Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

vendredi, 14 septembre 2018

La Post-démocratie, une démocratie sans liberté ?

democratiepost1.gif

La Post-démocratie, une démocratie sans liberté ?

Michel Lhomme ♦
Philosophe, politologue.

Ex: https://metamag.fr

La montée du populisme, l’hyper libéralisme, la désinformation et les manipulations électorales sont les questions abordées par les derniers best-sellers politiques internationaux comme How Democracies Die (« Comment les démocraties meurent ? ») de Steven Levitsky et Daniel Ziblatt; How Democracy Ends (« Comment les démocraties se terminent ? ») de David Runciman ou le seul ouvrage déjà traduit en français, Le peuple contre la démocratie de Yascha Mounk [L’Observatoire, Paris 2018]. Tous ces ouvrages sont imprégnés de pessimisme sur l’avenir du pire système politique, à l’exception de tous les autres, comme Churchill le définissait. En France, au contraire, nos universitaires organiques continuent d’animer des séminaires sur la démocratie.

Le dernier rapport de Freedom House qui analyse les données de 195 pays pour évaluer leur état de santé démocratique, souligne que 2017 a marqué 12 années consécutives de détérioration globale de l’intégrité des processus électoraux en raison de facteurs tels que l’argent excédentaire dans les campagnes ou la manipulation médiatique. Selon Freedom House, l’année dernière, dans 71 pays, les droits politiques et civils et les libertés publiques ont été réduits et seulement 35 ont été améliorés. Depuis 2000, au moins 25 pays ont cessé d’être démocratiques. Pendant la guerre froide, les coups d’État ont été responsables de 75% des cas de rupture démocratique, en particulier en Afrique et en Amérique latine. Aujourd’hui, ces méthodes grossières de coup d’état militaire pour capturer le pouvoir avec la violence ont cédé la place à des stratégies beaucoup plus sophistiquées pour déformer ou déformer la volonté populaire au profit des puissants, quitte même parfois à faire revoter les électeurs (idée qui commence à prendre de l’ampleur en Angleterre face au Brexit) ou à ne pas tenir compte de leur vote (le référendum français sur la constitution européenne). Le paradoxe de cette nouvelle voie électorale vers l’autoritarisme est que les nouveaux liberticides utilisent les institutions mêmes de la démocratie de manière graduelle, subtile et même légalement pour l’assassiner.

À l’ère du numérique, le pouvoir politique dispose désormais de multiples instruments pour dénigrer la volonté populaire sans recourir à la violence, à la répression. Dans sa large gamme d’options, le pouvoir utilise la manipulation des documents de recensement, les scandales créés de toutes pièces par « la transparence », les calendriers électoraux (les législatives post-présidentielles), l’exclusion arbitraire de candidats, le redécoupage des circonscriptions. De fait, le vol électoral parfait est celui qui est perpétré avant que les gens votent.

Pour les politistes, il n’y a rien à redire à 2017 : les Français se sont librement exprimés, même si au final Emmanuel Macron ne représente que 15 % des inscrits. À l’échelle mondiale, seulement 30% des élections entraînent un changement de gouvernement ou un transfert de pouvoir à l’opposition. Et ce chiffre est encore plus bas dans les pays ayant un passé autoritaire récent. De fait, il n’y a pas un seul autocrate du 21ème siècle qui n’ait appris qu’il est plus facile de rester au pouvoir à travers des « exercices démocratiques », ce qui explique le paradoxe que même s’il y a plus d’élections que jamais, le monde devient moins démocratique.

Mais fi du processus électoral désormais maîtrisé pour que la populace ne parvienne jamais au pouvoir, la post-démocratie est en train d’opérer une synthèse encore plus radicale celle de l’autoritarisme numérique et de la démocratie libérale utilisant l’intelligence artificielle et les données recueillies pour surveiller et prévenir tout dérapage oppositionnel à la vision mondialiste car le numérique ne promet pas seulement une nouvelle économie  pour réformer le monde, il promet aussi aux gouvernements de lui permettre de mieux comprendre le comportement de ses citoyens pour les surveiller et les contrôler en permanence. Cette nouvelle réalité citoyenne offrirait ainsi aux gouvernants une alternative possible à la démocratie libérale d’hier restée trop gênante parce que source d’oppositions argumentatives. Il ne s’agirait plus d’éduquer mais de formater, à la lettre une éducation non plus critique à la Condorcet mais de la confiance à la Blanquer, soit la confiance en l’autorité immuable de l’administration des choses, prélèvement à la source et contrôle du privé par impôt et compteur link en prime, par solde de toute monnaie papier, par suivi informatique des déplacements et des pensées.

L’intelligence artificielle permettra aux grands pays économiquement avancés d’enrichir leur citoyenneté sans en perdre le contrôle. Certains pays sont déjà dans cette direction. La Chine, par exemple, a commencé la construction d’un État autoritaire en support numérique, une sorte de nouveau système politique, un système de contrôle social indolore avec l’utilisation d’outils de surveillance perfectionnés comme la reconnaissance faciale qui vise à pouvoir contrôler n’importe quel secteur turbulent de la population. Plusieurs États liés à l’idéologie numérique ont commencé d’ailleurs à imiter le système chinois. Une grande partie du XXe siècle a été définie par la concurrence entre les systèmes sociaux démocratiques, les fascistes et les communistes. On en discute encore en Gaule dans les bibliothèques du Sénat  alors que la synthèse de la démocratie libérale et de l’autoritarisme numérique se déroule sous nos yeux.

Les gouvernements pourront censurer de manière sélective les problèmes et les comportements sur les réseaux sociaux tout en permettant aux informations nécessaires au développement d’activités productives de circuler librement. Ils mettront ainsi un terme enfin au débat politique réalisant de fait le projet libéral en son essence : la dépolitisation du monde.

vendredi, 07 septembre 2018

Carl Schmitt fra “terra e mare” alla ricerca di un “nomos” per la Terra

Carl Schmitt. Plaidoyer pour la multipolarité, 1943.png

Carl Schmitt fra “terra e mare” alla ricerca di un “nomos” per la Terra

da Giovanni Balducci
Ex: http://www.barbadillo.it

Nella postfazione a Terra e mare di Carl Schmitt, dal titolo “Il potere degli elementi”, il grande quanto sfortunato filosofo e storico della filosofia Franco Volpi (scomparso prematuramente nel 2009 a soli 57 anni in un banale incidente in bici), facendo fede sul resoconto di un discepolo del grande giurista tedesco, ci presenta la suggestiva immagine di uno Schmitt che nel suo eremo di Plettenberg, in piena seconda guerra mondiale, si interroga circa le sorti del mondo e dell’Europa in particolare, sublimando la sua nostalgia e il proprio isolamento accostando la sua sorte a quella di eminenti predecessori o di mitiche figure di valenti outsider, fra cui Niccolò Machiavelli, che dopo aver insegnato al mondo gli arcana imperii ebbe a terminare i suoi giorni nel suo ritiro di San Casciano e il letterario Benito Cereno, il capitano “bianco”, uscito dalla penna di Herman Melville, ammutinato da schiavi “negri”.

Il grosso problema che a quel tempo ossessionava Schmitt era riuscire a dirimere il conflitto, da lui individuato, fra le due concezioni del mondo cattolica ed ebraica, che caratterizzava la civiltà occidentale. Schimitt, che stranamente – stando al racconto – ha appeso alla parete del suo studio un ritratto del politico ebreo Benjamin Disraeli, quando nelle case di ogni buon tedesco anni ’40 l’unico quadro a campeggiare era quello del Führer, non fa mistero di ritenere come interpretazione vincente la visione ebraica della storia, intesa come progresso dell’umanità verso un “futuro regno di pace”, o se si vuole, verso la “Nuova Gerusalemme”, lontana sì nel tempo, ma situata nell’aldiquà, e dunque ben più concreta di quell’ipotetico aldilà cui anelava la teologia cristiano-cattolica.

Per Schmitt, tuttavia, il cristianesimo può essere interpretato come una sorta di divulgazione “essoterica” fatta ai gentili della vera dottrina giudaica. In effetti, nella stessa interpretazione della Genesi, come espressa nello Zohar, suo commentario cabbalistico, si afferma che compito di ogni pio ebreo e di ogni uomo di retta volontà tra i gentili sarebbe quello di operare per la realizzazione del «tikkun» , la riparazione dell’anima umana (tikkun ha-nefesh) e di rimando del mondo (tikkun ha olàm), riportando la “presenza divina” (Shekhinah), o meglio sarebbe dire, rendendo la stessa presente, nel dominio degli uomini, riscattando in tal modo il peccato di Adamo, che osò separare sé stesso dalla Totalità universale e divina. Lo stesso Disraeli, del resto appare a Schimitt come «un iniziato, un saggio di Sion»: è quanto testualmente scrive nell’edizione di Terra e Mare del 1942; frase saggiamente espunta a guerra finita.

Un altro tema forte delle cogitazioni del grande giurista tedesco è la lotta tra le categorie giuridico-politiche di «Staat» (“Stato”), quella, per intenderci, dello stato “Leviatano” introdotta da Hobbes, e quella, verso cui Schmitt è più propenso, ritenendola superiore sia allo «Staat» di Hobbes sia all’ideologia völkisch che animava l’azione di Hitler e del nazionalsocialismo, di «Großraum» (“grande spazio terrestre”, o anche “ spazio imperiale”).

Questa variante era preferita da Schimitt alla stessa Lega delle Nazioni, incapace di dirimere le grandi questioni europee ed internazionali e di dare nuova legge e nuovo ordine al mondo, secondo il famoso concetto schmittiano di «nomos della terra». Essa inoltre si mostrava in tutta la sua debolezza al confronto con gli Stati Uniti d’America, che Schmitt vedeva come il vero nuovo “arbitro della terra”.

Egli, tuttavia, pur ammirando la dottrina Monroe, che secondo la sua visione delle cose aveva consentito agli Stati Uniti di assurgere al primato internazionale, costituendosi come un mix di indipendentismo e sovranità (isolazionismo?) e interventismo mirato in spazi extranazionali, riteneva che gli Stati Uniti, pur non essendo, a differenza dell’Inghilterra, un fattore di “dissolvimento”, non potevano rappresentare quella che per lui doveva essere la figura del katèchon, capace di frenare il processo dissolutivo dell’Ecumene occidentale, e per due gravi motivi: l’incapacità dimostrata nel recidere il cordone ombelicale dalla madrepatria britannica e al contempo l’ideologia accarezzata di un “nuovo secolo americano”.

Ecco che proprio questo farebbe declassare agli occhi di Schmitt gli Stati Uniti, da possibile katèchon, al ruolo addirittura di “ acceleratore involontario” della definitiva dissoluzione della società occidentale.

La concezione marittima del potere, come portata avanti dagli inglesi, per Schmitt, infatti, aveva avuto un ruolo determinante nella fine della concezione continentale, dunque terrestre, dello Ius publicum Europaeum e dell’ordine tradizionale del Vecchio continente, tendendo essa a radicalizzare i conflitti fino a promuovere l’ideologia di una “guerra totale” , che più non si limita al mero scontro fra eserciti belligeranti, ma porta alla “criminalizzazione” di interi popoli, e addirittura degli stati che commerciano o in qualche modo sono accusati di sostenere l’economia del nemico.

Schmitt paragona l’Inghilterra a una “nave” – a una “nave pirata” ad esser precisi – del resto, gran parte del suo impero è stato costruito grazie ad azioni che non tenevano in nessun conto alcuna legge e il Diritto delle genti. Veri e propri atti di pirateria di schiumatori e buccaneers, come quelli di Francis Drake, poi divenuto Sir, hanno rappresentato il suo quasi consueto modus operandi.

Era pressappoco quanto si stava già profilando sullo scenario di guerra cui Schmitt sta assistendo. Siamo per la precisione nell’anno di “grazia” 1942, quando, sbarcando in Irlanda, giunge in Europa il primo contingente militare statunitense, e la guerra dopo aver attraversato gli elementi terra e aria, si appresta ad interessare l’elemento acqua, facendosi poi addirittura sottomarina.

@barbadilloit

Di Giovanni Balducci

jeudi, 06 septembre 2018

Cultuurmarxisme - Essaybundel van Paul Cliteur e.a.

paulcliteur.jpg

Cultuurmarxisme

Essaybundel van Paul Cliteur e.a.

door Johan Sanctorum

Ex: https://doorbraak.be

Het is duidelijk dat er een nieuwe intellectuele wind waait in de lage landen, met een reeks denkers/auteurs die het zinkende eiland van de politieke correctheid verlaten hebben. Een aantal van hen ontmoeten we in de nieuwe essaybundel ‘Cultuurmarxisme’, samengesteld door filosoof-jurist Paul Cliteur.

CM-PC.jpgHet probleem van zo’n essaybundel, waarin we naast Cliteur namen terugvinden als Sid Lukkassen, Maarten Boudry, Derk Jan Eppink, en Wim van Rooy, is uiteraard de consistentie en de overlappingen. Soms krijg je wel eens een déjà-lu, ofwel tegenspraken waarvan je denkt: hadden ze dat niet beter eens uitgeklaard. Toch is het een interessante caleidoscoop van meningen en invalshoeken geworden, die ingaat op het fenomeen van de politieke correctheid, met de term cultuurmarxisme als sleutel. Ons artikel van woensdag j.l., ‘Het grote gelijk van links’, was daar een goede aanloop toe: een lectuur van een Knack-column getekend Bert Bultinck, die alle ‘witte’ Vlamingen per definitie als racisten beschouwt, uitgezonderd zichzelf allicht. Wat hem meteen de status geeft van moreel rechter, therapeut, zelfs orakel.

Betutteling van minderheden

Waarover gaat cultuurmarxisme? Over de manier hoe links via de media en de culturele instellingen haar eigen gelijk steeds weer te voorschijn goochelt. Journalisten, schrijvers, artiesten, culturo’s… allen behoren ze tot een nomenklatura die zichzelf in stand houdt als elite die onderdrukt, censureert, terwijl ze beweert voor vrijheid, democratie en emancipatie te gaan.

Niet langer was de klassenstrijd het ordewoord, wel de fameuze Lange Mars door de Instellingen.

Historisch is de term onverbrekelijk verbonden met de theorieën van de Italiaanse communist Antonio Gramsci (1891-1937), die vaststelde hoe links de greep op de arbeiders – die massaal naar de partij van Mussolini overliepen- verloor, en zich genoodzaakt zag het geweer van schouder te veranderen. Sid Lukkassen beschrijft die ommekeer op pittige en goed gedocumenteerde wijze. De nagestreefde culturele hegemonie van het Marxisme 2.0 stelde zich tot doel het volk van zijn vals bewustzijn (sic) te bevrijden door de media en de cultuurwereld te monopoliseren en van daaruit de revolutionaire waarheid te propageren. Niet langer was de klassenstrijd het ordewoord, wel de fameuze Lange Mars door de Instellingen. Een verschuiving van economie naar cultuur dus, via een soort Trojaansepaarden-tactiek.

Daardoor verloor het originele socialisme zijn band met het volk, en tendeerde de linkse doctrine naar een universele slachtoffercultuur: alle mogelijke minderheidsgroepen of benadeelden (vrouwen, allochtonen, holebi’s…) worden het fetisj van een intellectuele minderheid die haar getalmatige minoriteit wil omzetten in morele superioriteit. Of zoals Maarten Boudry het uitdrukt: ‘… de doorgeschoten verheerlijking van ‘diversiteit’ en de betutteling van minderheden, die ontaardt in een soort ‘Olympisch Kampioenschap van Slachtofferschap’. Zo ontstond een ‘surrogaat-proletariaat’ terwijl de werkende klasse massaal naar (centrum-)rechts overliep en de pococratische dogma’s weghoonde, wat de linkse elite nog meer in de rol van eenzame wereldverbeteraar duwde. Het is een vicieuze cirkel, een zelfversterkend mechanisme.

Advertentie

Hoewel wij het cordon hebben, manifesteert politieke correctheid zich in Nederland als sociaal fenomeen misschien nog extremer dan in Vlaanderen. Denk maar aan de jaarlijks terugkerende Zwartepietendiscussie en de spandoeken van groenlinks die de Syriëgangers verwelkomen. Udo Kelderman gaat daarbij specifiek in op die Nederlandse Zwartepietenkwestie en het dwangmatig refereren aan de slavernij: alle kleurlingen die in Nederland rondlopen zijn zogenaamde ex-slaven, wat de autochtoon in de rol van ex-slavendrijver duwt en dus schuldig aan misdaden tegen de menselijkheid. Door die paranoïde stigmatisering, ook gesignaleerd door Sebastien Valkenberg en Puck van der Land, manoeuvreert links zich in de rol van geweten-van-de-natie, waarbij tal van samenlevingsproblemen rond bijvoorbeeld migratie gewoon worden weggeblazen. Wie er toch aandacht aan besteedt, hoort bij fout-rechts en verliest alle intellectuele credibiliteit. Zo heb je natuurlijk altijd gelijk.

Totalitaire tendensen

De uitbouw van een sterke bureaucratie met repressieve tentakels die de burger bij de les moeten houden.

Een consequentie van het cultuurmarxisme, dat zweert bij de bovenbouw en de instellingen, is tevens de uitbouw van een sterke bureaucratie met repressieve tentakels die de burger bij de les moeten houden. Denk maar aan parastatale vzw’s als UNIA. Het fenomeen profileert zich ook via de groene betuttelingsmanie en de stigmatisering van de burger als vervuiler, waar Jan Herman Brinks een bijdrage aan besteedt. Maar ook in het onvoorstelbare waterhoofd dat EU heet, de supranationale schoonmoeder die steeds meer bevoegdheden naar zich toetrekt: het uitverkoren domein van Derk Jan Eppink die stevig van leer trekt tegen de EU als neo-cultuurmarxistisch project. Het verklaart de rabiate eurofilie van oude ‘68ers als Paul Goossens en revolteleider Daniel Cohn-Bendit, deze laatste ook niet toevallig bekeerd tot het groene gedachtegoed. Wat Paul Cliteur doet besluiten dat het cultuurmarxisme fundamenteel een ondemocratische beweging is.

Dat vermoeden van een omfloerste dictatuur wordt gestaafd door de soms discrete, soms manifeste affiniteit van linkse westerse intellectuelen met totalitaire systemen en regimes, met Mao-China uiteraard als model waar de ’68ers zich op verkeken, en het bezoek van J.P. Sartre aan de Sovjet-Unie van de jaren vijftig als archetype. Een affiniteit die Eric C. Hendriks in de verf zet.

De bijdrage van Wim van Rooy mag in dat opzicht ook niet onvermeld blijven, daar waar hij postmoderne theoretici als Derrida en andere ‘68ers of nakomelingen analyseert als uitvoerders van een nihilistisch weg-met-ons-project, een identitaire deconstructie die finaal uitloopt op de masochistische omarming van een anti-democratische geweldcultuur als de islam. Hetzelfde geldt voor de bizarre alliantie tussen feminisme en islamofilie, een fenomeen dat Jesper Jansen belicht.

‘Complotdenken’

De gemeenschappelijke noemer van alle bijdragen is enig cultuurpessimisme waar ik me niet altijd kan in vinden. Met name lijkt me de banvloek over de postmoderne denkers niet helemaal terecht, want hun behoefte aan deconstructie, met Nietzsche als verre stamvader, treft elke vorm van totalitair denken en zeker ook religieuze ideologieën als de islam. Het westerse denken is fundamenteel kritisch en de ironie is nooit ver weg, iets wat we van de antieke Griekse filosofie hebben overgehouden en moeten blijven koesteren. Dat is nu net het kenmerk van het cultuurmarxisme: het mankeert elk gevoel voor humor, evenals de grote monotheïstische systemen trouwens.

Men zou het ook kunnen zien als iets viraals, een kwaadaardig proces dat zich geautomatiseerd heeft en uitwoekert

Het spreekt vanzelf dat links heel de gedachtegang van dit boek zal wegzetten als een ridicule complottheorie. Misschien geeft de ondertitel ‘Er waart een spook door het Westen’ daar ook wel enige aanleiding toe. Is het echt zo dat er ergens in een bunker door topintellectuelen wordt beraadslaagd over de controle van de culturele instellingen, de media en het mainstreamdiscours? Natuurlijk niet, zegt Paul Cliteur, het is veel erger dan dat, want dan konden we het ding makkelijk oprollen. Het gaat daarentegen om een duurzaam paradigma dat zich via netwerking, sociale druk en soms regelrechte chantage of dreiging met broodroof reproduceert. Een fenomeen waar Puck van der Land, Sebastien Valkenberg en Emerson Vermaat bij stilstaan. Men zou het ook kunnen zien als iets viraals, een kwaadaardig proces dat zich geautomatiseerd heeft en uitwoekert, voorbij de generatie van de ‘68ers die vandaag overigens hun pensioensleeftijd hebben bereikt zonder dat we hun erfenis zomaar kunnen dumpen. Perry Pierik heeft het over kneedbaarheid en besmettelijkheid: ‘Het woord cultuurmarxisme is zo beladen, omdat het een proces aangeeft van ideeën en krachten, dat als semtex plakt aan het gereedschap van de progressieve wereld, waarmee de Gutmensch zijn morele gelijk veilig probeert te stellen.’

De remedies?

De rechtstaat dient een breed gedragen wettelijk kader te creëren waarin hij zichzelf beschermt tegen aanvallen van buitenuit

Dat maakt het ook zo hachelijk om er tegenin te gaan, en het discours over cultuurmarxisme voorbij de klaagzang te tillen. Zijn er tegenstrategieën mogelijk, methodes, attitudes, werkmodellen die de cultuurhegemonie van links kunnen doorbreken? Slechts enkele auteurs durven het aan om een alternatief te formuleren. Samensteller Paul Cliteur pleit voor een weerbare democratie: dat is een democratie die zich niet passief-pluralistisch laat vullen met alle mogelijke politieke tendensen of religiën, maar die georiënteerd verloopt, met een duidelijk kompas, gericht op het voortbestaan en de bloei van die democratie. Niet elke levensbeschouwing komt in aanmerking om door de rechtstaat zomaar aanvaard te worden, ze mag zich niet suïcidaal gedragen. Deze toetssteen geldt in de eerste plaats voor de drie grote totalitaire ideologieën van vorige en deze eeuw, namelijk fascisme, communisme, islamisme. De rechtstaat dient een breed gedragen wettelijk kader te creëren waarin hij zichzelf beschermt tegen aanvallen van buitenuit, denk aan de islam die de godsdienstvrijheid inroept om uiteindelijk de sharia te kunnen instellen. Anderzijds zou dit weer kunnen leiden naar een weldenkende consensusdemocratie met cordons etc. – Het debat hierover is zeker nog niet ten einde.

Sid-portret-boekenbeurs-300x300.pngSid Lukkassen komt tot een andere conclusie: de culturele hegemonie van links moeten we laten voor wat ze is. We moeten compleet nieuwe, eigen media, netwerken en instellingen oprichten die niet ‘besmet’ zijn door het virus en voor echte vrijheid gaan: ‘De enige weg voorwaarts is dus het scheppen van een eigen thuishaven, een eigen Nieuwe Zuil met bijbehorende instituties en cultuurdragende organen. Die alternatieve media zijn volop aan het doorschieten, Doorbraak is er een van.

Eric C. Hendriks pleit in het afsluitende essay ten slotte voor een zekere mate van chaos (‘rommeligheid’) en échte diversiteit, niet de geënsceneerde diversiteit van links, maar gebaseerd op individuele mondigheid en autonomisme, bloemen die bloeien vanuit het ‘burgerlijke midden’. Dat is een mooi einde. Zo’n boek, zelfs over het cultuurmarxisme, mag niet eindigen als een klaagzang van een stel querulanten. Er is hoop, er schuilt kracht in de basis, het volk is moe maar niet uitgeteld, niet alle jonge intellectuelen doen in hun broek, er ontluikt een tegendemocratie.

‘Cultuurmarxisme’ is een plaats in uw boekenkast zeker waard, misschien naast ‘De Langste Mars’, want goed gezelschap versterkt elkaar. Op negen november e.k. gaan de auteurs van beide,- Paul Cliteur,  Sid Lukkassen en ondergetekende,- een panelgesprek aan op de Antwerpse boekenbeurs. Nu al noteren.

mercredi, 05 septembre 2018

Las normas como alma de la corrección política

normen.jpg

Las normas como alma de la corrección política

Ex: https://disidentia.com

Imaginen una fiesta del colegio de sus hijos, sobrinos o nietos y al intentar acceder les dicen “sólo dos adultos por niño; es la norma”. También pueden imaginar el acceso a una discoteca en el que le informan que “con zapatillas no puede; es la norma” o la sala de cine que reza “no puede acceder con comida del exterior”, pero usted sí puede acceder con la que compre en su establecimiento. Pónganse también en la tesitura de una persona de edad avanzada, ajena a las tecnologías, que necesita ingresar dinero en el banco y le dicen: “debe hacerlo por el cajero automático, son normas de la sucursal”. Normas, normas y más normas.

La normopatía es un modelo de conducta en el que la persona considera la norma como la garantía objetiva ante cualquier situación

Estos casos cotidianos sirven de ejemplo para tratar un asunto muy común hoy en día como es la normopatía. Un modelo de conducta caracterizado porque la persona considera la norma como la garantía objetiva ante cualquier situación o problema. Erich Fromm hablaba de la conformidad automática. Es decir, la persona deja de ser ella misma y adopta por completo las pautas culturales, transformándose en un ser exactamente igual a todo el mundo. Como los demás esperan que sea. También es compatible con la banalidad del mal descrita por Hannah Arendt: las personas acturarían dentro de las reglas del sistema al que pertenecen sin reflexionar sobre estas y sobre sus actos.

Aunque pueda parecer algo inusual o extraño, la normopatía se ha convertido en un soporte más de una supuesta objetividad. Hasta tal punto de que, como en los casos mencionados, no hay opción al diálogo porque imperan las normas, que en realidad convierten o, más bien disfrazan de autoridad a algunas personas.

La norma como criterio de salud

La psiquiatría actual define la salud mental en función de la adaptación a normas socialmente establecidas. Al definir así la salud, etiqueta a la persona perfectamente adaptada a las normas sociales como el modelo a seguir. El normópata como ideal.

Sin embargo, ¿cómo sabemos que normas son esas? ¿Quién tiene la potestad de dictarlas? ¿Cuáles son apropiadas y por qué? Según el sistema y sus diferentes estamentos (judicial, médico, político, etc.) las normas se conforman a través del consenso entre los profesionales de cada categoría.

Se considera sano sólo a aquél que cumple las normas

A su vez, esto conduce a dos preguntas que son, como poco, inquietantes: ¿Cómo se selecciona a esos profesionales? Y ¿qué validez tienen las normas basadas en el consenso de unos pocos, que no se basan en sólidos principios conceptuales y teóricos? Obviamente una validez limitada, pues la realidad que nos conforma es múltiple y variada y está constituida por factores biológicos, psicológicos y socioculturales. Pero ante esta dificultad, en lugar de confrontarlo, se rehuye el análisis, considerando sano sólo a aquél que cumple las normas. Asunto arreglado.

paragraphen-buerokraten,large.1505126024.png

La norma como autocensura

Sí, es cierto que las normas funcionan para tranquilidad del gestor. Pero gestionar no consiste en poner normas sino en todo lo contrario: en lograr que prosperen espacios de progreso con la menor cantidad de normas. Las normas son estúpidas cuando, en lugar de favorecer la gestión de los espacios y de la gente, sirven para crear espacios de vacío, limitantes, excluyentes y discriminatorios. Todavía más cuando erigen una muralla entre los pensamientos de quien las cumple y el mundo social que lo rodea. Hay normas que anestesian, que atenúan la propia subjetividad, enajenando e incluso alienando a las personas que toman postura a favor de la norma de forma automática y acrítica.

Esta normopatía guarda una relación muy estrecha con las formas de difusión de los mensajes, los medios de comunicación, la propaganda, la cultura, etc. Las estadísticas, los sondeos, los mensajes que marcan el criterio de normalidad se han vuelto omnipresentes, forzando a quien se sale de la norma, a los indecisos, a alienarse con la mayoría.

Con la corrección política el poder huye del conflicto y busca someter al individuo a través de la norma impuesta

Así, cuando se usa el orden y la disciplina en lugar de incorporar los conflictos, el poder se coloca por encima de la sociedad. Con la corrección política, y con otras formas de expresión, el poder huye del conflicto y busca someter al individuo a través de la norma impuesta. Prolifera así lo igual.

Fenómenos como el miedo, la globalización y el terrorismo, tan presentes en la sociedad actual, son muestras del violento poder de lo igual. La hipercomunicación, el exceso de información, la sobreproducción y el hiperconsumismo son herramientas de las que se nutre el sistema para expulsar lo distinto, como bien explica Byung-Chul Han en su ensayo La expulsión de lo distinto.

Si una persona no hace uso de lo que llaman “lenguaje inclusivo”, es silenciada

Si una persona no cumple las normas, es expulsada. Si no hace uso de lo que llaman “lenguaje inclusivo”, silenciada. Si no piensa como la norma indica, negada su existencia. Si no condena ciertos actos, resulta criminalizado. Un niño travieso es considerado problemático porque no cumple la norma: es calificado como enfermo. Si una persona está triste y no cumple la norma social de producir y consumir: es considerando enfermo.

Se trata de normas dirigidas a silenciar la diferencia, hasta tal punto de hacer creer que no existe otra opción, otra forma de ver y actuar. Se incita a sentir pavor hacia lo distinto y se impide el diálogo con el fin de que las personas asuman las pautas, las creencias, ideologías y movimientos hegemónicos, como única forma de permanecer en la sociedad. El individuo renuncia a su propio criterio para conseguir la falsa aceptación de una mayoría que se ha erigido como autoridad y como poseedores de la verdad: busca el triunfo social y profesional mostrando cierta domesticación, limitándose a hacer lo que se espera de él.

El individuo renuncia a su propio criterio para conseguir la falsa aceptación de una mayoría que se ha erigido como poseedora de la verdad

Así los normópatas pierden todo sentido crítico de la realidad y tienden a considerar las normas de manera extrema. Pierden su subjetividad. Sus decisiones quedan fuertemente influidas por lo que la norma define como correcto. Y lo correcto es que haya normas iguales e inalterables en cualquier espacio, ya sea un colegio, la universidad, el Senado, un movimiento o un partido político. La normopatía se basa en lo igual. No se puede negar que es sencillo y fácil el procedimiento como tal: simplifica mucho las cosas.

Normenlupe.jpg

Disentir antes que consensuar

Este modelo de conducta se presenta hoy supuestamente avalado por algunas ciencias y, por lo tanto, como irrefutable. Sin embargo, la normopatía contraviene una ley básica de la evolución: la diversidad. La selección natural escogió como estrategia y garantía de supervivencia la diversidad ante los cambios naturales y sociales. Si todos pensásemos y actuásemos igual nos extinguiríamos al no tener un repertorio de conductas diverso y heterogéneo con el que sobrevivir a los cambios naturales.

Es fundamental aprender a flexibilizar las normas en contextos distintos, inesperados, aplicando otros criterios que pueden ser igualmente válidos

Por ello es importante enseñar a nuestros hijos, a nuestros alumnos y a la sociedad en general que las normas son importantes en contextos muy concretos. Pero también es fundamental aprender a flexibilizar las normas en contextos distintos, inesperados, aplicando otros criterios que pueden ser igualmente válidos, con valor educativo, comunitario y social diferente al establecido, pero no por ello equivocados.

Las normas no son verdades absolutas. Son formalismos que pierden su eficacia cuando dejan de ser útiles. Si nos ponemos al servicio de la norma, el poder encontrará una vía adicional para adoctrinarnos y someternos a la corrección política. Cuanto más se desarrolle el criterio de la normopatía para definir lo correcto, más enfermos surgirán. Se trata de una ingeniería social que beneficia al sistema.

Si nos ponemos al servicio de la norma, el poder encontrará una vía adicional para adoctrinarnos y someternos a la corrección política

No hay duda de que la normopatía se ha convertido en una amenaza seria para la salud. La mejor receta para escapar de ella es desarrollar espacios de encuentro en los que disentir sea la norma. Sobre todo, espacios educativos en los que se enseñe el disenso antes que el consenso.

lundi, 06 août 2018

La notion d'hybris dans notre conception de l'Etat européen

lifehub-apopseis-127.jpg

La notion d'hybris dans notre conception de l'Etat européen

Par Eugene Guyenne

(pour Le Parti des Européens)

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Aujourd'hui en France, certaines personnes par naïveté et/ou malhonnêteté pour la plupart, pourraient penser que concevoir un État européen comme le fait le Parti des Européens, est un acte hybris. Déjà il s'agit de replacer ce qu'est l'hybris (húbris), qui vient du grec, c'est-à-dire "la démesure", "l'excès". Historiquement on sait à quoi se rattache la notion d'hubris et de démesure. À la Grèce et la Rome antique et leurs impérialismes respectifs, avec la notion coloniale.

Ensuite, il s'agit de comparer deux conceptions que sont "État européen" et "hybris".

L'État européen n'existe pas actuellement - puisque l'Union Européenne est simplement une structure qualifiée de "supra-nationale" par certains, ayant une fonction financière et très politique et intégrale dans ses institutions - mais certaines personnes travaillent à la réflexion de celui-ci. Donc l'État européen serait-il  une marque d'hybris au prétexte d'une grandeur ?

Que peut-on dire des anciens empires récents - qu'ils soient ottoman, russe (tsariste ou soviétique), yougoslave (communiste ou nationaliste) et austro-hongrois ? Que dire des anciens empires coloniaux français et britannique, dont par ailleurs la France et la Grande-Bretagne ne s'en sont toujours pas débarrassés voire pire, continuant même de s'y appuyér respectivement par le biais des DOM/TOM et de la francophonie d'un côté, et le Commonwealth d'un autre. Que dire d'états tels que le Canada et de la Russie actuelle puisque ceux-ci sont deux des plus grands territoires dans le monde ? Et non sans réveiller certaines consciences, de l'annexion russe de la Crimée au cas du Haut-Karabakh.

Et du point de vue régionaliste, puisque l'État français est jacobin, n'y a-t-il pas une forme de démesure de l'État français depuis l'Ancien-Régime, d'avoir annexé des anciennes provinces telles que la Gascogne, la Provence, le Dauphiné, la Normandie, la Bretagne, les Flandres, puis à une époque plus récente la Corse, l'Alsace/Lorraine et j'en passe ? De la part de l'État allemand d'avoir annexé à l'époque moderne, les duchés du Schleswig, du Holstein, de Bavière, de Bade et de Wurtemberg ?

Qui sont réticents parce qu'ils ne défendent qu'une vision nationale, de leur nation et de leur peuple, une nation par ailleurs jacobine. Ceci explique entre autres leur réticence à propos de l'Union Européennecomme des États-Unis, en dehors de leurs idéologies véhiculées. Dont leur principal argument est la démesure de celles-ci.

Mais il n'en est rien puisque cet État européen souhaité, réellement européen à tous les points de vue, n'est pas une forme de démesure. Puisque c'est la conservation d'un territoire européen déjà existant dont cet État, protecteur de celui-ci, n'a aucune volonté impériale.

L'Union Européenne n'est pas non plus une manifestation d'hybris puisque si certains reconnaissent en elle une structure "supra-nationale" (vis-à-vis de leur nation), elle n'a aucun pouvoir politique et n'a qu'un pouvoir économico-financier (et encore !)  puisqu'à l'intérieur certains ne font pas partie de la zone-euro et que par conséquent, ce sont les États européens (membres ou pas de l'UE) qui décident de leur propre politique et sont les responsables de leurs laxismes notamment en matière migratoire.

Donc d'aucune manière, l'État européen ne présente une forme d'hybris puisque celui-ci ne présente aucun caractère impérial et encore moins colonial mais simplement la conservation d'un territoire, d'une civilisation, d'un peuplement et d'identités respectives a l'intérieur de celui-ci, représenté par un État.

01:03 Publié dans Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hybris, europe, théorie politique, politologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

vendredi, 03 août 2018

Ruimterevolutie: Hoe de walvisjacht ons wereldbeeld veranderde

walvisjacht.jpg

Ruimterevolutie: Hoe de walvisjacht ons wereldbeeld veranderde

door Erwin Wolff

Ex: http://www.novini.nl

Het boek Land en zee van de Duitse rechtsfilosoof Carl Schmitt is een opvallende afwijking van zijn gebruikelijke discours. In zijn andere werken schrijft hij vooral over recht, politiek en direct aanverwante zaken. Een voorbeeld is het boek Die geistesgeschichtliche Lage des heutigen Parlamentarismus waarin Schmitt in 1923 de parlementaire democratie van de Weimarrepubliek bekritiseert. Bekender is het werk Der Begriff des Politischen waarin hij de politiek tot wij-zij tegenstellingen herleidt. In Land en zee gaat hij echter op heel andere zaken in.

Wat is de aarde eigenlijk en hoe komt het dat we de aarde zien zoals wij die zien? Hoe komt het dat wij anno 2018 de aarde zien als een groen-blauwe bol in een oneindige ruimte? Hoe kan dat zo verschillen van het wereldbeeld van andere volkeren? Volgens Carl Schmitt ligt hier een zogenoemde “ruimterevolutie” aan ten grondslag en die heeft alles te maken met de manier waarop onze voorouders naar hun wereld keken.

CSlandenzee.jpgDe eersten die de omslag maken zijn de oude Grieken in de klassieke Oudheid. Griekenland bestaat uit vele stadstaten, maar de zeemacht Athene en de landmacht Sparta steken in deze Griekse wereld boven allen uit. Het denken van de Grieken veranderde van een volk dat zich enkel met landbouw bezighield naar een zeemacht, omdat het op een gegeven moment het gehele oostelijke deel van de Middellandse zee ging beheersen. De Grieken waren opgesloten in deze context en ze misten de mankracht om hieruit te breken.

