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samedi, 18 septembre 2010

Renato del Ponte: Mes souvenirs de Julius Evola

Mes souvenirs de Julius Evola

Renato Del Ponte

Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

Renato del Ponte est une figure incontournable de l’évolisme européen. Fondateur du Centro studi evoliani à Gênes en 1969 et éditeur des revue Arthos, il anime aussi le Mouvement traditionaliste romain. Il nous a fait l’amitié de nous accorder l’entretien qui suit.

Question: Renato del Ponte, votre nom est étroitement lié à celui d’Evola, pourriez vous vous présenter à nos lecteurs et préciser ce qui vous a amené à Evola et quels ont été vos rapports avec lui?

Réponse: Je suis simplement une homme qui a toujours cherché à donner à sa propre vie, sur les plans existentiels, politiques et culturels, une ligne d’extrême cohérence. Il est normal que sur cette voie mon itinéraire ait rencontré celui d’Evola qui avait fait de la cohérence dans sa vie comme dans ses écrits son mot d’ordre. Naturellement pour des raisons conjoncturelles – Evola est né en 1898 et moi en 1944 – la rencontre physique n’a pu se produire que dans les dernières années de sa vie.

Les circonstances et les particularités de nos rapports sont développés en partie dans les courriers que nous avons échangé à partir de 1969 et jusqu’en 1973 (Ndlr: Édité dans le livre Julius Evola, Letttere 1955-1974, Edizioni La terra degli avi, Finale Emilia, 1996, pp. 120-155).

Il s’est toujours s’agit de rapports très cordiaux, emprunts pour ma part de la volonté de créer un réseau organisationnel qui fasse mieux connaître sa pensée en Italie et à l’étranger.

Q.: C’est vous qui avez déposé dans une crevasse du mont Rosé l’urne contenant les cendres d’Evola. Pourriez vous nous dire dans quelles circonstances ?

R.: C’est effectivement moi et d’autres amis fidèles qui avons assuré le transport et le dépôt des cendres d’Evola dans une crevasse du Mont Rosé à 4.200 mètres d’altitude, à la fin d’août 1974. Pour vous dire la vérité, je n’étais pas l’exécuteur testamentaire des dernières volontés d’Evola, mais je lui avais promis ainsi qu’à notre ami commun Pierre Pascal, que je serais vigilant à ce que les volontés concernant sa sépulture soient correctement exécutées.

Comme le craignait Evola, il y eut de graves et multiples négligences qui m’obligèrent a intervenir et a procéder à l’inhumation avec l’aide d’Eugène David qui était le guide alpin d’Evola lorsqu’il fit ses ascensions du Mont Rosé en 1930. Il m’est impossible de raconter toutes les péripéties, certaines particulièrement romanesques, mais vous pouvez vous reporter à l’ouvrage collectif Julius Evola: le visionnaire foudroyé (Copernic, Paris, 1979) ou certaines sont relatées.

Q.: Vous animez le Mouvement traditionaliste romain. Qu’est-ce ?

R.: Le Movimento tradizionalista romano est une structure essentielle­ment culturelle et spirituelle qui se propose de mieux faire connaître les caractéristiques de la Tradition romaine, laquelle n’est pas une réalité historique définitivement dépassée, mais une entité spirituelle immortel­le capable d’offrir encore aujourd’hui un modèle opératif existentiel et une orientation religieuse basée sur ce que nous définissons comme la «voie romaine des Dieux». Dans ce but, le mouvement agit sur un plan interne et communautaire, très discret, voué à la pratique de la pietas, et sur un plan externe voué à faire connaître la thématique traditionnelle de la romanité au travers de manifestes, de livres – par exemple ma Religione dei Romani (Rusconi, Milano, 1992) qui a obtenu un important prix littéraire – et de revues. Pour le reste des particularités vous devez vous référer à mon intervention faites à Paris en février dernier au colloque de L’originel sur le paganisme et qui sera probablement publiée en français dans la revue Antaios.

Q.: Pour certains, la période du groupe Ur est la plus intéressante d’Evola. Il nous semble qu’elle mélangea politique para-fasciste, occultisme et art moderne dans un étonnant et fascinant cocktail. Est-ce exact? Comment analyser cette phase de la vie d’Evola?

R.: Je ne peux pas parler de manière brève du groupe d’Ur et de ses activités. Je vous renvoie à mon livre Evola e il magico Gruppo di Ur (Sear Edizioni, Borzano, 1994).

Je me limiterai à dire gué c’est la période la plus engagée de la vie d’Evola.

Cela parce que ce fut la période où certains courants ésotériques, qui pour une bonne part se revendiquaient de la tradition romaine, avaient quelques espérances concrètes d’influencer le gouvernement de l’Italie.

Mais aussi cette phase de la vie d’Evola peut être interpétée comme une tentative, caractéristique de toute son existence, de «procéder autre­ment», de dépasser les limites des forces qui conditionnent l’existence, pour créer quelque chose de nouveau, ou de meilleur, de revenir à des conditions plus «normales» d’une vie selon la Tradition.

Q.: Comment concilier évolisme et engagement politique?

R.: Si vous me parlez de possibles actions politiques d’orientation une fâché plus limitée, réservée à une minorité qui est de tenter d’influencer certains groupes ou certaines ambiances, mais au niveau individuel et sans espérance concrète de publication de revues et d’édition.

Nous allons bientôt recommencer à publier Arthos à un rythme trimestriel. Il est naturel que l’initiative italienne soit accompagnée par la naissance de groupes et de mouvements analogues en Europe et surtout en France où l’œuvre d’Evola est bien connue. L’année a venir verra sûrement la réalisation d’initiatives concrètes dont vous serez bien sur informés puisque nous comptons naturellement sur votre active contri­bution.

Note
Article tiré de «Lutte du Peuple», numéro 32, 1996.

lundi, 13 septembre 2010

Entretien avec Jean Haudry

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

 

Entretien avec Jean Haudry

 

propos recueillis par Xavier Cheneseau

 

1- Professeur à l'Université Lyon III, vous dirigez «l'Institut d'Etudes Indo-euro­péennes». Pouvez-vous nous dire en quelques mots qui étaient les Indo-Euro­péens?

 

jean-haudry.pngBien que je ne dirige plus l'Institut (mon ami Allard m'a remplacé dans cette fonc­tion), je continue à me consacrer aux études indo-européennes. Les Indo-Euro­péens ne peuvent se définir, dans un pre­mier temps, que comme «locuteurs de l'in­do-européen reconstruit», comme des in­do-européanophones comme il existe des «francophones», etc. C'est seulement dans un deuxième temps, à partir de la recons­truction (fondée en grande partie sur celle de la langue) de la civilisation matérielle et de la culture, en particulier de la «tra­dition indo-européenne» qu'on peut parler de «peuple indo-européen», et chercher à le situer dans l'espace et dans le temps, c'est-à-dire par rapport aux sites archéo­logiques actuellement connus.

 

2- Peut-on parler d'unité des Indo-Euro­péens? A quand remonte celle-ci? Comment s'est formée la communauté primitive?

 

On peut sans aucun doute parler d'une «période commune» de l'Indo-Européen et donc de ses locuteurs les Indo-Européens; sinon, la notion même d'indo-européen, lan­gue commune dont sont issues les lan­gues indo-européennes par un pro­ces­sus de dialectalisation, serait vide de sens. Cette période commune se situe au Néo­lithique et se termine avec ce que cer­tains préhistoriens nomment «l'âge du cuivre»: le nom du «cuivre» (*áyes-)  figure en effet dans le vocabulaire reconstruit, tandis qu'on n'y trouve ni le nom du bronze, ni celui du fer. La localisation la plus pro­bable du dernier habitat commun est le site dit des «Kourganes», en Ukraine, aux Vième et IVième millénaires. Quant à la formation de l'ethnie, je persiste à croire, après E. Krause, Tilak, et quelques au­tres, qu'elle s'est effectuée dans les ré­gions circumpolaires arctiques. Mais, en l'absence de confirmation archéologique, ce n'est là qu'une hypothèse, et qui ne fait pas, tant s'en faut, l'unanimité.

 

3- Existe-t-il un type physique spécifique­ment indo-européen?

 

La réponse à cette question ne peut être que «statistique»: aucune langue n'est liée par nature et définitivement à une ethnie ou à une race. Mais de même que la grande majorité des locuteurs des langues bantu sont de race noire, et que la grande majorité des locuteurs du japonais sont de race jaune, on peut affirmer sans ris­quer de se tromper que la grande majo­rité des locuteurs de l'indo-européen étaient de race blanche. On peut même préciser, en se fondant sur la tradition indo-européenne, qui associe constam­ment le teint clair, les cheveux blonds et la haute stature à son idéal social et mo­ral, que la couche supérieure de la po­pu­lation, au moins, présentait ces trois ca­ractères. Les documents figurés de l'é­poque historique confirment cette hypo­thèse; mais l'archéologie préhistorique, sans l'infirmer positivement, ne la con­firme pas non plus: il semble bien que les migrations indo-européennes n'aient pas été des mouvements massifs de popula­tions. Par là s'explique l'apparente contra­diction entre les deux points de vue: un petit groupe peut véhiculer et trans­met­tre l'essentiel d'une tradition, mais il ne laisse guère de traces anthropologiques de sa présence sur le terrain.

 

4- Quelle était la vision du monde des Indo-Européens?

 

Le formulaire reconstruit (plusieurs cen­taines de formules) exprime manifeste­ment les idéaux et les valeurs d'une «so­ciété héroïque», un type d'organisation so­ciale pré-féodale bien connu, qui se pro­longe à l'âge du bronze et même au début de l'âge du fer. On peut supposer qu'elle était déjà constituée en ce qui concerne les Indo-Européens, au Néolithique final (à l'«âge du cuivre»). Dans cette «société héroïque», la gloire et la honte sont les deux forces principales de pression (et de répression) sociales. Il s'agit de ce que les ethnologues nomment shame culture,  par opposition aux guilt cultures, dans les­quelles ce rôle revient au sens du péché. Gloire et honte affectent à la fois l'in­dividu (qui, par la «gloire impérissable» atteint la forme supérieure de la survie) et sa lignée toute entière, ascendants et descendants. D'où une inlassable volonté de conquête et de dépassement de soi, et des autres.

 

5- Que signifie le concept «d'idéologie tri­partite»? Avait-il un objectif précis?

 

On nomme «idéologie tripartite» la ré­par­tition de l'ensemble des activités cosmi­ques, divines et humaines en trois sec­teurs, les «trois fonctions» de souverai­neté magico-religieuse, de force guerrière et de production et reproduction, mise en lu­mière par Georges Dumézil. On ne sau­rait parler d'un «objectif» quelconque à propos de cette tripartition: il s'agit en ef­fet d'une part (essentielle) de la tra­di­tion indo-européenne, et non d'une cons­truc­tion artificielle, comme celles des «idéo­logues». C'est pourquoi le terme d'«i­déologie» ne me paraît pas très heureux; il conduit à cette confusion, quand on n'a pas présente à l'esprit la définition qu'en a donné Dumézil.

 

6- «La révolution française» semble avoir fait disparaître la conception trifonction­nelle de la société, êtes-vous d'accord avec cette vision des choses?

 

Est-il sûr que la conception trifonction­nelle était vivante dans la société d'An­cien Régime finissant? J'en doute. L'a­bolition des trois ordres, qui repré­sen­taient effectivement une application du mo­dèle trifonctionnel n'a fait qu'entériner un changement de mentalité et un chan­gement dans les réalités sociales. La no­blesse avait depuis longtemps cessé d'être une caste guerrière et privée de ses der­niers pouvoirs politiques par Louis XIV, il ne lui restait que des «privilèges» dont la justification sociale n'était pas évidente. On peut à l'inverse estimer que la Révo­lution a donné naissance à une nouvelle caste guerrière sur laquelle Napoléon Bo­naparte a tenté d'édifier un nouvel ordre social.

 

7- Est-il possible d'adapter une nouvelle tripartition à nos sociétés post-indus­trielles?

Je ne crois pas que la tripartition fonc­tionnelle représente un idéal éternel et intangible, tel le dharma  hindou. La fonc­tion guerrière a perdu aujourd'hui une grande part de sa spécificité, écartelée entre la science et la technique d'une part, l'économie de l'autre. Quant à la fonc­tion magico-religieuse, on peut se de­mander qui en est aujourd'hui le repré­sentant. Elle se répartit sur un certain nombre d'organisations (et une multitude d'individus) dont on ne peut attendre une régénération de nos sociétés, bien au con­traire. Mais nombre de sociétés indo-eu­ropéennes anciennes n'étaient pas orga­nisées sur le modèle trifonctionnel. Seuls, les Indo-Iraniens et les Celtes, en dé­ve­loppant une caste sacerdotale, ont réalisé à date ancienne une société trifonction­nelle. Or, ce ne sont pas les peuples qui ont le mieux réussi dans le domaine po­litique.

 

8- Est-ce à dire que cette nouvelle triparti­tion puisse être un élément de renouveau de nos civilisations?

 

Un renouveau de nos civilisations (je di­rais plutôt: une régénération de nos peu­ples) ne saurait venir d'un retour à un type d'organisation politique, économique et social des périodes médiévales ou pro­to­historiques. Je sais bien qu'il existe dans nos sociétés des gens qui ont pour idéal l'«âge d'or» de la horde primitive vivant de cueillette. L'archaïsme et la régression sont des phénomènes typiques des pé­rio­des de décadence; ils sont la contre-partie sociale de l'infantilisme sénile. Le renou­veau ne peut venir que d'un retour aux for­ces vives de la tradition, c'est-à-dire aux idéaux et aux valeurs qui ont fait le succès historique des peuples indo-euro­péens, qui a abouti à l'émergence du mon­de civilisé, industrialisé et développé. Il s'agit d'abord de la volonté d'être, dans le monde et dans la durée: d'aimer la vie, de la transmettre, de lutter contre toutes les formes de mort, de décadence, de pourri­ture. Il s'agit aussi de la volonté d'être soi, de maintenir la différence capitale en­tre le sien et l'étranger. Ces deux idéaux ne sont d'ailleurs pas spécifiques: ils sont communs à tout groupe humain qui sou­haite exister comme tel et avoir un ave­nir. Nos ancêtres indo-européens ont vou­lu davantage: on constate dans leur tra­dition une volonté d'être «plus que soi», de se dépasser, de conquérir, et pas seule­ment des territoires, d'accéder à cette sur­humanité que certains d'entre eux —les Grecs— ont nommés «héroïque» et que tous, même sans la nommer, ont connue. C'est dans cette perspective que le modèle trifonctionnel peut être un élément de re­nouveau: comme échelle de valeurs, et non comme principe d'organisation socia­le.

Professeur Haudry, nous vous remercions de nous avoir accordé cet entretien.

dimanche, 04 juillet 2010

Le élites di Washington sono molto préoccupate per i nuovi blocchi anti-egemonici

Le élites di Whashington sono molto preoccupate per i nuovi blocchi anti-egemonici

di Pepe Escobar - Salvador Lopez Arnal

Fonte: Come Don Chisciotte [scheda fonte]





Lentamente ma energicamente il popolo del Sud si organizza e si prepara politicamente non solo per frenare l'imperialismo militarista e bellicista degli Stati Uniti ma anche per mettere fine all'ipocrisia dell'abuso di dominazione neo-coloniale da parte delle potenze industriali europee, con le loro addormentate società civili. Frenare le ingiustizie a cui sono sottomessi numerosi popoli in pieno ventunesimo secolo, rispetto e mutua reciprocità sono i nuovi dogmi. In questa intervista, il nostro collega Pepe Escobar analizza il modo in cui alcuni paesi emergenti, come il Brasile, la Turchia o l'India, stanno organizzando una nuova era di relazioni armoniche e rispettose fra i popoli.

Domanda: in un recente articolo pubblicato da Asia Times Online [1], tradotto da Sinfo Fernández di Rebelión, lei parlava della dominatrice. Mi permetta di complimentarmi per la sua trovata terminologica. Perché lei crede che la Segreteria di Stato statunitense (Hillary Clinton) si adatti bene a questo termine? Non sono migliorate le forme di politica estera degli Stati Uniti nell'amministrazione Obama?

Pepe Escobar: Hillary è una dominatrice nel senso che è capace di soggiogare tutto il Consiglio di Sicurezza dell'ONU invece di ammettere il fallimento della sua diplomazia. Forse lo ha imparato con Bill... O forse sono tutti masochisti.

No, non è così. La ragione principale è che la Cina e la Russia si lasciarono dominare. Cina e Russia decisero che era meglio lasciare la stridula Hillary dominare il palco per qualche giorno, e lavorare in silenzio per raggiungere il loro obiettivo: porre sanzioni con il massimo sentore “light” su Teherán. Per ciò che riguarda l'Iran, gli Stati Uniti sono ciechi, lo vedono tutto rosso. Lo stesso può dirsi in relazione a Israele, lo vedono tutto bianco celestiale.

Domanda: il nodo centrale del suo recente articolo – «Irán, Sun Tzu y la dominatrix» [2] [
Traduzione Comedonchisciotte N.d.r] – è l'accordo fra le diplomazie di Brasile, Turchia e Iran sul tema dello sviluppo nucleare di quest'ultimo Paese. In cosa consiste questo accordo?

Pepe Escobar: è essenzialmente lo stesso accordo proposto dagli stessi statunitensi nell'ottobre del 2009. La differenza sta nel fatto che, secondo la proposta del 2009, l'arricchimento dell'uranio si realizzava in Francia e in Russia e ora, attraverso l'accordo, si effettuerà in Turchia.

La differenza fondamentale è nel metodo. Turchia e Brasile si sono comportate con diplomazia, senza polemiche e rispettando le ragioni iraniane. Altro dettaglio fondamentale: tutto quello che hanno fatto era già stato discusso in dettaglio a Washington. Quando è stato presentato un risultato concreto, quando è stato raggiunto l'accordo con l'Iran, Washington, mi permetta la metafora bellica, ha sparato loro un colpo nelle costole.


Domanda: non è una novità nella diplomazia internazionale che Brasile e Turchia, due paesi non contrapposti agli Stati Uniti, si mettano in gioco in questa faccenda? Perché lei crede che abbiano scommesso su questa strategia autonoma? Cosa vincerebbero? L'Iran non è forse lontano, molto lontano, dal Brasile?

Pepe Escobar: ogni Paese ha i suoi motivi per espandere la propria mappa geopolitica. La Turchia si vuole proiettare come attore eccezionale, che conta davvero in Medio Oriente. Ne consegue una politica diciamo post-Ottomana, organizzata dal Ministro delle Relazioni Estere, il professor Ahmet Davutoglu.

Anche il Brasile, con una politica molto intelligente di Lula e del suo ministro Celso Amorim, vuole posizionarsi come mediatore onesto nel Medio Oriente. Il Brasile fa parte della BRIC (Brasile, Russia, India, Cina) che secondo me è attualmente il vero contro-potere all'egemonia unilaterale degli Stati Uniti. Se circa due settimane fa ha discusso formalmente a Brasilia la sua adesione, la Turchia sarebbe parte del gruppo, il quale sarebbe quindi chiamato BRICT. Questa è la nuova realtà nella geopolitica globale. E, senza dubbio, le vecchie élites di Washington sono diventate livide.

Domanda: non sembra, come lei stesso segnalava, che l'accordo abbia suscitato entusiasmo nella Segreteria di Stato né nei governi europei. Perché? Vorrebbero che la strada diplomatica fallisca per proseguire con le loro sanzioni e condurci ad uno scenario bellico? Se è così, cosa guadagnerebbero con esso? Non ci sarebbero troppi fronti aperti allo stesso tempo?

Pepe Escobar: dalla prospettiva della politica interna degli Stati Uniti, quello che interessa a Washington è cambiare il regime. Ci sono almeno tre tendenze in lizza. I “realisti” e la sinistra del Partito Democratico che sono a favore del dialogo; l'ala del Pentagono e dei servizi di intelligence vogliono almeno delle sanzioni, e i repubblicani, i neocolonialisti, le lobby di Israele e la sezione Full Spectrum Dominance del Pentagono vogliono un cambio di regime sia come sia, inclusa la strada militare, se fosse necessario.

I governi europei sono cagnolini da compagnia di Bush o di Obama. Non servono a niente. Ci sono voci autorevoli in alcune capitali europee e a Bruxelles. Sanno che l'Europa ha bisogno del petrolio e del gas iraniano per non essere ostaggi di Gazprom. Ma sono una minoranza.

Domanda: lei crede che il Governo iraniano aspiri, oltre le sue dichiarazioni, a possedere un armamento nucleare? Per farsi rispettare? Per piegare Israele? Per attaccarla? Pakistan nucleare, India nucleare, Israele nucleare, Iran nucleare. Tutta questa zona non diventerebbe un'autentica polveriera?

Pepe Escobar: sono stato molte volte in Iran e mi sono convinto di quanto segue: il regime iraniano può causare rabbia ma non è un sistema suicida. Il leader supremo, in diverse occasioni, ha annunciato una fatwa affermando che l'arma nucleare è “non-islamica”. Le Guardie Rivoluzionarie supervisionano il programma nucleare iraniano, senza dubbio, ma sanno molto bene che le ispezioni e il controllo della IAEA, Agenzia Internazionale dell'Energia Atomica, sono molto seri. Se punteranno a sviluppare una bomba atomica rudimentale, saranno scoperti e denunciati immediatamente.

Di fatto, l'Iran non ha bisogno di alcuna bomba atomica come elemento di dissuasione. Gli basta un arsenale militare high-tech, di tecnologia sempre più avanzata. L'unica soluzione giusta sarebbe una denuclearizzazione totale del Medio Oriente che Israele, ovviamente, con i suoi più di duecento missili nucleari, non accetterà e mai rispetterà.

Domanda: che ruolo gioca la Russia in questa situazione? Lei ricordava che l'impianto nucleare di Bushehr fu costruito dalla Russia, che lì si stanno si stanno svolgendo le ultime prove e che probabilmente si inaugurerà quest'estate.

Pepe Escobar: Bushehr deve essere inaugurata in agosto, dopo molti ritardi. Per la Russia l'Iran è un cliente privilegiato in termini nucleari e degli armamenti. Ai russi interessa che l'Iran continui in questo modo, che la situazione non cambi. Non vogliono l'Iran come potere nucleare militare. È una relazione con molti nodi, ma soprattutto commerciale.

Domanda: nel suo articolo lei cita il vecchio generale e stratega Sun Tzu. Ricorda un aforisma del filosofo cinese: “lascia che il tuo nemico commetta i suoi errori e non correggerli”. Lei afferma che Cina e Russia, maestri strateghi quali sono, stanno applicando questa massima rispetto agli Stati Uniti. Che errori stanno commettendo gli USA? Sono tanto goffi i suoi strateghi? Non hanno per caso letto Sun Tzu?

Pepe Escobar: tutti gli statunitensi ben educati nelle università hanno letto Sun Tzu. Altra cosa è saperlo applicare. Cina e Russia, in una strategia comune ai BRIC, si accordarono per lasciare gli Stati Uniti con l'illusione di condurre le sanzioni, nello stesso tempo in cui lavorarono e lavorano per minarle al massimo e approvare in ultima istanza un pacchetto di sanzioni molto “light”. Russia e Cina vogliono stabilità in Iran con il beneficio delle loro importanti relazioni commerciali. Nel caso della Cina, tenga in conto che l'Iran è un grande fornitore di gas e questo riguarda la massima sicurezza nazionale.

Domanda: siamo, lei riassume, in una situazione in cui sul tavolo dell'Agenzia Internazionale dell'Energia Atomica c'è un accordo di interscambio approvato dall'Iran, mentre nelle Nazioni Unite è in marcia un'offensiva di sanzioni contro l'Iran. Lei si domanda di chi si dovrebbe fidare la “comunità internazionale”. Io le domando: di chi si dovrebbe fidare la “comunità internazionale”?

Pepe Escobar: la vera “comunità internazionale”, i BRIC, i paesi del G-20, le 118 nazioni in sviluppo del Movimento dei non-allineati, insomma, tutto il mondo in sviluppo, sta con Brasile, Turchia e la loro diplomazia di non-opposizione. Solo gli Stati Uniti vogliono sanzioni e i suoi patetici, ideologici cani da compagnia europei.

Domanda: lei afferma anche che l'architettura della sicurezza globale, “vigilata da un pugno di temibili guardiani occidentali auto-nominati”, è in coma. L'Occidente “atlantista” affonda come il Titanic. Non esagera? Non confonde i suoi desideri con la realtà? Non c'è il pericolo reale che l'affondamento distrugga quasi tutto prima di affondare definitivamente?

Pepe Escobar: io ero già di fronte, con l'orrore di tutto il mondo, come per ora poter almeno credere nella possibilità di un nuovo ordine, delineato soprattutto dal G-20 e dai paesi del BRICT. Inclusa la T finale.

Il futuro economico è dell'Asia e il futuro politico è dell'Asia e delle grandi nazioni in via di sviluppo. È chiaro che le élites atlantiste rinunciano al loro potere solo dopo aver visto i propri cadaveri distesi per terra. Il Pentagono continuerà con la sua dottrina di guerra infinita. Però prima o poi non avrà come pagarla. Non nego che sia una possibilità che gli USA, in un futuro prossimo, sotto l'amministrazione di un pazzo repubblicano di estrema destra, entri in un periodo di guerra allucinata, sconvolta. Se così fosse, sarà senza dubbio la sua caduta, la caduta del nuovo Impero Romano.

Domanda: quale forte lobby degli USA è a favore della guerra infinita a cui si è appena riferito? Chi sostenta e finanzia questa lobby?

Pepe Escobar: La guerra infinita è la logica della Full Spectrum Dominance, la dottrina ufficiale del Pentagono, che include “l’encirclement” di Cina e Russia, la convinzione che questi paesi non possano emergere come ficcanaso e competitori degli USA, e inoltre fare tutti gli sforzi per controllare o almeno vigilare Eurasia. È la dottrina del Dr. Strangelove [3], però è anche la mentalità dei dirigenti militari statunitensi e della maggioranza del suo establishment. Il complesso industrial-militare non ha bisogno dell'economia civile per sostentarsi. Ha in elenco un'enorme quantità di politici e tutte le grandi corporazioni.

Domanda: lei parla della dottrina del Dr. Zbigniew “conquisteremo l'Eurasia”. Un'altra trovata, mi permetta un altro complimento. Il vecchio assessore alla sicurezza nazionale, lei segnala, sottolineò che “per la prima volta in tutta la storia umana, l'umanità si è svegliata politicamente -questa è una nuova e totale realtà- , una cosa mai successa prima”. Secondo lei è così? Che parte dell'umanità addormentata si è svegliata?

Pepe Escobar: per le élites statunitensi il dato essenziale è che Asia, America Latina e Africa stanno intervenendo politicamente nel mondo in un modo impensabile durante il colonialismo e che la decolonizzazione è, per loro, un incubo senza fine. Come dominare chi ora sa come comportarsi per non essere dominato di nuovo? È una domanda basilare.

Domanda: Washington, profondamente unilaterale, lei segnala, non esita a puntare l'indice fino al più vicino dei suoi amici. Perché? Sono per caso l'incarnazione dell'Asse del Male? Può essere raggiunta l'egemonia con procedimenti così poco gentili? Fino a quando?

Pepe Escobar: Non si può sottovalutare la crisi statunitense. È totale: economica, morale, culturale e politica. Ed anche militare perché furono distrutti in Iraq e sono al limite di un’umiliante sconfitta totale in Afganistan. Il nuovo secolo americano morì già nel 2001. L'11 settembre, oggi, si può interpretare come un messaggio apocalittico di fine.

Domanda: ma qual è uno degli attori principali della politica statunitense nel Vicino Oriente? Israele è addormentato? Quali sono i piani dei bulli di Gaza? [4]

Pepe Escobar: Israele si è convertito in quello che io chiamo “briccone” [birbante, o stato villano]. Sparta paranoica, etno-razzista, che ha la responsabilità della macchia profonda dell'apartheid. Israele sarà ogni volta più isolata dal mondo reale, protetta solo dagli USA, di cui è uno Stato-cliente. E il suo incubo, come se si trattasse di un film horror hollywoodiano, sarà il ritorno di ciò che è stato represso: la storia gli farà pagare per tutto l'orrore che ha perpetrato e continua a perpetrare contro i palestinesi.

Domanda: che opinione ha dell'azione di Israele dello scorso 30 maggio? Che senso può avere un attacco a dei pacifisti solidali con Gaza?

Pepe Escobar: fa parte della stessa logica di sempre. Abbiamo sempre ragione; quelli che sono contro le nostre politiche sono terroristi o antisemiti. Ora Israele è nella fase di difendere l'indifendibile: il blocco di Gaza.

È chiaro che ora tutto il mondo lo sa e non lo potrà più ingannare con le sue bugie, la Palestina sarà l'eterno Vietnam di Israele. Ma dubito, come nel caso degli Stati Uniti, che questa volta siano capaci di imparare la lezione.

Pepe Escobar [foto accanto al titolo N.d.r.], analista geopolitico. È autore di «Globalistan: How the Gbalizad World is Dissolving into Liquid War» (Nimble Books, 2007) e di «Red Zone Blues: a shapshot of Baghdad during the surge». Recentemente ha pubblicato «Obama does Globalistan» (Nimble Books, 2009), un libro che merita di essere tradotto (in spagnolo) con urgenza.

NOTE

[1] Fonte:
http://www.atimes.com/atimes/Middle...

[2]
http://www.rebelion.org/noticia.php..., 27 maggio 2010.

[3] Il film di S. Kubrick il cui titolo in italiano è “il Dottor Stranamore”, uno dei film preferiti di Manuel Sacristán.

[4] La domanda è stata formulata prima dell'attacco alla Flotilla della libertà e solidarietà. L'intervista termina con una domanda sull'attacco. “La Palestina sarà l'eterno Vietnam di Israele”, afferma Escobar.

Titolo originale: ""LA GUERRA INFINITA ES LA LÓGICA DE LA DOCTRINA OFICIAL DEL PENTÁGONO”"

Fonte: www.rebelion.org
Link: http://www.rebelion.org/noticia.php?id=107156
04.05.2010

Traduzione per www.comedonchisciotte.org a cura di GABRIELLA REHO
Tante altre notizie su www.ariannaeditrice.it


[Truppe statunitensi sparse per il mondo nel tentativo di ottenere una dominazione militare, oltre che economica. Il caso iracheno è esemplare. Si tratta di un’invasione per il petrolio, con il pretesto di difendersi da possibili armi nucleari che non sono mai state trovate.]

mardi, 18 mai 2010

Entretien avec Maurizio Blondet (2004)

11s-22f14.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 2004

Entretien avec Maurizio BLONDET


http://www.comedonchisciotte.luogocomune.net/

Le journaliste et écrivain Maurizio Blondet nous a accordé un entretien téléphonique pour qu’il passe en direct sur une radio libre de Vénétie, la Radio Gamma 5 (94,00 MHz). Nous publions ici les extraits les plus significatifs de cet entretien.

 

Propos recueillis par Marcello PAMIO
 
Q: On parle de plus en plus de technologies capables d’intercepter les télécopies, les conversations sur portable et les courriers électroniques. Il existe actuellement des satellites militaires qui sont à même de photographier tout et, devant cet extraordinaire déploiement de technologies, l’ennemi public numéro un dans le monde reste introuvable. Car où est Oussama Ben Laden, qu’a-t-il fait depuis le 11 septembre, comment mène-t-il son existence, ponctuée de proclamations sur vidéo?

 

MB: C’est plus qu’évidemment maintenant : Ben Laden a été un agent de la CIA, au moins jusqu’à la fin de l’année 1999. On le soupçonne d’avoir fait assassiner, sur ordre de la CIA, en août 2001, environ un mois avant le 11 septembre, le général afghan Massoud, un homme capable d’unifier l’Afghanistan. Il est probable que Ben Laden travaille toujours pour les services secrets américains aujourd’hui, en faisant semblant d’être un ennemi des Etats-Unis.

Aujourd’hui, Ben Laden n’envoie plus que des vidéocassettes et n’aurait plus donné un seul coup de téléphone cellulaire depuis deux ans, puisque toute conversation ou toute autre communication peut être contrôlée. De même que tout mouvement financier.  Les  Américains possèdent un logiciel, qui s’appelle Promis, servant à contrôler toutes les formes de mouvements financiers suspects et, a fortiori, aussi tous ceux qui ne sont pas suspects. Ils prétendent qu’ils ne l’utilisent pas, mais en réalité, puisqu’ils l’ont, je ne comprends pas très  bien pourquoi ils ne s’en serviraient pas.

Alors, me demanderez-vous, Ben Laden dirige al-Qaeda sans utiliser le moindre moyen de communication? Dans mon livre; intitulé “Oussama Ben Mossad”, j’ai formulé une hypothèse: à la fin, après une quinzaine  d’années de guerre, on verra réapparaître Ben Laden dans le rôle de Grand Calife de La Mecque, dans une Arabie Saoudite divisé en deux morceaux : la partie pétrolière et démocratique (comme l’Irak!) et l’autre partie, mecquoise, intouchable parce que lieu saint.

Aujourd’hui, ses proclamations vidéo ont pour but de maintenir vivante cette perception d’un terrorisme ubiquitaire. Il y a un livre qui explique tout cela, c’est le fameux “1984” de Georges Orwell, où l’on évoque une guerre qui n’existe pas et n’a jamais existé, mais qui maintient toute la population sous l’empire de la terreur et rend nécessaire un gouvernement autoritaire, une gestion secrète des affaires de l’Etat, etc. Il faudrait que nous le relisions tous attentivement car le monde de ce livre nous l’avions pris pour une métaphore de l’empire soviétique; aujourd’hui, à coup sûr, il est une métaphore de l’empire de Bush!

Q: Dans votre livre “11 settembre: colpo di stato in USA” [« 11  septembre : coup d’Etat aux Etats-Unis »], vous parlez d’un véritable coup d’Etat à l’intérieur même de l’appareil américain et vous apportez les preuves de ce que vous avancez. Depuis ce jour, les médias répètent à satiété que le « monde n’est plus comme avant ». Quel est donc ce « coup d’Etat » qui a tout changé ?

MB: Si quelqu’un vous avait dit en 1997 que les Etats-Unis dispooseraient de bases militaires permanentes en Afghanistan, en Azerbaïdjan, en Géorgie (dans le jardin en face de la “Maison Russie”), vous auriez traité cette personne de folle. Or, c’est en 1997 précisément que sort de presse le livre de Zbigniew Brzezinski (Conseil près la sécurité nationale, homme clef de la Commission Trilatérale et du CFR). Il avait pour titre : “Le grand échiquier”. Dans ce livre, il a dit exactement ce qui allait se passer. Par exemple, que les Américains devaient s’emparer de la zone centre-asiatique, sous influence russe, et je dis bien “russe” et non soviétique, car les Tsars l’avaient conquise et la possédaient. L’objectif de cette gigantesque manoeuvre était de soustraire cette zone-clef de la géopolitique à l’influence russe afin de réduire la Russie au statut de petite puissance asiatique.

L’Ukraine, elle, est le trait d’union entre l’Occident et l’Orient, le lieu de passage de tous les oléoducs venus d’Asie centrale. Pour cette raison, il fallait la soustraire à l’influence russe. Tout ce que Brzezinski a annoncé, c’est effectivement produit! Pour déclencher cette vaste opération de contrôle, l’Amérique avait besoin d’un prétexte, d’un événement–choc capable d’affoler et de mobiliser la population américaine. Ce prétexte, ce sera le 11 septembre 2001. Il était d’ailleurs prévu dans les documents émanant des néo-conservateurs, écrits au moins cinq années auparavant. Ces documents évoquaient la nécessité d’un nouveau Pearl Harbour... Et, effectivement, ce “Pearl Harbour” est arrivé, grâce au travail d’un agent de la CIA qui s’appelle Ben Laden !

Ce qui est incroyable, c’est que l’on vous traite de “conspirationniste”, de “complotiste”, quand vous démontrez cela. Dans mes livres, pourtant, je mentionne des faits et j’aimerais bien être contredit, si je me trompe...

Q: En novembre dernier, nous avons assisté à la victoire électorale de George Walker Bush contre son « frère-en-loge » John Kerry. On pourrait dire bien des choses sur le vote électronique en Ohio, mais je ne comprend pas pourquoi Kerry ne l’a pas emporté. Car lui aussi aurait fait le jeu des multinationales, des lobbies bellicistes et d’Israël. Quelles manigances se dissimulent-elles derrière cette présidentielle ?

MB: A mon avis, Kerry n’a même pas tenté de gagner les élections, dans la mesure où cette attitude lui a été ordonnée par la centrale qui orchestre les agissements des deux candidats-clowns (Kerry et Bush ne  sont que des figurants). Tout s’est passé comme si l’on cherchait encore à véhiculer l’idée que l’Amérique reste une démocratie. On a  demandé à Kerry de jouer le rôle du challengeur (démocratique). Mais on a vu qu’il a fait tant bien que mal une campagne électorale de trois semaines seulement, avec un message de  ce type : “Je ferai mieux les mêmes choses que Bush”. C’est-à-dire la guerre. Les Américains n’ont donc pas compris pourquoi il fallait voter pour lui!

A l’évidence, tout ce cirque électoral était télécommandé: les deux candidats font partie de la société secrète “Skull & Bones”, recrutant dans l’Université de Yale, d’où sont issus les fonctionnaires et les responsables du gouvernement secret des Etats-Unis. Tout est dès lors fiction; Poutine est lucide quand il dit qu’il préfère Bush à Kerry, parce que Bush fait les choses de manière si burtale qu’il s’aliène des sympathies partout dans le monde. Pour l’Europe, si Kerry l’avait emporté, il aurait été plus difficile de dire “non”; nous aurions dû envoyer plus de troupes en Irak et, plus tard, en Iran... Car il est clair que les ambitions américaines ne se limitent pas à l’Irak, mais s’étendent à l’Iran, à la Syrie et à l’Arabie Saoudite.

Q: Je vous ai posé cette question parce qu’à Stresa, sur les rives du Lac de Côme, en juin dernier, le « Groupe Bilderberg » s’est réuni et, me semble-t-il, il s’était prononcé en faveur de Kerry et du vice-président qu’il aurait nommé, Edwards…

MB: George Soros était en faveur de Kerry. Ce qu’il dit est parfaitement vrai. Le groupe Bilderberg est composé d’Américains et d’Européens: c’est une sorte de commission bilatérale pour formuler des politiques communes. Le Groupe Bilderberg s’inquiète dès lors des tiraillements qui existent aujourd’hui entre l’administration Bush et les Européens. Il voudrait faire ce que fait Bush, mais avec la participation de l’Europe. Celle-ci veut avoir une part du gâteau, car, en ultime instance, l’enjeu est la possession des sources de pétrole. Les Américains du Groupe Bilderberg ne veulent pas que l’Europe deviennent une sorte de satellite des Etats-Unis, car il n’est pas complètement inféodé aux néo-conservateurs, qui, eux, sont “messianiques” et ne voient pas l’utilité des alliances, estimant qu’ils bénéficient des “faveurs divines”.

Q: Il y a quelques jours, Colin Powell a dû céder la place à la « panthère noire », alias Condoleeza Rice. Je ne crois pas me tromper en disant que Powell, la « Colombe de Washington » avait l’intention de faire donner son crédit international pour mettre un petit peu la politique extrémiste de Sharon sur la  sellette. Est-ce la raison de son licenciement ? Ou bien y en a-t-il une autre ?

MB: En effet, il me semble que cela soit la raison de son limogeage. Colin Powell a accepté de jouer les figures humiliées en faisant son tour du monde, mais il aurait très bien pu devenir le héros d’une autre Amérique, qui se serait opposée à Bush; mais dans les fait, Powell a servi le régime. Certains l’appelaient l’ “Oncle Sam”. Mais maintenant l’équipe Bush, et ce qui se profile derrière elle, est sûre de gouverner encore pendant quatre ans, alors elle s’est débarrassé de Powell, parce qu’il ne servait plus à rien. C’est grave parce que ses attributions vont à Condoleeza Rice qui est la femme à tout faire de Bush. Il faut savoir que Bush est un homme qui souffre de graves problèmes psychiatriques: c’est un ancien alcoolique, un ancien cocaïnomane,  et qu’il est donc un homme que l’on peut aisément manipuler et manoeuvrer. Il n’est ni l’acteur ni le protagoniste de quoi que ce soit : il n’est qu’un figurant. Les vrais chefs de l’Amérique semblent être Dick Cheney (vice-président) et Donald Rumsfeld (chef du Pentagone). S’il y avait un homme qui aurait dû être licencié après les élections, ce devait être Rumsfeld, parce qu’il est responsable des désastres militaires en Irak... Cette situation indique un durcissement et nous verrons se dérouler des choses encore plus terribles dans les années à venir...

Q: Quel est le rôle du père George Herbert Walker Bush, maçon du 33ième degré du rite écossais ancien et accepté ?

MB: Bush-le-Père est probablement l’initiateur des événements; il n’est pas “messianiste” mais cynique. Il dirige un fond d’investissement très spécial, qui, avant le 11 septembre, achetait les actions des entreprises militaires, tant américaines qu’européennes. Ce sont ces entreprises qui gagnent le plus grâce aux guerres menées par Bush-le-Fils. C’est là un autre aspect du gigantesque conflit d’intérêts qui se déploie aujourd’hui: chaque fois que le fils fait la guerre, le père gagne de l’argent!

Q: L’Iran est aux premières loges dans la liste des « Etats-voyous ». Depuis l’an 2000, l’Iran stocke des euros plutôt que des dollars, ce qui a causé de nombreuses difficultés à l’économie américaine, pour ne pas parler de la fourniture de gaz naturel pour 100 milliards de dollars à la  Chine, en contravention avec les lois  sur l’embargo. Quelle politique l’administration américaine mettre-t-elle en œuvre contre l’Iran ?

MB: C’est Sharon qui veut que les Etats-Unis attaquent l’Iran. Mais la raison n’en est pas simple parce que les Américains s’essoufflent en occupant l’Irak. Nous verrons  quelles mesures ils prendront : vont-ils réintroduire la conscription? Pourront-ils faire la guerre dans ces conditions sans provoquer une révolte des citoyens américains? Pour convaincre le peuple, devront-ils mettre en scène un nouvel attentat d’Al-Qaeda, encore plus sanguinaire, comme on peut le craindre, afin d’entraîner l’ensemble du pays dans une guerre contre l’Iran?

Or, l’Iran est un pays difficile à envahir : il a 70 millions d’habitants; il est beaucoup plus vaste que l’Irak et peut compter sur une certaine couverture militaire, certainement russe mais aussi chinoise, vus les rapports économiques très étroits qui se sont noués entre la Chine et l’Iran. Par le biais d’un méga-contrat de 100 milliards de dollars, portant sur la fourniture de gaz pendant 25 ans, la Chine s’est ainsi dotée d’une sécurité énergétique. Donc, si une puissance agresse l’Iran, elle agresse automatiquement les intérêts de la Chine. Il ne faut pas oublier que toute l’opération en cours en Ukraine est une opération téléguidée par Washington, exactement comme l’était l’opération de Soros en Géorgie. Si, en pratique, cette opération vise à priver Poutine de toute espèce d’hégémonie dans la région, car tant la Russie que l’Ukraine sont dotées d’armes nucléaires. Les armes atomiques ukrainiennes sont aujourd’hui sous le contrôle des Etats-Unis. Mais que se passera-t-il si le pays est secoué par une guerre civile?

Q: Je voulais vous le demander : que se passe-t-il exactement en Ukraine aujourd’hui ?

MB: En pratique, il s’agit d’inclure l’Ukraine dans la sphère d’influence américaine. Je dis bien “américaine” et non “européenne” ou “occidentale”! Cela pose de très graves problèmes à Poutine. Un exemple: Poutine dispose d’une flotte en Mer Noire; si l’Ukraine lui devient hostile, il n’a plus de liens territoriaux directs avec cette flotte. Ne parlons même pas des nombreux oléoducs russes, qui fournissent aujourd’hui du pétrole à l’Europe et qui passent justement par le territoire ukrainien! L’intérêt des Américains est de contrôler ces oléoducs, parce que, dans cette zone, le pétrole n’a pas d’accès direct à la mer. L’opération vise proprement à exproprier Poutine. Dans cette conjoncture, il est l’agressé et non pas l’agresseur.

De même, l’attentat si sanguinaire de Beslan contre les enfants d’une école a été évalué correctement par Poutine (qui fut un agent du KGB et qui sait pertinement bien comment ce genre de choses se déroulent...): les terroristes sont les instruments de la “Rome” qui a ses bases sur la Tamise et sur le Potomac et qui veut diviser pour régner, exactement comme le voulait la Rome antique. Ce sont les pouvoirs pétroliers de Londres et de Washington qui manipulent et déploient les terroristes “islamistes”. Il suffit de suivre la trajectoire du chef de ces terroristes tchétchènes, Bassaïev. Il a été auparavant le chef des gardes du corps du plus importants et du plus riches des oligarques russes, Boris Berezovsky, celui qui s’était emparé de toutes les richesses minières de la Russie. Poutine les lui a reprises tout simplement parce qu’il ne les lui avait pas payées. Songeons aussi à la Ioukos, qui est la propriété de l’oligarque Komarovsky et qu’il a achetée pour 200 millions de dollars au temps des privatisations, avec des fonds prêtés par la famille Rothschild. Aujourd’hui, la Ioukos vaut 17 milliards de dollars en bourse!

Q: Changeons de discours : je suis curieux de savoir pourquoi vous avez écrit l’un de vos derniers livres, dont le titre est : “La strage dei genetisti” (« Le massacre des généticiens ») Qu’entendez-vous par « massacre des généticiens » ?

MB: Depuis le 11 septembre, plusieurs généticiens sont morts mystérieusement, dans des “accidents” variés, souvent des homicides; en tout 25, peut-être 26. Tous s’occupaient d’armes “génétiques”, bactériologiques et se penchaient sur la façon de manipuler l’ADN pour des raisons militaires. Personne ne comprend vraiment ce qui s’est passé, mais, très probablement, une guerre secrète a lieu, sur ces types d’armement; les recherches ne sont pas suffisamment avancées, si bien qu’il suffit de tuer quelques hommes compétents pour freiner le développement des armes chez l’ennemi. Si, par exemple, les Chinois éliminent cinq généticiens américains qui s’occupent d’un tel programme, il est peu probable que les Américains trouvent immédiatement cinq autres généticiens de même niveau pour reprendre les recherches. C’est une guerre secrète de ce type qui est en cours entre Etats qui tentent de mettre au point des armes dites génétiques. L’arme en question serait un microbe, une bactérie, un virus capable de frapper seulement un type spécifique de génotype! L’existence probable de cette arme génétique a été révélée par un membre du Parlement israélien. Ce parlementaire a fait une déclaration mystérieuse puis ne l’a plus  jamais répétée... C’est une  information très alarmante parce que les effets de cette arme ressemblenet à des maladies naturelles. Comme celle qui a frappé Arafat, par exemple. Le Président de l’OLP est mort à la suite de symptômes très étranges: des milliers de micro-hémorragies dans les vaisseaux de petites dimensions, ce qui ne correspond à aucune symptomatologie de maladies connues! D’où la suspicion d’un empoisonnement, mais d’un empoisonnement perpétré à l’aide d’une arme très sophistiquée et braquée spécifiquement sur un type de cible...

Propos recueillis par Marcello Pamio; Source: www.disinformazione.it , 05 décembre 2004.

lundi, 17 mai 2010

Entretien avec le Prof. Claudio Risé: les Etats d'ancienne mouture ne contrôlent plus les flux de communication!

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

 

Entretien avec le Prof. Claudio Risé:

Les Etats d'ancienne mouture ne contrôlent plus les flux de communication!

 

«Les hommes politiques italiens qui regardent vers l'avenir et constatent qu'inéluctablement une entité padanienne verra tôt au tard le jour enragent ou se désespèrent. Cette rage et ce désespoir sont pourtant en contradiction avec le sacro-saint droit à l'auto-détermination des peuples et avec l'Histoire, avec un “H” majuscule. Parce que le processus historique actuelle­ment en cours depuis la chute du Mur de Berlin indique clairement que la survie des vieux Etats nationaux ne peut plus constituer un dogme. Nous nous trouvons aujourd'hui face à une affir­mation globale des différences et des identités ethniques et culturelles qui se développent dans le monde entier. La myopie des politiciens romains les place en dehors de l'histoire». L'homme qui prononce devant moi ces paroles fortes n'est pas un militant de la Ligue lombarde de Bossi mais un universitaire tranquille qui vit au Sud-Tyrol et à Milan et enseigne à l'Université de Trieste une matière complexe que l'on nomme la “polémologie”, soit l'étude des guerres et surtout des guerres menées à l'époque dite “postmoderne” (de 1945 à nos jours).

 

Le Professeur Claudio Risé est aussi psychanalyste et auteur de nombreux livres nous permet­tant de méditer sur le destin et le passé des cultures traditionnelles et identitaires. Parmi ces ouvrages: Psicanalisi della guerre  (Red Edizioni) et Misteri, guerra e trasformazione  (Società Editrice Barbarossa).

 

Q.: Professeur Risé, qu'entendez-vous par “guerre postmoderne”?

 

CR: Si nous entendons par “moderne” l'époque qui a commencé par les révolutions bour­geoises de la fin du XVIIIième, qui se basaient sur les thèses de l'idéologie des Lumières et ont constitué l'origine à leurs avatars: le libéralisme, le marxisme et le fascisme, nous pourrions dé­finir la “postmodernité” comme l'ère de la crise de ces sociétés, crise commencée immédiate­ment après la seconde guerre mondiale qui a atteint son maximum d'acuité après l'effondre­ment de l'empire communiste à l'Est. Nous noterons, dans cette optique, que la ma­jeure partie des conflits qui ont éclaté au cours des cinquante dernières années a été déclen­ché au nom de principes considérés à tort comme “dépassés” par les mentalités matérialistes et illuministes: ces principes sont les droit à l'auto-détermination, la défense d'un territoire spéci­fique, la dé­fense existentielle de sa propre nation, que l'on perçoit comme l'expression inalié­nable d'une culture, de facteurs raciaux, de traditions, d'un héritage historique et non plus sim­plement comme un ordre juridique sec et codifié. Les guerres du XIXième siècle et les deux conflits mondiaux de notre siècle n'étaient pas du tout liés à de tels sentiments, à l'exception notable du monde germanique où l'on conservait intacte la notion d'une “Kultur” (c'est-à-dire l'essence des mythes fondant une communauté populaire) que l'on opposait volontiers à la “Zivilisation” (la dimension exclusivement matérielle et technique de l'écoumène humain, di­mension que détestait Spengler).

 

Q.: Aujourd'hui, nous assistons effectivement à un réveil des ethnies, que les médias et le monde politique italiens minimisent, ridiculisent ou tentent de criminaliser, notamment quand il s'agit de l'idée de “Padanie”. Ce comporte­ment ne se repère pas avec la même intentisé ailleurs...

 

CR: Telle est bien la question. Un Etat historiquement fort comme la Grande-Bretagne vient à son tour de reconnaître le Pays de Galles comme un Etat national (potentiel) et révise ses posi­tions dans l'épineuse question irlandaise. Une vieille nation digne comme l'Espagne parle dé­sormais d'autonomie et l'applique comme en Catalogne. En revanche, chez nous, les journaux italiens sont les seuls dans tout le monde civil à refuser de reconnaître comme un fait politique pertinent, de grande portée historique, l'émergence d'une entité padanienne. D'autre part, il faut souligner que les politiciens italiens ignorent les tenants et les aboutissants de cette ques­tion, car ils ne connaissent pas (ou feignent de ne pas connaître) la nature du problème. L'Italie étouffe dans le magma énorme de la bureaucratie étatique, dont le personnel est littéralement terrorisé à l'idée de perdre son travail. L'aversion à l'égard de l'idée padanienne chez beaucoup de fonctionnaires de l'Etat et de politiciens est ridicule, au-delà même de toute rhétorique de circonstance: elle est principalement motivée par leur instinct de survie, par le désir de maintenir des privilèges acquis. Le régime italien doit retrouver le calme en jettant un oeil sur les chiffres réels et non seulement sur les chiffres de propagande: depuis la fin de la guerre jusqu'à au­jourd'hui, le nombre des Etats est passé d'une quarantaine à près de deux cents. Faire sem­blant de ne pas voir cette évidence, c'est de la sottise sinon de l'aveuglement.

 

Q.: Comment expliquez-vous que, dans une époque essentiellement marquée par le globalisme économique, ce sont justement ces tendances identitaires qui soient en pleine expansion et que l'on redécouvre ses racines ethniques?

 

CR: Le globalisme des marchés s'accompagne d'une informatisation globale: là réside, à mes yeux, la grande innovation positive. Grâce aux réseaux d'internet, par exemple, des modèles culturels différents et des mouvements ethniques se diffusent et peuvent s'affronter entre eux chaque jour vingt-quatre heures sur vingt-quatre: c'est là un phénomène sans précédent. L'ouverture sur Internet a ôté aux Etats le pouvoir de contrôler la communication de masse. Paradoxalement, nous nous apercevons que le globalisme aide formidablement les revendica­tions ethniques des peuples.

 

Q.: Alors, Francis Fukuyama et les partisans du mondialisme, qui proclamaient qu'ils allaient mettre un terme à l'histoire et transformer la planète en un ag­glomérat d'individus sans racines se sont trompés dans leurs calculs?

 

CR: La théorie de Fukuyama a déjà été démentie depuis un certain temps, même s'il ne veut pas l'admettre. Les effets néfastes de la mondialisation sont déjà là, bien concrets, il suffit de garder les yeux ouverts. A leur grande stupeur, les potentats américains ont dû constater que les communautés redécouvraient peu à peu leurs cultures, leurs musiques, leurs littératures. Les forces traditionnelles sont revenues dans le circuit après l'hibernation due au bipolarisme USA/URSS (qui, par ailleurs, était un faux bipolarisme, vu les accords plus ou moins secrets entre les deux superpuissances). Ainsi, les marchés internationaux sont “relus” par les peuples spécifiques: ceux-ci acceptent de rentrer sur ces marchés, mais en n'abandonnant pas leurs ca­ractéristiques particulières et sans s'aligner sur une idéologie exclusivement économiciste. En effet, nous devons être bien attentifs à ne pas confondre le mondialisme homologuant, ennemi des racines des peuples, et le globalisme des échanges. Ce dernier, je le répète, est l'“ami” de l'idéal d'auto-détermination.

 

Q.: Selon vous, Prof. Risé, l'entité padanienne en Italie du Nord finira pas s'imposer, puisque l'histoire va dans cette direction. Naîtra-t-elle pacifique­ment ou y a-t-il des risques de tensions entre centralistes et indépendan­tistes, comme semble le prévoir le Prof. Miglio?

 

CR: Je ne suis pas en mesure de prédire l'avenir dans une boule de cristal, mais j'entrevois tout de même un grand danger pour l'Italie: sa faiblesse... Un individu qui possède un “moi” fort se montre plus tolérant que celui que ne possède qu'un “moi” faible. Si l'on reporte le “moi” indivi­duel sur celui de l'Etat, le résultat est identique. On sait comment est née l'Italie (l'Etat italien): sous l'impulsion d'un complot anglo-français, car la France comme l'Angleterre sont les enne­mies jurées de l'institution impériale (le Saint-Empire) et des puissances centre-européennes. Mais le résultat de ces manigances franco-britanniques a été un Etat faible qui ne manifeste au­cun respect pour les cultures vivantes et réelles à l'intérieur de ses frontières. L'identité des peuples de Padanie et des régions alpines est historiquement liée à la culture du vénérable Saint-Empire romain d'une part, et aux racines celtiques et lombardes, d'autre part. Les cul­tures, les sociétés, les communautés charnelles et réelles de ces régions padaniennes et al­pines ont entre elles des rapports féconds et profonds tandis que l'Etat italien est né au départ de principes tout-à-fait opposés voire antagonistes à ceux que la romanité antique, solaire et respectueuse de toutes les composantes de son Empire. La Rome antique n'a rien à voir avec la Rome actuelle. Valentin Moroz avait raison d'écrire, après sa condamnation en ex-URSS pour ses activités en faveur du nationalisme ukrainien: «Une nation ne peut exister que s'il y a des hommes prêts à mourir pour elle. Je sais que tous les hommes sont égaux. Ma raison me le dit. Mais en même temps, je sais que ma nation est unique... Mon cœur me le dit». Il me semble que de tels sentiments sont très éloignés de l'état d'esprit qui règne en Italie aujourd'hui.

(propos recueillis par Gianluca Savoini, pour le quotidien La Padania, 6 juin 1997).

 

samedi, 15 mai 2010

Intervista a Francesco Polacchi (Blocco Studentesco)

Intervista a Francesco Polacchi



Francesco Polacchi è nato a Roma nel 1986. Studente di Scienze storiche presso l’università di Roma Tre, è responsabile nazionale del Blocco Studentesco.

Quali sono i miti, gli autori e le esperienze che consideri parte integrante del tuo bagaglio politico-culturale?


Cercherò di essere sintetico... Trovo la Storia molto divertente: credo che sia molto più simpatica e meno noiosa di come ce la si voglia far passare di questi tempi; credo cioè che nulla avvenga mai per caso e che il passato esista sia perché debba riproporsi sia perché gli uomini debbano carpire gli insegnamenti degli avi in situazioni completamente differenti da come si erano proposte in precedenza.
I periodi storici in cui più ritrovo lo spirito e le linee guida della mia azione sono l’Impero Romano, anche se sono consapevole che in mille anni di storia (considerandolo quindi dall’atto della fondazione di Roma quale Imperium) tanti sono stati i momenti e i motivi che lo hanno portato alla sua implosione; l’Impero di Federico II quale più longeva e fresca espressione della nuova sintesi delle idee Imperium, popolo e rivoluzione sociale e amministrativa nell’artecrazia e infine, ovviamente, il Fascismo. Inoltre ci sono altri momenti quali il Risorgimento, il periodo napoleonico o alcuni altri imperatori «medioevali» (uso le virgolette perché odio la parola «medioevo» in quanto vorrei sapere quale epoca non è un passaggio tra due epoche???). Come autori ho sempre svariato: da Degrelle a Palahniuk, da Sun Tzu a Bunker, da Omero e Virgilio a Fante e Bukowski...


Che cosa è stato secondo te sinteticamente il Fascismo? Alcune sue intuizioni e proposte possono essere valide ancora oggi?

In senso lato il fascismo è stata la grande poesia del XX secolo; l’originale sintesi tra la moderna idea di Stato, le nuove esigenze della società con una visione del mondo lontana dall’essere contingente e immanente. In senso stretto fu ciò che trasformò l’Italia da un paese agricolo a una nazione industriale.
Molte sono le intuizioni che possono essere ancora valide, come la politica sulla casa di proprietà, sulla socializzazione delle imprese, su un’economia guidata (non bloccata) dallo Stato, sulla costruzione di grandi infrastrutture, la lotta alla mafia... tutte cose che ormai sono tristemente cadute nel dimenticatoio perché il fascismo è oggetto di una damnatio memoriae che non concede sconti.


Come e perché nasce il Blocco Studentesco? Qual è la sua «missione»?

Non siamo religiosi, quindi in un certo senso non crediamo alle «missioni»... però accetto la provocazione e dico che la nostra volontà è quella di riportare la partecipazione politica tra i giovani in un periodo storico in cui si fa di tutto per andare nella direzione opposta; d’altronde: meno domande e meno curiosi = meno problemi. Questo è un po’ il perché. Sul come la cosa è molto divertente. Ufficialmente il Blocco Studentesco nasce il 12 settembre del 2006 a CasaPound, ma l’idea era nata qualche mese prima sulle scale quando mi ritrovai con Davide di Stefano a parlare con Gianluca Iannone il quale ci disse un po’ per gioco: «perché non fate un movimento studentesco?». Detto fatto e, così come in altre situazioni, la nascita del Blocco non deve essere vista come chissà quale operazione studiata nelle segrete da chissà quanto tempo... Sicuramente però è stato proprio il momento giusto per partire!


In che stato si trova l’attuale sistema dell’istruzione nazionale?

Non bene. Troppi finanziamenti alle scuole private e poca attenzione al settore pubblico in cui molto spesso gli addetti non fanno il loro dovere avvalorando la tesi di chi vorrebbe privatizzare anche l’aria che si respira.


Come giudichi le ultime riforme della Gelmini in materia di scuola e università?

Non sono poi così negative. A me fa sorridere il fatto che tutte le manifestazioni di protesta che furono fatte nell’autunno 2008, a parte pochi interlocutori tra cui noi!!!!, non avevano idea su cosa andare a parare. Noi volevamo bloccare la legge 133, gli altri al massimo il grembiule e il maestro unico: assurdo. Tornando a bomba: la riforma sugli accorpamenti dei licei era necessaria così come il riordino degli istituti tecnici; altre cose come le norme antibullismo e il voto in condotta sono palliativi populistici. Sull’università, fermo restando la nostra assoluta contrarietà alla legge 133 voluta dalla finanziaria del 2008, gli interventi contro il baronato e in favore della maggiore trasparenza di assegnazioni e fondi non possono che farmi piacere.


Tu conosci molto bene gli interessi politici che gravitano intorno alla scuola. Quali sono i veri centri di potere che dettano l’agenda in fatto di istruzione?

Con la legge 133 si concede la possibilità a terzi di entrare nei consigli di amministrazione degli atenei. Il problema è che così facendo le materie umanistiche andrebbero ovviamente a soccombere e materie più tecniche a essere favorite. In più la mia grande paura è relativa alla possibile intromissione delle multinazionali farmaceutiche.


Che modello di scuola/università propone il Blocco? Come intende realizzarlo?

La scuola e l’università devono essere i luoghi in cui si formano le coscienze delle nuove generazioni e la professionalità della classe dirigente del futuro. Anche se non devono essere viste come scuole di lavoro, è chiaro che devono rappresentare la piattaforma di lancio per gli studenti nella società civile, cioè in quella dei «grandi». Oggi assistiamo purtroppo alla distruzione della comunità scolastica in nome di una più proficua e con meno problemi scuola-azienda che nell’università è già diventata una realtà. Per raggiungere questo obiettivo puntiamo sulla ricostruzione di un movimento che sia al tempo stesso una vera e propria comunità di giovani dediti quotidianamente alle attività politiche seguendo i nostri princìpi basilari. È nell’azione quotidiana che si possono gettare le fondamenta per il futuro e, nel frattempo, concorrere a qualsiasi tipo di elezione dove far valere le nostre idee riportando lo spirito di trincea che ci contraddistingue.


Ultimamente stiamo purtroppo assistendo a un continuo crescendo di tensione con le formazioni della cosiddetta «sinistra antagonista», tanto che alcuni – probabilmente in maniera esagerata – fanno paragoni con gli anni piombo. A chi e a cosa giova questa situazione?

Il paragone con gli anni di piombo è assolutamente esagerato... qualcosa è cambiato, non tutto, ma qualcosa sì. Questa situazione giova moltissimo all’estrema sinistra in quanto, essendo ormai sconfitti dalla Storia, possono trovare un motivo per continuare a esistere solo nel cannibalismo politico, cioè solo nutrendosi delle altrui battaglie per avere qualcosa da contraddire, qualcosa contro cui opporsi. In più questa situazione fa gola a tutti i finti democratici che trovano l’occasione per poter aprire bocca e darle fiato, usando il linguaggio politichese per affermare cose banalissime e avere un minimo di visibilità nonostante la loro inconsistenza politica.


Questa domanda è quasi d’obbligo. Che significato ha avuto l’ormai celebre manifestazione anti-Gelmini dell’autunno 2008? All’inizio sembrava che si fosse veramente riusciti a realizzare una protesta corale e trasversale, al di là delle vecchie contrapposizioni politiche. Poi che cosa è successo?

C’era una volta una manifestazione studentesca... il Blocco e le incredibili vicende di piazza Navona. Nelle due settimane precedenti al 29 ottobre il nostro movimento era impegnato in una vera e propria agitazione studentesca partecipando a manifestazioni, cortei, sit-in, assemblee straordinarie, occupazioni di innumerevoli scuole per contestare la legge 133 (che fa parte della finanziaria 2008) e tutto questo ovviamente con studenti di qualsiasi opinione politica... il 29 ottobre era l’ultimo giorno.


Il Blocco Studentesco si sta espandendo in tutta Italia, contando numerosi militanti e decine di migliaia di simpatizzanti. Qual è il segreto di questo successo? Che cosa rappresenta il Blocco per le nuove generazioni?

Il Blocco è il nuovo che avanza, è l’irrazionale voglia di vivere, è un’esplosione di vitalità che non tutti riescono a capire, ma con cui tutti devono fare i conti. Credo che il segreto del successo vada rintracciato nell’impegno costante dei militanti che con i loro sacrifici portano «avanti la baracca» e nell’organizzazione scientifica del da farsi. Quando a questi due elementi si aggiunge un contenuto rivoluzionario il resto vien da sé.


In cosa invece il Blocco, secondo te, deve ancora migliorare?

Si deve sempre migliorare in tutto, la perfezione non è di questo mondo, ma tendendo costantemente ad essa si migliora tutti i giorni.


Feste, sport, concerti. Che importanza rivestono questi eventi per la politica del Blocco?

Sono mezzi importanti per dimostrare realmente la nostra essenza. Mostriamo a tutti come ci divertiamo ai nostri concerti e alle nostre feste, condividendo con gli altri la nostra innata propensione al sorriso e al divertimento. Insomma tutto il contrario di quello che dicono alcuni giornali descrivendoci come pazzi asociali assetati di sangue. Senza tralasciare poi l’importanza economica che rivestono tali eventi, essendo quasi l’unica fonte di autofinanziamento per il gruppo.


Che ruolo giocano le nuove tecnologie all’interno della militanza politica del nuovo millennio?

Un ruolo importantissimo, basti pensare che subito dopo gli scontri di Piazza Navona abbiamo messo su youtube il nostro video-verità che ci ha permesso di mostrare a tutti come erano andate realmente le cose. Per non parlare dell’importanza che riveste la grafica nei nostri manifesti e nei nostri volantini. È un altro campo in cui dimostriamo di essere avanguardia.
Se nel ’900 era il cinema l’arma più forte, nel terzo millennio è internet a rivestire il ruolo di protagonista indiscusso.


È nato da poco «Idrovolante», il trimestrale del Blocco Studentesco all’università. Quanto è importante la battaglia culturale per un’organizzazione come il Blocco? Quali sono le linee-guida e le idee-forza della nuova cultura che si intende proporre?

La battaglia culturale è la battaglia più importante. Tramite il nostro giornalino, le nostre assemblee e le nostre conferenze stiamo di fatto portando avanti una piccola rivoluzione culturale. In Italia, purtroppo, dal secondo dopoguerra in poi la sinistra ha monopolizzato questo settore servendosi di case editrici, cantanti, autori, comici, per far credere a tutti che la «cultura sta a sinistra». Si sono volutamente criminalizzati autori come Pound, Céline, La Rochelle e gettati nel dimenticatoio avvenimenti storici come la tragedia delle foibe. Tutto ciò che non piaceva all’intellighenzia salottiera era considerato non cultura. CasaPound ha rivoluzionato tutto questo, diventando un vero e proprio laboratorio culturale dove si parla di tutto e tutti possono parlare.
Inevitabilmente questo dà fastidio a qualcuno che ha smarrito ormai presa sulle masse e vivacità culturale.
Passando alle linee-guida e alle idee-forze credo che i manifesti dell’
EstremoCentroAlto e della Neoterocrazia raffigurino in versi la nostra «idea di mondo».


Quali sono i prossimi obiettivi del Blocco? Quali le prospettive?

Gli obbiettivi sono molti e le sfide più grandi sono quelle che ci entusiasmano di più. Quest’anno abbiamo raggiunto risultati importanti alle elezioni della Consulta Provinciale degli studenti, prendendo 4 presidenti e una marea di voti, poi ci saranno le elezioni universitarie, le prime a cui partecipa il Blocco e ogni anno ci sono le elezioni all’interno dei vari licei. Abbiamo organizzato una festa con quasi mille persone al Piper, storico locale romano, e il 7 Maggio staremo in piazza per la Giovinezza al potere. L’obbiettivo principale è quello di risvegliare questa generazione dallo stato confusionale in cui è stato trascinato dall’attuale società dei consumi, ma soprattutto vogliamo volere e affermare!


Che cosa ti aspetti dalla manifestazione nazionale del 7 maggio?

Immagino migliaia di persone che colorano la città con fumogeni e bandiere, allegria incontenibile mista a rabbia da urlare in faccia a chi ci dice che va tutto bene e a chi ci vorrebbe morti. Dimostrare a tutti che siamo noi la meglio gioventù.

vendredi, 14 mai 2010

Questions à Karel Dillen (1994)

dillen1.jpgArchives du CRAPOUILLOT - 1994

Questions à Karel Dillen

 

1) Pendant la dernière guerre, vous avez été un jeune homme sage et studieux, qui ne s'est pas engagé, ni dans la résistance ni dans la collaboration. Les injustices et la vio­lence de l'épuration ont fait de vous un nationaliste dur et pur. Pouvez-vous nous expli­quer cette grande mutation personnelle?

 

Cette mutation n'a pas été aussi dramatique que vous le laissez sous-entendre. L'athénée (équivalent du lycée) que je fréquentais baignait dans une atmosphère nationaliste fla­mande. Bon nombre de professeurs étaient des nationalistes convaincus et engagés. Leur enseignement s'en ressentait. N'ayant rien eu à voir avec la collaboration, après le départ des Allemands, je n'ai eu aucun ennui et j'ai conservé mes droits politiques. Autour de moi, la répression frappait cruellement certains de nos anciens professeurs, comme Reimond Rens ou le romancier Oswald Everaert. Quelques-uns de mes condis­ciples plus âgés, dont Herman Pauwels, ont été jetés en prison, battus, torturés et sont sortis brisés des cachots belges. La plupart des professeurs inquiétés ont été chassés de nos écoles et collèges, ce qui, à long terme, a eu des conséquences sur la qualité globale de l'enseignement. Pour moi, ce fut un contraste horrible par rapport à la relative tolérance qui règnait dans l'école pendant les trois premières années de la guerre: on savait perti­nemment bien qui était, parmi les professeurs et les élèves, en faveur des alliés et qui soutenait l'«Ordre Nouveau» pro-allemand. Mais la discussion demeurait ouverte et courtoise. En 1943, les choses ont mal tourné. Dans la région d'Anvers, des professeurs pro-alliés ont été arrêtés et internés à Buchenwald. Seuls les communistes ont survécu à cet effroyable univers concentrationnaire et sont revenus. Après avoir servi de traduc­teur dans les services annexes de l'armée britannique et effectué mon service militaire, je me suis engagé dans un mouvement de jeunesse nationaliste, le mouvement «Sint-Arnoutsvendel», même si, à 22 ans, je n'avais plus aucune prédisposition pour ce type d'activité! J'étais fasciné par le courage de ses animateurs qui affirmaient haut et clair leur nationalisme en dépit de la tourmente. Dans ce cadre, j'ai commencé ma vie de mi­litant, en organisant des manifestations de souvenir et d'hommage aux victimes de l'épuration. J'ai également organisé le premier meeting à Anvers en faveur de l'am­nistie. J'ai ensuite tout naturellement participé aux premiers combats de la Vlaamse Concentratie,  le premier parti nationaliste flamand d'après 1945. Le nationalisme de cette époque-là se portait mal: il avait été décapité, ses principaux animateurs croupis­saient dans les geôles belges, les autres étaient privés de leurs droits civils ou devaient trimer dur pour se refaire une situation. Pour sortir de l'isolement la VC était contrainte de tenter une ouverture vers des milieux qui n'étaient pas nationalistes (indépendants et paysans). Un travers dans lequel la Volksunie,  le parti qui devait succéder à la VC, allait tomber à son tour, surtout sous l'impulsion du «centriste» Hugo Schiltz et par le no­yautage des éléments gauchistes, de plus en plus nombreux pendant les années 60.

 

2) La fidélité aux principes, l'éthique de la continuité, le refus des bricolages politiciens et des compromissions qui ne mènent à rien constituent les principales caractéristiques de votre vision de la politique. Nous aimerions que vous nous donniez quelques préci­sions...

 

En effet, je refuse catégoriquement de conclure des compromis qui menacent ou ruinent les principes clairement définis, adoptés par un parti ou un mouvement prenant son en­vol. Sur le long terme, la succession ininterrompue des compromis et des concessions ne permet plus de mener une politique cohérente. L'électeur n'y trouve plus son compte. Rien ne peut être décidé, tranché. Rien ne peut être fait, aucun problème ne peut être ré­solu. C'est le règne de l'indécision. L'histoire du mouvement flamand dans notre après-guerre illustre parfaitement ce type d'enlisement. Certes, il a des circonstances atté­nuantes parce qu'il a été brisé par la répression. Le calcul des nationalistes prêts aux compromis s'explique tout simplement parce que ces hommes ne voulaient pas rester dans la marginalité; sans alliances, aucune victoire électorale, même minime, n'était possible. La Volksunie  a connu cet état d'esprit dès le début des années 60, l'aile cen­triste du mouvement, celle de Schiltz, désirait partager ne fût-ce qu'une parcelle du pou­voir. Elle a été renforcée, avant et après 68, par des éléments gauchistes qui, auparavant, n'avaient jamais trouvé leur place dans le mouvement flamand. Nationalistes purs, centristes prêts à toutes les compromissions et gauchistes messianistes se côtoyaient ainsi dans un parti qui naviguait au pifomètre, sans suivre de ligne directrice. Les na­tionalistes pourtant n'ont pas réagi devant les dérives centristes ou gauchistes. Moi-même, au départ, je ne voulais pas lâcher le seul parti nationaliste flamand ayant sur­vécu aux tourmentes du siècle. Comme les autres, je suis resté parce que je ne voyais pas d'autres solutions. A l'époque, créer un nouveau parti aurait été suicidaire. Les accords du Palais d'Egmont (1977), où la Volksunie  a jeté par dessus bord les principes du mou­vement flamand pour obtenir quelques misérables strapontins, ont été la goutte qui a fait déborder le vase. J'ai franchi le pas. J'ai lancé le VNP, devenu, après quelques avatars, le Vlaams Blok.

 

3) Vous êtes député européen depuis cinq ans. Quel est votre jugement sur l'Europe de Bruxelles et de Strasbourg? Quelle Europe souhaiteriez-vous voir advenir?

 

Mon jugement est facile à formuler: l'Europe de Bruxelles est une catastrophe pour les Européens. Ils risquent de tomber sous la coupe d'une eurocratie subtilement autoritaire, qui régentera leur vie comme le Big Brother  d'Orwell régentait la vie des habitants d'Oceana dans ce célèbre roman prémonitoire que fut 1984.  Les eurocrates n'ont plus que le mot de «subsidiarité» à la bouche. La «subsidiarité», en théorie, c'est donner un pou­voir de décision aux plus petits échelons de la politique. En pratique, nos bons eurocrates ne se soucient pas davantage de cette théorie qu'un poisson d'une pomme. L'eurocratie se mêle de tout, de la longueur des saucissons ou de la grosseur des petits pois. Elle parle du respect des «différences», mais ne leur laisse plus aucune place. Et quand on me parle d'une Europe fédérale, je ne vois pas de quel fédéralisme on parle; je m'insurge contre ce faux fédéralisme qu'on cherche à nous imposer de force car il n'est que le masque pu­blicitaire d'une monstruosité centralisatrice, sèchement administrative, autoritaire et mondialiste. Face à ce fédéralisme malhonnête, je lutte pour une Europe confédérale qui, dans un deuxième temps, dirigera son attention sur ces faits concrets, historiques et éternels que sont les peuples. Tous les peuples d'Europe ont droit à l'auto-détermination. En ce qui nous concerne, la Flandre doit encore devenir Etat.

 

4) Comment appréciez-vous le travail de la “fraction technique des droites européennes” que vous animez notamment avec Jean-Marie Le Pen?

 

Je rappellerais que nous sommes une fraction “technique” et non pas un groupe qui ras­semble des partis porteurs d'une vision du monde monolithique et standardisée. Certes, nous avons tous énormément de points communs. Mais aussi des différences. La con­ception française et la conception flamande du nationalisme sont très différentes. Le Vlaams Blok  avait plus d'affinités avec nos collègues allemands qui, comme nous, sont animés par un nationalisme qui place le peuple, le Volk,  au-dessus de l'Etat. Alle­mands et Flamands ont élaboré un nationalisme ethnique, dérivé de la philosophie de Herder. Les Français ont développé un nationalisme d'adhésion, comme l'a théorisé Renan. Les autres différences sont secondaires. Par exemple, la problématique de la peine de mort: le FN français est inconditionnellement en faveur de la peine de mort. Le Vlaams Blok  est moins catégorique. Personnellement, je suis contre. Mais la problé­matique n'est pas close au sein de notre parti. Le souvenir de l'épuration et de nos mar­tyrs m'incline à rejeter la peine de mort. Je reste séduit par les arguments de Maître Jac­ques Isorni, le défenseur de Pétain et de Brasillach.

 

Au sein de la “fraction technique”, la coopération est bonne, même si, au départ, nos col­lègues français ont dû s'étonner de la nature du nationalisme flamand. Sur le plan hu­main, l'expérience est très positive. Les qualités intellectuelles et politiques de mes col­lègues français sont exceptionnelles. Leurs compétences nous apportent beaucoup. La survie de cette fraction dépendra des résultats en Allemagne. Si nos amis y dépassent la barre des 5% en dépit de leurs querelles intestines, nous recommencerons l'expérience sans hésiter. Flanqués sans doute par de nouveaux collègues néerlandais et danois.

 

5) Vous êtes un lecteur attentif de la presse française de droite. Vous avez connu person­nellement des hommes aussi différents que Maurice Bardèche et Olier Mordrel, aux­quels vous demeurez inébranlablement fidèle. Pouvez-vous nous dire deux mots sur ces amitiés indéfectibles?

 

Mon intérêt pour la France remonte aux temps de la répression. L'avocat Walter Bouche­ry, un nationaliste d'après 1945, peu compromis dans la collaboration, très critique à son égard, s'engage tout de suite sur la brèche, dès la fin des hostilités, et publie une revue in­titulée Wit en Zwart  (Blanc et Noir) qui ne dura que trois numéros, avant d'être inter­dite. J'y ai découvert un article sur Robert Brasillach, qui a aussitôt éveillé mon intérêt. Je n'ai plus cessé, depuis lors, de m'intéresser passionnément à ce personnage tragique de l'histoire et des lettres françaises. J'ai entamé une quête, que je poursuis toujours d'ailleurs, dans les publications, revues, journaux et livres français qui évoquent ce martyr de la cause nationale. C'est ainsi que j'ai découvert les revues de droite qui s'in­surgeaient contre les rigueurs de l'épuration: les Ecrits de Paris  et Défense de l'Occi­dent.  Bardèche, armé de son immense culture, comprenait bien quels étaient les ressorts du nationalisme flamand, ce qui est rare chez nos amis français. Le nationalisme eth­niste était pour lui une valeur positive, y compris celui des Bretons. Finalement, j'ai ap­pris à le connaître personnellement, je lui ai posé des tas de questions sur Brasillach, il m'a prêté sa collection de Je suis partout,  pour que je la consulte. Plus tard, il est venu prononcer une conférence à Anvers sur «L'Europe entre Washington et Moscou».

 

J'ai connu Olier Mordrel quand il était encore interdit de séjour en France. Mordrel a fait ainsi la navette entre tous les pays voisins de la France. C'est ainsi qu'un jour il est venu loger chez moi. Le lendemain, il s'est adressé à Bruxelles à un auditoire d'une quarantaine de Bretons qui souhaitaient rencontrer leur célèbre exilé. Mordrel était pro­che depuis longtemps du mouvement flamand, qui lui a toujours manifesté un indé­fecti­ble attachement et s'est montré solidaire de ses initiatives. Avant guerre, il avait connu Hector De Bruyne de la Volksunie,  un nationaliste de pure eau devenu par la suite mi­nistre du commerce extérieur de l'Etat belge.

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Mais je voudrais aussi évoquer la figure de Robert Poulet, que les nationalistes français connaissent bien pour ses chroniques dans Rivarol  et Ecrits de Paris.  Le contact s'est établi à la suite d'une recension de Ce n'est pas une vie,  un récit autobiographique où il évoque notamment les longs mois qu'il a passés dans sa cellule de condamné à mort à Bruxelles. J'avais écrit cette recension dans l'hebdomadaire satirique et nationaliste anversois 't Pallieterke,  auquel j'ai collaboré pendant de très longues années. Cette re­cension a enchanté Poulet et a fait que nous nous sommes liés d'amitié. L'homme m'a séduit par son intégrité. Sa culture immense, ses conseils, ses souvenirs ont été pour moi un enrichissement personnel inestimable. L'année de sa mort, en 1989, le journaliste flamand Manu Ruys a lancé une initiative visant sa réhabilitation et a adressé une mis­sive au Palais de Laeken. La première réaction du Palais a donné un faible espoir au no­nagénaire. La deuxième réaction a été un refus poli mais froid. Poulet a été terriblement déçu. Il est mort quelques mois plus tard, après m'avoir légué les documents re­latifs à cette affaire. Je les ai publiés dans 't Pallieterke. Cette affaire a conforté mon républi­canisme.

 

6) Le directeur du Belgisch Israelitisch Weekblad (Hebdomadaire Israëlite Belge) d'Anvers, Monsieur Louis Davids, a pris votre défense contre les “progressistes anti-fascistes” qui sévissent en dedans et en dehors de la communauté juive d'Anvers, de Bruxelles et de Belgique. Expliquez-nous donc cet état de choses à peine croyable pour les Français d'aujourd'hui...

 

C'est simple. J'ai derrière mois 45 années d'activisme politique. J'ai écrit des milliers de pages. J'ai prononcé des centaines de discours. Pas un mot, pas une ligne dans tout ce­la qui soit qualifiable d'antisémite. Les rapports entre les nationalistes flamands et la communauté israëlite à Anvers et en Belgique ne sont pas conflictuels, hormis le petit incident que vous signalez et qui émane de marginaux qui veulent singer les modes de Paris. Ces rapports varient entre la sympathie et la neutralité. Qui plus est, le mouve­ment nationaliste flamand a eu ses héros, ses martyrs et ses militants juifs. Je pense surtout à cette figure sublime que fut Marten Rudelsheim, mort dans une prison belge en 1920. Cet intellectuel brillant, issu des milieux nationaux-libéraux, avait milité dès son plus jeune âge pour la séparation administrative et pour la flamandisation de l'Univer­sité de Gand, dans une Belgique qui ne connaissait aucune université flamande, alors que nous formons la majorité de la population. En 1914-18, les autorités allemandes a­vaient appuyé et concrétisé ce projet par solidarité inter-germanique. Rudelsheim a été condamné pour collaboration et interné, ses juges n'étant sans doute pas exempts de ré­flexes antisémites plus ou moins conscients. Rudelsheim est mort en héros, pour notre cause. Notre reconnaissance sera éternelle. Je pense aussi au dévouement du Professeur Wenger, qui a multiplié les initiatives culturelles à Anvers et n'a jamais cessé de sou­te­nir l'Université de notre ville. Je pense aussi au Dr. Schaap, israëlite hol­landais, dont les convictions sont très ancrées à droite, qui mène un combat pour la sau­vegarde de l'i­dentité de la Flandre méridionale, qui fait partie aujourd'hui du départe­ment du Nord (France).

 

Louis Davids, que vous mentionnez, est le rédacteur en chef du principal hebdomadaire israëlite d'Anvers, la ville qui compte la plus forte communauté juive de Belgique, une communauté solidement ancrée dans notre passé et notre tissu industriel, notamment dans le secteur de la taille du diamant. Louis Davids et son équipe n'ont jamais participé aux attaques habituellement lancées contre le mouvement flamand par quelques cénac­les minoritaires de la communauté juive de Bruxelles, fortement influencés par l'idéo­logie anti-identitaire que distillent certains philosophes juifs de la place de Paris, qui ne se souviennent pas des leçons sublimes de Simone Weil, la jeune et poignante philosophe décédée à Londres en 1942 et dont l'ouvrage principal s'intitule L'enracinement.  Pour ces “penseurs” à la mode, toute affirmation d'une identité est suspecte d'antisémitisme. Généralisation qui est évidemment fausse. Il fallait remettre les pendules à l'heure. En­suite, ce journal ne participe pas à la campagne hostile à l'amnistie que mènent les mê­mes cénacles bruxellois. En effet, le combat pour l'amnistie a rebondi en Flandre: on pense enfin réviser le procès d'une fermière innocente, mère de plusieurs enfants, fusil­lée en 1945 pour une délation qu'elle n'avait jamais commise et qu'aucune preuve sé­rieuse n'étayait. Louis Davids est un honnête homme: je crois donc qu'il ne voit aucun inconvénient, en tant qu'israëlite, en tant que ressortissant d'une communauté qui a pourtant très injustement souffert lors de la dernière guerre, à ce que l'on réexamine le dossier de cette pauvre femme.

 

 

lundi, 12 avril 2010

Intervista ad Adriano Scianca


Adriano Scianca è nato a Orvieto nel 1980. Laureato a Roma in filosofia, è giornalista e scrittore. Ha collaborato a numerose riviste culturali, tra cui «Orion», «Letteratura-Tradizione» ed «Eurasia». Per la cultura di CasaPound, gestisce l’
«Ideodromo» e ha redatto Il Manifesto dell’EstremoCentroAlto.



Quali sono i miti, gli autori e le esperienze che consideri parte integrante del tuo bagaglio politico-culturale?

Una precoce lettura dei classici evoliani, dei quali mi appassionarono l’ampio respiro e la profondità storica in cui inquadrare i rudimenti della mia visione del mondo; l’incontro con la cosiddetta «Nuova destra», che ha sciolto certe cristallizzazioni e mi ha insegnato l’importanza di un confronto serrato con il pensiero dominante al quale opporre sempre tesi altrettanto persuasive; la collaborazione con una testata «storica» del mondo nazionalrivoluzionario come «Orion» grazie alla sostanziale mediazione di Gabriele Adinolfi, che mi ha insegnato a ridare spina dorsale a quelle intuizioni neodestre troppo spesso tendenti al debolismo; il passaggio dalla teoria alla prassi con l’ingresso nella palestra dell’anima di CasaPound, nella quale tutto ha finalmente acquisito un senso.


Georg W. F. Hegel è stato un filosofo fondamentale per la storia della filosofia occidentale. Quali sono state le sue migliori intuizioni e i suoi abbagli?

Hegel ha il merito di aver concepito il reale come divenire e il difetto di averne imprigionato l’essenza nella gabbia della dialettica. I suoi testi sono pieni di intuizioni geniali intrappolate nella ragnatela del «sistema» onnicomprensivo e definitivo. Molto interessanti, ovviamente, le sue riflessioni sullo Stato come eticità.


Quanto ha influito il pensiero di Nietzsche sulla società del suo tempo? Quanto è ancora attuale il filosofo tedesco?

Nella società del suo tempo passò pressoché inosservato, stampando i suoi libri da solo e impazzendo poco prima che il suo pensiero si diffondesse come una salutare epidemia. Nella storia del pensiero occidentale, in compenso, Nietzsche segna uno spartiacque fondamentale. Esiste un «prima di Nietzsche» e un «dopo Nietzsche», c’è poco da fare. Con Giorgio Locchi amo ricordarne la fondamentale intuizione della «apertura della storia» contro ogni finalismo; con Luciano Arcella mi piace sottolinearne la fondamentale «mediterraneità» contro la pesantezza «tedesca, troppo tedesca»; con Gilles Deleuze me ne servo per stanare lo spirito reattivo in ogni sua metamorfosi.


Che cosa può ancora insegnarci oggi l’opera di Robert Brasillach?

Non ebbe il talento letterario corrosivo di un Céline né la lucida visione tragica di un Drieu. Eppure seppe dipingere il «sentimento del fascismo» come nessun altro mai. Raccontò un fascismo che era soprattutto cameratismo e allegria e continuò a guardare i campi della gioventù, i fuochi nella notte, i canti dei Balilla con lo stupore estasiato di un bambino. Ecco, Brasillach ci insegna a non perdere mai quello sguardo, ad avere diciassette anni per tutta la vita, ad essere curiosi della propria epoca.


Hai più volte citato nei tuoi scritti Gilles Deleuze. Che valore dài al suo pensiero?

Me ne innamorai leggendo all’università Nietzsche e la filosofia, libro illuminante e straordinariamente scorrevole per l’autore. La sua lettura della Genealogia nietzscheana mi rivelò un mondo. Altre sue cose sono più pesanti, soprattutto quando in esse si fa sentire l’influenza di Felix Guattari. Fu un filosofo di sinistra? Primo: chi se ne frega. Secondo: chi sono io per contraddire Alain Badiou, che ha scritto: «[All’epoca] avevo la tendenza a identificare come “fascista” la sua apologia del movimento spontaneo, la teoria degli “spazi di libertà”, il suo odio della dialettica, per dirla tutta: la sua filosofia della vita e dell’Uno-Tutto naturale».


Giovanni Gentile è stato definito il «filosofo del Fascismo». Quanto è stato grande, a tuo parere, il suo contributo nell’edificazione del regime fascista?

È veramente paradossale che gran parte del neofascismo abbia snobbato questo pensatore. Persino un gigante come Adriano Romualdi ne parlò come di un liberale che si era dato una verniciata di fascismo. Eppure – tanto per limitarci all’essenziale – basterebbe rileggere La dottrina del fascismo, scritta insieme a Mussolini, per capire l’importanza del pensatore. Quanto all’aspetto più propriamente filosofico invito tutti a leggersi il fondamentale volume di Emanuele Lago, La volontà di potenza e il passato, nel quale emerge con chiarezza la parentela spirituale fra Gentile e Nietzsche.


La Scuola di Mistica Fascista è stata la fucina dei cosiddetti «apostoli del Fascismo». Quali furono i punti di forza di quell’affascinante esperienza?

Prendi un gruppo di giovani svegli, colti, laboriosi, gente che costituirebbe la classe dirigente di ogni Stato e a cui sarebbe possibile vivere di rendita. Metti che invece questi ragazzi abbiano l’unico pensiero fisso di donare totalmente se stessi a un’idea e che si applichino in questo senso con un ardore e una purezza incontrovertibili, fin nelle minuzie dell’esistenza quotidiana. Metti che queste persone fondino una scuola attorno a cui orbitino migliaia di altri giovani. Una scuola perfettamente inserita nell’ufficialità di un regime che faccia di essa il bastione e il motore di una rivoluzione. Metti che scoppi una guerra e che tutti, dico tutti, gli appartenenti alla scuola partano volontari, chiedendo, implorando la prima linea. E metti infine che questi ragazzi muoiano uno a uno, nel sacrificio esemplare e religioso di se stessi sull’altare dell’idea. Ecco, questo fu la Scuola di Mistica fascista. Un episodio che fa tremare i polsi, che ci mette di fronte a noi stessi in modo definitivo. Qualcosa che azzera le discussioni. Trovatemi un Giani o un Pallotta democratici, comunisti, liberali o anarchici. Non ne esistono e questo è quanto.


Fascismo-movimento e Fascismo-regime. La dizione defeliciana ha creato non pochi fraintendimenti, in quanto alcuni hanno enfatizzato le differenze di questi due elementi, mentre altri hanno preferito uno a discapito dell’altro. Tu come la vedi?

Una distinzione che non ho mai capito: in quale regime o tipo di governo non c’è una qualche distinzione tra le proposte di poeti, filosofi, intellettuali da una parte e l’azione di amministratori, governanti, politici dall’altra? Perché allora si enfatizza questa dialettica solo nel fascismo? Forse per salvare intellettuali di prim’ordine dalla condanna generalizzata e separare così astrattamente i «buoni» dai «cattivi»? Ogni momento storico conosce lo scarto fra teoria e prassi. Il fascismo, semmai, è fra i regimi in cui meno si può proporre un simile discorso: Pavolini fu fascista di movimento o di regime? E Gentile? Giani? Ricci? Evola? Gli psicodrammi sui fatti cattivi che tradiscono sempre le intenzioni buone lasciamole a comunisti e cristiani, a noi piace il movimento che si fa regime, l’intellettuale che coincide con il militante.


Destra e sinistra nel Fascismo. Quale è stato il rapporto tra queste due «anime» durante il Ventennio? Quale il loro lascito?

Il fascismo è sintesi o non è. La sua forza fu l’unione di tutte le verghe, sottrarne una a posteriori è sbagliato, in qualsiasi senso ciò accada. Si può, ovviamente, avere una sensibilità più affine all’una o all’altra corrente, basta non prepararsi alibi con discutibili viaggi mentali. Chiamo «viaggio mentale» ogni tesi che perda di vista la complessità del reale per venire incontro a mancanze tutte nostre e consentirci di fare le cose più semplici di quanto non lo siano. Il fascismo non fu una semplice variante del socialismo o una parodia di militarismo prussiano. Forse è ora di recuperare un sano «fascismo di centro»...


Evola è stato un punto di riferimento importante degli eredi del Fascismo. Qual è stata la forza e la debolezza del suo pensiero?

Quando, negli anni ’30, tutti si pavoneggiavano con i distintivi del Pnf lui urlò al mondo la sua adesione a idee che trascendevano il fascismo; quando tutti, dopo l’8 settembre, se la squagliavano lui era al suo posto di milizia. Mi sembra che questo basti a definire la statura del personaggio. Molto amato quanto odiato, andrebbe semmai contestualizzato. Diciamo che fu meno importante di quanto credano i suoi adoratori e più di quanto credano i suoi detrattori. Ha scritto diverse cose discutibili e fornito indicazioni esistenziali preziose. Alle prime si sono attaccati tutti gli sfigati del mondo, convinti che la ciclicità del tempo e il kali yuga fornissero un alibi alla loro inettitudine. Sono quelli, per capirci, che continuano a scrivere «epperoché», «femina» e «Aristotile» in ossequio al maestro. E tuttavia non sarà un caso che quanto di meglio è uscito dal nostro mondo rechi una forte impronta evoliana. Pensiamo solo a personalità come Clemente Graziani, Maurizio Murelli, Cesare Ferri, Carlo Terracciano, Claudio Mutti, Walter Spedicato, Adriano Romualdi, Peppe Dimitri, Gabriele Adinolfi. Forse i tempi oggi sono maturi per riscoprire un Evola oltre le incrostazioni, comprese quelle che lui stesso contribuì a creare. Un Evola scintillante e rinnovato. Un Evola mito mobilitante, come nel bellissimo manifesto rosso della conferenza che si svolse a CasaPound nel 2004.


È corretto parlare di egemonia della sinistra nel mondo della cultura e dell’informazione?

Per esserci vera egemonia ci dev’essere un progetto, una qualche idea di società da proporre, una politica. Oggi, palesemente, tutto questo manca. L’egemonia di sinistra è stata una realtà concretizzatasi in una mafia culturale odiosissima. Ora questa egemonia arranca e lascia solo rendite di posizione. Dall’altra parte la destra non sa opporre se non lamenti e alibi per le proprie sconfitte o cialtroni prezzolati che svillaneggiano nei posti che contano finché dura il boss, senza però costruire alcunché. Da una parte c’è un’egemonia in crisi, dall’altra l’incapacità di crearne una nuova. In questo teatrino della sconfitta, l’unica proposta d’avanguardia può essere solo quella volta a creare nuova egemonia. Sull’«Ideodromo» mi è capitato di scrivere: «Guardandoci attorno ora che molti bastioni di quel fortino culturale sono caduti, dobbiamo lanciare un messaggio che sia chiaro e netto: noi l’egemonia non la chiediamo, ce la prendiamo. Se le regole del gioco sono già scritte e ci vedono relegati fuori dallo stadio, noi facciamo invasione. Non cerchiamo scuse o riconoscimenti, ci rimbocchiamo le maniche e ci riprendiamo tutto. Dire che sia facile sarebbe da pazzi. Dire che è impossibile sarebbe da vili».


È possibile proporre un altro modo di fare cultura, che sia incisivo e accattivante, in grado di superare i dettami del «politicamente corretto»?

Il politicamente corretto già non è più cultura, è un rantolo d’agonia. Per il resto, praticamente tutta la cultura che conta del ’900 è affar nostro. Basta con i complessi di inferiorità. Solo noi abbiamo gli strumenti concettuali per interpretare la modernità: usiamoli! Solo dopo aver acquisito tale consapevolezza potremo impostare una seria politica culturale. Che, ovviamente, deve essere tutta puntata a creare senso: dare senso al mondo, dare senso all’epoca presente, dare senso alla comunità nazionale. Se si fa cultura in questo modo non occorre preoccuparsi di avere un approccio «incisivo e accattivante», le cose vengono da sé.


Che cosa rappresenta CasaPound nella cornice politica attuale? Quali le prospettive future?

Rappresenta una speranza, una volontà e una via. Pregi, difetti, prospettive e pericoli non dovrei essere io a indicarli: facendone parte la cosa assumerebbe toni autoelogiativi, questi sì un vero pericolo da evitare. Credo tuttavia di essere oggettivo se affermo che Cpi è la vera novità degli ultimi anni. Le prospettive mi sembrano luminose, a patto di saper capitalizzare la crescita esponenziale del movimento ed evitare l’effetto «recupero» da parte di un sistema che ha sempre bisogno di «cattivi» folcloristici da esibire.


Quali pensi che siano le maggiori qualità di Gianluca Iannone?

Ci sarebbe molto da dire, al riguardo, e invece dirò molto poco, poiché ho l’onore di confrontarmi quotidianamente con Gianluca e so quanto poco ami la personalizzazione delle battaglie di CasaPound. Generosità, lungimiranza, coerenza e genialità dell’uomo sono sotto gli occhi di tutti, anche dei nemici. Interni ed esterni.


Come e perché nasce il manifesto dell’EstremoCentroAlto? Quale idea di società e di politica vuole proporre?

Il manifesto dell’EstremoCentroAlto nasce in onore alla sentenza di Delfi: «divieni ciò che sei». Anche noi siamo divenuti ciò che già eravamo, ovvero spiriti liberi non incasellabili in categorie. La vera sfida ora è esplicitare i contenuti già presenti nel manifesto. Personalmente vedo l’EstremoCentroAlto come una visione originaria, cristallina sulla realtà del terzo millennio, oltre tutti i residui «ideologici» e i viaggi mentali del neofascismo. I tre termini che formano la nuova definizione segnano già una discontinuità in direzione di una politica non falsamente moderata, non ondivaga, non prostituita. Quale idea della società propone? Libertaria ma responsabile, scanzonata ma severa, popolare ma gerarchica. Questo mi sembra appaia chiaramente da parole come queste: «Un’idea ed una comunità sempre in bilico tra imperium e anarchia, un sentimento del mondo che non concepisce alcun ordine sociale al di fuori di un ordine lirico. Una visione che rifiuta il grigiore burocratico della città-caserma tanto quanto l’attrazione morbosa per l’informe, per il deforme, per i maleducati dello spirito. Un’idea politica che disprezza le cosche, le oligarchie, le caste, le sette e le lobby e che immagina, per ogni Stato degno di questo nome, la partecipazione per base, la decisione per altezza e la selezione per profondità». Insomma: uno Stato sovrano che non diventi però un cerbero o un aguzzino, una società in cui sia garantita la circolazione delle élites e il popolo si senta di nuovo padrone del proprio destino.

mardi, 06 avril 2010

Tomislav Sunic répond aux identitaires

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 2004

Tomislav SUNIC répond aux Identitaires 

 

Le 30 Janvier 2004

sunicXXX.jpgRencontre avec le docteur Tomislav SUNIC, enseignant en sciences politiques aux Etats Unis et écrivain croate.

Pamphlétaire et contestataire de la droite antilibérale croate, ancien diplomate, il est l’auteur d’ouvrages traitant entre autre de la géopolitique dans les Balkans, de la démocratie et de l’utopie égalitaire. Tom Sunic dénonce inlassablement le danger de la globalisation mondialiste en train d’éclore sur les décombres du communisme dans les pays de l’Est. Tomislav Sunic est également le correspondant en Croatie de la revue Nouvelle Ecole.

 

Aujourd'hui, il milite notamment pour un véritable rapprochement entre les deux frères ennemis croates et serbes. Cette guerre larvée servant, selon Tomislav SUNIC, les intérêts des ennemis de l'Europe.

 

Au début des années 90, les occidentaux voyaient s'engager le provisoire dernier acte d'une guerre civile européenne qui avait commencé presque 80 ans plus tôt. Quels étaient les ingrédients récurrents de ce conflit yougoslave encore mal compris en France ?

 

Tomislav SUNIC : Les responsables de cet acte de guerre sont à chercher chez les jacobins français, chez Clemenceau, dans le Traité de Versailles, chez Mitterrand, et bien sûr, chez les Américains qui avaient prêché, à partir de 1948 et jusqu’en 1990, “ l’unité et l’intégrité ” d’un pays artificiel, connu sous le nom de “ Yougoslavie ”.

 

Aujourd'hui, vous souhaitez un rapprochement entre les deux frères ennemis croates et serbes. Celui-ci semble encore bien précaire. Comme l'ont démontré les affrontements sérieux survenus lors de rencontres sportives, notamment au cours du match Croatie-Serbie de water-polo du dernier championnat d'Europe, les cicatrices semblent profondes. Bien sûr, les ennemis de l'Europe s'en réjouissent. Une normalisation réelle des rapports croato-serbes est-elle concevable ou encore illusoire ?

 

TS : Laissons le sport à part. Lorsque les équipes de différentes villes croates s’affrontent, il y a toujours une pagaille - comme d’ailleurs partout chez les supporters en Europe. Le problème réside dans la mythologie grande-serbe et la martyrologie grande-croate. Au cours des dernières 70 années, à savoir depuis la fondation de la Yougoslavie en 1919, les intellectuels serbes et croates, n’ont jamais jugé nécessaire de se débarrasser de leurs mythes pseudo-historiques. Le vrai délire commença en 1945 lors de la prise du pouvoir par les communistes, et lorsque l’hagiographie serbe imposa dans les écoles, et auprès du grand public occidental, sa victimologie “ anti-fasciste ” s’élevant à 600.000 Serbes prétendument tués par les fascistes croates de 1941 à 1945. Cette surenchère a eu pour cause, chez les Croates, de profondes frustrations, un romantisme politique souvent bête, et une poussée révisionniste qui aboutit en 1990 à l’éclatement du pays. Hélas, le nationalisme croate est également à la base de sa “ légitimité négative ” ; malheureusement on reste un bon Croate en fonction de son anti-serbisme, c’est-à-dire en diabolisant l’Autre. Le résultat fut la deuxième guerre entre les Serbes et les Croates en 1991.

Tant que les intellectuels serbes et croates ne se mettront pas sérieusement au travail pour examiner leurs victimologies respectives, et qui remontent à la deuxième guerre mondiale, la guerre larvée sera là, au grand plaisir des ennemis de l’Europe.

 

Croatie et Serbie semblent rivaliser d'ardeur pour livrer leurs patriotes respectifs au Tribunal Pénal International de La Haye. Quel est votre avis sur cette Cour et sa légitimité ?

