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mardi, 08 juillet 2025

Attaques contre des navires concernant la Russie témoignent d’une coopération britannico-ukrainienne

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Attaques contre des navires concernant la Russie témoignent d’une coopération britannico-ukrainienne

Source:  https://dissident.one/aanvallen-op-schepen-met-betrekking...

Il semble que les attaques contre des navires liés à la Russie se produisent désormais de manière régulière, écrit Moon of Alabama :

Une explosion a frappé le pétrolier Vilamoura, qui naviguait sous drapeau des Îles Marshall et transportait environ un million de barils de pétrole brut, au large des côtes de la Libye, selon l’opérateur grec TMS Tankers. – Greek City Times, 1er juillet 2025

Suite à l’explosion, la salle des machines a été submergée, rendant le navire inutilisable. TMS Tankers a indiqué que le navire, qui se dirigeait, depuis Zueitina, en Libye, vers Gibraltar, sera probablement remorqué vers la Grèce mardi ou mercredi. La cause de l’explosion reste inconnue.

La société de sécurité Vanguard a évoqué vendredi la possibilité que le Vilamoura ait été touché par une mine, mais a précisé que les autorités n’avaient encore rien confirmé.

L’exploitant s’est distancié des spéculations selon lesquelles le navire aurait été la cible de saboteurs.

Selon le Financial Times, il s’agit au moins du cinquième pétrolier (dûment archivé), cette année, à avoir été victime d’explosions:

"Une série d’attaques mystérieuses avec des mines de type limpet contre des pétroliers a ébranlé le monde maritime. On spécule que ces explosions font partie d’une campagne de sabotage soutenue par un État".

Cinq navires ont été touchés par des explosions délibérées cette année. Le dernier incident s’est produit la semaine dernière, lorsque la salle des machines du pétrolier grec Vilamoura a été submergée alors qu’il naviguait au large de la Libye.

Quelques semaines après les attaques, tous les navires ont accosté dans des ports russes. Certains experts en sécurité suggèrent donc que l’Ukraine aurait été impliquée dans ces explosions.

Le rapport du FT ne mentionne toutefois pas le cas d'un navire de fret russe qui aurait été attaqué à l'aide d'explosifs fin 2024 et aurait coulé:

"L'exploitant russe d’un cargo, qui a coulé en Méditerranée entre l’Espagne et l’Algérie, a déclaré jeudi que le navire avait été frappé par une série d’explosions dues à du sabotage".

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"Oboronlogistica, une entreprise d’État qui exploitait le cargo Ursa Major, a indiqué que le navire avait été détruit par trois explosions puissantes juste au-dessus de la ligne de flottaison. Selon l’entreprise, le navire a coulé à cause d’une "attaque terroriste"".

Dans un communiqué de l’agence de presse d’État russe RIA Novosti, l’entreprise a indiqué que les explosions avaient laissé un trou, côté tribord du navire, et que la salle des machines avait été envahie par une fumée épaisse, empêchant l’équipage d’y pénétrer. Elle a ajouté que les dommages à la salle des machines rendaient impossible l’activation des pompes et le maintien de la flottabilité du navire.

L’entreprise a rapporté que le navire, l’un des plus grands cargos russes, avait quitté Saint-Pétersbourg et transportait deux grues lourdes et d’autres équipements vers le port de Vladivostok, sur la côte est de la Russie.

Tous ces attaques semblent avoir été menées à l'aide de mines limpet magnétiques. Ces mines sont fixées sur la coque d’un navire lorsqu’il est à l’ancre ou amarré. Elles peuvent être déclenchées par un minuteur ou un signal radio.

La campagne contre ces navires liés à la Russie pourrait être une opération ukrainienne. Mais je serais surpris si les Britanniques n’y étaient pas impliqués.

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L'Ukraine n’est pas connue pour avoir un accès aisé aux ports de la Méditerranée et pour ses spécialistes qualifiés en plongée. Le British Special Boat Service (SBS), en revanche, l'est :

"Le SBS dispose d’une sous-unité spécialisée dans la manipulation de véhicules transportant des nageurs (SDV), mieux connue sous le nom d'unités SDV.

Ces véhicules, lancés depuis des sous-marins, sont idéaux pour installer des mines limpet sur la coque des navires, sans éveiller la suspicion.

Le Royaume-Uni a participé à la planification de l’attaque ukrainienne à Kursk. Il a été impliqué dans plusieurs opérations de sabotage menées par le service de renseignement militaire ukrainien sur le territoire russe. Des soldats britanniques meurent sur le front en Ukraine.

Lorsqu’il s’agit d’enquêter sur des opérations de sabotage contre des navires, les unités antiterroristes russes doivent prêter toute leur attention à d'éventuels acteurs britanniques plutôt qu’ukrainiens.

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lundi, 07 juillet 2025

Sahra Wagenknecht contre de nouvelles participations du BSW au gouvernement: «Nous avons été roulés dans la farine»

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Sahra Wagenknecht contre de nouvelles participations du BSW au gouvernement: «Nous avons été roulés dans la farine»

Berlin. La participation du BSW au gouvernement en Thüringe et Brandebourg n’a pas été favorable au parti de Sahra Wagenknecht – de nombreux électeurs et sympathisants ont été déçus par la rapidité des alliances conclues avec les vieux partis que sont la CDU et la SPD. La cheffe du parti elle-même a exprimé aujourd’hui son scepticisme quant à d’éventuelles futures participations au gouvernement. Dans un entretien avec le Redaktionsnetzwerk Deutschland (RND), elle a souligné que les dirigeants du BSW ne sont plus prêts à faire partie « d’une coalition sans profil », « dont le seul dénominateur commun est d’être contre l’AfD ». Cela concerne notamment les prochaines élections régionales de l’année prochaine.

Sahra Wagenknecht a conseillé à la CDU en Saxe-Anhalt d’envisager un gouvernement minoritaire ou même une coalition avec l’AfD. « Le cordon sanitaire (Brandmauer) est une idiotie antidémocratique qui ne fait que favoriser l’AfD », a-t-elle expliqué. La CDU aurait dû intégrer l’AfD plus tôt, « quand elle était encore bien moins radicale ». Si cela continue à ne pas se produire, il pourrait bientôt y avoir dans l'Est rien que des gouvernements portés par la seule AfD, car « ils n’auraient alors plus besoin de personne pour former une coalition ».

Les participations précédentes du BSW en Thüringe et dans le Brandebourg ont plutôt nui au parti, a reconnu Sahra Wagenknecht. « L’année dernière, nous avons fait des erreurs, surtout en Thüringe. » Le BSW s’est « en partie laissé manipuler par d’autres partis », a-t-elle critiqué. Les sondages dans le Brandebourg et en Thüringe ont montré que beaucoup d’électeurs « espéraient quelque chose d’autre de notre part, quelque chose que nous n’avons pas pu fournir en étant dans le carcan d’une coalition avec les vieux partis ». Ce problème a été « sous-estimé » et, à cause de cela, « nous avons déçu les gens, ce qui a aussi nui à notre parti dans son ensemble ».

Pour les élections régionales de 2026, Sahra Wagenknecht a annoncé une meilleure préparation : « Nous formulerons des revendications très claires. » Son avenir personnel dans le BSW est une question ouverte. Lors du congrès du parti prévu pour novembre, une décision sera prise sur un changement de nom et une nouvelle direction. « Je continuerai à m’engager pour le BSW, indépendamment de la fonction précise que je pourrais occuper », a assuré Sahra Wagenknecht. « Je ne vais pas partir et laisser le parti seul. Mais nous devons nous ouvrir davantage, nous avons besoin de plus de visages bien profilés pour nous présenter au public, car nous avons, dans nos rangs, beaucoup de très bonnes personnes ». 

 

La députée européenne de la FPÖ Petra Steger sur la criminalisation des forces patriotiques par «la justice devenue arme politique»

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La députée européenne de la FPÖ Petra Steger sur la criminalisation des forces patriotiques par «la justice devenue arme politique»

Source: https://www.unser-mitteleuropa.com/170839

Dans un communiqué de presse, la députée européenne de la FPÖ, Petra Steger, dénonce vivement la criminalisation des forces politiques dans l’UE par « l’instrumentalisation de la justice devenue arme politique ».

La nouvelle accusation portée contre l’ancien Premier ministre tchèque Andrej Babiš (photo) n’est pas un cas isolé selon la députée européenne Petra Steger (FPÖ), mais fait partie d’une tendance européenne bien plus large. « Dans de plus en plus d’États membres de l’UE, nous observons le même mécanisme alarmant. Ceux qui s’opposent à l’établissement bruxellois, qui pensent et agissent en patriotes, deviennent la cible de la justice. En Hongrie, en Pologne, en Roumanie ou en Italie – partout où des forces de droite et conservatrices gagnent des majorités, des adversaires politiques cherchent à utiliser les tribunaux pour réaliser ce qu’ils n’ont pas pu obtenir aux urnes », avertit Petra Steger.

L’affaire Babiš est exemplaire d’un développement où les principes de l’État de droit sont de plus en plus sacrifiés à des intérêts partisans: « Le fait que, juste avant des élections importantes, des enquêtes soient lancées ou que des procès soient rouverts, suscite des doutes légitimes sur l’indépendance de nombreux systèmes judiciaires – même si cela est régulièrement nié par les institutions de l’UE ».

La députée FPÖ voit dans cette stratégie une expression d’une peur profonde de l’établissement face au changement démocratique: « Les électeurs ont depuis longtemps compris que les partis traditionnels européens ne défendent plus leurs intérêts. La classe politique réagit à cela par la répression plutôt que par l’autocritique. Mais le temps de l’ingérence est révolu – l’Europe devient patriotique ! ».

Enfin, Petra Steger exige une transparence totale quant à l’influence politique qui s'exerce sur les enquêtes et jugements judiciaires: « Si l’UE veut vraiment défendre l’État de droit, elle doit aussi veiller à ce que les tribunaux ne deviennent pas les complices d’une élite en déroute. La justice ne doit pas devenir une arme contre l’opposition ! ».

Une guerre pour sauver le dollar

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Une guerre pour sauver le dollar

Par Jürgen Elsässer

Source: https://www.compact-online.de/ein-krieg-um-den-dollar-zu-... 

Le retournement brusque du président américain, qui, en un tourne-main, est passé du statut de président de la paix à celui de fauteur de guerre, a, outre la pression du lobby israélien, des raisons économiques: les États-Unis sont en faillite.

Le problème principal des États-Unis n'est pas la dette en soi (actuellement 37 billions de dollars), elle qui était au centre du conflit entre Donald Trump et Elon Musk : ce dernier voulait la réduire résolument, le premier la freinait.

Le vrai problème est plutôt ladite "dette extérieure nette", c'est-à-dire la différence entre les dettes envers l'étranger et les créances propres sur l'étranger: celle-ci atteignait déjà en 2021 18 billions de dollars, soit près de 80% du produit intérieur brut annuel. À titre de comparaison: en 1989, la RDA était considérée comme en faillite parce que sa dette envers l'Ouest représentait 16% du PIB annuel. En réalité, aucun investisseur responsable ne voulait plus prêter de l'argent à "l'Etat socialiste allemand des ouvriers et des paysans". Mais dans le cas des États-Unis, la dette publique et le déficit commercial ne sont pas une raison suffisante pour les milliardaires et fonds du monde entier de ne plus investir leur argent aux États-Unis… Ce qui semble fou a une raison plausible: le gouvernement américain peut, contrairement à celui de tout autre État débiteur, promettre aux acheteurs de ses titres d’État de les forcer à tout moment et en tout lieu, par la force militaire, à échanger ces papiers sans valeur contre des marchandises.

Des pays comme l’Irak sous Saddam Hussein ou la Libye sous Khadafi, qui menaçaient de ne plus facturer leurs ventes de pétrole et de gaz en dollars mais en monnaies concurrentes, ont été déclarés "États voyous" et liquidés militairement. Actuellement, la même menace plane sur l’Iran, qui possède les plus grandes réserves mondiales de pétrole et de gaz, et qui fournit également ces énergies fossiles en grande quantité à la Chine, principal rival des États-Unis. La protection d’Israël, les armes de destruction massive — tout cela n’est que propagande. Quand les Anglo-Américains parlent des droits de l’homme, ils pensent en réalité aux droits d’exploitation.

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L’impérialisme du papier-monnaie

La politique étrangère américaine se trouve face à un dilemme: le billet vert n’est plus garanti par l’or ou par une performance économique réelle, mais seulement par la force militaire brute. Plus l’économie américaine sombre dans le rouge, plus la politique étrangère sera agressive pour encaisser les dettes et faire taire les créanciers. En même temps, cette posture de plus en plus agressive a modifié la structure des créanciers des États-Unis: les banques d’État de Chine et du Japon, qui, il y a 15 ans, détenaient la majorité des bons du Trésor américain, se sont depuis éloignées de leurs papiers dollar. Elles ont été remplacées par des clients non étatiques: super-riches du monde entier et fonds souverains comme Blackrock. La Fed peut continuer à construire sur ces "rochers noirs".

Mais de nombreux investisseurs du Sud global et de la sphère BRICS sont devenus nerveux, après que les États-Unis (tout comme l’UE) ont gelé les avoirs des riches Russes (et pas seulement de l’État russe). Une telle expropriation de grands investisseurs n’avait auparavant été vue que dans des États socialistes. Depuis, les titres américains ne sont plus un refuge sûr pour les magnats de la finance — cela prive le moteur perpétuel de l’enrichissement américain de sa base.

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Dans COMPACT magazine, n°12/2024, j’avais déjà abordé ce sujet. Mon article de l’époque se terminait par une réflexion sur les alternatives qui s'offraient à Trump :

"Le chemin hors du piège de la dette mène Trump dans une impasse: il doit soit restaurer la crédibilité militaire des États-Unis (et donc la couverture hors-économique du dollar) après le fiasco en Afghanistan, ce qui pourrait — contre sa volonté — le conduire à des aventures: si ce n’est contre la Russie, alors contre l’Iran ou la Chine. Ou il tente de rallier à nouveau les milliardaires étrangers en s’orientant vers les prétendus "États voyous" du groupe BRICS, en mettant fin au gel illégal des avoirs russes, et en essayant un genre de "Grand Deal" avec Moscou et Pékin. Mais alors, il se retrouve face à Wall Street, à la City de Londres et à Blackrock".

De nos jours, il est évident que Trump a choisi la seconde option, celle de la guerre.

***

Pour en savoir plus sur la crise économique mondiale et l’impératif économique, lisez cette édition spéciale de COMPACT:  https://www.compact-shop.de/shop/compact-spezial/welt-wir... 

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Fanatiques et fin du monde

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Fanatiques et fin du monde

Par Federico Bischoff

Source: https://www.compact-online.de/fanatiker-und-weltuntergang...

Les fondamentalistes religieux du judaïsme, du christianisme et de l’islam rêvent de la dernière bataille, où le diable sera vaincu. Après quoi, le royaume de Dieu s’installera. Pour en savoir plus sur les prophéties religieuses de la fin du monde et leurs effets sur l’histoire mondiale, lisez le bestseller d’Oliver Janich, « Le secret dévoilé ». Très pertinent ! En savoir plus ici: https://www.compact-shop.de/shop/neu/oliver-janich-das-of....

Les gens ordinaires craignent bel et bien qu’une guerre mondiale éclate. Bertolt Brecht écrivait — comme pour lancer un avertissement aux Allemands : « La grande Carthage a mené trois guerres. Elle était encore puissante après la première, encore habitable après la deuxième. On ne pouvait plus la retrouver après la troisième. »

Les fanatiques voient cela plus froidement. Mao se moqua de la crainte des Soviétiques d’un conflit nucléaire mondial et de la politique de détente de Moscou, en argumentant que la Première Guerre mondiale avait libéré un sixième de la Terre du capitalisme, et qu’après la Seconde, d’autres pays étaient devenus socialistes — alors pourquoi craindre la Troisième ?

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Pour les apocalypse juifs, la situation est similaire. Au milieu des batailles de 1914-1918, l’Empire britannique donna, pour affaiblir l’ennemi ottoman, le décisif coup de pouce à la colonisation sioniste de la Palestine avec la Déclaration Balfour. Et après 1945, la création de l’État d’Israël ne pouvait plus être empêchée. Alors, qu’est-ce qui s’oppose à une nouvelle guerre mondiale ? — demandent les cyniques.

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Martin Buber résuma la pensée des factions apocalyptiques du judaïsme dans son roman « Gog et Magog » :

« Le monde des nations est en agitation, et nous ne pouvons pas vouloir qu’il s’arrête, car c’est seulement lorsque le monde se met en travail qu’adviennent les douleurs du Messie. La délivrance n’est pas un cadeau fini de Dieu, déposé du ciel sur la terre. Dans de grandes douleurs, le corps du monde doit accoucher, il doit toucher le seuil de la mort avant de pouvoir naître. »

Et encore : « Nous devons œuvrer pour que cette lutte s’intensifie jusqu’aux douleurs du Messie. Les nuages de fumée autour de la montagne du monde sont encore petits et éphémères. De plus grands, plus persistants, viendront. Nous devons attendre le moment où le signe nous sera donné… Il ne nous est pas ordonné de l’éteindre, mais de l’enflammer. »

L’outil de Dieu

La dernière phrase est décisive. Le vrai pieux, selon la théorie, n’attend pas la venue du royaume de Dieu, mais agit activement en provoquant l'Armageddon. Celui qui souhaite la venue du Messie sait très bien que la dernière bataille de l’humanité doit la précéder. Dans toutes les religions monothéistes, elle se déroule en Terre Sainte.

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Fatalement, l’alliance formée entre des juifs fondamentalistes et des évangéliques partageant les mêmes idées s'avère particulièrement dangereuse. En réalité, l'ancien Testament et les enseignements du Nouveau Testament présentent de grandes différences: Yahvé est un Dieu colérique et punisseur, qui extermina les ennemis d’Israël, et qui contraint les pécheurs de ses fidèles à l’obéissance par le feu et l’épée (voir Sodome et Gomorrhe). Jésus, lui, prêche le pardon et l’amour des ennemis, et il sauve non seulement les Israélites, mais toute l’humanité.

Mais il existe un pont théologique enjambant cette fracture, c’est la fameuse Révélation de Jean dans le Nouveau Testament, qui correspond à la description de l’Armageddon dans l’Ancien Testament par le prophète Ézéchiel. Il y est question du jugement contre « Gog de Magog », un souverain du Nord (ce qui peut s’interpréter comme Babylone/Bagdad, l’Iran ou aussi la Russie d’aujourd’hui).

Ézéchiel : « Oui, tu viendras de ton lieu, du plus extrême Nord, toi et beaucoup de peuples avec toi, qui monteront tous sur des chevaux, une multitude grande et un peuple puissant. Tu monteras contre mon peuple Israël, comme une nuée obscure qui couvre le pays. »

Gog et ses armées seront totalement détruits :

« Et je jugerai contre lui lui envoyant pestilence et sang ; je ferai pleuvoir des pluies diluviennes, des grêlons, du feu et du soufre sur lui et sur ses hordes de guerre, sur beaucoup de peuples qui sont avec lui. »

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Dans l’Apocalypse de Jean, une bataille similaire est décrite. Cependant, Gog n’apparaît pas, et les ennemis sont Satan, « la bête », « le faux prophète » et « la prostituée Babylone ». À Jérusalem, 144.000 pieux seront rachetés. Les sept sceaux, sept trompettes et sept coupes de la colère répandent mort et terreur, peut-être avec des armes de destruction massive. À la fin, tous les incroyants seront jetés « dans une mer de feu et   de soufre brûlant ». Ensuite, Christ revient sur terre et établit son royaume millénaire.

