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mercredi, 06 février 2013

La criminalité, une conséquence de la pauvreté ?...

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La criminalité, une conséquence de la pauvreté ?...

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com/

Nous reproduisons ci-dessous un texte de Laurent Obertone, cueilli sur Atlantico et consacré à l'absence de lien automatique entre criminalité et pauvreté. Laurent Obertone vient de publier La France orange mécanique, aux éditions Ring, une description hallucinante de l'insécurité et de la violence qui règne dans notre pays...

 

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Non, la criminalité n'est pas forcément liée à la pauvreté

La criminalité est-elle liée à la pauvreté, à l’environnement ou au chômage ? La Creuse (96e), le Cantal (89e), et le Lot (71e), présentent les PIB les plus bas de France. Ce sont aussi les trois départements les moins criminels et délinquants. On peut les comparer avec trois départements parmi les plus criminels et délinquants, c’est à dire la Seine-Saint-Denis (15e), les Bouches-du-Rhône (11e) et le Rhône (3e).

Les départements à forte criminalité que sont le Rhône, l’Essonne, le Val-de-Marne, la Seine-et-Marne, ont des taux de chômage beaucoup plus bas que la Creuse, le Cantal, ou le Lot. Selon l’Apce, 8 000 entreprises se créent par an dans le « 9-3 », qui dispose de pôles économiques gigantesques, et où les investissements de rénovation urbaine sont fréquents et sans équivalent (Anru). Le revenu moyen des ménages y est de 2 186 euros par mois, légèrement supérieur à la moyenne nationale. Saisissante est la comparaison avec la Creuse (1 777 euros par mois). Quant aux bénéficiaires du RSA, ils représentent la même proportion en Seine-Saint-Denis que dans l’Aude, les Ardennes ou encore les Pyrénées-Orientales (Insee, 2010). Au niveau régional, l’Île-de-France, région la plus touchée par la criminalité, présente le troisième taux de chômage le plus bas de France.
« L’exclusion », ce fut d’abord celle des habitants historiques des grands ensembles. Immigrés portugais, polonais, italiens ou manœuvres français, ce sont eux qui ont fui massivement le nouveau communautarisme qui s’installait dans les banlieues dès les années 60. Contrairement à ce qu’affirment certains sociologues, « l’exclusion » est endogame. Tous les plans de mixité sociale, de logements sociaux, de rénovation urbaine et d’aménagement de la ville n’empêcheront jamais les communautés de se regrouper. C’est humain, et on observe ces phénomènes dans tous les pays du monde, quelles que soient les communautés. L’individu n’existe pas sans son groupe. Il ne s’en éloignera que par la contrainte. Les gens ne sont pas figés ou « parqués » dans un environnement soi-disant responsable de leurs déprédations. Un observateur attentif remarquera qu’autour des banlieues il n’y a pas de miradors et de factionnaires prêts à tirer dans le dos des fuyards.
Qu’est-ce qui empêche ces habitants de partir, comme l’ont fait des milliers de Français, d’Italiens ou de Portugais tout aussi modestes ? Des barrages de police ? Le coût de l’immobilier ? À Bobigny, le mètre carré est à 3 200 euros. Il est en moyenne de 6 000 euros à Paris, mais à 1 700 euros à Brest, ou encore à 2 300 euros dans une ville dynamique comme Dijon. Un studio en Seine-Saint-Denis est beaucoup plus cher qu’en province. Les aides sociales permettent largement de s’y établir, d’autant que les logements sociaux provinciaux et ruraux sont plus accessibles. L’Insee, dans son enquête nationale logement 2006, nous apprend qu’après Paris, « c’est en Seine-Saint-Denis que les ménages consacrent la part la plus importante de leur revenu (13 %) à se loger », y compris en secteur HLM (12 %). Des chiffres comparables à ceux de la France métropolitaine pour la location classique et pour les hlm (12,8 % dans les deux cas). On ne peutdonc pas dire qu’un loyer excessivement avantageux les retientdans le « 9-3 ». Comment nos sociologues expliquent-ils que les parfois très modestes gens du voyage se déplacent et se sédentarisent où bon leur semble ?
Peut-être n’est-il pas question pour les communautés concernées de se disperser sur le territoire. Peut-être ne veulent-elles pas partir. La Cour des comptes a montré en 2012 que la fameuse mixité sociale n’existait pas, malgré dix années de dispositifs censés la favoriser. « Il ne suffit pas de modifier le visage des quartiers pour modifier les visages des quartiers, qui restent colorés », expliquait le sociologue Renaud Epstein (Le Point, 18/07/12). L’homme n’est pas mû seulement par l’argent ou l’amour de l’Autre. L’attachement de certaines communautés aux grands ensembles est réel. Les barres d’immeuble sont parfois considérées comme un territoire, le substitut d’une identité perdue, qui n’a jamais su se reconstruire.
Mais le discours médiatique ne veut pas de cette réalité. Lui n’évoque que l’exclusion pour expliquer, justifier, exorciser le communautarisme, et à travers lui les cahots d’une société devenue hétérogène. Comme les problèmes demeurent, s’aggravent, alors que les discours et les analyses restent les mêmes, les gens commencent à se poser des questions. Et si les experts se trompaient ? Et s’ils avaient renoncé à la vérité ? Et s’ils incitaient tout le monde à y renoncer, sous peine de poursuites ? Pourquoi le feraient-ils ? Peut-être bien pour l’égalité républicaine, « âme de la France » selon François Hollande. Tout le monde est égal. Entendez, tout être humain a les mêmes capacités physiques et intellectuelles, tout un chacun peut s’adapter à tout environnement, devenir champion d’échecs, éboueur ou haltérophile, faire la même chose que n’importe qui, ressembler à n’importe quoi, donc se constituer le même patrimoine, éprouver les mêmes satisfactions, vivre les mêmes aventures que celui que l’on choisira de jalouser. 
Comme de tels décrets ont la fâcheuse tendance à ne pas se réaliser, les égalitaristes ont décidé de favoriser ceux qui n’y arrivaient pas, par l’éducation, l’accès à la culture, les aides sociales, l’invention de droits spécifiques. Et comme ça ne fonctionnait toujours pas, ils ont eu la brillante idée d’accuser ceux pour qui ça fonctionnait d’être de vils spoliateurs. Bien entendu, toute ressemblance avec des situations ayant existé est purement fortuite. 
De favoriser les faibles on en vient tout naturellement à pénaliser les forts. Lorsque l’on prétend lutter « contre les inégalités », on lutte contre la réussite, c’est-à-dire contre la propriété, le pouvoir, le possédant, le méritant, le riche, l’héritier. Celui qui n’a pas été exclu ou volé, celui qui a été favorisé par sa roublardise, son état-civil, et sûrement ses atteintes aux droits de l’Homme. En clair, le Français qui rapporte de l’argent à la société, qui peut se targuer de sa réussite, de son patrimoine, de son histoire, de sa civilisation occidentale. Pour rééquilibrer les choses, on a décidé de le grever d’un lourd handicap. On a fait en sorte qu’il devienne, par la magie des médias, un salaud de colonialiste, esclavagiste, un pillard trop riche, trop beauf, trop raciste, machiste, homophobe, exploiteur, stigmatisant, même pas de gauche, voilà la conséquence première de la logique de fraternité appliquée au droit. Ces dernières années, l’égalitarisme, un véritable culte de l’envie, a inondé tous les compartiments de la société. Jamais autant de Français ne se sont haïs eux-mêmes. Jamais autant d’esprits a priori normalement constitués ne se sont persuadés que « tout le monde était bon » à part eux, que c’était incroyable qu’il y ait « encore des guerres et des pauvres au xxie siècle », qu’il était urgent de « faire payer les riches », que la criminalité c’est « l’exclusion parce que l’immigration est une chance pour la France”.
Laurent Obertone (Atlantico, 20 janvier 2013)

samedi, 02 février 2013

Imaginer une société libérale...

Imaginer une société libérale...

dereglementation-liberalisme-300x283.jpg« On pourrait ainsi, dans l’absolu, imaginer une société libérale dont l’économie serait entièrement tournée vers l’exportation et dont la consommation intérieure serait donc réduite au minimum (sauf, bien sûr, pour la bourgeoisie exportatrice et les catégories sociales qui lui seraient liées). Une coexistence relativement pacifique entre cette forme d’économie de marché et un pouvoir fondamentalement autoritaire (voire « conservateur ») serait alors théoriquement possible (notons que c’est d’ailleurs encore partiellement le cas en Chine « communiste », puisque la consommation privée n’y représente que 37% du PIB contre -par exemple- 71% aux Etats-Unis). En revanche, sitôt que la consommation intérieure ostentatoire (c’est-à-dire le développement d’un mode de vie capitaliste fondé sur la mode, le spectacle et la movida) commence à dépasser un certain pourcentage du PIB, il est inévitable -à plus ou moins long terme- que les « mœurs » évoluent dans un sens individualiste, narcissique et libéral (autrement dit, « de gauche », au sens contemporain du terme) et que le contrôle strictement totalitaire de la population devienne progressivement problématique, voire définitivement impossible. C’est alors que, dans l’intérêt même de l’élite au pouvoir, le vieux système du parti unique doit peu à peu céder sa place à une forme ou une autre de « régime représentatif », adoubé par la « communauté internationale » et désormais fondé -comme tous ses semblables- sur le principe de l’alternance unique (autrement dit, du « combat » savamment mis en scène par les médias officiels -sur le modèle « TF1 contre Canal Plus »- entre une gauche « citoyenne » et moderniste, chargée de reprendre systématiquement à son compte toutes les transformations morales et culturelles engendrées par la dynamique capitaliste, et une droite libérale qui doit, à l’inverse, feindre en permanence d’être conservatrice et de défendre les valeurs éthiques anticapitalistes auxquelles les classes populaires sont encore massivement attachées). Cette division du travail entre les deux faces opposées du ruban de Möbius libéral s’est toujours avérée incomparablement plus efficace que le vieux système du parti unique (et l’on comprend que la gauche et la droite libérales aient désormais un intérêt commun à présenter leur « antagonisme » électoral comme indépassable).

dimanche, 20 janvier 2013

Consommation et Surconsommation

Consommation et Surconsommation

 

L’accès à la consommation nous est présenté comme la source du bonheur, alors que paradoxalement, être consommateur rend vaine toute tentative d’accéder au bonheur. La publicité est là pour nous rappeler à l’ordre, pour créer l’insatisfaction, le manque et une dépendance par rapport à des produits qui jusque-là n’étaient pas indispensables à l’épanouissement, et qui s’ajoutent à nos besoins.

Il serait plus sage de ne pas tenter d’avoir tout ce que l’on nous propose, mais de savoir apprécier ce que l’on a. Il faudrait d’ailleurs faire en sorte de se libérer de la surabondance (également surabondance de pollution, d’uniformisation, de stress … etc !) plutôt que de convoiter avec obsession ce qui nous fait défaut (le pouvoir d’achat, l’emploi, l’innovation, les parts de marché, la croissance, etc), pour plus de simplicité et moins d’illusionnisme. Posséder le dernier « iphone » est-il indispensable à la vie ?

Comment les hommes faisaient-ils avant toutes ces technologies high-tech qui se régénèrent indéfiniment ? Comment vivaient-ils, étaient-ils épanouis, étaient-ils en manque? En manque de quoi, de bien matériel ? Mais combien de ces choses sont vraiment utiles à notre épanouissement ? Ne servent-elles pas plutôt à cacher notre frustration devant ce monde que nous avons de plus en plus de mal à comprendre et à appréhender ?

L’expansion du développement transforme sur son passage l’autarcie des peuples en misère, et partout sur terre, goûter à « l’économie de marché » devient une addiction qui se substitue à tout mode de vie alternatif (gratuit) et indépendant (libre). Ce système économique arrivera à son apogée quand la mondialisation aura transformé toutes les cultures et toutes les ressources naturelles en marchandises identiques.

Aujourd’hui l’argent ne représente plus rien de concret et se répand plus vite que les réalités du monde qui nous entoure, l’économie s’est emballée comme un taureau fou. En se déconnectant de la réalité, elle est devenue nocive. Cette pseudo science économique régit les décisions politiques de tout bord, mais dans ses savants calculs, elle oublie un facteur essentiel et déterminant : les limites de la planète.

En revanche elle est la source de gains faramineux pour une petite oligarchie constituée de financiers qui ont su endetté des pays en voie de développement comme le Brésil, aujourd’hui contraint à rembourser sa dette en puisant dans les poumons de la planète : la forêt Amazonienne.

En renouvelant obsessionnellement le marché pour amasser des gains, le progrès technologique a rendu la surproduction et la surconsommation responsable de la plus part des problèmes écologiques. Croire en l’émergence d’une nouvelle technologie pour régler ces déséquilibres serait alors un nouveau piège du progrès. Il est impératif de réduire notre impact sur la planète, nous ne sommes pas des consommateurs nés.

Cette surconsommation nous est imposée malgré nous par le modèle de développement capitaliste. Aujourd’hui cette doctrine consumériste est une foi quasi-religieuse et fondamentaliste. Nous sommes pris en otage par le culte et le conditionnement de la consommation. Dans cet empire économique tout n’est pourtant pas régi par le matérialisme, et il existe quantité d’alternatives pour contribuer à son bien-être.

S’il est parfaitement humain d’avoir des désirs autres que nos besoins fondamentaux, passé un certain seuil ces désirs exacerbés deviennent déraisonnables et finissent par être une source de problèmes pour soi et les autres. De plus l’ironie veut qu’une fois l’objet de son désir obtenu, on est toujours insatisfait. Ces deux constats permettent d’établir que le bonheur ne s’achète pas, le bonheur s’apprend en s’ouvrant au monde et en établissant une éthique personnelle, et non en suivant des modèles préétablis.

2CCR

(Merci à BOB)

samedi, 12 janvier 2013

Connaissez-vous Vance Packard?

 
 

Connaissez-vous Vance Packard ? Il fut le premier, avec son ouvrage The Hidden Persuaders (1), à attirer dès 1957 l’attention du public sur les techniques de manipulation mentale. Vous savez, ces techniques que la loi antisecte a  finalement renoncé à interdire… peut-être parce qu’elles sont plus souvent utilisées par les publicitaires que par les sectes.

 

hidden.jpgEn 1964, il publie un autre ouvrage, Une société sans défense, sur la surveillance et le fichage de la population par la police, mais surtout par les entreprises, où cette fois il n’hésite pas à comparer la société dans laquelle il vit, l’Amérique des années 1960, aux œuvres d’anticipation de George Orwell et d’Aldous Huxley : 1984 et Le Meilleur des mondes.

Le temps a passé depuis mais les livres de Vance Packard, de George Orwell et d’Aldous Huxley n’ont rien perdu de leur actualité. Le monde dans lequel nous vivons correspond à peu de choses près à ce qui était à l’époque imaginé comme un cauchemar.

Pourtant une fausse note subsiste : la dictature que redoutaient Orwell et Huxley était d’inspiration soviétique, mais le “ totalitarisme tranquille ” (2)  que nous connaissons aujourd’hui est capitaliste. Hormis cela, tout correspond : l’œil des caméras de vidéosurveillance épie chacun de nos gestes, nous sommes au seuil d’une normalisation génétique, la voix des médias nous berce du lever au coucher dans la douce anesthésie d’un divertissement médiocre et nous assure que notre monde serait parfait sans la petite délinquance et la contestation politique. Ce divertissement insipide comme un sucre d’orge porte même un nom : le tittytainment. Ce terme inventé par Zbigniew Brzezinski, qui fut conseiller pour la sécurité nationale auprès de Jimmy Carter, est une contraction de entertainment (divertissement) et de tits (seins en argot américain). L’évocation des seins se réfère ici plus à leur fonction nourricière qu’érotique. L’idée de Zbigniew est que, dans un monde où 20 % de la population mondiale suffira à faire tourner l’économie, le problème des nantis consistera à doser le pain et les jeux qu’il leur sera nécessaire d’accorder à la majorité démunie afin qu’elle se tienne tranquille :

Un coktail de divertissement abrutissant et d’alimentation suffisante permettrait selon lui de maintenir de bonne humeur la population frustrée de la planète (3).

 

C’est là que réside la différence entre le totalitarisme communiste et celui de nos “ démocraties-marchés (4) ” : l’ultralibéralisme a compris qu’il pouvait contenir par la douceur ses populations dans une aliénation passive que Staline cherchait à imposer par la force. Sylvio Berlusconi n’a menacé personne pour arriver au pouvoir, il a acheté des chaînes de télévision. Dans le roman de George Orwell, la population ne peut pas éteindre la télévision dans les appartements individuels. Dans l’Italie capitaliste, elle le peut, mais elle ne le fait pas. Et l’auteur du Meilleur des mondes l’avait déjà compris :

Aldous Huxley n’a-t-il pas écrit que le mot d’ordre devenu classique de Patrick Henry – la liberté ou la mort – paraîtrait aujourd’hui mélodramatique ? Nous l’avons remplacé, soutient-il, par des exigences d’un tout autre ordre : “ Donnez-nous des télévisions et des hamburgers, mais débarrassez-nous des responsabilités de la liberté (5). ”

vp1.jpgCe nouveau mot d’ordre sonne le glas de nos démocraties. Un exemple ? La disparition du commerce de proximité au profit de la grande distribution. Les grandes surfaces se sont imposées par la douceur et la séduction à nos habitudes de consommation. Des prix bas, une gamme étendue de produits et de services : le consommateur ne résiste pas. Pourquoi résisterait-il ? Il ne veut pas comprendre que, quand la grande distribution aura totalement éliminé le commerce de proximité et quand les fusions entre groupes auront abouti à un partage stable du territoire, les distributeurs n’auront plus aucune raison de se gêner pour augmenter subrepticement leurs marges commerciales… mais ils n’auront pas davantage de raisons de revenir contrepartie de cette augmentation au choix et à la qualité autrefois assurés par le commerce de proximité ! Ils auront imposé une implacable dégradation du service rendu aux consommateurs en éliminant la production artisanale et en exigeant de leur fournisseurs rapidité d’approvisionnement et quantités industrielles au détriment de toute qualité. Lorsqu’on est parvenu à s’assurer le monopole d’un marché et que tout boycottage est devenu impossible, on peut tout à coup démasquer ses longues dents et tirer une grosse marge bénéficiaire de mauvais produits.

Le choix de la grande distribution aura été effectué “ démocratiquement ”, comme celui de la télévision de Berlusconi. Les réactions des consommateurs ne sont pas difficiles à prévoir, elles font l’objet de tant d’investigations, d’études et de sondages que les pièges tendus par les experts du marketing font mouche à tous les coups. C’est pour cela que la démocratie est si facile à acheter.

L’ultralibéralisme a parfaitement compris que les méthodes staliniennes tant redoutées par Huxley et Orwell étaient aussi maladroites qu’inutiles : pourquoi contraindre brutalement les citoyens à une béate passivité alors qu’une connaissance plus approfondie de leurs comportements démontre qu’ils ne demandent que cela ? La population n’a nul besoin que l’aliénation soit obligatoire pour s’y adonner. Personne n’oblige encore les Italiens à regarder les chaînes de télévision de Berlusconi. Ce n’est que dans un second temps, quand tous les autres médias auront été éliminés, que celui-là deviendra obligatoire. Parce que la population préfère le divertissement à l’analyse, les grands groupes de presse et de télévision qui proposent un divertissement facile plutôt que des analyses sérieuses éliminent le journalisme d’investigation honnête et s’assurent progressivement un monopole de fait. Une fois ce monopole installé par le “ choix démocratique du marché ”, les informations indispensables à la vie quotidienne ne passeront plus que par ce vecteur unique et le rendront obligatoire. Après que nous lui aurons nous-mêmes souhaité la bienvenue, la dictature sera entrée par nos portes grandes ouvertes et se sera installée à notre table .

Philippe Laporte

Note :

(1) En traduction française : La Persuasion clandestine, Calmann-Lévy, 1958.
(2) André Bellon, Anne-Cécile Robert, Un totalitarisme tranquille, Syllepse, 2001.
(3) Hans-Peter Martin et Harald Schumann, Le Piège de la mondialisation, Solin – Actes Sud, 1997, page 13.
(4) Gilles Châtelet, Vivre et penser comme des porcs, Folio, 1999.
(5) Vance Packard, Une société sans défense, Calmann-Lévy, 1965, page 22.

vendredi, 11 janvier 2013

Egobody: la fabrique de l'homme nouveau

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Robert Redeker : Egobody

La fabrique de l’homme nouveau

par François-Xavier Ajavon

Ex: http://www.actu-philosophia.com/

Depuis plusieurs dizaines d’années le philosophe Robert Redeker frappe de sa sagacité des sujets aussi divers que le sport [1] ou le progressisme [2], et n’hésite pas à explorer des thématiques singulières telles que le sens d’un gimmick électoral (le « Yes we can » d’Obama) [3] ou la question du rapport entre philosophie et état dépressif [4]. Ecrivant de longue date dans Les Temps Modernes (la revue fondée par Sartre et dirigée par Claude Lanzmann), le philosophe s’est toujours inscrit dans une démarche humaniste et voltairienne, particulièrement cohérente, qui l’a conduit en 2006 à dénoncer – dans les colonnes du Figaro à travers une tribune vitriolée [5] - les intimidations islamistes récurrentes visant à atteindre le principe de laïcité qui fonde notre République. La suite est connue et a fait, contre son gré, de Redeker une figure médiatique : un débat public passionné autour de la libre parole sur les religions, une hystérie médiatique inextinguible [6], et surtout l’efflorescence nauséabonde de maintes menaces de mort à l’encontre du philosophe. Frappé d’une « fatwa » prise très au sérieux par les autorités, Redeker a été placé depuis le début de l’ « affaire » sous constante surveillance policière. Ayant été contraint de renoncer à son poste d’enseignant, Redeker poursuit son travail philosophique solitaire dans le contexte du CNRS. Dans les colonnes du journal régional La Dépêche du Midi il expliquait en mai dernier ses conditions de vie : « Pendant mes vacances dans le Gard, l’été dernier, trois policiers m’ont accompagné dans tous mes déplacements privés (…) Je travaille beaucoup chez moi. J’ai un bracelet électronique. S’il m’arrive quelque chose, cela se sait immédiatement… » [7] C’est dans ces révoltantes conditions de vie et de travail que le philosophe traqué, vivant comme un fugitif, a rédigé la matière de son piquant essai Egobody, la Fabrique de l’homme nouveau paru chez Fayard. Raison de plus pour s’y intéresser. Prolongeant le propos énoncé dans un article publié par Le Monde dès 2009 [8], Robert Redeker a l’ambition dans cet ouvrage de donner le portrait le plus exact de l’homme moderne, tel qu’il le perçoit dans la plus appréciable des lucidités : l’egobody, confondant son âme et son moi avec son corps. La démarche de l’auteur, s’intéressant aux multiples facettes de la vie contemporaine qui sont susceptibles de forger le nouvel « homme nouveau » (par l’alimentation, le sport, la publicité, les médias, etc.), s’inscrit dans un projet intellectuel ayant pour ambition de « reconstruire l’anthropologie philosophique » [9]. Redeker constatant que depuis trop longtemps la philosophie, « honteuse d’elle-même » [10], ne s’approprie plus directement la question de l’homme en la laissant à la science, estime qu’elle doit reprendre la main, et en revenir à l’horizon des Lumières et de Kant, pour qui l’interrogation « Qu’est-ce que l’homme ? » était centrale.

Pour Redeker, répondre à cette question, c’est d’abord comprendre quelles mutations ont pu conduire au développement d’egobody et à sa fulgurante multiplication, sous toutes les latitudes et longitudes du globe, du fait de l’horreur artificielle et presque industrielle de sa reproductibilité universelle et absolue. L’egobody (dont Redeker « scanne » [11] bien des aspects dans son essai et en livre maints visages : depuis la quinquagénaire obsédée par son apparence, ivre de jeunisme et refusant de vieillir, jusqu’aux interchangeables créatures du showbiz, ultra-formatées, en passant par les sportifs ayant renoncé à l’âme pour un vulgaire « mental »…) n’obéit pas à une logique politique, mais purement industrielle. En ce sens il n’y a pas de lien entre ce pathétique egobody, et le sinistre « homme nouveau » tel que les théoriciens du III ème Reich, par exemple, le rêvaient. « Le corps nouveau contemporain n’est pas sculpté par le volontarisme politique, mais s’est développé à l’écart du politique » [12]. La « dictée du corps », selon la belle expression de Redeker ne vient plus d’une église imposant des normes, des interdits, ou bien de l’idéologie d’un parti, projetant le déploiement de cohortes unifiées d’individus-objets ; cette dictée vient de la publicité (entendue en ces termes par l’auteur : « Tout ce qui est mis en scène devant un public dans un espace collectif ouvert (sport, télévision, show-business, érotisme commercial, cinéma) » [13]). Redeker nous fait donc le portrait d’un homme nouveau vivant à travers le « miroir » des écrans. Non seulement dépendant des productions médiatiques, mais puisant dans cet imaginaire souvent formaté par le marketing et le langage des annonceurs, des clés pour mener sa propre barque dans le monde : « le téléspectateur est un pervers narcissique téléchargeant son logiciel comportemental. En regardant ces écrans, il se donne inconsciemment un objectif : je dois coller à mon image, telle qu’elle apparaît sur ces écrans » [14]. Ailleurs, et sur la base d’une analyse parfois moins pertinente, l’auteur voit egobody comme prisonnier de l’informatique (et spécifiquement d’Internet) et de leurs logiques de flux informationnels traversant perpétuellement les individus. En tant qu’homo numericus [15], l’homme moderne se croit hyper-connecté à une vie sociale qui est en réalité absente : « Dans les cybercafés, il décline son identité collective comme geek. On le voit rivé à des écrans, relié, même dans la rue, à des câbles dont il paraît un prolongement, pianotant des SMS, communiquant partout et toujours » [16]. Egobody, dont le corps a englouti l’âme, et dont le corps même est réduit à un petit tas d’octets [17] trouve son existence ultime – et la moins consistante - sous la forme d’un avatar de réseau social. Redeker analyse même en détail, sur tout un chapitre, le phénomène Facebook : « (ceci) cristallise la révolution anthropologique dont traite ce livre » [18]. Egobody tombe dans le piège que lui tend la cybernétique et feint de croire que l’informatique est un simple outil, à la neutralité inoffensive, alors que – d’après l’auteur – ces nouvelles technologies réorganisent en profondeur nos façons de penser, et influent sur nos grilles de lectures du monde.

 

Mais egobody est avant tout transformé directement dans sa chair, et doit se saisir comme un individu qui a presque muté. Un individu devenu OGM par l’effet, d’abord, de la nourriture qu’il ingère : « Par le biais de la nourriture, le monde industriel a pénétré, par capillarité, dans notre moi biologique, a pris possession de notre corps et l’a transformé » [19]. Les aliments modernes, à la fois sur-contrôlés sur le plan des risques sanitaires, aseptisés, comportent aussi un certain nombre d’additifs chimiques dont ne connaît pas toujours les effets à long terme ; et qui« maçonnent » [20] savamment le corps d’egobody, sans que ce dernier en ait toujours conscience. Enfermé dans un culte délirant de son enveloppe charnelle, l’homme nouveau exige que la santé apporte à ce corps sacralisé une jeunesse éternelle. La santé rêvée par egobody doit – en somme – abolir la perspective de la maladie, du vieillissement, de la déchéance et de la mort. « Dangereuse santé qui voudrait jeter aux oubliettes notre condition humaine, qui voudrait nous faire oublier que nous ne sommes que des hommes » [21]. A travers sa mystique de la santé, egobody en rupture avec le christianisme, ne vise pas une immortalité post mortem par la voie de la résurrection, mais une forme « d’immortalité ante mortem » [22] matérialiste.

pt.jpgDès lors, débarrassé du souci fondamental de vivre, c’est-à-dire essentiellement de se préparer à l’idée de mourir, egobody, réduit à un corps formaté par les écrans, n’a plus qu’à simplement jouir. Jouir par le divertissement qui est son « tropisme principal » et l’enfonce toujours plus dans un quotidien « lunaparkisé » [23], hyperfestif et faussement joyeux. Jouir aussi par la sexualité, dont egobody est sommé d’en faire un « étendard » [24]. Redeker se moque des dernières déclarations de l’Abbé Pierre, se sentant obligé de révéler que malgré sa grande fidélité à Dieu, et à ses vœux de jeunesse, il avait cédé dans la fraîcheur nécessairement positive de son adolescente au plaisir de faire l’amour [25]. « Dernier substitut trouvé au Salut, la sexualité a en effet été récupérée par le discours hygiéniste, qui le présente comme un facteur de santé ». Fini, donc, pour egobody, ce délicieux et inégalable sentiment de se perdre dans la luxure… Egobody ne croit plus en Dieu, ni au diable, ni au péché originel. Il n’est plus qu’une enveloppe corporelle, et la sexualité ne devient pour lui qu’une simple fonction possible de ce corps-outil.

Se dégage de ce parcours le constat de l’émergence au XXème siècle d’un « homme planétaire » (chapitre XIX), uniformisé, standardisé, co-produit par les médias et les logiques de la société de consommation. Loin de l’idéal d’homme universel rêvé par les Lumières dans le contexte d’un authentique « projet » politique ou philosophique, cet homme planétaire « (résulte) du maillage médiatico-technologique (radio, télé, internet), industriel et commercial, recouvrant toute la terre » [26]. L’homme planétaire – reproductible et interchangeable – ne vit donc même plus pour vivre, mais pour simplement consommer. Mieux, pour faire consommer son corps. Et cela dans la perspective d’une obsessionnelle vie sans fin – inspirée par les médias et veillée par la santé - où les différences individuelles se lisseraient progressivement en un seul et unique type humain. Certainement le dernier de tous [27].

De l’art de dépeindre la modernité. Montaigne décrivait son propre style – et sa façon de faire cheminer sa pensée – comme étant « à sauts et à gambades ». On peut regretter que le fil de la pensée de Robert Redeker soit parfois difficile à suivre par une tendance à la versatilité, quand ce n’est même au papotage. L’auteur a parfois tendance à embarquer dans le flot de sa pensée (dont l’élan est toujours extrêmement stimulant) un nombre abondant de notions et de références hétéroclites – issues d’horizons très divers [28]- qui ne sont pas toujours clairement définies, et dont l’emboitement parfois artificiel pourrait conduire les grincheux à n’être pas convaincus.

Mais c’est là une tendance propre à l’ « essai » d’aller par sauts et gambades, même quand les grands écarts et les entrechats ne sont pas exécutés avec la grâce stylistique d’un Montaigne. Le cheminement que propose Redeker n’en demeure pas moins extrêmement stimulant : le philosophe s’engage dans une démarche parfaitement nécessaire de critique de la modernité, et du modèle humain qu’il engendre, egobody. C’est en ceci que la référence à Philippe Muray inscrite un peu crânement sur l’accroche de la quatrième de couverture se justifie pleinement ; Redeker – sans l’humour et la truculence de l’auteur du XIXème siècle à travers les âges, mais avec des intuitions singulièrement brillantes – fait un salutaire effort de compréhension de l’homme moderne qui, en rupture avec une forme de négativité archaïque, en guerre contre la mort, en révolte contre la vie intérieure, formaté par le sport et les modèles d’humanité inconsistante véhiculées par le show-business, se vautre dans le bonheur artificiel d’une vie sous assistance festive, et dans le fantasme d’une humanité réduite à sa seule vie corporelle. Espérons que Redeker pourra poursuivre avec bonheur sa réflexion plutôt lucide sur le monde moderne, lui qui – ne l’oublions pas – vit comme un fugitif pour avoir cru qu’il était encore possible d’exprimer une opinion libre sur tous les sujets.

Notes

[1] Robert Redeker, Le sport contre les peuples, Editions Berg International, 2002 ; Le sport est-il humain ? Editions du Panama, 2008.

[2] Robert Redeker, Le Progrès ou L’Opium de l’histoire, Editions Pleins Feux, 2004.

[3] « Yes we can », Slogan électoral, Editions Pleins Feux, 2009.

[4] Robert Redeker, Dépression et philosophie : Du mal du siècle au mal de ce siècle, Editions Pleins Feux, 2007.

[5] « Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ? », Le Figaro, 19 septembre 2006.

[6] Dans une « Chronique de la philosophie médiatique » publiée ici même en 2008 nous nous étions intéressé à la pression médiatique pesant sur Redeker « Robert Redeker devant le tribunal du people » : http://www.actu-philosophia.com/spi...

[7] « Redeker : ‘Je vis comme un semi-clandestin’ », La Dépêche du Midi, 12 mai 2010.

[8] « Le nouveau corps de l’homme entre sport, publicité et pornographie », Le Monde, Mercredi 19 août 2009.

[9] Robert Redeker, Egobody, La fabrique de l’homme nouveau, 2010, Fayard, p. 58.

[10] Ibid. p. 57

[11] Le mot est de l’auteur. Ibid. p. 158. Un travail de synthèse rendu obligatoire par ce constat (p. 8) : « Depuis trois décennies s’est imposée l’image d’un homme éparpillé en mille tessons épars ».

[12] Ibid. p. 22

[13] Ibid. p. 23

[14] Ibid. p. 92

[15] Ibid. p. 159

[16] Ibid. p. 86

[17] Malraux parlait de sa vie intime comme d’un « petit tas de secrets ».

[18] Ibid. p. 161

[19] Ibid. p. 16

[20] Ibid. p. 19

[21] Ibid. p. 130

[22] Ibid. p. 114

[23] Ibid. p. 87

[24] Ibid. p. 45

[25] Ibid. p. 46

[26] Ibid. p. 185

[27] A l’appui de sa démonstration concernant « l’homme planétaire » on peut regretter la tentative de réhabilitation opérée par Redeker à propos de l’œuvre de Gobineau, auteur du fameux Traité sur l’inégalité des races humaines (1853), qu’il voit (p. 189) comme un « grand et beau livre ». Difficile de le suivre dans son invitation à « ôter le substrat racialiste hiérarchisant de sa pensée », même si cette dernière permet d’illustrer la question du métissage. Une figure du métis que Redeker illustre d’ailleurs de manière un peu irritante – à plusieurs reprises – par la figure du président américain Barak Obama. (par exemple p. 30)

[28] Que les âmes sensibles se préparent d’ailleurs, dans l’exploration de l’horizon d’egobody à rencontrer ce que l’on pourrait appeler des « gros bouts » de réalité triviale parfois pénibles tels que : « les Ken et les Barbie » (le mot est de l’auteur) des chaînes d’info continue (p. 29) ; la télé-réalité, Loft-Story « zoo humain » (p. 37) ; la série télé Plus belle la vie (p. 88) ; l’insipide « Cerise » de la pub Groupama (p. 90) ; la série Desperate Housewives (p. 119) et même le film Le grand bleu de l’insupportable Luc Besson, convoqué pour illustrer le sentiment d’ « extase régressive » (p. 155) provoqué par une séance de « surf » sur Internet. Mais c’est peut-être au prix de ces références là que l’on s’approche au plus près de l’univers infernal d’egobody.

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"Egobody" de Robert Redeker

"Egobody" de Robert Redeker

Homo novus festivusque

http://www.lecture-ecriture.com/

egobody---.jpgProfesseur de philosophie et écrivain, R. Redeker se lance dans une virulente polémique: il entend "passer au scanner" l'homme contemporain – baptisé "Egobody"– que nous serions tous devenus "à des degrés divers". Il dissèque cet homme nouveau en l'opposant à l'ancien, disparu selon lui, dans les années 1970. Les riches références philosophiques et religieuses, évitant l'écueil de la déploration moralisante, visent à nous convaincre que nous vivons une "véritable révolution anthropologique": celles du "des-humain", du "neg-humain". Toutes les valeurs, idéaux et interdits qui liaient les hommes et donnaient du sens à l'existence individuelle et collective ont disparu : les 18ème et 19ème ont annoncé la mort de Dieu, du diable et du péché originel; le 20ème celle de l'homme et des idéologies politiques... Face à cet horizon amputé de toute verticalité, de toute métaphysique, la publicité, les industries du divertissement, les nouvelles technologies ont eu le champ libre pour "fabriquer" Egobody: ayant perdu son "âme" – son for intérieur –, il ne distingue plus son "moi" de son corps: ego=body.
   
   • Le philosophe Redeker ramène l'homme moderne à un organisme biologique consommateur et soucieux de sa seule apparence; à un "noeud de connexions" relié par des prothèses (téléphones portables, internet). Son intelligence se réduit à son "mental", asservie à des objectifs productivistes dans l'entreprise, utilitaristes dans l'enseignement. Conditionné à consommer aliments et divertissements industriels, Egobody a perdu toute conscience du temps et de l'espace et ne vit que dans le présent, éternel "adolescent aux cheveux gris"
    
 tumblr_lcgyzwvfTM1qc01tho1_500.jpg  • Prenons du recul! Pour nous alerter, Redeker nous provoque: il cultive l'excès, multiplie les généralisation hâtives et sans nuances, se fait pamphlétaire; toutefois le propos mérite réflexion. "Je suis mon corps" croit Egobody; publicité, champions, mannequins en donnent à voir une image standard: chacun tente de s'y conformer car notre corps constitue notre horizon – limité – : notre projet ne serait que de le garder jeune, séduisant et quasi-immortel. Redeker nous met en garde: cette dictature de l'apparence, les nouvelles technologies, exterminent l'intériorité de l'homme. Convaincus que l'on ne peut plus changer le monde ni se changer soi-même, nous en serions venus à n'avoir pour idéal que notre "épanouissement" personnel, dès que s'interrompt le stress du "labeur" qui, à l'inverse du travail, nous transforme en boule d'énergie sans projet. Or, se prendre soi-même pour fin ne signifie pas être heureux souligne l'auteur. Matérialiste et narcissique, consommateur d'événements festifs propres à combler son vide intérieur, Egobody ne sait plus lutter contre ses travers ni leur résister. Il s'épanouit donc au détriment d'autrui; ainsi le sport est-il dangereux qui, en développant un mental de "gagnant", transforme les partenaires en autant d' ennemis.
   Egobody ploie sous "les" soucis, mais n'a plus conscience "du" souci; il s'éparpille dans "les" loisirs, mais ignore "le" loisir. Il n'entend plus sa voix intérieure qui rappelait à l'homme ancien que la vie est souci, gravité, détresse métaphysique, car permanente conscience de notre mortelle condition. Egobody ignore la valeur du silence et de l'ennui, terreau de la liberté de pensée.
   
   • Cette mutation anthropologique du 21ème siècle aboutit à une négation de l'homme occidental devenu planétaire: désormais tout en corporéïté, en apparence, Egobody n'est plus qu'un "sac de peau" vide.
   Le lecteur balance entre rire et irritation. Certes, exagérer l'impact des tendances contemporaines aide à prendre conscience des risques encourus; mais le propos de Redeker tend à la caricature tant il nie systématiquement toute avancée bienfaitrice de la modernité: on s'interroge lorsqu'il déplore que le pouvoir politique, à défaut d'idéal, ait fait de la santé son objectif, ou que l'on cherche à supprimer la douleur... Mais c'est là aussi le regard nécessaire d'un philosophe sur notre temps: sans doute oublions-nous trop souvent que l'homme n'est, selon Pascal, qu'un "roseau", un corps faible et mortel; mais un "roseau pensant": sa force, propre à lui seul, c'est son "âme", sa voix intérieure, qui lui permet de trouver du sens à son passage sur cette terre.

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vendredi, 23 novembre 2012

Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie

«Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie», par Edward Bernays

 

Qui a dit : « L’ingénierie du consentement est l’essence même de la démocratie, la liberté de persuader et de suggérer » ?

Non, la propagande politique au XXème siècle n’est pas née dans les régimes totalitaires, mais au cœur même de la démocratie libérale américaine ; elle est née d’Edward Bernays, l’auteur de cette phrase.

Le père de la propagande

edward-bernays.jpgEdward Bernays (1891-1995), neveu de Sigmund Freud émigré aux Etats-Unis, est considéré comme le père de la propagande politique institutionnelle et de l’industrie des relations publiques, dont il met au point les méthodes pour des firmes comme Lucky Strike. Son œuvre aborde des thèmes communs à celle de Walter Lippmann, notamment celui de la manipulation de l’opinion publique. Il fit à ce titre partie du Committee on Public Information créé par Woodrow Wilson [président des Etats-Unis - NDLR] pour gagner l’opinion publique américaine à l’entrée en guerre des États-Unis en 1917.

Conseiller pour de grandes compagnies américaines, Bernays a mis au point les techniques publicitaires modernes. Au début des années 1950, il orchestra des campagnes de déstabilisation politique en Amérique latine, qui accompagnèrent notamment le renversement du gouvernement du Guatemala, main dans la main avec la CIA.

Il a inventé cette technique moderne qui consiste à plier nos esprits aux projets de certains, technique que l’on nomme communément « propagande ».

Pour Bernays, la démocratie doit être pilotée par la minorité intelligente, c’est-à-dire, par l’élite…

Les méthodes de Bernays : de la théorie à la pratique.

En combinant les idées de Gustave Le Bon et Wilfred Trotter sur la psychologie des foules avec les idées sur la psychanalyse de son oncle maternel, Sigmund Freud, Eddy Bernays a été un des premiers à vendre des méthodes pour utiliser la psychologie du subconscient dans le but de manipuler l’opinion publique.

Pour lui, une foule ne peut pas être considérée comme pensante, seul le ça s’y exprime, les pulsions inconscientes. Il s’y adresse pour vendre de l’image dans des publicités, pour le tabac par exemple, où il utilise le symbole phallique. À la demande de l’industrie cigarettière, qui cherchait à faire tomber le tabou de la consommation du tabac par les femmes, il a notamment organisé des défilés très médiatisés de « fumeuses » jeunes et jolies qui affirmaient leur indépendance et leur modernité par l’acte de fumer en public (« Les torches de la liberté »…).

En politique, il « vend » l’image des personnalités publiques, en créant par exemple le petit-déjeuner du président, où celui-ci rencontre des personnalités du show-biz. Il considère qu’une minorité intelligente doit avoir le pouvoir « démocratique » et que la masse populaire doit être modelée pour l’accepter.

L’exemple de la première guerre mondiale

Des techniques de propagande ont été codifiées et appliquées la première fois d’une façon scientifique par le journaliste Walter Lippmann et le psychologue Edward Bernays au début du XXème siècle.

Pendant la Première Guerre mondiale, Lippman et Bernays furent engagés par le président des États-Unis Woodrow Wilson pour faire basculer une opinion américaine traditionnellement isolationniste vers l’interventionnisme. Pour cela, il fit appel aux Comités pour l’information du public (Commitee on Public Information) dirigés par le journaliste George Creel, « privatisant » ainsi la propagande de guerre.

La campagne de propagande de Creel, Lippman et Bernays effectuée pendant six mois fut si intense que l’hystérie anti-allemande générée a impressionné l’industrie américaine, qui découvrait tout à coup les immenses ressources que l’on pouvait déployer pour influencer l’opinion publique d’un pays entier. Bernays a inventé les termes d’esprit de groupe et d’ingénierie du consentement, des concepts importants en propagande appliquée.

Lord Ponsonby, un aristocrate anglais, socialiste et pacifiste, résuma ainsi les méthodes utilisées pendant le conflit (y compris par son propre pays) : il faut faire croire :

  1. que notre camp ne veut pas la guerre
  2. que l’adversaire en est responsable
  3. qu’il est moralement condamnable
  4. que la guerre a de nobles buts
  5. que l’ennemi commet des atrocités délibérées (pas nous)
  6. qu’il subit bien plus de pertes que nous
  7. que Dieu est avec nous
  8. que le monde de l’art et de la culture approuve notre combat
  9. que l’ennemi utilise des armes illicites (pas nous)
  10. que ceux qui doutent des neuf premiers points sont soit des traitres, soit des victimes des mensonges adverses (car l’ennemi, contrairement à nous qui informons, fait de la propagande).

L’historienne Anne Morelli a montré que cette grille pouvait s’appliquer encore aux conflits de la fin du XXème siècle. Certains soulignent aussi leur adéquation avec des conflits très actuels.

Les relations publiques, dont usent les États et les entreprises, s’inspirent directement des travaux de Lippman et Bernays.

En 1928, Bernays publie Propaganda

L’analyse de Chomsky :

« Le manuel classique de l’industrie des relations publiques », selon Noam Chomsky. Véritable petite guide pratique écrit en 1928 par le neveu américain de Sigmund Freud. Ce livre expose cyniquement et sans détour les grands principes de la manipulation mentale de masse ou de ce que Bernays appelait la « fabrique du consentement ».

Comment imposer une nouvelle marque de lessive ? Comment faire élire un président ? Dans la logique des « démocraties de marché », ces questions se confondent.

Bernays assume pleinement ce constat : les choix des masses étant déterminants, ceux qui viendront à les influencer détiendront réellement le pouvoir. La démocratie moderne implique une nouvelle forme de gouvernement, invisible : la propagande. Loin d’en faire la critique, l’auteur se propose d’en perfectionner et d’en systématiser les techniques à partir des acquis de la psychanalyse.

L’analyse de Blandine Josselin :

edw bern.jpgCar l’homme fait partie de ce « gouvernement de l’ombre », aujourd’hui « spin doctors » et autres conseillers en relation publique, qui régit toutes les activités humaines, du choix de nos lessives aux décisions de nos chefs d’Etat. A travers ses multiples exemples aux allures de complot, son oeuvre, Propaganda, est tout à la fois une théorie des relations publiques et le guide pratique de cette « ingénierie du consentement ».

Explicitant avec une clarté étonnante les multiples techniques et ressorts psychologiques de la propagande (le cher oncle n’est jamais bien loin !), cette oeuvre écrite en 1928 apparaît aujourd’hui comme un témoignage édifiant et profondément actuel, qui aurait toute sa place dans un cours de self-défense civique.

Précieux, ce «manuel» l’est par son absence totale de langue de bois. A la manière d’un Patrick Le Lay des grands jours, Bernays revendique sans même rosir son mépris pour le «troupeau» et son goût pour l’autorité. Si l’auteur choque aujourd’hui, il désarçonne aussi par tant de candeur et de ferveur pour ce qu’il chérit comme un progrès pour l’humanité.

Il pousse surtout à réfléchir sur la réalisation de l’idéal démocratique, tant la transparence et la consternante «bonne foi» de son argumentaire en trois temps paraît infaillible. Selon lui, la propagande n’est pas un vilain mot, car l’action de dominer et manipuler les foules est inévitable, nécessaire pour «organiser le chaos» et même profitable pour «guider» la masse «égarée», ainsi soulagée de l’éreintante tâche de penser par soi-même. Bernays fonde tout son argument sur l’évacuation de l’individu et la fatalité du consentement populaire.

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Edward Bernays, Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie, Editeur Zones, octobre 2007, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Oristelle Bonis et préfacé par Normand Baillargeon, philosophe, professeur à l’université du Québec à Montréal, et auteur d’un Petit cours d’autodéfense intellectuelle paru chez Lux en 2007.

Sources : evene.fr et agoravox.fr

Polémia

lundi, 12 novembre 2012

La France intellectuelle de Jules Monnerot

monnerot.jpg

La France intellectuelle de Jules Monnerot

Ex: http://www.juanasensio.com/


«L’illusion intellectuelle par excellence est l’illusion de l’intellectuel sur lui-même.»
Jules Monnerot, Inquisitions (José Corti, 1974), p. 54.


Comment serait-il aimé, voire, tout simplement, lu et commenté, ce penseur durablement ostracisé par une élite médiatico-politique qu'il n'est plus vraiment besoin de présenter, puisque non seulement Jules Monnerot a magnifiquement analysé la faillite de son surgeon le plus réussi, l'intellectuel, mais a en outre averti qu'il n'écrivait que s'il avait quelque chose à dire (1), au rebours donc des pratiques lamentables de cette même élite dont l'essence labile réside dans le fait de parler, écrire ou, simplement, se montrer, pour ne rien dire, écrire ou même, montrer ?
Comment Jules Monnerot ne serait-il pas réduit à quelques signes extérieurs qui, dans ce qui reste encore l'un des pays les plus idéologisés de notre planète, la France, ont valeur, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, de jugement et de condamnation intellectuelle, morale et même physique, sous une forme certes plus adoucie qu'à l'époque de l'Épuration, où n'étaient point rares les exécutions ?
Rions, a contrario, de la fausse intelligence et de la fausse bravoure d'un Richard Millet (paraît-il phalangiste lors de la Guerre du Liban, ce qu'aucune preuve historique ne vient conforter) ayant pignon sur rue, voix sur les plateaux de télévision et qui, lui, vend en quantité ses essais, à vrai dire de plus en plus affligeants, et affligeants, avant tout, pour celui qui se prétend le dernier écrivain de France, d'un point de vue littéraire.
Nous avons, en fin de compte, les proscrits et les penseurs que nous méritons, tous deux d'opérette, alors qu'un écrivain de talent comme Robert Brasillach, lui, a été expédié ad infernos, en toute bonne conscience n'en doutons point, par un jury de petits juges gris pâle.
Dès lors, nous ne pouvons que comprendre le mouvement d'humeur de Jules Monnerot qui, en préambule de son analyse remarquable du phénomène de décomposition de la vie intellectuelle française, s'étonne que son nom ne se trouve, «sauf erreur, en 1969, dans aucun dictionnaire français des auteurs ou des œuvres écrites» (Avertissement au lecteur, p. 7, en italiques).
Il n'est pas davantage acquis que son nom figure dans des dictionnaires plus récents, tant paraît scandaleuse à nos penseurs la position d'un auteur comme Monnerot : il pense, et il pense justement, méchamment, et sa pensée est une critique absolue de la non-pensée de nos penseurs.
Je me contenterai ici, n'étant point ce qu'il est convenu d'appeler un analyste politique ni même un historien des idées, d'éclairer durement quelques arêtes du texte de Monnerot, sur lesquelles je souhaite que les imbéciles à la vue courte et au cerveau atrophié se coupent mauvaisement, quitte à ce que la gangrène infecte une plaie à vif et que, à défaut de leur couper la tête, d'humanistes chirurgiens les privent de leur faculté de se déplacer.
Commençons par remarquer la façon, aussi méchante que drôle, dont Monnerot caractérise la nouvelle cléricature de l'intellectuel, laquelle n'a pu voir le jour, de même que le suffrage universel, qu'au moment où le christianisme, en tant que corps politico-théologique régissant la vie politique, sociale, morale et intellectuelle française, a été contraint de relâcher son emprise formidable.
L'homme ayant on le sait horreur du vide, il a bien fallu inventer un substitut à l'Église si, selon Monnerot, la «déchristianisation illustrait dans le fait l'axiome que Saint-Simon et Auguste Comte avaient répété toute leur vie : «Un système... ne peut être remplacé par la critique qui en fait apparaître les inconvénients.» Il s'agit en effet de deux fonctions psychologiques différentes. Le catholicisme avait été élaboré par plus de dix-neuf siècles de pensée et de charité. Il laissait derrière lui un immense manque à gagner affectif. La thématique socialiste, elle-même affectivisation du marxisme (2), lui-même philosophie à dominante affective (messianique) en dépit d'une indigence certaine, devait tomber dans un avenir qui n'était pas éloigné, comme une sorte de pluie bienfaisante sur ces landes affectives désertiques où ne poussaient, de place en place, que les affligeants cactus du progrès pour demain» (p. 12).
On constate qu'un polémiste, mais pouvions-nous l'ignorer en lisant un Bernanos, un Bloy ou un Boutang, est d'abord un écrivain de panache et surtout de talent. On constate aussi qu'un Philippe Muray n'a fait que développer, sans doute sans même le savoir, ces lignes tranchantes en quelques milliers de pages, bien souvent répétitives et, n'en déplaise à Maxence Caron, trop souvent faciles.
Jules Monnerot affirme qu'il faut dater «de l'avènement du suffrage universel l'époque où les idées politiques sont pratiquement frappées d'impuissance en politique» (p. 13) puisqu'il s'agit désormais «d'extraire des idées-forces (de la pensée conservatrice comme de l'autre), des thèmes intellectuellement assez sommaires et affectivement assez motivants, pour déterminer des individus incultes (comparés aux électeurs des précédents régimes), polarisés par des appétits ou des aversions élémentaires» (ibid.), les clercs, qui depuis les années 30, depuis qu'ils se sont défroqués, comme Julien Benda l'a si bien montré, sont devenus les véritables maîtres de l'intelligence, exerçant leur nouveau pouvoir sur les masses moutonnantes de ce qui ne portait pas encore le nom d'opinion publique.
Jules Monnerot choisit, pour illustrer cette idée d'un travestissement du pouvoir intellectuel (3) la figure de Renan, honnie par tant d'écrivains qui ne lui ont jamais pardonné sa palinodie intellectuelle, morale et spirituelle : «Il changera d'habit, mais non de ton, méritant de manière équivoque la révérence d'un auditoire déchristianisé en surface, qu'il devait rassurer sourdement par des gestes de prêtre» (p. 15).
Ainsi, les «desservants du nouveau culte ne portent plus d'ornements sacerdotaux. La soutane s'allège en redingote, avant de se raccourcir en veston» (pp. 15-6).
Cette idée du travestissement de la modernité, si chère aux yeux d'écrivains tels que Léon Bloy et Georges Bernanos, est constante, dans le livre de Monnerot, par exemple lorsqu'il aborde, dans des pages assez belles, la question de l'intellectuel en littérature, cette dernière étant définie, voici qui plairait à Roberto Calasso, comme «le surnaturel lorsqu'on n'y croit plus» (4), le fait «d'y avoir cru laiss[ant] un ancien frisson; et cet art [n'étant] que la possibilité de l'évoquer» (p. 19), puisque la «fonction spécifique de l'artiste du langage, de l'homme qui agit par le mot», est de «jouer des mots avec une telle habileté qu'il leur reste (aux mots) quelque chose des pouvoirs acquis au cours de leur usage premier, quelque chose du temps où les mots renvoyaient à la mort, à la vie, à l'ordre et au désordre» (ibid.).
Le faux écrivain, disons Jean-Paul Sartre sur le roman le plus connu duquel Monnerot écrit des pages terribles (cf. pp. 95-113) (5), évoque lui, au contraire, moins un usage second des mots (qui selon Monnerot est l'essence même de la littérature, à savoir «des mouvements de la sensibilité en l'absence de la chose», p. 19), qu'un usage frauduleux de ces mots au moyen de ce que j'ai appelé un langage vicié, de plus en plus facilité par les techniques de masse (6) dont un Serge Tchakhotine, avec Le Viol des foules par la propagande politique ou un Armand Robin avec le magistral La Fausse parole, ont donné des aperçus saisissants.
Pourtant, il serait faux de penser que Jules Monerrot place l'intellectuel moderne sous la seule lumière, ô combien crue, de l'imposture. Son analyse est plus subtile puisqu'il admet que l'intellectuel, «en même temps qu'il abuse, s'abuse. C'est un «auto-abusé». Il n'a point la stature du grand trompeur. Ce n'est pas Lucifer. Ce n'est même pas Protagoras qui voulait bien parler pour tromper les autres mais dont il était exclu que, ce faisant, il se trompât lui-même» (p. 36), peut-être parce que, comme l'écrit Monnerot en utilisant une comparaison savoureuse, l'intellectuel n'a pas la stature d'un Socrate, dont «la voix porte si loin parce qu'il y a eu la cigüe. Le whisky n'a pas les mêmes vertus» (p. 35), peut-être parce que seule l'exemplarité d'une vie, son témoignage direct, ne peuvent être contrefaits, si celui «qui est exposé, qui s'expose, est toujours autre chose qu'un professeur de morale» (p. 131), peut-être parce que l'intellectuel «s'affirme un simple justificateur» car, «professeur dans la vie, il est contre-professeur sur l'estrade», le «public populaire» étant de fait la «dupe des formes et marques extérieures de la compétence (une certaine phraséologie, l'autorité de la voix, l'assurance du maintien, tous les trucs enfin que confère une longue pratique)» et cette duperie étant escomptée «par les ordonnateurs et les metteurs en scène de la représentation théâtrale» (ibid.), ces «moutons privés [étant] des lions publics», les «surenchères verbales compens[ant] les timidités de la conduite» (p. 55).
«L'histoire des intellectuels, qui selon Monnerot se ramène, certes, à une série de faillites sur les deux plans qui leurs sont propres : celui de la justesse de la pensée par rapport à elle-même et celui de la justesse de la pensée par rapport au réel» (p. 62), est développée à l'aide d'exemples précis tout au long du deuxième chapitre du livre.
Selon l'auteur, quelque chose change à partir de la Seconde Guerre mondiale : «À cette époque la figure de l'Intellectuel se fige. Les traits s'en exagèreront après la deuxième guerre (sic) mondiale, ils ne changeront pas. Nous avons déjà l'éminent fonctionnaire qui est moralement de toutes les grèves et de toutes les révoltes, postalement de toutes les insurrections. Célébrateur rituel des défaites nationales, il hurle à la mort en toute sécurité. Quelles que soient l'outrance des exhibitions sur tréteaux, l'intensité des violences pétitionnaires, pour ce «rebelle à prix fixe», tout se passera comme si, outre ses émoluments, la société qu'il vilipende par principe, lui avait reconnu, comme à l'officier la propriété de son grade, le monopole de l'épithète morale, de la phrase révolutionnaire, de l'anathème inconséquent» (p. 85).
Ce sont bien évidemment les idéologies inhumaines du communisme (7) et de l'hitlérisme, leur lutte à mort et la défaite historique de la seconde, qui vont cristalliser, jusqu'à nos jours c'est une évidence, cette posture grotesque de l'intellectuel.
Il nous faut cependant revenir aux années trente : «La chronologie (l'existence joue de ces tours à l'essence) nous indique que l'effervescence antifasciste atteint son acmé au temps même de la Iejovtchina, la grande purge de Staline, et des plus célèbres procès de Moscou : après Zinoviev, Kamenev, Radek et Boukharine, pour ne parler que d'eux. Des cent trente-quatre membres du Comité central du P.C. de l'U.R.S.S., et des suppléants qui siégeaient au XVIIe congrès (1934), cent dix furent fusillés ou disparurent... Que ces victimes trouvent des pleureuses, ou qu'elles s'en passent ! L'intellectuel a toutes ses larmes retenues !» (p. 84).
Il les verse pourtant, ses larmes, notre intellectuel, mais sur les seules victimes, certes courageuses, qui ont lutté, au nom du communisme, contre la folie nazie. Les propos de Jules Monnerot sembleront dès lors, pour le lecteur contemporain, une dangereuse révision de l'histoire officielle de France, qui on le sait est parfaitement fausse, à tout le moins scandaleusement exagérée : le communisme nous a libéré du fascisme. Ainsi, les «condamnations à mort ou à la prison portées contre des écrivains réputés pro-hitlériens, alors que les intellectuels communistes florissaient (sic) à Paris, sont des crimes judiciaires, et doublement, puisque la société semblait soudain reconnaître à l'écrivain, pour le tuer, des responsabilités qu'elle lui refusait lorsqu'il n'était question que de le faire vivre. Mais ceux des intellectuels chez qui les sympathies pour le communisme et la haine du fascisme étaient récentes, se déchargeaient sur ces boucs émissaires d'un poids de culpabilité dont, par ce sacrifice humain, ils étaient délivrés» (p. 91).
Et Jules Monnerot, dans une page remarquable, d'évoquer le mécanisme qui, depuis que le communisme est devenu, dans l'esprit des Français, une idéologie fondamentalement moins délétère que le nazisme (alors que le bilan humain du communisme se chiffre, selon les estimations les plus prudentes, en dizaines de millions de morts), rejette en enfer tout personne qui oserait contester la bonté de ce fanatisme messianique laïcisé : «L'identité de nomination a pour fin d'étendre le même sentiment hostile à deux êtres artificiellement et abusivement identifiés. En ce sens la magie – c'est bien d'opérations magiques qu'il s'agit – a des effets réels. Car si ce transfert de haine réussit (faire passer par exemple sur la dernière en date des droites les sentiments de haine déjà investis sur les «droites» précédentes [...]), ce n'est qu'une question de moyens (les «mass media» ici sont déterminants), si ce transfert réussit, il a des effets réels, il motive des actes. Si l'on a réussi à lier par conditionnement de réflexes une épithète à des conduites hostiles, l'épithète, disons, de «fasciste», et ensuite à l'accoler à tel individu, il suffira par exemple de circonstances favorables pour que l'individu soit lynché par une foule à motivations «antifascistes». La chose n'est pas sans précédents. L'usure inévitable de l'épithète «fasciste», en dépit des malédictions rituelles de ceux qui s'appellent eux-mêmes des «mandarins», a amené nos publicistes sous contrôle «intellectuel» à y substituer progressivement l'épithète «d'extrême-droite». Mais cette dernière épithète ne tient que par le mot d'ordre. Trop abstraite, elle n'est pas assez «magique». On peut crier «fasciste assassin !» pour faire lyncher un homme; avec «d'extrême-droite assassin» on n'y parviendrait pas. Et c'est ainsi que d'insuffisance en incapacité, le mauvais logicien finit par n'être plus même un bon «publicitaire». Sur la voie déclive de l'inintelligence intellectuelle, on cherche en vain une ligne d'arrêt» (p. 123).
Des lignes qui n'ont pas vraiment perdu leur terrifiante actualité et qui me font dire que Jules Monnerot, hélas, s'est trompé sur un seul point, le plus important en fin de compte de sa démonstration : «Certes, l'Intellectuel n'a pas fini de nuire. Il peut nous montrer encore combien forte est la malfaisance des faibles. Mais nous le savions déjà. L'oraison funèbre par anticipation est aussi contraire aux lois du genre qu'aux convenances elles-mêmes. Mais peut-être, en ce qui les concerne, n'en est-il pas d'autre. Tout porte à croire qu'on ne célébrera pas le centenaire des Intellectuels en 1998» (p. 136).

