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mercredi, 13 mai 2015

Réflexions générales sur le concept d’ « Eurasie »

 

 
 
Robert Steuckers :
Réflexions générales sur le concept d’ « Eurasie »
 
 
Conférence préparée pour une rencontre eurasiste à Marseille, le 12 juillet 2014, présentée lors des « Rencontres eurasistes » de Bruxelles, le 18 octobre 2014
 
Quand on parle d’eurasisme actuellement, on a tendance à y voir une sorte d’ersatz des idéologies défuntes, qui devrait incessamment en prendre le relais, comme le voulaient par ailleurs les eurasistes des années 20 et 30, dont les démarches ont été analysées avec minutie par le Professeur Marlène Laruelle (1). Celle-ci démontre le caractère éminemment russe de la démarche eurasiste des années 20 et 30. Par conséquent, si l’Europe, le sous-continent indien, la Chine et d’autres puissances d’Asie centrale ou d’Asie orientale adoptent une stratégie « eurasienne » ou « eurasiste », le concept d’un eurasisme nouveau, conforme aux aspirations de l’Europe ou de ces autres puissances petites ou grandes, doit certes garder son noyau théorique russe, vu la qualité des arguments développés par les eurasistes de l’émigration russe de Berlin, Prague, Bruxelles et Paris entre 1920 et 1940 mais il doit aussi être élargi pour en faire la pratique naturelle des puissances du BRICS et donner corps à la géopolitique pragmatique suggérée à tous par le président kazakh Nazarbaïev, qui assure aujourd’hui les destinées de l’Etat le plus central de la masse continentale eurasienne, du « Heartland » tel qu’il fut théorisé par Sir Halford John Mackinder en 1904. 
 
Les Chinois et les Japonais (la filière géopolitique « mandchoue » de l’école dite de Tokyo, inspirée par les thèses grandes-continentales de Karl Haushofer) apporteront certainement leur pierre au nouvel édifice et la tâche de futures « rencontres eurasistes » pourraient fort bien être d’illustrer et de commenter des travaux réalisés à l’autre extrémité de la masse continentale eurasienne car la raison pragmatique nous induit tout naturellement à penser que l’avenir de l’Extrême-Orient aurait bien sûr tout à gagner d’un apaisement des tensions récentes entre la Chine et le Japon et à une réactivation des projets d’une grande « sphère de coprospérité est-asiatique » (Daitoa Kyoeiken), théorisés immédiatement avant la seconde guerre mondiale par le Prince Konoe, par le ministre japonais des affaires étrangères Matsuoka Yosuke et par le géopolitologue Sato Hiroshi (qui parlait également d’une « sphère de coprospérité des mers du Sud ») (2). Sato Hiroshi se réclamait de Haushofer dans la mesure où celui-ci estimait dans ses écrits que le Japon avait pour mission historique de contrôler les espaces de la « zone des moussons », dont la géopolitique américaine d’aujourd’hui reparle d’ailleurs avec grande précision, formulant un projet de contrôle serré de cette zone au départ de bases situées dans l’Océan Indien pour que Washington hérite définitivement, ou du moins durablement, des atouts que possédait l’Empire britannique jusqu’en 1947, année où les deux puissances rivales du sous-continent indien ont acquis leur indépendance (3).
 
De Krymski a Beckwith
Pour nous Européens de l’Extrême-Occident de la masse continentale eurasienne, une théorie eurasiste n’est possible qu’à la condition d’intégrer dans toute démarche politique ou diplomatique future et « eurasienne » le fait archéologique et linguistique indo-européen, comme l’admettait aussi un historien russe pré-eurasiste mais indo-européanisant du 19ème siècle, Agafangel Efrimovitch Krymski (1871-1942). En effet, avant la ruée des cosaques du Tsar vers le Pacifique, à partir de la fin du 16ème siècle, les peuples européens n’ont connu de projection vers le centre de la masse eurasienne qu’à l’époque de la conquête de ces vastes espaces steppiques par des peuples cavaliers proto-iraniens, comme le démontre avec une remarquable érudition le Professeur Christopher I. Beckwith (4) qui voit l’idéal politico-religieux le plus emblématique des peuples d’Eurasie formulé implicitement dès l’époque axiale de cette première migration vers le centre de l’Asie, vers les hauts plateaux iraniens puis vers la Chine (au-delà de la Dzoungarie), migration portée par des guerriers montés sur chars, aventureux, regroupés en « comitatus » autour d’un « prince » énergique, fondateur de structures politiques solides, figure charismatique qu’il faut imiter et reproduire sans cesse pour la gloire du peuple ou de la lignée dont on est issu. Pour Beckwith, l’idée eurasienne, l’idée seule capable de donner vigueur aux « empires de la Route de la soie » et des périphéries que Mackinder nommaient les « rimlands », est directement issue de ces premières vagues de la diaspora indo-européenne en Asie centrale, en Iran (y compris dans le royaume moyen-oriental de Mitanni) et au-delà de l’Indus dans le sous-continent indien, sous l’impulsion de la caste des kshatryas.
 
Pour Beckwith, ce modèle est certes d’origine européenne, se manifeste pour la première fois chez ces Proto-Iraniens, mais il a été repris successivement par tous les fondateurs d’empires de cette très vaste région, qu’ils aient été européens, huns, turcs, mongols, mandchous, etc. Tout théoricien ouest-européen d’un eurasisme nouveau doit donc intégrer ce fait protohistorique de la diaspora indo-européenne (ou proto-iranienne) dans ses réflexions (géo)-politiques, savoir qu’elle a un droit d’aînesse sur le plan axiologique, les ressacs qui ont suivi cette première expansion proto-iranienne, à partir des invasions hunniques ayant acculé l’Europe dans le cul-de-sac de la péninsule européenne, entre Mer Noire et Atlantique (res nullius à l’époque).
 
L’Europe-cul-de-sac
Aucune perspective géopolitique valable ne peut vouloir ce statut médiocre d’isolé en cul-de-sac, où semblent aujourd’hui se complaire les eurocrates, animés par des idéologies boiteuses, amnésiques, méprisables qui font dire à l’écrivain russe contemporain Edouard Limonov que l’Europe occidentale est devenue un « Grand Hospice ». Déjà au 12ème siècle, l’érudit anglais Guillaume de Malmesbury justifiait les Croisades non pas par le désir pathologique de faire la guerre à ses voisins mais de sortir de ce cul-de-sac pour récupérer les ports d’accès aux routes de la soie, pour ne pas mariner dans un isolement qui conduit à l’implosion, ce que confirme par ailleurs la grande spécialiste allemande contemporaine de l’histoire d’Arménie, Tessa Hofmann (5), quand elle évoque les royaumes arméniens de Cilicie aux 13ème et 14ème siècles. Après avoir reçu l’amical aval du grand Empereur Frédéric I Barberousse, ceux-ci branchaient, via les éléments croisés qui structuraient et protégeaient la région, l’Europe occidentale du moyen-âge sur le commerce d’Asie, première tentative de rompre l’encerclement, l’enclavement, qui étouffait l’Europe en occupant durablement la région d’Antioche, en tenant à distance les éléments seldjouks qui prétendaient couper les communications. Les Arméniens du « Comté d’Edesse » ont initié les caravaniers italiens aux routes de la Soie : c’est au départ des ports ciliciens, aux mains des Arméniens et des Croisés, que Nicola et Marco Polo entreprendront leurs voyages vers les immensités asiatiques ou vers la Cour du Grand Khan.
 
« Shatterbelt » et « gateway regions »
 
Quand on se complait dans l’idée médiocre d’une « Europe-cul-de-sac », on pose les limites orientales de l’Europe, limites purement théoriques, totalement dépourvues de pertinence, sur les Monts Oural alors que le sommet le plus élevé de cette chaine de collines est de 1600 m, exactement comme le Chasseral dans le Jura suisse. Entre l’Europe proprement dite, celle de l’espace civilisationnel médiéval, et les autres espaces impériaux d’Asie, de Perse et d’Inde, se situe un « shatterbelt » de zones mixtes, de zones de transit que le géopolitologue américain contemporain Saul B. Cohen (6) nomme également les « gateway regions » ou les « gateway states » : la Cilicie arménienne du temps des Croisades était une porte d’accès au « gateway » géant qu’est la Route de la soie ; l’Ukraine d’aujourd’hui est une autre « gateway region » et c’est, par la force des choses, une zone de fortes turbulences géopolitiques, tout comme le Nord de la Syrie et tout l’espace bouleversé par les forces de l’EIIL, un espace qui est bel et bien le correspondant actuel et l’extension vers la Perse de la Cilicie des 13 et 14ème siècles, mais un espace cette fois bouleversé de fond en comble, au point de ne plus pouvoir jouer pleinement son rôle de « gateway ». Début 2015, les observateurs les plus pertinents des effervescences en gestation pronostiquent d’ores et déjà de nouvelles zones de turbulence en Moldavie et au Turkménistan voire un affaiblissement programmé de l’Europe par une variante nouvelle des  « révolutions de couleur », sous la forme d’une confrontation entre populations autochtones (opérations PEGIDA en Allemagne et « Je suis Charlie » en France) et immigrés musulmans qui grèvera dangereusement les budgets des Etats et fragiliseront l’euro, suite à la crise grecque et à la victoire probable de l’extrême-gauche hellénique.
 
Cette brûlante actualité doit nous obliger à signaler les débuts d’une constante de l’histoire : les cavaliers proto-iraniens de la protohistoire, et leurs successeurs scythes ou alains, ont lié le vaste « shatterbelt » entre l’Europe et l’Inde, entre l’Europe et la Chine. Cette réalisation n’a suscité que nostalgies : l’Empire romain voulait rétablir la liaison avec l’Inde et la Chine, on le sait désormais comme le prouve l’importance de certains ports antiques en Mer Rouge, le site caravanier transarabique de Pétra en Jordanie ou les campagnes des empereurs romains en Mésopotamie. L’histoire des vagues successives de peuples cavaliers indo-européens vers l’Inde et la Chine devrait donc relever d’un savoir indispensable, digne complément des anciennes « humanités » (sabotées par des politiciens veules et criminels), nécessaire noyau d’une future paedia renaissanciste, dont les jalons ont été posés par Iaroslav Lebedynsky, auteur de monographies précises sur chacun des peuples cavaliers de la grande « gateway region » steppique entre Europe et Chine.
 
Attila pénètre dans la trouée pannonienne
 
Les momies du Tarim (7), comme les démonstrations du Prof. Christopher I. Beckwith, et les analyses grammaticales et sémantiques de la langue tokharienne, parlée par les ressortissants de ce peuple dont proviennent les momies, prouvent l’influence prépondérante de ces peuples cavaliers, charistes et tisserands sur le développement initial de la civilisation chinoise. Ces peuples, descendants des Proto-Iraniens, ainsi que les Tokhariens et apparentés, garderont une maîtrise complète de l’espace steppique eurasien dont la qualité stratégique est celle d’un « shatterbelt » selon Cohen, jusqu’en + /- 200 av. J. C. A ce moment-là une confédération de peuples nomades hunniques, qui reprend à son compte le haut degré d’organisation sociale des Proto-Iraniens et de leurs descendants, que l’on peut dire inspirés par les valeurs insignes et fondatrices du proto-zoroastrisme, provoque, par ses coups de butoir, le reflux des Indo-Européens en Asie centrale. Leurs successeurs huns se heurteront au barrage des empires : la Chine tient le coup, Rome s’effondre dès que les cavaliers du chef Attila pénètrent dans la trouée pannonienne, le territoire de l’actuelle Hongrie, point central et névralgique du dispositif impérial romain sur l’axe fluvial danubien. Le choc survenu en Pannonie provoque l’effondrement de l’Empire romain, y compris en Méditerranée. Celle-ci, bien que d’importance cardinale, ne suffisait pas pour en conserver la cohérence et l’unité.
 
 
Les tenants d’une vision scolaire et étriquée de l’histoire antique de Rome considèrent que celle-ci est une civilisation exclusivement « méditerranéenne », axée sur ce que Mussolini, pétri de nostalgie romaine, appelait la « Mare Nostrum ». Rome, on l’oublie trop souvent, était également une civilisation rhénane-mosellane autour de Trêves et de Cologne. Elle se déployait également le long de l’axe danubien. Donc le long de deux voies de circulation posées sur un axe Ouest-Est, la Méditerranée et le Danube, lequel était toutefois partiellement interrompu à hauteur des « portes de fer » (sur l’actuelle frontière serbo-roumaine) ou « cataractes de l’Ister ». Tout empire, qu’il soit perse, romain ou chinois, est aussi un réseau de communications : Rome, et par conséquence, l’Europe, reposait dans l’antiquité 1) sur les voies maritimes méditerranéennes dès que Caïus Julius reçoit le titre de « Caesar » pour avoir vaincu les pirates de la Méditerranée (son premier triomphe) ; 2) sur les voies de communications terrestres que furent les routes romaines ; 3) sur les voies fluviales au départ de la rive occidentale du Rhin et de la rive méridionale du Danube. L’impérialité romaine en Europe est donc la maîtrise de ces trois modes de communications que la restauration impériale pippinide/carolingienne voudra remettre en état de fonctionnement après la déchéance des derniers Mérovingiens : l’effondrement du Bas Empire avait été suivi d’une désagrégation du système des routes romaines, si bien que seules les communications par voies d’eau permettaient encore le transport de masse.
 
Le partage de Verdun de 843
 
On ne répétera jamais assez que le fameux partage de Verdun de 843 partage en fait des systèmes fluviaux entre les héritiers du fils de Charlemagne : à la Francie occidentale, les bassins de la Somme, de la Seine, de la Loire et de la Garonne, soit ce que les historiens et cartographes appellent désormais l’ « espace gallique » ; à la Lotharingie centrale, dévolue à l’aîné Lothaire et détentrice de la titulature impériale, les bassins de la Meuse, du Rhin, du Rhône et du Pô ; à la Francie orientale, dévolue au jeune et vigoureux Louis, les bassins fluviaux parallèles de la grande plaine nord-européenne et le devoir de reconquérir le Danube sur toute sa longueur, jusqu’à la Mer Noire, accès à la mythique Colchide des Argonautes et porte de la Perse. Louis établit ses capitales à Francfort sur le Main, entre la Rhénanie urbanisée et le reste de son royaume, et à Ratisbonne (Regensburg) sur le Danube, afin, justement, de se projeter vers l’aval du grand fleuve central. Ce partage de Verdun était sage et la mort prématurée de Lothaire donnera au jeune Louis la titulature impériale, après quelques vicissitudes guerrières, soit le double « espace lotharingien et germanique », au détriment de Charles le Chauve, roi de la Francie occidentale, dont les successeurs n’auront de cesse de vouloir usurper l’héritage de Lothaire, en le grignotant pendant près de dix siècles, arrêtant sa fringale territoriale par l’annexion illégitime de la Savoie en 1861 et ne laissant comme lambeaux intacts qu’une Belgique écervelée et amnésique, un Luxembourg comme coffre-fort, une Hollande isolée au nord du Rhin et de la Meuse et aliénée mentalement par un calvinisme anti-impérial (bien décrit par le philosophe allemand Christoph Steding), une Italie padanienne prospère mais liée à l’Adriatique et à la zone alpine, une Suisse, dont le territoire romand s’étend entre l’arrière-pays jurassien au sud de Bâle et Genève, là où les fleuves commencent seulement à être navigables, rendant cette Suisse au-delà de Bâle et de Genève inintéressante, contrairement au réseau routier de la Franche-Comté, pour les impérialistes galliques ou ouest-franciens, à partir de Philippe le Bel et de Louis XI. Les querelles innombrables et incessantes qui ont suivi la mort du malheureux Lothaire vont donc déterminer pendant plus de mille ans l’histoire de la péninsule occidentale de la masse territoriale eurasienne et l’empêcher de faire le grand bon en avant pour récupérer en Asie centrale son droit d’aînesse, héritage des « comitati » rassemblés autour de princes cavaliers énergiques, une quinzaine de siècles avant notre ère. 
 
 
Toynbee et la Bithynie
 
L’objectif des sages qui ont présidé à l’élaboration du Traité de Verdun était donc de laisser le bassin danubien au plus jeune et au plus vigoureux des héritiers du fils de Charlemagne, pour qu’il puisse faire face aux Hongrois et réorganiser le Danube jusqu’à son delta, afin d’y restaurer une impérialité « romaine », portée cette fois par les Francs et/ou les Germains. Le but était d’atteindre la Mer Noire et de renouer avec un système de communications permettant de commercer avec les Byzantins et les Perses voire avec tous les peuples qui vivaient au-delà de cette Perse mythique, de cet Orient qui avait été « indo-européen » avant d’être récemment islamisé. La Mer Noire, mer intérieure, est, pour les Européens de l’Ouest, la porte vers l’Eurasie, tout comme elle est, pour les Russes, un accès potentiel à la Méditerranée orientale, nécessité que postule leur volonté d’être tout à la fois les héritiers de la civilisation grecque (qui fut un Axe nord-sud, pontique/est-méditerranéen, dont le Bosphore était un goulot d’étranglement en position centrale) et de l’impérialité byzantine. Arnold Toynbee, qui a animé le « Royal Institute of International Affairs », instance compilant une immense documentation et téléguidant l’action des diplomates et stratégistes britanniques, était byzantinologue : pour lui, la civilisation grecque, posée comme matrice de la civilisation européenne (ce qui n’est que partiellement vrai à nos yeux !), est une civilisation qui lie l’espace aride du bout de la péninsule balkanique baignée par l’Egée mais tire ses substances vitales, son blé, son bois, de la maîtrise de l’espace pontique. Il n’y a pas de civilisation grecque sans les ressources de la Crimée, qui passent par le Bosphore. Autour de ce Bosphore, plus particulièrement en Bithynie, écrit Toynbee, se trouve un territoire qui, si on le domine durablement, donne tout à la fois la clef de la Méditerranée, l’accès aux routes de la soie ou à la « gateway region » de Scythie (l’actuelle Ukraine !), permet aussi l’accès à la Perse par la Colchide transcaucasienne, etc. Rome hérite de cette puissance en conquérant la Bithynie : elle sera, immédiatement après César, maîtresse du Danube, de la Crimée et de l’espace pontique et entrera en conflit avec l’Empire perse qui, lui, cherchera à se projeter vers la Méditerranée orientale : Byzance, puis l’Empire ottoman, hériteront de ce clivage Rome/Perse. Et l’adversaire ottoman de l’Europe entre le 14ème et le 18ème siècle a acquis sa puissance et sa force d’expansion immédiatement après avoir consolidé ses positions en Bithynie, ce qui lui a permis de conquérir l’Anatolie occidentale et une bonne partie des Balkans, avant même la chute de Constantinople. 
 

 

Charlemagne, incarnation d’une impérialité devenue romano-germanique, ne s’opposait nullement à Byzance, à l’Empire romain d’Orient, dirigé par le Basileus : le modèle qui le fascine, et qu’il adoptera pour embellir sa capitale d’Aix-la-Chapelle, sera précisément byzantin. Le Dom d’Aix-la-Chapelle, édifié sur un plan octogonal, reflète une splendeur byzantine, surtout depuis sa restauration récente. Charlemagne respectait donc le droit d’aînesse de l’Empire romain d’Orient et visait à lier territorialement son Empire franc à celui du Basileus. Pour y parvenir, il fallait dégager la trouée pannonienne au niveau de la puszta hongroise et rétablir le contact avec les Byzantins à hauteur des « portes de fer ». Pour réaliser un tel projet impérial, il fallait creuser une voie d’eau entre le Main et le Danube, entre le bassin rhénan dont les eaux se jettent dans la Mer du Nord et le bassin danubien, dont les eaux coulent vers la Mer Noire. En 793, Charlemagne ordonne le creusement d’un canal, que l’on appellera la fosse caroline ou fossa carolina ou Karlsgraben. Elle servira pendant un temps assez long au cours du haut moyen-âge, avant de s’enliser et de décourager les marchands vu la difficulté que constituait le système des biefs élémentaires de l’époque, mais elle s’avèrera utile dans les opérations logistiques, d’abord pour mettre un terme définitif à la domination des Avars sous Charlemagne, ensuite pour repousser les envahisseurs magyars, définitivement battus par Othon I en 955 à Lechfeld, permettant l’établissement définitif du Saint Empire Romain de la Nation germanique. Il y a à nouveau impérialité en Europe, à partir de la victoire d’Othon, parce qu’il n’y a plus de blocage hostile, porté par un élément quelconque niant ou ignorant l’héritage romain, en Pannonie.
 
Restaurer l’Empire par la maîtrise de la Pannonie
L’objectif stratégique de Charlemagne à Othon I a bel et bien été la maîtrise du Danube et de la plaine pannonienne car, dès que ce plan se réalise, il y a alors retour automatique à une impérialité à la romaine puisque Rome entretenait de nombreuses légions en Hongrie actuelle, dont les bains chauds de Budapest sont un souvenir remarquable, au même titre que ceux d’Aix-la-Chapelle. Autre preuve de restauration impériale : l’impérialité romaine était l’alliance de la sédentarité latine et de la mobilité cavalière (et eurasienne !) des foederati iazyges et roxolans (étudiés par Lebedynsky), dont les humanités un peu figées de nos curricula scolaires d’antan ne nous parlaient pas encore. Rome en effet, comme Athènes jadis avec sa police scythe, tablait sur le concours de cavaliers aguerris issus de la steppe : on les appelle surtout des Sarmates dans les sources classiques mais les unités qui servaient en Pannonie portaient les noms tribaux de Iazyges et de Roxolans. Ces cavaliers expérimentés étaient chargés de protéger cette trouée pannonienne contre les attaques des Daces ou des tribus germaniques comme les Quades ou les Marcomans. 
 
Par la conversion des Hongrois, la Pannonie, après la victoire d’Othon I, retrouve une garnison permanente de cavaliers de la steppe, de cavaliers eurasiens, qui promettent fidélité à l’Europe (à la « chrétienté » dans le langage médiéval), de toujours se ranger du côté de celle-ci et d’interdire à toute invasion venue de la steppe de bouleverser encore l’ordre néo-romain. Les Hongrois ont toujours tenu cette promesse, en laissant passer les Croisés, en luttant héroïquement contre les Turcs aux 15ème et 16ème siècles, en se sacrifiant deux fois dans les rues de Budapest en 1945 (pour protéger Vienne) et en 1956. Aujourd’hui toutefois, le parti nationaliste hongrois Jobbik, dégoûté sans nul doute par la veulerie et l’impéritie criminelle des cliques eurocratiques (qui cultivent avec une obstination pathologique le déni de toute romanité donc de toute européanité vraie et héritée), parie pour un eurasisme pantouranien, renouant avec quelques antécédents : les idées pantouraniennes des transfuges hongrois, devenus généraux dans l’armée ottomane, après la révolte de 1847-1848 matée par les Autrichiens ; les visions du turcologue judéo-hongrois Armin Vambéry, théoricien d’un pantouranisme dont les Hongrois de l’Empire des Habsbourgs seraient partie prenante, tout comme pour son homologue et coreligionnaire judéo-lorrain David Léon Cahun ; l’idéologie pantouranienne du géographe Pal Teleki (1879-1941, suicidé), futur ministre des affaires étrangères et premier ministre anglophile du gouvernement Horthy avant la deuxième guerre mondiale. Il semble que ce pantouranisme hongrois d’avant le néo-nationalisme actuel du mouvement Jobbik ait été une manœuvre occidentale, franco-britannique, pour disloquer l’Empire des Habsbourgs, ruiner tout nouveau tandem austro-hongrois ou germano-hongrois et balkaniser la Mitteleuropa, comme l’a fait le Traité de Versailles de 1919.  
 
 
Des Sicambres à Parzival
 
L’impérialité romaine puis l’impérialité othonienne recèlent donc toutes deux une dimension eurasienne, non retenues par les humanités édulcorées et figées ad usum Delphini ou par certains eurasistes russes des années 20 et 30 qui fustigeaient la civilisation « romano-germanique » en la décrétant imperméable à tout dynamisme d’origine eurasienne ou fondamentalement étrangère à la civilisation byzantine. Les éléments scythes puis sarmates ont été déterminants dans le façonnage du mental germanique, dépositaire de la titulature impériale, comme le note bien le Prof. Beckwith. Par ailleurs, de nouvelles études tendent à prouver que les éléments sicambres de la confédération franque, originaires de Cologne et de sa région et dont sont issus les Mérovingiens, avaient des origines sarmates (8), tout comme les mythes arthuriens, faussement dits « celtiques », en Britannia. Les idéaux sarmates, ceux du « comitatus » proto-iranien selon Beckwith, serviront, tout comme le « fottowat » musulman imprégné de traditions persanes (Saladin !) et non arabes, à faire éclore, dans le sillage des Croisades, le noyau dur de la civilisation européenne médiévale, c’est-à-dire les ordres de chevalerie, exprimée notamment par le mythe de Parzival (Perceval chez Chrétien de Troyes) dans l’œuvre de Wolfram von Eschenbach, qui s’inspire des mythes arthuriens, considérés aujourd’hui comme relevant du sarmatisme romain, et les introduit en Germanie continentale. Perceval est le frère en esprit du Perse Feirefiz, dont la mère est de « peau brune ». Le mythe forgé par Wolfram von Eschenbach vise à ramener au souvenir des chevaliers la tradition cavalière, chevaleresque du « comitatus » proto-iranien (et eurasien) partagée par l’impérialité germanique et l’impérialité kurde ou persane, tout en constatant une différenciation d’ordre racial. 
 
Revenons à l’époque carolingienne. Si l’objectif de Charlemagne et de ses successeurs compétents était de restaurer la communication sur le Danube, de déboucher en Mer Noire et de relier l’Ouest et l’Est à hauteur du Bosphore byzantin, à la même époque, des éléments européens non romanisés, très éloignés du monde romain et méditerranéen, entreprennent une percée plus à l’Est : les Vikings scandinaves et les Varègues suédois, dont la plaque tournante stratégique et commerciale a été le port de Haithabu, atteignent la Volga et le comptoir de Bolgar et restaurent de la sorte un commerce eurasien en prise tout à la fois sur la Volga qui mène à la Caspienne et de la Caspienne à la Perse et de la Perse à Bagdad et sur les routes de la Soie menant vers le centre de la masse continentale eurasienne et vers la Chine.  
 
 
Limes danubien et axe gothique
 
Rome était certes, depuis l’issue des guerres puniques, une puissance méditerranéenne mais elle était présente aussi sur la rive occidentale du Rhin, avec des villes comme Trêves, Cologne, Bonn, Mayence, Arlon, Tongres, Metz, Strasbourg, et sur la rive méridionale du Danube avec Castra Regina (Regensburg/Ratisbonne), Vindobona (Vienne), Aquincum (Budapest) et Colonia Singidunum (Belgrade). Plus loin, au-delà des « portes de fer », en province de Moesia Inferior, avec Novae (Svishtov), Durostorum (Silistra), etc. Jean de Brem, dans son Testament d’un Européen, d’inspiration romanisante et byzantinisante (les eurasistes russes les plus sourcilleux ne pourront nous reprocher cette lecture…), rappelle l’évacuation des régions aujourd’hui bavaroises et le remplacement de la population celte romanisée ou de souche italienne par les nouveaux venus, les Bajuwaren germaniques. Face à ce limes du delta hollandais jusqu’à celui du Danube, se regroupent une masse d’Européens non romanisés, les Germains, principalement, et leurs alliés, issus de peuples divers. Ils occupent la rive orientale du Rhin et la rive septentrionale du Danube et, surtout sous l’impulsion des Goths, maîtrisent, à l’époque du Bas-Empire ce qu’il conviendra ultérieurement d’appeler l’ « axe gothique », soit la ligne qui va de la Mer Baltique à la Mer Noire, jusqu’à la Volga. Il s’agit de l’extension d’une culture dite de Wielbark, surgie sur les rives de la Baltique, à l’embouchure de la Vistule, suite à une occupation de populations venues de l’actuelle Gothie suédoise et de l’île de Gotland, pour s’étendre au 3ème siècle jusqu’au delta du Danube et jusqu’à l’embouchure du Dniestr, sous le nom de culture de Tcherniakov. 

 

 
Portées par les Goths, préalablement issus de la Suède actuelle, les cultures de Wielbark et de Tcherniakov contribuent au « membrage » territorial de l’Europe en dehors de l’orbe romaine. La juxtaposition conflictuelle de ces deux blocs, dont le premier est avéré, ancré dans l’histoire antique, et l’autre en gestation, va créer au-delà de l’espace romanisé un barrage gothique dans le « shatterbelt » ukrainien, sarmatisé après avoir été dominé par les Scythes, et une sarmatisation partielle de l’élément goth, créant, de ce fait, une fusion germano-eurasienne féconde et relativement homogène, qui ne sera que de brève durée et n’aura pas le temps de se cristalliser : en 369, les Huns ­ -qui ont soumis les Alains, autre peuple cavalier indo-européen dont descendent les actuels Ossètes-, franchissent le Don, limite fluviale du pouvoir d’Ermanarich, roi wisigoth. Le verrou gothique du « shatterbelt » steppique ukrainien a sauté : les Huns seront rapidement sur le Danube et sur le Rhin. Rome vacille puis s’effondre. L’Empire finira par disparaître car sans verrou gothique et sans verrou romain, il n’y a pas d’impérialité possible en Europe.
 
La présence tatar/mongole empêche tout membrage de l’axe gothique
 
Mais si les Huns et les Alains ont indubitablement repris à leur compte l’idéal du « comitatus » des cavaliers proto-iraniens, leur pouvoir sur les peuples est éphémère, sans doute à cause d’une hypertrophie impériale, les cavaliers hunniques et leurs alliés contraints s’étant trop éloignés de l’espace premier de leur rassemblement. Plus tard, les Avars ont pris leur relais dans la plaine pannonienne, ont parfois été les alliés des Byzantins et ont influencé tous les peuples slaves et germaniques du bassin danubien, de la zone anciennement dace des Carpathes et de la Bohème. Ils seront progressivement éliminés par les Pippinides et les Carolingiens. Les Magyars seront battus par Othon I. De même, les Mongols et les Tatars, présents en Russie et en Ukraine de 1235 à 1480, n’exigent qu’allégeance et tribut sans occuper réellement le terrain. L’Europe a failli tomber à la même époque car les hordes mongoles arrivent sur la Vistule et battent les armées impériales et polonaises à Liegnitz en Silésie et atteignent l’Adriatique après avoir battu les Hongrois puis les Croates. La mort du Grand Khan Ögödei oblige les Mongols, respectueux de leurs coutumes, de retourner vers leurs bases de départ pour participer à l’élection d’un nouveau chef suprême. Le joug tatar, comme l’appellent les Russes, après s’être imposé de 1235 à 1480, a empêché un nouveau « membrage » territorial sur l’ancien « axe gothique », détruit en sa période de gestation par la première invasion hunnique, annihilé une seconde fois quand s’écroule la Russie kiévienne, expression d’une fusion varèguo-slave. Le choc avec les hordes tataro-mongoles, pourtant peu nombreuses, a brisé le « membrage » en gestation du binôme Varègues/Slaves sur l’axe baltique/pontique, tourné vers Byzance, donc vers l’espace pontique, le Bosphore, l’Egée et le bassin oriental de la Méditerranée et capable, comme le diront plus tard Catherine II de toutes les Russie et son ministre Potemkin, de souder une civilisation néo-hellénique, rajeunie par les éléments slaves, baltes et germaniques. Ce projet n’a jamais pu être réalisé. L’Europe reste alors enclavée, elle fait du sur-place ou ne réussit que de petites opérations ponctuelles de « désenclavement » (9), dont aucune n’a une réelle ampleur, confirmant le constat de Guillaume de Malmesbury : l’Europe est un sous-continent assiégé, battu en brèche par des ennemis acharnés. Son expansion future n’est pas due à sa malignité, à un désir sauvage de dominer autrui mais à une nécessité de se désenclaver, d’échapper à des étaux mortels, mis en œuvre eux, par des adversaires qui n’ont ni nos scrupules ni un souci de l’ « Autre » comme on le dit aujourd’hui, suite aux réflexions du philosophe Levinas.
 
Un seul objectif : se désenclaver !
 
Pour le Prof. Jean-Michel Sallmann, l’histoire de l’Europe est constitué d’une série de tentatives, d’abord timides ensuite grandioses, de désenclavement.  1) Les Croisades seront une première tentative de sortir de l’étau imposé par les Seldjoukides et leurs successeurs après leur victoire contre les Byzantins à Manzikert en 1071. L’appel d’Urbain II (alias Eudes de Châtillon) aux Francs à Clermont-Ferrand le 27 novembre 1095 demande, suite aux appels du Basileus Alexis I, de libérer la « Romania », soit l’espace jadis romain, d’une « race étrangère », mais non pas une race au sens ethnologique du terme (concept biologisant et darwinien inconnu à l’époque). Par « race », Urbain II et ses contemporains entendent un ensemble uni par une même idée et une même fidélité à l’Empire ou à ce qui demeure de cet Empire dans les esprits (comme l’explique parfaitement Jean de Brem dans son Testament d’un Européen). Finalement, ces expéditions vers le Levant furent un échec géopolitique dès la fin du 13ème siècle, sauf qu’elles permirent une deuxième forme de désenclavement, celle amorcée en parallèle à ces Croisades, soit 2) le développement des entreprises commerciales italiennes, essentiellement génoises et vénitiennes, lesquelles s’implantent en Crimée (en Tauride) pour se brancher sur les routes de la Soie du nord, grâce à une tolérance mongole pour le commerce que n’auront plus les Tatars de Crimée et d’Ukraine quand ils chercheront la protection des Turcs contre les Russes dans cette « gateway region ». Là aussi, les Italiens seront évincés du commerce centre-asiatique, au bénéfice d’un autre commerce, transatlantique celui-là, que domineront durablement des puissances atlantiques désormais liées aux Amériques. Il faudra attendre l’entrée en Crimée des troupes de Catherine II de Russie pour restaurer potentiellement un commerce liant le reste de l’Europe à l’Asie centrale, et au-delà de ses immensités territoriales, de ses déserts et de ses massifs montagneux (Altaï, Himalaya), à la Chine et à l’Inde, deux « marchés » plus accessibles au commerce maritime, plus rapide et moins onéreux, dominé par les Anglais.
 
Trois tentatives de faire sauter les verrous tatar et ottoman
 
Il y aura trois tentatives majeures pour faire sauter les verrous tatar et/ou ottoman : une offensive russe, une volonté portugaise de contourner l’Afrique et la longue guerre mené par l’Espagne pour maîtriser toute la Méditerranée. Sous l’impulsion de marchands anglais, qui se souvenaient vraisemblablement des initiatives scandinaves entre les 9ème et 12ème siècles, le Tsar Ivan le Terrible voudra rétablir sous son autorité un ensemble territorial partant de la Mer Blanche pour aboutir à la Caspienne, à Astrakhan, tout en rassemblant les terres que baigne la Volga au profit de son empire qui se pose comme l’héritier de Byzance, éliminée par le Sultan Mehmet II en 1453. Il y réussira mais sans rouvrir les routes commerciales de Marco Polo, à cause du maintien d’une présence tatar sous la protection de la Sublime Porte ottomane en Ukraine actuelle, en une zone pleinement qualifiable de « gateway area ». En compensation, l’œuvre géopolitique d’Ivan le Terrible rouvre la voie sibérienne aux cosaques, qui atteindront le Pacifique après un siècle de chevauchées. L’action géopolitique ante litteram d’Ivan le Terrible amorce le reflux tatar/mongol mais renforce simultanément la volonté de résistance ottomane qui, paradoxalement et en dépit de la volonté russe de devenir la « Troisième Rome », adopte les stratégies byzantines « antilatines » et « anticatholiques » en Méditerranée, en Mer Noire et dans le bassin danubien, autant d’actualisations des stratégies jadis préconisées par Justinien et ses généraux. Il y a eu fusion entre la géopolitique byzantine et la géopolitique ottomane dès la prise de Constantinople : le fameux film turc à grand spectacle relatant l’œuvre militaire de Mehmet II met en scène des Grecs pro-ottomans.

 

 
La tentative portugaise est plus grandiose. Sous l’impulsion du Prince Henri le Navigateur (1394-1460), Anglais du clan des Lancastre par sa mère, une école s’établit à Sagres au Portugal qui compile le savoir géographique disponible à l’époque, attirant à elle des savants de toutes origines. Dès l’âge de vingt ans, l’Infant Henri obtient de son père Jean I qu’il lance une campagne contre les pirates maures de Ceuta. La conquête de ce nid de pirates barbaresques permet de découvrir que la richesse des royaumes maures de l’actuel Maroc et de l’Andalousie musulmane provenait des richesses africaines, dont l’or de l’actuel Ghana, ramenées par les caravanes transsahariennes. Tout en préconisant un harcèlement systématique de la côte marocaine afin de contrer toute contre-offensive maure, Henri conçoit alors le projet de lancer des expéditions maritimes par cabotage le long des côtes atlantiques de l’Afrique pour contourner ces pistes caravanières et pour assurer un transport plus rapide et quantitativement plus important au bénéfice du Portugal. Les recherches de l’école géographique de Sagres permettent d’amorcer le désenclavement de l’Europe via les côtes africaines et via les immensités océaniques de l’Atlantique :   en 1419-1420, les explorateurs Joao Gonçalves Zarco et Tristao Vaz Teixeira découvrent Madère ; en 1427, Diego de Silves découvre les Açores ; en 1434, Gil Eanes franchit le Cap Bojador ; en 1444, année de la bataille fatidique de Varna contre les Ottomans, Nuno Tristao arrive jusqu’à l’embouchure du fleuve Sénégal ; après la mort de l’Infant Henri, Rui de Sequiera arrive au Bénin en 1472 puis, entre 1482 et 1486, Diego Cam atteint l’embouchure du fleuve Congo et pousse jusqu’aux côtes de l’actuelle Namibie. Entre 1487 et 1488, Bartolomeu Dias double le Cap de Bonne Espérance. En 1498, Vasco de Gama arrive à Calicut en Inde. La route vers le sous-continent indien, vers les épices et vers les régions du monde que les Romains aspiraient à explorer, est enfin accessible aux Européens, qui viennent de réussir à se désenclaver, grâce à l’impulsion première de l’Infant Henri, grâce au travail intellectuel de l’école de Sagres. L’ère de la suprématie européenne commence. 

 

 

L’Espagne ne cherchera pas à contourner la masse continentale africaine, projet qu’elle estime sans doute démesuré, et envisage de maîtriser d’abord les deux bassins de la Méditerranée, contre les Ottomans et les Barbaresques, puis de donner, à terme, des coups de bélier sur les côtes orientales de la Grande Bleue afin de rouvrir les voies classiques du commerce eurasien au départ des ports syriens et d’Alexandrie. Cette aventure –le rêve alexandrin de Charles-Quint et de Philippe II-  avait commencé dès les 13ème et 14ème siècles par les conquêtes aragonaises des îles (Baléares, Sardaigne, Sicile, Italie du Sud et parties du Péloponnèse grec). En 1565, Philippe II prend Malte. La prise de Chypre par les Ottomans ne sera pas compensée par la victoire de Lépante en 1571. Les projets espagnols de désenclaver l’Europe par le « fond » de la Méditerranée n’aboutiront pas, en partie à cause de l’alliance entre les monarques français et l’ennemi ottoman, exemple flagrant de trahison civilisationnelle, à l’origine du déclin irrémédiable de l’Europe aujourd’hui et explication au tropisme musulmaniste de la « République » maçonnique et laïcarde, en dépit d’une incompatibilité de cette idéologie stupide et vulgaire avec toute position religieuse de grande profondeur temporelle, quelle qu’elle soit. L’Espagne se tournera alors vers l’exploitation des Amériques et gardera ses conquêtes dans le Nouveau Monde jusqu’au début du 19ème siècle.
 
Cette rétrospective sur les tentatives européennes de désenclaver notre sous-continent nous montre que les conflits sont permanents et que les zones-clefs de la géostratégie peuvent redevenir, après les périodes plus ou moins longues d’apaisement, des enjeux déclencheurs de nouveaux conflits chauds. Les confrontations pour maîtriser ces zones-clefs sont donc des permanences de l’histoire qu’aucune idéologie iréniste, qu’aucun discours pacifiste, ne peuvent effacer ou rendre caduques. Nous avons vu que le conflit franco-allemand de 1870 à 1945 (ou à 1963, lors de la rencontre De Gaulle/Adenauer qui scelle la nouvelle amitié franco-allemande) a été un conflit pour la maîtrise de l’espace dit « lotharingien » puis pour le Danube et surtout le Pô, parce que les rois de France voulaient une fenêtre sur l’Adriatique pour avoir accès justement au commerce que tentait de rétablir Venise. Au-delà de cet enjeu des guerres d’Italie, de la conquête de la Franche-Comté (« El camino espanol ») par Louis XIV et des campagnes de Napoléon III en Lombardie au 19ème siècle, ces guerres incessantes visaient aussi, quelque part, à établir des têtes de pont est-méditerranéennes ou pontiques pour accéder aux routes de la soie : les croisades françaises visent à prendre Alexandrie, de même que le commerce italien qui entend également conserver et consolider ses avantageux avant-postes en Crimée, jusqu’au moment où les Tatars, oublieux des sagesses de leurs khans antérieurs, s’allieront aux Ottomans qui verrouilleront tous les accès méditerranéens et pontiques au commerce eurasien pour ne laisser aux Européens que les routes ouvertes par les Portugais ou l’exploitation du Nouveau Monde.
 
Le projet ? Ré-enclaver l’Europe !
 