Chez les juifs fondamentalistes, qui nient Jésus en tant que Sauveur, la venue du Messie est liée à la restauration du mythique temple du roi Salomon. La communauté Chabad Loubavitch est convaincue que cela doit se produire sur le site de l’ancien temple, c’est-à-dire le Mont du Temple à Jérusalem. Mais cela nécessiterait d’abord de démolir un bâtiment important: la mosquée al-Aqsa, vieille de 1300 ans. Enfin, il serait impensable de construire le troisième temple tant qu’un sanctuaire musulman s’y trouve.

Déjà en 1948, le grand-rabbin de l’époque déclarait :

« Tel Aviv ne sera pas la capitale, mais Jérusalem, car c’est là que se trouvait le temple de Salomon, et toute la jeunesse juive est prête à sacrifier sa vie pour conquérir le site de leur temple sacré. » Il est difficile d’imaginer que les musulmans renoncent à leur troisième lieu saint, après La Mecque et Médine, sans être chassés militairement de Palestine.

L’alliance apocalyptique

Les États-Unis, sous la direction des francs-maçons mais avec une majorité évangéliste, sont le creuset où se mêlent ultrareligieux évangélistes et juifs apocalyptiques. Ces fameux puritains (du latin purus = pur) ont émigré de Grande-Bretagne, après les guerres de religion entre anglicans et catholiques aux 15ème et 16ème siècle, quand une certaine tolérance s’était installée, où on les considérait, dès lors, comme dangereux à cause de leurs idées. Dans les colonies américaines, les fervents de l’Ancien Testament dominaient. Il y aurait eu plus de sorcières brûlées là-bas que sous les injonctions de l’Inquisition catholique.

Une coalition lâche entre la majorité blanche protestante (WASP) et les Juifs s’est formée dès avant la Première Guerre mondiale, car les banquiers juifs représentaient la base financière de la future grande puissance, mais cette alliance resta fragile à cause de l’antisémitisme des vieux puritains anglais.

Ce n’est qu’avec la création, au début des années 1970, du mouvement des néoconservateurs qu’une symbiose stable s’est formée, basée sur une solidarité sans compromis avec Israël et sur l'ambition américaine d'exercer une hégémonie sur le monde entier ; toute politique de détente, au Moyen-Orient comme vis-à-vis de l’URSS, a été rejetée. Les néoconservateurs atteignirent leur apogée sous ce président religieux que fut George W. Bush (2001-2009), notamment après le 11 septembre.

Les principaux centres de décision — notamment au Pentagone — furent occupés par des tenants de l'idéologie neocon. Des groupes de travail communs entre le Likoud israélien et les républicains américains (par exemple par le truchement du think tank « Project for the New American Century ») ont sans cesse préparé les guerres qui furent menées contre les États islamiques, notamment en falsifiant des preuves quant aux armes de destruction massive qu'aurait possédées Saddam Hussein, alors qu'elles n’ont jamais existé. Une attaque contre l’Iran, prévue dès 2008/2009, a été évitée de justesse suite à l'intervention de l’état-major américain.

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La bataille finale dans l’islam

La figure salvatrice du Mahdi apparaît chez les musulmans après la mort de Mahomet, lorsque les califes ont éliminé le successeur désigné du prophète, Ali. Les partisans de ce dernier, les chiites, voient, depuis, Ali comme le souverain attendu, celui qui doit rétablir la vraie foi. À la fin des temps, il unira tous les musulmans et participera à la bataille décisive contre Dajjâl (le mal ultime, comparable à l’Antéchrist).

L’historien nord-africain islamisé Ibn Khaldoun décrit comme suit, au 14ème siècle, le déroulement de cette bataille finale:

« Ensuite, Jésus descendra et tuera Dajjâl. Ou Jésus descendra avec lui, aidera à tuer Dajjâl et priera derrière lui. » La description montre que, même s’il n’est pas vu comme le Messie, dans l’islam, Jésus joue un rôle positif et important, comme prophète et aussi dans les événements de la fin des temps.

Ce personnage a inspiré les sanglants soulèvements mahdi contre la domination coloniale britannique au Soudan à la fin du 19ème siècle. En Iran, le Mahdi est considéré depuis la Révolution islamique de 1979 comme le véritable chef de l’État. Sa résurrection n’est prophétisée qu’après des bouleversements et des guerres majeurs, ce qui alarme l’Occident, craignant que les mollahs ne provoquent une telle évolution.

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Au cours des trente dernières années, l’Iran a adopté une politique extérieure défensive. Des milices chiites comme le Hezbollah ont participé, avec le soutien de Téhéran, à la lutte contre al-Qaida et l’État islamique, et ont défendu aussi, dans la guerre civile syrienne et au Liban, des villages chrétiens. La relation avec le Hamas sunnite, jusqu’à l’escalade récente, était froide.

 

Le ministre italien de la défense secoue l’OTAN: «L’alliance n’a plus de légitimité»

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Le ministre italien de la défense secoue l’OTAN: «L’alliance n’a plus de légitimité»

Rome. La structure qui régente le partenariat militaire occidental grince de toutes parts. Après que le président slovaque Fico a récemment évoqué une sortie de son pays, c’est maintenant un autre coup dur qui vient de Rome: dans un discours fondamental et remarquable, le ministre de la Défense italien Guido Crosetto, peu avant le sommet de l’OTAN, a remis en question la légitimité de l’alliance occidentale. « L’OTAN n’a plus de légitimité », a déclaré le ministre lors d’une intervention à Padoue, ajoutant que les temps avaient changé : « Les États-Unis et l’UE ne sont plus le centre du monde. »

Crosetto, qui est membre du parti de droite Fratelli d’Italia et est considéré comme un proche conseiller de Giorgia Meloni, appelle à une réorientation fondamentale de l’alliance: pour continuer à garantir paix et défense mutuelle, il faut coopérer avec le Sud global.

Les propos interviennent à un moment critique — l’Italie, depuis 1949, l’un des douze membres fondateurs de la Charte de l’Atlantique Nord, est l’un des piliers historiques du pacte. Juste avant la réunion des 32 États membres à La Haye, où Donald Trump, président des États-Unis, est aussi attendu, un membre clé de l’OTAN remet en question les bases mêmes de l’alliance.

Crosetto a également été plus loin lors de son discours à l’université de Padoue, exprimant des critiques acerbes sur le rôle de l’UE : « Nous parlons souvent comme si nous vivions encore il y a 30 ans. Mais tout a changé. » Il a poursuivi avec une critique mordante : « Nous parlons de l’Europe comme si elle comptait encore. Peut-être aurait-elle pu compter un jour, si elle avait joué un rôle politique qu’elle n’a justement pas joué. Si elle avait eu une politique étrangère ou une défense originale. Mais, comme ce ne fut pas le cas, son temps est révolu. »

Ce pas en avant est particulièrement remarquable compte tenu de l’évolution politique de la Première ministre Meloni. Elle doit son succès électoral en 2022 à une critique acerbe contre l’UE, mais s’est depuis révélée une partenaire fiable dans la politique ukrainienne de Bruxelles. En tant que présidente des Fratelli d’Italia, elle dirige une coalition de trois partis de droite et conservateurs, ce qui donne un poids supplémentaire aux déclarations de Crosetto. Reste à voir si ses critiques ne sont que de la rhétorique ou si elles annoncent réellement un virage en politique étrangère de l’Italie (mü).

Source: Zu erst, juin 2025.

Comme l’Oncle Sam en Hexagone

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Comme l’Oncle Sam en Hexagone

par Georges Feltin-Tracol

On doit à Yannick Sauveur une excellente biographie de son ami Jean Thiriart parue en 2016 chez Pardès dans la collection « Qui suis-je ? ». Ce proche du fondateur de Jeune Europe a cependant commencé son militantisme aux débuts des années 1970 dans les rangs solidaristes. Il vient de publier une enquête très étayée et un réquisitoire solide sur un mal qui ravage la France.

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L’américanisation de la société française. Acculturation et perte d’identité (L’Æncre, coll. « Nouveaux enjeux du XXIe siècle », 2025, 310 p., 35 €) met en lumière une tendance inquiétante qui atteint tout l’Hexagone. Les Français se rêvent de plus en plus en Texans de la Seine, en Californiens du Rhin, en Floridiens de la Garonne, en New-Yorkais de la Loire et en Chicagoans du Rhône. Ce phénomène, particulièrement prégnant, est fort ancien. Il se manifeste à travers divers canaux de propagation dont ceux de la culture dite populaire : le cinématographe, la variété musicale, le roman et la bande dessinée.

Yannick Sauveur rappelle l’intervention primordiale de la CIA en matière culturelle afin de mieux façonner les « élites » d’Europe occidentale. Ainsi la construction européenne s’opère-t-elle dès le départ sous la tutelle implicite – mais réelle – des États-Unis d’Amérique ! Sous le prétexte facile de contrer la menace communiste soviétique, écrivains, journalistes et essayistes de renom s’engagent volontiers dans la promotion de l’atlantisme, de l’occidentalisme et du mondialisme sans toujours en connaître les aboutissements !

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Déjà dénoncée en son temps par Régis Debray dans Civilisation. Comment nous sommes devenus américains (2017) et L’Édit de Caracalla. Ou plaidoyer pour les États-Unis d’Occident (2002), l’américanisation ne se limite pas au haut de la société; elle se diffuse partout, y compris et surtout dans les zones rurales où prolifèrent festivals, clubs et fêtes locales de country music chaque fin de semaine. La langue de Molière est sérieusement touchée par cette mode détestable. Par la faute du Conseil constitutionnel présidé par le délétère Robert Badinter, la loi Toubon de 1994 ne s’applique pas (ou si peu). On ne traduit plus les titres des films ! Une flopée d’anglicismes (« expérimentation », « létal » ou « dispatcher ») métastase le français courant. Maintes enseignes – et pas seulement les salons de coiffure ! – emploient des termes angloïdes, c’est-à-dire un sabir bâtard qui n’est finalement qu’un globish lamentable. Le grand remplacement n’est pas démographique; il est aussi linguistique.

L’Union dite européenne est en pointe dans cette invasion insidieuse. Malgré le Brexit, l’unique langue (officieuse) de travail de la Commission et du fumeux Parlement demeure l’anglais par la faute des responsables français qui, à partir de 1974, ont renoncé à soutenir leur propre langue. Mais est-ce si surprenant quand Yannick Sauveur rapporte que cette politogenèse soi-disant européenne est de confection étatsunienne et que de nombreux politiciens et politiciennes hexagonaux en tant que Young Leaders de la French American Foundation servent de relais majeurs d’influence étrangère ? Par ailleurs, l’entité terroriste planétaire appelée OTAN renforce l’intégration des États d’Europe dans une matrice occidentale cosmopolite.

On connaît bien maintenant les connexions entre les cénacles mondialistes et les instances de l’État profond US. Certes, il n’y a jamais une identité complète de vue, de projet et d’ambition entre eux. Toutefois, il importe de prendre en compte qu’en-dehors du courant isolationniste qui récuse souvent l’Ancien Monde s’affrontent une tendance hégémoniste pour qui les États-Unis doivent assumer seuls la direction politique du monde, quitte à s’emparer de nouvelles terres, et une faction globaliste chez qui l’expansion du modèle étatsunien doit susciter l’arasement total des cultures, des peuples et des nations. Pour ce dernier groupe, l’occidentalisation, l’américanisation et la mondialisation ne sont pas les étapes successives d’un seul et même procédé, mais les manifestations parfois simultanées d’une procédure d’homogénéisation de très longue durée.

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Tel un déluge ou un raz-de-marée gigantesque, l’américanisation se retrouve partout, des arts dont l’art contemporain en est le fer de lance à la gastronomie. À la pause – déjeuner de Midi, le burger remplace le sandwich ! Quant aux divertissements, Disneyland – Paris attire un public venu de toute l’Europe pour déverser sur lui un récit détourné et dévoyé des mythes ancestraux européens. L’Oncle Sam pille sans retenue nos ressources, nos talents et notre imaginaire. Résultat, « l’aliénation culturelle, écrit Yannick Sauveur, va d’abord imprégner des enfants qui, dès le plus jeune âge, vont être conditionnés par l’american way of life. Ce n’est pas être excessif de dire que Disneyland symbolise à souhait l’impérialisme américain et l’américanisation culturelle et, circonstance aggravante, avec la complicité des dirigeants de notre pays ».

Les Français portent eux aussi une grand part de responsabilité dans cette « McDonaldisation » qui « est aussi, à travers le succès de toutes ces chaînes commerciales d’origine américaine, prévient encore Yannick Sauveur, le spectacle peu réjouissant de la standardisation poussée à l’extrême et aussi avec pour conséquence la mort des centres villes et le déclin voire la disparition des petits commerces ». Le corollaire de ce triste constat correspond à l’essor d’un hyper-individualisme perceptible à l’hypertrophie de la place de l’automobile, élément central dans la surconsommation. Il serait peut-être temps que l’opinion avisée délaisse cet engouement pernicieux et s’intéresse à cette discipline novatrice lancée dès 1991 par Thomas Molnar : l’américanologie.

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 163, mis en ligne le 2 juillet 2025 sur Radio Méridien Zéro.

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jeudi, 03 juillet 2025

Le kabuki du cessez-le-feu

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Le kabuki du cessez-le-feu

par Pepe Escobar

Au final, comme on pouvait s'y attendre, le directeur du cirque a fait TACO (« Trump Always Chickens Out », Trump se défile toujours).

Il était terrifié par trois développements cruciaux basés sur les faits réels.

  1. 1. Le message iranien sur les préparatifs à la fermeture du détroit d'Ormuz. La CIA avait averti Trump que la Chine était viscéralement opposée au blocus du détroit. Selon un vétéran du Deep State, c'est l'une des raisons pour lesquelles Trump a décidé de poursuivre malgré tout son opération théâtrale « spectaculaire » (sic) à Fordow. Mais lorsque le spectre d'un détroits d'Ormuz bloqué, détruisant l'économie mondiale est devenu réel, il a fait TACO.
  2. 2. L'avertissement iranien a été transmis par le bombardement de la base d'Al-Udeid au Qatar, le joyau militaire de l'hégémon en Asie occidentale. Même des sources atlantistes à Doha confirment que les dégâts causés à la base – évacuée – ont été « monumentaux », avec au moins trois missiles ayant atteint leurs cibles. Téhéran disait sans équivoque : « Nous pouvons vous frapper partout, à tout moment, avec tout ce que nous voulons. Et vos laquais du CCG vous en tiendront responsables. »
  3. 3. La raison principale est probablement que les génocidaires de Tel-Aviv épuisent rapidement leurs missiles intercepteurs ; en effet, tout leur réseau de défense aérienne, déjà perméable, est en difficulté. Lors du dernier tir de missiles iranien important sur la Palestine occupée lundi matin, le taux d'interception est tombé en dessous de 50% et l'Iran a commencé à viser le réseau électrique israélien. La nouvelle directive de l'Iran – offensive stratégique continue, pas de patience temporisatrice – visait à paralyser complètement l'économie israélienne. De plus, les génocidaires avaient déjà supplié Téhéran de « mettre fin à la guerre ». Téhéran a répondu que le moment n'était pas encore venu. Les génocidaires ont donc supplié papa Trump de les sauver.

La chaîne d'événements qui a conduit au cessez-le-feu reste obscure. Un facteur clé qui a accéléré les événements a été la rencontre personnelle de Poutine avec le ministre iranien des Affaires étrangères Araghchi au Kremlin.

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S'exprimant au nom de l'ayatollah Khamenei, Araghchi aurait demandé une livraison importante d'armes et surtout de systèmes de défense ; mais cela prendra du temps, d'autant plus que le partenariat stratégique récemment approuvé par la Douma et le Majlis à Téhéran n'est pas – officiellement – une alliance militaire.

Toutefois, selon des sources moscovites bien informées sur la rencontre, Poutine a placé la Russie au centre d'une possible résolution, évinçant ainsi Washington. L'équipe Trump 2.0 était furieuse. Trump s'est vanté que l'Iran et Israël l'avaient appelé presque simultanément pour convenir d'un cessez-le-feu. Balivernes: seul Tel-Aviv l'a fait. Poutine a une fois de plus clairement indiqué que la Russie soutiendrait l'Iran, offrant indirectement une issue à Trump.

Fidèle à son caractère, le directeur du cirque a sauté sur l'occasion pour annoncer son propre cessez-le-feu, à la manière d'une émission de téléréalité. Et cela seulement deux jours après s'être réjoui que le programme nucléaire iranien ait été « anéanti » (il insiste sur ce point même si les services secrets américains admettent que le programme pourrait avoir pris quelques mois de retard).

Un tabou suprême a été brisé

L'Iran a appris quelques leçons importantes de la manière la plus dure, en payant un prix terrible. Téhéran s'est montré trop transparent et raisonnable dans ses relations avec un groupe de gangsters : depuis l'autorisation de la surveillance nucléaire de l'AIEA, qui s'est avérée être un processus d'accumulation d'informations précieuses pour les objectifs israéliens, jusqu'à la croyance en la diplomatie et le respect d'accords qui ont été brutalement abandonnés.

Il n'y a pas de diplomatie lorsqu'il s'agit de traiter avec le Léviathan/Behemoth impérial, surtout lorsque celui-ci envisage avec horreur la réduction de son empreinte dans tout le Sud du monde.

Sur le plan intérieur, cependant, l'Iran passe à la vitesse supérieure. Il existe au moins trois factions opposées : l'ayatollah Khamenei et son cercle restreint, plus l'IRGC ; les réformateurs, incarnés par la présidence modérée de Pezeshkian ; et ceux que l'on pourrait appeler les nationalistes laïques, qui veulent un Iran fort mais pas une théocratie.

L'IRGC détient désormais tout le pouvoir. La défense de la patrie contre l'axe sioniste mortel, y compris l'hégémon, a cristallisé un sentiment généralisé d'unité nationale et de fierté. Tous les secteurs de la population iranienne – 90 millions d'âmes, que quelqu'un le dise au pathétique Marco Rubio – se sont ralliés sous le drapeau.

Conceptuellement, le cessez-le-feu – personne ne sait combien de temps il durera – est défavorable à l'Iran, car sa capacité de dissuasion croissante est désormais perdue. Israël va fébrilement renforcer ses défenses aériennes, tandis que l'Iran, seul, aura besoin de mois, voire d'années, pour se reconstruire.

Le modus operandi impérial reste le même. Le directeur du cirque a vu qu'une humiliation monstrueuse se profilait, quelque chose qui ressemblait au Vietnam d'Israël: il a donc annoncé un cessez-le-feu unilatéral puis s'est enfui.

Cependant, la configuration des prochaines batailles a changé. Si Washington décide d'intensifier à nouveau les hostilités ou de recourir à la pratique éprouvée de l'utilisation de proxys terroristes, l'Iran, en tant que leader de facto de la Résistance, ripostera avec détermination. Le mythe de l'invincibilité génocidaire a été brisé à jamais. Tout le Sud du monde l'a vu et prend désormais cet état de fait au sérieux.

Une discussion sérieuse reste ouverte sur la question de savoir si Téhéran optera finalement pour suivre le modèle nord-coréen afin de contrer l'imposition, jusqu'ici infructueuse, du modèle libyen et/ou syrien. L'enrichissement de l'uranium se poursuivra. Avec un rebondissement supplémentaire digne d'un film noir: personne ne sait où se trouve l'uranium.

