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mercredi, 20 avril 2022

Werner Sombart et la bourgeoisie

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Werner Sombart et la bourgeoisie

par Joakim Andersen

Source: https://motpol.nu/oskorei/2022/04/08/werner-sombart-och-bourgeoisien/

Werner Sombart (1863-1941) était en son temps l'un des géants des sciences sociales, aussi bien considéré que son ami Max Weber. Entre autres choses, Sombart a inventé le terme de capitalisme tardif et a développé la perspective que Schumpeter nommera plus tard la destruction créatrice. Jeune homme, il est influencé par Marx et est décrit par Engels comme le seul professeur qui comprenait vraiment le Capital, se situant à l'interface entre la sociologie et l'histoire économique. Le Sombart de la maturité s'est en partie écarté de Marx et est parvenu, à bien des égards, à des conclusions similaires à celles de Spengler. Spengler parlait du socialisme prussien et Sombart du socialisme allemand, les similitudes entre leurs deux approches étaient par ailleurs considérables.

La social-démocratie allemande dans laquelle Sombart évoluait en tant que jeune homme s'est développée dans une direction intéressante à l'époque de la Première Guerre mondiale; nous avons déjà évoqué des figures telles que Plenge, Lensch, Woltmann et Niekisch. Ces sociaux-démocrates peuvent être considérés comme une partie importante du mouvement parti de ce qu'Alexandre Douguine appelle la "deuxième théorie politique" pour aboutir à la troisième, alors que la social-démocratie dans son ensemble n'a pas franchi cette étape complètement. Une expression quintessentielle de la perspective sombartienne pendant la Première Guerre mondiale se trouve dans son "livre de guerre" Händler und Helden, récemment traduit en anglais sous le titre Traders and Heroes. Nous reviendrons sur la description que fait Sombart des commerçants et des guerriers et sur ses réflexions sur "la perfide Albion"; aujourd'hui, nous nous concentrerons plutôt sur la parenté entre Sombart et Klages. 

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Sombart s'est intéressé à l'histoire du capitalisme dans des ouvrages puissants tels que Der moderne Kapitalismus. Les conditions anthropologiques du capitalisme, le bourgeois en tant que type social et psychologique, étaient intéressantes dans ce contexte. Elle était au centre de l'ouvrage Der Bourgeois de 1911, parfois traduit par "La quintessence du capitalisme". C'est une œuvre fascinante à bien des égards. Sombart note que l'amour de l'or et des taxes est très ancien, mais qu'au cours d'un processus historique, la "cupidité de l'or" a été remplacée par "l'amour de l'argent" en Europe. Cette rage de l'argent a d'abord touché le clergé et les Juifs, selon Sombart, mais a fini par imprégner une grande partie de la société. La rage du lucre, cependant, n'est pas la même chose que le capitalisme; l'argent pourrait être acquis par tout, de la violence et de la magie à la fonction publique et à la fraude. Mais "au fil du temps, l'amour de l'argent s'est uni à l'esprit d'entreprise, et l'esprit capitaliste en a résulté".

Sombart décrit ce qu'il appelle des entreprises, des projets conçus pour faire du profit. Tout projet réussi de ce type nécessite trois personnalités, même si elles peuvent être réunies dans une seule tête: le conquérant, l'organisateur et le commerçant. Quatre types de projets ont été courants dans l'histoire, Sombart dépeint ici les projets guerriers, les systèmes féodaux, l'État et l'Église. Progressivement, de tels projets ont pu être remplis de l'esprit du capitalisme. Sombart évoque ici, entre autres, les libres commerçants, les propriétaires fonciers et les spéculateurs.

Il essaie d'identifier le bourgeois comme un type. Ceci est d'autant plus significatif que "l'esprit d'entreprise et l'esprit bourgeois... lorsqu'ils sont réunis ont généré l'esprit capitaliste". Sombart montre les similitudes entre le grand-père de Léonard et Benjamin Franklin, significatives malgré la distance dans le temps, et dépeint les idéaux bourgeois (résumés dans les mots "l'esprit bourgeois est composé de calcul, de politique prudente, de raison et d'économie"). Il les dissèque en détail, abordant, entre autres, la tenue de livres, l'économie de temps, l'honnêteté en affaires, l'épargne et la diligence. Le fait que même les personnes riches soient économes et diligentes représentait une révolution psychologique. Sombart décrit également le grand changement psychologique qui s'est opéré entre les premiers capitalistes et les capitalistes modernes tardifs, et qui n'a pas joué en faveur de ces derniers.

4576840.jpgSombart devient vraiment passionnant lorsqu'il explore les conditions biologiques de la bourgeoisie. Il note que toutes les expressions de l'esprit capitaliste sont enracinées dans des tendances héritées. Ce sont des qualités qui ne sont pas très courantes, et ce sont deux tendances distinctes. Sombart écrit ici que "deux âmes habitent la poitrine de chaque bourgeois complet: l'âme du croque-mort et l'âme du bourgeois respectable. L'union des deux produit l'esprit capitaliste". L'entrepreneur, "le croque-mort", doit être intelligent, sage et imaginatif. Il, ou elle, doit avoir de la vitalité, une certaine nature robuste et une âme pas trop sensible. C'est dans son portrait de la "nature bourgeoise" que Sombart se rapproche de Klages. Il observe que les gens sont soit donneurs, soit preneurs, marqués par la luxuriance ou l'avarice. Le type "seigneurial" que Sombart associe aux aristocrates plus âgés a des idéaux subjectifs et personnels, le type bourgeois est plutôt objectif et matériel. "Les anciens avaient des valeurs personnelles, nous, les bourgeois, des valeurs matérielles", écrit Sombart, "l'un vit, voit, pense; l'autre organise, forme, éduque". L'affinité avec la perspective biocentrique de Klages, avec son "Eros cosmogonique", devient plus évidente lorsque Sombart aborde l'aspect érotique du contraste.

Fascinante est la tentative de Sombart de relier les conditions biologiques du capitalisme à différents peuples. Il constate que les peuples européens présentent tous ces conditions, mais pas au même degré. Les peuples les moins prédisposés à l'esprit du capitalisme étaient les Celtes et certains peuples germaniques (comme les Goths). Les peuples ayant les meilleures prédispositions, Sombart les divise en peuples héroïques et peuples marchands (comparez marchands et guerriers). Parmi les héroïques, on compte les Romains et plusieurs tribus germaniques. Les commerçants comprenaient des Florentins, des Juifs, des Frisons et des Écossais (pas les Highlanders, d'influence plus celtique). Sombart rappelle la perspective bioculturelle de la Nouvelle Droite lorsqu'il explique comment la sélection au fil des générations a pu affecter la quantité de "gènes capitalistes" dans différents groupes. Comme Klages, il soupçonne que "les éléments non capitalistes ont d'abord été éliminés"; dans plusieurs sociétés, même les strates les plus héroïques ont disparu avec le temps. Que certains types de personnalité soient désavantagés par certaines formes de société ne devrait pas être une hypothèse tout à fait invraisemblable; beaucoup ont remarqué que les types de patients et certaines formes d'originalité sont triés dans le "capitalisme tardif" de notre époque.

Dans l'ensemble, Der Bourgeois est une œuvre fascinante. Sombart aborde tous les sujets, de l'État moderne en tant qu'enfant des souverains italiens du 15e siècle (comparez Burckhardt) au lien entre le capitalisme et les non-conformistes religieux et les religions en général (l'analyse de Sombart du rôle des Juifs dans l'histoire du capitalisme est peut-être l'une de ses théories les plus controversées aujourd'hui). Il aborde le rôle central joué par les migrants dans le développement de l'esprit du capitalisme, "le nouveau venu n'est pas non plus mû par un sentiment, son environnement ne signifie rien pour lui". L'analyse de Sombart sur le déclin du capitalisme se fonde sur son caractère de synthèse de traits héroïques, mercenaires et bourgeois. Au fil du temps, l'élément héroïque a diminué, "l'esprit d'entreprise (et avec lui naturellement l'esprit capitaliste) meurt lorsque les hommes sombrent dans l'aisance confortable d'une vie dépendante des dividendes". À cela s'ajoutent l'élément bureaucratique croissant et le déclin de la procréation. Comme Schumpeter, Sombart soupçonne que le capitalisme vit dangereusement, et que cela est dû à une bourgeoisie bureaucratisée et détendue qui a perdu ses traits héroïques. Quelle que soit l'appréciation que l'on porte sur le capitalisme historique, il mérite d'être connu.

Pourquoi le Français va réélire Macron à hauteur de 60% (écrit avec Edouard Drumont)

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Pourquoi le Français va réélire Macron à hauteur de 60% (écrit avec Edouard Drumont)

Nicolas Bonnal

On va citer son testament à Edouard Drumont. Notre journaliste-penseur, maître de Bernanos, honni par nos flics de la pensée, ne se fait plus d’illusion sur ses compatriotes petit-bourgeois et laïcards apprivoisés à l’orée des années 1890; il observe que l’électorat parisien déjà adore réélire de banals conseillers municipaux ripoux:

« …Les Parisiens ont réélu la plupart des conseillers municipaux convaincus d'avoir trempé dans ces malpropretés. Ils les ont réélus très librement, avec des urnes très surveillées par des représentants de tous les partis,  par des gens de comités experts dans toutes les roueries électorales et qu'on ne met pas facilement dedans. »

Et de chercher une explication: l’ataraxie. Mieux même, la prostration.

« Tout vient se briser contre une indifférence absolue, contre une sorte d'ataraxie, d'impassibilité générale, qui n'est point l'ataraxie stoïque dont parle Proudhon, mais plutôt une inertie maladive, une prostration sur laquelle rien n'agit. »

Le cœur ne bouge plus trop :

« Les physiologistes connaissent bien ces phases passagères où le cœur est inexcitable. L'organe où l'humanité puise sa flamme a soudain des moments de repos, d'hébétude, de torpeur après lesquels il reprend son fonctionnement… A l'heure actuelle, malheureusement, ce n'est plus par saccades, c'est toujours que le cœur ne répond plus  aux excitants. Et comme ce bourdon, qui rythme nos artères, nos expansions et nos violences, dépend lui-même du cerveau, c'est toujours au cerveau qu'il faut chercher la cause des défaillances et des sommeils. »

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Et Drumont de s’interroger :

« Comment s'étonner alors que la lassitude saisisse ces entendements secoués, non plus la saine lassitude du travail, où se puisent des forces nouvelles, mais la dépression atonique où l’on a l’illusion de la vigueur ? »

Le monde moderne est là et son absence de réaction (sauf pour aller se vacciner ou pester contre le fascisme ou la Russie – toujours par conformisme et conditionnement):

« La Mort gagne le monde par l’insensibilité, par l’anesthésie. Cette anesthésie sociale, que l’on appelle l’ataraxie, envahit les masses, comme sa sœur envahit les êtres. Elle débute d'ici, de là, par plaques qui se rejoignent et couvrent bientôt le corps tout entier. Certaines régions intermédiaires jouissent d'une fausse excitation que l’on retrouve avant tous les désastres. Celui qu'attend la congestion bâtit des projets bienheureux. »

Le temps est à l’optimisme paresseux:

«Nous autres, au bord du gouffre, nous affirmons le Progrès indéfini, une ère joyeuse et libre. Au fond, nous ne croyons même pas à Demain, et nous nous en occupons très peu.»

Nous sommes entourés de frivoles en effet:

« Les frivoles rient jusqu'à la mort; les esprits moins légers, ceux qui réfléchissent sur les spectacles que la vie déroule devant eux et qui s'irritent de ce qu'elle leur cache, ne peuvent se défendre de la tristesse qui se dégage de tout... Cor sapientium ubi tristitîa...»

On chasse le pessimisme (pas de grand remplacement, pas de gouvernance mondiale, pas de dictature sanitaire, pas de complots…):

« Les Français modernes n'ont rien de tout cela. Les troublantes théories de Schopenhauer comme les belles désespérances de Tolstoï, vastes et désolées comme des steppes, les laissent parfaitement indifférents. Intellectuellement, c'est trop fort pour eux, trop étendu d'horizon, trop intense de pensée; cela les  obligerait à trop de méditation ».

Et on se contente de peu intellectuellement et moralement et spirituellement :

« La conception que les Français contemporains ont de la vie n'a d'analogue dans aucun temps, elle est tout à fait particulière à notre époque. Notons tout d'abord que si la vie moderne s'est compliquée au point de vue des faux besoins et des raffinements du bien-être, elle s'est singulièrement simplifiée au point de vue moral; comme une espèce de Peau de chagrin, elle se rétrécit tous les jours sous ce rapport. »

Le monde moderne a créé son homme en France, pays de la Révolution (voyez nos textes sur Cochin) et du bourgeois (Taine) :

« Le régime moderne a créé, on peut le dire, un type d'être spécial que l'on serait tenté d'appeler le contribuable; car, en réalité, si on demandait à beaucoup d'hommes de ce temps pourquoi ils sont sur la terre, ils seraient bien embarrassés de répondre et finiraient  par vous dire:

— Ma foi, pour faire notre service militaire, pour acquitter nos contributions et pour payer notre terme ».

S’ensuit une belle comparaison animale :

« Les Français sont admirablement dressés à toute cette organisation fiscale; ils sont comme les méharis qui s'agenouillent pour qu'on puisse les charger plus facilement, ou comme les chevaux de renfort d'omnibus qui, leur besogne faite, vont tout seuls rejoindre leur place au bas de la montée et attendent là qu'on les attelle de nouveau… »

Sources :

Drumont, Testament, III, 1, p.171-172 (archive.org).

https://archive.org/details/letestamentduna01drumgoog

https://www.revuemethode.org/m101828.html

https://strategika.fr/2020/07/19/augustin-cochin-et-le-pi...

https://strategika.fr/2021/08/01/pass-sanitaire-biopoliti...

https://reseauinternational.net/terreur-republicaine-et-d...

 

mardi, 19 avril 2022

La Russie, les Etats-Unis et la Chine dans une conjoncture de conflit. Quels sont les objectifs prioritaires de la "nouvelle guerre froide"?

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La Russie, les Etats-Unis et la Chine dans une conjoncture de conflit. Quels sont les objectifs prioritaires de la "nouvelle guerre froide"?
 
Politique internationale ou Macht-Welt-Politik

 

Puisque la politique internationale a été tenue depuis toujours comme politique de puissance, Macht-Politik dans la culture allemande et Power politics dans le monde anglo-saxon, la conversion idéaliste des Etats en porteurs d'avenirs pacifiés n'a concerné que l'Europe post-moderne, héritière du droit des gens, des empires universels du passé et du cosmopolitisme des élites intellectuelles des XVIIIème  et XIXème siècles.

La morphologie triadique du système multipolaire actuel distingue toujours entre objectifs historiques et objectifs éternels et accorde à la géopolitique et à dialectique de l'antagonisme la tâche de distinguer entre types de paix et types de guerres. En fonction des rôles joués par les grands acteurs historiques nous passerons en revue  - et à des seules finalités de connaissance,-  les différents types de paix, car ils déterminent non seulement les types de guerre, mais également les stratégies générales des acteurs majeurs du système.

Pour l'Europe l’Idéal-type de paix dans un système planétaire est une paix d'équilibre entre l'Amérique et la Russie, puisque le continent est situé à la jonction du Rimland et du Heartland, entre la terre centrale et la grande île du monde ; pour la Russie une paix d'empire, fédératrice de plusieurs peuples, de plusieurs terres et de multiples confessions religieuses. Une paix d'Hégémonie est celle qui convient au choix de l'Amérique, vouée, par sa mission universelle, à exercer son pouvoir sur les trois Océans, Indien, Pacifique et Atlantique, en respectant la souveraineté des pays de la bordure des terres. Pour l'Empire du milieu, le mandat du ciel situe le meilleur type de paix entre une architecture régionale équilibrée et une vision planétaire à long terme, déterminée en partie par sa position géopolitique et en partie par la rivalité qui découle de sa culture et du système mondial des forces. Quant à la crise ukrainienne et à son issue, la superposition de trois types d'hostilité et donc d'insécurité alimentera un conflit de longue durée. S'y entremêlent de manière contrastée:

- Une hostilité/insécurité de la Russie vis-à-vis l'Otan et des Etats-Unis.
- Une inimitié de l'Union européenne vis-à-vis de la Russie. Une ambiguïté de la Chine quant à la pression américaine sur les sanctions occidentales, concernant l'économie russe et ses conséquences et ces incertitudes influent sur le dilemme de fond de notre époque, "affrontement ou condominium" sino-américain, auquel est subordonnée la paix mondiale.

Dans cette conjoncture de changement, le continent européen, sans hauteur symbolique et historique devient  le reflet du type d'ordre qui règne dans le monde selon  la formule d'une "Nouvelle guerre froide", contestée par certains (G. H. Soutou).

Les objectifs prioritaires de la "Guerre Froide" de l'âge de la bipolarité. Une approche comparée

Le conflit entre les deux blocs de l'époque de la bipolarité n'était qu'un aspect du processus de transformation et de passage du capitalisme au socialisme, qui se voulait révolutionnaire. Il conjuguait tous les aspects de la vie collective des peuples et des nations et excluait des accords durables comme celui d'une coexistence pacifique entre les deux systèmes. Tout devait se passer suivant le primat du conflit et guère de la paix, selon les lois inexorables et objectives de l'histoire.  

51qBxbAKe9L.jpgCependant l’objectif stratégique de l'Occident, selon un courant de pensée américain offensif, représenté par Robert Strausz-Hupé, William R. Kintner et Stefan T. Possony  et exposé dans le livre "A forward strategy for America", devait exiger comme "objectif prioritaire, la préservation et la consolidation de notre système politique, plutôt que le maintien de la paix". Selon ce courant, la survie du régime politique des Etats-Unis, n'autorisait "d'autre choix qu'une stratégie à la Caton": "Carthago delenda est !". La coexistence de deux empires rivaux était conçue comme une cause d'instabilité profonde, qui devait déboucher fatalement sur une guerre inexpiable. La situation multipolaire d'aujourd'hui est-elle comparable à celle de l'époque? Change-t-elle sur le fond, à l'essence de la rivalité et à la structure de l'hostilité déclarée? La précarité apportée à la sécurité de la Russie est-elle le premier pas d'une stratégie générale d'élimination d'un adversaire, pour qu'il ne s'allie au troisième, en vue d'un guerre totale, difficile à gagner ?

Le triple rôle de la Russie, national, eurasien et mondial

La rivalité est-elle compatible avec la paix, indépendamment du rôle historique d'un acteur de l'importance de la Russie ? Cet immense pays remplit aujourd'hui un triple rôle, national ou de régime, régional ou eurasien, et mondial ou de système. En fonction du premier, il constitue un modèle spécifique d'autocratie, porteuse d'une Weltanchauung anti-occidentale, qui doit résoudre en permanence le problème de la légitimité du pouvoir et du consensus des opinions; en rapport au deuxième, un facteur de stabilité et d'équilibre en Eurasie, convoité par le grand Turc. Par référence au système planétaire, un type d'ordre, de meneur du jeu et de leadership, qui apparaît indispensable contre l'entreprise multipolaire et désagrégeante de l'hégémonie américaine. Sur sa face européenne la menace d'une alliance germano-russe ferait de Moscou une candidate moderne à l'empire universel, ôtant la liberté des pays d'Europe centrale; sur l'échiquier de la jonction du Rimland planétaire et du Heartand continental, la Turquie et l'Iran se disputeraient le rôle d'alliés privilégiés pour un condominium, excluant l'hégémon de la terre centrale et agrégeant l'Inde à une entreprise de long terme. Et, dans la profondeur des espaces et du temps, vers les bordures des deux océans, indien et pacifique, la Russie se joindrait à l'Empire du milieu pour donner vie à une civilisation renouvelée et non décadente s'imposant sur la multiplicité des centres asiatiques de décision. Ce rôle de la Russie est à la fois ambivalent, entrainant et dangereux, pour l'Est et pour l’Ouest. Pour l'ensemble des menaces actuelles, politiques, idéologiques et militaires, la stratégie de Caton, définie dans les années soixante, demeure-t-elle toujours valable. "Carthago delenda est!". L'Occident et l'Otan recommandent l'asphyxie de l’économie russe, en pratiquant au même temps la stratégie de la provocation, de l'usure et de l'escalade militaire.

Se faire justice soi même

Puisque la théorie des relations internationales part de l'idée que chaque unité politique a le droit, en dernier recours, de se faire justice d'elle -même, l'enjeu de la décision finale sur la paix et la guerre est défini par le Chef de l'Etat- Chef de guerre. Comment les opérations militaires engagées sur le terrain des combats, peuvent-elles être reconduite à la logique de la négociation et du compromis? Et, faute d'univocité et d'objectifs communs, qui peut jouer, à une échelle diplomatique, le rôle du médiateur et de l’arbitre?

Qui peut juger enfin de la pertinence et satisfaction des objectifs atteints? La stratégie du Blitz initial imputée au Chef d'Etat-Chef de guerre du pouvoir perturbateur part du principe de la primauté du système interétatique, ce qui exclut la prédominance explicative du facteur économique. En effet la guerre d'Ukraine est une guerre politique et pas une guerre personnelle, d'homme à homme, soumise à l'idée d’une punition ou d'un crime.

Le système interétatique est un système dans lequel s'intègrent les Etats, dont aucun n'est soumis à un pouvoir central de contrôle et qui s'organise autour du principe de survie. En ce sens le recours à des fictions comme celles de la paix par la morale ou de la paix par le droit, voilent les relations d'inimitié, idéologiques ou géopolitiques. A ce propos, le changement de stratégie opérationnelle pratiquée par l'Etat major russe, après l'attaque initiale et le siège des métropoles, a été de consolider l'emprise sur la mer d'Azov et de lier plus étroitement la Russie à la Crimée, soustrayant celle-ci et l'intégralité de la Mer Noire, au contrôle de l'Otan. Par ailleurs et à propos de la conduite de terrain, tactique ou stratégique, le principe de solidarité des Etats-nucléaires face au risque paroxystique de l'atome, se fonde sur le principe du concept "d'acteur rationnel" et exclut toute notion d'effets pervers, par vice mental ou par égarement de la raison, qui constitue un des sujets de prédilection de la communication psycho-politique occidentale.

Inimitié et hostilité

Or, l'enjeu du conflit ukrainien, de nature géopolitique et sécuritaire, oppose deux frères-ennemis, qui ont beaucoup de choses en commun (ethnie, religion, histoire) et appartiennent à une même zone de civilisation, se réclamant des mêmes principes, poursuivis alternativement par le dialogue ou par le combat. Le dialogue a donné lieu à l'intérieur de l'aire culturelle de l'ancienne Byzance à l'antithèse classique de l'Etat et de l'Eglise sous la forme du césaro-papisme, come subordination du pouvoir idéologico-religieux au pouvoir étatique et à l'hybridation bicéphale de la souveraineté encore effective sous le régime soviétique. Le combat a marqué la division de l'Ukraine en deux zones culturelles, lors de la deuxième guerre mondiale, exploitées intensément par les médias mainstream et par leurs efforts de propagande.

Persuasion et subversion à l'heure du conflit ukrainien

L'effort constamment entretenu pour dresser les opinions contre leurs élites, (oligarques à l'Est, et anti-souverainistes à l'Ouest), désigne un mode d'action qui a pour but une conversion des esprits au profit de la cause défendue par l'un ou l'autre des deux belligérants. En l'absence d'un objectif commun d'ordre et de stabilité, visant à délimiter des zones d'influence légitimes, la mobilisation mondiale autour du conflit, acquiert la signification d'un choix entre globalisme occidental et souverainisme oriental (Russie et Chine) et cette signification a pour origine l'hétérogénéité des intérêts et des cultures des deux camps, démocratique en Occident et autocratique en Eurasie. L'objet de dispute demeure cependant la sécurité, et, en amont, la préservation d'une certaine conception de l'aire civilisationnelle, de la société et de ses mœurs. La propagande forcée du temps de la bipolarité est devenue guerre de l'information, brouillard de Fake news et théâtre de cyberwars. L'un et l'autre camps considèrent cette propagande comme une entreprise de subversion et tiennent la sienne propre pour persuasion.

Homogénéité et hétérogénéité des deux camps

Du point de vue des régimes constitutionnels pluralistes, l'hétérogénéité des structures politiques et sociales des pays de l'Ouest, favorise la liberté d'expression et la compétition des idées, tandis que l'homogénéité organisée, entretenue par les régimes autocratiques, de Russie ou de Chine, décourage la critique ou l'opposition et la propagande apparaît  comme l'une des armes de l'arsenal politique du pouvoir en place. Les campagnes multiples contre les maux de la société post-moderne, par lesquels les opposants aux régimes occidentaux, s'efforcent de gagner des adeptes, sont amplifiés par une militance plus au moins déguisée, mais présentés comme des infiltrations intellectuelles du camp d'en face. Cette infiltration ne réussit pas à éliminer l'engagement du camp adverse, se situant entre le pouvoir et le peuple.

Dans le cadre du conflit ukrainien ces infiltrations sont emphatisées ou suscitées de toute pièce pour dénigrer le régime adverse. Ainsi les trois voix de la Triade (Chine, Occident et Russie), sont différemment audibles, car elles sont différemment ostracisées et  l'adhésion intellectuelle et morale aux régimes du Heartland (Chine, Russie et Iran), ou du Rimland (Amérique, Europe, Grande Bretagne et Indopacifique ), est exaspérée et poussée aux extrêmes par la dialectique de la subversion et de la persuasion des deux camps, qui se rejettent réciproquement l'accusation d'agresseurs, de dangers publics et de criminels de guerre. Chacun des deux justifie son combat au nom de deux conceptions de la géopolitique actuelle qui oppose l'eurasisme au globalisme et donc le souverainisme du premier à l'individualisme démocratique du deuxième. Or, si , dans ce dialogue péremptoire et confus, la persuasion  consiste à convaincre, la subversion et le langage de la passion attisent la flamme du mécontentement et incitent à la rébellion et à la révolte. Cependant la subversion suppose l'existence d'agents dormants et de structures opérationnelles, aptes à la transformation du mécontentement en rébellion et de la rébellion en révolte, puis, de celle-ci en révolution, de couleur ou pas et, à l'extrême en coup d'Etat de Palais  A ce point, ce qui est décisif, ce sont la prise de pouvoir et le changement de régime, effectués grâce aux alliances militaires, supportées de l'extérieur par le pouvoir en place.

Les Etats-Unis et le "Regime change"

Une des finalités de l'action politique contemporaine est de mettre en œuvre la démocratie, de dénigrer le pouvoir autoritaire et d'assurer la stabilité du pouvoir. Une dégradation des conditions de vie ou un affaiblissement du soutien conscient et intentionnel du gouvernement peuvent inverser très rapidement les bases sociales ou le socle idéologique du pouvoir établi. Pour rappel, la politique américaine du "regime change" a été le cadre théorique de l'interventionnisme militaire dans plusieurs pays jugés faibles, au nom des intérêts stratégiques des Etats-Unis et de politiques d'incitation à des réformes politiques. Or, dans le cadre de sa visite à Varsovie du 27 mars dernier, le Président J. Biden, n'a pas hésité à proclamer, dès son arrivée, que le départ de Poutine du pouvoir, n'était pas un but de guerre pour les Etats-Unis, pendant que la presse anglaise formulait l'hypothèse qu'un insuccès militaire de l'armée russe condamnerait le Chef du Kremlin à quitter le pouvoir dans les deux ans. Ainsi dans une campagne orchestrée autour des résultats obtenus par l'invasion de l'Ukraine, de sa surprise stratégique  et de son enlisement présumé, l'ex-oligarque et opposant russe Mikhail Khodorkovski, après 10 ans de prison, purgés en Sibérie pour "fraude fiscale", en appelle à l'histoire, pour prophétiser une chute prochaine de Poutine, comme une constante de l'histoire russe, en cas d'échec politique ou militaire. La guerre prochaine,- dit-il - dans une interview accordée au Figaro du 29 mars dernier, contre la Pologne ou un pays balte, scellera une prise de risque supplémentaire, marquant un décalage entre la vision des occidentaux et celle de Poutine.

A titre de rappel la politique d'Obama/Bush de "regime change", recherchant une ligne directrice pour résoudre le dilemme entre démocratie et stabilité, ou de l'actuelle administration démocrate pour articuler une stratégie globale et définir une doctrine pour le paix en Europe et dans le monde, a été  de construire un ordre international pacificateur, en incitant les régimes en place à des réformes politiques et socio-économiques. Cependant, en partant de perspectives historiques antagonistes, les objectifs opposés de l'Occident et des puissances de l'Eurasie et du Pacifique, peuvent-ils trouver une conciliation dans leurs intérêts et stratégies divergentes? Ou bien, en revanche, ne contribuent-ils pas à frayer la voie des seules puissances montantes, visant à définir un nouvel ordre international plus adapté à l'époque de la multipolarité et, à l'aide de celui-ci, à définir un système post-wesphalien plus stable et une conception plus conséquente de la démocratie?

Bruxelles le 31 mars 2022.

Werner Sombart et le socialisme allemand

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Werner Sombart et le socialisme allemand

par Joakim Andersen

Source: https://motpol.nu/oskorei/2022/04/17/werner-sombart-och-den-tyska-socialismen/

Werner Sombart (1863-1941) était l'un des principaux sociologues de son temps. Comme sa source d'inspiration Marx, il s'intéressait à l'histoire économique et à l'économie politique. Le jeune Sombart était considéré comme radical, devenu plus âgé, il suivait le mouvement patriotique de la social-démocratie allemande et écrivit, entre autres, son "livre de guerre" Händler und Helden (récemment traduit en anglais sous le titre Traders and Heroes). Il y décrit les différences entre l'ennemi anglo-saxon à l'esprit commercial et l'Allemagne à l'esprit héroïque. Cette perspective trouve un écho dans l'ouvrage tardif Le socialisme allemand de 1934, dans lequel Sombart décrit l'ordre social qu'il juge le mieux adapté à la patrie héroïque. C'est un ouvrage fascinant ; entre autres, Le socialisme allemand offre l'occasion de comparer la pensée de Sombart avec celles de Marx, de Spengler et du national-socialisme.

imawssocalls.jpgSombart et Marx

Le jeune Sombart avait été fortement influencé par Marx, Engels l'avait même décrit comme le seul professeur capable de comprendre le Capital. Le Sombart que nous rencontrons dans Le Socialisme allemand était plus sceptique quant à ce qu'il avait nommé le socialisme prolétarien. Entre autres choses, il a critiqué l'accent mis par Marx sur le prolétariat en particulier et a plutôt mis en avant la classe moyenne. Ceci au point que son socialisme allemand "peut, par conséquent, être désigné (et marqué comme hérésie) comme un socialisme de classe moyenne. Le socialisme allemand adopte cette position, pleinement conscient de ses implications, parce qu'il considère que les intérêts de l'individu, ainsi que ceux de l'État, sont mieux gardés par les classes moyennes". Comparez Sam Francis et l'accent populiste de notre époque placé sur les "gens ordinaires". Soit dit en passant, le prolétariat marxien signifiait souvent, d'un point de vue politique, les couches les plus éduquées, de sorte que Marx et Sombart se recoupaient partiellement ici.

3a3498a1841e61cee6d10b40ae69ceeca7aacc5e0e0c240f1cd6dd5cc12c71bf.jpgSombart a également écrit que "Karl Marx a fondamentalement tort de dire que les classes et les guerres de classes ont toujours existé. La vérité est qu'il n'y en avait pas avant notre époque. Ce n'est qu'à l'ère économique que les intérêts économiques sont déterminants dans la formation des structures de groupe". La critique décisive de Sombart à l'égard du marxisme est liée au "Livre de la guerre", il écrit en 1934 que "le commerçant et le héros: ils forment les deux grands contrastes; ils forment également les deux pôles de toute orientation humaine sur terre. Le commerçant, comme nous l'avons vu, entre dans la vie avec la question suivante: Que peut me donner la vie? Il veut obtenir pour lui-même le plus grand gain possible pour le moins d'efforts possible... le héros rencontre la vie avec la question: que puis-je donner à la vie? Il veut donner, se prodiguer sans retour... on peut aussi dire que la conception marchande est centrée sur les intérêts, l'héroïque sur une idée... et on peut donc conclure qu'il existe aussi, selon l'esprit qui règne, un socialisme héroïque et un socialisme marchand". Pour Sombart, le socialisme prolétarien marxien était un "socialisme commerçant", plus intéressé par la félicité que par le devoir. Il a également critiqué des éléments du marxisme tels que son égalitarisme, son ressentiment, son athéisme, son attitude envers l'État, etc. Il a décrit le socialisme prolétarien et le libéralisme comme étant similaires : "Le socialisme allemand n'est pas doctrinaire. Le doctrinarisme est une maladie maligne qui, avec la montée du libéralisme, a attaqué l'esprit de l'humanité européenne (et aussi de l'humanité allemande, dont nous pourrions montrer qu'elle est particulièrement réceptive à cette maladie), puis a atteint son véritable développement dans le monde idéal du socialisme prolétarien". En même temps, il a décrit le socialisme prolétarien comme une réaction compréhensible à l'ère économique.

Comme Evola, le Sombart mature s'est retourné contre "l'âge économique"; comme un Evola plus âgé, il a également soutenu que la théorie matérialiste de l'histoire "est, en fait, valable pour l'âge passé, mais seulement pour le passé". Sombart a vu l'ère économique comme une profonde décadence, "seul celui qui croit au pouvoir du diable peut comprendre ce qui s'est passé en Europe occidentale et en Amérique au cours des cent cinquante dernières années". Les Occidentaux avaient fermé la porte au monde de l'au-delà, et le résultat était un désespoir, un libéralisme et un matérialisme croissants. La communauté de construction, la guilde, le foyer et d'autres associations historiques ont été sapés et remplacés par l'individualisme. La critique sociale de Sombart reste ici précieuse, identifiant les aspects clés du déclin. Il a notamment écrit que l'ère économique se caractérisait par "l'acceptation exclusive de la valeur monétaire. Toutes les autres valeurs sont, par un processus raffiné de désapprobation, dépourvues de leur pouvoir d'imposer la reconnaissance, ou elles servent simplement de moyen d'atteindre la richesse". C'est là qu'il s'est déplacé dans une zone frontière fructueuse entre Marx et le conservatisme culturel, en contraste avec l'École de Francfort, et en combinaison avec un idéal humain plus différencié et héroïque. Sombart a également analysé ce qu'il a appelé l'impérialisme capitaliste financier, écrivant que "jamais auparavant il n'y a eu une situation dans laquelle les hommes d'affaires ont gouverné, soit personnellement, soit par le biais de leur organisation ou de ses organes."

Contre le socialisme marxien, Sombart voulait opposer un socialisme allemand, il mentionnait ici des prédécesseurs nationaux comme Rodbertus, Lassalle etc. Étant donné sa définition plus large du socialisme en tant que "normalité sociale", il pourrait également inclure des personnes comme von Stein et Goethe parmi les socialistes allemands. Il cite ici Robert Ley, "Qu'est-ce que le socialisme ? Rien d'autre que la camaraderie". Sombart a écrit que "par socialisme allemand, on peut comprendre les tendances du socialisme qui correspondent à l'esprit allemand, qu'elles soient représentées par des Allemands ou des non-allemands. Auquel cas on pourrait éventuellement considérer comme allemand un socialisme qui est relatif, unifié (national), volontaire, profane et héroïque."

61Eo4hJRTLL.jpgSombart et Spengler

Sombart rappelait Spengler à bien des égards, notamment parce qu'ils ont tous deux développé leurs propres socialismes et les ont opposés à l'Angleterre. Spengler a développé un socialisme prussien et a décrit les différences entre l'Anglais et le Prussien. Sombart a nommé son alternative le socialisme allemand mais a également développé une distinction entre les guerriers anglais et les guerriers allemands. Tous deux ont également adopté une position partagée sur le projet national-socialiste, notamment par le biais d'une théorie de la race partiellement différente. Sombart et Spengler ont également été de fructueux critiques culturels et sociaux. Sombart a décrit, entre autres, comment l'ère économique avait infantilisé les peuples par sa fascination pour le grand, le rapide et le nouveau. Comme Spengler, il n'était pas impressionné par la "démocratie", écrivant que "la démocratie à l'ère économique ne signifie rien d'autre que la légalisation de la vente de chevaux". Tous deux associaient le "socialisme prolétarien" à la mentalité de crémier, Spengler exprimant que "le marxisme est le capitalisme de la classe ouvrière".

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En tant que critique culturel, Sombart était souvent aussi perspicace que Spengler. Il a identifié le stress constant de l'ère économique et a cité Goethe: "ce travail non perturbé, innocent, somnambulique, par lequel seul de grandes choses peuvent être réalisées, n'est plus possible". De même, il a décrit ce qu'a signifié la perte du lien avec la nature. Comme Spengler, Sombart s'est intéressé aux conséquences de la technologie moderne; sans devenir un primitiviste, il a pu constater que "l'élimination des attributs divins dans la pensée naturelle correspond à la déshumanisation dans la pensée technique" et que "la technique moderne est construite sur la précision et les hommes dans son application n'ont pas affaire à des âmes humaines mais à des objets morts: esclaves-bœufs-chevaux-chauffeurs."

Sombart, par contre, découvrait un caractère religieux plus marqué dans le socialisme allemand. Cela lui a permis d'écrire que la nation était centrale mais qu'elle n'était pas Dieu. Pour Sombart, cependant, la nation et l'État faisaient clairement partie du plan de Dieu pour l'humanité. Il a décrit l'esprit populaire de la manière suivante: "manifestement, il existe une telle chose que l'"idée" populaire, comme il existe une idée de la personne individuelle: une entité éternelle, une monade, une entéléchie. Cette idée contient l'essence que Dieu a imprimée à cette personne et à ce peuple et qui est posée pour la personne individuelle, comme pour le peuple individuel, pour être réalisée sur terre... chez l'individu, nous l'appelons la personnalité ; chez le peuple, Volksgeist ou le génie d'un peuple. Ce génie va devant le peuple comme une nuée le jour, comme une colonne de feu la nuit. En réalité, il ne s'agit toujours que d'un objectif, d'une tâche."

418AHrh0ZAL.jpgSombart s'est également inscrit en faux contre la vision pessimiste de l'histoire de Spengler, arguant que le déclin n'était pas une évidence. Chaque nouvelle génération avait la possibilité de restaurer la vitalité de la nation. Il apparaît également comme un peu plus socialiste au sens contemporain du terme que Spengler, bien qu'il ne veuille pas dire qu'un État fort doit nécessairement être aussi grand. En général, le raisonnement de Sombart sur l'État, la propriété privée, le marché etc. est mieux compris de manière dialectique, comme "both-and" plutôt que "either-or". Cela devient explicite dans ses réflexions sur la propriété germanique où il écrit que "le problème de la propriété n'est pas pour l'Allemagne un problème indépendant. L'alternative au sujet de laquelle une lutte si acharnée a été menée pendant des centaines d'années, et dans de nombreux endroits est encore menée aujourd'hui - propriété privée ou propriété commune - n'existe pas pour l'Allemagne. Considérée à juste titre, ce n'est pas du tout une question de "ou bien" mais seulement une question de "aussi bien que". La propriété privée et la propriété commune continueront d'exister côte à côte. À quoi il faut ajouter, bien sûr, que la propriété privée ne sera pas une possession illimitée, mais une possession limitée en droit, du moins en ce qui concerne la propriété des moyens de production et du sol". Sous le contrôle de l'État, il voulait voir, entre autres, les prêts bancaires, les industries importantes pour la défense et "toutes les entreprises à grande échelle qui tendent à s'étendre au-delà des limites appropriées d'une économie privée et qui ont déjà pris le caractère d'une institution publique".

Sombart et le national-socialisme

En 1934, le national-socialisme est encore une nouvelle puissance et il est difficile de prévoir sa pratique politique. Néanmoins, la relation de Sombart au mouvement semble originale. Il était capable d'en parler positivement en termes généraux et de faire le lien entre le socialisme national et le socialisme allemand; des similitudes existaient notamment dans les points de vue sur l'État et l'économie. En même temps, Hitler est pratiquement absent du livre; Sombart a probablement cité plus souvent Robert Ley du Deutsche Arbeitsfront. Il pourrait également écrire que l'homme moderne est souvent prisonnier d'idées fixes, énumérant parmi elles l'athéisme et le darwinisme ainsi que l'antisémitisme. Globalement, c'est dans la vision de la race et de la nation que les différences entre l'idéalisme de Sombart et l'idéologie nationale-socialiste sont les plus apparentes. Sombart s'intéressait davantage à ce qu'Evola décrivait comme la "race de l'esprit" et la "race de l'âme" qu'à la "race du corps", arguant que celles-ci ne se recouvrent pas complètement. Il a notamment écrit que "l'esprit allemand dans un Noir est tout aussi possible que l'esprit noir dans un Allemand. La seule chose que l'on puisse démontrer, c'est que les hommes à l'esprit allemand sont beaucoup plus nombreux parmi le peuple allemand que parmi le peuple noir, et l'inverse". Il a également fait valoir que de nombreux Juifs avaient un esprit allemand plutôt que juif. Il n'était pas un nordique mais soulignait la diversité des Allemands. Il y avait aussi un côté anticolonial chez Sombart, il prédisait dès 1934 que les peuples de couleur réagiraient au colonialisme et il décrivait la politique britannique d'anéantissement de l'industrie textile indienne comme un écrémage malveillant avec pour conséquence une misère massive.

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Il convient également de noter que Sombart a placé la nation et l'État au centre, décrivant la nation allemande comme un mélange de plusieurs influences raciales. De nombreuses nations, selon Sombart, sont composées de plusieurs peuples différents. Il écrit ici que "le peuple est terrestre, chthonique, maternel-matriarcal ; la nation, spirituelle, apollinienne, paternelle-patriarcale. Le germanisme (Deutschtum) est un pur esprit; la nationalité allemande, un esprit terrestre. Le peuple est aveugle ; la nation, voyante". On retrouve là Evola et Dugin. Quoi qu'il en soit, les réflexions de Sombart sur l'Allemand sont enrichissantes. Il décrit les Allemands comme un peuple actif, masculin et rural, marqué par la rigueur, l'objectivité et l'autoglorification. L'objectif du socialisme allemand était de réaliser leur potentiel pour être un peuple spirituel, actif et diversifié.

La vision de l'État de Sombart était liée à sa croyance en Dieu; il s'opposait vigoureusement à la vision libérale de l'État comme un simple outil pratique. Au lieu de cela, il a cité von Stein, "l'État n'est pas une association agricole ou de fabrique, mais son but est le développement religieux-moral, spirituel et corporatif; par son organisation, il doit former non seulement un peuple artistique et industrieux, mais aussi un peuple énergique, courageux, moral et spirituel". Il est intéressant de noter qu'il a défendu l'État de succession tout en adoptant une vision "historico-réaliste" de son émergence ("le concept de "succession" devrait toujours être politique, car ce n'est que dans ce sens qu'il est possible de penser rationnellement à une "structure de succession").

Dans l'ensemble, Sombart est toujours une source de connaissance intéressante, le socialisme allemand ne faisant pas exception. Il a été écrit à une époque de transition, où il n'était pas rare que la social-démocratie se transforme en national-socialisme et où les conséquences de diverses élections étaient encore enveloppées de brouillard, ce qui signifie que peu de lecteurs seront entièrement d'accord avec ses conclusions. Les analyses culturellement critiques de Sombart sur les effets de l'ère économique sur la culture et la société, ainsi que ses tentatives de décrire la geramnité spirituelle comme une alternative possible, devraient avoir une valeur durable. Quiconque a lu Traders and Heroes reconnaîtra son analyse de l'importance accordée par le monde moderne à la "commodité". Sombart lui a donné le nom de "comfortisme" et l'a lié à un déficit existentiel : "Le comfortisme n'est pas une forme structurelle externe de l'existence, mais un type et une manière définis d'évaluation des formes de vie. Elle n'est pas dans l'objet mais dans l'esprit, et, par conséquent, peut s'étendre aussi bien aux riches qu'aux pauvres... la nécessité, évoquée plus haut, de combler le vide créé dans l'âme matérialiste après chaque jouissance par une nouvelle jouissance, a conduit à la course-poursuite dans laquelle l'homme moderne passe sa vie". Des analyses similaires peuvent être faites à notre époque de "divertissement", de toute façon Sombart est souvent aussi précis dans sa critique culturelle que, disons, Adorno.

Ancestrale et révolutionnaire. La nouvelle Europe selon Guillaume Faye

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En français, l'article en hommage à Guillaume Faye paru le 16 avril 2022 dans le quotidien italien Il Giornale !

Ancestrale et révolutionnaire. La nouvelle Europe selon Guillaume Faye

Plus cité que lu, loin de la gauche et de la droite, l'auteur français Guillaume Faye a proposé des scénarios audacieux

Luigi Iannone

Source: https://www.ilgiornale.it/news/spettacoli/ancestrale-e-rivoluzionaria-nuova-europa-secondo-faye-2026856.html

Guillaume Faye (1949-2019), intellectuel excentrique, à la production magmatique et presque indéfinissable, est autant cité que peu lu, notamment en raison de la rareté des traductions italiennes. À l'exception du Système à tuer les peuples et Archéofuturisme, il y a très peu de choses à trouver. Adriano Scianca tente de combler cette lacune en rassemblant les essais, articles et interviews les plus significatifs de ces quarante dernières années dans Dei e potenza (Altaforte Edizioni, p. 290, euro 17).

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Deux livres de Faye traduits en italien et parus dans la collection "Sinergie" des Editions Barbarossa de Milan.

Bien que ses intérêts tournent autour de thèmes et de références issus du monde identitaire (critique de la société de consommation et de l'occidentalisme, nationalisme continental, révolution conservatrice, Nietzsche, mythe indo-européen, paganisme, question de la technologie), le premier tournant de Faye est sa rupture avec la nouvelle droite. Des divertissements ininterrompus l'ont même conduit à entrer dans le monde du show-business, en tant qu'animateur d'une émission de radio humoristique et, de son propre aveu, en tant qu'acteur dans un film porno. Une fois cette phase également passée, il a repris avec vigueur son activité de conférencier et d'écrivain jusqu'aux derniers mois de sa vie, marqués par un cancer.

faye.jpgLe Système à tuer les peuples, un livre publié en 1981, représente le mieux la partie destructive de sa pensée. Il cloue au pilori la société globale, ses représentations massives et unificatrices et l'idéologie égalitaire occidentale structurée comme un véritable système, bien que le récit général tente de nous dire autre chose : "L'opinion publique est l'alibi. Le Système l'utilise pour démontrer à quel point il est démocratique, comment il est basé sur le consensus et l'assentiment général". Sous couvert d'un cosmopolitisme tolérant, nous assisterions en fait à la destruction de toute spécificité et à l'affirmation d'une idéologie mondiale "qui arpente les couloirs des institutions internationales et s'exprime dans les programmes de tous les partis politiques importants de la planète".

Avec L'archéofuturisme, Faye fait un pas en avant et tente de trouver une issue. L'idée est de combiner les valeurs médiévales (archaïques), des concepts tels que la hiérarchie et la virilité, avec le progrès scientifique; les archétypes avec le prométhéisme technologique. Une telle démarche serait possible pour deux raisons que l'on peut déduire des pages mêmes de Dei e Potenza: la reconquête de l'Europe par un conflit aux proportions énormes qui devra impliquer tout le continent, et la renaissance de la figure du révolutionnaire.

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Selon Faye, la modernité touche à sa fin et avec elle ses fétiches libéraux et humanitaires. Notre époque ne s'achèverait pas avec la civilisation libérale dirigée par un État universel, le village planétaire prophétisé par MacLuhan, mais ouvrirait plutôt une phase où les peuples et les identités ethniques seraient en compétition: "Les peuples vainqueurs seront ceux qui resteront fidèles ou reviendront aux valeurs et aux réalités ancestrales - qui sont culturelles, éthiques, sociales et spirituelles - et qui, en même temps, domineront la technoscience. Le XXIe siècle sera le siècle où la civilisation européenne, à la fois prométhéenne et tragique, se métamorphosera ou se dirigera vers un déclin irrémédiable. Ce serait alors le moment de reprendre les anciennes valeurs, sans toutefois chercher à les réintroduire à la lettre, car elles ont été modifiées au cours des siècles, et cela pourrait se faire sous le double signe de Mars, le dieu de la guerre, et d'Héphaïstos, le dieu qui forge les épées, le seigneur de la technologie des feux chtoniens.

Et voici l'autre point. Pour Faye, l'idée de révolution, abandonnée par les intellectuels progressistes qui sont désormais réduits à des gardiens du pouvoir, ne serait même pas celle avancée par les intellectuels de droite dont les actions semblent toujours se terminer par des poses esthétiques. La figure du rebelle, plus ou moins sur le modèle de Dominique Venner, qui s'est suicidé dans la cathédrale Notre-Dame en 2013, leur semble inutile. Ce rebelle-là aspire à être une minorité, perdue dans le rêve littéraire, comblée par l'auto-exil et jamais prête à se battre. Des intellectuels comme Cioran, Debord ou Baudrillard (qu'il définit comme des "rebelles pessimistes"), ou comme Céline, Jean Mabire et Venner ("rebelles joyeux") reculeraient devant l'idée malsaine qu'ils n'ont qu'à semer.

006724613.jpgFaye les assimile à des simulateurs de dissidence, fonctionnels à un néo-totalitarisme qui a besoin de ces faux concurrents et les nourrit presque. C'est pourquoi il espère l'entrée en scène du révolutionnaire qui - contrairement au rebelle - considère les idées comme des moyens et non comme des fins, qui n'ont donc de véracité que si elles sont subordonnées à leur efficacité. Et sur le terrain, il n'identifie que deux projets révolutionnaires, tous deux archéo-futuristes mais incompatibles: celui des musulmans (le "partisan" sans frontières, pour citer Schmitt) qui vise la conquête planétaire et avec le même rôle que le révolutionnaire marxiste du 20ème siècle, et celui qui œuvre pour la reconquête européenne.

En fin de compte, même dans un cadre analytique riche en stimuli et en provocations, certains nœuds non résolus demeurent. Tout d'abord, on ne voit pas comment il est possible de concilier, dans l'ordinaire le plus banal de nos vies, des instances archétypales, des valeurs qui ont été dépassées et le prométhéisme de la civilisation technique. Deuxièmement, pourquoi une société globale et massifiée qui s'est abandonnée à la conformité devrait-elle soudainement se retourner ? Et enfin : d'où doit venir cette nouvelle figure de révolutionnaire ?

Unipolarité, bipolarité, multipolarité et la guerre d'Ukraine

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Unipolarité, bipolarité, multipolarité et la guerre d'Ukraine

Vers une multipolarité de plus en plus complexe: scénario pour l'avenir

Enric Ravello Barber

Source: https://www.enricravellobarber.eu/2022/04/unipolaridad-bipolaridad-multipolaridad.html#.Yl5zFNPP2Uk

Derrière la prétendue fin de l'histoire proclamée par le publiciste du Pentagone Francis Fukuyama, se cachait une aberration philosophique : sortir l'homme de son habitat, celui de l'Histoire, entendue comme son "faire-dans-le-monde", et ouvrir la porte au post-humanisme qui nous apparaît déjà aujourd'hui comme une réalité de fait. Cette entorse à l'histoire a signifié la mise en œuvre urbi et orbi de ce que les occupants successifs de la Maison Blanche, sans la moindre dissimulation, ont appelé le Nouvel Ordre Mondial - nous insistons sur le mot "Monde" - : c'est-à-dire l'unification du monde sous la direction des Etats-Unis, ou, en d'autres termes, un monde unipolaire, c'est-à-dire avec un seul centre de pouvoir : Washington.

Les erreurs stratégiques des administrations américaines successives, toujours sous inspiration néo-con unipolaire, ont donné à la Russie le temps nécessaire pour se reconstruire en tant que puissance militaire et la Chine a émergé comme une puissance mondiale de premier ordre, non seulement en tant que puissance militaire mais aussi en tant que puissance globale (économique, stratégique, industrielle, technologique et diplomatique).

La Chine est devenue le principal acteur de la deuxième vague de mondialisation. Ce n'était qu'une contradiction apparente pour une puissance communiste de prôner la réduction de tous les obstacles au commerce mondial, puisque la vente de ses produits manufacturés sur les marchés mondiaux était la principale cause de sa croissance en tant que puissance.

L'essor de la Chine annonce en quelque sorte la fin du rêve unipolaire des Etats-Unis et montre une nouvelle réalité bipolaire. Quelques décennies après la chute de l'URSS, le monde vit à nouveau la lutte pour l'hégémonie planétaire entre deux puissances: les États-Unis et la Chine.

La Russie, devenue le troisième acteur mondial, propose un pas en avant, une nouvelle correction au Nouvel Ordre Mondial de Washington: le monde multipolaire. La Russie constituerait un troisième pôle géopolitique, une situation qui se conjuguerait également avec l'émergence de puissances régionales qui fragmenteraient davantage le plan de domination mondiale de la Maison Blanche: la Turquie, l'Iran et l'Inde joueraient ce rôle.

Dans cette réalité, l'Europe, le non-sujet géopolitique par excellence, pourrait cependant jouer un rôle décisif - comme l'ont constaté certains de ses dirigeants. Dans ce contexte multipolaire, l'Europe devrait s'émanciper de sa soumission aux États-Unis et devenir un autre centre de pouvoir, capable d'agir sur la scène internationale selon ses propres dynamiques et intérêts, de plus en plus opposés et divergents de ceux de la métropole colonisatrice Stars and Stripes. Et pour cela, l'une des conditions nécessaires - de la culture à l'énergie - serait une synergie entre l'Europe et la Russie, qui renforcerait le rôle de ces deux réalités et, partant, remettrait en question et diminuerait celui des États-Unis.

Aujourd'hui, tous ces scénarios sont en jeu dans la guerre d'Ukraine. Les États-Unis, qui provoquent depuis des années des situations inacceptables pour Moscou, voient dans cette guerre la possibilité ultime de couper le rapprochement et la collaboration croissante entre la Russie et l'Allemagne - dont le gaz est l'un des éléments clés - et de détruire ainsi l'option de ce troisième pôle et la construction d'un monde multipolaire: son premier objectif est d'isoler Moscou de ses partenaires géopolitiques potentiels, le second est de détruire la Russie en tant que puissance et de réduire encore l'UE au statut de colonie. C'est pourquoi elle est aujourd'hui la principale intéressée à prolonger la guerre en Ukraine, afin que Washington regagne du terrain dans une logique unipolaire. La Chine joue une fois de plus son grand atout diplomatique, la patience, l'objectif est aussi un affaiblissement progressif de la Russie et son éloignement de l'Europe, une Russie faible et isolée dépendrait de plus en plus de sa relation avec Pékin, ce qui ferait de la Chine à nouveau la seule puissance disputant la domination du monde aux Etats-Unis (logique bipolaire). Une Russie renforcée, confortée dans son prestige diplomatique et militaire, renforcerait la logique multipolaire, une logique que certains dirigeants européens tentent de soutenir dans le peu de marge de manœuvre dont ils disposent ; le refus d'inclure le gaz et l'énergie dans les sanctions contre la Russie est la preuve de cette réalité.

En bref, l'issue finale de la guerre en Ukraine marquera le scénario mondial des prochaines décennies, et surtout pour les Européens. Deux options s'offrent à eux : soit la non-existence géopolitique et la soumission absolue à l'atlantisme américain, soit l'émancipation géopolitique et l'articulation en tant qu'acteur international dans une réalité multipolaire, et nous le répétons, cette dernière pour une synergie - et non une soumission - avec une Russie puissante et antagoniste à l'unipolarisme de Washington et au bipolarisme de Pékin.

lundi, 18 avril 2022

La mémoire sélective de Robert Kagan

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La mémoire sélective de Robert Kagan

Andrew Bacevich

Source: https://katehon.com/ru/article/izbiratelnaya-pamyat-roberta-kagana

Selon un journaliste de Foreign Affairs, la Russie est entrée en Ukraine parce que les Etats-Unis ne sont pas suffisamment impliqués dans les conflits mondiaux.

Récemment, dans les pages de Foreign Affairs, l'infatigable Robert Kagan a fait un autre plaidoyer enflammé au nom de l'empire. En véritable Américain, Kagan évite bien sûr d'utiliser le mot "I(mperium)", qui est offensant. Il préfère le terme "hégémonie", qui, explique-t-il, est doux et n'implique ni domination ni exploitation, mais une soumission volontaire - "une condition plutôt qu'un objectif". En grattant la surface, cependant, vous verrez que The Price of Hegemony offre une variation sur le thème standard de Kagan : l'impératif de la domination mondiale militarisée des États-Unis, quel qu'en soit le prix et sans trop se soucier de qui paie.

Peu de gens accuseraient Kagan d'être un penseur profond ou original. En tant qu'écrivain, il est moins un philosophe qu'un pamphlétaire, bien qu'il ait un véritable don pour formuler ses pensées. Considérez, par exemple, sa célèbre déclaration selon laquelle "les Américains viennent de Mars et les Européens de Vénus". Cette phrase "les guerriers contre les faibles", autrefois considérée comme exprimant la vérité du fond de la pensée de Lippmann, a depuis perdu beaucoup de son attrait persuasif, notamment parce que les guerriers, également connus sous le nom de "troupes", ne se sont pas particulièrement bien débrouillés lorsqu'ils ont été envoyés pour libérer, soumettre ou renverser qui que ce soit.

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Ainsi, Kagan est susceptible de partager le sort non seulement de Walter Lippmann, mais aussi de Scotty Reston ou de Joe Olsop, autrefois éminents chroniqueurs de Washington, aujourd'hui complètement oubliés. Bien sûr, le même sort attend toute la foule de commentateurs (y compris l'auteur de ces lignes) qui fulminent sur le rôle de l'Amérique dans le monde, croyant à tort que des responsables de haut rang à la Maison Blanche, à Foggy Bottom ou au Pentagone leur demandent conseil. Ils le font rarement.

Néanmoins, Kagan se distingue des autres sur un point : sa capacité à combiner cohérence et flexibilité est inégalée. Il est lui-même tout à fait agile. Quoi qu'il arrive dans le monde réel, il est prêt à expliquer comment les événements confirment le caractère indispensable d'un leadership américain affirmé. À Washington (et dans les pages de Foreign Affairs), cela est toujours bienvenu.

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Cette dextérité se manifeste de manière éclatante dans son dernier essai, dont le sous-titre pose la question suivante : "L'Amérique peut-elle apprendre à utiliser sa puissance?". Kagan arrive à sa propre réponse - les États-Unis non seulement peuvent apprendre, mais ils doivent le faire - même s'il ignore complètement ce qu'ils ont finalement obtenu avec le vigoureux déploiement de la puissance américaine au cours des deux dernières décennies et à quel prix.

Ainsi, son essai contient diverses références sinistres au mauvais comportement de la Russie, ainsi que des allusions à quelques actions indésirables de la Chine. Peut-être inévitablement, Kagan jette aussi quelques allusions tout aussi sinistres à l'Allemagne et au Japon à l'approche de la Seconde Guerre mondiale, la source d'enseignement historique faisant autorité dans les cercles de Washington. Cependant, il est silencieux sur les guerres américaines en Afghanistan et en Irak après le 11 septembre. Ils n'ont pas reçu la moindre mention - aucune, zéro.

Selon Kagan, la guerre russo-ukrainienne en cours s'est produite au moins en partie à cause de la passivité américaine. Les administrations américaines successives depuis la fin de la guerre froide ont refusé de faire leur travail. En termes simples, ils n'ont fait aucun effort pour garder la Russie sous contrôle. Alors qu'il serait "obscène de blâmer les États-Unis pour l'attaque inhumaine de Poutine contre l'Ukraine", écrit Kagan, "insister sur le fait que l'invasion n'était absolument pas provoquée est trompeur". Les États-Unis "ont mal joué la carte de la puissance". Ce faisant, ils ont donné à Vladimir Poutine une raison de penser qu'il pouvait s'en tirer avec une agression. Ainsi, Washington, comme si elle était restée les bras croisés pendant les deux premières décennies de ce siècle, a provoqué Moscou.

"En gérant l'influence des États-Unis de manière plus cohérente et plus efficace", les présidents, à commencer par Bush père, auraient pu empêcher la dévastation dont ont souffert les Ukrainiens. Du point de vue de Kagan, les États-Unis ont été trop passifs. Aujourd'hui, écrit-il, "la question est de savoir si les États-Unis continueront à commettre leurs propres erreurs" - des erreurs d'omission, selon lui - "ou si les Américains apprendront à nouveau qu'il vaut mieux dissuader les autocraties agressives avant qu'elles ne s'emparent de la puissance".

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La référence précoce à l'endiguement des autocraties agressives doit être déchiffrée. Kagan fait semblant de le faire. Ce qu'il suggère en fait, c'est de poursuivre l'expérimentation de la guerre préventive, qui est devenue un élément central de la politique de sécurité nationale américaine depuis le 11 septembre. Kagan, bien sûr, a soutenu la doctrine Bush de la guerre préventive. Il était pleinement préparé à l'invasion de l'Irak. Mise en œuvre en 2003 sous la forme de l'opération Iraqi Freedom, la doctrine Bush a eu des résultats désastreux.

Aujourd'hui, même deux décennies plus tard, Kagan ne peut se résoudre à reconnaître l'immensité et le grotesque de cette erreur, ni ses effets secondaires, notamment la montée du Trumpisme et tous les maux qui en découlent.

"L'Amérique peut-elle apprendre à utiliser sa puissance ?" - Que cette question soit évaluée comme une question urgente est certainement vrai. Cependant, penser que Robert Kagan est qualifié pour donner une réponse cohérente est trompeur.

Que nous réserve la région Asie-Pacifique ?

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Que nous réserve la région Asie-Pacifique ?

Un rapport de l'ONU révèle une baisse de la croissance économique

Source: https://katehon.com/ru/article/chto-zhdet-aziatsko-tihookeanskiy-region

La reprise économique dans la région Asie-Pacifique après la pandémie et d'autres chocs mondiaux devrait être basée sur un "nouveau pacte social" complet pour protéger les personnes vulnérables dans les années à venir, selon un rapport publié mardi 12 avril par la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie et le Pacifique (CESAP).

Outre la pandémie, le rapport montre que les économies régionales sont confrontées à "plusieurs risques baissiers" liés à une chaîne d'approvisionnement mondiale non durable, à "des pressions inflationnistes croissantes, à la perspective d'une hausse des taux d'intérêt, au rétrécissement de l'espace fiscal" et aux conséquences économiques mondiales émergentes de la crise en cours en Ukraine.

La croissance économique des pays en développement de cette vaste région devrait se contracter à 4,5 % en 2022 et à 5 % en 2023, en baisse par rapport à un taux de croissance antérieur de 7,1 % en 2021.

La perte de production cumulée due à la pandémie pour les économies en développement de la région est estimée à près de 2000 milliards de dollars de 2020 à ce jour.

L'étude met en garde contre les réductions des dépenses publiques dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la protection sociale "afin de protéger les acquis du développement des dernières décennies et d'empêcher un nouveau creusement des inégalités dans la région".

Le rapport note que la pandémie a privé plus de 820 millions de travailleurs informels dans la région de la CESAP et plus de 70 millions d'enfants issus de familles à faibles revenus d'un accès adéquat aux revenus et à la scolarité. "Ce résultat aura un impact négatif sur le potentiel de gain futur de ces personnes et sur la croissance globale de la productivité", indique le communiqué de presse de l'ESCAP, alors que 85 autres millions de personnes dans la région Asie-Pacifique ont déjà été poussées dans l'extrême pauvreté en 2021.

"Alors que les pays en développement de la région vont de l'avant, apprenant à vivre avec le virus, en trouvant un équilibre entre la protection de la santé publique et les moyens de subsistance, il est temps de jeter les bases d'un avenir plus équitable avec des chances égales et des résultats inclusifs", a déclaré Armida Salcia Alisjahbana, Secrétaire exécutive de la CESAP, dans un communiqué.

La Commission recommande un "programme politique à trois volets" visant à construire une économie inclusive pour la région. Tout d'abord, au lieu de procéder à des réductions, les pays en développement de la région devraient orienter les dépenses publiques vers les soins de santé universels de base, continuer à progresser vers l'éducation primaire et secondaire universelle et étendre la couverture de la protection sociale. La Commission fait valoir qu'une politique fiscale "intelligente" peut améliorer l'efficacité et l'efficience globales des dépenses publiques et de la perception des recettes. Dans le même temps, il convient d'explorer de nouvelles sources de revenus, comme la taxation de l'économie numérique, et de déplacer la charge fiscale vers les ménages à hauts revenus.

Deuxièmement, l'étude 2022 soutient que les banques centrales de la région peuvent et doivent modifier leurs politiques monétaires traditionnelles pour promouvoir un développement inclusif. Tout en restant concentrées sur le maintien d'une inflation faible et stable, les banques centrales peuvent investir une partie de leurs réserves officielles dans des obligations sociales, étudier comment la monnaie numérique d'une banque centrale peut élargir l'accès aux services financiers, et encourager des instruments financiers plus innovants pour assurer la protection sociale.

Troisièmement, les gouvernements peuvent également guider, façonner et gérer activement la transformation économique structurelle de plus en plus induite par la révolution numérique de la robotique et de l'intelligence artificielle pour obtenir des résultats plus inclusifs. Cela comprend le soutien au développement de technologies à forte intensité de main-d'œuvre, l'accès inclusif à une éducation de qualité, le recyclage, le renforcement des capacités dans les négociations du travail et les planchers de protection sociale.

L'Étude économique et sociale de l'Asie et du Pacifique, publiée pour la première fois en 1947, est l'enquête économique et sociale annuelle la plus ancienne et la plus complète des Nations Unies, qui sert de base à l'élaboration des politiques dans la région.

Quelle leçon la Russie peut-elle en tirer, compte tenu de sa confrontation avec l'Occident? Seule une poignée d'États de la région nous ont imposé des sanctions. Les autres sont favorables à la coopération, d'où la possibilité d'ouvrir de nouvelles niches de coopération, compte tenu des risques mentionnés et de la baisse des taux de croissance. Les pays d'Asie-Pacifique peuvent tirer parti de l'évolution de l'environnement mondial et offrir des biens et services de substitution identiques à ceux que nous recevions auparavant de l'Occident collectif. À son tour, la région a un besoin constant de ressources énergétiques, que la Russie possède en abondance. Tout compte fait, une réorientation vers l'Est est nécessaire à long terme en raison de la croissance de la technologie, de la main-d'œuvre et de l'accumulation de richesses dans cette partie du monde.

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Café Noir N.42

Pierre Le Vigan - Tout Sauf Macron: Quand les Castors du bas font barrage aux Castors du haut

Café Noir – Un Autre Regard sur le Monde. Émission du vendredi 15 avril 2022 (enregistrée le 15/04/2022) avec Gilbert Dawed & Pierre Le Vigan.
 
Le sommaire et les liens des livres de Le Vigan ci-dessous.
 
SOMMAIRE
00:58 Quelles leçons peut on tirer du premier tour?
04:12 Pourquoi le succès relatif de Mélenchon ?
11:59 Y a-t-il un échec d'Éric Zemmour,
17:30 Parenthèse Jean Lasalle & NDA
18:41 Quel avenir pour le Rassemblement National ?
23:10 Faut-il glisser un bulletin de vote au second tour et pour qui? Errata: A
02:55 c'est bien entendu Danièle Obono ou Clementine Autain et pas Rokhaya Diallo.
 
 
 
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Pakistan: de la géopolitique linéaire à la géo-économie multipolaire

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Pakistan: de la géopolitique linéaire à la géo-économie multipolaire

Leonid Savin

Source:  https://www.geopolitika.ru/en/article/pakistan-linear-geopolitics-multipolar-geo-economics

NdlR: Cet article date du 25 janvier 2022, donc avant l'éviction d'Imran Khan.

Le 17 janvier, le Premier ministre pakistanais Imran Khan a écrit sur son compte Twitter qu'il avait eu une conversation téléphonique avec le président russe Vladimir Poutine et l'a remercié pour sa "déclaration résolue selon laquelle la liberté d'expression ne peut servir de prétexte pour insulter notre Prophète" [i].

Le Premier ministre a noté que "le président Poutine est le premier dirigeant occidental qui a fait preuve de sympathie et de sensibilité à l'égard des sentiments du monde musulman". En outre, il a souligné que "les relations bilatérales du Pakistan avec la Russie se développent sur une trajectoire ascendante, en accordant une attention accrue aux liens commerciaux et économiques et à la coopération dans le domaine de l'énergie.

Il a confirmé la détermination du gouvernement à mettre en œuvre le projet de gazoduc Pakistan Stream dès que possible. Les deux dirigeants ont convenu de renforcer la coopération bilatérale dans divers domaines, d'étendre les échanges de haut niveau et de maintenir un contact étroit sur les questions liées à l'Afghanistan.

Imran Khan a déclaré qu'il se réjouissait de la visite du président Poutine au Pakistan, ainsi que de sa propre visite en Russie au moment opportun [ii].

Plus récemment, le Pakistan a fait la une des médias, principalement en raison de certains événements négatifs - attentats terroristes, tensions à la frontière indo-pakistanaise, loyauté envers les États-Unis. Il n'y avait pratiquement aucune information sur la politique intérieure de ce pays. Et du côté russe, seul un petit nombre de spécialistes s'intéressaient activement au Pakistan, qui se comptent sur les doigts d'une main.

Mais ces dernières années, le Pakistan a considérablement modifié tant les approches de la conduite des affaires intérieures que les vecteurs de sa politique étrangère, ce qui est associé à une compréhension des changements en cours dans la conjoncture politique mondiale. Étant le plus grand partenaire de la Chine, ainsi que de l'Arabie saoudite et de la Turquie, Islamabad tente de trouver un équilibre entre les puissances régionales, tout en tenant compte de la tension constante avec l'Inde, qui lui est liée par une histoire commune, dont plusieurs guerres et la question non résolue du Cachemire.

C'est la plus grande puissance d'Asie du Sud dotée de l'arme nucléaire, avec une population de 200 millions d'habitants, parmi lesquels la classe moyenne est en pleine expansion. La situation géographique unique qui relie les eaux chaudes de l'océan Indien aux montagnes de l'Hindu Kush et aux contreforts de l'Afghanistan donne au pays des avantages pour relier les flux de transport de la Chine, de l'Iran, de l'Inde, de l'Afghanistan et des pays d'Asie centrale.

L'histoire culturelle montre qu'il y a toujours eu des intersections de diverses civilisations dans le pays. Le 21ème siècle ouvre de nouvelles opportunités pour le Pakistan (et pas seulement pour lui). Et beaucoup dépend maintenant du choix des partenaires et de la volonté politique des dirigeants - que le Pakistan devienne un État puissant ou qu'il souffre d'une instabilité chronique et d'accidents politiques.
Politique actuelle

Après l'arrivée au pouvoir du gouvernement d'Imran Khan en 2018, le Premier ministre a immédiatement déclaré qu'il ne permettrait pas aux États-Unis d'utiliser leur pays dans des conflits contre d'autres États [iii].

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Bien que les relations avec l'Occident restent le plus souvent normales, un cap vers une réorientation et un changement de priorités est clairement perceptible (toutefois, comme chez d'autres partenaires des États-Unis, par exemple au Moyen-Orient). Le récent refus de participer au "Sommet des démocraties", qui s'est tenu les 9 et 10 décembre 2021 sous la forme d'une conférence en ligne, est révélateur à cet égard.

Malgré l'invitation des États-Unis, le ministère des Affaires étrangères du Pakistan a exprimé son appréciation générale de manière assez diplomatique, tout en notant que "le Pakistan est une grande démocratie fonctionnelle avec un système judiciaire indépendant, une société civile active et des médias libres. Nous restons profondément engagés dans la poursuite du développement de la démocratie dans le pays, la lutte contre la corruption et la protection des droits de tous les citoyens".  

Il convient de noter que, selon les normes occidentales, le Pakistan se situe à un niveau plutôt bas dans le classement des pays du monde sur l'indice de démocratie (108 sur 167 selon l'agence britannique Economist Intelligence Unit pour 2020). Mais le Pakistan partage l'opinion de la Russie selon laquelle chaque pays a le droit de vivre selon ses traditions et ses valeurs culturelles et historiques.

À cet égard, le Pakistan dispose d'un système judiciaire assez unique. Au niveau local, les problèmes sont résolus lors d'une réunion communautaire (par exemple, dans le nord-ouest du pays, où vivent les Pachtounes, il s'agit d'une jirga associée au code de conduite traditionnel du Pachtounwali ; au Baloutchistan et dans d'autres régions, il existe des traditions similaires, souvent basées sur les coutumes soufies), il existe également un système de justice laïque, mais en parallèle, il existe une Cour suprême de la charia.

L'armée continue de jouer un grand rôle dans la gouvernance du pays. Outre les fonctions de sécurité et de défense, de nombreuses entreprises et même des centres d'analyse au Pakistan ont été fondés par d'anciens militaires, et cette continuité est tout à fait palpable dans la vie publique et politique.

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Il convient de souligner que les activités des organisations interdites dans le pays posent toujours problème. Outre les groupes islamistes radicaux, les talibans pakistanais sont toujours actifs, et nombre de leurs dirigeants se trouvent en Afghanistan voisin. Il est donc important pour Islamabad d'avoir un lien direct avec le nouveau gouvernement afghan et, par son intermédiaire, de prévenir toute provocation sur le territoire pakistanais.

Étant donné que les talibans pakistanais sont composés d'ethnies pachtounes, ils ont déjà mené des attaques terroristes contre d'autres groupes ethniques (notamment contre des chiites hazaras vivant au Baloutchistan), des représentants de l'État et même des travailleurs chinois. Entre-temps, le Baloutchistan a également son propre groupe séparatiste ethnique (il en existe un similaire en Iran, et il y avait auparavant un "Jundallah" actif, qui était financé par la CIA).

Les partisans des opinions sunnites radicales apportent également beaucoup de problèmes au gouvernement. Au niveau officiel, le Jamiat Ulema-i-Islam (Assemblée du clergé islamique) (photo) est un parti religieux et théocratique ultraconservateur avec une histoire idéologique remontant à 100 ans. Le chef du parti est Fazl-ur-Rehman, qui est également considéré comme le leader du Mouvement démocratique pakistanais, ce qui semble être un oxymore.

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Auparavant, le parti Jamiat Ulema-i-Islam jouait un grand rôle, mais il a maintenant perdu son influence. Au total, moins de neuf députés de ce parti sont représentés à l'Assemblée nationale et aux assemblées provinciales.

La loi sur le blasphème est toujours problématique, à cause de l'interprétation de laquelle il y a eu de nombreux cas d'arrestation de représentants d'autres religions. Toute déclaration imprudente de non-musulmans concernant le Coran ou le prophète Mahomet est souvent interprétée au Pakistan comme un blasphème, pour lequel des peines sévères sont prévues, pouvant aller jusqu'à la peine de mort.

Toutefois, le gouvernement actuel est plutôt optimiste, comme en témoigne la stratégie de sécurité nationale du Pakistan, qui a été publiée à la mi-janvier 2022.

De la géopolitique à la géoéconomie

Le document indique que "notre situation géo-économique importante donne au Pakistan l'opportunité de se proposer comme un creuset d'intérêts économiques régionaux et mondiaux grâce à des initiatives en tant que lien de connexion. Cela reste une priorité, et son succès exige la paix et la stabilité régionales, auxquelles le Pakistan reste pleinement attaché" [iv].

Ils parlent également de la nécessité d'entretenir des relations de bon voisinage (y compris avec l'Inde) et d'améliorer les relations avec les partenaires traditionnels. La version complète de la stratégie reste classifiée [v].

Cependant, la partie disponible au public indique la poursuite de la course au renforcement des liens régionaux. Puisque le projet du siècle au Pakistan est le Corridor économique Chine-Pakistan, qui représente l'initiative clé "Belt and Road", alors, à bien des égards, le Pakistan s'appuie sur les infrastructures déjà créées.

Le port en eau profonde de Gwadar, dans le sud du pays, est déjà relié par rail et autoroute au cœur du Pakistan - le Pendjab, et de là, des branches sont construites plus au nord.

En 2021, un accord a été signé sur la création du corridor de transport transafghan vers l'Ouzbékistan. En décembre 2021, le train de marchandises Islamabad-Téhéran-Istanbul a été lancé, ce qui augmentera le commerce entre les trois pays. En outre, le Pakistan s'attend à pouvoir accéder au marché européen via la Turquie.

Le même mois, le Pakistan et l'Arabie saoudite ont signé deux accords concernant des programmes de recrutement et d'évaluation des compétences pour la main-d'œuvre pakistanaise employée dans le Royaume d'Arabie saoudite.

Les accords ont été signés lors de la visite du ministre fédéral de l'éducation, de la formation professionnelle et du patrimoine national, Shafqat Mahmood, au Royaume d'Arabie saoudite, a déclaré un porte-parole du ministère des affaires étrangères.

Et le ministre pakistanais des Affaires étrangères a déclaré début décembre qu'il était prêt à accueillir le sommet tant retardé de l'Association sud-asiatique de coopération régionale (SAARC) si les "obstacles artificiels" sur son chemin étaient levés. Il a fait cette déclaration lors d'une réunion avec le secrétaire général du groupe, Esala Weerakoon, qui était en visite à Islamabad.

Le Pakistan était censé accueillir le sommet en 2016, mais l'Inde a boycotté la réunion des dirigeants de la SAARC et a également persuadé certains autres États membres de faire de même. Selon la charte de l'ASACR, le sommet ne peut avoir lieu si l'un des pays participants n'y participe pas. Depuis lors, l'Inde s'est toujours tenue à l'écart du sommet, retardant ainsi la réunion des dirigeants de huit pays d'Asie du Sud.

Le Pakistan cherche également à entrer directement sur le marché de l'ANASE afin de diversifier ses capacités et son potentiel. La stratégie "Engager l'Afrique" est également activement mise en œuvre, tant par le biais de liens commerciaux et économiques que dans le domaine de la coopération militaire.

La Russie et le Pakistan

En ce qui concerne le gazoduc Pakistani Stream mentionné par Imran Khan, un accord bilatéral de construction a été signé le 28 mai 2021 à Moscou. Du côté russe, le document a été signé par le ministre russe de l'Énergie, Nikolay Shulginov, et du côté pakistanais par l'ambassadeur Shafqat Ali Khan.

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Légende: en noir, gazoduc Gwadar/Nawabshah; en bleu, gazoduc Nord-Sud (Lahore/Nawabshah/Karachi); en vert, gazoduc TAPI (Turkménistan, Afghanistan, Pakistan, Océan Indien).

Cet accord a été préparé depuis 2015 sous le nom original de gazoduc "Nord-Sud" et il a une signification géopolitique importante pour les deux pays. Mais le problème est que le Pakistan n'a pas payé à la Russie la dette extérieure qui s'est accumulée depuis l'époque soviétique. Par conséquent, le commerce bilatéral et les relations économiques entre les deux pays étaient pratiquement gelés. Ce n'est qu'après le paiement de la dette d'un montant de 93,4 millions de dollars en février 2020 que la situation s'est débloquée [vi].

La Russie détient une participation de 26 %. En outre, la partie russe aura le droit d'avoir une voix décisive lors du choix des entrepreneurs, sur la conception, les travaux d'ingénierie, les fournitures et la construction.

Bien qu'aujourd'hui le principal segment de la coopération entre les pays couvre un secteur limité de l'alimentation et des matières premières, il existe néanmoins une dynamique importante dans les relations économiques entre la Russie et le Pakistan.

Au cours du premier semestre 2021, le chiffre d'affaires commercial de la Russie avec le Pakistan s'est élevé à 419.950.742 $, soit une augmentation de 43,17 % (126.630.995 $) par rapport à la même période en 2020. Les exportations de la Russie vers le Pakistan au 1er semestre 2021 se sont élevées à 210.641.504 $, soit une augmentation de 74,45% (89.898.115 $) par rapport à la même période en 2020. Les importations de la Russie en provenance du Pakistan au cours du premier semestre de 2021 se sont élevées à 209.309.238 $, soit une augmentation de 21,29 % (36.732.880 $) par rapport à la même période en 2020 [vii].

Bien sûr, pendant un certain temps, la portée de la coopération russo-pakistanaise restera limitée, mais en développant progressivement des relations où les échanges humanitaires, culturels et éducatifs sont nécessaires (y compris la diplomatie des peuples et les initiatives de petites entreprises), nous pouvons former une feuille de route stratégique.

À propos, la coopération militaire entre la Russie et le Pakistan se déroule comme prévu, des exercices militaires conjoints sont régulièrement organisés, notamment les manœuvres "Amitié" sur le territoire des deux pays [viii].

Le développement d'un pôle touristique au Pakistan avec la participation de la Russie peut également présenter une opportunité unique, aussi bien sur la côte que le long des routes historiques très fréquentées, de Mohenjo Daro et de la capitale culturelle de Lahore à la vallée de Swat habitée par le peuple unique des Kalash et au sommet du K2.

Et, bien sûr, la coopération entre la Russie et le Pakistan peut réduire davantage la dépendance d'Islamabad à l'égard de vieux liens inconfortables avec les puissances occidentales.

Notes:

[I] https://twitter.com/ImranKhanPTI/status/1483002931070869506

[ii] https://propakistan.ru/article/imran-khan-pozvonil-vladimiru-putinu

[iii] https://www.fondsk.ru/news/2018/12/24/imran-han-amerikancam-my-bolshe-ne-podstavim-vam-plecho-dlja-vojn-s-drugimi-47344.html

[iv] https://www.pakistantoday.com.pk/2022/01/15/national-security-policy-2022-2026/

[v] https://en.dailypakistan.com.pk/14-Jan-2022/pm-imran-launches-public-version-of-pakistan-s-first-national-security-policy

[vi] https://www.banki.ru/news/lenta/?id=10918154

[vii] https://russian-trade.com/reports-and-reviews/2021-08/vneshnyaya-torgovlya-rossii-s-pakistanom-v-1-polugodii-2021-g/

[viii] https://function.mil.ru/news_page/country/more.htm?id=12387698@egNews

dimanche, 17 avril 2022

Le corridor de transport nord-sud (NSTC) est un projet d'intégration trans-civilisationnelle

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Le corridor de transport nord-sud (NSTC) est un projet d'intégration trans-civilisationnelle

Andrew Korybko

Source: https://katehon.com/en/article/north-south-transport-corridor-trans-civilizational-integration-project

Le NSTC représente la convergence physique des grands plans stratégiques de la Russie, axés sur le sud, qui visent à équilibrer les ancrages irano-pakistanais de son pivot de l'Oumma dans cette partie particulière du supercontinent avec le Néo-NAM qu'elle poursuit conjointement avec l'Inde. L'optique trans-civilisationnelle est extrêmement importante car elle montre que la prédiction du soi-disant "choc des civilisations" de Huntington n'était qu'un exemple de vœu pieux mal intentionné (si ce n'est une proposition politique provocante) et qu'elle a été incontestablement remise en question par la convergence des civilisations entre le christianisme oriental, l'islam et l'hindouisme incarnée par le NSTC.

L'émergence de l'ordre mondial multipolaire (ou "nouvel ordre mondial" comme l'appelle le président américain Joe Biden) a été accélérée par les conséquences induites par la réponse sans précédent et dûment planifiée depuis longtemps par l'Occident dirigé par les États-Unis dès qu'a commencé l'opération militaire spéciale en cours de la Russie en Ukraine, que l'Amérique a elle-même provoquée. L'une des tendances les plus importantes de cette transition systémique mondiale est la montée des civilisations en tant qu'acteurs internationaux, qui a été prédite en détail par l'universitaire russe Leonid Savin dans son livre de 2020 Ordo Pluriversalis : The End Of Pax Americana And The Rise Of Multipolarity que l'auteur a chroniqué ici peu après sa sortie. Le corridor de transport nord-sud (NSTC) entre la Russie, l'Azerbaïdjan, l'Iran et l'Inde - et qui peut aussi facilement s'étendre au Pakistan voisin pour renforcer le commerce bilatéral croissant avec la Russie - jouera un rôle irremplaçable à cet égard.

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Ce projet ambitieux relie la civilisation chrétienne orthodoxe orientale de la Russie aux civilisations musulmanes de l'Azerbaïdjan, de l'Iran et du Pakistan, ainsi qu'à la civilisation majoritairement hindoue de l'Inde. Étant donné que l'Inde, l'Iran et le Pakistan sont devenus plus importants que jamais pour la Russie en raison de leur neutralité de principe qui leur permet de lui servir de soupape de pression économique stratégique, il ne fait aucun doute que le NSTC, auquel les deux premiers pays participent et le troisième pourrait éventuellement le faire aussi, deviendra un projet phare multipolaire aux côtés du gazoduc Pakistan Stream (PSGP) et du PAKAFUZ. Ce que tous ces projets ont en commun, c'est qu'il s'agit de projets de connectivité Nord-Sud, ce qui prouve que la grande réorientation stratégique de la Russie vers le Sud après 2014 n'était pas purement axée sur la Chine comme beaucoup le pensaient, mais que Moscou a équilibré son "pivot vers l'Oumma" et sa vision "néo-NAMienne" avec l'Inde.

Cela ne veut pas dire que la Chine ne joue pas un rôle crucial dans la grande stratégie russe - en vérité, ces deux grandes puissances servent de double moteur à l'ordre mondial multipolaire émergent - mais simplement que le Kremlin a sagement cherché à éviter de manière préventive toute dépendance disproportionnée potentielle vis-à-vis de la République populaire par le biais de ces initiatives complémentaires axées sur le Sud. Le "pivot de l'Oumma" fait référence à la priorité qu'il accorde à des partenaires non traditionnels à majorité musulmane comme l'Iran et le Pakistan, tandis que le Neo-NAM est le plan officieux des relations russo-indiennes, par lequel ces deux pays cherchent conjointement à créer un troisième pôle d'influence dans la phase de transition bimultipolaire entre unipolarité et multipolarité. Le Pivot de l'Oumma et le Néo-NAM s'équilibrent l'un l'autre, ce qui équilibre à son tour la Chine dans cette grande stratégie kissingerienne post-moderne poursuivie par la Grande Puissance eurasienne.

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Le NSTC représente la convergence physique des plans stratégiques de la Russie axés sur le sud, qui visent à équilibrer les ancrages irano-pakistanais de son pivot de l'Oumma dans cette partie particulière du supercontinent avec le Néo-NAM qu'elle poursuit conjointement avec l'Inde. L'optique trans-civilisationnelle est extrêmement importante car elle montre que la prédiction du soi-disant "choc des civilisations" de Huntington n'était qu'un exemple de vœu pieux mal intentionné (si ce n'est une proposition politique provocante) et a été indiscutablement remise en question par la convergence des civilisations entre le christianisme oriental, l'islam et l'hindouisme incarnée par le NSTC. Cela constitue un exemple puissant pour la communauté internationale (qui, dans ce contexte, fait également référence à la société civile mondiale) à deux égards : premièrement, cela réfute l'"inévitabilité" du choc des civilisations ; et deuxièmement, cela montre que la Chine n'en a pas le monopole.

Pour développer ce dernier point, on a considéré jusqu'à présent que l'initiative Belt & Road (BRI) de la Chine était le seul moyen physique de rassembler diverses civilisations à travers l'objectif commun d'un commerce, d'un investissement et d'un développement socio-économique mutuellement bénéfiques, mais l'existence même du NSTC montre que la Russie et ses partenaires azerbaïdjanais, iraniens, indiens et peut-être même bientôt pakistanais peuvent tous s'unir pour poursuivre ce même objectif. En fait, la Chine a également un rôle crucial à jouer dans le NSTC puisque le pacte de partenariat stratégique conclu au printemps dernier avec l'Iran aurait vu la République populaire accepter d'investir plus de 400 milliards de dollars dans la République islamique au cours du prochain quart de siècle, ce qui se traduira probablement par des investissements impressionnants dans les infrastructures pour faciliter le NSTC à certains égards, notamment en termes de connectivité irano-pakistanaise du fait que ce dernier accueille le CPEC.

"La quête de souveraineté économique de la Russie n'est pas synonyme d'isolationnisme", contrairement à ce que certains observateurs occidentaux ont faussement prétendu, car personne ne peut nier la vision transcivilisationnelle et transcontinentale avancée par le NSTC dans lequel Moscou joue un rôle clé. "Le coup de judo géo-économique de Poutine vient de renverser les tables financières de l'Occident" après que le dirigeant russe a décrété que tous les contrats de gaz avec les pays nouvellement conçus comme inamicaux, tels que ceux de l'UE, doivent être payés en roubles, ce qui aura pour conséquence soit de soutenir le rouble s'ils s'y conforment, soit de risquer une crise économique totale en Occident s'ils refusent, les deux résultats étant bénéfiques à Moscou à leur manière. Dans le contexte de la présente analyse, ces derniers développements signifient que l'importance stratégique du NSTC va continuer à augmenter pour toutes ses parties prenantes, qui pourraient prospectivement s'étendre pour inclure également leurs autres partenaires du Sud.

La fin de la domination mondiale des États-Unis & Ce qui est en jeu

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La fin de la domination mondiale des États-Unis & Ce qui est en jeu

Karl Richter

Source: https://www.facebook.com/karl.richter.798

Depuis quelques heures, nous y voyons plus clair. Les pièces du puzzle s'assemblent pour nous former une image globale. Le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov a annoncé cet après-midi sur la chaîne de télévision russe "Russia 24", à la surprise générale, un autre objectif de guerre de la Russie en Ukraine, sans que les médias occidentaux n'en soufflent un mot : "Notre opération spéciale doit mettre fin à l'expansion inconsidérée, à la domination totale des Etats-Unis dans le monde, une domination qui s'accompagne de violations du droit international". (Source : https://m.ura.news/news/1052544901 )

Lavrov a cité les actions américaines au Kosovo et en Irak comme exemples de telles violations du droit international par les Etats-Unis.

Les cartes sont désormais sur la table et chacun sait désormais de quel côté il faudra se situer. Chacun doit assumer la responsabilité de ses choix et de leurs conséquences. Nous assistons actuellement à la poursuite de l’objectif poursuivi suite à la crise sanitaire : si quelqu'un se fait piquouzer, sans que l’on ait à demander le pourquoi, on en concluera que chacun décide lui-même et en assume également les conséquences. Je vous renvoie à mon post d'hier ("Ce qui est en jeu", cf. infra). Depuis cet après-midi, c'est officiel et plus personne ne peut se soustraire à la décision : soit on est du côté de l’instance criminelle mondiale qu'est l'Amérique, soit on ne l'est pas. Il n'est plus nécessaire d'en débattre.

***

Ce qui est en jeu

Ces dernières semaines, des militants bien intentionnés ne cessent de répéter que la guerre en Ukraine n'est pas la nôtre et que nous devrions plutôt nous occuper de l'Allemagne. Mais ce n'est pas suffisant.

En Ukraine, c'est l'avenir du monde qui est en jeu, indépendamment de la durée de la guerre et de la possibilité qu'elle se termine par une solution négociée qui ne ferait que retarder le conflit en soi. Mais les "masterminds", qu'ils s'appellent Alexandre Douguine ou Francis Fukuyama, sont tout à fait d'accord sur le fait que l'issue du conflit ukrainien sera déterminante pour l'orientation future de la situation mondiale. Soit l'Occident l'emporte, soit ce n'est pas le cas : la Russie, la Chine et l'Eurasie en formation auront alors acquis la maîtrise de la situation. Dans ce sens, l'issue de la guerre est très importante pour notre propre avenir. Comme l'Allemagne n'a actuellement ni les moyens ni même la volonté d'adopter une position neutre, elle participe inévitablement à la confrontation entre les blocs et en subira les conséquences, dans un sens ou dans l'autre. Face à cela, chacun devra d'une manière ou d'une autre se positionner et expliquer quelles sont les conséquences du jeu en acte qu'il préfère et quelles sont celles qu'il préfère épargner à notre pays.

Celui qui ne fait rien - de même que celui qui soutient l'Ukraine - soutient la poursuite de l'hégémonie américaine, des "valeurs dites occidentales", du pillage du monde par Big Money. Il soutient le fait que l'Allemagne reste une plaque tournante pour les guerres d'agression américaines dans le monde entier et devienne la cible d'éventuelles attaques militaires de toute partie adverse. Il soutient aussi le suicide économique de l'Europe qui a soutenu une politique énergétique délirante et des sanctions absurdes. Il soutient le programme satanique des élites occidentales, qui se résume à la destruction de la famille, à la destruction de notre santé et de notre intégrité physique, à l'effacement de l'identité personnelle (via le transhumanisme !).

En supposant que la Russie ne fasse PAS partie du Great Reset : la Russie, la Chine et l'Eurasie représentent au contraire la fin de la domination mondiale du dollar américain, l'avènement d'un véritable ordre mondial multipolaire, le respect des valeurs traditionnelles telles que la famille, la patrie et l'identité, et le rejet de toutes les formes de décadence libérale occidentale, qui est de facto une "culture de mort". Au printemps 2020, Poutine a déclaré que tant qu'il serait au pouvoir, il n'y aurait pas de "mariage homosexuel" en Russie - une déclaration parmi d'autres.

Oui, il y a des nuances de gris et des nuances intermédiaires : des pays comme la Russie et la Hongrie ont également mis en œuvre cette mise en scène mondiale que fut le « confinement sanitaire », parfois en adoptant des mesures drastiques ; la Chine l’a pratiqué de manière encore plus coercitive. La Chine en particulier, avec son système de crédit social et l'un des régimes sanitaires les plus rigides au monde, et, là, ce n'est pas nécessairement un modèle pour nous. Personne ne devrait non plus être naïf en ce qui concerne la Russie : personne ne s'attend à ce que la Russie nous "libère". Mais si elle poussait les Américains hors d'Europe, ce serait déjà un saut quantique pour notre partie du monde, dont les conséquences seraient difficilement prévisibles ; encore plus pour la répartition globale du pouvoir.

Au fond, c'est très simple. Les Américains ont encore du mal à accepter le fait qu'ils ne jouent plus dans la cour des grands. La Chine a remplacé les Etats-Unis en tant que championne du monde des exportations, le dollar perd du terrain à grande échelle (ce qui explique la course folle à la guerre de l'Occident, qui utilisent les malheureux Ukrainiens pour arriver à ses fins) ; l'Inde et l'Arabie saoudite sont en train de passer au paiement en roubles, et en Europe, Orbán fait ses premiers pas en ce sens. Et, enfin, la Russie et la Chine disposent d'armes hypersoniques, mais non les Américains. Ce qui signifie que les Américains sont en train de passer en deuxième division. Pour l'instant, ils ont encore du mal à l'accepter. Quelques coups sensibles, de nature militaire mais aussi monétaire, pourraient éventuellement leur faire comprendre qu'ils n'ont plus rien à faire en Europe. Biden ne sera pas assez fou pour risquer une guerre nucléaire à cause de l'Ukraine - ce qui ne veut pas dire qu'il n'y aura pas d'utilisation d'armes nucléaires tactiques en Europe.

L'Europe, l'UE, va passer à l'état de décomposition active dans les prochains mois, dans un an ou dans trois ans au maximum. Poutine n'a même pas encore commencé à fermer le robinet du gaz et tend toujours la main à l'Occident. L’eurocratie de Bruxelles est assez folle pour se tirer une balle dans le pied. L'Europe s'apprête à vivre un interrègne sanglant et agité : elle pourrait échanger un hégémon contre un autre, et le retour à sa propre force est loin d'être visible. Mais la catastrophe peut ouvrir de nouvelles voies qui ne sont pas encore perceptibles aujourd'hui. En attendant, il se peut que les valeurs de l'Europe - les vraies - soient mieux conservées à Moscou qu'à Bruxelles et à Washington.

La revue de presse de CD 17 avril 2022

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La revue de presse de CD

17 avril 2022

EN VEDETTE

Outil de travail, un annuaire de six clubs d’influence

N’en déplaise aux esprits simples il n’existe pas de « grand complot mondial » avec une salle obscure ornée de flambeaux, où de petits hommes gris (vous pouvez changer la couleur selon vos goûts) se réunissent à 7, 10 ou 12 pour décider du sort du monde. Mais il existe bien des cercles d’influence dont une partie au moins des activités sont publiques et les autres privées, dans des proportions variables. Un de nos lecteurs (que nous remercions) s’est livré à une compilation des membres de certains d’entre eux. Il obtient un tableau à près de 1200 entrées dont de nombreux journalistes, certains noms peuvent se retrouver plusieurs fois s’ils appartiennent à plusieurs cercles. Nous conseillons à nos lecteurs de télécharger cette base de données qui constitue un instrument de travail parmi d’autres. Notre lecteur s’est intéressé à six cercles d’influence dont au moins quatre sont dans l’orbite du soft power américain.

