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Démocratie parlementaire contre gouvernement des juges : le problème ne se pose pas qu’en Pologne et en Hongrie !
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Europe – La question de la démocratie parlementaire contre le gouvernement des juges ne concerne pas que la Pologne et de la Hongrie, même si la Commission européenne et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) semblent concentrer leur attention principalement sur ces deux pays d’Europe centrale depuis maintenant 10 ans (depuis 2010 pour la Hongrie et depuis 2015 pour la Pologne). Et d’ailleurs, la limitation des pouvoirs des parlements démocratiquement élus au moyen d’un équilibre des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire n’est pas une condition indispensable à la démocratie, comme le montre la tradition de souveraineté illimitée du parlement au Royaume-Uni. À cet égard, n’oublions pas que l’un des principaux points mis en avant par les partisans du Brexit et autres eurosceptiques britanniques, c’était justement que soumettre leur pays aux décisions de tribunaux supranationaux ou internationaux comme la Cour de justice de l’UE et la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) empiète de plus en plus sur la souveraineté du Parlement de Westminster et est par nature antidémocratique. La Grande-Bretagne n’a certes pas pour le moment l’intention de se retirer de la Convention européenne des droits de l’homme et de rejeter la juridiction de la CEDH, mais la question peut à nouveau se poser à la suite du rapport publié en février par le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), où il est fait état des liens étroits entre un nombre important de juges de la CEDH et l’Open Society Foundations de George Soros, ce qui soulève des questions sur l’impartialité des auteurs de nombreux jugements importants. En vertu du Traité de Lisbonne, les précédents établis par la CEDH affectent le droit de l’UE, et cela pose donc des limites claires à la souveraineté des États-nations, comme c’est aussi le cas avec la CJUE. Cette dernière est une institution de l’Union européenne et elle a, depuis longtemps déjà, pris l’habitude d’interpréter les traités européens de manière à favoriser l’évolution vers une Europe fédérale bien au-delà de ce qui est prévu par la lettre de ces traités. La question de l’actuelle réforme judiciaire polonaise, soumise à la CJUE par la Commission européenne, offre justement aux juges de Luxembourg une opportunité pour étendre les pouvoirs de Bruxelles comme jamais auparavant.
L’UE prend parti pour les juges rebelles en Pologne au nom de l’État de droit et de la démocratie
En effet, le 8 avril dernier (soit un mois avant la date originellement prévue pour l’élection présidentielle polonaise), la CJUE répondait favorablement à une demande de la Commission européenne en délivrant une ordonnance provisoire censée « geler » la Chambre disciplinaire créée au sein de la Cour suprême polonaise (qui est une cour de cassation) dans le cadre de la réforme judiciaire adoptée en 2018 par le Parlement dominé par le parti Droit et Justice (PiS) de Jarosław Kaczyński et sa coalition Droite unie (une majorité absolue reconduite à la chambre basse du Parlement lors des élections législatives d’octobre 2019). La dispute autour de cette Chambre disciplinaire entre dans le cadre d’un conflit plus large concernant la façon dont sont nommés les quinze juges siégeant au Conseil national de la magistrature (KRS), car c’est le KRS qui présente au Président polonais un choix de candidats à la Chambre disciplinaire. Depuis la réforme du KRS adoptée en 2018, ces quinze juges (sur 25 membres du KRS au total) sont nommés non plus par d’autres juges mais par le Parlement, ce qui signifie que la majorité parlementaire PiS est désormais à l’origine de la majorité des nominations au KRS. Ces membres choisis par le PiS ont donc eu une voix décisive quant aux candidatures soumises au président Andrzej Duda (qui vient lui aussi du PiS) pour siéger à la Chambre disciplinaire. Il convient toutefois de préciser que, si elle stipule qu’il doit y avoir 15 juges parmi les 25 membres du Conseil national de la magistrature, la Constitution polonaise laisse au Parlement le soin de déterminer la façon dont ces juges doivent être nommés, et le Tribunal constitutionnel polonais a confirmé en mars 2019 que la procédure de nomination des membres actuels du KRS était conforme à la Constitution.
Pourtant, certains juges polonais remettent en cause la légitimité de ce KRS réformé et de la Chambre disciplinaire nouvellement créée à la Cour suprême. La juge Małgorzata Gesdorf, première présidente de la Cour suprême qui s’est engagée activement depuis 2017 contre les réformes de la justice adoptées par le Parlement (y compris en prenant part à des manifestations organisées par l’opposition), a publiquement demandé aux juges de la Chambre disciplinaire de ne plus rendre de jugements plusieurs mois avant l’arrivée à terme de son propre mandat de première présidente le 30 avril dernier. Le président de l’association de juges Iustitia a annoncé pour sa part qu’il ne comparaîtrait pas devant la Chambre disciplinaire, alors qu’il avait été convoqué pour son militantisme politique (les juges en Pologne n’ont pas le droit de faire de la politique de manière publique). Pire encore, certains juges de rang inférieur siégeant dans les tribunaux locaux ont prétendu pouvoir contester les décisions rendues par d’autres juges dont la nomination avait été proposée au président de la Pologne par le KRS réformé, car ils considèrent que ces nominations n’avaient pas été faites de manière valide, le KRS réformé ne jouissant pas de la légitimité nécessaire à leurs yeux (en vertu de leur propre interprétation de la Constitution, chose pourtant normalement réservée au Tribunal constitutionnel). Même si en vertu des traités européens l’organisation du pouvoir judiciaire est normalement une compétence souveraine de chaque État membre, en août 2018 un groupe de juges polonais rebelles siégeant à la Chambre du travail et des assurances sociales de la Cour suprême a envoyé à la CJUE une série de questions préjudicielles portant sur les réformes du PiS dans une affaire sans lien direct avec ces questions, ce qui est une pratique interdite par le droit européen. Dans un jugement rendu en novembre 2019, la Cour de justice a déclaré que c’est à la juridiction de renvoi, en l’occurrence à la Chambre du travail et des assurances sociales près la Cour suprême polonaise, « de vérifier si la KRS offre ou non des garanties suffisantes d’indépendance à l’égard des pouvoirs législatif et exécutif ».
Ce jugement avait de quoi surprendre, car en droit polonais seul le Tribunal constitutionnel a cette compétence, et les traités européens n’autorisent pas la CJUE à attribuer une telle compétence à un autre organe judiciaire d’un État membre. Néanmoins, prétendant se fonder sur cette décision de novembre de la CJUE, la première présidente de la Cour suprême Małgorzata Gesdorf (dessin, ci-contre)a convoqué le 23 janvier une audience rassemblant trois des cinq chambres de la Cour suprême, soit environ la moitié de tous les juges de la Cour suprême, afin d’adopter une résolution par laquelle toutes les décisions prises par la Chambre disciplinaire étaient déclarées non valides et tous les juges nommés par le Président Duda sur la base des candidatures présentées par le KRS réformé devaient cesser de prononcer des jugements, cette résolution de la Cour suprême affirmant que les réformes votées par le Parlement en 2017-18 violaient le droit européen, à savoir le principe d’indépendance de la justice mentionné en termes généraux dans les traités européens. La présidente de la Diète (la chambre basse du parlement polonais) a donc saisi le Tribunal constitutionnel sur la question des compétences respectives du Parlement et de la Cour suprême. Les juges constitutionnels ont alors suspendu à titre provisoire la résolution de la Cour suprême avant de constater dans un arrêt définitif rendu le 20 avril que la résolution adoptée le 23 janvier à la Cour suprême violait à la fois la Constitution polonaise et le droit européen et n’avait donc aucun effet.
Pour ajouter à la confusion, le 20 avril, soit 10 jours avant la fin de son mandat de première présidente de la Cour suprême, la juge Małgorzata Gesdorf délivrait un arrêt en vertu duquel elle transférait toutes les affaires confiées à la Chambre disciplinaire aux autres chambres de la Cour suprême. Mme Gesdorf justifiait sa décision en brandissant l’ordonnance provisoire du 8 avril de la CJUE, alors que les décisions de la CJUE ne peuvent pas s’appliquer directement (il aurait fallu un vote du parlement polonais pour mettre en œuvre l’ordonnance provisoire de la CJUE, c’est-à-dire pour suspendre l’application de la loi ayant décidé de la création de ladite Chambre disciplinaire). Le 5 mai, cet arrêt était annulé par le premier président par interim de la Cour suprême polonaise, Kamil Zaradkiewicz. Conformément à la Constitution polonaise, le juge Zaradkiewicz a été nommé par le président Andrzej Duda pour conduire la procédure d’élection du prochain premier président de la Cour suprême, Małgorzata Gesdorf n’ayant pas conduit cette élection avant la fin de son mandat.
Toutefois, de même que la Commission Juncker auparavant, la Commission Von der Leyen prend ouvertement parti pour les juges polonais rebelles qui, comme mentionné plus haut, demandaient eux aussi à la Cour de justice de l’UE de se prononcer un jugement sur la validité du régime disciplinaire mis en place par le Parlement polonais. Ce jugement de la CJUE serait censé s’appuyer sur les principes généraux d’État de droit et d’indépendance des tribunaux mentionnés dans les Traités européens. Le 29 avril, la Commission européenne engageait d’ailleurs une nouvelle procédure contre la Pologne, cette fois à propos d’une réforme du régime disciplinaire des juges adoptée en janvier 2020. Cette réforme vise à pouvoir sanctionner efficacement ces juges qui, prétendant appliquer directement la décision de la CJUE de novembre 2019, remettent en cause la légitimité d’autres juges quand ceux-ci ont été nommés sur recommandation du Conseil national de la magistrature (KRS) après les réformes du PiS. Dans tout autre pays de l’UE, un juge ne peut pas invalider un jugement au prétexte que le juge à l’origine de la décision ne serait pas légitime à ses yeux. Mais pour la Commission européenne, que la Pologne sanctionne ce type de comportements rebelles de la part de juges militants serait une atteinte au principe d’indépendance de la justice !
UE contre Hongrie
De manière assez similaire, lorsqu’en 2011 Viktor Orbán, fort d’une majorité constitutionnelle au parlement, a introduit une nouvelle constitution qui restreignait les compétences de la Cour constitutionnelle hongroise et abaissait l’âge de la retraite des juges à 62 ans, de manière à éliminer les juges qui avaient commencé leur carrière sous le régime communiste, la Commission européenne a pris le parti de ceux qui voyaient en ces réformes une menace pour l’État de droit et pour la démocratie. Elle a alors porté la question de l’âge de la retraite devant la CJUE qui a estimé en novembre 2012 que « l’abaissement radical de l’âge de la retraite des juges hongrois constitue une discrimination fondée sur l’âge non justifiée », et la Hongrie a dû porter l’âge de la retraite des juges à 65 ans, soit l’âge standard de la retraite dans ce pays. En juin 2011, le Parlement européen a de son côté adopté une résolution critiquant la nouvelle Loi Fondamentale hongroise parce qu’elle serait « susceptible de mettre en péril l’indépendance de la justice hongroise », notamment à cause des « dispositions portant sur la nouvelle Cour constitutionnelle hongroise ». Autre exemple : en juin 2019, la Commission européenne a adressé au Conseil une recommandation sur la Hongrie dans laquelle elle explique que « l’équilibre des pouvoirs, crucial pour assurer l’indépendance de la justice, a été encore affaibli dans le système des tribunaux ordinaires. Le Conseil national de la magistrature fait face à des difficultés croissantes pour exercer un contrepoids face aux pouvoirs du Président de l’Office national de la justice. Cela fait naître des inquiétudes concernant l’indépendance judiciaire. » Sans surprise, tandis que les membres du Conseil national de la magistrature sont des juges nommés par d’autres juges, le président de l’Office national de la justice est nommé par le Parlement. Ici encore, la Commission européenne, tout comme le Parlement européen, attaque la Hongrie pour avoir mis en place un contrôle parlementaire sur des juges nommés (et non élus), comme si l’État de droit et la démocratie ne pouvaient être garantis que par l’existence d’un pouvoir judiciaire totalement indépendant, et comme si un pouvoir judiciaire contrôlé uniquement par lui-même était en soi la meilleure garantie de démocratie.
Pourquoi l’UE n’a-t-elle jamais remis en cause le principe de la souveraineté illimitée du Parlement britannique ?
Si c’était le cas, les institutions de l’UE auraient dû mettre le Royaume-Uni sous le feu des projecteurs dès son adhésion au bloc européen en 1973, ou au minimum dès l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en 2009, puisque ce traité a incorporé dans le droit européen la Charte des droits fondamentaux et l’obligation de souscrire à la Convention européenne des droits de l’homme. Il est vrai que le protocole n° 30 de la Charte des droits fondamentaux stipule explicitement que « La Charte n’étend pas la faculté de la Cour de Justice de l’Union européenne, ou de toute juridiction de la Pologne ou du Royaume-Uni, d’estimer que les lois, règlements ou dispositions, pratiques ou action administratives de la Pologne ou du Royaume-Uni sont incompatibles avec les droits, les libertés et les principes fondamentaux qu’elle réaffirme. ». Mais alors, en vertu dudit Protocole, ce qui s’appliquait au Royaume-Uni jusqu’au Brexit devrait s’appliquer à la Pologne aussi, ce qui n’est manifestement pas le cas aux yeux de la Commission européenne et de la CJUE (voir le jugement du 19 novembre 2019 à propos du Protocole n° 30 et de l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la République de Pologne et au Royaume-Uni : « il ne remet pas davantage en question l’applicabilité de la Charte en Pologne et n’a pas pour objet d’exonérer la République de Pologne de l’obligation de respecter les dispositions de la Charte »).
Tandis que l’on reproche à Varsovie et Budapest des réformes décrites comme constituant un abus de pouvoir par le parlement et comme remettant en cause le système d’équilibre et de séparation des pouvoirs et donc, paraît-il, l’État de droit et la démocratie, dans l’une des plus anciennes démocraties d’Europe la souveraineté du parlement est définie de la manière suivante : « La souveraineté parlementaire est un principe de la constitution britannique. En vertu de ce principe, le Parlement est l’autorité juridique suprême du Royaume-Uni qui peut adopter ou abroger toute loi. D’une manière générale, les tribunaux ne peuvent pas annuler ses lois et aucun Parlement ne peut adopter de lois que les futurs Parlements ne pourront pas modifier. La souveraineté parlementaire est l’élément le plus important de la constitution britannique. »
La moitié des juges de la Cour suprême polonaise et sa première présidente se sont arrogé en janvier le droit d’invalider une loi adoptée par le Parlement, en se fondant sur le jugement de la CJUE de novembre où il était dit que le droit européen est supérieur aux lois nationales, et en arguant du fait que le deuxième alinéa de l’article 19, par. 1, du traité sur l’Union européenne stipule que « Les États membres établissent les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union ». Malheureusement, la Commission européenne soutient ouvertement cette attitude clairement inconstitutionnelle au nom du principe de l’application directe du droit européen. En Pologne, seul le Tribunal constitutionnel a la capacité d’invalider des lois approuvées par le Parlement, et c’est pourquoi les juges constitutionnels polonais ont invalidé le 20 avril 2020 cette résolution adoptée le 23 janvier à la Cour suprême, la considérant comme non conforme à la Constitution polonaise et au droit européen. En même temps, dans un autre pays ayant appartenu à l’Union européenne jusqu’en janvier 2020, le Parlement « peut adopter ou abroger toute loi » et « les tribunaux ne peuvent pas annuler ses lois », ce qui n’a jamais posé problème à la Commission européenne actuelle ni à aucune Commission antérieure.
Par ailleurs, le Royaume-Uni n’a pas de cour constitutionnelle et sa Cour suprême, qui est considérée par de nombreux observateurs comme contraire à la tradition parlementaire britannique, n’a été créé qu’en 2009 par une loi promulguée par le Parlement sous le gouvernement travailliste de Tony Blair. Puisque d’après la constitution britannique « aucun Parlement ne peut adopter de lois que les futurs Parlements ne pourront pas modifier », la Cour suprême britannique pourrait facilement être abolie par la majorité parlementaire actuelle. Il se trouve que le nouveau Procureur général pour l’Angleterre et le pays de Galles nommé par le premier ministre Boris Johnson en février, Suella Braverman, est d’avis que, pour le bien de la démocratie, le Parlement doit récupérer la souveraineté qui lui a été confisquée non seulement par l’Union européenne mais aussi par les tribunaux. Mme Braverman a écrit en janvier que l’arrêt par lequel la Cour suprême avait décidé en septembre que la suspension du Parlement par Boris Johnson était illicite était un nouvel exemple de « l’intrusion continue et chronique des juges » sur le terrain de la politique. Elle a critiqué l’« activisme judiciaire » et déclaré : « Oui, les tribunaux doivent agir pour contenir les abus de pouvoir par le gouvernement, mais si un petit nombre de juges non élus et n’ayant de comptes à rendre à personne continuent de déterminer les grandes politiques publiques en s’opposant aux décideurs élus, notre démocratie ne peut pas être qualifiée de représentative. La légitimité du parlement est sans égale et c’est la raison pour laquelle nous devons reprendre les commandes, non seulement aux dépens de l’UE, mais aussi de l’appareil judiciaire ». En tant que procureur général, Braverman est maintenant procureur en chef pour l’Angleterre et le Pays de Galles et premier conseiller juridique du gouvernement.
Dans un article intitulé « Réparer la Cour suprême devrait être la priorité constitutionnelle de Boris Johnson », l’éditorialiste du Telegraph Charles Moore se moque de la vision d’un Brexit qui serait « une lutte entre les ‘populistes’ sans vergogne et les justes déterminés à résister à tout ce qui pourrait avoir ‘un effet extrême sur les fondements de notre démocratie’ », les derniers mots étant une citation de la décision de septembre de la Cour suprême qui avait invalidé la suspension du Parlement par Johnson quand l’opposition anti-Brexit, aidée par le Speaker John Bercow, avait pris le contrôle de l’ordre du jour de la Chambre des communes tout en refusant de nouvelles élections. Pour que cela ne se reproduise pas à l’avenir, Boris Johnson a promis d’abroger la loi de 2011 sur la durée fixe du Parlement afin de redonner au gouvernement la capacité de convoquer des élections législatives au moment où il le souhaite. Moore suggère aussi que le gouvernement et sa majorité au Parlement trouvent le moyen de restaurer une prérogative de la prorogation (suspension du Parlement pour une durée déterminée) qui ne doit pas être soumise au contrôle des juges. Il estime en outre qu’« il faut revoir le panel ‘indépendant’ chargé de nommer les juges, qui donne à l’establishment une capacité presque illimitée d’auto-réplication » En effet, écrit Moore, la « Déclaration des droits de 1689 […] protège la liberté politique en insistant pour qu’aucune ‘délibération du Parlement’ ne puisse être ‘annulée’ par un tribunal », et « il n’y avait jamais eu auparavant de séparation formelle des pouvoirs dans ce pays. C’était mieux ainsi », conclut l’éditorialiste.
Les gens comme Małgorzata Gesdorf – la première présidente de la Cour suprême polonaise jusqu’au 30 avril – ou Věra Jourová – la Vice-présidente de la Commission européenne pour les Valeurs et la Transparence qui remet aujourd’hui en cause le droit qu’a le Parlement polonais de nommer des membres de son Conseil national de la magistrature (KRS) – pensent-ils donc aussi que l’État de droit et la démocratie sont menacés en Grande-Bretagne à cause d’une séparation des pouvoirs insuffisante ?
Les juges de Soros à la Cour européenne des droits de l’Homme
Une autre question est de savoir si les « juges non élus et n’ayant de comptes à rendre à personne » qui siègent à la CJUE et à la CEDH sont vraiment indépendants et impartiaux. La CEDH en particulier soulève de sérieux doutes. S’il ne s’agit pas d’une institution de l’Union européenne, c’est elle qui interprète la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Or « les droits fondamentaux, tels qu’ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, font partie du droit de l’Union en tant que principes généraux. » (art. 6, par. 3, du Traité sur l’Union européenne). Au cours de la décennie écoulée, les jugements de la CEDH ont imposé à l’Italie la légalisation des unions homosexuelles et à l’Autriche l’adoption des enfants par le « deuxième parent » dans les couples homosexuel. La CEDH a aussi exercé des pressions sur la Pologne en faveur d’une libéralisation de l’avortement tandis que la Hongrie a été forcée d’abolir la perpétuité réelle (la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle). Non seulement la CEDH est-elle souvent accusée d’activisme judiciaire en raison de ses interprétations souvent très libres et militantes d’une Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales écrite en termes généraux, mais ce reproche est désormais conforté par un rapport récemment publié par le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), une ONG internationale dédiée à la protection des droits de l’homme. On trouve en effet dans ce rapport une liste des juges de la CEDH ayant des liens étroits avec les ONG actives devant cette même CEDH. Comme on peut le lire dans l’introduction du rapport de l’ECLJ, « au moins 22 des 100 juges permanents ayant siégé à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) entre 2009 et 2019 sont anciens responsables ou collaborateurs de sept ONG fortement actives auprès de cette Cour. Douze juges sont liés au réseau de l’Open Society Foundation (OSF), sept aux comités Helsinki, cinq à la Commission Internationale des Juristes, trois à Amnesty International, un à Human Rights Watch, un à Interights et un à l’A.I.R.E. Centre. L’Open Society se distingue par le nombre de juges qui lui sont liés et par le fait qu’elle finance les 6 autres organisations citées dans ce rapport. Depuis 2009, on recense au moins 185 affaires dans lesquelles l’une de ces sept ONG est officiellement impliquée dans la procédure. Parmi celles-ci, dans 88 cas, des juges ont siégé dans une affaire dans laquelle était impliquée l’ONG avec laquelle ils étaient liés. (…) Sur la même période, on observe seulement 12 cas de déports dans lesquels un juge s’est retiré d’une affaire en raison, semble-t-il, d’un lien avec une ONG impliquée dans l’affaire. Cette situation met en cause l’indépendance de la Cour et l’impartialité des juges ; elle est contraire aux règles que la CEDH impose elle-même aux États en la matière. C’est d’autant plus problématique que le pouvoir du tribunal est exceptionnel. »
La démocratie en Occident menacée par l’activisme judiciaire plutôt que par la souveraineté parlementaire
Et si donc la véritable menace pour la démocratie occidentale aujourd’hui ne venait pas de « populistes sans vergogne » rétablissant un certain contrôle parlementaire sur le pouvoir judiciaire, mais plutôt de l’attitude de ces « justes déterminés à résister à tout ce qui pourrait avoir ‘un effet extrême sur les fondements de notre démocratie’ », et de leur volonté de mettre à la merci d’un gouvernement de juges « éclairés » toutes les lois adoptées par les parlements élus ?
Le problème n’est pas uniquement européen. Quand la Cour suprême des États-Unis a imposé la légalisation du « mariage gay » dans les 50 États de l’Union en 2015, le juge dissident Antonin Scalia (photo) a qualifié cette décision d’insulte à la démocratie et il a accusé la Cour suprême dont il faisait partie de chercher de plus en plus souvent à créer les politiques de la nation plutôt qu’à se poser en arbitre. « La décision prise aujourd’hui veut dire que mon dirigeant et le dirigeant des 320 millions d’Américains vivant entre les deux côtes, c’est une majorité des neuf juristes siégeant à la Cour suprême », a alors écrit Scalia. « Cette pratique de la révision constitutionnelle par un comité non élu de neuf personnes, toujours accompagnée (comme c’est le cas aujourd’hui) d’éloges excessifs de la liberté, prive le peuple de la liberté la plus importante qu’il s’était affirmé dans la Déclaration d’Indépendance et qu’il avait obtenu par la révolution de 1776 : la liberté de se gouverner lui-même. »
Sans aller aussi loin, l’arrêt de juin 2018 de la Cour de justice de l’Union européenne qui a contraint les 28 États membres à reconnaître les effets juridiques des unions de même sexe porte lui aussi dans une certaine mesure atteinte à la liberté des peuples de l’Europe de se gouverner eux-mêmes. En effet, en vertu des traités européens qui ont été approuvés par leurs représentants élus, ces peuples n’avaient jamais sciemment renoncé à leur droit de décider souverainement de leurs transformations sociétales futures.
Et d’ailleurs, n’en déplaise à la Commission européenne et à la Cour de Justice de l’UE, les peuples de l’Union européenne n’ont jamais non plus formellement renoncé à leur droit de préserver ou rétablir une certaine forme de contrôle démocratique sur leur propre système judiciaire et de défendre la démocratie parlementaire contre l’activisme des juges militants.
Article publié originellement le 12 mars 2020 en anglais sur kurier.plus, le site de l’Institut de coopération polono-hongroise Wacław Felczak.
Traduit en français et mis à jour le 7 mai 2020 pour le Visegrád Post.
En août 2019, le président américain Donald Trump affirme vouloir acheter le Groenland au Danemark. Derrière l’attitude cavalière et le ton proche de la plaisanterie, la proposition, plus sérieuse qu’il n’y paraît, révèle de nombreux enjeux économiques et géopolitiques, indices de l’intérêt croissant que suscite l’Arctique.
La proposition n’est pas si saugrenue de la part des États-Unis, dont l’expansion doit historiquement beaucoup à l’acquisition de territoires (la Louisiane à la France en 1803, la Floride à l’Espagne en 1819, l’Alaska à la Russie en 1867). Mais pourquoi Donald Trump s’intéresse-t-il à cet immense territoire peu peuplé (2,16 millions de kilomètres carrés pour 55 992 habitants au 1er janvier 2019) ? Une partie de la réponse réside dans les énormes richesses dont regorge le Groenland, qu’il s’agisse des minerais (cuivre, zinc, fer, diamant, or, titane, uranium) ou des hydrocarbures offshore, lesquels ne sont toutefois pas assez concentrés pour en permettre une exploitation rentable vu le coût élevé de l’extraction dans les conditions extrêmes du milieu arctique. D’autres acteurs les convoitent, à l’instar de la Chine, qui a des visées sur les terres rares, une matière première dont elle est la première importatrice mondiale, et dont le Groenland abrite 12 à 25 % des réserves mondiales. Ces ressources sont encore peu exploitées puisque 85 % des recettes d’exportations de ce territoire autonome dépendant du Danemark sont issues des produits de la pêche.
Pourtant, l’intérêt des États-Unis est plus stratégique qu’économique. Entre Europe et océans Arctique et Atlantique, le Groenland a une situation aussi importante que l’Alaska, autre porte de l’Arctique, et qui a justifié par le passé deux tentatives d’achat, en 1867 et en 1946. Les États-Unis disposent d’ailleurs d’installations militaires de premier plan sur ce territoire, avec la base de Thulé, dans le nord-ouest, et des équipements de surveillance spatiale. Cette proposition de Donald Trump s’inscrit donc dans les nouvelles orientations de la stratégie américaine, révélant le regain d’intérêt de l’Arctique pour la première puissance mondiale.
Les États-Unis cherchent à réinvestir la région face à la réémergence russe et aux appétits chinois, comme en témoigne en septembre 2019 la visite du vice-président américain, Mike Pence, en Islande. Déjà, en mai 2019, le secrétaire d’État, Mike Pompeo, avait tenu un discours agressif contre la volonté supposée de la Russie et de la Chine de s’approprier la région, un ton surprenant pour une réunion du Conseil de l’Arctique, le forum intergouvernemental regroupant les États riverains de l’Arctique, plutôt caractérisé par la coopération que par le conflit.
Cette proposition a pourtant peu de chances d’aboutir, un achat nécessitant l’accord du Parlement groenlandais (l’Inatsirartut, Chambre monocamérale de 31 membres), certes autonome du Danemark auquel il est rattaché, mais qui lui assure une grande partie du financement de son fonctionnement, à hauteur de 500 millions d’euros annuels. Le poids des partis indépendantistes rend improbable le choix d’une nouvelle tutelle pour un territoire qui recherche plutôt les moyens de son indépendance, aussi bien politique qu’économique.
La Roumanie à deux doigts de la violence politique
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Roumanie – Dès l’accession (d’une rapidité certes surprenante), en 2014, de Klaus Iohannis à la plus haute responsabilité de l’État roumain, ses détracteurs ont usé et abusé contre lui du qualificatif « nazi ». Dans la plupart des cas, de façon assez stupide : ceux qui l’employaient, ne sachant guère ce que recouvre le terme, se contentaient de faire ainsi méchamment allusion à l’origine ethnique de Klaus Iohannis , issu d’une minorité de langue allemande (les « Saxons » de Transylvanie) de ce pays multiethnique qu’est la Roumanie. Des liens familiaux ont aussi été mis en exergue (les Saxons ayant, dans les années 1930 et pendant la Seconde Guerre mondiale, bien souvent cédé aux sirènes de l’hitlérisme), liens familiaux dont Klaus Iohannis n’est bien entendu pas responsable. Et si on a certes pu relever chez lui des propos suggérant un certain antisémitisme, ce dernier est trop répandu en Roumanie pour qu’on puisse en tirer quelque conclusion que ce soit quant aux phobies supposées dudit Klaus Iohannis, et encore moins quant à leur origine.
Il existe néanmoins une affinité grandissante entre le discours politique de Klaus Iohannis et certains thèmes de l’idéologie de l’Allemagne hitlérienne – affinité dont il est probable que Iohannis lui-même n’ait pas conscience, ce dernier ne semblant pas briller par sa culture historique ou philosophique.
Bref retour en arrière :
Dès la campagne menant à sa première élection, Klaus Iohannis – suivi en cela par la quasi-totalité de la « droite » roumaine rassemblée autour de lui – a systématiquement évacué la politique de son discours électoral.
En Hongrie, le FIDESZ au pouvoir se présente comme « de droite » ou « conservateur » (ajoutant éventuellement « illibéral » depuis 2015, à l’usage de publics plus initiés) ; que ces étiquettes soient appropriées ou non, elles ont le mérite de situer l’idéologie de ce parti de gouvernement sur un spectre idéel, où d’autres positions sont aussi possibles : l’opposition parlementaire au FIDESZ, par exemple, bien qu’essentiellement libérale à la Macron, est généralement nommée – et se nomme souvent elle-même – opposition « de gauche » (ou, de plus en plus, « écologiste » pour certains). Elle constitue donc une option politique, que les médias proches des partis de gouvernement ne recommandent naturellement pas à l’électorat, mais dont tout le monde reconnaît la dignité.
En Roumanie, dès sa campagne de 2014, non content de dénoncer la présence, dans les rangs de la « gauche » roumaine, de quelques personnalités soupçonnées de malversations, Klaus Iohannis a décidé de faire de ses adversaires « socio-démocrates » (à vrai dire : populistes) « le parti de la corruption », tandis que son propre camp (de facto libéral à la Macron) cessait de se définir comme la « droite » roumaine, pour devenir le camp « du travail bien fait ». Ce remplacement relativement brutal (quoique non dénué de précédents dans la vie politique roumaine de l’après-1989) de la politique par la morale a été accompagné :
D’abord d’une exploitation médiatique assez malsaine de l’origine (territorialement transylvaine, ethniquement germanique) du candidat, instaurant symboliquement une hiérarchisation géo-biologique de la population roumaine : au Nord-ouest, les transylvains travailleurs, donc riches, cultivés et disciplinés ; au Sud-est (à l’extérieur de l’arc carpatique), les valaques et moldaves, paresseux, voleurs, obscurantistes, portés au mensonge et à l’assistanat. Ce discours a, en 2014 (et même encore un peu en 2019 !) séduit beaucoup d’électeurs issus de la minorité hongroise de Transylvanie. L’ironie du sort a voulu que Klaus Iohannis, élu grâce à eux, se soit ensuite avéré être le président le plus magyarophobe de l’histoire constitutionnelle roumaine (époque communiste comprise). Klaus Iohannis est en effet avant tout une marionnette de l’État profond roumain, lui-même inféodé à l’Empire occidental, qui n’accepte pas les velléités d’indépendance de la Hongrie de Viktor Orbán.
Puis, assez vite, d’une coloration de plus en plus biopolitique de ce moralisme. La Roumanie de Klaus Iohannis est devenue « la Roumanie propre », tandis que son adversaire socio-démocrate (en dépit du fait que son programme n’a plus rien de marxiste depuis trente ans) devenait « la peste rouge ». Dans les médias proches de la « droite » roumaine, il est depuis plusieurs années implicitement admis que les électeurs du Parti Social-Démocrate ne peuvent « commettre » un tel choix électoral qu’en l’absence de facultés intellectuelles appropriées – et, à chaque poussée électorale du PSD réapparaît l’idée de remettre en cause le suffrage universel, pour en exclure soit les non-diplômés (réputés idiots), soit les pauvres (scrutin censitaire), soit les vieux – soit toutes ces catégories à la fois (que le discours de la droite roumaine tend de toute façon à confondre).
C’est ici qu’apparaît un trait spécifiquement est-européen de ce discours d’extrême-droite, dont on trouvera aussi des équivalents en Ukraine (chez les « ultras »), ou encore en Pologne (chez les adversaires du PiS), mais qui a naturellement de quoi surprendre l’observateur d’Europe occidentale : son caractère « progressiste ». C’est en effet une rhétorique d’extrême-droite (hostile à la démocratie, anti-égalitariste, construisant « l’ennemi intérieur », etc.) qui puise moins sa légitimité dans un passé plus ou moins mythique que dans une certaine vision (eugéniste et technologiste) de l’avenir. Ce pourquoi elle réussit en même temps à être favorable au multiculturalisme, à l’agenda LGBT etc.. On reconnaît là un thème majeur de l’idéologie américaine, effectivement très présente en Roumanie, à la fois par les canaux culturels ordinaires (actifs aussi en Europe de l’Ouest), et, de façon plus directe, par la propagation cancéreuse des sectes néo-protestantes pilotées depuis les États-Unis d’Amérique.
Le dénouement (en cours) :
Une fois instruit de ces éléments, on comprend mieux pourquoi, dans la Roumanie de Klaus Iohannis, la « crise du Covid » ne pouvait que dégénérer.
Apparemment, pourtant, tout s’est passé comme ailleurs : sortant d’une insouciance coupable, le gouvernement est d’abord surpris par une menace mal connue, et médiatiquement grossie par la « communication de crise » du gouvernement chinois ; il surréagit donc, et – étant, comme presque partout ailleurs en Europe, à peu près dénué de moyens d’action technique au terme de décennies de saccage néo-libéral du secteur public – trouve une solution techniquement peu convaincante, mais spectaculaire, dans la folie suggérée à Boris Johnson (vite imité par Macron) par le gourou Neil Ferguson : le confinement. Jusqu’ici, rien de très surprenant, vu de France, d’Italie, de Suisse ou même de Hongrie.
Mais voilà : en Roumanie, « l’idéologie Covid » se superpose si parfaitement à celle du régime Iohannis qu’elle le mène tout naturellement à ses dernières conséquences. J’ai déjà évoqué ailleurs le premier acte du drame, à savoir la transformation rapide, en mars-avril 2020, de cette démocratie (certes plus formelle que réelle, compte tenu du poids de l’État profond) en dictature militaire. J’ai aussi évoqué les amendes – d’un montant record en Europe – infligées à la pelle pour les moindres infractions à des règles de confinement particulièrement absurdes et liberticides. Ces amendes sont très vite devenues une des premières recettes fiscales de l’exsangue État roumain.
Or ce 6 mai, la Cour Constitutionnelle roumaine a frappé ces amendes d’illégalité. Elle reproche notamment au décret qui les institue de ne pas définir avec assez de précision les conditions de constatation du délit, ouvrant ainsi un espace d’arbitraire policier que tout le monde a, en effet, pu constater. Ami français : à bon entendeur…
Sans attendre, Klaus Iohannis a, dès le 7 mai, a consacré une allocution télévisée au commentaire de cette décision et de la situation du pays. Confondant allègrement communication de crise et discours de campagne, il a désigné deux ennemis de la « Roumanie propre » qu’il pense incarner :
un appareil judiciaire dont il laisse entendre qu’il serait secrètement complice du PSD (que cet appareil judiciaire a pourtant fort sévèrement puni à l’époque où ce parti était présidé par Liviu Dragnea, aujourd’hui incarcéré), et
à nouveau, le PSD lui-même. Bien qu’en charge du gouvernement – dirigé par son acolyte Ludovic Orban –, et en dépit du fait que le PSD a approuvé au parlement les pouvoirs exceptionnels confiés audit gouvernement au début de la « crise sanitaire », Iohannis avait déjà, le 29 avril, accusé (sans le moindre fondement) le PSD de « vouloir vendre la Transylvanie aux Hongrois ». Cette fois-ci, plaçant carrément PSD et Covid19 sur le même plan, il donne au discours biopolitique de l’extrême-droite libérale au pouvoir en Roumanie sa forme achevée, parfaite et probablement définitive. La métaphore dangereuse de la « peste rouge » est devenue hallucination en bonne et due forme.
Examinons, donc, l’impact de ces deux « calamités » sur la société roumaine :
Le bilan officiel du Covid19 est aujourd’hui en Roumanie de 888 morts, soit, en deux mois de décompte, 1.26 jour de mortalité générale. Cette situation est d’ailleurs générale en Europe post-communiste, pour, notamment, des raisons de faible longévité (notamment masculine), que j’ai analysées ailleurs. Rien n’indique donc que ce taux de mortalité soit à l’avenir susceptible d’une forte augmentation, ni dans des conditions de confinement actuelles, ni hors confinement (comme le suggère assez clairement l’exemple biélorusse, équivalent oriental de l’exemple suédois).
J’ai souvent évoqué dans ces chroniques le bilan des gouvernements du PSD de Liviu Dragnea (2016-2019), qui a notamment doublé les salaires de la fonction publique – et donc ceux des professions de santé, ralentissant ainsi l’exode des médecins roumains. Aussi léger que soit le bilan roumain de l’épidémie, on peut donc raisonnablement penser que, sans ces gouvernements, il aurait été un peu plus lourd.
Bien plus que par un Covid qui y tue bien moins que les grippes ordinaires, ou par la « peste rouge » du timide PSD, la Roumanie semble donc actuellement menacée par le délire autoritaire de Klaus Iohannis et de l’extrême-droite atlantiste qu’il incarne.
On ne compte plus les voies de faits commises par des membres des forces de l’ordre sur des passants circulant pourtant régulièrement. Il est aussi question de médecins – de toute évidence intimidés – refusant aux victimes de telles violences un certificat d’attestation qui leur est pourtant statutairement dû. Sous prétexte de lutte contre les « fake news », le régime a fait fermer divers sites d’information hostiles à Klaus Iohannis, dont le site Justițiarul, auquel Klaus Iohannis porte une vieille rancune, pour avoir révélé l’un des aspects les moins reluisants de son ascension sociale au début des années 1990 : ses liens avec un réseau canadien de trafic d’enfants (le site étant censuré, impossible de fournir un lien, ndlr). Sur Internet, enfin, une armée de trolls (a priori issus des effectifs des services « secrets » – c’est-à-dire de la police politique roumaine, la plus nombreuse d’Europe) guette le moindre signe de scepticisme à l’égard du confinement, pour brutalement rappeler à l’ordre le « contrevenant », en évoquant les souffrances de parents placés en soins intensifs (à ceci près que la Roumanie n’a probablement pas assez de lits de soins intensifs pour héberger les parents de tous ces trolls).
Conclusion provisoire :
La question est maintenant avant tout de savoir dans quelle mesure l’État profond roumain conserve encore le contrôle du simulacre démocratique qu’il gère de plus ou moins près depuis l’assassinat du couple Ceauşescu. Si tel est encore le cas, alors Klaus Iohannis est certainement très proche de sa fin politique, et servira de fusible. Ses charges exagérées contre le PSD peuvent dans ce cas avoir été mises en scène dans le but de doper a contrario la popularité de ce parti (désormais tout aussi contrôlé par l’État profond que le PNL de Iohannis), qui accèderait alors pacifiquement au pouvoir, « afin que tout change pour que rien ne change ».
Si, en revanche, Klaus Iohannis s’avérait être sincère dans le délire paranoïaque et eugéniste affiché par ses dernières interventions publiques, on pourrait désormais s’attendre au pire. Dans ce second cas, il serait tout aussi improbable de le voir finir son mandat (voire l’année) aux commandes de l’État roumain. Mais il risquerait alors, avant de quitter la scène de façon plus ou moins brutale, de laisser un bilan plus lourd que celui du Covid-19, voire (et ce n’est pas peu dire) plus lourd que celui du confinement.
Dans une tribune, une dizaine de militaires de haut rang ayant quitté le service et regroupés au sein du Cercle de réflexion interarmées, s’inquiètent de la participation de la France au prochain exercice militaire de l’OTAN.
Defender 2020, le prochain exercice militaire de l’OTAN, soulève un débat majeur. Quand bien même on craindrait les « cyber-intrusions » russes ; même si, pris de court par le retour populaire de la Crimée dans le giron russe, les Européens gouvernés par l’Amérique furent tétanisés par l’habileté de Poutine, il n’en reste pas moins qu’organiser des manœuvres de l’OTAN, au 21ème siècle, sous le nez de Moscou, plus de 30 ans après la chute de l’URSS, comme si le Pacte de Varsovie existait encore, est une erreur politique, confinant à la provocation irresponsable. Y participer révèle un suivisme aveugle, signifiant une préoccupante perte de notre indépendance stratégique. Est-il possible que la France s’en dispense ?
Le surgissement d’un fléau planétaire qui confine près de 4 milliards de Terriens, éclairant d’une lumière crue les grandes fragilités de l’humanité, pourrait contribuer à nous débarrasser des vieux réflexes de guerre froide. Faisant soudain peser une menace existentielle, ce fléau transfrontalier hiérarchise les priorités stratégiques, dévoile la futilité des anciennes routines et rappelle le poids de notre appartenance à l’ensemble eurasiatique, dont la Russie est le pivot ancestral.
Certains peuvent redouter de choquer nos partenaires de l’Est européen encore accablés par les souvenirs du rideau de fer. Ils oublient cependant qu’en 1966, il y a plus d’un demi-siècle, Charles de Gaulle dont tout le monde se réclame, mais que personne n’ose plus imiter – sauf en posture – , avait purement et simplement signifié à l’allié américain à qui l’Europe et la France devaient pourtant leur survie, qu’il n’était plus le bienvenu à Fontainebleau. C’est que le « Connétable », ayant chevillé à l’âme l’indépendance du pays, n’avait pas oublié qu’en 1944 Roosevelt avait l’intention de mettre la France sous tutelle administrative américaine.
Pourtant, nombre de militaires d’abord, au prétexte que l’OTAN était une norme opérationnelle et technologique, pourvoyeur à l’occasion d’un appui logistique essentiel, n’ont cessé de militer pour contourner l’affirmation d’indépendance gaullienne, sans cesser de s’en réclamer.
Ensuite, du côté des politiques dès avril 1991, dans l’opposition, appuyant Philippe Seguin contre Charles Pasqua et Jacques Chirac, François Fillon également opposé au traité de Maastricht, avait tenté la quadrature du cercle dans une tribune du Monde. Il y soutenait que l’Europe de la défense était une « chimère », tout en proposant de « placer ses alliés au pied du mur en proposant une véritable européanisation de l’alliance atlantique, en concurrence avec l’actuel projet de simple replâtrage de l’OTAN sous leadership stratégique américain. » Son but était également de préparer le retour de la France dans le commandement d’une OTAN repensée, à l’aune, disait-il de « l’esprit de 1949 » avec une « européanisation de tous les commandements » et « coopération et interopérabilité des forces plutôt que leur intégration ».
Nicolas Sarkozy décide de « rentrer dans le rang »
Dès son entrée à l’Élysée en 1995, Jacques Chirac, pourtant le premier héritier de l‘exigence d’indépendance sous le grand pavois de Charles de Gaulle, entamait les négociations pour le retour de la France dans le Commandement intégré de l’Alliance. En échange – mais sans réel moyen de pression – il réclamait, l’attribution à Paris du poste de Commandement du flanc sud de l’Alliance à Naples, tout de même port d’attache de la 6ème flotte de l’US Navy. Un article de Libération dont la lecture est édifiante détaillait le 27 février 1997, sous la plume de Jacques Amalric, ancien correspondant du Monde à Washington et à Moscou, les dessous de ces marchandages. Chacun jugera à quel point les contorsions sémantiques contrastaient avec l’inflexible fermeté gaullienne, 30 ans plus tôt.
Au passage, il est juste de rappeler que c’est la gauche française qui, apparemment à contre-emploi, s’est opposée au sabordage de l’héritage gaullien. En 1997, Lionel Jospin, devenu premier ministre, affronta directement Jacques Chirac sur cette question.
Mais celui qui a décidé de « rentrer dans le rang » de la structure militaire intégrée c’est bien Nicolas Sarkozy, venu en août 2007 aux États-Unis rencontrer Georges Bush. Le résultat fut l’annonce faite par le Président Français devant le Congrès des États-Unis, le 7 novembre 2007, 41 ans après l’affirmation d’indépendance de Charles de Gaulle. L’affaire fut entérinée par le parlement français saisi par une motion de censure, rejetée en 2009. Pour le prix de son retour, Paris reçut la compensation du Commandement non directement opérationnel dit « Allied Command Transformation » (A.C.T) basé à Norfolk dont la mission est une réflexion technologique, structurelle, tactique et stratégique en même temps qu’une action pédagogique vers les pays membres, visant à la fois à la prise de conscience et à l’harmonisation.
Sans en nier l’importance, on ne peut s’empêcher de penser qu’il s’agit d’une consolation :
1) Fournir le cadre conceptuel pour la conduite de futures opérations conjointes combinées
2) Définir le concept et les moyens capacitaires des opérations futures de l’Alliance
3) Évaluer la pertinence des concepts opérationnels émergents – notamment dans le domaine des hautes technologies – et les traduire en une doctrine d’emploi validée par la recherche scientifique à la fois fondamentale et expérimentale
4) Persuader les nations membres, individuellement et collectivement, d’acquérir les capacités indispensables et de fournir la formation initiale nécessaire à la mise en œuvre des nouveaux concepts validés, qu’ils soient endogènes à l’OTAN ou générés hors Alliance.
Le processus est un renoncement
Nous en sommes là. 54 ans après la brutalité du panache stratégique gaullien, le processus est un renoncement. Aujourd’hui, alors que le pouvoir a abandonné à Bruxelles et à la Banque Centrale Européenne une partie de sa marge de manœuvre régalienne, en échange de la construction d’une Europe dont la voix peine à se faire entendre, quand on écoute les affirmations d’indépendance de la France, on est saisi par l’impression d’une paranoïa. La contradiction diffuse le sentiment d’un « théâtre politique » factice, probablement à la racine d’une désaffection électorale, dont l’ampleur est un défi pour notre démocratie.
Enfin, pour un pays européen déjà sévèrement frappé par d’autres menaces, dans une Union menaçant de se déliter, alors que le voisin grec est confronté à un défi migratoire lancé par le Grand Turc membre de l’Alliance, mais cependant engagé dans une stratégie de retour de puissance par le truchement d’une affirmation médiévale religieuse clairement hostile, aller gesticuler militairement aux ordres de Washington aux frontières de la Russie qui n’est depuis longtemps plus une menace militaire directe, traduit pour le moins une catalepsie intellectuelle, confinant à la perte de l’instinct de survie.
Il faut rechercher les racines de ce naufrage dans notre passé récent. S’étant abîmée à deux reprises au 20ème siècle dans le nihilisme suicidaire, la 2ème fois dans une abjection morale impossible à justifier, l’Europe a, en dépit des vastes apports de ses « lumières », perdu les ressorts moraux de l’estime de soi, condition première d’une affirmation de puissance.
Plus encore, le sillage mental de cet héritage insupportable véhicule toujours un parasitage du jeu démocratique. Interdisant à la pensée conservatrice de s’exprimer, la mémoire du génocide raciste plombe toutes les politiques de contrôle des flux migratoires et de répression des incivilités, y compris celles menaçant clairement l’intégrité du territoire.
Cette dépression morale de la Vieille Europe a conduit à son effondrement stratégique, laissant libre cours à l’empiétement américain. De ce point de vue, il n’est pas étonnant que l’Allemagne se soit aussi longtemps affirmée comme le premier point d’appui stratégique de l’Amérique en Europe.
Ajoutons que les accusations qui, dans ce contexte, où les menaces ont radicalement évolué, soupçonnent l’Amérique de perpétuer une mentalité de guerre froide hors du temps, ne manquent pas de pertinence. Le blocage politique antirusse de toutes les élites américaines confondues s’articule à l’obsession stratégique de perpétuer la raison d’être de l’OTAN, un des principaux adjuvants de la prévalence américaine après 1949.
Notons cependant que, sévèrement critiqué par sa propre bien-pensance, Trump qui harcèle verbalement l’Europe en même temps que la plupart de ses alliés, est, au contraire de son administration et du complexe militaro-industriel, favorable à un rapprochement avec la Russie.
Conclusion
Dans ce contexte dont il faut bien reconnaître que la trajectoire générale est à rebours de la décision de rupture gaullienne de 1966, que faire pour nous libérer de l’emprise américaine et initier un rapprochement avec Moscou ? Tirant le bilan des avantages / inconvénients de notre retour dans le commandement intégré avec cependant des responsabilités opérationnelles réduites, devrions-nous, balayant tous les inconvénients, tourner le dos à Washington désormais considéré par beaucoup comme un hostile ?
Le Dao chinois affirme que « la réalité se construit du battement des contraires ». Illustrant le mouvement cosmologique et la succession cyclique des saisons, la vision porte également sur les interactions entre les situations, les hommes et leurs organisations. Elle spécule que tout changement est le résultat d’une contrainte adverse, sans être nécessairement un affrontement hostile.
Dans le cas qui nous occupe, il est illusoire de croire que, sans une pression significative, les États-Unis modifieraient à la fois leur attitude de suzerain à l’égard des membres de l’alliance et leur hostilité anachronique avec la Russie.
L’épidémie qui frappe le monde bouleverse les routines et les repères. Elle met à jour les dysfonctionnements et les incohérences. Propice aux introspections, elle rappelle qu’à la chute de l’URSS, l’OTAN, saisie par un hubris de puissance a exercé de lourdes pressions sur les marches de la Russie, au-delà des frontières allemandes, mettant la sécurité de l’Europe en danger. Du coup, la crise incite à revenir à l’essentiel du régalien : la sécurité de la France et l’indépendance de sa diplomatie dont on voit bien qu’elles ne peuvent être abandonnées à d’autres.
Le moment est venu de tenter une pression sur Washington en engageant un dialogue stratégique avec Moscou. Si la France se dispensait de participer à certains manœuvres de l’OTAN aux portes de la Russie, anticipant une menace militaire classique aujourd’hui évaporée, elle sonnerait le réveil de la raison, « coup de cymbale » adressé à Washington et Moscou signifiant la fin des léthargies. Le but ne serait pas un renversement d’alliance, mais un rééquilibrage.
Au demeurant, l’initiative marquant le retour de notre indépendance n’a que trop tardé quand on songe que dans le document officiel « Joint Nuclear opérations»* référencé JP-3-72 récemment analysé par la Fondation pour la Recherche Stratégique le Pentagone planifie l’emploi d’armes nucléaires tactiques sur le théâtre européen dans les phases conventionnelles du combat aéroterrestre y compris celles impliquant les forces spéciales. Ce concept est scénarisé et mis en œuvre dans le prochain exercice OTAN Defender 2020 dans lequel l’envahisseur de certains pays européens est clairement désigné.
Si l’exercice a lieu, il devrait permettre de valider sur le papier l’emploi éventuel de nouvelles armes nucléaires tactiques sous contrôle des États-Unis que le traité INF de 1987 interdisait jusqu’en 2019. La France, en participant à cet exercice comme membre de la structure militaire intégrée de l’Otan cautionnerait cette nouvelle stratégie en contradiction complète avec la doctrine française de dissuasion qui refuse toute bataille nucléaire.
Surtout elle apporterait, involontairement, sa caution à la réactivation de la guerre froide avec la mise au ban occidental de la Fédération de Russie présentée comme l’agresseur potentiel principal des pays européens. Ce qui est, là également, en contradiction avec l’orientation actuelle de la diplomatie française qui vise un rapprochement avec la Russie.
Pour éviter que l’initiative d’un désistement français soit perçue comme une provocation par les pays baltes et les PECO, il serait nécessaire de placer la manœuvre diplomatique dans un contexte européen. Paris donnerait l’élan en coordination étroite avec l’Allemagne.
Dans cette démarche gardons-nous de deux écueils : le premier serait de tourner le dos à Washington, « Il s’agit de faire l’Europe sans rompre avec les Américains, mais indépendamment d’eux », répétait Charles de Gaulle ; le deuxième serait la tentation fédéraliste, tant il est vrai que « l’arbitraire centralisation provoquera toujours, par chocs en retour, la virulence des nationalités. (…) L’union de l’Europe ne saurait être la fusion des peuples (…) Mais elle peut et doit résulter de leur systématique rapprochement. » (Charles de Gaulle, Mémoires d’espoir).
Pour le Cercle de Réflexions Interarmées. Général (2S) François Torrès, Général (2S) Jean-Claude Rodriguez, Général (2S) Jean-Serge Schneider, Général (2S) Grégoire Diamantidis, Général (2S) Marc Allamand, Général (2S) Jean-Pierre Soyard, Contre-Amiral (2S) François Jourdier, Général (2S) Jean-Claude Allard, Général (2S) Christian Renault, Capitaine de Vaisseau (ER) Alexis Beresnikoff,
L’économie européenne devrait connaitre une récession de 7,5% en 2020… si tout se passe bien
par Ivan Lapchine
Ex: http://www.lesobservateurs.ch
En communiquant ses nouvelles prévisions, le 6 mai, la Commission européenne a prévenu que «l'économie de l'UE connaîtra[it] une récession dans des proportions historiques cette année». Elle devrait être à peu près semblable pour la moyenne des 27 Etats membres et pour la seule zone euro, avec des contractions des produits intérieurs bruts (PIB) respectives de 7,5% et 7,75%. Une reprise est attendue en 2021 aux environs de 6% pour les deux ensembles.
L’ampleur du choc causé par le coronavirus se constate dans celle de la révision brutale des prévisions de la Commission : elles ont été revues à la baisse d'environ neuf points de pourcentage par rapport à ce qui était envisagé à l’automne et de 6,5 points en seulement deux mois.
Tous les Etats membres ont été atteintes, mais pour l’année 2020, l’ampleur de la récession variera suivant les pays et la structure de leur économie. L’Espagne, la Grèce et le Portugal où le tourisme apporte habituellement une importante contribution économique seront les plus touchés avec près de 9% de contraction du PIB.
Le taux de chômage dans la zone euro devrait passer d’une moyenne de 7,5% en 2019 à 9,5% en 2020, avant de retomber à 8,5% en 2021. Dans l'UE, il devrait passer de 6,7% en 2019 à 9% en 2020, puis tomber à environ 8% en 2021. Certains Etats membres connaîtront une augmentation du chômage plus importante que d'autres. Ceux qui comptent une forte proportion de travailleurs sous contrat de courte durée et ceux dont une grande partie de la main-d'œuvre dépend du tourisme sont particulièrement vulnérables. Les jeunes qui entrent sur le marché du travail en ce moment auront également plus de mal à trouver leur premier emploi.
La zone euro proche de la déflation
Enfin, les prix à la consommation devraient chuter sensiblement cette année en raison de la baisse de la demande et de la forte baisse des prix du pétrole, qui, ensemble, devraient plus que compenser les hausses de prix isolées causées par les ruptures d'approvisionnement liées à la pandémie. La zone euro, se trouvera dangereusement proche de la déflation avec un indice de progression des prix de 0,2% en 2020, et à 1,1% en 2021. La situation ne sera guère meilleure pour la moyenne des 27 avec une inflation prévue à 0,6% en 2020 et 1,3% en 2021.
Après avoir baissé depuis 2014, le ratio dette publique/PIB devrait de nouveau augmenter en 2020. Dans la zone euro, il devrait passer de 86% à 102,75% et de 79,4% à 95% dans l’UE.
Incertitude «exceptionnellement élevée» et risques «orientés à la baisse»
Dans son communiqué, la Commission européenne ajoute que ses prévisions «sont assombries par un degré d'incertitude plus élevé que d'habitude». En effet, elles se basent sur un scénario qui prévoit un déconfinement progressif de l’activité économique en Europe à partir de mai. Mais la commission prévient qu’«une pandémie plus grave et plus durable […] pourrait entraîner une baisse du PIB beaucoup plus importante».
L’exécutif européen affirme avec insistance la nécessité d’un plan de relance coordonnée au niveau européen qu’elle prépare et espère faire accepter aux Etats membres malgré leurs divergences. Dans son communiqué la Commission européenne souligne qu’«étant donné l'interdépendance des économies de l'UE, la dynamique de la reprise dans chaque Etat membre affectera également la force de la reprise des autres Etats membres».
«Reprise collective» et «réponses coordonnées»
A ce sujet, Valdis Dombrovskis, vice-président de la commission a déclaré : «Notre reprise collective dépendra de la poursuite de réponses fortes et coordonnées aux niveaux européen et national. Nous sommes plus forts ensemble.»
Paolo Gentiloni, commissaire européen à l'économie, a pour sa part souligné que «tant la profondeur de la récession que la force de la reprise ser[aie]nt inégales, conditionnées par la vitesse à laquelle les fermetures peuvent être levées, l'importance des services comme le tourisme dans chaque économie et par les ressources financières de chaque pays». Et pour lui ces divergences entre les économies constituent «une menace pour le marché unique et la zone euro» qui peut toutefois être atténuée «par une action européenne commune et décisive».
Enfin, la Commission redoute un reflux de la mondialisation qu’elle caractérise par «des changements d'attitude plus radicaux et permanents à l'égard des chaînes de valeur mondiales et de la coopération internationale». Cette tendance, écrit-elle, «pèserait sur l'économie européenne très ouverte et interconnectée».
Deutschlands Automobilindustrie droht ein Desaster
Ex: https://kopp-report.de
Der bekannte Wirtschaftswissenschaftler Ferdinand Dudenhöffer hat eine düstere Prognose für die Automobilindustrie abgegeben. Nach Einschätzung des deutschen Hochschulprofessors, der an der Universität St. Gallen lehrt, wird sich die Branche weltweit frühestens im Jahr 2025 von den Nachwirkungen der Corona-Krise erholt haben. Das ist vor allem für die deutsche Volkswirtschaft eine schlechte Nachricht. Denn der Wohlstand unseres Landes ist maßgeblich vom Kraftfahrzeugbau abhängig, der mit 436 Mrd. Euro mehr als ein Fünftel zum Gesamtumsatz des verarbeitenden Gewerbes beisteuert und 836.000 Menschen beschäftigt.
In keinem anderen Land der Welt hat die Autoindustrie einen so großen Anteil an der heimischen Wertschöpfung wie bei uns. Wichtig auch: Etwa zwei Drittel der Einnahmen aus dem Verkauf deutscher Fahrzeuge werden im Ausland generiert. Doch dort wird die Nachfrage infolge des weltweiten Konjunktureinbruchs 2020 deutlich zurückgehen.
Dudenhöffer geht davon aus, dass der Autoabsatz in Asien im Vergleich zum Vorjahr von 32 Millionen verkauften Einheiten auf heuer 25,9 Millionen sinkt, ein Minus von über 19 Prozent. Für Nordamerika rechnet Dudenhöffer mit einem Absatzverlust von 4 Millionen Einheiten oder 20 Prozent gemessen an der Stückzahl, die 2019 erreicht wurde.
Und in Europa dürften nach den Berechnungen des Experten 2,8 Millionen Autos weniger abgesetzt werden als noch in 2019 (minus 17,7 Prozent), wobei Westeuropa wegen der schon heute hohen Marktsättigung stärker betroffen sein wird als der Osten des Kontinents, wo es in puncto Mobilität noch Nachholbedarf gibt.
Weltweit wird die Zahl der produzierten Autos im laufenden Jahr gegenüber 2019 um 14,4 Millionen Einheiten auf 65,2 Millionen einbrechen, was einem Rückgang von über 18 Prozent entspricht. Das wäre der niedrigste Stand seit 2011. Noch dramatischer sieht die Prognose für Deutschland aus. Bei uns soll der Ausstoß um 900.000 auf dann nur noch 3.800.000 Fahrzeuge sinken. 100.000 Arbeitsplätze stehen auf der Kippe. Bereits jetzt sind nach Angaben des Verbandes der Automobilindustrie (VDA) 400.000 Beschäftigte in der Branche von Kurzarbeit betroffen. Kein Wunder, dass die Hersteller auf eine möglichst schnelle Wiederaufnahme der Produktion drängen, die in einigen Werken bereits wieder anläuft, wenn auch nur eingeschränkt. Denn die Lieferketten aus dem Ausland sind fragil. Viele Fahrzeugkomponenten z.B. aus Norditalien stehen wegen des Shutdowns und der Ausfuhrbeschränkungen noch nicht wieder zur Verfügung.
Vor allem aber fehlt es an Nachfrage der Käufer. In Erwartung der von Wirtschaftsforschern vorhergesagten schweren Rezession und millionenfacher Arbeitslosigkeit halten sich die Verbraucher mit teuren Neuanschaffungen wie einem Auto verständlicherweise zurück. Im Vorfeld des am heutigen Dienstag stattfindenden Telefongipfels mit Bundeskanzlerin Merkel fordert der VDA deshalb eine vom Staat finanzierte, zeitlich befristete »Neustart-Prämie« als Anreiz, um Konsumenten zum Kauf eines Neuwagens zu motivieren. Insidern zufolge soll diese Prämie nach den Vorstellungen der Branche mindestens 2.500 Euro betragen. Dieser »Sockelbetrag« könne mit zusätzlichen Boni kombiniert werden, um den Absatz umweltfreundlicher Fahrzeuge im Sinne der Klimaschutzziele – zusätzlich zum bereits bestehenden Förderprogramm Elektromobilität (FEM) – zu unterstützen. Auch Jahreswagen sollen in das Prämienmodell einbezogen werden.
Ob sich die Branche mit diesen weitreichenden und für den Steuerzahler kostspieligen Forderungen wird durchsetzen können, bleibt abzuwarten. Eine politische Entscheidung soll heute noch nicht getroffen werden. Kritiker sehen in der Kaufprämie eine ungerechtfertigte Bevorzugung der Autoindustrie gegenüber anderen Branchen, die wirtschaftlich ebenfalls mit dem Rücken zur Wand stehen.
Im Übrigen stellt sich die Frage, ob sich der gewünschte Effekt in der jetzigen Phase tatsächlich einstellen würde. Denn noch ist die Corona-Epidemie nicht ausgestanden, eine zweite oder gar dritte Infektionswelle, wie sie z.B. bei der Spanischen Grippe der Jahre 1918/1919 auftrat, könnte eine erneute Verschärfung des Lockdowns durch die Politik zur Folge haben – ein Szenario, das von den Mainstreammedien gestützt auf die Aussagen des Robert Koch Instituts (RKI) und anderer einschlägig bekannter Virologen jeden Tag aufs Neue an die Wand gemalt wird. So lange diese Unsicherheit besteht, werden auch großzügige Kaufprämien die Konsumenten nicht dazu verleiten, in Scharen in die Autohäuser zu strömen. Notwendig ist eine langfristige Perspektive im Umgang mit dem Virus und ein politisches Konzept, das ein höchstmögliches Maß an Gesundheitsschutz vor allem für die besonders gefährdeten Gruppen der Bevölkerung gewährleistet, ohne dabei die Wirtschaft zu ruinieren. Daran fehlt es in Deutschland auch Monate nach dem Ausbruch der Pandemie bis heute.
Experte Dudenhöffer prognostiziert, dass sich der weltweite Automarkt erst 2025 wieder erholt haben wird. Erst dann könnten die Absatzzahlen des Jahres 2019, dem letzten Jahr von Corona, wieder erreicht bzw. leicht übertroffen werden. Von dieser Entwicklung dürfte Asien überproportional profitieren, weil hier die Motorisierung der Bevölkerung in vielen Ländern deutlicher geringer ist als in den Industriestaaten Nordamerikas und Europas.
Bis diese lange Durststrecke überwunden ist, wird es zu einer Schrumpfung der Branche kommen, um die bestehenden Überkapazitäten abzubauen, die Dudenhöffer auf 25 Prozent beziffert. Unabhängig von der aktuellen Krise wird dieser Strukturwandel zahlreiche gut bezahlte Jobs in der Automobilindustrie kosten, auch bei uns.
Eine zusätzliche Belastung speziell für die deutschen Hersteller resultiert aus der politischen Verteufelung des Dieselmotors und dem aus Gründen des »Klimaschutzes« erzwungenen Umstieg auf elektrisch betriebene Fahrzeuge, deren Produktion deutlich weniger Teile und damit auch Arbeitskräfte insbesondere bei den Zulieferern erfordert.
Der Autobranche stehen also schwere Zeiten ins Haus. Die Maßnahmen zur Bekämpfung der Virus-Pandemie haben die Lage noch einmal deutlich verschärft. Darunter werden hierzulande vor allem solche Bundesländer zu leiden haben, die große Produktionsstandorte beherbergen, etwa Niedersachsen mit VW in Wolfsburg, Nordrhein-Westfalen (Ford), Baden-Württemberg (Daimler-Benz, Porsche) und Bayern (BMW, Audi).
Ganze Regionen, in denen der Automobilbau wirtschaftlicher Taktgeber ist, droht der Niedergang, wenn dort in größerem Maßstab Jobs und damit Kaufkraft verloren gehen. Dafür verantwortlich sind Fehlentscheidungen der Politik, die nicht nur in der Corona-Krise, sondern schon zuvor getroffen worden sind!
Am vergangenen Wochenende hat sich der Souverän dieses Landes eindrucksvoll mit Demonstrationen zurückgemeldet und die Wiederherstellung seiner elementaren Freiheitsrechte eingefordert. Während Linksterroristen der Antifa einmal mehr versuchten, politisch Andersdenkende zu unterdrücken, führten Medien und Politik gleichzeitig eine Diffamierungskampagne gegen regierungskritische Bürger durch.
Deutschlandweit beteiligten sich Zehntausende Bürger an Demonstrationen und forderten ihre (eigentlich) vom Grundgesetz geschützten Rechte ein. Die Reaktionen der politisch-medialen Eliten darauf beweist einmal mehr, wie fortgeschritten der Meinungstotalitarismus in diesem Land bereits ist.
Anstatt Positionen des Volkes anzuhören, sein eigenes Handeln und seine eigenen Positionen zu hinterfragen, stellt der Mainstream lediglich erneut seine Diskursunfähigkeit unter Beweis. Jegliche Regierungskritik wird von der Staatspropaganda versucht als »Rechts« oder als eine »Verschwörungstheorie« zu framen. Die Protagonisten dieser Willkür reichen von herrschenden Politikern, Staatsjournalisten von ARD und ZDF sowie deren Anhängsel bei Spiegel, Süddeutsche und Co. bis zu den schwarzuniformierten Linksterroristen der Antifa.
Die Meinungsfreiheit in diesem Land ist auf den Personenkreis beschränkt, der die Meinung des Mainstreams widerspiegelt und die Meinung der Regierung beklatscht.
Das Waffenarsenal der Totalitären ähnelt in der Corona-Krise auch deren Vorgehen bei Themen wie Flüchtlingskrise, Migration, Ausländerkriminalität und Islam. Auch bei diesen Themen verweigern sie sich jeglicher Diskussion, weil sie argumentativ nicht in der Lage sind eine offene Debatte zu führen, geschweige denn diese für sich zu gewinnen.
Mangels Argumenten bedienen diese sich einzig einem moralisierenden Ton, der allein darauf gerichtet ist, jeglichen Diskurs im Keim zu ersticken. Betraf es vor Corona mehrheitlich Bürger die politisch rechts von einer extrem nach links gerutschten Merkel-CDU standen, erfahren aktuell Millionen Bürger dieses Landes, wie schnell und wie willkürlich man von dieser Regierung und ihren Staatsmedien als »Verschwörungstheoretiker« zu stigmatisieren versucht wird:
• Sie haben sich eine eigene Meinung zum Coronavirus gebildet? – Verdachtsfall Verschwörungstheoretiker!
• Sie haben eine regierungsabweichende Meinung zum Coronavirus? – Verschwörungstheoretiker!
• Sie äußern öffentlich eine regierungswidersprechende Meinung zum Coronavirus? – Rechter Verschwörungstheoretiker!
Stasi-Journalismus bei der Tagesschau
Vorneweg bei dieser »Menschenjagd« marschiert die Tagesschau der ARD. Ein Artikel auf tageschau.de über eine Demonstration für Grundrechte ist mit »Jahrmarkt der kruden Ideen« betitelt.
Die Kommentarfunktion ist hier natürlich abgeschaltet. Die Diffamierungen der mit über acht Milliarden Euro zwangsfinanzierten medialen Blockwarte, in diesem Fall zeichnet die »Journalistin« Silvia Stöber für dieses Machwerk verantwortlich, sind mehrheitlich nach dem gleichen Muster aufgebaut. Obwohl deutschlandweit zehntausende und in dem Berliner Fall mehrere hundert Menschen aus der Mitte der Gesellschaft sich friedlich versammelten, um für ihre Freiheitsrechte einzustehen, suchen sich die Häscher der ARD gezielt diskussionswürdige Minderheitenmeinungen aus der Menge heraus, um damit dann die Demonstration als Ganzes zu stigmatisieren.
Ein Mann hält ein kleines Pappschild mit der Aufschrift »5 G Kills« vor sich und wird sofort fotografiert und für die Bebilderung des Artikels verwendet. Die wenigsten Bürger auf dem Rosa-Luxemburg-Platz dürften mit der »Verschwörungsideologie QAnon«, so Silvia Stöber auf tageschau.de, bekannt, geschweige denn mit dieser übereinstimmen, doch trotzdem wird diese Einzelmeinung ganz am Anfang prominent in den Artikel eingebaut, um die gesamte Demonstration ins Lächerliche zu ziehen – dieser ein verschwörungsideologisches framing zu verpassen.
Die drehende Stimmung in der Bevölkerung lässt die Merkel-Regierung und ihre medialen Handlanger merklich nervöser werden. Doch selbst die reihenweise Aufhebung der Zwangsmaßnahmen durch Gerichte lässt den Staatsapparat nicht innehalten, sondern immer wilder um sich schlagen.
Erfahren muss dies aktuell der Rechtsanwalt und FDP-Bundestagsvizepräsident Wolfgang Kubicki. Im Angesicht des Festhaltens der Bundesregierung an den weitreichenden Grundrechtseinschränkungen kritisiert Kubicki:
»Mittlerweile habe ich das Gefühl, einige Ministerpräsidenten gefallen sich in der Rolle, dass sie auftreten können wie Sonnenkönige und den Eindruck vermitteln, die Gewährung von Freiheiten seien Gnadenakte.«
Auch bezüglich der widersprüchlichen Argumentation zur Einschränkung elementarer Freiheitsrechte der Bundesregierung und des Robert-Koch-Instituts leistet sich Kubicki eine eigene Meinung. Bekanntlich wurden die Zwangsmaßnahmen zuerst mit der Verdopplungszahl der Infizierten begründet, als diese das vorgegebene Ziel unterschritten, führten die Berliner Eliten nun die sogenannte Reproduktionsrate als alles verbindliche Messlatte an. Ein mehr als befremdliches Verhalten findet auch Kubicki:
»Heute habe ich gelernt, dass der R-Wert offenbar gar nicht mehr alleine aussagekräftig ist, anders, als es die Bundeskanzlerin Mitte April noch vermittelte. Was mich wundert, weil wesentliche Grundrechtseinschränkungen mit diesem R-Wert begründet worden sind.«
Weiter äußert sich Kubicki: »Ein Schelm, wer Böses dabei denkt. Der R-Wert des Robert-Koch-Instituts steigt ausgerechnet zur Konferenz der Kanzlerin mit den Ministerpräsidenten, bei der vor weiteren Lockerungen gewarnt werden soll“, so der Bundestagsvizepräsident. Er haben den Eindruck, dass die Zahlen »politisch motiviert« seien, so Kubicki.
Die Bundesregierung und die Mainstream-Medien verstricken sich immer tiefer in Widersprüche um die Zwangsmaßnahmen aufrechtzuerhalten und werden dabei ertappt und vorgeführt.
Was meinen Sie, wie die Bundesregierung darauf reagiert? Einsicht? Aufklärung? Und mit dem Einräumen der widersprüchlichen Positionen?
Natürlich nicht, die Staatsmacht schaltet umgehend in den Diffamierungsmodus. Der Chef der bayerischen Staatskanzlei Florian Herrmann (CSU) nahm Kubicki ins Visier und verbreitete über die Medien: »Diesen Vorwurf halte ich für äußerst problematisch… Das sind Vorwürfe, die man normalerweise nur von der AfD kennt. Das sind Verschwörungstheorien.«
Sur l’interdiction du Hizbollah en Allemagne ou force salamalecs pour Israël
Malgré la crise du coronavirus, il y a tout de même d’autres thématiques sur lesquelles il conviendrait de s’entretenir. Parmi celles-ci, l’interdiction en Allemagne du Hizbollah chiite, désormais posé comme « organisation terroriste » suite à de longues pressions du lobby pro-israélien, interdiction qui est l’œuvre du ministre de l’intérieur allemand Seehofer, surnommé « Drehhofer », du verbe « drehen », « tourner », tourner comme une girouette. Cette gesticulation de Seehofer-la-girouette est, sur le plan politique, totalement dépourvue de sens car, d’abord, le Hizbollah ne commet pas d’attentats terroristes sur le sol allemand, et, ensuite, cette interdiction postule, très logiquement, qu’il aurait fallu aussi rompre toutes relations diplomatiques avec le Liban car, dans ce pays du Levant, le Hizbollah participe régulièrement à l’exercice du pouvoir.
Cet incident démontre une fois de plus, et très clairement, que la politique dite « allemande » est dictée par d’autres et qu’en aucun cas elle est faire par des Allemands pour des Allemands. Comme j’ai pu le constater personnellement après plusieurs visites à ce pays, le Hizbollah bénéficie au Liban d’une aura considérable tant chez les chrétiens que chez les musulmans. Pourquoi ? Parce que, d’une part, il dispose d’un vaste réseau d’organisations caritatives et, d’autre part, il a la réputation de pouvoir tenir tête militairement et efficacement tant aux Israéliens qu’aux terroristes sunnites de l’Etat islamiste (soutenu par Israël et les Etats-Unis). C’est donc avec raison qu’un représentant du conseil des gardes de la révolution iranienne a pointé l’attention du gouvernement fédéral allemand, suite à l’interdiction proclamée par Seehofer, pour lui dire que le Hizbollah a contribué de manière importante à ce que les coupeurs de têtes de l’Etat islamiste n’ont pas pu étendre leurs activités dans les capitales européennes au cours de ces dernières années (voir le lien : https://www.almasdarnews.com/…/hezbollah-prevented-isis-fr…/).
On déplorera tout particulièrement une chose dans cette affaire de l’interdiction du Hizbollah en Allemagne : le médium « Compact » (revue + chaîne TV) de Jürgen Elsässer, qui se déclare « non conformiste », a appuyé la décision ridicule et Israel-friendly de Seehofer en la décrivant comme un « coup contre les islamistes ». Cela nous permet de poser un constat : toute expression de l’Islam-bashing fait toujours mouche dans les milieux « populistes de droite » qui, décidément, demeurent complètement désorientés dans leurs postures idéologiques.
Plus pénible encore : la première demande d’interdiction du Hizbollah date de juin 2019 et vient précisément des élus de l’AfD au Bundestag et avait été, à l’époque, rejeté à la majorité ! Raison de plus pourquoi il conviendrait de voir en l’AfD, qui a décidé de se poser comme, je cite, « pro-juif à 100% », tout ce que l’on veut sauf une réelle alternative pour l’Allemagne.
Restons-en aux faits : en 2006, le Hizbollah avait empêché que le Sud du Liban soit conquis et absorbé par les Israéliens. Israël ne l’a jamais oublié, tout comme le fait, d’ailleurs, que le Hizbollah est désormais une partie constitutive du « corridor chiite » et constitue dès lors un facteur géopolitique de poids dans la région. Mais ce n’est pas là notre problème. Ce qui compte surtout, c’est que le Hizbollah n’a jamais poursuivi l’objectif d’islamiser le monde entier ni d’envoyer des barbus complètement camés pour commettre des attentats-suicides dans le monde. Mettre sur le même plan le Hizbollah, d’une part, et al Qaeda ou l’Etat islamique, d’autre part, relève de la stupidité politique et de l’aveuglement idéologique. L’interdiction par Seehofer -cet homme sait-il faire autre chose qu’interdire ?- fait honte : ce n’est pas là mon gouvernement, ce n’est pas là mon Allemagne.
Si l’État italien s’est trouvé dépassé par l’ampleur de la crise, des militants de Casapound ont apporté à leur échelle, une pierre précieuse pour venir en aide au peuple romain.
L’Italie a été le premier pays d’Europe a être particulièrement touché par l’épidémie du Covid-19. Avec 28.884 décès et 211.000 cas confirmés dans toute la botte à ce jour, les Italiens entament un déconfinement progressif à partir du 4 mai. Malgré une crise sanitaire inquiétante et un État qui semble dépassé, les militants de la Casapound ne se sont pas laissé abattre par la fatalité.
Convaincu de la nécessité de servir leur peuple avant tout, les militants ont bravé le confinement pour distribuer plusieurs tonnes de produits élémentaires aux habitants de la capitale, ont accompagné les Italiens durant ces longues semaines au rythme des émissions de Radio Bandiera Nera et ont même organisé des vidéoconcerts de leurs groupes phares : Bronson ou encore Ultima Frontiera.
Pierre d’Her vit à Rome depuis plusieurs années, il a participé aux élans de solidarité au cœur de la ville éternelle. Pour Infos-Toulouse, il décrypte ces heures sombres vécus par tout un peuple, et qui risquent de ne pas s’arrêter au déconfinement. Surveillance, répression et précarité risque de succéder à la crise sanitaire.
Infos-Toulouse : Quelle est la situation sanitaire aujourd’hui en Italie ? Pierre d’Her : Les chiffres de contaminations, de décès et de guérisons montrent que la situation s’améliore en particulier dans le nord du pays. Le bilan atteint un peu plus de 28.000 décès, mais bien malin celui qui peut réussir à lire correctement ces chiffres. La moyenne d’âge des personnes décédées est de 79 ans, au 28 avril, seul 4,7% des victimes étaient âgées de moins de 60 ans. Le pays tarde pourtant à redémarrer, les autorités faisant peser le spectre de la reprise de la contamination en cas de libre circulation de la population.
On reproche en France une gestion hasardeuse de la crise, que dire du gouvernement italien ? Le gouvernement italien actuel a mal géré la crise mais a aussi payé des années de coupures budgétaires dans le domaine de la santé. Le manque de lits disponibles, de ventilateurs pulmonaires, de stocks de masques et de matériel de protection pour le personnel soignant n’est certainement pas uniquement la faute du gouvernement actuel mais des 30 milliards de coupures budgétaires de ces vingt dernières années. Comme en France, le vrai coupable est le système libéral.
Les fautes du gouvernement sont certainement d’avoir mis beaucoup de temps à réagir. En janvier, alors qu’il était encore possible d’intervenir avec des quarantaines limitées et l’investissement dans le dépistage, on nous disait que le virus n’atteindrait pas l’Italie et que le pays était de tout de façon prêt à se défendre.
« 40% des bars et restaurants ne rouvriront pas »
L’Italie a toujours eu une réputation particulière en termes de gestion. Nous dirige-t-on vers des scandales ? Les premiers scandales de gaspillage voire de détournements d’argent public sont déjà en train d’être découverts. 30 millions d’euros ont été débloqué par la région Lazi pour acheter des masques, dont le tiers a déjà été versé à une fantomatique société au capital de 10.000 euros, spécialisée dans la vente… d’ampoules électriques, véridique ! On attend encore la livraison. Ajoutant que le prix de vente de ces masques dépassait d’un tiers le prix du marché on se demande bien à qui a profité le crime…
Dans une Italie déjà précaire, à quelles conséquences doit-on s’attendre économiquement ? Les millions de salariés mis au chômage technique n’ont pas encore touché un centime et les prévisions les plus optimistes parlent du mois de juin pour les premiers versements. Les titulaires d’activités ont touché 600 euros d’aides, ce qui pour la plupart des commerçants ne représente qu’un infime pourcentage des dépenses mensuelles sachant que les factures continuent à arriver et que le paiement des charges sociales n’a pas été annulé mais juste repoussé.
Beaucoup craignent la réouverture car les vautours viendront tous présenter la facture. Juste à Rome, on estime que 40% des bars et restaurants ne rouvriront pas, ainsi que 45% des hôtels. D’autre part, la gestion de la sortie de crise est très inquiétante, le gouvernement voulant imposer des mesures de contrôle sanitaire qui empêchera les commerces de travailler en limitant le nombre de clients, en imposant de nombreux frais pour procurer du gel, des gants, des masques aux clients et au personnel, et en imposant dans certains cas le paiement électronique, diabolisant l’argent liquide vecteur de transmission de microbes mais surtout outil d’évasion fiscale. Le 18 mai, vous aurez le droit d’aller travailler et juste de gagner ce qu’il vous faut pour survivre et payer vos impôts, ne vous avisez pas de penser que vous aurez le droit de vous divertir. Avec l’été qui arrive, les scénarios les plus fous sont envisagés, comme l’interdiction des plages publiques, les phases horaires programmées pour accéder aux plages privées, l’interdiction des jeux de balle et un nombre limité de baigneurs distants l’un de l’autre.
Près de dix tonnes de produits élémentaires distribués aux Romains
Casapound s’est particulièrement mobilisé pendant cette crise. Quel a été l’engagement de ses militants durant ses longues semaines ? Pour ce qui est de la maison mère, il a bien sur fallu réorganiser les tours de garde car de nombreux militants ne pouvaient plus se déplacer sans risquer des amendes salées. Pour ce qui est de la solidarité et du travail des militants, nous avons organisés de nombreuses collectes et distributions alimentaires dans les différentes villes d’Italie et en particulier deux grosses distributions à Rome les 21 avril et 1er mai derniers où furent donnés de l’aide à prêt de 500 familles. Certains étaient sur place, d’autres, ne pouvant pas se déplacer furent livrés par nos militants et une flotte de taxis mis à disposition gratuitement.
Certaines de nos communauté en ont aussi profité pour faire quelques travaux dans les sections et pour nettoyer et occuper de nouveaux espaces comme ce fut le cas à Ostie. À noter aussi que cette quarantaine a eu au moins l’avantage d’augmenter l’audience de nos médias comme le Primato Nazionale en ligne et sur papier, l’activité de la Testa di Ferro fut stimulée par le temps libre pour lire et enfin notons le grand retour de notre radio en ligne, Radio Bandiera Nera, qui bénéficie de taux d’écoutes tout à fait honorables. Comme beaucoup, nous avons aussi organisés des concerts et conférences en ligne et en direct.
Notons l’initiative dite des « Mascherine tricolore », les masques tricolores qui organisent dans toute l’Italie des centaines de manifestations pour rappeler au gouvernement que les masques protègent des virus et ne sont pas faits pour rendre le peuple muet.
Comment ce sont déroulés ces distributions à la population ? Ce sont prêts de 10 tonnes de denrées de première nécessité qui furent distribuées. Eau, pâtes, riz, conserves, produits pour l’hygiène personnelle et désinfectants. De nombreux militants sont venus pour distribuer et assurer la sécurité des personnes venus récupérer les colis. En effet, la police n’aurait pas hésité à tout interrompre et à distribuer des PV si le nombre n’était pas de notre côté. Malheureusement, cet État est encore plus policier qu’auparavant et a transformé de nombreux concitoyens en petits espions paranoïaques et jaloux. Hier encore, les policiers de la Digos (les RG Italiens) filmaient pour augmenter leurs archives et un hélicoptère nous survolait.
D’une manière plus concrète, on ne peut qu’avoir un immense sentiment de tristesse de voir ces Italiens en file pour attendre quelques kilogrammes de pâtes et de la lessive. Des pères et des mères de famille « normaux », des personnes âgées accompagnées par nos jeunes militants jusqu’à la maison. Le tout s’est déroulé dans le calme et le silence car il n’y a rien à fêter, silence interrompue deux fois pour écouter « L’inno a Roma » de Pucini et l’hymne national Italien. À noter comme je vous le disais précédemment, la présence d’une trentaine de chauffeurs de taxi qui avaient répondu à notre appel pour apporter des colis à des familles ne pouvant pas se déplacer : huit familles à Talenti, cinq familles à la Magliana, six familles à Tor Vergata… Les voitures se remplissaient de dizaines de kilos de sacs et de packs d’eau.
« Une majorité des citoyens sont dociles voire pire complices »
Quels lendemains sont à prévoir en Italie, à la sortie de cette période ? C’est une catastrophe annoncée. L’économie italienne était déjà mal en point depuis la mise en place de l’Euro. L’endettement colossal du pays, augmentée dans les derniers mois d’une manière exponentielle a déjà valu à la dette italienne d’être notée comme « Junk bonds », vendredi dernier par l’agence de notation Fitch. On a ici le sentiment que l’idée est d’éliminer définitivement la classe moyenne, le commerce indépendant et de proximité au profit des chaînes. Le bilan est dur à faire mais on estime qu’un tiers des commerces ne rouvrira pas. L’industrie du tourisme est sinistrée pour au moins un an, les millions d’Américains et d’Asiatiques venant visiter le pays chaque année n’étant pas attendus avant longtemps.
Les politiciens parlent d’augmenter le télétravail ce qui ne peut se faire que dans certaines branches et de livraisons à domicile pour les restaurants ce qui provoquera outre un changement radical de la profession, la mort assurée de nombreuses activités.
La chose inquiétante est la sorte d’apathie de la population. À force d’avoir cultivé cette idée de peur de la mort, quasiment irrationnelle à moins d’être âgée, en mauvaise santé ou particulièrement malchanceux, une majorité des citoyens sont dociles voire pire complices, appelant au besoin les forces de l’ordre pour dénoncer un voisin qui aurait reçu une visite ou une famille sur un toit à griller des saucisses. Peu de gens s’indignent que l’on utilise des drones ou des hélicoptères pour chasser les promeneurs solitaires sur une plage déserte ou dans la montagne. Malgré les 25 degrés à Rome, un nombre non négligeable de personnes portent en plus du masque, qui n’est pas obligatoire à part dans les endroits fermés, des doudounes, bonnets et capuches pour se protéger du monstre COVID.
Sera-t-il possible de vous rendre visite prochainement ? Si tout va bien dès juin, tous les commerces et hôtels devraient être rouverts mais certainement avec des restrictions que nous ne connaissons pas encore. Pour ce qui est de CasaPound, elle n’a jamais fermée, elle demeure un îlot de liberté que l’on peut toujours rejoindre si l’on est un renard furtif.
Il n’a fallu que quelques instants, le 16 mars, pour que le chef de l’État et son gouvernement, au nom de la lutte contre la pandémie de coronavirus, assignent à résidence les Français et les privent de la plupart de leurs libertés civiles, politiques et sociales que l’on croyait inaliénables : liberté d’aller et de venir, liberté de réunion, liberté d’entreprendre, liberté de travailler, etc. La justice a été mise quasiment à l’arrêt, les avocats confinés, les détentions provisoires automatiquement prolongées, les forces de l’ordre (entendues dans un sens très extensif puisqu’elles incluent les policiers municipaux et assimilés) investies des pleins pouvoirs appliquer ces mesures privatives de liberté.
Le confinement sans base légale
Cette suspension de l’État de droit s’est faite sans base légale. En effet, le décret du 16 mars restreignant les déplacements des citoyens n’entre pas dans les compétences du pouvoir exécutif, puisque seul un juge judiciaire, le juge des libertés, peut normalement en décider sur une base individuelle. Néanmoins, la justice administrative, en l’occurrence le Conseil d’État, l’a validé en s’appuyant sur la théorie jurisprudentielle des « circonstances exceptionnelles », ce qui n’est sans doute pas sa décision la plus inspirée.
Ce n’est que le 23 mars que le Parlement a donné une base légale aux mesures annoncées le 17 mars en votant dans la précipitation la loi créant un « État d’urgence sanitaire » qui autorise le gouvernement à le déclencher « en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population », une définition particulièrement floue. Toute cette loi cultive le flou, les infractions qu’elle prévoit laissant par exemple une large part à l’interprétation policière et donc à l’arbitraire. Reconductible par le Parlement - éventuellement pour une durée supérieure à deux mois- il donne les pleins pouvoirs à l’exécutif, le Parlement étant dépouillé de ses pouvoirs et réduit au rôle de simple spectateur. Si l’Assemblée n’a pas modifié le projet du gouvernement, le fait majoritaire étant ce qu’il est, le Sénat, dominé par la droite classique, a heureusement réussi à introduire quelques garde-fous dans ce texte improvisé et mal ficelé en prévoyant notamment qu’il cessera de s’appliquer en tout état de cause le 1er avril 2021, sauf vote d’une loi contraire. Une précision fondamentale à laquelle les services du gouvernement n’avaient curieusement pas pensé.
Pas tout à fait une dictature
Il est remarquable que cette législation d’exception, justifié par le recours à un langage guerrier unique en Europe (« Nous sommes en guerre ») n’ait pas fait l’objet d’une saisine du Conseil constitutionnel, l’opposition, tout aussi interdite de terreur que l’opinion publique, ayant renoncé à exercer ses droits, un fait sans précédent, alors qu’il s’agit d’une atteinte particulièrement grave à l’État de droit. Les juges constitutionnels n’ont été saisis que sur un point de détail, la suspension des délais pour juger des questions préjudicielles de constitutionnalité (QPC), une disposition qu’il a d’ailleurs validée.
Tant que l’État d’urgence sanitaire s’appliquera (jusqu’à la fin du mois de juillet vient-on d’apprendre), la France n’est plus une démocratie, même si elle n’est pas tout à fait une dictature. En son temps, François Mitterrand avait dénoncé le « coup d’État permanent » qu’étaient les institutions de la Ve République. Le coronavirus a permis d’aller jusqu’au bout de cette logique institutionnelle. Le chef de l’État, s’appuyant sur une majorité soumise et face à une opposition inexistante, s’est emparé de tous les leviers de pouvoir en invoquant la nécessité de préserver la santé des Français et une urgence sanitaire qu’il n’a pas voulu voir venir, lui qui dix jours plus tôt incitait les Français à continuer à vivre comme avant.
Cette mise entre parenthèses de l’État de droit s’est accompagnée de l’arrêt brutal d’une grande partie de l’économie, conséquence logique du confinement. Surtout, le gouvernement a décidé, sans aucune concertation, quels commerces pourraient rester ouverts, contraignant les entreprises à mettre au chômage partiel plus de 11 millions de salariés du secteur privé.
Absence de débat
Il est proprement sidérant que ces pouvoirs exceptionnels confiés à l’Etat pour appliquer un confinement brutal et sans nuance à tout un pays, l’un des plus durs d’Europe avec ceux de l’Espagne, de l’Italie et de la Belgique, n’ait donné lieu à aucun débat, comme s’il n’y avait pas d’autre choix. Pourtant, jamais une démocratie n’a utilisé dans le passé cette méthode pour lutter contre une pandémie (il y a seulement eu des confinements partiels au début du siècle précédent), notamment lors de la grippe espagnole de 1918-1919, de la grippe asiatique de 1959 ou de la grippe de Hong Kong de 1969. Le fait que le confinement ait été une solution inventée par la Chine, un régime totalitaire, pour contenir la pandémie de coronavirus aurait dû au minimum interroger sur sa légitimité. Pourtant, il s’est imposé presque naturellement, tout se jouant en réalité lorsque l’Italie a pris la décision de confiner l’ensemble de sa population à compter du 10 mars, ce qui a provoqué un effet domino, chacun voulant montrer qu’il avait aussi à cœur de protéger sa population : l’Espagne l’impose le 15 mars, la France le 16, la Belgique le 18...
Pourtant, il y avait matière à débattre et sur tous les plans. Sur le principe du confinement lui-même d’abord. Car il n’est qu’un pis-aller visant à ralentir la propagation du virus et éviter un engorgement des hôpitaux qui pourrait se traduire par des morts additionnels. En clair, le virus continuera à circuler et à tuer ceux qu’il doit tuer après la levée du confinement - dans une proportion que personne ne connait- puisqu’il n’existe et qu’il n’existera pas avant un ou deux ans un vaccin et que les traitements en sont encore au stade expérimental.
Le confinement est un piège politique
Manifestement, personne n’a réalisé qu’il risquait d’être très difficile de sortir sans dommage politique du confinement une fois décidé, une partie de l’opinion publique risquant de s’autopersuader au fil des jours qu’il s’agit en fait d’éradiquer la maladie. Si la pandémie continue à tuer, et elle le fera, le gouvernement sera automatiquement accusé de mettre en danger la santé de ses citoyens pour sauver « l’économie », un gros mot pour une partie des Français comme si le fait de travailler pour vivre était secondaire par rapport à la santé… Autrement dit, la tentation sera forte de revenir au confinement aveugle pour faire taire les polémiques ou d’en sortir le plus tard possible, la voie choisie par la France après six semaines d’État d’urgence sanitaire.
C’est d’ailleurs pourquoi des pays comme la Suède, la Suisse, l’Allemagne ou encore les Pays-Bas soit n’ont pas adopté cette stratégie, laissant la vie suivre son cours normal, soit l’ont appliqué avec beaucoup plus de finesse, ce qui a permis d’éviter d’en passer par la case des pouvoirs exceptionnels confiés à l’exécutif et surtout de casser l’économie.
Pourquoi confiner tout un pays ?
Ce verrouillage total d’un pays est d’autant plus discutable que des régions entières étaient et sont encore quasiment épargnées par le virus : pourquoi imposer le même traitement à la Creuse qu’à l’Ile de France, aux Pouilles qu’à Milan ? Pourquoi n’avoir pas confiné en fonction de l’extension de la pandémie, exactement comme l’a fait l’Allemagne, où les Länder sont compétents en matière de santé publique, avec le succès que l’on sait ? Ainsi, dès le départ, deux foyers ont été identifiés en France : l’Oise et Mulhouse. Or, plutôt que de réagir immédiatement en isolant ces deux régions et en déployant des moyens médicaux militaires pour soulager les hôpitaux, le gouvernement a tergiversé laissant le virus se répandre. Il reste sidérant qu’il ait fallu attendre le 24 mars, soit une semaine après la décision de confiner le pays, pour que le service de santé militaire soit envoyé en renfort à Mulhouse ! De là à penser que le confinement total ait aussi été motivé par l’incapacité des autorités à anticiper la crise, il n’y a qu’un pas que je me garderai bien de franchir.
De même, le choix des entreprises à fermer et des mesures de précautions à prendre aurait aussi été un champ de discussion possible. Par exemple, on a rapidement su que l’air conditionné permettait au virus de circuler au-delà d’un mètre et de contaminer de nombreuses personnes. Dès lors, fermer les cordonneries, les galeries d’art ou les fleuristes et laisser les supermarchés ouverts a-t-il un sens médical ? De même, la fermeture des écoles était-elle nécessaire ? Tout cela a été laissé à l’appréciation d’une bureaucratie sans contrôle et sans aucune concertation avec l’ensemble des acteurs économique et sociaux.
Pourquoi assigner à résidence une population entière ?
Enfin, il est apparu très tôt que la maladie était en très grande majorité fatale pour les personnes âgées de plus de 70 ans (moyenne d’âge des décès en Italie ou en France : 80 ans) et celles qui ont des pathologies graves, en clair les personnes affaiblies. Dès lors, confiner tous les actifs et plonger le pays en récession était-il rationnel ? Peut-être aurait-il fallu se concentrer sur la protection de ces groupes à risques plutôt que de mettre sous cloche tout un pays sans penser au lendemain, d’autant qu’on sait pertinemment que le virus est là pour longtemps.
Le débat devient, à ce point-là, particulièrement émotionnel, car il renvoie à notre rapport à la mort. Pourquoi une telle pandémie, qui n’est pas la première que le monde ait affrontée et qui est surtout très loin d’être la plus mortelle de l’histoire, a-t-elle conduit des États à décider de mesures sans précédent tout en sachant qu’elles n’étaient pas un remède ? Pourquoi une telle panique, surtout si l’on compare la mortalité causée par le coronavirus avec celle des autres maladies ? Même s’il faut être encore prudent, puisque cinq mois après son apparition, on sait toujours aussi peu de chose du covid-19, ce qui devrait nous mettre en garde sur le scientisme qui nous a saisis, les médecins ayant dit tout et son contraire sur cette pandémie, rendant ainsi la décision politique particulièrement difficile. Mais rappelons néanmoins que 400.000 nouveaux cancers sont diagnostiqués chaque année en France et que 150.000 Français en meurent et pourtant tabac et alcool ne sont toujours pas interdits alors que cela permettrait d’en éviter une bonne partie. Si toute vie mérite d’être sauvée, pourquoi se monter si désinvolte à l’égard du cancer ? De même, les grippes saisonnières (alors qu’il existe un vaccin qu’une grande majorité estime dispensable) tuent chaque année entre 3000 et 15.000 personnes (sans parler des plus de 30.000 morts de la grippe de Hong Kong en 1969 dans un pays de 51 millions d’habitants ou du nombre équivalent de morts en 1959 dans un pays de 45 millions d’habitants), les infections saisonnières respiratoires 68.000 personnes, les accidents de la route 3500 personnes auxquels il faut ajouter les handicapés à vie. Et pourtant, personne n’a songé à interdire la voiture (et chaque mesure visant à renforcer la sécurité suscite son lot de protestations, rappelons les 80 km/h) ou à faire de la lutte contre la pollution ou la malbouffe un impératif catégorique.
Si on regarde les statistiques de la mortalité dans le monde, on s’aperçoit que la faim (pourtant facile et peu couteuse à éradiquer), la malaria, le SIDA ou encore les guerres (souvent faites avec les armes produites par nos industries) tuent infiniment plus que le coronavirus ne tuera jamais.
Choisis ton camp camarade, mais il n’y a qu’un camp du bien, celui du confinement !
Il faudrait sans doute interroger la responsabilité des médias audiovisuels dans cette panique qui s’est emparée des opinions publiques occidentales (avec une exception allemande, les télévisions germaniques ayant volontairement décidé de traiter le covid-19 à la place qu’il mérite). Annoncer tous les matins le nombre de morts sans les mettre en perspective (par rapport à la moyenne habituelle des morts, leur âge, la comorbidité dont ils souffraient, etc.), consacrer des journaux entiers à la pandémie ne peut qu’ébranler même les têtes les mieux faites... Imaginez que chaque matin on égrène le nombre de morts en France toutes causes confondues et qu’on y consacre l’ensemble des journaux : qui oserait encore tout simplement vivre ?
Il ne s’agit pas de dire qu’une mort n’a aucune importance, mais simplement que toute politique publique doit faire l’objet d’une évaluation coût-bénéfice. Si on n’interdit pas les ventes d’armes, le tabac, l’alcool, la voiture, les camions, les centrales thermiques, c’est parce que collectivement nous estimons que le coût serait supérieur au bénéfice que nous en tirerions. Mais ce débat, dans la déferlante émotionnelle qui dure depuis deux mois, est de fait interdit. Ceux qui ont osé questionner la stratégie choisie et surtout sur sa durée ont été cloués au pilori par les plus radicaux, ceux qui se font entendre. Être opposé à la prolongation du confinement, c’est être pour le « sacrifice » de ceux qui sont malades, « cracher à la gueule des morts » et j’en passe. Bref, choisis ton camp camarade, mais il n’y a qu’un camp du bien, celui du confinement ! J’ai même été menacé de mort, moi et ma famille, par de braves gens qui estiment que toute vie doit être sauvée à n’importe quel prix sans que la contradiction de leurs propos ne leur effleure l’esprit pour avoir osé m’interroger dans deux tweets du 9 avril, trois semaines après le début du confinement : « C’est dingue quand on y songe : plonger le monde dans la plus grave récession depuis la seconde guerre mondiale pour une pandémie qui a tué pour l’instant moins de 100.000 personnes (sans parler de leur âge avancé) dans un monde de 7 milliards d’habitants. La grippe saisonnière, qui tue surtout les jeunes enfants, c’est entre 290.000 et 650.000 par an dans le monde. Et tout le monde s’en tape, mais grave ».
La récession la plus grave de tous les temps hors période de guerre (et encore)
Or, le confinement va entrainer une récession inimaginable par sa violence : elle devrait atteindre entre 8 % et 15 % du PIB, un recul de l’activité sans précédent en temps de paix (il faut remonter à 1942 pour enregistrer une récession de -10 %). Jamais on n’a mis une économie totalement à l’arrêt comme on vient de le faire, il faut en prendre conscience. Le chômage partiel touche désormais près de douze millions de travailleurs (un salarié du privé sur deux !) et les licenciements secs entrainés par des milliers de faillites d’entreprises vont se compter par centaines de milliers voire millions une fois que le dispositif de chômage partiel pris en charge par l’État arrivera à échéance (car il coûte une fortune). Et plus l’arrêt de l’économie se prolongera, plus difficile sera le redémarrage. Le coût engendré par la mise en place d’un filet social et par les plans de l’économie va entrainer une dégradation sans précédent des comptes publics et les jeunes générations qui vont devoir payer deux fois le confinement : par la perte de leur emploi et par l’augmentation des impôts pour ceux qui le conserveront.
Il ne faut pas oublier que le chômage est une aussi catastrophe sanitaire, mais plus diffuse et donc socialement plus acceptable : on estime ainsi à 14.000 les décès qu’il cause chaque année en France par les maladies induites. Et comment ne pas parler de son cortège de misère, de faim, de déclassement social, etc.. Les effets du confinement vont aussi d’avoir des conséquences terribles sur le mental des Français, sur les violences faites aux femmes et aux enfants, sur leur santé (par exemple, les dépistages précoces des cancers, des AVC, des crises cardiaques sont suspendus et on ne sait encore rien des suicides, etc.), sur le décrochage scolaire (combien d’enfants ont purement et simplement disparu du système ?).
Un État de droit durablement affaibli
Enfin, croire que les libertés publiques, la démocratie, sortiront intactes de cet épisode est juste un doux rêve. L’État d’urgence sanitaire va rester inscrit dans notre droit pour longtemps exactement comme l’État d’urgence, déclenché en 2015 a finalement été intégré au droit commun. Il est rare qu’un Etat renonce de lui-même aux pouvoirs gagnés sur le législatif et la justice. Le tracking des individus, via les smartphones, que certains considèrent comme une nécessité, pourrait bien devenir la règle au nom de la sauvegarde de notre santé devenue LA priorité, la vie privée étant ravalée au rang de préoccupation d’un autre âge. Avoir choisi le confinement total et l’État d’urgence laissera des traces durables dans la démocratie française.
Je ne prétends pas ici apporter une réponse. Simplement, les premiers éléments du déconfinement montrent qu’une autre voie aurait été possible : confinement pas département, large pouvoir d’appréciation laissé aux autorités locales, saisine du juge judiciaire pour consigner les porteurs du virus, etc. Je regrette juste l’absence de délibération démocratique avant la mise en place de l’État d’urgence sanitaire et sa prolongation. Comme si sacrifier les générations de moins de 60 ans et suspendre l’État de droit étaient des évidences non questionnables.
En conclusion provisoire, je pense qu’il ne faut pas se tromper sur la signification de l’évènement inimaginable que nous vivons : c’est le triomphe de l’individualisme, celui de la santé immédiate de l’individu face au bien-être collectif actuel et futur. Les termes du débat sont en réalité identiques à ceux du changement climatique : doit-on accepter de sacrifier son bien-être immédiat pour assurer la survie de l’espèce humaine ?
C'est par l'émergence de ses peuples que l'Europe survivra
Comment comprendre l'évolution de notre continent sans faire recours à l'Histoire ?
"Chaque peuple n'a pas un sang qui lui soit propre; mais il a toujours sa propre culture, le réseau des valeurs morales et esthétiques qui ont été élaborées au cours de siècles et qui constituent la spécificité de sa physionomie. C'est là l'élément qui, même si nous parvenions à des unions politiques plus vastes, telle l'Europe unie, ne sera jamais anéanti et qui distinguera, à l'intérieur de l'Europe, chaque peuple européen... Et il ne doit pas être anéanti car c'est de lui que provient non seulement la force créatrice de chaque société isolée, mais aussi la force de l'union de toutes ces sociétés" (Constantin Tsatsos - Président de la république grecque).
Aujourd'hui chacun s'accorde à penser que le monde est en crise et, quand bien même la pensée dominante voudrait limiter cette crise au seul aspect financier, il est évident que ce n'est que l'épiphénomène d'une crise structurelle du système mondialiste. Pendant des siècles, les peuples ont vécu en conscience de ce qu'ils étaient, de l'héritage qu'ils portaient et du devoir de transmission qui leur incombaient. A cet égard, les artistes étaient l'avant-garde des dépositaires de la mémoire collective des peuples et par cette maintenance de la mémoire la plus longue de véritables éveilleurs de peuples. En ce temps là, on pouvait véritablement parler d'intellectuels organiques. D'ailleurs, c'est en Italie que l'émergence de cette prééminence de la culture sur le politique fut conceptualisée.
Gramsci s'est intéressé de près au rôle des intellectuels dans la société. Il disait notamment que tous les hommes sont des intellectuels, mais que tous n'ont pas la fonction sociale d'intellectuels. Il avançait l'idée que les intellectuels modernes ne se contentaient pas de produire du discours, mais étaient impliqués dans l'organisation des pratiques sociales. Ils produiraient le sens commun, c'est à dire ce qui va de soi. Ainsi les intellectuels engagés joueraient un rôle majeur en produisant des évidences qui détruiraient le sens commun produit, selon lui, par la bourgeoisie.
Il établissait de plus une distinction entre une « intelligentsia traditionnelle » qui se pense (à tort) comme une classe distincte de la société, et les groupes d'intellectuels que chaque classe génère « organiquement ». Ces intellectuels organiques ne décrivent pas simplement la vie sociale en fonction de règles scientifiques, mais expriment plutôt les expériences et les sentiments que les masses ne pourraient pas exprimer par elles-mêmes. L'intellectuel organique comprendrait par la théorie mais sentirait aussi par l'expérience la vie du peuple.
La nécessité de créer une culture propre aux travailleurs est à mettre en relation avec l'appel de Gramsci pour un type d'éducation qui permette l'émergence d'intellectuels qui partagent les passions des masses de travailleurs. Les partisans de l'éducation adulte et populaire considèrent à cet égard Gramsci comme une référence. On attribue à Gramsci la phrase : « Il faut allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté », la citation exacte est (traduit littéralement de l'italien) : « Je suis pessimiste avec l'intelligence, mais optimiste par la volonté »
La conscience de la mission incombant à l'intellectuel (et donc à l'artiste) dans la société est apparu comme une évidence à un créateur comme Pier Paolo Pasolini. Pier Paolo Pasolini est un écrivain, poète, journaliste, scénariste et réalisateur italien qui est né le 5 mars 1922 à Bologne. Il a eu un destin hors du commun et finira assassiné, sur la plage d'Ostie, à Rome, dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975. Son œuvre artistique et intellectuelle est politiquement engagée et a marqué la critique. Doué d'éclectisme, il se distingue dans de nombreux domaines. Connu notamment pour un engagement à gauche, il se situera pourtant toujours en dehors de l'institution. Il sera un observateur féroce des transformations de la société italienne de l'après-guerre. Son œuvre va susciter de fortes polémiques et provoquera des débats par la radicalité des idées qu'il y exprime. Il va se montrer très critique envers la bourgeoisie et la société consumériste italienne émergente en prenant très tôt ses distances avec un certain esprit contestataire de 1968.
Donc, dans l'Italie de l’immédiat après-guerre, ce fut assurément le poète et metteur en scène Pier Paolo Pasolini qui représentera le mieux la figure de l'intellectuel organique. Pasolini eut cette révélation en se recueillant devant les cendres de Gramsci. Autodidacte et jouissant d'une grande influence au sein du monde artistique transalpin, il devient la clef de voute du cinéma italien illustré par les œuvres de Michelangelo Antonioni, Federico Fellini, Luchino Visconti, Franco Zeffirelli, Vittorio de Sica ou de Luigi Comencini, Pietro Germi, Mario Monicelli, Dino Risi et Ettore Scola. A cette époque, le cinéma italien était un des meilleurs au monde et projettait un œil très critique sur la société moderne déstructurante. Mais, après l'assassinat de Pasolini, l'ensemble du champ culturel italien va être totalement bouleversé.
Dans les années qui suivirent, un ensemble d'innovations technologiques et administratives - la télévision câblée ou la possibilité de créer des chaînes privées financées par la publicité, vont modifier profondément le paysage audio-visuel. L'exemple significatif est représenté par un entrepreneur en bâtiment, Silvio Berlusconi, qui après avoir fait fortune dans l'immobilier, va s'engouffrer dans ce nouveau marché potentiel. En quelques années, ses trois chaînes de télévision (Canale 5, Italia 1, Retequattro), puis la holding financière Fininvest et le groupe de communication Mediaset créés pour les contrôler, ne deviennent pas seulement le premier opérateur privé de la communication dans la Péninsule, mais, surtout, développent le mercantilisme et la pornographie à tous les niveaux de la vie culturelle. C'est l'arrêt de mort du cinéma italien qui, depuis la "libération" (de Païsa de Roberto Rossellini, 1946 à "La pelle" (la peau) de Liliana Cavanni d'après le roman de Curzio Malaparte, 1981) était devenu l'un des plus talentueux de la planète.
Après cette décadence culturelle (que subirent tous les pays européen, sous l'effet pervers du mondialisme) nous apparait, depuis le début des années 2000, de nouvelles perspectives. Car aujourd'hui, Internet et la révolution numérique permettent aux cultures des nationalités opprimées d'accéder à l'hégémonie par rapport aux systèmes étatisés (voire mondialisés) qui les ont submergées.
On pourrait prendre l'exemple de l'Ecosse où, les réseaux sociaux ont joué un rôle primordial, depuis que l'âge légal du vote pour le scrutin sur l'indépendance a été abaissé à 16 ans. Or, dans cette bataille du web, le camp du oui l'a emporté largement au sein des générations montantes même si, finalement, le non a triomphé du fait, essentiellement, du vote des retraités : les jeunes de 16 et 17 ans ont choisi le oui à 71%, tandis que les plus de 65 ans privilégiaient le non à 73%. Et, pourtant, si c'était, finalement, les nationalistes écossais qui avaient gagné ? Ils vont obtenir encore plus de pouvoirs - alors qu'ils en avaient déjà beaucoup - ce qui ne peut manquer de susciter de nouvelles contradictions chez leurs adversaires à Londres et ailleurs. Une affaire à suivre quand ces générations montantes seront aux affaires…
Tout aussi intéressant est l'exemple catalan. Le processus d'accès à l'autonomie commence, dans les années 1970, par l'engagement de plasticiens de renom comme Joan Miró, Antoni Tàpies ou Miquel Barceló, qui affirment haut et fort leur "catalanité" (les artistes intellectuels organiques). Ils seront relayés, au niveau des mass-médias, par les chanteurs-compositeurs de la nouvelle chanson catalane (Lluís Llach, avec "L'estaca «). En quelques décennies, un vaste mouvement se développe. Il autorise, peu à peu, la culture catalane à supplanter celle que l'Etat espagnol avait imposée. A partir de là, le gouvernement de Barcelone décidera d'organiser, en toute illégalité par rapport aux lois espagnoles, une consultation électorale (avec une question simple : "Voulez-vous que la Catalogne devienne un Etat ? Dans le cas d'une réponse affirmative, voulez-vous que cet Etat soit indépendant ?") qui sera interdite par l'état central espagnol. Mais, le ver barcelonais est désormais dans le fruit madrilène.
Et la France, me direz-vous, dans tout ça ?
Il faut quand même se souvenir que "la dernière barricade" sur le sol français (ne comptons pas la "révolution d'opérette" de Mai 1968) date, en fait, de Mai 1871 au sein de cette "république une et indivisible".
Déjà, lors de l'insurrection de 1848 qui signe l'échec de la Seconde République, c'est la structure centralisatrice hexagonale (enfin presque hexagonale, puisqu'à cette époque le Comté de Nice et la Savoie n'ont pas encore été annexés) qui va profiter de cet évènement : c'est Napoléon III qui, finalement, tire les marrons du feu de l'insurrection de février et, surtout, de celle, désespérée, du mois de juin suivant. Le 2 décembre 1851, son coup d'Etat militaire installe une chape de plomb sur l'hexagone tout entier. Flaubert va en rendre compte en 1857 : il sera condamné pour "outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs" pour l'avoir écrit Madame Bovary. Quant à Victor Hugo, il devra prendre la route de s'exil : d'abord à Bruxelles puis à Guernesey. Il faudra une défaite militaire de première importance, celle de la Guerre franco-allemande de 1870-71, pour qu'un autre système politique, la Troisième République, puisse voir le jour. Et pourtant, cela était prévisible et inscrit dans les archives historiques de ce pays. Je vais citer, ici, le cardinal de Richelieu, au siège de La Rochelle, en 1627, dont la citation reprise dans son Testament politique paru en 1688 montre bien que la visée globale de ce système centralisateur n’a pas changé depuis trois siècles : "L’autorité contraint à l’obéissance, mais la raison y persuade ". Et, dans ce domaine, la république jacobine ne cède en rien aux monarchies.
A première vue, cet Etat-nation singulier ne semble pas concerné par ce qui se passe autour de lui. Son équilibre interne a longtemps reposé sur ces trois piliers inébranlables qu’étaient le service militaire, le fisc et l’école communale. De plus, ces institutions avaient uniformisé les comportements des Français et créé un imaginaire collectif dans lequel ils se reconnaissaient: la débrouillardise, le système D antidote à la bureaucratie, les mythiques prouesses amoureuses dont ils se sont toujours glorifié et l'art culinaire. Bref, la cause pourrait être à tout jamais entendue sans que l'élection d'un maire nationaliste dans la principale ville de Corse ou le développement d'un vigoureux esprit entrepreneurial transfrontalier au Pays Basque puissent y changer grand chose. Alors que tous les pays voisins ont, depuis longtemps, mis en place de puissantes communautés régionales (Espagne), une régionalisation dynamique (Italie et Royaume-Uni) ou un véritable système fédéraliste (Suisse, Allemagne et Belgique), la France, de par son exception culturelle, serait elle donc vouée à l'uniformité, au centralisme et à la standardisation ? Pas forcément, même si, il faut en être conscient, ce sera plus dur qu'ailleurs à cause de l'histoire de ce pays qui s'est construit, non par l'adhésion des peuples mais par la conquête et l'annexion de ces mêmes peuples. Cela dit, l'histoire n'est écrite nulle-part et rien n'est éternel.
Je voudrai, à présent, citer une personnalité incontestable et incontournable, telle que celle de Claude Levi-Strauss: " Car, si notre démonstration est valable, il n'y a pas, il ne peut y avoir, une civilisation mondiale au sens absolu que l'on donne souvent à ce terme, puisque la civilisation implique la coexistence de cultures offrant elles le maximum de diversité, et consiste même en cette coexistence. La civilisation mondiale ne saurait être autre chose que la coalition, à l'échelle mondiale, de cultures préservant chacune son originalité". (Claude Levi-Strauss - "Races et Histoires").
C'est ainsi, alors que les leviers de pouvoir et d'information (?) officiels cherchent à nous démontrer que l'histoire a un sens qui irait vers une cité mondiale unique, que la réalité les rattrape en démontrant le contraire. Cela explique tous leurs efforts et les moyens colossaux développés pour tenter d'infléchir les mentalités dans leur sens.
Malheureusement, les forces centrifuges sont nettement plus fortes, naturellement, que les forces centripètes. La nature a toujours eu tendance à aller vers la diversité et non pas vers l'uniformité. Même si la "machine à broyer les cultures" pendant du "système à tuer les peuples" veut aller à l'encontre de cette tendance naturelle, il y a encore, sûrement, bien des raisons d'espérer. Et, c'est d'ailleurs, véritablement, la seule issue pour l'Europe (je parle ici de notre Vieux Continent et non pas du machin baptisé U.E) de survivre: c'est par l'émergence des toutes ses cultures et la renaissance de ses peuples que notre vieille Europe (et sa civilisation) survivra.
"Rien ne serait plus contraire à la vérité que de voir dans l'affirmation de l'identité culturelle de chaque nation, l'expression d'un chauvinisme replié sur soi-même. Il ne peut y avoir de pluralisme culturel que si toutes les nations recouvrent leur identité culturelle, admettent leurs spécificités réciproques et tirent profit de leurs identités enfin reconnues" (M. Amadou Mahtar M'Bow - directeur général sénégalais de l'UNESCO).
L'Allemagne et la France ont signé deux accords pour lancer le développement en commun d'un nouveau char de combat, dit système de combat terrestre (Main Ground Combat System) destiné à remplacer dans les années 2030 les chars Leopard 2 allemands et Leclerc français.
Le projet sera conduit sous un leadership allemand. Il associera comme partenaires principaux les trois entreprises Rheinmetall, KMW et Nexter qui formeront une coentreprise. Rappelons que Nexter S.A. est un groupe industriel de l'armement appartenant à l'État français. Il fabrique du matériel militaire pour le combat terrestre, aéroterrestre, aéronaval et naval. Il est issu de différentes entités du groupe GIAT industries qui en devient la holding de tête.
Le ministère de la Défense allemand vient d'annoncer mardi la signature de deux accords par les deux partenaires : un accord-cadre (framework agreement) suivi d'un accord de mise en œuvre (implementing agreement). Ce dernier permettra de passer un contrat pour une étude de définition de l'architecture du futur système. Cette commande est un préalable au développement de démonstrateurs technologiques, qui serviront à évaluer le MGCS, selon les besoins et exigences allemandes et françaises,
Les coûts de développements encore mal précisés sont estimés aujourd'hui à un minimum de 1,5 milliard d'euros pour parvenir aux phases de réalisation et d'industrialisation à partir de 2028. Ceci ne comprend évidemment pas les coûts de fabrication.
Le marché européen potentiel serait de 100 Milliards d'euro. Les industriels visent également de nombreuses commandes à l'exportation. L'enjeu est donc majeur pour eux. Le MGCS servira aussi de plate forme pour divers types d'engins blindés plus polyvalents. Il s'agit du concept dit multi-plateformes associant des systèmes sous pilotage humain et d'autres complètement automatisés.
Du côté allemand, on considère que ce programme devrait compenser l'appel de l'Allemagne au F-18 américain pour renouveler sa flotte de Tornado, au lieu de s'adresser au français Dassault qui pouvait fournir des Rafales de nouvelle génération considérés comme bien plus performants.
Est-ce à dire que le projet d'une Défense européenne franco-allemande qui échapperait au contrôle du Pentagone pourrait ainsi se préciser ? Paris l'espère mais Berlin, malgré l'accord de principe donné sur ce sujet par la chancelière Merkel à Emmanuel Macron, reste, semble-t-il encore, très réticent.
Note
En attendant 2040 et l'entrée en service de MGCS, KMW et Nexter (KNDS) continuent de préparer l'European Main Battle Tank (EMBT), résultant de l'union entre un Leclerc et un Leopard 2 dévoilé en juin 2018 lors du dernier salon Eurosatory. A compter de 2025, l'EMBT pourrait devenir une solution intermédiaire pour les pays dont le remplacement des flottes ne pourra pas attendre vingt années de plus ou dont le budget s'avérerait trop serré pour acquérir le MGCS.
Le Billet d'humeur d'Alexander Markovicz, directeur de l'Institut Souvorov:
Crise sanitaire: l'homme est-il un être social ou un loup pour son prochain?
Dans sa célèbre phrase qui sera réellement formatrice pour la vision libérale de l’homme, Thomas Hobbes constatait que „l’homme était un loup pour l’homme“. Avec les retombées de la crise du coronavirus, cette maxime ne semble plus seulement concerner l’homme universalisé qui erre de la Californie à l’Australie, l’homme qui devient un loup voleur de PQ, mais aussi les Etats occidentaux eux-mêmes.
Jusqu’ici, seuls les Etats en dehors de la „communauté occidentale des valeurs“ éprouvaient ce genre de comportements brutaux dans leur quotidien comme, récemment, l’Etat du Vénézuela, auquel avait été imposées de lourdes sanctions économiques parce qu’il avait osé contrecarrer le projet politique que lui concoctaient les Etats-Unis. D’après l’Institut CEPR, basé à Washington, les sanctions occidentales, en vigueur depuis 2017, ont provoqué la mort de 40.000 personnes.
Ces sanctions, contraires au droit des gens, se poursuivent toutefois pendant la pandémie du Covid-19, qui frappe, de manière particulièrement lourde, des Etats comme l’Iran. Si l’on peut dire que les sanctions constituent une forme de „terrorisme économique“, elles se voient doublées aujourd’hui par un „terrorisme médical“, comme le constate très justement le ministre iranien des affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif.
Mais la terreur maniée par l’Occident commence à se tourner contre l’Occident lui-même. Ainsi, en date du 15 mars 2020, les Etats-Unis ont essayé de débaucher des scientifiques de la firme thuringienne CureVac, qui travaillaient à l’élaboration d’une substance antivirale, afin qu’ils ne la développent plus que pour un vaccin au seul usage des Américains eux-mêmes. L’entreprise allemande n’a pas cédé aux pressions américaines. La France, elle aussi, est désormais la cible d’interventions intempestives américaines du même type. Jean Rottner, le Président de la région Grand-Est (à laquelle appartiennent également l’Alsace et la Lorraine), a annoncé que des agents américains avaient acheté sur le tarmac des masques de protection destinés à la France, en offrant de trois à quatre fois le prix de base !
En Europe aussi les Etats se comportent comme des loups entre eux. La Suisse en a pâti car la France a empêché la livraison de 240.000 masques, en imposant un embargo à l’exportation. Le rappel à l’ordre de l’UE contre ce blocus français n’a eu aucun effet car Paris l’a ignoré délibérément. La RF allemande a, elle aussi, retenu une livraison pendant deux semaines. Pour la Suisse, c’est une catastrophe car le pays, qui ne produit pas de masques lui-même, a d’ores et déjà dû les rationner. Les Italiens sont tout particulièrement déçus et ulcérés par l’absence totale de solidarité à leur égard au cours des derniers mois écoulés. Une aide rapide n’est venue que d’ailleurs, ce qui était inattendu: ce sont les Etats posés comme „ennemis“, la Russie et la Chine, qui ont envoyé, dans des délais très brefs, des médecins militaires et des produits médicaux dans le pays, profondément ébranlé par la crise sanitaire. Quelles furent les aides apportées par les Etats-Unis et d’autres pays de l’OTAN ? Elles ont été insignifiantes selon les Russes et les Chinois, au vu des souffrances encourues. Les Italiens ont exprimé leur amertume: sur les réseaux sociaux, on a vu apparaître des images où des automobilistes effaçaient les étoiles du drapeau de l’UE sur les plaques d’immatriculation de leurs voitures, on a vu des vidéos où des citoyens italiens remplaçaient, sur les mâts de leurs communes les drapeaux européens par des drapeaux russes ou chinois. Moscou et Beijing agissent dans le sens de la coopération, prouvant que, pour la Chine et la Russie, l’homme est avant tout un être social et non „un loup pour l’autre“. Une vision que les Etats libéraux de l’américanosphère n’ont jamais faite leur.
« L’affection du peuple est la seule ressource qu’un prince puisse trouver dans l’adversité ». Macron en aurait bien besoin de l’affection de son peuple en ces temps difficiles de pandémie, mais pour la mériter, cette affection, il aurait fallu écouter Machiavel : « Contenter le peuple et ménager les grands, voilà la maxime de ceux qui savent gouverner ». Maxime, dont hélas, Macron n’a appliqué que la seconde moitié. Pourtant, comme le souligne Olivier Pironet, Machiavel insiste bien là-dessus dans les Discours sur la Première décade de Tite-Live : « Pour diriger, il faut choisir un camp, et ce ne peut être que celui du peuple « car ses buts (…) sont plus honnêtes que ceux des grands, les uns voulant opprimer, l’autre ne pas être opprimé ». Il faut d’autant plus choisir le peuple que, dès lors que « seuls les riches et les puissants proposent des lois, favorisant bien moins la liberté que l’accroissement de leur pouvoir, » l’État est miné à sa racine même, corrompu. C’est ainsi que la République romaine se perdit, comme la République florentine. » Et la République macroniste !!!
Il est logique que Machiavel, un esprit libre, soit calomnié par les envieux et les conformistes et qu’il soit admiré par d’autres esprits libres, eux aussi amplement calomniés, tels que Jean-Jacques Rousseau, selon qui Le Prince est le « livre des républicains », et Antonio Gramsci, qui écrit dans ses Notes sur Machiavel, sur la politique et sur Le Prince moderne que « dans la conclusion, Machiavel lui-même se fait peuple, se fond avec le peuple ».
Par un de ces hasards dont la vie est friande, alors que je commençais à écrire cet article, J.L. Mélenchon, interrogé sur la gestion macroniste de la crise sanitaire par Ali Baddou, dans l’émission C l’hebdo, donnait, lui aussi, sa définition de l’art de gouverner : « C’est l’art, en démocratie, de faire consentir des mesures en prouvant qu’elles sont nécessaires. Tout ce qui procède de l’arbitraire, du décret, de la diabolisation est mal vécu ».
Oui, c’est le paradoxe que nous vivons en France en ce moment. Nous avons une Constitution qui octroie un pouvoir quasi absolu à l’exécutif qui ne s’est pas privé d’en user et d’en abuser pour nous imposer des décennies d’austérité « pour rester compétitifs », « pour nous intégrer dans la mondialisation », « pour tenir notre rang », « pour sauver le pays », et « en même temps », nous nous apercevons, effarés, qu’en dépit de toute cette austérité, de tous ces sacrifices, la « riche » France est privée de tout, totalement démunie et dépendante du reste du monde.
Pourtant, au sortir de la dernière guerre mondiale, grâce principalement à de Gaulle, la France avait retrouvé son indépendance dans tous les domaines : alimentaire, sanitaire, vestimentaire et militaire. Elle s’était même dotée, à la libération, d’un système de protection sociale hors-pair, élaboré par le Conseil National de la Résistance. La Sécurité sociale, obligatoire et universelle, a été créée par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945, sous l’égide de Pierre Laroque et du ministre communiste Croizat. Un système social, au départ géré par les travailleurs, que les présidents successifs, amis du MEDEF, n’ont cessé d’attaquer et d’affaiblir dans le seul et unique but de le privatiser.
Rappelé au pouvoir en 1958, de Gaulle a mis fin à la guerre d’Algérie et décolonisé l’Afrique. Il engage une politique « d’indépendance nationale » pour lutter contre le projet européen de Jean Monnet et l’hégémonie étasunienne (il a développé l’arme atomique et est sorti du commandement intégré de l’OTAN), raison pour laquelle, sans doute, il a été débarqué à l’occasion du référendum de 1969.
Ses successeurs, stipendiés par la finance et/ou les États-Unis, se sont empressés de renoncer progressivement à des pans entiers de la souveraineté de la France au profit des banques, des monopoles privés (ce que Noam Chomsky appelle la « tyrannie privée »), des puissances étrangères (Allemagne, États-Unis) et d’une haute-administration technocratique française et bruxelloise toujours plus pléthorique, corrompue et incompétente.
Pompidou avait comme slogan de campagne aux élections présidentielles de 1969 : « L’ouverture dans la continuité ». Il a en effet ouvert la France à la concurrence internationale (il relance la politique de construction européenne et est favorable à la suppression totale des barrières douanières au sein de la CEE), et aux marchés financiers avec la loi La loi no 73-7 du 3 janvier 1973 sur la Banque de France qui oblige la France à emprunter aux banques privées (et donc à leur payer des intérêts au lieu de se financer gratuitement auprès de la Banque de France).
Retournement de situation remarquable, l’Angleterre, qui est sortie de l’UE et entrée dans la pandémie, et qui a besoin d’argent pour sauver son économie réelle, vient, comme l’explique Philippe Murer, de faire voler en éclat cette règle sacro-sainte du néo-libéralisme en décidant d’emprunter directement à sa Banque centrale.
Le successeur de Pompidou, Giscard d’Estaing, a initié les premières « réformes sociétales » qui serviront désormais à compenser, sinon dissimuler, la destruction programmée de notre système social (l’abaissement de la majorité civile à 18 ans, la dépénalisation de l’avortement ou l’instauration du divorce par consentement mutuel). Sur le plan politique, il a mené la France dans trois impasses délétères : 1. il a inauguré l’austérité que nous subissons toujours ; 2. il a entamé des guerres néo-coloniales en Afrique pour soutenir ses pions (l’affaire des diamants de Bokassa) ou des intérêts occidentaux, des guerres qui n’ont plus cessé depuis ; 3. et surtout il a ouvert le bal de la déréglementation financière en signant, en 1976, les accords de la Jamaïque, enterrant à jamais le rôle de l’or comme monnaie internationale de réserve. C’est désormais le Far West ! La finance internationale est devenue totalement privée. Non seulement privée mais largement « off-shore », en dehors de tout contrôle des espaces nationaux et des pouvoirs politiques.
Mitterrand est élu en 1981. Il abolit la peine de mort, instaure la 5ième semaine de congés payés et trahit les Français en 1983 avec le « tournant de la rigueur ». Il engage la France dans la guerre du Golfe, la première d’une longue liste de guerres du pétrole au profit des États-Unis et lâche toujours plus la bride à la finance en abrogeant en 1984, la loi de 1945 dite de séparation bancaire qui interdisait aux banques de spéculer avec vos économies.
Chirac le remplace en 1995. Aussitôt élu, il lance une réforme (comprendre privatiser) des retraites et de la sécurité sociale, mais n’ose pas passer outre à l’opposition du pays (comme l’ont fait ensuite Sarkozy, Hollande et Macron). En 1996, il supprime le service militaire car une armée de métier est plus docile et plus discrète. En 1999, il participe avec les États-Unis à une campagne illégale de bombardements de l’Otan contre la République fédérale de Yougoslavie, un état européen allié mais qui avait le tort d’être « socialiste » et de constituer « un obstacle au triomphe planétaire de l’économie de marché ». L’opération se fait sous couvert de l’« ingérence humanitaire », une notion inventée par le maléfique Dr Koushner pour justifier les guerres d’agression de l’Empire, et qui sera réutilisée en Libye avec autant de succès. La guerre de Yougoslavie a duré 78 jours (la plus longue de l’OTAN) et s’est « nourrie de bobards médiatiques destinés à aligner l’opinion des populations occidentales sur celle des états-majors ».
L’écrivain autrichien Peter Handke sera à peu près le seul à condamner cette agression qui inaugure les guerres de changement de régime, et qui sonne le glas de l’ « Europe de la paix ». En 2001, Chirac accepte de se joindre aux États-Unis et à l’OTAN dans la guerre d’Afghanistan, mais, en 2003, il se révolte et refuse de suivre les États-Unis dans une nouvelle guerre d’Irak, ce qui sauvera l’honneur de ce président somme toute assez belliqueux sous ses dehors bonhomme. De son côté, Jospin est parvenu, en 2000, à faire voter les 35 heures (notez que Macron vient de revenir par ordonnance aux 60 heures !) mais c’est aussi lui qui entame la valse des privatisations. Jospin pourra se glorifier devant l’histoire d’être le dirigeant qui a le plus privatisé. Comme disait mon père, il faut un gouvernement de gauche pour faire passer des mesures de droite. C’est aussi sous Chirac, en 2005, que les Français, obligés de rentrer dans la zone Euro en 1999, commencent à comprendre ce que l’Union Européenne signifie, et refusent le Traité européen. Ce sera le dernier référendum auquel les Français auront droit.
Chirac est sans doute le dernier président français à avoir pris ou laissé prendre quelques décisions indépendantes voire opposées à l’UE et/ou aux États-Unis. Ses successeurs, Sarkozy, Hollande et Macron, qui ne valent même pas la peine d’être étudiés séparément, se soumettent entièrement, lâchement, éhontément, à la quadruple tyrannie du privé, de la technocratie, de l’UE et de l’Empire étasunien. En quelques années, la France perd tout ce qui lui reste de souveraineté. Elle rentre dans le commandement intégré de l’OTAN, ce qui l’oblige à servir de mercenaire à l’Empire en Libye, en Irak, au Yémen, en Palestine, en Afrique, etc. Ces agressions nous reviennent en boomerang sous une forme violente avec le terrorisme et pacifique avec l’arrivée de millions de malheureux qui fuient les guerres que nous leur menons. L’emprise sur l’État de la finance en particulier et du privé en général s’accélère (crises financières, économiques, traités de libre-échange qui sacrifient notre industrie, note agriculture, nos travailleurs), les dettes, le chômage, la précarité, la pauvreté explosent et les libertés diminuent, pendant qu’une minorité de globalistes hors-sol s’enrichissent sans limite.
Nos trois derniers présidents, sont passés maîtres dans l’art de ne pas gouverner. Ayant perdu tous les leviers de l’état au profit de l’UE, des multinationales et de notre grand ami étasunien, s’ils ne peuvent gouverner, ils peuvent encore nuire et ils ne s’en privent pas, à l’instar de ces notables africains chargés par l’administration coloniale de collecter les impôts et que leur population haïssait.
L’application servile et implacable des directives de leurs maîtres
Tout le monde sait maintenant que notre politique intérieure est régie par les GOPE, les Grandes orientations de politique économiques, rédigées par les technocrates non élus de Bruxelles, qui obligent les états à toujours plus d’austérité, de privatisations, de concurrence libre et non faussée, de délocalisations, de destruction des services publics. Pas besoin d’en dire plus, il n’y a qu’à voir la France à l’heure du coronavirus. Bien sûr, cela convient très bien à nos présidents, tous au service du Capital, qui ne pourraient pas appliquer aussi brutalement ces politiques, s’ils ne pouvaient pas s’abriter derrière l’UE.
Et tout le monde sait que notre politique extérieure est décidée par l’Otan, sous commandement étasunien. Cela aussi convient très bien à nos présidents, tous atlantistes, qui ne pourraient pas se livrer à autant de guerres de pillage aux quatre coins du monde, s’ils ne pouvaient pas s’abriter derrière l’Otan, d’autant plus qu’en dehors même de leur immoralité et de leur illégalité, tout comme l’UE, elles nous coûtent un « pognon de dingue » et rapportent essentiellement aux États-Unis.
Le siphonnage des richesses de la nation à des fins privées
Comme ils n’ont plus à gouverner, ils ont beaucoup de temps à consacrer à leur « carrière » (traduire enrichissement personnel). Comme le dénonce Vincent Jauvert dans Les voraces : « Jamais sous la Ve République les élites qui dirigent notre pays n’ont été aussi riches et obnubilées par l’argent. Jamais autant de hauts fonctionnaires n’ont pantouflé à prix d’or dans le privé. Jamais autant de ministres n’ont été multimillionnaires. Jamais autant de responsables politiques et non des moindres sont devenus lobbyistes ou avocats d’affaires. »
Sans compter que le nombre de ces parasites et de leurs abus se multiplie de façon exponentielle car tous ceux qui en ont le pouvoir augmentent les salaires et les primes, créent des milliers de sinécures prébendes, privilèges et avantages, instituent des centaines d’agences gouvernementales-paravent, multiplient les cadeaux fiscaux et les exonérations de toutes sortes, privatisent à tour de bras, pour s’enrichir et enrichir toujours plus leurs clients ou alliés sur notre dos, tout cela avec la bénédiction de l’UE qui elle aussi nous coûte un pognon de dingue. Dans tous les corps d’état que les Français entretiennent en France et à Bruxelles, et l’armée ne fait pas exception, il y a bientôt plus d’officiers que de simples soldats…
Les mensonges, les promesses, les inversions accusatoires
Ces gens ont tellement perdu l’habitude de s’occuper du pays qu’ils sont devenus incapables de régler même les choses les plus simples, comme des commandes de masques. Ils en sont réduits à réquisitionner les masques que les régions commandent !
La crise du Coranavirus met à jour leur inutilité totale et absolue. Ils n’ont rien vu venir, rien anticipé, rien préparé, rien. Ils courent partout comme des poulets sans tête, ils colmatent les brèches qu’ils ont ouvertes, contredisent les ordres qu’ils ont donné, et les rares décisions qu’ils prennent sont mauvaises. La population a compris qu’on ne pouvait rien attendre d’eux et elle se débrouille toute seule. La première fois que j’ai vu ça, c’est au Mexique. Tout y est privatisé, l’état ne fait plus que deux choses, lever des taxes et envoyer la police. Le système D et la solidarité prévalent. Mais pendant que j’étais au Mexique, je n’ai quand même jamais entendu les ministres appeler aux dons pour aider entreprises…
Et quand ni les mensonges, ni la communication, ni les promesses ne marchent plus, ils nous accusent de leur incurie et nous punissent de leur incompétence en nous enfermant ad vitam aeternam et en réprimant sauvagement ceux qui n’obtempèrent pas assez vite…
La répression
L’état d’urgence sanitaire donne les pleins pouvoirs à l’exécutif pour : réprimer les récalcitrants au confinement (ou présumés tels) notamment dans les quartiers populaire (10% des amendes en Seine St Denis), mettre au pas les travailleurs en détruisant le droit du travail et en supprimant les contrôles de l’inspection du travail, faire taire l’opposition et les critiques avec des traditionnels appels à l’unité soutenus par une rhétorique guerrière qui permet de dénoncer comme traîtres les récalcitrants, diminuer les libertés (tracking) et multiplier les ordres contre-ordres et désordres plus ou moins légaux, en toute impunité.
Comme dit le proverbe : pour quelqu’un armé d’un marteau, tout ressemble à des clous.
L’effacement des traces
La dérégulation, la déresponsabilisation, le laxisme, l’imprévoyance, qui caractérisent la gouvernance actuelle, engendrent catastrophe sur catastrophe, que nos élites n’ont plus le pouvoir, ni le temps, ni l’envie de solutionner. Alors, après avoir s’être beaucoup agité devant les caméras, avoir beaucoup menti et avoir beaucoup promis de se convertir (à l’écologie, au climat, à la planification, au pacifisme, à la séparation des pouvoirs, à l’Europe, à la démondialisation, au respect des lois, à la défense de l’hôpital public, etc.), dès que la pression est un peu retombée, on se dépêche, avec l’aide des médias pour toujours complaisants, de mettre la poussière sous le tapis et d’effacer les traces. Comme l’explique Annie Thébaud-Mony, sociologue de la santé, il n’y a eu aucun suivi médical (ou autre, d’ailleurs) après l’incendie de Notre Dame (plomb), celui de l’usine de Lubrizol, et quantités d’autres scandales sanitaires ou écologiques. Pareil pour les crises financières : après la crise de 2008, tout est reparti comme si de rien n’était. Pareil pour la crise des Gilets jaunes, où sont les milliers de cahiers de doléances qu’on a fait rédiger aux Français?
Mais laissons le dernier mot à Machiavel:
« L’habituel défaut de l’homme est de ne pas prévoir l’orage par beau temps ». Ne pas gouverner, c’est refuser de prévoir, d’anticiper, de se préparer (la gestion des flux).
« Pour prévoir l’avenir, il faut connaître le passé, car les événements de ce monde ont en tout temps des liens aux temps qui les ont précédés. Créés par les hommes animés des mêmes passions, ces événements doivent nécessairement avoir les mêmes résultats ». Ne pas gouverner, c’est refuser de tirer des leçons du passé ou de ses propres erreurs («Soyez fiers d’être des amateurs»).
« La soif de dominer est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur de l’homme ». Ne pas gouverner, c’est accepter la loi du plus fort (la loi du marché, la compétition de tous contre tous).
« L’expérience prouve que jamais les peuples n’ont accru leur richesse et leur puissance sauf sous un gouvernement libre. » Ne pas gouverner, c’est refuser à son peuple la justice et la liberté qu’il est en droit d’attendre de son pays.
« Le parti de la neutralité qu’embrassent le plus souvent les princes irrésolus, qu’effraient les dangers présents, le plus souvent aussi les conduit à leur ruine ». Ne pas gouverner, c’est refuser ou être incapable de choisir, de décider (le « en même temps »).
La crise du Coronavirus, a mis les projecteurs sur l’incurie, l’amateurisme et la corruption de nos dirigeants. Espérons que la population, ne laissera pas, cette fois-ci, les puissants imposer le retour au « business as usual », dans une société de surveillance encore plus répressive, autoritaire et précaire qu’avant, comme certains le craignent. Il est vrai que comme dit Machiavel : « La meilleure forteresse des tyrans, c’est l’inertie des peuples », et aussi, en l’occurrence, les institutions de la Ve République, sans lesquelles la Macronie n’aurait pas tenu jusqu’ici. C’est seulement en descendant dans la rue, tous ensemble que nous arriverons à nous faire entendre. Espérons que personne ne manquera au rendez-vous, cette fois-ci !
Appendice
Machiavel, haut-diplomate de la République florentine, a dû s’exiler sur ses terres lorsque les Médicis ont renversée la République en 1512. Pour tenter de rentrer en grâce, il fait parvenir à Laurent II de Médicis, un traité de philosophie politique portant sur le gouvernement des principautés (Le Prince, en français). Comme dit Olivier Pironet : « Il s’agit pour son auteur de réfléchir aux moyens de rétablir la république dans la cité toscane et d’édifier un État suffisamment fort pour « prendre » (unifier) l’Italie et la « délivrer » des puissances étrangères. Le Prince s’adresse à celui qui sera capable de réaliser ce double objectif.» Dans son autre œuvre majeure, les Discours sur la première décade de Tite-Live, publiés en 1531, Machiavel examine, en relisant l’histoire romaine, les principes du régime républicain, et démontre sa supériorité par rapport aux systèmes despotiques ou autoritaires (principati). Selon lui, chaque régime repose sur l’opposition fondamentale entre deux grandes classes, ou « humeurs » (umori) sociales, qui en détermine la forme : le peuple, c’est-à-dire le commun des citoyens, et les grands, ceux qui constituent l’élite sociale, économique et politique. Les seconds, minoritaires, veulent la domination ; le premier, majoritaire, la conteste : « Et de ces deux appétits opposés naît dans les cités un de ces trois effets : ou monarchie, ou liberté, ou licence. » La monarchie, ce principato autoritaire que Machiavel voit également dans l’oligarchie, est incapable de résoudre la question sociale. Il faut donc lui préférer un régime républicain, seul système à même de garantir l’égalité des citoyens, la réalisation du bien public et l’indépendance du pays. Mais cette république, comme le précisent les Discours, ne peut s’appuyer que sur l’institution de la discorde civile entre les élites et la plèbe, autrement dit sur la reconnaissance politique du conflit inhérent à la cité : « Dans toute république, il y a deux umori (…) et toutes les lois favorables à la liberté ne naissent que de leur opposition. » Alors que la grande majorité des penseurs républicains de son époque prônent une oligarchie, le Florentin préconise l’instauration d’une république populaire (stato popolare) fondée sur l’autorité suprême d’une assemblée au sein de laquelle le peuple peut participer, au même titre que les grands, à la direction des affaires de la cité.
Pour Machiavel, il n’y a pas de plus grand bien, que la liberté. Pour lui comme l’explique Cristian Nadeau, pour être autonomes, nous devons vivre dans un État libre, c’est-à-dire un État où la liberté de chacun se mesure à l’aune de la liberté de tous. La liberté de tous n’est cependant possible qu’à deux conditions: a) personne n’est soumis à qui ce soit; b) l’État n’est soumis à personne sinon à la volonté de ses membres (indépendance de l’État par rapport aux forces extérieures). Ainsi, lorsqu’il s’agit de la liberté de l’État, Machiavel affirme qu’elle doit être défendue à n’importe quel prix, « soit ignominieusement, soit glorieusement », car la défense de la patrie est toujours la défense du bien. Le plus grand danger pour l’intérêt commun est de laisser libre cours à la poursuite des intérêts personnels, ceux des individus ou ceux des groupes sociaux. Pour qu’une république soit libre, elle ne doit appartenir à personne.
La destra radicale noglobal. Antimondialismo e capitalismo
di Matteo Luca Andriola
Pronunciare oggi la parola antiglobalizzazione, ai più fa venire in mente la sinistra radicale e l’area della contestazione nata alla fine degli anni Novanta nota come “movimento noglobal”: area multivariegata, composta da associazioni e gruppi che contestano il processo della globalizzazione neoliberista, fonte di inaccettabili iniquità tra Nord e Sud del mondo e all’interno delle singole società nazionali, in lotta contro lo strapote re delle multinazionali e le politiche liberoscambiste seguite dal Fondo Monetario Internazionale (Fmi) e dalla Wto (World Trade Organization). È giusto però porsi una domanda: vista l’egemonia della sinistra su tale movimento di protesta transnazionale, per la forte presenza di soggetti neomarxisti, ecologisti e vicini all’antagonismo, il fenomeno di questa contestazione si limita alla sinistra? No.
Marco Fraquelli, autore del volume A destra di Porto Alegre. Perché la Destra è più no-global della Sinistra (Rubbettino, 2005) sottolinea – pur essendo egli stesso di sinistra e discepolo del politologo Giorgio Galli – che i movimenti noglobal, nati a Seattle nel 1999 e protagonisti di importanti battaglie storiche, come la nascita nel 2001 del Social Forum di Porto Alegre in contrapposizione al World Economic Forum di Davos, e la contestazione del G8 di Genova, tendono “a contestare la globalizzazione convinti comunque che si tratti di un fenomeno che, attraverso opportuni correttivi, possa virare verso orizzonti positivi”, “che possa esistere insomma una globalizzazione ‘dal volto umano’, che sia possibile in altri termini, definire e imporre una nuova governance (e questo spiega per esempio le istanze per l’applicazione della Tobin Tax, per la cancellazione del debito contratto dai Paesi poveri, ecc.)” (1): ciò mostra che questi movimenti accettano le implicazioni della globalizzazione, rifiutando solamente il lato economico (“la Sinistra ha come obiettivo la mondializzazione senza il mercato” scrive Jean-François Revel), essendo figli dell’universalismo.
Al contrario la cultura di destra (termine usato dall’autore operando un’evidente quanto utile semplificazione, che racchiude complesse esperienze radicali-tradizionaliste, comunitariste o la Nuova destra metapolitica) presenta “molto spesso, nei confronti della globalizzazione, posizioni assai più radicali rispetto ai movimenti liberali e di sinistra” essendo “interprete ‘costituzionalmente’ di un nichilismo così profondo da non lasciare alcun margine a istanze in qualche modo riformatrici” (2), dato che nella sua lunga storia ha espresso valori come identità, patria, comunità, specificità e senso della gerarchia; tutti valori intrinsecamente antagonisti a qualsivoglia visione uniformante e globalista. Ma ciò significa che è anche contro il sistema economico capitalista?
Il mondialismo: il sistema per uccidere i popoli
Il grande cambio di paradigmi culturali in seno alla cultura di destra, che spinge diversi suoi settori ad archiviare l’analisi cospirazionista di marca antisemita dei fenomeni globali – che partendo dai Protocolli dei Savi di Sion porta alle riflessioni di Emmanuel Malynski (autore di un saggio sulla “guerra occulta”) e di Julius Evola – avviene in Francia in seno al Grece (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne), il centro studi francese patrocinato dal 1969 da Alain de Benoist e da altri intellettuali provenienti da destra, che si fa portavoce delle istanze della cosiddetta nouvelle droite; in Italia ciò avviene dentro la redazione del mensile Orion, fondato da Maurizio Murelli nel 1984, che dopo l’iniziale “linea nazional-rivoluzionaria” “vicina alle posizioni tradizionaliste-rivoluzionarie di Franco ‘Giorgio’ Freda” (3), arriva a proporre arditamente – non senza i condizionamenti della nouvelle droite – una ‘nuova sintesi’ nazionalcomunista: l’unione degli ideali del “fascismo-movimento” (secondo l’espressione coniata da Renzo De Felice) con quelli del bolscevismo pre-regime, accanto a un occhio di riguardo per il mondo islamico (soprattutto l’Iran di Khomeini) e la spiritualità russa. Un accostamento ‘rivoluzionario’ che li porta a riunire in un unico pantheon richiami a Julius Evola, Léon Degrelle, Alain de Benoist e Aleksandr Dugin, a Mao Zedong, Fidel Castro, Iosif Stalin, Che Guevara, Yasser Arafat, la guerriglia corsa, basca e irlandese, arrivando fino alle tesi di Noam Chomsky e Serge Latouche; il tutto nell’ottica di un’aspra lotta al mondialismo, ovvero alla globalizzazione nel suo significato più profondo, non solo economico ma anche politico-culturale e antropologico, e ai suoi principali fautori, gli Usa.
La nouvelle droite svilupperà le prime analisi sul mondialismo, che non declinerà mai nel cospirazionismo, descrivendolo come un tratto ontologico del capitalismo stesso, che per sua natura non può rimanere relegato entro i confini di un singolo Stato ma ha la tendenza a ‘mondializzarsi’. L’analisi del fenomeno viene fatta nel 1981 dall’esponente del Grece Guillaume Faye nel libro Le système à tuer les peuples (Il sistema per uccidere i popoli), dove l’autore, citando Weber, Schmitt, Habermas e la Scuola di Francoforte – ergo, non intellettuali di destra – spiega che dal 1945 si sarebbe sviluppato globalmente un Sistema, descritto in questi termini: “La caratteristica precipua del Sistema, che oggi esercita la sua azione alienante e repressiva in gradi diversi su tutti i popoli e tutte le culture, è in effetti quella di essere costituito da un insieme di strutture di potere – di carattere principalmente economico e culturale, ma anche direttamente politico, tramite le grandi potenze e le istituzioni internazionali – completamente inorganico, funzionante in modo meccanico, senza altro significato che la propria sopravvivenza ed espansione in vista di un’uscita definitiva dell’umanità dalla storia [...] le espressioni particolari del suo potere sociale sono [...] il monopolio dell’informazione e l’uso repressivo del potere culturale” (4). Una descrizione che ricorda la Megamacchina “tecno-socio-economica” analizzata negli anni Novanta da Serge Latouche, “un bolide che marcia a tutta velocità ma [che] ha perso il guidatore”, i cui effetti determinano “conseguenze distruttive non solo sulle culture nazionali, ma anche sul politico e, in definitiva, sul legame sociale, tanto al Nord quanto al Sud” (5). La principale arma usata dal Sistema per “uccidere l’anima” (l’identità) è una subdola forma di penetrazione culturale che omologa i costumi e, in conformità al vigente complesso economico, i consumi. Gli Stati Uniti, visto il loro carattere antitradizionale (è una nazione giovane nata dall’immigrazione e dal melting pot di popoli diversi fra loro) sono vittime stesse del Sistema da loro creato, che procede da solo per mezzo di una “classe tecnocratica cosmopolita” (manager, amministratori delegati, decisori finanziari) che dirige una politica ormai svuotata da ogni potere: “Contrariamente alle tesi marxiste, nessun ‘direttore d’orchestra’ più o meno occulto ci governa. Nessuna volontà coscientemente programmata anima l’insieme per mezzo di decisioni globali a lungo termine. Il potere tende a non aver più né ubicazione né volto; ma sono sorti poteri che ci circondano e ci fanno partecipare al nostro proprio asservimento. La ‘direzione’ delle società si effettua oggi al di fuori del concetto di Führung. Il Sistema funziona in gran parte per autoregolazione incitativa. I centri di decisione influiscono, tramite gli investimenti, le tattiche economiche e le tattiche tecnologiche, sulle forme di vita sociale senza che vi sia alcuna concertazione d’assieme. Strategie separate e sempre impostate sul breve termine si incontrano e convergono. Questa convergenza va nel senso del rafforzamento del Sistema stesso, della sua cultura mondialista, della sua sovranazionalità, così che il Sistema funziona per se stesso, senza altro fine che la propria crescita. Le sue istanze direttive molteplici decentrate, si confondono con la sua stessa struttura organizzativa. Imprese nazionali, amministrazioni statali, multinazionali, reti bancarie, organismi internazionali si ripartiscono tutti un potere frammentato. Eppure, a dispetto, o forse proprio a causa dei conflitti interni d’interessi, come la concorrenza commerciale, l’insieme risulta ordinato alla costruzione dello stesso mondo, dello stesso tipo di società, del predominio degli stessi valori. Tutto concorda nell’indebolire le culture dei popoli e le sovranità nazionali, e nello stabilire su tutta la Terra la stessa civilizzazione” (6). Il Sistema cancella i territori e le loro sovranità, modellandole così a immagine e somiglianza dell’unico sistema vincente, quello nordamericano: “Il mondialismo del Sistema non procede dunque per conquista o repressione degli insiemi territoriali e nazionali, ma per digestione lenta; diffonde le sue strutture materiali e mentali insediandole a lato e al di sopra dei valori nazionali e territoriali. Si ‘stabilisce’ come i quaccheri, senza tentare di irreggimentare direttamente, [...] parassitando i valori e le tradizioni di radicamento territoriale. La presa di coscienza del fenomeno si rivela di conseguenza difficile. Parallelamente alla loro formazione ‘nazionale’ i giovani dirigenti d’azienda del mondo intero hanno oggi bisogno, per vendersi e valorizzarsi, del diploma di una scuola americana. Niente di obbligatorio in questa procedura; ma poco a poco il valore di questo diploma americano e ‘occidentale’ soppianta gli insegnamenti nazionali, la cui credibilità deperisce. Un’istruzione economica mondiale unica vede allora la luce. Essa veicola naturalmente l’ideologia del Sistema” (7).
Ergo, la nouvelle droite, grazie al volume di Guillaume Faye, de-ebraicizza e de-complottizza l’analisi sul mondialismo, anche se negli ambienti del radicalismo di destra il concetto continuava sovrapporsi alla retorica antigiudaica. Non è casuale che Orion, che nel decennio Novanta sarà Organo del Fronte antimondialista, nei primi anni di vita editoriale, e cioè fra il 1984 e il 1987 circa, userà ancora tematiche cospirazioni ste antigiudaiche pescate dai Protocolli dei Savi di Sion, denunciando alleanze occulte fra l’alta finanza, ovviamente ebraica, le organizzazioni massoniche con a capo il B’nai B’rith, e i numerosi circoli sionisti sparsi in tutto l’Occidente, descritti come “l’architrave del progetto mondialista” dato che sarebbero tutti “casa, borsa e Sinagoga” (8). Il sionismo e il mondialismo sarebbero quindi considerate le due facce della stessa medaglia: il sionismo è “una delle componenti più importanti [...] del discorso mondialista” si legge in Orion, “il sionismo [...] è genocida e razzista [...] oggi l’unico vero razzismo esistente al mondo è quello praticato dal sionismo nazionale e internazionale. Un razzismo che affonda le sue radici nella storia, nella cultura e nella religione ma, certamente, l’unico vero e identificabile potere razzista e genocida” (9).
Col tempo i toni si sgrezzeranno, e anche se Orion continuerà a essere un’avanguardia del revisionismo (o forse è il caso di parlare di negazionismo) sull’Olocausto (10), presto lo sarà a livello continentale, grazie alla costruzione di soggetti transeuropei come il Fronte europeo di liberazione e Sinergie europee.
Il mondialismo è presentato come “un’ideologia, un progetto, una tendenza [...] parte integrante di progetti variamente formulati da diverse organizzazioni tra di loro alleate e concorrenti al tempo stesso”; si afferma “che il Governo Mondiale è un progetto perseguito e non realizzato; che comunque queste organizzazioni hanno un potere enorme e controllano diversi Paesi attraverso mezzadri insediati nei governi, attraverso l’alta finanza, il sistema bancario, il sistema creditizio, l’infiltrazione in organismi come l’Onu, il Gatt, l’Unicef ecc.; esse controllano inoltre la totalità dei mezzi di informazione e cercano di agire in modo discreto per plasmare menti e condizionare caratteri; lavora per lo sfruttamento intensivo del Terzo Mondo; lavora attraverso il controllo geopolitico, geofinanziario, geoenergetico; lavora per distruggere culture e popoli, per omologare, omogeneizzare, appiattire, uniformare” (11). Nell’analisi economica fatta da Orion esistono degli attori, soggetti che comporrebbero le varie lobby oligarchiche che sviluppano il disegno mondialista, gruppi totalmente svincolati da ogni legame partitico e governativo e da ogni controllo pubblico, capaci di condizionare i “partiti mondialisti” che portano avanti tale progetto nella società civile, omologandola all’American way of life: “Il governo planetario, o come si desidera definirlo, va pensato come un insieme di attori ciascuno dei quali adempie a un ruolo ben preciso, e che si rapporta con gli altri senza vincoli burocratico-gerarchici, quando piuttosto secondo un equilibrio che assomiglia più a un concetto di interfunzionalità reciproca di diversi elementi” (12). Parliamo di organizzazioni multilaterali a sfondo economico-finanziario, come banche centrali, banche d’affari e investitori istituzionali, agenzie di stampa e media, agenzie di rating e, infine, club internazionali a sfondo politico. Nel primo caso fanno capo a organismi come la Wto, la Banca mondiale e il Fondo monetario internazionale, tutti organismi “mondialisti”, a cui si sommano l’Organizzazione di Bali per la supervisione bancaria, lo Iosco (Organizzazione internazionale delle commissioni nazionali emettitrici di titoli obbligazionari), l’Isma (International securities market association) e l’equivalente per i titoli obbligazionari, l’Iso, i quali, “lungi dal perseguire gli obiettivi dichiarati, ovvero la salvaguardia della libertà degli scambi commerciali, economici e finanziari, attuano, attraverso il costante governo dei flussi dei beni, delle monete e dei titoli finanziari un rigoroso controllo delle politiche commerciali e finanziarie dei singoli Paesi, a esclusivo favore di quelli occidentali, che possono così penetrare gli altri mercati del mondo senza dover soggiacere alla legge della reciprocità, cosa che minaccerebbe di rompere gli equilibri di forza e di potere acquisito esistenti tra le diverse monete” (13).
La Banca mondiale quindi, sorta per finanziare i Paesi sottosviluppati tramite risorse prelevate dai Paesi più ricchi (“non a caso”, nota Fraquelli, “il nome originale con cui sorse a Bretton Woods era quello di Banca Internazionale per la Ricostruzione e lo Sviluppo”), non favorisce in realtà i Paesi finanziati, bensì le multinazionali lì presenti, ergo l’Occidente. Alcune di esse hanno dimensioni finanziarie e produttive superiori a quelle di Stati sovrani: l’azienda automobilistica Ford – registrava Orion – ha negli anni Novanta giri d’affari superiori all’ammontare delle entrate di Stati come la Norvegia e l’Arabia Saudita, mentre il colosso del tabacco Philip Morris vanta un volume di vendite il cui valore supera il prodotto interno lordo della Nuova Zelanda (14).
Tali risorse quindi, prelevate dalle economie deboli, servirebbero a sostenere gli investimenti delle multinazionali private presenti in tali Paesi. Chi favorisce la disuguaglianza economico-finanziaria sono le banche centrali come la Federal Riserve, la Bundesbank tedesca e, poi, la Banca centrale europea, tutti soggetti istituzionali che perseguono l’obiettivo di conciliare le esigenze dei mercati americano e tedesco verso gli altri “attori mondialisti”, come le banche d’affari; la quintessenza, se ci pensiamo, del processo di finanziarizzazione dell’economia, “perché senza alcuna definita collocazione geografica” e quindi “apolidi”, ma presenti in una fitta “rete globale” presente in tutto il mondo, realtà come Morgan Stanley, Goldman Sachs, Merill Lynch, Salomon Brothers e JP Morgan, per citare le più importanti, si muovono come “gestori delle interazioni tra le decisioni ‘politiche’ prese a livello di organismi multilaterali e specifici settori delle economie locali, quali per esempio le banche domestiche, i fondi d’investimento, i governi stessi (attraverso le privatizzazioni, tutte gestite dalle cinque banche menzionate) e gli enti territoriali. Di fatto queste banche rappresentano il lato ‘ufficiale’ degli orientamenti del governo mondiale, e hanno il ruolo di ‘guru’” (15).
Fondamentali poi i club internazionali politici, i quali ufficiosamente fungerebbero da cardine fra i vari “attori mondialisti”, quali la Trilateral Commission, il Bilderberg Group e il Club di Roma, a cui Orion dedica numerose analisi e, all’inizio, l’inserto Orion-finanza – diretto dal torinese Mario Borghezio, poi esponente della Lega Nord e tramite fra il Carroccio e il radicalismo di destra. Nell’ultimo fascicolo, il numero 4 del maggio 1986, Orion pubblica per la prima volta l’elenco dei membri della Trilateral Commission, organizzazione che prende il nome dalla teoria del suo ideologo, Zbigniw Brzezinsky, che teorizza la fine del bipolarismo indicando in “tre pilastri” – Usa, Giappone e Europa occidentale – gli attori di un progetto liberoscambista capace di avvicinare tali zone per poi unificare il sistema economico-finanziario. Grazie a pubblicazioni di questo tipo – nonostante persista una certa retorica antiebraica – Orion cerca di archiviare l’ormai vetusta e desueta teoria del ‘grande complotto’ a opera della “grande piovra ‘giudaico-massonica’ che manovrerebbe tutto. Descrivendo un vertice della Trilateral tenutosi a Madrid dopo la riunione del G7 a Tokyo a metà anni Ottanta, che vedeva riunite persone come David Rockfeller, Isamu Yamashita, Giovanni Agnelli, Zbigniew Brzezinski (ex consigliere di Jimmy Carter) e Robert McNamara, tutti interessati alla Spagna soprattutto dopo il suo ingresso nella Comunità europea per il suo ruolo strategico (“trampolino di lancio per la strategia mondialista americana”) per le sue relazioni coi Paesi arabi, il Nord Africa e l’America Latina, ruolo svolto precedentemente dal Giappone per l’Europa, Murelli scriverà: “Chi oggi si domanda come sia stata possibile l’espansione dell’industria giapponese in così breve tempo, trova in questa autorevole dichiarazione la risposta al quesito”. La Trilateral Commission “sta soppiantando le vecchie strutture mondialiste quali la Massoneria”. Infatti, continua Murelli, “è forse un caso che la politica finanziaria nazionale di questi ultimi tempi ha come chiodo fisso, per esempio, l’internazionalizzazione non solo dei capitali, ma anche e soprattutto delle imprese e della produzione? È forse un caso che se mentre colano a picco personaggi come Calvi e Sindona emergono i vari De Benedetti, Berlusconi, Agnelli ecc.? È forse un caso che proprio Agnelli si sia battuto affinché l’affare Sirwkoski fosse vantaggioso per un’impresa americana piuttosto che da un’impresa italiana? E ancora: è un caso che l’Avvocato sostenga l’acquisto di Alfa Romeo da parte della Ford, azienda automobilistica che attraverso la sua Fondazione – ma guarda caso! – assieme alla Lilly Endowment, alla Rockfeller Brothers Fund e alla Kattering Fondation ha, fin dall’inizio, costituito una delle principali fonti di finanziamento della Trilateral?” (16).
Le pubblicazioni della Società Editrice Barbarossa, contestando l’analisi complottista, inizieranno a identificare negli Stati Uniti il principale motore del mondialismo (contraddicendo così l’analisi di Guillaume Faye secondo cui tale processo di omologazione non presenterebbe “nessun ‘direttore d’orchestra’ più o meno occulto” che “anima l’insieme per mezzo di decisioni globali a lungo termine”), per il suo volere “la creazione di un unico governo o amministrazione (il Nuovo Ordine Mondiale), di un unico assetto politico, istituzionale e sociale (il liberismo), di un unico sistema di valori (individualismo-egualitarismo-dottrina dei Diritti dell’Uomo), e quindi di un unico insieme di costumi e di stile di vita (il consumismo) estesi a tutta la Terra e funzionali al dominio assoluto da parte delle forze politiche, economiche e culturali che lo incarnano: le élite della finanza mondiale!” (17). Si attacca l’Occidente, un sistema americanocentrico (una centralità dovuta al fatto che la stragrande maggioranza delle multinazionali e le più influenti lobby finanziarie hanno la loro sede legale negli Stati Uniti), anche se i suoi centri d’irradiazione sono policentrici e sparsi in tutto il globo. Infatti, “le imprese multinazionali – oltre l’80 per cento dei casi a sede statunitense – dominano il mercato delle principali derrate di base e degli altri settore chiave (macchinari industriali e agricoli, fertilizzanti, elettronica, ecc.)” (18). Gli ingredienti per la creazione di questo One World (il Nuovo Ordine Mondiale) uniformato all’American way of life sarebbero le “strutture tecnoeconomiche, l’ideologia universalista e la sottocultura di massa che potremmo definire – sottolinea Faye – ‘americano occidentale’”.
Per Gabriele Adinolfi “tutte le ideologie moderne sono mondialiste, dal liberalismo al comunismo alla socialdemocrazia. E ciò non si limita alle ideologie moderne: possiamo anzi dire che il reale scontro ideologico che ha caratterizzato gli ultimi diciotto secoli della nostra storia sia proprio quello tra l’ideale di mondialismo e l’idea di universalità. La divergenza fra questi è palese. La prima concezione è tipicamente immanente, fa capo a un’organizzazione materiale al contempo super e trans partes che si traduce immancabilmente in un modello uniforme sul quale debbono appiattirsi, deformandosi e spegnendosi per forza di cose, tutte le singole individualità e collettività. L’altra [...] si fonda su di un’idea gerarchica e trascendentale rappresentata non da un apparato esclusivista (quali per esempio una Chiesa o il partito comunista) ma da un centro ideale che sia al contempo riferimento, fusione, sintesi ed elemento di trascendenza (quale fu a suo tempo l’imperatore o meglio l’idea di Impero) [...] Custodendo gelosamente le singole differenze come altrettanti patrimoni, l’universalità le unisce e le salda esclusivamente in un’idea spirituale trascendentale, non in un modello culturale totalizzante come pretende al contrario il mondialismo [...] Il mondialismo è infatti il frutto di un’idea monoteistica, totalizzante, di filiazione diretta dall’Antico Testamento. L’universalità, viceversa, è al contempo monistica e politeistica” (19).
Identificando nel monoteismo giudaico-cristiano la cultura principalmente responsabile della genesi del mondialismo, notiamo come il gruppo di Orion recuperi le suggestioni neopagane della nouvelle droite, però scevre da ogni rimando di tipo antisemita. L’altra peculiarità del mondialismo è il rifarsi all’“ideologia universalista”, espletata “sia attraverso l’utopia cosmopolita e pacifista alla Emergency oppure tramite lo sbrigativo pragmatismo yankee alla Bush”, una “moderna religione” laica che fa sua la dottrina dei diritti umani, “la suprema espressione dell’Egualitarismo”, una “tendenza storica nata e affermatasi per la prima volta nella storia con il giudeo-cristianesimo e in seguito dispiegatasi storicamente nelle sue varianti laiche (democrazia liberale, comunismo, mondialismo ecc.)”, che impone una “morale presuntamente universale [che] fornisce l’armatura ideologica a un neo-colonialismo che al posto del ‘fardello dell’uomo bianco’ ha oggi come giustificazione un devastante cocktail di angelismo e ipocrisia. [...] La distruzione dei popoli passa anche da qui, dall’imposizione a livello planetario dei ‘valori’ occidentali e dalla conseguente disintegrazione di ogni legame organico, di ogni tradizione particolare, di ogni residuo di comunità – tutti ostacoli alla presa di coscienza della nuova ‘identità globale’ da parte del cittadino dell’era della globalizzazione. [...] rigettare la dottrina dei diritti dell’uomo non significa parteggiare per lo sterminio, per l’ingiustizia o per l’odio. [...] Il riconoscimento dei diritti umani, di per sé, non fonda proprio nulla, se non quel tipo di giustizia e di libertà che, tautologicamente, si trovano espresse... nella dottrina dei diritti umani! Malgrado il fatto che i sostenitori di tale dottrina continuino a pensare di aver ‘inventato la felicità’, occorre sostenere con decisione che un’altra giustizia, un’altra libertà, un’altra pace sono possibili. Opporsi ai diritti dell’uomo significa rifiutare una morale, un’antropologia, una certa idea dei rapporti internazionali e della politica, una visione del mondo globale figlia di una tendenza storica ben individuabile” (20).
Nella visione liberale – ‘figlia’ dell’illuminismo e della rivoluzione del 1789 e ‘madre’ del mondialismo – l’uomo è solo un individuo e se condariamente è membro di una cultura/comunità. Nell’idea tradizionale l’uomo è concepito olisticamente come parte della comunità organica. A una visione liberale fondata sui diritti dell’uomo, si contrappone una visione antimondialista fondata sui diritti dei popoli, delle etnie e delle comunità, incarnata dall’Euthereos, concezione indoeuropea dell’appartenenza, dove l’uomo è libero se è libera la sua comunità tradizionale: “Al leitmotiv dei diritti dell’uomo noi opponiamo la visione sinfonica secondo cui siamo dei popoli che rifiutiamo di lasciarci considerare un gregge portato verso gli altari o verso i mattatoi della società mercantile [...] Per quanto sembrino lontani dalle nostre preoccupazioni materiali, è con la carne e con lo spirito dei territori, dei clan, delle tradizioni e delle patrie, delle comunità e dei gruppi intermedi che bisogna ricollegarsi, poiché sono loro che conservano al mondo le sue varietà, la sua densità organica, la sua poesia, e innalzano ancora arcipelaghi di resistenza nei confronti dell’Impero della ragione totalitaria ammantata di morale che favorisce, volente o nolente, la colonizzazione delle terre da parte dei soli interessi tecno-economici e la trasformazione dell’uomo in semplici relais-robot dei circuiti di produzione-consumo” (21). L’etnocidio e la successiva costruzione di una società multietnica attraverso l’immigrazione e il melting-pot passerebbe dall’imposizione di un’etica universale che omologherebbe il tutto sotto un unico modello, edificato per gradi, “estirpando ogni precedente identità (e quindi differenza). La cancellazione delle differenze è a priori trascendentale, la condizione di possibilità della ‘società’ multirazziale. Ma con cosa riempire questo vuoto? Ricorrendo necessariamente a uno strumento astratto (e quindi ideologico). E allora: il diritto è la risposta; dunque accomunare ogni uomo attraverso il diritto” (22). E se questo diritto nasce con la Modernità, il problema, quindi, è essa, tout court. In ossequio a Evola, uno dei testi più emblematici di Carlo Terracciano è Rivolta contro il mondialismo moderno, dove l’autore vede la tradizione come il baluardo contro la cosiddetta ‘sovversione’ mondialista, un atto “rivoluzionario” in quanto capace di contrastare il sistema che sovverte le naturali radici dei popoli. Infatti, “se la conservazione è il contrario della Tradizione che è rivoluzionaria, la Sovversione, come tutti i fenomeni di ribellismo del mondo moderno, è una rivoluzione di segno contrario, una Contro-rivoluzione, sempre nel senso tradizionale del termine. Essa infatti, nel momento stesso in cui pretende di distruggere le forme del presente (e questo è il suo aspetto più positivo) lo fa nel nome e nel segno della ‘modernità’, come catego ria mentale e spirituale [...]. La sovversione tende a ribaltare le forme del passato per conservare l’essenza del presente, cioè il modernismo antitradizionale, cercando così di arrestare il vero processo rivoluzionario che chiuda un ciclo e ne apra uno nuovo. È insomma un’altra forma della conservazione [...]. Nel mondo moderno, alla fine di un ciclo, ogni distruzione del passato e del presente è propedeutica al compiersi del ciclo storico medesimo” (23).
Un antimondialismo che non è anticapitalismo
L’analisi antimondialista, nonostante tocchi punti interessanti, è più debole rispetto a quella anticapitalista marxiana: non mette infatti in discussione il capitalismo e contesta le dinamiche globali e transnazionali solo nella sfera culturale, ergo sovrastrutturale. Insomma, tolta la retorica antiebraica, rimane, aggiornata, la critica dei vecchi fascismi al capitalismo apolide – e in tal caso improduttivo perché nato dalla speculazione, dall’usura – da contrapporre al capitalismo ‘sano’, quello locale e produttivo, dove il motore è il ‘produttore’, termine che sottintende sia il lavoratore che l’imprenditore in nome di una ricetta corporativa, la so cializzazione fascista della Rsi, che Orion, archiviato il nazionalcomunismo, riscopre negli anni Duemila quando diventa un faro per l’area ‘non conforme’ (cioè CasaPound). Non casualmente Gabriele Adinolfi, nel marzo 2005 scrive che “la Socializzazione rappresenta indiscutibilmente il compimento estremo della rivoluzione sociale mussoliniana. Economicamente essa rappresenta il punto di rottura con il capitalismo. Non è assolutamente vero che durante il Ventennio l’economia fascista sia stata capitalista: tutt’altro. Ogni intervento legislativo attesta la continua aggressione, da parte dello Stato nazionale e proletario, allo strapotere privato. Il Corporativismo, all’inverso di quanto ha voluto sostenere la propaganda marxista, ha rappresentato un’esperienza controcorrente rispetto al capitalismo, incentrata sull’organicità sociale. Il capitalismo, ovviamente, esercitò da sempre un’azione di contenimento rispetto alla rivoluzione autoritaria del Duce; sicché, inchiodato in una logica di azione/reazione, il Regime aveva finito col riuscire a imporre agli industriali un rapporto di armonia tra lavoro e capitale, tra società e individualità. In questa logica di armonia (contrassegnata dal procedere inesorabile dell’azione sociale del Capo) si mantiene il rapporto capitale-lavoro durante il Ventennio” (24). Una lettura revisionista ed edulcorata del regime mussoliniano quella di Adinolfi, che ‘dimentica’ le origini antioperaie dello squadrismo mussoliniano e la prima fase deflazionista e neoliberista del regime, opportunisticamente archiviata dopo la crisi borsistica del 1929, che colpì il capitalismo mondiale (a esclusione dell’Unione Sovietica) e obbligò il capitalismo, per resistere all’urto, a ricorrere al sostegno dello Stato, imponendo al fascismo l’attuazione di riforme corporativiste. Riforme che, con la Repubblica Sociale, spinsero l’ala populista del fascismo repubblicano a radicalizzarsi, ma solo alla fine (verso il dicembre del 1944) col boicottaggio degli occupanti/alleati tedeschi (il che dovrebbe far riflettere quando oggi l’estrema destra si erge ad alfiera del ‘sovranismo’). Insomma, il corporativismo solidarista auspicato in risposta al mondialismo, è solo una governance del capitalismo.
C’è però da chiedersi perché tali riflessioni, come notava Fraquelli, paiono più innovative, più ‘rivoluzionarie’. Va detto che esse vengono elaborate in una fase cruciale di cambi paradigmatici in seno al capitalismo globale, ovvero a cavallo degli anni Settanta e Ottanta, quando avvengono dei profondi mutamenti di natura strutturale, dato che, conclusi i famosi Trenta gloriosi (1945-1975), si ha l’avvio “della società post industriale, caratterizzata dalla fine del modello fordista e della centralità operaia, dallo sviluppo del terziario avanzato e dalla prima globalizzazione finanziaria, con la deindustrializzazione, le delocalizzazioni, i primi flussi migratori. Prende il via la rivoluzione conservatrice neoliberista degli anni Ottanta, che non coinvolgerà solo Ronald Reagan negli Stati Uniti e Margaret Thatcher in Gran Bretagna, ma muterà anche la genetica della sinistra. È il caso del francese François Mitterand e, in Italia, del Psi di Bettino Craxi” (25), una rivoluzione neoliberista che spingerà i settori più dinamici della destra culturale a dare una lettura più profonda rispetto a quelle date precedentemente.
La fase corrisponde non solo all’abbandono del pensiero marxiano da parte della socialdemocrazia, ma pure alla sua debolezza in seno ai partiti comunisti. Se negli anni Settanta era ancora egemone, è negli anni Ottanta “che si registra l’avvio della fase discendente della cultura marxista in Italia. Questa viene attaccata ‘dall’esterno’ (gli apparati ideologici dello Stato borghese), ‘dall’interno’ (vengono a galla le tendenze interne al Pci che puntano a una sua trasformazione socialdemocratica o si rafforzano le tendenze che prendono le distanze da Lenin o dal marxismo orientale) e ‘di lato’ (sorgono riviste e centri studio per influire sul dibattito interno del Partito)” (26), con l’epilogo odierno di una sinistra radicale comunista (o postcomunista?) che attua nei primi anni Novanta la sua rifondazione su basi ideologiche fragili ed eclettiche, che pescano più dalla nuova sinistra anni Sessanta.
Una delle motivazioni di tale crisi, rileva il filosofo marxista Domenco Losurdo, è da ricercare dal fatto che la sinistra italiana e occidentale risulta assente, incapace di rendersi realmente indipendente dal sistema imperialistico, quando non colpevole di aver spianato la strada a un neoimperialismo di ritorno sotto forma di guerre di esportazione della democrazia occidentale, veicolando un pregiudizio eurocentrico e inconsciamente razzista. Secondo Losurdo questo avviene perché s’è creata una dicotomia fra marxismo occidentale, “che ha sviluppato una sua personale riflessione separandosi dallo sviluppo del pensiero marxista nel resto del mondo, un marxismo occidentale che ha influenzato i movimenti della cosiddetta ‘nuova sinistra’ e il filone sviluppatosi dal ‘68 in poi, divenendo egemone dopo il crollo dell’Unione Sovietica. Un pensiero, i cui cantori odierni sarebbero Negri, Hardt, Zizec e prima ancora Foucault e Arent, che ha rimosso dalle sue riflessioni il nodo della lotta antimperialista di matrice leninista e quello sullo sviluppo delle forze produttive, come invece hanno continuato a fare quei movimenti affermatisi fuori dall’Occidente, che si sono posti l’obiettivo di fare uscire dalla miseria e dalla fame centinaia di milioni di essere umani” (27). Tutti intellettuali – pensiamo alla fortuna entro Rifondazione comunista o nell’area noglobal del libro di Toni Negri e Michael Hardt Impero e Moltitudini – che non contestavano la globalizzazione in quanto tale, ma solo la sua governance èlitaria, auspicandone, come notava Fraquelli all’inizio, una dal “volto umano”, cioè gestita dal basso.
Sta di fatto che la Kulturkritik delle nuove destre metapolitiche – una versione aggiornata della Konservative Revolution sviluppatasi a Weimar fra le due guerre e del filone antimoderno e aristocratico nietzscheano – cerca di rielaborare se stessa in risposta e reazione alla post modernità. Se la destra, con un intellettuale atipico come Alain de Benoist, ha cercato di uscire dal gorgo rielaborando la propria cultura, così non ha fatto la sinistra, che la propria cultura l’ha rinnegata. È in questo spazio che la nouvelle droite ha avuto gioco facile a sviluppare la sua strategia culturale. Ed è su questo terreno che la sinistra deve riflettere, per non perdere la battaglia sociale che caratterizzerà il futuro scontro politico.
Note
1 M. Fraquelli, A destra di Porto Alegre. Perché la Destra è più noglobal della Sinistra, con un’introduzione di G. Galli, Soveria Mannelli, Rubbettino, 2005, p. 7
2 Ibidem
3 P.-A. Taguieff, Sulla Nuova destra. Itinerario di un intellettuale atipico, Firenze, Vallecchi, 2004, pp. 65, 66 (ed. orig. Sur la Nouvelle Droite, Paris, Descartes & Ce, 1994)
4 G. Faye, Il sistema per uccidere i popoli, 1981, 1º ed. it., Edizioni dell’Uomo libero, 1983, ristampato dalle Edizioni Barbarossa nel 1997, pp. 37, 38
5 S. Latouche, La megamacchina. Ragione tecnoscientifica, ragione economica e mito del progresso, Torino, Bollati Boringhieri, 1995, p. 29
6 G. Faye, Il sistema per uccidere i popoli, cit., p. 82
7 Ibidem, p. 59
8 C. Terracciano, Caleidoscopio Giugno 1987 e dintorni: Apocalypse now, in Orion, n. 34, giugno 1987, p. 292
9 Così nel commento al Manifesto Politico del convegno organizzato dal mensile, tenutosi a Milano il 17 maggio 1987, pubblicato su Orion, n. 33, luglio 1987, p. 339
10 Cfr. M. L. Andriola, La retorica antigiudaica e il negazionismo sulle pagine del mensile Orion, in Giornale di Storia Contemporanea, nuova serie, n. 1/2016, pp. 177-196
11 M. Murelli, Fisionomia ed essenza del mondialismo, in Orion, n. 74, novembre 1990, p. 1
12 Centro Studi Orion, La conformazione del potere mondialista, in Orion, nuova serie, n. 165, giugno 1998, p. 35
13 M. Fraquelli, A destra di Porto Alegre, cit., p. 44
14 R. Barnet, J. Cavanagh, Le trame del conflitto mondiale, in Orion, nuova serie, n. 125, febbraio 1995, p. 34
15 Centro Studi Orion, La conformazione del potere mondialista, cit., p. 36
16 M. Murelli, La Trilaterale, in Orion, n. 21, giugno 1986, pp. 149 (a p. 148 lo schema della Trilateral). Per confermare la sua tesi, Murelli cita la seguente dichiarazione di Zbigniew Brzezinski: “Dobbiamo sostituire il sistema internazionale attuale con un sistema nel quale devono essere integrate le potenze attive e creatrici emerse negli ultimi tempi. Questo sistema deve comprendere anche il Giappone, il Brasile, i Paesi produttori di petrolio inclusa l’Unione Sovietica [...] Sarà un mondo nel quale le supremazie nazionali spariranno”. Z. Brzezinski, dichiarazione rilasciata a ¿Que pasa?, n. 662-663, agosto 1979, cit. in Ibidem. Tornando al Giappone, è lì che nell’ottobre 1973 nacque la Trilateral, dato che in quell’anno fra Usa ed Europa vi fu “il deterioramento delle relazioni comuni (ricordiamo semplicemente l’effetto della crisi del dollaro e del sistema monetario internazionale) ma anche per il crescente isolamento del Giappone e ciò in contrasto con la sua potenza economica”. J. Carvajal, dichiarazione rilasciata a Diario 16, 18 giugno 1986, p. 21. Jaime Carvajal fu Presidente del Banco Industrial e noto trilateralista
17 G. Santoro, Dominio Globale. Liberoscambismo e Globalizzazione, Cusano Milanino, Società Editrice Barbarossa, 1998
18 G. Santoro, Il Mito del libero mercato, Cusano Milanino, Società Editrice Barbarossa, 1997, p. 135
19 G. Adinolfi, Nuovo ordine mondiale. Tra imperialismo e impero, Cusano Milanino, Società Editrice Barbarossa, 2006, pp. 185, 186
20 A. Scianca, Diritti dell’uomo?, in Orion, nuova serie, n. 226, luglio 2003. Adriano Scianca diverrà poi responsabile culturale di CasaPound, e oggi dirige la rivista online e cartacea Il Primato Nazionale, sempre vicina ai ‘fascisti del III millennio’
21 J. Marlaud, Per una critica radicale ai diritti dell’uomo, in Orion, nuova serie, n. 94, luglio 1992, p. 25
22 G. Damiano, Elogio delle differenze, Padova, Edizioni di Ar, 1999
23 C. Terracciano, Rivolta contro il mondialismo moderno, Molfetta, Noctua Edizioni, 2002, p. 144
24 G. Adinolfi, Le mine dimenticate, in Orion, nuova serie, n. 246, marzo 2005, pp. 15, 16
25 M. L. Andriola, Fra postmodernità, crisi del marxismo e affermazione delle nuo- ve destre metapolitiche: il caso italiano, in Paginauno, n. 62, aprile-maggio 2019, p. 48. Rimando a S.G. Azzarà, Crisi della cultura di massa, postmodernismo e necessità della menzogna, in Marxismo Oggi, n. 1-2, 2011, pp. 71-144
Louis Alexandre, rédacteur en chef de la revue Rébellion et spécialiste des questions sociales, analyse la situation sociale née du confinement et présente l’actualité de sa revue.
Après la crise sanitaire, la crise sociale ? C’est la crainte pour les renseignements généraux mais aussi pour la prédictions de nombreux spécialistes. Alors que des « efforts » seront demandés aux employés pour aider l’économie à se relever, Louis Alexandre craint que ce ne soit qu’un écran de fumée pour détruire encore plus le droit des travailleurs.
Infos-Toulouse : Le Covid-19 est à l’origine d’une crise sans précédent. Pensez-vous qu’un retour à la normale est possible rapidement ?
Louis Alexandre : Cela est possible malheureusement. Le pire est que tout rentre dans la norme voulue par nos gouvernants. Qu’on oublie les sacrifices des uns et les responsabilités des autres. Que les milliers de morts des hôpitaux et des Ehpad ne soient plus que des statistiques dans un rapport, qu’on ne tire pas les enseignements de tout cela. Mais je doute que cela soit aussi facile pour l’oligarchie. Si elle utilise la peur et la culpabilisation pour soumettre les esprits, la colère née de sa gestion calamiteuse de la situation sanitaire laisse penser qu’un nouveau cycle de révoltes va prendre la suite du mouvement des Gilets jaunes.
Croyez-vous que le gouvernement tire des enseignements de la situation?
Il n’aura pas le choix car la colère populaire va lui présenter l’addition. « Nous sommes en guerre », martelait frénétiquement Emmanuel Macron lors de sa première intervention. Oui, en effet, ils sont en guerre sociale depuis son élection. Élu parce qu’étant le dernier barrage de l’oligarchie face à la montée du populisme, la macronie mène un lutte sans merci contre toutes les conquêtes sociales des travailleurs français et l’idée d’une nation solidaire. Dans sa politique intérieure comme extérieure, son agenda était d’imposer sa vision libérale d’un monde sans limite.
La crise sanitaire du Covid-19 a profondément bouleversé leurs plans car c’est une remise en question radicale du modèle mondialiste. Comme on l’avait observé lors des premiers jours de mobilisation des Gilets jaunes, le gouvernement a paniqué devant une situation nouvelle et tragique. Ils n’ont pas été à la hauteur des enjeux et cela s’est vu. La honte tue quand le roi se réveille nu.
Heureusement pour lui, la force régalienne de l’État a repris le dessus. Sauvée hier par les forces de l’ordre républicain des Gilets jaunes, la macronie a survécu grâce au dévouement des professionnels de santé. La machine a tourné uniquement par le travail des classes laborieuses qui ont assuré leurs devoirs alors que les élites fuyaient leurs responsabilités.
« Macron a tiré une balle dans la nuque du Code du travail »
Que vous inspirent les mesures d’urgence pour le redémarrage ?
C’est ma crainte. On aura beau applaudir les infirmières, célébrer les petits paysans et saluer le travail des ouvriers qui font tourner la nation durant cette crise, on risque de ne pas voir le hold-up que prépare l’oligarchie sur notre dos. Le MEDEF a déjà déclaré qu’il fallait donner un bon coup de fouet pour relancer la machine ! Macron avait commencé à tuer le Code du travail quand il était ministre de Hollande, là il lui a tiré une balle dans la nuque. Le patronat en rêvait, le Covid-19 l’a fait…
L’autre point très inquiétant est le développement de la surveillance numérique de masse. Les dispositifs de traçage et de contrôle social qui risquent d’être mis en oeuvre pour des raisons sanitaires, seront très utiles pour garantir une reprise sans explosion de révolte. Comme les lois antiterroristes post-Charlie, beaucoup de mesures de surveillance peuvent devenir des armes contre toute forme de dissidence au sein de la population.
Que vous inspirent les théories du complots présentes sur le net ?
Les gens doutent, avec raison du système, et les « Fakes News » propagées par le médias officiels n’y sont pas pour rien. Après je me méfie beaucoup des vertus incapacitantes de ce genre de lubies. À trop chercher les détails, on perd la logique de l’ensemble. Qu’un chinois ait choppé la maladie dans un bol de soupe au pangolin ou que la CIA (ou autres) ait créé le virus en laboratoire, ce sont d’abord les conséquences immédiates qu’ils faut combattre.
« Cette force ne sera pas perdue »
L’avenir est donc sombre selon vous ?
« Il faut opposer au pessimisme de la raison l’optimisme de la volonté », disait Gramsci. Il y a des choses très positives qui ont été semées dans les esprits. Les semaines de confinement ont aussi déconfiné l’imaginaire et la pensée collective. On a vu que la solidarité et l’entraide était toujours présente chez les « braves gens ». Que la spiritualité pouvait être vivante en dehors d’un cadre social établi. On a compris ce qui était essentiel à nos vies. Cette force ne sera pas perdue, j’en suis certain.
On peut transposer l’avis du philosophe Slavoj Zizek sur les thèses complotistes sur les attaques du 11 septembre : « Il n’est pas nécessaire, de toute façon, de l’avoir organisé. Cela a servi à justifier une certaine politique. Et c’est encore mieux, dans la perspective, si cela n’a pas été prémédité. C’est cela surtout qu’il faut voir. Sans même une quelconque conspiration, cela fonctionne. D’un autre côté, il est vrai qu’il y a quelque chose, qui justifie que l’on réfléchisse à l’existence de figures paranoïaques conspirationnelles. (…) Aujourd’hui, avec la technologie, on sait ce qui se passe, partout. C’est pourquoi les États ont sans cesse besoin d’intervention secrètes. Il y a certainement des conspirations, partout, à cause de cette connaissance technologique de l’état du monde. De toutes les façons, je le répète, nous n’avons pas besoin de conspiration pour comprendre l’exploitation que l’on a faite du 11 septembre ».
Comment la revue Rébellion prépare la suite ?
En travaillant d’arrache-pied comme toujours. Les dernières semaines furent intenses en matière de diffusion sur notre site avec plusieurs articles publiés pour tenir en éveil nos lecteurs. Nous avons eu aussi un élan de soutien sans précédent, d’abonnements et de commandes. Je voudrais d’ailleurs remercier l’ensemble de ce nouveau public (mais aussi les anciens qui reviennent nous aider pour l’occasion) qui viennent nous donner les moyens d’assurer un nouvel élan pour nos initiatives.
La sortie du numéro 88 devra avoir lieu prochainement. Après 18 ans d’existence, Rébellion se renouvelle constamment et la jeune équipe qui émerge est surement la plus prometteuse de son histoire. De manière militante, il faut profiter de cette période de « calme avant la tempête » pour faire le bilan des expériences passée et surtout de redonner une dimension positive, créatrice et dynamique à notre engagement. Beaucoup de balivernes ont été balayées par la crise (le survivalisme du dimanche, la misanthropie en carton et le complotisme bidon), on ne doit pas retomber dans cela et proposer autre chose de plus constructif.
Un dernier mot ?
Prenez soin de vous et de vos familles ! Rendez-vous utile et préparez l’alternative !
L’affaire Airbus et les réponses européennes à l’extraterritorialité du droit américain
Auteur : Florent Rabottin
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Les multiples condamnations des sociétés européennes par les tribunaux américains ont marqué les esprits. La France en fut une cible privilégiée avec des amendes représentant ces dernières années plus de 20 milliards d’euros. En 2017, une utilisation encore plus agressive de la législation américaine permettant à General Electric de prendre le contrôle d’Alstom Énergie s’est matérialisée par l’organisation d’une campagne d’intimidation, l’incarcération d’un cadre dirigeant (Frédéric Pierucci[i]) et des menaces personnelles contre les dirigeants français du groupe. Comment se fait-il que les États-Unis puissent sanctionner nos entreprises ? Comment répondre à ses intrusions juridiques et économiques ?
La moralité comme prétexte à la défense des intérêts économiques
La genèse de l’extraterritorialité du droit américain commença par le scandale du Watergate qui met au jour un système de corruption de hauts fonctionnaires étrangers par des entreprises américaines. En réaction, le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) fut promulgué le 19 décembre 1977 afin de lutter contre la corruption d’agents publics à l’étranger. Les multinationales américaines s’émeuvent alors d’une législation qui ne leur permettent plus d’agir à armes égales face à leurs concurrents étrangers, ceux-ci pouvant continuer à utiliser la corruption afin d’obtenir des marchés. Débute alors un long travail d’influence juridique des autorités et des multinationales américaines pour imposer ces nouvelles dispositions le plus largement possible. Dans cet objectif, une étape majeure est franchie avec l’adoption par l’OCDE, le 17 décembre 1997, de la Convention de lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales qui « transpose » le FCPA aux pays représentant la grande majorité de l’économie mondiale[ii]. La justice américaine obtient alors toute légitimité pour lancer des enquêtes à l’encontre de sociétés quelle estime être en infraction de sa législation.
Deux ans plus tard et les attentats du 11 septembre 2011, un nouveau front s’ouvre contre le terrorisme et ses sources financières liées à la corruption, source d’argent sale susceptible de soutenir des projets d’attaques islamistes[iii]. Sous ce prétexte, le Patriot Act donne aux services de renseignement américains la capacité quasi illimitée de collecter des informations[iv]. Après la chute de l’URSS, les services de renseignements se concentrent ainsi sur une nouvelle cible : les communications commerciales. L’Administration américaine dispose désormais des moyens nécessaires à l’espionnage industriel à grande échelle afin de capter des secrets d’affaires et de constituer des dossiers pour corruption en fonction des intérêts des États-Unis. On s’aperçoit alors que « les propos « vertueux », les bonnes intentions affichées traduisent moins le souci d’éradiquer réellement les pratiques corruptrices, que la propension à jeter le discrédit sur des concurrents afin d’ouvrir de nouveaux marchés aux intérêts américains[v]». L’extraterritorialité du droit américain est désormais pleinement opérationnelle.
Un mécanisme juridique étendu, soutenu par un système étatique organisé
En vertu du principe de souveraineté, chaque État légifère librement, les lois étant régies par le principe de territorialité. Cela signifie que les textes régulièrement adoptés s’appliquent sur son territoire, à l’intérieur de ses frontières. Par exception, l’administration américaine applique sa propre norme juridique, adoptée par ses représentants nationaux, à un acteur économique étranger au-delà de ses frontières. La notion d’extraterritorialité du droit américain va même plus loin[vi], consistant en « une grande variété de lois et mécanismes juridiques conférant aux autorités américaines la capacité de soumettre des entreprises étrangères à leurs standards […] de capter leur savoir-faire, d’entraver les efforts de développement des concurrents […] contrôler ou surveiller des sociétés étrangères gênantes ou convoitées […]. ». De cette manière, les États-Unis s’attribuent une compétence judiciaire universelle grâce à l’application extensive de critères de rattachement territoriaux, souvent très ténus, tels que l’usage du dollar, d’un serveur de messagerie numérique américain, d’un composant électronique, voire d’un photocopieur ou d’un smartphone de fabrication américaine[vii].
Deux agences sont chargées de faire respecter ces lois : le DoJ (Department of Justice) et la SEC (Security exchange commission). Ces procédures sont initiées et alimentées par les services de renseignement de la CIA (Central Intelligence Agency) à la NSA (National Security Agency) en passant par le FBI (Federal Bureau of Investigation) et ses agents placés dans les ambassades. L’information est alors remontée en utilisant si besoin des sources rémunérées, voire des organisations non gouvernementales[viii]. Ces informations sont traitées par divers organismes : le DoJ, le Trésor (Departement of Treasure), la SEC (Security exchange commission), la Réserve fédérale et l’OFAC (Office of Foreign Assets Control), qui surveille l’application des sanctions internationales américaines. À cela peut s’ajouter l’action de procureurs locaux, voire d’États, comme celui de New York, qui sont régulièrement partie prenante dans les procédures contre les grands groupes étrangers. Les procédures d’investigations américaines étant généralement assurées par des cabinets d’avocats et d’audit anglo-saxons fortement rémunérés par les groupes européens pour rassembler les preuves de leur culpabilité[ix]. Les sanctions résultant de ces négociations ne sont pas juridiques mais permettent d’annuler une procédure qui pourrait se poursuivre devant des tribunaux américains. Le DoJ joue ainsi sur la « peur » du juge en cas de procédure judiciaire qui serait plus longue et surtout plus coûteuse en cas de condamnation. Cette appréhension empêche les entreprises accusées de se prévaloir des lois de blocage, qui leur permettent de ne pas communiquer à des autorités étrangères des documents stratégiques pouvant porter atteinte à la souveraineté ou aux intérêts économiques essentiels de leur pays d’origine.
Des initiatives de riposte juridique européennes
Après des années de victimisation, plusieurs textes ont été promulgués afin de tenter de reprendre les prérogatives de sanction des entreprises européennes, principalement par la création d’un parquet européen[x]. Censé être opérationnel à partir de novembre 2020, cette instance indépendante avec des compétences judiciaires propres, aura pour mission de diriger des enquêtes et mener des poursuites pénales contre la fraude aux intérêts financiers de l’UE. Il pourra engager des poursuites directement au niveau national des États membres concernant des infractions portant atteinte au budget de l’UE, telles que la fraude, la fraude transfrontière à la TVA, la corruption ou le blanchiment de capitaux. Le Parquet européen travaillera en coopération avec l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF), Eurojust, Europol et les parquets nationaux.
Certains États membres ont également agit tel que la France avec l’entrée en vigueur le 1er juin 2017 de la loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique[xi], qui a pour objectif de s’appliquer « en toutes circonstances » pour venir sanctionner tout délit de corruption commis à l’étranger par une personne physique ou morale française ou par une personne résidant habituellement ou exerçant tout ou partie de son activité économique sur le territoire français. Ces mesures sont contrôlées par l’Agence française anticorruption. Elle a introduit également, sous l’égide du Parquet national financier (PNF), la Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) dans le droit pénal français. Inspirée par le modèle américain du deferred prosecution agreement, elle s’adresse aux personnes morales mises en cause pour corruption, trafic d’influence, blanchiment, blanchiment aggravé et blanchiment de fraude fiscale en leur permettant de négocier une amende sans aller en procès ou sans plaider coupable. La logique est comparable au Royaume-Uni avec le United Kingdom Bribery Act (UKBA) et la création du Serious Fraud Office, équivalent du DoJ américain.
Ainsi, les réactions de certains pays européens face à l’ingérence américaine ont été globalement de copier le système de lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent, d’abord par la « transposition » de la législation FCPA dans le périmètre OCDE, puis par la création d’équivalents des organismes administratifs américains au niveau européen et national. La procédure est également calquée avec la volonté de privilégier fortement les transactions (deals of justice). On a pu l’observer avec la condamnation d’UBS par tribunal correctionnel de Paris avec une amende d’un montant de 3,7 milliards d’euros tel que requis par le PNF, alors que l’amende proposée dans le cadre de la CJIP préalable, proche d’un milliard d’euros, soit plus de trois fois moins que la peine prononcée par la juridiction, démontre la volonté des autorités françaises d’inciter les entreprises à conclure des accords transactionnels.
La nouvelle concurrence juridique européenne dans condamnation tripartite d’Airbus
On a observé plusieurs groupes européens opter pour l’utilisation des mécanismes transactionnels comme le motoriste britannique Rolls-Royce, qui a été condamné début 2017 à verser une amende de 763 millions d’euros aux autorités judiciaires britanniques, américaines et brésiliennes afin de solder une affaire de corruption à l’étranger après avoir lui-même dénoncé les faits au SFO fin 2012 ; ou bien HSBC ou la Société Générale avec le recours à la CJIP en France.
Le dernier cas en date fut celui d’Airbus, trouvant un accord de principe avec le PNF, le SFO et le DoJ pour payer une amende de 3,6 milliards d’euros. Soupçonné à plusieurs reprises de corruption, l’entreprise a identifié des pratiques commerciales illégales dans le cadre de contrats internationaux et s’est dénoncée elle-même auprès des autorités dans une optique de pleine coopération. L’entreprise a utilisé les dispositions des législations britannique (UK Bribery Act) et française (loi Sapin II) pour éviter le risque d’une condamnation pénale et de se voir interdire l’accès aux marchés publics dans le monde, signifiant de facto son arrêt de mort.
Le SFO et le PNF ont été saisis en 2016. L’année suivante, c’était au tour du DoJ d’ouvrir à son tour une enquête. Airbus concluant ses contrats en dollars, la menace d’une condamnation pénale américaine pouvait s’avérer dévastatrice pour l’avionneur. Parallèlement, la justice américaine soupçonnait Airbus de n’avoir pas obtenu les autorisations nécessaires pour exporter des armements contenant des composants américains (International Traffic in Arms Regulations). Le paiement de l’amende a ainsi été réparti entre le SFO, le DoJ et le PNF, 2,1 milliards d’euros revenant au Trésor public français. L’affaire Airbus démontre que l’application des dispositions anticorruption françaises et britanniques peuvent entraver les sanctions américaines, les États-Unis n’ayant plus le monopole des sanctions dans ce domaine. Les amendes infligées peuvent alors, au moins en partie, revenir aux États européens.
Des recommandations extra juridique pour éviter des sanctions extraterritoriales
La pression américaine nous oblige, en réaction, à sanctionner nos entreprises et essayer de rapatrier une part la plus importante possible de l’amende, de faire en sorte que les informations récoltées soient sous contrôle national et éviter que les données fuitent vers d’autres puissances étrangères, que les acteurs du développement du dossier restent européens (recours à des cabinets d’avocats nationaux et non pas anglo-saxons) et essayer de démontrer que l’Europe est elle aussi disposée à lutter efficacement contre la corruption et dissuader les américains de le faire à notre place, comme essaie de le démontrer le groupe Thalès aujourd’hui.
Souvent trop concentrées sur leurs cœurs de métier et la satisfaction de leurs clients, les entreprises ne pensent que trop peu à considérer la réalité de la guerre économique mondialisée. Il est donc impératif de sensibiliser au maximum les chefs d’entreprises et leurs salariés à ces questions. La prise de conscience des sociétés européennes doit passer par davantage de protection de leur patrimoine informationnel et de leurs communications (messageries cryptées et anonymisées) et mettre en place des systèmes d’intelligence stratégique pour surveiller, analyser et contrer les pratiques concurrentielles déloyales[xii].
Ces initiatives doivent être couplées par une remontée d’information des services achats et des ressources humaines des entreprises pour prévenir les éventuelles transactions pouvant être assimilées à des pots de vin[xiii]. Il est également nécessaire, dans la mesure du possible, d’éviter d’avoir recourt à tout élément pouvant servir de critère de rattachement (utilisation du dollar…etc.) permettant aux juridictions américaines d’être compétente en cas de potentielle violation de leur législation. Ces procédures doivent être intégrée à un cadre de mise en conformité renforcé des pratiques de l’entreprise. En France, la loi Sapin II a permis d’orienter les entreprises dans leurs démarches de mise en conformité de leurs pratiques et les efforts se poursuivent en ce sens.
Les entreprises européennes, malgré leur sensibilisation, voient de nouveaux fronts s’ouvrir encore avec l’entrée en vigueur de textes supplémentaires à portée extraterritoriale renforçant davantage l’arsenal juridique américain. De nouvelles formes d’extraterritorialité du droit seront également à prévoir avec l’expansion de la Chine avec les Nouvelles Routes de la Soie, dont les projets de développement de leurs partenaires sont régis par des contrats de droit chinois. Le droit islamique est également un vecteur de puissance et se diffuse à travers le monde[xiv]. L’inde et la Russie réfléchissent à leur tour à la création de lois extraterritoriales[xv]. A l’Europe et à la France de rester vigilant et ne pas se renforcer d’un côté pour se faire mieux déborder de l’autre.
Notes:
[i] Pierre Pierucci et Matthieu Aron, Le piège américain, édition JC Lattès, janvier 2019
[ii] Emmanuel Breen, FCPA. La France face au droit américain de la lutte anti-corruption, coll. « Pratique des affaires », Joly éditions, 2017
[iii] Ali Laïdi, Le droit, nouvelle arme de guerre économique, édition Actes Sud – Questions de société, février 2009, pp 51 – 52
[iv] Jean-Baptiste Noé, L’extraterritorialité, une arme de guerre, Conflits – La guerre du droit, n° 23, sept. – oct. 2019, p. 17
[v] Jean-François Tacheau, Stratégies d’expansion du nouvel empire global, L’Âge d’homme, 2001, p. 19
[vi] Régis Bismuth, Pour une appréhension nuancée de l’extraterritorialité du droit américain – quelques réflexions autour des procédures et sanctions visant Alstom et BNP Paribas, Annuaire français de droit international, LXI, CNRS Éditions, Paris, 2015
[vii] Hervé Juvin, Historique de l’extraterritorialité, Conflits – La guerre du droit, n° 23, sept. – oct. 2019, pp. 14 – 16
[viii] Ali Haïdi, Le droit, nouvelle arme de guerre économique, édition Actes Sud – Questions de société, février 2009, pp 232 – 240
[ix] Nicolas Lerègle, Le selfish law : in my law we trust… Vous de même ! Conflits – La guerre du droit, n° 23, sept – oct 2019, pp. 12 – 13
[x] Règlement (UE) 2017/1939 du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen
[xi] Loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi « Sapin II »
[xii] Jean-Baptiste Noé, Les entreprises doivent se former à la guerre économique, Conflits – La guerre du droit, n° 23, sept. – oct. 2019, p. 41
[xiii] Véronique Chapuis Thuault, Christian Harbulot, Frédéric Pierucci, William Feugère et Blandine Cordier-Palasse, Conférence « Extra-territorialité : une nouvelle arme de guerre économique ? », École de guerre économique, 19 février 2020
[xiv] Olivier Hanne, Le droit islamique comme vecteur de puissance, Conflits – La guerre du droit, n° 23, sept – oct 2019, pp. 56 – 58
[xv] Loïk Le Floch Prigent, Ardavan Amir-Aslani, Ali Laïdi et Olivier de Maison Rouge, Table ronde : le droit, arme de puissance économique ?, Cercle Droit & Liberté, 12 février 2020
Au cœur d’une crise mondiale inédite par son ampleur, Strategika vous propose l’éclairage d’analystes et de penseurs reconnus dans leur domaine d’expertise. Nous avons posé à chacun une série de questions qui portent sur les différents aspects de cette véritable crise de civilisation ainsi que sur ses répercussions politiques, géopolitiques et sociales.
C’est aujourd’hui Lucien Cerise qui nous répond.
Après des études en philosophie, communication et sciences du langage, Lucien Cerise poursuit des recherches indépendantes sur les questions d’ingénierie sociale, de piratage de l’esprit et d’épidémiologie des idées, ou mémétique. Il a publié deux romans et divers textes théoriques, articles, préfaces et livres, seul ou dans des collectifs, dont les plus actuels sont Gouverner par le chaos (2010, 2014), Neuro-Pirates (2016), Retour sur Maïdan – La guerre hybride de l’OTAN (2017).
Strategika – On lit beaucoup d’éléments contradictoires selon les différentes sources d’information disponibles ou selon les avis des professionnels de la santé. Quelle est la réalité effective de cette pandémie selon vous ?
N’étant pas spécialiste des questions médicales, je vais essayer de répondre avec prudence depuis mon champ d’étude, qui traite aussi de contagion, mais plutôt celle des idées et des virus informationnels, ainsi que du langage et de sa fonction performative de façonnage de la réalité dans les méthodes d’influence et de contrôle social, ce que j’appelle du « reality-building ». J’ajoute à cela quelques observations de sens commun et de logique élémentaire. On voit effectivement que les contradictions abondent dans le discours des professionnels de la santé, et ils sont eux-mêmes souvent contredits par les faits, si bien que l’on peut se poser des questions sur ce qu’est réellement cette pandémie. Dans un premier temps, Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, annonce publiquement le 24 janvier 2020 à la sortie du Conseil des ministres que « tout est sous contrôle ». Verbatim d’un extrait de son discours :
« En termes de risques pour la France, des analyses de risques d’importation sont modélisées régulièrement par les équipes de recherche. Le risque d’importation de cas depuis Wuhan est modéré. Il est maintenant pratiquement nul puisque la ville, vous le savez, est isolée. Les risques de cas secondaires autour d’un cas importé sont très faibles et les risques de propagation du virus dans la population sont très faibles. Cela peut évoluer évidemment dans les prochains jours s’il apparaissait que plus de villes sont concernées en Chine, ou plus de pays, notamment de pays de l’Union Européenne. » (1)
À la décharge d’Agnès Buzyn, il faut avouer qu’elle n’était pas toute seule à raconter n’importe quoi, elle était soutenue par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), qui fut dirigé par son mari, Yves Lévy, de 2014 à 2018 :
« De son côté, l’OMS espérait alors que les mesures prises par la Chine suffiraient à “stopper la transmission” et estimait qu’il était encore “trop tôt pour déclarer l’urgence internationale”. (…) En l’occurrence, ce 24 janvier en début d’après-midi, une équipe de l’Inserm a publié “un modèle pour estimer le risque d’importation de l’épidémie en Europe”. Les chercheurs ont fait des estimations de risque en se basant sur les données des flux aériens entre les pays de l’Union européenne et les régions chinoises touchées. Ils ont alors réalisé deux scénarios, “celui d’un faible risque de diffusion et celui d’un risque élevé”. Résultat : pour la France, le risque d’importation était estimé entre 5% et 13%. Il n’y avait donc effectivement, en théorie, qu’un faible risque de diffusion à l’intérieur de nos frontières. » (2)
Une modélisation scientifique vaut par son taux de prédictibilité. Autrement dit, les modélisations de l’OMS et de l’Inserm ne valent rien. Le 17 mars dans le quotidien Le Monde, Agnès Buzyn reviendra sur ses déclarations initiales du 24 janvier en prétendant qu’elle avait menti et qu’elle pensait depuis décembre 2019 qu’une crise grave se préparait. Bref, la communication des autorités sanitaires, des médias et du gouvernement français baigne dans la désinformation, les « fake news » et les injonctions contradictoires depuis le début. Pour se faire une idée de la réalité effective de cette pandémie, il faut donc commencer par oublier la parole politico-médiatique, ses éléments de langage et sa façon de nous raconter les événements (storytelling). Ensuite, une question vient spontanément à l’esprit : le vent de panique générale n’est-il pas un peu exagéré ? L’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) publie sur son site un recensement du nombre de décès quotidiens réalisé par les mairies. Les chiffres comparés des trois dernières années montrent une légère augmentation du nombre de décès toutes causes confondues en 2020 par rapport aux années précédentes à partir du 16 mars, c’est-à-dire depuis le début du confinement. À la date arrêtée du 6 avril, le nombre de décès sur trois ans était de 1731 en 2018, 1649 en 2019, 2410 en 2020. L’Insee commente ainsi les pourcentages :
« Au niveau départemental, trois départements comptent au moins deux fois plus de décès entre le 1er mars et le 6 avril 2020 que sur la même période de 2019 : le Haut-Rhin (+ 143 %), la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine. Neuf autres départements enregistrent un nombre de décès supérieur de 50 % à moins de 100 % à celui observé en 2019. Il s’agit de tous les autres départements franciliens – le Val-de-Marne (+ 78 %), le Val-d’Oise (+ 70 %), Paris (+ 62 %), l’Essonne (+ 61 %), la Seine-et-Marne (+ 55 %) et les Yvelines (+ 52 %) – mais également des Vosges (+ 74 %), de la Moselle (+ 60 %), du Bas-Rhin (+ 56 %) et de l’Oise (+ 53 %). Trente-deux départements au total enregistrent un nombre de décès supérieur d’au moins 20 % à 2019. À l’opposé, 29 départements ont moins de décès enregistrés entre le 1er mars et le 6 avril 2020 que sur la même période de 2019. Ces départements sont essentiellement situés dans l’Ouest et le Centre de la France. » (3)
Il y a donc plus de décès en 2020 dans certains départements, mais il y en a moins dans d’autres départements. En outre, la courbe de progression du nombre de décès pour 2020 a commencé à dépasser de manière significative celles des années précédentes avec le début du confinement. En conséquence, si le confinement des malades s’explique très bien – mais pourquoi cette année et pas les précédentes ? – le confinement des bien-portants sur tout le territoire peine à trouver une justification, hormis la raison officielle avancée de ne pas saturer les services d’urgence et de réanimation avec de nouveaux cas lourds de contamination. Or, la plupart des hôpitaux publics ne connaissent pas d’affluence excessive et les cliniques privées sont peu sollicitées. Ce à quoi on nous rétorquera que c’est justement grâce au confinement drastique de masse. Cet argument est-il consistant ? Pour le tester, tournons-nous vers la cyndinique, la discipline scientifique qui étudie le risque et le danger. La cyndinique distingue entre risque perçu et risque réel. Le risque perçu est largement façonné par le discours tenu sur le risque réel. Il y a simultanément un fossé et un continuum entre le risque réel et sa représentation mentale langagière. Pour mieux saisir ce qui se passe, il faut réussir à démêler les interactions entre l’actuel et le potentiel, le réel et le virtuel. Pour justifier le confinement de masse, la narration politico-médiatique dit : « Les hôpitaux risquent d’être saturés, restez chez vous ». Le réel dit : « Les hôpitaux ne sont pas saturés ». La narration politico-médiatique dit : « Les hôpitaux ne sont pas saturés grâce au confinement, donc continuez à respecter le confinement sinon les hôpitaux seront saturés ». On en arrive à une situation paradoxale, et même absurde, une sorte de raisonnement circulaire que l’on peut analyser par la théorie des jeux et le phénomène des prédictions auto-réalisatrices, où le confinement des bien-portants permet de ne pas saturer les structures hospitalières, vidant de son sens le confinement dans le réel puisqu’il y a de la place dans les hôpitaux, mais le justifiant théoriquement par prévention, pour éviter une saturation qui pourrait avoir lieu mais qui n’a pas lieu dans le réel. C’est à ce moment que le type de raisonnement qu’on appelle communément un « prétexte » vient s’immiscer dans le processus décisionnaire du pouvoir et lui permet d’instaurer de nouvelles mesures de contrôle social dont la dangerosité peut s’avérer encore supérieure au prétexte alloué. Ce sont les paradoxes du principe de précaution : pour éviter un risque – saturation des hôpitaux – on ne le prend pas. Conséquence : le risque n’advient pas dans le réel, il n’existe que potentiellement – pas de saturation globale des hôpitaux. Le discours alarmiste se retrouve alors en décalage avec le réel, et avec les causes qu’il cherche dans le réel, mais il permet néanmoins de légitimer dans le réel des mesures préventives qui peuvent avoir des effets pervers, pires que le danger que l’on souhaite éviter. De fait, ce confinement des bien-portants sur tout le territoire aggrave la situation sanitaire en imposant à tout le monde des conditions de vie claustrées pathogènes et un climat anxiogène et dépressif apocalyptique particulièrement nocif pour le système immunitaire, qu’il faudrait au contraire renforcer. Tous les rythmes biologiques, psychologiques, socio-économiques sont déréglés. Le confinement de masse va de toute évidence se révéler contre-productif et viendra alimenter le taux de mortalité lié à cette « crise », largement amplifiée par l’hystérie médiatique. Parmi les nombreux couacs de la communication gouvernementale, le ministre de la Santé, Olivier Véran, déclarait lui-même le 9 mars à la télévision :
« Mais en réalité, vous savez ce qui fait que la grippe s’arrête au printemps ? Ce n’est pas la chaleur. Au printemps qu’est-ce qui se passe ? On ouvre les fenêtres, on ouvre les portes, on n’est plus confiné dans des lieux, on va dehors. Et donc, c’est le confinement qui provoque la circulation du virus. » (4)
Pour ce qui concerne les estimations du nombre de malades et de décès du coronavirus annoncées par les autorités dites compétentes, professionnels de la santé ou autres, elles varient d’une source à l’autre et d’une méthode de recensement à l’autre, parfois sans test de dépistage et sur la base d’un simple entretien avec le médecin généraliste. Comment tenir compte de ces chiffres qui ne font l’objet d’aucun consensus et ne sont ni vérifiables, ni certifiés ? Sur le plan national comme international, le nombre exact de cas réels de malades ou de morts du coronavirus est simplement inconnu à ce jour. En ce moment, seuls le recoupement critique des sources, le bon sens et l’expérience personnelle sont des bouées auxquelles s’accrocher pour se faire une idée de ce qui se passe réellement. De toute façon, même en accordant une confiance aveugle à la parole politico-médiatique et à ses chiffres officiels, ces derniers ne sont guère effrayants. Sans oublier qu’il faut encore déduire les cas de comorbidité, quand le décès est en fait provoqué par une autre maladie contractée par le patient ou par l’association de plusieurs maladies, dont le coronavirus entre autres. En outre, il serait bon de comparer ces chiffres avec ceux des gens guéris et ayant développé une immunité, et qui forment une majorité écrasante à près de 99% des cas. Cela devrait donc orienter les pouvoirs publics sur la stratégie d’immunité collective, ou immunité de groupe, la seule capable d’en finir sur le long terme avec la maladie. Comparons les avantages et les inconvénients des deux stratégies, « confinement pour tous » ou « confinement des seuls malades plus développement de l’immunité de groupe dans la société » : dans les deux cas, il y a des morts, mais au moins le confinement des seuls malades ne bloque pas la société, ce qui évite les dommages collatéraux socio-économiques de la crise qui provoqueront des morts supplémentaires. Or, au lieu d’affronter un virus somme toute assez bénin en prenant des mesures volontaristes de renforcement du système immunitaire des Français, le gouvernement a choisi une stratégie d’évitement du virus, en attendant le développement d’un vaccin. On voit poindre certains intérêts commerciaux lucratifs. Quand on additionne les conflits d’intérêts, les mensonges et les initiatives délibérées de sabotage, on en vient à se demander si la santé des Français n’est pas entre les mains de mafieux et de criminels. L’hôpital public – comme tous les services publics – est savamment déconstruit depuis des années et, depuis janvier, tout ce qui marche pour contenir une épidémie et sauver des vies est négligé, rejeté, rendu inaccessible ou difficile d’accès à la population par le gouvernement : refus de fermer les frontières, pénurie de masques, de tests de dépistage, de respirateurs artificiels, de gel hydro-alcoolique, stocks de médicaments disparus, l’hydroxychloroquine classée « substance vénéneuse » le 13 janvier puis retirée de la vente libre, etc. Et à la place, de la psychose, des menaces, des contraventions, souvent abusives, et la banalisation par décret le 28 mars du Rivotril, sédatif pouvant entraîner la mort, pour les patients « atteints ou susceptibles d’être atteints par le virus SARS-CoV-2 ». Tout est fait systématiquement et méthodiquement, point par point, pour doper le taux de mortalité de ce virus bénin. Cette persistance dans l’erreur est le signe soit d’une incompétence totale, soit d’une volonté de nuire, et probablement les deux.
En conclusion, soit ce virus est très dangereux et les mesures du gouvernement jusqu’à la mi-mars ont permis de l’installer en France, et de le cultiver depuis ; soit ce virus n’est pas si dangereux, et les mesures prises depuis la mi-mars sont excessives et comportent des risques supérieurs au virus lui-même. Manifestement, si l’on en reste aux chiffres annoncés, ce virus est assez contagieux mais peu mortel, avec de nombreux cas sans symptômes, et le système immunitaire de l’espèce humaine est parfaitement capable de le combattre sans confinement de masse, ni vaccin, mais avec un régime alimentaire prophylactique, un mode de vie sain et actif supposant de ne pas rester confiné et des médicaments peu onéreux en cas de contamination (Plaquénil, Interferon Alfa 2B, etc.). Rappel d’un principe de virologie, lui-même rappelé en septembre 2009 par Martin Winckler, médecin généraliste et écrivain, en pleine crise du H1N1, à savoir qu’un virus est soit très contagieux, soit très létal, mais qu’il ne peut pas être les deux en même temps :
« Un virus a un seul but dans la vie : multiplier son ADN le plus vite possible pour survivre génétiquement, comme le font tous les êtres dotés d’un ADN. Or, un virus, c’est un ADN réduit à sa plus simple expression. Son but, ça n’est pas de rendre malade. Les symptômes de la maladie sont liés aux réactions de l’organisme destinées à éradiquer le virus : la fièvre, c’est le corps qui la produit pour empêcher le virus de se reproduire ; les courbatures, c’est la contraction intense des muscles pour produire de la fièvre ; la toux, c’est la réaction inflammatoire du nez, de la trachée et des bronches à l’entrée du virus dans les tissus respiratoires. Le virus, lui, il a intérêt à ce que le patient reste debout et le transmette dans ses gouttelettes de salive. On comprend donc que pour qu’un virus soit très contagieux (par voie aérienne), il faut AUSSI qu’il soit relativement bénin. S’il est très dangereux, il risque en effet de tuer ses hôtes avant qu’ils ne l’aient transmis. Les virus les plus contagieux de la planète, ceux du rhume de cerveau, ne tuent personne… » (5)
Strategika – Cette pandémie précède-t-elle un effondrement économique et systémique ?
Certains commentateurs estiment que l’exagération de cette crise sanitaire par les médias permettra de camoufler une vraie crise économique, ou de renforcer encore le pouvoir de la banque en poussant l’économie réelle à l’effondrement et à un « reset » général, avec une éventuelle spoliation des épargnants au passage pour financer un « bail-in », ou quelque chose dans ce genre. Pourquoi pas ? L’oligarchie financière est capable de tout pour accroître sa domination. Une chose est certaine : le confinement aura un coût économique et humain supérieur au virus lui-même. Il faut distinguer deux niveaux : la pandémie en elle-même et les choix politiques mis en œuvre pour l’endiguer. En fait, ce n’est pas la pandémie en elle-même qui risque de provoquer un effondrement quelconque, c’est le confinement de la population saine qui peut provoquer cet effondrement économique et systémique, au prétexte de lutter contre le virus. Une pandémie sans confinement de la population saine n’aurait qu’un faible impact sur l’économie puisque la majorité de la population continuerait à travailler et produire. En attendant, les rapports d’experts s’accumulent et se contredisent, certains parlent de confinement de 18 mois ou plus, d’autres de déconfinement progressif et partiel, à partir du 11 mai pour la France, etc. Un confinement jusqu’en 2022, y compris un confinement intermittent, un mois sur deux ou sur trois, aurait le même impact qu’une guerre sur les pays qui l’auraient appliqué. Autrement dit, le remède serait pire que le mal. La pandémie toute seule ne mettra pas des pays entiers à genoux, mais le confinement prolongé de la population bien-portante, oui, avec certitude. Dans l’hypothèse d’un confinement court, de nombreux secteurs de l’économie réelle vont de toute façon être ravagés, de nombreux commerçants seront ruinés, sans même parler de la remise en cause d’acquis sociaux décidée par un vote du Sénat le 19 mars, censée relancer la machine et n’être que provisoire, mais peut-être pas. En revanche, un certain nombre de valeurs boursières sont en hausse et profitent de la crise, toutes celles liées à l’informatique et à l’industrie des vaccins, deux secteurs d’activité qui fusionnent dans la personne de Bill Gates :
« Le coronavirus ne fait pas que des malheureux en Bourse. Certaines valeurs ont bondi à Wall Street ces derniers jours, portées par le sentiment des investisseurs qu’elles profiteront de la situation actuelle. C’est le cas notamment de Novavax. Ce petit laboratoire situé dans le Maryland s’est spécialisé dans les vaccins et a annoncé cette semaine qu’il tentait de développer un vaccin contre le Covid-19. En l’espace de deux jours, sa capitalisation boursière a quasiment doublé pour frôler les 600 millions de dollars. Une aubaine pour cette société qui ne compte que quelques centaines de salariés et qui a reçu le soutien de la fondation Bill et Melinda Gates. » (6)
Récemment, Bill Gates a annoncé s’impliquer encore davantage dans cette voie en sponsorisant la recherche sur sept vaccins. Le grand capitalisme industriel et financier parvient toujours à tirer bénéfice des crises, et même souvent il les provoque, selon le principe de la « stratégie du choc » exposé par Naomi Klein dans son livre de 2007. L’économie a ses parasites et ses charognards. À l’opposé, pour de nombreuses petites et moyennes entreprises, le confinement va provoquer au minimum une récession. Il va y avoir une pandémie de faillites de sociétés, avec leur lot de dépressions, crises de nerfs, suicides, règlements de comptes violents, divorces et violences conjugales, tout cela provoqué non par le virus mais par le confinement de la population saine, qui fait courir à toute la population d’énormes risques psychosociaux, pour reprendre une terminologie que nos experts devraient connaître. Le manque d’activité va aussi augmenter sensiblement les problèmes de santé, troubles cardio-vasculaires, troubles musculo-squelettiques, troubles du sommeil. Au total, le confinement va tuer plus que le coronavirus lui-même, directement ou indirectement.
Strategika – Plus de 3 milliards de personnes sont appelées à se confiner dans le monde. Pour la première fois de son histoire, l’humanité semble réussir à se coordonner de manière unitaire face à un ennemi global commun. Que vous inspire cette situation ?
Cette quarantaine à l’échelle mondiale est sans précédent, mais elle connaît des exceptions et des modulations dans son application. En France, des consignes émanant du ministère de l’Intérieur ont été données ponctuellement et localement pour alléger les mesures de confinement en faveur des demandeurs d’asile, des juifs en période de shabbat et des banlieues à forte population immigrée. Avant cette crise sanitaire, l’humanité s’était déjà coordonnée face à un ennemi commun plus ou moins construit par les médias à la suite des attentats du 11 septembre 2001. Ces considérations me font penser au rapport d’Iron Mountain, paru en 1967 avec une préface de l’économiste John Kenneth Galbraith. L’auteur principal du texte, qui reste anonyme, rapporte les réflexions d’un think-tank du complexe militaro-industriel américain sur l’utilité de la guerre pour créer de l’ordre social, au sens d’un conformisme et d’une discipline de masse, ou comment faire émerger un ordre conformiste à partir du chaos, et en réaction au chaos, par peur du chaos. En cas de paix trop prolongée, le texte mentionne que, pour garder la population sous contrôle, il faut chercher des ennemis de remplacement et des substituts à la guerre, comme les crises écologiques ou sanitaires, qui deviennent de grandes causes internationales plus ou moins fictives mais dont le but est de créer de la croyance commune, et ce faisant, d’uniformiser les représentations et les comportements. Le système mondialiste passe son temps à mettre au point des capteurs d’attention à l’échelle mondiale pour synchroniser tous les cerveaux de la planète. Les grandes compétitions sportives comme les Jeux olympiques ou la coupe du monde de football sont aussi des exemples de synchronisation globaliste du temps de cerveau disponible. La question qui intéresse les mondialistes est, par-delà toutes les particularités, ethniques, culturelles, d’âge, de genre, etc., qu’est-ce qui intéresse tout le monde ? L’homogénéisation des comportements, c’est-à-dire la militarisation des comportements, la capacité à faire agir une foule comme un seul homme, est le sommet de l’art politique, envisagé sous l’angle des méthodes de conditionnement comportemental, voire de dressage comportemental, du type « chien de Pavlov ».
Bill Gates est l’un des principaux leaders d’opinion à diffuser la narration visant à récupérer la crise pour renforcer cette synchronisation mondialiste. Le 19 mars, le fondateur de Microsoft publiait sur son blog un entretien auquel il venait de répondre à propos de la crise sanitaire en cours. Quatre thématiques se distinguent dans ses propos : 1) la solution au virus passe nécessairement par un vaccin, 2) ce vaccin sera couplé à un certificat numérique indiquant qui est vacciné ou pas, 3) en attendant, il faut rester chez soi et maintenir la distanciation sociale entre les personnes, 4) mais faire le contraire entre les pays, car les virus ne connaissent pas les frontières nationales. Bien évidemment, si le virus transgresse les frontières nationales, c’est justement parce qu’elles ne sont pas assez marquées et hermétiques, et qu’il faut donc plus de « distanciation sociale » entre les pays. Mais pour récupérer cette crise à leur profit, Bill Gates et les mondialistes ont besoin de commettre intentionnellement une erreur logique de raisonnement qui permet d’implanter dans les esprits que cette pandémie serait au contraire la conséquence d’un manque d’unité globale et d’un déficit de mondialisation :
« Question : Quels changements devrons-nous apporter au mode de fonctionnement des entreprises pour maintenir notre économie tout en assurant la distanciation sociale ? Bill Gates : La question de savoir quelles entreprises doivent continuer à fonctionner est délicate. Il s’agit certainement de l’approvisionnement alimentaire et du système de santé. Nous avons encore besoin d’eau, d’électricité et d’internet. Les chaînes d’approvisionnement pour les choses essentielles doivent être maintenues. Les pays sont encore en train de déterminer ce qu’il faut continuer à faire fonctionner. À terme, nous disposerons de certificats numériques indiquant qui s’est rétabli, ou a été testé récemment, ou, quand nous aurons un vaccin, qui l’a reçu. (…) Question : Selon vous, quelle est la stratégie à long terme pour lutter contre cette pandémie et pensez-vous qu’elle nous préparera adéquatement à la prochaine ? Bill Gates : Je pense qu’une fois que la situation sera maîtrisée, les gouvernements et les autres intervenants investiront massivement pour être prêts pour la prochaine. Il faudra pour cela une coopération mondiale, en particulier pour aider les pays en développement qui seront les plus touchés. Un bon exemple est la nécessité de tester des thérapies partout où la maladie est présente pour aider le monde entier. Le virus ne respecte pas les frontières nationales. » (7)
De manière assez étrange, Bill Gates, censé être un grand capitaine d’industrie, ne se pose plus la question de la prospérité économique ou de la productivité des entreprises. Son approche est assez minimaliste, voire décroissante, ou carrément « survivaliste », pour la simple raison que dans son paradigme, ce sont les robots et l’intelligence artificielle qui font tourner le système. Les travailleurs humains et la société de consommation appuyée sur une économie réelle qui leur est destinée n’ont plus de sens. Ils peuvent, ils doivent être détruits, de même que les frontières nationales, dont les peuples ont besoin, mais pas les machines. Un pas plus loin, et ce sont les frontières nationales qui sont accusées de propager la pandémie. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen va dans ce sens et déclarait début avril :
« “Le retour des contrôles aux frontières dans les États membres constitue une menace pour la vie et la santé des citoyens de l’Union, car la chaîne d’approvisionnement est ainsi perturbée. Le marché doit rester fluide”, a déclaré Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne. » (8)
Strategika – Cette pandémie va-t-elle forcer l’humanité à se doter d’un gouvernement mondial comme le préconisait Jacques Attali lors de la pandémie de grippe A en 2009 ?
Ces préconisations essayent d’articuler crise sanitaire et programme géopolitique. On sait que Jacques Attali est versé dans l’ésotérisme cabalistique, qui est en fait un programme politique et géopolitique. (9) De ce point de vue, le peuple d’Israël est élu par Dieu pour diriger le monde, la capitale de ce gouvernement mondial doit être Jérusalem, et la méthode pour y arriver est le Tikkoun Olam, terme hébraïque signifiant la « réparation du monde ». Réparer un monde qui n’en a pas besoin signifie en fait le détruire. Évidemment, détruire le monde aboutira à détruire aussi les juifs, mais il ne faut pas demander trop de cohérence à ces grandes théories mystiques. De ce point de vue eschatologique, les crises, les catastrophes, la peur sont des phénomènes positifs. Cette croyance en un nouvel ordre mondial émergeant du chaos est largement partagée dans de nombreux cercles de réflexion, de la franc-maçonnerie au groupe de Bilderberg, dont deux membres, Gordon Brown et Henry Kissinger, sont venus prêter main-forte à Jacques Attali avec des appels à créer un gouvernement mondial pour lutter contre le coronavirus. L’environnement d’Agnès Buzyn présente aussi ce double arrière-fond occulte, pétri de conflits d’intérêts, et occultiste, entre le B’naï B’rith, la fameuse loge maçonnique interdite aux non-juifs, et le Grand Orient, ainsi que le résume Politique Magazine :
« Du réseau, Agnès Buzyn n’en manque pas. Celle qui avait épousé dans les années 80 le fils cadet de Simone Veil, et qui est aujourd’hui mariée à l’ex directeur de l’Inserm [Yves Lévy] (signataire notamment d’un appel des directeurs de recherche à voter contre Marine Le Pen en avril 2017), a également su faire son chemin au sein des plus gros conglomérats financiers du monde pharmaceutique. Entre la fin des années 90 et le début de la décennie 2010, Agnès Buzyn a ainsi été rémunérée par les géants pharmaceutiques Genzyme, Novartis et Bristol-Myers Squibb pour intervenir en congrès ou siéger au comité consultatif de certains de leurs produits oncologiques phares. À l’instar de son père, longtemps membre actif du B’naï B’rith, elle n’hésite pas à plancher dans les loges maçonniques, comme le 15 octobre 2015 au Grand Orient de France sur le thème de “La fin de vie des enfants”. Deux ans plus tard, cette inconnue du grand public sera nommée ministre de la Santé. L’une de ses premières mesures sera d’étendre la vaccination obligatoire des bébés à 11 maladies, avec une entrée effective dès le 1er janvier 2018. En parallèle, le ministère de la Santé doublera le prix du vaccin contre la grippe suite à l’introduction de nouvelles souches par les laboratoires. Dans le milieu médical, de nombreuses voix se sont élevées contre ces mesures aux relents de conflit d’intérêts. » (10)
Strategika – En 2009 toujours, Jacques Attali expliquait que « l’Histoire nous apprend que l’humanité n’évolue significativement que lorsqu’elle a vraiment peur ». Que vous inspire cette idée ?
Pour les mondialistes comme Jacques Attali, si la mondialisation ne marche pas, c’est donc qu’il faut plus de mondialisation. Pour imposer ce raisonnement illogique dans les esprits, de gros moyens sont mis en œuvre consistant à affoler les masses pour qu’elles perdent leur capacité de raisonnement lucide et leur faire accepter plus facilement des solutions aberrantes et contre leur intérêt. Pour ce faire, il faut diminuer dans la population l’activité cérébrale liée au néocortex, c’est-à-dire les fonctions réflexives et d’analyse du long terme, et augmenter l’activité du cerveau reptilien, qui gère l’instinct de conservation mais à court terme, et qui manque de discernement réflexif. La peur est mauvaise conseillère, le pouvoir cherche donc à l’amplifier dans la population, qui se retrouve alors comme une souris dans un labyrinthe, à avancer effrayée au gré des portes qui s’ouvrent ou se ferment devant elle. En France, depuis janvier, toutes les solutions rationnelles à la crise ont été ignorées ou sabordées méthodiquement par le gouvernement pour nous guider vers un seul et unique débouché : la vaccination de masse et la surveillance électronique. Certes, depuis la mi-avril, une inflexion commence à se faire sentir en faveur de plusieurs traitements peu onéreux, notamment ceux tournant autour de la chloroquine, mais ce fut un combat pour l’imposer et rien n’est encore gagné, le lobby des vaccins et de la surveillance électronique a encore de nombreuses cartes à jouer. Pour fabriquer le consentement à ces solutions irrationnelles, la peur et le stress sont des leviers très efficaces (triggers). La situation depuis janvier ressemble étrangement à une stratégie de conduite du changement et d’ingénierie sociale connue sous l’expression de « pompier pyromane », ou encore problème-réaction-solution : le gestionnaire du système créé un problème dans le système, ou le laisse arriver, pour susciter une réaction de stress et une demande de solution, laquelle sera apportée par le gestionnaire lui-même. Dans l’univers du développement informatique, c’est un secret de Polichinelle que les virus et leurs antivirus sont conçus par les mêmes unités de recherche. La « menace pandémique » est un dispositif de contrôle social qui ressemble aussi beaucoup à la « menace terroriste », menace semi-virtuelle amplifiée par l’hystérie médiatique, avec un ennemi invisible qui peut frapper n’importe où et n’importe quand. À la suite d’attentats terroristes, le plan Vigipirate a été déclaré mais ne sera jamais levé, alors même que des djihadistes sont remis en liberté par le ministère de la Justice. De la même façon, le pouvoir va tenter de pérenniser le confinement d’une manière ou d’une autre, ou du moins de pérenniser la philosophie paranoïaque et l’état d’esprit apeuré issu de la crise, alors même qu’il contrôle les paramètres de la crise.
Le 7 mars, Emmanuel et Brigitte Macron se rendaient au théâtre pour montrer que tout va bien et que l’on peut sortir de chez soi. Le 16 mars, Emmanuel Macron nous donne l’ordre de rester chez nous et déclare sur un ton martial que « Nous sommes en guerre ! », ce qui contraste assez fortement avec son propre comportement mais aussi avec les « gestes barrières » édictés pour nous protéger. Une guerre que je peux mener en me lavant les mains et en toussant dans mon coude me donne presque envie de dire que « Je m’en lave les mains » justement. Dans le cas présent, on assiste à une véritable mise en scène de la peur soutenue par une véritable propagande 24 heures sur 24. Nul besoin que le danger soit réel, la représentation du danger est suffisante. Nous abordons le thème de la guerre psychologique, qui est un volet de cette guerre hybride totale menée contre les peuples et qui s’appuie autant sur le réel que sur l’irréel. Cette campagne de panique organisée et orchestrée est en fait une vaste opération psychologique (psyop). Les services secrets britanniques et américains, et leurs laboratoires de recherche associés comme l’Institut Tavistock ont beaucoup réfléchi sur le rôle des traumatismes dans le changement psychologique et social. William Sargant, psychiatre militaire ayant travaillé sur le projet MK-Ultra de la CIA publiait en 1957 un ouvrage intitulé « La bataille pour l’esprit » (Battle for the Mind), dans lequel il étudie le rôle des perturbations mentales dans le façonnage des croyances et des convictions. Le chapitre VII porte comme titre « Le lavage de cerveau dans la religion et la politique » et commence ainsi :
« Les preuves rassemblées dans les chapitres V et VI montrent comment différents types de croyances peuvent être implantées chez de nombreuses personnes, après que les fonctions cérébrales aient été suffisamment perturbées par des peurs, des colères ou des excitations arrivant accidentellement ou provoquées délibérément. Parmi les résultats de telles perturbations, les plus courants sont une altération temporaire du jugement et une suggestibilité accrue. Ses diverses manifestations collectives sont parfois classées sous la rubrique “instinct de troupeau” et apparaissent de façon plus spectaculaire en temps de guerre, lors de graves épidémies et dans toutes les périodes similaires de danger commun, ce qui augmente l’anxiété et donc la suggestibilité individuelle et collective. » (11)
Strategika – Comment voyez-vous l’évolution de la pandémie et ses conséquences politiques et sociales dans les semaines à venir ?
Si ce virus est un virus normal, c’est-à-dire apparu naturellement, par sélection naturelle, il devrait s’affaiblir, voire disparaître, avec l’été et l’immunité de groupe, qui va augmenter tendanciellement malgré le confinement. Le principal obstacle à cette résolution naturelle de la crise vient de ce qu’elle est manifestement instrumentalisée politiquement pour faire avancer le projet de gouvernement mondial sous surveillance électronique, et que pour cette raison, la crise risque d’être prolongée artificiellement. On va nous annoncer que le virus a muté ou qu’il y a un nouveau virus, etc. Plusieurs scientifiques, dont un prix Nobel de médecine, Luc Montagnier, ont fait remarquer que ce virus comportait des séquences de VIH et qu’il s’agissait forcément d’une création humaine, probablement échappée par accident du laboratoire P4 de Wuhan en Chine. De nombreux pays travaillent sur des armes biologiques, éventuellement couplées avec des vaccins, et employées pour tuer ou stériliser. L’histoire retiendra le nom de Wouter Basson, médecin sud-africain en charge du programme militaire de guerre bactériologique du régime d’apartheid (Project Coast), et le South African Institute for Maritime Research (SAIMR) évoqué dans le documentaire Cold Case Hammarskjöld, qui travaillèrent sur des vaccins visant à stériliser ou inoculer une maladie à certaines catégories de la population. (12) L’Afrique du Sud ne fut évidemment pas le seul pays à s’intéresser à ces recherches et les populations ciblées peuvent varier. Wouter Basson voyageait beaucoup pour partager son expérience en bioterrorisme d’État :
« L’”espion globe-trotter” se targuait d’avoir coopéré avec Saddam Hussein. Il affirmait avoir eu des crédits illimités pour acquérir du matériel “auprès de la mafia de l’armement chimique” en Libye ou en Europe de l’Est. Des documents font aussi état de nombreux échanges avec Israël ou l’Allemagne de l’Ouest. Basson lui-même a admis “avoir négocié un certain nombre de choses avec l’armée belge”. Les services secrets suisses le recevaient à bras ouverts. » (13)
En outre, il est plus que probable que les mesures de contrôle social et de surveillance ne cesseront pas après la crise et deviendront pérennes, comme le redoute Edward Snowden, ce qui signifie que nous serons en liberté surveillée permanente. Il faut parler de biopouvoir, notion travaillée par Michel Foucault et Giorgio Agamben. Jadis, le pouvoir politique et les sciences de la vie étaient deux domaines distincts et compartimentés, aujourd’hui ils fusionnent dans le biopouvoir, avec le transhumanisme en horizon. Le biopouvoir étudie certaines disciplines comme la sociobiologie et l’éthologie pour prendre le contrôle total de notre corps dans ses deux dimensions, intérieure et métabolique mais aussi extérieure, c’est-à-dire notre façon d’occuper l’espace, nos déplacements, nos allées et venues, nos faits et gestes. Grâce à cette crise sanitaire, le biopouvoir est en mesure de nous imposer de nouvelles règles de proxémique, c’est-à-dire qu’il peut déterminer la distance qu’il y aura entre moi et autrui, et entre moi et le monde. Le biopouvoir veut le confinement définitif, le Grand Confinement. Au moyen de cette pseudo-crise sanitaire, il est en train de nous faire entrer dans une vaste prison à ciel ouvert, physique et numérique. Le système panoptique carcéral étudié par Michel Foucault dans Surveiller et punir est le modèle appliqué en ce moment : des individus isolés physiquement du monde – principe du confinement – et isolés les uns des autres – principe de la distanciation sociale – mais chacun sous l’œil du pouvoir et de sa technologie de surveillance. Le confinement et la distanciation sociale sont les deux concepts clés d’une restructuration complète du lien social sur une base complètement paranoïaque, fondée sur la peur et la méfiance vis-à-vis des autres, puisqu’on m’inculque que je peux mourir d’avoir croisé quelqu’un dans la rue, et vis-à-vis de moi-même, car je suis potentiellement coupable de transmettre le virus. On s’achemine tranquillement vers une interdiction de se serrer la main, ce geste pourtant universel et immémorial signifiant la confiance.
Il faut donc se méfier de chaque personne dans la rue, ainsi que de soi-même, mais en revanche il est interdit de se méfier du pouvoir, il est même obligatoire de lui faire confiance, ainsi qu’à sa parole, même quand elle accumule les contradictions et les mensonges flagrants. Tout scepticisme conduit à être accusé de « conspirationnisme » ou de « théorie du complot », ce qui sera bientôt criminalisé. Nous sommes au cœur de l’ingénierie sociale, la réécriture furtive des relations de confiance/méfiance/indifférence pour réécrire la perception d’autrui et la structure du lien social. Le biopouvoir veut une méfiance générale dans les structures horizontales de la société mais une confiance aveugle envers lui, donc sur le plan vertical. Nous devons aimer Big Brother. La nature humaine est en cours de modification au prétexte d’une crise largement gonflée par la bulle médiatique virtuelle, c’est-à-dire une vaste dramaturgie à laquelle nous sommes sommés d’adhérer aveuglement en dépit de ses incohérences évidentes, principe de la « double pensée » orwellienne dans 1984. Ces nouvelles normes mentales et comportementales à intérioriser définitivement – puisqu’on nous martèle que plus rien ne sera comme avant ! – sont le produit d’une expérimentation « in vivo » sur cobayes humains visant à une nouvelle rationalisation scientifique du lien social. Nous assistons à une déstabilisation des rythmes biologiques et des constantes anthropologiques élémentaires, ainsi que de l’intelligence collective organique, intuitive et spontanée de l’espèce pour les réécrire selon d’autres règles, celles du nouvel ordre mondial de Bill Gates et Attali, ce New World Order annoncé par George H.W. Bush le 11 septembre 1990 pour célébrer la fin du communisme.
Le biopouvoir joue avec nos nerfs et notre santé. Le tonus physique et émotionnel est fortement éprouvé par cette crise à moitié imaginaire dont découlent des mesures de confinement, c’est-à-dire d’emprisonnement de masse, qui, elles, sont bien réelles. Les analystes des services de renseignement qui étudient les réactions de la population peuvent tester en direct leurs modèles issus de la criminologie et de la justice prédictive, reposant sur l’établissement d’un continuum prison-liberté pour qu’il n’y ait plus de différence entre les deux. La psychose, c’est l’indistinction générale, la fusion de tout, l’incapacité à distinguer intérieur et extérieur. Le confinement pour tous est psychotique en abolissant la distinction intérieur/extérieur à deux niveaux : il abolit la distinction entre maladie et santé dans un état maladif global ; il abolit la distinction entre intérieur et extérieur de la prison dans un régime carcéral commun et un statut général d’assigné à résidence. Les murs de notre appartement sont devenus les murs de notre maison d’arrêt. L’univers pénitentiaire, voire concentrationnaire, sort de son statut de relégation et s’étend à toute la société, et ce n’est même plus une métaphore. En effet, d’une part les citoyens normaux sont emprisonnés chez eux et risquent des représailles judiciaires s’ils sortent trop loin ou dépassent l’heure légale de la promenade, comme s’ils étaient en train de s’évader ; d’autre part, au prétexte d’éviter l’épidémie en prison, des milliers de prisonniers sont extraits de leurs cellules et renvoyés chez eux, dans des conditions de semi-liberté qui se distinguent à peine de celles des voisins, théoriquement en liberté, mais de fait contraints et surveillés dans les mêmes proportions. (14) À ce stade, il devient difficile de distinguer les deux états « prison » et « liberté » car ils ont fusionné. Pas besoin de bracelet électronique, nous portons tous une laisse mentale. Nous avons le droit de sortir, mais avec un papier à faire remplir par soi-même et de manière « dérogatoire » par rapport à ce qui est considéré comme normal : être enfermé.
Strategika – Existe-t-il une issue politique à la situation que vous venez de décrire et quelle forme pourrait-elle prendre selon vous ?
La seule issue politique réside dans le retour des égoïsmes nationaux. Fort heureusement, l’humanité est encore incapable de s’unir. Tous les pays ne réagissent pas de la même façon, il y a encore de la diversité et de l’hétérogène, et les leçons à tirer de cette crise varient aussi d’un pays à l’autre. Il faut espérer un impact sur l’opinion publique qui ferait réfléchir un maximum de monde sur le caractère nuisible de ces idées tournant autour d’un gouvernement mondial, ce qui permettrait d’amorcer un mouvement de démondialisation et de relocalisation. Avec cette crise mondiale, nous avons la preuve définitive du danger d’un système mondial unifié et ouvert, où la contagion des problèmes ne rencontre aucune limite, aucun obstacle, aucune frontière nationale, et peut se diffuser à grande vitesse sans résistance. Quand il n’y a pas de murs dans une maison, le feu se propage plus rapidement. Il faut donc en finir avec la connotation toujours positive associée à la notion d’ouverture, et passer d’une apologie systématique de la société ouverte à un « éloge des frontières », comme écrivait Régis Debray. Bref, le mot d’ordre gouvernemental « Restez chez vous ! » doit être récupéré et retourné en slogan localiste et antimondialiste pour lutter avec humour contre les deux piliers de l’hybris libérale que sont le marché global et l’immigration sans limites. J’espère aussi que la démonstration actuelle de la toute-puissance coercitive de l’État, capable de séquestrer chez eux des millions de gens au prétexte d’une menace tout à fait discutable, servira de pédagogie à tous ceux qui s’imaginaient pouvoir échapper à Big Brother et qui se retrouvent confinés comme tout le monde. Le pouvoir de l’État, on le subit, ou on le contrôle, mais on n’y échappe jamais. Il faut donc le contrôler pour ne pas le subir. Le pouvoir, c’est la capacité à se faire obéir par les forces de l’ordre. On sait que l’on est au pouvoir quand les forces de l’ordre nous obéissent. Quand on n’a pas les moyens de la révolution ou du coup d’État, pour parvenir à ce résultat – diriger les forces de l’ordre – il faut donc en passer par des organisations politiques de masse, capables de reprendre le contrôle de l’État, c’est-à-dire qui jouent le jeu des institutions et des médias. La métapolitique militante et dissidente n’est évidemment pas inutile, elle est un contre-pouvoir qui permet de préparer les esprits et de travailler l’opinion publique, mais elle est simplement impuissante par elle-même, on le voit avec évidence en ce moment, ce n’est pas elle qui passe ses ordres aux forces de l’ordre.
Strategika – Comment liez-vous la crise actuelle à votre domaine d’expertise et votre champ de recherche ?
En 2010, je décrivais dans Gouverner par le chaos la situation actuelle dans ses grandes lignes, à savoir comment certaines forces tentaient d’implémenter un totalitarisme numérique à l’échelle mondiale au moyen d’une stratégie du choc qui pouvait être une épidémie. Je ne parle que de ça, directement ou indirectement, depuis dix ans. La crise du coronavirus présente un cas pratique d’ingénierie sociale et de constructivisme des perceptions, ce que j’ai appelé « reality-building ». Je propose les définitions suivantes : « L’ingénierie sociale est la transformation furtive d’un sujet social, individu ou groupe. » Selon cette définition, l’IS est plus que de la manipulation ou de la propagande, qui restent réversibles. L’IS cherche à transformer votre nature de manière irréversible mais aussi furtive et subliminale. Il s’agit de pirater votre esprit pour vous faire adopter sans même que vous ne vous en rendiez compte un changement définitif. Maintenant, définition du reality-building : « Construction de la réalité par la parole, reposant sur le principe de l’hypnose, c’est-à-dire que la parole de l’hypnotiseur devient la réalité de l’hypnotisé. » Comment la parole de quelqu’un peut-elle devenir la réalité de quelqu’un d’autre ? Une parole, c’est-à-dire un récit composé de simples mots, peut devenir votre réalité dès lors que vous y croyez, c’est-à-dire que vous accordez votre confiance à ces mots, peu importe qu’ils correspondent à une réalité matérielle objective ou pas.
Pour bien comprendre ce que nous vivons, il faut faire des allers et retours permanents entre la réalité et la fiction, l’actuel et le potentiel, les deux domaines étant en interaction permanente dans le cerveau humain. Nous retrouvons la même structure qu’avec la « menace terroriste » : un mélange de réel et de fiction, combiné à deux stratagèmes bien connus qui sont le pompier pyromane et le triangle de Karpman. Sur le mélange réel/fiction, souligné dans son dernier livre par le professeur Didier Raoult – qui se fait le disciple occasionnel de Jean Baudrillard : les partisans du « tout réel » ont tort, les partisans du « tout fiction » ont tort. Exemple : ce n’est pas parce que la « version officielle » de la crise du coronavirus est fausse qu’il n’y a pas de maladie ; de même, ce n’est pas parce que la « version officielle » des attentats terroristes est fausse que les attentats n’ont pas lieu. Des événements ont lieu, et c’est la narration explicative qui est fausse, pas les événements en eux-mêmes. Il peut arriver également que les faits soient entièrement faux et non seulement la narration du pouvoir, son storytelling. La réalité est alors entièrement résorbée dans une représentation, ce que certains appellent l’ère post-vérité et post-factuelle. Mais le plus souvent, il y a tout de même des morceaux de réalité dans la fiction, ne serait-ce que pour rendre la fiction d’ensemble plus crédible. C’est le principe de la propagande grise, qui mélange des éléments vrais et faux, pour mieux faire passer les faux. Les lecteurs de Philip K. Dick sont également familiers de cette dialectique du réel et du virtuel tournant autour du fameux thème de science-fiction du « cerveau dans la cuve » et posant la question solipsiste « Le monde existe-t-il en dehors de la représentation présente dans mon cerveau ? » Mon mémoire de maîtrise de philosophie en 1995 portait sur les relations entre le réel et l’imaginaire, et le passage graduel et insensible de l’un à l’autre, avec toutes les dérives pathologiques possibles qui constituent le cœur de la condition humaine, par opposition aux autres espèces vivantes, qui sont bien plus dans le « réel » pur. En effet, le cerveau humain ne distingue pas spontanément le réel du virtuel, ce qui explique que nous puissions éprouver des émotions réelles et nous mettre à pleurer ou à rire en regardant un film de fiction. Un autre phénomène intéressant que tous les joueurs de tennis ont expérimenté : on peut améliorer sa technique de jeu en regardant des matchs à la télé. Tous ces mécanismes neuro-moteurs sont fondés sur la fonction mimétique de l’esprit humain et les neurones miroirs qui nous dotent d’une grande capacité d’apprentissage épigénétique, c’est-à-dire post-natal et par imitation des autres membres de la société. Ceci explique aussi que le coronavirus n’a pas besoin d’exister réellement pour exister mentalement et produire des effets dans la réalité parce que l’on croit qu’il existe réellement. C’est aussi le mécanisme de l’effet placebo et du rôle de la pensée dans les phénomènes psychosomatiques, bien connus de la recherche clinique et de ses études en double aveugle, quand ni le médecin, ni le patient ne savent si le médicament prescrit contient le principe actif ou non. Cette boucle de rétroaction entre le réel et sa représentation est fascinante.
L’analyse de la crise actuelle révèle aussi l’application combinée de deux techniques d’ingénierie sociale : 1) le pompier pyromane, qui repose sur la trilogie déjà mentionnée problème-réaction-solution ; 2) le triangle de Karpman, c’est-à-dire le jeu de rôles bourreau/victime/sauveur, qui permet de jouer à volonté sur les relations de confiance, de méfiance et d’indifférence et de les modifier dans l’opinion publique, afin de structurer et façonner cette opinion publique. En IS, la phase d’hameçonnage (phishing) repose sur l’usurpation d’identité et l’abus de confiance. Il s’agit d’hameçonner, ou attraper, la confiance d’autrui, en usurpant une identité inoffensive, c’est-à-dire en se faisant passer pour une victime ou un sauveur. Exemple : le pouvoir provoque la crise, ou laisse la crise s’installer. Dans le réel, le pouvoir occupe donc la place du pyromane, donc du bourreau. Puis, une fois que la crise est installée et en cours, le pouvoir se présente comme le sauveur, qui va donc nous sauver de la crise qu’il a lui-même installée furtivement, tel un pompier qui éteindrait l’incendie après l’avoir lui-même allumé discrètement.
Le pompier pyromane créé donc un problème – ou le laisse arriver, ou favorise son avènement – puis il attend la réaction de panique dans la population, puis il apporte sa solution pleine de compassion pour les victimes. Cette solution n’est pas forcément la meilleure sur le long terme mais elle l’intéresse lui d’abord à court terme. Par exemple, Bill Gates et ses amis mondialistes ne vont pas nous parler de tous les traitements alternatifs aux vaccins, ils ne parleront pas non plus de respecter la bonne distance entre les nations pour éviter la contagion internationale du virus. Non, surtout pas, car ce sont les bonnes solutions à long terme. Au prétexte de cette crise, les mondialistes cherchent à imposer la vaccination obligatoire de masse et une surveillance électronique toujours plus intime, avec la suppression de l’argent physique, accusé de transmettre le virus, remplacé par le paiement sans contact, et in fine, l’introduction de composants électroniques dans le corps portant les informations qui permettront la traçabilité et l’identification numérique des individus, comme cela se pratique déjà avec le bétail et les animaux domestiques. Ce ne sera sans doute pas au moyen de la puce RFID classique de la taille d’un grain de riz, qui est déjà dépassée technologiquement, mais sous forme d’objets encore plus petits et de tatouages à points quantiques. Cette approche authentiquement cybernétique, c’est-à-dire qui ne distingue pas entre les êtres vivants et les objets inanimés, tous décrits comme des « systèmes », transformera les êtres humains en objets connectés. Au niveau international, ce programme d’identification numérique de chaque individu est soutenu par Bill Gates et porte un nom : ID2020. En France, le développement de l’identité numérique est soutenu depuis 2004 au moyen de divers stratagèmes avoués dans le Livre Bleu du GIXEL – Groupement professionnel des industries de composants systèmes électroniques (devenu ACSIEL en 2013). (15)
Il ne faut pas oublier non plus que cette crise se trame sur fond d’un bras de fer opposant la Chine aux USA pour la suprématie informatique mondiale. Le gouvernement chinois veut en effet équiper l’entièreté du parc informatique de la Chine avec un système d’exploitation fabriqué en Chine, et abandonner Windows, développé par Microsoft de Bill Gates. Le rapport de forces est radical : si la Chine parvient à se débarrasser de Microsoft, vu la capacité d’entraînement de la Chine au niveau mondial, Microsoft est mort. Donc aussi la NSA et son système Echelon, c’est-à-dire l’État profond et le complexe militaro-industriel anglophones, dont l’unité est formalisée par l’Accord UKUSA, mieux connu sous le nom des Five Eyes, désignant l’alliance des services de renseignement du Royaume-Uni, des USA, du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, et qui ne pourront plus espionner tranquillement la Terre entière avec les backdoors de Windows. Cette guerre à mort pour la suprématie informatique mondiale entre la Chine et le monde anglophone couvait depuis au moins 2014 mais elle a explosé en 2019. Ceci étant dit, la Chine ne nous sauvera pas du cauchemar cybernétique. Les multiples tentatives de déstabilisation de ce pays par des puissances étrangères depuis les événements de la place Tian’anmen, en passant par le Tibet, les Ouïgours et Hong-Kong ont poussé le gouvernement chinois à développer une surveillance électronique de masse, notamment avec son système de crédit social à reconnaissance faciale, qui n’a rien à envier aux projets occidentaux en la matière et qui est même en avance sur eux.
Le confinement et la distanciation sociale sont les concepts clés du nouveau paradigme international qui essaye de se mettre en place : des individus isolés physiquement et qui ne pourraient communiquer que par écrans interposés, donc sous l’œil de Big Brother. L’informatique doit encadrer totalement nos vies, devenir enveloppante et omniprésente, un passage obligé, une médiation nécessaire dans notre rapport au monde, à autrui et à nous-mêmes. Il y a inversion du contenant et du contenu : normalement, la réalité réelle contient la réalité virtuelle, mais nous glissons progressivement dans un monde où c’est la réalité virtuelle qui contiendra le réel. Le but ultime est la destruction de la réalité physique, toujours incontrôlable, remplacée par une réalité numérique parfaitement contrôlée. Le remplacement du monde réel par un monde virtuel n’est possible que par étapes. Pour commencer, la nature doit devenir défectueuse et inquiétante, pleine de virus très méchants, si l’on veut fabriquer le consentement des peuples au Grand Confinement, c’est-à-dire à la psychose hygiéniste et à l’artificialisation numérique totale, qui deviendront alors des refuges et des solutions de sécurité.
Le couple confinement/distanciation sociale nous éloigne du monde et d’autrui, et nous prive d’une relation naturelle et immédiate au monde. Pour le biopouvoir, toute la vie doit devenir sans contact, non seulement les paiements. Les observations de Walter Lippmann sur la construction de l’opinion publique par les médias sont plus que jamais d’actualité : pour que les médias contrôlent parfaitement l’opinion publique et le cerveau collectif, il faut une barrière entre le public et les faits, que le public ne puisse pas constater la matérialité des faits, donc la réalité des faits, et qu’il soit contraint d’accorder sa confiance à la narration médiatique parce qu’il ne peut pas faire autrement. Le biopouvoir cherche à contrôler le robinet des informations, car cela lui donne le contrôle du flux des contenus qui occuperont votre temps de cerveau disponible. Quand il n’y a plus de source d’information directe, que l’information est entièrement indirecte, passée au filtre d’un intermédiaire, d’un média, alors cet intermédiaire médiatique peut construire la réalité, parce que la réalité est entièrement résorbée dans la représentation dont il a le monopole. La parole de l’hypnotiseur devient la réalité de l’hypnotisé. Pour se prémunir contre ce risque, il faut tout d’abord devenir imperméable, ou au moins critique, vis-à-vis de la parole politico-médiatique, cesser de l’intérioriser, d’y croire, de lui faire confiance, du moins de manière inconditionnelle, et surtout il faut pouvoir sortir de chez soi pour aller constater les faits soi-même.
Petit problème d’ingénierie sociale : comment être suffisamment nombreux dans la rue, sur les réseaux sociaux, et partout, à dire « Stop Confinement ! » et « Non aux vaccins ! » pour que le dispositif de répression soit inopérant ? Comment atteindre le seuil de bascule, le seuil critique permettant d’imposer une nouvelle norme dans les esprits, y compris dans la tête de la police ? Ce qui s’est passé à Berlin le 11 avril, quand de simples gens ont organisé une manifestation pour braver le confinement, avait un air de déjà vu le 9 novembre 1989, quand les Berlinois ont attaqué le mur, sans que les forces de l’ordre n’interviennent, car elles avaient été désarmées psychologiquement par l’instauration d’une nouvelle normalité, c’est-à-dire d’une nouvelle légitimité, légalité, majorité, phénomène psychologique qui s’appelle le « retournement » ou « spin » en anglais, proche de la notion de « conversion ». Voir aussi du côté de l’astroturfing, qui consiste à créer un consensus majoritaire sur telle idée ou solution en procédant à un encerclement cognitif de l’ennemi pour marginaliser et mettre en minorité ses solutions, qui sont en l’occurrence le confinement de masse, la vaccination de masse et la surveillance électronique de masse. Il faut toujours viser les grands nombres et la quantité. Le retournement des masses, la conversion des masses, et en particulier des forces de l’ordre, précède et accompagne tous les mécanismes révolutionnaires. Notre travail doit être de convertir un maximum de monde autour de nous, au moyen d’une contamination mémétique massive, car il n’y a que le nombre qui nous protège, illustration du slogan : « Quand on n’a pas les millions, il faut être des millions. » Le problème à surmonter vient de ce que les mesures du gouvernement, qui occupe la place du sauveur, ont encore des connotations positives dans l’opinion publique. Devenons donc des spin-doctors, passons aux travaux pratiques d’ingénierie sociale, retournons l’opinion publique sur ces sujets en accolant une connotation négative, celle du bourreau, à la formule confinement/vaccin/surveillance électronique et à ceux qui la promeuvent. Comment ? Rappeler inlassablement les chiffres très modestes de la mortalité de ce virus. Rappeler que le confinement de masse retarde l’acquisition de l’immunité de masse et va donc provoquer autant de morts sinon plus que le confinement des seuls malades. Communiquer en essaim sur les solutions alternatives à la trilogie confinement/vaccination/surveillance électronique, de sorte que le message contamine tout le corps social et finisse par impacter le sommet du pouvoir. Il y a déjà des résultats positifs puisque les solutions alternatives aux vaccins ont commencé à exister dans l’opinion publique et à se faire une place dans la parole politico-médiatique, mais ce n’est pas suffisant, il ne faut pas relâcher la pression et nous devons continuer à réclamer l’accès à tous les traitements non vaccinaux, et non seulement celui du professeur Raoult.
Pour finir, un conseil de reality-building pour cultiver l’optimisme et ainsi renforcer notre système immunitaire. La « pensée positive », qu’on appelait avant la méthode Coué, l’autosuggestion, a un effet psychosomatique bien réel sur le corps. Face à la maladie, il faut adopter une bonne attitude qui renforce nos défenses immunitaires en développant un sentiment d’invincibilité. Quiconque a peur d’attraper le coronavirus doit considérer qu’il l’a déjà eu, mais de façon asymptomatique, et qu’il en est sorti vainqueur et désormais immunisé. Et ainsi, pour parodier Mao, de victoire en victoire, jusqu’à la victoire finale !
Notes:
(1) Compte-rendu du Conseil des Ministres du 24 janvier 2020, intervention d’Agnès Buzyn sur le coronavirus entre 12.20 et 18.30.
(7) « What changes are we going to have to make to how businesses operate to maintain our economy while providing social distancing? [Bill Gates] The question of which businesses should keep going is tricky. Certainly food supply and the health system. We still need water, electricity and the internet. Supply chains for critical things need to be maintained. Countries are still figuring out what to keep running. Eventually we will have some digital certificates to show who has recovered or been tested recently or when we have a vaccine who has received it. (…) What do you see as the long-term strategy for fighting this pandemic and do you feel like it will adequately prepare us for the next? [Bill Gates] I think that after this is under control that Governments and others will invest heavily in being ready for the next one. This will take global cooperation particularly to help the developing countries who will be hurt the most. A good example is the need to test therapeutics wherever the disease is to help the whole world. The Virus doesn’t respect national boundaries. »
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré aux conséquences économiques de la crise sanitaire. Économiste de formation, vice-président de Géopragma et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Candidat aux élections européennes sur la liste du Rassemblement national, il a publié récemment un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).
Économie : En territoire inconnu
Wall Street a connu début avril sa meilleure semaine depuis… 1938 ! Au moment même où les États-Unis annonçaient un nombre record d’inscriptions au chômage : 16 millions ! Malgré l’extension mondiale de la pandémie de Covid19, la paralysie d’un nombre croissant d’économies et la réduction du commerce international, de l’ordre de 30 %, ni les produits de taux, ni les actions n’ont subi les conséquences de la crise en proportion des effets attendus sur les résultats des entreprises, à l’exception des valeurs directement impactées ; tourisme, aéronautique, etc.
Les marchés lead l’économie
Que se passe-t-il ? Aucun hasard dans cet apparent paradoxe, aucune raison non plus d’en appeler à la ritournelle de ceux qui veulent que tout ça n’ait aucun sens, que les marchés aient perdu toute utilité, et qu’il suffise de fermer les Bourses, d’interdire le versement des dividendes, et accessoirement de nationaliser les entreprises. Les Cassandre finissent toujours par avoir raison, elles ne savent ni quand ni pourquoi, ce qui les rend dérisoires.
Mieux vaut regarder en face les trois faits révolutionnaires qui changent tout ce que nous croyions savoir sur les marchés.
D’abord, ce ne sont plus les chiffres d’affaires et les résultats qui font les mouvements des valeurs d’actifs, c’est l’action des Banques centrales. Business ne fait plus-value. Ceux qui croient encore que les sociétés privées dirigent le monde doivent y réfléchir. Depuis un mois, les États décident du versement des dividendes et des rachats d’action, les États décident de l’implantation des usines et des autorisations de vente à l’étranger ou d’importation de produits industriels, et les États décident de la vente ou non d’entreprises privées à d’autres entreprises privées, le blocage de la vente de Photonis à Télédyne en France en donnant un bon exemple !
Nous sommes loin de l’abandon d’Alcatel, d’Alstom, de Morpho-Safran, de Technip, des Chantiers de l’Atlantique, etc. Et ceux qui croient encore que les marchés s’autorégulent doivent abandonner leurs illusions ; les banques centrales ont tiré la leçon de 2008, elles savent que les marchés s’autorégulent encore moins qu’ils ne sont transparents et équitables, et elles en tirent la conséquence ; à elles de faire les prix de marché — pour le meilleur ou pour le pire, c’est une autre histoire !
L’endettement
Ensuite, la Nouvelle Politique Monétaire (NPM) et son application signifient que l’émission de monnaie est devenue le vrai moteur des économies, et que tout peut être fait, rien ne doit être exclu, qui assure le maintien des valorisations boursières. Les banques centrales sont le premier acteur de l’économie nouvelle. Les marchés ont été nationalisés ; ou, plutôt, les marchés financiers sont devenus trop importants pour les laisser à la confrontation des acheteurs et des vendeurs. Le citoyen avait disparu, effacé par le consommateur, le consommateur disparaît, effacé par l’investisseur, devenu l’acteur central de la société globale, ou par son symétrique, le consommateur endetté, État ou particulier, qui doit avoir la certitude, non de rembourser ses dettes, ne rêvons pas, mais de pouvoir s’endetter davantage !
Nous sommes passés d’un univers dans lequel le crédit bancaire et les aides d’État déterminaient l’activité, au monde dans lequel la valorisation boursière commande la propriété et in fine décide de l’activité du crédit. Quelle Nation pourrait accepter que les plus belles entreprises nationales soient rachetées à vil prix parce que les cours de leurs actions ont baissé ? Trois solutions : la nationalisation, à la fois suspecte et coûteuse ; l’interdiction par la loi, qui trouve vite ses limites géopolitiques ; le soutien des cours. D’où cette conviction appliquée, il faut faire tout ce qu’il faut pour que les valorisations demeurent élevées, et progressent, c’est la condition de la stabilité économique ! La surabondance monétaire booste les cours des actions. Est-ce la nouvelle règle du jeu ?
Enfin, c’en est fini de la diversité des anticipations, cette fiction convenable des marchés où les prix étaient le résultat de l’appréciation du risque, et des anticipations d’acteur divers par leurs horizons de gestion, leurs objectifs de rendement, leur appétence pour le risque, etc. Jamais la détention d’actions n’a été aussi massivement concentrée entre les mains des 1 % de « superriches » — aux États-Unis, de toute leur histoire ! Et jamais la concentration des pouvoirs (ou la confiscation de la démocratie) n’a joué aussi manifestement pour protéger les super-riches contre tout événement fâcheux, et leur garantir la poursuite accélérée de leur enrichissement !
Les banques centrales sont prêtes à tout
Les données publiées par le site « Zerohedge » indiquent plus de 16 000 milliards de dollars ont été engagées par la FED pour sauver les banques américaines, leurs actionnaires et leurs dirigeants, de la faillite et de ses conséquences judiciaires pour les uns, financières pour les autres ! Ce qu’elles n’indiquent pas, c’est ce phénomène bien connu et si bien exploité ; la surrèglementation nourrit l’hyperconcentration. Seuls, les très gros, très riches et très forts bénéficient des seuils réglementaires et normatifs qui excluent les plus petits, plus faibles, moins riches.
Le temps est venu de ranger au bazar des accessoires défraîchis les enseignements de l’économie classique sur la fabrication des prix et les racontars sur « la concurrence libre et non faussée » que nul n’a jamais rencontrée nulle part ailleurs que dans les manuels d’économie et les discours de la Commission européenne à la Concurrence ! Les marchés actions doivent progresser, les Banques centrales en sont garantes, et on ne gagne jamais contre les banques centrales, c’est bien connu ! Voilà qui met à bas tout ce que nous croyions savoir sur les politiques de gestion d’actifs. Les politiques de gestion raisonnables, différenciées, basées sur les fondamentaux des entreprises ou des États n’ont plus de sens quand ce sont les injections de liquidités et les politiques de rachat de tout et n’importe quoi par les banques centrales qui font les cours. S’il est une conclusion à tirer de l’énormité des engagements des banques centrales, Fed comme BCE, c’est bien qu’elles sont prêtes à acheter n’importe quoi pour que la musique continue !
Dans ces conditions, le couple risque-rentabilité qui dirigeait les allocations d’actifs raisonnées n’est plus de saison. La sélection des titres est un exercice vain. Tout simplement parce que la partie « risque » s’est évanouie, ou que l’action des banques centrales fait qu’il est impossible de l’évaluer. Il n’y a plus de prix pour le risque, ce qui interroge au passage sur le nouveau tour du capitalisme et le sens du mot « entrepreneur ». La logique est : qui va bénéficier des actions de la FED et du Congrès, de la BCE et des décisions du Conseil et de l’Eurogroupe ?
La richesse ne vient plus du travail
Au moment d’entrer en territoire inconnu, que conclure ? D’abord, essayer de comprendre les règles du « new normal ». Les règles ne sont pas les mêmes, ce qui ne signifie qu’il n’y a pas de règles ; elles sont nouvelles, c’est tout. Ensuite, s’efforcer de prévoir l’évolution dans le temps de ces règles et de leurs impacts, leur nouveauté même pouvant réserver toutes les surprises. Enfin, reconnaître l’intérêt de la France, et faire en sorte que la France sorte gagnante d’un jeu qui fera des gagnants et des perdants.
Sauver l’effet richesse, c’est la nouvelle règle du chef d’orchestre. La richesse dans les pays riches ne vient plus du travail, mais de la détention ou de l’attraction du capital (cas exemplaire des start-up qui ne sont riches ni de produits, ni de clients, ni de chiffre d’affaires, mais du capital qu’elles lèvent sans limites, et qu’elles consomment également sans limites ; voir Uber, Tesla, etc. !) Et voilà comment des compagnies aériennes américaines qui ont racheté pour 45 milliards de leurs propres actions (soit 96 % de leur cash flow disponible) pour enrichir leurs actionnaires demandent… 54 milliards d’aides au gouvernement pour ne pas faire faillite (Boeing a suivi la même politique, consacrant la totalité de son cash flow disponible en dix ans au rachat de ses propres actions et demande également le sauvetage par l’argent public) !
Le compromis entre le capital et le travail a été rompu dans les années 1990 pour être remplacé par un compromis entre les détenteurs du capital et les banques centrales ; il ne s’agit plus de partager des gains de productivité, il s’agit de s’enrichir sans fin ! Il ne s’agit plus de redouter une « stagnation séculaire » de la croissance dans les pays riches, il s’agit d’assurer l’enrichissement des plus riches par la création monétaire déversée sur les marchés d’actifs ! Ce ne sont plus les plus vulnérables qui sont protégés, ce sont les plus riches qui peuvent se servir. Il est permis d’espérer, mais ce n’est pas demain que le monde du travail retrouvera les leviers qui lui avaient permis de négocier le partage des gains de productivité qu’assurait l’industrie — d’ailleurs, il n’y a plus chez nous ni industrie ni gains de productivité ! Pour s’en convaincre, et contrairement à tout ce que suggèrent la situation actuelle et la célébration méritée du courage des soignants, des gendarmes et des policiers, des caissières et des livreurs, il suffit de regarder où va l’argent émis par les banques centrales ; les marchés ont l’argent, les soignants ont l’ovation de 20 heures aux fenêtres chaque soir ! Paradoxalement, la pandémie marque un nouveau bond en avant du capitalisme libéral. Certains peuvent rêver que ce soit le dernier.
L’Europe laissée de côté pour le véritable affrontement
Éviter la confrontation au réel et ruiner l’adversaire, c’est le jeu du moment. Un jeu impitoyable dans la confrontation des faibles aux forts. La Chine est annoncée grande gagnante de l’épreuve actuelle. Attendons. Il serait paradoxal que le pays d’où est parti la pandémie, qui l’a probablement aggravé par sa politique de censure des informations critiques, ou simplement des mauvaises nouvelles, et par le retard mis à en reconnaître le caractère expansif et non maîtrisé, en tire un bénéfice géopolitique et financier, mais nous sommes installés en plein paradoxe (le fait qu’une chose et son contraire puissent être affirmés en même temps est caractéristique de la situation présente, c’est-à-dire du chaos cognitif et de la confusion mentale) ! Attendons pour en juger de voir quels engagements en faveur de la relocalisation massive de nos productions stratégiques seront effectivement tenus.
Tout indique que les États-Unis se détournent de l’Europe pour engager la confrontation avec le pays qu’ils jugent leur premier adversaire du XXIè siècle, une confrontation dont tout indique qu’elle mobilisera la gamme entière des stratégies non conventionnelles et des armes non militaires, les moyens de paiement, les systèmes d’information et les attaques biologiques constituant quelques-uns des moyens d’un arsenal varié. Bitcoin, 5G, biotech — nous n’avons encore rien vu des ressources que la monnaie et la finance de marché peuvent mobiliser pour appauvrir l’ennemi, pour diviser l’ennemi, pour obliger l’ennemi à composer.
Plus besoin des canonnières du commodore Perry pour obliger un pays à s’ouvrir et à se plier ! Au choix, on considérera les milliers de milliards de dollars mis sur la table par la FED depuis ces dernières années comme une arme de destruction massive pour les détenteurs de papier libellé en dollar, ou pour le système financier occidental lui-même… les paris sont ouverts ! Et on sera attentif au projet attribué au macronisme de confier la gestion des réserves d’or de la France à une banque américaine ; après le pillage d’Alstom, le pillage de la Banque de France ? Pendant la pandémie, le hold-up continue !
Protéger le patrimoine national et l’activité nationale devient une priorité pour chaque État. C’est la priorité de la France. La sécurité monétaire, la sécurité économique et patrimoniale, s’imposent au premier rang des enjeux de sécurité globale. Derrière les soubresauts boursiers, les risques de prise de contrôle de tel ou tel fleuron technologique ou industriel sont multipliés. Derrière la suppression de la monnaie papier, les enjeux de contrôle, de détournement, et de vol, sont gigantesques. Derrière la naïveté avec laquelle les administrations européennes prétendent se moderniser en substituant au papier et au guichet l’Internet obligé se cache mal l’exploitant américain ou chinois et un retour au temps des colonies, quand quelques compagnies privées, aventureuses et pirates, se partageaient des continents.
Et qu’en sera-t-il si le traçage individuel grâce aux données collectées à partir des téléphones portables se justifie par des motifs sanitaires pour devenir la règle imposée à toute la population, au bénéfice des prestataires qui s’en félicitent déjà ? La pandémie n’arrête pas les (bonnes) affaires d’Atos et de ses concurrents (écouter à ce sujet sur RTL l’étonnant discours du commissaire européen Thierry Breton, ex-PDG d’Atos, ouvrant sereinement la voie au contrôle numérique de la population européenne !) Derrière l’échappée belle de toutes les règles budgétaires de rigueur imposées par l’Union, s’annonce une course qui fera des gagnants et des perdants.
La France doit saisir dans la pandémie une bonne occasion de rompre avec les contraintes que l’Union européenne impose aux choix nationaux, à la protection du marché national, à la préférence pour les entreprises nationales. La France doit utiliser au maximum les facilités qui sont offertes par la BCE, par un mécanisme européen de solidarité (MES) débarrassé de toute conditionnalité, par le fonds européen de relance annoncé.
Elle doit le faire au profit des entreprises françaises, des projets français, de l’indépendance de la France – et sauver les entreprises familiales du commerce et de la restauration, contre les ambitions prédatrices des chaînes mondiales de « malbouffe ». Elle doit mobiliser toutes les capacités que l’Union européenne peut offrir dans son propre intérêt, comme l’Allemagne, comme les Pays-Bas, comme les autres Nations le font. Et elle doit plus encore considérer les marchés financiers pour ce qu’ils sont, un outil à la disposition de qui choisit de s’en servir. Voilà qui n’invalide pas le rôle des marchés, mais qui le transforme.
Tout simplement parce que nous sortons du monde du bon père de famille qui savait que rembourser des dettes enrichies. Dans le nouveau monde, non seulement les dettes ne seront jamais remboursées, mais celui qui s’enrichit est celui qui peut émettre le plus de dettes. Dans le nouveau monde, ce ne sont plus des créanciers exigeants et sourcilleux qui achètent la dette, ce sont des banques centrales d’autant plus accommodantes qu’elles jouent elles-mêmes leur survie — au cours des dernières semaines, la nouvelle Présidente de la BCE, Christine Lagarde, l’a bien compris !
Et l’impensable arrive. La France de 2020 doit savoir s’enrichir de sa dette et mobiliser sans freins la dépense publique, si elle sait l’employer à relocaliser son industrie, à relancer une politique territoriale qui commence par le soutien au secteur de l’hôtellerie, de la restauration familiale et du petit commerce, à relancer de grands projets (le second porte-avion, le cloud français ?) et à réduire le coût du financement de son économie, l’exemple allemand étant sur ce sujet à méditer.
Mieux vaut danser en cadence quand s’arrêter donne le vertige. Les colonnes du temple européen s’effondrent les unes après les autres, de Maastricht à Schengen, ce n’était que des colonnes en papier. Mais que l’entreprise privée, libre de sa stratégie, que les marchés concurrentiels où se forment les prix, que l’allocation des capitaux selon le rapport rendement-risque disparaissent par la magie complaisante des banques centrales, voilà qui mérite attention ; ce sont cette fois les bases du libéralisme qui sont mises à mal. Certains diront ; changeons de partition ! D’autres diront plus simplement ; tant que la musique joue, il faut continuer à danser, seuls ont tort ceux qui pensent d’en tirer en s’isolant dans leur coin. Mais la seule question qui compte est tout autre ; vaut-il mieux être celui qui joue dans l’orchestre, celui qui danse sur la piste, ou celui qui agite son mouchoir sur le quai en regardant partir le Titanic, tous pavillons flottant au vent ?
Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 13 avril 2020)
En estos días de pandemia, algunos se han referido al cierre de fronteras y las medidas extraordinarias adoptadas por los gobiernos citando recurrentemente la celebérrima fórmula schmittiana sobre la manifestación fáctica del verdadero poder soberano, que es quien decide sobre la excepcionalidad. En realidad, Carl Schmitt no aludía con esto al recurso por parte de los Ejecutivos a los poderes excepcionales o de emergencia previstos en las Constituciones, cuyo ejercicio está acotado a predeterminadas circunstancias de gravedad o alteración de la normalidad jurídico-política, como resulta de la crisis sanitaria del Covid-19, sino al estado de excepción, algo mucho más profundo y vasto en su obra que remite al propio concepto de lo político.
Puestos a seguir con el genial politólogo y jurista alemán, sorprende que en estos momentos de tanta excepcionalidad, en coherencia con lo anterior, no se haya reparado en traer a colación también una temática que cobra plena vigencia y a la que este teórico de la democracia dedicó su atención: la dictadura como forma de gobierno emanada, precisamente, de la máxima excepción. La dictadura, institución clásica de Roma, rescatada con las revoluciones liberales y democráticas de los siglos XVIII y XIX, ha pervivido a lo largo de la historia bajo diversos regímenes, fueran liberal-parlamentarios, autocráticos, autoritarios o puramente totalitarios de un signo u otro e implantadas con carácter transitorio o con vocación de permanencia. Y parece que, por todo lo que estamos presenciando, no es una forma lejana y arrumbada en el tiempo, sino que retorna bajo el pretexto de lucha contra el coronavirus.
Los poderes de emergencia tasados en las Constituciones, llamados estados de excepción, implican una suspensión o restricción provisional de alguno de los derechos garantizados en éstas ante una situación grave o extraordinaria prevista en la norma con la finalidad de defender la propia Constitución o en pos de un bien superior. Por ejemplo, proteger la salud pública ante una pandemia.
Sin embargo, el enfoque schmittiano de estado excepcional no debe confundirse con los mencionados estados de excepción constitucionales, aunque se solape con ellos. La excepción es la condición para que irrumpa en el momento de crisis, de alteración del orden existente, el soberano quien es el mismo que decide sobre la excepcionalidad para enfrentar la amenaza que quiebra la normalidad y regularidad jurídica. Lo cual presupone el acto político por excelencia, que es la previa designación del “enemigo”, sin el cual no puede existir la excepción, comunidad política ni lo propiamente político. La excepción se decide contra el hostil que amenaza el orden normativo preestablecido.
Así, la suprema excepción que implica la suspensión general del orden jurídico significa la imposición transitoria de una dictadura cuya finalidad puede ser el restablecimiento del orden preexistente, una vez conjurado el peligro existencial o, como suele mostrar la historia de forma más habitual, una dictadura sin posibilidad de regreso a la regularidad anterior, sino a la instauración constituyente de un nuevo orden.
Un ataque sin precedentes del Régimen contra los derechos y las libertades
El gobierno de coalición del PSOE y Unidas Podemas decretó el estado de alarma, que es el más leve y limitado dentro de los tres estados de excepción, graduados de menor a mayor restricción de derechos, del artículo 116 de la Constitución del régimen del 78 (alarma, excepción y sitio) y además, permite eludir el control parlamentario, cuya actuación se ciñe a convalidar los decretos de estado de alarma que pueden ser prorrogados ilimitadamente. Ahora bien, bajo el decreto dictado por el ejecutivo para combatir al “enemigo”, el Covid-19, y escudados en las recomendaciones de un comité científico y expertos médicos se ha suspendido de facto derechos y libertades que, bajo ningún concepto, están contemplados en la previsión del estado de alarma, el cual, entre otras medidas, solo permite la posibilidad de restringir la libre circulación en determinados lugares y a determinadas horas. Así, de un plumazo se ha confinado a toda la ciudadanía en sus domicilillos y se ha impuesto un toque de queda permanente que supone un flagrante atentado contra derechos y libertades, incluso de los denominados como fundamentales, tales como el de reunión, libertad de circulación, residencia, reunión y manifestación. Con las medidas de “hibernación” de la economía, de parón forzoso de casi todas las actividades, se ha vulnerado el derecho al trabajo y el de libertad de empresa. Por la vía de hecho, se ha suspendido la ley de transparencia, contribuyendo al apagón informativo que además sostienen cadenas y medios de prensa regados con dinero público; a lo que se suman las encuestas sesgadas del CIS, un organismo público puesto al servicio del gobierno de forma burda y descarada. Qué decir de los rastreos promovidos en internet y redes sociales por el Ministerio de Interior bajo la coartada de contrarrestar los “ciber-bulos” y localización de discursos sobre la infección que puedan ser considerados peligrosos e incluso punibles; y otras medidas del ente público RTVE, como verifica RTVE también para la neutralización de supuestos “fake news”, atentando con todo lo anterior contra el derecho a la información, a la vez que se imponen subrepticiamente mecanismos de censura y se coarta el derecho a la libertad de expresión.
Cuanto menos, si no solo resulta inquietante la monitorización del confinamiento vía geolocalización de móviles, supone además una violación del derecho a la intimidad y al secreto en las comunicaciones de la ciudadanía.
A lo que se sumarían otras iniciativas liberticidas en el mundo entero, como la acometida motu proprio por WhatsApp para limitar el reenvío masivo de mensajes, que no puede ser interpretada de otra manera que como un medio indiscriminado para censurar preventivamente la propagación, llegado el caso, de mensajes subversivos a través de esta aplicación propiedad de Facebook, cuyas relaciones de colaboración con la agencias norteamericanas de seguridad e inteligencia NSA y CIA son sobradamente conocidas.
Estamos ante una suspensión generalizada de derechos y libertades anti-jurídica, conculcando la propia norma que rige al régimen del 78, y por tanto ante la emergencia de una dictadura de facto, con una deriva despótica. No es un golpe de estado partidista de corte bolivariano como pretende cierta derecha casposa, sino la dictadura del mismo régimen del 78 al completo, dada la solícita asistencia de todos los partidos al Ejecutivo por acción u omisión, reyertas de banderías aparte.
Está por ver si lo excepcional devolverá en algún momento la normalidad anterior a la pandemia o, por el contrario, como puede intuirse por la envergadura de las actuaciones excepcionales impuestas en España, y en buena parte del mundo con el confinamiento masivo de poblaciones, se está jalonando el camino hacia una nueva “normalidad” que instituirá en lo cotidiano el cercenamiento de derechos y libertades. Máxime para reforzar los mecanismos de control de conflictividad y represión social de una población noqueada de antemano por el coronavirus ante la gran crisis económica global del liberal –capitalismo que es una realidad cuyos efectos devastadores para España pronostican, para empezar, una espeluznante caída del 15% del PIB y tasas de desempleo superiores al 20%, con el consiguiente bucle infernal de repunte de déficit y deuda públicas, deterioro y devaluación de las condiciones socio-económicas de la ciudadanía y de la vida en general
“Resistiré”
Si bien, con carácter anecdótico, puede haber algunos pocos, muy pocos, periodistas y juristas en España que comienzan a cuestionar tímidamente y de pasada algunos aspectos del estado de alarma, no puede hablarse de ninguna reacción significativa por parte de nuestros compatriotas frente a la vulneración de sus derechos y libertades bajo este estado de alarma impropio que algunos sí denunciamos desde el primer momento. A diferencia, por ejemplo, de otros países, tales como Estados Unidos en los que hay protestas contra las medidas de confinamiento o Alemania, cuyo Tribunal Constitucional ha fallado a favor de unos ciudadanos que pretendían manifestarse en la vía pública.
Nuestros queridos compatriotas pueden seguir endulzando su confinamiento, sometido a vigilancia policial y, a veces también bajo el escrutinio de vecinos chivatos vocacionales presentes en todas las dictaduras y estados policiales, con el jolgorio en los balcones, el trágala de las consignas oficiales y participar de las convocatorias de las 20h, los catárticos “2 minutos del odio” orwellianos, reconvertidos en aplausos acríticos de adhesión a la gestión gubernamental de una calamidad, así como atiborrarse de los amables reportajes de sainetes vecinales de entrañables y conmovedores gestos solidarios que emiten constantemente los informativos, junto a series de entretenimiento e infinidad de conciertos online.
“Resistiré” es el himno oficial de la dictadura del Covid-19. Pero resistencia es también la consigna que los españoles deben interiorizar frente a esta dictadura cuyos resultados nos abocan a una catástrofe sin parangón.
Der größte Crash aller Zeiten: Deutschland am Scheideweg
Ex: https://kopp-report.de
Einer der klügsten Köpfe Deutschlands legt nach: Nach Der Draghi-Crash (2017), Wenn schwarze Schwäne Junge kriegen (2018) und Verzockte Freiheit (2019), allesamt Bestseller, hat der Ökonom und Risikomanager Markus Krall, ein neues, 300 Seiten starkes Buch mit dem Titel Die bürgerliche Revolution vorgelegt. Sein Untertitel ist Programm: »Wie wir unsere Freiheit und unsere Werte erhalten«.
Im ersten Teil seines Buches zeigt Krall, der sich selbst als libertär einordnet, welche Entwicklungen die bürgerlich-freiheitliche Ordnung in Europa und Deutschland bedrohen. In komprimierter und auch für Laien verständlicher Form erläutert Krall die fatalen Folgen, die von der planwirtschaftlichen Geldpolitik der Notenbanken für Wachstum und Wohlstand unserer Gesellschaft ausgehen. Dieser vom Autor so bezeichnete »Geldsozialismus«, der zu Lasten der Leistungsträger geht und seinen sichtbarsten Ausdruck in den Nullzinsen der EZB finde, führe unweigerlich zum Kollaps des monetären Systems und der Marktwirtschaft. Die politische Klasse billige den Kurs der Zentralbanken, um mit immer neuen Schulden die kurzfristigen Konsumwünsche der Bürger zu befriedigen und Wählerstimmen zu maximieren. Die herrschenden Eliten seien nicht in der Lage, den Menschen durch Aufklärung und geistige Führung das langfristig Notwendige zu vermitteln. Den tieferen Grund für dieses Versagen sieht Krall in der adversen ökonomischen Selektion des politischen Personals, die den Aufstieg rückgratloser Opportunisten ohne intellektuelle Befähigung begünstige.
Der absehbare wirtschaftliche Zusammenbruch werde am Ende auch die Demokratie zerstören, ist sich Krall sicher, und führt als historisches Beispiel die Weimarer Republik an. Dieses Szenario werde begünstigt durch die Aushöhlung der Herrschaft des Rechts und die defizitär ausgestaltete Gewaltenteilung in Deutschland, was der Autor beispielhaft an der Institution des Bundesverfassungsgerichts und seiner Rechtsprechung festmacht. Letztlich versagten aber alle drei Gewalten – Exekutive, Legislative und Jurisdiktion – bei ihrer vom Grundgesetz vorgegebenen Aufgabe, die konstitutionelle Ordnung zu schützen und die Rechte der Bürger zu wahren.
Scharfe Kritik übt Krall an den Kirchen, die zu einem »Wurmfortsatz des Staates« verkommen seien und sich dem linken Zeitgeist angebiedert hätten. Ihre Funktionsträger schwiegen zum Konsumterror, zur Auflösung von Ehe und Familie, zu Pornographie und Abtreibung. Stattdessen beteilige man sich an der Abschaffung der freiheitlichen Ordnung, obwohl die ihr ideengeschichtliches Fundament gerade im christlichen Glauben finde. Die Folge, so Krall, sei »die tiefgreifendste Erosion des Glaubens in unserer Gesellschaft, die je stattgefunden hat«. Das Führungsversagen der Kirchenoberen schaffe ein geistiges Vakuum, das sowohl von scheinwissenschaftlicher Propaganda mit religiösem Wahrheitsanspruch wie der Klimahysterie als auch dem Islamismus gefüllt werde.
Ebenfalls hart ins Gericht geht Krall mit den Medien, die ihrer Rolle als »vierte Gewalt« zur Kontrolle der Mächtigen nicht mehr gerecht würden. Stattdessen fungierten sie als ein Erziehungsinstrument im Interesse der herrschenden Eliten, was besonders im Haltungsjournalismus zum Ausdruck komme, der nicht mehr zwischen Nachricht und Meinung unterscheide. Ziel sei es, das Publikum im politisch korrekten Sinn umzuerziehen. Dazu gehöre es auch, die Sprache zu manipulieren, indem bestimmte Begriffe als »Unworte« aus dem Diskurs verbannt oder usurpiert und mit neuen Bedeutungen aufgeladen werden. Krall nennt dafür einige Beispiele im Buch. Darüber hinaus würden ganze Themenkomplexe und unliebsame Meinungen in der öffentlichen und medialen Diskussion verunglimpft. Eine besonders unrühmliche Rolle bei dem Versuch, die destruktive Politik der Regierenden zu rechtfertigen, spiele der öffentlich-rechtliche Rundfunk, den der Bürger als Opfer der Indoktrination auch noch mit Zwangsgebühren finanzieren müsse. Gleichzeitig werde das Internet als freier Informations- und Diskussionskanal für kritische Bürger durch immer schärfere Gesetze und Zensurmaßnahmen beschränkt. Als Beispiele führt Krall das Netzwerkdurchsetzungsgesetz und den auf EU-Ebene beschlossenen Upload-Filter an.
Als ideologische Grundlage für die gesellschaftlichen Verwerfungen, die den Fortbestand der bürgerlich-freiheitlichen Gesellschaftsordnung gefährden, identifiziert Markus Krall den Kulturmarxismus. In ihm manifestiere sich die Herausforderung des Sozialismus in der Gegenwart, der für die Unfreiheit des Menschen stehe. Seine Merkmale seien die Feindschaft gegen Ehe und Familie, die Ablehnung des Privateigentums, die Verneinung der Freiheitsrechte des Individuums, der Hass auf die Religion und insbesondere das Christentum sowie die Zerstörung von Kunst, Kultur und Musik. In allen seinen historischen Ausprägungen – einschließlich der des Nationalsozialismus – habe der Sozialismus stets zu Massenmord und Genozid geführt, weshalb diese Ideologie ein Todeskult sei, der die Vernichtung der Menschheit zum Ziel habe. Krall beschreibt die »weichen« Methoden, mit denen die Kulturmarxisten versuchen, die Macht schrittweise an sich zu reißen, um danach zu den viel brutaleren Mitteln des Staatssozialismus überzugehen.
Für den Autor ist klar: Die Gesellschaften des Westens stehen vor einem Kampf um die Freiheit, sowohl gegen die Kräfte des Kulturmarxismus als auch des salafistischen Islamismus, der eine Spielart der sozialistischen Menschenfeindlichkeit sei. Wie dieser Kampf ausgehen wird, hängt nach Meinung von Krall entscheidend davon ab, ob die Leistungsträger der Gesellschaft bereit und in der Lage sind, die freiheitliche Kraft der bürgerlichen Revolution zu revitalisieren. Es gehe um Freiheit oder Knechtschaft. Das sei der epochale und unausweichliche Konflikt, den es zu bestehen gelte.
Im zweiten Teil seines Buches zeigt Markus Krall auf, mit welchen Strategien und Methoden es dem Bürgertum gelingen kann, diesen Kampf zu gewinnen. Der nahende Zusammenbruch des Geldsystems biete dabei die Chance zu einer grundlegenden Erneuerung, sofern es gelinge, den Menschen zu verdeutlichen, dass der Crash nicht die Folge von Markt-, sondern von Staats- und Politikversagen sei. Ziel müsse eine »Republik der Freiheit« basierend auf Bildung und Leistung sein, die Marktwirtschaft, Eigentum, Ehe und Familie, Religion, Individualität und christlich-europäischer Kultur verpflichtet sei. Krall entwirft den 100-Tage-Plan einer neuen freiheitlichen Regierung, der die Reaktivierung der Selbstheilungskräfte des Marktes zum Ziel hat, um die Folgen der jahrzehntelangen Misswirtschaft rasch zu überwinden.
Dem schließt sich ein umfassendes Konzept für die Reform des Grundgesetzes an, das von allen freiheitsfeindlichen Elemente bereinigt werden müsse. Krall will für Deutschland eine Reform an Haupt und Gliedern, die nicht nur die Wirtschaft, sondern alle Politikfelder umfassen soll.
Der Autor beschränkt sich dabei nicht auf Allgemeinplätze, sondern legt seine Vorstellungen zur Neugestaltung unserer Verfassungsordnung sehr konkret dar. Einige der Programmpunkte dürften kontroverse Diskussionen auslösen, etwa die Forderungen nach einer Mindestqualifikation für Amtsträger der Exekutive, der Abschaffung des Länderfinanzausgleichs und einem Goldstandard. Oder der Gedanke, ein Wahlkönigtum anstelle des heutigen, von den Parteien ausgekungelten Bundespräsidenten zu konstituieren.
Mit Die bürgerliche Revolution hat Markus Krall einen provokanten Debattenbeitrag vorgelegt, der es bereits kurz nach seinem Erscheinen in die Spiegel-Bestsellerliste geschafft hat. Zu Recht. Ein empfehlenswertes Buch für alle freiheitlich denkenden Zeitgenossen, denen die Zukunft Deutschlands nicht gleichgültig ist!
«Une annulation des dettes ne changera rien aux difficultés de l’Afrique»
Entretien avec Caroline Galactéros*
paru dans le FigaroVox le 17/04/2020
Ex: http://www.geopragma.fr
FIGAROVOX.- Le chef de l’État s’est engagé à «effacer» une partie de la dette des pays africains, était-ce la meilleure manière d’aider ces pays face à la crise économique sans précédent qui guette le monde entier?
Caroline GALACTÉROS.- La France a décidé de réorienter une partie de son aide au développement à hauteur d’1,2 milliard d’euros pour alléger les dettes bilatérales de certains pays africains envers nous et renforcer les systèmes de soins, de recherche et de détection, notamment via les instituts Pasteur. Paris a par ailleurs poussé le Club de Paris, qui réunit les créanciers de l’Afrique, à déclarer un moratoire sur 20 des 32 milliards de dollars dus cette seule année, par 76 pays pauvres dont 40 africains. Il s’agit donc à ce stade d’un moratoire, non d’une annulation ni même d’un allègement ou d’un rééchelonnement. Par ailleurs, le FMI et la Banque mondiale ont eux aussi activé certains de leurs mécanismes pour pouvoir prendre en charge le service de la dette durant quelques mois ou prêter (comme d’ailleurs l’UE à hauteur de 20 milliards d’euros) aux pays africains dont le budget est très lourdement au service de la dette et qui risquent une trop grande fragilisation si la crise du coronavirus venait à les toucher massivement submergeant leurs structures sanitaires notoirement insuffisantes et souvent dépendantes de l’intervention humanitaire.
“Au regard du sous-équipement de notre système de soins, on peut imaginer l’incidence d’une propagation soudaine du Covid-19 en Afrique.”
Quand on voit le sous-dimensionnement et le sous-équipement de notre propre système de soins, alors que nous pérorions sur sa supériorité mondiale il y a encore quelques mois, on peut imaginer l’incidence d’une propagation soudaine du Covid-19 sur certains grands ou petits États africains. Pour l’heure, le continent est toutefois peu touché à l’exception de l’Algérie, de l’Égypte et de l’Afrique du Sud. Les pays les plus à risque sont paradoxalement les plus développés et ceux qui dépendent fortement du tourisme et du pétrole, deux ressources en chute libre. La crise économique liée à la pandémie menace au bas mot 20 millions d’emplois, pourrait priver les États africains d’un tiers de leurs recettes fiscales et faire chuter leur croissance d’au moins 1%, sans parler du fait que les économies africaines demeurent majoritairement informelles, ce qui rend le concept du confinement tout simplement impraticable.
De ce point de vue, Paris est donc une fois encore dans l’incantation généreuse, sans grands risques, mais aussi un peu décalée par rapport à la réalité des nouveaux équilibres de puissance et d’influence. L’initiative française masque mal la préoccupation grandissante qui est la nôtre. En appelant à l’annulation de la dette, Emmanuel Macron a aussi saisi l’opportunité, après son offensive européenne manquée sur la mutualisation des dettes européennes, de mettre une nouvelle fois LE sujet brûlant sur la table. Celui de notre propre dette que les vannes désormais grandes ouvertes de la création monétaire pour parer l’effondrement de l’économie nationale (et européenne) va rendre elle aussi ubuesque et de fait bientôt irremboursable! Un peu comme lorsqu’on veut poser une question personnelle à un psychologue et qu’on lui «demande conseil pour un ami».
Toutefois, cette salve de générosité envers l’Afrique correspond sans doute aussi à un élan plus large et partiellement sincère, que le tragique de la situation mondiale actuelle permet d’invoquer…sans trop y croire. En effet, la France est aussi en train de «tester» auprès des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, un texte appelant à une trêve mondiale des conflits en cours, tandis que la Russie a, de son côté, proposé son aide à l’Amérique. Donald Trump avait semblé prêter l’oreille. Crise du Pétrole oblige probablement. La Chine enfin a, à plusieurs reprises, appelé à l’unité du monde et au renforcement du multilatéralisme face à une menace qui vise la communauté humaine dans son ensemble.
“Les attaques sur la propagande des démocratures respirent la frustration et l’impuissance.”
Évidemment, comme pour les cargaisons de matériel sanitaire et médical livrées par la Russie à l’Italie ou par Pékin à l’Europe, on crie à la propagande et à l’instrumentalisation de la solidarité. Comment imaginer qu’il puisse exister, à côté d’un évident opportunisme et de la gestion bien comprise des intérêts nationaux, une once d’empathie ou de générosité gratuite dans l’action de ces démocratures? À mon sens, ces attaques sont à la fois puériles et contre-productives. Elles respirent la frustration et l’impuissance. Nous aimerions bien, nous aussi, être sortis de la tempête, avoir protégé nos populations, limité les pertes et remis notre appareil productif en branle, nous offrant le luxe de nous porter au secours des autres et de leur faire sentir combien ils dépendent de nous pour avoir abandonné leur souveraineté industrielle ou sanitaire…! Nous en sommes très loin. La crise du Coronavirus est une crise d’humanité. Elle révèle l’indifférence, la rapacité, l’absence d’appréhension globale de notre sort au-delà des envolées abstraites sur le multiculturalisme. C’est déjà le multilatéralisme qui est en morceaux et qu’il faudrait savoir ranimer.
N’est-ce pas la Chine qui est le plus gros créancier de l’Afrique?
En effet, la Chine détient environ 40% de la dette africaine: 145 milliards de dollars sur 365. Il faut savoir que cette dette n’est pas que publique, mais détenue partiellement par des fonds d’investissement, des banques, des entreprises privées. La Chinafrique n’est pas un mythe. La Chine achète l’Afrique depuis déjà près de 20 ans, sur les décombres de notre influence viciée par la repentance. L’absence de conditionnalité politique mise à son appui financier (il suffit de reconnaître l’existence d’une seule Chine pour être dans les clous) lui a assuré un immense succès qui lui fait posséder des pans entiers de l’économie de certains États ou parfois leur dette entière.
“La Chinafrique n’est pas un mythe.”
Pékin n’a donc pas d’intérêt à annuler quoi que ce soit, mais à creuser plus encore son emprise économique et monétaire, comme d’ailleurs en Amérique latine. Le projet des Nouvelles Routes de la Soie y pourvoie notablement et vise à installer des têtes de pont notamment portuaires pour les produits chinois à destination des marchés locaux mais aussi européens. Il est d’ailleurs évident qu’au moment où se conclut ce «généreux» moratoire, de multiples contreparties en concessions minières, pétrolières agricoles doivent être négociées sans doute à des conditions léonines, contre le secours chinois (comme probablement contre celui des autres créanciers occidentaux du continent). La pandémie a juste accéléré la bascule en cours depuis plus d’une décennie du leadership global du monde vers l’Asie et chacun cherche à en tirer parti, ou du moins, à n’en point trop faire les frais.
Cette aide sera-t-elle suffisante?
Évidemment non. Ce n’est pas à la mesure des problèmes de l’Afrique qui sont endémiques. Rien ne garantit d’ailleurs qu’elle sera véritablement «fléchée» vers les bons usages et qu’elle ne disparaîtra pas au moins partiellement dans les poches de ses récipiendaires africains officiels. C’est un geste qui ne coûte pas grand-chose au Club de Paris au G20 et mais ne rapportera pas non plus beaucoup aux populations africaines.
“C’est un geste qui ne rapportera pas non plus beaucoup aux populations africaines.”
C’est à mon sens surtout un moyen d’espérer retarder les effets déstabilisateurs de la pandémie sur un continent surpeuplé dont nous voudrions en Europe qu’il fixe ses populations afin d’enrayer la perspective de flux migratoires à sens unique incontrôlables, et ce plus encore maintenant que nos propres populations vont par millions se retrouver hors de l’emploi et que les coûts économiques et sociaux de l’épidémie en Europe vont exploser.
La fermeture des frontières européennes a ralenti pour un temps la pression migratoire. Faut-il s’attendre à ce qu’elle s’intensifie dans les années qui viennent à cause de la crise?
Oui. D’abord car il faudrait une prise de conscience durable pour que l’espace Schengen demeure véritablement fermé, ce qui est impératif. Je rappelle que la France, tandis que la pandémie fait toujours rage, n’a toujours pas jugé bon de fermer ses frontières nationales avec ses voisins immédiats tandis que l’Allemagne ou l’Italie sont infiniment plus pragmatiques…Nos tabous européistes et idéologiques nous affaiblissent dans la réponse à la crise.
“Le pire en matière de pression migratoire est à venir.”
S’agissant de l’Afrique, le pire en matière de pression migratoire est donc à venir. À cause de la crise, à cause des guerres de déstabilisation suicidaires que nous soutenons toujours au Moyen-Orient sans voir qu’elles creusent au loin le lit de la déstructuration nationale. À cause aussi des questions environnementales qui affectent une Afrique déjà si structurellement frappée par les éléments. Plus encore que cette pandémie sans doute, le défi migratoire est et sera pour l’Europe le test de sa survie. Si elle ne sait pas comprendre que la souveraineté de ses membres et le rétablissement d’États lucides et solides au socle régalien assumé sont, non des handicaps, mais les conditions de sa renaissance comme ensemble qui compte, alors l’UE mourra progressivement de son européisme hors sol, de son allégeance mentale et stratégique naïve à une Amérique plus patriote et unilatéraliste que jamais, dont elle ne constitue en fait docilement que la profondeur stratégique continentale face à la Russie et face à la Chine. Pour survivre, et d’autant plus après ce coup d’arrêt économique, l’Europe va devoir réserver ses forces et ses moyens pour ses propres populations et valoriser la préférence communautaire dans tous les domaines. Pour reconstituer ses forces et ses équilibres, sans indifférence au reste du monde, mais sans vivre dans un permanent renoncement à elle-même. Ce sursaut ne sera possible qu’avec des gouvernants dotés de vision, de cohérence et de courage politique.
Alors que l'Allemagne entreprend aujourd'hui, méthodiquement et franchement, son déconfinement, les représentants du meilleur système du monde, celui de l'Hexagone, s'exprimaient hier sur les ondes du service public. La longueur de leur communication n'a d'égal que le nombre de questions sans véritables réponses.
Humainement, on peut les plaindre de leur douleur, visible en ce moment, dans leur rôle de ministres, c'est-à-dire serviteurs, d'un État aussi lourd, aussi centralisé, aussi coûteux et en même temps aussi impuissant, hésitant et cafouilleux.
Mais, autant nous souffrons tous de cet étatisme, autant nos bons esprits faiseurs d'opinion suggèrent d'en guérir les maux par un surcroît d'étatisme.
Cette conférence de presse conjointe du Premier ministre et du ministre de la Santé présentait, sur tous les points, le mérite d'une certaine franchise, celle de sa propre obscurité. Les deux intervenants associés dans cette entreprise s'enlisaient en effet dans les nouveaux méandres de la parole publique.
Ils y étalaient donc à l'envi leurs propres incertitudes.
Deux heures pour lâcher, ce 19 avril, à peu près trois informations : la première pour annoncer que nous pourrons, c'est une bonne nouvelle, aller visiter ceux de nos aînés séjournant, dépendants, contraints, en fin de vie, dans des maisons de retraite ; la deuxième qu'il sera bientôt obligatoire de porter un masque dans les transports en commun et d'installer du gel dans les magasins – à condition de pouvoir se procurer masques et gels, idem pour les tests – sans garantie du gouvernement ; et enfin, confirmation, on ne sait toujours rien, après un mois de confinement et une semaine de tâtonnement, de ce qu'il en sera vraiment de la vie scolaire des enfants et de leurs vacances d'été.
Pour le reste, débrouillez-vous dans le brouillard braves gens, mais attention aux gendarmes.
Une seule chose semble certaine : les bistrots seront totalement fermés et les écoles en partie ouvertes. Cette dernière décision, arrêtée en fait parce qu'il se révèle urgent de laisser les parents travailler, se veut prise en principe au nom de l'égalité des chances. Le discours présidentiel du 13 avril a fixé la doctrine sur ce point. Reste aux syndicats et aux bureaucrates de l'Éducation nationale de s'accorder sur sa mise en œuvre. Ils n'y sont pas encore parvenus.
Ainsi, la parole publique ne souffre pas seulement de l'incertitude propre au sujet.
Comment accepter un propos toujours si imprécis, sur la disponibilité des masques, ou des tests, nous contraignant de croire, par ailleurs à l'omnicompétence de notre bureaucratie ?
Comment se fier, pensera-t-on, à des experts qui se contredisent ?
Comment croire en un président de leur comité, si péremptoire face aux médias, le Delfraissy, obligé de reconnaître les larges pans de son ignorance quand il est auditionné par les Sénateurs le 15 avril ?
Le discrédit s'abat, plus encore, et de plus en plus massivement, depuis les authentiques mensonges proférés face à la crise.
Le 24 janvier, deux victimes du virus chinois étaient confirmées en France, sur des patients hospitalisés à Paris et Bordeaux. Ce jour-là, encore ministre de la santé, Agnès Buzyn déclare : • 1° que "le risque d’importation depuis Wuhan est pratiquement nul"; • 2° que "le risque de propagation est très faible"; • 3° que "notre système de santé est bien préparé".
Trois affirmations totalement démenties par les faits
Le 17 mars, la même Buzyn affirme au Monde que, dès le mois de janvier, elle avait prévenu le Premier ministre de la gravité potentielle de l’épidémie de nouveau coronavirus. Autrement dit, si on la croit : d’une part le Gouvernement, informé du danger, n’aurait pas agi ; d’autre part, elle-même aurait sciemment cherché à tromper l'opinion.
Le 27 janvier, le professeur Jérôme Salomon directeur général de la santé ose affirmer que "nous bénéficions en France d’un test rapide qui va être disponible de plus en plus largement sur le territoire dans les prochains jours".
Le 23 février, Olivier Véran, qui vient de succéder à Agnès Buzyn, annonce : "dans les hôpitaux de Paris, nous allons pouvoir être largement en mesure de répondre aux demandes, quelles qu’elles soient, de réalisation de tests".
Que vaut donc aujourd'hui, au pays de Voltaire et des servantes de Molière, la parole publique ?
Le 11 mai approche, et ce jour-là, devant le désastre, l'opinion et la rue, artificiellement endormies jusque-là, se réveilleront et pourront demander des comptes.
Le règne du mensonge appartient toujours, certes hors concours, aux héritiers de l'empire du communisme. Mais si nous ne voulons pas évoluer vers l'ombre mortifère du totalitarisme, il faut prendre conscience du danger, ici et maintenant, de la post vérité officielle.
JG Malliarakis Pour recevoir en temps réel les liens du jour de L'Insolent, il suffit de le demander en adressant un message à courrier.insolent@gmail.com
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Denis Collin, cueilli sur le site La Sociale et consacré à la décomposition accélérée des élites françaises. Agrégé de philosophie et docteur ès lettres, Denis Collin est l’auteur de nombreux ouvrages consacrés à la philosophie, à la morale et à la pensée politique, dont Introduction à la pensée de Marx (Seuil, 2018) et Après la gauche (Perspective libres, 2018).
Pourrissement des élites
Pour une analyse du cas français
Il n’y a pas de société sans élite. Ce constat est désagréable pour tous ceux qui, comme moi, tiennent l’égalité pour une vertu fondamentale. Mais c’est un fait. Nous ne pouvons guère nous passer de chefs capables de prendre des bonnes décisions sans trop tergiverser, de penseurs qui voient un peu plus loin que le bout de leur nez. Aucun État ne peut se passer d’un corps de fonctionnaires compétents, intègres et connaissant les lois et les techniques de l’administration. Qu’on le veuille ou non, toutes ces tâches ne peuvent être exercées par tous. Pour devenir un bon médecin, il faut beaucoup de temps et de connaissances et personne ne peut s’improviser médecin.
Le problème est bien connu : comment concilier l’idéal démocratique avec la nécessité que les élites gouvernent de fait. Il doit demeurer un libre jeu, conflictuel, entre le peuple et les grands, pour parler comme Machiavel. Les lois fondamentales doivent être adoptées par le peuple tout entier et les élites doivent être élues par le peuple et doivent lui rendre des comptes. La république idéale n’a pas d’autres principes. Le problème tient à ce que dans une société divisée en classes sociales aux intérêts divergents et même antagonistes, les élites sont sélectionnées par leur compétence, mais aussi et surtout par leur origine sociale. Ceux d’en haut finissent en haut ! Vilfredo Pareto a consacré un travail monumental à cette question en montrant les difficultés de la sélection des élites et la nécessité de la circulation des élites.
Si nous revenons maintenant à la situation française, il faut faire un constat terrible : celui de la décomposition accélérée des élites. En rajeunissant le personnel politique et en contribuant à l’éjection d’une bonne partie de la vieille classe politique, le macronisme a mis en lumière l’extraordinaire effondrement du niveau intellectuel des élites instruites dans notre pays. La bêtise crasse, la vulgarité, l’absence de tout sens moral et l’incompétence accablante dominent ces nouvelles élites, cette classe des « crétins éduqués » si bien caractérisée par Emmanuel Todd. Chaque jour, presque chaque heure, un des personnages haut placés du gouvernement profère quelque énormité qui va alimenter les réseaux sociaux. La porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye excelle dans ce domaine, mais elle s’est tout simplement mise dans les pas de son « Jupiter » dont les petites phrases sur les gens qui ne sont rien, les chômeurs qui n’ont qu’à traverser la rue, etc. ont donné le ton général. Lallement et Castaner, Aurore Bergé et Amélie de Montchalin, Élisabeth Borne qui les a dépassées (les bornes) en niant la nécessité pour les éboueurs d’avoir des masques, cette députée LREM, médecin de son état, qui affirme que gouvernement a volontairement menti sur les masques pour mieux obliger les Français à se laver les mains : la galerie des monstres n’en finit pas.
Trransformations sociales du mode de production capitaliste
Il serait absurde de penser qu’un hasard malencontreux a permis à cette assemblée de prendre le pouvoir. Contrairement à l’idée que 99 % des citoyens s’opposeraient à 1 % de salopards, il faut admettre que la stratification sociale, les modes de formation et l’évolution technologique ont produit ces gens.
La France, c’est bien connu maintenant et nous le vérifions cruellement ces jours-ci, est un pays largement désindustrialisé — à la différence de nos voisins allemands et italiens (on oublie que la deuxième puissance industrielle de l’UE n’est pas la France, mais l’Italie). La désindustrialisation affaiblit le poids des élites scientifiques et techniques. À l’époque des Trente Glorieuses, l’appareil d’État était dominé par les « grands corps » issus des prestigieuses écoles d’ingénieurs (Polytechnique, Mines, Ponts et Chaussées). Ces gens n’étaient forcément des modèles d’humanisme ni d’humanité, mais au moins on peut présumer qu’ils savaient de quoi ils parlaient. En outre, leur existence sociale dépendait de l’existence d’une industrie forte et de la pérennité des orientations stratégiques de l’État. L’orientation vers les services et le commerce au détriment de l’industrie date de Giscard d’Estaing, grand européiste. Elle sera poursuivie par Mitterrand, en dépit de velléités contraires entre 1981 et 1983 et par tous les gouvernements successifs depuis. Macron n’est que l’aboutissement d’un héritage particulièrement lourd.
La délocalisation massive de la production vers les pays à bas coûts de main-d’œuvre se projette dans l’ensemble du corps social. Les ouvriers et les techniciens de l’industrie ont vu leurs effectifs fondre. Des pans entiers de l’industrie (textile, sidérurgie, électroménager) ont quasiment disparu. Les automobiles « françaises sont massivement fabriquées en dehors de nos frontières, notamment pour les petites citadines et gammes moyennes sur lesquelles la marge de profit est plus faible quand elles restent fabriquées en France. Est apparue une nouvelle classe moyenne supérieure de managers, commerciaux, communicants, DRH, etc. dont les compétences techniques et scientifiques sont nettement moindres, mais dont l’arrogance surpasse bien vite les pires des anciens élèves de l’X. Cette classe moyenne supérieure mène une vie aisée. Ses enfants trustent les bonnes écoles. Elle parle systématiquement une langue qui mélange des restes de français avec le globish. Elle comporte plusieurs millions d’individus. Certains sont directement des profiteurs de ce nouveau système et beaucoup d’autres sont seulement des aspirants, mais qui veulent y croire parce qu’ils pensent qu’ils le valent bien. Cette classe supérieure (entre la moyenne supérieure et la vraiment supérieure) est généralement “progressiste” : elle aime le “high tech”, les voyages, la communication et ne souhaite pas trop s’encombrer de restrictions. Elle est aussi souvent sympathisante de la cause animale, et elle est favorable au multiculturalisme avec d’autant plus de ferveur qu’elle vit dans ses propres quartiers, notamment les centres-villes “gentrifiés”. Point commun : la haine des “gilets jaunes”, ces ploucs qui fument et roulent au gazole, comme l’avait dit un certain ancien ministre, le sieur Benjamin Grivaux, disparu prématurément de la scène politique pour avoir voulu faire concurrence à Rocco Siffredi…
Des sociologues comme Christophe Guilluy ou des politologues comme Jérôme Sainte-Marie ont commencé d’analyser ces transformations sociales, mais c’est un travail qu’il faudrait poursuivre afin d’en comprendre toutes les implications.
L’éducation nouvelle et la fin de la culture générale
La culture générale a toujours eu pour finalité la formation intellectuelle des classes dominantes. De Gaulle le disait clairement : “La véritable école du commandement est la culture générale. Par elle, la pensée est mise à même de s’exercer avec ordre, de discerner dans les choses l’essentiel de l’accessoire (…) de s’élever à ce degré où les ensembles apparaissent sans préjudice des nuances. Pas un illustre capitaine qui n’eût le goût et le sentiment du patrimoine et de l’esprit humain. Au fond des victoires d’Alexandre, on retrouve toujours Aristote.” Tout est dit ! C’est pour cette raison que le mouvement ouvrier traditionnel a toujours revendiqué pour les prolétaires l’accès à cette “école du commandement”. Dans les écoles de formation des partis “marxistes” on faisait lire Marx et Engels, mais aussi Balzac et Hugo. On y vénérait l’histoire autant que la poésie.
À partir du moment où le gouvernement cède la place à la gouvernance, où la communication envahit tout le champ public autant que privé — ce qui commence au début du XXe siècle — la culture générale authentique n’est plus d’aucune utilité. Symbolique : la suppression de l’épreuve de culture générale à l’entrée de Sciences Po Paris — une école “prestigieuse” qui depuis longtemps n’était le plus souvent que “science pipeau”. La politique n’a plus besoin de culture, comme la direction de l’industrie n’a plus besoin d’ingénieurs. Une classe dirigeante cultivée peut être aussi cruelle et cynique qu’une classe dirigeante inculte — si la culture avait un rapport quelconque avec le bien, on le saurait. Mais une classe dirigeante inculte n’a aucun sens des perspectives d’avenir, y compris de son propre avenir. L’enseignement des vertus ayant complètement disparu, il ne peut plus en émerger quelque grand homme, quelque visionnaire.
Toutes les “réformes” de l’école depuis 1968 ont eu comme principale finalité l’abaissement du contenu des disciplines enseignées, entraînant l’indifférence croissante à l’idée de vérité objective. Tout bon communicant le sait : la vérité n’existe pas, elle n’est que ce que l’on parvient à faire croire. La pédagogie n’est rien d’autre qu’une technique de persuasion. L’idée n’est pas neuve. Elle est propre au système totalitaire, ainsi que l’a bien montré Hannah Arendt — on peut lire avec profit son livre sur Du mensonge à la violence. La fin de la culture générale implique également la fin du rapport au passé. Ce qui est inscrit d’une manière ou d’une autre dans l’idéologie du “progressisme” s’impose avec d’autant plus de perfidie qu’on multiplie les commémorations qui n’ont pas d’autre fin que de réécrire le passé, comme le fait Winston dans 1984.
L’élite gouvernante réunie derrière la figure de Macron — on a maintes fois raconté comment Macron a été choisi par l’élite tant étatique (inspection des finances) que capitaliste — est à la fois inculte (il suffit d’avoir entendu Macron essayer de s’élever spirituellement pour comprendre pourquoi il n’a pas passé l’agrégation de philosophie) et douée pour le baratin. Ils font tous immanquablement penser à un vendeur de voitures d’occasion, ce qui est un peu injuste pour les vendeurs de voitures d’occasion. Dans l’attitude de ces gens dans la crise du coronavirus il y a une part d’affolement devant une situation qui les dépasse, parce qu’il faut faire autre chose que de la communication et que les manuels de résolution de problèmes n’indiquent pas la procédure à suivre.
Ce qui atteint les classes dominantes rejaillit sur les classes dominées. On le sait depuis longtemps, ce sont souvent les intellectuels issus des classes dominantes qui ont apporté leurs armes aux dominés. Marx et Engels n’étaient pas des gros producteurs de plus-value ! Au lieu de ces mouvements des classes dominantes vers les classes populaires, nous avons aujourd’hui une “rébellion” organisée, patronnée, financée par les grands capitalistes qui y voient une opportunité commerciale autant qu’une idéologie parfaitement adéquate à leur monde, les mouvements “anti-discrimination” de tous les cinglés de la Terre, féministe 2.0, LGBTQ+++, décoloniaux de tous poils et amis des islamistes qui trustent les postes à l’Université, organisent les colloques les plus déments sur fonds publics et organisent la chasse aux sorcières contre ceux qui gardent un peu de bon sens.
La destruction du sens moral
Ce qui a disparu, ainsi que l’a très bien montré Diego Fusaro, c’est la “conscience malheureuse”, c’est-à-dire l’existence au sein de la classe dominante de la conscience de la contradiction entre les idéaux intellectuels et moraux au nom desquels elle a instauré sa domination (liberté, égalité, fraternité) et la réalité de cette domination. Tous ces ressorts de la vie sociale qui expriment la “force de la morale” [1] ont été progressivement supprimés. Entre un moralisme puritain et anxiogène et la destruction du “Surmoi” (au sens freudien), on aurait dû trouver une juste mesure. La critique du moralisme s’est transformée en critique de la morale et en apologie du “style décomplexé”. Sarkozy avait fait l’éloge de la “droite décomplexée”. Que veut dire “être décomplexé” ? C’est assez simple : mentir sans même avoir honte quand on se fait prendre la main dans le sac, n’avoir aucune compassion réelle pour les plus faibles, sauf, si c’est utile de manifester une compassion feinte qui n’entraîne aucune action, mépriser ceux qui se trouvent plus bas dans l’échelle sociale (les fameuses “gens qui ne sont rien”), et plus généralement refuser toute contrainte d’ordre moral et considérer que la réussite en termes d’argent est le seul critère qui vaille. Dans un tel monde, la corruption et les passe-droits sont normaux. Un Benalla est protégé et peut faire ce qu’il veut. Les titulaires de fonctions politiques se considèrent comme les propriétaires des lieux qu’ils occupent — voir le couple Macron à l’Élysée. Cette pourriture se propage de haut en bas — la soumission totale ou presque de la magistrature au pouvoir exécutif en est un exemple. “Le poisson pourrit par la tête” dit un proverbe.
Certes, rien de tout cela n’est vraiment neuf. Les scandales émaillent la vie de toutes les républiques. Mais ce qui est nouveau, c’est qu’il n’y a même plus de scandale. L’immoralisme a pignon sur rue et ceux qui invoquent la morale ne sont plus craints, mais traités comme des niais incurables, reliquats du “monde d’avant”. On a légalisé l’euthanasie obligatoire pendant cette crise sanitaire sans qu’il y ait le moindre débat et sans qu’on entende la moindre protestation. La vie humaine a un coût, n’est-ce pas. Et si cela passe aussi facilement, c’est que les esprits sont préparés depuis longtemps, parce que, depuis longtemps, règne le “tout est possible” — un slogan dont Hannah Arendt avait montré qu’il est un des slogans du système totalitaire.
Tous les pays d’Europe ne sont pas également atteints par ce mal qui décompose les élites françaises. Le contrôle de la morale publique reste assez fort dans les pays protestants d’Europe du Nord. Plus généralement, le parlementarisme aide à réfréner les délires des puissants, y compris dans un pays où la corruption est endémique comme l’Italie. La France qui se pensa jadis comme le phare intellectuel et politique de l’Europe, est aujourd’hui dans la pire des situations. “Ma France”, celle de Jean Ferrat peine à survivre sous le tas de fumier de la caste. Pourtant, il reste un peu d’optimisme. Emmanuel Todd dit les choses à sa manière : les classes supérieures ont bloqué l’ascenseur social, donc les meilleurs éléments des classes populaires restent “en bas” et donc logiquement la bêtise se concentre en haut ! Voilà où est l’espoir.
Denis Collin (La Sociale, 5 avril 2020)
Note :
[1] Voir La force de la morale par Denis Collin et Marie-Pierre Frondziak, à paraître à l’automne 2020 aux éditions « Rouge et Noir ».
Toujours persuadé, au fond, que ce pays reste la cinquième ou la sixième puissance mondiale et devrait se comporter comme telle, Éric Zemmour s'exclamait ce 13 avril sur CNEws, dans son émission Face à l'Info : "Si on n’est toujours pas capables de produire suffisamment de masques, cela veut vraiment dire que l’on est un pays du tiers-monde".
Cette terrible question était formulée le 14 avril, avant même l'intervention présidentielle. Fidèle admirateur des institutions de la cinquième république, un peu contrarié cependant par les faits du demi-siècle écoulé depuis 1970, notre brillant polémiste en attendait manifestement un caractère providentiel.
Or, il plaidait pour la fin du confinement la plus rapide possible. Le processus avait déjà été enclenché dans l'Europe du nord, en Autriche comme dans la majorité des Länder allemands notamment, en Tchéquie et même dans les deux pays les plus touchés, l'Italie et l'Espagne. Ainsi, la date choisie par le gouvernement de Paris pour amorcer la délivrance des Français pouvait servir d'indicateur quant au problème évoqué plus haut : sommes-nous devenus, oui ou non, un pays du tiers-monde ? Le lecteur peut, dès lors, considérer que poser cette question revient à y répondre.
Bien des traits de l'évolution de notre société, de notre bureaucratie et de la classe politique ne laissent pas de nous conforter dans le sentiment de déclassement, de déclin et, à certains égards, de déchéance. Ne nous égarons pas, cependant, dans la délectation morose du sentiment de décadence : nous ne sommes pas en présence d'une fatalité collective, mais d'un renoncement de la part de nos dirigeants.
Mais il n'est pas de pays du tiers-monde qui se respecte sans des médias servilement aux ordres du pouvoir et des affairistes de connivence.
Les noms viennent trop facilement à l'esprit pour que quiconque puisse douter de cette situation au sein comme au voisinage de l'État central parisien. Et la servilité de certains commentaires convenus a confirmé la consistance de ce qui a cessé d'être une rumeur pour devenir une certitude.
Ainsi put-on entendre, au lendemain du discours tristounet du 13 avril, l'ironique festival suivant sur BFM :
Ruth Elkrief : "Une date, un ton, l'humilité, l'empathie. Une allocution très carrée, très précise. Il y a une manière d'être beaucoup plus proche des Français. Et il y a un horizon. [... ] Il rappelle que nous sommes tous des êtres humains fragiles."
Apolline de Malherbe : "C'était un ton extrêmement humble, assez naturel. Il était assez franc, assez vrai. Ensuite, l'humilité pour lui-même et sur l'avenir. On a le sentiment du Paul Valéry qui dit que les civilisations sont mortelles. C'est une étape extrêmement importante."
Anna Cabana : "Dans la tonalité, l'espoir renaît. Dans ses précédentes allocutions, il était très tragédien. Là, il nous parle de jours heureux à venir. C'est du lyrisme souriant."
Thierry Arnaud : "On a bien compris que sa manière à lui de se réinventer, c'est vraiment de lutter contre les inégalités."
Alain Duhamel : "C'est son meilleur discours depuis le début, le plus humain. Un discours plus modeste, précis. Il y avait un ton, des réponses, un calendrier."
Bruce Toussaint : "Merci Monsieur le ministre de nous avoir réservé vos premières réactions après le discours du président de la République."
Ainsi va ce pays, ainsi va une partie du monde, celle qui s'agenouille devant l'Empire du capitalo-communisme chinois.
On félicite ce régime abominable pour son efficacité. On le remercie déjà pour son aide humanitaire. Bientôt on sollicitera ses financements. Car on accepte, jour après jour, de dépendre de l'aide de la dictature de Pékin. Nos technocrates la jugent indispensable sinon pour enterrer dignement nos morts, du moins pour combler le coût, évalué à 120 milliards d'euros, 15 milliards par jour, de la prolongation des mesures trop tardives, consécutives aux dégâts sanitaires, occasionnés par les mensonges des obligés du camarade Xi Jin-Ping.
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