Pas toen het Romeinse Rijk uitdijde naar het tegenwoordige Frankrijk en dus naar de Atlantische oceaan, wist de klassieke Oudheid uit deze kooi te breken in de eerste eeuw van onze jaartelling. Maar toen was het eigenlijk al gedaan. Het Romeinse Rijk stortte zichzelf daarna in chaos en er was onder Romeinse leiding geen paradigmaverschuiving.

In de middeleeuwen was heel Europa, van het noorden tot het hele zuiden, opgemaakt uit verschillende agrarische staten. Aan de randen van deze boerenstaten werd er visserij bedreven. Met de Bijbel in de hand werden de Germaanse volkeren van noord tot zuid bekeerd tot het Christendom. De ruimte op de aarde is wat de Middeleeuwers betreft een heleboel land en een heleboel agrarische producten op dat land. Tot het einde van de middeleeuwen is er geen echte verandering in deze zienswijze.

In het Oude Testament is er een mythisch zeedier te vinden, de leviathan (Job, hoofdstuk 40 en 41), en leviathan gaat een grote rol spelen in de omslag van het besef van ruimte van de Germaanse volkeren in Europa. De leviathan, meestal afgebeeld als walvis, lokt de vissers van Europa de zee op omdat deze vis zich niet laat vangen aan de kust. Zonder de walvisjacht zouden de Europese vissers in een smalle strook van de kust zijn gebleven. Het besef van de ruimte op aarde verandert onder druk van de walvisjacht razendsnel. Carl Schmitt beschrijft dit fenomeen als een “ruimterevolutie”. De ruimte waarin men denkt te leven verandert van landmassa naar land- en zeemassa.


Ook de middelen om zich op de zee te begeven veranderen. De galei van de Klassieke wereld worden afgedaan en schepen die de wind opvangen met zeilen doen hun intrede. Men kan veel verder en veel sneller zich op zee begeven. Er wordt een nieuw continent ontdekt en daarmee nieuwe handel, nieuwe regels, nieuwe innovaties. Ongeveer tussen de jaren 1490 en 1600 vinden deze veranderingen plaats. Het besef van de ruimte waarin men denkt te leven verandert en de middeleeuwse ordening der dingen komt definitief ten einde. Hulpeloos rolt de Europese beschaving een nieuw tijdperk binnen.

Het begin is nog wat onhandig. Er gebeurt ook iets geks met Engeland. Vooral Engeland is in de middeleeuwen ook een boerenstaat die zich voornamelijk bezighoudt met schapen, textiel en Frankrijk proberen te veroveren. Het protestantse Engeland draait zijn rug naar het continent Europa en richt zich op de zee. Met zo’n succes zelfs dat het de katholieke landen Spanje en Portugal inhaalt. De heerschappij van de zee is van niemand of iedereen. Maar eigenlijk vooral van één land: Engeland. Dit Germaanse volk beheerst in de negentiende eeuw de zee, de zeehandel en daarmee de wereld. Zozeer zelfs dat Engeland zichzelf niet meer als Europese macht ziet.

We belanden aan in de 20e eeuw en dan vindt een tweede ruimterevolutie plaats. Het oudtestamentische monster, Leviathan, is niet meer zozeer een vis, maar een ijzeren monster in de vorm van een modern slagschip. De overgang van stoomboot naar modern slagschip is niet kleiner dan de overgang van galei naar zeilschip, verklaart Carl Schmitt. Duitsland en enkele andere landen zijn industriële machten geworden en kunnen net zo produceren als Engeland. Hiermee komt de onbetwiste heerschappij over de zee door Engeland ten einde.

Land en Zee is een bijna dichterlijke beschrijving van deze gigantische veranderingen. Het zijn mooie woorden die laten zien hoe het komt dat de Europese beschaving andere volkeren ontdekte en dat het niet die andere volkeren zijn geweest die ons ontdekt hebben.

dimanche, 01 juillet 2018

De Carl Schmitt et du combat tellurique contre le système technétronique

romische.png

De Carl Schmitt et du combat tellurique contre le système technétronique

Il y a déjà cinq ans, pendant les fortes manifs des jeunes chrétiens contre les lois socialistes sur la famille (lois depuis soutenues et bénies par la hiérarchie et par l’ONG du Vatican mondialisé, mais c’est une autre histoire), j’écrivais ces lignes :

« Deux éléments m’ont frappé dans les combats qui nous occupent, et qui opposent notre jeune élite catholique au gouvernement mondialiste aux abois : d’une part la Foi, car nous avons là une jeunesse insolente et Fidèle, audacieuse et tourmentée à la fois par l’Ennemi et la cause qu’elle défend ; la condition physique d’autre part, qui ne correspond en rien avec ce que la démocratie-marché, du sexe drogue et rock’n’roll, des centres commerciaux et des jeux vidéo, attend de la jeunesse.»

L’important est la terre que nous laisserons à nos enfants ne cesse-ton de nous dire avec des citations truquées ; mais l’avenir c’est surtout les enfants que nous laisserons à la terre ! Cela les soixante-huitards et leurs accompagnateurs des multinationales l’auront mémorisé. On a ainsi vu des dizaines milliers de jeunes Français – qui pourraient demain être des millions, car il n’y a pas de raison pour que cette jeunesse ne fasse pas des petits agents de résistance ! Affronter la nuit, le froid, la pluie, les gaz, l’attente, la taule, l’insulte, la grosse carcasse du CRS casqué nourri aux amphétamines, aux RTT et aux farines fonctionnaires. Et ici encore le système tombe sur une élite physique qu’il n’avait pas prévue. Une élite qui occupe le terrain, pas les réseaux.

Cette mondialisation ne veut pas d’enfants. Elle abrutit et inhibe physiquement – vous pouvez le voir vraiment partout – des millions si ce n’est des milliards de jeunes par la malbouffe, la pollution, la destruction psychique, la techno-addiction et la distraction, le reniement de la famille, de la nation, des traditions, toutes choses très bien analysées par Tocqueville à propos des pauvres Indiens :

« En affaiblissant parmi les Indiens de l’Amérique du Nord le sentiment de la patrie, en dispersant leurs familles, en obscurcissant leurs traditions, en interrompant la chaîne des souvenirs, en changeant toutes leurs habitudes, et en accroissant outre mesure leurs besoins, la tyrannie européenne les a rendus plus désordonnés et moins civilisés qu’ils n’étaient déjà. »

Et bien les Indiens c’est nous maintenant, quelle que soit notre race ou notre religion, perclus de besoins, de faux messages, de bouffes mortes, de promotions. Et je remarquais qu’il n’y a rien de pire pour le système que d’avoir des jeunes dans la rue (on peut en payer et en promouvoir, les drôles de Nuit debout). Rien de mieux que d’avoir des feints-esprits qui s’agitent sur les réseaux sociaux.

land.jpg

J’ajoutais :

« Et voici qu’une jeunesse montre des qualités que l’on croyait perdues jusqu’alors, et surtout dans la France anticléricale et libertine à souhait ; des qualités telluriques, écrirai-je en attendant d’expliquer ce terme. Ce sont des qualités glanées au cours des pèlerinages avec les parents ; aux cours des longues messes traditionnelles et des nuits de prières ; au cours de longues marches diurnes et des veillées nocturnes ; de la vie naturelle et de la foi épanouie sous la neige et la pluie. On fait alors montre de résistance, de capacité physique, sans qu’il y rentre de la dégoutante obsession contemporaine du sport qui débouche sur la brutalité, sur l’oisiveté, l’obésité via l’addiction à la bière. On est face aux éléments que l’on croyait oubliés. »

Enfin je citais un grand marxiste, ce qui a souvent le don d’exaspérer les sites mondialistes et d’intriquer les sites gauchistes qui reprennent mes textes. C’est pourtant simple à comprendre : je reprends ce qui est bon (quod verum est meum est, dit Sénèque) :

« Je relis un écrivain marxiste émouvant et oublié, Henri Lefebvre, dénonciateur de la vie quotidienne dans le monde moderne. Lefebvre est un bon marxiste antichrétien mais il sent cette force. D’une part l’URSS crée par manque d’ambition politique le même modèle de citoyen petit-bourgeois passif attendant son match et son embouteillage ; d’autre part la société de consommation crée des temps pseudo-cycliques, comme dira Debord et elle fait aussi semblant de réunir, mais dans le séparé, ce qui était jadis la communauté. Lefebvre rend alors un curieux hommage du vice à la vertu ; et il s’efforce alors à plus d’objectivité sur un ton grinçant.

Le catholicisme se montre dans sa vérité historique un mouvement plutôt qu’une doctrine, un mouvement très vaste, très assimilateur, qui ne crée rien, mais en qui rien ne se perd, avec une certaine prédominance des mythes les plus anciens, les plus tenaces, qui restent pour des raisons multiples acceptés ou acceptables par l’immense majorité des hommes (mythes agraires).

noces-de-cana-175590_2.jpg

Le Christ s’exprime par images agraires, il ne faut jamais l’oublier. Il est lié au sol et nous sommes liés à son sang. Ce n’est pas un hasard si Lefebvre en pleine puissance communiste s’interroge sur la résilience absolue de l’Eglise et de notre message :

Eglise, Saint Eglise, après avoir échappé à ton emprise, pendant longtemps je me suis demandé d’où te venait ta puissance.

Oui, le village chrétien qui subsiste avec sa paroisse et son curé, cinquante ans après Carrefour et l’autoroute, deux mille ans après le Christ et deux cents ans après la Révolution industrielle et l’Autre, tout cela tient vraiment du miracle.

Le monde postmoderne est celui du vrai Grand Remplacement : la fin des villages de Cantenac, pour parler comme Guitry. Il a pris une forme radicale sous le gaullisme : voyez le cinéma de Bresson (Balthazar), de Godard (Week-end, Deux ou trois choses), d’Audiard (les Tontons, etc.). Le phénomène était global : voyez les Monstres de Dino Risi qui montraient l’émergence du citoyen mondialisé déraciné et décérébré en Italie. L’ahuri devant sa télé…

Il prône ce monde une absence de nature, une vie de banlieue, une cuisine de fastfood, une distraction technicisée. Enfermé dans un studio à mille euros et connecté dans l’espace virtuel du sexe, du jeu, de l’info. Et cela donne l’évangélisme, cette mouture de contrôle mental qui a pris la place du christianisme dans pas le mal de paroisses, surtout hélas en Amérique du Sud. Ce désastre est lié bien sûr à l’abandon par une classe paysanne de ses racines telluriques. Je me souviens aux bords du lac Titicaca de la puissance et de la présence catholique au magnifique sanctuaire de Copacabana (rien à voir avec la plage, mais rien) ; et de son abandon à la Paz, où justement on vit déjà dans la matrice et le conditionnement. Mais cette reprogrammation par l’évangélisme avait été décidée en haut lieu, comme me le confessa un jour le jeune curé de Guamini dans la Pampa argentine, qui évoquait Kissinger.

J’en viens au sulfureux penseur Carl Schmitt, qui cherchait à expliquer dans son Partisan, le comportement et les raisons de la force des partisans qui résistèrent à Napoléon, à Hitler, aux puissances coloniales qui essayèrent d’en finir avec des résistances éprouvées ; et ne le purent. Schmitt relève quatre critères : l’irrégularité, la mobilité, le combat actif, l’intensité de l’engagement politique. En allemand cela donne : Solche Kriterien sind: Irregularität, gesteigerte Mobilität des aktiven Kampfes und gesteigerte Intensität des politischen Engagements.

Tout son lexique a des racines latines, ce qui n’est pas fortuit, toutes qualités de ces jeunes qui refusèrent de baisser les bras ou d’aller dormir : car on a bien lu l’Evangile dans ces paroisses et l’on sait ce qu’il en coûte de trop dormir !

requetes.gif

Schmitt reconnaît en fait la force paysanne et nationale des résistances communistes ; et il rend hommage à des peuples comme le peuple russe et le peuple espagnol : deux peuples telluriques, enracinés dans leur foi, encadrés par leur clergé, et accoutumés à une vie naturelle et dure de paysan. Ce sont ceux-là et pas les petit-bourgeois protestants qui ont donné du fil à retordre aux armées des Lumières ! Notre auteur souligne à la suite du théoricien espagnol Zamora (comme disait Jankélévitch il faudra un jour réhabiliter la philosophie espagnole) le caractère tellurique de ces bandes de partisans, prêts à tous les sacrifices, et il rappelle la force ces partisans issus d’un monde autochtone et préindustriel. Il souligne qu’une motorisation entraîne une perte de ce caractère tellurique (Ein solcher motorisierter Partisan verliert seinen tellurischen Charakter), même si bien sûr le partisan – ici notre jeune militant catholique – est entraîné à s’adapter et maîtrise mieux que tous les branchés la technologie contemporaine (mais pas moderne, il n’y a de moderne que la conviction) pour mener à bien son ouvrage.

Schmitt reconnaît en tant qu’Allemand vaincu lui aussi en Russie que le partisan est un des derniers soldats – ou sentinelles – de la terre (einer der letzten Posten der Erde ; qu’il signifie toujours une part de notre sol (ein Stück echten Bodens), ajoutant qu’il faut espérer dans le futur que tout ne soit pas dissous par le melting-pot du progrès technique et industriel (Schmelztiegel des industrielltechnischen Fortschritts). En ce qui concerne le catholicisme, qui grâce à Dieu n’est pas le marxisme, on voit bien que le but de réification et de destruction du monde par l’économie devenue follen’a pas atteint son but. Et qu’il en faut encore pour en venir à bout de la vieille foi, dont on découvre que par sa démographie, son courage et son énergie spirituelle et tellurique, elle n’a pas fini de surprendre l’adversaire.

Gardons une condition, dit le maître : den tellurischen Charakter. On comprend que le système ait vidé les campagnes et rempli les cités de tous les déracinés possibles. Le reste s’enferme dans son smartphone, et le tour est joué.

Bibliographie:

Carl Schmitt – Du Partisan

Tocqueville – De la démocratie I, Deuxième partie, Chapitre X

Guy Debord – La Société du Spectacle

Henri Lefebvre – Critique de la vie quotidienne (Editions de l’Arche)

mercredi, 16 mai 2018

Mutations politiques et mort du pouvoir régalien

automne-autumn-fall-rue-street-grenoble-france-vaienvadrouille.jpg

Mutations politiques et mort du pouvoir régalien

Ex: http://www.geopolintel.fr

Il ne s’agit pas ici de dresser un énième bilan catastrophiste de notre avenir proche - pénuries énergétique ou alimentaires, épuisement des terres arables, fonte de la calotte glaciaire arctique, explosion démographique du Tiers-Monde, extinction massive des espèces animales, vieillissement des populations européennes de souche, déferlement migratoire et grand remplacement - les projections de la CIA suffisent amplement à cela1. Intéressons-nous plutôt à ce que nous avons sous les yeux sans toujours le discerner, à savoir des phénomènes qui sont de sûrs indicateurs de la Grande transformation en cours. Laquelle n’est pas seulement sociétale avec la révolution des mœurs et la normalisation de comportements hier encore jugés déviants (voire pathologiques ou bien criminels telles les procédures abortives illicites) ; avec l’unification d’un marché planétaire ringardisant des nations devenues postindustrielles ; ou encore avec une reconfiguration géopolitique globale et la constitution d’un bloc eurasiatique disputant l’hégémonie à l’Amérique-monde…

À y regarder de plus près « L’ère des organisateurs » décrit par James Burnham en 1947, prend aujourd’hui, soixante-dix plus tard, tout son sens. Sur le Vieux continent la technocratie, forme évoluée de la bureaucratie à l’âge des algorithmes et de l’administration dématérialisée, s’est effectivement imposée avec la construction de l’entité européenne. Au reste l’évidente fiction démocratique [1] a survécu tant que les États méchamment balayés par le vent de la mondialisation (et par la crise endémique accompagnant les restructurations économiques) ont pu maintenir une certaine souveraineté (au moins de façade) et une part d’autonomie dans leur gestion jusqu’à ce que le maillage des traités et des directives (oukases) imposées par Bruxelles ait révélé le pot aux roses : l’indépendance des États européens avait vécu : la ligne mortelle du renoncement et de la soumission avait en effet été franchie sans crier gare.

La bronca judiciaire polonaise

La crise actuelle qui oppose Bruxelles à Varsovie en est une bonne illustration. Le plus remarquable dans cette affaire tient en la volonté de la Commission européenne d’imposer aux Polonais la prééminence du judiciaire sur l’exécutif au motif (controuvé) de la séparation des pouvoirs [2]. Ceci n’est pas anodin et permet d’identifier – à partir du cas polonais - une tendance réellement lourde devant aboutir à l’effacement du politique au profit du gouvernement des juges appelés à régler seuls les différends entre acteurs économiques et sociaux. On le voit désormais avec le recours de plus en plus fréquent aux instances arbitrales (internationales ou non) et particulièrement aux tribunaux américains appelés à trancher les contentieux entre groupes transnationaux… « Après s’être attaqué aux banques européennes et à la firme Volkswagen à laquelle le Département américain de la Justice vient d’infliger 4,3 milliards de $ d’amende. C’est au tour de Fiat Chrysler d’être accusé… Transactions et amendes visant des groupes étrangers se multiplient et se chiffrent en dizaines de milliards. La France se convertit à la justice transactionnelle qui pourrait être testée avec UBS… la loi dite Sapin II du 9 septembre 2016 permettant désormais de procéder à des marchandages pénaux » [3]. Des transactions judiciaires court-circuitant la Loi (ou l’annulant de fait) et conduites par des magistrats dont il faut souligner le grand degré général de politisation (d’imprégnation idéologique), dont beaucoup appartiennent à des fraternités opératives et qui appliquent couramment les textes suivant une lecture très anachronique, c’est-à-dire dans un esprit fort éloigné de celui de leurs rédacteurs.


Autrement dit, à titre d’exemple, des gens de justice qui interprètent les textes selon l’air du temps et suivant une sensibilité (supposée compassionnelle) érigée aux noms des Valeurs (flottant dans le ciel étoilé de la dive Union européenne) en normes jurisprudentielles contraignantes, la plupart du temps au mépris d’un intérêt général bien compris. À telle enseigne qu’ « en matière d’immigration, ceux qui décident ne sont ni les ministres, ni les préfets, mais les juges » [4]. Lesquels se font les complices des passeurs en ne voulant voir qu’un acte d’humanité là où se trouve une infraction manifeste associée à un geste politique subversif. Conclusion : « les ministres parlent en matière d’immigration, mais ils ne gouvernent pas, ce sont les juges qui décident aujourd’hui ». Or, au-delà de la seule question migratoire, si nous devons tirer un enseignement de ce constat sans appel, ce serait qu’à présent le politique s’efface tendanciellement devant le juridique. La nature du pouvoir est donc de ce point de vue, en train de changer dans sa substance même. Il serait par conséquent opportun de voir et de savoir où cela nous mène. Non ?

suicidegaulois.jpgVers la fin du Politique

De nombreux faits semblent signaler dans un monde en mutation un effacement du politique. Ainsi un déséquilibre significatif se fait jour, de plus en plus visible, entre l’exécutif et le juridique au profit du second. C’est sous cet angle – avons-nous dit - qu’il convient d’interpréter le contentieux opposant la Commission européenne à la Pologne. À l’époque où tout se contractualise (même les rapports amoureux au sein du mariage qui peuvent faire l’objet aux États-Unis d’une nomenclature contraignante), il est dans la logique des choses que l’instance judiciaire arbitrale prenne peu à peu le pas sur un exécutif réduit le plus souvent à la gestion des affaires courantes par des chambres dont le coût budgétaire est exorbitant au regard de leur utilité et plus encore de leur représentativité démocratique. Au reste les Exécutifs court-termistes en raison de leur médiocrité intrinsèque ont-ils réellement les capacités (notamment cognitives), les moyens, la volonté ou l’envie de voir par-delà la ligne d’horizon ? Mais ceci est un autre débat.

Nous devons en effet voir dans le contractualisme une sorte de corrélat du libéralisme ultra, lequel, depuis la vague déréglementaire des années 70 sous la présidence de Gerald Ford a affranchi les marchés financiers des dernières entraves de nature étatique. Dès 1984 la France socialiste s’est alignée sur les fameux reaganomics si bien qu’en 1986 la loi Bérégovoy permettait d’appliquer servilement l’Art. 16-4 de l’Acte unique européen [5].

Concrètement la Gauche - européiste à tout crin - aura de 1981 à 2005 participé à hauteur de 66% à la libéralisation totale du secteur bancaire tandis que la droite molle n’y aura contribué que pour 34%. La tendance lourde est ici de toute évidence au retrait, voire à l’éviction, de l’État (et simultanément celle du politique) en tant qu’arbitre et régulateur. L’État garant des grands équilibres entre les acteurs et les intérêts économiques individuels ou collectifs, publics et privés, s’efface alors au profit d’accords de gré à gré ou d’adhésion, de personnes physiques à personnes morales, les accords bi ou multilatéraux entre États n’étant au fond que des super contrats.

Triomphe annoncé du contractualisme libéral

Les sociétés modernes sont d’ailleurs à ce point imbibées de contractualisme libéral que « tout individu considère désormais que sa liberté d’agir n’est limitée que par l’assentiment de l’autre » [6]. Contractualisme qui a – soulignons-le - vidé le chimérique Contrat social de Rousseau de tout contenu pour faire du lien social une question fondamentalement privée échappant à la médiation et au contrôle de l’État. Les lois vivant par elles-mêmes finiront par réduire logiquement le pouvoir législatif à n’être plus que résiduel. Le pouvoir réel reviendra alors aux individus et non aux institutions, telle est au final la philosophie de l’anarcho-capitalisme qui par capillarité tend à se diffuser dans l’ensemble du corps social.

Selon cette dynamique, l’État est appelé à se comporter de plus en plus en banal acteur socio-économique, gestionnaire de la chose publique à coup des contrats. Une évolution déjà sensible dans l’Administration qui tendrait à déstatufier ses fonctionnaires (dont le statut est fixé par la loi n° 83-634 du 13 juil. 1983) au profit d’une contractualisation générale, certes dite de fonction publique. Mais ne différant sur le fond du contrat de droit privé qu’à la marge et par le choix des mots. En matière de migration la tendance est tout autant marquée. En témoigne la loi du 7 mars 2016 créant un contrat d’intégration républicaine (CIR) en remplacement du contrat d’accueil et d’intégration (CAI) entré en vigueur en janvier 2007 et dont l’objectif était de contractualiser les engagements réciproques d’un étranger et des autorités françaises… la nationalité hexagonale n’étant plus à partir de là une question d’adhésion mais la conclusion d’un simili engagement sans obligation ni sanction pour le particulier devenu derechef un ayant-droits multicartes.

Dérive institutionnelle et sociétale que nous serions coupables d’ignorer en ce qu’elle balaye ce qui pouvait encore subsister d’une justice distributive (à chacun selon ses mérites) pour faire place à une justice sinistrement commutative. Celle des contrats qui supposerait des contractants à armes et parts égales et sans préjuger du fait que si « tous les animaux sont égaux, certains le sont plus que d’autres  » [7]. Un cas de figure où le pot de terre se retrouve placé sur le même pied que le pot de fer !

Une évolution déjà curieusement et paradoxalement annoncée par le théoricien du socialisme Joseph Proudhon « La justice commutative, le règne des contrats, en autres termes, le régime économique ou industriel, telles sont les différentes synonymies de l’idée qui, par son avènement, doit abolir les vieux systèmes de justice distributive, de règne des lois, en termes plus concrets, de régime féodal, gouvernemental ou militaire. L’avenir de l’humanité est dans cette substitution »… Comme quoi, pour ceux qui en douteraient encore, socialisme et libéralisme convergent depuis toujours !

La dislocation des partis

Parmi les mutations en cours, nous venons d’établir que le politique tend à s’effacer au profit d’un juridisme contractualiste conquérant… Autrement dit, faisant la part belle aux accords entre personnes (physiques ou morales) et réduisant ipso facto le contrôle de l’État (et ses immixtions autoritaires) sur les transactions privées. En fait c’est tout l’esprit du droit anglo-saxon moderne qui contamine notre système juridique et par voie de conséquence bouleverse nos institutions et l’esprit de nos lois… ainsi que des structures mentales héritées du monde romain, et presque inchangées depuis vingt siècles. Comprenons que cette configuration inédite modifie notre rapport au monde et la perception que nous en avons (notre filtre idiosyncrasique). Le gouvernement des juges (ceux d’instances arbitrales séparées du domaine régalien) annonce sans conteste un changement de nature du pouvoir.

Transformation qui se manifeste de façon beaucoup plus immédiate et appréhensibles pour qui voulait la voir bien avant l’élection fracassante de M. Macron… Mais que celle-ci a mise à nu. À commencer par la dislocation des partis traditionnels de gauche et de droite et celle du Front national qui - normalement - ne devrait pas survivre à son effondrement d’entre les deux tours. Maintenant reste à savoir si les morceaux peuvent être encore recollés et si les partis décomposés sont susceptibles de resurgir de leurs cendres ? Ceci pourrait être effectivement envisageable si ces éclatements n’étaient en réalité les révélateurs d’un vide de longtemps préexistant. En témoigne déjà la disparition des anciennes lignes de démarcation entre gauche et droite, piteuse confusion des genres qu’a épinglé des formules comme l’UMPS ou la Drauche [8] .

Notons en outre que les factions politiques dominantes sont paradoxalement minoritaires (la République en marche écrase l’Assemblée de tout son poids avec seulement 14,5% des inscrits !). Le condominium (alternatif) sur les affaires publiques socialistes et républicains n’est en fait parvenu à se maintenir pendant un demi siècle que grâce à de tortueuses politiques d’alliance, de redistribution de la manne des postes et des prébendes et de découpages électoraux ad hoc. En un mot la dichotomie droite-gauche non seulement a vécue mais elle était devenue depuis belle lurette une fiction que seule masquait l’inertie du système. Les arbres vermoulus et creux peuvent rester debout indéfiniment en dépit des bourrasques jusqu’à ce qu’un souffle indu les mette à bas ! Or il ne s’agit pas d’une simple reconfiguration du paysage politique mais bien d’un phénomène dont il n’est pas certain que les observateurs aient mesuré toute la portée. Alors qu’elles leçons tirer de la débâcle structurelle des partis ?

coquille-vide-de-la-mer-en-surface-avec-mi.jpg

La première est que la démocratie n’est de toute évidence plus qu’une coquille vide. On en est à stigmatiser ceux qui (par exemple La Manif pour tous) s’insurgent contre des lois jugées scélérates, au motif qu’il serait antirépublicain (illégal) de critiquer des textes adoptés par les deux assemblées. Mais qui composent le Parlement ? Les votes y sont-ils à ce point légitime qu’il devienne interdit de les contester ? Car par quels mécanismes d’exclusion des partis politiques - plus ou moins fantoches - sont-ils parvenus à tel degré de monopole légal ? Peut-on prendre au sérieux une représentation du peuple interdisant à un quart de l’électorat toute voix au chapitre ? Cela commence à se voir et certains d’ailleurs font mine de s’en émouvoir. Le plus surprenant dans l’affaire n’étant pas que la démocratie soit confisquée mais que se fût tissé un tel consensus du silence autour de ce formidable déni de démocratie, une forfaiture avérée. Que les bénéficiaires se taisent, soit, mais les autorités morales, les intellocrates, les juristes ? Personne ne s’indigne et tous cohabitent jusqu’à présent dans le meilleur des mondes politiciens en négation du principe de souveraineté populaire… Souveraineté dont l’expression parlementaire se trouve à présent réduite à n’être plus qu’une machine à cribler les impuretés idéologiques pouvant gripper le système producteur d’un oppressif goulag consensuel.

Obsolescence du politique

Parmi les leçons immédiates que l’on peut tirer de l’élection du sieur Macron quant à l’effondrement des formations traditionnelles de gouvernement (ou leur servant de repoussoir alias le Front National), nous avons benoîtement feint de découvrir que l’arbre était creux et que les partis politiques n’étaient en vérité que des coquilles pathétiquement vides depuis des lustres. Encore fallait-il le voir pour l’admettre… ou vice versa. La classe politique incapable d’exercer véritablement le pouvoir - s’étant déchargée de toutes ses responsabilités sur la technocratie bruxelloise et finançant les déficit structuraux de l’État au moyen d’un endettement ad libitum - excellait néanmoins dans l’art d’accéder aux Affaires et de s’y maintenir contre vents et marées depuis quarante ans en alternance… pour ne pas dire depuis juin 1944 et l’instauration d’un Gouvernement provisoire où se retrouvaient pêle-mêle gaullistes, communistes et socialistes.

Une bande des quatre (avec les radicaux et les caméléons) qui accrochés à la façon des tænias aux ors des palais de la république, conservera le monopole de l’État pour une durée de vie égale à celle des démocraties populaires soviétiques. Or, avec la dislocation des partis issus de la Révolution de 1945- [9], c’est - si l’on y réfléchit bien - une page de l’histoire qui se tourne, équivalente, en mode mineur et avec moins de fracas, à la chute du Mur de Berlin. Nous sortons du théâtre de l’alliance gaullo-communiste [10] (l’origine et le point d’arrivée du marxisme-léninisme étant la social-démocratie allemande fondée en 1863) pour entrer dans un Nouveau monde comme le dit si bien M. Macron, relevant d’un nouveau champ épistémique libéral-libertaire (anoméen), soit un libéralisme ultra mâtiné de freudo-marxisme. Mais cela les historiens ne s’en apercevront qu’après coup, comme de bien entendu.

Le Système désormais se dispense du « politique »

Exit donc la classe politique dont M. Macron et ses commanditaires nous fournissent maintenant (en remplacement) une sorte fac-similé avec le Mouvement (!) « En marche  [11] ». Un hologramme sous deux espèces : un palais Bourbon ultra croupion pour ne pas dire fantoche, occupé par une écrasante majorité d’ilotes de la politique (et choisi essentiellement pour cette éminente qualité sous couvert d’ouverture à la société civile), et un élyséen aux dents blanches (et aux appétits carnassiers) soigneusement drivé par ses mentors et cornacs, idéologues et magnats des affaires, de la finance et de la presse. Déité trinitaire et monolithique constitutive des modernes oligopoles et des nouvelles féodalités planétaires.

macrontoutneuf.jpgAvec M. Macron, prête-nom ou fidéicommis d’une syndication de grands intérêts (ceux qui l’ont propulsé sans coup férir aux commandes du paquebot en perdition « France ») nous voyons clairement que l’homme a été évidemment parachuté à son poste… Qu’il ne s’est pas hissé à la force du poignet par le laborieux truchement des partis. Ces paniers de crabes écumant avec leurs tripatouillages, leurs magouilles, les copinages, les parrainages et les affiliations plus ou moins discrètes. Tout cela est révolu, vieux jeu, ringard. Aux orties les partis qui ne servent plus à rien, pas même à servir de caisse de résonance ou d’exutoire à la France populaire et moribonde, celle des usines délocalisées, des friches industrielles et des zones rurales livrées à l’agro-industrie mondialisée… Toutes choses et secteurs dont la nouvelle aristocratie cosmopolitiste n’a que faire et ne rêve que de placer en sédation profonde à coup d’allocs et de drogues dites douces en libre accès (du ballon rond à la marie-jeanne) !

Bref, ce coup d’État institutionnel (grâce aux mécanismes électoraux garantissant jusqu’à ce jour funeste des rentes de situation à perpétuité), n’a été possible que parce que les partis politiques et leurs caciques (ainsi que leurs vindicatives rombières et leurs jeunes bas-bleu), ne pouvaient plus y faire obstacle ayant déjà sombré en silence corps et biens. En un mot, devenu inutile et matière inépuisable à scandales, le personnel politique ayant administré une fois pour toutes la preuve de son incapacité à donner le change et tenir sa place de façon crédible (en répondant avec zèle aux attentes des maîtres de l’ombre), devait une fois pour toutes quitter les tréteaux. Ici pas de conspirationnisme à la petite semaine, ceux qui dirigent de derrière le rideau, ceux qui distribuent les rôles et délèguent les fonctions, sont connus de tout un chacun. Ils se pavanent régulièrement sur les écrans familiaux des services publics d’hypnose collective (financés par une juteuse redevance) et ont finalement décidé de court-circuiter (ou de faire l’économie) de politiciens à la ramasse dont la médiocrité commençait d’ailleurs à faire tache.

Démocratie aussi directe que surplombante

Autrement dit, gouverner en direct sans plus d’appareils partisans, lourds, peu maniables et fauteurs permanents d’embarras. Le processus n’est pas achevé mais il est engagé et devrait voir bientôt - pour commencer - la disparition du sénat, la réduction du nombre de députés et ainsi de suite. Tel sera l’un des inéluctables aboutissements à venir du coup d’éclat macroniste. La partitocratie ayant fait long feu, le moment était certes venu de lui substituer un dispositif plus efficace et plus adapté aux nécessités de l’heure (européanisation à marche forcée et unification euratlantiste). Un appareil d’État par conséquent relooké et rajeuni, progressant masqué sous le visage lisse du jeune premier Macron… en réalité un acteur sans véritable étoffe en dépit des dithyrambes qui pleuvent et l’accablent tant ils sont excessifs. Reste qu’il suffit de louer médiatiquement assez fort son génie, pour que beaucoup y croient. En fait Macron était le personnage idoine pour endosser les habits neufs d’un pouvoir anamorphique (en profonde mutation).

Maintenant pour ne pas conclure, récapitulons : le changement de nature du pouvoir est aujourd’hui marqué par la fin du politique au sens classique. Les corps intermédiaires que constituait le bicaméralisme (la chambre haute étant le Sénat et l’Assemblée nationale, la chambre basse), sont devenus obsolètes et pire, inutiles. Les puissances économiques (commerce et industrie) et surtout financières qui dirigent le monde veulent gouverner les peuples (l’on ne parle plus de nation) en direct, sans intermédiaires institutionnels. À ce titre M. Macron est essentiellement une sorte de régent de la banque de France (n’ayant « de France » que le nom car strictement inféodée à des intérêts privés), doublé d’un syndic de faillite (il devra faire la part du feu entre le rentable et le non rentable : en sacrifiant par exemple les classes moyennes et les déserts ruraux au profit des secteurs les plus dynamiques concentrés dans les grands centres urbains à vocation cosmopolitiste), et enfin (au moins de depuis Jacques Chirac ) un super VRP (représentant de commerce) dont les objectifs détermineront la vision géopolitique et conditionneront la diplomatie. Ce que n’ont pas vu les imbéciles thuriféraires du génie et de l’audace du sieur Macron en matière de relations internationales. Car sa politique n’est évidemment pas celle de l’intérêt à long terme de la nation (un mot inexistant dans le vocabulaire présidentiel), mais la réalisation de gains court-termistes, soit une politique de « coups » ! Un peu à l’image de celui qui traverse un gué en sautillant et pierre en pierre… en espérant qu’à chaque rebond, les points d’appui salvateurs soient bien au rendez-vous !

3-singes.jpg

Le Quatrième pouvoir a évincé le Premier

Ce à quoi s’ajoute - n’oublions pas - le dépérissement de la fonction judiciaire régalienne que vient peu à peu détrôner un contractualisme libéral invasif sous la poussée du droit anglo-saxon. C’est la tripartition fonctionnelle du pouvoir politique en France depuis Montesquieu (exécutif/législatif/judiciaire) qui est ici remise en cause. Mais cela ne s’arrête pas là ! L’élection de M. Macron nous montre en définitive que l’obsolescence du politique est parvenue – quasiment – à son terme. À savoir que ce sont les médias et leur capacité à manipuler l’opinion publique qui ont fait d’un presque inconnu un chef d’État en brûlant toutes étapes d’un ordinaire cursus honorum. Ceci étant tout sauf accidentel. Ainsi donc, à partir de maintenant, le Quatrième et récent pouvoir (la presse) devient effectivement le Premier : dorénavant politiciens et médiacrates faiseurs de rois, entrés en relation osmotique sont appelés à se fondre et à se confondre. Rappelons que puissances d’argent et machineries médiatiques sont actuellement une seule et même entité. Or la science et l’art de la guerre contre l’esprit humain (sous le vocable entre autres d’ingénierie sociale) faisant de réels et constants progrès… notamment grâce à la psychanalyse, charlatanerie thérapeutique mais féroce outil de manipulation mentale. Là encore, le politique, ses rhétoriciens, ses sophistes, ses blablas et sa jactance, doivent céder le pas aux experts de la psychologie des foules et de leur viol permanent par une propagande offensive œuvrant au service exclusif de la révolution mondiale et sociétale qui, lentement mais sûrement, nous dévore… presque à notre insu. La redoutable apathie des peuples européens en témoigne.

Pour ne pas conclure…

Exit le politique

L’élection de M. Macron nous a révélé que les partis politiques n’étaient plus que des coquilles vides depuis des lustres. La classe politique compradore s’étant déchargée depuis longtemps de toutes ses responsabilités sur la technocratie bruxelloise (et au moyen d’un endettement ad libitum), excellait néanmoins dans l’art d’accéder aux Affaires et de s’y maintenir, ceci depuis le Gouvernement provisoire de juin 1944 associant gaullistes, communistes et socialistes. Or, avec la dislocation des partis nés à la libération de Paris, c’est une page d’histoire qui se tourne, peut-être équivalente, mais en mode mineur, à la chute du Mur de Berlin. Nous sortons en effet du théâtre de l’alliance gaullo-communiste* pour entrer dans un Nouveau monde macronien, relevant d’un nouveau paradigme, celui d’un libéralisme ultra mâtiné de freudo-marxisme.

Exit la classe politique que M. Macron et ses commanditaires ont remplacée par une sorte de fac-similé… En marche. Un hologramme à deux visages : un palais Bourbon ultra croupion, occupé par une écrasante majorité d’ilotes de la politique (et choisi pour cette éminente qualité sous couvert d’ouverture à la société civile), et un élyséen aux dents blanches et aux appétits carnassiers, soigneusement drivé par ses mentors et cornacs, idéologues et magnats des affaires, de la finance et de la presse.

M. Macron, prête-nom ou fidéicommis d’une syndication de grands intérêts, ne s’est évidemment pas hissé à la seule force du poignet via le laborieux circuit partisan. Tout cela est d’ailleurs révolu, vieux jeu, ringard. Aux orties les partis qui ne servent plus à rien, pas même à servir de caisse de résonance ou d’exutoire à la France populaire et moribonde, celle des usines délocalisées, des friches industrielles et des zones rurales livrées à l’agro-industrie mondialisée.

Bref, un coup d’État institutionnel n’ayant été possible que parce que les partis et leurs caciques avaient déjà sombré en silence corps et biens. Devenu inutile et matière inépuisable à scandales, le personnel politique devait quitter les tréteaux pour nous avoir tant de fois administré la preuve de son incapacité à tenir sa place de façon simplement crédible. Bref, ceux qui dirigent derrière le rideau, distribuent les fonctions et les rôles ont finalement décidé de court-circuiter de politiciens dont la médiocrité commençait à faire tache.

La partitocratie ayant fait long feu, le temps est donc venu de lui substituer un dispositif plus adapté aux nécessités de l’heure (européanisation à marche forcée et unification euratlantiste). Un appareil d’État par conséquent relooké et rajeuni, progressant masqué sous le visage lisse du jeune premier Macron… en réalité piètre acteur en dépit des dithyrambes qui pleuvent et l’accablent tant ils sont excessifs.

Récapitulons : les corps intermédiaires que formait le bicaméralisme (Sénat et Assemblée nationale), sont désormais devenus inutiles. Les puissances économiques et financières qui dirigent le monde veulent gouverner les peuples en direct, sans intermédiaires institutionnels. À ce titre M. Macron peut être considéré comme une sorte de régisseur de l’entreprise France et un syndic de faillite devant faire la part du feu entre le durable et le consommable, en sacrifiant les classes moyennes et la province au profit des grands centres urbains à vocation cosmopolitiste. Enfin un super VRP dont les objectifs commerciaux détermineront la vision géopolitique et conditionneront la diplomatie.

Mais si l’élection de M. Macron nous montre l’obsolescence du politique, elle révèle également que se sont les médias qui sont aujourd’hui les vrais maîtres du jeu. Que leur capacité à manipuler l’opinion publique est telle qu’ils sont parvenus à faire d’un quasi inconnu, un chef d’État. Concluons que le Quatrième pouvoir (la presse) est en réalité devenu le Premier : dorénavant politiciens et médiacrates faiseurs de rois, sont appelés à se fondre et à se confondre.

Notes

[1Sachant que les parlements nationaux ne sont plus (à 90%) que des chambres d’enregistrement des décisions prises par le soviet bruxellois.

[2La superstructure régalienne de l’État repose sur la triade des trois pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire. Un archétype qu’il conviendrait de réviser dans la mesure où aujourd’hui la « communication » (la médiacratie) prime sur toutes les autres expressions du politique.

[3lefigaro.fr 14 janv.17

[4JYLeGallou/bvoltaire7sept17

[5Art 16-4 « Le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée… L’unanimité est nécessaire pour les mesures constituant un recul en matière de libération des mouvements de capitaux ».

[6FTeusch/bvoltaire28sept17

[7Orwell « La ferme des animaux » 1945.

[8Expression que vulgarise Benoît Hamon en décembre 2012 alors qu’il est ministre de l’Économie sociale et solidaire, pour désigner « les politiques dites sociales mais tout à fait libérales ».

[9L’épuration fit plus de victimes que n’en fit la Terreur (hors les guerres de Vendée).

[10« À la Libération, de Gaulle nommera cinq ministres communistes, dont un ministre d’État, Maurice Thorez… Une centaine de membres du Komintern [organe de la révolution mondiale] seront propulsés au sommet de l’État. Des durs. Ils deviendront intouchables du fait de l’instauration du statut de la fonction publique, signé par Thorez » [Eric Brunet/lepoint.fr10nov16].

[11Reprise d’un slogan de Vichy qu’avait déjà copié en 1965 le libéraliste américanolâtre Lecanuet… Tout comme Mitterrand avait fait campagne en 1981 (La Force tranquille) sur fond d’azur et de clocher de nos terroirs ! Cliché plagié d’une affiche pétainiste ce qu’à bien vu et noté l’expert journaleux Jean-Marie Colombani dans sa biographie du susdit (1985 P.177)

 

mardi, 15 mai 2018

El crepúsculo de las ideologías

GFM.jpg

Carlos X. Blanco:
 
El crepúsculo de las ideologías
 
Ex: https://latribunadelpaisvasco.com

Una de las constantes quejas del pensador español don Gonzalo Fernández de la Mora era el exceso de pathos y la carencia de logos en nuestra producción intelectual nacional. Creía el filósofo que en nuestro suelo patrio habían florecido no pocos "sentidores", pero muy escasos "razonadores". Es la España en exceso quijotesca la que causaba rechazo en don Gonzalo, la España plena de ideales –que no ideas- nunca realizados por resultar desde el principio ideales imposibles. Es la España trágica unamuniana, anegada de dudas y desazón, rica en sentimiento pero carente de hilos de discurso racional, la que había que superar según él, cargándola a nuestras espaldas pero no mirándola más, pues la mirada nacional, decía el pensador, ha de apuntar hacia un futuro nítido trazado a base de planes racionales, cuidadosamente calculados, racionalmente trazados, inyectados con dosis adecuadas de realismo y pragmatismo.


GFML1.jpgYo también lo creo, y en esto coincido con Fernández de la Mora. Nos hace falta una filosofía, y no una filosofía cualquiera. Nos hace falta una filosofía positiva. Entiéndaseme bien: positiva no significa positivista. De esta otra ya andamos sobrados. No faltan columnistas, periodistas, científicos sociales y naturales, expertos en "H" o en "B", que lanzan al aire y a las masas la carnaza positivista de que la "filosofía no sirve para nada" y venden la baratija de que, a lo sumo, un mero análisis lógico y lingüístico de los enunciados es cuanto queda por hacer al filósofo profesional. Eso, o la divulgación generalista, el trenzado ideológico-partidista o la labor anticuaria de rescatar y exponer "ideas del pasado". El neopositivismo anglosajón y colonizador fue parte del recado atlantista que nos llegó tras la "apertura" de nuestro país a la ayuda y a la influencia angloamericana en pleno franquismo, y se tradujo en la creación masiva de cátedras y plazas docentes de una filosofía –- la "analítica" –- que no era nuestra y que nada nos decía. Pudo ser una alternativa "modernizadora" ante el acartonamiento escolástico de la universidad franquista, es cierto, un acicate, siempre saludable, para estudiar lógica formal o interesarse por la epistemología de las ciencias "duras", pero poco más.


La filosofía positiva por la que abogaba don Gonzalo, me parece a mí, era más bien otra. Es la filosofía rigurosa, la que atiende a hechos, experiencia y raciocinio, pero no al sentimiento. Es la filosofía entendida como un saber estricto, tomando ésta expresión del antecedente germánico de Fichte (1762-1814). Dicho proyecto del saber estricto tuvo continuadores en suelo hispano, en grandes autores como Ortega y Zubiri. En tiempos más recientes, y a pesar del sesgo que el propio nombre implica, hablo del término "materialismo", la filosofía de Gustavo Bueno supone un jalón fundamental para superar la etapa noventayochista y neorromántica de los "sentidores" hispanos y edificar definitivamente una escuela filosófica hispana de "pensadores" rigurosos, distantes y alérgicos de cualquier sesgo ideológico, metafísico (metafísico en el sentido de pre-crítico), partidario, etc. En la actualidad, un discípulo de Gustavo Bueno, don Manuel Fernández Lorenzo, pugna por elaborar esa filosofía "positiva", que no positivista, ni tampoco materialista, que esté "al nivel de nuestro tiempo", dando cuenta, como quería Ortega, de la génesis operatoria (en gran parte manual) de nuestros conocimientos y de las estructuras ontológicas del mundo.


GFML2.jpgLas quejas de G. Fernández de la Mora, así como sus proyectos modernizadores, han quedado en el olvido. El cambio de Régimen, desde el franquismo (sistema en el cual éste pensador fue destacado miembro, e incluso ministro) hacia la Restauración borbónico-constitucional (R78) supuso el olvido e incluso la postergación de su obra. El filósofo conservador, pero en absoluto fascista, había concebido una España moderna en el plano científico y tecnológico, una España en la cual primaran el mérito, la capacidad, la preparación, y en donde se proscribiera para siempre la demagogia, el juego doctrinario, la retórica verbal y el patetismo. Es una voz la de Fernández de la Mora que no ha sido escuchada. Una España que la escuchara, será una nación radicalmente otra, renovada y sin prejuicios.


Si bien es del todo cierto que asistimos a un Crepúsculo de las ideologías (título de un jugoso y fundamental ensayo suyo), hay una y muy fundamental ideología que todavía se sostiene en pie. Una simple y llana ideología que a alguien le interesa sostener aunque sea a través de todos los artificios y por medio de las más variadas tretas: la ideología de actuar como si aún existieran ideologías y la de hacer creer que existen y son importantes. Le resulta muy útil al sistema, y en especial al R78, hacer creer a la gente que aún existen izquierdas y derechas. Le resulta muy rentable al sistema ese empeño en catapultar a la fama a ignorantes retóricos que propagan discursos vacuos y sofismas del más bajo nivel.


A veces da miedo. Este país estuvo a punto de ser gobernado por un profesor de ciencias políticas que no era capaz de citar adecuadamente una obra de Kant, y al punto, si Dios no lo remedia, nos va a gobernar otro señor de la nueva hornada a cuyo magín ni siquiera le viene el título de ninguna, lo cual no sé si es peor. No es que haya desaparecido la filosofía de nuestro escenario político, y que nunca haya entrado en las cabezas de nuestros políticos, sino que más bien el Régimen es la negación más explícita y radical del pensamiento racional mismo.

La ignorancia de nuestros políticos o líderes de masas es mucho más peligrosa que la barbarie de las turbas descontroladas, pues estos personajes sirven de modelos de conducta y sentimiento a turbas futuras más numerosas y más osadas. Sus consignas encaminadas a la indignación o la movilización sirven para que un pueblo esclavizado refuerce la apretura de sus grilletes, creyéndose libre en un sistema que se dice liberal. La ideología según la cual existen ideologías, la creencia de que en Podemos hay un ápice de socialdemocracia y otro de libertarismo, el señuelo de que allí anidan comunistas y revolucionarios, tanto como el engaño de que en Cs y en el PP existe un liberalismo, o de que en el PSOE se conservan esencias de la II Internacional o del modelo sueco… Todo esto es engaño, demagogia, ideología. Todo ello no es más que esa Ideología que reza que nuestro R78 es ideológico. Esa ideología es la Caverna Platónica en la que media España está metida. La otra media se desinteresa, ve deportes o escucha chascarrillos en vez de ruedos políticos, o se evade alienada por los medios más diversos.

GFML4.jpgFernández de la Mora proclamaba sustituir las ideologías, ya moribundas, por ideas. Trocar a los demagogos y a los declamadores por expertos. En vez de entusiasmo, peligroso explosivo que siempre deviene en tiranía, consenso. El consenso tácito y la deliberación fría deben ocupar su puesto rector en lugar de la asamblea tumultuaria. El análisis sosegado de proyectos racionales en vez de agitación y propaganda. Qué duda cabe que la filosofía positiva no corrió la mejor de las fortunas una vez desembocada la partidocracia del R78. El régimen constitucional postfranquista ensalzó la retórica partidista y encumbró a un sinfín de ideólogos, retóricos vanos, arribistas, vividores "liberados" de los sindicatos y de los aparatos electoralistas. Los expertos, las personas formadas en las distintas ramas de la vida orgánica del Estado (administradores, expertos juristas, tecnólogos, economistas planificadores…) hubieron de ceder sus sillas o pasar a un discreto y segundo plano ante el soberano imperio de los grandilocuentes vendedores de humo. Incluso dentro de la democracia postfranquista se advierten claramente dos generaciones: una, primera, aún bien acreditada en cuanto a titulación académica y experiencia práctica en la empresa pública o en la privada, y otra, segunda, en la que ahora más y más nos hundimos, en la cual el lumpen de la sociedad, los sectores sociales más refractarios al esfuerzo intelectual, profesional y, en general, humano, se dedican, con el carnet en la boca, a ascender por los aparatos electoralistas para conseguir aplausos fáciles y cargos sine cura.

GFML3.jpgDon Gonzalo despedía con alegría al tipo de político retórico y declamador, pero experto en nada, que había dominado la escena pública europea durante todo el siglo XIX y que aún prolongaba su inútil existencia en el XX. A la par, el filósofo bendecía en "El Crepúsculo de las Ideologías" al tecnócrata, al experto, al "conocedor" que no busca encandilar a las masas, manipularlas y tocar las fibras de su entusiasmo, sino ser eficaz servidor público que plantea objetivos realistas en orden a una mejora del bienestar general, haciendo del Estado una maquinaria ágil, inteligente, bien engrasada. Una maquinaria que ha de renunciar, bajo riesgo de recaer en el ideologismo y en el utopismo más peligrosos, a reformar al hombre.


La visión gramsciana, tan extendida hoy en Occidente, y no precisamente bajo gobiernos comunistas sino bajo fuerzas que a menudo se dicen "liberales", es la antítesis del "Estado de Obras" de nuestro autor. El filósofo marxista italiano Antonio Gramsci (1891-1937), uno de los principales intelectuales revolucionarios de toda la Historia, había dejado claro que el Estado tenía la misión de transformar al hombre. El Estado era, bajo el capitalismo y, después, bajo el futuro comunismo, algo más que un comité dirigente de la Producción. El Estado poseía una misión ética. El Estado debía ser el agente de la transformación de la propia esencia del hombre. Una esencia histórica, si cabe hablar así, esto es, transformable. Dicha transformación fue dirigida inicialmente por los patronos capitalistas que habrían creado un Estado a su medida (muy especialmente a través de las instituciones educativas), para así disponer de un obrero igualmente hecho a su medida. El comunismo hará lo propio. Una vez conquistada la hegemonía, y tras ella, inmersa la sociedad toda en una etapa revolucionaria, el Estado proseguirá con esa función que hoy llamaríamos función de "ingeniería social", haciendo de cada individuo un convencido comunista.

Por el contrario, casi diríamos que en las antípodas, la Tecnocracia de Gonzalo Fernández de la Mora se situaría en la más genuina tradición del realismo político hispano. Lejos de una transformación general del hombre, pues en el colectivo "hombre" siempre habrá hondas e insalvables disparidades (de talento, de capacidad, de formación, de inquietud, de lealtad), el Estado debería reducirse a ser el más elevado servicio de "puesta a punto" de todos los torrentes de energía social, para aprovecharlos y encauzarlos de la mejor manera posible, haciendo aquí de catalizador, allí de coordinador, y más allá de planificador y rector. En el Estado tecnocrático los expertos siempre serán consultados y el gestor político, como el buen ingeniero, se debe poner el casco, bajar "a pie de obra" y consultar a los subordinados y a los adláteres para palpar las realidades sobre las que quiere operar. Una cosa es poner a punto la maquinaria estatal, partiendo de una sustancia antropológica dada, y otra es transmutar esa sustancia.


GFML5.jpgUn ejemplo de cómo esta filosofía de ideas y no de utopías ideológicas perdió la batalla, y el vicio del ideologismo alcanzó el triunfo, fue el rosario de las reformas educativas de la democracia. Cada nueva ley de educación, comenzando con la barbarie de la LOGSE, hasta llegar a la actual LOMCE, demostró ser la consagración del ideologismo. En lugar de dotar al Estado de ideas, ideas tonificantes, hemos tenido ideología y más ideología. España necesitaba ideas en el sentido filosófico, esto es, conceptos generales (trans-categoriales) que hundieran sus raíces en los más variados conceptos y categorías científicas y técnicas, ideas que, debidamente entretejidas, formaran un proyecto comunitario para "poner a punto" nuestra sociedad y vuelvan a "ajustar" debidamente a España en el orden internacional, colocándola en el puesto que le compete y que se merece ateniéndose a su Historia y a su Presente. Pues bien, en lugar de eso, hemos sido víctimas de los pedagogos, esto es, de los ideólogos, que de manera harto interesada nos equipararon a todos por lo bajo, sustituyendo el imperativo del esfuerzo por la "integración" y halagando al vago y al parásito, con la esperanza de que sean muchedumbre los que sigan depositando en los mismos ataúdes ideológicos el voto mayoritario de los borregos.

mardi, 08 mai 2018

Déclin aristocratique et corvée démocratique

eluminure-rouge-1..jpg

Déclin aristocratique et corvée démocratique 

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org

On peut s’adonner à l’adoration de la démocratie en ces temps d’État profond et d’Europe de Bruxelles, il reste que le mot plèbe, dont elle marque la triomphe, a été balayé de tous temps par les génies de l’humanité, à commencer par Platon ou Juvénal, jusqu’à Nietzsche ou Tocqueville. On a évoqué les transformations sociétales (les chiens et les gosses qui parlent aux maîtres et aux parents, etc.) du livre VIII de la République, mais on va revenir ici à la démocratie à la grecque et à sa gestion compliquée…

Fustel de Coulanges dresse un tableau assez terrible de la progression démocratique à Athènes et dans la Grèce ancienne, où elle fut plus cruelle qu’à Athènes, parfois abominable. Mais elle est tellement fatale et inévitable – y compris la décadence qui va avec – qu’on ne va pas la dénoncer !

La Cité dans l’Histoire… Fustel écrit, dans un style proche de Tocqueville :

« Mais telle est la nature humaine que ces hommes, à mesure que leur sort s’améliorait, sentaient plus amèrement ce qu’il leur restait d’inégalité. »

La progression de la plèbe est bien sûr liée à celle de la tyrannie :

« Dans quelques villes, l’admission de la plèbe parmi les citoyens fut l’œuvre des rois ; il en fut ainsi à Rome. Dans d’autres, elle fut l’œuvre des tyrans populaires ; c’est ce qui eut lieu à Corinthe, à Sicyone, à Argos. »

Fustel ici nous fait découvrir un poète méconnu et politiquement réac, Théognis de Mégare. Le passage est passionnant, décrivant un déclin de l’humanité qui nous rappelle celui où Ortega nous explique que l’humanité moderne, comme la romaine, est devenuestupide :

« Le poète Théognis nous donne une idée assez nette de cette révolution et de ses conséquences. Il nous dit que dans Mégare, sa patrie, il y a deux sortes d’hommes. Il appelle l’une la classe des bons, ἀγαθοί; c’est, en effet, le nom qu’elle se donnait dans la plupart des villes grecques. Il appelle l’autre la classe des mauvais, κακοί; c’est encore de ce nom qu’il était d’usage de désigner la classe inférieure. Cette classe, le poète nous décrit sa condition ancienne : « elle ne connaissait autrefois ni les tribunaux ni les lois » ; c’est assez dire qu’elle n’avait pas le droit de cité. Il n’était même pas permis à ces hommes d’approcher de la ville ; « ils vivaient en dehors comme des bêtes sauvages ». Ils n’assistaient pas aux repas religieux ; ils n’avaient pas le droit de se marier dans les familles des bons. »

theo.jpg

Théognis apparaît comme un nostalgique du temps jadis, le laudator temporis acti, façon Bonald par exemple qui écrit au lendemain de la brutale Révolution dite française (comme disait Debord, une bourgeoisie habillée… à la romaine). Il ajoute :

« Mais que tout cela est changé ! les rangs ont été bouleversés, « les mauvais ont été mis au-dessus des bons ». La justice est troublée ; les antiques lois ne sont plus, et des lois d’une nouveauté étrange les ont remplacées. La richesse est devenue l’unique objet des désirs des hommes, parce qu’elle donne la puissance. L’homme de race noble épouse la fille du riche plébéien et « le mariage confond les souches ». 

Et Fustel décrit le noble destin de Théognis :

« Théognis, qui sort d’une famille aristocratique, a vainement essayé de résister au cours des choses. Condamné à l’exil, dépouillé de ses biens, il n’a plus que ses vers pour protester et pour combattre. Mais s’il n’espère pas le succès, du moins il ne doute pas de la justice de sa cause ; il accepte la défaite, mais il garde le sentiment de son droit. A ses yeux, la révolution qui s’est faite est un mal moral, un crime. Fils de l’aristocratie, il lui semble que cette révolution n’a pour elle ni la justice ni les dieux et qu’elle porte atteinte à la religion. « Les dieux, dit-il, ont quitté la terre ; nul ne les craint. La race des hommes pieux a disparu ; on n’a plus souci des Immortels. »

Puis, comme Mircéa Eliade, mais bien avant, Fustel explique que Théognis comprend qu’on oubliera même le souvenir de la nostalgie :

« Ces regrets sont inutiles, il le sait bien. S’il gémit ainsi, c’est par une sorte de devoir pieux, c’est parce qu’il a reçu des anciens « la tradition sainte », et qu’il doit la perpétuer. Mais en vain la tradition même va se flétrir, les fils des nobles vont oublier leur noblesse ; bientôt on les verra tous s’unir par le mariage aux familles plébéiennes, « ils boiront à leurs fêtes et mangeront à leur table » ; ils adopteront bientôt leurs sentiments. Au temps de Théognis, le regret est tout ce qui reste à l’aristocratie grecque, etce regret même va disparaître. »

Et comme on ne descend jamais assez bas, cette semaine j’ai découvert que ma libraire ne savait pas écrire Shakespeare, ma femme que son imprimeur de partitions ignorait qui était Mozart.

Le culte religieux, lié à l’aristocratie (la marque de l’aristocrate c’est la piété, dit Bonald) disparait donc :

« En effet, après Théognis, la noblesse ne fut plus qu’un souvenir.

Les grandes familles continuèrent à garder pieusement le culte domestique et la mémoire des ancêtres ; mais ce fut tout. Il y eut encore des hommes qui s’amusèrent à compter leurs aïeux ; mais on riait de ces hommes. On garda l’usage d’inscrire sur quelques tombes que le mort était de noble race ; mais nulle tentative ne fut faite pour relever un régime à jamais tombé. Isocrate dit avec vérité que de son temps les grandes familles d’Athènes n’existaient plus que dans leurs tombeaux (La cité antique, pp.388-389). »

Arrive la démocratie dont on oublie qu’elle fut surtout une corvée compliquée (comme dit Cochin, il faut se coucher tard pour conspirer longtemps…). Le peuple gagne peu à devenir démocrate. Il en devient esclave, explique Fustel dans des chapitres justement ignorés…

« A mesure que les révolutions suivaient leur cours et que l’on s’éloignait de l’ancien régime, le gouvernement des hommes devenait plus difficile. Il y fallait des règles plus minutieuses, des rouages plus nombreux et plus délicats. C’est ce qu’on peut voir par l’exemple du gouvernement d’Athènes. »

Ici on croirait du Tocqueville. Peut-être que la sensibilité aristocratique de nos deux grands historiens…

Numa_Fustel_de_Coulanges.jpgMais Fustel décrit la corvée démocratique au jour le jour (pp.451-452) :

« On est étonné aussi de tout le travail que cette démocratie exigeait des hommes. C’était un gouvernement fort laborieux. Voyez à quoi se passe la vie d’un Athénien. Un jour il est appelé à l’assemblée de son dème et il a à délibérer sur les intérêts religieux ou financiers de cette petite association. Un autre jour, il est convoqué à l’assemblée de sa tribu ; il s’agit de régler une fête religieuse, ou d’examiner des dépenses, ou de faire des décrets, ou de nommer des chefs et des juges. »

Après c’est du Prévert :

« Trois fois par mois régulièrement il faut qu’il assiste à l’assemblée générale du peuple ; il n’a pas le droit d’y manquer. Or, la séance est longue ; il n’y va pas seulement pour voter : venu dès le matin, il faut qu’il reste jusqu’à une heure avancée du jour à écouter des orateurs. Il ne peut voter qu’autant qu’il a été présent dès l’ouverture de la séance et qu’il a entendu tous les discours. Ce vote est pour lui une affaire des plus sérieuses ; tantôt il s’agit de nommer ses chefs politiques et militaires, c’est-à-dire ceux à qui son intérêt et sa vie vont être confiés pour un an ; tantôt c’est un impôt à établir ou une loi à changer ; tantôt c’est sur la guerre qu’il doit voter, sachant bien qu’il aura à donner son sang ou celui d’un fils. Les intérêts individuels sont unis inséparablement à l’intérêt de l’État. L’homme ne peut être ni indifférent ni léger. »

Tout est préférable au règne des Agathoi (les « bons » de Théognis)… Fustel ajoute :

« Le devoir du citoyen ne se bornait pas à voter. Quand son tour venait, il devait être magistrat dans son dème ou dans sa tribu. Une année sur deux en moyenne, il était héliaste, c’est-à-dire juge, et il passait toute cette année-là dans les tribunaux, occupé à écouter les plaideurs et à appliquer les lois. Il n’y avait guère de citoyen qui ne fût appelé deux fois dans sa vie à faire partie du Sénat des Cinq cents ; alors, pendant une année, il siégeait chaque jour, du matin au soir, recevant les dépositions des magistrats, leur faisant rendre leurs comptes, répondant aux ambassadeurs étrangers, rédigeant les instructions des ambassadeurs athéniens, examinant toutes les affaires qui devaient être soumises au peuple et préparant tous les décrets. »

Avec sa méticulosité et sa soif de taxes et de règlements, la démocratie exige déjà un job à temps plein qui va créer une bureaucratie fonctionnarisée. Et on retombe inévitablement sur l’importance de l’argent déjà dénoncée par Théognis :

«  Enfin il pouvait être magistrat de la cité, archonte, stratège, astynome, si le sort ou le suffrage le désignait. On voit que c’était une lourde charge que d’être citoyen d’un État démocratique, qu’il y avait là de quoi occuper presque toute l’existence, et qu’il restait bien peu de temps pour les travaux personnels et la vie domestique. Aussi Aristote disait-il très-justement que l’homme qui avait besoin de travailler pour vivre ne pouvait pas être citoyen. »

N’oublions que la Révolution Française accoucha de la plus formidable armée de fonctionnaires au monde, celle qui émerveillait aussi bien Taine que le pauvre Karl Marx qui inspira les totalitarismes révolutionnaires(« dans un pays comme la France, où le pouvoir exécutif dispose d’une armée de fonctionnaires de plus d’un demi-million de personnes et tient, par conséquent, constamment sous sa dépendance la plus absolue une quantité énorme d’intérêts et d’existences, où l’État enserre contrôle, réglemente, surveille et tient en tutelle la société civile… »).

On n’est pas ici pour transformer le cours de l’histoire humaine, et on s’en gardera, vu que ce désir malheureux est si souvent promis à un sort malheureux ! Mais on ne s’étonnera alors pas, etj’inviterai à découvrir l’œuvre du philosophe libertarien Hoppe à ce propos, en affirmant que le grand avènement démocratique, avec son cortège de guerres impériales-humanitaires-messianiques, de contrôles étatiques et d’inflation fiscale,  marque souvent la fin d’une civilisation en fait – y compris et surtout sur le plan culturel. Que le phénomène démocratique ait débouché sur le césarisme ici, le fascisme ou le communisme là, et sur la création maintenant d’une caste mondialisée de bureaucrates belliqueux ne devra bouleverser personne.

Sources citées 

Théognis – Elégies (Remacle.org)

Fustel – La cité dans l’histoire (classiques.uqac.ca)

Marx – Le dix-huit Brumaire

lundi, 30 avril 2018

Conquête des droits : le droit à l’existence

trace-de-brennu.png

Conquête des droits : le droit à l’existence

par Antonin Campana

Ex: http://www;autochtonisme.com

 

Légalement, en République, le concept de « Français de souche » n’existe pas. Les « Français blancs dits de souche » ne constituent pas un « groupe de personne » au sens de la loi. Cette notion « ne recouvre aucune réalité légale, historique, biologique ou sociologique», et «la “blancheur” ou la “race blanche”» n'est «en aucune manière une composante juridique de la qualité des Français» (Tribunal Correctionnel de Paris, mars 2015). Par contre, le concept de néocalédonien de souche existe juridiquement et les néocalédoniens de souche constituent bien un « groupe de personnes », et même un « peuple », au sens de la loi (Accord de Nouméa, loi organique 99-209…). Le refus de reconnaître juridiquement le peuple souche de France est à la base d’un système profondément inégalitaire, discriminant et lourd de menaces pour celui-ci (système qui permet par exemple d’insulter en toute impunité les « Français blancs » et d’appeler contre eux à la violence. Cf. le jugement du Tribunal cité plus haut, qui ne trouve aucune objection au fait d’inciter à « niquer » les « petits Gaulois de souche »).

Nous avons montré (ici) que le peuple autochtone de souche européenne, c’est-à-dire le peuple français historiquement « blanc », avait été juridiquement transféré en 1790 dans une nation civique. Cette nation civique a pris le nom de « peuple français » ce qui était un détournement manifeste de nom, voire un vol, puisque cette nation était en fait un « creuset » destiné à intégrer les hommes de toutes les origines.

Dans ce creuset, le peuple français de souche subit aujourd’hui une relation de domination, puisque le régime en place le nie et se refuse à considérer autre chose qu’une nation civique « sans distinction ». Pour la République, il n’y a que le corps d’associés indifférenciés et pas de « corps intermédiaires » ou de « sections du peuple » dans ce corps : pas de peuple souche donc. Celui-ci s’est évaporé et n’est même pas une composante parmi d’autres de la société multiraciale et multiculturelle : il n’existe tout simplement pas !

 La question qui se pose est donc celle-ci : le peuple souche existe-t-il encore, ou a-t-il disparu le 14 juillet 1790 après son transfert dans la nation civique ? Il n’y a que deux réponses possibles à cette question :

  • Oui, il a disparu : il faut donc reconnaître juridiquement son génocide (rappelons que la Convention des Nations Unies pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948) considère que la « soumission intentionnelle d’un groupe [national, ethnique, racial ou religieux] à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle » est un acte de génocide).
  • Non, il existe toujours : il faut par conséquent reconnaître juridiquement son existence.

Bien sûr, la seconde réponse est la seule réponse acceptable, puisque des Français de souche se revendiquent toujours comme tels. Néanmoins, le peuple souche a bien a été victime d’une tentative de génocide, tentative toujours en cours, d’ailleurs, avec le Grand Remplacement et la négation autistique de son existence (négation d’existence qui permet au passage de nier le Grand Remplacement : on ne saurait remplacer ce qui n’existe pas).

Or, non seulement l’existence du peuple souche n’est pas reconnue, mais son effacement est implicitement proclamé par la loi républicaine (sans que pour autant le génocide soit reconnu). Le Conseil Constitutionnel rappelle que le peuple français, défini comme un « concept juridique » (sic !), est une « catégorie unitaire insusceptible de toute subdivision en vertu de la loi », et que la Constitution de la Ve République « ne connaît que le peuple français composé de tous les citoyens français sans distinction d’origine, de race ou de religion » (décision n°91-290DC du 09 mai 1991). Exit donc le peuple souche comme catégorie à part entière.

Pourquoi cette discrimination et ce rejet, si l’on considère que le peuple des Autochtones mélanésiens est quant à lui respectueusement reconnu par les mêmes instances républicaines ? L’interrogation est d’autant plus légitime que le peuple des Autochtones mélanésiens de Nouvelle-Calédonie et le peuple des Autochtones européens de France, peuples vivant sur le même « Territoire de la République », peuvent présenter des titres similaires justifiant leur droit à être tous deux juridiquement reconnus comme peuples à part entière.

Si les premiers Lapitas, ancêtres des kanaks, arrivent dans l’archipel vers 1000 avant notre ère. Les ancêtres des Européens, quant à eux, peuplent l’Europe depuis la nuit des temps. Les peintures de Lascaux ont 20 000 ans, celles de la grotte Chauvet, en Ardèche, ont 35 000 ans. Depuis, le peuplement européen de l’Europe a été ininterrompu jusqu’à aujourd’hui. Est-il besoin de le rappeler ? Faut-il énumérer toutes les empreintes laissées en Europe par ce peuplement européen ?

Pour le reste, le peuple autochtone de France pourrait quasiment s’approprier mot à mot le préambule de l’accord de Nouméa :

« [Lorsque la République] prend possession  [de la France], elle s'approprie un territoire et n'établit pas des relations de droit avec la population autochtone. Les traités passés constituent  des actes unilatéraux.

Or, ce territoire n'était pas vide.

Il était habité par des hommes et des femmes qui se dénommaient [Français]. Ils avaient développé une civilisation propre, avec ses traditions, ses langues, ses coutumes qui organisaient le champ social et politique. Leur culture et leur imaginaire s'exprimaient dans diverses formes de création.

Des hommes et des femmes sont venus en grand nombre, [à la fin du XX siècle], animés par leur foi religieuse, venus contre leur gré ou cherchant une seconde chance [en France]. Ils se sont installés. Ils ont apporté avec eux leurs idéaux, leurs connaissances, leurs espoirs, leurs ambitions, leurs illusions et leurs contradictions.

[La relation de la France avec la République] demeure marquée par la dépendance coloniale, un lien univoque, un refus de reconnaître les spécificités, dont les populations nouvelles ont aussi souffert dans leurs aspirations.

Le choc de la colonisation  [républicaine et migratoire] a constitué un traumatisme durable pour la population d'origine.

Les [Français] ont été privés de leur nom en même temps que de leur terre. Une importante immigration a entraîné des déplacements considérables de populations [françaises], dans lesquels [les familles françaises] ont vu leurs moyens de subsistance réduits et leurs lieux de mémoire perdus. Cette dépossession a conduit à une perte des repères identitaires.

L'organisation sociale française s'en est trouvée bouleversée. Les mouvements de population l'ont déstructurée, la méconnaissance ou des stratégies de pouvoir ont conduit trop souvent à nier les autorités légitimes [NDLR : identitaires] et à mettre en place des autorités dépourvues de légitimité [NDLR : républicaines], ce qui a accentué le traumatisme identitaire.

Simultanément, le patrimoine culturel français était nié ou pillé.

A cette négation des éléments fondamentaux de l'identité française se sont ajoutées des limitations aux libertés publiques et une absence de droits politiques, alors même que les [Français de souche] avaient payé un lourd tribut à la défense de la [République], notamment lors de la Première Guerre mondiale.

Les [Autochtones sont] repoussés aux marges géographiques, économiques et politiques de leur propre pays, ce qui pourrait, chez un peuple fier et non dépourvu de traditions guerrières, provoquer des révoltes.

La colonisation [républicaine] a porté atteinte à la dignité du [peuple autochtone de France] [qu’elle prive] de son identité. Des hommes et des femmes ont perdu dans cette confrontation leur vie ou leurs raisons de vivre. De grandes souffrances en sont résultées. Il convient de faire mémoire de ces moments difficiles, de reconnaître les fautes, de restituer [au peuple autochtone de France] son identité confisquée, ce qui équivaut pour lui à une reconnaissance de sa souveraineté, préalable à la fondation d'une nouvelle souveraineté

Il est aujourd'hui nécessaire de poser les bases d'une citoyenneté [autochtone de France], permettant au peuple d'origine de constituer avec les hommes et les femmes qui y vivent une communauté humaine affirmant son destin commun.

La taille [de la France] et ses équilibres économiques et sociaux ne permettent pas d'ouvrir largement le marché du travail et justifient des mesures de protection de l'emploi local.

Il convient d'ouvrir une nouvelle étape, marquée par la pleine reconnaissance de l'identité [autochtone].

Le passé a été le temps de la colonisation. Le présent est le temps du  rééquilibrage. L'avenir doit être le temps de l'identité, dans un destin commun.

La République est prête à accompagner le peuple autochtone de France dans cette voie ».

Dans l’accord de Nouméa, la République reconnaît que les Autochtones mélanésiens de Nouvelle-Calédonie forment un « peuple » : le « peuple kanak » (point 3 par exemple). Obliger la République à reconnaître que les Autochtones européens de France forment eux-aussi un peuple, tant par leur lignée particulière, leur culture spécifique, que leur lien à la terre ancestrale, revient à faire acte de justice, au nom de l’égalité entre les peuples.

La reconnaissance du droit à l’existence juridique entraînera mécaniquement l’octroi de droits collectifs jusqu’au droit du peuple autochtone à disposer de lui-même. N’allons pas croire que la reconnaissance de ce droit sera offerte sur un plateau. Il devra être conquis de haute lutte, comme il l’a été en Nouvelle-Calédonie. Un Avis de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) du 23 février 2017, observe qu’« aucune définition formelle de la notion d' "autochtone ", pas plus que celle d' "indigenous " en anglais, n'a été arrêtée en droit international ». Pourtant, cette Commission décrète arbitrairement que « seuls les Kanak de Nouvelle-Calédonie et les Amérindiens de Guyane sont des peuples autochtones de la République française ». C’est que la CNCDH a parfaitement compris que le régime en place ne tiendrait pas longtemps si le droit des peuples autochtones était appliqué aux Français de souche européenne. Du point de vue républicain, il est vital que le peuple souche de France ne soit absolument pas conscient de son assujettissement à une République trop universelle pour être française, trop absolue pour être démocratique, trop ouverte pour ne pas être remplaciste.

Le peuple autochtone de France ne doit jamais être reconnu en tant que tel : de son point de vue, la CNCDH a raison !  Mais ce déni d’existence et cette crispation ne montrent-t-elles pas aux Autochtones le point faible du Système et par conséquent la direction de leur combat ? Dans cette conquête du droit à exister juridiquement, conquête mobilisatrice s’il en est, les Autochtones ne manqueront pas d’arguments. Ils disposent de tous les atouts nécessaires pour montrer et démontrer autant qu’il faudra qu’ils ne sont ni un sous-peuple, ni un peuple fantôme, mais un peuple historique et un grand peuple : qui pourra soutenir longtemps le contraire sans passer pour un imbécile ou un antijaphite ?

Antonin Campana

Conquête des droits : le droit à la dignité

droit-a-la-dignite-autochtone.jpg

Conquête des droits : le droit à la dignité

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

Principe ou postulat : la dignité est une norme impérative. Elle est accordée à chaque être humain et constitue de ce fait une base du droit international. Depuis Kant, on admet que la dignité d’une personne impose de ne pas traiter celle-ci seulement comme un moyen, mais comme une fin en soi. Autrement dit, une personne n’est pas un objet dont on peut se servir, c’est une entité intrinsèque, autonome et libre de réaliser le plein épanouissement de ses facultés. On lui doit un respect inconditionnel.

Comme il existe une dignité individuelle, il existe aussi une dignité collective propre à chaque peuple, dignité reconnue elle-aussi par le droit international. La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones accorde ainsi aux peuples autochtones le droit à vivre dans la dignité. Cette dignité doit être protégée de toute forme de violence et la Déclaration demande aux « moyens d’informations » de refléter fidèlement la « dignité » de la culture, des traditions, de l’histoire et des aspirations autochtones (art. 15).

Ramené aux peuples, le droit à la dignité signifie que ceux-ci ne doivent jamais être traités comme des moyens ou des objets mais doivent être respectés en tant qu’entités libres et en capacité de réaliser en toute autonomie le plein épanouissement de leurs cultures, de leurs traditions, de leurs histoires et de leurs aspirations. De ce point de vue, le peuple des Autochtones européens de France est-il traité par la République étrangère de France plutôt comme un moyen ou plutôt comme une entité autonome et respectable ?

L’histoire de ces deux derniers siècles apportent une réponse catégorique et sans ambigüité. Tout d’abord, soulignons que l’existence du peuple autochtone est niée par la République. Comment, dans ces conditions, celle-ci pourrait-elle lui reconnaître une quelconque dignité ? La négation d’existence est le pire que l’on puisse faire à un individu comme à un peuple. Il faut y voir non seulement un manque total de respect mais aussi un désir d’effacement qui peut s’assimiler à un meurtre ou à un génocide symbolique.

 Indubitablement, ce peuple autochtone de France, peuple « qui n’existe pas », a été le moyen de l’expansionnisme républicain. La République s’en est servie comme d’un vulgaire outil lui servant à propager ses idéaux en Europe, tout d’abord, puis dans ses colonies et finalement dans le monde entier. D’un point de vue républicain, l’instrumentalisation du peuple autochtone a été bénéfique, puisque les « principes » et les « valeurs » de 1789 structurent aujourd’hui le Système et donnent la norme à l’ensemble du monde occidental. Du point de vue du peuple instrumentalisé, le bilan et autrement plus négatif puisqu’il a payé de son sang l’expansionnisme de cette « matrice ». Nous parlons ici de plusieurs millions de morts, des bocages vendéens à la conquête du Tonkin, sans oublier Verdun ou Diên Biên Phu. Rappelons, pour faire court, que la France était en 1789 le troisième pays le plus peuplé du monde après la Chine et l’Inde... et que cela n’était déjà plus vrai en 1795.  

Utilisé dans un premier temps pour propager le républicanisme, le peuple autochtone a ensuite servi de laboratoire au modèle mondialiste de société ouverte. En devenant « creuset » (le « creuset républicain »), c’est-à-dire récipient servant à fabriquer la « mixité » et la « diversité », son statut de simple « moyen », voire d’objet, s’est confirmé. C’est en effet « au milieu de lui » (une expression biblique qu’il faut retenir) et pas dans quelque contrée inoccupée, que les expérimentateurs et ingénieurs sociaux républicains ont choisi de déverser progressivement et avec méthode des flots d’immigrés de toutes provenances. Sans égard pour ses souffrances, la mise en danger de son avenir ou l’insécurité culturelle ainsi générée, les ingénieurs sociaux républicains se sont servis de lui pour expérimenter un nouveau modèle de société. Le projet a entièrement reposé sur la créativité, la puissance de travail et le capital matériel que le peuple souche a su accumuler durant des siècles à force de sueur et de sang. C’est sur l’exploitation du labeur autochtone que repose encore la paix sociale. Que les Autochtones cessent de payer leurs impôts ou de travailler quelques jours et le modèle républicain explose instantanément. Le peuple autochtone est un peuple réduit en esclavage pour que dure le « vivre-ensemble ». Or aucun maître ne reconnaîtra la dignité de son esclave.

Moyen de propagation d’une idéologie mais aussi moyen d’expérimentation d’un modèle de société, le peuple autochtone a aussi été considéré par les instances républicaines comme un moyen commode d’explication des échecs de ce modèle de société. En effet, le modèle républicain de « vivre-ensemble » ne fonctionnant pas, il était important de trouver un bouc émissaire afin de disculper le régime et innocenter les valeurs et principes « universels » qui légitiment l’entreprise d’ingénierie sociale. Le peuple bouc émissaire parfait a été (et reste) le peuple autochtone réduit au racisme récurrent et historique qui serait le sien. Tout un système d’avilissement (antijaphétisme) va donc être construit à seule fin de « prouver » ce racisme irréductible, racisme qui, bien entendu, est la cause toute trouvée d’un « vivre-ensemble » impossible. CQFD !

On le voit, la République a seulement et toujours considéré le peuple autochtone comme un moyen. Moyen d’expansion idéologique, moyen d’expérimentation de la société ouverte, moyen d’explication des échecs politiques : la République n’a jamais reconnu l’autonomie du peuple français de souche européenne, elle n’a jamais reconnu son droit à organiser le fonctionnement de sa société selon son identité spécifique, elle n’a même jamais reconnu son existence ! Dans ces conditions, comment pourrait-elle reconnaître sa dignité ?

Un droit ne se mendie pas, il se prend. Ainsi du droit à la dignité.  Il ne tient qu’à nous d’imposer une histoire qui ne soit pas qu’une succession de méfaits. Il ne tient qu’à nous d’exiger de la République une repentance pour les crimes qu’elle a commis envers notre peuple et il ne tient qu’à nous de montrer que nous existons, non en tant qu’individus ou en tant que « citoyens », mais en tant que peuple millénaire ! La République reconnaît volontiers la dignité des Autochtones, mais en tant qu’individus abstraits. Or notre dignité ne s’inscrit pas dans une abstraction (l’Homme) mais dans une réalité concrète : celle de notre appartenance généalogique et identitaire. Nous devons exiger un respect inconditionnel, non en tant que citoyens calibrés, « sans distinction » et interchangeables, mais en tant que membres d’un peuple particulier.

Mais comment avoir de telles exigences quand on est un peuple dispersé ? Si la République joue avec notre peuple, c’est que notre peuple n’est pas organisé. Si elle traite le peuple autochtone comme un moyen, un objet ou un outil, c’est que le peuple autochtone accepte de l’être. Le droit à la dignité ne pourra être reconquis avant que nous ayons psychologiquement intégré à la fois notre condition subalterne, notre exploitation sociale et politique, et les responsabilités de la puissance étrangère républicaine. Il revient au Grand Rassemblement autochtone et à la lutte pour les droits, dont le droit à la dignité, de laver nos esprits de cette propagande deux fois séculaires qui nous amoindrit à nos propres yeux.

Antonin Campana

Le holisme comme réponse au monde moderne

holisme.jpg

Le holisme comme réponse au monde moderne

par Georges FELTIN-TRACOL

Du grec holos, « entier », le holisme est un terme inventé en 1926 par le général Jan Christiaan Smuts, Premier ministre d’Afrique du Sud, pour désigner un ensemble supérieur à la somme de ses parties. L’écrivain britannique Arthur Koestler vulgarisa la notion dans Le cheval dans la locomotive (1967) et Janus (1978). L’anthropologue français Louis Dumont s’y référait déjà en 1966 dans Homo hierarchicus.

Bien connu pour son action permanente envers les plus démunis des nôtres, le pasteur Jean-Pierre Blanchard reprend à son compte le concept dans son nouvel essai L’Alternative holiste ou la grande révolte antimoderne (Dualpha, coll. « Patrimoine des héritages », préface de Patrick Gofman, 2017, 156 p., 21 €). Il y développe une thèse qui risque d’agacer tous ceux qui gardent un mur de Berlin dans leur tête.

Si le monde moderne se caractérise par le triomphe de l’individu et l’extension illimitée de ses droits considérés comme des désirs inaliénables à assouvir, l’univers traditionnel préfère accorder la primauté au collectif, au groupe, à la communauté. Certes, chacune de ces visions du monde antagonistes comporte une part de l’autre. La domination de la Modernité demeure toutefois écrasante, d’où des réactions parfois violentes. Ainsi le pasteur Blanchard voit-il dans la longue révolte des paysans mexicains entre 1911 et 1929 la première manifestation du holisme. Ensuite surgiront tour à tour les révolutions communiste, fasciste et nationale-socialiste. L’auteur insiste longuement sur le paradoxe bolchevique : le progressisme revendiqué se transforma en un conservatoire des traditions nationales et populaires. Le communisme réel est en fait un holisme contrarié par le matérialisme historique. On sait maintenant que la République populaire démocratique de Corée a une société plus communautaire, plus holiste, que cet agrégat bancal d’atomes individualistes déréglés qu’est le Canada.

Alternative-holiste-quadri-1.jpg

Aujourd’hui, la vision holistique des rapports collectifs humains prend la forme de l’idéologie islamiste. Le choc frontal entre la modernité occidentale et cet autre holisme est brutal. L’incantation lacrymale et victimaire aux droits de l’homme, au « vivre ensemble » et à l’individu-tyran n’écartera pas la menace islamiste; elle la fortifiera au contraire. La civilisation européenne ne survivra que si elle renoue avec « la transcendance, ce retour qui combat le monde occidental bourgeois issu de la philosophie des Lumières [qui] offre de nouvelles perspectives pour l’avenir (p. 156) », un avenir holistique, communautaire et organique pour les peuples autochtones d’Europe.

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 76, diffusée sur Radio-Libertés, le 27 avril 2018.

jeudi, 26 avril 2018

An Introduction To Power Through The Lens Of Bertrand de Jouvenel

Bertrand-de-Jouvenel.jpg

An Introduction To Power Through The Lens Of Bertrand de Jouvenel

In 1945, a remarkable book was published under the title On Power: The Natural History of its Growth[i] which at the time appears to have been well-received. The author, Bertrand de Jouvenel, would go on to become a founding member of the Mount Pelerin society two years later. Since then, it has not fared well, which is surprising when considering the depth and insight of the book.

The political theory of Jouvenel presented in On Power is one which provides an interpretation of human society and the role of power (especially the dominant centralizing power which is termed “Power”) as following certain imperatives dependent on the relative position of the actors in question. This conception of power is one which recognizes both the social nature of power as well as the expansionary nature of power. As Jouvenel writes:

The duality is irreducible. And it is through the interplay of these two antithetical principles that the tendency of Power is towards occupying an ever larger place in society; the various conjunctures of events beckon it on at the same time that its appetite is driving it to fresh pastures. Thus there ensues a growth of Power to which there is no limit, a growth which is fostered by more and more altruistic externals, though the motive-spring is still as always the wish to dominate.[ii]

jouvenel-190x320.pngIt is at this point that we can both thank Jouvenel for the model he provides and also reject his attempts to adapt this system of insights to a defense of mixed governance in book VI.[iii] While it is necessary to acknowledge the debt from Jouvenel, it is also just as important to explain exactly how and where further developments from Jouvenel depart from him in a manner which retains the coherence of his breakthrough while rejecting his adherence to a classical liberalism that in essence is a cultural artefact of the very same power conflict he uncovered.

The model, which we can adopt without the confusion provided by Jouvenel’s political affiliation, is one that shows that Power acts both for its own expansion and security, and also as a social process for the benefit of those who come under the purview of Power. With this rough basis, we can begin to view the development of governance in a more sophisticated manner and view a process which has been concealed by modern liberal theory; concealed by precisely those elements of modernity which demand that we view humans as self-interested agents working for primarily selfish means.

One only has to review the works of the liberal tradition, such as those of Thomas Hobbes, David Hume, or Adam Smith to see that the human agent in the modern liberal tradition is one which operates on an individual basis within a moral framework that takes the human agent as an anti-social entity. It is no surprise, then, that all liberal theory takes governance as at best a necessary evil to be maintained to avoid all out conflict (Hobbes) or as something to be rejected entirely as an immoral entity (various anarchisms). All aspects of modernity are tied together by these very same shared ethical assumptions to which all their theories must accord. If, contrary to the modern liberal tradition, the human agent is not an anti-social agent acting from individually determined self-interest, but is instead a social one, then we should see the actions of the human agent being in accordance not only with the individual’s circumstance based interest, but also with the perceived interest of the society within which the individual resides. This would hold just as much for subjects as it would for rulers. The tyrannical ruler of the modern liberal mind, randomly acting out of cruelty because they are unrestrained by checks and balances, would then prove to be a fiction.

The extended model that can be derived from Jouvenel is both exceptionally simple, yet of devastating importance. It is simply that in any given political configuration if there are multiple centers of power, then conflict will occur as the centers of power seek to both secure their position and pursue expansion, which will be done with the ostensible purpose of the good of society in mind. The dominant power center will become the central Power. This dominant Power will enlarge its remit and power not by direct physical conflict (which would in effect spell outright civil war), but through means presented (and seen by both the actors in power and those who benefit) as being beneficial to society overall.

The example of the expansion of the remit of the monarchs of Europe and its transformation into the modern state is presented by Jouvenel to demonstrate this model, and the picture painted is stark and repeatedly supported by historical record. As Jouvenel makes plainly clear, “It is true, no doubt, that Power could not make this progress but for the very real services which it renders and under cover of the hopes aroused by its displays of the altruistic side of its nature.”[iv]

For example:

To raise contributions, Power must invoke the public interest. It was in this way that the Hundred Years’ War, by multiplying the occasions on which the monarchy was forced to request the cooperation of the people, accustomed them in the end, after a long succession of occasional levies, to a permanent tax, and outcome which outlived the reasons for it. It was in this way, too, that the Revolutionary Wars provided the justification for conscriptions, even though the files of 1789 disclosed a unanimous hostility to its feeble beginning under the monarchy. Conscription achieved fixation. And so it is that times of danger, when Power takes action for the general safety, are worth much to it in accretion to its armoury, and these, when the crisis has passed, it keeps.[v]

Of course, it is not only in times of public danger when Power proceeds under the name of public interest. The direction of the monarch’s competition was not only towards external power centers to which overt war was socially permissible, but also internal competitors in the form of barons and lords to whom overt war was not permissible (generally). To them, a process which can best be described as a coalition of the high and low in society was in action. As Jouvenel notes regarding Power:

The growth of its authority strikes private individuals as being not so much a continual encroachment on their liberty, as an attempt to put down various petty tyrannies to which they have been subject. It looks as though the advance of the state is a means to the advance of the individual.[vi]

jouvenelpouvoirlp.jpgJouvenel further elaborates on this with the following: “the monarchy, through its lawyers, comes between the barons and their subjects; the purpose is to compel the former to limit themselves to the dues which are customary and to abstain from arbitrary taxation.”[vii]

The monarchy, then, engaged in this alliance with the common people due to the imperatives its relatively weak position foisted on it, and also as a means to ostensibly better govern. Monarchy was anything but a despotism which modern liberal propaganda post-enlightenment has presented it as, but rather a political structure under restraints which were genuine–a reality that we are blind to due to the shared assumptions provided by modernity, namely that we have passed from a period of darkness into the enlightenment of liberal governance. These assumptions were perpetuated by Power’s expansion.

It is here that we can move past Jouvenel and reflect further on the issue of personal liberty by refusing to be engaged in advocacy of classical liberalism, and by being aware of these assumptions of self-interest. We can then use his observation of this high-low alliance to make some startling assertions I believe are implicit in his work. The bases of these observations are provided by the following passage:

If the natural tendency of Power is to grow, and if it can extend its authority and increase its resources only at the expense of the notables, it follows that its ally for all times is the common people. The passion for absolutism is, inevitably, in conspiracy with the passion for equality.

History is one continuous proof of this; sometimes, however, as if to clarify this secular process, she concentrates it into a one-act play, such as that of the Doge Marino Falieri. So independent of the Doge were the Venetian nobility that Michel Steno could insult the Doge’s wife and escape punishment which was so derisory as to double the insult. Indeed, so far above the people’s heads was this nobility that Bertuccio Ixarello, a plebeian, was unable, in spite of his naval exploits, to obtain satisfaction for a box on the ear given by Giovanni Dandalo. According to the accepted story, Bertuccio came to the Doge and showed him the wound in his cheek from the patrician’s ring; shaming the Doge out of his inactivity, he said to him: “Let us join forces to destroy this aristocratic authority which thus perpetuates the abasement of my people and limits so narrowly your power.” The annihilation of the nobility would give to each what he wanted—to the common people equality, to Power absolutism. The attempt of Marino Falieri failed and he was put to death.

A like fate befell Jan van Barneveldt, whose case was the exact converse. In the history of the Netherlands we come across this same conflict between a prince wishing to increase his authority, in this case the Stadtholder of the House of Orange, and social authorities standing in his way, in this case the rich merchants and ship owners of Holland. William, commander-in-chief throughout thirty difficult and glorious years, was nearing the crown and had already refused it once, as did Caesar and Cromwell, when he was struck down by the hand of the assassin. Prince Maurice inherited his father’s prestige, added to it by victories of his own, and seemed about to reach the goal, when Barneveldt, having organised secretly a patrician opposition, put an end to Maurice’s ambitions by putting an end , through the conclusion of peace, to victories which were proving dangerous to the Republic. What did Maurice do then? He allied himself with the most ignorant of the preachers, who were, through fierce intolerance, the aptest to excite the passions of the lower orders: thanks to their efforts, he unleashed the mob at Barneveldt and cut off his head. This intervention by the common people enabled Maurice to execute the leader of the opposition to his own increasing power. That he did not gain the authority he sought was not due to any mistake in his choice of means, as was shown when one of his successors, William III, made himself at last master of the country by means of a popular rising, in which Jean de Witt, the Barneveldt of this period, had his throat cut.[viii]

It is a position without controversy to trace the origins of liberalism, classical liberalism, and modernity in general to Protestantism and the Reformation. If what Jouvenel outlines in the above passage and in the rest of On Power is correct, then it seems quite evident that the origins of Protestantism and its success is a result of these very same conflicts between these various power centers—something Jouvenel points to with his reference to equality being the ally of Power. It would seem that really equality and liberty are both in conspiracy with Power, for just what was the subsequent intellectual descendant of these “most ignorant preachers” but the liberal tradition proper? So, we have a conundrum. Jouvenel is writing in defense of a liberal political position which he is clearly demonstrating was propagated and favored by power actors in conflict with other power actors. The question we can ask ourselves at this juncture is: how does this accord with the accepted narrative of the development of liberalism? Because the radical implications presented by Jouvenel’s model are that this entire political and social paradigm was favored and propelled forward not by reasoned discourse and collective enlightenment, but in actuality as a result of its suitability and beneficial character in relation to the expansion of Power.

jouvelepolpur.jpgIn asking such a question, the focus of our attention must therefore shift from popular considerations of liberalism as a rational discourse conducted over many centuries to which the assent of reasonable and rational agents was won, to instead a consideration of it as being the result of institutional actions. In effect, we go from the Whig theory of history, Progress etc. to one which identifies modernity as the cultural result of institutional conflict.

Luckily, a great deal of work on this new interpretation of the historical development of liberalism has actually already been done, but the authors in question, like Jouvenel, have not fully understood the implications of their observations. Some of the more striking recent examples have included William T Cavanaugh’s The Myth of Religious Violence[ix] and Larry Siedentop’s Inventing the Individual[x] which both deal with the events leading up to the development of modern liberalism and beyond. Cavanaugh in particular is quite forceful in drawing the reader’s attention to the manner in which institutional conflict preceded the development of liberalism and the Reformation and Jouvenel beckons us to go deeper into this.

Citing the examples of Baruch Spinoza,Thomas Hobbes, and John Locke,[xi] who presented religious division as the cause of the conflicts of the Thirty Years War that led to liberalism, Cavanaugh notes that this narrative is without historical basis. More modern liberal thinkers have subsequently traced the birth of liberalism to the so-called religious conflicts of this period, with Cavanaugh citing Quintin Skinner, Jeffrey Stout, Judith Shklar and John Rawls as exemplifying it.[xii] The problem, as Cavanaugh takes pains to point out, is that the institutional changes which were supposed to have been ushered in as a result of the religious conflicts actually presaged them and caused them. To make matters worse, there is no clear division line between the denominations in the conflict. To bolster his argument, he provides ample examples of conflict occurring between states with the same denominations, as well as collaboration between differing denominations (including Catholic and Protestant states). The most trenchant observation is provided by the example of the conflict between Charles V and the Papacy:

As Richard Dunn points out, “Charles V’s soldiers sacked Rome, not Wittenberg, in 1527, and when the papacy belatedly sponsored a reform program, both the Habsburgs and the Valois refused to endorse much of it, rejecting especially those Trentine decrees which encroached on their sovereign authority.” The wars of the 1520s were part of the ongoing struggle between the pope and the emperor for control over Italy and over the church in German territories.[xiii]

Cavanaugh even manages to find a wonderful quote from Pope Julius III complaining of Henry II of France’s actions: “in the end, you are more than Pope in your kingdoms…I know no reason why you should wish to become schismatic.”[xiv] Clearly, those in positions of power had no problem seeing schism as a power play.

As such, we can see clearly the role of Jouvenel’s mechanism of power employing dissenting sects in the process of power expansion. The employment of schismatic sects and the promotion of what Jouvenel called “the most ignorant of the preachers”[xv] becomes an obvious means of extending the power of the power centers in question. This observation is supported by the thesis presented by Cavanaugh that the Reformation failed in those states that were advanced in the state’s absorption of ecclesiastical power:

It is unarguably the case that the reinforcement of ecclesiastical difference in early modern Europe was largely a project of state-building elites. As G. R. Elton bluntly puts it, “The Reformation maintained itself wherever the lay power (prince or magistrates) favoured it; it could not survive wherever the authorities decided to suppress it.”[xvi]

In contrast:

Where the Reformation succeeded was in England, Scandinavia, and many German principalities, where breaking with the Catholic Church meant that the church could be used to augment the power of the civil authorities. To cite one example, King Gustav Vasa welcomed the Reformation to Sweden in 1524 by transferring the receipt of tithes from the church to the Crown. Three years later, he appropriated the entire property of the church. As William Maltby notes, accepting Lutheranism both gave princes an ideological basis for resisting the centralizing efforts of the emperor and gave them the chance to extract considerable wealth from confiscated church properties.[xvii]

jouvelpoilpuiss.jpgAs for Larry Siedentop, his work on the history of the individual constantly gropes at outlining the mechanism Jouvenel provides, which is arguably the cause of the invention of the individual that he traces. There is no reason to assume that the mechanism of using the rhetoric of individualism and equality as a means to undermine competing power centers began with the Reformation, and Siedentop confirms it did not. It appears to be a constant of human political structure. Siedentop provides a point by point history of the process of the development of the concept of the individual as being a moral development driven by Church authorities and then by secular authorities (at which point we have liberalism). Siedentop does this by continually employing an understanding of early Christian European society as being essentially corporatist, with the Church engaging in a process of breaking down this feudal structure using fundamentally anarchist conceptions of society based on the invention of the individual. Siedentop’s account is essentially Jouvenelian without realizing it. We can even catch him making the Jouvenelian observation on ancient developments leading up to the invention of the individual:

The long period of aristocratic ascendancy in Greek and Italian cities, founded on the family and its worship, had already reduced kingship to a religious role, stripping kings of political authority. The reason for this is clear enough. Kings had frequently made common cause with the lower classes. They had formed alliances with clients and the plebs, directed against the power of the aristocracy. Challenged both from without (by a class which had no family worship or gods) and from within (by clients questioning the traditional ordering of the family), the aristocracy of the cities carried through a political revolution to avoid a social revolution.[xviii]

As with Jouvenel, we can see the process of centralization and individualization as a political structure-driven phenomena without the ideological adherence to liberalism; we are not making any moral claims here, merely noting an obvious systemic mechanism. Siedentop himself goes close to doing so himself as, for example, when he notes of early Christian Rome:

However, by the end of the third century one section of the urban elites embarked on a different course for dealing with the emperor and provincial governors, a course which drew on their Christian beliefs and enabled them to become the spokesmen of the lower classes. A new rhetoric served their bid for urban leadership. It was a rhetoric founded on ‘love of the poor’. Drawing on features of the Christian self-image—the church’s social inclusiveness, the simplicity of its message, its distrust of traditional culture and its welfare role—‘love of the poor’ made possible, Brown argues, a regrouping within the urban elites. It was a rhetoric that reflected and served an alliance between upper-class Christians and the bishops of cities, who were themselves often men of culture or paideia.

This new rhetoric was put to use ‘in the never ending task of exercising control within the city and representing its needs to the outside world.[xix]

Siedentop shows that the Bishop of the European cities promoted individualism contra the secular authorities, and that this was then taken forward with what he calls the Papal Revolution. The Papacy began a series of centralizing policies resulting in the creation of a bureaucracy around the papal office, which Siedentop claims was copied by secular authorities. This process brought the Papacy into a conflict with secular authorities that would ultimately lead to the Reformation, and Siedentop himself identifies that it was driven to a large degree by the dynamics of the Church’s position within the power centers of Western Europe:

The second half of the eleventh century saw dramatic change. Determined to define and defend the church as a distinct body within Christendom, and to protect its independence, popes began to make far more ambitious claims. They began to claim legal supremacy for the papacy within the church, what within a few decades would be described as the pope’s plenitude potestatis, his plenitude of power.[xx]

The significance of all of this is made clear by the following passage which brings us back to Cavanaugh:

By the mid-fifteenth century the papacy had – relying on the centralized administration that had been created since the twelfth century – regained control over the Church. The project of reform which the church had failed to carry through did not die, however. The cause of church reform was almost immediately taken up by secular rulers who drew their own conclusions from the series of frustrated general councils and the resurgence of papal pretensions. The French king, in the Pragmatic Sanction of Bourges (1438), and the German empire, at the Diet of Mayence in 1439, introduced greater autonomy and more collegiate government into national churches. But even these national reforms championed by secular rulers were soon abandoned as a result of papal pressure and diplomacy, returning the situation in the church, at least in appearance, to one of papal absolutism.

But it was only an appearance. For the project of reform, which had eluded both the leaders of the church and secular rulers, had now taken root among the people.

Was it mere chance that the fourteenth and fifteenth centuries saw such widespread popular agitation within the church, with Pietist movements in the Netherlands and Germany fostering a distrust of clerical authority, while the Lollards in England and the Hussites in Prague openly criticized the established church hierarchy, especially the papacy? In the eyes of John Wycliffe, leader of the Lollards, the church had lost its way, preoccupied with legal supremacy and the accumulation of wealth rather than the care of souls, its proper role. Wycliffe spoke for many across Europe when he called for translation of the scriptures into popular languages, so that they could be widely read and properly understood, giving people a basis for judging the claims of the clerical  establishment. The understanding of ‘authority’ was taking a dramatic turn, away from aristocracy towards democracy.[xxi]

jouvenelsov.jpgIt clearly wasn’t mere chance that this popular agitation occurred; it was clearly encouraged and allowed space by the secular rulers. It was the result of competing power centers wresting control from one another. The tool of individualizing was taken from the Church’s hands and used against it. Jouvenel implies that these preachers would have had institutional support. And in the case of John Wycliffe, he had the powerful sponsorship of John of Gaunt, the de facto king of England. This has puzzled historians greatly, but it does not puzzle us. As for Jan Hus, we have the Archbishop of Prague Zbyněk Zajíc and then King Wenceslaus IV. It seems to be a general law that all of these anti-clerical reformists were also pro-secular government and under the protection of patrons in the process of centralizing power and in chronic conflict with ecclesiastical authorities. They all ended in confiscation of Church property. Both Martin Luther and William of Ockham provide excellent additional examples.

The startling issue we now must face is that not only does Jouvenel indicate that the role of power in undermining other power centers by encouraging equality and individualism continues back in history, but it also continues forward to the present. Can it be that the history of the West and the history of liberalism is the ever increasing growth of centralizing power and not simply a moral development following reason? Was the later secularizing of this Christian project of ‘individualizing’ that is embodied in the Enlightenment successful in providing a ground from which to account for the ethical value of this development? Or is it largely a rather mindless result of power conflicts with secular authorities selecting the nearest theories, in order to provide a sheen of legitimacy for their actions?

Given this framework in mind, the fundamental issue is: at what point does this process become harmful and outright suicidal? Moreover, now being aware of this process, may we not look on the events currently occurring in our society and not identify which current iterations of this ‘individualizing’ are symptomatic of raw unnecessary conflict? Which are clearly without any reason?

We can then see that this Jouvenelian mechanism raises far-ranging and profound questions. It is neither Marxist, nor liberal, but instead concentrates on the role of power centers, or competing authorities, as being the drivers of cultural developments under their purview. The relations, imperatives, and motives of these centers then become key and from this we can begin to build a whole new political theory which is unlike any currently in existence.

It has profound applications.



Citations:

[i]Bertrand de Jouvenel, On Power: Its Nature and the History of Its Growth, (USA: Beacon Press Boston, 1962).

[ii]Ibid.,119.

[iii]Ibid.,283.

[iv]Ibid.,128.

[v]Ibid.,129.

[vi]Ibid.,130.

[vii]Ibid.,167.

[viii]Ibid.,178-79.

[ix]William T. Cavanaugh,The Myth of Religious Violence: Secular Ideology and the Roots of Modern Conflict (Oxford: Oxford University Press, 2009).

[x]Larry Siedentop, Inventing the Individual: The Origins of Western Liberalism (Cambridge: Belknap Harvard University Press, 2014).

[xi]Cavanaugh, The Myth of Religious Violence, 124-27.

[xii]Ibid.,130.

[xiii]Ibid.,143.

[xiv]Ibid.,167.

[xv]Jouvenel, On Power, 179.

[xvi] Cavanaugh, The Myth of Religious Violence, 168.

[xvii]Ibid.,167.

[xviii]Ibid., 29.

[xix]Siedentop, Inventing the Individual, 82.

[xx]Ibid.,201.

[xxi]Ibid.,330.

lundi, 26 mars 2018

Sans arme, ni haine, ni violence

déso.jpg

Sans arme, ni haine, ni violence

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

Pour le pouvoir en place, les Français de souche n’ont aucune existence juridique et le peuple autochtone n’existe pas. Or, dire d’un peuple qu’il n’existe pas est d’une violence inouïe, d’autant que les ressorts psychologiques de cette négation sont toujours à rechercher dans le désir malsain d’effacer physiquement le peuple en question. La négation généralisée du droit à l’existence des peuples autochtones européens est une extermination symbolique qui se double d’une extermination réelle puisque ceux-ci tendent à disparaître sous l’effet d’une submersion migratoire organisée. La question de la contestation du régime politique en place revêt donc un caractère vital pour les peuples autochtones. Mais quelle forme doit prendre concrètement la lutte ? Doit-elle être aussi violente que peut l’être le régime ou doit-elle, au contraire, faire appel à une forme de « désobéissance civile » ? Notre position sur le sujet est sans ambigüité : nous considérons que l’usage de la violence est à bannir absolument. Cela pour plusieurs raisons :

Premièrement, les Européens ont été largement domestiqués. Ils furent autrefois des conquérants  capables de soumettre le monde, mais force est de constater qu’ils n’ont plus qu’une lointaine ressemblance avec leurs ancêtres. On ne doit rien attendre de gens qui laissent sans réagir leurs femmes se faire violer, comme à Cologne en décembre 2015. L’Européen type est un quinquagénaire isolé qui n’aspire plus qu’à une retraite paisible. Autant en être conscient.

 Deuxièmement, les Etats supranationaux européens se sont dotés de moyens qui les rendent indestructibles frontalement : arsenal juridique (loi sur le renseignement, lois contre le terrorisme…), capacités techniques (satellites, logiciels espions, « boîtes noires »…), moyens de renseignement  (écoutes, balises, indicateurs…), militarisation du cadre urbain (plan Vigipirate, opération sentinelle), forces de police efficaces et soumises, paramétrages des moyens militaires pour répondre à la violence civile (« opération ronces »), etc.

Troisièmement, notre peuple ne se relèverait pas d’une défaite. En cas de défaite « à domicile », face à l’Etat  supranational, face aux communautés allochtones, voire, ce qui est le plus probable, face aux deux réunis contre lui, la dilution de notre peuple s’accélèrerait inéluctablement.

Quatrièmement, voulons-nous la Syrie pour nos enfants, si d’autres solutions sont possibles ? La violence est toujours réciproque. Décider de l’employer est un acte grave dont il faut bien peser les conséquences sur soi, sa famille et son peuple.

déso2.jpg

En d’autres termes, la violence, en l’état actuel des choses, n’est pas envisageable. Il faut faire face au régime avec réalisme et ne pas l’attaquer sur son point fort. La population autochtone est une masse d’individus isolés, incapables d’agir ensemble, ne se faisant pas confiance, inconscients parfois de la situation, bref, pour tout dire : incapables de résister. Le premier travail consistera donc à rassembler le « reste pur » de la population (les « Réfractaires ») puis à organiser celui-ci de manière à agréger progressivement toute la population. Ce premier travail, non-violent par définition, devra se concrétiser par la formation d’un Etat parallèle, d’un gouvernement parallèle et de communautés autochtones. La proto-nation autochtone ainsi formée et structurée sera une puissante force de résistance au régime en place, à condition de ne pas faire le jeu d’un régime paramétré pour vaincre toute opposition frontale et d’adopter une forme de « désobéissance civile ».

« La désobéissance civile est le refus assumé et public de se soumettre à une loi, un règlement, une organisation ou un pouvoir jugé inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de combat pacifique » (Wikipedia). La désobéissance civile s’adresse au sens de la justice de la majorité au nom de « principes supérieurs » qui ont été violés. On parlera ici du droit à l’existence du peuple autochtone, droit ouvertement bafoué par le pouvoir républicain.

La désobéissance civile n’est pas la passivité. C’est un combat. Comme tout combat, la désobéissance civile a une stratégie et mène des actions. Que ces actions soient non-violentes ne changent rien à leur nature. Elles devront tenir compte des « ressources » disponibles (ressources humaines, financières, médiatiques…), de la situation (rapport de force…) et de l’état de conscience de la population (l’action sera-t-elle comprise ?). Elles devront aussi trouver leur place et leur justification par leur conformité à la stratégie choisie.

La référence absolue en matière de lutte non-violente est le politologue américain Gene Sharp. Celui que certains nomment le « Machiavel de la non-violence » n’est certes pas un ami des peuples autochtones. L’Albert Einstein Institution fondée par Sharp en 1983 est la vitrine séduisante de la CIA et de l’OTAN. Financée par la National Endowment for Democracy (CIA), l’Albert Einstein Institution travaille en étroite collaboration avec d’autres officines spécialisées dans « l’ingérence démocratique » comme l’USAID, Freedom House, ou l’Open Society de Georges Soros.

sharp.jpg

Il est admis par l’ensemble des analystes que les théories de Gene Sharp sont à l’origine des révolutions de couleurs. L’Albert Einstein Institution revendique d’ailleurs la « révolution originelle » (sic) en Serbie (2000), la « révolution orange » en Ukraine (2004), la « révolution des tulipes » au Kirghizistan (2005) auxquelles nous pouvons ajouter la « révolution des roses » en Géorgie (2003), la  « révolution bleue » en Biélorussie (2005) et même le « printemps arabe » en Tunisie, Egypte et  Syrie durant les premières semaines (2010-2012).

Le lecteur accoutumé à ce blog aura compris que conformément à ce qu’énonce Gene Sharp, nous avons défini une « stratégie globale » (libérer le peuple autochtone du « corps d’associés » qui l’étouffe et du régime qui l’opprime) et des stratégies plus limitées se situant dans la stratégie globale (rassembler et organiser ; lutter pour les droits).

La « stratégie globale » détermine l’objectif à atteindre (la libération du peuple autochtone). Elle coordonne l’action de l’ensemble des organisations, des communautés, des institutions autochtones de manière à atteindre cet objectif. Les stratégies limitées, ou intermédiaires, ont un niveau de planification plus restreint. Nous en déterminons deux :

  • Une « stratégie de conservation » : rassembler, organiser et protéger ce qui subsiste (le peuple autochtone, l’identité autochtone,  les terres autochtones…). L’Etat parallèle autochtone et les communautés autochtones sont à la fois des buts et des moyens dédiés à cette stratégie.
  • Une « stratégie d’expansion » : lutter pour obtenir des droits collectifs croissants, jusqu’au droit à l’existence nationale. La désobéissance civile non-violente est, selon nous, le moyen à privilégier pour atteindre les objectifs de cette stratégie.

Les stratégies de conservation et d’expansion ont chacune leurs propres objectifs. Ceux-ci doivent être en cohérence avec la stratégie globale retenue. Pour atteindre ces objectifs stratégiques, il est nécessaire de procéder par étapes en utilisant des « tactiques » appropriées en fonction des ressources disponibles, du contexte et des opportunités. Les engagements tactiques mobilisent un ensemble de moyens sur une période courte, des domaines spécifiques et des objectifs mineurs (campagne de sensibilisation à l’antijaphétisme, campagne de boycott de produits…) . Les gains tactiques obtenus réalisent progressivement les buts stratégiques fixés. Au contraire de la stratégie qui détermine des objectifs plus ou moins lointains et généraux, la tactique vise donc des actions limitées et des objectifs restreints à la portée d’un mouvement de libération.

Les engagements tactiques utilisent des « méthodes », c’est-à-dire des formes d’action pour atteindre leurs objectifs. Ces « méthodes » sont multiples et doivent toujours, selon nous, être non-violentes. Dans son manuel, De la dictature à la démocratie (L’Harmattan 2009), Gene Sharp répertorie près de 200 méthodes d’actions non-violentes. Le politologue les classe en trois catégories :

1. Les méthodes de protestation et de persuasion non-violentes :

  • Parades, marches, veillées…
  • Communications à de larges audiences (journaux, livres, sites internet…)
  • Groupes de pression
  • Pressions sur les individus (fonctionnaires, journalistes, politiciens…)
  • Défilés de voitures, sons symboliques, port de symboles, fausses funérailles, hommage sur une tombe…
  • Rassemblements publics, silence, action de « tourner le dos »
  • Enseignement et formation
  • Etc.

2. Les méthodes de non-coopération

  • Non-coopération sociale : ostracisme de personnes, boycott social sélectif, excommunication…
  • Non-coopération avec évènements, coutumes et institutions sociales 
  • Boycott économique : boycott de produits, d’enseignes, de commerces, de films, refus de payer les loyers, Retraits de dépôts bancaires, refus de déclaration de revenus…
  • Grèves
  • Non-coopération politique : Rejet de l’autorité : rejet d’allégeance, refus de soutien public, désobéissance déguisée, docilité réticente et lente
  • Boycott des élections
  • Retrait du système scolaire d’Etat
  • Boycott des institutions, associations, structures ayant un soutien d’Etat
  • Blocage de lignes de communication ou d’information
  • Non-coopération administrative, judiciaire, retards, obstructions, report des tâches…
  • Etc.

3. Les méthodes d’intervention non-violentes

  •  interventions psychologiques : jeûnes de pression morale, harcèlements, exposition volontaire aux éléments…
  • Interventions physiques : sit-in, occupation d’espaces, invasion non-violente, obstruction non-violente, occupation avec voitures…
  • Interventions sociales : engorgement de services, institutions sociales alternatives, interventions orales en public, travail au ralenti…
  • Interventions économiques : grève, prise de contrôle non-violente d’un terrain, marchés alternatifs, institutions économiques alternatives…
  • Interventions politiques : surcharge de systèmes administratifs, double pouvoir et gouvernement parallèle…

on-the-duty-of-civil-disobedience-9781625587701_lg.jpgDans cette optique, la résistance autochtone peut mener une multitude d’actions non-violentes : blocages momentanés de certains nœuds routiers, autoroutiers ou ferroviaires ; résistance fiscale ; boycott des élections ; lobbying ; constitution de ZAD identitaires ; interpellation d’élus républicains ;  sit-in ; occupation d’écoles ; manifestations ; harcèlement ; etc.  Il n’y a de limites que notre imagination… et l’étendue du Grand Rassemblement, c’est-à-dire des forces disponibles.

Ce sont en effet les ressources humaines disponibles qui conditionneront en grande partie la nature et l’ampleur des actions entreprises. Tout plan d’action devra au préalable évaluer le plus précisément possible la situation et les possibilités d’action. Une action réussie est une action qui aura d’une part entamé la légitimité du régime et qui aura d’autre part propagé parmi les Autochtones l’idée de sécession et de rassemblement. Gene Sharp établit que les actions initiales devront comporter peu de risques, surtout si la population est craintive et se sent impuissante, ce qui est le cas pour le peuple autochtone. Il faudra alors limiter l’action à des protestations symboliques ou à des actes de non-coopération limités et temporaires (dépose de fleurs dans un emplacement symbolique, veillées, boycotts…).  L’important est de fixer des objectifs intermédiaires réalisables dont le succès ne peut qu’encourager à la répétition. Il n’y a rien de plus facile que d’engorger le standard téléphonique d’une municipalité hostile, que d’harceler la permanence d’un politicien, que de donner de la voix lors de la projection d’un film antijaphite. Répété 1000 fois, « sans haine, sans violence et sans armes », ces petites actions uniront le peuple autochtone et abattront le régime en place.   

Antonin Campana

jeudi, 22 mars 2018

Aux origines de la pensée radicale de Jure Georges Vujic

Jure_Vuji_Foto_gK_B_ovi_1453970046_5_38_photo.jpg

Aux origines de la pensée radicale de Jure Georges Vujic

Jure Georges Vujic, écrivain franco-croate, politologue et contributeur de Polémia, vient de publier un nouvel ouvrage sur la pensée radicale. Nous reproduisons ici pour nos lecteurs le texte de sa recension.


JV-livre.jpgA la suite de son dernier livre en français aux éditions KontreKulture Nous n’attendrons plus les barbares, Jure Georges Vujic, écrivain franco-croate et politologue, signe cette fois ci en langue croate, son dernier ouvrage La pensée radicale- phénoménologie de la radicalité politique aux Editions Alfa, Zagreb, 2016.
Vujic se livre à un travail exhaustif de recensement, de déchiffrage et de présentation synoptique des grands courants de pensée radicaux de droite comme de gauche dans l’histoire de idées politiques.

En s’interrogeant sur les sources épistémologiques, sociologiques et philosophiques de la pensée radicale, l’auteur constate que la matrice commune à tous ces mouvements hétéroclites de la radicalité politque, est constituée par cette volonté de s’en prendre et de se confronter aux racines des choses, (radical, étymologie radix-racines) aux origines plutôt qu’aux symptômes des crises morales, politiques, sociales et civilisationnelles.
Vujic différencie le radicalisme de l’extrémisme politique, un expression jounalistique vague et fourre-tout qui s’apparente plus à une une transgression et une forme d’activisme violent plutôt qu’à une idéologie, un discours politique articulé.

La pensée radicale, de droite comme de gauche, postule très souvent le primat de l’action sur la pensée par une volonté de prise direct sur le réel et une volonté d’influencer par les actes le cours des événements de la réalité sociale et politique, le plus souvent en légitimant la violence sociale et politique. L’auteur se réfère aux travaux des théoriciens du syndicalisme révolutionnaire (Sorel, Labriola), aux théories de la guerilla urbaine de Carlos Marighella, mais aussi aux travaux de Saul D.Alinsky et Laird Wilcow sur l’extrémisme et le radicalisme ou encore de Pierre Besnard.

Pensée sauvage et pensée radicale

Comment ne pas tracer un parallèle entre la pensée sauvage de Claude Lévi-Strauss dans le domaine de l’anthropologie à celle de la pensée radicale en politique, puisque toutes deux associent les événements, le vécu immédiat, « le faire » aux structures, alors que la pensée moderne très souvent constructiviste, “ingénieuse”, partira de la structure, des institutions pour créer l’événement. Dans les deux cas, il s’agit d’une pensée qui appréhende directement sans intermédiaires le réel, une dynamique de l’élémentaire et du concert, qui repose sur une conception empirique et intuitive du réalité, par opposition à la pensée domestique, policée du réformisme très souvent spéculative et discursive.
Là encore la dimension révolutionnaire de la pensée radicale qui peut être aussi contradictoirement contre-révolutionnaire et conservatrice, s’apparente à une philosophie de l’engagement total désintéressée qui tout comme la pensée sauvage n’a pas été cultivée et domestiquée et corrompue à des « fins de rendement ».

Vujic constate que « toute forme de théorisation du phénomène social doit partir des manifestations extrêmes », et non le contraire des manifestations habituelles et normales.
Au delà de la simple lecture idéologique et méthodologique des nombreux mouvements de la droite et de la gauche radicale, l’auteur se livre à une herméneutique de la radicalité politique en se référant aux thèses de Alter Benjamin et Siegrfied Kraucauer qui proposent de comprendre la réalité contingente à partir de l’observation des extrêmes, tout en privilégiant l’analyse Schmitienne de la situation exceptionnelle qui permet l’irruption de la véritable souveraineté.

C’est bien à cette épistémologie radicale que l’on doit la compréhension du phénomène de la conflictualité politique et sociale de même que l’essence du politique dans un sens Feundien. C’est ainsi que, parallèlement aux idéal-types Weberiens, Walter Benjamin, pour qui le radicalisme a une fonction cognitive, propose d’appréhender la réalité sociale en partant des « types extrêmes ».
Le radicalisme épistémologique entend opérer une rupture avec les préjugés et les modes de pensée conformistes. Il s’agit bien d’un antagonisme frontal face à la raison commune et au sens commun comme l’indique Razmig Keucheyan. En se référant au concept de limite schmittien, l’auteur constate qu’alors que la radicalité politique critique les institutions de l’ordre dominant et que le radicalisme épistémolgique critique la pensée dominante.

C’est en ce sens que la radicalité politique s’accommode très bien de la théorie de rupture épistémologique (Gaston Bachelard, Louis Althusser, Michel Foucault et Pierre Bourdieu), laquelle postule que la pensée originelle (quelle soit philosophique, politique, scientifique etc..) se doit toujours d’être en rupture avec « l’esprit du temps » et la pensée commune dominante.
L’auteur évoque aussi « l’homme différencié de la tradition évolienne » et le « sujet radical » de Douguine, en tant que sujet qui se situe en dehors de l’influence contingente des lois historiques et positivistes.

Radicalisme du centre

Vujic s’interroge : est-il légitime de se demander si notre vie politique ne souffre pas d’une certaine radicalisation du centre ?
Le centre radical est un terme relativement nouveau dans la politique et la théorie politique, mais qui est souvent utilisé pour décrire les idéologies politiques, mouvements et partis qui rejettent explicitement les deux extrêmes de gauche et de droite, et prônent le compromis avec leurs variantes plus modérés (centre gauche et centre droit) et réformistes.
Le plus souvent, libéralisme sociétal et irénisme cohabitent avec cette gouvernance consensualiste qui dilue toute forme de conflictualité et d’agonalité aboutissant à ce que Carl Schmitt appelle la négation du « Nomos », du politique même.

Bernard Dumont et Christophe Reveillard parlent déjà d’une nouvelle forme d’extrémisme à propos du modérantisme qui, au nom du compromis, d’une approche centriste, disqualifie toutes les autres formes d’activisme politique ou social.
Il est évident qu’aujourd’hui, quand le clivage droite-gauche disparaît dans le conformisme consensualiste, la démocratie parlementaire fait face à une nouvelle crise de légitimité, sur fond d’opposition croissante entre le peuple et l’oligarchie gouvernante.

Il s’agit d’une véritable crise de confiance entre la classe politique, les élites et les citoyens qui sont à la recherche de nouvelles sources de légitimité politique de type « charismatique », « plébiscitaire » ou « référendaire» que leur fournissent des options politiques populistes de gauche radicale et droite.
Le débat démocratique et politique a quitté le cadre actuel de la légitimité politique rationnelle « juridique procédurale » selon Weber, ce qui remet en question les fondements mêmes la démocratie occidentale.

Certes, il y a diverses pensées radicales à travers l’histoire qui, en dépit des projets utopiques qui ont conduit au totalitarisme moderne du XXe siècle, ont su anticiper et poser de bonnes questions de nature sociale, politique et philosophique, mais qui se sont le plus souvent traduits dans une pratique désastreuse avec des effets indésirables inattendus.
En fait, la pensée radicale est toujours un questionnement constant et permet l’ouverture de nouvelles perspectives ontologiques et sociales.

Vujic conclut qu’une telle pensée doit toujours prévoir et accepter d’être soumise à l’épreuve, ce que Augusto del Noce appelle « l’hétérogenèse des fins », à savoir que les idées les plus nobles soient elle, ne mènent pas nécessairement aux résultats escomptés et peuvent même générer par le bais des vicissitudes de l’histoire le contraire des intentions premières.

Cependant, Vujic constate que le radicalisme ou l’extrémisme ne sont pas inhérents au totalitarisme politique et peuvent très bien être présents dans une démocratie, lorsque les idées de liberté, d’égalité, de droits… cèdent à une radicalisation idéologique déraisonnable et à une interprétation partielle.

Lorsque les principes de liberté, d’égalité, de progrès s’autonomisent et s’émancipent les uns par rapport à l’autre, alors ils peuvent constituer une menace pour la démocratie et se transforment en néolibéralisme, en messianisme, et judiciarisme en oligarchie tout comme le constate Tzvetan Todorov dans son livre Les ennemis intimes de la démocratie (Todorov T., Les ennemis intimes de la démocratie, Robert Lafont, 2012, Paris).

D’autre part, la réduction sémantique de la radicalité à la seule action violente est erronée dans la mesure où il existe tout au long de l’histoire des mouvement radicaux avec le plus souvent une idéologie de rupture avec l’ordre établi, qui ne sont jamais passés à l’action violente.

D’autre part, on constate aujourd’hui qu’en raison de l’ambiguïté polysémique et sémantique du vocable radicalisation et son amplification médiatique, que le populisme est le plus souvent assimilé au radicalisme voir à l’extrémisme, de sorte que l’ étiquette péjorative de « populiste » a remplacé celle d’hier de « fasciste ».
Le danger de cette représentation, très souvent instrumentalisée, et contingente de la radicalité est de s’enfermer dans le présentisme, c’est-à-dire dans un présent sans passé ni avenir, sans prendre en cause les relations de cause et effets et les variables culturelles et historiques, au risque de tomber dans les généralisations et des assimilations excessives et arbitraires à propos d’une phénomène pluriel et pluridimensionnel. D’autre part on oublie trop souvent que ce sont les mouvements radicaux et révolutionnaires qui ont été, au cours de l’histoire, à l’origine de nombreux changements de paradigmes politiques et sociaux (en bien ou en mal) et que ce qui est perçu comme radical aujourd’hui peut très bien, à l’avenir et dans un autre contexte socio-culturel, être perçu comme la norme.

L’hybris démocratique peut ainsi résulter d’une politique réduite à la simple technique-gestion, et constituer ainsi une radicalité instrumentaire oppressante. En effet, Vujic compare la pensée radicale et la pensée utopique sous-jacente aux idéologies souvent totalitaires de la modernité (exemple l’utopie des lumières, et l’utopie mondialiste planétaire d’aujourd’hui).
Ainsi, Jean-Claude Carrière déclare dans un ouvrage collectif intitulé Entretiens sur la fin des temps : « Une société sans pensée utopique est inconcevable. Utopie au sens de désir d’un mieux ». Carrière ne dit pas que la pensée politique se doit d’avoir une dimension utopique mais que la société ne peut fonctionner sans une pensée – qu’elle soit articulée conceptuellement ou imaginaire, de nature ou non politique – qui lui permette de se projeter dans un avenir où les maux présents dont elle souffre trouveraient quelques remèdes.

En effet, tout comme le constate Vujic, la pensée radicale en tant que pensée forte et holiste est à l’antipode de la pensée faible de Vattimo qui légitime par un discours postmoderniste et relativiste l’actuelle politique technocratique sans référents supérieurs métapolitiques et ontologiques, et s’apparente en fin de compte à un déni de pensée.

L’ouvrage de Vujic, qui a fait l’objet de nombreuses recensions dont une publiée par le centre d’Etudes stratégiques REXTER sur l’observation de la radicalité te du terrorisme, constitue un apport considérable pluridisciplinaire ainsi qu’un outil universitaire fondamental pour la compréhension de la phénoménologie de la radicalité politique.
Les lecteurs croates pourront découvrir dans le cadre d’une approche synoptique avec de nombreuses illustrations inédites (affiches de propagande, manifestes, livres, photographies…) des courants de pensée radicaux comme le monarchisme contre-révolutionnaire, le nationalisme révolutionnaire, le communautarisme, le national-anarchisme, l’autonomisme de gauche, la gauche prolétarienne, le naxalisme indien et le mouvement zapatiste, avec des passerelles parfois originales entre par exemple les mouvements de « Troisième Voie » nationaux révolutionnaires avec les mouvements de la gauche radicale tels que Lotta Continua et les expériences anarcho-syndicalistes.

C’est pourquoi ce nouvel ouvrage de Vujic est particulièrement d’actualité à l’heure où les spécialistes de la radicalisation et de la dé-radicalsation font recette. En effet, presque absente jusqu’aux attentats du 11 septembre 2001, la notion de radicalisation et de dé-radicalisation qui se focalise sur les acteurs et leur motivations, se rapporte le plus souvent à l’islamisme politique et au djihadisme.
Néanmoins suite aux attentats islamistes et à la mise en oeuvre de dispositifs de contrôle et de répression des « fakes news » et de la radicalisation par l’Internet, ce contrôle pourrait très bien s’appliquer à tous les citoyens dans la mesure de l’interprétation floue et extensive du critère et de l’identité même de la radicalité.

Source : Correspondance Polémia – 18/03/2018

lundi, 19 mars 2018

L'oeuvre de Carl Schmitt, une théologie politique

carl-schmitt-nauka-o-konstytucji_WoAP2688.JPG

L'oeuvre de Carl Schmitt, une théologie politique

L’auteur examine en quatre chapitres l’impact de celle-ci.

hm-lcs.jpgLa leçon de Carl Schmitt

Heinrich Meier

Acheter

L’auteur examine en quatre chapitres l’œuvre de Carl Schmitt, en montrant que ce qui l’unifie, c’est qu’elle constitue une «théologie politique». Toutefois, il faut se reporter à la fin de l’ouvrage pour comprendre ce qu’il faut entendre par ce terme. Dans la dernière partie du livre, l’auteur propose une rétrospective sur «la querelle de la théologie politique», qui permet de mieux comprendre le sens de cette expression utilisée dans le reste de l’ouvrage. Il y montre que si l’on interprète souvent l’expression de «théologie politique», à partir des textes mêmes de l’œuvre de Schmitt, comme «une affirmation relevant de l’histoire des concepts ou plutôt une hypothèse de la sociologie de la connaissance qui traite des «analogies de structures» entre des disciplines et des «transpositions» historiques» (p256), on restreint la portée et l’importance de ce concept que l’auteur estime central dans la pensée de Schmitt. Certes, C. Schmitt, évoquant une «théologie politique» a bien l’idée que des juristes ont transféré les concepts théologiques, comme celui de la toute-puissance de Dieu, sur le souverain temporel, dans les Temps modernes. Mais pour lui, la «théologie politique» désigne aussi, derrière cette opération de transfert, la volonté de ces juristes de répondre en chrétien à l’appel de l’histoire en «montrant le chemin à suivre pour sortir de la guerre civile confessionnelle.» Leur entreprise de sécularisation n’était pas portée par des intentions antichrétiennes, mais, bien au contraire, inspirée chrétiennement. Jean Bodin et Thomas Hobbes par exemple, que Schmitt désigne comme «ses amis», se tinrent, dans l’interprétation qu’il en donne, «solidement à la foi de leurs pères, et cela pas seulement de manière extérieure» (p261). Autrement dit, plus qu’un transfert de fait et historiquement repérable, la théologie politique désignerait pour Schmitt une attitude dans laquelle c’est à la politique de remplir une mission héritée de la religion, dans un monde qui se sécularise ou qui s’est sécularisé. La sécularisation, qui advient de fait, doit être gérée dans une intention qui demeure animée par la foi chrétienne. De là résulte entre autre que le critère du politique manifesté par la distinction entre ami et ennemi renvoie, pour l’auteur, en dernière analyse à l’opposition entre Dieu et Satan.

Chapitre 1: la réflexion schmittienne sur la morale

Dans le premier chapitre, centré sur la réflexion schmittienne sur la morale, l’auteur commence par montrer quel tableau –qui l’indigne– Schmitt dresse de son époque: un monde vivant aux pulsations de l’entreprise commerciale, rongé progressivement par la sécularisation et l’abandon de la foi, la démesure des hommes qui en «substituant à la providence les plans échafaudés par leur volonté et les calculs de leurs intérêts, pensent pouvoir créer de force un paradis terrestre dans lequel ils seraient dispensés d’avoir à décider entre le Bien et le Mal, et duquel l’épreuve décisive serait définitivement bannie.» (p15). La science elle-même n’est pour Schmitt que «l’auto-divination contre Dieu». Et Schmitt rejette ces formes d’auto-habilitation, par lesquelles l’homme prétend s’émanciper du Dieu transcendant.

Or, ce que souligne l’auteur, c’est que c’est chez Bakounine que Schmitt trouve en quelque sorte le paradigme de cette rébellion et de cette défense de la désobéissance, contre le souverain et contre Dieu. Bakounine en effet «conteste l’objet de la conviction la plus intime de Schmitt. Il attaque la révélation et nie l’existence de Dieu; il veut supprimer l’Etat et nie l’universalité revendiquée par le catholicisme romain.» (p19) ( «Dieu étant tout, le monde réel et l’homme ne sont rien. Dieu étant la vérité, la justice, le bien, le beau, la puissance et la vie, l’homme est le mensonge, l’iniquité, le mal, la laideur, l’impuissance et la mort. Dieu étant le maître, l’homme est l’esclave. Incapable de trouver par lui-même la justice, la vérité et la vie éternelle, il ne peut y arriver qu’au moyen d’une révélation divine. Mais qui dit révélation, dit révélateur, messies, prophètes, prêtres et législateurs inspirés par Dieu même; et ceux-là une fois reconnus comme les représentants de la divinité sur terre, comme les saints instituteurs de l’humanité, élus par Dieu même pour la diriger dans la voie du salut, ils doivent nécessairement exercer un pouvoir absolu. Tous les hommes leur doivent une obéissance illimitée et passive, car contre la Raison Divine il n’y a point de raison humaine, et contre la Justice de Dieu, point de justice terrestre qui tienne. Esclaves de Dieu, les hommes doivent l’être aussi de l’Eglise et de l’Etat, en tant que ce dernier est consacré par l’Eglise.» Mikhaïl Bakounine, Dieu et l’Etat). La devise «Ni Dieu ni maître» affiche le rejet de toute forme d’obéissance et détruit les fondements classiques de l’obéissance dans la culture européenne d’après Schmitt. Pour Bakounine, la croyance en Dieu est la cause de l’autorité de l’Etat et de tout le mal politique qui en procède. D’ailleurs Schmitt reprend à Bakounine l’expression de «théologie politique» que ce dernier emploie contre Mazzini. Pour Bakounine, le mal vient des forces religieuses et politiques affirmant la nécessité de l’obéissance et de la soumission de l’homme; alors que pour Schmitt – et dans une certaine tradition chrétienne – le mal provient du refus de l’obéissance et de la revendication de l’autonomie humaine.

cs-car.jpgChez ces deux auteurs, politique et religion sont mises ensemble, dans un même camp, dans une lutte opposant le bien au mal, même si ce qui représente le bien chez l’un représente le mal chez l’autre. Pour Schmitt, dans ce combat, le bourgeois est celui qui ne pense qu’à sa sécurité et qui veut retarder le plus possible son engagement dans ce combat entre bien et mal. Ce que le bourgeois considère comme le plus important, c’est sa sécurité, sécurité physique, sécurité de ses biens, comme de ses actions, «protection contre toute ce qui pourrait perturber l’accumulation et la jouissance de ses possessions» (p22). Il relègue ainsi dans la sphère privée la religion, et se centre ainsi sur lui-même. Or contre cette illusoire sécurité, Schmitt, et c’est là une thèse importante défendue par l’auteur, met au centre de l’existence la certitude de la foi («Seule une certitude qui réduit à néant toutes les sécurités humaines peut satisfaire le besoin de sécurité de Schmitt; seule la certitude d’un pouvoir qui surpasse radicalement tous les pouvoirs dont dispose l’homme peut garantir le centre de gravité morale sans lequel on ne peut mettre un terme à l’arbitraire: la certitude du Dieu qui exige l’obéissance, qui gouverne sans restriction et qui juge en accord avec son propre droit. (…) La source unique à laquelle s’alimentent l’indignation et la polémique de Schmitt est sa résolution à défendre le sérieux de la décision morale. Pour Schmitt, cette résolution est la conséquence et l’expression de sa théologie politique» (p24).). Et c’est dans cette foi que s’origine l’exigence d’obéissance et de décision morale. Schmitt croit aussi, comme il l’affirme dans sa Théologie politique, que «la négation du péché originel détruit tout ordre social».
Chez Schmitt, derrière ce terme de «péché originel», il faut lire la nécessité pour l’homme d’avoir toujours à choisir son camp, de s’efforcer de distinguer le bien du mal («Seule une certitude qui réduit à néant toutes les sécurités humaines peut satisfaire le besoin de sécurité de Schmitt; seule la certitude d’un pouvoir qui surpasse radicalement tous les pouvoirs dont dispose l’homme peut garantir le centre de gravité morale sans lequel on ne peut mettre un terme à l’arbitraire: la certitude du Dieu qui exige l’obéissance, qui gouverne sans restriction et qui juge en accord avec son propre droit. (…) La source unique à laquelle s’alimentent l’indignation et la polémique de Schmitt est sa résolution à défendre le sérieux de la décision morale. Pour Schmitt, cette résolution est la conséquence et l’expression de sa théologie politique» (p24).). L’homme est sommé d’agir dans l’histoire en obéissant à la foi («la théologie politique place au centre cette vertu d’obéissance qui, selon le mot d’un de ses plus illustres représentants, «est dans la créature raisonnable la mère et la gardienne de toutes les vertus» (Augustin, Cité de Dieu XII, 14). Par leur ancrage dans l’obéissance absolue, les vertus morales reçoivent un caractère qui leur manquerait autrement.» (p31-32).), et il doit pour cela avant faire preuve de courage et d’humilité. L’auteur montre ainsi que loin de se réduire à la «politique pure», la pensée schmittienne investit la morale en en proposant un modèle aux contours relativement précis.

Chapitre 2: Réflexion sur la conception politique de Schmitt

Dans chapitre II, H. Meier montre que la conception politique de C. Schmitt ne peut être entièrement détachée d’une réflexion sur la vérité et la connaissance. En effet, Schmitt écrit, dans La notion de politique, que le politique «se trouve dans un comportement commandé par l’éventualité effective d’une guerre, dans le clair discernement de la situation propre qu’elle détermine et dans la tâche de distinguer correctement l’ami et l’ennemi». Cela implique que le politique désigne un comportement, une tâche et une connaissance, comme le met en évidence l’auteur. Pour mener à bien l’exigence d’obéissance mise au jour dans le chapitre précédent, il faut une certaine connaissance. Cela semble relativement clair, mais l’auteur va plus loin et défend la thèse selon laquelle non seulement le politique exige la connaissance, mais il veut montrer que l’appréhension du politique pour Schmitt est «essentiellement connaissance de soi» (p46).

La distinction entre l’ami et l’ennemi s’appuie sur une notion existentielle de l’ennemi. L’ennemi présupposé par le concept de politique est une réalité publique et collective, et non un individu sur lequel on s’acharnerait, mu par une haine personnelle. Comme le précise H. Meier, «il n’est déterminé par aucune «abstraction normative» mais renvoie à une donnée de la «réalité existentielle» (…). Il est l’ennemi qui «doit être repoussé» dans le combat existentiel.» (p49). La figure de l’ennemi sert le critère du politique, mais chez Schmitt, selon l’auteur, elle n’est pas le fruit d’une élaboration théorique, voire idéologique, mais elle est ce en face de quoi je suis toujours amené existentiellement à prendre position et elle sert aussi à me déterminer et à me connaître moi-même, sur la base du postulat que c’est en connaissant son ennemi qu’on se connaît soi-même. Grâce à la distinction entre l’agonal et le politique, qui tous deux mettent en jeu la possibilité de ma mort et celle de l’adversaire ou de l’ennemi, mais qui s’opposent sur le sens de la guerre et la destination de l’homme ( Dans une compréhension politique du monde, l’homme ne peut réaliser pleinement sa destinée et sa vocation qu’en s’engageant entièrement et existentiellement pour l’avènement de la domination, de l’ordre et de la paix, tandis que dans la pensée agonale, ce qui compte, c’est moins le but pour lequel on combat que la façon de combattre et d’inscrire ainsi son existence dans le monde. E. Jünger, qui défend une pensée agonale écrit ainsi: «l’essentiel n’est pas ce pour quoi nous nous battons, c’est notre façon de nous battre. (…) L’esprit combattif, l’engagement de la personne, et quand ce serait pour l’idée la plus infime, pèse plus lourd que toute ratiocination sur le bien et le mal» (La guerre comme expérience intérieure).), Schmitt montre qu’il ne s’agit pas de se battre par principe et pour trouver un sens à vie, mais de lutter pour défendre une cause juste, ou mieux la Justice. Et c’est à ce titre que le politique est ce par quoi l’homme apprend à se connaître, à savoir ce qu’il veut être, ce qu’il est et ce qu’il doit être ( H. Meier développe ainsi un commentaire long et précis sur le sens d’une phrase de Theodor Däubler qui revient souvent chez Schmitt: «l’ennemi est la figure de notre propre question». Nous nous connaissons en connaissant notre ennemi et en même temps nous reconnaissons notre ennemi en celui qui nous met en question. L’ennemi, en quelque sorte, est aussi le garant de notre identité. Notre réponse à la question que l’ennemi nous pose est notre engagement existentiel-par un acte de décision – concret dans l’histoire.).

cs-pol.pngLa confrontation politique apparaît comme constitutive de notre identité. A ce titre, elle ne peut pas être seulement spirituelle ou symbolique. Cette confrontation politique trouve son origine dans la foi, qui nous appelle à la décision («La foi selon laquelle le maître de l’histoire nous a assigné notre place historique et notre tâche historique, et selon laquelle nous participons à une histoire providentielle que nos seules forces humaines ne peuvent pas sonder, une telle foi confère à chacun en particulier un poids qui ne lui est accordé dans aucun autre système: l’affirmation ou la réalisation du «propre» est en elle-même élevée au rang d’une mission métaphysique. Etant donné que le plus important est «toujours déjà accompli» et ancré dans le «propre», nous nous insérons dans la totalité compréhensive qui transcende le Je précisément dans la mesure où nous retournons au «propre» et y persévérons. Nous nous souvenons de l’appel qui nous est lancé lorsque nous nous souvenons de «notre propre question»; nous nous montrons prêts à faire notre part lorsque nous engageons ma confrontation avec «l’autre, l’étranger» sur «le même plan que nous» et ce «pour conquérir notre propre mesure, notre propre limite, notre propre forme.»« (p77-78).).

Aussi les «grands sommets» de la politique sont atteints quand l’ennemi providentiel est reconnu. La politique n’atteint son intensité absolue que lorsqu’elle est combat pour la foi, et pas simple combat, guerre limitée et encadrée par le droit des gens moderne (Les croisades sont ainsi l’exemple pour C. Schmitt d’une hostilité particulièrement profonde, c’est-à-dire pour lui authentiquement politique.). C’est pour une communauté de foi, et plus particulièrement pour une communauté de croyants qui se réclame d’une vérité absolue et dernière, au-delà de la raison, que la politique peut être authentique. C’est d’abord pour défendre la foi qu’on tient pour vraie, une foi existentiellement partagée – et qui éventuellement pourrait être une foi non religieuse – que la politique authentique peut exister. C’est ainsi que Schmitt pense défendre la vraie foi catholique contre ces fausses fois qui la mettent en danger et qui sont le libéralisme et le marxisme. Ce qu’on appelle ordinairement ou quotidiennement la politique n’atteint pas l’intensité décisive des «grands sommets», mais n’en est que le reflet.

Chapitre 3: théologie politique, foi et révélation

Dans le troisième chapitre, H. Meier établit l’inextricable connexion entre théologie politique, foi et révélation. Aussi la théologie politique combat-elle l’incroyance comme son ennemi existentiel. Comme le résume l’auteur: «l’hostilité est posée avec la foi en la révélation. (…) la discrimination entre l’ami et l’ennemi trouverait dans la foi en la révélation non seulement sa justification théorique, mais encore son inévitabilité pratique» (p102). Obéir sérieusement à la foi exige, pour Schmitt, d’agir dans l’histoire, ce qui suppose de choisir son camp, c’est-à-dire de distinguer l’ami de l’ennemi. Politique et théologique ont en commun la distinction entre l’ami et l’ennemi; aussi, note l’auteur, «quand le politique est caractérisé grâce à la distinction ami-ennemi comme étant «le degré extrême d’union ou de désunion» (…), alors il n’y a plus d’obstacle au passage sans heurt du politique à la théologie de la révélation. La nécessité politique de distinguer entre l’ami et l’ennemi permet désormais de remonter jusqu’à la constellation ami-ennemi de la Chute, tandis que se révèle le caractère politique de la décision théologique essentielle entre l’obéissance et la désobéissance, entre l’attachement à Dieu et la perte de la foi.» (p104). L’histoire a à voir avec l’avènement du Salut, les fins politiques et théologiques sont indissociables pour Schmitt. La décision entre Dieu et Satan est aussi bien théologique que politique, et lorsque l’ennemi providentiel est identifié comme tel, le théologique et le politique coïncident dans leur définition de l’unique ennemi. Le reste du temps, politique et théologique peuvent ne pas coïncider, dans la mesure où toute confrontation politique ne met pas en jeu la foi en la révélation et où toute décision théologique ne débouche pas nécessairement sur un conflit politique. Et si Schmitt développe une théologie politique, c’est parce que ce qui est fondamental est le théologique (qui toujours requiert la décision et l’engagement de l’homme («la foi met fin à l’incertitude. Pour la foi, seule la source de la certitude, l’origine de la vérité est décisive. La révélation promet une protection si inébranlable contre l’arbitraire humain que, face à elle, l’ignorance semble être d’une importance secondaire.» (p138).)) qui prend parfois, mais pas toujours nécessairement, la forme du politique pour sommer l’homme de se décider.

Puis l’auteur examine la critique de la conception de l’Etat dans la doctrine de Hobbes (dans Le Léviathan dans la doctrine de l’Etat de Thomas Hobbes. Sens et échec d’un symbolisme politique) qu’il étudie en trois points.

Thomas_Hobbes_(portrait).jpgD’une part, Schmitt reproche à Hobbes d’artificialiser l’Etat, d’en faire un Léviathan, un dieu mortel à partir de postulats individualistes. En effet, ce qui donne la force au Léviathan de Hobbes, c’est une somme d’individualités, ce n’est pas quelque chose de transcendant, ou plus précisément, transcendant d’un point de vue juridique, mais pas métaphysique. A cette critique, il faut ajouter que, créé par l’homme, l’Etat n’a aucune caution divine: créateur et créature sont de même nature, ce sont des hommes. Or ces hommes, véritables individus prométhéens, font croire à l’illusion d’un nouveau dieu, né des hommes, et mortels, dont l’engendrement provient du contrat social. Et cette création à partir d’individus et non d’une communauté au sein d’un ordre voulu par Dieu, comme c’était, selon Hobbes, le cas au moyen-âge, perd par là-même sa légitimité aux yeux d’une théologie politique ( C. Schmitt écrit ainsi que: «ce contrat ne s’applique pas à une communauté déjà existante, créée par Dieu, à un ordre préexistant et naturel, comme le veut la conception médiévale, mais que l’Etat, comme ordre et communauté, est le résultat de l’intelligence humaine et de son pouvoir créateur, et qu’il ne peut naître que par le contrat en général.»).

D’autre part, Schmitt critique le geste par lequel l’Etat hobbesien est à lui-même sa propre fin. Autrement dit, cette œuvre que produisent les hommes par le contrat n’est plus au service d’une fin religieuse, d’une vérité révélée, mais, au contraire, est rendu habilité à définir quelles sont les croyances religieuses que doivent avoir les citoyens, qu’est-ce qui doit être considéré comme vrai. Enfin, Schmitt désapprouve le symbole choisi par Hobbes pour figurer l’Etat, le Léviathan.

Comme le note l’auteur, Schmitt pointe la faiblesse et la fragilité de la construction de Hobbes: «C’est un dieu qui promet aux hommes tranquillité, sécurité et ordre pour leur «existence physique ici-bas», mais qui ne sait pas atteindre leurs âmes et qui laisse insatisfaite leur aspiration la plus profonde; un homme dont l’âme artificielle repose sur une transcendance juridique et non métaphysique; un animal dont le pouvoir terrestre incomparable serait en mesure de tenir en lisière «les enfants de l’orgueil» par la peur, mais qui ne pourrait rien contre cette peur qui vient de l’au-delà et qui est inhérente à l’invisible.» (p167). Autrement dit, chez Hobbes, l’Etat peut se faire obéir par la peur de la mort, ce qui rend l’obéissance des hommes relatives à cette vie terrestre, alors que pour Schmitt, ce qui rend décisif et définitif l’engagement politique, c’est qu’il a à voir avec la fin dernière, le salut. Aussi peut-on être prêt ou décidé à mourir pour lutter contre l’ennemi, ce que nous craignons alors le plus est moins la mort violente que l’enfer post mortem. Et on comprend ainsi bien comment le libéralisme est ce qui veut éviter cet engagement, en niant la dimension proprement politique de l’existence humaine.

Chapitre 4: l'histoire comme lieu de discernement

Dans le dernier chapitre, centré sur l’histoire comme lieu de discernement dans lequel doit toujours se décider l’homme, l’auteur montre comment morale, politique et révélation sont liées à l’histoire pour permettre une orientation concrète («Pour la théologie politique, l’histoire est le lieu de la mise à l’épreuve du jugement. C’est dans l’histoire qu’il faut distinguer entre Dieu et Satan, l’ami et l’ennemi, le Christ et l’Antéchrist. C’est en elle que l’obéissance, le courage et l’espérance doivent faire leurs preuves. Mais c’est en elle aussi qu’est porté le jugement sur la théologie politique qui se conçoit elle-même à partir de l’obéissance comme action dans l’histoire.» (p177).). L’exemple privilégié par Schmitt pour mesurer un penseur qui se décide à l’histoire dans laquelle il se fait condamné à naviguer est celui de Hobbes. En effet, pour Schmitt, Hobbes prend position, avec piété pour l’Etat moderne, dans un cadre historique précis, celui des luttes confessionnelles, et sa décision en faveur de l’Etat qui neutralise les oppositions religieuses et sécularise la vie est liée à ce contexte historique. Si pour Schmitt, l’Etat n’est plus au XXème siècle une bonne réponse politique à la situation historique, au temps de Hobbes, se déterminer en faveur de cet Etat était la bonne réponse, puisque l’Etat «trancha effectivement à un moment historique donné la querelle au sujet du droit, de la vérité et de la finalité en établissant le «calme, la sécurité et l’ordre» quand rien ne semblait plus urgent que l’établissement du «calme, de la sécurité et de l’ordre»« (p183). En revanche, une fois conçu, l’Etat comme machine ou comme appareil à garantir la sécurité, il peut tomber entre les mains du libéralisme, du bolchévisme ou du nazisme qui peuvent s’en servir pour parvenir à leur fin, d’où sa critique de l’Etat au XXème siècle.

csquoteequ.jpg

La question que pose alors l’auteur est celle de l’engagement de Schmitt. Il montre que Schmitt dans les années 1920 et au début des années 1930 commence par soutenir le fascisme mussolinien dans lequel il voit le modèle d’un Etat qui s’efforce de maintenir l’unité nationale et la dignité de l’Etat contre le pluralisme des intérêts économiques. Il oppose ce type d’Etat au libéralisme qu’il considère comme un «système ingénieux de méthodes visant à affaiblir l’Etat» et qui tend à dissoudre en son sein le proprement politique. Il critique l’Etat de droit bourgeois et en particulier le parlementarisme ( Il écrit ainsi dans l’article «l’Etat de droit bourgeois»: «les deux principes de l’Etat de droit bourgeois que sont la liberté de l’individu et la séparation des pouvoirs, sont l’un et l’autre apolitiques. Ils ne contiennent aucune forme d’Etat, mais des méthodes pour mettre en place des entraves à l’Etat.»). Il démasque l’imposture des prétendues démocraties qui n’intègrent pas le peuple, qui ne lui permettent pas d’agir en tant que peuple ( Pour Schmitt, le peuple ne peut être que réuni et homogène (c’est-à-dire non scindé en classes distinctes ou divisé culturellement, religieusement, socialement ou «racialement»). Il estime également que seule l’acclamation permet d’exprimer la volonté du peuple, à l’opposé des méthodes libérales qu’il accuse de falsifier la volonté du peuple.) mais l’atomisent, ne serait-ce que parce qu’au moment de la décision politique, les hommes sont isolés pour voter, alors qu’ils devraient être unis: «ils décident en tant qu’individus et en secret, ils ne décident pas en tant que peuple et publiquement.» (p204). Ce qui fait que les démocraties libérales sont pour lui des démocraties sans démos, sans peuple. Schmitt veut fonder la politique sur un mythe puissant et efficace, et dans cette optique, il estime que le mythe national sur lequel se fonde le fascisme est celui qui donne le plus d’intensité à la foi et au courage (plus, par exemple, que le mythe de la lutte des classes). Ce que souligne l’auteur cependant, c’est que pour Schmitt, tout mythe est à placer sur un plan inférieur à la vérité révélée. Il s’agit donc pour le théologien politique de ne pas croire ce mythe, national ou autre, parce qu’il est éloigné de la vraie foi, mais de l’utiliser pour intensifier la dimension politique de l’existence que tend à effacer le libéralisme européen de son époque.

Comment concilier la décision de Schmitt en faveur du nazisme au printemps 1933? Pour Heinrich Meier, il faut considérer avant tout que cet engagement est fait en tant que théologien politique et non en tant que nationaliste. Il faudrait la lire comme l’essai pour sortir de deux positions antagonistes et qu’il rejette toutes les deux: le libéralisme et le communisme, tous deux adversaires du catholicisme et animés par une commune tradition visant un objectif antipolitique (L’auteur écrit ainsi: «Pendant les dix années, de 1923 à 1933, durant lesquelles Schmitt, empli d’admiration, suivit le parcours de Mussolini, sa conviction que le libéralisme et le marxisme s’accordaient sur l’essentiel ou en ce qui concerne leur «métaphysique» ne fit que se renforcer: l’héritage libéral était toujours déterminant pour le marxisme, qui «n’était qu’une mise en pratique de la pensée libérale du XIXème siècle». La réunion du libéralisme et du marxisme dans la «nouvelle croyance» du temps présent (…) disposant d’un fonds de dogmes communs et poursuivant le même objectif final antipolitique, devait faire apparaître le fascisme et le national socialisme comme les antagonismes les plus résolus.» (p212-213).). A cela s’ajoute, selon l’auteur, l’idée que le nazisme s’appuie sur la croyance au destin et à l’importance d’agir dans l’histoire. Mais peu après cette explication des raisons de l’adhésion de Schmitt au national-socialisme, l’auteur s’attache à montrer que des critiques du régime apparaissent dans ses écrits. On peut ainsi selon l’auteur lire de nombreux passages du livre sur Hobbes comme des critiques indirectes du régime nazi qui ne pouvaient pas ne pas être prises comme telles à l’époque (par exemple, des passages dans lesquels il explique que si l’Etat ne protège pas efficacement les citoyens, le devoir d’obéissance disparaît, ou des passages exposant que si un régime relègue la foi à l’intériorité, le «contre-pouvoir du mutisme et du silence croît».) Cependant, l’auteur prend également soin de distinguer d’un côté l’éloignement de Schmitt du pouvoir nazi en place et de l’autre la persistance de son antisémitisme. Ainsi le livre sur Hobbes est foncièrement antisémite – l’antisémitisme de ce livre ne serait pas qu’un fond, un langage destiné à répondre aux critères de l’époque – comme, du reste, dans de nombreux ouvrages. Et pour l’auteur cet antisémitisme a son origine dans la tradition de l’antijudaïsme chrétien, ce qui n’a pas détaché Schmitt de l’antisémitisme nazi. Au contraire, comme le souligne H. Meier, «on est bien obligé de dire que c’est l’hostilité aux «juifs» qui lie le plus durablement Schmitt au national-socialisme (…) Et il restera fidèle, même après l’effondrement du Troisième Reich, à l’antisémitisme» (p220).

Puis l’auteur s’intéresse à l’interprétation que Schmitt fait de l’histoire en mettant au cœur de cette interprétation le katechon, qu’on trouve dans la seconde lettre de Paul aux Thessaloniciens, et qu’il définit comme «la représentation d’une force qui retarde la fin et qui réprime le mal» ( Schmitt écrit ainsi dans Terre et Mer: «Je crois au katéchon; il représente pour moi la seule possibilité, en tant que chrétien, de comprendre l’histoire et de lui trouver un sens.»). Schmitt expose une vision chrétienne de l’histoire (notamment exposée dans une critique de Meaning in History de Karl Löwith) qu’il entend opposer à celle du progrès défendue par les Lumières, le libéralisme et le marxisme. La Providence ne peut être assimilée aux planifications prométhéennes humaines. La notion de katechon permet d’une part de rendre compte du retard de la parousie – et donc de l’existence perse de l’histoire ( C’est d’ailleurs dans cette perspective que Paul en parle.); d’autre part, elle «protège l’action dans l’histoire contre le découragement et le désespoir face à un processus historique, en apparence tout-puissant, qui progresse vers la fin. Enfin, elle arme à l’inverse l’action dans l’histoire contre le mépris de la politique et de l’histoire en l’assurant de la victoire promise.» (p231-232). En effet, sans le katechon, on est conduit à penser que la fin de l’histoire est imminente et que l’histoire n’a qu’une valeur négligeable.

cssov.jpg

Ainsi, l’auteur parvient à montrer efficacement comment morale, politique, vérité révélée et histoire sont liées dans la pensée schmittienne, pensée ayant son centre dans la foi catholique de Schmitt. On ne peut comprendre la genèse des concepts schmittiens et leur portée véritable qu’en ayant à l’esprit cette foi expliquant sa pensée est moins une philosophie politique – si la philosophie doit être pensée comme indépendante de la foi en la révélation – qu’une théologie politique, pour ainsi dire totale en ce qu’elle informe tous les aspects de l’existence. La tentative d’H. Meier d’expliquer et de rendre compte et de l’engagement de Schmitt dans le nazisme –sans évidemment l’excuser ou n’en faire qu’une erreur malencontreuse– par l’antagonisme que ce régime pouvait manifester à l’encontre des autres régimes (libéralisme, marxisme) qui luttaient contre le catholicisme est pertinente, d’autant qu’elle ne le disculpe pas et qu’elle prend soin de souligner son indéfendable antisémitisme. Il faut aussi reconnaître à l’auteur une connaissance extrêmement précise des textes de Schmitt, de leur contexte et des adversaires que vise ce dernier même lorsqu’ils ne sont pas nommés, ce qui contribue à la clarification de maintes argumentations de Schmitt parfois équivoques ou elliptiques.

dimanche, 18 mars 2018

Porter l’idée d’un nouvel équilibre planétaire fondé sur la régulation

equilibrecailloux.jpg

Porter l’idée d’un nouvel équilibre planétaire fondé sur la régulation

Ex: https://lignedroite.club - Texte de la rubrique Vision géopolitique

Le concept de communauté internationale, qui revient de façon récurrente dans le discours des diplomates occidentaux, n’est qu’un artifice destiné à légitimer la politique étrangère des États-Unis. Or celle-ci, porteuse de l’idéologie mondialiste, est contraire aux intérêts de la France et de l’Europe. Aussi notre pays devrait-il, selon Ligne droite, contester l’organisation actuelle des relations internationales et nourrir la grande ambition d’œuvrer à l’avènement d’un « nouvel équilibre planétaire » ancré dans la réalité du monde multipolaire d’aujourd’hui et axé sur la régulation des échanges.

La notion de communauté internationale, un instrument de l’imperium américain

La notion de « communauté internationale », qui reprend sous un angle un peu différent celui de nouvel ordre mondial très en vogue à la fin du XXe siècle, est en effet une formule des plus ambiguë. Ceux qui s’en réclament laissent entendre qu’ils parlent pour l’ensemble des nations du monde, alors qu’il ne s’agit le plus souvent que des États-Unis et de leurs « alliés ». Cette référence à la communauté internationale est dès lors quasi systématiquement utilisée pour des actions ou des prises de position qui servent les États-Unis et leur vue du monde.

Autant dire, dans ces conditions, que cette notion s’inscrit dans un cadre très politiquement correct. Elle repose sur l’idée que le modèle américain fondé sur le libéralisme et la démocratie va s’étendre au monde entier et s’appuie sur l’idéologie mondialiste qui conduit à supprimer les frontières, à réduire le pouvoir des États et à œuvrer à la globalisation de la planète. En effet, la communauté internationale en question ne se préoccupe pas des identités et considère avec méfiance les États qui y demeurent attachés comme la Russie et tous les pays de l’Est de l’Europe.

Une conception politiquement correcte inadaptée au monde multipolaire d’aujourd’hui

Ligne droite estime en conséquence que les notions de nouvel ordre mondial et de communauté internationale doivent être rejetées car elles véhiculent le mondialisme, le libre-échangisme intégral, l’immigrationnisme et l’atlantisme. À ce titre, elles vont à l’encontre de ce qui est souhaitable pour le France et l’Europe, aussi notre pays doit-il les contester tout en proposant une autre vision.

Cette démarche se révèle d’autant plus légitime que le concept de communauté internationale ne correspond en rien à la réalité du monde d’aujourd’hui. La planète est en effet loin de converger autour du pôle américain, lequel perd d’ailleurs de son influence. Notre époque apparaît au contraire marquée par l’émergence de nouvelles puissances qui structurent la scène mondiale selon un schéma multipolaire. Un schéma qui n’est pas compatible avec la notion de communauté internationale puisqu’aucun des nouveaux pôles émergents comme la Chine, l’Inde ou le monde musulman, pas plus d’ailleurs que la Russie, le Brésil ou l’Afrique, ne sont prêts à s’aligner sur les États-Unis.

Il faut lui substituer le concept de nouvel équilibre planétaire

Ligne droite considère donc que la France devrait se faire le champion d’une autre conception des relations internationales. Une conception qu’elle devrait populariser sous le nom de « nouvel équilibre planétaire » et qui devrait reposer sur deux grands principes : prendre en compte la réalité multipolaire du monde d’aujourd’hui et substituer à l’ultralibéralisme international le principe de la régulation générale de tous les échanges.

Le nouvel l’équilibre planétaire pour une régulation des échanges

Contrairement au nouvel ordre mondial qui organisait le laisser-faire laissez-passer général tant pour les biens et services que pour les mouvements migratoires, le nouvel équilibre planétaire proposé par la droite nouvelle devrait s’appuyer sur le principe simple selon lequel les échanges ne sont admis que s’ils sont bénéfiques pour les deux parties concernées et doivent donc être régulés en conséquence.

Dans ce cadre, l’organisation du commerce mondial devrait être entièrement revue et de nouvelles négociations devraient être ouvertes en son sein pour mettre en place des écluses douanières entre les grands ensembles économiquement homogènes.

De même, s’agissant de l’immigration, la maîtrise des flux devrait s’imposer comme la règle commune. Aucun mouvement migratoire ne pourrait être organisé sans l’accord des deux pays concernés. Quant aux déplacements clandestins, ils devraient être combattus par les pays d’émigration comme par ceux d’immigration et, dans la mesure où ils sont organisés par des filières mafieuses, traités comme tels par les services compétents.

Le nouvel équilibre planétaire pour la stabilité du monde

Par ailleurs, le nouvel équilibre planétaire devrait prendre en compte la réalité du monde et reconnaître son caractère multipolaire. Pourrait en effet être constitué un G9 d’un nouveau genre regroupant les principaux pôles de puissance: Chine, Japon, Inde, Brésil, États-Unis, Russie et Europe, auxquels devraient être adjoints deux autres États, l’un représentant le monde musulman et l’autre l’Afrique(au besoin selon une formule de tourniquet). Une telle instance même informelle qui représenterait avec neuf partenaires la presque totalité de la population mondiale pourrait être le lieu le plus pertinent où débattre des conflits et des problèmes du monde. Une configuration qui serait capable d’apporter une plus grande stabilité internationale, car fondée, non plus sur une puissance unique qui cherche à s’imposer, mais sur l’équilibre des principaux pôles de puissance de la planète.

Le nouvel équilibre planétaire, un projet susceptible de s’imposer

Pour mettre en œuvre un tel projet, très différent des pratiques actuelles, la droite nouvelle, une fois au pouvoir, devrait commencer par faire de la France le champion de cette idée, à charge pour elle de l’expliquer et d’en assurer la promotion. Si, ensuite, l’Europe confédérale, telle que préconisée par Ligne droite, reprenait ce projet à son compte, gageons que tout deviendrait alors possible. L’idée d’un nouvel équilibre planétaire pourrait en effet intéresser les BRICS. Le Brésil, la Russie, la Chine, l’Inde et l’Afrique du Sud cherchent en effet à réduire l’influence des États-Unis dans le monde. Ils ne pourraient dès lors que soutenir un projet visant à institutionnaliser la réalité multipolaire qu’ils incarnent et, forte de ce soutien, l’Europe serait en mesure de faire prévaloir ce changement radical de l’organisation des relations internationales.

En tout état de cause, la France, dirigée par la droite nouvelle, aurait tout intérêt à porter l’idée d’une rénovation profonde des relations internationales. En dehors des bénéfices qu’elle et les autres pays européens pourraient en retirer si le projet se concrétisait, le seul fait de s’en faire l’artisan permettrait à la France de gagner en stature et d’offrir aux Français des perspectives ainsi qu’une ambition collective qui leur rendrait espoir et fierté.

lundi, 12 mars 2018

Qui se souvient de Juan Donoso Cortès?

« Qui se souvient de Juan Donoso Cortès ? » : c’est sur cette interrogation que Christophe Boutin introduit l’entrée « Donoso Cortès » dans l’excellent Dictionnaire du conservatisme dont il est à l’origine avec Frédéric Rouvillois et Olivier Dard.

Qui se souvient en effet de cet espagnol éclectique qui a partagé sa vie entre l’Espagne où il est né et la France où il est mort après quelques tribulations européennes ?

Juriste de formation, historien par passion, homme politique par devoir, diplomate autant par nature que par vocation (ambassadeur d’Espagne à Berlin puis à Paris), il restera auprès des érudits comme un formidable ciseleur de formules et un orateur au souffle puissant. Ne lui en faut-il pas d’ailleurs, pour énoncer son identité complète : Juan Francisco Maria de la Salud Donoso Cortès y Fernandez Canedo, marquis de Valdegamas. Ouf !

Tout au long d’une vie trépidante, il observe ses contemporains et les institutions qui les gouvernent. Certaines de ses observations sont des plus pertinentes, notamment lorsqu’il pose un regard aigu sur la société française : « Chez les peuples qui sont ingouvernables, le gouvernement prend nécessairement les formes républicaines ; c’est pourquoi la république subsiste et subsistera en France. »

Il souligne ce qui pour lui en est la cause : « Le grand crime du libéralisme, c’est d’avoir tellement détruit le tempérament de la société qu’elle ne peut rien supporter, ni le bien, ni le mal. »

Voilà qui en 2018 et entre deux grèves des services publics, rassurera les hommes politiques inquiets sur l’avenir de nos institutions. Encore que, à en croire Donoso, le président et ses ministres devraient s’interroger sur la réalité des pouvoirs qu’ils croient détenir : « Un des caractères de l’époque actuelle, c’est l’absence de toute légitimité. Les races gouvernantes ont perdu la faculté de gouverner ; les peuples la faculté d’être gouverné. Il y a donc dans la société absence forcée de gouvernement. »

Donoso souligne l’évolution perverse de la classe dirigeante devenue « une classe discutante » qui répugne à assumer son vrai rôle et de ce fait devient incapable de décider : « Il est de l’essence du libéralisme bourgeois de ne pas décider […], mais d’essayer, à la place de cette décision, d’entamer une discussion. »

N’est-ce pas ce qui pousse nos gouvernements, lorsqu’ils craignent de trancher, à créer ces commissions Théodule moquées par De Gaulle.

Il dénonce la complicité entre le pouvoir et la presse d’information accusée de dégoupiller ces grenades fumigènes destinées justement à enfumer l’opinion : « Le journalisme c’est le moyen le plus efficace inventé par les hommes pour cacher ce que tout le monde doit savoir… »

Et c’est ainsi que, pour Donoso Cortès, s’ouvre la voie à cette dérive des institutions qui conduit à faire entrer « l’esprit révolutionnaire dans le Parlement. »

Ce noble espagnol qui connaît l’Europe pour l’avoir sillonnée en différentes circonstances, devine les risques qui la guettent : « Je représente la tradition, par laquelle les nations demeurent dans toute l’étendue des siècles. Si ma voix à une quelconque autorité, Messieurs, ce n’est pas parce que c’est la mienne : c’est parce que c’est la voix de nos pères. »

JDC-cit.png

Donoso Cortès traverse des temps troublés dans lesquels révolutions, révoltes et pronunciamientos alimentent les chroniques et ne laissent guère d’options aux populations qui les subissent. Il en vient à considérer qu’en période de crise il ne reste plus qu’à choisir entre la dictature du poignard et celle du sabre. D’où sa conclusion « je choisis la dictature du sabre parce qu’elle est plus noble. » Et n’est-ce pas cette dictature du poignard que nous vivons quand, en ce début de troisième millénaire, nous assistons à ces morts politiques qui relèvent davantage d’une embuscade de ruffians que d’un duel entre gentilshommes.

Il perçoit dans les tendances politiques qui semblent se dégager les signes avant-coureurs « dun nouveau paganisme (qui) tombera dans un abîme plus profond et plus horrible encore. Celui qui doit lui river sur la tête le joug de ses impudiques et féroces insolences, s’agite déjà dans la fange des cloaques sociaux. »

Ne trouvez-vous pas quelque actualité à ces propos ?

Mais je vous prie d’excuser ma distraction. J’ai omis de vous préciser que ce monsieur est né en 1809 et mort en 1853.

Décidément comme l’affirmait le roi Salomon, il y a quelques années déjà, rien de nouveau sous le soleil.

vendredi, 09 mars 2018

Politique des racines

enracinement_M.jpg

"Enracinement", par Manon Potvin

Politique des racines

par Georges FELTIN-TRACOL

GB-limites.jpgEn 2014, dans le sillage de la « Manif pour Tous », Gaultier Bès se faisait connaître par Nos limites. Pour une écologie radicale, un essai co-écrit avec Marianne Durano et Axel Nørgaard Rokvam. Le succès de cet ouvrage lui permit de lancer en compagnie de la journaliste du groupe Le Figaro, Eugénie Bastié, et de Paul Piccarreta, la revue trimestrielle d’écologie intégrale d’expression chrétienne Limite.

Au deuxième trimestre 2017, Gaultier Bès a publié Radicalisons-nous ! qui use et parfois abuse des métaphores végétales. Il a néanmoins averti que « la métaphore (“ transport ”, en grec) n’est pas un rapport d’identité, mais d’analogie (p. 27) ». Le titre est déjà un savoureux contre-pied à l’opinion médiatique ambiante qui pourchasse toute manifestation de radicalité. Pour les plumitifs stipendiés, la radicalité signifie l’extrémisme. « Tous ceux qui sortent des sentiers battus, on les disqualifie en les traitant d’extrémistes (ou d’« ultra », de “ khmers ”, d’« ayatollas », et bien sûr de “ radicaux ” (p. 13). » Pour preuve, les terroristes islamistes. Or, « l’extrémisme se pense toujours contre, en marge, aux extrémités, par rapport à un centre dont elle cherche toujours à s’éloigner. La radicalité, au contraire, se suffit à elle-même. Elle va au bout de sa propre logique (p. 114) » parce qu’elle part de la racine du sujet et/ou du diagnostic. Les militants radicaux ne sont surtout pas des dingues extrémistes bien souvent manipulés par des officines discrètes… Tout le contraire des « djihadistes [qui] sont de nulle part et de partout. Leurs places fortes sont semblables en cela aux grandes places financières, multiculturelles, cosmopolites même (p. 110) ». Les « soldats du Califat universel » sont en réalité des triples déracinés du point de vue de la géographie, de la culture et de l’histoire. L’auteur aurait pu les qualifier d’« individus unidimensionnels » au sens marcusien du terme.

Radicalité et enracinement

GB-rad.jpgDans sa préface, Jean-Pierre Raffin estime quant à lui que la radicalité « est une notion noble qui fait appel aux fondements, aux racines de notre être, de notre vie en société puisque l’être humain est un être social qui, dépourvu de liens, disparaît ou sombre dans la démence (p. 7) ». Gaultier Bès prévient aussi que « sans la profondeur de l’enracinement, la radicalité se condamne à n’agir qu’en surface et se dégrade en extrémisme. Sans la vigueur de la radicalité, l’enracinement n’est qu’un racornissement, qui, faute de lumière, conduit à l’atrophie (p. 16) ». Il se réfère beaucoup à la philosophe Simone Weil malgré une erreur sur l’année de son décès, 1943 et non 1944, en particulier à son célèbre essai sur l’Enracinement.

Il existe une évidente complémentarité entre radicalité et enracinement. Il entend « réhabiliter la notion de radicalité et montrer qu’elle n’est viable qu’à condition d’être enracinée (p. 12) ». Il insiste volontiers sur le fait que « l’enracinement […] n’est pas nostalgique, mais politique. Il ne rêve à aucune restauration, il ne fantasme aucun âge d’or, il se pense plutôt comme une force révolutionnaire, une quête de justice qui s’appuie sur une tradition non-violente. […] Ce n’est ni une réaction ni un figement, mais un mouvement spirituel, une actualisation dynamique qui s’appuie sur le passé pour mieux embrasser l’avenir (pp. 19 – 20) ». Par conséquent, il désapprouve l’expression de « Français de souche ». Il a raison. Il y a plus d’une décennie, un rédacteur de Terre et Peuple privilégiait « l’expression “ Européen de racine ” à celle d’« Européen de souche » couramment employé parmi nous, car la racine c’est vivant alors que la souche est morte (1) ».

gaultier-bes-french-author-c2a9yves-samuelciric.jpg

Gaultier Bès

S’appuyer sur les racines n’implique pas un quelconque fixisme. Outre la nécessité d’éviter deux tentations, « celle du statu quo (p. 15) » et « celle de la table rase, et elle est à la mode. Le Progrès rase gratis ! (p. 15) », Gaultier Bès conçoit l’identité « comme une continuité permanente, c’est-à-dire comme une réalité à la fois durable et mouvante, évolutive et constante (p. 63) ». L’identité est comme la vie d’un homme : l’allure physique d’une même personne varie au fil de l’âge. L’identité française de 2018 n’est pas celle de 1830 et encore moins celle de 1580. Elle repose pourtant sur un socle ethnique indubitable d’origine boréenne. Gaultier Bès n’évoque pas ce patrimoine génétique et anthropologique commun. Pour lui, « les peuples ont des racines qui les rattachent et à un territoire et à une histoire, et que les nations qu’ils forment au gré des circonstances sont moins des radeaux de fortune que des “ maisons communes ” (p. 75) ». L’expression « maison commune » serait-il un clin d’œil (incongru ?) au mouvement métapolitique naguère animé par Laurent Ozon ? Gaultier Bès connaîtrait-il par ailleurs les travaux de l’excellent revue Le recours aux forêts qu’Ozon dirigea dans les années 1990 ? Cette belle revue défendait déjà l’enracinement et l’écologie réelle, étudiait Jacques Ellul et Bernard Charbonneau et se doutait que « l’enracinement sans radicalité est artificiel, la radicalité sans enracinement superficielle (p. 80) ».

Identité(s) et politique

Gaultier Bès se montre parfois sinon ambigu, pour le moins confus. Il considère que « l’identité comme le chemin le plus sûr vers l’altérité (p. 52) ». Très bien ! Mais comment concilier cette indispensable altérité quand il écrit par ailleurs que la France est une vieille nation politique, un État-nation qui s’est édifié sur un déracinement concerté des peuples, des territoires et des métiers, sur l’ethnocide des campagnes et la suppression des corporations ? Certes, « l’État-Nation n’est pas l’alpha et l’oméga de la vie politique, reconnaît-il. C’est moins, à l’instar de la laïcité, une “ valeur ” qu’un principe de gouvernement (p. 70) ». Émanation de la Modernité, l’État-nation déracine tout, y compris ces nations que sont les ethnies et les peuples. Mondialisme inassumé et partiel, il arrase les différences essentielles. Il aurait pu introduire dans sa réflexion la notion clé de terroir. Il semble l’oublier. Or, sans terroir, l’enracinement se révèle impossible. Le terroir est l’appropriation par le sang, l’égrégore communautaire, l’histoire et la culture, le sol investi par les génies de lieu. La nation dans sa fibre la plus authentique, avant de subir une évolution stato-nationale, coïncidait à « une culture enracinée dans le terroir (bodenständig Kulture) (2) ». Pourquoi dès lors vouloir opposer la nation à l’empire, cette forme politique qui met en cohérence des nations culturelles plus ou moins proches, dont il ne paraît pas saisir les implications pratiques de ces diversités mises à l’unisson ? Le modèle impérial diverge de la fallacieuse construction dite européenne. Il déplore les transferts de souveraineté stato-nationale prévues par les traités européens vers une strate européenne inexistante du fait de leur dépolitisation de ses instances. Il en résulte leur neutralisation politique (Carl Schmitt).

L’Europe n’est pas le miroir du monde, mais la consécration d’un polyculturalisme enraciné et autochtone. « La polis ne saurait se superposer au cosmos (p. 71) », et ce, malgré que « mondialisation culturelle et globalisation économique sont les deux faces d’une seule et même médaille (p. 76) ». Certes, « contre la City et son monde, précise-t-il plus loin, être radical, c’est user pleinement de son droit de cité (p. 123) ». Ce droit de cité ne présuppose-t-il pas l’établissement de limites, appelées par exemple frontières non seulement en géopolitique, mais aussi d’un point de vue juridique ? Force est de constater que Gaultier Bès n’aborde pas ce sujet brûlant. En effet, quelque soit sa nature, un État se doit d’établir des bornes tant territoriales que civiques. L’appartenance à une citoyenneté suppose une distinction radicale entre les citoyens et les autres, et justifie la préférence nationale. En bon Français, Gaultier Bès confond citoyenneté et nationalité. « La nation est une fiction ? Sans doute ! Mais elle est une fiction utile, condition d’une vie politique que soit autre chose que la chambre d’enregistrement des grandes firmes mondialisées (p. 64). » La nation comme peuple vivant n’est jamais fictive. C’est la citoyenneté qui l’est, surtout à l’heure de ces saloperies de réseaux sociaux et de matraquage télévisuel incessant, sans oublier les méfaits de la partitocratie. Le temps est venu de dissocier la nation et l’État. La première retrouve son caractère communautaire et identitaire; le second prend enfin une tournure spécifiquement politique en devenant sciemment communautariste autochtone et en promouvant un aspect authentiquement plurinational.

racines1.jpg

L’auteur aurait pu se référer à l’excellente Note sur la suppression générale des partis politiques de Simone Weil. L’État-nation meurt d’un leurre démocratique et de la malfaisance des partis politiques. Outre la politicaillerie et l’invasion de la Technique, la croyance en une illusoire « fin de l’histoire (Francis Fukuyama) » favorise le pacifisme, abolit les volontés et ricane du citoyen prêt à se sacrifier pour sa cité et les siens. Le courage a déserté le Vieux Continent. Citoyenneté et res publica demeurent pourtant des concepts hautement polémogènes. La cité n’existe qu’à travers la perception, réelle ou supposée, d’un danger plus ou moins imminent envers elle. Du coup, le paragraphe « La nation et la paix » évacue le conflit comme permanence politique et nécessité historique. La lecture d’un ouvrage méconnu de Régis Debray, Le code et le glaive (3), lui aurait été profitable dans une perspective « nationiste ».

Gaultier Bès confond aussi le tribalisme, manifestation tangible de l’hyper-modernité ultra-individualiste, du communautarisme, véritable bête noire de la doxa ordo-républicaine hexagonale. Oublie-t-il que l’Ancienne France d’avant 1789 était un agencement dynastique de communautés multiples et variées ? On ne peut mettre dans une même équivalence des démonstrations néo-tribales suscitées par le consumérisme libéral (adeptes des rave parties, vegans, féministes hystériques, gays) et l’affirmation salutaire de communautés spirituelles, ethniques, culturelles et linguistiques. Les droits à la différence charnelle et à la reconnaissance institutionnelles ne concernent que les Alsaciens, les Basques, les Bretons, les Catalans, les Corses, les Savoisiens, voire les musulmans, et nullement les fumeurs de shit, les joueurs de boules ou les fans de piercing ! Seule la renaissance de communautés organiques enracinées favoriserait un renouveau démocratique de proximité. L’auteur constate que « la politique se meurt de n’être plus qu’une grande surface où le citoyen-consommateur erre, éperdu, entre les rayons pleins de promesses et de programmes affriolants (pp. 13 – 14) ». Bref, « il nous faut repenser radicalement la politique. La remettre à sa place (p. 15) ». Comment remédier à la dépréciation du politique ? Par l’intermédiaire des AMAP, des SEL, des coopératives, des jardins partagés, du recyclage généralisé, des monnaies locales ? Toutes ces excellentes initiatives n’influent cependant qu’en marge de la « société liquide (Zygmunt Bauman) ». Le tissage des liens sociaux participe au réenracinement et au maintient de son identité, de sa liberté et de sa souveraineté. « Plus un peuple a des racines solides, plus il a de ressources pour préserver son indépendance (p. 68). » Que faire alors quand les racines s’étiolent et se sclérosent ? C’est le cas pour des Français de plus en plus hors-sol.

Affranchissement du local

racines2.jpgGaultier Bès fait finalement trop confiance aux racines. Il a beau distinguer « l’image végétale des “ racines [à] celle, toute minérale, des “ sources ” (p. 25) », il se méprend puisque l’essence bioculturelle de l’homme procède à la fois aux racines, aux sources et aux origines. Ces dernières sont les grandes oubliées de son propos. Ce n’est toutefois qu’en prenant acte de cette tridimensionnalité que l’enracinement sera complet. Pourtant, il prend soin de préciser que « le global n’est pas l’universel, c’est l’extension d’un local hégémonique (p. 76) ». L’avertissement fait penser à l’opuscule du Comité invisible, À nos amis. Le local « est une contraction du global (4) ». « Il y a tout à perdre à revendiquer le local contre le global, estime le Comité invisible. Le local n’est pas la rassurante alternative à la globalisation, mais son produit universel : avant que le ne soit globalisé, le lieu où j’habite était seulement mon territoire familier, je ne le connaissais pas comme “ local ”. Le local n’est que l’envers du global, son résidu, sa sécrétion, et non ce qui peut le faire éclater (5). » Outre le collectif d’ultra-gauche, Guillaume Faye s’interrogeait sur l’ambivalence du concept. « L’enracinement doit […] se vivre comme point de départ, la patrie comme base pour l’action extérieure et non comme “ logés ” à aménager. Il faut se garder de vivre l’enracinement sous sa forme “ domestique ”, qui tend aujourd’hui à prévaloir : chaque peuple “ chez soi ” pacifiquement enfermé dans ses frontières; tous folkloriquement “ enracinés ” selon une ordonnance universelle. Ce type d’enracinement convient parfaitement aux idéologues mondialistes. Il autorise la construction d’une superstructure planétaire où s’intégreraient, privés de leur sens, normés selon le même modèle, les nouveaux “ enracinés ” (6). »

En lisant Radicalisons-nous !, on a l’impression que l’enracinement des peuples du monde entier assurerait une paix universelle, ce qui est à la fois irréaliste et fort naïf. En effet, l’auteur écarte les facteurs d’imprévisibilité de l’histoire. Même si tout un chacun (re)trouverait un enracinement approprié, tensions et contentieux plus ou moins virulents persisteront.

En célébrant « la politique par la racine », sous-titre de ce bon essai qui fait la part belle aux formules bien tournées : « Pour que notre avenir soit fécond, notre présent se doit d’être profond (p. 54) » et s’achève sur un manifeste en dix points parmi lesquels « la radicalité ne croit pas au Progrès (p. 120) » et « la radicalité est la condition de toute écologie (p. 121) », Gaultier Bès ignore peut-être que l’intérêt pour les racines n’est pas nouveau. Aux élections européennes de 1999, la liste CPNT (Chasse, pêche, nature et traditions) avait pour sympathique slogan « De toute la force de nos racines ». Plus anciennement, en 1977, le Club de l’Horloge publiait Les racines du futur, un magistral travail de reconquête intellectuelle qui mentionne « le triple enracinement ». Le constat de cet essai démontre un plus grand pragmatisme que celui de Gaultier Bès. « De cet enracinement dans l’espace et le temps pourra naître une communauté de destin. La définition d’un projet collectif doit enrayer les effets pervers d’un enracinement qui pourrait favoriser l’éclosion d’une multitude d’égoïsmes locaux ou régionaux. […] La définition d’un destin commun, qui est de la compétence souveraine de l’État, la conquête collective d’une “ nouvelle frontière ” économique, sociale, scientifique voire géographique (comme la construction européenne), pourra, seule, sublimer les égoïsmes et les particularismes, dans le respect des différences et des autonomies (7). »

La récente exposition éditoriale (y compris médiatique) d’une quête des racines lui (re)donne cependant une sympathique notoriété métapolitique. Qu’elle soit fertile auprès des Albo-Européens !

Georges Feltin-Tracol

Notes

1 : Jean-Patrick Arteault, « Guerre culturelle et combat identitaire », Terre & Peuple la revue, n° 25, Équinoxe d’automne 2005, p. 18.

2 : Martin Heidegger, Lettres à sa femme Elfride. 1915 – 1970, le Seuil, 2007, lettre du 8 juillet 1918, p. 109. En matière d’enracinement et nonobstant une langue souvent hermétique et déroutante, y compris pour les germanistes, la pensée de Heidegger présente plus que jamais un atout considérable, surtout à l’heure où une cohorte de sycophantes « universitaires » ose contester l’auteur des prophétiques Cahiers noirs.

3 : Régis Debray, Le code et le glaive. Après l’Europe, la nation ?, Albin Michel – Fondation Marc-Bloch, 1999.

4 : Comité invisible, À nos amis, La fabrique éditions, 2016, p. 191.

5 : Idem, pp. 190 – 191.

6 : Guillaume Faye, Europe et modernité, Eurograf, 1985, pp. 53 – 54.

7 : Club de l’Horloge, Les racines du futur. Demain la France, Masson, 1977, p. 194. Lisons aussi Bernard Charbonneau, L’Homme en son temps et en son lieu, préface de Jean Bernard-Maugiron, RN Édition, coll. « Ars longa, vita brevia », 2017.

• Gaultier Bès, Radicalisons-nous ! La politique par la racine, préface de Jean-Pierre Raffin, Éditions Première Partie, coll. « À la limite », 2017, 127 p., 7 €.

vendredi, 02 mars 2018

Guerra e Politica nel pensiero di von Clausewitz

141123-warren-clausewitz-tease_izefen.jpg

Guerra e Politica nel pensiero di von Clausewitz

Il generale, scrittore e teorico militare prussiano Carl Von Clausewitz (1780-1831) è noto per la celebre definizione della guerra, come “politica attuata con altri mezzi”. Sebbene ciò costituisca indubbiamente il merito più grande di Clausewitz alla dottrina pura del warfare (più per le sue implicazioni che per la giù lodevole chiarificazione concettuale), rimane il fatto che così come vien presentata tale definizione, oltre a mostrare la presunta erudizione di chi la dice, non chiarisce né l’oggetto né il concetto di se stessa.

C’è una seconda obiezione ad un genere di approccio semplicistico al pensiero di Clausewitz e, allo stesso tempo, a quella succitata abusata definizione: che egli non dà una sola definizione di “guerra”, ma più d’una (ad esempio: “La guerra è dunque un atto di violenza per costringere l’avversario a seguire la nostra volontà”). Anzi, Von Clausewitz presenta l’importante definizione di guerra come peculiare forma della lotta politica. Nella sua introduzione e più che per ragioni dottrinarie, egli introduce il concetto per focalizzare la prospettiva di lettura del fenomeno della guerra all’interno della sua peculiare visione, e non come una definizione che fa capo alla chiarificazione nei termini di un assioma.

517NN1G86RL.jpgOltre a questa differenza di fatto esistente nelle guerre, va stabilito in modo esplicito e preciso anche il punto di vista – pure praticamente necessario – secondo cui la guerra non è niente altro che la politica dello Stato proseguita con altri mezzi. Questo punto di vista, tenuto ben fermo dappertutto, darà unità a questa trattazione saggistica. E tutto sarà quindi più facile da districare.

La oramai famosa e storica definizione, di per sé, non ci dice molto né sulla guerra, né sulla politica, né sulla relazione vigente tra politica e guerra. Ed è appunto in quest’ultima relazione che dobbiamo soffermare la nostra attenzione e solo perché attraverso la sua chiarificazione si dà la possibilità di interpretare correttamente la medesima in modo che disveli con chiarezza tutta la sua profondità.

Per ammettere che la definizione non sia vuota, urge specificare che “la politica dello stato proseguita con altri mezzi” sia un predicato la cui conoscenza non è supposta con il termine “guerra”. Procedendo per comprendere la seconda parte della definizione, bisogna comprendere che sussiste una precisa relazione tra la politica di uno Stato e i mezzi con cui essa agisce effettivamente nel mondo. Sicché il centro della definizione ruota attorno al concetto stesso di “politica”.

Von Clausewitz, in diversi punti, tratta della natura del conflitto e di come la guerra non sia che una sua specifica parte. La politica è, a sua volta, un sottoinsieme del dominio degli ambiti a conflitto di interesse, sicché tanto la politica che la guerra fanno capo ad una medesima più generale categoria che ha entrambi come sottoinsiemi propri. Se la guerra è una parte della politica, in quanto suo proseguimento, allora la politica segue gli stessi obiettivi della guerra, pur utilizzando sistemi diversi per raggiungere il proprio obbiettivo.

Diciamo dunque che la guerra non appartiene all’ambito delle arti o delle scienze ma all’ambito della vita sociale. È un conflitto di grandi interessi che si risolve nel sangue, e soltanto in questo si differenzia dagli altri. Meglio che con qualsiasi arte la guerra potrebbe essere paragonata al commercio, che pure è un conflitto di interessi e di attività umane. Ma molto più vicino alla guerra sta la politica che, da parte sua, può essere vista di nuovo come una specie di commercio di dimensioni più grandi. Oltre a ciò la politica è il grembo in cui si sviluppa la guerra: in essa si trovano abbozzati in modo embrionale i lineamenti della guerra come le proprietà delle creature viventi nel loro embrione.

9780198737131.jpgCentrando il nostro pensiero sulla politica, per poi passare alla guerra, è necessario soffermarsi su questo punto. La politica è un conflitto di interessi, si fonda su di essi e si basa su rapporti di forza, vale a dire su rapporti tra individui che pensano e agiscono in modo da raggiungere i loro scopi. Sicché si può divergere per almeno due ragioni: si diverge sul fine o si diverge sul mezzo, o su entrambi. La politica ammette diversificazione di partiti non solo in virtù dello scopo finale, cioè un peculiare ordinamento sociale o economico, ma pure sui mezzi attraverso cui raggiungere lo scopo. I comunisti e i socialisti non avevano grandi distinzioni in merito ai fini, ma grandi differenze sussistevano nella concezione dei mezzi attraverso cui raggiungere gli scopi.

La politica, allora, non è altro che la gestione dell’esistente (cose e persone) al fine di raggiungere uno scopo sociale prefissato, la cui realizzazione implica delle conseguenze sull’organizzazione sociale. Per questo essa è molto vicina alla guerra sul piano astratto. Anzi, si può dire che la guerra e la politica sul piano astratto (cioè privi della discriminante dei mezzi) siano esattamente la stessa cosa. Se la politica e la guerra si effettuassero con le medesime tecniche (cioè l’utilizzo dei mezzi in modo consono alla loro tipologia) verrebbero inevitabilmente a collassare l’una con l’altra, divenendo indistinguibili.

Non è un caso che in alcune epoche storiche, in periodi particolarmente tormentati in alcune società, si assista ad una inestricabile serie di attentati a sfondo politico: le guerre civili romane, le trame e i sotterfugi del periodo rinascimentale italiano, gli attentati al potere di ogni genere di resistenza del periodo post-coloniale algerino o vietnamita (ad esempio). Essi non sono altro che fenomeni specifici di una realtà in cui la politica è fatta principalmente con i mezzi della guerra, pur senza arrivare ad uno scontro tra forze armate equipaggiate per una campagna militare.

Dunque, la politica è la pianificazione di una strategia per raggiungere alcuni scopi, ritenuti fondamentali. Gli scopi politici sono definiti da condizioni di interesse permanenti nei gruppi politici attivi. Tali scopi definiscono l’interesse e l’ambito dell’azione politica.

19327984032.jpgOgni attore politico ammette tre generi di relazioni con un altro attore politico: alleanza, indifferenza, ostilità. Nel caso in cui le due parti in contrapposizione non trovino alcun genere di accordo possibile né sui fini da raggiungere, né sui mezzi, e sono propensi a darsi battaglia per ottenere la vittoria sull’altro, si giunge al conflitto. Se il conflitto è di natura sociale, si parla di lotta politica; se il conflitto è di natura armata, si parla di guerra. Politica e guerra sono solo due casi particolari della logica del conflitto e la guerra è, a sua volta, una peculiare forma della politica. Perché è solo l’interesse politico a determinare la volontà di combattere per mezzo delle armi.

Se è vero che in un tipo di guerra la politica sembra scomparire del tutto (mentre nell’altro viene fuori in modo molto determinato) si può tuttavia affermare che un tipo di guerra è politico quanto l’altro. Se si considera infatti la politica come l’intelligenza dello Stato personificato devono poter essere comprese, sotto tutte le costellazioni osservabili, anche quelle guerre in cui la natura dei rapporti impone il primo tipo. Lo scopo di ogni guerra, dunque, è propriamente uno scopo politico e, se esso cambia, è perché è cambiata la politica all’interno di uno Stato.

Se da una guerra di conquista si passa ad una guerra volta a stabilizzare solo una parte del territorio acquisito non è perché ciò è dovuto alla natura di quella guerra, ma perché è cambiata l’opinione della classe dirigente in merito ai fini che quella guerra deve raggiungere. I generali sono solo degli esecutori degli ordini di un sovrano, sia esso un monarca o un parlamento, sia esso stesso il sovrano della Nazione, come Giulio Cesare o Napoleone.

Ma Giulio Cesare e Napoleone, in realtà, sono solo degli esempi di generali che conoscono bene gli scopi da raggiungere proprio perché essi stessi li definiscono e li concepiscono con chiarezza in quanto a capo di una fazione politica o di uno Stato. Dunque, la massima “la guerra è la politica dello Stato proseguita con altri mezzi” indica che la guerra non è che un peculiare mezzo della politica di uno Stato, vale a dire uno strumento nelle mani dei politici per ottenere gli scopi loro o della nazione. I mezzi della guerra sono quelli utilizzati in un combattimento.

Dunque, in breve:

1. Dobbiamo concepire la guerra in ogni circostanza non come una realtà indipendente ma come uno strumento politico. Soltanto con questa concezione è possibile non entrare in contraddizione con l’intera storia della guerra. Essa soltanto apre il grande libro ad una lettura intelligente;

2. Questa prospettiva ci mostra quanto diverse debbano essere le guerre, a seconda della natura dei loro motivi e delle situazioni da cui nascono. Il primo, il più grande e decisivo atto di giudizio che l’uomo di Stato e capo militare compie è quello di riconoscere correttamente sotto questo riguardo la guerra che intraprende, di non prenderla o volerne fare qualcosa che non può essere che per la natura dei suoi rapporti. Questa è dunque la prima, la più comprensiva di tutte le questioni strategiche. La natura della guerra è, dunque, dipendente da due fattori decisivi: gli scopi politici e i mezzi militari. In base alla natura degli scopi si definiranno anche i mezzi adeguati per raggiungerli.

8096207c24d6c99a1e36f9dd058fa116--carl-von-clausewitz-google-search.jpgAllo stesso tempo, con l’avanzare della tecnica e delle conoscenze scientifiche, le guerre cambiano di strumenti ma non nella sostanza. La natura dei fini umani è sempre la stessa, non cambia in base alle epoche storiche: ciò che cambia è l’oggetto, non l’intenzione verso di esso. In questo senso, la guerra, non solo nel suo farsi ma anche nel suo concetto, è di natura permanentemente multiforme. Essa cambia nei mezzi e negli scopi, cioè muta totalmente di forma. È la forma della guerra, non le sue ragioni profonde, a costituire la ragione fondamentale della diversità dei conflitti armati della storia. Eppure, a partire dalla comprensione della guerra nel suo ruolo di strumento politico, si nota una lunga linea di continuità tra i vari fenomeni bellici.

Alla luce di tutto quello finora detto e riprendendo la frase di Von Clausewitz, solo adesso siamo in grado di comprendere più affondo la natura e la profondità di tale definizione, perché abbiamo chiarito la natura della politica (quel tanto che basta a questo riguardo), la natura del mezzo e la peculiarità della guerra. La guerra, dunque, è solo una peculiare forma della più generale lotta politica, politica che è da Von Clausewitz pensata esclusivamente nei termini dello Stato; forma di lotta che prevede la sopraffazione dell’avversario, nel caso in cui gli obbiettivi delle due parti in lotta siano diametralmente antitetici.

Ad esempio, nella seconda guerra mondiale Hitler non aveva ben compreso che l’Inghilterra non avrebbe mai accettato una pace o una tregua, nonostante fosse giunta al limite delle sue possibilità di resistenza. E non l’avrebbe mai accettata perché in gioco c’era la volontà di distruggere l’avversario o di essere distrutti da esso, e ogni obiettivo mediano non sarebbe risultato sufficiente a spegnere la volontà di combattere degli inglesi, che, come lo stesso Hitler sapeva bene, era superiore a quella di qualunque altro popolo, con l’eccezione, forse, dei russi.

Un’ultima osservazione da tenere a mente: la guerra totale prevede la distruzione del nemico, per quanto insensato possa essere questo genere di guerra; ma questo genere di guerra rimane indubbiamente la minoranza dei casi, sia nel tempo che nello spazio e, in ogni caso, come non manca di sottolineare Liddell Hart, le guerre non sono mai giunte vicino a determinare lo sterminio del popolo con cui si combatteva. Ad esempio, tutte le guerre successive alla seconda guerra mondiale non furono guerre totali, ad iniziare dalle guerre post-coloniali, per finire alle guerre recenti degli Stati Uniti in Afganistan e in Iraq o le guerre israeliane. In questo genere di guerre quello che conta è mettere il nemico nelle condizioni di smettere di combattere, sia esso perché glielo si impedisce fisicamente, togliendogli i mezzi sia perché gli si toglie la volontà di combattere. Ma rimane sempre il dato finale: lo scopo è quello di ottenere un obbiettivo specifico, non di distruggere.

(di Massimiliano Carta)

jeudi, 01 mars 2018

Notre vision du monde - Petit bréviaire pour étudiant militant

sanmiguel.jpg

Notre vision du monde

Petit bréviaire pour étudiant militant

La vision du monde chrétienne-conservatrice vient d'être mise en ligne par le site "Orages d'acier" - A lire !
 
Ex: http://oragesdacier.info
 
A. Ce qui ne va pas dans notre monde
 
a. Prendre du recul sur notre époque :
 
Il est difficile d’avoir du recul sur son époque. Comment qualifier notre monde et notre société alors que nous sommes entièrement partie prenante de celle-ci ? Sommes-nous capables de nous extraire suffisamment de ce monde pour y jeter un regard critique ? L’adage « nihil nove sub solle » nous avertit contre les jugements hâtifs qui consisteraient à voir notre époque comme la pire de toutes. À chaque époque, des esprits, parfois qualifiés, à juste titre ou non, de réactionnaires ont décrit leur époque comme celle du déclin et de la fin de la civilisation. Il faut donc se prémunir des comparaisons trop simples avec le passé. On a facilement tendance à idéaliser le passé et à en oublier la complexité pour n’en retenir que des éléments figés. Un certain nombre de problèmes sociaux que sont la prostitution, la drogue, l’alcoolisme, les guerres de religion, la violence de rue, le racisme… se sont déjà posés à d’autres époques. L’histoire est faite par les hommes, et la nature humaine garde en elle quelques invariants quelles que soient les époques. « Partout où il y a de l’homme, il y a de l’hommerie ». Une société où tous ces problèmes seraient évacués est une société imaginaire et utopique. Partout où l’homme a voulu réaliser la société idéale, il n’a fait qu’établir l’enfer sur terre. 
 
b. Faut-il pour autant en conclure que notre époque n’a rien de particulier ? 
 
Notre société est une société technique !
 
Monde de flux : Le chemin de fer, les avions, les compagnies low-coast l’automobile, les autoroutes, les transports en commun, le T.G.V…. ont considérablement augmenté nos capacités de déplacement et réduit l’espace temps. À l’époque de nos grands-parents il fallait compter au moins une demi-journée pour se rendre à Paris. Lorsque les compagnies comme easy-jet n’existaient pas, les voyages à l’étranger étaient très exceptionnels. On pouvait visiter une fois dans sa vie un pays du Maghreb, la Hollande, l’Italie et la Pologne… En 2015 une campagne de publicité proposait aux consommateurs d’acheter leurs billets d’avion dans des distributeurs de nourriture pour illustrer la banalité de l’avion. Notre époque est donc celle de la mobilité et des flux comme jamais aucune autre époque n’a connu.
 

flux.jpg

 
Hyper communication : Le téléphone, la télévision, les chaînes d’information continue, la télé réalité, internet, les réseaux sociaux, le smartphone, ont considérablement modifié notre rapport au monde et à la communication. Grâce à nos smartphones nous sommes en permanence connectés au monde, nous pouvons savoir à la minute près ce qui se passe à n’importe quel endroit de la planète, nous pouvons voir nos proches à l’autre bout du monde grâce à une connexion 4G, nous pouvons échanger des photos en moins d’une seconde. Notre quotidien est bercé par les images diffusées par les médias de masse à tel point que celles-ci façonnent notre représentation du monde. Nous éprouvons facilement plus de compassion pour les malheureux qui nous sont présentés sur nos écrans que pour notre voisin dont nous ne connaissons pas les soucis quotidiens. Grâce aux réseaux sociaux nous avons accès librement à la vie privée de nos contacts qui peuvent partager tous les détails de leur existence. Mais si nous sommes aussi de plus en plus connectés à nos smartphones nous sommes de moins en moins connectés au monde physique qui nous entoure. Encore une fois notre époque est une époque non seulement des flux de transport, mais aussi celle des flux de communication et d’images virtuelles.
 
Santé et humain augmenté : Grâce à la génétique, aux I.R.M., au don du sang, au transfert d’organe, au clonage, et aux progrès de la chirurgie, nous pouvons vivre plus longtemps, et guérir de maladies dont on mourait autrefois. La mort est donc constamment repoussée à plus tard. L’homme a gagné une maîtrise quasi parfaite du vivant : il est désormais question de transhumanisme. Non seulement nous voulons, mais aussi, nous devons repousser toujours plus loin nos limites naturelles pour vivre plus longtemps, pour faire plus de choses, pour ne plus payer le prix de la fatigue et de la vieillesse. Ces progrès de la médecine ont complètement chamboulé notre rapport à la mort qui devient de moins en moins acceptable dans nos sociétés. La mort qui était autrefois une réalité quotidienne (on veillait les morts chez eux, on assumait le caractère macabre de la mort par un culte des morts très présent dans la société) est devenue une réalité avec laquelle nous sommes de plus en plus mal à l’aise. La mort est devenue une réalité aseptisée, on meurt à l’hôpital et on fait semblant de ne pas être triste aux enterrements.
 
Sexe et technique : Notre époque a aussi un rapport très particulier au sexe, aujourd’hui la pornographie est accessible gratuitement à partir de n’importe quel appareil disposant d’une connexion internet. En 2004 une enquête du CSA révélait que 80 % des garçons entre 14 et 18 ans et 45 % des filles du même âge avaient vu au moins une fois un film X durant l’année. C’était il y a treize ans… L’imaginaire pornographique précède l’accès des jeunes à la sexualité, à tel point que c’est la sexualité telle qu’elle est mise en scène dans la pornographie qui dicte ses codes dans les premiers rapports sexuels des jeunes. Notre époque est aussi celle de l’accès à la contraception : préservatifs distribués gratuitement à l’école dès le collège, pilules du lendemain en accès libre et gratuit, avortements remboursés par la sécurité sociale… Nous vivons pour la première fois à une époque où la possibilité technique de déconnecter l’acte sexuel de la procréation est rendue non seulement possible mais nécessaire.
 

exdoll-veut-charmer.jpg

 
Technico-capitalisme : Notre époque est encore davantage celle d’un nouveau capitalisme, renouvelé et amplifié par la technique. La condition ouvrière n’a pas disparue, elle s’est transformée. Le capitalisme du XXIème siècle fonctionne d’une part sur la dématérialisation des capitaux, la création monétaire sans limite et la spéculation infinie sur les dettes. D’autre part elle vise des gains de productivité qui poussent les multinationales à délocaliser sans cesse leurs usines de production là où la main d’œuvre est la moins chère tout en la remplaçant petit à petit par des robots. La publicité vise à créer des besoins permanents chez la population afin d’écouler une marchandise inutile produite en quantité croissante.
 
Notre monde a construit des structures de péché !
 
Vivre pour consommer : Nous vivons dans un monde où l’enrichissement est devenu un modèle de société qui justifie tous les sacrifices. Nos sociétés sont arrivées à un stade paradoxal de la modernité où nous inventons et produisons des objets sensés nous affranchir de la domination de la nature mais qui nous aliènent à un nouveau système : celui du cycle de la production et de la consommation. Jusqu’où sommes nous prêts à aller pour nous payer le confort moderne ? Vivre dans un petit appartement étriqué entouré d’autres cages à lapin, respirer la pollution des voitures lorsque l’on sort dans la rue, prendre deux fois par jour un bus ou un métro bondé, subir les avanies d’un chef de service, de collègues ou de clients revêches, passer ses journées devant un écran pour produire des salaires qu’on est priés de dépenser illico en fringues jetables entretenant ainsi le très rentable et inutile mécanisme du gaspillage, partir en vacances en même temps que tout le monde, pour parcourir des circuits prédéfinis par l’industrie du tourisme. Nous sommes devenus des handicapés bardés de diplômes : incapable d’enfoncer un clou, de planter des roses ou des radis, d’éduquer un enfant ou de faire la cuisine et c’est tout bénéfice pour le système marchand.
 

credit-consommation.jpg

 
Démesure : L’homme moderne a perdu le sens de la mesure, il veut toujours plus et ne supporte aucune limite à son désir. La crise de société que nous vivons consiste principalement dans le fait qu’il est devenu légitime aux yeux de la société de n’accepter aucune limite à son désir. Le besoin d’aménager son environnement pour le rendre plus habitable est un besoin naturel de l’homme, mais tout besoin peut se changer en folie et en démesure comme le besoin de se nourrir peut mener à l’orgie.
La société occidentale a développé des modèles ou des voies qui conduisent l’homme à s’éloigner des limites imposées par la nature, de la loi divine… ce sont ce que le Pape Jean-Paul II appelait des structures de péché.
 
Libéralisme : Le libéralisme fait de la liberté un absolu. Rien ne peut s’imposer à elle que ce soit la morale, la vérité ou le bien. La rentabilité économique s’impose comme l’ultime raison des décisions politiques et économiques. Pour « lutter contre le chômage » on est donc prêt à perdre les acquis sociaux obtenus par des siècles de lutte.  Il est devenu légitime qu’un grand patron qui gagne dix fois le salaire de ses employés puisse les licencier quand il juge que son entreprise court un « risque ».
 
Divinisation de l’argent : Le capitalisme fait de l’argent une fin. L’argent est un bon serviteur mais un mauvais maître. Dans notre société il est devenu normal de vivre pour produire de l’argent. L’argent ne sert plus simplement de valeur d’échange qui permet aux hommes de se procurer ce dont ils ont besoin pour vivre, l’accumulation de l’argent devient un objectif. L’homme, la morale, la beauté, tout est subordonné à l’argent.
 
Notre univers culturel a été remplacé !
 
Américanisation : Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, les États Unis sont devenus les maîtres de l’occident. L’Europe a consenti à cette domination militaire et économique en pensant ainsi se préserver du péril soviétique. Le soft power américain nous impose désormais un mode de vie, un univers culturel et une vision du monde. On peut résumer ce nouvel ordre culturel américain par trois idées : sex, fun and money.
 
Art moderne : L’art moderne a imposé une nouvelle définition de l’art. La rupture et la créativité pure constituent l’essence de l’art. La beauté est désormais considérée comme un sentiment primaire. Ainsi on a vu les pires horreurs comme un sextoy ou un vagin géant être reconnus par nos gouvernants comme des œuvres d’art officielles, sans oublier les différentes pièces de théâtre comme Golgotha piquenique…. La laideur sponsorisée, érigée en art officiel est imposée aux peuples européens. C’est le règne de la laideur qui envahit nos vies. Le beau est systématiquement tourné en dérision.
 

oeilAM.jpg

 
Culture populaire et standardisation : Derrière cet art qui sert également à blanchir de l’argent on subit l’influence plus diffuse de la société du spectacle hollywoodienne. De Marvel à Games Of Throne en passant par Disney et Cyril Hanouna… il s’agit d’un imaginaire destiné à remplacer nos traditions qui étaient foncièrement hostiles au marchandage. La culture du hipster et du rappeur ont remplacé nos traditions populaires. La culture populaire est devenue totalement artificielle et marchande puisqu’elle devient un produit dont le rôle est de produire de l’argent. Sa part spirituelle est réduite à minima quand elle ne diffuse pas des valeurs mondialistes ou anti-française. La standardisation des objets du quotidien illustrée par la bibliothèque Ikéa et le pavillon d’habitation manifeste une immense perte anthropologique. Depuis toujours les hommes ont éprouvé le besoin d’inscrire leur propre marque dans les objets du quotidien, les outils, les meubles et les maisons étaient peints, sculptés ou gravés. L’homme exprimait ainsi son besoin de spiritualiser la matière. Quelle spiritualité dans l’objet industriel standardisé si ce n’est celle du vide ? L’homme moderne est dans l’incompréhension devant ceux qui préfèrent encore le beau au confort et à la praticité.
 
Les poisons intellectuels qu'on nous injecte depuis l'enfance !
En plus d’un univers esthétique dominé par le rap et les séries américaines, c’est notre intelligence elle-même qui est contaminée par des idées qui nous paralysent totalement.
 
Idéologie du progrès : Le mythe du progrès consiste à croire que ce qui vient après est nécessairement supérieur à ce qui était avant. Depuis les Lumières les partisans du progrès essayent d’imposer l’idée que toute critique des idées modernes libérales ou égalitaristes, de la technique, sont des tentatives de retour en arrière. L’idéologie du progrès consiste à croire que le progrès est continu et infini : que l’histoire du monde est une histoire du progrès. Le progrès n’est pas univoque, il ne va pas dans un seul sens, il est aussi synonyme de disparitions et de destructions : l’électricité a fait disparaître les allumeurs de réverbères à gaz, les organes servant aux greffes qui peuvent sauver nos vies, sont les organes de personnes décédées d’un accident de la route… Les objets fabriqués à la chaîne au Bangladesh que nous achetons représentent autant d’objets qu’un artisan normand n’arrivera pas à vendre… Les autoroutes construites sont aussi des paysages défigurés… L’invention du micro-onde et des plats surgelés mène petit à petit à la raréfaction de la gastronomie française, à la désacralisation du repas… Les heures passées devant un écran sont des heures en moins passées à discuter entre amis… etc… etc…
 
Culture de la repentance : Nous croyons que les européens sont responsables de la colonisation et de l’esclavage et que nous portons tous la responsabilité collective des crimes commis en cette période. La culture de la repentance c’est la culture de l’excuse qui nous fait systématiquement baisser la tête, avoir honte de notre histoire et nous fait voir nos ancêtres comme des criminels. La repentance empêche notre peuple d’être fier de son passé et le force à s’incliner devant l’étranger.
 

pasteff.jpg

 
Antiracisme : Le corollaire de cette culture de la repentance c’est l’antiracisme qui s’impose comme un dogme et une idéologie. L’autre nom de l’antiracisme c’est le racisme anti-blanc. Toutes les races peuvent se plaindre des discriminations subies au nom de leur différence à l’exception des blancs qui ont le devoir de culpabiliser de ce qu’ils sont.
 
Antifascisme : L’intelligentsia de gauche a développée une puissante arme qui s’appelle l’antifascisme. Celle-ci permet de diaboliser systématiquement son adversaire de droite en l’accusant de fascisme ce qui équivaut à le rapprocher du nazisme et donc du mal absolu. Le fascisme partageant la quasi-totalité de ses fondamentaux avec la tradition de droite, il est donc impossible d’échapper à l’anathème sans se conformer à l’idéologie de gauche. C’est tout le drame de La Manif pour tous ou du Front National qui se sont persuadés qu’ils rencontreront le succès à l’unique condition qu’ils arrivent à éviter d’être qualifiés de fascistes, malheureusement ces tentatives ont été vaines.
 
Féminisme : La femme serait dominée et exploitée par l’homme depuis la préhistoire. Le féminisme serait la prise de conscience de cette domination et la lutte des femmes pour redresser l’inégalité.  Mais le féminisme qui voulait faire de la femme l’égale de l’homme lui a souvent ôté les privilèges de sa condition d’épouse et de mère dont le rôle était de faire renaître la vie dans le foyer à travers les tâches sacrées du quotidien :  travaux de la maison, soin aux enfants, préparation des repas, attention à la toilette, autant de tâches par lesquelles un foyer existe ou non et par lesquelles la transmission de la tradition s’effectue; les femmes doivent faire un métier pour devenir autonomes et entrer dans la logique de production qui les fait sortir de leur fonction sacrée. La nature tend vers l’harmonie à partir des contraires. L’égalitarisme remplace l’harmonie par l’unisson, détruit les différences pour uniformiser les conditions.
 
Universalisme : Les déterminismes que sont la culture, le sexe, la langue, la religion doivent être gommés afin que chacun puisse choisir ce qu’il veut être. On doit pouvoir choisir sa nationalité, son sexe et être accepté ainsi par tous. Rien ne doit dicter aux hommes qui ils sont et donc on doit abolir tout ce qui détermine les hommes dans une identité car cela enferme les hommes dans des cases et génère des discriminations. L’individu roi impose sa dictature au détriment des communautés naturelles. Tout devient interchangeable et finalement tout tend vers l’uniformité. On pourrait imaginer dans cette logique un jour où à force de métissage il n’y aurait plus qu’une seule race, plus qu’un seul sexe, qu’une seule langue et qu’une seule culture.
 

benetton.jpg

 
Relativisme : Depuis l’Antiquité les hommes se disputent pour démontrer et argumenter en faveur de visions du bien différentes. Les chrétiens prétendent avoir démontré l’existence de Dieu, les athées auraient prouvé son inexistence. La raison et les arguments sont des mirages. Il n’y a pas de vérité, tous les comportements et toutes les croyances se valent. L’homosexualité est aussi légitime que le mariage, l’urinoir de Duchamp est aussi digne d’être dans un musée que la Joconde… Ce qui est naturel et évident au Nord ne l’étant plus au Sud, tout se vaut. Le relativisme est lui aussi un dogme qui mériterait d’être relativisé.
 
Des dangers pour l’avenir :
 
Absence de sursaut électoral : L’avenir semble encore plus sombre car les signes du réveil tant attendu peinent à se montrer et les hommes politiques élus se font les serviteurs du mondialisme libéral le plus extrême. La vague populiste que beaucoup annonçaient il y a encore quelques mois semblent s’être changée en flaque ou avoir montré son vrai visage : celui de la démagogie. Trump n’est pas le héros de droite dont certains rêvaient, Alexis Tsipras en Grèce, le mouvement 5 étoiles en Italie tombent dans les mêmes travers que la caste politique corrompue et se soumettent au diktat de Bruxelles.
 
Surveillance généralisée : La vague d’attentats qui s’est abattue sur l’Occident aurait pu réveiller nos compatriotes mais au lieu de cela elle est un prétexte à la mise en place d’une société du contrôle permanent. La police et les services de renseignements ont accès à nos messageries, plus besoin de mandat pour nous espionner. Les marchands de caméras de surveillances voient leurs ventes exploser. Les renseignements intérieurs ont même décidé de débloquer un budget pour surveiller les mouvements nationalistes. Autrement dit la lutte contre le terrorisme islamique légitime une surveillance accrue des militants patriotes.
 

privacy_surveillance.jpg

 
Perte de contrôle du système technicien : Dans un autre domaine nous pouvons légitimement craindre du côté des technologies : nous avons mis au point un univers technologique que nous ne maîtrisons plus. Les accidents nucléaires sont des événements qui nous guettent en permanence, chaque année de nouvelles épidémies et de nouveaux virus dont nous pouvons suspecter une origine humaine, liée à des expérimentations, font leur apparition, notre alimentation est de plus en plus toxique (O.G.M; pesticides, engrais chimiques…) la vie est de plus en plus menacée par nos inventions techniques : ondes wifi, pollution, produits toxiques présents dans les savons, les produits d’entretien…  Le plus grand drame étant la perte de contrôle et de maîtrise de nos propres inventions.
 
Développement d’une nouvelle humanité :  On voit également apparaitre un véritable marché de l’eugénisme avec la possibilité de passer par des banques de sperme et d’ovules, entreprises qui permettent de choisir le sexe, la couleur des yeux, le caractère de son enfant. L’avortement nous permet d’éliminer les trisomiques et autres handicapés, la PMA nous permet de fabriquer l’homme idéal. Pour couronner le tout, le transhumanisme financé par Google et d’autres entreprises aux projets rassurants nous permettra d’augmenter nos facultés naturelles. Bien évidement cet eugénisme sera réservé à ceux qui en ont les moyens, les autres serviront de réservoir d’organes pour les privilégiés. Les pires cauchemars de la science fiction se réalisent sous nos yeux.
 
Invasion migratoire : Après avoir voulu imposer la démocratie par les bombes et la guerre, les Etats-Unis et leurs alliés ont totalement bouleversé les délicats équilibres du Moyen Orient. L’Afrique et les pays du Moyen-Orient sont dans un état de tension permanente, les mafias locales de passeurs organisent main dans la main avec les ONG soutenues par l’Open Society de Georges Soros un énorme trafic d’êtres humains que cautionnent nos gouvernements européens. Une véritable vague migratoire déferle sur l’Europe, chaque week-end ce sont des milliers de clandestins qui débarquent sur les côtes italiennes et les îles grecques. Ce flux n’est pas prêt de se tarir et les pays européens font tout pour encourager ce trafic et cet immense exode du Sud vers le Nord. Cet immense phénomène migratoire pose des questions existentielles. En plus de voir les pays africains se vider de leur population, la présence d’une majorité d’hommes et de musulmans parmi les dits « migrants » peut légitimement nous inquiéter. Mais il ne s’agit pas simplement de cela : à quoi ressemblera l’Europe dans vingt ans si nous continuons à accueillir ces populations ? Les capitalistes y voient une main d’oeuvre bon marché et peu exigeante en terme de droit du travail. Si l’on peut assimiler des individus quand on est une civilisation sûre d’elle-même, on voit mal comment assimiler des peuples lorsque l’on est une civilisation décadente.  L’islam représente une véritable menace pour le continent européen qui risque de connaître de nouvelles guerres de religions s’il ne se soumet pas à l’islam.
 

fluechtlingsbootvorlampedusadpa.jpg

B. Notre vision de l’homme et du cosmos
 
Le cosmos est ordonné indépendamment de la volonté humaine :
Dieu a crée l’univers et il a disposé ses parties avec une sagesse infinie dont tous les efforts de compréhension des scientifiques ne viendront jamais à bout.  L’ordre du cosmos est beau et admirable. 
 
La place de l’homme dans la création :
L’homme n’est qu’une créature au milieu de cet immense univers. Mais Dieu a voulu que l’homme soit le gardien libre de sa création afin de le faire participer à cette magnifique oeuvre. Si l’homme a reçu l’intelligence en don pour aménager son habitat sur cette terre, il n’a pas le droit de la détruire ou de se faire l’égal de Dieu en la dénaturant. 
 
L’homme est un être sociable par nature :
il reçoit tout de la société, il nait infiniment redevable vis à vis de ses ancêtres. Pour grandir il s’enracine dans une culture et une communauté à laquelle il doit apporter sa contribution personnelle. « L’égoïsme rationnel » des penseurs libéraux est donc contre nature. La société est un fait de nature, ce n’est pas à l’État de créer artificiellement un ordre social rationnel et égalitaire coupé du dynamisme de la nature humaine. 
 
L’homme est fait pour la vertu :
d’un point de vue strictement naturel, l’homme devient véritablement homme (c'est à dire libre et non plus dominé par sa part d’animalité) en conquérant la liberté sur ses passions et en dominant ses instincts (tempérance), il acquiert les vertus par répétition d’actes bons qui lui permettront de faire le bien même lorsque cela est rendu difficile à cause de certaines situations (courage), d’être juste à l’égard de ses semblables (justice) avec intelligence et sagesse (prudence). Il y a un vrai bien objectif pour l’homme contrairement à ce que disent les modernes, un homme qui ne devient pas vertueux est une loque et il en souffre, un homme qui acquiert les vertus (prudence, tempérance, courage et justice) est un homme heureux car c’est là que réside la fin naturelle de l’homme.
 

Erzengel_Michael.jpg

 
Le mystère du mal :
Puisque nous sommes chrétiens nous croyons que nos premiers ancêtres, Adam et Ève ont contracté par leur désobéissance et leur orgueil une blessure qui se transmettra à toute l’humanité. Cette blessure nous la connaissons tous, c’est ce qui nous empêche de faire le bien que nous voulons faire et ce qui fait que nous faisons le mal que nous ne voulons pas commettre. De là il est important de se souvenir qu’il n’y aura jamais de paradis sur terre et que toutes les institutions politiques, mêmes les mieux intentionnées, seront toujours imparfaites. Mais cela ne nous empêche pas de désirer le meilleur tout en sachant que cela restera imparfait. 
 
L’homme est fait pour s’élever vers Dieu :
la révélation chrétienne nous fait connaître la voix de Dieu et son dessein pour l’humanité. Nous savons que l’homme n’est pas fait pour vivre éternellement sur cette terre. La terre est le lieu du combat pour choisir l’alliance à laquelle Dieu nous invite et pour renoncer aux pièges du démon. Nous ne sommes pas fait pour durer, c’est pour cela que nous ne devons pas craindre la mort mais seulement le jugement de Dieu. 
 
La sainteté :
En tant que chrétien nous voulons aimer Dieu et vivre avec lui en le contemplant dans ce monde de béatitude qu’est le paradis qui nous attend après la mort sur cette terre. Mais en attendant la mort nous devons vivre sur cette terre car Dieu l’a voulu ainsi. Nous devons imiter Jésus Christ et particulièrement son sacrifice d’amour. Notre existence sur terre doit se résumer à un sacrifice d’amour en union avec le sacrifice de Jésus-Christ qui nous sauve du péché. L’amour parfait c’est l’amour de Dieu d’où découle celui pour ses créatures. L’amour pour les créatures doit être proportionné car l’amour excessif d’une créature peut nous éloigner de Dieu et c’est justement en cela que consiste le péché : préférer la créature au créateur. Dieu veut que nous fassions le bien et que nous luttions contre le mal, il veut que nous vivions conformément à la nature qu’il nous a donné sinon il nous aurait donné une autre nature.
 
Sainteté et politique : 
Le chrétien doit aimer son prochain mais cet amour s’incarne dans l’ordre naturel voulu par Dieu c'est à dire dans le cadre de la communauté puis de la société.
Ainsi il est normal d’aimer d’abord ses parents, ses enfants, les autres membres de sa famille, puis les membres de sa communauté, puis son peuple, puis les peuples plus proches de nous, puis l’homme en général, puis les animaux, les plantes, les rochers…
Aimer d’abord ne signifie pas détester les autres, mais cela signifie que nous sommes d’abord responsables du bien de ceux que Dieu à fait « nos proches » avant d’être responsable du bien de ceux qui sont plus éloignés de nous.
Dieu a fait l’homme de façon qu’il vive en communauté, et détruire la communauté est contraire à la volonté de Dieu. Un des devoirs du chrétien sur cette terre c’est donc la charité politique qui consiste à faire le bien de ceux qui partagent la même cité et de participer au bien de cette cité : c'est à dire de mettre en commun un certain nombre de biens, de veiller aux plus démunis et aux plus pauvres, et de défendre la cité contre les attaques ennemies. Car le monde est ainsi fait depuis le péché originel : oui il faut le dire, il y a des ennemis et des gens qui veulent faire du mal à nos proches. Individuellement, le chrétien peut et doit accepter les souffrances que la vie lui impose, mais il doit lutter contre celles qu’on impose à ses proches, c’est ainsi qu’il se sanctifie. La politique est le plus haut degré de la charité car il s’agit de militer pour le bien de la communauté.  C’est une responsabilité qui incombe à chacun (avec des degrés variés dans le mode d’action, mais avec un même degré dans la qualité de l’engagement). 

Clausewitz y el marxismo revolucionario

por Roberto Sáenz

Ex: https://www.mas.org.ar

Guerra, política y partido

“La revolución proletaria no puede triunfar sin un partido, por fuera de un partido, contra un partido o con un sustituto para un partido. Esa es la principal enseñanza de los diez últimos años” (León Trotsky, Lecciones de Octubre).

El desborde ocurrido en las jornadas del 14 y 18 de diciembre ha puesto sobre la mesa la discusión sobre las relaciones entre guerra y política. A pesar de su campaña contra los “violentos”, el único violento fue el gobierno: reprimiendo una concentración de masas sobre el fondo del repudio masivo a la ley antijubilatoria, era inevitable que su acción represiva desatara una dura respuesta de los sectores movilizados.

La “gimnasia” del enfrentamiento a la represión dejó un sinnúmero de enseñanzas. Entre ellas, una central: las relaciones entre lucha política y lucha física: el pasaje de la lucha política a la acción directa.

Esta problemática ha sido abordada por el marxismo sobre todo a partir de la Revolución Rusa. Si bien con antecedentes en los estudios de Marx y Engels, y también los debates en la socialdemocracia alemana (que tuvo como gran protagonista a Rosa Luxemburgo), fueron Lenin y Trotsky los que le dieron vuelo a las investigaciones sobre las relaciones entre ambos órdenes sociales[1].

La fuente básica de los marxistas ha sido siempre Karl von Clausewitz, oficial del ejército prusiano, que a comienzos del siglo XIX y resumiendo la experiencia de los ejércitos napoleónicos, escribió su clásico tratado De la Guerra que hasta hoy expresa uno de los abordajes más profundos de dicho evento.

Clausewitz iniciaba su estudio con una sentencia que rompía con el sentido común de la época, cuando señalaba que la guerra no es una esfera social autónoma sino “la continuidad de la política bajo otras formas”, formas violentas.

51wviVgjw7L.jpgLenin y Trotsky recuperarían sus definiciones dándoles terrenalidad en la experiencia misma de la revolución: en el evento por antonomasia del pasaje de la política a la lucha física: la ciencia y arte de la insurrección: el momento en que se rompe el continuum de la historia con la intervención de las masas comandadas por el partido revolucionario, que se hacen del poder y cambian la historia.

Si, en definitiva, la lucha política es una lucha de partidos, la insurrección como evento máximo de traducción de la política al enfrentamiento físico, no tiene otra alternativa que ser comandado por un partido. Volveremos sobre esto.

A la insurrección de Octubre le seguiría la experiencia de Trotsky al frente del Ejército Rojo durante la guerra civil; las enseñanzas desprendidas de dicho evento.

A partir de la experiencia, y de la elaboración teórica desprendida de la misma, se fue forjando un corpus de conceptos, donde un lugar no menor lo ocupan las categorías de estrategia y táctica; la estrategia, que tiene que ver con el conjunto total de los enfrentamientos que llevan al triunfo en la confrontación; la táctica, relacionada con los momentos parciales de dicho enfrentamiento: los momentos específicos donde se pone a prueba la estrategia misma; estrategia que, como decía Clausewitz, debe entrar en el combate con el ejército y corregirse a la luz de sus desarrollos.

De ahí que esta elaboración tenga que ver con el pasaje de la política a la guerra: con aquel momento donde los enfrentamientos se sustancian en el lenguaje de la lucha física; lucha física que, de todas maneras, siempre está comandada por la política: “Bajo el influjo de Sharnhorst, Clausewitz se interesó por la visión histórica de la guerra (…) y llega a la temprana conclusión de que la política es el ‘alma’ de la guerra” (José Fernández Vega, Carl von Clausewitz. Guerra, política y filosofía).

La guerra como continuidad de la política

Desde Clausewitz guerra y política son esferas estrechamente relacionadas. Lenin y Trotsky retomaron esta definición del gran estratega militar alemán de comienzos del siglo XIX. Se apoyaron en Engels, que ya a mediados del siglo XIX le había comentado a Marx el “agudo sentido común” de los escritos de Clausewitz. También Franz Mehring, historiador de la socialdemocracia alemana y uno de los aliados de Rosa Luxemburgo, se había interesado por la historia militar y reivindicaba a Clausewitz.

Por otra parte, hacia finales de la II Guerra Mundial, en el pináculo de su prestigio, Stalin rechazó a Clausewitz con el argumento de que la opinión favorable que tenía Lenin acerca de éste se debía a que “no era especialista en temas militares”…

Pierre Naville señalaría que el Frente Oriental y el triunfo militar del Ejército Rojo sobre la Wehrmacht, había confirmado la tesis contraria: la validez de Clausewitz y lo central de sus intuiciones militares; entre otras, la importancia de las estrategias defensivas en la guerra.

Según su famosa definición, para Clausewitz “la guerra es la continuación de la política por otros medios”. Quedaba así establecida una relación entre guerra y política que el marxismo hizo suya. La guerra es una forma de las relaciones sociales cuya lógica está inscripta en las relaciones entre los Estados, pero que el marxismo ubicó, por carácter transitivo, en la formación de clase de la sociedad. La guerra, decía Clausewitz, debe ser contemplada “como parte de un todo”, y ese todo es la política, cuyo contenido, para el marxismo, es la lucha de clases.

1492101427125.jpg

Con agudeza, el teórico militar alemán sostenía que la guerra debía ser vista como un “elemento de la contextura social”, que es otra forma de designar un conflicto de intereses solucionado de manera sangrienta, a diferencia de los demás conflictos.

Esto no quiere decir que la guerra no tenga sus propias especificidades, sus propias leyes, que requieren de un análisis científico de sus determinaciones y características. Desde la Revolución Francesa, pasando por las dos guerras mundiales y las revoluciones del siglo XX, la ciencia y el arte de la guerra se enriquecieron enormemente. Tenemos presentes las guerras bajo el capitalismo industrializado y las sociedades pos-capitalistas como la ex URSS, y el constante revolucionamiento de la ciencia y la técnica guerrera.

Las relaciones entre técnica y guerra son de gran importancia; ya Marx había señalado que muchos desarrollos de las fuerzas productivas ocurren primero en el terreno de la guerra y se generalizan después a la economía civil.

Las dos guerras mundiales fueron subproducto del capitalismo industrial contemporáneo: la puesta en marcha de medios de destrucción masivos, el involucramiento de las grandes masas, la aplicación de los últimos desarrollos de la ciencia y la técnica a la producción industrial y a las estrategias de combate (Traverso).

Esto dio lugar a toda la variedad imaginable en materia de guerra de posiciones y de maniobra: con cambios de frente permanentes y de magnitud, con la aparición de la aviación, los medios acorazados, los submarinos, la guerra química y nuclear y un largo etcétera[2].

Como conclusión, cabe volver a recordar lo señalado por Trotsky a partir de su experiencia en la guerra civil: no hay que atarse rígidamente a ninguna de las formas de la lucha: la ofensiva y la defensa son características que dependen de las circunstancias. Y, en su generalidad, la experiencia de la guerra ha consagrado la vigencia de las enseñanzas de Clausewitz, que merecen un estudio profundo por parte de la nueva generación militante.

La política como “guerra de clases”

Ahora bien, si la guerra es la continuidad de la política por otros medios, a esta fórmula le cabe cierta reversibilidad: “Si la guerra puede ser definida como la continuidad de la política por otros medios, [la política] deviene, recíprocamente, la continuidad de la guerra fuera de sus límites por sus propios medios. Ella también es un arte del tiempo quebrado, de la coyuntura, del momento propicio para arribar a tiempo ‘al centro de la ocasión” (Bensaïd, La política como arte estratégico).

claus.jpgDe ahí que muchos de los conceptos de la guerra se vean aplicados a la política, ya que ésta es, como la guerra, un campo para hacer valer determinadas relaciones de fuerza. Sin duda, las relaciones de fuerza políticas se hacen valer mediante un complejo de relaciones mayor y más rico que el de la violencia desnuda, pero en el fondo en el terreno político también se trata de vencer la resistencia del oponente.

En todo caso, la política como arte ofrece más pliegues, sutilezas y complejidades que la guerra, como señalaría Trotsky, que agregaba que la guerra (y ni hablar cuando se trata de la guerra civil, su forma más cruenta), debe ser peleada ajustándose a sus propias leyes, so pena de sucumbir: “Clausewitz se opone a las concepciones absolutistas de la guerra [que la veían como una suerte de ceremonia y de juego] y enfatiza el ‘elemento brutal’ que toda guerra contiene” (Vega, ídem).

De allí que se pueda definir a la política (metafóricamente) como continuidad de la “guerra” que cotidianamente se sustancia entre las clases sociales explotada y explotadora. Así, la política es una manifestación de la guerra de clases que recorre la realidad social bajo la explotación capitalista. Esta figura puede ayudar a apreciar la densidad de lo que está en juego, superando la mirada a veces ingenua de las nuevas generaciones.

Nada de esto significa que tengamos una concepción militarista de las cosas. Todo lo contrario: el militarismo es una concepción reduccionista que pierde de vista el espesor de la política revolucionaria, y que deja de lado a las grandes masas, reemplazadas por la técnica y el herramental de guerra, a la hora de los eventos históricos.

Es característico del militarismo hacer primar la guerra sobre la política, algo común tanto a las políticas de las potencias imperialistas como a las formaciones guerrilleras pequeño-burguesas de los años 70: perdían de vista a las grandes masas como actores y protagonistas de la historia.

51P0TJuOCUL._SX329_BO1,204,203,200_.jpgTal era la posición del general alemán de la I Guerra Mundial, Erich von Ludendorff, autor de la obra La guerra total (1935), donde criticaba a Clausewitz desde una posición reduccionista que ponía en el centro de las determinaciones a la categoría de “guerra total”, a la que independizaba de la política negando el concepto clausewitziano de “guerra absoluta”, que necesariamente se ve limitado por las determinaciones políticas.

A su modo de ver De la guerra era “el resultado de una evolución histórica hoy anacrónica y desde todo punto de vista sobrepasada” (Darío de Benedetti, ídem).

Para Ludendorff y los teóricos del nazismo, lo “originario” era el “estado de guerra permanente”; la política, solamente uno de sus instrumentos. De ahí que se considerara la paz simplemente como “un momento transitorio entre dos guerras”.

En esa apelación a la “guerra total” las masas, el Volk, eran vistas como un instrumento pasivo: pura carne de cañón en la contienda: “Ludendorff olvida el factor humano, las fuerzas morales según Clausewitz, como factor decisivo de toda movilización (…) [apela a] un verdadero proceso de cosificación, que permite una total disposición de medios para su alcance” (de Benedetti, ídem).

Pero lo cierto es lo contrario: si la guerra no es más que la continuidad de la política por medios violentos, es la segunda la que fija los objetivos de la primera: “En el siglo XVIII aún predominaba la concepción primitiva según la cual la guerra es algo independiente, sin vinculación alguna con la política, e, inclusive, se concebía la guerra como lo primario, considerando la política más bien como un medio de la guerra; tal es el caso de un estadista y jefe de campo como fue el rey Federico II de Prusia. Y en lo que se refiere a los epígonos del militarismo alemán, los Ludendorff y Hitler, con su concepción de la ‘guerra total’, simplemente invirtieron la teoría de Clausewitz en su contrario antagónico” (AAVV, Clausewitz en el pensamiento marxista).

Con esta suerte de “analogía” entre la política y la guerra lo que buscamos es dar cuenta de la íntima conflictividad de la acción política; superar toda visión ingenua o parlamentarista de la misma. La política es un terreno de disputa excluyente donde se afirman los intereses de la burguesía o de la clase obrera. No hay conciliación posible entre las clases en sentido último; esto le confiere todos los rasgos de guerra implacable a la lucha política.

La política revolucionaria, no la reformista u electoralista, tiene esa base material: la oposición irreconciliable entre las clases, como destacara Lenin. Lo que no obsta para que los revolucionarios tengamos la obligación de utilizar la palestra parlamentaria, hacer concesiones y pactar compromisos.

Pero la utilización del parlamento, o el uso de las maniobras, debe estar presidida por una concepción clara acerca de ese carácter irreconciliable de los intereses de clase, so pena de una visión edulcorada de la política, emparentada no con las experiencias de las grandes revoluciones históricas, sino con los tiempos posmodernos y “destilados” de la democracia burguesa y el “fin de la historia” que, como señalara Bensaïd, pretenden reducir a cero la idea misma de estrategia.

Tafel_Landwehr_1813.jpg

Crítica del militarismo

El criterio principista de tipo estratégico que preside al marxismo revolucionario es que todas las tácticas y estrategias deben estar al servicio de la autodeterminación revolucionaria de la clase obrera, de su emancipación. Sobre la base de las lecciones del siglo XX, debe ser condenado el sustituismo social de la clase obrera como estrategia y método para lograr los objetivos emancipatorios del proletariado.

El sustituismo como estrategia, simplemente, no es admisible para los socialistas revolucionarios. Toda la experiencia del siglo XX atestigua que si no está presente la clase obrera, su vanguardia, sus organismos de lucha y poder, sus programas y partidos, si no es la clase obrera con sus organizaciones la que toma el poder, la revolución no puede progresar de manera socialista: queda congelada en el estadio de la estatización de los medios de producción, lo que, a la postre, no sirve a los objetivos de la acumulación socialista sino de la burocracia.

Un ejemplo vivido por los bolcheviques a comienzos de 1920 fue la respuesta al ataque desde Polonia decidida por el dictador Pilsudsky en el marco de la guerra civil, ataque que desató una contraofensiva del Ejército Rojo que atravesó la frontera rusa y llegó hasta Varsovia. Durante unas semanas dominó el entusiasmo que “desde arriba”, militarmente, se podía extender la revolución. Uno de los principales actores de este empuje fue el talentoso y joven general Tujachevsky (asesinado por Stalin en las purgas de los años 30[3]).

Esta acción fue explotada por la dictadura polaca de Pilsudsky como “un avasallamiento de los derechos nacionales polacos”, y no logró ganar el favor de las masas obreras y mucho menos campesinas, por lo que terminó en un redondo fracaso.

trotsky_gettyimages-3230044_b.jpg

Trotsky, que con buen tino se había opuesto a la misma[4], sacó la conclusión que una intervención militar en un país extranjero desde un Estado obrero, puede ser un punto de apoyo secundario y/o auxiliar en un proceso revolucionario, nunca la herramienta fundamental: “En la gran guerra de clases actual la intervención militar desde afuera puede cumplir un papel concomitante, cooperativo, secundario. La intervención militar puede acelerar el desenlace y hacer más fácil la victoria, pero sólo cuando las condiciones sociales y la conciencia política están maduras para la revolución. La intervención militar tiene el mismo efecto que los fórceps de un médico; si se usan en el momento indicado, pueden acortar los dolores del parto, pero si se usan en forma prematura, simplemente provocarán un aborto” (en E. Wollenberg, El Ejército Rojo, p. 103).

De ahí que toda la política, la estrategia y las tácticas de los revolucionarios deban estar al servicio de la organización, politización y elevación de la clase obrera a clase dominante; que no sea admisible su sustitución a la hora de la revolución social por otras capas explotadas y oprimidas  aparatos políticos y/o militares ajenos a la clase obrera misma (otra cosa son las alianzas de clases explotadas y oprimidas imprescindibles para tal empresa).

El criterio de la autodeterminación y centralidad de la clase obrera en la revolución social, es un principio innegociable. Y no sólo es un principio: hace a la estrategia misma de los socialistas revolucionarios en su acción.

Otra cosa es que las relaciones entre masas, partidos y vanguardia sean complejas, no admitan mecanicismos. Habitualmente los factores activos son la amplia vanguardia y las corrientes políticas, mientras que las grandes masas se mantienen pasivas y sólo entran en liza cuando se producen grandes conmociones, algo que, como decía Trotsky, era signo inequívoco de toda verdadera revolución.

Ocurre una inevitable dialéctica de sectores adelantados y atrasados en el seno de la clase obrera a la hora de la acción política; no se debe buscar el “mínimo común denominador” adaptándose a los sectores atrasados sino, por el contrario, ganar la confianza de los sectores más avanzados para empujar juntos a los más atrasados.

Incluso más: puede haber circunstancias de descenso en las luchas del proletariado y el partido -más aún si está en el poder- verse obligado a ser una suerte de nexo o “puente” entre el momento actual de pasividad y un eventual resurgimiento de las luchas en un período próximo. No tendrá otra alternativa que “sustituir”, transitoriamente, la acción de la clase obrera en defensa de sus intereses inmediatos e históricos.

AKG1569606.jpg

Algo de esto afirmaba Trotsky que le había ocurrido al bolchevismo a comienzos de los años 20, luego de que la clase obrera y las masas quedaran exhaustas a la salida de la guerra civil[5]. Pero el criterio es que aun “sustituyéndola”, se deben defender los intereses inmediatos e históricos de la clase obrera. Y esta “sustitución” sólo puede ser una situación transitoria impuesta por las circunstancias, so pena de transformarse en otra cosa[6].

Ya la teorización del sustituismo social de la clase obrera en la revolución socialista pone las cosas en otro plano: es una justificación de la acción de una dirección burocrática y/o pequeñoburguesa que, si bien puede terminar yendo más lejos de lo que ella preveía en el camino del anticapitalismo, nunca podrá sustituir a la clase obrera al frente del poder. Porque esto amenaza que se terminen imponiendo los intereses de una burocracia y no los de la clase obrera (como ocurrió en el siglo XX).

Quebrar el movimiento inercial  

De lo anterior se desprende otra cuestión: la apelación a los métodos de lucha de la clase obrera en contra del terrorismo individual o de las minorías que empuñan las armas en “representación” del conjunto de los explotados y oprimidos.

En el siglo pasado han habido muchas experiencias: el caso de las formaciones guerrilleras latinoamericanas, y del propio Che Guevara, que excluían por definición los métodos de lucha de masas en beneficio de los “cojones”: una “herramienta central” de la revolución, porque la clase obrera estaba, supuestamente, “aburguesada”…

Un caso similar fue el del PCCh bajo Mao. La pelea contra el sustituismo social de la clase obrera tiene que ver con que los revolucionarios no “inventamos nada”: no creamos artificialmente los métodos de pelea y los organismos de lucha y poder. Más bien ocurre lo contrario: buscamos hacer consciente su acción, generalizar esas experiencias e incorporarlas al acervo de enseñanzas de la clase obrera.

1141003431.jpgEsta era una preocupación característica de Rosa Luxemburgo, que insistía en la necesidad de aprender de la experiencia real de la clase obrera, contra el conservadurismo pedante y de aparato de la vieja socialdemocracia.

Vale destacar también la ubicación de Lenin frente al surgimiento de los soviets en 1905. Los “bolcheviques de comité”, demasiado habituados a prácticas sectarias y conservadoras, se negaban a entrar en el Soviet de Petrogrado porque éste “no se declaraba bolchevique”… Lenin insistía que la orientación debía ser “Soviets y partido”, no contraponer de manera pedante y ultimatista, unos y otros.

Sobre la cuestión del armamento popular rechazamos las formaciones militares que actúan en sustitución de la clase obrera, así como el terrorismo individual, y por las mismas razones. Pero debemos dejar a salvo no sólo la formación de ejércitos revolucionarios como el Ejército Rojo, evidentemente, también experiencias como la formación de milicias obreras y populares o las dependientes de las organizaciones revolucionarias.

Este último fue el caso del POUM y los anarquistas en la Guerra Civil española, más allá del centrismo u oportunismo de su política. Y podrían darse circunstancias similares en el futuro que puedan ser englobadas bajo la orientación del armamento popular.

Agreguemos algo más vinculado a la guerra de guerrillas. En Latinoamérica, en la década del 70, las formaciones foquistas o guerrilleras, rurales o urbanas, reemplazaban con sus “acciones” la lucha política revolucionaria (las acciones de masas y la construcción de partidos de la clase obrera).

Sin embargo, este rechazo a la guerra de guerrillas como estrategia política, no significa descartarla como táctica militar. Si es verdad que se trata de un método de lucha habitualmente vinculado a sectores provenientes del campesinado (o de sectores más o menos “desclasados”), bajo condiciones extremas de ocupación militar del país por fuerzas imperialistas, no se debe descartar la eventualidad de poner en pie formaciones de este tipo íntimamente vinculadas a la clase trabajadora. Esto con un carácter de fuerza auxiliar similar a una suerte de milicia obrera, y siempre subordinada al método de lucha principal, que es la lucha de masas[7].

Pasemos ahora a las alianzas de clases y la hegemonía que debe alcanzar la clase obrera a la hora de la revolución. Si la centralidad social en la revolución corresponde a la clase obrera, ésta debe tender puentes hacia el resto de los sectores explotados y oprimidos.

Para que la revolución triunfe, debe transformarse en una abrumadora mayoría social. Y esto se logra cuando la clase obrera logra elevarse a los intereses generales y a tomar en sus manos las necesidades de los demás sectores explotados y oprimidos.

Es aquí donde el concepto de alianza de clases explotadas y oprimidas se transforma en uno análogo: hegemonía. La hegemonía de la clase obrera a la hora de la revolución socialista corresponde al convencimiento de los sectores más atrasados, de las capas medias, del campesinado, de que la salida a la crisis de la sociedad ya no puede provenir de la mano de la burguesía, sino solamente del proletariado.

2930402253.jpgEste problema es clásico a toda gran revolución. Si la Revolución Francesa de 1789 logró triunfar es porque desde su centro excluyente, París, logró arrastrar tras de sí al resto del país. Algo que no consiguió la Comuna de París cien años después, lo que determinó su derrota. El mismo déficit tuvo el levantamiento espartaquista de enero de 1919 en Alemania, derrotado a sangre y fuego porque el interior campesino y pequeño-burgués no logró ser arrastrado. Multitudinarias movilizaciones ocurrían en Berlín enfervorizando a sus dirigentes (sobre todo a Karl Liebknecht; Rosa era consciente de que se iba al desastre), mientras que en el interior el ejército alemán se iba reforzando y fortaleciendo con el apoyo del campesinado y demás sectores conservadores.

Precisamente en esa apreciación fundaba Lenin la ciencia y el arte de la insurrección: en una previsión que debía responder a un análisis lo más científico posible, pero también a elementos intuitivos, acerca de qué pasaría una vez que el proletariado se levantase en las ciudades.

El proletariado se pone de pie y toma el poder en la ciudad capital. Pero la clave de la insurrección, y la revolución misma, reside en si logra arrastrar activamente o, al menos, logra un apoyo pasivo, tácito, o incluso la “neutralidad amistosa” (Trotsky), de las otras clases explotadas y oprimidas en el interior.

De ahí que alianza de clases, hegemonía y ciencia y arte de la insurrección tengan un punto de encuentro en el logro de la mayoría social de la clase obrera a la hora de la toma del poder.

Una apreciación que requerirá de todas las capacidades de la organización revolucionaria en el momento decisivo, y que es la mayor prueba a la que se puede ver sometido un partido digno de tal nombre: “Todas estas cartas [se refiere a las cartas de Lenin a finales de septiembre y comienzos de octubre de 1917], donde cada frase estaba forjada sobre el yunque de la revolución, presentan un interés excepcional para caracterizar a Lenin y apreciar el momento. Las inspira el sentimiento de indignación contra la actitud fatalista, expectante, socialdemócrata, menchevique hacia la revolución, que era considerada como una especie de película sin fin. Si en general el tiempo es un factor importante de la política, su importancia se centuplica en la época de guerra y de revolución. No es seguro que se pueda hacer mañana lo que puede hacerse hoy (…).

“Pero tomar el poder supone modificar el curso de la historia. ¿Es posible que tamaño acontecimiento deba depender de un intervalo de veinticuatro horas? Claro que sí. Cuando se trata de la insurrección armada, los acontecimientos no se miden por el kilómetro de la política, sino por el metro de la guerra. Dejar pasar algunas semanas, algunos días; a veces un solo día sin más, equivale, en ciertas condiciones, a la rendición de la revolución, a la capitulación (…).

“Desde el momento en que el partido empuja a los trabajadores por la vía de la insurrección, debe extraer de su acto todas las consecuencias necesarias. À la guerre comme à la guerre [en la guerra como en la guerra]. Bajo sus condiciones, más que en ninguna otra parte, no se pueden tolerar las vacilaciones y las demoras. Todos los plazos son cortos. Al perder tiempo, aunque no sea más que por unas horas, se le devuelve a las clases dirigentes algo de confianza en sí mismas y se les quita a los insurrectos una parte de su seguridad, pues esta confianza, esta seguridad, determina la correlación de fuerzas que decide el resultado de la insurrección” (Trotsky, Lecciones de Octubre).

El partido como factor decisivo de las relaciones de fuerzas    

Veremos someramente ahora el problema del partido como factor organizador permanente y como factor esencial de la insurrección.

Derbent-Volskrieg.jpgEl partido no agrupa a los trabajadores por su condición de tales sino solamente aquéllos que han avanzado a la comprensión de que la solución a los problemas pasa por la revolución socialista: el partido agrupa a los revolucionarios y no a los trabajadores en general (cuya abrumadora mayoría es de ideología burguesa, reformista y no revolucionaria).

Quienes se agrupan bajo un mismo programa constituyen un partido. Pero si sus militantes no construyen el partido, no lo construye nadie: el partido es lo menos objetivo y espontáneo que hay respecto de las formas de la organización obrera: requiere de un esfuerzo consciente y adicional, con leyes propias.

Un problema muy importante es el de la combinación de los intereses del movimiento en general y los del partido en particular a la hora de la intervención política. Un error habitual es sacrificar unos en el altar de los otros.

En el caso de las tendencias más burocráticas, lo que se sacrifica son los intereses generales de los trabajadores en función de los del propio aparato. Ya Marx sostenía que los comunistas sólo se caracterizaban por ser los que, en cada caso, hacían valer los intereses generales del movimiento.

Pero es también una concepción falsa creer que los intereses del partido nunca valen; que sólo vale el interés “general”, sacrificando ingenuamente los intereses del propio partido.

Así se hace imposible construir el partido, cuya mecánica de construcción es la menos “natural”. Precisamente por esto hay que aprender a sostener ambos intereses: las condiciones generales de la lucha y la construcción del partido a partir de ellas. Además, hay que saber evaluar qué interés es el que está en juego en cada caso. Nunca se puede correr detrás de toda lucha, de todo acontecimiento; no hay partido que lo pueda hacer.

Pero cuando se trata de organizaciones de vanguardia, hay que elegir. Hay que jerarquizar considerando el peso del hecho objetivo, y también las posibilidades del partido de responder y construirse en esa experiencia.

Esto significa que no siempre la agenda partidaria se ordena alrededor de la agenda “objetiva” de la realidad. Hay que considerar la agenda de la propia organización a la hora de construirse, sus propias iniciativas: “La observación más importante que se puede hacer a propósito de todo análisis concreto de la correlación de fuerzas es que estos análisis no pueden ni deben ser análisis en sí mismos (a menos que se escriba un capítulo de historia del pasado), sino que sólo adquieren significado si sirven para justificar una actividad práctica, una iniciativa de voluntad. Muestran cuáles son los puntos de menor resistencia donde puede aplicarse con mayor fruto la fuerza de la voluntad; sugieren las operaciones tácticas inmediatas; indican cómo se puede plantear mejor una campaña de agitación política, qué lenguaje entenderán mejor las multitudes, etc. El elemento decisivo de toda situación es la fuerza permanentemente organizada y dispuesta desde hace tiempo, que se puede hacer avanzar cuando se considera que una situación es favorable (y sólo es favorable en la medida en que esta fuerza existe y está llena de ardor combativo); por esto, la tarea esencial es la de procurar sistemática y pacientemente formar, desarrollar, hacer cada vez más homogénea, más compacta y más consciente de sí misma esta fuerza [es decir, el partido]” (Gramsci, La política y el Estado moderno, pp. 116-7).

En síntesis: el análisis de la correlación de fuerzas sería “muerto”, pedante, pasivo, si no tomara en consideración que el partido es, debe ser, un factor fundamental en dicha correlación de fuerzas; el factor que puede terminar inclinando la balanza; el que munido de una política correcta, y apoyándose en un determinado “paralelogramo de fuerzas”, puede mover montañas.

La figura del “paralelogramo de fuerzas” nos fue sugerida por la carta de Engels a José Bloch (1890). Engels colocaba dicho paralelogramo como subproducto de determinaciones puramente “objetivas”. Sin embargo, a la cabeza de dicho “paralelogramo” se puede y debe colocar el partido para irrumpir en la historia: romper la inercia con el plus “subjetivo” que añade el partido: “(…) la historia se hace de tal modo, que el resultado final siempre deriva de los conflictos entre muchas voluntades individuales, cada una de las cuales, a su vez, es lo que es por efecto de una multitud de condiciones especiales de vida; son, pues, innumerables fuerzas que se entrecruzan las unas con las otras, un grupo infinito de paralelogramos de fuerzas, de las que surge una resultante -el acontecimiento histórico- (…)”.

El partido que sepa colocarse a la cabeza de dicho “paralelogramo”, que haya logrado construirse, que sepa hacer pesar fuerzas materiales en dicho punto decisivo, podrá mover montañas: romper el círculo infernal del “eterno retorno de lo mismo” abriendo una nueva historia.

Bibliografía

AAVV, Clausewitz en el pensamiento marxista, Pasado y Presente.

Darío de Benedetti, La teoría militar entre la Kriegsideologie y el Modernismo Reaccionario, Cuadernos de Marte, mayo 2010.

Daniel Bensaïd, La politique comme art stratégique, Archives personnelles, Âout 2007, npa2009.org.

  1. Engels, Carta a José Bloch, Londres 21/2 de septiembre de 1890, Marxist Internet Archive.

Antonio Gramsci, La política y el Estado moderno, Planeta-Agostini, Barcelona, 1985.

León Trotsky, Lecciones de Octubre, Kislovodsk, 15 de septiembre de 1924, Marxist Internet Archive.

José Fernández Vega, Carl von Clausewitz. Guerra, política y filosofía, Editorial Almagesto, Buenos Aires, 1993.

  1. Wollenberg, El Ejército Rojo.

[1] De Lenin se conoce un cuaderno de comentarios sobre De la Guerra; Trotsky “mechó” muchas de sus reflexiones estratégicas con referencias al teórico alemán, amén de tener sus propios Escritos militares.

[2] Ver nuestro texto Causas y consecuencias del triunfo de la URSS sobre el nazismo, en www.socialismo-o-barbarie.org.

[3] Tujachevsky estaba enrolado en la fallida “teoría de la ofensiva”. Trotsky estaba en contra de la misma: la condenaba por rígida, militarista y ultraizquierdista. Ver las Antinomias de Antonio Gramsci (un valioso texto del marxista inglés Perry Anderson de los años 70).

[4] En este caso se dio una sorprendente “inversión” (en relación a los errores) bajo el poder bolchevique: en general, fue Lenin el que dio en la tecla en las disputas con Trotsky. Pero en este caso las cosas se dieron invertidas: mientras Lenin se arremolinaba entusiasta sobre los mapas siguiendo la ofensiva, Trotsky manifestaba sus reservas.

[5] Ver al respecto nuestros textos sobre el bolchevismo en el poder.

[6] Ver al respecto El último combate de Lenin de Moshe Lewin.

[7] En todo caso, el siglo XX ha dado lugar a un sinnúmero de ricas experiencias militares en el terreno de la revolución, las que requieren de un estudio ulterior.

 

mercredi, 28 février 2018

Henri Lefebvre et le procès marxiste de la vie quotidienne

HLspace.jpg

Henri Lefebvre et le procès marxiste de la vie quotidienne

par Nicolas Bonnal

Ex; http://www.dedefensa.org

Henri-Lefebvre-1971-1.jpgTout le monde a oublié Henri Lefebvre et je pensais que finalement il vaut mieux être diabolisé, dans ce pays de Javert, de flics de la pensée, qu’oublié. Tous les bons penseurs, de gauche ou marxistes, sont oubliés quand les réactionnaires, fascistes, antisémites, nazis sont constamment rappelés à notre bonne vindicte. Se rappeler comment on parle de Céline, Barrès, Maurras ces jours-ci… même quand ils disent la même chose qu’Henri Lefebvre ou Karl Marx (oui je sais, cent millions de morts communistes, ce n’est pas comme le capitalisme, les démocraties ou les Américains qui n’ont jamais tué personne, Dresde et Hiroshima étant transmuées en couveuses par la doxa historique).

Un peu de Philippe Muray pour comprendre tout cela – cet oubli ou cette diabolisation de tout le monde :

« Ce magma, pour avoir encore une ombre de définition, ne peut plus compter que sur ses ennemis, mais il est obligé de les inventer, tant la terreur naturelle qu’il répand autour de lui a rapidement anéanti toute opposition comme toute mémoire. »

J’avais découvert Henri Lefebvre grâce à Guy Debord qui, lui, est diabolisé pour théorie de la conspiration maintenant ! Sociologue et philosophe, membre du PCF, Lefebvre a attaqué la vie quotidienne, la vie ordinaire après la Guerre, premier marxiste-communiste à prendre en compte la médiocrité de la vie moderne à la même époque qu’Henri de man (je sais, merci, fasciste-nazi-réac-technocrate vichyste etc.). Le plus fort est que Lefebvre attaque le modèle soviétique qui débouchait à la même époque sur le même style de vie un peu nul, les grands ensembles, le métro-boulot-dodo, le cinoche…

J’ai déjà évoqué Henri de Man dans mon livre sur la Fin de l’Histoire. Un bel extrait bien guénonien sans le vouloir :

« Tous les habitants de ces maisons particulières écoutaient en même temps la même retransmission. Je fus pris de cette angoisse … Aujourd'hui ce sont les informations qui jouent ce rôle par la manière dont elles sont choisies et présentées, par la répétition constante des mêmes formules et surtout par la force suggestive concentrée dans les titres et les manchettes. »

HL-manifdiff.jpgC’est dans l’ère des masses. On peut rajouter ce peu affriolant passage :

« L'expression sociologique de cette vérité est le sentiment de nullité qui s'empare de l'homme d'aujourd'hui lorsqu'il comprend quelle est sa solitude, son abandon, son impuissance en présence des forces anonymes qui poussent l'énorme machine sociale vers un but inconnu. Déracinés, déshumanisés, dispersés, les hommes de notre époque se trouvent, comme la terre dans l'univers copernicien, arrachés à leur axe et, de ce fait, privés de leur équilibre. »

Lefebvre dans un livre parfois ennuyeux et vieilli hélas (le jargon marxiste des sixties…) dénonce aussi cet avènement guénonien de l’homme du règne de la quantité. Il se moque des réactionnaires, mais il est bien obligé de penser comme eux (et eux ne seront pas oubliés, lui oui !) :

« Le pittoresque disparaît avec une rapidité qui n’alimente que trop bien les déclarations et les lamentations des réactionnaires…. »

Ici deux remarques, Herr professeur : un, le « pittoresque » comme vous dites c’est la réalité du paysage ancestral, traditionnel saboté, pollué et remplacé, ou recyclé en cuvette pour touristes sous forme de « vieille ville ». Deux, les chrétiens révoltés qui dénoncent cette involution dès le dix-neuvième ne sont pas des réacs sociologiques, pas plus que William Morris ou Chesterton ensuite.

Henri Lefebvre poursuit, cette fois magnifiquement :

« Là où les peuples se libèrent convulsivement des vieilles oppressions (nota : les oppressions coloniales n’étaient pas vieilles et furent remplacées par des oppressions bureaucratiques ou staliniennes pires encore, lisez Jacob Burckhardt), ils sacrifient certaines formes de vie qui eurent longtemps grandeur – et beauté. »

Et là il enfonce le clou (visitez les villes industrielles marxistes pour vous en convaincre :

« Les pays attardés qui avancent produisent la laideur, la platitude, la médiocrité comme un progrès. Et les pays avancés qui ont connu toutes les grandeurs de l’histoire produisent la platitude comme une inévitable prolifération. »

HL-revUrb.jpgLes pays comme la Chine qui ont renoncé au marxisme orthodoxe aujourd’hui avec un milliard de masques sur la gueule, de l’eau polluée pour 200 millions de personnes et des tours à n’en plus finir à vingt mille du mètre. Cherchez alors le progrès depuis Marco Polo…

Matérialiste, Lefebvre évoque ensuite l’appauvrissement du quotidien, la fin des fêtes païennes-folkloriques (j’ai évoqué ce curieux retour du refoulé dans mon livre sur le folklore slave et le cinéma soviétique) et il regrette même son église enracinée d’antan (s’il voyait aujourd’hui ce que Bergoglio et les conciliaires en ont fait…). C’est la fameuse apostrophe de Lefebvre à son Eglise :

« Eglise, sainte Eglise, après avoir échappé à ton emprise, pendant longtemps je me suis demandé d’où te venait ta puissance. »

Eh oui cette magie des siècles enracinés eut la vie dure.

Je vous laisse découvrir cet auteur et ce livre car je n’ai pas la force d’en écrire plus ; lui non plus n’est pas arrivé avec le panier à solutions rempli…

Penseur du crépuscule marxiste, Lefebvre m’envoûte comme son église parfois. Comme disait le penseur grec marxiste Kostas Papaioannou, « le capitalisme c’est l’exploitation de l’homme par l’homme, et le marxisme le contraire » ! De quoi relire une petite révolte contre le monde moderne !

La révolution ? Le grand chambardement ? Sous les pavés la plage privatisée par les collègues de Cohn-Bendit ? Je laisserai conclure Henri Lefebvre :

« En 1917 comme en 1789, les révolutionnaires crurent entrer de plain-pied dans une autre monde, entièrement nouveau. Ils passaient du despotisme à la liberté, du capitalisme au communisme. A leur signal la vie allait changer comme un décor de théâtre. Aujourd’hui, nous savons que la vie n’est jamais simple. »

Et comme je disais que nos cathos réacs étaient les plus forts :

HL-VQ.jpg« La révolution… crée le genre d’homme qui lui sont nécessaires, elle développe cette race nouvelle, la nourrit d'abord en secret dans son sein, puis la produit au grand jour à mesure qu'elle prend des forces, la pousse, la case, la protège, lui assure la victoire sur tous les autres types sociaux. L'homme impersonnel, l’homme en soi, dont rêvaient les idéologues de 1789, est venu au monde : il se multiplie sous nos yeux, il n'y en aura bientôt plus d’autre ; c'est le rond-de-cuir incolore, juste assez instruit pour être « philosophe », juste assez actif pour être intrigant, bon à tout, parce que partout on peut obéir à un mot d'ordre, toucher un traitement et ne rien faire – fonctionnaire du gouvernement officiel - ou mieux, esclave du gouvernement officieux, de cette immense administration secrète qui a peut-être plus d'agents et noircit plus de paperasses que l'autre. »

C’était l’appel de Cochin, le vrai…

Sources

Henri Lefebvre – critique de la vie quotidienne, éditions de l’Arche

Henri de Man – L’ère des masses

René Guénon – la crise du monde moderne ; le règne de la quantité et les signes des temps

Chesterton – Orthodoxie ; hérétiques (Gutenberg.org)

Cochin – La révolution et la libre pensée

Nicolas Bonnal – Chroniques sur la fin de l’histoire ; le cinéma soviétique et le folklore slave ; Céline, le pacifiste enragé

Julius Evola – révolte contre le monde moderne

samedi, 24 février 2018

LA DICTATURE DE L'UTILITARISME

panopticon_isla_de_pinos_isla_de_la_juventud.jpg

LA DICTATURE DE L'UTILITARISME

Visitez le site du Cercle de l’Aréopage : http://cercleareopage.org
Conférence au Cercle de l'Aréopage: LA DICTATURE DE L'UTILITARISME
Par Yvan Blot
 
Retrouvez les évènements du Cercle : http://cercleareopage.org/conf%C3%A9r...
Lisez La Relance de la Tradition: Notes sur la situation de l'Église