Aujourd’hui, le Levant est ravagé par les miliciens de l’EIIL jusqu’en Mésopotamie, empêchant du même coup tout développement de la région au profit d’une synergie eurasienne. La « gateway region » ukrainienne est bloquée au niveau du Donbass par une guerre permanente que l’on voudra maintenir et entretenir sur la très longue durée, afin d’installer un « abcès de fixation » purulent qui aura pour double fonction d’entraver l’acheminement d’hydrocarbures russes vers l’Ouest et de fragiliser l’Ukraine, privée ainsi de ses régions industrielles et mise à charge d’une Union Européenne déjà financièrement exsangue. La Crimée va bientôt être coincée entre ce Donbass bloqué par une guerre interne aux conséquences imprévisibles et une Moldavie/Transnistrie que l’on s’apprête, dans certains cénacles de stratégistes d’Outre-Atlantique, à porter en ébullition pour imposer un nouveau verrou qui parachèvera le ré-enclavement de l’Europe, ennemi principal de Washington. A ces deux foyers de turbulences sur le « gateway » ukrainien et à l’implosion du Levant et de l’Irak, s’ajoutent la réactivation probable des conflits tchétchène et daghestanais, du conflit russo-géorgien, de manière à créer des blocages de longue durée non seulement de part et d’autre de la Crimée, mais aussi entre l’espace maritime pontique et la Caspienne. Par ailleurs, au départ d’un Afghanistan abandonné par les soldats de la coalition atlantiste, des djihadistes, que l’on posera comme « incontrôlables », s’infiltreront au Turkménistan pour bloquer les communications au-delà de la Caspienne. L’ancienne route maritime portugaise, dans l’Océan indien, le long des côtes de l’Afrique orientale, est, elle, partiellement interrompue en une zone océanique importante, au large de la Somalie par la piraterie que l’on combat soi-disant avec les flottes ultra-modernes de l’OTAN mais qui fait preuve d’une résilience finalement fort suspecte, tant et si bien que deux verrous y sont présents implicitement : entre Madagascar et la côte orientale de l’Afrique, au niveau du Kenya, et à la sortie de la Mer Rouge. On le voit : l’ennemi, c’est l’Europe qu’il faut ré-enclaver et qu’il faut faire imploser de l’intérieur en la livrant en permanence à des politiciens écervelés et en y déversant constamment des populations hétérogènes et inassimilables, débarquant à Lampedusa et sur les îles de l’Egée grecque. Toutes les avancées de l’Europe hors de son enclavement médiéval sont rendues nulles et non avenues par les stratégistes américains, héritiers des thèses et projets de Brzezinski.
 
Un chaos « néo-mongol » en Asie centrale ?
 
L’objectif essentiel des volontés européennes de désenclaver notre sous-continent était de renouer des relations commerciales avec l’Inde et la Chine, qui, à elles deux, faisaient au total au moins 35% du commerce mondial jusqu’au milieu du 19ème siècle. Dans l’Océan Indien, qui devient une « route de la soie » maritime et remplace les voies terrestres, les Britanniques prendront le relais des Portugais et des Hollandais mais excluront le reste de l’Europe : la France de Louis XV est chassée des Indes, la compagnie d’Ostende au service de l’Empereur d’Autriche est également sabotée, tandis que la Russie avance ses pions en Asie centrale, menaçant à terme les Indes anglaises. La maîtrise russe de la « terre du milieu » (avant que le géographe Halford John Mackinder ne forge le concept en 1904) s’oppose à la maîtrise britannique de l’« océan du milieu », en une confrontation binaire Terre/Mer que soulignera notamment Carl Schmitt. Cette dialectique induit la notion de « Grand Jeu », où le protagoniste russe cherche, au 19ème siècle, surtout sous Alexandre II, à parachever l’œuvre d’Ivan le Terrible en « rassemblant les terres » au sud de ses conquêtes antérieures de Sibérie septentrionale, région très inhospitalière où ne passait aucune « route de la soie ». En poussant vers la Perse et vers les terres islamisées et iranisées des Turkménistan et Ouzbékistan actuels, la Russie tsariste s’emparait de plusieurs tracés des anciennes routes de la soie, reliant notamment les villes de Samarkand, de Merv et de Boukhara. Un embranchement de ce réseau de voies terrestres partait vers l’Inde sur le chemin emprunté jadis par les conquérants perses et afghans de la vallée du Gange : à Londres, on imaginait déjà que les cosaques du Tsar allaient s’élancer sur les mêmes pistes et arriver à Bénarès et à Calcutta. Simultanément, surtout après le complètement du chemin de fer transsibérien jusqu’à Vladivostok et Kharbin en Mandchourie, les Russes s’emparent de l’espace où s’étaient rassemblées, vers 200 avant notre ère, les premières coalitions hunniques et mongoles qui avaient éliminé d’Asie centrale les royaumes indo-européens, tokhariens ou autres, avant de disloquer l’Empire gothique en gestation en Ukraine et, par suite, l’Empire romain. La conquête russe de cet antique espace de rassemblement hunno-mongol rend impossible, jusqu’à nos jours, toute nouvelle dislocation, par coups de butoir hunniques ou mongols, de cet immense espace réunifié cette fois par les Tsars –et non plus par des khans mongols qui ont trop souvent souhaité le vide et la « désurbanisation » totale en ces terres immenses entre la Mandchourie et l’Ukraine. Les Tsars, eux, font œuvre « romaine » en construisant des voies de communications, telles les tracés du chemin de fer transsibérien, et en jalonnant ce tracé de nouveaux centres urbains. Raison pour laquelle certains observateurs n’ont pas hésité à qualifier la volonté américaine de bouleverser l’Asie centrale, parfois par djihadismes interposés, de « néo-mongolisme », vu qu’elle a parfois souhaité un chaos généralisé et durable, afin d’affaiblir les empires périphériques, russe ou chinois. Serait dès lors « néo-mongole » la stratégie de bouleverser le Turkménistan et peut-être aussi l’Ouzbékistan (plus lié à l’Organisation de Shanghaï) par des nouveaux talibans venus d’un Afghanistan laissé volontairement dans le chaos le plus absolu, après le départ des troupes américaines qui ont, bien évidemment, subtilement préparé ce désordre artificiel… sans en avoir l’air et surtout contrairement aux intentions proclamées par les médias. Le Turkménistan détient d’immenses réserves d’hydrocarbures, exportables vers l’Europe, qui cherche des alternatives à une trop grande dépendance russe : le projet de bouleverser la paix intérieure dont jouit encore ce pays, sous prétexte que son pouvoir présidentiel serait trop « fort », et donc pas assez « démocratique » au regard des innombrables ONG américaines, n’est pas seulement un projet antirusse mais avant tout un projet antieuropéen, qui vise à freiner encore davantage l’approvisionnement en hydrocarbures de notre sous-continent. 
 
Accès à la Mer Rouge
 
Il faudra cependant attendre 1783 pour que Catherine II, Impératrice de toutes les Russies, reprenne la Crimée aux Tatars inféodés aux Ottomans. Du coup, la Russie, auparavant éloignée de tout littoral utile, bénéficie du tremplin pontique de l’antique civilisation hellénique et des comptoirs génois et vénitiens, mais en l’articulant forcément dans une direction nord-sud. Ce nouvel état de choses menace la puissance devenue quasi globale de l’Angleterre depuis la guerre de Sept Ans, où elle a évincé la France des Indes et du Canada. Albion craint une pression permanente et dangereuse sur la future artère méditerranéenne qu’elle compte bien ouvrir en s’emparant de l’Egypte et en creusant un canal entre la Méditerranée et la Mer Rouge pour réactiver le commerce avec l’Inde que les Romains entretenaient au départ des ports égyptiens de Bérénice et de Myos-Hormus en direction du Yémen et du Gujerat indien. Le bassin oriental de la Méditerranée et l’accès à la Mer Rouge doivent dès lors demeurer sous contrôle anglais et sans aucune pression venue d’ailleurs en Europe : ni d’une Autriche qui se découvrirait une vocation adriatique, égéenne et est-méditerranéenne ni d’une Russie qui se projetterait de l’espace pontique vers Alexandrie et la vallée du Nil ni d’une France révolutionnaire ou bonapartiste qui s’installerait en Egypte, à l’ombre des pyramides « d’où quarante siècles la contempleraient » ni d’une France de la Restauration qui appuierait trop généreusement Mehmet Ali. Parce que sa puissance globale en gestation postule de conserver le sous-continent indien et de maîtriser l’Océan du Milieu, soit l’Océan Indien, l’Angleterre des Pitt et de leurs successeurs doit être la seule puissance capable de contrôler le corridor Méditerranée à son profit, à l’exclusion de toutes les autres puissances européennes. L’installation des Russes en Crimée est donc un casus belli potentiel, tout comme la campagne d’Egypte de Bonaparte sera considérée comme un danger mortel pour le dispositif anglais entre la métropole britannique et les possessions indiennes.
 
L’eurasisme informel du 18ème siècle
 
En effet, entre la fin de la guerre de Sept Ans et la Révolution française, surtout sous le règne de Louis XVI, une sorte d’unité stratégique eurasienne existe, même si, au départ, elle était encore privée de la mobilité qu’offrent les flottes. Louis XVI fait la paix avec l’Autriche de Marie-Thérèse et de Joseph II ; l’Autriche est alliée des Russes contre les Ottomans dans le bassin danubien et en Mer Noire. L’Europe connaît un bond en avant en tous domaines, vu la neutralisation de l’ennemi ottoman pluriséculaire, puis les explorations maritimes, favorisées par Louis XVI, par la Tsarine et ses successeurs, vont bon train (10) : les puissances de cette alliance informelle se dotent, après la Guerre de Sept Ans, de flottes capables d’exercer la pression que craignent les Pitt à Londres. Aujourd’hui, cette tradition européenne et eurasienne, au sens de cette alliance informelle du 18ème siècle, est reprise par Don Sixto Enrique de Borbon, héritier, pour les légitimistes carlistes, de la Couronne d’Espagne (11) et non pas seulement par des nostalgiques marginalisés d’une forme ou d’une autre de « national-bolchevisme ». Après la parenthèse des guerres contre la Révolution française et l’Empire napoléonien, l’Europe, cette fois avec l’Angleterre, cherchera à restaurer cet espace pacifié de l’Atlantique au Pacifique par la mise en œuvre d’un nouveau système, celui de la Sainte-Alliance, née lors du Congrès de Vienne de 1814 que l’historien allemand contemporain Eberhard Straub considère comme un exemple de sagesse politique, dans la mesure où son système de sécurité collective a procuré un siècle de paix à l’Europe, qui a pu ainsi s’imposer au monde tout en conservant sa diversité (12).
 
La Doctrine de Monroe
 
L’alliance franco-austro-russe du 18ème siècle, bien qu’informelle, et la Sainte-Alliance du Congrès de Vienne ont été des espaces eurasiens unis, stratégiquement unifiés. Ils ont toutefois été de courte durée. La Révolution française, que quelques historiens français comme Olivier Blanc (13) considèrent comme une fabrication des services de Pitt, bouleverse l’équilibre européen en déployant une idéologie délirante et déstabilisatrice qui a ruiné toute coopération harmonieuse entre la France, l’Autriche et la Russie. Blanc a exploré les archives de manière méticuleuse pour étayer ses thèses. Au départ de son travail, on peut avancer l’hypothèse que les services de Pitt visaient à faire exploser la France de Louis XVI qui misait sur le développement d’une flotte capable d’intervenir en tous points du globe, d’une flotte qui avait battu les Anglais à Yorktown en 1783. L’objectif de Pitt était aussi de saboter les efforts austro-russes contre l’Empire ottoman pour éviter cette double pression sur le Bosphore et la Méditerranée orientale et pour obliger les Autrichiens à affronter les hordes révolutionnaires française aux Pays-Bas méridionaux et en Rhénanie. Il s’agissait de générer le chaos dans toute l’Europe pour éviter une alliance paneuropéenne ou la domination du sous-continent par une puissance trop hégémonique. D’où, pour Straub, la phobie de Metternich et des congressistes viennois pour les théories dites « démocratiques », plus ou moins dérivées des idées révolutionnaires françaises, parce qu’on les devinait génératrices d’un chaos sans fin.
 
Dans une première phase, qui a duré une bonne douzaine d’années, le bloc européen de la Sainte-Alliance suscite les craintes d’une puissance émergente, viscéralement hostile à la vieille Europe au nom d’un fondamentalisme protestant et bibliste, camouflé derrière un rationalisme et un « déisme » de façade et de circonstances, détaché de tout héritage historique concret : les Etats-Unis d’Amérique. Ceux-ci craignaient que les puissances européennes ne portent assistance à l’Espagne confrontée aux nouveaux nationalismes démocratiques des populations indigènes et créoles des vice-royaumes du Nouveau Monde. En 1823, en réaction au danger potentiel que représentait la Sainte-Alliance eurasienne, le Président James Monroe énonce sa célèbre doctrine de « l’Amérique aux Américains », forgeant de la sorte une politique qui deviendra constante : celle du refus de toute ingérence européenne dans le Nouveau Monde. Les Etats-Unis ne craignaient pas seulement un éventuel secours porté à l’Espagne ruinée et désormais incapable de se réaffirmer dans les Amériques : ils craignaient aussi et surtout la présence russe en Alaska et en Californie, voire aussi la possible alliance entre Russes et Espagnols sur la côte pacifique de l’Amérique du Nord, qui aurait verrouillé la marche en avant des Etats-Unis vers la bi-océanité, clef de leur future puissance globale. On oublie souvent de mentionner que Monroe, quand il a énoncé sa doctrine, avait l’aval plus ou moins secret de la Grande-Bretagne qui, elle aussi et en dépit de la guerre qui venait de l’opposer aux jeunes Etats-Unis en 1812, ne désirait pas voir d’autres puissances européennes intervenir dans les Amériques, où elle cherchait à contrôler seule certains marchés, notamment en Argentine. La Doctrine de Monroe sera complétée par le « corollaire Roosevelt » après la guerre hispano-américaine de 1898, qui arrache à l’Espagne Cuba et les Philippines, un corollaire qui stipule que toute politique que les Etats-Unis pourraient considérer comme contraire à leurs intérêts serait traitée comme un acte d’agression. C’est ce « corollaire Roosevelt » qui justifie encore et toujours aujourd’hui les interventions américaines dans le monde, ainsi que l’espionnage des réseaux ECHELON et Prism (l’affaire Snowden) dirigé essentiellement contre l’Europe. Le « corollaire Roosevelt » est interprété de manière très vaste : le développement optimal d’une technologie quelconque, mais surtout aéronautique ou spatiale, même dans un pays « allié », est considéré comme une agression contre les intérêts des firmes concurrentes américaines donc contre l’intérêt des Etats-Unis en tant que puissance.
 
Crise grecque et question d’Orient
 
La cohérence eurasienne de la Sainte-Alliance sera, nous l’avons dit, de courte durée. Ce seront principalement les deux puissances occidentales, la France et la Grande-Bretagne, qui la saborderont progressivement. Les premières lézardes à l’édifice eurasien, que fut la Sainte-Alliance, ont été : le soutien aux Grecs révoltés contre la Sublime Porte ; l’indépendance belge ; la Guerre de Crimée, qui sanctionne la rupture entre un Occident colonial, qui n’est plus centré sur l’Europe même (14), et un « Orient » centre-européen et russe, toujours fidèle à l’esprit premier de la Sainte-Alliance ; l’intervention anglo-française en Chine, lors des guerres dites de l’opium. Eberhard Straub montre que cette Sainte-Alliance, soucieuse de maintenir l’Europe en état de stabilité durable, garantissait l’intégrité de l’Empire ottoman. La révolte grecque et le mouvement des Philhellènes (dont Lord Byron) induisent trois puissances de la Sainte-Alliance à rompre avec l’idéal metternichien et antirévolutionnaire de stabilité européenne : l’objectif n’est pas tant de sauver les Grecs du joug ottoman, car on ne s’était jamais fort soucié d’eux, mais d’obtenir des concessions, des bases pour prendre Constantinople et se projeter vers la Méditerranée (les Russes) ou pour s’installer dans la capitale ottomane et verrouiller le Bosphore pour éviter justement cette projection russe vers Chypre, l’Egée et l’Egypte. Metternich voit dans ce soutien, purement tactique, une amorce de « balkanisation » de l’Europe, une balkanisation qui ne serait pas tant territoriale que mentale : les Européens cesseraient de poursuivre ensemble, dans la cohérence, des politiques stabilisantes communes, qui constitueraient l’essence même du nouvel ordre équilibré voulu par les congressistes de Vienne. Le Tsar Nicolas I voulait toutefois un partage des dépouilles ottomanes, où chaque bénéficiaire trouverait son intérêt mais les deux puissances occidentales, qui agissaient davantage dans les intérêts des Ottomans que dans ceux des Russes, ont refusé cet expédient qui aurait pu, finalement, sauver la cohérence de la Sainte-Alliance. Anglais et Français, rappelle Straub, se méfiaient du résultat à long terme d’un accord général qui affaiblirait définitivement l’Empire ottoman qui n’aurait alors plus eu d’autre solution que de demander son inféodation à l’Empire russe, exactement comme aujourd’hui, la Turquie d’Erdogan et de Davutoglu joue sur deux tableaux, sur l’Occident et sur la Russie, dans l’espoir de se hisser au rang d’une puissance régionale incontournable. Metternich, face à la première crise grecque des années 20 du 19ème siècle qui déclenche ce que l’on a appelé la « question d’Orient », accuse Lord Palmerston d’être un « tyran » dans la mesure où c’est l’Angleterre qui mène une politique égoïste, contraire aux intérêts du continent dans son ensemble. L’objectif anglais, lui, était de contrôler la Méditerranée sans aucune possibilité d’être contrecarré par une autre puissance européenne, quitte à soutenir toute sorte de mouvements séditieux de nature révolutionnaire (selon Metternich), comme aujourd’hui une politique comparable se déploie en Syrie afin qu’aucun môle de puissance régionale, alliée à la Russie ou à une autre puissance européenne, qui se montrerait challengeuse, ne puisse émerger.
 
Indépendance belge et Guerre de Crimée
 
Deuxième lézarde dans l’édifice de la Sainte-Alliance : l’indépendance belge. Une fois de plus, c’est l’Angleterre qui craint le développement du Royaume-Uni des Pays-Bas, disposant d’une flotte hollandaise de haute qualité, d’une industrie textile en Flandre (la Lys autour de Courtrai et Wijnegem) et en Wallonie (vallée de la Vesdre), d’un binôme charbon/acier à Mons, Charleroi et Liège, d’une présence en Insulinde à la charnière de l’Océan Indien et du Pacifique, d’anciennes colonies en Afrique du Sud (colonie du Cap) et dans l’île Maurice qui auraient pu revenir dans le giron néerlandais et surtout d’une aura dans une Allemagne du Nord qui parle des dialectes très proches du néerlandais. Ce Royaume-Uni des Pays-Bas aurait parfaitement pu attirer à lui, plutôt que la Prusse, les régions d’Allemagne du Nord. Pour briser ce môle germanique continental potentiel en face de ses côtes, à une nuit de navigation du cœur de Londres, jadis incendiée par la flotte de l’Amiral de Ruyter lors des guerres anglo-hollandaises du 17ème siècle, il fallait lui faire subir une sécession définitive, affaiblissant les deux lambeaux subsistants. 
 
Troisième lézarde, encore plus profonde : la Guerre de Crimée. Après le soutien français apporté en 1839-1840 au khédive d’Egypte, Mehmet Ali, en révolte contre la Sublime Porte, les deux puissances occidentales, la France et l’Angleterre, se muent en protectrices de l’Empire ottoman pour contenir la Russie au nord du Bosphore. Bismarck reste neutre, de même que la Belgique de Léopold I, qui est un ancien officier de l’armée du Tsar Alexandre. Cette intervention franco-anglaise en Mer Noire vise l’endiguement de la Russie, le maintien d’un Empire ottoman désarticulé, affaibli, incapable d’autonomie et à la merci des pressions occidentales qui entendent garder les mains complètement libres en Méditerranée orientale et en Egypte. Elle génère également l’anti-occidentalisme russe, comme l’attestent d’ailleurs le Journal d’un écrivain de Dostoïevski et les souvenirs de Tolstoï, officier combattant sur le front de Crimée. La Guerre de Crimée provoque donc une rupture profonde entre l’Ouest et la Russie qui alimentera toutes les idéologies antioccidentales qui germeront ultérieurement, qu’elles aient été de facture slavophile ou eurasiste et que cet eurasisme ait été tsariste ou communiste (stalinien). 
 
 
La ruine de la Chine des Qing
 
Parallèlement à ces trois lézardes –question grecque, révolution belge et Guerre de Crimée-  les deux puissances occidentales participent à la ruine de la Chine, présente dans le Sinkiang (le « Turkestan chinois ») et au Tibet, deux composantes importantes du puzzle centre-asiatique à l’époque de gloire des routes de la soie. La première guerre de l’opium, menée par l’Angleterre contre le Céleste Empire, se déclenche parce que le protectionnisme chinois, porté par une bureaucratie bien organisée, barre l’accès au commerce que les Anglais voudraient illimité. Le protectionnisme des empereurs Qing crée un déséquilibre commercial en défaveur des Anglais qui importent plus de marchandises chinoises qu’ils n’en exportent vers le Céleste Empire. Obligés de payer en lingots d’argent, métal précieux qu’ils ne possèdent pas en grandes quantités, les Anglais, pour importer leur thé, vendent de l’opium indien contre l’argent qu’ils ont préalablement cédé pour obtenir le breuvage traditionnel des après-midi londoniens. Ils inversent alors le déséquilibre commercial : l’Empereur, en envoyant son haut fonctionnaire zélé Lin Zexu, riposte en interdisant les fumeries d’opium, en confisquant les ballots de drogue et en imposant de sévères restrictions. Ces mesures entraînent l’intervention britannique et la première guerre de l’opium (1839-1842) qui s’achève par le Traité de Nankin, où la Grande-Bretagne obtient pleine satisfaction. La seconde guerre de l’opium (1856-1860) se déclenche immédiatement après la Guerre de Crimée, sous prétexte d’un non respect des clauses du Traité de Nankin de 1842. La France, alliée de l’Angleterre, participe à la curée et, en 1860, cette guerre se solde par la prise de Pékin et le pillage du Palais d’été. La Chine est contrainte d’accepter les stipulations de la Convention de Pékin (1860), qui reprennent les clauses humiliantes des traités précédents. Cette défaite entame considérablement le prestige des empereurs Qing : la Chine, auparavant superpuissance économique, déchoit en un pays déficitaire, rétif à la modernisation technique, et en une nation esclave de la consommation d’opium. La situation déplait à de larges strates de la population chinoise, ce qui aboutit à la révolte dite des Taiping, qui éclate dès 1851. Le pouvoir central mettra quinze ans à mater ce soulèvement, dirigé par un certain Hong Ziuquan, qui se prenait pour le frère de sang de Jésus-Christ (15). 
 
 
Dislocation de l’Empire des Qing
 
L’affaiblissement du pouvoir impérial permet aux Britanniques de progresser en Birmanie, ancien Etat tributaire de la Chine, et aux Français de s’emparer de l’Annam et de tout le Vietnam dans les années 80 du 19ème siècle. Les maoïstes s’inspireront de cette révolte des Taiping, 80 ou 90 ans plus tard, car elle prêchait un certain égalitarisme et rejetait les hiérarchies politiques traditionnelles, qui venaient de prouver leur incompétence à maintenir la Chine dans son statut de grande puissance impériale. Simultanément, vu le discrédit dans lequel le pouvoir Qing était tombé, d’autres révoltes secouent la Chine au même moment, risquant de précipiter l’Empire dans un chaos indescriptible où s’affrontent des entités rivales. La révolte des Taiping constitue sans doute la guerre civile la plus meurtrière de l’histoire : de vingt à trente millions de morts. La Chine en ressort démographiquement affaiblie. Elle passe de 410 millions d’habitants en 1851 à 350 millions en 1873 (16). Indépendamment des ravages cruels que cette révolte a fait subir à la Chine, elle servira, en dépit d’une inspiration chrétienne bizarre donc non chinoise, non autochtone, de modèle aux nationalismes futurs et au maoïsme (qui est un nationalisme chinois à la sauce communiste). L’idéologie des nationalismes et communismes chinois, irréductibles à leurs modèles européens car sinisés en profondeur, a pour socle principal un refus des « traités inégaux », pareils à ceux imposés par les Britanniques suite aux deux guerres de l’opium, ce qui induit aujourd’hui, alors que la Chine se redresse et reprend la place prépondérante qu’elle détenait jadis dans l’économie mondiale, une volonté de laisser à chaque entité politique le droit de déterminer librement ses choix, sans que ceux-ci ne soient oblitérés par des idéologies universalistes (17), imposées par des puissances hégémoniques occidentales et contraires aux principes du mos majorum à la chinoise, c’est-à-dire du culte des ancêtres, et à la sage notion de perpétuation des schémas connus qu’il convient de ne pas modifier, au nom d’un équilibre et d’une harmonie issus d’une méditation des pensées taoïstes. Les Taiping, en s’inspirant d’une interprétation très biscornue des évangiles, n’avaient pas opté pour un « schéma connu », confucéen ou taoïste, parce que les schémas connus, à leurs yeux, avaient justement déchu et précipité la Chine dans une incapacité à saisir les clefs de la puissance moderne, elles, bien instrumentalisées par l’ennemi britannique. Après la longue guerre civile, l’Impératrice régente Cixi lancera timidement la Chine sur la voie d’une modernisation technologique insuffisante, selon un rythme trop lent, jugeront plus tard les révolutionnaires du Kuomintang du Dr. Sun Ya Tsen, qui proclameront la république en 1912.
 
L’extraversion des deux puissances occidentales s’est traduit, tout au long du 19ème siècle, par des interventions répétées sur des théâtres non européens, par un désintérêt croissant et par un mépris affiché pour les autres puissances européennes non extraverties (selon la terminologie adoptée par Constantin Frantz), dont elles n’ont jamais tenu compte des besoins et des aspirations. Elles n’ont eu de cesse de camoufler leur mépris derrière des discours ronflants, idéologiques ou moralisants, avec l’appui d’une presse haineuse déversant des flots de logorrhées bellicistes ou dépréciatives contre les Russes, par exemple, ou contre les Allemands et les Autrichiens, considérés comme des « barbares » grossiers, incultes parce que ne partageant pas les schémas révolutionnaires, jacobins ou manchesteriens. Cette attitude, en ruinant la pentarchie de la Sainte-Alliance, a provoqué quantité de déséquilibres stratégiques en Europe, comme l’avait prévu Frantz, ce qui a conduit à l’explosion d’août 1914. Et à la fin de l’excellence européenne.
 
De la dangerosité perverse des modernités
 
Toutefois, aux yeux du Prof. Beckwith, les modernisations/centralisations, par l’action des communistes, affecteront les grandes entités politiques de la masse continentale eurasiatique, surtout la Chine et la Russie maitresses des vastes régions de l’Asie centrale, où des syncrétismes séduisants avaient été forgés par des cultures aujourd’hui disparues. Ces modernisations vont éradiquer la diversité linguistique et religieuse, les synthèses fécondes qui ont innervé la région, laissant derrière elles un désert culturel, que les postcommunismes actuels ne parviennent pas à combler, surtout que la planète entière subit, depuis la chute du Mur de Berlin, un tropisme « néolibéral » préoccupant, bien plus incapable de restaurer les assises des vieilles cultures centre-asiatiques que ne l’étaient les communismes dans leurs diverses moutures. Beckwith conclut à la dangerosité perverse des modernités. L’explorateur italien Giuseppe Tucci (1894-1984), polyglotte et orientaliste, est sans nul doute celui qui nous a, de la manière la plus didactique, dressé un tableau des religions syncrétiques de cette Asie centrale et du Tibet (18) : un dossier à ouvrir afin de parfaire le long travail de restauration qu’il faudra bien entreprendre pour guérir l’humanité des maux de la modernité et des faux traditionalismes qu’elle génère dans son sillage pour perpétrer par procuration, par succession ininterrompue d’opérations « fausse bannière », son œuvre de destruction et de mort, comme le montre l’instrumentalisation du fondamentalisme des salafistes et des wahhabites, dont les pauvres schémas n’arrivent pas à la cheville des anciens syncrétismes, à dominante musulmane, nés et morts à Samarkand et à Boukhhara.
 
Pour sortir la Chine de la misère où l’avaient plongé les guerres de l’opium et les pressions britanniques, le premier mouvement républicain, le Kuo Mintang du Dr. Sun Yatsen, s’inspirera indirectement, après sa prise du pouvoir en 1911-1912, des thèses de l’Allemand Friedrich List, qui entendaient généraliser un développement intérieur, c’est-à-dire un colonialisme intérieur et non pas tourné vers l’extérieur et vers les périphéries non européennes. List a inspiré le développement des communications par canaux et voies de chemin de fer en Allemagne (projet concret visant à réaliser le testament politique du Roi Frédéric II de Prusse) et en Belgique (à l’invitation de Léopold I). Sollicité comme « expert ès-développement » avant la lettre, il a également influencé l’organisation territoriale des Etats-Unis dans la première moitié du 19ème siècle, préconisant, notamment, de relier la région des grands lacs, fertile en céréales, à l’Atlantique par un système de canaux, donnant ainsi le coup d’envoi à la puissance agricole que sont demeurés les Etats-Unis depuis lors, dont la meilleur arme, selon Eagleburger, assistant de Kissinger et conseiller de Nixon, est la surproduction de denrées alimentaires (« Food is the best weapon in our arsenal »). Plus tard, List a été considéré comme le théoricien du développement autonome et de l’indépendance économique nationale ou continentale, surtout dans les pays du dit « tiers monde » qui venaient d’accéder à l’indépendance. Il avait des disciples chinois, dont le dernier en date est assurément Deng Xiaoping, promoteur de la Chine post-maoïste. Dans la France gaullienne, l’économiste François Perroux se plaçait dans son sillage et plaidait en faveur d’une indépendance semi-autarcique que d’autres, comme André Grjébine, moderniseront dans le cadre européen, sans obtenir l’oreille des eurocrates.
 
Kang Youwei et Liang Qichao
 
Les idées de List vont bien entendu inspirer les précurseurs chinois du mouvement national et républicain du Kuo Mintang. Dans un ouvrage largement distribué dans les pays anglo-saxons et en Allemagne, l’historien indien du développement  Pankaj Mishra (19), qui enseigne en Angleterre, rappelle le travail patient des hauts mandarins chinois qui ne voulaient pas voir leur patrie impériale sombrer dans un marasme définitif. Parmi eux, Liang Qichao et son maître Kang Youwei. Tous deux entendaient imiter le mouvement Meiji japonais, moderniser et généraliser l’enseignement, les structures de l’Etat et les forces armées. Ils se heurteront à une forte résistance des éléments passéistes. Les nationalistes étatistes du Kuo Mintang et les communistes de Mao seront tous deux, à leur manière, les héritiers de cette volonté modernisatrice de Liang Qichao et Kang Youwei, pionniers du renouveau chinois, inspirés par l’ère Meiji japonaise, dès la fin du 19ème siècle. Les idées de Liang Qichao et de Kang Youwei sont néanmoins pétries de confucianisme, catalogue de principes inébranlables dont ils ne se déferont jamais, alors que la tentation des premiers nationalistes du Kuo Mintang était de rejeter l’héritage confucéen comme responsable du retard et des défaites chinoises. De même, en dépit des discours communistes lors de la « longue marche » et de la prise du pouvoir, en dépit de la révolution culturelle maoïste des années 60 du 20ème siècle, mise ultérieurement sur le dos de la « Bande des quatre » (dont la veuve de Mao), le confucianisme n’a cessé d’irriguer la pensée politique chinoise dans sa volonté de récupérer son statut de grand empire historique : il a marqué les avatars du Kuo Mintang dans la gestion de l’île de Formose, devenue la « Chine nationaliste » ; il a marqué tout aussi profondément la gestion communiste de la Chine continentale. Il a accompagné le pays dans sa marche hors du premier carcan communiste pour le faire évoluer vers le système original qui, aujourd’hui, lui a redonné une puissance incontournable, bien qu’elle soit, in fine, plus quantitative que qualitative, car calquée sur le modèle occidental et social-darwiniste, comme l’avait d’ailleurs prévu un disciple de Kang Youwei, fasciné par le social-darwinisme occidental à la fin du 19ème siècle, Tan Sitong, décapité sur ordre de l’Impératrice douairière en 1898, suite à l’éviction de l’héritier réformiste du trône chinois, Guangxu. Celui-ci avait reçu, sans les formalités inutiles de la vieille étiquette impériale, Liang Qichao, Kang Youwei et Tan Sitong pour faire passer, sur le mode accéléré, des réformes modernisatrices, bien que toujours confucéennes dans leur esprit, suite à l’écrasante défaite subie par la Chine face aux armées japonaises en 1895 : l’expérience a duré exactement 103 jours, explique Pankaj Mishra, avant d’être brutalement réprimée par Cixi, appuyée par le vieux mandarinat et les partisans obtus des vieilles structures vermoulues de la dynastie Qing. Il ne restait plus que la voie nationaliste et républicaine, antimandchoue, celle d’un bouleversement radical comme le voulait Sun Yatsen. Elle aboutira en 1911-1912.
 
Rigidités mentales de l’occidentalisme et du fondamentalisme
 
En dépit du sort tragique du malheureux Tan Sitong  -qui avait délibérément choisi le martyr, parce qu’un homme insigne, disait-il, devait accepter la mort pour assurer le triomphe final de ses idées qui ne voulaient que le bien public-  le mélange éclectique de pensées pragmatiques confucéennes et d’idées occidentales, libérales, nationalistes ou communistes, procure à la Chine contemporaine une pensée politique finalement plus souple que l’actuelle panacée occidentale où dominent, en dépit des paroles en apparence « progressistes », des rigidités mentales dérivées des calvinisme et puritanisme fondamentalistes, alliés au wahhabisme et au salafisme dans le monde musulman. De telles pensées refusent obstinément les syncrétismes et les éclectismes idéologiques et philosophiques qui, au cours de l’histoire, ont apporté l’harmonie aux empires et aux Etats. Ce sont des schémas para-théologiques fondamentalistes qui se profilent derrière les idéologies figées que professe l’Occident et qui contribue à son ressac. Elles se présentent sous des couleurs politiques différentes, tout en partageant en filigrane les mêmes postulats fondamentalistes, souvent déguisés en « progressismes », en pseudo-avatars de l’idéologie des « Lumières » : c’est tantôt ce que l’on appelait justement le « libéralisme doctrinaire » au 19ème siècle, revenu à l’avant-plan, suite à Thatcher et Reagan, sous le nom de « néo-libéralisme », tantôt le marxisme non marxien (car Marx ne répétait pas des schémas figés et irréalistes comme ses piètres disciples), tantôt le discours sur les droits de l’homme, où ceux-ci servent de référence au prêchi-prêcha du « politiquement correct » et d’instruments de subversion maniés par les services américains pour bouleverser les Etats qui résistent à leur hégémonie ou entendent garder des barrières quelconques pour préserver leurs outils industriels nationaux. Via une quantité d’ONG, ces idéologies figées et répétitives servent d’instruments dans une lutte sans répit contre les syncrétismes féconds dans les mondes arabe, turc ou orthodoxe. Le monde asiatique avait réagi contre cette instrumentalisation du discours sur les droits de l’homme dès le début des années 90, où les diverses doctrines de Clinton avaient imposé ce discours comme référentiel unique et non critiquable. Au fil du temps, ce référentiel, soustrait à toute critique, est devenu le socle inamovible du « politiquement correct », débouchant sur ce que Georges Orwell avait défini comme le « goodthink ». L’alliance paradoxale du « politiquement correct » et des fondamentalismes télé-évangéliques, chrétiens-sionistes ou salafistes a conduit la planète au blocage actuel, au chaos qui agite le « rimland » géopolitique de la Libye aux frontières de l’Iran et au Pakistan, à la confusion totale qui marque les esprits en Occident, où la caste politique est désormais incapable de distinguer ce qui peut consolider le Bien public de ce qui le disloque et le ruine. 
 
Ce chaos sur les « rimlands » méditerranéens, moyen-orientaux ou musulmans, de la frontière tunisienne à l’Indus est né de la volonté de l’hegemon américain. Au départ d’un soutien à apporter aux mudjahiddins afghans contre les protecteurs soviétiques d’un régime laïque à Kaboul, Zbigniew Brzezinski voulait se servir du levier islamiste pour finir par contrôler la Route de la Soie dans l’Asie centrale musulmane, soviétique jusqu’à la dislocation de l’URSS. Le fondamentalisme islamiste était alors un pur instrument et on n’imaginait pas à Washington que des éléments de ce golem à têtes multiples pourraient un jour devenir incontrôlables et poursuivre un agenda non dicté par une tierce puissance ou se montrer indisciplinés et commettre des actions non souhaitées par leurs commanditaires de départ. En 2012, Brzezinski lui-même constate l’échec de son projet stratégique (20) mais, malgré cet aveu, bien étayé, Washington a réactivé en 2013-2014 la stratégie qu’il préconisait en Ukraine. 
 
 
De la position centrale de l’Iran
 
Sur fond de quel autre projet, cette réactivation des projets initiaux de Brzezinski sur la « gateway region » ukrainienne  s’est-elle déployée ? Le projet de contrôler la Route de la Soie centre-asiatique est, simultanément, un projet d’unir politiquement, sous la férule d’un hégémonisme américain, la zone d’intervention virtuelle de l’USCENTCOM, le commandement militaire américain au centre de la masse continentale eurasiatique. L’espace géographique dévolu à l’USCENTCOM a pour centre l’Iran. Dans un premier temps, les Etats-Unis visaient à annuler le pouvoir d’attraction que ce centre iranien pouvait éventuellement déployer dans sa périphérie, de l’Egypte à l’Inde. Le rayonnement de la « civilisation iranienne » était un projet du Shah qui était parvenu à faire la paix avec les Saoudiens (annulant de la sorte l’antagonisme chiites/sunnites revenu à l’avant-plan pour ravager le Proche et le Moyen Orient aujourd’hui), à soutenir financièrement l’Afghanistan voisin, à tisser des liens féconds avec l’Inde, à forger des accords industriels et énergétiques avec l’Europe et à pactiser dans un projet gazier avec l’URSS de Brejnev. Il fallait briser ce rayonnement iranien sur le « rimland » de l’Océan Indien et le nouveau tandem pétrolier irano-saoudien. Le Shah, bien qu’officiellement « allié », devait dès lors être éliminé : on lui a balancé la révolution de Khomeiny pour ruiner ses projets et affaiblir ses partenaires européens qui venaient de vivre les Trente Glorieuses. Mais le golem Khomeiny s’est avéré récalcitrant et les projets atomiques, que l’ayatollah ne souhaitait pas développer (il avait lancé une « fatwa » contre les armes atomiques), ont été repris par Ahmadinedjad, figure diabolisée à souhait par le pouvoir médiatique américain sur la planète. L’Iran était décrété « Etat voyou ». Son pouvoir d’attraction n’était pas entièrement éliminé mais sérieusement limité. Cependant, l’Iran, de par sa centralité sur le territoire dévolu à l’USCENTCOM ou au « Greater Middle East », est incontournable. L’intervention en Afghanistan n’a apporté aucun autre résultat que le chaos au bout de quatorze ans. Onze ans de présence américaine en Irak se solde par un déchaînement de violence encore plus spectaculaire. D’où certains stratégistes envisagent une autre stratégie (21) : ôter à l’Iran le statut d’ « Etat voyou » et en refaire un allié afin de dominer le centre même de l’espace du « Plus grand Moyen Orient ». Cette stratégie, d’abord complètement isolée dans un « paysage idéologique américain » dominé par le bellicisme intransigeant des « néo-conservateurs » faisant chorus autour des deux présidents Bush, est désormais envisagée comme une solution possible par davantage de stratégistes, sans nul doute parce que les clivages religieux du Moyen Orient se sont avérés plus résilients que prévus. Les différences entre chiites et sunnites avaient été considérées comme superficielles, comme des enfantillages archaïques appelés à disparaître. La suite des événements a prouvé le contraire : les peuples du Moyen Orient tiennent à leurs religions et ne veulent pas se noyer dans l’océan des hommes sans substance et sans qualités que génère le libéralisme occidental. En Irak, le pouvoir chiite, mis en place par les Américains suite à l’élimination du nationaliste arabe sunnite Saddam Hussein, se sent plus proche de la « civilisation iranienne », dominée par l’islam chiite, que du wahhabisme sunnite saoudien, qui soutient désormais des forces djihadistes sunnites en Irak, pour éviter une extension géopolitique indirecte des « Perses », par chiites irakiens interposés, alors que, pourtant, ces chiites irakiens avaient été hissés au pouvoir par les Américains, alliés des Saoudiens : une contradiction majeure des stratégistes d’Outre-Atlantique qui aura des répercussions inattendues et catastrophiques. De même, l’Afghanistan, de langue iranienne (indo-européenne), où les Pachtounes dominants sont sunnites et où la minorité asiatique persophone des Hazaras est chiite, n’est toujours pas pacifié : les bases arrières pakistanaises des talibans, d’abord alliés puis ennemis, plongent le Pakistan dans le chaos ; l’Iran, lui, reste stable dans un environnement totalement bouleversé. L’élection de Hassan Rohani en 2013 a facilité l’apaisement mais le jeu demeure complexe et les relations irano-américaines ambigües, surtout parce qu’un alignement sur les BRICS pourrait s’avérer tout aussi intéressant pour l’Iran qu’un retour dans le système atlantiste global visant l’endiguement permanent de la Russie et de la Chine. Israël, qui a bénéficié jusqu’ici du statut de seul allié privilégié des Etats-Unis, craint le rapprochement irano-américain qui relativiserait considérablement sa position au Proche et au Moyen Orient où son ennemi le plus tenace reste le Hezbollah chiite libanais, iranophile par une sorte de nouvelle convergence panchiite, peu perceptible sur l’échiquier régional avant l’intervention américaine en Irak. Le regard à porter sur une éventuelle position rétrogradée d’Israël doit tenir compte d’une mutation notable : la tradition juive avait toujours été de s’allier avec les Perses contre les puissances venues de l’Ouest (les Romains puis les Byzantins), dans le souvenir du Cyrus de la Bible, expliquant aussi le patriotisme des juifs d’Iran ; Netanyahu, lui, pratique une politique juive « hérodienne », favorable à la puissance hégémonique venue de l’Ouest, en l’occurrence les Etats-Unis, qui prennent le relais d’une Angleterre que les ancêtres idéologiques du Likoud, son parti, avait soit combattue au nom de l’anticolonialisme soit favorisée au nom d’une alliance contre le fascisme et le nazisme.
 
De la stratégie eurasienne d’Obama
 
Dans ce contexte trouble et bouleversé, quelle est donc la stratégie eurasienne d’Obama ? Quels en sont les contours et les visées ?
 
 Obama vise, semble-t-il, à contrôler la Mer Noire, à réaliser à son profit les clauses du Traité de Paris de 1856 : arracher la Mer Noire à toute forme d’hégémonisme russe. L’objectif d’Obama est de contrôler ou d’empêcher l’utilisation maximale des gazoducs et oléoducs « South Stream » ; cette politique, une fois de plus, vise davantage l’Europe, premier concurrent des Etats-Unis et « ennemi métaphysique » dans la mesure où c’est l’Allemagne qui en est le centre névralgique et que tout retour de l’Allemagne à l’avant-plan sur l’échiquier politique et économique international, surtout par le biais d’un tandem énergétique germano-russe, est la hantise des anciens trotskistes devenus « néo-conservateurs » et bellicistes à tous crins car leur idéologie est inspirée in fine par les puritanismes les plus échevelés, ennemis de toute forme de diplomatie harmonieuse et d’équilibres syncrétiques.
 
2)     Le contrôle de la Mer Noire implique un retour des Etats-Unis et de l’OTAN en Géorgie et en Azerbaïdjan, en exploitant les ressources de l’allié turc, exactement comme au temps de la Guerre de Crimée.
 
3)     Ce projet de domination de l’espace pontique implique aussi d’aider financièrement l’Arménie à se désenclaver, alors qu’elle est un allié-clef de la Russie et, accessoirement, de l’Iran dans le Caucase.
 
4)     Même si cela n’apparaît pas directement aujourd’hui, ce faisceau de stratégies dans l’espace pontique doit aussi compter sur une réactivation de la subversion wahhabite en Tchétchénie et au Daghestan, de façon, cette fois, à interrompre potentiellement le transit des hydrocarbures non plus seulement à hauteur du Donbass ukrainien mais cette fois dans l’espace transcaucasien, entre la Mer Noire et la Caspienne. Nous aurions affaire, si cette stratégie finit par s’inscrire dans les faits, à une double interruption des flux énergétiques en direction de l’Europe. 
 
5)     La visée finale de cette stratégie pontique de l’ « administration » Obama est bien sûr d’affaiblir l’Europe, puisque la Russie vend alors ses hydrocarbures ailleurs en Asie, à des clients que les Etats-Unis ne peuvent guère influencer. Pour les Russes, la partie est nulle. Le North Stream achemine le gaz vers l’Allemagne, à l’abri de toute subversion dans l’espace pontique, mais le reste de l’Europe orientale et centrale est affaibli par le fonctionnement déficitaire du système South Stream, ce qui implique ipso facto un affaiblissement du centre germanique de l’Europe et une balkanisation es volontés européennes, mutatis mutandis, comme le craignait Metternich. 
 
6)     Au-delà de cet affaiblissement de l’Europe toute entière, la stratégie américaine actuelle semble vouloir joindre l’espace pontique à l’espace iranien, justement en agissant dans le Caucase, en Géorgie (l’antique Colchide), en Azerbaïdjan, en Arménie et sur le flanc septentrional de la chaîne montagneuse caucasienne. De la Roumanie à l’Afghanistan, nous verrions alors se reconstituer le verrou d’endiguement, rêvé par tous les stratégistes anglo-saxons depuis Pitt. Simultanément, ce verrou géopolitique sur le rimland qui courrait d’Ouest en Est serait doublé d’un verrou placé sur un axe nord-sud et couperait l’Europe, ennemi principal, de ses approvisionnements russes et caucasiens, ou ne tolérerait qu’un approvisionnement qui passerait par un contrôle turc, tandis que les hydrocarbures iraniens seraient déviés vers d’autres Etats clients. 
 
7)     Autre facette de cette stratégie entre Danube et Indus (sur l’antique territoire de l’Empire macédonien d’Alexandre le Grand) : centrer autour de l’Iran, redevenu ami, dépouillé de son statut infâmant d’ « Etat voyou », les territoires placés, de manière informelle et virtuelle, dans l’orbite de l’USCENTCOM ; simultanément, pour couper l’Europe et la Chine voire l’Inde d’autres approvisionnements en matières premières diverses et indispensables, puis pour prendre solidement pied en Afrique, en développant l’AFRICOM.
 
8)     La Chine ne doit pas seulement être contenue en Afrique, où elle a déployé une diplomatie sans imposer de contraintes idéologiques comme le fait l’Occident, mais aussi ailleurs, surtout dans le Pacifique. Il faut empêcher, mais ce sera difficile, son approvisionnement optimal en hydrocarbures, comme cela avait été pratiqué contre le Japon en 1940-1941. Pour parvenir à endiguer la Chine, on réhabilite l’OTASE, équivalent en Asie orientale de l’OTAN. On cherche à embrigader la Thaïlande et le Vietnam dans une politique d’endiguement et à empêcher la Birmanie (le Myanmar) de faire aboutir dans ses ports les terminaux pétroliers et gaziers de la Chine dans le Golfe du Bengale.
 
Cette politique internationale belligène d’Obama, qui n’est jamais qu’un avatar logique des stratégies guerrières pensées par les néoconservateurs avant ses mandats, a suscité, on s’en doute, la riposte « eurasienne » de la Russie et de la Chine :
 
1)     Les gazoducs sibériens acheminent désormais une bonne partie du pétrole et du gaz russes vers la Chine et non plus vers l’Europe, en passant par l’Ukraine secouée par des troubles civils, fabriqués par les ONG américaines.
 
2)     Remplacer le dollar par d’autres devises pour les échanges internationaux.
 
3)     Inclure l’Iran dans l’Organisation de Shanghai donc dans le groupe BRICS.
 
Cette priorité, qui consiste, en fin de compte, à contrôler tout le rimland de la Grèce à la Mer de Chine du Sud, est handicapée par le chaos persistant qui bouleverse le Proche Orient et la Mésopotamie irakienne. Ce chaos empêche l’organisation optimale, pourtant promise, d’un « Plus Grand Moyen Orient ». Ces désordres sanglants ne peuvent constituer un modèle séduisant. D’autres acteurs, en apparence alliés des Etats-Unis, poursuivent d’autres projets, comme le Qatar ou l’Arabie Saoudite qui ne se soucient guère de l’établissement d’un « Greater Middle East » et donnent la priorité à l’élimination de toutes les factions musulmanes qui ne s’alignent pas sur les canons rigoristes du wahhabisme saoudien. Cette priorité induit un état de guerre permanent de tous contre tous qui n’autorise aucune installation d’un pouvoir solide, syncrétique et pacificateur. Du coup, des voix s’élèvent pour dire « qu’il manque un Saddam » (22), corroborant ainsi les paroles prophétiques prononcées par le Raïs vaincu et écrasé au pied de la potence… L’Irak, disait-il, en cet instant fatidique, « était plongé dans un enfer ». Le baathisme, même sous la poigne très rude des militaires irakiens, était un système plus efficace, plus générateur d’ordre et de paix civile, que le chaos installé depuis l’invasion américaine. De même, Bachar El-Assad apparaît comme un allié potentiel contre les débordements incontrôlables de l’EIIL, en dépit des diabolisations qu’il a subies dans les médias au début de la guerre civile syrienne. La stratégie consistant à armer des factieux déséquilibrés ou d’anciens vaincus de guerres civiles antérieures ou des minorités religieuses et/ou ethniques ou des politiciens falots et véreux aspirant à s’emparer d’un pouvoir qu’ils ne pourraient pas tenir avec leurs seules forces s’avère un fiasco : il aurait mieux valu préconiser un développement harmonieux à la chinoise.
 
L’harmonie confucéenne, idéologie chinoise, asiatique, confucéenne ou bouddhiste recèle plus de possibles féconds que les fondamentalismes puritains américains ou wahhabites saoudiens. Et quand le fanatisme puritain se camoufle derrière une interprétation facile, médiatisable et caricaturale de l’idéologie des droits de l’homme, qui confine à l’hystérie avec Carter, Bill et Hillary Clinton ou encore Bernard-Henri Lévy, le chaos s’installe et l’enfer (pavé de bonnes intentions) descend sur terre comme en Libye, en Syrie, en Irak ou dans le Donbass. Les droits de l’homme, dans leur application, disaient déjà les Chinois au début des années 90 du 20ème siècle, doivent être tempérés par les messages pacificateurs des religions traditionnelles, surtout le confucianisme qui prêche l’harmonie. Qui dit religion apaisante dit automatiquement capacité à forger des syncrétismes harmonieux et féconds, comme le voulait le Shah avec son idée de « civilisation iranienne » qui est parvenu à signer une paix avec le roi Fayçal d’Arabie Saoudite, réduisant à néant, dans les années 70 du 20ème siècle, le contentieux pluriséculaire entre Chiites et Sunnites. Autre syncrétisme pacificateur : les baathismes syrien et irakien qui, bien que devenus ennemis, ont chacun procuré la paix intérieure à leurs pays respectifs. Quant au kémalisme, reposant sur le syncrétisme alaouite turc et sur l’appareil militaire (hostile aux fondamentalismes et aux terribles simplifications des zélotes religieux), il offrait, finalement, une plus large marge de manœuvre à la Turquie et ses dernières manifestations, avant la mise au pas fondamentaliste perpétrée par Erdogan, avaient fait montre de velléités eurasistes, liées idéologiquement à ses positions parfois pantouraniennes, plus conformes à la position pontique de la Turquie, réduite sur le plan territorial suite aux clauses du Traité de Lausanne de 1923 et dépouillée des ressources énergétiques de l’actuel Kurdistan irakien (gisements de Kirkouk et de Mossoul). 
 
L’alliance entre les puritains de Boston (avec leurs avatars télé-évangélistes, chrétiens-sionistes et autres), les trotskistes de la côte est, mués en néoconservateurs pour qui la notion trotskiste de « révolution permanente » s’est transformée en pratique de la « guerre permanente », et les wahhabites djihadistes saoudiens qui ont plongé la Libye, la Syrie et l’Irak dans le chaos, est une alliance que l’on peut sereinement qualifier de calamiteuse, vu l’absence de résultats acceptables au regard de la simple bienséance. Face à elle, l’eurasisme est donc un antidote où entrent en jeu les valeurs asiatiques, bouddhistes et confucéennes non dérivées du tronc abrahamique et les volontés syncrétiques des grands khans mongols dont Marco Polo fut un conseiller pendant dix-sept ans. A ce corpus de religions asiatiques et à cette volonté de syncrétisme s’ajoutent les idéaux équilibrants et apaisants que nous lègue Aristote, avec son idée de « nomos » de la terre, reprise au 20ème siècle par Carl Schmitt. Il ne s’agit nullement d’un « nomos » figé, comme pourrait nous le faire croire l’aristotélisme scolastique ou la pratique metternichienne en marge de la Sainte-Alliance, mais d’un « nomos » dynamique, que le philosophe Heidegger, sous l’impulsion du futur archévêque de Fribourg Conrad Gröber, a exploré, prouvant que les concepts grecs étaient plus « fluides », plus souples, que ne l’avaient imaginé les scolastiques : ceux-ci, prêtaient le flanc aux critiques, souvent antireligieux, qui percevaient l’aristotélisme des « Anciens » comme une charpente trop rigide, rejetée par les « Modernes ». Confucianisme chinois et aristotélisme tablant sur un « nomos » irrigué de concepts fluides impliquent la mise en œuvre d’une diplomatie planétaire diamétralement différente de la pratique occidentale dominante aujourd’hui et opposée à l’anti-diplomatie du néoconservateur Robert Kagan à l’époque du fameux Axe Paris-Berlin-Moscou de 2003 quand l’Europe et la Russie se sont opposées, de concert mais hélas trop brièvement, au bellicisme américain en Irak. Cet axe éphémère était une réactualisation de l’alliance implicite franco-austro-russe du 18ème siècle, flanquée des bonnes politiques maritimes du Roi Louis XVI et de la Tsarine Catherine. 
 
La réémergence d’un Axe Paris-Berlin-Moscou, difficile à raviver depuis la trahison du gaullisme par Sarkozy et Hollande, renoue avec les meilleurs traditions du siècle des Lumières, où les Lumières n’étaient pas réduites aux piètres schémas vociférés par un Bernard-Henri Lévy. Il s’agissait de neutraliser le cycle infernal des guerres mondiales et des guerres permanentes commencé avec la Guerre de Sept Ans en 1756 (23). L’eurasisme est donc cette réponse nécessaire et équilibrante à des forces génératrices de désordres criminels et destructeurs.
 
Robert Steuckers, octobre 2014 (rédaction finale, janvier 2015). 
 
Notes :
 
(1) Marlène LARUELLE, L’idéologie eurasiste russe ou comment penser l’empire, L’Harmattan, Paris, 1999.
(2) Christian W. SPANG, Karl Haushofer und Japan – Die Rezeption seiner geopolitischen Theorien in der deutschen und japanischen Politik, Iudicium Verlag, München, 2013.
(3) Robert KAPLAN, Monsoon – The Indian Ocean and the Future of American Power, Random House, New York, 2011.
(4) Christopher I. BECKWITH, Empires of the Silk Road – A History of Central Eurasia from the Bronze Age to the Present, Princeton University Press, Princeton, 2009.
(5) Tessa HOFMANN, Annäherung an Armenien – Geschichte und Gegenwart, Verlag C. H. Beck, München, 1997-2006.
(6) Sur Saul B. Cohen, cf. David CRIEKEMANS, Geopolitiek – ‘Geografisch geweten’ van de buitenlandse politiek ?, Garant, Antwerpen/Apeldoorn, 2007.
(7)   J. P. MALLORY & Victor H. MAIR, The Tarim Mummies. Ancient China and the Mystery of the Earliest Peoples from the West, Thames & Hudson, London, 2000.

(8) Reinhard SCHMOECKEL, Die Indoeuropäer - Aufbruch aus der Vorgeschichte, Verlag Bublies, Schnellbach, s.d.

 (9) Jean-Michel SALLMANN, Le grand désenclavement du monde – 1200-1600, Payot, Paris, 2011.
(10) Pour comprendre la volonté russe de se projeter vers le Pacifique, lire: Owen MATTHEWS, Glorious Misadventures – Nikolai Rezanov and the Dream of a Russian America, London, Bloomsbury, 2013-2014.
(12) Eberhard STRAUB, Der Wiener Kongress – Das grosse Fest und die Neuordnung Europas, Stuttgart, Klett-Cotta, 2014.
(13) Olivier BLANC, Les hommes de Londres – Histoire secrète de la Terreur, Paris, Albin Michel, 1989.
(14) Cf. notre article consacré à Constantin Frantz : in Jean-François MATTEI, Les Œuvres philosophiques (deux tomes), volume III de l'Encyclopédie philosophique universelle, Paris, PUF, 1992.
(16) John KING FAIRBANK, The Great Chinese Revolution 1800-1985, 1986, p. 81.
(17) Robert STEUCKERS, “Les amendements chinois au nouvel ordre mondial”, sur http://robertsteuckers.blogspot.be/2014/04/les-amendements-chinois-au-nouvel-ordre.html
(18) Giuseppe TUCCI, Les religions du Tibet et de la Mongolie, Payot, 1973.
(19) Pankaj MISHRA, Aus den Ruinen des Empires – Die Revolte gegen den Westen und der Wiederaufstieg Asiens, S. Fischer, Frankfurt a. M., 2013.
(20) Robert STEUCKERS, « Etonnantes révisions chez les grands stratégistes américains », cf. http://robertsteuckers.blogspot.be/2013/08/etonnantes-revisions-chez-les-grands.html
(21) Robert BAER, Iran – l’irrésistible ascension, J.C. Lattès, Paris, 2008; Trita PARSI, Treacherous Alliance – The Secret Dealings of Israel, Iran, and the U.S., Yale University Press, 2007; Barbara SLAVIN, Bitter Friends, Bosom Enemies – Iran, the U.S., and the Twisted Path to Confrontation, St. Martins Press, New York, 2007.
(22) Wayne MADSEN, “Missing Saddam”, cf. http://euro-synergies.hautetfort.com/apps/search/?s=missing+saddam
(23) Robert STEUCKERS, “Historical Reflections on the Notion of “World War””, cf. http://robertsteuckers.blogspot.be/2014/02/historical-reflections-on-notion-of.html

dimanche, 10 mai 2015

Lafcadio Hearn and Japanese Buddhism

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Lafcadio Hearn and Japanese Buddhism

by Kenneth Rexroth

Ex: http://www.bobsecrets.org

“In attempting a book upon a country so well trodden as Japan, I could not hope — nor would I consider it prudent attempting — to discover totally new things, but only to consider things in a totally new way. . . . The studied aim would be to create, in the minds of the readers, a vivid impression of living in Japan — not simply as an observer but as one taking part in the daily existence of the common people, and thinking with their thoughts.”

So Lafcadio Hearn wrote to Harper’s Magazine in 1889 just prior to leaving for Japan. He kept this promise so well that by his death in 1904 (as Koizumi Yakumo, a Japanese citizen) he was acclaimed as one of America’s greatest prose stylists and the most influential authority of his generation on Japanese culture. That reputation has dimmed somewhat since then. Changing tastes in literary styles have made Hearn’s work seem old-fashioned, and Japan’s astonishing absorption of Western industrial methods and industrial values have made him for a time irrelevant.

Now interest in ancient Japanese culture and religion is again on the rise, and Hearn’s work, devoted as it is to what he perceived as lasting and essential in Japanese life, is experiencing a revival. From his essays and stories emerges a sensitive and durable vision of how Buddhism was and still is lived in Japan — the ancient Buddhist traditions, rituals, myths, and stories that are still preserved, and their effects upon the beliefs and daily life of ordinary Japanese people.

lafcadio-hearn-1406.jpgLafcadio Hearn was born on the Ionian island of Santa Maura in either June or August 1850 and died in Okubo, Japan in 1904. His father was an Irish surgeon major stationed in Greece and his mother a Greek woman, famous for her beauty. It was she who named him Lafcadio, after Leudakia, the ancient name of Santa Maura, one of the islands connected with the legend of Sappho. In a relatively short lifespan of fifty-four years he managed to live several different literary lives.

From Greece, at two years of age, he went to Ireland, where his father soon obtained a dissolution of marriage from his mother. She was sent back to Greece. His father quickly remarried and went off to India. That is the last Hearn saw of either of them.

His formal education consisted of one year at a Catholic school in France (he just missed Guy de Maupassant, who entered the school a year later and who later became one of his literary idols), and four years at St. Cuthbert’s in England, where he lost one eye in a playing field accident. The disfigurement (the blinded eye was whitened, the good eye protruded from overuse) helped to make Hearn a painfully sensitive and shy person for the rest of his life. At seventeen, as a result of financial and personal misfortunes in the family, he was withdrawn from school. A year later, his uncle gave him passage money to America and advised him to look up a distant relative in Cincinnati. From then on Hearn had to make his own way in the world.

After a year of homelessness and near-starvation in Cincinnati, Hearn got a job as an editor for a trade journal and then as a reporter for the daily Enquirer. His assignment was the night watch, his specialty sensational crimes and gory murders. He had good contacts in the coroner’s office, and his small, shy figure and one-eyed face did not arouse suspicion among the street people. His stories, with their ghastly descriptions, were frequent features that titillated the Enquirer’s readers. The editor reluctantly fired Hearn when rumors began to circulate that he was living with a mulatto woman whom he insisted he had married. (He had, but Ohio law refused to recognize mixed marriages.)

Another daily newspaper, the Cincinnati Commercial, hired him immediately. Here Hearn was allowed to contribute brief scholarly essays, local color stories, and prose poems, as well as the sensational stories that had got him his reputation. But he was restless with this kind of newspaper work, and sick of Cincinnati. In 1877 he quit the Commercial and left for New Orleans.

There he found work as a reporter for the struggling Item, though what he reported was anything he fancied, most often sketches of Creole and Cajun life. His Item essays were eccentric, flamboyant, and often self-indulgent, but they caught the eye of New Orleans’ literary establishment. When the city’s two largest newspapers merged to form the Times-Democrat, Hearn was invited to be its literary editor. He translated and adapted French stories (principally Gautier, Maupassant, Flaubert, and Loti — none of whom yet had a reputation in America); he wrote original stories in the lavish prose style he was perfecting at that time; and he collected local legends and factual narratives. His subjects ranged from Buddhism to Russian literature, from popularizations of science to European anti-Semitism. Altogether he offered the people of New Orleans such unpredictable and exotic fare that his reputation soon spread throughout the South. By this time he had become a disciple of his contemporary, Robert Louis Stevenson (or perhaps vice versa: they developed similarly mellifluous prose styles and shared a fondness for fantastic and exotic subject matter). Hearn was enormously popular. From these years in New Orleans date Stray Leaves from Strange Literatures, 1884, Some Chinese Ghosts, 1887, and a novel, Chita, 1889.

In 1887 Hearn went to the West Indies for Harper’s Magazine and produced Two Years in the French West Indies, 1890, and his last novel, Youma, 1890, an unprecedented story about a slave rebellion.

In 1890 he went to Japan for Harper’s but soon became a school teacher in Izumo, in a northern region then little influenced by Westernization. There he married Koizumi Setsuko, the daughter of a Samurai. In 1891 he moved to Kumamoto Government College.

Hearn was by now well known in America as an impressionistic prose painter of odd peoples and places. For this he was at first celebrated and later deprecated. Yet much of his Japanese work is of an entirely different quality and intention. He wrote to his friend Chamberlin in 1893, “After for years studying poetical prose, I am forced now to study simplicity. After attempting my utmost at ornamentation, I am converted by my own mistakes. The great point is to touch with simple words.” The Atlantic Monthly printed his articles on Japan and syndicated them to a number of newspapers. They were enormously popular when they appeared and became even more so when they were published in two volumes as Glimpses of Unfamiliar Japan, 1894.

In 1895 Hearn became a Japanese citizen and took the name of Koizumi Yakumo. In 1896 he became professor of literature at Tokyo Imperial University, a most prestigious academic position in the most prestigious school in Japan. From then until his death he produced his finest books: Exotics and Retrospectives, 1898, In Ghostly Japan, 1899, Shadowings, 1900, A Japanese Miscellany, 1901, Kwaidan, 1904, Japan, An Attempt at Interpretation, 1904. These were translated into Japanese and became at least as popular in Japan as they did in America.

During the last two years of his life, failing health forced Hearn to give up his position at Tokyo Imperial University. On September 26, 1904, he died of heart failure. He had instructed his eldest son to put his ashes in an ordinary jar and to bury it on a forested hillside. Instead, he was given a Buddhist funeral with full ceremony, and his grave is to this day a place of pilgrimage perpetually decorated with flowers.

At the turn of the century, Hearn was considered one of the finest, if not the finest, of American prose stylists. He was certainly one of the masters of the Stevensonian style. As literary tastes changed, he was thought of more as a writer of pretty but dated essays about Japanese tame crickets and of sentimental ghost stories. After his death, his literary reputation was further damaged by the publication of several collections of his florid earlier work. His all-but-final reputation was as a lush, frothy stylist whose essays and stories were about as important as the pressed flowers likely to be found between their pages.

In fact, Hearn’s Japanese writings demonstrate economy, concentration, and great control of language, with little stylistic exhibitionism. Their attitude of uncritical appreciation for the exotic and the mysterious is as unmistakably nineteenth century as the fine prose idiom with which it is consistent.

lafc2.jpgIn spite of the incredible changes that have taken place in Japan since Hearn’s death in 1904, as an informant of Japanese life, literature, and religion he is still amazingly reliable, because beneath the effects of industrialization, war, population explosion, and prosperity much of Japanese life remains unchanged. For Hearn the old Japan — the art, traditions, and myths that had persisted for centuries — was the only Japan worth paying attention to. Two world wars and Japan’s astonishing emergence as a modern nation temporarily extinguished the credibility of Hearn’s vision of traditional Japanese culture. But both in the West and in Japan interest in the old forms of Japanese culture is increasing. In Tokyo there are still thousands of people living the old life by the traditional values alongside the most extreme effects of Westernization. Pet crickets, for example, still command high prices, and more people apply their new prosperity to learning tea ceremony, calligraphy, flower arrangement and sumi-e painting than ever before. Ghost stories like those told by Hearn are popular on television; three of his own were recently combined to make a successful movie that preserves his title, Kwaidan.

One of the foreigners’ (and Westernized, secularized Japanese intellectuals’) myths of Japan is that the Japanese are a fundamentally secular, irreligious people. Nothing could be less true. The great temples swarm with pilgrims and are packed during their major festivals. Buddhism is more popular than ever. Shinto and Shingon and Tendai Buddhism perpetuate rites that began long before the dawn of Japanese history.

Although it is no longer true, if it ever was, that Japan is totally “Westernized,” it is certainly the most Post-Modern of all the major nations today. With an economy which has ceased to be based on the mechanical, industrial methods of the nineteenth century (really because the old industrial capital structure was destroyed and everything dates from 1946), Japan has moved into the electronic age more completely than any other nation. Yet any Japanese who wishes can still make immediate contact with the Stone Age.

Hearn foresaw the industrialization of Japan and her development of imperialist ambitions. As much as possible he avoided the atmosphere of modernization, spending his summers away from Tokyo at Yaizu, a small fishing village where today there is a Hearn monument. His happiest period in Japan was the early years he spent as a country school teacher in Matsue on the southwest coast. His house and garden there are still preserved, and a Hearn museum is located next door. The essay “In a Japanese Garden” in his book Glimpses of Unfamiliar Japan describes his home and Matsue.

Beginning with Charles Eliot’s Japanese Buddhism, there has grown up an immense bibliography of Buddhological works in Western languages. Since World War II, there is an ever greater store in the United States of books on Zen, which has become a popular form of Existentialism. There is no interpreter of Japanese Buddhism quite like Hearn, but he is not a Buddhologist. Far from it. Hearn was not a scholar, nor was he in the Western sense a religious believer. What distinguishes him is an emotional identification with the Buddhist way of life and with Buddhist cults. Hearn is as good as anyone at providing an elementary grounding in Buddhist doctrine. But what he does incomparably is to give his reader a feeling for how Buddhism is lived in Japan, its persistent influence upon folklore, burial customs, children’s riddles, toys for sale in the marketplace, and even upon the farmer’s ruminations in the field. For Hearn, Buddhism is a way of life, and he is interested in the effects of its doctrine upon the daily actions and common beliefs of ordinary people. Like the Japanese themselves, he thinks of religion as something one does, not merely as something one believes, unlike the orthodox Christian whose Athanasian Creed declares: “Whosoever would be saved, it is necessary before all things that he believe . . .”

One of the things Hearn admires about Buddhism is its adaptability to the spiritual and historic needs of a people. If they need a pantheon of gods, Buddhism makes room for them. If they need to fix upon a savior, Buddhism provides one. But the Buddhist elite, the more learned monks, never lose sight of the true doctrine. I will never forget a symposium in which I once took part along with a number of Buddhist clergy. A Westerner asked the leading Shinshu abbot, “Do you really believe in the existence of supernatural beings like Amida and Kannon, and in a life after death in the True Land Paradise of Amida?” The abbot answered very quietly, “These are conceptual entities.” In fact the Diamond and Womb Mandalas with their hundreds of figures (sometimes represented by quasi-Sanskrit letters) are tools for meditation. The monk moves from the guardian gods at the outer edge, in to the central Buddha — the Vairocana — and at last beyond him to the Adi Buddha — the Pure, unqualified Void.

Yet, popular rather than “higher” Buddhism is Hearn’s main subject, and he always is careful to distinguish between the metaphysically complex Buddhism of the educated monks and the simpler, more colorful Buddhism of the ordinary people.

The only peculiarity in Hearn’s Buddhism is his habit of equating it with the philosophy of Herbert Spencer, now so out of date. However, this presents few difficulties for the modern reader, as his Spencerianism can be said to resemble Buddhism more than his Buddhism resembles Herbert Spencer. Also, it is not Spencer’s Darwinism, “red in tooth and claw,” but Spencer’s metaphysical and spiritual speculations that have influenced Hearn’s interpretation of Buddhism. We must not forget that Teilhard de Chardin, who certainly is not out of date, is, in the philosophical sense, only Herbert Spencer sprinkled with holy water. Philosophies and theologies come and go, but the group experience of transcendence is embedded in human nature, and when it is abandoned, theology, philosophy, and eventually culture, perish.

It is difficult to think of a better guide to Japanese Buddhism for the completely uninformed than Hearn, though there are others who may be his equals. Certainly the popularizers of Zen are not. Zen, after all, is a very special sect, in many ways more Vedantist or Taoist than Buddhist. And of course as the religion of the Japanese officer caste and of the great rich it plays in Japan a decidedly reactionary role. Hearn’s Buddhism is far less specialized than Zen. It is the Buddhism of the ordinary Japanese Buddhist of whatever sect.

The first distinction to be made in any consideration of Buddhism itself is that Christianity is the only major religion whose adherents live lives and hold beliefs diametrically opposed to those of its founder. Nothing could be less like the life of Jesus than that of the typical Christian, clerical or lay. Imagine thirteen men with long beards, matted hair, and probably lice, in ragged clothes and dusty bare feet, taking over the high altar at St. Peter’s in Rome or the pulpit of a fashionable Fifth Avenue sanctuary. The Apostolic life survives in only odd branches of Christianity: the Hutterites, some Quakers, even Jehovah’s Witnesses, but not, as everyone knows, in official and orthodox denominations. Catholicism carefully quarantines such people in monasteries and nunneries where a life patterned on that of the historic Jesus is not wholly impossible to achieve. The opposite is true of Buddhism. No matter how far the sect — Lamaism, Zen, or Shingon — may have moved from the Buddhologically postulated original Buddhist Order, all sects of Buddhism are pervaded by the personality of the historic Siddhartha Gautama.

The historicity of almost all the details of what are generally considered to be the earliest Buddhist documents is subject to dispute and in many instances is improbable. The earliest surviving Life of Buddha was written hundreds of years after his death. The prevailing form of Buddhism in Japan, Mahayana, seems to Westerners more like a group of competing, highly speculative philosophies than a religion. The complete collection of Hinayana, Mahayana and Tantric Buddhist texts makes up a very large library. In addition, there are many thousands of pages of noncanonical commentary and speculation. Yet out of it all emerges, with extraordinary clarity, a man, a personality, a way of life and a basic moral code.

lafc.jpgBuddha was born in Kapilavastu, now Rummimdei, Nepal, sometime around 563 BC and died about 483 BC in Kusimara, now Kasia, India. His personal name was Siddhartha Gautama. Buddha, The Enlightened One, is a title, not a name, as is Shakyamuni, the saint of the Shaka clan. In Japan, the historic Buddha is commonly known as Shakya. He was a member of the Kshatriya warrior caste, the son of the ruler of a small principality.

For six years Buddha lived with five other ascetics in a grove at Uruvela practicing the most extreme forms of self-mortification and the most advanced techniques of Hatha Yoga, until he almost died of starvation. He gave up ascetic life, left his companions, and traveled on. At Bodh Gaya he seated himself under a Bo tree (ficus religiosa) and resolved not to get up until he had achieved true enlightenment. Maya, the personification of the world’s illusion, with his daughters and all the attendant incarnate sins and illusions, attacked him without success. Gautama Siddhartha achieved final illumination, entered Nirvana and arose a Buddha: an Enlightened One. He returned to his five companions at Uruvela and preached to them the Middle Way between self-indulgence and extreme asceticism. They were shocked and repudiated him, but after he had preached to them the Noble Eightfold Way and the Four Truths, they became the first Buddhist monks.

The first Truth is the Truth of suffering: birth is pain, old age is pain, sickness is pain, death is pain, the endless round of rebirths is pain, the five aggregates of grasping are pain. The second Truth is the cause of pain: the craving that holds the human being to endless rebirth, the craving of the passions, the craving for continued existence, the craving for nonexistence. The third Noble Truth is the ending of pain: the extirpation of craving. The fourth Noble Truth is the means of arriving at the cessation of pain: the Noble Eightfold Path, which is right views, right intentions, right speech, right action, right livelihood, right effort, right mindfulness, right concentration (or contemplation). This doctrine is the essence of Buddhism, common to all of its otherwise divergent sects. It is always there, underlying the most extreme forms of Tantrism or Amidism. It produces in the personality of the devout Buddhist what the Japanese would call the iro, the essential color of the Buddha-life.

As Hinduism was taking form in the Upanishads, it began to teach the doctrine of the identity of the individual self, the Atman, and of the universal self, Brahman as Atman. Buddha attacked the Atman doctrine head-on, denying the existence of the individual or absolute self. He taught that the self is simply a bundle of skandhas, the five aggregates of grasping: body, feeling, perception, mental elements, and consciousness. The skandhas that comprise the self are momentary and illusory in the flux of Being — but they do cause and accumulate karma, the moral residue of their acts in this life and in past lives. It is karma which holds the aggregates embedded in the bonds of craving and consequence until the skandhas disintegrate in the face of Ultimate Enlightenment. In the most philosophical teaching of Buddhism, it is the karma and the skandhas which reincarnate. The individual consciousness or soul, as we think of it, disappears. But the universal belief in the reincarnation of the individual person has always overridden this notion. The ordinary Buddhist in fact believes in the rebirth of the self, the atman.

It is these doctrines which distinguish Buddhism. Many ideas which we think of as especially Buddhist are actually shared by Hinduism, by Jainism, and in fact by many completely secular modern Indians — transmigration, Yogic practices (some modern Buddhologists have held that Buddhism is only a special form of Yoga, anticipating its final synthesis in the Yoga Sutras of Patanjali). Vedic gods appear at all the crucial moments in Buddha’s life, from his conception to his entry into final Nirvana. Some time after its inception, Buddhism developed the practice of bhakti, personal devotion to a Savior, parallel to that of Hinduism. But always what distinguishes Buddhism is the Buddha Way, the Buddha-life, the all-pervasive personality of its founder, as the personality of Krishna in the Bhagavad Gita does not.

The fifty years after his illumination Buddha spent traveling and preaching, usually with a large entourage of monks. In his eightieth year he stopped at the home of Cunda the smith, where he and his followers were given a meal of something to do with pigs. The language is obscure — pork, pigs’ food, or something that had been trampled by pigs. Buddha became ill and later stopped in the gardens of Ambhapala, where he announced to his monks that he was about to enter Parinirvana, the final bliss. He lay down under the flowering trees and died, mourned by all creation, monks, laymen, gods, and the lowest animals. His last words were, “The combinations of the world are unstable by nature. Monks, strive without ceasing.”

This is the account preserved by the Pali texts, the sacred books of the Theravada Buddhists, of the religion of Ceylon, Burma, and the countries of the Indo-Chinese peninsula. Pali is a dialect of a small principality in Northern India, now forgotten in its homeland. The Pali texts are earlier than all but fragments of Buddhist Sanskrit documents, but this does not necessarily mean that the Hinayana (“The Lesser Vehicle”) Buddhism which they embody is the most primitive form of the religion. Theirs is simply the religion of the Theravada, “The religion of the Elders,” one of the early sects. However, up until the reign of Ashoka, the saintly Buddhist emperor who ruled more of the Indian subcontinent than anyone before him, Buddhism seems to have been a more or less unified religion resembling the later Hinayana. From the reign of Ashoka to the beginning of the Christian era two currents in Buddhism began to draw more and more apart until Mahayana, “The Greater Vehicle,” became dominant in the North and in Java. All the forms of Japanese Buddhism with which Hearn came into contact are rooted in the Mahayana tradition.

The many Mahayana texts are differentiated from the postulated Buddha Word as it appears in Pali by several radically different, indeed contradictory, beliefs and practices. In Hinayana man achieves Nirvana, or advances towards it in a future life, solely by his own efforts to overcome the accumulated evil karma of thousands of incarnations. There is devotion to the Founder as the Leader of the Way, but no worship, because there is nothing to worship. The difference is the same as that which the Roman Catholic Church calls dulia, adoration of the saints, and latria, adoration of God. Mahayana introduced the idea of saviors, Bodhisattvas, who have achieved Buddhahood but who have taken a vow not to enter Nirvana until they can take all sentient creatures with them. As saviors they are worshipped with a kind of hyper-dulia, as is the Blessed Virgin in Roman Catholicism. Buddhism was influenced by the great wave of personal worship that swept through India, bhakti, the adoration of Krishna, the incarnation of Vishnu, or of Kali, the female embodiment of the power of Shiva. At least theoretically above the Bodhisattvas arose a pantheon of Buddhas of whom Vairocana was primary. Later, an Adi-Buddha was added above him. It is disputable if either properly can be called the Absolute. If there is any absolute in Buddhism, it is Nirvana, which in fact means the religious experience itself. From Vairocana emanate the four Dhyana Buddhas, the Buddhas of Contemplation, of whom Amida is the best known, and of whom the historic Shakyamuni is only one of four, although in his most transcendental form he can be equated with Vairocana or the Adi Buddha.

lafc4.jpgThe story of the development of Mahayana as it spread from what is now Afghanistan and Russian Turkestan to Mongolia and Indonesia to Tibet, China and Japan, while it died out in India, would take many thousands of words to tell. There are traces of Buddhism in China two hundred years or more before the Christian era. Its official introduction is supposed to have occurred in the first century AD. From then until the Muslim conquest of India, Chinese pilgrims visited India and brought back caravan loads of statuaries and sutras (sacred texts) which were translated into Chinese.

Indian missionaries emigrated to China and taught and translated. Buddhism was introduced into Korea in the fourth century and had thoroughly established itself in the three countries of the peninsula by the seventh. From there it passed to Japan in the sixth century.

The first missionaries converted the Soga Clan, which was then the power behind the Japanese throne. For the greater part of a century Buddhism was almost exclusively the religion of a faction of the nobility, and its fortune varied with the factional struggles of the court. In 593 AD Prince Shôtoku became the effective head of state. His knowledge of Buddhism and of the more profound meanings of Mahayana was extraordinary. He not only saved Buddhism from rapidly becoming a cult of magic and superstition, but like Ashoka in India before him, he went far to make it a religion of the people. He copied sutras in characters of gold on purple paper. He preached the doctrines of Mahayana to the common people as well as to the court. He established hundreds of monasteries, nunneries and temples. Not least, he promulgated a kind of charter which modern Japanese called The Seventeen Article Constitution, in which Buddhist ethics and, to a lesser degree, Confucianism were established as the moral foundations of Japan. To this day he is regarded by many as an avatar of Avalokiteshvara, Kuan Yin in Chinese and Kannon or Kwannon in Japanese — the so-called Goddess of Mercy and the most popular of all Bodhisattvas.

By the eighth century Buddhism had become Japan’s official state religion, a feat Hearn credits to Buddhism’s absorption and expansion of the older Shinto worship of many gods, ghosts, and goblins (the gods, Buddhas or Bodhisattvas, the ghosts beings in transit from one incarnation to another, and the goblins, gakis, beings suffering in a lower state of existence). By the thirteenth century most of the major forms of Japanese Buddhism — a religion quite distinct from Buddhism elsewhere in the world — had been established, though minor sects continued to proliferate.

Ten large sects dominate Japanese Buddhism. The oldest of these are Tendai and Shingon. First was Tendai, established by the monk Saichô in 804 on Mt. Hiei northeast of Kyoto (Heian kyo), facing the most inauspicious direction. Not long afterwards the monk Kukai returned from China and introduced Shingon, which became the Japanese form of Tantric Buddhism. In China, Tendai attempted a synthesis of the various schools and cults in the great complex of monasteries on Mt. T’ien Tai. The similar monastic city on Mt. Hiei sheltered a wide variety of cults, doctrines, and philosophies. Basically, however, Japanese Tendai modified what in India was known as “right-handed” Tantrism, which we see today in the Yellow Hat sect of Tibetan Lamaism in exile. All the great Buddhist sutras were studied, the doctrine of the Void, the doctrine of Mind Only, the vision of reality as the interpenetration of compound infinitives of Buddha natures of the Avatamsaka Sutra, and the complex panpsychism of the Lankavatara Sutra. Most popular, however, was the Lotus Sutra (Hokkekyo in Japanese), the Saddharma Pundarika Sutra, the only major Buddhist document a Japanese lay person is at all likely to have read. Tendai is a ceremonial religion, and only in recent years has it done much for the laity except to permit them to participate in pilgrimages and to watch public ceremonies.

Shingon is even more esoteric than Tendai and is in fact Japanese Lamaism. Its doctrines are occult, its mysteries are not divulged to the people, and many of its rites are kept secret. The worship of Buddhas and Bodhisattvas as sexual dualities or as terrifying wrathful figures is not as common in Japan as in Tibet, though in both cultures the emphasis on magic formulas, gestures, spells and special methods of inducing trance remains essential. It is not known how many Tantric shastras (scriptures secondary to sutras) survive and are studied in Shingon monasteries, but recent discoveries and paintings of this literature are read by the more learned Japanese monks. “Left-handed” Tantrism, with its cult of erotic mysticism, survives underground in Tachigawa Shingon.

The worship of Amida which began in India around the advent of the Christian era, almost certainly under the influence of Persian religion, effected a complete revolution in Japanese Buddhism when it was introduced in the ninth century. Originally sheltered within the Tendai sect, Amidism grew to be the most popular form of Buddhism in Japan — and the one with which Hearn was most familiar. Amida is the Buddha of Endless Light whose paradise, The Pure Land, is in the west. He has promised that any who believe in him and call on his name will be saved and at death will be reborn in his Pure Land. Buddha, of course, insisted that by oneself one is saved and thus achieves, not paradise, but Nirvana, which far transcends any imaginable paradise. Hearn, however, observed that few Japanese even knew of the concept of Nirvana. For them Amida’s Pure Land was the highest heaven imaginable. Buddha also forbade worship of himself or others and considered the gods inferior to human beings because they could not escape the round of rebirths and enter Nirvana. Amidism, as a gesture to orthodoxy, teaches that the older Buddhism is too hard for this corrupt age and that the Pure Land, unlike other paradises, provides a direct stepping stone to Nirvana. As the Amidist sects developed in Japan, the doctrine of salvation by faith became more and more extreme. At first, it was necessary to invoke the name of Amida many times a day and especially with one’s last words, but finally one had only to invoke it once in a lifetime. This was enough to erase the karma, the consequences, of a life of ignorance and sin.

The Japanese monk Nichiren, who played a role not unlike that of the Hebrew Prophets, taught that salvation could be won by reciting the words “Namu Myohorengekyo,” “Hail to the Lotus Sutra!” The Lotus Sutra is a sort of compendium of Mahayana Buddhism, lavishly embroidered with miraculous visions, with thousands upon thousands of Buddhas, Bodhisattvas, gods, demigods and lesser supernatural beings. But its important chapter is the Kannon (Avalokiteshvara), which raises the Bodhisattva to a position similar to that of Amida, The Savior of the World, “He Who Hears The World’s Cry.” The earliest Kannon statues and paintings seem to have reached Japan from the oasis cities of Central Asia. Their peculiar sexlessness led the Japanese, as it did the Chinese, to think of the Bodhisattva as a woman. Not just Westerners, but most Japanese, refer to him as the Goddess of Mercy, and cheap modern statues which depict him holding a baby bear a striking resemblance to popular representations of the Virgin Mary.

The secret of the tremendous success of Amidism and Nichirenism is that they are congregational religions. The largest of all Buddhist sects, the Amidist Jodo-Shinshu, is in this sense much like a modern Christian denomination. But in other respects, and despite its tremendous pilgrimages, Buddhism seems inaccessible to the common Japanese. Very few people know anything about the profound and complex metaphysics of the Mahayana speculation. A surprising number do know the life of Buddha as it is told in Hinayana, which scarcely exists in Japan, and do try to model their lives on the Buddha-life — with remarkable success. But for most secular Japanese, a Buddhist monk is just a kind of undertaker, to be called upon only when somebody dies.

Zen Buddhism cultivated a special sensibility that many Japanese people think of as Japanese. The tea ceremony, sumi-e ink painting, the martial arts (archery, sword play, jiu-jitsu, judo, aikido, wrestling), flower arrangement, pottery, and haiku survive as creative expressions of the Zen sensibility in pursuit of perfection. But this sensibility has weakened in most modern Japanese.

Zen is often translated as Enlightenment (Ch’an or Dhyana), but it means something like illumination, specifically illumination achieved by systematic religious meditation of the kind we identify as yoga. It is supposed to have been introduced to China by a missionary Indian monk, Bodhidharma, probably in the sixth century. It spread to Japan in the thirteenth as the long civil wars were beginning, became popular with the military castes and the great rich, and for a long time dominated the intellectual and artistic life of the country. Zen owed its powerful influence to the fact that it began as a revolt against the Buddhist cults of its time and reverted to what the nineteenth century was to call “Primitive” Buddhism. It rejected the salvation by faith and the devotional worship of Amidism, the cults of Kannon and the Lotus Sutra (“By yourself alone shall you be saved,” says Gautama). It reinstated yogic meditation with a view to final enlightenment as the central and essential practice of the Buddhist religious life. Finally, it reinstated Shakyamuni himself, Shaka, as he is known in Japanese: its special interpretation of the Buddha-life is modeled on his.

Since World War II, Zen Buddhism has become enormously popular in the West, and largely in response to its reception here it has seen an intellectual revival in Japan. Although Hearn was familiar with Zen theories and practices, and had Zen Buddhist friends, he wrote little about the sect that was to become the most influential in the West. Neither Zen as a manifestation of aristocratic traditions nor Zen as a popular fad interested him. Instead, he kept his eye on what had persisted in Japanese Buddhism through the centuries among the farmers, fishermen, and other poor folk. Many of their beliefs inform their stories, and many of their customs in turn have stories behind them. It was the survival of Buddhism in such forms that above all else engaged Hearn.

Hearn’s role in the spread of Buddhism to the West was a preparatory one. He was the first important American writer to live in Japan and to commit his imagination and considerable literary powers to what he found there. Like the “popular” expressions of Buddhist faith that were his favorite subject, Hearn popularized the Buddhist way of life for his Western readers. And he was widely read, both in his articles for Harper’s Magazine and the Atlantic Monthly, and in his numerous books on Japan. Hearn’s essays, with their rich descriptions and queer details, almost never generalizing but staying with a particular subject, always backed by the likeable and enthusiastic personality of Hearn himself, and always factually reliable, satisfied the vague and growing curiosity of his American readers about the mysterious East.

At St. Cuthbert’s school, at age fifteen, Hearn had discovered that he was a pantheist. That is not unusual for a fifteen-year-old, and the fact that pantheism is unaccepted in Christian doctrine or in Western philosophical thought normally suffices to extinguish the common adolescent philosophy or to transmute it to something less vulnerable. But the idea stuck with Hearn, and when finally, at forty, he arrived in Japan, he was delighted to find that he could now exercise and explore his intuition of God-in-All. If Hearn entered Japanese culture and achieved understanding of Japanese Buddhist (and Shinto) thought with unprecedented rapidity for a Westerner, it is because his own spirit had always longed for an atmosphere in which his belief in the sentience and blessedness of all Nature could flourish.

Hearn never became a Buddhist, and he remained skeptical about certain of Buddhism’s key doctrines — such as the relationship of karma and rebirth — but he passionately believed that Buddhism promoted a far better attitude toward daily life than did Christianity. It would be up to more scholarly and less imaginative writers to begin to translate and preach specific Buddhist doctrines, but Hearn has done much to translate the spirit of Japanese Buddhism and to prepare Western society for it.

KENNETH REXROTH
1977

 

This essay was originally published as the Introduction to The Buddhist Writings of Lafcadio Hearn (1977). It was reprinted in World Outside the Window: Selected Essays of Kenneth Rexroth (1987). The Buddhist Writings collection is out of print, but dozens of other Hearn books are still available.

Copyright 1987 Kenneth Rexroth Trust. Reproduced by permission of New Directions Publishing Corp.

 

Zentralasien – Die neue Zielscheibe für die USA

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Zentralasien – Die neue Zielscheibe für die USA

F. William Engdahl

Seit der Zeit, als die CIA mehr als 100 Mudschahedin, islamische Gotteskrieger – unter ihnen ein fanatischer Saudi namens Osama bin Laden – für einen zehn Jahre währenden Stellvertreterkrieg gegen Einheiten der Sowjetarmee in Afghanistan bezahlte und ausbildete, ist Washington von der Idee besessen, weit nach Zentralasien vorzudringen, um einen Keil zwischen China und Russland zu treiben.

Ersten Versuchen während der Anwesenheit amerikanischer Truppen in Afghanistan nach dem 11. September 2001 war nur mäßiger Erfolg beschieden. Jetzt will es Washington offenbar erneut versuchen. US-Botschafter Richard M. Miles wurde sogar aus dem Ruhestand zurückgerufen, um eine neue Farbenrevolution in die Wege zu leiten.

Washington fühlt sich offenbar zu der neuen Konzentration auf Zentralasien gedrängt. Denn weit davon entfernt, sich den finanziellen Sanktionen der USA und der EU zu beugen, wirkt Russland dynamischer denn je und schließt allerorten strategisch wichtige Verträge über wirtschaftliche und militärische Zusammenarbeit ab. Und Russlands eurasischer Nachbar, die Volksrepublik China, präsentiert Pläne für den Bau von Öl- und Gaspipelines und Hochgeschwindigkeits-Eisenbahnverbindungen quer über den eurasischen Kontinent bis nach Russland. Darauf scheint Washington nun zu reagieren.

Das Problem der Neokonservativen in Washington liegt in ihrer mangelnden Kreativität, die Folgen ihres Vorgehens zu verstehen, genauer gesagt: Sie sind reichlich dumm. Und ihre Tricks sind inzwischen allgemein bekannt, nicht nur in Moskau, sondern auch in Usbekistan, Kirgistan und anderen ehemaligen zentralasiatischen Teilrepubliken der Sowjetunion.

Der kommende Wirtschaftsboom in Zentralasien

Die zentralasiatischen Republiken, insbesondere Kirgistan und Usbekistan, liegen strategisch wichtig zwischen China, Kasachstan und Russland. Das bedeutet: Sie liegen im Zentrum des zukünftigen Wirtschaftsbooms, der mit Chinas neuem Hochgeschwindigkeits-Eisenbahnnetz der Neuen Seidenstraße kommen wird. Durch diese Eisenbahnverbindungen entsteht eine hocheffiziente Überlandverbindung, die auch bei möglichen Unterbrechungen des Seeweges durch die USA offenstehen und in ganz Eurasien rapide wachsenden Handel ermöglichen –potenziell auch den Handel mit Europa, wenn die EU jemals den Mut aufbringt, sich Washington zu widersetzen.

Weiterlesen:

http://info.kopp-verlag.de/hintergruende/geostrategie/f-william-engdahl/zentralasien-die-neue-zielscheibe-fuer-die-usa.html

Sancties tegen Rusland treffen centraal Azië hard

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Door: Henk Jurgens

Ex: http://www.doorbraak.be

Sancties tegen Rusland treffen centraal Azië hard

De Centraal-Aziatische republieken lijden zwaar onder het Europees embargo van Russische producten.

In Rusland werken miljoenen gastarbeiders uit de voormalige Sovjetrepublieken. Velen van hen zijn er illegaal. Allen sturen ze geld naar hun families thuis, veel geld. Volgens de Wereldbank hangt 21% van de Armeense economie, 31,5% van de economie van Kirgizië, 42% van de Tadzjiekse en 12% van de Oezbeekse economie af van deze geldzendingen. Veel van de arme gezinnen op het platteland zijn hiervan volledig afhankelijk.

Volgens The Guardian werken er 2,4 miljoen Oezbeken in Rusland. Zes tot zevenhonderdduizend zijn legaal, de anderen leven zonder geldige papieren. Oezbekistan heeft ongeveer 29 miljoen inwoners. The Moscow Times berichtte dat er in 2014 meer dan 200 000 illegale Tadzjieken door de Russen de grens zijn overgezet. Er wordt geschat dat er nog ruim een miljoen Tadzjieken in Rusland leven. Tadzjikistan heeft acht miljoen inwoners.

De exacte cijfers over de gastarbeiders zijn onbekend. Zoals overal op de wereld doen ook de gastarbeiders het werk dat de autochtonen niet willen doen. En nu het economisch slechter gaat als gevolg van de lage olieprijs en de sancties verdringen de Russen de gastarbeiders weer uit hun slecht betaald, ongeschoold werk. In het eerste kwartaal van 2015 is de Russische economie al met 2% gekrompen. De centrale bank van Rusland voorziet voor het jaar 2015 een economische krimp van 4%. Begin dit jaar heeft de Russische regering wetgeving afgekondigd waardoor het moeilijker wordt voor gastarbeiders van buiten de EEU om een verblijfsvergunning te krijgen. De EEU, de Euraziatische Economische Unie, is door Rusland opgericht om een vrijhandelszone tussen de voormalige Sovjetrepublieken, vergelijkbaar met die van de EU, te krijgen. Kazachstan, Wit-Rusland, Armenië en Kirgizië zijn lid, Oezbekistan en Tadzjikistan niet. Immigranten van buiten de EEU moeten voor ze een verblijfsvergunning krijgen eerst inburgeringcursussen volgen en examens afleggen in de Russische taal en de Russische geschiedenis. Verder betalen ze drie keer zoveel voor een werkvergunning in Moskou dan immigranten uit de EEU. In 2010 werkten 72% van de Tadzjiekse gastarbeiders in Moskou.


Als gevolg van de sancties tegen Rusland en de lage olieprijs is de Russische roebel gedevalueerd. Het naar huis gestuurde geld is daardoor minder waard. Niet alleen is er voor de gastarbeiders minder werk, hun inkomen daalde ook dramatisch. De Wereldbank verwacht dat ze in 2015 voor 10 miljard USD minder naar huis kunnen sturen. Volgens The Economist overweegt een kwart van de gastarbeiders om weer naar huis te gaan, maar thuis is er geen werk. De vrees voor sociale onrust als gevolg van werkloosheid en armoede is bij de politieke elite van de thuislanden groot.

Een land als Tadzjikistan staat onder grote politieke druk vanuit Moskou om lid van de EEU te worden. Door de devaluaties van de roebel is de somoni, de Tadzjiekse munt, ten opzichte van de roebel 35% meer waard geworden. De export naar Rusland staat daardoor onder grote druk.
Ook Oezbekistan overweegt, volgens The Diplomat, zich bij de EEU aan te sluiten. Het land was een belangrijke partner voor de Verenigde Staten tijdens hun oorlog in Afghanistan maar nu Amerika zich uit Afghanistan terug trekt vervalt de noodzaak hun bevoorrading via Oezbekistan te laten lopen.


Kirgizië is inmiddels tot de EEU toegetreden. Het is een klein, arm land met 5,5 miljoen inwoners. Volgens The Diplomat controleert Rusland de economie van Kirgizistan. Buiten de Vallei van Fergana, de vallei tussen Kirgizië, Oezbekistan en Tadzjikistan, met zijn vruchtbare landbouwgronden is er weinig economische activiteit. Alleen de toeristenindustrie is een beetje in opkomst zoals ik tijdens mijn verjaardag in 2009 in Bishkek, de hoofdstad, heb mogen ervaren.

Net als in Turkmenistan en Oezbekistan hangt ook de export van de Kazachse olie en gas af van Russische pijpleidingen. Kazachstan heeft nauwe economische banden met Rusland. In 2013 bedroeg de Russische export naar Kazachstan 17,7 miljard USD en de Kazachse export naar Rusland $5,8 miljard. Afgelopen jaar is de handel met Rusland echter met 20% afgenomen. Het land heeft vooral veel last van goedkope Russische producten die de markt overspoelen. In februari vroegen ondernemers de regering de import van een aantal Russische producten, waaronder auto's, voedsel en fruit drastisch te beperken. Goedkope Russische producten verdringen de Kazachse. De Tenge, de Kazachse munt, is het afgelopen jaar met 20% ten opzichte van de US dollar gedevalueerd maar de roebel devalueerde nog veel meer. Een roebel was in juni 2014 nog 5,44 tenge waard, begin 2015 was dit gedaald tot 3 tenge.

Het Amerikaanse ratingbureau Standard & Poor verwacht dat het bruto nationaal product van Kazachstan in 2015 met 1,5% zal dalen. Dit komt voornamelijk door de lage olieprijzen. Ruim 20% van het bnp en ruim 60% van de export komt voor rekening van de olie- en gasindustrie. De Kazachse begroting gaat uit van een olieprijs van 80 USD per vat. Op het ogenblik ligt dit rond de $60. Het land zit dan ook door de sancties tegen Rusland en de lage olie- en gasprijs op de wereldmarkt in grote economische problemen. Het is dan ook geen wonder dat president Nazarbaev samen met Lukashenko, de president van Wit-Rusland, er alles aan doet om de burgeroorlog in de Oekraïne te beëindigen en daardoor de sancties tegen Rusland te laten opheffen. Afgelopen december sloot hij een contract met Kiev om Kazachse steenkool aan Oekraïne te gaan leveren. Ook de Minsk-akkoorden die min of meer tot een staakt-het-vuren in Oost Oekraïne hebben geleid zijn na bemiddeling van de beide presidenten tot stand gekomen.

Er zijn berichten dat ook ambassadeurs van de Europese Unie met Russische parlementariërs gaan praten over een mogelijke beëindiging van de sancties. Om de burgeroorlog in de Oekraïne definitief te beëindigen is een dialoog met Rusland noodzakelijk. Ook de NAVO-top die jarenlang in het geheim met de Russische militairen in gesprek was moet weer met de Russen gaan praten. Het is onverantwoord dat deze discussies zijn stil gevallen.
Natuurlijk moeten de Russen zich uiteindelijk uit Oost-Oekraïne terug trekken, maar dat geldt ook voor de ruim duizend Amerikaanse trainers en waarnemers die het leger van Kiev 'adviseren'.


Voor de arme gezinnen op het platteland van Centraal-Azië is beëindiging van de sancties tegen Rusland op kort termijn noodzakelijk.

 

Nazarbaev rieletto Presidente del Kazakhstan: significato e reinterpretazioni

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Nazarbaev rieletto Presidente del Kazakhstan: significato e reinterpretazioni

Dal nostro corrispondente ad Astana Dario Citati, Direttore del Programma “Eurasia” dell’IsAG

Ex: http://www.geopolitica-rivista.org


Le quinte elezioni presidenziali nella storia del Kazakhstan indipendente, tenutesi domenica 26 aprile 2015, si sono concluse con l’ampiamente prevista vittoria del Presidente uscente Nursultan Nazarbaev, che guida lo Stato centroasiatico dal 1991, anno in cui il Paese ottenne la piena sovranità dopo la dissoluzione dell’Unione Sovietica. Il verdetto delle urne è risultato un autentico plebiscito, con il 97,7% delle preferenze che hanno premiato Nazarbaev. I due avversari, il candidato “verde” Abelgazi Kussainov e Tunguz Syzdykov del Partito Comunista del Popolo, hanno raccolto rispettivamente l’1,6% e lo 0,7%.

Prima ancora delle valutazioni sul significato di tali percentuali – cioè nei briefing e nelle conferenze stampa tenutesi nella giornata del voto quando non si conoscevano i risultati definitivi – molti degli osservatori internazionali hanno tenuto a sottolineare la piena regolarità procedurale del voto. Per l’Italia erano presenti, in qualità di osservatori OSCE, il Sen. Sergio Divina e l’On. Riccardo Migliori, Presidente emerito dell’Assemblea Interparlamentare OSCE. Entrambi hanno affermato che le operazioni di voto si sono svolte con trasparenza, in un clima di elevata partecipazione ai seggi e quasi di “festa nazionale”. Il Segretario Generale dell’Organizzazione per la Cooperazione di Shangai, Sergej Mezencev, ha parimenti confermato la regolarità delle operazioni di voto in tutti i seggi visitati.

Per quanto attiene invece al significato politico della tornata elettorale, nonché al livello di democratizzazione del Paese, altri osservatori indipendenti hanno fornito elementi importanti di valutazione. Secondo Richard Weitz dello Hudson Institute di Washington, ad esempio, “le elezioni del 2015 confermano che in Kazakhstan gli istituti di rappresentanza si sviluppano positivamente”. Per comprendere l’enorme divario di percentuali tra il vincitore e gli sconfitti, ha quindi sostenuto che “la qualità intrinseca delle elezioni non può essere valutata in base ai criteri europeo-occidentali, perché simili paragoni indurrebbero a un giudizio sbagliato sugli sforzi del Paese nell’implementazione delle proprie riforme: queste ultime vanno invece valutate alla luce dell’eredità storica del Kazakhstan, nonché del suo livello di sviluppo sociale”.

Anche un altro osservatore occidentale, Daniel Witt, ha affermato che “il giudizio sulla qualità democratica delle elezioni non si può basare solo sulla descrizione di un singolo evento”, in quanto “gli appuntamenti elettorali sono un processo continuo di perfezionamento, da condurre attraverso la comparazione tra le elezioni di oggi e quelle del passato, per verificare il progresso raggiunto a ogni tornata elettorale”.

In base a questi giudizi si può affermare che il senso politico di queste elezioni presidenziali del 2015 sta soprattutto in un test di fiducia della popolazione verso lo stesso Nursultan Nazarbaev, l’uomo che incarna il destino stesso del Kazakhstan indipendente. Un test che avviene peraltro in un momento delicato di transizione, segnato da uno scenario geopolitico molto teso su cui influiscono la stessa crisi ucraina e le sanzioni in Russia che hanno avuto ripercussioni anche sul mercato kazako. D’altra parte, queste elezioni presidenziali avrebbero dovuto tenersi nel 2016, ma sono state anticipate al 2015 sia per evitare la sovrapposizione con le elezioni parlamentari, sia per consentire una programmazione più sistematica per iniziative di grande rilievo nel futuro prossimo come l’Expo2017.

Si è soliti affermare che per un Paese come il Kazakhstan, ventiquattro anni dopo l’ottenimento dell’indipendenza, la stabilità e la garanzia di uno sviluppo pacifico sono ancora oggi più importanti di una concezione della democrazia all’occidentale, segnata cioè dal multipartitismo e dall’assenza di una figura personale carismatica. Ciò è senz’altro plausibile: al momento dello scioglimento dell’URSS, il Kazakhstan era considerato fra i Paesi più a rischio implosione e caos. Il suo percorso di stabilizzazione interna, nonché l’apertura alle organizzazioni e alla cooperazione internazionale sono in genere unanimemente riconosciuti come positivi, se valutati in base alle condizioni di partenza, e restano un elemento imprescindibile per comprendere le ragioni di un consenso così vasto per Nazarbaev.

Ma c’è un fattore non meno rilevante per collocare in un’ottica più vasta il senso di queste elezioni. Forse più di qualsiasi altro Paese ex sovietico, il Kazakhstan è riuscito a diminuire significativamente la presenza nello Stato nell’economia e a favorire la libertà d’impresa privata (a livello di piccola e media imprenditoria e senza liberalizzazioni “traumatiche”), spesso in tempi rapidissimi. Vale la pena ricordare che solo tra il 2012 e il 2013 esso è passato dal 71° al 51° posto tra i Paesi a maggiore competitività economica nell’annuale classifica mondiale stilata dal World Economic Forum e ancora oggi è indicizzato come un Paese estremamente conveniente per esportazioni e investimenti.

È ben noto quanto, nelle società contemporanee, la concorrenza economica e la libertà d’impresa siano strettamente legate allo sviluppo della democrazia e della competizione politica. La modernizzazione di questa repubblica centroasiatica è cominciata soprattutto a partire dalla graduale concessione delle libertà economiche dopo settant’anni di monopolio di Stato. La riconferma di Nazarbaev può essere letta quindi anche come un riconoscimento per l’aumento di tali libertà, a cui la generazione nata e cresciuta nel Kazakhstan indipendente dovrà far seguire un consequenziale sviluppo politico e civile.

mercredi, 06 mai 2015

Une coalition sino-russo-iranienne opposée à l’Otan débute-t-elle à Moscou?

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Une coalition sino-russo-iranienne opposée à l’Otan débute-t-elle à Moscou?

La Conférence de Moscou sur la sécurité internationale, en avril, a été une occasion de faire savoir aux Etats-Unis et à l’OTAN que d’autres puissances mondiales ne les laisseront pas faire comme ils l’entendent.

Le thème portait sur les efforts communs de la Chine, de l’Inde, de la Russie et de l’Iran contre l’expansion de l’OTAN, renforcés par des projets de pourparlers militaires tripartites entre Pékin, Moscou et Téhéran.

Des ministres de la Défense et des responsables militaires venus du monde entier se sont réunis le 16 avril au Radisson Royal ou Hotel Ukraina, l’une des plus belles réalisations de l’architecture soviétique à Moscou, connue comme l’une des Sept sœurs construites à l’époque de Joseph Staline.

L’événement de deux jours, organisé par le ministère russe de la Défense était la quatrième édition de la Conférence annuelle de Moscou sur la sécurité internationale (CMSI/MCIS).

Des civils et des militaires de plus de soixante-dix pays, y compris des membres de l’OTAN, y ont assisté. A part la Grèce, toutefois, les ministres de la Défense des pays de l’OTAN n’ont pas participé à la conférence.

Contrairement à l’année dernière, les organisateurs de la CMSI n’ont pas transmis d’invitation à l’Ukraine pour la conférence de 2015. Selon le vice-ministre russe de la Défense Anatoly Antonov, «à ce niveau d’antagonisme brutal dans l’information par rapport à la crise dans le sud-est de l’Ukraine, nous avons décidé de ne pas envenimer la situation à la conférence et, à ce stade, nous avons pris la décision de ne pas inviter nos collègues ukrainiens à l’événement.»

A titre personnel, le sujet m’intéresse, j’ai suivi ce genre de conférences pendant des années, parce qu’il en émane souvent des déclarations importantes sur les politiques étrangères et de sécurité. Cette année, j’étais désireux d’assister à l’ouverture de cette conférence particulière sur la sécurité. A part le fait qu’elle avait lieu à un moment où le paysage géopolitique du globe est en train de changer rapidement, depuis que l’ambassade russe au Canada m’avait demandé en 2014 si j’étais intéressé à assister à la CMSI IV, j’étais curieux de voir ce que cette conférence produirait.

Le reste du monde parle: à l’écoute des problèmes de sécurité non euro-atlantiques

La Conférence de Moscou est l’équivalent russe de la Conférence de Munich sur la sécurité qui se tient à l’hôtel Bayerischer Hof en Allemagne. Il y a cependant des différences essentielles entre les deux événements.

Alors que la Conférence sur la sécurité de Munich est organisée autour de la sécurité euro-atlantique et considère la sécurité globale du point de vue atlantiste de l’OTAN, la CMSI représente une perspective mondiale beaucoup plus large et diversifiée. Elle représente les problèmes de sécurité du reste du monde non euro-atlantique, en particulier le Moyen-Orient et l’Asie-Pacifique. Mais qui vont de l’Argentine, de l’Inde et du Vietnam à l’Egypte et à l’Afrique du Sud.  La conférence a réuni à l’hôtel Ukraina tout un éventail de grands et petits joueurs à la table, dont les voix et les intérêts en matière de sécurité, d’une manière ou d’une autre, sont par ailleurs sapés et ignorés à Munich par les dirigeants de l’OTAN et des Etats-Unis.

Le ministre russe de la Défense Sergey Shoigu, qui a un rang d’officier équivalent à celui d’un général quatre étoiles dans la plupart des pays de l’OTAN, a ouvert la conférence. Assis près de Shoigu, le ministre des Affaires étrangères Sergey Lavrov a aussi pris la parole, et d’autres responsables de haut rang. Tous ont parlé du bellicisme tous azimuts de Washington, qui a recouru aux révolutions de couleur, comme l’Euro-Maïdan à Kiev et la Révolution des roses en Géorgie pour obtenir un changement de régime. Shoigu a cité le Venezuela et la région administrative spéciale chinoise de Hong Kong comme exemples de révolutions de couleur qui ont échoué.

Le ministre des Affaires étrangères Lavrov a rappelé que les possibilités d’un dangereux conflit mondial allaient croissant en raison de l’absence de préoccupation, de la part des Etats-Unis et de l’OTAN, pour la sécurité des autres et l’absence de dialogue constructif. Dans son argumentation, Lavrov a cité le président américain Franklin Roosevelt, qui a dit:

«Il n’y a pas de juste milieu ici. Nous aurons à prendre la responsabilité de la collaboration mondiale, ou nous aurons à porter la responsabilité d’un autre conflit mondial «Je crois qu’ils ont formulé l’une des principales leçons du conflit mondial le plus dévastateur de l’Histoire: il est seulement possible de relever les défis communs et de préserver la paix par des efforts collectifs, basés sur le respect des intérêts légitimes de tous les partenaires » , a-t-il expliqué à propos de ce que les dirigeants mondiaux avaient appris de la Seconde Guerre mondiale.

Shoigu a eu plus de dix réunions bilatérales avec les différents ministres et responsables de la Défense qui sont venus à Moscou pour la CMSI. Lors d’une réunion avec le ministre serbe de la Défense Bratislav Gasic, Shoigu a dit que Moscou considère Belgrade comme un partenaire fiable en termes de coopération militaire.

Russie

De g. à dr.: Sergei Lavrov, ministre des Affaires étrangères, Sergei Shoigu, ministre de la Défense, Nikolai Patrushev, secrétaire au Conseil de sécurité et Valery Gerasimov, chef de l’état-major général, participant à la 4e Conférence de Moscou sur la sécurité (RIA Novosti / Iliya Pitalev)

Une coalition sino-russo-iranienne: le cauchemar de Washington

Le mythe que la Russie est isolée sur le plan international a de nouveau été démoli pendant la conférence, qui a aussi débouché sur quelques annonces importantes.

Le ministre kazakh de la Défense Imangali Tasmagambetov et Shoigu ont annoncé que la mise en œuvre d’un système de défense aérienne commun entre le Kazakhstan et la Russie a commencé. Cela n’indique pas seulement l’intégration de l’espace aérien de l’Organisation du traité de sécurité collective, cela définit aussi une tendance. Cela a été le prélude à d’autres annonces contre le bouclier de défense antimissile de l’OTAN.

La déclaration la plus vigoureuse est venue du ministre iranien de la Défense Hossein Dehghan. Le brigadier-général Dehghan a dit que l’Iran voulait que la Chine, l’Inde et la Russie s’unissent pour s’opposer conjointement à l’expansion à l’est de l’OTAN et à la menace à leur sécurité collective que constitue le projet de bouclier antimissile de l’Alliance.

Lors d’une réunion avec le ministre chinois des Affaires étrangères Chang Wanquan, Shoigu a souligné que les liens militaires de Moscou avec Beijing étaient sa «priorité absolue». Dans une autre rencontre bilatérale, les gros bonnets de la défense iraniens et russes ont confirmé que leur coopération sera une des pierres angulaires d’un nouvel ordre multipolaire et que Moscou et Téhéran étaient en harmonie quant à leur approche stratégique des Etats-Unis.

Après la rencontre de Hossein Dehghan et la délégation iranienne avec leurs homologues russes, il a été annoncé qu’un sommet tripartite se tiendrait entre Beijing, Moscou et Téhéran. L’idée a été avalisée ensuite par la délégation chinoise.

Le contexte géopolitique change et il n’est pas favorable aux intérêts états-uniens. Non seulement l’Union économique eurasienne a été formée par l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan et la Russie au cœur post-soviétique de l’Eurasie, mais Pékin, Moscou et Téhéran – la Triple entente eurasienne – sont entrés dans un long processus de rapprochement politique, stratégique, économique, diplomatique et militaire.

L’harmonie et l’intégration eurasiennes contestent la position des Etats-Unis sur leur perchoir occidental et leur statut de tête de pont en Europe, et même incitent les alliés des Etats-Unis à agir de manière plus indépendante. C’est l’un des thèmes centraux examinés dans mon livre The Globalization of NATO [La mondialisation de l’OTAN].

L’ancien grand ponte états-unien de la sécurité Zbigniew Brzezinski a mis en garde les élites américaines contre la formation d’une coalition eurasienne «qui pourrait éventuellement chercher à contester la primauté de l’Amérique». Selon Brzezinski, une telle alliance eurasienne pourrait naître d’une «coalition sino-russo-iranienne» avec Beijing pour centre.

«Pour les stratèges chinois, face à la coalition trilatérale de l’Amérique, de l’Europe et du Japon, la riposte géopolitique la plus efficace pourrait bien être de tenter et de façonner une triple alliance qui leur soit propre, liant la Chine à l’Iran dans la région golfe Persique/Moyen-Orient et avec la Russie dans la région de l’ancienne Union soviétique», avertit Brzezinski.

«Dans l’évaluation des futures options de la Chine, il faut aussi considérer la possibilité qu’une Chine florissante économiquement et confiante en elle politiquement – mais qui se sent exclue du système mondial et qui décide de devenir à la fois l’avocat et le leader des Etats démunis dans le monde –  décide d’opposer non seulement une doctrine claire mais aussi un puissant défi géopolitique au monde trilatéral dominant», explique-t-il.

C’est plus ou moins la piste que les Chinois sont en train de suivre. Le ministre Wanquan a carrément dit à la CMSI qu’un ordre mondial équitable était nécessaire.

La menace pour les Etats-Unis est qu’une coalition sino-russo-iranienne puisse, selon les propres mots de Brzezinski, «être un aimant puissant pour les autres Etats mécontents du statu quo».

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Un soldat pendant un exercice impliquant les systèmes de missiles sol-air S-300/SA sur le terrain d’entraînement d’Ashuluk, dans la région  d’Astrakhan (RIA Novosti / Pavel Lisitsyn)

Contrer le bouclier anti-missile des Etats-Unis et de l’OTAN en Eurasie

Washington érige un nouveau Rideau de fer autour de la Chine, de l’Iran, de la Russie et de leurs alliés au moyen de l’infrastructure de missiles des Etats-Unis et de l’OTAN.

L’objectif du Pentagone est de neutraliser toutes les ripostes défensives de la Russie et des autres puissances eurasiennes à une attaque de missiles balistiques US, qui pourrait inclure une première frappe nucléaire. Washington ne veut pas permettre à la Russie ou à d’autres d’être capables d’une seconde frappe ou, en d’autres termes, ne veut pas permettre à la Russie ou à d’autres d’être en mesure de riposter à une attaque par le Pentagone.

En 2011, il a été rapporté que le vice-Premier ministre Dmitri Rogozine, qui était alors envoyé de Moscou auprès de l’OTAN, se rendrait à Téhéran pour parler du projet de bouclier antimissile de l’OTAN. Divers articles ont été publiés, y compris par le Tehran Times, affirmant que les gouvernements de Russie, d’Iran et de Chine projetaient de créer un bouclier antimissile commun pour contrer les Etats-Unis et l’OTAN. Rogozine, toutefois, a réfuté ces articles. Il a dit que cette défense antimissile était discutée entre le Kremlin et ses alliés militaires dans le cadre de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC).

L’idée de coopération dans la défense entre la Chine, l’Iran et la Russie, contre le bouclier antimissile de l’OTAN est restée d’actualité depuis 2011. Dès lors, l’Iran s’est rapproché pour devenir un observateur dans l’OTSC, comme l’Afghanistan et la Serbie. Beijing, Moscou et Téhéran se sont rapprochés aussi en raison de problèmes comme la Syrie, l’Euro-Maïdan et le pivot vers l’Asie du Pentagone. L’appel de Hossein Dehghan à une approche collective par la Chine, l’Inde, l’Iran et la Russie contre le bouclier antimissile et l’expansion de l’OTAN, couplé aux annonces faites à la CMSI sur des pourparlers militaires tripartites entre la Chine, l’Iran et la Russie, vont aussi dans ce sens.

Les systèmes de défense aérienne russes S-300 et S-400 sont en cours de déploiement dans toute l’Eurasie, depuis l’Arménie et la Biélorussie jusqu’au Kamchatka, dans le cadre d’une contre-manœuvre au nouveau Rideau de fer.  Ces systèmes de défense aérienne rendent beaucoup plus difficiles les objectifs de Washington de neutraliser toute possibilité de réaction ou de seconde frappe.

Même les responsables de l’OTAN et le Pentagone, qui se sont référés aux S-300 comme le système SA-20, l’admettent. « Nous l’avons étudié nous sommes formés pour le contrer depuis des années. Nous n’en avons pas peur, mais nous respectons le S-300 pour ce qu’il est: un système de missiles très mobile, précis et mortel », a écrit le colonel de l’US Air Force Clint Hinote pour le Conseil des relations étrangères basé à Washington.

Bien qu’il y ait eu des spéculations sur le fait que la vente des systèmes S-300 à l’Iran serait le point de départ d’un pactole provenant de Téhéran dû aux ventes internationales d’armes, résultat des négociations de Lausanne, et que Moscou cherche à avoir un avantage concurrentiel dans la réouverture du marché iranien, en réalité la situation et les motivations sont très différentes. Même si Téhéran achète différentes quantités de matériel militaire à la Russie et à d’autres sources étrangères, il a une politique d’autosuffisance militaire et fabrique principalement ses propres armes. Toute une série de matériel militaire – allant des chars d’assaut, missiles, avions de combat, détecteurs de radar, fusils et drones, hélicoptères, torpilles, obus de mortier, navires de guerre et sous-marins – est fabriqué à l’intérieur de l’Iran. L’armée iranienne soutient même que leur système de défense aérienne Bavar-373 est plus ou moins l’équivalent du S-300.

La livraison par Moscou du paquet de S-300 à Téhéran est plus qu’une simple affaire commerciale. Elle est destinée à sceller la coopération militaire russo-iranienne et à renforcer la coopération eurasienne contre l’encerclement du bouclier anti-missiles de Washington. C’est un pas de plus dans la création d’un réseau de défense aérienne eurasienne contre la menace que font peser les missiles des Etats-Unis et de l’OTAN sur des pays qui osent ne pas s’agenouiller devant Washington.

Par Mahdi Darius Nazemroaya –  23 avril 2015

Mahdi Darius Nazemroaya est sociologue, un auteur primé et un analyste géopolitique.

Article original : http://rt.com/op-edge/252469-moscow-conference-international-security-nato/

Traduit de l’anglais par Diane Gilliard

URL de cet article : http://arretsurinfo.ch/une-coalition-sino-russo-iranienne-opposee-a-lotan-debute-t-elle-a-moscou/

samedi, 25 avril 2015

Will Greece Join the Eurasian Union?

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F. William Engdahl

Ex: http://journal-neo.org

Will Greece Join the Eurasian Union?

At the very least the new Greek government realizes it must play in a deadly power game over the future of the nation in an asymmetrical manner. The so-called Troika—EU Commission, European Central Bank and IMF—is demanding blood from a turnip when it comes to Greece. So after hitting a granite wall in appealing for easing of the austerity to permit Greek economic growth to begin climbing back to solvency, the government of Greek Prime Minister Alexis Tsipras is looking at every option. The latest move is their looking east to Moscow and then Beijing. The Greek crisis, which began in October 2009 is at a critical crossroads.

In 2007-2008 as the US-centered sub-prime real estate debt crisis first erupted, Greek state debt was around 100% of GDP, higher than EU average but not unprecedented and manageable. By 2014 the debt had soared to 175% of GDP, higher than even Italy. The country had to take €240 billion from the Troika to avoid debt default, a step that would have brought German and French banks holding Greek bonds to likely default. At the start of the Greek crisis Greek bonds were held by mainly EU banks who found the higher interest rates attractive. When a bank crisis in Germany and France threatened as a Greek default threatened, the EU governments, the IMF and the European Central Bank took over 80% of Greek sovereign debt, letting the private banks once more off the hook at the expense of Greek and European taxpayers.

Either the Euro or Dollar goes

Greece was literally the Achilles Heel of the Euro and Washington and Wall Street hit it with a savagery not seen since they ran the Asia Crisis and Russian sovereign default crises in 1997-1998. When Greece imploded in late 2009 the dollar was the main currency under threat of abandonment. The Chinese were openly rebuking the US Government for letting its own deficits and debt explode at a rate well over $1 trillion a year. The response of the US Treasury Financial Warfare Division, the Federal Reserve and of Wall Street and the rating agencies was to launch a counter attack on the euro to “save” the dollar. It worked and few of the naïve Berlin politicians, certainly not Schäuble, nor Merkel, had a clue how sophisticated the Washington currency war machinery had become. They began to find out.

The USA credit rating agencies, led by Standard & Poors and Moody’s, took the unprecedented step of downgrading Greek government debt three notches in one day in April 2010 just as EU Governments had agreed a Greek rescue plan. That downgrade to so-called junk status meant that pension funds and insurance companies around the world were immediately forced to dump their Greek bonds by law, forcing interest rates Greece must pay to borrow, were it even able, to unpayable levels. A cabal of New York hedge fund managers led by George Soros met to coordinate Geek speculative attacks, worsening the crisis and the costs to Greek taxpayers.

What did Greece get for that new debt? A bloody austerity dictate from the EU, led by German Finance Minister Wolfgang Schäuble whose austerity demands made Heinrich Brüning in 1931 look like an angel of mercy. Unemployment soared to depression levels of 27% for the general population, falling to 25.7% in January 2015—hailed by Brussels and Berlin as a “sign” their austerity is working!—youth unemployment reaching well over 60%. The IMF as always, dictated massive cuts in public employees and health and education services to “save” money, only making tax revenues decline more. It all demonstrated what Germans knew painfully well from the 1930’s, namely that austerity never solves a debt crisis, only real economic growth.

The left party of Tsipras, Syriza, which evolved out of the Greek Communist Party after the collapse of the Soviet Union was elected in January by a desperate electorate fed up with depression and Weimar-style austerity without end. Tsipras’ mandate is to get a better economic future for Greeks. His only option at this point is to opt out of the Euro and perhaps also out of the EU and NATO.

The British Telegraph reported on April 2, a week before likely IMF loan payment default by Greece that Greece was drawing up drastic plans to nationalize the country’s banking system and introduce a parallel currency to pay bills unless the eurozone takes steps to defuse the simmering crisis and soften its demands. Sources close to the ruling Syriza party said the government is determined to keep public services running and pay pensions as funds run critically low. The Telegraph cites a senior Greek official: “We are a Left-wing government. If we have to choose between a default to the IMF or a default to our own people, it is a no-brainer. We may have to go into a silent arrears process with the IMF. This will cause a furore in the markets and means that the clock will start to tick much faster,” the source told The Telegraph.

Failing to get one Euro of genuine relief from Schäuble or the EU, and with the prospect of default on a €458 million repayment to the IMF or default on state pensions, Tsipras flew to Moscow to meet with Putin. Despite that Greece paid the €458 million to the International Monetary Fund on April 9, the real question is the next payments Greece must make every week in April and a further $7.75 billion it will have to pay in May and June, while struggling to pay its own government staff and state pensions.

Greece as Russian Energy Hub?

The Putin Tsipras meeting prepared for possible future steps that could alter the future of not only Greece but of the entire EU. President Putin announced after his talks with Tsipras on April 8 that Tsipras did not ask Russia for financial aid.

What they did discuss was potentially far more significant for Greece. They talked about energy projects including Putin’s proposed Turkish Stream to deliver Russian gas to Turkey instead of directly to the EU after Brussels, pushed by Washington, sabotaged the Russian South Stream gas project.

Turkish Stream proposes to deliver gas to the Greek border adjacent to Turkey. Greek Energy Minister Panagiotis Lafazanis said that Athens supports Russia’s planned Turkish Stream pipeline project, as well as extending the gas route to Greece. Russia and Turkey signed a memorandum of understanding on the construction of the gas pipeline between the two countries under the Black Sea in December 2014. Greece would then become a distribution hub to further passage of gas to consumers in southern Europe including Italy, an alternative to the defunct South Stream.

Putin remarked after his talks with Tsipras at their joint press conference in Moscow on 8 April, “Of course, we have discussed the prospects of realization of the large infrastructure project which we call Turkish Stream — a key project for transporting Russian gas to the Balkans, maybe to Italy, the countries of Central Europe. The new route will provide for the Europeans’ needs in fuel, and would allow Greece to become one of the main power distribution centers on the continent, could help attract significant investments into the Greek economy.” Greece would also earn gas transit fees of hundreds of millions of euros annually if it joins the Turkish stream pipeline project.

In turn, Tsipras said that Athens is interested in attracting investment in construction of the pipeline on its territory to handle gas coming through the Turkish Stream.

According to media reports, Putin and Tsipras will also focus on possible discounts on Russian natural gas for Greece. In addition Russia discussed investing in joint venture companies with the Greek government. Initial projects to be explored include a public Greek-Russian company and Russian investment in the harbor at Thessaloniki that the IMF demands be privatized as well as railway participation. Following last week’s talks with Russian Energy Minister Alexander Novak and Russian energy company Gazprom CEO Alexei Miller, Lafazanis said that Athens had asked for a cut in its price for Russian natural gas.

Russia and Eurasia?

Putin called for trade relations to be restored between Russia and the EU, including Greece. He said the two had discussed “various ways of co-operating, including major projects in energy. Under these plans, we could provide loans for certain projects,” Putin said, adding that it was not a question of aid. One of those plans is for the pipeline called “Turkish Stream”, to channel natural gas from the Turkish-Greek border into Greece.

For his side Tsipras made clear his government opposed any new sanctions on Russia, something that Washington was not at all pleased about, with US media editorials attacking Greece for being the mythical Trojan Horse for Russia to get back into the EU orbit. Responding in his typically droll humor, the Russian president told BBC, “About mythology and Trojan horses and so forth: the question would be valid if I was the one going to Athens,” he said. “We are not forcing anyone to do anything.”

Recent polls show that well over 63% of Greeks are warm to Russia as an ally, while only 23% feel warm towards the EU. The two countries, Russia and Greece, share a common Orthodox religion and historically were close. Costas Karamanlis, Greek conservative Prime Minister from 2004-09 pursued a “diplomacy of the pipelines,” where he saw Greece as a gateway for Russian oil and gas to Europe. Washington and Brussels were furious. Karamanlis was voted out in suspicious circumstances a year after signing a gas deal with President Putin, just before the revelation of the financial crisis. After he lost elections in 2009, it emerged that Russia’s FSB security agency had warned its Greek counterpart, EYP, of a 2008 plot to assassinate Karamanlis to halt his pro-Moscow energy alliance.

Trojan Horses, Achilles Heels and the rich heritage of Greek mythology do nothing to solve the crisis of Greece, which, in reality, is the general crisis of European civilization.

What no one in Berlin, Paris or Rome dare to address is the reality that the European Union countries are dying. Demographically, economically and morally they are in a death agony downward spiral. Either they make a definitive break with the bankrupt Washington and NATO Atlantic dollar world and throw their lot fully behind making the Eurasian Economic Union led by Russia into a viable new region of economic prosperity, along with China and the New Silk Road high-speed rail projects criss-crossing Eurasia, or in four or five years at best the EU will be choking in its own debt and economic depression as is Greece today.

The only other option open at this time, the option of the status quo financial powers that be, was tried in Nazi Germany, Vichy France and Mussolini Italy in the 1930’s. We don’t need to try that again.

F. William Engdahl is strategic risk consultant and lecturer, he holds a degree in politics from Princeton University and is a best-selling author on oil and geopolitics, exclusively for the online magazine “New Eastern Outlook”.
First appeared: http://journal-neo.org/2015/04/16/will-greece-join-the-eurasian-union/

Eurasia XXXVII (1/2015)

L’EURASIA AGGREDITA SU PIÙ FRONTI

Eurasia XXXVII (1/2015)

Ex: http://www.eurasia-rivista.org

L’EURASIA AGGREDITA SU PIÙ FRONTI

L’EURASIA AGGREDITA SU PIÙ FRONTI
Ecco di seguito l’elenco degli articoli presenti in questo numero, con un breve riassunto di ciascuno di essi.

Editoriale
Claudio Mutti, L’Eurasia aggredita su più fronti

Dossario: L’Eurasia aggredita su più fronti

LA GUERRA SU PIÙ FRONTI CONTRO IL CUORE DELL’EURASIA
di Mahdi Darius Nazemroaya

Gli USA hanno scatenato in Eurasia e in Africa una Guerra su più fronti che si estende all’America Latina. Lo scopo di Washington e Wall Street è di impedire l’integrazione eurasiatica e la nascita di un blocco economico rivale. È in questo contesto che Washington sta destabilizzando la Siria, l’Iraq e l’Ucraina. L’obiettivo strategico consiste nell’impedire che attorno al centro del Continente eurasiatico si uniscano le periferie dell’Europa occidentale e dell’Estremo Oriente. Ecco perché Washington sta facendo il possibile contro la Federazione Russa e contro l’Unione Economica Eurasiatica.

O l’OCCIDENTE O L’EURASIA
di Spartaco Alfredo Puttini

Lo svolgersi degli eventi che si susseguono sulla scena internazionale palesano ogni giorno di più uno stato di crescente tensione. Non si allude qui ai vari focolai che tormentano diverse regioni del pianeta, magari da decenni, ma alla crescente rivalità che divide e contrappone le grandi potenze. Per tutti coloro che hanno guardato con occhi disincantati la realtà internazionale di questi ultimi decenni il manifestarsi delle divergenze tra l’Occidente guidato dagli Stati Uniti da un lato e la Russia ed altre forze dall’altro non rappresenta una novità, ma una conferma. La conferma della inevitabile alterità fra il tentativo di egemonia statunitense e la volontà di una serie di Stati e di popoli di difendersi e di ripristinare un equilibrio di potenza, favorendo la nascita di un mondo multipolare.

LA QUESTIONE UCRAINA IN PROSPETTIVA GEOPOLITICA
di Fabio Falchi
Riguardo alla “questione ucraina”, i media occidentali non si limitano alla consueta criminalizzazione del “nemico”, bensì “ignorano” quasi del tutto le vicende belliche del conflitto russo-tedesco nel 1941-45 e non esitano a presentare una visione palesemente “distorta” della stessa storia della Russia. Nondimeno, è palese che gli “strateghi occidentali” siano perfettamente consapevoli che quanto accade in Ucraina è una minaccia gravissima alla sicurezza nazionale della Russia. Posto allora che non è verosimile che gli Stati Uniti vogliano combattere una guerra termonucleare contro la Russia, è lecito ritenere che si sia in presenza di una vera e propria strategia della tensione, che ha come obiettivo la destabilizzazione non solo della Russia ma anche della stessa Europa.

LA SINDROME DI GORBACIOV
di Vincenzo Mungo
La politica di Gorbaciov fallì nel suo obiettivo anche a causa delle incertezze della classe dirigente sovietica di quel periodo. Oggi, sotto l’incalzare della pressione occidentale, la classe dirigente russa rischia di diventare preda di un analogo complesso di paure, di indecisioni e di eccessiva tolleranza verso gli avversari. Qualora essa si lasciasse contagiare di nuovo dalla “sindrome di Gorbaciov”, non farebbe altro che consegnare il Paese all’imperialismo americano.

LA BIELORUSSIA AL BIVIO
di Giuseppe Cappelluti
Tradizionalmente la Bielorussia è il più filorusso tra gli Stati postsovietici: la sua popolazione si percepisce tanto come bielorussa quanto come russa, e il suo governo è uno dei maggiori fautori dell’integrazione eurasiatica. Tuttavia, negli ultimi mesi, le tensioni in Ucraina e le pressioni incrociate di Russia e Occidente hanno spinto il Paese in una posizione non facile, da cui esso sta cercando di uscire riscoprendo il nazionalismo e adottando una posizione ambigua sulla crisi in corso nel Paese esteuropeo. Alcuni, specie in Occidente, sostengono – non senza una certa Schadenfreude – che Russia e Bielorussia stiano vivendo una sorta di crisi di coppia. Una rottura vera e propria, però, è tutt’altro che probabile.

LA REPUBBLICA OLTRE IL DNESTR
di Ivelina Dimitrova
La Repubblica moldava di Pridnestrov’e, la Transnistria, è uno Stato che, benché non sia riconosciuto da nessuno, tuttavia esiste dal 2 settembre 1990, quando, all’epoca della sua dichiarazione di indipendenza, molti degli attuali membri dell’UE non esistevano ancora come Stati. La Transnistria è un paese che ha il suo esercito, la sua frontiera, la sua moneta, la sua polizia ed una sua spiccata identità “nazionale”. Oggi, con il conflitto in Ucraina, questa piccola striscia di terra ha assunto un’importanza ancora più grande dal punto di vista geopolitico.

LA CORSA ALL’ARTICO
di Emiliano Vitaliano
Negli ultimi anni lo scioglimento progressivo dei ghiacciai ha spinto varie potenze mondiali a manifestare interesse per le ingentissime risorse naturali dell’Artico. La Russia intravede in questa zona una possibilità di rafforzare la propria economia e di giocare un ruolo da protagonista nella politica mondiale. La Cina è interessata, oltre che ai vari giacimenti, anche ai nuovi corridoi di navigazione, così come l’UE. Le risorse naturali dell’Artico fanno gola anche agli USA, i quali temono la vicinanza della Russia alle coste americane. Insomma, l’Artico è lo scenario in cui si stabiliranno i nuovi equilibri geopolitici del pianeta.

UNA “PIETRA NERA” A STELLE E STRISCE STA COMPRANDO L’ITALIA?
di Stefano Vernole
Il fondo d’investimento statunitense Blackstone e il suo ex gestore Blackrock stanno acquisendo sempre più potere in Italia, quasi a compensare il recente attivismo economico della Repubblica Popolare Cinese nel nostro paese. L’indebitamento statale, le misure finanziarie richieste per adeguarsi ai parametri europei, le nuove privatizzazioni hanno aperto diverse prospettive agli investitori ma soprattutto agli speculatori, mentre lo sguardo “interessato” dei servizi di sicurezza italiani sembra posarsi più sui primi che sui secondi. Dietro un’apparente concorrenza di carattere commerciale si nasconde uno scontro geopolitico determinante per le sorti dell’Eurasia.

EUROPA: TERRA DI CONQUISTA O CAMPO DI BATTAGLIA?
di Alessandra Colla
I fatti di Parigi sono stati magistralmente usati per rafforzare una concezione negativa dell’Islam e per rilanciare l’immagine dell’Occidente come portatore di libertà e tolleranza. Facendosi carico di un’offensiva contro l’Islam, l’Europa non fa altro che svolgere il “lavoro sporco” richiesto dal progetto della globalizzazione americana.

Osservatorio

L’EUROPA DIVISA: BUDAPEST E ATENE
di Ivelina Dimitrova

Mai come oggi i rapporti tra il Cremlino e l’Occidente sono stati così tesi. Tuttavia, nell’attuale situazione di stagnazione economica e di instabilità politica, una parte significativa dell’opinione pubblica europea si sta chiedendo il perché di tanto accanimento nei confronti della Russia e molti uomini politici ritengono vitale per l’Europa il miglioramento delle relazioni con il Cremlino. Grecia ed Ungheria, in particolare, stanno conducendo una politica pragmatica nei confronti della Federazione Russa, essendo più preoccupate di tutelare l’interesse nazionale che di adeguarsi totalmente alle imposizioni occidentali.

I RAPPORTI FRA GRECIA E TURCHIA E IL RUOLO DI MOSCA
di Aldo Braccio
Chi soffia sul fuoco dello scontro di civiltà addita non di rado come modello dell’opposizione fra “Europa cristiana” e “Asia islamica” proprio il contrapporsi di Grecia e Turchia. Prescindendo da queste enfatizzazioni interessate, è certo che non mancano motivi di contrasto fra i due Paesi: la questione cipriota – ampliata oggi dalla scoperta dell’importanza dell’isola nel reperimento di risorse energetiche – quella inerente la ripartizione degli spazi marittimi e il problema scottante del transito di immigrati clandestini ne sono gli elementi salienti. L’entrata in scena del nuovo governo greco – significativamente sostenuto dalla minoranza turca presente in territorio ellenico – può favorire un percorso di reciproca collaborazione soltanto faticosamente intrapreso negli anni scorsi con la costituzione di un Consiglio di alta cooperazione strategica. Fondamentale nella ricerca di nuovi e più stabili equilibri sarà il ruolo che svolgerà la Russia, potenza eurasiatica di riferimento e di richiamo per Atene (come gli esponenti di Syriza hanno decisamente ribadito) ma anche interlocutore assolutamente imprescindibile per Ankara; fra Grecia e Turchia potrà essere Mosca – anziché l’Unione Europea, che non ha fin qui voluto o saputo svolgere tale ruolo – a favorire un’intesa in questo importante quadrante del Mediterraneo.

PREMESSE E CONSEGUENZE DEL VOTO GRECO
di Andrea Turi
Il leader di Syriza, Alexis Tsipras, trionfa nelle elezioni politiche anticipate di fine gennaio. Un successo annunciato che impaurisce i creditori internazionali e la troika. Cosa comporta la vittoria del partito antiausterità? Chi sono i suoi alleati di governo? La Grecia è pronta a guardare verso altre direzioni e a muoversi oltre il mero atlantismo della sua politica estera? Cronistoria e analisi di un voto figlio della crisi ellenica.

FRONT NATIONAL… FRONT FAMILIAL
di Yannick Sauveur
La presentazione del Front National che viene fatta al grande pubblico è ampiamente viziata. Una comprensione più esatta di quello che è il FN, da quando Marine Le Pen ne ha assunto la presidenza (gennaio 2011), non può prescindere dalla storia del partito, a partire dalla sua fondazione nel 1972. Considerato in una prospettiva diacronica, il FN rivela continuità e momenti di rottura; questi ultimi, più formali che sostanziali.

L’INCERTO FEDERALISMO IRACHENO
di Ali Reza Jalali
Il sistema di governo dell’Iraq si caratterizza per una marcata autonomia delle regioni rispetto al governo centrale, muovendosi dunque, dopo gli anni del dominio nazionalista di Saddam, da un modello tendenzialmente accentratore a un modello di tipo vagamente federale, con i vantaggi e gli svantaggi che derivano da questa impostazione. I vantaggi derivano dalla scelta di instaurare un modello che, almeno in linea teorica, si addice a un paese non omogeneo come l’Iraq; gli svantaggi invece derivano dall’eccessiva frammentazione che il federalismo comporta in un paese con forti pulsioni alla secessione, al terrorismo settario e alle ingerenze straniere dei vari attori regionali, senza dimenticare il ruolo fortemente deleterio dell’intervento occidentale del 2003.

L’IDROPOLITICA DELLA TURCHIA
di Francesco Ventura
Il controllo delle acque dei fiumi Tigri ed Eufrate da parte della Turchia può conferire ad Ankara il ruolo di serbatoio idrico del Vicino Oriente, riequilibrando il potere derivante dal possesso degli idrocarburi degli Stati arabi. La nuova geopolitica turca, così come interpretata dall’attuale Primo Ministro turco Ahmet Davutoglu nella sua opera Profondità strategica. Il ruolo internazionale della Turchia, trova nello sviluppo del Progetto dell’Anatolia Sudorientale (GAP) uno strumento per aumentare il proprio peso specifico in tutta la regione. Uno strumento di medio-lungo periodo che, vista la crescente scarsità idrica, sarà sicuramente cruciale nel futuro prossimo.

NUOVE FORME DI POLITICA MIGRATORIA
di Gabriele Abbondanza
L’attuale scenario internazionale presenta una lunga lista di aree critiche, alla base di un rinnovato insieme di flussi migratori irregolari. Italia e Australia sono due paesi che, nonostante le evidenti differenze culturali e la distanza geografica, risentono in maniera simile di tali fenomeni, in particolare dell’immigrazione illegale via mare. Il presente saggio si propone di approfondire le politiche migratorie dei due paesi, radicalmente diverse per mezzi e scopi, per poi auspicare la combinazione delle pratiche migliori di entrambi i sistemi, proponendo l’idea di una “Soluzione Mediterranea”.

Interviste

INTERVISTA A TOUAMI GARNAOUI
a cura di Anna Maria Turi

jeudi, 23 avril 2015

Eurasia as We Knew it is Dead

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The U.S. Knew it Too

Eurasia as We Knew it is Dead

by PEPE ESCOBAR
Ex: http://www.counterpunch.org

Move over, Cold War 2.0. The real story, now and for the foreseeable future, in its myriad declinations, and of course, ruling out too many bumps in the road, is a new, integrated Eurasia forging ahead.

China’s immensely ambitious New Silk Road project will keep intersecting with the Russia-led Eurasia Economic Union (EEC). And that will be the day when the EU wakes up and finds a booming trade/commerce axis stretching from St. Petersburg to Shanghai. It’s always pertinent to remember that Vladimir Putin sold a similar, and even more encompassing, vision in Germany a few years ago – stretching from Lisbon to Vladivostok.

It will take time – and troubled times. But Eurasia’s radical face lift is inexorable. This implies an exceptionalist dream – the U.S. as Eurasia hegemon, something that still looked feasible at the turn of the millennium – fast dissolving right before anyone’s eyes.

Russia Pivots East, China Pivots West

A few sound minds in the U.S. remain essential as they fully deconstruct the negatives, pointing to the dangers of Cold War 2.0. The Carnegie Moscow Center’s Dmitri Trenin, meanwhile, is more concerned with the positives, proposing a road map for Eurasian convergence.

The Russia-China strategic partnership – from energy trade to defense and infrastructure development – will only solidify, as Russia pivots East and China pivots West. Geopolitically, this does not mean a Moscow subordinated to Beijing, but a rising symbiotic relationship, painstakingly developed in multiple stages.

The BRICs – that dirty word in Washington – already have way more global appeal, and as much influence as the outdated G-7. The BRIC New Development Bank, ready to start before the end of 2015, is a key alternative to G7-controlled mechanisms and the IMF.

The Shanghai Cooperation Organization (SCO) is bound to include India and Pakistan at their upcoming summer summit in Russia, and Iran’s inclusion, post-sanctions as an official member, would be virtually a done deal by 2016. The SCO is finally blossoming as the key development, political/economic cooperation and security forum across Asia.

Putin’s “greater Europe” from Lisbon to Vladivostok – which would mean the EU + EEC – may be on hold while China turbo-charges the its New Silk Road in both its overland and maritime routes. Meanwhile, the Kremlin will concentrate on a parallel strategy – to use East Asian capital and technology to develop Siberia and the Russian Far East. The yuan is bound to become a reserve currency across Eurasia in the very near future, as the ruble and the yuan are about to rule for good in bilateral trade.

The German Factor

“Greater Europe” from Lisbon to Vladivostok inevitably depends on a solution to the German puzzle. German industrialists clearly see the marvels of Russia providing Germany – much more than the EU as a whole – with a privileged geopolitical and strategic channel to Asia-Pacific. However, the same does not apply as yet to German politicos. Chancellor Angela Merkel, whatever her rhetoric, keeps toeing the Washington line.

The Russian Pipelineistan strategy was already in place – via Nord Stream and South Stream – when interminable EU U-turns led Moscow to cancel South Stream and launch Turk Stream (which will, in the end, increase energy costs for the EU). The EU, in exchange, would have virtually free access to Russia’s wealth of resources, and internal market. The Ukraine disaster means the end of all these elaborate plans.

Germany is already the defacto EU conductor for this economic express train. As an export powerhouse, its only way to go is not West or South, but East. Thus, the portentous spectacle of an orchestra of salivating industrialists when Xi Jinping went to Germany in the spring of 2104. Xi proposed no less than a high-speed rail line linking the New Silk Road from Shanghai to Duisburg and Berlin.

A key point which shouldn’t be lost on Germans: a vital branch of the New Silk Road is the Trans-Siberian high-speed rail remix. So one of the yellow BRIC roads to Beijing and Shanghai boasts Moscow as a strategic pit stop.

That Empire of Chaos …

Beijing’s Go West strategy overland is blissfully free of hyperpower meddling – from the Trans-Siberian remix to the rail/road routes across the Central Asian “stans” all the way to Iran and Turkey. Moreover, Russia sees it as a symbiosis, considering a win-win as Central Asian stans jump simultaneously aboard the EEU and what Beijing dubs the Silk Road Economic Belt.

On other fronts, meanwhile, Beijing is very careful to not antagonize the U.S., the reigning hyperpower. See for instance this quite frank but also quite diplomatic interview to the Financial Times by Chinese Prime Minister Li Keqiang.

One key aspect of the Russia-China strategic partnership is that both identify Washington’s massively incoherent foreign policy as a prime breeder of chaos – exactly as I argue in my book Empire of Chaos.

In what applies specifically to China and Russia, it’s essentially chaos as in divide and rule. Beijing sees Washington trying to destabilize China’s periphery (Hong Kong, Tibet, Xinjiang), and actively interfering in the South China Sea disputes. Moscow sees Washington obsessed with the infinite expansion of NATO and taking no prisoners in preventing Russia’s efforts at Eurasian integration.

Thus, the certified death of Russia’s previous geopolitical strategy. No more trying to feel included in an elite Western club such as the G-8. No more strategic partnership with NATO.

Always expert at planning well in advance, Beijing also sees how Washington’s relentless demonization of not only Putin, but Russia as a whole (as in submit or else), constitute a trial run on what might be applied against China in the near future.

Meet the Imponderables

All bets are off on how the fateful U.S.-China-Russia triangle will evolve. Arguably, it may take the following pattern: The Americans talk loud and carry an array of sticks; the Russians are not shy to talk back while silently preparing strategically for a long, difficult haul; the Chinese follow a modified “Little Helmsman” Deng Xiaoping doctrine – talk very diplomatically while no longer keeping a low profile.

Beijing’s already savvy to what Moscow has been whispering: Exceptionalist Washington – in decline or not – will never treat Beijing as an equal or respect Chinese national interests.

In the great Imponderables chapter, bets are still accepted on whether Moscow will use this serious, triple threat crisis – sanctions, oil price war, ruble devaluation – to radically apply structural game changers and launch a new strategy of economic development. Putin’s recent Q&A, although crammed with intriguing answers, still isn’t clear on this.

Other great imponderable is whether Xi, armed with soft power, charisma and lots of cash, will be able to steer, simultaneously, the tweaking of the economic model and a Go West avalanche that does not end up alienating China’s multiple potential partners in building the New Silk roads.

A final, super-imponderable is whether (or when, if ever) Brussels will decide to undertake a mutually agreed symbiosis with Russia. This, vs. its current posture of total antagonism that extends beyond geopolitical issues. Germany, under Merkel, seems to have made the choice to remain submitted to NATO, and thus, a strategic midget.

So what we have here is the makings of a Greater Asia from Shanghai to St. Petersburg – including, crucially, Tehran – instead of a Total Eurasia that extends from Lisbon to Vladivostok. Total Eurasia may be broken, at least for now. But Greater Asia is a go. There will be a tsunami of efforts by the usual suspects, to also break it up.

All this will be fascinating to watch. How will Moscow and Beijing stare down the West – politically, commercially and ideologically – without risking a war? How will they cope with so much pressure? How will they sell their strategy to great swathes of the Global South, across multiple Asian latitudes?

One battle, though, is already won. Bye, bye Zbigniew Brzezinski. Your grand chessboard hegemonic dream is over.

Pepe Escobar is the author of Globalistan: How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007), Red Zone Blues: a snapshot of Baghdad during the surge and Obama does Globalistan (Nimble Books, 2009).  His latest book is Empire of ChaosHe may be reached at pepeasia@yahoo.com.

This piece first appeared at Asia Times.

dimanche, 19 avril 2015

Quand la Nouvelle Route de la Soie rencontre l'Union eurasienne

Quand la Nouvelle Route de la Soie rencontre l'Union eurasienne

Auteur : Pepe Escobar
Ex: http://zejournal.mobi

Tous les rêves des exceptionnalistes qui prient pour que la Russie et la Chine abandonnent leur solide partenariat stratégique gagnant-gagnant, entièrement conçu pour leurs intérêts nationaux communs, ont été dissipés par la visite cruciale à Moscou du ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi.

poutine_Wang_Yi_moscou.jpgA Moscou, Wang a souligné à la fois la politique Look East de la Russie et celle de la Chine Go West – qui englobent essentiellement l'immense projet de Nouvelles Routes de la Soie – disant que ce projet « a créé des opportunités historiques pour l'amarrage des stratégies de développement des deux pays. »

Ils sont entièrement en phase. Look East, la stratégie de la Russie, ne concerne pas seulement la Chine, mais au moins autant l'intégration eurasienne que les routes de la soie de la Chine Nouvelle, car Moscou en a besoin pour développer la Sibérie orientale et l'Extrême-Orient russe.

Le partenariat stratégique, en perpétuelle évolution n'englobe pas seulement l'énergie, y compris la possibilité d'investissements chinois dans des projets cruciaux de pétrole et de gaz russes, mais aussi l'industrie de la défense ; il est de plus en plus question d'investissement, de banque, de finance et de haute technologie.

La portée du partenariat est extrêmement large, de la coopération Russie-Chine au sein de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) au rôle de la Russie et de la Chine dans la nouvelle banque de développement BRICS, et du soutien de la Russie à l'infrastructure chinoise dirigée par la Banque asiatique d'investissement (AIIB) et la Fondation de la Route de la Soie.

Pékin et Moscou, avec les autres nations du BRICS, se dirigent rapidement vers un commerce débarrassé du rôle du dollar US, en utilisant leurs propres monnaies. En parallèle, ils étudient la création d'un système SWIFT de remplacement – qui sera nécessairement rejoint par les pays de l'UE, comme ils se joignent à l'AIIB ; car si en théorie l'Allemagne pourrait se permettre de perdre son commerce avec la Russie en raison de la politique de sanctions de Berlin – au grand mécontentement des industriels allemands –, elle ne peut tout simplement pas se passer de l'énergie russe. Et pour l'Allemagne, perdre le commerce avec la Chine est totalement impensable.

Le Trans-Siberian boosté aux stéroïdes

Deux jours après sa visite à Moscou, Wang est allé jusqu'à rencontrer le ministre des Affaires étrangères de Mongolie Lundeg Purevsuren, soulignant que la Nouvelle Route de la Soie développera une nouvelle plate-forme, un corridor économique trilatéral reliant la Russie, la Chine et la Mongolie.

Ce à quoi Wang faisait allusion est le corridor de transport eurasien prévu – qui mettra en vedette, un chemin de fer flambant neuf haute vitesse Trans-Siberian de $278 milliards reliant Moscou à Pékin, en seulement 48 heures, avec toutes les escales intermédiaires.

Il était donc inexorable que Wang lui-même assemble les pièces du puzzle que Washington refuse de voir : « La construction du corridor économique Chine-Russie-Mongolie relierait la Ceinture économique de la Route de la Soie en Chine au plan ferroviaire transcontinental de la Russie et au programme de la Route de la Prairie en Mongolie. »

Ce que nous avons ici avant tout, c'est la Nouvelle Route de la Soie, qui établit une connexion directe entre la Chine et l'Union économique Russie-Eurasie-(EEU). La Chine et l'EEU sont tenues de mettre en place une zone de libre-échange. Rien de plus naturel en pratique, car il s'agit du sujet de l'intégration eurasienne. Les détails seront entièrement discutés lorsque le président chinois Xi Jinping ira en visite à Moscou le mois prochain, et au Forum économique de Saint-Pétersbourg en juin.

La connexion IP chinoise

La politique chinoise à couper le souffle du Go West débloque enfin aussi un défi clé du Pipelineistan dans la Nouvelle Route de la Soie ; le gazoduc Iran-Pakistan (IP), qui à l'origine incluait l'Inde, était sans relâche harcelé par les deux administrations Bush et Obama et bloqué par les sanctions américaines.

Le tronçon iranien de 900 km, jusqu'à la frontière pakistanaise, est déjà terminé. Ce qui reste – 780 km, coût $2 milliards – sera essentiellement financé par Pékin, le travail technique étant effectué par une filiale de la CNPC. Le Président Xi va annoncer l'accord à Islamabad ce mois-ci.

Donc, ce que nous avons ici, c'est une Chine qui intervient activement, dans le style gagnant-gagnant, afin de mettre en place un cordon ombilical d'acier entre l'Iran et le Pakistan, pour le transport de gaz, avant même que les sanctions sur l'Iran soient levées, progressivement ou non. Appelez cela l'esprit d'entreprise des Nouvelles Routes de la soie en action – chapitre Asie du Sud.

Bien sûr, il y a aussi des avantages innombrables pour Pékin. L'Iran est déjà une question de sécurité nationale pour la Chine – en tant que premier fournisseur de pétrole et de gaz. Le pipeline passera par Gwadar, le port stratégique de l'océan Indien, déjà sous gestion chinoise. Le gaz pourra alors être expédié en Chine par la mer ou – mieux encore – un nouveau pipeline de Gwadar au Xinjiang, parallèle à l'autoroute du Karakoram, pourrait être construit au cours des prochaines années, contournant ainsi le détroit de Malacca, qui est un objectif crucial de la stratégie de diversification énergétique complexe de la Chine.

Et puis il y a l'Afghanistan – qui, du point de vue de Pékin s'inscrit dans le projet de la Nouvelle Route de la Soie en tant que corridor de ressources entre le Sud et l'Asie centrale.

Pékin veut idéalement investir dans le développement des infrastructures de l'Afghanistan pour accéder à ses ressources et consolider encore une autre tête de pont du Xinjiang à l'Asie centrale et plus loin vers le Moyen-Orient. Les produits fabriqués en Chine doivent actuellement passer par le Pakistan pour être exportés vers l'Afghanistan .

CNPC et la China Metallurgical Group Corp. sont déjà en Afghanistan, par le biais d'investissements dans le bassin pétrolifère de l'Amou-Daria et dans l »énorme mine de cuivre d'Anyak. C'est pas simple, mais c'est un début. La Russie et la Chine membres de la SCO ont grand besoin d'un Afghanistan stable, mûr pour le business à la fois dans la Nouvelle Route de la Soie et dans l'EEU. La question clé est de savoir comment satisfaire les talibans. Certes, en n'appliquant pas les méthodes de Washington.

Pendant ce temps, la proposition du Pentagone, pour ce que son nouveau chef Ash Carter décrit dédaigneusement comme cette partie du monde, est de déployer – devinez quoi – de nouvelles armes qui vont du système de défense antimissile THAAD encore en production, jusqu'aux derniers bombardiers furtifs en passant par les les unités spécialisée dans la cyber-guerre. La coopération économique eurasienne ? On oublie. Pour le Pentagone et l'Otan – qui, soit dit en passant, ont récemment perdu une guerre de treize ans contre les talibans – la coopération économique est pour les poules mouillées.


- Source : Pepe Escobar

dimanche, 05 avril 2015

Dimitrios Kisoudis: Goldgrund Eurasien

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Dimitrios Kisoudis: Goldgrund Eurasien – eine Rezension

By Benedikt Kaiser 

Ex: http://www.sezession.de

Dimitrios-Kisoudis_Goldgrund-Eurasien.jpgEng verknüpft mit »Eurasien« [2] als ideologischem Großraumkonzept, das sich gegen die Hegemonialmacht USA stellt, ist der Name Alexander Dugin [3]. Häufig wird er als »Stichwortgeber« Wladimir Putins interpretiert. Der ehemalige Nationalbolschewist Dugin vereinigt in seinem Theoriegehäuse geopolitische, traditionale und russisch-mystische Elemente. Dimitrios Kisoudis untersucht nun diese eklektizistische Ideologie (Goldgrund Eurasien, hier bestellen [4]), stellt sie kenntnisreich in den Kontext eurasischer Visionen, ist aber spürbar weniger von René Guénon, Karl Haushofer oder russischen Mystikern beeinflußt.

Der Anthropologe argumentiert im »Krieg der Ideen« (Kisoudis) vielmehr im libertären Sinne F. A. von Hayeks und Murray Rothbards. Mit den Ahnherren eines klassischen Marktliberalismus (Hayek) bzw. »Anarchokapitalismus« (Rothbard) will Kisoudis nachweisen, daß schon im Kalten Krieg nicht nur der Sowjetkommunismus, sondern auch der westliche »Kollektivismus mit demokratischem Anstrich« von authentischen Liberalen und Libertären scharf kritisiert worden ist. Die Sowjetunion ist verblichen, die Ost-West-Frontstellung hingegen nicht. In der Ukraine, ohne die Rußland kein eurasisches Reich mehr sei (so Großrusse Alexander Dugin und US-Falke Zbigniew Brzezinski [5] übereinstimmend), werde dies besonders deutlich.

Ohnehin sei mit der Präsidentschaft Putins die Konfliktlinie wieder virulent geworden. Putin begann als Europäer, suchte Nähe und wandte sich – verärgert über EU-Arroganz und die Osterweiterung der NATO – vom Westen ab; er wurde zum Eurasier. Der russische Präsident förderte die Verquickung mit der traditionell staatstragenden orthodoxen Kirche (Moskau: das »Dritte Rom«). Während der Westen seine Traditionen auslösche, gestalte Rußland die seinigen neu. Kisoudis verhehlt nicht, daß seine Sympathie dem geopolitischen Antipoden der Vereinigten Staaten gilt, folgt aber nicht der eurasischen Feindschaft zum Liberalismus.

Die Österreichische Schule jedenfalls zähle nicht zu den postmodernen Auflösungsideologien, sondern zeige seit jeher ein Faible für Überlieferungen. Kisoudis läßt diesen Überlegungen eine idealtypische Liberalismus-Exegese folgen samt hinlänglich bekannter libertärer Kritik am Staatsgeld (»Geldsozialismus«), verknüpft mit einem Plädoyer für die Privatisierung des Währungswesens.

Derartiges hat freilich auch in Rußland keine Perspektive. Doch Kisoudis hält sich daran nicht auf, er schätzt das russische Steuersystem, ein gewisses ökonomisches Laisser-faire, allgemeiner: die russischen Freiheiten. Putins Staatskonzeption ist für ihn kein antiliberaler Entwurf, sondern »autoritärer Liberalismus«. Wirtschaft dürfe fast alles – nur nicht für den Gegner arbeiten. Das berge mehr Selbstbestimmungen für Unternehmer als der westliche Sozialdemokratismus. In dieser Lesart ist der neue Kalte Krieg der »heißkalte« Konflikt zwischen dem autoritär-liberalen Osten und dem postmodern-»geldsozialistischen« Westen. Die Vorzeichen haben sich also gewendet: Der Osten ist nicht mehr sozialistisch, der Westen nicht mehr liberal und marktwirtschaftlich.

Kisoudis ist in seinem geistreichen und sprachlich virtuosen Essay außerordentlich stark, wo er die Bereiche Politische Theologie und Geopolitik tangiert, in wirtschaftstheoretischer Sicht verliert er sich allzusehr in anarchokapitalistischer Ideologie, dabei werden die Ebenen der Betrachtung teils jäh gewechselt. Deutschland rät er zu einer Neujustierung der Außen- und Handelspolitik in Richtung China und Rußland. Dann folgt einer der gedanklichen Sprünge des Autors: Viele Probleme Deutschlands habe die »postmoderne Ideologie« amerikanischer Provenienz zu verantworten, aus der folge: »Deutschland ist bunt wie nie. Aber bunt sind auch die Zufallsgemälde des Schimpansen Congo.«

Dimitrios Kisoudis: Goldgrund Eurasien. Der neue Kalte Krieg und das Dritte Rom, Waltrop/Leipzig: Manuscriptum 2015. 120 S., 14 €, hier bestellen [4]

samedi, 04 avril 2015

Vladimir Poutine prépare-t-il un « gros coup » avec le Japon ?

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Vladimir Poutine prépare-t-il un « gros coup » avec le Japon ?

Arnaud Dubien*
Ex: http://metamag.fr
 
Pendant que la Russie et l’Occident restent enfermés dans la logique des sanctions, Vladimir Poutine se tourne vers l’Asie, et particulièrement vers le Japon. Arnaud Dubien, directeur de l’Observatoire franco-russe, analyse les futures relations entre la Russie et le Japon.

Rendons tout d’abord à César ce qui lui appartient. Le thème et la thèse du présent post de blog m’ont été inspirés par Jean Radvanyi, professeur à l’INALCO et membre du conseil scientifique de l’Observatoire, le 12 mars dernier lors du festival géopolitique de Grenoble. Le sujet est, à mon avis, d’importance majeure, et je crains qu’il soit hors des radars européens.

Depuis plusieurs semaines, l’attention de la presse et des milieux politiques occidentaux se focalise sur l’unité fissurée des États-membres de l’UE quant à la prorogation des sanctions économiques sectorielles adoptées l’été dernier et devant « tomber » le 31 juillet 2015. Sept pays au moins, du sud ( Chypre, Grèce, Espagne, Italie ) ou de l’ex-empire des Habsbourg ( Autriche, Hongrie, Slovaquie ), ne cachent plus leur hostilité à la logique des sanctions. Pour sa part, le Kremlin réédite sa politique du « salami » visant à accentuer ces divisions, ce qui est de bonne guerre.

Mais la Russie travaille au-delà de l’Europe. En direction des BRICS et de puissances régionales clés ( Iran, Égypte, Turquie ), bien sûr. Dans cette démarche visant à rééquilibrer sa politique étrangère, la Chine – premier partenaire commercial de Moscou – occupe une place centrale. Mais Moscou, de sources concordantes, veut également ouvrir une brèche dans l’unité occidentale… en Asie. La « cible » est le Japon.

Le contexte bilatéral russo-japonais est bien connu. Le contentieux sur les Kouriles a, jusqu’ici, empêché un rapprochement qui ferait pourtant sens au vu de la montée en puissance de la Chine et des complémentarités économiques entre les deux pays. L’alliance militaire entre Tokyo et Washington limite également les marges de manœuvre des Japonais. Paradoxalement, c’est Dmitri Medvedev – auquel les poutiniens purs et durs reprochent sa mollesse sur le dossier libyen – qui a exacerbé les tensions avec Tokyo en 2011 en se rendant sur les Kouriles et en annonçant une militarisation des îles.

Mais un « alignement des astres » favorable se met en place, qui laisse entrevoir une percée diplomatique et, potentiellement, un véritable mouvement tectonique en Asie du Nord-Est. Trois facteurs au moins poussent le Kremlin à s’engager sur cette voie : la volonté de « retourner » un pays occidental de premier plan, ce qui serait un camouflet pour les Etats-Unis ; la crainte ( implicite, mais réelle ) que les choses aillent trop vite et trop loin avec les Chinois ; enfin, la possibilité d’obtenir des investissements japonais massifs en Sibérie ( et ailleurs en Russie ).

L’affaire de Crimée change également la donne : Poutine peut d’autant plus facilement faire des concessions sur les Kouriles  comme il l’a d’ailleurs fait en 2004 avec la Chine et en 2010 avec la Norvège ) qu’il a « récupéré » la Crimée. L’obstacle de politique intérieure, qui avait fait capoter une initiative semblable envisagée par Boris Eltsine en 1992, n’existe plus. Côté japonais, on s’inquiète du rapprochement entre Moscou et Pékin et on est prêt, semble-t-il, à franchir le Rubicon. Hasard ou pas, la chancelière Merkel a eu un long échange avec son homologue japonais début mars afin de le convaincre de maintenir les sanctions en l’état.

Aux dernières nouvelles, la visite de Vladimir Poutine à Tokyo doit avoir lieu avant l’été. À suivre.

*directeur de l’Observatoire franco-russe

lundi, 30 mars 2015

EEUU impone sanciones contra Alexander Dugin, la Unión Euroasiática de la Juventud, y dos de sus dirigentes

Los sancionados eurasistas son Alexander Dugin, Andrey Kovalenko, y Pavel Kanishchev, además de la Unión Euroasiática de la Juventud.

Las sanciones congelan los bienes de los señalados e impide a cualquier entidad financiera de Estados Unidos hacer negocios con los individuos o instituciones sancionados. Estas sanciones siguen los pasos de las acciones emprendidas por la Unión Europea y Canadá el pasado 16 de febrero, que fueron prorrogadas la semana pasada. Por otra parte, incluyen a Oleg Kozyura, jefe del Servicio Federal de Migración de Rusia en Sebastópol (Crimea), al que EE.UU.

EFE | ÚN.- Estados Unidos anunció hoy nuevas sanciones contra una entidad financiera rusa, una organización política, y catorce personas, entre ellos el ex primer ministro de Ucrania Mykola Azárov, por su papel en el conflicto en el este del país.

Las sanciones congelan los bienes de los señalados e impide a cualquier entidad financiera de Estados Unidos hacer negocios con los individuos o instituciones sancionados.

“Desde el inicio de esta crisis, hemos demostrado que vamos a imponer costos a los que violan la soberanía y la integridad territorial de Ucrania”, indicó el subsecretario interino para Terrorismo e Inteligencia Financiera del Departamento del Tesoro de EE.UU., Adam Szubin, en un comunicado.

Entre los sancionados también hay dos altos funcionarios del Gobierno del expresidente de Ucrania Víktor Yanukóvich.

Esos señalados son el ex primer viceministro Serhiy Arbuzov y la exministra de Salud Raisa Bogatyrova, que está siendo investigada por malversación de fondos estatales “a gran escala” y la transferencia ilegal de estos fondos fuera del país.

El Departamento del Tesoro indicó que los sancionados han sido incluidos en su “lista negra” por ser responsables o cómplices de “amenazar la paz, la seguridad, la estabilidad, la soberanía y la integridad territorial de Ucrania”.

El listado también incluye ocho a separatistas ucranianos y un pro-separatista ruso, así como la organización Unión Euroasiática de la Juventud, rama juvenil del ultranacionalista Movimiento Euroasiático ruso, a la que EE.UU. acusa de estar reclutando individuos con experiencia militar para combatir en Ucrania.

Se trata de Roman Lyagin, que sirvió como jefe de la Comisión Electoral Central de la autoproclamada República Popular de Donetsk; su ex “ministro de Defensa”, el comandante rebelde Serhii Zdriliuk; el ex “ministro de Seguridad”, Alexander Khodakovsky, y Alexandr Karaman, que ha ejercido varios cargos en el gobierno de esa región.

Figuran, además, Ekaterina Gubareva, ex “ministra de Exteriores”, de la autoproclamada República Popular de Donetsk; así como los líderes de la autoproclamada República Popular de Lugansk Sergei Abisov y Yuriy Ivakin.

Por otra parte, incluyen a Oleg Kozyura, jefe del Servicio Federal de Migración de Rusia en Sebastópol (Crimea), al que EE.UU. acusa de la expedición sistemática y rápida de pasaportes rusos a residentes en Crimea.

Además, también sancionó al Banco Comercial Nacional Ruso, al que el Tesoro acusa de trasladarse a la región ucraniana de Crimea después de que Moscú se anexionase ese territorio en 2014.

Estas sanciones siguen los pasos de las acciones emprendidas por la Unión Europea y Canadá el pasado 16 de febrero, que fueron prorrogadas la semana pasada.

“Si Rusia sigue apoyando la actividad desestabilizadora en Ucrania y viola los acuerdos y la puesta en práctica del plan de Minsk (para lograr una solución pacífica al conflicto), los costos sustanciales que ya enfrenta seguirán aumentando”, advirtió Szubin.

Fuente: Libreprensa

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Originales del Departamento del Tesoro de los EEUU:

Treasury Announces New Designations of Ukrainian Separatists and their Russian Supporters

3/11/2015

Action Targets Eight Ukrainian Separatists, a Russian Pro-Separatist Organization and Three of its Leaders, a Crimean Bank, and Three Former Yanukovych Officials

WASHINGTON – The United States supports the Minsk agreements and views them as the best means to a diplomatic resolution of the conflict in eastern Ukraine. The proof of Russia’s peaceful intentions in Ukraine would be in its full and unambiguous implementation of the September Minsk agreements and the February 12 Minsk Implementation Plan. Recent assaults by Russian-armed separatists, however, particularly those that have targeted Debaltseve and Mariupol – two cities that unquestionably lie outside of separatist-occupied territory according to the September 19 ceasefire line – constitute violations of the letter and spirit of the Minsk agreements.

eury-asianmission.jpgAs part of an ongoing effort to hold accountable those responsible for violations of Ukraine’s sovereignty and territorial integrity, the U.S. Department of the Treasury today imposed sanctions on eight Ukrainian separatists and one pro-separatist Russian entity and its leaders pursuant to E.O. 13660 for being responsible for or complicit in actions or policies that threaten the peace, security, stability, sovereignty, or territorial integrity of Ukraine, for being leaders of such entities, or for asserting governmental authority over a part or region of Ukraine without the authorization of the Government of Ukraine. Additionally, Treasury today designated and blocked the assets of one bank pursuant to E.O. 13685 for operating in the Crimea region of Ukraine, and three individuals pursuant to E.O. 13660 for the misappropriation of state assets of Ukraine. These sanctions follow similar action taken by the European Union and Canada on February 16. We continue to work to remain in lockstep with our international partners in our efforts to incentivize a diplomatic resolution to the crisis in Ukraine.

“From the start of this crisis, we have demonstrated that we will impose costs on those who violate the sovereignty and territorial integrity of Ukraine. That includes individuals, organizations, businesses, and the governments that support them,” said Acting Under Secretary for Terrorism and Financial Intelligence Adam J. Szubin. “If Russia continues to support destabilizing activity in Ukraine and violate the Minsk agreements and implementation plan, the already substantial costs it faces will continue to rise.”

Undermining Ukraine’s Sovereignty – Executive Order 13660

Roman Lyagin has served as the chairman of the Central Election Commission (CEC) and as minister of social and labor policy of the self-proclaimed Donetsk People’s Republic (DPR). In his role as CEC chairman, he helped organize a number of votes in the region that were denounced as illegal by the government of Ukraine in Kyiv, including a May 2014 “independence referendum” and a November 2014 election for leadership positions in the self-proclaimed DPR. In addition, Lyagin actively interfered with the internationally-recognized national Ukrainian elections by confiscating ballots and preventing voting in the May 2014 Ukrainian parliamentary elections and the October 2014 election for Ukraine’s President. He has been designated for having asserted governmental authority over a part or region of Ukraine without the authorization of the Government of Ukraine, and for having engaged in actions that have undermined democratic processes in Ukraine.

Yuriy Ivakin is being designated pursuant to E.O. 13660 for asserting governmental authority over a part or region of Ukraine without the authorization of the Government of Ukraine, and for being a leader of the self-proclaimed Luhansk People’s Republic (LPR), an entity whose property and interest in property are blocked by this order. Ivakin has led the ministry of internal affairs of the self-proclaimed LPR. In May 2014, Ivakin, accompanied by representatives of the self-proclaimed LPR, entered the regional directorate of the Ukrainian Ministry of Internal Affairs in Luhansk and declared himself the head of the regional directorate.

Aleksandr Karaman has held a number of leadership posts within the self-proclaimed DPR, including minister for social and labor policy, foreign minister, deputy prime minister, and deputy chairman of the council of ministers. Karaman is being designated for being a leader of the self-proclaimed DPR, and for threatening the peace, stability, sovereignty, and territorial integrity of Ukraine.

Oleksandr Khodakovskyy is being designated pursuant to E.O. 13660 for being responsible for or complicit in actions or policies that threaten the peace, security, stability, sovereignty, or territorial integrity of Ukraine, and for asserting governmental authority over a part or region of Ukraine without the authorization of the Government of Ukraine. Khodakovskyy is the former head of the self-proclaimed DPR security service, and is the chief of the Vostok Battalion, a unit of the DPR militia that engaged in fighting with the Ukrainian military at Donetsk Airport.

Senior “rebel commander” Serhii Zdriliuk served as an aide to Igor Girkin (a.k.a Igor Strelkov), former “defense minister” of the self-proclaimed DPR. Zdriliuk and Girkin were involved in the takeover of Ukraine’s Crimea region that led to Russia’s illegal annexation of the region in March 2014. He is being designated for actions that threaten the territorial integrity of Ukraine, and has acted on behalf of the self-proclaimed DPR. Girkin was designated in June 2014 pursuant to E.O. 13660.

The Eurasian Youth Union has actively recruited individuals with military and combat experience to fight on behalf of the self-proclaimed DPR and has stated that it has a covert presence in Ukraine. Aleksandr Dugin, Andrey Kovalenko, and Pavel Kanishchev are leaders of the Eurasian Youth Union. This group and its leaders are being designated for being responsible for or complicit in actions or policies that threaten the peace, security, stability, or sovereignty or territorial integrity of Ukraine.

Ekaterina Gubareva is being designated for being responsible for or complicit in actions or policies that threaten the peace, security, stability, sovereignty, or territorial integrity of Ukraine. Gubareva previously held the title of foreign minister of the self-proclaimed DPR, and has engaged in efforts to transfer funds from Russia to the DPR. She was a signatory to an October 2014 statement signed by self-proclaimed DPR and LPR leaders and representatives refusing to return to the Government of Ukraine control of the Ukrainian side of the international border with Russia.

Sergei Abisov was appointed minister of interior affairs of the self-proclaimed Republic of Crimea in May 2014. Abisov is being designated because he has asserted governmental authority over a part or region of Ukraine without the authorization of the Government of Ukraine.

Oleg Kozyura is the head of the Federal Migration Service of Russia in Sevastopol, Crimea, and is responsible for the systematic and expedited issuance of Russian passports for the residents of Crimea. As leader of the Federal Migration Service of Russia in Sevastopol, Kozyura facilitated the issuance of more than 260,000 Russian passports to the citizens of Sevastopol and other regions. Kozyura is being designated because he leads an entity that has, or whose members have, asserted governmental authority over a part of Ukraine without the authorization of the Government of Ukraine.

Crimean Bank – Executive Order 13685

eury-snovygeopolitiki_0.jpgRussian National Commercial Bank (RNCB) is being designated today pursuant to E.O. 13685 for operating in the Crimea region of Ukraine. RNCB had no presence in the Crimea region of Ukraine prior to its occupation and attempted annexation by Russia and Russian authorities have used the bank to facilitate its illegal efforts to incorporate Crimea into the Russian Federation. Following the annexation, RNCB bought or took over branches of retreating banks and now operates the largest banking network in Crimea.

Former Yanukovych Officials and Misappropriation of Ukrainian State Assets – Executive Order 13660

Mykola Azarov is the former Prime Minister of Ukraine. Azarov is being designated because he is responsible for the misappropriation of state assets of Ukraine.

Serhiy Arbuzov is the former First Deputy Prime Minister and former acting Prime Minister of Ukraine. He is being designated for acting on behalf of former Ukrainian President Viktor Yanukovych as First Deputy Prime Minister and as a member of Yanukovych’s inner circle. Arbuzov was a leading member of a group of Yanukovych political appointees responsible for key economic positions in the government.

Raisa Bohatyriova is the former Minister of Health of Ukraine. She is currently under investigation in Ukraine for the large-scale embezzlement of state funds and the illegal transfer of those funds outside the territory of Ukraine. She is being designated for the misappropriation of state assets of Ukraine.

All the individuals and entities designated today are blocked. Their property and interests in property within U.S. jurisdiction are frozen and U.S. persons are generally prohibited from doing business with them.

For identifying information on the individuals and entities named in this release, please click here.

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Fuente: ht tp://www.treasury.gov/press-center/press-releases/Pages/jl9993.aspx

Ukraine-related Designations
3/11/2015
OFFICE OF FOREIGN ASSETS CONTROL
Specially Designated Nationals List Update
The following individuals have been added to OFAC’s SDN List:

ABISOV, Sergei (a.k.a. ABISOV, Sergei Vadimovich); DOB 27 Nov 1967; POB Simferopol, Crimea, Ukraine (individual) [UKRAINE-EO13660].

ARBUZOV, Serhiy (a.k.a. ARBUZOV, Sergey G.; a.k.a. ARBUZOV, Serhiy Hennadiyovych); DOB 24 Mar 1976; POB Donetsk, Ukraine; Former First Deputy Prime Minister of Ukraine (individual) [UKRAINE-EO13660].

AZAROV, Mykola Yanovych (a.k.a. AZAROV, Mykola Nikolai Yanovych; a.k.a. PAKHLO, Nikolai Yanovich); DOB 17 Dec 1947; POB Kaluga, Russia; Former Prime Minister of Ukraine (individual) [UKRAINE-EO13660].

BOHATYRIOVA, Raisa Vasylivna (a.k.a. BOGATYRIOVA, Raisa; a.k.a. BOGATYROVA, Raisa; a.k.a. BOGATYRYOVA, Raisa; a.k.a. BOHATYREVA, Raisa; a.k.a. BOHATYROVA, Raisa; a.k.a. BOHATYRYOVA, Raisa; a.k.a. BOHATYRYOVA, Rayisa); DOB 06 Jan 1953; POB Bakal, Chelyabinsk, Russia (individual) [UKRAINE-EO13660].

DUGIN, Aleksandr (a.k.a. DUGIN, Aleksandr Gelyevich; a.k.a. DUGIN, Alexander Gelyevich); DOB 07 Jan 1962 (individual) [UKRAINE-EO13660].

GUBAREVA, Ekaterina (a.k.a. GUBAREVA, Yekaterina); DOB 05 Jul 1983 (individual) [UKRAINE-EO13660].

IVAKIN, Yuriy Vladimirovich (a.k.a. IVAKIN, Yurii); DOB 13 Aug 1954; POB Perevalsk, Ukraine (individual) [UKRAINE-EO13660].

KANISHCHEV, Pavel; DOB 1986 (individual) [UKRAINE-EO13660].

KARAMAN, Aleksandr (a.k.a. CARAMAN, Aleksandru; a.k.a. KARAMAN, Alexander; a.k.a. KARAMAN, Oleksandr); DOB 26 Jul 1956; POB Republic of Mordovia, Russia (individual) [UKRAINE-EO13660].

KHODAKOVSKYY, Oleksandr Sergeyevich (a.k.a. KHODAKOVSKIY, Aleksandr; a.k.a. KHODAKOVSKY, Alexander); DOB 18 Dec 1972; POB Donetsk, Ukraine (individual) [UKRAINE-EO13660].

KOVALENKO, Andrey; DOB 30 Dec 1985 (individual) [UKRAINE-EO13660].

KOZYURA, Oleg Grigorievich (a.k.a. KOZYURA, Oleg Grigoryevich); DOB 19 Dec 1962; POB Zaporozhye, Ukraine; Head of the Office of the Federal Migration Service in the City of Sevastopol (individual) [UKRAINE-EO13660].

LYAGIN, Roman (a.k.a. LIAGIN, Roman; a.k.a. LIAHIN, Roman; a.k.a. LYAHIN, Roman); DOB 30 May 1980; POB Donetsk, Ukraine (individual) [UKRAINE-EO13660].

ZDRILIUK, Serhii Anatoliyovych (a.k.a. ZDRILIUK, Serghiei; a.k.a. ZDRILYUK, Sergei; a.k.a. ZDRILYUK, Sergey; a.k.a. ZDRYLYUK, Serhiy); DOB 23 Jun 1972; POB Vinnytsia Region, Ukraine; nationality Ukraine; citizen Russia (individual) [UKRAINE-EO13660].

The following entities have been added to OFAC’s SDN List:

EURASIAN YOUTH UNION, Russia 3, Bagrationovskiy Proezd, House 7, Area 20 B, Office 405, Moscow 121087, Russia; Website http://rossia3.ru; Email Address esm@rossia3.ru [UKRAINE-EO13660].

RUSSIAN NATIONAL COMMERCIAL BANK (a.k.a. RNKB OAO; a.k.a. ROSSISKI NATSIONALNY KOMMERCHESKI BANK OTKRYTOE AKTSIONERNOE OBSHCHESTVO; a.k.a. “RNCB”), d. 9 korp. 5 ul.Krasnoproletarskaya, Moscow 127030, Russia; SWIFT/BIC RNCO RU MM; Website http://www.rncb.ru; Email Address rncb@rncb.ru; BIK (RU) 044525607; Registration ID 1027700381290 (Russia); Tax ID No. 7701105460 (Russia); Government Gazette Number 09610705 (Russia) [UKRAINE-EO13685].

Fuente: ht tp://www.treasury.gov/resource-center/sanctions/OFAC-Enforcement/Pages/20150311.aspx

Desde La Cuarta Teoría Política en español* queremos mostrar nuestro apoyo y reconocimiento a los camaradas sancionados por la mafia imperialista estadounidense y sus cipayos.

*Naturalmente, desde la Página Transversal nos unimos a ese apoyo y reconocimiento.

Fuente: La Cuarta Teoría en español

Russland setzt auf Währungsallianz mit China

Russland setzt auf Währungsallianz mit China

Ex: http://www.unzensuriert.at

 
Ein stabiler Wechselkurs von Dollar zu Yuan ist die Basis einer neuen Währungspolitik. Foto: Federal Reserve / Wikimedia (CC BY-SA 3.0)
 
Ein stabiler Wechselkurs von Dollar zu Yuan ist die Basis einer neuen Währungspolitik.
Foto: Federal Reserve / Wikimedia (CC BY-SA 3.0)

Einen weiteren Schritt in Richtung Abschaffung des US-Dollars als Weltwährung haben nun Moskau und Peking gestartet. Am vergangenen Dienstag gab Russland den Startschuss zum Handel sogenannter Yuan-Rubel-Futures. Mit diesen Futures-Kontrakten soll der Markt für das Währungspaar Chinesischer Yuan / Russischer Rubel im internationalen Wirtschaftskreislauf erschlossen werden. Basis ist der sprunghafte Umsatzanstieg des Handels an der Moskauer Börse in der chinesischen Yuan-Währung.

So explodierte der Handel um nicht weniger als 700 Prozent, d.h. auf 395 Milliarden Rubel, die in der chinesischen Währung gehandelt wurden. Und dies ging ausschließlich zu Lasten des US-Dollars. Wobei gleichzeitig der Wechselkurs zwischen US-Dollar und Yuan in den letzten Jahren sehr stabil war. Dies privilegiert den Yuan zusätzlich als eine der neuen Weltwährungen. 

Moskau: Währungssicherungselemente werden geschaffen

Laut Andrej Schemetow, dem Chef der Moskauer Börse, ist dies die Basis für die Etablierung einer vollständigen Palette von Yuan-Sicherungselementen beim internationalen Warenverkehr. Damit versucht mach die Spekulationsangriffe von Seiten der USA gegen den Rubel, die seit dem Ausbruch der Ukraine-Krise fortlaufend stattfinden, zu neutralisieren. Handelssanktionen und andere Instrumente des Westens gegen Moskau im Zuge des laufenden Wirtschaftskriegs verlieren so ihre Wirksamkeit.

samedi, 28 mars 2015

Turkmenistan and the Geopolitical Tightrope between Russia/Iran and NATO/EU Powers

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Turkmenistan and the Geopolitical Tightrope between Russia/Iran and NATO/EU Powers

Nuray Lydia Oglu, Hiroshi Saito and Lee Jay Walker

Ex: http://moderntokyotimes.com

Turkmenistanllll.gifThe nation of Turkmenistan is of major geopolitical significance because of its shared borders with Afghanistan, Iran, Kazakhstan and Uzbekistan. Of equal significance is the coastal area that links Turkmenistan to the Caspian Sea; thereby sharing a potent area with Azerbaijan, Iran, Kazakhstan and the Russian Federation. This reality means that current strains between the Russian Federation and NATO/European Union powers can be felt within important geopolitical decisions that Turkmenistan needs to make. However, the one biding factor prior to the recent clash between Moscow and Washington was the need to remain neutral when applicable.

Energy politics, NATO encroachment, tensions between Iran and Turkey over Syria – and elements of distrust between Tehran and Washington – adds further complexity to an already complex issue. On top of this, Iran is worried by Turkey’s role in being a transit for Takfiri sectarian terrorists against Syria, with the knock on effect being further destabilization in Iraq.

Also, the crisis in Afghanistan remains up in the air. Therefore, Turkmenistan is worried about the growing menace of Takfiri forces, the possible menace of ISIS (IS – Islamic State), political Islam undermining indigenous Islam, and if Iraq is anything to go by – after America and allies pulled out – then the possible reality of new destabilization in Afghanistan. These important factors, and others, mean that Turkmenistan is increasingly feeling the global tensions that persist.

In the area of energy politics it is clear that the European Union (EU), Azerbaijan and Turkey have a different objective compared to Iran and the Russian Federation. This reality is clearly visible when viewing the Trans-Caspian Pipeline (TCP) because Moscow and Tehran oppose the TCP based on geopolitical and economic factors. Despite this, the EU, Azerbaijan and Turkey have made positive overtures that include areas outside of the TCP. Therefore, Turkmenistan needs to weigh up the TCP carefully given the geopolitical importance of energy politics alongside other important factors.

Zaur Shiriyev at The Jamestown Foundation states: From Turkmenistan’s point of view, Gazprom’s declaration that it would cut its imports by nearly two-thirds—to 4 billion cubic meters (bcm)—has serious implications. The Russian financial crisis and decline in oil prices has had a direct impact on Turkmenistan’s internal market; notably, it has devalued its currency by 19 percent versus the dollar (Hurriyet Daily News, February 17). These various factors have strengthened Ashgabat’s motivations for seeking alternative markets for its gas. But Turkmenistan’s traditional approach to pipeline politics—that of “zero financial burden, hundred percent effectiveness”—remains unchanged, and so Ashgabat is interested in exporting to markets through existing pipelines or where there are opportunities for expansion, like with the China route. Despite Ashgabat’s dissatisfaction with Gazprom’s decision to cut gas imports, after twenty years of neutrality, Turkmenistan’s approach is unlikely to change; it will almost certainly maintain political sensitivity in its approach toward Moscow. This is particularly important given the broader atmosphere of confrontation between Russia and the West. Ashgabat is highly unlikely to actively support the European Union’s energy diversification strategy, as this would contradict the strongly business-based approach of the Turkmenistani leadership toward gas politics.”

The situation in Afghanistan and the rise of Takfiri Salafi forces in several nations is also worrying the political elites in Turkmenistan. Not only this, the murky role of NATO Turkey being an open conduit for several terrorist and sectarian forces against Syria also complicates the positive hand being plied by Ankara. Also, if NATO powers and allies can create a political vacuum in Afghanistan, Iraq and Libya and then leave, then how trustworthy are NATO powers in being a genuine partner in the fight against terrorism? Indeed, even political elites in Washington are questioning the current Erdogan government in Turkey therefore divisions within NATO clearly exist.

Turkmenistan refrained from joining the Collective Security Treaty Organization and clearly the Russian Federation must be disappointed by this reality. Of equal significance is the fact that Turkmenistan is only “a guest” of the Shanghai Cooperation Organization despite the powerful geopolitical significance of this organization. However, the decreasing role of America and NATO within Afghanistan may lead to Turkmenistan focusing more strongly on the Russian Federation, China and Iran.

It is abundantly clear that Turkmenistan prefers the geopolitical status quo but this may hinder the economic growth of this nation. Also, the growing menace of terrorism, Islamist indoctrination and the threat of greater destabilization in Afghanistan may lead to Turkmenistan to look towards the Russian Federation and Iran.

After all, it is abundantly clear that in Iraq it is Iranian military forces that are on the ground and helping the central government of this nation. This fact highlights the current weakness of the Obama administration in America. Therefore, while Turkmenistan doesn’t want to take sides, it is equally true that America is losing its influence in Afghanistan and Iraq respectively. However, for Turkmenistan, the economic equation is also of equal significance therefore the political tightrope will remain until brave decisions are taken by this nation.

http://www.jamestown.org/single/?tx_ttnews[tt_news]=43646&tx_ttnews[backPid]=7&cHash=a79ddb4bdb31ed4e48c3832c0a85ced8#.VQXtNGb6nLU

 

mtt

 

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vendredi, 20 mars 2015

Washington’s War on Russia

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Only Moscow Can Stop It

Washington’s War on Russia

by MIKE WHITNEY
Ex: http://www.counterpunch.org

“In order to survive and preserve its leading role on the international stage, the US desperately needs to plunge Eurasia into chaos, (and) to cut economic ties between Europe and Asia-Pacific Region … Russia is the only (country) within this potential zone of instability that is capable of resistance. It is the only state that is ready to confront the Americans. Undermining Russia’s political will for resistance… is a vitally important task for America.”

-Nikolai Starikov, Western Financial System Is Driving It to War, Russia Insider

“Our first objective is to prevent the re-emergence of a new rival, either on the territory of the former Soviet Union or elsewhere, that poses a threat on the order of that posed formerly by the Soviet Union. This is a dominant consideration underlying the new regional defense strategy and requires that we endeavor to prevent any hostile power from dominating a region whose resources would, under consolidated control, be sufficient to generate global power.”

-The Wolfowitz Doctrine, the original version of the Defense Planning Guidance, authored by Under Secretary of Defense Paul Wolfowitz, leaked to the New York Times on March 7, 1992

The United States does not want a war with Russia, it simply feels that it has no choice. If the State Department hadn’t initiated a coup in Ukraine to topple the elected president, Viktor Yanukovych, then the US could not have inserted itself between Russia and the EU, thus, disrupting vital trade routes which were strengthening nations on both continents. The economic integration of Asia and Europe–including plans for high-speed rail from China (“The New Silk Road”) to the EU–poses a clear and present danger for the US whose share of global GDP continues to shrink and whose significance in the world economy continues to decline. For the United States to ignore this new rival (EU-Russia) would be the equivalent of throwing in the towel and accepting a future in which the US would face a gradual but persistent erosion of its power and influence in world affairs. No one in Washington is prepared to let that happen, which is why the US launched its proxy-war in Ukraine.

The US wants to separate the continents, “prevent the emergence of a new rival”, install a tollbooth between Europe and Asia, and establish itself as the guarantor of regional security. To that end, the US is rebuilding the Iron Curtain along a thousand mile stretch from the Baltic Sea to the Black Sea. Tanks, armored vehicles and artillery are being sent to the region to reinforce a buffer zone around Europe in order to isolate Russia and to create a staging ground for future US aggression. Reports of heavy equipment and weapons deployment appear in the media on nearly a daily basis although the news is typically omitted in the US press. A quick review of some of the recent headlines will help readers to grasp the scale of the conflict that is cropping up below the radar:

“US, Bulgaria to hold Balkans military drills”, “NATO Begins Exercises In Black Sea”, “Army to send even more troops, tanks to Europe”, “Poland requests greater US military presence”, “U.S. Army sending armored convoy 1,100 miles through Europe”, “Over 120 US tanks, armored vehicles arrive in Latvia”, “US, Poland to Conduct Missile Exercise in March – Pentagon”

Get the picture? There’s a war going on, a war between the United States and Russia.

Notice how most of the headlines emphasize US involvement, not NATO. In other words, the provocations against Russia originate from Washington not Europe. This is an important point. The EU has supported US-led economic sanctions, but it’s not nearly as supportive of the military build up along the perimeter. That’s Washington’s idea and the cost is borne by the US alone. Naturally, moving tanks, armored vehicles and artillery around the world is an expensive project, but the US is more than willing to make the sacrifice if it helps to achieve its objectives.

And what are Washington’s objectives?

Interestingly, even political analysts on the far right seem to agree about that point. For example, check out this quote from STRATFOR CEO George Friedman who summed it up in a recent presentation he delivered at The Chicago Council on Foreign Affairs. He said:

“The primordial interest of the United States, over which for centuries we have fought wars–the First, the Second and Cold Wars–has been the relationship between Germany and Russia, because united there, they’re the only force that could threaten us. And to make sure that that doesn’t happen.” … George Friedman at The Chicago Council on Foreign Affairs, Time 1:40 to 1:57)

Bingo. Ukraine has nothing to do with sovereignty, democracy or (alleged) Russian aggression. That’s all propaganda. It’s about power. It’s about imperial expansion. It’s about spheres of influence. It’s about staving off irreversible economic decline. It’s all part of the smash-mouth, scorched earth, take-no-prisoners geopolitical world in which we live, not the fake Disneyworld created by the western media. The US State Department and CIA toppled the elected-government in Ukraine and ordered the new junta regime to launch a desperate war of annihilation against its own people in the East, because, well, because they felt they had no other option. Had Putin’s ambitious plan to create a free trade zone between Lisbon to Vladivostok gone forward, then where would that leave the United States? Out in the cold, that’s where. The US would become an isolated island of dwindling significance whose massive account deficits and ballooning national debt would pave the way for years of brutal restructuring, declining standards of living, runaway inflation and burgeoning social unrest. Does anyone really believe that Washington would let that to happen when it has a “brand-spanking” trillion dollar war machine at its disposal?

Heck, no. Besides, Washington believes it has a historic right to rule the world, which is what one would expect when the sense of entitlement and hubris reach their terminal phase. Now check out this clip from an article by economist Jack Rasmus at CounterPunch:

“Behind the sanctions is the USA objective of driving Russia out of the European economy. Europe was becoming too integrated and dependent on Russia. Not only its gas and raw materials, but trade relations and money capital flows were deepening on many fronts between Russia and Europe in general prior to the Ukraine crisis that has provided the cover for the introduction of the sanctions. Russia’s growing economic integration with Europe threatened the long term economic interests of US capitalists. Strategically, the US precipitated coup in the Ukraine can be viewed, therefore as a means by which to provoke Russian military intervention, i.e. a necessary event in order to deepen and expand economic sanctions that would ultimately sever the growing economic ties between Europe and Russia long term. That severance in turn would not only ensure US economic interests remain dominant in Europe, but would also open up new opportunities for profit making for US interests in Europe and Ukraine as well…

When the rules of the competition game between capitalists break down altogether, the result is war—i.e. the ultimate form of inter-capitalist competition.” (The Global Currency Wars, Jack Rasmus, CounterPunch)

See? Analysts on the right and left agree. Ukraine has nothing to do with sovereignty, democracy or Russian aggression. It’s plain-old cutthroat geopolitics, where the last man left standing, wins.

The United States cannot allow Russia reap the benefits of its own vast resources. Oh, no. It has to be chastised, it has to be bullied, it has to be sanctioned, isolated, threatened and intimidated. That’s how the system really works. The free market stuff is just horsecrap for the sheeple.

Russia is going to have to deal with chaotic, fratricidal wars on its borders and color-coded regime change turbulence in its capital. It will have to withstand reprisals from its trading partners, attacks on its currency and plots to eviscerate its (oil) revenues. The US will do everything in its power to poison the well, to demonize Putin, to turn Brussels against Moscow, and to sabotage the Russian economy.

Divide and conquer, that’s the ticket. Keep them at each others throats at all times. Sunni vs Shia, one ethnic Ukrainian vs the other, Russians vs Europeans. That’s Washington’s plan, and it’s a plan that never fails.

US powerbrokers are convinced that America’s economic slide can only be arrested by staking a claim in Central Asia, dismembering Russia, encircling China, and quashing all plans for an economically-integrated EU-Asia. Washington is determined to prevail in this existential conflict, to assert its hegemonic control over the two continents, and to preserve its position as the world’s only superpower.

Only Russia can stop the United States and we believe it will.

MIKE WHITNEY lives in Washington state. He is a contributor to Hopeless: Barack Obama and the Politics of Illusion (AK Press). Hopeless is also available in a Kindle edition. He can be reached at fergiewhitney@msn.com.

mardi, 17 mars 2015

Nouvelle importance de la Mongolie

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Nouvelle importance de la Mongolie

par Jean-Paul Baquiast
Ex: http://www.europesolidaire.eu
 
Du grand Empire Mongol qui pendant des siècles avait fait trembler ou rêver l'Asie et l'Europe, reste aujourd'hui la Mongolie, dite encore parfois Mongolie Extérieure, à qui l'on n'attribue généralement pas un grand poids géopolitique.
 
Le ministère français des affaires étrangères, quant à lui, dans ses « Conseils aux voyageurs », n'en donne pas une description très attrayante: « Pour tout déplacement en Mongolie, pays très étendu (trois fois la France) et faiblement peuplé (2,75 millions d'habitants), il est impératif de disposer d'un excellent contrat d'assurance maladie/rapatriement couvrant la totalité du séjour mongol et de vérifier si la compagnie d'assurance choisie dispose de correspondants administratifs et médicaux en Mongolie.I l est également indispensable de se munir des coordonnées précises de ces correspondants avant d'entreprendre le voyage, et de les conserver avec soi durant tout le séjour. » Il est vrai que se perdre dans le désert de Gobi peut légitimement faire peur.

Mais il s'agit d'une erreur. Aujourd'hui la Mongolie joue dans le monde un rôle important. Elle le doit d'abord à sa situation géographique qui la place au coeur de l'Asie, entre la Russie et la Chine et qui fait d'elle un point de passage essentiel pour les routes commerciales terrestres entre l'Europe et l'Asie-Pacifique. Elle dispose aussi d'importantes réserves minérales aujourd'hui considérées comme rares, cuivre, molybdène, étain, tungstène et or notamment.

Mais elle doit également ce rôle à ce qu'elle a nommé la « third neighbour approach diplomacy». Ce terme désigne la volonté du pays de ne pas se limiter aux relations avec ses deux grands voisins, Chine et Russie, mais de rechercher des relations de bon voisinage avec des pays plus éloignés, Japon, Corée du Sud et Etats-Unis notamment. Pour le moment, il faut bien remarquer que l'Europe ne figure pas dans la priorité des « troisièmes voisins » à fréquenter.

Aussi ouverte en théorie que soit la diplomatie mongole, elle a toujours refusé de s'inclure dans des alliances, militaires ou économiques, qui seraient dirigées contre la Chine et la Russie. Ceci n'a pas été cependant sans que les Etats-Unis s'y essayent à plusieurs reprises, ayant proposé à la Mongolie de créer sur son territoire un réseau de bases militaires analogue à celui mis en place dans une Europe plus docile.

La Mongolie a cependant accepté de participer aux côtés des Etats-Unis aux guerres menées par ces derniers en Afghanistan et en Irak. De même ses experts militaires se joignent depuis 2006 à des manoeuvres communes dites « Khaan Quest » . Il existe dans la capitale, Oulan Bator, un centre dit d' « entrainement au maintien de la paix » ( Regional Peacekeeping Training Center ) financé par l'Amérique, dont le nom est tout un programme. En avril 2014, le secrétaire à la défense de l'époque, Chuck Hagel, avait déclaré que la Mongolie était pour l'Amérique un « partenaire stratégique ». Sur le plan économique, le gouvernement américian veille soigneusement à préserver les positions des deux principales entreprises minières anglo-américaines, American Peabody Energy Corporation et Rio Tinto Ltd.

Tout ceci n'est pas sans inquiéter la Chine, car fidèle à sa politique de « défense des droits de l'homme et de la démocratie», la diplomatie américaine et ses services secrets ne cessent de susciter un sentiment anti-chinois dans la région autonome voisine de la Mongolie dite Uyghur Autonomous Region of the People's Republic of China (XUAR), laquelle abrite 9 millions de musulmans dont certains sont de plus en plus tentés par l'indépendance, quand ils ne fomentent pas en Chine même des attentats au nom d'un nouveau djihad à la mode asiatique.

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La Mongolie et le BRICS

Pour rééquilibrer les rapports de force, la Mongolie a décidé de renforcer ses relations avec la Russie. Ceci prendra une nouvelle actualité avec la mise en place des coopérations stratégiques et éventuellement militaires développées à l'initiative de cette dernière au sein du BRICS et de l'Organisation de Coopération de Shanghai (SCO). Dans ce cadre, à la suite d'une visite en début d'année du vice président de la Douma Sergei Naryshkin, la Mongolie a exprimé le désir que se mette en place à travers son territoire des branches terrestres de la Nouvelle Route de la Soie, décidée par la Chine et soutenue par la Russie. Il s'agira de construire des voies ferrées et des autoroutes, ainsi que des pipe-lines pour le gaz et le pétrole venant de Russie. Ce projet s'appellera « Route de la Steppe ». Il complétera la Route de la Soie et devrait permettre de développer une zone économique active. La Mongolie sera présente à la prochaine réunion du BRICS à Ufa et devrait devenir membre observateur au sein de la SCO

Dans l'immédiat, contrairement à la volonté (honteuse) de non participation de ses homologues européens à la commémoration organisée en mai 2015 pour célébrer le 70e anniversaire de la victoire de l'URSS dans la Grande guerre patriotique, le président de la Mongolie Tsakhiagiin Elbegdorj sera présent au premier rang. Il aura l'occasion d'y rencontrer Vladimir Poutine, sans mentionner d'autres rencontres également envisagées.

Rappelons une nouvelle fois ici que si l'Europe n'avait pas sur ordre de Washington, décidé de refuser pour le moment toutes les coopérations stratégiques dites euroBRICS, elle aurait pu reprendre un peu d'influence dans une partie du monde où elle est devenue pratiquement invisible.

Notes

* Empire Mongol. Wikipedia

* Mongolie Wikipedia

Jean Paul Baquiast

El 'Altyn', ¿un 'euro' para Eurasia?

 

Ex: http://www.elespiadigital.com

Una Zona Monetaria Común dentro de la Unión Económica Euroasiática (UEE) haría que la unión fuese aún más estable y económicamente atractiva, según un grupo de expertos citados por RIA Novosti.

La viabilidad de una moneda común para la unión compuesta por Rusia, Bielorrusia, Kazajistán y Armenia está siendo analizada por el Banco Central de Rusia en colaboración con el Gobierno, a instancias del presidente ruso, Vladímir Putin.

Se estima que el 1 de septiembre de este año estará listo el análisis para determinar si la unión monetaria en la UEE es un proyecto viable.

El año pasado en Kazajistán fueron firmados los documentos que prevén la creación para 2025 del Banco Euroasiático y la creación de una moneda única para Bielorrusia, Rusia y Kazajistán. "La situación política exterior puede haber influido en las decisiones económicas, y el presidente de Rusia ha decidido acelerar este proceso", señala el director del departamento de análisis de la empresa de servicios financieros Alpari, Alexander Razuvaev.

El experto asegura que la nueva moneda "puede entrar en vigor el 1 de enero de 2016", argumentando que "la política controla la economía". Sin embargo, hay quienes opinan que la transición debe hacerse de manera más pausada.

Un 'altyn' para Eurasia

La denominación provisional de la moneda única de Eurasia es 'altyn' (una moneda usada históricamente en Rusia y en varios países de la región), nombre que fue evocado en público por el presidente de Kazajistán, Nursultan Nazarbayev. Sin embargo, según algunos medios de comunicación también se estaría discutiendo el nombre de 'euraz'.

El Banco Central de la UEE, que se encargará de supervisar la política monetaria única, estará ubicado en Alma-Ata, antigua capital kazaja. "Solo que no será un análogo del Banco Central Europeo. Probablemente las decisiones serán tomadas de manera unánime por los jefes de Estado o por las directivas de los Bancos Nacionales de los países miembro", dice Razuvaev.

Se estima que la moneda única sea similar al rublo ruso y se sustente en las exportaciones de materias primas de Rusia y Kazajstán. El mercado potencial de circulación ronda los 180 millones de personas, sumando un volumen total del PIB de más de 2 billones de dólares.

Un paso lógico

Por un lado, la introducción de la moneda única en la UEE es un paso lógico en el marco de la coordinación económica, sostienen los expertos. "La moneda única es la última etapa de la integración monetaria", explica el director del Centro de Estudios de Integración del Banco Euroasiático de Desarrollo, Yevgeni Vinokurov.

La unión monetaria puede tener un impacto positivo en el desarrollo del mercado común en el marco de la UEE, tanto en términos de evitar el impacto de las fluctuaciones de las monedas de los países participantes, como también de la simplificación de los cálculos internos, dijo a RIA Novosti el director general del Centro de Comercio Internacional Vladímir Salamatov.

Según Vinokurov, las monedas de la UEE dependen de facto y en gran medida del rublo ruso. "Esta es, en nuestra opinión, una razón más para considerar la integración. Ya que, de todas formas, la tasa de cambio de sus monedas se basará en el rublo", explica. Y concluye preguntándose: "¿no será mejor hacer este mecanismo claro y ajustable?".

Periodo de configuración

La introducción de una moneda única no se puede hacer de la noche a la mañana. "Necesitamos un período suficientemente largo de ajuste. Se trata de coordinar las políticas monetarias y cambiarias, y de la coordinación mutua de las tasas de cambio de las monedas nacionales", agrega Vinokourov.

Una condición importante para el buen funcionamiento de la unión monetaria es una coordinación fiscal (en términos de legislación fiscal). Solo después de eso será posible la introducción de una moneda única y un único centro de emisión, resalta el experto.

La ministra para la Integración y la Macroeconomía de la UEE, Tatiana Válovaya, hizo un llamamiento este martes a los países miembros a no apresurarse, afirmando que primero es necesario crear un mercado único y luego hablar de la posibilidad de una moneda única. "Pero es necesario coordinar la política monetaria", concluyó.

Economistas: El mundo está al borde de una crisis monetaria sin precedentes

El fortalecimiento del dólar estadounidense, la "muerte" del euro y 74 billones de dólares en derivados sobre divisas, todo eso puede provocar la mayor crisis monetaria, advierten expertos.

El economista Michael Snyder opina que el fortalecimiento del dólar que se observa estas semanas "no es una buena noticia".

"Un dólar fuerte perjudica a las exportaciones estadounidenses, dañando así la economía del país. Además, la debilidad del dólar ha impulsado una fuerte expansión de los mercados emergentes de todo el mundo. Mientras el dólar se fortalece, se hace mucho más difícil para los países pedir prestado y pagar las deudas viejas", escribió en su artículo en el portal Infowars.

Por otra parte está el euro, que se encamina hacia mínimos históricos. La moneda europea se acerca a la paridad con el dólar y "finalmente caerá bajó el dólar", cree Snyder.

"Esto va a causar un gran dolor de cabeza en el mundo financiero. Los europeos tratan de resolver sus problemas económicos mediante la creación de enormes cantidades de dinero nuevo. Es la versión europea de la flexibilización cuantitativa, pero tiene efectos secundarios muy negativos", advierte el economista.

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Análisis: Cómo el Mercosur y la Unión Euroasiática desafían a Estados Unidos y la hegemonía del dólar

Por Ariel Noyola Rodríguez

Las estrategias de contención económica promovidas por Washington en contra de Moscú y Caracas precipitaron la reconfiguración de alianzas en el sistema mundial. Es que aunque Rusia se localice geográficamente en el norte del hemisferio, su agenda diplomática guarda una mayor vinculación con las economías emergentes. Lo mismo sucede en relación a los países de América Latina, la región que de acuerdo con el canciller de Rusia, Serguéi Lavrov, está llamada a convertirse en un pilar clave en la construcción de un orden mundial multipolar.

Sin lugar a dudas, los nexos de Rusia con la región latinoamericana se profundizan de manera acelerada. Según la base de datos sobre comercio de mercancías de las Naciones Unidas (UN Comtrade, por sus siglas en inglés), los intercambios entre Moscú y América Latina alcanzaron una cifra récord de 18.832 millones de dólares en 2013, un monto 3 veces mayor en relación a 2004 (Brasil, Venezuela, Argentina, México y Ecuador son los 5 socios más importantes del oso ruso en América Latina).

Hay complementariedad económica en lo fundamental. Las exportaciones de Rusia hacia América Latina están concentradas en más de 50% en fertilizantes, minerales y combustibles. En tanto Moscú compra a los países latinoamericanos básicamente productos agrícolas, carnes y componentes electrónicos. De acuerdo con las proyecciones elaboradas por el Instituto de Latinoamérica de la Academia de Ciencias de Rusia, el comercio bilateral alcanzará los 100.000 millones de dólares el año 2030, un aumento de más de 500%.

Sin embargo, también hay múltiples desafíos en el horizonte. El contexto recesivo de la economía mundial, la tendencia deflacionaria (caída de precios) en el mercado de materias primas (en especial el petróleo), la desaceleración del continente asiático y las sanciones económicas impuestas por Estados Unidos y la Unión Europea, revelan la urgente necesidad de elevar los términos de la relación diplomática entre Rusia y los países latinoamericanos.

Como efecto de la caída del comercio entre Rusia y la Unión Europea, América Latina emerge de alguna manera como mercado sustituto y, al mismo tiempo, en calidad de receptora de inversiones de alta tecnología. En ese sentido, hay que destacar los proyectos de inversión del Consorcio Petrolero Nacional (conformado por Rosneft, Gazprom Neft, LUKoil, TNK-BP y Surgutneftegas) comprometidos con empresas de Brasil, Argentina, Venezuela, Guyana y Cuba, entre otros países.

Por añadidura, existe un amplio abanico de posibilidades para la construcción de alianzas científico-tecnológicas que por un lado, promuevan el desarrollo industrial de la región latinoamericana y, por otro lado, contribuyan a diversificar las exportaciones de Moscú, actualmente concentradas en los hidrocarburos.

El largo estancamiento de la actividad económica mundial, así como el aumento de la conflictividad interestatal por garantizar el suministro de materias primas fundamentales (petróleo, gas, metales, minerales, tierras raras, etcétera.) para la reproducción de capital, promueven la construcción de alianzas estratégicas a través de acuerdos de comercio preferenciales, inversiones conjuntas en el sector energético, transferencias tecnológicas, cooperación técnico-militar, etcétera.

Bajo esa misma perspectiva, la relación estratégica que Rusia mantiene con varios países latinoamericanos en el plano bilateral (Argentina, Brasil, Cuba, Ecuador, Nicaragua, Venezuela, etcétera.), busca ampliarse en la región sudamericana a través la Unión Euroasiática (conformada por Rusia, Bielorrusia, Kazajistán, Armenia y Kirguistán) como punta de lanza.

Es que si bien el presidente Vladimir Putin planteó en 2011 (en un artículo publicado en el periódico 'Izvestia') convertir la Unión Euroasiática en un mecanismo puente entre la región Asia-Pacífico y la Unión Europea, el cerco impuesto en contra de la Federación Rusa por la Organización del Tratado del Atlántico Norte (OTAN) canceló temporalmente esa posibilidad.

En consecuencia, la Unión Euroasiática rompe sus límites continentales a través de la creación de zonas de libre comercio con China en el continente asiático, Egipto en el Norte de África y el Mercado Común del Sur (Mercosur, conformado por Argentina, Brasil, Paraguay, Uruguay y Venezuela) en América Latina.

En los últimos años, la relación estratégica entre la Unión Euroasiática y el Mercosur representa la mayor apuesta de Rusia en la región sudamericana en materia de integración regional: ambos bloques poseen una extensión territorial de 33 millones de kilómetros cuadrados, una población de 450 millones de habitantes y un PIB combinado por encima de los 8,5 billones de dólares (11.6% del PIB mundial medido en términos nominales). La relación estratégica persigue dos objetivos generales. En primer lugar, disminuir la presencia de Estados Unidos y la Unión Europea en los flujos de comercio e inversión extrarregionales. Y en segundo lugar, acelerar el proceso de desdolarización global a través del uso de monedas nacionales como medios de liquidación.

La construcción de un sistema de pagos alternativo a la Sociedad para las Comunicaciones Interbancarias y Financieras Internacionales (SWIFT, por sus siglas en inglés) por parte de Rusia (China anunció recientemente el lanzamiento de un sistema de pagos propio, mismo que podría comenzar a funcionar el próximo mes de septiembre), así como la experiencia de América Latina sobre el Sistema Único de Compensación Regional (SUCRE) para amortiguar los shocks externos sobre el conjunto de la región, son evidencia del creciente protagonismo de ambas partes en la creación de instituciones y nuevos mecanismos financieros que abandonan la órbita del dólar.

Es indudable, frente a la embestida económica y geopolítica emprendida por el imperialismo norteamericano, que las economías emergentes eluden confrontaciones directas a través de la regionalización. De manera sucinta, la Unión Euroasiática y el Mercosur deberán enfocar sus esfuerzos hacia una mayor cooperación financiera y en paralelo, articular un frente común en defensa de la soberanía nacional y los principios del derecho internacional.

En conclusión, la relación estratégica entre la Unión Euroasiática y el Mercosur tiene una enorme oportunidad para presentar ante el mundo parte de la exitosa respuesta de ambos bloques a la profundización de la crisis económica actualmente en curso y, con ello, contribuir de manera decisiva a debilitar los cimientos de la hegemonía del dólar.

dimanche, 15 mars 2015

Vers une Allemagne post-occidentale?

par Hans Kundnani
Ex: http://l-arene-nue.blogspot.fr
 
Ce texte est la traduction d'un article de Hans Kundnani, paru dans la revue Foreign affairs de janvier-février 2015. Hans Kundnani est un spécialiste de la politique étrangère allemande et officie notamment au sein d'un Think Tank, le Conseil européen pour les relations internationales. Ses analyses sont souvent remarquables, mais il me semble hélas qu'elles sont assez peu relayées en France. C'est pourquoi j'ai traduit ce papier. Il dresse le portrait d'une Allemagne telle que nous ne la connaissons absolument pas, mais telle qu'elle est assez souvent décrite - pour ce que j'en ai lu - dans la presse anglo-saxone, bien moins "coincée" que la notre sur sujet-là, et qui se refuse à en faire un tabou. Attention, ça décoiffe !
***
L'annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014 a été un choc stratégique pour l'Allemagne. Soudain, l'agression russe mettait en cause l'ordre sécuritaire européen que la République fédérale tenait pour acquis depuis la fin de la Guerre froide. Berlin venait de passer deux décennies à tenter de renforcer ses liens politiques et économiques avec Moscou, mais l'action de la Russie en Ukraine suggérait que le Kremlin n'était plus guère intéressé par un partenariat avec l'Europe. En dépit de la dépendance de l'Allemagne au gaz russe et de l'importance de la Russie pour les exportateurs allemands, la chancelière Angela Merkel a fini par accepter de sanctionner la Russie. Elle a même contribué à persuader d'autres États membres de l'Union européenne à faire de même.
 
Mais la crise en Ukraine a rouvert de vieilles questions relatives à la relation de l'Allemagne au reste de l'Occident. En avril 2014, lorsque la radio allemande ARD demande à ses auditeurs quel rôle leur semble devoir jouer leur pays dans la crise, seuls 45% se prononcent pour une Allemagne au diapason de ses alliés de l'UE et de l'OTAN. En revanche, 49% souhaitent que l'Allemagne joue un rôle de médiateur entre la Russie et l'Ouest. Des résultats qui ont inspiré à l'hebdomadaire Der Spiegel un édito daté de mai où il met en garde l'Allemagne contre la tentation de détourner de l'Occident.

 

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La réponse germanique à la crise ukrainienne doit être replacée dans le contexte d'un affaiblissement de long terme de ce qu'on nomme la Westbindung, c'est à dire l'arrimage du pays à l'Ouest, en vigueur depuis l'après-guerre. La chute du mur de Berlin et l'élargissement de l'Union européenne ont libéré le pays de la dépendance à l'égard des États-Unis que lui imposait l'impératif de se protéger contre l'Union soviétique. Dans le même temps, l'économie allemande, très dépendante aux exportations, est devenue plus tributaire de la demande des marchés émergents, notamment du marché chinois.
 
Le pays a beau rester attaché à l'intégration européenne, ces facteurs permettent tout à fait d'imaginer une politique étrangère allemande post-occidentale. Un tel changement a des enjeux de taille. Étant donnée la montée en puissance de l'Allemagne au sein de l'UE, les relations du pays avec le reste du monde détermineront dans une large mesure celles de tout l'Europe.
 
Le paradoxe allemand
 
L'Allemagne a toujours eu une relation compliquée avec l'Occident. D'un côté, bon nombre des idées politiques et philosophiques qui comptent à l'Ouest proviennent d'Allemagne, avec des penseurs aussi majeurs qu'Emmanuel Kant. Mais d'un autre côté, l'histoire intellectuelle allemande est mêlée d'éléments plus sombres, qui ont parfois menacé les valeurs occidentales, comme le courant du nationaliste du début du XIXe siècle. À partir de la seconde moitié du XIXème, les nationalistes allemands ont cherché à définir l'identité allemande par opposition avec les principes rationalistes et libéraux de la Révolution française et les Lumières. Le phénomène a culminé dans le nazisme, que l'historien Heinrich August Winkler a défini comme « l'apogée du rejet germanique du monde occidental ». Dès lors, l'Allemagne était un cas paradoxal. Elle était partie intégrante de l'Occident tout en le défiant radicalement de l'intérieur.
 
Après la Seconde Guerre mondiale, l'Allemagne de l'Ouest participe à l'intégration européenne, et, en 1955, elle rejoint l'OTAN. Pour une bonne quarantaine d'années, la Westbindung, conduit l'Allemagne à prendre des initiatives de sécurité conjointes avec ses alliés occidentaux, ce qui représente pour elle une nécessité existentielle l'emportant sur tout les autres objectifs de politique étrangère. Le pays continue de se définir comme une puissance occidentale tout au long des années 1990. Sous le chancelier Kohl, l'Allemagne réunifiée décide d'adopter l'euro. À la fin de la décennie, elle semble même se réconcilier avec l'utilisation de la force militaire pour s'acquitter de ses obligations de membre de l'OTAN. Après le 11 septembre 2001, Gerhard Schröder promet aux États-Unis une « solidarité inconditionnelle » et engage des troupes en Afghanistan.


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Toutefois, au cours de la dernière décennie l'attitude de l'Allemagne envers le reste du monde occidental change. Dans le débat sur l'intervention en Irak en 2003, Schröder évoque l'existence d'une « voie allemande », qui se distingue de la « voie américaine ». Et depuis lors, la République fédérale n'a cessé d'affermir son opposition à l'usage de la force armée. Après son expérience en Afghanistan, elle semble avoir décidé que la meilleure leçon à tirer de son passé nazi n'était pas « plus jamais Auschwitz » - l'argument précisément invoqué pour justifier la participation à l'intervention l'OTAN au Kosovo en 1999 - mais « plus jamais la guerre ». D'un bout à l'autre de l’échiquier politique, les responsables allemands définissent désormais leur pays comme une Friedensmacht , une « puissance de paix ».
 
L'attachement de l'Allemagne à la paix a fini par conduire l'Union européenne et les États-Unis à l'accuser de jouer au cavalier solitaire au sein de l'alliance occidentale. S'exprimant à Bruxelles en 2011, le secrétaire américain à la Défense Robert Gates avertissait ainsi que l'OTAN était en voie de devenir une « alliance à deux vitesses », avec d'un côté les membres prêts à contribuer aux engagements de l'alliance, et de l'autre ceux qui appréciaient les avantages de l'adhésion, qu'ils s'agisse de garanties en termes de sécurité ou des places en État-major, mais refusaient de partager les risques et les coûts. Il pointait en particulier ces membres de l'OTAN qui refusent de consacrer à la défense le montant convenu de 2 % de leur PIB. Or l'Allemagne est à peine à 1,3 %. Récemment, la France également critiqué son voisin pour son inaptitude à fournir une contribution digne de ce nom à l'occasion des interventions au Mali ou en République centrafricaine.

 
Mais l'une des raisons pour lesquelles l'Allemagne a négligé ses obligations envers l'OTAN est que la Westbindungn'apparaît plus comme une nécessité stratégique absolue. Après la fin de la guerre froide, l'Union européenne et l'OTAN se sont élargies aux pays d'Europe centrale et orientale, ce qui fait que l'Allemagne est désormais « entourée d'amis» et non plus d'agresseurs potentiels, comme l'a dit un jour l'ancien ministre de la Défense Volker Rühe. Elle est donc bien moins dépendante des États-Unis pour sa sécurité.
 
Dans le même temps, son économie est devenue plus dépendante des exportations, notamment en direction de pays non-occidentaux. Durant la première décennie de ce siècle, alors que la demande intérieure restait faible et que les entreprises gagnaient en compétitivité, l'Allemagne devenait de plus en plus accro aux débouchés extérieurs. Selon la Banque mondiale, la part des exportations dans le PIB du pays a bondi de 33% 2000 à 48% en 2010. Ainsi, à partir de l'ère Schröder, l'Allemagne commence orienter sa politique étrangère en fonction de ses intérêts économiques et plus particulièrement en fonction des besoins de son commerce extérieur.
 
Un autre facteur a également contribué à cette réorientation. Il s'agit de la montée d'un sentiment anti-américain dans l'opinion publique. Si la guerre en Irak a rendu les Allemands confiants dans leur capacité à se montrer autonomes vis à vis des États-Unis sur les questions militaires, la crise financière de 2008 a fait naître l'idée qu'ils pouvaient également s'autonomiser dans le domaine économique. Pour beaucoup d'Allemands, la crise a mis en évidence les lacunes du capitalisme anglo-saxon et validé le bien fondé d'une économie sociale de marché comme la leur. En 2013, les révélations relatives aux écoutes de la NSA y compris sur le téléphone portable de Merkel, ont encore renforcé ce sentiment anti-américain. Désormais, beaucoup d'Allemands disent qu'ils ne partagent plus les mêmes valeurs que le États-Unis. Certains avouent même qu'ils ne les ont jamais partagées.
 

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Pour sûr, la culture politique libérale de l'Allemagne, fruit de son intégration à l'Ouest, perdurera. Mais il reste à voir si le pays continuera à suivre systématiquement ses partenaires et à défendre coûte que coûte les valeurs occidentales, alors que sa croissance est devenue tributaire de pays non-occidentaux. Pour avoir une idée de l'évolution possible d'une politique étrangère allemande post-occidentale, il suffit de se rappeler 2011, qui vit la République fédérale s'abstenir au Conseil de sécurité de l'ONU sur l'intervention en Libye, tout comme la Russie et la Chine, et à l'opposé de la France, de la Grande-Bretagne et des États-Unis. Certains responsables allemands assurent que cette décision ne reflète pas une tendance de long terme. Mais un sondage réalisé par la revue de géopolitique Politikpeu après le vote au Conseil de sécurité a montré que les Allemands se répartissent en trois groupes. Ceux qui pensent qu'il faut continuer à coopérer principalement avec les partenaires occidentaux, ceux pour qui il faut privilégier d'autres pays, comme la Chine, l'Inde ou la Russie, et ceux qui souhaitent combiner les deux approches.
 
La nouvelle Ostpolitik
 
La politique russe de l'Allemagne a longtemps été basée sur l'échange politique et sur l'interdépendance économique. Lorsque Willy Brandt devient chancelier de la RFA en 1969, il essaie de contrebalancer la Westbindung en recherchant une relation plus ouverte avec l'Union soviétique. Il inaugure une nouvelle approche devenue célèbre sous le nom d'Ostpolitik(ou « politique orientale »). Brandt pensait que l'approfondissement des entre les deux puissances pourraient éventuellement conduire à la réunification allemande, une conception que son conseiller Egon Bahr baptisa Wandel durch Annäherung: le « changement par le rapprochement ».
 
Depuis la fin de la guerre froide, les liens économiques entre Allemagne et Russie se sont encore renforcés. Invoquant le souvenir de l'Ostpolitik, Schröder entreprit lui-même une politique de Wandel durch Handel , ou « changement par le commerce ». Les responsables politiques allemands, en particulier les sociaux-démocrates, se sont faits les hérauts d'un « partenariat pour la modernisation », au titre duquel l'Allemagne fournirait à la Russie la technologie pour moderniser son économie - puis, idéalement, ses pratiques politiques.
 
L'existence de ces liens aident à comprendre la réticence initiale de l'Allemagne à l'idée d'imposer des sanctions après l'incursion russe en Ukraine en 2014. Avant de décider si elle emboîterait ou non le pas aux États-Unis, Mme Merkel a subi les pressions de puissants lobbyistes de l'industrie, emmenés par le Comité pour les relations économiques en Europe de l'Est. Celui-ci a fait valoir que les sanctions pénaliseraient durement l'économie allemande. Afin de témoigner de soutien au président russe Vladimir Poutine, Joe Kaeser, le PDG de Siemens, lui a rendu visite dans sa résidence des environs de Moscou juste après l'annexion de la Crimée. Kaeser avait alors garanti à Poutine que sa firme, qui faisait des affaires en Russie depuis près de 160 ans, ne laisserait pas quelques « turbulences de court terme » - sa manière de désigner de la crise - affecter sa relation avec le pays. Dans un éditorial publié dans le Financial Times en mai 2014, le directeur général de la Fédération des industries allemandes, Markus Kerber, écrivait que les entreprises allemandes soutiendrait les sanctions, mais le feraient « le cœur lourd ».
 

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La forte dépendance allemande à l'énergie russe a également conduit Berlin à redouter les sanctions. Après la catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011, la République fédérale a en effet décidé de sortir du nucléaire plus tôt que prévu, ce qui a rendu le pays plus dépendant encore au gaz russe. En 2013, la Russie fournissait environ 38% de son pétrole à l'Allemagne et 36% de son gaz. L'Allemagne pourrait certes diversifier ses sources d'approvisionnement, mais un tel processus prendrait des décennies. Dans l'immédiat, elle se montre donc réticente à toute perspective de contrarier Moscou.
 
Quant aux sanctions, Angela Merkel ne s'est pas seulement heurtée à l'opposition des industriels, mais également à celle de son opinion publique. Certains, aux États-Unis ou en Europe, ont eu beau accuser le gouvernement allemand d'être trop conciliant avec la Russie, beaucoup en Allemagne, l'on trouvé au contraire trop agressif. Illustration: lorsque le journaliste Bernd Ulrich a appelé de ses vœux des mesures sévères contre Poutine, il s'est fait littéralement inonder de courriers haineux l'accusant de visées bellicistes. Même Frank-Walter Steinmeier, ministre des Affaires étrangères et perçu de longue date comme un ami de la Russie, a dû faire face à des accusations similaires. Les révélations quant à l'espionnage pratiqué par la NSA ont par ailleurs accru la sympathie pour la Russie. Comme Bernd Ulrich le notait en avril 2014, «  quand le Président russe dit se sentir oppressé par l'Occident, beaucoup ici pensent « nous aussi »».
 
Cette identification à la Russie a des racines historiques profondes. En 1918, Thomas Mann publiait un livre, Considérations d'un homme étranger à la politique, dans lequel il affirmait que la culture allemande était distincte - supérieure - à celle des autres pays occidentaux comme la France ou le Royaume-Uni. La culture germanique, soutenait-il, se trouve quelque part entre la culture russe et les cultures du reste de l'Europe. Cette idée a connu un regain de vitalité spectaculaire ces derniers mois. L'historien Winkler critiquait vertement, dans le Spiegel, en avril 2014, la démarche de ces Allemands qui expriment un vif soutien pour à la Russie, et tentent de repopulariser « le mythe d'une connexion entre les âmes russe et allemande ».
 
L'élaboration par Merkel d'une réponse à l'annexion de la Crimée a donc relevé du funambulisme. La chancelière a d'abord cherché à maintenir ouverte la possibilité d'une solution politique, au prix d'heures passées au téléphone avec Poutine, et en envoyant Steinmeier jouer l'intermédiaire entre Moscou et Kiev. Ce n'est qu'après que le vol de la Malaysia Airlines eût été abattu le 17 Juillet 2014, a priori par les séparatistes pro-russes, que les responsables allemands se sentirent à l'aise pour adopter une position plus ferme. Même alors, le soutien de l'opinion aux sanctions demeura tiède. Un sondage réalisé en août par l'ARD révélait par exemple que 70 % des Allemands soutenaient la seconde salve des sanctions européennes contre la Russie, qui comprenait l'interdiction de visas et le gel des avoirs d'une liste d'hommes d'affaires russes. En revanche, seuls 49 % se disaient prêts à continuer de soutenir les sanctions si elles devaient nuire à l'économie domestique, comme ce serait probablement le cas la troisième série de sanctions. Et cela pourrait être plus marqué encore si l'Allemagne entrait en récession, ainsi que de nombreux analystes l'annoncent. Les industriels allemands ont eu beau accepter les sanctions, ils n'en ont pas moins continué à faire pression sur Merkel pour les assouplir. En outre, l'Allemagne a clairement fait savoir qu'aucune option militaire n'était sur la table. Au moment du sommet de l'OTAN au Pays de Galles en septembre, Merkel s'est opposée au projet d'établir une présence permanente de l'Alliance en Europe orientale, et a fait valoir qu'une telle initiative constituerait un viol de l'acte fondateur OTAN-Russie 1997. Pour le dire autrement, la République fédérale n'a aucune volonté de mener une politique de containment de la Russie.

 
Le pivot vers la Chine
 
L'Allemagne s'est également rapprochée de la Chine, un indice encore plus probant de l'amorce d'une politique étrangère post-occidentale. Comme avec la Russie, les liens sont de plus en plus étroits. Durant la décennie écoulée, les exportations vers la Chine ont augmenté de façon exponentielle. En 2013, elles sont montées jusqu'à 84 milliards de dollars, presque le double du montant vers la Russie. L'Empire du Milieu est devenu le deuxième plus grand marché pour les exportations allemandes hors de l'UE, et pourrait bientôt dépasser les États-Unis pour devenir le premier. Il est d'ores et déjà le principal marché pour Volkswagen et pour la Classe S de Mercedes-Benz.

 

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Les relations entre l'Allemagne et la Chine se sont intensifiées après la crise financière de 2008, alors que les deux pays se trouvaient dans le même camp dans les débats sur l'économie mondiale. Tous deux avaient tendance à exercer une pression déflationniste sur leurs partenaires commerciaux, critiquaient la politique d'assouplissement quantitatif conduite par la Fed américaine et ignoraient les appels des États-Unis à prendre des mesures pour corriger les déséquilibres macroéconomiques mondiaux. Dans le même temps, tous deux se rapprochaient politiquement. En 2011, ils ont même commencé à tenir annuellement une consultation intergouvernementale. C'était la première fois que la Chine se lançait dans une négociation aussi étroite avec un autre pays.
 Pour l'Allemagne, la relation est essentiellement économique, mais pour la Chine, qui souhaite une Europe forte pour contrebalancer la puissance américaine, elle est également stratégique. Pékin voit l'Allemagne comme une clé pour obtenir le type d'Europe qu'elle désire, d'abord parce que la République fédérale semble être de plus en plus puissante au sein de l'Union européenne, mais peut-être aussi parce que les tropismes allemands semblent plus proches des siens que ne le sont ceux, par exemple, de la France ou du Royaume-Uni.
 
Le rapprochement Berlin-Pékin intervient cependant que les États-Unis adoptent une approche plus dure envers la Chine dans le cadre de ce qu'on appelle leur pivot vers l'Asie. Ceci pourrait poser un problème majeur à l'Occident. Si Washington venait à se trouver en conflit avec la Chine sur des questions économiques ou de sécurité, s'il venait à y avoir une « Crimée asiatique » par exemple, il y a une possibilité réelle que l'Allemagne demeure neutre. Certains diplomates allemands en Chine ont déjà commencé à prendre leurs distances avec l'Ouest. En 2012 par exemple, l'ambassadeur d'Allemagne à Pékin, Michael Schaefer, déclarait dans une interview: « je ne pense pas qu'il y existe encore une chose telle que l'Occident ». Compte tenu de leur dépendance croissante au marché chinois, les entreprises allemandes seraient encore plus opposées à l'idée de sanctions qu'elles ne le furent contre la Russie. Le gouvernement allemand serait d'ailleurs plus réticent à en prendre, ce qui creuserait encore les divisions au sein de l'Europe, puis entre l'Europe et les États-Unis.

 
Une Europe allemande
 
La peur de la neutralité allemande n'est pas chose nouvelle. Au début des années 1970, Henry Kissinger, conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, avertissait que l'Ostpolitik à l’œuvre en RFA pourrait être une carte dans les mains de l'Union soviétique et menacer l'unité transatlantique. Il prévenait que des liens économiques plus étroits avec l'URSS ne pourraient qu'accroître la dépendance de l'Europe vis à vis de l'Est, ce qui compromettrait les solidarités à l'Ouest.
 
Le danger que pressentait Kissinger n'était pas tant un départ de la RFA de l'OTAN, mais, comme il le dit dans ses mémoires, le fait qu'elle puisse « se tenir à l'écart des tensions hors d'Europe, même quand seraient menacés les intérêts fondamentaux et la sécurité ». Heureusement pour Washington, la guerre froide a tenu ces tentations en échec, cependant que l'Allemagne de l'Ouest s'appuyait sur Washington pour assurer sa sécurité.
 
Cependant, l'Allemagne se trouve à présent dans une position plus centrale et plus forte en Europe. Pendant la guerre froide, la RFA était un État faible et quasi marginal de ce qui est devenu l'Union européenne. A l'inverse, l'Allemagne réunifiée est aujourd'hui l'une des plus fortes, si ce n'est la plus forte puissance d'Europe. Ceci étant donné, une Allemagne post-occidentale pourrait emporter à sa suite nombre d'autres pays, en particulier les pays d'Europe centrale et orientale dont les économies sont profondément imbriquées avec la. Si le Royaume-Uni quitte l'UE, comme il est en train de l'envisager, l'ensemble sera encore plus susceptible de s'aligner sur les préférences germaniques, en particulier pour tout ce qui concerne les relations avec la Russie et la Chine. Dans ce cas, l'Europe pourrait se trouver en opposition avec les États-Unis – et une faille pourrait s'ouvrir au sein du monde occidental, pour ne jamais se refermer.

La Russie, amie d'une Europe authentique

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La Russie, amie d'une Europe authentique

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

La guerre civile ukrainienne, l’annexion de la Crimée et le récent assassinat de l’opposant libéral Boris Nemtsov, amènent les media occidentaux à considérer la Russie de Poutine comme une menace pour la paix en Europe. Selon une inversion accusatoire classique, un article du journal Le Monde du 23 février affirme même que la Russie considérerait l’Union Européenne « comme son ennemie ».

Que reproche-t-on réellement à Poutine ? De braver les interdits de la police de la pensée. De remettre en cause les dogmes d’un Occident sur le déclin. D’avoir redonné à la Russie ses lettres de noblesse, alors qu’elle était affaiblie et même avilie du temps d’Eltsine. Poutine en effet n’est pas un partisan déclaré d’une « gay pride » moscovite mais il préfère relancer la natalité du peuple russe, qui était auparavant au plus bas. S’il n’est pas nationaliste, désavouant les excès de la droite radicale, il est néanmoins patriote.

Gorbatchev a été abusé. S’il a eu raison de redonner leur liberté aux pays d’Europe centrale et orientale, s’il a été utile pour libérer la Russie d’une dictature nocive, les USA en revanche n’ont pas joué le jeu. Ils n’ont jamais traité la (nouvelle) Russie comme un partenaire respectable, à traiter avec correction. Pendant qu’Eltsine assistait impuissant ou complice au démantèlement du pays, engraissant les oligarques comme d’autres engraissent les oies, un par un, les pays d’Europe centrale adhéraient à l’OTAN, une organisation née pour enrayer le communisme et qui n’avait donc plus lieu d’exister après 1991.

Poutine a été choisi en 1999 par Eltsine mais sans avoir encore révélé qui il était. Il a tenu sa parole, protégeant la famille de l’ancien président de poursuites sans doute justifiées. En revanche, il a démantelé le système Eltsine, traquant sans répit les « marchands du temple ». Berezovski dut s’exiler et Khodorkovski finit en prison. Poutine a eu le temps d’analyser les causes du déclin de son pays et nommer les coupables. Au pouvoir, il va donc les combattre sans ménagement. D’un point de vue russe, ces gens ont trahi leur patrie.

Poutine a parfaitement compris que la Russie était une nation d’Europe et a maintenu la ligne de la « maison commune européenne » au moins jusqu’à 2005. Il a tendu la main à l’Union Européenne qui jamais n’a eu le courage de la saisir, préférant être la vassale des USA. S’il a obtenu difficilement l’abandon de la mise en place de bases américaines anti-missiles aux frontières du pays, il n’a pas pu enrayer la stratégie américaine contre son pays et n’a pas réussi à convaincre les autres Européens de se désolidariser de cette puissance qui a mis le continent sous diktat.

La stratégie russe consiste donc à neutraliser les vassaux de l’Amérique qui vivent à ses frontières, y compris par des actions militaires. La Transnistrie, l’Ossétie du nord et l’Abkhazie et maintenant le Donbass ukrainien, empêchent Moldavie, Géorgie ou Ukraine de rejoindre l’OTAN. L’adhésion à l’Union Européenne, dans la mesure où cette dernière ne se place pas en adversaire, ne le dérange pas. C’est une réponse impopulaire aux yeux de la communauté internationale et cause de conflits gelés. Il est trop facile d’en accuser la Russie. C’est bien parce qu’elle est victime d’une stratégie russophobe d’encerclement, pensée par les technocrates de Washington, républicains comme démocrates, qu’elle est contrainte de répondre comme elle le peut et sans bénéficier des appuis nécessaires pour éviter de jouer un « mauvais rôle ».

La balle est clairement dans le camp de l’Union Européenne. C’est à celle de décider si elle veut continuer à payer les pots cassés d’une stratégie atlantiste ou si elle est prête à prendre son destin en mains. La politique qu’elle mène est contraire à ses intérêts et surtout à ceux des peuples. Elle est vectrice de mondialisme lorsqu’elle devrait au contraire être un rempart.

Les USA n’ont peur que d’une chose, que l’Union Européenne et la Russie convergent et travaillent de concert pour l’intérêt des Européens. Ils favorisent donc en son sein tous les germes de décadence, promouvant toutes formes de communautarisme, et sont un soutien sans réserve d’une immigration massive indigeste et mettant en danger les valeurs les plus ancestrales de la civilisation européenne.

Or la Russie semble renoncer à cette espérance d’une Europe se libérant de ce joug et préfère se tourner par défaut vers l’Asie. Elle commet là une erreur majeure. Son avenir est européen et ne peut qu’être européen. Son salut est en elle et en nous, comme le nôtre d’ailleurs. Elle choisit d’encourager les passions centrifuges de l’Union Européenne au lieu d’encourager son unité, de peur que cette unité se fasse contre elle.

Mais les vrais européistes savent que la Russie a toujours été le rempart de l’Europe face à l’Asie avide de ses richesses. Et ils savent désormais que la Russie est aussi le rempart de l’Europe contre une Amérique qui nie ses racines européennes et se retourne contre la maison-mère, trahissant dans le même temps le peuple américain fondateur, de souche européenne, minoritaire sur son propre sol dans quelques décennies.

Les libéraux-atlantistes, dans et en dehors de la Russie, sont des ennemis déclarés de notre civilisation et de leur propre peuple. Les gouvernements d’Europe orientale qui tapent sur la Russie se trompent d’ennemis. Et les nationalistes ukrainiens, passéistes, bafouent les principes mêmes qu’ils devraient chérir, oubliant qu’ils sont des Slaves et (donc) des Européens et pas des Occidentaux. La Russie n’est pas l’ennemie de l’Europe, elle est une composante de l’Europe. Les Russes sont nos frères, comme le sont pour eux et pour nous les Ukrainiens. Mais la Russie attend que les Européens envoient à leur tour les bons signaux et redeviennent maîtres chez eux, dans tous les sens du terme.

L’alliance euro-russe, le ralliement de la Russie au projet d’unification politique du continent européen, voilà la seule ligne que devraient défendre de véritables Européens, d’âme et de sang, de cœur et de raison. En n’oubliant pas que les spéculateurs qui ont attaqué la Grèce et par ce biais la zone euro ne roulaient pas pour Moscou mais pour Washington. En n’oubliant pas qu’une Europe unie de l’Islande à la Russie sera et de loin la première puissance mondiale, détrônant les USA. En n’oubliant pas que la grande Europe sera capable de faire entendre sa voix, et ainsi de protéger concrètement son identité contre toutes les agressions, internes et externes, du mondialisme.

Si l’avenir de la Russie est européen, l’avenir de l’Europe est dans l’amitié avec la Russie, même « poutinienne ». Nous pourrons donner des leçons à Vladimir Poutine quand nous aurons su nous doter de vrais dirigeants et entreprendre les réformes indispensables pour notre salut. Et je ne doute pas qu’alors les Russes sauront nous encourager. Mais n’attendons pas d’eux qu’ils fassent le travail pour nous.

L’Europe avec la Russie, la Russie dans l’Europe !

Thomas FERRIER (PSUNE)

samedi, 14 mars 2015

El futuro de Eurasia: prolegómenos para la integración geopolítica del continente


Por Leonid Savin

Ex: http://www.elespiadigital.com

El comienzo del siglo XXI no ha sido tan color de rosa como fue descrito por los futurólogos y planificado por los políticos: una crisis financiera mundial, los problemas dentro de la zona euro, el “pantano” para las tropas estadounidenses en Irak y Afganistán, los conflictos armados en Europa Central, Norte de África y el Medio Oriente, una serie de revoluciones de color en el espacio post-soviético, y disturbios en las capitales de Europa Occidental. Se diría que con la tecnología moderna, la herencia histórica y el acuerdo convencional sobre los derechos humanos, Europa ya ha definido su futuro y, si no está siguiendo lo planificado, por lo menos está manteniendo las políticas regulatorias en el ámbito de su competencia. Sin embargo, los desarrollos actuales indican que todo resultó ser más complicado. El mundo ha entrado en una zona de turbulencia geopolítica, con procesos en varios niveles, nuevos retos y respuestas asimétricas.

Además de la vieja dicotomía entre conservadores y progresistas, surgen en Europa nuevas tendencias políticas que intentan repensar su europeidad y priorizar el futuro desarrollo y la supervivencia. Variantes en relación al tema del futuro de la OTAN y la planificación de la defensa conjunta con los EEUU, fluyen desde cumbres marginales y anti-globalización como desde un fondo político intelectual, lo que demuestra la inutilidad de ejecutar la política de antiguos vectores.

La situación es tal que el debate contemporáneo en torno al futuro de Europa, el destino de Rusia y de otros países del continente, no puede considerarse por separado. De la investigación etimológica al replanteamiento pragmático del viejo Lebensraum (incluyendo la dependencia de recursos) – de una forma u otra, la superpoblada orilla de Eurasia desde Gibraltar hasta el mar de Barents está volviendo su mirada hacia el Este.

En cierta época, los conceptos de “Europa” y “Asia” se limitaron al mundo helenístico y a los países vecinos, dentro de un paradigma que asignó significados particulares. La expansión del Imperio Romano, la era de la gran migración y la difusión del cristianismo, cambiaron la estructura política de la parte occidental del continente euroasiático. Mientras esta región se sumergió en un frenesí feudal, un nuevo imperio se formó en las fronteras orientales. La Horda de Genghis Khan logró en un tiempo extraordinariamente corto unir por la fuerza kanatos, reinos y principados, extendiéndose a través de miles de kilómetros, mostrando un nuevo modelo de Estado, de diplomacia y de tácticas militares. La importancia histórica del proyecto mongol es simplemente asombrosa. Nadie más, ni antes ni después, fue capaz de crear tal vasto Imperio. Mientras tanto, hay claros marcadores geopolíticos de este fenómeno. Historiadores europeos modernos han señalado que la Rus había frustrado la oleada de nómadas de Asia hacia Occidente, salvando así a Europa de una inminente desaparición. Interpretaciones completamente diferentes se expresaron en relación con el destino de Rusia. Aunque la escuela soviética de pensamiento insistió en la existencia del yugo mongol-tártaro, la escuela histórico-filosófica euroasianista refuta tales supuestos, con el apoyo de elementos de hecho. De acuerdo con la teoría del cambio de los imperios, la Rus tomó la batuta de las hordas ya fragmentadas, en gran medida tomando prestados sus mecanismos de construcción del Estado, necesario para una mayor expansión.

Aunque anteriormente hubiera “campañas contra los cismáticos” y otros obstáculos (como en todas partes), la primera confrontación total de Oriente y Occidente comenzó con la “era de Gutenberg” [1]. La imprenta, originalmente concebida con el fin de ayudar a difundir la Palabra de Dios, no sólo dio lugar a un efecto contrario (porque la difusión de la Biblia socavó la autoridad de la Iglesia Católica), sino también a la aparición de las primeras instituciones de la guerra de la información. Mientras que las primeras embajadas de Europa occidental viajaron para comerciar con Moscú, la población local fue sometida a un adoctrinamiento, recurriendo a las metáforas del Antiguo testamento y creando una imagen poco favorecedora de los gobernantes de Rusia y de su pueblo.

Sin embargo, la primera ola de globalización que termina con el descubrimiento de América, apareció como el comienzo de una nueva era global. Al mismo tiempo, Europa, desgarrada por guerras y contradicciones, trasladó parte de su teatro de operaciones de combate a los territorios de los nuevos espacios abiertos, inaugurando así el comienzo de nuevos procesos civilizatorios.

Todavía había muchos episodios de comprensión mutua entre Rusia y Europa en una serie de cuestiones, sin embargo, con el inicio del siglo XX, la modernidad alcanzó todo su potencial, y tres ideologías principales saltaron a la arena: el marxismo con el postulado de la la lucha de clases; el corporativismo estatal con una perspectiva nacional, que se convirtió en el nacionalsocialismo y el fascismo; y el liberalismo. Las tres tendencias ideológicas no eran ajenas a las cuestiones territoriales, nacionales y de recursos, pero parece que la escuela geopolítica anglosajona deliberadamente ha demonizado a Rusia. Ellos hicieron de Rusia, conceptualmente, no sólo un Heartland, sino también una fuente de inestabilidad, de donde se originó el “tierra de vándalos” a imagen de los hunos, los turcos y los mongoles, que atacaron los alrededores del mundo romano [2]. A estas alturas, con la memoria histórica ya debilitada, después del colapso del Imperio Austro-Húngaro pocos estuvieron interesados en la historia del pueblo húngaro, que venía desde más allá de los Urales, y otros temas fueron pasados por alto. ¿Quién recuerda ahora a los ávaros, que una vez penetraron en el territorio de la actual Alemania y, de hecho, crearon Baviera (y ahora el tipo antropológico de la población de esta tierra federal es marcadamente diferente del de los sajones o de Westfalia), o de los eslavos, presidiendo el área del actual Berlín? ¿Y recuerdan en los círculos políticos polacos las ideas de un destacado dramaturgo y escritor, Stanisław Witkiewicz, quien en la década de 1930 expresó en su metáfora artística la ansiedad asociada a la amenaza de la migración desde China? [3]

Aunque estas observaciones pueden parecer insignificantes, son todos eslabones de una cultura estratégica de uno u otro estado con su pueblo, de alguna manera realizados en la geopolítica popular.

Turquificar Alemania, africanizar Francia, indianizar el Reino Unido, magrebizar Italia y España, y un número aún no determinado de chinos, vietnamitas y otras diásporas asiáticas en cada país de la UE, en la dinámica geopolítica, puede conducir a resultados muy impredecibles [4]. Mas la rápida islamización de los países europeos en el contexto de un declive demográfico de la población nativa. El estado de ánimo actual en algunos países de la UE, en particular entre los nuevos miembros, muestra claramente que a la gente no le gustan los proyectos de etno-globalización en su tierra natal, al menos en su forma presente [5]. Característicamente, el principal vector de la migración actual pasa por el eje Norte-Sur, no por el eje Este-Oeste, donde la frontera sanitaria artificial todavía juega el papel de parachoques disuasorio.

La guerra fría no sólo condujo a la división en dos bandos, sino también a la aparición de una nueva terminología. En Occidente hay una cristalización final de la filosofía política, conocida como atlantismo. Un político británico, John Williams, amplía este término calificándolo como teología atlantista [6]. Afirma que, como cualquier teología, el atlantismo se basa en el mito de que, en última instancia, los intereses geopolíticos y geoestratégicos de Europa y Estados Unidos son inseparables. Al mismo tiempo, Williams cree que las relaciones entre los EEUU, Europa y Rusia durante la Guerra Fría son también otro mito, que se tradujo en una crisis de identidad propia.

La sustitución por el neo-atlantismo (el neologismo nació en Italia en la década de 1950) [7] como definición de las nuevas relaciones entre los miembros de la comunidad atlántica, tampoco duró mucho y está perdiendo rápidamente su sustancia interna. Así como con las instituciones de la democracia, resulta obvio que va a declinar. En este sentido, cabe señalar que el término “déficit democrático” ha surgido en Europa en 1977 para definir la incapacidad de los países miembros de la UE para abordar las cuestiones relacionadas con las necesidades de los ciudadanos europeos [8].

En este contexto, viendo a los Estados Unidos como su sucesor geopolítico, la Europa unida debe reconocer que no estaba en condiciones de hacer frente al programa de “Melting Pot“, y digerir todos los inmigrantes de sus antiguas colonias, junto con la nueva fuerza laboral de la migración continua.

El cuadro de la Europa pos-Guerra Fría fue transformado por la admisión de nuevos miembros en la UE. El factor mar Báltico-Negro fue añadido al factor dominante Atlántico-Mediterráneo, y los países de esta región se vieron obligados a enfrentarse a una serie de cuestiones: la adaptación del sistema jurídico, las instituciones políticas y civiles, la economía; tratando de preservar su memoria y sus tradiciones históricas nacionales al mismo tiempo. Junto con esta expansión geográfica fue posible la aparición de un discurso sobre el nuevo eje geopolítico, en cierta medida compitiendo con el viejo eje [9]. La cuestión de la centralidad para definir la nueva Europa (el término de Friedrich Naumann “Middle Europa“) también siguió siendo reinterpretada. Se propusieron definiciones tales como “MidiEurope“, “Dimidial Europa” y “Viscalian Europa“, que se basan en los términos latinos correspondientes [10]. Éstas definiciones se superponen con los conceptos existentes de Euroregiones, basados en el modelo de cuenca (el área de las cuencas del Mosa-Rin, las tierras bajas del Danubio). Una escuela geopolítica alemana sobre Eurafrica sonó de nuevo, sin embargo, bajo la influencia de los intereses franceses – creando así el fantasma de la Unión Mediterránea, que no pudo llegar a buen puerto debido al bloqueo alemán a la posibilidad de este proyecto. Del mismo modo, en las nuevas versiones posmodernas y tecno-políticas (con la energía y el componente de la comunicación) fue revivido el proyecto de Mezhmorye (“entre los mares” Báltico y Negro), del geógrafo y cartógrafo polaco Eugeniusz Romer, el prototipo que a su vez sirvió para la idea de Jagiellonian (Gran Lituania). Junto con los atractivos respecto a la comunicación (la adaptación de la ruta “desde los varegos a los griegos” en un nuevo guión), este modelo geopolítico tuvo un componente étnico-nacional, se asumió que la identidad cultural báltico-eslava serviría como una base adicional para la ejecución de este proyecto. Pero las preguntas acerca de la pertenencia a un tipo de civilización [11], a veces llamada el mundo occidental-cristiano o el super-ethnos europeo-occidental, condujo al descubrimiento de algunas contradicciones profundamente arraigadas en función de factores históricos o etno-políticos, que también tienen un componente pragmático que se expresa en la estructura de las fronteras y los puntos de vista sobre la asignación de los recursos. Frente la presión de los antiguos miembros de la UE para la homogeneización del espacio económico, que se refleja sobre todo en el hecho de que las empresas transnacionales han tenido acceso a los recursos nacionales, los Estados del eje mar Báltico-Negro estaban interesados en medidas proteccionistas contra un efecto tan unilateral de globalización.

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Podemos decir que los intentos iniciales para establecer una Unión de cooperación regional, junto con los componentes históricos, hasta cierto punto han servido como base para la remodelación de este proyecto en un plano estratégico diferente, más amplio, que afecta a los intereses de las grandes potencias – continental (Euroasiática) y atlantista (mundialista). No es casualidad que cierto número de investigadores comenzaran a comparar el modelo del eje mar Báltico-Negro con una frontera sanitaria, como la que se formó después del Tratado de Versalles al final de la Primera Guerra Mundial. Un proyecto geopolítico, indirectamente asociado con tales ideas, llamado GUUAM (Georgia, Ucrania, Uzbekistán, Azerbaiyán y Moldavia), que no tuvo ningún verdadero desarrollo y fue concebido como un proyecto de los países occidentales (incluyendo los EEUU) para crear una barrera artificial entre la Rusia moderna y la UE.

Podemos recordar otra serie de proyectos, ni siquiera realizados, como Chimerica o Сhindia, pero a juzgar por la posición de la futura integración de Rusia y Europa, que en teoría es el proyecto más grande e importante que podría cambiar el orden mundial, es necesario hacer algunas observaciones preliminares. La alianza llamada Eurosiberia ya era considerada como una opción de futuro. La necesidad de convergencia fue destacada por Jean Thiriart, quien soñaba con un imperio desde Dublín hasta Vladivostok (no obstante, prediciendo la caída de la URSS).

Los opositores intransigentes a la amistad y la cooperación con Rusia apuntan a los precedentes históricos y a la imprevisibilidad del gobierno ruso. En realidad, Europa vió muchos más conflictos históricos. Incluso después de los Acuerdos de Helsinki, una guerra civil estalló en el corazón mismo de Europa – la de Yugoslavia, que tuvo consecuencias de largo alcance, incluyendo el reconocimiento de Kosovo. El movimiento moderado de los secesionistas y el separatismo radical en España, el Reino Unido y Bélgica continúa hasta nuestros días. Y quien vigile de cerca la crónica de los acontecimientos internacionales, encontrará fácilmente que los EEUU es el más impredecible: la promesa de no ampliar la OTAN hacia el Este en la década de 1990 y de permanecer en Kirguistán sólo durante dos años en la base de Manas (y en muchas otras, incluso en los países de la UE), fueron promesas vacías. Y si en este tipo de cuestiones de principio no existe ninguna garantía de que Washington no vaya a engañar de nuevo, ¿cómo es posible además trabajar con un socio tan fiable?

Ahora estamos en el siguiente punto de bifurcación, cuando existe una oportunidad de hacer un breve alto en el camino y repensar los procesos asociados a los patrimonios territoriales, los estados nacionales, los agravios históricos, etc., para crear una nueva estrategia común, adecuada para todos los actores de Eurasia. Por supuesto, el término puede tener varios significados semánticos. Por ejemplo, la India, China y el sudeste asiático son aglomeraciones demasiado específicas incluso para las antiguas repúblicas soviéticas. Y los primeros euroasianistas imaginaron Eurasia como Rusia, y no como Europa más Asia, considerándolo un mundo único. Sin embargo, Eduard Suess, en su obra fundamental “The Face of the Earth” [12], utiliza el concepto de Eurasia apuntando la arbitrariedad de los límites entre Europa y Asia, y que las fronteras no son sólo una herramienta de separación, sino también un fenómeno social complejo que une a las naciones y a los pueblos.

Quizás muchos señalarán un tipo muy diferente de conciencia de los pueblos y países desde Chukotka hasta el Atlántico, pero ¿sobre qué base los pueblos de Europa construirán juntos una existencia colectiva si ya hay tantas contradicciones en la UE? En nuestra opinión, para crear una plataforma geopolítica compartida que pueda satisfacer a todos, o al menos a la mayoría de las fuerzas, los desacreditados conceptos de democracia y liberalismo, y el populismo social de izquierda de partidos y líderes particulares, que son una nueva versión de la consigna de los francmasones – “libertad, igualdad, fraternidad” -, son poco adecuados. ¿Qué nueva idea debería unir y satisfacer a todos los pueblos de Eurasia?

El fundador del movimiento eurasiático, el geógrafo Petr Savitsky, propuso un modelo de ideocracia que se caracteriza por una visión del mundo compartida, y por la buena voluntad de las élites gobernantes en servir a la única idea rectora que representa “el beneficio del colectivo de los pueblos que habitan este particular mundo autárquico”[13]. Esta es una muy buena definición, y si este mundo se interpreta como el espacio del continente euroasiático, hay muchos puntos en común y perspectivas para una realización creativa.

Además, el común destino continental es el elemento vinculante que apunta las condiciones geopolíticas comunes. No es coincidencia que Hitler tratara de llegar hasta los Urales, lo cual habla acerca de la integridad de la plataforma del Este europeo, no obstante, incluso los Urales no son ya una barrera, y el extremo Oriente está más “europeizado” que algunas ciudades en las inmediaciones de Moscú. Las comunicaciones modernas y los centros de transporte crearon un mosaico geopolítico polifacético de un mismo cuadro. Y si antes del siglo XX todavía era posible hablar de un “obstáculo eurasiático”, en referencia a la extensión de las tierras del Imperio Ruso, a las eternamente congeladas latitudes del norte, y a la carencia de acceso a los mares cálidos, separados por Persia y la India, ahora todo eso es facilitado por los proyectos de infraestructura de transportes, las nuevas tecnologías y la comprensión de los principios de autarquía económica propuestos por Friedrich List.

Hace mucho tiempo llegó un momento en el que, a partir de pequeños grupos construidos sobre el principio de la autosuficiencia, fue necesario trasladarse a las zonas de “topogénesis” (o el lugar de desarrollo, el término propuesto por Peter Savitsky para explicar el conjunto de factores geográficos, étnicos, económicos, históricos y otros, que representan un todo) [14], y Grandes Espacios de Carl Schmitt. Dado el sistema político internacional contemporáneo de múlti-capas y multi-nivel, tal proyecto es factible.

Si bien no vamos a hablar sobre el futuro de la política migratoria (aunque Rusia tiene una gran cantidad de territorios no desarrollados que, como antes, pueden ser poblados por extranjeros – Catalina la Grande dio tierra a los alemanes; los kurdos, los serbios y otros pueblos encontraron refugio en Rusia), este delicado asunto debería ser resuelto con cuidado y gradualmente.

Aún así, hay que sacar algunas conclusiones relacionadas con la posibilidad de crear una configuración supranacional unificada.

La UE debería reconocer su dependencia constante de los recursos energéticos rusos. El “North Stream” ya había conectado Rusia con Alemania. El “South Stream” finalmente cerrará la dirección del Mar Negro. Todos los pragmatistas entienden que la idea de “Nabucco” es desequilibrada y motivada políticamente. Las tecnologías verdes resuelven el problema sólo parcialmente. Además de la energía, hay otros recursos naturales, incluyendo el agua, los minerales, los bosques, etc. Rusia ocupa una sexta parte de la tierra y posee el máximo inventario de estos recursos. Por supuesto, con las políticas posmodernas actuales y los procesos de globalización, uno puede ser dueño de la tierra de manera extraterritorial, pero en el caso de Rusia, al menos en el corto plazo, eso no es posible. Sólo las inversiones mutuas y los proyectos de integración (comenzando con la cancelación del régimen de visados), pueden abrir el acceso real a la gestión de estos recursos en nombre de los intereses comunes.

Es una cuestión de voluntad política. Sólo los fuertes pueden crear una formación tan gigantesca. Hagamos que esto sea una voluntad colectiva, aunque debemos actuar con decisión y audacia. Llámelo una autodeterminación geopolítica de todos los participantes del proceso.

Es posible que, junto con los procesos globales, nuevos horizontes conducirán a la creación de una nueva clase (relativamente hablando), y darán lugar a la superación de la dicotomía derecha-izquierda en algunos sistemas políticos. En el período de entreguerras en Europa hubo intentos de poner en práctica iniciativas interesantes bautizadas como “la tercera vía”. Es posible que en el proceso de diseño político una nueva teoría política sea creada [15].

¿Cómo continuará la discusión política, social, económica, de defensa y sobre muchos otros temas? Sólo podemos decir que es necesario un “multiálogo” [16] como herramienta para la comunicación interestatal y para la comunicación internacional, en el proceso de producción de las normas y las instituciones necesarias.

A pesar del proceso de creación de la Unión Euroasiática, como Vladimir Putin dijo en octubre de 2011 hablando de la participación de la UE en la construcción de Eurasia, tal proyecto está aún, al margen del discurso de grupos intelectuales independientes, sólo en el esfera de la imaginación. Pero, como escribió un famoso teórico estadounidense del comunitarismo, Michael Walzer, incluso un estado es invisible, y para que aparezca, debe ser imaginado, debe dársele un carácter, y luego, personificarlo y hacerlo visible. La imaginación, según Albert Einstein, es mejor que el conocimiento, por lo tanto, la configuración emergente de Eurasia es el retorno de un sueño para todos los pueblos del continente, que serán capaces de poner en práctica gradualmente en la realidad. Y el conocimiento existente (incluyendo la experiencia negativa), y la tecnología deberían ser instrumentos para esta Gran Empresa Geopolítica.

Notas:

[1] Marshall McLuhan. The Gutenberg Galaxy. The Making of Typographic Man. University of Toronto Press, 1962.

[2] J. Mackinder Halford. The Geographical Pivot of History, Geographical Journal, London, 1904.

[3] Stanislaw Witkiewicz. Nienasycenie. Powiesc, t. 1-2, Warsz., 1957.

[4] La cuestión del etnocentrismo en un estado nacional, es decir, la división entre “nosotros” y “ellos”, se planteaba a menudo en el discurso ideológico, reflejándose, por ejemplo, en una “caza de brujas”, y en una política nacional. Sin embargo, incluso en una sociedad homogénea en términos culturales y étnicos, siempre habrá algunos mecanismos invisibles que empujan a la violencia mutua. El filósofo francés René Girard propone apartarse del modelo de “etnocentrismo” y buscar la causa dentro de la sociedad, que durante la historia del mundo siempre ha necesitado un chivo expiatorio. Para obtener más información, consulte René Girard. La violencia et le Sacre. Grasset y Fasquelle, 1972.

[5] La prueba de esto es el fracaso del proyecto de la multiculturalidad, lo que fue reconocido por Angela Merkel y Nicolas Sarkozy.

[6] John Williams, Atlanticism: The Achilles’ Heel of European Security, Self-Identity and Collective Will. http://www.redpepper.org.uk/atlanticism/

[7] Pietro Pirani. “The Way We Were”: Continuity and Change in Italian Political culture. 5, 2008. http://www.psa.ac.uk/journals/pdf/5/2008/Pirani.pdf

[8] Laffen, B. “Democracy and the European Union’, in Cram, L., Dinan, D. and Nugent, N. (eds.)

-Developments in the European Union, London: Macmillan Press Ltd., 1999, p. 334

[9] Leonid Savin. And the geopolitics of regional risks, Geopolitics No. 10

[10] Drynochkin A.V. Eastern Europe as an element of system of global markets. M: Olita, 2004. p. 11.

[11] Hay que señalar que no existe una clara interpretación del término “civilización”.

[12] Suess, Eduard. Das Antlitz der Erde. Wien, 1885.

[13] N.S. Trubetskoy. Acerca de la idea de un estado ideocrático, Eurasian chronicle. Issue XI. Paris, 1935. pp. 29-37.

[14] Peter Savitsky. The Continent Of Eurasia. – M.: Agraffe, 1997.

[15] Alain de Benoist propone llamar a una futura teoría que trascienda el marco del marxismo, el liberalismo y el fascismo, el Nuevo Nomos de la Tierra, y el profesor Alexander Dugin llama a tal ideología la Cuarta Teoría Política.

[16] Duke R. Gaming: The Future Language. N. Y.: Sage Publications, 1974.

(Traducción Página Transversal)

vendredi, 06 mars 2015

Obama’s “Pivot to Asia” and the Military Encirclement of China

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Is China The World’s New Industrial Super-Power? Obama’s “Pivot to Asia” and the Military Encirclement of China

Obama’ recent visit to India netted a trove of economic, military, and nuclear power agreements with India. The visit – and the agreements -  underscored the attempt by the U.S. state to utilize its ‘pivot to Asia’ to create military and economic alliances with other Asian nations in order to encircle and isolate China.  

The military wing of the ‘Asian Pivot’ is called ‘Air-Sea Battle Plan’. It involves progressively moving up to 60% of  U.S. military forces into the Asian area, alongside the placement of new and advanced military equipment and new military bases and alliances with countries like the Philippines, South Korea, and Japan.

The economic wing of the pivot is the Trans-Pacific Partnership (TPP). It’s a proposed regional regulatory and investment treaty which would exclude and which currently involves negotiations between Australia, Brunei, Canada, Chile, Japan, Malaysia, Mexico, New Zealand, Peru, Singapore, the United States, and Vietnam.

This military and economic encirclement strategy confronts, however, a very  large obstacle. The U.S. state may for now remain the worlds sole military super-power, based on its enormous expenditures for military, security, and online monitoring of the worlds’ people. But China has emerged in the past seven years as the worlds’ leading industrial super-power. In a shift – unprecedented historically for its speed – China has ,moved at warp speed in the past seven years to replace the U.S. as the world’s largest industrial producer.  As recently as 2007, China produced a mere 62% of U.S. industrial output.  But by 2011, China’s  output was 120% of U.S. output, and the gap continues to grow.  This displacement of the U.S. by China is the fastest shift in the balance of world industrial output in recorded economic history.

In the same period in which Chinas’ industrial production essentially doubled, US industrial output shrank by one percent,, EU industrial output  declined by nine percent  and Japans output shriveled by seventeen percent..

This historic shift of industrial power to China has immense consequences. To begin with, we need to recognize that real wealth is not money, stocks, bonds, or the  manipulation of exotic financial instruments such as derivatives as found on Wall Street.  Real wealth is the result of ability to produce goods and services which have value for human beings.

In China the hundreds of thousands of industrial workers churning out products in just one province – Guangdong – outnumber the entire industrial workforce of the U.S. An ever-increasing proportion of the worlds manufactured goods are produced:  each year in China: hundreds of millions of socks to cover the worlds feet; the majority of clothing worn in the U.S. while most-often bearing U.S. brands, is China-made; computers and mobile phones such as  the Apple products are primarily produced in China, as are the notebook computers sold worldwide by Chinese computer company Lenovo. The largest annual production of Chinese state-owned, joint state-private, and solely private  companies.  And the largest annual production of cars in any country  in the world now also takes place in China. And there are the high speed Chinese-made magnetic trains which increasingly crisis-cross the country, and which are being sold and erected in varoius other countries.

The notion that China’s rise can be ‘contained’ or encircled is dubious not only because of China’s industrial prowess, but also because of the international trade it engenders.

As the Economist magazine observed: “China’s international trade in goods did indeed lead the world in 2013. Its combined imports and exports amounted to almost $4.2 trillion, exceeding America’s for the first time.”  In fairness, it should be added that when international trade in services is added to trade in manufactured goods, the U.S. was still ahead.  U.S. industry also retains the lead in hi-tech production methods, though that lead is being narrowed.

China’s trade relationships with other Asian nations – nations the U.S. stare is attempting to woo – constitutes a particular barrier to isolating China. The China–ASEAN Free Trade Area is a free trade area among the ten member states of the Association of Southeast Asian Nations (ASEAN) and the People’s Republic of China.  Implemented in 2010, the China-Asian free trade zone  reduced tarrifs or import duties on 90% of goods to zero.

Prospective participants in the U.S.-sponsored TPP are still engaged in complex negotiations. Even if successful TPP will be primarily a regulatory framework and not an actual free trade zone. By contrast, China-Asian is already the largest free trade area in terms of population, and third largest in nominal GDP, in the world. Besides China, it includes Vietnam, Thailand,, Laos, Cambodia Myanmar, Philippines, Brunei, Indonesia.and Singapore.

Chinese trade with the other member nations is growing at a healthy 10% per year; and currently stands at about 500 billion (U.S.) per year. China is furthering economic integration with its neighbors by providing financial and technical support for construction of railways linking Chinese cities with key points in neighboring countries like Vietnam and Thailand.

As the worlds’ new industrial super-power, trying to encircle or catch China is at best an arduous task. “The train.” one might say, “has already left the station.”

jeudi, 05 mars 2015

L’empreinte de la Turquie dans la guerre de l’Occident contre la Chine et la Russie

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L’empreinte de la Turquie dans la guerre de l’Occident contre la Chine et la Russie

 
Alors que l’attention mondiale était focalisée sur la France à la suite des meurtres de Charlie Hebdo, la chasse à l’homme qui en a découlé, et sur les conséquences politiques de l’incident, de nombreuses informations importantes ont été discrètement repoussées dans les pages intérieures des principaux journaux mondiaux et sont passées derrière les premiers titres des programmes d’information des chaînes de télévision de la planète. Au Nigeria, Boko Haram est réapparu plus agressif que jamais, commettant une des pires atrocités de l’histoire récente de la région. En Syrie et en Irak, la guerre contre l’État islamique continue sans faiblir. En Grèce, une élection capitale aura lieu, qui pourrait avoir des conséquences désastreuses pour le futur de l’Union Européenne.Doucement, sans fanfare médiatique des médias internationaux, des articles sont sortis de Chine, indiquant que les autorités chinoises ont arrêté au moins dix Turcs suspectés d’avoir organisé et facilité le passage illégal de la frontière à de nombreux extrémistes ouïghours (un groupe ethnique musulman de l’Ouest de la Chine). Il a de plus été révélé que les extrémistes ouïghours avaient prévu d’aller en Syrie, en Afghanistan et au Pakistan, afin de s’entraîner et de combattre avec d’autres djihadistes.

Bien que les détails de l’enquête n’aient pas encore été entièrement révélés, l’incident dévoile un problème bien plus vaste que celui posé par quelques Turcs impliqués dans la fabrication de faux papiers et l’immigration illégale. L’histoire constitue plutôt une preuve de plus de l’existence d’un réseau terroriste international, bien financé et bien organisé, utilisé et/ou facilité par le gouvernement et les services de renseignement turcs. Depuis le refuge trouvé par les extrémistes le long de la frontière avec la Syrie jusqu’à la fourniture de soutien matériel aux terroristes en Chine, la Turquie s’est placée au centre d’un réseau de terrorisme international tourné vers les pays qui s’opposent à l’OTAN et qui barrent la route à la vision néo-ottomane que le président Erdogan et le Premier ministre Davutoglu promeuvent pour la Turquie.

Ce que nous savons et pourquoi c’est important.

Selon le ministère turc des Affaires étrangères, les dix citoyens turcs ont été arrêtés à Shanghai le 17 novembre 2014, pour avoir facilité l’immigration illégale. Alors que les accusations officielles portées contre eux vont de la fabrication de faux documents à l’assistance à l’immigration illégale, la question sous-jacente est celle, plus vaste, du terrorisme international. Parce que, bien sûr, les preuves indiquent que ces immigrants ouïghours ne voyageaient pas seulement pour aller voir des êtres chers dans un autre pays. Au contraire, ils appartenaient vraisemblablement à une tendance, déjà identifiée antérieurement, d’extrémistes ouïghours voyageant au Moyen-Orient pour s’entraîner et se battre aux côtés de l’État islamique ou d’autres groupes terroristes.

En fait, cette tendance avait été révélée deux mois auparavant, en septembre 2014, lorsque Reuters avait rapporté que Pékin avait formellement accusé les militants ouïghours de s’être rendus dans les territoires contrôlés par l’État islamique pour y être entraînés. Le Jakarta Times indonésien avait corroboré ces accusations en rapportant que quatre djihadistes ouïghours chinois avaient été arrêtés en Indonésie après avoir voyagé depuis le Xinjiang en passant par la Malaisie. De plus, d’autres rapports sont apparus ces derniers mois, dépeignant une campagne concertée pour aider les extrémistes ouïghours à se déplacer à l’intérieur de l’Asie, communiquant et collaborant avec des groupes terroristes transnationaux comme l’EI.

Maintenant, avec ces dernières révélations au sujet de Turcs impliqués dans le trafic d’extrémistes, un élément indispensable de l’infrastructure de transit des terroristes semble dévoilée. La question essentielle reste évidemment: pourquoi?

Pourquoi la Turquie, un pays qui a longtemps cherché à jouer sur les deux tableaux de la division Est-Ouest (qui est rapidement devenue une division entre l’Otan et le groupe BRICS/CSO [Conseil de sécurité de Shanghai: NdT], cherche-t-elle à déstabiliser la Chine de cette façon? Pourquoi prendre le risque de perdre un partenariat potentiellement lucratif avec Pékin pour aider un mouvement radical islamiste marginal au Xinjiang?

Le revanchisme turc ottoman

Si la politique d’Ankara fomentant un conflit régional par l’intermédiaire du terrorisme peut sembler contre-intuitive, étant donné les intérêts politiques et économiques actuels de la Turquie et l’importance pour elle d’entretenir des relations positives avec les pays non occidentaux, cette politique prend tout son sens dans une perspective néo-ottomane.

Il est peut être essentiel à ce stade de définir néo-ottoman simplement comme le terme servant à décrire le désir du gouvernement turc actuel de réunifier les peuples turcs dispersés entre Istanbul et la Chine occidentale, en passant par l’Asie centrale. Ainsi, Erdogan et Davutoglu voient-ils les djihadistes du Mouvement islamique de l’Est du Turkménistan (MIET ou les talibans chinois) du Xinjiang, et d’autres groupes similaires, non comme des terroristes chinois mais comme les enfants perdus de la Turquie, en quête désespérée d’une réunion avec leur patrie originelle. Même si une telle pensée à des relents évidents de néocolonialisme, elle n’est pas entièrement impopulaire en Turquie, surtout au sein de la base conservatrice qui soutient Erdogan.

L’attrait politique du revanchisme turc est essentiel à la compréhension de la raison pour laquelle il est mis en avant. Erdogan et son Parti de la justice et du développement (AKP) ont galvanisé un large segment de la population devenu toujours plus sceptique à l’égard du libéralisme de l’Occident et de ses effets pernicieux, tels qu’ils sont perçus par la société turque. En retour, cela alimente une position agressive et militariste en matière de politique étrangère, où Erdogan joue avec les termes respect et honneur. C’est ce qu’a rapporté The Atlantic en 2013.

Mais, au delà de la politique étrangère, il y a une transformation intérieure significative,qui est aussi dictée par l'histoire.Dans le même discours,le ministre des Affaires étrangères à évoqué le besoin d'une grande restauration où «nous avons besoin d'adopter complètement les valeurs anciennes que nous avons perdues». Louant les liens historiques qui reliaient les peuples de Turquie par delà les «nouvelles identités qui nous ont été imposées par la période moderne», Davutoglu à soutenu que la route du progrès de la Turquie se trouvait dans son passé – une affirmation qui a suffisamment terrifié les détracteurs du gouvernement pour qu'ils en fassent une plate-forme politique perdante à chaque élection.

Mais lorsque l’on considère précisément les pays et les peuples qui sont affectés par cette pensée revancharde turque, les empreintes digitales de la politique étrangère de l’Occident – en particulier les États-Unis – deviennent immédiatement apparentes.

L’ Occident écrit la politique, la Turquie fait le sale boulot.

Plus on regarde la carte des peuples turcs, plus il est évident que le revanchisme turc (ou néo-ottomanisme) est une politique étrangère parfaitement alignée sur celles des États-Unis, puisque ses cibles principales sont la Russie et la Chine. En effet, une telle conclusion devient inévitable lorsque l’on considère le fait que les peuples turcs sont présents sur une large bande qui traverse les sphères d’influence, tant de la Chine que de la Russie. Des anciennes Républiques soviétiques d’Asie Centrale au Xinjiang en Chine occidentale, les populations turques sont devenus des foyers importants de terrorisme potentiel, de sécessionnisme et de déstabilisation. De plus, comme les États-Unis quittent formellement l’Afghanistan (restant bien entendu de façon informelle pour de multiples raisons), leur aptitude à influencer directement et/ou contrôler les événements sur le terrain en Asie centrale est considérablement diminuée.

Les États-Unis ont soutenu depuis longtemps des groupes terroristes dans toute la région du Caucase afin de déstabiliser et de contrôler la Russie et d’étouffer son développement politique et économique. La chose est aussi vraie pour le Xinjiang, en Chine, où les États-Unis, par l’intermédiaire de la National Endowment for Democracy et de nombreuses autres ONG chargées de promouvoir la démocratie, ont soutenu politiquement et financièrement durant des années les groupes séparatistes ouïghours. Pourtant, maintenant que la Turquie est devenue un acteur régional cherchant à affirmer sa propre hégémonie, Washington semble parfaitement se satisfaire de permettre à cette stratégie de se réaliser au détriment de la Russie et de la Chine.

Un bon indicateur de cette manière de voir de la part des États-Unis apparaît peut être dans le fait que des attaques terroristes à grande échelle au Xinjiang et en Chine occidentale ne sont généralement presque pas mentionnés par les médias occidentaux. Par exemple, le 31 mai 2014, 31 civils Chinois ont été tués dans une attaque terroriste sur un marché au Xinjiang. Presque trois fois le bilan des attentats contre Charlie Hebdo, mais à peine une mention de ces actions en Occident. C’est sans aucun doute dû au fait que l’Occident doit toujours présenter la Chine comme l’agresseur, jamais comme la victime du terrorisme. Au delà du double standard, une telle hypocrisie illustre l’état d’esprit insidieusement cynique des planificateurs occidentaux, qui considèrent toute les formes possibles de déstabilisation de la Chine comme un gain net pour leur hégémonie.

Les États-Unis sont gagnants lorsque la Chine et la Russie sont perdantes

flags8341c555853ef014.jpgCe sont finalement, la géopolitique et l’économie qui dictent l’agenda de la politique étrangère de l’Occident (et par extension de la Turquie) en Asie centrale et en Chine. Il s’agit d’une tentative d’étouffer le développement économique, tant de la Russie que de la Chine, et d’empêcher les deux puissances de poursuivre leur double démarche de coopération et d’intégration régionale. Ainsi considérée, la Turquie devient une pièce géante instrumentalisée pour garder la Russie et la Chine séparées mais aussi garder séparées la Chine et l’Europe. Il y a beaucoup de magie derrière le rideau proverbial.

Dans le contexte de la Chine, l’objectif premier de Washington est de l’empêcher d’étendre l’infrastructure de son développement économique, non seulement en Asie mais tout spécialement en Europe. Le plus important des grands projets de la Chine est la Nouvelle route de la soie – un projet ambitieux qui relierait la Chine à l’Europe par voie terrestre, grâce à des trains à grande vitesse, des nouveaux aéroports et un vaste réseau de distribution. Un tel développement transformerait le commerce mondial, et la Chine ne serait plus contrainte de dépendre presque entièrement des transports maritimes commerciaux, une sphère dominée par la force navale et l’influence des États-Unis.

La ville occidentale chinoise d’Urumqi, capitale de la province du Xinjiang, est un pivot de la Nouvelle route de la soie. Comme l’a expliqué Duan Zixin, le directeur général du Groupe Xinjiang Airport :

«Nous croyons que le nouvel aéroport international dans la capitale régionale d’Urumqi sera opérationnel vers 2020. Il deviendra une des plate-formes aéroportuaires les plus importantes d’Asie centrale. (…) Notre objectif est de lancer de nouvelles routes reliant le Xinjiang à des centres commerciaux essentiels en Asie centrale, à l’Est de l’Asie et en Europe. Ce sera une Route de la soie aérienne.»

L’expansion des aéroports, jointe à la proposition d’utiliser Urumqi comme plate-forme ferroviaire sur le réseau de distribution de la Nouvelle route de la soie, a propulsé le Xinjiang au centre des projets chinois d’expansion économique mondiale. C’est précisément cela qui a fait de la déstabilisation du Xinjiang une priorité pour les États-Unis et la Turquie, son alliée dans la région. En finançant, en entraînant et en fournissant un soutien matériel à l’ETIM et à d’autres groupes extrémistes dans la région, l’Occident espère en quelque sorte que le Xinjiang ne sera pas viable pour le développement économique, faisant ainsi dérailler les projets de la Chine.

De façon similaire, la Russie a commencé à mettre en œuvre ses projets les plus importants en Asie centrale, spécifiquement avec l’établissement et l’expansion de l’Union économique eurasienne – une alliance économique régionale incluant la Russie, le Kazakhstan, la Biélorussie et l’Arménie; le Kirghizistan doit la rejoindre cette année et le Tadjikistan a manifesté son intérêt. Si l’on considère l’immensité géographique de la zone couverte par l’UEE, on ne peut s’empêcher de la voir comme un élément fondamental pour le succès de la Nouvelle route de la soie. En fait, les planificateurs russes et chinois ont depuis longtemps reconnu ce partenariat naturel et cette trajectoire mutuellement bénéfique à leur développement.

Les importants contrats autour de l’énergie récemment signés entre la Russie et la Chine, dont des engagements à investir des sommes importantes pour le développement d’infrastructures d’oléoducs tant à l’Ouest – le pipeline Altaï, ce n’est pas une coïncidence, terminera sa route au Xinjiang – qu’à l’Est, ont rendu Washington toujours plus nerveux. Naturellement, les États-Unis comprennent le potentiel inhérent à une telle coopération, qui pourrait même finalement transformer l’Europe en un allié peu fiable pour eux. Par conséquent, ils feront tout pour empêcher la coopération russo-chinoise de se réaliser.

Ainsi, l’Occident laisse la Turquie plus ou moins libre de poursuivre sa stratégie néo-ottomane en recourant à des méthodes états-uniennes éprouvées: financer le terrorisme, fomenter des guerres civiles et alimenter le chaos, dans un but de gestion de crises. Cette politique a déjà conduit à des morts innombrables en Syrie et indéniablement, elle provoquera toujours plus de morts à l’avenir. Elle a créé des divisions et des conflits au Moyen Orient, au profit des États-Unis et de leurs alliés les plus proches dans la région, Israël et la Turquie. Elle place la Russie et la Chine directement dans le viseur de l’Empire. Il semblerait que cela ait toujours été le but.

Eric Draitser

Eric Draitser est un analyste géopolitique indépendant basé à New York City, il a fondé StopImperialism.org il est aussi éditorialiste pour Russia Today, exclusivement pour le journal en ligne New Eastern Outlook.

Par Eric Draitser – Le 2 février 2015 – Source NEO

Traduit par Lionel, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone

Source: http://lesakerfrancophone.net/lempreinte-de-la-turquie-dans-la-guerre-de-loccident-contre-la-chine-et-la-russie/

mercredi, 04 mars 2015

Sven Hedin : explorateur des immensités centre-asiatiques

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Helge Morgengrauen :

Sven Hedin : explorateur des immensités centre-asiatiques

A l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance

Sven-Hedin_1652.jpegSven Hedin est né le dimanche 19 février 1865 au sein d’une  famille bien en vue de la bourgeoisie de Stockholm, descendant de lignées paysannes du centre de la Suède mais qui comptait aussi, parmi ses ancêtres, un rabbin de Francfort-sur-l’Oder. Le père de Sven Hedin était un architecte très actif, qui a connu le succès tout au long de sa carrière. La famille « vivait simplement, sans prétention, en ses foyers régnaient calme et tranquillité, confort et bonheur », écrira plus tard son célèbre fils.

Ce fils exceptionnel a reçu les prénoms de Sven Anders et, très tôt, il savait déjà qu’il deviendrait un explorateur. Tout au début de son rêve, il admirait les explorateurs polaires, surtout son compatriote Nordenskiöld qui fut le premier à maîtriser le passage du Nord-Est, soit la voie maritime dans l’Océan Glacial Arctique qui longe les côtes septentrionales de l’Europe et de l’Asie. C’est Nordenskiöld que le jeune Sven Hedin voulait imiter.

Plus tard, dans les années 1880, le jeune homme, à l’approche de ses vingt ans, part pour la première fois en Asie. Il est d’abord, pendant quelques mois, précepteur dans une famille suédoise. Il avait déjà appris le russe, la langue persane et celle des Tatars. Quand sa tâche de précepteur prit fin, il utilisa l’argent gagné pour faire un long voyage à travers la Perse, la Mésopotamie et le Caucase. Cet enfant, né un dimanche, avait parcouru plus de 3000 km dans des déserts, des montagnes enneigées, avait traversé lacs, mers et fleuves, avait utilisé soixante chevaux sur les chemins les plus dangereux sans subir le moindre dommage, sans avoir été dépouillé par des bandits, sans être tombé malade. Sven Hedin, en effet, avait une constitution de fer : le succès de son voyage le prouvait ; plus tard, cette santé n’allait jamais le trahir. Revenu en Suède, il relate ses voyages dans un livre, qui parait en 1887 et compte 461 pages : encore aujourd’hui, la lecture de cet ouvrage demeure captivante. Sven Hedin avait une santé de fer, bien d’autres dons, mais aussi et surtout celui d’écrire.

Quelques années plus tard, il participe, au titre de vice-consul, à une mission diplomatique suédoise, que le Roi Oscar II envoie au Shah de Perse. Cette mission ne dure qu’un an mais, au cours de cette année en Perse, Hedin escalade le Demawend, la plus haute montagne de Perse (5610 m). Dès son retour, il rédige une thèse sur ce massif montagneux iranien et obtient ainsi le titre de docteur en 1892 à l’Université de Halle an der Saale en Allemagne. Ensuite, un livre tout public, intitulé « Durch Khorassan und Turkestan » (« A travers le Khorassan et le Turkestan »), rend compte de ce voyage.

Sven Hedin avait trouvé sa voie. Dans les années qui suivirent cette première mission en Perse, il organise quatre expéditions en Asie centrale qui, chacune, dureront parfois plusieurs années et lui procureront une gloire internationale. La première de ces expéditions, de 1893 à 1897, parcourt l’Asie centrale : Hedin explore la chaîne du Pamir, dans la région frontalière actuelle qui sépare l’Afghanistan, la Chine, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Il ne parvient toutefois pas à escalader jusqu’au sommet une montagne de cette chaîne qui dépasse les 7000 m. Il traverse aussi le désert du Taklamakan, où il est presque mort de soif : il relatera ultérieurement cette expédition dans un livre très poignant, « Abenteuer in Tibet » (« Aventure au Tibet »). De fait, Hedin s’était avancé très profondément dans le territoire tibétain, encore inconnu des Européens.

 

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Deux ans après cette première expédition, en 1899, Sven Hedin s’embarque pour un nouveau long voyage qui durera jusqu’en 1902. Dans le cadre de cette nouvelle expédition, il voyage 2000 km sur fleuve le long de la chaîne du Tarim et découvre le secret naturel de la « mer mouvante », le Lop Nor. Il essaie en vain d’atteindre la capitale Lhassa. De 1905 à 1909, une troisième expédition le mènera dans plusieurs régions encore inconnues de l’Asie centrale. Il traverse le désert du Kevir et parcourt, en tout et pour tout, huit fois les pistes transhimalayennes dans une région montagneuse qui recevra plus tard son nom. Il explore également les régions aux sources des fleuves Bhramapoutre et Indus.

Lorsque Sven Hedin entreprend en 1926 sa dernière expédition, la plus longue de sa carrière, il a presque 61 ans : l’enthousiasme, le désir de découvrir et d’œuvrer au bénéfice des sciences géographiques, ne l’a toujours pas quitté. Cette dernière expédition va durer neuf ans ! Dans le cadre de ce très long voyage, il doit vérifier, pour le compte de la Lufthansa allemande, quelles pourraient être les voies aériennes pour accéder à l’Extrême Orient.

Dans la foulée, Hedin dirige ce que l’on appelait à l’époque, l’ « Université itinérante » (« Die wandernde Universität ») et recherche également, pour un Américain, une lamasserie pour qu’on puisse la reproduire pour une exposition universelle devant se dérouler à Chicago. De plus, pour le compte du gouvernement chinois, il examine les possibilités de tracer des voies de communication terrestres dans le Sin-Kiang.

Tous ses voyages ont été relatés dans de nombreux ouvrages. Sven Hedin a également été l’auteur de livres populaires, que les non scientifiques aujourd’hui, liront encore avec beaucoup de plaisir. Parmi ces ouvrages à destination du grand public, nous en trouvons plusieurs rédigés pour les jeunesses suédoise et allemande, parmi lesquels « Abenteuer in Tibet », « Von Pol zu Pol » (« D’un Pôle à l’autre ») et « Meine erste Reise » (« Mon premier voyage »).

Tout au long de sa vie, Hedin a été honoré, a reçu plusieurs titres de docteur (dont ceux que lui ont octroyés les universités d’Oxford et de Cambridge). Il a rencontré personnellement de nombreuses têtes couronnées et des chefs d’Etat, ce qu’il raconte par ailleurs dans « Grosse Männer, denen ich begegnete » (« Les grands hommes que j’ai rencontrés »).

Sven_Hedin's_gravestone_at_Adolf_Fredriks_kyrkogård,_Stockholm,_Sweden.jpgHedin était germanophile et ne s’en est jamais caché. Cette sympathie pour le Reich, il la conservera même après l’effondrement dans l’horreur que l’Allemagne a connu en 1945. On lui reprochera cette attitude, aussi en Suède et, évidemment, dans les pays victorieux. La rééducation, en Allemagne, fera que ce germanophile impénitent sera également ostracisé, en dépit de ses origines partiellement juives et de son esprit universel. Cet ostracisme durera longtemps, perdure même jusqu’à nos jours. Pourtant Hedin, qui avait la plume si facile, s’est justifié avec brio, en écrivant « Ohne Auftrag in Berlin » (« A Berlin sans ordre de mission »). Ses démonstrations n’ont servi à rien. Sven Hedin meurt, isolé, à Stockholm le 26 novembre 1952.

Helge Morgengrauen.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°8/2015 ; http://www.zurzeit.at ).

Sven Hedin's 1928 Expedition through the Gobi Desert of China

Sven Hedin's 1928 Expedition through the Gobi Desert of China

A silent documentary made in 1928 of Swedish explore Sven Hedin's expedition through the Gobi desert of Inner Mongolia and Xinjiang. Towns visited include Baotou (Paotou), Hami (Kumul) and Urumchi (Urumqi). At the very end of the film Sven Hedin meets Xinjiang's warlord governor Yang Zengxin (who was assassinated a few months later).
FULL VERSION:
http://www.archive.org/details/swedis...

00:05 Publié dans Eurasisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : eurasie, désert du gobi, sven hedin, chine, explorateurs, suède | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook