe parvenait, non sans peine, à s'extraire, l'autre au con­traire paraissait s'engluer. En même temps, tout son corps s'agitait avec véhémence; sa dé­marche était une espèce de danse extraordinaire, aussi peu banale que possible». Autre ap­proche de la mort avec Le Marin Rejeté par la Mer (1963), qui voit une bande d'adolescents nihilistes combattant leur sensibilité s'essayer à l'exercice macabre de la mise à mort de Ryuji, l'officier de marine marchande, amant de la mère de Noboru, membre du groupe, par l'ignoble sacrifice longuement détaillé par l'auteur d'un innocent chaton abandonné.

 

A cette époque Mishima a déjà pris conscience, au cours des évènements de 1960, de son intérêt pour la politique. Les émeutes qui émaillèrent le renouvellement de l'ANPO (traité de sécurité américano-japonais), humiliante charte imposée par Mac Arthur en 1945, agirent sur Mishima comme le révélateur d'un engagement à venir. C'est alors qu'il découvre la richesse de la tradition militariste nippone. A l'automne 1960, il termine la nouvelle Yûkoku (Patriotisme, aujourd'hui insérée dans le volume La Mort en été) qui traite à travers l'histoire d'un jeune officier, le lieutenant Takeyama Shinji, de l'affaire Ni Ni Roku, putsch entrepris le 26 février 1936 par la société secrète impérialiste Kodo-Ha. Tiraillé entre sa fidélité pour l'Empereur et celle pour la Kodo-Ha, Takeyama préfère se suicider en compagnie de son amie Reiko, shinju  fort idéalisé et accompagné d'un véritable luxe de détails: «Il est difficile d'imaginer spectacle plus héroïque que le sursaut du lieutenant qui brusquement rassembla ses forces et releva la tête (...). Il y avait du sang partout. Le lieutenant baignait jusqu'aux ge­noux et demeurait écrasé et sans force, une main sur le sol. Une odeur âcre emplissait la pièce. Le lieutenant, tête ballante, hoquetait sans fin et chaque hoquet ébranlait ses épaules. Il tenait toujours dans sa main droite la lame de son sabre, que repoussaient les intestins et dont on voyait la pointe».

 

A deux reprises, Mishima reprend ce thème, dans la pièce Toka no Kiku puis dans l'essai Eirei No Koe (La Voix des Morts héroïques, parue en 1966). De Patriotisme,  il dira: «Ce n'est ni une comédie, ni une tragédie, mais simplement l'histoire d'un bonheur... Le douloureux suicide du soldat équivaut à une mort honorable sur le champ de bataille». De cette nouvelle devait être tiré un film éponyme en 1965, où Takeyama sera joué par... Mishima lui-même. On se souvient de la honte qui l'étouffa sa vie durant d'avoir triché au conseil de révision en 1945, alors que le Japon mobilisait ses dernières forces pour repousser l'hydre américaine. Dix ans après ce film, Mishima se rejouait la même scène, sans caméra cette fois.

 

Mais si Mishima manifeste un réel intérêt pour la politique, il reste un parfait apoliteia, seule­ment préoccupé par la figure de l'Empereur, à qui il reproche d'avoir trahi et sa charge divine et son peuple, sacrifié en son nom propre pendant huit ans de guerre. «Pourquoi fallait-il qu'il devienne un être humain...», écrira-t-il. La lecture de son roman Après le Banquet (1960) prouve quant à elle le profond mépris que ressentait Mishima pour la classe politique en gé­néral et le rôle prégnant qu'y tient l'argent. Le ridicule dont il affuble des personnages à l'identité réelle à peine voilée que manipule allègrement une sombre prostituée ne manqua pas de lui causer des déboires avec les milieux politiciens et certains groupes extrémistes.

 

Il s'initie aux règles du Bushido  ainsi qu'aux arts martiaux (Kendo et Karaté), réédite le premier en 1967 le bréviaire du Samurai condamné par l'occupant en 1945, le Hagakuré, du guerrier Yamamoto Jocho (XVIIIième siècle), qu'il adapte aux conditions du XXième siècle et sous-titre Le Japon Moderne et l'Ethique Samourai:  il en retient particulièrement quelques idées-clés, la soumission à son destin et à la mort, au relent fortement teinté de stoïcisme: «La mort recèle toujours un combat obscur entre la liberté de l'homme et un destin qui le dépasse». En introduction, il note: «Un homme d'action est destiné à subir une longue période de tension et de concentration jusqu'au dernier instant où il achève sa vie par son acte final: la mort —soit par causes naturelles, soit par seppuku»  Si la mort l'obsède depuis son enfance, sa propre mort lui devient dès à présent prépondérante. «Aux abords de la quarantaine, l'âge com­mence à tracasser Mishima» remarque Scott-Stokes dans sa biographie. Toujours en ex­cellente condition physique, ses muscles se font maintenant moins proéminents, ses con­tractions moins impressionnantes. Comment un homme si pétri d'esthétique classique pour­rait s'en contenter, lui qui écrivait, toujours dans Le Soleil et l'Acier, qu'à un muscle dur cor­respond la force de caractère et «la sentimentalité à un ventre flasque».

 

Impossible d'accepter l'inéluctable décrépitude de l'âge, lui qui sait que la grande idée de l'art classique se trouve dans la commémoration dans le marbre de l'instant parfait où s'affirme la beauté ultime, l'extrême moment qui précède le déclin et derrière lui, la mort. C'est désormais à elle qu'il consacrera ses dernières années. Dans l'ouvrage Shobu No Kokoro (L'Ame des Guerriers), reprise d'un dialogue avec Murakami Ichiro, paru après son décès, il confie: «On doit assurer la responsabilité de ses paroles, une fois qu'on les a prononcées. Il en va de même du mot écrit. Si l'on écrit: Je mourrai en novembre, alors on doit mourir. Si l'on fait une fois bon marché des mots, on continuera de le faire». Sa tétralogie achevée, La Mer de la Fertilité, certainement le sommet de son écriture, et interrogation sur la réincar­nation où s'exprime un bouddhisme plus universitaire que mystique, Mishima Yukio pourra se considérer enfin au bord de la falaise et rejoindre le héros qu'il vénère le plus, lui-même. «Le suicide est quelque chose qui s'organise dans le silence du cœur, comme une œuvre d'art» disait Albert Camus. Alors que persomne ne voulait voir en Mishima la réunion de la plume et de l'épée, il décidait de mourir fièrement, puisqu'il ne lui était plus permis de vivre avec fierté.

 

Dans son excellente biographie, Mishima ou la vision du vide, Marguerite Yourcenar de­vait écrire: «Il y a deux sortes d'êtres humains: ceux qui écartent la mort de leur pensée pour mieux et plus librement vivre, et ceux qui, au contraire, se sentent d'autant plus sagement et fortement exister qu'ils la guettent dans chacun des signaux qu'elle leur fait à travers les sen­sations de leur corps ou les hasards du monde extérieur. Ces deux sortes d'esprit ne s'amalgament pas. Ce que les uns appellent une manie morbide est pour les autres une hé­roïque discipline». Mishima aura vécu en artiste tragique, acceptant posément de se retirer en «joyeux pessimiste». Dyonisien aurait sans doute conclu Nietzsche.

 

*

Quand du haut du balcon du GQG des Jieitaï, ce 25 novembre fatidique de 1970, Mishima, revêtu de son uniforme moutarde, le front masqué par son hachi-maki, le poing tendu vers la foule qui le conspue, s'écrie «Au nom du passé, à bas l'avenir!», c'est d'abord et surtout à lui-même qu'il s'adresse, lui, subtile réunion d'irrationalisme nippon et d'universalisme européen, ayant décidé d'en finir avec une vie qui ne peut plus répondre à son idéal de beauté phy­sique, de grandeur virile, de pureté olympienne. Sa résolution est prise, recouvrer sa liberté dans l'extase finale de la mortification purificatrice, à l'image de ce Saint Sébastien agonisant peint par Gueno Reni qu'il ne cessera jamais de révérer dans son martyre, allant jusqu'à l'imiter pour le photographe Shinoyama Kishi. Deux mois avant son seppuku, il posait en­core pour un recueil de photos jamais publié et intitulé Otoko no Shi (La Mort d'un Homme). Sur certaines on le voit couvert de sang, sur d'autres mimant son seppuku. «Qu'est-ce que l'éternité», s'interrogeait Pierre Drieu la Rochelle. «Une minute excessivement in­tense». De son amour pour Saint Sébastien devait découler sa passion pour Gabriele d'Annunzio, dont il traduisit Le Martyre de Saint Sébastien et comme lui s'écriant: «J'ai tout risqué, j'ai tout donne, j'ai vaincu», il put lancer fièrement à la face de ce monde vieillot et as­soupi, dernier acte d'insoumission à la fatalité, cet épitaphe: «La mort violente est l'ultime beauté, toujours, et surtout quand on est jeune».

 

Laurent SCHANG,

le 27 juin 1997.

 

mardi, 21 avril 2009

"Cette gaieté paradoxale et prodigieuse"

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« Cette gaieté paradoxale et prodigieuse » [1957]

 

Nous avions exhumé l’article de Lucien Rebatet paru à la sortie de D’un château l’autre. Voici celui de Robert Poulet qui évoque, dans l’introduction, la polémique née au sein de la rédaction de l’hebdomadaire Rivarol.

 

Dans les circonstances difficiles, il vaut mieux être tout à fait clair et tout à fait franc. J’ai lu, comme tout le monde, l’interview que Louis-Ferdinand Céline a donnée à L’Express le mois dernier. J’y ai retrouvé, ni plus ni moins, le ton, l’humeur, les dispositions qui ont toujours distingué l’auteur du Voyage au bout de la nuit. Avec les mêmes facéties truculentes, les mêmes défis burlesques, la même affectation de platitude et de grossièreté, qu’il mettait déjà dans ses discours au temps glorieux de ses débuts, et qui comme alors enveloppent bel et bien une extraordinaire hardiesse de pensée et d’expression... En ayant l’air de se moquer de tout et de lui-même, Bardamu vient d’asséner à ses adversaires qui avaient pensé cette fois le prendre au piège, des vérités comme aucune oreille française n’en a encore entendu depuis dix ans. Et les artificieux propos de Mme Françoise Giroud ¹ ne parvenaient pas une seconde à couvrir cette voix qui porte, jusque dans le registre le plus contenu, quand Céline joue, avec des intonations redoutables, la scène de l’esclave rebelle et puni : du Plaute tranposé dans ce siècle sans élites ; un morceau plus que remarquable, et où l’on ne découvre, mon cher Pierre-Antoine Cousteau, pas un atome de reniement ².

 

   À celui qui ne fut jamais d’aucun clan, et qui se définit justement par cette autonomie totale, qui va jusqu’à la manie, jusqu’à la furie, on ne saurait demander de respecter la « loi du clan » – à laquelle je ne crois pas, quant à moi. Je n’ai de considération que pour la probité individuelle, pour l’amitié, pour la solidarité du malheur, qui est une question de sentiment. Il ne me paraît pas du tout qu’en l’occurrence le persécuté Céline, le méconnu Céline ait enfreint ces règles de pure hygiène morale. Celles-ci ne sauraient exiger qu’un écrivain de vigoureux tempérament cesse de se manifester sous l’aspect qui répond en lui à des nécessités quasi constitutionnelles.

 

L’œuvre et l’outil

 

  Depuis vingt-cinq ans tout juste, l’auteur de Normance a toujours réussi à conjuguer le profond sérieux, qui se dissimule dans son œuvre et dans sa vie, et qui s’y approfondit encore en pathétique, avec la nature orageuse et volcanique de son art ; et aussi avec l’impatience irritée, le besoin de scandale et de contradiction, qu’excite chez lui – c’est sa vocation particulière – la soif de vérité, de pureté, de justice. Dès le commencement, on a reconnu dans cet anarchiste aux visions obscènes, aux propos blasphématoires, un défenseur déçu et meurtri de la tradition. Cet iconoclaste garde en lui le regret des « bonnes façons de vivre ». Sa manière de servir le beau et le vrai, c’est de s’insurger aveuglément contre toutes les impostures qui en tiennent lieu, dans une société faussée à la base ; de s’insurger sans réserve, sans mesure, comme il convient à l’indignation et à la déréliction. Et, comme les choses qu’il faut bafouer ont pris l’aspect des usages et des lois, l’insurrection célinienne s’ouvre par une explosion de délire subversif.

