mercredi, 08 octobre 2025
La Russie tenait à un fil au-dessus de l’abîme: pourquoi le 7 octobre est-il une fête nationale en Russie?

La Russie tenait à un fil au-dessus de l’abîme: pourquoi le 7 octobre est-il une fête nationale en Russie?
Alexandre Douguine
L’anniversaire de Poutine est une fête nationale, car Poutine lui-même incarne dans notre système politique le princeps. Il existe un concept romain — celui de princeps, du principat. C’est la figure centrale du système politique, intermédiaire entre la république et l’empire. Et Poutine, à cet égard, est un précurseur. Il transforme la république des années 1990 — en voie de désintégration, corrompue, pro-occidentale, privée de souveraineté et en pleine décomposition — en un futur Empire. Et lui-même est comme un pont vers celui-ci.

Autrefois, les empereurs (et même avant, à l’époque de la République romaine) étaient appelés Pontifes (pontifices), c'est-à-dire bâtisseurs de ponts. Plus tard, ce titre a été repris par le pape de Rome, mais à l’origine, il symbolisait le pouvoir sacré. Et Poutine est justement un tel bâtisseur de ponts. Il construit un pont de la république défaillante, chancelante, désintégrée vers un Empire en pleine ascension.

C’est là son rôle fondamental. Il ne tient pas seulement à sa position et à ses fonctions, car il existe différentes personnalités qui, une fois arrivées au sommet du pouvoir, en font des usages très divers. Certains pour le bien, d’autres pour le mal; certains pour la tyrannie et leur propre affirmation, d’autres, à l’inverse, vont trop loin dans la piété, oubliant la nécessité du côté redoutable du pouvoir d’État.
C’est pourquoi les possibilités du Souverain Suprême sont en effet immenses, mais beaucoup dépend de la manière dont l’individu, détenteur du pouvoir suprême, correspond à la nature même de ce pouvoir. Et chez Poutine, c’est précisément en tant qu’homme que cette combinaison s’est révélée extrêmement heureuse, voire salvatrice, déterminante pour notre pays à l’époque où nous vivons.


Il existe une tradition de la fin du Moyen Âge et jusqu’à la Réforme, étudiée par Ernst Kantorowicz, historien et philosophe politique remarquable. Il parlait du phénomène des « deux corps du roi ». L’un des corps est le corps individuel, l’autre — sa fonction de princeps, de souverain. Autrement dit, un corps — celui de l’individu, et l’autre — celui de cette fonction sacrée: être à la tête de la société, à la tête du système politique.
Chez Poutine, nous voyons l’harmonie entre ces deux corps: entre l’individualité de Vladimir Vladimirovitch Poutine, avec son parcours et son histoire personnels, et le corps du Souverain Suprême de la Russie à une période critique et décisive. Et selon la façon dont ces deux corps interagissent, il en résulte soit un tournant heureux ou salvateur, soit, au contraire, un échec.
Chez Poutine, nous voyons l’harmonie de ces deux subjectivités: la subjectivité sacrée du principat et le destin personnel, individuel, d’un homme issu des rangs de la sécurité, patriote, serviteur de sa Patrie à quelque poste que ce soit, même le plus modeste.
Poutine est un homme du peuple. Il est arrivé à sa position véritablement à partir des échelons les plus bas, servant la Patrie à chaque étape avec foi et loyauté. Il est un princeps méritocratique, c’est-à-dire ayant accédé au sommet du pouvoir grâce à ses mérites (meritas), et non par une position ou des privilèges initiaux. Il faut aussi en tenir compte.
À cet égard, Poutine, surtout lorsque nous regardons en arrière sur ses 25 années au pouvoir, a opéré un véritable (et souvent invisible) retournement incroyable dans l’histoire russe. Notre pays glissait vers l’abîme. Il est tombé dans l’abîme en 1991 et, en principe, il aurait dû glisser de la dernière falaise, perdre définitivement sa souveraineté, instaurer une gestion extérieure — ce vers quoi menait en fait la politique de l’ère Eltsine.

Et c’est précisément Poutine qui a rattrapé notre pays, suspendu à un dernier fil, encore accroché à la falaise avec le risque imminent de s’écraser au fond du gouffre et de voler en éclats (ce qui était alors une réalité à portée de main), et, grâce à un effort incroyable, mais aussi avec beaucoup de précaution, l’a ramené, du moins, sur cette falaise. Et nous avons commencé à penser comment retrouver notre place dans l’histoire, comment restaurer la plénitude de notre souveraineté, comment faire renaître la Grande Russie que nous semblions avoir définitivement perdue dans les années 1990.
À cet égard, Poutine est bien sûr un homme du destin, un homme marqué par le courant de l’histoire russe, difficile, parfois paradoxale, dont la langue, dont l’idéogramme nous échappent parfois. Nous ne comprenons pas toujours ce qu’elle attend de nous, car elle ne parle pas toujours clairement.
Les grandes actions ne sont pas toujours précédées de grands manifestes. Parfois, l’histoire émet des sons indistincts, et ensuite tout s’épanouit et commence à monter. L’histoire russe est pleine de paradoxes, et dans cette histoire, Poutine et son règne, sans aucun doute déjà maintenant (dès le début, c’était évident), sont placés sous le signe de la lumière.
Dans l’histoire romaine, il y avait une tradition de succession d’empereurs. L’un était mauvais, l’autre bon, puis à nouveau un mauvais, puis à nouveau un bon. Ils formaient une structure presque binaire, 1-0 : empereur réussi, empereur raté. Dans notre histoire, ce n’est pas toujours ainsi, mais il y a des souverains qui, à l’évidence, du point de vue des réalisations historiques, dans la trame, dans le texte de notre histoire, sont inscrits en lettres majuscules, dûment soulignées, en caractères gras. Et ils représentent quelque chose d’important, de bon, de salvateur…
Certains dirigeants étaient cruels, d’autres humains. Poutine lui-même, sans aucun doute, n’est pas cruel, il est humain, mais par la grandeur, il se tient au niveau des plus grandes figures de l’histoire russe. Et le fait qu’il parvienne à accomplir ses exploits incroyablement difficiles pour sauver la Russie en politique intérieure sans effusion de sang, qu’il n’usurpe jamais de pouvoirs supplémentaires, ne les dépasse jamais et, au contraire, se comporte de manière extrêmement humaine, bienveillante et tolérante, même envers ses adversaires idéologiques, cela fait de lui bien sûr une personnalité unique.
Je pense que Poutine construit un pont vers la véritable renaissance spirituelle, sociale et économique de la Russie. Et je félicite sincèrement notre Souverain Suprême, princeps, qui relève la Russie, à l’occasion de sa fête ! À l’Ange — couronne d’or !
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Géorgie – La Gaule du Caucase

Géorgie – La Gaule du Caucase
Source: https://www.anonymousnews.org/international/georgien-das-...
Qu'il s'agisse de l'assaut du palais, des barricades enflammées ou des dames âgées distribuant des biscuits, les routines des manifestants sont pratiquement les mêmes, tout comme celles de la police qui y réagit. C'est en Géorgie qu'a débuté en 2003 la première révolution colorée de l'espace post-soviétique – et c'est en ce même pays que cette ère prendra fin.
Par Alexander Nossowitsch
Dès la nuit suivant les élections, on a tenté, comme à l'accoutumée, de prendre d'assaut le palais présidentiel en Géorgie. Par habitude, on a brûlé des pneus et érigé des barricades. Tout aussi routinièrement, la police a éteint les pneus et dispersé les manifestants à l'aide de canons à eau. Tous ces événements ont éclaté au cours du week-end et se sont rapidement apaisés.
Il ne semble pas y avoir de suite au « banquet ». Il aura lieu tout au plus pour les leaders des manifestations, mais pas au sens habituel du terme: ils n'accèderont pas au pouvoir en tant qu'émissaires du « monde libre », mais seront très probablement emprisonnés pour avoir tenté de renverser l'ordre constitutionnel. Ils en ont eux-mêmes pris conscience: ils se renvoient la responsabilité de l'assaut du palais présidentiel et font référence aux mythiques « provocateurs russes ».
Les événements qui se sont déroulés samedi à Tbilissi peuvent être considérés comme une sorte de « post-scriptum » à l'échec de la tentative de « révolution colorée » en Géorgie.
Il y a un an, l'Occident libéral et mondialiste – qui agissait alors encore comme une entité unique – avait déployé des efforts considérables pour inciter les autorités géorgiennes à ouvrir un deuxième front contre la Russie. À l'époque, la situation politique en Géorgie était très agitée depuis plusieurs mois: des « émissaires » occidentaux étaient présents sur le « Maïdan » local, il y avait des manifestations de masse, des combats de rue, les réseaux sociaux étaient utilisés pour mobiliser les étudiants à des actions de protestation, et des dames âgées s'agenouillaient devant les forces spéciales – tout cela conformément aux méthodes habituelles quand l'on cherche à précipiter un changement de régime.
À l'époque, le gouvernement géorgien avait réussi à résister et à défendre la volonté majoritaire de la population lors des élections législatives. Ce qui se passe actuellement est un écho de ces événements, qui se répètent aujourd'hui sous forme de farce, en accéléré. De nouvelles élections ont lieu, mais cette fois-ci au niveau municipal. Une fois de plus, l'opposition affirme que la victoire lui a été volée, alors que cette fois-ci, elle n'a même pas participé aux élections dans de nombreuses circonscriptions et avait déclaré à l'avance que ces élections étaient illégitimes. Bruxelles ne s'est pas précipitée pour soutenir « ses » alliés en Géorgie, car ce ne sont pas des personnes pour lesquelles on sacrifierait ses week-ends, et pour Washington, ces personnes ne sont certainement pas « les siennes ».
Au fond, les partisans de Mikhaïl Saakachvili suivent le même chemin que Saakachvili lui-même: de président de la Géorgie à sans-abri, puis à prisonnier.
Deuxième point, et non des moindres: l'échec manifeste de ce cinquième «Maïdan» à Tbilissi en quatre ans marque non seulement la fin définitive de l'ère Mikhaïl Saakachvili en Géorgie, mais aussi la fin de l'ère des «révolutions de couleur» en soi. Cette époque est révolue. Il est symbolique que la Géorgie, où cette ère avait commencé dans l'espace post-soviétique en 2003, y mette désormais un terme.


Les méthodes de changement de régime développées par Gene Sharp (photo) ont été utilisées pendant des décennies par des politiciens, des journalistes et des organisations non gouvernementales pro-occidentaux – en tant qu'agents des services secrets américains et européens – et analysées et étudiées dans les moindres détails. Afin de contrer ces méthodes, des contre-mesures efficaces ont déjà été développées et testées. La seule chose qui manque encore, c'est la souveraineté extérieure, la légitimité intérieure, un État qui fonctionne et la volonté politique des gouvernements concernés de mettre en œuvre ces contre-mesures.
Tout comme les méthodes simples, les méthodes sociales perdent également de leur actualité avec le temps.
La présence d'un « sacrifice sacré », la « colère juste » de la foule, la représentation d'activistes corrompus comme représentants de l'ensemble du peuple, de jolies filles qui cousent des rubans sur les uniformes des soldats et de touchantes grand-mères qui leur offrent des biscuits: toutes ces manipulations politiques ne fonctionnent plus. Le tour a été dévoilé et le magicien n'impressionne plus. Mais il ne faut pas se détendre, les escroqueries prennent sans cesse de nouvelles formes. Les escrocs s'adapteront toujours aux nouvelles conditions et développeront de nouvelles méthodes. Et cela ne concerne pas seulement les appels téléphoniques frauduleux et la correspondance sur les réseaux sociaux, mais aussi la grande politique.
15:08 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, géorgie, caucase, révolution de couleur, gene sharp |
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L’accord Moscou-Téhéran redessine la carte stratégique de l’Arctique à l’océan Indien

L’accord Moscou-Téhéran redessine la carte stratégique de l’Arctique à l’océan Indien
Un nouveau corridor relie exportations de gaz, infrastructures nucléaires et systèmes militaires dans un bloc non occidental
par Global GeoPolitics
Source: https://ggtvstreams.substack.com/p/moscowtehran-agreement...
Le partenariat stratégique global entre la Russie et l’Iran, entré en vigueur en 2025, exige une analyse approfondie. Les partisans présentent l’accord comme un réalignement souverain et un rempart contre l’hégémonie occidentale. Les sceptiques mettent en garde contre des pièges cachés : un cartel énergétique déguisé, une subvention à l’escalade, et une fracture structurelle des chaînes d’approvisionnement mondiales. Aucune de ces lectures n’est suffisante seule. Le pacte incarne des contradictions qui définiront la géopolitique de la prochaine décennie.
Le traité instaure un cadre de 20 ans liant la Russie et l’Iran dans les domaines de l’énergie, des transports, de la défense, de la finance, de la technologie et de la diplomatie. Sa ratification a déjà été approuvée par la Douma russe. La mise en œuvre de ses dispositions testera les limites imposées par les sanctions, la méfiance, les capacités internes et la pression extérieure. Ses effets se feront sentir en Europe, au Moyen-Orient, en Asie du Sud et sur la carte énergétique mondiale.
Au cœur de l’alliance, la résilience stratégique mutuelle est l’objectif. La Russie cherche des échappatoires aux points d’étranglement occidentaux. L’Iran souhaite des technologies avancées, des garanties de sécurité et des marges de manœuvre face aux pressions. Le traité formalise la coopération dans le nucléaire civil (rôle de Rosatom sur quatre réacteurs iraniens, pour environ 25 milliards de dollars), un gazoduc passant par l’Azerbaïdjan vers l’Iran (potentiellement 55 milliards de m³ annuels), et la relance des échanges via le Corridor de transport international Nord-Sud (INSTC) afin de contourner les routes maritimes occidentales. Ce gazoduc serait comparable à l’ancien Nord Stream. L’Iran prévoit aussi de fournir 40 turbines MGT-70 à la Russie, sous licence Siemens, desserrant la pression sur les centrales thermiques russes soumises aux sanctions. Des mesures fondamentales comme l’intégration des systèmes de paiement (Mir en Russie, Shetab en Iran) figurent dans l’accord. La logique spatiale est claire : réorienter le commerce via l’Iran, réduire la dépendance au canal de Suez, à la mer Rouge, au Bosphore, à la Méditerranée, et concentrer les flux énergétiques sous un nouvel axe.
La dimension énergétique est la plus évidente. Si la Russie peut acheminer du gaz via l’Iran, elle gagne des routes d’exportation alternatives, moins vulnérables aux blocages. L’Iran devient un hub de transit, gagnant à la fois des droits de passage et un levier stratégique. Chine, Inde, Pakistan, Turquie et Irak sont tous sur des trajectoires potentielles. Le traité facilite aussi les investissements russes dans le pétrole/gaz et les infrastructures iraniennes, allégeant les contraintes capitalistiques imposées par les sanctions occidentales. Pour l’Iran, dont la croissance de la production gazière a ralenti (2 % par an récemment) tandis que la consommation explose et que l’infrastructure se dégrade, le capital et la technologie russes offrent un certain soulagement. Mais l’Iran fait face à un déficit gazier chronique (historiquement 90 millions de m³/jour, pouvant atteindre 300 millions en hiver). Sans aide extérieure, son réseau électrique s’effondre, les raffineries sous-performent, les industries tournent au ralenti. Le traité constitue une bouée partielle.
Cependant, les défis sont de taille. Un rapport du Stimson Center prévient que la construction de pipelines, l’exposition aux sanctions, les risques de transfert technologique, les inefficacités de gestion et la dépendance excessive au capital russe sont des dangers majeurs. L’Iran doit moderniser ses installations vieillissantes, surmonter les blocages du financement extérieur, corriger les mauvais incitatifs et gérer corruption et bureaucratie internes. La Russie doit assumer le risque d’investissements sous sanctions, dans des terrains difficiles, et faire confiance aux capacités de l’Iran.
La confiance politique et stratégique reste fragile. Les renseignements britanniques ont souligné la méfiance persistante et reconnu que le traité n’apportera peut-être pas de percées majeures. Eurasia Review qualifie l’alliance de « tiède », notant la concurrence énergétique entre Moscou et Téhéran, des volumes commerciaux modestes (environ 5 milliards de dollars), et l’inexécution d’accords antérieurs. En pratique, la Russie a refusé une clause de défense mutuelle complète. Le pacte interdit d’aider un agresseur tiers mais n’engage pas à une assistance militaire directe. La diplomatie iranienne a insisté sur le refus d’être entraînée dans des blocs militaires. Lors des récentes frappes américaines et israéliennes sur des sites nucléaires iraniens, Moscou a publiquement condamné les attaques mais n’a offert aucune réponse militaire. Ce fossé révèle la différence entre alliance rhétorique et pacte opérationnel.
Le traité modifie aussi la dynamique des sanctions et des juridictions légales. La Russie a déjà rejeté la récente réactivation des sanctions de l’ONU contre l’Iran (via le mécanisme de retour automatique) comme illégale et non contraignante. Cette position construit de fait une légalité parallèle où Moscou agit comme si les sanctions ne la concernent pas, favorisant ainsi leur contournement ou non-respect. Téhéran menace également de refuser inspections ou coopération avec l’AIEA si les sanctions perdurent. Avec deux grandes puissances ignorant ouvertement les mécanismes de coercition occidentaux, l’application des règles devient asymétrique. Les pays qui souhaitent commercer avec l’une ou l’autre seront exposés à des risques juridiques, diplomatiques ou devront compartimenter leurs relations.

Les implications régionales sont profondes. Dans le Caucase du Sud, le gazoduc passera probablement par l’Azerbaïdjan, donnant à Bakou un rôle de hub mais l’exposant aussi aux pressions concurrentes de Moscou, Téhéran et l’Occident. Les intérêts arméniens peuvent être affectés. Pakistan et Inde pourraient chercher à utiliser le corridor pour l’énergie et le commerce. L’INSTC vise à contourner Suez et à raccourcir de 40 % le transit Russie-Inde, offrant une alternative aux routes maritimes dominées par les marines occidentales. Pour l’Europe, de nouveaux flux gaziers pourraient réduire certains marchés ou leur pouvoir de négociation. Pour le Sud global, ce nouveau corridor offre une diversification potentielle des échanges, mais la plupart des États n’ont pas la capacité de gérer les risques géopolitiques.
Sur le plan énergétique mondial, le pacte favorise la dédollarisation. Russie et Iran privilégient les échanges bilatéraux en monnaies locales et les systèmes de paiement alternatifs. À terme, cela peut éroder la domination du dollar sur certains marchés de l’énergie, surtout parmi les pays tolérants aux sanctions. Le traité ne vise pas à renverser à lui seul la primauté monétaire américaine, mais il contribue à l’infrastructure de la fragmentation systémique.

Il faut se demander si le traité fait partie d’un plan « sombre » ou d’un virage souverain rationnel. L’architecture énergétique et de transport construite ici n’est pas neutre : contrôler les flux, les goulots d’étranglement, les dépendances et la fixation des prix, c’est le pouvoir. Cela peut favoriser l’escalade dans les conflits. La Russie utilise déjà des drones iraniens (Geran/Shahed) en Ukraine ; l’Iran accède à la défense anti-aérienne russe (S-400) et aux plateformes Su-35. Ce transfert accroît le risque militaire au Moyen-Orient et au-delà. Mais l’absence de clause de défense mutuelle indique que chaque partie souhaite préserver sa liberté d’action, sans engagement en cas d’escalade.
Des analystes indépendants, comme ceux du Centre for Analysis of Strategies and Technologies (CAST, basé à Moscou mais indépendant), notent que la logique des exportations d’armes russes s’aligne naturellement sur les besoins iraniens. L’Iran tire profit de l’accès à des systèmes lourds pour sa sécurité intérieure. Mais CAST relève aussi le risque d’une dépendance excessive, de fuite technologique et de contrecoups diplomatiques.
L’équilibre international se modifie. L’Occident ne peut traiter la Russie et l’Iran de la même façon : la Russie demeure économiquement plus stable, militairement plus puissante et centrale en Eurasie. L’Iran est un partenaire junior, limité par la démographie, la fragilité économique, les sanctions et la contestation interne. L’axe est donc asymétrique. La Russie gagne en influence, l’Iran obtient protection et investissement. Mais le danger réside dans des attentes démesurées: si la Russie échoue à livrer, la désillusion iranienne peut nourrir instabilité, coups d’État ou dérives agressives.
Il faut aussi juger le coût de la réaction occidentale. Les États-Unis peuvent sanctionner les entreprises tierces impliquées dans la construction du pipeline, bloquer les transferts de technologie, exercer des pressions sur les États du Golfe ou imposer des sanctions secondaires. Ces leviers existaient déjà partiellement. Le traité amplifie la confrontation : pipelines via l’Azerbaïdjan, corridors étendus via le Pakistan ou l’Inde suscitent des réactions régionales. Les pays situés sur la route peuvent subir des pressions.
Le risque d’escalade demeure élevé. Si les tensions avec Israël ou l’Arabie saoudite s’aggravent, l’Iran peut utiliser sa position énergétique ou son poids politique. Cela mettra la Russie sous pression pour répondre ou risquer la vassalisation. Le traité brouille la frontière entre géopolitique de l’énergie et sécurité. En Afrique, Amérique latine et Asie du Sud-Est, les pays observant cette alliance peuvent réévaluer leurs propres alliances. Certains s’aligneront, d’autres temporiseront.
Pourtant, le récit du virage souverain a du sens. Le traité élargit la multipolarité. Il offre aux États non occidentaux une alternative structurelle à la dépendance. Pour les pays soumis à des sanctions ou à la coercition occidentale, l’exemple est parlant : commerce via l’Iran, contrats énergétiques hors dollar, cadres juridiques contournant les tribunaux occidentaux, chaînes d’approvisionnement indépendantes. Dans les petits États (Venezuela, certaines régions d’Afrique, certains États asiatiques), l’alliance propose de nouveaux modèles. Si le corridor fonctionne et que les échanges augmentent, le traité pourrait contribuer à créer une économie mondiale parallèle.
Mais cela dépendra de la mise en œuvre, de la discipline et de la coordination mutuelle. De nombreux traités visionnaires échouent à l’application. La Russie doit éviter la surextension ; l’Iran doit maintenir les réformes structurelles ; les États non alignés doivent éviter d’être entraînés dans des conflits par procuration.


Le plus grand danger du traité réside dans la surconfiance. Si la Russie s’implique militairement trop tôt, elle risque l’enlisement. Si l’Iran attend trop de soutien, il pourrait provoquer une répression. L’architecture reste déséquilibrée, l’énergie, le transport et la finance étant largement russes. Mais le risque stratégique pèse sur les deux.
En somme, le traité Russie-Iran de 2025 fait partie d’une reconfiguration progressive de l’ordre mondial. Il ne s’agit pas simplement d’une réaction à la pression occidentale, ni d’une tentative conspirationniste de briser l’ordre mondial. Il s’agit plutôt de diplomatie d’État, où les puissances cherchent à accroître leur influence, à sécuriser des voies stratégiques et à affirmer leur autonomie. L’issue dépendra de l’exécution, de la dynamique de la guerre des sanctions, des évolutions régionales, du niveau de confiance réciproque et des capacités internes des acteurs. Les observateurs, surtout hors du récit dominant, devront voir si le corridor est à la hauteur des ambitions ou s’effondre sous la pression.
Rédigé par : GGTV
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14:42 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : iran, russie, actualité, géopolitique, asie, affaires asiatiques |
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France: quand le «macronisme» s'effondre sur lui-même

France: quand le «macronisme» s'effondre sur lui-même
Elena Fritz
Source: https://pi-news.net/2025/10/frankreich-wenn-der-macronism...
L'affaire Lecornu montre que le macronisme n'a jamais été un mouvement politique, mais plutôt un mode de gestion du déclin assorti d'une prétention esthétique des plus discutables.
La démission de Sébastien Lecornu, à peine 24 heures après sa nomination au poste de Premier ministre, fait l'effet d'un scandale politique. En réalité, elle est l'expression d'une rupture structurelle plus profonde. La France assiste à la lente désintégration du macronisme, une forme de pouvoir technocratique qui a perdu sa base sociale.
Depuis 2017, Emmanuel Macron vend aux Français une image de «modernisation» qui signifie en réalité déréglementation, démantèlement social et exaltation morale. La soi-disant «voie européenne» n'est rien d'autre que l'institutionnalisation de l'irresponsabilité: les intérêts nationaux sont externalisés, les conflits sociaux européanisés, les décisions politiques anonymisées.

Lecornu était la figure idéale dans ce système: adaptable, loyal, ambitieux. Le fait qu'il jette l'éponge n'est pas un acte de rébellion, mais le dernier réflexe de son instinct de survie. Dans le macronisme, le poste de Premier ministre est un produit jetable: toute figure chargée de mettre en œuvre des réformes impopulaires est sacrifiée dès que les protestations deviennent trop fortes.
Lecornu, un symptôme, pas une solution
Derrière la rhétorique libérale se cache une politique d'austérité profonde. Retraites, éducation, santé: tout est réduit afin de financer de nouveaux projets d'armement.
L'Ukraine sert de prétexte moral à la transformation de l'économie française en économie de guerre. Le prix à payer: une perte silencieuse mais perceptible de cohésion sociale.
La démission de Lecornu n'est pas un échec personnel, mais le symptôme d'un ordre politique qui se consume lui-même. La France veut être à la fois un État social, un empire et une superpuissance morale – et perd peu à peu chacun de ces éléments.
Ce n'est pas « l'Europe » qui tremble, mais l'appareil bruxellois, dont la façade était soutenue par la stabilité française et la solvabilité allemande. Lorsque Paris vacille, l'équilibre politique de l'UE s'effondre. Sans la France, Bruxelles perd son ancrage légitime, son centre sémantique. L'UE, « projet de rationalité », se révèle de plus en plus comme un projet visant à préserver sa propre bureaucratie.
Conclusion
L'affaire Lecornu montre que le macronisme n'a jamais été un mouvement politique, mais un mode de gestion du déclin assorti d'une prétention esthétique des plus discutables. Maintenant que même les personnages les plus loyaux de ce macronisme quittent le navire, la vérité se révèle: la France n'est pas à l'aube d'un changement de pouvoir, mais d'une lassitude du pouvoir lui-même.
Et l'UE, qui a soutenu cette orientation, sent pour la première fois que ses fondements, basés sur une illusion technocratique et une hybris morale, ne tiennent pas la route lorsque le ciment français s'effrite.
13:19 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, macronisme, sébastien lecornu, emmanuel marcon, actualité, europe, affaires européennes |
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mardi, 07 octobre 2025
La gauche psychanalytique

La gauche psychanalytique
par Roberto Pecchioli
Source : Il perchè cui prodest & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-sinistra-psica...
Psychanalytique parce qu’elle projette ses propres fantasmes sur la réalité, la déformant jusqu’à la nier : l’idéologie gauchiste dévoyée et l’aversion pour tout ce qui est normal.
Arrêtez le monde, je veux descendre. Est-ce la vieillesse, ou l’altérité absolue face aux idées dominantes, mais je ne supporte plus les Bons, les Pacifistes, les Belles Âmes. Peut-être dois-je me faire soigner, car tout écart par rapport à la pensée magique progressiste de l’Occident comateux est considéré comme une maladie. Psychique, naturellement. De nouvelles phobies sont inventées chaque matin: xénophobie, homophobie, transphobie, technophobie, islamophobie. Plus on en trouve, mieux c’est. Il y a toujours de la place nouvelle dans l’idéologie gauchiste dévoyée. Si tu n’es pas comme moi, si tu penses différemment, raisonne le bon progressiste qui transpire la bonté par tous les pores, tu es rongé par la haine. Il faut donc punir par la loi un sentiment, selon le critère de la mélasse progressiste indigeste. Dans la mécanique mentale correctionnelle et rééducative, ce sont toujours les autres qui haïssent. Telle est la pédagogie de la normophobie, l’aversion pour tout ce qui est normal.
La gauche moderne autoproclamée – normophobe – est psychanalytique en tant qu’idéalisme. Au sens philosophique du terme: elle confond l’idée avec la réalité. Vieille histoire, inaugurée par le vieux Hegel, qui toutefois n’aurait pas aimé la frénésie du changement thématisée par Marx. Psychanalytique parce qu’elle projette ses propres fantasmes sur la réalité, la déformant jusqu’à la nier. La projection, selon Freud, est le mécanisme de défense inconscient qui consiste à attribuer à autrui ses propres pensées, sentiments ou qualités inacceptables ou déplaisants, afin d’éviter le conflit et l’angoisse de les reconnaître. Raccourci parfait pour nier la réalité: par exemple, ils croient à l’égalité en dépit de l’évidence de son inexistence dans la nature. Ou que le mariage n’est pas l’union d’un homme et d’une femme, et que donc le prétendu mariage homosexuel (un oxymore évident) est un acte bienfaisant d’égalité.

Personne n’y avait jamais pensé: merveilles du progrès, l’œuf de Christophe Colomb qui tient debout parce qu’il est écrasé. L’obsession pour l’égalité déclinée en termes d’équivalence, d’homologation, d’interdiction de constater les différences et les faits. Contra factum non valet argumentum, disaient les Latins. Vieillerie! L’idéalisme (l'idéisme) malade, onirique, est la négation de la biologie elle-même: masculin et féminin sont des constructions sociales des classes dominantes. Nous ne sommes pas ce que nous sommes, seule compte l’autoperception; aujourd’hui, je me sens chat, donc je le suis, demain, je me considèrerai femme. Personne ne peut me juger ni me demander de me regarder dans le miroir. Au diable la réalité.
La gauche psychanalytique ? Psychanalytique parce qu’elle projette ses propres fantasmes sur la réalité, la déformant jusqu’à la nier.
Les gauchistes y croient toujours, mordent à l’hameçon des menteurs et des agitateurs auxquels leurs pères et grands-pères n’auraient jamais prêté l’oreille, eux qui maniaient la faucille et le marteau pour faire vivre la famille, dite "traditionnelle" pour la discréditer. Tradition signifie transmission: inutile de rappeler que qui ne transmet pas détruit. «Bien creusé, vieille taupe», commenta Marx à propos de la révolution qui agit en sous-main comme les rongeurs, qui ne songent guère à construire. Belles âmes, désaccoutumées à l’ordre mental, pensent à la fois que le pouvoir naît du canon du fusil, «mais aussi » (copyright Walter Veltroni) qu’il suffit, pour arrêter les guerres, d’arborer un drapeau arc-en-ciel et proclamer la nécessité du «dialogue», remède universel. Étrange qu’Héraclite, le philosophe du changement (panta rhei, tout coule) ait écrit que « pōlemos (le conflit) est le père de toutes choses, de tout le roi ; et il révèle certains comme dieux, d’autres comme hommes, les uns il fait esclaves, les autres libres». La notion de pōlemos indique le principe fondamental du devenir du monde et de l’harmonie de la réalité. Trop compliqué: pour éviter le mal de tête, la seule guerre qui indigne ces messieurs et compagnons – alors qu’il y en a des dizaines en cours – est celle de Palestine, à laquelle ils appliquent immédiatement le même critère de jugement unique, estampillé conforme: opprimé contre oppresseur. La logique dualiste du plus facile, ici coïncidant avec la vérité.
Le progressiste collectif est sincèrement persuadé que la manifestation, la mobilisation et la grève résolvent tout. D’ailleurs, le mythe de la grève générale, ferment de révolte et de révolution sociale, théorisé par Georges Sorel, est plutôt démodé et Sorel lui-même a ensuite suivi d’autres voies idéales. Le vacarme progressiste actuel sur Gaza est exemplaire: ils vivent la juste cause palestinienne comme un psychodrame à réparer en agitant des drapeaux ou en bloquant – ici, pas là-bas – gares, autoroutes, transports. Jamais de grèves proclamées pour se défendre contre les factures d’énergie, la hausse des dépenses militaires, pour condamner la fuite de Fiat hors d’Italie, pour les malversations bancaires, pour soutenir ceux qui ont été licenciés pour refus de vaccin.

Le vide décrit par Eugenio Montale: «ne nous demande pas le mot qui scrute de tous côtés notre âme informe», pour conclure «cela seulement aujourd’hui nous pouvons te dire / ce que nous ne sommes pas, ce que nous ne voulons pas». Un siècle plus tard, nous voilà revenus au point de départ. Ils savent ce qu’ils ne veulent pas, mais ignorent à quelle société ils veulent tendre. Hurleurs sans idées. Autrefois, ils étaient communistes et luttaient pour quelque chose. Les grèves d’hier rassemblaient des foules dignes qui exigeaient la justice sociale, défendaient le travail et une répartition plus équitable des richesses. Peut-être aspiraient-ils à devenir petits-bourgeois, comme le pensaient les francfortistes qui niaient la nature révolutionnaire du prolétariat industriel, mais c’étaient des générations concrètes avec des objectifs précis.
L’exemple parfait de la dissonance cognitive progressiste sont les flash mobs – rassemblements spontanés, brefs, chorégraphiés – réalisés dans de nombreux hôpitaux italiens pour soutenir la Palestine. Outre l’inanité évidente du moyen utilisé, le choix du lieu frappe, typique de ceux qui n’ont aucun rapport avec la réalité. Dans les hôpitaux, on souffre; patients et familles attendent des soins, pas des manifestations. Dans ce cas, comme dans les blocages routiers et des transports, il est probable que le résultat soit contraire aux attentes, mais l’idéalisme à bon marché qui se moque des faits est plus facile. Cela coûte peu, comme la foire à l’indignation sourcils froncés et moralisme verbeux. Le progressisme adore le mot droits, dont il use chaque jour, passé du champ social (travail, salaire, santé, éducation, sécurité) à celui de l’individualisme amoral, libertin et consumériste.

L’archétype progressiste contemporain est un éternel adolescent, un Peter Pan immature dont l’aspiration est des vacances éternelles (c’est-à-dire, étymologiquement, des absences) auxquelles tout lui est dû. Il y a « droit » et chaque nouveau droit devient invariablement une « loi de civilisation ». Donc le passé, tout passé, doit être interprété comme barbarie, dont on sort en se confiant à la mystique du progrès: après, c’est toujours mieux qu’avant. Dans un monde où le capitalisme est vraiment devenu «destruction créatrice» (J. Schumpeter), c’est le binôme étrange, maîtres universels et progressistes, qui l’emporte. Ils ne veulent pas l’admettre, mais la conscience malheureuse des plus réfléchis sait que c’est la vérité. La solution, tout aussi facile, est la préférence pour les gestes symboliques, le bavardage pensif où l’on se lave la conscience et où l’on donne libre cours à l’émotivité, dernier refuge de l’esprit, par nature passager, trouble éphémère, petite larme légère qui certifie la bonté, l’appartenance granitique à l’armée du Bien.
Les gauchistes se divisent en trois catégories principales: ceux d’origine catholique croient à un humanitarisme larmoyant, fraternité abstraite d’une religion sans Dieu. La couleur rose. Le gros du corps central, ex-, post-, néo-communiste, s’est adapté à une sorte de marxisme light, épuré de l’abolition de la propriété privée. La couleur rouge. Troisième secteur, la couleur fuchsia de la bourgeoisie libérale, globaliste, dévouée au Marché, à la Technique, à l’Innovation. Toutes convergent dans le Progrès et les Droits tout en détestant Dieu, la patrie et la famille. Ce n’est plus la religion l’opium du peuple, mais plutôt l’opium des dépendances et des modes qui est la religion des peuples. Leur idole est toujours l’Autre, la Victime. Ils ont la manie du défilé, du nombre, qui ne produit pas de force mais du poids. Enfant, je me demandais pourquoi ils «prenaient toujours parti pour l’équipe adverse». Maintenant je le sais, c’est la haine pour la comparaison insoutenable, la rancœur pour ce qui est plus élevé et plus beau.

L’idéologie gauchiste dévoyée et l’aversion pour tout ce qui est normal : l’archétype progressiste contemporain est un éternel adolescent, un Peter Pan immature dont l’aspiration est des vacances éternelles où tout lui est dû.
J’exagère ? Peut-être, mais parfois il faut laisser parler ses tripes. Lors des manifestations pro-Pal à Rome, une bonne cause – mais qui, pour beaucoup, n’était qu’une occasion de se défouler contre le gouvernement – a aussi été ternie par des jets d’œufs, de pierres et d’insultes contre le siège du mouvement ProVita. Un signal révélateur. D’autres hommes vertueux (ou dames) ont souillé la statue du pape Wojtyla, traité de fasciste de m... Les voyous et les crétins ne sont pas ennoblis par les drapeaux qu’ils brandissent. J’exagère encore ? Alors j’insiste: la haine, les visages livides de rage, la rancœur de gens mal dans leur peau, la négligence personnelle, sont filles du nihilisme de ceux qui ne croient qu’à la destruction. Orphelins de père et de mère, enfants naturels d’idéologies rances, ils trouvent dans l’aversion une raison de vivre.

Le sempiternel dualisme: ils ont besoin de l’ennemi, à leurs yeux toujours absolu. Un sondage a révélé que plus d’un quart de la faction la plus progressiste américaine approuve la violence et l’assassinat politique, contre sept pour cent du monde ultraconservateur. Il s’agit, c’est la justification gramscienne, de violence « progressive », destinée à l’édification d’une société meilleure. Meilleure? Fichez-moi la paix, dirait Totò, qui était tout de même le prince De Curtis. Un autre élément psychanalytique est la fascination – qui devient mode de vie – pour les instincts les plus bas, présentés comme spontanéité, sincérité, naturalisme. Dans la gauche psychanalytique, c’est le Ça qui gagne, les pulsions et besoins primitifs. Et l’emportent même sur le vieux rouge, le violet de la rancœur et le jaune de l’envie, autre thème freudien. Charlie Kirk avait tort de défier ses adversaires: prove me wrong, prouve-moi que j’ai tort. Impossible. L’évangile apocryphe progressiste est une séquence de dogmes sectaires, indiscutables, aussi durs que les Commandements. Pour Moïse le radical-progressiste, génération perdue de l’Occident terminal, le divan du psychanalyste ne servira à rien.
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La force d'Israël

La force d'Israël
Andrea Marcigliano
Source: https://electomagazine.it/la-forza-di-israele-2/
Israël est incontestablement en train de gagner. Sur tous les fronts, balayant les Palestiniens de Gaza et les réduisant à leur plus simple expression en Cisjordanie. Et, dans le même temps, les Israéliens occupent une partie de la Syrie, imposent à Damas un gouvernement fantoche, et entrent massivement au Liban. Et contraignent le Hezbollah à une défense désespérée.
Sans oublier, par ailleurs, les attaques en profondeur en Irak. Et celles, plus lointaines, contre l'Iran.
En somme, une victoire militaire sur tous les fronts, qui ne laisse aucune place à d'autres interprétations. Une victoire, si vous voulez, qui est brutale et cynique, mais incontestable.
Cependant, une question me vient à l'esprit. Comment Netanyahu a-t-il la force de faire tout cela ? La force de réaliser, en fait, le rêve du Grand Israël. En effaçant ou en réduisant au minimum la présence arabe dans les territoires ?
Et c'est une question bien plus complexe qu'on pourrait le croire à première vue.

Car, bien sûr, Israël dispose d'une excellente organisation militaire. Une armée efficace et équipée des meilleurs outils contemporains. Elle a des commandants compétents et des soldats déterminés. Au point qu'ils se permettent d'être impitoyables.
Cependant, si l'on regarde les chiffres bruts, les Israéliens ne sont qu'une poignée. Peu nombreux, très peu nombreux dans le contexte de cet océan varié et tumultueux qu'est le monde arabe.
On se demande alors naturellement si la force d'Israël est uniquement militaire. Et la réponse est évidente. Même si elle n'est pas simple.
La force d'Israël est avant tout et essentiellement politique. Et pas seulement parce qu'il bénéficie du soutien quasi inconditionnel de Washington.
Ce qui permet vraiment à Israël de faire la pluie et le beau temps au Moyen-Orient, c'est le comportement des États arabes. Ou plutôt leur ambiguïté fondamentale sur la question palestinienne.
Car, en paroles, tous les États arabes, ou presque, sont pro-palestiniens. Mais seulement en paroles, justement.
En réalité, tous négocient en coulisses avec Israël. Et ils s'efforcent d'empêcher la création d'une Palestine indépendante. À jamais.
Il n'y a pas que la Jordanie, qui considère les Palestiniens comme des traîtres à la monarchie hachémite. Et préfère qu'ils soient punis et balayés par les Israéliens.
L'Égypte a également une attitude pour le moins ambiguë. Tout comme les pétromonarchies du Golfe.

Et ne parlons pas de la nouvelle Syrie d'Al-Jolani... désormais satellite d'Israël.
Avec le Hezbollah en difficulté croissante au Liban et l'Iran sous le feu des attaques, les Palestiniens sont complètement seuls. Abandonnés à leur sort.
Ankara, quant à elle, ne les soutient qu'en paroles. En réalité, elle continue à négocier et à faire des affaires avec Tel-Aviv.
Bien sûr, l'humeur des masses arabes serait différente. Et c'est précisément pour cette raison que les élites gouvernementales font semblant de soutenir la cause palestinienne.
Mais il ne s'agit que d'une fiction.
Une fiction qui permet à Israël, avec quelques millions d'hommes, de dominer la scène.
Non seulement pour ne pas être submergée, mais aussi pour réaliser le rêve du Grand Israël.
Sans se soucier de l'océan arabe dans lequel elle est enclavée.
Et en poursuivant son chemin. Inexorablement.
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Les coulisses de la reconnaissance de la Palestine par l’Europe! - Un plan de sauvetage d’Israël sous couvert de soutien à la Palestine

Les coulisses de la reconnaissance de la Palestine par l’Europe!
Un plan de sauvetage d’Israël sous couvert de soutien à la Palestine
Entretien avec Peiman Salehi, analyste iranien
Question de Yasin Okyay
Source: https://www.aydinlik.com.tr/haber/avrupanin-filistini-tan...
Pourquoi de nombreux pays européens ont-ils décidé d'agir « maintenant » pour reconnaître la Palestine ? Que signifie le plan de Trump pour Gaza ? Qui en tire avantage ? Quelles seront les conséquences du désarmement du Hamas et du transfert du contrôle de Gaza ? L’analyste politique iranien Peiman Salehi a répondu aux questions les plus fréquemment posées...
De nombreux pays européens ont décidé de reconnaître la Palestine. Cependant, alors que tout cela se produit, l’agressivité d’Israël envers la Palestine se poursuit encore. De la rencontre entre Trump et Netanyahu à la Maison Blanche a émergé un « Plan Gaza » en 20 points. Ce plan prévoit la fin des affrontements à Gaza, l’absence d’expulsion de la population gazaouie et l’engagement d’Israël à ne pas annexer de territoires. Toutefois, selon le plan, le Hamas devra déposer les armes et transférer le contrôle de Gaza à un gouvernement de transition composé de technocrates internationaux placés sous la supervision de Trump. Ce plan ne vise pas seulement à réduire la présence politique et militaire du Hamas et de la Palestine, mais il transfère également tout pouvoir et toute volonté politique sous le contrôle des États-Unis et d’acteurs internationaux.
L’analyste politique iranien Peiman Salehi a évalué ces développements pour le media turc Aydınlık Avrupa. Salehi souligne que le timing de la reconnaissance de la Palestine par les États européens n’est pas fortuit, et que cette action pourrait, en fin de compte, servir les intérêts d’Israël. À propos du plan en 20 points de Trump sur Gaza, Salehi affirme: «L’insistance de Trump sur le désarmement du Hamas et le transfert du contrôle de Gaza n’est pas une demande neutre. Il s’agit en réalité d’une stratégie de domination à long terme. Le désarmement privera les Palestiniens de leur unique véritable force de dissuasion. Cela ouvrira la voie à une intervention plus profonde d’Israël dans la vie politique et sécuritaire de Gaza».
« Le timing de la reconnaissance de la Palestine n’est pas une coïncidence »
Ce timing n’est pas le fruit du hasard. L’Europe voulait montrer qu’elle avait encore du poids au Moyen-Orient et qu’elle pouvait agir de manière indépendante de Washington. Pourtant, en pratique, ce mouvement faisait partie d’un projet plus vaste mené en coordination avec les intérêts des États-Unis et d’Israël. En reconnaissant la Palestine à ce moment précis, les gouvernements européens espéraient gérer la crise et orienter celle-ci vers une issue contrôlée, plutôt que de risquer une escalade incontrôlée des tensions.

« Netanyahu n’a pas atteint ses objectifs »
Après presque deux ans de guerre, Netanyahu n’a pas réussi à atteindre les objectifs qu’il avait fixés pour Gaza. Les pertes civiles se sont accrues et le gouvernement israélien fait face à des critiques internationales croissantes. Il est devenu urgent pour Netanyahu d’avoir une porte de sortie qui ne ressemble pas à une défaite. L’Europe a joué la carte de la reconnaissance pour donner une impression de progrès.
« L’acte de reconnaissance de l’Europe sert les intérêts d’Israël »
Cette reconnaissance n’a pas qu’une valeur symbolique. Elle vise également à montrer qu’Israël se bat fermement, mais peut accepter une solution de compromis international, et à préparer le terrain pour une telle issue. Les mouvements de résistance ne seront pas totalement éliminés, mais leurs victoires ne seront pas non plus pleinement reconnues. En ce sens, l’action de l’Europe vise moins à rendre justice aux Palestiniens qu’à préserver la stabilité d’Israël et l’influence de l’Occident dans la région.
« Le plan Gaza en 20 points avantage Israël »
Que pensez-vous du plan Gaza en 20 points de Trump et Netanyahu, et quelles seraient les conséquences du désarmement et du transfert du pouvoir par le Hamas ?
Ce plan confirme les attentes de beaucoup: il donne clairement l’avantage à Israël. L’initiative de reconnaissance de l’Europe n’ayant pas permis de clore la guerre comme le souhaitaient les dirigeants occidentaux, Trump est intervenu avec une proposition qui renforce la position d’Israël et lui offre une protection politique.
« Le nouveau plan pour Gaza n’est pas de bonne foi »
La question centrale ici est la confiance. Ni les États-Unis ni Israël ne se sont révélés des acteurs fiables pour la paix. Israël a violé à maintes reprises les cessez-le-feu tant au Liban qu’à Gaza. Les États-Unis se sont retirés unilatéralement de l’Accord nucléaire iranien, qu’ils ont ensuite utilisé contre Téhéran selon leur propre interprétation. Compte tenu de tout cela, il y a peu de raisons de croire que le nouveau plan soit de bonne foi.

«Le désarmement privera les Palestiniens de leur seule force de dissuasion»
L’insistance de Trump sur le désarmement du Hamas et le transfert du contrôle de Gaza n’est pas une demande neutre. Il s’agit en réalité d’une stratégie de domination à long terme. Le désarmement privera les Palestiniens de leur unique véritable force de dissuasion. Cela ouvrira la voie à une intervention plus profonde d’Israël dans la vie politique et sécuritaire de Gaza. Un tel scénario n’a guère de chances d’apporter la paix. Cela créerait un vide que des puissances extérieures chercheraient à combler, menant à davantage d’instabilité et de polarisation dans la région.
«Téhéran soutient que la question palestinienne doit être résolue par les Palestiniens»
Que se passerait-il si un gouvernement de transition supervisé par Trump était instauré à Gaza ? Quelle serait la position de l’Iran dans ce cas ?
L’Iran ne reconnaîtra comme légitime aucun gouvernement de transition imposé de l’extérieur à la Palestine. Téhéran a toujours défendu que la question palestinienne devait être résolue par les Palestiniens eux-mêmes. Le fait que Trump supervise un tel gouvernement conforterait l’Iran dans l’idée que «le but n’est pas la paix, mais une ingénierie politique en faveur d’Israël».

« Les actions de Trump sont en parfaite harmonie avec Israël »
Du point de vue iranien, Trump n’est pas une figure neutre. Il a transféré l’ambassade américaine à Jérusalem et a promu le « Deal du siècle ». Ses actions sont en parfaite harmonie avec la position d’Israël. Par conséquent, un gouvernement de Gaza établi sous son contrôle serait considéré comme une extension de l’occupation par d’autres moyens. En pratique, cela encouragerait l’Iran à renforcer son soutien aux groupes de résistance palestiniens. Si ces groupes sont désarmés, les Palestiniens perdront leur unique force de dissuasion. Cela inciterait l’Iran à compenser la situation par un soutien politique et matériel accru. Une telle démarche ne calmerait pas le conflit, mais approfondirait la tension. Du point de vue iranien, cela confirmerait que les États-Unis cherchent à imposer des solutions de l’extérieur, plutôt qu’à respecter le droit des peuples à l’autodétermination.
« La Palestine est une question de civilisation »
Comment voyez-vous l’avenir de la Palestine ?
À court terme, la situation n’est pas prometteuse. Il est probable que l’on assiste à des cessez-le-feu fragiles et à des initiatives internationales éphémères visant davantage à gérer qu’à résoudre la crise. Les pertes humaines demeureront lourdes et l’incertitude politique persistera. Cependant, à long terme, la question palestinienne n’est pas seulement un conflit territorial, mais une question historique et civilisationnelle. Même si les organisations sont affaiblies ou les dirigeants ciblés, l’idée de résistance ne peut être éradiquée. Chaque nouvelle génération hérite de la mémoire et de la cause. Ainsi, les tentatives d’éliminer la volonté palestinienne par le désarmement ou des gouvernements imposés échoueront à apporter la stabilité.
« L’affaiblissement de l’hégémonie unipolaire offre une opportunité aux Palestiniens »
Les changements mondiaux sont également importants. La montée de nouvelles puissances dans le Sud global et l’affaiblissement croissant de l’hégémonie unipolaire des États-Unis offrent aux Palestiniens plus d’opportunités de faire entendre leur voix sur la scène internationale. Leur lutte est de plus en plus perçue comme faisant partie d’un mouvement plus large pour la multipolarité et la justice.
« Toute solution ignorant le droit des Palestiniens à l’autodétermination s’effondrera tôt ou tard »
L’avenir de la Palestine sera donc façonné par la coopération entre les acteurs palestiniens sur le terrain et les grandes transformations géopolitiques mondiales. Toute solution qui ignorerait le droit des Palestiniens à l’autodétermination finira tôt ou tard par s’effondrer, entraînant un nouveau cycle de crise. La véritable stabilité ne viendra que lorsque le peuple pourra décider lui-même de son destin.
12:01 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, palestine, levant, israël, iran, hamas, proche-orient, méditerranée |
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Allemagne: Vers un état d'urgence sous l'hystérie guerrière

Allemagne:
Vers un état d'urgence sous l'hystérie guerrière
par Wolfgang Hübner
Source: https://pi-news.net/2025/10/mit-kriegshysterie-in-den-not...
Il est tentant pour Merz & Co. de « résoudre » la crise politique intérieure due à la force montante de l'AfD et le front politique extérieur dans la guerre en Ukraine à l'aide de lois d'urgence.
Friedrich Merz ne sera jamais un chancelier populaire ni couronné de succès. Mais il fait tout pour devenir au moins le premier chancelier fonctionnant à coup de mesures d'urgence dans l'histoire de la République fédérale. L'hostilité envers la Russie, qu'il soutient agressivement avec d'autres, la militarisation de l'économie et de la société, l'escalade de l'hystérie guerrière mènent à un objectif bien caché, mais de plus en plus clair: faire de l'Allemagne un État en état permanent d'urgence dans lequel les droits fondamentaux sont restreints ou supprimés, mais où le pouvoir du gouvernement peut prendre des proportions dictatoriales.
Contrairement à de nombreux autres membres du gouvernement de coalition formé par l'Union (démocrate-chrétienne) et la SPD socialiste, Merz est assez âgé pour avoir vécu le 30 mai 1968. À l'époque, après des années de luttes politiques contre la résistance acharnée de l'opposition extraparlementaire (APO), les lois d'urgence ont été adoptées au Bundestag à une large majorité par les partis au pouvoir, l'Union et la SPD. En ce jour noir de l'histoire de notre pays, 100 députés du Bundestag ont tout de même voté contre cette modification de la Loi fondamentale, y compris ceux qui venaient des rangs de la SPD.
Pendant près de 60 ans, c'est-à-dire pendant toute la durée de la « guerre froide » jusqu'en 1990, les lois d'urgence n'ont pas été appliquées. Mais la demande du plus fervent belliciste de la CDU, Roderich Kiesewetter, de proclamer « l'état d'urgence » en raison de prétendues menaces russes, laisse entrevoir les possibilités envisagées. En effet, il est tentant pour la démocratie partitocratique allemande de « résoudre » à la fois la crise politique intérieure due à la montée en puissance de l'AfD et la confrontation en cours, extrêmement dangereuse sur le plan de la politique étrangère, suite à la guerre en Ukraine à l'aide de lois d'urgence.

Le ministre-président sortant de Saxe-Anhalt, Reiner Haseloff (CDU), n'a laissé aucun doute sur la façon dont le cartel formé par la CDU/CSU, la SPD et les Verts, ainsi que les médias de masse, se perçoit lui-même, à savoir comme un « système » qui, selon la devise « C'est nous ou eux ! », est prêt à tout pour empêcher l'AfD de participer au pouvoir. Dans le même temps, Manfred Weber, homme politique européen de premier plan issu de la CSU, propose dans un talk-show de paralyser le métro de Moscou par une cyberattaque. Il s'agit là d'une provocation politique, incendiaire et irresponsable, dont la réalisation entraînerait des représailles très sévères de la part de la Russie, à moins que le président Poutine ne veuille risquer sa chute au profit de cercles plus radicaux.
Ce qui est particulièrement grave dans cette situation, c'est que la direction de la SPD, autour de Lars Klingbeil et Boris Pistorius, accepte d'attiser l'hystérie guerrière. Mais tout comme la SPD était prête, en 1968, avec à sa tête la légende du parti Willy Brandt, à faire passer les lois d'urgence avec l'Union contre une forte opposition interne au parti, la social-démocratie d'aujourd'hui, en pleine déliquescence, est prête à s'opposer une fois de plus aux intérêts du peuple en matière de liberté et de paix.
Encore une remarque personnelle: en tant que vétéran de l'APO ("Opposition extra-parlementaire"), ayant participé à de nombreuses manifestations et rassemblements contre les lois d'urgence entre 1966 et 1968, je n'aurais jamais imaginé devoir un jour assister à l'application de ces lois. Cela m'attriste de devoir désormais le craindre à mon grand âge.
11:17 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, allemagne, europe, affaires européennes |
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lundi, 06 octobre 2025
L’humanité sera confrontée à des épreuves terribles

L’humanité sera confrontée à des épreuves terribles
Alexandre Douguine
Les changements dans l’ordre mondial se produisent généralement par la guerre. Il est très rare que ceux qui détiennent le pouvoir absolu acceptent de s’en défaire volontairement. En général, ils s’y accrochent jusqu’au bout, jusqu’à être détruits et réduits en cendres. Il ne fait aucun doute que c’est également le cas aujourd’hui.
Bien sûr, l’histoire prend parfois des tournures inattendues. Par conséquent, on ne peut qu’hypothétiquement compter, espérer ou, du moins, souhaiter que les dirigeants occidentaux renoncent volontairement à leur hégémonie. Mais tout nous dit que cela est peu probable. Et si cela n’arrive pas, il y aura la guerre. Cette guerre a déjà commencé: la guerre en Ukraine et les conflits au Moyen-Orient en sont le prélude. Mais elle n’a pas encore atteint son plein développement. Pour l’instant, il ne s’agit que d’un avant-goût de cette grande et fondamentale guerre qui sera menée pour la redistribution de la véritable souveraineté entre les forces en train de naître aujourd’hui.
Aujourd’hui, nous disons souvent que nous vivons dans un monde multipolaire, que le monde n’est plus unipolaire, que les BRICS sont en ascension et qu’ils représentent « la plus grande partie de l’humanité ». Pourtant, nous voyons que l’hégémonie du système unipolaire demeure très forte, bien qu’elle soit en déclin et que la société occidentale soit confrontée à une crise interne, une implosion plutôt qu’une explosion, qui menace de détruire sa civilisation.
Mais, dans un certain sens, malgré une nette tendance à la baisse, l’hégémonie occidentale reste plus forte que la multipolarité.
Soyons honnêtes : elle est encore capable, par exemple, de restructurer l’équilibre des pouvoirs dans l’espace post-soviétique.
Il est évident que les globalistes agissent depuis trois décennies en Ukraine, en Moldavie, dans le Caucase du Sud et en Asie centrale. Mais c’est nous qui le leur avons permis.

Et malgré les divisions qui affectent actuellement l’Occident, divisé en deux ou trois forces distinctes — les mondialistes de l’Union européenne, Trump et le mouvement MAGA — leur pouvoir est tel qu’ils parviennent à influencer les élections en Roumanie, à éliminer les candidats qui ne leur conviennent pas, à tuer une dizaine de candidats d’« Alternative pour l’Allemagne » en faisant passer cela pour des « accidents » et, enfin, à manipuler les élections en Moldavie. Parallèlement, la guerre en Ukraine se poursuit, l’Occident ne recule pas et il nous est très difficile de remporter une victoire décisive. Autrement dit, il est prématuré d’affirmer que le monde occidental unipolaire n’existe plus. Il existe toujours, même s’il est à l’agonie.
Et, bien sûr, il est très probable que si le monde unipolaire ne s’effondre pas prochainement, tout finira par nous conduire à une grande guerre.
Je ne sais pas où elle aura lieu. Dans le Pacifique contre la Chine, contre l’Inde, au Moyen-Orient ou avec notre implication directe? Il est tout à fait possible que tout commence précisément chez nous. Ainsi, ce qui se passe en Ukraine pourrait être le début d’une guerre bien plus vaste et grave. Car c’est précisément la Russie — avec nos armes nucléaires, nos territoires, notre identité historique, notre capacité à comprendre les processus mondiaux — qui est de plusieurs pas en avance, même sur la Chine.


La Chine ne devient que maintenant une puissance véritablement mondiale, ce qui représente une nouvelle qualité, une nouvelle situation pour elle. Il n’est pas certain qu’elle puisse y faire face. Nous avons été une grande puissance mondiale aussi bien au 20ème siècle (une des deux) qu’au 19ème (une parmi plusieurs). La grandeur de la Chine remonte à l’Antiquité. Bien que la Chine soit aujourd’hui sans aucun doute une puissance de premier plan, l’une des deux ou trois qui gouvernent le monde. Mais c’est une expérience nouvelle pour la Chine contemporaine. Il faut s’y préparer, car de nombreuses erreurs peuvent être commises. Dans notre cas, cette expérience est très vivante, et c’est pourquoi la Russie est le principal obstacle pour les mondialistes et leur principal ennemi. Voilà pourquoi c’est nous, et pas d’autres, qui sommes les principaux adversaires dans cette guerre, le paratonnerre à travers lequel circule l’histoire mondiale. C’est nous qui construisons ce monde multipolaire.
La grande question est de savoir si, dans ces circonstances, il sera possible d’éviter une troisième guerre mondiale. Pour l’instant, la seule proposition réaliste serait notre capitulation, c’est-à-dire mettre fin à la guerre volontairement, lever le drapeau blanc à l’avance et nous livrer à la merci des vainqueurs. Mais reconnaître volontairement la défaite ne signifie pas la fin de la guerre. Nous avons encore la volonté et les forces de combattre, et nous ne nous dirigeons pas vers la défaite, mais vers la victoire. Donc, si la seule façon d’éviter une grande guerre est la défaite, ce n’est pas ce que nous voulons, et cette option est donc exclue. Ce n’est pas à nous de décider s’il y aura guerre ou non, il ne nous reste qu’à observer comment le monde unipolaire déplacera les pièces de cette confrontation.
Cependant, dans l’ensemble, je suis d’accord avec l’analyse selon laquelle nous ne pourrons pas éviter une grande guerre mondiale. Et dans ce cas, la Chine sera impliquée, et probablement aussi l’Inde, tout le Moyen-Orient et le monde islamique. Bien entendu, cela aura aussi des répercussions en Afrique et en Amérique latine, où des coalitions se forment également en faveur de l’unipolarité ou de la multipolarité.
C’est pourquoi l’humanité sera confrontée à des épreuves terribles. Nous en vivons déjà certaines. Mais en comparaison de ce qui nous attend, ce que nous subissons aujourd’hui semblera un jeu d’enfants. Je ne m’en réjouis pas, ni ne m’en félicite, comme il est naturel pour toute personne normale. C’est simplement que, presque toujours, tout le monde dit ne pas vouloir la guerre, mais les guerres adviennent malgré tout. Que l’on le veuille ou non. Il y a dans l’histoire une certaine logique à laquelle il est pratiquement impossible d’échapper.
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Oublier l’Occident - Un point de vue russe

Oublier l’Occident
Un point de vue russe
Leonid Savin
Note préliminaire du traducteur: Leonid Savin demande d'oublier l'Occident wokiste voire l'Occident tout court avec les idéologies qui ont préparé le terrain au wokisme de l'ère Obama-Biden. Pour nous, qui vivons dans l'Occident géographique tout en refusant l'Occident mental, il s'agit aussi de réaliser une "épochè" des idéologies et des pseudo-théologies qui ont jeté les base de l'occidentisme actuel: le puritanisme, le calvinisme, l'ère de Cromwell, les fadaises énoncées par Locke, les fondamentalismes américains, le républicanisme français, le jacobinisme hystérique, etc. Et de revaloriser toutes les initiatives qui ont visé à freiner ces accélérationismes, à jouer un rôle katechonique, à détruire définitivement et sans pitié les remugles de ces dévoiements. Cette posture, nécessaire, salutaire, implique donc, aussi, d'avoir une attention plus soutenue, presque exclusive, pour les traditions des mondes européens et extra-européens traditionnels, dont l'Iran, l'Inde, la Chine, comme le préconise Leonid Savine.
En Russie (mais pas seulement, cela est également vrai pour les pays d’Amérique latine, d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie), on accorde encore beaucoup d’attention à l’Occident collectif. Dans certains pays, cela s’explique par le fait que les médias globalistes occidentaux continuent d’y opérer activement, alimentant sans cesse l’attention du public et suscitant l’intérêt pour les événements dans les États occidentaux ou à travers le prisme de la vision du monde occidentale. Cependant, en Russie, où, après le début de l’Opération militaire spéciale, ces agents médiatiques ont soit quitté le pays, soit été déclarés indésirables, ce sont les chaînes de télévision d’État qui maintiennent elles-mêmes le focus sur l’agenda occidental, imitées en cela par les médias en ligne et les blogueurs. Cette situation ne correspond pas aux déclarations des autorités russes sur la nécessité de créer un ordre mondial multipolaire plus juste, ni à l’éducation selon des valeurs patriotiques à l’intérieur du pays.
Car si l’on organise en permanence des talk-shows, des émissions et des journaux télévisés centrés sur le monde occidental, même sous un angle critique (regardez quelle nouvelle absurdité Donald Trump a dite ou discutons des plans de l’UE et de l’OTAN), la population continuera malgré tout à raisonner dans des catégories où l’Occident apparaît comme quelque chose de significatif et, malgré les reportages sur des émeutes à Athènes ou une gay pride à Amsterdam, il subsistera une vision du monde où les autres régions, malgré leurs indicateurs géographiques, démographiques, culturels et politiques plus importants, seront perçues comme secondaires voire de second ordre.
De plus, cela continuera de restreindre sérieusement l’horizon d’attente et de réduire le potentiel de futures formes de coopération et d’interaction – qu’il s’agisse de tourisme banal ou de projets scientifiques, économiques et culturels conjoints.
Par conséquent, il est nécessaire de revoir sérieusement l’agenda médiatique. D’un côté, il s’agit de limiter considérablement la diffusion de contenus liés à l’Occident collectif. Il faudrait établir un quota à ne pas dépasser pour les contenus traitant d’événements liés, d’une manière ou d’une autre, à l’Occident. Sachant que, dans l’agenda international, l’Occident restera présent de toute façon (l’agonie et les actions expansionnistes de l’UE et des États-Unis se poursuivront encore un certain temps), il convient de mener une politique éditoriale soigneusement calibrée, en filtrant minutieusement les matériaux.

D’un autre côté, il faut combler le vide ainsi créé par un contenu de qualité, reflétant les processus dans d’autres régions du monde. Les contenus provenant de pays amis, surtout ceux ayant soutenu la Russie dans l’Opération militaire spéciale, doivent progressivement être intégrés dans l’espace médiatique russe et devenir la nouvelle norme – des matériaux et points de vue de la RPDC, de la Chine, de l’Inde, de l’Iran, du monde arabe, des pays d’Afrique, de Cuba, du Nicaragua, du Venezuela (ces trois pays étant mentionnés comme partenaires stratégiques dans la doctrine de politique étrangère de la Russie), du Brésil et de l’Afrique du Sud comme membres des BRICS, des pays de l’UEEA doivent être diffusés régulièrement dans le cadre de la politique publique de radiodiffusion, mais aussi dans la presse écrite et les médias électroniques.

Si l’on tient compte du nouveau concours Intervision, de la signature d’accords de coopération entre le ministère russe de la Culture et la RPDC, de la conclusion d’accords avec des médias africains, ainsi que du travail dans le cadre des BRICS, on peut dire que ce travail a déjà commencé. Il faut le rendre plus systémique, stratégiquement réfléchi et global.
Au lieu de diffuser des images ou des vidéos des sessions du Parlement européen ou d’accorder beaucoup de temps aux élections dans un pays européen, il vaudrait mieux proposer une analyse des débats au Majlis d’Iran avec des commentaires d’experts sur le système politique de la République islamique d’Iran et la théologie chiite, évaluer les réalisations technico-économiques du Bharat (nouveau nom de l’Inde sur la scène internationale, nom qui est authentique) et présenter des exemples d’art contemporain venant des pays d’Amérique latine.
Les propos de Nikolaï Danilevski selon lesquels l’Europe n’est qu’une petite péninsule occidentale du continent eurasiatique ne doivent pas être perçus uniquement comme un appel à se protéger de la toxicité actuelle de la culture européenne, mais aussi comme une invitation à la découverte créative de soi, telle que prônée par les Eurasistes il y a cent ans. Nous avons de nombreux voisins sur le continent dont l’héritage culturel et historique présente un vif intérêt. Et de là s’étendent des liens et des ponts avec d’autres formations culturelles non moins importantes – en Asie du Sud-Est, ainsi que dans le Maghreb et le Machrek, plus connus sous des noms inventés en Occident – Afrique du Nord et Moyen-Orient.

Dans un monde multipolaire, de telles innovations seront perçues positivement au-delà de l’Occident, comme une poursuite de la lutte contre le néocolonialisme et le racisme gnoséologique occidental. Et la réaction en retour, d’une manière ou d’une autre, contribuera à améliorer l’image globale de la Russie, notamment à travers l’augmentation du contenu de qualité en provenance de Russie et sur la Russie (puisque le changement d’approche implique une coopération appropriée en matière de politique de l’information entre les pays).
De plus, une information plus complète contribuera également au développement de la créativité à l’intérieur même de la Russie, car la diversité des formes et des pratiques issues de différentes parties du monde enrichira notre peuple de connaissances et stimulera de nombreuses initiatives. L’expérience en matière d’entrepreneuriat ou d’autogestion quelque part en Asie pourrait être reproduite dans l’une des régions de Russie, et l’information sur les besoins en Amérique latine pourrait intéresser l’un de nos producteurs.
L’Occident collectif, fondé sur la kleptocratie et l’arrogance, en raison de la folie des sanctions persistante et de la désinformation organisée, ainsi que de sa propre dégradation scientifique et culturelle, est peu susceptible de proposer à la Russie quoi que ce soit d’utile ou de substantiel. C’est pourquoi il doit être exclu de notre champ d’information. Que les diplomates professionnels continuent à gérer les relations bilatérales et que les militaires renforcent la capacité de défense du pays. Et que le contenu en provenance des pays du Sud global et de l’Est global renforce et étende les processus de multipolarité.
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La fin de la société ouverte!

La fin de la société ouverte!
Source: https://www.unser-mitteleuropa.com/98852
Le système politique occidental se considère comme libre, libéral et bien sûr démocratique. Ces attributs sont encore utilisés avec succès par les élites occidentales auprès des personnes qui ne connaissent pas le système occidental de l’intérieur.
Une sorte de base philosophique pour le système occidental fut fournie jadis par Karl Popper avec sa description de ce système comme une « société ouverte ». Elle serait ouverte, selon Popper, parce que le débat politique y serait ouvert à tous les résultats et ne serait pas déterminé par des objectifs idéologiques, ou des lois historiques prétendues (celles de l'historicisme), ou des traditions. Dans l’idéal de société « ouverte », il n’existe donc pas de vérité absolue.

Par exemple, selon Popper, on ne peut pas conclure, après avoir observé de très nombreux cygnes blancs, que tous les cygnes sont blancs. Un seul cygne noir suffit à contredire cette affirmation. De telles subtilités sont extrêmement dangereuses. On pourrait tout aussi bien affirmer aujourd’hui qu’on ne peut pas conclure, à partir de l’observation de milliards d’êtres humains qui se répartissent en hommes et en femmes, qu’il n’existe que deux sexes. Tout fou qui prétend appartenir à un autre sexe devrait donc réfuter l’existence de seulement deux sexes.
La «société ouverte» a pour but de libérer les capacités critiques de l’homme. Le pouvoir de l’État doit ainsi être partagé autant que possible afin d’éviter les abus de pouvoir. Le débat politique dans la «société ouverte» est naturellement démocratique, ce qui ne signifie pas la domination de la majorité, mais la possibilité de révoquer le gouvernement de manière pacifique.
Ainsi, la « société ouverte » se distingue du fascisme, du communisme, du nationalisme et de toute théocratie.
Ce concept politique offre sans aucun doute des aspects attractifs, surtout pour tous les libres penseurs qui ne veulent pas se laisser enfermer dans un carcan idéologique. D’un autre côté, ce concept présente aussi des faiblesses dangereuses (comme le montre l’exemple ci-dessus), car il ne propose aucune perspective à long terme pour la société et rejette également toute tradition. Pourtant, la tradition recèle souvent des expériences vieilles de plusieurs siècles, voire de plusieurs millénaires, sur la vie et ses lois. Popper rejette explicitement de telles lois en tant qu’elles seraient de l'historicisme. Ignorer ces lois se transformera tôt ou tard en piège mortel pour une société.

De cette manière, la porte est ouverte à toutes sortes d’absurdités, comme la folie du genre, la glorification de toutes sortes de perversions sexuelles ou de modes de vie alternatifs, qui finissent par signifier le déclin et la mort assurés de la société concernée. Popper a développé ses idées pendant la Seconde Guerre mondiale, à une époque où les priorités étaient naturellement différentes d’aujourd’hui.
En l’absence de toute directive pour organiser la vie, de nombreuses personnes finissent par être totalement désorientées et donc particulièrement réceptives à la propagande de l’air du temps diffusée par les médias, contrôlés en coulisses par les élites du pouvoir. C’est pourquoi George Soros est également un adepte de cette philosophie, ce qu’il a exprimé par la création de son « Open Society Foundation ».

À ce stade, les idées de la « société ouverte » sont contrecarrées par la pratique:
Le débat sur les objectifs actuels de la société occidentale n’a depuis longtemps plus lieu en public, mais dans des cercles de pouvoir qui se coupent de la société. Il ne s’agit que des intérêts des acteurs représentés dans ces cercles de pouvoir. Les résultats de ce débat sont emballés pour le grand public dans des narratifs de bien-pensance, puis communiqués par les médias. Un véritable débat ouvert serait, lui, tout autre.
La société occidentale est donc tout sauf ouverte et elle est ouvertement antidémocratique, car ces médias n’autorisent plus que des opinions qui ne s’opposent pas aux intérêts des élites en coulisses.
L’intolérance des médias envers ceux qui pensent différemment est devenue de plus en plus insupportable ces dix à quinze dernières années. L’explication est simple: depuis la crise financière de 2008, le monde occidental est en mode de gestion de crise permanent.
L’arrière-plan plus profond de cette crise permanente réside dans des déplacements tectoniques du pouvoir à l’échelle mondiale, au détriment des élites occidentales.

Comme le système occidental, avant la chute du rideau de fer, était préférable à tout autre système politique, les élites occidentales pouvaient bien tolérer la critique, même fondamentale. En ce sens, on était « libéral » au sens de Popper. L’effondrement du Pacte de Varsovie a marqué l’apogée du pouvoir occidental. La défaite de l’Union soviétique a été perçue comme une sorte de fin de l’histoire. Les élites occidentales se croyaient à jamais maîtresses du monde. Ensuite, la descente a été lente mais certaine. Les citoyens ordinaires l’ont aussi ressenti dans leur portefeuille. Il en a résulté des mouvements « populistes » qui ont remis en question le pouvoir des élites. À partir de ce moment, les médias de masse contrôlés sont devenus de plus en plus illibéraux envers ceux qui pensent différemment.
La guerre en Ukraine est pour les élites occidentales une sorte de séisme, qui a suivi les déplacements tectoniques du pouvoir mentionnés ci-dessus. Leur hégémonie est désormais remise en cause. Avec la domination sur cette planète, tous les avantages économiques qu’ils en tiraient disparaîtront bientôt. Il ne s’agit pas seulement de la possibilité de s’enrichir en imprimant de l’argent. Sont également importants, par exemple, l’imposition mondiale des droits de brevet, ce que seul un hégémon peut finalement faire.
Dans une telle situation, les élites ne tolèrent aucune contradiction. Désormais, elles ont définitivement arraché leur masque libéral et tentent d’éliminer les dissidents. Ce qui peut arriver aux amis de Poutine, par exemple, l’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder ou l’ancienne ministre autrichienne des Affaires étrangères Karin Kneissl peuvent en témoigner.
Popper se retournerait dans sa tombe !
12:32 Publié dans Actualité, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, karl popper, société ouverte, philosophie |
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Grokipedia – Elon Musk peut-il détrôner Wikipédia?

Grokipedia – Elon Musk peut-il détrôner Wikipédia?
Source: https://report24.news/grokipedia-kann-elon-musk-wikipedia...
Avec « Grokipedia », Elon Musk souhaite créer un contrepoids à Wikipédia, dominé par la gauche écologiste. Son entreprise xAI, qui exploite également la plateforme d'IA Grok, s'en charge apparemment déjà. Allons-nous enfin avoir une plateforme de connaissances alternative plus crédible ?
Wikipédia, le roi incontesté des encyclopédies en ligne, a désormais un concurrent. Elon Musk veut lancer un nouveau défi avec Grokipedia. L'objectif déclaré : une plateforme de connaissances sans les « biais gauchistes » souvent critiqués qui, selon de nombreux détracteurs, sapent la neutralité de l'original.
Le moment choisi pour cette annonce n'est pas un hasard. Peu avant, le cofondateur de Wikipédia, Larry Sanger, avait fait sensation dans une interview avec Tucker Carlson en demandant directement à Musk de l'aider à lutter contre la censure et le parti pris idéologique de sa propre création. Au lieu d'une réforme laborieuse du système existant, Musk opte désormais pour l'attaque directe: la création d'une encyclopédie entièrement nouvelle.
La vision de Musk pour Grokipedia est claire: elle doit constituer «une amélioration considérable» et servir l'objectif de xAI, qui est de «comprendre l'univers». La stratégie est bien connue: comme pour le rachat de Twitter (aujourd'hui X) et le développement de l'IA Grok, il s'agit de réduire la censure et les «filtres woke» afin de laisser plus de place à la diversité des points de vue.
Mais une chose est sûre: cela ne sera pas si simple. Wikipédia est depuis longtemps indissociable de Google. Quiconque effectue une recherche aboutit d'abord à la version «officiellement approuvée» de la vérité. Reste à voir si Grokipedia parviendra à contrer cet avantage algorithmique. Mais le simple fait d'essayer pourrait suffire à faire transpirer les censeurs dans leurs tours d'ivoire chez Wikipédia.
11:47 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : grokipedia, elon musk |
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Face à la menace russe, l'Europe s'arme pour résister aux États-Unis

Face à la menace russe, l'Europe s'arme pour résister aux États-Unis
Cristi Pantelimon
Source: https://www.estica.ro/article/la-adapostul-amenintarii-ru...
La guerre en Ukraine comporte tellement d'aspects positifs et négatifs qu'il est difficile, pour un profane, de comprendre le déroulement des événements.
Dernièrement, après la rencontre en Alaska, le président Trump, très optimiste auparavant quant à ses relations avec V. Poutine, est devenu plutôt réservé. Les États-Unis remettent sur le tapis la question de l'aide militaire à l'Ukraine, sous une forme aggravée, avec la livraison de missiles Tomahawk.
Dans le même temps, le ton de l'Europe à l'égard de Moscou semble également se durcir. Un pétrolier russe « fantôme » a reçu la visite d'un commando français, signe que l'Europe veut se montrer plus « assertive » dans ses relations avec la Russie.
En réalité, les choses sont inversées.
Les Américains voudraient se livrer à l'escalade, mais ils ne le peuvent plus, car l'Ukraine n'a plus la capacité réelle de percer le front. De plus, les Américains ne veulent pas envenimer la situation au point que l'idée du prix Nobel et les résultats de l'accord Poutine-Trump disparaissent complètement. Les États-Unis mènent une guerre ambivalente et complexe. Ils ne peuvent pas abandonner le levier de la guerre, qui facilite les négociations générales avec la Russie et la Chine (et assure, indirectement, le déclin de l'UE), mais ils ne veulent pas non plus apparaître comme une puissance belliqueuse – voir le cas du Moyen-Orient, où ils se qualifient de "force de paix"...
Les États-Unis mènent également une guerre difficile à l'intérieur – le discours de Donald Trump devant les 800 chefs de l'armée américaine ne laisse aucune place à l'interprétation.
L'Europe, quant à elle, cherche une solution pour assurer sa future autonomie stratégique, ce qui signifie que, sous le couvert de la menace russe fictive, elle va s'armer pour devenir plus assertive dans ses relations avec les États-Unis, qui détiennent toujours la suprématie militaire... chez les Européens !
Au fond, pourquoi les Européens détruiraient-ils leurs acquis dans une guerre entre l'OTAN et la Russie, c'est-à-dire entre les États-Unis et la Russie?
Récemment, Scot Bessent, secrétaire au Trésor américain, a déclaré franchement: «Comme je l'ai dit à mes homologues européens il y a environ deux semaines: Tout ce que j'entends de votre part, c'est que Poutine veut entrer dans Varsovie. La seule chose dont je suis sûr, c'est que Poutine n'entrera pas dans Boston ».
Morale: les Européens, qui savent que Poutine ne veut pas entrer dans Varsovie, en sont venus à créer eux-mêmes, dans l'ombre, l'image d'une Russie agressive, qui sert leurs plans d'armement et d'autonomie stratégique.
L'avenir est devant nous !
11:23 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, europe, affaires européennes |
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dimanche, 05 octobre 2025
Andrej Babiš triomphe en République tchèque – Bruxelles en mode panique

Andrej Babiš triomphe en République tchèque – Bruxelles en mode panique
Source: https://report24.news/andrej-babis-triumphiert-in-tschech...
Les Tchèques en ont manifestement assez de la politique autodestructrice du cartel des partis inféodés à Bruxelles. Le parti ANO d'Andrej Babiš est arrivé largement en tête des élections législatives. Un nouveau succès des "patriotes pour l'Europe" et un nouveau coup dur pour les eurocrates.
Les eurocrates bruxellois ont dû hyperventiler collectivement samedi soir. Andrej Babiš, tour à tour qualifié par la presse de «Trump tchèque» ou de «milliardaire qui a trop d'opinions», a encore frappé: il a rallié les électeurs à sa cause, humilié l'establishment et semé à nouveau la panique parmi les partisans du politiquement correct sur le continent. Son parti ANO a remporté haut la main les élections législatives tchèques.
Babiš a déclaré laconiquement: «Nous voulons sauver l'Europe». Une phrase qui est à peu près aussi bien accueillie à Bruxelles que la proposition de mettre fin à la propagande sur le genre. Car pour Babiš, sauver ne signifie pas «plus de centralisme», «plus d'union de la dette» ou «plus de wokeness», mais au contraire moins de Bruxelles, plus de Prague et moins d'idéologie, mais plus de sens des réalités.
Babiš a promis des salaires plus élevés, des impôts moins élevés et la fin de l'austérité, qui ne sert en réalité qu'à redistribuer les richesses du bas vers le haut. Les Tchèques, qui ont docilement soutenu le programme de l'UE ces dernières années et ont en contrepartie subi une hausse des prix, une désindustrialisation et une pénurie d'énergie, ont désormais voté pour un revirement.
Le rêve bruxellois d'une Europe « progressiste » implose face à la résistance de ceux qui n'ont plus envie de se sacrifier pour des guerres étrangères, l'hystérie climatique et le chaos migratoire.

La réaction hystérique de Bruxelles est presque touchante. Les mêmes fonctionnaires qui se présentent comme les défenseurs de la démocratie et de l'État de droit lèvent les yeux au ciel chaque fois que le peuple ne vote pas comme ils l'avaient prévu. «Populisme», «extrémisme de droite», «ami de Poutine»: telles sont les accusations typiques lorsque les décisions démocratiques ne correspondent pas à leur programme. Pourtant, Babiš n'est pas anti-européen, comme on le prétend. Il ne veut pas isoler la République tchèque, mais souhaite une Europe qui ne s'étrangle plus elle-même. Pas étonnant qu'il s'allie avec Viktor Orbán, le Premier ministre hongrois, et qu'il bouscule l'UE avec d'autres «patriotes pour l'Europe». Bruxelles a besoin d'urgence d'une nouvelle dose de réalisme – et elle va l'obtenir, qu'elle le veuille ou non.
Le retour de Babiš est une nouvelle fissure dans la façade de «l'ordre fondé sur des règles» derrière laquelle se cache l'arrogance morale de l'Occident et ses valeurs. La façade s'effrite, et chaque nouvelle victoire électorale d'un réaliste dérangeant fait tomber un peu plus de crépi. Les gens ne veulent pas d'utopies climatiques, pas de paquets de milliards sans fin pour des fronts lointains, pas de leçons de morale administrées par des politiciens qui n'ont plus eux-mêmes à faire la queue à la caisse du supermarché. Andrej Babiš l'a compris. Et c'est pourquoi de nombreux Tchèques l'ont soutenu, lui et son parti ANO.
18:01 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, europe centrale, république tchèque, andrej babis, affaires européennes |
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République tchèque - Un signal clair : les premiers dépouillements montrent une victoire électorale écrasante des patriotes

République tchèque - Un signal clair: les premiers dépouillements montrent une victoire électorale écrasante des patriotes
Source: https://unzensuriert.at/312060-klares-signal-erste-stimma...
La République tchèque connaît un tournant politique: l'ancien Premier ministre Andrej Babiš devrait remporter une victoire électorale écrasante avec son mouvement ANO (« Oui ») et s'apprête à revenir à la tête du gouvernement.
Le parti frère du FPÖ nettement en tête
Après dépouillement d'environ la moitié des voix, ANO est clairement en tête avec 38,3% des suffrages, devant la coalition libérale-conservatrice au pouvoir Spolu du Premier ministre Petr Fiala, qui n'obtient qu'environ 20 % des voix.
Les deux autres partis patriotiques obtiennent également de bons résultats. Le parti "Motorists", associé à l'ANO et au FPÖ au sein du groupe européen « Patriots for Europe », recueille actuellement 7,1% des voix, tandis que le SPD (« Liberté et démocratie directe »), qui fait partie du même groupe européen que l'AfD allemande, en recueille 8,3%.
Changement d'orientation politique à Prague
Les Tchèques montrent ainsi clairement qu'ils en ont assez de l'explosion des prix, de la bureaucratie européenne et d'un gouvernement qui se soucie davantage de l'Ukraine, de la politique sociale de gauche et de Bruxelles que de sa propre population.
Cette élection est considérée comme le signe d'un changement d'orientation politique en Europe centrale. Outre les gouvernements hongrois et slovaque, la République tchèque va désormais exiger davantage d'autonomie et moins d'idéologie de gauche à Bruxelles.
Babiš, la voix du peuple
Pendant la campagne électorale, Babiš s'est présenté comme l'antithèse d'un establishment déconnecté de la réalité, responsable de la forte inflation et de la baisse du pouvoir d'achat. Selon lui, le chef du gouvernement, Fiala, « a laissé tomber la population et gaspillé des milliards, alors que les familles ont du mal à payer leurs factures de chauffage ».
Dans ce contexte, la guerre en Ukraine a été un thème central de la campagne électorale. Babiš a annoncé la fin de la controversée « initiative tchèque sur les munitions », qui finançait les livraisons d'armes à Kiev.
Une politique pour son propre pays
« Nous devons nous occuper de nos propres citoyens et attendre que la guerre soit terminée », a-t-il déclaré. Dans le même temps, il a annoncé son intention de relancer le groupe de Visegrád, c'est-à-dire la coopération étroite entre la République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie et la Pologne, afin de renforcer un bloc souverain d'Europe centrale au sein de l'UE qui s'oppose aux directives paternalistes de Bruxelles.
Malgré sa proximité avec Viktor Orbán et Robert Fico, Babiš rejette les accusations selon lesquelles il souhaiterait mener une politique «pro-russe». Il souligne lui-même ne pas être un ami de Poutine, mais plutôt un admirateur de Donald Trump. Sa position: Prague doit définir ses propres intérêts, et non Washington, Bruxelles ou un autre pays.
Une coalition gouvernementale de droite probable
Si le dépouillement des votes confirme les résultats actuels, les partis patriotiques formeront ensemble la majorité au Parlement à Prague.
Babiš, Tomio Okamura du SPD et Petr Macinka du nouveau mouvement des « motoristes », qui s'opposent fermement à la politique climatique de l'UE et militent pour un renforcement des compétences nationales, pourraient former un gouvernement patriotique de droite.
17:52 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : république tchèque, actualité, europe, europe centrale, affaires européennes, politique |
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Sacrifice et souveraineté: la géopolitique comme épopée théodramatique ou tragédie païenne

Sacrifice et souveraineté: la géopolitique comme épopée théodramatique ou tragédie païenne
Santiago Mondéjar
Source: https://geoestrategia.eu/noticia/45216/geoestrategia/sacr...
Le discours officiel émanant des institutions européennes présente la guerre en Ukraine comme une lutte moralisatrice, presque téléologique : une confrontation lucide et manichéenne entre le bien et le mal, la lumière et les ténèbres, l’innocence et l’agression. Les politiciens, analystes et médias consacrent l’Ukraine comme protagoniste héroïque, tandis qu’ils relèguent la Russie au rôle d’antagoniste maléfique, reproduisant ainsi une structure narrative similaire aux drames moraux théo-dramatiques expliqués par Hans Urs von Balthasar (1988).
Le drame chrétien — exemplifié dans la Divine Comédie de Dante ou dans Le Grand Théâtre du Monde de Calderón — imprègne le mal et la souffrance d’une signification au sein d’une économie de la rédemption, dans laquelle l’action humaine est soumise au jugement moral et à la possibilité de la grâce. Dans ce cadre conceptuel, le conflit se configure comme un jugement éthique, une narration de rédemption et un impératif moral : l’Europe se sent poussée à agir avec droiture, s’efforçant de protéger les opprimés et de réparer un ordre brisé. Cette rhétorique évoque les exhortations collectives des grandes puissances européennes pendant la Première Guerre mondiale, marquées par une narration linéaire et téléologique, investie d’une providence morale projetée sur les réalités géopolitiques (Mosse, 1990). Cependant, sous cette idéalisation morale se cache une réalité brute.
La guerre en Ukraine, comme tous les conflits, est alimentée par la realpolitik: un choc d’intérêts stratégiques, d’insécurités historiques et de calculs pragmatiques (Mearsheimer, 2014), marqué par l’hamartia et la péripétie, c’est-à-dire les erreurs de jugement et les retournements soudains du destin. Ainsi, le conflit s’éloigne du drame chrétien, avec sa promesse d’une issue morale, et se rapproche d’une tragédie païenne, soumise à l’implacable dynamique du pouvoir effectif.
Lorsque les dirigeants européens et leurs hérauts projettent une cohérence narrative imaginaire sur le conflit, ils ignorent les limites du volontarisme, la contingence des résultats et la chimère d’une résolution téléologique. À la place, émerge une logique brutale, amorale et contingente, plus proche des tragédies d’Euripide que de la dramaturgie salvatrice articulée par von Balthasar (1988). À l’instar de la tragédie grecque, le conflit se déroule dans un cadre indifférent à la clarté morale, où les acteurs poursuivent leurs fins, conditionnés par les circonstances plus que par des impératifs éthiques (Lebow, 2003).
En moralisant le conflit, l’Europe commet une grave erreur en imposant une dramaturgie politique conçue comme un drame moral à une réalité profondément tragique, brutale et moralement ambiguë : un drame de nécessité, non de grâce divine.
Cependant, cette tendance à la moralisation est révélatrice d’un point de vue anthropologique. L’Europe, culturellement imprégnée d’un imaginaire chrétien qui entre en collision avec sa dépendance séculaire à la guerre (Traverso, 2007), s’efforce de doter le conflit d’une clarté morale qui légitime le soutien public et justifie, a posteriori, l’exceptionnalisme de sa politique du fait accompli (Anderson, 2006).
Comme le raconte Euripide, le poids du passé fait pencher la balance vers la force brute, comme le montrent les vies d’Agamemnon, Clytemnestre et leur descendance, ce qui reflète la conception grecque de la parenté comme lien inséparable de responsabilité morale partagée: la loyauté familiale unit et divise, et la vengeance, même justifiée, perpétue la misère (Goldhill, 1986). Ce schéma de violence cyclique liée à la lignée trouve un parallèle en Ukraine: les intérêts géostratégiques, les alliances de circonstance et les héritages historiques partagés fonctionnent comme des parentés géopolitiques.
Cependant, en cadrant la guerre comme un acte de justice providentielle, on fait taire le khoros — le chœur tragique grec, la voix collective de la raison —, voix qui pourrait indiquer que la racine du conflit n’est pas à chercher dans un dessein divin, mais dans l’ambition politique et la contingence historique. Par ce glissement narratif vers le moralisme, on obscurcit l’essence tragique du conflit, ce qui encourage des réactions politiques motivées davantage par l’impossibilité d’échapper au cercle vicieux du maintien à tout prix d’une cohérence morale qui n'est imposée que par l’intérêt à éliminer les réalités brutales de la politique internationale.
La morphologie de la tragédie grecque, avec son indifférence remarquable au sentimentalisme, offre un cadre plus solide pour explorer la dynamique du pouvoir, de la justice et des conflits contemporains. Elle permet d’apprécier comment la politique et les relations internationales reflètent une philosophie enracinée dans le tragique : un cynisme sous-jacent qui défie le moralisme simpliste en reconnaissant l’inévitabilité du conflit, la nature illusoire de la justice et les cicatrices indélébiles des offenses (Lebow, 2003).

Un exemple paradigmatique est la saga de la Maison d’Atrée, marquée par la mort, la trahison et la violence, nées de dettes héritées qui entraînent les acteurs dans des conflits dépassant leurs choix individuels, transformant la volonté en une force tragique. Agamemnon, roi de Mycènes, incarne l’hybris : l’orgueil démesuré qui défie les limites humaines et divines. Sa décision de sacrifier sa fille Iphigénie pour obtenir des vents favorables pour Troie, inspirée par l’oracle et manipulée par Ulysse, révèle comment l’ambition et la quête de l’honneur s’entrelacent avec la contrainte et la stratégie politique.
L’arrogance d’Agamemnon l’aveugle aux conséquences de ses actes: des décisions qui paraissent rationnelles ou nécessaires déclenchent des représailles, des échecs et des passions déchaînées. Dans cette tragédie, chaque personnage parcourt un chemin de perdition, convaincu de la justice de sa cause, mais prisonnier d’une obsession implacable.

De façon analogue, l’Occident collectif, gonflé de confiance après sa victoire dans la Guerre froide, a commis une erreur de jugement similaire : il a sous-estimé la complexité du conflit et, dans sa présomption de suprématie morale et matérielle, a précipité une collision avec la réalité. À l’instar de Clytemnestre qui transforme le ressentiment familial en autorité politique par la vengeance, la perception par la Russie de la déloyauté ukrainienne et de la malhonnêteté systématique de l’Occident depuis l’ère Gorbatchev reflète la tension entre le devoir et le ressentiment, la solidarité et le conflit (Sakwa, 2017).
Les liens, qu’ils soient familiaux ou géopolitiques, peuvent conduire à l’unité comme à la destruction mutuelle. Sur ce plan tragique, l’Ukraine émerge comme une Iphigénie, symboliquement immolée sur l’autel des ambitions d’autrui, prise au piège de forces qui dépassent sa volonté de puissance. L’Union européenne, quant à elle, assume le rôle d’Ulysse, tissant de subtiles tromperies — comme les accords de Minsk, que Merkel et Hollande se sont plus tard vantés d’avoir manipulés — pour orienter les attentes et subordonner le destin de l’Ukraine aux intérêts d’un ordre géopolitique (Sakwa, 2017). La tragédie réside dans le fait que, malgré la volonté souveraine de l’Ukraine, ses souffrances sont instrumentalisées par des tiers, ce qui en fait un axe narratif du pouvoir et de la légitimité.
Ce schéma reprend la structure d’Euripide: la victime, loin d’être passive, met à nu l’hybris de ceux qui l’entourent et révèle la fragilité de toute prétention à la moralité ou à la rationalité absolue dans les conflits (Euripide, 2001). Le sacrifice d’Iphigénie trouve un écho dans le présent, démontrant combien la tension entre l’ambition, l’honneur et la contrainte demeure catastrophique, même si les acteurs modernes se drapent dans la rhétorique de la justice morale et du droit international.
D’un point de vue philosophique, la tragédie offre un cadre indispensable pour comprendre les conflits humains. La synthèse du mythe et de la géopolitique révèle que les guerres sont façonnées par des passions profondément humaines : l’hybris, la loyauté et la vengeance motivent des décisions qui transcendent les dichotomies morales simplistes. Comme l’illustre la Maison d’Atrée, la parenté et l’ambition servent de sources doubles d’identité et de calamité (Goldhill, 1986).

De même, la guerre en Ukraine montre que les États, tout comme les individus, sont pris dans des réseaux d’obligations, de survie et d’orgueil, ce qui reflète les impulsions humaines éternelles. Même lorsque la noblesse ou la sincérité animent les efforts pour restaurer l’ordre et la justice, ces actions portent en elles les germes de leur propre ruine. La tragédie, par sa lucidité inébranlable, enseigne les limites de l’action humaine et la persistance du conflit comme horizon inexorable de la condition mortelle.
L’offensive russe en Ukraine peut être interprétée, métaphoriquement, comme la matérialisation d’un destin tragique plus que comme le produit d’un choix moral. La politique, dans ce scénario, se présente comme un théâtre où le pouvoir s’affirme à travers la confrontation (Lebow, 2003). Dans la tragédie grecque, le héros n’agit pas par volonté propre ou par calcul moral, mais parce qu’il le doit: il est pris dans une logique d’inévitabilité dictée par les dieux, le destin ou sa propre hybris.
Oreste ne tue pas Clytemnestre seulement pour venger son père, mais parce que l’ordre du monde l’y oblige (Eschyle, 2009). De même, la mentalité occidentale peut être comprise comme la sécularisation d’un fatalisme historiciste qui, chez Fukuyama (1992), hérite de la téléologie dialectique de Hegel, lui-même inspiré de la philosophie de l’histoire d’Augustin. Dans La Cité de Dieu, Augustin a posé pour la première fois dans la tradition occidentale une conception téléologique et linéaire de l’histoire: un drame à dessein divin, orienté vers une culmination religieuse. Hegel sécularise cette vision dans le Weltgeist, l’Esprit absolu qui, à travers un processus dialectique, atteint la conscience de soi et la liberté dans le monde.
L’histoire acquiert ainsi une direction, un but et une fin dans les deux sens: comme objectif et comme terme. Fukuyama, adoptant ce schéma hégélien, remplace l’État idéal de Hegel par la démocratie libérale occidentale, la proclamant « forme définitive du gouvernement humain ». Dans son récit, les guerres, les révolutions et les conflits ne sont pas de simples accidents historiques, mais des étapes nécessaires dans la dialectique vers une synthèse finale. Cependant, en déclarant que cette synthèse est déjà atteinte, Fukuyama transforme la démocratie libérale d’un système politique contingent en un destin manifeste de l’humanité, une prétention qui révèle une théologie politique sécularisée, au sens développé par Carl Schmitt : le souverain, incarné dans l’ordre libéral, décide de l’état d’exception, suspendant le conflit idéologique fondamental.
La démocratie libérale cesse d’être un projet politique faillible et devient un dogme incontestable, une question de foi qui relègue la dissidence au statut d’hérésie, destinée à être éradiquée par le cours inexorable de l’histoire.
Cependant, cela commet le péché capital que la tragédie grecque dénonce sévèrement : l’hybris de s’arroger des attributs divins. Alors que la vision augustino-hégélienne est linéaire et optimiste, projetant le salut séculier, la perspective tragique est cyclique et pessimiste, avertissant du châtiment inévitable pour ceux qui prétendent transcender les limites de la condition mortelle. Dans la vision du monde grecque, l’univers est régi par un ordre cosmique (thémis) que les humains ne doivent pas troubler. Le destin (moira) des mortels est la finitude, l’imperfection et le changement ; toute tentative d’atteindre la stabilité éternelle ou la connaissance absolue — attributs exclusifs des dieux — constitue une transgression punissable.
En proclamant la fin de l’histoire, Fukuyama commet précisément cette hybris, s’arrogeant le déterminisme divin sur le parcours de l’humanité. En ce sens, la guerre en Ukraine n’est pas une simple erreur de calcul ou un excès conjoncturel, mais une tragique anagnôrisis : le moment où les acteurs, aveuglés par leur propre ambition, reconnaissent que le pouvoir ne peut s’affirmer que par la violence. La catharsis qui en résulte n’est pas rédemptrice, mais dévastatrice, et évoque la terreur et la pitié tandis que le monde est témoin de la façon dont la logique du pouvoir plonge des millions de personnes dans la souffrance (Aristote, 1997).
Le sacrifice d’Iphigénie trouve un écho tragique dans le conflit ukrainien. Agamemnon ne sacrifie pas sa fille par désir ou justice, mais parce que la logique du destin et de la guerre l’y contraint (Eschyle, 2009). De même, les acteurs en Ukraine sont otages de la nécessité historique, un sacrifice exigé par l’hybris du pouvoir absolu. À la différence du drame chrétien, où la souffrance vise la rédemption (von Balthasar, 1988), dans la logique de la tragédie il n’y a pas de salut : l’action politique répond au destin, non à la moralité, et vise l’affirmation de la souveraineté à tout prix.
Tout en sachant que leurs actions déclencheront un cycle implacable de violence qui pourrait bien finir par les dévorer, les acteurs géopolitiques poursuivent, car s’arrêter signifierait renoncer à leur propre existence politique.
Bibliographie:
Aeschylus. (2009). The Oresteia (R. Fagles, Trans.). Penguin Classics.
Anderson, B. (2006). Imagined Communities: Reflections on the Origin and Spread of Nationalism (Rev. ed.). Verso.
Aristotle. (1997). Poetics (M. Heath, Trans.). Penguin Classics.
Euripides. (2001). Iphigenia at Aulis (P. Vellacott, Trans.). Penguin Classics.
Fukuyama, F. (1992). The End of History and the Last Man. Penguin Books.
Goldhill, S. (1986). Reading Greek Tragedy. Cambridge University Press.
Lebow, R. N. (2003). The Tragic Vision of Politics: Ethics, Interests and Orders. Cambridge University Press.
Mearsheimer, J. J. (2014). ‘Why the Ukraine Crisis Is the West’s Fault: The Liberal Delusions That Provoked Putin’. Foreign Affairs, 93(5), 77–89.
Mosse, G. L. (1990). Fallen Soldiers: Reshaping the Memory of the World Wars. Oxford University Press.
Sakwa, R. (2017). Russia Against the Rest: The Post-Cold War Crisis of World Order. Cambridge University Press.
Traverso, E. (2007). Fire and Blood: The European Civil War, 1914–1945 (A. Brown, Trans.). Verso.
von Balthasar, H. U . (1988). Theo-Drama: Theological Dramatic Theory (Vol. 1, G. Harrison, Trans.). Ignatius Press.
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Tiraillements moldaves

Tiraillements moldaves
par Georges Feltin-Tracol
Le dimanche 28 septembre 2025 s'est déroulée l’élection des 101 députés du parlement monocaméral de la Moldavie. Coincé entre la Roumanie et l’Ukraine, ce pays de 33 700 km² et d’environ trois millions d’habitants sans oublier un million vivant à l’étranger, suscite l’intérêt, l’attention et la convoitise de voisins plus ou moins proches. Son existence même procède des fracas de la géographie, de l’histoire et de la démographie.
Ancien membre de l’URSS, la Moldavie concentre tous les affres issues de l’effondrement de l’ancienne puissance soviétique. Malgré un drapeau assez similaire, les armoiries étatiques en plus, et l’usage du roumain, la Moldavie – capitale : Chisinau - ne se confond pas avec la région éponyme, cœur historique de la nation roumaine. Le moldave est d’ailleurs un parler roumain qui, à l’époque soviétique, s’écrivait en alphabet cyrillique. Des Moldaves plutôt russophones préfèrent se référer à la Moldova. Problème sémantique permanent pour une terre toujours revendiquée !


Moldavie désigne en effet deux territoires contigus. Le premier s’étend entre l’Ouest des Carpates et le fleuve Prout, constitue une région roumaine avec pour ville principale Jassy. Le second situé entre le Prout et la rive occidentale du fleuve Dniestr s’appelle aussi la Bessarabie du nom d’une dynastie moldave. Quant à la rive orientale, elle a été nommée la Transdniestrie. Cette seconde Moldavie voit à la fin du Moyen Âge les Ottomans amputer à leur profit sa partie méridionale autour du bourg de Boudjak, ce qui la coupe de tout accès à la Mer noire.


Les groupes ethniques présents en Moldavie imaginent un destin politique différent. Au moment de la dislocation de l’Union Soviétique, les Moldaves roumanophones et les Roumains unionistes ont espéré dans le rattachement de la Moldavie à la Roumanie. Les puissances occidentales rejetèrent cette aspiration louable. Superviseur de la soi-disant « transition démocratique » à l’Est entre 1991 et 1993, le président du Conseil constitutionnel français, Robert Badinter, sacralisa l’intangibilité des frontières, quitte à favoriser les conflits armés.
Des violences affectèrent rapidement le nouvel État. Craignant une éventuelle intégration dans l’ensemble roumain, la minorité gagaouze – des turcophones convertis au christianisme orthodoxe au XVe siècle – proclame son indépendance en août 1990 avant de bénéficier d’un statut de république autonome au sein de l’État moldave. Élisant au suffrage universel direct un bashkan (le gouverneur), la Gagaouzie se compose de quatre territoires non continus.
![moldova_map_transnistria[1]-2936322850.jpg](http://euro-synergies.hautetfort.com/media/01/02/2826679679.jpg)
Cette solution constitutionnelle ne concerne pas la Transnistrie ou « République moldave du Dniestr ». S’étirant sur une bande de 500 km² entre le Dniestr et la frontière ukrainienne, la Transnistrie défend l’autodétermination des populations slavophones (environ 28 % d’Ukrainiens et 25 % de Russes), d’où sa sécession en 1991. C’est toujours à l’heure actuelle un « État-fantôme » non reconnu sur le plan diplomatique qui maintient néanmoins une garnison militaire russe de 1500 hommes (la 15e armée). Pendant la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement du maréchal roumain Ion Antonescu avait créé une région spéciale – la grande Transnistrie – s’étendant de la Podolie aux berges du Dniestr et du Boug. Il faut noter qu’en 2005 est fondée à la demande de l’Union dite européenne l’Eurorégion Siret – Prout – Dniestr qui couvre à la fois la Roumanie et la Moldavie.
Quand éclate la guerre entre la Russie et l’Ukraine en février 2022, les commentateurs se surprennent qu’à part quelques missiles tombés sur le sol transnistrien et de brefs incidents, ni les Russes, ni les Ukrainiens n’utilisent ce foyer séparatiste pour lancer des offensives. Des liens économiques étroits, parfois mafieux, existent en fait entre Tiraspol et Kyiv si bien qu’aucun protagoniste n’a vraiment intérêt à ouvrir un nouveau front. Les Ukrainiens considèrent la Transnistrie qui a maintenu le décorum soviétique et les statues du camarade Vladimir Illich comme un espace neutre où se nouent de fructueuses affaires. Kyiv se méfie de tout projet grand-roumain et n’oublie pas qu’Odessa fut un port roumain entre 1941 et 1944…

L’actuel gouvernement moldave, fort d’une majorité absolue au Parlement sortant grâce aux députés du PAS (Parti Action et Solidarité), ne cache pas son orientation euro-atlantiste. Ainsi a-t-il interdit le port du ruban noir et orange de Saint-Georges et le symbole Z. En revanche, la Gagaouzie ignore tout simplement ces interdictions, car les Gagaouzes conservent un tropisme moscovite. Depuis la fin de l’année 2023, le parlement autonome gagaouze a rompu toute relation officielle avec le gouvernement et les autres institutions moldaves. Les autorités gagaouzes dénoncent, sous couvert de lutter contre la corruption, le PAS de volonté centralisatrice.


La réalité est toutefois plus complexe et moins binaire. Certes, certains Moldaves souhaitent rejoindre le monde russe tandis que d’autres rêvent d’unir la Moldavie à la Roumanie. Mais des Moldaves aspirent à rester indépendants, voire à former une « grande Moldavie » aux dépens des Roumains (le moldovenisme) alors qu’une infime minorité a envisagé avant la guerre de 2022 une éventuelle intégration à l’Ukraine.
Le gouvernement moldave et les Occidentaux s’élèvent contre les ingérences russes dans les affaires intérieures moldaves tout en pratiquant une influence atlantiste poussée. Ces mêmes Occidentaux se taisent, approuvent ou se félicitent de l’expulsion du champ électoral de certaines formations politiques suspectées de collusions avec Moscou. Le 26 septembre dernier, à la demande du ministère de la Justice et au lendemain d’un jugement rendu par la cour d’appel de Chisinau, la commission électorale moldave interdit d’activités pour un an le mouvement Cœur de la Moldavie, membre du Bloc électoral patriotique avec les communistes et les socialistes, alliance soutenue par l’ancien chef d’État Igor Dodon (2016 – 2020).

Le parti d’Irina Vlah (photo), ancien bashkan, se voit accusé d’achats de suffrages, de financement illégal et de blanchiment d’argent (on se croirait chez les macroniens et les socialistes hexagonaux !). Supposé lié à Moscou, le Bloc Alternatif entend dépasser le clivage gauche – droite. Jugé « populiste », Notre Parti de Renato Usatii se méfie à la fois des factions pro-occidentales et pro-russes et tendrait vers un moldovenisme modéré. Quant au bloc Victoire du banquier millionnaire moldavo-russo-israélien Ilan Shor, il n’a pas eu le droit de présenter des candidats, car son fondateur vit à Moscou. L’oligarque verserait des sommes d’argent à des milliers de Moldaves nécessiteux. Le gouvernement ne goûte guère cette charité intéressée. La police moldave a pris l’habitude de donner des amendes aux bénéficiaires d’Igor Shor d’un montant de 1 275 à 1 780 €. Une fortune pour les Moldaves !
La désinformation n’est pas seulement russe; elle provient aussi du gouvernement. Le lundi 22 septembre, les policiers arrêtent une centaine de personnes suspectées de préparer des opérations de déstabilisation. Les services russes les auraient formées lors d’un récent séjour en Serbie elle-même en plein tumulte politico-social. Serait-ce l’embryon d’une contre-révolution de couleur ? Les personnes arrêtées ont moins de chance que les Géorgiens parce qu’on attend toujours la réaction scandalisée de l’Union pseudo-européenne !
Ces initiatives liberticides se réfèrent aux restrictions politiques roumaines au moment de l’élection présidentielle controversée en 2024 – 2025 en attendant l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France. On constate qu’une indéniable frénésie complotiste frappe maintenant les officines atlantistes.

Gangréné par une corruption endémique, l’État moldave, le plus pauvre du continent européen, demeure par son histoire, sa population et sa géographie, tiraillé entre Bucarest, Moscou et Kyiv sans omettre l’ombre d’Ankara. Les cénacles islamo-nationalistes néo-ottomans turcs se souviennent que la Bessarabie relevait de l’Empire ottoman. Malgré leur confession chrétienne, leur fidélité au patriarcat de Moscou et leur russophilie, les Gagaouzes sont des turcophones, ce qui peut favoriser les volontés pantouraniennes.
Le destin imbriqué de la Moldavie, de la Gagaouzie et de la Transnistrie demeure énigmatique. Leurs velléités nationales se contrarient bien évidemment. Il faut donc craindre que la situation moldave soit plus que jamais insoluble à moyenne échéance.
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 168, mise en ligne le 3 octobre 2025 sur Radio Méridien Zéro.
15:36 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : moldavie, europe, affaires européennes, actualité |
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L’Occident étouffe la dissidence pour préparer les citoyens à la guerre

L’Occident étouffe la dissidence pour préparer les citoyens à la guerre
Davide Rossi
Source: https://telegra.ph/LOccidente-soffoca-il-dissenso-per-pre...
La situation actuelle a généré les prémisses dramatiques visant à diffuser une culture de guerre, alimentée par des peurs savamment et artificiellement construites, en inventant des ennemis là où il n’y en a pas.
À notre époque, marquée par des oppositions souvent plus verbales et verbeuses que substantielles, mais toujours dichotomiques, ne laissant aucune place au dialogue, à la confrontation, à l’approfondissement, où l’on véhicule des modèles absolus et absolutistes selon lesquels il n’est pas permis de s’aventurer dans la réflexion mais où il s'agit simplement de prendre parti, presque obligatoirement du côté de la pensée dominante, prélude à toute guerre, la dissidence étant devenue inadmissible, répréhensible, erronée et fausse simplement parce qu’elle a été pensée.
Lire la complexité des faits et de la réalité devient ainsi toujours et en tout cas condamnable, car cela impliquerait de démanteler l’architecture de guerre qui s’est construite autour du récit dominant, lequel doit être soutenu à chaque souffle médiatique, imposé avec une violence à la fois subtile et robuste à des citoyennes et citoyens de plus en plus détachés et désorientés face à un monde qu’on leur fait percevoir comme lointain et incompréhensible.

L’acquiescement passif généralisé des anciennes générations, majoritaires en Occident, trouve un triste et tragique équivalent symétrique parmi les jeunes générations, bien que, fort heureusement, de notables et brillantes exceptions existent. Les jeunes, en effet, ont généralement intériorisé la substance de cette induction martelée, pour aboutir à une passivité complaisante tout en se consacrant à des questions éphémères, où le jeu de la dissidence n’est qu’un jeu, où mettre ou non un « like » sur les réseaux sociaux est essentiellement pareil et totalement insignifiant, car toutes ensemble, les nouvelles générations occidentales, et celles qui ont été occidentalisées à travers le monde, ont été convaincues de s’intéresser à des sujets peu significatifs et essentiellement évanescents, pour lesquels le fait de prendre parti devient un masque social pour une représentation sans avenir.
Après avoir été privés de la parole, le système tente de priver également les jeunes générations de toute pensée et, comme le rappelait à juste titre l’écrivain Erri De Luca il y a quelque temps, il ne leur reste plus qu’à écrire sur leur propre corps, en essayant d’y graver ce que l’on suppose indélébile, alors que cela s’effacera avec le temps et le cours de la vie, transformant les tatouages en une éloquence muette d’un corps plus ou moins maladroitement encadré par les époques précédentes, mais incapable, comme celui qui l’habite, de parole.
Écouter sans parler ni répondre et, au final, ne plus parler, enfermés dans une réalité irréellement réelle, virtuellement compensatrice des besoins émotionnels et communautaires qui, en Occident, ont été violemment étouffés pour transformer les femmes et les hommes, et surtout les jeunes, en atomes sociaux inoffensifs et insignifiants, des monades séparées de toutes les autres et toutes ensemble coupées du monde qui les entoure.
Le tout est aggravé par la réduction de l’information et de la connaissance à ce qui peut être simplement et uniquement véhiculé par le smartphone, érigé en source principale, pour beaucoup exclusive, d’interaction avec le monde extérieur, dans un cadre qui confond le haut et le bas, le bon et le mauvais, le vrai et le faux, le tout dans un kaléidoscope où distinguer devient une fatigue supplémentaire et difficile à pratiquer, et où les mille pages des « Frères Karamazov » de Dostoïevski deviennent un sommet inatteignable, même dans le simple résumé wikipédesque. Privés ainsi de savoirs et de beauté, les langages et les pensées s’appauvrissent, brûlent leurs racines, abandonnées, perdues et oubliées, tout comme sont oubliés en même temps les multiples et complexes branches qui tiraient origine, sève et vie de ces racines, donnant feuilles, fruits, fleurs, c’est-à-dire toute la richesse bigarrée des cultures.

Une communication qui, par ailleurs, se trouve écrasée par des dynamiques de marchandisation et de commercialisation où les valeurs et qualités artistiques et culturelles sont submergées et dévastées par les exigences d’un marché qui engloutit toute dimension et surtout l’imaginaire personnel et collectif, violemment colonisé et poussé vers une homogénéisation dévastatrice, réductrice, avilissante.
Le tragique résultat final est une société appauvrie et appauvrissante, où le réel est transcendé au profit du superficiel, où la complexité est réduite à des jugements banalisés, positifs ou négatifs, dictés par des attitudes superficiellement préconçues, au sein de dichotomies culturelles et politiques où progressisme et conservatisme sont réduits à des postures générales, impalpables et factices, manifestant davantage une gigantesque pauvreté spirituelle qu’une profonde plénitude de contenu.
L’Occident, ainsi privé de son univers culturel et de ses valeurs séculaires, a perdu de vue l’essentiel, pour se réduire à la simple vénération de l’argent, devenu malheureusement et tragiquement l’étalon de toutes les relations, une approche monétariste de la culture et des relations humaines qui a produit une coexistence de plus en plus injuste dans ses dynamiques matérielles et de plus en plus dégradée dans ses dynamiques spirituelles.
Le tout dans une auto-référentialité qui amène les citoyennes et citoyens occidentaux à perdre totalement de vue et à ne pas comprendre les expressions culturelles et les sociétés extra-occidentales, dans lesquelles les relations humaines et la vie quotidienne sont encore rythmées par des temps, des pensées et des modalités étrangères à la marchandisation.
Cette situation a généré les prémisses dramatiques visant à véhiculer une culture de guerre, alimentée par des peurs soigneusement et artificiellement construites, inventant des ennemis là où il n’y en a pas, comme dans le cas de la Russie, construisant des murs qui rendent incompréhensible ce qui est étranger à la petitesse des horizons dans lesquels on nous a enfermés, une cour étouffée par des murs encore plus étouffants et lourds, vendue comme un « jardin fleuri », selon les paroles tragiques de Josep Borrell, ancien Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères, épigone de toutes celles et ceux qui ont pris et continuent à prendre l’Union européenne et l’Occident pour un paradis démocratique, alors qu’il s’agit, à l’évidence, d’un enfer libéral-libéraliste, néolibéral, tandis que ceux qu’ils désignent comme autocraties et dictatures sont des nations où la politique décide de l’économie au bénéfice des citoyens et aussi, justement, des États dans lesquels les femmes et les hommes sont encore loin de la dégradation et de la décadence que nous vivons et traversons dans le Vieux Continent et le reste de l’Occident, des États-Unis à l’Australie. Cet Occident collectif de plus en plus vidé de sens et de signification et, pour cette raison même, privé d’espérance.

Le déclin de l’Occident n’est pas simplement un déclin matériel et irréversible dû à la fin de la période du pillage des matières premières énergétiques et alimentaires au détriment du Sud global, mais c’est aussi et surtout le crépuscule d’une civilisation qui a renoncé à la confrontation, à la recherche et à l’innovation, et s’est tristement et tragiquement repliée dans une fermeture hautaine face à toute forme d’altérité, par peur de toute confrontation et contamination, montrant ainsi toute la faiblesse d’un temps, le présent, qui a détruit ses propres racines historiques, spirituelles, matérielles pour se réduire à un miroir complaisant de soi-même dans la pauvreté actuelle, image compensatoire, autosuffisante et auto-gratifiante, un selfie dont on ajuste les couleurs et le contraste sans se rendre compte qu’il reste essentiellement une image pauvre, floue et délavée.
Pour toutes ces raisons et bien d’autres, je continue à croire que celles et ceux qui trouveront en eux-mêmes la force de ne pas renoncer, d’étudier, de résister, de lutter — forts de leur histoire, de leur culture, de leur identité, y compris religieuse et politique — non seulement pourront s’améliorer eux-mêmes et améliorer leur entourage, mais surtout indiqueront une voie vers la paix, la coopération et l’amitié entre les peuples à toutes celles et ceux qui, violés et humiliés par la violence du système libéral, ont perdu tout espoir et toute parole et s’abandonnent de plus en plus à la rhétorique belliqueuse de la guerre.
14:53 Publié dans Actualité, Philosophie, Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : occident, décadence, sociologie, philosophie |
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samedi, 04 octobre 2025
Les Cent jours de Merz: bilan d'un échec

Les Cent jours de Merz: bilan d'un échec
Berlin. Cent jours se sont écoulés depuis l'entrée en fonction officielle de la coalition noire-rouge de Merz (= chrétiens-démocrates et socialistes). De nombreux électeurs sont désormais complètement désabusés et doivent se rendre à l'évidence que le changement politique promis ne se concrétise pas. Le gouvernement Merz poursuit sans discontinuer la politique ratée de ses prédécesseurs de la coalition « feu tricolore ». Merz, qui s'était présenté pour « réduire de moitié » l'AfD, s'est révélé être un exécutant sans volonté du programme gauche-vert – et a contribué à l'envolée inattendue de l'AfD.
Tous les problèmes fondamentaux du pays continuent de s'aggraver sous la coalition noire-rouge. L'immigration massive n'est pas stoppée, la désindustrialisation progresse et le pillage des contribuables pour des projets idéologiques se poursuit sans relâche. De nombreux secteurs de l'économie ont désormais perdu tout espoir et délocalisent de plus en plus leurs activités à l'étranger.
Le pouvoir réel reste entre les mains des forces qui mènent l'Allemagne dans la mauvaise direction depuis des décennies. S'appuyant sur le dogme du « mur coupe-feu » (= du "cordon sanitaire") et sur des structures parallèles centrées autour d'ONG généreusement subventionnées, les idéologues de gauche tiennent fermement les rênes. L'État de droit et la démocratie sont systématiquement sapés, tandis que le seul parti d'opposition sérieux est menacé d'interdiction. Cela ne reflète pas l'État de droit allemand, qui a déjà beaucoup souffert sous la ministre de l'Intérieur de gauche Nancy Faeser.
Mais la voix du peuple souverain se fait de plus en plus forte. Malgré toutes les campagnes de dénigrement et d'exclusion, l'AfD est désormais devenue la première force politique du pays dans les sondages. Rien ne pourra l'empêcher d'accéder aux responsabilités gouvernementales.
Le bilan historique du chancelier Merz est bien sûr désastreux. Après seulement cent jours au pouvoir, il entrera dans les annales de la République fédérale comme le président de parti qui aura achevé l'œuvre destructrice de Merkel, comme le fraudeur électoral qui aura facilement éclipsé tous les opportunistes et les girouettes qui l'ont précédé, notamment dans les rangs de l'Union (chrétienne-démocrate), comme l'homme de main d'un front uni de gauche woke inébranlable – et comme un échec sans précédent, laissant aux générations futures une dette colossale et une société en pleine désintégration (rk).
Source: Zu erst, Oct. 2025.
18:26 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, politique, allemagne, europe, affaires européennes, friedrich merz |
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La rivalité entre Moscou et Washington dans le monde turcophone

La rivalité entre Moscou et Washington dans le monde turcophone
Stefano Vernole
Source: https://telegra.ph/La-rivalit%C3%A0-tra-Mosca-e-Washingto...
Le grand partenariat eurasiatique représente en effet la seule carte dont disposent Moscou et Pékin pour concilier leurs projets d’infrastructures dans la région.
Tandis que l’administration Trump joue la carte de la séduction face aux «swing states» en les attirant avec de nouveaux accords énergétiques — comme celui proposé à la Turquie pour l’achat de son GNL, devenu manifestement moins attrayant après le doublement de la connexion énergétique russo-chinoise — et dans les secteurs de la technologie nucléaire civile et de l’aviation, ou proposé au Kazakhstan et à l’Ouzbékistan, avec 12 milliards de dollars dans les secteurs aérien, ferroviaire et dans celui des matières premières, la Russie mise sur une stratégie globale et promeut le concept « Altaï, patrie des Turcs » ainsi que le projet « Grand Altaï » comme contrepoids à l’Organisation des États turciques (OTS). Par le biais de conférences, d’expéditions et d’initiatives soutenues par l’État, Moscou cherche à se positionner non comme un acteur marginal dans le monde turc, mais comme son centre historique et culturel, notamment après la médiation nécessaire atteinte avec Istanbul en Syrie après la chute d’Assad.

Selon divers documents publiés, la Russie commence à percevoir l’OTS comme un défi à sa présence en Asie centrale, et la narration de l’Altaï présente la région Sayan-Altaï comme le berceau des langues, des États et de la culture turcs aux 6ème-7ème siècles. Les historiens et fonctionnaires russes soulignent combien l’Altaï est le lieu d’origine sacré des peuples turcs et représente un espace de coexistence entre communautés slaves et turques au nom d’une origine eurasiatique commune.
Cette vision de la translatio imperii permet à Moscou de se présenter en «gardienne» du patrimoine turc, tout comme la Turquie l’a fait, à l’inverse, avec la gestion de Sainte-Sophie à Istanbul.
Des conférences comme le Forum international de l’Altaï à Barnaoul, la publication de la Chronique de la civilisation turque et des programmes pour la jeunesse en turcologie donnent à ce récit un certain poids académique. Cette approche met en lumière le rôle de la Russie comme centre de civilisation et non comme périphérie.

Moscou promeut le projet « Grand Altaï » comme une initiative transfrontalière reliant la Russie, le Kazakhstan, la Mongolie et la Chine. Les objectifs proclamés du projet en matière d’écologie, d’échanges scientifiques et de renaissance culturelle s’alignent sur des objectifs politiques plus larges: renforcer le patrimoine turc dans une identité eurasiatique; étendre le soft power russe à travers des projets transfrontaliers; démontrer la capacité à établir des plateformes d’interconnexion alternatives.


En juillet 2025, le Premier ministre Mikhaïl Michoustine a accueilli à Manzherok, en République de l’Altaï, des dirigeants venus du Kazakhstan, d’Arménie, de Biélorussie et d’autres pays. Bien que présenté officiellement comme un forum environnemental, l’événement a aussi servi de plateforme pour discuter d’intégration et de commerce, révélant ainsi sa nature géopolitique sous couvert culturel.
Les États d’Asie centrale cherchent à équilibrer prudemment les deux cadres.
Le Kazakhstan a reconnu l’Altaï comme une « patrie sacrée de la civilisation turque », tout en s’engageant activement dans des projets lancés par l’Organisation des États turciques (OTS), tels que le livre d’histoire turc commun et l’alphabet unifié. L’Ouzbékistan et le Kirghizistan participent à des festivals et expéditions sur l’Altaï, obtenant une légitimité culturelle sans engagements politiques plus profonds.
Pendant ce temps, les initiatives de l’OTS continuent de progresser. Le livre d’histoire, coordonné par l’Académie turque, est en cours de rédaction et l’alphabet unifié, approuvé en 2024, est introduit progressivement. La Russie observe les deux initiatives avec suspicion, craignant que le nationalisme turcophone ne soit utilisé contre l’intégration eurasiatique.
Plutôt que d’affronter directement l’OTS, la Russie insère l’Altaï dans des stratégies eurasiatiques plus larges, y compris les programmes culturels de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et le dialogue avec l’Union économique eurasiatique (UEE). La compétition concerne cependant moins l’interprétation historique que la définition de futures constellations d’influence.
La stabilité de l’Asie centrale est devenue une composante essentielle de la stabilité même de la République populaire de Chine. Le Traité de bon voisinage, d’amitié et de coopération éternelle, signé à Astana le 17 juin 2025, engage six parties à ne pas s’aligner l’une contre l’autre, à la modération réciproque, aux consultations et à l’élargissement de la coopération en matière de sécurité et d’économie, tout en intégrant les principes de souveraineté et d’intégrité territoriale, et en permettant des liens opérationnels plus profonds.
Les récents sommets de Xi’an et d’Astana ont créé 13 plateformes de coopération et mis en place un Secrétariat pour en coordonner la mise en œuvre. En juillet 2025, la Chine et ses partenaires d’Asie centrale ont inauguré des centres de coopération au Xinjiang pour la réduction de la pauvreté, l’échange éducatif et la prévention de la désertification. Leur mission est pratique: emplois ruraux, formation professionnelle, transfert de technologies et gestion environnementale afin de réduire les racines de l’insécurité.

Les corridors économiques terrestres à travers le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, le Turkménistan et l’Ouzbékistan revêtent aujourd’hui une importance stratégique. L’Asie centrale offre à Pékin une diversification des routes, des tampons physiques contre les chocs maritimes et un accès aux marchés adjacents. La Chine a approuvé la troisième connexion ferroviaire Chine-Kazakhstan, a avancé la ligne Chine-Kirghizistan-Ouzbékistan après des décennies de négociations et a amélioré les routes avec le Tadjikistan. Les services de conteneurs se sont étendus et le corridor transcaspien a vu sa capacité et sa coordination améliorées. Pékin combine la logistique au pilotage sécuritaire: gestion des frontières, partage de données et formations conjointes, souvent sous l’égide de l’OCS.
Le grand partenariat eurasiatique représente en effet la seule carte dont disposent Moscou et Pékin pour concilier leurs projets d’infrastructures dans la région, fournir à l’Asie centrale la connectivité nécessaire à son essor économique et empêcher les États-Unis d’y créer un foyer de déstabilisation de toute l’Eurasie.
La stratégie du président Vladimir Poutine de centraliser le pouvoir dans la Fédération de Russie a des implications particulières pour les régions frontalières russes, qui ont poursuivi un dialogue avec les États voisins. Le territoire de l’Altaï et la République de l’Altaï — deux régions frontalières russes du sud-ouest de la Sibérie — participent ainsi à une initiative régionaliste avec les régions voisines de la Chine, du Kazakhstan et de la Mongolie. Cette alliance régionale multilatérale entre administrations infranationales vise à coordonner les politiques de développement économique dans la sous-région des monts Altaï. Ses perspectives dépendent en grande partie du soutien politique et économique des autorités fédérales russes, mais aussi du consensus chinois et de l’élaboration d’un soft power eurasiatique plus que jamais nécessaire au vu des défis géostratégiques actuels.
18:05 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : asie centrale, actualité, pays turcophones, turcophonie, asie, chine, russie, altaï, affaires asiatiques, connectivité, géopolitique |
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La Belgique verse des pensions à des «co-veuves» de polygames au Maroc et en Algérie!

La Belgique verse des pensions à des «co-veuves» de polygames au Maroc et en Algérie!
Les chiffres ne mentent pas: au début de cette année, 424 pensions de survie belges ont été réparties entre deux veuves d'un même homme polygame. Cela signifie que l'État belge reconnaît de facto les mariages polygames par le biais de la sécurité sociale, bien que la polygamie soit interdite par la loi en Belgique.
Plus frappant encore, dans le cas des allocations de transition – qui sont versées pendant 48 mois maximum en cas d'enfants à charge –, le montant intégral est versé deux fois. Dans ce cas, les deux veuves reçoivent donc chacune le montant total.

La députée flamande Ellen Samyn, du VB (photo), qui a demandé à recevoir ces chiffres, qualifie cette pratique de « totalement inacceptable ». « La reconnaissance de facto de la polygamie par le gouvernement fédéral, y compris le double versement des allocations de transition, est totalement inacceptable », dénonce-t-elle.
Dans sa réponse à la question de Mme Samyn, le ministre des Pensions, Jan Jambon (N-VA), a indiqué que la Belgique respecterait tous les accords bilatéraux en la matière. Dans la pratique, cela signifie que les mariages polygames, qui sont légaux dans d'autres pays, ont également des conséquences fiscales et sociales en Belgique.
17:44 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : actualité, belgique, europe, affaires européennes |
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Adieu à la «Nouvelle Droite!» - Pour une critique interne de la ND allemande

Adieu à la «Nouvelle Droite!»
Pour une critique interne de la ND allemande
Werner Olles
Pas d’inquiétude ! Ou, inversement: ne vous réjouissez pas trop vite ! La teneur du titre ci-dessus ne signifie nullement un adieu à la vraie et honnête droite. Notre décision – hélas bien trop tardive – ne signifie que ceci: nous renonçons définitivement à tenter 1) de faire entendre raison à ces intellectuels arrogants et pédants qui se désignent encore, bien à tort, comme représentant la « Nouvelle Droite », alors qu’ils sont depuis belle lurette totalement dépassés et obsolètes, à ces politiciens de pacotille, ces discoureurs philosophants et ces lâches politiques hissés sur une chaise percée académique, dont le plus grand bonheur a été de réussir en tant que porteurs d’eau ou de valises de quelque député AfD, et 2) de leur demander de mettre fin à leur existence parasitaire de figurines de la « Nouvelle Droite intellectuelle » et réformiste.
Notre critique n’a en rien un caractère généralisateur, car tout notre respect va toujours à des « Nouveaux Dextristes » tels que l’éditeur Götz Kubitschek, qui a brillamment dévoilé le système qui « joue à l’État » et a démasqué un certain M. Krah – à qui, soit dit en passant, nous n’accorderions pas la moindre confiance – comme étant un joueur politique dangereux; mon respect va aussi au fondateur du Mouvement identitaire et activiste politique Martin Sellner, qui continue son oeuvre malgré toutes les tracasseries et répressions de la classe dirigeante corrompue ; il va aussi au publiciste Wolfgang Hübner, qui, jour après jour, trouble par ses commentaires en ligne le consensus mensonger et rend transparent pour tous les règles du langage pseudo-démocratique, y compris le jargon du régime de la RFA et de ses médias menteurs, déformé en outil de propagande et de publicité démocratique économiciste et belliciste ; il va aussi à Jürgen Elsässer, qu’on partage ou non toutes ses idées et thèses. Naturellement, ces auteurs et activistes, cités ici, représentent toute une cohorte d’autres camarades, qu’il serait trop long d’énumérer ici.

Notre respect n’est pas acquis en revanche à ces érudits de cabinet, ces bavards et ignorants qui aiment trop se pavaner dans la lumière d’un certain gourou, qui s’en prennent volontiers à des camarades plus âgés en leur adressant des commentaires venimeux – ou, pire encore, veulent leur faire la leçon – mais qui, à part quelques traités théoriques et alambiqués et l'organisation de lamentables événements sans grand intérêt, n’ont rien accompli de significatif.
Cette soi-disant « Nouvelle Droite » n’a produit ni un militant courageux comme Tommy Robinson, prêt à se jeter dans la mêlée contre les bandes terroristes antifas ou islamistes si nécessaire, ni un excellent penseur comme Guillaume Faye, dont les idées et théories fascinantes et originales enthousiasment tout véritable homme de droite ayant su se débarrasser de toutes les œillères conformistes. Elle n’a pas non plus réussi à faire émerger un philosophe et analyste géopolitique comme Alexandre Douguine, dont les analyses et impulsions intelligentes sont décisives pour toute vraie droite, et elle n’a pas su non plus attirer à elle d’importants analystes politiques, intellectuels organiques et théoriciens comme Günter Maschke et Robert Steuckers, qui, au contraire, s’en sont très justement éloignés.

Elle n’a pas non plus découvert de remarquables talents littéraires comme Jean Mabire, Dominique Venner, Jean Raspail ou Richard Millet. En vérité, elle est spirituellement et intellectuellement à bout de souffle et assiste, ébahie sinon incrédule, au suicide civilisationnel, culturel et ethnique de son propre peuple, suicide qui est notre réalité d’aujourd’hui.
Cette « Nouvelle Droite » n’a jamais compris, et ne comprendra jamais, que la construction théorique et la force révolutionnaire vont de pair, et que les élections et le droit de vote, à l’époque de « notre démocratie libérale », sont totalement inutiles tant qu’ils ne se réfèrent pas à une totalité qui serait la négation affirmative de la réalité sociale actuelle et tant qu'ils n’aspirent pas au statut de critique universelle à la manière hégélienne.
Ce que la « Nouvelle Droite » a par contre réussi depuis les années 1980, c’est la formation récurrente de personnages et types sociaux esthétisants et auto-esthétisants, ce qui n’est en fin de compte rien d’autre qu’une caricature pop-culturelle de la concrétude chosifiée et usurpée de l’ontologie, telle que la met en lumière Heidegger dans « L'Être et le Temps ». Nous la félicitons de tout cœur pour ce résultat fantastique. Bravissimo ! Laissons-la donc mijoter tranquillement dans son propre jus. Son temps est révolu ! Qu’elle repose en paix !
17:29 Publié dans Actualité, Nouvelle Droite | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : actualité, allemagne, nouvelle droite |
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vendredi, 03 octobre 2025
Emergence et développement des BRICS: un point de vue européen

Emergence et développement des BRICS: un point de vue européen
Robert Steuckers
(Texte rédigé en septembre 2024)
Par le poids déterminant mais non oblitérant de la Russie et de la Chine dans le phénomène des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), ce dernier apparaît bien évidemment comme un fait géopolitique et géoéconomique propre à la masse continentale eurasienne, située à l’Est du Niémen, du Dniepr, du Bosphore et du Caucase. Notre espace, situé à l’Ouest de cette ligne floue n’aurait rien à voir avec ce monde de steppes infinies, au-delà duquel la race jaune domine. C’est oublier un peu vite que l’Europe a été matériellement une pauvre civilisation repliée sur elle-même (ce qui ne minimise aucunement la richesse spirituelle du moyen âge), une civilisation « enclavée », et qui cherchait désespérément à se désenclaver (1), position fragile que l’esprit de croisade tentera en vain d’annuler. Seules les villes marchandes italiennes, Venise et Gênes, resteront vaille que vaille branchées sur les routes de la Soie. La pression ottomane, surtout après la chute de Byzance (1453), semblait inamovible. Les initiatives maritimes portugaises suite aux travaux scientifiques et géographiques du Prince Henri le Navigateur, la découverte de l’Amérique par Colomb et la conquête russe du bassin de la Volga et des premières terres sibériennes effaceront cet enclavement européen. On connaît la suite. Toutefois, à la fin du 18ème siècle, avant la totale mainmise britannique sur le sous-continent indien, la Chine et l’Inde demeuraient les principales puissances industrielles, les civilisations les plus riches. La parenthèse miséreuse de l’Inde et de la Chine n’aura finalement duré que moins de deux siècles. Nous assistons aujourd’hui, voire depuis trois décennies, au retour à la situation d’avant 1820 (2).

Le désir de désenclavement était bien présent dans l’esprit de nos ancêtres aux 15ème et 16ème siècles. Pour ce qui concerne la Moscovie (on ne parlait pas encore de « Russie »), le personnage le plus emblématique fut Sigismund von Herberstein (3) (illustration). Diplomate au service des empereurs germaniques Maximilien I, Charles-Quint et Ferdinand I, il exécuta deux missions en Russie en 1517-1518 et 1526-1527, à l’époque où régnait Vassili III, père d’Ivan IV le Terrible. Sigismund von Herberstein ramène de ces deux voyages une description détaillée et inédite du territoire de la Russie-Moscovie, plus particulièrement de son hydrographie, les fleuves étant les principales voies de communication depuis les Varègues (et probablement de peuples divers avant eux) (4). La mission de von Herberstein était de plaider la paix entre la Pologne-Lituanie et la Moscovie afin d’organiser une vaste alliance entre ces puissances slaves ou balto-slaves et le Saint-Empire contre les Ottomans, puissance montante à l’époque. Dès les premières décennies du 16ème siècle, la raison civilisationnelle postulait une alliance entre l’Europe centrale (et bourguignonne car Philippe le Bon et Charles le Hardi entendaient tous deux reprendre pied sur le littoral de la mer Noire) et les Etats polono-lituanien et moscovite, tout en annulant, par l’art de la diplomatie, les belligérances entre ces derniers. Une sagesse qui n’a pas été réitérée dans l’actuel conflit russo-ukrainien.

Plus tard, après que le Saint-Empire a été ravagé par les armées de Louis XIV (allié aux Ottomans pour prendre l’Autriche à revers), les universités, dont Heidelberg, avaient été réduites en cendres, laissant une quantité d’étudiants et de professeurs sans emploi. Le Tsar Pierre le Grand entreprend, au même moment, une modernisation-germanisation de la Russie et fait appel à ces cadres déshérités, tout en recevant les conseils de Gottfried Wilhelm Leibniz (portrait), le célèbre philosophe et mathématicien allemand. Pour Leibniz, intéressé par la pensée chinoise, la Moscovie du Tsar Pierre, en commençant à gommer le chaos de toutes les terres sises entre l’Europe et la Chine, fera de cet espace un « pont » entre l’écoumène européen, centré sur le Saint-Empire (à reconstituer), et la Chine. L’harmonie devra alors, à terme, régner sur cet ensemble à trois piliers. L’eurasisme, avant la lettre, est donc né dans la tête de ce philosophe et mathématicien hors pair (pour son époque), qui oeuvrait sans relâche dans la bonne ville de Hanovre, à la charnière des 17ème et 18ème siècles.

Plus tard, sous la République de Weimar, les cercles nationaux-révolutionnaires, qu’Armin Mohler comptait parmi les avatars de la « révolution conservatrice », évoquaient une « Triade » germano-soviéto-chinoise, reposant sur le Kuo Min Tang de Tchang Kai Tchek, le PCUS sous la houlette de Staline et un pôle révolutionnaire allemand anti-occidental qui devait encore prendre le pouvoir : cet aspect de la diplomatie et de la géopolitique nationales-révolutionnaires de l’ère de Weimar n’a guère été exploré jusqu’ici. En effet, mis à part une thèse de doctorat de Louis Dupeux (5), ni la littérature scientifique ni la très nécessaire littérature militante et vulgarisatrice n’ont abordé en profondeur cette notion de « Triade » qu’analyse pourtant un témoin direct des activités de ces cercles nationaux-révolutionnaires sous la république de Weimar, Otto-Ernst Schüddekopf (6). Ce dernier fréquenta les cercles autour d’Ernst Niekisch, Ernst Jünger et Friedrich Hielscher à partir de 1931. Il se spécialisa dans l’histoire de la marine et des forces aériennes britanniques et dans la politique des points d’appui du Reich de Guillaume II au cours de ses études de 1934 à 1938. Plus tard, il fut affecté à l’Abwehr (pour des opérations antibritanniques, notamment en Irlande) puis à l’Ahnenerbe (dont le directeur Wolfram Sievers était un ami de Hielscher) et, finalement, au RSHA. En dépit de cette inféodation aux sphères prétoriennes du Troisième Reich, Schüddekopf et Sievers aideront des dissidents proches des cercles NR et seront au courant de la tentative d’attentat contre Hitler, qui fut ultérieurement perpétrée par Stauffenberg, sans pour autant subir les foudres de la police politique. En 1945, Schüddekopf sera incarcéré pendant trois ans dans une prison de haute sécurité à Londres puis entamera une carrière universitaire en République Fédérale (7).


Un autre personnage précurseur de l’eurasisme, style BRICS, sera l’officier Richard Scheringer (1904-1986) (photo), natif d’Aix-la-Chapelle. Sa qualité d’officier ne l’empêcha pas d’avoir eu plutôt une carrière rouge de rouge. L’analyse des textes parus dans sa revue Aufbruch (8) révèle un tropisme chinois, inséré dans l’espoir de voir triompher une « Triade » anti-occidentale, tropisme chinois qui agitait certains esprits dans les coulisses de la diplomatie belge (et dont la trace la plus visible reste la présence de Tchang, l’ami d’Hergé, à Bruxelles dans les années 30 et la parution de l’album de Tintin, Le Lotus bleu, clairement sinophile). En dépit de son militantisme communiste, Scheringer servira dans la Wehrmacht en territoire soviétique sans être inquiété par les services allemands et reprendra son militantisme rouge, avec ses fils et sa petite-fille (qui seront tous députés PDS, ancêtre de Die Linke). Au soir de sa vie, il appellera à manifester contre la « double décision de l’OTAN » et contre l’implantation de missiles américains sur le territoire de la RFA. Il tentera de mobiliser son vieux camarade Ernst Jünger pour qu’il en fasse autant. Jünger envoya une couronne de fleurs à son enterrement à Hambourg avec la mention « Au vieil ami ». Il resterait à analyser les rapports entre les universités allemandes de l’entre-deux-guerres et des dizaines d’étudiants indiens, désireux de secouer le joug britannique. Ces étudiants appartenaient à toutes les tendances révolutionnaires et indépendantistes possibles et imaginables et cherchaient des appuis allemands tant sous la république de Weimar que sous le régime national-socialiste. La question des rapports germano-indiens est extrêmement complexe et excède le cadre de ce modeste article (9). Aujourd’hui, les étudiants indiens sont, dans Allemagne en déclin du Post-Merkelisme et de Scholz, les plus nombreux parmi les étudiants étrangers inscrits dans les universités.


La « Triade » semble être aujourd’hui une chimère imaginée par des personnages en marge des politiques dominantes et triomphantes de l’entre-deux-guerres allemand. Mais son émergence, même marginale et diffuse, est la hantise des services anglo-saxons. Or, force est de constater qu’en dépit des élucubrations impolitiques répandues par les médias, en coulisses, la « Triade » était devenue, tacitement, un fait accompli. La Russie fournissait le gaz de l’Arctique à un prix défiant toute concurrence, lequel gaz passait dans les eaux de la Baltique, bordée jusqu’il y a quelques mois par des Etats neutres non inféodés à l’OTAN (Finlande, Suède). La Chine était le premier partenaire commercial de l’Allemagne. L’Ostpolitik des socialistes (Brandt, Schmidt, Schröder), préconisant des relations normalisées avec l’Union Soviétique d’abord avec la Russie ensuite, et la Fernostpolitik des démocrates-chrétiens (Strauss), favorisant tous les liens possibles avec la Chine, avaient, avec un réel succès, pris le relais des spéculations sans lendemain des intellectuels non conformistes du temps de la république de Weimar.
La Terre du Milieu russe (ou le « Pont » de Leibniz) avait apaisé le Rimland centre-européen, apaisé l’Iran des mollahs et forgé une alliance pragmatique avec une Chine qui se débarrassait des colifichets idéologiques du maoïsme de la « révolution culturelle », tout en gardant les bons rapports avec l’Inde forgés depuis l’indépendance du sous-continent en 1947. Deux cauchemars de la géopolitique anglo-saxonne de MacKinder et de Spykman s’étaient installés dans le réel : 1) la Terre du Milieu avait avancé pacifiquement ses glacis, rendant plus difficile toute stratégie d’endiguement ; 2) Un morceau considérable du rimland sud-asiatique, l’Iran, était désormais relié aux réseaux ferroviaires financés par la Chine et branchés sur le Transsibérien russe, qui, en fait, est le véritable « pont », bien concret, rêvé par Leibniz du temps de Pierre le Grand. Les deux gazoducs de la Baltique soudaient, dans une concrétude énergétique tout aussi tangible, l’alliance germano-russe préconisée par quantité d’hommes d’Etats depuis Gneisenau, Clausewitz, Bismarck, Rathenau, etc.

Pour briser cette dynamique, il fallait agir en actualisant de vieilles stratégies d’endiguement, de propagande et de zizanie belliciste. Rendre purulent l’abcès ukrainien, en réactivant de vieilles querelles entre Slaves (le contraire de la politique préconisée par Sigmund von Herberstein), en hissant partout au pouvoir en Europe des politiciens de bas étage, des idéologues fumeux et incultes, des juristes ou des banquiers dépourvus de culture historique, des écologistes véhiculant les délires woke, etc. Ce personnel, en rupture de ban avec toutes les écoles diplomatiques, fera une politique dictée par Washington : reniement des politiques socialistes en Allemagne (avec ostracisme à l’encontre de Schröder, qui présidait la gestion des gazoducs de la Baltique), réalignement de la France sur les délires atlantistes depuis Sarközy, abandon des politiques de neutralité en Suède, Finlande et même Suisse (seule l’Autriche résiste mieux grâce à la solide présence de la FPÖ dans les assemblées fédérale et régionales et à la proximité de la Hongrie), création du chaos wokiste et multiculturel dans toutes les sociétés ouest-européennes et même en Pologne depuis le retour de Tusk au pouvoir.
L’émergence, le développement et la consolidation du Groupe BRICS vient donc d’une volonté d’organiser l’ensemble du territoire eurasien des rives orientales du Don et de la Volga jusqu’aux littoraux du Pacifique, d’échapper à un Occident devenu fou, plus rébarbatif encore que l’Occident fustigé par les intellectuels non conformistes des années 1920 et 1930, d’une volonté d’appliquer les recettes d’un économiste pragmatique du 19ème siècle, Friedrich List. Pour cet économiste libéral, ou considéré tel, le rôle premier de l’Etat est d’organiser les communications à l’intérieur de ses frontières, de rendre ces communications rapides et aisées, de créer des flux permanents de marchandises et de personnes, notamment afin de fixer les populations sur leur propre sol et d’empêcher toute hémorragie démographique, telle celle que les Etats allemands (avant l’unification) avaient connu au bénéfice des Etats-Unis.

List (illustration) a exercé une influence prépondérante dans l’Allemagne de son temps mais a également œuvré aux Etats-Unis, préconisant de grands travaux (chemins de fer, canaux, etc.) qui, après leur réalisation, ont donné aux Etats-Unis les assises de leur puissance et permis l’éclosion de leur atout majeur : la bi-océanité. L’idée d’organiser les communications terrestres sera reprise par les dirigeants russes qui créeront le Transsibérien et par des penseurs pragmatiques du Kuo Min Tang chinois, oubliés suite aux vicissitudes tragiques de l’histoire chinoise des 19ème et 20ème siècles. C’est cette volonté véritablement politique de créer des infrastructures, présente en Chine, qui incitera Xi Jinping à lancer son fameux projet des « routes de la Soie » ou BRI (« Belt and Road Initiative »).
La Chine est passée ainsi du maoïsme et de son interprétation naïve et schématique de Marx à un listisme concret et créatif et, ensuite et surtout, à un intérêt pour Carl Schmitt, théoricien qui refusait explicitement toute immixtion étrangère dans les affaires intérieures d’un autre « grand espace ». Dès la fin des années 1980, la Chine avait émis « les cinq principes de la coexistence pacifique », l’adoption planétaire desquels garantissant à tous d’emprunter les « bons taos » (les « bonnes voies », les « bon chemins ») (10). Parmi ces cinq principes figure, bien évidemment, celui qui vise à préserver chaque entité étatique de toute immixtion indue et corruptrice en provenance de puissances lointaines, développant un programme hégémonique ou cherchant à monter des alliances interventionnistes à prétention planétaire, comme l’est, par exemple, l’OTAN. Les BRICS, le noyau initial comme les nouveaux pays adhérents, entendent justement emprunter de « bon taos », qui postulent le contraire diamétral de ce que préconise le « nouvel ordre mondial » de Bush et de ses successeurs à la Maison Blanche ou des dispositifs que veut mettre en place la nouvelle direction de l’OTAN (Stoltenberg, Rutte).
Les deux postulats principaux qui animent les pays du groupe BRICS sont : 1) le développement sans entraves de voies de communications terrestres et maritimes sur la masse continentale ou autour d’elle (le long des littoraux des pays du rimland selon MacKinder et Spykman) et le refus de toute immixtion visant l’hégémonie unipolaire (américaine) ou le blocage des communications entre les rimlands et l’intérieur des continents ou l’endiguement de toute exploitation des nouvelles routes maritimes (Arctique, Mer de Chine du Sud, côtes africaines de l’océan Indien). Voyons comment cela s’articule pour chaque pays participant à la dynamique des BRICS :
La Russie a toujours cherché un débouché sur les mers chaudes ; elle est actuellement attaquée sur deux fronts : celui de l’Arctique-Baltique et celui de la mer Noire. Elle n’a les mains libres qu’en Extrême-Orient, justement là où l’appui britannique au Japon en 1904 avait manœuvré pour lui interdire un accès facile au Pacifique, quatre ans après les 55 jours de Pékin ; les sanctions, forme d’immixtion et de guerre hybride, permettent paradoxalement de développer un commerce des matières premières avec l’Inde et la Chine, totalisant près de trois milliards d’habitants. Le chaos créé en mer Noire bloque (partiellement) l’exportation des céréales russes et ukrainiennes vers la Méditerranée et l’Afrique : le développement de l’agriculture russe sous Poutine est un atout de puissance, que la Russie des Tsars était sur le point de se doter avant que certains services n’utilisent des révolutionnaires utopistes pour éliminer Stolypine et ne favorisent l’émergence d’un bolchevisme anti-agraire. Cette défaillance sur le plan agricole a rendu le communisme soviétique faible et caduc au bout de sept décennies. Il est dans l’intérêt de tous de voir les agricultures russe et ukrainienne se développer et trouver des débouchés, notamment en Afrique. La création d’un foyer durable de turbulences aux embouchures du Don, du Dniepr et du Dniestr contrecarre les intérêts de bon nombre de pays, d’où l’intérêt pour le groupe BRICS de l’Ethiopie, de l’Egypte et de l’Algérie, voire d’autres pays d’Afrique subsaharienne.
La Chine a développé, dans la phase post-maoïste de son histoire récente, une modernité technologique étonnante pour tous ceux qui la croyaient condamnée à une stagnation archaïsante. Dès la moitié du 19ème siècle, les visées américaines sur l’Océan Pacifique, entendaient conquérir le marché chinois pour une industrie américaine à développer qui ne comptait pas encore sur les marchés européens. Ce marché chinois, espéré mais jamais conquis, relevait d’une puissance sans forces navales, non thalassocratique, qui pouvait s’étendre vers l’Ouest, le « Turkestan chinois » (ou Sinkiang) et le Tibet. Washington acceptait une Chine continentale et refusait implicitement une Chine dotée d’un atout naval. L’industrialisation de pointe de la Chine au cours de ces trois dernières décennies a obligé Pékin à protéger les lignes de communications maritimes en mer de Chine du Sud, autour du « point d’étranglement » (choke point) qu’est Singapour pour accéder aux sources d’hydrocarbures que sont les rivaux iranien et saoudien. Par ailleurs, Chinois et Russes tentent de rentabiliser la route arctique qui mène plus rapidement à l’Europe, aux ports de Hambourg, Rotterdam et Anvers-Zeebrugge (ces deux derniers alimentant la Lorraine, l’Alsace, la Bourgogne, la Champagne et partiellement la Franche-Comté, via l’axe du Rhin) (11).

La fonction de « pont » passant ainsi à l’Arctique et doublant le Transsibérien et les nouvelles voies ferroviaires prévues par les Chinois. La construction du Transsibérien et son parachèvement en 1904 avait suscité les réflexions de MacKinder sur la nécessité d’endiguer le « Heartland » russe. Le projet à tracés multiples de Xi Jinping suscite le bellicisme actuel des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de l’OTAN. A cela s’ajoute que la Chine dispose de réserves considérables de terres rares, indispensables à la fabrication de matériels informatiques, fait qui ne devraient pas laisser nos dirigeants indifférents et les inciter à poursuivre une politique européenne rationnelle, visant à ne pas être dépendants et à ne pas être entraînés dans les stratégies vengeresses et destructrices des Etats-Unis.
L’Inde britannique était une masse territoriale capable d’offrir une vaste base territoriale pour contrôler le rimland de la Méditerranée à l’Indochine, sans oublier la façade africaine de l’Océan Indien jusqu’au Grands Lacs et jusqu’au-delà du Nil ; au Soudan et en Egypte. Le combat pour l’indépendance fut long pour tous les Indiens, qu’ils soient musulmans, sikhs ou hindous. L’émancipation de l’Inde impliquait une nouvelle orientation géopolitique : le sous-continent ne devait plus être la base principale, la plus vaste et la plus peuplée, destinée à parfaire la stratégie de l’endiguement de la Russie/de l’Union Soviétique mais devenir à terme une éventuelle fenêtre du Heartland sur l’Océan du Milieu. Les rapports indo-soviétiques furent toujours optimaux, puisque l’URSS restait seule en piste après l’élimination de l’Allemagne en 1945, mais l’Inde a toutefois servi de barrage contre la Chine, abondant ainsi directement dans le sens de la géopolitique thalassocratique anglo-américaine : dans l’Himalaya (Ladakh) et dans toutes ses entreprises visant à soutenir le Tibet. Le conflit indo-pakistanais a induit une géopolitique particulière : les Etats-Unis incluaient le Pakistan dans l’alliance endiguante que fut le Pacte de Bagdad (Turquie, Irak avant 1958, Iran, Pakistan), ce qui obligeait l’Inde à maintenir ses bons rapports avec l’URSS, tout en demeurant l’un des pays-phares du non-alignement de Bandoeng. Le Pakistan demeurait l’ennemi et cet ennemi était ancré dans des structures militaires « défensives » pilotées par les Etats-Unis. Et pour être plus précis, quand la Chine et les Etats-Unis deviennent de facto alliés à partir de 1972, suite à l’œuvre diplomatique de Kissinger, le Pakistan offre à la Chine un débouché sur l’Océan Indien.

L’art de la diplomatie des Indiens est subtil : il navigue entre l’amitié traditionnelle avec la Russie, le non-alignement et ses avatars actuels et une ouverture méfiante mais réelle à l’anglosphère, héritage de son imbrication dans l’ancien Commonwealth britannique et résultat du statut de langue véhiculaire qu’y revêt l’anglais. On s’aperçoit ainsi que l’Inde bascule vers la multipolarité, surtout à cause de ses relations économiques avec la Russie et de sa volonté de « dé-dollariser », mais participe aux manœuvres militaires de l’AUKUS dans la zone indo-pacifique, lesquelles manœuvres visent la Chine. L’Inde entend réactiver les initiatives des « non-alignés » qui avaient joint leurs efforts dès le grand congrès de Bandoeng (Indonésie) en 1955. Le non-alignement avait perdu de son aura : avec la multipolarité qui se dessine à l’horizon, il semble revenir à l’avant-plan avec Narendra Modi.
L’Iran, dont on ne saurait juger la politique extérieure en ne tenant compte que des aspects du régime des mollahs à l’intérieur, a été une grande puissance jusqu’à l’aube du 19ème siècle. Comme l’Inde et la Chine, l’irruption de l’impérialisme anglais dans l’espace des océans Indien et Pacifique a induit un ressac dramatique de la puissance persane, laquelle avait déjà subi les coups de butoir russes dans l’espace sud-caucasien. L’Iran s’est alors retrouvé coincé entre deux empires : celui des Russes puis des Soviétiques, menace terrestre, au nord et surtout dans les zones de peuplement azerbaïdjanais ; celui des Britanniques à l’Est d’abord, dans les régions du Beloutchistan, à l’Ouest ensuite, dès sa présence en Irak suite à l’effondrement de l’Empire ottoman en 1918 et dès sa mainmise sur les pétroles de Mésopotamie (Koweit, Kirkouk, Mossoul).

Comme Atatürk en Turquie post-ottomane, le premier Shah de la dynastie de Pahlavi opte pour une modernisation qu’il ne peut réellement mener à bien malgré des aides européennes (allemandes, italiennes, suisses, suédoises). La neutralité iranienne est violée par les Britanniques et les Soviétiques en 1941, immédiatement après le déclenchement de l’Opération Barbarossa : l’Iran est partagé en zones d’influences et, en 1945, après l’élimination de l’Axe, Staline entend rester dans les régions azerbaïdjanaises, quitte à y faire proclamer une république provisoire qui demanderait bien vite son inclusion dans l’URSS. Le nouveau Shah, dont le père venait de mourir en exil dans les Seychelles britanniques, perçoit le danger soviétique comme la menace principale et s’aligne sur les Américains qui n’ont pas de frontière commune avec l’Iran. Son ministre Mossadegh, qui voulait nationaliser les pétroles de l’Anglo-Iranian Oil Company, est évincé en 1953, suite à des opérations que le peuple iranien n’oublia pas. L’Iran adhère au Pacte de Bagdad ou au CENTO, prolongement de l’OTAN et de l’OTASE, organisant au profit des Etats-Unis et selon les doctrines géopolitiques de Nicholas Spykman l’ensemble du rimland euro-asiatique pour endiguer et l’URSS et la Chine. Le CENTO ne durera que jusqu’en 1958, année où la révolution baathiste irakienne arrive au pouvoir à Bagdad.
La révolution chiite fondamentaliste de 1978-79, dont les avatars actuels sont anti-américains, a d’abord été favorisée par les Etats-Unis, Israël, le Royaume-Uni et la France de Giscard d’Estaing. Le Shah évoquait un « espace de la civilisation iranienne », qu’il entendait faire rayonner sans tenir compte des projets stratégiques américains, avait signé avec la France et l’Allemagne les accords de l’EURATOM (déjà la question du nucléaire !), avait développé une marine en toute autonomie, avait eu des velléités « gaulliennes », avait conclu des accords gaziers avec Brejnev et réussi quelques coups diplomatiques de belle envergure (liens renforcés avec l’Egypte, paix avec les Saoudiens et accords pétroliers avec Riyad, accords d’Alger avec l’Irak pour régler la navigation dans les eaux du Shat-el-Arab). Ces éléments ne sont plus mis en exergue par les médias aujourd’hui et le rôle joué par les Occidentaux dans l’élimination du Shah est délibérément occultée, notamment par une gauche qui fut, à la fin des années 1970, le principal agent de propagande pour justifier, dans l’opinion publique, ces manœuvres américaines contre leur principal allié théorique dans la région.

Plusieurs historiens et l’ancien ministre du Shah, Houchang Nahavandi, ont cependant analysé les événements d’Iran en ce sens, ce que j’ai bien mis en évidence dans un texte antérieur (12). Il semble que les services américains aient voulu agir sur deux plans : premièrement, éliminer le Shah qui avait créé une synergie nucléaire et industrielle avec l’Europe et gazière avec l’URSS (l’objectif premier a été de nuire à l’Europe et de ruiner toute coopération énergétique avec l’URSS) ; deuxièmement, installer un régime très différent des régimes occidentaux, ce qui permettait d’orchestrer sans cesse une propagande dénigrante contre lui, de créer une sorte de « légende noire » anti-iranienne, comme il en existe contre l’Espagne, l’Allemagne, la Russie, la Chine ou le Japon qui peuvent être réactivées à tout moment. L’Iran est donc un exemple d’école pour démontrer a) la théorie de l’occupation d’une part du rimland asiatique à des fins d’endiguement ; b) la relativité de la notion d’« allié », dans la pratique américaine, dans la mesure où un « allié », sur le rimland, ne peut chercher à se réinscrire dans sa propre histoire, à développer une diplomatie originale neutralisant des inimitiés que l’hegemon entend laisser subsister pour créer des conflits régionaux affaiblissants, à renforcer son potentiel militaire, à sceller des accords énergétiques avec des pays tiers même alliés (en l’occurrence l’Europe, l’URSS et l’Arabie Saoudite) ; c) la pratique de créer des mouvements extrémistes déstabilisateurs, de les appuyer dans un premier temps puis de les dénigrer une fois leur pouvoir établi et d’organiser boycotts et sanctions contre eux sur le long terme afin de prévenir la réactivation de toutes les synergies autonomes qu’avaient amorcé à feu doux le régime initial.
Ce sont précisément ces exemples d’école, perceptibles dans le cas iranien, qui ont donné aux puissances émergentes (ou réémergentes comme la Russie de l’après-Eltsine) l’impulsion première qui les amènent, aujourd’hui, à joindre leurs efforts économiques. Il convenait d’échapper à ce quadruple danger qu’avait révélé l’histoire iranienne de ces cinquante dernières années. Les stratégies économiques des BRICS, suivies de l’organisation de la nécessaire protection militaire des nouvelles voies ou systèmes de communication, visait à annuler la stratégie d’endiguement en organisant des routes nouvelles reliant le Heartland russo-sibérien aux périphéries (rimlands), les régions orientales de la Chine à l’intérieur des terres (Sinkiang) et au reste de l’Asie centrale (Kazakhstan), les réseaux intérieurs chinois aux ports du Pakistan (et, de là, aux sources arabiques d’hydrocarbures). Ces axes de communications se portent vers l’Europe, réalisant le vieux vœu de Leibniz. Les diabolisations russophobes, sinophobes (etc.) ne permettent pas de créer une diplomatie globale efficace et fructueuse. L’entretien médiatique de « légendes noires » n’est donc pas de mise, comme le soulignaient déjà les « amendements » chinois au programme du « nouvel ordre mondial » dans les années 1990.

La notion d’« allié », battue en brèche par la doctrine Clinton depuis ces mêmes années 1990, n’existe plus en réalité car elle a été bel et bien remplacée par la notion d’« alien countries », ce qui explique l’adhésion aux BRICS d’anciens alliés des Etats-Unis comme l’Arabie Saoudite ou l’Egypte et les velléités turques. Enfin, la pratique de soutenir des mouvements extrémistes déstabilisateurs ou de monter des « révolutions de couleur » ou des « printemps arabes » oblige les puissances du monde entier à une vigilance commune contre l’hyperpuissance unipolaire, allant bien au-delà d’inimitiés ancestrales ou de la fadeur de l’internationalisme simpliste des communismes de diverses moutures. La leçon iranienne a été retenue partout, sauf en Europe.
Il est évident que les BRICS ont leur noyau solide en Asie, plus exactement en Eurasie, l’Afrique du Sud, bien que potentiellement riche, est une projection afro-australe de cette nouvelle grande synergie eurasiatique qui ne pourra être pleinement intégrée à la dynamique si les Etats de la Corne de l’Afrique, dont l’Ethiopie, nouvelle adhérente aux BRICS, retrouvent stabilité et organisent leurs réseaux de communication intérieurs. Le Brésil, où les Etats-Unis ont encore de solides alliés, est certes un géant mais il est fragilisé par la défection de l’Argentine de Miléi. Seules les communications transcontinentales en Amérique du Sud, reliant les littoraux du Pacifique à ceux de l’Atlantique, donneront corps à un véritable pôle ibéro-américain dans la multipolarité de demain. De même, la coopération sino-brésilienne sur le plan de l’agro-alimentaire, sur base d’échanges dé-dollarisés, laisse envisager un avenir prometteur.
La multipolarité en marche dispose d’atouts de séduction réels :
Le gaz russe et les autres hydrocarbures sont incontournables pour l’Europe, l’Inde, la Chine et le Japon. L’effondrement économique de l’Allemagne (but visé par Washington) et de son industrie automobile est dû aux sanctions et au sabotage des gazoducs de la Baltique, renforcé par la politique énergétique inepte dictée par les Verts, téléguidés en ultime instance par le soft power américain et les services de Washington : le refus du nucléaire (et la politique de s’attaquer au nucléaire français) s’inscrit bel et bien dans le cadre d’une vieille politique américaine d’affaiblir l’Europe, le pari sur les énergies solaire et éolienne correspond aux objectifs du fameux « Plan Morgenthau », visant, en 1945, avant la généralisation du Plan Marshall, à transformer le centre du sous-continent européen en une aimable société pastorale, comme l’a souligné avec brio la Princesse Gloria von Thurn und Tassis (13). Ces énergies, dites « renouvelables » ne suffisent pas pour alimenter une société hautement industrialisée.

Autre atout : le blé (14). La fin du communisme et aussi du néolibéralisme en Russie, en 1991 et en 1999, a permis, sous Poutine, de relancer l’agriculture et d’en faire un atout majeur de la politique russe. De même, avant les événements, l’Ukraine, elle aussi, était devenue une puissance agricole qui comptait. Ce blé est indispensable à de nombreux pays d’Afrique, qui, sans lui, risqueraient en permanence la famine et l’exode vers l’Europe d’une bonne fraction de leur jeunesse. La confrontation russo-ukrainienne, outre qu’elle ramène la guerre en Europe, ruine les bénéfices qu’avait apportés la résurrection de l’agriculture dans les anciennes républiques slaves de l’URSS. La coordination des productions agricoles est en voie de réalisation rationnelle dans les pays BRICS, y compris en Inde qui, de vaste pays souvent victime de famines jusque dans les années 1960, est devenu un exportateur de céréales et de riz (15).
La consolidation lente de pays BRICS, malgré les embûches systématiques perpétrés par les services américains, progresse, accompagnée du phénomène de la « dé-dollarisation », qui inquiète les décideurs étatsuniens. Ainsi, le sénateur américain Marco Rubio, de Floride, vient de présenter au Congrès un projet de loi visant à punir les pays qui se désolidariseraient du dollar. Le projet de loi vise à exclure du système mondial du dollar les institutions financières qui encouragent précisément la dédollarisation et utilisent les systèmes de paiement russe (SPFS) ou chinois (CIPS) (16).

Cette pression constante et ces interminables sanctions, procédés éminemment vexatoires, n’empêchent nullement l’ANASE (ASEAN), le marché commun de l’Asie du Sud-Est, de se rapprocher de la Chine et donc du groupe BRICS, détachant ainsi partiellement un marché de 600 millions de clients potentiels des réseaux dominés par les Etats-Unis (17). Des basculements de telle ampleur risquent à terme de réduire considérablement, voire d’annuler, la suprématie occidentale et de la ramener à ce qu’elle était à la fin du 18ème siècle. L’Europe, par son inféodation inconditionnelle et irrationnelle à Washington, risque tout bonnement une implosion de longue durée si elle persiste dans cette alliance atlantique contre-nature. Il est donc temps d’unir les esprits véritablement politiques de notre sous-continent et de combattre les tenants délirants de toutes les nuisances idéologiques, insinués dans les mentalités européennes par le soft power américain. Car l’Europe est perdante sur tous les tableaux.
A l’Est de l’Europe, une guerre lente persiste, handicapant les communications entre des parties du monde qui ont toujours été des débouchés pour nous, depuis la plus haute antiquité : origines steppiques des cultures kourganes, présence grecque en Crimée et à l’embouchure du Don, domination des fleuves russes par les Varègues et présence scandinave dans la place de Bolgar en marge de l’Oural, nécessité des croisades pour reprendre pied dans toutes les régions-portails du Pont, du Levant et du delta du Nil, présence des Génois et des Vénitiens aux terminaux pontiques de la route de la Soie, etc. Une Ukraine qui serait demeurée neutre, selon les critères mis au point lors des pourparlers soviéto-finlandais à partir de 1945, aurait été bénéfique à tous, y compris aux Ukrainiens qui seraient demeurés maîtres de leurs richesses minérales et agricoles (au lieu de les vendre à Monsanto, Cargill et Dupont).
La pire défaite de l’Europe (et de la Russie !) dans le contexte hyper-conflictuel que nous connaissons aujourd’hui se situe dans la Baltique. La Baltique était un espace neutre, où régnait une réelle sérénité : l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN fait de cette mer intérieure du Nord de l’Europe un espace de guerre chaude potentielle. Le territoire finlandais, désormais otanisé, permet de faire pression sur la mer Blanche et sur l’espace arctique, à l’heure où la « route de la Soie maritime » du Grand Nord permettrait de raccourcir considérablement la distance entre l’Europe et l’Extrême-Orient chinois, japonais et coréen, sans compter l’ensemble des pays de l’ANASE.

L’Europe est donc face à un triple verrou : a) le verrou baltique-arctique (avec suppression des gazoducs Nord Stream, et blocage potentiel de la route arctique) ; b) le verrou pontique en mer Noire qui entrave la ligne Danube-Pont-Don-Volga-Caspienne-Iran et que les Russes cherchent à contourner en organisant avec les Iraniens et les Indiens le « Corridor économique Nord-Sud », partant de Mumbai, traversant l’Iran et la Caspienne ou longeant celle-ci à travers l’Azerbaïdjan (18) ; c) le verrou est-méditerranéen ou israélien, qu’il serait judicieux de nommer le « mur hérodien », érigé par les Britanniques et ensuite entretenu par les Américains, afin de créer un chaos permanent au Levant et en Mésopotamie. Les lecteurs de Toynbee et de Luttwak sauront que les rois Hérode de l’antiquité étaient en place grâce à l’appui romain pour contrer toute avancée perse en direction de la Méditerranée : le sionisme israélien est un avatar moderne de ce mur romain, incarné par les rois Hérode. L’énergie russe ne passe plus par les gazoducs de la Baltique ; dans quelques semaines, le gouvernement Zelenski fermera les gazoducs ukrainiens qui amènent le gaz aux Slovaques, aux Hongrois et aux Autrichiens, trois pays récalcitrants dans l’OTAN et l’UE. Il restera le gazoduc turc mais quid si Erdogan pique une crise d’anti-européisme ou si l’Occident américanisé impose des sanctions à Ankara, si la Turquie s’aligne sur les BRICS ou continue à avoir des relations normales avec Moscou ?
Le monde bouge, les cartes sont redistribuées chaque jour qui passe. Cette mobilité et cette redistribution postule une adaptation souple, allant dans nos intérêts. L’Europe n’était pas une aire enclavée mais était ouverte sur le monde. Elle risque désormais l’enclavement. Elle se ferme au risque de l’implosion définitive, parce qu’elle s’est alignée sur les Etats-Unis et a adopté, contre ses intérêts, des idéologies nées aux Etats-Unis : hippisme, néolibéralisme, irréalisme diplomatique (alors que Kissinger préconisait un réalisme hérité de Metternich), wokisme. Il est temps que cela change. La montée des BRICS est un défi, à relever avec des dispositions mentales très différentes, que nous enseignent les grandes traditions pluriséculaires, surtout celles nées aux périodes axiales de l’histoire.
Notes :
- (1) Lire le livre de Jean-Michel Sallmann, Le grand désenclavement du monde 1200-1600, Payot, 2011.
- (2)Ian Morris, Why the West Rules – For Now, Profile Books, London, 2011.
- (3) Gerd-Klaus Kaltenbrunner, « Sigmund von Herberstein – Ein österreichischer Diplomat als ‘Kolumbus Russlands’ », in : Vom Geist Europas – Landschaften – Gestalten – Ideen, Mut-Verlag, Asendorf, 1987.
- (4) Lecture indispensable : Cat Jarman, River Kings. The Vikings from Scandinavia to the Silk Roads, Collins, London, 2021.
- (5) Louis Dupeux, Stratégie communiste et dynamique conservatrice. Essai sur les différents sens de l'expression « National-bolchevisme » en Allemagne, sous la République de Weimar (1919-1933), (Lille, Service de reproduction des thèses de l'Université) Paris, Librairie H. Champion, 1976.
- (6) Otto-Ernst Schüddekopf, National-Bolschewismus in Deutschland 1918-1933, Ullstein, Frankfurt/M-Berlin-Wien, 1972. J’inclus bon nombre de faits, mentionnés par Schüddekopf dans le chapitre intitulé « Conférence de Robert Steuckers à la tribune du ‘Cercle non-conforme’ » (Lille, 27 juin 2014), in : R. S., La révolution conservatrice allemande, tome deuxième, Editions du Lore, s. l., 2018.
- (7) Fiche Wikipedia d’Otto-Ernst Schüddekopf : https://de.wikipedia.org/wiki/Otto-Ernst_Sch%C3%BCddekopf
- (8) Reprint partiel de cette revue « nationale-communiste » : « Aufbruch » - Dokumentation einer Zeitschrift zwischen den Fronten, Verlag Dietmar Fölbach, Koblenz, 2001.
- (9) On lira toutefois la passionnante étude de Kris Manjapra, Age of Entanglement. German and Indian Intellectuals Across Empire, Harvard University Press, Cambridge/London, 2014.
- (10) Robert Steuckers, « Les amendements chinois au ‘Nouvel Ordre Mondial’ », in ; Europa – vol. 2 – De l’Eurasie aux périphéries ; une géopolitique continentale, Bios, Lille, 2017.
- (11) Voir : https://market-insights.upply.com/fr/la-carte-verite-des-...
- (12) Robert Steuckers, « L’encerclement de l’Iran à la lumière de l’histoire du Grand Moyen-Orient » & « Réflexions sur deux points chauds : l’Iran et la Syrie », in Europa, vol. III – L’Europe, un balcon sur le monde, Bios, Lille, 2017. Voir aussi, R. S., « Le fondamentalisme islamiste en Iran, négation de l’identité iranienne et création anglo-américaine », in Europa, vol. II – De l’Eurasie aux périphéries, une géopolitique continentale, Ed. Bios, Lille, 2017.
- (13) Daniell Pföhringer, « Plan Morgenthau et Nord Stream: Gloria von Thurn und Taxis en remet une couche », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/10/08/m...
- (14) Stefan Schmitt, « Les céréales et la guerre », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/07/31/l...; Enrico Toselli, « Le blé ukrainien contre les agriculteurs polonais. Et le blé russe nourrit l'Afrique », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2023/04/14/l...; un point de vue russe sur le problème : Groupe de réflexion Katehon, « La crise du blé et la sécurité alimentaire », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/07/19/l... ; pour réinsérer la question dans une vaste perspective historique : Andrea Marcigliano, « Sur le blé: de l'antiquité à la guerre russo-ukrainienne », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/06/22/s...
- (15) Pour bien comprendre la problématique, ainsi que celle du stockage stratégique du grain (dont la Chine est l’incontestable championne), lire le chapitre IV de : Federico Rampini, Il lungo inverno – False apocalissi, vere crisi, ma nonci salverà lo Stato, Mondadori, Milan, 2022.
- (16) Le dossier présenté par Thomas Röper, sur base d’une analyse d’Asia Times : «La dédollarisation, voie vers la liberté financière mondiale », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2024/09/09/l...; voir aussi : Bernhard Tomaschitz, « Les États-Unis veulent désormais sanctionner les pays qui abandonnent le dollar - Un sénateur veut stopper la dédollarisation progressive par des sanctions », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2024/08/18/l...
- (17) Enrico Toselli, « Pour la première fois, les pays de l'ANASE préfèrent la Chine aux États-Unis en matière d'investissement dans la défense militaire », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2024/04/05/p...
- (18) Arthur Kowarski, « L'Inde intensifie sa coopération avec l'Iran dans le domaine des infrastructures de transport », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2024/05/15/l... ; Pepe Escobar, « L'interconnexion de la BRI et de l'INSTC complètera le puzzle eurasien », http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/08/22/l...
18:21 Publié dans Actualité, Géopolitique, Synergies européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : robert steuckers, brics, géopolitique, politique internationale, histoire |
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La Dictature de la Société Ouverte - De la démocratie suspendue à la guerre culturelle

La Dictature de la Société Ouverte
De la démocratie suspendue à la guerre culturelle
Alexander Douguine
Alexander Douguine déclare que les élections en Moldavie dévoilent la main de fer de la dictature libérale-globaliste, un régime qui intensifie la répression alors que la Russie fait face à une épreuve décisive de volonté.
Animateur : Aujourd’hui, nous allons évidemment commencer par les élections en Moldavie: comment elles se sont déroulées, ce qu’elles ont produit, quels sont les résultats et ce que cela signifie pour la Moldavie elle-même et, naturellement, pour la Russie. Selon la CEC du pays, après le dépouillement de 99% des bulletins, le parti « Action et Solidarité » a perdu 10 sièges au parlement. Les résultats préliminaires montrent la répartition suivante des forces: le PAS a reçu 49% des voix, ce qui lui a donné 53 mandats ; le Bloc Patriotique — 24%, soit 27 mandats ; le Bloc Alternatif — 8%, soit 9 sièges ; « Notre Parti » — 6% et 6 sièges ; le parti « Démocratie à la Maison » — 5% et également 6 sièges. Quel tableau se dessine ? Les partis d’opposition ont néanmoins réussi à surpasser le parti au pouvoir, lui refusant une majorité absolue. Cependant, le PAS a conservé un soutien important, obtenant un nombre impressionnant de voix. Pouvez-vous nous dire ce que signifient ces résultats pour la Moldavie et pour la Russie, surtout compte tenu du fait que la rhétorique à notre égard pourrait changer?
Alexander Douguine : Nous assistons à la façon dont le globalisme libéral, vaincu dans la plupart des pays du monde — y compris les États-Unis — tente désespérément de s’accrocher à l’Europe. Là où les régimes libéraux et globalistes subsistent — comme ceux qui prédominaient en Amérique avant Trump — ils ont choisi une nouvelle voie: la dictature libérale directe.
Les procédures démocratiques sont suspendues ou complètement abolies, du moins temporairement. C’est la fameuse « démocratie suspendue » — une suspension partielle et sectorielle qui crée des conditions exceptionnelles pour l’ascension de dirigeants et de partis servant la stratégie globaliste. À cette fin, ils commettent des violations : ils emprisonnent des candidats gênants, comme Evghenia Guțul (photo, ci-dessous), chef de l’autonomie gagaouze, qui est en détention ; ils interdisent des partis, comme « Grande Moldavie ». Les procédures de vote portent atteinte aux droits: sur une diaspora moldave forte de 400.000 personnes en Russie, seules 10.000 ont été autorisées à voter. Il s’agit d’une suppression délibérée visant à préserver l’apparence d’élections tout en garantissant le pouvoir total aux libéraux.

Nous avons vu cela en Roumanie, où un candidat populiste a remporté le premier tour mais a été écarté et les résultats annulés. Une tactique similaire a été utilisée en France contre Marine Le Pen, qui est poursuivie sur des prétextes fabriqués et privée du droit de se présenter. Qu’est-ce que cela signifie? Là où les libéraux conservent le pouvoir, comme en Moldavie, ils ne l’abandonneront pas même si leur mandat prend fin. Maia Sandu fait partie du système Soros. Soros s’oppose aux États-Unis; Trump s’oppose à Soros; mais en Europe, Soros contrôle de nombreux actifs politiques et géopolitiques. À l’exception de la Slovaquie et de la Hongrie, l’Europe est sous son influence. Aux États-Unis, des poursuites pénales en vertu de la loi RICO ont commencé contre lui, mais son empire globaliste continue de dominer.
En Moldavie, en Roumanie, en Allemagne, en France — partout où ils peuvent agir — ils avancent vers une dictature libérale explicite. Nous l’avons compris trop tard. Maintenant, il y a un réel risque de guerre civile généralisée. Donald Trump, ayant compris à quoi il était confronté, a radicalement changé les règles de vote en Amérique: désormais, on ne peut voter qu’en personne, avec une pièce d’identité, pas par courrier et pas tout le monde, y compris les migrants illégaux, comme le voulaient les démocrates. Les républicains, ayant pris le pouvoir, le conserveront à tout prix ou ils seront finis — il n’y aura pas de prochaine élection. C’est une confrontation entre deux forces: les élites globalistes de Soros et les mouvements populaires disparates. Les mouvements populaires n’ont pas de plateforme ni d’idéologie unifiée.
En Moldavie, les gens votent contre l’usurpation du pouvoir, guidés par le bon sens, mais ils ne sont pas unis. Il y a de nombreux partis dont les dirigeants ne trouvent pas de dénominateur commun. Les régimes de Voronine et Dodon ont laissé passer leur chance, n’ayant pas reconnu la menace des structures de Soros, fondamentalement totalitaires, extrémistes et, dans la pratique, terroristes.
Animateur : Dites-vous que le pouvoir en Moldavie est déjà perdu pour l’opposition?
Alexandre Douguine : Oui, je pense qu’il est perdu, car il ne s’agit plus de démocratie. Celui qui détient le pouvoir décide de ce qui se passera ensuite. Si le pouvoir n’est pas pris et établi comme force dominante, comme les populistes européens veulent le faire — ce qui n’est pas acquis, cela peut mener à la guerre civile — rien ne changera. Les populistes américains, malgré leurs hésitations, ont gagné avec Trump. Celui qui prendra le pouvoir — élites globalistes ou forces populaires disparates — ne devra pas le rendre. Dans notre situation — jamais. Il existe de nombreuses façons de réprimer une opposition fragmentée. Le PAS a perdu 10% [note: plus haut il est dit « 10 sièges » ; ici Douguine semble parler de pourcentage ou de sièges — je reste fidèle au texte qui m'a été soumis pour traduction], mais ils ont le président et la majorité. Ils imposeront leur programme: ils entraîneront la Moldavie dans une guerre contre nous, l’annexeront à la Roumanie ou lanceront une opération en Transnistrie.
Animateur : Et concernant la persécution de l’opposition en cas d’une telle victoire — sera-ce possible?
Alexandre Douguine : Absolument. Ils ne libéreront pas Evghenia Guțul. Il s’agit d’un système totalitaire pour lequel il n’existe pas de lois. Ils savent parfaitement que deux forces opposées existent, et l’antagonisme entre elles grandit chaque jour. Celui qui détient le pouvoir devra s’y accrocher à tout prix. Nous avons sous-estimé l’ampleur de la menace.

Lorsque la Moldavie avait un président amical et rationnel, Igor Dodon (photo), que je connais personnellement, nous avions l’opportunité de changer la situation. Mais nos illusions sur la démocratie occidentale se sont avérées plus fortes que celles de ses propres adeptes. Aujourd’hui, les derniers à croire encore à la démocratie occidentale, c’est nous, ici à Moscou. En Occident, plus personne n'y croit depuis longtemps. Seules subsistent les forces de la tradition — conservateurs, populistes. Nous sommes fragmentés, sans idéologie unifiée, mais il y a en nous une force, celle du peuple qui s’oppose aux élites.

Souvenez-vous du parti de Huey Long (photo, ci-dessus), en Amérique au 19ème siècle, qui a essayé de donner une forme politique aux idées du peuple contre les élites. L’actuelle vague de populisme pourrait se cristalliser en une vision du monde conservatrice et multipolaire. Nous y travaillons, mais nous avons un retard catastrophique. Nous faisons face à des régimes libéraux-nazis qu’il faut renverser et déclarer illégaux. Nous avons réussi à le faire en Russie, grâce à Vladimir Poutine — ils ont été déclarés illégaux. Mais les réseaux d’influence subsistent, surtout dans l’éducation.
Partout, je rencontre le réseau ramifié des structures Soros qui imprègnent notre enseignement supérieur: bourses, critères de scientificité — tout suit leurs modèles. Nous essayons de créer une liste blanche de revues académiques exemptes d’influence globaliste, mais les structures toxiques sont partout.
En Moldavie, ils sont impuissants face à eux. Là-bas, le peuple est admirable: culture orthodoxe, gens sensés, mais ils sont divisés. Le parti Shor, le parti de Dodon, les communistes — ils sont tous différents, sans plateforme commune. Le bon sens est là, mais il est insuffisant dans la lutte contre l’idéologie de l'ennemi. Obsédés par le mythe de la démocratie libérale, nous avons raté le moment où nos forces étaient au pouvoir en Moldavie — elles n'étaient pas pro-russes, mais pro-moldaves, non sorosisées, elles étaient souverainistes. Voronine en était. Si nous avions gardé nos positions alors, en comprenant que le prochain gouvernement serait antidémocratique, truqué, avec une persécution totalitaire de la dissidence, il fallait agir de manière décisive, exclure du pouvoir les forces toxiques et extrémistes. Sinon, la guerre civile ou non-civile nous attend. Si, comme en Ukraine, ils prennent le contrôle de toute la société, cela deviendra une guerre contre le pôle qui incarne l’alternative au libéralisme.
Animateur : Vous avez dit « si ». Réussiront-ils ?
Alexandre Douguine : Ils ont déjà réussi. La Moldavie est sous leur contrôle. L’opposition existe, mais elle sera réprimée, achetée, détruite ou emprisonnée sous n’importe quel prétexte. Ils possèdent la Moldavie, et leurs actions futures, hélas, ne dépendent pas de nous. Nous avons perdu toute possibilité de contre-action, pour l'essentiel. L’espace post-soviétique nous échappe, sous nos yeux. Je ne sais pas qui en est responsable — tout cela demeure opaque ici, à Moscou.
Le président agit de manière irréprochable, mais ceux chargés de l’espace post-soviétique ont échoué. Ce n’est pas seulement mon avis. Je ne connais pas leurs noms, je n’ai pas enquêté, et il ne serait pas approprié de les nommer. Mais toute l’arc du monde post-soviétique s’est effondré. Dès qu'une fenêtre d’opportunité s’ouvre — nous la manquons. Des forces souveraines, et non globalistes, arrivent au pouvoir — nous les soutenons, certes, mais très faiblement. Quand l’Occident les harcèle, nous n’apportons pas d’aide dans les moments décisifs. Pas à pas, nous ne comprenons pas la gravité de ce qui se passe. Dans l’espace post-soviétique — en Moldavie, en Ukraine, en Biélorussie — la polarisation règne. Les globalistes soutiennent leurs gens, leur donnant carte blanche pour commettre de la violence, des agressions, pour promouvoir des idéologies nationalistes et néonazies. Ils interdisent ces idéologies chez eux, mais ici, le long de cette ceinture territoriale ex-soviétique, ils les cultivent, leur apportant un soutien politique, médiatique, militaire et économique, les utilisant pour rompre nos liens à des fins subversives.

La Moldavie risque de devenir un nouveau front de guerre. Tout a changé de niveau. Il y a trente ans, nous avons laissé partir l’Ukraine — c’était un crime. Nous ne la récupérerons pas sans guerre, même pour un statut de neutralité. Il en va de même pour tous les pays de l’espace post-soviétique. Si nous n’avons pas assuré le contrôle de leur neutralité, ils deviennent un nouveau front de guerre. Nous savons que les Ukrainiens, de connivence avec Maia Sandu (photo, ci-dessus), prévoient une intervention militaire en Transnistrie pour couper cette enclave prorusse, la priver de tout rôle stratégique et préserver Odessa pour notre offensive du Sud. Du point de vue de la guerre, ils agissent rationnellement — ils prennent ce qu’ils peuvent. Ils font la guerre contre nous, installent des régimes dictatoriaux, falsifient les élections, piétinent les procédures démocratiques. Et nous, nous clamons que cela est antidémocratique, nous envoyons des notes à l’ONU, aux tribunaux des droits de l’homme. Cela ne sert à rien. Quel était l’intérêt de dire qu’Hitler violait les droits de l’homme? Cela lui était égal. Il était assez fort pour imposer sa politique en Allemagne et dans l’Europe occupée. Il en est de même avec le libéralisme.
Les libéraux ont pris le pouvoir dans l'Occident collectif. Avant Trump, ils contrôlaient totalement l’Amérique. Mais il y a eu une percée des forces populistes — sous les balles, comme pour Charlie Kirk, sous les tentatives d’assassinat comme contre Trump. C’est une guerre entre deux blocs: les élites libérales de Soros et leurs agents, y compris ceux qui agissent en Russie. Chez nous, ils ont été écartés de la politique — grâce à Vladimir Poutine — mais dans les domaines de la culture, de l’éducation, de la société civile, ils sont bien enracinés. Ce n’est que maintenant que la libération commence.
Je les rencontre partout — non seulement achetés par Soros, mais idéologiquement transformés en porteurs de la vision du monde libérale-globaliste, profondément enrôlés. Des peuples entiers, comme l’Ukraine sous un régime nazi, leur sont soumis. Une partie des Moldaves vote pour Sandu — oui, les élections sont truquées, les conditions inégales, mais il y a des gens qui votent quand même. Ils ont capturé une partie de notre peuple frère, orthodoxe et admirable, pénétrant les consciences, manipulant les âmes. C’est une véritable zombification, une propagande du globalisme et du libéralisme. Notre riposte, elle, n'est que sporadique.
Les Moldaves votent pour les partis d’opposition, veulent la paix, l’équilibre avec l’Europe et la Russie, rejettent l’usurpation, les gay prides, la perte de souveraineté. Mais ils sont impuissants tant qu’ils ne s’unissent pas. Il faut une idéologie, une politique décisive et proactive dans l’espace post-soviétique. La prochaine étape, c’est la guerre. Vous ne voulez pas de guerre? — alors il faut des transformations politiques radicales en Moldavie, en Arménie, en Azerbaïdjan, au Kazakhstan. Sinon, la guerre est inévitable — sous une autre forme.

Animateur : Donc il y a encore des options en Moldavie ? Ou bien ne nous reste-t-il qu’à regarder et attendre que la Moldavie devienne l’Ukraine d’aujourd’hui ?
Alexandre Douguine : Si nous ne voulons pas la guerre ou une participation active à la vie politique de l’espace post-soviétique, nous n’avons pas le choix — d’autres prendront les décisions. Si Soros décide que la guerre est nécessaire, ils la déclencheront. Nous pouvons nous y opposer, mais ils provoqueront le conflit. Si nous n’intervenons pas de façon décisive dans les processus politiques de ces pays, ils le feront pour nous, supprimant les dirigeants souverainistes, en les tuant, en les emprisonnant, en les expulsant et en leur retirant leurs droits — cela se produit partout dans l’espace post-soviétique.
Soit nous nous engageons activement dans la politique de ces pays pour éviter la guerre, soit nous laissons tout à leur discrétion — alors il faudra se battre, et se battre jusqu’à la victoire, en s’emparant de territoires. Nous sommes dans une situation difficile, comme endormis, plongés dans les douleurs fantômes d’un monde qui n’existe plus.
Maia Sandu incarne un régime dictatorial totalitaire. Elle impose ses candidats tout en se cachant derrière l’image d’une petite demoiselle innocente. Soros dispose d’une nouvelle génération — les générations Erasmus, des figures stéréotypées, identiques, sans volonté, qui paraissent impuissantes et superficielles. Mais ce ne sont pas eux qui gouvernent; c’est un système dur de contrôle global, terroriste et radical-libéral qui règne.
Animateur : Il y a des informations complémentaires à vos propos : Moscou affirme que des centaines de milliers de Moldaves ont été privés de la possibilité de voter sur le territoire de la Russie, comme l’a déclaré Peskov au sujet des élections parlementaires dans la république.
Nous avons pour l’instant couvert la question moldave. Je propose de discuter des événements aux États-Unis. J’aimerais entendre vos commentaires sur les déclarations de Donald Trump et la situation qui s’est produite là-bas. Que s’est-il exactement passé ? Je vais le raconter à nos auditeurs. Dimanche dernier, dans l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours au Michigan, pendant l’office, une fusillade a eu lieu. Un homme de 40 ans, armé, a ouvert le feu sur les fidèles puis a mis le feu à l’église. Plus tard, l’assaillant a été neutralisé et l’incendie maîtrisé. Initialement, un mort et neuf blessés avaient été signalés, mais par la suite, on a appris qu’il y avait quatre victimes. Donald Trump a commenté cette tragédie en déclarant : « Cette épidémie de violence dans notre pays doit cesser immédiatement. » Il a écrit cela dimanche sur le réseau social Truth Social. Et voici ce qui m’intéresse: comment Donald Trump compte-t-il lutter contre cette épidémie de violence ?
Alexandre Douguine : Lorsque nous avons discuté de la Moldavie et de l’espace post-soviétique dans la première partie de l’émission, nous avons en réalité touché à la question essentielle. Le monde dans lequel nous vivons est un monde où la violence devient la force déterminante. Si vous ne l’exercez pas contre vos adversaires, eux l’exerceront contre vous. On aimerait trouver un moyen d’éviter ce dilemme, mais c’est impossible.

Les principes libéraux, exposés dans la « Bible des libéraux » — La Société ouverte et ses ennemis de Karl Popper —, précisent clairement: il existe des ennemis de la société ouverte à gauche et à droite — des conservateurs à droite, des socialistes et des communistes à gauche. Pour que la société ouverte survive, elle doit frapper la première contre ces ennemis. Que signifie « frapper » ? Détruire, supprimer, neutraliser, décapiter, réprimer, appliquer la violence. Les libéraux considèrent cette violence comme nécessaire afin que les ennemis de la société ouverte ne frappent pas les premiers. Point. Nos aspirations bien intentionnées au dialogue, à la négociation, à la persuasion n’ont pas leur place dans ce modèle. Si nous n’attaquons pas, ils frapperont les premiers et nous détruiront pour construire leur "société".
La Russie est devenue un obstacle à leur État global et à leurs plans libéraux, alors ils ont provoqué cette guerre. Nous pouvons crier paix, amitié, démocratie et négociations jusqu’à l’épuisement — la guerre est inévitable. C’est la loi d’aujourd’hui. Cela s’applique aussi à nous. Si nous ne faisons pas preuve de fermeté, si nous n’utilisons pas la violence contre les partisans de la société ouverte, eux — théoriquement, pratiquement, infrastructurellement, idéologiquement — sont prêts à nous frapper. La question est de savoir qui détient le pouvoir d’exercer cette violence.
Je parle de la violence au sens large — pas seulement des meurtres, mais aussi des restrictions. Comment restreindre les terroristes? Comment restreindre les agents étrangers? C’est la pression de l’État. Celui qui est au pouvoir peut prendre l’initiative. Il se passe la même chose en Amérique.
L’arrivée au pouvoir de MAGA et de Trump est une révolution conservatrice affirmant des principes diamétralement opposés à ceux de Soros et de sa "société ouverte". La société ouverte prône la multiplicité des genres, l’importation de migrants illégaux, la dilution de l’identité nationale, la répression des religions traditionnelles, surtout le christianisme, et la négation du patriotisme de la majorité américaine qui a créé l’État, au profit des récits libéraux. Avant Trump, sous Obama et Biden, des forces étaient au pouvoir qui détruisaient l’identité américaine, promouvaient la multiplicité des genres, détruisaient tout. Les chrétiens — évangéliques, mormons, catholiques — sont devenus des cibles de violence et de persécution.

Charlie Kirk, membre actif du mouvement MAGA et chrétien, a récemment été tué pour sa foi, son conservatisme et son attachement aux valeurs traditionnelles — à leurs yeux, il était un ennemi de la société ouverte.
Pour revenir à Popper: les libéraux disent — tuez l’ennemi de la société ouverte avant qu’il ne vous tue. Ils qualifient tout le monde de fasciste, de communiste, d'agent de Poutine, de nouveau raciste — n’importe quelle étiquette. C’est ainsi qu’ils procèdent. L’assassinat de Charlie Kirk a consolidé les forces populistes MAGA, mais en face il a aussi consolidé les libéraux. Leur réaction a été monstrueuse: ils ont jubilé. C’est comme les Ukrainiens qui célèbrent tout attentat contre le pont de Crimée ou leurs succès terroristes. Une personne innocente est tuée — et toute l’Ukraine exulte. Telle est leur essence. Ils ont le pouvoir, les médias, l’influence sur l’éducation. En Amérique, les blogueurs libéraux n’ont pas pu cacher leur joie: ils ont poussé des cris, ri, sauté, crié « Hourra ! Hourra ! » — un chrétien a été tué. Une telle attitude, présente dans une partie significative de la société américaine, est une incitation au terrorisme. Toutes les cibles deviennent des ennemis de la société ouverte, y compris les chrétiens.

Animateur : Dois-je comprendre que, pour les démocrates, l’assassinat de Charlie Kirk est devenu la manifestation d’utiliser potentiellement la violence?
Alexandre Douguine : Exactement. Ils ont compris que c’est tout à fait possible, désormais, de faire usage de la violence. La presse démocrate, en particulier Jimmy Kimmel (photo), le célèbre animateur télé, l’a ouvertement soutenu. Trump a renvoyé Kimmel, mais il a été immédiatement réintégré sur ABC — et tout continue. Donc, de fait, c’est possible. Donc — il faut détruire l’ennemi. Trump fait un geste habile: réalisant que le pays s’enfonce dans une spirale de violences croissantes, il rétablit les cliniques psychiatriques. Les démocrates les avaient fermées, déclarant que les troubles mentaux étaient un choix libre, juste une « différence ». Du point de vue des principes DEI — diversité, équité, inclusion — les malades mentaux étaient assimilés aux bien-portants, et les institutions psychiatriques supprimées. Imaginez des millions de malades mentaux errant aux États-Unis? Ils ne sont pas enregistrés, on leur vend des armes, on leur donne des calmants et des drogues qui circulent presque sans contrôle. Les démocrates pratiquent des expériences monstrueuses sur les enfants, leur permettant de changer de sexe ou d'espèce dès le plus jeune âge: un enfant dit « je suis un chat » — et, poussé par des parents démocrates détraqués, on lui coud une queue, sans aucun contrôle médical.
Je suppose que Trump prend une mesure stratégique, en restaurant les cliniques psychiatriques pour assainir une société qui, sous les démocrates, a perdu la notion de normalité. C’est pour cela qu’ils tuent les chrétiens, les conservateurs, en criant « frappez le fasciste ! », ils attaquent quiconque ose ne serait-ce que critiquer modérément l’ordre existant. C’est une guerre civile psychiatrique, où des libéraux et démocrates devenus fous, élevés à la cancel culture, à la persécution et à la diabolisation des adversaires, agissent avec une extrême imprudence.
Des données récemment publiées montrent que 73% des sénateurs et représentants démocrates considèrent Trump comme un fasciste. S’il est fasciste, il est illégitime. Leur culture dit: tout fasciste, réel ou imaginaire, doit être détruit, ses partisans détruits à leur tour, les chrétiens détruits, les ennemis de la société ouverte détruits. Après 2020, dans les États contrôlés par les démocrates, il arrivait que des partisans républicains soient refusés à l’embarquement dans les avions.
Dans une telle réalité — avec les cliniques psychiatriques supprimées, l’accès libre aux armes, une campagne de haine contre des « fascistes » qui n’ont rien à voir avec le fascisme — on vous traitera de fasciste, pour un oui ou un non. Vous dites : « Je ne suis pas fasciste », mais leur logique est: vous êtes un crypto-fasciste et pouvez, en cette qualité, être tué. C’est ainsi qu’ils agissent, en qualifiant tous les ennemis de la société ouverte de fascistes. Les Ukrainiens, qui sont ouvertement nazis, font le sale boulot pour eux, tuant des Russes, et sont dès lors épargnés de l’étiquette de nazisme — ce sont des « enfants ». Leurs opposants, non liés au nazisme, sont déclarés fascistes — sur Wikipédia, ce qui ne peut pas être corrigé.

Même Elon Musk a constaté que les mensonges, les calomnies et les insultes contre les adversaires idéologiques pullulent sur Wikipédia. Il a proposé des sommes énormes pour la renommer « crappypedia », car tout y est faux, mais les gens y croient. Essayez de la corriger — des censeurs libéraux remplacent l’information neutre par l’inverse si cela jette une ombre sur leur idéologie ou réhabilite des ennemis de la société ouverte. C’est cela, la dictature.
Comment arrêter cette violence? Trump a menacé d’engager une contre-violence dès le premier jour, mais il ne l'a pas lancée. Prenez James Comey, ancien directeur du FBI, qui a été convoqué sous mandat d’arrêt, mais qui peut, en utilisant la loi, ne pas se présenter pendant neuf jours — et il ne se présente pas, puis devient introuvable. Les partisans de MAGA disent: «Trump, tu as le pouvoir plein et entier». Aux États-Unis, le pouvoir présidentiel est légalement immense, malgré certaines limites. Il existe des moyens d’exercer ce pouvoir, d’arracher les racines du réseau libéral terroriste. Emprisonner George Soros, son fils Alexander Soros, qui a amené Maia Sandu au pouvoir — avec la secte anti-moldave, fondamentalement totalitaire, en Moldavie — le mettre en prison, et les résultats seraient différents. Mais Trump hésite. C’est une force puissante, et il comprend qu’il ne pourra peut-être pas y faire face. L’escalade de la violence aux États-Unis, qui augmente chaque jour, pourrait pousser les autorités à agir de façon décisive.
Nous, dans notre foi sacrée en la démocratie, nous nous trompons profondément. C’est le témoignage de notre naïveté, l’illusion que nous vivons dans un monde soviétique bienveillant où tout se décide par des accords et des procédures. Cela nous rend vulnérables, nous transforme en victimes. Ils nous tuent puis nous accusent de notre propre disparition, disant que nous l’avons mérité, et — la roue tourne.

Trump sous-estime probablement la menace de la démocratie libérale. En Amérique, tout le monde croit à la démocratie, mais elle a cessé de fonctionner depuis longtemps. L’État profond, les élites libérales, en ont usurpé les instruments, les ont accaparés et ont privé le peuple de la capacité de s’en servir. C’est là la dictature idéologique des libéraux. Soit on applique des mesures sévères comme Trump le menace avec la loi RICO contre Soros. RICO est une loi contre la corruption profonde, introduite il y a des décennies, qui permet des mesures extraordinaires: arrestations, perquisitions, interrogatoires sans formalités, car la mafia et le racket avaient tellement pénétré le système que les méthodes ordinaires ne fonctionnaient plus. Trump menace d’utiliser RICO contre Soros et les globalistes, mais pour l’instant il ne fait que brandir le poing. Les documents, j’imagine, sont déjà en train de disparaître. Ils les changent d’endroit, effacent les données des ordinateurs, des disques, des téléphones — ils ne sont pas stupides.
La révolution conservatrice de MAGA est la seule façon de sauver l’Amérique de la guerre civile. La victoire de Trump n’est pas garantie. S’il perd, la violence s’intensifiera et le pays sera déchiré — non pas en deux Amériques, mais en dix ou vingt, comme pendant la guerre de Sécession. Les États-Unis cesseront d’exister. Si Trump gagne, il devra agir avec dureté, sans compromis, en tant que chef de la droite. Dans cette nouvelle guerre civile, la question sera de savoir si Trump et MAGA peuvent rassembler la majorité, ou si la minorité libérale, s’appuyant sur la terreur, pourra écraser la majorité conservatrice.
Nous assistons à une guerre civile mondiale. En Moldavie, l’illusion de la démocratie est utilisée pour détruire la démocratie. Nous devons comprendre que l’ordre mondial s’effondre et que la violence devient la norme, comme au 20ème siècle. Soit vous détruisez l’ennemi, soit il vous détruit. Tous les moyens sont bons. Les libéraux — au nom de la société ouverte — sont prêts à tuer, emprisonner, réprimer et détruire leurs adversaires. Ce n’est pas une métaphore, mais la réalité.
Animateur : Alexandre Guelievitch, merci pour vos réponses détaillées.
Alexandre Douguine : Merci à vous, meilleurs voeux de prospérité.
15:12 Publié dans Actualité, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : alexandre douguine, entretien, russie, moldavie, états-unis |
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Conflit et transformation systémique avec risques de guerre mondiale

Conflit et transformation systémique avec risques de guerre mondiale
Wellington Calasans
Source: https://jornalpurosangue.net/2025/09/24/conflito-e-transf...
Des analystes indépendants avertissent que le monde s’achemine vers une période d’instabilité sans précédent, stimulée par la fragmentation de l’ordre unipolaire et l’émergence d’une compétition stratégique multipolaire.
Le Rapport sur les Risques Globaux 2025 souligne que les conflits armés, les guerres commerciales et la polarisation technologique constituent les principaux risques à court et moyen terme, avec le Moyen-Orient comme épicentre de tensions potentiellement explosives.
Des régions comme le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord affichent le plus faible indice de paix mondiale depuis 16 ans, abritant quatre des dix pays les plus conflictuels du monde.
Cette réalité exige non seulement de se livrer à une analyse précise, mais aussi de lancer une alerte urgente: la transition vers un monde multipolaire, sans mécanismes efficaces de gestion des crises, peut déboucher sur une guerre mondiale aux proportions catastrophiques.

- La Restructuration du Système Financier Mondial: une Chaîne d’Acier pour le Nouvel Ordre
La dédollarisation n’est plus une théorie: c’est une stratégie concrète, portée par des partenariats stratégiques qui menacent l’hégémonie du dollar.
– Yuan adossé à l’or et le Petroyuan:
L’Arabie Saoudite et la Chine progressent dans la création d’un système où le pétrole est négocié en yuans, convertis directement en or physique à la Bourse Internationale de l’Or de Shanghai (SGEI), avec la confirmation que la SGEI établira un coffre-fort en territoire saoudien.
En 2023, le commerce bilatéral entre les deux pays a atteint 87 milliards de dollars, renforçant la viabilité du yuan comme monnaie de règlement énergétique. De plus, un accord de swap de devises de 7 milliards de dollars entre la Chine et l’Arabie Saoudite signale l’accélération de la dédollarisation.

– Infrastructure financière alternative:
Les BRICS développent un système de règlement transfrontalier appelé “BRICS Clear”, conçu pour fonctionner sans le dollar, consolidant une architecture financière parallèle. À ce jour, la Nouvelle Banque de Développement des BRICS a déjà approuvé plus de 32,8 milliards de dollars de financement pour des projets dans les pays membres, créant ainsi un réseau financier autonome.
– Accumulation mondiale d’or:
Les banques centrales ont acheté 1037 tonnes d’or en 2023, un record historique, portant les réserves mondiales à 36.700 tonnes en fin d’année. Cette ruée vers l’or n’est pas qu’une diversification: c’est un signe clair de la perte de confiance dans la stabilité du dollar et la gouvernance financière occidentale.
- Géopolitique et réalignements stratégiques: le fil qui lie l’économie à la guerre
Les changements financiers sont indissociables des alliances militaires et énergétiques qui redéfinissent les cartes du pouvoir.

– Le partenariat sino-russe - l’énergie comme arme stratégique:
Le gazoduc Power of Siberia 2 n’est pas qu’un projet énergétique: c’est un acte géopolitique qui réduira le rôle du GNL américain sur le marché mondial et consolidera la dépendance russe à la Chine. Ce projet met à l’épreuve la résilience des relations sino-russes, la Russie jouant un rôle clairement subordonné dans le partenariat.
– Le Moyen-Orient - Du pacte États-Unis–Arabie Saoudite à l’axe Pékin-Moscou-Téhéran :
Alors que les États-Unis cherchent un pacte de défense avec l’Arabie Saoudite, Riyad a déjà approuvé son entrée dans un bloc de sécurité dirigé par la Chine, s’éloignant ainsi de Washington. La médiation chinoise dans l’accord de normalisation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran en 2023, ainsi que les exercices navals conjoints entre la Chine, la Russie et l’Iran dans le golfe d’Oman, montrent comment Pékin occupe le vide laissé par le retrait stratégique des États-Unis.
- Conséquences systémiques: l’abîme de la guerre sans règles
La transition vers la multipolarité n’est pas neutre: elle crée un vide de gouvernance où des erreurs de calcul peuvent déclencher des conflits mondiaux.
– Dédollarisation et fragmentation économique:
La ruée vers l’or et la création de systèmes financiers parallèles ne sont pas de simples ajustements techniques. Elles traduisent une perte irréversible de confiance dans la capacité des États-Unis à garantir la stabilité globale, augmentant le risque de sanctions économiques susceptibles de déclencher des réponses militaires.
– Instabilité structurelle en Occident:
Avec les États-Unis réorientant leur attention vers la compétition avec la Chine et la Russie, leur influence au Moyen-Orient décline, créant un scénario de “course aux armements” régionale incontrôlée. La fragmentation de l’ordre libéral, conjuguée à l’essor de blocs régionaux armés, élimine les mécanismes de médiation qui ont empêché de grandes guerres depuis 1945.

Alerte rouge pour une guerre sans précédent
Comme on l’a vu, la transition vers un ordre multipolaire n’est pas un processus fluide : c’est une zone de turbulences où l’absence de règles claires et la compétition pour les sphères d’influence créent des risques existentiels.
Le Moyen-Orient, déjà épicentre de l’insécurité mondiale, est devenu un champ de bataille indirect entre puissances, où même les accords énergétiques sont des armes stratégiques.
Le Power of Siberia 2, les coffres saoudiens d’or et les systèmes de règlement des BRICS ne sont pas de simples projets économiques — ce sont des infrastructures de guerre financière qui, mal gérées, pourraient conduire à des affrontements militaires directs.
L’histoire montre que les transitions de pouvoir mondial s’accompagnent rarement de paix. Avec la dissolution de l’ordre post-Guerre froide, l’absence de canaux de dialogue entre les blocs émergents et la course aux armements en Asie et au Moyen-Orient créent un scénario où un seul incident — une cyberattaque, une catastrophe diplomatique ou une erreur de calcul — peut déclencher une guerre mondiale sans précédent.
L’humanité ne peut se permettre l’arrogance de croire que les “guerres mondiales” appartiennent au passé. Le temps de construire des sauvegardes, c’est maintenant — avant que la logique occidentale voulant que la multipolarité soit une ère sans règles ne nous entraîne vers l’abîme.
13:12 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : actualité, transformation systémique, conflictualité |
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