Notes
(1) «Le lecteur parvenu jusqu'à la fin m'a déjà excusé si, contrairement à une idée aujourd'hui reçue, mais qui pudiquement demeure informulée, je n'écris que si j'ai quelque chose à dire, et pour le dire», Jules Monnerot, La France intellectuelle (Éditions Raymond Bourgine, 1970, p. 135). Sans autre mention, toutes les italiques sont de Jules Monnerot lui-même.
(2) Il n'est sans doute pas inutile de rappeler que Jules Monnerot est l'auteur d'une Sociologie du communisme parue en 1949 et traduite en plusieurs langues, qui constitue un réquisitoire aussi implacable que documenté sur l'idéologie la plus meurtrière qu'ait connue, jusqu'à ce jour, l'humanité. Sans doute tenons-nous là l'explication majeure de l'occultation volontaire dans laquelle les mandarins français ont tenu (et continuent de tenir) les analyses de Jules Monnerot, et cela en dépit même du fait qu'un Julien Gracq a répété son admiration pour un livre tel que La poésie moderne et le sacré. Évoquons ce jugement sans appel de l'auteur sur ses contemporains si prudemment taiseux : «Une généralisation de la lâcheté sociologique telle que les paralogismes marxistes et communistes ne rencontrent pas du tout de résistance spécifique, reste encore improbable, en dépit des immenses efforts et moyens consacrés à ce résultat grandiose», Inquisitions, op. cit., p. 84.
(3) «Il faut chercher l'origine historique de l'emploi du mot clerc comme épithète que l'intellectuel s'applique à lui-même dans les années 1930 dans l'influence qu'eut encore Ernest Renan sur les hommes d'une génération, celle de Péguy. Renan effectivement avait été clerc : séminariste. Mais ne dépouillant point les manières du clerc qu'en définitive il avait voulu être, Renan, qui mène jusqu'à son terme une carrière universitaire et académique hors de pair, est l'incarnation historique par excellence du cléricalisme qui supprime Dieu et garde le prêtre, en sorte que le nouveau «clerc» hérite du prestige de l'homme consacré sans se refuser aucune des commodités de l'homme qui ne l'est pas. Ses manières rappellent au respect un peuple qui garde en lui l'archétype social de la hiérarchie catholique. L'intellectuel va naître» (p. 15).
(4) C'est la thèse de La poésie et le sacré (Gallimard, 1949), pp. 159-60 : «Quand, au lieu du sacré, il n’y a de plus en plus que l’officiel – risible, indifférent ou profitable mais jamais exaltant – les dispositions affectives et les situations vécues d’où il tire sa substance sont rejetées de l’autre côté. Les hommes en qui le sacré demande à être, tournent le dos à tout ce que conservent, que représentent et que signifient des religions qui ne sont plus que ritualisme, des ritualismes qui ne sont plus que le rempart de ce que le profane compte de plus vulgaire, refusent d’y participer. Ou «nous ne sommes pas au monde» ou «nous y sommes pour qu’il ne soit plus». Si, comme le voulait Sorel, les «renouveaux» sont des retours aux sources, si les grands fondateurs d’ordres catholiques – comme en un autre sens les réformateurs hérétiques – ont remagnétisé leur religion par le contact de vertus et de particularités originelles que leur vocation était de retrouver et de réinventer, de ce que les derniers avatars du romantisme font curieusement écho aux premières (?) manifestations de la religion, on pourrait peut-être inférer, non seulement que le surréalisme est symptôme d’un état de besoin, mais encore qu’il prend place dans une constellation qui pourrait peut-être apparaître un jour préreligieuse, c’est-à-dire religieuse. À travers les alternances de décomposition et de recomposition du sacré, ses sources surréelles, qu’elles bouillonnent ou qu’elles filtrent, ne tarissent pas»,
(5) C'est l'intégralité de cette analyse qu'il faudrait citer : «Sartre excelle donc dans cette forme spécialisée de la rhétorique qu'on nomme philosophie universitaire, et qui semble faite tout exprès pour qu'y brillent les talents littéraires les plus introvertis et abstraits. Il lui arrive constamment d'oublier de définir les notions, de préciser la portée et les limites des conventions, de passer sous silence les postulats implicites grâce auxquels il lui donne à lui-même, et aux lecteurs qu'il abuse par des procédés littéraires, l'illusion de démontrer ce qu'il affirme», p. 112.
(6) «On prévoit le temps où le pur consommateur, comme les enfants jouent au jeu de construction, en disposant dans tous les ordres possibles des éléments de films préfabriqués à cet usage, et en se les projetant successivement jusqu'à ce qu'il ait épuisé le nombre de combinaisons possibles, pourra se faire ses romans tout seul» (p. 21).
(7) Je cite, pour le plaisir, ces quelques lignes consacrées aux chrétiens progressistes : «Apparemment, en dépit d'expériences concluantes, comme celle des prêtres ouvriers, ils n'ont pas compris que la différence entre les communistes du XXe siècle et les barbares des cinq premiers siècles de notre ère, est que les barbares se convertissaient au christianisme, alors que les communistes au XXe convertissent les chrétiens en leur laissant (pour combien de temps ?) des rites», pp. 140-1.

dimanche, 11 novembre 2012

The Visionary Theories of Pitirim Sorokin

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Culture in Crisis: The Visionary Theories of Pitirim Sorokin

Ex: http://www.satyagraha.wordpress.com/

Introduction

Pitirim Sorokin, a leading 20th century sociologist, is a name you should know. Consider this quote of his:

The organism of the Western society and culture seems to be undergoing one of the deepest and most significant crises of its life. The crisis is far greater than the ordinary; its depth is unfathomable, its end not yet in sight, and the whole of the Western society is involved in it. It is the crisis of a Sensate culture, now in its overripe stage, the culture that has dominated the Western World during the last five centuries. It is also the crisis of a contractual (capitalistic) society associated with it. In this sense we are experiencing one of the sharpest turns in the historical road…. The diagnosis of the crisis of our age which is given in this chapter was written…. Gigantic catastrophes that have occurred since that year…strikingly confirm and develop the diagnosis…. Not a single compartment of our culture, or of the mind of contemporary man, shows itself to be free from the unmistakable symptoms….

Shall we wonder, therefore, that if many do not apprehend clearly what is happening, they have at least a vague feeling that the issue is not merely that of “prosperity,” or “democracy,” or “capitalism,” or the like, but involves the whole contemporary culture, society, and man? …

Shall we wonder, also, at the endless multitude of incessant major and minor crises that have been rolling over us, like ocean waves, during recent decades? Today in one form, tomorrow in another. Now here, now there. Crises political, agricultural, commercial, and industrial! Crises of production and distribution. Crises moral, juridical, religious, scientific, and artistic. Crises of property, of the State, of the family, of industrial enterprise…Each of the crises has battered our nerves and minds, each has shaken the very foundations of our culture and society, and each has left behind a legion of derelicts and victims. And alas! The end is not in view. Each of these crises has been, as it were, a movement in a great terrifying symphony, and each has been remarkable for its magnitude and intensity. (P. Sorokin, SCD, pp. 622-623)

Background

Pitirim Alexandrovich Sorokin (1889 – 1968) was born in Russia to a Russian father and an indigenous (Komi, an ethnic group related to Finns) mother. Like other intellectuals of his age, he was swept up in the revolt against the tsarist government. He held a cabinet post in the short-lived Russian Provisional Government (1917), and had the distinction of being imprisoned successively by both tsarist and Bolshevist factions. Eventually sentenced to death, he was pardoned by Lenin, emigrated, and came to the US. There he enjoyed a long and distinguished academic career, much at Harvard University, where he served as head of the sociology department.

His experience and acute observations of Russian politics left him uniquely suited for understanding the transformational forces of the 20th century. By 1937 he published the first three volumes of his masterpiece, Social and Cultural Dynamics, but he continued to refine his theories for nearly three more decades.

Based on a careful study of world history – including detailed statistical analysis of art, architecture, literature, economics, philosophy, science, and warfare – he identified three strikingly consistent phenomena:

  1. There exist two fundamental, alternative cultural patterns, broadly characterized as materialistic (Sensate) and spiritual (Ideational), along with certain intermediate or mixed patterns.
  2. Every society tends to alternate between materialistic and spiritual periods, sometimes with transitional, mixed periods, in a regular and predictable way.
  3. Times of transition from one orientation to another are characterized by many wars and crises.

Characteristics of the two primary cultural patterns and one important mixed pattern are outlined below.

Sensate (Materialistic) Culture

The first pattern, which Sorokin called Sensate culture, has these features:

  • The defining cultural principle is that true reality is sensory – only the material world is real. There is no other reality or source of values.
  • This becomes the ubiquitous organizing principle of society. It permeates every aspect of culture and defines the basic mentality. People are unable to think in any other terms.
  • Sensate culture pursues science and technology, but dedicates little creative thought to spirituality or religion.
  • Dominant values are wealth, health, bodily comfort, sensual pleasures, power and fame.
  • Ethics, politics, and economics are utilitarian and hedonistic. All ethical and legal precepts are considered mere man-made conventions, relative and changeable.
  • Art and entertainment emphasize sensory stimulation. In the decadent stages of Sensate culture there is a frenzied emphasis on the new and the shocking (literally, sensationalism).
  • Religious institutions are mere relics of previous epochs, stripped of their original substance, and tending to fundamentalism and exaggerated fideism (the view that faith is not compatible with reason).

Ideational (Spiritual) Culture

The second pattern, which Sorokin called Ideational culture, has these characteristics:

  • The defining principle is that true reality is supersensory, transcendent, spiritual.
  • The material world is variously: an illusion (maya), temporary, passing away (“stranger in a strange land”), sinful, or a mere shadow an eternal transcendent reality.
  • Religion often tends to asceticism, or attempts at zealous social reform.
  • Mysticism and revelation are considered valid sources of truth and morality.
  • Science and technology are comparatively de-emphasized..
  • Economics is conditioned by religious and moral commandments (e.g., laws against usury).
  • Innovation in theology, metaphysics, and supersensory philosophies
  • Flourishing of religious and spiritual art (e.g., Gothic cathedrals)

Integral Culture

Most cultures correspond to one of the two basic patterns above. Sometimes, however, a mixed cultural pattern occurs. The most important mixed culture Sorokin termed an Integral culture (also sometimes called an idealistic culture – not to be confused with an Ideational culture.) An Integral culture harmoniously balances sensate and ideational tendencies. Characteristics of an Integral culture include the following:

  • Its ultimate principle is that the true reality is richly manifold, a tapestry in which sensory, rational, and supersensory threads are interwoven.
  • All compartments of society and the person express this principle.
  • Science, philosophy, and theology blossom together.
  • Fine arts treat both supersensory reality and the noblest aspects of sensory reality.

Western Cultural History

Sorokin examined a wide range of world societies. In each he believed he found evidence of the regular alternation between Sensate and Ideational orientations, sometimes with an Integral culture intervening. According to Sorokin, Western culture is now in the third Sensate epoch of its recorded history. Table 1 summarizes his view of this history.

Table 1
Cultural Periods of Western Civilization According to Sorokin

Period Cultural Type Begin End
Greek Dark Age Sensate 1200 BC 900 BC
Archaic Greece Ideational 900 BC 550 BC
Classical Greece Integral 550 BC 320 BC
Hellenistic – Roman Sensate 320 BC 400
Transitional Mixed 400 600
Middle Ages Ideational 600 1200
High Middle Ages, Renaissance Integral 1200 1500
Rationalism, Age of Science Sensate 1500 present

Based on a detailed analysis of art, literature, economics, and other cultural indicators, Sorokin concluded that ancient Greece changed from a Sensate to an Ideational culture around the 9th century BC; during this Ideational phase, religious themes dominated society (Hesiod, Homer).

Following this, in the Greek Classical period (roughly 600 BC to 300 BC), an Integral culture reigned: the Parthenon was built; art (the sculptures of Phidias, the plays of Aeschylus and Sophocles) flourished, as did philosophy (Plato, Aristotle). This was followed by a new Sensate age, associated first with Hellenistic  (the empire founded by Alexander the Great) culture, and then the Roman empire.

As Rome’s Sensate culture decayed, it was eventually replaced by the Christian Ideational culture of the Middle Ages. The High Middle Ages and Renaissance brought a new Integral culture, again associated with many artistic and cultural innovations. After this Western society entered its present Sensate era, now in its twilight. We are due, according to Sorokin, to soon make a transition to a new Ideational, or, preferably an Integral cultural era.

Cultural Dynamics

sorokin-hardcover-cover-art.jpgSorokin was especially interested in the process by which societies change cultural orientations. He opposed the view, held by communists, that social change must be imposed externally, such as by a revolution. His principle of imminent change states that external forces are not necessary: societies change because it is in their nature to change. Although sensate or ideational tendencies may dominate at any given time, every culture contains both mentalities in a tension of opposites. When one mentality becomes stretched too far, it sets in motion compensatory transformative forces.

Helping drive transformation is the fact that human beings are themselves partly sensate, partly rational, and partly intuitive. Whenever a culture becomes too exaggerated in one of these directions, forces within the human psyche will, individually and collectively – work correctively.

Crises of Transition

As a Sensate or Ideational culture reaches a certain point of decline, social and economic crises mark the beginning of transition to a new mentality. These crises occur partly because, as the dominant paradigm reaches its late decadent stages, its institutions try unsuccessfully to adapt, taking ever more drastic measures. However, responses to crises tend to make things worse, leading to new crises. Expansion of government control is an inevitable by-product:

The main uniform effect of calamities upon the political and social structure of society is an expansion of governmental regulation, regimentation, and control of social relationships and a decrease in the regulation and management of social relationships by individuals and private groups. The expansion of governmental control and regulation assumes a variety of forms, embracing socialistic or communistic totalitarianism, fascist totalitarianism, monarchial autocracy, and theocracy. Now it is effected by a revolutionary regime, now by a counterrevolutionary regime; now by a military dictatorship, now by a dictatorship, now by a dictatorial bureaucracy. From both the quantitative and the qualitative point of view, such an expansion of governmental control means a decrease of freedom, a curtailment of the autonomy of individuals and private groups in the regulation and management of their individual behavior and their social relationships, the decline of constitutional and democratic institutions.” (MSC p. 122)

But, as we shall consider below, at the same time as these crises occur, other constructive forces are at work.

Trends of our Times

Sorokin identified what he considered three pivotal trends of modern times. The first trend is the disintegration of the current Sensate order:

In the twentieth century the magnificent sensate house of Western man began to deteriorate rapidly and then to crumble. There was, among other things, a disintegration of its moral, legal, and other values which, from within, control and guide the behavior of individuals and groups. When human beings cease to be controlled by deeply interiorized religious, ethical, aesthetic and other values, individuals and groups become the victims of crude power and fraud as the supreme controlling forces of their behavior, relationship, and destiny. In such circumstances, man turns into a human animal driven mainly by his biological urges, passions, and lust. Individual and collective unrestricted egotism flares up; a struggle for existence intensifies; might becomes right; and wars, bloody revolutions, crime, and other forms of interhuman strife and bestiality explode on an unprecedented scale. So it was in all great transitory periods. (BT, 1964, p. 24)

The second trend concerns the positive transformational processes which are already at work:

Fortunately for all the societies which do not perish in this sort of transition from one basic order to another, the disintegration process often generates the emergence of mobilization of forces opposed to it. Weak and insignificant at the beginning, these forces slowly grow and then start not only to fight the disintegration but also to plan and then to build a new sociocultural order which can meet more adequately the gigantic challenge of the critical transition and of the post-transitory future. This process of emergence and growth of the forces planning and building the new order has also appeared and is slowly developing now…

The epochal struggle between the increasingly sterile and destructive forces of the dying sensate order and the creative forces of the emerging, integral, sociocultural order marks all areas of today’s culture and social life, and deeply affects the way of life of every one of us. (BT, 1964, pp. 15-16)

The third trend is the growing importance of developing nations:

“The stars of the next acts of the great historical drama are going to be — besides Europe, the Americas, and Russia — the renascent great cultures of India, China, Japan, Indonesia, and the Islamic world. This epochal shift has already started…. Its effects upon the future history of mankind are going to be incomparably greater than those of the alliances and disalliances of the Western governments and ruling groups. (BT, 1964, pp. 15-16)

Social Transformation and Love

While the preceding might suggest that Sorokin was a cheerless prophet of doom, that is not so, and his later work decidedly emphasized the positive. He founded the Harvard Research Center for Creative Altruism, which sought to understand the role of love and altruism in producing a better society. Much of the Center’s research was summarized in Sorokin’s second masterpiece, The Ways and the Power of Love.

This book offered a comprehensive view on the role of love in positively transforming society. It surveyed the ideals and tactics of the great spiritual reformers of the past – Jesus Christ, the Buddha, St. Francis of Assisi, Gandhi, etc. – looking for common themes and principles.

We need, according to Sorokin, not only great figures like these, but also individuals who seek to exemplify the same principles within their personal spheres of influence.  Personal change must precede collective change, and nothing transforms a culture more effectively than positive examples. What is essential today, according to Sorokin, is that individuals reorient their thinking and values to a universal perspective – to seek to benefit all human beings, not just oneself or ones own country.

A significant portion of the book is devoted to the subject of yoga (remarkable for a book written in 1954), which Sorokin saw as an effective means of integrating the intellectual and sensate dimensions of the human being. At the same time he affirmed the value of traditional Western religions and religious practices.

The Road Ahead

Sorokin’s theories supply hope, motivation, and vision. They bolster hope that there is a light at the end of the tunnel, and that it may be not too far distant. The knowledge that change is coming, along with an understanding of his theories generally, enables us to try to steer change in a positive direction. Sorokin left no doubt but that we are at the end of a Sensate epoch. Whether we are headed for an Ideational or an Integral culture remains to be seen. It is clearly consistent with his theories that an Integral culture is attainable and is something to seek:  a new Renaissance.

A similar view was expressed by Frijtof Capra, who, in his book, The Turning Point, suggested we are on the verge of one of the greatest cultural transitions ever:

The rhythmic recurrences and patterns of rise and decline that seem to dominate human cultural evolution have somehow conspired to reach their points of reversal at the same time. The decline of patriarchy, the end of the fossil-fuel age, and the paradigm shift occurring in the twilight of the sensate culture are all contributing to the same global process. The current crisis, therefore, is not just a crisis of individuals, governments, or social institutions; it is a transition of planetary dimensions. As individuals, as a society, as a civilization, and as a planetary ecosystem, we are reaching the turning point…

During this phase of revaluation and cultural rebirth it will be important to minimize the hardship, discord, and disruption that are inevitably involved in periods of great social change, and to make the transition as painless as possible. It will therefore be crucial to go beyond attacking particular social groups or institutions, and to show how their attitudes and behavior reflect a value system that underlies our whole culture and that has now become outdated. It will be necessary to recognize and widely communicate the fact that our current social changes are manifestations of a much broader, and inevitable, cultural transformation. Only then will we be able to approach the kind of harmonious, peaceful cultural transition described in one of humanity’s oldest books of wisdom, the Chinese I Ching, or Book of Changes: “The movement is natural, arising spontaneously.” (Capra, pp. 32-34)

One reason that change may happen quickly is because people already know that the present culture is oppressive. Expressed public opinion, which tends to conformity, lags behind private opinion. Once it is sufficiently clear that the tide is changing, people will quickly join the revolution. The process is non-linear.

Christianity and Islam

Viewed in terms of Sorokin’s theories, the current tensions between the West and Islam suggest a conflict is between an overripe ultra-materialistic Western culture, detached from its religious heritage and without appreciation of transcendent values, against a medieval Ideational culture that has lost much of its earlier spiritual creativity. As Nieli (2006) put it:

“With regard to the current clash between Islam and the West, Sorokin would no doubt point out that both cultures currently find themselves at end stages of their respective ideational and sensate developments and are long overdue for a shift in direction. The Wahabist-Taliban style of Islamic fundamentalism strays as far from the goal of integral balance in Sorokin’s sense as the one-sidedly sensate, post-Christian societies of Northern and Western Europe. Both are ripe for a correction, according to Sorokin’s theory of cultural change, the Islamic societies in the direction of sensate development (particularly in the areas of science, technology, economic productivity, and democratic governance), the Western sensate cultures in the direction of ideational change (including the development of more stable families, greater temperance and self-control, and the reorientation of their cultural values in a more God-centered direction). Were he alive today, Sorokin would no doubt hold out hope for a political and cultural rapprochement between Islam and the West.” (Nieli, p. 373)

The current state of affairs between Christianity and Islam, then, is better characterized as that of mutual opportunity rather than unavoidable conflict. The West can share its technological advances, and Islam may again – as it did around the 12th century – help reinvigorate the spirit of theological and metaphysical investigation in the West.

Individual and Institutional Changes

Institutions must adapt to the coming changes or be left behind. Today’s universities are leading transmitters of a sensate mentality. It is neither a secret nor a coincidence that Sorokin’s ideas found little favor in academia. A new model of higher education, perhaps based on the model small liberal arts colleges, is required.

Politics, national and international, must move from having conflict as an organizing principle, replacing it with principles of unity and the recognition of a joint destiny of humankind.

A renewal in religious institutions is called for. Christianity, for example, despite its protestations otherwise, still tends decidedly towards an ascetic dualism – the view that the body is little more than a hindrance to the spirit, and that the created world is merely a “vale of tears.” Increased understanding and appreciation of the spiritual traditions of indigenous cultures, which have not severed the connection between man and Nature, may assist in this change.

Sorokin emphasized, however, that the primary agent of social transformation is the individual. Many simple steps are available to the ordinary person. Examples include the following:

  • Commit yourself to ethical and intellectual improvement. In the ethical sphere, focus first on self-mastery. Be eager to discover and correct your faults, and to acquire virtue. Think first of others. See yourself as a citizen of the world. Urgently needed are individuals who can see and seek the objective, transcendent basis of ethical values.
  • Cultivate the Intellect: study philosophy; read books and poetry; listen to classical music; visit an art museum.
  • Practice yoga.
  • Be in harmony with Nature: plant a garden; go camping; protect the environment.
  • Reduce the importance of money and materialism generally in your life.
  • Turn off the television and spend more time in personal interaction with others.

A little reflection will doubtless suggest many other similar steps. Recognize that in changing, you are not only helping yourself, but also setting a powerfully transformative positive example for others.

The Supraconscious

Sorokin’s later work emphasized the role of the supraconscious — a Higher Self or consciousness that inspires and guides our rational mind. Religions and philosophical systems universally recognize such a higher human consciousness, naming it variously: Conscience, Atman, Self, Nous, etc. Yet this concept is completely ignored or even denied by modern science. Clearly this is something that must change. As Sorokin put it:

By becoming conscious of the paramount importance of the supraconscious and by earnest striving for its grace, we can activate its creative potential and its control over our conscious and unconscious forces. By all these means we can break the thick prison walls erected by prevalent pseudo-science around the supraconscious. (WPL, p. 487)

The reality of the supraconscious is a cause for hope and humility: hope, because we are confident that the transpersonal source of human supraconsciousness is providential, guiding culture though history with a definite plan; and humility, because it reminds us that our role in the grand plan is achieved by striving to rid ourselves of preconceived ideas and selfishly motivated schemes, and by increasing our capacity to receive and follow inspiration. It is through inspiration and humility that we achieve a “realization of man’s unique creative mission on this planet.” (CA, p. 326).

References

  • Coser, Lewis A. Masters of Sociological Thought. 2nd ed. New York: Harcourt Brace Jovanovich, 1977.
  • Sorokin, Pitirim A. Social and Cultural Dynamics. 4 vols. 1937 (vols. 1-3), 1941 (vol. 4); rev. 1957 (reprinted: Transaction Publishers, 1985). [SCD]
  • Sorokin, Pitirim A. The Crisis of our Age. E. P. Dutton, 1941 (reprinted 1957). [CA]

Le mariage et les enfants, des biens de consommation ?

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Le mariage et les enfants, des biens de consommation ?

par Dominique VENNER

À l’origine, tout le monde pensait que le projet de loi sur le mariage des homosexuels était l’un des attrape-nigauds (en termes crus, attrape-couillons) par lesquels les politiciens amusent la galerie, faute de pouvoir agir sur les vrais dossiers. Et puis, très vite, on a compris que derrière l’attrape-nigauds s’était glissé l’un de ces projets très réels par lesquels les fanatiques de la déconstruction veulent détruire un peu plus les fondements qui continuent de structurer les sociétés européennes aussi malades soient-elles.
La question posée ne concerne nullement la tolérance ou le respect à l’égard de particularités sentimentales ou sexuelles minoritaires. L’homosexualité n’est pas une nouveauté historique. Il serait facile de dénombrer d’illustres personnages, rois, reines ou grands seigneurs des temps anciens qui préféraient la fréquentation intime du même sexe, et dont les chroniques anciennes se sont parfois moquées.
La vie privée est l’affaire de chacun et, tant que les préférences particulières ne dégénèrent pas en manifestations provocantes et en prosélytisme outrancier, il n’y a rien à objecter. Le respect du secret de la « privacy », comme disent les Anglais, s’impose. En France, par la création du « pacte civil de solidarité et de concubinage » (pacs), la loi a créé un cadre légal permettant à deux personnes du même sexe (ou de sexe différent) de vivre ensemble avec une série d’avantages sociaux ou fiscaux. Il s’agit d’une consécration sociale du désir d’amour ou d’affection.
Le mariage est autre chose. Il ne se rapporte pas à l’amour, même quand il en est la conséquence. Le mariage est l’union entre un homme et une femme en vue de la procréation. Si l’on enlève la différence de sexe et la procréation, il ne reste rien, sauf l’amour qui peut s’évaporer.
À la différence du pacs, le mariage est une institution et pas un simple contrat. L’institution du mariage est définie par un ensemble de droits et de devoirs réciproques non seulement entre les époux, mais envers les enfants à naître. La cité (autrement dit la loi et ses représentants) intervient pour célébrer solennellement le mariage (devant le maire), estimant qu’elle en a besoin dans l’intérêt général. Jusqu’à maintenant, aucune société n’a jamais pensé avoir besoin de couples homosexuels pour se perpétuer.
Insistons sur ce point, le mariage n’est pas une célébration de l’amour. Le mariage est une institution fondée sur la filiation et la parenté, même si les circonstances, parfois, ne permettent pas la venue d’enfants. La présomption de paternité est son nœud fondateur. Nos contemporains, comme voici 3000 ans les héros de l’Iliade (Achille, fils de Pélée, Ulysse fils de Laerte, etc.) continuent de se penser comme fils ou filles de ceux dont ils sont nés. Et peu importe la bonne ou la mauvaise entente entre les générations. La rupture de filiation est toujours un drame. Pour les enfants nés hors mariage, les recherches en paternité ne se rapportent pas qu’à d’éventuels héritages, mais à un besoin impérieux de savoir d’où l’on vient, de qui l’on est l’enfant.
Il faut aussi parler de l’adoption qui est toujours un risque et une souffrance. Certains couples homosexuels exigent de pouvoir adopter un enfant, un peu comme on achète un chien, un chat ou un instrument sexuel. Pour le moment, la loi nie l’analogie entre l’adoption par un couple homosexuel et par un couple formé d’un homme et d’une femme unis par le mariage. Elle estime à bon droit qu’un enfant, pour son équilibre ultérieur, a besoin d’un père et d’une mère. C’est donc l’intérêt de l’enfant qui est pris en compte et non les lubies ou les désirs de jouissance de certains adultes.
En clair, il serait destructeur de changer la définition de la filiation et de la famille pour répondre aux attentes égoïstes de couples homosexuels très minoritaires. Ceux-là ont droit au respect de leurs différences, pour autant qu’ils ne détruisent pas une institution qui a été conçue dans l’intérêt des enfants. Si l’on admet le « mariage pour tous », pourquoi ne pas l’étendre à sa guenon ou à son chien préféré, à son frère ou à sa sœur, à son père ou à sa mère ? Pourquoi ne pas prévoir le mariage d’une femme avec deux ou trois hommes ? Toutes ces extravagances, on peut s’y adonner plus ou moins discrètement hors mariage. La seule question, finalement, consiste à se souvenir que le mariage n’est pas un bien de consommation ouvert à toutes les fantaisies.
Il est vrai qu’intervient en force la mode du gender, la « théorie des genres » (gender studies) venue des Etats-Unis et enseignée désormais dans les programme scolaires du second degré. Cette mode prétend que l’identité sexuelle est le résultat d’une construction sociale. Simone de Beauvoir écrivait déjà dans Le Deuxième Sexe, « on ne nait pas femme, on le devient ». Elle s’inspirait de la théorie de Sartre selon qui l’identité se réduit au regard que les autres portent sur nous. C’était idiot, mais nouveau, donc intéressant et « vendeur ». Les théoriciens des gender studies sont des féministes extrémistes et des homosexuels qui entendent justifier leurs particularités en niant qu’il y ait des femmes et des hommes – et sans doute aussi qu’il y ait des biches et des cerfs, des brebis et des béliers… (1) Comme cette fraction de la population dispose d’un haut pouvoir d’achat, son influence sur les décideurs de la « pub » est considérable. D’autant que leurs lubies relayées par les médias favorisent les nouveautés et les modes dont se nourrit le système marchand (2). Il est évident que pour ces toqués dorés sur tranche, le modèle familial fondé sur l’hétérogénéité des sexes et sur les enfants, n’est aussi qu’un « conditionnement social » qu’il faut éliminer. Ce sera plus difficile qu’ils ne l’imaginent.
 

Dominique Venner

 Notes

  1.  J’ai publié dans La Nouvelle Revues d’Histoire n° 30 (dossier Les femmes et le pouvoir), p. 40, un florilège des élucubrations de Mme Françoise Héritier, professeur honoraire au Collège de France, pour qui les différences physiques entre les hommes et les femmes, viendraient de la domination exercée par les mâles sur les femelles durant les millénaires du Paléolithique, les messieurs se réservant la nourriture carnée, alors qu’il imposaient aux dames d’être végétariennes… comme Hitler. Lumineux, non ?
  2. Réflexion sur le système marchand développée dans mon livre Le Choc de l’Histoire (Via Romana, 2011).

Pitirim Sorokin

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Pitirim Sorokin

by Morris Berman

Ex: http://morrisberman.blogspot.be/

 

“Eat bread and salt and speak the truth.” —old Russian proverb
 
I suddenly remembered, the other day, that it had been ages since I dipped into the work of Pitirim Sorokin, the Russian sociologist who immigrated to the United States and founded the Department of Sociology at Harvard, where he taught for nearly thirty years. His four-volume Social and Cultural Dynamics was written over 1937-41, and rereading it at this late date, one has to marvel at the prescience of the man. Much of what he predicted regarding the cycles of civilization is coming true in our time.
 
Sorokin distinguished between what he called Ideational cultures and Sensate cultures. The former, he wrote, are spiritual in nature, focusing on the inner life of human beings. The latter, on the other hand—of which the West for the last five hundred years is a classic example—are preoccupied with the material modification of the external world by means of science and technology, and are the opposite of the Ideational ones.  The Sensate culture of the last five centuries, he claimed, is now in crisis; in its dying phase.
 
(Sorokin also posited the existence of an intermediary-type culture between the Sensate and the Ideational, which he called Idealistic, and which is a compromise between faith and pure empiricism. What we find here is a harmonious synthesis among reason, faith, and the senses as sources of knowing. Sad to say, the West has seen only two such periods in its long history, ones that might well be termed golden ages: Greece in the fifth and fourth centuries B.C., and Europe during A.D. 1200-1350.  Knowledge was not narrowed to one vista, he said, nor reduced to one source. Think Aeschylus, Thomas Aquinas.)
 
So Sorokin believed that present-day Sensate/scientific culture was in a state of fatigue; that it had run its course. When you have the excessive domination of a single system, he wrote, eventually it begins to exhibit signs of self-destruction.  The pendulum starts to swing in the other direction because each type of culture contains only part of the truth, and is thus an untruth.  But this partial truth is mistaken for the whole truth, and becomes the basis for culture and social life—which is the untruth of the situation. The false part of the culture tends to grow, and eventually, the whole thing goes out of kilter. In other words, the untruth evokes a strong reaction, creating a dynamic of change and disintegration. (Cf. Hegel, or even Aristotle: any reality contains its own negation within itself, producing its antithesis over time.) Cultures dominated by one-sided mentalities, said Sorokin, fall victim to their own narrow-mindedness.  He goes on:
 
“The great crisis of Sensate culture is here in all its stark reality. Before our very eyes this culture is committing suicide. If it does not die in our lifetime, it can hardly recover from the exhaustion of its creative forces and from the wounds of self-destruction. Half-alive and half-dead, it may linger in its agony for decades; but its spring and summer are definitely over….I hear distinctly the requiem that the symphony of history is playing in its memory.”
 
Sorokin’s predictions for this end-game scenario (remember, he’s writing this nearly seventy-five years ago) were as follows:
 
1. The boundary between true and false, and beautiful and ugly, will erode.  Conscience will disappear in favor of special interest groups. Force and fraud will become the norm; might will become right, and brutality rampant. It will be a bellum omnium contra omnes, and the family will disintegrate as well. “The home will become a mere overnight parking place.”
 
2. Sensate values “will be progressively destructive rather than constructive, representing in their totality a museum of sociocultural pathology….The Sensate mentality will increasingly interpret man and all values ‘physicochemically,’ ‘biologically,’ ‘reflexologically,’ ‘endocrinologically,’ ‘behavioristically,’ ‘economically’…[etc.].”
 
3. Real creativity will die out. Instead, we shall get a multitude of mediocre pseudo-thinkers and vulgar groups and organizations. Our belief systems will turn into a strange chaotic stew of science, philosophy, and magical beliefs.  “Quantitative colossalism will substitute for qualitative refinement.” What is biggest will be regarded as best. Instead of classics, we shall have best-sellers. Instead of genius, technique. Instead of real thought, Information. Instead of inner value, glittering externality.  Instead of sages, smart alecs. The great cultural values of the past will be degraded; “Michelangelos and Rembrandts will be decorating soap and razor blades, washing machines and whiskey bottles.”
 
4. Freedom will become a myth. “Inalienable rights will be alienated; Declarations of Rights either abolished or used only as beautiful screens for an unadulterated coercion. Governments will become more and more hoary, fraudulent, and tyrannical, giving bombs instead of bread; death instead of freedom; violence instead of law.” Security will fade; the population will become weary and scared.  “Suicide, mental disease, and crime will grow.”
 
5. The dies irae of transition will not be fun to live through, but the only way out of this mess, he wrote, is precisely through it. Under the conditions outlined above, the “population will not be able to help opening its eyes [this will be a very delayed phase in the U.S., I’m guessing] to the hollowness of the declining Sensate culture…. As a result, it will increasingly forsake it and shift its allegiance to either Ideational or Idealistic values.” Finally, we shall see the release of new creative forces, which “will usher in a culture and a noble society built not upon the withered Sensate root but upon a healthier and more vigorous root of integralistic principle.” In other words, we can expect “the emergence and slow growth of the first components of a new sociocultural order.”
 
Hey, one can only hope.

samedi, 27 octobre 2012

Différence sexuée et orientation sexuelle : ne pas tout confondre

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Différence sexuée et orientation sexuelle : ne pas tout confondre

par Pierre LE VIGAN

La protestation de députés U.M.P. vis-à-vis de la nouvelle rédaction des manuels de Première en Sciences de la vie et de la terre (S.V.T.) amène, à nouveau, à s’interroger sur une polémique où la stupidité n’est pas d’un seul côté.

L’émission « Répliques » de France Culture, du 8 octobre 2011, a encore abordé ce débat sous le titre « Théorie du genre, différence des sexes ».

De quoi s’agit-il ? Les manuels de Première en S.V.T. indiquent « si l’identité sexuelle et les rôles sexuels et ses stéréotypes dans la société appartiennent à la sphère publique, l’orientation sexuelle appartient à la sphère privée ». Paradoxe : affirmer dans un manuel public que « l’orientation sexuelle appartient à la sphère privée » est quelque peu contradictoire. Mais l’essentiel est ailleurs. L’identité sexuée c’est pour l’immense majorité d’entre nous le genre sexuel, masculin ou féminin, qui nous est assigné par la nature, ou si on préfère, le hasard ou encore le destin. L’ambiguïté anatomique est ici très rare et donc l’identité sexuée est pour l’immense majorité un non-problème. Elle est évidente. À côté de cela, on parle parfois d’une identité sexuelle, qui serait plus ouverte. Si on veut dire par là que, dans la psychologie de chacun, cœxistent des éléments féminins et des éléments masculins, c’est exact. Mais la notion d’identité sexuelle tend plutôt à introduire de la confusion. Ce qu’il faut mettre en rapport avec l’identité sexuée, c’est bien plutôt la notion d’orientation sexuelle. Or celle-ci est effectivement ouverte, un homme peut aimer les hommes, en tout cas les préférer. Idem pour une femme qui peut préférer ses semblables au sexe opposé. Ce que nous apprend la sociologie la plus élémentaire, c’est tout de même que cette orientation ne concerne rarement plus de 10 % d’une population. Elle est marginale comme celle des collectionneurs de timbres ou des passionnés d’histoire napoléonienne, ce qui bien entendu ne dit rien de sa valeur ou de non-valeur.

Soyons clair : l’idée de discriminer les homosexuels est antipathique, l’idée de les recenser aussi – ce qui paradoxalement invalide l’idée défendue par certains homosexuels d’imposer le « outing », déclaration comme quoi on est ou on a été à l’occasion praticien de l’homosexualité. Pour ma part,  je trouve souhaitable d’éduquer au rejet de l’homophobie, c’est-à-dire à combattre l’idée que les homosexuels seraient moins respectables (ou moins courageux, ou moins franc, moins loyaux, etc.) que d’autres. Cela fait partie des multiples aspects de la morale civique, et d’ailleurs de l’intelligence la plus élémentaire. L’important est de ne pas tout confondre. Or une tendance actuelle tend à dire que les orientations sexuelles ne sont que le fruit d’un conditionnement culturel et qu’il faut combattre celui-ci. Dans cette perspective, c’est toute la littérature enfantine, ou une bonne partie de la littérature tout court qui font partie de ce conditionnement. On voit l’absurdité. L’histoire de l’homme comme créateur d’œuvres littéraires et artistiques est condamnée. Or l’histoire de l’homme n’est pas autre chose que l’expression de ce qui lui est propre anthropologiquement. Le genre, c’est-à-dire être homme ou femme fait partie de l’identité sexuée et un homosexuel homme reste du point de vue de la sexuation pleinement un homme, sauf cas très rares des transsexuels. L’orientation sexuelle est bien autre chose que l’identité sexuée c’est-à-dire le genre, masculin ou féminin, elle relève bien souvent d’une histoire personnelle que la société – et, pour le coup, nous serons d’accord avec le manuel de première, – n’a pas à connaître; c’est une affaire privée. Voir dans le genre, comme le font les gender studies (« études de genre ») bénéficiant avec une folie inconscience d’une chaire à Sciences Po une pure histoire de rapports de force, et en clair de domination des schémas masculins, c’est un contresens total. C’est surtout du constructivisme anthropologique dans la filiation directe du communisme le plus stalinien. Que l’identité sexuée ait à voir non seulement avec l’anatomie mais avec les sédimentations culturelles, c’est une évidence et cela prouve une fois de plus que la nature de l’homme, c’est aussi d’avoir une culture : l’homme est un animal naturel et culturel. Mais que les sédimentations culturelles soient l’origine – et une origine soi-disant « artificielle » – des identités sexuées est absurde.

Freud faisait l’éloge des « belles différences ». L’écrivain Michel Schneider s’attache aussi à la valeur symbolique et structurante pour l’homme de ces « belles différences ». Que la pratique homosexuelle, prédominante ou occasionnelle, s’inscrive dans une différence à l’intérieur de ces « belles différences », c’est une chose. Que ces orientations et ces pratiques puissent aboutir à nier les identités sexuées elles-mêmes ce n’est pas sérieusement défendable.

Pierre Le Vigan


Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

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dimanche, 21 octobre 2012

The Manly Barbarian

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The Manly Barbarian:
Masculinity & Exploit in Veblen’s Theory of the Leisure Class

By Jack Donovan

Thorstein Veblen’s Theory of the Leisure Class was written as a treatise on economics, but in pieces—like the work of Freud and Darwin—it reads today like an early stab at evolutionary psychology. I decided to dig into it after reading Venkatesh Rao’s brilliant essay “The Return of the Barbarian [2].” Rao updated some of Veblen’s basic ideas and used them as a jumping off point for an argument about conflicts between sedentary cultures (which invest everything into civilization and become completely dependent on it) and pastoral nomads (who are used to thinking on their feet). I was interested in the way that the traits Veblen assigned to Barbarians overlap with the archetypal essence of masculinity I developed in The Way of Men [3]. “Manliness-as-barbarianism” offers a muscular way to expand an anti-modern, extra-Christian understanding of men and masculinity.

Veblen’s opening “Introductory” essay is alive, colorfully written and packed with interesting ideas. The rest of the book, although peppered with smart and timeless observations, suffers from a middle class bookworm’s ressentiment toward both “delinquent” bullies and predatory elitists (who he thinks have a lot in common) as well as a lot of rambling, convoluted writing and thinking about classes which no longer exist in quite the same forms.

His basic theory rests on the idea that humans were once relatively peaceful savages who acquired a predatory habit. These peaceful savages—“noble savages,” you might say—shared work and resources, and could afford no class of individuals who abstained from certain kinds of work. However, as men developed the knack for preying on other living creatures, including other groups of men, divisions of labor occurred. Men are generally better suited to hunting and fighting, so hunting and fighting became man’s work, and women were left to do the work which remained. This gendered split of labor occurs at the “lower” stage of barbarism, when technology has advanced to the point where hunting and fighting are feasible, and opportunities for hunting and fighting occur with enough regularity for the action to become culturally important to the group. For instance, an isolated island with plenty of fresh fruits and vegetables, but no pigs to hunt, would be less conducive to the predatory “habit” of mind.

According to Veblen, the barbarian man’s work is characterized by exploit. He “reaps what he has not strewn.” The manly barbarian takes what he wants with a violent hand and an iron will.

More broadly, the work of men deals with animate phenomena. Veblen stresses that, to the barbarian, that which is “animate” is not merely what is “alive.” Like his contemporary Thomas Carlyle, he recognized that our forefathers inhabited a far more magical world. As Carlyle wrote in Heroes and Hero-Worship:

To the wild, deep-hearted man all was yet new, not veiled under names or formulas; it stood naked, flashing in on him there, beautiful, awful, unspeakable…

. . . The world, which is now divine only to the gifted, was then divine to whosoever would turn his eye upon it.

The angry volcano, the changeable sea, the exclamatory thunderclap and the snap of lighting—each one as animated as a bear or a snake or a herd of aurochs. Before our age of conceit, the whole world was alive in a way. The task of man was to challenge and master the world, to dare and to fight against its untamed fury. To leap a crevasse, to climb a mountain, to tramp through the white powder that falls from the sky. In Veblen’s words, the work of men was work that demanded “prowess,” not mere “diligence” and “drudgery.”

According to him, “virtually the whole range of industrial employments is an outgrowth of what is classed as women’s work in the primitive barbarian community.” Men reserved their strength for dynamic activities. Mere chores—the preparation of food, the production of clothing, the repetitive execution of menial processes—were assigned to women, to the weak and infirm, to slaves.

Masculinity must be proved, and the work that demonstrates strength, courage and mastery, bestows proof. A fresh carcass, a rack of antlers, a string of ears, your enemy’s wife. These proofs of exploit convey achievement and status. The trophy is physical evidence of honor and successful initiation into the hierarchy of men, a symbolic representation of dominance demonstrated in conflict with men or beasts. Veblen wrote:

Under this common-sense barbarian appreciation of worth or honor, the taking of life—the killing of formidable competitors, whether brute or human—is honorable in the highest degree. And this high office of slaughter, as an expression of the slayer’s prepotence, casts a glamour of worth over every act of slaughter and over all of the tools and accessories of the act. Arms are honorable, and the use of them, even in seeking the life of the meanest creatures of the fields, becomes an honorific employment. At the same time, employment in industry becomes correspondingly odious, and, in the common-sense apprehension, the handling of the tools and implements of industry falls beneath the dignity of able-bodied men. Labor becomes irksome.

The accumulation of objects of honor becomes an end in itself, and Veblen’s economic theory is based on the idea that as civilizations become more complex, symbols and the appearance of honor become more important than honorific deeds themselves. The upper classes make ostentatious and often wasteful displays of wealth as a matter of habit, and—especially in the open-caste system of American society—the lower and middle classes toil to gain honor by attaining high-end goods. Hence, the popular obsession with logos, luxury vehicles and all our sundry forms of bling and swag.

More relevant to the discussion of masculinity, however, is Veblen’s breakdown of manly and unmanly work. As the drudgery of industry among those engaged in lackluster occupations increases in efficiency, a surplus of goods allows particularly talented or well-born men to devote themselves completely to tasks which produce little of tangible value, but which deal specifically with the animate world and the application or management of exploit. These non-industrial occupations include government, warfare, religious observances, and sports. In the barbarian world, where manly exploit is righteousness, the highest status men are warriors, priests, and kings. Athletics include abstract rehearsals for war and the practice or demonstration of skills applicable to hunting, fighting or mastering nature. The rightful role of the barbarian priest—as storyteller, shaman, philosopher, scribe and artist—is to place the exploits of men in the magical, animate world. The barbarian priest provides the barbarian warrior with a compelling narrative. As Mishima might say, the priest finds the poetry in the splash of blood.

Veblen’s take on the predatory culture of barbarian thugs—and evidence of it in the aristocracy of his time—was somewhat snide. He was clearly biased in favor of the sensible, hard-working middle class, who he saw as being less concerned with violence and exploit, and more in touch with the peaceful ways of pre-barbarian savages. Today, there is every reason to believe that tribal violence has always been golden [4] to males, as it is even in our close ancestors, the chimpanzees. The supposedly non-violent savages studied by the scientists and explorers of Veblen’s era are more reasonably understood as culs-de-sac in human cultural development. In zero scarcity pockets of peace and plenty, men tend to lapse into softness and mother-worship. Men who are attracted to the barbarian way of life—or the idea of it—continually warn against this tendency. Settled as we are in this suburban bonobo cul-de-sac of a global empire, the majority of modern men can only daydream about an age of blood and poetry, and listen to stories about the days of high adventure [5].

If we put aside fantasies of noble savages and recognize the barbarian as the father of all men, his interest in exploit and preference for demonstrations of prowess over mere industry help to explain some of the conflicts between manliness and our modern industrial (and post-industrial) way of life. Anti-modern passions in men, while often couched in talk of the greatness of dying or past civilizations, are also often connected to a yearning for a return to the “barbarian values” of blood, honor, magic, poetry, adventure and exploit which are forbidden to all but a few in our “evolved” modern world.


Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com

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samedi, 20 octobre 2012

La Presse est devenue le premier pouvoir

La Presse est devenue le premier pouvoir - Soyons informés sur ceux qui nous informent !

La Presse est devenue le premier pouvoir


Soyons informés sur ceux qui nous informent !

Claude Chollet
 
En vous réveillant vous avez allumé la radio. Petit déjeunant, vous écoutez/regardez les informations. Vous avez poursuivi votre écoute en voiture ou dans les transports en commun grâce à votre téléphone. Vous avez parcouru un journal gratuit et acheté un quotidien. Dans la journée vous avez navigué sur plusieurs sites. Le soir vous avez regardé le journal télévisé. Si vous êtes addictif,  vous avez aussi écouté/vu les radios et les télévisions d’information en continu. 
 
 
Mais cette information qui la crée ? La sélectionne pour vous ? Qui la transforme ? Qui décide pour vous ce qui doit être mis en exergue ou ce qui doit être tu ? L’information n’est pas un objet neutre, elle est produite, gérée, orientée. Par qui ? Par les journalistes eux-mêmes bien sûr et par les médias qui les emploient. Les mêmes médias souvent contrôlés par des groupes industriels et financiers qui, s’ils prétendent à la neutralité, défendent leurs propres intérêts. 
Edmond Burke en 1787 a créé l’expression « quatrième pouvoir », reprise ensuite par Tocqueville en 1837. Les moyens de communication (tous les moyens) servent – ou devraient servir – de contre-feux aux trois pouvoirs incarnant l’Etat : exécutif, législatif et judiciaire.
 
Mais ce quatrième pouvoir est devenu le premier. 
 
Il influence les élections;  il commente et oriente les décisions du législatif comme de l’exécutif ; il juge aussi les juges. Il fait et défait les réputations, celle des groupes aussi bien que la vôtre.
Les journalistes sont ils indépendants ? Ils dépendent de leur hiérarchie dans les médias qui les font travailler. Ils dépendent encore plus de leur éducation, des cercles qu’ils fréquentent, de l’atmosphère culturelle et politique dans laquelle ils baignent, d’un certain esprit de caste, de ce que Bourdieu appelle l’habitus.
 
 
Tous les journalistes ne sont bien sûr pas logés à la même enseigne. A côté de quelques dizaines de vedettes et de quelques milliers de journalistes employés sur une longue durée, la réalité est de plus en plus celle des soutiers de l’information payés à  la pige, nouvelle classe intellectuelle précarisée.
 
Peut-on parler d’une crise du journalisme ? 

D’une certaine forme plutôt de fin de la liberté d’expression ? Les lois en vigueur défendent la liberté de la presse tout en l’encadrant. Serge Halimi dans son ouvrage « Les chiens de garde » est plus que critique vis à vis des médias et de leurs acteurs. Halimi reprend les thèses de Guy Debord sur la société moderne « Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans la représentation ». Mais qui représente cette représentation ?
 
 
Si les journalistes doivent être protégés, le lecteur, l’auditeur, le spectateur ont aussi des droits. Le droit de savoir qui parle, qui écrit, par quel itinéraire. Michel Field a parfaitement le droit d’avoir été un militant trotskyste dans sa jeunesse. Mais ses auditeurs ont aussi le droit de connaître ses amitiés et ses arrières plans idéologiques. Sans oublier les commanditaires qui l’emploient. Exemple parallèle celui de Joseph Macé-Scarron passé du GRECE au statut d’icône du boboïsme  gay chez Marianne
 
C’est ce droit  de savoir de l’auditeur, du spectateur, du lecteur que l’Observatoire des Journalistes et de l’Information Médiatique(OJIM) veut promouvoir. Une meilleure connaissance du monde journalistique et des médias  favorise une véritable démocratie et une éthique civique. L’OJIM vise à devenir une véritable ONG de salubrité déontologique.
 
 
Sur le site de l’OJIM vous trouverez les portraits des vedettes du journalisme comme des analyses des médias et des réseaux. Tout ceci dans un esprit citoyen et participatif. Si le site n’a pas de forum, nous encourageons nos lecteurs à compléter nos rubriques. Ces ajouts seront pris en compte et intégrés dans la mesure où ils sont sourcés et exclus d’esprit polémique. L’OJIM vise à mieux informer les citoyens sur leur environnement médiatique quotidien. 
 
Pour aller plus loin :
Serge Halimi, Les nouveaux chiens de garde, nouvelle édition 2005, Editions Raisons d’Agir, voir aussi le remarquable film éponyme.
Guy Debord, la Société du Spectacle, Folio, thèse 1.

mardi, 16 octobre 2012

The Disappearance of Public Intellectuals

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The Crisis of Education as a Public Good

The Disappearance of Public Intellectuals

by HENRY GIROUX
 

With the advent of Neoliberalism, we have witnessed the production and widespread adoption within many countries of what I want to call the politics of economic Darwinsim. As a theater of cruelty and mode of public pedagogy, economic Darwinism removes economics and markets from the discourse of social obligations and social costs.  The results are all around us ranging from ecological devastation and widespread economic impoverishment to the increasing incarceration of large segments of the population marginalized by race and class. Economics now drives politics, transforming citizens into consumers and compassion into an object of scorn.  The language of rabid individualism and harsh competition now replaces the notion of the public and all forms of solidarity not aligned with market values.  As public considerations and issues collapse into the morally vacant pit of private visions and narrow self-interests, the bridges between private and public life are dismantled making it almost impossible to determine how private troubles are connected to broader public issues. Long term investments are now replaced by short term profits while compassion and concern for others are viewed as a weakness.  As public visions fall into disrepair, the concept of the public good is eradicated in favor of Democratic public values are scorned because they subordinate market considerations to the common good.  Morality in this instance simply dissolves, as humans are stripped of any obligations to each other. How else to explain Mitt Romney’s gaffe caught on video in which he derided “47 percent of the people [who] will vote for the president no matter what”?[i] There was more at work here than what some have called a cynical political admission by Romney that some voting blocs do not matter.[ii]  Romney’s dismissive comments about those 47 percent of adult Americans who don’t pay federal income taxes for one reason or another, whom he described as “people who believe that they are victims, who believe the government has a responsibility to care for them, who believe that they are entitled to health care, to food, to housing, to you-name-it,”[iii] makes clear that the logic disposability is now a central feature of American politics.

As the language of privatization, deregulation, and commodification replaces the discourse of the  public good, all things public, including public schools, libraries, transportation systems, crucial infrastructures, and public services, are viewed either as a drain on the market or as a pathology.[iv]  The corrupting influence of money and concentrated power not only supports the mad violence of the defense industry, but turns politics itself into mode of sovereignty in which sovereignty now becomes  identical with policies that benefit the rich, corporations, and the defense industry.”[v]  Thomas Frank is on target when he argues that “Over the course of the past few decades, the power of concentrated money has subverted professions, destroyed small investors, wrecked the regulatory state, corrupted legislators en masse and repeatedly put the economy through he wringer. Now it has come for our democracy itself.”[vi]

Individual prosperity becomes the greatest of social achievements because it allegedly drives innovation and creates jobs. At the same time, massive disparities in income and wealth are celebrated as a justification for a survival of the fittest ethic and homage to a ruthless mode of unbridled individualism.  Vulnerable populations once protected by the social state are now considered a liability because they are viewed as either flawed consumers or present a threat to a right-wing Christian view of America as a white, protestant public sphere. The  elderly, young people, the unemployed, immigrants, and poor whites and minorities of color now constitute a form of human waste and are considered disposable, unworthy of sharing in the rights, benefits, and protections of a substantive democracy.  Clearly, this new politics of disposability and culture of cruelty represents more than an economic crisis, it is also speaks to a deeply rooted crisis of education, agency, and social responsibility.

Under such circumstances, to cite C. W. Mills, we are seeing the breakdown of democracy, the disappearance of critical intellectuals, and “the collapse of those public spheres which offer a sense of critical agency and social imagination.”[vii]  Since the 1970s, we have witnessed the forces of market fundamentalism strip education of its public values, critical content, and civic responsibilities as part of its broader goal of creating new subjects wedded to consumerism, risk-free relationships, and the destruction of the social state.  Tied largely to instrumental purposes and measurable paradigms, many institutions of higher education are now committed almost exclusively to economic goals, such as preparing students for the workforce. Universities have not only strayed from their democratic mission, they seem immune to the plight of students who have to face a harsh new world of high unemployment, the prospect of downward mobility, debilitating debt, and a future that mimics the failures of the past.   The question of what kind of education is needed for students to be informed and active citizens is rarely asked.[viii]

Within both higher education and the educational force of the broader cultural apparatus– with its networks of knowledge production in the old and new media– we are witnessing the emergence and dominance of a powerful and ruthless, if not destructive, market-driven notion of education, freedom, agency, and responsibility. Such modes of education do not foster a sense of organized responsibility central to a democracy. Instead, they foster what might be called a sense of organized irresponsibility–a practice that underlies the economic Darwinism and civic corruption at the heart of American and, to a lesser degree, Canadian politics.

The anti-democratic values that drive free market fundamentalism are embodied in policies now attempting to shape diverse levels of higher education all over the globe. The script has now become overly familiar and increasingly taken for granted, especially in the United States and increasingly in Canada.  Shaping the neoliberal framing of public and higher education is a corporate-based ideology that embraces standardizing the curriculum, top-to-down governing structures,  courses that promote entrepreneurial values, and the reduction of all levels of education to job training sites. For example, one university is offering a master’s degree to students who commit to starting a high-tech company while another allows career officers to teach capstone research seminars in the humanities. In one of these classes, the students were asked to “develop a 30-second commercial on their ‘personal brand.’”[ix]

Central to this neoliberal view of higher education is a market-driven paradigm that  wants to eliminate tenure,  turn the humanities into a job preparation service, and reduce most faculty to the status of part-time and temporary workers, if not simply a new subordinate class of disempowered educators.  The indentured service status of such faculty is put on full display as some colleges have resorted to using “temporary service agencies to do their formal hiring.”[x] Faculty in this view are regarded as simply another cheap army of reserve labor, a powerless group that  universities are eager to exploit in order to increase the bottom line while disregarding the needs and rights of academic laborers and the quality of education that students deserve.

giroux3.jpgThere is no talk in this view of higher education about shared governance between faculty and administrators, nor of educating students as critical citizens rather than potential employees of Wal-Mart.  There is no attempt to affirm faculty as scholars and public intellectuals who have both a measure of autonomy and power. Instead, faculty members are increasingly defined less as intellectuals than as technicians and grant writers. Students fare no better in this debased form of education and are treated either as consumers or as restless children in need of high-energy entertainment—as was made clear in the recent Penn State scandal. Nor is there any attempt to legitimate higher education as a fundamental sphere for creating the agents necessary for an aspiring democracy. This neoliberal corporatized model of higher education exhibits a deep disdain for critical ideals, public spheres, and practices that are not directly linked to market values, business culture, the economy, or the production of short term financial gains.   In fact, the commitment to democracy is beleaguered, viewed less as a crucial educational investment than as a distraction that gets in the way of connecting knowledge and pedagogy to the production of material and human capital.

Higher Education and the Crisis of Legitimacy

In the United States, many of the problems in higher education can be linked to low funding, the domination of universities by market mechanisms, the rise of for-profit colleges, the intrusion of the national security state, and the lack of faculty self-governance, all of which not only contradicts the culture and democratic value of higher education but also makes a mockery of the very meaning and mission of the university as a democratic public sphere.  Decreased financial support for higher education stands in sharp contrast to increased support for tax benefits for the rich, big banks, the Defense Budget, and mega corporations.  Rather than enlarge the moral imagination and critical capacities of students, too many universities are now wedded to producing would-be hedge fund managers, depoliticized students,  and creating modes of education that promote a “technically trained docility.”[xi]  Strapped for money and increasingly defined in the language of corporate culture, many universities are now “pulled or driven principally by vocational, [military], and economic considerations while increasingly removing academic knowledge production from democratic values and projects.”[xii]

College presidents are now called CEOs and speak largely in the discourse of Wall Street and corporate fund managers while at the same time moving without apology or shame between interlocking corporate and academic boards. Venture capitalists scour colleges and universities in search of big profits to be made through licensing agreements, the control of intellectual property rights, and investments in university spinoff companies. In this new Gilded Age of money and profit, academic subjects gain stature almost exclusively through their exchange value on the market. It gets worse as exemplified by one recent example. BB&T Corporation, a financial holdings company, gave a $1 million gift to Marshall University’s business school on the condition that Atlas Shrugged by Ayn Rand [Paul Ryan’s favorite book] be taught in a course.   What are we to make of the integrity of a university when it accepts a monetary gift from a corporation or rich patron demanding as part of the agreement the power to specify what is to be taught in a course or how a curriculum should be shaped?  Some corporations and universities now believe that what is taught in a course is not an academic decision but a market consideration.

Not only does neoliberalism undermine  both civic education and public values and confuse education with training,  it also treats knowledge as a product, promoting a neoliberal logic that views schools as malls, students as consumers, and faculty as entrepreneurs. It gets worse.  As Stanley Aronowitz points out, [t]he absurd neoliberal idea that users should pay for every public good from parks and beaches to highways  has reached education with a vengeance”[xiii] as more and more students are forced to give up attending college because of skyrocketing tuition rates.  In addition, thousands of students are now saddled with debts that will bankrupt their lives in the future. Unfortunately, one measure of this disinvestment in higher education as a public good can be seen in the fact that many states such as California are spending more on prisons than on higher education.[xiv]  Educating low income and poor minorities to be engaged citizens has been undermined by an unholy alliance of law and order conservatives, private prison corporations, and prison guard unions along with the rise of the punishing state, all of whom have an invested interest in locking more people up, especially poor minority youth, rather than educating them.  It is no coincidence that as the U.S., and Canada to a lesser degree, disinvests in the institutions fundamental to a democracy, it has invested heavily in the rise of the prison-industrial complex, and the punishing-surveillance state.  The social costs of prioritizing punishing over educating is clear in one shocking statistic provided by a recent study which states that  “by age 23, almost a third of Americans or 30.2 percent have been arrested for a crime…that researches say is a measure of growing exposure to the criminal justice system in everyday life.”[xv]

Questions regarding how education might enable students to develop a keen sense of prophetic justice, utilize critical analytical skills, and cultivate an ethical sensibility through which they learn to respect the rights of others are becoming increasingly irrelevant in a market-driven and militarized university.  As the humanities and liberal arts are downsized, privatized, and commodified, higher education finds itself caught in the paradox of claiming to invest in the future of young people while offering them few intellectual, civic, and moral supports.

If the commercialization, commodification, and militarization of the university continue unabated, higher education will become yet another one of a number of institutions incapable of fostering critical inquiry, public debate, human acts of justice, and public values. But the calculating logic of the corporate university does more than diminish the moral and political vision and practices necessary to sustain a vibrant democracy and an engaged notion of social agency. It also undermines the development of public spaces where matters of dissent, critical dialogue, social responsibility, and social justice are pedagogically valued– viewed as fundamental to providing students with the knowledge and skills necessary to address the problems facing the nation and the globe. Such democratic public spheres are especially important at a time when any space that produces “critical thinkers capable of putting existing institutions into question” is under siege by powerful economic and political interests.[xvi]

Higher education has a responsibility not only to search for the truth regardless of where it may lead, but also to educate students to make authority and power politically and morally accountable while at the same time sustaining “the idea and hope of a public culture.”[xvii]  Though questions regarding whether the university should serve strictly public rather than private interests no longer carry the weight of forceful criticism they did in the past, such questions are still crucial in addressing the purpose of higher education and what it might mean to imagine the university’s full participation in public life as the protector and promoter of democratic values.

What needs to be understood is that higher education may be one of the few public spheres left where knowledge, values, and learning offer a glimpse of the promise of education for nurturing public values, critical hope, and a substantive democracy.  It may be the case that everyday life is increasingly organized around market principles; but confusing a market-determined society with democracy hollows out the legacy of higher education, whose deepest roots are moral, not commercial. This is a particularly important insight in a society where the free circulation of ideas are not only being replaced by ideas managed by the dominant media, but where critical ideas are increasingly viewed or dismissed as banal, if not reactionary. Celebrity culture and the commodification of culture now constitute a powerful form of mass illiteracy and increasingly permeate all aspects the educational force of the wider cultural apparatus. But mass illiteracy does more than depoliticize the public, it also becomes complicit with the suppression of dissent.  Intellectuals who engage in dissent and “keep the idea and hope of a public culture alive,”[xviii] are often dismissed as irrelevant, extremist, or un-American. Moreover, anti-public intellectuals now dominate the larger cultural landscape, all too willing to flaunt co-option and reap the rewards of venting insults at their assigned opponents while being reduced to the status of paid servants of powerful economic interests.  At the same time, there are too few academics willing to defend higher education for its role in providing a supportive and sustainable culture in which a vibrant critical democracy can flourish.

These issues, in part, represent political and pedagogical concerns that should not be lost on either academics or those concerned about the purpose and meaning of higher education. Democracy places civic demands upon its citizens, and such demands point to the necessity of an education that is broad-based, critical, and supportive of meaningful civic values, participation in self-governance, and democratic leadership. Only through such a formative and critical educational culture can students learn how to become individual and social agents, rather than merely disengaged spectators,  able both to think otherwise and  to act upon civic commitments that “necessitate a reordering of basic power arrangements” fundamental to promoting the common good and producing a meaningful democracy.

Dreaming the Impossible

Reclaiming higher education as a democratic public sphere begins with the crucial project of challenging, among other things, those market fundamentalists, religious extremists, and rigid ideologues who harbor a deep disdain for critical thought and healthy skepticism, and who look with displeasure upon any form of education that teaches students to read the word and the world critically. The radical imagination in this discourse is viewed as dangerous and a dire threat to political authorities. One striking example of this view was expressed recently by former Senator Rick Santorum who argues that there is no room for intellectuals in the Republican Party. Needless to say, education is not only about issues of work and economics, but also about questions of justice, social freedom, and the capacity for democratic agency, action, and change, as well as the related issues of power, inclusion, and citizenship. These are educational and political issues, and they should be addressed as part of a broader effort to re-energize the global struggle for social justice and democracy.

If higher education is to characterize itself as a site of critical thinking, collective work, and public service, educators and students will have to redefine the knowledge, skills, research, and intellectual practices currently favored in the university. Central to such a challenge is the need to position intellectual practice “as part of an intricate web of morality, rigor and responsibility” that enables academics to speak with conviction, use the public sphere to address important social problems, and demonstrate alternative models for bridging the gap between higher education and the broader society.  Connective practices are key: it is crucial to develop intellectual practices that are collegial rather than competitive, refuse the instrumentality and privileged isolation of the academy, link critical thought to a profound impatience with the status quo, and connect human agency to the idea of social responsibility and the politics of possibility.

Connection also means being openly and deliberately critical and worldly in one’s intellectual work. Increasingly, as universities are shaped by a culture of fear in which dissent is equated with treason, the call to be objective and impartial, whatever one’s intentions, can easily echo what George Orwell called the official truth or the establishment point of view. Lacking a self-consciously democratic political focus, teachers are often reduced to the role of a technician  or functionary engaged in formalistic rituals, unconcerned with the disturbing and urgent problems that confront the larger society or the consequences of one’s pedagogical practices and research undertakings. In opposition to this model, with its claims to and conceit of political neutrality, I argue that academics should combine the mutually interdependent roles of critical educator and active citizen. This requires finding ways to connect the practice of classroom teaching with the operation of power in the larger society and to provide the conditions for students to view themselves as critical agents capable of making those who exercise authority and power answerable for their actions. Such an intellectual does not train students solely for jobs, but also educates them to question critically the institutions, policies, and values that  shape their lives, relationships to others, and myriad connections to the larger world.

I think Stuart Hall is on target here when he insists that educators also have a responsibility to provide students with “critical knowledge that has to be ahead of traditional knowledge: it has to be better than anything that traditional knowledge can produce, because only serious ideas are going to stand up.”[xix] At the same time, he insists on the need for educators to “actually engage, contest, and learn from the best that is locked up in other traditions,” especially those attached to traditional academic paradigms.[xx]  It is also important to remember that education as a utopian project is not simply about fostering critical consciousness but also about teaching students to take responsibility for one’s responsibilities, be they personal, political, or global. Students must be made aware of the ideological and structural forces that promote needless human suffering while also recognizing that it takes more than awareness to resolve them. This is the kind of intellectual practice that Zygmunt Bauman calls “taking responsibility for our responsibility,”[xxi] one that is attentive to the suffering and needs of others.

Education cannot be decoupled from what Jacques Derrida calls a democracy to come, that is, a democracy that must always “be open to the possibility of being contested, of contesting itself, of criticizing and indefinitely improving itself.”[xxii]  Within this project of possibility and impossibility, education must be understood as a deliberately informed and purposeful political and moral practice, as opposed to one that is either doctrinaire, instrumentalized, or both. Moreover, a critical pedagogy should be engaged at all levels of schooling. Similarly, it must gain part of its momentum in higher education among students who will go back to the schools, churches, synagogues, and workplaces in order to produce new ideas, concepts, and critical ways of understanding the world in which young people and adults live. This is a notion of intellectual practice and responsibility that refuses the insular, overly pragmatic, and privileged isolation of the academy.  It also affirms a broader vision of learning that links knowledge to the power of self-definition and to the capacities of students to expand the scope of democratic freedoms, particularly those that address the crisis of education, politics, and the social as part and parcel of the crisis of democracy itself.

In order for critical pedagogy, dialogue, and thought to have real effects,  they must advocate the message that all citizens, old and young, are equally entitled, if not equally empowered, to shape the society in which they live. This is a message we heard from the brave students fighting tuition hikes and the destruction of civil liberties and social provisions in Quebec and to a lesser degree in the Occupy Wall Street movement.  If educators are to function as public intellectuals, they need listen to young people all over the world who are insisting that the relationship between knowledge and power can be emancipatory, that their histories and experiences matter, and that what they say and do counts in their struggle to unlearn dominating privileges, productively reconstruct their relations with others, and transform, when necessary, the world around them. Simply put, educators need to argue for forms of pedagogy that close the gap between the university and everyday life. Their curricula need to be organized around knowledge of those communities, cultures, and traditions that give students a sense of history, identity, place, and possibility. More importantly, they need to join students in engaging in a practice of freedom that points to new and radical forms of pedagogies that have a direct link to building social movements in and out of the colleges and universities.

Although there are still a number of academics such as Noam Chomsky, Angela Davis, Stanley Aronowitz, Slavoj Zizek, Russell Jacoby, and Cornel West who function as public intellectuals, they are often shut out of the mainstream media or characterized as marginal, even subversive figures. At the same time, many academics find themselves laboring under horrendous working conditions that either don’t allow for them to write in an accessible manner for the public because they do not have time—given the often almost slave-like labor demanded of part-time academics and increasingly of full-time academics as well—or they retreat into a highly specialized, professional language that few people can understand in order to meet the institutional standards of academic excellence. In this instance, potentially significant theoretical rigor detaches itself both from any viable notion of accessibility and from the possibility of reaching a larger audience outside of their academic disciplines.

Consequently, such intellectuals often exist in hermetic academic bubbles cut off from both the larger public and the important issues that impact society. To no small degree, they have been complicit in the transformation of the university into an adjunct of corporate and military power. Such academics have become incapable of defending higher education as a vital public sphere and unwilling to challenge those spheres of induced mass cultural illiteracy and firewalls of jargon that doom critically engaged thought, complex ideas, and serious writing for the public to extinction. Without their intervention as public intellectuals, the university defaults on its role as a democratic public sphere capable of educating an informed public, a culture of questioning, and the development of a critical formative culture connected to the need, as Cornelius Castoriadis puts it, “to create citizens who are critical thinkers capable of putting existing institutions into question so that democracy again becomes society’s movement.”[xxiii]

Before his untimely death, Edward Said, himself an exemplary public intellectual, urged his colleagues in the academy to directly confront those social hardships that disfigure contemporary society and pose a serious threat to the promise of democracy.  He urged them to assume the role of public intellectuals, wakeful and mindful of their responsibilities to bear testimony to human suffering and the pedagogical possibilities at work in educating students to be autonomous, self-reflective, and socially responsible. Said rejected the notion of a market-driven pedagogy, one that created cheerful robots and legitimated organized recklessness and illegal legalities.  In opposition to such a pedagogy, Said argued for what he called a pedagogy of  wakefulness and its related concern with a politics of critical engagement. In commenting on Said’s public pedagogy of wakefulness, and how it shaped his important consideration of academics as public intellectuals, I begin with a passage that I think offers a key to the ethical and political force of much of his writing. This selection is taken from his memoir, Out of Place, which describes the last few months of his mother’s life in a New York hospital and the difficult time she had falling to sleep because of the cancer that was ravaging her body. Recalling this traumatic and pivotal life experience, Said’s meditation moves between the existential and the insurgent, between private pain and worldly commitment, between the seductions of a “solid self” and the reality of a contradictory, questioning, restless, and at times, uneasy sense of identity. He writes:

‘Help me to sleep, Edward,’ she once said to me with a piteous trembling in her voice that I can still hear as I write. But then the disease spread into her brain—and for the last six weeks she slept all the time—my own inability to sleep may be her last legacy to me, a counter to her struggle for sleep. For me sleep is something to be gotten over as quickly as possible. I can only go to bed very late, but I am literally up at dawn. Like her I don’t possess the secret of long sleep, though unlike her I have reached the point where I do not want it. For me, sleep is death, as is any diminishment in awareness. ..Sleeplessness for me is a cherished state to be desired at almost any cost; there is nothing for me as invigorating as immediately shedding the shadowy half-consciousness of a night’s loss than the early morning, reacquainting myself with or resuming what I might have lost completely a few hours earlier. I occasionally experience myself as a cluster of flowing currents. I prefer this to the idea of a solid self, the identity to which so many attach so much significance. These currents like the themes of one’s life, flow along during the waking hours, and at their best, they require no reconciling, no harmonizing. They are ‘off’ and may be out of place, but at least they are always in motion, in time, in place, in the form of all kinds of strange combinations moving about, not necessarily forward, sometimes against each other, contrapuntally yet without one central theme. A form of freedom, I like to think, even if I am far from being totally convinced that it is. That skepticism too is one of the themes I particularly want to hold on to. With so many dissonances in my life I have learned actually to prefer being not quite right and out of place.[xxiv]

It is this sense of being awake, displaced, caught in a combination of diverse circumstances that suggests a pedagogy that is cosmopolitan and imaginative–a public affirming pedagogy that demands a critical and engaged interaction with the world we live in mediated by a responsibility for challenging structures of domination and for alleviating human suffering.  As an ethical and political practice, a public pedagogy of wakefulness rejects modes of education removed from political or social concerns, divorced from history and matters of injury and injustice. Said’s notion of a pedagogy of wakefulness includes “lifting complex ideas into the public space,” recognizing human injury inside and outside of the academy, and using theory as a form of criticism to change things.[xxv] This is a pedagogy in which academics are neither afraid of controversy or the willingness to make connections that are otherwise hidden, nor are they afraid of making clear the connection between private issues and broader elements of society’s problems.

For Said, being awake becomes a central metaphor for defining the role of academics as public intellectuals, defending the university as a crucial public sphere, engaging how culture deploys power, and taking seriously the idea of human interdependence while at the same time always living on the border — one foot in and one foot out, an exile and an insider for whom home was always a form of homelessness. As a relentless border crosser, Said embraced the idea of the “traveler” as an important metaphor for engaged intellectuals. As Stephen Howe, referencing Said, points out, “It was an image which depended not on power, but on motion, on daring to go into different worlds, use different languages, and ‘understand a multiplicity of disguises, masks, and rhetorics. Travelers must suspend the claim of customary routine in order to live in new rhythms and rituals … the traveler crosses over, traverses territory, and abandons fixed positions all the time.’”[xxvi]  And as a border intellectual and traveler, Said embodied the notion of always “being quite not right,” evident by his principled critique of all forms of certainties and dogmas and his refusal to be silent in the face of human suffering at home and abroad.

Being awake meant refusing the now popular sport of academic bashing or embracing a crude call for action at the expense of rigorous intellectual and theoretical work. On the contrary, it meant combining rigor and clarity, on the one hand, and civic courage and political commitment, on the other. A pedagogy of wakefulness meant using theory as a resource, recognizing the worldly space of criticism as the democratic underpinning of publicness, defining critical literacy not merely as a competency, but as an act of interpretation linked to the possibility of intervention in the world. It pointed to a kind of border literacy in the plural in which people learned to read and write from multiple positions of agency; it also was indebted to the recognition forcibly stated by Hannah Arendt that “Without a politically guaranteed public realm, freedom lacks the worldly space to make its appearance.”[xxvii]

For public intellectuals such as Said, Chomsky, Bourdieu, Angela Davis, and others, intellectuals have a responsibility to unsettle power, trouble consensus, and challenge common sense.  The very notion of being an engaged public intellectual is neither foreign to nor a violation of what it means to be an academic scholar, but central to its very definition.  According to Said, academics have a duty to enter into the public sphere unafraid to take positions and generate controversy, functioning as moral witnesses, raising political awareness, making connections to those elements of power and politics often hidden from public view, and reminding “the audience of the moral questions that may be hidden in the clamor and din of the public debate.”[xxviii]  At the same time, Said criticized those academics who retreated into a new dogmatism of the disinterested specialist that separates them “not only from the public sphere but from other professionals who don’t use the same jargon.”[xxix] This was especially unsettling to him at a time when complex language and critical thought remain under assault in the larger society by all manner of anti-democratic forces.

g9781612050560.jpgThe view of higher education as a democratic public sphere committed to producing young people capable and willing to expand and deepen their sense of themselves, to think the “world” critically, “to imagine something other than their own well-being,” to serve the public good, and to struggle for a substantive democracy has been in a state of acute crisis for the last thirty years.[xxx]  When faculty assume, in this context, their civic responsibility to educate students to think critically, act with conviction, and connect what they learn in classrooms to important social issues in the larger society, they are often denounced for politicizing their classrooms and for violating professional codes of conduct, or, worse, labelled as unpatriotic.[xxxi] In some cases, the risk of connecting what they teach to the imperative to expand the capacities of students to be both critical and socially engaged may costs academics their jobs, especially when they make visible the workings of power, injustice, human misery, and the alterable nature of the social order. What do the liberal arts and humanities amount to if they do not teach the practice of freedom, especially at a time when training is substituted for education?  Gayatri Spivak provides a context for this question with her comment: “”Can one insist on the importance of training in the humanities in [a] time of legitimized violence?”[xxxii]

In a society that remains troublingly resistant to or incapable of questioning itself, one that celebrates the consumer over the citizen,  and  all too willingly endorses the narrow values and interests of corporate power, the importance of the  university as a place of critical learning, dialogue, and social justice advocacy becomes all the more imperative.  Moreover, the distinctive role that faculty play in this ongoing pedagogical project of democratization and learning, along with support for the institutional conditions and relations of power that make it possible, must be defended as part of a broader discourse of excellence, equity, and democracy.

Despite the growing public recognition that market fundamentalism has fostered a destructive alignment among the state, corporate capital, and transnational corporations, there is little understanding that such an alignment has been constructed and solidified through a neoliberal disciplinary apparatus and corporate pedagogy produced in part in the halls of higher education and through the educational force of the larger media culture.  The economic Darwinism of the last thirty years has done more than throw the financial and credit system into crisis; it has also waged an attack on all those social institutions that support critical modes of agency, reason, and meaningful dissent.  And yet, the financial meltdown most of the world is experiencing is rarely seen as part of an educational crisis in which the institutions of public and higher education have been conscripted into a war on democratic values. Such institutions have played a formidable, if not shameless role, in reproducing market-driven beliefs, social relations, identities, and modes of understanding that legitimate the institutional arrangements of cut-throat capitalism.  William Black calls such institutions purveyors of a “criminogenic environment”—one that promotes and legitimates market-driven practices that include fraud, deregulation, and other perverse practices.[xxxiii]  Black claims that the most extreme pedagogical expression of such an environment can be found in business schools, which he calls “fraud factories” for the elite.[xxxiv]

There seems to be an enormous disconnect between the economic conditions that led to the current financial meltdown and the current call to action by a generation of young people and adults who have been educated for the last several decades in the knowledge, values, and identities of a market-driven society.  Clearly, this generation will not solve this crisis if they do not connect it to the assault on an educational system that has been reduced to a lowly adjunct of corporate interests and the bidding of the warfare state.

Higher education represents one the most important sites over which the battle for democracy is being waged. It is the site where the promise of a better future emerges out of those visions and pedagogical practices that combine hope, agency, politics, and moral responsibility as part of a broader emancipatory discourse. Academics have a distinct and unique obligation, if not political and ethical responsibility, to make learning relevant to the imperatives of a discipline, scholarly method, or research specialization. But more  importantly, academics as engaged scholars can further the activation of knowledge, passion, values, and hope in the service of forms of agency that are crucial to sustaining a democracy in which higher education plays an important civic, critical, and pedagogical role.  If democracy is a way of life that demands a formative culture, educators can play a pivotal role in creating forms of pedagogy and research that enable young people to think critically, exercise judgment, engage in spirited debate, and create those public spaces that constitute “the very essence of political life.”[xxxv]

Finally, I want to suggest that while it has become more difficult to imagine a democratic future, we have entered a period in which young people all over the world are protesting against neoliberalism and its pedagogy and politics of disposability. Refusing to remain voiceless and powerless in determining their future, these young people are organizing collectively  in order  to create the conditions for societies that refuse to use politics as an act of war and markets as the measure of democracy. They are taking seriously the words of the great abolitionist Frederick Douglas who bravely argued that freedom is an empty abstraction if people fail to act, and “if there is no struggle, there is no progress.”

Their struggles are not simply aimed at the 1% but also the 99 percent as part of a broader effort to get them to connect the dots, educate themselves, and develop and join social movements that can rewrite the language of democracy and put into place the institutions and formative cultures that make it possible. Stanley Aronowitz is right in arguing that “The system survives on the eclipse of the radical imagination, the absence of a viable political opposition with roots in the general population, and the conformity of its intellectuals who, to a large extent, are subjugated by their secure berths in the academy. [At the same time,] it would be premature to predict that decades of retreat, defeat and silence can be reversed overnight without a commitment to what may be termed  ‘a long march’ though the institutions, the workplaces and the streets of the capitalist metropoles.”[xxxvi]

The current protests in the United States, Canada, Greece, and Spain make clear that this is not–indeed, cannot be–only a short-term project for reform, but a political movement that needs to intensify, accompanied by the reclaiming of public spaces, the progressive use of digital technologies, the development of public spheres,  the production of new modes of education, and the safeguarding of places where democratic expression, new identities, and collective hope can be nurtured and mobilized.  A formative culture must be put in place pedagogically and institutionally in a variety of spheres extending from churches and public and higher education to all those cultural apparatuses engaged in the production and circulation of knowledge, desire, identities, and values. Clearly, such efforts need to address the language of democratic revolution rather than the seductive incremental adjustments of liberal reform. This suggest not only calling for a living wage, jobs programs, especially for the young, the democratization of power, economic equality, and a massive shift in funds away from the machinery of war and big banks  but also a social movement that not only engages in critique but makes hope a real possibility by organizing to seize power.  There is no room for failure here because failure would cast us back into the clutches of authoritarianism–that while different from previous historical periods–shares nonetheless the imperative to proliferate violent social formations and a death-dealing blow to the promise of a democracy to come.

Given the urgency of the problems faced by those marginalized by class, race, age, and sexual orientation, I think it is all the more crucial to take seriously the challenge of Derrida’s provocation that “We must do and think the impossible. If only the possible happened, nothing more would happen. If I only I did what I can do, I wouldn’t do anything.”[xxxvii]  We may live in dark times as Hannah Arendt reminds us, but history is open and the space of the possible is larger than the one on display.

Henry A. Giroux holds the Global TV Network chair in English and Cultural Studies at McMaster University in Canada. His most recent books include: “Take Back Higher Education” (co-authored with Susan Searls Giroux, 2006), “The University in Chains: Confronting the Military-Industrial-Academic Complex” (2007) and “Against the Terror of Neoliberalism: Politics Beyond the Age of Greed” (2008). His latest book is Twilight of the Social: Resurgent Publics in the Age of Disposability,” (Paradigm.)


Notes.

[i] David Corn, “Secret Video: Romney Tells Millionaire Donors What He Really Thinks of Obama Voters,” Mother Jones (September 17, 2012). Online: http://www.motherjones.com/politics/2012/09/secret-video-romney-private-fundraiser

[ii] Naomi Wolf, “How the Mitt Romney Video Killed the American Dream,” The Guardian (September 21, 2012). Online: http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2012/sep/21/mitt-romney-video-killed-american-dream?newsfeed=true

[iii] Corn, “Secret Video,” http://www.motherjones.com/politics/2012/09/secret-video-romney-private-fundraiser

[iv] George Lakoff and Glenn W. G Smith, “Romney, Ryan and the Devil’s Budget,” Reader Supported News, (August 22, 2012). Online:

http://blogs.berkeley.edu/2012/08/23/romney-ryan-and-the-devils-budget-will-america-keep-its-soul/

[v] João Biehl, Vita: Life in a Zone of Social Abandonment (Los Angeles: University of California Press, 2005). These zones are also brilliantly analyzed in Chris Hedges and Joe Sacco, Days of Destruction, Days of Revolt (New York: Knopf, 2012).

[vi] Thomas Frank, “It’s a rich man’s world: How billionaire backers pick America’s candidates,”

Harper’s Magazine (April 2012). Online: http://harpers.org/archive/2012/04/0083856

[vii]. C. Wright Mills, The Politics of Truth: Selected Writings of C. Wright Mills, (New York: Oxford University Press, 2008), p. 200.

[viii]. Stanley Aronowitz, “Against Schooling: Education and Social Class,” Against Schooling, (Boulder, CO: Paradigm Publishers, 2008), p. xii.

[ix]. Ibid, Kate Zernike, “Making College ‘Relevant’,” P. ED 16.

[x] Scott Jaschik, “Making Adjuncts Temps—Literally,” Inside Higher Ed (August 9, 2010). Online: http://www.insidehighered.com/news/2010/08/09/adjuncts

[xi] Martha C. Nussbaum, Not For Profit: Why Democracy Needs The Humanities, (New Jersey: Princeton University Press, 2010), p. 142.

[xii] Greig de Peuter, “Universities, Intellectuals, and Multitudes: An Interview with Stuart Hall”, in Mark Cote, Richard J. F. Day, and Greig de Peuter, eds.,Utopian Pedagogy: Radical Experiments against Neoliberal Globalization, (Toronto: University of Toronto Press, 2007), p. 111.

[xiii]. Ibid., Aronowitz, Against Schooling, p. xviii.

[xiv] Les Leopold, “Crazy Country: 6 Reasons America Spends More on Prisons Than On Higher Education,” Alternet, (August 27, 2012). Online

http://www.alternet.org/education/crazy-country-6-reasons-america-spends-more-prisons-higher-education?paging=off. On this issue, see also the classic work by Angela Davis: Are Prisons Obsolete? (New York: Open  Media, 2003) and Michelle Alexander, New Jim Crow: Mass Incarceration in the Age of Colorblindness (New York: New Press, 2012).

[xv] Erica Goode, “Many in U.S. Are Arrested by Age 23, Study Finds,” New York Times (December 19, 2011), p. A15.

[xvi]. Cornelius Castoriadis, “Democracy as Procedure and democracy as Regime,” Constellations 4:1 (1997), p. 5.

[xvii] George Scialabba, What Are Intellectuals Good For? (Boston: Pressed Wafer, 2009) p. 4.

17. Ibid. .

[xix]. Greig de Peuter, Universities, Intellectuals and Multitudes: An Interview with Stuart Hall,” in Mark Cote, Richard J. F. Day, and Greig de Peuter, eds.  Utopian Pedagogy: Radical Experiments Against Neoliberal Globalization (Toronto: University of Toronto Press, 2007), p. 113-114.

[xx]. De Peuter, Ibid. P. 117.

[xxi]. Cited in Madeline Bunting, “Passion and Pessimism,” The Guardian (April 5, 2003). Available online: http:/books.guardian.co.uk/print/0,3858,4640858,00.html.

[xxii]. Giovanna Borriadori, ed., “Autoimmunity: Real and Symbolic Suicides–A Dialogue with Jacques Derrida,” in Philosophy in a Time of Terror: Dialogues with Jurgen Habermas and Jacques Derrida (Chicago: University of Chicago Press, 2004). P. 121.

[xxiii]. Cornelius Castoriadis, “Democracy as Procedure and Democracy as Regime,” Constellations 4:1 (1997), p.  10.

[xxiv]. Edward Said, Out of Place: A Memoir  (New York: Vintage, 2000), pp. 294-299

[xxv]. Said, Out of Place, p. 7.

[xxvi]. Stephen Howe, “Edward Said: The Traveller and the Exile,” Open Democracy (October 2, 2003). Online at: www.opendemocracy.net/articles/ViewPopUpArticle.jsp?id=10&articleId=1561.

[xxvii]. Hannah Arendt, Between Past and Future: Eight Exercises in Political Thought (New York: Penguin, 1977), p. 149.

[xxviii]. Edward Said, “On Defiance and Taking Positions,” Reflections On Exile and Other Essays (Cambridge: Harvard University Press, 2001), p. 504.

[xxix]. Edward Said, Humanism and Democratic Criticism (New York: Columbia University Press, 2004), p. 70.

[xxx]. See, especially, Christopher Newfield, Unmaking the Public University: The Forty-Year Assault on the Middle Class (Cambridge: Harvard University Press, 2008).

[xxxi]. See Henry A. Giroux, “Academic Unfreedom in America: Rethinking the University as a Democratic Public Sphere,” in Edward J. Carvalho, ed.,  “Academic Freedom and Intellectual Activism in the Post-9/11 University,” special issue of Work and Days 51–54 (2008–2009), pp. 45–72. This may be the best collection yet published on intellectual activism and academic freedom.

[xxxii] Gayatri Chakravorty Spivak, “Changing Reflexes: Interview with Gayatri Chakravorty Spivak,” Works and Days, 55/56: Vol. 28, 2010, p. 8.

[xxxiii]. Bill Moyers, “Interview with William K. Black,” Bill Moyers Journal (April 23, 2010).

Online at:  http://www.pbs.org/moyers/journal/04232010/transcript4.html

[xxxiv]. Moyers, “Interview with William K. Black.”

[xxxv]. See, especially, H. Arendt, The Origins of Totalitarianism, 3rd edition, revised (New York: Harcourt Brace Jovanovich, 1968); and J. Dewey, Liberalism and Social Action [orig. 1935] (New York: Prometheus Press, 1999).

35.  Ibid, Aronowitz, “The Winter of Our Discontent,” p. 68.

[xxxvii]  Jacques Derrida, “No One is Innocent: A Discussion with Jacques About Philosophy in the Face of Terror,” The Information Technology, War and Peace Project, p. 2 available online: http://www.watsoninstitute.org/infopeace/911/derrida_innocence.html

dimanche, 24 juin 2012

Les « élites » et « l'écroulement d'un monde », selon Frédéric Lordon

 

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Les « élites » et « l'écroulement d'un monde », selon Frédéric Lordon

Ex: http://verslarevolution.hautetfort.com/

« (...) la catastrophe étant sans doute le mode historique le plus efficace de destruction des systèmes de domination, l’accumulation des erreurs des "élites" actuelles, incapables de voir que leurs "rationalités" de court terme soutiennent une gigantesque irrationalité de long terme, est cela même qui nous permet d’espérer voir ce système s’écrouler dans son ensemble.

Il est vrai que l’hypothèse de l’hybris, comprise comme principe d’illimitation, n’est pas dénuée de valeur explicative. (...) Car c’est bien l’abattement des dispositifs institutionnels de contention des puissances qui pousse irrésistiblement les puissances à propulser leur élan et reprendre leur marche pour pousser l’avantage aussi loin que possible. Et il y a bien quelque chose comme une ivresse de l’avancée pour faire perdre toute mesure et réinstaurer le primat du "malpropre" et du "borné" dans la "rationalité" des dominants.

Ainsi, un capitaliste ayant une vue sur le long terme n’aurait pas eu de mal à identifier l’État-providence comme le coût finalement relativement modéré de la stabilisation sociale et de la consolidation de l’adhésion au capitalisme, soit un élément institutionnel utile à la préservation de la domination capitaliste – à ne surtout pas bazarder ! Évidemment, sitôt qu’ils ont senti faiblir le rapport de force historique, qui au lendemain de la seconde guerre mondiale leur avait imposé la Sécurité sociale – ce qui pouvait pourtant leur arriver de mieux et contribuer à leur garantir trente années de croissance ininterrompue –, les capitalistes se sont empressés de reprendre tout ce qu’ils avaient dû concéder. (...)

Il faudrait pourtant s’interroger sur les mécanismes qui, dans l’esprit des dominants, convertissent des énoncés d’abord grossièrement taillés d’après leurs intérêts particuliers en objets d’adhésion sincère, endossés sur le mode la parfaite généralité. Et peut-être faudrait-il à cette fin relire la proposition 12 de la partie III de l’Éthique de Spinoza selon laquelle "l’esprit s’efforce d’imaginer ce qui augmente la puissance d’agir de son corps", qu’on retraduirait plus explicitement en "nous aimons à penser ce qui nous réjouit (ce qui nous convient, ce qui est adéquat à notre position dans le monde, etc.)".

Nul doute qu’il y a une joie intellectuelle particulière du capitaliste à penser d’après la théorie néoclassique que la réduction du chômage passe par la flexibilisation du marché du travail. Comme il y en a une du financier à croire à la même théorie néoclassique, selon laquelle le libre développement de l’innovation financière est favorable à la croissance. Le durcissement en énoncés à validité tout à fait générale d’idées d’abord manifestement formées au voisinage immédiat des intérêts particuliers les plus grossiers trouve sans doute dans cette tendance de l’esprit son plus puissant renfort.

C’est pourquoi la distinction des cyniques et des imbéciles est de plus en plus difficile à faire, les premiers mutant presque fatalement pour prendre la forme des seconds. À bien y regarder, on ne trouve guère d’individus aussi "nets" – il faudrait dire aussi intègres – que le Patrick Le Lay de TF1 qui, peu décidé à s’embarrasser des doctrines ineptes et faussement démocratiques de la "télévision populaire", déclarait sans ambages n’avoir d’autre objectif que de vendre aux annonceurs du temps de cerveau disponible ; rude franchise dont je me demande s’il ne faut pas lui en savoir gré : au moins, on sait qui on a en face de soi, et c’est une forme de clarté loin d’être sans mérite.

Pour le reste, il y a des résistances doctrinales faciles à comprendre : la finance, par exemple, ne désarmera jamais. Elle dira et fera tout ce qu’elle peut pour faire dérailler les moindres tentatives de re-réglementation. Elle y arrive fort bien d’ailleurs ! Il n’est que de voir l’effrayante indigence des velléités régulatrices pour s’en convaincre, comme l’atteste le fait que, depuis 2009, si peu a été fait que la crise des dettes souveraines menace à nouveau de s’achever en un effondrement total de la finance internationale. Pour le coup, rien n’est plus simple à comprendre : un système de domination ne rendra jamais les armes de lui-même et cherchera tous les moyens de sa perpétuation.

On conçoit aisément que les hommes de la finance n’aient pas d’autre objectif que de relancer pour un tour supplémentaire le système qui leur permet d’empocher les faramineux profits de la bulle et d’abandonner les coûts de la crise au corps social tout entier, forcé, par puissance publique interposée, de venir au secours des institutions financières, sauf à périr lui-même de l’écroulement bancaire. Il faut simplement se mettre à leur place ! Qui, en leur position, consentirait à renoncer ?

Il faudrait même dire davantage : c’est une forme de vie que ces hommes défendent, une forme de vie où entrent aussi bien la perspective de gains monétaires hors norme que l’ivresse d’opérer à l’échelle de la planète, de mouvementer des masses colossales de capitaux, pour ne rien dire des à-côtés les plus caricaturaux, mais bien réels, du mode de vie de l’ "homme des marchés" : filles, bagnoles, dope. Tous ces gens n’abandonneront pas comme ça ce monde merveilleux qui est le leur, il faudra activement le leur faire lâcher.

C’est en fait à propos de l’État que le mystère s’épaissit vraiment. Préposé à la socialisation des pertes bancaires et au serpillage des coûts de la récession, littéralement pris en otage par la finance dont il est condamné à rattraper les risques systémiques, n’est-il pas celui qui aurait le plus immédiatement intérêt à fermer pour de bon le foutoir des marchés ?

Il semble que poser la question ainsi soit y répondre, mais logiquement seulement, c’est-à-dire en méconnaissant sociologiquement la forme d’État colonisé qui est le propre du bloc hégémonique néolibéral : les représentants de la finance y sont comme chez eux. L’interpénétration, jusqu’à la confusion complète, des élites politiques, administratives, financières, parfois médiatiques, a atteint un degré tel que la circulation de tous ces gens d’une sphère à l’autre, d’une position à l’autre, homogénéise complètement, à quelques différences secondes près, la vision du monde partagée par ce bloc indistinct.

La fusion oligarchique – et il faudrait presque comprendre le mot en son sens russe – a conduit à la dé-différenciation des compartiments du champ du pouvoir et à la disparition des effets de régulation qui venaient de la rencontre, parfois de la confrontation, de grammaires hétérogènes ou antagonistes. Ainsi par exemple a-t-on vu, aidé sans doute par un mécanisme d’attrition démographique, la disparition de l’habitus de l’homme d’État tel qu’il a pris sa forme accomplie au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’expression "homme d’État" n’étant pas à comprendre au sens usuel du "grand homme" mais de ces individus porteurs des logiques propres de la puissance publique, de sa grammaire d’action et de ses intérêts spécifiques.

Hauts fonctionnaires ou grands commis, jadis hommes d’État parce que dévoués aux logiques de l’État, et déterminés à les faire valoir contre les logiques hétérogènes – celles par exemple du capital ou de la finance –, ils sont une espèce en voie de disparition, et ceux qui aujourd’hui "entrent dans la carrière" n’ont pas d’autre horizon intellectuel que la réplication servile (et absurde) des méthodes du privé (d’où par exemple les monstruosités du type "RGPP", la Révision générale des politiques publiques), ni d’autre horizon personnel que le pantouflage qui leur permettra de s’intégrer avec délice à la caste des élites indifférenciées de la mondialisation.

Les dirigeants nommés à la tête de ce qui reste d’entreprises publiques n’ont ainsi rien de plus pressé que de faire sauter le statut de ces entreprises, conduire la privatisation, pour aller enfin rejoindre leurs petits camarades et s’ébattre à leur tour dans le grand bain des marchés mondiaux, de la finance, des fusions-acquisitions – et "accessoirement" des bonus et des stock-options.

Voilà le drame de l’époque : c’est qu’au niveau de ces gens qu’on continue à appeler – on se demande pourquoi tant leur bilan historique est accablant – des "élites", il n’y a plus nulle part aucune force de rappel intellectuelle susceptible de monter un contre-discours. Et le désastre est complet quand les médias eux-mêmes ont été, et depuis si longtemps, emportés par le glissement de terrain néolibéral ; le plus extravagant tenant à la reconduction des éditorialistes, chroniqueurs, experts à demi vendus et toute cette clique qui se présente comme les précepteurs éclairés d’un peuple nativement obtus et "éclairable" par vocation.

On aurait pu imaginer que le cataclysme de l’automne 2008 et l’effondrement à grand spectacle de la finance conduirait à une non moins grande lessive de tous ces locuteurs émergeant en guenilles des ruines fumantes, mais rien du tout ! Pas un n’a bougé !

Alain Duhamel continue de pontifier dans Libération ; le même journal, luttant désespérément pour faire oublier ses décennies libérales, n’en continue pas moins de confier l’une de ses plus décisives rubriques, la rubrique européenne, à Jean Quatremer qui a méthodiquement conchié tous ceux qui dénonçaient les tares, maintenant visibles de tous, de la construction néolibérale de l’Europe. Sur France Inter, Bernard Guetta franchit matinée après matinée tous les records de l’incohérence – il faudrait le reconduire à ses dires d’il y a cinq ans à peine, je ne parle même pas de ceux de 2005, fameuse année du traité constitutionnel européen… L’émission hebdomadaire d’économie de France Culture oscille entre l’hilarant et l’affligeant en persistant à tendre le micro à des gens qui ont été les plus fervents soutiens doctrinaux du monde en train de s’écrouler, parmi lesquels Nicolas Baverez par exemple, sans doute le plus drôle de tous, qui s’est empressé de sermonner les gouvernements européens et de les enjoindre à la plus extrême rigueur avant de s’apercevoir que c’était une ânerie de plus. Et tous ces gens plastronnent dans la plus parfaite impunité, sans jamais que leurs employeurs ne leur retirent ni une chronique ni un micro, ni même ne leur demandent de s’expliquer ou de rendre compte de leurs discours passés.

Voilà le monde dans lequel nous vivons, monde de l’auto-blanchiment collectif des faillis. (...)

Dans ce paysage où tout est verrouillé, où la capture "élitaire" a annihilé toute force de rappel, je finis par me dire qu’il n’y a plus que deux solutions de remise en mouvement : une détérioration continue de la situation sociale, qui conduirait au franchissement des "seuils" pour une partie majoritaire du corps social, c’est-à-dire à une fusion des colères sectorielles et à un mouvement collectif incontrôlable, potentiellement insurrectionnel ; ou bien un effondrement "critique" du système sous le fardeau de ses propres contradictions – évidemment à partir de la question des dettes publiques – et d’un enchaînement menant d’une série de défauts souverains à un collapsus bancaire – mais cette fois autre chose que la bluette "Lehman"…

Disons clairement que la deuxième hypothèse est infiniment plus probable que la première… quoiqu’elle aurait peut-être, en retour, la propriété de la déclencher dans la foulée. Dans tous les cas, il faudra sacrément attacher sa ceinture. (...)

À constater le degré de verrouillage d’institutions politiques devenues absolument autistes et interdisant maintenant tout processus de transformation sociale à froid, je me dis aussi parfois que la question ultra taboue de la violence en politique va peut-être bien devoir de nouveau être pensée, fût-ce pour rappeler aux gouvernants cette évidence connue de tous les stratèges militaires qu’un ennemi n’est jamais si prêt à tout que lorsqu’il a été réduit dans une impasse et privé de toute issue.

Or il apparaît d’une part que les gouvernements, entièrement asservis à la notation financière et dévoués à la satisfaction des investisseurs, sont en train de devenir tendanciellement les ennemis de leurs peuples, et d’autre part que si, à force d’avoir méthodiquement fermé toutes les solutions de délibération démocratique, il ne reste plus que la solution insurrectionnelle, il ne faudra pas s’étonner que la population, un jour portée au-delà de ses points d’exaspération, décide de l’emprunter – précisément parce que ce sera la seule. »

Frédéric Lordon (décembre 2011)

mercredi, 06 juin 2012

Le revenu de citoyenneté, une fausse bonne idée

Le revenu de citoyenneté, une fausse bonne idée

par Pierre LE VIGAN

944825_5877469.jpgLe revenu de citoyenneté a été défendu par des hommes venus de la droite comme de la gauche. Il relève malheureusement d’idées floues et de beaucoup de confusion.

Attribuer un revenu de citoyenneté, c’est monétariser ce qui ne doit pas l’être : la citoyenneté. Pour les gens aisés, ce revenu sera un supplément inutile, pour les gens pauvres, il sera insuffisant. Il est prévu que ce revenu remplace les multiples aides existantes. Mais celles-ci ont chacune une fonction, et celle–ci est différente : l’allocation logement ne sert pas aux mêmes personnes que l’allocation perte d’autonomie, ou la pension d’invalidité pour les invalides, ou l’allocation adulte handicapé. Ces aides ont chacune une fonction et ne peuvent être ramenées à une seule : le revenu de citoyenneté. Comment une personne invalide ayant besoin d’être aidée dans ses gestes quotidiens peut-elle se passer d’une prise en compte spécifique de sa situation ?

Avec le revenu de citoyenneté, il s’agirait d’attribuer un revenu sans qu’il y ait un engagement réciproque. C’est renforcer la logique d’une société d’ayants droits, ce qui est le contraire d’une société de citoyens.

Le revenu de citoyenneté est aussi une façon de tourner la page d’une société du travail, alors que le travail reste le seul producteur de richesse (relisons Marx). Prôner le revenu de citoyenneté, c’est une façon d’abandonner toute ambition, autrement plus nécessaire, de changer le travail. Dans le travail salarié, il faut donner plus de contenu à l’épanouissement, et limiter au mieux l’aliénation, et il faut développer des alternatives au travail salarié lui-même. Il faut aussi créer une sécurité sociale professionnelle, un droit à la formation et à la reconversion. Des enjeux qui correspondent à des besoins réels des hommes au travail et non pas à une négation de la place du travail.

Plutôt que le revenu de citoyenneté, il faut développer des gratuités c’est-à-dire des prises en charge collectives de certains coûts. Ce peut être la gratuité des transports collectifs, des musées, etc.

Le revenu de citoyenneté accroît la monétarisation de la vie, les gratuités (rien n’est jamais gratuit, tout a un coût, mais par la gratuité la collectivité peut indiquer ses priorités), éventuellement avec des contreparties en termes de service civique permettent au contraire un dépassement de la marchandisation.

Quel en est son coût ?

Si 1000 euros par mois sont distribués à 26 millions de Français (soit la population active), le coût est de 26 000 millions donc 26 milliards par mois (ce qui équivaut au plan de relance Sarkozy – Devedjian de 2008-2009, mais qui, lui, est annuel) donc 312 milliards par an.

Si 500 euros sont distribués aux 60 millions de Français, le coût est de 30 milliards par mois, soit 360 milliards par an.

Pour information, le budget de l’État français en 2010 était d’environ 400 milliards dont 150 milliards de déficit.

Conclusion : le revenu de citoyenneté ne peut se faire qu’avec une suppression de toutes les autres politiques sociales, souvent utiles, hormis le fait qu’elles servent de pompes aspirante pour l’immigration, en les remplaçant par un revenu de citoyenneté… inutile et malsain.

Pierre Le Vigan


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samedi, 26 mai 2012

Pour en finir avec le multiculturalisme

Pour en finir avec le multiculturalisme

par Laurent Ozon

00:05 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, multiculturalisme, multiculture, sociologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

vendredi, 25 mai 2012

“Le Complexe de Narcisse”, recension de l’ouvrage de C. Lasch

“Le Complexe de Narcisse”, recension de l’ouvrage de C. Lasch

par Guillaume FAYE

Ex: http://vouloir.hautetfort.com/

clcn10.jpg« Partout, la société bourgeoise semble avoir épuisé sa réserve d’idées créatrices (…) La crise politique du capitalisme reflète une crise générale de la culture occidentale. Le libéralisme (…) a perdu la capacité d’expliquer les événements dans un monde où règnent l’État-Providence et les sociétés multinationales et rien ne l’a remplacé. En faillite sur le plan politique, le libéralisme l’est tout autant sur le plan intellectuel ».

Ce diagnostic porté par Christopher Lasch, l’un des observateurs les plus lucides de l’actuelle société américaine, donne le ton du réquisitoire qu’il a fait paraitre contre la mentalité et l’idéologie décadente des sociétés bourgeoises, sous le titre de The Culture of Narcissism (en traduction française, Le complexe de Narcisse). Dans cet essai, Lasch s’efforce de donner une description aussi précise que possible d’une « nouvelle sensibilité américaine » que l’on retrouve aujourd’hui, plus ou moins atténuée ou déformée, dans la plupart des pays industriels. Conclusion générale de son analyse l’individualisme traditionnel propre à l’idéologie libérale ne se traduit plus aujourd’hui, contrairement à ce qui se passait encore dans les années 60, par une politisation de l’opinion ou une radicalisation de la recherche du bien-être économique, mais par un repli radical sur le “moi” individuel. Ce repli correspond à la poursuite effrénée du “bonheur intérieur”. L’homme contemporain part à la recherche de lui-même, sans illusions politiques, mû par une angoisse qu’il tente d’apaiser par un recours systématique à toutes les formes de sécurité. C’est le triomphe de Narcisse.

Passant en revue l’évolution de la littérature, du système d’éducation, des médias de masse et du discours politique, C. Lasch dresse ainsi la “géographie” d’un narcissisme contemporain dans lequel il n’est pas éloigné de voir, à juste titre, le stade ultime du déclin d’une civilisation.

L’« invasion de la société par le moi » produit, dit-il, une course sans limites vers la « sécurité physique et psychique ». Équivalant à une existence menée dans un perpétuel présent, elle interdit « tout sens de la continuité historique ». Les modes “psy”, les obsessions sexuelles étalées dans le discours public, la frénésie des “expérimentations personnelles”, le désintérêt pour le travail, “l’égotisme” d’une famille nucléaire essentiellement consommatrice, la “théâtralisation de l’existence”, le mimétisme vis-à-vis des “vedettes” de la scène ou de la chanson, sont autant de traits caractéristiques du narcissisme.

« Cette concentration sur soi définit (…) le mouvement de la nouvelle conscience », note Lasch, qui ajoute : « La recherche de son propre accomplissement a remplacé la conquête de la nature et de nouvelles frontières ». Sur le plan politique, un tel comportement s’observe à gauche aussi bien qu’à droite. La gauche était d’ailleurs, depuis longtemps, acquise à une idéologie de refus de la vie-comme-combat. La droite, elle, a peu à peu été gagnée aux valeurs de la pensée rationnelle, calculatrice et bourgeoise. La fuite devant la lutte aboutit ainsi à un psychisme « misérabiliste », que Lasch décrit en ces termes : l’homme « est hanté, non par la culpabilité, mais par l’anxiété (…) Il se sent en compétition avec tout le monde pour l’obtention des faveurs que dispense l’État paternaliste. Sur le plan de la sexualité (…) son émancipation des anciens tabous ne lui apporte pas la paix (…) Il répudie les idéologies fondées sur la rivalité, en honneur à un stade antérieur du développement capitaliste. Il exige une gratification immédiate et vit dans un état de désir inquiet et perpétuellement inassouvi ».

L’origine de ce « complexe de Narcisse », état psychologique ultime de la mentalité individualiste, est à rechercher dans la décomposition d’une société qui, fondée sur l’égalité et l’autonomie individuelle, s’est peu à peu transformée en jungle sociale. « La culture de l’individualisme compétitif est une manière de vivre qui est en train de mourir — note à ce propos C. Lasch. Celle-ci, dans sa décadence, a poussé la logique de l’individualisme jusqu’à l’extrême de la guerre de tous contre tous, et la poursuite du bonheur jusqu’à l’impasse d’une obsession narcissique de l’individu pour lui-même. La stratégie de la survie narcissique (…) donne naissance à une « révolution culturelle qui reproduit les pires traits de cette même civilisation croulante qu’elle prétend critiquer (…) La personnalité autoritaire n’est plus le prototype de l’homme économique. Ce dernier a cédé la place à l’homme psychologique de notre temps — dernier avatar de l’individualisme bourgeois ».

Soumis aux “experts” et dominé par les psychiatres, l’homme contemporain s’est donc anxieusement lancé à la poursuite de son “moi”. Démobilisé dans ses instances profondes, imperméable à toute visée politique de longue durée, inapte à la compréhension d’un destin collectif, indifférent à l’histoire, il planifie, comme un comptable, l’obtention de son bonheur intime. Ce dernier, jusqu’à la fin des années 60, se confondait avec la réussite matérielle et le bien-être du confort domestique. C’était l’époque de la deuxième “révolution industrielle”, animée par une idéologie de la compétition individuelle et caractérisée par l’accession massive des classes moyennes au standing de la bourgeoisie aisée. Mais aujourd’hui, l’idée de bonheur a pris une autre résonance. Elle a dépassé sa connotation purement matérielle pour se doter d’une portée “psychologique”. Il s’agit maintenant de sécuriser son “moi”, de “partir à la recherche de soi-même”, sur la base d’une introspection presque pathologique. À la quête du bonheur économique, dont les limites apparaissent désormais clairement, s’ajoute la recherche du “bonheur intérieur”. L’idéal mercantile du bien-être petit-bourgeois conserve sa vigueur, mais il ne suffit plus à étancher la soif de l’homme contemporain. Celui-ci veut accéder à la “félicité psychique”. Il se tourne vers une série d’utopies nouvelles. L’État-Providence est là pour lui promettre la “bonne vie” sans le stress, le maximum de droits avec le minimum de devoirs, le confort à peu de frais, la prospérité matérielle dans la quiétude du “moi”.

Toutefois, les gourous du mieux-vivre, s’ils ont rejeté les valeurs de compétition et de risque, n’ont pas abandonné pour autant les aspirations matérialistes de la bourgeoisie traditionnelle. Narcisse, obsédé par son désir d’apaiser ses “tensions” psychologiques, de réaliser ses “pulsions” libidinales, n’entame pas une critique sur le fond de la société de consommation. Il veut l’abondance, mais sans avoir à se battre pour l’obtenir ; la richesse, mais sans effort, et, en plus, la plénitude sexuelle et l’apaisement de ses conflits quotidiens.

L’impossibilité évidente de satisfaire en même temps ces exigences contradictoires donne à la mentalité narcissique une conscience à la fois infantile et douloureuse. Plus l’individu se replie sur lui-même, plus il se découvre des “problèmes” nouveaux et insolubles. La recherche du bonheur débouche sur une angoisse qui n’est plus regardée comme un défi, mais comme une menace. La nouvelle bourgeoisie narcissique est une classe fragile, inquiète, hypersensible, superficielle, instable.

Une autre cause du narcissisme contemporain, qui « recroqueville le moi vers un état primaire et passif dans lequel le monde n’est ni crée ni formé », réside dans la permissivité sociale et la bureaucratisation. La permissivité détruit les normes de conduite collectives. Loin de libérer, elle isole. Elle fait exploser le sens. Privé du cadre éducatif et des institutions hérités, l’individu ne sait plus comment se comporter. Il s’en remet alors ans injonctions éphémères que lui distillent les médias, la publicité, les “manuels” d’éducation sexuelle, etc. Les conseils (intéressés) des magazines ou de la télévision se substituent à l’expérience intériorisée de la tradition familiale ou communautaire. Les règles de vie ne sont plus trouvées que par fragments ou par accident, dans le champ anonyme et frustrant du “discours public”. Le “surmoi” social s’est effondré. Les normes de comportement, auxquelles nulle société n’échappent, ne proviennent plus que des structures dominantes, économiques et techniques, de la société, Privé d’autodiscipline, puisqu’il n’intériorise pas les règles sociales, l’individu se heurte brutalement aux interdits socio-économiques qu’il découvre en arrivant à l’âge adulte : règles bureaucratiques, pratiques bancaires, impératifs commerciaux, etc. Élevé dans le mythe d’une “liberté” formelle, il supporte de moins en moins bien ces contraintes et réagit en se renfermant d’autant plus sur lui-même.

La bureaucratisation des activités sociales accentue la tendance. Déchargeant les hommes des soucis de la lutte quotidienne, elle donne aux hommes l’illusion de l’irresponsabilité. L’individu se découvre étranger à ceux qui l’entourent, à ceux qui partagent son existence quotidienne et à qui, désormais, plus rien ne le lie. La mentalité d’assistance, le recours perpétuel à des “droits” que rien ne vient plus fonder, la sécurisation de la vie privée par la bureaucratisation de l’État-Providence décharge l’individu de son rôle actif. Que lui reste-t-il à faire alors, puisque rien ne l’attache plus aux autres, sinon à se passionner pour lui-même ?

Le déclin des idéaux révolutionnaires et du marxisme orthodoxe a fait perdre l’espoir d’une transformation radicale de la société. L‘idéologie égalitaire a reporté ses visées dans le domaine des contre-pouvoirs insignifiants et des micro-aménagements quotidiens. L’égalitarisme ne laisse plus entrevoir de “paradis social”, mais seulement des “paradis individuels”. L’utopie du bonheur s’affaiblit sur le plan collectif et se rétracte au niveau intime et personnel. Nous en sommes à l’ère, prévue (et voulue) par l’École de Francfort, des “révolutions minuscules”.

La “fin de l’histoire”, elle aussi, est recherchée sur le plan individuel après l’avoir usé sur le plan social et collectif, Même la société “bonheurisée” et privée de véritable histoire politique que nous connaissons actuellement apparaît comme trop astreignante. Elle ne constitue pas encore un refuge suffisamment sécurisant contre le stress. Elle n’endort pas encore assez. L’individu, en se repliant sur sa sphère psychique, prend mentalement sa retraite dès l’âge de 20 ans. La société n’entend plus sortir directement de l’histoire ; c’est l’individu qui se retire de la société.

Oublieuse de toute notion de continuité historique, de toute perception dense des liens sociaux, la société narcissique incite à vivre pour soi-même et à n’exister que dans l’instant. Tel est d’ailleurs le sens de la plupart des messages publicitaires. Tel est aussi le “discours” distillé à longueur de temps par des magazines, de plus en plus nombreux, qui se spécialisent dans la résolution “catégorielle” des problèmes individuels (parents, enfants, jeunes femmes, amateurs de vidéo, etc.) et l’étude “micro-dimensionnelle” de la vie quotidienne. Dans cette recherche, nulle place n’est laissée à l’accomplissement personnel dans le sens d’un style aristocratique ou d’un dépassement de soi. On en reste aux fantasmes stéréotypes, à la planification “micro-procédurière”, à l’introspection complaisante d’un “moi” de plus en plus étiolé. « La survie individuelle est maintenant le seul bien », observe C. Lasch. Le XXIe siècle, à ce rythme, ne sera pas un siècle religieux, mais un siècle thérapeutique.

Dans cette perspective, le culte de la fausse intimité, l’intensification artificiel le des rapports subjectifs, la simplification primitiviste des “rituels” de séduction et d’approche, constituent des formes maladroites de compensation par rapport au cynisme social et à l’absence de valeurs partagées. L’existence de liens entre l’individu et des valeurs de type communautaire reste en effet une nécessité inéluctable dans toute société, quand bien même la conscience individuelle les refuse. Les liens affectifs individuels demeurent insuffisants pour donner aux individus un sens à leur existence. Ainsi, paradoxalement, la vague actuelle de “sentimentalité” qui tend à isoler l’individu à l’intérieur du couple, et le couple à l’intérieur de l’ensemble de la société, débouche sur la mort de toute affection authentique et sur la fragilisation des rapports d’union. L’amour comme l’amitié, pour être durables, doivent s’insérer dans un cadre plus large que celui défini par leurs protagonistes immédiats. Or, c’est cette dimension communautaire que le “narcissisme” attaque dans ses racines. Lorsque l’individu ne peut plus ni percevoir ni “idéaliser” le groupe, la cité, la communauté à laquelle il appartient, il est obligatoirement conduit à intensifier ses rapports infimes de façon si hypertrophique qu’il finit en fait par les détruire. C’est ainsi, par ex., que la vague récente de “néoromantisme”, évoquée par Edouard Shorter (Naissance de la famille moderne, Seuil, 1979), ne débouche pas sur l’amour, mais sur l’égotisme et sur l’obsession de soi.

De même, les fausses expérimentations vitales, qui ne reposent sur aucune habitude culturelle, sur aucun besoin intériorisé, dépersonnalisent l’individu au lieu de le recentrer, le “débranchent” en quelque sorte du monde vécu sans lui fournir “l’autre dimension” souhaitée. N’ayant pas trouvé le bonheur dans la consommation matérielle et le confort économique, la nouvelle bourgeoisie “narcissique” tente de l’atteindre dans une consommation de “produits spirituels”, dont la qualité laisse, évidemment, fort à désirer. Les États-Unis, et plus spécialement la sphère “californienne”, sont particulièrement en pointe dans ce style d’entreprises, dont certains essaient de nous persuader qu’elles constituent la naissance d’une nouvelle culture ou la source possible d’un renouveau de la spiritualité.

La description que donne C. Lasch est convaincante de bout en bout. Pourtant, Lasch semble ne pas tirer toutes les conclusions de son propos, probablement parce qu’il se trouve lui-même immergé dans une société américaine dont il n’ose pas remettre en cause les idéaux fondateurs (dont le “narcissisme” est pourtant l’aboutissement). C’est pourquoi il propose, de façon assez peu crédible un retour à des valeurs anciennes auxquels il n’envisage à aucun moment de donner un nouveau fondement. (Certains pourront voir là un essai de réactivation du puritanisme américain traditionnel).

Ce n’est pourtant pas, à notre avis, dans un quelconque “ordre moral” que réside la solution au “mal de vivre” de Narcisse. La solution ne peut procéder d’une manipulation sociale, d’une transformation des institutions, d’une évolution mécanique des codes sociaux ou d’un discours purement moral, Pour en finir avec “l’idéologie de la compassion” et la mentalité de “l’avoir-droit narcissique”, toute attitude répressive ou, au contraire, de simple lamentation, ne peut que se révéler sans effet. Seuls peuvent mobiliser les individus en tant que parties intégrantes d’un peuple, des projets d’essence politique et culturelle, fondés sur des valeurs (et des contre-valeurs) entièrement opposées à celles qui ont présidé à la naissance de la “république universelle” des États-Unis d’Amérique. Ce n’est pas, bien entendu, d’outre-Atlantique, que l’on peut les attendre.

Le complexe de Narcisse : La nouvelle sensibilité américaine, traduit par Michel Landa, Robert Laffont, coll. Libertés 2000, 1981. [Version remaniée : La Culture du narcissisme, Champs-Flam, 2006]

► Guillaume Faye, Nouvelle École n°37, 1982.

dimanche, 08 avril 2012

En finir avec les faux diagnostics!...

En finir avec les faux diagnostics!...

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com/

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur le site de Valeurs actuelles et consacré aux erreurs de diagnostic qui ont conduit à mener pendant trente ans une politique de la ville absurde et à se laisser se développer une culture de l'excuse en faveur des voyous de banlieue...

voyoux banlieue.jpg

 

En finir avec les faux diagnostics

L’affaire Mohamed Merah aidant, voici les “quartiers chauds” revenus au centre des débats de l’élection présidentielle. Sont-ils des pépinières à djihadistes ? Des couveuses pour bandits ? Alimentés par cent poncifs et idées reçues, les commentaires coulent à flots, issus de la culture de l’excuse, et véhiculés par nombre de journalistes et politiciens.

Or, confronté aux faits et chiffres, ce catéchisme lacrymal a pour caractéristique majeure d’être entièrement et matériellement faux.

Rappel de la ritournelle des Diafoirus-sociologues : dans des “quartiers pauvres” et “territoires de relégation”, croupirait toute une “jeunesse abandonnée et méprisée”… “moins dangereuse qu’en danger”, des damnés de la terre condamnés à “une vie de galère” et ne recherchant finalement qu’“un peu d’attention et de reconnaissance”.

Observons d’abord que cette doctrine misérabiliste n’a absolument rien de marxiste, Karl Marx lui-même qualifiant férocement ce Lumpenproletariat (“prolétariat en haillons”) de “racailles”. On est là à mi-chemin entre le pire mélodrame hugolien et l’abbé Pierre du crépuscule – le tout dans un total mépris de réalités manifestes et établies. Qu’on en juge.

– Misère (entraînant et expliquant la révolte et la violence) ? faux ! D’après l’Insee, la Seine-Saint-Denis est le quinzième département le plus riche de France – compte non tenu, par définition, de l’économie souterraine qui l’irrigue. En y ajoutant les milliards de la drogue, le “9-3” est sans doute en réalité parmi les cinq départements les plus riches de France.

– Quels sont à l’inverse les plus pauvres ? L’Ariège (91e), le Cantal (92e) et la Creuse (96e). Ajoutons un taux de pauvreté de 19 % dans un tiers des départements ruraux de France métropolitaine – c’est-à-dire plus élevé que dans le “9-3”. Plus largement, souligne lumineusement le géographe Christophe Guilluy, « 85 % des ménages pauvres ne vivent pas dans les quartiers sensibles et… la majorité des chômeurs de longue durée se répartit sur l’ensemble du territoire ». Or, où brûlent les voitures ? Où tire-t-on à la kalachnikov sur les policiers ? Dans la Creuse ou en Seine-Saint-Denis ?

– Les pauvres “assignés à résidence”, dans de lointains territoires de relégation ? Archifaux, là encore ! À l’échelle du Bassin parisien dans son entier, la Seine-Saint-Denis est dans une position confortablement centrale, non dans une lointaine bordure – et dans les “zones urbaines sensibles” (Zus) de ce département, comme dans celles des autres de la région parisienne, la mobilité de la population est la plus élevée de France (taux de mobilité de 61 %, selon l’Observatoire national des Zus).

– Les quartiers sensibles représentent la jeunesse, la France rurale n’étant plus peuplée que de paysans âgés ? Faux ! Ces quartiers et cités ne rassemblent que 9 % de la jeunesse (l’Insee, toujours), la France périphérique au contraire (grande banlieue et villes-satellites des métropoles) abritant un jeune sur trois de 18-24 ans – et ce, avec un taux de criminalité fort bas.

Ajoutons que l’espace rural (18 % de la population métropolitaine, 11 millions d’habitants) compte désormais 32 % d’ouvriers, 27 % d’employés – et seulement 7 % d’agriculteurs… sans que nulle déprédation ou exaction ne s’y commette, ou presque.

Industrielle ou rurale, cette France périurbaine est celle des précaires, agriculteurs percevant les minima sociaux, ouvriers pauvres, travailleurs à temps partiel. Cette “France des plans sociaux” abrite les nouvelles classes populaires évincées des grandes métropoles (centre-ville et première couronne) – désormais fiefs de la bourgeoisie-bohème (“bobo”) et des immigrés récents. Or quoique victime de la recomposition sociale du territoire, cette France périphérique est calme. Malgré une pauvreté invisible, la délinquance y est rare et la criminalité, plutôt exceptionnelle.

Avec une insondable morgue, les journalistes “tendance bobo” dénigrent cependant cette France périphérique et sa “logique de repli”. Alors que, pour ces populations victimes de la mondialisation et de la prédation financière, il s’agit, tout au contraire, d’une demande de protection.

Or il est crucial de poser justement ce diagnostic, sans se laisser emporter par des lubies idéologiques ou par un sentimentalisme niais. Car, de même qu’on ne raisonne pas juste sur des figures fausses, on ne peut édifier de politique efficace sur des concepts erronés. Pourtant, c’est ce que l’on fait depuis trente ans sous le nom – déjà absurde – de “politique de la ville”.

Comme de l’eau dans un trou, cette “politique” déverse des milliards d’euros dans des programmes immobiliers opaques et dans d’incontrôlables subventions : 550 millions d’euros en 2012 pour la politique de la ville ; 390 millions pour la “cohésion sociale et l’égalité des chances”, nom fort noble pour ce qui ressemble souvent à du racket ou du chantage à l’émeute. À la lumière des réalités que je viens d’énoncer, c’est cette politique-là, d’abord, qu’il faut revoir de fond en comble. Administré à partir d’un faux diagnostic, un médicament n’a aucune chance, jamais, de faire le moindre effet !

Xavier Raufer (Valeurs actuelles, 29 mars 2012)

samedi, 07 avril 2012

Eine fundamentale Fernsehkritik: Der engagierte Intellektuelle Pierre Bourdieu und die Demagogie des Banalen

Eine fundamentale Fernsehkritik: Der engagierte Intellektuelle Pierre Bourdieu und die Demagogie des Banalen      

Geschrieben von: Felix Menzel

Ex: http://www.blauenarzisse.de/

 

 

Im Mai 1996 strahlte der französische Privatsender Paris Première zwei Vorlesungen Über das Fernsehen des linken Soziologen Pierre Bourdieu (1930-2002) aus. Das Besondere daran: Bourdieu kritisierte als Sprecher im Fernsehen das Fernsehen, entzog sich jedoch den strengen Restriktionen des Mediums. Damit ging er einen gehörigen Schritt weiter als seine intellektuellen Vorgänger, die ihre Kritik an dem Leitmedium der letzten Jahrzehnte zumeist in schwerverständlichen Büchern versteckten.

Max Horkheimer und Theodor W. Adorno hatten in ihrer Dialektik der Aufklärung bereits gnadenlos mit der „Kulturindustrie“ abgerechnet. Von links kam danach u.a. noch von Hans Magnus Enzensberger mit seinem Baukasten zu einer Theorie der Medien (1970) ein Aufruf, das Monopol der Massenmedien zu brechen, weil diese Kommunikation verhindern würden, statt sie zu ermöglichen.

Das Fernsehen beschreibt die Welt nicht, es schreibt uns Dinge vor

Allen drei Ansätzen gemein ist die Kritik am Eindringen des Ökonomischen in das Feld des Journalismus und alle drei Ansätze bemängeln das intellektuelle Niveau des Fernsehens aus der Sicht des Intellektuellen. Bourdieu läßt in Über das Fernsehen von dem Versuch ab, die vordergründige Funktion des TV-Journalismus zu ergründen. Sein Interesse gilt vielmehr den „anonymen, unsichtbaren Mechanismen“, die dafür sorgen, daß TV-Journalisten über dieses und jenes Ereignis berichten und zwar in ganz bestimmter Art und Weise.

Das Fernsehen kann durch die Macht der Bilder Wirklichkeit imitieren und deshalb besonders viele Menschen mobilisieren. Es vermittelt mehr als nur ein Deutungsangebot der Welt. Es macht „aus dem Be-Schreiben der sozialen Wellt (…) ein Vor-Schreiben“, so Bourdieu. Den Zuschauern werde so nur eine konventionalisierte Wirklichkeitskonstruktion des Mediensystems angeboten, das jedoch ins Unterbewußtsein vordringt. Auf diese Weise kann das Fernsehen völlig realitätsferne Vorstellungen verbreiten. Das Problem ist, daß sich diese Vorstellungen auf die soziale Welt ganz real auswirken, sobald die Zuschauer beginnen praktisch zu handeln.

Die Manipulateure sind selbst manipuliert worden

Wenn Bourdieu in diesem Kontext von Manipulation spricht, dann immer im doppelten Sinne: Die Journalisten selbst sind „manipuliert“ worden und wirken nun „manipulierend“. Das Fernsehen habe Selbstzensur etabliert, die zu einer konformen Berichterstattung und Bestätigung des status quo führen soll. Hinzu käme, daß „eine Reservearmee für die Fernseh- und Rundfunkmetiers in Bereitschaft steht“. Querdenker, die unbequeme Wahrheiten aussprechen wollen, hindere dies daran, neue, andere bzw. kritische Berichte und Kommentare zu veröffentlichen. Bourdieu bemängelt am politischen Fernsehjournalismus, daß er die soziale Welt durch seine eigene Brille betrachte und sie dabei verzerre. Als Beispiel führt er die journalistische „Vorliebe für das gewöhnliche Ungewöhnliche“ an.

Dies wirkt sich auch auf die politischen Diskurse aus. Um als Intellektueller bestehen zu können, bedürfe es weniger eines hintergründigen Fachwissens als vielmehr einer ausgereiften Medienkompetenz. Bourdieu weist auf diesen Umstand hin, indem er auf die Einschränkung der Redezeit aufmerksam macht und beschreibt, daß der Ablauf einer Talkrunde immer einem Drehbuch folgt. Dadurch kommen nicht die intelligentesten Wissenschaftler, Intellektuellen und Künstler im Fernsehen zu Wort, sondern diejenigen, die sich den Gepflogenheiten des Fernsehens am besten anpassen können. Die Medien hätten sich dabei eine „Schiedsrichterrolle“ erkämpft, die es ihnen erlaube, Urteile zu fällen.

Der spektakuläre Markt gewinnt die Oberhand

Bourdieu bestreitet nicht, daß der TV-Journalismus über eine relative Autonomie verfügt, dennoch sieht er ihn „vermittels der Einschaltquote unter der Fuchtel des ökonomischen Feldes“. Noch radikaler als Bourdieu hat der italienische Philosoph Giorgio Agamben in Anlehnung an Guy Debords Die Gesellschaft des Spektakels die Wesensart der (audio-)visuellen Massenmedien beschrieben: „Die äußerste Form des Kapitalismus (…) stellt sich als eine immense Akkumulation von Bildern dar, in der alles, was unmittelbar erlebt wurde, in eine Repräsentation verschoben wird. (…) In Gestalt dieser abgetrennten und von den Medien geordneten Welt, in der sich die Form des Staates und die der Ökonomie durchdringen, erlangt die Marktwirtschaft ihren Status absoluter und von jeglicher Verantwortung entbundener Souveränität über das gesamte gesellschaftliche Leben.“

Die Gesellschaft wandle sich in einen „einzigen spektakulären Markt“ um. Bourdieu benennt mit den „Vermischten Meldungen“ das deutlichste Symptom dieses spektakulären Marktes. Den Boulevardnachrichten geht es ausschließlich um Sensationseffekte, die die Einschaltquote nach oben treiben. Diese für den Durchschnittsgeschmack optimierte Banalisierung führt laut Bourdieu zu politischem Desinteresse und Konformität. Enzensberger spricht in diesem Zusammenhang von „Nullereignissen“, von „Vorgängen, die buchstäblich nichts bedeuten.“ Die von Versammlungen und Printmedien getragene „Politik kultureller Aufklärung“ werde so durch eine „Art spontaneistische Demagogie“ im Fernsehen ersetzt, betont Bourdieu.

Der korrumpierte Intellektuelle

Dies führt soweit, daß sich ein Großteil der Intellektuellen dem Leitmedium anpaßt. Bourdieu nennt sie „Doxosophen“. Diese „polymorphen Vielschreiber“ wollen gar keine „kritische Gegenmacht“ einnehmen. Sie lassen sich vielmehr von Meinungsforschungsinstituten, die interessengeleitete Umfragen starten, vereinnahmen. Bourdieu wünscht sich dagegen den „kritischen Intellektuellen“, der gefordert sei, eine „Internationale der Intellektuellen“ zu bilden, um gehört zu werden. Die Lösung dürfe es weder sein, sich in den Elfenbeinturm zurückzuziehen, noch, sich dem Fernsehen anzupassen.

Die Versuchung ist aber groß: Da der Bildschirm „eine Stätte narzißtischer Zurschaustellung“ ist, befriedigen selbst viele Intellektuelle dort lieber ihre egoistischen Bedürfnisse, als Inhalte in den Mittelpunkt zu stellen. Auch bei eigentlichen Informationsformaten neigt also das Fernsehen dazu, alle Beteiligten in eine Unterhaltungsrolle zu drängen. Das „Infotainment“ erlaubt keine tiefgründigen Äußerungen. Im Gegenteil, ‚Infotainment’ ist ein streng reglementiertes Format mit strikten Rollenzuweisungen, die Redezeit jedes Sprechers (egal, ob Moderator, Experte, Politiker, …) ist auf wenige Minuten begrenzt. Längere Erläuterungen erlaubt dieses Format, abgesehen von wenigen Nischen, auch nicht.

Wir alle sind Satelliten geworden

Der Medienphilosoph Marshall McLuhan hat die These in den Raum gestellt, daß sich die Menschheit im Zuge des Wandels vom Buchdruck- zum Fernsehzeitalter in ein globales Dorf wandelt, das einer Stammesgesellschaft sehr ähnlich sei. Politiker etwa würden bei ständiger Begleitung von Kameras eher wie Stammeshäuptlinge auftreten. Durch die ständige Beobachtung und Ausweitung der Öffentlichkeit kann der Zuschauer zudem weltweit Nähe zu Menschen aufbauen, die er persönlich gar nicht kennt. Jean Baudrillard spricht in diesem Zusammenhang davon, daß „der Mensch heute selber – samt seinem Körper, seinem Denken und seinem Lebensraum – ex-orbitant, ein Satellit geworden ist“.

Nun könnte man meinen, die dadurch entstehende Kontrolle durch die Öffentlichkeit führe dazu, Konflikte und Kriege vermeiden oder wirksamer bekämpfen zu können. Daß dies nicht so ist, hängt mit der von Bourdieu, Neil Postman und anderen erkannten Tendenz des Fernsehens zusammen, durch Unterhaltung alle Themen aufzuweichen. Das Fernsehen verlangt vom Zuschauer keine persönlichen Konsequenzen ab, sondern emotionalisiert ihn lediglich.

Aufmerksamkeitserzwingung durch Trivialität mit Spezialeffekten

Der Philosoph Peter Sloterdijk spitzt das in seiner Verachtung der Massen noch zu. Die Massenkultur „bleibt auf Strategien der Aufmerksamkeitserzwingung angewiesen, weil sie vorhat, triviale Gegenstände und Personen in die vorderste Sichtlinie zu stellen.“ Es sei „kein Zufall, daß Massenkultur überall, wo sie sich geltend macht, auf die Verbindung von Trivialität mit Spezialeffekten setzen wird.“ Sloterdijk vergißt an dieser Stelle zwar, daß die Konsumenten nicht durch bestimmte Personen gezwungen werden, sich diese durch Spezialeffekte verschönerte Trivialität anzusehen. Aber grundsätzlich liegt er trotzdem richtig: Der Zwang liegt in der Omnipräsenz des Trivialen und den fehlenden Alternativen begründet.

Das Fernsehen hat so eine große Bedeutung, weil es ihm gelingt, eine einheitliche Konsumhaltung der Massen hervorzubringen. Kein anderes Medium ist in der Lage, die Emotionen der Zuschauer zu so einer kollektiven Verbindlichkeit zu treiben. Mit Bourdieus Vokabular gesprochen: „Die feinen Unterschiede“ fallen weg und der Habitus der Menschen gleicht sich gegenseitig an.

dimanche, 11 mars 2012

The Eviction of the Yeomen

The Eviction of the Yeomen

By Brooks Adams

Ex: http://www.counter-currents.com/

Editor’s Note:

The following is roughly the first 40% of “The Eviction of the Yeomen,” chapter 9 of Brooks Adams’ The Law of Civilization and Decay.

Reading Adams’ account of the forces that ultimately created the British empire and diaspora, it is hard to regard it as a glorious and civilizing process, but rather as a sordid and savage one, given that the conquest and settling of new lands, the extermination, enslavement, and dispossession of non-whites, and even the despoiling of nature and the extinction of entire species, appear to be mere extensions of the rise of capitalism in England on the ruins of a fundamentally more humane political order.

None of this implies, of course, that the heirs of these upheavals should surrender our lands and go home. Past wrongs cannot be redressed, and in any case, our primary focus should be on building a just social order for the future. And for that task, Brooks Adams offers us much food for thought.

The remainder of chapter 9 deals with the Church of England. It throws a great deal of light on the prevalence of religious cynicism and insincerity in the Angl0 cultural sphere. I will reprint it on another occasion.

010_1.jpgLike primitive Rome, England, during the Middle Ages, had an unusually homogeneous population of farmers, who made a remarkable infantry. Not that the cavalry was defective; on the contrary, from top to bottom of society, every man was a soldier, and the aristocracy had excellent fighting qualities. Many of the kings, like Coeur-de-Lion, Edward III, and Henry V, ranked among the ablest commanders of their day; the Black Prince has always been a hero of chivalry; and earls and barons could be named by the score who were famous in the Hundred Years’ War.

Yet, although the English knights were a martial body, there is nothing to show that, on the whole, they surpassed the French. The English infantry won Crecy and Poitiers, and this infantry, which was long the terror of Europe, was recruited from among the small farmers who flourished in Great Britain until they were exterminated by the advance of civilization.

As long as the individual could at all withstand the attack of the centralized mass of society, England remained a hot-bed for breeding this species of man. A medieval king had no means of collecting a regular revenue by taxation; he was only the chief of the free-men, and his estates were supposed to suffice for his expenditure. The revenue the land yielded consisted of men, not money, and to obtain men, the sovereign granted his domains to his nearest friends, who, in their turn, cut their manors into as many farms as possible, and each farmer paid his rent with his body.

A baron’s strength lay in the band of spears which followed his banner, and therefore he subdivided his acres as much as possible, having no great need of money. Himself a farmer, he cultivated enough of his fief to supply his wants, to provide his table, and to furnish his castle, but, beyond this, all he kept to himself was loss. Under such a system money contracts played a small part, and economic competition was unknown.

The tenants were free-men, whose estates passed from father to son by a fixed tenure; no one could underbid them with their landlord, and no capitalist could ruin them by depressing wages, for the serfs formed the basis of society, and these serfs were likewise land-owners. In theory, the villains may have held at will; but in fact they were probably the descendants, or at least the representatives, of the coloni of the Empire, and a base tenure could be proved by the roll of the manorial court. Thus even the weakest were protected by custom, and there was no competition in the labor market.

The manor was the social unit, and, as the country was sparsely settled, waste spaces divided the manors from each other, and these wastes came to be considered as commons appurtenant to the domain in which the tenants of the manor had vested rights. The extent of these rights varied from generation to generation, but substantially they amounted to a privilege of pasture, fuel, or the like; aids which, though unimportant to large property owners, were vital when the margin of income was narrow.

During the old imaginative age, before centralization gathered headway, little inducement existed to pilfer these domains, since there was room in plenty, and the population increased slowly, if at all. The moment the form of competition changed, these conditions were reversed. Precisely when a money rent became a more potent force than armed men may be hard to determine, but certainly that time had come when Henry VIII mounted the throne, for then capitalistic farming was on the increase, and speculation in real estate already caused sharp distress. At that time the establishment of a police had destroyed the value of the retainer, and competitive rents had generally supplanted military tenures. Instead of tending to subdivide, as in an age of decentralization, land consolidated in the hands of the economically strong, and capitalists systematically enlarged their estates by enclosing the commons, and depriving the yeomen of their immemorial rights.

The sixteenth-century landlords were a type quite distinct from the ancient feudal gentry. As a class they were gifted with the economic, and not with the martial instinct, and they throve on competition. Their strength lay in their power of absorbing the property of their weaker neighbors under the protection of an overpowering police.

Everything tended to accelerate consolidation, especially the rise in the value of money. While, even with the debasement of the coin, the price of cereals did not advance, the growth of manufactures had caused wool to double in value. “We need not therefore be surprised at finding that the temptation to sheep-farming was almost irresistible, and that statute after statute failed to arrest the tendency.”[1]

The conversion of arable land into pasture led, of course, to wholesale eviction, and by 1515 the suffering had become so acute that details were given in acts of Parliament. Places where two hundred persons had lived, by growing corn and grain, were left desolate, the houses had decayed, and the churches fallen into ruin.[2]The language of these statutes proves that the descriptions of contemporaries were not exaggerated.

For I myself know many towns and villages sore decayed, for it whereas in times past there war in some town an hundred households there remain not now thirty; in some fifty, there are not now ten; yea (which is more to be lamented) I know towns so wholly decayed, that there is neither stick nor stone standing as they use to say.

Where many men had good livings, and maintained hospitality, able at times to help the king in his wars, and to sustain other charges, able also to help their pore neighbors, and virtuously to bring up their children in Godly letters and good sciences, now sheep and conies devour altogether, no man inhabiting the aforesaid places. Those beasts which were created of God for the nourishment of man do now devour man. . . . And the cause of all this wretchedness and beggary in the common weal are the greedy Gentlemen, which are sheepmongers and grazers. While they study for their own private commodity, the common weal is like to decay. Since they began to be sheep masters and feeders of cattle, we neither had victual nor cloth of any reasonable price. No meruayle, for these forestallers of the market, as they use to say, have gotten all things so into their hands, that the poor man must either buy it at their price, or else miserably starve for hunger, and wretchedly die for cold.[3]

The reduction of the acreage in tillage must have lessened the crop of the cereals, and accounts for their slight rise in value during the second quarter of the sixteenth century. Nevertheless this rise gave the farmer no relief, as, under competition, rents advanced faster than prices, and in the generation which reformed the Church, the misery of yeomen had become extreme. In 1549 Latimer preached a sermon, which contains a passage often quoted, but always interesting:

Furthermore, if the king’s honor, as some men say, standeth in the great multitude of people; then these grazers, inclosers, and rent-rearers, are hinderers of the king’s honor. For where as have been a great many householders and inhabitants, there is now but a shepherd and his dog. . . .

My father was yeoman, and had no lands of his own, only he had a farm of three or four pound by year at the uttermost, and hereupon he tilled so much as kept half a dozen men. He had walk for a hundred sheep; and my mother milked thirty kine. He was able, and did find the king a harness, with himself and his horse, while he came to the place that he should receive the king’s wages. I can remember that I buckled his harness when he went unto Blackheath field. He kept me to school, or else I had not been able to have preached before the king’s majesty now.

He married my sisters with five pound, or twenty nobles apiece; so that he brought them up in godliness and fear of God. He kept hospitality for his poor neighbors, and some alms he gave to the poor. And all this he did of the said farm, where he that now hath it payeth sixteen pound by year, or more, and is not able to do anything for his prince, for himself, nor for his children, or give a cup of drink to the poor.[4]

The small proprietor suffered doubly: he had to meet the competition of large estates, and to endure the curtailment of his resources through the enclosure of the commons. The effect was to pauperize the yeomanry and lesser gentry, and before the Reformation the homeless poor had so multiplied that, in 1530, Parliament passed the first of a series of vagrant acts.[5]

ImperialYeomanryOfficer.jpgAt the outset the remedy applied was comparatively mild, for able-bodied mendicants were only to be whipped until they were bloody, returned to their domicile, and there whipped until they put themselves to labor. As no labor was supplied, the legislation failed, and in 1537 the emptying of the convents brought matters to a climax. Meanwhile Parliament tried the experiment of killing off the unemployed; by the second act vagrants were first mutilated and then hanged as felons.[6]

In 1547, when Edward VI was crowned, the great crisis had reached its height. The silver of Potosi had not yet brought relief, the currency was in chaos, labor was disorganized, and the nation seethed with the discontent which broke out two years later in rebellion. The land-owners held absolute power, and before they yielded to the burden of feeding the starving, they seriously addressed themselves to the task of extermination. The preamble of the third act stated that, in spite of the “great travel” and “godly statutes” of Parliament, pauperism had not diminished, therefore any vagrant brought before two justices was to be adjudged the slave of his captor for two years. He might be compelled to work by beating, chaining, or otherwise, be fed on bread and water, or refuse meat, and confined by a ring of iron about his neck, arms or legs. For his first attempt at escape, his slavery became perpetual, for his second, he was hanged.[7]

Even as late as 1591, in the midst of the great expansion which brought prosperity to all Europe, and when the monks and nuns, cast adrift by the suppression of the convents, must have mostly died, beggars so swarmed that at the funeral of the Earl of Shrewsbury:

there were by the report of such as served the dole unto them, the number of 8000. And they thought that there were almost as many more that could not be served, through their unruliness. Yea, the press was so great that divers were slain and many hurt. And further it is reported of credible persons, that well estimated the number of all the said beggars, that they thought there were about 20,000.

It was conjectured “that all the said poor people were abiding and dwelling within thirty miles’ compass of Sheffield.”[8]

In 1549, just as the tide turned, insurrection blazed out all over England. In the west a pitched battle was fought between the peasantry and foreign mercenaries, and Exeter was relieved only after a long siege. In Norfolk the yeomen, led by one Kett, controlled a large district for a considerable time. They arrested the unpopular landlords, threw open the commons they had appropriated, and ransacked the manor houses to pay indemnities to evicted farmers. When attacked, they fought stubbornly, and stormed Norwich twice.

Strype described “these mutineers” as “certain poor men that sought to have their commons again, by force and power taken from them; and that a regulation be made according to law of arable lands turned into pasture.”[9]

Cranmer understood the situation perfectly, and though a consummate courtier, and himself a creation of the capitalistic revolution, spoke in this way of his patrons:

And they complain much of rich men and gentlemen, saying, that they take the commons from the poor, that they raise the prices of all manner of things, that they rule the poverty, and oppress them at their pleasure. . . .

And although here I seem only to speak against these unlawful assemblers, yet I cannot allow those, but I must needs threaten everlasting damnation unto them, whether they be gentlemen or whatsoever they be, which never cease to purchase and join house to house, and land to land, as though they alone ought to possess and inhabit the earth.[10]

Revolt against the pressure of this unrestricted economic competition took the form of Puritanism, of resistance to the religious organization controlled by capital, and even in Cranmer’s time, the attitude of the descendants of the men who formed the line at Poitiers and Crecy was so ominous that Anglican bishops took alarm.

It is reported that there be many among these unlawful assemblies that pretend knowledge of the gospel, and will needs be called gospellers. . . . But now I will go further to speak somewhat of the great hatred which divers of these seditious persons do bear against the gentlemen; which hatred in many is so outrageous, that they desire nothing more than the spoil, ruin, and destruction of them that be rich and wealthy.[11]

Somerset, who owed his elevation to the accident of being the brother of Jane Seymour, proved unequal to the crisis of 1549, and was supplanted by John Dudley, now better remembered as Duke of Northumberland. Dudley was the strongest member of the new aristocracy. His father, Edmund Dudley, had been the celebrated lawyer who rose to eminence as the extortioner of Henry VII, and whom Henry VIII executed, as an act of popularity, on his accession. John, beside inheriting his father’s financial ability, had a certain aptitude for war, and undoubted courage; accordingly he rose rapidly. He and Cromwell understood each other; he flattered Cromwell, and Cromwell lent him money.[12]

Strype has intimated that Dudley had strong motives for resisting the restoration of the commons.[13]

In 1547 he was created Earl of Warwick, and in 1549 suppressed Rett’s rebellion. This military success brought him to the head of the State; he thrust Somerset aside, and took the title of Duke of Northumberland. His son was equally distinguished. He became the favorite of Queen Elizabeth, who created him Earl of Leicester; but, though an expert courtier, he was one of the most incompetent generals whom even the Tudor landed aristocracy ever put in the field.

The disturbances of the reign of Edward VI did not ripen into revolution, probably because of the relief given by rising prices after 1550; but, though they fell short of actual civil war, they were sufficiently formidable to terrify the aristocracy into abandoning their policy of killing off the surplus population. In 1552 the first statute was passed looking toward the systematic relief of paupers.[14] Small farmers prospered greatly after 1660, for prices rose strongly, very much more strongly than rents; nor was it until after the beginning of the seventeenth century, when rents again began to advance, that the yeomanry once more grew restive. Cromwell raised his Ironsides from among the great-grandchildren of the men who stormed Norwich with Kett.

I had a very worthy friend then; and he was a very noble person, and I know his memory is very grateful to all—Mr. John Hampden. At my first going out into this engagement, I saw our men were beaten at every hand. I did indeed; and desired him that he would make some additions to my Lord Essex’s army, of some new regiments; and I told him I would be serviceable to him in bringing such men in as I thought had a spirit that would do something in the work. This is very true that I tell you; God knows I lie not. “Your troops,” said I, “are most of them old decayed serving-men, and tapsters, and such kind of fellows; and,” said I, “their troops are gentlemen’s sons, younger sons and persons of quality: do you think that the spirits of such base and mean fellows will ever be able to encounter gentlemen, that have honor and courage and resolution in them?” . . . Truly I did tell him; “You must get men of a spirit: . . . a spirit that is likely to go on as far as gentlemen will go; — or else you will be beaten still. . . .”

He was a wise and worthy person; and he did think that I talked a good notion, but an impracticable one. Truly I told him I could do somewhat in it, . . . and truly I must needs say this to you, . . . I raised such men as had the fear of God before them, as made some conscience of what they did; and from that day forward, I must say to you, they were never beaten, and wherever they were engaged against the enemy, they beat continually.[15]

Thus, by degrees, the pressure of intensifying centralization split the old homogeneous population of England into classes, graduated according to their economic capacity. Those without the necessary instinct sank into agricultural day laborers, whose lot, on the whole, has probably been somewhat worse than that of ordinary slaves. The gifted, like the Howards, the Dudleys, the Cecils, and the Boleyns, rose to be rich nobles and masters of the State. Between the two accumulated a mass of bold and needy adventurers, who were destined finally not only to dominate England, but to shape the destinies of the world.

One section of these, the shrewder and less venturesome, gravitated to the towns, and grew rich as merchants, like the founder of the Osborn family, whose descendant became Duke of Leeds; or like the celebrated Josiah Child, who, in the reign of William III, controlled the whole eastern trade of the kingdom. The less astute and the more martial took to the sea, and as slavers, pirates, and conquerors, built up England’s colonial empire, and established her maritime supremacy. Of this class were Drake and Blake, Hawkins, Raleigh, and Clive.

For several hundred years after the Norman conquest Englishmen showed little taste for the ocean, probably because sufficient outlet for their energies existed on land. In the Middle Ages the commerce of the island was mostly engrossed by the Merchants of the Steelyard, an offshoot of the Hanseatic league; while the great explorers of the fifteenth and early sixteenth centuries were usually Italians or Portuguese; men like Columbus, Vespucius, Vasco-da-Gama, or Magellan. This state of things lasted, however, only until economic competition began to ruin the small farmers, and then the hardiest and boldest race of Europe were cast adrift, and forced to seek their fortunes in strange lands.

For the soldier or the adventurer, there was no opening in England after the battle of Flodden. A peaceful and inert bourgeoisie more and more supplanted the ancient martial baronage; their representatives shrank from campaigns like those of Richard I, the Edwards, and Henry V, and therefore, for the evicted farmer, there was nothing but the far-off continents of America and Asia, and to these he directed his steps.

The lives of the admirals tell the tale on every page. Drake’s history is now known. His family belonged to the lesser Devon gentry, but fallen so low that his father gladly apprenticed him as ship’s boy on a channel coaster, a life of almost intolerable hardship. From this humble beginning he fought his way, by dint of courage and genius, to be one of England’s three greatest seamen; and Blake and Nelson, the other two, were of the same blood.

Sir Humphrey Gilbert was of the same West Country stock as Drake; Frobisher was a poor Yorkshire man, and Sir Walter Raleigh came from a ruined house. No less than five knightly branches of Raleigh’s family once throve together in the western counties; but disaster came with the Tudors, and Walter’s father fell into trouble through his Puritanism. Walter himself early had to face the world, and carved out his fortune with his sword. He served in France in the religious wars; afterward, perhaps, in Flanders; then, through Gilbert, he obtained a commission in Ireland, but finally drifted to Elizabeth’s court, where he took to buccaneering and conceived the idea of colonizing America.

A profound gulf separated these adventurers from the landed capitalists, for they were of an extreme martial type; a type hated and feared by the nobility. With the exception of the years of the Commonwealth, the landlords controlled England from the Reformation to the revolution of 1688, a period of one hundred and fifty years, and, during that long interval, there is little risk in asserting that the aristocracy did not produce a single soldier or sailor of more than average capacity. The difference between the royal and the parliamentary armies was as great as though they had been recruited from different races. Charles had not a single officer of merit, while it is doubtful if any force has ever been better led than the troops organized by Cromwell.

Men like Drake, Blake, and Cromwell were among the most terrible warriors of the world, and they were distrusted and feared by an oligarchy which felt instinctively its inferiority in arms. Therefore, in Elizabeth’s reign, politicians like the Cecils took care that the great seamen should have no voice in public affairs. And though these men defeated the Armada, and though England owed more to them than to all the rest of her population put together, not one reached the peerage, or was treated with confidence and esteem. Drake’s fate shows what awaited them. Like all his class, Drake was hot for war with Spain, and from time to time he was unchained, when fighting could not be averted; but his policy was rejected, his operations more nearly resembled those of a pirate than of an admiral, and when he died, he died in something like disgrace.

The aristocracy even made the false position in which they placed their sailors a source of profit, for they forced them to buy pardon for their victories by surrendering the treasure they had won with their blood. Fortescue actually had to interfere to defend Raleigh and Hawkins from Elizabeth’s rapacity. In 1592 Borough sailed in command of a squadron fitted out by the two latter, with some contribution from the queen and the city of London. Borough captured the carack, the Madre-de-Dios, whose pepper alone Burleigh estimated at £102,000. The cargo proved worth £141,000, and of this Elizabeth’s share, according to the rule of distribution in use, amounted to one-tenth, or £14,000. She demanded £80,000, and allowed Raleigh and Hawkins, who had spent £34,000, only £36,000. Raleigh bitterly contrasted the difference made between himself a soldier, and a peer, or a London speculator:

I was the cause that all this came to the Queen, and that the King of Spain spent 300,000li the last year. . . . I that adventured all my estate, lose of my principal. . . . I took all the care and pains; . . . they only sate still . . . for which double is given to them, and less then mine own to me.[16]

Raleigh was so brave he could not comprehend that his talent was his peril. He fancied his capacity for war would bring him fame and fortune, and it led him to the block. While Elizabeth lived, the admiration of the woman for the hero probably saved him, but he never even entered the Privy Council, and of real power he had none. The sovereign the oligarchy chose was James, and James imprisoned and then slew him. Nor was Raleigh’s fate peculiar, for, through timidity, the Cavaliers conceived an almost equal hate of many soldiers. They dug up the bones of Cromwell, they tried to murder William III, and they dragged down Marlborough in the midst of victory. Such were the new classes into which economic competition divided the people of England during the sixteenth century, and the Reformation was only one among many of the effects of this profound social revolution.

[. . .]

Although the spoliations of Edward [VI] are less well remembered than those of his father [Henry VIII], they were hardly less drastic. They began with the estates of the chantries and guilds, and rapidly extended to all sorts of property. In the Middle Ages, one of the chief sources of revenue of the sacred class had been their prayers for souls in purgatory, and all large churches contained chapels, many of them richly endowed, for the perpetual celebration of masses for the dead; in England and Wales more than a thousand such chapels existed, whose revenues were often very valuable. These were the chantries, which vanished with the imaginative age which created them, and the guilds shared the same fate.

Before economic competition had divided men into classes according to their financial capacity, all craftsmen possessed capital, as all agriculturists held land. The guild established the craftsman’s social status; as a member of a trade corporation he was governed by regulations fixing the number of hands he might employ, the amount of goods he might produce, and the quality of his workmanship; on the other hand, the guild regulated the market, and ensured a demand. Tradesmen, perhaps, did not easily grow rich, but they as seldom became poor.

With centralization life changed. Competition sifted the strong from the weak; the former waxed wealthy, and hired hands at wages, the latter lost all but the ability to labor; and, when the corporate body of producers had thus disintegrated, nothing stood between the common property and the men who controlled the engine of the law. By he 1 Edward VI., c. 14, all the possessions of the schools, colleges, and guilds of England, except the colleges of Oxford and Cambridge and the guilds of London, were conveyed to the king, and the distribution thus begun extended far and wide, and has been forcibly described by Mr. Blunt:

They tore off the lead from the roofs, and wrenched out the brasses from the floors. The books they despoiled of their costly covers, and then sold them for waste paper. The gold and silver plate they melted down with copper and lead, to make a coinage so shamefully debased as was never known before or since in England. The vestments of altars and priests they turned into table-covers, carpets, and hangings, when not very costly; and when worth more money than usual, they sold them to foreigners, not caring who used them for “superstitious” purposes, but caring to make the best “bargains” they could of their spoil. Even the very surplices and altar linen would fetch something, and that too was seized by their covetous hands.[17]

These “covetous hands” were the privy councilors. Henry had not intended that any member of the board should have precedence, but the king’s body was not cold before Edward Seymour began an intrigue to make himself protector. To consolidate a party behind him, he opened his administration by distributing all the spoil he could lay hands on; and Mr. Froude estimated that “on a computation most favorable to the council, estates worth . . . in modern currency about five millions” of pounds, were “appropriated—I suppose I must not say stolen—and divided among themselves.”[18] At the head of this council stood Cranmer, who took his share without scruple. Probably Fronde’s estimate is far too low; for though Seymour, as Duke of Somerset, had, like Henry, to meet imperative claims which drained his purse, he yet built Somerset House, the most sumptuous palace of London.

Notes

1. Agriculture and Prices, iv. 64.

2. 6 Henry VIII., c. 5; 7 Henry VIII., c. i.

3. Jewel of Joy, Becon. Also England in the Reign of Henry VIII, Early Eng. Text Soc, Extra Ser., No. xxxii. p. 75.

4. First Sermon before Edward VI. Sermons of Bishop Latimer, ed. of Parker Soc., 100, 101.

5. 22 Henry VIII., c. 12.

6. 27 Henry VIII., c. 25.

7. Edward VI., c. 3.

8. Brit. Mus., Cole MS. xii. 41. Cited in Henry VIII. and the English Monasteries, Gasquet, ii. 514, note.

9. Eccl. Mem., ii. pt. i, 260.

10. Sermon on Rebellion, Cranmer, Miscellaneous Writings and Letters, 194–6.

11. Sermon on Rebellion, Cranmer, Miscellaneous Writings and Letters, 195, 196.

12. Cal. ix. No. 193.

13. Eccl. Mem., ii. pt. I, 152.

14. 5 and 6 Edw. VI., c. 2.

15. Cromwell’s Letters and Speeches, Carlyle, Speech XI.

16. Raleigh to Burleigh, Life of Sir Walter Raleigh, Edwards, ii. 76, letter xxxiv.

17. The Reformation of the Church of England, ii. 68.

18. History of England, v. 432.

 


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vendredi, 02 mars 2012

Guillaume Faye: Sexe et dévoiement

Guillaume Faye:

Sexe et dévoiement

mercredi, 29 février 2012

Debunking Another Lie: Lawrence H. Keeley’s War Before Civilization: The Myth of the Peaceful Savage

Debunking Another Lie:
Lawrence H. Keeley’s War Before Civilization: The Myth of the Peaceful Savage

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Lawrence H. Keeley’s War Before Civilization: The Myth of the Peaceful Savage (New York: Oxford University Press, 1996)

This slender volume published by Oxford University Press is an invaluable contribution to the historical and anthropological literature. Author Lawrence H. Keeley [3], a professor of anthropology at the University of Illinois at Chicago, is an archaeologist specializing in the prehistory of northwestern Europe.

According to Keeley, the thoughts of English philosopher Thomas Hobbes and French philosopher Jean-Jacques Rousseau embody two competing paradigms of peace, violence, and civilization.

Hobbes believed the inertial “natural” state of humanity to be war, not peace. In Keeley’s rendering Hobbes was nevertheless a universalistic egalitarian who did not think human beings were “innately cruel or violent or biologically driven to dominate others”—a faith Keeley shares.

But the dominant ideological-academic paradigm of today is Rousseau’s, which denies “civilization its humanity while proclaiming the divinity of the primitive.” (p. 6)

The most interesting and surprising observation Keeley makes about these two men is this one: “Unlike Hobbes, Rousseau seemed genuinely interested in whether his contentions were confirmed in the observations of real ‘savages’ then being encountered by European explorers. His disciples accompanied French explorations and brought back mixed reports.”

But Rousseau and his followers “were too thoroughly convinced that the natural state of human society was a peaceful combination of free love and primitive communism to see [the] violent first encounters as anything but rare aberrations.” (p. 7)

“Prejudices” and “blinders,” Keeley says, prevent professional anthropologists and archaeologists from acknowledging “unambiguous physical evidence” of primitive violence. Successive waves of “existentialism, structuralism, structural Marxism, poststructuralism, and postmodernism” in the humanities and social sciences “have left American universities a ‘burned-over district.’” (pp. 221–22, n. 1)

Keeley demonstrates conclusively that prevailing dogmas about primitive life—the myth of the peaceful savage corrupted by white civilization—is contrary to fact.

Keeley marshals three kinds of evidence to make his case: prehistoric findings by archaeologists, 20th century ethnographic surveys by cultural anthropologists who lived among still-extant primitive peoples, and historical accounts of early contact between whites and nonwhites.

“A Scarcity of Peace”

“Given the neo-Rousseauian tenor of the present day, it comes as a shock to discover that the proportion of war casualties in primitive societies almost always exceeds that suffered by even the most bellicose of war-torn modern states.” (p. 88)

Professor Keeley debunks two primary myths in particular: the romantic, Left-wing, anti-Western, Rousseauian-Fennimore Cooper (he mentions the latter author by name) primitive idyll, as well as a WWII-era academic perception that nonwhite tribesmen waged a stylized, less horrible, special kind of primitive warfare that differed radically from “real” or “true” war conducted by modern, civilized states. By comparison, primitive warfare was seen as unprofessional, undisciplined, unspecialized, ineffective, unserious, and relatively harmless.

But, Keeley asserts, genuinely peaceful societies have been extremely rare: 90–95% of known societies have engaged in warfare on a routine basis.

One fascinating chapter in history I had not been aware of involved the stark contrast between the violent Spanish and US frontier engagement of Amerindians in Mexico and America versus a far more intelligent, peaceful, and just handling of essentially the same situation in Canada. (pp. 152–57)

In North America, Indian tribes on both sides of the 49th parallel were frequently the same. Likewise, Euro-Canadians and Euro-Americans were essentially the same racially and ethnically.

In Mexico and the US there was frequent bitter warfare. But in Canada subjugation, pacification, and segregation on reservations was accomplished peacefully. Keeley’s explanation of how this occurred is extremely interesting. Essentially, it was a function of different central government and law enforcement policies.

Another opinion of Keeley’s is that the Inuit may have committed genocide against the Greenland Vikings: “The unequivocal traditions of the Inuit, not recorded until 1850, claim that their ancestors administered the coup de grâce to the fading Norse colonies in the course of mutual raids and massacres.” (p. 77) There is archaeological evidence to support the tradition.

The author analyzes the cross-cultural history of warfare from every conceivable angle: its prevalence and importance, frequency, degree of mobilization, tactics, weapons, fortifications, battles, raids, ambushes, massacres, primitive versus civilized warfare, prisoners, captives, war deaths, wounds, mutilation, trophy-taking (of body parts), cannibalism, looting and destruction, territorial acquisition, motives and causes of warfare, population density and pressure, trading, raiding, frontiers, attitudes toward war and peace, and the maintenance of peace.

Cannibalism

His discussion of cannibalism (pp. 103–106) illustrates his approach to these various subjects.

Anthropologists distinguish three kinds of cannibalism.

Ritual cannibalism, the most frequent type, involved consumption of a portion of a corpse for magical purposes—brain, heart, liver, bits of flesh, or ashes from various body parts mixed with a beverage. Such cannibalism was very widely distributed, though not the norm in prestate warfare.

Culinary or gastronomic cannibalism consisted of eating human meat as food. Starvation cannibalism occurred under famine conditions.

Academic disputes arise particularly over culinary cannibalism. “Neo-Rousseauians” deny that it ever existed anywhere, except under conditions of extreme starvation. While not true, “Certainly, it appears that many of the societies accused of culinary cannibalism either were being slandered by their enemies or, at most, practiced ritual cannibalism.” Alleged cases of culinary cannibalism often turn out to be exaggerations of ritual cannibalism or misinterpretations of customs having nothing to do with cannibalism, such as preserving skulls as war trophies.

Nevertheless, culinary cannibalism has occurred.

Ethnographic evidence concerning the Polynesians of the Marquesas Islands derived from native self-reports initially categorized them as ritual cannibals. However, wholesale consumption of human flesh leaves distinct forensic archaeological evidence in the form of human bones treated like the bones of meat animals.

Subsequent archaeological evidence from the Marquesas revealed, contrary to ethnographic accounts, that the scale of culinary cannibalism was large, and increased as the population expanded and other sources of meat disappeared.

Additional evidence for culinary cannibalism has been found among tribes and chiefdoms in southern Central America and northeastern South America. Many tribes “reputedly consumed large numbers of their dead foes and captives. Notwithstanding some kind of magical or religious justification, several of these groups seemed to have positively relished human flesh.”

People in Oceania, sections of the Congo, and Amerindian tribes in the American Southwest also ate human victims. Cannibalism occurred as well in Early Neolithic (3000–4000 BC) southern France and portions of Bronze Age and Early Iron Age Europe.

The Aztecs are a special case. Keeley does not accept the contention of Marxist Jewish anthropologist Marvin Harris that the Aztec empire was the only “[culinary] cannibal state.” (Aztec society is considered a state or civilization rather than a tribe.)

“There can be little doubt,” Keeley writes, “that the Aztecs annually sacrificed large numbers of war captives in their great temples and that parts of these victims’ bodies [ritual cannibalism] were eaten. There were even recipes for human stews.” Archaeological excavation “has uncovered ample evidence of human sacrifice but none yet of cannibalism.” He leaves open the possibility that future excavations might turn up evidence of culinary cannibalism.

Keeley concludes, “It is clear that the consumption of enemies’ corpses has occurred in the warfare of several tribes and chiefdoms. Victorious states may have ruthlessly exploited the vanquished, but, with the exception of the Aztecs, they have never actually consumed them.”

Discussion of cannibalism covers only four pages in Keeley’s book, and I have omitted most of the details, supporting evidence, and citations.

Scaling the Data

Keeley presents the data he has gathered and tabulated proportionally, measuring deaths and other figures against the size of the societies in question. It is this approach that suddenly places primitive and modern warfare on a proper analytical footing.

The author has constructed several graphs, typically with percentage figures along one axis and type of society along the other: prehistoric, primitive, civilized, tribal, ancient, modern, hunter-gatherer, horticulturalist, pastoralist, and state entities.

Graphs show percent of male populations mobilized, percent killed and wounded in specific battles, annual war deaths as percentage of mean population, percent of deaths from warfare by society, and percent of territorial change per generation.

An appendix consisting of seventeen supplementary tables tabulating statistical data used in the text is included at the end of the book. The tables were constructed from a wide array of academic studies, many of which were cross-cultural in nature.

Because the proportional approach is central to Keeley’s method, it is worth quoting his argument at length:

Some readers may be unconvinced by percentage comparisons between populations of hundreds or thousands of people and populations of millions or tens of millions—that is, they are more impressed by absolute numbers than ratios. However, consistent with such views, such skeptical readers must also disdain any calculations of death rates per patient or passenger-mile and therefore always choose to undergo critical surgery at small, rural, Third World clinics and fly on small airlines. At such medical facilities and on such airlines, the total number of passenger or patient deaths are always far fewer than those occurring on major airlines or at large university and urban hospitals. These innumerate readers should also prefer residence on one of the United States’s small Indian reservations to life in any of its metropolitan areas since the annual absolute number of deaths from homicide, drug abuse, alcoholism, cancer, heart disease, and automobile accidents will always be far fewer on the reservations than in major cities and their suburbs. (p. 214 n. 21)

Not Perfect

Keeley deserves enormous credit for debunking an asinine anti-white narrative (which his book very effectively does), but he is not perfect.

Keeley harbors the academic’s simplistic, black-and-white detestation of Germany, saying that by his “conservative calculation,” excluding deaths from disease and starvation, “the annual homicide rate of Nazi Germany (1933 to 1945)” qualifies it as “the most homicidal society ever recorded.” (p. 206, n. 11)

Nowhere is the deadliness of Communism discussed. The USSR is mentioned only in connection with its casualties in WWII: “In modern history, Nazi Germany is unique in both the scale and the indiscriminateness of its homicides.” (p. 214, n. 28)

Keeley even writes, “The human-hide lampshades produced at Nazi death camps are perhaps the modern era’s preeminent symbol of evil.” (p. 102)

He does not define his nonstandard use of “homicide,” but it obviously includes alleged camp deaths and probably some or all enemy military deaths as well. Nevertheless, Germany (or Europe, when figures are inclusive) is at the bottom, not the top, of his tabulated statistical rankings, which invariably show primitive warfare to have been far more lethal and violent, proportionally speaking, than modern conflicts.

In WWII, the Allies “delivered the world from evil” through the use of “total war.” Keeley approvingly quotes British historian H. P. Willmott’s belief that 57 million dead is “a small price to pay for ridding the world of depraved wickedness.” (p. 222, n. 2) (Academics, like politicians and bureaucrats, are casual about the loss of human life as long as the killing serves their ideological predilections.)

Keeley is a garden-variety egalitarian: “all members of our species have within rather narrow limits of variation the same basic physiology, psychology, and intellect.” Variations in temperament or intellect “have no value in explaining social or cultural differences between groups.” People of every racial background win Nobel Prizes. “The many and profound differences in technology, behavior, political organization, and values” among the peoples of the Earth are explained solely by “nongenetic” “material and social factors.” “This attitude reflects not just the antiracist tenor of the twentieth century, but also the accumulated facts and especially the experiences of ethnographers.” (p. 180)

The allusion to “accumulated facts” as proving human sameness is significant because, unlike most academics, Keeley places a high premium on facts and evidence—it was, after all, hard archaeological and anthropological data that compelled him to abandon his faith that civilization is inherently evil.

Clearly, breaking free of one overarching societal myth does not of necessity open a man to new ideas, or produce general skepticism or caution. Keeley does not ask himself, “If this was wrong, what other widely-held beliefs might also be constructed upon sand?” Instead, he simply reaches a dead end and switches his impressive critical faculties off.

This is not to say that the author beats the reader over the head with his misguided beliefs—he doesn’t. They play little role in the overall discussion. Nevertheless, they constitute his guiding principles.

Furthermore, Keeley does not draw sensible conclusions from his empirical findings, leading him to deduce some rather appalling “lessons” from his survey.

Though rejecting the myth of the pacified past out of hand, and with it the unequivocal conclusion “that the only answer to the ‘mighty scourge of war’ is a return to tribal conditions and the destruction of [Western] civilization,” he remains committed to the “practical prospect for universal peace.” (p. 179)

Peace will be achieved in familiar Left-wing fashion by creating

the largest social, economic, and political units possible, ideally one encompassing the whole world, rather than allowing those we do have to fragment into mutually hostile ethnic or tribal enclaves. The degree of mutual interdependence created by modern transportation and communications long ago rendered the concepts of national and ethnic self-sufficiency and self-determination absurd and dangerous delusions. (p. 181)

World peace will be achieved without resort to “totalitarian tyranny, disastrous economic policies, or state imposition of cultural or religious uniformity”—or, for that matter, massive warfare and permanent, institutionalized violence and injustice. (p. 181)

So the man who challenged stereotypes through laborious theoretical and empirical work didn’t learn as much from his intellectual breakthrough as one might have expected.

Fortunately, Keeley generally keeps these cherished if erroneous beliefs to himself and permits his considerable accumulation of the evidence do most of the talking. The author adheres to facts rather than dogma at least within his specialty—no small feat for an academic.

I highly recommend this book. It is full of useful information and insights. At only 245 pages it is quite short—183 pages of text plus an appendix, bibliography, footnotes, and index. The rudimentary 4-page index could have been usefully expanded.

White nationalists and patriotic military personnel alike—active duty, academic, retired, conservative, libertarian, or pro-white—can learn a great deal from this overview. A cursory check of the Internet provides no indication that the book is being consistently used as a standard text in military curricula.

Professor Keeley has done a great service by writing War Before Civilization.

 


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jeudi, 16 février 2012

La valeur travail dissoute
 dans le néolibéralisme

La valeur travail dissoute
 dans le néolibéralisme

En 2007, Nicolas Sarkozy avait fait de la « valeur travail » un argument central d’une campagne électorale victorieuse. Cinq ans plus tard, cette dernière est plutôt en lambeaux. Car ce discours, dont l’efficacité reposait à la fois sur les faiblesses de la gauche en ce domaine et sur une certaine confusion sémantique, s’est brisé sur les effets délétères des orientations économiques néolibérales que le gouvernement a impulsées contre vents et marées.

Promouvoir la « valeur travail »… En fait c’est avant tout le slogan « travailler plus pour gagner plus » qui a incarné cette démarche, explicitement hostile aux trente-cinq heures, parées de tous les défauts : étouffoir mis sur le pouvoir d’achat, encouragement à la paresse, carcan posé contre la nécessaire flexibilité et compétitivité de nos entreprises. Or les trente-cinq heures ne justifiaient pas cette diabolisation, même si on pouvait en critiquer nombre de limites. Si elles se sont traduites par une certaine modération salariale, elles ont tout de même aidé à la création de plusieurs centaines de milliers d’emplois et n’ont guère freiné – on peut même le regretter – la tendance au développement de la flexibilité du temps de travail à l’initiative des directions d’entreprise. Leur faiblesse tenait plutôt dans l’intensification et la dégradation du sens du travail qu’elles ont accompagnées, notamment dans les secteurs les moins qualifiés et les moins organisés syndicalement du monde du travail. Pouvoir faire un travail de qualité, conforme aux valeurs que l’on investit dans son activité professionnelle, est devenu encore un peu plus difficile.

 

C’est sans doute pour avoir été insuffisamment attentive ou trop défensive à propos de cette dimension essentielle de la « valeur travail » – enjeu de sens et de reconnaissance, y compris bien entendu dans la dimension du salaire, mais aussi du pouvoir d’agir et de dire son mot sur le lieu de travail – que la gauche a été sévèrement battue il y a cinq ans.

Cinq ans plus tard, la preuve a été faite des impasses du néolibéralisme en matière de revalorisation du travail. Ce n’est pas sans raison qu’au cours des manifestations d’opposition aux décisions gouvernementales des dernières années le slogan initial a pu être retourné en « travailler plus pour gagner moins ». Car en quoi consiste la « valeur travail » dans notre société ? D’abord en la possibilité de travailler régulièrement : le nombre de chômeurs et de précaires atteint des records. Ensuite dans une rémunération décente : huit millions de personnes sont en dessous du seuil de pauvreté et le bilan du RSA en matière de réinsertion est dérisoire. Enfin, en la possibilité de se reconnaître dans un travail de qualité, réalisé dans des conditions décentes : la souffrance au travail, qui trouve son expression extrême dans des suicides au travail, fait des ravages. Ajoutons un travail qui ne dégrade ni la santé ni l’environnement : les catastrophes alimentaires et sanitaires font la une de l’actualité.

Mais la victoire possible de la gauche dans quelques semaines se fera-t-elle simplement « par défaut », sur la base du bilan négatif de Nicolas Sarkozy en ce domaine comme en bien d’autres ? Où la revalorisation du travail trouvera-t-elle toute la place qu’elle mérite dans la campagne électorale ?

L’Humanité