 

   Les révolutionnaires professionnels n’en sont pas encore revenus, d’avoir vu naguère cet isolé, ce vagabond de la pensée, battre une fois pour toutes les records de négation, de destruction, de malédiction qu’ils pensaient avoir établis depuis cent ans, et qui, par comparaison avec la terrible et naïve « table rase » où s’installe Bardamu, paraissent les fruits d’une timidité ridicule. Personne n’avait jamais poussé la dérision de tout aussi loin que le petit médecin de banlieue, mal embouché, sorti d’on ne sait quels remous coloniaux, maritimes, internationaux, populaires, et qui surgit un matin de 1931 sur la scène de Paris.

 

   Dès ses premiers mots, il montra ce que peut être, réellement, un contempteur du monde moderne. Du coup on vit les mœurs, les usages, la sensibilité, le langage même, chanceler sur leurs bases. D’autant que le novateur s’était fabriqué l’outil qu’il fallait ; un style comme on n’en avait jamais vu nulle part, fait d’argot décanté, qu’entrecoupent des  soupirs,   des  haussements d’épaules ; le mouvement d’un discoureur de bistrot qui crache de mépris entre deux onomatopées ou qui a des renvois de vin bourru ; rythme essentiellement vulgaire, qui soutient une émotion parfaitement indépendante, parfaitement aberrante, mais d’une secrète noblesse.

 

Le génie deux fois escamoté

 

  Le miracle se reproduisit, en plus éclatant encore, avec Mort à crédit. Seulement, déjà la tourbe des imitateurs s’était jetée sur le pur produit du célinisme. Dès avant la guerre, les sous-Céline pullulaient ; et maintenant il en est qui n’ont jamais lu leur modèle, qui n’ont jamais entendu prononcer son nom, ayant trouvé leur provende chez des épigones et des caudataires qui l’avaient pesamment remâchée ; et prospérant en outre dans une atmosphère intellectuelle que régit la conspiration du silence, au détriment de « l’auteur le plus original qui soit apparu en Europe depuis un siècle » (dixit Middleton Murry) ³.

 

   Que reprochent à Céline les critiques qui pendant deux lustres l’ont supprimé de l’histoire littéraire, exclu de la vie littéraire, jeté moralement dans des oubliettes aussi profondes que celles dans lesquelles le grand écrivain languit au Danemark, pour avoir « vendu les plans de la Ligne Maginot » (ô alliance de la méchanceté et de la sottise, dont Hamlet devait rire amèrement à Elseneur, distante d’une portée de mitraillette) ? Ils lui reprochent (au nom d’un principe né de la guerre) d’avoir écrit des pamphlets contre les Juifs avant la guerre.

 

   L’extravagance furibarde de Bagatelles pour un massacre et des Beaux draps avait sa source – c’est visible pour qui étudie de sang-froid ces pages pleines de divagations, d’imprudences, de méprises monumentales, pêle-mêle avec quelques beautés sulfureuses – dans l’angoisse que la vue trop exacte des hécatombes imminentes, voulues par les uns, acceptées par les autres, inspirait à un homme dont la pensée première, la définition initiale est l’horreur des maux évitables, avec la rage de crier cette horreur, fût-ce dans la confusion extrême qui accompagne les grandes crises de prophétisme.

 

   Quoi qu’il en soit, l’événement Céline, pour des motifs qui ne tenaient pas à la littérature, et même qui ne se rattachaient pas aux idées de résistance et de collaboration, étrangères à ce j’men-fichiste fabuleux, à ce parangon d’anarchie, disparut d’une époque qui, sans lui, se révélait inexplicable. La jeunesse française ignore le romancier contemporain dont l’attitude, l’esprit, le vocabulaire, répondent le mieux au chaos mental et moral dans lequel elle se complaît, se raccrochant à des interprètes beaucoup moins qualifiés, beaucoup moins expressifs – et surtout beaucoup moins libres.

 

Quelques petites choses

 

   Aux hommes de lettres « engagés », auxquels la nouvelle génération  a  un  moment prêté l’oreille, faute de mieux, la révélation célinienne oppose, au contraire, le spectacle d’une âme soucieuse de se dégager à fond, de se dégager de tout, pour avoir senti soudain que toutes les contraintes sociales, avec les doctrines et les institutions dont elles découlent, étaient en train d’appesantir sur l’Occidental du XXème siècle une énorme chape de mensonge, faits de la corruption et de la falsification du patrimoine humain. Procédant du même état d’âme, le Voyage fit le même bruit d’écroulement que le dernier effort de Samson. Si les jouisseurs du désordre, les adorateurs de l’absurde, étaient conséquents avec eux-mêmes, ils se tourneraient de ce côté, pour voir enfin sortir de la terre, au milieu des décombres que Louis-Ferdinand Céline remue avec de sanglants sarcasmes, la pousse verte du naturel, en attendant la fleur de la charité, que n’ont pas étouffée toute cette colère et toute cette haine.

 

   S’il y a dans ce temps-ci un écrivain qui l’exprime en plein, et qui même anticipe sur le temps à venir, avec des mots que sans doute on ne comprendra tout à fait qu’au-delà des effondrements qui y conduisent, c’est bien celui-ci, dont pourtant la plupart de nos successeurs n’ont aucune idée par la faute des témoins prévenus et des serviteurs infidèles de la littérature.

 

   Ils tablèrent d’abord sur l’absence du personnage, puis sur son affaiblissement. Depuis son retour en France, l’auteur de L’Église a publié trois livres, dont les deux premiers, malgré des passages étonnants, que lui seul pouvait écrire, avaient quelque chose de blessé, un souffle rauque de grabataire ; un creux s’ouvrait au cœur de cette élocution toujours abondante et puissante. Puis, il y eut les Entretiens avec le professeur Y, où s’étirait et se gonflait une pugnacité convalescente. Mais voici D’un château l’autre. Et nul ne peut nier que le grand Céline soit revenu.

 

   C’est si vrai que les chevaliers de la distraction calculée, les spécialistes de la bouche en cul-de-poule et de la mine-de-rien ont compris qu’il fallait changer de tactique. Du moment qu’on renonçait à faire comme si l’homme et l’œuvre étaient morts ou mieux, n’avaient jamais existé, il n’y avait pas de moyen terme : il fallait se précipiter à leur rencontre. Ainsi s’explique le tumulte exceptionnel qui s’est élevé dans la presse depuis trois semaines. Tout d’un coup, le réprouvé, le maudit, l’intouchable, est devenu l’un des thèmes majeurs de la publicité journalistique, l’un des bouffons favoris que ses organisateurs proposent au public. Et ainsi, tout en jouant les Frontins et les Scapins, au commandement et conformément à sa pente, Céline a-t-il pu se débarrasser de deux ou trois petites choses qu’il avait sur le cœur...

 

Une réalité seconde

 

   Passons outre à ces numéros de cirque, mais d’un cirque sur lequel plane un drame. Et arrêtons-nous devant le livre qui a provoqué la rentrée du clown (voir les conséquences du fait dans un célèbre conte d’Edgar Poe 4 ).

 

   On sait que les romans céliniens sont toujours tirés d’une réalité interprétée et transverbérée à laquelle s’applique le martèlement du verbe, dont les coups rapides et répétés finissent par forger une réalité seconde, chargée de poésie frénétique et sarcastique, avec une épouvante au bout. Cette fois, c’est sur ses souvenirs d’Allemagne – où il dut fuir en 1944, menacé de mort, sans nul motif – que l’auteur a travaillé. Il en résulte que, par exemple, on voit surgir à Sigmaringen une image du Maréchal Pétain, une image de Pierre Laval, et beaucoup d’autres images dont chacune a l’air d’être quelqu’un, de porter un nom. Purs cauchemars, où naturellement n’interviennent aucune des délicatesses ou des précautions que l’auteur a toujours instinctivement méprisées, à tort ou à raison, ne trouvant son maximum d’expressivité que dans l’irrespect intégral. Néanmoins, je défie bien les esprits les plus mal disposés de retirer d’un tel tableau une idée amoindrie des personnes qu’il met en scène.

 

   Cela éclate surtout aux yeux de ceux qui prennent la peine de lire jusqu’au bout ces trois cent cinquante  pages  à  la  température d’ébullition. Il en sera récompensé par des plaisirs, par des surprises, dont les lecteurs des romans à la mode, si infirmes, si timorés sous leur masque de fausses audaces, ont perdu l’habitude. Il y a, notamment, une hallucination au bord de la Seine, qui rappelle dans le féerique et dans l’effrayant la fameuse « galère » du Voyage, et laisse loin derrière elle les plus échevelés pensums surréalistes. Il y a l’errance en chemin de fer. Il y a l’écriture, qui est encore plus divisée qu’avant ; ce n’est plus qu’un halètement musical, comme dans les premiers Stravinsky. Il y a cette gaieté paradoxale et prodigieuse, où entrent des éléments enfantins, des éléments jupitériens, à mi-chemin entre le petit garçon qui faisait des niches à ses copains en poussant dans Paris la voiture de sa mère dentellière, et le démiurge qui se moque de sa création au moment de la détruire. 

 

   En ce cas, le monde finirait par un cri de désespoir, qui ressemblerait furieusement à un cri de joie. C’est pourquoi l’on peut croire qu’au fin fond de la dissolution universelle à la Céline, il y a un noyau de santé. Puisse-t-il en tirer tout le suc, le cher homme !

 

   En attendant, voici son bouquin. Le troisième de sa main qui ait chance de défier les siècles. Citez-moi seulement une dizaine de contemporains, dans les trois générations, qui puissent en dire autant !

 

Robert POULET

(Rivarol, 4 juillet 1957)

 

 

Notes

 

1. C’est François Giroud qui avait rédigé le chapeau rédactionnel de cette interview paru dans L’Express (14 juin 1957) sous le titre « Voyage au bout de la haine ».

2. Poulet répond ici à l’article de P.-A. Cousteau paru dans Lectures françaises (juillet-août 1957) sous le titre « Fantôme à vendre ».

3. John Middleton Murry (1889-1957), critique littéraire anglais, époux de Katherine Mansfield.

4. « La Barrique d’amontillado », avec son personnage tragique de Fortunato.

samedi, 18 avril 2009

Il federalismo etnico di Saint Loup

Il federalismo etnico di Saint-Loup

 Jérôme Moreau : Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

 “La gioventù francese che ieri viveva nelle tenebre, a cui mancava un ideale, che aveva perso la fede nei destini della patria, sarà abbagliata domani dal compito che l’attende: rifare l’Europa…” (1).

Saint-Loup Per la destra, per lo meno quella che non lo disprezza, Marc Augier detto Saint-Loup è il romanziere della civiltà minacciata e dell’Europa delle patrie carnali… Due temi che sono punto di riferimento dopo Solstice en Laponie, pubblicato nel 1939, dove l’autore espone già il suo timore per l’evangelizzazione e la colonizzazione delle popolazioni lapponi da parte dei mercanti della morale. Riflessione che prosegue sotto l’occupazione, soprattutto negli articoli sui Baschi ed i Bretoni dove Saint-Loup pone i primi fondamenti del “federalismo etnico” quale principio su cui vuole organizzare l’Europa (2). Sia detto tra parentesi, la difesa dei popoli minacciati non si limita nel suo spirito al solo territorio europeo giacché egli affermava nel 1941, in un articolo sull’avvenire dell’Impero francese: “Il nostro dovere in Africa è quello di ristabilire nel quadro storico e razziale una grande civilizzazione araba ed una grande civilizzazione nera (3)”.

Ed è sempre per l’Europa delle etnie che Saint-Loup ha seguito la fede gammata ed è andato a combattere sul Fronte dell’Est nel 1942. Egli era in effetti persuaso fin dal 1941 che la Germania preparasse una pace fondata su un federalismo etnico europeo. A questa convinzione si aggiunge ancora l’idea, diffusa precedentemente negli ambienti tedeschi rivoluzionari conservatori, che il futuro dell’Europa si trovi ad Est, in una Russia battuta dove si potranno attingere nuove forze: economiche, razziali, spirituali.

Dopo la sconfitta è difficile per molti comprendere come Saint-Loup abbia potuto interpretare – benché non sia stato il solo – il pangermanismo hitleriano come un tentativo di unione dell’Europa sulla base delle etnie che la compongono. Otto Strasser che manifestava negli anni trenta la medesima volontà, l’intenzione di riorganizzare l’Europa su basi etnico-linguistiche, entrerà presto in conflitto con i seguaci ortodossi di Hitler. Probabilmente questo atteggiamento era dovuto all’anticomunismo fanatico che Saint-Loup aveva sviluppato a causa del suo contatto con i militanti di sinistra nel periodo tra le due guerre mondiali (4). L’esperienza del fronte russo segna però un radicale cambiamento nell’atteggiamento di Marc Augier, che non si fa più illusioni sulle intenzioni tedesche. Questa tendenza è manifestata in alcuni articoli su “Combattant Européen” che oscillano tra la fedeltà completa ed una certa presa di distanza dalle posizioni ideologiche tedesche. Così scriveva a qualche mese di distanza “Hitler non è che un uomo (5)” mostrando così il suo rifiuto verso un’Europa a dominazione tedesca: “Non si tratta di fonderci in una specie di europeo. Non vogliamo essere germanofili o russofili. Vogliamo rimanere noi stessi, con la nostra eredità nazionale, pur adottando uno stile di vita moderno. E vogliamo arricchire questo stile con il genio francese che non è un mito (6)”.

La contraddizione apparente di questi due propositi deve essere compresa con lo iato tra un giuramento di fedeltà incondizionata e il pensiero proprio di Marc Augier. Questa confusione tra l’aspetto sentimentale e quello dottrinario che ha potuto, dopo il 1945, far passare Saint-Loup come un settario del Nazionalsocialismo proprio quando egli considerava lo stato nazione come un principio politico storicamente superato. Non è tuttavia errato osservare che questa contraddizione rimane in Saint-Loup per quelli che dopo la guerra hanno voluto far coincidere la sua esperienza nelle Waffen SS con la sua concezione del mondo. Nelle opere Götterdämmerung, Les Volontaires e Les Hérétiques, Saint-Loup, manifesta un viscerale attaccamento ai suoi camerati lasciando libero corso ai suoi fantasmi e concepisce l’esistenza di una frazione oppositrice federalista che avrebbe tentato di affermarsi all’interno del regime nazionalsocialista.

Jean Mabire, Les Jeunes Fauves du Führer Saint-Loup non ha mai deposto l’uniforme. Rifare l’Europa! Ma perché l’Europa delle etnie, delle patrie carnali? Perché nello spirito di Saint-Loup questa è la forma politica che più ha la forza di resistere alle ideologie massificanti - liberalismo, cristianesimo, comunismo - nascoste sotto la maschera dell’universalismo e dell’internazionalismo. Perché gli stati nazione hanno confini ideologici. Perché la patria carnale, terra dei padri, risponde ad una aspirazione di identità naturale. “L’Europa deve dunque essere riconsiderata a partire dalla nozione biologicamente fondata del sangue (…) e degli imperativi tellurici (…). Non può esistere che come somma di piccole patrie carnali nutrite di questa doppia forza. Infatti più lo spazio unificato si estende, più la realtà razziale si diluisce per mescolamento e più il territorio sfugge alla proprietà del singolo a profitto della massa (7)”. Saint-Loup fa della razza il motore della storia di un popolo e dell’ibridazione la principale minaccia che grava su una civiltà. Poiché l’omogeneità razziale è un elemento di stabilità.

La dottrina di Saint-Loup non si manifesta dunque sotto la forma di un nazionalismo aggressivo ma si avvicina maggiormente ad un differenzialismo etnico. In altre parole solo colui che ama e vuole difendere il suo popolo è capace di amare ed apprezzare i popoli stranieri. L’affermazione del diritto alla differenza si sostituisce all’imperialismo e Saint-Loup può stigmatizzare l’universalismo come ideologia razzista. E’ proprio quello che si vede in La Nuit commence au Cap Horn, eccellente libro con i caratteri dell’affresco epico: gli indiani della terra del fuoco sono vittime di un pericoloso progetto di un pastore evangelico pieno di buone intenzioni ma incapace di concepire un modo d’esistere diverso dal suo. Un popolo soccombe al colonialismo cristiano perché il cristianesimo è inadatto all’ambiente in cui questo popolo evolve. La morte di una civiltà attraverso l’arrivo di missionari, funzionari, commercianti. Questa tematica è anche quella di La peau de l’aurochs (8) pubblicato per la prima volta nel 1954 e finalmente ristampato. Anche in questo libro una civiltà è minacciata di scomparire; un’invasione dittatoriale, la conquista della meccanizzazione che si sostituisce poco a poco alla tradizione rurale e cattolica locale.

Nelle opere di Saint-Loup la patria carnale appare allo stesso tempo come un’alternativa politica, sociale e religiosa. Politica inizialmente, poiché rappresenta un rifugio contro l’imperialismo. Sociale in seguito, poiché mira a rafforzare il senso della comunità, che è istinto puramente etnico. Si basa su ciò che Saint-Loup chiama “socialismo dell’azione” che è destinato a diventare la pietra angolare della nuova Europa e che si definisce come un socialismo radicato, un atteggiamento del cuore, della volontà, di opposizione alla logica astratta del marxismo-leninismo. La patria carnale è infine un’alternativa religiosa che ci permette di ricollegarci alle nostre radici pagane. Ad una concezione eroica della vita che il giudeo-cristianesimo, religione salvifica, ha soffocato. La patria carnale deve concepirsi in un certo senso come un ritorno alle fonti spirituali e sensoriali dell’uomo. “Si tratta per l’individuo di attingere alle fonti di vita eroiche ed estetiche, di ricevere quindi l’insegnamento del combattimento naturale e di tutto ciò che implica: selezione delle aristocrazie con la lotta per la vita, nuova nozione del diritto che si stabilisce più con l’azione del forte e del migliore, infine ricerca ed applicazione della nozione estetica e della vera grandezza (9)”. Il federalismo etnico di Saint-Loup porta in realtà una nuova concezione della società. Un paganesimo eroico e popolare che rimanda ad un’immagine più accettabile della persona umana.

N'oubliez jamais - Saint-Loup Nonostante le apparenti contraddizioni, l’itinerario politico di Saint-Loup obbedisce ad una logica perfettamente coerente, dove la volontà di affermarsi caccia le contrazioni ideologiche. Prende forma un mondo di grande salute fisica e morale dove tutti i popoli hanno il diritto di esistere, purché radicati nelle loro proprie culture. Nel tempo, Saint-Loup ha tessuto un opera sincera attraverso la quale si è espresso uno spirito libero, che ha pagato la sua libertà con la cospirazione del silenzio di cui si circonda il suo nome.

Note

1 Marc Augier, “Jeunesse d’Europe, unissez-vous!”, Conversazione del 17 maggio 1941 sotto gli auspici del Groupe Collaboration à la Maison de la Chimie - Paris.
2 Marc Augier, A la recherche des forces françaises, in La Gerbe, 4-9-1941 e 2-10-1941.
3 Marc Augier, La route de l’huile, in La Gerbe, 6-2-1941.
4 Occorre sempre avere lo spirito per comprendere l’itinerario politico di Saint-Loup, che ha fatto le sue prime esperienze politiche nell’ambito della sinistra “Fronte Popolare”. “Infatti Marc Augier fu uno dei principali animatori e ideologi del movimento Auberges de jeunesse (ostelli della gioventù, ajisme), fu redattore principale del periodico Cri des Auberges de Jeunesse (rivista del centro Laïc degli Auberges de Jeunesse), incaricato nel gabinetto di Léo Lagrange sotto governo del fronte popolare nel 1936 e vicino a Jean Giono, il suo riferimento ideale e maestro, con cui partecipò all’esperienza pacifista del Contadour. Per tutto questo periodo del dopo guerra, sono il pacifismo e volontà d’unire la gioventù europea che motivano il suo impegno. Rappresentante del CLAJ al Congresso Mondiale della gioventù che ebbe luogo negli Stati Uniti nel 1937, si rese tuttavia conto che i delegati comunisti si consegnavano ad una intensa propaganda bellicista contro la Germania e l’Italia. Da quella data manifesta i suoi primi sentimenti anticomunisti. Varie volte, dopo il 1941, Marc Augier considererà del resto la crociata europea contro il bolscevismo come il logico prolungamento della sua azione passata nell’ambito del movimento Ajiste.
5 Marc Augier, La fidélité des Nibelungen, in Le Combattant Européen, 30-9-1943.
6 Marc Augier, Ce siècle avait deux ans, in Le Combattant Européen, 15-6-1943.
7 Saint-Loup, Une Europe des patries charnelles?, in Défense de l’Occident, n°136, marzo 1976.
8 Saint-Loup, Peau de l’aurochs, Paris, Editions de l’Homme libre, 2000.
9 Marc Augier, Les Skieurs de la nuit, Paris, Stock, 1944, pp. 16-17.

In edizione italiana sono usciti presso l’editore Volpe e Sentinella d’Italia (via Buonarroti 4 – 34074 Monfalcone) le seguenti opere di Saint-Loup:

Saint-Loup, I volontari europei delle Waffen SS, Volpe, 1967 (curatore Adriano Romualdi).
Saint-Loup, Il sangue d’Israele, Sentinella d’Italia, 1975.
Saint-Loup, I velieri fantasma di Hitler, Sentinella d’Italia, 1978.
Saint-Loup, I volontari. Storia della LVF contro il bolscevismo, Sentinella d’Italia, 1983.
Saint-Loup, Gli eretici. Storia della Divisione SS “Charlemagne”, Sentinella d’Italia, 1985.
Saint-Loup, I nostalgici, Sentinella d’Italia, 1991.

Traduzione italiana di Harm Wulf.


Jérôme Moreau

jeudi, 16 avril 2009

La pazza del Bargello - Il d'Annunzio pagano

La pazza del Bargello.
Il D’Annunzio pagano

di Luca Leonello Rimbotti

Fonte: mirorenzaglia [scheda fonte]

Come sappiamo, nella cultura europea a cavallo tra Otto e Novecento - corrosa dal degrado positivista - D’Annunzio ha significato la rivolta romantica e dionisiaca del gesto audace, dell’istinto vittorioso, dell’immersione nella sensualità selvatica. Era la rivendicazione di un patrimonio di atavismi che il razionalismo moderno stava spegnendo con la sua violenta irruzione nei mondi della tradizione: di qui l’amore per la bellezza dorica - che l’Immaginifico assaporò nella sua crociera greca del 1895 -, per il lusso dell’estetica, per la volontà di potenza che crea il Superuomo.

In D’Annunzio c’è la sintesi del volontarismo di Nietzsche, dello slancio vitale di Bergson e della filosofia dell’azione di Blondel: in lui dunque si riassumono al meglio - nella poesia, nella narrativa, nella vita vissuta e poi nell’interventismo eroico del “poeta-soldato” - tutti i patrimoni culturali e ideologici che la vecchia Europa rilancerà in chiave tradizionale e anti-modernista. E con D’Annunzio, infatti, avremo il tipico rappresentante di quella figura di esteta armato che dominerà gli eventi a partire dalla guerra del 1914: da Jünger a Marinetti, da Soffici a Péguy ai vorticisti inglesi.

I messaggi di egualitarismo democratico e di individualismo borghese con cui il progressismo stava già allora sfibrando le radici europee, vennero rovesciati con una rivolta neo-pagana, nuova e antica, intesa a impugnare l’identità arcaica come un’arma estetica, letteraria e, infine, anche politica. Nel tardo Ottocento, D’Annunzio è già una guida per queste energie antagoniste, che saranno l’avanguardia europea delle future rivoluzioni nazionali del XX secolo.

Incastonato tra La Vergine delle rocce del 1895 e Il Fuoco del 1900, cioè i due bastioni del sovrumanismo nietzscheano rielaborato da D’Annunzio, c’è un piccolo capolavoro di solito trascurato dagli esegeti - forse perché al frivolo pubblico parigino dell’epoca non piacque il suo andamento sofoclèo e a quelli di oggi giunge estranea ogni forma di pensiero mitico -, ma che ben si inserisce nel filone neo-pagano, che è il fulcro di tutta l’opera dell’Inimitabile. Alludiamo al Sogno di un mattino di primavera, dramma “rinascimentale” buttato giù alla svelta nel 1897, nello spazio di pochi giorni, per placare il dispetto di Eleonora Duse [nel ritratto sotto a sinistra], cui pochi mesi prima era stata preferita Sarah Bernhardt nel ruolo di protagonista della Città morta.

In questo apice di vis tragica che è il Sogno, D’Annunzio dà fondo alla sua inesauribile vena visionaria. Del personaggio principale, Donna Isabella, la Demente, impazzita per essersi vista uccidere dal marito l’amante stretto tra le braccia, egli fa un’icona dell’uscita dalla normalità attraverso il più atroce dolore. E dell’ingresso in quell’arcano spazio aperto che è la follia, la grande follia. D’Annunzio scrisse il Sogno di un mattino di primavera in piena febbre nietzscheana: aveva da poco scoperto la grandezza recondita del Solitario, fu anzi tra i primi in Europa a capirne e divulgarne il genio rivoluzionario, ne rimase impregnato e ne impregnò molta parte della sua opera: pensiamo al Trionfo della morte, del 1894, in cui il “superuomo” Giorgio Aurispa esalta il «sentimento della potenza, l’istinto di lotta e di predominio, l’eccesso delle forze generatrici e fecondanti, tutte le virtù dell’uomo dionisiaco».

E proprio nel Sogno noi ritroviamo, schermati dietro il tragico destino individuale della pazza Isabella, questi stessi valori. Ciò che D’Annunzio definiva essenzialmente come la «giustizia dell’ineguaglianza». La Demente - creatura per definizione ineguale, inassimilabile alla normalità che appiattisce e livella - diventa il lato femminile e notturno del suprematismo virile e attivo proclamato da D’Annunzio. Chiusa in un micromondo claustrale, circondata dalle attenzioni cliniche dei “normali”, la pazza d’amore è lo specchio teatrale della follia vera in cui si rinchiuse Nietzsche. Ricordiamo che quando D’Annunzio scriveva questa sua prosa tragica, Nietzsche era ancora vivo, ma già da anni tutto avvolto da una pazzia inespressiva, che aveva ormai già dato tutto, e che era il prezzo che dovette pagare per aver troppo a lungo fissato le voragini della mente. Come l’Isabella di D’Annunzio, Nietzsche visse i suoi ultimi anni sorvegliato a vista dai “vivi”, per lo più ignari di quale profonda sapienza ci possa essere in simili fughe dalla “normalità”.

Bisogna tornare più spesso al D’Annunzio “minore”, a quello del Libro ascetico della Giovane Italia, dei Taccuini, della Vita di Cola di Rienzo… e a quello del Sogno di un mattino di primavera. Quando ripenso al D’Annunzio folgorale e insieme notturnale, alla sua capacità medianica di trasferire nei posteri i suoi mondi di apparizioni e di presenze arcane attraverso sedute di veri e propri transfert scenici, mi torna alla mente una rappresentazione del Sogno a cui ebbi modo di assistere anni fa, nel cortile del Palazzo del Bargello di Firenze. Qui prese corpo, dapprima lentamente, poi in maniera trascinante, la rarissima sintesi tra l’eloquenza traboccante della parola dannunziana e l’eloquenza muta dell’antica pietra squadrata: il Bargello, austero palazzo medievale. Questo prezioso vestigio della Firenze gotica e ghibellina, spazio di severità duecentesca un tempo sacrario del potere popolare, sede del Podestà e della Guardia del Capitano del Popolo, eretto da un Lapo Tedesco che fu forse il padre di Arnolfo di Cambio, è il luogo che meglio si prestava alla congiura dannunziana tra raffinatezza dei sensi e rigore della volontà politica. Qui D’Annunzio soleva venire e tornare, fermandosi davanti alle opere del Verrocchio, di Benedetto da Maiano, del Laurana…dai suoi Taccuini sappiamo che fu più volte al Bargello negli anni della sua residenza alla Capponcina di Firenze: aggirandosi tra quei capolavori, gli venne l’idea di fare una delle sue coltissime citazioni. E nel Sogno fa dire a Isabella di un busto di Desiderio da Settignano che lei teneva amorevolmente sulle ginocchia, consumandolo di pianto e di carezze.

Il Sogno di un mattino di primavera è un cammeo di prodigi. Qui D’Annunzio l’occulto, l’uomo d’arme che conosceva le tecniche dell’estasi, che invocava gli attimi visionari, che era sciamano, taumaturgo e profeta, ci mette a contatto con una creatura esiliata dalla vita, ma aperta a valori di eccezionale trascendenza. La Pazza si è fatta fare una veste verde, vuole diventare natura, vuole essere selva: «Ora potrò distendermi sotto gli alberi…non s’accorgeranno di me…sarò come l’erba umile ai loro piedi…vedo verde, come se le mie palpebre fossero due foglie trasparenti…io potrò dunque con gli alberi, con i cespugli, con l’erba essere una cosa sola…». E si fa guanti di rami, stringe ghirlande, si fascia di fili d’erba, aspetta di farsi bosco per rivivere in natura la natura selvaggia del suo amore. Impossibile non riandare, davanti a tali celebrazioni, a quella passione per la dimensione dionisiaca e panteista che, ad esempio, traspare in certe inquadrature del Trionfo della morte: l’epopea del «dominatore coronato  da quella corona di rose ridenti di cui parla Zarathustra…». Qualcosa che ricorre di nuovo quando Giorgio Aurispa il solitario, nell’osservare il tramonto, sente pulsare gli annunci di Zarathustra nel trionfo di una natura esuberante, irta di colori che eccitano l’animo e fondono l’uomo con le più enigmatiche energie del creato. Perfetta creazione silvestre, simbolo compiuto di pagana immersione nella natura pànica, l’Isabella del Sogno reca anche archetipi di morte, di sangue e di scatenata sensualità.

Essa ci rimanda con naturale similitudine alla Wildfrau nordica, la “vergine selvatica” che percuote le notti durante la caccia selvaggia di Wotan, così come compare nel mito indoeuropeo della ridda, che accomuna mistero, magia e ancestrali terrori, giacenti nella sfera della natura barbarica e nel subconscio atavico dell’uomo: purissimo scrigno da cui sale - quando la si sa udire - la voce del sangue primordiale. Come spesso accade alla tregenda pagana, la morte e il dolore non sono tuttavia disgiunti da una sensualità istintuale. E, infatti, profondamente sensuale è il contatto di Isabella col corpo dell’amato morente, da cui sgorga sangue come da una fonte inesauribile. Il suo trauma si muta allora in una sorta di allucinazione orgasmica:

«…La sua bocca mi versava tutto il sangue del suo cuore, che mi soffocava; e i miei capelli n’erano intrisi; e il mio petto inondato; e tutta quanta io ero immersa in quel flutto…com’erano piene le sue vene e di che ardore! Tutto l’ho ricevuto sopra di me, fino all’ultima stilla; e gli urli selvaggi che mi salivano alla bocca io li ho rotti coi miei denti che stridevano, perché nessuno li udisse…».

In brani di rapimento erotico come questo - in cui, tra l’altro, non si è lontani neppure dagli estatici abbandoni alla voluttà del sangue presenti, ad esempio, nelle lettere di Santa Caterina da Siena: «Annegatevi nel sangue del Cristo crocifisso, bagnatevi nel sangue, saziatevi di sangue…» -, noi riconosciamo una miriade di rimandi alla sacralità pagana e neo-pagana del sangue, ai suoi occulti poteri fecondanti, alle sue qualità misteriche di infondere vita ulteriore, e proprio quando fuoriesce in fiotti, come seme di vita, da un corpo in travaglio di morte.

Basterà ricordare la libido di sangue ossessivamente presente nella tragedia greca, capace di celebrare l’amore di rango come una lotta spasmodica che non fa più differenza tra la vita e la morte, che riconosce nella carne viva, nel segno sensuale, un universo infinito, confine tra saggezza e follia scatenante: Pentesilea, ad esempio,  di cui Kleist fece un superbo affresco del dramma romantico…ferro di lame e di scudi, ma anche di cuori. Tutto questo ebbe riverberi nella nostra poesia nazionalista dei poeti-soldati volontari nella Grande Guerra: amore e lotta celebrati in nozze mistiche di sangue. Ad esempio, in Vittorio Locchi o in Giosuè Borsi, il sangue dell’eroe caduto e riverso al suolo, con la bocca a toccare il terreno come in un bacio, diviene seme generatore, potenza che feconda la terra redenta, paragonata a una sposa che si lasci inondare il grembo dal flusso ancora caldo dello sposo morente. Nel poemetto di Locchi, un tempo famoso, intitolato La sagra di Santa Gorizia, la città da liberare attende il suo eroe come un’amante fremente: «Amore, amore dolce, mi vedi? Amore dolce, mi senti? - chiede l’amata - Quanti tormenti ancora, quanti tormenti prima degli sponsali?». È un misticismo di visionaria trance erotico-guerriera, che certo rinnova esplicitamente gli arcaici connubi di Eros e Thànatos. Ed è in un trionfo di celebrazioni al benigno destino, alla vita che vince la morte, alle armi che liberano lo spirito, che avviene alla fine l’apoteosi trasfiguratrice dell’unione tra la città-femmina, finalmente liberata, e il vittorioso eroe liberatore.

L’amore - ma non solo quello letterario, proprio quello vero…ma certo non quello “comune”…- è sempre a un passo dalla pazzia: c’è un frammento del Sogno, in cui Isabella viene assalita da gelido terrore nel vedere una coccinella posatasi sul suo candido braccio e da lei creduta una goccia di sangue: esatta trasposizione della demenza che impietrisce Parsifal nell’osservare la rossa goccia di sangue di un passero sulla neve immacolata…

Detto per inciso, sottesa al Sogno leggiamo una - certo non casuale - combinazione di fine simbolismo cromatico: il bianco dei lunghi capelli e dello spettrale volto di Isabella, il verde della sua mimesis selvatica e il rosso del sangue dell’amato: ed ecco qua i tre colori per i quali l’Orbo Veggente andrà a rischiare la vita, ormai anziano, sui fronti della Grande Guerra…È in situazioni come queste che noi, più che altrove, apprezziamo la fantastica capacità dannunziana di intrecciare una raffinata sensibilità con il primario istinto di vita. Se c’è un luogo in cui la follia diventa mistica percezione dell’Altrove, magia di poteri visionari, potenza che fonde in un unico rogo  il dolore e la gioia, questo è l’amore pazzo e disperato: quello profondamente filosofico di Nietzsche, come quello semplicemente umano di Isabella. D’Annunzio, alla sua maniera di grande sensitivo, li visse e li rappresentò entrambi.

E li rappresentò anche nella vita vera vissuta, magari alla maniera di un sacerdote pagano che solennizzasse i riti della terra e del sangue. Tra i suoi amori folli, c’era infatti, e non minore, anche quello per l’Italia. Un suo legionario ricordò un giorno di  come, già vecchio e cadente, al Vittoriale ogni tanto il Comandante amasse celebrare occulte comunioni insieme ai suoi fedelissimi: «sovente, la notte, adunato un piccolo numero di fedeli, alla rossastra luce fantastica di torce resinose, parla della nostra terra e della nostra stirpe, della nostra guerra e dei nostri Morti, dei nostri mari e delle nostre glorie; qui i compagni lo ritrovano, lo rivedono e lo risentono, come in trincea e come a Fiume». Una liturgia nibelungica per eredi della razza di Roma: esisteranno ancora da qualche parte, dispersi, solitari, silenziosi, uomini simili?