L'Empire du Chaos, comme on pouvait s'y attendre, ne s'arrêtera jamais. Seule l'union du Sud du monde, animée d'une volonté de fer, pourra le contraindre à s'arrêter. Les conditions ne sont pas encore réunies.

Dans l'état actuel des choses, le véritable cessez-le-feu serait entre les États-Unis et le Sud du monde, guidé institutionnellement par la Russie, la Chine, les BRICS et diverses autres organisations multipolaires. Les chances que les classes dirigeantes américaines respectent un cessez-le-feu aussi durable, s'il devait jamais avoir lieu, sont inférieures à zéro.

Quant au cessez-le-feu entre l'Iran et Israël, ce n'est pas la fin de la guerre. Au contraire, c'est la fin – incertaine – de la première bataille chaude. Les chiens et les hyènes de la guerre reviendront, tôt ou tard. Il y aura encore et encore du sang. Cependant, au moins un tabou suprême a été brisé: l'entité qui pratique le culte de la mort en Asie occidentale peut vraiment être mortellement blessée.

 

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dimanche, 29 juin 2025

Sommet de l’OTAN 2025 : un blazer, des images et des messages

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Sommet de l’OTAN 2025 : un blazer, des images et des messages

Elena Fritz

Bron: https://pi-news.net/2025/06/nato-gipfel-2025-blazer-bilde...

Trump impressionné: pour la première fois, le président ukrainien Zelenskyj n’est pas apparu lors du sommet de l’OTAN à La Haye en pull vert olive, mais avec un veston sombre.

Vu de l’extérieur, c’était un sommet de l’OTAN comme beaucoup d’autres: beaucoup de caméras, beaucoup de promesses, beaucoup de rhétorique. Mais en regardant de près, on a pu remarqué: le décor est resté le même, mais la pièce a changé. Et un veston est devenue la star silencieuse de tout l'événement.

Dans quelques années, en repensant au sommet de l’OTAN 2025 à La Haye, on se souviendra peut-être moins des conférences de presse ou des déclarations finales — mais surtout du veston. Plus précisément: du veston de Volodymyr Zelensky. Pour la première fois, le président ukrainien n’est pas apparu en pull vert militaire, mais en tenue civile. Une rupture avec son rôle public antérieur — et peut-être un symbole involontaire de la dynamique modifiée au sein de l’alliance. Car même si personne ne voulait le dire tout haut: les coordonnées bougent. Pas de manière dramatique. Mais de façon perceptible.

Un sommet tissé de sous-entendus

Officiellement, tous ont souligné la détermination de l’OTAN à soutenir l’Ukraine. Le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, a loué l’unité de l’alliance, le soutien militaire, la ligne commune. On aidera Kiev à « tenir jusqu’à ce qu’une paix viable soit atteinte », a-t-on dit. Cela sonne bien. Mais que dit-il vraiment ?

D’une part: que la paix semble lointaine. D’autre part: que « tenir » militairement n’est pas une stratégie, mais un simple état de choses. Rutte a insisté sur le fait que les États-Unis continuent d’aider Kiev — par des renseignements, des systèmes de défense aérienne, un soutien logistique. Mais en même temps, ses mots contenaient un appel discret aux Européens: ces derniers devaient prendre plus de responsabilité, donner plus d’argent, fournir plus d’efforts propres. D’ici 2035, les dépenses de défense des États membres doivent augmenter pour atteindre cinq pour cent du PIB, la production d’armement doit être accrue, le personnel doit être renforcé, les stocks de munitions remplis — un programme d’investissement gigantesque sans débat de société, le tout justifié par le récit de la menace.

Trump n’est pas le problème — il est la nouvelle norme

Ce qui a surtout marqué, c’est la façon dont l’Europe s’est désormais adaptée en silence à Donald Trump. Pas d’irritations ouvertement étalées, pas de querelles transatlantiques. Au contraire: reconnaissance, retenue, adaptation.

Macron a ouvertement déclaré que l’Europe doit reprendre le dialogue avec la Russie — sur le contrôle des armements, la confiance réciproque, la coexistence. Merz a indiqué que l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN est « impossible » tant que Trump est en fonction — peut-être plus tard, mais pas maintenant.

Ce ne sont pas des déclarations spectaculaires, mais elles indiquent un ton nouveau. Comme si la réalité, l’incertitude, le malaise étaient désormais acceptés. De la défiance transatlantique, on est passé à une adaptation prudente.

L’Ukraine: visible, mais stratégiquement isolée

Pour l’Ukraine, cela signifie une constatation amère. Même si elle continue de recevoir des déclarations de loyauté publiques, la voie vers l’OTAN est pratiquement gelée. Pas de date, pas de plan, pas d’engagements concrets.

Et ainsi, le veston de Zelensky est devenu une métaphore: il témoigne de la tentative de rester en lien, avec une scène politique qui poursuit déjà ses propres scripts. La rhétorique du « combat jusqu’à la victoire » paraît de plus en plus dépassée. L’Ukraine n’est plus le centre du récit occidental — elle est une variable dans une équation plus grande.

Conclusion: la façade tient encore — mais des travaux sont en cours derrière elle

Le sommet de l’OTAN 2025 a marqué un tournant. Non pas par ce qui a été dit, mais par ce qui n’a plus besoin d’être dit. L’Europe commence à se libérer prudemment de la tutelle américaine — non par conviction, mais parce qu’il n’y a guère d’alternatives. Les États-Unis restent présents, mais ne dominent plus.

L’Ukraine reste un sujet, mais n'est plus le centre des préoccupations. Et le veston ? Il reste — comme symbole d’un sommet qui en disait long sur l’état de l’Occident, sans le dire tout haut.

Grand dérangement au Moyen-Orient

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Grand dérangement au Moyen-Orient

par Georges Feltin-Tracol

Les dirigeants du Hamas se doutaient-ils qu’en lançant leur offensive–éclair le 7 octobre 2023, ils changeraient le visage du Moyen-Orient ? Ne faut-il pas maintenant s’interroger sur l’existence d’un enchâssement machiavélique de plans destinés à briser l’« Axe de la Résistance » contre Israël ? Les guerres de Benyamin Netanyahou lui permettront-elles de remodeler à sa guise toute une région et d’arrêter l’apparition d’un monde multipolaire aux valeurs pluriverselles?

À l’origine, les services secrets israéliens ont encouragé l’essor du Hamas opposé à l’OLP de Yasser Arafat. Une fois encore, le golem s’est retourné contre ses maîtres. Malgré le départ des colons israéliens et le retrait des troupes de Tsahal en 2005 sur l’ordre du premier ministre israélien d’alors, Ariel Sharon, Tel-Aviv n’a jamais cessé de surveiller dans le détail la Bande de Gaza dont la superficie correspond à peu près à trois fois Paris (bois de Boulogne et de Vincennes inclus). Par ailleurs en pointe dans le contrôle numérique de masse, Israël a proscrit l’argent liquide et sait parfaitement identifier une population gazaouie désormais martyre.

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En agressant l’Iran sans prendre la peine de lui déclarer la guerre tel un autre 1er septembre 1939, Israël ouvre un cinquième front à la suite de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est occupés, du Liban et de la Syrie. Ces différents conflits quasi-simultanés occultent les procès en corruption qui frappent Netanyahou et détournent l’attention de l’opinion publique du contentieux féroce entre la Cour suprême et l’exécutif. Cette nouvelle guerre préventive d’agression soude pour le moment les six partis de la coalition gouvernementale.

Le gouvernement Netanyahou invente un danger nucléaire iranien imminent alors que le premier Guide suprême de la Révolution, Rouhollah Khomeiny, avait émis une fatwa condamnant cette arme redoutable. Ce fait importe peu pour Tel-Aviv qui rêve de briser la « Pieuvre » tant ses tentacules que sa tête. Dans Le Figaro Magazine des 23 et 24 mai 2025, Alexandre Devecchio interroge Stéphane Simon, co-auteur avec Pierre Rehov du 7 Octobre. La Riposte (Fayard, 2025). Stéphane Simon déclare qu’« aujourd’hui, Israël prépare la dernière manche qui vise la fin du régime de Téhéran ». Pourquoi ? Parce que l’instant lui est propice.

La Syrie néo-baasiste de Bachar al-Assad a disparu en décembre 2024 au profit de forces islamistes subventionnées par la Turquie et le Qatar. L’état-major israélien a aussi tiré tous les enseignements de la guerre de 2006 contre le Hezbollah. Quelques exemples rapportent la haute fiabilité des réseaux de renseignement qui associent données satellitaires - numériques et collectes précises d’informations sur le terrain, d’où l’assassinat de Hassan Nasrallah, secrétaire général charismatique du Hezbollah, le 27 septembre 2024. Évoquons aussi le piège des talkies walkies et autres bipeurs qui a tué, blessé ou handicapé plusieurs milliers de cadres du Hezbollah. Produits en Israël, les trois grammes d’explosif implantés, les bipeurs sont cédés à une société hongroise qui les vend ensuite au Hezbollah. Israël avait donc bien préparé cette opération depuis plusieurs trimestres, voire années… Ainsi peut-on se demander si, à l’instar de Franklin Delano Roosevelt qui sût la veille du 7 décembre 1941 l’attaque-surprise japonaise sur Pearl Harbor, Benyamin Netanyahou était au courant de l’action sanglante du 7 octobre sans penser à son ampleur, ni à son impact tragique. Dès son premier mandat de premier ministre (1996 – 1999), il considère l’Iran comme son ennemi principal. Il déteste l’Iran qui signifie « royaume des Aryens ». Cette appellation servirait-elle de prétexte à une susceptibilité mémorielle excessive ?

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L’agression contre l’Iran n’est pas une foucade du régime suprémaciste de Tel-Aviv, mais une action de guerre mûrement réfléchie. Appliquant les méthodes opérationnelles de l’OTAN, l’aviation israélienne se serait rendue maîtresse du ciel iranien en dépit des 1500 – 2000 km de distance entre les deux États.

On reste toutefois pantois devant l’impréparation de l’Iran, pourtant puissance régionale de plus de 82 millions d’habitants, face à une guerre préventive aérienne: pas d’abris de défense pour les civils, sécurité publique déficiente, faiblesse de la protection autour des responsables militaires iraniens. À ces manques s’ajoute une absence flagrante de réactions de la part des « tentacules », à savoir d’alliés affaiblis (Hezbollah, Hamas), lointains (les « partisans d’Allah » houthistes du Yémen) ou dubitatifs (les milices populaires irakiennes). L’assassinat de hauts responsables militaires et scientifiques, la destruction de centres stratégiques militaires et nucléaires, le bombardement des locaux de la télévision officielle indiquent la présence en Iran d’agents secrets, de forces spéciales et de collaborateurs locaux, et ce depuis de nombreux mois, même de nombreuses années.

À la lumière des récents événements, deux faits confirment la forte implication d’Israël dans le désordre intérieur iranien. L’un se passe le 31 juillet 2024. Ce jour-là, le chef du Hamas, « Ismaël Haniyeh, rapporte encore Stéphane Simon, meurt dans sa chambre piégée d’une bombe au cœur d’une résidence sécurisée du palais présidentiel » iranien. Toujours pour Stéphane Simon, c’est « la démonstration de l’infiltration du Mossad au cœur du régime iranien ». Sous l’empire Pahlavi, le Shah d’Iran était un allié précieux pour Israël au même titre d’ailleurs que la Turquie laïque et les Kurdes d’Irak et de Syrie. Cette proximité stratégique n’a pas empêché les États-Unis de fomenter en partie la révolution islamique afin de surseoir au développement nucléaire de l’Iran.

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Le second concerne la révolution de couleur « Femme – Vie – Liberté », processus incontestable de déstabilisation socio-politique qui s’apparente à une intense action de guerre psychologique. Les manifestants et les manifestantes hostiles aux institutions de la République islamique agissent en idiots utiles du suprémacisme israélien anti-iranien. À côté des actions clandestines montées par les services israéliens sur le sol iranien, « Femme – Vie – Liberté » signale la réalité d’une cinquième colonne qui a pour objectif le renversement de la république islamique. Par qui la remplacer ? Israël ne se tournera pas vers Maryam Radjavi, présidente des Moudjahiddines du peuple qui ont longtemps séjourné dans l’Irak baasiste de Saddam Hussein. Quant à recourir au prétendant impérial en exil Reza Pahlavi, ce ne serait guère judicieux, car il deviendrait aussitôt un nouveau repère d’unité nationale pour tous les Iraniens.

Il est possible que le gouvernement israélien mise sur un éclatement, effectif ou latent, de l’Iran en jouant sur des minorités ethniques. Au Sud-Est, les indépendantistes baloutches pourraient ériger un État qui attirerait ensuite vers lui le Baloutchistan pakistanais. Au Nord-Ouest, les Kurdes édifieraient un territoire autonome à l’image du Kurdistan irakien et, peut-être, du Rojava syrien. Au Sud-Ouest, les arabophones (plus d’un tiers de la population locale) du Khouzistan (ou Arabistan), assez rétifs à la tutelle de Téhéran, s’en sépareraient pour mieux se rapprocher de l’Irak. Mais la plus grande menace provient du Nord, des portes du Caucase.

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Les Occidentaux oublient que l’Arménie, encerclée à l’Est et à l’Ouest par la Turquie et l’Azerbaïdjan, y compris par son exclave du Nakhitchevan, entretient d’assez mauvaises relations avec son voisin géorgien. Le seul État qui persiste à aider Erevan s’appelle l’Iran. Pendant la guerre de reconquête de l’Artsakh, l’Azerbaïdjan a bénéficié de l’aide militaire israélienne. La fragilisation poussée de l’Iran inciterait l’Azerbaïdjan à s’emparer des régions iraniennes de langue azérie au nom des vieilles revendications rattachistes, puis d’effacer définitivement l’Arménie des cartes en se partageant avec la Turquie son territoire. Un Grand Azerbaïdjan pèserait alors de tout son poids sur l’avenir non seulement de l’Iran, mais aussi de l’Asie centrale avec le risque accru d’irriter une Russie attentive à son étranger proche et d’encourager les forces islamistes les plus extrémistes à renverser les gouvernements du Kazakhstan, du Tadjikistan, de l’Ouzbékistan, du Turkménistan et du Kirghizistan à partir du foyer inflammable de la vaste vallée de la Ferghana.

L’effondrement de l’Iran assurerait à l’actuel gouvernement israélien la satisfaction de ses visées messianiques dans la reconfiguration géopolitique du Moyen-Orient. La fin de l’« Axe de la Résistance » lui faciliterait la déportation massive des Palestiniens de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est vers le Liban, la Syrie, la Jordanie et l’Égypte aux frontières redessinées, mais aussi vers l’Europe. Le régime de Tel-Aviv ferait deux pierres d’un coup : résoudre la question démographique palestinienne lancinante et semer les ferments de division multiculturalistes chez l’héritière d’Édom, la civilisation européenne d’essence boréenne, qu’il exècre. L’Iran ou le dernier avant-poste de l’Europe boréale ? L’histoire est plus que jamais imprévisible et surprenante.

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 162, mise en ligne le 24 juin 2025 sur Radio Méridien Zéro.

« Les États-Unis ont attaqué non seulement l’Iran, mais aussi la multipolarité… »

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« Les États-Unis ont attaqué non seulement l’Iran, mais aussi la multipolarité… »

Onur Sinan Güzaltan 

Les États-Unis ont rejoint les attaques d’Israël contre l’Iran, et la guerre s’est intensifiée.

Les États-Unis ont ciblé les installations nucléaires en Iran. Quel est votre avis sur cette question ?

Les États-Unis ont attaqué l’Iran en ignorant le droit et les normes internationales. Cette attaque aura de nombreuses conséquences négatives.

L’Iran, qui est la cible des attaques, y répondra bien sûr de différentes manières. La plus évidente de ces réponses sera de continuer à frapper Israël, la plus grande base américaine dans la région. En dehors de cela, il est possible que les alliés de l’Iran dans la région, notamment les Houthis au Yémen et le Hezbollah au Liban, soient impliqués dans cette guerre qui ne cesse de s'accroître. Il y a de nombreuses bases, centres et soldats américains dans la région… Il est très probable qu’ils soient ciblés dans la période à venir. De plus, l’Iran pourrait prendre des mesures visant à perturber la chaîne économique mondiale via le détroit d’Hormuz et la mer Rouge.

Dans tous les cas, les États-Unis et Israël paieront un prix lourd.

D’un autre côté, en termes de politiques américaines, les discours MAGA, ou « America First » (l’Amérique d’abord), représentés par Trump, sont complètement tombés en désuétude. Les États-Unis sont de nature agressive et l’ont montré une fois de plus au monde avec l’attaque contre l’Iran.

Une autre leçon à tirer de l’attaque américaine contre l’Iran est que les négociations avec l’impérialisme n’ont aucune suite. La Russie a été visée durement à chaque fois qu’elle s’est assise à la table de négociation pour régler la question de l’Ukraine. Assad s’est assis à la table avec l’Occident en 2010, et la guerre civile a immédiatement éclaté dans son pays. Kadhafi a été renversé de façon similaire…

Et l’Iran a été ciblé alors qu’il négociait avec les États-Unis…

Ces exemples montrent que l’impérialisme ne comprend que la force, pas la négociation.

Comment le rôle des États-Unis dans la guerre changerait-il le cours de la guerre ?

Eh bien, les États-Unis sont manifestement un pays puissant. Ils disposent d’une supériorité technologique, d’armes avancées et de capacités de renseignement.

Mais l’Iran est aussi un pays puissant et aura des réponses à donner aux États-Unis.

L’étendue dans laquelle les États-Unis peuvent prendre des risques dans la période à venir sera décisive. Si l’Iran répond, quelle sera la position des États-Unis ? Oseront-ils, par exemple, lancer une opération terrestre ? Je ne pense pas… Les États-Unis ont fait un choix difficile, et je doute qu’ils voient clairement quel chemin suivre.

D’un autre côté, l’attitude de la Russie et de la Chine sera importante.

En frappant les installations nucléaires iraniennes, les États-Unis ont tenté d’envoyer un message non seulement à l’Iran, mais au monde entier; ils ont voulu dire: « Je suis toujours le maître du monde. »

La Russie et la Chine accepteront-elles ce message ?

Il vaut la peine de souligner que l’attaque américaine ne concerne pas seulement l’Iran, mais aussi la multipolarité.

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Comment évaluez-vous la situation d’Israël dans la guerre ?

La situation actuelle montre clairement que le système de défense aérienne et le Dôme de fer d’Israël ont échoué face aux frappes de missiles de l’Iran.

Les rapports indiquent qu’Israël ne peut tenir que 10 ou 12 jours de plus dans une telle guerre. C’est précisément la réalité qui se profile derrière l’implication des États-Unis. Trump s’est impliqué dans cette guerre pour sauver Israël, qui s’effondrait et perdait la guerre.

Quant aux déclarations provenant d’Iran, à la fin, le peuple iranien et l’État iranien défendent leur propre terre. C’est une défense territoriale. Et jusqu’à présent, ils ont réussi. Ils ont pu répondre à chaque mouvement israélien par une contre-attaque équivalente.

Il y a eu des discussions sur la supériorité technologique d’Israël et de ses alliés. Mais l’utilisation des missiles Fattah par l’Iran dans ses frappes de représailles a suscité de nouveaux débats à ce sujet. Quel est votre point de vue ?

La réalité sur le terrain nous montre ceci: tout d’abord, l’Iran lutte contre les sanctions occidentales depuis plus de 45 ans. Il a donc développé une économie indépendante.

