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mardi, 07 mai 2019

Le droit, arme de guerre des Etats-Unis...

 

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Le droit, arme de guerre des Etats-Unis...

Entretien avec Ali Laïdi
Ex: http://www.metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Ali Laïdi au Figaro Vox à l'occasion de la sortie de son essai Le droit, nouvelle arme de guerre économique (Acte Sud, 2019). Docteur en science politique, Ali Laïdi est chroniqueur à France24, où il est responsable du "Journal de l'Intelligence économique". Il est également chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). et enseigne à Sciences Po Paris. Il a déjà publié une Histoire mondiale de la guerre économique (Perrin, 2016).

Comment le droit est devenu l’arme favorite des États-Unis pour s’accaparer nos entreprises

FIGAROVOX.- Comment résumer en quelques lignes l’usage du droit en tant qu’arme de guerre économique? Comment définir l’extra-territorialité du droit américain?

Ali LAIDI.- Les juristes distinguent deux types d’extraterritorialité, notamment à travers la question des sanctions. Il y a d’abord les sanctions primaires, appliquées lorsque l’État américain décide d’interdire à ses sociétés et à tout ce qu’il considère comme étant des «US persons» d’avoir des relations commerciales avec certaines entités, généralement un État. Or dans ce cas précis, selon les juristes, nous ne serions pas dans un cas d’extraterritorialité puisque cette sanction primaire ne s’applique qu’aux US persons. Cependant, la définition de l’US persons aux États-Unis est tellement large qu’une filiale d’entreprise étrangère peut être comprise comme US person et donc tomber sous le coup des sanctions primaires.

Il y a ensuite les sanctions secondaires, qui s’appliquent à tout le monde, toutes les entreprises, qu’elles soient américaines ou étrangères. Dans ce cas-là, certains juristes acceptent de reconnaître qu’il y a une forme d’extraterritorialité.

Mais, pour les géopolitologues, il est évident que l’extraterritorialité se situe à la fois dans les sanctions primaires et secondaires et il est très intéressant d’en étudier les effets, notamment en ce qui concerne les affaires d’embargos ou de lutte contre la corruption, car dans ces domaines-là, le lien avec le territoire américain est beaucoup plus ténu. En effet, dans la plupart des cas recensés depuis un certain nombre d’années, les cas de corruption ont lieu en dehors du territoire américain. Mais un lien peut être établi dès lors que vous allez utiliser le dollar, ou par exemple si vous avez utilisé un compte Gmail dont le serveur se situe en partie aux États-Unis. La définition de la compétence du droit américain sur les faits de corruption à l’étranger est donc extrêmement large, même si elle ne touche pas directement le territoire américain.

Pouvez-vous revenir sur l’affaire Alstom?

C’est en 2010 que les Américains sonnent l’alerte et que le Département de la Justice des États-Unis ouvre une procédure contre le Français Alstom. Des années que la société pratique la corruption, enchaîne les condamnations, pourtant rien ne change. En 2004 et 2008, les justices mexicaine et italienne condamnent Alstom à plusieurs milliers de dollars et à une exclusion pour quelques années des marchés publics pour corruption de fonctionnaires. En 2011, la justice suisse épingle le Français pour corruption et trafic d’influence en Tunisie, Lettonie et Malaisie et condamne Alstom à une amende de plus de 40 millions d’euros. Prévenants, les Suisses qui savent que la justice américaine s’intéresse également à Alstom, lui envoient l’ensemble des pièces de cette affaire. Lesquelles alourdissent le dossier ouvert par Washington.

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Autant dire que les Américains ne manquent pas d’éléments pour aller chercher querelle à Alstom et exiger que l’entreprise lance une enquête interne. Ils passent à l’attaque en 2013 et interpellent un cadre d’Alstom, Frédéric Pierucci, vice-président d’Alstom Chaudière. La rumeur dit même que Patrick Kron est menacé d’un emprisonnement s’il met les pieds aux États-Unis. Pendant que Frédéric Pierucci croupit sous les verrous, Patrick Kron négocie dans le plus grand secret la vente de la branche énergie (Alstom Power) de son entreprise à l’américain General Electric. Malgré la résistance d’Arnaud Montebourg, alors ministre de l’économie, au plus haut niveau de l’État, la messe est déjà dite. On a lâché Alstom.

Le 19 décembre, lors de l’Assemblée générale d’Alstom, le dépeçage d’Alstom est acté. Dans les trois co-entreprises Energie créé dans le plan, General Electric est majoritaire. Les Américains y pilotent les deux directions les plus stratégiques: les directions financières et opérationnelles. Les Français sont cantonnés à la technologie. C’en est fini de l’indépendance atomique française chère au Général De Gaulle. La fabrication des turbines, élément indispensable au fonctionnement de nos centrales nucléaires, passe sous pavillon américain.

Quelles sont les réactions des États visés par ce genre de pratiques? Comment a réagi la France, par exemple, à l’affaire Alstom?

Les Européens ne bougent pas. Angela Merkel reconnaît la légitimité des États-Unis à épingler les entreprises étrangères soupçonnées de corruption. En 2015, des députés français enquêtent sur l’extraterritorialité de la législation américaine mais le rapport n’aboutit à aucune décision politique forte. J’ai beaucoup travaillé sur la réponse de la France en particulier et de l’Europe en général, et le bilan c’est qu’il n’y en a pas. Les Européens sont tétanisés par rapport à ce problème-là, et ils ne savent pas quoi faire. Le plus extraordinaire, c’est qu’ils se plaignent même de ne pas avoir été préparés, alors même que l’une des premières manifestations de l’extraterritorialité date de 1982, lorsque le président Reagan a voulu interdire aux filiales des entreprises américaines de participer à la construction d’un gazoduc entre l’URSS et l’Europe. À cette époque, Margaret Thatcher s’était fermement opposée à la position américaine de vouloir imposer des sanctions aux filiales américaines, ce qui avait fait reculer Ronald Reagan.

C’était donc déjà un signe de la volonté des Américains de s’immiscer dans les relations commerciales et l’autonomie économique de l’Europe. En 1996, il y a eu un second signal avec la loi fédérale Helms-Burton, qui renforçait l’embargo contre Cuba, et la loi d’Amato-Kennedy, qui visait à sanctionner les États soutenant le terrorisme international et qui donnait la possibilité à Washington de punir les investissements - américains ou non - dans le secteur énergétique en Iran ou en Libye. Toute cette expérience n’a donc servi à rien, comme l’illustre tout ce qui se passe aujourd’hui avec le cas iranien. On a l’impression que l’Union européenne repart à zéro, qu’elle n’a pas enrichie sa réflexion sur le sujet.

J’explique cela par le fait que tant qu’il n’y aura pas un cadre général de pensée stratégique économique en Europe, à chaque fois les fonctionnaires de Bruxelles se trouveront dépouillés, car ils ne savent pas comment réagir. En effet, le concept de guerre économique est un concept complètement balayé à Bruxelles où l’on n’a jamais accepté de réfléchir sur la question. L’Europe, c’est la paix, et la puissance est un gros mot à Bruxelles.

L’Union européenne n’est donc pas en mesure de répondre à ces menaces?

En 1996, il y a eu une occasion formidable de réagir face aux lois Helms-Burton et Amato-Kennedy, lorsque les Européens ont décidé d’établir un règlement pour protéger les entreprises européennes. L’Union européenne avait déposé plainte à l’OMC, mais malheureusement elle l’a retirée. Les Européens ont trouvé un accord avec les Américains, et ce fut là l’erreur stratégique. Cet accord reposait alors essentiellement sur la bonne volonté du président Clinton, et sur celle du Congrès qui, éventuellement, n’appliquerait pas forcément les dispositions des lois qui posaient problème. Selon moi, à l’époque il aurait vraiment fallu traiter le problème à la racine et laisser la plainte déposée à l’OMC aller jusqu’au bout. Cela aurait permis de montrer que les Européens n’accepteraient pas ce type de diktat économique.

On mesure aujourd’hui le prix de cette erreur politique des Européens. Le président Trump n’étant pas tenu par la promesse de ses prédécesseurs a décidé très récemment d’appliquer le titre III de la loi Helms-Burton qui autorise les poursuites des entreprises étrangères devant les tribunaux américains. Faut-il déposer une nouvelle plainte à l’OMC? Aujourd’hui, une telle action semble inenvisageable tant les Européens craignent de donner une occasion à Donald Trump de quitter l’OMC. Bruxelles et Paris sont donc systématiquement sur la défensive, ne trouve pas de solutions, et toutes les entreprises européennes ont aujourd’hui quitté l’Iran et peut-être Cuba dans les prochains mois. Et ce n’est pas la plateforme financière de troc promise par Paris, Londres et Berlin pour assurer des relations commerciales avec Téhéran qui va radicalement modifier le rapport de force avec les Américains. L’ambition européenne se limite aux échanges dans les secteurs de l’alimentation et des médicaments. Ce n’est pas cela qui fera revenir Total, Peugeot ou Renault…De plus, les Américains comptent tout faire pour l’empêcher de fonctionner.

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Vous expliquez qu’Airbus sera la prochaine cible de l’extraterritorialité du droit américain...

Depuis le printemps 2016, Airbus Group traverse une zone de turbulence juridique. Thomas Enders, alors PDG de l’avionneur européen (remplacé par Guillaume Fleury) a décidé d’ouvrir le parapluie en se confessant de son propre chef à l’agence britannique de crédit à l’exportation (UK Export Finance, UKEF): son entreprise a oublié de mentionner certains intermédiaires dans plusieurs contrats à l’export. Depuis, les Britanniques et les Français via le Parquet national financier, enquêtent. Thomas Enders pensait couper l’herbe sous le pied des Américains. Mais en décembre dernier, on a appris que Washington avait placé Airbus sous enquête. Il est clair qu’une épée de Damoclès est placée au-dessus de l’avionneur européen. Avec la présence des Américains dans la procédure, la facture risque d’être salée, forcément de plusieurs milliards d’euros.

Les États-Unis sont-ils le seul pays à mettre en œuvre l’extra-territorialité de leur droit? Vous expliquez que c’est beaucoup grâce à leurs services secrets…

Les Américains sont en effet le seul pays à manier leurs lois extraterritoriales de manière aussi intrusive et agressive. Et visiblement cela marche quand vous constatez qu’ils peuvent frapper des entreprises russes et même chinoises (ZTE et Huawai). Les Européens répondent qu’ils possèdent aussi une législation extraterritoriale à travers le Règlement général de protection des données (RGPD) censé contraindre les entreprises du monde entier à protéger nos données personnelles. Mais la loi américaine qu’on appelle le Cloud Act voté en août dernier permet à n’importe quelle autorité de poursuite américaine d’exiger l’accès à nos données quand bien celles-ci sont hébergées en Europe par un Gafa. Les États-Unis sont extrêmement agressifs car, vous avez raison de le noter, ces lois leur permettent de récupérer des millions d’informations économiques qui vont nourrir les bases de données de leurs services de renseignement. Et servir à la protection de leurs intérêts économiques et commerciaux. Il va falloir surveiller la réponse chinoise. Souvent Pékin applique la réciprocité. Il faudra voir comment les Chinois se comportent notamment sur les marchés de la route de la Soie. Ce n’est pas un hasard si les Chinois ont été les premiers à traduire mon livre.

Ces pratiques deviendront-elles systématiques? Ou bien les États-Unis seront-ils contraints de les abandonner?

Elles commencent à poser des problèmes aux Américains. Diplomatiques d’abord. Les relations avec leurs alliés se tendent de plus en plus. Vont-ils finir par se révolter ou accepter un statut plus proche de vassal que d’allié? Vont-ils utiliser les mêmes armes, et dans ce cas, cette affaire pourrait très mal finir... Ou alors se détacher du dollar au profit de l’euro et du yuan? Problèmes sécuritaires ensuite. Les organisations criminelles et terroristes ainsi que les États qualifiés de «voyous» par Washington s’adaptent à la nouvelle situation. Ils trouvent les parades pour parer aux coups de l’Amérique. Le problème, c’est que les lois extraterritoriales américaines sont trop efficaces. Résultat: les entreprises occidentales n’osent plus bouger le moindre petit doigt et désertent certains marchés risqués. Ce qui affaiblit la surveillance américaine, les autorités manquant de sources pour faire remonter les bonnes informations. Du coup, remarquent les spécialistes américains de la sécurité, les outils de surveillance et de contrôle commencent à diminuer. Les entreprises et les acteurs moins dociles, plus opaques, s’en réjouissent.

Ali Laïdi, propos recueillis par Etienne Campion (Figaro Vox, 3 mai 2019)

dimanche, 05 mai 2019

La chimère du monde unipolaire

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La chimère du monde unipolaire

par V.A. Michurin

Les jugements concernant l’idée selon laquelle nous vivons dans un monde unipolaire peuvent être entendus partout. Les « patriotes » en parlent avec une voix enrouée par la peur et avec un regard de condamnation, les « cosmopolites pro-occidentaux » avec une attitude nettement élogieuse et une tape indulgente sur le bras de l’interlocuteur, les « pragmatiques » lèvent les bras : c’est la réalité, disent-ils. A première vue, de fait, tous les faits confirment cette thèse : après la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis sont devenus le leader évident de tout le monde non-communiste, et après le grand effondrement du « système socialiste mondial » et de l’URSS, et aussi l’affaiblissement de l’héritière de la Russie – la Fédération Russe – au rang d’une puissance plus faible, tributaire des pays occidentaux, les Etats-Unis ont presque automatiquement acquis le rôle de leader mondial. Ils ne veulent pas être évincés de ce rôle, et ils le clament de toutes les manières possibles. Le monde unipolaire est-il donc, réellement, la « Fin de l’Histoire » ? Ou peut-il s’agir d’une illusion qui s’est enracinée dans la conscience de masse ?  Ou un paradoxe historique a-t-il réellement surgi ?

lev-gumilev_1-t.jpgEssayons de donner la réponse, en partant de la théorie de l’ethnogenèse de L.N. Gumiliev [1]. Cette théorie, avant tout, permet d’échapper à ce que Gumiliev lui-même a appelé « l’aberration de la proximité », lorsque « face à face, la face n’est pas vue ». Chacun peut tenter l’expérience : mettez la paume de la main très près du visage – elle semblera plus grande que l’armoire de l’expérimentateur à cinq mètres de là. Si un homme ne connaît pas le concept de la perspective, il y croira toujours. Dans la vie quotidienne, l’erreur est évidente. Mais lorsqu’il s’agit de comprendre des événements modernes avec une perspective vraiment historique, sans une vision objective prenant en compte la régularité de la montée et de la chute des civilisations et des peuples, nous ne pouvons pas l’éviter.

Le problème est que pour la majorité des gens, les événements et les phénomènes modernes semblent toujours magnifiques et faisant date, alors que les anciens semblent recouverts par la poussière des siècles et ne semblent pas aussi significatifs. Il est difficile d’échapper à cette déformation émotionnelle.

Expliquons notre approche de ce thème avec un exemple concret. Toutes les branches occidentales de l’humanité sont déjà entrées jadis dans un nouveau millénaire, en considérant qu’elles étaient dans un « monde unipolaire ». C’était le début d’une nouvelle ère, quand les concepts d’« empire romain », de « monde civilisé », de « monde entier », étaient considérés comme des synonymes par la conscience collective. Cette vision était basée sur de solides fondations – Rome n’avait pas de rivaux puissants, elle gérait plus ou moins efficacement la « pax romana » qui existait alors. La conscience des premiers chrétiens était légitimement liée à une perception unipolaire du monde. Et après ? La « fin du monde » était aussi prévue, et elle survint à l’époque des « grandes invasions ». Les siècles ont passé, et à la place de la partie occidentale de l’empire romain, qui avait toujours paru éternel, un conglomérat varié d’états « barbares » apparut, dont la population ne se rappelait plus du tout l’ancienne tradition. Et maintenant, au XXe siècle, il y a même des gens qui nient en bloc qu’un empire romain ait jamais existé.

Ce que nous voulons dire est que le premier point de vue (le leadership mondial américain comme signe de la « fin de l’histoire ») ne peut absolument pas être pris au sérieux. Le concept de la « dilution du monde dans le marché intégré » sous l’égide des Etats-Unis est une nouvelle sorte de « communisme », c’est-à-dire une propagande-fantôme exigeant un acte de foi, au lieu d’une attitude consciente. Les faits de la présence d’un marché financier mondial, du dollar comme devise mondiale, et d’Internet, n’abrogent pas les lois de l’ethnogenèse, comme la cruelle réalité le démontre constamment.

Tournons-nous donc vers les faits réels.

*   *   *   *   *

Aux XVIIIe et XIXe siècles, en Amérique du Nord, à partir des descendants de colons venant de régions d’Europe à prédominance protestante – Anglais, Hollandais, Allemands, Français, Scandinaves –, une ethnie complètement nouvelle se développa, mais qui appartenait en même temps indubitablement à la civilisation occidentale. Elle sera correctement nommée WASP (White-Anglo-Saxons-Protestants) ou Yankee, pour empêcher une confusion avec le concept juridique d’Amérique. Pour les contemporains, il devint bientôt évident que les anciens habitués des salons de thé de Boston ou les Minutemen n’étaient pas simplement des insurgés contre les autorités anglaises, mais quelque chose d’essentiellement nouveau.

La nouvelle ethnie se développa à partir des représentants les plus « passionnés » des ethnies protestantes d’Europe [2]. Ces gens ne savaient pas comment utiliser leurs forces dans leur pays natal et avaient en eux suffisamment d’énergie pour traverser l’océan et s’adapter à des conditions inhabituelles et plutôt dures. On pourrait dire que la colonisation de l’Amérique du Nord et l’apparition à cet endroit d’une ethnie nouvelle en expansion vigoureuse fut la dernière manifestation sérieuse de « passionnarité » venant de la super-ethnie occidentale [3]. La « frontière », la conquête de l’Ouest Sauvage [Wild West] (c’est-à-dire un paysage complètement nouveau), représente en elle-même la dernière grande communauté de « passionnés » générée par la civilisation européenne. Après cela, au XXe siècle, l’Occident donna naissance à un grand nombre de personnalités brillantes, mais dans l’ensemble les « passionnés » restèrent des exceptions plutôt que la règle, dans les ethnies occidentales, leur proportion étant insignifiante et décroissante avec le temps.

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Les Etats-Unis créèrent un système ethnico-social assez raisonnable, basé sur la non-ingérence dans les coutumes des divers groupes de colons et sur la tolérance ethnique (c’est précisément ce système qui permet jusqu’à ce jour l’existence du conglomérat poly-ethnique nord-américain). En Amérique se précipitèrent aussi les fractions actives d’autres peuples éloignés des protestants mais capables de cohabiter avec eux dans le cadre du système américain : les Irlandais, les Polonais, les Italiens, les Juifs. Un rôle singulier fut joué dans la vie du pays par les Juifs d’Europe de l’Est, dont la « passionnarité » au XIXe siècle et au début du XXe était très élevée.

A la longue, les Etats-Unis devinrent le refuge des aventuriers du monde entier, cherchant un meilleur sort, représentants les ethnies et les civilisations les plus diverses. Certains d’entre eux devinrent de loyaux citoyens des Etats-Unis, trouvant un langage commun avec la majorité ethnique du pays. Certains se rassemblèrent dans des mafias ethniques fermées. Le poids spécifique de la fraction des ethnies plutôt éloignées du stéréotype de comportement européen s’accrut constamment dans la composition des immigrants (le pourcentage des immigrants originaires d’Asie, d’Afrique et d’Amérique Latine dans la composition de ceux qui s’établissent définitivement aux Etats-Unis est passé de 12% en 1951 à 88% en 1990 – I. Tsanenko, Social and Political Consequences of International Population Shift, MeiMO, N° 3, 1999, pp. 59-63). En conséquence, l’Amérique s’est transformée en un conglomérat de peuples, loin d’être toujours proches (complémentaires) les uns des autres –, ce qui génère des conflits ethniques sporadiques, et pas seulement cela. Gumiliev a démontré que la montée des Weltanschauungen [visions-du-monde] négatrices de la vie (anti-systémiques) est liée aux zones de contacts ethniques négatifs. Ces phénomènes, à un degré maximum, sont caractéristiques des Etats-Unis : ainsi l’apparition de sectes totalitaires complètement non-naturelles, la croissance de la violence gratuite, et le niveau croissant de criminalité.

Tous ces facteurs contiennent un énorme potentiel d’instabilité pour la société multiethnique américaine. En partant de l’hypothèse qu’à long terme les Etats-Unis seraient capables de conserver leur rôle dans le monde et un état stable de leur économie, étroitement lié à ce rôle, il est possible de formuler le pronostic suivant : la société américaine restera solide tant que l’ethnie de base (Yankees – protestants) conservera un niveau de « passionnarité » suffisant pour maintenir en ordre l’actuel système social, et tant que les groupes ethniques du pays ne seront pas contraints par une politique d’Etat à un mélange artificiel. Si l’Amérique devenait réellement un melting-pot, au lieu d’une cohabitation des ethnies, cela serait la garantie de sa ruine rapide.

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Les raisons pour lesquelles l’Amérique est devenue au XXe siècle l’incontestable leader de l’Occident sont, pour le chercheur familiarisé avec la théorie de l’ethnogenèse, aussi évidentes que le sont les raisons de la venue de l’été après le printemps pour des climatologues. Les Etats-Unis ont simplement joué le rôle d’une « pompe aspirante » absorbant les gens les plus forts et les plus entreprenants de toute l’Europe, c’est-à-dire concentrant en eux [= aux Etats-Unis] le fond génétique européen de « passionnarité ». Grâce à celui-ci, la récession générale de « passionnarité », inéluctable pour la super-ethnie occidentale, eut lieu aux Etats-Unis beaucoup plus lentement qu’en Europe.

En plus de cela, il est nécessaire de dire que la destinée historique de l’Amérique avec sa situation géographique au XXe siècle étaient simplement extrêmement favorables. Sa situation devint très favorable dès la fin de la Première Guerre mondiale. A cet égard, la promotion des Etats-Unis à un rôle dirigeant commença déjà à rencontrer un obstacle avec la « passionnarité » décroissante de leur population, composée de gens actifs, pragmatiques et respectueux des lois, ne pensant qu’à accroître leur bien-être, au lieu de penser à la mission mondiale de leur pays – c’est-à-dire des gens représentant la phase inertielle de l’ethnogenèse. Ces gens trouvaient naturelle et évidente l’idéologie de l’isolationnisme, qui peut être exprimée par ces mots : « Pourquoi nous charger d’un autre problème ? ».

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Bien que cela puisse sembler paradoxal, il est cependant possible de dire que ceux qui ouvrirent la voie au leadership mondial américain furent les Japonais, provoquant la guerre du Pacifique en attaquant Pearl Harbour en 1941. Le puissant lobby isolationniste, qui ne laissait pas l’Amérique entrer dans la guerre, fut obligé de céder. Les événements ultérieurs se développèrent selon une logique implacable. Le Japon n’avait aucune chance de gagner contre les Etats-Unis (à cause de l’énorme disparité entre les potentiels d’économie de guerre) et était entré en guerre seulement à cause d’un surplus de « passionnarité » de type oblatif, qui avait surgi massivement en résultat de la poussée de « passionnarité » qui transforma le Japon après la révolution de Meiji. Tous les jeunes officiers japonais souhaitaient périr pour l’Empereur, et le gouvernement du pays ne pouvait rien faire contre cela (il est intéressant de noter que, une fois débarrassé du surplus de « passionnarité » qui était un obstacle à la vie, le Japon réalisa d’importants succès économiques dans les années d’après-guerre. La guerre joua pour le Japon un rôle similaire à celui d’une saignée pour les hypertendus). Etant entrés en guerre, les Etats-Unis la menèrent selon leurs inclinations, représentations et possibilités, c’est-à-dire en créant – grâce à l’invulnérabilité de leur territoire face à l’ennemi – un complexe militaro-industriel d’une dimension absolument sans précédent, permettant à l’armée de conduire la guerre en usant d’une supériorité technique quantitative (et souvent aussi qualitative) écrasante.

On pense généralement que si l’Amérique n’était pas entrée en guerre, les pragmatiques Américains auraient difficilement commencé à investir dans la création d’un aussi vaste complexe militaro-industriel. Mais dès que cette branche hypertrophiée eut été créée, elle se transforma dans les années d’après-guerre en une force autonome poussant les Etats-Unis à adopter un style de comportement plus actif, plus « puissant », sur la scène mondiale.

Après la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis eurent à nouveau de la chance : ils trouvèrent un ennemi idéal – le communisme, qui leur permit de rassembler tout le monde non-communiste sous leur égide, et qui n’avait aucune chance de remporter une victoire définitive (pour beaucoup d’Américains, et aussi pour Staline, il était évident que même les espoirs les plus illusoires de « victoire mondiale du communisme » étaient morts le matin du 22 juin 1941).

Les Etats-Unis tirèrent avantage de tous les avantages de leur situation. Ils se subordonnèrent les restes de « passionnarité » de l’Europe Occidentale, épuisée par la guerre et égarée, et s’attachèrent le Japon, ils introduisirent le dollar comme équivalent monétaire mondial, remplaçant dans les faits l’or lui-même. Les succès américains se déroulaient parallèlement à un déclin constant de la « passionnarité » de la population du pays. Après avoir vaincu le Japon, trente ans plus tard les Américains perdirent au Vietnam, bien qu’ils aient utilisé la même stratégie d’usage massif d’une puissance militaro-technique écrasante. Les recrues étaient simplement d’une autre génération.

Ensuite, les Américains et leurs alliés poussèrent habilement l’URSS à sa dissolution, en stimulant le processus objectivement rapide de désintégration de son élite politique. Après août 1991, la « force des choses » elle-même, ainsi que la politique rigoureuse de leur gouvernement, avaient porté les Etats-Unis à une position dirigeante dans le monde.

Et maintenant ?

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Maintenant, nous voyons un paradoxe historique, où le leader mondial est un pays avec une population apathique, bien que travaillant dur, généralement pas intéressée par la politique étrangère (chacun sait que dans les campagnes électorales des candidats à la présidence US, les questions de politique intérieure sont absolument prédominantes, et selon les sondages

13% seulement des Américains sont favorables à ce que les Etats-Unis deviennent l’unique leader mondial pour la solution des problèmes internationaux – Z. Brzezinski, The Grand Chessboard, Moscou 1998, p. 249). La puissance militaro-technique des Etats-Unis est incontestable, mais il existe un certain nombre de limitations externes et internes, qui ne permettent pas à cette puissance de devenir une arme absolue capable de mettre le monde entier à genoux.

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Remarquons qu’après le Vietnam, la force militaire a été utilisée par les Américains seulement dans des cas où des pertes humaines significatives dans leur camp étaient exclues (Irak, Serbie). En cela, les Etats-Unis ressemblent à un homme qui de temps en temps frappe son chien juste pour lui montrer « qui est le maître dans la maison ». Face à des centres de force, ou « pôles », sérieux (Chine, Inde, Iran, et récemment même la Russie), les Etats-Unis se comportent plus poliment, visant moins à imposer qu’à manœuvrer. Les Etats-Unis ont donc tendance à beaucoup insister sur leur « leadership mondial » dans un but de propagande, et en retirent un bénéfice très concret.

Economiquement aussi les Etats-Unis sont très forts, pas tellement en tant qu’hégémonie et dictateur mondial, mais en tant que l’un des secteurs importants de l’économie mondiale, représentant un système uniforme se développant selon ses propres lois. En même temps, il est déjà impossible de dire que leur rôle soit beaucoup plus important que celui de la « Grande Chine » ou celui de l’Europe unie (la part des Etats-Unis dans le PNB mondial a diminué – en 1950 elle constituait environ 30% et elle atteint aujourd’hui à peine plus de 20% – MEiMO, n.s. 10, 1999, p. 27 – et leur part dans les exportations mondiales a chuté encore plus fortement, de 60% en 1950 à 12-13% aujourd’hui).

