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mardi, 09 juin 2009

La sexualité est-elle soluble dans le libéralisme?

 

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La sexualité est-elle soluble dans le libéralisme ?

Mardi, 02 Juin 2009 - http://unitepopulaire.org 

« À mesure que la société s’est affranchie des non-dits et des pudeurs, le sexe, entendons par là la sexualité, est devenu un enjeu de débats d’idées. Et de s’indigner de ce que le sexe soit sous le joug du libéralisme et réduit à un utilitarisme. Bien vu. Le libéralisme moderne fait en sorte qu’aucun domaine n’échappe à son emprise. Son idéologie est que la vie sociale est mue par le seul intérêt et par le plaisir. Du point de vue du libéralisme, tous les domaines de l’activité sont amenés à être régis par ces principes.

 

Le public et le privé sont ainsi tous concernés et la frontière entre les deux tend à s’estomper. Ainsi des coachs et des "spécialistes" du "développement personnel" expliquent comment faire du travail salarié, qui par nature relève d’un rapport de contrainte et de subordination, un espace de réalisation de soi. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que le sexe soit inclus dans le système des intérêts et des plaisirs. Si ce qui est utilitaire comme le salariat doit aussi être agréable, ce qui est a priori non utilitaire comme le sexe doit maintenant devenir utile et être valorisé, évalué, rentabilisé. Telle est la logique du libéralisme. Comment cela devient-il possible ? Pour le comprendre, il faut revenir aux fondements.

 

Le principe du libéralisme est l’absence de limites et l’inscription de chaque activité humaine dans le registre de la consommation. Le libéralisme y travaille sous divers aspects. L’un de ceux-ci est le passage de l’idéologie du "droit" au devoir-être et au devoir faire. On affirme d’abord le droit à une sexualité épanouie, et on développe ensuite l’idée que cela passe par le devoir de tout mettre en œuvre pour obtenir celle-ci. Il faut donc "forcer le destin". Ainsi, la majorité des rencontres se font maintenant par le web. Par ce biais, les rencontres se marchandisent puisque les hommes paient pour s’inscrire. Mais la démarche va au-delà. Ces rencontres se rationalisent à outrance et deviennent quelque chose d’équivalent à la recherche d’un emploi. Elles s’inscrivent dans la recherche d’une adéquation offre-demande. Alors que dans une rencontre, celle-ci ne peut être complètement prévue puisque la rencontre est censée faire changer l’un et l’autre, et donc créer une situation nouvelle. Désormais, chacun est censé être prêt au bonheur et doit en tout cas s’y préparer. Pour cela, des coachs psycho-sexuels proposent leurs services. Leur idée : chacun dispose d’un capital personnel et donc sexuel qu’il s’agit de faire "fructifier". Une sexualité réussie doit s’afficher, c’est un élément de visibilité sociale.

 

Nous sommes dans l’air du temps. On passe ainsi du droit au bonheur au devoir de le montrer pour prouver son efficience. Ceci se fait au nom d’une équivalence générale des valeurs – ou encore marchandisation de toutes les valeurs. Du point de vue libéral, on ne voit en effet pas très bien pourquoi quelqu’un de performant sur le marché du travail, de l’argent ou du pouvoir ne le serait pas dans sa vie sexuelle. Et réciproquement. Ce qui veut dire que la preuve de l’un tend à conforter la preuve de l’autre.

 

Si le corps est un capital, il est tout à fait normal d’en tirer profit en fonction des souhaits de chacun. Ainsi la prostitution devient un métier comme un autre, et le ou la prostitué devient un "travailleur du sexe". Une conception qui occulte le fait que si la prostitution est bien l’un des plus vieux métiers du monde, elle n’a jamais été un métier comme un autre. Après le puritanisme, le libéralisme produit ainsi une vision pseudo-décomplexée du sexe qui, en fait, le banalise et, même dans le cas de la prostitution, rabat une relation marchande mais complexe sur une pratique hygiéniste et strictement marchande.

 

Un autre aspect de la sexualité en régime libéral est particulièrement destructeur du lien social. C’est le fait que l’axiomatique libérale de l’intérêt et du plaisir aboutit à imaginer une sexualité sans l’autre. C’est ce à quoi s’emploie la pornographie. Elle a bien sûr bénéficié pour se développer de la grande peur du sida, dont elle est contemporaine. Mais son impact ne s’explique pas principalement par cela. Elle s’est développée parce que c’est un marché qui a pu prospérer sur l’isolement et la destruction des liens sociaux, stigmates manifestes de la société mondialisée. À cela s’est ajouté le culte de la performance qui, mis en scène dans la pornographie, tend à dévaloriser la sexualité réellement vécue puisque celle-ci risque d’être moins "réussie" techniquement que la sexualité visionnée. C’est l’effet de la spectacularisation de l’intime. L’idéal-type d’une sexualité comme exploit quasi-sportif – une sexualité compétitive – a remplacé l’hédonisme gentiment libertin et égalitaire des années 68.

Maintenant, beaucoup d’adolescents connaissent la pornographie avant de connaître réellement la sexualité et donc abordent celle-ci avec une vision parfaitement technicisée et selon un schéma de figures érotiques ou plutôt machinales imposées. Ceci provoque évidemment des troubles narcissiques et des troubles de la relation à l’autre. Dans les films porno, la femme est insatiable et les acteurs sont tous performants et interchangeables. Pas dans la vraie vie. La pornographie est aussi une métaphore de la transparence. On y montre tout ce qui est possible et seul existe ce qui est montré. Si la pornographie est une sexualité sans l’autre, le libéralisme pousse de toute façon à n’utiliser l’autre que comme un investissement. Et à se retirer de celui-ci si l’investissement ne s’avère pas rentable.

 

La logique est celle du zapping. Sachant que, à la limite, l’autre n’est pas indispensable et les sex toys sont faits pour le prouver. C’est "le plaisir à portée de soi-même" dit la publicité. Une certaine Anne Lolotte, qui donne des "consultations" à des "patients" (sic) explique : "À partir du moment où une patiente ou un patient accepte d’utiliser un sex toy c’est déjà un pas fait vers l’autonomie, la capacité au jeu et au plaisir." Nous sommes dans une logique libérale : dans une société de défiance généralisée, le contrat le plus fiable n’est-il pas celui que l’on fait avec soi-même ? Chacun est alors responsable et en quelque sorte propriétaire de son propre plaisir. Jouir ? Yes I can. La société du libre-échange devient celle où l’autre n’étant jamais que le même il n’y a plus rien à échanger et l’autosuffisance affective et sexuelle devient un idéal. […]

 

Culte de la performance et réduction à l’objet caractérisent donc la vision libérale de la sexualité. Alors que le puritanisme dévalorisait le sexe, la société de la transparence, dont la pornographie est l’une des manifestations, se propose de l’aseptiser, de le neutraliser, et de le marchandiser. Le sexe, y compris la séduction, est réduit à des performances à maximiser ou n’est rien. La société des ego fait ainsi de la sexualité une pratique diabolique – au sens étymologique de "ce qui sépare" – alors que la sexualité relève normalement du symbolique, c’est-à-dire d’un signe de reconnaissance, de ce qui donne un horizon commun à un couple ou à une collectivité. La sexualité n’est pas un capital à faire fructifier. C’est une pure dépense. Ce n’est pas non plus un ensemble de techniques. C’est une réalité têtue qui ne se laisse pas réduire à une fonctionnalité. »

 

 

Pierre Le Vigan, "Une nouvelle guerre du sexe ?", Europe Maxima, 8 mars 2009

mardi, 02 juin 2009

Wer sich nicht wehrt...

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Wer sich nicht wehrt

Ellen KOSITZA - http://www.sezession.de/

… der lebt verkehrt! Gerade bin ich auf ein Buch hingewiesen worden, über das ich gewiß nicht von allein gestolpert wäre. Aufs Stichwort Schlägerei hab ich nie ein google-alert gesetzt. Seit wir so idyllisch auf dem Lande wohnen, betrifft uns dergleichen nicht mehr. Davor schon. Bis zum Backfisch-Alter war ich ein Rabauke – keine sportliche Rangelei ohne mich; das Wort „Schulhof-Gewalt“ gab’s damals noch nicht, blutige Knie waren Alltag.

Später trug ich meine Haare lang, die böseren körperlichen Auseinandersetzungen folgten erst dann. Vier Attacken (nie politisch motiviert) mußte ich im Alter zwischen 17 und 22 abwehren, zweimal bekam ich ordentlich was ab – einmal war der Grabscher das Opfer, ihn erwischte meine Wasserflasche.

Im Rhein-Main-Gebiet war und ist Straßengewalt ein Dauerthema, vor allem für junge Männer, die schon damals für zahlreiche Ziele diverse Umwege einschlugen – die zu nehmen ich mich stets weigerte. Bloß kein verkehrtes Leben! Heute sind das für mich nicht Geschichten „von gestern“, sondern „von dort“.

Das mir eben anempfohlene Buch mit dem recht martialischen Titel Die Schlägerei- Selbstverteidigung im Straßenkampf von „Selbstverteidigungscoach“ Mike Toss (Book on demand, also unlektoriert: Kein Problem, hier wird ja keine Geisteswissenschaft betrieben) verspricht glaubwürdig Abhilfe für solche (u.U. lebenswichtigen) Situationen, in denen der hehre Vorsatz, daß „Gewalt auch keine Lösung“ sei, nicht weiterhilft.

Gemäß Klappentext werden rund ums „Tabuthema“ (wer will leugnen, daß es eins ist?) Straßenschlägerei Punkte wie Angstkontrolle, Kampfpsychologie und solche Techniken vermittelt, die auch ohne jahrelanges Training in Streßsituationen abrufbar sein sollen. Und natürlich: Wie man die handfeste Auseinandersetzung vermeidet.

„Es geht um ihre Gesundheit, und niemand hat das Recht, Sie zu verletzen!“

00:25 Publié dans Psychologie/psychanalyse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : défense, auto-défense, sociologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 30 mai 2009

"Le bonheur paradoxal" de Gilles Lipovetsky

Le bonheur paradoxal, essai sur la société d'hyperconsommation

 

                  La bibliothèque NextModerne, interview Gilles Lipovetsky par Denis Failly           Gilles Lipovetsky, Editions Gallimard, 2006

Ex.: http://nextmodernitylibrary.blogspirit.com/

Une nouvelle modernité est née au cours de la seconde moitié du XXème siècle : la civilisation du désir, portée par les nouvelles orientations du capitalisme de consommation. Mais ces deux dernières décennies, un nouveau séisme est apparu qui a mis fin à la société de consommation, une nouvelle phase du capitalisme de consommation s'est mise en place : la société d'hyperconsommation.



Quelques mots de l'auteur, Gilles Lipovetsky


Denis Failly - Gilles Lypovetsky, Pourriez nous brièvement nous définir l'hypermodernité

Gilles Lypovetsky -medium_lipovetsky.jpg "La modernité s'est construite au 18ème siècle en mettant en place trois grands systèmes les droits de l'homme et la démocratie, le marché, et enfin la dynamique de la techno-science, le problème c'est que pendant deux siècles et demi ces 3 systèmes ont été fortement attaqués par des systèmes qui les rejetaient, par exemple le totalitarisme qui rejetait à la fois le marché et la démocratie. Aujourd'hui se fait sentir moins le besoin d'un contre modèle qu'une nouvelle régulation qui met au centre l'individu."

 

Denis Failly - "En quoi le bonheur est - il paradoxal ?

Gilles Lypovetsky - L'hédonisme, la consommation promet des bonheurs, de l'évasion, c'est une société qui stimule une marche au bonheur dans ses référentiels, mais la réalité c'est que l'on voit la multiplicité des anxiètés, la morosité, l'inquiétude, le ras le bol, l'insatisfaction quotidienne. Donc voilà, l'idée de bonheur paradoxal est : que plus la société marche au bonheur plus montent les plaintes, les récriminations, les insatisfactions.


Denis Failly - Quelles sont les grandes tendances de la société que vous appelez «hyper consommative» dans votre ouvrage ?

Gilles Lypovetsky- L'équipement, non plus centré sur les biens mais sur les personnes, par exemple le téléphone avant c'était semi collectif, ou bien on avait une télé par ménage...
- les cultures de classes s'érodent, le fait d'appartenir à un groupe social ne détermine plus strictement les modes de consommation parce que les cultures de classes se sont effondrées, à cause de l'information, à cause de la pub, de la diffusion des valeurs hédonistes, à partir de là, le consommateur devient un hyper consommateur, c'est à dire volatile, infidèle, qui échappe au quadrillage de classe d'autrefois.
- Une consommation émotionnelle, une satisfaction pour soi ou ses proches, soit par ce que dans la consommation on cherche par exemple à fuir un malaise, c'est une sorte de thérapeutique, soit par ce que les gens ont envie de vivre des expériences nouvelles, dans le sport, le tourisme... pour connaître des sensations nouvelles, donc la consommation devient beaucoup plus émotionnelles ou expérientielles. - On a des consommations de plus en plus clivées entre le haut de gamme et le low cost, ce sont les deux segments de marchés qui se développent le plus, le moyen de gamme décline, les extrêmes se renforcent.


Denis Failly - Comment aujourd'hui les jeunes construisent leur identité à travers la consommation ?
Gilles Lypovetsky- Comme les jeunes sont aujourd'hui éduqués dans l'idée d'être eux mêmes, d'être plus autonomes, du coup ils cherchent au travers de la consommation ce qui leur permet d'afficher leur personnalité même si c'est en copiant le modèle de leur camarade, donc au travers du conformisme, du culte des marques, ils construisent leur identité.

Denis Failly - Que vous inspirent Internet comme nouvelles manières de faire lien ?

Gilles Lypovetsky- Oui avec Internet beaucoup de choses sont liées à la consommation on entre dans l'hyperconsommation puisqu'il n'y a pas plus de limites, il n'y a plus de barrières spatio – temporelles. Il y a une information beaucoup plus ample avec un consommateur plus reflexif qui est capable de comparer de juger les offres...Internet favorise le low cost, départ dernière minute...tarifs préférentiels.
Le succès des blogs, c'est une certaine défiance envers les médias traditionnels au profit de l'expression des individus qui montrent qu'il y a une limite à la consommation et que les gens ont envie aussi de devenir acteur, de s'exprimer, de passer à côté des circuits ou des réseaux tradiitionnels.
C'est sympa comme phénomène mais il peut y avoir des dérives du n'importe quoi, il n'y a plus de filtrage, c'est un peu comme les cafés philos c'est parfois un peu de la bouillie pour le dire simplement.

Denis Failly - Par rapport à certains sociologues qui postulent l'existence de tribus, de communautés...est ce que l'hyperconsommateur est un hyper - individualiste et en quoi les deux s'opposent ?

Gilles Lypovetsky - C'est une question en fait conceptuelle, empiriquement les tribus existent mais c'est purement descriptif maintenant il faut les penser et c'est là ou la notion de tribu ne va pas, car la tribu c'est clos c'est fermée, hors, ce qui caractèrise le moment, c'est que les gens changent et à part les adolescents les gens sont dans une tribu, dans une autre... et ils peuvent mélanger, ils ne sont pas fait d'une pièce, les punks ou les goths c'est un tout petit monde mais ça représente pas le monde des adultes. Pour définir un adulte qu'elle est sa tribu exact, il peut aller faire du camping, faire de la musique classique etc, alors à quelle tribu appartient-il ? si il n'y plus d'homogéneïté c'est difficile. Ce sont des tribus tellement perméables tellement fugitives que la notion de tribu ne me paraît pas correcte, la tribu, on peut l'observer à des signes, mais on ne peut pas la penser parce que ce qui pense le tribalisme d'aujourd'hui c'est l'hyper-individualisme justement, les individus ne sont plus incrustés, incorporés dans quoi que ce soit puisque ce qui les caractérise c'est leur labilité, leur capacité à ne pas être intégrés, mais de choisir leur groupe d'appartenance.

Denis Failly - Gilles Lypovetsky, Vous sortez un nouvel ouvrage en septembre, pouvez-vous nous en dire plus ?

Gilles Lypovetsky - Oui, ca va s'appeler la « société de déception », j'essaie de voir comment l'expèrience de la déception fait partie de la condition humaine, les hommes sont déçus car ils ont des désirs et les désirs correspondent rarement à ce que l'on a, mais la modernité lui donne un poids, une surface beaucoup plus importante qu'autrefois. On le voit dés le 19ème siècle avec Durkheim, Tocqueville notamment. La notion d'égalité fait monter les aspirations, avant nous étions enfermés dans notre monde aujourd'hui c'est ouvert. Le livre monte que ce phénomène n'a fait que s'exacerber, avec le recul du religieux qui n'encadre plus les comportements, avec l'école qui ne répond plus aux promesses d'ascenseur sociale, avec la fin de la croyance dans le progrès, les gens sont méfiants envers la technique, ils ont peur des OGM, ils ont peur du réchauffement de la planète.. La technique déçoit, l'école déçoit, la politique déçoit on est dans une période de désillusion...

Denis Failly - Gilles Lypovetsky, je vous remercie


NB :  cette interview de Gilles Lipovetsky a été réalisée par téléphone

 
Bio : Gilles Lipovetsky est Professeur agrégé de philosophie à l'université de Grenoble, Membre du Conseil d’analyse de la société (sous l’autorité du Premier Ministre), Membre du Conseil national des programmes (Ministère de l’Education Nationale), Consultant à l’Association Progrès du Management. il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages :
L'Empire de l'éphémère, Le Crépuscule du devoir, La Troisième femme, édition Gallimard, L'Ere du vide, La société de déception, Métamorphoses de la culture libérale, Le luxe éternel, Les temps hypermodernes, etc.

vendredi, 29 mai 2009

M. Gauchet: "La démocratie du privé perturbe le collectif"

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«La démocratie du privé perturbe le collectif»

Interview - Ex: http://www.liberation.fr/

Invité de «Libération», Marcel Gauchet dresse le bilan de deux années de sarkozysme. Et réagit à l’actualité tout au long de ce numéro spécial.

 

Théoricien de la crise de la démocratie et directeur de recherches à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), Marcel Gauchet, 63 ans, répond aux questions de Libération.

Quel bilan politique dressez-vous des deux premières années de Nicolas Sarkozy à l’Elysée ?

Le sarkozysme est difficile à analyser, car il est caméléonesque. Il manie la contradiction sans complexe. En jouant sur tous les tableaux, il se rend insaisissable, ce qui explique que les protestations de la gauche le laissent indemne. Néanmoins, si on doit faire un bilan, on peut dire que le sarkozysme a probablement épuisé son capital initial et que s’il continue de faire illusion, c’est paradoxalement grâce à la crise, qui le prend à contre-pied, mais justifie, pour quelque temps encore, son activisme. L’essence du sarkozysme, c’est, sous le titre de la «réforme», l’idée que le moment est venu de banaliser la France, en économie, en diplomatie, dans l’éducation… C’est un programme de pasteurisation européo-libérale du pays, dont les deux armes principales sont d’une part la communication, que Nicolas Sarkozy manie en virtuose, et d’autre part la vitesse et l’emballement du rythme : réformes annoncées à jet continu pour déstabiliser les opposants, qui n’ont pas le temps de se mobiliser qu’on en est déjà à la réforme suivante ; multiplication des fronts pour brouiller les cartes, etc.

Cette formule serait en train de toucher à ses limites ?

J’en ai l’impression. D’une part, une bonne partie des prétendues réformes sont pour la galerie. Sarkozy sait marier comme personne l’intransigeance verbale et une gestion très chiraquienne des compromis. C’est un bonapartisme pour la télévision, où l’affichage de la volonté l’emporte sur la réalité. Ca ne marche qu’un temps et les limites de l’entreprise commencent à se voir. Ensuite, l’effet de surprise ne joue plus. La démarche se heurte à la résistance de l’exception française. Or celle-ci est solide. Elle repose sur une culture politique républicaine ancrée dans une vision très forte de l’histoire du pays. Sarkozy a eu tort de croire qu’il pouvait se contenter de concessions rhétoriques à ce noyau dur, avec les discours de Guaino. Il a sous-estimé la vitalité de ce cadre historique et mental. Aussi son action s’enlise-t-elle. Nous sommes en train de passer de la guerre de mouvement à la guerre de tranchées. La crise lui offre un répit qu’il a saisi avec son intelligence et sa souplesse habituelles. Elle fragilise son discours sur le fond, mais elle met en valeur son pragmatisme et son volontarisme, qui sont bien adaptés à la situation.

Les Français ne l’ont-ils pas élu justement pour ce programme de réformes ?

Les Français sont ambigus et contradictoires. Ils aspirent au changement car ils ont les réflexes d’une ancienne grande puissance qui ne veut pas abdiquer. Ils entendent rester dans le peloton de tête - de ce point de vue, le discours de Sarkozy a rencontré un écho profond dans la société. Mais ils veulent aussi rester ce qu’ils sont. Voilà pourquoi ils sont si réactifs dès qu’ils ont l’impression que l’on risque de toucher à ce qui constitue le cœur de l’expérience politique française. Dans le discours, Sarkozy a essayé de jouer sur les deux tableaux, en annonçant le changement tout en invoquant la France éternelle, de Jeanne d’Arc à Guy Môquet. Mais dans la pratique, ce grand écart s’est révélé intenable. L’histoire a disparu en route, au profit d’un changement souvent très ignorant des réalités françaises.

Le sarkozysme incarne-t-il une étape de la crise de la démocratie telle que vous l’analysez dans vos essais ?

Ce serait lui faire beaucoup d’honneur que d’y voir un phénomène historique significatif en lui-même. Le sarkozysme n’est qu’une conjoncture française, mais qui met néanmoins en lumière un élément sous-jacent de la crise de la démocratie : une volonté de pouvoir dont l’effet est une dévitalisation du pouvoir. Typique, par exemple, est la place démesurée donnée par le chef de l’Etat à la communication, comme si agir sur les images était transformer la réalité. Caractéristique, également, son impossibilité de faire le départ entre l’homme privé et sa fonction publique. Or une telle distinction, c’est l’âme même de la démocratie, où le pouvoir est dans les institutions, non dans les personnes. Chez Nicolas Sarkozy, la dimension institutionnelle est absente. L’autorité qui compte, à ses yeux, c’est la sienne, pas celle de l’Etat, dont il n’a pas le souci. Par ce trait, il incarne à merveille ce que j’appelle «la démocratie du privé», qui est un processus de désarticulation de la démocratie sous l’effet de l’individualisation et de la privatisation du monde.

L’idée que nous sommes passés d’une «démocratie du public» à une «démocratie du privé» est au cœur de votre réflexion actuelle. Qu’entendez-vous par là ?

Pour le dire abruptement, la question est de savoir si le collectif jouit d’une existence indépendante de celle des êtres qui le composent. Si oui, on peut lui donner une expression institutionnelle, une expression publique, distincte de l’expression privée des individus, qui ont par ailleurs voix au chapitre. Historiquement, c’est cette idée qui a longtemps prévalu. Elle a eu de beaux jours politiques, spécialement en France, où elle a constitué l’âme de l’Etat républicain. Dans ce cadre, les libertés individuelles sont supposées s’accomplir par la participation à la chose publique. Parallèlement, il est vrai, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis avaient développé des modèles plaçant l’accent davantage sur les libertés individuelles que sur la chose publique, sans ignorer le rôle de celle-ci. Mais depuis une trentaine d’années, cette tradition anglo-américaine s’est radicalisée et diffusée partout. La pente du monde est de remettre en question toutes les formes de collectivisation de l’existence politique, au nom de l’idée qu’il n’existe que les individus réels et leurs intérêts particuliers, et que c’est de leur interaction que doivent surgir les compromis acceptables pour tout le monde. C’est ce qu’on appelle le néolibéralisme. La chose publique, dans ce cadre, n’a plus de consistance par elle-même, elle n’est plus que l’instrument des demandes émanées de la sphère privée. Les institutions collectives sont discréditées, parce qu’elles sont toujours suspectes de ne pas prendre en compte les personnes concrètes. Sous couvert des mêmes règles, l’esprit du fonctionnement de la démocratie a complètement changé.

Néanmoins, la démocratie américaine se caractérise par des valeurs collectives très fortes : patriotisme et religion.

En effet. C’est, pour le coup, l’exception américaine : les Etats-Unis sont dotés d’une identité politique très forte et le pays où les libertés privées ont le plus de place. C’est fonction de la foi dans la «destinée manifeste» de l’Amérique et dans son rôle de puissance à l’échelle du monde. L’Etat-nation américain est projeté vers l’extérieur ; il n’organise pas la société à l’intérieur. C’est ce qui fait que la démocratie du privé coexiste avec une dimension publique axée sur le rayonnement des Etats-Unis. Les Européens, au contraire, ont abandonné toute politique de puissance et, dans leur démocratie sociale, le poids des institutions publiques est grand. Aussi chez eux l’irruption de la démocratie du privé est-elle très perturbatrice pour l’identité collective. Ils ne savent plus très bien où ils en sont. Autant, pour les Américains, la démocratie du privé se complète par un Etat tourné vers le dehors, autant, pour les Européens et en particulier pour les Français, elle se solde par l’incapacité d’assumer un héritage historique dont ils ne savent plus trop que faire, tout en y restant attachés.

La «démocratie du privé» s’accompagne d’une «oligarchisation» de la société, dites-vous, mais aussi d’une montée en puissance de la protestation. N’est-ce pas contradictoire ?

La démocratie du privé, ce n’est pas du tout le repli des gens dans leur foyer, le cocooning, la passivité : c’est l’alignement de chacun sur son intérêt d’individu et la légitimation absolue de celui-ci, donc de sa défense inconditionnelle. C’est dire que l’effervescence protestataire, la revendication et le contentieux sont garantis d’avance. Mais ces revendications campent sur leur particularité, en se plaçant à l’extérieur du politique. La protestation s’en remet en fait aux responsables et leur dit : «Voilà ce que nous voulons, débrouillez-vous pour trouver les moyens». Le mot-clé est résister. Mais si vous ne formulez pas de propositions, si vous ne prenez pas en charge le point de vue de l’ensemble où votre réclamation doit s’inscrire, ce sont les gouvernants qui le font pour vous. Le problème de cette formule, c’est qu’elle ne permet pas de remonter au collectif. Elle exige, mais délègue aux hommes politiques le soin de décider : ainsi, la protestation secrète naturellement l’oligarchisation. Du reste, le personnel politique s’accommode de la situation. Il a compris que si elle est parfois inconfortable, elle lui laisse les cartes bien en main. Le divorce entre le haut et le bas se creuse. Car les citoyens continuent dans le même temps d’aspirer à une grande politique. On a vu à l’occasion de la dernière élection présidentielle que leur attente était intacte. Les électeurs aspirent à une puissance du politique que toute leur pratique au quotidien a pour effet de rendre impossible. D’où le sentiment général d’une dépossession incompréhensible.

Comment s’en sort-on ?

D’une part, il ne faut pas sous-estimer la prise de conscience par les individus des contradictions et de l’impasse dans laquelle ils sont. Les gens ne sont pas stupides, ils voient bien que quelque chose coince. Car cette équation impossible, on la trouve à tous les niveaux : dans la famille, à l’école, dans l’entreprise. L’évolution du syndicalisme, par exemple, est significative. Mais ce mouvement des mentalités ne suffit pas à faire bouger les choses à lui seul. C’est la rencontre avec les circonstances historiques qui précipite le changement, dans les moments de choix qui font apparaître la nécessité de reprendre en compte le collectif. En la matière, nous avons tout ce qu’il nous faut sous la main : la crise financière, le défi écologique, le blocage européen, le déséquilibre des systèmes sociaux. L’art du politique, c’est de conjuguer ces deux forces.

La crise financière est-elle un autre symptôme de la «démocratie du privé» ?

Elle est le symptôme économique de la dérive politique entraînée par la confiance illusoire dans l’autorégulation des intérêts individuels. Elle fait apparaître la vacuité de ce rêve d’agrégation automatique. La vérité est qu’un monde mondialisé a plus besoin que tout autre d’une organisation. Savoir laquelle va nécessiter du temps, mais tel est le but qu’il faut se fixer et c’est dans une telle optique qu’on peut par exemple parler de protection économique.

Est-ce le nouveau rôle historique de la gauche ?

Autant je ne vois pas de raison de désespérer à long terme, autant je suis obligé de constater, en ce qui concerne la France actuelle, que nous sommes au plus bas. Nous payons le prix du mitterrandisme, qui a été le visage sous lequel la France a défini pour longtemps son attitude face à ce changement de cap du monde. Elle a commencé par le refuser, sous Giscard. Puis, dans les années 80, tandis que le Royaume-Uni avait élu Thatcher et les Etats-Unis Reagan, est arrivé Mitterrand, qui a installé une culture de la dénégation, consistant à s’adapter à la nouvelle donne, mais sans le dire. Les socialistes français en sont toujours là : ils ont la particularité d’être à la fois très rigides doctrinalement et très cyniques en pratique. A leur décharge, il faut dire que Mitterrand avait cru trouver une échappatoire en jouant l’Europe : puisque le modèle français était condamné, il a voulu construire à un échelon européen une nouvelle synthèse du libéralisme et de l’Etat fort. Faire une Europe française, en somme. Dans les années 80, le projet européen a été le grand espoir de la société française. Mais il se trouve que le projet a échoué : l’Europe telle qu’elle s’est développée n’est pas française, on peut même dire qu’elle est anti-française, tout simplement parce qu’elle reflète la réalité d’un monde qui va spontanément à rebours de notre héritage historique. Le désenchantement qui s’en est suivi vis-à-vis de l’Europe a été spectaculaire. Depuis, personne n’a fait l’effort de reprendre le problème à la racine. Jospin, qui semblait l’avoir compris, n’a pas osé. Ségolène Royal est passée à côté. La panne est complète.

Les deux grands courants concurrents du PS - le pôle écologiste et libertaire et la gauche radicale - vous semblent-ils porteurs de promesses ?

Non, pas la moindre, hélas ! La gauche radicale est une rémanence de notre histoire. C’est la Révolution française qui revient, par-delà le communisme. Besancenot nous propose un néo-hébertisme et Badiou nous réinvente Babeuf et sa Conjuration des Egaux. Tout cela bouillonne, exprime des choses profondes, mais n’offre guère de perspectives opératoires. Quant à la liste commune Cohn-Bendit-José Bové, la contradiction de la nouvelle démocratie individualiste du privé y atteint son sommet. Il n’y a vraiment que sur le papier que le souci écologique et la radicalisation des droits personnels collent ensemble !

Critiquer les droits de l’homme, n’est-ce pas encourager des formes politiques autoritaires ?

Je ne critique pas les droits de l’homme, je critique l’usage qu’on en fait, ce qui est fort différent. Ils sont indiscutables dans leur ordre, mais ne fournissent en rien une réponse générale, immédiate et totale aux questions qui nous sont posées. Ils établissent la base de légitimité du pouvoir dans nos sociétés ; ils énoncent ce qu’on ne doit en aucun cas violer et ce vers quoi nos sociétés doivent tendre, en tant que sociétés d’individus. Mais en aucun cas ils ne définissent le système politique ou l’organisation sociale qui permettront d’assurer leur développement. Les droits de l’homme sont le fondement et le but, pas le moyen. Ils ne nous dispensent pas, comme l’illusion du moment le fait croire, de réfléchir sur l’ordre politique et sur le fonctionnement de la société en tant que tels. Si l’idée de socialisme doit retrouver un sens vivant, c’est du côté de cette conjonction qu’il faut le chercher.

Recueilli par ÉRIC AESCHIMANN et LAURENT JOFFRIN

mardi, 26 mai 2009

A la conquête de l'opinion numérique...

 

 

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A la conquête de l’opinion numérique...

Par Olivier Carer

Altermedia

Internet ne doit pas être simplement considéré comme un endroit à la mode où l’on flâne sans but. Parce que ce territoire virtuel s’est construit autour de valeurs qui nous sont proches et qu’il est ouvert aux plus entreprenants, nous pouvons nous y faire entendre. Parce que l’opinion numérique est plus proche du pays réel que l’opinion publique fabriquée, nos idées ont toutes les chances d’y trouver de l’écho.

 

Tout le monde connait « l’opinion publique », opinion supra-individuelle qui serait l’agrégat des représentations, valeurs ou croyances partagées dans la population. Toute proportion gardée, parce qu’elle induit une sorte d’âme collective, elle s’apparente à l’unité mentale que Gustave Le Bon voulait voir dans le phénomène des foules.

 

L’opinion publique est avant tout une opinion contrôlée

 

Dans les faits, la notion d’opinion publique est aujourd’hui une construction doublement artificielle :

 

- D’une part, parce que cette opinion commune ne se forge plus de manière spontanée mais se construit selon de savantes manipulations qu’Edward Bernays, le père de la propagande politique moderne, avait décrites et même théorisées. L’encadrement médiatique et les officines publiques ou privées de la pensée unique sont à la manœuvre.

 

- D’autre part, parce que son expression est confisquée par les éditorialistes ou les sondagiers qui s’en font les porte-parole pour canaliser une spontanéité qui pourrait être dangereuse. Tous les manipulateurs d’opinion savent qu’au sein des foules, le sentiment peut être contagieux et qu’à l’instar des phénomènes de panique, le mimétisme l’emporte sur l’indépendance intellectuelle.

 

Or, à côté de cette opinion publique, souvent bêlante, se construit en silence une opinion, plus autonome, plus organisée, plus critique mais aussi et surtout moins docile envers les puissances installées ; cette opinion qui se construit de manière quasi dissidente sur un réseau social non encore contrôlé, c’est l’opinion numérique.

 

Un nouveau monde : une société post journalistique

 

L’écriture a fait sortir l’humanité de la préhistoire en 3300 avant Jésus-Christ. Gutenberg l’a fait entrer dans l’âge du papier, celui de la connaissance, celui de la diffusion par le livre. Avec Internet, le monde bascule dans un âge nouveau, celui de l’immatériel. La technique du « copier-coller » nous propulse dans l’ère de l’abondance, dans laquelle les denrées culturelles, informatives ou cognitives sont duplicables à l’infini, gratuitement, sans effort. Internet a aboli non seulement le support mais également le transport et, parce qu’il fonctionne dans l’immédiateté, le temps.

 

Info low cost : le journaliste professionnel a perdu le monopole de l’information et du décryptage

 

Le blogueur, devenu pigiste quotidien, sonne la fin de la confiscation du décryptage de l’information par les experts et les éditorialistes de la bien-pensance. Mieux, le monopole de l’information qui ressortait du privilège exclusif de la caste journalistique vole en éclat ; aujourd’hui, le moindre témoin d’un événement dégaine son téléphone portable et devient, en une seconde, un envoyé spécial du web. En plus de la défiance légitime attachée à une presse servile et arrogante, les journaux agonisent sous le poids de leur lourdeur, de leur coût ou de leur manque de réactivité. Même si ses orphelins ne veulent pas encore se l’avouer, Gutenberg est vraiment mort ; or, - et c’est pour nous l’important - derrière la fin de cette équation économique qui emporte dans son sillage les médias audiovisuels, se profile progressivement l’effacement des moyens traditionnels de contrôle des masses.

 

Lorsque l’opinion numérique impose sa loi

 

Deux exemples, parmi d’autres, tirés de l’actualité récente corroborent ce constat :

- L’affaire de l’agression du bus est, pour notre famille politique, quasiment historique. Pour la première fois, un site nationaliste, en l’occurrence l’excellent FdeSouche, sans autres moyens que le talent et le courage de ses animateurs, aura brisé le mur de la censure ; s’appuyant sur le « buzz » c’est-à-dire l’opinion numérique, il aura imposé au Système une information qu’il voulait taire et aux rédactions télévisées un des titres du 20 heures.

- Le deuxième exemple est tiré du cafouillage parlementaire lors de l’adoption de la loi Hadopi. Son simple déroulement prouve la puissance du net. Personne n’a, en effet, osé avouer que la désertion des députés UMP et de leur président de groupe lors du débat et du premier vote était liée à l’incroyable pression de la blogosphère sur les parlementaires de base. Il aura fallu toute l’autorité de l’Elysée pour empêcher la déconfiture finale.

 

Notre chance : l’opinion numérique se rapproche du pays réel

 

Nous devons en avoir conscience. En lieu et place de la notion galvaudée « d’opinion publique », internet fait émerger une « opinion numérique », plus active et organisée. Sorte de conscience collective, elle véhicule une défiance instinctive à l’égard du système et nous est donc potentiellement favorable. Dans la société libéralo-marchande de Nicolas Sarkozy, ses valeurs de partage (liberté de diffusion des idées et des contenus, sens collectif), d’horizontalité des rapports (refus des experts officiels) ou de gratuité (bénévolat) sont profondément subversives et déstabilisatrices pour l’ordre établi. C’est dans ce contexte que doit se comprendre la loi Hadopi et toutes les manœuvres de contrôle d’internet.

 

C’est pourquoi, sans abandonner l’action de terrain, qui reste primordiale, chacun de nous doit avoir à cœur d’apporter sa contribution à la conquête numérique. Une course de vitesse est engagée.

M. Bardèche: définition du technocrate

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Maurice Bardèche: définition du technocrate

“Comme chacun le sait, le technocrate est un spécialiste, et on ne lui demande pas plus de qualités morales éminentes qu’à un cardiologue ou un oto-rhino. Il sert comme eux à rédiger des ordonnances. Il est expressément invité à ne pas avoir de caractère, mais seulement de l’autorité. Il est un technicien des problèmes posés par les collectivités anonymes de producteurs-consommateurs et il doit régler leurs mouvements comme un ingénieur. Il peut avoir des idées, il importe même qu’il en ait. Mais il abhorre par formation tout ce qui dépasse, tout ce qui ne rentre pas dans les normes, tout ce qui ne s’inscrit pas docilement dans les statistiques. Son arme est la dissuasion, mot feutré, récemment introduit dans notre vocabulaire, et qui évoque très discrètement le systèmes des tubulures dans lequel nous sommes priés de circuler. Ce gestionnaire est hostile à toute brutalité, et également fermé à toute supériorité qui n’est pas strictement technique. Il connaît des contribuables, des assujettis, les hommes ne lui apparaissent que sous leur définition administrative. Il n’imagine pas qu’ils puissent être autre chose. Il ne demande jamais à quoi servent finalement les ordonnances qu’il prescrit. Il est soumis, non à des hommes, mais à un système qu’il s’interdit de juger. Ces qualités développent le sang-froid. Le technocrate est calme et objectif. Il se soucie aussi peu des destructions qu’il accomplit que le menuisier des copeaux que fait tomber sa varlope. Ce n’est pas de la cruauté mentale, c’est simplement absence d’imagination. Cette aristocratie technique est désincarnée, hautement cérébrale. Ce sont les grand-prêtres de l’ordinateur, messies envoyés sur la terre pour prêcher l’obéissance et la prospérité, et consubstantiellement au Père qui s’appelle le Cerveau et qui régnera sur les hommes profanant la parole magnifique, pendant des siècles et des siècles.”

Maurice BARDECHE, Sparte et les sudistes, Montrouge, Pythéas, 1994, p. 37-38.

lundi, 25 mai 2009

La situation est-elle prérévolutionnaire?

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La situation est-elle prérévolutionnaire ?

Six thèses sur les bouleversements politiques

1/ Contrairement à ce que soutiennent les historiens et les sociologues, les bouleversements politiques, et notamment les révolutions, sont imprévisibles :

Il faut se méfier en effet de la tendance contemporaine à rationaliser a postériori des évènements, pour y plaquer une grille de lecture idéologique et souvent moralisante, sinon religieuse : l’histoire est alors perçue comme fatalité ou comme châtiment des « fautes » commises par ceux qui perdent le pouvoir. On se souvient de l’ouvrage de Tocqueville L’Ancien Régime et la Révolution, emblématique du genre, puisque son auteur conclut que c’est la monarchie centralisatrice qui est responsable de la Révolution.

Mais cette approche idéologique sert en général surtout à légitimer le nouveau pouvoir issu de ces mêmes bouleversements et accessoirement à valoriser auprès des nouveaux maîtres, celui qui se livre à cette lecture rétrospective de l’histoire. Les universitaires sont passés maîtres en la matière. Ces analyses a posteriori expriment aussi la croyance dans le sens de l’histoire que des esprits « éclairés » pourraient décrypter.

En réalité très rares sont ceux qui sont capables de prévoir de tels évènements : ils sont surtout incapables de les dater. Ils ne sont en outre jamais écoutés.

L’exemple de la chute de l’URSS est éclairant : on peut certes trouver de bons auteurs qui ont annoncé sa décadence ou sa fin (comme par exemple G. Le Bon et son analyse de l’utopie) : mais personne n’a prévu exactement les circonstances ni encore moins la date où elles se sont produites. Sans parler de tous ceux qui se sont trompés quant aux modalités (ex. H. Carrère d’Encausse).

2/ Il est extrêmement rare en outre que les acteurs, sans parler des spectateurs, de ces bouleversements aient conscience de ce qui se produit vraiment :

La lecture des « journaux » rédigés par les contemporains de bouleversements politiques majeurs est éclairante sur ce plan : tels Fabrice à Waterloo, ils ne relèvent souvent que des détails insignifiants qui ne permettent pas d’avoir une vue d’ensemble de ce qui se passe vraiment. De fait comme le dit la sagesse populaire « l’histoire est comme l’herbe : on ne la voit pas pousser ». On se souvient que Lénine fait une conférence à Zurich au début de 1917 pour faire le constat que la révolution n’éclatera pas ! Quelques semaines plus tard il est à Petrograd.

En outre ces témoignages passent à côté d’un phénomène politique essentiel mis en lumière par J.Monnerot : l’hétérotélie qui fait que les acteurs politiques conduisent souvent sous le poids des circonstances des politiques contraires à leurs intentions déclarées. Bien rares sont ceux qui veulent le reconnaître. Qui aurait prévu que le Général De Gaulle serait l’artisan d’un rapprochement franco-allemand ? Certainement pas en 1940 !

3/ Les explications économiques et sociales des bouleversements politiques sont en général dénuées de fondement :

Ce type d’explications a posteriori des bouleversements révolutionnaires est réductionniste et traduit l’influence de la sociologie marxiste de l‘histoire, très en vogue depuis le XXème siècle dans l’université et la recherche : les révolutions seraient la conséquence de l’exploitation sociale, devenue insupportable aux masses (comme le fascisme en Europe serait la conséquence de la crise de 1929 et de l’inflation). Le triomphe du capitalisme en Occident conduit en outre à survaloriser les facteurs économiques par rapport à tous les autres.

Il est pourtant contestable que la pauvreté ou la misère conduise toujours à la révolte et surtout débouchent sur des bouleversements politiques durables. Ils conduisent tout autant à l’apathie et au repli sur soi. Les révolutions ont comme moteur l’espoir en un monde meilleur. La grande misère débouche tout aussi bien sur le désespoir.

En outre les pauvres sont en général fragiles : ils sont dès lors peu capables d’ébranler à eux seuls un ordre politique, encore moins un état moderne. Ces concepts sont enfin extrêmement relatifs : un chômeur aujourd’hui n’est pas dans la situation d’un chômeur dans les années 30.

On peut surtout défendre tout aussi bien le point de vue inverse : les révolutions sont plutôt le fait de ceux qui veulent préserver leur situation ou qui veulent renforcer leur position. Comme le dit l’adage « les mutineries éclatent à l’arrière, jamais au front » : c’est-à-dire qu’elles sont en général le fait de ceux qui ont peur d’aller au front.

L’analyse de l’origine sociale des principaux acteurs révolutionnaires du XVIIIème au XXème siècle est d’ailleurs éclairante : ils étaient avant tout originaires de la petite ou moyenne bourgeoisie provinciale et non pas des miséreux et très rarement des « travailleurs manuels ».

Beaucoup de bouleversements politiques ont été initiés en réalité par l’action de certaines élites à l’encontre des aristocraties en place, plus que par une révolte populaire : par exemple la révolution anglaise a été provoquée par la petite noblesse soucieuse de préserver ses libertés locales face au pouvoir royal. Et ce sont les libéraux qui ont conduit par leurs intrigues le tsar, l’empereur d’Allemagne ou le roi d’Espagne à l’abdication, ouvrant la voie à la révolution. La Révolution française aurait-elle eu lieu si Louis XVI et la Cour n’avaient pas été si sensibles aux Lumières ? Ne vivons nous pas justement aujourd’hui la « révolte des élites » en Occident, selon l’expression de Ch .Lasch ? Le poisson ne pourrit-il pas d’abord « par la tête » ?

4/ Les révolutions frappent tout aussi bien les régimes et les Etats réputés jusqu’alors solides et forts, que les plus instables:

C’est l’autre aspect de leur caractère imprévisible.
En Europe tous les pays ont connu des révolutions politiques plus ou moins violentes. Les plus brutales ont touchées des Etats considérés alors comme puissants: France en 1789, Russie en 1917, Allemagne en 1919.
Le phénomène révolutionnaire a pour caractéristique en effet l’implosion rapide de tout le système institutionnel : les régiments se mutinent, la police disparaît du jour au lendemain, les fonctionnaires n’obéissent plus, les usines s’arrêtent, les amis d’hier se haïssent.
Mais jusqu’au moment fatal rien ne le laissait vraiment prévoir. Ce qui prouve que les révolutions ont avant tout des causes psychologiques et morales.
A l’époque contemporaine la France a connu un temps ce phénomène étrange : en mai 1968, avant le retour de Baden-Baden de De Gaulle, qui a justement réussi à interrompre le processus d’implosion.

5/ C’est la combinaison catastrophique de multiples causes qui conduit aux révolutions :

Le propre d’une catastrophe est de combiner différentes causes normalement indépendantes mais qui brusquement produisent des effets convergents et inattendus.

Le Titanic coule sans secours parce que le commandant veut naviguer vite de nuit (sans radar..) dans une zone d’icebergs, parce qu’un iceberg est de forme biscornue, parce que toutes les cloisons étanches ne sont pas posées et parce qu’aucun bateau alentours n’interprète correctement les signaux de détresse qu’il émet.

Il en va de même des bouleversements politiques qui sont assimilables à des catastrophes. Ils ne peuvent se réduire à une cause unique.

Car l’accumulation de petites causes peut produire de grands effets comme le savait la sagesse populaire et comme le redécouvre la théorie du chaos. C’est aussi ce qui rend difficile les prévisions politiques car les régimes sont des systèmes complexes.

Plus grande la complexité, plus élevé le risque de conjonction imprévue.
Souvent un évènement joue à lui seul le rôle de catalyseur de la crise politique : dans l’histoire il s’agit souvent d’un évènement extérieur (défaite militaire notamment). Il est intéressant de relever d’ailleurs que les républiques en France ont toutes chuté à l’occasion de conflits extérieurs.

6/ Malgré les apparences, on ne doit donc pas exclure l’occurrence de bouleversements politiques majeurs dans les sociétés occidentales d’aujourd’hui :

Les sociétés occidentales modernes sont certes dotées d’appareils de répression et de sidération de l’opinion – en particulier grâce au pouvoir médiatique – formidables et qui paraissent sans précédent dans l’histoire. Les citoyens sont en général réduits au silence (« majorités silencieuses ») car ces sociétés sont devenues de puissantes oligarchies.

Mais ne disait-on pas la même chose de tous les puissants empires qui se sont pourtant effondrés ?

On ne doit pas oublier en outre que ces sociétés sont de plus en plus hétérogènes, en particulier du fait de l’immigration de masse, donc plus complexes. La domination des valeurs marchandes a conduit en outre à l’atomisation sociale. Sous l’influence des médias ces sociétés deviennent composées de foules psychologiques, aux réactions sentimentales imprévisibles.

Pour l’instant le Système qui s’est imposé en Occident paraît inexpugnable. Mais pour combien de temps ?

Michel Geoffroy
07/05/09

Polémia


 

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jeudi, 21 mai 2009

La crisi del dono - Intervista Claudio Risé

La crisi del dono.
Intervista Claudio Risé

di Susanna Dolci - 07/05/2009

Fonte: mirorenzaglia [scheda fonte]

crisidono

 

È, Claudio Risé [nella foto sotto], uno degli psicanalisti italiani di ampia fama nazionale ed internazionale. Docente di Scienze Sociali alle Università di Trieste-Gorizia, Insubria (Varese) e Bicocca (Milano), da oltre trent’anni studia l’uomo e la donna ovvero il maschile ed il femminile, nelle loro molteplici sfaccettature. La vita, la famiglia e la genitorialità con particolare attenzione alla figura paterna intesa come assenza o come “mestiere” difficile. I suoi numerosi libri sono stati tradotti in molti paesi europei ed in Brasile. Un spazio internet a disposizione del suo pubblico: www.claudio-rise.it. Esce in questi giorni per le Edizioni San Paolo La crisi del dono. La nascita e il no alla vita. È questo suo nuovo andare in riflessione, una discesa verso le «radici del pensiero che rifiuta la nascita». Un’attenzione di saggia misura sull’aborto inteso come quotidianità di azione da cronaca e da statistica, di battaglia politica, di leggi, di polemica, di giudizi positivi e negativi, di “crimine” addirittura, di orrori legalizzati od illegali e di tanto altro da aggiungere. O da sottrarre… Dipende, sempre, dai punti di vista. Ma il libro non è solo questo… ed è già molto. “La crisi del dono” è una sorta di Summa che non tralascia nulla perché niente vuole lasciare nel silenzio. Tutti gli attori legati alla venuta al mondo vengono chiamati in causa. Siano essi uomini, donne, bambini stessi e dunque padri, madri e figli, miti e mitologie, cambiamento e rinnovamenti, sacro e profano. Spetta, alfine ed in piena libertà, ad ogni singolo lettore decidere a quale cammino interpretativo accingersi. Che oscilla, in presenza, dagli albori temporali come il classico pendolo foucaultiano o la inimitabile quanto terribile spada di Damocle. Tutto sempre e come eterna scelta tra la vita e la morte. Un sentito ringraziamento a Claudio Risé per la sua piena e gentile disponibilità alla realizzazione dell’intervista che segue, nonostante i suoi molteplici impegni.

È stato appena editato dalle Edizioni San Paolo. È il suo “La crisi del dono. La nascita ed il no alla vita”. Lei ci parla di: Mito, Nascita, Figlicidio, Figli, Uomo, Donna, Aborto… E tanto ancora…  Se dovesse definire il centro di questo libro, cosa direbbe?

È un libro sulla nascita, come evento fisico, psichico e simbolico, sul suo significato e sulle resistenze che suscita. Molto spesso non la vogliamo (non solo quella fisica), perché ci chiede sempre di cambiare, trasformarci, ri/nascere.

 

Cos’è veramente l’aborto?

La scelta di evitare una nuova nascita sopprimendo il nascituro. Al di là delle considerazioni morali (non spetta a me giudicare), è una scelta fortemente conservatrice, contro il cambiamento. Dal punto di vista psicologico esprime un’avversione al futuro, alla trasformazione che regge il mondo, cui oppone il potere dell’Io individuale, quello che decide, appunto, l’aborto.

Tra abortire e dare in adozione c’è da sempre in mezzo una montagna invalicabile? Perché?

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È invece valicabile; molti la attraversano. Occorre rinunciare al possesso del figlio. Che del resto nessuno ha, perché il figlio appartiene a sé stesso. E, per la persona religiosa, a Dio.

Com’è il mondo in cui viviamo? Cito alcuni termini ricorrenti nei suoi studi e libri: neopaganesimo, narcisismo, droghe, guerra, terrorismo, scontro di etnie ma anche felicità come dono di sé, l’altro. Incubi quotidiani, difetti e pregi di questa nostra esile esistenza. Come affrontare al meglio o meno peggio tutto ciò?

Io racconto solo la psiche delle persone che vedo, la quale a sua volta parla del mondo in cui vivono. Un buon metodo per star bene, conosciuto da sempre,  potrebbe essere quello di cercare di essere se stessi, senza continuamente conformarsi, o dipendere dall’approvazione degli altri. Ha dei prezzi, ma ci si guadagna il vivere la propria vita, e non quella altrui, o del sistema  di comunicazione dominante.

 

Uomo? Uomo selvatico? O Maschio? Identità maschile tra essere io e/od altro da proprio sé medesimo? Tra Don Giovanni e Padre?

Consiglio di evitare ogni etichetta, comprese quelle sopra elencate (anche se prese dai miei libri) ed ascoltare chi si è. Che è sempre dentro, non fuori di noi.

 

La Donna? Mi verrebbe di aggiungere “è mobile….” ma forse è meglio “selvatica”? E d’ingegno? A metà tra forza e mistero dell’eterno archetipo dell’essere femminile? La Grande Madre, terribile eppur generosa?

Idem. Ognuna scopra sé stessa, e la interpreti. Il resto riguarda le altre, non te.

 

Lei parla della figura del Padre come dono, assenza e mestiere? Chi è un padre?

Un uomo che genera con una donna un figlio, lo protegge e aiuta a crescere quando è piccolo, e poi a diventare se stesso quando è più grande. Una figura elementare, che la natura conosce da sempre.

 

La natura intesa come mondo selvatico? Ancora respira nel suo esistere?

Sì. Tra le prime leggi firmate dal nuovo Presidente degli Stati Uniti ce n’è una che estende enormemente le aree vincolate a Wilderness, cioè  destinate a rimanere incontaminate, già molto estese in quel Paese. E’ una questione di grande attualità, e futuro. Ma naturalmente la Wilderness è ovunque, a cominciare da dentro di noi. Anche qui, si tratta di ascoltarla, e onorarla. E goderla.

 

Dove vanno i giovani?

Bisognerebbe chiederlo a loro. Io sono vecchissimo.

 

La comunità vivente ha ancora un suo specifico perché ben definito? È ancora dono e sacrificio?

Senza l’uno, e l’altro, non esiste comunità. Al massimo società, associazioni, club etc.

 

Famiglia VS divorzio. Anche qui quali i pregi, le colpe e loro effetti collaterali

La famiglia può fallire, così come un bimbo può essere soppresso. Basta si sappia che è un disastro, e non  si spacci divorzio ed aborto per cose da niente.

 

A conclusione. Siamo ancora in grado di trasformarci e rinnovarci? O restiamo in una immobile opposizione che nega l’anelito alla vita?

Non siamo noi a scegliere. È la natura a determinare che tutto, nell’essere umano, cambia continuamente nel corso della vita, le sue cellule, i suoi neuroni, i suoi sentimenti, il mondo intorno a lui. Certo possiamo optare per la sclerosi, mummificarci a vent’anni; molti lo fanno. Sono di solito pazzi, e piuttosto infelici, ma si può fare anche così. Però è meglio seguire, con spirito di avventura e divertimento, il misterioso  e sorprendente itinerario che la vita ci propone.


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lundi, 18 mai 2009

Money Talks

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http://www.theoccidentalobserver.net/authors/Sunic-Money.html#TS
 

Money Talks

Tom Sunic

Never has money been so important in human relations. Never has it so much affected the destiny of so many Americans and Europeans. Today money has become a civil religion that makes it the centerpiece of discourse in all cultures and subcultures. At European and American cafes, on the Champs Élysées, or on Sunset Boulevard, at concert halls, and even in parliaments, one hears and smells its verbal derivatives such as “moulah,” “dough,” “fric,” “Kohle,” “pognon.”  It is a language understood by all. In all segments of their lives Western citizens invariably talk about money and what money can buy. The great respite may come with the current financial crisis, which is finally undoing the liberal system with all its conventional wisdoms and lies. The ongoing economic depression may be the sign that the reign of money and the dictatorship of well-being are coming to an end. 

Sounds familiar? No, it does not.  In ancient European traditions money and commerce were looked down upon and at times these two activities were in principle forbidden to Europeans. Merchants were often foreigners and considered second class citizens.

The famous English poet and novelist D. H. Lawrence — a "revolutionary nationalist" — talks about “money madness” in his collection of poems Pansies. His poem “Kill money” summarizes best this facet of 20th-century mores: Kill money/put money out of existence/It is a perverted instinct/A hidden thought /which rots the brain, the blood, the bones, the stones, the soul.

Similar views were held by the long forgotten American Southern agrarians in the 30’s, who viciously attacked American money madness and the belief in progress. They had dark premonitions about the future of America. As noted by John Crowe Ransom, “Along with the gospel of progress goes the gospel of service. Americans are still dreaming the materialistic dreams of their youth.” And further he writes: “The concept of Progress is the concept of man’s increasing command, and eventually a perfect command over the forces of nature: a concept which enhances too readily our conceit and brutalizes our life.” 

Thousands of book titles and thousands of poems from antiquity all the way to early modernity bear witness to a tradition of deep revulsion Europeans had for money and merchants. Charles Dickens’ description of the character Fagin the Jew in his novel Oliver Twist may be soon cut out from the mandatory school curriculum. Fagin’s physical repulsiveness, his strange name, and most of all his Jewish identity do not square with modern ukases on ethnic and diversity training in American schools. The crook Fagin illustrates boundless human greed when he sings to himself and his young  captive boys: “In this life, one thing counts / In the bank, large amounts / I'm afraid these don't grow on trees, / You've got to pick-a-pocket or two / You've got to pick-a-pocket or two, boys, / You've got to pick-a-pocket or two.”

Already Ezra Pound, a connoisseur of the English language and a visionary on the methods of usury, and his contemporary,  Norwegian Nobel prize winner Knut Hamsun, have disappeared from library shelves. Their fault? They critically examined the crisis of financial capitalism, or what we call more euphemistically today “global recession” and the main movers and shakers behind it. 

In medieval times, money and the merchant class were social outcasts solely needed to run the economy of a country. Yet today they have morphed into role models of the West represented by a slick and successful banker dressed in an Armani suit and sporting a broad smile on his face. What a change from traditional Europe in which an intelligent man was destined for priesthood, sainthood, or a military career!

It is with the rising tide of modernity that the value system began to change. Even nowadays the word ‘merchant’ in the French and the German languages (marchand, Händler) has a slightly pejorative meaning, associated with a foreigner, prototypically a Jew. The early Catholic Church had an ambiguous attitude toward money — and toward Jews. Well known are St. Luke’s parables (16:19–31) that it “is easier for a camel to go thru the eye of a needle than for a rich man to enter the kingdom of heaven.”

But the Church chose a less pious way to power. In 1179, the Third Lateran Council forbade Jews from living in Christian communities and exiled them to ghettos — with full rights to practice usury and tax collecting. To a large extent the Church, while providing the best shelter for Jews against frequent bouts of popular anti-Jewish anger, also greatly amassed wealth — courtesy of Jewish tax collectors.

The father of the Enlightenment, the 18th-century French philosopher Voltaire, is often quoted as a first spokesman of tolerance and human rights in Western civilization. But it is often forgotten that Voltaire was also an unabashed anti-Semite. Voltaire’s critical remarks about Jews and their love for money were recently expunged from his books, or simply not translated. But some still thrive such as “always superstitious and greedy for the good of others, always barbarous, crawling when in misfortune and insolent in prosperity, that is what the Jews were in the eyes of the Greeks and Romans..”  (Essais sur les mœurs

The ancient European ruling class certainly had its share of corruption and greed. But in principle, until the Enlightenment, the social roles of money and merchants were subjugated to the role of the prince and power politics. Until then, the entire value system had been based on spiritual transcendence and not on economic growth — at least in its appearance. In ancient Greece, King Midas who was a kind man, could not resist the temptation of turning everything into gold with his magic fingers, until he ruined his family, turned water into undrinkable metal, and his face assumed the shape of a donkey. King Croesus went berserk after amassing so much wealth that he could not devote his time and his thoughts to the impending war with the Persians.

In the ancient European tradition, revulsion against money pervades the sagas and the old popular legends, teaching everybody that piety prospers over prosperity. Material wealth brings disaster.

Today, by contrast, official advocacy of frugality and modesty is perceived as a sign of the early stage of lunacy. If a well-educated and well-cultivated man comes along and starts preaching modesty or rejects honoraria for his work, he is considered a failure, a person who does not respect his own worth. How on earth can some well-read and well-bread person offer his services for free?  How on earth can a well-educated man refuse using his mental resources to generate the almighty dollar? The answer is not difficult to discover. In capitalism everything has its price, but nothing has value.  

The modern liberal capitalist system is a deeply inhuman system, based on fraudulent teaching that everybody is equal in economic competition. In reality though, it rewards only those whose skills and talents happen to be marketable. Those rare Whites who decide to retain some vestiges of old European traditions are squarely pronounced incompetent.  Liberal capitalism both in America and in Europe has turned all humans into perishable commodities.

Nobody summarized this better than the Italian philosopher Julius Evola, another revolutionary nationalist who wrote: “Facing the classical dilemma 'your money or your life,' the bourgeois will answer: 'Take my life but leave me my money.'”

Greed, passionate greed eclipses all elements of human decency. Until relatively recently avarice was laughed at and its chief protagonists were considered immoral people, so well represented in Molière’s comedy L’Avare. Today the greedier the better: The money maker is the ultimate role model.  

Both East and West participate in this ethic of greed. The richest people in post-communist Eastern Europe are former communist hacks who converted themselves in a twinkle of an eye from disciples of Marx into acolytes of Milton Friedman and Friedrich Hayek. Finance capitalism provides the perception of limitless possibility of how to get rich out of the blue. This is a typical Bernie Madoff syndrome, namely that affluence can be created by sheer speculation. The entire banking system in Eastern Europe has been sold to foreigners over the last 10 years.  

Modern capitalism and a penchant for finance owe much to Judaism.  Werner Sombart, a German disciple of Max Weber, who can in no way be called an anti-Semite wrote in The Jews and Modern Capitalism that “money was their sole companion when they were thrust naked into the street, and their sole protector when the hand of the oppressor was heavy upon them. So they learned to love it, seeing that by its aid alone they could subdue the mighty ones of the earth. Money became the means whereby they — and through them all mankind — might wield power without themselves being strong.” 

Money changes social mores too. Young White couples put off having children until they achieve their economic dreams, while Mexicans and Blacks begin having children as impoverished teenagers, and Muslims place a high value on fertility. This is one of the main causes of our malaise, as White societies with declining fertility are inundated by highly fertile non-White populations with value systems that prize fertility over the accumulation of the accouterments of economic success.

And in this economic recession these Whites are not interested in a pay raise but rather in how to keep their job — security at all cost, even if it means working for lower wages. Neither are young job market entrants interested in saving money. Instead they live on credit in their petty little niche with their petty little pleasures and without incurring any risks.

What a difference from early American pioneers described by Jack London, who braved the vagaries of weather and who totally ignored the meaning of “hedge funds”! The attractions of money and the necessity of making money mean that everybody in our postmodern world becomes prey to the system.  

It is a fundamental mistake among many so called right wingers and racialists to assume that capitalism is the only answer to communism. Both systems are in fact similar because they preach the same religion of progress and the unfolding of earthly paradise — albeit in different gears.  But this time liberal capitalism has nobody to hide behind in order to conceal its vulgar depravity. The likely hypothesis is that the crumbling capitalist system will fall apart as a result of its own victory. One dies always from those who give him birth. 

 

Tom Sunic (http://www.tomsunic.info/; http://doctorsunic.netfirms.com/) is an author, former political science professor in the USA, translator and former Croat diplomat. He is the author of Homo americanus: Child of the Postmodern Age ( 2007

Claduio Risé: la postmodernité est une révolution conservatrice!

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Archives de "Synergies Européennes" - 1997

Claudio Risé:

 

La postmodernité est une révolution conservatrice!

 

Quel corpus idéologique succédera à la droite? Affinons notre question: comme jamais la droite ne gagne les élections, sauf en Angleterre, comme elle connaît la défaite depuis plus d'un demi-siècle en Italie, sera-t-elle éliminée à tout jamais des prochains chapitres des livres d'histoire? Cette question, nombreuses sont les revues les plus autorisées de l'établissement culturel et politique du monde occidental: depuis Foreign Affairs aux Etats-Unis, très écouté au “département d'Etat”, en passant par Theory, Culture and Society en Grande-Bretagne, l'une des revues les plus attentives aux phénomènes dits “postmodernes”, jusqu'au Monde Diplomatique  de Paris, qui se pose comme l'observateur classique de la gauche en matières de politique internationale.

 

Le Monde Diplomatique  se préoccupe surtout de “la droite à la conquête des âmes”, dont la gauche semble avoir oublié de s'occuper, parce qu'elle se concentre obsessionnellement sur sa propre survie après l'écroulement du marxisme. Cette droite qui inquiète le Monde Diplomatique  est une droite dont la vitalité ne se mesure pas tant (ou pas seulement) en termes de suffrages, mais surtout en termes d'adhésions individuelles ou d'élites intellectuelles ou, plus particulièrement, de jeunes. De ce point de vue, la victoire récente des listes de droite lors des dernières élections universitaires italiennes  —même si l'on décrète dans les rangs mêmes des droites qu'il ne s'agit que d'un phénomène “qualunquiste”, “quelconque”, purement réactif, dépourvu de signification—  je crois, personnellement, qu'il s'agit d'un signal de plus, annonciateur d'une situation en mutation rapide.

 

Mais ce qui inquiète un bon nombre de politologues de gauche, ce sont les curieuses affinités qui relient la réflexion sur la postmodernité dans son ensemble au mouvement qui s'était développé dans l'Allemagne de la République de Weimar et que l'on appelle la “révolution conservatrice”, dont les principaux exposants furent Ernst Jünger, Martin Heidegger et le juriste Carl Schmitt.

 

Quels sont les indices qui nous permettent de dire que la “révolution conservatrice” est de retour? Goran Dahl, professeur de sociologie à l'Université de Lund en Suède, vient de consacrer un long essai sur cette question dans la revue Theory, Culture and Society. L'un des principaux indices permettant de poser l'analogie “révolution conservatrice”/“postmodernité” est la valorisation accordée à la technologie, perçue comme l'instrument parfait pour se libérer du “vieil ordre”, ainsi que des classes dirigeantes incapables et corrompues qui l'expriment. Du temps de la “révolution conservatrice”, Ernst Jünger avait fait du “Travailleur” le héros des nouvelles technologies destinées à changer le monde. Cette option “technique” avait grandement irrité les proto-nazis (on a trouvé la phrase suivante dans l'une de leurs publications mineures: «Jünger se rapproche de la zone des balles dans la nuque»), tout comme les sociaux-démocrates, désorientés par cette figure d'un “Travailleur” si peu marxiste, plus passionné par la guerre que par l'économie.

 

Aujourd'hui, à l'âge postmoderne, c'est quelque chose de très semblable qui se passe: la technologie et l'informatique constituent la grande ligne de partage entre ceux qui parient sur les “temps nouveaux” et sont prêts à courir des risques et à se lancer dans l'aventure, d'une part, et ceux qui, à droite mais surtout à gauche, dressent haut la bannière de la “vieille” modernité contre la postmodernité hypertechnologique. Ces partisans conservateurs et frileux de la “vieille modernité” accusent par exemple Internet de tous les maux imaginables: la guerre, l'effondrement de la religion ou la prolifération des religiosités alternatives et irrationnelles, la pédophilie, etc. Mais Internet est surtout utilisé ouvertement comme instrument pour rassembler des informations sur les mouvements affirmant les identités traditionnelles (culturelles, religieuses, nationales) et, de ce fait, proches des principes qu'avait affirmés jadis la “révolution conservatrice”.

 

Autre similitude entre postmodernité et “révolution conservatrice”, qui a surpris beaucoup de monde: les deux mouvements d'idées estiment que sont positives et fécondes les “différences” entre les peuples et les cultures, nées sur des territoires précis. Cette position conduit à une rupture voire à un choc frontal tant avec la gauche  —qui prône l'universalisme et, en paroles du moins, l'égalité absolue—  qu'avec la droite (du temps de la “révolution conservatrice”, c'était Hitler) qui est toujours plus ou moins ouvertement raciste et pour laquelle le différent est toujours inférieur. Sur le terrain des “différences”, le réveil de la révolution conservatrice acquiert une vitalité explosive face à l'égalitarisme hypocrite de la gauche car justement cet égalitarisme a été contesté en premier lieu par les peuples dominés par les empires coloniaux construits sur des fondements issus de l'idéologie progressiste! Sur cette thématique, la version postmoderne de la révolution conservatrice est bien vivante, non seulement parce qu'elle s'articule sur les notions dégagées par les principaux philosophes du siècle  —de Derrida à Foucault et à Deleuze—  mais surtout parce que ses thèses sont celles de tout le discours culturel et politique de l'ère post-coloniale, discours qui est sans doute la part la plus substantielle de la postmodernité.

 

Par l'effet de la globalisation, marque majeure de notre contemporéanité, cet héritage idéologique postcolonial trouve évidemment des alliés importants. Comme, par exemple, Kishore Mahbubani, secrétaire du ministère des affaires étrangères de Singapour, qui se plaignait, dans les colonnes de la revue Foreign Affairs,  que les Occidentaux avaient du mal à comprendre que l'Asie pouvait accepter la technologie avancée sans pour autant renoncer à ses propres traditions et à sa propre culture.

 

L'Occident, selon cet homme politique de Singapour, n'a pas vraiment accepté que “d'autres cultures ou d'autres formes d'organisation sociale pouvaient avoir une égale validité”, justement parce que “la croyance en la valeur universelle de ses propres idées peut amener à l'incapacité de reconnaître le principe de la diversité”. La domination à l'ère coloniale de l'idéologie des Lumières et de ses dérivés idéologiques constitue d'ailleurs une thématique à la fois politique et morale que l'on ne peut plus esquiver. Thématique à laquelle un philosophe attentif et sensible comme Salvatore Veca, pour ne donner qu'un exemple, a consacré des réflexions très précises et pertinentes dans son dernier essai, Dell'incertezza  (paru chez Feltrinelli). Pour Veca, la (re)-valorisation des différences induit que le lieu, le site, le topos  d'une culture, puis la culture proprement dite ainsi que les traditions enracinées prennent le pas, dans l'ère postmoderne comme dans le corpus doctrinal de la “révolution conservatrice”, la place qu'occupait le temps (plus ascétique) dans la modernité, et cela sous l'oripeau de l'idée de progrès, présente depuis le XVIIIième des Lumières jusqu'à nos jours.

 

Avec la (re)-valorisation du topos, on affirme également ipso facto la centralité de la géopolitique (comme l'a noté l'Allemand Joachim Weber), qui affirme les caractéristiques “organiques” (c'est-à-dire culturelles au sens anthropologique) des nations qui ne sont finalement que fort mal représentées par les ordres juridiques que sont les Etats classiques, issus des révolutions bourgeoises et aujourd'hui nettement en crise. Cette radicalité “révolutionnaire-conservatrice” se lie non seulement avec les exposants philosophiques de la postmodernité mais aussi avec les autres protagonistes de la pensée scientifique contemporaine tels Paul Feyerabend, dont l'idée centrale est que le savoir n'est jamais universel, mais toujours une “valeur locale, destinée à satisfaire des besoins locaux”, propres de nations, de peuples et de cultures particulières (ou de “tribus”, dirait Michel Maffesoli, autre brillant exposant de cette option particulariste suscitant tant de turbulences).

 

«Le conservatisme, pour être plus révolutionnaire que n'importe quelle forme d'“illuminisme” positiviste, n'a besoin de rien de plus que d'esprit, et de rien de moins qu'une révolution conservatrice», écrivait Thomas Mann en 1921. Voilà pourquoi, à l'ère postmoderne, qui est tout à la fois conservatrice et futuriste, on assiste au retour de la “révolution conservatrice”, nous assure Goran Dahl. Du reste, on peut observer que cette “révolution conservatrice” n'a jamais totalement disparu. Tant Jünger que Heidegger ou Schmitt ont survécu gaillardement à l'effondrement allemand de 1945 et n'ont jamais abandonné leurs idées. Immédiatement après la fin des hostilités, ils ont trouvé des disciples attentifs et des continuateurs féconds. Certes, la “modernité” est restée en selle, du moins officiellement, et continue à nier les différences, à manier sa notion de “progrès”, à imposer son mépris pour tout ce qui est “local”, pour les potentialités de la “terre”. La survivance du corpus des Jünger, Schmitt et Heidegger peut sembler marginale. Mais aujourd'hui, postmodernité et postcolonialisme ont revalorisé les traditions, les différences et les territoires et il me semble beaucoup plus difficile de faire machine arrière, alors que les plus brillants esprits du siècle ont bel et bien participé au mouvement. Mais il est vrai aussi que les tenants actuels du différencialisme sont fort différents de cette “nichée de dragons” qu'avait aimée Stephen Spender dans le Berlin qui basculait dans le nazisme et qu'il a décrite avec un esthétisme complaisant dans Un monde dans le monde. Les tenants contemporains ressemblent au contraire davantage à ces étudiants qui viennent, en Italie, de voter pour les listes de droite lors des élections universitaires. Car, comme nous l'a dit Sergio Ricossa, dans les colonnes d'Il Giornale,  le 27 avril 1997, “ils veulent connaître le monde tel qu'il est”. Ils sont moins romantiques, moins grandiloquents, que leurs prédécesseurs. C'est mieux, car notre siècle en a trop vus, des dragons...

 

Claudio RISÉ.

(article paru dans Il Giornale, 6 mai 1997).

 

jeudi, 14 mai 2009

Konversion zum Islam: Eine neue Antwort auf die Identitätskrise

Konversion zum Islam: Eine neue Antwort auf die Identitätskrise
Geschrieben von Carlo Clemens - http://www.blauenarzisse.de/   

IslamObwohl offizielle Statistiken oftmals kaum aussagekräftig sind, da aus Angst vor vermeintlich rassistischer Diskriminierung viele Differenzierungen unter den Teppich gekehrt werden, geht man laut dem Zentralinstitut Islam-Archiv-Deutschland Stiftung e.V. (ZIAD) in Soest davon aus, daß es in der Bundesrepublik Deutschland heute etwa 3,5 Millionen Muslime gibt – 6,5 Prozent mehr noch als im Jahr 2006. Ein unglaublicher Geburtenüberschuß und Familiennachzug machen es möglich. Doch nicht alle Muslime müssen aus dem islamischen Kulturbereich stammen: Jedes Jahr sind es mehrere tausend Konvertiten, die in der Religion des Propheten Mohammed den wahren Sinn und den richtigen Weg sehen.

Ich selbst kann den Weg vom orientierungslosen, getauften Deutschen hin zur Konversion zum Islam sehr gut nachvollziehen. Obwohl ich eigentlich schon immer im Denken ein Konservativer war, der sich für die christlich-abendländische Prägung Deutschlands und Europas stark machte, gab es in meinem Leben durchaus Phasen, in denen ich mir ernsthafte Gedanken über die Vorteile und Konsequenzen des islamischen Glaubens gemacht habe.

Der Islam bietet Antworten auf die europäische Identitätskrise. Aber für uns nicht die richtigen.

Es sind oft die dunklen Herbst- und Winterabende, die einen zum melancholischen Nachdenken bringen. Winterdepressionen wecken innere Sehnsüchte nach Wärme, Geborgenheit und dem wahren Sinn des Lebens. Vor allem in dem Zeitabschnitt, in dem ein Jugendlicher zum jungen Erwachsenen wird, distanzieren sich viele von pubertärem Kinderkram wie Saufereien, Diskos und dummen Flittchen und suchen nach einer fundamentalen, alles erklärenden Lebensgrundlage. Der Islam bietet vermeintlich eine endgültige Antwort auf all diese Fragen der Identitätskrise und eine einfache und stringente Lebensanleitung, konträr zu den unerklärlichen und komplexen Lebensumständen der reizüberfluteten dekadenten Konsum- und Mediengesellschaft. Laut Schätzungen sind bereits über 100.000 Deutsche zum Islam konvertiert. Allein im Jahr 2006 waren es rund 6.000.

Hinzu kommt die fundamentale Selbstüberzeugung der meisten gläubigen Muslime, dem „einzig wahren Glauben“ anzugehören. Von religiösem Eifer beflügelt, im Denken, etwas Gutes für Allah zu tun und die armen Ungläubigen rechtzuleiten, entwickeln viele islamische Jugendliche – Jungen wie Mädchen – ein enormes Sendungsbewußtsein. Ich komme aus einer Stadt, in der in einigen Jahrzehnten die deutschen Mehrheitsverhältnisse gekippt sein werden. Auf meinem Gymnasium gibt es kaum einen praktizierenden Christen. Dafür allerdings ist die Mehrheit der Schülerschaft muslimisch. Das religiöse Selbstbewußtsein der Türken und Araber, kombiniert mit dem eingangs erwähnten emotionalen Faktor in vielen suchenden Nicht-Muslimen, ist eine unglaublich verlockende Mixtur, um sich der herrschenden Leitkultur – als nichts anderes kann man den Islam in multikulturellen Gegenden bezeichnen – anzuschließen.

Der Schriftsteller und studierte Islamwissenschaftler, Stefan Weidner, vergleicht in der Süddeutschen Zeitung vom 7. September 2007 das innere Ringen vor der Konversion zum Islam mit dem Heiratsantrag „eines äußerst viel versprechenden, obschon recht autoritären Typen. Die Versuchung zum Jawort ist bei solchen Anträgen naturgemäß groß, selbst wenn der Verstand schüchtern ein paar Einwände macht.“

Warum so viele Deutsche zum Islam konvertieren

Ein gleichaltriger Bekannter von mir, den ich schon seit Grundschulzeiten kenne, ist vor einigen Jahren zum Islam konvertiert. Er war der letzte, von dem ich das erwartet hätte. Er ist ein zutiefst unpolitischer, augenscheinlich zumindest auch unernster Mensch, immer zu Späßen aufgelegt. Die meisten seiner Freunde, mit denen er als Deutscher zugange war und ist, waren und sind teils strenggläubige Muslime. Doch ich dachte, daß er für etwas wie Frömmigkeit und Transzendenz niemals empfänglich wäre – tja, falsch gedacht.

Nach Jahren von sinnlosem Dasein haben ihm seine Freunde als Schritt über die Schwelle zum Erwachsenwerden anscheinend die Lebensanleitung für das richtige, „wahrhaftige“ Leben gezeigt. Heute manifestiert sich sein Glaube in einer äußerst anti-amerikanischen und anti-israelischen Haltung, die im Politik-Unterricht gar in Verschwörungstheorien über den 11. September 2001 ausartet. Ein Freund von ihm, der maßgebend an dessen Überzeugung zum Islam federführend war, hält im Biologie-Unterricht Vorträge, die die Evolutionstheorie für falsch erklären. Wohlgemerkt, wir sind in der 13. Klasse einer gymnasialen Oberstufe.

Die Lehrer üben sich in resignierter Zurückhaltung: Man dürfe ja keine religiösen Überzeugungen in Frage stellen, auch wenn das natürlich absolut unglaubliche Zustände seien. Aber unsere Schule macht ja bei „Schule ohne Rassismus – Schule mit Courage“ mit – also nach außen hin weiterhin alles paletti in Multikultopia.

Konversion zum Islam: Kaum Transparenz für Außenstehende

Die Konversion zum Islam läuft äußerst unkompliziert und unbürokratisch ab. Ab dem Alter von 14 Jahren ist man in Deutschland religionsmündig, das heißt, daß man jeder beliebigen Religion beitreten bzw. aus ihr austreten darf. Davor ist das eine Sache der Erziehungsberechtigten. Ob man in diesem jungen Alter schon fähig ist, sich ausreichend und unvoreingenommen über einen Glauben und alle damit verbundenen Pflichten und Konsequenzen zu informieren, darf bezweifelt werden.

Konvertiert man zum Islam, so hat man das sogenannte „Schahada“, das Glaubensbekenntnis zum Islam („Es gibt keinen Gott außer Gott [Allah], und Mohammed ist sein Gesandter“) vor zwei muslimischen Zeugen in arabischer Sprache zu sprechen. Nach dieser Prozedur, die als erste der fünf Säulen des Islams gilt, ist man ein Muslim. Die nachträgliche Beschneidung ist genauso wie eine Registrierung, z.B. im Islam-Archiv in Soest, nicht unbedingt notwendig.

Anders als bei den Kirchen gibt es bei den Muslimen in Deutschland keinen zentralen Dachverband, lediglich viele verschiedene, unverbindliche Moscheevereine. Diese strukturelle Zerklüftung erschwert zum einen eine statistische Übersicht über Muslime hierzulande und zum anderen eine Kontrolle über etwaige radikale Strömungen. Vor allem gilt dies in Anbetracht des großen Anteils an Kindern und Jugendlichen, die den Predigten der Imame unkontrolliert ausgesetzt sind.

Die Schwäche des Christentums ist die Stärke des Islam

Die enorme Vitalität der islamischen Expansion in Europa, getragen von der selbstlosen und aufopfernden Hingabe vieler junger Muslime, profitiert ungemein von der gesellschaftlichen Schwäche des Christentums. Viele Sinnsuchende, die sich Moscheedem Islam zugewendet haben, haben sich zuvor auch mit dem Christentum, der Religion in die sie hineingeboren wurden, auseinandergesetzt. Doch für kaum einen versprühen mausgraue Kirchengemeinden noch einen attraktiven Charme, geschweige denn einen Ausweg aus der inneren Depression. Viele Konvertiten begründen ihren Schritt damit, daß sie Probleme mit dem christlichen Dogma der Dreifaltigkeit Gottes hätten sowie mit den klaren religiösen Vorschriften im Islam, so Muhammad Salim Abdullah, Seniordirektor des Islam-Archives. Und wie soll man als Deutscher oder Nicht-Deutscher eine Kultur respektieren oder für sich beanspruchen, die sich gerade mitten in ihrer kulturellen Selbstaufgabe befindet?

Die Christengemeinde ist innerlich in viele Strömungen und Untergliederungen gespalten. Kein Mensch überblickt scheinbar archivierte christliche Grundsätze, wie genannte Dreifaltigkeit oder die bischöfliche Hierarchie, die scheinbar überhaupt keinen direkten Bezug zu den Belangen und Problemen der heutigen Zeit haben. Allgegenwärtig ist das negative Klischeebild der Kirchen: Kreuzzüge, pädophile Pfarrer, spießige Rentner, altmodische Kirchenlieder oder biedere Enthaltsamkeit vor der Ehe.

Während die hiesige Medienkultur ehrfürchtigen und ängstlichen Respekt vor der islamischen Empfindlichkeit zeigt, wird das Christentum in Filmen, Büchern, Comedy-Serien und Internet-Videos sorglos verspottet und lächerlich gemacht. Jesus Christus gilt nicht länger als eine zumindest mit Respekt zu behandelnde Moralinstanz, sondern nur noch als ein nicht ernstzunehmender, langweiliger und enthaltsamer Ökohippie. Und wie kann eine Religion denn die richtige sein, wenn sie so sehr in Frage gestellt wird – und noch dazu von den eigenen Leuten? Wenn ihr so viele davonlaufen? Wenn sie keinen Nachwuchs mehr hat? Der Hegemonialsieg des Islams über das Christentum scheint besiegelt.

In westdeutschen Großstädten ist die Jugendkultur in den letzten Jahren spürbar orientalisiert worden.

Auch eine Orientalisierung der Jugendkultur ist in Großstädten unschwer zu erkennen. Neben dem Döner Kebab als des Deutschen allerliebster Schnellimbiß erleben bei jungen Leuten in den Städten orientalische Cafés, türkische Internet-Cafés, islamische Kulturtreffs, Shisha-Bars, „Oriental Nights“ in Bars und Diskos oder gar nahöstliche Verhaltensnormen wie die „Brüderküßchen“ zur Begrüßung ungeahnte Beliebtheit. Die Islamisierung wird mittlerweile auch von Deutschen als eine Normalität angesehen. Der Islam ist nicht länger eine „Religion wie jede andere auch“, sondern durch die Abstinenz des Christentums in der städtischen Jugend gar der einzig wirklich präsente und existente Glauben.

Die islamische Jugendkultur wirkt für viele exotisch, neu und aufregend – anders als die christliche. Die meisten wissen nicht viel über die unterschiedlichen Facetten des Islams: die vielen widersprüchlichen und fragwürdigen Passagen im Koran, die fragwürdige Biographie des Propheten oder die wahren Ausmaße und Folgen einer endgültigen Islamisierung der westlichen Kultursphäre. Aber dafür mögen sie den kitschig-orientalischen „1001-Nacht-Flair“. Dazu kommt noch die routiniert einstudierte Berufsbegeisterung der etablierten Politikerklasse ob der „weltoffenen Multikulti-Idylle“ und der islamischen „Kulturbereicherung“. Da muß der Islam doch einfach das richtige sein.

Konservative und Islam: Freunde im Geiste?

Nicht erst seit der Allensbacher Markt- und Werbeträger-Analyse AWA 2008 läßt sich in der Jugend eine Renaissance von konservativen Grundwerten erkennen: Konträr zu den Überzeugungen der individualistisch-emanzipatorischen 68er-Generation sind heute Faktoren wie Familie, Kinder, zu Hause bleibende Mütter oder Sicherheit beliebter denn je.Hier besteht ein elementarer Konsens zwischen Konservativen und der islamischen Bewegung, die in ihrem Verständnis von Familie, Nationalstolz, Ehe und gesellschaftlichem Sittenverfall zumindest oberflächlich typisch konservativ ist. Eine insgeheime Sehnsucht vieler deutscher Jugendlicher nach diesen Werten der Sicherheit und Wahrhaftigkeit drückt sich in der steigenden Gunst der Lehre des Islam aus.

Doch ist die islamische Ausbreitung nun etwas Gutes für das gesellschaftliche Zusammenleben? Immerhin konkurriert er mit beachtlichen Erfolgen gegen die von uns doch so kritisierte wertelose Konsumgesellschaft. Aus konservativer wie auch aus nicht-konservativer Sicht muß die Islamisierung dennoch mit Sorge betrachtet werden.

Das Zulassen der Islamisierung wäre unverantwortlich

Zum einen natürlich können Konservative nicht unkritisch über die demographische Verdrängung der Einheimischen und das Aussterben der abendländischen Kulturprägung hin zu einem „Eurabien“ hinwegsehen. Der Islam in seiner orthodoxen Form, wie er von den meisten Muslimen praktiziert wird, widerspricht den europäischen Grundideen der Aufklärung vollkommen. Die Islamisierung beinhaltet in der Konsequenz den geistigen Rückfall Europas ins patriarchale Mittelalter.

Realität in Deutschland sind die arabischen und türkischen Macho-Paschas, unterwürfige und separierte Burkamädchen, die allgegenwärtige Homosexuellenfeindlichkeit, das Verurteilen ehrloser „deutscher Schlampen und Opfer“ und das immerwährende Fernbleiben der meisten muslimischen Schüler bei Klassenfahrten und Sportunterricht an deutschen Multikulti-Schulen.

Dieser Artikel erschien zuerst in Blaue Narzisse, #10, Dezember 2008.

 

00:30 Publié dans Islam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : islam, religion, crise religieuse, sociologie, christianisme, allemagne | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mercredi, 13 mai 2009

le mariage transformé par ses célibataires mêmes

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Le mariage transformé par ses célibataires mêmes

par Philippe Muray, écrivain* - Ex: http://www.communautarisme.net

Par-delà le néo-mariage, et quelques autres revendications divertissantes, c’est la réduction au silence du moindre propos hétérodoxe qui se profile, c’est l’écrasement légal des derniers vestiges de la liberté d’expression, c’est la mise en examen automatique pour délit de lucidité.

Le mariage est une invention qui remonte à la plus haute antiquité. Je parle du mariage à l’ancienne, cette institution conformiste, vermoulue et petite-bourgeoise qui véhicule depuis la nuit des temps « les valeurs hétéro-patriarcales et familialistes » pour m’exprimer comme Christophe Girard et Clémentine Autain. Sauf erreur de ma part, cette mémorable conquête n’a pas été arrachée, l’arme à la main, de nuit, dans la précipitation et sous la menace des pires représailles, par une petite bande de fanatiques de la nuptialité bien décidés à se servir de la lâcheté des uns, de l’ambition des autres, de la démagogie tremblotante de tous, pour faire triompher leur cause. Nulle part ce type de mariage ne paraît avoir été imposé par la force. Ni en jetant à l’opinion publique un fatras précipité de raisonnements contradictoires afin d’extorquer d’elle, par sondage, une approbation apeurée. Il n’est pas davantage le fruit d’une volonté claironnée de mettre à genoux le pouvoir politique. Aucun gouvernement, à ma connaissance, n’a cédé aux partisans de la conjugalité dans la crainte de se voir accusé de gamophobie (du grec gamos, mariage).

Y a-t-il même eu « débat », à propos de cette importante « question de société », chez les Égyptiens pharaoniques, à Babylone, en Inde, à Lascaux, entre psychanalystes lacustres, sociologues troglodytes, militants de l’un ou l’autre bord ? En a-t-on discuté, dans le désert de Chaldée, à la lueur de la Grande Ourse ? A-t-on menacé de ringardisation les adversaires de cette nouveauté ? Les a-t-on accusés de ne rien comprendre à l’évolution des mœurs, de s’accrocher à des modèles désuets, d’alimenter la nostalgie d’un ordre soi-disant naturel qui ne relève que de la culture ? La Guerre des Games (de gamos, mariage, je ne le répéterai plus) a-t-elle eu lieu ?

Il semble bien que non. La chose, c’est horrible à dire, s’est faite toute seule, suivant la pente de l’espèce, laquelle sait si bien jouer sur les deux tableaux pour protéger ses intérêts, manier en même temps la carotte et le bâton, l’appât et l’hameçon, le désir de satisfaction sexuelle des individus et ses propres nécessités vitales de perpétuation, et emballer cela dans les mirages vaporeux de la pastorale romantique.

On a tout essayé, par la suite, avec le mariage. On l’a plié dans tous les sens. On a tâté de la polygamie, de la bigamie, de la monogamie, de l’adultère, du divorce à répétition, du mariage forcé, du mariage civil, du mariage religieux, du mariage d’argent, du mariage raté. On a même vu des mariages heureux. On a vu des mariages stériles et d’autres féconds, des unions dramatiques et des noces de sang. On en a fait des vaudevilles et des tragédies. Avec des placards pleins d’amants, des cocus en caleçon, des maîtresses acariâtres. Le mariage, en résumé, n’a été inventé que pour fournir des sujets de romans et pour assurer la chaîne sans fin des générations ainsi que le veut l’espèce.

Il n’en va pas exactement de même du futur mariage homosexuel, dont la genèse aura laissé tant de traces, à l’inverse de l’autre, qu’il sera aisé de la reconstituer. C’est que cette nouveauté ne va pas de soi, comme d’ailleurs la plupart des opérations expérimentales de notre temps. L’époque moderne, dont l’essence même est le soupçon dans tous les domaines, explose en cette affaire dans une sorte d’opéra-bouffe stupéfiant où la mauvaise foi et le chantage se donnent la réplique inlassablement. C’est d’abord le code civil qui a été instrumenté. On a prétendu qu’il n’y était stipulé nulle part que le mariage était réservé aux personnes de sexe opposé. Les homosexuels militants se sont engouffrés dans cet « oubli » pour exiger, au nom de l’égalité des droits, « l’accès des gays et des lesbiennes au mariage et à l’adoption ». L’exigence d’égalité est la grosse artillerie qui renverse toutes les murailles de Chine. La marche sans fin vers l’égalité absolue remplace, chez les minorités dominantes et furibondes, le défunt sens de l’Histoire. Pour ce qui est du code civil, d’abord paré de toutes les vertus, il n’a plus été qu’une sorte d’opuscule diffamatoire sitôt qu’on découvrit l’article 75, qui détermine que le mariage consiste à « se prendre pour mari et femme ». Peu soucieux de logique, les militants de la nouvelle union conclurent aussitôt à l’urgence d’une refonte de ce code que, l’instant d’avant, ils portaient aux nues. Et, en somme, puisque la loi est contre les homos, il faut dissoudre la loi. 

 
Dans le même temps Noël Mamère, bonimenteur de Bègles, agitait son barnum ; et les notables socialistes se bousculaient au portillon de l’avenir qui a de l’avenir dans l’espoir de décrocher le titre de premier garçon d’honneur aux nouvelles épousailles. Le terrorisme et la démagogie se donnaient le bras sur le devant de la scène. On « déconstruisait » en hâte le mariage à l’ancienne. On affirmait qu’il est aujourd’hui « en crise » quand la vérité est qu’il l’a toujours été, par définition, puisqu’il unit deux personnes de sexe opposé, ce qui est déjà source de crise, et que, par-dessus le marché, il les soumet à des postulations contradictoires, le mensonge romantique et la vérité procréatrice. On rappela, contre les réactionnaires qui lient mariage et reproduction, qu’il n’en allait plus ainsi depuis la révolution contraceptive (ce qui ne pouvait manquer, ajoutait-on, de rapprocher les comportements homos et hétéros), quand c’est en fait depuis toujours, et dans toutes les civilisations, que l’on a cherché, certes avec moins d’efficacité technique qu’aujourd’hui, à réguler la fécondité, c’est-à-dire à autonomiser la sexualité par rapport à la « reproduction biologique ».

En quelques jours apparurent les étonnantes notions de « mariage fermé » (antipathique, hétéro) et de « mariage ouvert » (sympathique) puis « universel » (supersympa). On publia des sondages dans lesquels la société française déclarait qu’elle était d’accord pour applaudir aux évolutions de la société française, mais de grâce, qu’on arrête de lui brailler dans les oreilles. Les partisans du néo-mariage expliquèrent à la fois qu’il ne fallait pas interpréter leur demande comme une volonté de normalisation ou comme un désir d’imitation mais qu’il y avait de ça quand même, et que d’ailleurs ils se moquaient des institutions dont ils étaient exclus, sauf que le seul fait d’en être exclus leur apparaissait comme un outrage. Réclamant en même temps le droit à la différence et à la similitude, exigeant de pouvoir se marier par conformisme subversif et pour faire « un pied de nez à la conception traditionnelle du mariage » (comme l’écrivent encore les impayables Christophe Girard et Clémentine Autain), ils affirmaient aussi que ce même mariage, à la fois convoité et moqué, revendiqué pour être rejeté, et de toute façon transformé s’ils y accédaient jusqu’à en être méconnaissable, serait un remède souverain contre « l’alarmant taux de suicide » qui sévit chez les jeunes homosexuels, ce qui laisse supposer que ces derniers se suicident tous par désespoir de ne pouvoir convoler officiellement. On aurait pu imaginer d’autres motifs.

Mais ces réflexions tomberont très bientôt sous le coup des lois anti-homophobie qu’un gouvernement vassalisé par les associations se prépare en toute sottise à faire voter. Mieux vaut donc se taire. Par-delà le néo-mariage, en effet, et quelques autres revendications divertissantes (suppression de la mention relative au sexe sur les papiers d’identité afin d’en terminer avec les « problèmes kafkaïens rencontrés par les individus de sexe mixte, hermaphrodites, transsexuels, transgenres », ou encore « dépsychiatrisation des opérations de changement de sexe »), c’est la réduction au silence du moindre propos hétérodoxe qui se profile, c’est l’écrasement légal des derniers vestiges de la liberté d’expression, c’est la mise en examen automatique pour délit de lucidité. Il est urgent que personne ne l’ouvre pendant que se dérouleront les grandes métamorphoses qui s’annoncent, dont ce petit débat sur l’effacement de la différence sexuelle est l’avant-propos. Le néo-mariage, dans cette affaire, n’est que l’arbre baroque qui cache la prison.

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Ce texte a été publié dans une version légèrement réduite sous le titre "La guerre du mariage a-t-elle eu lieu ?" dans Marianne (18/09/2004, page 79). Cette version intégrale est reproduite avec l'autorisation de l'auteur.

*Philippe Muray est l'auteur de
nombreux ouvrages, dont Après l'histoire, Belles Lettres, 2002.

Voir aussi sur le site de l'Observatoire du communautarisme :
Les démons, par Philippe Muray

Photo de Philippe Muray : droits réservés (HANNAH/OPALE - 18, rue des Quatre Fils - 75003 Paris)


Lundi 20 Septembre 2004

mercredi, 06 mai 2009

La grande falsification: l'art contemporain

La grande falsification : L’art contemporain

La grande falsification : L’art contemporain
de Jean-Louis Harouel

Le néant artistique abusivement appelé art contemporain est la lointaine suite de la crise de la peinture déclenchée par le progrès technique dans la seconde moitié du XIXe siècle. Sous l’effet de cette crise, la religion de l’art inventée par le romantisme s’est trouvée privée de sens. La délirante sacralisation de l’artiste par la philosophie allemande, qui lui conférait le statut de voyant, de messie, de philosophe, a basculé au XXe siècle dans l’absurde, le dérisoire, voire l’abject. Tel est le prétendu art contemporain: une religion séculière de la falsification de l’art, où l’adoration de l’art a fait place à celle du soi-disant artiste, et où l’œuvre d’art se trouve remplacée par n’importe quoi pourvu qu’il ne s’agisse pas d’art. Aussi bien tout cela est-il aujourd’hui très vieux. Dès les débuts du XXe siècle, les figures les plus radicales des avant-gardes avaient été au bout de la logique du remplacement de l’art par n’importe quoi. Tout ce qui s’est fait depuis dans ce sens n’est qu’une fastidieuse rabâcherie. Né de la volonté politique de la classe dirigeante américaine au temps de la guerre froide, le succès mondial du prétendu art contemporain est à beaucoup d’égards un accident de l’histoire. Il n’en reste pas moins que l’aberrant triomphe de cet ersatz d’art renvoie les sociétés occidentales actuelles à leur profonde déculturation.

Agrégé des Facultés de droit, diplômé de Sciences Po, Jean-Louis Harouel est professeur à Paris II. Auteur d’une douzaine de livres, il a notamment étudié en juriste l’histoire de l’État, de l’administration et de la ville. Par ailleurs, il est l’un des meilleurs connaisseurs de la pensée du grand économiste Jean Fourastié (Productivité et richesse des nations, Gallimard, 2005). Il est en outre spécialiste de sociologie de la culture (Culture et contre-cultures, PUF, 3e éd. 2002).

Disponible sur Amazon


 

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vendredi, 01 mai 2009

"La journée de la jupe"

“La journée de la jupe” :

fulgurante réponse à

“Entre les murs”

par Saint-Plaix

Depuis sa sortie en avant première sur Arte, qui réalisa ce soir-là son record d’audience, La journée de la jupe - film qui marque le retour d’Isabelle Adjani absente des écrans depuis plusieurs années - fait couler beaucoup d’encre et soulève des réactions indignées dans la bien-pensance de gauche notamment dans les colonnes de l’imMonde qui dénonce une « dérive raciste et xénophobe », quant aux organisations féministes, elles déclarent en réponse « ne pas avoir vu le même film » qui dénoncerait, selon elles, la condition des filles dans les banlieues soumises aux dictats islamistes…

A s’arrêter, selon les commentaires de ces diverses corporations dites zintellectuelles, à des aspects spécieux de ce film, on en oublie le message fondamental qui dérangera les tenants de la pensée unique : les conséquences de l’intégration communautaire envisagée comme refus de l’assimilation. C’est l’éternel problème qui reçoit là une magistrale démonstration que chacun ne veut surtout ni voir ni commenter. On en reste donc à insister sur l’exceptionnelle prestation de l’actrice, que l’on n’avait pas vue aussi brillante depuis son interprétation de Camille Claudel. Là le consensus s’est à juste titre tout de même imposé.

Nous n’avons donc, nous non plus, pas vu le même film !

Le cadre est simple : un collège de banlieue “difficile” où un professeur de français va faire un cours sur Molière dans la petite salle de théâtre où certains élèves doivent réciter certaines scènes. Comme on se l’imagine, parmi les élèves présents, on note une forte majorité de “jeunes issus de la diversité”, ou dit plus clairement, une majorité partagée entre des ressortissants d’origine maghrébine et des africains noirs, les autres, minoritaires, blancs, sont assez représentatifs de ces classes dites défavorisées qui tentent de sauvegarder encore leur place en banlieue… Tout ce petit monde des deux sexes se fout éperdument du cours sur Molière et des prestations forcées des camarades désignés envoyés jouer sur scène. Dans le brouhaha que le professeur ne maîtrise pas, les clans ethniques vaquent à leurs occupations préférées : le bavardage, la vantardise et la provocation. On remarque une forte tête plutôt “blonde” et une autre carrément plus “noire”, petits chefs qui mènent la vie dure à tout le monde et terrorisent leurs camarades. Et oui, c’est une constatation : il existe en banlieue des meneurs et des petits caïds, des dealers et des délinquants, qui ne sont pas forcément des blancs aux yeux bleus !

La prof a beau hurler, rien n’y fait, et elle commence à s’énerver sérieusement devant cet aréopage, jusqu’au moment où, ultime provocation, la forte tête blonde exhibe un révolver qu’elle sort de son sac, pour épater la tête noire et s’imposer au groupe arme à la main. La salle alors est bouclée à clef.

A l’extérieur, des bruits de ces menaces ayant filtré par la vertu du téléphone portable d’une élève, tout de même inquiète de la tournure des évènements, le corps enseignant est en émoi devant une situation envisagée en termes de prise d’otage : on y retrouve le principal, un pleutre geignard et des professeurs très politiquement corrects dont les femmes qui dénoncent à loisir « les provocations de cette enseignante qui s’obstine par exemple à venir au lycée en jupe dans ce quartier sensible ». Très clairement, si elle se fait prendre en otage, c’est de sa faute ! Seule, une enseignante, amie de l’héroïne de l’histoire, va prendre son parti et la soutenir, elle seule contre tous.

Et les forces de police investissent le lycée…

C’est alors qu’à l’intérieur du théâtre, un conflit éclate, une bousculade se produit, et fortuitement, le révolver tombe, est ramassé, et remis à la prof… qui va s’en servir !

Là, le film bascule dans sa dimension originale : un huis clos où vont s’affronter les élèves et la prof qui utilise la menace de l’arme qu’elle détient pour s’imposer et qu’elle n’hésite pas à brandir pour obtenir le calme… et exiger l’attention de l’auditoire à son enseignement ! A cela, se surimpose un quiproquo d’un nouveau genre. Une prise d’otage, révolver au point, d’une classe par un professeur motivé par un seul but : faire son cours ! Un scénario original et brillamment traité.

Des scènes fortes, comme celle où, à quatre reprises, la tête noire se retrouve avec le révolver sur la tempe pour finir par énoncer, conformément à la demande de son professeur et malgré toute sa mauvaise volonté, que Molière s’appelle Jean Baptiste Poquelin, ou une autre où une des élèves avertit la prof quand elle risquerait de se retrouver surprise par des meneurs… Une certaine complicité se dessine entre les élèves, notamment les filles, et cette prof qui a retrouvé son autorité, même si c’est par arme interposée.

D’autres scènes fortes où, parmi les forces de l’ordre averties de la vraie nature de la prise d’otage, il ne se trouve qu’un officier de police partisan du dialogue avec la « preneuse d’otage » face aux autres, partisans de la manière forte pour délivrer les élèves. On suit petit à petit la sympathie croissante pour l’enseignante qui entend aussi utiliser cette situation imprévue pour énoncer publiquement des revendications : dénoncer les violences faites aux filles en milieu scolaire (dont les tournantes dont elle retrouve une trace sur un téléphone portable et dont elle fera par force dénoncer les coupables à la tête noire), et faire instaurer une fois par an « la journée de la jupe » pour faire afficher aux filles leur féminité retrouvée, enfin dégagée de la tyrannie et de la perversion des garçons, et leur permettre d’évoluer comme toutes les autres filles de leur âge des autres milieux socioéducatifs.

Comme par hasard, cette dernière revendication rencontre aussitôt l’hostilité de la ministresse empantalonnée, dépêchée sur place, consternée d’une telle revendication qui provoque ce commentaire péremptoire : « On s’est battu pendant un siècle pour pouvoir porter le pantalon, ce n’est tout de même pas pour revendiquer maintenant le port de la jupe ! » Donc, c’est clair, on est féministe ou féminine, mais on ne peut pas être les deux à la fois. Tout le monde sait cela, qu’on se le dise !

Le huis clos se poursuit. La prof explique à ses élèves ses motivations pour l’enseignement du français et l’importance que cela devrait avoir pour eux, descendants d’immigrés à qui elle défend de parler arabe entre eux… jusqu’au moment où elle rétorque dans cette langue à une réflexion désobligeante !

Chacun comprend alors avec stupeur qu’elle est “des leurs” et qu’elle a choisi non seulement de devenir française mais de le vivre pleinement et de le faire partager… Elle a clairement opté pour l’assimilation.

Au bout de plusieurs heures, la police donnera l’assaut, contre l’avis du seul officier de police partisan de la négociation, pour « délivrer les élèves ».

Dans l’intervalle, à l’intérieur, la prof est devenu une héroïne, un leader qui a rallié l’immense majorité de sa classe qui la rejetait et la méprisait jusque là et à l’inverse, les meneurs traditionnels sont réprouvés voire rejetés. Cet aspect, loin du syndrome de Stockholm auxquels certains ne manqueront pas de se référer, est particulièrement bien rendu : l’ascendant et le respect primitivement conquis par la force mais ensuite accepté tacitement par tous. Lors de l’assaut, malgré le mouvement de protection qui sera effectué par ses élèves face aux forces d’intervention, la prof - alors qu’il n’y a nulle raison tactique pour tirer ni aucune menace de sa part - sera intentionnellement abattue d’une balle à bout portant…

Comme on est loin de la vision démagogique développée par nos journaleux gaucho-féministes !

Ainsi le vrai message délivré est limpide : l’immigré assimilé doit être un réprouvé surtout s’il a trouvé toute sa place et qu’il suscite des vocations. La tentation assimilatrice - face au communautarisme conséquence de l’intégration - est réprouvée politiquement, au besoin même à l’encontre des sentiments des jeunes issus de la diversité qui pourraient se laisser séduire ! La société plurielle issue de la diversité, formatée aujourd’hui par les officines et leurs dictats soit disant antiracistes, doit s’y conformer !

La journée de la jupe est un film à voir, à l’opposé des clichés et des poncifs éculés véhiculés par Entre les murs. Rassurons-nous, ce film n’aura pas de Palme d’or à Cannes : c’est un bon film original, très bien joué qui ne laisse pas indifférent.

Un film qui dépeint la jeunesse de banlieue sans complaisance, avec ses tabous raciaux et machistes, sans clichés anti-blancs, ce qui n’est pas si fréquent et ce qui a provoqué évidemment la colère de l’imMonde.

Un film qui porte un grand message d’espoir : celui d’une jeunesse dont la dérive pourrait peut être se fondre dans l’assimilation à la société pourvu que les extrémistes qui aujourd’hui l’animent en toute impunité soient réprimés réellement, et non tacitement soutenus politiquement par les tenants de la promotion de cette mixité culturelle et sociale, credo des BHL, Attali et autres “penseurs” chers à nos politiques et à nos médias.

Décidément, non, nous n’avons pas vu le même film !

Source : Le libre journal


 

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jeudi, 30 avril 2009

Le crépuscule des élites

Le Crépuscule des élites

Cf. : http://www.tatamis.fr 

Préface de Roland Dumas

UN OUVRAGE DECAPANT

Après une carrière riche d’écrivain, de journaliste et de chef d'entreprise, Louis Dalmas consacre son talent à la publication d'un livre intitule de façon amusante “Le crépuscule des élites”.

Mais le plus troublant n’est pas dans le titre, il est dans la lecture de chacun des chapitres. II touche à tout avec une ironie cinglante et des vérités qui sont communicatives. Le tout est bien écrit, de façon agréable, et composé de telle manière qu'on s'y retrouve toujours.

Chacun y découvrira des situations ou bien des problèmes qu'il aura connus dans sa vie, dont il a souffert et sur lesquels il n'a pas toujours conclu ; qu'il s’agisse de l’information, qu'il s’agisse de l'Amérique, qu’il s’agisse du Proche-Orient, qu’il s’agisse de la Yougoslavie dont j’ai cru compren-dre que Louis Dalmas était amoureux (en parti-culier de la Serbie), rien ne manque à cette œuvre.

Mais, le plus drô1e du livre est dans la confection de chaque chapitre. En effet, l’écriture elle-même est composée de personnages qui interviennent et qui disent les choses dans le langage de tout le monde. Madame Sorladon (?) ou Madame Méla-mois (?) dont les noms phonétiquement font déjà rire, sont chargées de nous décrire le cadre dans lequel va se dérouler le prochain chapitre et sont des comparses nécessaires à la bonne marche de cet ouvrage.

On passe de la conversation de tous les jours à quelque chose de plus sophistiqué, de plus recherché, de plus acide aussi. On y trouve des phrases de bon sens, des évidences comme on peut en entendre tous les jours. Celle-ci par exem-ple : “L’évolution des sociétés est lente et l’erreur de certains politiciens est de ne pas s’en rendre compte”. À qui le dites vous, Madame Sorladon ?

Madame Mélamois – au nom si évocateur – est en réalité Madame “Tout le Monde”.

L’information, la presse ne trouvent guère grâce aux yeux de Louis Dalmas. Je ne le lui reproche-rai pas, bien au contraire. J’ai noté ce passage : “Selon ces cuistres (les journalistes !), toute opinion, pour être crédible, doit être aussi en-nuyeuse et difficile à assimiler que possible. Il n'y a qu’à feuilleter le terne oracle de l'intelligentsia française – Le Monde – pour en être convaincu”. C’est une opinion que je partage depuis un grand nombre d’années et que le temps qui passe n’altè-re en rien...
Mais il peut être bien plus sévère encore. Quel spectacle que celui-ci : “L’équipe est sur le terrain. Les joueurs ont les yeux bandés. Comme ils ne voient ni le ballon, ni les buts, ils courent dans tous les sens et shootent dans le vide. Sur les maillots, on distingue le logo du club, un cerveau avec des trous de gruyère sur un plateau de fromages. De temps en temps, deux hommes se heurtent de plein fouet. On les évacue sur une civière marquée ‘offerte par la Banque Mondiale’ et le grand écran à un bout du stade affiche ‘c’est la faute à Milosevic’”. Comme quelqu'un d’autre avait écrit “C'est la faute à Voltaire et à Rous-seau !”...

Tout le texte est à l’avenant, les raccourcis sont saisissants, les images percutantes, mais il res-pecte un certain équilibre quand même dans la critique systématique qui correspond au titre du “Crépuscule des élites”. Le rythme respecte la même cadence tout au long du livre et à chaque chapitre. II est enjoué, équilibré et agréable.
Je recommanderai particulièrement le passage intitulé “Les deux visages de l'Amérique”.
L'ensemble est signifiant. II mérite d’être lu com-me tel. Ce livre connaîtra le succès par son originalité et par la maîtrise de la pensée de l'au-teur.

J’y retrouve à plusieurs occasions ce sentiment d’affection que nourrit l'auteur pour le peuple serbe. Dans le dialogue entre Madame Mélamois et Madame Sorladon, nos deux complices accom-pagnatrices, apparaît cette phrase :
“– Mais ces Serbes, ils ont tout de même commis des atrocités, non ?
– Qu’est ce que vous croyez Madame Mélamois, que la guerre c’est un match de football, déjà que dans les stades on se fout sur la gueule, alors sur les champs de bataille, vous imaginez...”
Et plus loin :
“– Et comme le dit Monsieur, quand on diabolise tout un peuple comme on l’a fait avec les Serbes, ça devient du racisme et c’est d'autant plus triste que ce coup-là, parmi les persécuteurs, se sont trouvés les descendants ou les proches de ceux mêmes qui avaient été persécutés.
– Les juifs ?
– Non, Madame Mélamois, pas les juifs, des juifs...”
Tout cela flaire la bonne humeur en surface. Mais en réalité, on plonge dans la profondeur des choses.
En écrivant cette préface, je ne puis m’empêcher de rapprocher ces pages écrites pour être lues de la période ou je dirigeais le ministère des Affaires étrangères et où le sentiment anti-serbe dominait. En effet, la scène politique internationale, au mé-pris de ce qu'avait été I'histoire de nos deux pays, histoire aux eaux mêlées, en était le reflet.

Roland Dumas
Avocat, ministre des Relations extérieures de 1984 à 1986, ministre des Affaires étrangères de 1988 à 1993, Président du Conseil Constitutionnel de 1995 à 2000.

Prix : 19,90€

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samedi, 25 avril 2009

Qu'est-ce que le relativisme?

 

Qu'est-ce que le relativisme?

Ex: http://unitepopulaire.org/

 

« De toutes les pathologies dont souffre notre société, le relativisme "philosophique" est certainement l’une des plus dangereuses, car son caractère diffus, sa fausse logique empreinte de scientificité et son adéquation trop parfaite avec la notion de tolérance (suprême valeur du monde post-moderne) lui procurent d’inestimables avantages sur les courants philosophiques concurrents. Si, depuis Montaigne, le relativisme a attiré de nombreux penseurs refusant l’idée selon laquelle une civilisation ou une religion ne peuvent se déclarer supérieures à toutes les autres, il est indéniable que depuis une soixantaine d’années, le paradigme relativiste a étendu son empire sur toutes les nations occidentales, abrutissant dramatiquement leurs populations désormais incapables de sauvegarder les bases mêmes et les principes primordiaux de la pensée et de la culture européenne. […]

 

Loin d’avoir permis la sauvegarde de la diversité culturelle, le relativisme a engendré la haine de soi (ou, par voie de conséquence, la xénophilie) et l’essor de l’individualisme radical, qui ont laminé à une vitesse extraordinaire des nations millénaires.

 

Aujourd’hui, le relativisme apparaît cependant davantage comme la conséquence d’une déréliction généralisée, comme un discours servant à légitimer les faiblesses d’un peuple, hier glorieux et rayonnant, et aspirant désormais à une totale retraite. »

 

 

 François-Xavier Rochette, "Vaincre le relativisme ?", Rivarol, 6 mars 2009

vendredi, 24 avril 2009

Recettes pour assainir l'économie au quotidien

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Recettes pour assainir l'économie au quotidien

 

Ex: http://unitepopulaire.org/

 

« Il est naturel d’adopter un mode de vie économe quand les temps sont durs et que l’on craint pour son emploi. Mais, au Royaume-Uni, aux Etats-Unis et dans d’autres pays, comme l’Espagne et l’Irlande, où l’activité est tirée par la consommation, cette tendance semble annoncer un changement bien plus profond : la fin d’un mode de vie fondé sur une consommation effrénée, alimentée par le crédit facile et l’effet de richesse induit par une valorisation constante des actifs [immobilier et portefeuilles d’actions]. D’ores et déjà, les Américains, naguère si dépensiers, ont relevé leur taux d’épargne personnelle de quasiment zéro – niveau aux alentours duquel il tournait depuis des années – à presque 3 % en novembre. Il devrait prochainement atteindre au moins 8 %, du jamais-vu depuis vingt ans, prévoit David Rosenberg, le chef économiste de la banque Merrill Lynch. A l’image des banques, surendettées et sous-capitalisées, poursuit Rosenberg, les ménages assainissent leur situation en dépensant moins, en épargnant plus et en remboursant leurs dettes. Et, comme dans le secteur financier, cela ressemble de moins en moins à des ajustements temporaires et de plus en plus à un changement d’habitudes durable. […]


A en croire Bob McKee, un analyste d’Independent Strategy, un cabinet de conseil en investissement de Londres, cette prudence ralentira la croissance du crédit et les prêts iront aux entreprises qui produisent et investissent, et non plus aux opérations financières hasardeuses. Cela devrait normalement favoriser une décélération et une stabilisation de la croissance économique. […] Les signes de restriction des dépenses sont partout visibles. La consommation est en berne dans tous les pays industrialisés. […] Dans des pays traditionnellement économes comme la Chine et l’Allemagne, les taux d’épargne déjà élevés ont encore progressé. Les Chinois sont plus que jamais près de leurs sous, alors que des millions de travailleurs ayant perdu leur emploi dans les usines du littoral rentrent dans leur village natal. […] A Hong Kong, les restaurants de luxe sont désertés, tandis que les gargotes de rue sont encore plus bondées que d’habitude. Au Royaume-Uni, la chaîne de supermarchés Sainsbury’s annonce un triplement des ventes de produits à petits prix comme la viande à braiser (le morceau le moins cher) en l’espace d’un an. L’enseigne de cordonnerie minute Timpson signale un bond des réparations de montres et de chaussures dans ses magasins. “Nous voyons défiler des clients d’un genre tout à fait nouveau, des personnes qui n’ont jamais pensé faire réparer quoi que ce soit“ constate le président de la société, John Timpson. “Une nouvelle mentalité s’installe : on se débrouille et on raccommode ses affaires” […] Les entreprises ne gagneront plus rien à lever des capitaux et à s’endetter au maximum. En revanche, celles qui ont des fonds propres solides, des actionnaires patients et une trésorerie saine – celles-là mêmes dont on raillait naguère le côté pépère – disposeront d’un avantage certain. […]


Bien sûr, de nombreux économistes vous diront que la consommation va repartir, entraînant l’économie dans son sillage. Mais, pour David Rosenberg, ce rebond sera bien plus modeste que d’habitude. Car, d’une part, la dévalorisation des logements et des comptes épargne-retraite provoquera un “effet de pauvreté” durable et, d’autre part, le flot de crédit facile qui avait dopé la consommation n’est pas près de couler à nouveau. […] La croissance mondiale finira bien par repartir, mais elle ne sera plus tirée par la consommation des pays occidentaux. Elle a des chances de rester en deçà des 5 % pendant de nombreuses années, notamment parce que, partout dans le monde, les dirigeants politiques ne rateront pas l’occasion de reprendre du pouvoir aux marchés. Cela se traduira, à tort ou à raison, par un interventionnisme accru de l’Etat et des politiques de redistribution, avec un alourdissement de la fiscalité et une baisse des profits des entreprises.


Cette nouvelle frugalité fera peur à mesure que ses effets se propageront à l’économie mondiale, mais s’avérera au final bénéfique. […] Les capitaux se feront plus rares, mais ils seront investis de manière plus efficace. Les profits des entreprises représenteront une part moins élevée du revenu national, mais ils seront plus stables. Ce sera un monde plus ennuyeux, à croissance moins forte. Mais ce sera aussi un monde plus tenable, avec moins de déséquilibres, de déficits et de mauvaises surprises économiques. » 

 

Newsweek, mars 2009 

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vendredi, 17 avril 2009

Le M.A.U.S.S.: Qu'est-ce que l'utilitarisme?

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

 

Le M.A.U.S.S.: «Qu'est-ce que l'utilitarisme?»

La revue semestrielle du M.A.U.S.S. consacre son n°6 à «Qu'est-ce que l'utilitarisme? Une énigme dans l'histoire des idées». Elle le présente ainsi: «Depuis près de deux siècles, dans les pays de tradition anglo-saxonne, l'utilitarisme a constitué la philosophie morale et juridique de base. A ce titre, il a suscité de nombreux débats. Rien de tel en France où, depuis la grande thèse d'Elie Halévy, La Formation du radicalisme philosophique (1903), l'utilitarisme était oublié et ignoré. Toutefois, depuis quelques années, les philosophes et les chercheurs en sciences sociales relancent le débat sur l'utilitarisme. A en croire Halévy et la quasi-totalité des commentateurs de l'époque, le fondateur de l'utilitarisme est Jeremy Bentham (1748-1832): sa doctrine reposerait sur l'hypothèse que les sujets humains doivent être considérés comme des égoïstes calculateurs et rationnels. Pas du tout, rétorquent nombre d'interprètes contemporains: non seulement J. Bentham ne postule nullement le caractère dominant des motivations égoïstes, mais, en adoptant comme critère du juste et du bien la maximisation du bonheur du plus grand nombre, il plaide au contraire pour l'altruisme. On ne saurait rêver lectures plus radicalement opposées. Ce numéro de la Revue du M.A.U.S.S. semestrielle présente donc les diverses interprétations et suggère deux manières originales, et de surcroît probablement justes, de résoudre l'énigme. Pour la première, loin d'inventer l'utilitarisme, Bentham est celui qui achève une certaine tradition utilitariste vieille de plus de deux mille ans. Pour la seconde, cette tension insoluble entre égoïsme et altruisme est précisément ce qui caractérise l'utilitarisme moderne et post-benthamien amorcé par John Stuart Mill» (PM).

 

Editions La Découverte/La Revue du MAUSS,  9 bis rue Abel-Hovelacque, F-75.013 Paris, 290 p., 160 FF.

jeudi, 09 avril 2009

Image de la femme dans les médias: nocif pour les jeunes filles

Image de la femme dans les médias : nocif pour les jeunes filles

"Une étude montre que l’image de la femme véhiculée par les médias est nocive pour les jeunes filles. Un groupe d’étude de l’American Psychological Association, a étudié les effets nocifs pour les jeunes filles de l’image dégradante de la femme véhiculée par la plupart des médias. Le rapport dénonce la « sexualisation » systématique des filles, que ce soit dans les revues pour adolescentes, dans les émissions de télévision, les jeux vidéo, les films et les clips vidéo musicaux. Les campagnes de publicité et les produits destinés aux enfants et aux jeunes filles ont également été passés en revue.

Le rapport définit la « sexualisation » comme le fait de présenter la femme comme un objet sexuel qui n’aurait d’autre valeur que l’attirance qu’elle exerce à travers son comportement. Les effets nocifs que la « sexualisation » entraîne vont des troubles alimentaires à la dépression. L’étude ne se penche que sur les effets nocifs physiques, n’entrant pas dans le domaine moral qu’il est nécessaire cependant de rappeler ici : l’image dégradante de la femme répandue par les médias et une très forte incitation à une conduite sexuelle désordonnée et immorale.

Exemples de « sexualisation » dénoncés par le rapport :
– Les jeunes « pops stars » présentées comme des objets sexuels
– Les poupées vêtues de façon racoleuse, ainsi que les mêmes « vêtements » pour petite-fille de sept ans : bustiers, bas-filet, etc.
– Les modèles féminins adultes habillées comme des petites filles.

Le groupe d’étude s’est constitué à la suite d’une inquiétude répandue aujourd’hui dans le public familial à la vue des « modèles » présentées par les médias pour les petites filles et les adolescentes. Le Dr Eileen Zurbriggen, qui a dirigé le groupe d’étude de l’American Psychological Association, et qui est professeur associée à l’Université Santa Cruz de Californie déclare : « les conséquences de la sexualisation des filles par les médias sont très réelles. Nous avons d’amples preuves pour conclure que la sexualisation entraîne des effets négatifs dans un grand nombre de domaines, incluant le fonctionnement des connaissances et la santé physique et mentale ». En conséquence, le groupe d’étude recommande aux parents, aux éducateurs et aux professionnels de santé d’être en alerte sur l’impact que celle-ci peut avoir sur les petites filles et les adolescentes. D’un simple point de vue de santé psychologique, il est urgent de combattre les images représentant les filles comme des objets sexuels.

Un exemple parmi bien d’autres cités, est celui d’une publicité avec la pop-star Christina Aguilera habillée en écolière, la chemise largement déboutonnée et une sucette dans la bouche. Le Dr Zurbriggen ajoute : « En tant que société, nous devons remplacer toutes ces images sexualisées par d’autres, montrant la compétence et les valeurs propres aux filles. Le but devrait être de délivrer un message, aussi bien pour les garçons que pour les filles conduisant à un développement du comportement beaucoup plus sain.»

Les recherches systématisées par ce groupe d’étude montrent que ces images et la promotion des filles comme des objets sexuels entraînent de nombreuses conséquences nocives pour la santé psychologique et le développement des jeunes filles.

« Les magazines pour adolescentes ne parlent que de sexualité »
Le Pr. Andrew Hill, professeur de psychologie médicale à l’Université de Leeds, a déclaré qu’il était difficile d’être en désaccord avec les conclusions du rapport. « Si vous regardez les magazines pour adolescentes, on n’y parle que de sexe », a-t-il notamment déclaré. « Nous sommes une société absorbée par le « visuel ». Notre opinion sur les personnes est dominée par leur apparence, la façon dont elles se présentent ». Pour lui, l’utilisation par les médias de l’image des femmes comme des objets sexuels est un sujet important à résoudre.

« Seulement 18% de ce que regardent les enfants à la télévision correspond à l’horaire et aux programmes qui leur sont destinés et la législation ne peut pas être la solution pour tout. « Une des clés est la responsabilité sociale, celle des annonceurs et des médias. Ils doivent être conscients que leurs produits et les images associées avec ces produits ont un impact et que ce n’est pas toujours un bon impact ».

Source : Avenir de la culture
Via Novopress Quebec

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mardi, 07 avril 2009

Le communautarisme américain

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

Université d'été de la F.A.C.E. - 1995

Résumé des interventions

Le communautarisme américain

(intervention de Robert Steuckers)

 

Le communautarisme américain d'aujourd'hui, c'est-à-dire tout le débat entre sociologues visant à réhabi­liter la notion de “communauté” aux Etats-Unis, est une réponse tardive au néo-libéralisme et une redé­couverte des liens communautaires. Conscients de la faillite et de l'impasse que sont l'individualisme et le collectivisme, les sociologues de la “nouvelle gauche” cherchent désormais à restaurer la logique com­munautaire. La plupart de ces nouveaux “communautariens” américains tâtonnent: ils tentent de vulgari­ser et d'adapter un discours qui a été parfaitement “scientificisé” en Europe avec Otto von Gierke, Ferdinand Tönnies (Communauté et société)  et François Perroux. Mais cet héritage précieux de la socio­logie avait été refoulé au profit de conceptions très “sociétaires” ou très “technocratiques” des agrégats humains. Les sociologues américains de la tradition “communautarienne” aujourd'hui émergente ont cons­taté, devant la déliquescence des villes américaines, devant la criminalité galopante, que leur société basculait dans l'anomie totale, vu la disparition de tous les référents sous les coups de l'hyper-modernité.

 

D'où le triple constat de cette nouvelle école sociologique et philosophique:

1) Les Etats-Unis sont une société sans référents, parce qu'elle est une société d'immigrés qui ont rompu avec leurs traditions ancestrales, sans en avoir reconstruit d'autres;

2) Or les Etats-Unis veulent être une société pleinement démocratique; mais une démocratie n'est viable que s'il existe au préalable des vertus civiques, c'est-à-dire une sorte de bloc d'idées incontestables, impliquant des droits et des devoirs. Les vertus civiques réclamées par toute démocratie saine sont l'avatar contemporain de la virtus  des Romains, de la virtù  de Machiavel et de la vertu de Montesquieu.

3) Pour que ces vertus civiques demeurent vivantes, dynamiques, adaptables aux circonstances, il faut que demeurent les liens, valeurs et comportements traditionnels; d'où la notion d'un “progrès” —qui effa­cerait définitivement ces legs irrationnels du passé pour qu'advienne un bien définitif, rationnel, raison­nable et épuré—  n'est plus défendable.

 

C'est sur base de ce triple constat que la sociologie récente aux Etats-Unis lance un appel aux citoyens pour qu'ils renouent avec leurs traditions, mais cet appel demeure assez vague et imprécis quand on le compare à la profondeur d'analyse d'un Tönnies ou d'un Perroux. Nous préférerions retourner à la rigueur de Tönnies et de Perroux, mais cette rigueur n'est plus directement accessible, même en milieu acadé­mique, c'est pourquoi nous sommes contraints en pratique de revenir dans le débat sur la “communauté” par cette “petite porte” —la seule qui ne soit pas condamnée—  qu'est le communautarisme américain ac­tuel.

 

Autre aspect intéressant de ce débat: il permet de dépasser le paralysant clivage “gauche/droite”, étant donné, justement, que les “communautariens”, s'ils viennent en majorité de la “gauche”, viennent aussi assez souvent d'une droite “axiologique” ou “aristotélo-thomiste”. Le communautarisme permet de ras­sembler tous ceux qui s'opposent au libéralisme radical, à l'hyper-individualisme et au culte de l'argent, revenu sur l'avant-scène avec Thatcher et Reagan. A l'époque du grand avènement du néo-libéralisme, de la fin des années 70 à l'entrée de Reagan à la Maison Blanche, les théories de Hayek et des Chicago Boys avaient triomphé de celles de John Rawls, consignées dans un ouvrage célèbre à l'époque, A Theo­ry of Justice  (1979). Rawls critiquait la notion de contrat aliénant ma liberté de citoyen, déléguant mes pouvoirs naturels à une instance appelée à barrer la route au chaos (guerre civile). Pour Rawls, le fait de déléguer ainsi ses propres pouvoirs ruine les ressorts coopératifs naturels de toute la société. Pour dé­passer cet effet pervers du contractualisme, il faut rendre vigueur aux normes traditionnelles, se débar­rasser de cette philosophie anglo-saxonne qui estime que les normes et les valeurs découlent d'énoncés vides de sens. Le livre de Rawls provoque deux réactions: 1) Nozick et Buchanan définissent des normes toutes faites, jugées comme universellement valables et intangibles (origines néo-libérales de la political correctness);  2) il faut faire revivre les normes traditionnelles, donc redonner vie aux res­sorts des com­munautés.

 

Parmi les nombreux protagonistes de ce nouveau “communautarisme”, citons Ben Barber, issu d'une gau­che très activiste, engagée dans tous les combats depuis 68. Ben Barber oppose très justement le li­bé­ra­lisme à la démocratie. Le libéralisme signifie l'anarchie sociale, l'effilochement des tissus séculaires, la fin des institutions stables de la société (mariage, famille, etc.), l'anomie. La démocratie, si elle est forte, im­plique la participation, donc des agrégats humains aux ressorts naturels intacts, capables de s'adapter en souplesse à tous les contextes et à tous les coups du sort. Restaurer une démo­cra­tie forte, contre les effets dissolutifs du libéralisme, signifie accroître la participation des citoyens à tous les niveaux de dé­cision, réactiver la citoyenneté. En effet, le libéralisme, issu du contractualisme, est une “démocratie faible”, dans le sens où il participe d'une épistémologie “newtonienne”, où le simplisme géométrique est de rigueur; le libéralisme est cartésien, dans le sens où il est déductif et où il ne consi­dè­re comme pleinement citoyens que ceux qui adhèrent religieusement à quelques vérités abstraites, alors que le “commu­nau­ta­ris­me” est amené à définir le citoyen comme le ressortissant d'un Etat qui a une histoire particulière et a dé­ployé des valeurs spécifiques, particularités et spécificités qui fondent justement la concrétude de la ci­toyenneté. Le libéralisme postule un homme dépolitisé (qui a délégué ses pouvoirs potentiels à une ins­tan­ce supérieure), ce qui est une aberration aux yeux de l'ancien militant gauchiste Ben Barber. Il faut donc opérer un retour à la Polis antique, où le citoyen se situe dans une histoire, où il intervient et par­ti­ci­pe. Le libéralisme, soit la “démocratie faible”, génère des pathologies: atomisation so­ciale, chaos, ano­mie, expédiant de la dictature, passivité des citoyens. Une démocratie réelle, soit une démocratie forte, com­mencent par des “assemblées de voisins” (5000 citoyens décrète Barber), reliées entre elles par des “coo­pératives de communication” (rendues possibles par les progrès en télécommuni­cations). Ben Barber pro­pose ce modèle pour les Etats-Unis, société où aucune tradition ne subsiste et où aucune tradition par­ticulière ne peut s'imposer à la majorité. D'autrs communautariens parle de “faire éclore partout des sphè­res de justice”. Un débat passionnant que les “Bons Européens” doivent brancher sur les legs com­munautaires de leurs propres histoires et sur l'appareil conceptuel que nous lèguent Otto von Gierke, Tön­nies et Perroux.

(résumé de Catherine NICLAISSE).

 

 

 

vendredi, 03 avril 2009

Sidaction, piège à cons - Contre l'empathie gratuite et obligatoire

Sidaction, piège à cons

Contre l’empathie gratuite et obligatoire

Élisabeth Lévy est journaliste, rédactrice en chef de Causeur.

Moi, le sida, je suis pas pour. Je suis même très fortement contre. Et non seulement je suis contre le sida en général, mais je suis très contre le sida des Africains, des Européens et des autres ; je suis tout aussi farouchement opposée au sida des homos, des hétéros, des travelos et des abstinents-transfusés. N’essayez pas, vous ne trouverez pas chez moi une once de complaisance pour cet ennemi public qui prétend nous priver de nos droits acquis au plaisir avec-qui-je-veux-quand-je-veux. On a pu me reprocher d’avoir cherché à comprendre les électeurs de Le Pen et ceux du FIS en Algérie (on connaît la pente glissante qui va de comprendre à justifier), d’aucuns me soupçonnent de ne pas participer avec une ferveur suffisante à la défense de nos libertés attaquées par qui vous savez. Mais dans la guerre de l’Humanité contre le redoutable HIV, mes états de service sont impeccables. Ou en tout cas passables. Si on ne peut pas dire que je sois à la pointe de la mobilisation, je n’ai jamais proféré ou écrit un mot qui laissât percer une sympathie mal réprimée ou une admiration nauséabonde pour le virus immonde – ni même pour son complice, le terrible Ratzinger (que paraît-il, les cathos français veulent débarquer comme s’il s’agissait d’un patron-voyou ou d’un président liberticide). Non, je vous jure, sur le sida, je suis clean. En cherchant bien, je suis à peu près sûre de n’avoir jamais répondu à un quêteur en ruban rouge “moi, le sida je suis pour”, alors que, honte à moi, j’ai bien dû une fois ou deux envoyer ainsi sur les roses un adversaire de la torture ou de la vivisection. Je ne le ferai plus.

Pourtant, depuis quelques jours, la vue d’un ruban me fait voir rouge. Ce défilé de journalistes concernés, animateurs engagés, artistes mobilisés et amuseurs conscientisés, me file des boutons. J’ai envie de leur balancer mes chaussures à la tête. Les politiques qui pérorent avantageusement, leur attestation de compassion épinglée au plastron me débectent. J’avais l’intention de m’infliger un peu de télévision ce week-end dans l’espoir de découvrir quelques contrevenants qui auraient refusé d’arborer leur rosette. Je l’avoue, j’ai renoncé. Un petit tour sur DailyMotion m’apprend cependant que Ruquier, Zemmour et Naulleau arboraient des revers affreusement vides. Il est vrai que l’obsédant ruban était gravé en incrustation sur l’écran, service public oblige. Heureusement, l’honneur fut sauf grâce aux invités. Avec leurs pin’s identiques, ceux-ci faisaient irrésistiblement penser aux “six anchois croupis dans la saumure du Bien” de Muray (la charité chrétienne m’interdit de rappeler qui il désignait par cette aimable formule). En tout cas, j’aurais adoré être invitée à l’émission pour ne pas le porter, ce ruban. Les programmateurs, ces divinités impitoyables qui terrorisent toutes les attachées1 de presse de Paris, n’ont pas pensé à moi.

Pourquoi tant de haine, me direz-vous ? Après tout, toutes ces bonnes volontés ne font de mal à personne. Et même elles font le bien. Or, contrairement à ce que pourraient penser des esprits simples, je ne veux aucun mal au bien. Je souhaite ardemment qu’on découvre un vaccin et qu’on arrête de nous prendre le chou avec cette malédiction contemporaine. Je suis également disposée à ce que l’on encourage l’usage du préservatif indépendamment de toute considération religieuse, ethnique, géographique ou sexuelle et à ce que l’on en enseigne le maniement à la maternelle. J’applaudirai quand on nommera Pierre Bergé ministre des Grandes causes et des Droits de l’homme – il ne le leur a pas envoyé dire aux Chinois : pas de droits de l’homme, pas de statuettes ! – et que sa première mesure sera la nationalisation immédiate de Durex et le remboursement du préservatif par la Sécurité sociale (je suis étonnée que cette revendication ne soit pas encore à l’ordre du jour de la Gay Pride). Au moment où j’écris ces lignes, je constate avec satisfaction que « mon » opérateur de téléphone mobile s’associe à l’union sacrée : je viens de recevoir un message me suggérant de soutenir le sidaction en envoyant un texto (et au fait, il toucherait pas un peu sur ce coup-là, frère SFR ?).

“Donnez pour le sida” (enfin contre, vous aurez rectifié) et “mettez des capotes” : j’ai beau chercher, je ne vois rien à redire aux deux commandements de la nouvelle religion officielle. Rien, sinon justement, qu’ils sont des commandements, gravés sur nos écrans comme la devise républicaine au fronton des mairies. Et avec ce genre de chose, on ne rigole pas. Le non-prosélytisme est déjà un crime. Essayez d’affirmer publiquement que vous préférez vous offrir un week-end ou des escarpins de douze plutôt que de donner un fifrelin à cette bonne œuvre obligatoire et vous verrez si ça fait rire votre auditoire. Voilà donc une semaine que tous les humoristes rebelles cognent en boucle sur le pape. J’attends celui qui osera se payer la fiole de Bergé ou ricaner sur le saint-ruban. J’admettrai que les Guignols sont subversifs le jour où ils déchireront le sidaction. Non madame, on ne peut pas rire de tout. Surtout avec vous. Pas un zeste de second degré ne sera toléré. Il était bien triste, vendredi, d’entendre Stéphane Bern qui avait troqué son élégance et sa distance amusée contre une solennité pompeuse et empreinte de respect onctueux pour l’inévitable Bergé. “Non ne me remerciez pas, c’est à nous de vous remercier pour tout ce que vous faites”, pour un peu il allait le remercier d’exister. Le fou du roi s’est aussi fendu d’une petite leçon de vie à l’usage des jeunes générations : “Ne faites confiance à personne.” Et pour être bien sûr que personne ne se marrait, dès que l’un de ses chroniqueurs tentait une vague blague au parfum de gaudriole, il s’empressait de lever l’ambiguïté d’un sentencieux : “C’est de l’humour, il faut utiliser des préservatifs.” Ce qui est marrant chez tous ces gens englués dans leur compassion pour les malades du sida, c’est qu’ils prennent lesdits malades, et avec eux tous leurs contemporains, pour des cons, incapables de faire le distinguo entre une blague et une affirmation sérieuse. Regardez-moi ces Africains qui obéissent aveuglément au Pape – comme en témoigne le succès de ses appels à la fidélité conjugale. Ces noirs sont de grands enfants. Cela dit, puisqu’on en est à l’éducation des masses, il faudrait peut-être préciser que les monogames impénitents peuvent se dispenser du recours à la capote – à condition bien entendu d’être munis d’une attestation de non-séropositivité qui devra être présentée sur demande à leur fucking-partner.

Désolée, mais le sidaction ne passera pas par moi. On me dira ce qu’on voudra, cet étalage de générosité, ce dégoulinage de vertu, ce matraquage de compassion sont obscènes. Ce défilé de pipoles qui rient de se voir si bons en ce miroir est dégoûtant. Que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, que ton aumône soit secrète, vous n’avez jamais entendu parler des Evangiles les gars ? D’ailleurs, le péquin est invité lui, à donner dans l’anonymat. Et puis, au-delà de l’obscénité, il y a le ridicule qui, comme toujours, semble échapper à tous les professionnels de la rebellitude. Pas un qui soit vaguement gêné de partir sabre au clair contre un adversaire sur lequel tous ses petits camarades se sont déjà rués. Montjoie, Saint-Denis, sus à l’ennemi ! Se payer le pape et dénoncer le virus, ça ne mange pas de pain et c’est bon pour l’image. Ce qu’aiment par-dessus tout nos courageux défenseurs du malade et de l’orphelin, c’est tirer sur les ambulances, de préférence en meute. Proclamer son soutien à une cause incontestable, telle est la dernière trouvaille des bouffons bouffonnants. À quand des badges pour dénoncer Hitler ? Un pin’s contre le racisme ? (Ah oui, celui-là on nous l’a déjà fait.)

On m’accordera (ou non) que le caractère hautement consensuel et même parfaitement unanimitaire de cette mobilisation a déjà de quoi porter sur les nerfs. Cela devrait suffire à renverser la charge de la preuve. Après tout, ce n’est pas à moi d’expliquer pourquoi ce raffut m’insupporte mais à ses auteurs de m’expliquer pourquoi ils le font. J’ai une petite idée que je vous livre telle quelle. Le sidaction est une proposition qu’on ne peut pas refuser parce que le sida est une maladie communautaire. Pour le dire clairement l’affaire des homosexuels mâles. Inutile de piailler, je sais qu’en vrai, c’est pas vrai. N’empêche que pour des raisons historiques et médicales, elle a été, dès son apparition (ou plutôt avec un train de retard comme l’explique Frédéric Martel dans Le Rose et le Noir), prise en charge par les associations homosexuelles. Pourquoi Pierre Bergé déploie-t-il tant d’énergie pour cette maladie-là et pas pour une autre ? Pourquoi toutes ces grandes âmes qui saignent pour l’Afrique ne donnent-elles jamais un gala pour lever des fonds pour la lutte contre la malaria ou la lèpre ? Pourquoi cette débauche d’empathie obligatoire ? La réponse est simple : le sidaction n’est que l’un des fronts de la lutte homosexuelle – et comme chacun sait la lutte continue. En conséquence, ne pas y participer, c’est être homophobe. (Et ironiser est bien pire encore.) D’ailleurs, je retire tout ce que je viens d’écrire. Je voudrais moi aussi contribuer à l’édification de mes concitoyens. Ne vous laissez pas enfariner. Comme le dit mon ami Marco, contre le sida, le ruban rouge, c’est pas efficace.

  1. Je sais, c’est sexiste et c’est fait exprès.

00:40 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : société, sociologie, postmodernité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 02 avril 2009

Vilfredo Pareto et la circulation des élites

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

Université d'été de la F.A.C.E. (juillet 1995):

Résumé des interventions

 

Jeudi 27 juillet 1995

 

Vilfredo PARETO et la circulation des élites

(Intervention d'Enrico Galmozzi, traduite par Alessandra Colla)

 

Cet exposé est aussi une présentation de la revue Origini, éditée conjointement par Alessandra Colla, le Centro Culturale Orion  et Sinergie Europee, qui vient de sortir un gros dossier sur Vilfredo Pareto.

 

Si des institutions scientifiques, comme celles qui gravitent autour de la maison d'édition Droz ou des Cahiers Vilfredo Pareto, à Genève et à Lausanne, ont continué, imperturbables, à éditer Pareto et ses exégètes ou continuateurs, en Italie, un voile est tombé sur son œuvre, jugé trop “à droite”, voire “pré-fasciste”, alors que la sociologie était jugée, à tort, comme un héritage exclusif des gauches. Pareto a donc toujours été plus accusé que lu, plus cité (à partir de sources secondaires) qu'étudié. Après les dé­cès de Raymond Aron et de Julien Freund, qui ont été ses meilleurs disciples, l'étude de l'œuvre paré­tienne est entrée, elle aussi, en dormition; avec la récente étude de Bernard Valade, on peut espérer son retour dans l'université française (cf. Pareto: la naissance d'une autre sociologie, PUF, 1990).

 

Dans le cadre de nos travaux, il est bon de rappeler quelques termes de la sociologie de Pareto:

- L'élite est la classe élue, un petit groupe qui se détermine seul, qui se montre capable d'influencer la masse, qui devient aussi, par le truchement du phénomène de la “circulation des élites” le groupe domi­nant au sein d'une société ou d'un Etat.

- Les résidus, sont des sentiments permanents, irrationnels, qui conditionnent les hommes individuelle­ment et collectivement, et déterminent leurs actions non-logiques. Ce sont les traditions, les héritages, les stratifications dues à la religion, aux droits anciens, aux préjugés.

- Les actions logiques, sont des raisonnements dérivés de l'observation des faits.

- Les actions non-logiques, relèvent, elles, des résidus.

 

Le fondement de l'œuvre de Pareto est une critique de l'idéologie, en somme, une volonté d'arracher les masques que se donne la praxis sociale pour retrouver le fonctionnement réel de la société et l'analyser crûment, sans aucun recours aux dérivatifs idéologico-philosophiques habituels. Dans le sillage de Pareto, le terme “idéologie” a été employé dans un sens polémique: les faits réels sont recouverts par un voile de nature idéologique, qui justifie l'existence d'appareils de pouvoir qui sont souvent efficaces en phase initiale de déploiement, mais qui s'usent avec le temps, pour tomber ensuite dans une caducité problématique, enrayant la bonne marche de la société et barrant la route aux forces innovantes. Pareto veut forger une méthode d'investigation scientifique de ce processus, afin que les forces innovantes puissent disposer d'un instrument critique imparable et jeter bas les forces déclinantes avant qu'elles ne figent une société et ne finissent par la tuer. Pour Pareto, il ne s'agit pas tant de refuser a priori toutes les mystifications idéologiques, car celles-ci se justifient dans la mesure où il y a une véritable demande so­ciale de mystification. Mais il faut que cette mystification serve un fonctionnement optimal de la société. Si elle ne justifie plus qu'un fonctionnement caduc, elle doit disparaître au plus vite. La mystification effi­cace est “mythe” au sens sorélien du terme, et correspond aux besoins réels de la société, fournissant un fondement axiologique pour maintenir harmonieusement un équilibre entre la masse et les élites; la mystification déployée comme écran devant une société en déclin ou un appareil politique figé est mani­pulation.

 

La politique est donc un lieu privilégié de la fiction, une fiction qui assure un équilibre des forces en jeu entre la masse et les élites. Pareto, pessimiste, méprise la démocratie parlementaire qui oblitère les spon­tanéités populaires, y compris quand elle prévoit le plébiscite (qui est une action de violence masquée par la légalité). Ce mépris marque une rupture radicale avec la conception optimiste du contrat social, domi­nante au 19ième siècle, et avec le positivisme d'un Auguste Comte. Ce dernier pensait que l'on pouvait obtenir une connaissance rationnelle de la société, or celle-ci se développe imprévisiblement: elle est un organisme en quête d'un équilibre et, en tant que telle, elle se soustrait à tous les calculs que libéraux, optimistes, positivistes, eudémonistes, progressistes, etc. ont cru benoîtement être des lois immuables dans le fonctionnement des sociétés humaines, en tous temps et en tous lieux.

 

Le pessimisme de Pareto interdit les jugements de valeur simplistes. Quand une élite nouvelle renverse une élite caduque ou moisie, cela ne signifie pas qu'elle est moralement meilleure: plus simplement, elle fonctionne mieux au moment où elle accède au pouvoir. Elle incarne une rupture avec l'ancienne culture dominante et ses traditions. La théorie parétienne de la circulation des élites permet de penser un équi­libre dynamique, une médiation qui, si elle est acceptée comme telle, empêche un bouleversement pa­roxystique et total de la société. Si les gouvernants acceptent la théorie de la circulation des élites et donc la caducité graduelle de tout pouvoir, ils coopteront et accepteront à leurs côtés les représentants des challengeurs, induisant de la sorte une rotation souple des élites. Les élites n'ont donc jamais duré au cours de l'histoire; elles ont pris le pouvoir dans leur phase de jeunesse, elles se sont usées en cours de maturité et elles ont sombré dans leur phase de vieillesse.

 

Pareto est toutefois inquiet en voyant s'installer le pouvoir de l'argent, la ploutocratie. L'économie omni­présente vide toutes les relations sociales de sens, elle détache les hommes de la religion, des traditions, des histoires nationales, toutes instances qui conférent du sens et à l'intérieur desquelles s'opéraient les contestations amenant les changements de pouvoir. La disparition des instances porteuses de sens va figé les processus de circulation et de rotation des élites.

 

(cf. Origini,  n°11, textes consacrés à Pareto et édités sous la direction d'Enrico Galmozzi; disponible à l'adresse belge de “Synergies”, prix: 25 FF ou 150 FB, port compris).

mercredi, 25 mars 2009

Gewelddadige spellen

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Gewelddadige spellen

Geplaatst door yvespernet

Naar aanleiding van de schietpartijen in scholen is het debat weer opgelaaid over gewelddadige spellen. Nu zouden er weer extra controlemechanismen moeten komen op spellen en anderen willen dan weer dat gewelddadige spellen gewoon niet meer op de markt komen. De daders van deze gruweldaden zouden immers geïnspireerd zijn door gewelddadige spellen en de oplossing zou dan toch simpel zijn? Gewoon heel die boel afschaffen en de overblijvende spellen sterk laten controleren.

Wel beste mensen, die controlemechanismen op spellen bestaan al. Die controlemechanismen heten verantwoordelijke ouders die weten waarmee hun kinderen bezig zijn. Ouders die interesse tonen in wat hun kinderen doen. Natuurlijk heeft elk kind ook geheimen voor zijn of haar ouders, maar als ouder is het maar een zeer kleine moeite om te zien welke beelden verschijnen op het televisie- of computerscherm. Er zullen altijd zonderlingen zijn die geschift zijn en dan daarenboven ook gewelddadige spellen spelen. Maar volgens mij zijn het eerder de daders van zulke daden die zich aangetrokken voelen tot gewelddadige spellen dan de spellen die mensen zouden aanzetten tot het plegen van extreme gewelddaden. Ouders van zulke figuren kunnen natuurlijk zeer weinig doen tegen de daden van hun kinderen, maar zij kunnen wel een rol spelen bij gewone kinderen om het geweld te kaderen en in te grijpen waar nodig. Ik zeg niet dat bij de schietpartijen ouders hun verantwoordelijkheid hebben ontlopen, verre van zelfs. Maar het waren dan ook personen met grote mentale problemen, niet gewone mensen die na een paar spelletjes te spelen opeens bedachten dat hun school overhoop schieten wel eens “tof” zou kunnen zijn.

Persoonlijk ben ik een relatieve “hardcore gamer”. Ik heb dan ook vele “extreem gewelddadige” spellen gespeeld. Noem ze maar op en er is een grote kans dat ik gespeeld heb en nog steeds in mijn bezit heb. Carmageddon I en II, de GTA-serie, Counterstrike, Diablo I & II, Manhunt, etc… Nooit heb ik echter de neiging gevoeld om mijn school overhoop te gaan schieten, mensen op straat voor punten te gaan dood rijden of andere extreme gewelddaden. Dat sommigen vol overtuiging wijzen naar die spellen is mijn inziens dan ook een ontlopen van verantwoordelijkheden. De beste controlemechanismen zijn de ouders. Als men een spel koopt, staat het al vol met waarschuwingen. Zo ben ik een grote fan van de Europa Universalis-reeks. Daar worden rijken gebouwd, legers de dood ingestuurd en mensen al dan niet vrijwillig tot een bepaalde godsdienst bekeerd. Het is minder grafisch dan een Counterstrike, maar in de kern is het wel pakken erger.

Ook het focussen op Counterstrike is compleet onnodig. Dat is een onschuldige mod van de Half Life-serie waar het er nog heel braafjes aantoe gaat. Het is wel enorm bekend en enorm graag gespeeld, maar om nu te zeggen dat het extreem gewelddadig is… Dan is bv Manhunt of GTA pakken “erger”, maar ik blijf erbij dat zo’n spellen mensen niet aanzetten tot moorden. Een spel als voornoemden kan volgens mij zelf als uitlaatklep dienen. Daarbij, als ze de grote sector van videospellen nog meer willen reglementeren, een sector die trouwens nog wel winst kent, dan gaan ze wel op internet spellen zoeken. Gamefudge.com, kongregate.com, etc… Er zijn nog tonnen meer websteks waar je gratis Flash-spellen kan spelen die bij momenten honderd keer gewelddadiger zijn dan wat je in de winkel kan kopen.

dimanche, 22 mars 2009

Zemmour, une élite comme les autres?

Zemmour, une élite comme les autres ?

Par Karl Hauffen

En lisant la dernière brève de Zemmour dans laquelle il se félicite de la mort des régions françaises, j’ai soudain pris conscience de la béance qui me séparait de ce patriote de plume. Car si la mort de ses régions est une chance pour la France, on est bien en droit alors de se demander ce que revêt exactement le terme de France. Qu’est-ce que la France pour Zemmour et avec lui, pour l’ensemble de l’intelligentsia intra-muros qui postillonne à longueur de temps le mot France comme d’autres celui d’Europe.

On aimerait qu’il nous explique une bonne fois pour toute ce qu’est au juste la France ? Un roman de Balzac ? Une poésie de Victor Hugo ? Napoléon et son code civil ? De Gaulle et sa grandiloquence de brave papi ? Un peu tout ça à la fois sans doute… Difficile donc de ne pas réprimer un certain pincement ironique devant cette vision proprement désincarnée et cérébrale de la nation. Dans ce fatras poussiéreux de bibliothèque, on cherche avec peine un corps vivant doté d’une âme. L’intelligent Zemmour nous offre-là la figure parfaite de l’idiot-savant - cette particularité dont seules les grandes écoles d’État parisiennes ont la recette - qu’il aime pourtant tant à fustiger par ailleurs. Inutile alors de discourir à longueur d’émissions sur le déclin de la France. Car une nation qui n’a pas d’autres points d’ancrage identitaire qu’une liste de bouquins, un carton rempli de textes administratifs et, encadrées de dorure, des photos d’hommes d’État illustres dans de ridicules costumes de parade est forcément une nation condamnée. Ce qu’aime et veut sauver Zemmour, ce n’est pas la France, mais son musée, ou plus exactement son mausolée.

La France meurt de son centralisme bureaucratique et des relations incestueuses qu’entretiennent entre elles les élites parisiennes. Elle meurt à petit feu d’être représentée par un aréopage de parvenus, élus mais sans pouvoir, intarissables bavards mais dénués de la moindre liberté d’initiative. Qui décide ? Les conseillers du président et les hauts-fonctionnaires au crâne d’œuf grouillant dans les couloirs des ministères aux nominations ronflantes et aux compétences à rallonge. Qui les a élus ? Personne. Ils sont là depuis des décennies et survivent inlassablement aux alternances gouvernementales, leurs mille projets de loi à tiroirs sous le bras. Cette caste d’idiots-savants est si savamment idiote qu’on connait à l’avance les solutions qu’elle proposera, que notre président s’appelle Mitterrand, Chirac ou Sarkozy. Pour combler les déficits ? Créons un nouvel impôt. Pour lutter contre le chômage ? Créons une subvention. Pour lutter contre l’insécurité ? Créons une commission. Pour lutter contre la dérive communautariste qu’induit une politique migratoire inconsidérée ? Créons un observatoire ou mieux encore, une Haute autorité de lutte quelconque.

La France de Zemmour est pourrie de la tête, une tête bouffie qu’une thrombose bureaucratique ne fait que rendre plus hideuse encore. La France qui travaille, celle silencieuse qui ne rappe pas, celle industrieuse des ouvriers, des petites gens, des petits entrepreneurs, cette France-là ne circule pas en vélib dans Paris intra-muros, ne lit pas Balzac et n’éprouve aucun orgasme particulier de la lecture emphatique des textes administratifs qu’on oppose quotidiennement à ses velléités de liberté. L’antimondialiste Zemmour qui se plait à moquer l’Europe désincarnée de Bruxelles rêve une France autant désincarnée, si ce n’est même plus. Que tout ceci est tragi-comique ! C’est en aimant la France de cette façon-là, que la petite bande des souverainistes autorisés, celle des Max Gallo, des Henri Guaino et des Villepin, contribue à en aggraver l’agonie. Zemmour ne déroge donc pas à la règle. Ne lui en déplaise, mais la France d’après, celle qui aura définitivement tué ses pays charnels, ne sera ni ce mausolée auquel il rêve, ni même cette ultime tentative de rester fidèle au souvenir du premier consul.

Sans ses régions, la France ne sera qu’une tête décapitée sanguinolente posée sur son propre cadavre en putréfaction. Un État lancé sans entrave sur la voie totalitaire avec tout en haut, un pouvoir qui aura définitivement retiré à ses couches populaires leur dernier outil de contrôle démocratique. La région, on le voit partout en Europe, est le premier espace d’adhésion et d’expression politique. Elle est la première brique sociale par laquelle la collectivité des hommes doit nécessairement passer pour se retrouver et se mettre en situation d’amorcer une action politique. Entre régionaux, on se comprend, on utilise les mêmes mots avec les mêmes accents. Quand on sait y lire, un Alsacien en dit plus en un regard que Zemmour en deux heures d’émission. S’organiser au niveau de la région devient alors plus simple, coule de source. Qu’attend donc Zemmour de ce découpage administratif qui refusera d’entendre les revendications d’hommes de même culture, de même souche sociale, conditionnés par le même contexte économique et moulés par des mœurs communes qui n’ont rien à voir avec celles apprêtées qui se pratiquent dans le monde clos du show-biz parisien ?

La France meurt chaque jour un peu plus de son incapacité à connecter une élite arrogante avec une population réduite au silence et Zemmour, dont on apprécie souvent par ailleurs les analyses pertinentes et affutées, nous dit sans rire que tout ceci est bel et bon. Comment ensuite le croire lorsqu’il prétend aimer la France ? En cela, il nous démontre qu’il fait bien partie, ni plus, ni moins, du même cercle fermé des élites autorisées, malgré le fait qu’il ait fait métier de les brocarder. S’il aime la France, il nous avoue son indifférence pour les Français, c’est-à-dire ce fragile assemblage de peuples européens qui composent la France. Zemmour est tombé amoureux d’un portait, mais il s’interdit d’en regarder l’incarnation vivante dans toute sa nudité. Car la France n’est pas seulement une idée, elle est avant tout une réalité organique complexe et diverse.


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