Ojim.fr

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CHINE

Entre influence et reconnaissance : la Chine dans l’Afghanistan des talibans

La Chine presse discrètement ses interlocuteurs talibans de veiller à ce que ses intérêts et ses investissements en Afghanistan fassent l’objet d’un soin particulier. Et surtout que le territoire afghan se garde d’accueillir à nouveau tout membre de la minorité musulmane chinoise ouïghoure du Xinjiang, hostile au gouvernement de Pékin. Quoique les autorités chinoises se gardent officiellement d’un tel projet, ce lobbying assumé par Pékin s’apparente de plus en plus à une entreprise réfléchie de reconnaissance internationale progressive de l’Émirat islamique d’Afghanistan.

Asialyst.com

https://asialyst.com/fr/2022/04/09/chine-afghanistan-tali...

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DÉSINFORMATION/CORRUPTION

Nils Melzer, rapporteur de l’ONU sur la torture : « Journalistes, l’affaire Assange vous concerne »

Nils Melzer (photo), rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, avait refusé de rendre visite à Julian Assange avant 2019. Il était totalement d’accord avec la version des médias, jusqu’à ce qu’il commence à y regarder de plus près, à lire les rapports et rende visite à Assange. Trois ans plus tard, il écrit The Trial of Julian Assange: A Story of Persecution (Le procès de Julian Assange: L’histoire d’une persécution), un appel urgent à tous les journalistes. « Ce qui arrive à Assange vous concerne tous ».

Lecridespeuples.fr

https://lecridespeuples.fr/2022/04/09/nils-melzer-rapport...

L’Affaire des caricatures publiées par l’ambassade de Russie en France

L’ambassadeur de Russie a été convoqué par Jean-Yves Le Drian après avoir publié deux caricatures sur son compte twitter. Retour sur les pratiques de la caricature et la liberté d’expression à géométrie variable.

lesakerfrancophone.fr

https://lesakerfrancophone.fr/laffaire-des-caricatures-pu...

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Le déclin de la presse papier en chiffres

Dans le cadre de la commission d’enquête du Sénat sur la concentration des médias, où un certain nombre d’industriels (Niel, Arnault, Lagardère, Bolloré) ont été entendus, la Direction des médias et des industries culturelles (DGMIC) a publié le 7 avril 2022 son rapport sur l’évolution de la presse papier 2010/2019 et ils ne sont pas réjouissants.

ojim.fr

https://www.ojim.fr/le-declin-de-la-presse-papier-en-chif...

ÉCONOMIE

L’économie néolibérale nous rend complètement cinglés

L’économie néolibérale était censée apporter un ordre mondial utopique. Au lieu de cela, elle nous a condamnés à un stress psychologique handicapant et à un effondrement social. Comment pourrons-nous jamais nous en remettre ?

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/l-economie-neoliberale-nous-ren...

ÉNERGIES

L’Arabie saoudite dévoile ses ambitions dans l’hydrogène

Le Royaume saoudien a récemment débuté la construction de sa première unité de production d’hydrogène vert. Ce projet, qui porte le nom d’Hélios, développé par un consortium américano-saoudien, permet aux autorités saoudiennes de dévoiler leurs ambitions dans l’hydrogène, afin de devenir rapidement l’un des plus gros producteurs au monde. Cette volonté sert deux objectifs pour l’Arabie saoudite : rester un leader de premier plan sur la scène énergétique mondial et produire une énergie plus verte et décarbonée pour répondre aux enjeux climatiques. Toutefois, ce projet n’est pas le premier, l’Arabie saoudite étant déjà un exportateur d’hydrogène bleu.

Revueconflits.com

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FRANCE

Présidentielle : voter avec les classes populaires et battre Macron

Je ne pensais quand même pas devoir assister en rage, au nouveau déploiement du grand barnum destiné à animer l’entre deux tours de la présidentielle. « La grande quinzaine antifasciste à nouveau dans votre ville ! » Je me trompais, ils sont tous là, les petits marquis, les profiteurs, les obligés, les corrompus, les « artistes » subventionnés, les sportifs ingrats, les faux intellectuels, ceux qui veulent aller à la soupe, ceux qui veulent la garder, les comiques officiels, les journalistes sans morale, les fonctionnaires dévoyés, tous ceux qui portent leur « antifascisme » à la boutonnière, comme un signe extérieur de richesse. Toutes les tribunes leur sont ouvertes, car notre oligarchie devenue ploutocratie a ses méthodes : le rouleau compresseur de ses médias, les pressions et l’intimidation pour les récalcitrants, on ne veut voir qu’une tête et l’entendre clamer tout unimement : « no pasaran ! »

Vududroit.com

https://www.vududroit.com/2022/04/presidentielle-voter-av...

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Corse : les paradoxes d’une île nationaliste qui vote Le Pen/Zemmour

Comment expliquer que la Corse a placé Marine Le Pen en tête des suffrages ce dimanche soir (25,58%) tout en réservant un score élevé à Eric Zemmour (12,80%) alors même que les nationalistes sont désormais hégémoniques aux élections locales ?

Breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2022/04/13/184998/corse-les-p...

Emmanuel Macron, une comète dans la galaxie Soros ?

Quelle est la proximité idéologique entre le président de la République française, Emmanuel Macron et le milliardaire américain George Soros ? Si cette question mérite d’être posée, c’est parce que certains faits mis en lumière par l’Observatoire du journalisme en avril 2021 sont pour le moins troublants. D’un côté, un milliardaire qui ne cache pas sa stratégie d’influence libérale libertaire. De l’autre, un président de la République française qui partage de nombreuses convictions de George Soros et les met en application. Il nous a paru important de sortir de l’oubli deux articles de l’OJIM publiés l’année dernière, quelque peu remaniés, consacrés à cette question.

polemia.com

https://www.polemia.com/emmanuel-macron-une-comete-dans-l...

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GAFAM

Guerre en Ukraine : Chris Hedges censuré par YouTube

« Je n’ai reçu aucune question ni avis de la part de YouTube. J’ai tout simplement disparu. Dans les systèmes totalitaires, on existe, puis on n’existe plus. Je suppose que cela a été fait au nom de la censure à l’encontre de la propagande russe, bien que j’aie du mal à voir comment une étude détaillée de « Ulysses » ou des biographies de Susan Sontag et de J. Robert Oppenheimer peuvent avoir un quelconque rapport avec Vladimir Poutine aux yeux des censeurs les plus obtus de la Silicon Valley.

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/guerre-en-ukraine-chris-hedges-...

GÉOPOLITIQUE

Iran, le conflit ukrainien bouscule la donne. Entretien avec Thomas Flichy de La Neuville

Comprendre la guerre en Ukraine sans prendre en compte l’Iran serait occulter une partie du problème. Il se pourrait bien que les États-Unis changent en effet de stratégie vis-à-vis de la République islamique dans le but de freiner les exportations gazières russes. Dans cette soudaine recomposition géopolitique, le Professeur Thomas Flichy de La Neuville analyse dans quelle mesure le conflit ukrainien pourrait profiter à une nouvelle et inattendue émergence iranienne.

Revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/iran-le-conflit-ukrainien-b...

Ukraine : le manichéisme contre le réalisme géopolitique

Dans les années 1930, a-t-on négocié avec Hitler ? Si la réponse la plus évidente, la moins simpliste et donc par définition la moins séduisante sera l’affirmative pour ceux qui se souviennent des funestes accords de Munich, la pique adressée cette semaine par le Premier ministre polonais Mateuz Morawiecki à un président français qui ne s’est pas privé de répondre avec une saillie qui n’honore pas sa fonction montre l’incroyable manichéisme dans lequel se noie désormais la géopolitique mondiale relativement au conflit russo-ukrainien. Un manichéisme totalement contraire à l’esprit même des relations internationales.

contrepoints.org

https://www.contrepoints.org/2022/04/11/425180-ukraine-le...

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LECTURE

Titre :

Le crépuscule du monde, de Werner Herzog. Séguier, 2022.

51g2svCJI6L._SX195_.jpgPrésentation :

« Soudain, trouant le silence, une voix me demanda : ‘’Si vous ne souhaitez pas voir l’empereur, qui d’autre pourriez-vous avoir envie de rencontrer au Japon ?’’ » A cette question, Werner Herzog répondit sans hésiter : ‘’Onoda’’. Le nom, à lui seul, à l’apparence d’une énigme. En 1945, lorsque le Japon capitule, Hiroo Onod est un soldat de l’armée impériale à qui l’on a confié la défense d’une petite île des Philippines. Ignorant la défaire de son pays, retranché dans la jungle, il continuera pendant près de trente ans une guerre imaginaire où les véritables ennemis sont moins les troupes américaines qu’une nature hostile… et ses propres démons. »

Auteur :

Werner Herzog est l’un des tous derniers grands metteurs en scène vivant. Créateur d’une œuvre cinématographique immense et sans égal – Aguirre, la colère de Dieu, Fitzcarraldo, L’énigme de Kaspar Hauser, Nosferatu, fantôme de la nuit, Grizzly Man - , mélange fascinant de fiction et de documentaire, il est aussi auteur de deux livres passionnants, un récit, Sur le chemin des glaces (POL, 1988) et un entretien, Manuel de survie (Capricci, 2008)).

Extraits :

« - Vous êtes ici le seul homme à avoir été entraîné à la guerre secrète et aux

tactiques de guérilla.

  • Affirmatif, major.
  • Voici l’ordre, dit Taniguchi. Dès que nos troupes auront quitté Lubang, vous aurez pour mission de continuer à occuper cette île jusqu’au retour de l’armée impériale. Vous défendrez ce territoire selon les principes de la guérilla, quoi qu’il en coûte. Toutes les décisions, vous le prendrez seul. Vous ne serez aux ordres de personnes. Vous êtes livré à vous-même. A compter de maintenant, il n’existe plus de règles. C’est vous qui décidez des règles.

Onoda reste de marbre.

  • Oui major, affirmatif.
  • - A l’exception d’une seule règle, précise Tanigucchi. Il ne vous est pas permis de porter la main sur votre propre personne. Si vous deviez être fait prisonnier, vous vous chargerez plutôt de livrer à l’ennemi toute une série d’informations erronées. »

« La guerre de Onoda n’a aucune importance pour le cosmos, le destin des peuples, le déroulement du conflit. La guerre de Onoda est composée à partir de l’union d’un néant imaginaire et d’un rêve, mais la guerre de Onoda, conçue à partir de rien, est un événement transcendant, un de ceux qui sont extorqués à éternité. »

«  A compter de maintenant et pour deux – ou quelques instants – Onoda est une partie de la jungle en mouvement. Lorsque, une fois, il réalise qu’il ne va pas pouvoir éviter une petite troupe de soldats de l’armée philippine en train d’avancer, il s’enfouit à la dernière minute sous une couche de feuillages. Dans sa précipitation, un retardataire de la troupe lui marche sur la main sans le remarquer. »

RÉFLEXION

Les jeunes, la consommation, la mondialisation : une question d'identité

Il est très difficile de prévoir comment les jeunes vont réagir à leur crise d'identité. Comment vont-ils s'orienter ? Préféreront-ils s'abandonner au vide existentiel des temps modernes ou feront-ils de la question de l'identité le pilier de leur rédemption ?

Euro-synergies.hautefort.com

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/04/08/l...

SANTÉ/MENSONGES/LIBERTÉ

Investigations et Expertises

Je vous mets à disposition ici les résultats de mes investigations et expertises, des liens sur les documents source des essais cliniques : Vous y trouverez mon « Evaluation des pratiques méthodologiques mises en œuvre dans les essais Pfizer dans le développement de son vaccin ARN-messager contre la COVID-19 en regard des Bonnes Pratiques Cliniques » Ce rapport met en évidence les multiples biais méthodologiques invalidant les résultats de l’essai clinique de phase 3 ayant donné lieu à l’utilisation du vaccin Comirnaty ® en vie réelle.
Mes conclusions expliquent notre réalité d’aujourd’hui :
– efficacité médiocre du vaccin,
– durée de la protection de 4 mois
– effets secondaires graves nombreux et inquiétants.

Le Blog de Christine-Cotton

https://christine-cotton.1ere-page.fr/

La Doxa du Covid : récit clinique d’une manipulation

Cet essai de Laurent Mucchielli est clair, net et précis : critique et clinique ! Pas de fioritures : du concret, des faits, rien que du concret. À chaque page, trois ou quatre notes de bas de page qui viennent prouver le dire du chercheur, via un panoramique assez impressionnant de ce qui s’est publié depuis une dizaine d’années en général, et ces deux dernières en particulier, dans les journaux scientifiques et ceux de sociologie sur la santé publique.

francesoir.fr

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Le symbolisme de Pâques... et les meilleurs vœux de la rédaction !

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Le symbolisme de Pâques... et les meilleurs vœux de la rédaction !

Source: https://www.azionetradizionale.com/2022/04/17/il-simbolismo-della-pasqua-e-gli-auguri-della-redazione-2/

Si dans les Eglises orientales on se salue en disant "Christ est ressuscité", alors qu'en Occident notre voeu "Joyeuses Pâques" n'est souvent qu'une référence au déjeuner pascal et à la énième beuverie, il est donc utile, comme toujours, de retrouver la signification ancienne des symboles et des mots liés à Pâques.

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Ainsi, nous retraçons ici - en mémoire d'Alfredo Cattabiani - le sens de Pâques et de ses protagonistes, du Christ ressuscité à l'œuf et au printemps.

Et nous vous adressons nos vœux les plus sincères pour la Résurrection de Pâques, afin que renaissent en chacun de nous la Lumière et la Vraie Vie, qui, en un éclair, tueront les ténèbres et la mort qui trompent.

De la rédaction d'AzioneTradizionale.com

Le dimanche de la résurrection était autrefois appelé "Pâques aux œufs" : dans de nombreuses cathédrales, le jeudi saint, un œuf d'autruche était placé dans le tombeau rituel avec l'Eucharistie et récupéré le jour de Pâques en chantant : "Surrexit Dominus vere : alleluia !".

L'œuf est donc le symbole du Christ ressuscité et de l'espérance en la résurrection future des fidèles en lui. De plus, dans toutes les traditions, l'œuf est un symbole de naissance et de renaissance. "Omne vivum ex ovo", dit un proverbe.

Mais l'œuf, qui naît d'une vie et donne naissance à une nouvelle vie, est aussi le symbole universel du renouvellement périodique de la nature ; il convient donc pour symboliser le renouvellement de l'année astrologique à l'équinoxe de printemps. 

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Manger des œufs signifiait donc se souhaiter une bonne année.

Tous ces symbolismes ont été christianisés à la lumière du Prologue de l'Évangile de Jean qui dit : "Au commencement était le Verbe, et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu".

Il était donc facile d'imaginer l'œuf cosmique comme un symbole du Christ. Mais le Christ est aussi celui qui meurt et ressuscite ; aussi l'œuf, en tant que tombeau dans lequel se prépare une nouvelle vie destinée à venir à la lumière, ne pouvait manquer d'inspirer aux premiers chrétiens le symbole de la résurrection.

C'est pour cette raison que des œufs en marbre ont été retrouvés dans les tombes des martyrs de Rome, comme dans les tombes de Sainte Balbine et de Sainte Théodora.

Tout cela a donné naissance à la coutume de l'œuf de Pâques comme symbole de la résurrection du Christ, à tel point que dans le passé, le samedi saint, les curés bénissaient des œufs bouillis et colorés à manger le dimanche.

Dès le XIIe siècle, des œufs bénis étaient déjà offerts dans de nombreux pays européens, tandis que la noblesse échangeait des œufs en argent ou en or ornés de pierres précieuses, de perles et d'émaux. Plus tard, est venue la coutume de cacher une surprise dans l'œuf de Pâques.

Au XVIe siècle, François Ier, roi de France, se voit offrir une coquille d'œuf contenant une gravure sur bois de la Passion. La coutume se répandit rapidement dans la France du Roi Soleil, à qui les courtisans offraient des œufs raffinés le dimanche de Pâques : les plus grands peintres de l'époque les peignaient avec amour.

Au XVIIIe siècle, Louis XV offre à Madame du Barry un grand œuf décoré contenant une statuette de Cupidon créée par l'orfèvre de la cour.

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Aujourd'hui, la tradition de colorier et de donner des œufs bénis, vivante dans toute la chrétienté, a survécu sécularisée dans les gâteaux de Pâques avec des œufs durs, dans les œufs en chocolat industriels et dans des communautés limitées comme celle de Piana di Albanesi, dans la province de Palerme, où les œufs peints en jaune ou en rouge qui ont été bénis à l'église sont distribués dans tous les foyers.

Mais dans le christianisme orthodoxe, contrairement à l'Occident, la signification sacrée attachée au don d'un œuf n'a jamais faibli.

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En Russie, on l'appelle pysanky, du verbe pysaty, "écrire", car les symboles sont dessinés sur la coquille authentique ou en bois le samedi soir : la décoration se déroule en silence, parfois interrompue par des prières et des chants anciens. La décoration se fait en silence, interrompue parfois par des prières et des chants anciens. Il s'agit probablement d'un rite très ancien lié au réveil du printemps, puis christianisé. 

Le matin de Pâques, chaque famille apporte son panier d'œufs peints, recouverts d'une lingette rituelle, à l'église pour la bénédiction.

Selon une légende ukrainienne, le diable est lié par une chaîne composée d'autant de maillons que d'œufs décorés au cours de douze mois.

11:12 Publié dans Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pâques, traditions, traditionalisme, oeufs de pâques | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 16 avril 2022

La crise ukrainienne à travers les yeux du monde arabe

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La crise ukrainienne à travers les yeux du monde arabe

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2022/04/15/ukrainan-kriisi-arabimaailman-silmin/

En Finlande et dans d'autres pays de l'UE, les événements en Ukraine sont suivis de près par les journalistes des médias grand public et les émissions d'information. La couverture officielle de YLE (la radio-télévision publique en Finlande) est d'un ton monocorde et recycle principalement la propagande produite par l'Occident et le régime ukrainien.

En Asie de l'Ouest (le "Moyen-Orient" en termes occidentaux), l'opération spéciale de la Russie est également très présente dans les médias sociaux de la région. Les analystes locaux surveillent également la façon dont l'Internet réagit à ces événements et leurs implications dans différents domaines de la vie et de la politique.

Cependant, le mélange de préférences et d'opinions politiques et idéologiques est différent de celui de l'Occident. Les accusations critiquant les événements en Ukraine sont davantage dirigées contre les États-Unis et leurs alliés que contre la Russie.

"Il y a plusieurs raisons à ce ton", explique le chercheur Yuri Zinin. "L'une des plus importantes est que la perception de la réalité actuelle par les gens est influencée par leurs souvenirs de la domination passée de l'Occident sur la région arabe. Les communautés locales en ont fait l'amère expérience, ce qui, d'une manière ou d'une autre, alimente des blessures qui n'ont jamais guéri."

L'"anti-occidentalisme" qui s'est accumulé au fil des décennies prend un nouveau sens. C'est pourquoi "beaucoup dans le monde arabe n'acceptent pas la rhétorique américaine sur le droit international et la souveraineté des États à la lumière des événements en Ukraine", suggère Zinin. Les violations de la souveraineté et des droits nationaux en Palestine, en Irak et en Libye sont souvent citées comme point de comparaison.

Le régime actuel de Kiev a également tenté de rejoindre l'Occident dirigé par les États-Unis. Même le vocabulaire du régime ukrainien est "emprunté aux ennemis de la Russie". Les personnes qui suivent le conflit dans le monde arabe se demandent donc "si les nationalistes ukrainiens combattent la Russie pour se défendre ou s'ils se précipitent simplement au secours des États-Unis et de l'OTAN".

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Dans les médias sociaux du monde arabe, les événements en Ukraine et les réactions de l'Occident sont également comparés aux conflits dans leur propre région, qui n'ont pas reçu la même réponse internationale, et les Occidentaux ne sont pas aussi réceptifs aux victimes de conflits plus éloignés, voire pas du tout.

"La vaste campagne médiatique menée par l'Occident en faveur du gouvernement de Kiev suscite des doutes chez les Arabes quant à sa base morale", déclare Zinin. "Les documents et les reportages télévisés qui poussent la souffrance des Ukrainiens afin de susciter la sympathie du public sont si agressifs qu'ils créent l'effet et la réaction exactement opposés parmi les utilisateurs des médias sociaux."

Selon les utilisateurs des médias sociaux, les médias mondiaux et le cyberespace font beaucoup de bruit autour de la guerre en Ukraine, mais ce qui se passe réellement est bien plus réduit au silence et dissimulé. La compréhension des internautes est largement colorée par la production des désinformateurs et falsificateurs ukrainiens et occidentaux.

Le site arabe Misbar, qui depuis 2019 s'est spécialisé dans la recherche et la dénonciation de faux fichiers dans les communautés en ligne, a été actif à cet égard. Ces dernières semaines, elle a enquêté et découvert un certain nombre de cas de ce type en Ukraine, sur la base de sources documentaires vérifiées.

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Il s'agit notamment d'images publiées de maisons incendiées par l'armée russe dans la ville de Sumy, au nord-est de l'Ukraine. Selon Misbar, ce ne sont rien d'autre que des photos de presse prises le 2 février 2020 après un incendie dans la ville d'Irshava, dans la région de Taka-Karpattia, en Ukraine occidentale.

Un autre exemple est une vidéo de prétendues attaques ukrainiennes sur des véhicules blindés russes à Kiev. Là encore, il s'agissait d'un faux : il s'agissait d'images de manifestants ukrainiens lançant des cocktails Molotov sur les troupes ukrainiennes lors de manifestations en 2014.

La publication émiratie fait référence au président ukrainien qui, avec le soutien de l'équipe occidentale, a gonflé le nombre de victimes civiles de l'opération russe. Il a également été établi que de nombreuses photographies citées comme preuves de "crimes de guerre" sont des montages, c'est-à-dire des prises de vue successives d'une même situation. Le journal algérien Le Jeune Indépendant a qualifié le massacre de Boutcha de "nouveau mensonge des atlantistes pour dénigrer la Russie".

Le monde arabe exprime ainsi "sa méfiance à l'égard du système international, qui a contribué à la crise dans la région et s'est précipité au secours de l'Ukraine, tout en ignorant les choses négatives qui se sont produites ou se produisent encore dans de nombreux pays arabes".

Selon le journal saoudien Okaz, les Arabes et leurs élites culturelles penchent vers la Russie sur la question ukrainienne. Toutefois, j'estimerais personnellement que leur attitude est également une indication de la réussite du Kremlin dans l'établissement de relations avec ses partenaires arabes au cours de la dernière décennie.

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Moscou entretient des relations particulièrement étroites avec les EAU et les deux pays coopèrent dans le cadre de jeux à l'étranger en Afrique et en Asie occidentale. Dans le même temps, les relations entre les Émirats et d'autres pays de la région et les États-Unis ont été tendues par les récents changements de politique sous Biden et l'administration précédente.

Les pays arabes considèrent la détérioration de leurs relations avec l'Occident comme une tendance plutôt que comme une série de décisions et d'événements individuels. La Russie est considérée comme un partenaire plus durable et plus fiable à long terme que les États-Unis.

"L'opération de la Russie en Ukraine est un cas particulier", déclare un écrivain arabe. Il est devenu "l'étincelle tant attendue qui contribuera au processus de sortie de l'ère d'incertitude ou de volatilité politique que le monde a connue toutes ces années".

L'ère américaine s'est caractérisée par "un Occident collectif poursuivant des politiques hégémoniques, pillant les biens nationaux et écrasant la volonté des nations par ses sanctions, et d'autres pôles qui ont peu à peu construit leurs économies et leurs institutions pour prendre leur place dans l'équilibre international des forces en fonction de leur potentiel croissant".

Cependant, ces nouveaux pôles géopolitiques se sont heurtés à chaque fois à la détermination de l'Occident à maintenir le statu quo et à conserver son propre ordre comme seul centre de pouvoir dans le monde, au lieu d'un système plus pluraliste et équitable.

"Le fait que les relations se soient maintenant envenimées et soient devenues plus turbulentes dans d'autres parties du monde que la seule Ukraine est un signe de changements imminents pour corriger les dysfonctionnements du système dans lequel le monde a vécu ces dernières décennies", prédit Zinin.

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France. La somme ne fait pas le total

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France. La somme ne fait pas le total

par Roberto Pecchioli

Source: https://www.ideeazione.com/francia-la-somma-non-fa-il-totale/

Le premier tour des élections présidentielles françaises évoque un vers du comique italien Totò (1898-1967) : c'est la somme qui fait le total. Dans ce cas, par la négative ; la somme ne fait pas le total, car une fois de plus, une anomalie des démocraties libérales autoproclamées s'est manifestée : la majorité des citoyens a voté contre le système, mais le système a gagné. Le 24 avril, cette vérité sera confirmée par le second tour entre Emmanuel Macron, le président en exercice, jeune gentleman de l'écurie Rothschild prêté à la politique, et Marine Le Pen, son adversaire, décrite comme une représentante de l'extrême droite.

Le schéma est le même que lors des élections précédentes et le résultat sera le même, même s'il est certain que la différence de voix entre l'homme de l'oligarchie et la femme de l'opposition sera beaucoup plus faible qu'en 2017, lorsque le schéma classique de la politique - pas seulement française - a fonctionné à la perfection, à savoir la conventio ad excludendum, le cordon sanitaire contre Le Pen, qui avait déjà été testé jadis contre son père Jean Marie.

Un coup d'œil aux chiffres : Macron a obtenu un peu plus de 27%, Le Pen plus de 23%, dépassant le troisième venu, Jean Luc Mélenchon, champion de la gauche sociale, d'environ un demi-million de voix. La défaite des partis politiques qui ont dominé la scène transalpine pendant des décennies a été dévastatrice : un humiliant 4,7 % pour la représentante de la droite modérée, Valérie Pecresse, et même 1,7 % pour Anne Hidalgo, la maire socialiste de Paris. Les résultats des écologistes et du candidat communiste, fidèle allié des socialistes, ont été très modestes. En revanche, le résultat du candidat rural conservateur, Jean Lassalle, est flatteur, avec un score peu impressionnant de 3 % des voix. Les 7 % recueillis par le polémiste d'extrême droite Eric Zemmour, un juif d'origine maghrébine, qui a mobilisé un nombre considérable de jeunes et imposé plusieurs thèmes de campagne, sont contradictoires.

Les deux candidats ultra-communistes ont fait chou blanc, avec un résidu de 2% pour le souverainiste Dupont Aignan, le seul à s'être rangé du côté de Marine Le Pen au second tour il y a cinq ans. Le taux d'abstention a été intéressant, atteignant 28% - un record - auquel il faut ajouter un nombre ostensible de citoyens non inscrits sur les listes électorales, une mesure préventive que la France partage avec les Etats-Unis.

Un Français sur trois n'a pas voté, et bien plus de 50% (Le Pen, Mélenchon, Lassalle, Dupont Aignan, l'ultra-gauche, certains partisans de Zemmour et les communistes "officiels") sont allés aux forces anti-establishment. Cependant, ceux-ci perdront, car la somme ne fait pas le total, c'est-à-dire qu'il est impensable que les opposants à Macron et à l'establishment convergent massivement vers la candidature de Le Pen. Au contraire, le réflexe conditionné de barrer la route à l'extrême droite a déterminé - alors que le dépouillement est encore en cours - le déploiement unanime des communistes, des socialistes, des écologistes et de la droite modérée et étourdie en faveur de Macron. Le soutien attendu de l'ancien président Sarkozy à son successeur est également arrivé.

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De manière cryptique, Mélenchon a exhorté les gens à ne pas voter pour Marine Le Pen, mais a évité de prendre le parti de Macron. Il semble que beaucoup ne l'écouteront pas: un tiers de ses électeurs serait prêt à voter pour Le Pen. Quoi qu'il en soit, la victoire de Macron ne fait aucun doute, même si l'écart ne sera pas énorme. Le système de pouvoir gagnera malgré le fait qu'il soit manifestement minoritaire parmi les citoyens. Un scénario similaire à celui de l'Italie, ressemblant de plus en plus à celui de l'Espagne et de l'Allemagne. Les anciennes "grandes" familles politiques du vingtième siècle qui se partageaient le pouvoir en faisant semblant de se le disputer (socialistes, popularistes démocrates-chrétiens, libéraux) ont de moins en moins d'audience dans l'opinion publique, mais elles parviennent à maintenir leur emprise sur la société parce que leurs adversaires sont politiquement incompatibles, querelleurs, en proie à des conflits passés et à des idiosyncrasies rédhibitoires. Diviser pour mieux régner, la plus ancienne leçon de pouvoir.

L'addition ne fait pas le compte et des millions de personnes, en France, en Italie et partout ailleurs, se réfugient dans l'abstention, dans l'indifférence rancunière, dans la radicalisation verbeuse. Pensons, en clé italienne, à l'immense déception de la grillina, qui a rassemblé en 2018 un électeur sur trois et a été instantanément apprivoisée et cooptée dans les mécanismes du pouvoir. Le sort de la Ligue, devenue l'alliée du gouvernement Draghi, le vice-roi des puissances fortes dont le métier est de liquider ce qui reste de la souveraineté, de l'économie et de la nation, n'est pas différent.

Les réactions italiennes au résultat des élections sont significatives : seul Salvini est favorable à Le Pen, tandis que Berlusconi fait l'éloge du "libéral et modéré" Macron et que Giorgia Meloni se déclare neutre, attendant le parti de Zemmour et la minorité gaulliste anti-Macron. Un intellectuel conservateur, Marco Gervasoni, souhaite la victoire de Macron parce qu'il est de droite.  Regardons les choses en face : il a raison. L'ancien fonctionnaire de Rothschild et ancien ministre socialiste est le produit d'une intuition de Giovanni Agnelli : la meilleure droite est le centre-gauche. Le droit de l'argent et la gauche de la morale se rencontrent au centre pour les affaires, comme l'a écrit un intellectuel socialiste, Jean-Claude Michéa. Macron est le croisement parfait entre la riche gauche "progressiste" - caviar, dit-on en France - et la vraie droite - libérale, atlantiste, mercatiste.

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Il est désormais inconvenant de considérer Marine Le Pen comme "d'extrême droite". Elle est la favorite des ouvriers français et des classes populaires: son programme social est tout sauf libéral, et ses mots d'ordre très clairs sur l'immigration et la culture de l'effacement sont moins radicaux que ceux de Zemmour, dont la base électorale est constituée des classes moyennes supérieures. Le schéma déjà vécu en Amérique se répète: Trump représente les valeurs morales traditionnelles et les grands secteurs territoriaux et sociaux des perdants de la mondialisation; les Démocrates représentent les classes supérieures urbaines et le radicalisme sur les questions éthiques et sociales.

Le 10 avril 2022, la France a montré que le schéma gauche-droite ne signifie presque plus rien. Elle est utilisée par le pouvoir en place pour se maintenir en place tout en diabolisant l'adversaire, en exerçant un chantage et en ralliant à lui les milieux et les classes dont les intérêts divergent des politiques concrètes mises en œuvre par les groupes dirigeants, qu'ils soient de centre-gauche ou de centre-droit. Le système de parti unique l'emporte en raison de l'incapacité persistante à trouver un terrain d'entente pour une vaste opposition à la fois politique, sociale, éthique et fondée sur des valeurs.

Le schéma est évident pour toute personne qui observe la réalité sans œillères: pas de droite/gauche, mais du haut/bas, centre/périphérie, exclus/gratifiés, villes/campagnes et banlieues, gagnants/perdants de la mondialisation, mondialistes/souverainistes et identitaires. En ce sens, les électeurs de Macron seront principalement des fonctionnaires, des professions libérales, des travailleurs de haut niveau dans les nouvelles technologies, des employés des secteurs économiques "forts" et des grandes villes. Le reste de la société est déjà son ennemi, comme le montre la révolte des gilets jaunes, les vagues de grèves et de manifestations populaires, l'opposition farouche à l'augmentation de l'âge de la retraite.

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Chaque nuit, la France est secouée par des émeutes, tandis que dans au moins sept ou huit cents quartiers (les banlieues), la police n'entre plus, soustraite de fait à l'autorité de la fière République. La nuit des élections a vu la dévastation de plusieurs villes, démontrant comment le modèle jacobin d'assimilation de grandes masses non-européennes a échoué de manière retentissante, tout comme les tentatives d'intégration. La France est aujourd'hui ce que l'Italie sera très bientôt.

La géopolitique joue un rôle important. La France aime se considérer comme une grande puissance sans en être une, mais elle conserve un certain degré d'indépendance internationale. Macron n'a pas épousé sans critique la ligne américaine sur le conflit ukrainien et a besoin d'accords avec l'avancée de l'axe russo-chinois en Afrique, où les intérêts français dans les pays dont la monnaie est encore le franc colonial émis par Paris sont énormes. Marine Le Pen interprète un sentiment répandu en promettant, en cas de victoire, de sortir le pays du commandement intégré de l'OTAN, une position gaulliste.

Cependant, la question à se poser est autre: la chef du Rassemblement national peut-elle vraiment devenir président ? La réponse est non. L'Europe, le système atlantique, l'oligarchie non élue de l'Occident peut tolérer - avec un agacement croissant - la petite faction hongroise, supporter l'anomalie polonaise dans une clé anti-russe, mais elle ne peut accepter une France désalignée, souverainiste et protagoniste de politiques migratoires, financières et sociales qui ne sont pas conformes à ses intérêts d'oligarchie. Une victoire de Le Pen plongerait probablement la France dans un climat insurrectionnel dont le feu serait attisé par les puissances financières, économiques et militaires mondialistes.

Cela signifie que la France, même fière, est un pays à souveraineté limitée et que la démocratie - c'est-à-dire la participation et la décision du peuple sur son propre destin - n'est qu'un vain mot. Cela fonctionne tant que celui qui leur plaît gagne, cela devient de l'extrémisme, du populisme et tout court du fascisme ou du communisme si un peuple décide d'une manière qui diffère de la volonté de ceux qui dominent le monde et contrôlent la presse, l'économie, la culture, la finance et la politique. Sous Macron, le fonds géant Black Rock a pénétré en France avec un succès retentissant, tout comme un géant du conseil, McKinsey.

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Déjà soupçonné d'avoir piloté la campagne présidentielle de 2017 en fonction des intérêts américains, le groupe a remporté des contrats d'une valeur de 2,3 milliards d'euros pour travailler sur des questions allant de la réforme des retraites à la numérisation. Malgré la force et la qualité traditionnelles des cadres supérieurs français, Macron a privatisé les grands choix, qui plus est à une société étrangère. Mc Kinsey est également accusé de ne pas avoir payé un centime d'impôt en France: c'est probable, car les sociétés de services - déterritorialisées comme les Gafam - parviennent à échapper à l'impôt partout, avec un réseau de sociétés, de facturation carrousel et de bureaux fictifs dans les paradis fiscaux. Selon le politologue français Thierry Meyssan, "le groupe McKinsey a réalisé un véritable exploit en élisant à la présidence un homme politique inexpérimenté afin de détruire la société française".

McKinsey et le Boston Consulting Group sont devenus les conseillers du gouvernement en matière de politique de défense, de climat et de migration, ainsi que dans le développement de stratégies épidémiques. Il y en aurait assez pour évincer le président, qui est également soupçonné d'évasion fiscale pendant les périodes où il a travaillé comme intermédiaire d'affaires de haut niveau. Des rumeurs, des soupçons, peut-être, qui s'abattraient pourtant comme des rochers sur le candidat Macron s'il n'était pas l'élu du système. En 2017, un scandale a été monté contre son adversaire le plus accrédité, le gaulliste François Fillon, qui n'a abouti à rien, l'accusation d'avoir employé sa femme comme eurodéputée avec un salaire de commis. La route était pavée pour l'enfant prodige.

Croyons-nous encore à la volonté du peuple, à la régularité matérielle des élections, à la possibilité réelle que les demandes du peuple l'emportent, quelles qu'elles soient ?  Si l'alternative n'est pas au goût des échelons supérieurs, ils organisent une campagne de diabolisation. Cela a fonctionné pendant des années, cela fonctionnera également au second tour entre Macron et Le Pen. Une fois encore, la somme ne s'additionnera pas. Mais c'est peut-être la dernière fois : bientôt la vague, d'où qu'elle vienne, qui l'incarne, ne pourra plus l'arrêter. Ou ils suspendront les délais inutiles, les procédures fatiguées de "leur" démocratie. En Italie, ils l'ont déjà fait.

Le carrefour de l'histoire au cœur de l'Asie

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Le carrefour de l'histoire au cœur de l'Asie

Un carrefour de peuples et d'histoires, l'Ouzbékistan au centre de l'Eurasie. Et avant l'épopée de Samarcande, c'était grâce aux exploits d'Alexandre le Grand

Andrea Muratore

Source: https://www.ilgiornale.it/news/cultura/alessandro-magno-oggi-luzbekistan-crocevia-storia-2023581.html

D'Alexandre le Grand à aujourd'hui, l'Ouzbékistan au carrefour de l'histoire

Au cœur de l'Eurasie se trouve une nation qui a été un carrefour de peuples, d'armées, de cultures, de religions et d'identités tout au long de son histoire : l'Ouzbékistan. L'Ouzbékistan est un pays qui vit encore comme un kaléidoscope d'identités après la mort du "père du pays" Islam Karimov, à la frontière entre l'ancien espace soviétique, l'Afghanistan, la Chine et le cœur de l'Asie centrale, et qui a eu une histoire tout aussi riche dans son passé.

L'Ouzbékistan est en fait le pays de Samarcande, le "rêve turquoise", le carrefour des caravanes des anciennes Routes de la soie, des routes commerciales sur lesquelles circulaient les hommes, les marchandises et les idées. Mais c'est aussi un pays qui a eu un très noble père dans son histoire: Alexandre le Grand. C'est le Macédonien qui a été le premier à labourer les étendues sablonneuses, les plateaux et les terres aujourd'hui gouvernées par l'ancienne république soviétique, pour faire de l'Ouzbékistan d'aujourd'hui le pôle d'attraction des hommes, des peuples et des identités qui en feront un élément constitutif de la civilisation humaine.

Vittorio Russo le rappelle bien dans son livre intitulé L'Uzbekistan di Alessandro Magno (L'Uzbekistan d'Alexandre le Grand), un essai publié par Sandro Teti dans lequel, entre histoire et mythe, présent et antiquité, se dessine une véritable radiographie de ces terres. Vittorio Russo, capitaine et navigateur au long cours depuis des décennies, a également travaillé de manière intensive en tant que journaliste et essayiste. Dans son essai sur l'Ouzbékistan, il entreprend un voyage à travers la géographie historique d'un pays où passé et présent se confrontent. Notamment parce que ce sont les Grecs menés par le Macédonien au 4e siècle avant J.-C. qui ont donné leur nom à de nombreux points de repère de l'Ouzbékistan.

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Les régions de Khwarizim, note Russo, "les Grecs et les Macédoniens d'Alexandre les appelaient Corasmia. Ces terres se trouvent sur les bords méridionaux de la mer d'Aral, le long du cours du fleuve-mer Amu Darya, appelé ainsi depuis les temps anciens parce qu'il était autrefois aussi illimité qu'une mer. C'est aussi la terre où les auteurs anciens ont placé le royaume des Amazones tueuses d'hommes. Le fleuve est également le même que l'ancien Oxus, dont Plutarque a écrit au premier siècle de notre ère qu'il avait "des eaux douces qui oignent la peau". La guerre d'Alexandre contre les Perses, l'Anabasis d'Alexandre racontée par Arrien, s'est déroulée sur l'Oxus, et le projet de "fusionner les peuples et les civilisations dans un destin commun, de mélanger les vies, les coutumes, les mariages et les habitudes" a été réalisé sur ses rives. Une idée unificatrice qui a favorisé un syncrétisme des civilisations, comme en témoignent le lien profond entre les cultures grecque, bouddhiste et sogdienne de l'ère post-macédonienne et le profond attrait qu'exercera, dès l'époque macédonienne, la terre de l'actuel Ouzbékistan. Selon Russo, "l'objectif d'Alexandre" était bien plus pragmatique au départ, "gouverner les peuples soumis à l'aide des structures administratives qu'il avait trouvées", tandis que "cet unitarisme harmonieux" des cultures auquel la vision classique fait référence était essentiellement un dérivé.

En fait, dans un voyage qui se déroule entre les villes contemporaines, de Tachkent à Boysun, le souvenir de la catastrophe de la mer d'Aral à l'époque soviétique et les pensées du passé, l'Alexandre le Grand qui émerge du livre de Russo est très loin de l'image oléographique véhiculée par les nombreux ouvrages, souvent pseudo-historiques, écrits à son sujet : le héros invincible immortalisé dans les marbres de Lysippe cède la place à l'ivrogne meurtrier, au fanfaron, à l'exterminateur de peuples superstitieux et cynique, mais c'est précisément dans l'actuel Ouzbékistan qu'il a vu la difficile réduction de ses diverses natures à une seule entité. Le guerrier féroce, qui a détruit l'Empire perse ; le souverain attentif au respect de l'ennemi, qui a vaincu et tué l'usurpateur Bessus, qui avait fait assassiner le Roi des Rois, et ennemi des Macédoniens, Darius III, le dernier souverain de la Perse ; le chef qui s'est imaginé comme un nouvel Ulysse, se déplaçant à travers des terres labourées plus tard par d'autres conquérants, des mers et des montagnes.

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Et ce n'est que grâce à la centralité dans l'histoire donnée à la terre, étudiée par Russo, par le passage d'Alexandre, cause de l'essor ultérieur de Samarcande, que l'Ouzbékistan d'aujourd'hui a pu être un centre d'attraction humain et culturel pour le futur: le centre de la philosophie de la civilisation islamique médiévale avec la pensée d'Avicenne ; la capitale des sciences grâce à la promotion du souverain Ulugh Beg ; et surtout, le pôle politique de rayonnement d'un pouvoir qui aimait se penser universel avec l'épopée de Timur, "Tamerlan" pour nous, qui depuis Samarcande a voulu construire un empire qui entre les XIVe et XVe siècles entendait se donner des connotations universelles. Faisant référence dans la lettre à l'empire mongol de Gengis Khan mais, en fait, regardant surtout le Macédonien et son objectif de construire l'unité dans la complexité. Faire revivre et transformer par l'art, l'architecture, la culture et la force politique les terres de l'actuel Ouzbékistan en un véritable "empire" de Samarkand. C'est toujours l'un des points de repère pour comprendre la civilisation antique et le carrefour des routes des peuples d'Europe et d'Asie. L'Ouzbékistan, qui a été le théâtre des raids macédoniens, est un carrefour décisif.

Un autre ouvrage de Vittorio Russo:

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Journaloperies

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Journaloperies

par Georges FELTIN-TRACOL

La guerre en Ukraine charrie comme tous les conflits son flot inévitable de fausses informations et de propagande tant du côté de l’agresseur russe que de l’agressé ukrainien. Dans ces circonstances tragiques, le système médiatique occidental d’occupation mentale n’hésite pas à tordre la réalité ou à créer des faits imaginaires afin d’émouvoir les masses crédules. La découverte de charniers dans la banlieue de Kyïv devrait inciter ce petit monde médiatique à la plus grande prudence. A-t-il déjà oublié l’affaire des couveuses de Koweït-Ville débranchées en 1990 par des soldats irakiens ? Cette information traumatisante se révéla un mensonge fomenté dans le cadre d’une intense guerre psychologique contre l’Irak. Et que penser du précédent de Timișoara en Roumanie ? L’exposition médiatique de nombreux cadavres d’hommes, de femmes et d’enfants provoqua la chute de Nicolae Ceaușescu à Noël 1989. On apprit plus tard que les dépouilles sortaient des morgues locales. La manipulation macabre revenait au KGB gorbatchévien ainsi qu’aux agents pro-soviétiques de la Securitate.

La présente narration journalistique ne respecte aucune déontologie. Les officines occidentales de désinformation le démontrent tous les jours. Le constatant en direct, le gouvernement militaire malien vient de suspendre la diffusion sur son territoire de France 24 et de RFI (Radio France Internationale) accusées de soutenir des allégations fausses. Cette décision légitime scandalise le gouvernement hexagonal et les journalistes du sérail qui, en revanche, se félicitent du bannissement dans toute l’Union dite européenne des réseaux de RT et de Sputnik dès le 1er mars 2022.

La Commission de Bruxelles a pour l’occasion outrepassé ses droits et violé l’accord audio-visuel signé avec l’autorité française compétente en excluant ces deux entreprises médiatiques. Malgré une audience plus que limitée, Sputnik et RT France travailleraient l’opinion publique au même titre que CNN, France 24, Radio Free Europe - Radio Liberty ou la BBC World Service. Cette censure extra-légale n’offusque pas les habituels dévots de la liberté d’expression à sens unique.

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Véritable expert de l’enfumage élevé au rang d’œuvre d’art, le quotidien Le Monde s’associe avec d’autres organes de presse occidentaux afin de révéler l’ensemble des biens détenus en Europe, en Amérique du Nord et en Océanie par Vladimir Poutine, son entourage et les oligarques russes. Il est en revanche étrange qu’aucun journaliste du Système ne se penche sur le patrimoine modeste d’Emmanuel Macron. Le « super-banquier » élyséen ne serait-il qu’un smicard contrarié ? Ce manque de curiosité surprend. Les grands groupes de presse pourraient aussi se saisir de l’incroyable « McKinseygate » s’ils n’étaient pas la propriété de ploutocrates liés aux commandes publiques. Il y a cinq ans, l’emploi fictif de Pénélope Fillon et les costumes de son mari suscitaient la mobilisation totale des journalistes et l’intervention rapide du Parquet national financier (PNF). Pour le « McKinseygate », le PNF vient à peine d’ouvrir une enquête préliminaire. Ne voudrait-il pas nuire à la réélection du candidat – président ? Peut-on encore croire à l’indépendance de la justice et des magistrats ?

Très en pointe en 2017 contre François Fillon, Le Canard Enchaîné s’écarte de ce scandale. Le palmipède imprimé préfère harceler Marine Le Pen, Éric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon plutôt que dénoncer le pillage organisé  méthodique de l’État par la caste mondialiste auquel il appartient.

Obsédés par l’extrême droite, les « Laurel et Hardy » guère comiques d’un quotidien gaucho-bancaire et la jeune inquisitrice d’un titre vespéral habitué aux articles spécieux quasi-psychotiques, vivent paradoxalement de la persistance de la supposée « bête immonde ». Sans elle, ils pointeraient à Pôle Emploi… Avec une rare mauvaise foi, ils pratiquent volontiers l’amalgame. Un tragique fait-divers, à savoir le meurtre de l’ancien joueur de rugby argentin, Federico Martín Aramburú, dans la nuit du 18 au 19 mars dernier dans le centre de Paris, permet à la meute journalistique de donner l’identité des personnes suspectées, de publier leur visage et d’insister sur leur militantisme passé au GUD (Groupe Union Défense) comme si la sanglante altercation avait eu une connotation politique. Pourquoi les officines de presse ne procèdent-elles pas de même pour les trafiquants de drogue, les délinquants du quotidien et les violeurs ? C’est à se demander si un militant identitaire urinant dans un jardin public à 2 h du matin ne commettrait pas un crime contre l’humanité...

Le 16 février 2022, le journal télévisé de France 2, dans le cadre de « L’Œil du 20 heures », diffusait un reportage tourné en caméra caché aux dépens d’Academia Christiana que surveilleraient les services de renseignement. Pour quelle raison maligne ? Les six minutes malhonnêtes chargent une sympathique et efficace association catholique identitaire culturelle et métapolitique. Le reportage proteste qu’une école hors contrat réservée aux garçons en Normandie accueillit les premières universités d’été d’Academia Christiana. Les résultats exceptionnels aux examens nationaux écrasent les établissements publics des environs en dépit de leurs soins pédagogiques palliatifs avancés. Il s’indigne par ailleurs qu’un médecin généraliste ne prescrive pas aux adolescentes la pilule contraceptive dont le rejet dans les eaux affecte les écosystèmes et les organismes vivants. Plutôt qu’accuser ce médecin, n’aurait-il pas dû cibler la pornographie qui assaille en permanence une jeunesse lobotomisée par l’« enseignement de l’ignorance » ?

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Le président d’Academia Christiana, Victor Aubert (photo), a dès le lendemain réagi aux attaques de ce reportage excrémentiel. Grâce aux réseaux sociaux, il a su contourner le refus inacceptable de France 2 de lui donner un droit de réponse. Ce n’est ni la première, ni la dernière fois que les « flics de l’information triturée » versent dans la « journaloperie » ordinaire. Sans tomber dans la paranoïa, restons vigilants, tenons notre langue et montrons tout notre mépris aux mercenaires du mensonge médiatique éprouvé. 

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 28, mise en ligne le 13 avril 2022 sur Radio Méridien Zéro.

vendredi, 15 avril 2022

Les barres de combustible à l'uranium - le monopole énergétique caché de la Russie

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Les barres de combustible à l'uranium - le monopole énergétique caché de la Russie

Auteur : U.K.

Source: https://zurzeit.at/index.php/uranbrennstaebe-russlands-verdecktes-energiemonopol/

Même si l'Autriche n'a jamais eu de centrale nucléaire en service et que l'Allemagne prévoit de fermer ses trois dernières centrales nucléaires à la fin de l'année, l'électricité nucléaire produite par des centrales de conception russe est une source d'énergie indispensable pour 100 millions de personnes dans les pays de l'Est de l'UE.

Dans les pays de l'ancien bloc de l'Est, mais aussi en Finlande, les réacteurs nucléaires à eau pressurisée de la série VVER, développés à l'époque soviétique, fournissent environ 40% de l'énergie électrique dont ces pays ont besoin. Mais ailleurs aussi, comme en Chine, en Turquie, en Inde, en Iran et bientôt au Bangladesh, les réacteurs VVER russes produisent de l'énergie électrique pour la charge de base.

Mais contrairement à une centrale à charbon conventionnelle, qui ne se soucie pas de savoir si le combustible est pelleté dans la chaudière depuis la Pologne, la Russie ou l'Australie, les réacteurs nucléaires nécessitent des barres de combustible à l'uranium adaptées dans les moindres détails à chaque type de réacteur. Ces barres de combustible sont des composants mécaniques de précision dans lesquels des pastilles céramiques d'uranium légèrement enrichi sont placées dans des réseaux de barres de zirconium, avec des tolérances de l'ordre du centième de millimètre.

La production doit respecter des règles réglementaires très strictes, notamment pour s'assurer que le matériau fissile ne puisse pas être réutilisé ultérieurement à des fins militaires. En général, le processus d'obtention d'une licence internationale pour un fabricant de barres de combustible dure environ cinq ans, et peu de pays dans le monde disposent de l'infrastructure et de la technologie nécessaires.

C'est ainsi que les réacteurs VVER actuellement en service, d'une puissance de 440 à 1.200 mégawatts, ne peuvent fonctionner qu'avec des barres de combustible fabriquées par TVEL, filiale de Rosatom, dans ses usines d'Elektrostal près de Moscou et de Novossibirsk. Certes, le groupe américain Westinghouse fabrique désormais des barres de combustible compatibles, qui sont également utilisées dans certaines centrales VVER en Ukraine. Mais même au sein d'une gamme de modèles, les barres de combustible ne peuvent pas être échangées à volonté, et les répliques américaines sont beaucoup plus chères que les originales de Rosatom.

Il n'y a donc pas d'alternative pour les exploitants de centrales en Europe de l'Est s'ils ne veulent pas rester dans l'obscurité. Même les politiciens responsables l'ont reconnu et n'ont pas encore inscrit la technologie nucléaire russe sur la liste des interdictions.

D'ailleurs, le renchérissement général des matières premières énergétiques n'épargne pas le minerai d'uranium brut : le prix du minerai d'uranium au Chicago Mercantile Exchange a triplé au cours des deux dernières années pour atteindre actuellement 63,5 dollars par livre américaine (environ 0,45 kg), après avoir oscillé entre 20 et 25 dollars pendant une décennie. La moitié de cette hausse s'est produite au cours des quelques semaines qui ont suivi la fin du conflit ukrainien.

18:23 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : énergie, uranium, russie, europe, affaires européennes | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

L'Europe est depuis longtemps un continent sans Dieu

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L'Europe est depuis longtemps un continent sans Dieu

Andreas Mölzer

Source: https://andreasmoelzer.wordpress.com/2022/04/13/vom-ende-des-christentums/

Les églises d'Europe sont vides. Certes, les cathédrales, les cathédrales impériales romanes et défensives du Rhin, les phares gothiques de Reims et Chartres, Ulm et Saint-Étienne à Vienne, sont toujours des témoins présents de la puissance du christianisme. Mais ils ne sont que les témoins d'une spiritualité oubliée, tout comme les palais de Versailles, de l'Escorial, de Schönbrunn parlent de la splendeur passée des anciens monarques, tout comme ces mêmes cathédrales parlent de l'importance passée du christianisme.

Mais aujourd'hui, Jésus semble avoir quitté l'Europe, l'ancien Occident chrétien. Il est possible qu'il soit encore présent en Pologne et en Croatie, mais sinon, ce christianisme est encore un facteur qui détermine en quelque sorte le cours de l'année et de la vie des gens en tant que socle culturel. La doctrine chrétienne dans son ensemble, l'Église catholique et ses dogmes, n'est plus qu'un souvenir refoulé. La Trinité avec Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit, la résurrection, le dernier jour, le paradis, les anges et enfin Satan et l'enfer, le purgatoire, sont autant de postulats religieux auxquels presque plus personne en Europe ne parvient à croire.

Il est vrai qu'avec l'orthodoxie, il existe encore à l'Est, dans le monde slave et chrétien, un développement particulier qui a pu déployer une nouvelle fois son efficacité dans les États postcommunistes. Le luthéranisme, le protestantisme, s'est depuis longtemps transformé en une organisation politiquement correcte de simple "aide à la vie". L'Eglise romaine titube d'un scandale d'abus à l'autre, et le pape émérite bavarois a depuis longtemps disparu, tandis que son successeur argentin ne fait que suivre l'esprit du temps par des signaux plats de prétendue modestie.

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Ainsi, le christianisme, en particulier le catholicisme romain, a depuis longtemps cédé la place à une religion civile politiquement correcte, dans laquelle la cancel culture et la wokeness sont plus importantes que les dix commandements. Et les partis politiques qui se disaient chrétiens ont depuis longtemps supprimé le "grand C" de leur nom et sacrifié la doctrine sociale chrétienne sur l'autel d'un esprit propre à la gauche tardive.

Qu'était autrefois ce christianisme ? A l'origine, il s'agissait d'une secte juive qui suivait un messie légendaire et dont Paul, le citoyen romain, a fait une Eglise qui se voulait accessible à tous. Ce christianisme, dans la continuité du judaïsme, était bien sûr une religion monothéiste. Mais une religion qui, au cours des premiers siècles de son existence, avec des divisions, des querelles de foi, des schismes et de multiples conflits, est devenue une religion avec la Trinité, avec des anges, avec d'innombrables saints, avec des objets, des images, des reliques et autres objets vénérés de manière cultuelle. Une religion dont les racines juives ont été enrichies par les mécanismes de la religion d'État romaine et, après les migrations germaniques, par les conceptions spirituelles propres à ces peuples du Nord, une religion qui est ainsi devenue le facteur intellectuel et spirituel central pour les mondes roman, germanique et slave d'Europe.

Et c'est au nom de cette religion que des millions de personnes ont été massacrées, que des fleuves de sang ont été versés, que des guerres de religion ont été menées, que des sorcières ont été brûlées et que des hérétiques ont été persécutés. La christianisation de l'Europe ancienne a peut-être été un processus de conversion, mais elle s'est accompagnée de nombreux bains de sang. Les croisades du haut Moyen Âge ont peut-être été menées dans le but de libérer le tombeau du Christ, mais elles ont également été des guerres de conquête meurtrières. Les guerres de religion des XVIe et XVIIe siècles, jusqu'à la guerre de Trente Ans, ont décimé la population européenne dans des proportions similaires à celles de la peste.

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Néanmoins, le christianisme, en tant que religion monothéiste dont le commandement central est l'amour du prochain, a sans doute été le facteur déterminant d'un développement que l'on peut définir comme une évolution culturelle, une incitation pour l'humanité marquée par le christianisme à renoncer à la violence. Et aujourd'hui, alors que les droits de l'homme universels sont théoriquement au cœur de la nouvelle religion civile, il faut bien dire que même celle-ci, sans la prétention du christianisme selon laquelle tous les hommes naissent avec la même dignité, empereur, roi, noble, citoyen, paysan, mendiant, esclave, en constitue la base.

Or, il semble que ce christianisme soit sur le point de disparaître dans la vieille Europe. Certes, de nos jours, on célèbre aussi la fête de Pâques, avec toutes sortes d'actes de consécration folkloriques, depuis l'Osterhasen, les œufs de Pâques, jusqu'à la consécration de la viande en Carinthie, et pourtant, il faut se demander qui pense encore à la résurrection du Christ, à l'Ascension et au Jugement dernier qui attend l'individu en question. Le pape argentin à Rome peut laver les pieds de n'importe quel sans-abri, et sa bénédiction Urbi et orbi peut être vue par des millions de personnes à l'écran, mais tout cela ne signifie pas grand-chose.

Le christianisme est peut-être devenu depuis longtemps une religion du tiers-monde, qui joue un rôle en Afrique noire, en Amérique latine et peut-être même dans certaines parties de l'Asie du Sud-Est. Le fait que le pape soit un latino-américain en tient compte. Il serait toutefois logique de transférer le siège du chef de l'Église en Afrique noire ou en Amérique latine et de faire du Vatican un musée unique.

En tout cas, le fait est que les Européens ont oublié le christianisme, voire l'ont supprimé. Certes, ils font baptiser leurs enfants, font appel à un prêtre pour les mariages et les enterrements, célèbrent Noël et, comme nous l'avons déjà dit, Pâques. Mais la signification spirituelle de tout cela a depuis longtemps été reléguée au second plan. Au lieu de cela, les cercles contemporains ont adopté la nouvelle religion civile du politiquement correct, avec tous ses corollaires, comme l'antifascisme obligatoire, le féminisme radical, le genderisme et, plus récemment, la Wokeness, la Cancel Culture, Black Lives Matter et d'autres folies similaires.

Les personnes ordinaires qui ne sont pas touchées par ces modes ne sont plus chrétiennes au sens propre du terme, mais font partie d'une culture absolument matérialiste qui vit d'une part le fétichisme de la croissance économique et d'autre part l'hédonisme et l'épanouissement personnel très superficiel.

Au lieu de la béatitude éternelle dans l'au-delà, on cherche à maximiser son propre bien-être ici-bas, et le postulat de l'amour chrétien du prochain est remplacé par un amour universel et lointain diffus, politiquement correct, qui se contente généralement de belles paroles et de bons sentiments. La prétention de mener une vie chrétienne et d'être un bon chrétien est considérée comme ridicule et archaïque, et les gens n'associent presque plus rien à la notion de péché ou même au pardon des péchés par la confession et l'absolution. En tenant compte de toutes ces évolutions, il faut donc en conclure que le christianisme en Europe est probablement sur le point de disparaître.

La voie verte vers la Troisième Guerre mondiale

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La voie verte vers la Troisième Guerre mondiale

Par Willy Wimmer

Source: https://www.world-economy.eu/nachrichten/detail/der-gruen...

Les cartes sont sur la table. Les États-Unis veulent une prise de contrôle hostile de la Russie. La Russie ne veut pas être poussée hors d'Europe et veut vivre dans des frontières sûres. Nous, Européens, sommes confrontés à la question de savoir si nous allons survivre à cette lutte ? Un regard en arrière apparaît utile. Il montre clairement où a été donné le coup d'envoi de l'évolution actuelle, d'une guerre au milieu de nous. C'était assez inattendu lorsqu'il y a presque un an, le nouveau président américain Biden a parlé du président russe Poutine comme d'un "tueur". Jusqu'à cette interview, le monde pensait que la Chine et l'Occident étaient sur le point de s'affronter par armes interposées à propos de Taïwan, des Ouïghours ou de quoi que ce soit d'autre. Avec l'interview évoquant le "tueur", les choses ont basculé. Il y a quelques semaines, Klaus von Dohnanyi a donné l'impression, lors d'un débat sur ZDF-Illner, que l'OTAN avait pris la décision unanime, au niveau des chefs d'État et de gouvernement, le 14 juin 2021, de faire entrer l'Ukraine dans l'OTAN. Tout le monde savait en quoi consistait la décision de l'OTAN de Bucarest en 2008, à l'instigation de la France et de l'Allemagne, sur cette question: l'Ukraine ne devait pas devenir la pierre angulaire d'une nouvelle confrontation entre l'Occident et Moscou. Au lieu de cela, une nouvelle architecture de sécurité devait être créée en Europe.

Les Américains s'en moquaient. Ils s'en sont tenus à leur ligne politique, mise en œuvre depuis 1917, qui consiste à façonner le continent européen selon leurs idées. Pour ce faire, l'Allemagne a tout d'abord été mise en coupe réglée par la Première Guerre mondiale et Versailles. Ce qu'il en restait a été instrumentalisé contre l'Union soviétique par Adolf Hitler, à tel point que jusqu'à la réunification allemande en 1990, les dommages de guerre résultant de la Seconde Guerre mondiale n'avaient pas été réparés en Union soviétique. L'année dernière, lors de la visite à Moscou de la sous-secrétaire d'État américaine, Mme Nuland, au début du mois d'octobre 2021, la Russie actuelle était encore soucieuse de son autonomie et de sa sécurité. Pour les États-Unis, il s'agissait et il s'agit toujours du plus grand échec supposé de la politique depuis 1917. Il fallait y remédier, tout comme la coopération économique fructueuse entre la Russie actuelle et l'Allemagne actuelle, malgré deux guerres mondiales.

Certes, le début de la guerre en Ukraine, avec l'attaque massive des forces ukrainiennes contre les "régions mentionnées dans les accords de Minsk", celles de Lougansk et de Donetsk, remonte déjà à des semaines terribles et meurtrières, le 17 février 2022. Mais avec les sanctions imposées à l'initiative des États-Unis, il ne reste presque plus rien de la coopération économique fructueuse entre la Russie et l'UE, dont la France et l'Allemagne, comme premier objectif de guerre dans la lutte contre la Russie. Le reste fait l'objet d'une campagne d'intimidation telle que nous, Allemands, l'avions vécue pour la première fois dans le feu roulant de la propagande franco-britannique contre l'empereur Guillaume II. Depuis l'inclusion frauduleuse des "quatorze points" de Wilson dans le traité d'armistice de novembre 1918, une phrase détermine cette forme de politique : c'est la parole non tenue qui prévaut. C'est comme l'élargissement à l'Est de l'OTAN.

Avec l'attaque ukrainienne contre Lougansk et Donetsk, il était clair pour tout le monde qu'il s'agissait de mettre en œuvre la ligne Zelensky pour la reconquête de Donetsk, de Lougansk et de la Crimée. Cela devait rendre caduques les dispositions du traité de l'OTAN selon lesquelles aucun État ne doit être admis dans l'OTAN s'il a des problèmes de frontières avec d'autres et donc des questions frontalières non résolues. Quelques jours après le 17 février 2022, les forces armées russes ont envahi l'Ukraine, 23 ans après la guerre d'agression de l'OTAN contre la Yougoslavie, que le département d'État américain avait classée au regard du droit international et de l'histoire lors de la conférence de Bratislava au printemps 2000. La réaction occidentale à l'invasion russe a reflété toute l'étendue de la politique occidentale vis-à-vis ou en rapport avec le rôle assigné à l'Ukraine.

Le peuple ukrainien doit voir son pays réduit en miettes pour des raisons géostratégiques, pour voir les aspects cités au début décidés du côté américain et russe. L'Europe de l'UE, mise au pas à l'instigation notamment des "Verts" politiques européens, veut que la décision soit prise sur le champ de bataille, comme le manifeste la Commission européenne. Aucune trace d'efforts de paix, on est devenu bien trop partisan pour cela. Il règne dans l'Europe de l'UE une atmosphère qui ne recule devant aucune diabolisation. Des armes sont livrées les yeux fermés, et il ne dépend plus de nous de savoir si nous avons franchi le seuil de la troisième guerre mondiale. Ce ne sont pas les godillots mais les talons aiguilles qui, cette fois-ci, martèlent sur le pavé le chemin de la perdition. 

L'opinion de l'auteur/interlocuteur peut différer de celle de la rédaction. Loi fondamentale Article 5, paragraphes 1 et 3 (1) "Chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, l'écrit et l'image et de s'informer sans entrave à partir de sources généralement accessibles. La liberté de la presse et la liberté d'information par la radio et le cinéma sont garanties. Il n'y a pas de censure".

Le traité de Rapallo de 1922

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Il est possible de faire autrement

Le traité de Rapallo de 1922 montre que l'Allemagne et la Russie peuvent pleinement coopérer - ce qui ne plaisait déjà pas aux puissances occidentales à l'époque.

par Hermann Ploppa

Source: https://www.rubikon.news/artikel/es-geht-auch-anders-3

La confrontation entre l'Occident dit des "valeurs" et la Russie ne cesse de s'intensifier. Bien avant que l'armée russe n'envahisse l'Ukraine en violation du droit international, le ton s'était déjà durci à l'égard de la Russie. Tout au long de l'histoire, la propagande antirusse a donné l'impression que les relations entre l'Allemagne et la Russie avaient toujours été hostiles. Cet oubli de l'histoire est politiquement voulu. Nous sommes tous plus ou moins conscients du terrible conflit armé de la Seconde Guerre mondiale. Elle a été suivie par la guerre froide, au cours de laquelle l'Allemagne de l'Ouest et l'Allemagne de l'Est se sont affrontées en tant qu'États de la ligne de front. Ce n'est qu'avec la politique de détente du chancelier Willy Brandt que d'autres sons de cloche se sont faits entendre. Une partie de notre mémoire collective veut que les relations avec notre voisin de l'Est aient toujours été extrêmement délicates. Mais c'est totalement faux.

La plupart du temps, les relations germano-russes ont été marquées par une étroite coopération et des échanges mutuels. Même à l'époque de la guerre froide, il y a eu des phases d'initiation d'une coopération étroite. Des rapprochements ont eu lieu entre le chancelier allemand de l'époque, Ludwig Erhard, et le chef d'État soviétique, Nikita Khrouchtchev. Le chancelier Helmut Kohl et Mikhaïl Gorbatchev ont également commencé à coopérer plus étroitement. Dans les deux cas, la perte soudaine du pouvoir des hommes forts de l'Est a conduit à la fin de l'Entente.

Une relation de confiance étroite s'est également développée entre le chancelier Gerhard Schröder et Vladimir Poutine. Le président français s'est également joint temporairement à ce groupe d'hommes. A Londres et à Washington, ces coopérations ont été regardées avec scepticisme. On y murmurait souvent que le dangereux "esprit de Rapallo" planait à nouveau sur l'Europe.

Le principe de la nation la plus favorisée

Il y a exactement 100 ans, le dimanche de Pâques 16 avril 1922, le traité portant le nom de la station balnéaire italienne était signé à Rapallo, près de Gênes, entre le Reich allemand et la République socialiste fédérative soviétique de Russie. Dans ce traité, les deux États s'assuraient le traitement de la nation la plus favorisée. En d'autres termes, ils ont commencé à entretenir des relations économiques normales, comme c'était le cas depuis longtemps entre tous les autres pays. Les deux pays renoncèrent aux demandes de réparations réciproques. En d'autres termes, ils renoncèrent aux indemnisations pour les dommages de guerre subis.

L'Allemagne a également renoncé à réclamer les biens allemands expropriés par les bolcheviques en Union soviétique. L'Allemagne a livré des installations industrielles à la Russie. En échange, la Russie fournissait à l'Allemagne le pétrole tant convoité. L'Allemagne a alors ouvert 2.000 stations-service qui servaient de l'essence en provenance d'Azerbaïdjan de la société de distribution soviétique Azneft.

Ce fut un pas en avant décisif pour l'économie allemande, qui souffrait encore largement du boycott de la communauté internationale. Une situation gagnant-gagnant absolue s'est également présentée dans le secteur militaire. En effet, le traité de Versailles interdisait à l'Allemagne d'avoir sa propre armée de l'air et ses propres unités de chars.

Les usines Junkers construisaient désormais leurs avions de guerre dans la banlieue de Moscou, à Fili. Les avions Junkers ont ensuite été testés à Lipetsk. Toute une génération de pilotes de chasse allemands a été formée ici. Les Allemands et les Russes ont également partagé des unités de gaz toxiques à Tonka. Alors que les soldats de la Reichswehr en Allemagne s'amusaient avec des chars factices sous les yeux des Alliés, des ingénieurs et des mécaniciens allemands construisaient de vrais chars en Union soviétique et les testaient à Kazan.

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L'architecte de Rapallo

Le traité de Rapallo est essentiellement l'œuvre du diplomate Adolf Georg Otto von Maltzan (photo), qui, par commodité, se faisait simplement appeler "Ago" (1). Ago von Maltzan avait déjà fait carrière à l'époque de l'Empire et, en tant que chef de la section Russie au ministère des Affaires étrangères, il travaillait depuis la fin de la guerre à un traité de coopération germano-russe. Lors de la conférence financière et économique de Gênes en avril 1922, il est apparu que la Grande-Bretagne et la France travaillaient également sur un traité économique avec l'Union soviétique.

Après avoir tenté d'imposer un changement de régime par une intervention militaire sanglante dans une Union soviétique encore fragile, puis avoir échoué lamentablement dans cette tentative, ces pays acceptaient désormais les bolcheviks comme nouveau "facteur d'ordre" dans la région et essayaient d'en tirer le meilleur parti.

Dans le même temps, les Soviétiques ont fait savoir au gouvernement allemand, par des canaux discrets, qu'ils pouvaient envisager un accord de coopération similaire à celui conclu avec les puissances occidentales, mais également avec l'Allemagne. La délégation allemande s'est alors mise en branle. C'était le 15 avril 1922 et il fallait être vigilant pour le lendemain afin de conclure un accord avec les Soviétiques avant la délégation américano-britannico-française. L'histoire a retenu ce que l'on a appelé la "conférence des pyjamas".

Pendant la nuit, Ago von Maltzan a rédigé le projet de traité et a tiré les membres de la délégation allemande de leur lit. En pyjama, les délégués se sont assis sur le bord de leur lit et ont travaillé ensemble sur le traité, paragraphe par paragraphe. Le ministre des Affaires étrangères responsable, Walther Rathenau, avait encore du mal. Il était plutôt sceptique quant à l'ensemble du projet. Mais finalement, Rathenau a accepté et le projet de traité a été adopté.

Le lendemain, les délégations allemande et soviétique se sont rencontrées, deux heures avant l'heure prévue pour la conclusion du traité, qui était celle fixée par les Alliés occidentaux. Du côté allemand, nous voyons en bonne place : le chancelier Joseph Wirth, le ministre des Affaires étrangères Walther Rathenau, le secrétaire d'État aux Affaires étrangères Ago von Maltzan et leur entourage.

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Du côté soviétique : Leonid Borissovitch Krassine, commissaire du peuple au commerce extérieur ; Georgi Vassiliévitch Tchitcherinr (photo), commissaire du peuple aux affaires étrangères, et comme conseiller Adolf Abramovitch Joffe, ambassadeur soviétique en Allemagne. La signature du contrat s'est déroulée dans une atmosphère très cordiale. Deux heures plus tard, la délégation des Alliés occidentaux est arrivée. Leur colère fut sans limite lorsqu'ils apprirent qu'on leur avait coupé les vivres au dernier moment.

Retour sur la scène internationale

Du point de vue allemand, le traité de Rapallo était la dernière chance d'échapper aux effets d'étranglement du traité de Versailles. En effet, le traité de Versailles n'a pas seulement dépossédé massivement les citoyens allemands et leur État mais les a plongés dans une servitude pour dettes totalement contre-productive, ce que l'économiste John Maynard Keynes, et non des moindres, a vivement condamné dans son livre très remarqué (2). L'Allemagne dans son ensemble a été chargée de la responsabilité exclusive du déclenchement de la guerre et mise au ban de la société par un isolement diplomatique.

L'État soviétique russe a également été mis au ban pour son opposition à l'ordre économique capitaliste et pour l'expropriation d'actifs étrangers. Il était donc logique que les stratèges des deux États parias réfléchissent intensément à une coopération germano-russe.

Les deux parties ont agi avec un pragmatisme absolu. La droite politique allemande voyait dans la coopération avec les bolcheviks une réelle opportunité de faire un retour en force de l'Allemagne en dehors des règles fixées par le régime de Versailles. Les partisans d'une union de l'Allemagne avec les puissances occidentales se trouvaient plutôt chez les libéraux et les sociaux-démocrates, tandis que les communistes votaient naturellement pour les Soviétiques.

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Malgré cela, la conclusion du traité de Rapallo le 16 avril 1922 entre l'Allemagne et la République socialiste fédérative soviétique de Russie fit l'effet d'une bombe sur la scène diplomatique internationale. La colère des Français et des Britanniques était immense. Car en fait, ils voulaient eux-mêmes conclure des traités avec les Soviétiques, qui s'étaient imposés comme "facteur d'ordre" sur le territoire de l'ancien empire tsariste. Les énormes ressources naturelles de l'empire géant font que toutes les réserves à l'égard de l'ennemi de classe communiste semblaient surmontables.

Or, le ministre allemand des Affaires étrangères Walther Rathenau et son secrétaire d'État Ago von Maltzan avaient signé le traité avec leur homologue soviétique Georgi Tchitcherine le dimanche de Pâques 1922, peu de temps avant que les Français et les Anglais ne signent un tel traité.

La méfiance des puissances occidentales

Le traité de Rapallo a été majoritairement bien accueilli en Allemagne. Les entrepreneurs allemands, en particulier, poussèrent Rathenau à le signer, car les marchés de l'Ouest leur étaient en grande partie fermés. De plus, on pensait qu'en annonçant la nouvelle politique économique, Lénine ferait un retour en arrière énergique vers l'économie de marché libérale - ce qui ne se réalisera pas sous cette forme, comme on le sait aujourd'hui. Un seul homme politique s'est élevé contre le traité de Rapallo : un certain Adolf Hitler, originaire de Bavière.

Le cas que le géopoliticien anglais Halford Mackinder a décrit dans une conférence donnée à Londres en 1904 comme le pire des cas pour les Anglais s'était donc produit : une puissance de dimension continentale, enclavée, s'était à nouveau alliée à une puissance côtière.

Les Allemands avaient rompu leur isolement et, par leur trahison, jugée sacrilège du point de vue anglais, laissaient entendre qu'ils étaient en mesure de construire dans l'espace eurasien un éventuel contre-pouvoir à l'ordre occidental.

En effet, peu après la fin de la guerre, des cercles influents de l'armée et de l'économie avaient déjà réfléchi à haute voix à un partenariat avec les Soviétiques.

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Walther Rathenau (photo), qui avait hérité du groupe électrique AEG de son père, et le président de son conseil d'administration, Felix Deutsch, entre autres, avaient publié un mémorandum le 17 février 1920. Dans ce document, il est fait référence à l'excédent de main-d'œuvre qualifiée en Allemagne, qui pourrait être parfaitement combiné avec un excédent de matières premières en Russie. Ce sont les "fruits qui mûriront dans un avenir pas très lointain, et non les avantages immédiatement tangibles, qui sont les plus importants si l'on veut juger de l'intérêt allemand à s'associer à la Russie soviétique" (3).

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Et le général-colonel Hans von Seeckt (ci-dessus), qui venait d'être promu chef de la direction de l'armée de terre de la Reichswehr en 1920, ne laissait aucun doute sur sa vision des choses dans deux mémoires publiés la même année :

"Ce n'est qu'en se rattachant fermement à la Grande Russie que l'Allemagne a la perspective de retrouver sa position de puissance mondiale... L'Angleterre et la France craignent la fusion des deux puissances terrestres et cherchent à l'empêcher par tous les moyens - c'est donc vers elle que nous devons tendre de toutes nos forces" (4).

Plus loin dans le second document : "Et si l'Allemagne se range du côté de la Russie, elle est elle-même invincible, car les autres puissances devront alors toujours tenir compte de l'Allemagne, car elles ne peuvent pas laisser la Russie sans surveillance" (5).

L'assassinat de Rathenau et ses conséquences

Mais Rathenau n'a plus eu la chance de pouvoir contribuer à l'évolution future. Tout comme Olof Palme, il refusait la protection rapprochée. Ainsi, le 24 juin 1922, deux mois à peine après avoir signé le traité de Rapallo, il fut abattu par deux tueurs à gages dans sa décapotable ouverte, alors qu'il se rendait à son travail au ministère des Affaires étrangères.

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L'indignation en Allemagne face à ce lâche assassinat a été gigantesque. Des centaines de milliers de personnes ont suivi son cercueil lors d'une impressionnante manifestation en faveur de la démocratie. Des émeutes de type guerre civile s'ensuivirent. Les assassins de Rathenau appartenaient à l'organisation Consul, également appelée  "Reichswehr noire". Il s'agissait d'une scission de la Brigade Erhardt, à laquelle appartenaient des sections importantes de la Division de fer, elle-même issue des Baltikum (mercenaires allemands) ...

La coopération germano-russe n'a jamais atteint la dimension envisagée par Rathenau et Seeckt. Néanmoins, l'armée de l'air et l'armée blindée allemandes ont continué à être développées en Union soviétique - jusqu'à ce que les nazis mettent fin à cette coopération d'un trait de plume en 1933.

Aujourd'hui, le traité de Rapallo du 16 avril 1922 est largement occulté de la mémoire collective. Il ne correspond tout simplement pas à l'agenda transatlantique.

Sources et notes :

(1) Niels Joeres : Der Architekt von Rapallo - Der deutsche Diplomat Ago von Maltzan im Kaiserreich und in der frühen Weimarer Republik. Heidelberg 2005.
(2) John Maynard Keynes : The Economic Consequences of the Peace. Londres 1919.
(3) Cité par Horst Günther Linke : Deutsch-sowjetische Beziehungen bis Rapallo. Cologne 1972. page 94.
(4) Ibid., page 153.
(5) Ibid., page 156.

Pour cet article, des passages du livre Der Griff nach Eurasien - Die Hintergründe des ewigen Krieges gegen Russland de Hermann Ploppa, Marburg 2019, ont été intégrés.

Livres de Hermann Ploppa:

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Coup d'Etat contre Imran Khan, guerre en Ukraine et initiative chinoise "Belt & Road"

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Coup d'Etat contre Imran Khan, guerre en Ukraine et initiative chinoise "Belt & Road"

Shaban Syed

Source: https://www.geopolitika.ru/es/article/golpe-de-estado-contra-imran-khan-guerra-de-ucrania-e-iniciativa-de-la-ruta-y-cinturon

On pourrait se demander quelle est la corrélation entre le coup d'État de changement de régime au Pakistan, la guerre en Ukraine et l'initiative "Belt and Road" de la Chine. La réponse est assez simple pour les analystes et observateurs proches des manœuvres politiques américaines, comme le journaliste américain Caleb Maupin, qui explique la corrélation en quelques lignes. "Les monopolistes de Wall Street veulent briser le Corridor économique Chine-Pakistan et stopper le développement dans toute l'Asie centrale. Le retrait de Khan fait partie de cette stratégie".

Cependant, la corrélation est peut-être visible pour la plupart, mais apparemment pas au Pakistan. La controverse se poursuit avec les partis d'opposition, les éléments des médias et même le pouvoir judiciaire qui réfutent avec véhémence les affirmations de Khan selon lesquelles les États-Unis ont fomenté une opération de changement de régime contre lui. Même après que Khan ait présenté une lettre envoyée par le sous-secrétaire d'État pour le Sud, Donald Lu (photo, ci-dessous), qui résume que "les relations américaines avec le Pakistan ne s'amélioreront pas tant que Khan ne sera pas démis de ses fonctions".

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Les affirmations de Khan n'ont sans doute pas été réfutées par la majorité de la population pakistanaise, consciente qu'il n'y a pas si longtemps, sous le président Bush, le premier ministre pakistanais Pervez Musharraf s'était entendu dire que les États-Unis bombarderaient le Pakistan pour le ramener "jusqu'à l'âge de pierre" si le pays ne coopérait pas à la guerre américaine contre l'Afghanistan ; le public n'a pas non plus oublié les crimes de guerre qui ont suivi et que les États-Unis et leurs alliés ont perpétrés au nom de la lutte contre la "terreur", avec des rapports horribles sur les tortures subies à Abu Gharib, par exemple, où des mères irakiennes emprisonnées ont été forcées de regarder leurs enfants se faire violer par des soldats américains.

Pourtant, ceux qui réfutent les allégations de changement de régime de Khan ne se préoccupent pas des crimes de guerre de l'OTAN, principalement la Ligue musulmane du Pakistan (PML) et le Parti du peuple pakistanais (PPP), qui ont tous deux un passé dûment documenté de scandales financiers, de détournement de fonds publics et d'acquisitions de penthouses à Londres et à New York. On peut affirmer que même les médias pakistanais sont complices, car beaucoup ont des intérêts particuliers, comme l'Express Tribune, par exemple, qui est affilié au New York Times et dont on attend qu'il projette le point de vue des États-Unis. Son principal argument est que, depuis que les États-Unis se sont retirés d'Afghanistan, ils n'ont pas besoin du Pakistan pour mener leurs opérations et ne s'intéressent donc pas à ses affaires intérieures.

Les réfractaires semblent être sur la même longueur d'onde que Washington, la fonctionnaire américaine Lisa Curtis, qui a servi sous les présidents Bush et Trump, déclarant : "Il est hautement improbable qu'un fonctionnaire américain s'implique dans la politique interne du Pakistan. Je pense qu'Imran Khan essaie de jouer la 'carte de l'Amérique' pour obtenir le soutien de sa base".

Il est difficile de prendre cette observation au sérieux si l'on considère que depuis la Seconde Guerre mondiale, la CIA s'est immiscée dans les affaires intérieures de nombreux pays et a financé quelque quatre-vingt-dix opérations de changement de régime depuis la Seconde Guerre mondiale dans le but d'installer un gouvernement favorable aux États-Unis.

La question à examiner est de savoir pourquoi la lettre indique que les relations américano-pakistanaises ne s'amélioreront pas si Imran Khan n'est pas destitué.

Se pourrait-il que sous le mandat de Khan, le Pakistan soit devenu moins un État client des États-Unis et ait rejoint l'ordre mondial multipolaire émergent dirigé par la Chine et la Russie, qui s'oppose à l'ordre du jour mondial hégémonique unipolaire des États-Unis ? Pour Washington, qui en était venu à dépendre du Pakistan en tant qu'État vassal doté d'un système judiciaire et d'une politique faibles et flexibles, Khan, autrefois considéré comme un "chouchou de l'Occident", était devenu un dangereux handicap.

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Après l'expulsion des États-Unis d'Afghanistan, Khan, avec le soutien de l'armée, a refusé d'autoriser les bases militaires américaines au Pakistan. Il a établi une politique étrangère indépendante en refusant de devenir un pion des États-Unis comme les dirigeants précédents, établissant des alliances stratégiques avec l'Iran, la Russie et la Chine, que les États-Unis décrivent continuellement comme une "menace mondiale".

Toutefois, ce qui a peut-être été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase pour les États-Unis et l'UE, c'est le fait que Khan soit allé rendre visite à Poutine pour discuter de questions commerciales à un moment où la Russie avait commencé ses opérations en Ukraine et avait également refusé de se plier à la pression des États-Unis et de l'UE pour condamner les actions russes.

Tout cela à un moment où Washington ralliait ses alliés pour qu'ils rejoignent l'OTAN et condamnent les opérations russes en Ukraine et où l'armée américaine se préparait à affronter la Russie et la Chine. Récemment, le président des chefs d'état-major interarmées, le général Mark Milley, a demandé un budget énorme de 773 milliards de dollars car, a-t-il dit, "la Chine et la Russie, qui disposent chacune d'importantes capacités militaires... cherchent à changer fondamentalement l'ordre mondial actuel fondé sur des règles" et doivent être affrontées.

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Outre un budget énorme, le secrétaire américain à la défense, Lloyd Austin, a également fait valoir que les États-Unis "doivent faire beaucoup plus" pour "tendre la main aux alliés de l'Amérique".  Un exemple de cette "main tendue" a été illustré récemment lorsque l'Autriche a lancé un ultimatum à l'Inde pour lui dire que son achat continu de systèmes d'armes russes n'est "pas dans son intérêt" et qu'il y aura une "demande" pour que les dirigeants de New Delhi échangent certains de ces systèmes contre des armes américaines et alliées.

Afin d'exercer un "effet de levier" sur les dirigeants mondiaux pour qu'ils se rallient à la guerre fomentée par les États-Unis et l'OTAN en Ukraine, où l'OTAN déverse des millions de dollars en armes, installe des bases militaires et des laboratoires d'armes biologiques, Washington n'a jusqu'à présent pas réussi à "mettre la main" sur Khan.

Contrairement aux réfractaires qui affirment que les États-Unis n'ont pas procédé à un changement de régime au Pakistan parce que ce pays n'est pas assez important, on peut affirmer qu'il est plus important et la raison en est simple, l'initiative "Belt and Road" de la Chine, dans laquelle le Pakistan joue un rôle clé.

L'ambitieuse initiative "Belt and Road" (BRI) de la Chine et le corridor économique Chine-Pakistan (CECP) vont transformer le paysage géopolitique mondial, en reliant de nombreux pays à travers le monde, en créant des corridors de connectivité pour renforcer le développement par le commerce et l'investissement. Les États-Unis sont particulièrement mécontents du projet de chemin de fer Pakistan-Afghanistan-Ouzbékistan (PAKAFUZ), qui reliera les pays enclavés d'Asie centrale et l'Afghanistan au Pakistan et à la mer d'Oman et, à l'horreur des États-Unis, facilitera l'accès terrestre de la Russie à l'Asie du Sud.

Washington sait que les économistes prédisent l'ascension fulgurante des économies asiatiques et le nouveau siècle asiatique et ont déjà mis en place une stratégie visant à provoquer un "chaos fabriqué" dans la région et à entraver les projets de développement économique.

Selon la doctrine Rumsfeld/Cebrowski et le rapport RAND de 2016, intitulé "Le chaos fabriqué", l'équilibre changeant des forces sera réajusté, la BRI sera détruite et toute menace de la Chine, de la Russie, du Pakistan et de l'Iran sera neutralisée. Dans le même ordre d'idées, le document de 2019 de RAND intitulé "Extending Russia : Competing from Advantageous Ground" se concentre sur l'engagement de la Russie dans les conflits de souveraineté et l'exploitation des tensions dans le Caucase du Sud, ce qui explique l'échec de l'opération de changement de régime de la CIA au Kazakhstan au début de cette année.

La même politique est évidente en Ukraine, où les États-Unis et leurs alliés ont financé une révolution de couleur, où Victoria Nuland, qui était sous-secrétaire d'État aux affaires européennes et eurasiennes, distribuait visiblement des "rafraîchissements" et encourageait le coup d'État. Aujourd'hui, les groupes néo-nazis soutenus par l'Occident causent des atrocités indicibles avec des armes occidentales, déstabilisent la région et fabriquent le "chaos".

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Le plus gros problème auquel est confronté le Pakistan est que si Khan ne remporte pas les prochaines élections, le pays pourrait redevenir un État vassal que les États-Unis peuvent contrôler et soumettre à leurs diktats. Même si l'"État profond" du Pakistan ne le permet pas, dans le passé, ils n'ont pas pu empêcher le détournement de fonds publics et la remise d'un trésor presque vide au gouvernement PTI lorsqu'il est arrivé au pouvoir.

Selon Andrew Korbyko, un analyste géopolitique qui a beaucoup écrit sur l'IRB et les questions connexes liées à l'Asie du Sud et à l'Asie centrale, avait averti : "Le retour du Pakistan au statut de vassal des États-Unis en cas de réussite de la campagne américaine de changement de régime contre le Premier ministre Khan pourrait donc déstabiliser l'Asie du Sud". Il souligne que non seulement le développement économique du Pakistan fera un pas en arrière, mais qu'un dirigeant pakistanais installé par les États-Unis pourrait politiser le CPEC et PAKAFUZ et ainsi compliquer les liens avec la Chine et la Russie.

"En d'autres termes", affirme-t-il, "le Pakistan pourrait être exploité" par l'empire américain en déclin dans sa quête de domination hégémonique "pour porter un coup sévère aux processus de connectivité multipolaire dans le cœur géostratégique de l'Eurasie".

Le chemin à parcourir s'annonce difficile. Toutefois, une lueur d'espoir réside dans le fait que le Pakistan n'a jamais eu de leader aussi populaire et respecté qu'Imran Khan. Les médias occidentaux se sont bien gardés de montrer les millions de personnes qui sont sorties pour le soutenir alors que le coup d'État contre lui se déroulait. Selon les observateurs de l'histoire, avec ce type de soutien, Khan reviendra au pouvoir ou connaîtra le sort de Zulfikar Ali Bhutto et de ces dirigeants qui ont refusé d'être les pions des États-Unis et des puissances occidentales.

Le concept d'hégémonie dans le réalisme

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Le concept d'hégémonie dans le réalisme

Aleksandr Douguine

Source: https://www.geopolitika.ru/pl/article/pojecie-hegemonii-w-realizmie

L'aspect le plus important de la théorie du monde multipolaire (TMM) est le concept de contre-hégémonie formulé pour la première fois dans le contexte de la théorie critique des relations internationales (RI). Dans la transition de la Théorie critique à la Théorie du monde multipolaire, ce concept est également soumis à un sens particulier de la transformation qui devrait être examiné plus en détail. Pour qu'une telle analyse soit possible, il est d'abord nécessaire de rappeler les principales positions de la théorie de l'hégémonie au sein de la Théorie critique.

Bien que le concept d'hégémonie dans la Théorie critique soit basé sur la théorie d'Antonio Gramsci, il est nécessaire de distinguer la position de ce concept par rapport au gramscisme et au néo-gramscisme de la façon dont il est compris dans les écoles réalistes et néo-réalistes de RI.

Les réalistes classiques utilisent le terme "hégémonie" dans un sens relatif et le comprennent comme "la supériorité réelle et substantielle de la puissance potentielle d'un État sur celle d'un autre, souvent des États voisins". L'hégémonie peut être comprise comme un phénomène régional, puisque la détermination de l'hégémonie de telle ou telle entité politique dépend de l'échelle. Thucydide lui-même a introduit le terme lorsqu'il a parlé d'Athènes et de Sparte comme des hégémons de la guerre du Péloponnèse, et le réalisme classique a utilisé le terme de la même manière jusqu'à aujourd'hui. Cette conception de l'hégémonie peut être décrite comme "stratégique" ou "relative".

51Xh6qQTpUL._SY291_BO1,204,203,200_QL40_ML2_.jpgDans le néoréalisme, l'"hégémonie" est comprise dans un contexte global (structurel). La principale différence avec le réalisme classique est que l'"hégémonie" ne peut être considérée comme un phénomène régional. Elle a toujours un caractère global. Par exemple, le néoréalisme de K. Waltz soutient que l'équilibre de deux hégémonies (dans un monde bipolaire) est la structure optimale de l'équilibre des pouvoirs à l'échelle mondiale. R. Gilpin estime que l'hégémonie ne peut être combinée qu'avec l'unipolarité, c'est-à-dire qu'il n'est possible d'avoir qu'un seul hégémon, ce qui est la fonction des États-Unis aujourd'hui.

Dans les deux cas, les réalistes comprennent l'hégémonie comme un moyen de corrélation potentielle entre les potentiels des différents pouvoirs étatiques.

La compréhension de l'hégémonie par Gramsci est tout à fait différente et se situe dans un champ théorique complètement opposé. Afin d'éviter la mauvaise utilisation du terme dans la RI et surtout dans la TMM, il est nécessaire de prêter attention à la théorie politique de Gramsci, dont le contexte est considéré comme une priorité majeure dans la théorie critique et la TMM. En outre, une telle analyse nous permettra de voir plus clairement le fossé conceptuel entre la théorie critique et le TMM.

Hola

jeudi, 14 avril 2022

La guerre en Ukraine, la myopie eurocentrique et le reste du monde

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La guerre en Ukraine, la myopie eurocentrique et le reste du monde. "Quelque chose" ne colle pas...

par Clement Ultimo

Source: https://www.destra.it/home/la-guerra-ducraina-la-miopia-delleurocentrismo-e-il-resto-del-mondo-qualcosa-non-torna/

La guerre en Ukraine est-elle un problème mondial ou européen ? Une question apparemment superflue, étant donné que les implications de la crise actuelle se font sentir à l'échelle planétaire, mais peut-être moins superflue qu'il n'y paraît à première vue, surtout si vous lisez des opinions et des considérations provenant de sources non euro-occidentales.

Si la guerre russo-ukrainienne est présentée aux opinions publiques européennes et occidentales comme un conflit total entre des visions opposées du monde et de l'histoire (une réédition actualisée et corrigée de l'affrontement entre le "monde libre" et le "monde socialiste" auquel les médias se sont généreusement prêtés avec une voix presque unanime), donc comme un conflit qui, pour sa portée "idéologique" - la démocratie contre l'autoritarisme - ne peut être confiné à une zone géographique spécifique, l'appréciation que le reste du monde porte sur l'affaire est tout autre.

La question des sanctions a clairement montré comment l'unanimité dans la marginalisation de la Russie dans le domaine économique n'est vraie que si l'on se réfère aux pays européens et à ceux du bloc atlantique (USA, évidemment, Australie, Japon, Corée du Sud). Plus de la moitié du monde n'adopte aucune mesure pour bloquer les échanges économiques avec la Russie, et parmi les nations qui refusent les sanctions, on trouve non seulement des pays marginaux - en termes de poids politique et économique, évidemment - mais aussi les économies émergentes des BRICS. Et s'il est trop facile pour la Chine d'expliquer son non-alignement sur les souhaits de Washington, il est plus complexe de le faire pour la "plus grande démocratie du monde", comme s'appelle avec emphase l'Inde, ou pour le Brésil ou l'Afrique du Sud.

Sont-ils tous des "États voyous", amis du "fou" Poutine ? De toute évidence, non. La guerre en Ukraine peut donc être présentée non pas comme un affrontement mondial, mais plutôt comme la nécessité de trouver "des solutions européennes à des problèmes européens", comme le souligne l'universitaire kenyane Martha Bakwesegha-Osula dans son article pour le magazine allemand Internationale Politik und Gesellschaft.

Une thèse développée et relancée dans les pages de la revue italienne de géopolitique Limes par Hu Chunchun, selon qui: "D'une part, l'Europe se dresse comme un phare de la civilisation moderne ; d'autre part, elle a à plusieurs reprises amené l'humanité au bord de la ruine et de la destruction. La culture européenne moderne semble donc posséder les traits d'un Janus à deux visages: un visage hideux de barbarie, masqué par une façade sacrée de valeurs et d'idées absolues. Dans l'histoire européenne, il est rare que nous acceptions les critiques non européennes de notre propre sens inébranlable du messianisme universel. En tant qu'universitaire qui, bien qu'enraciné dans la culture chinoise, a toujours admiré la grande entreprise de civilisation européenne, permettez-moi de lancer un appel à l'Europe. Le conflit actuel ne concerne pas la liberté contre la répression et la tyrannie; il s'agit de la perpétuation d'une logique historique intrinsèque à l'Europe moderne. Il est temps pour les citoyens européens de mettre un terme à ce jeu insensé à somme nulle, qui est perçu avec angoisse et horreur par les cultures hors d'Europe. Après un siècle de catastrophes, le Vieux Continent n'a pas le droit de forcer le monde entier à choisir une fois de plus entre la guerre et la paix, entre la destruction et la survie".

En bref, le moment est peut-être vraiment venu pour l'Europe d'essayer de regarder la réalité historique avec des yeux différents. Non seulement parce que la "fin de l'histoire" hypothéquée par Fukuyama n'était qu'une confortable illusion dans laquelle les sociétés européennes - sénescentes et incapables de projection extra-domestique - se sont bercées depuis des décennies, mais surtout parce que, aujourd'hui plus que jamais, une vision strictement occidentalo-centrée (l'eurocentrisme est un fantôme depuis au moins 80 ans) est irréaliste et trompeuse. Elle est donc un signe avant-coureur de problèmes.