Le monde unipolaire est une chimère. La réalité est une chose différente. Une élite essentiellement cosmopolite, basée sur la « continuation transocéanique de l’Europe » faible en « passionnarité » mais pragmatique – les Etats-Unis –, exploitant correctement une situation historique mondiale unique qui prit forme grâce au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, a maintenant gagné plus de poids dans le monde que toute autre élite. Elle a ainsi habilement joué sur les contradictions existantes dans le monde moderne (en fait, multipolaire), construit par un processus en fait contemporain. Le mythe de la puissance éternelle et indestructible de l’Amérique est donc une efficace arme de propagande et d’intimidation.

Les perspectives d’existence des Etats-Unis dans le présent et difficile monde « pseudo-unipolaire » dépendent de savoir si l’élite politique américaine peut rester en équilibre sur la corde, en empêchant les processus de croissance de « passionnarité » dans diverses régions du monde (avant tout, en Eurasie) de passer cette limite critique où le contrôle US sur les endroits stratégiques importants et les sources de matières premières serait perdu, ce qui en retour pourrait saper la position militaire et économique mondiale américaine. Si cette limite était franchie, la destinée future des Etats-Unis serait pitoyable : ils deviendraient un Etat lointain et pas particulièrement intéressant, dont l’élite politique resterait face à une population ethniquement variée, ayant perdu le très haut niveau de vie qui ne servirait plus de stimulant pour rester dans le cadre du système social existant de nos jours.

En dépit des incontestables avantages de l’actuelle situation des Etats-Unis dans le monde, la tendance basique mondiale à long terme (et peut-être pas à si long terme) leur est défavorable : la « passionnarité » de la civilisation européenne vieillissante et de sa partie transocéanique va en diminuant, alors qu’elle augmente dans de nombreuses nations du monde – certaines d'entre elles étant loin d’être prêtes à se résigner à l’actuel rôle mondial des Etats-Unis. Tout cela justifie parfaitement le sentiment d’« alerte historique, et probablement même de pessimisme » qui, comme l’écrit Brzezinski dans le livre susmentionné (p. 251), « commence à être perçu dans les milieux les plus conscients de la société occidentale ».

Originellement publié dans « Deti feldmarshala », n° 6, 2000.

Republié avec des modifications mineures sur : http://kulichki.rambler.ru/~gumilev/MVA/mva03.htm

Notes de la rédaction (M.C.)

[1] Lev Nikolaiévitch Gumiliev (1912-1992), historien, orientaliste, ethnologue et archéologue russe. Selon la théorie de l’ethnogenèse de Gumiliev, une ethnie (« un phénomène à la frontière de la biosphère et de la sociosphère ») n’est pas un « état » mais un « processus », caractérisé par sa propre structure particulière, son propre stéréotype comportemental et ses propres phases de développement (la période créative, la période de réalisme ou période inertielle, la période de déclin). [Il est intéressant de comparer les idées de Gumiliev à celles d’Oswald Spengler et d’Arnold Toynbee, NDT].

Une courte biographie et une version abrégée de son livre Ethnogenesis and the Biosphere peuvent être trouvées en langue anglaise sur le site d’Artiom : http://artiom.home.mindspring.com/gumilev/

[et aussi sur www.cossackweb.com/gumilev/contents.htm]

[2] Le mot russe « passionarnost » (« drive » étant son équivalent anglais) a été introduit par Gumiliev pour identifier le « facteur X » de l’ethnogenèse, l’impulsion anti-entropique dont le jaillissement est typique de la période créative d’une ethnie. Le processus de l’ethnogenèse, dans son ensemble, peut être décrit comme une perte plus ou moins intensive de la « passionnarité » du système.

[3] La super-ethnie est un groupe d’ethnies qui sont apparues en même temps dans une certaine région et qui se manifeste dans l’histoire en tant qu’unité d’une mosaïque d’ethnies.

 

 

 

DOUGUINE : Israël nous rapproche de l’Armageddon – la Déclaration de Trump sur les Hauteurs du Golan est de mauvais augure

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DOUGUINE : Israël nous rapproche de l’Armageddon – la Déclaration de Trump sur les Hauteurs du Golan est de mauvais augure

Par Natalia Makeeva

La reconnaissance par le président américain Donald Trump de la souveraineté israélienne sur les Hauteurs du Golan continue à être discutée par des politiciens et des figures publiques autour du monde. Le décret correspondant a été signé par le dirigeant américain le jour d’avant, le 25 mars 2019. La Syrie a déjà déclaré que par cette mesure Trump a piétiné la loi internationale.

L’Agence d’Information Fédérale (FAN) rappelle que depuis de nombreux siècles, tout ce qui arrive en Israël, en Syrie et dans cette région est souvent interprété par une partie de la tradition intellectuelle à travers des interprétations chrétiennes, juives et islamiques comme associé à la Fin du Monde. FAN a discuté de cela avec le leader du « Mouvement Eurasien » international, le philosophe et politologue Alexandre Douguine.

Au début de la conversation, le philosophe a expliqué l’essence de l’Etat d’Israël du point de vue de la tradition religieuse juive.

« L’actuel Etat d’Israël est un simulacre. C’est une proclamation antisémite et antijuive dans tous les sens de ces concepts », assure Douguine. « Si vous le regardez depuis le judaïsme, c’est une parodie. En tant que partie du modèle eschatologique juif [décrivant la fin du monde], sa mission est une pure imposture. Le fait est que dans le judaïsme, dans l’histoire juive, le retour des Juifs dans la Terre Promise doit survenir au moment de l’arrivée du Moshiach [= le Messie]. Tant que le Messie ne vient pas, ils n’ont pas le droit religieux de revenir ici. L’Etat d’Israël est un obstacle pour le Messie. [Il faut choisir :] Le Moshiach ou Israël. »

Par conséquent, d’après Douguine, pour que le Moshiach puisse venir, Israël doit cesser d’exister, parce que c’est un simulacre, une tentative de remplacer le divin, du point de vue du judaïsme, par la volonté humaine.

Douguine  explique que la reconnaissance des Hauteurs du Golan par Trump amène la Fin du Monde.

Quant à Trump, d’après l’interlocuteur de FAN, il est loin des sujets religieux.

« Trump, bien sûr, est un réaliste et un politicien complètement séculier. Il cherche des alliés parmi les mouvements conservateurs de droite, sans prêter attention à la religion à laquelle ils appartiennent », explique Douguine. « Il a misé sur quelques politiciens, en particulier sur Netanyahu. En même temps, Trump est absolument indifférent aux questions eschatologiques et elles n’ont pas de sens pour lui. Il soutient des politiciens simplement en raison des nécessités politiques ».

Quant au Golan, l’idée de reconnaître les droits d’Israël sur les Hauteurs du Golan de la Syrie, qui sont occupées par cet Etat [Israël], est une mesure purement politique.

« De mon point de vue, cela rend finalement plus proche l’effondrement de l’Etat d’Israël », dit Alexandre Douguine. « L’Amérique, représentée par Trump, peut temporairement soutenir Netanyahu, mais plus Israël agit agressivement et audacieusement, plus l’hostilité envers lui grandit, non seulement de la part de la population arabe mais aussi de la part d’autres pays ».

Par conséquent, conclut l’interlocuteur de FAN, le seul résultat de cette reconnaissance sera l’approche de la fin de l’Etat d’Israël.

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« Et c’est la signification eschatologique », Douguine en est convaincu. « Lorsqu’il s’effondrera, les Juifs se retrouveront face à une nouvelle expulsion, recherchant un nouveau foyer, et alors, du point de vue des Juifs traditionnels, l’obstacle à la réalisation de leur scénario eschatologique sera éliminé. C’est dans ce sens et seulement dans ce sens que j’interprète la décision de Trump, qui est simplement un instrument du destin. Plus tôt l’Etat d’Israël s’effondrera et disparaîtra de la face de la terre, plus tôt dans la perspective juive – c’est-à-dire de leur point de vue, le Moshiach viendra et plus tôt le [véritable] Etat apparaîtra, de leur point de vue. »

« D’un point de vue chrétien, tout sera différent », remarque-t-il.

En même temps, d’après Douguine, les cercles fondamentalistes protestants n’ont pas beaucoup d’influence sur Trump, il est bien plus probablement un homme séculier – un playboy, un réaliste politique.

« D’une manière générale il est de droite, conservateur, et il traite bien les religions. Mais il ne comprend pas la théologie protestante – il a un profil complètement différent, un style différent. Il ne s’y intéresse pas, cela ne compte pas. Et il voit tout à travers des catégories politiques réelles. Et les lignes plus profondes du destin et de l’humanité motivent les actions des pays ou de leurs dirigeants contre leur volonté, sans qu’ils s’en rendent compte, qu’ils comprennent ce qu’ils font ou qu’ils ne le comprennent pas », conclut le philosophe.

Rappelons que les Hauteurs du Golan sont un territoire disputé entre Israël et la Syrie, dont ils firent partie entre 1944 et 1967. En résultat de la dénommée Guerre des Six Jours en juin 1967, le territoire fut envahi par Israël. En 1981, la Knesset israélienne proclama sa souveraineté sur le Golan, mais cette décision ne fut pas reconnue par le Conseil de Sécurité de l’ONU. En 2018, les hauteurs furent complètement capturées par des militants islamistes. Durant l’été 2018, l’Armée Arabe Syrienne parvint à les chasser de la région.

Les Hauteurs du Golan sont un territoire important pour au moins deux raisons : l’accès aux réserves d’eau dépend du contrôle de ces hauteurs, et elles sont aussi d’une importance stratégique d’un point de vue militaire.

Source

[Dans un article il y a quelques années, le philosophe russe disait déjà : « Le problème d’Israël n’est pas géopolitique ou économique. Il est théologique. Leur Messie ne vient pas. Les calculs juifs disent unanimement : il est grand temps, il devrait sûrement se hâter. Si les USA tombent, il y aura presque immédiatement un pays de moins au Moyen-Orient. Devinez lequel ? Donc il doit vraiment venir, parce que toutes les actions politiques et militaires des Juifs dans la seconde moitié du XXe siècle furent orientées vers sa venue. S’il attend encore, ils sont perdus. Il ne viendra pas, ni maintenant, ni plus tard. C’est vraiment une mauvaise nouvelle. Une mauvaise nouvelle pour les bon Juifs. Ils pourraient promouvoir un simulacre du genre Sabbataï Zeevi. Un Messie virtuel. Ils le peuvent peut-être. Et ils le feront peut-être. Ce sera encore pire pour eux. Internet ne peut pas les sauver. Ni le veau d’or, ni un gros mensonge. » (Alexandre Douguine, « The end of Present World. Post-American future », conférence de Londres, octobre 2013). – NDT.]

 

 

 

mardi, 02 avril 2019

Washington cherche l’escalade : y aura-t-il de nouvelles sanctions contre la Russie à cause du soutien de Moscou à Maduro ?

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Washington cherche l’escalade : y aura-t-il de nouvelles sanctions contre la Russie à cause du soutien de Moscou à Maduro ?

Washington / Caracas : Le gouvernement américain entend infliger de nouvelles sanctions à la Russie, cette fois à cause du soutien que celle-ci apporte au régime de Maduro au Vénézuela. John Bolton, conseiller ès-sécurité du Président Trump, a condamné ce soutien et a averti d’autres Etats de n’envoyer ni forces militaires ni équipements. « Nous considérerons de tels actes provocateurs comme une menace directe contre la paix internationale et contre la sécurité dans la région » a lancé Bolton.

Elliott Abrams, plénipotentiaire américain pour le Venezuela, a déclaré que les Etats-Unis disposaient de toute une série d’options pour s’opposer à l’engagement russe au pays de Maduro. Quand on lui a posé la question de savoir ce que le gouvernement américain entendait faire pour barrer la route aux projets russes en Amérique latine, Abrams a répondu : « Nous avons une liste d’options ». Il y aurait ainsi des possibilités au niveau diplomatique mais aussi au niveau économique, c’est-à-dire des sanctions. Il n’a pas été plus explicite. Mais il a toutefois souligné : « Ce serait une erreur, pour les Russes, de croire qu’ils ont les mains libres en cette région. Ils ne les ont pas ! ». Et il a ajouté que le nombre de soldats russes au Venezuela n’est pas très grand mais leur influence potentielle est néanmoins considérable. Leur présence ne va pas dans l’intérêt de la population du pays.

Les Russes ont toutefois contesté les accusations des Américains, ces derniers jours, et leur ont reproché d’organiser un coup d’Etat pour favoriser un changement de régime au Venezuela, ce qui revient à s’immiscer de manière inacceptable dans les affaires intérieures de l’Etat sud-américain. Moscou se réfère à un accord existant de coopération militaire et technique avec le Venezuela. Vendredi dernier, la Russie a demandé une nouvelle fois que les Etats-Unis ne se mêlent pas des affaires intérieures du Venezuela. Washington n’a pas le droit, ajoutent-ils, de dicter à d’autres Etats avec quels pays ils peuvent collaborer, pensent les principaux acteurs de la politique étrangères à Moscou.

(article paru sur http://www.zuerst.de – 01 avril 2019).

dimanche, 31 mars 2019

Reflecting on the Interwar Right

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Reflecting on the Interwar Right

Please note this rightist opposition to war must be distinguished from the objections of Communist sympathizers or generic leftists to certain wars for ideological reasons. For example, George McGovern, who was a longtime Soviet apologist, protested the Vietnam War, while defending his own role in dropping bombs on helpless civilians in World War Two. For McGovern the “good war” was the one in which the US found itself on the same side as the Soviets and world Communism. Clearly McGovern did not object to American military engagements for rightist reasons.

My own list of interwar American Rightists would include predominantly men of letters, e.g., Wallace Stevens, H.L. Mencken, George Santayana (who was Stevens’s teacher at Harvard and longtime correspondent), Robert Lee Frost, the Southern Agrarians, and pro-fascist literati Ezra Pound and Lovecraft, (if accept these figures as part of a specifically American Right). Although Isabel Patterson and John T. Flynn may have regarded themselves as more libertarian than rightist, both these authors provide characteristically American rightist criticism of the progress of the democratic idea. The same is true of the novelist and founder of the libertarian movement Rose Wilder Lane, whose sympathetic portrayal of an older America in “House on the Prairie” has earned the disapproval of our present ruling class. Many of our rightist authors considered themselves to be literary modernists, e.g., Stevens, Pound and Jeffers. But as has been frequently observed, modernist writers were often political reactionaries, who combined literary innovations with decidedly rightist opinions about politics. Significantly, not only Mencken but also Stevens admired Nietzsche, although in Stevens’s case this admiration was motivated by aesthetic affinity rather than discernible political agreement.

This occasions the inevitable question why so many generation defining writers, particularly poets, in the interwar years took political and cultural positions that were diametrically opposed to those of our current literary and cultural elites. Allow me to provide one obvious answer that would cause me to be dismissed from an academic post if I were still unlucky enough to hold one. Some of the names I’ve been listing belonged to scions of long settled WASP families, e.g., Frost, Stevens, Jeffers, and, at least on one side, Santayana, and these figures cherished memories of an older American society that they considered in crisis.  Jeffers was the son of a Presbyterian minister from Pittsburgh, who was a well-known classical scholar. By the time he was twelve this future poet and precocious linguist knew German and French as well as English and later followed the example of his minister father by studying classics, in Europe as well as in the US.

Other figures of the literary Right despised egalitarianism, which was a defining attitude of the self-identified Nietzschean Mencken. The Sage of Baltimore typified what the Italian Marxist Domenico Losurdo describes as “aristocratic individualism” and which Losurdo and Mencken identified with the German philosopher Nietzsche. This anti-egalitarian individualism was easily detected in such figures as Mencken, Pound and the Jeffersonian libertarian, Albert J. Nock.

états-unis,droite américaine,conservatisme,conservatisme américain,littérature,lettres,lettres américaines,littérature américaine,histoire,paul gottfried,philosophie,nietzschéismeIt may be Nock’s “Memoirs of a Superfluous Man” (1943) with its laments against modern leveling tendencies, and Nock’s earlier work “Our Enemy, The State” (1935) which incorporated most persuasively for me this concept of aristocratic individualism. Nock opposed the modern state not principally because he disapproved of its economic policies (although he may not have liked them as well) but because he viewed it as an instrument of destroying valid human distinctions. His revisionist work Myth of a Guilty Nation, which I’m about to reread, has not lost its power since Nock’s attack on World War One Allied propaganda was first published in 1922. Even more than Mencken, whose antiwar fervor in 1914 may have reflected his strongly pro-German bias, Nock opposed American involvement in World War One for the proper moral reasons, namely that the Western world was devouring itself in a totally needless conflagration. Curiously the self-described Burkean Russell Kirk depicts his discovery of Nock’s Memoirs of a Superfluous Man on an isolated army base in Utah during World War Two as a spiritual awakening. Robert Nisbet recounts the same experience in the same way in very similar circumstances. 

Generational influence:

These interwar rightists of various stripes took advantage of a rich academic-educational as well as literary milieu that was still dominated by a WASP patrician class before its descendants sank into Jed Bushism or even worse. These men and women of letters were still living in a society featuring classes, gender roles, predominantly family owned factories, small town manners, and bourgeois decencies. Even those who like Jeffers, Nock and Mencken viewed themselves as iconoclasts, today may seem, even to our fake conservatives, to be thorough reactionary. The world has changed many times in many ways since these iconoclasts walked the Earth. I still recall attending a seminar of literary scholars as a graduate student in Yale in 1965, ten years after the death of Wallace Stevens, and being informed that although Stevens was a distinguished poet, it was rumored that he was a Republican. Someone else then chimed in that Stevens was supposed to have opposed the New Deal, something that caused consternation among those who were attending. At the times I had reservations about the same political development but kept my views to myself. One could only imagine what the acceptance price for a writer in a comparable academic circle at Yale would be at the present hour. Perhaps the advocacy of state-required transgendered restrooms spaced twenty feet apart from each other or some even more bizarre display of Political Correctness.  I shudder to think.

But arguably the signs of what was to come were already present back in the mid-1960s. What was even then fading was the academic society that still existed when Stevens attended Harvard, Frost Dartmouth, though only for a semester, or Nock the still recognizably traditional Episcopal Barth College. Our elite universities were not likely to produce even in the 1960s Pleiades of right-wing iconoclasts, as they had in the interwar years and even before the First World War.  And not incidentally the form of American conservatism that came out of Yale in the post-war years quickly degenerated into something far less appealing than what it replaced. It became a movement in which members were taught to march in lockstep while advocating far-flung American military entanglements. The step had already been taken that led from the interwar Right to what today is conservatism, inc. Somehow the interwar tradition looks better and better with the passage of time.

samedi, 30 mars 2019

Les États-Unis perdent le contrôle de l’Europe…

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Les États-Unis perdent le contrôle de l’Europe…

 
… alors que le pipeline Nordstream 2 est sur le point d’être achevé 
 
par Tom Luongo
 
Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Le pipeline Nordstream 2 représente le dernier avatar de l’influence américaine sur les affaires intérieures de l’Europe. Une fois terminé, il témoignera de la scission fondamentale entre l’Union européenne et les États-Unis. 
 
L’Europe sera la première à défendre avec succès son indépendance nouvellement proclamée. Et les États-Unis devront accepter de ne plus avoir le contrôle sur l’étranger. C’est un schéma qui se répète partout dans le monde en ce moment. Votre vision de Nordstream 2 dépend de qui vous êtes.

Si vous êtes les États-Unis, il s’agit d’une rebuffade massive de l’ordre institutionnel de l’après-Seconde guerre mondiale, principalement financé par les États-Unis pour reconstruire l’Europe et la protéger du fléau de l’URSS.

Du point de vue de l’Europe, c’est : « Bien joué, mais la Russie n’est plus une menace et il est temps de nous débarrasser de la tutelle des États-Unis. »

Et si vous êtes Russe, Nordstream 2, c’est la fissure qui sépare les deux adversaires tout en améliorant la sécurité nationale à votre frontière occidentale.

L’Europe a ses propres ambitions impériales et Nordstream 2 en est une partie très importante. Ces ambitions, toutefois, ne sont pas conformes à celles des États-Unis, en particulier sous la houlette de Donald Trump.

Trump a cette étrange idée que les États-Unis n’ont rien reçu en retour pour avoir pris la direction du monde « libre » ces soixante-dix dernières années. Dans l’esprit simpliste de Trump, le déficit commercial massif du pays est une richesse volée par ses partenaires commerciaux.

Il refuse de voir la richesse gaspillée que nous avons « perdue » par des décennies de corruption, de paresse, d’atteinte aux réglementations, etc.

Ainsi, Nordstream 2 est une abomination pour Trump car celui-ci finance l’OTAN pour protéger l’Europe de la Russie, mais celle-la augmente ensuite la quantité de gaz acheté à ce même ennemi.

Et cela devrait vous indiquer où tout cela se dirige à long terme : à la dissolution de l’OTAN rendue inutile par la Russie et l’UE.

Aussi, peu importent les efforts des États-Unis et des forces anti-russes des sociétés européenne et britannique pour arrêter ce pipeline, comme en témoigne le vote non contraignant de cette semaine au Parlement européen, l’appétit américain n’existe plus réellement.

Le Sénat américain n’a aucun intérêt à demander au Président de sanctionner les sociétés qui construisent Nordstream 2. Cela n’empêcherait pas Trump de sanctionner de toute façon s’il le voulait.
 

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La vraie raison pour laquelle Trump ne sanctionnera pas Nordstream 2 est la même que celle qui le pousse à se tourner vers la Chine pour le commerce : liquidité du dollar dans le commerce mondial.

Il a déjà fait assez de dégâts. Il cherche maintenant à se faire réélire face à une réserve fédérale hostile.

S’il devait sanctionner Nordstream 2, il l’aurait fait. En vérité, ce vote au Parlement européen marque le dernier faible souffle pour tenter d’arrêter le pipeline et non le coup rusé d’un type qui détient des as dans ses poches.

C’est précisément parce que les États-Unis n’ont pas imposé de sanctions, qu’il ne reste que des incantations vertueuses pathétiques.

Pour que cela se produise, il faudrait que ce soit avant les élections au Parlement européen de mai, au cours desquelles nous pouvons nous attendre à voir au moins doubler le nombre de représentants eurosceptiques élus.

Si la situation continue de dégénérer en France, si l’Italie se durcit encore contre l’UE et si le Brexit est reporté, les eurosceptiques pourraient devenir le bloc le plus important du Parlement européen en juillet.

À ce stade, nous assisterons à une dégringolade en flèche de l’influence de la tristement célèbre liste Soros dans le parlement européen et peut-être même au sein de la Commission européenne. Et, le cas échéant, davantage de contrats de pipeline et d’investissements dans l’énergie russe.

En fait, un Parlement eurosceptique pourrait lever complètement les sanctions contre la Russie. De plus, les prochaines élections en Ukraine vont probablement amener au pouvoir une personne qui n’est pas pleinement soumise à la stratégie américaine.

Avec tout cela et les élections législatives ukrainiennes qui auront lieu plus tard cette année, nous verrons probablement l’Ukraine et Gazprom renégocier le contrat de transport de gaz, apportant encore plus de gaz russe sur le continent.

Et cela ne fera que rendre Trump encore plus furieux qu’il ne l’est maintenant, car il a énormément misé sur la stratégie globale de faire des États-Unis un puissant exportateur de gaz, et il a besoin de clients. L’Europe et la Chine sont deux clients évidents, mais la Russie a maintenant surclassé Trump chez les deux.

La fin de cette expansion interminable et superficielle met les États-Unis face à la dette insoutenable provoquée par le boom de la fracturation hydraulique (gaz de schiste), alors que le service de cette dette fait monter en flèche la demande de dollars, entraînant une forte hausse des taux d’intérêt.

Le marché du schiste va se fracasser à nouveau.

Tout cela confirme pour moi que le sommet des Jardins, l’été dernier, entre Poutine et la chancelière allemande Angela Merkel a accouché d’une stratégie visant à battre Trump sur Nordstream 2 et à entamer la prochaine phase des relations entre la Russie et l’Allemagne.

L’image est importante, et cette celle-ci capture bien ce que les deux parties ont voulu transmettre. Cette réunion marque le début d’un changement positif des relations entre l’Allemagne et la Russie.

La question est pourquoi ?

La réponse évidente est la nécessité résultant de la pression exercée sur les deux pays par Donald Trump, par le biais des sanctions et des droits de douane, ainsi que de leurs intérêts communs représentés par le gazoduc Nordstream 2.

Et tout ce que cela implique.

Tom Luongo Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone

jeudi, 28 mars 2019

Michael Snyder et la dystopie californienne

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Michael Snyder et la dystopie californienne

Par Nicolas Bonnal

Ex: https://leblogalupus.com

Les films de dystopie (Blade runner, Rollerball, Soleil vert) nous promettaient un futur abominable et surréaliste, et en vérité nous avons un futur nul qui confirme l’observation de Léon Bloy faite en 1906, à savoir que nous sommes déjà morts. On est dans un monde bête, laid, matérialiste, certes surpeuplé, mais qui ne va pas trop mal, qui fonctionne globalement. Ce n’est pas grave, on continue dans les fictions de nous promettre un futur abominable au lieu de nous montrer notre présent cher et dégoûtant… Il semble que ce pessimisme extra soit de mise dans nos sociétés pour établir la dictature ou cet imprécis ordre mondial dont rêve une partie des élites humanitaires. On nous promet le pire pour nous donner des ordres. Mais c’est un autre sujet… je maintiens que le seul film de dystopie réaliste reste Alphaville puisqu’il montrait notre décor, notre apparence de réalité, mais truffé de contrôle mental et cybernétique. C’est bien là que nous sommes, et pas dans les espaces infinis.

ms-bend.jpgJe lis Michael Snyder et son blog apocalyptique depuis des années et je fais donc attention chaque fois qu’à la télévision on montre des images de la vie quotidienne en Amérique. Or de petits films sur mes espagnols à travers le monde démontrent qu’effectivement les conditions de vie aux USA sont devenues sinistres et hors de prix, sans qu’on puisse évoquer la poétique de Blade runner…Plusieurs amis fortunés qui font aussi des allers et retours et m’ont confirmé que le vieil oncle Sam coûte bien cher, comme Paris, Londres et des milliers d’endroits (même se loger en Bolivie devient un exploit, vive Morales-Bolivar-Chavez…), pour ce qu’il offre ; d’autres amis moins fortunés, universitaires, survivent durement. Car il y a en plus les persécutions politiques qui gagent nos si bienveillantes démocraties…

On écoute les dernières révélations de Snyder sur la Californie :

« 53% des californiens veulent partir… Cela montre simplement ce qui peut arriver lorsque vous laissez des fous diriger un État pendant plusieurs décennies. Dans les années 1960 et 1970, la possibilité de s’établir sur la côte ouest était «le rêve californien» de millions de jeunes Américains, mais à présent, «le rêve californien» s’est transformé en «cauchemar californien».

Snyder ajoute ce que nous savons par le cinéma (qui ment toujours moins que les news) :

« Les villes sont massivement surpeuplées, la Californie connaît le pire trafic du monde occidental, la consommation de drogue et l’immigration clandestine alimentent un nombre incroyable de crimes, les taux d’imposition sont abominables et de nombreux politiciens de l’état semblent être littéralement fous. Et en plus de tout cela, n’oublions pas les tremblements de terre, les incendies de forêt et les glissements de terrain qui font constamment les gros titres dans le monde entier. L’année dernière a été la pire année pour les feux de forêt dans l’histoire de la Californie , et ces jours-ci, il semble que l’État soit frappé par une nouvelle crise toutes les quelques semaines. »

calg.jpgEn vérité les gens supporteraient tout (« l’homme s’habitue à tout », dixit Dostoïevski dans la maison des morts), mais le problème est que cette m… au quotidien est hors de prix ! Donc…

« Un nombre croissant de Californiens envisagent de quitter l’État – non pas à cause d’incendies de forêt ou de tremblements de terre, mais à cause du coût de la vie extrêmement élevé, selon un sondage publié mercredi. Le sondage en ligne, mené le mois dernier par Edelman Intelligence, a révélé que 53% des Californiens interrogés envisagent de fuir, ce qui représente un bond par rapport aux 49% interrogés l’année dernière. L’enquête a révélé que le désir de quitter le pays le plus peuplé du pays était le plus élevé. »

On évoque les règlementations de cet état exemplaire pour tous les progressistes et sociétaux de la foutue planète :

« Grâce à des restrictions de construction absolument ridicules, il est devenu de plus en plus difficile de construire de nouveaux logements dans l’État. Mais entre-temps, des gens du monde entier continuent à s’y installer car ils sont attirés par ce qu’ils voient à la télévision. »

Notre grand pessimiste documenté précise :

« En conséquence, l’offre de logements n’a pas suivi la demande et les prix ont explosé ces dernières années. Les chiffres suivants proviennent de CNBC …

À l’échelle de l’État, la valeur médiane des maisons en Californie s’élevait à 547 400 $ à la fin de 2018, tandis que la valeur médiane des maisons aux États – Unis était de 223 900 $ . À titre de comparaison, la valeur médiane des maisons dans l’État de New York s’établissait à 289 000 dollars et à 681 500 dollars à New York; New Jersey était 324 700 $. Oui, il y a beaucoup d’emplois bien rémunérés en Californie, mais vous feriez mieux d’avoir un très bon travail pour pouvoir payer les paiements hypothécaires d’une maison valant un demi-million de dollars. »

Du coup il faut vivre avec des colocataires, même en couple !

« Bien sûr, de nombreux Californiens se retrouvent dans une situation financière extrêmement pénible en raison de coûts de logement incontrôlables. Ils sont donc plus nombreux que jamais à emménager avec des colocataires. En fait, un rapport récent a révélé que le nombre de couples mariés vivant avec des colocataires «a doublé depuis 1995» … Le nombre de couples mariés vivant avec des colocataires a doublé depuis 1995, selon un rapport récent du site immobilier Trulia. Environ 280 000 personnes mariées vivent maintenant avec un colocataire – et cela est particulièrement vrai dans les villes coûteuses comme celles de la côte ouest. »

La Californie n’est pas seule dans ce cas :

« À Honolulu et à Orange Country, en Californie, la part des couples mariés avec des colocataires est quatre à cinq fois supérieure au taux national. San Francisco, Los Angeles, San Diego et Seattle ont également des taux très élevés de couples mariés avec colocataires. Ces mêmes villes ont des coûts de location et de logements très supérieurs à la moyenne (Trulia note que les coûts de logement dans tous ces marchés ont augmenté de plus de 30% depuis 2009), les habitants de San Francisco, extrêmement coûteux, ont besoin de plus de 123 000 dollars de revenus pour vivre confortablement… »

Puisqu’on parle d’Honolulu, je ne saurais trop recommander, sur la dystopie hawaïenne, le film d’Alexander Payne avec Clooney, film nommé justement les Descendants, qui traite du néant dans la vie postmoderne. Honolulu, un Chicago au prix de Monaco. Dire qu’il y en a encore pour critiquer Rousseau…

calcrazy.pngLes impôts pleuvent comme en France :

« En plus des coûts de logement, de nombreux Californiens sont grandement frustrés par les niveaux de taxation oppressifs dans l’État. À ce stade, l’État a le taux d’imposition marginal le plus élevé de tout le pays … Avec 12,3%, la Californie est en tête des 50 États en 2018 avec le taux d’imposition marginal le plus élevé, selon la Federation of Tax Administrators ; et cela n’inclut pas une surtaxe supplémentaire de 1% pour les Californiens ayant des revenus de 1 million de dollars ou plus. »

Evidemment on a d’autres privilèges culturels…Snyder :

« Hier, j’ai écrit un article intitulé «Les rats, la défécation publique et la consommation de drogue à ciel ouvert: nos grandes villes occidentales sont en train de devenir des enfers inhabitables» , et cela a déclenché une tempête de feu. Plus de 1 000 commentaires ont déjà été publiés sur cet article, et quelques personnes enthousiastes ont tenté de convaincre le reste d’entre nous que la vie sur la côte ouest n’est pas si mauvaise. Je suis désolé, mais si votre ville compte beaucoup plus de toxicomanes par voie intraveineuse que d’élèves du secondaire, ce n’est pas un endroit où je voudrais fonder une famille … »

La conclusion pas très gaie :

« Au total, environ 5 millions de personnes ont fait leurs valises et ont quitté définitivement la Californie au cours des 10 dernières années. Malheureusement, la nation tout entière est en train de devenir comme la Californie et si nous ne renversons pas les choses, il n’y aura plus de place où aller. »

C’est TS Eliot, cité dans Apocalypse now, qui dans ses Hommes creuxévoque ce monde qui ne finira pas dans une déflagration, mais dans un pleurnichement (not in a bang but a whimper). Nous y sommes et cette agonie interminable peut encore bien durer cent ans…

Note

J’ajouterai cet extrait de Ron Unz sur la Californie :

« Le style de vie californien, riche et extrêmement agréable, de l’après-guerre, était largement reconnu aux États-Unis, et ce leurre magnétique fut à l’origine des premières étapes de la croissance démographique très rapide de l’État. Mais plus récemment, les effets néfastes de la congestion routière, des options de logement épouvantables et de la concurrence acharnée sur le marché de l’emploi ont considérablement réduit l’attrait de l’État. La croissance a fortement diminué , en partie parce que l’afflux continu d’immigrants a été partiellement compensé par un départsimultané de résidents existants. »

https://nicolasbonnal.wordpress.com/2019/02/18/michael-sn...

 

mercredi, 27 mars 2019

La défaite américaine et le le retour de l’empire des steppes

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La défaite américaine et le le retour de l’empire des steppes

 
Ex: https://www.geopolitica.ru

Ecrabouillement américain face aux soviets et aux chinois : le poing par Philippe Grasset (dans une mer de sarcasmes et par la Rand Corporation en personne). Problème : ils n’ont pas de solutions…A compléter avec les propos de Bayan-Orson Welles (la rose noire, 1950) ; les flèches (les missiles) valent mieux que les armures (les porte-avions). Pour comprendre l’empire des steppes, lire Grousset sur classiques.uqac.ca.

L’USS Pentagone et sa Mer des Sargasses

12 mars 2019 – La communauté des experts, aussi bien férue de l’objet de leur expertise que des relations publiques, commence à  s’alarmer des progrès russes et chinois en matière d’armement ; mais  piano pianissimo, cette alarme, au rythme postmoderne, bien que les termes et les trouvailles qui la justifient effraient les experts eux-mêmes.

Il s’agit essentiellement, pour notre propos de ce jour, d’un rapport suivant une simulation particulièrement sophistiquée de la  RAND Corporation. C’est un événement important, qui devrait faire autorité à Washington : la RAND est le  think tanks  US le plus prestigieux et le plus influent pour les questions techniques de la communauté de sécurité nationale ; basée en Californie et dominant le domaine de l’expertise technique depuis 1948 (date de sa création), directement connectée à l’USAF et à l’industrie d’armement (officiellement, c’est la firme Douglas, agissant comme faux-masque de l’USAF, qui créa la RAND). Ses analyses reflètent et inspirent à la fois les conceptions des milieux experts des forces armées : une étude de la RAND ainsi présentée publiquement fait autorité et indique selon les normes de la communication ce que le Pentagone et la communauté de sécurité nationale pensent et doivent penser à la fois.

En effet, RAND est venue à Washington présenter un rapport très technique sur des simulations d’une Troisième Guerre mondiale au CNAS (Center for a New American Security), autre  think tank  mais plus doué en relations publiques et établi en 2007 pour présenter une vision “bipartisane” de la  politiqueSystème suivie par les USA ; c’est-à-dire, un institut recyclant la politique-neocon  habillé d’une parure de consensus washingtonien dans le sens évidemment belliqueux qu’on imagine. La séance d’information a été rapportée par divers médias, et nous citons aussi bien ZeroHedge.com que SouthFront.org.

Le rapport, présenté  le 7 mars, envisage divers scénarios des engagements au plus haut niveau des USA contre la Russie ou contre la Chine. Le verdict est peu encourageant : “Nous nous ferons péter le cul !” : « “Dans nos simulations, lorsque nous affrontons la Russie et la Chine, les Bleus  [les USA]  se font péter le cul”, a déclaré jeudi l’analyste de RAND David Ochmanek. “Nous perdons beaucoup de gens, nous perdons beaucoup d’équipements. Nous n’atteignons généralement pas notre objectif d’empêcher l’agression de la part de l’adversaire”, a-t-il averti. »

Et pour suivre, sur l’état général des conclusions du rapport : « Alors que la Russie et la Chine développent des chasseurs de cinquième génération et des missiles hypersoniques, “nos éléments reposant sur des infrastructures de base sophistiquées, telles que des pistes et des réservoirs de carburant, vont connaître de graves difficultés”, a déclaré Ochmanek. “Les unités navales de surface vont également connaître de graves difficultés”

» “C’est pourquoi le budget 2020 présenté la semaine prochaine prévoit notamment de retirer du service actif le porte-avions USS Truman plusieurs décennies à l’avance, et d’annuler une commande de deux navires amphibies de débarquement, comme nous l’avons signalé. C’est aussi pourquoi le Corps des Marines achète la version à décollage vertical du F-35, qui peut décoller et atterrir sur des pistes aménagées très petites et très rustiques, mais la question de savoir comment entretenir en état de fonctionnement un avion de très haute technologie dans un environnement de très basse technologie reste une question sans réponse”, selon le site Breaking Defence… »

Certains points spécifiques des équipements par rapport aux simulations de la RAND font l’objet de précisions et d’observations, – en général très critiques, parce que personne ne semble satisfait de l’état des forces et de leurs capacités en cas de conflit. On en signale ici l’une et l’autre, par ailleurs sur des sujets déjà connus, et avec des conclusions qui n’étonneront personne, dans tous les cas parmi les lecteurs de dedefensa.org.

  • Le F-35, l’inépuisable JSF. On a lu plus haut cette remarque selon laquelle le F-35B des Marines à décollage vertical (ADAC/ADAV) trouvait sa justification dans les conditions dévastées pour les USA d’un conflit à venir, mais qu’on doutait grandement qu’il puisse jouer un grand rôle opérationnel à cause de l’extrême complexité de l’entretien opérationnel de l’avion dans un tel environnement. Un autre intervenant ajoute cette remarque, où l’on pourrait voir une ironie désabusée :

« “Dans tous les scénarios auxquels j’ai eu accès”, a déclaré Robert Work, ancien secrétaire adjoint à la Défense ayant une grande expérience des exercices opérationnels, “le F-35 est le maître du ciel quand il parvient à s’y trouver mais il est détruit au sol en grand nombre”. » Cette remarque, d’ailleurs bien trop follement optimiste sinon utopiste (ou ironique ?) pour les capacités du F-35 lorsqu’il parvient à se mettre en position de combat aérien, marque surtout la prise en compte de la fin de l’ Air Dominance pour l’USAF et les forces aériennes US en général, du fait de la puissance nouvelle acquise notamment par les Russes, suivis par les Chinois en pleine expansion militaire.

  • La décision de retrait et de mise en réserve (“mise en cocon”) du porte-avions USS Truman, annoncée au début du mois, a  d’abord été présentéecomme une manœuvre de l’US Navy pour obtenir un budget supplémentaire pour garder cette unité en service actif et poursuivre en même temps la construction des deux premiers classes USS  Gerald R. Ford, toujours  aussi catastrophiques et empilant délais sur augmentation de coût. (On cite le précédent d’une manœuvre similaire lorsque la Navy avait prévu de faire subir le même sort au USS  George-Washington  en 2012, la Maison-Blanche allouant avec le soutien du Congrès les fonds nécessaires pour éviter cette réduction de la flotte des onze porte-avions de la Navy.) La Navy économiserait jusqu’à $30 milliards en écartant le  Truman  qui va bientôt entrer en refonte de mi-vie s’il reste en service (un travail très complexe, coûteux et long : 2024-2028).

Mais on voit que la RAND suscite une explication qu’elle renforce d’autres constats, qui impliquerait que la Navy estime le danger des nouvelles armes hypersoniques trop grand pour continuer à mettre toute sa puissance stratégique sur les porte-avions. Venant de la RAND, avec tout son crédit, la chose doit être considérée sérieusement, pour marquer combien les USA commenceraient à prendre conscience de la puissance de leurs adversaires stratégiques du fait de la percée majeure constituée par les missiles hypersoniques.

  • Un autre exemple des insuffisances considérables débusquées par la RAND concerne la couverture anti-aérienne des forces terrestres. Les experts du think tank ont fait leur compte, ce qui est illustré par cette remarque :

« … Si l’on se base sur une situation purement hypothétique [selon les moyens actuels], “si nous partions en guerre en Europe, il y aurait une unité de [missiles sol-air de défense aérienne] Patriot qui serait disponible pour y être envoyée, pour être déployée à la base de Ramstein. Et c’est tout”, dit Work avec amertume. L’US Army compte 58 brigades de combat mais ne dispose d’aucune capacité de défense anti-aérienne et antimissile pour les protéger contre des attaques de missiles venues de la Russie. »

Cette situation US est en complet contraste avec celle des Russes, qui intègrent dans leurs forces terrestres des unités de défense anti-aérienne chargées de la protection des forces en campagne. C’est d’ailleurs autant une question de moyens qu’une question structurelle et même psychologique. Les forces armées US ont toujours fonctionné depuis 1945 selon le principe qu’elles disposaient d’une totale domination aérienne qui jouaient un rôle d’interdiction quasi-impénétrable. Cette situation est très largement mise en cause aujourd’hui, notamment avec les progrès russes en matière d’A2/AD («  [Z]ones dite A2/AD, ou Anti-Access/Area-Denial ; c’est-à-dire des sortes de No-Fly-Zone pour l’aviation ennemie, du fait des moyens russes parfaitement intégrés de détection, de brouillage et de contrôle électroniques, et de destruction, qui transforment toute incursion aérienne ennemie dans ces zones en un risque inacceptable »).

Non seulement les forces US sont affaiblies, non seulement l’apparition des missiles hypersoniques donne aux Russes une puissance de feu d’une catégorie nouvelle et révolutionnaire, mais en plus la structure des forces US est fondée sur le postulat psychologique quasi-inconscient (“inculpabilité-indéfectibilité”) de la supériorité US (notamment aérienne) qui dispense ces forces d’avoir une défense organique puissante.

USA : le Russiagate est vraiment fini

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USA : le Russiagate est vraiment fini

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Le 12 février, nous écrivions "Le Russiagate est fini". La conclusion était basée sur un rapport de NBC :

Après deux ans d'enquête et 200 entretiens, le Comité du renseignement du Sénat touche à la fin de son enquête sur les élections de 2016, n'ayant encore trouvé aucune preuve directe d'un complot entre la campagne Trump et la Russie, selon les démocrates et les républicains siégeant au comité. ... Les démocrates et autres opposants à Trump pensent depuis longtemps que l'avocat spécial Robert Mueller et les enquêteurs du Congrès découvriront de nouvelles preuves plus explosives de la coordination de la campagne de Trump avec les Russes. Mueller pourrait encore le faire, bien que des sources au ministère de la Justice et au Congrès affirment qu’il est sur le point de clore son enquête.

La théoricienne du complot Russiagate, Marcy Wheeler, a répliqué en affirmant que le complot avait été prouvé lorsque l’ancien chef de campagne de Trump, Paul Manafort, a admis avoir transmis des données sur les élections à des contacts ukrainiens/russes pour s’attirer les faveurs d’un oligarque russe auquel il devait de l’argent. Mais les crimes de Manafort, pour lesquels il a plaidé coupable le 14 septembre 2018, n’avaient rien à voir avec « la Russie » ou avec Trump et seulement de manière indirecte avec sa campagne électorale : Vendredi, Manafort, directeur de la campagne présidentielle de Donald Trump de juin à août 2016, a plaidé coupable devant le tribunal fédéral de Washington pour deux accusations de complot contre les États-Unis, dont un pour lobbying, impliquant des crimes financiers et la violation de l'enregistrement comme agent étranger, et l'autre impliquant la subornation de témoins. Dans le cadre de son plaidoyer, Manafort a également reconnu sa culpabilité dans des accusations de fraude bancaire qu'un jury fédéral de Virginie avait portées contre lui le mois dernier.

Marcy, la théoricienne du Russiagate, et d’autres personnes espéraient que l’enquête sur Mueller aboutirait à un acte d’accusation qui justifierait le non-sens absolu qu’elle-même et d’autres ont promu pendant plus de deux ans. Il y a à peine deux semaines, l’ancien directeur de la CIA, John Brennan, qui a probablement conspiré avec les services de renseignement britanniques pour confondre Trump dans l’affaire avec la Russie, a déclaré qu’il s’attendait à de nouvelles inculpations : Lors de son apparition sur MSNBC le 5 mars 2019, Brennan a prédit que Mueller émettrait des actes d’accusation pour «complot criminel» impliquant Trump ou les activités de ses collaborateurs lors de l’élection de 2016.

Ce dernier espoir des jusqu’au-boutistes est maintenant évanoui : Le Conseil spécial, Robert S. Mueller III, a remis vendredi au procureur général, William P. Barr, un rapport très attendu, mettant ainsi fin à son enquête sur l'ingérence de la Russie dans l'élection de 2016 et l'éventuelle entrave à la justice par le président Trump. ... Un haut responsable du département de la justice a déclaré que le Conseil spécial n’avait recommandé aucune autre inculpation - une révélation applaudie par les partisans de Trump, alors même que d’autres enquêtes liées à celui-ci se poursuivent dans d’autres départements du département de la justice. ... Aucun des Américains inculpés par Mueller n'est accusé d'avoir conspiré avec la Russie pour s'immiscer dans l'élection - la question centrale du travail de Mueller. Au lieu de cela, ils ont plaidé coupable pour divers crimes, notamment d'avoir menti au FBI. L’enquête s’est terminée sans inculpation de plusieurs personnalités qui étaient sous la surveillance de Mueller depuis longtemps. ...
 

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Les conclusions du rapport Mueller seront publiées par le ministère de la Justice dans les prochains jours.

Que les promoteurs du Russiagate aient eu tort de gober les conneries du dossier Steele et les mensonges sur les « hackers russes » propagés par les marchands de sornettes Clapper et Brennan était évident depuis longtemps. En juin 2017, nous avions évoqué un long article du Washington Post sur le piratage présumé des élections en Russie et avions remarqué : En lisant cet article, il devient clair - mais jamais dit - que l'unique source de cette affirmation de Brennan sur le "piratage russe" en août 2016 est l'absurde dossier Steele, un ex-agent du MI6 payé très cher pour des recherches sur Trump commanditées par l'opposition. La seule autre "preuve" de "piratage russe" est le rapport Crowdstrike sur le "piratage" de la DNC. Crowdstrike qui soutient un agenda nationaliste ukrainien, a été embauché par la DNC et a dû se rétracter sur d'autres affirmations de "piratage russe" et personne d'autre n'a été autorisé à consulter les serveurs de la DNC. Autrement dit : Toutes les allégations de "piratage russe" reposent uniquement sur les "preuves" de deux faux rapports.

Le dossier Steele était une fausse étude commanditée par l’opposition et colportée par la campagne Clinton, John McCain et un groupe de types de la sécurité nationale anti-Trump. La prétention encore non prouvée de « piratage russe » visait à détourner l’attention du fait que Clinton et la DNC se soient entendus pour éliminer Bernie Sanders de la candidature. L’affirmation stupide selon laquelle la pêche aux clics sur internet, par une entreprise commerciale de Leningrad, aurait été une « campagne d’influence russe », a été conçue pour expliquer la défaite électorale de Clinton contre l’autre pire candidat de tous les temps. L’enquête Russiagate visait à empêcher Trump de nouer de meilleures relations avec la Russie, comme il l’avait promis lors de sa campagne.

Tout cela a connu un certain succès parce que des médias et blogueurs étaient heureux de vendre de telles absurdités sans les mettre dans un contexte plus large.

Il est grand temps de lancer une enquête approfondie sur Brennan, Clapper, Comey et la campagne Clinton afin de mettre en lumière le complot qui a conduit au dossier Steele, à l’enquête du FBI qui en découla, et à toutes les autres conneries qui ont suivi cette enquête.

En ce qui concerne Marcy Wheeler, Rachel Maddow et d’autres imbéciles qui ont colporté l’absurdité du Russiagate, je suis d’accord avec l’avis de Catlin Johnstone : Tous les politiciens, tous les médias, tous les experts de Twitter et tous ceux qui ont gobé cette giclée débile de bouses de vaches se sont officiellement discrédités à vie. ... Les personnes qui nous ont conduits dans ces deux années de folie du Russiagate sont les dernières personnes que quiconque devrait jamais écouter pour déterminer l’orientation future de notre monde.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone

mardi, 26 mars 2019

The Great Delusion: Liberal Dreams and International Realities

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The Great Delusion: Liberal Dreams and International Realities

An excerpt from John Mearsheimer's latest book.
by John J. Mearsheimer

Ex: https://nationalinterest.org

Editor’s Note: This is an excerpt from the new book The Great Delusion : Liberal Dreams and International Realities by John Mearsheimer.

Liberal hegemony is an ambitious strategy in which a state aims to turn as many countries as possible into liberal democracies like itself while also promoting an open international economy and building international institutions. In essence, the liberal state seeks to spread its own values far and wide. My goal in this book is to describe what happens when a power­ful state pursues this strategy at the expense of balance­-of­-power politics.

Many in the West, especially among foreign policy elites, consider liberal hegemony a wise policy that states should axiomatically adopt. Spreading liberal democracy around the world is said to make eminently good sense from both a moral and a strategic perspective. For starters, it is thought to be an excellent way to protect human rights, which are sometimes seri­ously violated by authoritarian states. And because the policy holds that liberal democracies do not want to go to war with each other, it ultimately provides a formula for transcending realism and fostering international peace. Finally, proponents claim it helps protect liberalism at home by eliminating authoritarian states that otherwise might aid the illiberal forces that are constantly present inside the liberal state.

This conventional wisdom is wrong. Great powers are rarely in a position to pursue a full­-scale liberal foreign policy. As long as two or more of them exist on the planet, they have little choice but to pay close attention to their position in the global balance of power and act according to the dictates of realism. Great powers of all persuasions care deeply about their survival, and there is always the danger in a bipolar or multipolar system that they will be attacked by another great power. In these circumstances, liberal great powers regularly dress up their hard­-nosed behavior with liberal rhe­toric. They talk like liberals and act like realists. Should they adopt liberal policies that are at odds with realist logic, they invariably come to regret it. But occasionally a liberal democracy encounters such a favorable balance of power that it is able to embrace liberal hegemony. That situation is most likely to arise in a unipolar world, where the single great power does not have to worry about being attacked by another great power since there is none. Then the liberal sole pole will almost always abandon realism and adopt a liberal foreign policy. Liberal states have a crusader mentality hard­-wired into them that is hard to restrain.

Because liberalism prizes the concept of inalienable or natural rights, committed liberals are deeply concerned about the rights of virtually every individual on the planet. This universalist logic creates a powerful incen­tive for liberal states to get involved in the affairs of countries that seriously violate their citizens’ rights. To take this a step further, the best way to ensure that the rights of foreigners are not trampled is for them to live in a liberal democracy. This logic leads straight to an active policy of regime change, where the goal is to topple autocrats and put liberal democracies in their place. Liberals do not shy from this task, mainly because they often have great faith in their state’s ability to do social engineering both at home and abroad. Creating a world populated by liberal democracies is also thought to be a formula for international peace, which would not just eliminate war but greatly reduce, if not eliminate, the twin scourges of nuclear prolifera­tion and terrorism. And lastly, it is an ideal way of protecting liberalism at home.

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This enthusiasm notwithstanding, liberal hegemony will not achieve its goals, and its failure will inevitably come with huge costs. The liberal state is likely to end up fi endless wars, which will increase rather than reduce the level of conflict in international politics and thus aggravate the problems of proliferation and terrorism. Moreover, the state’s militaristic behavior is almost certain to end up threatening its own liberal values. Liber­alism abroad leads to illiberalism at home. Finally, even if the liberal state were to achieve its aims—spreading democracy near and far, fostering eco­nomic intercourse, and creating international institutions—they would not produce peace.

The key to understanding liberalism’s limits is to recognize its relation­ship with nationalism and realism. This book is ultimately all about these three isms and how they interact to affect international politics.

Nationalism is an enormously powerful political ideology. It revolves around the division of the world into a wide variety of nations, which are formidable social units, each with a distinct culture. Virtually every nation would prefer to have its own state, although not all can. Still, we live in a world populated almost exclusively by nation­-states, which means that liberalism must coexist with nationalism. Liberal states are also nation­states. There is no question that liberalism and nationalism can coexist, but when they clash, nationalism almost always wins.

The influence of nationalism often undercuts a liberal foreign policy. For example, nationalism places great emphasis on self­-determination, which means that most countries will resist a liberal great power’s efforts to inter­fere in their domestic politics—which, of course, is what liberal hegemony is all about. These two isms also clash over individual rights. Liberals be­lieve everyone has the same rights, regardless of which country they call home. Nationalism is a particularist ideology from top to bottom, which means it does not treat rights as inalienable. In practice, the vast majority of people around the globe do not care greatly about the rights of individu­als in other countries. They are much more concerned about their fellow citizens’ rights, and even that commitment has limits. Liberalism oversells the importance of individual rights.

mears-tragedy.jpgLiberalism is also no match for realism. At its core, liberalism assumes that the individuals who make up any society sometimes have profound differences about what constitutes the good life, and these differences might lead them to try to kill each other. Thus a state is needed to keep the peace. But there is no world state to keep countries at bay when they have profound disagreements. The structure of the international system is anar­chic, not hierarchic, which means that liberalism applied to international politics cannot work. Countries thus have little choice but to act according to balance-­of-­power logic if they hope to survive. There are special cases, however, where a country is so secure that it can take a break from realpolitik and pursue truly liberal policies. The results are almost always bad, largely because nationalism thwarts the liberal crusader.

My argument, stated briefly, is that nationalism and realism almost always trump liberalism. Our world has been shaped in good part by those two powerful isms, not by liberalism. Consider that five hundred years ago the political universe was remarkably heterogeneous; it included city­-states, duchies, empires, principalities, and assorted other political forms. That world has given way to a globe populated almost exclusively by nation­ states. Although many factors caused this great transformation, two of the main driving forces behind the modern state system were nationalism and balance-­of-­power politics.

The American Embrace of Liberal Hegemony

This book is also motivated by a desire to understand recent American foreign policy. The United States is a deeply liberal country that emerged from the Cold War as by far the most powerful state in the international system. 1 The collapse of the Soviet Union in 1991 left it in an ideal position to pursue liberal hegemony. 2 The American foreign policy establishment em­ braced that ambitious policy with little hesitation, and with abundant opti­mism about the future of the United States and the world. At least at first, the broader public shared this enthusiasm.

The zeitgeist was captured in Francis Fukuyama’s famous article, “The End of History?,” published just as the Cold War was coming to a close. 3 Liberalism, he argued, defeated fascism in the first half of the twentieth century and communism in the second half, and now there was no viable alternative left standing. The world would eventually be entirely populated by liberal democracies. According to Fukuyama, these nations would have virtually no meaningful disputes, and wars between great powers would cease. The biggest problem confronting people in this new world, he suggested, might be boredom.

It was also widely believed at the time that the spread of liberalism would ultimately bring an end to balance-­of-­power politics. The harsh security competition that has long characterized great-­power relations would dis­appear, and realism, long the dominant intellectual paradigm in inter­national relations, would land on the scrap heap of history. “In a world where freedom, not tyranny, is on the march,” Bill Clinton proclaimed while campaigning for the White House in 1992, “the cynical calculus of pure power politics simply does not compute. It is ill­-suited to a new era in which ideas and information are broadcast around the globe before ambas­sadors can read their cables.”

Probably no recent president embraced the mission of spreading liberal­ism more enthusiastically than George W. Bush, who said in a speech in March 2003, two weeks before the invasion of Iraq: “The current Iraqi re­gime has shown the power of tyranny to spread discord and violence in the Middle East. A liberated Iraq can show the power of freedom to transform that vital region, by bringing hope and progress into the lives of millions. America’s interests in security, and America’s belief in liberty, both lead in the same direction: to a free and peaceful Iraq.” Later that year, on September 6, he proclaimed: “The advance of freedom is the calling of our time; it is the calling of our country. From the Fourteen Points to the Four Freedoms, to the Speech at Westminster, America has put our power at the service of principle. We believe that liberty is the design of nature; we be­lieve that liberty is the direction of history. We believe that human fulfill­ment and excellence come in the responsible exercise of liberty. And we believe that freedom—the freedom we prize—is not for us alone, it is the right and the capacity of all mankind.”

Something went badly wrong. Most people’s view of U.S. foreign policy today, in 2018, is starkly different from what it was in 2003, much less the early 1990s. Pessimism, not optimism, dominates most assessments of America’s accomplishments during its holiday from realism. Under Presi­dents Bush and Barack Obama, Washington has played a key role in sow­ing death and destruction across the greater Middle East, and there is little evidence the mayhem will end anytime soon. American policy toward Ukraine, motivated by liberal logic, is principally responsible for the ongo­ing crisis between Russia and the West. The United States has been at war for two out of every three years since 1989, fighting seven different wars. We should not be surprised by this. Contrary to the prevailing wisdom in the West, a liberal foreign policy is not a formula for cooperation and peace but for instability and conflict.

In this book I focus on the period between 1993 and 2017, when the Clinton, Bush, and Obama administrations, each in control of American foreign policy for eight years, were fully committed to pursuing liberal hegemony. Although President Obama had some reservations about that policy, they mattered little for how his administration actually acted abroad. I do not consider the Trump administration for two reasons. First, as I was finishing this book it was difficult to determine what President Trump’s foreign policy would look like, although it is clear from his rhetoric during the 2016 campaign that he recognizes that liberal hegemony has been an abject failure and would like to abandon key elements of that strategy. Second, there is good reason to think that with the rise of China and the res­urrection of Russian power having put great power politics back on the table, Trump eventually will have no choice but to move toward a grand strategy based on realism, even if doing so meets with considerable resistance at home.

John J. Mearsheimer is the R. Wendell Harrison Distinguished Service Professor of Political Science at the University of Chicago. His many books include The Tragedy of Great Power Politics and Conventional Deterrence .

jeudi, 21 mars 2019

Charles Beard: Punished for Seeking Peace

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Charles Beard: Punished for Seeking Peace

His reputation was savaged because he had the temerity to question the 'Good War' narrative.

Charles Austin Beard: The Return of the Master Historian of American Imperialism, Richard Drake, Cornell University Press, 336 pages

Charles Austin Beard: The Return of the Master Historian of American Imperialism is a new book by Richard Drake, himself an accomplished historian who teaches at the University of Montana. Although an estimable study, I can predict with certainty that it won’t be making The New York Times’s bestseller list.

The problem is not with the book, but with its protagonist. Even though today Charles Beard is all but forgotten, he remains a reviled and discredited figure—a supposed emblem of irresponsible scholarship. Yet the story of his rise and fall remains instructive.

For several decades prior to World War II, Beard stood alone at the pinnacle of his profession. As a historian and public intellectual, he was prolific, influential, fiercely independent, and equally adept at writing for scholarly audiences or for the general public. Then in the 1940s, during the last decade of his life, his reputation cratered suddenly, savagely, and irrevocably. Like Bill Cosby or Harvey Weinstein in our own day, almost overnight Beard became a pariah.

Rather than anything as heinous as serial sexual abuse, however, Beard’s offense was to have committed heresy, not once but twice over. Prior to the attack on Pearl Harbor, he opposed U.S. intervention in the European war that had begun in September 1939. And when that conflict ended in 1945 he had the temerity to question the heroic “Good War” narrative that was even then already forming.

Present-day Americans have become so imbued with this narrative as to be oblivious to its existence. Politicians endlessly recount it. Television shows, movies, magazines, and video games affirm it. Members of the public accept it as unquestionably true. From the very moment of its inception, however, Beard believed otherwise and said so in the bluntest terms possible.

For Beard, that narrative echoed a similar line that President Woodrow Wilson had promulgated while justifying U.S. intervention in the prior European war of 1914 to 1918. Back then, the issue at hand, according to Wilson, had been really quite simple: good pitted against evil with freedom, democracy, and prospects of world peace at stake.

Beard had enthusiastically supported Wilson’s war. Only later, especially when reflecting on the terms of the Versailles Treaty, did he develop second thoughts. With many others, Beard soon concluded that the Great War, as it was then called, had never been about freedom and democracy. The actual stakes had related to power, profit, and empire. And rather than advancing the cause of world peace, as Wilson had promised, the war’s outcome merely laid the basis for another bloodletting on an even larger scale.

During the 1920s, Beard began to align himself with the “revisionists”—scholars and journalists who rejected the official line about the origins of the Great War and about why Wilson had abandoned neutrality to fight alongside Great Britain and France. Revisionists disagreed among themselves about many things, but on one point all concurred: on matters related to war, the official story is merely a cover, propaganda concocted for domestic consumption. The purpose of that story is to conceal truth and manipulate popular opinion.

This deep-seated skepticism informed Beard’s perspective on U.S. foreign policy as it evolved after 1933. An early supporter of President Franklin Roosevelt, he recognized that FDR was a supremely gifted politician. Yet he also suspected that the president was a conniving dissembler. When New Deal reforms failed to provide an antidote to the Great Depression, Beard worried that Roosevelt might court trouble abroad. Distracting “giddy minds with foreign quarrels,” as Shakespeare had written in Henry IV, Part 2, offered the prospect of diverting attention from the shortcomings of FDR’s domestic programs.

As Beard saw it, unfolding events confirmed these suspicions. FDR promised peace, yet as the decade progressed, he was maneuvering the United States toward a showdown not only with Nazi Germany but also with the Japanese Empire. In a series of increasingly impassioned books and essays, Beard warned that FDR’s actions were at odds with his words. In the end, his efforts (and those of other anti-interventionists) proved to be of no avail. In December 1941, Roosevelt got the war on two fronts that he had deemed necessary.

beardbook1.jpgMy own judgment is that Roosevelt was right: U.S. entry into what became enshrined as World War II was indeed necessary. Yet by no stretch of the imagination does the result qualify as a “Good War.” And here is where Beard’s critique retains relevance.

As Beard pointed out at the time, a war that found the United States allied with Joseph Stalin’s Soviet Union could not possibly be conducive to freedom and democracy, however loosely defined. Stalin was a mass murderer. The Soviet Union was hostile to every value that America purported to represent. No less than Hitler’s Germany, it was a totalitarian enterprise with ambitions to expand its empire.

Furthermore, just as Beard charged, FDR did indeed lie to the American people about the purposes and implications of U.S. policy. Here is Roosevelt campaigning for a third term in Boston on October 30, 1940: “I have said this before, but I shall say it again and again and again: your boys are not going to be sent into any foreign wars.” Even by the standards of Donald Trump, this qualifies as a humongous whopper.

Roosevelt also exceeded his constitutional authority as commander-in-chief, the undeclared war waged by the U.S. Navy against German U-boats operating in the North Atlantic in 1941 offering but one example. While professing a commitment to peace, he also put the squeeze on Japan, confronting that nation with a choice of submission or war. When the Japanese opted for the latter, his administration was neither surprised nor disappointed.

Once the war against the Axis powers was fully engaged, Roosevelt sanctioned massive and indiscriminate bombing campaigns, culminating (after his death) in the use of atomic bombs to destroy Hiroshima and Nagasaki. Not unlike its adversaries, in waging war, the United States had shelved moral considerations. At home, meanwhile, all the chatter about freedom did not prevent America from maintaining a system of de facto racial apartheid and from locking up in concentration camps minorities deemed less than fully loyal.

None of these inconsistencies in the Good War narrative are secret. In the years since, all have been explored, documented, and discussed in detail. For our purposes, however, what matters is this: from a political perspective, none of them count for beans. Donald Rumsfeld might classify them as known knowns we choose to ignore. Yet it’s an inclination we indulge at our peril.

Today the Good War narrative survives fully intact. For politicians and pundits eager to explain why it is incumbent upon the United States to lead or to come to the aid of those yearning to be free, it offers an ever-ready reference point. Casting World War II as a perpetually relevant story of good versus evil relieves Americans of any obligation to consider how the international order may have changed since Hitler inspired Roosevelt, Winston Churchill, and Stalin to forge their unlikely ménage à trois.

In that sense, the persistence of the Good War narrative robs Americans of any capacity to think realistically about their nation’s role in the existing world. Instead, it’s always 1938, with appeasement the ultimate sin to be avoided at all costs. Or it’s 1941, when an innocent nation subjected to a dastardly attack from out of the blue is summoned to embark upon a new crusade to smite the evildoers. Or it’s 1945, with history calling upon the United States to remake the world in its own image. Meanwhile, the crimes, misdemeanors, and miscalculations that U.S. policymakers have racked up then and since end up being filed under the heading of irrelevant.

The charge laid against Beard by those who destroyed his reputation was that he was an “isolationist.” This was a malign distortion of Beard’s actual views, albeit one employed time and again ever since to smear anyone daring as Beard did to challenge the prevailing globalist consensus. The very fact that the smear retains political utility seven decades after World War II is a prime example of how the Good War continues to pervert contemporary foreign policy discourse.

There will be those who say that World War II revisionism inevitably involves anti-Semitism and Holocaust denial. Beard himself disproves this canard, as Richard Drake demonstrates. Beard’s purpose was not to identify scapegoats, but to establish accountability.

Drake’s fine book—itself an exercise in revisionism of the best sort—performs an important service. It invites readers to do what Beard himself strove to do as he kept close watch on events during the 1930s and 1940s: to remain alert to hypocrisy and contradiction contributing to the misuse of American power. In an era awash with fake news, the handiwork not only of policymakers but of the media itself, this task becomes more important than ever.

While World War II may have been necessary, it was not good. It was an epic tragedy from which Americans can learn much with relevance to the present day. But learning assumes a willingness to see beyond myths. Charles Beard shows us where to begin.

Andrew J. Bacevich is The American Conservative‘s writer-at-large. His new book is Twilight of the American Century, published by the University of Notre Dame Press. 

mardi, 19 mars 2019

USA: Guerre économique ou « guerre absolue » ?

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USA: Guerre économique ou « guerre absolue » ?

par Jean-Claude Paye

Ex: http://www.wikistrike.com

S’appuyant sur la Stratégie de sécurité nationale de Donald Trump, Jean-Claude Paye revient sur l’articulation des politiques économique et militaire de la Maison-Blanche. Il analyse l’opposition entre deux paradigmes économiques, l’un promouvant la mondialisation du capital (soutenu par le parti Démocrate) et l’autre l’industrialisation US (soutenu par Trump et une partie des Républicains). Si le premier conduisait à éliminer tout obstacle par la guerre, le second utilise la menace de la guerre pour rééquilibrer les échanges d’un point de vue national.

Dans le texte précédent « Impérialisme contre super-impérialisme » [1], nous avons soutenu que, en désindustrialisant le pays, le super-impérialisme états-unien avait affaibli la puissance des USA en tant que nation. Le projet initial de l’administration Trump était de procéder à une reconstruction économique sur une base protectionniste. Deux camps s’affrontent, celui porteur d’un renouveau économique des USA et celui en faveur d’une conflictualité militaire de plus en plus ouverte, option qui semble être principalement portée par le Parti démocrate. La lutte, entre les Démocrates et la majorité des Républicains, peut ainsi être lue comme un conflit entre deux tendances du capitalisme états-unien, entre celle porteuse de la mondialisation du capital et celle prônant une relance du développement industriel d’un pays économiquement déclinant.

Ainsi, pour la présidence Trump, le rétablissement de la compétitivité de l’économie US est prioritaire. La volonté de son administration d’installer un nouveau protectionnisme doit être lue comme un acte politique, une rupture dans le processus de mondialisation du capital, c’est à dire comme une décision d’exception, dans le sens développé par Carl Schmitt : « est souverain celui qui décide de la situation exceptionnelle » [2]. Ici, la décision apparaît comme une tentative de rupture d’avec la norme de la trans-nationalisation du capital, comme un acte de rétablissement de la souveraineté nationale US face à la structure impériale organisée autour des États-Unis.

Le retour du politique

La tentative de l’administration Trump se pose comme une exception face à la mondialisation du capitalisme. Elle se montre comme une tentative de rétablir la primauté du politique, suite à la constatation que les USA ne sont plus la super-puissance économique et militaire, dont les intérêts se confondent avec l’internationalisation du capital.

Le retour du politique se traduit d’abord par la volonté de mettre en œuvre une politique économique nationale, de renforcer l’activité sur le territoire US, grâce à une réforme fiscale destinée à rétablir les termes de l’échange entre les États-Unis et ses concurrents. Actuellement, ces termes se sont nettement dégradés en défaveur des USA. Ainsi, le déficit commercial global des États-Unis s’est encore creusé de 12,1 % en 2017 et se monte à 566 milliards de dollars. En soustrayant l’excédent que le pays dégage dans les services, pour se concentrer sur les échanges de biens uniquement, le solde négatif atteint même 796,1 milliards de dollars. C’est évidemment avec la Chine que le déficit est le plus massif : il a atteint, en 2017, le niveau record de 375,2 milliards de dollars pour les seuls biens [3].

La lutte contre le déficit du commerce extérieur reste centrale dans la politique économique de l’administration US. Privée par les Chambres états-uniennes de sa réforme économique fondamentale, le Border Adjusment Tax [4] destiné à promouvoir une relance économique grâce une politique protectionniste, l’administration Trump tente de rééquilibrer les échanges au cas par cas, par des actions bilatérales, en exerçant des pressions sur ses différents partenaires économiques, principalement sur la Chine, afin qu’ils réduisent leurs exportations vers les USA et qu’ils augmentent leurs importations de marchandises états-uniennes. Pour ce faire, d’importantes négociations viennent d’avoir lieu. Le 20 mai, Washington et Pékin ont annoncé un accord destiné à réduire de manière significative le déficit commercial US vis-à-vis de la Chine [5]. L’administration Trump réclamait une réduction de 200 milliards de dollars de l’excédent commercial chinois, ainsi que des droits de douane en forte baisse. Trump avait menacé d’imposer des droits de douane de 150 milliards de dollars sur les importations de produits chinois, et, comme mesure de rétorsion, la Chine se proposait de riposter en visant les exportations US, notamment le soja et l’aéronautique.

Opposition stratégique entre Démocrates et Républicains

Globalement, l’opposition entre la majorité du Parti républicain et les Démocrates repose sur l’antagonisme de deux visions stratégiques, tant au niveau économique que militaire. Ces deux aspects sont intimement liés.

 

Pour l’administration Trump le redressement économique est central. La question militaire se pose en terme de soutien d’une politique économique protectionniste, comme moment tactique d’une stratégie de développement économique. Cette tactique consiste à développer des conflits locaux, destinés à freiner le développement des nations concurrentes, et à saborder des projets globaux opposés à la structure impériale US, tel, par exemple, celui de la nouvelle Route de la soie, une série de « corridors » ferroviaires et maritimes devant relier la Chine à l’Europe en y associant la Russie. Les niveaux, économique et militaire, sont étroitement liés, mais, contrairement à la position des Démocrates, restent distincts. La finalité économique n’est pas confondue avec les moyens militaires mis en œuvre. Ici, le redéploiement économique de la nation états-unienne est la condition permettant d’éviter ou, du moins, de postposer un conflit global. La possibilité de déclencher une guerre totale devient un moyen de pression destiné à imposer les nouvelles conditions états-uniennes des termes de l’échange avec les partenaires économiques. L’alternative qui s’offre aux concurrents est de permettre aux USA de reconstituer leurs capacités offensives au niveau des forces productives ou d’être engagé rapidement dans une guerre totale.

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La distinction, entre objectifs et moyens, présent et futur, n’apparaît plus dans la démarche des Démocrates. Ici, les moments stratégique et tactique sont confondus. L’écrasement de ces deux aspects est caractéristique du schéma de la « guerre absolue », d’une guerre débarrassée de tout contrôle politique et qui n’obéit plus qu’à ses propres lois, celles de la « montée aux extrêmes ».

Vers une guerre « absolue » ?

La conséquence de la capacité du Parti démocrate à bloquer une relance interne aux USA est que si les USA renoncent à se développer, le seul objectif reste d’empêcher, par tous les moyens, dont la guerre, les concurrents et adversaires de le faire. Cependant, le scénario n’est plus celui des guerres limitées de l’ère Bush ou Obama, d’une agression contre des puissances moyennes déjà affaiblies, tel l’Irak, mais bien celui de la « guerre totale », telle qu’elle a été pensée par le théoricien allemand Carl Schmitt, c’est à dire d’un conflit qui entraîne une mobilisation complète des ressources économiques et sociales du pays, tels ceux de 14-18 et de 40-45.

Cependant, la guerre totale, de par l’existence de l’arme nucléaire, peut acquérir une nouvelle dimension, celle de la notion, développée par Clausewitz, de « guerre absolue ».

Chez Clausewitz, la « guerre absolue » est la guerre conforme à son concept. Elle est la volonté abstraite de détruire l’ennemi, tandis que la « guerre réelle » [6] est la lutte dans sa réalisation concrète et son utilisation limitée de la violence. Clausewitz opposait ces deux notions, car la « montée aux extrêmes », caractéristique de la guerre absolue, ne pouvait être qu’une idée abstraite, servant de référence pour évaluer les guerres concrètes. Dans le cadre d’un conflit nucléaire, la guerre réelle devient conforme à son concept. La « guerre absolue » quitte son statut d’abstraction normative pour se transformer en un réel concret.

Ainsi, comme catégorie d’une société capitaliste développée, l’abstraction de la guerre absolue fonctionne concrètement, elle se transforme en une « abstraction réelle » [7], c’est à dire une abstraction qui ne relève plus seulement du processus de pensée, mais qui résulte également du procès réel de la société capitaliste [8].

La « guerre absolue » comme « abstraction réelle »

Comme l’exprime le phénoménologue marxiste italien Enzo Paci, « la caractéristique fondamentale du capitalisme... réside dans sa tendance à faire exister des catégories abstraites comme catégories concrètes » [9]. Ainsi, en 1857, dans les Grundrisse(Fondamentaux), Marx écrivait déjà que « les abstractions les plus générales ne prennent au total naissance qu’avec le développement concret le plus riche… ».

Ce processus d’abstraction du réel n’existe pas seulement à travers les catégories de la « critique de l’économie politique », telles qu’elles ont été développées par Marx, comme celle de « travail abstrait », mais porte sur l’ensemble de l’évolution de la société capitaliste. Ainsi, la notion de « guerre absolue » quitte, à travers les rapports politiques et sociaux contemporains, le terrain de la seule abstraction de pensée pour devenir également une catégorie acquérant une existence réelle. Elle ne trouve plus sa seule fonction comme horizon théorique, comme « concret de pensée », mais devient un réel concret. La guerre absolue cesse alors d’être un simple horizon théorique, une limite conceptuelle, pour devenir un mode d’existence, une forme possible, effective, de l’hostilité entre les nations.

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Déjà, dans un article de 1937 « Ennemi total, guerre totale et État total » [10], Carl Schmitt suggère que les évolutions techniques et politiques contemporaines réalisent une identité entre la réalité de la guerre et l’idée même de l’hostilité. Cette identification conduit à une montée des antagonismes et culmine dans la « poussée à l’extrême » de la violence. C’est dire implicitement que la « guerre réelle » devient conforme à son concept, que la « guerre absolue » quitte son statut d’abstraction normative pour se réaliser en « guerre totale ».

Alors, le rapport guerre-politique se renverse, la guerre n’est plus, tel que le développait Clausewitz, pour caractériser son époque historique, la forme la plus haute de la politique et son achèvement momentané. La guerre totale, en devenant guerre absolue, échappe au calcul politique et au contrôle étatique. Elle ne se soumet plus qu’à sa propre logique, elle « n’obéit qu’à sa propre grammaire », celle de la montée aux extrêmes [11]. Ainsi, une fois déclenchée, la guerre nucléaire échappe au cran d’arrêt de la décision politique, de la même manière que la mondialisation du capital échappe au contrôle de l’État national, des organisations supra-nationales et plus généralement à toute forme de régulation.

Pour Donald Trump, les armées US ne sont plus là pour anéantir les États ne participant pas à la mondialisation du capital, par choix ou par nécessité, mais pour menacer toute puissance qui freinerait la réindustrialisation des États-
Unis.
De la « guerre contre le terrorisme » à la « guerre absolue » ?

Le 19 janvier 2018, parlant à l’Université Johns Hopkins dans le Maryland, le Secrétaire à la Défense du gouvernement Trump, James Mattis, a dévoilé une nouvelle stratégie de défense nationale reposant sur la possibilité d’un affrontement militaire direct entre les États-Unis, la Russie et la Chine [12]. Il a précisé qu’il s’agissait là d’un changement historique par rapport à la stratégie en vigueur depuis près de deux décennies, celle de la guerre contre le terrorisme. Ainsi, il a précisé : « C’est la concurrence entre les grandes puissances – et non le terrorisme – qui est maintenant le principal objectif de la sécurité nationale américaine ».

Un document déclassifié de 11 pages, décrivant la Stratégie de défense nationale en termes généraux [13], a été remis à la presse. Une version confidentielle plus longue, qui inclut les propositions détaillées du Pentagone pour une augmentation massive des dépenses militaires, a été, quant à elle, soumise au Congrès [14]. La Maison-Blanche demande une augmentation de 54 milliards de dollars du budget militaire, en la justifiant par le fait qu’« aujourd’hui, nous sortons d’une période d’atrophie stratégique, conscients du fait que notre avantage militaire compétitif s’est érodé » [15]. Le document poursuit : « La puissance nucléaire — la modernisation de la force de frappe nucléaire implique le développement d’options capables de contrer les stratégies coercitives des concurrents, fondées sur la menace de recourir à des attaques stratégiques nucléaires ou non-nucléaires ».

Pour l’administration Trump, l’après-Guerre froide est terminée. La période pendant laquelle les États-Unis pouvaient déployer leurs forces quand ils le veulent, intervenir à leur guise, n’est plus d’actualité. « Aujourd’hui, tous les domaines sont contestés : les airs, la terre, la mer, l’espace et le cyberespace » [16].

« Guerre absolue » ou guerre économique

La possibilité d’une guerre des USA contre la Russie et la Chine, c’est-à-dire le déclenchement d’une guerre absolue, fait partie des hypothèses stratégiques, tant de l’administration états-unienne que des analystes russes et chinois. Cette faculté apparaît comme la matrice qui sous-tend et rend lisible la politique étrangère et les opérations militaires de ces pays, par exemple l’extrême prudence de la Russie, une retenue qui peut faire penser à de l’indécision ou à un renoncement, par rapport aux provocations états-uniennes sur le territoire syrien. La difficulté de la position russe ne provient pas tant de ses propres divisions internes, du rapport de forces entre les tendances mondialiste et nationaliste au sein de ce pays, que des divisions inter-états-uniennes balançant entre guerre économique et guerre nucléaire. L’articulation entre menaces militaires et nouvelles négociations économiques sont bien deux aspects de la nouvelle « politique de défense » US.

Cependant, Elbrige Colby, assistant du Secrétaire à la Défense a cependant affirmé que malgré le fait que le discours de Mattis mette clairement l’accent sur la rivalité avec la Chine et la Russie, l’administration Trump veut « continuer de rechercher des zones de coopération avec ces nations ». Ainsi, Colby disait, « il ne s’agit pas d’une confrontation. C’est une démarche stratégique de reconnaître la réalité de de la compétition et l’importance du fait que "les bonnes clôtures font les bons voisins" » [17].

Cette politique prônant le rétablissement de frontières contrarie frontalement la vision impériale US. Bien résumée par le Washington Post, cette dernière pose une alternative : la persistance d’un Empire états-unien « garant de la paix mondiale » ou bien la guerre totale. Cette vision s’oppose au rétablissement d’hégémonies régionales, c’est à dire d’un monde multipolaire dont, selon cet organe de presse, « le résultat serait la future guerre mondiale » [18].

[1] « USA : Impérialisme contre ultra-impérialisme », par Jean-Claude Paye, Réseau Voltaire, 26 février 2018.

[2] Carl Schmitt, Théologie politique I, trad J.-L. Schiegel, Paris, Gallimard, 1988, p. 16.

[3] Marie de Vergès, « Les Etats-Unis de Donald Trump enregistrent leur plus gros déficit commercial depuis 2008 », Le Monde économie, le 7 février 2018.

[4] Jean-Claude Paye, « USA : Impérialisme contre ultra-impérialisme », Op. Cit.

[5] « Washington et Pékin écartent pour l’heure une guerre commerciale », La Libre et AFP, le 20 mai 2018.

[6] Voir C. von Clausewitz, De la guerre, ouvr. cit., p. 66-67 et p. 671 et ss., et C. Schmitt, Totaler Feind, totaler Krieg, totaler Staat, ouvr. cit, p. 268 : « Il y a toujours eu des guerres totales ; cependant il n’existe de pensée de la guerre totale que depuis Clausewitz, qui parle de « guerre abstraite » ou de « guerre absolue » ».

[7] Lire : Emmanuel Tuschscherer, « Le décisionisme de Carl Schmitt : théorie et rhétorique de la guerre », Mots. Les langages du politique, mis en ligne le 9 octobre 2008.

[8] Alberto Toscano, « Le fantasme de l’abstraction réelle », Revue période, février 2008.

[9] Enzo Paci, Il filosofo e la citta, Platone, Whitebread, Marx, editions Veca, Milano, Il Saggitario, 1979, pp. 160-161.

[10] C. Schmitt, « Totaler Feind, totaler Krieg, totaler Staat », in Positionen und Begriffe, Berlin, Duncker und Humblot, p. 268-273, voir note 1 in Emmanuel Tuschscherer, « Le décisionisme de Carl Schmitt : théorie et rhétorique de la guerre », op.cit., p. 15.

[11] Bernard Pénisson, Clausewitz un stratège pour le XXIe siècle ?, conférence à à l’Institut Jacques Cartier, le 17 novembre 2008.

[12] “Remarks by James Mattis on the National Defense Strategy”, by James Mattis, Voltaire Network, 19 January 2018.

[13Summary of the National Defense Strategy of The United State of America.

[14National Defense Strategy of The United State of America, The President of The United State of America, December 18, 2017. Notre analyse : « La Stratégie militaire de Donald Trump », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 26 décembre 2017.

[15] Mara Karlin, « How to read the 2018 National Defense Strategy », Brookings, le 21 janvier 2018.

[16] Fyodor Lukyanov, « Trump’s defense strategy is perfect for Russia »,The Washington Post, January 23, 2018.

[17] Dan Lamothe, « Mattis unveils new strategy focused on Russia and China, takes Congress to task for budget impasse », The Washington Post, January 19, 2018.

[18] « The next war. The growing danger of great-power conflict », The Economist, January 25, 2018.

 

Jean-Claude Paye

Jean-Claude PayeSociologue. Dernier ouvrage publié en français : De Guantanamo à Tarnac . L’emprise de l’image(Éd. Yves Michel, 2011). Dernier ouvrage publié en anglais : Global War on Liberty (Telos Press, 2007).

Chine-Amérique : les trois fronts de la guerre économique voulue par Trump

La guerre économique qui vient de commencer entre les États-Unis et la Chine sur le front commercial, est déjà en cours sur le front industriel où elle pourrait s’aggraver. Il est peu probable qu’elle déborde au front financier. Mais Si la situation s’envemine, cette guerre économique pourrait avoir un impact analogue à celui de la crise de 2008. Il pourrait coûter 4 points de PIB aux deux principaux protagonistes, un peu plus pour l’Union européenne et sans doute pour le reste de l’Asie où ce conflit saperait le fonctionnement des chaînes globales de valeur.
 
Dans un rapport paru en décembre 2017, la National Security Strategy définissait la Chine comme un « rival stratégique » des États-Unis au même titre que la Russie. C’était le début de le début de l’offensive américaine. Six mois plus tard, la mise en ligne sur le site de la Maison Blanche d’un document dénonçant les pratiques chinoises pour obtenir les technologies marquait la victoire des Faucons, dont Peter Navarro, ex-professeur de l’université de Californie et auteur de Death by China et d’un film éponyme.

Front commercial

Les échanges sino-américains de marchandises ont atteint 620 milliards de dollars en 2017. Quant au déficit des États-Unis (384 milliards), il est loin d’être compensé par leur excédent dans les échanges de services (38 milliards), qui serait plus élevé si les pratiques d’optimisation fiscale des entreprises américaines ne privaient l’Amérique d’une partie des revenus de propriété intellectuelle.
 
Les relations commerciales ne se réduisent plus aux flux qui traversent les frontières mais incluent l’activité des filiales. Les ventes des succursales américaines en Chine (272 milliards de dollars) sont près de deux fois supérieures au montant des exportations de l’Amérique vers l’Empire du milieu. Inversement, celles des filiales chinoises aux États-Unis sont faibles (10 milliards). Prenant en compte ces ventes, la Deutsche Bank montre que le déficit « des échanges agrégés » sino-américains a diminué de 111 milliards en 2008 à 30 milliards de dollars en 2016, alors que selon les douanes, le déficit commercial s’est creusé de 271 milliards de dollars en 2008 à 384 milliards de dollars en 2017.
 
Le rééquilibrage est en cours mais cette évolution, de même que les promesses faites par la Chine après l’imbroglio ZTE, n’a pas calmé l’ardeur du président et de ses conseillers. C’est que la Maison Blanche poursuit d’autres objectifs.
 
Premier objectif : à quelques mois des élections de mi-mandat, Donald Trump montre qu’il tient ses promesses électorales. Renouant avec la tradition, de Reagan à Obama en passant par Georges W. Bush, il a élevé les droits de douane sur les importations d’acier. La différence est que la Chine est un fournisseur marginal des États-Unis et que Trump a invoqué la sécurité nationale pour éviter un vote du Congrès. Cette hausse, comme les précédentes, a été critiquée par l’industrie automobile et le milliardaire a réagi en prenant, également au nom de la sécurité nationale, des mesures contre les importations de voitures allemandes dont il dénonçait déjà la présence dans les années 1980.
 
Second objectif : ses conseillers qui veulent enrayer la montée en puissance de l’industrie chinoise ont élaboré des frappes « chirurgicales » avec des hausses tarifaires sur des produits ciblés par le plan « Manufacturing China 2025 ». Une première liste de 818 produits, 34 milliards de dollars d’importations, est frappée d’un tarif additionnel de 25 % depuis ce vendredi 6 juillet et une seconde liste élaborée après l’enquête menée dans le cadre de l’article 301 comprend 284 produits pour lesquels le niveau des hausses n’a pas encore été décidé. Aucun bien de consommation n’est concerné.
 
Aller plus loin, comme le souhaite Donald Trump dans ses tweets, n’est pas sans risque. Du fait de l’imbrication des économies, une hausse des droits de douane sur des produits made in China rendra plus onéreux des produits fabriqués aux États-Unis avec des conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages américains et la compétitivité des exportations américaines.

Front industriel

Sur le front industriel l’objectif des faucons de la Maison Blanche va beaucoup plus loin qu’une mesure punitive. Il s’agit de freiner les avancées chinoises en faisant obstacle aux transferts de technologie qui s’opèrent via les investissements directs étrangers (IDE), vers la Chine ou de la Chine vers les États-Unis. Ce choix conduit à un changement radical vis-à-vis de la mondialisation.
 
Rappelons que la Chine est l’un des premiers pays hôtes des IDE et que ces derniers représentent un apport considérable de technologies pour son industrie. Le marché chinois a toujours fait rêver et Pékin monnaie son accès contre l’acquisition de technologies. Les investissements étrangers en Chine ont longtemps dégagé suffisamment de bénéfices pour que les entreprises acceptent de céder leurs technologies. C’est moins le cas depuis quelques années et les entreprises étrangères hésitent davantage à s’implanter. L’un des objectifs de la baisse des impôts sur les sociétés est de freiner les investissements américains en Chine où selon les résultats de l’enquête de la Chambre de commerce américaine (décembre 2016), six entreprises sur dix envisageraient de se retirer.
 

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Quant aux entreprises chinoises, si elles investissent à l’étranger, c’est pour acquérir des ressources et des technologies. Entre 2014 et 2016, elles ont plus investi aux États-Unis que les entreprises américaines n’ont investi en Chine. Après une embellie en 2016, les investissements en Amérique ont chuté en 2017 du fait des restrictions imposées par le gouvernement de Pékin, inquiets des sorties de capitaux. Ils se sont effondrés au premier semestre 2018, avec une baisse de 92 % en valeur et une division par deux en nombre, selon Rhodium. La détérioration des relations bilatérales et le renforcement du Committee on Foreign Investment in the United States expliquent cette dégringolade. Parmi les décisions marquantes, Washington a posé son veto au rachat de Qualcomm par une entreprise sino-malaisienne en mars ainsi qu’à un projet d’implantation de China Mobile en juillet.
 
En 2017, General Motors a vendu plus de voitures en Chine qu’aux États-Unis, respectivement 4 et 3 millions. Pour plusieurs grandes entreprises américaines, l’évolution du marché chinois est un enjeu plus important que celle du marché américain. Les sept cents filiales américaines peuvent devenir des otages d’une guerre économique si Pekin leur rend la vie plus difficile. Plusieurs anecdotes signalent qu’elles rencontrent davantage de difficultés. Ouvrir ce front, qui affecterait plus l’économie américaine que les hausses tarifaires, serait une arme à double tranchant. Il provoquerait une baisse plus forte des entrées d’IDE, tout en affectant l’économie chinoise qui connaît une phase de ralentissement.

Front financier

Dans un conflit avec les États-Unis, la Chine a deux autres armes à sa disposition : la parité du yuan et ses créances sur le Trésor américain. À partir de 2005, le gouvernement chinois a engagé une appréciation de sa monnaie pour inciter les entreprises à monter en gamme. Interrompu par la crise mondiale, ce mouvement a repris jusqu’en 2013 et après plusieurs mois de baisse, il s’est à nouveau apprécié. Au cours des deux derniers mois, le rythme de la baisse du yuan a été le plus fort. La Chine va-t-elle le déprécier pour compenser une hausse des tarifs douaniers sur ces exportations ? Elle s’en défend, et la Banque Centrale a pris des mesures pour freiner cette baisse qui pourrait être la conséquence d’une fuite de capitaux. Utiliser l’arme du change serait une option dangereuse du fait de ses répercussions sur l’inflation en Chine, un casus belli aux États-Unis.
 
La Chine reste le premier créancier étranger de l’État américain, avec un peu plus de 1 000 milliards de dollars en mai 2018. Peut-elle utiliser cette arme contre Washington ? Dans ses souvenirs de sa visite à Pékin comme Secrétaire d’État, Hilary Clinton confie qu’il lui était difficile de se montrer ferme avec son banquier. Ses propos ne doivent pas faire illusion. L’accumulation par la Chine de bons du Trésor ne lui donne pas d’influence sur la gestion économique américaine. En effet, Pékin ne détient que 5 % de la dette publique américaine (21 000 milliards de dollars), qui est portée à plus de 70 % par les institutions fédérales des États-Unis, dont la Sécurité sociale, mais aussi par ses banques, ses entreprises et ses ménages.
Faute d’alternative, le marché des bons du Trésor américain est le plus liquide au monde. En vendant leur portefeuille, les autorités chinoises provoquerait une baisse de valeur qui ne les épargneraient pas, sans que ce geste ne mette vraiment en difficulté l’économie américaine.

Les conséquences d’une stratégie perdant-perdant

La guerre économique qui démarre poursuit plusieurs objectifs aux échéances variées : le mois de novembre pour les élections, début 2019 pour le déficit bilatéral. Si ce dernier est surtout le fruit de l’organisation des chaînes de valeur entre les deux superpuissances, il est aussi sensible aux arbitrages de la Chine pour ses achats de matières premières. Quant au déficit courant américain que le président Trump veut résorber, il n’est pas une conséquence des politiques commerciales chinoises ou allemandes, mais il sanctionne le fait que les Américains vivent au-dessus de leurs moyens.
 
Les « bruits de botte » de ces derniers mois ont créé un climat d’incertitude. Avant même que la première salve n’ait été tirée, les conséquences étaient d’ores et déjà perceptibles sur l’évolution du Dow Jones et du Hang Seng, comme sur l’économie réelle. La baisse d’un quart des cours du soja depuis avril affecte 300 000 producteurs américains et des lettres de commande aux exportateurs chinois. Elle porte sur 10 % des importations américaines de Chine et provoquerait, selon le Cepii, une baisse d’environ 25 milliards de dollars des exportations chinoises. L’impact sera modeste et affectera plus l’économie chinoise qui ralentit que l’économie américaine dopée par les réductions budgétaires.
 

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« Aucun pays ne répondra aux mesures américaines », n’a pas hésité à fanfaronner Peter Navarro. Las ! En dépit de ces affirmations, la Chine – qui a par ailleurs déclaré qu’elle ne respecterait pas l’embargo sur l’Iran – répond par des hausses tarifaires sur 50 milliards de dollars d’importations venant de circonscriptions américaines ayant voté pour Donald Trump. Cette réponse amènera-t-elle le président à déclencher la seconde phase de son offensive en demandant au département du Commerce d’imposer une hausse de 10 % ? Ira-t-il jusqu’à 500 milliards, comme il l’a annoncé ? Le conflit porterait sur l’équivalent de 4 points de PIB américain auxquels s’ajouterait l’impact des mesures prises par le Canada et éventuellement par l’UE. Selon une estimation du Conseil d’Analyse économique, l’impact global (cumulé) d’une guerre économique approcherait celui de la crise de 2008 et serait de 4 points de PIB pour les deux principaux protagonistes, un peu plus pour l’UE et sans doute pour le reste de l’Asie car ce conflit saperait le fonctionnement des chaînes globales de valeur.
 
Cette offensive américaine devrait accélérer plutôt que freiner la mise en œuvre du plan « Manufacturing China 2025 ». Un plan qui est dans la ligne de mire du gouvernement américain et auquel les médias chinois ne font plus allusion depuis quelques semaines pour ne pas l’irriter. Au mois de mars, l’affaire ZTE avait révélé la dépendance technologique de la Chine pour les semi-conducteurs. Elle avait aussi renforcé la détermination chinoise de consolider cette industrie. Jack Ma, le PDG d’Alibaba, a annoncé la création d’une division R&D consacrée aux puces utilisées dans l’intelligence artificielle. Dans ce domaine crucial, la taille de la population connectée et la faible protection des données personnelles donne un avantage à la Chine.
En engageant une guerre économique au nom du « Make America great again », le président déconstruit l’architecture de l’ordre mondial que les États-Unis ont bâti à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il lui substitue un nouvel ordre dans lequel, l’Amérique, comme le Royaume-Uni du XIXème sicèle, n’aura ni allié éternel ni adversaire perpétuel, mais seulement des intérêts. C’était envisageable au temps de la Pax Britannica. Mais pas dans un monde multipolaire.
A propos de l'auteur
Jean-Raphaël Chaponnière est membre du groupe Asie21 (Futuribles) et chercheur associé à Asia Centre. Il a été économiste à l’Agence Française de Développement, conseiller économique auprès de l’ambassade de France en Corée et en Turquie, et ingénieur de recherche au CNRS pendant 25 ans. Il a publié avec Marc Lautier : "Economie de l'Asie du Sud-Est, au carrefour de la mondialisation" (Bréal, 2018) et "Les économies émergentes d’Asie, entre Etat et marché" (Armand Colin, 270 pages, 2014).

samedi, 16 mars 2019

Propos d’Alain de Benoist sur Salvini, la « Lega » et ses éditeurs de la "Alt-Right" américaine

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Propos d’Alain de Benoist sur Salvini, la « Lega » et ses éditeurs de la "Alt-Right" américaine

Par Gilles Dusaussois

Sur le site https://www.ariannaeditrice.it, en date du 2 mars 2019, j’ai eu la surprise de trouver un entretien étonnant qu’Alain de Benoist a accordé à Anais Ginori, journaliste auprès du quotidien italien La Repubblica. Les réflexions de la figure de proue de la « Nouvelle Droite » méritaient, me semble-t-il, une traduction française. La voici :

La Nouvelle Droite, que vous avez créée, il y a un demi-siècle, fut-elle une tentative de dédouaner des idées extrémistes ?

Je ne me suis jamais reconnu dans l’étiquette inventée par des journalistes. Mon groupe de réflexion s’occupe plutôt de formuler une critique radicale de la modernité, de la destruction des solidarités, à travers ce que Marx définit comme « les eaux glacées du calcul égoïste ».

Certains de vos amis vous décrivent comme le père spirituel de Salvini. Est-ce exact ?

Je n’ai rencontré Salvini qu’une seule fois et, franchement, je doute qu’il ait jamais lu mes livres. Je ne me reconnais pas dans la Lega ni davantage dans le « Mouvement Cinq Etoiles ». J’observe en voisin ce gouvernement parce que l’Italie est un laboratoire du populisme.

Vos livres sont très prisés parmi les militants de la « Alt-Right » (américaine)...

Par pitié, ce sont de petits extrémistes ridicules. Ils se servent de moi pour se construire une crédibilité. Je m’intéresse à Trump qui vaut mieux que ce qu’en pensent ses adversaires. Aux Etats-Unis, j’aurais voté pour Bernie Sanders. Et, aujourd’hui en France, je me sens proche des Gilets jaunes.

Commentaires :

  • Voilà la « Nouvelle Droite » devenue subitement « marxiste » après un itinéraire qui ne l’aurait pas laissé deviner… La question qu’il faut se poser est dès lors la suivante : peut-on, à intervalles réguliers, opérer des volte-face aussi audacieuses sans justement perdre une certaine crédibilité… ?
  • Le chef de file de la ND ffançaise semble considérer Salvini comme un beauf analphabète, attitude d’autant plus bizarre que la revue éléments, qu’il patronne et où il fait la pluie et le beau temps, vient de sortir un numéro assez copieux faisant l’éloge de Salvini et de la forme de populisme qu’il a inaugurée. Pire: ce sont donc les propres rédacteurs d'éléments qui sont reniés puisque ce sont eux, principalement, qui ont soutenu la thèse du lien entre Salvini et AdB... Des purges en vue dans la rédaction ? Aussi fracassantes que celles qui ont lourdé Faye dans les années 1980 et Champetier au début des années 2000 ?

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On voit bien Salvini sur la couverture, avec, en plus, la mention suivante: "Les intellectuels qui l'ont formé"...

  • Le reniement unilatéral de la Lega et du M5S paraît comique dans la mesure où notre philosophe du 11ème arrondissement semble passionné, ces temps-ci, par le « populisme », en dépit de la diabolisation de cet « -isme ».
  • Les éditeurs de la « alt-right » se sont décarcassés pour publier ses livres, pour prendre le risque d’un bouillon, surtout en traduisant « Vu de droite », livre datant de 1978 et comprenant des textes des années 1970, et ont dépensé des sommes rondelettes pour l’inviter aux Etats-Unis. Ils apprécieront hautement cette nouvelle vogue de l’élégance française, en apprenant que le sieur AdB les prend pour « de petits extrémistes ridicules » qui abusent de sa personne pour se faire valoir.
  • Enfin, contradiction supplémentaire : le chef de file de la ND se dit proche des Gilets jaunes mais rejette Salvini, la Lega, le M5S (et donc di Maio) qui sont leurs principaux soutiens au niveau international. Comprenne qui pourra. A moins qu’il faille imputer le grand âge du « philosophe » ?

mercredi, 13 mars 2019

Les 10 fonctions de l’USAID, la méga agence « humanitaire » de la CIA

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Les 10 fonctions de l’USAID, la méga agence « humanitaire » de la CIA

Auteur : Nazanín Armanian
Ex: http://www.zejournal.mobi

Les camions de charité de l’USAID destinés au Venezuela restent stationnés à la frontière avec la Colombie, tandis que Donald Trump, l’homme qui incarne la solidarité, menace le pays sud-américain d’une attaque militaire : il veut que des milliers de Vénézuéliens qui vont mourir des conséquences des bombes et des balles le fassent avec leur ventre plein de biscuits qu’il ne pourrait pas vendre sur les marchés des pays développés, peut-être parce qu’on a utilisé des graines modifiées pour les faire, ou parce qu’ils allaient expirer.

L’Agence des États-Unis pour le Développement International (USAID) a été créée en 1961 dans le but d’étendre le « Plan Marshal » aux pays stratégiques du monde, en canalisant ses politiques pour

1) empêcher les forces communistes, renforcées par la défaite du fascisme pendant la Deuxième Guerre Mondiale, de prendre le pouvoir et

2) ouvrir de nouveaux marchés aux entreprises étatsuniennes.

Le lien entre l’USAID et le Bureau de Sécurité Publique, alors dirigé par l’agent de la CIA Byron Engle, a été renouvelé année après année : en 2015, Barack Obama a nommé Gayle Smith, directrice du Conseil de Sécurité Nationale de la Maison Blanche, à la tête de l’agence.

Selon WikiLeaks, entre 2004 et 2006, l’USAID a mené plusieurs actions au Venezuela et fait un don de 15 millions de dollars à des dizaines d’organisations civiles, afin de faire avancer la stratégie de l’ancien ambassadeur de Washington William Brownfield, basée sur la provocation d’une fracture du Chavisme et l’organisation des secteurs mécontents des réformes du Parti Socialiste Uni du Venezuela.

Les fonctions de l’USAID

1- Choisir le bon pays pour le projet préparé par le Secrétaire d’État, et évidemment ce n’est pas toujours le pays le plus utile. Ensuite, l’agence doit décider dans quel secteur elle sera impliquée, bien que ses secteurs préférés soient l’énergie, l’éducation, la santé, la sécurité et l’agriculture. Dans ce secteur, la production de cultures vivrières est généralement remplacée par des cultures commerciales. Elle place ensuite ses troupes dans des positions clés pour subvertir les économies locales. Les fois où elle embauche des gens de valeur solidaires indigènes, c’est pour réduire ceux qui devraient militer dans les partis politiques pour un changement fondamental dans la gestion de la charité.

En Irak colonisé, l’USAID injecte l’économie néolibérale, impose des privatisations massives, y compris une partie de l’industrie pétrolière, et force la théocratie fantoche installée à comparer les grains transgéniques de Monsanto.

Au Pérou, l’agence a donné 35 millions de dollars dans les années 1990 à la campagne de Alberto Fujimori, dont les mesures économiques ont plongé le pays dans la misère. La solution du protégé de l’USAID n’était pas de réduire la pauvreté mais de réduire les pauvres : Fujimori a stérilisé de force 300 000 femmes autochtones.

2- Affaiblir et même éliminer les institutions du pays d’accueil, en créant des réseaux et des entités parallèles, en favorisant la dénationalisation des secteurs fondamentaux en faveur « d’entrepreneurs ». Évidemment, l’intérêt de la bourgeoisie étatsunienne n’est pas dans l’autosuffisance des autres pays, bien au contraire.

3- Faciliter à la CIA le « placement de ses hommes dans la police de pays stratégiques à travers le monde« , explique AJ Langguth, ancienne correspondante du New York Times. En fait, le budget de l’USAID est en partie le financement caché des agences de renseignement américaines.

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4- Renforcer la domination des États-Unis sur la finance mondiale. En Inde, pays d’accueil de la Chine pour Washington, l’USAID, en coordination avec le gouvernement d’extrême droite de Narendra Modi, a mis en œuvre la « numérisation de l’économie », forçant des dizaines de millions de personnes des classes les plus pauvres du pays à abandonner le paiement en espèces en faveur du numérique, leur donnant seulement un mois – novembre 2016 – pour livrer leurs grosses coupures à la banque, lorsque la plupart ne détenaient aucun compte bancaire. Et qu’a obtenu l’USAID ?

a) Servir les intérêts des Technologies de l’Information (TI), des fournisseurs de services de paiement et des sociétés émettrices de cartes de crédit MasterCard, Visa et la Fondation Gates qui a promis en échange de donner un généreux chèque à l’ONU.

b) Appauvrir les Indiens en détruisant les économies de nombreux petits commerçants et producteurs, qui n’arrivaient pas à déposer leur argent.

c) Obtenir les données des utilisateurs.

d) En réduisant l’utilisation des liquidités à l’échelle mondiale, elle permet aux États-Unis de renforcer le dollar par la domination de leurs entreprises sur les finances internationales.

e) Surveiller le commerce mondial : Washington peut ainsi sanctionner, par exemple, les entreprises qui travaillent avec l’Iran, comme Huawei en Chine.

5- Former les forces de répression d’un État, en les préparant à démanteler la résistance de la population. Dan Mitrione, un homme de l’USAID en Uruguay, a donné des cours dans les années 1970 sur « l’art complexe de l’interrogatoire » et la manière dont les détenus devraient être torturés, en utilisant des hommes et des femmes « vivants » sans abri comme cobayes humains. L’USAID, avec les Bérets verts et la CIA, est impliqué dans la torture, le meurtre et la disparition de milliers d’hommes et de femmes guatémaltèques progressistes après avoir formé près de 30 000 policiers et des groupes paramilitaires pour cette mission.

Au Brésil, le Bureau des Initiatives de Transition (OTI), un contractant de l’USAID chargé de déstabiliser les gouvernements non alliés, a agi de la même manière. L’une de ses victimes était Dilma Rousseff, arrêtée et torturée pour être une étudiante marxiste.

6- Créer des milliers d’emplois pour les ONG étatsuniennes et leur fournir d’énormes fonds publics et privés pour servir les intérêts de donateurs tels que Rockefeller, Soros, Gates, Ford et Omidyar, tout en ouvrant les marchés aux sociétés des États-Unis. L’USAID elle-même prétend retourner dans son pays près de 80% de l’argent investi dans cette organisation.

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Une fois que Bush et ses alliés ont transformé l’Irak en décombres avec des mensonges en 2003, un des contractants de l’USAID, Creative Associates International Inc. (CAII) a remporté un contrat de 157 millions de dollars pour l’achat de tableaux noirs et de craie pour des écoles qui avaient été détruites par des missiles étatsuniens. Un autre, International Relief and Development (IRD), a reçu 2,4 milliards de dollars pour les mêmes fins, et Halliburton et Bechtel ont reçu la même somme.

En Afghanistan, principal bénéficiaire de l’aide américaine, où des centaines « d’experts en genre » occidentaux ont débarqué pour « sauver les femmes », l’USAID a alloué 216 millions de dollars en 2018 pour autonomiser 75 000 femmes : selon l’Inspecteur général spécial pour la reconstruction de l’Afghanistan, seulement 50 environ ont été employées et l’argent des contribuables a disparu. 89,7 millions de dollars de plus ont disparu. Arnold Fields, son directeur, a été forcé de démissionner par le Congrès.

La « Démocratisation de l’Afghanistan » menée par Bush-Cheney et 300 000 soldats de l’OTAN et des dizaines de milliers de sous-traitants « djihadistes » du Pentagone, en plus de tuer presque un million d’Afghans et de pousser des millions de familles à quitter leur foyer, a eu pour effet de faire oublier la mémoire historique du pays des manuels scolaires : peu se souviennent que la République démocratique d’Afghanistan (1978-1992), dirigée par les communistes, a éliminé l’usure, la culture de l’opium, légalisé les syndicats, établi une loi sur le salaire minimum, a établi la négociation collective, l’égalité entre hommes et femmes, qui a permis que pour la première fois 40% des médecins soient des femmes ainsi que 60% des professeurs de l’université de Kaboul. L’éducation a été déclarée gratuite et universelle, de même que les soins de santé, et les lits d’hôpitaux ont été doublés.

Selon la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), le nombre de civils tués ou blessés lors d’attaques de l’OTAN en 2017 a augmenté de 50 % par rapport à 2016, les deux tiers du total étant des femmes et des enfants. Aujourd’hui, les écoles de l’USAID n’enseignent pas les valeurs de la collectivité, mais l’individualisme le plus pervers du « chacun pour soi ».

7- Déstabiliser la résistance à l’impérialisme et aux dictatures alliées, dans les pays en tension, en soulageant la faim de manière ponctuelle et dans des moments concrets par des aumônes, empêchant la population de s’organiser pour exiger la justice sociale. En Égypte, à la fois sous le régime Moubarak et aujourd’hui sous le despotisme du général al Sisi, Washington oblige le Caire à acheter des armes alors que des milliers de personnes vivent dans des cimetières, puis envoie l’USAID pour distribuer du pain dans les quartiers qui se sont levés pendant le « printemps » de 2011, déstabilisant ainsi la résistance.

Il a fait la même chose en Haïti : dans les quartiers où les ouvriers avaient organisé des « pots publics » pour demander justice, il distribue de misérables sacs de nourriture, cherchant une loyauté : « Tout le monde embrasserait les mains qui leur donne de la nourriture« , ont-ils pensé.

8– Provoquer des protestations populaires contre les gouvernements qu’elle répudie sous la bannière de la « Promotion de la démocratie ». L’USAID a été expulsée de Russie, des pays de l’ALBA (Bolivie, Cuba, Équateur, Dominique, Nicaragua et Venezuela) et du Burkina Faso. Ici, le président Thomas Sankara, le Che Guevara du Burkina Faso, a été renversé par un coup d’État parrainé par la France et assassiné en 1987 en punition de ses grandes mesures visant l’autosuffisance de la nation. La Libye, l’un des pays les plus développés d’Afrique, est aujourd’hui le meilleur exemple de ce type de « libération ».

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9- Créer ses propres médias apparemment dépolitisés (sports, comédies musicales, etc.) envoyant des messages subliminaux au profit de l’économie de marché, de la consommation, du manque de solidarité, etc. L’USAID, par le biais de l’OTI, a introduit à Cuba en 2010 un système de messagerie similaire à Twitter appelé ZunZuneo. Tout en recueillant les données personnelles de centaines de milliers d’utilisateurs par le biais de leur téléphone portable, il a tenté d’organiser des dissidences dans le réseau et aussi dans les rues. Creative Associates International Inc. (CAII), un autre contractant de l’USAID, a parrainé des rappeurs pour capter les jeunes.

10- Recevoir plus de subventions par plus de destruction à cause de la guerre : en mars 2017, les États-Unis ont « par erreur » bombardé un bâtiment à Mossoul tuant 105 civils irakiens : deux jours plus tôt l’USAID avait déposé sa demande de nouveau budget pour la reconstruction de l’Irak : marchés « guerre-construction » ? Pompiers pyromanes ? Toute ressemblance avec la scène du film « Child » où Charlot propose à son fils de casser les fenêtres du quartier afin de gagner de l’argent en installant du nouveau verre n’est que pure coïncidence !

Si la guerre et la pauvreté n’étaient pas aussi rentables, elles seraient interdites par la loi.

Traduit par Pascal, revu par Martha pour Réseau International


- Source : Publico (Espagne)

dimanche, 03 mars 2019

Yockey et la machine américaine à uniformiser

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Yockey et la machine américaine à uniformiser

Les Carnets de Nicolas Bonnal

FPY-imp.jpgRené Girard a parlé de l’Amérique comme puissance mimétique. Sur cette planète de crétins en effet tout le monde veut devenir américain, y compris quand il s’agit de payer des études à quarante mille euros/an, des opérations à 200 000 euros, de devenir obèse et même abruti par la consommation de médias et d’opiacés...

L’affaire est déjà ancienne et René Guénon a bien évoqué après Tocqueville ou Beaumont la médiocrité industrielle de la vie ordinaire/américanisée qu’on nous impose depuis les bourgeoises révolutions...

Un des américains à avoir le mieux parlé de cette uniformisation, après Poe ou Hawthorne, fut Francis Parker Yockey. Je laisse de côté ses vues politiques totalement aberrantes et je prends en compte ses observations sociologiques qui, comme celles de Louis-Ferdinand Céline, sont souvent justes ou/et intéressantes. Voici ce qu’il observe à l’époque de Bogart, quand tout le monde là-bas mène une vie gris Hopper, clope sans arrêt, boit son whisky au petit-déjeuner, imite les criminels en se couvrant d’un chapeau et d’une ridicule gabardine :

« La technique pour éliminer la résistance américaine à la distorsion de la culture a été l'uniformité. Chaque Américain a été fait pour s'habiller de la même manière, vivant et discutant de la même façon, se comportant de la même manière et pensant aussi identiquement. Le principe de l'uniformité considère la personnalité comme un danger et aussi comme un fardeau. Ce grand principe a été appliqué à tous les domaines de la vie. La publicité d'un genre et à une échelle inconnue de l'Europe fait partie de cette méthode d'éradication de l’individualisme. On voit partout le même visage vide, souriant. »

La femme américaine fut plus facilement mécanisée que l’homme :

«  Ce principe a avant tout été appliqué à la femme américaine dans les vêtements, les cosmétiques et le comportement, elle a été privée de toute individualité. Une littérature, vaste et inclusive, s'est développée pour mécaniser et uniformiser tous les problèmes et toutes les situations de la vie. Des millions de livres sont vendus pour dire à l’Américain «Comment se faire des amis». D’autres livres lui expliquent comment écrire des lettres, se comporter en public, faire l’amour, jouer à des jeux, uniformiser sa vie intérieure, comment beaucoup d'enfants à avoir, comment s'habiller, même comment penser. »

FPY-lost.jpgLe cinéaste Tim Burton a bien moqué ce comportement homogénéisé/industriel dans plusieurs de ses films, par exemple Edouard aux mains d’argent. Kazan avait fait de même dans l’Arrangement. Aujourd’hui ce comportement monolithique/industriel s’applique à l’humanitaire, à la déviance, à la marginalité, au transsexualisme, au tatouage, au piercing, etc. 

Toujours dans Empire, Francis Parker Yockey ajoute :

« Un concours a récemment eu lieu en Amérique pour trouver «Mr. L'homme moyen». Des statistiques générales ont été utilisées pour trouver le centre/moyen de la population, les relations matrimoniales, la répartition de la population, le nombre de familles, la répartition rurale et urbaine, et ainsi de suite. Enfin, un homme et sa femme avec deux enfants dans une maison de taille moyenne en ville ont été choisis comme «famille moyenne». Ils ont ensuite fait un voyage à New York, ont été interviewés par la presse, fêtés, sollicités pour approuver les produits commerciaux... »

On pense aux films de Capra qui déclinaient jusqu’à l’écœurement ce modèle de l’homme moyen dont se moquent les Coen dans leur œuvre (revoyez Barton Fink ou l’Homme qui n’était pas là sous cet angle) :

Yockey : « Leurs habitudes à la maison, leurs ajustements de vie ont généralement fait l’objet d’une enquête, et puis de généraliser. Ayant trouvé l'homme moyen du haut vers le bas, les idées et les sentiments ont ensuite été généralisés sous la forme de pensées moyennes impératives et des sentiments. Dans les «universités» américaines, les maris et les femmes assistent à une conférence sur l'adaptation au mariage. L’individualisme ne doit même pas être accepté dans quelque chose d'aussi personnel que le mariage. L’uniforme civil est aussi rigoureux – pour chaque type d’occasion – en tant que vêtement militaire ou liturgique le plus strict. »

Notre rebelle dénonce la liquidation des arts : 

« Les arts ont été coordonnés dans le schéma directeur. Il n’y a en Amérique, avec ses 140 000 000 d’habitants, pas une seule compagnie d'opéra continue, ni un seul théâtre continu ; le théâtre n’y produit que des «revues» et des pièces de propagande journalistique. »

Comme Céline ou Duhamel, Yockey souligne le rôle du cinéma :

« Pour le reste, il n’y a que le cinéma et c’est, après tout, le moyen le plus puissant de l’uniformisation de l’Américain. »

La peinture et la musique sont remplacées :

« Dans un pays qui a produit West, Stuart et Copley, il n'y a pas un seul peintre de notoriété publique qui continue dans la tradition occidentale. Les «abstractions», la folie picturale et le souci de la laideur monopolisent l'art pictural.

FPY-flames.jpgLa musique est rarement entendue en Amérique, ayant été remplacée par le battement de tambour sans culture du noir. Comme le dit un musicologue américain: «Le rythme du jazz, tiré de tribus sauvages, est à la fois raffiné et élémentaire et correspond aux dispositions de notre âme moderne. Cela nous excite sans répit, comme le battement de tambour primitif du danseur de la prière. Mais il ne s'arrête pas là. Il doit en même temps tenir compte de l'excitabilité de la psyché moderne. Nous avons soif de stimuli rapides, excitants et en constante évolution. La musique est un excellent moyen d’excitation, syncopé, qui a fait ses preuves. »

Et la littérature aussi :

« La littérature américaine, qui a produit Irving, Emerson, Hawthorne, Melville, Thoreau et Poe, est aujourd'hui entièrement représentée par des distorteurs de la culture qui transforment les motifs freudiens et marxistes en pièces de théâtre et en romans. »

Famille et religion n’existent déjà plus (années de la révolution sociétale Roosevelt) :

« La vie de famille américaine a été complètement désintégrée par le régime qui déforme la culture. Dans le foyer américain habituel, les parents ont en réalité moins d'autorité que les enfants. Les écoles n'appliquent aucune discipline, pas plus que les églises. La fonction de formation des esprits des jeunes a été abdiquée par tous en faveur du cinéma. Le mariage en Amérique a été remplacé par le divorce. Ceci est dit sans intention paradoxale. Les statistiques montrent que dans les grandes villes, un mariage sur deux se termine par un divorce. Le pays dans son ensemble, le chiffre est un sur trois. »

La presse sert à manipuler, à préparer la guerre (pensons à l’Iran, au Venezuela, à la Russie, à la Chine, gros morceaux pourtant, mais rien n’arrêtera nos couillons) :

« L'uniformité est la technique de l'excitation. La presse présente chaque jour de nouvelles sensations. Que ce soit un meurtre, un enlèvement, un scandale gouvernemental ou une alerte à la guerre, peu importe la raison. Mais, à des fins politiques particulières, ces dernières sensations sont les plus efficaces. Pour nous préparer à la Seconde Guerre mondiale, le facteur de distorsion a administré tous les jours une nouvelle "crise". Le processus a augmenté jusqu'à ce que la population soit prête à se féliciter du déclenchement de la guerre comme un soulagement de la constante tension nerveuse. Lorsque la guerre est apparue, le distorteur a immédiatement appelé une "guerre mondiale" malgré le fait que seulement trois puissances politiques étaient engagées, et les plus forts pouvoirs n'étaient pas impliqués. »

On tape souvent sur les Américains ou les Anglo-Saxons en oubliant, comme me disait Jean Parvulesco peu avant sa mort, qu’ils avaient d’abord perdu le combat chez eux…

 

Source

Yockey, Imperium, world-outlook, pp. 502-506

jeudi, 28 février 2019

Plus que jamais, l'Iran entre USA et Europe

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Plus que jamais, l'Iran entre USA et Europe

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com 
 
La dernière Grande Idée de Trump, qui est opérationnalisée par son gendre Kushner, c’est le transfert de capacités nucléaires vers les amis de l’Arabie Saoudite. Un certain nombre d’articles à ce propos ont été publiés, notamment sur CounterPunch le 20 février 2019. Cette question du “nucléaire saoudien” ainsi posée de façon très “opérationnelle” si l’on a l’esprit le rôle important de négociateur secret pour Trump que Kushner tient en général, devient pour de nombreux commentateurs la question de“l’Arabie armée de nucléaire éventuellement pour frapper l’Iran”. Dans son texte de CounterPunch, Charles Pierson rappelle que MbS (Mohammed ben Salman) déclarait le 18 mars 2018 dans une interview sur CBS, dans l’émission 60 Minutes : 

« L’Arabie Saoudite ne veut pas acquérir de bombe nucléaire, mais sans aucun doute si l’Iran développait une bombe nucléaire, nous suivrions la même voie aussi vite que possible. » 

RT-com a rencontré notamment Lew Rockwell, l’une des personnalités les plus influentes du mouvement libertarien aux USA, dont le jugement rend compte de courants d’importance dans les milieux dissidents très structurés que constituent les libertariens : 

« “C'est très alarmant. C’est une chose terrible de diffuser ce type de technologie dans un État totalitaire comme l’Arabie saoudite”, a déclaré à RT, le consultant politique Lew Rockwell. “C’est une démarche extrêmement imprudente...” “Ils veulent produire du plutonium pour pouvoir produire des armes nucléaires. Ils veulent que l'Arabie saoudite possède des armes nucléaires pour pouvoir menacer l’Iran, – et éventuellement aller jusqu’à les utiliser contre l'Iran, afin qu'Israël ne soit pas obligé d'utiliser ses armes nucléaires.” 

» “Cela pourrait conduire à une guerre terrible. Donc, pour que les États-Unis prennent ce risque… je suppose qu’il y a l’espoir, sinon la perspective d’en tirer des sommes d’argent considérables.[...] Tout cela fait partie du plan de Trump ... pour détruire l'Iran”.“C'est un risque énorme car Mohammed bin Salman sera très capable de neutraliser l'Iran. L’idée qu’ils armeraient Mohammed bin Salman d’armes nucléaires est certainement une conception qui pourrait avoir l’air de venir d’un film de science-fiction ou de politique-fiction. C’est une situation comme ‘Docteur Folamour’, de Kubrick.” » 

D’une façon assez significative, volontairement ou pas, l’article de RT-com commence par cette phrase : « Les relations commerciales entre Donald Trump et l’Arabie Saoudite, qui chercherait à présent à acquérir le savoir-faire nucléaire des États-Unis, mettent le monde en danger, ont averti des analystes interrogés par RT... » La phrase parle de “Donald Trump” et non des USA, tandis que l’autre partie est désignée normalement et logiquement comme une nation. Cela recouvre une situation qu’on pourrait qualifier d’“explosive” essentiellement par les positions, les pouvoirs, la culture des différents participants au pouvoir US en général, et dans ce cas dans la question des relations avec l’Arabie Saoudite. C’est donc “Trump”, ou disons “la famille Trump” qui traite directement avec l’Arabie. Les seuls intérêts stratégiques qu’elle prend en compte sont ceux d’Israël, le seul but stratégique qu’elle poursuit est la destruction de l’Iran ; le reste se mesure pour elle au volume de business qu’elle parvient à établir dans ses discussions avec les Saoudiens. 

C’est dire, au travers de ce désordre et de ses actions incontrôlables si cette nouvelle concernant l’Arabie devrait agiter fortement ceux qui sont partie prenante dans la question des relations avec l’Iran, et notamment dans le maintien du traité JCPOA que les USA ont quitté en 2017. Nous parlons donc là essentiellement des Européens qui, sur cette question, présentent une position assez unie et tout de même assez ferme. Les dernières nouvelles d’Arabie n’ont fait qu’aggraver une situation déjà extrêmement grave pour les relations entre les USA et l’Europe (l’UE), d’une gravité qui ne se dément pas et même ne cesse de se renforcer depuis mai 2017 (date du retrait US du JCPOA). 

On s’en est aperçu à la conférence annuelle de Munich (dite “le Davos de la défense”), il y a une grosse semaine. Pour la première fois depuis longtemps, les Russes s’y sont sentis mieux à l’aise que les délégués de l’américanisme tonitruant, – et encore, pour ces derniers dans la mesure où ils sont capables de percevoir les nuances révélatrices, mais il s’agit dans notre chef d’une observation objective qui se passe de la connaissance des humeurs d’un Pence ou d’un Pompeo. On prendra comme exemple de ce climat inattendu l’appréciation générale du ministre russe Lavrov, qui n’a jamais eu depuis de très, très longues années une telle couleur et une aussi bonne humeur, et qui, littéralement, a dit tout haut ce que pensent assez bas la plupart des Européens... 

« “[La communauté internationale] a commencé à mieux écouter[la Russie]”, a observé Sergueï Lavrov, ce 17 février, devant des journalistes, ajoutant : “Nous sommes des gens patients... au sens stratégique du terme.” A [Munich...], la délégation russe a enchaîné les rencontres bilatérales, y compris avec des États européens très critiques à l'encontre de l'action internationale de la Russie. La veille, Londres et Moscou avaient renoué un dialogue diplomatique rompu depuis l'éclatement de l'affaire Skripal, il y a onze mois. 

» [Lavrov] a exprimé la conviction que les tentatives répétées de Washington d'imposer sa volonté “menaçaient le système économique international”, alimentant un “sentiment d’incertitude” dans le monde. Les “mesures coercitives unilatérales des États-Unis qui tentent d’appliquer leur législation de manière extraterritoriale et d’obliger les autres pays à se conformer aux lois d’un État étranger” ne font que contribuer à la “confusion” entre ses propres alliés, a-t-il encore estimé. » 

Effectivement, l’accueil fut notablement froid, parfois glacial, lors du discours du vice-président Pence à Munich, comme le précise Tom Luongo : « Le silence qui s’abattit sur la salle à Munich lors du discours de Mike Pence devrait être un signal d’alarme pour tous ceux qui se trouvent à Washington DC, pour qu’ils comprennent que le monde tel que nous l’avons connu n’existe plus... [...] Bolton, Pence et Pompeo furent ignorés et le ministre russe des affaires étrangères Lavrov fut la vedette de la conférence... » 

Il y eut même une riposte en règle au discours de Pence, qui venait demander fermement, d’enjoindre si vous voulez aux Européens de se conformer aux consignes et de n’entraver en rien les innombrables sanctions US contre l’Iran, – ou gare... Ce fut la Haute Représente de l’IE, Federica Mogherini, qui lui répondit indirectement en affirmant qu’il n’était pas question pour l’Europe de laisser aller à vau l’eau le traité JCPOA, et par conséquent les relations restaurées avec l’Iran. Mogherini, qui s’est bien entendu depuis longtemps avec son collègue iranien, tout au long des négociations du traité, est la plus farouche défenderesse du JCPOA. Pour cela, elle s’est placée, et elle y a été poussée par les États-Membres, comme rempart de l’UE contre les entreprises délétères des USA. 

(Les États-Membres jurent que Mogherini les représente en évitant de se mettre eux-mêmes trop en valeur, en cas de retour de bâton. On connaît : la souveraineté en balance entre eux et l’UE permet aisément de se défausser de certaines responsabilités... On ne fera pas trop de procès là-dessus malgré l’absence de gloire de la posture, l’enjeu étant largement au-dessus de ces manœuvres habituelles.) 

Le fait est que des sources assez pures et profondes auxquelles nous avons déjà étanché notre soif de savoir nous confirment sans la moindre ambiguïté que cette affaire iranienne reste plus que jamais la pierre de touche des relations transatlantiques. On en remet et on insiste : « L’on peut même dire que si jamais une très grave dissension doit éclater entre l’Europe et les USA, ce sera sur cela, et même plus encore, qu’au vu de l’affaire telle qu’elle est engagée, avec l’entêtement et l’hubris US, on irait jusqu’à penser que cet affrontement est inévitable... » 

Dans son texte, Luongo développe l’idée qu’à Munich, c’est plutôt Merkel qui, par son discours, a signifié aux USA que “l’époque a changé” : « La chancelière allemande Angela Merkel a tourné la page des relations avec les États-Unis. Son discours à la Conférence sur la sécurité à Munich devrait être considéré comme une déclaration de divorce de l’Allemagne du système mis en place par les USA à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. » On peut sans aucun doute discuter ce jugement, la chancelière Merkel ayant montré sa capacité d’avaler des couleuvres en nombre considérable, mais il s’agit ici de reconnaitre une convergence de dynamiques et de pressions, – et plutôt qu’opposer Merkel à Mogherini pour savoir qui fait quoi mieux ou moins bien que l’autre, les ajouter pour conclure que la course des choses est réglée par la puissance d’événements colossaux, – auxquels d’ailleurs, il faut s’empresser de le dire, l’équipage américaniste contribue bien plus que les autres par son entêtement, son aveuglement, sa quasi-certitude de figurer dans l’agenda des dieux comme étant d’essence divine. 

... C’est impérativement dans ce contextequ’il faut 1) continuer à considérer l’affaire Iran-JCPOA à la mesure de sa réelle importance, et 2) apprécier que les entreprises du type “crime organisé” de “la famille Trump” avec MbS contribuent notablement à pourrir ce dossier de la façon la plus inquiétante qui soit... L’interminable crise iranienne (depuis 1979 et dans sa séquence actuelle depuis 2003) pourrait enfin justifier la patience qu’elle a exigé si elle parvenait à s’imposer comme l’événement extérieur et supérieur à toute nos ambitions de servilité capable de soumettre l’axe transatlantique à son épreuve ultime de rupture. Elle est la mieux placée pour cela. 
 

L'or de la France confié à une banque américaine !

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L'or de la France confié à une banque américaine !

Ex: http://echelledejacob.blogspot.com 
 
La gestion du stock d’or de la Banque de France, propriété collective des Français, vient d’être confiée, sans qu’ils en soient prévenus et sans la moindre explication, à une Banque américaine à la réputation sulfureuse, JP Morgan & Chase. Il se pourrait qu’il se retrouve bientôt à la Banque Centrale Européenne en échange d’une autorisation à poursuivre la politique économique catastrophique du gouvernement et dans le cadre du projet d’européanisation forcée de la France. Cela pourrait aussi avoir pour objectif de priver un gouvernement (RN par exemple) de la possibilité de recréer un Franc solide.

À quoi sert un stock d’or ? 

Les 2 435 tonnes d’or stockées dans le sous-sol de la Banque de France (BdF) ont été acquises au fil des décennies avec les impôts payés par les Français, notamment au cours des années 1950 à 1965. De plus, le président de Gaulle a procédé à des ventes de dollars américains pour les convertir en or, et il a rapatrié de l’or français stocké aux Etats-Unis pendant la guerre pour reconstituer un stock de 3 024 tonnes auxquelles s’ajoutent, mais il ne nous appartient pas, de l’or confié en garde par des banques centrales ou organismes financiers, tels que que la Banque centrale européenne, le Fonds monétaire international et la Deutsche Bundesbank. C’est une pratique courante de répartition des risques. 

Ce stock est un fond de garantie en cas de crise financière, de guerre ou autre catastrophe majeure. Il permet ensuite la reconstitution d’une monnaie solide ou des transactions financières entre États via leurs banques centrales. C’est en quelque sorte le bas de laine des Français, même si juridiquement cet or est la propriété de la République, inscrit à l’actif du bilan de la BdF. Aujourd’hui, il servirait en cas, par exemple, d’effondrement de l’euro, ce qui n’est plus impensable en raison de l’état désastreux de la gestion de l’économie de l’Union Européenne gérée par les technocrates de Juncker.

Stocker de l’or est une erreur pour Bercy 

Stocker de l’or, quelle erreur, vous diront les énarques de Bercy, l’or comme les devises ou l’argent, ça doit travailler. Premier grand succès de ces énarques, ils réussissent en 2004 à convaincre Nicolas Sarkozy, alors ministre des Finances de Raffarin, de vendre 588,6 tonnes d’or du stock pour remédier aux conséquences de la crise financière de 2002. Le stock tombe à 2 435,4 tonnes. En soi, l’idée n’est pas mauvaise, mais nos spécialistes énarques de Bercy s’occupent de la vente et font perdre 10 milliards à la France, car entre 2004 et 2009, la valeur de l’or a considérablement augmenté et ces 588 tonnes qui valaient 9 milliards en 2004 en auraient valu 19 en 2009… si la BdF les avait gardées. Personne n’est parfait, surtout les énarques, et la leçon a porté. 

Depuis, selon l’accord entre l’État et la BdF publié au J.O. en 2011, la Banque de France n’a plus le droit d’offrir un service de vente et d’achat de lingot d’or, ni d’acheter ou vendre des napoléons 20 francs en or. De toutes façons, ça n’avait jamais rapporté grand-chose à cause d’une fiscalité déjà excessive.

Le président veut et autorise un marché de l’or à Paris 

Voilà nos énarques de Bercy bien contrariés. Heureusement, un miracle se produit : Macron-l’énarque est élu, Bercy repart à l’assaut et obtient au mois de novembre 2018 la création d’un marché de l’or à Paris. Prétexte : le marché londonien de l’or va s’effondrer en raison du Brexit (les énarques l’espèrent !), la France va le récupérer et se faire des c… en or. 

Mais pas question de laisser Bercy gérer comme en 2004. Le 2ème sous-gouverneur de la BdF, Sylvie Goulard, énarque comme il se doit et recasée par Macron à la BdF après un éphémère passage d’un mois au ministère des Armées où elle n’a pas fait la moindre étincelle, trouve la solution. 
 
Il faut savoir que Sylvie Goulard, outre d’être très compétente pour passer des concours, s’en mettre plein les poches (c’est pour ça qu’elle a été virée de la Défense, elle était en même temps payée 10 000 $/mois par un institut américain), et compétente en communication comme tout bon énarque mais totalement incompétente dans tout le reste, a passé deux ans comme « conseiller spécial » à l’Institut Bergrruen (celui qui la payait quand elle était ministre). 

C’est un Institut californien où l’on débat pour « changer le Monde », imaginer comment construire l’Europe fédérale et le gouvernement mondial. Et en débattant, car on y débat beaucoup, on s’y constitue un carnet d’adresses en or. En effet, on y trouve des gens comme Romano Prodi, Gerhard Schroder, Mario Monti, Felipe Gonzalez, Joseph Stiglitz, Pisani-Ferry, Jacques Delors, Pascal Lamy de la Banque Mondiale, Peter Sutherland de la Banque Fédérale allemande et accessoirement ex-président de la Trilatérale, Pierre Moscovici, le très brillant ministre de l’Économie de Jean-Marc Ayrault (52 Milliards d’impôts supplémentaires en 2012-2013, 10 % de chômage) recasé par Hollande à la Commission européenne, le président de Goldman Sachs, etc.
Avec tout ça, si vous ne savez pas gérer un stock d’or ensuite… 

Bref, Sylvie Goulard, 2ème vice-gouverneur a eu une idée géniale : confier la gestion de notre or à JP Morgan & Chase, 1ère banque américaine, 4ème banque mondiale, qui gère 42 % des comptes aux USA, Visa, etc. avec un bilan annuel de 2 513 milliards de $ en actifs. En 2010 JP Morgan a racheté Chase afin de pouvoir rentrer dans le marché des matières premières, pétrole, gaz, électricité, métaux. Dont l’or où, en s’associant sur le marché de Londres avec plusieurs grandes banques, Barclays et Goldman Sachs notamment, elle est devenue le premier agent d’influence sur les cours. D’où son nouveau nom : JP Morgan & Chase.

JP Morgan & Chase, banque à problèmes 

Pour ne parler que des douze dernières années (JP-MC existe depuis 180 ans), JP-MC avait commercialisé en avril 2007 un produit financier complexe lié à des prêts dans l’immobilier, sans informer les investisseurs du rôle joué par le fond « Magnetar Capital », qui lui appartenait et dont le rôle était précisément de miser sur la baisse de ces produits financiers. Dix mois plus tard, les investisseurs étant ruinés, et pour éviter d’être trainée en justice, la JP-MC a finalement accepté en juin 2011 de rembourser les investisseurs. 

En 2012, JP-MC avoue avoir perdu 2 Mds $ à cause d’un trader français, Bruno Michel, plus malin qu’elle. Normal, il est français. 

En novembre 2013, JP-MC annonce un accord sous forme d’amende de 13 Mds$ avec le ministère de la Justice des États de New York et de Californie, pour arrêter les poursuites judiciaires liées à la crise des subprimes

Toujours en novembre 2013, JP-MC a également dû payer 4,5 Mds$ à une série d’institutions financière dont Goldman Sachs, ING, et BlackRock, pour solder un conflit qui les opposait suite à diverses malversations. 

En janvier 2014, JP-MC paie une amende de 1,7 Mds$ pour escroquerie (dite au « schéma de Ponzi ») dans le cadre de l’affaire Madoff

En novembre 2014, après une enquête de la Financial Conduct Authority (Royaume-Uni), de la Finma (Suisse), de la Commodity Futures Trading Commission (États-Unis) et de l’Office of the Comptroller of the Currency (États-Unis), JP-MC avec quelques autres banques paie une amende de 4,2 Mds$ dans le cadre d’ententes entre banques pour manipuler le cours du Libor, un indice de taux de change. Ayant soudoyé un employé du Trésor, elle avait appris que Lehman Brothers était sur le point de déposer son bilan, avait, la veille, avec l’aide de ses copines, fait saisir 8,6 Mds$ de liquidités, y compris 5 Mds$ en numéraire. 

Etc. Etc. Bref, comme dit sa publicité, « 180 années d’excellence« . Dans l’escroquerie ? 
Escroqueries en tous genres, la banque rêvée pour lui confier de l’or !  

C’est donc la Banque rêvée pour lui confier la gestion de l’or de la BdF. Surtout au moment où États-Unis, Chine, Russie et quelques autres achètent de l’or à tour de bras pour faire face à la probable crise financière qui arrive. Et ceci au moment où John Edmonds, l’un des « gold-traders » de JP-MC vient d’avouer au FBI s’être adonné à la technique de manipulation de marché dite du « spoofing » (1) des centaines de fois avec l’assentiment de sa hiérarchie pendant 6 longues années, de 2009 à 2015. 

Sa hiérarchie, s’appelle Jamie Dimon, CEO (2) de JP-MC, lequel après avoir déclaré que le Bitcoin était « une fraude« , s’est écrié « Nom de D…, la con… Bon sang, mais c’est bien sûr » et a créé un bitcoin-JP-MC spécifique. Quand on est champion du monde de la fraude et de l’escroquerie sur les marchés, tous les marchés, immobilier, financiers, métaux, palladium, lithium, or, etc. on ne rate pas une occasion pareille ! Et surtout pas de devenir partenaire de la BdF sur le marché de l’or.

L’accord-or avec la Banque de France est un marché particulier 

Cela dit, il ne s’agit pas d’un marché de l’or au sens classique, c’est-à-dire qui coterait le Napoléon et le lingot. Le stock d’or de la Banque de France va être « mobilisé » par JP-MC pour garantir des « swaps or contre devise » (contrats d’échanges or contre devises) et du « leasing d’or » (prêts d’or). Pour l’instant, seules les autres banques centrales de la planète pourront faire usage de ces produits financiers avec la BdF, mais comme celle-ci a pris pour partenaire la banque la plus pourrie du monde (ou presque), pourquoi pas une banque européenne ou française ? Cela ouvre la possibilité qu’à l’avenir des banques commerciales internationales puissent également y avoir accès. D’où son évolution récente en JP Morgan-Chase & Co. 

De facto, l’or de la Banque de France n’est plus à l’abri : une mauvaise opération, un krach financier soudain, des calculs erronés, et une partie de cet or qui sert de garantie aux Français devra quitter le gigantesque (22 000 m2) coffre-fort du sous-sol de la BdF à Paris. 

Sylvie Goulard s’y est préparée, elle a fait exécuter des travaux d’agrandissement pour que de gros élévateurs puissent y circuler quand il faudra sortir l’or : La rénovation des coffres, des ascenseurs et des salles est pratiquement achevée. Le sol a été renforcé pour supporter le poids du passage de chariots élévateurs lourds et le stockage a été réaménagé pour faciliter la manutention et « d’ici la fin de l’année un nouveau système informatique sera mis en place, pour répondre au mieux aux opérations de marché » (Sylvie Goulard à L’Usine nouvelle). 

Pourrait-on nous expliquer pourquoi ce ne sont ni le gouverneur de la BdF, ni le ministre des Finances, ni le président mais une obscure sous-fifre qui nous apprend tout ça, sans nous dire ce que le gouvernement va faire comme spéculations hasardeuses avec l’or des Français, par un banque américaine plus ou moins louche, et sous le contrôle d’énarques incompétents dans ce domaine ? 

L’Imprécateur
Source


1: « spoofing » Le spoofing en finance est une technique manipulation boursière qui consiste à offrir des titres à la vente ou l’achat dans l’intention d’annuler l’ordre juste avant qu’il soit exécuté, et ceci afin d’obtenir un mouvement favorable au spoonfinger. JP-MC achetait des titres-or, les revendait quelques instants avant la clôture à prix bas, provoquant un panique à la baisse, pour protéger le dollar, car l’or à un cours trop élevé provoque une baisse du dollar. Or elle spéculait sur le dollar. 

2: CEO : Chief Executive Officer = Directeur Général

dimanche, 24 février 2019

Cosmos russe contre Espace américain

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Cosmos russe contre Espace américain

Leonid Savin

Source: http://www.katehon.com

Le 12 avril, la Russie célèbre le Jour de la Cosmonautique. Le premier vol habité dans l’espace eut lieu en 1961 avec le cosmonaute russe Youri Gagarine. Les USA répondirent au programme spatial soviétique en créant l’ARPANET, qui posa les fondations de l’Internet. En fait, nous pouvons voir dans cette course à la supériorité davantage qu’une compétition technologique avec des slogans idéologiques.

Le terme « cosmos », qui est principalement utilisé en Russie, vient du grec est signifie « ordre ». En anglais, le mot « espace » est lié à l’idée d’expansion, c’est-à-dire un domaine qui est regardé comme le prochain pas pour conquérir la terre, la mer et l’air.

Les vols spatiaux introduisirent la cosmocratie dans la géopolitique, et à la fin du XXe siècle le Professeur d’Etudes Militaires Comparatives à l’Ecole d’Etudes aériennes/spatiales Avancées de l’US Air Force, Everett Dolman, suggéra l’introduction du terme « astropolitique ». Il dit : « La société doit considérer la conquête de l’espace comme un impératif moral, nécessaire pour la survie de la race humaine, et doit aussi se percevoir comme la mieux équipée pour dominer cette sphère (…) ». Il ne parle pas de la race humaine abstraite, mais de sa sous-espèce anglo-saxonne, formée après le combat contre les autres sur les vastes champs de la Terre. Ceci est connu sous le nom d’« esprit de la frontière », louangé par Frederick Jackson Turner à la fin du XIXe siècle, et s’élevant aujourd’hui jusqu’aux  hauteurs stellaires. Si à l’époque des pionniers l’« esprit de la Frontière » prétendait détruire des tribus indiennes, maintenant les USA sont capables de répéter cette expérience au niveau spatial. Ce n’est pas du tout par hasard que les USA créèrent la série de la « Guerre des Etoiles » et d’autres films de science-fiction classiques et célèbres comme « Avatar » ; c’est un autre retour de l’Inconscient Collectif des porteurs de  d’« esprit de la Frontière », réintroduit sous une forme moderne et équipé de méthodes de manipulation culturelle-informationnelle.

Les USA tentent de transformer ces fantaisies en réalité ; même leurs stratégies sont souvent approuvées par la recherche scientifique et le globalisme optimiste.

Le 22 avril 2010, le colonel de l’US Army et mainteneur Timothy Creamer, avec ses collègues à bord de l’ISS (ses membres étaient l’autre Américain – le capitaine, deux mainteneurs russes, et un Japonais) envoya un message à la Terre en utilisant Twitter.

Leur premier tweet dans l’espace était tout à fait inoffensif pour tous les utilisateurs de twitter : « Hello Twitterverse ! Nous sommes maintenant en train de twitter depuis la Station Spatiale Internationale – le premier tweet en temps réel depuis l’Espace ! A bientôt ».

Souvenons-nous que Twitter fut activement utilisé dans les émeutes massives en Iran en 2009, et la même année en Moldavie les manifestations furent appelées la « Twitter Revolution ».

L’autre morceau de la cosmocratie est la base du contrôle de l’espace extérieur. Le réseau américain de contrôle de l’espace extérieur est situé sur tous les continents et îles. Son but est de stimuler la conscience situationnelle comme l’un des principaux éléments de la guerre de réseau. D’après l’armée américaine, cela permettra aux USA d’atteindre une supériorité spatiale complète et d’« empêcher un Pearl Harbor spatial ». L’élite scientifique américaine décrit cela d’une manière plus délicate : détecter et traquer les objets spatiaux tels que les satellites et les débris orbitaux. L’ancien astronaute et général de l’US Air Force, directeur du Commandement Stratégique, Kevin Hilton, dit que la question des débris spatiaux est hors de contrôle : il y a en orbite autour de la Terre plus de 15.000 débris et morceaux de satellites et autres objets spatiaux. « On estime que ce nombre pourrait monter jusqu’à un total de 50.000 dans un futur pas très éloigné », a-t-il dit, et il a appelé les autres pays à coopérer pour résoudre ce problème.

Il est intéressant de savoir que l’idée d’utiliser l’espace pour stocker les déchets fut proposée à la fois par l’URSS et par les USA. En 1959, le scientifique soviétique Kapitsa proposa d’envoyer les déchets nucléaires dans l’espace. En 1972, Schlesinger proposa de faire la même chose en utilisant une navette réutilisable. Cette question demeure non-résolue aujourd’hui.

Cependant, la militarisation de l’espace est toujours un grave problème. Au milieu des années 2000, le Pentagone a défini de nouveaux objectifs dans ce domaine : création d’une arme aérienne anti-satellite, de systèmes de satellites de télécommunication, de lasers aériens et spatiaux, de vaisseaux d’études de l’espace profond, et de cargos spatiaux plus puissants. Des satellites avec divers moyens de surveillance furent lancés, et des systèmes laser furent créés.

next100.jpgGeorge Friedman, dans son livre The Next 100 Years, dit que bientôt le but du contrôle militaire et politique de l’espace sera la mise en œuvre de satellites portant des armes de destruction massive. La miniaturisation des armes et de divers systèmes automatiques est en cours de réalisation. Les experts disent que bientôt les nouveaux nano- et pico-satellites auront un diamètre de 10 centimètres environ.

Cela a provoqué une réponse : Vladimir Poutine a appelé à la prévention d’un espace extérieur militarisé, et a été appuyé par l’Assemblée Générale des Nations Unies, qui a adopté une résolution nommée Coopération internationale dans l’usage pacifique de l’espace extérieur. Cependant, du fait de la création de son système d’armes de destruction massive (WMD), les USA ont refusé de signer le document, et accusent maintenant les autres Etats de militarisation de l’espace.

Les USA ont maintenant montré la faiblesse de leur propre programme spatial (par exemple, la dépendance vis-à-vis des moteurs de fusées russes), et la Russie, au contraire, revendique le statut de puissance spatiale. Un nouveau cosmodrome [1] sera bientôt terminé, et bientôt les premiers satellites seront envoyés en orbite.

Ainsi, dans le contexte de l’astropolitique, la thèse d’Emmanuel Kant sur « le ciel étoilé au-dessus de nous et la loi morale au-dedans de nous » est à nouveau devenue urgente.

 

[1] Il s’agit du nouveau cosmodrome de Vostochny, dans l’Extrême-Orient russe, près du fleuve Amour. Un premier lancement de fusée a été effectué le 28 avril 2016. (NDT)

17:21 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : russie, cosmos, états-unis, espace | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 21 février 2019

The Republicans’ Millennial Problem

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The Republicans’ Millennial Problem

It's going to take more than policy gimmicks to compete with the growing allure of victimology

In a recent article at TAC, writer Alex Muresianu put into relief the difficulties that lie ahead for the GOP as it seeks to capture a larger chunk of the Millennial vote.

In the 2018 elections, voters between the ages of 18 and 29 voted for Democrats in House races by a margin of 35 points. Tellingly, Millennials who attended college were more likely to vote Democrat than those who didn’t. As a retired professor, I can attest to the immersion in leftist ideas that a college education, particularly in the humanities and social sciences, brings with it. But however we look at the demographic under consideration, the disparity in voting preferences cited by Muresianu remains quite noticeable.

Muresianu proposes that Republicans endeavor to reduce “income inequality” in part by making it easier to live in urban areas. Because of controls on who can build what in certain cities, which are invariably run by Democratic administrations, Millennials, who concentrate in those cities, are paying more for housing and rentals than they otherwise would. If more abundant and cheaper housing were available, those urban residents might reward the Republicans who helped bring this about by changing their party affiliations.

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Pardon my skepticism. For one, people tend to make their electoral choices for cultural and sociological—not just material—reasons. Further, it seems unlikely that policies, even ones as popular as affordable urban housing, can shake political loyalties that run so deep.

Let’s look at non-economic factors. Black voters are not rushing to embrace Donald Trump because he improved their employment prospects (unemployment is at its lowest rate since 2006). As a bloc, black voters loathe the president and prefer Democrats who—though they might not be much help financially—still appeal to their view of themselves as an oppressed minority.

Democrats play up race and gender because it works as an electoral magnet. Muresianu and I may not like this situation (personally I detest it). But it is nonetheless a winning strategy. Millennials vote for the Left because they have been conditioned to do so by social media, educational institutions, and their peers. They are not likely to be turned away by a policy gimmick—one that could only be implemented, by the way, if Republicans capture municipal governments, a prize that the GOP will not likely be winning in the near future. (The bane of the GOP, Bill de Blasio of New York City, won 65.3 percent of the votes cast in his last mayoral race.)  

This doesn’t necessarily hold in Europe, where some young people are more inclined to vote for the Right than they are here. In France, the Rassemblement National is building its base among Millennials; a similar trend can be seen at work among populist Right parties in Eastern Europe. In Hungary, the favorite political party among university students is the very far Right (I don’t use this term lightly) Jobbik Party. But there are also variables at work in Europe that have helped make the young more conservative: less urbanization in some countries than is the case here, a high degree of ethnic and racial homogeneity, and the persistence of traditional family and gender relations are all factors that counteract the cultural-political radicalization of young adults.

In the U.S., we may have reached a perfect storm for this radicalization, because very few of the countervailing forces that continue to operate in other societies are present here. This is not to even mention the giveaway programs (masquerading as “socialism”) that the Democrats have promised the young. How can Republicans match such largesse?

Moreover, a growing percentage of Millennial voters are multiracial and generally tend toward the Left. A study by the Brookings Institute in 2016 indicates that no more than 55 percent of those between 18 and 34 are white. It is hard to imagine that these non-white young voters, who are now solidly on the Left, will embrace Republican politicians because they promise to free up the urban rental and real estate markets.

Political and cultural loyalties may change among some Millennials but not because of the attraction of deregulation (except possibly for marijuana). These loyalties will change as certain groups within the leftist front start fighting each other. Why should straight white males continue to make common cause with black nationalists, feminists, and LGBT activists? Why should poor blacks go on supporting indefinitely the policy of rich leftist elites advocating virtually open borders? Being flooded with unskilled labor from other countries certainly doesn’t help the job situation in black communities.

The politics of victimology does have its limits and at some point may show wear. Hatred of white male Christian heterosexuals cannot keep a coalition going forever, particularly when this alliance of self-described victims reveals sharply competing interests and sensibilities. Of course, the Left’s coalition will not fall apart in the short run. But if some Millennials do eventually move towards the Right, what will draw them will not be the promise of cheaper lodgings. Something more dramatic will have to happen.

Paul Gottfried is Raffensperger Professor of Humanities Emeritus at Elizabethtown College, where he taught for 25 years. He is a Guggenheim recipient and a Yale Ph.D. He is the author of 13 books, most recently Fascism: Career of a Concept and Revisions and Dissents.

mardi, 19 février 2019

Le féminisme US par-delà le rien et le mâle

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Le féminisme US par-delà le rien et le mâle

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Les médias expliquent qu’on demande, qu’on exige une présidente féministe en Amérique… Ah, ces élues du congrès en blanc, comme elles les auront émus, ces médias…

Je n’étonnerai personne en écrivant que 90% des antisystèmes sont des hommes, et que lorsqu’on trouve des femmes dans les rangs antisystèmes, c’est essentiellement par islamophobie. Ceci concédé, notre monde aux affaires repose sur les valeurs féminines : « pleurnicherie humanitaire » (Muray), hystérie belliciste, autoritarisme tortueux (Merkel, Clinton…). Sans oublier la haine du sexe et de la reproduction, qui sont devenues des valeurs féministes. Dans l’Espagne féministe-socialiste de Sanchez, le sexe doit se faire avec notaire.

Le Deep State et l’empire nous préparent un après-Trump (je laisse de côté le gros poisson décevant) qui sera pire que la candidate hilarante. On pense à la Cortez-machin et à ses clones ; on aura alors un bolchévisme écologiste et belliciste à la sauce féministe et antiraciste aux affaires. L’Amérique pourra-t-elle le supporter ? On espère que non et qu’elle s’écroulera avec son gnosticisme politique – sauf si elle nous emporte dans sa chute. Toujours est-il que cette montée planétaire et quelque peu comique du féminisme aboutira de toute manière à l’extinction de l’occident et sans doute du monde. On s’en moque d’ailleurs car on ne regrettera pas ce qui est devenu si méprisable. La multiplication des hommes-enfants politiques de type Macron, Sanchez, Obama, Rivera et autres (des « macroncitos » comme on dit en Espagne) montrent ce triomphe de la cause féministe qui repose sur une alliance avec les lobbies ultras des minorités sexuelles.

Nous allons nous citer dans cette affaire :

« Autoritaire et humanitaire, Angela Merkel incarne le péril féministe ; voyez L’Express qui évoqua dans une manchette débile ces femmes qui sauvent le monde. En réalité si nous avions eu Hillary Clinton au pouvoir, nous aurions déjà la guerre mondiale. Merkel incarne l’esprit de la nursery décrit en 1921 par Chesterton lors de son voyage en Amérique. Pour Chesterton la féministe (la fasciste ou la bolchéviste au féminin) considère le citoyen comme un enfant, pas comme un citoyen :

“And as there can be no laws or liberties in a nursery, the extension of feminism means that there shall be no more laws or liberties in a state than there are in a nursery.”

C’est ainsi du reste que fonctionne la démocratie en Europe bruxelloise : comme dans une nursery, avec des peuples infantiles et bien soumis, sauf la minorité machiste-populiste-raciste qui horrifie  raisonnablement les medias bien-pensants. Le féminisme devient le noyau du totalitarisme postmoderne. On retrouve comme toujours Tocqueville et son pouvoir prévoyant, tutélaire et doux, qui cherche à nous fixer dans l’enfance.

J’ajoutais alors :

« Les froides fonctionnaires sans enfant remplissent nûment leur tâche ingrate, oubliant au passage que l’homme a été créé égal à la femme, l’électeur à son élu.

Evoquons les harpies bellicistes… Sur ce sujet Philippe Grasset remarquait « la tendance  d’Obama à s’entourer de créatures essentiellement féminines, les Harpies diverses, Nuland, Rice, Flournoy, Clinton, Power, les personnages les plus extrémistes de toutes les administrations depuis des décennies, sinon les plus extrémistes de toute l’histoire de la diplomatie US. »

Emmanuel Todd avait dénoncé la dérive féministe de la diplomatie américaine. Il analysait les agendas du féminisme ombrageux dans son presque impeccable Après l’empire :

« L'Amérique, dont le féminisme est devenu, au cours des années, de plus en plus dogmatique, de plus en plus agressif, et dont la tolérance à la diversité effective du monde baisse sans cesse, était d'une certaine manière programmée pour entrer en conflit avec le monde arabe, ou plus généralement avec la partie du monde musulman dont les structures familiales ressemblent à celles du monde arabe, ce que l'on peut nommer le monde arabo-musulman. »

Todd ajoutait :

« Il y a quelque chose d'inquiétant à voir une telle dimension devenir un facteur structurant des relations internationales. Ce conflit culturel a pris depuis le 11 septembre un côté bouffon et à nouveau théâtral, du genre comédie de boulevard mondialisée. D'un côté, l'Amérique, pays des femmes castratrices, dont le précédent président avait dû passer devant une commission pour prouver qu'il n'avait pas couché avec une stagiaire ; de l'autre, Ben Laden, un terroriste polygame avec ses innombrables demi-frères et demi-sœurs. Nous sommes ici dans la caricature d'un monde qui disparaît. Le monde musulman n'a pas besoin des conseils de l'Amérique pour évoluer sur le plan des mœurs. »

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L’anthropologue et démographe voyait aussi la dégénérescence gagner le monde scientifique anglo-saxon/occidental à cause de cette idéologisation féministe ; comme on sait toutes les sciences sont compromises en occident PC maintenant, aussi bien les humaines que les dures ou la génétique, ce qui confirme la Chine et la Russie dans leur suprématie technologique et militaire.

Emmanuel Todd donc :

« Le conflit entre le monde anglo-saxon et le monde arabo-musulman est profond. Et il y a pire que les prises de position féministes de Mmes Bush et Blair concernant les femmes afghanes. L'anthropologie sociale ou culturelle anglo-saxonne laisse apparaître quelques signes de dégénérescence (…) Si une science se met à distribuer des bons et des mauvais points, comment attendre de la sérénité de la part des gouvernements et des armées ? »

Si la suite est facile à prévoir (guerre mondiale contre les machos russes-chinois-iraniens, extinction démographique, migrations pleurnichardes, et explosion de la dépense/dette sociale), ce qui précédait ce désastre est à rappeler – et on le retrouvera une fois de plus chez Tocqueville. On relira son ami Gustave de Beaumont avec profit aussi (1). 

Notre génie écrivait, beaucoup plus perspicace que Marx ou Engels dans cette affaire :

« Aux États-Unis, les doctrines du protestantisme viennent se combiner avec une Constitution très libre et un état social très démocratique ; et nulle part la jeune fille n’est plus promptement ni plus complètement livrée à elle-même. »

La femme américaine est plus affranchie que l’homme :

« Longtemps avant que la jeune Américaine ait atteint l’âge nubile, on commence à l’affranchir peu à peu de la tutelle maternelle ; elle n’est point encore entièrement sortie de l’enfance, que déjà elle pense par elle-même, parle librement et agit seule ; devant elle est exposé sans cesse le grand tableau du monde ; loin de chercher à lui en dérober la vue, on le découvre chaque jour de plus en plus à ses regards, et on lui apprend à le considérer d’un œil ferme et tranquille. Ainsi, les vices et les périls que la société présente ne tardent pas à lui être révélés ; elle les voit clairement, les juge sans illusion et les affronte sans crainte ; car elle est pleine de confiance dans ses forces, et sa confiance semble partagée par tous ceux qui l’environnent. »

La conséquence :

« Il ne faut donc presque jamais s’attendre à rencontrer chez la jeune fille d’Amérique cette candeur virginale au milieu des naissants désirs, non plus que ces grâces naïves et ingénues qui accompagnent d’ordinaire chez l’Européenne le passage de l’enfance à la jeunesse. Il est rare que l’Américaine, quel que soit son âge, montre une timidité et une ignorance puériles. Comme la jeune fille d’Europe, elle veut plaire, mais elle sait précisément à quel prix. »

Et cette constatation redoutable :

« Si elle ne se livre pas au mal, du moins elle le connaît ; elle a des mœurs pures plutôt qu’un esprit chaste. »

Ce mixte « d’esprit peu chaste » et de « mœurs très pures » est devenu le fondement de notre société orwellienne et fanatique de la censure. On cherche la petite bête immonde et on châtie. C’est finalement une police politique et même sexuelle qui envahit notre quotidien vitrifié : en France on poursuit les hommes qu’on aurait entendu siffler des filles… En Andalousie, le mari doit avoir un suivi psychiatrique dans le cadre de la loi de la violence de genre… il va de soi que l’homme qui accepte ce type de couvre-feu anti-masculin n’est plus tout à fait un homme. Mais après des siècles de progrès et de libération…

Restons sur Tocqueville ; bien avant toutes ces blanches sages du congrès américain, la jeune fille US effraie notre juriste voyageur (et abominable macho) : « J’ai souvent été surpris et presque effrayé en voyant la dextérité singulière et l’heureuse audace avec lesquelles ces jeunes filles d’Amérique savaient conduire leurs pensées et leurs paroles au milieu des écueils d’une conversation enjouée ; un philosophe aurait bronché cent fois sur l’étroit chemin qu’elles parcouraient sans accidents et sans peine… »

Le monde postmoderne repose sur le ressentiment, celui des ex-esclaves, des ex-colonisés, des ex-femmes, des ex-persécutés, des ex-animaux…, et il ne s’en remettra pas, puisqu’à la destruction intérieure des pays doit s’ajouter la grande guerre sainte extérieure. Il faut épurer/refonder ce monde, et dites-vous qu’elles (et ils) iront jusqu’au bout.

bst.jpgNota : si l’américaine est née comme ça, gnostique en fait –cf. les filles du Dr March ou la péroreuse Beecher-Stowe, l’européenne a dû être transformée, travaillée. Un Nietzsche remonté écrivait dans par-delà le bien… et le mâle : « Sans doute, il existe, parmi les ânes savants du sexe masculin, assez d’imbéciles, amis et corrupteurs des femmes, qui conseillent à ces dernières de dépouiller la femme et d’imiter toutes les bêtises dont souffre aujourd’hui en Europe « l’homme », la « virilité » européenne, — qui aimerait avilir la femme jusqu’à la « culture générale », ou même jusqu’à la lecture des journaux et jusqu’à la politique. On veut même, de ci de là, changer les femmes en libres penseurs et en gens de lettres. »

Et Nietzsche d’ajouter justement dans son splendide texte : « tout cela est la révélation, sinon d’une déchéance de l’instinct féminin, d’une mutilation de la femme. »

Et on ne parlera pas de la mutilation/déchéance des hommes !

Note

(1) Gustave de Beaumont écrit sur cette femme américaine isolée, abstraite et gnostique : « Sa vie est intellectuelle. Ce jeune homme et cette jeune fille si dissemblables s'unissent un jour par le mariage. Le premier, suivant le cours de ses habitudes, passe son temps à la banque ou dans son magasin ; la seconde, qui tombe dans l'isolement le jour où elle prend un époux, compare la vie réelle qui lui est échue à l'existence qu'elle avait rêvée. Comme rien dans ce monde nouveau qui s'offre à elle ne parle à son cœur, elle se nourrit de chimères, et lit des romans. Ayant peu de bonheur, elle est très religieuse, et lit des sermons. »

Sources

Alexis de Tocqueville, De la démocratie, II, troisième partie, chapitre 9 (classiques.uqac.ca)

Gustave de Beaumont – Marie, ou de l’esclavage (classiques.uqac.ca)

Nietzsche – Par-delà le bien et le mal, § 239

Gilbert Keith Chesterton – What I saw in America (Gutenberg.org)

Nicolas Bonnal – Machiavel et les armes de migration massive ; Nietzsche et la guerre des sexes ; les grands westerns américains, une approche traditionnelle et rebelle (Amazon.fr)

Emmanuel Todd – Après l’empire (Gallimard)

11:38 Publié dans Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sociologie, féminisme, états-unis | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

D'une conférence à l'autre, la guerre américaine en Europe

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D'une conférence à l'autre, la guerre américaine en Europe

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Lors de la récente conférence de Varsovie organisée par Washington avec les bons services de la Pologne,  les Américains avaient tenté de former un front uni pour « Promouvoir la Paix et la sécurité au Moyen Orient ».

En fait il s'agissait de définir les modalités d'une véritable guerre contre l'Iran, que Donald Trump s'est promis de détruire. La conférence fut un échec. A part Israël et les monarchies arabes du pétro-dollar, aucun des Etats Européens ne s'y firent représenter, sauf par des fonctionnaires sans pouvoir, non plus que Federica Mogherini qui dirige le service diplomatique de l'UE.

L'objectif en était de démontrer que l'Iran veut mettre en place un « corridor d'influence » entre l'Irak, la Syrie et le Liban, que le vice-président américain Mike Pence a décrit comme un « corridor de soutien au terrorisme ». Il s'agissait dans un premier temps d'exiger des Européens qu'ils se retirent de l'accord de 2015 avec l'Iran entérinant le fait que celle-ci avait renoncé à l'arme nucléaire, ce qu'ils refusent de faire. Mais il s'agissait aussi d'obliger les Européens à imposer à Téhéran un blocus complet, ce qui aurait été un véritable acte de guerre.

Les Européens s'y refusent, malgré les « sanctions » américaines visant leurs entreprises opérant en Iran. On notera qu'en fait de terrorisme, c'est l'Iran qui en est pour le moment la victime, puisqu'un attentat non revendiqué à la bombe avait fait pendant la conférence de Varsovie 27 morts parmi des militaires iraniens appartenant à la Garde Révolutionnaire iranienne.

55e Conférence de Munich sur la Sécurité

Mais Washington malgré cet échec diplomatique ne renonce pas. Lors de la 55e Conférence de Munich sur la Sécurité, qui a toujours été conçue par les Etats-Unis comme une préparation à la guerre contre Moscou et qui s'est ouverte le 15 février, le Munich Security Report 2019, désormais disponible, largement inspiré par le Pentagone, n'a rien de rassurant. Il présente comme inévitable une guerre entre les Etats-Unis, la Russie et la Chine, qui nécessairement dégénérait en conflit nucléaire. Il n'aborde en rien la question de savoir comment éviter cette guerre, mais comment s'y préparer et les mesures à prendre pour en limiter les dégâts.

Le président allemand de la conférence, Wolfgang Ischinger, est un diplomate, ancien ambassadeur d'Allemagne à Washington. Il a toujours été très proche des Etats-Unis. Il vient de déclarer en introduction qu'un nouvelle ère de compétition entre Grandes Puissances, Etats-Unis, Chine et Russie s'était désormais ouverte . Elle était accompagnée d'un vide dans le leadership mondial au niveau de ce qui a été nommé l'ordre libéral international. La suite de ses propos recommande une augmentation de la puissance destinée à intimider les Etats menaçants. Chacun a compris qu'il s'agissait de la puissance militaire.

L'Allemagne, la Grande Bretagne et la France ont décidé récemment d'augmenter leur puissance militaire. Elles n'ont pas précisé la menace contre laquelle elles veulent réagir. Depuis longtemps, Washington souhaite que ces armes prennent le relais des siennes en Europe. Il n'est pas certain que les populations européennes soient prêtes à accepter les destructions et les morts qui résulteraient d'un conflit sur le Continent avec la Russie et la Chine, fut-il non-nucléaire. Manifestement la nouvelle Conférence de Munich sur la Sécurité vise à préparer les esprits européens à l'acceptation d'un tel conflit.

PS. Concernant l'<Allemagne et l'Otan, voir
http://www.spacewar.com/reports/Germany_to_let_NATO_use_i...

mardi, 12 février 2019

The Costs of Misunderstanding Iranian Foreign Policy

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The Costs of Misunderstanding Iranian Foreign Policy

This is because, contrary to what many believe, Iran’s foreign policy today is largely shaped by its threat perceptions and interests—not ideology.

Because the contours of Iran’s foreign policy appear to be drawn primarily by security considerations, including deterrence and power projection, the United States isn’t likely to fundamentally change the country’s behavior.

American policymakers have several blind spots when it comes to understanding the behavior of other governments, especially when they consider them to be adversaries. The worst of these is the tendency to ascribe profound ideological motives to a regime’s leadership when they are usually concerned much more with self-preservation and protecting their national interests as they understand them. During the Cold War, many anticommunists imagined that the Soviets were much more bent on pursuing a revolutionary foreign policy than they actually were. Those who understood that Soviet foreign policy had a great deal of continuity with the policy of pre-revolutionary Russia were more likely to make sense of what the Soviets were likely to do and why they were doing it. Interpretations of other states’ behavior that reduce everything to the official ideology of that state are always going to miss the mark because the real reasons for their conduct are to be found elsewhere.

Prior to the negotiation of the nuclear deal, Americans were regularly treated to nonsensical “analysis” that portrayed Iran as a fanatical government prepared to commit national suicide in pursuit of its goals abroad. This “martyr-state” myth has thankfully been thoroughly debunked and discredited by events, but the fact that it flourished at all shows how determined many American policymakers and pundits are to perceive their adversaries as irrational, inflexible maniacs that cannot be deterred or reasoned with.

Iran hawks in the Trump administration still insist on describing Iran’s policies in terms of exporting revolution. Pompeo said as much in his widely-panned article for Foreign Affairs from last year:

The regime’s revolutionary mindset has motivated its actions ever since—in fact, soon after its founding, the IRGC created the Quds Force, its elite special forces unit, and tasked it with exporting the revolution abroad. Ever since, regime officials have subordinated all other domestic and international responsibilities, including their obligations to the Iranian people, to fulfilling the revolution.

As Tabatabai explains, this is a dated interpretation that ignores the changes in Iran and its government over the last four decades:

But a closer assessment of the regime’s foreign policy unveils a much more pragmatic Iran, one whose policies are nonetheless shaped by its historical experiences and culture.

The Trump administration can’t or won’t acknowledge the existence of this “much more pragmatic Iran,” because that would be an admission that their own uncompromising hard-line approach is unnecessary and harmful. They need to portray Iran as a destabilizing revolutionary state to make their obsessive hostility to Iran seem more defensible, but it is all based on a faulty understanding of the country and its government. That in turn has led to the administration’s preposterous demands that Iran radically alter its foreign policy, but that won’t ever happen because Iran considers its current policies to be important for their national security and for the survival of the regime. Far from being the self-destructive revolutionaries that Iran hawks want them to be, Iran’s leaders are interested in self-preservation above all else. The U.S. needs to have an Iran policy that takes that into account, or else we will continue to have a failing and bankrupt Iran policy that achieves nothing besides deepening the enmity between our governments.

lundi, 11 février 2019

Pourquoi les États-Unis voudraient-ils du pétrole du Venezuela ?

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Pourquoi les États-Unis voudraient-ils du pétrole du Venezuela ?

par Andrew Korybko

Article original de Andrew Korybko, publié le 26 janvier 2019 sur le site Eurasia Future 
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr 

alors qu’ils achètent déjà 41 % de ses exportations totales …

Le discours dominant des médias alternatifs selon lequel Washington veut imposer un régime fantoche pro-américain au Venezuela pour contrôler tout le pétrole du pays n’a pas beaucoup de sens si l’on considère qu’elle achète déjà 41% des exportations totales de la République bolivarienne, ce qui signifie qu’une autre explication plus nuancée doit être donnée pour expliquer ce double raisonnement.

La communauté des médias alternatifs est pleine de commentaires sur la façon dont les États-Unis veulent imposer un régime fantoche au Venezuela afin de contrôler le pétrole du pays, mais cela n’a pas beaucoup de sens car ils achètent  déjà 41% des exportations totales de la République bolivarienne, comme en témoigne le résumé de la réunion de l’Agence de l’information énergétique sur le commerce énergétique entre les deux au 7 janvier 2019. Selon le rapport, les États-Unis sont le premier client du Venezuela, tandis que le Venezuela est le troisième plus gros fournisseur d’importations de pétrole brut des États-Unis, de sorte que Washington obtient déjà tout ce dont il a besoin de Caracas en l’état. Compte tenu de cette dynamique ironique entre les deux adversaires géopolitiques et idéologiques, on pourrait s’attendre à ce que les États-Unis obtiennent un jour l’accès aux ressources des plus grandes réserves pétrolières du monde dans la ceinture de l’Orénoque, ce qui contredit une fois de plus le discours simpliste selon lequel Washington ne mène cette guerre hybride que pour le pétrole.

Néanmoins, la vérité est que le contrôle du pétrole vénézuélien est effectivement l’une des motivations de ce conflit, mais pas de la manière dont il est décrit. En plus d’assurer un contrôle géopolitique total sur le bassin des Caraïbes et d’affronter idéologiquement le socialisme, les États-Unis veulent obtenir une influence prédominante sur le Venezuela afin de l’intégrer dans une structure parallèle de type OPEP pour contester l’arrangement conjoint OPEP+ russo-saoudien selon les prévisions de l’auteur fin 2016 concernant la formation du cartel North American-South American Petroleum Exporting Countries (NASAPEC). Cette entité fonctionnerait comme la composante énergétique de la « forteresse américaine » et pourrait exercer une forte pression à long terme sur le marché pétrolier international aux dépens de la Russie et de l’Arabie saoudite. Si l’on ajoute à cela les plans d’investissement conjoints des États-Unis et du Qatar dans le GNL, il est clair que les États-Unis sont en train de faire un jeu de puissance mondial pour le contrôle de l’industrie mondiale de l’énergie, ce qui pourrait avoir des conséquences très négatives pour la Russie.

La grande puissance multipolaire eurasienne compte sur ses exportations d’énergie pour faire avancer ses intérêts financiers et géopolitiques, mais cela pourrait être plus difficile à faire – malgré ses partenariats pétroliers et gaziers avec l’Arabie saoudite et l’Iran respectivement (qui font partie de la stratégie d’« équilibrage » du pays) – au cas où le NASAPEC et son alliance GNL avec le Qatar dans l’hémisphère occidental devienne une forte concurrence dans tous ces domaines. Le risque potentiel est que la Russie perde beaucoup de revenus à long terme si les États-Unis parviennent à maintenir les prix du pétrole et du gaz à un bas niveau, ce qui pourrait se combiner avec les coûts accrus associés à la nouvelle course aux armements provoquée par le retrait de Washington du Traité INF pour exercer une pression immense sur Moscou afin de « compromettre » son principal rival géopolitique dans un stratagème que j’ai décrit dans l’article « Les véritables aspirations américaines concernant la Russie », en avril 2018.

L’héritage ultime du président Poutine repose sur sa capacité à tenir les nombreuses promesses socio-économiques qu’il a faites à ses compatriotes au cours de sa campagne de réélection l’année dernière, même si toutes reposaient sur l’hypothèse que les futurs marchés du pétrole et du GNL resteraient stables et largement sous le contrôle de la Russie, ainsi que sur le fait que les progrès des missiles hypersoniques du pays pourraient empêcher le déclenchement d’une nouvelle et coûteuse course aux armes. Les mesures énergétiques et militaires américaines susmentionnées ont brisé ces présomptions et pourraient mettre en péril les plans soigneusement élaborés par le dirigeant russe pour améliorer les moyens d’existence de tous ses compatriotes (en particulier la majorité de la population qui vit en dehors de ses villes les plus développées que sont Moscou et Saint-Pétersbourg), même si, pour l’instant, le pire scénario est encore loin d’être certain, en attendant le résultat de la crise au Venezuela, ce qui explique pourquoi la Russie souhaite tant « faire office d’intermédiaire » entre son gouvernement et « son opposition ».

Andrew Korybko est un analyste politique américain basé à Moscou qui se spécialise dans les relations entre la stratégie américaine en Afro-Eurasie, la vision mondiale de la nouvelle connectivité de la route de la soie en Chine et la guerre hybride.

samedi, 09 février 2019

WASHINGTON, PEKIN : HEGEMONIE NUMERIQUE CONTRE HEGEMONIE TELLURIQUE

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WASHINGTON, PEKIN : HEGEMONIE NUMERIQUE CONTRE HEGEMONIE TELLURIQUE

par Jean-Claude Empereur
Ex: http://www.europesolidaire.eu 
 
Nous republions ici, avec son accord, un article de Jean-Claude Empereur, membre du Comité de Rédaction de Europe Solidaire. Nous le remercions. Cet article est particulièrement d'actualité le jour où la Commission, avec la décision Alstom-Siemens, trahit une fois de plus les Européens

LES NOUVEAUX ASPECTS DU « PIÈGE DE THUCYDIDE »

Auteur: 
Jean-Claude Empereur
Date de publication: 21/7/2018

Note Introductive

L'Institut Européen des Relations Internationales témoigne de sa reconnaissance au Vice-Président de la "Convention pour l'Indépendance de l'Europe", Mr Jean-Claude Empereur, pour l'autorisation à reprendre la publication de son essai, au titre "Washington, Pékin : Hégémonie Numérique contre Hégémonie Tellurique. Les nouveaux aspects du « Piège de Thucydide »", paru sur la "Revue Politique et Parlementaire", d'avril-septembre 2018. Il s'agit d'une réflexion originale et précieuse pour tous les lecteurs, professionnels et/ou engagés, qui participent à la vie civile et politique, avec le souci d'en dégager les options internationales et la perspective historique. (N.d.R)

**************

Le XXI ème siècle sera dominé par l'affrontement entre la Chine et les États-Unis. Dans un récent ouvrage le géopolitologue Graham Allison nous invite à relire Thucydide.

Dans « Destined for war. Can America and China escape the Thucydides's trap?, à la suite d'une analyse historique très serrée, l'auteur nous rappelle, en se référant à la guerre du Péloponnèse, que lorsqu'une puissance régnante est défiée par une puissance émergente, un risque de conflit apparaît. Il recense, au cours de l'histoire, seize occurrences de ce type dont, selon lui, douze d'entre elles ont débouché sur un conflit majeur. Le plus souvent la puissance qui se sent menacée dans sa prééminence, prend l'initiative de l'affrontement mais doit finalement s'incliner.

L'affrontement qui se précise, chaque jour un peu plus, entre la Chine et les États-Unis s'apparente-t-il à celui qui, cinq cents ans, avant notre ère opposa Sparte et Athènes ? Ses conséquences pour l'équilibre du monde et le destin de la civilisation occidentale seront-elles les mêmes ? C'est toute la question. 

Ce conflit entre Sparte et Athènes est interprété par la pensée géopolitique traditionnelle comme celui opposant une puissance terrestre à une puissance maritime.

Il est tentant d'appliquer ce schéma de pensée à l'affrontement Chine, puissance terrestre, États-Unis, puissance maritime. Sans être totalement infondée cette grille d'analyse reflète très imparfaitement la réalité. En effet elle ne prend en compte ni l'évolution des technologies ni les différences fondamentales de conception de l'hégémonie chez chacun des protagonistes.

En réalité ce sont deux formes inédites d'hégémonie qui se dressent l'une contre l'autre : l'une, américaine, est numérique, l'autre, chinoise, est tellurique, la première s'inscrit dans le virtualisme et le big data, la seconde dans le continentalisme et les infrastructures physiques.

Les protagonistes de la première pratiquent le jeu d'échec, où il s'agit d'éliminer progressivement l'adversaire, puis de s'en saisir brutalement, ceux de la seconde, le jeu de go, où pour vaincre l'adversaire, on envahit patiemment l'échiquier par infiltration et contournement.

Confrontée à cette situation l'Europe est démunie, elle ne maîtrise plus le numérique depuis près de cinquante ans.Petit cap de l'Asie elle est dépourvue de grands espaces et de profondeur stratégique. Pour desserrer cet étau géopolitique il lui faut se réinventer en se dégageant de son obsession institutionnelle et normative. En a-t-elle encore la possibilité voire même la volonté ?

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Les États-Unis ou l'hégémonie numérique 

Même si la Chine développe, de nos jours, une puissante industrie du numérique, les États-Unis sont aujourd'hui dans ce domaine, et sans doute pour longtemps encore, les maîtres du monde. Petit à petit le numérique devient le cœur de leur puissance économique et militaire ainsi que de leur influence politique et culturelle.

Pour bien comprendre l'importance de cet aspect des choses il faut avoir à l'esprit quelques principes simples :

  • La puissance des ordinateurs double tous les deux ans. Cette loi empirique, baptisée « loi de Moore » du nom de son inventeur, ne cesse de se vérifier depuis un demi-siècle. Parfois contestée de nos jours, elle continuera, dans le futur, à se vérifier, voire à s'amplifier en raison des progrès technologiques d'ores et déjà en gestation. Elle est devenue une loi de l'histoire.

  • Ses conséquences : tout ou presque tout devient progressivement numérisable et automatisable. « L'automatisation généralisée va dominer le monde » prédit Bernard Stiegler dans « Disruption ». Ce phénomène renforcé par le développement de la robotisation, de l'intelligence artificielle et de la convergence des sciences cognitives avec les nano, bio et info technologies envahit l'ensemble des activités humaines, celles de la paix comme celles de la guerre.

  • Ce foisonnement technologique et numérique, en accélération constante, produit, à partir de l'activité de chacun d'entre nous, des « projections algorithmiques ». Celles-ci constituent le socle du « big data », c'est à dire de cet ensemble de données que génèrent, en continu, les hommes et leurs institutions.Ce « big data » devient, à son tour, une matière première dont l'exploitation massive constitue, peu à peu, la base de l'économie mondiale, mais aussi la source de toute les manipulations médiatiques et politique imaginables. La puissance algorithmique d'un Etat devient ainsi un élément majeur de de son influence géopolitique.

La puissance algorithmique américaine repose sur le contrôle d'un appareil technologique hard et soft qui maîtrise l'intégralité, de la chaîne de traitement de cette ressource inépuisable. Cette maîtrise assure ce qui est la base de la stratégie planétaire des États-Unis, la « Full spectrum dominance ».

Cette hégémonie numérique n'est pas négociable, elle s'exprime par différents canaux :

  • Le contrôle exclusif d'une chaîne scientifique, technologique et industrielle dédiée au numérique (composants, ordinateurs, télécommunications, logiciels, services etc...) appuyée sur tout un réseau de centres de recherche, d'universités ? souvent sanctuarisés en des lieux tels que la Silicon Valley et abondamment soutenue par des fonds publics en provenance du secteur de la défense.

  • Une communauté du renseignement dotée d'une diversité et d'une ubiquité jusqu'à présent inégalée : seize agences couronnées par la National Security Agency (NSA) à l'écoute permanente du monde.

Cette double maîtrise inspire une double stratégie :

Une politique de colonisation numérique exercée à partir d'une interaction constante entre le « big data » et les GAFA dont l'utilisation permanente d'applications les plus diverses en croissance exponentielle, par des milliards d'individus de par le monde, tend à devenir un élément majeur du PIB américain de sa croissance. Un phénomène très particulier de l'économie numérique américaine est rarement souligné .Il est pourtant essentiel car il va prendre de plus en plus d'importance. La plupart des sociétés du numérique Google, Amazon, Facebook etc. investissent une énorme part de leurs profits, hors du numérique, dans les industries nouvelles : espace, transport, nucléaire... où elles apportent leur formidable capacité d'innovation, rendant ainsi ce phénomène de colonisation exponentiel et de plus en plus dominateur.

Une politique d'influence, sorte de « digital power » venant diversifier et amplifier le traditionnel « soft power » où, la mise en réseau, l'instantanéité, la mise hors sol, dans le « nuage » de nos activités  apporte, avec elle, cette « siliconisation du monde » dont nous parle Eric Sadin dans son livre éponyme.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : Facebook compte 2,2 milliards d'usagers mensuels, WhatsApp est utilisé quotidiennement par 1 milliard d'utilisateurs, et YouTube également par plus de 1 milliard d'entre eux. Parallèlement à ces services Google, Twitter, LinkedIn, Instagram pour ne citer que les principaux se sont répandus sur la totalité de la planète en utilisant tous les supports possibles : câbles, satellites, ballons, construisant ainsi une sorte de dôme numérique surplombant le monde.

Comme le prévoyait Thomas L. Friedman, la terre devient plate, lisse et sans aspérités. Notre destin commun, sous l'influence de cette siliconisation américaine n'est autre que la transposition numérique de la « Manifest destiny » réaffirmée naguère par Madeleine Albright sous le vocable de « Nation indispensable ». Il suffit de lire les cartes du monde, diffusées par Facebook ou ses épigones, pour s'en rendre compte, l'une des dernières éditions s'ingéniant à cartographier, à l'échelle mondiale, les relations tissées par des « amis » qui ne cessent de « liker » entre eux. Traduction géopolitique d'une sorte de vivre ensemble mondialisé ignorant rapports de forces et conflits territoriaux effaçant États et nations. Une « géopolitique numérique du tendre » en quelque sorte, figure nouvelle du messianisme bienveillant.

Tout se passe comme si les États-Unis sentant leur leadership battu en brèche s'enfonçaient dans une conception virtualiste du monde de plus en plus déconnectée des réalités géopolitiques actuelles. Karl Rove, le conseiller de George W. Bush l'avait exprimé naguère dans une formule saisissante et péremptoire : « Nous sommes un empire désormais, et lorsque nous agissons, nous créons notre propre réalité. Nous sommes les acteurs de l'histoire... et vous, vous tous, vous resterez cantonnés dans l'étude de ce que nous faisons »

Ce virtualisme géopolitique avait commencé avec le projet hollywoodien de Guerre des étoiles de Ronald Reagan qui ne fut pas sans résultat géopolitique, Donald Trump lorsqu'il accéda au pouvoir avait déjà derrière lui dix ans de téléréalité. Barack et Michelle Obama viennent de signer avec Netflix le géant du streaming numérique (1000 productions originales pour la seule année 2018...). un contrat portant sur plusieurs années pour la réalisation de séries « pour découvrir et mettre en lumière des histoires de personnes qui font la différence dans leurs communautés et veulent rendre le monde meilleur». Cette extension constante du numérique augmente parallèlement la puissance de l'Amérique et réciproquement. Les mathématiciens parleraient d'une relation biunivoque. Rien ne semble pouvoir arrêter ce mouvement.

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La Chine ou l'hégémonie tellurique

La puissance chinoise ré-émergente ne partage pas cette interprétation du monde. A ce virtualisme géopolitique elle oppose, en effet, un réalisme continentaliste prenant la forme d'une hégémonie tellurique c'est à dire inscrite dans les grands espaces les territoires, le sol, construite à partir d'infrastructures stratégiques, ferroviaires, routières, énergétiques, aériennes et maritimes, centrées sur l'ensemble eurasiatique et donnant corps au projet des :  Nouvelles routes de la soie : la «  Belt and road initiative » (BRI)  lancé par Xi Jinping en 2013.

Sans exclure, bien entendu, la part de propagande, jamais absente des stratégies élaborées par les régimes autoritaires, il serait imprudent de ne pas prendre en compte l'ambition géopolitique particulièrement originale de cette stratégie. Il s'agit d'une politique planétaire d'aménagement du territoire au sens que l'on donnait à cette politique, en France, à l'époque de la reconstruction et des trente glorieuses.

Construire un territoire à partir d'un réseau de villes et d'infrastructures destiné à permettre un développement harmonieux et coordonné. La différence d'approche avec la politique française des années soixante est toutefois de taille : la conception chinoise est délibérément géopolitique et s'applique à la terre entière, non seulement à l'ensemble eurasiatique mais aussi à l'Afrique et à l'Amérique latine.

Tout d'abord l'Eurasie. A cent ans de distance la BRI donne consistance, en élargissant encore son amplitude géographique à l'ensemble de l'Eurasie, à l'intuition et surtout à la mise en garde de Halford John Mackinder sur l'importance, pour le contrôle de la planète, de « l'ile du monde », « pivot géographique de l'histoire ». (Conférence à la Royal Geographical Society de Londres, février 1904). Ce qui n'était, à l'origine, qu'une vision prémonitoire devient avec la BRI une réalité concrète.

La cible de la BRI n'est autre que la totalité de l'espace eurasiatique de Pékin aux extrémités de l'Europe, au Moyen Orient, ainsi qu'aux rivages de l'Océan indien avec comme point de départ un programme de 1200 milliards de dollars, ferroviaire (fret et grande vitesse), routier, énergétique et maritime. Ce programme est déjà en cours de réalisation il comprend six grands corridors géographiques structurant comme les doigts de la main la totalité de l'espace eurasiatique.

D'ici le milieu du siècle le projet des Nouvelles routes de la soie devrait concerner une centaine de pays, impliquer 7000 projets d'infrastructures pour un montant de 8000 milliards de dollars d'investissement.

Le programme ne s'arrête pas là.En s'appuyant sur la ceinture maritime de la route de la soie, il se déploie en Afrique, se prolonge par des infrastructures ferroviaires,la mise en place d'un point d'appui stratégique à Djibouti et se poursuit vers la Méditerranée via le Pirée, l'utilisation de nombreuses facilités maritimes au Maghreb, ou la prise de participation dans le capital de l'aéroport de Toulouse mais aussi dans le financement de la centrale nucléaire d'Hinkley Point.

Enfin l'Amérique latine complète cette politique d'aménagement planétaire par la participation à la construction d'une voie terrestre routière et ferroviaire entre le Brésil et le Pérou, l'utilisation massive du canal de panama et la conception d'un projet de nouveau canal à plus grande capacité au Nicaragua. Ce n'est qu'en consultant les cartes, celle du globe en particulier, que l'on peut prendre conscience de la dimension tentaculaire de la BRI, programme géostratégique dont il n'existe aucun précédent dans l'histoire.

Par ailleurs, cette « vertébration » du monde pour reprendre une expression d'Ortega Y Gasset s'appuie sur un ensemble institutionnel et financier considérable.

  • L'Organisation de Coopération de Shanghai (OCS), organisme original qui regroupe des États au moyen d'une structure très décentralisée sans porter atteinte à leur souveraineté, s'étend sur plus de 60 % du territoire de l'Eurasie et regroupe près de 45 % de la population de la planète, Les membres de l'OCS possèdent 20 % des ressources mondiales de pétrole, 38 % du gaz naturel, 40 % du charbon et 30 % de l' uranium, 95% des terres rares D'après les données de la Banque mondiale, le PIB global de l'OCS représente déjà plus de 20% de celui de l'économie mondiale.

  • La Banque asiatique pour les infrastructures. AIIB. (200 milliards de dollars) au capital duquel participent, à l'exception de États-Unis et du Japon, la plus grande partie des membres de la communauté internationale à laquelle il faut ajouter le Silk Fund (80 Mds de dollars).

  • La banque des BRICS (200 milliards de dollars) vient compléter ce système pour financer des interventions en dehors du périmètre Eurasiatique.

Par ailleurs, le livre blanc 2017/2022 sur la politique de l'espace prévoit l'exploitation des météorites et de la Lune notamment pour extraire de notre satellite l'hélium 3 nécessaire à la fusion nucléaire civile ainsi que le programme « Made in China 2025 » annonce le développement des dix technologies d'avant-garde à maîtriser d'ici là. Cette double ambition complète cette stratégie du « Marathon de cent ans » affichée par les responsables du Parti communiste chinois, dans une optique de revanche, dès le lendemain de la rencontre de Nixon avec Mao Tse Toung (1972), pour rattraper puis dépasser les Etats-Unis. Ce qui frappe dans cette démarche qui n'est toutefois pas sans risques politiques, écologiques, économiques et financiers, la Chine étant très endettée et ses initiatives parfois mal reçues chez ses voisins, c'est la combinaison qu'elle organise entre planification séculaire et constante accélération.

Enfin, sur le plan politique, la récente décision consistant à ne plus limiter le nombre des mandats du Président confirme cette volonté de maîtrise du temps et de l'espace.

Préférence pour le temps long, prise en compte des grands espaces, financements à long terme, souplesse d'organisations multilatérales politiques économiques et militaires , liaisons permanentes entre politiques d'aménagement et politiques industrielles, recherche de la coopération régionale par la connectivité telles sont les formes d'une hégémonie ascendante qui prend appui sur le sol, les territoires, les continents et préserve les États.

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L'Union Européenne ou l'hégémonie inversée

Les Européens, après l'effondrement de l'Union Soviétique, ont souscrit béatement au grand récit de la mondialisation heureuse et de la fin de l'histoire. Ils ont banni de leurs discours les notions de conflit et de puissance. Ils se sont aveuglés en privilégiant la servitude volontaire sur la prise de conscience des réalités. La caractéristique la plus évidente de l'Europe au cours de ce dernier quart de siècle est son manque de perspective à long terme sur l'histoire mondiale et son refus de toute vision géopolitique.

Or après soixante-dix ans de relative stabilité, le monde est redevenu « normal », c'est-à-dire multipolaire et potentiellement conflictuel. Les Européens abordent cette nouvelle période de l'histoire du monde sans vision d'ensemble et dans un grand désarroi. Épuisés par deux guerres mondiales

Ce désarroi est d'autant plus profond qu'ayant misé, épuisés par deux guerres mondiales, pour fonder leur projet d'intégration , sur les normes et les valeurs, c'est-à-dire sur la raison et les bons sentiments, ils se trouvent plongés, à nouveau, dans une situation de montée des périls, voire même de montée aux extrêmes, perspective que leur inconscient collectif avait refoulé jusqu'alors.

Enfin ce réveil douloureux les surprend en un temps de bouleversements démographiques, technologiques, économiques, culturels et géopolitiques dont l'imprévisibilité, l'ampleur et l'accélération continue tétanisent et sidèrent leurs opinions publiques.

Cette situation devrait inciter les Européens, à placer la préoccupation d'indépendance au cœur de leur réflexion et surtout au centre d'un projet de refondation plus que jamais nécessaire. De cette volonté d'indépendance tout le reste, en effet, découlera : définition des intérêts vitaux, formes de puissance, règles de solidarité, transformation institutionnelle, vision géopolitique et en fin de compte souveraineté.

Par rapport à cet affrontement entre hégémonie numérique américaine et hégémonie tellurique chinoise, l'espoir qu'ils ont mis, par irénisme juridique, dans l'avènement d'une forme inédite de puissance, cette illusoire « puissance par la norme », vacille sous nos yeux.

L'inversion du principe de subsidiarité s'est traduite par un foisonnement réglementaire et jurisprudentiel qui, loin de protéger les États européens, se retourne contre eux, situation encore aggravée du fait de l'utilisation, chaque jour plus invasive, du droit américain à l'ensemble de la planète.

Sans vouloir occulter un certain nombre de réussites, sur le plan économique, force est de constater que l'opinion publique perçoit de plus en plus l'Union comme un monstre technocratique dont le comportement hégémonique plutôt que de se tourner vers le reste du monde afin de participer à ce gigantesque affrontement de souverainetés qui caractérise le monde en ce début de XXI ème siècle les prend pour cible .Loin de libérer leurs énergies elle leur inflige une gouvernance qui, sous couvert de technicité rationnelle et vertueuse, leur impose une vision repentante et culpabilisatrice de leur destin collectif.

Incapable de concevoir une souveraineté qui lui soit propre l'Union européenne se comporte comme un système annihilateur de souverainetés nationales prenant la forme insolite d'une hégémonie technocratique inversée.

Le phénomène de décomposition auquel se trouve confrontée l'Union résulte de la triple convergence, contre cette hégémonie, d'une révolte des peuples, des États et des nations.

La situation se complique d'autant plus que par rapport à l'affrontement entre la Chine et les États-Unis les Européens se trouvent démunis. Ils sont pris dans un véritable étau géopolitique qu'ils ne semblent pas en mesure de desserrer.

Ils ne disposent, en effet, ni de la puissance numérique actuellement entièrement dominée par les Américains et sans doute demain par les Chinois, et sont coupés de toute profondeur stratégique, non seulement par leur situation géographique de petit cap de l'Asie mais aussi par l'interdiction absolue qui leur est faite, par leurs alliés anglo-saxons, de s'entendre avec la Russie dans une perspective eurasiatique.

Ils se sont condamnés eux-mêmes à être à la fois les prisonniers et les gardiens d'une stratégie d'endiguement engagée pendant la guerre froide, tournée vers l'URSS. Justifiée à l'époque mais maintenue depuis, sans raison, sous la pression américaine et dont l'OTAN, en extension constante, est le bras séculier elle est dorénavant étendue à la Chine et donc à l'ensemble de l'Eurasie.

Cette stratégie d'interdiction géopolitique est totalement contraire aux intérêts européens.

A quelques jours d'intervalle deux anciens Premiers ministres français, Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin viennent de se prononcer pour la création d'un axe Paris, Berlin, Moscou, Pékin. C'est une initiative importante elle marque en effet la prise en compte d'une vision géopolitique eurasiatique auquel le discours européen traditionnel et très incantatoire, centré depuis des décennies, sur la réconciliation franco-allemande ne nous avait pas habitués.

Les exigences de la géographie et de la géopolitique reprennent enfin leur droit. Puisse la réflexion sur les grands espaces l'emporter sur celles de la gouvernance par les chiffres et les obsessions comptables d'une technocratie sans vision.

Ce n'est peut-être pas tout à fait un hasard si face à l'affrontement de ces deux hégémonies numériques et telluriques qui vont façonner le monde pour les décennies à venir il revient à la France ce finisterre de l'Eurasie, initiateur des grandes idées européennes d'annoncer un changement de cap.

Ce changement d'angle de vue et de perspective est d'autant plus nécessaire que sous la pression démographique qui s'affirme et les ruptures d'équilibre entre les deux rives de la Méditerranée qui se font jour, la montée d'une autre forme d'hégémonie s'annonce, celle anarchique, des masses en mouvement, que seule une politique de codéveloppement entre l'Europe et l'Afrique peut enrayer.

Jean-Claude Empereur

Haut fonctionnaire honoraire
Vice –Président de la Convention pour l'Indépendance de l'Europe