 

TS : Aucun. La Cour de La Haye fonctionne d’après le principe du “ deux poids deux mesures. ” Ce qui n’est pas permis aux Serbes et aux Croates, est loisible pour les guerriers américains, israéliens, etc… Revenons à la phrase lapidaire de Carl Schmitt : “ Auctoritas non veritas facit legem ” (*). En bon français, c’est la qualité du flingue qui décide qui ira à La Haye, qui aura raison et qui aura tort, et qui va façonner par la suite le droit international. Le Tribunal de La Haye est un alibi pour l’incompétence de la classe politique en Union Européenne, qui fut d’ailleurs totalement incapable de mettre fin au conflit yougoslave dans les années 90.

 

Bien que les composants soient un peu différents – distinctions ethniques plus franches – les gouvernements des principales capitales européennes continuent leur politique de l'autruche, et semblent nier l'évidence en minimisant la possibilité d'affrontements multiculturels et/ou multiethniques graves dans les années à venir. Est-ce, selon vous, lâcheté ou volonté délibérée de refuser l'évidence ? Qu'est-ce qui pourrait faire échapper l'UE a une crise “ à la yougoslave ” ?

 

TS : “ L’Euroslavie ” actuelle ressemble étrangement à l’ex-Yougoslavie. Soyons sérieux. Le système bruxellois n’est pas conçu comme vecteur pour réunir les peuples européens dans un destin commun. L’UE est un vaste marché, un bazar dont l’avenir dépend uniquement d’un perpétuel bond économique en avant.

 

En effet, qui aurait cru que la Yougoslavie multiculturelle allait éclater en décombres ? Je crois que la même “ balkanisation ” attend l’Union européenne demain, avec des conséquences beaucoup plus graves. Tant que l’État-providence fonctionne, bon gré mal gré, tant que les allogènes reçoivent leur morceau de sucre de la part des contribuables européens, le calme est garanti. Une fois que la crise économique deviendra palpable, nous serons témoins d’une guerre civile autrement plus sauvage que dans les Balkans. Victime de ses illusions du progrès, et croyant naïvement en la théologie du marché libre, l’Union Européenne va devenir la proie de ses propres chimères. Le soi-disant bon fonctionnement de l’UE, avec son prétendu élargissement à l’Est, ressort d’un nouveau romantisme politique. Ce projet reste la plus grande imposture après la deuxième guerre mondiale.

 

Pertes des valeurs traditionnelles, plaisirs petits-bourgeois, dévirilisation, paradis artificiels, le matérialisme libéral triomphe en Europe occidentale. Quelle est votre réponse au chaos du monde moderne ?

 

TS : Lorsqu’on lit les écrivains des années trente nous nous rendons compte du même scénario en Europe. Nul doute, le libéralisme touche a sa fin. Le roi est nu ; il n’a plus de repoussoir communiste. Donc sa dégénérescence apparaît plus clairement. Tant mieux. Il faut que la situation empire davantage, pour que davantage de gens puissent déchiffrer l’ennemi principal.

 

On a dit que Rome était tombée car ses Dieux l'avaient abandonnée. Voyez-vous dans la perte totale de sens du sacré en Occident, une des causes profondes de son déclin ?

 

TS : Bien entendu. Même les grandes religions monothéistes ne sont plus capables d’insuffler le sens du sacré à leurs brebis. Hélas, dans la perspective historique, cinquante, voire une centaine d’années, ne veulent rien dire. Mais pour nous-mêmes, pour qui le temps vole si rapidement, il est peu probable que le grand retour des dieux ait lieu pendant notre parenthèse terrestre… Mais, peut-être dans une vingtaine d’années, verrons-nous la grande renaissance des dieux européens !

 

Les hommes debout au milieu des ruines - identitaires éveillés- ont coutume de dire que le soleil se lèvera à l'Est. Le salut de l'Occident peut-il venir de l'exemple des jeunes générations d'Europe de l'Est ? Et, selon vous, un rapprochement concret des forces nationales de chacun des pays de l'Ouest et de l'Est pour une renaissance européenne est-il sérieusement envisageable ?

 

TS: Le grand avantage du communisme fut sa barbarie et sa transparence vulgaire. Son grand avantage fut également qu’il sut préserver, malgré son dogme international, l’homogénéité ethnique des Européens de l’Est. La Russie, la Croatie, la Serbie, l’Estonie, etc. restent des enclaves blanches, de solides “ camps des saints ”. Espérons que la classe dirigeante en Europe orientale ne va pas tomber dans la surenchère du mimétisme pro-occidental et qu’elle ne va pas remplacer sa maladie de “ l’homo sovieticus ” par la nouvelle pathologie de “ l’homo occidentalis ”. Il y a quelques signes encourageants que cette Europe cioranienne commence à s’apercevoir de l’imposture occidentalo-libérale. Mais pour mener le travail de renaissance à son terme, il faut que ses citoyens fassent table rase de leur petit nationalisme et qu’ils abandonnent la haine de l’Autre, c’est-à-dire de leurs voisins. Les individus sages et cultivés de l’Europe occidentale pourraient y aider et cela d’une manière considérable.

 

Pour finir, un message pour les visiteurs du site “ les-identitaires.com ” ?

 

TS : Unissons nos forces identitaires et patriotiques, apprenons les langues et la culture de nos voisins européens ! Pratiquons l’identification – non seulement avec notre tribu – mais surtout avec l’Autre, à savoir nos frères voisins européens !

(*) Littéralement : “ C’est l’opinion et non la vérité qui fait la loi ”, à prendre ici au sens de “ C’est l’autorité et non la vérité qui commande à la loi ”.

 

Propos recueillis par Renaud BOIVIN

Pour en savoir plus : http://doctorsunic.netfirms.com

samedi, 03 avril 2010

Intervista a Gabriele Adinolfi

Intervista a Gabriele Adinolfi

Ex: http://augustomovimento.blogspot.com/


Gabriele Adinolfi è nato a Roma nel 1954. Tra i fondatori di Terza Posizione, è analista politico e scrittore. Ha collaborato a numerose iniziative culturali, tra cui «Orion», gestisce il sito di informazione «Noreporter» e ha istituito il Centro Studi Polaris.


Quali sono i miti, gli autori e le esperienze che consideri parte integrante del tuo bagaglio politico-culturale?

Silla, Cesare, Augusto, Giuliano, gli Ottoni, Barbarossa, Carlo V, Napoleone e i grandi dell’Asse.
Poi, sul piano degli scrittori, Friedrich Nietzsche, in cui è essenziale lo sforzo poetico dello spirito guerriero, il coraggio di guardare la nudità senza arrossire; Pierre Drieu La Rochelle, la sobria e cosciente concezione di vivere la tragedia; Julius Evola, il nume che ti presenta direttamente la tua verità ancestrale e quella divina; Benito Mussolini, il pensiero lineare e lirico in geometrie perfette; Luigi Pirandello, come dice lui stesso, «le maschere nude», quindi l’ironia divina nell’introspezione della commedia umana; Jean Mabire, la capacità di disegnare paesaggi e personaggi eroici propri ad un romanziere, che è stato ufficiale di commando e che resta legato ad un immaginario pagano; infine Alexandre Dumas, l’espressione delle gerarchie valoriali che si rivelano nel pieno delle passioni umane. Ma penso si debbano aggiungere anche Emilio Salgari che con i suoi capolavori di avventura ha creato un immaginario impareggiabile invitandoci a vivere sul serio, ed Edmondo De Amicis che con il libro Cuore ha insegnato e formato tantissimo le generazioni che vanno da quella cresciuta immediatamente prima del fascismo alla mia.


Soppressione delle libertà politiche, leggi razziali, imperialismo coloniale, alleanza con Hitler. Queste sono le classiche accuse rivolte al Fascismo dalla vulgata corrente. Che cosa rispondi a chi presenta tutto ciò come la definitiva condanna in sede storiografica e politica del Ventennio?

Che chi lo pensa è ignorante, male informato o prevenuto.
Il Fascismo e l’Asse hanno rappresentato l’espressione piena e vitale della libertà e della dignità dei popoli e lo hanno fatto da ogni punto di vista: esistenziale, politico, culturale, finanziario, economico, energetico e sociale.
Chi ha conculcato le libertà, oltre ad aver eliminato centinaia di milioni di uomini, chi ha imposto il sistema criminale e mafioso in cui versa oggi un pianeta allo sbando, preda dello sfruttamento integrale di popoli, individui e risorse, della speculazione intensiva ed estensiva che si estende al sistematico utilizzo del narcotraffico e alle miliardarie e delinquenziali operazioni farmaceutiche che apportano epidemie e impediscono qualsiasi cura di successo, è proprio chi alla Germania dichiarò guerra nel 1939 e poi combatté contro di noi ed il Giappone. Si tratta di quegli stessi che, dopo aver commesso il genocidio completo dei nativi americani, hanno compiuto i massacri al fosforo, al napalm e con le bombe atomiche.
Non possono così che suonare grottesche le accuse mosse all’Asse; in particolare quella che va ultimamente alla moda di prendersela con il Fascismo per le leggi razziali, stilate peraltro al varo dell’Impero, «dimenticando» che tra i «buoni» le leggi razziste erano attive, dall’arrivo dei «progressisti» al potere, come in Francia dove furono introdotte da un premier israelita o negli Usa dove rimasero attive fino al 1964. Pretendere che queste fossero un motivo di differenziazione e di scontro è ridicolo come lo è la distrazione odierna, visto che nessuno si scandalizza per quelle tuttora in vigore in Liberia e in Israele.
Che i padrini della mafia americana e cosmopolita o i lacchè dello stalinismo possano aver presentato, a posteriori, il Fascismo e l’Asse in questo modo falso e fittizio ci sta pure: hanno vinto e possono fare quello che vogliono, anche imporre leggi contro la ricerca storica. Poiché poi la menzogna è tipica della loro cultura, è normalissimo che la propaghino ovunque a mascheratura della loro sozzura.
Quello che non si può invece avallare è il tentativo pietoso di coloro che, avendo frequentato ambienti diversi dai dominanti, ambienti in cui proprio la conoscenza storica è la prima attività politica, si affannino a dire bestialità di questo tipo nel vile e servile conato di essere accettati. Non si sa bene da chi vogliano esserlo né come sperino di riuscirci perché chi striscia non piace neppure a colui verso cui si prosterna. Ma mi chiedo anche perché mai costoro dovrebbero fare carriera.
Cos’hanno, infatti, da farci la Nazione, il popolo, la stessa umanità, di gente così?
Infine ci sono quelli a cui, come si dice a Roma «non regge la pompa»: quelli che hanno paura di essere giudicati e cercano di farsi strada a gomitate «prendendo le distanze» da questo o da quell’aspetto, in modo da non sentirsi scomunicati. La scala di valori tra costoro varia: molti sono semplicemente dei deboli, altri sono degli influenzati, comunque scarsamente combattivi, parecchi invece sono dei banali miserabili.
Non hanno la forza e il coraggio di andare in fondo nella ricerca della giustizia e della verità e preferiscono evitare di pagare dazio, gettando al mare la memoria dei vinti perché tanto non costa nulla. Infatti perdono solo la dirittura e la dignità.


Uno sguardo all’attualità. Come giudichi sinteticamente Berlusconi e la sua politica estera?

Berlusconi è un po’ Craxi, un po’ Pacciardi e un po’ Cossiga. Ovviamente è soprattutto craxiano, anche se il ruolo dell’Italia è cambiato sulla questione palestinese; infatti, a differenza di Craxi, Berlusconi è filo-israeliano. Ma non dimentichiamoci che non c’è più Arafat dalla parte dei palestinesi, e quindi mancano le parti con cui dialogare.


Oltre a un’innegabile componente craxiana, in Berlusconi rivedi confluite anche altre tradizioni politiche, per esempio di un Giolitti?

Sicuramente Berlusconi ha una componente giolittiana. Nondimeno il presidente più simile a Giolitti è stato Andreotti.


Che ne pensi della politica economica dell’attuale governo?

L’Italia, dal punto di vista capitalista, diplomatico ed energetico, sta seguendo le linee di politica estera già abbozzate e poi delineate da Mussolini verso est e sud. Ribadisco che tuttavia il modello politico, sociale e culturale non è sicuramente mussoliniano.


Sul caso Alitalia, come giudichi il comportamento dell’esecutivo?

In Italia il capitalismo funziona sul consociativismo e sul co-interesse. Ossia: più do da mangiare ad un nemico e meno lo ho contro.


Quale reputi che sia l’influenza della massoneria oggi?

Nei precedenti governi, compresi quelli Berlusconi, ci furono certamente uomini con una forte connotazione massonica e con un passato di quel marchio, ma oggi i poteri forti sono altra cosa: a livello nevralgico c’è una compenetrazione di interessi vaticani, laici, protestanti, israeliti che convivono tramite strutture miste. L’«Ancien Régime» vuole questo consociativismo con le comunità islamiche, e questo modello è dettato da Usa e Francia.


Come giudichi la caduta dell’ultimo Governo Prodi?

Vista la situazione internazionale, con il Trattato di Lisbona, è interesse dei centri di potere che vengano fatte determinate riforme. I poteri forti volevano Prodi, ma è impossibile governare ricorrendo ogni volta al voto determinante dei senatori a vita. Quindi, dopo aver concepito l’irrimediabilità della bancarotta per il governo Prodi, i centri di potere hanno permesso nuovamente a Berlusconi di gestire la situazione. Tuttavia Murdoch, i magistrati e la CEI sono in conflitto con il Cavaliere, che però è supportato dal Vaticano. Le oligarchie comunque non sono di certo filo-berlusconiane.


La Mafia è, secondo te, un potere forte?

Non totalmente. Lo Stato non la può abbattere e non ha i mezzi per farlo. Ma, qualora acquisisse tutto questo, lo potrebbe fare sicuramente.


Perché Berlusconi è entrato in politica?

Entra in politica per salvare le tv. Poi, dopo averci preso gusto, ha deciso di rimanerci ed ampliare il suo impero, entrando in collisione con i magistrati.


Che cosa ne pensi delle affermazioni di Gelli su Berlusconi? Secondo te chi ha fatto entrare il Cavaliere in politica?

A proposito di Gelli, non è affatto vero che la P2 voleva bloccare l’avanzata comunista al governo. Inoltre va detto che ricevere complimenti da Gelli non è affatto positivo; magari Gelli li ha fatti perché, avendo perso la leadership, è geloso di Berlusconi. Resta comunque una persona poco credibile e, quel che è certo, non è stato lui a far entrare il Cavaliere in politica, ma piuttosto Bettino Craxi e Francesco Cossiga.


Capitolo «Gianfranco Fini»: con le sue ultime scelte, dove vuole arrivare?

Innanzitutto voglio precisare che ritengo che Fini sia mosso dall’invidia nei confronti di Berlusconi. Ad ogni modo, il suo sogno è fare il Presidente della Repubblica, ma forse ha fatto calcoli inesatti, perché nel suo giochino «scandalistico» ottiene consenso a sinistra, che tuttavia è effimero: la sinistra infatti non lo sosterrebbe mai a discapito di un suo esponente. Un altro suo possibile errore è l’eccessiva convinzione che sembra nutrire di essere tutelato e garantito da centri di potere esteri, che, a parte Londra, non hanno motivi per appoggiarlo.


Ultimamente si sono accese roventi polemiche sul ruolo effettivo di Di Pietro in Tangentopoli. Tu come la vedi?

Americani e comunisti, sapendo che non avrebbe mai potuto affossare il Pci, hanno fatto fare a Di Pietro una manovra politico-giudiziaria che ha spazzato via tutti i partiti politici del tempo, escludendo solo il Pci. Non a caso, per darsi una collocazione politica, si è fatto aiutare da Occhetto che, comunque, resta per me il vero regista della manovra di Tangentopoli.


Passiamo velocemente alla storia. Riguardo alla Guerra Fredda, che cos’è che non ci ha raccontato la storiografia ufficiale?

La Guerra Fredda si è combattuta realmente in Asia, non in Europa. Kennedy e Krusciov, che passano per moderati, sono stati coloro che hanno alzato maggiormente il tiro e rischiato seriamente di arrivare ad uno scontro armato. Da questa situazione chi ne ha tratto vantaggio è stata la Cina, perché è stata utilizzata dagli USA in funzione anti-sovietica.


Non furono in pochi coloro che, dopo la disfatta bellica, traslocarono dal Pfr al Pci, come ad es. Stanis Ruinas. Come giudichi questa scelta? Fu un tradimento o un percorso rivoluzionario alternativo?

A mio giudizio è dura passare il solco tra Fascismo e Pci, in particolare dopo le stragi ignobili commesse dai partigiani; anche se il Msi è lontano anni luce dal Fascismo, non bisogna dimenticare che il Movimento Sociale non aveva spazi e perciò, invece che scomparire, ha dovuto fare delle scelte. Il problema di quel partito, secondo me, è comportamentale, perché questo al suo interno aveva personaggi rivoluzionari, ma aveva una gestione para-statale. Comunque in politica non esiste il «giusto» o «sbagliato»: ciò che conta è l’uomo e nel Msi purtroppo vi fu molto l’inversione delle gerarchie con tutto quello che ne è conseguito.


Torniamo alla politica attuale. Quali prospettive per CasaPound?

Innanzitutto dipenderà dal ritmo che CasaPound avrà, anche se a mio parere gli allargamenti numerici sono stati negli ultimi tempi un po’ eccessivi e la obbligano a un forte impegno per rispondere al suo clamoroso successo. Ma dal punto di vista della creazione artistica e delle capacità dialettiche e mediatiche, CasaPound sta bruciando qualsiasi record. Proprio per questo ci vuole tenuta. Ad oggi è difficile capire quali siano i limiti che possa incontrare e quali gli obiettivi che le possano essere preclusi, se riesce a mantenere una corsa cadenzata.


Come giudichi le accuse di entrismo, giunte sia da destra che da sinistra, rivolte a CasaPound?

CasaPound ha abbandonato l’infantilismo destro-terminale e lo ha fatto senza sottostare alle logiche dell’entrismo. Questo fa letteralmente impazzire i duri e puri della «masturb-azione» che vedono ogni giorno la fotografia dell’essere radicali, idealisti e concreti e non hanno alibi per motivare la loro mancanza di azione.


Parliamo di Polaris. Come nasce questo centro studi, e perché?

Nel sistema moderno ed oligarchico, un ruolo essenziale nella formazione delle élites è dovuto ai think tank, che restano comunque un modello americano. Anche in Europa esistono, mentre in Cina e in India si stanno sviluppando. In Italia i centri studi, se hanno forza, producono programmi scientifici (come la Fondazione Ugo Spirito), oppure sono salotti correntizi dei politici che hanno tendenza alla superficialità. Il think tank fa analisi, propone soluzioni e strategie per conto di poteri forti economici privati. Polaris prova una terza via, cioè tracciare e proporre analisi e strategie per tutti gli operatori politici ed a vantaggio della nazione. Facendo un esempio, è come un’agenzia di servizi per le questioni politiche, giuridiche ed economiche; al contrario di come spesso avviene, Polaris è cresciuta gradualmente e da marzo editerà una pubblicazione trimestrale, che si pone ai livelli e nelle competenze trattate di riviste come «Limes» o «Aspenia».


Come è possibile coniugare movimentismo futur-ardito, attività culturale d’avanguardia ed elaborazioni strategiche ad ampio respiro?

Essenzialmente bisogna coniugare strutture a importanti reti relazionali.



jeudi, 25 mars 2010

H. de Sy: "De top van de Vlaamse Beweging is even Jacobijns als Parijs"

Hubert de Sy: "De top van de Vlaamse beweging is even Jacobijns als Parijs"

Christian Dutoit 

Ex: http://www.meervoud.org/

Vlaams.jpgEen hekelschrift. Zo noemt auteur Hubert de Sy zelf het boek dat hij vorig jaar uitgaf met als merkwaardige titel 'Het belgicistisch regime en de Vlaamse maar versnipperde beweging'. Volgens de achterflap verkondigt het boek 'politiek uiterst non-correcte meningen en stellingen.'
Het boek kende enig succes en is binnenkort aan zijn derde druk toe. Tijd voor Meervoud om een gesprek aan te gaan met de auteur over zijn 'hekelschrift' en over wat hem ertoe brengt zich als nestor (de Sy werd geboren in 1921) en na een lange en zeer gevarieerde carrière (oud-koloniaal ambtenaar, directeur van de Vlaamse Elsevier, VEV,...) in te laten met die 'versnipperde' Vlaamse beweging.

- Uw boek wordt door velen die het gelezen hebben, waaronder ikzelf, als nogal 'pessimistisch' aangevoeld. In een inleiding laat u Trends-directeur Crols ongeveer zeggen dat Brussel een blok aan het been is van de rest van Vlaanderen, en u schijnt zich daarbij aan te sluiten.

Hubert de Sy: Ik wens dat niet, maar ik denk dat er geen andere mogelijkheid meer is. Brussel heroveren, dat vind ik een utopie. Een dwaasheid. Niet alleen kunnen we niet op tegen de Franstalige belgicisten, maar binnen vijf jaar zijn de Arabieren baas. Hoe kunnen wij dat omkeren? Waar ik aan denk is, als Vlaanderen onafhankelijk is of zelfbestuur heeft, Brussel af te kopen. Met geld, veel geld. Brussel en Wallonië leven maar dank zij het geld van de Vlamingen. Je mag dat draaien of keren zoals je het wil.

- Eigenlijk geeft u nu Henri Simonet postuum gelijk, die ooit beweerde dat de verfransing van Brussel een 'onomkeerbaar sociologisch feit was'?

Hubert de Sy: Dat is een maatschappelijk fenomeen, daar kan je niet tegenop. Dat kun je niet tegenhouden met wetten.

- Maar Brussel 'afkopen'? Dat is een zachte variatie op wat Guido Tastenhoye van het Vlaams Blok hier ooit in deze kolommen verkondigde. Hij wou natuurlijk wel de ring afsluiten of de Brusselaars eventueel onder water zetten. Maar goed, ...

Hubert de Sy: Kijk, Brussel kan niet leven zonder geld van Vlaanderen. Dus kan Vlaanderen zeggen: je krijgt geld, mààr!

- Brussel is toch een economisch verlengstuk van Vlaanderen?

Hubert de Sy: Brussel is inderdaad een economisch verlengstuk van Vlaanderen, maar of er nu een Belgisch, een federaal of een confederaal systeem is, die economische relatie tussen Vlaanderen en Brussel heeft daar niets mee te maken. De structuur van de staat verandert niets aan de commercie. De Vlamingen gaan blijven verkopen. Als Delhaize of GB goedkoper varkensvlees vinden in Vlaanderen, dan gaan ze toch niet zeggen:Vlaanderen, dat is een andere staat. Dan gaan ze dat toch gewoon kopen. De economische middens trekken zich niets aan van het staatsbestel.

- In het verleden is het toch al gebeurd dat Wallonië liever bussen ging kopen in Frankrijk dan in Koningshooikt, de Van Hool-affaire.

Hubert de Sy: Dat is toch zeker zeer marginaal.

- En onlangs dreigde Di Rupo er nog mee Vlaamse producten te boycotten als er een nieuwe ronde in de staatshervorming zou komen?

Hubert de Sy: Dat is een politiek discours. In de praktijk kan dat misschien werken voor vijf procent van de economische uitwisseling.

- Ik kom nog even terug op de commentaren op uw boek. De meeste commentatoren en recensenten noemen het pessimistisch. Bent u pessimist van nature of het geworden?

Hubert de Sy: Ik moet toegeven dat mijn vrouw dat ook soms zegt. Maar als iemand iets zegt dat niet strookt met 'la pensée unique', dan ben je automatisch een pessimist. Ik beweer dat ik mijn best gedaan heb om rekening te houden met naakte feiten, en te trachten nuchtere gevolgtrekkingen te maken. Dat is mijn standpunt. Ik geef u het voorbeeld, dat voor mij emblematisch is, van de splitsing van Brussel-Halle-Vilvoorde. In dit geval heeft zelfs de top van de Vlaamse intellegentsia gezegd aan de Vlaamse politici dat ze eindelijk eens gebruik moesten maken van hun parlementaire meerderheid. Het heeft niet geholpen. Ze hebben het een tweede keer gedaan. Het heeft absoluut niet geholpen, integendeel. De resultaten van de kieswet zijn erger wat er ooit geweest is en ze zijn nu definitief vergrendeld. Brussel-Halle-Vilvoorde staat nu als kiesdistrict compleet open voor de propaganda van Franstalige politici. Wat heeft dat met pessimisme te maken? Het heeft te maken met het aanhalen van concreet controleerbare onbetwistbare feiten die aantonen dat de Vlaamse beweging niet alleen meer vooruit gaat maar integendeel achteruit gaat. Je kan zo honderd voorbeelden aanhalen.

- Hoewel het economisch niet zo goed voor de wind gaat doet Vlaanderen het voorlopig nog economisch beter dan Wallonië en Brussel. Hebt u er een verklaring voor waarom dat zich niet politiek vertaalt?

Hubert de Sy: Je bedoelt dat de economische macht zich politiek niet uitdrukt? Dat wordt moeilijk. Ik was toen actief in het Vlaams Economisch Verbond, toen de eerste regionalisering plaatsvond. Toen ging het goed met de inkomsten van het VEV, omdat ik het argument had om via die regionalisering te pleiten voor een grotere samenwerking met het VEV eerder dan met het VBO. Rekening houdende met een nieuwe economisch-politieke context. Zeer vlug hebben wij dan vastgesteld - na vijf of tien jaar - dat de Vlaamse economische middens ingezien hebben dat de macht van het Belgisch establishment, het Belgisch kapitaal, belgicistisch gebleven was en dat ze daar niets tegen konden doen. Een zakenman moet geld verdienen of vooral in leven blijven. Ze hebben ingezien dat ze in een Belgische context leven en dat het zakelijk gevaarlijk is zich flamingant op te stellen. Omdat ze te doen hebben met de macht van de Générale, Paribas enzovoort. Kort na de oorlog had je nog fabrikanten, ik denk aan Sabbe, die hun bedrijf De Vlaamse Tapijtweverij noemden. Het is ondenkbaar dat men vandaag een bedrijf opricht dat zich 'Vlaams' noemt. Die mensen kwamen uit Vlaamse college's waar ze liederen zongen als 'Mijn Vlaandren heb ik hartlijk lief' en 't zijn weiden als wiegende zeeën'. Dat is nu totaal gedaan. Wat doen de katholieke scholen vandaag? Die leren veilig vrijen.

- Kom, de tijden zijn toch ook wel enigszins veranderd.

Hubert de Sy: Ik wil maar zeggen dat het identiteitsbewustzijn maar kan komen uit de familie en uit het onderwijs. Dat gezeur, dat emmeren over identiteit heeft geen zin. Welk onderwijsprogramma is er vandaag nog dat de Vlaamse beweging uitlegt? Dat is toch essentieel, niet alleen voor Vlaanderen maar ook voor België.

- OK, u bent een weinig pessimistisch. Probeert u eens na te gaan wat er vandaag dan wèl nog goed is aan de Vlaamse beweging?

Hubert de Sy: Wat is er verkeerd aan de Vlaamse beweging? Wel, ik ga natuurlijk niet akkoord met Schiltz die zegt dat de Vlaamse beweging afgedaan heeft omdat we nu een Vlaams parlement hebben.

- Rekent u Schiltz tot de Vlaamse beweging?

Hubert de Sy: Neen. Hij en de Spirit-groep hebben de Vlaamse beweging ontmand. En de Spiritgroep, met Anciaux aan de kop, heeft ze afgemaakt. De Vlaamse beweging is nu meer dan ooit nodig. Maar de strategie is verkeerd. Sedert dertig jaar is men bezig over de Vlaamse identiteit en over de eerbaarheid van het Vlaams-nationalisme. Kijk, die Vlaamse identiteit: elk volk heeft zijn identiteit. Waarom moet dat bewezen worden? Het moet eventueel via het onderwijs en de kleine verenigingen uitgelegd worden. De Vlaamse identiteit bestaat, maar het identiteitsbewustzijn bestaat niet. De strategie is verkeerd omdat men bezig is met dingen die evident zijn. Nationalisme is gelijk een broodmes, je kunt ermee doen wat je wil. Je kunt er brood mee snijden, en dat is goed, maar je kunt ook de nek oversnijden van de vijand. In 'Doorbraak' heeft Manu Ruys dat 'Byzantijns' academisme genoemd. Centraal voor de Vlaamse beweging zijn het gedachtegoed van Maurits Van Haegendoren, en Lode Claes. De eerste zei: red de democratie, en Vlaanderen zal gered zijn. En de tweede had het over de 'afwezige meerderheid'. De Vlaamse beweging moet zich toespitsen op diegenen die potentieel iets kunnen veranderen aan de situatie. En dat zijn namelijk de politici. Je kan maar een wet baren en doen uitvoeren via het parlement. Je gaat er toch niet van uit, zoals Tastenhoye, dat we gaan opstaan en plaats nemen in de loopgraven. Dat is toch te knettergek. Enkel de parlementairen kunnen Vlaanderen zelfstandigheid geven of, voor degenen die het wensen, onafhankelijkheid. Die moeten dus het vuur aan de schenen gelegd worden. Aan de electorale schenen dus. Ach, als je die Nieuwe Politieke Cultuur van Verhofstadt nu ziet. Er zijn nog nooit zoveel politieke benoemingen geweest. En de groenen doen daar hevig aan mee. De Vlaamse beweging heeft geen boodschap aan steriel academisme. De top van de Vlaamse beweging is even Jacobijns als Parijs. Kijk naar dat recente congres over identiteit...

- Van de Marnixring?

Hubert de Sy: Inderdaad. Manu Ruys heeft daar zeer kritisch op gereageerd. Er waren 40 sprekers, het was internationaal, en er waren 500 of 600 aanwezigen. Het bewijs dat het gelukt was is het feit dat de voorzitter achteraf uitgenodigd werd op een drietal internationale congressen. Hoeveel schuppen aarde zal dat aan de Vlaamse zaak bijbrengen? Niets. Niets, niets.

- Wat zou u dan wel willen zien?

Hubert de Sy: Twee dingen. Eerst de strategie. Er zijn honderden kleine Vlaamse verenigingen en honderden kleine blaadjes. Men moet die basis inschakelen. Er is geen middenveld die de idealen van de Vlaamse beweging vertaalt naar het gewone volk. En ten tweede moet aan de Vlamingen uitgelegd worden wat de economische en culturele nadelen zijn van de huidige politiek. Cultureel de verfransing van Vlaams-Brabant. Economisch het aantal euro's dat jaarlijks gespendeerd wordt aan de Franstaligen. Dit soort dingen moet gevulgariseerd worden. We moeten opnieuw samen bewegen. En nu beweegt iedereen in zijn eigen hoekje. Maar ik heb weinig vertrouwen in de Vlaamse intelligentsia. Hoeveel zouden er zich nog als Vlaming durven uiten? Zou het vijf procent zijn? Kijk naar een Guido Van Gheluwe (oprichter van de Orde van den Prince, nvdr). Dat is een hevige flamingant, bijna Blokker aan het worden vrees ik zelfs. Maar die durven niet naar buiten treden. Hij is dolgelukkig met mijn boek, omdat ik zeg wat hij niet durft zeggen.

- Er zijn ook mensen die juist omwille van het Vlaams Blok niet meer naar buiten treden.

Hubert de Sy: Het Vlaams-nadelige van het Vlaams Blok is dat men alles wat Vlaamsgezind is amalgameert met het Blok.

- In die zin is het Vlaams Blok dan een blok aan het been van de Vlaamse beweging?

Hubert de Sy: Dat schrijf ik letterlijk. Het cordon sanitaire is natuurlijk totaal ondemocratisch, maar dat belet niet dat de situatie zodanig geëvolueerd is dat de reputatie van het Vlaams Blok door dat systematisch amalgameren door mannen als Ludo Dierickx, Mark Spruyt en onze filosoof daar, hoe heet hij ook weer...

- U bedoelt Dieter Lesage?

Hubert de Sy: Ja, iemand die zich altijd filosoof verklaart. Die zijn erin geslaagd de Vlaamse beweging te demoniseren. En dat is een drama.

- Nu even iets helemaal anders. Wat vindt u van de activiteiten van het TAK?

Hubert de Sy: TAK? (denkt even na). Zeer positief. Kijk, twintig of dertig jaar geleden hadden wij 'taaltuinen'. Met Mark Galle, op de radio. Als je vandaag naar Ninove gaat, dan daag ik u uit om te verstaan wat ze daar zeggen. Antoon Roosens, die ik in mijn boek citeer, heeft ooit gezegd dat een volk zich niet kan laten respecteren als het geen cultuurtaal heeft. En wat doet de Vlaamse beweging daarvoor? Niets. Niets, sorry, niets.

- Maar nu verwart u het TAK een beetje met de Vereniging Algemeen Nederlands of de vroegere ABN-kernen.

Hubert de Sy: Het TAK, ik vind dat perfect. Het TAK, u bedoelt daar dus mee de mensen die tegen het Frans en het Engels zijn.

- Laten we even verder gaan. De Vlaamse Volksbeweging? De vorige voorzitter, Ivan Mertens, voorspelde de Vlaamse onafhankelijkheid voor vorig jaar...

Hubert de Sy: De VVB is even belangrijk als ze ooit geweest is. Maar ze volgt een verkeerde strategie. Ze werkt defensief. Vlaanderen Staat in Europa, dat spreekt niet tot de bevolking. Hoeveel Vlamingen kennen het verschil tussen volk, staat, natie, enzovoort... Ze houdt zich bezig met identiteit en de eerbaarheid van de Vlamingen. Ze moet veel agressiever worden. Ze moet vooral de basis betrekken.

- Hoe staat u dan tegenover het Vlaams Blok? Die partij heeft een volkse basis, of niet?

Hubert de Sy: Interessant. Daar kun je niet in twee woorden op antwoorden. Het Vlaams Blok is opgericht door Hugo Schiltz. Dat heeft Mark Grammens gezegd. Daar ga ik 100% mee akkoord. Het verraad van Hugo Schiltz ligt aan de oorsprong van het VB. In het VB heb je de overschotten, de restanten of de naweeën van de collaboratie en vooral van de repressie die het grootste schandaal van de Belgische geschiedenis is. Die rechtse of zelfs uiterst-rechtse strekking zindert vandaag nog altijd na bij mensen van het VB. Denk ik toch.

- Anderzijds recruteren ze een flink deel van hun electoraat bij vroegere SP-kiezers. Hoe verklaart u dat dan?

Hubert de Sy: Da's toch makkelijk. Als er op de markt een ruimte komt, dan is er altijd wel iemand die erin springt. De SP is een kaviaar-SP geworden en wordt het elke dag nog iets meer. Het Vlaams Blok is daar natuurlijk ingesprongen. Het VB is naar de gewone mens gegaan met het Vlaamse idee en natuurlijk ook met het migrantenidee. Het VB heeft rekening gehouden met de gewone Vlaamse mensen die in buurten wonen die overstelpt worden met migranten, en gaat ervan uit dat dit ook mensen zijn. En dat die mensen soms gedurende twee generaties gewerkt hebben voor een eigen huis, en dat hun eigen huis vandaag niets meer waard is. En daar houdt pater Leman géén rekening mee. En dat vind ik onzindelijk. Dat vind ik schandalig. Die mensen worden veel meer gediscrimineerd - vind ik - dan sommige migranten. OK, migranten worden wel gediscrimineerd, maar positief gediscrimineerd, sorry. Maar positieve of negatieve discriminatie, discriminatie is altijd verkeerd en ondemocratisch.

- Via uw talloze lezersbrieven bent u een actief medewerker van 't Pallieterke.

Hubert de Sy: Kijk, 't Pallieterke is een troostappel voor veel flaminganten. Daar lezen ze wat ze graag horen. Daar kunnen ze hun zeg kwijt. Het is vooral de troostappel voor de ouderwetse flamingant. Ik vind het zeer belangrijk, maar nog eens, de belgicistische middens zijn er ook in geslaagd 't Pallieterke te demoniseren. Van het bij Hitler te zetten. Dat is spijtig, maar wat kun je eraan doen? De belgicistische middens hebben àlle media in handen.

- Wat vindt u van de huidige evolutie bij het Ijzerbedevaartcomité?

Hubert de Sy: Wel, Lionel Vandenberghe heeft het Comité ontluisterd en vandaag loopt hij over naar de SP.a. Alle overlopers zijn onzindelijke mensen, maar hij is nog veel onzindelijker want hij loopt over van het Vlaamse naar het Waalse kamp. SP.a is een aanhangsels, via handen, voeten en portefeuilles, zetels en prebendes gebonden aan de PS en die PS is dé echte pest voor Vlaanderen. Omdat ze de macht hebben. Hij is dus de schaamte en de schande voorbij.

- Bent u ooit op de Ijzerbedevaart geweest?

Hubert de Sy: Ja, één keer. Maar de bedevaart is kapotgemaakt door de politieke partijen. In het begin de Volksunie, later de CVP. Zij hebben het dus gepolitiseerd. En al wat gepolitiseerd is, is rot. Per definitie. Vrede en geen oorlog, dat is het essentiële. Men had nooit die nazi's uit Holland en vooral uit Duitsland naar Diksmuide moeten laten komen. Dat was een fout van het Comité, dat kunnen ze zelfs niet aan het Blok verwijten. Het Vlaams Blok heeft daar overigens ook stommiteiten gedaan. Verreycken gedroeg er zich als een feldwebel. Daar is het Vlaams Blok enorm fout geweest.

- Hoe staat u tegenover N-VA?

Hubert de Sy: Ik vind Bourgeois een enorm charmant man. Ik wil de N-VA vergelijken met de VU van vóór Schiltz. Ik vind het schandalig dat men bang is voor de 'V' van de CD&V maar vind de 5%-regeling al even schandalig. Ik hoop werkelijk dat ze het halen. Kijk, nu kun je als Vlaming die afzijdig wil blijven van het Vlaams Blok weer stemmen voor een Vlaamse partij.

- Voor een 'proper' Vlaams Blok dus, zoals Bérénice Vaeskens in dit nummer van Meervoud stelt?

Hubert de Sy: Dat men mij dan die term 'proper' eens uitlegt. Zijn de socialisten 'proper' met Agusta? Het grote euvel van het VB is dat die partij stemmen heeft afgepakt van de SP. En het feit dat ze tegen de koning zijn.

- Een laatste vraagje, wat vindt u nu eigenlijk van een fenomeen als Meervoud?

Hubert de Sy: Ik vind dat een oase in de Vlaamse pers. Wat ik vooral apprecieer is dat Meervoud links is. Maar dat er weinigen zo hevig kritiek durven uitbrengen op de kaviaarsocialisten van de SP. Dat vind ik eerlijke journalistiek.

Hubert de Sy. Het belgicistisch regime en de Vlaamse maar versnipperde beweging. Mechelen, 2002, 387 p. Verkrijgbaar via Roulartabooks, Meiboomlaan 33, 8800 Roeselare. E-post: Jan.Ingelbeen@roularta.be

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samedi, 06 mars 2010

Intervista a Luca Leonello Rimbotti

Intervista a Luca Leonello Rimbotti

Ex: http://augustomovimento.blogspot.com/

Luca Leonello Rimbotti è nato a Milano nel 1951. Laureato in storia contemporanea, si occupa di mito, filosofia e politica nella cultura europea, in special modo tedesca. È autore – tra gli altri – dei volumi
Il fascismo di sinistra. Da Piazza San Sepolcro al Congresso di Verona (Settimo Sigillo, 1989), Il mito al potere. Le origini pagane del nazionalsocialismo (Settimo Sigillo, 1992), Globalizzazione (Settimo Sigillo, 2003) e La rivoluzione pagana. Relativismo etnico e gerarchia delle forme (Ar, 2006). Ha collaborato con le riviste «Elementi», «Italicum», «Margini», «Linea», «Diorama letterario», «Trasgressioni».



Quali sono i miti, gli autori e le esperienze che consideri parte integrante del tuo bagaglio politico-culturale?


Il Sovrumanismo di Nietzsche e Stirner, ma anche le individualità letterarie per così dire «eroiche» del tipo di Byron o William Blake, il Romanticismo anglo-tedesco, certe personalità che incarnano la lotta contro il proprio tempo e hanno il tratto del solitario e visionario precursore – da Herder a Oriani, per intenderci – fino ad ambienti del ribellismo storico, ad esempio l’anarco-squadrismo antemarcia. Poi ci metterei il classicismo dorico, l’estetica pre-raffaellita e in genere il figurativismo ottocentesco, da Friedrich ai Simbolisti al Futurismo... poi hanno avuto grande incidenza sulla mia formazione certi ambiti musicali della mia generazione, legati alla musica hard-rock e heavy-metal, coi loro immaginari rivoltosi e i loro rimandi ai valori tradizionali vissuti come opposizione anti-borghese... ma si potrebbe continuare.


Che cos’è stato sinteticamente il Fascismo, in che modo il suo insegnamento può essere ancora valido oggi, e in che senso te ne senti continuatore?

Il punto a mio vedere di gran lunga più importante del Fascismo è stato il tentativo storico di coniugare la tradizione popolare con la modernità: una nuova considerazione delle masse come soggetto politico, una concezione dinamica della vita e della socialità, un potente mito aggregante e identitario, una volontà di futuro che si sposava senza tante incrinature con la rivendicazione delle più lontane appartenenze, coi simboli antichi, col culto della terra dei padri, con la sacralizzazione della comunità di popolo, etc. Trovo che tutto questo proprio oggi rappresenti qualcosa di vivo, giudico che sia un’ideologia generosa di affratellamento e di fierezza, per cui ogni popolo dovrebbe riunirsi attorno ai propri patrimoni ereditati, così da offrire la maggiore resistenza contro il tentativo in atto di distruggere i legami nazionali a favore di un cosmopolitismo privo di identità e negatore delle differenze. Personalmente, mi sento un modesto ma tenace continuatore di tali valori: e da quarant’anni (da quando pubblicai il mio primo articolo) batto e ribatto sul medesimo tasto di una tenuta strenua sui significati di legame e di identità, poiché penso che, perduti questi, non si avranno più uomini e popoli, ognuno con la propria storia e la propria cultura, ma soltanto individui degradati e popolazioni ammassate a casaccio.


Quali sono gli storici che hanno contribuito secondo te ad una più oggettiva e disinteressata interpretazione del Fascismo?

Quelli classici. De Felice, Nolte, Mosse, poi Acquarone, Salvatorelli, Santarelli, sui quali mi sono formato. Ad essi si sono aggiunti Emilio Gentile, Settembrini, Sternhell, Parlato e pochi altri: ma nessuno di essi ha dato interpretazioni «disinteressate». Molti, anzi tutti, erano e sono in varia misura ostili al fascismo. Ciò non toglie che spunti, idee, metodi siano stati per me di insegnamento. Quando mi laureai, il mio professore mi disse che potevo, anzi dovevo avanzare giudizi di valore: da allora così faccio in ogni mio scritto e diffido di chi si proclama super partes. Non avere opinione su ciò che si scrive – essere dunque disinteressati – non è buona cosa per uno storico...


Quali sono, a tuo parere, le più profonde affinità e differenze tra il Fascismo italiano e il Nazionalsocialismo tedesco?

Sono stati movimenti storici molto più affini che differenti. Entrambi intesi a operare quella unione tra modernità e tradizione di cui dicevamo, entrambi basati su sistemi affini di mobilitazione popolare, su una struttura di partito e poi di Stato molto simile. La differenza sta nelle rispettive caratteristiche nazionali: l’antisemitismo, ad esempio, blando e solo di matrice cattolica in Italia, era in Germania diffuso a livello popolare. La maggiore somiglianza risiede, più che nei sistemi sociali o partitici, a mio parere, nella eguale volontà di operare una rivoluzione antropologica, creando un tipo nuovo di uomo che rompesse la tradizione progressista occidentale e si ricollegasse al mito eroico indoeuropeo: la Romanità e il Germanesimo ebbero questa funzione.


In cosa, secondo te, il Fascismo fu il legittimo erede di Roma antica? La Roma fascista fu veramente la Terza Roma?

Penso di sì. Se furono legittimi altri richiami alla Roma antica – pensiamo ai giacobini, ammiratori della Roma repubblicana, o a Mazzini, o ai poeti risorgimentali... – lo fu a maggior ragione il fascismo, che sui temi della fedeltà alla stirpe, la sacralizzazione della tradizione, l’imperialismo colonizzatore, la socialità corporativa, la gerarchia di rango, il senso del destino, etc. ci impiantò un moderno Stato nazionale. Dopo la Roma antica e quella papalina, davvero quella fascista avrebbe dovuto essere la Terza Roma, per dichiarazione esplicita dei suoi protagonisti: che fosse di cartapesta, grottesca o imbelle come ama dire la storiografia, non saprei. Dopotutto, a parte le gravissime deficienze umane, organizzative, etc. del fascismo, alla coalizione mondiale nemica occorsero diversi anni di guerra totale per abbattere un tale disegno politico... di cartone: o sbaglio? E, a giudicare da quanto se ne scrive ancora oggi, tutto questo ha lasciato una certa traccia nella storia.


Giovanni Gentile è stato definito il «filosofo del Fascismo». Quanto è stato grande, a tuo parere, il suo contributo nell’edificazione del regime fascista?

Gentile era uno dei pochi intellettuali italiani conosciuti a livello internazionale: e altri di questa categoria, come ad es. Pirandello o Marinetti, furono del pari fascisti. Ma il fascismo di Gentile fu piuttosto un liberalismo nazionale radicale. Anche se, dobbiamo dire, la socialità gentiliana aveva un tono non solo conservatore: l’umanesimo del lavoro aveva una sua nobiltà e una sua grandezza, e la sua concezione dell’Io come essere comunitario, la sua indicazione che la comunità nazionale non consiste nella mera cittadinanza, ma nell’unità spirituale, costituiscono un’ideologia di forte presa identitaria. La civiltà del lavoro come compiuta realizzazione dell’Idea ha una sua logica e sul finire Gentile – mi riferisco specialmente a Genesi e struttura della società, del 1943 – colse i rapporti tra liberalismo e anarchismo, rifiutandoli nel nome di una marcata funzione sociale dello Stato. Personalmente ho un po’ rivalutato Gentile per alcuni di questi aspetti: non vedeva il partito rivoluzionario, vedeva lo Stato, d’accordo, ma alla fine fece spazio – da buon hegeliano – a una concezione organica non certo di «destra». Sua fu poi, insieme a Mussolini, la visione del fascismo non come semplice movimento politico, ma come religione, forza dello spirito.


Quali furono i pregi e i difetti del «Fascismo di sinistra»?

I pregi? La volontà politica di eliminare i condizionamenti capitalistici senza distruggere il capitale, che è ricchezza del popolo, l’idea di dare al lavoro il protagonismo sociale, la determinazione di farne un elemento della decisione e non della sola esecuzione della volontà politica. Considerare un’unica classe: il popolo. E dare soltanto a chi vive del suo lavoro – che sia in basso o in alto – dignità e onore sociale. La competenza poi (ad es. in Bottai) era giudicata centrale, quindi niente retorica operaista, ma coscienza che senza gerarchia si fa la fine che ha fatto il comunismo, e che fecero le comuni ottocentesche. Al posto dell’utopia, la concreta concezione dello Stato organico: ognuno al suo posto e tutti a remare dalla stessa parte. I difetti? Non avere avuto una potente referente nel partito. Dopo l’accantonamento di Rossoni (1928) non si ha più un leader del fascismo corporativo. Mussolini si barcamena tra capitalisti, monarchia e Chiesa. La Carta del Lavoro era un buon punto di partenza, poi le corporazioni del 1934 rimasero sulla carta. La Camera dei Fasci e delle Corporazioni poteva essere un ottimo strumento per istituzionalizzare il fascismo social-progressista... ma è del 1939, non ebbe tempo per incidere.


Berto Ricci è stato uno degli intellettuali più brillanti e vivaci della «nuova generazione». Qual è il valore della sua opera? Quale lezione ne possiamo trarre oggi?

La sua lotta contro il borghesismo e la concezione individualistica della società, che è tipica della cultura italiana, trovo che sia ancora oggi un messaggio vivo e un modello estremamente valido. Il suo battersi, insieme a tanti altri giovani dell’epoca, per un’idea di «aristocrazia di comando» che desse ai migliori, ai più efficienti e ai più disinteressati, le leve del potere, eliminando la corruzione, il clientelismo e la tradizionale pratica italiana di stare dalla parte del più forte. L’avvento di una generazione di uomini liberi da condizionamenti, che avesse in mente il riscatto dell’onore e della dignità del popolo, e che fosse per questo in grado di toccare gli interessi privati avendo come sponda il fulcro centrale del potere: il partito e Mussolini. Che, invece, rimasero troppo spesso prigionieri dei poteri forti pre-fascisti, alla fine – grazie alle vicende mondiali – risultati vincenti.


La Scuola di Mistica Fascista è stata la fucina dei cosiddetti «apostoli del Fascismo». Quali furono i punti di forza di quell’affascinante esperienza?

La volontà di considerare la vita degna di essere vissuta soltanto se spesa servendo ideali nobili di offerta di sé. Considero la Scuola di Mistica un vero sacerdozio, un ambiente che con taglio propriamente religioso giudicava il sacrificio – persino della propria vita – un fine luminoso cui aspirare, una meta con la quale la persona umana si completa, diventando qualcosa di sovrumano. La dimensione trascendente, innestata su una fede fanatica – non dissimile dalla fede dei santi e dei martiri – è una via difficile e dolorosa, tanto più ardua da intraprendere se concepita come offerta spontanea, persino gioiosa e sorridente nello sforzo di superare i limiti della nostra natura di uomini: si tratta di apici esistenziali difficilmente comprensibili dall’uomo normale, specialmente in un’epoca come la nostra, che premia il furbo, il dissacratore, l’arrivista... cioè i valori opposti a quelli di una visione mistica e sacrale della vita.


In cosa risiede la portata rivoluzionaria del Corporativismo e della Socializzazione delle imprese?

La conciliazione delle classi, il superamento della conflittualità interna al corpo sociale: questo il dato sovvertitore. Il fatto che può essere un partito egemone e addiririttura uno Stato illuminato a guidare il processo di liquidazione del predominio degli interessi privati su quelli comunitari. L’idea che il popolo è un’unità organica, una comunità unita da un medesimo destino e non un insieme di interessi divergenti, legati alla categoria di lavoro cui si appartiene. Pur con certe differenze, talora marcate, tra il sindacalismo integrale e il corporativismo vero e proprio, si nota un comune intendimento di pervenire al concetto di organicità dell’economia. Progetti come quello della corporazione proprietaria di Spirito – in un contesto di maggiore forza politica – avrebbero rivoluzionato gli assetti sociali dalle fondamenta: la proprietà, la gestione e gli utili d’impresa spartiti tra i membri della produzione, gli esecutivi come i direttivi. Ma anche il corporativismo «di regime», pur attuato poco e male, aveva un’ideale nobile: proprietà dei mezzi produttivi inalterata, ma verifica che non avesse a prevalere l’interesse del capitalista sull’interesse della produzione nazionale. La socializzazione, poi, che dava al lavoro la cointeressenza sugli utili, spingeva tale ottica rivoluzionaria a un punto radicale: la stessa gestione è appannaggio delle categorie del lavoro, e il ricavato viene suddiviso tra chi lavora, e non elargito dal capitalista in qualità di salario. Antioperaismo, anticapitalismo e produttivismo organico: non c’è nulla, in questa concezione, che non possa essere ancora oggi pienamente ripreso da un movimento politico inteso a superare le micidiali derive della gestione multinazionale dell’impresa e soprattutto a spezzare il predominio della finanza sull’economia e quello dell’economia sulla politica. Molto modestamente e con tutti i limiti del caso, il sottoscritto è stato il primo ad occuparsi specificamente del «fascismo di sinistra», anticipato solo dal breve saggio di Silvio Lanaro che comparve sulla rivista «Belfagor» nel 1975: lo stesso Settembrini – che nel suo libro Parlato, pur citandomi, dice essere stato il primo – mi seguì di due anni. Rivendico questa modesta primogenitura e confesso che non mi sono mai distaccato dalle mie giovanili convinzioni, che il fascismo avesse una forte spinta rivoluzionaria anche in senso sociale.


Evola è stato un punto di riferimento importante degli eredi del Fascismo. Qual è stata la forza e la debolezza del suo pensiero?

La sua forza è stata nella rara capacità di evocare miti viventi. Di fare di alcuni simboli e di alcuni mondi culturali l’antefatto immediato di una presa di coscienza politica che potesse essere ancora attuale. Il suo talento nell’affrescare valori storici e significati tradizionali imprime indubbiamente un’energia ideologica animatrice, che rimane indelebile in chi ha avuto i suoi libri tra gli elementi formativi. Certo, non comprese appieno il fascismo e la sua epoca. Non ebbe i mezzi culturali per apprezzare uno sforzo di tale portata, inteso a innestare i motivi tradizionali nella modernità, facendone cultura di popolo ed estraendoli dalle chiuse stanze degli eruditi. Similmente ai circoli nazionalconservatori tedeschi, era assente in Evola la sensibilità politica atta ad apprezzare il disegno di portata epocale di combinare l’arcaicità col futuro. Mancanza impolitica non da poco, che tuttavia non ne compromette il retaggio sotto il punto di vista del valore culturale e ideologico.


Quali sono stati, a tuo parere, i gruppi organizzati e le fucine di pensiero più importanti e validi del neofascismo dal dopoguerra ad oggi?

Penso che soltanto l’ambiente di Ordine Nuovo sia stato, ai tempi e per un breve periodo, un vero laboratorio di pensiero politico. Agganciato a Evola – pur coi difetti di costui di cui si è detto – quel sodalizio ebbe la capacità di sollevare argomenti, miti, inquadrature con ricadute sul politico, insomma un’ideologia in sé coerente, una vera concezione del mondo. Personalmente poi ho partecipato per lunghi anni all’esperienza della cosiddetta «Nuova Destra»: qui veramente si ebbero incisivi segnali di uno svecchiamento della cultura politica, nuovi temi affiorarono, antichi complessi venivano abbandonati. De Benoist per un periodo importante è stato un maestro di elaborazione nuova, un intellettuale creativo e fertile, che ha aperto spazi e indicato metodi. In maniera non dissimile, Marco Tarchi ha impresso in tanti di noi la capacità di vedere le cose più da lontano, con ottica libera, cercando nuovi collegamenti. Purtroppo il progetto metapolitico della Nuova Destra, isolata in modo crescente, non ha sfondato: e i suoi paladini hanno finito con l’essere attirati di nuovo dal magnete delle loro culture di provenienza. Così molti oggi sono tra le gambe del potere, altri sono rifluiti allo studio del fascismo e dintorni. Marco lotta ancora da solo e con qualche giovane nella sua trincea. Ma l’esperienza – parlo per me – non è stata infeconda, i suoi semi hanno in qualche modo fruttificato, anche se solo a livello individuale.


Anni di piombo. Quali i miti da sfatare, le logiche ed i protagonisti occulti di quel periodo?

Confesso che l’intero capitolo degli «anni di piombo» non mi ha mai interessato. L’ho sempre visto come un ginepraio di loschi traffici, atteggiamenti ambigui, idealismi mal riposti e oscene compromissioni. Ho un istintivo distacco per tutto quanto non è limpido e aperto. Dico soltanto che provo umana comprensione per tutti coloro che, senza colpe, sono stati travolti dalla logica dura del potere, e ne hanno sofferto.


Si parla spesso di «identità», o con richiami puramente retorici oppure con invocazioni ideologiche al meticciato: che senso ha questa parola? Il melting pot è, secondo te, un pericolo o una possibilità?

Identità è l’esser se stessi: ciò vale per un singolo uomo come per un singolo popolo. Tutto ciò che non attiene all’esser se stessi è evidentemente estraneo o addirittura nemico dell’identità, mirando a sfigurare un volto e a renderlo irriconoscibile. Gettare masse delle più disparate provenienze all’interno di un popolo significa volerne annientare la forma e la caratteristica storica, bella o brutta che sia. Tanto l’immigrante quanto chi subisce l’immigrazione perde qualcosa di sostanziale: la propria tradizione, il proprio passato, la propria cultura, il proprio onore di uomo, che non consiste solo nell’individualità, ma anche nell’appartenere a una cultura storica, sia pure la più umile del pianeta. Che, in quanto tale, merita anch’essa rispetto e protezione: che c’è di positivo in questo voler annientare i legami di storia e di cultura? In nome di cosa, poi? La cittadinanza universale?


Che cosa pensi del processo di unificazione europea? Meglio un’unione “inquinata” da derive liberalcapitalistiche, oppure un rafforzamento delle sovranità nazionali?

L’attuale unificazione europea è a gestione bancaria, lo vede anche un cieco. I popoli europei – del resto quasi mai consultati in proposito e, quando consultati, espressisi negativamente – non c’entrano niente. Un rafforzamento identitario a tutti i livelli, oggi che il vecchio nazionalismo è superato da due guerre civili, sarebbe auspicabile in vista di un’Europa unita. I regionalismi, in questo senso, li giudico positivamente, come ogni fenomeno di rinsaldamento identitario. Lo stesso nazionalismo non esclude né il regionalismo né l’europeismo, anzi li presuppone: gli imperi da sempre sono innestati sulle piccole appartenenze. Di solito si obietta che il nazionalismo porta alla guerra. Direi che non è vero. È solo quando il nazionalismo viene forzato dall’interesse economico imperialista che diventa un elemento infiammabile, altrimenti l’amare il proprio popolo non prevede affatto l’odiare quelli altrui, al contrario. Le recenti faide balcaniche sono state causate da precedenti motivi di internazionalismo comunista: popoli a forte identità mescolati a forza dal pregiudizio anti-nazionale, e che hanno scatenato l’odio reciproco che si crea dalla fusione coatta. Mi risulta poi che la liberaldemocrazia sia in grado di scatenare guerre perfettamente distruttive, senza avanzare la minima rivendicazione nazionale, ma anzi proprio nel nome di quelle utopie internazionaliste che vengono gestite da liberali e neo-giacobini (la «destra» e la «sinistra») in assoluta concordia.

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dimanche, 14 février 2010

Démocratie sous tutelle: entretien avec Paul Piccone

piccone.jpgArchives de Synergies Européennes - 1995

 

Démocratie sous tutelle

 

Entretien avec Paul Piccone, directeur de «Telos» (New York)

 

Dans les années 60, la plus importante des revues culturelles américaines, Telos, éditée à New York, crée le phénomène de la «Nouvelle Gauche» et ouvre la voie à la “contestation permanente” de 1968, en important aux Etats-Unis la pensée critique de l'Ecole de Francfort, d'Adorno et de Marcuse. Mais aujourd'hui, étonnant signe des temps: Telos  diffuse désormais la pensée de Carl Schmitt aux Etats-Unis, avec l'intention bien profilée de donnée une “épine dorsale” aux New Republicans, qu'on appelle aussi la New Right aux Etats-Unis. L'un des directeurs de Telos  est Paul Piccone, philosophe du politique, Italo-Américain de tempérament volcanique que j'ai rencontré lors d'un colloque à Pérouse. Il m'a parlé avec beaucoup d'enthousiasme de Gianfranco Miglio, le politologue qui a introduit Schmitt en Italie. «L'alliance entre Fini et Miglio», m'a dit Piccone, «est la véritable nouveauté, une nouveauté surpre­nante, dans votre pays. C'est le présidentialisme plus le fédéralisme. C'est l'Etat fort mais “petit”, assorti des libertés locales, des autonomies culturelles, de l'articulation des différences. C'est ce que tentent de réaliser les néo-conservateurs aux Etats-Unis».

 

Q.: Mais, cher Professeur, je vous demande un instant... Je voudrais que vous m'expliquiez comment vous êtes passé d'Adorno à Schmitt, de la nouvelle gauche à la nouvelle droite...

 

PP: Je vous dirais tout simplement que la première chose à se mettre en tête, c'est que la dichotomie gauche/droite est désormais dépassée. Aujourd'hui, le conflit politique ne passe plus par ces catégories, mais par d'autres: nous avons et nous aurons d'autres clivages: les populistes (les partisans du peuple) contre la nouvelle classe des technocrates, la démocratie contre la radicalisation de l'idéologie des Lumières.

 

Q.: Je crains de ne pas comprendre: votre populisme, c'est donc la droite; et la “nouvelle classe”, c'est la nouvelle gauche, “radicale-chic”...

 

PP: Il faut commencer par s'ôter de la tête l'idée fausse du populisme qu'a bricolée la gauche; quand elle parle de populisme, elle imagine des foules de paysans du Middle West, ignorants et armés de fourches, qui s'en vont lyncher des Noirs et molester des Juifs. Cette imagerie sert la nouvelle classe; en la manipu­lant, elle défend son pouvoir. La démocratie, pour la “nouvelle classe”, constitue un danger: parce que, pour elle, le peuple, source originelle de la souveraineté, est aussi le réceptacle d'une irrationalité invin­cible. De ce fait, le peuple a besoin de dirigeants sages et éclairés qui disent et manient les “règles” for­melles de la démocratie. Mais la démocratie représentative en vient à représenter de moins en moins les besoins de la vie réelle des gens, et de plus en plus des techniques formelles. Et sur ce champ technico-formel, seuls sont autorisés à intervenir les avocats, les bureaucrates, les intellectuels. De fait, cette conception est bien celle du progressisme de ce siècle, depuis le marxisme réel jusqu'à la sociale-démo­cratie et au Parti Démocrate américain; tous sont les versions différentes d'un centralisme bureaucra­tique qui essaie par tous les moyens de justifier son existence et de se légitimer politiquement. C'est ainsi que fonctionne le puissant appareil administratif-redistributif qui corrige les différences créées par le mar­ché. Finalement, la vie réelle du peuple, avec son organicité et son patrimoine d'expériences collectives, en vient à être entièrement dominée par un seul et unique héritage culturel, celui des Lumières qui se pro­clame frauduleusement seul “rationnel”, seul “universel(lement valable)”. Et prétend protéger le peuple contre lui-même. Les néo-républicains américains s'opposent à cette mythologie; leur lutte prend la forme d'une lutte contre la bureaucratie étatique omniprésente, qui empêche les communautés particulières de vivre comme elles l'entendent.

 

Q.: C'est donc un phénomène très américain...

 

TELOS142_MED.gifPP: C'est vrai. Très américain au sens le plus profond du terme. La démocratie américaine, en effet, a été fondée par des fanatiques religieux  —les pères pélerins du Mayflower—  qui ont fui l'Europe pour pouvoir conserver leur liberté d'être des fanatiques. Ils ont donc créé un système de liberté, où tous ont le loisir d'être fanatiques sans être troublés par personne; et spécialement sans être dérangés par les héritiers de la “démocratie jacobine” de la Révolution Française, qui prétendent imposer à chacun, au nom de la Raison, un catalogue bien délimité de valeurs auxquelles nous sommes tous priés de nous adapter. Mais je ne crois pas que cela soit un phénomène exclusivement américain: parce qu'aujourd'hui la Raison des Lumières, qui au fil des décennies s'est faite Etat, menace tout le monde. Au fait, a-t-on arrêté la Madonne en Italie?

 

Q.: Vous voulez dire la Madonne de Civitavecchia, celle qui pleure des larmes de sang? Les juges, en effet, l'ont mise sous sequestre car ils suspectaient une super­cherie, ils ont cru que l'on abusait de la crédulité populaire...

 

PP:  A qui le dites-vous... Je ne sais pas si la Madonne pleure pour du vrai, mais ce qui m'importe, moi, c'est que ceux qui y croient sont libres d'y croire sans que l'autorité de l'Etat n'ait à s'y immiscer pour dé­cider si oui ou non ces larmes de sang sont une tromperie qui abuse de la crédulité populaire. Cet incident devrait vous montrer à quoi se réduit la démocratie formelle... Elle n'est plus que l'expression d'une classe de “protecteurs” qui protègent l'ensemble des citoyens jugés incapables de se gouverner eux-mêmes. La démocratie représentative est périmée et s'est muée en une démocratie radicale (qui se dit “libérale” dans le monde anglo-saxon), où les choix démocratiques sont réduits et réservés à ce qui est parfaitement insignifiant. Déjà l'Ecole de Francfort avait démasqué cette fraude. Mon évolution de la nou­velle gauche à la nouvelle droite s'explique par une fidélité à cette démarche démasquante.

 

Q.: Mais cette démarche était de gauche...

 

PP: Si vous voulez. L'Ecole de Francfort, et tout spécialement Adorno, dans sa Critique de l'Aufklärung, nous ont expliqué comment la “rationalité instrumentale”, absoluisée, finit par exclure comme “irrationnels” tous les réflexes vitaux des gens normaux pour qui vivre est plus important que penser. La démocratie des Lumières, qui est une démocratie représentative, n'offre qu'une représentation appauvrie de la vie politique. Ce qui nous ramène au phénomène dont nous subissons aujourd'hui les effets néga­tifs: les démocraties deviennent ingouvernables, les masses sont devenues abstentionnistes, c'est le règne des intérêts particuliers. La démocratie a sombré dans le radicalisme démocratique qui rend tout gouvernement impossible.

 

Q.: Que peut-on faire pour s'y opposer?

 

PP: Il faut récupérer à notre profit la pensée de Carl Schmitt. Parce que Carl Schmitt a théorisé la contra­diction fondamentale entre ce “radicalisme libéral” (issu des Lumières) et la démocratie. Schmitt a amorcé une critique démocratique de la démocratie libérale issue des Lumières et nous a montré combien il était nécessaire de surmonter les formalismes, les “règles”, afin de restaurer les liens entre gouvernants et gouvernés, sans lesquels la démocratie n'a pas de sens.

 

Q.: Mais cette démocratie schmittienne n'est-elle pas la fameuse démocratie plébis­citaire, portée à bout de bras par un homme providentiel?

 

PP: C'est cela le nouveau populisme. Il doit conduire à l'émergence d'une politique populiste, faite par le peuple et pour le peuple. Cette politique ne sera plus l'œuvre d'une caste de professionnels, mais par des membres effectifs d'une communauté déterminée, qui font de la politique pour exprimer directement les exigences et les besoins expérimentés dans la vie quotidienne, la leur et celle de leurs électeurs.

 

Q.: Comment décririez-vous l'expérience Berlusconi?

 

PP: Berlusconi est le moindre mal, parce qu'il n'y a pas autre chose pour l'instant. Mais Berlusconi n'a pas de programme, pas de “vision”. C'est l'axe Fini-Miglio qui me semble aujourd'hui plus prometteur en Italie. A deux, ils peuvent jeter les bases d'une démocratie populiste en Italie.

 

(propos recueillis par Maurizio BLONDET; entretien paru dans Pagine Libere, Rome, juin 1995).

vendredi, 15 janvier 2010

Entretien avec Hellmut Diwald

hstDiwaldHellmut.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1992

Entretien avec Hellmut DIWALD

 

propos recueillis par Irmhild DESCHNER et Peter BOSSDORF

 

Hellmut Diwald, né en 1929 en Moravie méridionale, a passé sa jeunesse à Prague et à Nuremberg. Après avoir achevé des études d'ingénieur en 1950, il obtient un diplôme d'histoire et un autre de philosophie en 1953. Depuis 1965, il enseigne l'histoire moderne et contemporaine à l'Université d'Erlangen-Nuremberg. Hellmut Diwald a acquis la célébrité en 1969, quand il a fait paraître une biographie de Wallenstein, et en 1978, en publiant une Histoire des Allemands (Geschichte der Deutschen),  qui provoqua un grand scandale, qui annonçait, huit ans à l'avance, la célèbre «querelle des historiens». Dans les années 80, Diwald a écrit et publié une quantité d'études, soulignant l'actualité de la question allemande.

 

ID/PB: Professeur, la fin de la guerre froide signifie-t-elle également la fin des problèmes de politique extérieure ou, au contraire, ces problèmes de politique extérieure se posent-ils dorénavant avec une acuité plus intense encore?

 

HD: On peut répondre par l'affirmative à vos deux questions. La fin de la guerre froide transforme globalement la politique internationale. Et la situation nouvelle est, à certains égards, bien plus imprévisible, car le nombre de dangers a cru: on l'a vu notamment quand Ukrainiens et Russes se sont querellés à propos de la flotte de la Mer Noire. Nous assisterons sans doute à l'éclosion de nouveaux conflits ailleurs, vu l'évolution qui se dessine dans le monde musulman. On peut le deviner avec ce qui s'est passé en Algérie.

 

ID/PB: Peut-on dire que les politiques suivies par les nouveaux Etats né sur le sol de l'ex-URSS sont dictées par des motivations nationales ou s'agit-il d'une tentative de faire passer dans le réel les valeurs occidentales?

 

HD: Pour moi, il s'agit surtout d'un retour à soi, à sa propre culture. Je ne parle pas de «valeurs occidentales» quand j'évoque les peuples d'Europe de l'Est ou de la CEI, ou quand je parle de leurs «nationalismes», car je n'oublie pas qu'en Union Soviétique, c'était une idéologie de facture occidentale qui était au pouvoir.

 

ID/PB: Pour nous Allemands, ce retour des peuples de l'Est européen à eux-mêmes, à leurs propres référents culturels, est-ce un signe positif?

 

HD: C'est un signe positif et prometteur. Dans la mesure où nous aussi, après la réunification partielle de l'Allemagne, ne souffrons plus, en tant que peuple ou partie de peuple, de l'étouffante pression marxiste ni de la doctrine d'Etat de l'ex-RDA. Pour nous aussi, la chute du Rideau de fer signifie le retour à une conscience de soi, qui nous apparaît sous des formes nouvelles, que nous avons encore à définir, à préciser.

 

ID/PB: Y a-t-il en Russie des traditions culturelles spécifiques qui peuvent spontanément s'aligner sur les conceptions occidentales de la démocratie et des droits de l'homme?

 

HD: Si ces traditions n'existent pas, ce n'est pas à nous de les imposer. C'est aux Russes à les faire advenir chez eux.

 

ID/PB: Ne court-on pas le danger, vu la disparité des moyens techniques et militaires modernes, que les Etats nationaux basculent dans une dépendance plus grande encore que par le passé?

 

HD: C'est possible, effectivement. Mais le danger de plus grande dépendance guettera surtout les Etats et les peuples de l'ex-URSS. Mais le plus gros problème, pour moi, c'est de savoir comment on va procéder pour imposer l'économie de marché dans ces pays. N'oublions pas que nous avons affaire à un pays où il n'y a jamais eu de classe moyenne, de bourgeoisie (au sens positif et industrieux du terme), pendant des décennies voire des siècles, si l'on inclut l'ère des Tsars. Jamais ces peuples n'ont appris à être autonomes.

 

ID/PB: L'Allemagne doit-elle s'engager politiquement ou économiquement dans ces régions?

 

HD: Economiquement, oui. Mais je reste très dubitatif quant aux chances de succès.

 

ID/PB: Mais n'y a-t-il pas de risques pour l'Allemagne, si elle prend des initiatives dans la CEI ou ailleurs? Par exemple, la prompte reconnaissance de la Slovénie et de la Croatie par l'Allemagne a exposé cette dernière à un risque: s'aliéner les Etats occidentaux.

 

HD: Pour moi, c'est un risque que nous ne devons même pas prendre en considération. Ce que la CEE a fait dans le cas yougoslave relève davantage de la farce que d'une politique précise, qui sait quels sont ses objectifs. Quand des peuples comme les Croates ou les Slovènes mettent si nettement à l'avant-plan leur droit à l'auto-détermination et leur identité et perçoivent ce droit et cette identité comme un droit de la personne humaine, il est normal, pour des motifs tant d'ordre moral que d'ordre politique, que nous ne nous adressions pas à nos voisins, pour leur demander s'ils sont d'accord ou non que nous reconnaissions ces principes. Nous avons toujours trop longtemps attendu avant de donner notre avis. Evidemment, en disant haut et clair son avis, on ne se fait pas toujours des amis. Mais cela n'a aucune importance: l'espace du politique est un espace où personne n'a des amis.

 

ID/PB: Mais ce que vous nous dites là, est-ce de la Realpolitik? Ne doit-on pas, en première instance, se ranger aux côtés des Etats dont on dépend le plus?

 

HD: Dans quelques mois, la situation en Yougoslavie sera telle que l'avait prévue, en pionnier, le gouvernement de la République Fédérale. L'éclatement de la Yougoslavie est désormais un fait acquis: les problèmes actuels, aussi tragiques sont-ils, dérivent d'une contestation globale du tracé des frontières. Et la CEE devra se rendre à l'évidence. Ensuite, nous, Allemands, qui avons toujours été la locomotive de l'Europe, n'avons pas sans cesse à dire: si vous n'êtes pas de notre avis, c'est avec plaisir que nous allons tout de suite nous aligner sur vos positions. Les Hollandais ou les Belges pensent-ils qu'ils vont se heurter à nous, s'ils ne sont pas tout-à-fait sur la même longueur d'onde que nous? Non! Il est dans notre intérêt que les Croates et les Slovènes se considèrent comme des partenaires de l'Allemagne. Alors pourquoi n'aurions-nous pas agi comme nous avons agi?

 

ID/PB: Mais en agissant de la sorte, ne risque-t-on pas de freiner ou de menacer le processus d'intégration à l'œuvre au sein de la CEE?

 

HD: Si le processus d'intégration est menacé par de telles décisions, c'est qu'il ne vaut rien. Par ailleurs, je voudrais tout de même vous signaler que le processus d'intégration européenne est menacé par des dangers pires; la décision allemande de reconnaître la Croatie et la Slovénie a certes été une décision de haute politique, que la RFA a osé, en pionnière, prendre seule, mais c'était aussi une décision que pas un seul Etat européen ne pouvait, à longue échéance, omettre de prendre. Personne ne pouvait indéfiniment se boucher les oreilles et fermer les yeux.

 

ID/PB: Mais l'éclatement de la Yougoslavie ne risque-t-il pas de poser un précédent, que craignent, pour de bonnes raisons, plusieurs Etats de l'Europe de l'Ouest?

 

HD: Ce n'est pas notre problème. L'Allemagne a aussi ses minorités ethniques et elles ne posent pas de problèmes. Prenons l'exemple de la minorité danoise du Nord du pays: elle dispose de droits clairement définis. Et les réglementations qui gèrent cette minorité sont exemplaires; le monde entier pourrait les imiter. Si les Tyroliens du Sud recevaient de Rome ce que nous accordons aux Danois du Slesvig, ils seraient heureux.

 

ID/PB: Dans le Traité qui sanctionne la réunification, on a expressément rénoncé, pour la première fois, aux régions d'Allemagne orientale (Poméranie, Silésie, Prusse orientale, etc.). En 1992, l'Allemagne aura-t-elle encore intérêt à réclamer ces régions devenues sous-développées du point de vue économique et très abîmées sur le plan écologique?

 

HD: La décision politique qui a été prise à Bonn n'est qu'un aspect de la problématique, l'aspect extérieur. Pour moi, qui suis historien, je vois les choses d'une toute autre façon, évidemment. Quand il est question de la Silésie et qu'on me demande qui sont les Silésiens, je ne peux bien sûr pas répondre que ce sont des Polonais qui viennent de Pologne. Vous comprenez bien que ça ne va pas, qu'il est exclu de poser une telle assertion, qui va à l'encontre de toute vérité historique. En revanche, on peut dire: oui, en 1991, ces régions ont été cédées en vertu de plusieurs traités; et j'ajouterais, personnellement: elles ont été cédées par nécessité. On nous a imposé le dilemme suivant: vous ne pourrez vous réunir, si vous ne renoncez pas expressément à ces territoires. Mais, l'histoire étant ce qu'elle est, c'est-à-dire un théâtre où surgit constamment l'imprévu, on ne peut pas encore dire avec certitude ce qu'il adviendra de la partie septentrionale de la Prusse orientale, après l'effondrement de l'URSS.

 

ID/PB: Peut-on encore parler aujourd'hui de sérieux conflits de frontières, mis à part ce qui se passe dans les pays du tiers-monde ou dans les Etats pluri-ethniques en phase de dissolution?

 

HD: A l'intérieur de l'Europe, les questions de frontières ne sont plus aussi importantes qu'elles ne l'ont été: c'est l'un des rares points positifs de l'intégration européenne.

 

ID/PB: Y a-t-il encore place en Europe, aujourd'hui, pour des conceptions ou des projets nationaux-étatiques ou stato-nationaux?

 

HD: Ce que l'on tente de définir comme «régionalisme», n'est rien d'autre qu'une revendication véhémente des groupes ethniques qui affirment ou veulent affirmer leur identité. Pourquoi ces groupes ethniques veulent-ils disposer de leur propre gouvernement? Pourquoi les Croates voudraient-ils leur propre gouvernement, si leur identité ne leur tenait pas à cœur?

 

ID/PB: N'y a-t-il pas là des motivations économiques qui entrent en ligne de compte?

 

HD: Non, ce sont des motivations historiques, religieuses, culturelles. Entre la Serbie et la Croatie, il y avait, jadis, un frontière très significative; la Serbie était perçue comme une zone intermédiaire entre l'Europe et le monde ottoman, tandis que la Croatie et la Slovénie faisaient partie de la monarchie austro-hongroise. Serbes et Croates ont été profondément déterminés par leurs destins historiques, très différents l'un de l'autre. Slovènes et Croates se sentent proches des Allemands, dont ils ont longtemps partagé l'histoire. Les choses se sont compliquées peu avant la première guerre mondiale: les Serbes ont rêvé de construire un royaume grand-serbe, en se soumettant tous les petits peuples ou minorités qui vivaient sur leur territoire ou aux alentours. La question qui se pose: cette volonté correspond-elle à l'idée que nous nous faisons de la justice?

 

ID/PB: Peut-on dès lors parler d'un retour de l'idée stato-nationale classique?

 

HD: Je ne crois pas. Nous n'assistons pas, je pense, au retour de la vieille conception de l'Etat-Nation, doté de droits de souveraineté, au sens classique du terme. Rien que parce qu'il y a imbrication étroite des économies les unes dans les autres, la souveraineté de chaque Etat est considérablement limitée; mais, en même temps, nous constatons que les pouvoirs exécutifs et législatifs sont demeurés intacts. Où trouve-t-on en Europe cette promptitude à renoncer à ses propres droits de souveraineté, que l'on observe chez nous? Evidemment, nous, Allemands, avons toujours trouvés qu'il était facile de renoncer à ses droits de souveraineté parce que depuis 1945, nous n'en avons plus.

 

lhwEinigVaterland.jpgID/PB: Aujourd'hui, une bonne part du travail législatif se fait au niveau européen...

 

HD: Oui mais ce travail législatif concerne essentiellement le domaine économique. Ce n'est pas pour rien que les politiciens de Bonn ont été déçus par les décisions de Maastricht; en effet, pratiquement rien n'a été fait dans le domaine institutionnel. Le gouvernement de Bonn a raconté partout, à grand renfort de publicité, que Maastricht a été un gros succès. Dans le fond, ça a été un bide complet.

 

ID/PB: Néanmoins, l'Allemagne joue un rôle directeur en Europe. Les vaincus de la seconde guerre mondiale sont-ils les vainqueurs de l'après-guerre?

 

HD: On résume souvent la situation par cette formule. A croire que, si une troisième guerre mondiale éclate, il vaudrait mieux se trouver dans le camp des vaincus.

 

ID/PB: La réunification semble donner raison aux adénaueriens et aux «atlantistes» qui préconisaient une politique dure contre l'URSS. Pensez-vous qu'une politique de «neutralisation» de l'Allemagne, comme le voulaient une certaine gauche et une certaine droite nationale, aurait prolongé inutilement la vie de l'URSS moribonde?

 

HD: Je ne crois pas que les atlantistes aient eu raison, ni d'ailleurs les protagonistes de la politique adenauerienne. Ceux qui le pensent interprètent mal les réalités politiques, géopolitiques et militaires. Si l'Allemagne avait opté pour la neutralité, l'URSS n'aurait eu aucun sursis complémentaire. Le système soviétique ne fonctionnait pas, avec ou sans guerre froide. Notre après-guerre a connu des phases de répit, où il n'y a pas eu la moindre course aux armements; pendant ces périodes de répit, l'URSS n'a pas progressé.

 

ID/PB: Après l'effondrement du communisme, peut-on encore parler d'un «ordre mondial»?

 

HD: Non, on assistera peut-être à des esquisses d'ordre mondial, mais non dans le sens où l'on pourrait dire: voilà, ceci est une construction équilibrée et harmonieuse, qui ne pose plus que quelques problèmes en certains points de friction. Observons la réalité contemporaine: l'Amérique est désormais incapable de faire face à ses propres problèmes intérieurs.

 

ID/PB: Et l'Allemagne, parvient-elle à résoudre les siens?

 

HD: Votre question peut nous amener à de très longs développements. Surtout dans le domaine de la consolidation juridique et constitutionnelle de la sphère politique. Je ne suis pas un théoricien de l'Etat. Mais je constate, comme beaucoup de mes concitoyens, que, manifestement, il y a quelque chose qui ne va pas en Allemagne, que nous, citoyens allemands, traitons notre communauté politique à la légère, sans la moindre gravité. J'ai un jour eu une formule ironique: notre rapport le plus intense à l'Etat concerne la législation fiscale, la réglementation de la circulation routière et le service militaire. Tout le reste nous est égal. L'Etat ne semble pas s'intéresser au citoyen individuel concret, car il table sur le citoyen majeur et émancipé. Mais l'Etat n'a jamais clairement défini ce qu'est exactement le citoyen majeur et émancipé, si ce n'est par des formules toute faites. Mais peut-on rencontrer quelque part, cet homme libre, responsable, etc., capable de prendre des décisions en toute sérénité et en toute liberté?

 

ID/PB: Mais n'est-ce pas précisément la rétention de cet Etat qui le rend si attachant?

 

HD: Non. Cette rétention sera exaltée parce qu'elle permet la liberté mais je ne crois pas que cela suffise pour donner à l'Etat une force générant la cohésion sociale.

 

ID/PB: Dans le cadre de la RFA, pensez-vous qu'il y ait encore place pour un parti conservateur ou un parti de droite?

 

HD: Conservateur ou de droite, je n'en sais rien et cela ne m'intéresse pas. Je ne vois pas non plus en quoi ces concepts de conservateur et de droite peuvent nous être encore utiles. En revanche, nous nous trouvons en face d'une quantité de problèmes concrets, qu'il faudrait affronter, de choses à changer et qu'il va falloir changer.

 

ID/PB: Vous vous êtes tenu éloigné de la politique partisane, mais vous ne vous êtes pas entièrement soustrait à elle. Je pense notamment au préambule du programme des Républicains, que vous avez rédigé...

 

HD: D'une part, je l'ai fait pour des raisons d'ordre privé. D'autre part, on peut saluer grosso modo la tentative de Schönhuber, qu'il poursuit d'ailleurs. Dans le fond, toute nouvelle formation politique, qui a l'intention de s'ancrer dans la vie politique, doit être saluée avec respect. Ne doit-on pas constater que les partis sont vieux et pétrifiés, qu'ils sont devenus des facteurs d'immobilisme? C'est un souci qui préoccupe surtout les partis eux-mêmes depuis des années, et pas seulement ceux qui ne sont membres d'aucune formation ou les citoyens engagés dans un parti ou un autre.

 

ID/PB: Après tous les échecs des partis de droite qu'a connus l'Allemagne, y a-t-il encore une chance pour un parti qui se positionnerait à droite de l'Union (le cartel des partis démocrates-chrétiens, ndt)?

 

HD: Oui. Je ne serais pas étonné si nous nous trouvons, dans deux ans, face à un paysage politique complètement modifié.

 

ID/PB: Professeur Diwald, nous vous remercions de nous avoir accordé cet entretien.

(une version légèrement différente de cet entretien est parue dans Junge Freiheit, n°1/2-1992; adresse: JF, Postfach 147, D-7801 Stegen/Freiburg). 

 

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mardi, 12 janvier 2010

Entretien avec Günter Maschke

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1991

93_thumb.jpgEntretien avec Günter Maschke

 

propos recueillis par Dieter STEIN et Jürgen LANTER

 

Q.: Monsieur Maschke, êtes-vous un ennemi de la Constitution de la RFA?

Q.: Monsieur Maschke, êtes-vous un ennemi de la Constitution de la RFA?

 

GM: Oui. Car cette loi fondamentale (Grund­gesetz)  est pour une moitié un octroi, pour une autre moitié la production juri­dique de ceux qui collaborent avec les vain­queurs. On pourrait dire que cette constitu­tion est un octroi que nous nous sommes donné à nous-mêmes. Les meilleurs liens qui entravent l'Allemagne sont ceux que nous nous sommes fabriqués nous-mêmes.

 

Q.: Mais dans le débat qui a lieu aujourd'hui à propos de cette constitution, vous la défen­dez...

 

GM: Oui, nous devons défendre la loi fon­damentale, la constitution existante car s'il fallait en créer une nouvelle, elle serait pire, du fait que notre peuple est complètement «rééduqué» et de ce fait, choisirait le pire. Toute nouvelle constitution, surtout si le peu­ple en débat, comme le souhaitent aussi bon nombre d'hommes de droite, connaîtrait une inflation de droits sociaux, un gonfle­ment purement quantitatif des droits fon­damentaux, et conduirait à la destruction des prérogatives minimales qui reviennent normalement à l'Etat national.

 

Q.: Donc, quelque chose de fondamental a changé depuis 1986, où vous écriviez dans votre article «Die Verschwörung des Flakhelfer» (= La conjuration des auxiliaires de la DCA; ndlr: mobilisés à partir de 1944, les jeunes hommes de 14 à 17 ans devaient servir les batteries de DCA dans les villes al­lemandes; c'est au sein de cette classe d'âge que se sont développées, pour la première fois en Allemagne, certaines modes améri­caines de nature individualiste, telles que l'engouement pour le jazz, pour les mouve­ments swing et zazou; c'est évidemment cette classe d'âge-là qui tient les rênes du pouvoir dans la RFA actuelle; en parlant de conjuration des auxiliaires de la DCA, G. Maschke entendait stigmatiser la propen­sion à aduler tout ce qui est américain de même que la rupture avec toutes les tradi­tions politiques et culturelles européennes). Dans cet article aux accents pamphlétaires, vous écriviez que la Constitution était une prison de laquelle il fallait s'échapper...

 

GM: Vu la dégénérescence du peuple alle­mand, nous devons partir du principe que toute nouvelle constitution serait pire que celle qui existe actuellement. Les rapports de force sont clairs et le resteraient: nous de­vrions donc nous débarrasser d'abord de cette nouvelle constitution, si elle en venait à exister. En disant cela, je me doute bien que j'étonne les «nationaux»...

 

Q.: Depuis le 9 novembre 1989, jour où le Mur est tombé, et depuis le 3 octobre 1990, jour officiel de la réunification, dans quelle mesure la situation a-t-elle changé?

 

GM: D'abord, je dirais que la servilité des Allemands à l'égard des puissances étran­gères s'est encore accrue. Ma thèse a tou­jours été la suivante: rien, dans cette réuni­fication, ne pouvait effrayer la France ou l'An­gleterre. Comme nous sommes devenus terriblement grands, nous sommes bien dé­cidés, désormais, à prouver, par tous les moyens et dans des circonstances plus cri­tiques, notre bonne nature bien inoffensive. L'argumentaire développé par le camp na­tio­nal ou par les établis qui ont encore un pe­tit sens de la Nation s'est estompé; il ne s'est nullement renforcé. Nous tranquilisons le mon­de entier, en lui disant qu'il s'agit du processus d'unification européenne qui est en cours et que l'unité allemande n'en est qu'une facette, une étape. Si d'aventure on rendait aux Allemands les territoires de l'Est (englobés dans la Pologne ou l'URSS), l'Autriche ou le Tyrol du Sud, ces braves Teu­tons n'oseraient même plus respirer; ain­si, à la joie du monde entier, la question allemande serait enfin réglée. Mais trêve de plaisanterie... L'enjeu, la Guerre du Golfe nous l'a montré. Le gouvernement fédéral a payé vite, sans sourciller, pour la guerre des Alliés qui, soit dit en passant, a eu pour ré­sultat de maintenir leur domination sur l'Al­lemagne. Ce gouvernement n'a pas osé exiger une augmentation des impôts pour améliorer le sort de nos propres compa­trio­tes de l'ex-RDA, mais lorsqu'a éclaté la guer­re du Golfe, il a immédiatement imposé une augmentation et a soutenu une action militaire qui a fait passer un peu plus de 100.000 Irakiens de vie à trépas. Admettons que la guerre du Golfe a servi de prétexte pour faire passer une nécessaire augmenta­tion des impôts. Il n'empêche que le procédé, que ce type de justification, dévoile la dé­chéance morale de nos milieux officiels. Pas d'augmentation des impôts pour l'Alle­ma­gne centrale, mais une augmenta­tion pour permettre aux Américains de massacrer les Irakiens qui ne nous mena­çaient nullement. Je ne trouve pas de mots assez durs pour dé­noncer cette aberration, même si je stig­ma­tise très souvent les hypo­crisies à conno­ta­tions humanistes qui con­duisent à l'inhu­ma­nité. Je préfère les dis­cours non huma­nistes qui ne conduisent pas à l'inhuma­ni­té.

 

Q.: Comment le gouvernement fédéral au­rait-il dû agir?

 

GM: Il avait deux possibilités, qui peuvent sembler contradictoires à première vue. J'ai­me toujours paraphraser Charles Maur­ras et dire «La nation d'abord!». Première possibilité: nous aurions dû parti­ciper à la guerre avec un fort contingent, si possible un contingent quantitativement su­périeur à ce­lui des Britanniques, mais ex­clusivement avec des troupes terrestres, car, nous Alle­mands, savons trop bien ce qu'est la guerre aérienne. Nous aurions alors dû lier cet engagement à plusieurs conditions: avoir un siège dans le Conseil de Sécurité, faire sup­primer les clauses des Nations Unies qui font toujours de nous «une nation ennemie», fai­re en sorte que le traité nous interdisant de posséder des armes nu­cléaires soit rendu caduc. Il y a au moins certains indices qui nous font croire que les Etats-Unis auraient accepté ces conditions. Deuxième possibilité: nous aurions dû refu­ser catégoriquement de nous impliquer dans cette guerre, de quelque façon que ce soit; nous aurions dû agir au sein de l'ONU, sur­tout au moment où elle était encore réticente, et faire avancer les cho­ses de façon telle, que nous aurions dé­clenché un conflit de grande envergure avec les Etats-Unis. Ces deux scénarios n'appa­raissent fantasques que parce que notre dé­gé­nérescence nationale et politique est désor­mais sans limites.

 

Q.: Mais la bombe atomique ne jette-t-elle pas un discrédit définitif sur le phénomène de la guerre?

 

GM: Non. Le vrai problème est celui de sa lo­calisation. Nous n'allons pas revenir, bien sûr, à une conception merveilleuse de la guer­re limitée, de la guerre sur mesure. Il n'empêche que le phénomène de la guerre doit être accepté en tant que régulateur de tout statu quo devenu inacceptable. Sinon, de­vant toute crise semblable à celle du Ko­weit, nous devrons nous poser la question: de­vons-nous répéter ou non l'action que nous avons entreprise dans le Golfe? Alors, si nous la répétons effectivement, nous créons de facto une situation où plus aucun droit des gens n'est en vigueur, c'est-à-dire où seu­le une grande puissance exécute ses plans de guerre sans égard pour personne et impose au reste du monde ses intérêts parti­culiers. Or comme toute action contre une grande puissance s'avère impossible, nous aurions en effet un nouvel ordre mondial, centré sur la grande puissance dominante. Et si nous ne répétons pas l'action ou si nous introduisons dans la pratique politique un «double critère» (nous intervenons contre l'Irak mais non contre Israël), alors le nou­veau droit des gens, expression du nouvel ordre envisagé, échouera comme a échoué le droit des gens imposé par Genève jadis. S'il n'y a plus assez de possibilités pour faire ac­cepter une mutation pacifique, pour amorcer une révision générale des traités, alors nous devons accepter la guerre, par nécessité. J'a­jouterais en passant que toute la Guerre du Golfe a été une provocation, car, depuis 1988, le Koweit menait une guerre froide et une guerre économique contre l'Irak, avec l'encouragement des Américains.

 

Q.: L'Allemagne est-elle incapable, au­jourd'hui, de mener une politique extérieure cohérente?

 

GM: A chaque occasion qui se présentera sur la scène de la grande politique, on verra que non seulement nous sommes incapables de mener une opération, quelle qu'elle soit, mais, pire, que nous ne le voulons pas.

 

Q.: Pourquoi?

 

GM: Parce qu'il y a le problème de la culpa­bilité, et celui du refoulement: nous avons refoulé nos instincts politiques profonds et naturels. Tant que ce refoulement et cette cul­pabilité seront là, tant que leurs retom­bées concrètes ne seront pas définitivement éliminées, il ne pourra pas y avoir de poli­tique allemande.

 

Q.: Donc l'Allemagne ne cesse de capituler sur tous les fronts...

 

GM: Oui. Et cela appelle une autre question: sur les monuments aux morts de l'avenir, inscrira-t-on «ils sont tombés pour que soit imposée la résolution 1786 de l'ONU»? Au printemps de cette année 1991, on pouvait re­pérer deux formes de lâcheté en Allemagne. Il y avait la lâcheté de ceux qui, en toutes cir­constances, hissent toujours le drapeau blanc. Et il y avait aussi la servilité de la CSU qui disait: «nous devons combattre aux côtés de nos amis!». C'était une servilité machiste qui, inconditionnellement, voulait que nous exécutions les caprices de nos pseudo-amis.

 

Q.: Sur le plan de la politique intérieure, qui sont les vainqueurs et qui sont les perdants du débat sur la Guerre du Golfe?

 

GM: Le vainqueur est inconstestablement la gauche, style UNESCO. Celle qui n'a que les droits de l'homme à la bouche, etc. et estime que ce discours exprime les plus hautes va­leurs de l'humanité. Mais il est une question que ces braves gens ne se posent pas: QUI décide de l'interprétation de ces droits et de ces valeurs? QUI va les imposer au monde? La réponse est simple: dans le doute, ce sera toujours la puissance la plus puissante. A­lors, bonjour le droit du plus fort! Les droits de l'homme, récemment, ont servi de levier pour faire basculer le socialisme. A ce mo­ment-là, la gauche protestait encore. Mais aujourd'hui, les droits de l'homme servent à fractionner, à diviser les grands espaces qui recherchent leur unité, où à dé­truire des Etats qui refusent l'alignement, où, plus sim­plement, pour empêcher cer­tains Etats de fonctionner normalement.

 

Q.: Que pensez-vous du pluralisme?

 

GM: Chez nous, on entend, par «pluralis­me», un mode de fonctionnement politique qui subsiste encore ci et là à grand peine. On prétend que le pluralisme, ce sont des camps politiques, opposés sur le plan de leurs Welt­an­schauungen, qui règlent leurs différends en négociant des compromis. Or la RFA, si l'on fait abstraction des nouveaux Länder d'Al­lemagne centrale, est un pays idéolo­gi­quement arasé. Les oppositions d'ordre con­fessionnel ne constituent plus un facteur; les partis ne sont plus des «armées» et n'exi­gent plus de leurs membres qu'ils s'en­ga­gent totalement, comme du temps de la Ré­pu­blique de Weimar. A cette époque, comme nous l'enseigne Carl Schmitt, les «totalités parcellisées» se juxtaposaient. On naissait quasiment communiste, catholique du Zen­trum, social-démocrate, etc. On pas­sait sa jeunesse dans le mouvement de jeu­nesse du parti, on s'affiliait à son association sportive et, au bout du rouleau, on était en­terré grâce à la caisse d'allocation-décès que les core­li­gionnaires avaient fondée... Ce plu­ralisme, qui méritait bien son nom, n'existe plus. Chez nous, aujourd'hui, ce qui do­mine, c'est une mise-au-pas intérieure com­plète, où, pour faire bonne mesure, on laisse subsister de petites différences mineures. Les bonnes consciences se réjouissent de cette situation: elles estiment que la RFA a résolu l'énigme de l'histoire. C'est là notre nouveau wilhel­mi­nisme: «on y est arrivé, hourra!»; nous avons tiré les leçons des er­reurs de nos grands-pères. Voilà le consen­sus et nous, qui étions, paraît-il, un peuple de héros (Hel­den),  sommes devenus de véri­tables marc­hands (Händler),  pacifiques, amoureux de l'argent et roublards. Qui plus est, la four­chette de ce qui peut être dit et pensé sans encourir de sanctions s'est ré­duite conti­nuel­lement depuis les années 50. Je vous rappel­lerais qu'en 1955 paraissait, dans une gran­de maison d'édition, la Deutsche Verlags-Anstalt, un livre de Wilfried Martini, Das Ende aller Sicherheit,  l'une des critiques les plus pertinentes de la démocratie parle­men­taire. Ce livre, au­jourd'hui, ne pourrait plus paraître que chez un éditeur ultra-snob ou dans une maison minuscule d'obédience ex­trê­me-droitiste. Cela prouve bien que l'es­pace de liberté intel­lectuelle qui nous reste se rétrécit comme une peau de chagrin. Les cri­tiques du sys­tème, de la trempe d'un Mar­tini, ont été sans cesse refoulés, houspillés dans les feuilles les plus obscures ou les cé­nacles les plus sombres: une fatalité pour l'intelligence! L'Allemagne centrale, l'ex-RDA, ne nous apportera aucun renouveau spirituel. Les intellectuels de ces provinces-là sont en grande majorité des adeptes exta­tiques de l'idéologie libérale de gauche, du pacifisme et de la panacée «droit-de-l'hom­marde». Ils n'ont conservé de l'idéologie of­ficielle de la SED (le parti au pouvoir) que le miel humaniste: ils ne veu­lent plus entendre parler d'inimitié (au sens schmittien), de con­flit, d'agonalité, et four­rent leur nez dans les bouquins indigestes et abscons de Stern­berger et de Habermas. Mesurez le désastre: les 40 ans d'oppression SED n'ont même pas eu l'effet d'accroître l'intelligence des op­pressés!

 

Q.: Mais les Allemands des Länder centraux vont-ils comprendre le langage de la réédu­cation que nous maîtrisons si bien?

 

GM: Ils sont déjà en train de l'apprendre! Mais ce qui est important, c'est de savoir re­pérer ce qui se passe derrière les affects qu'ils veulent bien montrer. Savoir si quel­que chose changera grâce au nouveau mé­lan­ge inter-allemand. Bien peu de choses se dessinent à l'horizon. Mais c'est égale­ment une question qui relève de l'achèvement du processus de réunification, de l'harmo­ni­sa­tion économique, de savoir quand et com­ment elle réussira. A ce mo­ment-là, l'Alle­ma­gne pourra vraiment se demander si elle pourra jouer un rôle poli­tique et non plus se borner à suivre les Alliés comme un toutou. Quant à la classe politique de Bonn, elle es­père pouvoir échapper au destin grâce à l'u­nification européenne. L'absorption de l'Al­le­magne dans le tout eu­ropéen: voilà ce qui devrait nous libérer de la grande politique. Mais cette Europe ne fonc­tionnera pas car tout ce qui était «faisable» au niveau eu­ro­péen a déjà été fait depuis longtemps. La cons­truction du marché inté­rieur est un bri­colage qui n'a ni queue ni tête. Prenons un exemple: qui décidera de­main s'il faut ou non proclamer l'état d'urgence en Grèce? Une majorité rendue possible par les voix de quelques députés écossais ou belges? Vouloir mener une poli­tique supra-nationale en con­servant des Etats nationaux consolidés est une impossi­bilité qui divisera les Européens plutôt que de les unir.

 

Q.: Comment jugez-vous le monde du con­servatisme, de la droite, en Allemagne? Sont-ils les moteurs des processus domi­nants ou ne sont-ils que des romantiques qui claudiquent derrière les événements?

 

GM: Depuis 1789, le monde évolue vers la gauche, c'est la force des choses. Le natio­nal-socialisme et le fascisme étaient, eux aussi, des mouvements de gauche (j'émets là une idée qui n'est pas originale du tout). Le conservateur, le droitier  —je joue ici au terrible simplificateur—  est l'homme du moin­dre mal. Il suit Bismarck, Hitler, puis Adenauer, puis Kohl. Et ainsi de suite, us­que ad finem. Je ne suis pas un conserva­teur, un homme de droite. Car le problème est ailleurs: il importe bien plutôt de savoir comment, à quel moment et qui l'on «main­tient». Ce qui m'intéresse, c'est le «main­te­neur», l'Aufhalter,  le Cat-echon  dont par­lait si souvent Carl Schmitt. Hegel et Sa­vi­gny étaient des Aufhalter  de ce type; en poli­ti­que, nous avons eu Napoléon III et Bis­marck. L'idée de maintenir, de contenir le flot révolutionnai­re/­dis­s­olutif, m'apparait bien plus intéressante que toutes les belles idées de nos braves conservateurs droitiers, si soucieux de leur Bildung.  L'Aufhalter  est un pessimiste qui passe à l'action. Lui, au moins, veut agir. Le conservateur droitier ouest-allemand, veut-il agir? Moi, je dis que non!

 

Q.: Quelles sont les principales erreurs des hommes de droite allemands?

 

GM: Leur grande erreur, c'est leur rous­seauisme, qui, finalement, n'est pas telle­ment éloigné du rousseauisme de la gauche. C'est la croyance que le peuple est naturel­lement bon et que le magistrat est corrup­ti­ble. C'est le discours qui veut que le peuple soit manipulé par les politiciens qui l'op­pres­sent. En vérité, nous avons la démo­cratie to­tale: voilà notre misère! Nous avons au­jour­d'hui, en Allemagne, un système où, en haut, règne la même morale ou a-morale qu'en bas. Seule différence: la place de la vir­gule sur le compte en banque; un peu plus à gauche ou un peu plus à droite. Pour tout ordre politique qui mérite d'être qualifié d'«or­dre», il est normal qu'en haut, on puis­se faire certaines choses qu'il n'est pas per­mis de faire en bas. Et inversément: ceux qui sont en haut ne peuvent pas faire cer­taines choses que peuvent faire ceux qui sont en bas. On s'insurge contre le financement des partis, les mensonges des politiciens, leur corruption, etc. Mais le mensonge et la cor­ruption, c'est désormais un sport que prati­que tout le peuple. Pas à pas, la RFA devient un pays orientalisé, parce que les structures de l'Etat fonctionnent de moins en moins correctement, parce qu'il n'y a plus d'éthi­que politique, de Staatsethos,  y com­pris dans les hautes sphères de la bureau­cratie. La démocratie accomplie, c'est l'uni­ver­salisa­tion de l'esprit du p'tit cochon roublard, le règne universel des petits ma­lins. C'est précisément ce que nous subis­sons aujour­d'hui. C'est pourquoi le mécon­tentement à l'égard de la classe politicienne s'estompe toujours aussi rapidement: les gens devinent qu'ils agiraient exactement de la même fa­çon. Pourquoi, dès lors, les politi­ciens se­raient-ils meilleurs qu'eux-mêmes? Il fau­drait un jour examiner dans quelle mesure le mépris à l'égard du politicien n'est pas l'envers d'un mépris que l'on cul­tive trop souvent à l'égard de soi-même et qui s'ac­com­mode parfaitement de toutes nos pe­tites prétentions, de notre volonté générale à vou­loir rouler autrui dans la farine, etc.

 

Q.: Et le libéralisme?

 

GM: Dans les années qui arrivent, des crises toujours plus importantes secoueront la pla­nète, le pays et le concert international. Le libéralisme y rencontrera ses limites. La pro­chaine grande crise sera celle du libéra­lisme. Aujourd'hui, il triomphe, se croit in­vincible, mais demain, soyez en sûr, il tom­bera dans la boue pour ne plus se relever.

 

Q.: Pourquoi?

 

maschke.jpgGM: Parce que le monde ne deviendra ja­mais une unité. Parce que les coûts de toutes sortes ne pourront pas constamment être externalisés. Parce que le libéralisme vit de ce qu'ont construit des forces pré-libérales ou non libérales; il ne crée rien mais consomme tout. Or nous arrivons à un stade où il n'y a plus grand chose à consommer. A commen­cer par la morale... Puisque la morale n'est plus déterminée par l'ennemi extérieur, n'a plus l'ennemi extérieur pour affirmer ce qu'elle entend être et promouvoir, nous dé­bouchons tout naturellement sur l'implosion des valeurs...  Et le libéralisme échouera par­ce qu'il ne pourra plus satisfaire les be­soins économiques qui se font de plus en plus pressants, notamment en Europe orientale.

 

Q.: Vous croyez donc que les choses ne changent qu'à coup de catastrophes?

 

GM: C'est exact. Seules les catastrophes font que le monde change. Ceci dit, les catas­tro­phes ne garantissent pas pour autant que les peuples modifient de fond en comble leurs modes de penser déficitaires. Depuis des an­nées, nous savions, ou du moins nous étions en mesure de savoir, ce qui allait se passer si l'Europe continuait à être envahie en masse par des individus étrangers à notre espace, provenant de cultures radica­lement autres par rapport aux nôtres. Le problème devient particulièrement aigu en Allemagne et en France. Quand nous au­rons le «marché in­térieur», il deviendra plus aigu encore. Or à toute politique ration­nelle, on met des bâtons dans les roues en invoquant les droits de l'homme, etc. Ceci n'est qu'un exemple pour montrer que le fossé se creusera toujours davantage entre la capacité des uns à prévoir et la promptitude des autres à agir en con­séquence.

 

Q.: Ne vous faites-vous pas d'illusions sur la durée que peuvent prendre de tels processus? Au début des années 70, on a pronostiqué la fin de l'ère industrielle; or, des catastrophes comme celles de Tchernobyl n'ont eu pour conséquence qu'un accroissement générale de l'efficience industrielle. Même les Verts pratiquent aujourd'hui une politique indus­trielle. Ne croyez-vous pas que le libéralisme s'est montré plus résistant et innovateur qu'on ne l'avait cru?

 

GM: «Libéralisme» est un mot qui recouvre beaucoup de choses et dont la signification ne s'étend pas à la seule politique indus­triel­le. Mais, même en restant à ce niveau de po­litique industrielle, je resterai critique à l'é­gard du libéralisme. Partout, on cherche le salut dans la «dé-régulation». Quelles en sont les conséquences? Elles sont patentes dans le tiers-monde. Pour passer à un autre plan, je m'étonne toujours que la droite re­proche au libéralisme d'être inoffensif et inefficace, alors qu'elle est toujours vaincue par lui. On oublie trop souvent que le libéra­lisme est aussi ou peut être un système de domination qui fonctionne très bien, à la condition, bien sûr, que l'on ne prenne pas ses impératifs au sérieux. C'est très clair dans les pays anglo-saxons, où l'on parle sans cesse de democracy  ou de freedom,  tout en pensant God's own country  ou Britannia rules the waves.  En Allemagne, le libéralisme a d'emblée des effets destruc­teurs et dissolutifs parce que nous prenons les idéologies au sérieux, nous en faisons les impératifs catégoriques de notre agir. C'est la raison pour laquelle les Alliés nous ont octroyé ce système après 1945: pour nous neutraliser.

 

Q.: Etes-vous un anti-démocrate,

Monsieur Maschke?

 

GM: Si l'on entend par «démocratie» la par­titocratie existente, alors, oui, je suis anti-démocrate. Il n'y a aucun doute: ce système promeut l'ascension sociale de types hu­mains de basse qualité, des types humains médiocres. A la rigueur, nous pourrions vi­vre sous ce système si, à l'instar des Anglo-Sa­xons ou, partiellement, des Français, nous l'appliquions ou l'instrumentalisions avec les réserves né­cessaires, s'il y avait en Allemagne un «bloc d'idées incontestables», imperméable aux effets délétères du libé­ra­lisme idéologique et pratique, un «bloc» se­lon la définition du ju­riste français Maurice Hauriou. Evidemment, si l'on veut, les Alle­mands ont aujourd'hui un «bloc d'idées in­contes­tables»: ce sont celles de la culpabilité, de la rééducation, du refoulement des acquis du passé. Mais contrairement au «bloc» dé­fini par Hauriou, notre «bloc» est un «bloc» de faiblesses, d'éléments affaiblissants, in­ca­­pacitants. La «raison d'Etat» réside chez nous dans ces faiblesses que nous cultivons jalousement, que nous conservons comme s'il s'agissait d'un Graal. Mais cette omni­pré­sence de Hitler, cette fois comme cro­que­mitaine, signifie que Hitler règne tou­jours sur l'Allemagne, parce que c'est lui, en tant que contre-exemple, qui détermine les règles de la politique. Je suis, moi, pour la suppres­sion définitive du pouvoir hitlérien.

 

Q.: Vous êtes donc le seul véritable

anti-fasciste?

 

GM: Oui. Chez nous, la police ne peut pas être une police, l'armée ne peut pas être une armée, le supérieur hiérarchique ne peut pas être un supérieur hiérarchique, un Etat ne peut pas être un Etat, un ordre ne peut pas être un ordre, etc. Car tous les chemins mènent à Hitler. Cette obsession prend les formes les plus folles qui soient. Les spécula­tions des «rééducateurs» ont pris l'ampleur qu'elles ont parce qu'ils ont affirmé avec succès que Hitler résumait en sa personne tout ce qui relevait de l'Etat, de la Nation et de l'Autorité. Les conséquences, Arnold Gehlen les a résumées en une seule phrase: «A tout ce qui est encore debout, on extirpe la moëlle des os». Or, en réalité, le système mis sur pied par Hitler n'était pas un Etat mais une «anarchie autoritaire», une alliance de groupes ou de bandes qui n'ont jamais cessé de se combattre les uns les autres pendant les douze ans qu'a duré le national-socia­lisme. Hitler n'était pas un nationaliste, mais un impérialiste racialiste. Pour lui, la nation allemande était un instrument, un réservoir de chair à canon, comme le prouve son comportement du printemps 1945. Mais cette vision-là, bien réelle, de l'hitlérisme n'a pas la cote; c'est l'interprétation sélective­ment colorée qui s'est imposée dans nos es­prits; résultat: les notions d'Etat et de Nation peuvent être dénoncées de manière ininter­rompue, détruites au nom de l'éman­cipa­tion.

 

Q.: Voyez-vous un avenir pour la droite en Allemagne?

 

GM: Pas pour le moment.

 

Q.: A quoi cela est-il dû?

 

GM: Notamment parce que le niveau intel­lectuel de la droite allemande est misérable. Je n'ai jamais cessé de le constater. Avant, je prononçais souvent des conférences pour ce public; je voyais arriver 30 bonshommes, parmi lesquels un seul était lucide et les 29 autres, idiots. La plupart étaient tenaillés par des fantasmes ou des ressentiments. Ce public des cénacles de droite vous coupe tous vos effets. Ce ne sont pas des assemblées, soudées par une volonté commune, mais des poulaillers où s'agitent des individus qui se prétendent favorables à l'autorité mais qui, en réalité, sont des produits de l'éducation anti-autoritaire.

 

Q.: L'Amérique est-elle la cible principale

de l'anti-libéralisme?

 

GM: Deux fois en ce siècle, l'Amérique s'est dressée contre nous, a voulu détruire nos œu­vres politiques, deux fois, elle nous a dé­claré la guerre, nous a occupés et nous a ré­éduqués.

 

Q.: Mais l'anti-américanisme ne se déploie-t-il pas essentiellement au niveau «impolitique» des sentiments?

 

GM: L'Amérique est une puissance étran­gè­re à notre espace, qui occupe l'Europe. Je suis insensible à ses séductions. Sa culture de masse a des effets désorientants. Certes, d'aucuns minimisent les effets de cette cul­ture de masse, en croyant que tout style de vie n'est que convention, n'est qu'extériorité. Beaucoup le croient, ce qui prouve que le pro­blème de la forme, problème essentiel, n'est plus compris. Et pas seulement en Alle­ma­gne.

 

Q.: Comment expliquez-vous la montée du néo-paganisme, au sein des droites, spécia­lement en Allemagne et en France?

 

GM: Cette montée s'explique par la crise du christianisme. En Allemagne, après 1918, le protestantisme s'est dissous; plus tard, à la suite de Vatican II dans les années 60, ça a été au tour du catholicisme. On interprète le problème du christianisme au départ du con­cept d'«humanité». Or le christianisme ne repose pas sur l'humanité mais sur l'a­mour de Dieu, l'amour porté à Dieu. Au­jour­d'hui, les théologiens progressistes attri­buent au christianisme tout ce qu'il a jadis combattu: les droits de l'homme, la démo­cra­tie, l'amour du lointain (de l'exotique), l'af­faiblissement de la nation. Pourtant, du christianisme véritable, on ne peut même pas déduire un refus de la poli­tique de puis­sance. Il suffit de penser à l'époque baroque. De nos jours, nous trou­vons des chrétiens qui jugent qu'il est très chrétien de rejetter la distinction entre l'ami et l'ennemi, alors qu'el­le est induite par le péché originel, que les théologiens actuels cherchent à mini­mi­ser dans leurs interpré­tations. Mais seul Dieu peut lever cette dis­tinction. Hernán Cor­tés et Francisco Pizarro savaient encore que c'était impossible, con­trairement à nos évêques d'aujourd'hui, Lehmann et Kruse. Cortés et Pizarro étaient de meilleurs chré­tiens que ces deux évêques. Le néo-paga­nis­me a le vent en poupe à notre époque où la sécularisation s'accélére et où les églises el­les-mêmes favorisent la dé-spi­ritualisation. Mais être païen, cela signifie aussi prier. Demandez donc à l'un ou l'autre de ces néo-païens s'il prie ou s'il croit à l'un ou l'autre dieu païen. Au fond, le néo-paga­nisme n'est qu'un travestissement actualisé de l'athéis­me et de l'anticléricalisme. Pour moi, le néo-paganisme qui prétend revenir à nos racines est absurde. Nos racines se si­tuent dans le christianisme et nous ne pou­vons pas reve­nir 2000 ans en arrière.

 

Q.: Alors, le néo-paganisme,

de quoi est-il l'indice?

 

GM: Il est l'indice que nous vivons en déca­dence. Pour stigmatiser la décadence, notre époque a besoin d'un coupable et elle l'a trou­vé dans le christianisme. Et cela dans un mon­de où les chrétiens sont devenus ra­rissi­mes! Le christianisme est coupable de la dé­cadence, pensait Nietzsche, ce «fanfaron de l'intemporel» comme aimait à l'appeler Carl Schmitt. Nietzsche est bel et bien l'ancêtre spirituel de ces gens-là. Mais qu'entendait Nietzsche par christianisme? Le protestan­tis­me culturel libéral, prusso-allemand. C'est-à-dire une idéologie qui n'existait pas en Italie et en France; aussi je ne saisis pas pourquoi tant de Français et d'Italiens se réclament de Nietzsche quand ils s'attaquent au christianisme.

 

Q.: Monsieur Maschke, nous vous remer­cions de nous avoir accordé cet entretien.

 

(une version abrégée de cet entretien est pa­rue dans Junge Freiheit n°6/91; adresse: JF, Postfach 147, D-7801 Stegen/Freiburg).

dimanche, 10 janvier 2010

Entretien exclusif avec A. Soljenitsyne

180px-Solzhenitsyn.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1991

Entretien exclusif avec Alexandre SOLJENITSYNE

 

propos recueillis par Wolfgang STRAUSS

 

Depuis novembre 1987, une complicité spirituelle lie le Prix Nobel de littérature Alexandre Soljénitsyne, en exil à Cavendish (Vermont, USA), et notre camarade Wolfgang Strauss, collaborateur des revues Europa Vorn, Staatsbriefe  et, pour les traductions françaises, de Vouloir. Cette amitié s'est scellée par une intense correspondance entre les deux hommes. Les propos ci-dessous ont été recueillis avant les événements d'août.

 

Q.: Le peuple allemand est enfin réunifié. Prenez-vous part aux événements qui se déroulent en Allemagne?

 

AS: Oui, évidemment. Car pour moi, vous ê­tes un important intermédiaire. Avant déjà, je lisais vos articles et vos recensions: un éditeur allemand me les envoyait. Lorsque je les lisais, j'étais surpris par la précision de vos connais­san­ces en histoire russe. Mais maintenant que je sais que vous avez séjourné dans l'Archipel Gou­lag, je comprends.

 

Q.: Les Allemands dans leur majorité aujourd'hui sont russophiles; ils se solidarisent avec le combat russe pour la liberté, pour la renaissance de la Russie, dont vous êtes le représentant, tant sur le plan politique que sur le plan spirituel. Mais, malheureusement, les informations que nous recevons sont rares et lacunaires.

 

AS: Bien sûr, vous avez appris personnel­le­ment à connaître la Russie et vous savez beau­coup de choses qu'il est difficile d'expli­quer à vos compatriotes. Ne perdez pas cou­ra­ge, gardez votre énergie, poursuivez vos efforts.

 

Q.: Au vu de la décadence dominante, quelles sont, à votre avis, les chances d'un renouveau spirituel et éthique chez les Russes et les Allemands?

 

AS: Oh, le chemin sera long avant que les peuples de Russie et de notre communauté ne recouvrent la santé morale. L'Allemagne, elle aussi, se trouve dans une triste situation, une situation pathologique, et peu de temps nous res­te pour retrouver la voie de la convales­cen­ce et de la guérison.

 

Q.: Quelle est votre tâche principale, aujourd'hui?

 

AS: Depuis six ans déjà, je ne réponds plus aux questions que me posent les médias occi­den­taux. Mon devoir, c'est d'écrire des livres. Et ce qui me reste à faire est titanesque. 

dimanche, 03 janvier 2010

Entrevista sovre uma das divisoes infantis do nacionalismo europeu

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Entrevista sobre uma das divisões infantis do nacionalismo europeu

by Rodrigo

Já não deposita esperança, como antes ou como alguns “nacional-revolucionários”, no mundo árabe-muçulmano?

Todas as tentativas anteriores de criar um eixo ou uma concertação entre os dissidentes construtivos da Europa manipulada e os parceiros do mundo árabe considerados “Estados-Pária” saldaram-se por falhanços. Os colóquios líbios da “Terceira Teoria Universal” deixaram de existir aquando da aproximação entre Khadaffi e os Estados Unidos e desde que o líder líbio adoptou políticas anti-europeias, nomeadamente participando recentemente no mobbing (mobilização mediática para fazer pressão política) contra a Suíça, um mobbing em curso desde há uns bons 10 anos e que encontrou novo pretexto para continuar depois da famosa votação sobre os minaretes.

O líder nacionalista Nasser desapareceu para ser substituído por Sadat e depois por Moubarak, que são aliados muito preciosos dos EUA. A Síria participou na perseguição ao Iraque, última potencia nacional árabe, eliminada em 2003, apesar do efémero e frágil eixo entre Paris, Berlim e Moscovo. As crispações fundamentalistas declaram guerra ao Ocidente sem fazer distinção entre a Europa manipulada e o Hegemon americano, com o seu apêndice israelita. Os fundamentalistas opõem-se aos nossos modos de vida tradicionais e isso é inaceitável, como são inaceitáveis todos os proselitismos do mesmo tipo: a noção de jahiliyah (idolatria a destruir) é para todos perigosa, subversiva e inaceitável; é ela que veicula esses fundamentalismos, logo à partida instrumentalizando contra os estados nacionais árabes, contra os resíduos de sincretismo otomano ou persa e depois por parte das diásporas muçulmanas na Europa contra todas as formas de politicas não fundamentalistas, nomeadamente contra as instituições dos Estados de acolhimento e contra os costumes tradicionais dos povos autóctones.

Uma aliança com estes fundamentalismos obrigar-nos-ia a renunciarmos ao que somos, do mesmo modo como exige o Hegemon americano, a exemplo do Grande Irmão do romance 1984 de Georges Orwell, exigem que rompamos com os recursos íntimos da nossa historia. O prémio Nobel da literatura Naipaul descreveu e denunciou perfeitamente este desvio na sua obra, evocando principalmente as situações que prevalecem na índia e na Indonésia. Neste arquipélago, o exemplo mais patente, aos seus olhos, é a vontade dos integristas de se vestirem segundo a moda saudita e imitar os costumes da península arábica, quando estas vestimentas e estes costumes eram diametralmente diferentes dos do arquipélago, onde há muito tempo reinava uma síntese feita de religiosidades autóctones e de hinduísmo, como atestam, por exemplo, as danças de Bali.

A ideologia inicial do Hegemon americano é também um puritanismo iconoclasta que rejeita as sínteses e os sincretismos da “Merry Old England” (1), do humanismo de Erasmo, do Renascimento Europeu e das políticas tradicionais da Europa. Neste sentido partilha bom número de denominadores comuns com os fundamentalismos islâmicos actuais. Os Estados Unidos, com o apoio financeiro dos Wahabitas sauditas, manipularam estes fundamentalismos contra Nasser no Egipto, contra o Xá do Irão (culpado de querer desenvolver a energia nuclear), contra o poder laico no Afeganistão ou contra Saddam Hussein, puxando provavelmente ao mesmo tempo alguns cordelinhos no assassinato do rei Faycol, “culpado” de querer aumentar o preço do petróleo e de se ter aliado, nesta óptica, ao Xá do Irão, como brilhantemente mostrou o geopolitólogo sueco, William Engdahl, especialista de geopolítica do petróleo. Acrescentemos de passagem que a actualidade mais recente confirma esta hipótese: o atentado contra a guarda republicana islâmica iraniana, os problemas ocorridos nas províncias iranianas com o fim de destabilizar o país, são obra de integrismos sunitas, manipulados pelos Estados Unidos e a Arábia Saudita contra o Irão de Ahmadinedjad, acusado de recuperar a política nuclear do Xá! O Irão respondeu apoiando os rebeldes zaiditas/xiitas do Yemen, retomando assim uma velha estratégia persa, anterior ao surgimento do Islão!

Os pequenos fantoches que se gabam de ser autênticos nacional-revolucionários e que se deleitam em todo o tipo de farsas pró-fundamentalistas são, na verdade, bufões alinhados por Washington por dois motivos estratégicos evidentes:

1- Criar a confusão no seio dos movimentos europeístas e fazê-los aderir aos esquemas binários disseminados pelas grandes agencias mediáticas americanas que orquestram por todo o mundo o formidável “soft power” de Washington;
2- Provar urbi et orbi que a aliança euro-islâmica (euro-fundamentalista) é a opção preconizada por “perigosos marginais”, por “terroristas potenciais”, pelos “inimigos da liberdade”, por “populistas fascizantes ou cripto-comunistas”.

Neste contexto encontramos também as redes ditas “anti-fascistas”, agitando-se contra fenómenos assimilados, mal ou bem, a uma ideologia política desaparecida desde há 65 anos. No teatro mediático, colocado em prática pelo “soft power” do Hegemon, temos, de uma parte, os idiotas nacional-revolucionários ou neo-fascistas europeus zombificados, mais ou menos convertidos a uma ou outra expressão do wahabismo e, de outra parte, os anti-fascistas caricaturais, largamente financiados com o propósito de mediatizar os primeiros (…).Todos têm o seu papel a desempenhar, mas o encenador é o mesmo e conduz a comédia com mestria. Tudo isto resulta num espectáculo delirante, apresentado pela grande imprensa, igualmente descerebrada.(…)

(…) Efectivamente, é forçoso constatar que o fundamentalismo judaico-sionista é igualmente nefasto ao espírito e ao politico quanto as suas contra-partes islamistas ou americano-puritanas. Todos, uns como outros, estão afastados do espírito antigo e renascentista da Europa, de Aristóteles, de Tito Lívio, de Pico della Mirandola, de Erasmo ou Justo Lipsio. Perante todas estas derivas, nós afirmamos, em alto e bom som, um “non possumus”!Europeus somos e europeus permaneceremos, sem nos disfarçarmos de beduínos, de founding fathers ou de sectários de Guch Emunim.

Não podemos classificar como anti-semita a rejeição desse pseudo-sionismo ultra-conservador que recapitula de maneira caricatural aquilo em que pensam políticos de aparência mais refinada, quer sejam likudistas ou trabalhistas, constrangidos a rejeitar os judaísmos mais fecundos para melhor desempenharem o seu papel no cenário do Próximo e Médio Oriente imaginado pelo Hegemon. O sionismo, ideologia inicialmente de facetas múltiplas, decaiu para não ser mais que o discurso de marionetas tão sinistras quanto os wahabitas. Todo o verdadeiro filo-semitismo humanista europeu mergulha, pelo contrário, em obras bem mais fascinantes: as de Raymond Aron, Henri Bergson, Ernst Kantorowicz, Hannah Arendt, Simone Weil, Walter Rathenau, para não citar mais que um pequeno punhado de pensadores e filósofos fecundos. Rejeitar os esquemas de perigosos simplificadores não é anti-semitismo, anti-americanismo primário ou islamofobia. Diga-se de uma vez por todas!

Excerto de uma entrevista a Robert Steuckers conduzida por Philippe Devos-Clairfontaine (Bruxelas, 7 de Dezembro de 2009)

jeudi, 31 décembre 2009

Entretien de Robert Steuckers à "Volk in Bewegung"

vib.jpgEntretien de Robert Steuckers  à “Volk in Bewegung”

Propos recueillis par Andreas Thierry

 

Novembre 2009

 

Monsieur Steuckers, pouvez-vous expliquer à nos lecteurs, en quelques mots, quels ont été les objectifs de « Synergies Européennes » ?

 

Pour répéter en gros ce que j’ai déjà maintes fois dit dans plusieurs entretiens, l’objectif principal de « Synergies Européennes » a été de faire émerger une sorte de « Think Tank », de « Boîte à idées », où penseurs et publicistes non conformistes venus de tout l’espace culturel européen pouvaient participer à la mise en forme d’une alternative générale au système dominant. Pour nous, la différence majeure entre la fidélité conformiste au système, d’une part, et la critique non conformiste de ce même système, d’autre part, réside essentiellement dans la différence fondamentale qui existe entre 1) une pensée organique, consciente des forces à l’œuvre dans l’histoire et proches des hommes réels et 2) une pensée détachée de l’histoire, des continuités historiques, mécanique et par là même étrangère à l’homme. Cette dernière forme de pensée nous est présentée désormais comme le sommet du « Bien », comme un corpus intangible dont on ne peut mettre la validité en doute. Pour parvenir à notre objectif, nous souhaitions établir une coopération constante, bien que souple, entre publicistes de toute l’Europe, de façon à ce qu’un flot d’informations directes et permanentes, issues immédiatement des sources, puisse s’écrire, surtout par le biais de traductions et d’entretiens. C’est ce que j’ai essayé de concrétiser personnellement dans les différentes revues que j’ai patronnées ou dont j’ai assumé le secrétariat de rédaction, comme « Vouloir », « Orientations », « Nouvelles de Synergies Européennes », « Au fil de l’épée ». D’autres comme Alessandra Colla et Marco Battarra, pour la revue milanaise « Orion » ont aussi cherché à développer une stratégie similaire comme, avant eux, mais cette fois dans le cadre de la « nouvelle droite » historique, le Dr. Marco Tarchi de Florence, avec son bulletin « Diorama Letterario ». En fait, s’il fallait trouver un modèle pour ce type de stratégie métapolitique, il faudrait assurément aller le chercher auprès de l’hebdomadaire parisien « Courrier International » d’Alexandre Adler qui, comme on peut le constater chaque semaine, publie des traductions en provenance du monde entier. Cet hebdomadaire, qui a rapidement reçu des appuis considérables, est devenu entretemps l’une des revues françaises les plus lues et les mieux faites. Hélas, elle ne répand pas un européisme comme celui que nous souhaitions voir se consolider ! Mais une stratégie de même type, une sorte d’ « imitatio Adleri », est celle que j’ai toujours suggérée en vain à divers éditeurs de revues ou d’hebdomadaires, y compris en Allemagne. Personne ne semblait s’intéresser à un tel projet. C’est dommage ! Et pourtant le brillant succès d’Adler nous démontre que cela aurait bien valu la peine de réaliser et de soutenir un projet similaire.

 

L’association et le réseau « Synergies Européennes » ont été fondés en 1993. Quel bilan en tirez-vous après plus de quinze ans ?

 

Le bilan, je dois l’avouer, n’est guère satisfaisant. Entre 1993 et 2003, tout a bien fonctionné : les revues paraissaient régulièrement, les contributions rédactionnelles arrivaient du monde entier au secrétariat de rédaction, séminaires et universités d’été se succédaient sans heurts au fil des années. Ce qui a rompu cette « coulée continue », c’est l’augmentation soudaine et considérable des tarifs postaux à la fin des années 90 en Belgique, ce qui a contribué à déstabiliser totalement les finances fort précaires de l’entreprise ; il faut ajouter à cela le décès de bon nombre d’abonnés âgés, qui incarnaient une véritable culture « revuiste », et l’intérêt croissant que portaient les plus jeunes à internet. Du coup, les livres et les revues n’attiraient plus autant le chaland, surtout dans l’espace linguistique francophone ou dans la petite Belgique, néerlandophone ou francophone. Ce changement de donne a d’ailleurs entrainé la disparition de bon nombre de revues ou de bulletins similaires aux nôtres. Seules l’école des cadres de Wallonie, sous la direction de Philippe Banoy, a fonctionné sans arrêt jusqu’à aujourd’hui, en poussant des pointes en Flandre méridionale et en Lorraine, régions occupées par la France, avec, en plus, des échanges féconds avec des groupes suisses romands ou flamands. Après quelques premiers projets sans lendemains, nos deux nouveaux sites sur la grande toile donnent, depuis leur création au début de 2007, des résultats que l’on peut considérer maintenant comme satisfaisants (voir : http://euro-synergies.hautetfort.com en sept langues et alimenté chaque jour ; et http://vouloir.hautetfort.com animé depuis Paris en coopération avec d’anciens correspondants français qui se sont donné pour tâche de digitaliser et d’éditer les archives des revues francophones du groupe, comme « Vouloir », « Orientations » et « Nouvelles de Synergies Européennes », en les flanquant de textes nouveaux ou complémentaires et de bibliographies actualisées).

 

Pourquoi ne parvient-on pas, malgré les bonnes intentions, à établir une meilleure coopération entre forces non conformistes, européistes et nationalistes en Europe ?

 

Pour répondre de manière exhaustive à votre question, il me faudrait tout un livre ! La raison principale de ce manque de coopération rationnelle doit certainement être portée au compte du déclin culturel généralisé que nous subissons depuis longtemps. Jadis, pendant la « période axiale » de l’histoire des idées, de cette révolution culturelle pacifique, que l’Europe a expérimentée entre 1860 et 1914, on étudiait encore le latin et le grec ancien dans les lycées, gymnases et athénées d’Europe, ce qui facilitait l’apprentissage général des langues modernes, ou du moins leur acquisition passive. De cette façon, on pouvait lire, au-delà des frontières, livres, essais et articles. Aujourd’hui, nous avons sans doute comme « lingua franca » une langue artificielle et internationale que nous utilisons « pour faire de la communication » : c’est le « basic English » mais il ne nous permet pas grand chose, à part commander à l’étranger un sandwich ou un cappuccino, en bafouillant… Mais il n’y a plus de communication fondamentale. Dans les cercles non conformistes, cette tragédie est surtout perceptible, lorsqu’on constate l’absence totale de relations culturelles suivies et systématiques entre les mondes linguistiques allemand et italien ou néerlandais et italien. La formidable production italienne de livres, d’idées, de revues et d’initiatives de toutes sortes est purement et simplement ignorée dans nos régions nord-européennes, alors que les questions abordées et étudiées en Italie le sont de manière nettement moins confuse que chez nous et les réponses que les Italiens apportent sont généralement intelligentes, d’une intelligence que nous aurions pu faire nôtre si nous avions lu les livres et les textes venus de la péninsule apennine. Je pense surtout à la critique finement ciselée de la partitocratie mafieuse, qui aurait été bien utile en Belgique notamment et qu’on aurait pu combiner en Allemagne avec les thèses bien argumentées du Prof. Erwin Scheuch de Cologne, aujourd’hui décédé, ou de celles du politologue von Arnim.

 

Comment jugez-vous l’option pro-sioniste que propage Guillaume Faye dans « La Nouvelle Question juive » et que certains partis de droite ou d’extrême droite ont reprise à leur compte, comme par exemple, le BNP britannique ou le mouvement « Pro Köln » en Allemagne ?

 

Votre question est fort intéressante et mériterait, pour en débattre à fond, un assez long essai, car la fameuse « question juive » est de fait d’une extrême complexité. Mais, avant d’aborder le vif de ce sujet, je tiens à dire que Faye est certainement l’un de mes plus vieux amis issus du mouvement dit de la « nouvelle droite », aujourd’hui moribond ou résiduaire en France et que, malgré toutes les divergences qui pourraient éventuellement nous séparer, cette amitié demeurera. Pour être amis, il ne faut pas nécessairement partager les mêmes points de vue sur tout. Pour maintenir une amitié, il y a surtout les expériences et les déceptions communes du passé… Elles ont souvent plus de poids. Dans le lent processus de déliquescence qu’a vécu la « nouvelle droite », ses avatars et ses reliquats, Faye et quelques autres, dont moi-même, ont été, au sein du vaste camp bigarré des diverses « droites », les victimes de jalousies tenaces, des victimes certes pas toujours innocentes (car nous rendions coup de Jarnac pour coup de Jarnac, nous répondions aux sombres perfidies par des moqueries bien salées) ; ce sont surtout la force de travail de Faye et sa productivité intense qui suscitaient ces jalousies. Dans les années 80, il faut tout de même rappeler que c’était lui le moteur du « mouvement métapolitique » d’inspiration gramsciste et non d’autres, comme on l’a affirmé trop souvent à tort. Des concepts comme « le système à tuer les peuples » et, plus tard, « l’archéofuturisme » demeurent, qu’on le veuille ou non, des instruments critiques féconds pour développer une « théorie critique » alternative, qui aurait pour but, de subvertir le système dominant exactement de la même façon que la « théorie critique » de l’Ecole de Francfort avait subverti les traditions politiques classiques en Europe. Faye est l’élève de quelques personnalités importantes du monde universitaire français, ne l’oublions pas, telles Bertrand de Jouvenel, Julien Freund (le disciple alsacien de Carl Schmitt), Michel Crozier (l’observateur critique des systèmes dominants qui multiplient les blocages sociaux, un observateur qui s’inscrit dans la tradition allemande de Max Weber), Henri Lefèbvre (ancien penseur principal du PCF) et Jules Monnerot (un des plus fins analystes des processus révolutionnaires du 20ème siècle). Sur l’influence de Lefèbvre, j’ai écrit un bref article (voir : http://euro-synergies.hautetfort.com/). Sur Freund, Jouvenel et Monnerot, Faye a écrit des articles et des essais substantiels. Il n’y a encore rien sur l’influence qu’a exercée sur lui Michel Crozier.

 

Je ne qualifierais pas « La Nouvelle Question juive » d’option pro-sioniste à 100% ; ce n’est pas le cas sauf pour les simplificateurs outranciers de tous bords, qui vont sans doute interpréter le contenu de ce livre de la sorte. Malheureusement les terribles simplifications ont souvent le dessus et c’est ce qu’il convient de déplorer. Surtout que personne n’a jamais demandé à Faye de justifier la curiosité qu’est le sionisme pour tout Européen moyen ou de la suggérer comme alliée. Lorsque Faye analysait ou analyse des processus sociaux, il reste un maître, qui transmet de manière percutante et didactique les idées de ses brillants prédécesseurs et professeurs. Mais, comme n’importe quel autre intellectuel non imbriqué dans la défense d’une confession religieuse ou dépourvu de formation théologique, Faye ne peut pas se muer du jour au lendemain en un théologien judaïsant ou en un spécialiste ès questions juives. C’est ce qu’il a tenté de faire, malheureusement, en écrivant ce fameux livre qu’est devenu « La Nouvelle Question juive » ! C’est ici qu’il faut voir la faiblesse intrinsèque de cet ouvrage.  Je ne trouve pas (ou pas assez) de sources ou de références sérieuses sur l’histoire proprement dite du mouvement sioniste, comme, par exemple, les travaux de Sternhell ou de Shindler, ou encore sur l’histoire de la Palestine au 20ème siècle, comme le livre de Gudrun Krämer en Allemagne. Dans les années 20 et 30 du 20ème siècle, le mouvement sioniste, comme nous l’apprend Shindler, a d’abord été inspiré par les combattants nationalistes irlandais (Michael Collins) puis, plus tard, par ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui les « Etats totalitaires » : ces engouements venaient du fait que les militants de l’Irgoun combattaient surtout l’Empire britannique. La situation a changé au cours des deux premières années de la seconde guerre mondiale, après que les services secrets britanniques aient froidement abattu les derniers sionistes pro-allemands ou pro-italiens ! Sans arguments historiques bien étayés, tout livre demeure une compilation de vœux pieux (ou impies…), ce qui n’est ni utile ni pertinent ni scientifique.

 

La deuxième critique que j’avancerais après avoir pris acte de « La Nouvelle Question juive », c’est que je n’y ai pas trouvé d’évocation de voix critiques venues d’Israël même : en effet, la critique du sionisme à l’intérieur même de l’Etat hébreu ou dans la littérature israélienne actuelle me paraît plus pertinente et plus utile que tout ce qui se produit en dehors, dans le monde arabe, en Europe ou en Amérique et que l’on peut aisément qualifier d’ « antisémite ». L’affaire Avraham Burg vient encore de nous le prouver en Allemagne récemment. Faye, comme la plupart des intellectuels français d’ailleurs, semble ignorer tous ces débats et toutes ces critiques en provenance d’Israël même, alors que la presse allemande, par exemple, s’en fait régulièrement l’écho. Mais je voudrais poser ici une question impertinente : qu’est le sionisme, sinon un simple instrument de l’impérialisme américain, exactement comme bon nombre (mais pas tous…) de phénomènes islamistes et fondamentalistes d’inspiration sunnite ou wahhabite ? Les positions prises par Faye dans « La Nouvelle Question juive » sont finalement tributaires des thèses émises par le géopolitologue français Alexandre Del Valle. Celui-ci, dans la première phase de son œuvre, avait mis très justement l’accent sur l’alliance implicite entre les Etats-Unis et le mouvement moudjahiddin en Asie centrale. Cette alliance avait été conçue par Zbigniew Brzezinski dans le but de mettre hors jeu l’Union Soviétique dans le « rimland » d’Asie du Sud-Ouest, comme disent les Américains. Les fondamentalistes islamistes d’obédience sunnite, dans ce contexte, ont servi de bandes armées mobiles pour une « low intensity warfare », pour une « guerre de basse intensité » contre les Chiites d’Iran ou pour inciter les Tchétchènes à faire la guerre contre la Russie dans le Caucase. Ce sont là des faits que personne ne peut nier. Dans la seconde phase de ses activités para-politiques, Del Valle a effectivement parié sur une option clairement pro-sioniste, ce qui lui a permis d’écrire des articles dans des publications pro-sionistes comme, par exemple, « Israël Magazine ». Del Valle, dont la famille est originaire de la communauté européenne d’Algérie, ancienne colonie française, répète ainsi, quarante ou cinquante plus tard, l’alliance entre les colons « pied-noir » qui se dressaient contre De Gaulle, notamment au sein de cette armée secrète que fut l’OAS, et certaines forces sionistes de la diaspora juive d’Algérie, qui sera, elle aussi, expulsée après l’indépendance du pays. L’option de Del Valle s’explique mieux, si on tient compte des expériences douloureuses et traumatisantes de toutes ses familles expulsées. Bien entendu, cette expérience, aussi traumatisante qu’elle soit, ne peut que difficilement servir de modèle ou d’orientation pour le reste de l’Europe ou entrer en ligne de compte pour façonner une future géopolitique européenne, car elle est finalement un phénomène historique qui s’est déroulé en marge du noyau central de notre continent. Il faut ajouter que ces débats sur la guerre d’Algérie et ses retombées sont courants en France, parfois très vivaces et peuvent provoquer encore de virulentes querelles.

 

J’ai exprimé mon point de vue, en présence de Faye, lors d’un colloque de la « Gesellschaft für Freie Publizistik » à Bayreuth en 2006 et, ensuite, lors de conférences publiques à Genève ou dans la région lilloise en 2009. Pour « Synergies Européennes », l’Amérique reste l’ennemi principal et donc tous les satellites de Washington doivent être considérés comme des ennemis de l’Europe, ou, du moins, comme des ennemis potentiels, même s’ils ne sont que des ennemis secondaires ou des ennemis de second rang. Dans le monde actuel, les schémas binaires, noirs/blancs, ne revêtent aucune utilité pratique, même si les médias les répandent pour tromper et gruger les masses. Les services américains et leur « soft power » médiatique ont réussi à établir un système très complexe d’alliances et de contre-alliances, que l’on peut modifier à l’envi, en inventant et en fabriquant en permanence des « vérités médiatiques », forgées sur des schémas simples et donc binaires, de manière à mieux pouvoir lancer des campagnes de haine contre n’importe quel ennemi désigné. Le « soft power » et les agences médiatiques fabriquent donc des faux amis et des faux ennemis, comme l’attestent l’histoire récente de l’Iran ou la guerre Iran/Irak, où, tour à tour, Bagdad et Téhéran ont été amis ou ennemis. Cette stratégie permet de dissimuler plus facilement les véritables intérêts impérialistes des Américains. Au Proche-Orient et au Moyen-Orient, il s’agit de maintenir aussi longtemps que possible le chaos et c’est à cela que servent les querelles permanentes entre sionistes, sunnites et chiites : la seule chose qu’il faut éviter, c’est le retour au pouvoir de nationalistes arabes laïques, inspirés par les actions et les idées de Michel Aflaq ou de Gamal Abdel Nasser, qui mettraient fin au chaos. Dans ce contexte, j’aimerais aussi rappeler que les frères musulmans sunnites d’Egypte ont été les pires ennemis de Nasser et, ainsi, des alliés implicites d’Israël et des Etats-Unis !

 

Faye, comme la plupart de nos concitoyens aujourd’hui, est aussi, dans ce contexte bigarré, chaotique et incompréhensible pour le commun des mortels, une victime du « soft power » omniprésent, justement parce que les mass médias ne donnent plus un accès immédiat à du savoir historique substantiel, quand ils commentent l’actualité au jour le jour. Faye avait soif de clarté, une clarté à mon sens mal comprise et par trop simplificatrice, ce que je ne peux accepter sur le plan intellectuel. Dans cette quête de clarté, il a opté pour un schéma anti-islamiste, tandis que son ancien compagnon de combat, Alain de Benoist, a opté, lui, pour un schéma pro-islamiste et pro-iranien, tout aussi inacceptable pour un européisme raisonné et raisonnable. Seule une étude en profondeur des grands courants de l’histoire turque, ottomane, arabe et iranienne peut nous aider à forger un instrument infaillible pour comprendre la situation qui agite l’Asie Mineure, le Moyen-Orient et l’Asie centrale.

 

Je ne crois pas non plus que « la Nouvelle Question juive » ait véritablement influencé le BNP britannique ou le mouvement « Pro Köln » en Allemagne, parce que, tout simplement, ce livre n’a jamais été traduit et a eu, en apparence, moins d’influence que les autres écrits de Faye. En Flandre et en Hollande, par exemple, ce sont d’autres voix, dans les reliquats du mouvement de Pim Fortuyn ou dans le parti actuel de Wilders, qui donnent le ton en matière d’hostilité à l’islamisme ; cette lame de fond hostile à l’islam des populations immigrées est partout perceptible dans ces « Bas Pays » de Par-Deça.  Signalons notamment les écrits et discours d’un professeur hollandais, le Dr. Hans Jansen (cf. « Vrij Vlaanderen », Bruxelles, n°1/2009), qui est l’une des figures de proue de l’anti-islamisme dans l’espace culturel néerlandophone, tandis que Faye, lui, y est isolé et inconnu. Je formulerai une dernière remarque : pour développer en Europe des argumentaires anti-impérialistes ou anti-américains, il me paraît dorénavant plus judicieux de se tourner vers l’Amérique latine et ses corpus doctrinaux indigénistes, bolivariens, péronistes et castristes ; le continent ibéro-américain recèle des potentialités beaucoup plus intéressantes que le monde arabo-musulman aujourd’hui, surtout parce que Chavez au Venezuela et Lula au Brésil ont inauguré une diplomatie alternative aux perspectives fécondes. Mais cette riche veine potentielle d’arguments pertinents et de réalisations pratiques demeure ignorée dans le camp des « droites », des nationalismes ou autres mouvances identitaires. Nous considérons, dans les cercles de « Synergies Européennes », que notre devoir est de faire connaître toutes ces thèses et ces thèmes. Raison pour laquelle il convient de consulter régulièrement : http://euro-synergies.hautetfort.com/ La plupart des argumentaires latino-américains, qui sont parus sur notre site, y figurent en langue espagnole. Mais que ceux qui ne sont pas hispanophones ou hispanistes se consolent : il existe aujourd’hui d’excellents logiciels de traduction !

 

Q. : La survie des peuples européens est menacée aujourd’hui plus que jamais. Quelles chances de survie l’homme blanc a-t-il encore au 21ème siècle ?

 

Je repère dans le ton de votre question l’influence claire et nette du dernier ouvrage de Peter Scholl-Latour, paru début novembre en Allemagne. Oui, c’est un fait, que sur les plans démographique et purement quantitatif, l’Europe ne signifie plus autant que jadis. L’Europe a été profondément affaiblie par les deux conflagrations mondiales qui ont ravagé son territoire au 20ème siècle. L’histoire européenne nous a cependant appris que les Européens, souvent, ne réagissaient qu’à la toute dernière minute, comme à Vienne en 1529, 1532 et 1683 ou dans l’espace méditerranéen à Lépante en 1571, sans pour autant disposer, à ces moments cruciaux, de la supériorité quantitative. La quantité n’est pas aussi importante que la qualité. La tâche première des forces non conformistes d’Europe, et c’est là une tâche extrêmement ardue, sera d’éveiller à nouveau le sens de la qualité, car la qualité implique l’action, tandis que la quantité, par sa masse, implique la passivité. C’est ce que nous enseignait Michel Crozier dans « L’acteur et le système » : l’homme ou les peuples sont paralysés dans le système dominant, que ce soit par le truchement d’un quiétisme à la hippy ou par celui de l’hyperconsommation. Si tel est le cas, ils ne sont plus « acteurs » dans leur propre système politique, sclérosé et bloqué, et leur liberté de façonner leur vie politique leur est ôtée. La tâche difficile est donc de retransformer les petits moutons passifs en loups actifs, dans l’espoir que les autres, pendant ce temps, étouffent sous le poids de leur propre masse, de leur propre quantité ou tombent exténués parce qu’ils n’ont cessé d’agir avec trop de fébrilité et de frénésie. Ce travail ne sera pas achevé demain ni après-demain. Nos petits-enfants, eux aussi, devront encore monter au créneau.

 

(rédigé à Forest-Flotzenberg, les 25 et 26 novembre 2009 ; version française : décembre 2009).

 

 

 

dimanche, 20 décembre 2009

Entretien avec Maître Jure Vujic

Jure_Vujic[1].jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 2001

 

ENTRETIEN avec MAITRE JURE VUJIC

 

 

Jure Vujic, avocat, diplômé de droit à la Faculté de droit d'Assas Paris II, est géopoliticien et écrivain franco-croate. Il est diplômé de la Haute Ecole de Guerre „Ban Josip Jelacic“ des Forces Armées Croates et de l'Académie diplomatique croate où il donne des conférences régulières en géopolitique et géostratégie. Il est l’auteur des livres suivants:  Fragmenti geopoliticke misli ( Zagreb, éditions ITG, 2004), Hrvatska i Mediteran – geopoliticki aspekti ( éditions de l'Académie diplomatique du Ministère des Affaires Etrangères et des intégrations européennes de la République de Croatie, 2008)  Intelektualni terorizam - Hereticki brevijar ( Zagreb, éditions Hasanbegovic, 2007), Trg marsala Tita: Mitovi i realnosti titoizma “ ( Zagreb, éditions Uzdanica, 2008), „Anamnèses et transits“ ( Zagreb-Bruxelles, éditions NSE), „Nord-Sud l'honneur du vide“ ( Zagreb-Bruxelles, éditions NSE), „Eloge de l'esquive“ ( Zagreb, éditions Ceres, 2006), Kad andeli utihnu - Apokrif Ante Gotovine “( Zagreb 2009). Il est également auteur d'une centaine d'articles en philosophie, politologie, géopolitique et géostratégie. Il collabore avec le Centre d'Etudes Politiques de Zagreb, les journaux „Vjesnik“, „Fokus“ „Vijenac“, „Hrvatski list“, Eurasia, Catholica, etc.

 

Maitre Jure Vujic, co-fondateur de la revue «Au fil de l'épée », collaborateur aux revues «Nouvelles de Synergies Européennes» et «Vouloir», penseur et écrivain, a répondu aux questions que lui a posées Robert Steuckers, responsable de Synergies européeennes.

 

Pouvez nous exposer les principales caractéristiques de la société globale contemporaine ?

 

Ce qui caractérise à mon sens la société globale c'est indéniablement la manipulation mentale généralisée. En effet la société globale est un vaste laboratoire où l'on s'ingénue à créer par le contrôle des esprits une société psycho civilisée qui grâce à la génétique expérimente le clonage d'êtres humains, décervelés et domestiqués, C'est en quelque sorte le remake du « procédé Bokanovsky » imaginé par Adous Huxley dans « le Meilleur des mondes ». Le but est dans l'esprit d'un Francis Fukuyama d'abolir . par l'intermédiaire des biotechnologies d'abolir le temps et les conrétudes naturelles, pour mettre un terme à l'histoire et anéantir les êtres humains en tant qu'êtres concrets, pour aller au de là de l'humain. Par les procédés de manipulation mentale on aboutit dans cette scociété globale à une nouvelle forme d'esclavagisme moderne. En effet, les nouvelles technologies informatiques et le monde des images, bouleversent toutes les données de la vie quotidienne comme le champ des investigations scientifiques. L'écran devient fatal et omniprésent comme du reste le règne du spectacle et du « simulakrum » de l'époque postmoderne stigmatisé par Jean Baudrillard. C'est de l'intérieur du monde envahissant des images que peut se voir la manipulation vidéographique, se déployer le régne des artifices et des simulations, se mettre en place une sacralisation nouvelle de l'image et de sa présence. La manipulation mentale dont je parle s'apparente à une secte globale. En effet, il y a une parenté flagrante en tre la secte, exigeant le consentement intime à un groupe donné et l'adhésion au marché universel , société à la fois globale et fragmentée en cellules consuméristes rendues narcissiques. La « société bulle » des cultes sectaires n'est que le plagiat microsociologique de la secte globale planétaire sommant chacun de devenir un « gentil et docile membre de l'humanité »_ Comme dans les sectes, la société globale qui se propose d'abolir le temps et l'histoire sécréte en elle une volonté de suicide collectif refoulée, l'autodestruction étant vécue de manière indolore de manière aseptique tel un voyage spirituel vers une autre incarnation. Il s'agit bien d'une nouvelle forme de « Kharma »moderne. La révolution technologique, le règne du cyberspace, la révolution numérique, le développement des réseaux électroniques d'information provoquent un syndrome de saturation cognitive. Assommés par un flux continu d'informations et d'images, les individus sont de moins en moins en mesure de penser et de décider, donc finalement de travailler, étant de plus en plus accablés et abrutis. Nous sommes au coeur de la cybercrétinisation. La manipulation mentale aboutit de même à la colonisation de l'inconscient et de l'imagination, en tant qu'espace intime onirique et symbolico-archétypal. Le capitalisme traditionnel qui se contentait jadis de la publicité s'attaque aujourd'hui aux domaines du rêve, de l'imagination, dans les visions du monde les plus intimes ; Cette colonisation de l'imagination s'opère par la diffusion de supplétif telle la science fiction, prêt à porter de l'imaginaire s'adressant aux « étages inférieurs » de l'inconscient, un imaginaire standardisé, pauvre,  qui se  ré duit le plus souvent à des formes bâtardes de vulgarisation, nulles aussi bien sur le plan littéraire qu'intellectuel. Le. loisir. imaginaire comtemporain qui vise à instaurer une société dejoie permanente se résout a une incitation collective à l'achat. La production symbolique autrefois ajustée à l'évolution des siècles est devenue frénétique, Le but est ici d'aboutir à une perte d'identité et des capacités réactives. Ainsi la société globale est une vaste techno utopie à propos de laquelle Armand Mattelart a dit « qu'elle se révèle une arme idéologique de premier plan dans les trafics d'influence, en vue de naturaliser la vision libre échangiste de l'ordre mondial, la théocratie libérale ».

 

Pour finir avec ce tableau, je dirais que la société globale est affectée d'un complexe Oedipe idéatique . Je m'explique, Pour reprendre un schéma Freudien dont je récuse. Toutefois.,le réductionnisme, la résolution du complexe d' Oedipe, s'effectue dans les conditions suivantes : le devenir fils requiert le deuil du « père idéalisé » (le tout puissant non « castré »), Cest àdire le consentement à la finitude du père, un tel consentement marque la reconnaissance de la différence et de la similitude entre le fils et le père. Dans notre société globale, faute de procédés d'idéalisation, le fils tue prématurément le père, de sorte que son deuil est en quelque sorte avorté. Il devient un individu néopatrimonial autocentré, qui résulte non d'une filiation naturelle voir paternelle mais d'une filiation patrimoniale, non pas héréditaire, mais toute artificielle, matérielle, autogénérée, une filiation bâtarde. En l'absence « d'une castration symbolique du fils », ce dernier ne peut articuler simultanément d'une part le manque d'oùj ili naît comme sujet, sa finitude, sa mortalité, et d'autre part son identification au père. La société globale est un auspice d'orphelins néo-patrinioniaux. Oedipo idéatique je disait. Idéatique, car selon la théorie du néocoriservateur, Arnold Gehien, la conscience suprême dans la vie sociale est la conscience idéative laquelle consiste en une activité créatrice qui s'exprime par la création et le fondement d'institutions, La société globale faute de vision de monde, engagée sur la voie d'un progrès sans fin s'emploie à démultiplier a l'infini les institutions pour pallier à son manque de conception et de sens historique. C'est la raison pour laquelle on aboutit à une hypertrophie institutionnelle de même qu'à une inflation législative et bureaucratique, dédale où le pauvre Oedipe se débat tel un foetus traumatisé.

 

Croyez vons en un possible éclatement de la société globale ?      

 

Même si je dois deçevoir les adeptes de l'apocalypse et les futurologues fantaisistes, les disciples du Kali Yuga, je ne suis pas en mesure de donner un réponse exacte à cette question et Préfère me cantonner à certaines leçons tirées de l'expérience Organiciste. Tout Etat, toute nation, toute culture comme tout corps social, sont en quelque sorte des Organismes. Le développement de tout organisme s'exprime Par la différenciation au sein de l'unité. Mais on doit admettre aussi la proposition contraire : à savoir que l'approche de, la décomposition se traduit par la confusion de ce qui fut distinct. Cette décomposition se traduit par un fléchissement de cette unité qui régnait sur l'innombrable variété des parties intégrantes. Ce morcellement qui marque l'affaiblessement de l'unité peut être la fin de tout. Le commencement de la fin. Le processus de  développement dans la vie organique suppose une gradation lente, la passage successif du plus simple au progressive , la plus complexe. , l'individualisation a la différenciation de tous les phénomènes analogues. L'unité dans la diversité, la complexité « florissante et polymorphe » est l'apogée du développement organique. A contraire la, société globale affiche sous le visage fallacieux dé ladifférence apparente , une complexité artificielle, mécaniciste et infernale, qui n'aboutit nullement à une différenciation par gradation mais bien à une uniformisation par nivellement, Toute société est vouée à des phases de naissance, de développement et de maturation puis de décomposition et de mort. La mort et la décomposition d'un organisme sont précédées des mêmses symptômes : simplification des parties intégrantes, diminution du nombre des signes, affaiblissement de l'unité et de la force, en même temps que confusion. Tout baisse graduellement, se dégrade et fusionne. C'est à ce momment là qu'entrent en scène la corruption et la mort. On aboutit alors au déclin de la forme qui n'est autre qu'une idée intérieure qui empêche la matière de se disjoindre.

 

Tous les sympthomes énoncés se retrouvent dans la société globale : uniformisation et simplification des parties intégrantes, absence de signes et règne des messages-information par écrans interposés, affaiblissement de l'unité et de la force par propagation du progressisme libéral et de l'égalitarisme niveleur, et confusion par démultiplication polyarchique des centres de décisons ; une telle société quiest en voie de décomposition pourrait bien imploser par entropie. Mais on ne peut préjudicier sur la fin d'une société:» l'agonie peut être lente, si lentequ'elle peut durer des années ou des siècles entiers, le temps durant lequel l'identité de peuples ainsi que des cultures entières peuvent disparditre.

 

Pouvez vous vous définir politiquement ?

 

Au lieu de typologies politico idéologiques, je crois plutôt à un certain déterminisme du tempérament, du caractère, l'oeuvre de l'intuition, une certaine tendance qui conditionnent dès notre plus jeune âge notre orientation politique. Comme Nikos Kazantzaki, je crois qu'il faut plutôt que de se soucier des hommes davantage aimer la flamme qui n'est pas humaine et qui les brûle. « Nous ne devons pas lutter pour l'humanité, niais pour cette flamme qui transforme en feu cette paille humide, l'inquiet, le ridicule que nous appelons humanité ». Oui il s'agit d'une tendance spCcifique, stylistique particulière, une résonnance insolite bref une intuition qui prend forme progressivement pour se traduire par une expression idéologique et politique. Non pas qu'il s'agit de ne pas se soumettre à un examen critique, mais plutôt accepter ce déterminisme et travailler pour que cette tendance aboutisse au plus haut degré de maturation, qui n'est rien d'autre qu'une conviction, une foi élégamment habillée. Une visée globale à la fois nuancée et déterminée, tranchée et rapace, agairie et détachée, visée incarnée par une certaine pensée vivante, un certain mode d'être, des formes d'actions qui résultent d'un vécu subjectif et qui poussent à agir, construire un devenir, ouvrant sur une voie chargée d'un sens historique, une destinée capable de recevoir un futur antérieur au de là des dichotomies tradition/modernité. Plus' qu'une mécanique particulière de 'structuration idéologique, il s'agit d'une tension qui oriente et enflamme l'action.

 

Je commencerais par une citation de L.F Céline : « la vieillesse rabâche et la jeunesse déconne ». Pour na part, arrivé à l'âge moyen et après avoir atteint un certain degré de maturité je l'espère, l'autoattribution d' étiquettes politiques ne me convient plus, elles me semblent risibles et incongrues à la fois. J'aurais peur de me répéter, de rabâcher et de décevoir les lecteurs. De nos jours se dire national révolutionnaire, nouvelle droite, nouvelle gauche, anarcho syndicaliste, de droite ou de gauche dans le cadre du système global qui détient des procédés d'autorégulation, de récupération et de neutralisation de groupes politiques les plus marginaux jugés subversifs, me semble tout à fait illusoire. D'autant plus que l'appartenance à une famille politique quelconque de doite ou de gauche me semble être un réflexe sécuritaire, que j'ai il y a longtemps dépassé, car j'ai fais l'expérience que l'on appartient nullement à un groupe social, politique, ni même pas à soi  même, si ce n'est à rien. Appartenir ou la douce complainte des adeptes du nostrisme. Je dois remarquer d'ailleurs que tous les disciples du cororminautarisme, du national, de la mouvance de droite ou de gauche sont profondément, contaminés par l'individualisme. On le voit dans leur impossibilité de fédérer les plus petites formations politiques et la fragmentation en plusieurs chapelles sectaires. J'inviterais donc tous les sbires du communautarisme à venir faire l'expérience sur le terrain, de vivre quelque temps dans les sociétés de type holiste dans les pays islamiques du moyen orient, en Asie en Inde, ou bien dans certaines régions de l'Europe centrale, plutôt que de cogiter et de se délécter cérébralement sur les bienfaits des sociétés communautaires, archaiques et appartenant à un passé mythique. Je vous assure que beaucoup d'entre eux désenchanteraient rapidement et reviendraient camper dans les cériacles hermétiques et confortables sur des positions incohérentes car mis à l'épreuve par le vécu subjectif Je préfère tout simplement garder ma dignité, en restant libre et debout, et prendre à chaque fois levirage d'un exil intérieur pour n'appartenir à rien, pour tout simplement demeurer et comprendre en toute liberté. C'est la raison pour laquelle je préfère développer une Pensée qui échappe aux carcans conformistes du globalisme ce qui n'est pas chose facile.

 

Parler de non conformisme à l'heure ou tous les avatars institutionnels, médiatiques ,politiques et sociaux du « political correct », font Office de sacerdoce religieux de pédagogues

sociaux et de censeurs à l'oeuvre dans toutes nos bonnes vielles démocraties Parlementaires, me parait être un exercice périeux engagé sur une pente raide de désaveu collectif. Faire

l'apologie élogieuse des Premiers non conformistes libertins du 18è' siècle, de Brantôme, Montluc, Bodin, Serres, de Verville, Vauquelin de la Fresnaye et dont le courant de

penser  constituait         ce        que      l'on       appelle aujourd'hui «artistocratisme      libertin » jusqu'aux        non conformistes contemporains anarcho-droitistes, Bernanos, Nimier, Céline et tant d'autres, se reclarner comme l'héritier de leur pensée, peut être éminemment honorable pour leur mémoire et rhétoriquernent satisfaisant, mais sans doute quelque peu prétentieux, lorsqu'un sait que seuls des êtres d'exception peuvent assumer un combat intégral et quasi

ontologique contre la société globale, et les plus faibles se fourvoieront très vite eux mêmes sur ce chemin dangereux. Etaler incongrûment les pâles constats de l'uniformisation et

du nivellement culturel dans nos sociétés dominées par l'anomie généralisée, dénoncer les mécanismes perfectionnés d'autorégulation et de récupération à l'oeuvre dans tous les

sytèmes bourgeois, nous conduit dans les méandres de réflexes conditionnés que nous contestons à priori pour aboutir a une réaction unique, contestataire dans l'âme, mais cependant stérile sur le plan pratique, et laquelle ne représente au fond que le pendant politique et philosophique opposé, „l'alter ego“renversé et répudié de la pensée dominante qui se nourrit allégrement de boucs émissaires affaiblis et manipulés. Dire et crier à tout bout de champ que le système nous. menti s'apparente aujourd'hui à une vérité de polichinelle. Les guerres de tranchée que se  livrent depuis des décennies certains individus libres face au mollock étatique, le monstre froid Nietzchéen, qui broit les individualités sur son passage, sont inéluctablement enlisés dans l'absence de stratégie globale, l'incohérence et l'inconsistance de certains laudateurs de l'ordre à tout prix, ou tout simplement dans le désarroi et la fatigue des protagonistes de « l'anticonformisme ». Bernanos l'avait bien compris : « les Êtres d'exception se forment à la lisière des pouvoirs forts ». Les tenants de l'ordre établi et leurs sbires goulurnent stipendiés ont bien compris la leçon : la démocratie parlementaire, le constitutionnalisme, les relais institutionnels et médiatiques de la société civile qui ne sont ce que Gramsci et Althusser appelèrent les « appareils de répression idéologique », sont bien plus efficaces dans la neutralisation de leurs ennemis que la bayonnette des militaires, car ils noient toute discussion supposée contestatrice dans le cadre d'une discussion globalisante par excellence, ou la confrontation des opinions finit par devenir une douce complainte consensuelle. La « clasa discutadora » de Donoso Cortes reste triomphante. Charles Péguy avait raison « ne rien dire c'est déjà capituler ». Il faut être agairi de cet irrespect chronique fait de manisfestations intermittentes et d'une lucidité à tout épreuve pour éviter les colibris de la récupération. Comprendre cela c'est déjà percevoir les crêtes escarpées d'une attitude authentiquement non conformiste.

 

 

Croyez vous encore en un non conformisme de gauche ou de droite ?

 

Les « non conformistes » de gauche, les quelques réscapés bolchos et rnaoistes, les anarcho libertaires, les émules de la nouvelle gauche de l'école de Francfort, que l'on retrouve dans les manifestations anti globalistes à Seattle et à Prague, restent depuis la dislocation de l'Union soviétique, marginalisés dans les dédales de la protohistoire relégués a un sectarisme épidermique, ou bien habilement transformés en courroie de transmission du système, porte parole et avantgarde de la mouvance globale de l'Euro social démocratie. Que dire d'un non conformisme à droite ? depuis 1789, la gauche prêche la fidélité aux idéaux de la Révolution fi ançaise. A l'inverse la droite se définit par le refus de ces idéaux. Elle n'est pas toujours réactionnaire mais elle originairement réactive. Se définir par le refus de quelque chose c'est accepter d'occuper une situation dérivée et rion matricielle, depuis deux siècles , la droite française occupe cette espace de négativité.

 

Que pensez vous de la possibilité de voir,se constituer un front idéologique contre révolutionnaire ?

 

L'histoire de la droite n'est que l'histoire d'une suite de division. La droite contre révolutionnaire est en voie de disparition et ne subsiste que dans un état embryonnaire qui se préoccupe plus de bons dieuseries que de pratique politique. Tout le monde à droite semble au moins rhétoriquement, rejeter l'héritage de 1789, sinon de 1793, même Le Pen , la droite monarchiste et intégriste reste empêtrée dans les inimités entre légitimistes et orléanistes, sans parler de la droite nostalgique bonapartiste et vichysoise.

 

Quels seraient alors les fils conducteurs et idéologiques d'une pensée authentiquement non conformiste ?

 

Etre non conformiste de nos jours ce serait refuser un certain ,ordre naturel des choses qui constitue le fondement de la pensée dominante, et autour duquel s'articule l'ordre publie qui lui même se confond avec la vérité officielle, et la politique qui reste cantonnée à la sauvegarde d'une prétendue morale publique. A l'inverse il s'agit de proclarrier la relativité générale des prduction humaines, des moeurs, des idéaux, des régles morales, des tendances esthétiques, comme autant de valeurs et de formes humaines  , Cela consiste à poursuivre et re3ter fidèle à une certaine conception tragique de l'homme et du monde, que les détracteurs épris d'empirisme béat refusent au nom de leur commodité intellectuelle.

 

Pouvez vous nous expliquer cette notion du tragique dansle monde ?

 

Le « tragisme » inhérent à notre non conformisme, consiste à accepter que l' univers est immense et infini alors quel 'homme est éphémère. Ainsi le vif sentiment tragique de, la vie present chez les esprits élevés s'inscrit dans lajouissance de r intensité de chaque mstant. Mais c'est aussi clarner la révolte permanente sans se résigner et être conseientque l'homme est appelé à historiciser son existence, et d'avoir la puissance de volonté nécessaire pour donner une forme dans un monde livré. au chaos. La forme, oui, voilà le mot clé, le concept central de nos préoccupations dans un monde deliquescent  voué à l'adoration du glossaire mécanique de l'argent. L'idéal  de forme, initié par les, doriens, qui s'est perpétue au cours des siècles, du moyen âge à l Age d'or chretien de la Renaissance , en passant par les arts florissants du 18ème siècle et présent dans une certaine mesure chez certains mouvements avantgardistes du 20ème siècle. Mais il convient de transcender cet idéal de forme comme simple attribut esthétique pour en faire un impératif catégorique existentiel et absolu ; « Autarciac », être sa propre loi, son propre principe disaient les anciens Romains, incarner une forme constitue chez l'homme un des attributs les plus nobles mais aussi des plus subversifs, face à une sociéte ou les idées, les principes se diluent dans un moule sulfureux et acide d'où sortent les pigmalions en série, les « remake » du dernier homme Nietzchéen, miniatures hominisés, écervelés, désensibilisés par une castration intellectuelle, produits fétiches de la société de consommation. Incarner une forme, c'est encore mûrir une disposition intérieure qui conjugue la nécessité, l'art de la nuance, le détachement et mépriser dignement sans hair, en étant conscient tout comme l'avait compris Drieu La Rochelle que « le venin de la faiblesse est dans la haine et l'accoutumance ».

 

Ainsi la forme devient un véritable antidote efficace contre le monde opaque de nos contemporains qui ricanent méchamment dans leurs niaiseries pusillanimes, sans avoir la force de regarder à la petite surface d'eux mêmes pour y entrevoir leur petitesse d'esprit et leur gouardise atavique. Une chose est sur, nos contemporains fiaissent tout ce qui est forme et pure beauté, lesquelles dans leur esprit ne sont que le fruit de la séléction naturelle. C'est pourquoi ils cultivent l'hypersubjectivisme, le relatif et la morbidité. Ils préfèrent l'informe, les laminations corporelles et spirituelles désarticulées par le jeu des compromissions, des alliances et des traîtrises, lot quotidien des existences sereines et communes. Nos contemporains vivent enfermes dans une caverne d'ombres qui ne sont pas malheureusement la projection des idées Platoniciennes, mais représentent les chimères fictives d'un monde Dantesque. C'est pourquoi l'égalitarisme tant vénéré par nos aieuls de la pévolution française, sur l'autel de la déesse Raison, constitue l'alibi favori des esprits médiocres, comme 116 l'évolutionnisme est la profession de foi des parvenus, afin de maintenir dans l'abrutissement, l'incapacité réactive des pans entiers de la population, quotidiennement gavé à la soupe médiatique, et dans le but d'écouler en toute quiétude leur camelote dans leur négoce usurier. Les affinités naturelles sur lesquelles de nos temps se bâtissent les prétendues amitiés, les amours, les réseaux de relations ne sont qu'une supercherie du monde monderne, dans laquelle se complaisent les invertébrés du système qui cultivent le nostrisme, la proximité, et l'identique par souci sécuritaire. Le non conformisme au contraire reconnait l'excellence des affinités éléctives qui sont soumises à notre libre examen et notre liberté de choix. Ce que redoutent les contemporains qui nous gouvernent, c'est, la luminosité d'un homme en forme, verticalité tendue, avec la prestance d'une proue, et qui comme les anciens perses se limitent à « bander l'arc et dire la vérité », seuls actes de foi qui dans leur dépouillement et leur sobriété propagent un souffle de liberté rédempteur.

 

Endosser une forme, c,est aussi revendiquer une vision plurielle du monde qui requiert un certain détachement à l'égard des biens matériels et du bonheur illusoire sur cette terre. C'est tout comme les gueux qui dans leurs hailloris rapiécés, portaient la croix et dédiaient leur dernier souffle dans le grodndement du « Quirie Eleison miscre nostre » ; alors la forme revêt la tunique de la passion, s'anime au coeur, de cette légion d'infortunés, sublimes cadavres en marche, morts vivants lancinants, aux bannières en berrie, de pure braise, psalmodiant les dernières paroles: « Pater, quia nesciunt, quid faciunt ». L'humilité prend corps. dans la supplication, la divine supplication, le « lamentu » du proscrit. L'humilité chavire dans l'écueil d'une pose statuaire dans le plasma marbré, son bustier rafistolé glapit aux accents d'une supplication qui émerge des sillons d'une glèbe ingrate qu'on lacère hardiement pour récolter que des racines décapitées. Cette supplication ne vocifère pas, ne quémande rien, comme elle n'éspère rien, car si c'était le cas elle serait vite renvoyée dans l'antichambre des bacchantes, qui désabusées attendent, gloussent et s'éteignent dans l'ivresse carnassière. Comme Charles Péguy l'a si bien écrit chez les modernes la supplication est une opération d'aplatissement mais infiniement plus profonde, plus vraie, tout autre, toute sage, toute résigéne est la supplication dans laquelle le supplié a une grande, une haute situation humaine. Alors la supplication constitue un vaste mouvement de retournement convulsif qui ne tolère aucun aucun atemoierrient évasif, aucune pose, aucune mise à l'épreuve devant la vindicte du révolté, de l'humble, du bâni ; car c'est avec verve, avec un courroux cinglant qu'il faut supplier méticuleusement sans signe de soumission, chasser les soubresauts élégiaques d'une pensée résignée et tout dire comme Céline le préconisait: »il faut tout dire, se taire, c'est trahir ». Cette supplication est un appel à l'affranchissement des intelligences et à la libération des âmes. Il s'agit d'une affaire d'honneur, car tous les menteurs et les laches baissent l'honneur qu'ils vilipendent et vitupèrent comme s'acharnant sur un vieillard affaibli , car l'honneur représente pour eux cette sonnerie stridente qui retentit dans leurs oreilles affaissées suspendues telles des fibules de pacotille. Car l'on ne peut conspuer l'honneur, comme on ne peut le décliner par une volte face, car il est entier et intégral comme l'amour  , il faut l'affronter, le regarder en face , mais pour cela il faut avoir du courage....

 

Une chose est sûre , Pescroquerie se perpétue remarquablement depuis 1789. Il n'en demeure pas moins pour employer des expressions à la mode que les droits de l'homme et l'égalitarisme, figures d'images virtuelles et synthétiques restent soumises à la triste réalité de Ferosion sociale, la paupérisation sociale acrrue et la criminalité rampante. Certes les acteurs d'hier ont troqué leur étoffe tricolore thermidorienne pour leur complet gris de l' Enarque docile, des dynasties bourgeoises qui nous gouvernent depuis des siècles dans l'irresponsabilité et la démission, restent les mêmes et la souveraineté nationale, la liberté et la dignité humaine sont bradées au nom des intérêts du capital financier dans une grande foire et en toute impunité  Avoir ce tableau la. roulette russe pourrait être lejeu favori de ceux qui ont chosis la voie du non conformisme. Mais les dés sont jetés, il faut affronter avec courage le Grand Inquisiteur Dostoïevskien qui dévore les libertés vulnérables et chancelantes de notre monde Orwellien , Le sentiment d'être un réprouve, mis au pied du mur, revient à accepter le bréviaire d'une conjuration permanente dans la joie et la sérénité , une joie qui comme le disait F. Nietzsche « veut l'éternité de tout ce qui est ».

 

Croyez vous au retour de l'idéologie et quelle serait son rôle dans notre société globale ?

 

Le discours dominant de la pensée globale qu'il soit de droite ou de gauche est celui de la priorité de la question sociale qui est à l'oeuvre dans tous les social démocraties au pouvoir, et qui tend volontairement à se substituer à la question nationale : il s'agit en fait du retour de la compétition pour le contrôle du champ intellectuel et religieux et du champ politique. En d'autres termes, i . e pense que ce qui est a l'ordre du jour est le fondement même du projet social et historique (de la rationalité ou de la transcendance) et ce que cela peut engager dans la gestion des systèmes des relations au sein du Soi et avec l'altérité : la question de l'enjeu d'une véritable idélogie à la fois nationale, et grande européenne est la réinscription du religieux dans la sphère politique qui sera en mesure de mettre un terme au « liberal age ». Sans me prononcer pour une quelconque forme de fétichisme de l'idélogie, à notre époque d'anomie généralisée, et de dépolitisation endémique, je pense~ qu'il convient de réhabiliter le rôle moteur d'une grande idélogie « oecuménique » qui devrait être un instrument de libération et de galvanisation des forces populaires inhibées, latentes de la société. Si j'insiste sur le rôle de l'idélogie dans la politique et de la société, c'est que l'homme politique est un animal idéologique. L'idéologie n'est pas qu'un leurre (le leurre fait partie de la réalité) , elle structure le comportement de l'homme d'autant plus que l'homme travaille contre ses intérets propres tout en les transposant sur la lutte contre les autres. Ce mécanisme étrange est une sorte de « pulsion aveugle ».

 

En ce sens  l'esprit de stratégie que développe volontiers l'homme politique est une manière de se préserver contre cette énergie irrationnelle. La stratégie introduit au jeu, elle introduit de l'ordre, lequel entraine au désordre et aux guerres de position. L'idéologie est dore, pour les partis, une référence de base afin d'affirmer leur identité, leur rôle dans la société, puisqu'elle permet au politicien de se reproduire en tant qu'animal idéologique. Dans le jeu de la contiguïté idéologique, plusieurs positions sont à conquérir: une concurrence déclarée ou suspendue, une alliance tantôt larvée ou ouverte , une complémentarité où chacun a sa place réelle , le regroupement par séries de différences ou par une simple juxtaposition , une fédération comme horizon ou comme projet fiable . Ce type d'idéologie secondée par une authentique éthique de droits et de devoirs tenderait à regrouper de façon oecuménique et à l'échelon national, les oppositions à l'intérieur de l'Etat et de l'administration, les oppositions veritablement alternatives a l'intérieur des Partis, les oppositions a l'oeuvre à tous les échelons associatif, les oppositions par l'abstention lors des élections, les oppositions radicales contre tout système électoral, les oppositions silencieuses difficiles a identifier qui sommeillent dans la communaute de base. Cette série d'oppostions latentes et explicites alimente chacune de nos sociétés. La fonction du politique serait d'identifier, d'intégrer et de polariser les positions de conflits, les potentialités « subversives et alternatives »et de les mettre en place dans.. une strucure révolutionnaire identifiable à un Etat de salut publie, Etat à la fois national remplissant une fonction « anagogique » et dont le moteur est une révolution permanente pour combattre le libéralisme intégral, véritable fléau du globalisme en oeuvre. Transnational et transétatique, ce phénomène a atteint une autonomie aux effets encore incalculables de l'économie par rapport au politique, dictant ses choix politiques aux Etasnations les plus fragiles, en fin ce qui reste des Etats nations ; Ajustez vos économies et soyez démocrates en imitant notre sacrosaint modèle : tel est le slogan en vogue. Pour les pays en voie de développement on utilise le chantage de la stratégie du « coupe feu » en vertu de laquelle on leur octroit de l'aide qu'à condition de libéraliser leur marché. Le libéralisme théocratique est le fer de lance du règne du marché sans frontières, concurrence intraitable qui pousse à la

modernisation soutenue de l'entreprise, à la mondialisation informatisée des flux et reflux monétaires, à un autre nouveau partage de la décision internationale du travail (matérielle ou virtuelle) . Pour contrecarrer le libéralisme qui détruit les fondements de la nation, les liens organiques et de solidarité de la société, dans sa logique irréversible, il est fondamental à chaque échelon national des nations européennes de rétablir la suprématie du politique sur l'économique et le fiancier.

 

Avant de penser géopolitiquement à une Union grande européenne, l'idéal serait de constituer à chaque échelon national, de vastes mouvements politiques auto centrés en équilibre avec leurs forces constructrices et destructrices, regroupés autour d'une communauté d'esprit et de valeurs salutaires, autour d'objectifs prioritaires dont le but principal est de rétablir la suprématie du politique pour l'ancrer dans tous les segments de la vie sociale, Cela présuppose une redéfinition et un recentrage radicale de la notion de Hierarchie et de PAutorité dans le sens d'un élitisme profond. Les leaders de tels mouvements seront amenés à être des manieurs d'hommes et d'idées selon la nouvelle loi de la hierarchie, du principe elitiste défini par Mosca, Pareto, Michels. Hierarchie établie en toute légitimité charismatique ou par d'autres moyens. A ce propos, le poète Ezra Pound écrivit « lorsque l'usure s'est installée dans toutes les couches de la société, le bistouri du chirurgien devient nécessaire.... ». Ou bien était il vraiment fou ou avait il fait preuve d'une extrême lucidité. J'opterais pour cette dernière explication.

 

Quelle est votre orientation philosophique ?

 

Tercerisme et differenciation !

 

Dans dans le monde des idées, comme dans la praxis existentielle, il est toujours plus facile d'exclure, de dissocier, de séparer des éléments, des notions , des concepts, des croyances contraires, apparement  antinomiques plutôt que de les relier, les réconcilier, y déceler les points de convergences tout en respectant leur sigularité et autonomie intrinsèque, et en évitant l'écueil d'un syncrétisme réducteur. D'ailleurs la signification originelle etymologique de toute vraie religion, le vocable « religare » signifie relier, réconcilier.L'“Ekumen“ non pas dans un sens strictement ecclesial et institutionnel, mais dans son sens étymologique, vient du verbe « oikos », habiter, vient de l'expression qui veut dire « la terre entière » donc le monde entier, connu à une époque donnée. Cet « Ekumen », cette « terre entière » renferment et expliquent la condition cosmique de l'homme son « autochtonie », son inaliénable appartenance à la terre, son être au monde, l'eau (Peau de la matrice maternelle, de l'oasis, ou de la pluie qui donne la vie, mais aussi l'eau du déluge ou de la mer qui dévaste ou noie), le feu ( le feu qui réchauffe et revigore, mais aussi qui brûle et détruit, le feu solaire créateur, ou le feu de l'enfer), la cendre ou la terre (la terre mère de notre naissance et subsistance, mais aussi la terre sépulcre de notre tombeau et de notre retour à la poussière) , le pain (le pain blanc de nos joies mais aussi le pain bis de nos larmes et de nos manques insatisfaits), la lumière (la lumière qui éclaire et rassure, mais aussi qui aveugle et dévoile au grand jour les trahisons). Ces éléments ou étants subsistarits qui sont les supports de l'autochtonie, de l'être au monde viennent métaphoriser l'existence de chacun. Bien en deçà de la conscience que nous en avons ou de l'intention que nous affichons, ils nous renvoient archaiquement l'écho de notre indissoluble mariage avec la terre, de notre condition existentielle originelle de l'être au monde. L'Ekumen, l'Oikos, représentent à mon sens notre habitus orginel, notre nomos spirituel pancréatique, où vient se consurrier, se rejoindre et se réconcilier tous les opposés, les impondérables antinomiques, la résolution de toutes les contradictions individuelles comme universelles. Il s'agit ici d'aboutir à un principe d'individuation dans le sens que lui a donné Nicolas de Cuses par le jeu de la résolution des conflits. Cet Ekumen est le lieu d'expression er de réalisation du schéma symbolique de l'altérité. En effet, la résolution et la conjonction des éléments antinomiques s'opèrent par le jeu « oecuménique » d'une différenciation, et d'un acte de néantisation. Non point le schéma métaphysique de la différence, conçue comme distance et éloignement, mais la différenciation par l'altérité. En effet, ce type de différenciation est intrinséquernent lié à une identité ou similitude des deux termes. Identité et différence sont exprimés comme « co appartenantes » et corpropriétaires l'une à l'autre, ainsi que l'a démontré Heidegger dans Identité et Différence. Non point donc comme deux réalités pleines qui seraient seulement en rapport dialectique inséparable  , un peu comme le recto verso d'une feuille de papier. mais comme deux réalités qui n'adviennent que barrée chacune par l'autre (de même que la présence et l'absence). La différenciation-altérité n'est jamais autant réalisée que dans la relation d'identité similitude, alors que l'altérité est le lieu symbolique d'où peut s'effectuer toute communication. Par ce que l'autre, le différent, le contradictoire, l'opposé est un sujet, et non un objet. C'est ici qu'intervient un deuxième concept central, la « taxis », qui nous renvoit à la notion grec d'un ordre trinaire, à l'idéal symphonique terceriste. Ce principe trinaire est aussi à l'origine de la corpropriété de l'homme concept qui articule dans'« l'archi symbole » du propre corps de chaque sujet, un triple rapport :au système culturel du groupe (corps social), à sa mémoire collective (corps traditionnel) et à l'univers (corps cosmique). Une telle articulation symbolique s'effectue de manière originale pour chacun, selon notamment l'histoire de son désir. Mais chacun n'est soi même que par ce qu'il est habité par ce triple corps. La « taxis » pésuppose que l'unicité et la totalité ne peuvent être réalisées par un procédé uniforme, par un nivellement unilatéral, mais intégre l'idée de la polymorphie respectueuse de la diversité. L'unicité ne peut être atteinte par la voie de la contrainte, mais uniquement par la voie de l'assimilation intériorisation et l'ouverture extériorisa tien. L'unicité de la taxis est à la fois mystère, communion et vocation. Comme dans l'unicité trinaire de la „taxis“, comme du reste est présent dans tout homme et être vivant, la matière et le spirituel, je suis convaincu en l'existence et l'action bénéfique d'une troisème force, sorte de réalité intermédiaire, modalité d'existence spécifique. Dans toute réalité intermédiaire, toute interface ou isthme, réside une forme d'entre deux, inséparable et insaisissable, un domaine de l'existence situé entre une: réalité déjà considérée comme existante et une autre envisagée comme non encore existante, c'est à dire non encore actualisée. Ainsi cette troisième forme, réalité intermédiaire reste une, identique à elle même, quel que soit le domaine où on l'envisage et la fonction qu'elle assure dans l'existence. Elle s'applique à des réalités les plus diverses qui la délimitent. Elle peut être considérée dans le processus d'actualisation des potentialités quasi divines, comme une relation toujours unique unissant les domaines où les mêmes réalités sont vues sous différentes perspectives.

 

A cet égard, l'idée d'illusion, non pas un phénomène qui réduit l'illusion à des représentations objectivables et subjectivisantes, joue un rôle primordial dans le processus de différenciation Dans le prolongement de la phénoménologie de Husserl, l'illusion est concue comme une action « édeitique » structurante de la conscience et qui aboutit à l'appréhension  d 'une surréalité. En ce sens il convient de déconstruire les fondements de la Raison pour lui restituer sa, fonction de turbulence et d'agressivité. Une raison expérimentale serait susceptible d'organiser surrationneleme le réel comme le rêve expérimental de Tristan Tzara organise surréalistiquement la liberté poétique. Nous sommes au coeur de l'idée de surrationalisme et de surerriffirisme forgé par Craston Bachelard et se, fondant sur les travaux de métagéométrie de Lobatchewsky et de Ouspensky. L'acte de langage est au centre de la notion de taxis, il est le lieu originel du rapport de l'altérité. Il correspond à la structure triadique de la personae » linguistique ( le « il », le « neutre je », le relationnel» ,le « différent »). C'est de cette faille insaturable d'altérité que nait la différenciation et la réciprocité permettant la communication. La troisième force, réalité terceriste dynamisante qui agit telle une monade, ne fait qu'actualiser cet acte de langage entre réalité distinctes et antinomiques j . usqu'à leur communion dialectique. Ainsi l'Ekumen, notre Oikos, habitus spirituel en perpétuel devenir est le lieu d'expression d'un langage synthétisant, oecuménique et unificateur qui mène vers l'ouverture sur le monde, lequel est indissociable de l'ouverture sur le temps, du temps profane qui ne touve sa consécration que dans je temps sacré transcendental, le temps existentiel de N. Berdiaeff, le monde de la totalité fragmentée de laquelle s'échappe et se dissocie les éléments distincts, parcellisés, individualisés, faute d'une différenciation par altérité correspond dans sa substance à une spirale ouverte regroupant globalement des éléments et unions secondaires induites dans l'erreur et l'illusion durant leur long voyage de permutation. Le jeu synthétisant de la taxis dont la force motrice est cette réalité trinaire intermédiaire, établit un rapport dialectique entre ces fragments du tout qui touvent ensemble et individuellement dans leur organisation organique et systémique, et dans le cadre du temps historique conçu comme espace symbolique, leur place mobile et multidimensionnelle dans l'interaction et la communion. Ainsi dans le cadre de l'Ekumen, se rencontre et se consument en se copénétrant dans un rapport dialectque d'altérité, le logos /concu comme langage, le penser/monde, le théos/dieu du monde, le Kosmos et la Physis/monde de la nature, Epoha/le monde historique, la Poesis et la Tehné/monde de la poésie et de l'art, et l'Anthropos/le monde de l'homme. L'ensemble de ces catégories particulières peut être contradictoire, se combattre, s'opposer, mais force est de constater que leur signification et interprétaion thématique, spéculative, théorique et technico scientifique ne font que résulter du monde et ne peuvent être réduites qu'à cela. L'ensemble de ces vocables, mots magiques, formules diverses s'explique par leur jeu mystérieux. Ce qui est pluriel et fondamental ne peut être traduit que dans l'unité d'une totalité quelconque. Car le véritable fondement ne résulte pas seulement de la synthèse de tous les avis et positions engagés dans un processus centrifuge, sans passer par une démarche centripète et centrale. De même qu'il existe un rapport dialectique entre la « tehné » et le rite/anthropos, de même il existe une intime communion, une copénétration entre le logos/langage et la « poesis ». le poème ne fait dailleurs que manifester ce qui « se joue » en tout language même le plus quotidiennement banal : la poésie proprement dite n'est jamais seulement qu'un mode plus haut de la fréquence plus subtile de la langue quotidienne, comme dans la « notion pure » Mallarméenne. La métaphore en tant que parole action, une parole qui construit qui fait  « poiein »le monde, n'est pas une sorte d'exorcisme, mais elle est ce qui porte le langage au plus proche de sa source vive. La poésie écrivait Bachelard, met le langage en état d'émergence. L'homme /Anthropos a une vocation poétique pour accomplir dans toute son essence la présence du monde , il est traversé par un dire qui le constitue et qui est le dire de l'être

 

La totalité et l'unicité représente cette ouverture vers le temps, passé, présent et avenir. L'homme est plongé dans un monde fracturé et fragmentarisé, lui même et les fragments sont

impliqués dans le jeu relationnel entre forces opposées. Cette situation qui peut être douloureuse pourtant l'interpelle sur le déplacement des horizons, de l'horizon du monde. Cette idée, cette notion d'Ekumen, n'est pas un monde figé, un mythe archaique, elle est une certaine expérience intérieure qui peut etre l'oeuvre de chaque homme, en effort tendu pour penser, intéger de façon synchronique, le logos, le théos, le kosmos, la physis, le bios, la psyché, la polis, la poesis et la tehné, pour dépasser leur dissociation et les réconcilier dans une direction d'ouverture ontologique multidimensionnelle et transhistorique, parfbis sans rechercher par crispation le sens et la vérité des choses et des êtres humains, qui au fond ne sont que des signes, L'Ekumen établit entre l'espace et le temps un rapport hérméneutique. En ce sens l'espace est conçu comme le lieu privilégié de rencontre et de communication entre le rituel et l'outil. Le rituel n'est pas compris ici dans un sens archaique et ne saurait être réduit à une forme de cristallisation du social dans un mode Durkheimien. Il s'agit ici d'un phénomène de « filialisation » qui essentialise à chaque instant. tout outil, tout élément appréhendé, manié concu comme un tout, qu'il soit ludique, utilitaire, ou a vocation prométhéenne transformable. Ici la dialectisation, la »communio » entre le tehné et l'action de l'anthropos proviennent et s'effectuent par le jeu d'un vieux fond de schèmes sub- rituel qui nous parlent sans cesse. Exemple la station verticale, le geste partageur droite/gauche ou avant/arrière, l'introspection ou la projection, l'action circulaire, l'ouverture ou la fermeture de la main, la souillure qui  vient tâcher la peau ou la purification qui vient l'effacer. Ce sont autant de schèmes sub-rituels appartenants à la symbolique primaire inscrite dans le topique du corps. Cette dialectisation rituelle entre l'anthropos et la tehné, l'outil et le rite aboutit à la « teleiosis » de l'homme, métaphorisée dans chaque action par le symbole du remplissage des mains qui désigne ainsi son accomplissement. De la sorte, il existe une imbrication du tehné et du rituel/anthropos, du matériel et du sacré. L'espace devient un espace polyphonique où s'opére une subtile articulation essentialiste entre le domaine matériel et spirituel. Le temps dans mon intime conviction est une vaste transhumance de l'esprit qui s'exile volontairement et intérieurement, et par voie de despatialisation conjointe, pour vaincre la peur, principale obstacle à la réalisation de toute forme d'Ekumen d'unité. Ainsi cette transhumance jalonnée par les réminiscences, les anmnèses et transits s'apparente à un voyage intérieur herméneutique où l'on rencontre autant de signes révélateurs, guides espistémologiques et esthétiques, et s'apparente donc à un voyage.,qui est un départ renouvelé et perpétuel vers le devenir qui mène à l'extérieur de soi même et nous fait osciller entre le réel et l'imaginaire , cette même transhumance, est un chemin tansitif, car penser, exister même, c'est par là même être toujours en chemin. Mais,un tel chemin n'est pas objectivisable comme une voie tracée devant nous. Il est inséparable de nous mêmes, C'est un « be wëgender . weg », un chemin cheminant, un chemin transitif; « c'est le chemin qui met tout en chemin; et ce chemin est parlant. Il est parlant en ce qu'il est ouvert à l'appel premierde l'être à l'égard duquel toute parole humaine est écoute et réponse. Il n' y a pas de récompenses ni de trésors à saisir au bout du chemin ». La seule forme de récompense n'est autre que le travail d'acheminement qui se fait en nousmêmes, travail d'enfantement de nous mêmes. Cet enfantement qui révèle la vraie nature de l'être qui sans mesure, calcul, sans explication ni justification est pure grâce

par don. Ici le véritable événement à penser et à méditer est l'appropriation du gratuit qui ne peut s'effectuer que dans une démarche de « désappropriation ». le mode humain de l'appropriation de l'être comme jeu et trace est la désappropriation.

 

Dans votre perspective qu'est ce que l'individu peut attendre de l'existence ?

 

Il s'agit ici pour chaque être de l'attente d'une venueprésence, une présence dont l'essence est la venue, l'avénement dans le temps chronologique de ce qui est donc essentiellemnt marqué du trait de l'absence « la trace matinale de la différence », qui telle une présence trace s'inscrit dans le temps transcendental et existentiel, qui n'est autre que l'éternel présent.

 

Comment qualifieriez vous votre sensibilité et votre style littéraire ?

 

Je pourrais me définir, même si je m'éfforce d'échapper à toute forme de catégorisation, ou plutôt je serais e . nelin à me réclamer d'un certaine forme d'existentialisme postsymbolique, un parnassien intuitionniste d'avant garde. En effet je pense que la vie intérieure, l'intuition sensible mis en forme est susceptible non seulement d'influer profondément sur toutes les formes de l'art mais aussi d'orienter tel un diapason l'existence entière. Dans mes écrits je me fais le chantre d'un certain imagisme émancipé de l'emprise de la réflexion affligeante; imagisme, faisceau d'images motrices qui véhiculent une imagination épurée, c'est à dire qu'elle est attirée ou possédée par l'image sans essayer de comprendre le sens de l'image. Il s'agit tout simplement de sentir, d'avoir l'intuition que l'image a une certaine signification, qu'elle est donc l'expression d'un état d'ame, cette expression n'est qu'une correspondance dont il est difficile ou impossible de donner une explication logique que d'ailleurs je ne recherche pas. Ainsi ma traduction ou la correspondance imaginative pourra être tour à tour d'apparence classique et d'apparence abstraite incohérente. Le style doit avoir une grande liberté, mais ponctué par un certain rythme. Les phrases peuvent se juxtaposer, s'entrechoquer, sans aucun souci de logique, mais elles doivent être ponctuées d'une rythmique intérieure de l'émotion qui les porte. Pour moi comme du reste je l'ai écrit dans mon ouvrage « Les bûchers de la Renaissance », l'art n'est peut être que la rythmique des formes absolues, et la forme absolue s'apparente à la beauté optimale  lontenue dans l'équation minimale, Le mouvement n'est plus qu'un mouvement musical échappant à un examen analytique. Ces formes absolues s'enroulent ou se diffusent ou bien jaillissent par brèves échappées et par ellipses. Il s'agit de phrases rytmiques et non logiques  Le symbolisme ne doit pas être pris a la lettre, il ne s'agit nullement de la transposition allégorique d'une image, d'un discours mais une suggestion comme une corde  vibre au son qu'elle même doit rendre. Henri de Régnier disait à ce propos « la poésie semble donc résigner son vieux pouvoir oratoire dont elle s'est servie si longtemps. Elle n'explique pas, elle suggère. » Encore une fois, je le répète la pratique du symbole n'est ni la comparaison ni la métaphore qui sont plus ou moins cherchés ou du moins acceptées par l'intelligence. Il s'agit parfois d'une intervalle , d'une faille, d'une image brisée,d'une arabesque qui jaillissent spontanement et dont on sent qu'elles ne traduisent pas mais qu'elles expriment qu'elles contiennent l'idée et l'émotion. Ici nous sommes dans le domaine du signe incantatoire, Paul Claudel disait: « le langage en nous prend une valeur moins d'expression que de signe, de surface et de l'esprit.“ Comme tous les philosophes qui influencèrent le mouvement symboliste, tels Hartmann et Shopenhauer ou chez les symbolistes décadents tel Jules Laforgue, je pense qu'à notre époque globale et virtuelle, le thème de l'illusion est d'une grande actualité, et comme je l'ai souligné auparavant l'illusion comme structure organisatrice d'une surréalité. A cet titre mes travaux littéraires et philosophiques s'inscrivent dans la lignée d'auteurs et de penseurs tels que Maurice Maeterlinck, Peter Jacobsen, Gontcharov, Lenormand, L. Pirandello, Ibsen, Henry Bataille, dont la réflexion était centrée sur le monde subsconscient et le sens de la réalité cachée, l'invisible derrière le visible. J'acceuille toutes les illusions dan , leur totalité et dans l'indifférenciation, toutes celles qui se présentent, celles qui' expriment des dégoûts comme celles qui égarent un instant dans le rêve, des visions de vie plate et grossières comme des rêveries exaltantes cosmogoniques, sans souci de codes, du goût, sans crainte du cru, du forcené, des dévergondages cosmologiques et du grottesque.

 

Tout comme grand européen que je suis, dans un sens métapolitque, je puis me dire existentialiste, car depuis Kierkegaard, Bergson, Max Scheler, Husserl, Heidegger,

 

Merleau Ponty, Louis Lavelle, les questions relatives au rapport essence existence, temps existence, la liberté, l'angoisse, l'intention action, subi ectivism e obj ectivisme restent des questions fondamentales et d'une extrême actualité. Existentialiste, j'ai toujours prôné pour la suprématie de la vie sur les structures abstraites et la réhabilitation de l'irrationalisme contemporain qui trouve ses ramifications philosophiques chez Schopenfauer, Nietzche, Adler, Jung, Schelling, Maurice Blondel, Wilhelm Dilthey, G . Simmel. En matière de morale, si mon option philosophique est d'essence terceriste, je réfute l'aliénation de la personne aux morales .classiques qui soumettent l'homme à un ordre préétabli par une « troisième personne ». Il convient en morale de rétablir la souveraineté de la « première personne », et il n'y a de moralité que dans la fidélité à soi même, dans t'obéissance aux exigences profondes de sa nature, comme le suggérait Georges Gusdorf.

 

Existentialiste, car depuis des décennies, depuis Wittgenstein, la philosophie contemporaine est soumise à une.contagion de la pensée analythique et pragmatique typiquement anglosaxone laquelle se livre à des divagations discurssives et spéculatives sur des thèmes stériles. En effet je. pense que la pensée antique, celle du moyen âge, de la Renaissance étaient hantées par la quête du sens et de la signification , l'essentiel de l'effort théorique et philosophique de ces périodes civilisationnelles, s'orientaient vers la morale, la religion, la mystique, les questions de l'être et de l'existant. La civilisation contemporaine et surtout en fin de siècle est une civilisation de l'information et de l'image. Toutefois je pense que la quête du sens ne sera jamais abandonnée, car elle est intimement liée à l'humanisme de l'homme à son essence même. Extentialiste, je suis car je pense que la portée et la thématique de l'ontologie et de l'épistémologie sont plus imprtants que la simple analytique discurssive à base syllogiste. La .. pensée . philosophique  européenne contemporaine se devrait de restituer et se consacrer comme depuis l'antiquité à la vraie question de toute grande philosophie qui est dans le sens donné à l'homme, à son devenir dans le monde, son rapport avec le temps et l'espace, avec le temps historique, l'infini, la mort, le pouvoir, la transcendance. A ce titre je pense que toute « tradition philosophique » se doit d'être revivifiée, irriguée par de nouveaux courants de penser, et je pense que l'apport de penseurs structuralistes tels que Lacan, Baudrillard, Derrida, Lyotard, Foucault en tant que Nietzchéens postmodemes est considérable dans la critique de la modernité et la déconstruction du langage dogmatique de la pensée unique, par le biais d'une démarche « rhizornique » et transversale. Mon existentialisme n'a que faire d'un réductionnisme rationaliste et logique, prétentieuse logique car elle n'a rien à faire dans le monde des idées, ni du reste dans la destinée du monde et de l'homme. Le plan de la réalité apparente n'est pas celui de la réalité transcendante. Cette dernière n'est pas faite de poussière de réalités pratiques pragmatiques. C'est un monde indépendant, organisé non pas par causes et effets, principes et conséquences, mais par analogies. Il s'agit d'un ordre d'affinités electives. L'une des plus grandes questions de l'homme est celui de son rapport et sa lutte avec l'infini et l'éternité. Et bien je terminerais pour clore cet entretien avec une citation de Mallarmé qui traduit très bien ce thème: .»un coup de dés jamais n'abolira le sort ».

 

Quels sont vos projets ?

 

Tout en continuant ma collaboration dans Synergies Européennes et avec au Fil de l'Epée, je viens d'inaugurer une série de brochures sous le sigle « Oikos » qui reprendra les thèses philosophiques et politiques que je viens de tracer sur des thèmes varies touchant aussi bien à la religion, la sociologie qu'à la politique. Les premières de ces brochures : »Benedetto Croce, la dialectique de la différence et l'esthétisation phalangiste de l'action », « Surrationalisme et suprématique de l'illusion », « le martyre de l'aigle bicéphale, petite chronique du Saint Empire », « L'expérience coloniale d'Alexandre le Grand », sont disponibles chez SynergiesBelgique et dans les points librairies habituels , Je rappelle que mon premier ouvrage « les Bûchers de la Renaissance » qui est un essai personnel sur le devenir de l'Europe à travers une actualisation des thèmes philosophiques et politiques de la Renaissance, ainsi que mon ouvrage philosophique « Anamnèses et transits » sont en vente sur commande toujours chez Synergies Européennes Belgique.

 

samedi, 19 décembre 2009

R. Steuckers: deux questions à la fin de la première décennie du 21ème siècle

RSnov0622222.jpgEntretien-éclair avec Robert Steuckers

 

Deux questions à la fin de la première décennie du 21ème siècle

 

Propos recueillis par Philippe Devos-Clairfontaine

 

Photo: AnaR - Senlis, Ile-de-France, novembre 2006

Question : Monsieur Steuckers, le site de “Synergies européennes” (http://euro-synergies.hautetfort.com) publie énormément de textes sur la “révolution conservatrice” allemande, en même temps qu’un grand nombre d’articles ou d’interventions sur l’actualité en politique internationale et en géopolitique: ne pensez-vous pas que la juxtaposition de ces deux types de thématiques peut paraître bizarre pour le lecteur non averti? Voire relever de l’anachronisme?

 

RS: D'abord quelques remarques: le présent est toujours tributaire du passé. A la base, nos méthodes d’analyse sont inspirées de l’historiographie née au XIX° siècle, avec Dilthey et Nietzsche, et des travaux de Michel Foucault, développés depuis le début des années 60: ces méthodes se veulent “généalogiques” ou “archéologiques”. Nous cherchons, dans nos groupes, qui fonctionnent, je le rappelle, de manière collégiale et pluridisciplinaire, à expliciter le présent par rapport aux faits antécédents, aux racines des événements. Pourquoi? Parce que toute méthode qui n’est pas archéologique bascule immanquablement dans le schématique, plus exactement dans ces schématismes binaires qui font les fausses “vérités” de propagande. “La vérité, c’est l’erreur”, disait la propagande de Big brother dans le “1984” d’Orwell. Aujourd’hui, les “vérités” de propagande dominent les esprits, les oblitèrent et annulent toute pensée véritable, la tuent dans l’oeuf.

 

En juxtaposant, comme vous dites, des textes issus de la “Konservaitve Revolution” et des textes sur les événements qui se déroulent actuellement dans les zones de turbulence géopolitique, nous entendons rappeler que, dans l’orbite de la “révolution conservatrice”, des esprits innovateurs, des volontés révolutionnaires, ont voulu déjà briser les statu quo étouffants, ont oeuvré sans discontinuité, notamment dans les cercles étiquettés “nationaux-révolutionnaires”. Vers 1929/1930, divers colloques se sont déroulés à Cologne et à Bruxelles entre les lésés de Versailles et les représentants des forces montantes anti-impérialistes hors d’Europe. Aujourd’hui, une attitude similaire serait de mise: les Européens d’aujourd’hui sont les principales victimes de Téhéran, de Yalta et de Potsdam. La chute du Mur de Berlin et la disparition du Rideau de Fer n’a finalement pas changé grand chose à la donne: désormais les pays d’Europe centrale et orientale sont passés d’une hégémonie soviétique, qui n’était pas totalement étrangère à leur espace, à une hégémonie américaine qui, elle, y est totalement étrangère. Plus la base territoriale de la puissance qui impose son joug est éloignée, non contigüe, plus le joug s’avère contre-nature et ne peut fonctionner que grâce à la complicité de pseudo-élites véreuses, corrompues, qui rompent délibérément avec le passé de leurs peuples. Qui rompt de la sorte avec le passé de son peuple introduit d’abord un ferment de dissolution politique (car toute politie relève  d’un héritage) et livre, par conséquent, la population de souche à l’arbitraire de l’hegemon étranger. Une population livrée de la sorte à l’arbitraire et aux intérêts d’une “raumfremde Macht” (selon la terminologie forgée par Carl Schmitt et Karl Haushofer) finit par basculer d’abord dans la misère spirituelle, dans la débilité intellectuelle, anti-chambre de la misère matérielle pure et simple. La perte d’indépendance politique conduit inexorablement à la perte d’indépendance alimentaire et énergétique, pour ne rien dire de l’indépendance financière, quand on sait que les réserves d’or des grands pays européens se trouvent aux Etats-Unis, justement pour leur imposer l’obéissance. L’Etat qui n’obtempère pas risque de voir ses réserves d’or confisquées. Tout simplement.

 

Du temps de la République de Weimar, les critiques allemands des plans financiers américains, les fameux plans Young et Dawes, se rendaient parfaitement compte de la spirale de dépendance dans laquelle ils jetaient l’Allemagne vaincue en 1918. Si, jadis, entre 1928 et 1932, la résistance venait d’Inde, avec Gandhi, de Chine, avec les régimes postérieurs à celui de Sun-Ya-Tsen, de l’Iran de Reza Shah Pahlevi et, dans une moindre mesure, de certains pays arabes, elle provient essentiellement, pour l’heure, du Groupe de Shanghai et de l’indépendantisme continentaliste (bolivarien) d’Amérique ibérique. Les modèles à suivre pour les Européens, ahuris et décérébrés par les discours méditiques, énoncés par les “chiens de garde du système”, se trouvent donc aujourd’hui, en théorie comme en pratique, en Amérique latine.

 

Q.: Vous ne placez plus d’espoir, comme jadis ou comme d’autres “nationaux-révolutionnaires”, dans le monde arabo-musulman?

 

RS: Toutes les tentatives antérieures de créer un axe ou une concertation entre les dissidents constructifs de l’Europe asservie et les parties du monde arabe posées comme “Etats-voyous” se sont soldées par des échecs. Les colloques libyens de la “Troisième Théorie Universelle” ont cessé d’exister dès le rapprochement entre Khadaffi et les Etats-Unis et dès que le leader libyen a amorcé des politiques anti-européennes, notamment en participant récemment au “mobbing” contre la Suisse, un “mobbing” bien à l’oeuvre depuis une bonne décennie et qui trouvera prétexte à se poursuivre après la  fameuse votation sur les minarets.

 

Le leader nationaliste Nasser a disparu pour être remplacé par Sadat puis par Moubarak qui sont des alliés très précieux des Etats-Unis. La Syrie a participé à la curée contre l’Irak, dernière puissance nationale arabe, éliminée en 2003, en dépit de l’éphémère et fragile Axe Paris Berlin Moscou. Les crispations fondamentalistes déclarent la guerre à l’Occident sans faire la distinction entre l’Europe asservie et l’hegemon américain, avec son appendice israélien. Les fondamentalismes s’opposent à nos modes de vie traditionnels et cela est proprement inacceptable, comme sont inacceptables tous les prosélytismes de même genre: la notion de “jalliliyah” est pour tous dangereuse, subversive et inacceptable; c’est elle que véhiculent ces fondamentalismes, d’abord en l’instrumentalisant contre les Etats nationaux arabes, contre les résidus de syncrétisme ottoman ou perse puis contre toutes les formes de polities non fondamentalistes, notamment contre les institutions des Etats-hôtes et contre les moeurs traditionnelles des peuples-hôtes au sein des diasporas musulmanes d’Europe occidentale. Une alliance avec ces fondamentalismes nous obligerait à nous renier nous-mêmes, exactement comme l’hegemon américain, à l’instar du Big Brother d’Oceana dans le roman “1984” de George Orwell, veut que nous rompions avec les ressorts intimes de notre histoire. Le Prix Nobel de littérature Naipaul a parfaitement décrit et dénoncé cette déviance dans son oeuvre, en évoquant principalement les situations qui sévissent en Inde et en Indonésie. Dans cet archipel, l’exemple le plus patent, à ses yeux, est la volonté des intégristes de s’habiller selon la mode saoudienne et d’imiter des coutumes de la péninsule arabique, alors que ces effets vestimentaires et ces coutumes étaient diamétralement différentes de celles de l’archipel, où avaient longtemps régné une synthèse faite de religiosités autochtones et d’hindouisme, comme l’attestent, par exemple, les danses de Bali.

 

L’idéologie de départ de l’hegemon américain est aussi un puritanisme iconoclaste qui rejette les synthèses et syncrétismes de la “merry old England”, de l’humanisme d’Erasme, de la Renaissance européenne et des polities traditionnelles d’Europe. En ce sens, il partage bon nombre de dénominateurs communs avec les fondamentalismes islamiques actuels. Les Etats-Unis, avec l’appui financier des wahabites saoudiens, ont d’ailleurs manipulé ces fondamentalismes contre Nasser en Egypte, contre le Shah d’Iran (coupable de vouloir développer l’énergie nucléaire), contre le pouvoir laïque en Afghanistan ou contre Saddam Hussein, tout en ayant probablement tiré quelques ficelles lors de l’assassinat du roi Fayçal, coupable de vouloir augmenter le prix du pétrole et de s’être allié, dans cette optique, au Shah d’Iran, comme l’a brillamment démontré le géopolitologue suédois, William Engdahl, spécialiste de la géopolitique du pétrole. Ajoutons au passage que l’actualité la plus récente confirme cette hypothèse: l’attentat contre la garde républicaine islamique iranienne, les troubles survenus dans les provinces iraniennes en vue de déstabiliser le pays, sont le fait d’intégrismes sunnites, manipulés par les Etats-Unis et l’Arabie saoudite contre l’Iran d’Ahmadinedjad, coupable de reprendre la politique nucléaire du Shah! L’Iran a riposté en soutenant les rebelles zaïdites/chiites du Yémen, reprenant par là une vieille stratégie perse, antérieure à l’émergence de l’islam!

 

Les petits guignols qui se piquent d’être d’authentiques nationaux-révolutionnaires en France ou en Italie et qui se complaisent dans toutes sortes de simagrées pro-fondamentalistes sont en fait des bouffons alignés par Washington pour deux motifs  stratégiques évidents: 1) créer la confusion au sein des mouvements européistes et les faire adhérer aux schémas binaires que répandent les grandes agences médiatiques américaines qui orchestrent partout dans le monde le formidable “soft power” de Washington; 2) prouver urbi et orbi que l’alliance euro-islamique (euro-fondamentaliste) est l’option préconisée par de “dangereux marginaux”, par des “terroristes potentiels”, par les “ennemis de la liberté”, par des “populistes fascisants ou crypto-communistes”. Dans ce contexte, nous avons  aussi les réseaux soi-disant “anti-fascistes” s’agitant contre des phénomènes assimilés à tort ou à raison à une idéologie politique disparue corps et biens depuis 65 ans. Dans le théâtre médiatique, mis en place par le “soft power” de l’hegemon, nous avons , d’une part, les zozos nationaux-révolutionnaires ou néo-fascistes européens zombifiés, plus ou moins convertis à l’un ou l’autre resucé du wahabisme, et, d’autre part, les anti-fascistes caricaturaux, que l’on finance abondamment à fin de médiatiser les premiers, notamment via un député britannique du Parlement européen. Tous y ont leur rôle à jouer: le metteur en scène est le même. Il anime le vaudeville de main de maître. Tout cela donne un spectacle déréalisant, relayé par la grande presse, tout aussi écervelée. Dommage qu’il n’y ait plus  un Debord sur la place de Paris pour le dénoncer!

 

Pour échapper au piège mortel du “musulmanisme” pré-fabriqué, tout anti-impérialisme européiste conséquent a intérêt à se référer aux modèles ibéro-américains. In fine, il me paraît moins facile de démoniser le pouvoir argentin ou brésilien, et même Chavez ou Morales, comme on démonise avec tant d’aisance le fondamentalisme musulman et ses golems fabriqués, que sont Al-Qaeda ou Ben Laden.

 

Alexandre del Valle et Guillaume Faye, que ce musulmanisme insupportait à juste titre, notamment celui du chaouch favori du lamentable polygraphe de Benoist, cet autre pitoyable graphomane inculte sans formation aucune: j’ai nommé Arnaud Guyot-Jeannin. Le site “You Tube” nous apprend, par le truchement d’un vidéo-clip, que ce dernier s’est récemment produit à une émission de la télévision iranienne, où il a débité un épouvantable laïus de collabo caricatural qui me faisait penser à l’épicier chafouin que menacent les soldats français déguisés en Allemands, pour obtenir du saucisson à l’ail, dans la célèbre comédie cinématographique “La 7ième Compagnie”… Il y a indubitablement un air de ressemblance… Cependant, pour échapper à de tels clowns, Del Valle et Faye se sont plongés dans un discours para-sioniste peu convaincant. Faut-il troquer l’épicier de la “7ième Compagnie” pour la tribu de “Rabbi Jacob”, la célèbre comédie de Louis de Funès? En effet, force est de constater que le fondamentalisme judéo-sioniste est tout aussi néfaste à l’esprit et au politique que ses pendants islamistes ou américano-puritains. Tous, les uns comme les autres, sont éloignés de l’esprit antique et renaissanciste de l’Europe, d’Aristote, de Tite-Live, de Pic de la Mirandole, d’Erasme ou de Juste Lipse. Devant toutes ces dérives, nous affirmons, haut et clair, un “non possumus”! Européens, nous le sommes et le resterons, sans nous déguiser en bédouins, en founding fathers ou en sectataires de Gouch Emounim. On ne peut qualifier d’antisémite le rejet de ce pseudo-sionisme ultra-conservateur, qui récapitule de manière caricaturale ce que pensent des politiciens en apparence plus policés, qu’ils soient likoudistes ou travaillistes mais qui sont contraints de rejeter les judaïsmes plus féconds pour mieux tenir leur rôle dans le scénario proche- et moyen-oriental imaginé par l’hegemon. Le sionisme, idéologie au départ à facettes multiples, a déchu pour n’être plus que le discours de marionnettes aussi sinistres que les Wahabites. Tout véritable philosémitisme humaniste européen participe, au contraire, d’un plongeon dans des oeuvres autrement plus fascinantes: celles de Raymond Aron, Henri Bergson, Ernst Kantorowicz, Hannah Arendt, Simone Weil, Walter Rathenau, pour ne citer qu’une toute petite poignée de penseurs et de philosophes féconds. Rejeter les schémas de dangereux simplificateurs n’est pas de l’antisémitisme, de l’anti-américanisme primaire ou de l’islamophobie. Qu’on le dise une fois pour toutes!

 

(Réponses données à Bruxelles, le 7 décembre 2009).

mercredi, 16 décembre 2009

Dragos Kalajic: un point de vue serbe

Kalajic.jpgArchives de Synergies Européennes - 1994

Un point de vue serbe

Entretien avec Dragos Kalajic, journaliste et écrivain à Belgrade

 

Propos recueillis par Robert STEUCKERS

 

Dragos Kalajic, ancien dissident de l'époque titiste, émigré en Italie et ailleurs en Europe, est journaliste à l'hebdomadaire serbe Duga, que l'on peut acheter à Bruxelles, où il dirige l'excellente rubrique de politique étrangère. Il est actif égale­ment dans le concert des revues de la «nouvelle droite orthodoxe». Ainsi, il signe des articles remarqués dans Elementy-Nache Ideye (Belgrade) et appartient au co­mité de patronage d'Elementy,  la revue que dirige Alexandre Douguine à Moscou. Il est aussi correspondant de l'hebdomadaire romain L'Italia Settimale, proche de l'AN et dirigé par Marcello Veneziani. Dragos Kalajic est également peintre, dont l'hyper-réalisme et les formes idéalisées des personnages se profilent sur des paysages surréalistes, avec un souffle épique qui rappelle l'heroic fantasy. Il a d'ailleurs écrit des romans dans cette veine. Mais l'essentiel de son œuvre est politique, avec des ouvrages remarqués sur l'Amérique, l'Europe et la Russie. Il a également patronné auprès d'éditeurs serbes l'édition de livres de Julius Evola, René Guénon, Mircea Eliade et Ernst Jünger.

 

Q.: Quel est votre jugement global sur la guerre qui se déroule au­jourd'hui dans les territoires de l'ex-Yougoslavie?

 

DK: Je tiens d'abord à vous remercier en créant un précédent par cet interview. Si ma mémoire de lecteur est fidèle, c'est bien la première fois qu'un organe de presse partisan de l'«Europe des pa­tries» s'intéresse au point de vue serbe sur les causes de la guerre en ex-Yougoslavie. Toutes nos connaissances et expériences attes­tent que c'est une guerre que les stratèges du «nouvel ordre mon­dial» mènent contre l'Europe et les Européens. Pour réaliser les buts de ce projet anti-européen, ils dressent les Musulmans et les Croates contre les Serbes qui défendent, maintenant, en solitaires, l'Europe et les Européens. Thomas Molnar est un des rares esprits de l'Ouest à l'avoir compris. S'adressant à son disciple Tom Fleming, rédacteur de la revue néo-conserva­trice Chronicle, qui s'apprêtait à se rendre dans les pays serbes, Molnar a dit: «Je dois avouer qu'aujourd'hui ce sont les Serbes, les Serbes seuls, qui nous défen­dent tous contre le “nouvel ordre mondial”. Les Serbes sont le seul peuple à lutter vaillamment pour les valeurs qui ont fait la gran­deur de l'Europe».

 

Pour pouvoir pénétrer les sens profond de cette observation, il convient de rappeler que les francs-maçons, à l'heure où l'Europe était couvertes de tombeaux, avait sacrifié sa jeunesse, construi­saient en 1918 la Yougoslavie comme “le futur rempart de la civi­li­sation contre l'expansion de la culture pangermanique”. J'ai puisé cette définition dans la Résolution sur la Yougoslavie adoptée le 29 mars 1917 par la maçonnerie du Grand Orient. C'est la définition euphémique du rempart destiné à empêcher l'expansion de l'influence politique et économique allemande en direction du Proche-Orient, c'est-à-dire vers la principale source de pétrole du monde, soumise alors au monopole du pseudo-impérialisme bri­tannique et aujourd'hui à celui du pseudo-impérialisme américain. C'est en recourant à la puissance de ce monopole que la politique de Washington, au service de la ploutocratie new-yorkaise, exerce son chantage sur l'économie de l'Europe et du Japon.

 

dra7s.jpgL'Allemagne est donc la première à s'être attelée à la tâche de dis­loquer la Yougoslavie en encourageant le séparatisme de ses Républiques. De la Slovénie et de la Croatie d'abord, puis, par voie de conséquence, de la Bosnie-Herzégovine. La politique alle­mande a réussi à arracher à la CEE la reconnaissance des Républiques séces­sionnistes comme Etats, au prix de la violation du droit internatio­nal et des dispositions de la Charte d'Helsinki. Permettez-moi de vous rappeler que dans la Charte d'Helsinki, du 1er août 1975, les Etats signataires déclarent “considérer comme inviolables les fron­tières de tous les Etats-membres et s'abstenir au­jourd'hui et à l'avenir de toute atteinte à ces frontières”.

 

Bien entendu, en admirateurs des thèses de Carl Schmitt et en par­tisans du principe de la primauté du politique sur le droit, nous pouvons, vous et moi, comprendre à la rigueur cette violation des normes juridiques internationales, surtout si cela est dans l'intérêt des Européens, fût-ce aux dépens de mes frères serbes! Mais en en­courageant et en reconnaissant la sécession de la Slovénie, de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine, on a largement ouvert la porte aux vents de la guerre qui ne cessent de souf­fler à l'encontre des intérêts européens. Pour appréhender le sens de la réponse serbe aux défis de la guerre, vous devez prendre en compte au moins quatre faits historiques de base.

 

1.

Les frontières des Républiques de l'ex-Yougoslavie ont été tracées tout-à-fait arbitrairement, en 1944, par les autorités commu­nistes illégitimes. Elles l'ont fait de manière à dépecer le corps et le terri­toire du peuple serbe, et à empêcher son unité, voire son soulève­ment. Sous la tyrannie communiste, la communauté serbe a été morcelée et a supporté à contre-cœur l'injustice qui lui a été faite, parce que les Serbes vivaient, malgré tout, dans un Etat unique. Toutefois, la sécession des Républiques et le démem­brement de la Yougoslavie ne devaient pas manquer d'actualiser la question des frontières.

 

2.

De sa naissance, en 1918, à sa mort, l'ex-Yougoslavie a été définie par toutes ses constitutions comme une communauté étatique de peuples. Des peuples serbe, croate et slovène au premier chef. C'est dire qu'elle n'a jamais été définie comme une commu­nauté étatique de Républiques ou d'unités administratives. Aussi, aux termes de toutes les Constitutions de l'ex-Yougoslavie, seuls ses peuples, et non point ses Républiques, étaient-ils titulaires du droit d'auto-dé­termination.

 

3.

Dans l'ex-Yougoslavie, la Croatie n'était pas définie, elle non plus, comme étant la République du seul peuple croate, mais comme celle des peuples croate et  serbe. La Constitution de l'ex-Bosnie-Herzégovine la définissait comme la République des peuples mu­sulman, serbe et croate. Elle prescrivait le consensus des représen­tants politiques des trois peuples pour toutes les décisions poli­tiques de fond. Je pense être en droit de conclure que la sécession de la Croatie et celle de la Bosnie-Herzégovine ont été accomplies de manière non seulement violente mais aussi anticonstitutionnelle. Les Serbes n'avaient rien contre le désir des Croates et des Musulmans de se détacher des la Yougoslavie et de créer leur propre Etat, mais ils ne pouvaient pas permettre que les Croates et les Musulmans entraînent également dans leur sécession le peuple serbe et les territoires dans lesquels les Serbes étaient majoritaires. En d'autres termes, face au défi des ambitions sécessionnistes des Croates et des Musulmans, les Serbes ont posé la question d'une dé­limitation équitable, considérant qu'ils avaient eux aussi le droit de décider eux-mêmes.

 

dra8s.jpg4.

Les Serbes se souviennent de l'effroyable génocide auquel ils ont été soumis pendant la Deuxième guerre mondiale de la part des Croates et des Musulmans dans l'Etat indépendant de Croatie, im­posé à la faveur de l'occupation allemande et italienne de la Yougoslavie. D'entrée de jeu, au lendemain des premières élections pluripartites, la politique des autorités croates en Croatie et celle de la coalition musulmano-croate en Bosnie-Herzégovine s'étant révé­lées comme ouvertement serbophobes et revan­chardes, assorties de surcroît d'actes de violence et de persécutions, le génocide a resurgi dans la mémoire des Serbes qui ont pris conscience de l'impérieuse nécessité de se défendre. Les premières attaques armées contre les Serbes de Croatie et de Bosnie-Herzégovine ont été lancées par les formations paramilitaires des nouvelles autorités. Les Serbes ont pris les armes parce qu'ils risquaient d'être l'objet d'un nouveau génocide ou, pour le moins, de se voir ravaler au rang de citoyens de second ordre, ex­posés aux humiliations, aux persécutions et à l'assimilation.

 

Nous pouvons revenir maintenant à la cause principale, à la cause extérieure de la guerre en ex-Yougoslavie, c'est-à-dire au rôle de la politique américaine qui utilise cyniquement la vieille formule du “divide et impera”. Ayant remarqué que le rempart anti-ger­ma­nique, que l'on appelait la “Yougoslavie”, était en train de se dislo­quer, les stratèges de Washington et du “nouvel ordre mon­dial” ont entrepris de réaliser une alternative offensive. Cette alternative se propose de plonger l'épée de l'Islam dans le cœur de la vieille Europe. Washington s'efforce de mettre en place, sous hégémonie turque, une chaîne ininterrompue d'Etats et de pseudo-Etats dans les Balkans, de la Turquie à la Bosnie-Herzégovine en passant par la Bulgarie, la Macédoine et l'Albanie. Ces derniers pays sont perçus comme le fer de lance de la pénétration de l'hégémonie turque et de l'immigration des masses islamiques en Europe. C'est au demeu­rant la raison pour laquelle la politique de Washington insiste si ra­geusement sur l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine, et s'oppose à toute partition de l'ex-République.

 

Les stratèges de Washington savent parfaitement qu'il ne manque aux Musulmans de l'ex-Bosnie-Herzégovine que quelques pourcents pour atteindre la majorité absolue. Comme ceux-ci pourraient réali­ser cette majorité à la faveur d'une simple immigration de Musulmans venus de Turquie, les leaders de l'islamisme bosniaque promettaient publiquement, avant la guerre, de faire venir de Turquie le nombre de Musulmans nécessaire, et de les installer en Bosnie-Herzégovine. Sous le couvert de la “société civile” et du “multiculturalisme”, les politiciens de Washington et leurs laquais musulmans s'appliquent donc à faire de toute la Bosnie-Herzégovine une “Musulmanie”, le plus grand Etat musulman au cœur de l'Europe. Le partage de la Bosnie-Herzégovine en trois Etats ethniques réduirait considérablement les dimensions de cette “Musulmanie” et en affaiblirait les potentialités. Constatons aussi que les médias occidentaux au service du “nouvel ordre mondial” accusent les Serbes d'avoir conquis près de 70% du terri­toire de la Bosnie-Herzégovine, alors que leur pourcentage dans la population totale ne serait que de 34%. Mais la vérité est que les Serbes n'ont rien conquis du tout et qu'ils se contentent de défendre ce qui est à eux. En effet, étant pour la plupart des agricul­teurs, les Serbes sont majoritaires dans les campagnes, tandis que les Musulmans sont concentrés dans les villes comme Sarajevo.

 

Ce qui pose un problème particulier aux stratèges américains dans cette guerre contre l'Europe, c'est le manque de continuité terri­to­riale entre l'Albanie et la Macédoine d'un côté, et la Bosnie-Herzégovine de l'autre. Pour pouvoir réaliser l'objectif d'une péné­tra­tion et d'une hégémonie turques et favoriser la conquête isla­mique pacifique de l'Europe par le biais de l'immigration, il est dès lors indispensable d'arracher à la Serbie les régions qui relient les points d'appui que nous venons d'évoquer. Ces régions sont la Raska, le Kossovo et le Métohie à population majoritairement mu­sulmane. C'est du reste pourquoi, usant de sanctions brutales et gé­nocidaires, la politique de Washington exige de la Serbie qu'elle leur accorde l'autonomie politique, c'est-à-dire en fait le statut d'Etat dans l'Etat. Vous devez savoir que les Albanais de la province de Kossovo-Métohie jouissent de droits plus étendus qu'aucune autre minorité nationale en Europe, mais qu'ils refusent de les exercer, allant, à l'instigation des fomentateurs de guerre de Washington, jusqu'à exiger l'indépendance complète, c'est-à-dire en réalité la sé­cession de la province et son rattachement à l'Albanie.

 

Dans le même temps, comme vous le savez, la politique de Washington exerce sur l'Union Européenne une forte pression pour l'amener à admettre en son sein la Turquie, présentée comme un Etat laïque et pro-occidental. S'imaginant que, hormis eux, per­sonne ne connaît leur langue, les géopoliticiens turcs expriment ouverte­ment dans leurs médias l'espoir qu'en entrant dans l'UE, ils islami­seront l'Europe. Simpliste, leur calcul est pourtant exact: la Turquie compte près de 70 millions d'habitants et, lorsque, fût-ce par le tru­chement de la double nationalité, les peuples turcophones des Républiques musulmanes de l'ex-URSS se seront joints à eux, ils se­ront au nombre de 200 millions. Permettez-moi maintenant de vous présenter une des projections géopolitiques extraites de la presse turque: elle a été exposée, avec une joie maligne et fondamentale­ment anti-européenne, par Nazimi Arifi, commentateur politique du journal turc Turkiye Gazetes,  dans les colonnes de l'organe des Musulmans bosniaques Preporod  du 15 août 1990: «L'Europe voit dans la Turquie un pays appelé à compter 200 millions d'habitants. Logiquement, l'Europe ne s'opposera pas à la Turquie. En outre, la présence des Musulmans en Europe est devenue une chose tout-à-fait normale. Dans dix ans, un Européen sur deux sera Musulman. La forte natalité chez les peuples musulmans, la migration écono­mique du monde is­lamique vers l'Europe, la baisse de la natalité européenne, les conversions à l'Islam sont autant de faits que, qu'elle le veuille ou non, l'Europe doit admettre».

 

drago07iq1.jpgOn ne saurait être plus clair. Quant à nous, les Serbes, dans les ruines de la Bosnie-Herzégovine, nous savons à quoi nous en te­nir puisque le leader des islamistes locaux, Alija Izetbegovic, nous l'a signifié depuis longtemps et sans ambages dans sa “Déclaration Islamique” de 1970: «Il n'y a ni paix ni coexistence entre la religion islamique et les institutions sociales et politiques non islamiques». Vous, nos frères d'Europe occidentale, devriez savoir, à propos de l'Islam, que le Coran ne prescrit à ses fidèles que deux attitudes face aux “infidèles”: la guerre ou la trêve, mais en aucun cas la paix. Le trêve, le Coran ne l'envisage que lorsque les Musulmans sont trop faibles pour mener la guerre. Dès qu'ils sont suffisamment forts, leur devoir est de faire la guerre pour la victoire sacrée de l'Islam. Il y a 600 ans, à la Bataille du Kossovo, les Serbes ont sacri­fié leur aristocratie et leur Etat pour défendre l'Europe contre l'invasion des armées musulmanes. Cette bataille a la même signifi­cation que celle de Poitiers, au 8ième siècle, quand les forces euro­péennes coalisées ont arrêté la pénétration islamique en Gaule. Aujourd'hui, une fois de plus, comme au 14ième siècle, les Serbes défendent l'Europe. Or nos frères d'Europe occidentale ne nous té­moignent ni reconnaissance ni so­lidarité: au contraire, ils nous dé­monisent cruellement, en adoptant toutes les positions serbophobes diffusées par les médias au service de la ploutocratie anglo-améri­caine et protestante, en vue d'établir le projet anti-européen de “nouvel ordre mondial”.

 

Comment expliquer l'erreur de la politique allemande qui, en sou­tenant les Croates et les Musulmans, ne fait en réalité que servir la stratégie de Washington? Dans le meilleur des cas, la politique al­lemande est victime de l'espoir fallacieux qu'elle pourra mettre à profit l'hégémonie turque et l'expansion islamique pour accéder aux marchés du Proche-Orient. Peut-être les Allemands misent-ils sur les sentiments traditionnellement germanophiles et anti-américains des peuples islamiques? Mais ces sentiments sont le fruit de con­jonctures à court terme et d'un pragmatisme éphémère. Ils sont donc changeants. Seuls les Serbes sont ca­pables de nourrir des sen­timents d'amitié au-dessus et même aux dépens de leurs intérêts politiques. Par leurs sentiments, les Serbes infirment la notion du politique chère à Carl Schmitt, parce qu'ils subordonnent la poli­tique à l'éthique. Les Serbes sont d'instinct des adeptes du principe de Cicéron qui disait que seul l'honneur détermine l'utilité, et non le contraire. Je veux dire par là qu'il n'y a pas aujourd'hui, parmi les géopoliticiens allemands, des spécialistes de l'ethnologie et de la ca­ractérologie nationale. Dommage, cas ce sont précisément des ethnologues allemands du 19ième siècle qui ont découvert dans les Serbes un peuple unique ayant le plus à cœur les principes de l'éthique aristocratique de la pensée et de l'action.

 

Q.: Quel est votre jugement sur les politiques croates et musulmanes depuis la dislocation de l'ex-Yougoslavie?

 

DK: Avant cette guerre, j'avais plus d'amis parmi les Croates que parmi les Serbes. La tragédie des Croates qui, conséquence d'une politique suicidaire, est en train de les conduire à la ruine, me fait une peine terrible. Je me sens parfaitement capable de ju­ger cette politique du point de vue des intérêts croates, et c'est sous cet angle que je me place maintenant pour répondre à votre question. Toutes mes connaissances, indirectes ou directes, me persuadent que la politique croate est le fruit d'une symbiose monstrueuse entre l'intelligentsia anti-croate et anti-catholique, d'une part, et l'obsession anti-serbe du nationalisme croate, d'autre part. Je dirais, en simplifiant les choses, que le cerveau de cette politique secrète un comportement hostile aux Croates en utili­sant comme force de travail et comme exécuteurs les muscles du nationalisme croate lui-même, dans sa forme brute.

 

Je suppose que le Président Tudjman est conscient de la force des ennemis des nationalismes européens et de la chrétienté, et qu'il s'est entouré de conseillers issus des milieux de l'intelligentsia libé­rale et antichrétienne pour donner le change à la plouto­cratie occi­dentale. Dès les premiers jours de son accession au pouvoir, il a fait appel à des conseillers venus des rangs du «Parti social-libéral croate», un parti d'opposition dont le signe est une parodie de la Croix: deux équerres maçonniques jointes. Selon toutes les appa­rences, Tudjman était devenu, dès le départ, leur otage. Ces conseil­lers ont tout fait pour pousser les Serbes à l'insurrection armée. Ils sont allés jusqu'à publier dans la presse croate le texte de l'enregistrement d'un entretien secret entre Tudjman et le regretté Jovan Raskovic, le leader combien pacifique des Serbes de l'ex-Croatie, qui ne demandait que l'autonomie culturelle pour le peuple serbe. Sans le moindre succès. Cet échec fit s'évanouir le prestige du Dr. Raskovic qui ne tarda pas à être remplacé par des chefs plus ré­solus de la résistance serbe.

 

Il m'apparaît très symptomatique que les agents patentés du mondialisme, qui détiennent le pouvoir culturel aujourd'hui, et tirent les ficelles des gouvernements et de leurs oppositions, s'emploient à défendre l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire de cette “Musulmanie” dans laquelle non seulement les Serbes mais aussi les Croates deviendraient des minorités nationales op­primées. Mais quand ils parlent de la Croatie elle-meêm, ils oublient leurs discours sur la “société civile” et la “société multicultu­relle”, qu'ils prononcent pour justifier le maintien d'un République de Bosnie-Herzégovine intégrale, et professent hargneusement la guerre, prônent la conquête militaire de la République Serbe de la Krajina (Srpska Krajina) qui s'est détaché de l'Etat croate. Or je connais fort bien le potentiel militaire de la Srpska Krajina et je sais aussi que, pour les Croates, l'option de guerre équivaudrait au suicide national, quasiment à un anéantissement génétique. En effet, la guerre actuelle a déjà coûté au peuple croate près de 70.000 hommes, les meilleurs de ses fils, souvent de très jeunes garçons.

 

L'instrument de cette politique, finalement anticroate et anticatholique, qui pousse la Croatie à la ruine, est le nationalisme croate dans sa forme brute et primitive, composé essentiellement de serbophobie. Au lieu de préserver et de développer l'individualité croate dans un esprit positif, il s'attache à nier exclusivement tout lien et toute resemblance avec les Serbes. Tout se passe comme si l'unique définition des Croates était qu'ils sont des “Non-Serbes”. Il me smeble aussi qu'ils cultivent une sorte de com­plexe d'infériorité vis-à-vis des Serbes. Volet pathologique particulier de ce complexe: la présence de descendants de Serbes convertis au catholicisme, qui constituent les éléments les plus combatifs du nationalisme croate et des milices qui luttent sur le front. En psychologie de la religion, cette forme de pathologie est ce que l'on appelle la “conversion incomplète”. C'est en tuant des Serbes qu'ils tentent de se confirmer comme Croates. Ce complexe a des racines très profondes qui remontent à l'époque des invasions ottomanes. La République de Venise, puis l'Empire austro-hongrois, a fait peupler les régions abandonnées par les Croates sous la poussée des conquérants, de Serbes prêts à défendre les armes à la main les terres qu'ils recevaient en fief. C'est ainsi qu'a été créée la Krajina, région frontalière où les Serbes ont toujours joui de l'autonomie politique, sous la juridiction de Vienne, et non pas sous celle de Zagreb.

 

La politique de la Croatie nouvelle a souffert, dès le départ, d'amoralisme: rejetant l'héritage communiste, elle s'est évertuée à conserver tous les territoires reçus en don de la géopolitique antiserbe du régime communiste. Au lendemain de l'émergence de leur Etat, les Croates chantaient Danke Deutschland!  Maintenant leurs hommes d'Etat se vantent sans vergogne de ce que la Croatie soit devenue un instrument de la politique de Washington. Il est intéressant de rappeler qu'à la veille de la guerre serbo-croate, le commandant des forces croates, le Général Martin Spegelj, se flattait publiquement d'avoir obtenu de certains généraux américains la promesse qu'ils lui fourniraient des armes pour 100.000 soldats. Et il conseillait, toujours publiquement, à ses su­bordonnés d'être sans pitié pour les Serbes, y compris les civils. Aiguillonnée par les émissaires et les agents de Washington, la politique croate conduit son peuple au bord du précipice. Si la fédération musulmano-croate en Bosnie-Herzégovine et sa confédé­ration avec la Croatie se maintiennent, les Croates deviendront en l'espace d'une génération une simple minorité nationale, et la Croatie ne sera plus qu'une région de la “Musulmanie”.

 

Q.: Vous qui êtes un ancien dissident de l'époque titiste, et même un émigré, pouvez-vous nous expliquez quelle a été la position de la droite yougoslave, ou des droites yougoslaves, à l'égard de Josip Broz, dit «Tito»?

 

DK: Les protagonistes de la droite authentique, spirituelle, en ex-Yougoslavie peuvent se compter sur les doigts de la main. Le ré­gime de Tito était confronté à trois espèces d'opposition, très faibles au demeurant face aux rangs serrés de la Ligue des commu­nistes de Yougoslavie qui disposait d'un monopole politique absolu: il y avait les néomarxistes qui critiquaient le pouvoir en place au départ de positions ultra-gauchistes, puis les nationalistes sentimentaux et, enfin, les partisans du libéralisme écono­mique. Fait intéressant, les protagonistes de ces trois types d'opposition sont aujourd'hui unis sur la plate-forme de l'idéologie libé­rale, de la “société civile”, du “multiculturalisme” et du mondialisme, et ils servent ouvertement les intérêts des seigneurs du “nouvel ordre mondial”.

 

De l'aveu de ses plus proches collaborateurs, Tito était maçon. L'année charnière de sa carrière fut 1956. Il reçut alors de John Forster Dulles l'autorisation et l'ordre de mettre en place le cadre politique nécessaire pour récupérer les anciennes colonies euro­péennes, sous le nom de “mouvement des non-alignés”. Vous êtes bien placé pour savoir que ces colonies se sont “libérées” avec l'aide financière et politique de Washington qui s'est appliqué à leur imposer une forme nouvelle de colonialisme, infiniment plus efficace: l'économie de la dette. Josip Broz Tito fut un des plus éminents exécutant de cette opération, et de nombreuses lignes de crédit passaient alors par la Yougoslavie. Tito devait faire de la Yougoslavie elle-même une colonie de l'internationale des usuriers. Beaucoup se souviennent aujourd'hui, non sans nostalgie, de l'“économie de bien-être” des années 70, mais ils ou­blient que la Yougoslavie contracta alors une dette de l'ordre de 30 milliards de dollars qu'il s'agit maintenant de rembourser!

 

Tito a su longtemps mettre habilement à profit la guerre froide en se faisant passer, en Occident, pour une victime en puissance de l'hégémonie soviétique, tout en laissant entendre à Moscou qu'il était disposé à se blottir de nouveau dans son giron. Il était aidé à la fois par l'Ouest et par l'Est, mais il finit, dans les années 70, par tomber dans le piège de l'usurocratie internationale. Sans se soucier des conséquences de son gâchis, il gaspillait les crédits, sachant que quelqu'un d'autre serait obligé de les rembourser après sa mort. Une plaisanterie, très populaire après la disparition de Tito, illustre bien le cynisme de sa politique. Vous vous rap­pelez sans doute que son agonie a été longue et qu'à cause de la gangrène qui le minait, on a dû lui amputer une jambe. Après que la Faucheuse eût fait son œuvre, notre personnage descend en enfer où il trouve, non pas les tourments et les supplices qu'il appréhendait, mais une étrange liesse, des festins, bref l'euphorie et la fièvre de la consommation. Demandant à son voisin ce qui se passait, il s'entend dire: «Tout a changé depuis l'arrivée de l'unijambiste. Nous sommes en train de croquer ses emprunts».

 

Q.: Dans le contexte actuel, eu égard au blocus que vous subissez et à l'image négative que véhicule les médias à propos de la Serbie, quelles sont vos intentions?

 

DK: Les Serbes rappellent volontiers un proverbe, dont la perti­nence est confirmée aujourd'hui, par les temps que nous vivons: «A quelque chose, malheur est bon». Les sanctions impitoyables et gé­nocidaires que nous subissons, et l'hostilité pour ainsi dire univer­selle qui nous entoure, nous obligent à nous surpasser. Pour pouvoir produire le minimum indispensable à notre existence  —c'est-à-dire notre Etat souverain et indépendant, et la liberté—  nous devons exiger de nous-mêmes un maximum qui effrayerait des peuples beaucoup plus grands et dotés d'une tradition et d'une force bien plus considérables que les nôtres. En luttant pour la liberté de notre patrie, nous combattons aussi pour tous les Européens, en leur don­nant l'exemple de l'abnégation et de l'autonomie. Nous défendons l'Europe contre la pénétration de l'islamisme, et nous résistons aux coups les plus terribles du “nouvel ordre mondial”.

 

En se débattant au milieu de tant d'épreuves, les Serbes ont montré et prouvé qu'ils sont des révolutionnaires conservateurs par excel­lence. Nous luttons pour les conditions dont nous avons besoin pour créer des valeurs qui méritent d'être sauvegardées. S'il n'y avait pas eu cette guerre, les Serbes auraient probablement sombré dans le guet-apens de ce qu'il est convenu d'appeler la “société multicul­turelle” et le “libre marché”. Grâce aux défis que nous lance le “nouvel ordre mondial”, nous savons désormais que le “libre mar­ché” n'est en fait que la formule servant à détruire les fondements économiques des nations et à ravaler l'homme au rang d'animal économique. Nous voyons à l'oeil nu ce que cette formule a fait de la Bulgarie, de la Roumanie, de la Hongrie, de la Pologne ou de la Russie. Tous ces pays et leurs peuples se sont candidement laissé entraîner dans un cycle nouveau d'exploitation coloniale, bien pire que les précédents. Les pays post-communistes ont largement ou­vert leur marché au capital étranger, espérant qu'il leur apporterait la vie que vivent les protagonistes de la série télévisée Dynasty. Or il est apparu que le ca­pital étranger évitait les secteurs productifs et s'investissait pour l'essentiel dans les réseaux de distribution de la camelote occi­dentale. Pour acheter toute cette pacotille qui leur donne l'illusion de participer à la “civilisation occidentale”, les peuples du post-communisme doivent s'endetter encore plus lour­dement. Le capital étranger est attiré principalement par les sa­laires de misère de la main-d'œuvre locale et le fait qu'il est exempté de toute obligation fiscale et syndicale. Les peuples du post-communisme ont le sentiment d'avoir été bernés parce qu'ils continuent à croupir dans le dénuement. C'est avec indignation qu'ils regardent les charo­gnards étrangers arracher leurs terres et leurs biens avec le concours des pseudo-élites politiques et des ma­fias.

 

Les sanctions imposées à la nouvelle Yougoslavie visent à briser non seulement l'économie nationale mais aussi celle des pays voisins, de la Bulgarie, de la Roumanie voire de la Grèce. Nous savons qu'à l'étranger une volée de rapaces appellent cet effon­drement de leurs vœux. Mais nous sommes fermement décidés à résister au siège, coûte que coûte. Les sanctions qui font que nous ne nous endettons plus, nous poussent à pratiquer la politique d'auto-suffisance économique. Il s'est révélé que nous de­vions importer peu de choses et que nous pouvions produire nous-mêmes bien des marchandises et services de substitution. J'espère, pour ma part, que les sanctions dureront assez longtemps pour contraindre notre politique à s'engager de la manière la plus énergique dans la voie de l'autosuffisance économique.

 

Nous savons que la pression des processus mondiaux d'intégration appelle la mise en place de dispositifs défensifs à leur me­sure. Nous devons riposter aux défis du mondialisme en créant notre propre système d'intégration, l'alliance culturelle, politique, économique et militaire des pays appartenant au cercle de la civilisation chrétienne orientale. Chacun des grands systèmes éco­nomiques existants se fonde sur une base religieuse. Le modèle capitaliste libéral repose sur les fondements puritains-protes­tants, biblico-calvinistes, qui ont été fort bien explicités par les recherches de Weber et de Sombart. A l'autre extrême, le modèle japonais de capitalisme a pour assise la conception bouddhique du travail. C'est dire que nous devons créer un système écono­mique répondant à la forma mentis  chrétienne orientale.

 

L'essence de la chrétienté orthodoxe est la doctrine de la divinisation de l'homme. En se rapprochant de Dieu, l'homme se méta­morphose et ressemble de plus en plus au modèle divin. Dans notre système, l'économie doit redevenir un moyen et cesser d'être la finalité de la vie. Elle doit être l'outil de la transformation spirituelle de l'homme et du peuple. L'éthique orthodoxe exclut l'égoïsme et prescrit la solidarité. Aussi notre système économique doit-il être au service de la collectivité, et non pas de l'individu. Le modèle japonais nous est très proche, et tout porte à croire que nous réussirons à ouvrir une “troisième voie” qui se situera à égale distance du capitalisme libéral et du socialisme réel, dont on sait qu'ils ne sont que deux chemins différents con­duisant au même abîme. En outre, le capitalisme libéral et le socialisme réel émanent de la même matrice, de matrice puritano-protestante.

 

Q.: Comment l'Etat serbe, agrandi ou non, se comportera-t-il, quand la guerre sera finie, à l'égard de l'Allemagne, de la France, de l'Europe occidentale dans son ensemble? Par ailleurs, comment mettra-t-on fin aux hostilités qui divisent les peuples slaves dans les Balkans?

 

DK: Nous saurons distinguer les peuples d'Europe occidentale de leurs pseudo-élites félonnes, qui sont pour l'essentiel au ser­vice du mondialisme. On a l'impression, du point de vue serbe, que les peuples d'Europe occidentale sont sous l'effet d'une drogue ou d'une anesthésie. Tout se passe, en effet, comme s'ils ne voyaient pas le gouffre vers lequel les pseudo-élites sont en train de les conduire. Ils nous font penser à quelqu'un qui serait atteint d'une grave maladie, sans en être encore conscient. La ma­ladie progresse lentement, de sorte que la victime ne remarque pas les changements qu'elle provoque. Elle s'y habitue, croyant que la douleur ou la torpeur qu'elle ressent de temps à autre n'est qu'une faiblesse passagère. Elle prend des sédatifs et des eu­phorisants qui éliminent de sa conscience des signes d'alarme pourtant précieux, au point de devenir la proie de ses propres chi­mères, en attendant l'effondrement définitif de son système de défense. Cette maladie dure depuis deux cents ans, depuis la Révolution française et l'usurpation du pouvoir par la bourgeoisie. L'Etat est détruit, l'Eglise minée, tandis que la scène publique devient le “marché libre” auquel l'homme ne peut accéder que comme consommateur ou comme producteur. Tout le reste, tout ce qu'il y a d'essentiel dans l'homme, tout ce qui lui permet de rester debout, a été fourré dans les chenils du privé où l'esprit et l'âme sont dévastés par les programmes médiatiques de débilisation et de crétinisation. L'immigration des masses africaines et asia­tiques assène le coup de grâce aux Européens de l'Ouest. J'ai bien peur qu'en l'espace d'une génération l'Europe occidentale ne devienne une province du Maghreb ou, au mieux, quelque chose qui ressemblera au Brésil d'aujourd'hui.

 

Nous les Serbes, nous vous aidons autant que nous le pouvons en luttant contre le “nouvel ordre mondial” et en endiguant la pé­nétration de l'Islam qui déferle sur l'Orient. Dans nos églises, nous sommes nombreux à prier pour le salut de nos frères européens de l'Ouest. Nous prions pour que vous sortiez enfin de votre narcose et de votre anesthésie, pour que vous preniez conscience du précipice vers lequel vos pseudo-élites politiques félonnes et corrompues sont en train de vous mener.

 

Pour ce qui est de l'hostilité entre les Slaves, plus particulièrement entre les Serbes et les Croates, elle ne dépend pas des Serbes. Nous, nous ne faisons que défendre notre patrie. Et nous savons que nous avons de notre côté les lois de la vie, la vérité et la justice. Nos adversaires ont opté, quant à eux, en faveur de l'American Way of Death, du mensonge et de l'injustice. Si para­doxal que cela puisse paraître, force est de constater que nous luttons aussi pour les Croates. Notre nationalisme n'est pas une fin en soi, mais un point de départ vers l'ouverture sur les valeurs des autres nations qui nous sont spirituellement proches. C'est une tradition qui remonte à l'empire médiéval serbe, successeur légitime et consacré de l'empire romain. C'est également de cette tra­dition romaine qu'émane notre emblème, l'aigle blanc bicéphale. Il nous rappelle en permanence que nous devons viser haut. J'ai parcouru et je parcours encore toutes les lignes de défense serbes, et je puis vous affirmer, la conscience parfaitement tranquille, que je n'y ai trouvé parmi les combattants un seul exemple de haine envers l'ennemi. Les Serbes sont au-dessus de toute haine. La seule tentation à laquelle il leur arrive de succomber, c'est celle du mépris pour l'ennemi, pour son aveuglement ou sa cruauté.

 

Q.: Quelle serait la place d'un parti nationaliste serbe dans l'Europe des patries ou des ethnies, dans le concert informel des natio­nalistes? Sous quelles conditions cette éventuelle insertion pourrait-elle se faire?

 

Pendant que vous rêvez, en Occident, à l'«Europe des patries», nous, nous la créons par notre lutte, de Belgrade à Moscou. Nous sommes en train d'en jeter les premiers fondements réels, concrets. Lorsque nous aurons réalisé notre alliance, nous vous aide­rons à nous rejoindre pour construire ensemble l'Europe des patries et des peuples unis, de Dublin à Vladivostok. Le premier pas doit être accompli dans le domaine de la culture, le second dans celui de la politique, et le troisième dans celui de l'économie. Cet ordre est suggéré par la tradition indo-européenne la plus ancienne, c'est-à-dire la structuration tridimensionnelle de tout com­munauté. Ce n'est pas un hasard si la construction de l'UE a commencé par l'économie. Si cette “erreur” a été commise, c'est pré­cisément pour assurer le règne du démon de l'économie sur la politique et la culture.

 

Pour ce qui est du “parti nationaliste serbe”, je n'envisage par une telle forme d'organisation politique. Je pense que la démocratie indirecte pluripartite est une institution pernicieuse qui sert à détruire l'unité de la nation. Nous réfléchissons à la démocratie di­recte et à des formes de représentation politique qui embrasseraient toutes les dimensions de la communauté, c'est-à-dire la science, la culture, le travail, l'église, l'armée...

 

Bien entendu, nous ne nous attendons pas à voir les institutions de la démocratie indirecte et pluripartite disparaître dans un proche avenir. Elles se maintiendront probablement bien avant dans le 21ième siècle, ne serait-ce que par la force de l'inertie. Aussi est-il indispensable de compléter un tel système en y adjoignant des institutions d'expression et de décision politique mul­tidimensionnelle. Cette alternative est également indispensable pour combattre la partitocratie qui a déjà causé bien du mal et qui en fait de plus en plus.

 

Ici, aux postes avancés de la défense de l'Europe, nous voyons clairement l'avenir et nous le vivons déjà. Cet avenir est placé sous le signe de grands heurts de civilisations, de religions et de races. Le sort des Européens se joue déjà, et cela sur la ligne Belgrade-Moscou. Nous, les Serbes et les Russes, connaissons bien les points faibles des défenseurs de l'Europe en Occident, et c'est la raison pour laquelle nous ne vous demandons pas de nous aider. De même, nous n'attendons pas de vous que vous vous joigniez à nous. Ce que nous vous demandons, c'est uniquement de nous comprendre, de ne pas succomber à la propa­gande de nos ennemis communs, de ne pas porter de jugement sur notre lutte en ressassant des préjugés et des poncifs histo­riques éculés.

 

Et surtout, n'ayez pas peur de nos ennemis communs, des seigneurs auto-proclamés du “nouvel ordre mondial”, qui s'agitent de l'autre côté de l'Atlantique. Ils sont beaucoup plus faibles qu'ils ne le croient. Une tête européenne intelligente les effraye plus que les arsenaux nucléaires de la Russie. Ils savent très bien que de cette tête européenne peut jaillir une étincelle qui mettrait le feu à leur monde, à leurs tromperies et à leurs chimères de papier, et le réduirait vite en cendres. Ces esprits nains et ces monstres moraux ne parviennent à survivre que grâce à leur art du parasitisme, grâce à la perfidie avec laquelle ils dressent les nations eu­ropéennes les unes contre les autres. La devise du nationalisme serbe est: «Nationalistes de tous les pays, unissez-vous»!

 

dimanche, 06 décembre 2009

Entretien avec Pavel Toulaev

Russian_soldiers_on_the_Champs_Elysees_DSC03310.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1998

Entretien avec Pavel Vladimirovitch Toulaev, Vice-Président de « Synergies Européennes » à Moscou

 

1. Pavel Vladimirovitch, comment vous présenteriez-vous à vos amis synergétistes d’Europe occidentale ?

 

PVT : Je m'appelle Pavel Vladimirovitch Toulaev et j'ai 39 ans. Russe et citoyen de la Russie, je réside à Moscou. De par ma formation, je suis traducteur-interprète en langue espagnole, anglaise et française et licencié en histoire ; par vocation je suis poète, philosophe et homme de lettres ; par profession, je suis professeur à l'Université linguistique d'Etat de Moscou ; par engagement social, je suis rédacteur scientifique et littéraire de la revue historique et culturelle Naslednié Predkov (Les legs des ancêtres). J'ai une cinquantaine de publications à mon actif sur la Russie, l'Espagne, l'Amérique latine et l'Amérique du Nord dans les genres les plus divers: des études scientifique aux visions mystiques. Parmi les plus significatives, je citerai: « Comprendre l'Entité russe », « Sept rayons », « La croix sur la Crimée », « La Révolution conservatrice en Espagne », « La Russie et l'Espagne s’ouvrent l'une à l'autre ». Parmi les livres sortis sous ma rédaction, je choisirais les recueils suivants: « La Russie et l'Europe: expérience d’une analyse à partir de l'idée de "sobornost " », « Le peuple et les intellectuels», « Perspective russe » et également « Philosophie posthistorique» par Vitalii Kovalev et « Comment l'ordre organise les guerres et les révolutions » par Antony Sutton.

 

2. Quelles sont les sources de votre mode de penser ?

 

PVT : Ma famille, mes amis et ma Patrie ont joué le rôle principal dans ma formation. Elevé dans les bonnes traditions russes et dans la famille d'un officier des services de renseignement pour l'étranger, j'ai reçu une éducation avec une forte orientation idéologique, fidèle aux principes du patriotisme, du socialisme soviétique et de la pratique sportive et culturelle au sein des organisations des pionniers et du Komsomol. Depuis l'enfance, j'ai eu l'occasion de beaucoup voyager. Né à Krasnodar, dans le sud ensoleillé de la Russie, j'ai passé ma jeunesse au bord de la mer Noire à Sotchi, j'ai été plus d'une fois dans la ville natale de mon père, Saint-Pétersbourg, et en Sibérie, pays natal de ma mère ; j'ai vécu en Autriche et en Australie, j'ai travaillé en Espagne et aux Etats-Unis. Mon expérience à l'étranger a considérablement influencé ma vision du monde, mais j'ai passé la plus grande partie de ma vie dans la capitale de la Russie. C'est surtout grâce à Moscou, avec ses traditions russophiles, orthodoxes et impériales, que j'ai atteint ma maturité.

La beauté et le mystère qui se manifestent dans la nature, dans l'érotisme et dans l'art ont aussi exercé une grande influence depuis toujours sur ma façon de penser. J'ai toujours considéré la création artistique et l'amour comme l'expression la plus naturelle du monde intérieur. Dans ma jeunesse je me suis appliqué à la peinture, j'ai été barde lorsque j'étais étudiant et j'ai vécu d'impressions musicales et théâtrales, j'ai écrit et exécuté moi-même des chansons. Après avoir adopté la foi orthodoxe, j'ai appris à chanter la messe. L'esthétique m'attire sous toutes ses formes et surtout sous sa forme musicale, qui n'a jamais cessé de m'envoûter véritablement. J'écoute régulièrement la musique classique de Bach et Tchaïkovski à Richard Strauss et Rachmaninov. J'aime également la musique populaire y compris l’occidentale par sa vitalité et son naturel.

 

3.Quels auteurs et quels livres vous ont marqué le plus dans votre jeunesse ?

 

PVT : Il est difficile d'opérer une sélection parmi les centaines d'auteurs et de livres que j'ai lus. Depuis l'enfance, j'ai avalé de tout selon de contes, des livres d'aventures, des romans policiers, des romans d'amour et des poésies. La première œuvre sérieuse dont je me rappelle est l'Odyssée d'Homère dans ma jeunesse, en dehors de ma passion pour la peinture et pour la musique, j'ai pris goût aux œuvres ayant trait aux beaux-arts aux musées et aux albums d'art.

 

Pendant les années universitaires sous l'influence de mon éducation soviétique, je me suis passionné pour le romantisme soviétique et le mouvement des partisans de l'époque. Une fois devenu boursier de thèse à l'Institut de lyrique latine de l'Académie des sciences de l'URSS, où je me suis spécialisé dans le Pérou, j'ai été enchanté par les travaux et la biographie de Che Guevara, de Fidel Castro, de Ho Chi Min, de José Carlos Mariategui, de Aya de la Torre, de Simon Bolivar et de José Marti. J'ai traduit et chanté les chansons de Victor Hara.

 

C'est au cours d’un stage de boursier de thèse que j'ai souhaité me familiariser avec les auteurs classiques russes de Pouchkine et Gogol, Tolstoï et Essenine, en dehors des œuvres de Marx, Hegel et Lénine, qu'il fallait obligatoirement lire à l'époque. Je me suis littéralement plongé dans leurs œuvres complètes pendant des semaines et des mois entiers dans les bibliothèques.

Dostoïevski m'a profondément secoué et ce sont surtout  Les Démons et Les frères Karamazov qui ont produit une grande impression sur moi. En lisant Dostoïevski, je me suis reconnu sans réfléchir... Ensuite cela a été le tour de Nikolaï Fedorov, utopiste l'excès, qui rêvait de redonner la vie tous nos ancêtres, une idée qui m'a stupéfié. En bon élève de la période soviétique, j'avais étudié l'histoire selon les principes du matérialisme historique et je me trouvais alors confronté à la résurrection des pères, aux racines aryennes, aux recherches de berceaux indo-européens, à la guerre pour Constantinople. En un mot, j'étais confronté à la contre-révolution. J'ai éprouvé un grand bonheur esthétique en lisant Nabokov. Sa langue somptueuse, veloutée et extraordinairement poétique, m'a charmé. Le roman surréaliste de Nabokov Le Don est un des meilleurs romans du XXième siècle.

 

tulaev.jpgParmi les philosophes, mon premier maître à penser a été Georg Wilhelm Friedrich Hegel. Pendant mon stage de boursier de thèse, j'ai été obligé d'étudier Les cahiers philosophiques de Lénine qui contiennent beaucoup d'extraits de la philosophie classique allemande. Je n'en suis pas resté là. M'étant armé de patience, j'ai consacré plusieurs mois à l'étude en autodidacte de la dialectique de l’absolu. J'ai étudié L'Encyclopédie philosophique, La

science de la logique, L'éstétique et ensuite La philosophie de l'histoire, le résultat a surpassé toute attente car je suis devenu un idéaliste convaincu.

 

Platon, que j'ai aussi lu en entier, a suivi Hegel et j'ai même composé deux dialogues philosophiques en m'inspirant des siens. Aristote ne m'a pas vraiment captivé et, au lieu d'étudier la Métaphysique, j'ai relu les biographies philosophiques de Diogène Laërce, les poèmes d'Homère et des magnifiques traductions d'hymnes anciens. Les classiques orientaux ont également exercé une influence considérable sur moi: parmi eux  le « Rigveda »,  le « Mahabharata », Le chevalier dans la peau de tigre de Chota Roustavéli ainsi que la poésie lyrique dans l'esprit de Nizami et de Omar Khayyam. En général, j'ai une prédilection pour l'Orient à laquelle ont contribué le Précis d'Histoire mondial de Djavaharlal Nehru, mon engouement pour les livres et les tableaux de Nikolaï Roerich, mon intérêt scientifique pour l'lnde, la Chine et la Corée du Nord. L'Orient de l’époque classique m'a toujours inspiré un sentiment de respect profond et parfois même d'exaltation et de vive émotion.

 

Le Zarathoustra de Friedrich Nietzsche m'a beaucoup marqué. Je l'ai lu pour la première fois dans une édition d'avant la révolution (il n'y avait pas d'éditions soviétiques), par la suite, j'ai eu accès aux nouvelles traductions et j'ai lu avec inspiration La naissance de la tragédie et l’esprit de la musique, L'Antéchrist  et d'autres œuvres. C'est en partie sous l'influence de Nietzsche que j'ai créé la société littéraire moscovite « Prométhée » avec une orientation pour l'esthétique musicale, pour le « cosmos russe » et l'astronautique. C'était une étape importante de mon cheminement spirituel, où trouvèrent leur expression les recherches et les élans de ma jeunesse romantique.

 

4. Quels penseurs ont attiré votre attention dans la maturité ?

 

PVT : Parmi les auteurs occidentaux, ce sont Wagner, Schopenhauer, Heidegger, Camus, Dali, Ortega y Gasset qui m'ont captivé, ensuite Dante, Baltasar Gracian, Ignace de Loyola, Rafael Calvo Serrer (surtout sa Théorie de la Restauration), Escriva de Balaguer (Chemin) et aussi la grandiose poésie épique espagnole « El Cid », que j'ai étudiée dans le texte original. Après avoir travaillé à Séville pour l'Expo-92 et avoir fait connaissance avec des phalangistes, j'ai étudié les œuvres de José Antonio Primo de Rivera, j'ai écrit la brochure La révolution conservatrice en Espagne et l'essai biographique Franco - Caudillo de l'Espagne.

 

Peu à peu, j'ai commencé à préférer les penseurs russes. Encore dans les années soviétiques grâce aux recherches fondamentales du fondateur de l'école mythologique A.H. Afanasiev (son travail principal Les conceptions poétiques des Slaves sur la nature) et de l'académicien B. A. Rybakov (Le paganisme des anciens Slaves et Le paganisme de l'ancienne Russie), j'ai découvert le monde de l'antiquité slave et je me suis sérieusement intéressé aux racines aryennes de notre civilisation. C'est ainsi que mon intérêt profond pour le passé est né et que j'ai été amené à lire avec la plus grande attention l'ouvrage en plusieurs tomes l’Histoire de l'Etat russe par N. M. Karamzine, à cela ont suivi les œuvres choisies sur l'histoire russe de S. M. Soloviev et les conférences renommées de M. O. Klioutchevski. Dans cette période, je suis devenu militant de la Société panrusse de protection des monuments historiques et culturels.

 

Depuis le debut de la « perestroïka », j'ai essayé de lire tout ce qui était interdit auparavant et qui était désormais disponible: les livres des écrivains russes-blancs, les analyses des dissidents soviétiques sur le rôle des juifs et des francs-maçons. Je me suis abonné à une montagne de revues copieuses: Problèmes de philosophie,  Notre contemporain (Nach Sovremenik), Moscou, Science et religion et d'autres sans compter quelques journaux politiques d'orientation patriotique dans le genre du Messager russe (Russkii Vestnik) et de Jour (Dyeïnn). C'est avec difficulté que j'ai avalé cette avalanche d'informations où foisonnaient les scandales, les sujets à sensation et les nouvelles tragiques.

 

Après l'abolition de la censure et la libération totale de la presse, les classiques de la pensée russe ont commencé à être publiés en gros tirages: Vl. Soloviev, N. Berdiaev, P. Florenski, Illin, E. Troubetskoi, L. Tikhomirov, I. Solonevitch et d'autres. Ils sont tous des idéalistes orthodoxes de tendances différentes. Je ne peux affirmer avoir lu toutes leurs œuvres (il y en a des centaines), mais j'ai étudié sérieusement l'essentiel. Sous l'influence des philosophes orthodoxes, j'ai élaboré l'idée russe: la « sobornost », qui signifie la liberté hiérarchique et différenciée en Dieu.

C'est à cette époque que j'ai étudié la Bible et que j'ai lu plusieurs fois l'Evangile. L'Ancien Testament a produit sur moi une impression sombre et lors de la lecture du Nouveau Testament j'ai été particulièrement touché par l'Evangile de Saint-Jean et par l'Apocalypse. La Liturgie divine et l'expérience mystique du martyr aident sensiblement à la compréhension de la véritable Orthodoxie.

 

Sur le plan personnel c'est le père Dmitri Doudko, éminent pasteur moderne et chef spirituel reconnu de l'opposition nationale-patriotique qui m'a offert son aide. J'ai en effet eu l'occasion de réviser un recueil de ses sermons choisis.

 

Alexei Fedorovitch Lossev reste pour moi encore aujourd'hui le dieu de la philosophie. Il est en même temps philosophe, philologue, musicologue, écrivain, expert de l'antiquité. C'est en la personne de Lossev que la pensée russe a surpassé pour la première fois l'école allemande, réunissant en soi les théories les plus innovantes de la dialectique antique et classique, de la phénoménologie moderne, de la philosophie de l'histoire et de la linguistique. La conception de Lossev est complète ; et elle est aussi exquise ; sa compréhension seule offerte un plaisir esthétique. Les travaux de Lossev, que je préfère, sont : La dialectique du mythe, La mythologie des Grecs et des Romains, Le problème du symbole et l’art réaliste  et bien sûr, son oeuvre fondamentale Histoire de l'Esthétique de l'Antiquité. Lossev est encore inconnu en Occident mais, avec le temps, il occupera sans aucun doute la place qui lui revient dans l'Olympe intellectuel.

 

Dans le cadre de cet interview, il faut réserver une place à part au fameux livre de Nikolaï Yakovlevitch Danilevsky La Russie et l'Europe: Aperçu sur l’attitude culturelle et politique du monde slave vis-à-vis du monde romano-germanique, où l'on élabore pour la première fois, sur une base scientifique, la doctrine du « type slave du point de vue historico-culturel ». J'ai non seulement étudié soigneusement cette œuvre fondamentale qui a exercé en son temps une influence fondamentale sur Spengler et qui a suscité un débat animé dans le milieu intellectuel russe de la fin du XIXième et du début du XXième siècle, mais j'ai aussi étudié l'histoire du problème, j'ai tenu une conférence scientifique à ce sujet dans le cadre du programme de la société historico-religieuse « Sobor » que je dirige et j'ai publié la première anthologie de la philosophie russe de l'histoire, qui comprenait des extraits de l’œuvre des slavophiles classiques, des occidentalistes et des eurasiens: Khomiakov, Kiréevski, Tioutchev, Herzen,

Danilevski, Léontiev, Rosanov, Troubetskoï, Ivanov, Fedotov, Lossev, et aussi des articles de mes contemporains et amis: Vitali Kovalev, Igor Demine, Vladimir Martchenkov, Nikolaï Licovoï, Andreï Pavlenko, Gueïdar Djemal, Viatcheslav Parchkov et d'autres auteurs de talent.

 

6. Quelles sont les grandes lignes de votre conception du monde ?

 

L'esprit russe a l'habitude d'écarter les structures de pensée rigides et encombrantes. Le paganisme slave était ouvert et polythéiste. L'Orthodoxie est à sa base apophatique. Les partisans de Bakounine et les marxistes-léninistes ont transformé la dialectique de Hegel en dialectique de la révolution. Les systèmes philosophiques, tels que « la sophiologie » de Vladimir Soloviev ou « la philosophie du nom » d'Alexeï Lossev, sont de rares exceptions.

 

Je n'ai jamais essayé de créer un système philosophique qui soit en même temps développé et achevé. De temps en temps, naturellement, j'ai dressé le bilan de mes recherches, mais à chaque fois une nouvelle vision du monde s'est ouverte à moi. De la fougue révolutionnaire de ma jeunesse, je suis passé à un prométhéisme créatif, du prométhéisme à l'esprit de « sobornost », de cet esprit de « sobornost » à l'académisme romantique. Maintenant je préfère contempler le monde, l'écouter, l'étudier, le comprendre en profondeur, le savourer, l'apprécier tout en exprimant ma volonté dans l'aspiration à la perfection et à la supériorité. D'ailleurs, je n'ai pas tiré un trait définitif sur mes recherches et je reste ouvert à la vie et à la connaissance. Disons que dans la poésie pendant un certain temps j'ai sciemment visé le symbolisme ontologique, mais actuellement, je me sens plus proche de la simplicité organique d'un romantisme concret et combatif. La paix, la guerre, l'amour, le foyer familial, une mort digne me sont nécessaires en tant que tels et non pas par le biais de symboles et de reflets.

 

Dans la thèse que je prépare actuellement sur l'histoire des relations russo-hispaniques, je développe une nouvelle tendance de la sémiotique historique. Je considère, étudie et lis toute l'histoire y compris les relations internationales comme un texte. Pour moi, en tant que culturologue qui se veut objectif et impartial, il est important de fuir l'idéologisation et la modernisation des faits historiques. Cela ne veut pas dire, bien sûr, que je n'ai pas de préférences, de convictions civiques et d'opinions politiques. Je suis un fondamentaliste russe, un patriote, j'aime la liberté et je déteste le pouvoir de l'argent.

 

Ce sont surtout mes poésies et mes essais réunis dans le livre Comprendre l’Entité russe qui illustrent le mieux ma conception. A ceux qui s'intéressent aux racines indo-européennes, aryennes et slaves, je recommande la lecture de mon étude Nos Dieux originaires: Zeus, Léto, Artemis, Apollon et leurs ancêtres et aussi le précis bibliographique Pôle hyperboréen (in : Naslédnié Predkov, n°4). Mes opinions actuelles, fondées sur un paradigme qualitativement nouveau, qui a été élaboré en tenant compte de l'utilisation de l'ordinateur et de l'expérience acquise aux Etats-Unis, ont été exprimées dans le recueil Prospective russe et également dans une série de nouveaux articles de revues et dans des interventions publiques. Une place particulière devrait être réservé, selon moi, à l’article « Les guerres de la nouvelle génération » (NdSE n°39).

 

7. Quel est le contenu du livre Perspective russe?

 

Perspective russe est un recueil collectif d’une dizaine d'écrivains russes, publié en 1996 par le centre de coordination «Pôle» en tant que supplément spécial à la revue Naslédnié Predkov. Ce recueil a le mérite fondamental de créer un modèle de passage au mouvement patriotique russe où le mode de pensée littéraire et idéaliste cèdera la place à une approche militaire et stratégique et où le national-conservatisme sera remplacé par le national-technocratisme.

 

Dans ce livre il y a six divisions: « L'ideologie nationale », « Guerre et Géopolitique », « La percée technologique », « La Russie et le monde contemporain », « Les conférences et les rencontres scientifiques », « Les nouvelles publications », qui contiennent les analyses des intellectuels les plus avancés de mon entourage. A part mon introduction, « La Renaissance russe: objectifs et priorités», les articles présents dans ce recueil sont: « Russie: principe aristocratique » (Alekseï Chiropaév), « La dictature du capital commercial » (Serguéï Gorodnikov), « La compétitivité de la Russie à l’avenir » (Andréï Saveliev), « La quatrième guerre mondiale » (Vladimir Popov), « Le Temps et le poids de la Russie » (Valeriï Milovanov), « Est-ce que la Russie possède une armée apte à combattre ? » (Evguénii Morozov), « La situation géostratégique après la guerre froide » (Alexandre Bedritzki), « L’exposition aéronautique et astronautique à Joukovskii » (Serguéï Guérasioutine). Ce recueil contient aussi une partie analytique, des traductions, des critiques, des nouvelles et de brèves  informations: « Qui Crée notre espace d’information? », « Le résultat des élections présidentielles », « Les droites en Europe Orientale » (d'après le livre de Paul Holenos  La liberté de haïr) ; la discussion du livre d'Antony Sutton Comment l'Ordre organise les guerres et les révolutions avec la critique « Conflits à régler: vers un nouvel ordre mondial », les critiques du « Recueil de géopolitique russe » ; du livre de K. E. Sorokine « La géopolitique de l'époque contemporaine et la géostratégie de la Russie » et le numéro qui vient de paraître de la Revue militaire et aussi la réponse à deux calomniateurs russophobes: Walter Laqueur et Alexandre Yanov, suite à la parution de leur livre Les Cent-Noirs. Naissance de l’extrême droite en Russie et Après Eltsine. La Russie de Weimar. A côté de ces articles, il y a, dans le recueil, mon interview intitulé: « Les USA sont un monde qualitativement à part ».

 

J'attire votre attention sur le fait que c'est justement dans « La perspective russe 1996 » que l'on a osé la première tentative de formuler les objectifs fondamentaux de la « Quatrième guerre mondiale ». En effet, la troisième guerre mondiale (appelée « guerre froide ») contre l'URSS et le communisme mondial, s'est officiellement close le 20 avril 1996, avec la signature au niveau étatique le plus élevé, de la « Déclaration de la rencontre moscovite ». C'est de là que sont nés de nouveaux problèmes et que des questions ont été soulevées ; c'est de là également que vient l'actualité de notre travail que les analystes les plus clairvoyants ont défini comme « une attaque intellectuelle de la nouvelle génération des patriotes ».

 

8. Quelles sont vos opinions géopolitiques et leur influence sur les débats à la Douma ?

 

Mes opinions politiques ainsi que ma vision du monde sont en développement perpétuel. Mon intuition de départ et ma volonté sont assez simples. Tout ce qui est bénéfique pour la Russie, pour ma Patrie, me convient. Tout ce qui est contre les Russes et la Russie dans son ensemble est inacceptable pour moi. Méthodologiquement, je dérive mon argumentation de la multiplicité et de la hiérarchie de l'être unique indivisible, composé de plusieurs types d'espaces: personnel, sacré, physique, historique, économique, d'information, etc. Une telle typologie peut varier. L'important est de comprendre que nous, notre famille, notre people, notre histoire, nos intérêts, nous sommes à l'intersection de ces mondes. Si l'on me lance un défi, je suis obligé de répondre. De surcroît, je veux gagner même si la mort me menace. Je le veux tellement et je ferai tout pour que mon désir se réalise, devienne réel. Cela c'est la substance. Quant à la forme, mon modèle métahistorique et descriptif, si l'on peut le synthétiser au maximum, contient trois espaces, grands et complexes, et de type différent, qui pénètrent l'un dans l'autre:

1) La Croix russe (elle se forme à l'intersection du chemin historique « des Varègues aux Grecs », direction Nord-Sud et de l'artère trans-européenne qui s’étend dans toute la Russie de l'Ouest à l'Est, où se cristallise le noyau russe renouvelé et ethniquement compact).

2) L'axe trans-aryen (il traverse la partie méridionale de l'espace central depuis le Nord-Ouest au Sud-Est et crée une attraction entre le Nord et le Sud aryens).

3) Le bouclier euro-asiatique (l'espace le plus étendu et le plus hétérogène qui pourrait être constitué potentiellement par tous les Etats de notre continent avec les îles adjacentes; son but essentiel consiste à créer une large union de défense contre les forces de l'atlantisme occidental, du mondialisme et du sionisme international). Il est important de ne pas confondre ces trois grands espaces car c'est à l'intérieur de chacun d'entre eux que les problèmes particuliers trouvent leur solution.

 

C'est par un souci d'exactitude scientifique que je dois préciser que mes opinions en matière de géopolitique se sont formées sous l'influence des œuvres d'Alexandre Douguine, surtout de sa revue Elementy. Je souhaite également mentionner le travail de Robert Steuckers « Panorama théorique de la géopolitique » ( j'ai participé à sa traduction en russe), les études d'Evguéniï Morozov et de ses compagnons de lutte dans le Recueil géopolitique russe et aussi les recherches en matière de race et d'eugénisme de Vladimir Avdéev, mon ami, membre du conseil de rédaction de Naslédnié Predkov.

 

Actuellement, j'interprète les anciens problèmes d'une nouvelle façon, je complète et je précise mes études précédentes. Il est indispensable de tenir compte de ce qui a été publié par d'autres auteurs ces dernières années. C'est surtout les Principes de géopolitique de A. G. Douguine, la Géopolitique contemporaine de K. E. Sorokine,  L'Europe unie: problèmes et perspectives de V. Wiedemann, les Manœuvres de la nouvelle géopolitique de A.V. Mitrofanov, l'étude critique de l'« eurocentrisme » de S. Kara-Mouzza. Ce qui différencie essentiellement mes anciennes vues des actuelles, c'est mon plus grand réalisme et le refus du schématisme occidental.

 

Vous me demandez quel est l'impact des projets géopolitiques sur les débats à la Douma. Je ne peux pas répondre avec précision à votre question car j'ai été au Comité de géopolitique seulement quelques fois (récemment, on y a présenté la revue Naslédnié Predkov). Toutefois, s'il faut s'en tenir à quelques démarches pratiques de l'administration actuelle des affaires étrangères du gouvemement d'Eltsine, signalons quelques points qui nous paraissent intéressants et positifs : une amitié préférentielle avec l'Allemagne, des rapports extrêmement chaleureux avec la France, un certain rapprochement avec le Japon, le fait d'accorder un plus grand poids au rôle de l'Espagne, l'intensification de la présence russe dans les Balkans malgré les menaces de la Turquie, et, en même temps, l'évident passage d’un stade à un autre : de l’alliance temporaire avec les USA, nous passons à un éloignement graduel par rapport aux Américains ; nous constatons aussi un rapprochement ostentatoire avec la Chine. La reprise de la lutte en faveur des anciens alliés dans le monde arabe, en Asie, en Amérique latine etc. On ne peut pas s'empêcher de remarquer les changements en faveur de mes amis politiques.

 

9. Comment voyez-vous la future collaboration entre les nouvelles droites en Russie et

en Europe occidentale ?

 

D'un point de vue géopolitique, ce qui m'intéresse ce n'est pas le fait d'être à droite ou à gauche, mais l'attitude réelle par rapport aux Russes, à la Russie, à notre passé, présent et futur. C'est cette vision qu’expriment mes amis espagnols, qui me disent: « Nous aimons les Russes indépendamment du fait qu’ils soient communistes ou monarchistes ». Ils incarnent l'idéal. Et ils ont raison car il y a non seulement des individus mais aussi des pays entiers qui changent leur orientation politique, bien que, malgré cela, les intérêts fondamentaux restent les mêmes dans le fond.

 

En définitive,  je me sens beaucoup plus proche de la droite. Ce n'est pas par hasard que Naslédnié Predkov (« L'héritage de nos ancêtres »), possède un sous-titre « revue des perspectives de droite ». Mais la question est de savoir de quelle droite il s'agit. « Les anciennes droites » diffèrent entre elles, les « nouvelles droites » sont aussi hétérogènes. Chez nous en Russie, par exemple, il y a des tendances extrémistes qui n'ont pas de lien réel avec la tradition nationale. Ce sont les habituels extrémistes de gauche: soit par le fond, soit par le langage, soit par la forme. C'est pour cette raison que la première chose à faire consiste à s'entendre sur les questions principales et à chercher ensuite des alliés.

 

Mais il y a autre chose. L'Europe occidentale, actuellement, n’est pas satisfaite de l'influence excessive des USA dans sa région. Mais elle possède des intérêts russes. En effet, l’intégration des petits Etats de l’Europe orientale ou septentrionale dans le marché commun et l'OTAN etc l'arrange parfaitement car dans ce cas, le rôle de ces mêmes Etats d'Europe occidentale s'accroît et leur structure s'actualise et se dynamise. Il serait plus avantageux pour les Russes que ce processus de dynamisation se développe à l'Est et au Sud par le territoire russe. Mais ce sont justement les conflits militaires provoqués et artificiellement entretenus en Europe orientale qui l'empêchent.

 

Votre organisation a lancé l’initiative « Synergon/Synergies Européennes » avec laquelle je me suis familiarisé en lisant les pages de la revue Impérativ (n°2), dirigée par Vladimir Wiedemann. Le document qu’il y a publié contient des pensées remarquables et constructives et comme, on le dit dans ce cas, chargées d'optimisme. Je suis surtout frappé par l'appel des auteurs à la conservation de la mémoire historique, des cultures enracinées et développées, ayant des traditions spirituelles riches. Vous comprenez profondément les problèmes écologiques et économiques de l'époque actuelle, vous ouvrez des perspectives aux jeunes, aux innovateurs, aux forces dynamiques. Ce sont surtout notre politique d'information et votre intention de contribuer à la création des bases d'un système de soutien intellectuel réciproque entre ceux qui partagent les mêmes idées « sur toute l’étendue du Grand Ordre continental » qui n'ont intéressé. Si j'ai bien compris, il ne s'agit pas ici de l'Europe occidentale qui attire vers elle une partie des pays d'Europe orientale dans les intérêts de l’OTAN mais de la formation sur tout notre continent d'une communauté qualitativement différente pour toute l'Eurasie.

 

Quelle forme prendra cette nouvelle communauté géopolitique, c'est avec le temps que nous le verrons. S'agirait-il de cet Empire Sacré entièrement autonome auquel vous aspirez ou d'une nouvelle Sainte-Allianœ ou de l'héritière de l'Union Soviétique ? Pour le moment, il n'y a pas de réponse précise à cette question comme à beaucoup d'autres. Il est clair que le chemin vers le bloc continental ne sera pas facile et, à l'avenir, il ne faut pas s'attendre à une solution rapide et pacifique de tous les problèmes existants.

 

Qu'est-ce que l'on peut proposer de concret aux membres de la « Synergies européennes » ? Tout d'abord, il s'agira d’apprendre à se connaître en profondeur. Pour le moment, je ne connais pas bien l'UE et je ne suis prêt qu'à avoir un rôle d'observateur. En deuxième lieu, il s'agira d'un champ intellectuel et d'information. Il sera indispensable de comparer notre terminologie, nos valeurs, nos objectifs. Il ne faut pas se hâter de créer un « nouvel ordre », en imitant les modèles historiques qui n'ont pas fonctionné autrefois ou qui se sont auto-éliminés. La troisième étape pourrait être une conférence permanente apte à faciliter le passage de la solution des problèmes théoriques aux questions pratiques. Ensuite, on pourrait envisager la publication d'un périodique en plusieurs langues étrangères y compris le russe.

 

Mais actuellement la Russie n'offre que rarement le matériel, prêt à être publié, pour « Synergies Européennes ». C'est une situation anormale. Elle ne correspond pas à l'apport des Russes au développement du continent. Par conséquent, nous devons tout d'abord créer des conditions aptes à faire naître une collaboration réciproque et passer ensuite aux questions pratiques d'organisation et de droit.

Pour conclure, je voudrais remercier personnellement Robert Steuckers pour l'attention qu'il consacre à la Russie, au nouveau mouvement de droite, à la revue « L'Héritage de nos ancêtres » et aussi pour m'avoir offert l'occasion de m'exprimer sur les pages de votre publication. Pendant que l'on préparait l'interview à l'impression, Anatoli M. Ivanov m'a montré une sélection des numéros  de «NdSE » et de «Vouloir» de ces dernières années. Je m'en félicite ! Vous publiez une revue tout à fait nécessaire et sérieuse. Ce sont surtout les éditions spéciales consacrées à l'idée russe et au bolchevisme national qui m'ont plu.

 

Permettez moi de souhaiter que nos rapports se développent ultérieurement sur la base d’un intérêt réciproque, d'une profonde compréhension mutuelle et des liens constructifs et amicaux. Ensemble, nous constituerons une force !

 

Pavel TOULAEV.

2 février 1998, rédaction : 15.10.98

 

vendredi, 04 décembre 2009

Entretien avec Tomislav Sunic - Journal "zur Zeit" (Vienne)

sunic0000.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1998

Entretien avec Tomislav Sunic

Journal zur Zeit (Vienne)

 

Tomislav Sunic est né en 1953 à Zagreb. Il est l'auteur de trois ouvrages importants: Against Democracy and Equality. The European New Right et Dissidence and Titoism (tous deux chez Peter Lang à Berne/Francfort) et Americka Ideologija (= L'idéologie américaine). A cause de sa dissidence politique, il a dû émigrer aux Etats-Unis en 1983, où il a étudié et obtenu son doctorat à la California State University à Sacramento et à l'University of California à Santa Barbara. Il a écrit pour plusieurs journaux aux Etats-Unis et enseigné à la California State University à Long Beach et au Juniata College en Pennsylvanie. Depuis 1993, il est revenu en Europe. Il écrit aujourd'hui pour Chronicles of American Culture et pour les journaux croates Hrvatsko Slovo et Matica. Robert Steuckers l'a interrogé pour l'hebdomadaire viennois zur Zeit.

 

Q.: Dr. Sunic, dans quel contexte familial avez-vous grandi? Quelles sont les influences idéologiques que vous a transmises votre père?

 

TS: Mon père était avocat, il défendait les dissidents politiques. Deux fois, il a été emprisonné pour non-conformité politique dans la Yougoslavie communiste. Il était hostile au communisme et fortement imprégné du catholicisme paysan croate. Amnesty International  l'a adopté comme exemple, parce qu'en 1985 il était le prisonnier politique le plus âgé du bloc communiste est-européen. La Frankfurter Allgemeine Zeitung et le journal Die Welt se sont engagés pour lui. Nous vivions dans des conditions très modestes, nous n'avions ni télévision ni voiture. Mon père pensait que seuls les livres transmettaient une culture réelle. Nous subissions sans cesse toutes sortes de tracasseries; mon père a rapidement perdu le droit d'exercer sa profession. Pendant la guerre, il n'avait nullement appartenu au parti oustachiste et se montrait plutôt critique à l'égard du système politique de Pavelic. Mon père a simplement servi dans les unités de défense territoriale (Domobran). Il a aujourd'hui 83 ans et a publié ses mémoires en 1996 sous le titre Moji “inkriminari” zapisi (= Mes papiers “incriminés”), ce qui a suscité beaucoup d'intérêts dans le nouvel Etat croate.

 

Q.: Comment décririez-vous votre propre voie philosophique et idéologique?

 

TS: Pour être bref, je commencerais par dire que je suis un “réactionnaire de gauche” ou un “conservateur socialiste”. Je n'appartiens à aucune secte, à aucun parti théologien et idéologue. J'étais anti-communiste comme mon père mais, quand j'étais jeune, ma révolte personnelle a pris l'aspect du hippisme. Je me suis rendu à Amsterdam puis en Inde, à Srinagar au Cashemir et dans la ville de Goa. L'alternative au communisme, pour moi, était, à l'époque, la communauté hippy. Je m'opposais à toutes les formes d'établissement, quelle qu'en ait été la forme idéologique. J'ai cependant bien vite compris que le hippisme était une triste farce. Pour m'exprimer sans détours: “Même en tirant des joints, les hippies ont réussi à reproduire une sorte de hiérarchie accompagnée de toutes les hypocrisies possibles”. Cela vaut également pour le féminisme et le mouvement gay. Ma seule consolation a été la lecture des grands classiques de la littérature mondiale. Eux seuls sont les antidotes aux conformismes. Enfant, je lisais Tintin en français, Karl May en allemand, de même que le poète Nikolas Lenau. Adolescent, j'ai continué à lire des livres allemands, français et anglais. C'est armé de cette culture livresque et de mon expérience hippy que j'ai découvert la musique rock, notamment Krafwerk et Frank Zappa, qui était tout à la fois anarchiste, pornographe et non-conformiste. Zappa a été très important pour moi, car il m'a appris la puissance de la langue réelle contre les hypocrisies des établis. Avec lui, j'ai appris à maîtriser le slang américain, que j'utilise très souvent dans mes écrits, afin de tourner en dérision l'établissement libéral de gauche, mais cette fois avec l'ironie et le sarcasme du conservateur.

 

Q.: Pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos études?

 

TS: En Croatie, au temps de la domination communiste, j'ai étudié la littérature, les langues modernes et la littérature comparée. En 1977, j'avais achevé mes études. Sur les plans esthétiques et graphiques, je ne pouvais plus supporter le yougo-communisme, la langue de bois et l'économie népotiste des Balkans. Cela me faisait littéralement gerber. En 1980, j'ai saisi la première occasion venue pour sortir du pays en travaillant comme interprète dans une entreprise yougoslave en Algérie. En 1983, j'ai émigré aux Etats-Unis. Là-bas, je me suis aussitôt plongé dans la littérature non-conformiste. A cette époque, mes auteurs favoris étaient Kerouac et le Français Barbusse; j'ai aussi lu Sartre, non pas parce qu'il était homme de gauche, mais parce qu'il était un dénonciateur caustique, il démasquait les hypocrisies. Je n'oubliais pas Hermann Hesse qui me rappelait mon voyage en Inde.

 

Q.: Aux Etats-Unis, vous avez découvert le néo-conservatisme américain...

 

TS: Je dois d'abord vous préciser que le néo-conservatisme américain ne peut pas être mis sur pied d'égalité avec le néo-conservatisme européen. Ce sont des écoles de pensée différentes. Ensuite, la gauche, la droite, qu'est-ce que cela signifie encore aujourd'hui? Je préfère distinguer les gens entre conformistes et non-conformistes. Mais dans les milieux néo-conservateurs américains, l'homme qui m'a le plus impressionné est Thomas Molnar. C'était lui mon maître-à-penser, sans doute parce qu'il est Hongrois et appartient à l'espace culturel de l'ancienne monarchie austro-hongroise. A l'évidence, Molnar est un conservateur, mais il reste un homme capable de manier l'ironie avec beaucoup d'humour. C'est ainsi que Molnar va toujours à l'essentiel. Ensuite, le spécialiste américain de Hegel et de Schmitt, Paul Gottfried, a exercé sur moi une profonde influence. J'ai ensuite connu Paul Fleming, qui dirige le journal Chronicles of American Culture. Je fais partie de son équipe rédactionnelle depuis plus de dix ans. En dépit de mes excellents contacts avec les néo-conservateurs américains, je suis resté une âme rebelle; c'est pourquoi je me suis intensément proccupé de la nouvelle droite ou du néo-conservatisme en Europe, notamment de l'œuvre d'Armin Mohler avec sa vision du “réalisme héroïque”, des travaux de Caspar von Schrenck-Notzing et de son hostilité à la dictature de l'“opinion publique”, des écrits de Gerd-Klaus Kaltenbrunner avec sa fascination pour la beauté dans notre monde en ruines, pour de Benoist et la synthèse qu'il a offerte dans Vu de droite. J'ai lu les auteurs que recommandaient les nouvelles droites européennes. Mon livre sur la nouvelle droite est en fait le résultat de mon plongeon dans cet univers culturel. Cependant, le label “nouvelle droite” peut être trompeur: je préfère parler de ce mouvement culturel, du moins pour son volet français, de “grecisme”. Je partage là la vision de de Benoist quand il conçoit son propre mouvement comme une centrale de recherche dynamique visant le maintien de la vivacité de notre culture européenne. Inutile d'ajouter que j'ai apprécié Céline (avec son âpre argot parisien qui détruit préventivement toutes les certitudes établies), Benn et Cioran, avec leur style inimitable. Ils restent tous trois les auteurs favoris du rebelle, que je suis et resterai.

 

Q.: En 1993, vous êtes rentré en Croatie et en Europe. Comment jugez-vous la situation en Europe centrale et orientale?

 

TS: Le destin de la Croatie est étroitement lié à celui de l'Allemagne, quel que soit par ailleurs le régime politique qui règne dans ce pays. Comme le disait le fondateur suédois de la géopolitique, Rudolf Kjellén: “on ne peut échapper à sa détermination géopolitique”. D'autre part, Erich Voegelin nous a appris que l'on peut certes rejeter les religions politiques comme le fascisme ou le communisme, mais que l'on ne peut pas échapper au destin de sa patrie. Le destin allemand, celui d'être encerclé, est comparable au destin croate, même si la Croatie n'est qu'un petit pays de la Zwischeneuropa. Un facteur géographique lie les Allemands et les Croates: l'Adriatique. Le Reich et la Double-Monarchie austro-hongroise ont été des Etats stables tant qu'ils ont bénéficié d'une ouverture sur la Méditerranée par la côte adriatique. Les puissances occidentales ont toujours tenté de barrer la route de l'Adriatique aux puissances centre-européennes: Napoléon a verrouillé l'accès de l'Autriche à l'Adriatique en annexant directement la côte croate à la France. C'était les “départements illyriens”. Plus tard, les architectes du désordre de Versailles ont réussi à parfaire magistralement cette politique. L'Allemagne et l'Autriche ont perdu leur accès à la Méditerranée et la Croatie a perdu son hinterland centre-européen et sa souveraineté. C'est là la clef du drame croate au cours du XXième siècle.

 

Q.: La Croatie sera-t-elle en mesure de trancher le nœud gordien? Pourra-t-elle utiliser sa position entre la Mitteleuropa et la Méditerranée de façon optimale?

 

TS: Notre classe moyenne et notre intelligentsia ont été totalement liquidées par la répression titiste après 1945. D'un point de vue sociobiologique, ce fut la pire catastrophe pour le peuple croate. La circulation optimale et normale des élites n'a plus été possible. L'“homo sovieticus” et l'“homo balkanicus” ont dominé le devant de la scène, au détriment de l'“homo mitteleuropeus”.

 

Q.: Comment voyez-vous les relations futures entre l'Etat croate et ses voisins dans les Balkans?

 

TS: Tout mariage forcé échoue. Deux fois au cours de ce siècle, le mariage entre la Croatie et la Yougoslavie a échoué. Il vaudrait mieux vivre avec les Serbes, les Bosniaques, les Albanais et les Macédoniens en bons voisins qu'en mauvais époux qui ne cessent de se quereller. Tous les peuples de l'ancienne et de l'actuelle Yougoslavie devraient pouvoir disposer de leur Etat. L'expérience yougoslave est un exemple d'école qui montre clairement l'échec de toute multiculture imposée de force.

 

Q.: Que se passera-t-il après Tudjman?

 

TS: L'avantage principal de Tudjman a été de dénoncer totalement l'historiographie propagandiste du yougo-communisme. Pour une grande partie, il a contribué à guérir le peuple croate et surtout sa jeunesse des affres de la falsification de l'histoire.

 

Q.: Docteur Sunic, nous vous remercions de nous avoir accordé cet entretien.

(propos recueillis le 13 décembre 1997).

mardi, 24 novembre 2009

Le rapport politique-ésotérisme: entretien avec le Prof. G. Galli

magier.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

Le rapport politique-ésotérisme

Entretien avec le prof. Giorgio Galli

 

Pendant de nombreux siècles, les rois, les empereurs, les hommes politiques, toujours isolés de leurs contemporains, ont demandé les conseils de “mages”, d'astrologues, de voyants, d'alchimistes, avant de prendre des décisions importantes. Ces curieux conseillers étaient toujours présents, plus ou moins officiellement, dans l'orbite des hommes qui les consultaient fidèlement. La révolution scientifique nous a fait croire que le mystérieux filon occulte qui s'insère entre la politique et les pratiques ésotériques s'était dilué et avait disparu. Mieux vaut être prudent avant de l'affirmer péremptoirement! Même à notre époque pleinement sécularisée, marquée par un grand scepticisme, par l'athéisme généralisé, on peut repérer les liens obscurs unissant de mystérieuses congrégations aux hommes du pouvoir.

 

Giogio Galli, professeur d'histoire des doctrines politiques à l'Université de Milan, s'est préoccupé de ces thématiques, en écrivant des livres qui ont suscité la curiosité, l'intérêt mais aussi causé une certaine inquiétude. Nous lui avons demandé de nous expliquer dans quelle mesure l'ésotérisme influence les lieux du pouvoir dans le monde occidental, au seuil du troisième millénaire.

 

GG: «Les rapports entre l'ésotérisme et la politique n'ont plus de nos jours la continuité qu'ils avaient dans les temps passés, mais le phénomène n'est pas pour autant épuisé depuis l'avènement de la révolution scientifique. Il est moins apparent, mais il est néanmoins présent. En notre siècle qui s'achève, à côté des idéologies de masse qui ont favorisé l'avènement de l'homme nouveau, dominateur de la technique et de la science, forgé dans l'acier des fabriques et prêt à se jeter dans les tempêtes d'acier comme l'a décrit Ernst Jünger, nous voyons réémerger des cultures anciennes qui, bientôt, influeront les événements historiques. De la mystérieuse figure de Raspoutine installée à la cour des Tsars aux voyants consultés par Hitler pendant la guerre, on constate que les hommes à la tête de la politique mondiale contemporaine ont consulté des astrologues connus: autant de phénomènes qui contredisent l'apparent cynisme de notre société contemporaine et démontrent que l'homme, même s'il est puissant, a besoin de croire en quelque chose».

 

Q: Depuis plusieurs années, vous avez étudié les rapports entre la culture politique et les anciennes cultures ésotériques. En lisant vos livres consacrés à cette thématique, comme Hitler e il nazismo magico, La politica e i maghi, Alba magica,  des pans obscurs des époques historiques récentes se révèlent et j'ai noté que l'ésotérisme en politique intéresse davantage la droite que la gauche. Comment cela se fait-il?

 

GG: «Je crois plutôt que la présence de l'occultisme est transversale et se retrouve dans tous les camps politiques, même si divers penseurs auxquels la droite extrême fait constamment référence, comme Julius Evola ou Ernst Jünger, ou l'entourage des SS de Himmler, ou les savants nationaux-socialistes qui se préoccupaient du Graal, se sont profondément intéressés aux arts ésotériques. Les écrivains Pauwels et Bergier, auteurs d'un livre devenu rapidement très célèbre, Le matin des magiciens, ont donné une définition lapidaire du national-socialisme: «C'est Guénon plus les Panzerdivisionen». René Guénon fut un grand connaisseur des cultes traditionnels pré-chrétiens et est devenu une sorte de “phare illuminant” pour certains cercles de la droite dure en Europe. Ces phénomènes idéologico-politiques nous amènent à constater ce que vous venez d'évoquer dans votre question: l'ésotérisme semble être un engouement des droites dures, mais, à l'analyse, on doit constater qu'il est présent dans toute la sphère politique et n'est nullement un apanage exclusif des droites. La recherche de l'irrationnel est profondément ancrée dans l'âme humaine. La science ne peut pas expliquer aux hommes pourquoi ils sont nés, pourquoi ils tombent amoureux, pourquoi ils meurent, etc.».

 

Q.: D'aucuns prétendent que lorsque l'on ne croit plus en Dieu, on croit en tout le reste...

 

GG: «Nous nous trouvons face à une grande crise des religions institutionalisées de modèle occidental. Le christianisme s'est transformé, alors que le mystère nous accompagne tout au long de notre vie. Le sacré connait une éclipse, aussi parce que l'Eglise catholique ne réussit plus à donner une réponse convaincante aux questions que les hommes lui posent. L'illusion des Lumièresa réduit les mystères de l'univers, ce qui s'est avéré une erreur. En outre, dans le monde entier, on assiste à un retour aux peurs ataviques de la fin des temps, parce que nous approchons le passage d'un millénaire à un autre. Toutes ces situations sont le terrain de culture de doctrines plus ou moins ésotériques, présentes en filigrane dans la société moderne: de l'homéopathie au New Age, de la prolifération des cartomanciennes aux prédicateurs itinérants. Ce vaste champ, qui a été jusqu'ici ignoré des historiens et des sociologues, pourrait être défini comme celui de la “fantapolitologie”: il pourrait révéler des indices intéressants sur la société actuelle. C'est pour cette raison que j'étudie le phénomène avec une attention soutenue».

 

Q.: Les symboles utilisés par les mouvements politiques peuvent avoir une signification dépassant le message politique proprement dit et renouer avec des mythes très anciens. Que pensez-vous de la récupération par la Lega Nord de Bossi des traditions celtiques et lombardes-germaniques? Et du symbole de la Padanie, le “Soleil des Alpes”?

 

GG: «Il me semble que la Ligue, qui existe depuis bientôt quinze ans, a connu des évolutions diverses. Le concept de Padanie est très récent et s'est imposé dans une phase de l'évolution du mouvement, où l'aspect symbolique est devenu plus important, où l'on assiste à la réémergence graduelle de cultures alternatives, y compris dans le champ politique. Aujourd'hui, la Ligue cherche à créer une identité padanienne, mais qui ne pourra pas se profiler sur une base seulement économique, religieuse ou linguistique, vu que la Padanie n'est pas l'Ecosse. D'où le projet de fonder cette identité sur un symbole fort. Indubitablement, la symbolique padanienne semble jouir d'un certain succès: la couleur (le vert) et le symbole (le Soleil des Alpes) sont immédiatement et clairement perceptibles. Evidemment, nous ne sommes pas en mesure de jauger de l'efficacité d'un tel message à court terme. Je ne crois pas que la référence à la culture celtique soit adaptée à la Padanie actuelle. Les Celtes possédaient une vision du sacré fortement liée à la nature. Les prêtresses druidiques y jouaient un rôle important. Les croyances celtiques n'ont rien de commun avec la culture des habitants de la Padanie en 1997».

 

Q.: De quoi parlera votre prochain livre?

 

GG: «Il traitera d'un aspect social particulier de l'Italie contemporaine. Je vais me référer au premier livre que j'ai écrit et j'intitulerai mon nouvel ouvrage Italia e meriggio dei maghi  (= L'Italie et le midi des mages). Je parlerai des innombrables personnes qui se sont rapprochées des cultures restées jusqu'ici marginales dans la société post-industrielle. Je vais démontrer que ces personnes n'ont pas choisi cette voie parce qu'elles se défient de la science, ou qu'elles ne l'ont pas empruntée uniquement en raison d'une telle méfiance. En Italie, un quart de la population se tourne désormais vers la médecine alternative, croit aux horoscopes, visite les cartomanciennes ou se rapproche des philosophies orientales. L'Italie est en train de changer, sous bon nombre d'aspects».

(propos recueillis par Gianluca Savoini, parus dans La Padania, 22 oct. 1997; trad. frtanç.: Robert Steuckers).

dimanche, 22 novembre 2009

Sur le Japon: entretien avec le Prof. G. Fino

sol_levante.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1998

Sur le Japon

Entretien avec le Prof. Giuseppe Fino

 

Aujourd’hui, la modernité a certes récupéré le Japon et l’a enveloppé dans sa grisaille, mais de temps en temps, un trait de lumière perce l’obscurité, nous rappelant un passé assez récent qui n’est pas encore complètement oublié. Le Professeur Giuseppe Fino vit au Japon. Il est l’auteur d’une étude sur Yukio Mishima (Mishima et la restauration de la culture intégrale). Nous lui avons posé quelques questions sur les “manifestations lumineuses qui rappellent la chaleur incandescente du Soleil Levant.

 

Q.: Il y a quelques temps, les journaux télévisés italiens ont évoqué l’épisode de ce soldat japonais qui considérait être encore en guerre, en dépit de la défaite de 1945. Que signifie le comportement de ce soldat pour les Japonais d’aujourd’hui?

 

R.: Au Japon aussi, les journaux télévisés ont rendu compte de la disparition de Yokoi Shoichi, le soldat japonais qui avait continué à “combattre” dans la jungle de l’Ile de Guam après 1945. Pour les Japonais de “gauche”, nés et élevés dans le climat pacifiste et démocratique de l’après-guerre, le comportement de Yokoi est difficilement compréhensible et acceptable: pour eux, c’est une manifestation du fanatisme qu’il faut taire ou dont il faut avoir honte. Pour les Japonais nés avant la guerre ou pour ceux qui ont encore la fibre patriotique, le comportement de Yokoi est exemplaire et héroïque. Pour les plus jeunes générations, en revanche, le nom de ce soldat ne dit hélas plus rien. Je voudrais ajouter une considération personnelle. Plus que Yokoi Shoichi, qui, en quelque sorte avait fini par s’accomoder  au climat de l’après-guerre, je voudrais rendre hommage à l’un de ses camarades, Onada Hiroo, qui avait préféré abandonner le Japon consumériste et américanisé pour aller s’installer en Amérique du Sud et y “élever des veaux et des lapins”.

 

Q.: Dans le livre Tenchû (= Punition du ciel), paru aux éditions Sannô-kai, on décrit les événements qui ont conduit à la révolte des officiers de 1936. Existe-t-il aujourd’hui au Japon des forces politiques qui se souviennent de ces événements, de ces hommes et des idéaux de cette époque?

 

R.: Non, il n’y a absolument aucune réminiscence valable. L’insurrection des “Jeunes Officiers” du 26 février 1936 (Ni niroku jiken)  n’est plus qu’un sujet de romans, d’essais et de films un peu nostalgiques. Les familles des “révoltés”, qui ont été exécutés, ont constitué des associations pour les réhabiliter mais aucun groupe politique ne se réfère plus à cette expérience, qualifiée de “pure néo-romantisme fasciste”. Enfin la droite japonaise extra-parlementaire considère que cet épisode est déshonorant et “hérétique”, car il n’a pas été approuvé par l’Empereur. Cela en dit long sur le conformisme qui règne au japon. Mishima est le seul à avoir donné en exemple le sacrifice de ces “Jeunes Officiers” et à les avoir réhabilité dans l’après-guerre.

 

Q.: Mishima est l’auteur japonais le plus traduit en Europe, mais la plus gran­de partie de ses lecteurs se contente de l’aspect narratif de ses œu­vres. Prof. Fino, vous êtes le seul à avoir reconstitué les racines culturelles de l’œuvre de Mishima dans Mishima et la restauration de la culture inté­grale;  pouvez-vous nous synthétiser les points essentiels de sa vision du monde?

 

R.: Les racines culturelles de Mishima sont nombreuses et complexes. Dans sa jeunesse, il a fait partie du mouvement néo-romantique de Yasuda Yo­juro et du poète Ito Shizuo, mais il a surtout été influencé par Hasuda Zen­mei, le théoricien de la “belle mort”. Dans l’après-guerre, après une pério­de de réflexion et d’activité littéraire un peu “intimiste” et “autobiogra­phique”, Mishima s’est mis à redécouvrir et réinterpréter la culture japo­naise (Nipponjin-ron; = Débats sur les Japonais). Dans son essai Défense de la culture (1969), Mishima découvre trois caractéristiques de cette culture japonaise, à ses yeux essentielles: la cyclicité, la totalité et la subjectivité. Pour Mishima, l’action, elle aussi, est culture. La forme la plus élevée de la culture est le bunburyodo, l’union de l’art et de l’action. Mishima retrouve aussi, dans la foulée, la philosophie activiste et intuitive du Wang Yang-ming (en japonais: Yomeigaku), le bushido intégral de l’Hagakure (Cf. Il pazzo morire, ed. Sannô-kai), le traditionalisme ou l’anti-modernisme du Shinpuren (La Ligue du Vent Divin) et l’idéalisme impérialiste et romantique des “Jeunes Officiers” du Ni niroku jiken. Au centre de la pensée de Mishima demeure toutefois l’Empereur comme concept culturel suprême, corollaire de son opposition politique contre-révolutionnaire et de son implacable critique de l’intellectualisme pacifiste et démocratique de l’après-guerre.

 

Q.: En Occident, c’est devenu une habitude de pratiquer des disciplines physiques extrême-orientales, tantôt comme pratiques sportives tantôt comme disciplines martiales. Cependant, je doute qu’il soit resté beaucoup d’éléments originaux dans ces disciplines telles qu’elles sont pratiquées en Occident. Qu’en est-il au Japon?

 

R.: La situation au Japon n’est guère différente. Surtout pour le judo et le karaté, il devient de plus en plus difficile de trouver des palestres donnant tout son poids à l’aspect “spirituel” de ces disciplines qui ne sont pas seulement sportives et agonales. La situation est légèrement meilleure dans les palestres de kendo et d’aikido. Elle est satisfaisante dans ceux qui s’adonnent au kyudo (tir à l’arc) et au i-ai (discipline de l’épée nue). Telle est du moins mon impression. Je dois vous confesser que je n’ai jamais fréquenté que les salles de judo...

 

Q.: Est-il possible de recevoir du Japon ultra-technologique d’aujourd’hui des enseignements valables pour l’Homme de la Tradition?

 

R.: Oui, il existe des possibilités, mais elles sont limitées à quelques monastères Zen et à quelques palestres d’arts martiaux, justement ceux qui sont influencés par la pensée Zen. Il faudrait une bonne dose de patience et de chance avant de trouver le Maître juste et le milieu adapté. Pour ceux qui voudraient éventuellement pratiquer le Zen, je conseille un engagement inconditionnel à long terme, si possible auprès des monastères de l’Ecole ou de l’Ordre Rinzai.

(propos parus dans la revue Margini, n°21/juin 1998; adresse: Margini, Libreria Ar, CP 53, Salerno).