Deuxièmement, nous voyons maintenant clairement que ces mêmes sanctions ont poussé l’Iran à développer sa propre industrie nationale de défense. Et avec les armes qu’ils produisent, ils peuvent résister contre les États-Unis et Israël.

Troisièmement, l’Iran possède un territoire vaste, ce qui lui donne plus de mobilité, plus de marge pour se retirer et se regrouper. Et si l’on compare les populations, celle de l’Iran est bien plus grande que celle d’Israël. Nous parlons ici d’un peuple avec une histoire plurimillénaire dans la région.

Israël, en revanche, est coincé dans une mince bande de terre. Il a une population fragmentée et un État relativement jeune. Militairement et économiquement, il dépend fortement du soutien financier et militaire des États-Unis et de l’Occident.

Donc, s'il n'y avait eu que l’Iran et Israël, sans implication d’un tiers, cette guerre se serait déjà terminée par la défaite d’Israël.

Des affirmations comme « Le régime iranien s’effondrera en trois jours » ou « L’État va se désagréger » sont creuses. L’Iran résiste depuis des décennies économiquement, socialement et militairement contre l’Occident. Et dans sa lutte contre l’Occident et ses proxies, comme Israël, l’Iran a montré qu’il est très résilient et efficace. C’est ce que nous voyons aujourd’hui.

Ce que nous vivons actuellement prouve que les pays qui comptent sur leurs propres ressources morales et matérielles peuvent rester forts. En résumé: moins vous dépendez de puissances extérieures, plus vos chances sont grandes de résister à l’agression occidentale-israélienne.

Quelle devrait être la position de la Turquie et des pays de la région face à la guerre Iran-Israël après l’intervention américaine ?

Il y a des messages de condamnation du gouvernement turc envers les États-Unis et Israël, mais cette rhétorique n’est pas suffisante.

Des renseignements directs et indirects sont fournis à Israël depuis les bases d’Incirlik et de Kürecik, situées en territoire turc. Ces bases doivent être fermées dès que possible.

En fin de compte, c’est la Turquie, voisine de l’Iran, qui peut devenir la cible, et les conséquences seront graves pour la Turquie.

Tous ceux avec qui je parle dans la région disent la même chose : « Si l’Iran tombe, nous tombons aussi. » Le monde arabe le sait. Et en Turquie, la conscience publique de cette réalité grandit. L’Iran est une puissance clé dans la région. Si les choses tournent contre l’Iran, les conséquences ne toucheront pas seulement les Iraniens, mais toute la région.

C’est pourquoi les pays de la région doivent agir avant qu’il ne soit trop tard.

Xi Jinping n'a pas assisté au sommet du groupe BRICS - Douguine s'exprime sur les principaux défis

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Xi Jinping n'a pas assisté au sommet du groupe BRICS

Douguine s'exprime sur les principaux défis

Alexandre Douguine

Xi Jinping a, pour la première fois, refusé d’assister au sommet du groupe BRICS. Beaucoup essaient déjà d’en faire une sensation, mais personnellement, je ne vois dans cette absence aucune connotation politique particulière. Le groupe BRICS est une organisation très sérieuse mais qui en est encore à ses débuts. Son potentiel n’est pas encore bien compris. Jusqu’à présent, le groupe BRICS ne fait que décrire les contours d’un futur ordre mondial multipolaire, où les différents pôles seront des États-civilisations: la Russie, la Chine, l’Inde, le monde islamique, les pays africains et latino-américains. Tout cela constitue pour l’instant une esquisse préliminaire de la multipolarité.

Il existe toutefois des contradictions entre ces pôles. Le monde islamique connaît une grande incertitude : notamment, les événements tragiques et terribles qui se déroulent actuellement au Moyen-Orient – avec la soi-disant "guerre de 12 jours" entre Israël et l’Iran. En même temps, les relations entre l’Iran et l’Inde, ainsi qu’entre l’Inde et le Pakistan, se sont tendues. Tout cela pose sans aucun doute de nombreux défis à l'émergence de la multipolarité.

C’est pourquoi, à mon avis, c’est une période où il ne peut y avoir de clarté quant au développement stratégique futur du groupe BRICS. Il est très important que de tels sommets aient lieu, que ce bloc multipolaire continue de se réunir. La présence de chefs d’État, je pense, n’est pas toujours nécessaire. Actuellement, il semble qu’il n’y ait pas de décisions mûres et entièrement préparées qui nécessiteraient la présence des chefs d’État. Là où ils seront présents, c’est bien ; là où ils seront représentés par des délégués dûment habilités, c’est tout aussi acceptable.

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Honnêtement, le BRICS n’a, pour l’instant, rien à dire au monde. Ce bloc n’est pas encore suffisamment uni pour proposer des décisions vraiment décisives ou pour adopter des documents communs concernant le Moyen-Orient ou d’autres questions. Je pense donc que ce n’est pas encore le bon moment pour que le groupe BRICS se réunisse au plus haut niveau, surtout avec la présence d’un pays aussi important que la Chine, pour faire réellement des déclarations déterminantes. Ce nouveau sommet sera un événement important, mais il se peut qu’il ne nécessite pas la présence du leader chinois.

C’est pourquoi je ne vois pas de véritable intrigues derrière ce qui se passe. La situation générale est que le groupe BRICS doit être soutenu, développé et renforcé. Mais dans les conditions actuelles, où la volatilité du système mondial est évidente, le groupe BRICS ne peut probablement pas faire de déclarations décisives valables pour le monde entier. Il est difficile d’imaginer des positions communes, par exemple entre la Chine et l’Inde. De plus, cette réunion spécifique du groupe BRICS ne comporte pas de tâches fondamentales. Quand de telles perspectives et horizons s’ouvriront, je pense que la Chine sera présente lors des rencontres du groupe BRICS et ce, au plus haut niveau.

Pour l’instant, je crois que chaque Etat-Civilisation doit préciser davantage ses propres positions et intérêts. La guerre de 12 jours a causé des secousses très graves, auxquelles faut réfléchir. Pour le moment, au niveau de chaque participant au monde multipolaire, il n’y a pas de clarté définitive. Je pense qu'il n'y a pas de clarté même chez nous, en Russie. Cette absence de clarté porte aussi sur les dernières propositions de Trump, qui représentent aussi un grand défi qu’il faut analyser, puis échanger des opinions, y compris au niveau du groupe BRICS.

vendredi, 27 juin 2025

L’américanisation linguistique de l’Union européenne

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L’américanisation linguistique de l’Union européenne

par Yannick Sauveur

Americanisationsocietefrancaisequadri.jpgSi mon essai sur l’américanisation de la société française [1] traite du cas français, il est évident, hélas, que les constats que je fais s’appliquent très largement à l’Europe dans son ensemble, voire à ce qu’on appelle improprement l’Occident. J’ai écrit un long chapitre relatif à l’acculturation linguistique. Même si l’américanisation recouvre tous les aspects de la vie courante : arts, musique, vêtement, restauration, tourisme, il en est un qui me paraît essentiel, être le problème numéro 1, c’est celui de la langue nationale qui est en voie de disparition. En disant nationale, j’entends le français en France (ou Wallonie, ou Québec ou Suisse romande), l’allemand en Allemagne, l’italien en Italie, le castillan en Espagne, etc. Les ravages de la domination culturelle américaine sont, faut-il le déplorer, identiques dans tous les pays se soumettant avec une facilité déconcertante à la colonisation américaine. Le linguiste italien Antonio Zoppetti rappelle le propos de Churchill selon qui « Le pouvoir de dominer la langue d’un peuple offre des gains bien supérieurs à ceux de lui enlever des provinces et des territoires ou de l’écraser en l’exploitant. Les empires du futur sont ceux de l’esprit. »[2]

L’américanisation n’est pas récente. Le déferlement culturel U.S., déjà présent dans la première moitié du 20ème siècle, prend son envol avec la fin de la 2ème Guerre mondiale : chewing-gum, bas Nylon, cigarettes blondes, coca-cola envahissent les territoires libérés. Ces nouveaux produits de consommation sont associés à un message subliminal, celui de liberté et c’est ainsi que la majorité des peuples vont entendre cette nouvelle occupation que certains nommeront plus tard une colonisation douce. Les Accords Blum-Byrnes et le Plan Marshall signés respectivement en 1946 et 1947 vont accélérer la domination politico-économico-culturelle tant il est vrai que tout est lié et qu’une domination qui ne serait que militaire n’aurait pas de sens, ce qu’a bien compris le politiste et ancien conseiller de Jimmy Carter, Zbigniew Brzezinski, pour qui « La domination culturelle des États-Unis a jusqu’à présent été un aspect sous-estimé de sa puissance globale. »

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Voilà pour le contexte historique. En ces années 40 et 50, les langues nationales sont encore épargnées. Au début des années 60, un auteur français, Etiemble, écrit un pamphlet, Parlez-vous franglais ?[3]. À la même époque des auteurs italien ou allemand auraient pu, tout aussi bien, écrire Parlez-vous italianglese ? ou Parlez-vous germanglais ? Etiemble fustige (déjà !) le sabir atlantique (« une langue au niveau le plus bas ») et l’invasion de l’anglais. Succès éditorial remarquable mais fiasco du point de vue de son influence. La lecture du livre d’Etiemble, à 60 ans de distance, prête à sourire tant il est vrai que les parking, dancing, building, pressing, lunch, business, fair-play, teenagers paraissent bien ordinaires à nos oreilles des années 2020.

A32635.jpgPour s’en convaincre, il n’est pas inutile de citer quelques-uns des mots et expressions couramment utilisés dans les médias grand public : les masters, les think tanks, les followers, les like, les posts, les happy hours, le management, les managers, le turn-over, le feedback, le merchandising, l’inévitable black friday, le coach et le coaching avec ses variantes, equicoach et equicoaching, le coworking, le leadership, les leaders, les show room, les fast food, le drive et les drive in, les hamburger, check in et check out, les looser, les spots diffusés en prime time, les podcasts et les émissions en replay, les talk show, un full time job, les news qui se déclinent en news magazines, en newsletter, le body language, les start-up, faire son coming out (très en vogue dans la classe élitaire de la politique et/ou du spectacle), les check up, les crowfunding (financement participatif), le coliving et autre storytelling. En lisant la presse, je découvre que ThereSheGoes est une application pour aider les femmes à entreprendre ou encore qu’un escape game permet de sensibiliser sur les handicaps invisibles. Quant à la team mise à toutes les sauces, elle fait presque partie du langage courant et dans son sillage, la dream team. J’ai vu récemment un panneau intitulé « Espace Street Workout » qui invite à respecter la charte éthique de la Fédération Mondiale de Street Workout[4] et de Calisthénics. J’arrête là cet exercice épuisant qui n’est pas une spécificité française. En Italie comme en France dans les aéroports ou dans les gares, les portes d’embarquement sont des gates !  

À cela ajoutons la transformation de nos villes, tant les périphéries avec les mêmes enseignes, les mêmes publicités, les centres-villes dont les vitrines se parent de slogans ou accroches anglo-saxonisées (Haircuts and Shaves BARBER SHOP Professionnal Service, L’Ideal Coffee - Working Café – Salad Bar – Petite restauration). On reste confondus devant pareille bêtise qui, hélas, se répand à toute vitesse.

41F80mI7nWL._SX195_.jpgCe langage, le franglais (Etiemble), le gallo-ricain pour Henri Gobard, le globish[5], langage réduit à 1.500 mots, syntaxe et grammaire simplifiées, voire la très expressive okeïsation, n’est qu’un des aspects de l’américanisation du langage. J’ai indiqué ailleurs[6] qu’il y avait deux types d’américanisation : Américanisation du riche, américanisation du pauvre (insidieuse), américanisation voulue (recherchée) ou subie, le résultat est le même. Et les deux publics peuvent se rejoindre et se retrouver dans un McDo. Cette américanisation subliminale de nos cerveaux (François Asselineau) n’est que la résultante d’un travail de sape en amont opéré depuis des décennies par des gouvernants serviles, des journalistes aux ordres, et plus généralement les élites complices de cette dégradation sans oublier une certaine bourgeoisie qui, par mimétisme, par snobisme envoie ses rejetons aux States (une année pour passer le bac américain, ou études supérieures complètes). Pour ceux-là, l’anglo-américain est une première langue à égalité avec la langue maternelle : les curriculums vitae sont rédigés exclusivement en anglais, même pas en bilingue langue maternelle/anglais ! Toutes les productions scientifiques sont majoritairement en anglais. C’est une erreur de croire que la richesse scientifique doive s’exprimer en anglais pour être reconnue. Le mathématicien Laurent Lafforgue (médaille Fields 2002) considère que, contrairement à l’opinion commune, ce n’est pas grâce à la vigueur et à la qualité de l’école française de mathématiques que les mathématiques françaises continuent à être publiées en français, mais, tout à l’inverse, parce que cette école continue à publier en français qu’elle conserve son originalité et sa force.[7]

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Les conférenciers s’expriment en anglais même s’il y a la traduction simultanée. Comment s’en étonner lorsque le Président de la République, Emmanuel Macron, s’obstine, contre tout bon sens, à ne pas utiliser la langue qui fut celle de la diplomatie pendant des siècles. Loin d’être un cas isolé, d’autres dirigeants, ainsi Mario Draghi, ancien Président du Conseil, ancien Président de la B.C.E., fait ses discours en anglais depuis des années.  La francophonie, elle-même, est en berne mais comment ne le serait-elle pas avec une secrétaire générale de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie), Louise Mushikiwabo (photo), élue en 2018 et réélue en 2022, dont la candidature a été présentée en anglais par le président du Rwanda, Paul Kagame. Il est vrai que le Rwanda a remplacé en 2008 le français par l’anglais en tant que langue obligatoire à l’école !

Comment imaginer qu’Emmanuel Macron, Friedrich Merz, Keir Starmer, Donald Tusk, quand ils se réunissent parlent dans une autre langue que l’anglo-américain ?

Les young leaders ne sont plus une spécificité franco-américaine. On les retrouve en Italie, en Allemagne, et même… en Afrique (Promotion 2023 de la French-African Foundation sous le haut patronage du Président Emmanuel Macron et du Président Paul Kagame). Les élites atlantistes sont associées aux cercles et organisations mondialistes : Fondation Rockefeller, Fondation Ford, Bilderberg Group, Aspen Institute. L’anglo-américain est tout naturellement la langue de communication pour ces participants du Bilderberg Group (réunion 2023) : Edouard Philippe, ancien Premier ministre français, Albert Bourla, Président de Pfizer, Paolo Gentiloni, Commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la fiscalité et à l’Union douanière, à la Commission européenne, Roberta Metsola, présidente du Parlement européen, etc. La présidente du Conseil italien et proche de Trump, Giorgia Meloni, fait partie de Aspen Italia.

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Léopold Sédar Senghor (photo), prévoyait que le français pourrait être à la fois la langue de l’unité européenne, la langue véhiculaire du bassin méditerranéen et celle de l’unité de l’Afrique ! Hélas ! Celui qui a tant œuvré pour la francophonie serait bien amer de constater que l’anglais règne en maître dans toute l’Union européenne alors que l’anglais n’est langue officielle d’aucun pays de l’U.E. À l’appui de l’anglais comme langue de l’U.E., les partisans invoquent le coût des traductions alors que la richesse induite par la diversité des langues est de loin supérieure au coût, en réalité négligeable.[8]

Dans une Europe débarrassée de la domination anglo-américaine, une authentique politique d’Éducation nationale devrait avoir pour mission l’apprentissage, dès l’entrée dans l’enseignement secondaire, de trois langues (en plus de la langue maternelle) et se poursuivre dans l’enseignement supérieur avec l’approfondissement d’une langue autre que l’anglais. Encore faudrait-il que dès le plus jeune âge, tant dans les familles que dans l’enseignement primaire, le civisme fût la règle : respect de sa langue maternelle (ou d’adoption pour les immigrés) et apprentissage rigoureux de celle-ci. Les patrimoines linguistiques nationaux doivent être protégés. Il est inutile d’empiler des lois alors qu’il suffit d’appliquer strictement les lois existantes (loi Toubon en France), ce qui suppose que les publicitaires, et autres communicants, révisent prestement leur vocabulaire.

Les partenariats et financements des organismes promouvant les langues nationales doivent être développés : Alliance Française, Goethe Institut, Institut Cervantes, etc. Le multilinguisme des élites doit être promu avec la connaissance minimale de l’allemand, de l’espagnol et du français. Est-ce utopique ? Oui, assurément dans le cadre actuel de l’U.E. mais certainement pas dans le cadre d’une Europe qui veut recouvrer les moyens de sa puissance, et la défense et la restauration des langues nationales en font partie. Avant toute chose, tout complexe d’infériorité doit être banni. La domination culturelle (et donc linguistique) anglo-saxonne n’est pas synonyme d’une quelconque supériorité mais renvoie à notre soumission voulue, acceptée.

Notes:

[1] Yannick Sauveur, L’américanisation de la société française, Éditions Aencre, 2024.

[2] Winston Churchill, Discours aux étudiants de Harvard, 6 septembre 1943.

[3] Etiemble, Parlez-vous franglais ? Gallimard, 1964.

[4] Le code éthique du Street Workout correspond, peu ou prou, à ce qu’on entendait par esprit sportif au temps de Pierre de Coubertin. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?!

[5] Contraction de Global et English, Jean-Paul Nerrière, ancien vice-président d’IBM USA serait à l’origine du globish.

[6] Cf. Questions-réponses, site Eurasia.

[7] Cité in Claude Hagège, Contre la pensée unique, Odile Jacob, 2012.

[8] Cf. Claude Hagège, Contre la pensée unique, Op.cit.

La doctrine du sursaut

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La doctrine du sursaut

Jordi Garriga

Donald Trump est président des États-Unis (pour la deuxième fois) depuis le 20 janvier dernier. Et on dirait qu'il a été élu il y a des années : chaque semaine, il nous offre des nouvelles, des gros titres et des raisons de dire, dans un anglais parfait : « What the fuck ! »

Le dernier en date s'est attribué le mérite d'avoir mis fin à une guerre que nous avons déjà surnommée la « guerre des 12 jours » entre Israël et l'Iran. Il n'a pas eu autant de chance avec la guerre en Ukraine, malgré ses appels (y compris des menaces) à la Russie dans des publications accrocheuses sur les réseaux sociaux. Trump possède un côté théâtral qui, bien que caractéristique de son caractère, s'inscrit parfaitement dans la tradition politique américaine : il est populiste, patriote et conservateur. Mais tout cela est commun à plusieurs familles idéologiques de droite aux États-Unis, qui n'ont que peu ou pas de liens avec l'Europe, malgré des tentatives de copier de manière simiesque le discours yankee (voir en Espagne Isabel Díaz Ayuso ou Irene Montero).

La ​​droite américaine privilégie généralement le libre marché, l'individualisme et les valeurs morales traditionnelles. Au-delà de cela, des divergences apparaissent, notamment l'interventionnisme à l'étranger, visant à imposer par la force leurs normes démocratiques, les États-Unis étant une nation choisie par Dieu pour guider l'humanité. D'autres privilégient l'isolationnisme pour une raison tout aussi valable : la démocratie américaine doit tirer parti de sa situation géographique et ne pas s'associer inutilement à des projets étrangers. Trump, avec son slogan « Make America Great Again » (qui peut prendre le sens que chacun juge approprié selon ses idées), a réussi à gagner en unissant ces familles. Une fois élu président, le réalisme politique règne. Et ce qui règne sur la planète, c'est l'émergence d'un ordre multipolaire, avec des acteurs incontrôlables par le seul exercice de la force, de la culture ou de l'économie : la Chine et l'Asie du Sud-Est, avec l'Iran et l'Inde, sont le nouveau centre du monde. L'Europe n'est plus une référence politique, économique, ni même morale: divisée en vingt gouvernements, traînant une dette éternelle, et transformée en laboratoire d'expérimentations sociales. C'est le mur antirusse, et c'est suffisant.

La doctrine du sursaut est l'offensive américaine actuelle : elle impose des sanctions et des récompenses par le biais de droits de douane ; elle fournit et retire son soutien militaire ; elle régule et déréglemente les migrations ; elle cible et retire les organisations terroristes de ses listes ; elle se lie d'amitié avec certaines nations et se crée des ennemis ; elle veut quitter l'OTAN et imposer davantage de dépenses militaires… Les États-Unis changent parfois d'avis ou de perspective (du moins superficiellement) tout en punissant ou en critiquant toute autre nation qui souhaite faire de même.

Le sursaut pour tout gouvernement est d'avoir le soutien des Yankees et de le perdre le lendemain ; le risque est que chaque groupe politique devienne un jour combattant pour la liberté et terroriste le mois suivant (et vice versa) ; il est tour à tour menacé ou loué, de sorte que la réaction à un mode de fonctionnement apparemment aussi insensé est la paralysie, la peur, l'indécision: le choc de ne savoir que faire ou dire. Ou, pour le dire autrement, le contrôle spirituel de telle nation ou de tel groupe.

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Et quand quelqu'un ne sait plus où il va, ne sait plus ce qu'il doit faire ou comment se gouverner, c'est l'heure du sheriff mondial, qui lui dira comment être un good boy ou, pire encore, un bon patriote. Personne ne lit ni ne se souvient de ce que George Washington a dit :

« La passion excessive d'une nation pour une autre produit une variété de maux. L'affection pour une nation favorite facilite l'illusion d'un intérêt commun imaginaire là où il n'en existe pas réellement, et instille en elle les inimitiés de l'autre et la pousse à entrer dans ses guerres sans justice ni motif. Elle pousse également la nation favorisée à accorder des privilèges refusés aux autres, ce qui est susceptible de nuire à la nation qui fait les concessions de deux manières : en renonçant inutilement à ceux qu'elle devrait conserver et en suscitant la jalousie, la mauvaise volonté et le désir de vengeance chez ceux à qui elle refuse ce privilège. Elle donne également aux citoyens ambitieux, corrompus ou abusés (qui se placent dans la dévotion d'une nation favorite) la facilité de renoncer ou de sacrifier les intérêts de leur pays sans haine et parfois même avec popularité, dorant une condescendance basse ou ridicule d'ambition, de corruption ou d'engouement sous les apparences d'un sentiment vertueux d'obligation, d'un respect louable pour l'opinion publique ou d'un un zèle louable pour le bien général ».

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jeudi, 26 juin 2025

La proposition en quatre points de Xi Jinping pour apaiser le conflit au Moyen-Orient

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La proposition en quatre points de Xi Jinping pour apaiser le conflit au Moyen-Orient

Giulio Chinappi

En pleine escalade de grande envergure entre Israël et l’Iran, Pékin propose une feuille de route vers la paix visant un cessez-le-feu immédiat, la protection des civils, la relance des négociations politiques et le soutien actif de la communauté internationale.

SOURCE première de l'ARTICLE : https://giuliochinappi.wordpress.com/2025/06/21/la-propos...

Jeudi 19 juin 2025, dans l'après-midi, le président chinois Xi Jinping a eu un entretien téléphonique avec le président russe Vladimir Poutine, au cours duquel les deux dirigeants ont échangé leurs points de vue sur la situation au Moyen-Orient. Xi Jinping a présenté une proposition en quatre points: le cessez-le-feu doit devenir une priorité urgente, garantir la sécurité des civils doit être la priorité absolue, le dialogue et la négociation sont les solutions fondamentales, et les efforts de paix de la communauté internationale sont indispensables. Cet échange a eu lieu dans un contexte critique, alors que le conflit entre Israël et l’Iran ne cesse de s’intensifier. La coordination des positions entre Xi et Poutine reflète non seulement la profondeur de la coopération stratégique entre la Chine et la Russie, mais envoie aussi un message clair à la communauté internationale: un appel à contenir les tensions et à préserver la paix régionale.

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La crise actuelle au Moyen-Orient a dépassé les limites d’un conflit conventionnel. Lors d’une nouvelle série d’attaques aériennes jeudi 19, Israël a visé trois installations nucléaires iraniennes, tandis qu’un missile lancé par l’Iran a frappé un hôpital en territoire israélien. Les deux parties ont promis des représailles, et le risque d’une escalade incontrôlable s'avèrerait gravissime.

Pendant ce temps, les États-Unis, malgré leur influence déterminante sur Israël, n’ont pas joué un rôle constructif. Au contraire, ils ont continué à alimenter le conflit, allant jusqu’à indiquer leur disponibilité à « intervenir directement », ce qui mine sérieusement les attentes de la communauté internationale en matière de désescalade. La situation étant devenue telle que « rien ne peut être exclu », la fenêtre d’opportunité pour éviter le pire est désormais très étroite.

Une fois que le conflit échappe à tout contrôle, il sera beaucoup plus difficile d’en inverser la trajectoire. Dans ce contexte, la Chine a été la première grande puissance à proposer un plan global et visionnaire, capable de répondre à la fois aux besoins immédiats et aux solutions à long terme, faisant preuve d’un fort sens des responsabilités.

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La « proposition en quatre points » est ciblée et va au cœur des enjeux actuels. Elle exhorte en premier lieu les parties en conflit, en particulier Israël, à arrêter rapidement les opérations militaires pour éviter que de nouveaux dégâts soient infligés aux civils. Elle invite ensuite à soutenir fermement une solution politique à la question nucléaire iranienne, et sollicite la communauté internationale, et en particulier ces pays qui exercent une plus grande influence sur les belligérants, à faire des efforts pour apaiser les tensions.

De nature orientée vers le problème, cette proposition ne se limite pas à identifier les voies fondamentales pour la résolution de la crise, mais trace également des parcours efficaces pour atténuer le conflit. Elle met au centre la recherche d’une paix durable et d’une sécurité collective, dans le respect total de l’ordre et de l’équité internationaux. Elle reflète l’analyse précise de Pékin et s’aligne sur les sollicitations répandues dans la communauté globale, en proposant un cadre d’action concret et réalisable.

La Chine a toujours agi comme facteur de paix et de stabilité au Moyen-Orient, comme en témoignent des gestes concrets: faciliter la réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, soutenir le retour de la Syrie à la Ligue arabe, défendre la cause des droits nationaux palestiniens, promouvoir la paix à Gaza et l’unité palestinienne, contribuer à des missions de maintien de la paix régionales ou aux aides humanitaires. En tout état de cause, Pékin a basé ses actions sur les principes de justice et sur les intérêts fondamentaux des populations du Moyen-Orient, proposant un nouveau modèle de sécurité commune, inclusive, coopérative et durable.

De l’autre côté, les accords de réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran signés à Pékin, ainsi que la déclaration palestinienne d’unité, témoignent de la confiance de la région dans la position impartiale de la Chine et dans l’esprit de sa nouvelle conception de la sécurité. La récente « proposition en quatre points » de Xi sur le conflit entre Israël et l’Iran confirme cette ligne morale, visant à favoriser concrètement la paix au Moyen-Orient.

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Avec une région instable, la paix mondiale reste un objectif difficile à atteindre. Les efforts pour promouvoir un cessez-le-feu et engager des négociations ne sont pas seulement nécessaires pour la région, mais indispensables à la stabilité mondiale. Cela requiert coordination et consensus entre les grandes puissances. La récente conversation téléphonique entre Xi et Poutine illustre cette étroite communication et coordination entre la Chine et la Russie sur les grandes questions internationales. En tant que membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, Pékin et Moscou coopèrent main dans la main sur la scène mondiale, jouant un rôle stabilisateur pour la paix régionale et mondiale. Cela met en évidence non seulement la contribution des pays émergents à la gouvernance globale, mais indique aussi la voie correcte pour que les grandes puissances coexistent dans un esprit de responsabilité partagée.

La crise au Moyen-Orient confirme que le monde est entré dans une « époque de turbulences et de transformations », et la « proposition en quatre points » représente la perspective cohérente de la sécurité selon les vues chinoises. De la guerre russo-ukrainienne à la question israélo-palestinienne, il est évident que les propositions de Pékin sont de plus en plus adoptées par de nombreux pays. Maintenant que des nuages de tension obscurcissent le Moyen-Orient, il est à espérer que la communauté internationale passe des paroles aux actes, en adoptant la « proposition en quatre points » de la Chine. Celle-ci se déclare prête à renforcer la communication et la coordination entre toutes les parties, à construire un consensus, à lutter pour la justice et à jouer un rôle constructif dans le rétablissement de la paix dans la région.

Saint-Pétersbourg: le discours de Poutine à SPIEF comme miroir d’un nouvel ordre mondial

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Saint-Pétersbourg: le discours de Poutine à SPIEF comme miroir d’un nouvel ordre mondial

Elena Fritz

Source: https://pi-news.net/2025/06/st-petersburg-putins-spief-re...

La politique de sanctions de l’Union européenne s’est depuis le début de la crise ukrainienne transformée en un instrument central du pouvoir eurocratique – et en une épreuve de légitimité démocratique. Autrefois justifiées comme une mesure ciblée contre les élites politiques de Moscou, les sanctions frappent aujourd’hui principalement la population elle-même: par des prix de l’énergie qui montent en flèche, des chaînes d’approvisionnement qui sont interrompues, par une désindustrialisation et une fragmentation croissante du marché intérieur européen.

Alors que les ménages allemands souffrent de coûts énergétiques explosifs, que des secteurs industriels sont délocalisés ou liquidés, et que la classe moyenne se trouve coincée entre une pression fiscale accrue et une incertitude quant à sa position prochaine, la Russie, lors du 28ème Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF), se présente comme un pôle de stabilité – non par l'effet d'une propagande, mais par des chiffres, des stratégies et des alliances (PI-NEWS en a rendu compte ici https://pi-news.net/2025/06/spief-2025-die-multipolare-re... - et ici - https://pi-news.net/2025/06/weltwoche-daily-putin-dritter-weltkrieg-ich-bin-besorgt/ ).

Discours de Poutine : résilience face aux crises et réorganisation sociétale

Vladimir Poutine a ouvert le forum plénier devant une assemblée internationale de dirigeants – dont le président indonésien Prabowo Subianto, des représentants de la Chine, de l'Afrique du Sud et de la famille royale bahreïnienne. Leur présence contredisait le récit occidental qui pose la Russie comme isolée.

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Poutine a accueilli plus de 20.000 participants venus de 140 pays, insistant sur le fait que la nature du SPIEF prend de plus en plus d’importance dans un contexte de bouleversements mondiaux. Les thèmes centraux étaient les suivants: décalages tectoniques dans l’économie mondiale, bouleversements démographiques, crises régionales, changement climatique et transition technologique vers une ère de systèmes autonomes.

Il a clairement indiqué: le progrès technologique doit être accessible à tous, sinon les inégalités mondiales se creuseront. Les nouvelles plateformes, l’intelligence artificielle et l’économie numérique ne doivent pas conduire à une hiérarchisation de l’humanité, mais plutôt favoriser la prospérité, l’éducation et l’inclusion sociale.

L’économie russe: de l’exportation de matières premières à un centre d’innovation

Poutine a fourni des chiffres concrets sur l’évolution macroéconomique : malgré les sanctions, le PIB russe croît depuis deux ans de plus de 4% par an. La part de l’économie hors pétrole et gaz a augmenté de 7,2% en 2023. Même en 2024 – malgré le maintien des régimes de sanctions – une croissance de 5,9% a été enregistrée. La contribution du secteur des matières premières à la performance économique est même légèrement négative, ce qui indique que la diversification fonctionne.

Les moteurs de cette croissance sont nombreux: agriculture, construction, industrie manufacturière, logistique, services financiers et TIC. Selon Poutine, la Russie devient “non seulement plus grande, mais aussi plus complexe, intelligente et résiliente”.

L’emploi, les salaires et la justice sociale au centre

Un point central de son discours était la transformation du marché du travail: 2,4 millions d’emplois nouveaux ont été créés ces dernières années. Le taux de chômage est à un niveau historiquement bas de 2,3%. Le chômage des jeunes est également très faible, à 7,5%, comparé à 16% en France ou 11% au Royaume-Uni, selon Poutine.

Il a annoncé une “économie à hauts salaires” – non par contrainte, mais par investissements dans la productivité, la qualification et la digitalisation. Il a souligné que, à l’avenir, les salaires devront refléter l’efficacité et la création de valeur, plutôt que la pénurie de main-d’œuvre.

Lutte contre la pauvreté: chiffres à forte portée politique

En 2000, selon Poutine, 29% de la population russe vivait sous le seuil de pauvreté – 42 millions de personnes. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 10,5 millions, soit 7,2%. La tendance est à la baisse continue. La réduction de la pauvreté n’est pas un simple effet secondaire, mais un objectif explicite de la politique économique. Il a également souligné que ces succès sont visibles régionalement, notamment dans des régions traditionnellement défavorisées comme le Caucase du Nord.

Science, numérisation et réforme éducative

Poutine a annoncé qu’il allait fortement développer la commercialisation de la science. Actuellement, une seule demande de brevet sur cent est réellement exploitée sur le marché. Universités, instituts de recherche et entreprises doivent être connectés par des standards uniformes et des outils de financement communs. L’objectif est de faire de la Russie un lieu de souveraineté technologique.

Il a évoqué la rapide mise en place du rouble numérique, des plateformes de transport publiques, des marchés numériques pour la main-d’œuvre et de nouvelles formes de crédit basées sur des garanties de brevets. Un paquet législatif spécifique est en préparation pour soutenir l’identité régionale et la puissance économique locale dans la culture et l’économie créative.

Perspective mondiale: la multipolarité comme responsabilité

Poutine a présenté le groupe BRICS comme une plateforme qui ne repose pas sur l’exclusion, mais sur l’intégration. Ses membres représentent déjà 40% du PIB mondial. L’idée n’est pas de créer un contre-bloc, mais un cadre multilatéral pour favoriser la croissance, l’infrastructure et la coordination technologique – notamment par le développement de standards communs, de systèmes de paiement et de cadres juridiques.

Conclusion

Le discours de Poutine n’était pas une dénonciation, mais une esquisse stratégique détaillée. Il adressait un message clair à l’Europe: pendant que l’UE affaiblit ses citoyens par des sanctions imposées d’en haut, la Russie oriente sa stratégie économique vers la résilience, la cohésion sociale et l’indépendance technologique.

Le forum SPIEF 2025 n’était pas un lieu où l'on fit du triomphalisme. C’était une invitation géopolitique et économique à la coopération – dans un contexte changé, mais sans exclusions idéologiques. La décision d’y participer ne revient pas à Moscou. Elle appartient à Bruxelles – ou peut-être n’y appartient-elle déjà plus.

mercredi, 25 juin 2025

La guerre risquée de l'Europe contre la "flotte fantôme" russe

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La guerre risquée de l'Europe contre la "flotte fantôme" russe

Anatol Lieven

L'Union européenne souhaite cibler les navires pétroliers illégaux, une mesure qui pourrait élargir la conflit en Ukraine et impliquer davantage les États-Unis.

Les dernières mesures adoptées par l'Union européenne (dans le cadre du 17ème paquet de sanctions contre la Russie annoncé en mai) visant à frapper de manière beaucoup plus forte la soi-disant “flotte fantôme” russe composée de pétroliers et d’autres navires, mettent en évidence le danger qu’avec la poursuite de la guerre en Ukraine; le risque d’un incident impliquant l’OTAN et l’UE dans un affrontement militaire direct avec la Russie persiste.

Les sanctions de l’UE prévoient l’interdiction d’accès aux ports, aux eaux nationales et aux zones économiques maritimes des États membres. Les navires entrant dans ces eaux risquent d’être saisis et confisqués. Il ne semble pas que Washington ait été consulté sur cette décision, malgré les risques évidents pour les États-Unis.

Dans le cadre de cette stratégie, le 15 mai, une vedette estonienne a tenté d’arrêter et d’inspecter un pétrolier dans le golfe de Finlande. La Russie a envoyé un avion de combat qui a survolé le navire estonien (volant probablement brièvement dans les eaux territoriales estoniennes) et les Estoniens ont fait marche arrière, du moins pour cette fois. En janvier, la marine allemande a saisi un pétrolier panaméen, l’Eventin, dans la mer Baltique après que ses moteurs soient tombés en panne, laissant le navire à la dérive dans les eaux territoriales allemandes.

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La Suède a désormais annoncé qu’à partir du 1er juillet, sa marine militaire arrêtera, inspectera et potentiellement saisira tous les navires suspects transitant dans sa zone économique exclusive, mobilisant l’aviation suédoise pour soutenir cette menace. Étant donné que la zone économique maritime combinée de la Suède et des trois États baltes couvre la totalité de la mer Baltique centrale, cela revient à une menace virtuelle de couper tout commerce russe à partir de la Russie via la Baltique, ce qui représenterait un coup économique très dur pour Moscou.

Cela pourrait également menacer de couper l’accès de l’enclave russe de Kaliningrad, entourée par la Pologne, à la mer.

C’est le genre d’action qui a traditionnellement mené à des guerres. L’hypothèse avancée par la partie suédoise semble être que la marine et l’aviation russes dans la Baltique sont maintenant si faibles, et si encerclées par le territoire de l’OTAN, que Moscou ne pourrait rien faire. Toutefois, il est très peu probable que les Suédois prennent cette mesure sauf s’ils croient aussi que, en cas de confrontation, Washington viendrait défendre la Suède, même si les décisions de l’UE et de la Suède ont été prises sans l’approbation des États-Unis et ne sont pas strictement couvertes par l’engagement de l’article 5 de l’OTAN.

Et malgré tout le langage hystérique sur la Russie “en guerre” avec les pays de l’OTAN, ces mesures de l’UE et de la Suède reposent aussi sur l’hypothèse que la Russie ne perdra pas son sang-froid et réagira par la force militaire. Les dirigeants européens pourraient cependant vouloir réfléchir à plusieurs questions: par exemple, que feraient les États-Unis si des navires transportant des marchandises américaines étaient interceptés par des navires étrangers ? Nous savons parfaitement que les États-Unis couleraient ces navires de guerre et déclareraient l’avoir fait en défense de la règle sacrée de la navigation libre, en laquelle l’UE prétend aussi croire.

Les dirigeants de l’UE et les amiraux devraient aussi consacrer un peu de temps aux médias sociaux russes et lire les attaques incessantes contre l’administration Poutine de la part des extrémistes, qui soutiennent précisément que Moscou a été trop molle et modérée dans sa réponse aux provocations occidentales, et que cette modération a encouragé l’Occident à intensifier ses actions. Ces extrémistes (surtout au sein des forces de sécurité) représentent de loin la plus grande menace politique intérieure que Poutine doit affronter.

À cet égard, il est important de noter que les actions visant à nuire à la “flotte fantôme” russe ne se sont pas limitées aux sanctions. Ces derniers mois, une série d’attaques contre ces navires en Méditerranée, utilisant des mines magnétiques et d’autres engins explosifs, ont été peu couvertes par les médias occidentaux.

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En décembre 2024, le cargo russe Ursa Major a coulé au large de la Libye après une explosion qui a tué deux membres d’équipage. Le titre de Reuters rapportant ces attaques était assez caractéristique : “Trois pétroliers endommagés par des explosions en Méditerranée au cours du dernier mois, causes inconnues, selon des sources.” Inconnues, vraiment ? Qui pensons-nous être les responsables probables ? Les forces spéciales laotiennes ? Les Martiens ? Et que font les gouvernements européens pour enquêter sur ces causes ?

Si les Russes coulaient un navire de guerre suédois ou estonien, l’administration Trump se retrouverait face à une décision terriblement difficile: intervenir et risquer une guerre directe avec la Russie, ou rester passive, créant une crise profonde avec l’Europe. La nouvelle serait alors qu’il serait sage et légitime pour Washington de déclarer publiquement qu’il désapprouve et qu’il ne contribuera pas à appliquer cette décision.

Washington doit aussi – enfin – prêter attention à ce que pense le reste du monde de tout cela. La majorité écrasante des sénateurs proposant d’imposer des droits de douane de 500% à tout pays achetant de l’énergie russe ne semble pas avoir réalisé qu’un des deux plus grands pays dans cette catégorie est l’Inde, maintenant considérée à Washington comme un partenaire essentiel des États-Unis en Asie. Et désormais, les alliés européens de l’Amérique comptent sur le soutien des États-Unis pour saisir les navires fournissant cette énergie à l’Inde.

L’administration américaine ferait bien d’avertir les pays européens que si cette stratégie mène à des affrontements maritimes avec la Russie, ce seront eux qui devront en assumer les conséquences. Surtout face au nouveau risque de guerre avec l’Iran, la dernière chose dont Washington a besoin est une nouvelle escalade des tensions avec Moscou qui nécessiterait un déploiement militaire américain massif en Europe. Et la dernière chose dont l’économie mondiale a besoin, ce sont des mesures qui pourraient faire encore augmenter les prix mondiaux de l’énergie.

Les gouvernements et institutions européens semblent avoir perdu toute capacité d’analyser les conséquences plus larges de leurs actions. Donc, une fois de plus, l’Amérique devra réfléchir à leur place.

Article original d’Anatol Lieven : https://responsiblestatecraft.org/russia-shadow-fleet/

La dernière bataille: Trump et le destin de l'humanité

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La dernière bataille: Trump et le destin de l'humanité

Alexandre Douguine

Tout semble aller mal, très mal. Trump est tombé dans le piège tendu par les globalistes et les néoconservateurs. Il continue de mener « leur guerre » contre la Russie en Ukraine et s’est maintenant engagé dans une autre « guerre qui n’est pas la sienne » au Moyen-Orient, et il n’y a aucune trace « de sa liste Epstein ».

Mais... malgré tout, le président Trump reste la personne la plus haïe et attaquée au monde, notamment par les réseaux globalistes. Il est en difficulté, et le mouvement MAGA est divisé par les guerres qu’il n’a pas initiées, mais qu’il continue de soutenir et d’alimenter: c’est une erreur fatale. Néanmoins, c’est toujours Trump, et il est en difficulté.

Nous devons être stratégiques. Trump reste une chance pour l’humanité d’éviter la catastrophe finale que nous imposent les globalistes. Il vaut mieux le soutenir, en essayant de corriger et d’améliorer ses erreurs, que de l’abandonner complètement.

Il est clair que les États-Unis n’ont pas besoin de guerres suicidaires. Théoriquement, Trump peut les arrêter. Les autres ne le veulent pas et ne le feront pas. Les globalistes sont pure malveillance. Trump se trouve entre le mal et le bien. Son hésitation entre deux pôles métaphysiques est déjà quelque chose de grand en ces temps très sombres. Il faut faire preuve de patience.

L’État sioniste d’Israël est l’ennemi absolu de l’Iran, des chiites, des Arabes et du monde musulman. C’est leur guerre, et nous devons laisser qu’ils la mènent. Deux eschatologies religieuses opposées se battent entre elles pour Jérusalem, Al-Aqsa et la Palestine. Cela n’a rien à voir avec le christianisme.

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La fin de la prétendue suprématie morale de l'Occident

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La fin de la prétendue suprématie morale de l'Occident

par Andrea Zhok 

Source : Andrea Zhok & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/91803

Alors que la tension monte au Moyen-Orient et que la possibilité d'une guerre totale, sans exclusion de coups inédits, devient de plus en plus réaliste, une réflexion culturelle d'ordre général pourrait sembler hors de propos, mais je pense qu'elle est néanmoins utile pour évaluer les développements à long terme.

Dans tous les principaux conflits en cours, nous assistons à une configuration oppositionnelle assez nette, avec peu de cas ambigus: la ligne de démarcation oppositionnelle est celle où un Occident, culturellement hégémonisé par les États-Unis d'Amérique, s'oppose à tous ceux qui ne sont pas directement ou indirectement soumis à lui.

Il s'agit donc d'une opposition franche le long des LIGNES DE POUVOIR, dans laquelle un « empire » consolidé s'oppose à d'autres pôles de pouvoir influents mais non soumis (Russie, Chine, Iran, etc.).

Mais tout pouvoir a toujours besoin d'une COUVERTURE IDÉOLOGIQUE, car tout pouvoir nécessite un certain degré d'adhésion généralisée de ses subordonnés: le pouvoir ne peut s'exercer sous forme de contrôle et de répression que jusqu'à un certain point, mais pour la grande majorité de la population, une adhésion idéologique générale doit prévaloir.

La couverture idéologique des pôles de résistance anti-occidentale est variée. À l'exception d'une certaine méfiance générale à l'égard de l'idée d'un « marché autorégulé », il n'y a pas d'idéologie commune entre la Chine, la Russie, l'Iran, le Venezuela, la Corée du Nord, l'Afrique du Sud, etc. Leur seule « idéologie » commune est le désir de pouvoir se développer de manière autonome, sur une base régionale, selon leurs propres lignes de développement culturel, sans ingérence extérieure. Cela ne fait pas nécessairement d'eux des porte-drapeaux de la paix, car il existe toujours des divergences de projet, même au niveau des relations régionales, mais cela rend néanmoins tous ces blocs réfractaires aux projections agressives et mondiales.

Cela représente une limite en termes de projection pure et simple de puissance par rapport au « bloc occidental » qui, dans le cadre de l'OTAN ou non, continue d'agir de manière concertée dans tous les scénarios conflictuels. Tout comme en Ukraine, la Russie affronte de fait les forces de l'Occident unifié, même si c'est indirectement, il en va de même pour l'Iran ces jours-ci (des fournitures militaires en provenance d'Allemagne, ainsi que des États-Unis, viennent d'arriver en Israël). En revanche, les alliances et les liens de soutien mutuel entre les blocs de la « résistance anti-occidentale » sont beaucoup plus occasionnels, éventuellement avec des accords bilatéraux limités.

La supériorité de la coordination occidentale dans l'usage de la force va toutefois de pair avec un autre processus, éminemment culturel, dont nous avons du mal à prendre conscience depuis l'intérieur même de l'Occident. Pendant longtemps, l'Occident post-lumières s'est présenté au monde et à lui-même comme l'incarnation d'une rationalité universaliste, d'une légalité internationale, de droits généralement étendus à tous les humains. La lecture opposée à l'Occident comme seul lieu de la raison et du droit, lequel se profile par opposition à la « jungle » que serait le reste du monde où prévaudraient la violence et l'abus de pouvoir, est encore aujourd'hui un élément standard de l'endoctrinement occidental: on la retrouve partout, des journaux aux manuels scolaires.

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La situation paradoxale est que le seul élément vraiment fondamental pour l'unité idéologique de l'Occident n'a rien à voir avec la raison ou le droit, mais tout à voir avec l'idée de légitimation conférée par la FORCE. L'idéologie réelle de l'Occident est forgée d'une part sur l'idée de la force anonyme des capitaux, qui s'exprime par exemple à travers les mécanismes d'endettement international, et d'autre part sur l'idée de la force industrielle et militaire, justifiée comme le gendarme nécessaire pour « faire respecter les contrats » et « faire payer les dettes ».

Le paradoxe de la situation réside dans le fait que l'Occident se présente au reste du monde, mais aussi en son sein, sous une forme qui ne peut être qualifiée que de MENTALEMENT DISSOCIÉE.

D'une part, il se présente comme le défenseur des faibles, des opprimés, comme le gardien mondial des droits de l'homme, comme le protecteur sévère des libertés, comme l'incarnation d'une justice aux prétentions universelles.

Et d'autre part, il adopte constamment des doubles standards scandaleux (« ce sont peut-être des fils de pute, mais ce sont nos fils de pute »), rompt les promesses faites (voir l'avancée de l'OTAN vers l'est), fomente des changements de régime (liste interminable), ment internationalement sans pudeur et sans jamais s'excuser (la fiole de Powell), utilise la diplomatie pour faire baisser la garde de l'adversaire et ensuite le frapper (négociations de Trump avec l'Iran), exerce également en interne toutes les formes de surveillance et de répression qu'il juge utiles (mais toujours « pour une bonne cause »), etc. etc.

Ce qui est à la fois terrible et déstabilisant, c'est que nous avons tellement intériorisé cette forme de « double pensée » que nous pouvons continuer à tenir un discours public délirant selon lequel, pour permettre aux femmes iraniennes de se promener tranquillement les cheveux au vent, il est raisonnable de bombarder leurs villes. Ou bien il est sensé, et on ne perçoit aucun double standard, de justifier qu'un pays rempli de bombes atomiques clandestines en bombarde préventivement un autre pour éviter que, tôt ou tard, ce dernier en possède également.

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Le véritable grand problème que l'Occident paiera dans les décennies à venir est que toute la grande tradition culturelle occidentale, son rationalisme, son universalisme, son appel à la justice, à la loi, etc. s'est révélée, à l'épreuve de l'histoire, être purement et simplement du vent, des masques, de la verbosité, tous incapables de construire une civilisation où l'on peut se fier à la parole.

De l'extérieur de cette tradition même, on ne peut que parvenir à une conclusion simple: toutes nos belles paroles de garçons bien élevés, nos appels à la rigueur scientifique, à la vérité, à la raison, à la justice universelle, ne valent finalement pas l'air chaud avec lequel elles sont prononcées. Ce ne sont que des couvertures pour l'exercice de la Force (l'« Ideenkleid » marxiste).

Nous avons beau nous efforcer de dire que cela n'a pas toujours été ainsi, que ce n'est pas nécessairement ainsi, notre perte de crédibilité vis-à-vis du reste du monde est colossale et difficilement récupérable (elle ne pourrait l'être que si ces appels à la raison et à la justice démontraient qu'ils ont les rênes du pouvoir dans les démocraties libérales occidentales, mais nous sommes à des années-lumière de cette perspective).

L'Iran est la clé de l'équilibre multipolaire au Moyen-Orient

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L'Iran est la clé de l'équilibre multipolaire au Moyen-Orient

par Stefano Vernole

Source : Strategic Culture & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/l-iran-e-la-chiav...

Comme signalé il y a quelques semaines, la D.I.A. américaine avait pris l'Iran pour cible. En résumé, les raisons en étaient les suivantes: l'Iran possède une capacité de représailles directes et pas seulement par procuration via l'Axe de la Résistance au Moyen-Orient ; l'Iran développe d'importantes capacités en matière de missiles et de drones ; l'Iran a des ambitions nucléaires, même s'il est encore loin de pouvoir développer une bombe atomique. Sur ce dernier point, Donald Trump (idole des "altermondialistes malins") a sèchement contredit le chef des services secrets américains, Tulsi Gabbard, en déclarant : « Je me fiche de ce qu'elle a dit. Je pense qu'ils étaient très près d'en avoir une ».

En réalité, dans le rapport de l'agence de renseignement de Washington, ce sont les motivations géopolitiques qui semblaient prévaloir. La coopération de l'Iran avec la Russie, la Chine et la Corée du Nord méritait, du point de vue américain, un durcissement des sanctions économiques, étant donné que la mise en service du corridor ferroviaire entre Téhéran et Pékin permettait de transporter le pétrole en 15 jours au lieu de 40 et de contourner le détroit de Malacca, qui risquait d'être fermé en cas de conflit pour Taïwan.

Ce n'est pas un hasard si les analystes militaires chinois ont immédiatement porté leur attention sur l'agression d'Israël contre l'Iran et en ont tiré des conclusions peu encourageantes: une profonde infiltration des services secrets sionistes dans la chaîne de commandement iranienne suivie de lourdes pertes militaires (celles subies par les Houthis au Yémen ne sont même pas comparables) ; une défense antiaérienne iranienne inefficace ; un manque de vigilance et de préparation dû à une certaine indolence des dirigeants iraniens ; l'échec de la politique de dissuasion iranienne ; crise totale de la tentative de réforme économique lancée par Raisi, puis brisée à la fois par la mort de l'ancien président iranien (difficile aujourd'hui de penser à un accident) et par l'instabilité régionale provoquée par Israël avec la chute d'Assad, l'attaque contre le Liban et le génocide des Palestiniens [1].

Bien sûr, la Chine, la Russie, la Turquie et les pays du golfe Persique, en premier lieu l'Arabie saoudite, ont sévèrement condamné l'attaque militaire israélienne et souhaiteraient sauver le gouvernement de Téhéran du « changement de régime » évoqué par Londres, Washington et Tel-Aviv. La Grande-Bretagne a mis ses bases militaires à la disposition de l'armée de l'air israélienne, transformant ainsi le territoire britannique en une zone de préparation directe pour les opérations contre l'Iran, fournissant à Tel-Aviv non seulement des bases aériennes, mais aussi ses services de renseignement. Elon Musk a activé le système satellitaire Starlink au-dessus de l'Iran, conférant à la coalition occidentale un avantage crucial en matière de communication et de navigation des données, tandis que le porte-avions américain Nimitz, en provenance de la mer de Chine méridionale, se dirige vers le golfe Persique. L'Occident dans son ensemble, avec le communiqué du G7, a fourni une légitimation formelle et « morale » au renversement du gouvernement iranien actuel.

La modalité de l'agression militaire israélienne est identique, tant sur le plan technique (lancement de drones à l'intérieur du pays) que politique (alors que l'Iran était en pourparlers avec les États-Unis), à celle de l'attaque ukrainienne contre les sites nucléaires et les bases russes il y a quelques semaines: la main est manifestement la même.

Pour la Russie, dont l'accord de partenariat stratégique avec l'Iran a été approuvé par Vladimir Poutine lui-même le 21 avril dernier, mais par Téhéran il y a seulement quelques jours, une défaite des ayatollahs serait un désastre géopolitique bien plus grave que la chute d'Assad en Syrie. L'Iran joue un rôle essentiel dans l'équilibre des pouvoirs au Moyen-Orient et est un allié indispensable dans la résistance à la domination mondiale occidentale; en particulier, l'équilibre stratégique dans la mer Caspienne serait rompu et les intérêts de Moscou dans le secteur énergétique seraient menacés au profit des États-Unis qui veulent exporter leur gaz naturel liquéfié.

De plus, un effondrement de l'Iran signifierait: l'effondrement du système d'alliances régionales de Moscou; la domination totale de l'Occident dans la région; l'isolement de la Russie et de ses principaux partenaires. La perte de l'Iran, membre des BRICS, deviendrait une catastrophe géopolitique pour le multipolarisme et confirmerait la capacité de l'Occident à résoudre par la force toutes ses contradictions géopolitiques. La vision à long terme esquissée par Brzezinski dans les années 1990 et par les néoconservateurs américains après le 11 septembre 2001 se réaliserait alors presque définitivement.

De son côté, Benjamin Netanyahu écarterait tout risque d'être remis en cause pour ses crimes évidents, devenant le symbole de la victoire atlantiste au Moyen-Orient.

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La Chine, qui a également conclu un accord de partenariat stratégique avec l'Iran et qui dépend fortement du pétrole iranien (environ 90% du pétrole transitant par le détroit d'Ormuz est destiné à Pékin), ne peut se permettre de perdre un partenaire indispensable à ses ambitions géopolitiques.

Que peut-il se passer maintenant ? Si la tentative de médiation diplomatique des pays d'Eurasie et des États voisins échoue, comme cela semble désormais évident, l'escalade devient inévitable.

Les États-Unis, la Grande-Bretagne et Israël, avec le plein consentement de leurs vassaux européens, recherchent des acteurs locaux capables de remplacer Khamenei et de conduire l'Iran vers une rupture avec Moscou et Pékin. Si les dirigeants actuels de Téhéran perçoivent le danger d'un renversement qui pourrait se produire si les États-Unis entrent directement en scène avec leurs forces armées, ils n'auront d'autre solution que d'augmenter le prix du conflit en dépassant toutes les « lignes rouges ». Mobiliser l'Axe de la Résistance, fermer le détroit d'Ormuz au passage des navires (avec le consentement de Pékin, désormais résigné à une guerre totale dans la région) et changer l'inertie de la bataille par une intervention terrestre depuis le Liban, la Syrie et l'Irak, sont les seules cartes dont elle dispose, compte tenu de la domination totale du ciel par Israël.

Plusieurs inconnues subsistent. Certes, la Chine n'interviendrait pas directement (tout comme la Russie engagée en Ukraine), mais elle pourrait aider l'Iran en lui fournissant du matériel militaire et en poussant le Pakistan à entrer en scène (le ministre pakistanais de la Défense a non seulement manifesté sa solidarité immédiate avec Téhéran, mais s'est également déclaré prêt à attaquer Israël en cas d'intervention militaire américaine contre l'Iran). Islamabad, seule puissance nucléaire islamique, apporterait une aide indispensable et pourrait également inciter l'Égypte et la Turquie (dont les dirigeants restent dans le collimateur de Tel-Aviv et le seront de toute façon dans un avenir pas trop lointain) à intensifier leur pression contre Israël. Reste à savoir si cet effet domino complexe n'impliquerait pas également d'autres acteurs mondiaux, à commencer par l'Inde, en quête de revanche après l'échec subi dans la bataille aérienne qui a suivi la crise du Cachemire.

La Troisième Guerre mondiale, évoquée ces dernières heures par Steve Bannon et Tucker Carlson, est-elle peut-être plus proche que nous ne l'imaginons ?

NOTE:

[1] Wang Shichun, "L'Iran sera-t-il la deuxième Syrie d'Assad?", guancha.cn, 14 juin 2025. L'analyste militaire chinois souligne également un conflit interne à l'appareil iranien entre la position du Guide suprême Khamenei, la ligne médiane de Pezeshkian qui attribue une grande partie de la corruption du pays aux Gardiens de la révolution et celle des libéraux qui souhaiteraient privatiser totalement l'économie.

Téhéran ne cède pas, Israël mise sur les États-Unis: premier bilan de la guerre entre Israël et l'Iran

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Téhéran ne cède pas, Israël mise sur les États-Unis: premier bilan de la guerre entre Israël et l'Iran

Andrea Muratore

Bron: https://it.insideover.com/guerra/teheran-non-crolla-israele-punta-sugli-usa-un-primo-bilancio-della-guerra-israele-iran.html  

Après plus d'une semaine, la guerre entre Israël et l'Iran présente des scénarios stratégiques de toute première importance qui sont encore en cours de consolidation, mais dont l'analyse permet de se frayer un chemin à travers un flot de propagande extrêmement visqueux et de comprendre comment le conflit le plus problématique de l'histoire récente du Moyen-Orient pourrait évoluer et façonner la région.

Récit contre réalité, la guerre d'Israël contre l'Iran

Comme toute guerre, celle entre Tel-Aviv et Téhéran est faite de récits autant que de faits. Des récits qui s'avèrent souvent fallacieux à l'épreuve des faits concrets et qui doivent être présentés comme tels. Nous le constatons dans l'attitude des acteurs sur le terrain, directement ou indirectement impliqués dans la guerre, qui a fortement changé au cours des journées où ce conflit s'est développé.

La première tendance, double, est la prémisse nécessaire à tout le reste. Nous constatons en effet que la justification israélienne d'une guerre préventive visant à empêcher Téhéran d'accéder rapidement à une forme de dissuasion nucléaire s'est avérée insuffisante pour expliquer la réelle volonté de Tel Aviv d'entrer en guerre, justifiée en réalité par la tentative d'affaiblir et de saper les fondements du régime iranien.

Après le bombardement de Be'er Sheva jeudi, le ministre de la Défense de Benjamin Netanyahu, Israel Katz, l'a clairement indiqué en désignant l'ayatollah Ali Khamenei comme une cible militaire légitime. Au cours de ces mêmes jours, le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Mariano Grossi, a rejeté l'hypothèse selon laquelle, malgré les critiques de l'organe de Vienne pour avoir violé ses obligations en matière de prolifération, l'Iran accélérerait réellement la possibilité de se doter de la bombe par excellence.

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Le régime ne s'effondre pas

Deuxièmement, nous constatons que malgré les coups très durs subis et l'éclaircissement continu des rangs supérieurs des forces armées, l'appareil du pouvoir iranien ne s'est pas effondré. L'architecture dite "baroque", qui pose la structure fondée sur le rôle du Guide suprême et des Gardiens de la révolution sur le gouvernement proprement dit et sur les forces armées traditionnelles, s'est révélée plus souple que prévu.

En particulier, le discours de Netanyahu, repris par de nombreux représentants des camps libéral et conservateur en Europe et aux États-Unis, selon lequel la libération de l'Iran du système de pouvoir actuel serait le résultat des raids de Tel-Aviv, ne s'est pas concrétisé. Indépendamment du jugement global sur le système de la République islamique et sur le Guide suprême, on constate qu'un régime en difficulté sur de nombreux fronts, de l'économie en crise aux questions sociales pressantes, n'a à ce jour aucune alternative crédible dans la société iranienne, que l'idée d'exporter un système démocratique à coups de bombes, une vieille tentation qui refait surface, semble pour le moins fallacieuse et que la ligne de réponse à Israël sur le terrain n'a pas provoqué de protestations ou de soulèvements.

Khamenei refuse la reddition, le système iranien ne s'effondre pas

À cet égard, le discours prononcé jeudi par Khamenei, dans lequel il a rejeté toute hypothèse de « reddition » du pays, comme l'avait demandé le président américain Donald Trump, a eu une importance politique considérable, dictant une ligne de conduite et mettant au défi les éventuels opposants de se manifester: aucun conflit ne semble avoir émergé dans l'architecture pourtant difficilement pénétrable du régime iranien.

Tout bien considéré, l'Iran subit les durs coups de l'offensive aérienne et balistique israélienne et tente de riposter avec une dissuasion balistique bien plus réduite, mais qui ne semble pas inexistante, loin de là. À ce jour, en substance, l'attaque de Tel-Aviv n'a pas encore provoqué le démantèlement total du nucléaire, n'a pas, jusqu'à présent, comme le confirme également le Jerusalem Post, ouvert de fissures irréparables dans le régime et n'a pas, troisième point de la confrontation entre le récit et la réalité, convaincu les États-Unis d'entrer en guerre pour porter un coup décisif à Téhéran, en évitant toute solution diplomatique.

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Le dilemme américain et l'heure de la diplomatie

Trump a été sollicité de toutes parts: plusieurs faucons du Parti républicain, menés par les sénateurs Ted Cruz et Lindsey Graham, poussent à s'engager aux côtés d'Israël, et le général Michael Erik Kurilla, à la tête du Commandement central (Centcom) chargé des opérations au Moyen-Orient, semble partager cet avis.

Dans le même temps, on note la froide réticence de l'aile proche du vice-président J. D. Vance et des figures politiques, commentateurs et faiseurs d'opinion proches du monde "Maga", comme le présentateur Tucker Carlson. Mais jeudi, The Donald a déclaré vouloir donner une nouvelle place à la diplomatie, ouvrant une fenêtre de deux semaines pour d'éventuelles rencontres diplomatiques avec les dirigeants de Téhéran.

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La « résurrection » de Shamakhani

À ce sujet, certaines informations intéressantes méritent d'être soulignées: tout d'abord, après que Trump ait ouvert cette fenêtre, l'Iran a annoncé que l'amiral Ali Shamakhani, haut conseiller de Khamenei et figure centrale de la diplomatie atomique avec Washington, était vivant et se remettait des blessures subies le 13 juin lors des attaques israéliennes qui ont déclenché la guerre. À propos de récits: Shamakhani avait été déclaré mort sur la base des communiqués militaires israéliens qui annonçaient son élimination.

Tel Aviv pensait avoir tué l'habile négociateur qui, jusqu'à il y a un mois, présentait des demandes pour le moins modérées dans ses discussions avec Washington: ouverture à l'abandon de l'uranium hautement enrichi, négociations directes et continues avec les États-Unis, politique permanente visant la désescalade. La nouvelle de la survie de Shamakhani ouvre la possibilité de recréer l'axe avec le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi au nom de la désescalade. Hier, les premières discussions ont eu lieu à Genève avec les diplomates de l'E3, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.

À propos de changement de discours: l'Europe, qui n'est pas intervenue dans les négociations entamées en avril par les États-Unis et l'Iran et qui, au début de la guerre, avait largement épousé le discours israélien et les raids, adopte désormais une approche plus inquiète, ouverte aux négociations et au cessez-le-feu. La volonté prématurée de venir en aide au (présumé) vainqueur a atteint son apogée lors du G7, lorsque le chancelier Friedrich Merz a déclaré qu'Israël « faisait le sale boulot pour nous tous ». La situation s'est avérée, comme dirait Giulio Andreotti, « un peu plus complexe ». Et le discours, éternel fléau de la politique internationale, a cédé la place au pragmatisme et à un plus grand réalisme. Ce qui, dans les affaires internationales, devrait toujours être bienvenu.

Téhéran ne cède pas, Israël mise sur les États-Unis: premier bilan de la guerre entre Israël et l'Iran

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Téhéran ne cède pas, Israël mise sur les États-Unis: premier bilan de la guerre entre Israël et l'Iran

Andrea Muratore

Bron: https://it.insideover.com/guerra/teheran-non-crolla-israele-punta-sugli-usa-un-primo-bilancio-della-guerra-israele-iran.html  

Après plus d'une semaine, la guerre entre Israël et l'Iran présente des scénarios stratégiques de toute première importance qui sont encore en cours de consolidation, mais dont l'analyse permet de se frayer un chemin à travers un flot de propagande extrêmement visqueux et de comprendre comment le conflit le plus problématique de l'histoire récente du Moyen-Orient pourrait évoluer et façonner la région.

Récit contre réalité, la guerre d'Israël contre l'Iran

Comme toute guerre, celle entre Tel-Aviv et Téhéran est faite de récits autant que de faits. Des récits qui s'avèrent souvent fallacieux à l'épreuve des faits concrets et qui doivent être présentés comme tels. Nous le constatons dans l'attitude des acteurs sur le terrain, directement ou indirectement impliqués dans la guerre, qui a fortement changé au cours des journées où ce conflit s'est développé.

La première tendance, double, est la prémisse nécessaire à tout le reste. Nous constatons en effet que la justification israélienne d'une guerre préventive visant à empêcher Téhéran d'accéder rapidement à une forme de dissuasion nucléaire s'est avérée insuffisante pour expliquer la réelle volonté de Tel Aviv d'entrer en guerre, justifiée en réalité par la tentative d'affaiblir et de saper les fondements du régime iranien.

Après le bombardement de Be'er Sheva jeudi, le ministre de la Défense de Benjamin Netanyahu, Israel Katz, l'a clairement indiqué en désignant l'ayatollah Ali Khamenei comme une cible militaire légitime. Au cours de ces mêmes jours, le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Mariano Grossi, a rejeté l'hypothèse selon laquelle, malgré les critiques de l'organe de Vienne pour avoir violé ses obligations en matière de prolifération, l'Iran accélérerait réellement la possibilité de se doter de la bombe par excellence.

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Le régime ne s'effondre pas

Deuxièmement, nous constatons que malgré les coups très durs subis et l'éclaircissement continu des rangs supérieurs des forces armées, l'appareil du pouvoir iranien ne s'est pas effondré. L'architecture dite "baroque", qui pose la structure fondée sur le rôle du Guide suprême et des Gardiens de la révolution sur le gouvernement proprement dit et sur les forces armées traditionnelles, s'est révélée plus souple que prévu.

En particulier, le discours de Netanyahu, repris par de nombreux représentants des camps libéral et conservateur en Europe et aux États-Unis, selon lequel la libération de l'Iran du système de pouvoir actuel serait le résultat des raids de Tel-Aviv, ne s'est pas concrétisé. Indépendamment du jugement global sur le système de la République islamique et sur le Guide suprême, on constate qu'un régime en difficulté sur de nombreux fronts, de l'économie en crise aux questions sociales pressantes, n'a à ce jour aucune alternative crédible dans la société iranienne, que l'idée d'exporter un système démocratique à coups de bombes, une vieille tentation qui refait surface, semble pour le moins fallacieuse et que la ligne de réponse à Israël sur le terrain n'a pas provoqué de protestations ou de soulèvements.

Khamenei refuse la reddition, le système iranien ne s'effondre pas

À cet égard, le discours prononcé jeudi par Khamenei, dans lequel il a rejeté toute hypothèse de « reddition » du pays, comme l'avait demandé le président américain Donald Trump, a eu une importance politique considérable, dictant une ligne de conduite et mettant au défi les éventuels opposants de se manifester: aucun conflit ne semble avoir émergé dans l'architecture pourtant difficilement pénétrable du régime iranien.

Tout bien considéré, l'Iran subit les durs coups de l'offensive aérienne et balistique israélienne et tente de riposter avec une dissuasion balistique bien plus réduite, mais qui ne semble pas inexistante, loin de là. À ce jour, en substance, l'attaque de Tel-Aviv n'a pas encore provoqué le démantèlement total du nucléaire, n'a pas, jusqu'à présent, comme le confirme également le Jerusalem Post, ouvert de fissures irréparables dans le régime et n'a pas, troisième point de la confrontation entre le récit et la réalité, convaincu les États-Unis d'entrer en guerre pour porter un coup décisif à Téhéran, en évitant toute solution diplomatique.

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Le dilemme américain et l'heure de la diplomatie

Trump a été sollicité de toutes parts: plusieurs faucons du Parti républicain, menés par les sénateurs Ted Cruz et Lindsey Graham, poussent à s'engager aux côtés d'Israël, et le général Michael Erik Kurilla, à la tête du Commandement central (Centcom) chargé des opérations au Moyen-Orient, semble partager cet avis.

Dans le même temps, on note la froide réticence de l'aile proche du vice-président J. D. Vance et des figures politiques, commentateurs et faiseurs d'opinion proches du monde "Maga", comme le présentateur Tucker Carlson. Mais jeudi, The Donald a déclaré vouloir donner une nouvelle place à la diplomatie, ouvrant une fenêtre de deux semaines pour d'éventuelles rencontres diplomatiques avec les dirigeants de Téhéran.

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La « résurrection » de Shamakhani

À ce sujet, certaines informations intéressantes méritent d'être soulignées: tout d'abord, après que Trump ait ouvert cette fenêtre, l'Iran a annoncé que l'amiral Ali Shamakhani, haut conseiller de Khamenei et figure centrale de la diplomatie atomique avec Washington, était vivant et se remettait des blessures subies le 13 juin lors des attaques israéliennes qui ont déclenché la guerre. À propos de récits: Shamakhani avait été déclaré mort sur la base des communiqués militaires israéliens qui annonçaient son élimination.

Tel Aviv pensait avoir tué l'habile négociateur qui, jusqu'à il y a un mois, présentait des demandes pour le moins modérées dans ses discussions avec Washington: ouverture à l'abandon de l'uranium hautement enrichi, négociations directes et continues avec les États-Unis, politique permanente visant la désescalade. La nouvelle de la survie de Shamakhani ouvre la possibilité de recréer l'axe avec le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi au nom de la désescalade. Hier, les premières discussions ont eu lieu à Genève avec les diplomates de l'E3, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.

À propos de changement de discours: l'Europe, qui n'est pas intervenue dans les négociations entamées en avril par les États-Unis et l'Iran et qui, au début de la guerre, avait largement épousé le discours israélien et les raids, adopte désormais une approche plus inquiète, ouverte aux négociations et au cessez-le-feu. La volonté prématurée de venir en aide au (présumé) vainqueur a atteint son apogée lors du G7, lorsque le chancelier Friedrich Merz a déclaré qu'Israël « faisait le sale boulot pour nous tous ». La situation s'est avérée, comme dirait Giulio Andreotti, « un peu plus complexe ». Et le discours, éternel fléau de la politique internationale, a cédé la place au pragmatisme et à un plus grand réalisme. Ce qui, dans les affaires internationales, devrait toujours être bienvenu.

dimanche, 22 juin 2025

La guerre à distance

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La guerre à distance

par Daniele Perra

Source : Daniele Perra & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-guerra-a-dista...

On peut déjà distinguer au moins deux phases dans cette actuelle « guerre à distance ».

1) L'hyper-exaltation israélienne du premier jour suite au lancement de l'opération « Rising Lion », avec Netanyahu qui, dès le deuxième jour, annonce la domination totale du ciel au-dessus de Téhéran.

2) La réaction iranienne, alors que l'exaltation israélienne s'estompe, puis le traditionnel jeu de la « carte victimaire » de la part de Netanyahu lui-même pour forcer l'intervention directe (sur le plan logistique, c'est déjà un fait accompli) des États-Unis contre l'Iran. Il est également curieux, à cet égard, que le gouvernement israélien lui-même soit passé de la position consistant à dire « ne publiez pas de photos et de vidéos de l'impact des missiles iraniens » (afin de ne pas nuire au moral de la population) à celle consistant à dire « publiez tout » (stratégie suivie, bien sûr, par nos médias); curieuse également la confrontation musclée entre Ben Gvir (celui qui veut le nettoyage ethnique à Gaza) et le chef du Mossad. Ben Gvir se plaint probablement parce que la guerre contre l'Iran détourne des ressources de son plan d'extermination (plus de 250 millions de dollars par jour, et considérons que rien que pendant la dernière année de l'administration Biden, Israël a reçu 20 milliards de dollars des États-Unis, alors que traditionnellement, cette aide s'est toujours élevée à environ 5 à 6 milliards par an, dons privés compris; et rappelons également qu'Israël est le seul État qui n'a pas à rendre de comptes à Washington sur la manière dont il investit l'argent reçu).

Quoi qu'il en soit, tout dépenser d'un seul coup est une tradition bien établie dans la doctrine militaire israélienne, parfois couronnée de succès (1967), parfois non (2006). Et même dans ce cas, les résultats sur le terrain sont assez décevants (à l'exception de l'assassinat de hauts responsables des Pasdaran et de scientifiques iraniens, à condition que le meurtre de civils puisse être considéré comme un succès militaire). Le programme nucléaire iranien n'est que partiellement affecté et les capacités de riposte de Téhéran sont presque intactes.

Si le conflit devait se prolonger, la position de Tel-Aviv pourrait être encore plus compromise. Si les États-Unis interviennent directement, il faudra évaluer la manière dont ils le feront. Les doutes de Trump sont en effet liés au risque de ne pas obtenir une victoire réelle exploitable sur le plan de la propagande interne aux États-Unis et à l'Occident en général. La Russie et la Chine ne permettront guère un « changement de régime » déjà très difficile, et les États-Unis pourraient risquer une « victoire à la Pyrrhus » inutile avec une action qui aurait presque exclusivement une valeur symbolique (les Iraniens sont probablement déjà en train d'évacuer et de démanteler les cibles éventuelles).

Ainsi, sans la certitude d'un changement de régime, les États-Unis n'agiront pas, ou le feront de manière partielle.

En conclusion, et en ce qui concerne la Chine, il est curieux que l'attaque israélienne ait eu lieu quelques jours avant l'inauguration de la ligne ferroviaire Pékin-Téhéran, branche fondamentale de la Nouvelle Route de la Soie: signe indéniable que (malgré les déclarations officielles), ce « nouveau » conflit a des raisons bien plus vastes qu'on ne pourrait le penser.

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Contenir la Russie ou remodeler le système? - Rééquilibrer les forces ou "pivoter hors d'Europe"?

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Contenir la Russie ou remodeler le système?

Rééquilibrer les forces ou "pivoter hors d'Europe"?

Irnerio Seminatore

Source: https://www.ieri.be/fr/publications/wp/2025/juin/contenir-la-russie-ou-remodeler-le-systeme

Table des matières

  • Les leçons de fond sur les causalités du conflit, les intérêts en jeu et l'ambivalence des négociations
  • Moments de rupture et réorganisation de l'ordre mondial
  • Pivoter hors d'Europe, plutôt que rééquilibrer les forces
  • "Pivot coopératif russe vers l'Est" ou "Pivot hégémonique mondial USA - Chine"
  • Conflit ukrainien, cessez le feu et négociations de paix
  • La Russie et les vérités faussées de l'Occident et ses conséquences

* * *

Les leçons de fond sur les causalités du conflit, les intérêts en jeu et l'ambivalence des négociations 

Des leçons de fond sont à tirer du conflit russo-ukrainien, pour mieux comprendre les divergences stratégiques euro-américaines et pour redéfinir la politique étrangère de l'Union à l'approche du sommet de l'Otan du 24 et 25 juin prochain à la Haye. Elles concernent tout à la fois les enjeux, les intérêts et les stratégies.

Pour ce qui est des causalités fondamentales du conflit, la première et plus importante repose sur le statut et la position géopolitique de l'Ukraine, couloir incontournable de l'Europe vers l'Asie et enjeu de la stratégie eurasienne de l'Amérique

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L'importance du facteur géographique n'avait pas échappé à Zbigniew Brzezinski qui, dans Le Grand Échiquier de 1997 avait identifié les trois leviers qui permettraient aux États-Unis de conserver le premier rôle dans les affaires mondiales au 21ème siècle: contenir la poussée de la Chine, poursuivre la division des Européens et couper la Russie post-soviétique de l’Ukraine. Celle -ci, située entre l’Union européenne à l’ouest et la Russie à l’est, a été souvent qualifiée d’État tampon. Or, il s'agit d'une définition qui remonte au Congrès de Vienne (1815) et qui implique une sorte de neutralisation et principalement d'une vocation de l'Etat tampon à ne rejoindre aucune alliance militaire ou organisation d’intégration économique afin d’éviter les conflits entre les puissances majeures du système. Cependant la succession des événements de la post guerre-froide prouve que cette mesure n'a pas eu de succès. Si la Russie a cherché à maintenir l’Ukraine dans son orbite, les États-Unis, de leur côté, ont voulu voir l’Ukraine comme un levier essentiel pour affaiblir la Russie.

Moments de rupture et réorganisation de l'ordre mondial

En effet sur le plan historique une succession de ruptures ont caractérisé le processus de réorganisation de l'ordre mondial, après la dislocation de L’Union soviétique (26 décembre 1991).

 En voici les quelques références essentielles :

- 1999, fin du conflit du Kosovo opposant Serbes et Kosovars suite à l’intervention de l’OTAN sans mandat de l'ONU ;

- 2001, attentat terroriste aux Tours Jumelles du World Trade Center de New York ;

- 2003 conflit d’Irak par l’invasion américaine contre Saddam Hussein.

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Pivoter hors d'Europe, plutôt que rééquilibrer les forces

À l’instar de l’antagonisme américano-soviétique de jadis et contrairement au conflit en cours entre la Russie et l'Ukraine, la compétition entre l'est et l'ouest s'est déplacée vers l'antagonisme entre Washington et Pékin pour l’hégémonie mondiale et a désormais un objet beaucoup plus important que le conflit ukrainien, se situant à un autre niveau stratégique.

L’actuelle connivence dans le "deal" américano-russe ne s’explique pas par une quelconque crainte que Moscou puisse dominer l’Europe ou menacer les pays baltes. Plutôt que de contenir Moscou, l’intérêt des États-Unis aujourd’hui serait de pivoter hors de l’Europe, en direction de l’Asie orientale, d’entraîner la Russie dans une coalition de rééquilibrage face à la Chine et de ne pas se laisser embourber dans une guerre en Europe de l’Est, en précipitant le rapprochement sino-russe. Pour le « réaliste » John Mearsheimer, la perspective d’intégrer l’Ukraine au sein de l’OTAN constituait et constitue encore une menace pour la Russie. Les Russes ne prétendaient pas que l’Ukraine était une menace en soi. C’est l’Ukraine au sein de l’OTAN qui concrétise cette menace. Par conséquent les Etats-Unis doivent désormais se détourner du continent européen pour mieux se consacrer à l’Asie. C'est là la contrainte de la politique du "Pivot” !

"Pivot coopératif russe vers l'Est" ou "Pivot hégémonique mondial USA - Chine"

Le terme “pivot vers l’Est” est réapparu dans le discours russe, lors du Forum économique international de Saint-Pétersbourg, en 2013. À cette occasion, Vladimir Poutine a évoqué la possibilité de développer les relations économiques avec les marchés de l’Asie-Pacifique, suivant en partie le modèle des États-Unis. Cependant, Poutine a immédiatement souligné une différence majeure: la Russie souhaitait coopérer avec la Chine et non rivaliser avec elle, contrairement à l’approche américaine. L’intérêt de la Russie pour l’Asie s’explique par la montée en puissance de la Chine, perçue comme une contre-force planétaire aux États-Unis. C’est pourquoi Moscou a cherché à établir une coopération avec Pékin, plutôt qu’une concurrence. Une autre différence notable entre le pivot asiatique américain et le pivot vers l’Est russe réside dans le rôle jusqu’alors limité de la Russie dans l’ensemble de la région Asie-Pacifique.

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La politique des grandes puissances se caractérise cependant toujours par une implacable compétition sécuritaire puisque chaque État cherche non seulement à gagner en influence relative, mais aussi à éviter que la balance des pouvoirs ne penche en sa défaveur. Cet objectif, dit de l'équilibrage, peut être mis en œuvre soit par un accroissement de sa puissance, soit par une alliance avec d’autres États pareillement menacés. Dans un monde réaliste, le pouvoir d’un pays s’apprécie essentiellement à l’aune de ses capacités militaires, lesquelles dépendent d’une économie avancée et d’une population nombreuse. En conséquence, face aux multiples tentatives de mettre un terme au conflit ukrainien, les difficultés dans la définition des missions aux délégations des deux parties, chargées du déroulement des pourparlers de paix, repose sur le concept de stabilité et, en conséquence sur le statut des puissances régionales affectées par le règlement obtenu. Le dilemme concernant l'issue du conflit ukrainien (paix de compromis, ou paix dictée), porte sur des perspectives de sécurité totalement éloignées, soit en termes de système, soit en termes de sous-système.

A titre d'exemple, l'objectif qui fut proposé par Kissinger, le retour négocié à un "status quo”, passant par la reconnaissance d’une Ukraine neutre, ne devait pas être opposé à l’analyse qui avait été celle de Zbigniew Brzeziński dans Le Grand Échiquier.  Reprenant les catégories forgées par Halford Mackinder, pour qui l’hégémonie mondiale dépendait de la prédominance exercée sur le Heartland qu’est l’Eurasie, Brzeziński voyait dans l’État ukrainien un important « pivot géopolitique », dont l’indépendance était de nature à contenir les ambitions impériales russes, à l'intérieur d'une bipolarité affichée. Dans l'actuelle formulation, l'objectif stratégique du "Pivot Asiatique" américain cache à la fois le moteur essentiel de la stratégie de l'Indo-Pacifique (APAC-2011), visant le sous-système asiatique et pas seulement la Chine et, au même temps une rivalité étendue au système international tout entier. A l'intérieur de ce cadre le "Pivot vers l'Est" de la Russie fait apparaître une véritable dépendance stratégique de la Russie vis-à-vis de la Chine et des Européens vis-à-vis de la Russie.

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En effet, dans le concept de "Pivot Américain" il s'agit de remodeler la centralité de l'ordre politique et la hiérarchie de puissance, bref le point de gravité du système, d'où tout dépend. Or, si "la stratégie du containment", en son pur concept, consiste à limiter l'influence politique, à isoler par des sanctions économiques et à s'opposer à l'expansion géopolitique et militaire d'un acteur étatique dans une région ou dans un sous-système, le remodelage du système est une politique planétaire et de long terme qui consiste à rivaliser pour déstabiliser, en s'opposant à toute forme de "status quo" et visant l'hégémonie impériale et universelle. La première implique l'exercice d'une liberté d'action et donc "une politique de bascule" entre système et sous-système (Ukraine, Taiwan, Tibet, Xinjiang..), qui inverse la politique de rapprochement de Nixon, la deuxième un bouleversement structurel et général des rapports mondiaux de forces et la montée en puissance d'un nouvel acteur universel.

Conflit ukrainien, cessez le feu et négociations de paix

Face aux risques d'une aggravation du conflit et après trois ans d’affrontement, les parties aux prises, ainsi que la communauté européenne et internationale, ont entamé des rencontres diplomatiques, visant à régler les différends existants, en leurs causes, évolutions et perspectives. Compte tenu des différentes perceptions des dangers et de tournants défavorables à l'Ukraine dans le développement des opérations terrestres et donc dans les rapports réels des forces, un bilan lucide de la situation politique et militaire demeure le préalable à l'évaluation des perspectives de sécurité auxquelles s'inspirent les deux parties et qui divergent profondément. Ainsi une vue d'ensemble doit être portée sur les aspects capacitaires des acteurs impliqués dans le conflit, directement ou indirectement, mais aussi sur leurs intentions et objectifs, déclarés ou latents.

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Nous commencerons par la Fédération de Russie dont l'action historique et le récit politique la désignent comme l'acteur principal des résolutions de pacification et de stabilisation recherchées. Les objectifs du Kremlin sont restés inchangées depuis le début des opérations militaires et peuvent se résumer en trois points:

- faire libérer par Kiev les quatre Oblasts de l'Ukraine considérés comme russophones, qui sont Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijjia (libération qui a été un facteur déclencheur du conflit).

 - s'engager au retrait de la candidature de l'Ukraine à devenir membre de l'Otan, assorti d'une réassurance de l'éventuel traité de paix par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.

- obtenir un changement de régime politique, appelé "dénazification" au sens des accords de Potsdam sur l'Allemagne (de juillet 1945, et signifiant à l'époque une légitimité démocratique et nouvelle pour l’Allemagne vaincue). Ces accords prévoyaient notamment la dénazification, la démilitarisation, la décartellisation et la décentralisation.

La Russie et les vérités faussées de l'Occident et ses conséquences

Les principaux obstacles à un processus de paix demeurent, selon de multiples observateurs, les Occidentaux et principalement la Grand Bretagne et la France, en raison de vérités faussées et du refus de comprendre l'adversaire. A la lumière de celles-là et au cœur des préoccupations de l'adversaire, le projet russe de protéger la population russe de l'Ukraine, facteur déclenchant du conflit, apparaît parfaitement légitime.

De cette incompréhension découlent une série de conséquences et donc la conception de l'importance du territoire à reconquérir (la Crimée et les quatre Oblasts du Donbass) et de l'aide occidentale accordée à l'Ukraine pour cette reconquête improbable. Il s'agit d'une aide qui prolonge la guerre sans donner un avantage sur le terrain à l'Ukraine, car cette victoire appartient à la Russie. Ils en dérivent deux répercussions importantes ; la construction d'un narratif illusoire qui consiste à faire davantage confiance à la représentation de la guerre qu'à la réalité du terrain et, quant au but de guerre, à faire croire en une paix de compromis et non de capitulation.

Cet artifice pousse Zelenski, à la légitimité discutée, à pratiquer une guerre d'éclat sur les arrières du front, sans influence sur la ligne des combats, (attaques d'aérodromes russes, contre le pont de Kersch..). Ce choix fait cliver le régime en place vers un régime terroriste, avec lequel il apparaît dès lors difficile de négocier. Le but de ce narratif est au fond de fausser la perspective, cependant que des rapports américains sur l'état du conflit, contredisent radicalement le narratif des Européens, qui demandent à être parties prenantes du conflit sans en avoir les moyens.

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Dans cette ligne de conduite et dans cette approche équivoque, il est nécessaire de distinguer également, au plan diplomatique, l'échange de mémorandums entre les parties aux prises pour amorcer un "cessez le feu", qui n'a pas de sens sans un "traité de paix” ; traité qui confère une convergence d'intentions et de sincérité à l'ensemble du processus. Or, à propos du conflit, si les Etats-Unis tâchent de le terminer et de s'en dégager au plus vite et si la Russie apparaît toujours prête à négocier, les Européens font tout pour empêcher la négociation, car le seul souci de la diplomatie de l'UE a été d'alimenter l'affrontement armé (J. Borrel) ou de le "décoloniser" (Kaja Kallas, Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité).

Pour celle-ci le concept de stabilité coïncide avec celui d'élimination de la Russie ou son découpage politique et territorial, bref une amputation eurasienne. Or, malgré le fait que l'armée ukrainienne n'a jamais eu le dessus dans le conflit, même dans la contre-offensive de 2023, l'objectif de l'UE demeure celui selon lequel "l'Ukraine doit gagner !", objectif, pour lequel un vaste plan de réarmement de l'Europe est entamé. En ce sens la diplomatie européenne n'a pas avancé depuis Angela Merkel et l’Ukraine est restée un conflit non résolu et donc gelé, à la marge, inessentiel au continent. Or, dans la "disputatio imperii" entre l'est et l’ouest, l’issue du conflit, au lieu de prendre la forme d’un projet de coopération et de développement Europe-Russie, figure comme une pomme de discorde et comme un gage d'instabilité permanente, gangrénant les relations entre Moscou et Paris, Paris et Berlin et l'Europe et l'Amérique.

La divergence  de prospective est évidente et elle apparaît au grand jour au Sommet du G7 au Canada du 17 juin dernier, où l'absence d'unité des Occidentaux reproduit des formules vides, du style: "le G7 s'est consacré à l'aide accordée à Kiev et "a de nouveau apporté son soutien à l'Ukraine, mais sans durcir le ton face à la Russie", En effet, "le club des grandes démocraties industrialisées n'a cette fois pas publié de déclaration commune dénonçant 'l'agression russe'",  "contrairement aux années précédentes quand Joe Biden était à la tête des États-Unis". Et, le dirigeant ukrainien, Volodymyr Zelenski, qui s'est rendu au Canada "pour plaider sa cause", sans grand succès, fait de l'Ukraine la "grande perdante d'un G7, dominé par la guerre au Moyen-Orient". N'ayant pas eu la "possibilité de s'entretenir avec le président américain", il "repart tout de même avec une nouvelle aide militaire de 1,27 milliard d'euros, notamment pour des drones et des véhicules blindés", preuve que, dans l'Europe multilatéraliste, les problèmes de la conscience historique peuvent avoir toujours des revers financiers.

Bruxelles, le 18 Juin 2025

L’Iran: l’un des principaux socles de nos origines indo-européennes

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L’Iran: l’un des principaux socles de nos origines indo-européennes

Pierre Emile Blairon

« Regardons-nous en face. Nous sommes des Hyperboréens – nous n’ignorons pas à quel point nous vivons à l’écart. « Ni par terre, ni par mer, tu ne trouveras le chemin qui mène chez les Hyperboréens » : voilà ce que Pindare savait déjà de nous. Par-delà le nord, la glace, la mort – notre vie, notre bonheur… Nous avons découvert le bonheur, nous connaissons le chemin, nous avons trouvé la voie pour sortir de millénaires entiers de labyrinthe. Qui l’a trouvé, à part nous ? »

C’est ce qu’écrivait Nietzsche dans L’antéchrist en 1896.

Qui sont donc ces « Hyperboréens » qui seraient nous-mêmes et dont très peu de personnes ont entendu parler ? Eh bien, il s’agit de nos plus lointains ancêtres, le peuple-source dont nous sommes issus [1], dont la grande ethnie indo-européenne est issue [2], une ethnie dont nos ennemis ne veulent considérer que l’aspect linguistique et qui est composée à l’origine des peuples grecs, italiques, albanais, indo-iraniens, celtiques, germaniques, nordiques, slaves, arméniens, qui sont nos frères et nos cousins.

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Julius Evola écrivait, dans l’entre-deux-guerres, à propos de nos ancêtres : « Cette hérédité des origines, cet héritage qui nous vient du fond des âges est un héritage de lumière »

Parmi ces peuples européens, l’une des principales composantes est constituée par les Indo-Iraniens qui étaient autrefois appelés Perses et qui sont venus de la Russie méridionale et du Caucase vers la fin du IIe millénaire avant notre ère.

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L’Iran « a donné naissance il y a 2500 ans au premier empire à vocation universelle en s'emparant de la prestigieuse Babylone : en 539 av. J.-C., Cyrus II le Grand, roi des Perses et des Mèdes, fonde le premier empire à vocation universelle de l'Histoire humaine. Depuis lors, les plateaux iraniens ont abrité des civilisations du plus extrême raffinement, qui n'ont rien à envier à l'Occident comme à l'Orient.

À la différence de leurs voisins, les Iraniens ne souffrent d'aucune frustration à l'égard de l'Occident. Ils n'ont de « revanche » à prendre sur personne, sinon sur les trublions cupides qui ont tenté depuis la Seconde Guerre mondiale de s'approprier leurs réserves pétrolières […] Dans l'Antiquité domine le mazdéisme (de Mazda, Dieu, dans la langue perse), aussi appelé zoroastrisme parce que fondé par le prophète Zarathoustra (ou Zoroastre) au VIIe siècle avant J.C. Il prospère sous les Achéménides (les héritiers de Cyrus) et va survivre jusqu'à l'approche de l'An Mil avant de s'effacer presque complètement face à la poussée de l'islam.

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Cependant, l’islam ne réussira pas à brider la culture persane qui « s'épanouit sous le règne d'Abbas I er comme en témoignent les beaux monuments d'Ispahan, les tapis, les céramiques et les délicieuses miniatures de cette époque. » (André Larané, 2500 ans d'Histoire de la Perse à l'Iran, Hérodote.net [3]

L’Iran est un grand pays, par son histoire, ses paysages, ses peuples, sa culture, son courage, mais aussi par sa superficie: 1.648.000 km2, soit plus de trois fois celle de la France.

Nous avons montré que les Iraniens ne sont pas des Sémites, comme on pourrait le croire parce qu’ils sont musulmans. A l’origine, ils n’étaient pas musulmans, tout comme les Gaulois n’étaient pas chrétiens.

La société traditionnelle iranienne, malgré l’intense propagande occidentale qui veut la faire passer pour une société aux mœurs obscurantistes, est à nouveau tournée vers son ancienne religion zoroastrienne (oui, encore une référence à Nietzsche : Zarathoustra) ainsi que nous l’explique cette jeune femme [4].

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Une autre vidéo est encore plus explicite: elle nous montre la jeunesse de Téhéran lors de la dernière fête païenne, mazdéiste, du printemps (Norooz [5]). Vous voyez beaucoup de jeunes filles voilées et de mollahs barbus ? Non ! La vidéo d’origine iranienne est accompagnée de ce commentaire : « Hier soir, c'était Chaharshanbe-Soori (fête du mercredi) que les Iraniens festoient et font la fête alors qu'ils disaient adieu à la dernière semaine de l'année avant l'arrivée de NOROOZ (le nouveau jour et l'arrivée du printemps). Voici à quoi ressemblaient les rues de Téhéran... C'est merveilleux de voir notre peuple célébrer malgré les difficultés économiques.

La jeune génération sait ce qu'elle veut, et la tyrannie de la religion n'en fait PAS partie. »

Les mensonges de l'Occident et de Nétanyahu ainsi que la bêtise et l'ignorance crasse de nos politiciens (voir, par exemple, les dernières positions de Marine Le Pen sur le sujet) nous conduisent tout droit à une guerre mondiale.

Le « régime des Mollahs », qui touche à sa fin, n’aura constitué qu’une parenthèse dans la grande et splendide histoire de l’Iran, toponyme qui signifie « royaume des Aryens », et une parenthèse encore plus insignifiante dans l’histoire fabuleuse de nos origines, notre cycle qui s’achève ayant débuté il y a plus de 60.000 ans.

Cette fin de cycle voit s’opposer deux grandes factions [6] qui vont s’affronter dans une guerre impitoyable : les Traditionalistes contre les Globalistes [7], la vérité contre le mensonge, la dignité des cultures anciennes contre l’abjection de notre monde en décomposition.

Si un conflit majeur devait survenir, ma place de cœur serait auprès de ces frères et de ces cousins que je ne connais pas, cette intuition lointaine, venue « du fond des âges », me le murmure, cet héritage des origines me le rappelle, le sort de cette jeunesse iranienne encore insouciante me l’impose.

Notes: 

[1] Les Hyperboréens étaient le peuple-source qui habitait l’Hyperborée à une époque relativement ancienne, il y a 64800 ans, selon la tradition indoue ; ce continent serait désormais enfoui sous les glaces ; le concept et la spiritualité qui se rattachent à l’Hyperborée se nomment : la Tradition primordiale, et ses partisans, les primordialistes. Voir l’article sur ce site : Qu’est-ce que la Tradition primordiale ? du 4 mai 2022.

[2] C’est le mathématicien indien Bal Gangadhar Tilak (1856-1920) qui a, le premier, ouvert l’ère des recherches indo-européennes contemporaines ; lui ont succédé, pour les principaux noms connus, dans l’ordre chronologique : Ananda Coomaraswamy, René Guénon, Julius Evola, Mircea Eliade, Alain Danielou, Jean Phaure, Paul-Georges Sansonetti ; les professeurs Georges Dumézil et Jean Haudry, linguistes et historiens des religions, ont plus particulièrement traité des langues et de l’organisation des sociétés indo-européennes.

[3] Voir la vidéo « De la Perse à l’Iran, 2500 ans d’histoire » https://www.youtube.com/watch?v=_uVPt7GLNH0

[4] https://www.facebook.com/reel/4177251819176792

[5] https://www.facebook.com/IranFocusedForum/videos/15201020...

[6] Voir mon article du 17 octobre 2024 : La guerre des deux mondes

[7] Voir mon article du 22 février 2024 : Traditionalistes contre globalistes : le grand chambardement planétaire

15:54 Publié dans Actualité, Traditions | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : iran, actualité, tradition | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook