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mercredi, 11 septembre 2013

Voyage au bout de la nuit

Les Sélénites revisiteront l’oeuvre majeure de Céline, Voyage au bout de la nuit, au Théâtre 2.21 de Lausanne du 24 septembre au 6 octobre 2013 dans une adaptation intitulée « Voyages au bout de la nuit (Hommes et ombres) ». Mise en scène Pascal Francfort, musique Marc Etienne Besson.

Théâtre 2.21
Rue de l’Industrie 10
1005 Lausanne

« Voyager, c’est bien utile, ça fait travailler l’imagination ». Chef-d’œuvre de la littérature du XXème siècle, Voyage au bout de la nuit continue à fasciner. Les thématiques bouleversantes qui tissent ce roman ne se sont jamais démodées. Guerre, colonisation, progrès, nouveau monde, amour, folie, survie, tout est là, sans concessions. Le regard acerbe que Céline porte sur son époque nous raconte encore et encore, et bien des fois terriblement, notre histoire. En s’inspirant de l’œuvre de Céline, les Sélénites vous convient à remettre le Voyage en route en ouvrant les portes de l’imaginaire. Une invitation à goûter à l’essence des sensations, à l’ivresse des perceptions, en fermant les yeux pour mieux voir. Une expérience sonore et visuelle, entre mémoire, rêve et réalité.

Dominique Venner, lecteur de Céline

 

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Dominique Venner, lecteur de Céline

par Marc LAUDELOUT


Dans son livre-testament ¹, Dominique Venner évoque Céline et plus particulièrement Les Beaux draps, « ce curieux livre qui délivrait un message furibard à l’encontre de la prédication chrétienne, ultime recours du régime de Vichy qu’il méprisait ». Et de citer la fameuse sortie de Céline visant « la religion de “Pierre et Paul” [qui] fit admirablement son œuvre, décatit en mendigots, en sous-hommes dès le berceau, les peuples soumis, les hordes enivrées de littérature christianique, lancées éperdues imbéciles, à la conquête du Saint Suaire, des hosties magiques, délaissant à jamais leurs Dieux, leurs religions exaltantes, leurs Dieux de sang, leurs Dieux de race. (…) Ainsi, la triste vérité, l’aryen n’a jamais su aimer, aduler que le dieu des autres, jamais eu de religion propre, de religion blanche. Ce qu’il adore, son cœur, sa foi, lui furent fournis de toutes pièces par ses pires ennemis. »


Venner observe avec pertinence que, dans un langage différent, Nietzsche n’avait pas dit autre chose. Cet été, Anne Brassié, dans un quotidien fervemment catholique, a adressé une lettre post-mortem  à Venner ². N’ayant jamais lu Les Beaux draps, la biographe de Brasillach précise qu’elle ne connaissait pas ce texte et s’insurge contre cette attaque frontale de la religion chrétienne, d’autant  que le païen Venner  la faisait  sienne  mutatis mutandis.


Encore faut-il préciser ce qui, pour Céline, constituait le crime des crimes : « La religion catholique fut à travers toute notre histoire, la grande proxénète, la grande métisseuse des races nobles, la grande procureuse aux pourris (avec tous les saints sacrements), l’enragée contaminatrice ».


Céline, défenseur résolu du génie de la race et de son intégrité, reprochait à l’Église de favoriser le métissage par sa doctrine égalitaire. Après avoir vu un de ses textes censuré par la presse doriotiste, il tint à faire connaître la phrase caviardée :  « L’Église, notre grande métisseuse, la maquerelle criminelle en chef, l’antiraciste par excellence. » L’antienne n’était pas nouvelle. Quatre ans plus tôt, dans L’École des cadavres, il vouait aux gémonies les « religions molles ».  Et précisait déjà  : « Vive la Religion qui nous fera nous reconnaître, nous retrouver entre Aryens, nous entendre au lieu de nous massacrer, mutuellement, rituellement, indéfiniment. »


Anne Brassié admet que « la violence de Céline est née de sa terrible clairvoyance, l’Europe s’engageant dans une seconde guerre civile après le premier suicide de la guerre de 14-18 ». Cela étant, elle rétorque : « Sont-ce vraiment les chrétiens qui ont préparé ces guerres ? Qui furent envoyés au front pour mourir, dès 1914, en première ligne ? Les paysans bretons, catholiques, les officiers français catholiques et le premier d’entre eux, Péguy. » Mais pour Céline, la religion chrétienne est une religion juive facilitant les grands massacres en anesthésiant les peuples ainsi aliénés ³. Si Céline est antinationaliste c’est parce qu’il considère que les nations sont manipulées et génératrices de guerre. Pour lui seule la race est capable d’éradiquer la nation, d’où cette vision du « racisme » perçu comme antidote au nationalisme. Cette conviction peut aujourd’hui être ignorée et dissociée de son esthétique. Il n’en demeure pas moins qu’elle fut sienne.


 

Marc LAUDELOUT

 

 

1. Dominique Venner, Un samouraï d’Occident. Le Bréviaire des insoumis, Éd. Pierre-Guillaume de Roux, 2013.

2. Anne Brassié, « Un samouraï d’Occident », Présent, n° 7899, 20 juillet 2013, p. 5a-e.

3. Nietzsche considère que le christianisme représente le judaïsme « à la puissance deux » (La Volonté de puissance, 1887) dans la mesure où l’esprit judaïque s’y est universalisé.

 

© Extrait du Bulletin célinien, septembre 2013.

Abonnement 1 an : 55 euros.

Le Bulletin célinien, Bureau Saint-Lambert, B.P. 77, 1200 Bruxelles.

Guardias Walonas - Gardes wallonnes

Marcha de las Guardias Walonas

Marche des Gardes wallonnes

mardi, 10 septembre 2013

Ich will nicht ohne Narben sterben!

Grande-Bretagne : L’immigration de masse a rendu l’économie moins performante

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Grande-Bretagne : L’immigration de masse a rendu l’économie moins performante

 



Dans l’ensemble, les chefs d’entreprise ont tendance à soutenir une politique d’immigration – dite “de la porte ouverte” – ce qui contribue à répondre aux pénuries de main d’œuvre dans les secteurs clés.

Mais, plus particulièrement, cela exerce aussi une pression à la baisse sur les salaires. L’effet est similaire au fait d’avoir des niveaux durablement élevés de chômage, car elle crée une réserve inépuisable de main-d’œuvre bon marché.

Il semble que l’on assiste à la stagnation la plus importante de la productivité britannique. Les économistes ont largement décrit ce phénomène en le qualifiant d’« énigme »; mot qu’ils tendent à utiliser pour décrire une tendance qui tranche avec les normes passées. Pour la plupart d’entre nous, il ne s’agit cependant pas du tout d’un mystère. Pour faire simple, nous avons d’une part la mise en place de politiques publiques qui n’incitent pas à consommer et, de l’autre, une absence totale de réformes bénéficiant au secteur productif. Malheureusement, cela n’a fait qu’empirer depuis le début de la crise financière.

La stimulation de la demande par l’intermédiaire de politiques fiscales et monétaires est la solution de facilité quand les économistes trouvent leurs limites. Elle est peut-être vitale pour prévenir l’évolution de la situation de contraction économique actuelle en une véritable dépression.

Cependant, si le début de redressement s’accélère au Royaume-Uni, il est nécessaire de réaffirmer qu’il ne conduira ni à une croissance soutenable sur le long terme, ni à l’augmentation du niveau de vie. Cela requiert des choix bien plus difficiles.

Une étude, conduite par l’OCDE en début d’année concernant l’économie britannique, attribue le faible taux de productivité depuis le début de la crise à de nombreux facteurs qui sont sans aucun doute une partie de l’explication.

A un certain niveau, c’est principalement lié au système des banques toxiques – possédant de nombreux actifs dépréciés ou qui devraient l’être – qui, comme l’a défendu Ben Broadbent – membre du Comité de Politique Monétaire de la Banque d’Angleterre – entrave la redistribution du capital entre les différents secteurs.

Les récessions éliminent normalement les entreprises et les industries les plus faibles, permettant ainsi aux plus fortes et aux plus productives de prospérer plus aisément. Mais le refus de reconnaître les actifs pourris, de peur des conséquences sur la solvabilité des banques, est venu court-circuiter ce processus quasi naturel. Une politique monétaire accommodante vient aussi soutenir les banques toxiques, là encore court-circuitant la discipline darwinienne du marché.

Comme nous le savons maintenant, la croissance d’avant la crise n’était pas produite par le travail réel mais était produite par la frénésie de la finance et du marché immobilier, tous deux emportés par l’explosion du système bancaire.

La thésaurisation de la main-d’œuvre qualifiée, les baisses de production de pétrole en Mer du Nord et l’incapacité à bien quantifier statistiquement la croissance dans le secteur de l’économie numérique britannique, ont peut-être aussi joué leur rôle.

Pourtant, aucune de ces raisons n’explique de manière convaincante les piètres performances de la productivité à long terme de la Grande-Bretagne.

Afin de trouver d’autres causes, je tiens à souligner deux autres aspects du problème :

- L’impact négatif de l’immigration de masse sur la productivité,

- Et l’incapacité à répondre à de simples carences de l’offre dans la planification, l’éducation, l’infrastructure, l’efficacité du secteur public, le système fiscal et les perpétuelles faibles performances à l’export.

Dans l’ensemble, les chefs d’entreprise ont tendance à soutenir une politique d’immigration – dite “de la porte ouverte” – ce qui contribue à répondre aux pénuries de main d’œuvre dans les secteurs clés de l’industrie.

Mais, plus particulièrement, cela exerce aussi une pression à la baisse sur les salaires. L’effet est similaire au fait d’avoir des niveaux durablement élevés de chômage, car elle crée une réserve inépuisable de main-d’œuvre bon marché.

Cela peut être, ou ne pas être, bon pour les profits des entreprises mais ce n’est certainement pas bon pour la productivité ou pour le niveau de vie des personnes à faible ou moyen revenu.

En rendant la main-d’œuvre bon marché, il supprime une incitation puissante au gain de productivité. Faible salaire, faible engagement.

Pour bien comprendre, regardez ce qui s’est passé depuis que la crise a débuté il y a 6 ans. Durant cette période, plus d’1 million d’emplois ont été créés dans le secteur privé, un exploit remarquable compte tenu de l’ effondrement de la production. Cela a contribué à maintenir le taux de chômage bien inférieur à ce qu’il serait autrement. L’exploit mérite clairement d’être salué mais il a été réalisé au détriment des revenus réels.

Une grande partie de la création d’emplois est composé de métiers à faible rémunération ou à temps partiel. Les revenus réels ont connu leur pire resserrement depuis les années 1920. Pourtant, ce n’est pas juste un phénomène récent. La pression sur les revenus réels, en particulier à l’extrémité inférieure de l’échelle des revenus, date d’avant la crise.

La concurrence étrangère, que ce soit via l’immigration ou l’importation de biens et services, a été un grand obstacle à la croissance des salaires. Ceci a, à son tour, limité les incitations aux gains d’efficacité. Le travail ‘pas cher’ est devenu un substitut à l’investissement dans l’usine, dans les machines, la formation et la recherche et développement.

Lorsque le dernier gouvernement s’est vanté d’un énième trimestre consécutif de croissance, il a omis de préciser que c’était dû en grande partie à l’évolution de la population. Le revenu par tête a progressivement stagné.

La Grande-Bretagne est une économie ouverte qui doit certainement se positionner sur le marché de la main d’œuvre internationale de valeur. Pourtant, les niveaux élevés d’immigration non-qualifiée ont été au mieux un jeu à somme nulle, et peut-être cela aura-t-il une influence négative en décourageant les futurs investissements nécessaires.

Aucun partisan libéral n’envisagerait d’empêcher les employeurs d’embaucher des travailleurs étrangers, mais il y a d’autres formes d’intervention de l’État qui pourraient être plus appropriées. Cependant l’Union Européenne déclarerait illégale toutes formes d’intervention de ce genre, comme par exemple imposer des taxes sur l’utilisation de la main-d’œuvre étrangère peu coûteuse.

En rendant le travail à faible qualification plus cher, le système fiscal fournirait une incitation puissante aux gains de productivité dans la construction, le commerce de détail, les services sociaux et d’autres industries britanniques. Ces taxes pourraient alors être réaffectées dans des dispositifs incitatifs en faveur de la formation et d’autres formes d’investissement.

En tout cas, si le niveau de vie doit à nouveau croître, les employeurs doivent réapprendre les vertus du “faire plus avec moins de travailleurs”. Les gains de productivité ne peuvent correctement se produire que si les entreprises les plus performantes et innovantes sont mises en situation de mettre les plus faibles hors-jeu. Au contraire, s’appuyer sur la croissance de la population et la baisse des coûts unitaires du travail qu’elle entraîne pour rester compétitif est une impasse.

A maintes reprises le Royaume-Uni a esquivé une délicate réforme de l’offre, pour ne s’appuyer que sur une relance de la demande. Ces mesures étaient manifestement importantes dans les premières phases de la crise puisqu’elles ont contribué à éviter que la dépression ne s’installe profondément. Cependant leur poursuite 5 ans après la crise occasionne très probablement plus de mal que de bien.

Selon la fameuse phrase de Juncker, “les politiciens occidentaux savent ce qui doit être entrepris mais ils ne savent pas comment se faire réélire après l’avoir fait.”

De la même façon, tous savent qu’une croissance tirée par la productivité est la seule forme de croissance digne de ce nom, mais ils ne peuvent pas prendre les décisions à long terme nécessaires à sa mise en œuvre.

The Telegraph

The Gentleman from Providence

The Gentleman from Providence

By Alex Kurtagić

Ex: http://www.counter-currents.com

iap

S. T. Joshi
I Am Providence: The Life and Times of H. P. Lovecraft [2]
2 vols.
New York: Hippocampus Press, 2012

When it comes to a truly comprehensive biography of Howard Philip Lovecraft, one cannot do better than S. T. Joshi’s I am Providence, a 2 volume, 1,000-page, 500,000-word mammoth of a book that aims to cover everything there is to know about the American master of the weird tale.

As with Mark Finn, whose biography of Howard I reviewed recently, it would seem that L. Sprague de Camp was what spurred Joshi into action: after reading the latter’s Lovecraft: A Biography upon initial publication in 1975, Joshi dedicated his life thereafter to the study of the author from Providence. His choice of university was dictated by its holding the Lovecraft manuscript collection of the John Hay Library. And when he discovered that At the Mountains of Madness, his favourite Lovecraft story, contained no less than 1,500 textual errors, he devoted the ensuing years to tracking down and examining manuscripts and early publications in order to determine the textual history of the work and make possible a corrected edition of Lovecraft’s collected fiction, “revisions,” and other writings. What we have here, you may confidently conclude, is the product of decades of fanaticism and obsessive investigation.

Lovecraft was born in 1890, into a conservative upper middle class family, in Providence, Rhode Island. His father, Winfield, was a travelling salesman, employed by Gorham & Co., Silversmiths, and his mother, Sarah, could trace her ancestry back to the arrival of George Phillips to Massachusetts in 1630. His parents married in their thirties.

The young Lovecraft was talented, intellectually curious, and precocious, able to recite poetry by age two, and to read by age three. Growing up at a time when school was not compulsory, Lovecraft would not be enrolled in one until he was eight years of age and his attendance would be sporadic, possibly due to a nervous complaint and / or psychosomatic condition. But he was well ahead of his coevals in any event, having been exposed, and thereafter enjoyed ready access, to the best of classical and English literature. From Lovecraft’s perspective, this meant 17th and early 18th century prose and poetry, and, indeed, so steeped was he in the canonical literature from this period that he regarded its style of writing not only the finest ever achieved, but, for him, the norm. In the process, he also absorbed some of the archaic tastes and sensibilities permeating this literature, which would subsequently be reflected in his writing, speech, and attitudes, fundamentally aristocratic and at odds with the 20th century. What is more, Lovecraft was never denied anything he may have needed in the pursuit of his intellectual development, be it a chemistry set, a telescope, or printing equipment, so he became knowledgeable enough on these topics, and particularly his passion, astronomy, to contribute articles to a local publication from an early age. He also regularly produced—while still in infancy—his own amateur scientific journals, many of which still survive and were personally examined by Joshi for this biography. Thus, from early on, Lovecraft, a somewhat lonely boy with a charmed boyhood, was committed to a life entirely of the mind.

With such beginnings, it would appear to a casual observer that Lovecraft was well-equipped to become a success in life. But, instead, in adulthood he experienced ever-worsening poverty, squalor, and, though well known for a period within the specialised milieu of amateur publishing, growing professional obscurity. That his legacy has endured owes—besides to the intrinsic value of his works—perhaps in a not insignificant measure to his having been a prodigous correspondent: it has been estimated that throughout the course of his life Lovecraft may have written as many as 100,000 letters (only about 20,000 of which survive), and these were not hastily penned missives, as can be seen in the many excerpts herein presented, but thoughtful communications, sometimes of up to 30 pages in length, which are works of literatue in themselves.

In examining his overall trajectory, we can identify a number of negative vectors early on. The loss of his father, who, following a psychotic episode and permanent committal to a local hospital, suffering from what Joshi presumes to have been syphilis, meant that, from 1893, Lovecraft passed into the care of his mother, aunts, and his maternal grandfather. Whipple van Buren Phillips, a wealthy businessman, proved a positive influence, but died in 1904, and, his estate being poorly managed, this eventually forced the family to downsize. This badly affected the young Lovecraft, to the point that he briefly contemplated suicide. He was eventually dissuaded by his own intellectual curiosity and love of learning.

In 1908, just prior to his high school graduation, Lovecraft suffered a nervous breakdown. Joshi speculates that failure to master higher mathematics may have been a factor, since Lovecraft’s ambition was to become a professional astronomer. (Failure to master meant not getting straight As, but, among the As, a few A-s and Bs.) Whatever its cause, the breakdown prevented Lovecraft from obtaining his diploma, a fact he would later conceal or minimise. Lovecraft then went into seclusion—hikikomori, as it would be called today—in which condition he remained for five years, mostly reading and writing poetry. Joshi expresses alarm at the sheer volume of reading undertaken by Lovecraft during this period, a large portion of it consisting of magazines.

Lovecraft’s re-emergence owes to his irritation with a pulp author, Fred Jackson, whose stories in Argosy magazine he found maudlin, mediocre, and irritating. His letter was published in the magazine, whereby it detonated an opinionated debate. When Lovecraft’s expressed view led to attacks, he responded in lofty and witty verse, thus instigating a months-long war—in archaic rhyme—in the letters’ page. This got him noticed by the president of the United Amateur Press Association (UAPA), Edward F. Daas, who invited Lovecraft to join. This inaugurated Lovecraft’s amateur career, which led to his return to fiction—something he had dabbled in years before—and, by 1919, to his first commerically published work. During his early years in amateurdom, Lovecraft would also produce his own literary journal, The Conservative, a publication that truly lived up to its name and that has only recently been reprinted by Arktos in unabridged form.

Throughout this period Lovecraft continued to live with his mother, who sustained them both off an ever-shrinking inheritance. Trapped between the expectations of her class and dwindling resources, she grew progressively more neurotic and unstable. She already had an unheathily close, love-hate, relationship with her son, and Joshi records that she considered her son’s visage too ugly for public view. By 1919, suffering from hysteria and clinical depression, she would be committed to hospital, where she would remain for the rest of her days. Mother and son stayed close correspondents, but she was a perennial source of worry. Thus, when Sarah died in 1921, initial grief led to a sense of liberation, and an improvement in Lovecraft’s general health—though he, at this time a tall man of nearly 200 lbs, always regarded himself as ailing.

Yet there were further turns to the worst ahead. In 1921, at a convention for amateur journalists in Boston, Lovecraft met Sonia Green, an assimilated 38-year-old Ukrainian Jew from New York, whom he would marry in 1924. Interestingly, Lovecraft only told his aunt after the fact, writing to her from New York, where he had by then already taken residence at Sonia’s apartment.

Joshi notes that at this time Lovecraft’s prospects appeared to be improving: Sonia earned a good living at a hat shop in Fifth Avenue, and Lovecraft’s professional writing career was taking off. Lovecraft, then in a decadent phase, was also enthralled by the city, where he had a number of amateur friends. However, Sonia lost her job almost immediately when the shop went bankrupt. This forced Lovecraft for the first time to find regular employment, but without qualifications, work experience, nor, apparently, marketable skills, he was unable to find a position. The consequent financial difficulties impacted on Sonia’s health, who entered a sanatorium for a period of recovery. Eventually, she would find a job in Cleveland, leaving Lovecraft to live on his own, in a tiny apartment, in Brooklyn Heights (then Red Hook), back then a seedy neighbourhood. Sonia sent him an allowance, which permitted him to cover his rent and minimal expenses, but otherwise Lovecraft lived in poverty, stretching as far as possible a minuscule fare of unheated beans, bread, and cheese.

This was, however, genteel poverty. When, on one occasion, Lovecraft’s apartment was burglarised, he was left with only the clothes on his back (while he slept, the thieves gained access to his closet and stole all his suits). His reaction says much about Lovecraft: first priority for him was to get four new replacements: light and dark, winter and summer—no easy task, given his slender wallet. A gentleman may be poor, but he must still dress like a gentleman! The ensuing hunt for suitable attire taxed Lovecraft’s ingenuity, and ignited his frustration at the shoddy quality of modern suits (Lovecraft’s original suits had been made in happier times). Eventually, he succeeded, with minimal compromise.

Seething with immigrants of all descriptions, crowded, and filthy, Lovecraft came to despise New York, recognising it as an emblem of modern degeneration (remember: he already thought this in 1925!). This negative opinion does not sit well with Joshi: having immigrated from India at a young age and having been a New York resident for 27 years, Joshi puts Lovecraft through the wringer for failing to appreciate the city’s vibrancy. Here and elsewhere, he attacks Lovecraft for his enamourment with Anglo-Saxondom, his fierce resistance to racial egalitarianism, and his rejection of the multicultural society. In Joshi’s estimation, Lovecraft ought to have considered Franz Boas’ research, which was beginning to transform anthropology at this time; Joshi views this as contrary to Lovecraft’s rigorous scientific outlook—in other words, as Lovecraft having been blinded by prejudice. However, this overlooks the fact that there were different strands of opinion in anthropology at this time: this was the Progressive Era, when the American eugenics movement was at its height, enjoying institutional legitimacy, famous proponents (e.g. John Harvey Kellogg), and backing from the likes of the Rockefeller Foundation, the Carnegie Institution, and the the Harriman estate. Boas’ findings were politically motivated and not universally accepted, and he had by no means proven his case. (Worse still, since then there have been accusations of scientific fraud.) It would, therefore, seem that Lovecraft was entirely consequent with his aristocratic and scientific worldview.

Though Joshi deems it necessary to shoehorn his views on race and racism—zzz . . . —he shows admirable restraint, all things considered—though he has still been criticised by readers. He clearly struggles to reconcile his admiration for Lovecraft with an imagined rejection by him, which is coloured by the absurdities of the modern discourse on these matters. As the author of The Angry Right: Why Conservatives Keep Getting it Wrong (2006), where he invects against liberals like William Buckley and Rush Limbaugh, and where he welcomes the Leftward drift of American values, he can understand Lovecraft’s own merely as a reflection of the times in which he lived. Yet, Joshi has expended an immense amount of time and energy studying and writing about Lovecraft’s thought and worldview, as expressed both in correspondence and in fiction, and thus makes a fair attempt at describing them at length in a temperate fashion.

Lovecraft would eventually return to Providence, thus marking the beginning of the most productive phase of his career. By this time his marriage to Sonia was essentially over; a final attempt was made, but Lovecraft’s aunts rejected the idea of Sonia setting up shop in Providence, regarding her—or rather, the idea of a businesswoman—as somewhat declassé. Joshi again takes Lovecraft to task for not having shown more backbone before his aunts, but he is, nevertheless, of the opinion that Lovecraft was unsuited for marriage—being emotionally distant, stiff-upper lipped, and sexually sluggish—and ought never to have taken a wife. The Lovecrafts would in time agree on an amicable divorce (though, in the end, and to Sonia’s shock later on, he never signed the decree).

Despite his peaking productivity, Lovecraft’s economic prospects continued to decline. His stories became longer and more complex, and it became increasingly difficult to place them. Farnsworth Wright, Weird Tales’ capricious editor, repeatedly rejected them, though sometimes he would accept some after a period, after lobbying or intercession by one of Lovecraft’s correspondents. His seminal essay on horror fiction, Supernatural Horror in Literature [3], completed at this time, appeared haphazardly and incompletely in tiny amateur publications, and would never appear in its final, revised, complete form during his lifetime. Therefore, Lovecraft, now living in semi-squalor with his aunt in cramped accommodation, was increasingly forced to survive through charging for “revisions,” which, given the amount of hands-on editing and re-writing involved, was for the most part tantamount to ghostwriting. Lovecraft was too much of a gentleman, too generous for his own good, and charged very modest fees. We must remember, however, that Lovecraft, in this same modest spirit, saw himself as a hack.

All the same, through extreme frugality and resourcefulness, Lovecraft still managed to travel yearly around New England, mainly as an antiquary. This resulted in extensive travelogues, written in 18th-century prose, replete with archaisms and therefore neither publishable nor intended for publication. Joshi mentions that some have criticised Lovecraft for expending excessive energy on correspondence and unpublishable travelogues, rather than writing fiction, but he argues that this was Lovecraft’s life, not his critics’—who are they to tell him, posthumously, what he ought to have done?

Joshi notes that the Great Depression forced Lovecraft to reconsider some of his earlier positions, and that he—encouragingly in his view—embraced FDR’s New Deal. He also notes, although briefly, that Lovecraft may have misunderstood the nature of the program. All the same, he likes to describe Lovecraft as having become a “moderate socialist,” even if he is later careful to point out that his socialism was radically distinct from the Marxist conception—in fact, Lovecraft instinctively sympathised with fascism and Hitler’s movement, and would remain firmly opposed to Communism. Lovecraft’s conception of socialism was entirely elitist. From his perspective, the culture-bearing stratum of a civilisation should not, in an ideal world, be shackled by the need to waste time and energy on trivial tasks, out of the need to earn a living: the production of high culture is often incompatible with commercial goals, so, in his view, it demands freedom from economic activity. And this implied some sort of patronage, in the manner that kings, popes, or wealthy aristocrats or businessmen provided to artists in the past. In other words, a portion of the nation’s wealth should be channelled into things of lasting value—and, therefore, into seeing to it that the very few individuals capable of producing them are in a position to do so. Lovecraft conceived this as socialism because he saw it as the task of the best to better the rest, and high art and intellection played an important rôle in that endeavour.

By 1936, Lovecraft, already in constant pain, was diagnosed with bowel cancer. He would die a few months later, on 15 March 1937.

As with Finn’s biography of Robert E. Howard, Joshi carries on beyond the grave to trace Lovecraft’s legacy, and the development of Lovecraft scholarship over the past 75 years. Like Finn, he has complaints about L. Sprague de Camp’s biography, which he deems substandard and inaccurate; he describes de Camp as business-minded (a euphemism for opportunist). Joshi also criticises August Derleth, one of Lovecraft’s correspondents, who acted early on and energetically to preserve Lovecraft’s legacy through his publishing company, Arkham House: as de Camp did with Howard, Derleth sought to extend Lovecraft’s mythology with posthumous “collaborations,” wherein he distorted the mythology by infusing it with his own preconceptions. To Joshi this was a disreputable attempt to market his own fiction using Lovecraft’s name, though Derleth would later become a well-regarded author in his own right.

While Joshi’s biography is impressive in its comprehensiveness and level of detail, I found his compulsion to provide a plot summary of every single story that Lovecraft ever wrote rather tedious and beyond requirements. One can see that the biography’s comprehensive logic dictates their inclusion, and they can be useful, but I wonder if the tomes’ objectives could not have been met without this overwhelming prolixity.

Joshi recognises his subject’s superior character in that, though Lovecraft would have been able to prosper economically had he compromised on quality, produced more, and stuck to what was popular, he remained steadfast in his refusal to do so. Whatever he did, he did to the best of his ability, without homage to Mammon. Readers, says Joshi, should be grateful for that, as it was this that has guaranteed the lasting value of Lovecraft’s work as well as his enduring legacy.

 


Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com

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[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2013/09/iap.gif

[2] I Am Providence: The Life and Times of H. P. Lovecraft: http://www.amazon.com/gp/product/1614980519/ref=as_li_ss_tl?ie=UTF8&camp=1789&creative=390957&creativeASIN=1614980519&linkCode=as2&tag=countercurren-20

[3] Supernatural Horror in Literature: http://shop.wermodandwermod.com/supernatural-horror-in-literature.html

Le roi Arthur était-il un cavalier sarmate?

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Le roi Arthur était-il un cavalier sarmate et les mythes arthuriens ont-ils une origine dans le Caucase ?

(source : agencebretagnepresse)

L’actualité récente en Géorgie a mis les projecteurs sur la République indépendante d’Ossétie (Indépendance proclamée en 1991). Les Ossètes comme les Bretons d’ailleurs, ont des origines ancrées dans la fin de l’Empire romain. Les Ossètes descendent des fameux Alains, ou plutôt de ceux qui sont restés et ne sont pas partis piller l’Empire au Ve siècle.

Les Sarmates en Bretagne insulaire

cataphracte.jpgCes peuplades qui parlent une langue iranienne apparaissent dans le bas-Empire romain sous le nom de Sarmates quand ils sont alliés ou federati et de Scythes quand ils sont ennemis. Envahisseurs, ils sont connus sous le nom d’Alains alliés des Vandales.

La cavalerie sarmate-alain très appréciée des Romains était quasiment invincible. Elle était appelée cavalerie [1], du nom de leur cuirasse d’écailles, la cataphracte.

Depuis 175, les Sarmates devaient fournir à Rome 5000 cavaliers, pour la plupart envoyés en Bretagne (insulaire) à la frontière nord. Les Sarmates de Bretagne auraient été commandés à la fin du IIe siècle par Lucius Artorius Castus qui serait le roi Arthur historique (1), du moins le premier, car il semblerait que le roi Arthur soit un personnage composé de plusieurs figures historiques. Lucius Artorius ayant vécu 200 ans plus tôt que le roi breton qui rallia les Brito-Romains contre les envahisseurs saxons.

D’après Léon Fleuriot, c’est Artorius Castus, préfet de la VIe légion, qui aurait aussi maté la révolte armoricaine de 184. Une intervention en Gaule que rapporte bien la légende dans la première version écrite, celle de Geoffroy de Monmouth.

C’est cette cavalerie sarmate-alain qui aurait apporté d’Asie le symbole du dragon en Grande-Bretagne. Rien de plus normal pour des cavaliers aux cuirasses écaillées de se battre derrière des enseignes d’un monstre écaillé. Le dragon rouge du roi Arthur, dit justement « Pendragon » comme le roi Uther. Le dragon rouge apparaît aussi dans les prophéties de Merlin. Un dragon que l’on retrouve aujourd’hui jusque sur le drapeau du Pays de Galles.

Les Alains en Armorique

Les Sarmates-Alains, révoltés contre Rome, ont pillé le nord de la Gaule de 407 à 409. Après avoir traversé la Loire en 408, le consul Aetius leur donnera l’Armorique pour qu’ils les laissent tranquilles. Un peu comme le roi de France cinq siècles plus tard donnera la Normandie aux Vikings de Rollon.

Avec à leur tête un chef du nom de Goar, les Alains se divisent en plusieurs bandent et pillent l’Armorique. C’est encore eux, redevenus des mercenaires au service de l’empire qui vont réprimer la dernière révolte armoricaine dite des Bagaudes (bagad = bande en gaulois et en breton moderne) en 445-448 à une époque où justement les Bretons commencent à arriver de Grande-Bretagne puisque les dernières légions la quittent en 441.

Certaines s’établiront juste de l’autre côté de la Manche puisque le mot Léon dérive justement de « légion » et Trégor de tri-cohortes. Voir à ce sujet le Guide des drapeaux bretons et celtes de Divi Kervella et Mikaël Bodloré-Penlaez, qui vient de sortir en librairie. Les symboles héraldiques du Haut-Léon et du Trégor semblent avoir justement hérité du dragon.

Certains linguistes pensaient que les patronymes Alain ou Alan seraient tout simplement des gens descendant d’Alains établis en Gaule mais le vieux breton a un terme alan pour le cerf et cette origine semble plus vraisemblable. Des Alains se sont surtout installes en Île-de-France, en Aquitaine, en Lusitanie (Portugal) autour de Carthagène en Vandalousie qui deviendra Andalousie. Le nom de Tiffauge, célèbre pour son Barbe Bleu viendrait du nom d’une des bandes de barbares alliés aux Alains, les Taïfales, établis dans cette région au Ve siècle. Le nom de l’Aunis viendrait aussi d’Alains.

Les mythes arthuriens d’origine alanique ?

Dans leur livre De la Scythie à Camelot, Covington Scott Littleton, professeur d’anthropologie à Los Angeles et Linda Ann Malcor, docteur en folklore et mythologie, ont remis en cause l’origine celtique du cycle arthurien.

Pour eux, le cour de cet ensemble fut apporté entre le IIe et le Ve siècle par des cavaliers alains-sarmates.

La culture des Ossètes, les cousins contemporains des Alains, possède des récits qui ressembleraient aux aventures d’Arthur et des chevaliers de la Table ronde. On y raconte notamment la saga du héros Batraz et de sa bande, les Narts. Dans cette histoire il est, entre autres, question d’épée magique qui serait l’équivalent d’Excalibur et de coupe sacrée, le Graal donc, la coupe du Wasamonga que l’on retrouve sur l’emblème moderne de l’État d’Ossétie du Sud avec un triskell qui est par contre universel et pré-cetique puisque sur des monuments mégalithiques comme à Newgrange en Irlande. Il semblerait que les échanges de mythes aient eu lieu dans les deux sens.

(1) rapprochement fait pour la première fois par Zimmer, Heinrichen 1890, repris par Kemp Malone en 1925.

Sources : – C. Scott Littleton, Linda A. Malcor, From Scythia to Camelot, New-York ; Oxon, 1994 (rééd. 2000).

- X. Loriot, Un mythe historiographique : l’expédition d’Artorius Castus contre les Armoricains, Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France, 1997.

- Guide des drapeaux bretons et celtes, D. Kervella et M. Bodloré-Penlaez. Éd. Yoran Embanner, 2008.

- Les Origines de la Bretagne, Léon Fleuriot. Payot, 1980 (nombr. rééd.).

Notes

[1] cataphractaire

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lundi, 09 septembre 2013

Mériguet et Van Hemelryck à Radio Courtoisie

Pour une entrée en Tradition

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Jean-Paul LIPPI:

Pour une entrée en Tradition
Prolégomènes à une métaphysique opérative

L'idée de Tradition, au sens guénonien du terme, connaît aujourd'hui un incontestable regain d'intérêt dans des milieux encore quantitativement restreints mais qui n'en paraissent pas moins appelés à jouir d'une influence grandissante, encore que celle-ci doive surtout, de par sa nature “subtile”, se faire sentir sur un plan très largement ignoré du grand public. De même, un certain nombre de personnes, légitimement insatisfaites des réponses apportées par le monde moderne à leur exigence spirituelle, poursuivent, le plus souvent à titre individuel, une recherche dans ce domaine, en s'appliquant à éviter autant que faire se peut les pièges d'un spiritualisme dévoyé et humanitariste. Devant cette situation, nous voudrions tenter d'apporter dans les lignes qui vont suivre une clarification quant à la véritable nature de la “Tradition” dont les premiers se réclament et à laquelle les secondes aspirent. Il nous semble en effet que le mot, s'il n'est pas toujours, à proprement parler, galvaudé, n'est que trop rarement employé dans la plénitude de sa signification, des valences secondaires lui étant trop fréquemment attachées. Cette volonté de clarification nous conduira également à préciser ce qu'il convient d'entendre, dans l'optique Traditionnelle, lorsque référence est faite à la “métaphysique”.

Envisagé dans la plénitude effective de sa définition, le mot “Tradition” ne désigne essentiellement nulle autre chose que la perception de l'immanence de la Transcendance, suivie de la transmission doctrinale de la possibilité de cette perception. Est donc “traditionniste”, pour employer le néologisme forgé par Pierre A. Riffard (1), tout homme qui vit hic et nunc cette Transcendance, c'est-à-dire qui ressent dans son Esprit, son âme et sa chair ― indissociablement ― l'action de celle-ci, sur le plan tant personnel qu'historique et / ou politique. Les mots n'étant que ce qu'ils sont, cette sensation renvoie, dans ses profondeurs ultimes, au registre de l'indicible, ce dont les adversaires de la vision du monde Traditionnelle ne manquent pas de tirer argument pour reléguer cette dernière au rayon des sous-produits de l'idéalisme, quand ce n'est pas à celui des délires quasi-psychotiques. Dans ce dernier cas, la volonté de vivre l'enseignement Traditionnel est ramené à un phantasme de réunification fusionnelle, affirmé fondé sur la nostalgie refoulée de l'état de non-séparation entre mère et nourrisson. Il n'est plus alors question de dépassement de la condition humaine et de rattachement au divin, mais au contraire de régression, soit intellectuelle soit affective, soit les deux à la fois. L'expérimentation de la Transcendance, identique, dès lors qu'elle est stabilisée, à la re-divinisation, ne s'analyse plus, dans le cadre de cette conception spirituellement mutilante, que comme une hallucination, provoquée par le désir angoissé d'échapper à la condition d'être « marqués par leur radicale finitude », ainsi que l'écrit un auteur par ailleurs intéressant mais qui n'en confond pas moins trop facilement la pensée de la Tradition avec sa parodie New Age (2).
 
En réalité, que l'appel à l'Esprit puisse effectivement, dans certains cas, cacher un malaise existentiel, le fait n'est pas niable, encore que les conséquences en soient parfois, même dans ces conditions, bien plus positives qu'on ne veut bien l'admettre (3). Mais vouloir à toute force tout ramener à cela, généralement, d'ailleurs, pour les besoins d'une cause partisane, philosophique ou religieuse, plus ou moins avouée revient à adopter l'attitude moderne par excellence qui consiste à toujours prétendre expliquer à bon droit le supérieur par l'inférieur, et à ne reconnaître in fine de légitimité au premier que du moment que l'on est (croit-on) parvenu à le réduire au second (4). Face à une contestation ainsi dirigée, la réaction des hommes de Tradition ne peut être d'engager la discussion selon une tactique “arguments / contre-arguments”, ceci en raison du caractère d'indicibilité ultime de l'expérience de l'immanence de la Transcendance mentionné plus haut. Il n'est pas pour autant question pour eux de se draper dans leur superbe pour mieux poitriner aux quolibets, ni davantage de reprendre à leur compte quelque saugrenu credo quia absurdum, mais simplement de relever que l'affirmation et sa réfutation ne sont pas, en l'occurrence, au même niveau, qu'elles ne renvoient pas, précisément, au même registre. C'est pourquoi il n'y a, à parler strictement, rien à répondre à qui nie la possibilité d'atteindre ― c'est-à-dire de retrouver ― des états de conscience supérieurs à celui partagé par l'immense majorité de factuelle humanité, ou, à plus forte raison, qui rejette l'éventualité même de l'existence de ces états. Ce qui doit parler ici, c'est seulement la force de l'exemple. Non que chacun soit libre de le suivre ou non, d'accepter ou de refuser la transmission (le tradere) de la doctrine puis de s'engager dans l'expérience de la Transcendance vécue en mode immanent. Il y a tout au contraire en ce domaine comme l'effet d'une Grâce (si l'on veut s'exprimer à la manière des théologiens) qui détermine pour chacun, au moins dans les conditions de son existence présente, une manière de prédestination (5).

On comprend aisément que ce vécu immanentiste de la Transcendance soit plus que difficilement compatible avec toute forme d'exclusivisme religieux, surtout militant et prosélyte. La forme, certes nécessaire sur son plan propre, que telle ou telle religion donne à l'expérience de la Transcendance a en effet pour conséquence inévitable de “figer” celle-ci dans son expression, ce par le mouvement même dans lequel elle en dévoile l'existence ; c'est pourquoi une religion peut être tout aussi bien un chemin d'accès à l'Absolu que l'occasion d'un piétinement, si ce n'est d'un égarement, spirituel. Nous retrouvons ici la distinction bien connue de l'ésotérisme et de l'exotérisme, distinction qui repose en dernière instance sur la faculté de passer, littéralement, “au travers des formes”. Il faut également souligner qu'un tel vécu interdit le culte de tout “impératif catégorique” moral, quelle qu'en puisse être la source. Dût ceci choquer certains parmi nos lecteurs, nous affirmons que la Tradition, parce qu'elle est d'essence métaphysique, ne saurait être en aucune manière “morale”. Si l'on veut authentiquement retraduire en langage normatif l'expérience des états supra-humains, c'est sur le plan de l'éthique et non sur celui de la morale qu'il convient de se situer, la seconde étant universaliste par définition alors que la première est différentialiste au sens où elle ne connaît d'autre loi que celle qui s'impose, à des fins de conservation (6), à un être particulier en fonction de sa nature propre, c'est-à-dire en fonction du niveau d'expérimentation de la Transcendance dont il est effectivement capable. Que des normes soient ― si l'on peut dire ― encloses dans chacun des « états multiples de l'Être » (7), nous ne songeons nullement à le nier. Mais, précisément parce que chaque norme est consubstantielle à l'état au niveau duquel (et à partir duquel) elle se manifeste, aucune d'entre elles ne saurait se prévaloir d'une validité universelle (8). C'est pourquoi celui qui atteint l'Absolu ne peut plus connaître de normes, puisqu'il les a toutes expérimentées et finalement dépassées, un tel être devenant donc « à lui-même sa propre Loi » (9). La morale possède certes sa justification sur le plan qui est légitimement le sien, celui de l'aide apportée, si l'on veut à la manière d'une béquille, aux individus incapables de se rendre authentiquement libres et donc de se tenir debout par leurs seules forces. Mais lui accorder une valeur éminente, c'est couper l'accès à l'Absolu, en bornant l'expérience de la Transcendance à l'un des niveaux de la Manifestation illusoirement posé comme ultime. De fait, l'Absolu ne mériterait pas son nom s'il ne contenait toutes les normes, y compris les plus “immorales”, chacun des « états multiples de l'Être » manifestant telle d'entre elles selon sa potentialité et sa valence particulières. Dès que conscience est prise de ceci, le refus d'un comportement quelconque ne peut plus se fonder sur des préceptes affirmés valides dans l'universel, mais uniquement sur l'affirmation de valeurs supérieures d'un point de vue métaphysique, c'est-à-dire témoignant d'un état de l'Être plus élevé et contenant de ce fait les précédents états qu'il dépasse selon le principe de l'intégration hiérarchisante. Repousser cette conception revient à rejeter principiellement la nécessaire dimension destructrice de l'Être et donc à mutiler intellectuellement l'Absolu.

Ces précisions indispensables étant apportées, la Tradition commence à apparaître sous son jour véritable. Ce dont celle-ci témoigne, c'est d'une Connaissance expérimentale, celle de la présence active de forces non-humaines dans le monde des hommes. Mais il faut prendre garde de n'enfermer la formule dans une dimension ni étroitement théiste ni, à l'inverse, vaguement “occultisante”. Ce qui est évoqué ici, ce n'est pas faction providentielle d'un Dieu personnalisé ou les agissements de “Supérieurs Inconnus” et autres entités plus ou moins désincarnées. Que de pareilles choses appartiennent au possible ― et tout particulièrement les secondes ―, nous ne songeons pas le moins du monde à le nier. Mais il s'agit là de phénomènes qui renvoient, du seul fait qu'ils sont, précisément, des phénomènes, au domaine de la physique (10), non à celui de la métaphysique. La Connaissance Traditionnelle, de nature authentiquement métaphysique parce que d'essence contemplative, est celle de l'Action, impersonnelle et détachée, de l'Absolu en tant que Source d'où jaillissent et où retournent s'anéantir tous les contraires dyadiquement unis dont l'entrelacs cosmique forme la trame de la Manifestation (11). La perception de l'immanence de la Transcendance repose sur la contemplation de (et la participation à l'éternel maelström d'Énergie qui danse sans début ni fin au sein du Vide universel comme dans le Cœur de l'Homme (12), maelström que l'Hindouisme représente par l'image du Shiva Nataraj dans un cercle de flammes (13). C'est sur cette base qu'il revient à chacun, s'il en ressent la vocation et entend l'appel de ce qui en lui est plus que simplement humain, de tenter, au risque très réel d'y perdre la raison et sans doute bien davantage, de faire sien ce « chaos vivant dans lequel est contenue chaque possibilité » (14), d'unir indissolublement en lui-même Connaissance et Puissance, ce qui est la seule manière réelle de dépasser tout aussi bien le nihilisme (Connaissance désespérée car sans Puissance) que le titanisme (Puissance enivrée car sans Connaissance). Si la quête vient à être couronnée de succès, celui qui l'aura menée à terme en recueillera les lauriers destinés à ceux auxquels il a été promis qu'ils re-deviendraient “comme des dieux”, c'est-à-dire qu'ils retrouveraient leur nature originelle non bornée. Toute la légitimité de la Voie tantrique, plus spécialement dans son orientation dite “de Main Gauche”, en tant que mode de déconditionnement et de réintégration au Divin reposant sur une intensification énergétique appropriée aux conditions du Kali Yuga, est là.

Cette mention du caractère originellement non borné ― donc essentiellement et absolument libre ― de la nature humaine, caractère qui la constitue immédiatement en tant que « préternature » selon la formule de Pierre Gordon (15), nous conduit à examiner le sens du mot “métaphysique” tel que l'emploient les traditionnistes afin de dissiper une confusion. En effet, la métaphysique Traditionnelle n'est pas la métaphysique moderne, celle des traités de philosophie rédigés dans le sillage du réductionnisme ontologique aristotélicien (16), même si l'assimilation est aujourd'hui trop répandue qui mène à ne voir dans la métaphysique qu'une espèce de sous-catégorie de la philosophie au surplus rendue obsolète par les prétendues conquêtes intellectuelles du positivisme logique (17). Or la métaphysique n'est pas la philosophie mais autre chose et davantage que celle-ci ; l'opposition complémentaire des deux disciplines renvoie à celle du sacré et du profane, et leur confusion en dit par elle-même long sur l'état réel du monde moderne (18). Non que la seconde soit dépourvue de sens et donc de légitimité. Mais la quête du Vrai qui la constitue et la « passion de la vérité » (19) qui l'évertue ne peuvent prétendre, du simple fait que la philosophie est une démarche tout humaine avec les limitations que cette qualification implique, s'élever au-dessus des horizons de l'intelligence logico-conceptuelle et spéculative. D'où la volonté, chez ceux qui en tiennent pour la thèse de la métaphysique philosophique, de parvenir à l'élimination de celle-ci.

Le cas d'un Ludwig Wittgenstein est de ce point de vue tout à fait significatif. En écrivant la phrase fameuse qui clôt le non moins fameux Tractacus (20) : « Ce dont on ne peut parler, il faut le taire », celui-ci n'aurait fait qu'énoncer une banalité fort peu “philosophique”, s'il n'avait eu pour projet, ce faisant, de mettre fin à la métaphysique en démasquant derrière celle-ci une faiblesse logique, létale selon lui, qui proviendrait du caractère d'au-delà du langage qu'il lui impute. « La juste méthode de philosophie serait en somme la suivante : ne rien dire sinon ce qui se peut dire, donc les propositions des sciences de la nature ― donc quelque chose qui n'a rien à voir avec la philosophie ― et puis à chaque fois qu'un autre voudrait dire quelque chose de métaphysique, lui démontrer qu'il n'a pas donné de signification à certains signes dans ses propositions. Cette méthode ne serait pas satisfaisante pour l'autre ― il n'aurait pas le sentiment que nous lui enseignons de la philosophie ― mais elle serait la seule rigoureusement juste », lit-on un peu plus haut (21) dans le même ouvrage. Mais la métaphysique que Wittgenstein poursuit de sa vindicte n'est que la métaphysique des philosophes, non la seule métaphysique que l'on doit tenir pour authentique précisément parce qu'elle se situe par-delà les enchaînements purement logiques (formels) de la philosophie, ce que l'emploi synonymique des deux termes dans le passage cité montre sans hésitation possible.

De la métaphysique authentique, on ne saurait d'ailleurs dire qu'elle est indicible formellement, même si elle le demeure, avons-nous dit, fondamentalement, l'indicibilité métaphysique de l'Absolu par le relatif que constitue le langage étant tout autre chose que l'indicibilité absolue de la métaphysique, ce dans la mesure où, si le signe n'est certes pas le sens, il n'en représente pas moins sa trace. Trace à dire vrai moins rémanente qu'actualisante et même incitatrice, car le sens, s'il fallut qu'il fût “voilé” ― ou encore “abrité” ― comme tout ce qui possède Gloire (22), appelle de ce fait son nécessaire dévoilement, non dans les rêveries “mystiques” au douteux parfum d'évasionnisme pseudo-spirituel (et au goût trop réellement infernal) chères aux zélateurs du soi-disant “Nouvel Âge-à-venir-pour-nous- apporter-le-bonheur” (23), mais dans le recueil patient des modalités horizontalement divergentes et verticalement convergentes de l'être-là. À cette nécessité du recueil peut seule faire droit la réconciliation de l'Attention, qui enveloppe amoureusement du regard le monde phénoménal, et de la Contemplation, qui transperce ce même monde pour atteindre au Mystère du « supramonde », lequel est aussi et tout autant un « intramonde ». Car, puisque le Monde est essentiellement un du Principe au plus bas étage de Sa manifestation (24), connaître, ce ne peut être voir simplement au-delà des formes mais également au travers de celles-ci, ce qui suppose que soit préalablement renversée en soi-même l'opacification, contrepartie individuelle de la « solidification du monde » (25), qui s'oppose à l'acuité du Regard. La « perspective métaphysique » (Georges Vallin) repose ainsi en dernière instance sur l'élection continuée de l'ascèse du diaphane. La formule selon laquelle « ce qui concerne la métaphysique, c'est ce qui est au delà de la nature » (26) est évidemment indiscutable, mais celle qui affirmerait que « ce qui concerne la métaphysique, c'est ce qui transparaît au travers de la nature » le serait tout autant. Ne serait-ce que parce que « la nature tout entière n'est qu'un symbole des réalités transcendantes » (27).

Si Wittgenstein, pour en revenir à lui, était parvenu à dépasser le simple niveau de la métaphysique des philosophes, il aurait pris conscience que ce dont on ne peut parler demande moins à être tu qu'à être vécu, car « ce dont il s'agit (pour (le métaphysicien), c'est de connaître ce qui est, et de le connaître de telle façon qu'on est soi-même, réellement et effectivement, tout ce que l'on connaît » (28). C'est pourquoi, après avoir écrit que « le monde est indépendant de ma volonté » (29), il aurait pu ajouter, en toute orthodoxie Traditionnelle (et “tantrique”) que ma volonté peut à son tour se rendre indépendante du Monde, et donc, à la fin, rendre le Monde dépendant d'elle, en s'enracinant dans ce qui transcende les phénomènes, c'est-à-dire en devenant identique à l'objet de ma Connaissance. Mais Wittgenstein, en tant que philosophe, ne peut pas ne pas être prisonnier des limitations formelles de la logique, et plus particulièrement de la formulation aristotélicienne du tiers-exclu, d'où sa conviction que « de même qu'il n'y a qu'une nécessité logique, il n'y a qu'une impossibilité logique » (30), ce qui l'amène à tenir pour « clair que le produit logique de deux propositions élémentaires ne peut être ni une tautologie ni une contradiction » (31), sans qu'il se doute apparemment que la notion de “contradiction” n'est elle-même qu'une conséquence de l'adoption d'un schéma exclusivement logique, schéma qui peut être dépassé par l'intuition de la non-contradiction absolue des contraires. Intuition intellectuelle, bien entendu, et non psychologique, donc essentiellement contemplative et non discursive, ceci parce qu'« en toute conception vraiment métaphysique, il faut toujours réserver la part de l'inexprimable ; et même tout ce qu'on peut exprimer n'est littéralement rien au regard de ce qui dépasse toute expression comme le fini, quelle que soit sa grandeur, est nul vis-à-vis de l'Infini » (32).

Cette dimension apophatique de la Connaissance, aucun système philosophique ne saurait l'admettre, simplement parce que, en tant que système, il est une “mise en discours” du Monde, le non-discours étant assimilé par les esprits systématiques au non-sens (33). D'où l'illusion dont est victime, après et avec bien d'autres, Wittgenstein et qui lui fait croire que « le sens du monde doit se trouver en dehors du monde », parce qu'« il n'y a pas en lui de valeur ― et s'il y en avait une, elle n'aurait pas de valeur » (34), alors que le sens du Monde réside, tout au contraire, dans la manifestation mondaine du sens, lequel, s'il n'est pas de ce Monde, n'en est pas moins dans ce monde. Pour le métaphysicien traditionniste, la radicale contingence des événements pointés dans le Tractacus (35) par la formule : « Car tout événement et être-tel ne sont qu'accidentels. Ce qui les rend non-accidentels ne peut se trouver dans le monde, car autrement cela aussi serait accidentel », cède la place à la signifiance, tout aussi radicale parce que nécessaire, de l'avènement décrypté par la pensée analogico-symbolique dont le déploiement constitue proprement l'ésotérisme. Le principe de l'homogénéité du Monde, que la Table d'Émeraude énonce, on le sait, sous la forme célèbre : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut », implique celui de l'homogénéité du sens, ce qui signifie que toute chose, même celle apparemment la plus insignifiante, est susceptible d'un dévoilement, non dans la singularité de sa présence mais par sa mise en relations avec l'ensemble des choses autres qu'elles-même, ensemble que le Tout recueille sous l'égide de l'Unité. Le rôle des symboles, dont chacun manifeste le Tout en récapitulant, sous la forme particulière et selon la logique articulatoire qui lui sont consubstantielles en raison des contingences ethno-historiques (36), la somme des relations universelles, est de rappeler cette homogénéité tout en offrant sous une forme voilée les moyens du dévoilement, lequel culmine dans la gnose. C'est pourquoi René Guénon peut affirmer que le symbolisme est « le moyen le mieux adapté à l'enseignement des vérités d'ordre supérieur, religieuses ou métaphysiques, c'est-à-dire de tout ce que repousse ou néglige l'esprit moderne » (37).

Si la philosophie demeure par nature étrangère à toute possibilité (et même à toute finalité) de Réalisation, la métaphysique, en revanche, prend en compte, ainsi que nous l'avons vu, l'obligation pour qui veut réellement connaître de devenir ce qu'il connaît, sans limitation aucune ― c'est-à-dire sans plus succomber à l'illusion suprême, celle de l'opposition du sujet et de l'objet ―, l'« affirmation de l'identification par la connaissance » s'identifiant elle-même au « principe même de la réalisation métaphysique » (38). Cette identification conduit dès lors à la Réalisation, non certes tout un chacun, mais ceux qui se montrent capables d'y parvenir au travers des épreuves, « car il y a, pour certaines individualités humaines, des limitations qui sont inhérentes à leur nature même et qu'il leur est impossible de franchir » (39). Ce n'est par conséquent nullement s'opposer à la pensée de la Tradition que d'affirmer que la métaphysique véritable se distingue aussi de la métaphysique moderne par son caractère essentiellement élitiste. René Guénon lie en effet explicitement “intellectualité” (dans le sens de “capacité d'accès à la gnose”) et “élite” ― par ex. dans la formule suivante : « Il ne peut y avoir qu'un seul moyen de sortir du chaos : la restauration de l'intellectualité et, par suite, la reconstitution d'une élite » (40) ― et précise que si l'Occident connut au Moyen Âge « des doctrines purement métaphysiques et que nous pouvons dire complètes », celles-ci demeurèrent toujours réservées « à l'usage d'une élite » (41). Quant à ceux que leurs « limitations » empêchent d'accéder à la Connaissance pleine et entière, il reste le secours des dogmes et de la foi (42).
Cette Réalisation que permet la démarche métaphysique et sans laquelle elle ne se justifierait aucunement (43), n'est en réalité rien d'autre qu'une ré-intégration, la restauration de l'« état primordial » qui est « celui qui était normal aux origines de l'humanité, tandis que l'état présent n'est que le résultat d'une déchéance, l'effet d'une sorte de matérialisation progressive qui s'est produite au cours des âges, pendant la durée d'un certain cycle » (44). Il s'agit donc bien moins de se rendre autre que l'on est que tel que l'on fut, ou, pour le dire avec une plus grande précision, de se ressaisir ainsi que l'on est toujours demeuré depuis il Origine, même si l'on avait oublié ce que l'on était. Ce ressaisissement, en tant que sortie hors de l'illusion du temps et accès à l'Éternité (45), est ainsi identique au « déchirement du Voile » qui dissimule la Réalité suprême (46).

Discipline éminemment pratique, opérative, si l'on considère le mot dans la plénitude de son acception ― en tant que voie de réalisation ―, la métaphysique l'est tout autant si on l'envisage de manière complémentaire comme grille d'intellection universelle. En tant qu'elle possède par nature le statut de métalangue par rapport à tous les énoncés ou vision du monde d'origine et de nature uniquement humaine, la perspective qui est sienne peut en effet légitimement s'appliquer à l'analyse des formes produites par telle ou telle civilisation, y compris, bien entendu, le monde moderne. C'est sur sa base que René Guénon ouvre le chapitre premier d'Orient et Occident en fondant l'étude de la civilisation occidentale comme tératologie (47) ; sur elle encore qu'il diagnostique des « signes des temps » dans les diverses manifestations de la modernité (48) ; sur elle toujours qu'il entreprend son « œuvre d'assainissement » en en condamnant théosophisme et spiritisme (49), peu avant que Julius Evola n'entreprenne, selon la même logique, d'arracher les « masques » du spiritualisme contemporain pour en révéler les « visages » (50). C'est sur elle enfin qu'il devient possible de comprendre la signification réelle des idéologies aujourd'hui dominantes.

Ainsi du libéralisme. Pour qui est demeuré capable de voir, il est patent que les analyses sociologiques ou économiques, si elles peuvent en éclairer certains aspects, sont incapables de rendre entièrement compte de celui-ci. Envisagé d'un point de vue métaphysique, le liberalisme apparaît comme une forme de “satanisme” plus précisément comme la forme que prend ce dernier, non seulement en tant qu'« esprit de négation et de subversion » (51), mais aussi de parodie, dès lors qu'il entend agir dans le domaine idéologico-politique. L'inversion des traits propres au mode de vie Traditionnel est visible à tous les niveaux du discours libéral. À la figure de l'Initié qui n'est devenu “à lui-même sa propre Loi” que parce qu'il a triomphé des épreuves et connu la renaissance spirituelle qui le place légitimement au-dessus de la condition humaine, et donc des règles qui s'appliquent, pour son bien propre et celui de sa Communauté, à tout homme qui n'a pas dépassé cette condition, le libéralisme substitue celle de l'Individu, lequel refuse toute autorité parce qu'il ne reconnaît d'autre loi que celle du désir sans frein, ce qui fait de lui un esclave alors même qu'il proclame en tous lieux sa liberté prétendument inaliénable. De même, l'idéologie libérale ― dont la devise “Laisser faire, laisser passer” est déjà en soi une parodie, celle de l'“Agir sans agir” taoïste ― remplace la doctrine Traditionnelle de l'Harmonie spontanée, et maintenue vivante par l'interactivité universelle innervée par l'Esprit, par la fiction mécaniste du Marché autorégulateur, allant jusqu'à affirmer que, dès lors que ce dernier pourra fonctionner sans contrôle, “la somme des déséquilibres particuliers ne pourra que créer l'intérêt général”, alors que la vérité est très exactement l'inverse, à savoir que c'est “l'équilibre général” (dans le sens d'“universel”) préexistant qui garantit seul le caractère éthiquement acceptable parce que métaphysiquement signifiant de ce qui apparaît, non comme des “déséquilibres particuliers”, mais comme des “modes d'expression”, nécessairement limitée, de l'Absolu à l'un ou l'autre niveau de sa Manifestation. Les affirmations prévaricatrices du libéralisme reviennent ici à affirmer que ce qui est en haut se trouve sous la dépendance de ce qui est en bas, ce qui représente le complet renversement de l'enseignement de la Tradition. De plus, le libéralisme est structurellement incapable de présenter la hiérarchisation sociale en termes autres qu'économiques, comme le résultat des mérites respectifs d'acteurs engagés dans un éternel procès de production et d'échange de biens matériels, ce qui : premièrement, constitue un mensonge, car le processus d'accumulation du capital empêche le jeu pourtant affirmé “libre” de la promotion sociale (52) ; deuxièmement, entraîne un état de guerre de chacun contre tous en exacerbant les rivalités mimétiques et les jalousies du ressentiment ; troisièmement, aboutit à nier toute vie, donc toute hiérarchie, spirituelle, en ramenant l'expérience de l'Être au niveau de la simple recherche de la satisfaction des besoins organiques, c'est-à-dire en prônant comme valeur dominante de la Cité un comportement caractéristique des stades les plus primitifs du comportement animal.

Ainsi mis en perspective, le libéralisme se laisse saisir pour ce qu'il est vraiment, une idéologie que l'on peut qualifier d'authentiquement “infernale”, d'autant plus que la volonté de séduire pour tromper et soumettre ― signature du satanique ― ne lui fait nullement défaut. En effet, le libéralisme joue analogiquement dans le domaine idéologico-politique le rôle que joue le New Age dans le domaine spirituel, parce qu'il s'agit, ici comme là de présenter une image dégradée de la liberté en l'assimilant à l'individualisme. La différence de positionnement des discours s'explique par celle des cibles (au sens où les spécialistes du “marketing” entendent ce mot) et tient à ce que le libéralisme s'adresse à ceux qui ne conçoivent même plus une autre vie que celle de la jungle, soit qu'il leur fournisse des armes afin qu'ils deviennent de meilleurs prédateurs, soit qu'il tente de les persuader que la jungle est un jardin d'enfants pour qu'ils demeurent des proies faciles (mais il s'agit toujours de faire en sorte que la jungle ne cesse pas d'être une jungle), alors que le New Age trouve un écho chez ceux qui s'imaginent qu'il est possible d'“humaniser” et de “spiritualiser” cette jungle en y baguenaudant pour y planter des fleurs multicolores au gré de ses caprices. Dans les deux cas, le but, qui ne situe pas seulement, répétons-le, à vue humaine, est d'empêcher la transmutation alchimique de la jungle en “forêt” (au sens d'Ernst Jünger), comme prélude à la concentration intensificatrice de cette dernière en « Arbre du Monde » en tant qu'« Arbre de Vie et de l'Immortalité » (53).

Sans doute, à ce stade de l'exposé, n'est-il pas inutile de revenir, pour préciser un point fondamental que nous n'avons fait jusqu'ici qu'effleurer, sur la question de l'origine de la métaphysique. Dans la mesure où elle voit (et donne à voir) le Monde depuis un point de vue que nous qualifierions volontiers, si le mot n'était si galvaudé, de “surhumain” (54), et où elle permet, dans le même temps, le dépassement effectif de la condition désormais commune à la quasi-totalité des hommes, la métaphysique ne saurait avoir une origine humaine. Cette nécessité, à la fois principielle et logique, d'une source an-historique et non-humaine est exposée par René Guénon dans La métaphysique orientale (55) : « Ces doctrines métaphysiques traditionnelles auxquelles nous empruntons toutes les données que nous exposons, qu'elle en est l'origine ? La réponse est très simple, encore qu'elle risque de soulever les protestations de ceux qui voudraient tout envisager au point de vue historique : c'est qu'il n'y a pas d'origine ; nous voulons dire par là qu'il n'y a pas d'origine humaine, susceptible d'être déterminée dans le temps. En d'autres termes, l'origine de la Tradition, si tant est que ce mot d'origine ait encore une raison d'être en pareil cas, est “non-humaine”, comme la métaphysique elle-même ». Cette origine ne peut donc être que l'Absolu, en entendant bien évidemment ce terme dans un sens a-personnel (non-théiste) puisque les “personnifications” n'importent pas davantage en sens ascendant que descendant, ne serait-ce que parce que la notion d'un Dieu personnalisé et dans le même temps absolutisé présente une contradiction dans les termes car la personnalité, du fait qu'elle se définit par la possession et la manifestation d'un certain nombre de traits idiosyncrasiques, implique la repérabilité et renvoie donc en toute rigueur au relatif et non à l'Absolu.

La métaphysique, en tant qu'elle s'identifie à la Tradition elle-même, peut donc être définie la codification inséparablement doctrinale et opérative d'une inspiration délivrée par l'Absolu (56). Encore reste-t-il à définir ce dernier.

Disons-le clairement : s'il est un point sur lequel nous estimons que les analyses évoliennes touchent juste, c'est l'affirmation selon laquelle l'Absolu ne mérite pleinement ce nom que d'être défini comme Puissance. Ceci parce que « la notion de puissance (çakti) (…) s'associe invariablement au concept de Divin, lequel est un et sans second. C'est par la vertu de cette çakti que le microcosme (adhyâtma) et la macrocosme (adhidaiva) sont étroitement reliés l'un à l'autre, et que tout ce qui se trouve dans l'un d'eux se trouve se retrouve nécessairement dans l'autre » (57). René Guénon ou Frithjof Schuon, pour des raisons qui tiennent à leur nature brahmanique, ne paraissent guère s'être arrêtés à cette conception, alors qu'Evola lui a toujours donné la place qui lui revient de droit en écrivant : « Et nous affirmons que le principe de l'absolu est la puissance (çakti), et que tout système qui pose dans l'ordre métaphysique quelque chose avant ou au-dessus de la puissance est rationaliste (au sens péjoratif utilisé par Guénon) et abstrait » (58). Sans doute, d'ailleurs, n'est-il pas tout à fait inutile de saisir l'occasion afin de préciser un point qui n'est pour nous nullement de détail : ce n'est pas parce que nous pensons que le métaphysicien italien a raison ici contre “l'orthodoxie” guénonienne que nous croyons qu'il en va de même partout et toujours. Nous nous en sommes expliqué autre part (59), en particulier en ce qui concerne l'incontestable erreur évolienne à propos de la hiérarchisation de la Royauté et du Sacerdoce et de ce qui en découle quant aux relations entre Action et Contemplation. Il est pour nous hors de discussion que la Contemplation est supérieure à l'Action comme sattwa l'est à rajas. Mais ceci ne nous incite aucunement à croire que la Connaissance l'est absolument à la Puissance, sauf à entendre celle-ci dans le seul sens dégradé de force motrice de l'action non-maîtrisée, ce qui n'est nullement notre cas. Pour reprendre une formule guénonienne déjà citée dans cet article, Connaissance et Puissance expriment à nos yeux un seul et même état, celui de l'être qui est « soi-même, réellement et effectivement tout ce qu'il connaît ». Qui connaît l'Absolu est l'Absolu, et la Puissance de celui-ci devient de ce fait la sienne, ce qui ne signifie évidemment pas qu'un être parvenu à un tel niveau de Réalisation fasse servir cette Puissance à la satisfaction de desseins personnels fondés sur le désir. Ceux qui voient dans l'exposition de telles doctrines un symptôme de “satanisme”, alors même qu'ils ignorent les agissements de ce dernier là où il se manifeste authentiquement, ne saisissent pas la contradiction qu'il y a à soutenir qu'un être qui a atteint l'Absolu, et qui a donc cessé d'être un “individu”, puisse encore éprouver des désirs, lesquels sont, par définition, relatifs aux conditions existentielles d'une individualité donnée. Croit-on vraiment que quiconque est réalisé éprouve la moindre envie de se gaspiller en soustrayant à l'Absolu, c'est-à-dire à lui-même, ne fût-ce qu'une parcelle de Puissance ? Si la Contemplation est traditionnellement reconnue supérieure à l'Action, c'est bien parce que la Réalisation conduit à la première et non à la seconde.

Pour notre part, nous appelons “puissance” l'intensité vibratoire d'un être individualisé, c'est-à-dire existant au niveau de tel plan de la Manifestation, et “Puissance” (avec la majuscule, donc) la vibration originelle unique dont la différenciation intensive crée les divers plans de Réalité (60). Jean Marquès-Rivière a fort éloquemment précisé cette distinction en écrivant : « En fait, il y a une communauté vibratoire étroite entre le corps humain et le cosmos, et l'on peut, avec les grandes cosmogonies asiatiques, considérer qu'il existe une seule et même substance qui se différencie par vibrations de plus en plus “lourdes”, de moins en moins rapides, la vibration originelle étant métaphysiquement à l'infini. Ces différenciations vibratoires créent des “mondes” ou plus exactement des “plans vibratoires” divers ayant chacun leur forme, leurs activités, leurs créatures et leurs lois » (61). La Puissance est l'essence de l'Absolu ― et c'est pourquoi il a pu être dit : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu » (62), la Parole évangélique n'étant autre que la « Parole de Puissance » (Mantrashakti) qui est originellement et éternellement identique à l'Absolu en tant que Principe créateur ― comme les puissances sont celles de innombrables entités qui peuplent le Monde, tant au plan matériel qu'à des niveaux infiniment plus subtils et, de ce fait, devenus inaccessibles à l'homme moderne. La “nature propre” (svadharma) d'un être donné est ainsi très exactement identique à son intensité vibratoire. Plus un être est “évolué”, c'est-à-dire plus il se trouve situé à un emplacement élevé sur l'échelle de la Manifestation (donc moins il s'est éloigné du Centre, donc, en fait, moins il est “involué”), plus il vibre rapidement. La doctrine des Gunas n'a pas d'autre signification : de sattwa à rajas puis à tamas, c'est l'« alourdissement vibratoire » qui s'accentue, ce qui explique et justifie la distribution hiérarchique des hommes en castes. On peut remarquer en passant qu'un être dont l'intensité vibratoire est incommensurablement supérieure à celle d'un autre être demeure de ce fait invisible aux yeux de ce dernier. C'est ce qui explique « l'éloignement » des dieux par rapport aux hommes depuis la séparation des deux lignées « qui étaient une à l'origine » (Hésiode), et c'est ce qui explique aussi, en sens inverse, les diverses apparitions religieuses, tant “divines” que “démoniaques”, lesquelles proviennent du rapprochement momentané ― qu'il soit accidentel ou délibéré ― de deux intensités vibratoires normalement incomparables.

On comprend à présent pourquoi la Réalisation ne peut être autre chose qu'une restauration, elle qui consiste dans la ré-élévation d'une intensité vibratoire particulière jusqu'au niveau de celle de la vibration originelle ; par cette ré-élévation, qui constitue stricto sensu l'initiation, la qualité humaine disparaît en cédant la place à ce qui est infiniment plus grand, car plus puissant, qu'elle, ce même si l'être “régénéré” demeure apparemment inchangé aux yeux des hommes communs. Les initiés sont dès lors “redevenus comme des dieux”, demeuraient-ils parmi les hommes jusqu'à la conclusion de leur existence terrestre, ce que Gustav Meyrink illustre à sa manière en évoquant « la loi sur laquelle repose toute magie : si deux grandeurs sont égales, elles se réduisent à une seule, quand bien même elles auraient une existence en apparence séparée dans l'espace et dans le temps » (63). On comprend aussi pourquoi la métaphysique, ainsi que nous l'avons déjà mentionné, ne peut être qu'a-morale (au sens d'un dépassement ou, pour mieux dire, d'un “laisser-derrière-soi” de la morale), dans la mesure où la Puissance ne saurait être ni “bonne” ni “mauvaise”, ce qui représenterait encore des limitations et nous ramènerait au domaine des simples puissances et donc du relatif (64). La Puissance est, tout simplement et tout uniment, à jamais irréductible à tout autre qu'Elle-même, et à jamais présente en toute forme manifestée, forme qui n'est que l'actualisation oublieuse d'Elle-même. Il ne nous semble pas faire preuve d'une trop grande audace intellectuelle en voyant ici la définition de l'Absolu, au souvenir duquel nous convie, et plus encore à la reconquête duquel nous appelle, la métaphysique authentique, c'est-à-dire la métaphysique intégrale et donc opérative.

► Jean-Paul Lippi, Antaïos n°15, 1999.

◘ Né à Marseille en 1961, Jean-Claude Lippi est diplômé de l'Institut d'Études Politiques d'Aix-en-Provence et docteur en Droit. Depuis quelques années, il s'impose comme l'un des meilleurs connaisseurs de la pensée traditionnelle. Son livre, Julius Evola, métaphysicien et penseur politique : Essai d'analyse structurale (Âge d'Homme 1998) constitue le texte de sa thèse. L'auteur a publié aux éditions Pardès, un remarquable Qui suis-je ? consacré à Evola (1898-1974), penseur de la Tradition pérenne et révolté contre le monde moderne. Présenter l'œuvre de Julius Evola, « un érudit de génie » (Marguerite Yourcenar) en moins de cent pages (nombreuses photographies, bibliographie), sans simplification ni hagiographie était un défi que JP Lippi a relevé avec brio. Voilà un parfait vade-mecum pour tous les passionnés de la pensée traditionnelle, qui permettra à l'honnête homme de mieux connaître le “sulfureux” Evola, depuis l'agitation dadaïste jusqu'à la contemplation immobile. Dans un texte consacré aux Mystères de Mithra, Evola écrivait précisément : « Notre désir d'infini, (…) notre seule valeur : une vie solaire et royale, une vie de lumière, de liberté, de puissance ». Ces simples mots devraient suffire à faire de lui un compagnon de veille et de randonnée.

 ◘ Notes :
1) « Qu'est-ce que l'ésotérisme ? », suivi de « Anthologie de l'ésotérisme occidental », in L'ésotérisme, Robert Laffont, coll. Bouquins, 1990, pp. 11-397, cit. p. 47. Les « traditionnistes » s'opposent à « ceux que l'on peut qualifier proprement de “traditionalistes”, c'est-à-dire ceux qui ont seulement une sorte de tendance ou d'aspiration vers la Tradition, sans aucune connaissance réelle de celle-ci » (René Guénon, Le Règne de la quantité et les signes des temps, 1945, Gallimard, coll. Tradition, 1972, p. 205).
2) Bernard Bastian, Le New Age ; D'où vient-il, que dit-il ? Réponses pour un discernement chrétien, O.E.I.L., Paris, 1991, p. 136
3) Frithjof Schuon l'a exprimé mieux que nous ne saurions le faire : « (…) la question qui ce pose n'est pas de savoir quel peut être le conditionnement psychologique dune attitude, mais bien au contraire quel en est le résultat. Quand on nous apprend par ex. qu'un tel a choisi la métaphysique à titre d'“évasion” ou de “sublimation” et à cause d'un “complexe d'infériorité” ou d'un “refoulement”, cela est sans importance aucune, car béni soit le “complexe” qui est la cause occasionnelle de l'acceptation du vrai et du bien ! » (« L'imposture du psychologisme », in Résumé de métaphysique intégrale, Le Courrier du Livre, 1985, pp. 101-107, cit. pp. 105-106).
4)Cette attitude est tout aussi bien politique que scientifique ou philosophique ; dans le premier cas, elle fonde la profession de foi démocratique, dans le second elle sous-tend les diverses doctrines évolutionnistes, dans le troisième elle légitime le progressisme.
5) Rien n'est en effet plus étranger à l'authentique esprit Traditionnel que l'idée moderne de tabula rasa qui égalise les hommes dans le néant à l'instant de leur naissance. Pour la Tradition, chacun naît porteur de qualifications précises, tout à la fois spécifiques dans leur modalité et partagées dans leur essence. C'est pourquoi un homme réalisé est en même temps un être unique (une Personne) et le membre d'un groupe ― réel ou idéal ― formé de ceux qui sont semblables à lui sous le rapport des qualifications (une caste). Ceci relève de la nécessité ; quant à la liberté, elle est donnée par le fait que chacun peut, sur la base existentielle fournie par ses qualifications propres, s'élever ou, au contraire, s'abaisser dans la hiérarchie des êtres, l'ante mortem ayant ici des répercussions obligées sur le post mortem et l'éventuelle procession vers une nouvelle existence terrestre. Cet enchaînement constitue la lai du Karma envisagée dans sa véritable dimension, technique et déterminante et non morale.
6) Nous entendons le mot au sens où Louis de Bonald écrit : « Qu est-ce que la conservation d'un être ? C'est son existence dans un état conforme à sa nature » (Théorie du pouvoir politique et religieux, 1796, suivi de Théorie de l'éducation sociale, choix et présentation par Colette Capitan, UGE, coll. 10-18, 1966, p. 31).
7) Cf. R. Guénon, Les états multiples de l'Être, 1932, Éd. Traditionnelles, 1984.
8) Tel est l'argument que l'on peut apposer à la morale kantienne, laquelle fait, comme on le sait, reposer la morale sur la raison, en prétendant de ce fait lui conférer une valeur indépendante de toute considération “existentielle”. Emmanuel Kant tient en effet pour « évident que tous les concepts moraux ont leur siège et leur origine complètement a priori dans la raison, dans la raison humaine la plus commune aussi bien que dans celle qui est au plus haut degré spéculative », d'où il conclut, après avoir exigé que soit admis comme étant « de la plus grande importance pratique de puiser ces concepts et ces lois à la source de la raison pure », que les lois morales doivent valoir non seulement pour l'homme mais aussi « pour tout être raisonnable en général » (Grundlegung zur Metaphysik der Sitten, traduit de l l'allemand par Victor Delbos : Fondements de la métaphysique des mœurs, 1785, Deuxième section, Delagrave, 1971, pp. 120-121). Or, même si l'on accepte de reconnaître en la raison une instance immédiatement normative, ce qui apparaît bien davantage comme une pétition de principe que comme une nécessité, l'impératif que celle-ci produit ne peut être dit catégorique qu'au seul niveau des êtres gouvernés exclusivement par elle, et non à celui d'êtres participant dune connaissance supra-rationnelle. Pour ces derniers, l'impératif catégorique tombe du fait qu'ils se situent, au sens littéral de l'expression, “par-delà bien et mal” parce que par-delà les bornes du monde balisé par la seule raison.
9) C'est le sens de la sortie des castes “par le haut”, celle du ativarna, par opposition à la même sortie effectuée “par le bas”, laquelle est propre au paria.
10) Nous ne disons point du “surnaturel” car ce mot, s'il ne vient que trop aisément sous la plume, n'en est pas moins dépourvu de sens. Tout ce qui existe, en quelque mode que l'on voudra, est naturel, c'est-à-dire engendré. Seul peut être à bon droit qualifié de “surnaturel” ce qui n'existe pas mais est, en ce qu'il demeure étranger à la temporalité du fait qu'il possède en soi-même sa propre cause identique à sa propre perfection (entéléchie nécessaire de l'Absolu). Stanislas de Guaita, au milieu de considérations toutes personnelles, à écrit des lignes non dépourvues d'intérêt sur cette question (cf. Essais de Sciences maudites : Le Serpent de la Genèse, 1897, Seconde Septaine - Livre II - La clef de la magie noire, coéd. Trédaniel / Savoir Pour Être, coll. Les trésors de l'ésotérisme, 1995, « Le surnaturel existe-t-il ? », pp. 14-17).
11) « L’Univers est un tissu fait de nécessité et de liberté, de rigueur mathématique et de jeu musical ; tout phénomène participe de ces deux principes » écrit Frithjof Schuon (Résumé de métaphysique intégrale, op. cit., p. 16).
12) De l'Homme, mais non de lui seul. La perception de l'unité supramondaine interdit de conférer à l'Humanité une suprématie sur le reste de la Manifestation, hormis sur un seul point : autant qu'il nous est permis d d'en juger, et dans le cadre de notre propre continuum, l'Homme est le seul être par le truchement duquel le Principe se rend à même de parvenir de manière intégrale à la ressaisie de Lui-même.
13) Jean Parvulesco, dont la vision du monde repose sur ce que nous qualifierions volontiers de “tantrisme marial”, rend cette idée par l'emploi d'une image véritablement prodigieuse : « Un immense lac de feu tournoyant sur lui-même, avec en son centre, la sur-centralité polaire de l'amour de Dieu et de Marie, tel est le dispositif en action de la divinité vivante, tel est le mystère de l'Ædificium Caritatis, tel est l'être même de Dieu » (« Dieu est amour, et l'amour soutient l'empire de la charité », in éléments n ° 95, « Avec ou sans Dieu ? », juin 1999, pp. 40-44, cit. p. 43).
14) Julius Evola, La tradizione ermetica, nei suoi simboli, nella sua dottrina e nella sua arte regia, traduit de l'italien par Yvonne J. Tortat : La tradition hermétique  : Les symboles et la doctrine. L'art royal hermétique, 1931, Éd. Traditionnelles, 1988, p. 35. C'est cette « coexistence » qui rend ce « chaos » indissociablement créateur et destructeur. Si c'est la seconde potentialité qui vient à prévaloir, soit par l'effet d'une évertuation ponctuelle volontaire (magie prétendue “noire” ou goétie), soit simplement par celui des lois cycliques de la Manifestation, nous trouvons l'image du Shiva tamasique ou, sur un plan plus cosmologique que métaphysique, celle du « Grand Dieu Pan » cher à Arthur Machen.
15) « Nos travaux antérieurs nous ont montré qu'au point de départ de nos annales se situe une Révélation, ou illumination primitive de la pensée humaine ; celle-ci se trouvait pourvue, en effet, originairement d'un potentiel mental supérieur, qui l'exhaussait au-dessus de la “nature”. Le péché, en la dessoudant de Dieu, autrement dit de l'Être, l'a dépouillée ipso facto de sa puissance première, et scindée de l'essence des choses. C'est ce dénivellement, cette chute vers un palier inférieur de connaissance, qui a ravalé le surhomme du début au rang d'homme, et déterminé la vision de l'univers comme un fluctuant agrégat de mécanismes physiques (…) L'on nomme Révélation Primitive la communication spéciale qui s'est établie, tout au début de l'histoire humaine, entre l'homme et la préternature. Par préternature nous entendons l'univers transcendant ou dynamique qui forme le substrat des choses accessibles à nos sens » (Pierre Gordon, La révélation primitive, Dervy, 1951, pp. 9 et 17, souligné dans le texte).
10) Pour une étude pénétrante des conséquences de la réduction de la métaphysique stricto sensu à la seule ontologie, cf. Georges Vallin, La perspective métaphysique, Dervy-Livres, 1977.
17) Cf. O. Hanfling, Logical Positivism, éd. Blackwell, Oxford, 1981.
18) Pour un exposé synthétique des rapports entre les 2 disciplines, cf.R. Guénon, Introduction générale à l'étude des doctrines hindoues, 1921, Deuxième partie : « Les modes généraux de la pensée orientale », chapitre VIII : « Pensée métaphysique et pensée philosophique », Trédaniel, 1997, pp. 123-140.
19) Étienne Borne, Passion de la vérité, Fayard, 1962.
20) Ludwig Wittgenstein, Tractacus logico-philosophicus, Vienne, 1918. Nous citons d'après la traduction due à Pierre Klossowski, Gallimard/Tel, 1989, p. 107 (texte suivi par les Investigations philosophiques).
21) pp. 106-107 (6.53), souligné dans le texte.
22) Ésaïe, IV, 5.
23) Il est trop évident (pour qui se donne la peine de regarder) que le New Age s'inscrit dans le cadre de la contre-Tradition et de la parodie dénoncées par R. Guénon pour qu'il soit indispensable d y insister. Disons simplement qu'il contribue, tant par son message de spiritualité à bon marché ― et donc à la portée du premier venu qui est toujours le moins qualifié ― que par les pratiques magico-religieuses qu'il génère de la part d'individus totalement inconscients de la véritable nature des forces avec lesquelles ils entrent en contact, à augmenter le chaos ambiant, y compris sur des plans tout à fait concrets.
24) La perception de l'Unité transtatique entraîne la prise de conscience de la présence continue du supra-mondain dans la Monde, donc l'élaboration de la doctrine immanentiste de la Transcendance que nous avons déjà évoquée. Insistons sur le fait que c'est bien cette perception (intuitive, dans le sens de “supra-sensible”) qui est première, et non l'élaboration doctrinale, ceci suffisant à distinguer la métaphysique de la philosophie.
25) Cf. R. Guénon, Le Règne de la quantité et les signes des temps, op. cit., ch. XVII, « Solidification du monde ».
26) R. Guénon, La métaphysique orientale, 1939, Éd. Traditionnelles, 1985, p. 7.
27) R. Guénon, Le Symbolisme de la Croix, 1931, coéd. Trédaniel-Véga, 1984, p. 10.
28) René Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 14, nous soulignons. Cette mise au point illustre ce que Georges Vallin décrit comme « le caractère d'intégralité qui permet à la perspective métaphysique de dépasser les limitations dogmatiques en général (La perspective métaphysique, op. cit., p. 153), limitations qui naissent inévitablement du fait que « la formulation dogmatique se révèle ordinairement par l'exclusion systématique d'un aspect du réel au profit d'un autre » (ibid., p. I55). On notera que, dans le cadre d'une critique des thèses de la métaphysique Traditionnelle telles que les expose précisément Vallin dans la fidélité à la Lux Guenoniana, critique conduite depuis des positions chrétiennes, Christophe Andruzac écrit : « La recherche d'un “Absolu” au-delà de toute dualité (être / agir, connaissance / connu, être / connaître, cause / effet, etc.), exprime à notre sens très profondément le thumos vers une vie de l'intelligence qui serait coextensive à la totalité de l'être. Mais cette vision n'exprime-t'elle pas la nostalgie qu'éprouve l'intelligence du contemplatif de connaître de la connaissance-même du Créateur ? » (R. Guénon. La contemplation métaphysique et l'expérience mystique, Dervy-Livres, coll. Mystiques et Religions, 1980, p. 45). On saisit bien à travers ces propos tout ce qui sépare la religion, en particulier dans le cadre des monothéismes, de la métaphysique. La première est structurellement incapable de dépasser le dualisme de la nature et de la surnature (du “contemplatif” / créature et du “Créateur” / contemplé) car elle demeure inéluctablement bloquée dans une conception antinomique de l'immanence et de la Transcendance, alors même que, comme le souligne à juste titre Vallin : « L'intuition intellectuelle de l'Un dépasse l'antinomie en posant la cause première à partir de l'Un et en intégrant dans l'Infini métaphysique l'indéfinité de l'existence “phénoménale” » (La perspective métaphysique, op. cit., p. 153).
29) Tractacus logico-philosophicus, op. cit., p. 102 (6.373).
30) Ibidem (6.375), souligné dans le texte.
31) Ibidem, p. 103 (6.3751).
32) René Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 10.
33) « Une réponse qui ne peut être exprimée suppose une question qui elle non plus ne peut être exprimée. L'énigme n'existe pas. Si une question se peut absolument poser, elle peut aussi trouver sa réponse » (Tractacus logico-philosophicus, op. cit., p. 105 (65), souligné dans le texte).
34) Ibidem, p. 103 (6.41), souligné dans le texte.
35) Ibidem.
36) La synergie de cette forme et de cette logique détermine l'action historique et culturelle (le la Tradition.
37) Symboles fondamentaux de la Science sacrée, Gallimard, 1962. Cette “efficacité” du symbole ― qui n'est certes pas réductible à une efficacité symbolique ― est fort bien explicitée par René Alleau : « Or la nature fondamentale du symbole étant d'élever l'âme humaine vers le surhumain, le mouvement même de la connaissance symbolique correspondait à un élan vers la Lumière incréée, au delà des apparences repérables de toute création matérielle et des bornes concevables de l'univers du discours » (De la nature des symboles : Introduction à la symbolique générale, 1958, Petite Bibliothèque Payot, 1997, p. 18).
38) R. Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 13.
39) Ibidem, p. 7.
40) La crise du monde moderne, 1927, Gallimard, coll. Tradition, 1973, p. 94.
41) La métaphysique orientale, op. cit., p. 14. Il va sans dire que prétendre donner au mot “élite” une signification sociologique et “réactionnaire” serait une lourde erreur, même si certains, en toute bonne foi “évangélique” (mais sans doute plus encore néo-conciliaire) semblent surtout avoir retenu de l'enseignement guénonien le risque qui serait le sien d'être : « récupéré par les milieux d'extrême-droite » (Bernard Bastian, Le New Age, op. cit., p. 38).
42) Nous ne pouvons que nous opposer sur ce point à notre excellent ami Arnaud Guyot-Jeannin, lequel écrit : « La Connaissance n'est rien d'autre que l'approfondissement de la foi. Sans foi, pas de Connaissance ! » (« Tradition d'abord ! », in Tradition - Lettre d'information du Cercle Sol lnvictus n°1, automne 1998, p. 2). Il nous semble au contraire que la Connaissance est non “l'approfondissement” de la foi, mais bien son dépassement. Celui qui connaît est de ce fait dispensé de croire. Le voudrait-il, d'ailleurs, qu'il ne le pourrait, puisque la foi suppose une séparation entre le sujet qui croit et l'objet de sa foi, ainsi qu'une ignorance, au moins relative, de la nature dernière de cet objet. Séparation et ignorance que la gnose laisse derrière elle sans possibilité de retour car « tout résultat, même partiel, obtenu par l être au cours de la réalisation métaphysique l'est de façon définitive » (R. Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p.20). Il y a des étapes sur le chemin de la Connaissance et la foi est l'une d'entre elles, supérieure certainement à l'agnosticisme, mais il n'y a pas de retour en arrière.
43) Affirmons-le sans barguigner, quitte à paraître provocateur : si la métaphysique ne conduisait pas à la Réalisation, autant vaudrait jouer aux petits chevaux que de s'en occuper. Quelle valeur réelle pourrait avoir une Connaissance qui ne serait pas immédiatement opérative, et qui demeurerait donc non intégrée à celui qui la posséderait ?
44) René Guénon, La métaphysique orientale, op. cit., p. 18.
45) Le ressaisissement se trouve tout à la fois au début de la Réalisation et à sa conclusion, celui-là apparaissant comme la préfiguration “possibilisante” de celle-ci. « La première chose à faire pour qui veut parvenir véritablement à la connaissance métaphysique, écrit Guénon, c'est de se placer hors du temps, nous dirions volontiers dans le “non-temps” si une telle expression ne devait pas paraître trop singulière et inusitée. Cette conscience de l'intemporel peut d'ailleurs être atteinte d'une certaine façon, sans doute très incomplète, mais déjà bien réelle pourtant, bien avant que soit obtenu dans sa plénitude cet “état primordial” dont nous venons de parler » (La métaphysique orientale, op. cit., p. 18).
46) La signification ultime de ce Voile, qui est celui d'lsis et que l'Hindouisme connaît comme Maya et l'Islam comme Hijâb, a été exposée par Frithjof Schuon dans une étude intitulée « Le mystère du Voile » publiée in L'ésotérisme comme Principe et comme Voie, Dervy, coll. L'Être et l'Esprit, 1997, pp. 45-62.
47) « La civilisation occidentale moderne apparaît dans l'histoire comme une véritable anomalie : parmi toutes celles qui nous sont connues plus ou moins complètement, cette civilisation est la seule qui se soit développée dans un sens purement matériel, et ce développement monstrueux, dont le début coïncide avec ce qu'il est convenu d'appeler la Renaissance, a été accompagné, comme il devait l'être fatalement, d'une régression intellectuelle correspondante ; nous ne disons pas équivalente, car il s'agit là de deux ordres de choses entre lesquels il ne saurait y avoir aucune commune mesure » (Orient et Occident, Payot, 1924, p. 9, nous soulignons).
48) Cf. Le Règne de la quantité et les signes des temps, op. cit.
49) Cf. Le théosophisme : histoire d'une pseudo-religion, 1921, Éd. Traditionnelles, 1966, et L'erreur spirite, 1923, mêmes éditions, 1952 (l'expression « œuvre d'assainissement » est due à Raymond Abellio et figure in « L'esprit moderne et la Tradition », introduction à Paul Sérant, Au seuil de l'ésotérisme, Grasset, coll. Correspondances, 1955, pp. 9-81, cit. p. 81).
50) Cf. Masques et visages du spiritualisme contemporain, 1932, Pardès, 1991.
51) R. Guénon, La crise du monde moderne, op. cit., p. 116. Lorsque nous évoquons le satanisme libéral, précisons-le, nous n'avons nullement à l'esprit l'image d'Épinal de l'entité à cornes et à queue fourchue, même si ce n'est certainement pas glisser de l'ésotérisme à l'occultisme vulgaire que d'admettre la possibilité, ici comme en d'autres endroits, d'une action “démoniaque” au sens usuel du terme. Citons encore une fois René Guénon afin de dissiper l'éventuel malentendu : « Quand nous qualifions de “satanique” l'action antitraditionnelle dont nous étudions ici les divers aspects, il doit être bien entendu que cela est entièrement indépendant de l'idée plus particulière que chacun pourra se faire de ce qui est appelé “Satan”, conformément à certaines vues théologiques ou autres, car il va de soi que les “personnifications” n'importent pas à notre point de vue et n'ont aucunement à intervenir dans ces considérations (Le Règne de la quantité et les signes des temps, op. cit., p. 236).
52) Point n'est besoin d'être marxiste pour comprendre ces choses. Mais le problème de ceux qui se réclament de la Tradition, y compris dans sa dimension politique de Droite, est souvent leur hostilité, certes compréhensible mais trop aisément bornée, au collectivisme, hostilité qui les empêche de distinguer le véritable ennemi. C'est ce qui conduit un certain nombre de personnes, par ailleurs correctement orientées sur le plan principiel, à adopter à l'encontre des victimes de la « démonie de l'économie » (pour nous exprimer à la manière évolienne) une attitude empreinte de la sécheresse de Cœur dont a toujours fait preuve la bourgeoisie, et donc à rejoindre d'une certaine façon les positions du monde moderne qu'elles prétendent combattre. Or, si la Tradition mène à défendre, au niveau politique, des valeurs qui appellent le qualificatif d'“aristocratiques”, cet aristocratisme ne peut être que social.
53) Mircea Eliade, Le chamanisme et les techniques archaïques de l'extase, 1951, Payot, 1996, p. 220.
54) Le surhumanisme de la métaphysique Traditionnelle est tout autre chose que celui dont Zarathoustra se fait le héraut. Pour dissiper les malentendus, mieux vaut parler de “suprahumanisme”.
55) Op. cit., p. 23.
56) C'est en ce sens que René Guénon peut parler de « métaphysique intégrale » et Frithjof Schuon reprendre cette expression pour en faire le titre de l'un de ses ouvrages (Résumé de métaphysique intégrale, op. cit.).
57) Comment discriminer le spectateur du spectacle ? (Drg - drçya - viveka), traduction par Michel Sauton d'après la version anglaise du swâmi Nikhilânanda, éd. Adrien Maisonneuve, coll. Vandé Mâtram, Paris, 1945.
58) « Il Problema di Oriente et Occidente » (Le Problème d'Orient et Occident), recension de René Guénon, Orient et Occident, in : Ultra, 1925, traduit de l'italien par Philippe Baillet et reproduit in  : Guido De Giorgio, L'Instant et l'Éternité et autres textes sur la Tradition, éd. Archè, Milan, 1987, pp. 259-260, cit. p. 260, souligné dans le texte (il faut lire ce dernier en faisant abstraction du ton inutilement polémique adopté par un homme alors encore très jeune).
59) Cf. notre ouvrage Julius Evola, métaphysicien et penseur politique : Essai d'analyse structurale, L'Âge d Homme, coll. Les études H, Lausanne, 1998, ainsi que notre entretien dans le n°14 de la présente revue, équinoxe de printemps 1999, pp. 76-86.
60) Nous pourrions tout aussi bien écrire « les diverses Réalités », puisque, pour n'importe quel être, son Monde est le Monde. C'est en ce sens qu' il faut entendre la formule conclusive du Règne de la quantité et les Signes des temps (op. cit., p. 272) : « Et c'est ainsi que, si l'on veut aller jusqu'à la réalité de l'ordre le plus profond, on peut dire en toute rigueur que la “fin d'un monde” n'est jamais et ne peut jamais être autre chose que la fin d une illusion ».
61) Le yoga tantrique hindou et tibétain, 4° éd. revue et augmentée, Archè, Milan, 1979, Introduction, p. XVII. C'est cette même conception, qui détermine la doctrine Traditionnelle en tant que monisme émanationniste, que Frithjof Schuon, dans le cadre d'une réflexion sur le problème du mal, rend par l'image du « rayonnement » qui émane du Centre Primordial, en précisant que si ce rayonnement est une nécessité, il n'en demeure pas moins que « qui dit rayonnement, dit éloignement, donc aliénation ou appauvrissement » (Résumé de métaphysique intégrale, op. cit., p. 16).
62) Évangile selon Jean, I, 1, traduction Louis Segond d'après le texte grec.
63) Walpurgisnacht, 1917, traduit de l'allemand par A. D. Sampiéri : La nuit de Walpurgis, Bibliothèque Marabout, 1973, pp. 90-91, souligné dans le texte. Précisons que nous sommes tout à fait conscient des réticences que suscite souvent la mention du nom d'un auteur que beaucoup de traditionnistes, à commencer par René Guénon lui-même, ont condamné dans les termes les plus sévères. Mais les zones d'ombre du personnage ne doivent pas interdire de reconnaître l'intérêt majeur que son œuvre présente.

64) C'est ce qu'Arthur Avalon (Sir John Woodroffe) exprime en disant du Mantra, qu'il définit comme « en un mot, une puissance (Shakti), la puissance sous la forme du son », que celui-ci « se prête impartialement à tout usage ». The Serpent Power, traduit de l'anglais par Charles Vachot d'après la 4° édition de 1950 : La puissance du Serpent : Introduction au tantrisme, Dervy-Livres, coll. Mystiques et Religions, 1990, pp. 88 et 87.

 

Suicide d’un enseignant

Quand vous lirez ce texte je serai déjà mort.

Suicide d’un enseignant

 
Les enseignants, personnels et élèves du lycée Artaud de Marseille sont bouleversés. Ils ont reçu dimanche vers 16 H le mail de Pierre Jacque, avec une pièce jointe annonçant son suicide et en expliquant la raison.

Ses collègues ont dit de lui que "C’était vraiment un professeur consciencieux, investi, compétent, passionné, très apprécié des élèves et des collègues, toujours souriant et prêt à discuter, à aider".

De Pierre JACQUE
Enseignant d’électronique
Le 1 septembre 2013

Objet : Évolution du métier d’enseignant.

Je vous fais part de ma décision de ne pas faire la rentrée scolaire 2013. En effet le métier tel qu’il est devenu au moins dans ma spécialité ne m’est plus acceptable en conscience.
Pour éclairer ma décision je vous décris succinctement mon parcours personnel.
Je suis devenu ingénieur en électronique en 1982 à l’âge de 24 ans. Ma formation initiale et surtout mon parcours professionnel m’ont amené à exercer dans la double compétence "hard" et "soft". Le métier prenant et difficile m’a toujours convenu tant que j’avais le sentiment de faire œuvre utile et d’être légitime dans mon travail.

Passé la quarantaine la sollicitation de plus en plus pressente d’évoluer vers des tâches d’encadrement et le sort réservé à mes aînés dans mon entreprise m’ont incité à changé d’activité. En 1999 j’ai passé le concours du capet externe de génie électrique et j’ai enseigné en section SSI et STI électronique. Le choc pour moi fut brutal de constater la baisse de niveau des sections techniques en 18 ans passé dans l’industrie notamment pour la spécialité agent technique (niveau BTS ou DUT suivant les cas). Même si le niveau enseigné était bien bas de mon point de vue, ma compétence était au service des élèves et je me sentais à ma place. Une difficulté était quand même le référentiel applicable (le programme) datant des années 80, ambitieux pour l’époque et en total décalage avec le niveau réel des élèves des années 2000. Une réforme semblait souhaitable pour officialiser des objectifs réalistes et orientés en fonction des besoins du marché du travail.

Puis vint la réforme de 2010 mise en place par Luc Chatel et applicable à la rentrée 2011. Pour le coup, le terme réforme est faible pour décrire tous les changements mis en place dans une précipitation totale. L’enseignement des métiers est réduit à peu de choses dans le référentiel de 4 spécialités seulement qui constitue des "teintures" sur un tronc commun généraliste d’une section unique appelée STI2D qui rentre bizarrement en concurrence avec la section SSI. L’électronique disparaît purement et simplement.

En lieu et place il apparaît la spécialité "Systèmes Informatiques et Numériques". Cela ne me pose pas de problème personnel, je maîtrise bien le domaine et je l’enseigne même plus volontiers que les classiques problèmes de courant de diode ou de montages amplificateurs. Je me pose quand même la question de la compétitivité de notre pays dans le domaine industriel avec un pareil abandon de compétence. La mise en place de la réforme est faite à la hussarde dans un état d’affolement que l’inspection a du mal à dissimuler.

Entre temps le gouvernement a changé sans que les objectifs soient infléchis le moins du monde ou qu’un moratoire soit décidé, ne serait-ce qu’à cause du coût astronomique de cette réforme. En effet il aura fallu réorganiser l’implantation de tous les ateliers de tous les lycées techniques de France, abattre des cloisons, en remonter d’autres à coté, refaire tous les faux plafonds, les peintures et renouveler les mobiliers. Ceci est fait à l’échelle du pays sans que la réforme ait été testée préalablement dans une académie pilote. Début 2011, l’inspection nous convoque en séminaire pour nous expliquer le sens et les modalités de la réforme ; il apparaît la volonté de supprimer toute activité de type cours ce qui est la radicalisation d’une tendance déjà bien marquée.

On nous assène en insistant bien que l’élève est acteur de son propre savoir, qu’il en est le moteur. Pour les spécialités, donc la mienne SIN entre autre, cela signifie qu’une partie conséquente de l’activité sera de type projet. A l’époque les chiffres restent vagues, il est question de 50% du temps au moins. La nature des projets, la façon de les conduire, la façon de les évaluer ne sont pas évoquées et les questions que posent les enseignants à ce sujet restent sans réponses, nous serons mis au courant après la rentrée de septembre. En attendant l’inspection nous fait entièrement confiance pour continuer comme d’habitude. Je fais remarquer qu’il ne faudra pas tarder car nous préparons les élèves au bac en deux ans et que la connaissance des modalités d’examens est incontournable rapidement après la rentrée pour un travail efficace, c’est-à-dire sans perte de temps.


Lors de la réunion suivante, après la rentrée 2011, l’inspecteur répond un peu agacé à la même question "que notre travail c’est d’enseigner et que l’évaluation verra après" (sic). En attendant le travail devant élève est commencé et moi et mes collègues travaillons à l’estime. Le manque de matériel se fait cruellement sentir dans mon lycée, les travaux nécessaires ne seront faits qu’à l’été 2012.

Lors d’une réunion aux alentours de février il nous est demandé pour la prochaine réunion d’exposer l’état d’avancement de la réforme et si possible les projets envisagés ou mieux déjà mis en œuvre. A ce moment je viens juste de recevoir un premier lot de matériel et je ne dispose du logiciel correspondant que depuis novembre. La pression amicale mais réelle pour commencer les projets va aller augmentant. J’ai un groupe de 16 élèves et un autre de 15 dans une salle qui est déjà trop étroite pour recevoir proprement 14 élèves en travaux pratiques et avec un matériel réduit qui ne me permets qu’un choix très restreint de sujets. La phase passée en projet sera cauchemardesque pour l’enseignant et la fraction d’élèves sérieux.

Le dernier mois de cette année de première sera passé en activités plus classiques. A la rentrée 2012 les élèves sont maintenant en terminale, j’ai les tables de travail prévues dans une salle provisoire de 80 m2 au lieu des 140 m2 prévus. Il est difficile de bouger, le travail en travaux pratiques reste possible et je couvre ainsi la partie communication réseau de référentiel au moyen d’un logiciel de simulation. Je ne dispose pas du matériel support. On me bricole une salle de 150 m2 à partir de deux salles de cours séparées par un couloir et j’attaque les projets dans ces conditions. Le couloir sera abattu aux vacances de février.

Pendant ce temps nous avons appris que la note du bac porterait uniquement sur le projet final est que la note serait constituée de deux parties égales, une attribuée par un jury en fin d’année suite à une soutenance orale avec support informatique, l’autre attribuée par l’enseignant de l’année au vu du travail fourni par les élèves. Les critères d’évaluation portent principalement sur la gestion de projet et la démarche de développement durable. Il est explicitement exclu de juger les élèves sur les performances et la réussite du projet. Ceci appelle deux remarques.

La première est que les critères sont inadaptés, les élèves sont incapables de concevoir et même de gérer un projet par eux-mêmes. De plus la démarche de développement durable est une plaisanterie en spécialité SIN où l’obsolescence programmée est la règle. Comment note-t-on alors les élèves ? A l’estime, en fonction de critères autres, l’inspection le sait mais ne veut surtout pas que la chose soit dite. Du coup cette note relève "du grand n’importe quoi" et ne respecte aucune règle d’équité. Elle est attribuée par un enseignant seul qui connaît ces élèves depuis au moins un an et compte coefficient 6 ce qui écrase les autres matières. Cela viole l’esprit du baccalauréat dans les grandes largeurs. Je considère que ceci est une infamie et je me refuse à recommencer.


L’ensemble du corps inspectoral est criminel ou lâche ou les deux d’avoir laissé faire une chose pareille. Cette mécanique est conçue dans une idée de concurrence entre les enseignants mais aussi entre les établissements pour créer une dynamique de très bonnes notes à l’examen y compris et surtout si elles n’ont aucun sens. Vous avez l’explication des excellents résultats du cru 2013 du baccalauréat au moins pour la filière technologique. Cela fait plus d’un an que je me plains à mon syndicat de cet état de fait. Pas un seul compte-rendu ni localement sur Marseille ni à un plus haut niveau n’en fait mention.
Je suis tout seul à avoir des problèmes de conscience. Ou alors le syndicat est activement complice de l’état de fait, le responsable local me dis : "mais non Pierre tu n’es pas tout seul". En attendant je ne vois aucune réaction et ce chez aucun syndicat. Que penser ? Soit nous sommes muselés, soit je suis le dernier idiot dans son coin. De toute façon je n’accepte pas cette situation.

Je pense au niveau toujours plus problématique des élèves, autrefois on savait parler et écrire un français très convenable après 5 ans d’étude primaire. Aujourd’hui les élèves bachelier maîtrisent mal la langue, ne savent plus estimer des chiffres après 12 ans d’études. Cherchez l’erreur. La réponse de l’institution est : "oui mais les élèves savent faire d’autres choses". Je suis bien placé dans ma spécialité pour savoir que cela n’est pas vrai ! Les élèves ne maîtrisent rien ou presque des techniques numériques d’aujourd’hui. Tout ce qu’ils savent faire est jouer et surfer sur internet. Cela ne fait pas un compétence professionnelle. Les médias nous rabattent les oreilles sur la perte de compétitivité du pays en laissant entendre que le coût du travail est trop élevé.

Cette présentation pèche par une omission grave. La réalité est que le travail en France est trop cher pour ce que les travailleurs sont capables de faire véritablement. Et là la responsabilité de l’éducation nationale est écrasante. Qui osera le dire ? J’essaye mais je me sens bien petit. J’essaye de créer un maximum d’émoi sur la question. J’aurais pu m’immoler par le feu au milieu de la cour le jour de la rentrée des élèves, cela aurait eu plus d’allure mais je ne suis pas assez vertueux pour cela.

Quand vous lirez ce texte je serai déjà mort.

Pierre Jacque
enseignant du lycée Antonin Artaud
à Marseille

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dimanche, 08 septembre 2013

D’UNE EVENTUELLE RIPOSTE RUSSE AU SILENCE DES DEUX PAPES

 

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D’UNE EVENTUELLE RIPOSTE RUSSE AU SILENCE DES DEUX PAPES
 
Par delà des transactions secrètes, quels intérêts pour l'Europe ?


Michel Lhomme
Ex: http://metamag.fr

Un mémorandum "d’action urgente" publié par le bureau du président Poutine aux Forces armées de la Fédération de Russie ordonnerait une "frappe militaire massive" contre l'Arabie saoudite au cas où l'Ouest attaquerait la Syrie . Selon le Kremlin, Poutine serait devenu "furieux" après une réunion début août avec le prince saoudien Bandar ben Sultan, chef des services de renseignement saoudien qui l’aurait averti que si la Russie n'acceptait pas la défaite de la Syrie, l'Arabie saoudite serait acculée à déchaîner les terroristes tchétchènes durant les Jeux Olympiques d'hiver des 7-23 février 2014 à Sotchi, en Russie.
 
Le journal libanais As-Safir a précisé le contexte de cette étonnante menace saoudienne contre la Russie. En fait, le prince Bandar se serait engagé à protéger la base navale russe syrienne (seul débouché méditerranéen pour la marine russe auquel la Russie tient absolument) si le régime Assad était renversé et aurait alors ajouté pour peser un peu plus dans la discussion : "Je peux vous donner une garantie pour protéger les Jeux Olympiques d'hiver prochain car les groupes tchétchènes qui menacent la sécurité des jeux sont contrôlés par nous". Le prince saoudien est même allé plus loin en précisant que les Tchétchènes qui opèreraient en Syrie ne sont qu’un outil de pression temporaire qui pourrait du jour au lendemain sur simple ordre de Riyad être mis à l’arrêt ! "Ces groupes ne doivent pas vous effrayer, aurait déclaré Bandar à Poutine, nous les utilisons dans le cadre du régime syrien mais ils ne joueront aucun rôle dans l'avenir politique de la Syrie.

Le London's Telegraph nous apprend que l'Arabie saoudite a secrètement offert à la Russie, sa participation à un vaste contrat pour contrôler le marché mondial du pétrole et du gaz dans toute la région, mais à l’unique condition que le Kremlin accepte de renverser le régime Assad et donc l’intervention militaire alliée qui se prépare. Quelle a été la réponse de la Russie ? Poutine aurait répondu : "Notre position sur Assad ne changera jamais. Nous pensons que le régime syrien est le meilleur orateur, s'exprimant au nom du peuple syrien, et non pas ceux des mangeurs de foie", faisant ici référence aux séquences de l’été montrant un rebelle djihadiste dévorant le cœur et le foie d'un loyaliste syrien !
 
Il va de soi qu’une riposte russe contre l’Arabie saoudite changerait la donne. Elle clarifierait en tout cas le double jeu américano-saoudien dans la région et mettrait les Etats-Unis au pied du mur de l’instrumentalisation faite depuis des années d’Al Qaïda (« la Base » en arabe). Briser l’Arabie saoudite, déjà actuellement en conflit interne, comme riposte à une attaque syrienne, franchement, très secrètement, on en rêve ! L’Irak  n’a toujours pas retrouvé un équilibre, la Turquie est divisée. Une telle riposte aurait le mérite de clarifier le jeu tordu des Saoud depuis des décennies mais il mettrait aussi très vite face à face Israël et l’Iran. On comprendrait alors que mourir pour Damas n’est qu’un petit préliminaire avant de se retrouver dans quelques années tous à Téhéran ou à devoir assurer la sécurité des boîtes branchées de Tel Aviv ! Poutine mettra-t-il son plan à exécution ? Quels marchandages de gros sous (les avoirs russes sont placés dans des banques américaines) pourraient-ils le faire plier ou sera-t-il après tout, lui l’orthodoxe, le sauveur des Chrétiens d’Orient, le nouveau « roi du monde » ?
 
Il est peut-être temps de clarifier notre position: pourquoi avons-nous toujours été sceptiques et interrogatifs sur le problème syrien ? C’est que contrairement justement à nos dirigeants et à toute la classe politique française, nous parlons en Européens et que pour nous, même si cette identité n’est pas exclusive, loin de là,  notre identité européenne demeure en partie chrétienne. Or, le reniement mercantile des Occidentaux en Orient est d’abord le sacrifice des Chrétiens, des Chrétiens du Liban et de Syrie, des Chrétiens d’Irak, des Chrétiens d’Egypte et de Tunisie. Nous sommes peut-être bénis des Dieux : nous avons deux papes mais pourtant, aucun des deux n’a levé le ton sur la Syrie, aucun des deux papes n’a souligné et posé le sort des Chrétiens de Syrie sur la balance, aucun des deux papes n’a défendu leurs intérêts. François 1er,  si avide de voyages ne devrait-il pas de suite s’envoler vers Damas et se poser là-bas en bouclier humanitaire?

Les Chrétiens de Syrie sont condamnés comme le furent les Chrétiens d’Irak. L’Arabie saoudite, ami des Etats-Unis et de la France s’en réjouit. Il est de bon ton dans les revues chrétiennes et même dans les sermons de justifier l’ingérence alliée au nom de la guerre juste. Pauvre St-Thomas ! C’est cela la moraline, oublier la force du réalisme, ne pas comprendre que comme dans toutes les crises du Moyen-Orient, les Chrétiens seront les boucs émissaires de toutes les rancunes religieuses et ethniques, des cibles faciles, isolées et minoritaires. Déjà, le régime d’Assad ne vient plus à leur aide. Si elle a lieu, l’intervention militaire alliée ne réussira pas à renforcer ou à unifier l’opposition syrienne parce que ce n’est tout simplement pas son but. Son but est de « renverser Assad sans le renverser » c’est-à-dire maintenir en Syrie une sorte de chaos généralisé comme en Irak, en Lybie et dans une moindre mesure au Liban, demain en Egypte. 

Pour les Saoudiens et les Qataris, le prochain gouvernement syrien sera sunnite et les Chrétiens seront immédiatement associés aux « croisés» occidentaux c’est-à-dire aux pires infidèles. Ils ne seront plus alors d’aucune utilité et donc massacrés ou contraints à l’exil forcé comme en Irak. Déjà totalement isolés, les Chrétiens syriens font aujourd’hui face à une rébellion divisée. Au sein de cette rébellion, les Islamistes sont chaque jour plus nombreux. Les Chrétiens ont été depuis le début par une habile propagande saoudienne assimilés au régime, ils sont donc l’une des cibles privilégiées de la rébellion. Largués par les Occidentaux, oubliés par la diplomatie vaticane, les Chrétiens de Syrie n’ont pas su ou n’ont pas pu prendre à temps leur distance avec le régime. Ils disparaîtront.
 
Ainsi, pour le point de vue européen qui devrait principalement nous occuper, une intervention militaire en Syrie ne vaut pas mieux qu’une non-intervention, guerre juste ou pas. Le sort des chrétiens de Syrie est scellé : ils sont condamnés. La France ne les aura pas aidés. Toutes les Eglises de Syrie ont d’ailleurs affirmé leur opposition à l’intervention militaire. Mais il faut aller plus loin et comprendre pourquoi les deux papes ne bougent pas : ils sont kantiens. La bévue des internationalistes et des mondialistes, lecteurs avides du traité de paix kantien, sur l’idée nationale et le concept de nation qu’ils sacrifient pour celui de cosmopolitisme, induit aujourd’hui ces apories d’une mondialisation tiraillée entre des principes républicains auxquels on ne cesse d’objecter le respect des différences communautaires, culturelles ou nationales et l’abandon de ces mêmes principes au nom d’une pseudo-démocratie mondiale et d’une ingérence humanitariste guerrière. Les deux papes sont en fait des papes totalitaires.

CARTES MOYEN-ORIENT

CARTES MOYEN-ORIENT

Cartes extraites de l'émission "Le dessous des cartes".
Certaines cartes datant de 2008, elles nécessitent des actualisations. Mais elles conviennent parfaitement à nos amis qui entendent faire des exposés sur les questions moyen-orientales.

Sommaire

1. Le Grand Moyen-Orient américain. (Septembre 2008) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/le-moyen-orient-americain
2. Syrie, les origines de la crise. 1/2. (Septembre 2012) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/syrie-les-origines-de-la-crise-1-2
3. Syrie : les implications régionales de la crise. 2/2. (Septembre 2012) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/syrie-les-implications-regionales-de-la-crise-2-2
4. Kurdistan, nouvel Etat au Moyen-Orient ? (Avril 2013) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/kurdistan-nouvel-etat-au-moyen-orient
5. L’arc de crise au Moyen-Orient. (Mars 2010) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/l-arc-de-crise-au-moyen-orient
6. Bombarder l’Iran. Avril 2010) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/bombarder-l-iran
7. Conflits 2030 : les facteurs. 1/2. (Janvier 2012) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/conflits-2030-les-facteurs-1-2
8. Conflits 2030 : les lieux. 2/2. (Janvier 2012) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/conflits-2030-les-lieux-2-2
9. Le canal Mer Rouge-Mer Morte. (Avril 2008) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/le-canal-mer-rouge-mer-morte#
10. Mondes arabes. (Septembre 2011) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/mondes-arabes
11. Turquie : retour vers l’Orient ? (Septembre 2011) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/turquie-retour-vers-l-orient
12. Le commerce des armes. (Mai 2008) :
==> http://ddc.arte.tv/nos-cartes/le-commerce-des-armes
 
 
 

L’oeuvre politique d’Alcuin à la cour de Charlemagne

L’oeuvre politique d’Alcuin à la cour de Charlemagne

Alcuin.jpg« Une rencontre entre deux grands hommes eut d’heureuses conséquences » écrit l’historien Pierre Racine  en introduction de son article sur Alcuin, paru dans le magnifique ouvrage de Jacques Le Goff, Hommes et Femmes du Moyen-Age. Il est vrai que la rencontre entre le moine northumbrien Alcuin et le roi des Francs Charles à Parme, en Italie aux alentours de 780, bouleversa les rapports entre l’Église et la royauté pippinide, et inaugura ce que les historiens appellent la « première renaissance carolingienne ». Bien que l’oeuvre d’Alcuin à la cour de Charlemagne ait de nombreux aspects, nous verrons ici les évolutions politiques qu’a connues le règne de Charlemagne, attribuées en grande partie à Alcuin mais également dues à la volonté propre du souverain.

Origine et formation

Alcuin naît en Northumbrie – région de York, en Angleterre – aux environs de 730. Issu sans doute de famille noble, Alcuin fait ses études à l’école de la cathédrale d’York en tant qu’élève d’Aelbert. Devenu bibliothécaire de l’école en 766, il est nommé maître d’école en 780 où il enseigne la littérature classique, la grammaire antique et les mathématiques, base du comput — calcul destiné à fixer la date des fêtes mobiles du calendrier ecclésiastique —, tout en subordonnant les sciences profanes à la Bible dont l’exégèse est selon lui la base du savoir. Cette même année, Alcuin fait la rencontre qui va changer sa vie, Charles, roi des Francs, à Parme. Impressionné par les qualités intellectuelles et la vivacité d’esprit de l’ecclésiastique, le roi l’invite à le suivre à la cour en 781.

Rôle politique

Alcuin va jouer un rôle majeur dans la politique carolingienne de cette fin du VIIIe siècle. De 782 à 796, il dirige l’école palatine où sont formés les enfants des nobles de l’entourage du roi. Dès son arrivée au service du souverain franc, il va célébrer en ce roi sacré le Christ Roi et Prêtre.

Déjà à la mort du pape Hadrien Ier fin 795, Alcuin voyait en le roi franc un « nouveau David », à la fois roi et prophète : « Le Christ, de nos jours, a concédé à son peuple comme rector (souverain) et doctor (professeur) un roi David de même virtus (mérite, valeur) et de même foi. »

Dans une autre lettre datée du 26 décembre 796, jour de l’accession de Léon III au trône pontifical, Alcuin, sur ordre de son maître Charles, déclare à l’intention du souverain pontife :

«Voici quelle est notre tâche. À l’extérieur, protéger, les armes à la main, avec le secours de la grâce divine, la sainte Église du Christ de l’invasion des païens et de la dévastation des infidèles; et à l’intérieur, défendre le contenu de la foi catholique. La vôtre, très saint Père, par la prière de vos mains levées au ciel à l’instar de Moïse, est d’aider notre armée jusqu’à ce que, par votre intercession, sous la conduite et par le don de Dieu, le peuple chrétien ait toujours la victoire sur les ennemis de son saint nom et que Notre Seigneur Jésus-Christ soit glorifié dans le monde entier. »

Alcuin prés.jpgCette lettre montre bien à quel point le pape, jusqu’alors souverain des âmes des chrétiens, est relégué au rang de simple puissance sacerdotale, n’ayant plus qu’un rôle de prière. Charles, de par son sacre, reçoit directement ses ordres de Dieu, et n’a donc aucune autre autorité au-dessus de lui. Le roi possède ainsi à la fois le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, car il a en charge et la sauvegarde de son royaume et le salut des âmes des chrétiens, rôle qui appartenait auparavant au souverain pontife. Dans les faits, Charlemagne profite de la faiblesse politique du pape Léon III, qui est d’ailleurs chassé de son trône par une révolte romaine, et qui ne se rétablit sur le Saint-Siège qu’avec l’intervention du roi franc.

Alcuin, dans de nombreuses lettres à son maître, l’exhortait à ne pas obéir aux autorités ecclésiastiques. Dans l’une de ces lettres, il précise l’ordre hiérarchique du monde chrétien:

« Trois dignités ont été jusqu’ici les plus élevées au monde. La première est la dignité apostolique qui donne le droit de gouverner en qualité de vicaire le siège du bienheureux Pierre, prince des apôtres. Comment celui qui le détient a été traité, je le sais par vous-même – il est question ici de la révolte contre Léon III. La deuxième est la dignité impériale avec l’administration séculière de la seconde Rome – Constantinople est le siège de l’empire d’Orient. Par quel acte impie le maître de l’Empire a été dépossédé non par des étrangers, mais par ses propres concitoyens, tout le monde le sait – Irène, veuve de l’Empereur Léon IV prit le pouvoir à la mort de son mari. Mais lorsque son fils Constantin VI devint majeur en 790, elle lui fit crever les yeux et le détrôna. La troisième est la dignité royale que Notre Seigneur Jésus-Christ vous a donnée en partage pour faire de vous le chef du peuple chrétien, plus puissant que le Pape et l’Empereur, plus remarquable par votre sagesse, plus grand par la noblesse de votre gouvernement. »

Il est flagrant ici qu’Alcuin place Charlemagne au-dessus des deux grandes autorités de l’époque, le Pape et l’Empereur. En réalité, la chose est plutôt évidente : le pape est faible et dépend entièrement du bon vouloir de Charlemagne pour conserver son trône, et le siège impérial d’Orient est vacant. Alcuin appelle alors son maître à remplir seul les deux fonctions de pape et d’Empereur : c’est la théocratie impériale que met en place Alcuin en suggérant à Charlemagne d’accéder à l’Empire, ce qui sera fait à la Noël 800.

Conclusion

Alcuin meurt abbé de Saint Martin de Tours — poste qu’il occupait depuis 796 — en 804, soit dix ans avant Charlemagne. Il a été question ici de l’influence d’Alcuin dans le domaine politique à la cour de Charlemagne : comment s’est peu à peu développée l’idée de théocratie impériale, remise en question de la théorie gélasienne – du nom du pape Gélase au Ve siècle – qui voulait la dualité du pouvoir entre temporel et spirituel ainsi que la primauté de ce dernier sur le premier. Cependant, à la mort de Charlemagne en 814, Louis, seul héritier de l’Empereur, va peu à peu perdre de l’influence et de son autorité auprès des ecclésiastiques en réaffirmant la doctrine gélasienne. L’Empereur sera même évincé du pouvoir par son fils Lothaire en 833.

Nicolas Champion

Sources :

  • CHELINI Jean, Histoire religieuse de l’Occident médiéval, Paris, Pluriel, 2010
  • GAUVARD Claude, Dictionnaire du Moyen Age, Paris, PUF, 2012
  • GUILLOT Olivier, RIGAUDIERE Albert, SASSIER Yves, Pouvoirs et institutions de la France médiévale, Paris, Armand Collin, 2011
  • LE GOFF Jacques, Hommes et Femmes du Moyen-Age, Paris, Flammarion, 2012

La bipolarisation droite-gauche n'existe plus en milieu populaire

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"La bipolarisation droite-gauche n'existe plus en milieu populaire"...

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

guilly.jpgNous reproduisons ci-dessous un entretien avec le géographe et sociologue Christophe Guilluy, publié cet été dans le quotidien Le Figaro. Christophe Guilluy est l'auteur d'un essai intitulé Fractures françaises (Bourin, 2010) qui a suscité de nombreux commentaires lors de sa publication. Cet essai, devenu introuvable, sera réédité début octobre chez Flammarion, dans la collection de poche Champs.

LE FIGARO. - Vous êtes classé à gauche mais vous êtes adulé par la droite. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?

Christophe GUILLUY.- Je ne suis pas un chercheur classique. Ma ligne de conduite depuis quinze ans a toujours été de penser la société par le bas et de prendre au sérieux ce que font, disent et pensent les catégories populaires. Je ne juge pas. Je ne crois pas non plus à la posture de l’intellectuel qui influence l’opinion publique. Je ne crois pas non plus à l’influence du discours politique sur l’opinion. C’est même l’inverse qui se passe. Ce que j’appelle la nouvelle géographie sociale a pour ambition de décrire l’émergence de nouvelles catégories sociales sur l’ensemble des territoires.

Selon vous, la mondialisation joue un rôle fondamental dans les fractures françaises. Pourquoi ?

La mondialisation a un impact énorme sur la recomposition des classes sociales en restructurant socialement et économiquement les territoires. Les politiques, les intellectuels et les chercheurs ont la vue faussée. Ils chaussent les lunettes des années 1980 pour analyser une situation qui n’a aujourd’hui plus rien à voir. Par exemple, beaucoup sont encore dans la mythologie des classes moyennes façon Trente Glorieuses. Mais à partir des années 1980, un élément semble dysfonctionner : les banlieues. Dans les années 1970, on avait assisté à l’émergence d’une classe moyenne, c’est la France pavillonnaire.

Vous avez théorisé la coexistence de deux France avec, d’une part, la France des métropoles et de l’autre la France périphérique.

On peut en effet diviser schématiquement la France en deux : la France périphérique, que certains ont dénommée mal à propos France périurbaine, est cette zone qui regroupe aussi bien des petites villes que des campagnes. De l’autre côté, il y a les métropoles, complètement branchées sur la mondialisation, sur les secteurs économiques de pointe avec de l’emploi très qualifié. Ces métropoles se retrouvent dans toutes régions de France. Bien évidemment, cela induit une recomposition sociale et démographique de tous ces espaces. En se désindustrialisant, les villes ont besoin de beaucoup moins d’employés et d’ouvriers mais de davantage de cadres. C’est ce qu’on appelle la gentrification des grandes villes, avec un embourgeoisement à grande vitesse.

Mais en même temps que cet embourgeoisement, il y a aussi dans les métropoles un renforcement des populations immigrées.

Au moment même où l’ensemble du parc immobilier des grandes villes est en train de se « gentrifier », l’immobilier social, les HLM, le dernier parc accessible aux catégories populaires de ces métropoles, s’est spécialisé dans l’accueil des populations immigrées. On assiste à l’émergence de « villes monde » très inégalitaires où se regroupent avec d’un côté des cadres, et de l’autre des catégories précaires issues de l’immigration. Dans ces espaces, les gens sont tous mobiles, aussi bien les cadres que les immigrés. Surtout, ils sont là où tout se passe, où se crée l’emploi. Tout le monde dans ces métropoles en profite, y compris les banlieues et les immigrés. Bien sûr cela va à l’encontre de la mythologie de la banlieue ghetto où tout est figé. Dans les zones urbaines sensibles, il y a une vraie mobilité : les gens arrivent et partent.

Pourtant le parc immobilier social se veut universel ?

La fonction du parc social n’est plus la même que dans les années 1970. Aujourd’hui, les HLM servent de sas entre le Nord et le Sud. C’est une chose fondamentale que beaucoup ont voulu, consciemment ou non, occulter : il y a une vraie mobilité dans les banlieues. Alors qu’on nous explique que tout est catastrophique dans ces quartiers, on s’aperçoit que les dernières phases d’ascension économique dans les milieux populaires se produisent dans les catégories immigrées des grandes métropoles. Si elles réussissent, ce n’est pas parce qu’elles ont bénéficié d’une discrimination positive, mais d’abord parce qu’elles sont là où tout se passe.

La France se dirige-t-elle vers le multiculturalisme ?

La France a un immense problème où l’on passe d’un modèle assimilationniste républicain à un modèle multiculturel de fait, et donc pas assumé. Or, les politiques parlent républicain mais pensent multiculturel. Dans la réalité, les politiques ne pilotent plus vraiment les choses. Quel que soit le discours venu d’en haut, qu’il soit de gauche ou de droite, les gens d’en bas agissent. La bipolarisation droite-gauche n’existe plus en milieu populaire. Elle est surjouée par les politiques et les catégories supérieures bien intégrées mais ne correspond plus à grand-chose pour les classes populaires.

Les classes populaires ne sont donc plus ce qu’elles étaient…

Dans les nouvelles classes populaires on retrouve les ouvriers, les employés, mais aussi les petits paysans, les petits indépendants. Il existe une France de la fragilité sociale. On a eu l’idée d’en faire un indicateur en croisant plusieurs critères comme le chômage, les temps partiel, les propriétaires précaires, etc. Ce nouvel indicateur mesure la réalité de la France qui a du mal à boucler les fins de mois, cette population qui vit avec environ 1 000 euros par mois. Et si on y ajoute les retraités et les jeunes, cela forme un ensemble qui représente près de 65 % de la population française. La majorité de ce pays est donc structurée sociologiquement autour de ces catégories modestes. Le gros problème, c’est que pour la première fois dans l’histoire, les catégories populaires ne vivent plus là où se crée la richesse.

Avec 65 % de la population en périphérie, peut-on parler de ségrégation ?

Avant, les ouvriers étaient intégrés économiquement donc culturellement et politiquement. Aujourd’hui, le projet économique des élites n’intègre plus l’ensemble de ces catégories modestes. Ce qui ne veut pas dire non plus que le pays ne fonctionne pas mais le paradoxe est que la France fonctionne sans eux puisque deux tiers du PIB est réalisé dans les grandes métropoles dont ils sont exclus. C’est sans doute le problème social, démocratique, culturel et donc politique majeur : on ne comprend rien ni à la montée du Front national ni de l’abstention si on ne comprend pas cette évolution.

Selon vous, le Front national est donc le premier parti populaire de France ?

La sociologie du FN est une sociologie de gauche. Le socle électoral du PS repose sur les fonctionnaires tandis que celui de l’UMP repose sur les retraités, soit deux blocs sociaux qui sont plutôt protégés de la mondialisation. La sociologie du FN est composée à l’inverse de jeunes, d’actifs et de très peu de retraités. Le regard porté sur les électeurs du FN est scandaleux. On les pointe toujours du doigt en rappelant qu’ils sont peu diplômés. Il y a derrière l’idée que ces électeurs frontistes sont idiots, racistes et que s’ils avaient été diplômés, ils n’auraient pas voté FN.

Les électeurs seraient donc plus subtils que les sociologues et les politologues… ?

Les Français, contrairement à ce que disent les élites, ont une analyse très fine de ce qu’est devenue la société française parce qu’ils la vivent dans leur chair. Cela fait trente ans qu’on leur dit qu’ils vont bénéficier, eux aussi, de la mondialisation et du multiculturalisme alors même qu’ils en sont exclus. Le diagnostic des classes populaires est rationnel, pertinent et surtout, c’est celui de la majorité. Bien évidemment, le FN ne capte pas toutes les classes populaires. La majorité se réfugie dans l’abstention.

Vous avancez aussi l’idée que la question culturelle et identitaire prend une place prépondérante.

Les Français se sont rendu compte que la question sociale a été abandonnée par les classes dirigeantes de droite et de gauche. Cette intuition les amène à penser que dans ce modèle qui ne les intègre plus ni économiquement ni socialement, la question culturelle et identitaire leur apparaît désormais comme essentielle. Cette question chez les électeurs FN est rarement connectée à ce qu’il se passe en banlieue. Or il y a un lien absolu entre la montée de la question identitaire dans les classes populaires « blanches » et l’islamisation des banlieues.

Vaut-il parfois mieux habiter une cité de La Courneuve qu’en Picardie ?

Le paradoxe est qu’une bonne partie des banlieues sensibles est située dans les métropoles, ces zones qui fonctionnent bien mieux que la France périphérique, là où se trouvent les vrais territoires fragiles. Les élites, qui habitent elles dans les métropoles considèrent que la France se résume à des cadres et des jeunes immigrés de banlieue. Ce qui émerge dans cette France périphérique, c’est une contre-société, avec d’autres valeurs, d’autres rapports au travail ou à l’État-providence. Même s’il y a beaucoup de redistribution des métropoles vers la périphérie, le champ des possibles est beaucoup plus restreint avec une mobilité sociale et géographique très faible. C’est pour cette raison que perdre son emploi dans la France périphérique est une catastrophe.

Pourquoi alors l’immigration pose-t-elle problème ?

Ce qui est fascinant, c’est la technicité culturelle des classes populaires et la nullité des élites qui se réduit souvent à raciste/pas raciste. Or, une personne peut être raciste le matin, fraternelle le soir. Tout est ambivalent. La question du rapport à l’autre est la question du village et comment celui-ci sera légué à ses enfants. Il est passé le temps où on présentait l’immigration comme « une chance pour la France ». Ne pas savoir comment va évoluer son village est très anxiogène. La question du rapport à l’autre est totalement universelle et les classes populaires le savent, pas parce qu’elles seraient plus intelligentes mais parce qu’elles en ont le vécu.

Marine Le Pen qui défend la France des invisibles, vous la voyez comme une récupération de vos thèses ?

Je ne me suis jamais posé la question de la récupération. Un chercheur doit rester froid même si je vois très bien à qui mes travaux peuvent servir. Mais après c’est faire de la politique, ce que je ne veux pas. Dans la France périphérique, les concurrents sont aujourd’hui l’UMP et le FN. Pour la gauche, c’est plus compliqué. Les deux vainqueurs de l’élection présidentielle de 2012 sont en réalité Patrick Buisson et Terra Nova, ce think-tank de gauche qui avait théorisé pour la gauche la nécessité de miser d’abord sur le vote immigré comme réservoir de voix potentielles pour le PS. La présidentielle, c’est le seul scrutin où les classes populaires se déplacent encore et où la question identitaire est la plus forte. Sarkozy a joué le « petit Blanc », la peur de l’arrivée de la gauche qui signifierait davantage d’islamisation et d’immigration. Mais la gauche a joué en parallèle le même jeu en misant sur le « petit Noir » ou le « petit Arabe ». Le jeu de la gauche a été d’affoler les minorités ethniques contre le danger fascisant du maintien au pouvoir de Sarkozy et Buisson. On a pu croire un temps que Hollande a joué les classes populaires alors qu’en fait c’est la note Terra Nova qui leur servait de stratégie. Dans les deux camps, les stratégies se sont révélées payantes même si c’est Hollande qui a gagné. Le discours Terra Nova en banlieue s’est révélé très efficace quand on voit les scores obtenus. Près de 90 % des Français musulmans ont voté Hollande au second tour.

La notion même de classe populaire a donc fortement évolué.

Il y a un commun des classes populaires qui fait exploser les définitions existantes du peuple. Symboliquement, il s’est produit un retour en arrière de deux siècles. Avec la révolution industrielle, on a fait venir des paysans pour travailler en usines. Aujourd’hui, on leur demande de repartir à la campagne. Toutes ces raisons expliquent cette fragilisation d’une majorité des habitants et pour laquelle, il n’y a pas réellement de solutions. C’est par le bas qu’on peut désamorcer les conflits identitaires et culturels car c’est là qu’on trouve le diagnostic le plus intelligent. Quand on vit dans ces territoires, on comprend leur complexité. Ce que le bobo qui arrive dans les quartiers populaires ne saisit pas forcément.

Christoph Guilluy (Le Figaro, 19 juillet 2013)

 

*Christophe Guilluy est un géographe qui travaille à l’élaboration d’une nouvelle géographie sociale. Spécialiste des classes populaires, il a théorisé la coexistence des deux France : la France des métropoles et la France périphérique. Il est notamment l’auteur d’un ouvrage très remarqué : Fractures françaises.

samedi, 07 septembre 2013

EU houdt Grieken in eurozone vanwege nieuwe aardgaspijpleiding

EU houdt Grieken in eurozone vanwege nieuwe aardgaspijpleiding

Griekse regering misbruikt Trans Adriatische Pijplein voor nieuwe schulden op kosten van de EU


Achter het streven om met alle mogelijke middelen Griekenland in de eurozone te houden zit behalve een politiek motief ook een belangrijk economisch aspect: aardgas. De EU wil zijn grote afhankelijkheid van Russisch aardgas verminderen en een nieuwe pijpleiding van Turkije via Griekenland naar Italië bouwen (zie afbeelding). Een eventuele Griekse uittreding uit de eurozone zou dit project in gevaar kunnen brengen.

Afhankelijk van Russisch gas

De Europeanen vragen zich af waarom de EU keer op keer op hun kosten nieuwe belastingmiljarden in Griekenland blijft pompen. Het bankroete land stevent inmiddels op zijn zoveelste reddingspakket af, en heeft nog amper iets van de vereiste hervormingen doorgevoerd. Waarom dan toch zo coulant voor de onverbeterlijk frauderende Grieken?

Het antwoord: de EU voelt de knellende band van bijna totale afhankelijkheid van Russisch aardgas. Feitelijk kunnen de Russen doen en laten wat ze willen; het is Gazprom dat bepaalt of miljoenen Europeanen komende winter hun huizen warm kunnen stoken, of in de kou moeten zitten.

Monopolie Gazpromia

Om het monopolie van 'Gazpromia', zoals Rusland ook wel spottend wordt genoemd, te doorbreken, wil Europa uit Azerbeidzjan aardgas importeren. Dit gas moet geleverd worden via de Trans-Adriatische-Pijplijn (TAP), die Russisch grondgebied vermijd. De TAP is dringend nodig, aangezien de geplande andere pijpleiding via Syrië niet gebouwd kan worden vanwege de burgeroorlog in dat land. Dat was tevens de reden van het Europese aardolie-embargo tegen de Syrische regering.

Athene misbruikt machtspositie voor nieuwe schulden

Omdat tweederde van de pijpleiding over Grieks grondgebied loopt en de Grieken beseffen dat de EU niet zonder hen kan, misbruikt Athene dit gegeven om vrijwel onbeperkt nieuwe schulden te maken, wetende dat Brussel nooit zal toestaan dat het TAP-project in gevaar komt. Uittreding uit de eurozone zal Griekenland namelijk absoluut zeker totaal doen instorten.

Extra gas vanwege mislukte Energiewende

Extra aardgas is broodnodig, vooral nu in Duitsland de Energiewende -de overgang op groene energie- een gigantisch financieel, technologisch en logistiek fiasco is geworden. Desondanks heeft de Nederlandse regering Rutte vorige maand besloten om ook in ons land met tientallen miljarden euro's subsidie een vergelijkbare, eveneens tot mislukken gedoemde omschakelijking te realiseren.

Strategisch belang

De pijpleiding wordt in geopolitiek opzicht van strategisch belang geacht. TAP-chef Kjetil Tungland is adviseur van de Atlantic Council, een Amerikaanse lobbygroep onder leiding van minister van Defensie Chuck Hagel. Zoals we in mei uitlegden draait het conflict in Syrië voor een groot deel om de nieuw te bouwen Nabucco pijpleiding van de Rode Zee via Jordanië en Syrië naar Turkije, die eveneens een geduchte concurrent voor Gazprom dreigt te worden.

Nieuw gasveld in Koerdistan

Bovendien is er in het Iraakse deel van Koerdistan onlangs een enorme nieuwe gasvoorraad ontdekt. Er worden reeds plannen gemaakt om dit gasveld aan te sluiten op de TAP in Turkije, waardoor de Europese afhankelijkheid van Russisch gas verder zal afnemen.

Alleen elite profiteert

De gewone Griek zal overigens niet profiteren van de gaspijpleiding. Die wordt namelijk net zoals in ons eigen land opgezadeld met forse bezuinigingen en pijnlijke ingrepen in de sociale zekerheid. Alleen de machtselite in Athene zal -zoals het al 100 jaar gaat- de eigen bankrekening flink kunnen spekken.

Nederlander betaalt indirect mee aan TAP

Via de vele bailouts, noodkredieten, hulpprogramma's, schuldenkwijtscheldingen betaalt de Nederlandse bevolking dus indirect mee aan de komst van de TAP, die € 4 miljard euro kost. De 'redding' van Griekenland met Europees belastinggeld is dus niet alleen voor de banken een buitengewoon lucratieve zaak, maar ook voor de energiegiganten.

 

Xander

(1) Deutsche Wirtschafts Nachrichten

Zie ook o.a.:
28-05: Strijd Syrië gaat om aardgas en monopoliepositie Gazprom

Vortrag Dr. Sunic / Conference Dr. Sunic


 
 


Prof. Dr. Tomislav Sunic

(http://www.tomsunic.com/?cat=35)

(USA, Kroatien)

(Schriftsteller, ehemaliger US Professor der Politwissenschaften)

Rede: „Ulrichsberg: Mahnort oder Wegweiser neuer Katastrophen“?

Im Andenken an die Zivilopfer des Kommunismus

 

Kranzniederlegung

Sonntag, den 15. September 2013, 10 Uhr,  Österreich (Kärnten), Ulrichsberg, Ort: 9063 Pörtschach am Berg bei der Stadt Klagenfurt

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Dr. Tomislav Sunic

(USA, Croatia)

(Author, former US political science professor)

Commemorative speech in the German language:  “Ulrichsberg:  A Memorial Place or a Guidepost to new Catastrophes”?

In memory of civilian victims of communism

 

Laying of a wreath

Sunday, September 15, 2013, 10AM, Austria, Carinthia, 9063 Pörtschach am Berg, near the town of Klagenfurt

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Prof. Dr. Tomislav Sunic

( autor,  bivši profesor političkih znanosti, SAD) 

Govor na njemačkom: „Ulrichsberg: memorijalni centar ili putokaz za nove katastrofe“?

U sjećanju na civilne žrtve komunizma

Polaganje vijenca i za hrvatske žrtve

Nedjelja, 15. rujna, 2013, 10h. Austrija, Koruška,  9063 Pörtschach am Berg kod Klagenfurta

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Tomislav Sunic

(USA, Croatie)

(Écrivain, ancien professeur de Sciences Politiques)

Allocution en langue  allemande :

"Ulrichsberg,  un lieu de commémoration ou l'annonce de nouvelles catastrophes „ ?

A la mémoire des victimes  du communisme

 

Dépôt de gerbe

Dimanche,  le 15 Septembre 2013, 10h00,  Ulrichsberg, près de Klagenfurt, Autriche, 9063 Pörtschach am Berg

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Anschließend legt Dr. Sunic mit dem Obmann des Bleiburger Ehrenzuges (PBV)  Ilija Abramovic einen Kranz für alle Kriegsopfer am kroatischen Ehrendenkmal der Opfer von Bleiburg am Ulrichsberg nieder.

Fahnen der Veteranen und Opferverbände ausdrücklich erwünscht.

Impressionen vom letzen Ulrichsbergtreffen

http://www.meinbezirk.at/klagenfurt/kultur/ulrichsberg-treffen-2012-friedens-u-voelkerverstaendigungsgedenkstaette-d348907.html

Kroatischer Kranz und Ehrendenkmal des Bleiburger Ehrenzuges am Ulrichsberg:

http://www.meinbezirk.at/klagenfurt/kultur/gedenktafeln-m3011086,348907.html

 
 
 

A Breviary for the Unvanquished

A Breviary for the Unvanquished

By Michael O'Meara 

A propos of Dominique Venner
Un Samouraï d’Occident: Le Bréviaire des insoumis [2]
Paris: PGDR, 2013

samocc.jpgIn his commentaries on the Gallic Wars, Julius Caesar claimed the ancient Celts were ruled by two principles: to fight well and to speak well. By this standard, the now famous essayist, historian, and former insurgent, Dominique Venner, who frequently identified with his Gallic ancestors, was the epitome of Caesar’s Celt—for with arms and eloquence, he fought a life-long war against the enemies of Europe. 

Like much else about him (especially his self-sacrifice on Notre Dame’s high altar, which, as Alain de Benoist writes, made him un personage de l’histoire de France), Venner’s posthumously published Un Samuraï d’Occident bears testament not just to his rebellion against the anti-European forces, but to his faith in the Continent’s tradition and the restorative powers this tradition holds out to a Europe threatened by the ethnocidal forces of the present American-centric system of global usury.

His “samurai” (his model of resistance and rebellion) refers to the “figure” of the aristocratic warrior, once honored in Japan and Europe. Such a figure has, actually, a long genealogy in the West, having appeared 30 centuries ago in Homer’s epic poems. And like a re-occurring theme, this figure continued to animate much of Western life and thought—up until at least 1945.

An especially emblematic illustration of Venner’s warrior is Albrect Dürer’s 1513 engraving of “The Knight, Death, and the Devil.” In the daunting Gothic forest sketched by Dürer, where his solitary knight encounters both the devil and time’s relentless march toward death, the figure of the noble warrior is seen serenely mounted on his proud horse, with a Stoic’s ironic smile on his lips, as he patrols the lurking dangers, accompanied by his dog representing truth and loyalty.

For Venner, Dürer’s timeless rebel does what needs doing, knowing that however high the price he must pay to defend the cosmic order of his world, it will be commensurate with whatever “excellence” (courage and nobility) he finds in himself. It is, in fact, the intensity, beauty, and grandeur of the knight, in his struggle with the forces of death and disorder, that imbue him with meaning. The crueler the destiny, it follows, the greater it is—just as a work of art is great to the degree it transcends tragedy by turning it into a work of beauty.

Contemporary “conservatives” and libertarians struggling with the crisis-ridden economic imperatives of our globalized/miscegenated consumer society, will undoubtedly think Venner’s warrior irrelevant to the great challenges facing it—but this is not the opinion of the “European Resistance” (and it will not likely be the opinion of the European-American Resistance, if one should arise). For between those forming the fake, system-friendly opposition to the liberal nihilism programming our global electronic Gulag—and those European rebels defending the Continent’s millennial tradition and identity—there stretches a gaping ontological abyss.

***

Venner’s book begins with an account of a not uncommon situation in today’s France, especially among the so-called petit blancs—the little people. He cites the case, reported by Le Monde, of one “Catherine C.,” who is what France’s black and brown invaders refer to as a Gauloise: a French native (i.e., someone whose Celtic ancestors fought Caesar’s legions).

All her life Catherine C. has lived in the suburbs of Paris, in a housing estate originally designed to lodge French workers, but now occupied almost exclusively by the invaders. She has hence become a “minority,” a stranger in her own land, abandoned to the whim and rule of the non-Europeans dominating her environment. As such, she rarely leaves her apartment, feeling alienated not just from her “neighbors,” but from the established institutions and authorities favoring the invaders. Even her son, who lacks her sense of French identity, has converted to Islam and wants “to be black or beur [Arab] like everyone else.” But however isolated and threatened, this Gauloise refuses—out of pride—to abandon her home or identity.

We know from other sources that Venner’s resistance to the present anti-white regime began long ago, in his late adolescence, when he took up arms to defend “French Algeria.” His resistance – then on the field of battle (against the outer enemy), later in Parisian street skirmishes (against the inner traitor), and finally on the printed page – has shaped the course of his entire life. Though a “tribal solidarity” and “rebel heart” motivated his initial resistance, the cause of France’s “little people”—the Catherine C.’s—constituting the majority of the nation—became a no less prominent motive for him, especially in that the “little people” of French France are the principal victims of the elites’ criminal system of governance and privilege.

***

“To exist,” Venner argues, “is to struggle against that which denies me.” Since 1945, the whole world has “denied” the European (allegedly “responsible” for the Shoah, slavery, colonization, etc.) the right to exist. At the most fundamental level, this implies that Europeans have no right to an identity: no right to be who they are (given that they are a scourge to humanity). Venner, of course, refused to submit to such tyranny, which has made him a “rebel”: someone who not only refuses to accommodate the reigning subversion, but who remains true to himself in the name of certain higher principles.

Venner’s rebel—the “unvanquished” to use Faulkner’s term—is an offspring of indignation. In face of imposture or sacrilege, the rebel revolts against a violated legitimacy. His rebellion begins accordingly in the conscience before it occurs in arms. Our earliest example of such a rebellion is Sophocles’ Antigone, who rebelled against King Creon’s violation of the sacred law. Like Antigone, Venner’s rebel warrior obeys a transcendent “legitimacy” and resists all that transgresses it; similarly, he never calculates the prospect of success or refuses to pay the often terrible price of rebellion—because a higher defining duty with which he identifies impels him to do so.

Since such rebellion arises from an offended spirit, it often breaks out where least expected. In a life spanning the 20th century’s great catastrophes (World War II, the German Occupation of France, the so-called “Liberation” and its murderous left-wing purges, the Cold War, Decolonization, etc.), Venner has known a Europe paralyzed by dormition (sleep)—too traumatized by the great bloodlettings and destructions of earlier decades to counter her ongoing de-Europeanization. The present “shock of history,” he contends, may change this.

A historical figure (in the form of a revolutionary opponent of De Gaulle’s Fifth Republic, then as a founder of the European New Right, and finally as a proponent of a “revolutionary nationalist” Europe) before he became a historian, Venner holds that there are no fatalities in history (“the trace men leave on their destiny”) and that Europeans, with their incomparable legacy, will eventually awake to resume their destiny. Their history and tradition weighs thus in their favor.

In the last year of his life, Venner thought the forces of French indignation had finally begun to stir. The massive, spontaneous upsurge of outraged opinion in early 2013 against the Taubira Law legalizing homosexual marriage had set it off. (What was so unexpected in this was that earlier, “Catholic” Spain had passed a similar law without mass protest.) Everywhere in French France, however, this perverted law was experienced as the last straw, for in denaturalizing the family it assaulted the very foundation of Continental life.

***

When a régime contemptuous of popular opinion provokes a “rebellion of the mothers,” as François Hollande’s Socialist/African government had, Venner thought it sign that an unpardonable transgression had occurred. For once middle-class Catholic house wives, with their children and strollers, joined militant identitarians and other rebels, in pouring onto French streets in unprecedented numbers to protest the Soviet-style desecrations, it was if another age had suddenly dawn— sign, perhaps, that the awakening had commenced.

Venner also reminds us that the founding work of European civilization, Homer’s Iliad, is all about what happens when the marriage law is violated. Though Homer believed a civilization could not exist in face of such violation, today’s elites know better—which suggests not just the advanced degree of decay among the latter, but the future-significance of the former.

The young identitarian and revolutionary nationalist rebels, who share Venner’s faith in the ongoing significance of the European tradition and follow him in resisting the violators, are the ones in whose hands the Continent’s future now lies—if Europeans are to have a future. The course of history in any case remains endless and open-ended: which means that the sons and daughters of Odysseus and Penelope, however denied they have become, may one day get another chance to re-conquer their lands and lives.

Venner’s last work (and he was always conscious that words are arms) addresses these awakening forces of resistance—preeminently those opposing the denaturalization of the nation (la Grande Replacement)—for the “prayers and hymns” of his breviary revere an alternative to liberal nihilism that re-grounds Europeans in themselves and in their unique heritage.

***

This European heritage is key to everything, for a people or civilization lacking a memory of its past and a stake in its continuation, is a people or civilization that no longer exists as such. Contrary to the tabula rasa suppositions of the moneychangers, Europeans were not born yesterday. Whatever future they have is unlikely to come from the deranged utopias planned for them, but rather from the memory of their past—and thus from the recognition of who they are in this period and of what is expected of them. Faithful to Europe, Venner’s rebel warrior fights for a future he sees sanctioned in everything that has gone before.

The hubristic course of the 20th century—with its great civil wars and wanton destruction, its world crusades and diseased, mercantile, technological metaphysics—has created a situation in which for the first time in history the Continent’s peoples have been denied their tradition (the soul of their culture) and compelled to find themselves in everything alien to who they are. As a historian and as one of Nietzsche’s “good Europeans,” Venner’s life work might be characterized as a struggle to recover Europe’s memory and the relevance of her sacred wisdom.

If Europeans, then, are to escape the great abyss of nothingness the money powers in Washington and New York plan for them, they will need to recover their identity as a people and a civilization. This means returning (not literally, but spiritually) to their roots, to those authentic sources that created them at the beginning of their history, distinguished their destiny from others, and sustained them over the millennia.

There is, as such, nothing antiquarian or nostalgic in this privileging of history’s longue durée, for the tradition and culture animating a people’s millennial history are ultimately never things of the past per se, but of the future—given that the aesthetic values and living spirituality inherent in them nourish the Europeans’ representations, structure their behavior, and lend meaning to their endeavors.

***

Venner claims the preeminent source for the spiritual re-conquest of Europe’s identity (given that the Catholic Church has abandoned its European roots for the sake of becoming a truly universal religion) is Homer, for his sacred poems reveal the “secret permanences” distinct to the Continent’s family of closely related nations and peoples. Though written at the dawn of our civilization, there is nothing in the Homerian epics that is not intimately familiar to the European of today. For in giving form to the European soul, Homer articulated a conception of the world that is entirely unique to the West—a conception, as Georges Dumézil demonstrated, that was rooted in the earlier Indo-European or Borean antecedents of pre-Hellenic Europe, and one that would shape the subsequently Latin, Celtic, Slavic, and Germanic expressions of European life. In Homer, the true European encounters a mirror of his soul.

Virtually every figure and sentiment distinct to European man is to be found in the civilization-creating monuments of the blind poet—for his epics articulated archetypes that will always be timeless and timely for “the white men of the West.” This seems especially the case in respect to Homer’s model of life, which makes “nature the base, excellence the goal, and beauty the horizon.” Above all, Homer’s virile concept of the warrior and his affirmation of the European tradition (which never actually changes, only adapts) offer Europeans the sole alternative to their impending extinction.

***

Those acquainted with Venner’s vast opus will find Un Samuraï d’Occident an eloquent summation of his identitarian postulates. Those unfamiliar with it may find a door opening to an entirely different future. Finally, for Venner’s fellow rebels—the unvanquished—his breviary is certain to impart new vigor to the hours and offices of their already endless sacrifices to remain true to themselves.

More on Dominique Venner

• “The Rebel [3]

• “From Nihilism to Tradition [4]

• “The Foundations of the 21st Century [5]

• “Another European Destiny [6]

• “The Shock of History [7]

• “Arms and Being [8]

Source: http://www.wermodandwermod.com/newsitems/news310820131249.html [9]

 


Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com

URL to article: http://www.counter-currents.com/2013/08/a-breviary-for-the-unvanquished/

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[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2013/08/Venner-Dominique-Un-samourai-dOccident.jpg

[2] Un Samouraï d’Occident: Le Bréviaire des insoumis: http://www.amazon.fr/Un-samoura%C3%AF-dOccident-br%C3%A9viaire-insoumis/dp/2363710738

[3] The Rebel: http://www.counter-currents.com/2010/06/the-rebel/

[4] From Nihilism to Tradition: http://www.counter-currents.com/2010/06/from-nihilism-to-tradition/

[5] The Foundations of the 21st Century: http://www.counter-currents.com/2010/06/foundations-of-the-twenty-first-century/

[6] Another European Destiny: http://www.counter-currents.com/2010/06/another-european-destiny/

[7] The Shock of History: http://www.counter-currents.com/2011/11/the-shock-of-history/

[8] Arms and Being: http://www.counter-currents.com/2013/07/arms-and-being/

[9] http://www.wermodandwermod.com/newsitems/news310820131249.html: http://www.wermodandwermod.com/newsitems/news310820131249.html

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Jean-Yves Le Gallou à Nantes

Conférence de Jean-Yves Le Gallou à Nantes le vendredi 20 septembre :

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Nietzsche et l'éternité

NIETZSCHE ET L’ETERNITE
 
Au cœur de la philosophie nietzschéenne

Pierre Le Vigan
Ex: http://metamag.fr

kmn1.gif « La vie éternelle n’est pas une autre vie, mais, précisément, la vie que tu vis » écrivait le philosophe de Sils-Maria. La question de l’éternité est au cœur de la pensée de Nietzsche. Aimer la vie longue est selon lui le contraire d’aimer la vie. L’homme ne se résigne pas à la brièveté. L’homme est malade du manque d’éternité. Pour Nietzsche c’est la cause du nihilisme. L’éternité est pourtant à portée de main. Elle est dans le corps même, ce grand oublié, elle est dans la vie même. C’est la vie elle-même qui crée les valeurs qui rendent inutile le nihilisme. La tentation du nihilisme est inhérente à la vie elle-même mais c’est la vie qui permet de la surmonter. « Nous ne pouvons comprendre que le monde que nous avons créé » explique Nietzsche. Il rejette ainsi toute foi et toutes valeurs extérieures à l’homme. Le principe d’une foi extérieure à l’homme est de refuser le temps cyclique, comme le faisait Augustin d’Hippone. Le monothéisme veut le temps droit et linéaire. Au contraire, Nietzsche affirme que « tout ce qui est droit ment (…), toute vérité est courbée, le temps lui-même est un cercle. » (Zarathoustra). C’était ce qu’exprimait Héraclite : « Pour le temps comme sur le pourtour de la roue, le début et la fin sont communs ». 

L’éternité s’atteint alors par la transformation « de tout ce qui a été » (Zarathoustra). Le surhomme n’est pas autre chose que l’homme qui interprète et transforme le monde, ici et maintenant, à la différence du stoïcien, qui se contente d’accepter le monde. Amor fati s’écrit Nietzsche. Mais il lui donne plutôt le sens d’amor mundi. Et le monde est transformation et métamorphose. Ambivalence de Nietzsche : « Je vous enseigne comment vous libérer du fleuve éternel ». L’éternité serait donc le mal ? Non, l’éternité serait le mal si elle était immuabilité. Ce qu’elle n’est pas. L’éternité bonne, c’est tout simplement l’éternelle métamorphose du présent. 

« Le royaume des cieux est un état du coeur – ce n’est pas un état ‘’au-dessus de la terre’’, ou bien ‘’après la mort’’ (…). Le ‘’règne de Dieu’’ n’est pas une chose que l’on attend, il n’a point d’hier et point d’après-demain, il ne vient pas en ’’mille ans’’ dans le sens chronologique ou historique, selon un calendrier – il est une expérience du cœur, il est partout, il n’est nulle part, il advient à tout moment et à tout moment n’est point là »(L’Antéchrist). Il en est du retour comme du bonheur. « L’éternel bonheur n’est pas une promesse mais une réalité ». Parce que tout présent inclut une promesse d’éternité. « Chaque chose a deux faces, l’une est celle de ce qui passe, l’autre celle de ce qui devient ». Il n’y a jamais ni de commencement ni de fin à l’écoulement du présent dans le passé, ni à son écoulement dans l’avenir. « Le temps plonge ses racines dans l’éternité et s’attache à elle » écrivait de son côté Nicolas Berdiaev. K. Michalski renouvelle l’étude de la question de l’éternel retour chez Nietzsche. « Zarathoustra raconte le mystère du retour de tout ». L’éternel retour du toujours neuf beaucoup plus qu’un éternel retour du même.
  
Krzysztof Michalski, La flamme de l’éternité. Essai sur la pensée de Friedrich Nietzsche, Zdl éditions, www.zdl-editions.com, 318 pages, 24,90 E

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Nietzsche e o Mundo Homérico

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Nietzsche e o Mundo Homérico

Por Carolina Figueroa León*
Ex: http://legio-victrix.blogspot.com
 
 
nag1.jpgNietzsche desde o princípio apresentou um apego ao mundo grego, uma idealização deste como estrutura social, ideológica e intelectual. Esta aproximação não é especificamente com a época clássica, mas com a época arcaica que é representada através dos poemas homéricos.
 
Tomando em conta que o ideal que surge neste período se baseia na luta de poder, na excelência de uma classe aristocrática que é representada através dos heróis e através da areté. Neste período em que o filósofo encontra a essência do grego, porque é o momento em que se desenvolve da melhor forma a condição inerente ao ser humano: o instinto e a vontade de poder. Portanto, ao tomar esta leitura deixamos de lado a visão de que estes poemas remetem necessariamente à época micênica, senão que por sua vez estão carregados de elementos ideológicos, morais e sociais correspondentes à época em que escreve Homero.
 
Para compreender como este ideal guerreiro baseado em uma moral agonística se encontra na sociedade aristocrática arcaica é necessário analisar a obra homérica, a qual se deve relacionar com o contexto do século VIII a.c. e desde aí contrastar com as posturas de Nietzsche, as quais se encontram em seus primeiros escritos mais filológicos como O Estado grego e A luta de Homero.
 
Portanto, é importante analisar o contexto histórico de enunciação destas epopeias, ver se este realmente se vê representado em ditas obras e finalmente analisar o problema a partir da leitura nietzschiana da cultura grega.
 
O mundo homérico e a moral agonística
 
O chamado mundo homérico é o que historicamente corresponde à época arcaica da cultura grega, em que se assentam as bases do crescimento e surgimento das grandes polis. Para Nietzsche é neste momento específico em que se daria o apogeu da cultura grega, não o mundo clássico que foi modificado pelo Romantismo e os filólogos classicistas: “Mas os gregos aparecem ante nós, já que a priori, precisamente pela grandeza de sua arte, como os homens políticos por excelência (...) Tão excessivo era nos gregos tal instinto (...) a expressão triunfal de tigres que mostravam ante o cadáver do inimigo; em suma, a incessante renovação daquelas cenas da guerra de Tróia, em cuja contemplação se embriagava Homero como puro heleno”[1].
 
Para começar esta análise é necessário nos remeter à época arcaica em si, para logo trabalha-la em comparação à homérica. A época arcaica é quando se destaca a imagem de um governo aristocrático precedente à democracia. Para autores como Francisco Rodríguez Adrados, este período é denominado a sociedade homérica, já que se baseia na mesma estruturação social que dão conta os poemas homéricos, posto que na cabeça da sociedade está o rei (Basileus) e este é secundado por aristocracia que na épica é representada na imagem dos heróis. Portanto, os pontos de reconstrução do ideal aristocrático se dão em Homero, quem logra encarná-los em seus poemas. Para Rodríguez Adrados isto se deveria a que o pensamento racional em que foi constituído esta aristocracia se baseia no mito principalmente.  Portanto, Homero plasma através de suas obras tal realidade, a qual se mescla com a mitologia existente de Micenas, mas por sua vez e com maior força aludindo a seu século [2].
 
Frente à utilização dos mitos como reconstrução de identidade e histórica, Rodríguez Adrados refere: “Se trata de uma sabedoria tradicional, de um espelho de conduta posto no passado e no aceitado tradicionalmente, que não tem porque ter uma coerência absolutamente rigorosa” [3].
 
Dentro deste tipo de sociedade vemos a imagem do homem que é similar aos deuses, com a única diferença que é mortal. Esta aristocracia por sua vez se caracteriza por uma moral agonística que se assenta nos valores como honra (time) e virtude ou excelência (aretê). Estes se encontram presentes já em grande medida na epopeia grega: “A moral da aristocracia grega é na epopeia essencialmente competitiva ou agonística” [4].
 
Esta imagem podemos percebê-la já que na maior parte do pensamento dos heróis, no caso da Ilíada, por exemplo: Glauco narra como seu pai Hipóloco o manda lutar a Tróia, o dizendo que é preferível que regresse morto, antes que derrotado e sem lograr ser o primeiro em batalha: “Me insto muitas vezes a ser o primeiro e me destacar entre os outros e a não desonrar a linhagem de meus pais que foram os primeiros em Feira e na vasta Licia” [5].
 
Frente a esta imagem da desonra da linhagem surge a noção de que o herói sempre deve ser virtuoso e é a partir deste elemento que surge o conceito de aretê. Esta excelência em primeiro momento se dá a nível de linhagem, já que sempre o herói é de uma família nobre. Esta traz o prêmio e a fama, o qual se demonstra através das botinhas que se recebia (Geras) logo depois da façanha.
 
A aretê que surge no ideal heroico é o que conforma a excelência da nobreza da sociedade arcaica, já que neste ideal assentam suas bases, que resgatam esses reis e heróis, porque são a representação de sua classe.
 
Finley também se refere á idéia que a aretê heroica é símbolo da nobreza quando nos afirma que isto se faz patente em Odisséia: “Particularmente na Odisséia, a palavra “herói” é uma expressão de classe para toda a aristocracia, e as vezes até parece compreender todos os homens livres”[6].
 
Podemos tomar o afirmado por Finley no seguinte fragmento da Odisséia: “Amanhã – indicou Atena a Telêmaco – convoca no ágora os heróis aqueus” [7]. É nesse sentido que a aretê se converte em um valor de ensinamento frente a esta sociedade. O que já é afirmado por Jeager em A Paideia [8] Para ele, o ideal de aretê é exemplificado através dos mitos heroicos. Precisamente neste sentido a educação do século VIII se baseia nas epopeias. Os cantos épicos se convertem em uma educação moral, em que se ensina que a aristocracia possui uma excelência que é natural. Mas apesar de ser uma condição imanente ao nobre, a aretê se deve demonstrar individualmente. Portanto, há que esforçar-se para conseguí-la, o que se vê na Ilíada quando nos narra que Aquiles foi treinado para vencer na arte da guerra por Fênix. O que nos apresente no canto IX quando Fênix trata de persuadir Aquiles para que volte a lutar com os aqueus: “O ancião cavaleiro Peleo quis que eu te acompanhasse no dia em que te enviar de Ptía a Agamenon. Todavia criança e sem experiência da funesta guerra nem do ágora (...) e me mandou que te ensinará a falar e a realizar grandes feitos (...) te criei até fazer-te o que és”[9].
 
Neste ponto vemos que não só importa a natureza especial do nobre, mas que há que desenvolvê-la e a partir disto é que se reconhece seu mérito.
 
Seguindo com as características desta excelência, surge a imagem da doxa, que se relaciona com a opinião que o resto possui do herói, é esta a que da posteridade e transcendência encarnada na Fama. Portanto, como antes mencionei, tal valor se representa através dos objetos materiais como os despojos de guerra. Portanto, a culminação desta doxa é a Glória ou kleos. Neste sentido ocorre a disputa entre Aquiles e Agamenon, já que ninguém dos dois pôde ficar sem uma escrava, que seja o exemplo tangível de seu triunfo. É por isso que a única forma para que Agamenon não perca sua honra ao entregar sua escrava a Apolo é remover a de Aquiles, posto que este é um igual.
 
Ao revistar este exemplo de Ilíada vemos que no mundo aristocrático não há uma diferença entre o parecer e o ser, ambos elementos são a mesma coisa, portanto, o que prima é a aparência principalmente. Devido a esta visão do homem é que surgiria a antes mencionada doxa que é a opinião, a que afirma o reconhecimento por parte do outro. Ao conseguir tal aceitação o herói pode chegar a tal (euphrosyne), que se representa através do despojo e do banquete “ O agathós ou homem destacado tem alguns meios de fortuna proporcionados. Isto se deduz do paralelismo que se estabelece entre a time ou honra de cada chefe e a parte de despojo que recebe”[10].
 
Outro ponto importante é o das riquezas, que também é outro componente da excelência. O qual se representa através das pertenças do oikos, tais como terras, gado, criados, escravos, etc. Todos estes bens se transmitem diretamente por via de herança. Daqui podemos desprender como nos afirma Rodríguez Adrados que, quando o nobre não pratica a guerra, desfruta da riqueza em seu lugar. Isto nos fica bastante claro na imagem do Banquete em Odisséia [11].
 
Para concluir este imaginário do mundo homérico me parece importante ressaltar que: “É uma sociedade voltada para o mundo, não a outra vida nem ao homem interior; mas com um ideal de heroísmo ao próprio tempo. O ideal se encarna no nobre, o homem superior ou excelente, cuja aretê é fundamentalmente competitiva, mas pode desembocar no sacrifício ou na alegria de um viver refinado” [12].
 
Diane-Kruger-Troie.jpgTomando esta citação compreendemos que a aristocracia se conforma a partir de sua riqueza, e devido a isto é fundamental entre os nobres fomentar vínculos com seus iguais, o qual se dá através da hospitalidade, já que se atende a alguém do mesmo valor moral e social. Neste sentido também se volta importante uma espécie de relação de parentesco dentro da que surge certo intercâmbio econômico representado em presentes (hedna). Na Odisséia se faz patente esta relação de hospitalidade através da narração da viagem de Telêmaco pelas cortes gregas, onde é bem recebido e por sua vez se atende tal como se formara parte da família, sem importar de onde venha, nem as fronteiras que os separam. Outro exemplo chave é o fato que conduz à Guerra de Tróia, a falta da hospitalidade de Paris (Alexandre) frente a Menelau ao raptar Helena.
 
A luta de Nietzsche
 
 O fascínio do filósofo pelo grego parte já de sua infância, na época em que vive com seu avô materno, quem o aproximará ao grego a partir das leituras de Homero que realiza. É neste ponto que o grego se converte em um refúgio para Nietzsche, quem detesta a educação petista na que cresceu, já que o grego se converte na antítese e anti-utopia frente á miséria de sua existência cotidiana cristã-protestante. A partir deste fascínio surge uma imagem do grego que irá contra o pensamento filológico de sua época, para quem a essência do grego se daria no século V ateniense, em pleno Classicismo. Para Nietzsche isto não é o grego, mas o pré-clássico, principalmente assentado no pré-socrático e em Homero.
 
O que se relaciona com as afirmações de Arsênio Ginzo em seu artigo “Nietzsche e os gregos”: “Nietzsche havia chegado cedo à conclusão de que a visão da Grécia transmitida pelo Classicismo alemão era instatisfatória. Já com anterioridade à publicação de O nascimento da tragédia, Nietzsche havia distanciado da imagem da Grécia dos clássicos alemães (...) A partir de 1869, quando começa sua atividade como professor em Basiléia, Nietzsche mostra claramente que resulta insatisfatória essa imagem da Grécia (...) A razão do rechaço nietzschiano consistia em que primeiro os clássicos e depois seus epígonos nos haviam transmitido uma imagem falsa da Antiguidade, uma <<falsa Antiguidade>>, idealizada, unilateral, domesticada” [13].
 
Este distanciamente o leva a afirmar que o centro de gravidade do grego já não é o século de Péricles, como afirmava o resto dos filósofos alemães de sua época, mas antes o século VI ou talvez antes: “Aqui se encontrariam a seu juízo os verdadeiros gregos, uma cultura grega todavia não falsificada nem debilitada, aqui residiria a <<origem criadora>> de uma cultura ocidental, a modo de referente paradigmático que lamentavelmente havia caído em esquecimento ou bem havia diluído seus perfis”[14].
 
Partindo desta imagem do grego contextualizada na época arcaica vemos que Nietzsche descobre neste o melhor exemplo da vontade de poder, a idéia de luta, de sobrepor-se ao outro, que define ao ser humano, o que estaria representado em Homero. E é neste contexto que se percebe a crueldade, a inveja, um gosto pela destruição, dando conta que a destruição é algo próprio do ser humano. Os gregos não forma deshumanos, mas os homems mais humanos dos tempos antigos. Aceitam, não inventam nada papra criar outra humanidade alternativa. A luta para Nietzsche é antes o fim da cultura e educação. E isto é o que afirma em seu texto A luta de Homero, onde a força do agon é o valor mais transcendente dentro da sociedade homérica. Esta imagem apontaria no pensamento do filósofo à noção de um grande desenvolvimento cultural, que só se havia logrado em tal sociedade. Ele não queria pensar na humanidade da antiga Grécia sem sua selvageria, na cultura em sua vigorosa natureza, nem na beleza de seu mundo sem todo o terrível e feio que formavam parte dele:
 
Assim vemos que os gregos, os homens mais humanos da antiguidade, apresentam certos traços de crueldade, de frieza destrutiva; traço que se reflete de uma maneira muito visível no grotesco espelho de aumento dos helenos (...) Quando Alexandre perfurou os pés de Batis, o valente defensor de Gaza, e atou seu corpo vivo ás rodas de seu carro para arrastá-lo entre as provocações de seus soldados, esta soberba nos parece como uma caricatura de Aquiles, que tratou o cadáver de Heitor de uma maneira semelhante (...)” [15]
 
Ao afirmar isto vai contra o otimismo do progresso que foi instaurado a partir do Iluminismo. Para Nietzsche o grego é a antítese do que odeia de sua época. Para ele os gregos seguem sendo o que haviam sido para os clássicos: paradigmas da humanidade, cultura do homem político, mas a imagem que tinha começou a oscilar entre a simplicidade da concepção clássico e o vigor, inclusive a atrocidade de uma cultura pagã, cujos valores representavam a antítese da história cristã.
 
É em meio a este ideal que começa a afirmar seu projeto de desmascaramento da cultura ocidental como uma luta, uma conquista e a partir disto se homologa com a sociedade homérica. Para ele tudo é visto como uma missão, os gregos eram construtores de cultura, de sua cidade, este não era um agon pessoal. De aí que Nietzsche não entenda o conceito de fama só como um reconhecimento egoísta que se comprova através dos bens materiais. E sim antes é outorgada pela coletividade. Por exemplo, a fama à que apela Aquiles tem que ver antes com a doxa, o que nos fica clarro através da idéia que os aqueus veem possível triunfo em Tróia se Aquiles não decide voltar a lutar. A partir deste exemplo podemos situar a idéia da individualidade que representa o herói para Nietzsche:
 
Cada ateniense, por exemplo, devia desenvolver sua individualidade naquela medida que podia ser mais útil a Atenas e que menos pudesse prejudica-la (...) cada jovem pensava no bem-estar de sua cidade natal, quando se lançava, bem à carreira, ou a tirar ou cantar; queria aumentar sua fama entre os seus; sua infância ardia em desejos de mostrar-se nas lutas civis como um instrumento de salvação para sua pátria (...)” [16] 
 
Analisando o texto O Estado grego de Nietzsche se visualiza seu ideal de um Estado orientado para a cultura, mas que deve ser fundamentalmente hierarquizado e fundamentado em base à escravidão. Nietzsche glorifica a pólis grega antiga como um arquétipo anti-socialista e anti-liberal. Uma sociedade hierarquicamente estruturada, cruelmente opressiva, cuja excelência cultural provém da implacável exploração dos escravos. Este ideal iria contra a organização burguesa da modernidade. Finalmente, quando conclui seu ensaio louva Platão como o grande teórico do Estado, mas o critica por ser o artífice da Idéia, que será o que ficará na criação do Cristianismo e uma filosofia metafísica. [17]
 
Outro dos pontos que resgata neste texto em relação á sociedade homérica é a noção de indivíduo excepcional que de desprende da imagem do herói, que possui virtude (aretê) e que é quem logra levar a cabo a culminaçãp da grande cultura e determinam o curso da história.
 
Em relação a esta idéia do homem excepcional podemos tomar em contra a noção do herói homérico seguindo as afirmações de Moses Finley em seu texto O mundo de Odisseu: “A idade dos heróis, tal como entendia Homero, foi, pois, uma época em que os homens superavam os padrões sucessivos de um grupo de qualidades específicas e severamente limitadas” [18].
 
A partir dessa noção de Finley podemos relacionar a visão do termo da individuação e por sua vez a imagem do gênio excepcional afirmada por Burckhardt.
 
Burckhardt em seus estudos relacionados com o Renascimento começa a afirmar que esta é a época em que surge a imagem do gênio, a idéia do desenvolvimento da individualidade do artista, elemento que romperia com o anonimato presente na arte da Idade Média. O que para ele se entenderia a partir do descobrimento do homem como homem. O artista agora aspira à fama terrestre, já não à espiritual tal como se via na Idade Média. Seu móvel é a glória, ser reconhecido por seus logros artísticos. Se perde totalmente a idéia medievalista do homem que vê a atividade terrestre como um passo ou preparação à vida celestial. O homem moderno ou renascentista para Burckhardt vê antes que a atividade que realiza  recai em seu presente e em suas glórias futuras, é antes um benefício imediato ao que pode ascender. É assim como Burckhardt afirma que este novo homem já não é passivo e receptivo, mas que antes se transforma em um grande criador. Um produtor de cultura. [19].
 
Esta idéia logo é aplicada por Nietzsche, quem entende a este gênio como um indivíduo excepcional que surge em toda sociedade como o artista ou militar. Tomando esta idéia, Nietzsche afirma o princípio de individuação que estará presente em sua obra O nascimento da tragédia. Este princípio se relaciona com a vontade individual que propõe Schopenhauer, a qual se relaciona com a denominada volição individual que é antes uma maniestação limitada da vontade que se daria a nível do mundo objetivo. Portanto, a vontade seria algo inconsciente que se manifesta no amor à vida de cada um dos indivíduos. A partir destas idéias afirma que o mais importante é entender que todos os fins que persegue o homem estão impulsionados por uma vontade que é original. A essência do mundo é a vontade, levada à vida mesma, sendo esta algo íntimo do ser, o que relacionamos com a noção do núcleo do indivíduo, com sua natureza humana [20].

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E é neste sentido que se afirma que o Estado deve preocupar-se deste indivíduo excepcional, que afirma uma vontade natural de aspirar à glória, seguindo as afirmações de Burckhardt. Devido a sua genialidade, Nietzsche afirma que o resto do povo (laos) deve se submeter, já que graças a esta escravidão estes gênios podem ter o tempo suficiente para o ofício e em meio dele criar cultura:
 
Com o fim de que haja um terreno amplo, profundo e fértil para o desenvolvimento da arte, a imensa maioria, ao serviço de uma minoria e mais além de suas necessidades individuais, há de submeter-se como escrava à necessidade da vida a seus gastos, por seu plus de trabalho, a classe privilegiada há de ser subtraída à luta pela existência, par que crê e satisfaça um novo mundo de necessidades” [21].
 
Ao ofício a que se refere Nietzsche não é o que atualmente entendemos como Estado de não atividade, senão que pelo contrário tomando a noção de ofício grega em que os artistas só se dedicavam a produzir cultura. É a partir desta idéia que Nietzsche nos propõe que para os gregos o trabalho era vergonhoso e frente a isto os disse:
 
O trabalho é uma vergonha porque a existência não tem nenhum valor em si: mas se adornamos esta existência por meio de ilusões artísticas sedutoras, e lhe conferimos deste modo um valor aparente, ainda assim podemos repetir nossa afirmação de que o trabalho é uma vergonha, e por certo na segurança de que o homem que se esforça unicamente por conservar a existência não pode ser um artista” [22].
 
Neste texto também podemos ver que se desprende esta defesa da moral agonística grega, da luta, o uso da violência para poder criar cultura, de aqui que para ele a escravidão se converta em uma horrível necessidade:
 
Os gregos se revelaram com seu certeiro instinto político, que ainda nos estágios mais elevados de sua civilização e humanidade não cessou de advertir-lhes com acento bronzeado: “o vencido pertence ao vencedor, com sua mulher e seus filhos, com seus bens e com seu sangue. A força se impõe ao direito, e não há direito que em sua origem não seja demasia, usurpação violenta” [23]. 
 
Por sua vez através desta visão violenta, de destruição e força, Nietzsche nos afirma como exemplo Iliáda: “a expressão triunfal de tigres que mostravam ante o cadáver do inimigo; em suma, a incessante renovação daquelas cenas da guerra de Tróia, em cuja contemplação se embriagava Homero como puro heleno” [24].
 
Em relação à imagem do gênio extraordinário, Nietzsche toma Homero, o qual se afirma em seu texto Homero e a filologia clássica. Neste trabalho, apresentado na inauguração de sua cátedra de filologia em Basiléia, não se mete na questão homérica, senão que antes interessa o que este como figura em si simboliza. Deste ponto de vista para o filósofo, Homero se converte em um modo de viver, uma política, um ideal religioso e na criação de um panteão de deuses.
 
Resgata Homero como o indivíduo excepcional que logra sublimar  a tradição, posto que já não é o poeta quem possui uma vontade racional, portanto, nega o conceito de tradição homérica. Há para Nietzsche o desenvolvimento dinâmico de um poeta que se eterniza em um futuro. Para os filólogos da época, Homero recolhe uma tradição de muitos séculos, a concretiza e a escreve. Mas Nietzsche disse que Homero não é isso, que não há uma vontade, e sim uma dinâmica. Para ele a única forma de abordar Homero é através da arte, não da razão, escrevê-lo através da experiência: “a possibilidade de um Homero se faz cada vez mais necessária. Se desde aquele ponto culminante voltamos atrás, encontramos logo a concepção aristotélica do problema homérico. Para Aristóteles é o artista imaculado e infalível que tem perfeita consciência de seus meios e de seus fins; com isto se revela também com a ingênua inclinação a aceitar a opinião do povo que adjudicava Homero a origem de todos os poemas cômicos, um ponto de vista contrário á tradição oral na crítica histórica (...) é necessário perguntar-se se existe uma diferença característica entre as manifestações do indivíduo genial e a alma poética de um povo” [25].
 
A excelência da alma individual que não inventa nada, que eleva a outra categoria à alma popular. O que nos leva a entender que personagens como Homero não são mais uns, senão que sublimam, que são excepcionais e que levam a outra categoria a uma tradição, dado por sua individualidade, seu caráter excepcional: “Agora se compreende pela primeira vez o poder sentido das grandes individualidades e das manifestações de vontade que constituem o mínimo evanescente da Humanidade; agora se compreende que toda verdadeira grandeza e transcendência no reino da vontade não pode ter suas raízes no fenômeno efímero e passageiro de uma vontade particular; se concebem os instintos da massa, o impulso inconsciente do povo como a única primavera, como o único palanque da chamada história do mundo” [26].
 
Para Nietzsche. Homero não só recompilou a poesia oral, visto que sem a figura do bardo não existiria Ilíada Odisséia: “Nós acreditamos em um grande poeta autor da Ilídia e Odisséia; sem embargo, não acreditamos que este poeta seja Homero” [27]. Esta é uma visão muito distinta da que afirmam os estudiosos da questão homérica. Nietzsche afirma uma terceira visão, diferente da noção que foi afirmado, em que se vê Homero como um personagem qualquer. Nietzsche ao invés disso disse que suas obras são produto de uma excepcionalidade, o que se relacionaria com o princípio de individualidade que aparece em o nascimento da tragédia. De onde se desprende a idéia que os personagens individuais determinam o curso da história.
 
Como temos visto, Nietzsche é muito certeiro ao realizar uma leitura do mundo homérico, e tomar deste aquela idéia que através do ideal guerreiro se pode lograr antes de tudo produzir cultura, portanto, não é tão azaroso que em Grécia se tenha dado a grande formação da cultura de Ocidenten, o qual claramente só se pode conseguir a partir da guerra, a que eles chamavam polemos. Daqui que a educação que se recebera aludira exatamente a um ideal guerreiro baseado na noção de aretê, a qual se lograva tanto a nível de trabalho individual como por sua vez pelo simples fato de nascer nobre. Portanto, os gregos foram uma cultura que se educou e conformou na base da noção de uma moral agonística, em que sempre há um que é superior ao outro. Mas ambos heróis estão na mesma altura, já que ambos possuem as mesmas características de nobreza, entendida através do termo aristoi. Daqui que se repete potentemente a imagem de Heitor, quem Homero nos apresenta como o único herói que poderia competir com a potencialidade de Aquiles. Desde este ponto me parece interessante o resgate que realiza Nietzsche frente ao que o resto de seus contemporâneos haviam considerado dentro dos estudos filológicos o menos importante, o mais bestial, que não teria comparação com ao nível artístico do século V. E é neste sentido que depois da conclusão que se a sociedade arcaica não tivesse sido constituída a partir desta noção de agon, não se tivesse logrado mais adiante tais manifestações culturais tão magnânimas que nos tem deixado o século V ateniense.
 
***
 
*Carolina Figueroa León é bacharel em Humanidades e Ciências Sociais. Licenciada em Literatura Criativa da Universidade Diego Portais com um Menor em menção em Cultura Clássica. Estudante do Programa de Magíster em Estudos Clássicos da Universidade Metropolitana de Ciências na Educação (UMCE).
 
[1] Nietzsche, Friedrich, O Estado grego. (Obra Póstuma) Prólogo de um livro que não foi escrito, 1871, p. 6
 
[2] Ver Rodríguez Adrados, Francisco, La democracia ateniense, Editorial Alianza, España, 1998.
 
[3] Ibíd., p. 32
 
[4] Ibíd., p. 36
 
[5] Homero, La Ilíada, Canto VI, Editorial Plaza y Janés, Barcelona, 1961, p. 154
 
[6] Finley, M.I., El mundo de Odiseo, Fondo de Cultura Económica, España, 1995, p. 30
 
[7] Ibíd., p. 20
 
[8] Ver Jaeger, Werner. “Capítulo II: Cultura y educación de la nobleza homérica” en Paideia: los ideales de la cultura griega, Editorial Fondo de Cultura Económica. México, 2001, pp. 32-47.
 
[9] Homero, Op. cit., pp.226-228
 
[10] Rodríguez Adrados, Op. cit., p.39
 
[11] Ver Homero, La Odisea, Canto XVII. Se menciona um banquete no cual se encontram os pretendentes de Penélope.
 
[12] Rodríguez Adrados, Op.cit., p.38
 
[13] Ginzo, Arsenio, “Nietzsche y los griegos”, Polis. Revista de ideas y formas políticas de la Antigüedad Clásica, núm. 12, 2000, p.103
 
[14] Ibíd., p.106
 
[15] Nietzsche, Friedrich, La lucha de Homero. Prólogo para um libro que não foi escrito (Obra póstuma) (1871-72).
 
[16] Ibíd.
 
[17] Nietzsche, Friedrich, Op. cit., pp.1-9
 
[18] Finley, M. I., Op.cit., p.30
 
[19] Burckhardt, Jacob, La Civilización del Renacimiento en Italia, Vol. I (New York: Harper & Row, Publishers, 1958), pp.143-174
 
[20] Véase Schopenhauer, Arthur, El mundo como voluntad y representación, 1844 (2º Edición, con los Suplementos).
 
[21] Nietzsche, Friedrich, Op. cit., 1871.
 
[22] Ibíd.
 
[23] Ibíd.
 
[24] Ibíd.
 
[25] Nietzsche, Friedrich, Homero y la filología clásica. Trabalho apresentado em Basilea no ano de 1869.
 
[26] Ibíd.
 
[27] Ibíd.

vendredi, 06 septembre 2013

Festa dei Cinghiali - Torino

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Les nouveaux visages du mondialisme

Les nouveaux visages du mondialisme

par Georges FELTIN-TRACOL

 

Suite à ma brève étude consacrée à l’U.K.I.P. (Parti de l’Indépendance de la Grande-Bretagne) de Nigel Farage, « Poussée souverainiste outre-Manche » dans le mensuel en ligne Salut public, n° 16 de juin 2013, des lecteurs se sont étonnés que je qualifie ce mouvement souverainiste britannique de « national-mondialiste ». Il est vrai que le qualificatif paraît osé, mais cette provocation voulue entend signaler une tendance nouvelle qui témoigne de la mue du mondialisme afin de contourner et de neutraliser les réactions souvent défensives qu’il suscite.

 

Le mondialisme « classique » se présente sous deux formes souvent antagonistes tant au sujet des moyens que des finalités dernières. Le premier mondialisme demeure le plus connu puisqu’il regroupe les cénacles de l’hyper-classe oligarchique planétaire et domine les médiats, la finance, la politique et les grands groupes transnationaux. Ces mondialistes-là se retrouvent régulièrement lors des réunions à Davos,  de la Commission Bilderberg ou de la Trilatérale, etc. Ces chantres de la mondialisation globale ne revendiquent pas publiquement, sauf exceptions notables, un État mondial. Ils préfèrent soutenir une « communauté internationale » régie par des normes occidentales, libérales et « démocratiques de marché » (en fait ploutocratiques et oligarchiques) qui écrase le politique au profit d’un économicisme. Pour eux, la paix universelle garantit le maximum d’affaires donc de profits. Le second mondialisme, bien plus récent, apparaît à la fin des années 1990. C’est l’« altermondialisme ». Prétextant des préoccupations sociales, environnementales et sociétales, les altermondialistes imaginent une structure politique inter-continentale dans laquelle les citoyens du monde sur-connectés exprimeraient leurs avis à des dirigeants révocables sur le champ grâce à la grande Toile numérique mondiale. Si les altermondialistes mènent souvent des combats sympathiques et nécessaires, leur dessein final d’évacuation définitive du politique et du conflit les dessert, d’où l’amenuisement perceptible depuis cinq – six ans de leur activisme.

 

Ces deux versions mondialistes ne cachent pas leur objectif ultime, ce qui explique probablement la méfiance immédiate des peuples. Suite à cette défiance véritable, tel un organisme confronté à un problème de survie, l’idéologie mondialiste a commencé une entreprise de diversification morphologique, à un travestissement des idées, voire à une infiltration, avec le secret espoir de favoriser une large confusion. Le phénomène est particulièrement notable avec le régionalisme.

 

En Bolivie, l’élection en 2006 de l’Amérindien révolutionnaire Evo Morales à la présidence de la République stimula le séparatisme de cinq départements amazoniens du pays. Il fallut toute l’autorité présidentielle d’Evo Morales pour éteindre ces velléités centrifuges. Ces séparatistes, souvent d’origine créole, proche des riches propriétaires des latifundia et financés par les États-Unis, défendaient-ils une culture particulière, une autonomie linguistique ou une spécificité historique ? Nullement ! Leurs motivations premières étaient la défense de leur fortune agrarienne et leur refus d’obéir à un président à la peau cuivrée. Il est intéressant de relever que certains de ces indépendantistes rêvaient que leur hypothétique État adhérât à l’A.L.E.N.A. …

 

On retrouve cet exemple de « régional-mondialisme » d’une manière moins nette, plus diffuse, en Europe de l’Ouest. probable grand vainqueur aux élections législatives, régionales et communautaires l’année prochaine en Belgique, la Nouvelle Alliance flamande de Bart De Wever doit être désignée comme une formation « nationale-centriste ». Si son seul député européen siège dans le groupe commun des Verts – A.L.E. (Alliance libre européenne – régionaliste), son meneur principal et actuel maire d’Anvers ne cache pas son admiration pour le libéral-conservateur anglais Edmund Burke. Se focalisant sur la question linguistique qui exclut les minorités francophones albo-européennes et qui accepte des populations étrangères non européennes néerlandophones, la N.V.A. soutient un regrettable point de vue assimilationniste et réducteur.

 

En Catalogne, l’année 2014 risque d’être décisive puisque le gouvernement autonome catalan démocrate-chrétien, encouragé par l’extrême gauche républicaine indépendantiste, prévoit un référendum d’auto-détermination par avance rejeté par le gouvernement conservateur de Madrid. Le chef de la Généralité catalane, Artùr Mas, développe une démagogie intense en faveur de l’indépendance alors que la région très autonome croule sous un endettement public faramineux. Indépendante, la Catalogne deviendrait une proie facile pour les jeunes requins friqués d’Asie et du Moyen-Orient. Comme pour les Flamands d’ailleurs, les indépendantistes catalans rêvent d’adhérer à l’Union européenne et de se maintenir dans l’Alliance Atlantique.

 

Le phénomène est plus frappante en Écosse. En 2014 se tiendra un référendum sur l’indépendance validé par le Premier ministre conservateur britannique, David Cameron, et son homologue écossais, Alex Salmond, chef du S.N.P. (Parti nationaliste écossais) indépendantiste d’orientation sociale-démocrate. Dans le cas d’une Écosse libérée d e la tutelle londonienne, le nouvel État serait toujours une monarchie parlementaire avec pour reine Elisabeth II et ses successeurs. Quant à la monnaie, ce serait soit l’euro, soit la livre sterling.

 

Il faut oublier les belles images du film de Mel Gibson Braveheart. Hormis une minorité indépendantiste identitaire réunie au sein d’un Front national écossais (1), les indépendantistes écossais – en tout cas leurs responsables – communient eux aussi dans le « multiculturalisme ». Dans la perspective de la consultation référendaire, le S.N.P. dispose du soutien de la communauté pakistanaise. D’ailleurs, le ministre écossais des Affaires étrangères et du Développement internationale, Humza Yousaf, est un Pakistano-Kényan. Alex Salmond déclare ainsi que « nous avons une identité attrayante, d’autant plus que nous ne mettons pas en avant un caractère exclusif. Les gens ont droit à la diversité et l’écossité en fera partie à coup sûr (2) ».

 

À quoi bon dès lors une Écosse indépendante si la population n’est plus écossaise à moyen terme ? Un néo-mondialisme investit donc le champ régional sans trop de difficultés d’autant que maints régionalistes récusent toute connotation identitaire.

 

Ce néo-mondialisme s’invite même chez les souverainistes anti-européens du Vieux Continent. Le cas du Parti pour la liberté (P.V.V.) néerlandais de Geert Wilders reste le plus exemplaire. Ce parti néo-conservateur et libéral défend les droits de la minorité homosexuelle face à l’affirmation d’un islam rigoriste assumé. Dans une logique de confrontation entre l’Occident, perçu comme la patrie universelle des droits de l’homme, et l’Islam, considéré comme une civilisation arriérée, le P.V.V. s’aligne sur des positions atlantistes et sionistes avec la secrète espérance de ne pas être diabolisé par les médiats. Cette démarche similaire se retrouve en Allemagne où règne depuis 1945 une incroyable terreur mémorielle. Des formations d’audience régionale comme Pro Köln (Pour Cologne) ou Pro N.R.W. (Pour la Rhénanie du Nord – Westphalie) tiennent un discours anti-musulman grossier qui confond Al-Qaïda et le Hezbollah libanais. On devine une argumentation néo-conservatrice et atlantiste du choc des civilisations…

 

En France, le néo-mondialisme ne parie pas encore sur le F.N. dédiabolisé de Marine Le Pen. Outre le Front de Gauche de Jean-Luc Mélenchon, il encourage plutôt l’ancien Young Leader de la French American Foundation, Nicolas Dupont-Aignan de Debout la République. Comme d’ailleurs Mélenchon, le député-maire d’Yerre suggère comme alternative au projet européen une union méditerranéen France – Afrique du Nord ! Remarquons aussi qu’il envisagea de coopérer avec le F.N. à la condition que celui-ci abandonne son positionnement identitaire. Or c’est précisément ce choix fondamental qui permet au part frontiste d’être la troisième force politique de l’Hexagone.

 

Le néo-mondialisme a enfin pris le visage du populisme en Italie avec Beppe Grillo et son Mouvement Cinq Étoiles. L’extraordinaire succès de cette force « anti-politique » aux législatives anticipées de février 2013 a mis en lumière le rôle de gourou de Gianroberto Casaleggio. Ce riche patron d’une entreprise d’informatique rêve d’un État mondial numérisé d’influence New AgeGaïa – dans lequel seraient proscrites les religions et les idéologies (3). Par certains égards, on peut considérer que Casaleggio représente le versant populiste d’un néo-mondialisme comme Wilders en incarne le versant néo-conservateur atlantiste. Dernièrement, Nigel Farage a considéré comme « épouvantable » une campagne du ministère britannique de l’Intérieur destinée à dégoûter les immigrés illégaux de venir en Grande-Bretagne (4). Farage précise même qu’il trouve cette opération publicitaire « très “ Big Brother ” […], très Allemagne de l’Est dans les années 1980, une horrible façon de lutter contre l’immigration (5) ».

 

Il est intéressant de remarquer que ces partis dits « populistes » et « eurosceptiques » mésestiment, minorent ou ignorent délibérément – peut-être pour satisfaire le politiquement correct des gras médiats – la thématique identitaire. L’U.K.I.P. dénonce plus la présence de Polonais ou de Grecs que l’immigration venue du Commonwealth. Quant aux critiques du P.V.V., elles se focalisent sur l’islam et non sur l’immigration (6). Finalement, au jeu des comparaisons, l’Aube dorée grecque et le Jobbik hongrois témoignent d’un sens plus développé de l’identité ancestrale autochtone, ce qui par ces temps troublés n’est pas négligeable.

 

Georges Feltin-Tracol

 

Notes

 

1 : Cette formation est évoquée par l’excellent blogue de Lionel Baland, le 21 juin 2013 : http://lionelbaland.hautetfort.com/

 

2 : dans The Observer cité par Courrier International du 18 au 24 juillet 2013.

 

3 : Lire l’excellente analyse de Patrick Parment, « Le présent italien annonce-t-il le futur italien ? », Synthèse nationale, n° 31, mars – avril 2013.

 

4 : Julien Laurens, « Shocking, la pub anti-clandestins ! », Aujourd’hui en France, 1er août 2013.

 

5 : dans Le Nouvel Observateur, 29 août 2013.

 

6 : À la décharge de l’U.K.I.P. et du P.V.V., reconnaissons-leur qu’ils viennent de s’opposer officiellement – et avec raison – à toute intervention militaire occidentale en Syrie. Ils rejoignent de ce fait le B.N.P., l’Aube dorée, le F.N. et les Republikaner allemands.

 


 

Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

 

URL to article: http://www.europemaxima.com/?p=3301

Esprits insoumis

"Il faut être indulgent à ceux qui, au lieu de profiter paisiblement des grandes routes toutes tracées et foulées par les générations précédentes et par les aînés, s’en écartent pour chercher une autre voie. Ils ont au moins de l’audace et du courage, vertus essentielles aux conquérants, si modestes soient-ils. Ils ne sont pas tous des triomphateurs mais il ne faut pas sourire devant le sentier, si petit soit-il, que quelques-uns parmi eux frayent dans n’importe quel domaine, parce qu’il y aura toujours des esprits insoumis qui préféreront aux belles routes battues les sentiers pittoresques et incertains, et aussi parce que des sentiers tracés peuvent devenir, grâce à ceux qui suivront et qu’ils auront tentés, de larges avenues."


Valentine de Saint-Point

Ex: http://zentropaville.tumblr.com

David Graeber: Bullshit Jobs

David Graeber: Bullshit Jobs

Ex: http://robertgraham.wordpress.com

Here is a piece by David Graeber from the online Strike magazine, which even elicited a rebuttal from that venerable organ of capitalist propaganda, The Economist. The loss of meaningful, productive work is something that both Paul Goodman and Noam Chomsky have often commented on. I included pieces by Goodman and Chomsky in Volume Two of Anarchism: A Documentary History of Libertarian Ideas and by Chomsky and Graeber in Volume Three: The New Anarchism (1974-2012).

On the Phenomenon of Bullshit Jobs

In the year 1930, John Maynard Keynes predicted that, by century’s end, technology would have advanced sufficiently that countries like Great Britain or the United States would have achieved a 15-hour work week. There’s every reason to believe he was right. In technological terms, we are quite capable of this. And yet it didn’t happen. Instead, technology has been marshaled, if anything, to figure out ways to make us all work more. In order to achieve this, jobs have had to be created that are, effectively, pointless. Huge swathes of people, in Europe and North America in particular, spend their entire working lives performing tasks they secretly believe do not really need to be performed. The moral and spiritual damage that comes from this situation is profound. It is a scar across our collective soul. Yet virtually no one talks about it.

Why did Keynes’ promised utopia – still being eagerly awaited in the ‘60s – never materialize? The standard line today is that he didn’t figure in the massive increase in consumerism. Given the choice between less hours and more toys and pleasures, we’ve collectively chosen the latter. This presents a nice morality tale, but even a moment’s reflection shows it can’t really be true. Yes, we have witnessed the creation of an endless variety of new jobs and industries since the ‘20s, but very few have anything to do with the production and distribution of sushi, iPhones, or fancy sneakers.

So what are these new jobs, precisely? A recent report comparing employment in the US between 1910 and 2000 gives us a clear picture (and I note, one pretty much exactly echoed in the UK). Over the course of the last century, the number of workers employed as domestic servants, in industry, and in the farm sector has collapsed dramatically. At the same time, “professional, managerial, clerical, sales, and service workers” tripled, growing “from one-quarter to three-quarters of total employment.” In other words, productive jobs have, just as predicted, been largely automated away (even if you count industrial workers globally, including the toiling masses in India and China, such workers are still not nearly so large a percentage of the world population as they used to be).

But rather than allowing a massive reduction of working hours to free the world’s population to pursue their own projects, pleasures, visions, and ideas, we have seen the ballooning not even so much of the “service” sector as of the administrative sector, up to and including the creation of whole new industries like financial services or telemarketing, or the unprecedented expansion of sectors like corporate law, academic and health administration, human resources, and public relations. And these numbers do not even reflect on all those people whose job is to provide administrative, technical, or security support for these industries, or for that matter the whole host of ancillary industries (dog-washers, all-night pizza deliverymen) that only exist because everyone else is spending so much of their time working in all the other ones.

These are what I propose to call “bullshit jobs.”

It’s as if someone were out there making up pointless jobs just for the sake of keeping us all working. And here, precisely, lies the mystery. In capitalism, this is precisely what is not supposed to happen. Sure, in the old inefficient socialist states like the Soviet Union, where employment was considered both a right and a sacred duty, the system made up as many jobs as they had to (this is why in Soviet department stores it took three clerks to sell a piece of meat). But, of course, this is the sort of very problem market competition is supposed to fix. According to economic theory, at least, the last thing a profit-seeking firm is going to do is shell out money to workers they don’t really need to employ. Still, somehow, it happens.

While corporations may engage in ruthless downsizing, the layoffs and speed-ups invariably fall on that class of people who are actually making, moving, fixing and maintaining things; through some strange alchemy no one can quite explain, the number of salaried paper-pushers ultimately seems to expand, and more and more employees find themselves, not unlike Soviet workers actually, working 40 or even 50 hour weeks on paper, but effectively working 15 hours just as Keynes predicted, since the rest of their time is spent organizing or attending motivational seminars, updating their facebook profiles or downloading TV box-sets.

The answer clearly isn’t economic: it’s moral and political. The ruling class has figured out that a happy and productive population with free time on their hands is a mortal danger (think of what started to happen when this even began to be approximated in the ‘60s). And, on the other hand, the feeling that work is a moral value in itself, and that anyone not willing to submit themselves to some kind of intense work discipline for most of their waking hours deserves nothing, is extraordinarily convenient for them.

Once, when contemplating the apparently endless growth of administrative responsibilities in British academic departments, I came up with one possible vision of hell. Hell is a collection of individuals who are spending the bulk of their time working on a task they don’t like and are not especially good at. Say they were hired because they were excellent cabinet-makers, and then discover they are expected to spend a great deal of their time frying fish. Neither does the task really need to be done – at least, there’s only a very limited number of fish that need to be fried. Yet somehow, they all become so obsessed with resentment at the thought that some of their co-workers might be spending more time making cabinets, and not doing their fair share of the fish-frying responsibilities, that before long there’s endless piles of useless badly cooked fish piling up all over the workshop and it’s all that anyone really does.

I think this is actually a pretty accurate description of the moral dynamics of our own economy.

Now, I realise any such argument is going to run into immediate objections: “who are you to say what jobs are really ‘necessary’? What’s necessary anyway? You’re an anthropology professor, what’s the ‘need’ for that?” (And indeed a lot of tabloid readers would take the existence of my job as the very definition of wasteful social expenditure.) And on one level, this is obviously true. There can be no objective measure of social value.

I would not presume to tell someone who is convinced they are making a meaningful contribution to the world that, really, they are not. But what about those people who are themselves convinced their jobs are meaningless? Not long ago I got back in touch with a school friend who I hadn’t seen since I was 12. I was amazed to discover that in the interim, he had become first a poet, then the front man in an indie rock band. I’d heard some of his songs on the radio having no idea the singer was someone I actually knew. He was obviously brilliant, innovative, and his work had unquestionably brightened and improved the lives of people all over the world. Yet, after a couple of unsuccessful albums, he’d lost his contract, and plagued with debts and a newborn daughter, ended up, as he put it, “taking the default choice of so many directionless folk: law school.” Now he’s a corporate lawyer working in a prominent New York firm. He was the first to admit that his job was utterly meaningless, contributed nothing to the world, and, in his own estimation, should not really exist.

There’s a lot of questions one could ask here, starting with, what does it say about our society that it seems to generate an extremely limited demand for talented poet-musicians, but an apparently infinite demand for specialists in corporate law? (Answer: if 1% of the population controls most of the disposable wealth, what we call “the market” reflects what they think is useful or important, not anybody else.) But even more, it shows that most people in these jobs are ultimately aware of it. In fact, I’m not sure I’ve ever met a corporate lawyer who didn’t think their job was bullshit. The same goes for almost all the new industries outlined above. There is a whole class of salaried professionals that, should you meet them at parties and admit that you do something that might be considered interesting (an anthropologist, for example), will want to avoid even discussing their line of work entirely. Give them a few drinks, and they will launch into tirades about how pointless and stupid their job really is.

This is a profound psychological violence here. How can one even begin to speak of dignity in labour when one secretly feels one’s job should not exist? How can it not create a sense of deep rage and resentment. Yet it is the peculiar genius of our society that its rulers have figured out a way, as in the case of the fish-fryers, to ensure that rage is directed precisely against those who actually do get to do meaningful work. For instance: in our society, there seems a general rule that, the more obviously one’s work benefits other people, the less one is likely to be paid for it. Again, an objective measure is hard to find, but one easy way to get a sense is to ask: what would happen were this entire class of people to simply disappear? Say what you like about nurses, garbage collectors, or mechanics, it’s obvious that were they to vanish in a puff of smoke, the results would be immediate and catastrophic. A world without teachers or dock-workers would soon be in trouble, and even one without science fiction writers or ska musicians would clearly be a lesser place. It’s not entirely clear how humanity would suffer were all private equity CEOs, lobbyists, PR researchers, actuaries, telemarketers, bailiffs or legal consultants to similarly vanish. (Many suspect it might markedly improve.) Yet apart from a handful of well-touted exceptions (doctors), the rule holds surprisingly well.

Even more perverse, there seems to be a broad sense that this is the way things should be. This is one of the secret strengths of right-wing populism. You can see it when tabloids whip up resentment against tube workers for paralyzing London during contract disputes: the very fact that tube workers can paralyze London shows that their work is actually necessary, but this seems to be precisely what annoys people. It’s even clearer in the US, where Republicans have had remarkable success mobilizing resentment against school teachers, or auto workers (and not, significantly, against the school administrators or auto industry managers who actually cause the problems) for their supposedly bloated wages and benefits. It’s as if they are being told “but you get to teach children! Or make cars! You get to have real jobs! And on top of that you have the nerve to also expect middle-class pensions and health care?”

If someone had designed a work regime perfectly suited to maintaining the power of finance capital, it’s hard to see how they could have done a better job. Real, productive workers are relentlessly squeezed and exploited. The remainder are divided between a terrorized stratum of the, universally reviled, unemployed and a larger stratum who are basically paid to do nothing, in positions designed to make them identify with the perspectives and sensibilities of the ruling class (managers, administrators, etc) – and particularly its financial avatars – but, at the same time, foster a simmering resentment against anyone whose work has clear and undeniable social value. Clearly, the system was never consciously designed. It emerged from almost a century of trial and error. But it is the only explanation for why, despite our technological capacities, we are not all working 3-4 hour days.

David Graeber

Vers une société de «jobs à la con» ?

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Vers une société de «jobs à la con» ?

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Le pamphlet d’un anthropologue américain dénonçant la bureaucratisation de l’économie et la multiplication des emplois inutiles, baptisés «bullshit jobs», a lancé une polémique.

Avez vous un «job à la con» ? Si vous avez le temps de lire cet article devant votre ordinateur au boulot, la réponse est probablement oui. Et à en croire la viralité du pamphlet consacré aux «bullshit jobs» (en VO) signé David Graeber, anthropologue à la London School of Economics et une des figures du mouvement Occupy Wall Street, vous n’êtes pas pas le seul.

 

Dans un court essai publié dans le magazine de la gauche radicale britannique Strike ! le 17 août, l’universitaire, qui n’aime pas qu’on le définisse comme anarchiste, décrit ce qu’il a baptisé le «phénomène des jobs à la con». Soit, selon lui, l’aliénation de la vaste majorité des travailleurs de bureau, amenés à dédier leur vie à des tâches inutiles et vides de sens, tout en ayant pleinement conscience de la superficialité de leur contribution à la société.

 

«Tout un tas d’emplois inutiles»


En introduction, David Graeber cite Keynes, qui, en 1930, prédisait que les avancées technologiques permettraient d’ici la fin du XXe siècle de réduire le temps de travail hebdomadaire à 15 heures par semaine. Pourtant, si la robotisation du travail a bien eu lieu dans de nombreux secteurs, «la technologie a été manipulée pour trouver des moyens de nous faire travailler plus», énonce Graeber.

«Pour y arriver, des emplois ont dû être créés et qui sont par définition, inutiles», explique-t-il, donnant en exemple «le gonflement, non seulement des industries de service, mais aussi du secteur administratif, jusqu’à la création de nouvelles industries comme les services financiers, le télémarketing, ou la croissance sans précédent de secteurs comme le droit des affaires, les administrations, ressources humaines ou encore relations publiques».

Et Graeber de conclure : «C’est comme si quelqu’un inventait tout un tas d’emplois inutiles pour continuer à nous faire travailler.»

Comment définir un emploi inutile ? Provocateur, Graeber propose la méthode empirique suivante : imaginer ce que serait le monde sans «les jobs à la con». «Dites ce que vous voulez à propos des infirmières, éboueurs ou mécaniciens, mais si ils venaient à disparaître dans un nuage de fumée, les conséquences seraient immédiates et catastrophiques, écrit-il.

Un monde sans profs ou dockers serait bien vite en difficulté, et même un monde sans auteur de science-fiction ou musicien de ska serait clairement un monde moins intéressant. En revanche, il n’est pas sûr que le monde souffrirait de la disparition des directeurs généraux d’entreprises, lobbyistes, chercheurs en relation presse, télémarketeurs, huissiers de justice ou consultants légaux. Beaucoup soupçonnent même que la vie s’améliorerait grandement.»

Tâches absconses

Dans le monde occidental, «les métiers productifs ont été automatisés» poursuit-il, alors qu’aux États-Unis et au Royaume-Uni, en un siècle, «les emplois en tant que professionnels, clercs, managers, vendeurs et employés de l’industrie de service ont triplé, passant de un quart à trois quarts des employés totaux». L’anthropologue remarque par ailleurs l’existence d’un corollaire paradoxal : plus un travail est utile à la société et moins il est payé.

Et bien souvent déconsidéré, même si Graeber reconnaît quelques exceptions, comme les médecins. Pendant ce temps-là, un nombre toujours plus important de «gratte-papiers» travaillent entre 40 et 50 heures par semaine à des tâches absconses, qu’ils accomplissent souvent dans les 15 heures prédites par Keynes, passant «le reste de leur temps à organiser ou aller à des séminaires de motivation, mettre à jour leur profil Facebook ou télécharger des séries télévisées».

L’auteur conclut que le néolibéralisme en est paradoxalement arrivé au même point que les systèmes soviétiques de la deuxième moitié du XXe siècle, c’est à dire à employer un très grand nombre de personnes à ne rien faire. Une aberration à l’encontre des principes même du capitalisme, et d’autant plus incompréhensible compte tenu de l’important nombre de chômeurs dans les pays industrialisés.

The Economist, journal libéral par définition, n’a pas attendu pour répondre à Graeber à travers une note de blog. Le magazine y défend les emplois administratifs et managériaux en mettant en avant la nature «progressivement complexifiée» de l’économie mondiale moderne.

«Les biens qui sont produits sont plus complexes, la chaîne de fabrication utilisée pour les produire est plus complexe, le système qui consiste à les marketer, les vendre et les distribuer est plus complexe, les moyens de financement de tout ce système sont plus complexes, et ainsi de suite. Cette complexité est ce qui fait notre richesse. Mais c’est extrêmement douloureux à manager.»

Modes de vie anxiogènes, ultra-contrôlés et aseptisés

Sur Slate.fr, le journaliste Jean-Laurent Cassely pousse l’analyse de Graeber un peu plus loin, énumérant les symptômes des «bullshit jobs» dans la société, du «syndrome de la chambre d’hôte» à ses infinies représentations dans la pop culture, du film Fight Club à la série télé The Office, en passant par l’œuvre de Michel Houellebecq. Il cite aussi la politologue Béatrice Hibou, directrice de recherche au CNRS et auteur de La bureaucratisation du monde à l’ère néolibérale (Éditions La Découverte).

Selon elle, l’émergence des «jobs à la con» va de pair avec les modes de vie anxiogènes, ultra-contrôlés et aseptisés, adoptés par le monde occidental. «Contrairement à une vision un peu critique de gauche qui dit que c’est de la faute du grand capital, en fait, nous sommes tous bureaucrates. Parce qu’au nom de la sécurité, du principe de précaution, de la facilité de la vie, on promeut cette extension de l’usage de la norme.»

Une chose est sûre : le succès de l’article de David Graeber, partagé frénétiquement sur les réseaux sociaux bien au-delà du cercle des universitaires ou des anarchistes et spontanément traduit dans de multiples langues par des blogueurs enthousiastes, témoigne ainsi de la validité d’une partie de sa théorie. Les ronds-de-cuir ont décidément beaucoup de temps libre devant leur ordinateur de bureau…

Libération

00:05 Publié dans Actualité, Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sociologie, bullshit jobs, jobs à la con | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook