Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 17 janvier 2023

Les objectifs du Maroc pour sa nouvelle démarcation maritime

63237714-45633500.png

Les objectifs du Maroc pour sa nouvelle démarcation maritime

Ali El Aallaoui

Analyste et chercheur en géopolitique

Source: https://masticadoresdeletrasfocus.wordpress.com/2020/09/05/los-objetivos-marroquies-de-su-nueva-delimitacion-maritima-by-ali-el-aallaoui/

L'objectif des autorités marocaines est de redessiner à nouveau le paysage politique du Sahara occidental, et de faire croire qu'il s'agit d'une étape dans le conflit territorial issu d'une mauvaise gestion des relations hispano-marocaines.

C'est la première fois dans l'histoire de l'humanité que toutes les régions du monde ont une forte présence dans les mers en même temps. Comme par le passé, la mer reste un vecteur de puissance, un espace nécessaire et essentiel pour développer des ambitions économiques et politiques.

La possession de matières premières, qu'elles soient agricoles ou minérales, a toujours été un élément fondamental de la puissance. C'est la volonté de les acquérir qui est à l'origine des grandes découvertes de la fin du 15ème et du début du 16ème siècle. Au début du 20ème siècle, dix des douze plus grandes entreprises américaines exploitaient des ressources naturelles. Tous les pays riches du 19ème et du début du 20ème siècle disposaient d'importantes ressources naturelles.

Partant de ce constat, le Maroc veut à tout prix faire pression sur l'Espagne pour qu'elle accepte le fait accompli principalement au Sahara occidental, sachant que la situation dans ce territoire, qualifié de territoire non autonome par les Nations Unies en 1963, est dans l'impasse depuis des années.

Contexte et objectif géopolitique

En d'autres termes, d'un point de vue contextuel, le Maroc profite de la période de non paix et de non guerre au Sahara Occidental. Elle considère également l'actuel gouvernement espagnol comme plus faible et veut donc le pousser à négocier l'espace maritime du Sahara occidental afin de lui accorder une certaine souveraineté territoriale de facto. Cependant, il doit savoir que l'Espagne est la puissance administrante au Sahara Occidental en vertu du droit international et que le Maroc est la puissance occupante.

Les nouvelles lois marocaines définissant son nouveau domaine maritime fixent ses eaux territoriales à 12 miles, délimitent sa zone économique exclusive à 200 miles et décident d'étendre son plateau continental à 350 miles. Avec les règlements adoptés, le Maroc étend sa tutelle légale sur l'espace maritime qui comprend le Sahara occidental jusqu'à la ville de Lagüera et au nord-est jusqu'à Saidia, à la frontière avec l'Algérie.

1-68.jpg

Dans cette perspective, l'objectif du Maroc est de retarder et de bloquer l'exécution de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 21 décembre 2016 qui a séparé le Sahara de la sphère de compétence des relations entre le royaume alaouite et l'UE. Car la question de la souveraineté sur le Sahara est le défi le plus important auquel sont confrontés les futurs accords entre le Maroc et l'UE. Dans ce sens, l'intégration des produits du territoire sahraoui dans les accords d'association avec l'UE présentera bientôt au Maroc un nouveau défi en termes de souveraineté sur le Sahara occidental.

Objectif économique

Les intérêts économiques et stratégiques et l'épuisement des ressources naturelles sur terre conduisent les États à poursuivre cette tentative de monopolisation des espaces maritimes au-delà des mers territoriales, dans les limites du plateau continental, avec la volonté de contrôler non seulement la surface, mais aussi les ressources halieutiques et minérales des fonds marins et du sous-sol.

En outre, les ressources naturelles sont considérées comme augmentant l'intervention des États dans les affaires des autres. Les deux guerres du Golfe sont perçues comme étant largement liées à la priorité donnée à l'accès aux réserves de pétrole.

Les ressources naturelles du Sahara occidental sont abondantes et jouent un rôle important pour influencer la diplomatie marocaine envers ses partenaires principalement européens. Ce qui explique , l'importance géostratégique et économique du Sahara occidental pour le Maroc, et aussi pour l'Union européenne en termes de ressources, ceci explique l'accord signé entre l'UE et le Maroc en 2019 sans aucun respect des décisions de la Cour de justice de l'Union européenne en 2016.

L'objectif stratégique du Maroc: maintenir le statu quo au Sahara occidental avec l'aide de l'Espagne

Le Maroc veut à tout prix rester sur le territoire sahraoui car il estime que le temps joue pour lui, que le développement de la région et l'évolution de la composition de la population rendront irréversible le rapport de force en sa faveur. C'est dans cette perspective que s'inscrit la nouvelle politique marocaine de délimitation maritime unilatérale.

Le principal intérêt du Maroc dans cette nouvelle approche est de prolonger le conflit au Sahara occidental sur le long terme, ou du moins de ne pas le résoudre avant longtemps. Ainsi, sans la coopération espagnole à cet égard, le Maroc ne peut pas appliquer sa politique coloniale au Sahara occidental car ses voisins, l'Algérie et la Mauritanie, s'opposent à ses revendications territoriales, sans parler du peuple sahraoui.

L'objectif des autorités marocaines est de redessiner à nouveau le paysage politique du Sahara occidental, et de faire croire qu'il s'agit d'une phase dans le conflit territorial et d'une mauvaise gestion des relations hispano-marocaines.

A propos des interventions "pacifiques" des États-Unis

inpksoidex.jpg

A propos des interventions "pacifiques" des États-Unis

Leonid Savin

Source: https://www.geopolitika.ru/en/article/us-peaceful-interventions

En novembre 2022, l'Institut des opérations de maintien de la paix et de la stabilité (qui sonne déjà comme un oxymore) a publié le Guide pratique du soutien de la défense à la stabilisation (DSS) : A Guide for Stabilization Practitioners. U.S. Army Peacekeeping and Stability Operations Institute (PKSOI), novembre 2022).

Ce document fait la lumière sur la manière dont le Pentagone interagit avec les autres autorités américaines et sur la manière dont l'armée américaine mène de telles opérations. En général, il fait référence aux opérations menées en dehors des États-Unis, c'est-à-dire dans d'autres pays.

Le manuel stipule que "la responsabilité principale pendant la stabilisation est de soutenir et de renforcer les efforts civils des agences principales du gouvernement des États-Unis conformément aux autorités statutaires disponibles, principalement en assurant la sécurité, en maintenant l'ordre public de base et en répondant aux besoins immédiats de la population".

550x705.jpg

Le rôle du DOD (Department of Defence) dans la force de stabilisation est placé dans le contexte gouvernemental plus large des lois, règlements et politiques liés à la stratégie de sécurité nationale, à la stratégie américaine de prévention des conflits et de promotion de la stabilité, à la revue d'assistance à la stabilisation et à la stratégie de défense nationale".

En d'autres termes, il existe un certain nombre de politiques et de lois qui sous-tendent les actions militaires américaines visant à intervenir dans d'autres nations si elles répondent aux critères définis dans ces doctrines et ces lois.

En général, il est indiqué que :

"1) Les États-Unis et nos partenaires ont besoin d'une approche nouvelle et plus disciplinée pour mener à bien la stabilisation dans les zones touchées par des conflits. Cette approche comprend l'analyse des risques et la concentration de nos efforts sur ce qui est absolument nécessaire pour atteindre la stabilité, plutôt que de poursuivre des programmes disparates en même temps. Une première étape essentielle vers des efforts de stabilisation plus harmonisés consiste à s'entendre sur les principes fondamentaux du concept lui-même. Malgré une expérience internationale significative au cours des dernières décennies, le concept de stabilisation reste mal défini et mal institutionnalisé dans les structures gouvernementales et multilatérales. Ce manque de normalisation de la définition et du processus conduit à des erreurs répétées, à des dépenses inefficaces et à une faible responsabilisation quant aux résultats.

2) Les décideurs politiques veulent être plus sélectifs et plus ciblés sur la façon dont nous nous engageons dans les environnements de stabilisation afin de maximiser la valeur des ressources des contribuables américains et internationaux. L'approche revitalisée de la stabilisation décrite ici peut aider à cibler l'engagement diplomatique dans ces environnements pour faire avancer une stratégie liée aux résultats de la stabilisation, permettre un meilleur séquençage et une meilleure superposition de l'assistance pour soutenir les acteurs légitimes locaux, réaliser des économies et favoriser une meilleure division du travail entre le gouvernement américain et les donateurs et institutions internationales".

snksIVXK_400x400.png

En gardant ces leçons à l'esprit, l'État, l'USAID et le DoD ont élaboré une définition affinée de la stabilisation qui peut guider nos efforts à cet égard. Nous définissons la stabilisation comme un effort politique impliquant un processus civil-militaire intégré pour créer les conditions dans lesquelles les autorités et les systèmes légitimes locaux peuvent gérer pacifiquement les conflits et empêcher une résurgence de la violence. De nature transitoire, la stabilisation peut inclure des efforts pour établir la sécurité civile, donner accès à la résolution des conflits, fournir des services de base ciblés et établir une base pour le retour des personnes déplacées et le développement à plus long terme".

Les acteurs clés de la politique étrangère des États-Unis - le Pentagone, le Département d'État et l'USAID, connue pour son soutien aux révolutions de couleur dans le monde - sont mentionnés.

Il est dit que "les Etats-Unis sont intéressés par la conduite d'activités de stabilisation dans l'un des pays suivants: Irak, Afghanistan, Syrie et Somalie; et les pays/régions identifiés dans la loi sur l'insécurité mondiale (GFA): Haïti, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, la Libye, le Mozambique, et la région côtière de l'Afrique de l'Ouest composée du Bénin, de la Côte d'Ivoire, du Ghana, de la Guinée et du Togo".

La moitié de ces pays ont déjà été directement attaqués par les États-Unis et leurs partenaires de l'OTAN. Par conséquent, le gouvernement américain veut prendre certaines mesures pour éliminer les conséquences de sa propre présence.

Prêtons attention aux principes de base de la Stabilization Assistance Review (un document-cadre visant à maximiser l'efficacité des efforts de stabilisation du gouvernement américain publié sur le site Web du département d'État américain en 2018) qui a été mentionnée.

Il note que "le gouvernement américain devrait institutionnaliser un processus par lequel nous identifions les pays/régions touchés par des conflits qui méritent une attention accrue, évaluons les intérêts et les priorités des États-Unis pour faire progresser la stabilisation dans ces pays/élaborons une planification stratégique pour faire face aux défis de la stabilisation". Les critères clés pour déterminer si, quand et comment poursuivre une mission de stabilisation doivent inclure l'intérêt national américain évalué; l'appropriation par les partenaires nationaux et locaux; les risques, les contraintes et les opportunités dans l'environnement opérationnel; le niveau de risque que nous sommes prêts à assumer; et le niveau de ressources durables que nous sommes prêts à engager.

ausa_poster_v1_09102019-2-e1595617841866.jpg

"... Une stabilisation réussie commence par l'élaboration d'une stratégie politique basée sur les résultats qui décrit nos hypothèses de base et les états finaux réalisables et qui guide toutes les lignes d'effort - l'engagement diplomatique, la défense, l'aide étrangère et l'engagement du secteur privé, le cas échéant - afin d'assurer l'unité de but au sein du gouvernement américain".

Dans les régions où la stabilisation est la plus prioritaire, l'État, l'USAID et le DoD doivent travailler avec l'ambassade américaine concernée, le bureau régional, les Combatant Commands et d'autres parties prenantes pour développer une stratégie politique pour la mission de stabilisation.

Les éléments clés à aborder dans la stratégie politique comprennent : les objectifs et la capacité du pays partenaire; les intérêts définis du gouvernement américain et les domaines dans lesquels les intérêts peuvent être en concurrence; la cartographie des acteurs clés; les états finaux et les objectifs politiques souhaités; les intérêts et les objectifs des partenaires; les besoins en ressources anticipés; le rôle des différents acteurs du gouvernement américain et des donateurs internationaux; les mécanismes de coordination civilo-militaire; l'évaluation des risques; et les analyses stratégiques pour suivre dans le temps et mesurer les progrès".

Il est immédiatement frappant de constater que les États-Unis évaluent non pas les intérêts des pays et régions touchés par les conflits, mais les leurs. En même temps, la responsabilité est placée sur les partenaires (vraisemblablement - sur les dirigeants des pays où les opérations de stabilisation seront effectuées). En d'autres termes, les autorités évitent toujours, dans un premier temps, d'assumer la responsabilité des échecs et des conséquences, à l'instar de ce que nous observons en Irak et en Afghanistan. Il est tout à fait naturel que Washington fasse de même à l'égard de l'Ukraine, dans laquelle il déverse actuellement des armes.

DSSguide4StabPrac_FCP_112022-1.png

Il est significatif que sur la carte des conflits, où plus d'un millier de personnes sont mortes au cours des cinq dernières années à cause des combats, l'Ukraine soit présente, mais qu'elle ne soit pas du tout mentionnée dans le document lui-même. Au lieu de cela, il mentionne régulièrement l'Afghanistan et les divers programmes que les États-Unis y ont mis en œuvre.

La plus récente Stratégie de prévention des conflits et de promotion de la stabilité (publiée en 2020) souligne un changement d'approche globale dans les interventions que les États-Unis entreprennent.

"Plutôt qu'une construction de la nation pilotée de l'extérieur, les États-Unis soutiendront des solutions politiques pilotées localement qui s'alignent sur les intérêts de sécurité nationale des États-Unis. Plutôt que des efforts fragmentés et de grande envergure, les États-Unis cibleront les facteurs politiques à l'origine de la fragilité. Plutôt que de déployer des efforts diffus et illimités, les États-Unis s'engageront de manière sélective en fonction des intérêts nationaux, des progrès politiques du pays hôte et de paramètres définis. Plutôt que de mettre en œuvre un ensemble disparate d'activités, les États-Unis intégreront stratégiquement leur réponse politique, diplomatique et programmatique".

En effet, les États-Unis avaient l'habitude de pratiquer le soi-disant "nation-building" - leur propre concept, imposé aux autres pays comme la seule recette correcte pour le développement de l'État. L'Afghanistan est un exemple parfait de la justesse et de l'efficacité de ce modèle. Bien sûr, là-bas, la priorité était donnée à toutes ces attitudes libérales-démocratiques qui existent aux États-Unis, sans tenir compte des spécificités culturelles et religieuses du pays cible.

Mais dans la nouvelle approche, là encore, l'intérêt principal est d'assurer la sécurité des Etats-Unis. Les facteurs qui seront retenus comme contribuant à l'instabilité dépendent entièrement des décideurs à Washington. Il ne fait aucun doute qu'au Liban, par exemple, ils incluront le parti politique Hezbollah et leurs alliés parmi ces facteurs. Mais il est peu probable que les forces d'autodéfense kurdes en Syrie, que la Turquie considère comme un groupe terroriste et la Syrie elle-même, du moins, comme une opposition armée, figurent sur cette liste. Car ce sont des forces qui sont utilisées comme des proxies par les États-Unis eux-mêmes.

Examinons les objectifs spécifiés dans cette stratégie. Le premier, intitulé "Prévention", indique que l'un des objectifs est de "développer et/ou renforcer les systèmes d'alerte précoce et les plans d'action précoce locaux, nationaux et régionaux, soutenus par une diplomatie préventive".

Rappelons que la diplomatie préventive n'est rien d'autre qu'un ensemble de menaces verbales adressées à un acteur. Bien que le site web de l'ONU donne une formulation plus douce - "actions diplomatiques visant à prévenir les désaccords entre les parties, l'escalade des désaccords existants en conflit, ainsi qu'à limiter la propagation des conflits existants".

Elle peut être trompeuse, tout comme la doctrine de la "responsabilité de protéger", qui, à en juger par la pratique et les réactions d'un certain nombre de pays, est l'apanage exclusif de l'Occident. Comme aucun des auteurs de cette doctrine ne s'est précipité pour défendre la population russophone en 2014 après le coup d'État en Ukraine et la répression militaire qui a débuté dans le sud-est de l'Ukraine, la diplomatie préventive sera également dirigée contre les pays et les gouvernements qui ne sont pas des clients et des satellites des États-Unis.

De même, le deuxième objectif, intitulé "Stabilisation", se lit comme suit : "Aider les acteurs nationaux et locaux, y compris, entre autres, la société civile et les femmes dirigeantes, à négocier et à mettre en œuvre des accords de paix ou des cessez-le-feu durables et inclusifs et les dispositions connexes en matière de justice transitionnelle et de responsabilité".

La manipulation des ONG et des projets de genre par les États-Unis est connue depuis longtemps. Et les auteurs ne font ici que souligner ces facteurs.

La stratégie mentionne également les outils que sont les sanctions, la pression financière, le renseignement, la surveillance et les communications stratégiques.

D'autres documents sont également mentionnés dans le guide de stabilisation. L'un d'eux est la stratégie américaine sur les femmes, la paix et la sécurité (dernière version publiée en juin 2019).

Elle peut être utilisée comme une justification supplémentaire de l'intervention, car les quatre lignes d'effort peuvent être interprétées comme justifiant les interventions.

    - Rechercher et soutenir la préparation et la participation significative des femmes du monde entier aux processus décisionnels liés aux conflits et aux crises ;

    - Promouvoir la protection des droits fondamentaux des femmes et des filles, l'accès à l'aide humanitaire et la sécurité contre la violence, les abus et l'exploitation dans le monde entier ;

    - Ajuster les programmes internationaux des États-Unis pour améliorer les résultats en matière d'égalité et d'autonomisation des femmes ;

    - Encourager les gouvernements partenaires à adopter des politiques, des plans et des capacités pour améliorer la participation significative des femmes aux processus liés à la paix et à la sécurité et aux institutions décisionnelles.

Enfin, le dernier document clé mentionné est la directive n° 3000.07 du Pentagone sur la guerre irrégulière.

Elle stipule que les activités liées à la guerre irrégulière seront intégrées aux efforts des autres agences du gouvernement américain (USG), des partenaires étrangers en matière de sécurité et de certaines organisations internationales en soutenant :

    - Les politiques, plans et procédures combinés, y compris la formation, l'éducation et les exercices en collaboration qui favorisent l'interopérabilité.

    - Des équipes civilo-militaires intégrées.

    - Les stratégies et opérations d'information visant à neutraliser la propagande de l'adversaire et à promouvoir les intérêts stratégiques des États-Unis.

    - Efforts pour améliorer le partage de l'information, le cas échéant, afin de synchroniser la planification, l'exécution et la transition des activités d'IW et de maintenir la compréhension partagée de l'environnement opérationnel nécessaire pour contrer les défis ou les menaces irrégulières.

    - Intégration des exigences et des capacités collectives dans les efforts de planification unifiée afin d'optimiser le développement et l'emploi des capacités.

    - Fourniture de services gouvernementaux essentiels, restauration des infrastructures d'urgence et secours humanitaire, si nécessaire.

Comme on peut le voir, une fois de plus, les intérêts stratégiques des États-Unis sont mentionnés, mais même les actions des forces d'opérations spéciales, dont la prérogative est la guerre irrégulière, indiquent la nature clairement non pacifique des intentions elles-mêmes, sans parler des actions pratiques possibles.

lundi, 16 janvier 2023

"Entretien avec Ionesco", redécouverte d'un penseur encombrant

eugene-ionesco.jpeg

Livres

"Entretien avec Ionesco", redécouverte d'un penseur encombrant

par Riccardo Rosati

Source: https://www.barbadillo.it/75125-libri-intervista-con-ionesco-alla-riscoperta-di-un-pensatore-scomodo/?fbclid=IwAR0JqjRwt6WSOWtEKSjV71iUMUfSd0lQAXv12C6161yUQn9KRpBWw1mnJyA

Au printemps 1985, Rome a accueilli dans ses murs anciens et immortels Eugène Ionesco (1909-1994), le grand dramaturge français d'origine roumaine. L'auteur d'œuvres d'une importance cruciale pour le théâtre contemporain telles que La Leçon (1951) et Rhinocéros (1959) a accordé à cette occasion une interview pour le moins décisive à Giuseppe Grasso, spécialiste des lettres françaises, qui a eu la grande chance de pouvoir deviser à l'écrivain, alors âgé de 76 ans.  

Ionesco logeait dans ce qu'on appelle aujourd'hui le Grand Hôtel St. Regis, l'un des plus beaux, et non vulgairement luxueux, hôtels de la capitale. L'interview est parue en juin de la même année dans le journal romain Il Popolo dans une version très abrégée. Aujourd'hui, grâce également à la sensibilité culturelle de l'éditeur Solfanelli, des Abruzzes, cette conversation voit enfin le jour dans son intégralité, offrant aux chercheurs en lettres françaises - y compris l'auteur de ces lignes - et pas seulement, un document extrêmement important qui devrait être valorisé dans la recherche sur le terrain, car il offre une contribution qui nous apporte des données factuelles, c'est-à-dire ce qui fait le "sang et le corps" d'une recherche académique efficace et non auto-référentielle. 

Une conversation avec un grand auteur

Le texte dont nous parlons éclate comme un nuage d'où surgissent les mots sous la forme d'une quasi "tempête". Un raisonnement, celui que Grasso stimule chez Ionesco, plein de sollicitations pour le lecteur, composé de références, de noms et de lieux d'une géographie idéale, dessinant métaphoriquement une cartographie de l'horizon culturel composite de cette thématique, autant qu'un auteur talentueux. En outre, Ionesco n'a jamais eu peur d'exposer ses convictions, comme, par exemple, son manque de sympathie pour certaines positions socialistes et progressistes. C'était une "offense" grave dans la France - tout aussi grave, voire pire, dans l'Italie - de l'époque, où des écrivains tels que Philippe Sollers et Jean-Paul Sartre étaient, à notre avis, appréciés bien au-delà de leurs mérites littéraires simplement pour avoir pris ouvertement parti pour les gauches ; c'est-à-dire le parti qui, pendant des décennies, dans les bons salons d'Europe, a été considéré, sans la moindre critique, comme le seul et l'unique. De telles catégories idéologiques, comme on peut également le comprendre à la lecture de ce volume, ne convenaient pas à un artiste comme Ionesco, et il ne pouvait en être autrement dans le cas du véritable inventeur du "théâtre de l'absurde". 

ionesco-libro-310x477.jpg

Si aujourd'hui cette longue conversation voit enfin le jour dans une version plus étendue, ce n'est pas par caprice de l'auteur, qui a mis la main à la pâte en reprenant les enregistrements originaux, mais en réponse à une particularité qui justifie sa re-proposition sous forme de livre: l'interview est un document et les pages qui la composent constituent un "texte", c'est-à-dire qu'elles donnent vie à une forme essayistique très particulière comme celle du "parlé", en l'occurrence sur le théâtre et la poétique de Ionesco, dont les mots étaient aussi inconfortables hier qu'aujourd'hui; nous ajouterons même que le monde globalisé craint l'intelligence, surtout quand elle est non-conformiste, et celle du notable dramaturge franco-roumain l'était certainement.

Le spécialiste chevronné ès-littérature française qu'est Grasso assume ici pleinement le rôle de l'intervieweur, réalisant qu'il s'adresse à un géant de la littérature, et qu'il fallait profiter de cette occasion, ce qu'il fait avec beaucoup de dévotion, sans toutefois faire un complexe d'infériorité. En fait, il est sûr de lui et pose des questions précises, sachant où "regarder", comment viser, à quoi s'attendre, malgré l'imprévisibilité de son interlocuteur pointu. Grasso sollicite le maître en face de lui sans aucun scrupule; il le marque, le presse, ne le ménageant que parfois, car il ne manque pas d'exprimer son désaccord ou de proposer des idées différentes. Mais lorsqu'il accepte d'être heureusement dépassé, il est déterminé à ramener un résultat concret, et c'est dans le caractère concret de la pensée exprimée par Ionesco que réside la qualité de cette publication, dûment élaborée par son éditeur. En substance, qu'est-ce qui en ressort ? Trois bonnes heures de conversation ! 

On découvre les pensées d'un écrivain "mal à l'aise".

Rhinoceros.jpg

L'interview est un genre littéraire problématique. Aujourd'hui comme jamais auparavant, la capacité à poser des questions a été complètement perdue. On s'offusque ou, plus souvent encore, on se plie en quatre, on flatte sans vergogne, passant de ce qui serait un service culturel à un véritable service idéologisé. Heureusement, ce n'est pas le cas avec le livre de Grasso. Ionesco lui-même explique ce qui est peut-être la principale tâche de l'écrivain, à savoir "poser des questions" et non "proposer des solutions" (21).

Le texte s'ouvre sur une introduction très utile de la journaliste Simone Gambacorta, qui précise qu'il s'agit également d'un "livre de liaisons", car il établit des liens et indique des perspectives. Gambacorta rappelle avec force l'importance de savoir mener un entretien. Nous pouvons presque appeler cela un "sous-métier" du journalisme, qui ne se réalise pas simplement en posant des questions, mais ce qui compte c'est : "[...] avoir quelque chose à dire" (5). Et Ionesco parle, se confesse presque, tout en restant toujours solennel. De ses paroles, on comprend la raison qui a poussé Grasso à emprunter le sous-titre du texte à une œuvre de l'intellectuel roumain Emil Cioran (1911-1995): De l'inconvénient d'être né (1973). La citation ouverte de l'éditeur à cet auteur raffiné et, injustement, encore peu étudié, sanctionne avec acuité une parenté de désenchantement; comme l'atteste d'ailleurs le court essai de Ionesco A propos de Beckett, qui conclut le volume et n'en dit pas moins sur l'écrivain que sur l'auteur de En attendant Godot (1952).

GL_absurdo_04.jpg

Ionesco et Beckett, unis par la même dénonciation inexorable, à la différence que le premier est plus "politique", tandis que le second est plus mental, comme l'explique également l'éditeur: "Par rapport à Beckett, dont le nihilisme apparaît beaucoup moins humoristique, centré avant tout sur le vide, Ionesco émet au contraire un cri étourdi face au vide, signalé par le rire" (29). Cette comparaison incite à mieux cadrer l'existentialisme de Ionesco qui, à la différence de son collègue irlandais, est vital, tendant à rejeter les raisonnements d'évasion: " La chose la plus absurde est d'être conscient que l'existence humaine est inacceptable... et, malgré tout, de s'y accrocher désespérément, conscient et affligé parce que destiné à perdre ce qu'on ne peut supporter [...]" (23).

Ainsi, l'inconvénient d'être chez Ionesco est une reconnaissance des choses, et non une "attente" stérile, bien que suggestive, comme nous le trouvons dans l'opus beckettien. À cet égard, Ionesco revendique légitimement, à notre avis, la paternité de ce que le critique et écrivain hongrois Martin Esslin (1918-2002) a défini pour la première fois comme le "théâtre de l'absurde". L'académie internationale, en revanche, a toujours désigné Beckett comme l'initiateur de ce courant littéraire, puisque les œuvres de Beckett ne visaient pas à ne rien raconter, mais faisaient plutôt du néant leur raison d'être. Pour sa part, Ionesco ne s'est jamais caché derrière "l'absurde"; au contraire, il s'en est servi comme d'un poinçon pour tenter de démêler le vide mental de l'âge moderne, ses nombreuses hypocrisies. Il va sans dire que, par le passé comme aujourd'hui, dire la vérité, peu importe de quelle manière, est considéré comme dangereux pour une certaine Pensée unique qui dirige l'Occident depuis des décennies. Ce système de pouvoir culturel a maintes fois changé de nom et de forme, mais son essence malveillante est restée intacte, et sans aucun scrupule, nous affirmons que de ce Mal, Ionesco se considérait fièrement comme un ennemi. 

f-b3f-4b0bbcb35c181.jpg

Ionesco, un anti-moderniste ?

Stylistiquement, on trouve dans le livre, surtout dans la partie qui précède l'interview, une sorte de contraste entre l'écriture de Grasso, avec une recherche parfois "baroque" de lemmes et l'alternance de phrases courtes et longues, qui est alors l'une des prérogatives d'un titan comme Joseph Conrad, et tout le monde ne peut pas être lui, dirions-nous, avec l'exactitude des réponses de Ionesco. Cependant, au final, le résultat global est fondamentalement harmonieux et la lecture est agréable. En outre, l'éditeur a le mérite, ainsi que le courage, de cadrer les idées de Ionesco dans une perspective que l'on pourrait qualifier de traditionaliste: "[...] l'homme, désarticulé de la transcendance, est un être englouti par les sables mouvants de l'insignifiance et du dérisoire, riche de ses déguisements, de ses soucis, de ses mesquineries" (22). Tout cela nous incite à poser de nouvelles bases dans l'étude de cet écrivain, c'est-à-dire une évaluation critique de Ionesco comme l'un de ces nombreux antimodernes dignes de ce nom dont les positions humaines et politiques ont été délibérément mal comprises.

La force de ce dramaturge, ce qui l'a rendu parfois impopulaire dans certains milieux, est que "son" vide n'en est pas un, puisqu'il est empreint d'un scepticisme structuré, à tel point que le terme "absurde" n'est utile que pour définir sa forme, mais pas son essence, si l'on considère, comme l'explique Grasso, qu'avec le théâtre Ionesco entendait : "[...] dénoncer, sans fausse modestie, la crédulité et l'absurdité de la condition humaine, vues comme les plaies [sic ! ] endémiques de l'homme bourgeois moyen" (22). 

Entretien avec Ionesco pourrait presque être jugé comme un livre "méta-théâtral", le prologue critique de l'éditeur préparant le lecteur à l'action théâtrale, tout comme dans les textes dramaturgiques, lorsqu'au début de chaque acte est décrite la scène dans laquelle les personnages vont évoluer. Et cet entretien qui prend la forme d'une pièce de théâtre se déroule en un seul acte, dans la confrontation verbale entre deux protagonistes isolés du reste du monde, rappelant paradoxalement le style de son "rival" Beckett.

Néanmoins, ce livre a aussi sa propre valeur pour la recherche, étant un excellent "outil" pour saisir la littérature française tout court, permettant d'aborder avec profit la lecture et la compréhension de cet auteur. Le "ton" de l'interview que Grasso recueille peut se résumer à l'hostilité bien connue de Ionesco envers Victor Hugo: "Il reste donc sa vie, sa grande éloquence, qui m'a toujours irrité et énervé, sa grande vanité littéraire; et le grand homme parfait, c'est-à-dire la "nullité" faite personne" (37). Une fois de plus, le dramaturge se montre sans fausse modestie, allant s'attaquer à l'une des plus pompeuses des idoles littéraires transalpines, car il possédait une sorte de "mauvaise intelligence", une caractéristique qui a fait la grandeur de Louis-Ferdinand Céline, et qui fait qu'il n'a pas peur des canons et des jugements.

Ainsi, cette rencontre à Rome il y a des années nous rappelle que l'opinion est quelque chose qui nous accompagne toujours, même si nous essayons souvent de la cacher avec crainte ou, pire encore, avec hypocrisie. Si, en revanche, on a l'intention de la jeter à la face du monde, comme Ionesco l'a fait avec ses œuvres et ses idées, alors il faut en être capable; en d'autres termes, être à la hauteur de ses idées préconçues et de ses idiosyncrasies. 

Il en va de même pour les positions politiques particulières de Ionesco, que Grasso encadre parfaitement en le décrivant comme un "démonteur de faux mythes" (31), notamment du communisme. C'est une autre raison pour laquelle il n'est pas apprécié par l'intelligentsia européenne qui, depuis des décennies, contribue à démolir tous les piliers de la culture du Vieux Continent. Nous partageons également les réflexions de Gambacorta dans sa présentation, qui nous incitent à redéfinir Ionesco une fois pour toutes comme un antimoderne: "[...] il savait bien comment la véritable perversion globale consistait en la prévalence de l'historique sur le métaphysique [...]" (6). Ce n'est donc pas une coïncidence si l'écrivain considérait que le "réalisme", qui est le vieux dogme de la gauche, était presque pernicieux, étant synonyme d'"engagement"; un mot en soi vide et canalisant souvent des imbroglios intellectuels et des mensonges: "La littérature réaliste est complètement fausse parce qu'elle tend à s'immiscer dans la démonstration" (11). Tout ceci devrait suggérer l'inclusion de Ionesco dans les rangs de ces penseurs anti-système d'origine roumaine tels que Cioran, Camilian Demetrescu et Mircea Eliade, déjà mentionnés, à qui nous devons une puissante défense d'une culture solide, mais non immuable, et profondément spirituelle. 

067d38dd9314c7d590e64db7ba584cf9.png

En résumé, Gambacorta fait à nouveau allusion de manière suggestive à une "consonance esthétique" (10) entre l'interviewé et l'intervieweur dans ce petit volume savant où il nous incite à considérer la vie essentiellement comme une tromperie divine, un concept nodal dans la vision du monde de Ionesco. Pour comprendre le grand auteur franco-roumain, il est peut-être utile de le juxtaposer une fois de plus à son collègue irlandais, et le fait que Beckett soit néanmoins présent dans ce texte est un grand enrichissement, afin d'avoir une idée complète du Théâtre de l'Absurde. Ainsi, Ionesco exprime, a de la vigueur; tandis que Beckett laisse ponctuellement planer un doute qui prend la forme d'une attente qui sent souvent la maladie, proposant un théâtre certes de grande qualité, mais à sa manière exécrable.

À l'inverse, Eugène Ionesco, malgré sa désillusion sur le sens même de la vie, nous apparaît comme tout sauf renonçant. En effet, en parfait antimoderne, il était peu attaché à l'existence en tant que fait matériel, mais ne s'est certainement pas ménagé dans la lutte contre les mensonges du progrès. 

Giuseppe Grasso, Intervista con Ionesco - L'inconveniente di essere nati  (avec un essai de l'auteur sur Beckett), Chieti, Solfanelli, 2017.

Alexandre Douguine: les conditions de notre victoire

511ec59a9942f7a2a45166484542b3db.jpg

Les conditions de notre victoire

Alexandre Douguine

Source: https://www.geopolitika.ru/article/usloviya-nashey-pobedy

Note du traducteur: Dans ce texte, qui a valeur de manifeste, Alexandre Douguine propose les mesures qui permettront de sortir la Russie de certaines impasses en lesquelles elle se trouve encore, en dépit de vingt ans de gestion poutinienne. Ces axes de réflexion valent également pour les pays d'Europe occidentale et centrale, Ukraine comprise. A chacun d'entre nous, en chacun de nos pays, d'adapter ces consignes à nos réalités nationales ou transrégionales (Euro-Regio, SarLorLux, Benelux, etc.).

Quels sont les changements dont nous avons besoin pour la Victoire ?

Je vais résumer ce que chacun pense et dit à ce propos.

1.

Il nous faut une transition qui parte de la domination de l'État pour aboutir à une alliance entre l'État et le peuple. L'unité organique du pouvoir avec le peuple. D'où, ipso facto, le passage de la manipulation à l'honnêteté.

2.

Transition du paradigme libéral au paradigme socialiste-populaire - les personnes du secteur public et les pauvres reçoivent un niveau élevé de soutien matériel.

3.

Changement de la prédominance du grand capital (oligarchie) en une véritable concurrence entre les représentants des petites et moyennes entreprises (les grandes entreprises, elles, sont nationalisées).

4.

Déplacement du centre de l'industrie, c'est-à-dire passage d'un commerce axé sur les seules matières premières vers une production reposant sur des réalisations à forte intensité de connaissances et vers le renouveau des zones rurales.

5.

Implantation de grandes agglomérations urbaines et nouveau développement des terres agricoles russes. Des mégapoles actuelles, nous passerons au renouveau des petites villes et à des centres ruraux d'un nouveau type. 

6.

Rejet du principe d'immunité et de promotion des managers corrompus et totalement inefficaces et introduction, à la place, du principe de méritocratie (pouvoir des dignes qui ont prouvé leur dignité dans la pratique).

7.

Passage de la RP à une société entièrement idéologique: les propagandistes ne défendent plus ce qui leur est commandé sur le moment, mais ce en quoi ils croient vraiment.

8.

Rejet de la culture du divertissement au profit de la culture classique - formatrice, édifiante, féconde.

9.

L'historicité du régime politique : la définition précise de la place de la Russie contemporaine dans la structure de l'histoire russe - en rendant hommage à l'Ancienne Rus', au Royaume de Moscou, à l'Empire russe, à l'URSS avec la malédiction sans équivoque du Temps des troubles et des infâmes années 1990. 

(Ndt: Ailleurs qu'en Russie, cela implique l'imbrication des peuples dans leur histoire et, simultanément, une malédiction pour les années de troubles et les siècles de malheur).

10.

La protection des valeurs traditionnelles dans leur intégralité et, simultanément, l'éradication des valeurs non traditionnelles sont confiées aux porteurs organiques de ces valeurs traditionnelles, et non à des gestionnaires aléatoires.

11.

Construire une société solidaire avec 

- la classe spirituelle comme boussole morale, 

- les guerriers héroïques en tant qu'élite politique et sociale (la nouvelle noblesse ou, si vous voulez, la nomenclature du parti) ,

- les travailleurs honnêtes (y compris les entrepreneurs honnêtes) comme norme de l'homme commun. 

12.

La création rapide d'une élite intellectuelle russe, indépendante des normes et stratégies de la civilisation occidentale. 

(Ndt: En Europe, cela signifie la réémergence d'une élite reposant sur les ordres de chevalerie, sur l'Ordre de la Toison d'Or, sur l'idée impériale traditionnelle, le tout assorti d'un rejet des logiciels culturels/politiques issus de l'iconoclasme du 16ème siècle et donc du puritanisme anglo-saxon, rationalisé en idéologie whig, et des dérives de la révolution française, dont le fatras républicain qui mine la France depuis de nombreuses décennies).

13.

Un retour au modèle de la société traditionnelle avec une famille forte - un rejet des interprétations séculières, contractuelles et individualistes du mariage.

Toutes ces étapes, pratiquement évidentes, sont autant de conditions nécessaires à la Victoire. Sans  y passer, c'est-à-dire si on laisse tout en l'état, nous sommes condamnés. Le modèle existant, qui était relativement efficace dans la période d'avant-guerre, ne répond plus aux exigences historiques. L'Opération militaire spéciale a commencé à le révéler. Cela a mis en évidence nos failles fondamentales. Dans la confrontation directe et frontale avec la civilisation occidentale, nos faiblesses ne sont pas seulement devenues manifestes mais fatales. Si nous voulons gagner, et nous n'avons pas d'autre option, nous devons changer fondamentalement le système actuel. Nous avons besoin d'un nouvel État et de nouvelles politiques. Nous n'avons pas beaucoup de temps. Je pense qu'il faut un an tout au plus pour faire des percées majeures dans ces directions.

"Invasion Los Angeles"/"They Live" - L'idéologie néolibérale et la façon dont nous pouvons voir la vérité à travers ces lunettes

They_Live-538833175-large.jpg

"Invasion Los Angeles"/"They Live" - L'idéologie néolibérale et la façon dont nous pouvons voir la vérité à travers ces lunettes

Alexander Markovics

Source: https://www.geopolitika.ru/de/article/sie-leben-die-neoliberale-ideologie-und-wie-wir-durch-die-brille-die-wahrheit-erkennen

" Travaillez ! Consommez ! Obéissez !"

Ce qui semble être une description de la réalité sociale de l'Occident du 21ème siècle sont les ordres donnés par les extraterrestres dans le film "Invasion Los Angeles" de John Carpenter, sorti en 1988. Ce fait n'est pas non plus un hasard, mais bien intentionnel. Comme Carpenter l'a expliqué dans une interview, le film a été réalisé à partir de la nouvelle de science-fiction 8 o'clock in the morning (en français: Les fascinateurs) de Ray Faraday Nelson de 1963, qui a été adaptée en bande dessinée par Bill Wray en 1986 [1] , non pas dans l'intention de créer un film d'action ou de science-fiction, mais comme un documentaire [2] sur les États-Unis dans les années 1980 et en particulier sur la révolution "(néo)conservatrice" de Ronald Reagan.

invasion-los-angeles-affiche-francaise-1171048.jpg

nadafascinators1986.jpg

La révolution de Reagan et le néolibéralisme comme thème principal de "They Live" ("Invasion Los Angeles")

C'est à cette époque que le néolibéralisme s'est pleinement imposé en Occident. Alors que les élites occidentales s'efforçaient auparavant de dompter le capitalisme, dans le cadre de la lutte inter-systèmes qu'était la guerre froide, afin de maintenir la loyauté de leurs propres travailleurs envers le libéralisme, l'expérience sociale des "Chicago Boys", qui avaient tenté une expérience sur le terrain au Chili sous la dictature de Pinochet, et donc un capitalisme désormais débridé, s'est imposée. Les prestations sociales ont été supprimées, les marchés dérégulés, les entreprises publiques privatisées et des millions de personnes transformées en working poor, des travailleurs qui vivaient au jour le jour.

5841632.jpgLes restes de la société ont été détruits par l'accélération de l'individualisme, "Bowling alone" devenant ainsi de plus en plus une réalité, ce qui signifiait également l'uniformisation progressive dans le sens du programme néolibéral. Cette révolution de Reagan, diffusée en Europe par Margret Thatcher ("There's no such thing as society [3]"), s'est également caractérisée par une émergence (à l'époque surtout dans les milieux universitaires) du politiquement correct, de la théorie du genre, de l'idée d'une société "verte", "climatiquement neutre" de la société (pensez à la chanson "California over all" des Dead Kennedys), d'une société de consommation qui consomme ses consommateurs et d'un antiracisme universaliste pathologique, toutes choses qui se poursuivent encore aujourd'hui. Ou pour reprendre les mots de Carpenter: la révolution Reagan n'a jamais pris fin. Tout cela s'est produit, à ses yeux, parce que la droite est "confuse et perdue", tandis que la gauche a laissé ses propres racines derrière elle.

Apparemment, il n'y a plus d'alternative à l'ordre existant, nous pouvons imaginer une fin du monde plutôt qu'une fin du capitalisme, comme l'a proclamé Slavoj Zizek, disciple de Lacan. Idéologiquement, elle est le résultat d'une transformation du capitalisme, depuis la théorie de la convergence [4] portée notamment par le think tank mondialiste "Club de Rome", jusqu'à sa version 2.0 décrite par Alexandre Douguine [5] , qui veut que les richesses du monde ne soient accessibles qu'à une petite élite, tandis que le reste de l'humanité "ne doit rien posséder et être heureux". (selon le World Economic Forum).

Comment "vous pouvez vivre" si vous êtes mort ? Sur la représentation visuelle de l'aliénation sous le capitalisme

Le film lui-même s'ouvre sur l'arrivée du travailleur migrant Nada à Los Angeles, en Californie, où il est lui-même le témoin direct de la pauvreté rampante dans un bidonville de sans-abri (qui constitue par ailleurs un décor authentique). Comme son nom et l'absence d'antécédents l'indiquent, il est une tabula rasa et une surface de projection, chacun d'entre nous pourrait être Nada. Avec l'aide d'un groupe de résistance chrétien, il obtient des lunettes de soleil qui lui permettent de voir au-delà de l'illusion de la réalité qui lui fait face et de découvrir la vérité: les humains sont dominés par des aliens qui ressemblent à la fois à des insectes extraterrestres et à des versions mortes-vivantes de nous-mêmes.

TheyLiveOBEY.jpg

They-live-1988-John-Carpenter-film-Invasion-Los-Angeles.jpg

La première contradiction du film apparaît alors clairement: comment peuvent-ils "vivre" s'ils sont morts? Il semble que le réalisateur Carpenter veuille ainsi attirer l'attention sur l'abandon de l'homme par son intégration dans le système néolibéral, en le transformant lui-même en objet. L'homme est aliéné de ses racines culturelles et finalement de son humanité, il devient une machine pour pouvoir fonctionner dans le système. La dialectique de la domination et de la servitude - la philosophie hégélienne dans le film.

Pourtant, les humains collaborent avec les extraterrestres, qui les rendent dociles grâce aux commodités des sociétés de consommation. Les extraterrestres de "Invasion Los Angeles" exercent un pouvoir sur les humains, tant sur le plan politique que socio-économique. En regardant à travers les lunettes qui lui permettent de voir au-delà de l'idéologie néolibérale des aliens, Nada se rend compte que les journaux contiennent en réalité des ordres codés, mais que les aliens lisent eux-mêmes - "Obéissez ! Travaille ! Consommez ! Marie-toi et procrée !" ne s'adresse pas seulement aux humains, mais aussi aux aliens eux-mêmes. Même l'appareil policier et médiatique qui maintient le système en place n'est pas seulement composé d'aliens, mais aussi d'humains.

On pense immédiatement à la dialectique de la domination et de la servitude de Georg Wilhelm Friedrich Hegel quand on remarque que les aliens sont les plus attachés à ce système [6], car ils ont les postes les plus prestigieux, un peu comme les maîtres d'esclaves. Les humains, en revanche, à l'instar des esclaves, ne peuvent que gagner puisqu'ils n'ont rien à perdre si ce n'est leurs chaînes [7]. Mais ce sont justement les collaborateurs humains qui ont beaucoup à perdre, comme on peut le lire dans cette citation révélatrice [8] vers la fin du film :

" En réalité, il n'y a plus de pays - de gens qui sont bons, encore moins ! Ils contrôlent tout, tout leur appartient, toute cette planète de merde, ils peuvent faire ce qu'ils veulent ! Qu'est-ce qu'il y a de mal à être bien de temps en temps?! Et ils font en sorte que nous soyons bien si nous les aidons! Ils nous laisseront tranquilles et nous pourrons gagner notre vie! Vous aurez aussi une part du gâteau, c'est ce que vous voulez, je le sais, honnêtement, c'est ce que tout le monde veut après tout"!

invasion-los-angeles-photo-5584196c5c6d1.jpg

Alors que le "système extraterrestre" du néolibéralisme dépasse les frontières des États-nations, que le libre marché abolit toutes les frontières, les personnes qui vivent dans ce système deviennent elles aussi des objets et ne peuvent plus décider elles-mêmes de leur destin. Ils sont eux-mêmes corrompus, déshumanisés et transformés en extraterrestres, étrangers les uns aux autres. Ils échangent leur humanité et leur intégrité contre une participation au système qui leur promet "une part" du gâteau, du confort matériel et du prestige en échange de leur âme. On peut donc voir dans cette citation non seulement un aspect critique du mondialisme et du libéralisme du film, mais aussi son message de lutte des classes, qui va bien au-delà du contenu des nouvelles/de la bande dessinée [9].

Ne pas penser ! Critique du politiquement correct

Tant eux que les aliens reçoivent l'ordre "No thought!/Ne pensez pas ! - on peut interpréter ce message comme une pique au "politiquement correct", qui veut également nous interdire de penser. Nous pouvons à nouveau voir ici une magnifique parabole de notre société, qui fonctionne si bien parce que les gens ne la remettent pas en question, ne sont plus capables de réfléchir et de philosopher sur leur propre existence.

L'effet diabolique du politiquement correct est de "mettre sur les rails" notre pensée, en nous interdisant non seulement de dire certaines choses, mais en les déclarant crime de lèse-pensée, et en nous programmant quasiment comme des robots selon les désirs de leurs utilisateurs. Le personnage de Holly, qui a l'air d'un hybride alien/humain à cause de ses yeux, incarne à cet égard la collaboration des humains avec ce système inhumain. La lutte entre Nada et Frank nous prouve qu'il est loin d'être facile d'accepter la vérité et de quitter le royaume du mensonge. Ce dernier refuse de mettre ses lunettes et de regarder la vérité en face.

Regarder derrière le voile de l'idéologie bourgeoise : une entreprise douloureuse

Mais pourquoi Frank résiste-t-il ? Il le fait parce qu'il est douloureux de regarder derrière l'illusion de l'idéologie bourgeoise et de voir la vérité [10]. Cette expérience douloureuse, qui consiste d'une part à réaliser que l'on a menti toute sa vie et d'autre part à s'avouer que l'on n'a que trop volontiers cru à ces mensonges, attend tous ceux qui ont percé à jour les mensonges vitaux du libéralisme. Qui veut admettre qu'il a été l'instrument de puissances inconscientes? Qui peut admettre qu'il a participé à un système inhumain et qu'il a peut-être même collaboré avec lui? Qui peut s'avouer qu'il s'y sent bien, même si c'est moralement mauvais? Et surtout, qui veut s'exposer volontairement aux rigueurs de la résistance, du "non-fonctionnement", alors qu'il peut simplement s'installer et "fonctionner" dans le mensonge?

"Invasion Los Angeles" et notre réalité : celui qui ne croit pas en Dieu est capable de croire en tout

Chacun d'entre nous y a été confronté ces dernières années: que ce soit les mensonges de notre État concernant le co ronavir us ou ceux concernant la guerre en Ukraine. Mais même si l'on a reconnu la vérité, on peut la rejeter et s'installer dans le mensonge. L'humanisme, le libéralisme et les Lumières ont en effet rendu cela possible: celui qui ne croit pas en Dieu ne croit pas en rien, mais est capable de croire n'importe quoi. Que ce soit l'agnosticisme, l'athéisme, le satanisme sans fard, le transhumanisme, la religion patchwork New Age ou les trois idéologies de la modernité, l'absence de relation avec Dieu et la métaphysique rend l'homme capable de tout dans son délire prométhéen.

Le christianisme comme réponse au nihilisme

A ce nihilisme de notre époque, que dénonçait également le moine orthodoxe Séraphin Rose, nous pouvons opposer le message chrétien de la Bible [11] :

Jésus dit donc aux Juifs qui croyaient en lui: "Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes mes vrais disciples, vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres".

Ronald Reagan et Margaret Thatcher sont arrivés au pouvoir, entre autres, en dénonçant le gouvernement en tant que tel et en stigmatisant toute forme de domination comme quelque chose de mal. Mais comme John Carpenter l'a justement fait remarquer dans une interview, il y a de bons et de mauvais gouvernements. Alors que le mauvais gouvernement est effectivement mauvais (ce qui inclut l'absence de domination), le bon gouvernement est bon et vrai.

they live 2.jpg

Nouvelle Droite et Quatrième Théorie Politique : nos lunettes pour voir la vérité

Face à un système qui, dans le cadre du Great Reset, est devenu encore plus inhumain et brutal que les extraterrestres néolibéraux de "Invasion Los Angeles", nous avons aujourd'hui plus que jamais besoin de lunettes pour voir et comprendre l'illusion dans laquelle nous vivons. Les idées de la Nouvelle Droite française et l'ouvrage d'Alexandre Douguine "La quatrième théorie politique" sont précisément des lunettes qui nous permettent de voir derrière les masques des mondialistes et de reconnaître la vérité en tant que telle, selon les paroles de Jésus, comme quelque chose qui nous rend libres et nous libère de l'esclavage. Si nous comprenons la modernité et ses racines, si nous comprenons l'anthropologie humaine et la philosophie sur lesquelles elle se fonde, nous serons non seulement en mesure de la déconstruire, mais aussi de formuler une alternative à la postmodernité qui rendra possible la liberté politique et spirituelle des peuples dans un monde multipolaire.

Notes:

[1] Vgl. Sie leben. Über Ideologiekritik und Verschwörungstheorien in der Science Fiction | TOR Online (tor-online.de) consulté le 14.01.2023
[2] Vgl. (15) They Live in John Carpenter's Own Words – YouTube, consulté le 14.01.2023
[3] Vgl. Margaret Thatcher: There’s No Such Thing as Society - New Learning Online, consulté le 14.01.2023
[4] Vgl. Konvergenztheorie • Definition | Gabler Wirtschaftslexikon , consulté le 14.01.2023
[5] Vgl. Dugin, Alexander: Das Grosse Erwachen gegen den Great Reset. Trumpisten gegen Globalisten. Arktos Media Ltd. 2021.
[6] Vgl. (15) THEY LIVE who is more enslaved? - YouTube , consulté le 14.01.2023
[7] Voyez, à ce propos, la citation de cet hégélien de gauche que fut Karl Marx: "Les prolétaires de ce monde n'ont rien à perdre, sinon leurs chaînes. Ils ont un monde à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous!".  Citation de Karl Marx: “Die Proletarier dieser Welt haben nichts zu ver...” (goodreads.com) , consulté le 14.01.2023
[8] Vgl. Sie leben! - Filmzitate , consulté le 14.01.2023
[9] Dans l'édition en bande dessinée, on voit apparaître des aliens sans abri et, ainsi, les limites entre humains et occupants s'estompent encore davantage que dans le film.
[10] Vgl. The Pervert's Guide to Ideology. Présenté par Slavoj Zizek. 2009.
[11] Vgl. Johannes 8:32 ...und werdet die Wahrheit erkennen, und die Wahrheit wird euch frei machen. (bibeltext.com), Jean 8:32 ...et vous reconnaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres; consulté le 14.01.2023

20:23 Publié dans Actualité, Cinéma, Film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : néolibéralisme, cinéma, film, john carpenter | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Analyse: L'immigration clandestine en Espagne

1000x563_cmsv2_52560e17-27c2-51a9-8a3e-d104cf4c3e00-3257580.jpg

Analyse (mai 2021):

L'immigration clandestine en Espagne

La perception persistante de la migration comme une menace est allée de pair avec l'incapacité des États membres de l'UE à faire face à l'augmentation des arrivées en faisant preuve de solidarité entre eux.

Par Ali Ahamed Haiba

Analyste géopolitique : Sahara occidental  

Source: https://www.tradicionviva.es/2021/05/19/la-inmigracion-ilegal-en-espana/       

Depuis plusieurs mois, l'Espagne est confrontée à un phénomène migratoire d'une ampleur sans précédent. Au moment où nous écrivons ces lignes, une vague incontrôlée de migrants déferle vers la ville autonome de Ceuta. C'est une nouvelle version de la Marche verte qui a forcé l'abandon d'Ifni et du Sahara occidental au Maroc en 1975. Nous ne savons pas comment cette nouvelle stratégie de pression basée sur les boucliers humains, y compris les mineurs d'âge, va se terminer.

De par sa nature même, il est clair que le flux migratoire qui arrive en Espagne depuis quelques mois est sans précédent dans l'histoire. En effet, au cours du premier trimestre 2021, le nombre d'arrivées par voie maritime via la route de l'océan Atlantique a augmenté, tout comme le nombre de victimes et de personnes disparues.

Dans ce contexte, les îles Canaries vivent un présent infecté par la pandémie, mais aussi par l'immigration clandestine, et les deux ravages sociaux sont presque identiques, car ce sont des maux qui rongent et ruinent le système social et économique des îles Canaries.

Par conséquent, les îles Canaries font l'objet de flux migratoires sans précédent en raison de leur voisinage immédiat et de la capacité des réseaux mafieux qui considèrent les îles Canaries comme une route plus facile et moins risquée malgré l'océan Atlantique.

Cette nouvelle vague d'immigration au moment de la pandémie a des conséquences négatives sur le secteur du tourisme, qui est le poumon de l'économie des îles Canaries. Cette situation s'explique par la concurrence du Maroc voisin, qui veut à tout prix être la principale destination touristique d'Afrique du Nord. C'est pourquoi l'immigration sera un outil important pour détrôner les îles Canaries en termes de nombre de nuitées et de population touristique. Cette raison d'être trouve son origine dans les faiblesses successives des gouvernements espagnols, tant de droite que de gauche, dans leur comportement vis-à-vis du Royaume du Maroc.

L'influence directe de l'immigration sur le secteur du tourisme dans les îles Canaries

En déclarant que l'Allemagne accueillerait tous les réfugiés syriens, Angela Merkel a créé un effet d'attraction, accentuant la prolifération de la tendance africaine à chercher par tous les moyens à s'installer sur les côtes du voisinage immédiat de l'Europe, qui n'est autre que les îles Canaries.

La menace de la crise migratoire dans les îles Canaries représente un échec général des politiques migratoires du gouvernement espagnol. Cette situation profitera au Maroc et à son projet touristique, car l'effondrement des îles Canaries en tant que point de référence touristique profitera sans aucun doute au Maroc.

En effet, en 2013, le roi du Maroc a présenté à Marrakech la "Vision 2020", qui visait à doubler la taille du secteur du tourisme au Maroc.

Dans cette perspective, le Maroc va utiliser la même stratégie que Fidel Castro pour faire de son pays une destination touristique. Fidel a commencé par envoyer, parmi les immigrants, les pires criminels de son île vers son plus grand concurrent, Miami. Cette stratégie a été copiée par le Maroc, comme l'exode Mariel de 1980 de Cuba à Miami, qui était une tromperie de Fidel Castro pour envoyer les 25.000 criminels les plus dangereux qu'il avait sous la main avant de commencer sa phase touristique.

Le phénomène de l'émigration exprime fondamentalement les disparités économiques qui caractérisent les deux continents d'Europe et d'Afrique. Le revenu national par habitant des pays africains est trop faible par rapport aux principaux pays de destination des flux migratoires, inférieur à 10% du revenu européen par habitant.

La situation de la migration irrégulière est "extrêmement préoccupante" à l'heure actuelle car les routes qui existaient il y a un an ont changé et se dirigent désormais vers l'archipel. C'est Alfred Sauvy qui a dit "si les richesses ne vont pas là où sont les hommes, les hommes vont naturellement là où sont les richesses".

La raison de ce phénomène peut se résumer à l'absence de sécurité économique, sociale et politique, ainsi qu'au déficit de gouvernance, qui sont des moteurs essentiels de la migration, et peuvent donc affecter et influencer la relation entre sécurité et migration. Une équation géopolitique très rentable aujourd'hui pour les gouvernements d'origine de l'émigration, afin de faire plier les Etats soumis à l'immigration.

Le Maroc et l'arme géopolitique de l'immigration

En 2001, le Sénégal, le Maroc et la Mauritanie ont signé un accord tripartite pour la construction de la route reliant Nouadhibou à Nouakchott. La frontière entre les deux pays a été rouverte en février 2002. La construction de la route reliant la capitale mauritanienne à la frontière entre le Sahara occidental et le Maroc à Algargarate a permis d'accroître les échanges commerciaux entre les deux pays et l'Afrique de l'Ouest.

Cette réouverture de la route maritime a été favorable aux transmigrants qui peuvent désormais franchir la frontière officiellement s'ils sont en possession des documents adéquats. Les transmigrants sont ensuite transportés sur les plages du Sahara occidental d'où ils attendent leur départ pour les îles Canaries.

En réalité, le Maroc utilise ces flux migratoires en provenance d'Afrique subsaharienne et du Maroc lui-même pour faire pression sur l'Espagne, et plus tard sur l'UE.

L'utilisation de l'immigration comme arme stratégique contre l'Espagne n'est plus un secret. Derrière le flux de petits bateaux et de cayucos qui continuent d'arriver aux îles Canaries depuis 2020 jusqu'à aujourd'hui, il y a une raison simple de faire plier l'Espagne pour qu'elle suive la politique du Maroc au Sahara occidental (un territoire qui attend toujours une décolonisation inachevée).

0f60e00b3e8272a4012a01d14f837510c884d78f.jpg

D'autres raisons sous-jacentes sont d'accepter le fait accompli de l'annexion par le Maroc des frontières maritimes du Sahara occidental, et de mettre en danger les frontières maritimes des îles Canaries et leurs ressources marines, d'être courtisés et subventionnés par Madrid et l'Union européenne pour freiner les sorties illégales de migrants.

Depuis plusieurs années, le Maroc tente d'étendre ses eaux ZEE jusqu'à la limite des 200m/n à laquelle il a droit en vertu du droit de la mer, mais qu'il devra partager avec les îles Canaries, l'Espagne et les îles Madère du Portugal. 

Sur le plan géopolitique, le Maroc a trouvé dans la carte d'immigration massive un outil de lobbying très facile et utile, avec un bénéfice rapide et direct. En effet, pendant des années, les relations bilatérales entre le Maroc et l'Espagne ont présenté un modèle de comportement dans lequel des négociations tendues ont conduit à une augmentation des départs de bateaux transportant des immigrants illégaux.

Tout ceci témoigne de la faiblesse de l'Espagne vis-à-vis de son voisin immédiat au sud.

L'immigration et la culture de la peur

Les gouvernements successifs en Espagne sont soumis à une pression politique constante sur la question de l'immigration. D'une part, certains employeurs espagnols réclament davantage de travailleurs immigrés et les groupes de défense des droits de l'homme réclament un niveau plus élevé de droits et de libertés pour les immigrés.

D'un autre côté, cependant, les électeurs sanctionnent les partis politiques considérés comme "mous" en matière d'immigration, et de nombreux électeurs se tournent vers les partis de droite radicale, qui défendent ouvertement de fortes positions anti-immigration. Quoi qu'il en soit, les pressions anti-immigrants sont devenues une motivation incroyablement puissante pour les politiciens espagnols.

En nous concentrant sur nos émotions et nos instincts, nous avons souvent tendance à perdre de vue la vue d'ensemble. Nous parlons de la protection de nos frontières, mais nous ne nous demandons pas s'il existe des voies légales alternatives pour ceux qui pourraient finalement avoir recours à la migration irrégulière. Et nous avons tendance à regarder l'avenir avec incertitude et malaise, plutôt que de planifier ce qui nous attend, ou même ce qui nous attend au coin de la rue. En outre, le public espagnol ne semble pas disposé à considérer la crise comme faisant partie du passé.

Cela s'explique en partie par le fait que les gens viennent avec des "cordes à leur arc" : lorsqu'ils déménagent, ils apportent avec eux leur culture, leur éducation et leurs croyances. Il est donc beaucoup plus difficile de peser rationnellement les coûts et les avantages et d'éviter les réactions de peur face à l'immigration.

La perception persistante de la migration comme une menace est allée de pair avec l'incapacité des États membres de l'UE à faire face à l'augmentation des arrivées en faisant preuve de solidarité les uns envers les autres. En effet, l'inaction et les réponses ratées ont probablement ancré un "état de crise perpétuelle".

Si nous ajoutons ce sentiment aux contradictions de l'actuel gouvernement espagnol, qui comprend des partis qui se sont expressément déclarés en faveur du "retour au Maroc" de Ceuta et Melilla et espèrent augmenter leur base électorale avec les apports démographiques irréguliers des flux migratoires, nous approcherons des proportions de cette crise dont les conséquences nous échappent encore.

dimanche, 15 janvier 2023

Biden s'apprête à passer une année inconfortable

LBZXZXBSIJBANKCYP32KELVYLE.jpg

Biden s'apprête à passer une année inconfortable

Bernhard Tomaschitz

Source: https://zurzeit.at/index.php/biden-steht-ungemuetliches-jahr-bevor/

Les Républicains vont créer une commission d'enquête à la Chambre des représentants sur les intérêts commerciaux de la famille Biden à l'étranger.

Le 3 janvier, la nouvelle Chambre des représentants américaine, élue en novembre, tiendra sa première session. Et contrairement à la législature précédente, les Républicains ont la majorité, ce qui aura des conséquences désagréables pour le président Joseph "Joe" Biden. En effet, il y a un mois déjà, des hauts responsables républicains ont déclaré que la création d'une commission d'enquête sur les liens commerciaux de la famille Biden avec l'étranger était "une priorité absolue".

"Je veux être clair. Il s'agit d'une enquête sur Joe Biden. C'est sur cela que se concentrera la commission lors de ce prochain Congrès", a déclaré le représentant républicain James Comer, cité par l'agence de presse Reuters. "Cette commission examinera le statut des relations de Joe Biden avec les partenaires étrangers de sa famille et déterminera s'il est un président compromis ou influencé par les dollars étrangers et le trafic d'influence", a déclaré Comer (photo).

committee-ranking-member-rep-james-comer-attends-a-house-news-photo-1673047545.jpg

Les intérêts commerciaux présumés de la famille Biden en Ukraine sont d'une grande sensibilité politique. Hunter Biden, le fils du président actuel, a siégé au conseil d'administration de la société gazière ukrainienne Burisma Holding après le coup d'État de Maïdan en 2014. En 2015, après que le procureur général ukrainien Viktor Chokine a annoncé l'ouverture d'une enquête pour corruption contre Burisma Holding, "Joe" Biden, alors vice-président des États-Unis, a menacé, lors d'une visite à Kiev en mars 2016, de retenir un prêt d'un milliard de dollars si Chokine n'était pas limogé.

Biden a réussi, car en 2018, lors d'un événement organisé par le groupe de réflexion Council on Foreign Relations, il s'est vanté : "J'ai dit que vous n'auriez pas le milliard.   (...) J'ai eu peur de leur dire : je vais partir dans six heures. Si le procureur n'est pas viré, vous n'aurez pas d'argent. D'accord, il a été viré (voir la vidéo ici: https://www.youtube.com/watch?v=UXA--dj2-CY)".

19:12 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, états-unis, joe biden, hunter biden | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Le chef des journalistes de l'UE: la nouvelle loi sur les médias de Zelenskyj est contraire aux normes européennes

Ukraine_media_center.png

Le chef des journalistes de l'UE: la nouvelle loi sur les médias de Zelenskyj est contraire aux normes européennes

Source: https://zuerst.de/2023/01/15/eu-journalistenchef-selenskyjs-neues-mediengesetz-widerspricht-eu-standards/

Bruxelles. La démocratie et les "valeurs" occidentales sont prétendument défendues en Ukraine - c'est du moins ainsi que les politiques et les médias le voient. Mais le vernis est depuis longtemps égratigné. L'Ukraine continue de s'enfoncer dans un marécage de corruption. Et la démocratie n'est pas vraiment au rendez-vous. Même Ricardo Gutiérrez, le secrétaire général de la Fédération européenne des journalistes (FEJ), a dû le reconnaître. En effet, la nouvelle loi ukrainienne sur les médias, entrée en vigueur au début de l'année, est un véritable camouflet pour la liberté des médias (voir notre article). Elle donne au gouvernement beaucoup plus de pouvoir et d'influence sur les fournisseurs d'informations du pays.

Le chef des journalistes européens Gutiérrez est étonné - car la Commission européenne et les chefs de gouvernement sont muets : "Nous sommes surpris par le manque de réaction des pays occidentaux", a déclaré Gutiérrez à SVT, la télévision publique suédoise. "Nous ne comprenons pas pourquoi ils ne disent pas à Zelenskyj que cette loi ne correspond pas à nos normes. Je dirais qu'il sera impossible pour l'Ukraine d'adhérer à l'UE avec une telle loi".

Le projet de loi litigieux a été élaboré il y a deux ans déjà, soit un an avant l'invasion russe de l'Ukraine. Dès son arrivée au pouvoir en 2019, Zelenskyj avait ordonné l'élaboration de la loi visant à renforcer la régulation des médias. Kiev ne peut donc pas invoquer l'attaque russe pour justifier cette tentative de censure étatique, vivement critiquée par les organisations de journalistes. "A notre avis, cette loi va permettre une censure arbitraire de la part du gouvernement ukrainien", déclare Gutiérrez.

Dans un communiqué, le Syndicat national des journalistes ukrainiens avait déjà déclaré que la loi constituait une menace pour la liberté de la presse dans le pays. "De tels pouvoirs sont clairement excessifs", écrivait l'organisation.

Lorsque le projet de nouvelle loi sur les médias a été publié, plusieurs organisations internationales de médias, dont le Comité pour la protection des journalistes et la Fédération européenne des journalistes, se sont prononcées contre. Ricardo Gutiérrez a déclaré au New York Times que la loi était contraire aux normes européennes en matière de liberté de la presse. "L'Ukraine démontrera son engagement européen en promouvant des médias libres et indépendants, pas en introduisant un contrôle étatique de l'information", a déclaré Gutiérrez.

En juillet déjà, la Fédération européenne des journalistes avait demandé aux autorités ukrainiennes de retirer le projet de loi sur les médias. Ce projet de loi "propose d'accorder à l'autorité nationale de régulation, le Conseil national de la radiodiffusion, des pouvoirs de régulation arbitraires et disproportionnés qui s'appliqueraient non seulement aux médias audiovisuels, mais aussi à la presse écrite et aux médias numériques", expliquait l'association. M. Gutiérrez a souligné que "la régulation forcée prévue par le projet de loi, entre les mains d'un régulateur entièrement contrôlé par le gouvernement, est digne des pires régimes autoritaires. Elle doit être retirée".

Le gouvernement Zelenskyj rejette de telles accusations. Selon le gouvernement de Kiev, la loi vise à être en conformité avec la législation européenne et à empêcher la propagande russe. La loi donne plus de pouvoir au Conseil national de la télévision et de la radio. Les membres du Conseil sont nommés par les députés. Selon l'Independent de Kiev, les sites d'information qui ne se sont pas enregistrés peuvent être fermés sans préavis par l'autorité.

L'été dernier, l'Ukraine a obtenu le statut de pays candidat à l'adhésion à l'UE. Selon le chef des journalistes de l'UE, M. Gutiérrez, ce n'est toutefois pas une option pour un pays qui ne favorise pas le pluralisme des médias et où le gouvernement contrôle une grande partie des médias. (mü)

Demandez ici un exemplaire gratuit du magazine d'information allemand ZUERST ! ou abonnez-vous ici dès aujourd'hui à la voix des intérêts allemands !

Suivez également ZUERST ! sur Telegram : https://t.me/s/deutschesnachrichtenmagazin

La FPÖ au Parlement européen : "L'ÖVP et les Verts veulent abolir la neutralité de l'Autriche"

oesterreich-armeeneu.jpg

La FPÖ au Parlement européen: "L'ÖVP et les Verts veulent abolir la neutralité de l'Autriche"

Source: https://zuerst.de/2023/01/15/fpoe-im-eu-parlament-oevp-und-gruene-wollen-die-neutralitaet-oesterreichs-abschaffen/

Vienne/Bruxelles. Les populistes autrichiens ne sont toujours pas prêts à accepter l'érosion progressive de la neutralité autrichienne dans le cadre du soutien occidental à l'Ukraine. Il y a plusieurs mois, la FPÖ avait déjà critiqué avec force au Conseil national de Vienne les centaines de transports de matériel occidental vers l'Ukaine via les routes et les voies ferrées autrichiennes. Cela met en danger le statut de neutralité de l'Autriche.

Au Parlement européen, l'eurodéputé FPÖ Roman Haider a renchéri en critiquant l'accord récemment signé, qui prévoit une coopération plus étroite entre l'OTAN et l'UE. Là encore, il s'agit avant tout de soutenir l'Ukraine. Haider a déclaré à ce sujet mardi au Parlement européen: "Le silence du gouvernement fédéral noir-vert sur l'érosion de la neutralité autrichienne par la coopération plus étroite entre l'UE et l'OTAN est révélateur". Selon lui, celle-ci constitue une menace claire pour la neutralité autrichienne.

"Il est évident que l'ÖVP et les Verts veulent supprimer la neutralité de l'Autriche par petites touches, sans consulter les citoyens sur cette question fondamentale", a constaté Haider - le silence persistant du gouvernement sur ce sujet important ne s'explique pas autrement.

La déclaration du chancelier Nehammer, membre de l'ÖVP, l'année dernière, selon laquelle l'adhésion de l'Autriche à l'OTAN "n'est pas une variante de la pensée", n'est donc qu'une tactique d'enfumage visant à tromper les citoyens. "Le FPÖ est désormais le seul parti autrichien à être fermement attaché à la neutralité", a souligné Haider (mü).

Demandez ici un exemplaire gratuit du magazine d'information allemand ZUERST ! ou abonnez-vous ici dès aujourd'hui à la voix des intérêts allemands !

Suivez également ZUERST ! sur Telegram : https://t.me/s/deutschesnachrichtenmagazin

Parution du n°458 du Bulletin célinien

delfccfault.jpg

Parution du n°458 du Bulletin célinien

2023-01-BC-Cover.jpgSommaire :

La biographie de Gen Paul 

Rentrée scolaire 1900, rue de Louvois 

Un dessinateur inattendu de Voyage. Le sculpteur Alfred Bottiau 

L.-F. Céline sur Internet 

Quand Charles Plisnier revenait sur son engouement pour Voyage au bout de la nuit.

 

Fariboles

On se souvient qu’à l’occasion du 30e anniversaire de la mort de Brasillach, l’historien Pascal Ory, partisan résolu de l’abolition de la peine de mort, avait déclaré qu’en février 1945, il aurait volontiers « figuré parmi les douze hommes qui exécutèrent au petit matin le condamné Robert Brasillach »¹. Pierre-Yves Rougeyron, militant de droite souverainiste, fait tout aussi bien. Faisant allusion au sort des manuscrits de Céline à la Libération, il clame : « Il fallait lui laisser ses œuvres, il fallait pas les piquer. C’est lui qu’il fallait pendre. C’est là où je suis très gaulliste : moi, je touche pas aux œuvres, c’est aux hommes que je touche. »². Cet épurateur au petit pied comprend-il que si l’on avait liquidé Céline en 1944, nous eussions été privés d’une grande part (et non la moindre) de son œuvre ?  Mais cet admirateur éperdu de Malraux n’en a certainement cure. Quant à l’auteur des Quatre jeudis, notre justicier à rebours ne fait pas davantage dans la dentelle : « Brasillach, je l’aurais flingué de mes mains. » [sic]. Vouant aux gémonies tous les écrivains de la Collaboration, sait-il que son idole voyait en Drieu la Rochelle « l’être le plus noble » qu’il ait jamais connu ? Mais un militant obtus peut-il comprendre ce genre de paradoxe ? Malraux forçait peut-être même son talent en déclarant que « Drieu n’a jamais trahi la France, même sous l’Occupation. »  Rougeyron s’en remettra-t-il ?

Sur cette période, bien des légendes circulent. Et il arrive que l’on parvienne à en créer de nouvelles dès lors que certaines affabulations sont reprises. Dans un livre récent, un prétendu historien – il n’en a pas la formation – affirme que « depuis l’arrivée des occupants, [Céline] ne cesse d’envoyer des lettres à l’ambassade d’Allemagne ou à la Wehrmacht [sic], par lesquelles il exige un durcissement des mesures raciales. »³. La seule correspondance adressée à un officiel allemand  que l’on  connaisse est celle adressée à son ami Epting, directeur de l’Institut allemand, où il ne demande rien de ce genre. À moins que l’auteur ne détienne une correspondance inédite de Céline à Otto Abetz ainsi qu’à quelque hiérarque de l’armée allemande ? Passons…

gen-paul-eugene-paul-peintre-portrait-de-celine-signe-g-5385.jpg

Dans le genre bobard étincelant, signalons aussi une vidéo sur Gen Paul dans laquelle une “spécialiste”4 affirme ceci : «  L’amitié entre Paul et Céline a probablement été l’une des plus importantes dans la vie des deux hommes, mais elle est devenue de plus en plus difficile, lorsque Céline s’est engagé à promouvoir ses idées plus que controversées, qui engendrera la rupture entre les deux hommes. » Vous pouvez me croire : la dame prononce cette phrase sans ciller. Comme on le sait, la rupture qu’elle évoque intervint bien après que Gen Paul eut accompagné Céline à l’ambassade d’Allemagne (février 1944), et auparavant à Berlin (mars 1942).  Ignore-t-elle  aussi que,  cette même année 42, l’artiste illustra Voyage et Mort à crédit ? Étonnant pour une experte en œuvres artistiques… Que n’a-t-elle lu, avant son exposé, la biographie de Gen Paul par Jacques Lambert qui vient d’être rééditée.

Notes:

  1. (1) Pascal Ory, « Apologie pour un meurtre », Le Monde, 6 février 1975.
  2. (2) Entretien de Pierre-Yves Rougeyron avec Élie Thomas et Sophie De Malta, Les Inactuels, 25 novembre 2022
  3. (3) Christophe Bourseiller, Ils l’appelaient “Monsieur Hitler” (L’histoire méconnue des nazis français, 1920-1945), Perrin, 2022.
  4. (4) Élodie Couturier, « Gen Paul, le gamin de Montmartre à New York. Sa cote en vente aux enchères », Expertisez.com, 1er décembre 2022.
 

L'Anti-Europe de l'UE se dissout dans l'AmEurope de l'OTAN

1642602523267.jpg

L'Anti-Europe de l'UE se dissout dans l'AmEurope de l'OTAN

par Luigi Tedeschi

Source : Italicum & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/l-antieuropa-della-ue-si-dissolve-nell-ameuropa-della-nato

Une Europe génétiquement atlantique

La guerre est revenue en Europe. L'illusion utopique des Lumières d'une paix perpétuelle fondée sur un progrès illimité et le libre marché mondialisé est terminée. La fin de l'histoire théorisée par Fukuyama avec l'avènement d'un nouvel ordre mondial dominé par l'unilatéralisme américain, s'est avérée être une autre illusion idéologique, destinée à être démentie par une réalité historique qui n'a jamais cessé de produire des changements dans la géopolitique mondiale et des conflits dans le monde d'ampleur et d'intensité variables.

La guerre en Ukraine, en tant que conflit indirect entre la Russie et les États-Unis, est un événement qui s'inscrit dans un vaste processus de transformation de l'ordre mondial. Un nouvel ordre mondial multilatéral peut émerger de la disparition de l'unilatéralisme américain, qui est apparu en même temps que la dissolution de l'URSS. Quelle que soit l'issue de la guerre russo-ukrainienne, il est certain que ce conflit ne prendra pas fin dans un avenir proche, tout comme d'autres théâtres de guerre pourraient se manifester avec l'éruption de tensions aujourd'hui latentes (voir Kosovo ou Taiwan), dans le monde.

Mais dans la perspective imminente d'un nouvel ordre mondial avec les différentes puissances continentales comme protagonistes, l'Europe brille par son absence, étant donné sa subordination consensuelle à l'OTAN. Les références historiques et idéales comme valeurs fondatrices d'une possible unité européenne, telles que le Saint Empire romain germanique, l'Empire des Habsbourg, les racines chrétiennes de l'Europe, n'ont jamais donné lieu à des mythes unificateurs compatibles avec la réalité de notre présent historique. Même les préfigurations théoriques d'une unité européenne, comme les principes du Manifeste de Ventotene (voir: https://journals.openedition.org/rbnu/684) ou l'idée d'une Europe des patries prônée par De Gaulle, se sont avérées être des vœux pieux qui ne se sont pas reflétés dans la politique des États européens, et encore moins dans les traités fondateurs de l'UE. Il n'y a jamais eu de mouvements politiques ayant pour objectif la construction d'un État européen unitaire, et l'Europe n'a jamais constitué un idéal capable de générer un militantisme politique chez les peuples. L'Europe n'a jamais été une patrie idéale qui susciterait des sentiments d'indépendance unitaire chez les peuples d'Europe, et la création d'un État européen unitaire et souverain n'est même pas envisagée par les institutions européennes officielles.

41FlrwnEvlL._SX320_BO1,204,203,200_.jpg

En ce qui concerne la déflagration que constitue la guerre russo-ukrainienne, l'Europe porte une grave responsabilité historique. L'Europe aurait dû jouer un rôle de médiateur entre les parties et engager des négociations diplomatiques qui auraient pu éviter la guerre, en garantissant l'adhésion de l'Ukraine à l'UE, mais pas à l'OTAN. Une Ukraine neutre, pays pont entre l'Europe et l'Eurasie, avec une Russie liée à l'Europe par une indispensable et avantageuse interconnexion économique et énergétique: tel aurait été l'équilibre politique nécessaire pour assurer une paix durable.

Concevoir un tel rôle géopolitique pour l'Europe apparaît toutefois, à la lumière des événements actuels, comme une idée totalement infondée et abstraite d'un point de vue historique et politique. En effet, l'Europe est incapable de jouer un rôle géopolitique indépendant car elle ne dispose pas d'un statut de tierce partie qui pourrait la légitimer pour assurer une médiation efficace entre les parties en conflit. L'UE est une union d'États soumis à la primauté américaine dans l'Alliance atlantique. Assumer un rôle autonome présuppose une subjectivité géopolitique unitaire qui fait défaut à l'UE. Par conséquent, assumer une position neutraliste entre la Russie et l'Occident atlantique aurait impliqué une rupture impensable de l'Europe avec l'OTAN. En outre, il convient de noter que l'UE, ne disposant pas d'armements autonomes pour sa propre sécurité, aurait encore moins pu garantir la paix en Ukraine avec un appareil militaire suffisamment dissuasif. L'Europe actuelle n'est ni génétiquement ni historiquement programmée pour devenir une puissance continentale. En effet, elle n'a même pas été en mesure de forcer l'Ukraine à respecter les accords de Minsk, conclus en 2014 sous les auspices de l'OCDE.

L'Union européenne est née avec la fin de l'eurocentrisme, c'est-à-dire en même temps que le déclin des puissances coloniales européennes, supplantées par la primauté américaine dans le monde, établie à la fin de la Seconde Guerre mondiale. L'unité européenne est conçue, avec une série successive de traités allant de la naissance de la CECA à la constitution de l'UE, comme l'Europe occidentale présidée par l'OTAN, par opposition à la zone des pays du Pacte de Varsovie, dominée par l'URSS.

1313394-Communauté_européenne_du_charbon_et_de_lacier.jpg

L'Europe avait ainsi sa raison d'être en fonction non seulement anti-soviétique, mais aussi anti-allemande, puisque les Etats-Unis s'étaient toujours opposés à l'émergence d'une puissance autonome en Europe comme alternative à l'OTAN. L'Union européenne, en tant que zone d'influence américaine, trouve donc ses origines dans la logique compensatoire de l'ordre bipolaire issu de la guerre froide. L'UE est donc une entité artificielle en dehors de l'histoire. Le soft power s'est affirmé comme un instrument de la domination américaine sur l'Europe. Avec l'adoption d'un système libéral-démocratique conforme au modèle économique et politique américain, l'américanisme consumériste s'est également répandu en Europe occidentale dans les coutumes et l'idéologie libérale dans la culture. L'ancrage de l'américanisme dans la société européenne a donc entraîné l'effacement de la mémoire historique de l'Europe et le renoncement à toute ambition de puissance des États européens. En bref, l'Europe a été déracinée de ses origines identitaires. Le processus d'unification européenne coïncide donc avec la sortie de l'Europe de l'histoire.

indelcpfx.jpgL'UE est définie par Lucio Caracciolo dans son livre La pace è finita, Feltrinelli 2022, comme "Anti-Europa", comme une zone géopolitique au sein de l'empire américain: "Définissons Anti-Europa dans un sens géopolitique: la négation de l'Europe comme sujet unitaire potentiel (le rêve européiste) et comme centre de pouvoirs transcontinentaux, le résultat du choix américain de rester en Europe occidentale après la Seconde Guerre mondiale. Afin d'ériger son propre empire informel, une avant-garde à étoiles et à rayures dans les immensités de l'Eurasie. Renverser la vision russe de la péninsule européenne s'étendant dans l'Atlantique. Pour Moscou, on l'oubli, elle est l'Asie antérieure (Perednaja Azija), l'accès via la Méditerranée et la Baltique aux routes océaniques. Pour Washington, la Subamérique postérieure, son espace déjà originel encore habité par des populations spécialement évoluées et conscientes, à pacifier et à intégrer dans son propre empire informel. Et donc à garder suffisamment divisé. Et surtout, séparé des profondeurs hostiles de l'Asie. Dans un empire sui generis sur le schéma - le pivot/moyeu  (Amérique) - les rayons (Européens)".

L'Europe a ainsi été reléguée dans l'hibernation de la post-histoire jusqu'à aujourd'hui où, avec le conflit russo-ukrainien, le retour de l'histoire a provoqué un réveil européen brutal et tragique. Si l'Europe s'est éloignée de l'histoire, ce sera néanmoins l'histoire qui l'engagera dans ses processus de transformation. L'illusion de la post-histoire, dans laquelle l'Anti-Europe s'est confinée, avait pour but de dissimuler l'hégémonie américaine sur le continent européen. Comme l'a déclaré Lucio Caracciolo dans le livre susmentionné: "Réfractaires aux lois historiques, nous en reconnaissons toutefois une: ceux qui veulent abolir l'histoire sont abolis par elle. D'abord l'histoire, puis, à distance, les idées et contre-idées visant à la maîtriser pour la réorienter vers ses propres fins abstraites. Si ce n'est vers sa fin. La dialectique entre européisme et anti-européisme dans ses déclinaisons changeantes le confirme. Hétérogénèse de la fin: la sacralisation d'une Europe utopique (ou dystopique, selon le point de vue) est la contre-chanson qui accompagne l'hégémonie américaine sur le Vieux Continent. La vengeance de l'histoire sur ceux qui prétendent la diriger".

Le modèle d'économie mixte adopté par l'Europe d'après-guerre, caractérisé par les libertés démocratiques, la prospérité généralisée et l'institution du bien-être, était entièrement fonctionnel à la stratégie américaine d'opposition au modèle totalitaire soviétique et à la pénétration idéologique du marxisme, qui avait de nombreux adeptes parmi la classe ouvrière des pays occidentaux. Après la fin de l'URSS et l'expansion de l'UE aux pays d'Europe de l'Est, l'expansion de l'OTAN aux frontières russes a été mise en œuvre en parfaite synchronisation.

10-dates-de-la-construction-européenne-e1577185883697.jpg

Avec l'avènement de l'unilatéralisme américain et de la mondialisation, le système néolibéral américain a été étendu à l'UE, qui a été créée par le traité de Maastricht de 1992 en tant qu'organe supranational privant progressivement les États de leur souveraineté. L'UE est donc un organe apatride (donc dépourvu de souveraineté politique), un modèle d'ingénierie économique et sociale néolibérale, dont la gouvernance est exercée par des élites technocratiques qui se sont superposées à l'ordre démocratique et qui a dévolu sa sécurité à l'OTAN.

Les pouvoirs supranationaux assumés par l'UE n'ont toutefois pas été assortis d'un processus d'unification politique de l'Europe, mais plutôt d'une tendance de plus en plus prononcée à la désintégration interne des États en petites patries régionales, avec la résurgence également de nationalismes identitaires ethniques. La guerre en Ukraine pourrait être l'incipit d'un processus de balkanisation d'une Europe désintégrée par la résurgence d'anciennes haines et rancunes entre les nombreux nationalismes ethniques en conflit. La rhétorique du courant dominant concernant l'unité européenne retrouvée sous la bannière de l'OTAN a été démentie par la réalité d'une Europe érodée de l'intérieur par la résurgence des nationalismes et leurs ambitions expansionnistes. En effet, le nationalisme polonais préfigure la renaissance du projet expansionniste "Trimarium", qui est d'ailleurs soutenu par les États-Unis dans une fonction anti-russe.

Corridoi_energetici_Trimarium_1217.jpg

L'éventuelle désintégration de l'UE entraînerait en outre la dévolution de la gouvernance politique de l'Europe aux États-Unis, puisque dans une situation de chaos conflictuel, seule l'OTAN pourrait servir de garant de la gouvernabilité de l'Europe. Dans la guerre russo-ukrainienne, on estime qu'à l'heure actuelle, les seuls gagnants sont les États-Unis, qui ont tué dans l'œuf toute perspective d'une Europe indépendante de l'OTAN, après avoir rompu les liens tant économiques que géopolitiques avec l'Eurasie. Une Europe dépourvue de pouvoir économique et subordonnée militairement à l'OTAN est destinée à devenir une zone continentale au sein de l'Anglosphère.

Il n'est pas dans les perspectives actuelles de Biden de conclure une paix avec la Russie. Au contraire, la prolongation de la guerre est nécessaire aux Etats-Unis pour perpétuer le climat d'urgence de guerre qui rendra l'Europe définitivement soumise à l'OTAN. La nécessité de l'existence d'un ennemi absolu, identifiable cette fois à la Russie de Poutine, est également cohérente avec les stratégies américaines, car elle peut renforcer, dans une fonction russophobe, le lien de subalternité européenne aux Etats-Unis. Tout à fait dans la ligne des stratégies de domination américaines se trouve, en outre, l'idéologie européiste, qui proclame la nécessité, le caractère indispensable, l'irréversibilité de l'union européenne, laquelle entraîne inéluctablement l'adhésion inconditionnelle à l'OTAN, à l'anglosphère, à l'Occident américain. L'idéologie pro-européenne subsiste, afin de dissimuler la réalité du bluff d'une unité européenne, historiquement convertie en Anti-Europe. Mais le dogme idéologique pro-européen qui répand la fausse image d'une Europe berceau des droits de l'homme, assiégée par l'autocratie russe, a une fonction manipulatrice bien plus importante dans la réalité historique actuelle : celle d'exorciser la dissolution progressive réelle de l'UE et avec elle, la décadence irréversible de l'Occident tout entier.

Germanophobie et anglosphère

La guerre russo-ukrainienne a entraîné de grands changements en Europe, notamment en ce qui concerne le rôle géopolitique de l'Allemagne dans le monde. Avec l'Ostpolitik du chancelier Willy Brandt, l'Allemagne s'était engagée sur la voie de la pacification, de l'expansion commerciale dans les pays d'Europe de l'Est et de l'interdépendance économico-énergétique avec l'URSS. L'Allemagne a ainsi repris un rôle de centralité géopolitique dans le contexte européen, tout en exerçant la fonction de garant de l'équilibre entre l'Europe de l'Ouest et de l'Est, dans le cadre de la bipolarité USA-URSS à l'époque de la guerre froide.

Après l'effondrement de l'URSS et la réunification de l'Allemagne, l'expansion de la sphère d'influence allemande s'est étendue à toute l'Europe de l'Est et les liens d'interdépendance économique et énergétique avec la Russie se sont renforcés avec la construction des gazoducs Nord Stream 1 et 2. La politique d'ouverture à l'Est des chanceliers allemands Kohl et Schroeder a été accentuée par Merkel, dont l'objectif était d'établir un partenariat avec Moscou, dans la perspective d'intégrer la Russie dans la "maison européenne commune". L'orientation de la politique étrangère allemande visait une relation toujours plus étroite avec Moscou, afin non seulement de favoriser l'ouverture de routes commerciales vers la Chine pour les exportations allemandes, mais aussi de contrebalancer l'influence géopolitique des États-Unis en Europe.

-1x-1ggr.png

L'Allemagne, en tant que puissance économique, mais sans ambitions géopolitiques expansionnistes, n'aurait pas dû susciter l'hostilité des Etats-Unis, toujours réticents à l'émergence d'une puissance européenne en opposition aux intérêts américains. Cependant, la politique de Merkel s'est avérée incompatible avec les objectifs stratégiques de l'Occident.

En fait, en Europe de l'Est (une région où a eu lieu la grande expansion industrielle allemande), l'Allemagne s'est imposée comme une puissance économiquement dominante, mais cette hégémonie ne s'est pas accompagnée d'une suprématie politique. Les pays d'Europe de l'Est, ainsi que les États baltes, ont été inclus dans la zone occidentale, et l'expansion de l'OTAN jusqu'aux frontières russes a révélé de manière flagrante les objectifs d'une stratégie américaine visant à contrer non seulement la Russie de Poutine mais aussi la puissance allemande.

Lors de la guerre ukrainienne de 2014, l'Allemagne a d'abord adopté une ligne pro-atlantique, car l'inclusion de l'Ukraine dans le contexte occidental offrait une occasion favorable à l'annexion de l'Ukraine dans sa zone d'influence économique. L'attitude de l'Allemagne est alors devenue très ambiguë. Elle a poursuivi une politique de détente vis-à-vis de Moscou afin de préserver ses propres intérêts économiques et énergétiques.

Le rôle de l'Allemagne dans l'appel au respect du traité de Minsk par l'Ukraine n'est pas pertinent, tout comme l'intervention pacificatrice du président Steinmeier en Ukraine. Au départ, l'Allemagne était également réticente à fournir des armes à l'Ukraine et à approuver les sanctions contre la Russie, mais l'intention de Scholz de "créer une paix sans armes" s'est avérée être un slogan sans contenu.

La fin du lien d'interdépendance avec la Russie coïncide avec le déclin de la puissance allemande. Sa suprématie économique sera mise à mal par les prix élevés de l'énergie, qui rendront ses exportations non compétitives, et par la politique protectionniste d'incitations importantes, faussant la concurrence, en faveur des entreprises américaines pour l'innovation verte, mise en œuvre par Biden afin de perturber l'industrie européenne. En outre, dans une Europe engloutie par l'OTAN, la Grande-Bretagne, bien que pays non membre de l'UE après le Brexit, finira par assumer le leadership, en tant qu'interlocuteur européen privilégié des États-Unis, étant donné le déclassement politique de l'Allemagne, qui a toujours dû contrer la germanophobie anglo-saxonne en Europe. L'Allemagne, et avec elle l'ensemble de l'UE, sera donc absorbée dans l'espace géopolitique de l'Anglosphère.

Cette même primauté européenne de l'Allemagne est aujourd'hui sapée par la Pologne, qui, en vertu du soutien américain dans une fonction anti-russe, ne cache pas aujourd'hui son ancienne germanophobie, avec sa demande de réparations de guerre contre l'Allemagne pour un montant de 1,3 trillion d'euros. Enfin, il convient de noter qu'après les attaques contre les gazoducs Nord Stream 1 et 2, l'activation du gazoduc Baltic Pipe sur la côte polonaise de la mer Baltique, par lequel le gaz norvégien sera importé en Europe, pourrait établir une dépendance énergétique de l'Allemagne et de l'UE vis-à-vis de la Pologne.

GS_EDK_thubpmb.png

En réalité, l'Allemagne vit depuis l'après-guerre dans un état de contradiction permanente, qui s'est finalement manifesté avec la guerre d'Ukraine. L'Allemagne s'est imposée comme une puissance économique en développant ses exportations tant vers l'Eurasie que vers l'Occident, mais dans le même temps, elle s'est reléguée au niveau de la post-histoire en confiant sa sécurité militaire à l'OTAN et en déléguant sa politique étrangère aux États-Unis. Ce statut de "puissance civile" s'est avéré incompatible avec les stratégies géopolitiques expansionnistes de l'OTAN et l'ère de la post-histoire a pris fin avec cette guerre indirecte entre les États-Unis et la Russie.

9788836151363_92_1000_0_75.jpg

Le géant économique allemand a toujours été un nain politique dans le contexte mondial. Ce déficit politico-stratégique de l'Allemagne est bien décrit dans un article d'Andreas Heinemann-Grueder paru dans Limes n° 10/2022 et intitulé "Nous, Allemands, voulons la paix, mais nous n'aurons que plus de guerre" : "Pour sa part, l'Allemagne a non seulement perdu son rôle de pont entre l'Est et l'Ouest, mais aussi sa position de leader au sein de l'Union européenne. La Turquie a repris son ancien rôle de médiateur avec Moscou. Le manque désastreux de prévoyance stratégique de la classe politique allemande et ses hésitations ont endommagé de façon permanente les capacités de persuasion du pays. Aujourd'hui, Berlin ne peut plus définir l'agenda européen vis-à-vis de la Russie. Le contrôle de sa direction a été repris par les puissances anglo-saxonnes et les "pays de l'Est".

En Allemagne, avec le déclin de la primauté économique, la question allemande se posera à nouveau. De même qu'au sein de l'UE, un profond clivage peut apparaître entre le front pro-atlantique et russophobe des États de l'Est (ainsi que des pays baltes et scandinaves) et les pays de l'Ouest et de la Méditerranée, qui sont favorables à une coexistence pacifique avec la Russie, de même une confrontation amère peut apparaître entre les Allemands de l'Ouest, pro-occidentaux et pro-russes, et les Allemands de l'Est, pro-russes. Depuis la réunification, ce n'est pas un nouvel État allemand unitaire qui a vu le jour, mais plutôt une République fédérale d'Allemagne élargie aux Länder de l'ancienne RDA, dont les habitants se sont toujours considérés comme des Allemands de seconde zone. Si le conflit interne à l'UE peut conduire à sa dissolution, l'accentuation de l'opposition entre les Allemands de l'Ouest et de l'Est pourrait, à terme, conduire à la déstabilisation interne de l'Allemagne, déjà minée par les contrastes régionaux entre les Länder riches et les Länder moins développés. Ces contrastes pourraient affecter l'existence même de l'unité nationale à l'avenir.

La parabole de Poutine est-elle en train de disparaître ?

L'"opération spéciale" de Poutine en Ukraine s'avère être un échec. Après l'échec initial de la guerre éclair, l'Ukraine et la Russie sont embourbées dans un conflit prolongé qui n'aura pas de vainqueur. Si Poutine n'arrive jamais à Kiev, Zelenski ne récupérera ni la Crimée ni le Donbass. La durée prolongée de la guerre ne peut que favoriser la stratégie des Etats-Unis, qui, en plus de ramener l'Europe dans l'espace atlantique, sans engagement direct dans le conflit, ont mis en œuvre une action d'attrition militaire et économique intensive contre une Russie qui montre toutes ses limites, tant militaires que politiques.

Après la dissolution de l'URSS et la tragique défaillance russe d'Eltsine, l'ascension de Poutine a conduit la Russie non seulement à la reconquête de son indépendance nationale, mais aussi à son retour en tant que protagoniste sur la scène géopolitique mondiale. La politique de Poutine est marquée par le pragmatisme; le capitalisme russe est, au moins en partie, contrôlé par l'État. Il n'existe pas de doctrine politique poutinienne. Mais en comparaison avec les autres puissances mondiales, les États-Unis et la Chine, la Russie présente de sérieuses lacunes, tant sur le plan militaire qu'économique. L'immense richesse de la Russie en matières premières et ses progrès scientifiques avancés ne se sont pas reflétés de manière adéquate dans son développement économique. Il convient de noter que l'écart de développement économique entre l'Union soviétique et l'Occident a été l'une des principales causes de l'effondrement de l'URSS.

Après 20 ans au sommet du pouvoir, avec l'échec politique probable de la guerre d'Ukraine, la saison de Poutine pourrait toucher à sa fin. Des changements internes majeurs dans le système politique pourraient alors se produire, mais ils n'entraîneront pas une déstabilisation institutionnelle de la Russie. Ce dernier a besoin de réformes profondes, tant sur le plan économique que politique. Il faudrait surtout mettre un terme au pouvoir économique et à l'influence politique des oligarques, une classe parasite qui a surgi avec la fin de l'URSS. Parmi les facteurs qui ont influencé le manque de développement économique de la Russie figure l'absence d'une classe moyenne productive répandue dans la société russe.

La fuite hors de Russie de milliers de citoyens pour échapper à une mobilisation partielle a mis en évidence la façon dont le soft power envahissant de l'américanisme occidental a également contaminé la société russe, en particulier les jeunes générations. Il s'agit d'un phénomène inquiétant pour la préservation des racines culturelles et de l'identité nationale de la Russie.

imeurdisssages.jpg

L'Anti-Europe se dissout dans l'AmEurope

Quelle que soit l'issue de cette guerre et les déficiences structurelles évidentes révélées par la Russie, devenue à moitié puissance mondiale, le déclin de l'Occident semble désormais irréversible. Le système néo-libéral, érodé par la récession et l'inflation incontrôlable, s'effrite en même temps que la mondialisation, qui a révélé toutes ses faiblesses et ses fragilités avec la crise pandémique, le prix élevé de l'énergie et la guerre. La suprématie économique et politique des États-Unis est mise à mal par l'émergence des nouvelles puissances continentales d'un BRICS qui ne cesse de s'élargir.

Mais surtout, l'Occident est déchiré par un processus de dissolution interne. Le modèle de société néo-libéral est en train de s'effriter, avec la manifestation de phénomènes de démembrement interne des Etats occidentaux (en premier lieu les USA), en raison de la contestation de plus en plus prononcée de la dérive oligarchique du système politique occidental et de la dégénérescence éthico-morale d'une société dominée par l'individualisme absolu et relativiste.

L'Anti-Europe s'est dissoute en Am-Europe : c'était le destin inéluctable d'une Europe identifiée à l'UE. L'ère de la post-histoire dans laquelle l'Europe avait hiberné touche à sa fin. Mais dans cette Europe privée de souveraineté, d'identité et de dignité, la "culture de l'annulation" rampante ne pourra jamais anéantir son histoire, ni faire disparaître la configuration géopolitique d'un continent eurasien penché vers l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient. L'impossibilité d'intégrer l'Europe dans l'Occident atlantique est bien argumentée par Franco Cardini dans son article intitulé "Chevaliers d'Amérique : "les valeurs de l'Occident" : "Quelqu'un a dit et écrit, sur des organes de presse de 'droite', que je suis 'anti-atlantique' et 'anti-américain' et qu'à 'Euramerica' je préfère 'Eurasia'. Qu'il soit clair que je ne suis pas un eurasiste, à supposer que l'eurasisme en tant que valeur politique existe. Certes, je préfère l'Eurasie à l'Euramérique et à son chien de garde, l'OTAN: mais précisément parce que je crois obstinément à la possibilité pour l'Europe de retrouver ses racines authentiques et de pouvoir, à l'avenir, construire une structure solide indépendante des blocs qui se dessinent et servir de médiateur entre eux en fonction d'une politique de paix. Dans leur système de construction de l'Amérique en tant que grande puissance dans le contexte des blocs opposés, les États-Unis ne nous laissent pas suffisamment d'autonomie: ils ne nous laissent donc pas non plus le choix. Si nous ne voulons pas rester soumis (et j'utilise un euphémisme), nous devons nous placer de l'autre côté en vue de rester autonomes et souverains: il leur appartiendra alors de rectifier les erreurs qu'ils ont commises et de regagner notre confiance, mais il n'y a pas de place pour cela pour le moment. En ce moment, je soutiens donc la nécessité pour l'Occident à tête américaine de ne pas suivre le dessein de la Maison Blanche et/ou du Pentagone de renverser le monde eurasiatique en rétablissant une hégémonie historiquement perdue de manière irréversible et en mettant en œuvre les stratégies et tactiques du totalitarisme libéraliste, le plus sournois mais non le moins infâme des totalitarismes (et il nous le montre en Europe aujourd'hui): tenter de réduire en bouillie toute liberté de pensée en dégradant systématiquement ses expressions en formes de fake news, en faisant un désert de toute différence de jugement et en appelant ce désert "démocratie"). Bien sûr, à la limite, une tyrannie lointaine est un moindre mal qu'une tyrannie proche et menaçante. Mais le fait que le totalitarisme occidental soit celui de la "pensée unique" et de la négation de trop de droits substantiels du plus grand nombre (à commencer non pas par la richesse, mais par la dignité civile et sociale) au nom du droit à l'exploitation par des lobbies donne à la "quasi tyrannie" qui nous menace un caractère particulièrement odieux : et le fait qu'elle puisse, au moins pour le moment, se permettre le luxe de formes de "liberté" qui sont en substance sans intérêt sinon socialement illusoires et dangereuses aussi parce qu'elles servent d'anesthésiant moral de masse la rend encore plus infâme.

La revue de presse de CD - 15 janvier 2023

news-business-newspaper-theater-thumbnail.jpg

La revue de presse de CD

15 janvier 2023

EN VEDETTE

Conflit Ukraine-Russie : du fantasme à la réalité, de l’illusion à la désillusion

Par le général (2s) Antoine Martinez.
Face à la guerre en Ukraine qui aurait pu et qui aurait dû être évitée, avons-nous encore le droit, dans un monde pourtant dit libre, d'appréhender cette situation dramatique avec une grille de lecture non manichéenne ou sommes-nous sommés de nous soumettre à la seule vérité dispensée officiellement sous peine d'être invectivés et insultés ? Un certain nombre de sujets doivent être évoqués, développés et analysés afin de mettre en évidence les véritables enjeux et les risques d'une confrontation généralisée qui n'est pas dans l'intérêt des Européens. Analyse très détaillée trouvée dans Antipresse n° 371 du 8 janvier 2023.

https://www.craft.do/s/ycqH2inv3rV1ye

AFRIQUE

Algérie : Du « royaume Arabe » à la départementalisation jacobine

Dans les années 1950, juste avant les indépendances, le monde en perdition n’était pas l’Afrique, mais l’Asie qui paraissait alors condamnée par de terrifiantes famines et de sanglants conflits : guerre civile chinoise, guerres de Corée, guerres d’Indochine et guerres indo-pakistanaises. En comparaison, durant la décennie 1950-1960, les habitants de l'Afrique mangeaient à leur faim, étaient gratuitement soignés et pouvaient se déplacer le long de routes ou de pistes entretenues sans risquer de se faire attaquer et rançonner.

Le blog de Bernard Lugan

https://bernardlugan.blogspot.com/

ALLEMAGNE

Annalena Baerbock - une construction des Etats-Unis ?

Outre de nombreuses lacunes et contradictions, la biographie de la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock révèle toutefois un point fixe constant : elle sert les intérêts des États-Unis. Le célèbre journaliste d'investigation Gerhard Wisnewski s'est mis sur la piste et révèle des choses étonnantes sur Baerbock dans son livre annuel « Verheimlicht - Vertuscht - Vergessen 2023 ».

euro-synergies.hautetfort.com

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2023/01/03/a...

DÉCONSTRUCTION

Manuel de l’OTAN sur le langage inclusif

Bureau de la représentante spéciale du secrétaire général de l’OTAN pour les femmes, la paix et la sécurité (sic). Un document officiel de 44 pages… Pour ne jamais oublier que la guerre est aussi, et surtout, culturelle !

nato.int

https://www.nato.int/nato_static_fl2014/assets/pictures/i...

droit-conscience-et-sentiments-requisitoire-eclaire-contre-le-nouvel-ordre-moral-occidental-par-eric-delcroix.jpg

L’antiracisme, ruine de l’âme

Par Éric Delcroix, juriste, essayiste et écrivain, auteur de Droit, conscience et sentiments. Du prétoire au confessionnal. Il est un phénomène cardinal qui détermine toute la vie sociale et politique du monde occidental, phénomène que personne ne semble voir, alors même qu’il est nouveau et fondamentalement subversif. Il s’agit du triomphe de la morale anti-discriminatoire, née dans sa forme achevée bien sûr aux États-Unis, dans les années cinquante du siècle dernier, notamment sous la plume d’un économiste, Gary Becker (1930-2014). Pour celui-ci, les discriminations, jusqu’alors tenues comme des affects naturels et mode de sélection sociale, étaient au bout du compte contre-productives pour les affaires (business), qui, avec l’effervescence moralisatrice, procèdent de l’essence du régime américain. Mais qui comprend de quoi il retourne ? Analysons les conséquences du mythe de l’antiracisme, derrière celui fondateur de l’antifascisme (ce trait d’union immarcescible et génial entre communistes et partis bourgeois, forgé par Staline en 1935, avec la politique dite des « Fronts populaires », jamais effacé) qui fonde de façon homogène l’idéologie occidentale (et russe) commune, occultant tout bon sens.

polemia.com

https://www.polemia.com/lantiracisme-ruine-de-lame/?utm_s...

DÉSINFORMATION/CORRUPTION/CENSURES/DÉBILITÉ

Référé suspension contre la décision de la CPPAP : le tribunal donne raison à FranceSoir

Le jugement du Tribunal administratif de Paris vient de tomber. Par une décision en date du 13 janvier 2023, celui-ci vient de trancher en faveur de FranceSoir et a prononcé la suspension de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la CPPAP a refusé le renouvellement de l’inscription dans ses registres de notre site en qualité de service de presse en ligne « jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ». Aussi, entre-temps, l’organe judiciaire enjoint la CPPAP « à rétablir le régime d’aide dont bénéficiait le site préalablement à la décision refusant le renouvellement de son agrément ». Il a été accédé à la demande du journal que soit transmise au Conseil d’État une question prioritaire de constitutionnalité qui devra traiter le sujet de la licéité de l’existence de la CPPAP.

francesoir.fr

https://www.francesoir.fr/politique-france/refere-suspens...

Daniel_Ellsberg_2020_06.jpg

Daniel Ellsberg : « Inculpez-moi aussi comme Julian Assange »

L’ancien fonctionnaire et lanceur d’alertes demande aux États-Unis de l’inculper dans la mesure où tout comme Julian Assange il est, de façon non autorisée, en possession de matériel classifié. Ellsberg emboîte ainsi le pas au fondateur de Cryptome.org qui a lui aussi demandé à être poursuivi, rapporte Joe Lauria.

les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/daniel-ellsberg-inculpez-moi-au...

Jean-Paul Sartre a-t-il appelé au meurtre des hommes blancs ? Askolovitch prétend que c’est faux pour accabler Houellebecq, la philosophe Bérénice Levet prouve que c’est vrai.

Dans sa revue de presse sur France Inter, Claude Askolovitch a accusé Le Point de couvrir un « gros mensonge » de Michel Houellebecq. La philosophe Bérénice Levet lui répond.

fdesouche.com

https://www.fdesouche.com/2023/01/07/affaire-houellebecq-...

Revue de presse RT du 1er au 7 janvier 2023

Exercice hebdomadaire de ré/désinformation grâce à Russia Today. Au sommaire : l’immigration clandestine explose en Europe ; les problèmes sanitaires dans les hôpitaux britanniques ; le FMI annonce une grâce récession ; les changements de politique étrangère en Israël ; nouvelles de Chine ; médiation entre Turquie et Syrie ; nouvelles de la guerre chaude en Ukraine ; rapport Pologne-Ukraine ; la Russie renforce son aviation stratégique ; militarisation accrue du Japon.

lesakerfrancophone.fr

https://lesakerfrancophone.fr/revue-de-presse-rt-du-1er-a...

ÉCOLOGIE

Stagnation du réchauffement climatique ?

Alors que les données globales du climat en 2022 n’ont pas de particularité remarquable, bien que le réchauffement reste à un niveau élevé, il est répété en boucle sur tous les médias et dans tous les discours politiques que la crise climatique aurait pris un tournant dramatique. Cette ritournelle mensongère est alimentée par un choix biaisé et délibéré de facteurs certes spectaculaires mais peu ou pas significatif d’une tendance lourde. Ainsi, les températures globales de l’année 2022 ne furent pas des plus élevées, les glaces de l’arctique n’ont pas fondu exagérément et les mers n’ont toujours pas recouvert l’île de Tuvalu (le niveau moyen monte actuellement de 34 cm par siècle). Documents et graphiques pour réfléchir.

Le blog de Michel de Rougemont

https://blog.mr-int.ch/?p=8888

Une nouvelle organisation paie des journalistes pour diffuser l’idéologie du changement climatique

Si vous voulez lutter contre le changement climatique, une solution consiste à payer des journalistes pour diffuser le message et les former à l’idéologie environnementale. Une autre voie consiste à promouvoir des produits qui s’inscrivent dans la transition vers les énergies renouvelables afin que les entreprises vertes puissent capitaliser sur ce que l’on appelle « l’opportunité morale ». C’est l’approche du 1Earth Fund, qui propose des cours, des certificats et des bourses aux reporters climatiques pour éduquer le public sur les combustibles fossiles tout en promouvant les solutions énergétiques vertes. L’organisation a été fondée par Roy Richards Jr., dont l’entreprise familiale Southwire distribue des produits et services d’énergie verte.

reseauinternational.net

https://reseauinternational.net/une-nouvelle-organisation...

ÉTATS-UNIS

L’industrie de l’armement domine le Congrès américain

Le nouveau budget militaire de 850 milliards de dollars, que la Chambre vient d’approuver est un cadeau à l’industrie de l’armement. Est-ce une coïncidence que les partisans du projet de loi à la Chambre aient reçu sept fois plus d’argent des entrepreneurs militaires que les opposants ?

les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/l-industrie-de-l-armement-domin...

carte_des_services_durgence_en_difficulte_en_france.jpg

FRANCE

Pénurie de médecins spécialistes, tiers-mondialisation de l’hôpital, abandon sécuritaire…est-il encore légitime de s’acquitter de l’impôt et des prélèvements sociaux en France ?

Est-il encore légitime de s’acquitter de l’impôt et des prélèvements sociaux en France ? Voici une question bien insolente, dans un pays qui interdit légalement toute incitation à ne pas s’acquitter de cette taxation généralisée. Une question insolente, mais néanmoins pertinente dans une société française où l’Etat, qui a le monopole des prélèvements, taxes, charges et impôts, rempli de moins en moins son rôle, et ne rend pas les services qu’il devrait rendre en échange justement de ces taxations.

breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2023/01/10/213447/penurie-de-...

Emmanuel Macron, image de la déraison occidentale

Pour la majorité de la population mondiale, l’Occident – c’est-à-dire l’espace formaté et dominé par les États-Unis – désigne le monde des fous : des fous qui croient par exemple que des hommes peuvent être enceints, qu’il est légitime d’euthanasier les malades ou qu’il faut arrêter de faire des enfants pour « sauver la planète ». Mais pour le reste du monde, l’Occident regroupe aussi les acteurs étatiques irrationnels. Des États et des gouvernements, et donc des interlocuteurs, non fiables. Qu’est-ce qu’un acteur étatique irrationnel ? Un État ou un gouvernement qui ne se soucie pas du bien de sa population. Et qu’est-ce qu’un État qui ne se soucie pas de protéger sa population ? Un État qui n’est pas souverain. Un acteur étatique irrationnel est aussi un acteur idéologique : il sacrifie sa population et son territoire à des idées abstraites, comme l’URSS à ses débuts.

polemia.com

https://www.polemia.com/emmanuel-macron-image-de-la-derai...

Pourquoi l’État est impuissant face aux marchés de la drogue : un ex des stups raconte

Jean-Pierre Colombies a travaillé plus de dix ans à la brigade des stups de Marseille. Il connaît le milieu de la drogue et les moyens que met en oeuvre l’État pour lutter contre le trafic de drogues. Il sait pourquoi les autorités n’obtiennent aucun résultat. Le phénomène est plus vaste, sociétal et culturel…

lemediapourtous.fr

https://lemediapourtous.fr/pourquoi-letat-est-impuissant-...

GAFAM

Les GAFAM en France : un lobbying aidé par un Etat faible ou séduit

« Dépenses de lobbying en augmentation rapide, débauchage de hauts fonctionnaires, contacts à l’Élysée, partenariats financiers avec des médias, des think tanks et des institutions de recherche... » L'Observatoire des multinationales a étudié les (grands) moyens du lobbying des GAFAM.

www.zdnet.fr/blogs

https://www.zdnet.fr/blogs/l-esprit-libre/les-gafam-en-fr...

twitter-files-matt-taibbi-feature.jpg

Les fichiers Twitter montrent comment l’État profond a conquis les médias sociaux

Matt Taibbi fait le point sur les récentes révélations concernant la manipulation de Twitter au profit d’entités gouvernementales partisanes. La publication des « fichiers Twitter » s’est faite dans plusieurs fils Twitter d’auteurs, de gauche comme de droite, qui ont eu accès aux fichiers et à la communication interne de Twitter.

lesakerfrancophone.fr

https://lesakerfrancophone.fr/les-fichiers-twitter-montre...

Guilhem Giraud : « Grâce à l’intelligence artificielle, la surveillance de masse n’a pas de limite ! »

Ancien ingénieur à la DST, aujourd’hui DGSI, Guilhem Giraud dénonce les dérives de la surveillance de masse dans un livre témoignage intitulé « Confidences d’un agent du renseignement français », publié aux éditions Robert Laffont. Un phénomène qui, selon lui, menace les libertés individuelles.

radiofrance.fr/franceculture

https://www.radiofrance.fr/franceculture/guilhem-giraud-g...

GRANDE-BRETAGNE

Projets et institutions britanniques intervenant dans les affaires d'autres États

Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord mérite une attention particulière et des recherches approfondies sur l'organisation et l'exécution d'opérations psychologiques et l'utilisation de technologies de manipulation, car il possède une longue et considérable expérience dans la réalisation de telles actions dans les régions les plus dissemblables du monde.

euro-synergies.hautetfort.com

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2023/01/09/p...

image_0947248_20201025_ob_86e6ea_churchill.jpg

John Charmley et l’effarant bilan de Winston Churchill

Brute impériale, raciste humaniste, boutefeu impertinent, affameur et bombardier de civils, phraseur creux et politicien incapable en temps de paix, américanophile pathétique, Winston Churchill est naturellement le modèle de cette époque eschatologique et de ses néocons russophobes (Churchill recommanda l’usage de la bombe atomique contre les Russes à Truman). On laisse de côté cette fois Ralph Raico pour évoquer le brillant historien John Charmley qui l’analysa d’un point de vue British traditionnel : Churchill anéantit l’empire, choisit le pire et la guerre, varia d’Hitler (le moustachu puis Staline) et humilia l’Angleterre transformée en brillant troisième des USA. Autant dire que Charmley n’est pas bien vu en bas lieu. Il écrit en effet que l’Angleterre ruina deux fois l’Europe pour abattre une Allemagne qui finit par la dominer économiquement ! Niall Ferguson a reconnu aussi les responsabilités britanniques dans la Première Guerre mondiale.

euro-synergies.hautetfort.com

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2023/01/11/j...

IMMIGRATION

Une maîtrise des flux migratoires illusoire ? Focus sur le Royaume-Uni

Lors du débat diffusé sur TV Libertés, Philippe Murer a souligné que le gouvernement britannique n’avait pas tenu sa promesse de baisse de l’immigration, qui a pourtant été l’une des raisons majeures du vote en faveur du Brexit, tout en précisant : « un pays souverain peut toujours arrêter les flux d’immigration et ils ne l’ont pas fait ». Jean-Yves Le Gallou a insisté sur d’autres explications à cet échec que les aspects institutionnels, comme l’idéologie immigrationniste et les intérêts économiques favorables à l’ouverture des frontières. L’exemple du Royaume-Uni montre-t-il que la maitrise des flux migratoires est une chimère, même en dehors de l’Union européenne ? Si échec il y a, quelles en sont les explications ? Après avoir fait un bilan sur l’ampleur des flux migratoires au Royaume-Uni, nous en aborderons les causes puis les moyens que se donne le gouvernement britannique pour les maitriser.

polemia.com

https://www.polemia.com/ue-une-maitrise-des-flux-migratoi...

Au Danemark, on ne badine pas avec l’immigration

Quel est le pays membre de l’Union Européenne dont les citoyens peuvent connaître en un clic sur un site dédié les nationalités d’origine des personnes immigrées, leur taux d’emploi, la part de l’aide sociale qui leur est attribuée, les faits de violence selon le pays d’origine de leurs auteurs ? Un pays « fasciste », dominé par l’extrême droite ? Nullement : c’est celui de Hamlet, devenu un royaume paisible, aujourd’hui gouverné par les sociaux-démocrates (centre gauche). Voilà plus de vingt ans que les gouvernements danois successifs, de droite ou de gauche, ont cessé de se déchirer ou de se faire « des nœuds au cerveau » à cause de l’immigration, mais poursuivent sérieusement, en soignant les détails, une politique d’accueil contrôlé.

laselectiondujour.com

https://www.laselectiondujour.com/au-danemark-on-ne-badin...

011071011.jpg

LECTURE

Titre :

Le temps des loups, d’Olivier Maulin. Borderline, 324 pages, 15 €.

Auteur :

Olivier Maulin est journaliste (critique littéraire à Valeurs actuelles) et écrivain (déjà 14 livres publiés). Il fait partie des quelques et rares jeunes écrivains français qui ont beaucoup de choses à dire avec une plume acérée et un regard pointu sur le monde actuel, sur la bêtise, l’hypocrisie de notre société. C’est rabelaisien, très drôle et profond à la fois.

Quatrième de couverture :

« Jean-Maurice Grosdidier est un crétin de compétition. Depuis la mort de ses parents, il vit avec ses deux frères dans une ferme-auberge des Vosges et attend que l’argent tombe du ciel. Quand il apprend que la star multimillionnaire de la littérature américaine Samantha-Sun Lopez est invitée au salon du livre d’Épinal, il accouche d’une idée désastreuse : la kidnapper pour obtenir une rançon. Évidemment, rien de se passera comme prévu… »

Extraits :

« Daphné Loisel-Monfils […] à 23 ans, venait de publier son premier roman où elle racontait d’une écriture blanche les relations perverses que lui avait imposée son père et qui avaient fait d’elle ‘’une putain libérée mais toujours soumise’’. Dans l’espoir de vérifier si elle était vraiment putain, quelques critiques avaient salué l’audace de la confession et vanté un texte dérangeant qui propulsait le lecteur hors de sa zone de confort, avant de la contacter pour boire un café. Elle était bien putain, mais de l’espèce frigide et torturée : les critiques s’étaient sauvés avant les croissants. »

« La libération des échanges commerciaux avait décimé l’activité en quelques décennies. Il restait un ou deux tissages vers Saulxures, reconvertis dans la lingerie de luxe, mais la plupart des usines avaient fermée ; elles étaient tombées en ruine, certaines avaient été rasées, la plus belle avait été transformée en musée. C’étaient des étudiantes en costume d’époque ou des emplois aidés qui actionnaient désormais les métiers à tisser devant les touristes digérant leur repas marcaire. Après, ils iraient voir l’exposition temporaire ‘’L’Inde aux 1 000 couleurs’’ ou les ‘’Tissus sacrés des Incas’’ puis achèteraient à la boutique des nappes, des torchons et des mouchoirs fabriqués à Gérardmer (en attendant que le site ferme à son tour : on commandera les mouchoirs vosgiens directement aux Chinois) »

« La laïcité ! Non mais la laïcité ! Au secours ! Sauf respect, monsieur le maire, la laïcité n’a jamais donné un seul Français. Pas un seul ! Et vous savez pourquoi ? Parce qu’il faut d’abord être français pour être laïque ! C’est la fameuse charrue avant le fameux bœuf ! Vous comprenez le problème ? Ni l’école, ni la laïcité, ni même votre foutue République n’ont jamais fait et ne feront jamais des bons petits Français ! Seules les mœurs françaises font un Français ! Vivre à la française, penser à la française, avoir une histoire française ou la reprendre à son compte ! Le reste, c’est de la rigolade, du carton plastifié tricolore brandi sur les plateaux télé par les Belphégor des déserts ! Pour être Français, il faut accepter de vivre en Français, point final ! »

« Dès le lendemain du coup d’État, le préfet se déplaça avec une vingtaine de policiers pour faire cesser les troubles. Blanche le reçut avec courtoisie dans la salle des fêtes de la mairie, entourée de cinquante francs-bûcherons armés, et lui notifia dans les formes la sécession du royaume d’avec la République française. Le préfet quitta les lieux et en appela à l’armée qui, occupés à se battre dans les banlieues, n’intervint pas. Dans les jours suivants, on établit les frontières du nouveau royaume, on déboulonna les symboles républicains et on frappa monnaie (le franc vosgien). »

AH2010.jpg

550x749.jpg

RÉFLEXIONS

« Toute cette façade que l’on appelle démocratie va bientôt s’effondrer », par Alexandre Dianine-Havard

D’origine française, russe et géorgienne, Alexandre Dianine-Havard vit à Moscou depuis une quinzaine d’années. Diplômé en droit, il a d’abord exercé le métier d’avocat en France puis en Finlande, avant de se consacrer au développement et à l’enseignement du système du Leadership Vertueux : une approche du leadership fondée sur la science de la vertu (arétologie) élaborée par les anciens Grecs, et destinée à faire émerger une nouvelle génération de leaders à même de « faire rayonner la beauté de la vie et de la famille, promouvoir une économie juste et remettre l’être humain au centre ». Lors de cet entretien, Alexandre Dianine-Havard a évoqué les grands défis auxquels notre civilisation est, selon lui, confrontée, dépeignant notamment une société peuplée d’êtres pusillanimes et irrésolus, en quête de confort et de plaisirs factices, esclaves de leurs désirs et de leurs passions, où la vertu, la transcendance et l’altruisme ont laissé place au relativisme, au consumérisme et à l’individualisme. « Je pense que le principal problème est anthropologique, nous ne savons plus du tout ce qu’est l’homme. Les principes de la nature humaine n’existent plus. C’est le subjectivisme, l’individualisme total à tous les niveaux. »

epochtimes.fr

https://www.epochtimes.fr/toute-cette-facade-que-lon-appe...

L'inégalité comme condition d'existence (Nicolas Berdiaev)

Vidéo. Grâce aux réflexions du philosophe russe Nicolas Berdiaev sur la notion d’inégalité, contrairement à l’avis commun, l’inégalité, loin d’être un mal, est, selon lui, la condition nécessaire à l’épanouissement de la vie et de tout génie créateur. L’égalitarisme, lui, loin d’être mû par l’amour, souhaite au contraire tout égaliser dans le néant. Un renversement de valeurs dont on voit aujourd’hui les multiples conséquences.

Le site d’Ego No

https://www.youtube.com/watch?v=knsUncJZB3Q

RUSSIE

Bulletin N°116. Bilan 2022 : autocritique, livraison d'armes, prise de Solédar. (12.01.2023).

Xavier Moreau nous donne des informations très précises sur les thèmes suivants : Chine et pétrole russe ; Provocation kiévienne à Kharkov ; Livraison d’armes otaniennes ; Autocritique 2022 ; Erreur sur les dates ; Déclenchement de l’opération spéciale ; Contre-offensives ukrainiennes ; Scénarios de fin d’année ; Acteurs rationnels vs acteurs irrationnels ; Médiocre performance de l’armée ukrainienne ; Résilience de l’économie russe ; Principe primordial de l’emploi de l’armée russe ; Carte des opérations militaires.

odysee.com

https://odysee.com/@STRATPOL:d/116e:f

SANTÉ

La « vaccination » contre la covid « réduit » les formes graves

Il est des images ou des tableaux qui se passent de commentaires. J’ai vérifié la source, en allant directement sur le site du gouvernement de Nouvelle Galle du Sud en Australie, où apparemment on ne cache rien. Ce sont les chiffres d’hospitalisations, soins critiques et décès, du 15 au 31 décembre 2022, selon le sexe, l’âge et le statut vaccinal, 0 à 4 doses ou plus. Signalons que les 4 doses ou plus ne sont pas les plus nombreux dans la population (45 %) …

covid-factuel.fr

https://www.covid-factuel.fr/2023/01/07/la-vaccination-co...

Y a-t-il une surmortalité chez les 20-40 ans depuis 2021 ?

On détecte un signal qui devrait conduire les autorités à enquêter et à chercher une explication à la nette inflexion à la hausse de la mortalité des jeunes au cours de l’année 2021, avec quelques centaines de décès inattendus. Et si de l’ordre de 400 décès de jeunes de 20 à 40 ans s’avèrent être imputables à une intervention humaine au cours de 2021, ce nombre n’est certes pas susceptible de modifier la démographie de la France, mais c’est bien davantage que le bilan du 13 novembre 2015 qui a scandalisé le monde entier, et cela ne peut pas être considéré comme négligeable ou excusable. Reste à savoir si le même phénomène se retrouve dans d’autres pays que la France, et si l’enquête sera sérieusement menée quelque part…

covid-factuel.fr

https://www.covid-factuel.fr/2023/01/13/y-a-t-il-une-surm...

Une spécialiste des affaires juridiques de Vanguard-Pfizer devient Madame maladies infectieuses.

Cette information venue de Suisse permet une remarquable analyse de la mise en place d’une toile arachnéenne mondiale de la Santé, pour le plus grand bien de Big Pharma.

Le blog de Liliane Held Khawam

https://lilianeheldkhawam.com/2023/01/08/une-specialiste-...

Covid-19 : les cas de myocardites après la troisième dose de vaccin ont augmenté de 800 %, selon une étude prospective

Depuis le lancement de la vaccination en population générale, de nombreuses études scientifiques confirment un risque de myocardite survenue après la vaccination anti-Covid. L'inflammation du myocarde toucherait majoritairement des hommes jeunes, des adolescents ou des enfants. Cependant, les myocardites étudiées sont généralement les cas les plus graves qui ont nécessité une prise en charge hospitalière. Qu'en est-il des patients qui présentent des lésions myocardites peu symptomatiques ou asymptomatiques, et qui, par conséquent, n'ont fait l'objet d'aucune prise en charge médicale ? Si aucun diagnostic n'est posé sur ces personnes, comment appliquer d'éventuelles mesures de prévention et de protection ? Enfin, comment évaluer l'incidence réelle des cas de myocardites survenues après une injection de vaccin anti-Covid-19 dans la population ? 

francesoir.fr

https://www.francesoir.fr/societe-sante/covid-19-etude-pr...

Y a-t-il une surmortalité depuis 2021 ?

Dès le début 2021, grâce à des analyses statistiques telles que celles proposées par la chaîne Youtube Décoder l’Éco, on avait compris que pour interpréter correctement la comparaison entre des courbes ou des données de mortalité, il fallait absolument prendre en compte la taille et l’âge de la population. Ainsi, même avec des taux de mortalité identiques d’une année sur l’autre pour chaque classe d’âge, l’accroissement et le vieillissement de la population française entre 2019 et 2020 devaient à eux seuls conduire à environ 30.000 décès supplémentaires en 2020 par rapport à 2019. Cela relativisait partiellement les 60.000 décès supplémentaires enregistrés en 2020, interprétés par la plupart des médias comme une preuve de la terrible dangerosité du Covid-19. Décoder l’Eco a depuis proposé des analyses plus poussées, incluant la notion d’année moisson, et interrogeant par ailleurs la part des décès directement dus à la politique sanitaire mise en œuvre face au Covid-19.

covid-factuel.fr

https://www.covid-factuel.fr/2023/01/12/y-a-t-il-une-surm...

UKRAINE

Guerre en Ukraine vidéo N°22

La situation sur le front de Bakhmut évolue rapidement. Le commandement russe de l’Opération Militaire Spéciale est redimensionné. La perspective d’une offensive russe se précise. Pendant ce temps les délires propagandistes continuent. Au sommaire : Observations sur le rôle des bellicistes français ; les conditions et les conséquences de la chute de Soledar ; le remaniement du commandement russe ; le déclenchement de l’offensive d’hiver ?

vududroit.com

https://www.vududroit.com/2023/01/guerre-en-ukraine-video...

UNION EUROPÉENNE

Media Freedom Act : les inquiétudes de l’Ojim étaient justifiées

Věra Jourová, vice-présidente tchèque de la Commission européenne chargée des valeurs et de la transparence, de mèche avec la galaxie Soros, est aux avant-postes dans le projet de mise en place d’un European Media Freedom Act.

ojim.fr

https://www.ojim.fr/media-freedom-act-les-inquietudes-de-...

 

samedi, 14 janvier 2023

Giorgia Meloni rêve de l'axe Washington-Garbatella au lieu de l'axe Paris-Berlin

WhatsApp-Image-2022-09-22-at-21.43.02-1024x576.jpeg

Giorgia Meloni rêve de l'axe Washington-Garbatella au lieu de l'axe Paris-Berlin

Ala de Granha

Source: https://electomagazine.it/meloni-sogna-lasse-washington-garbatella-al-posto-di-quello-parigi-berlino/

L'axe Paris-Berlin a échoué. Du coup, Giorgia Meloni dépose une pierre tombale sur l'Europe carolingienne. Il est dommage que l'alliance franco-allemande se soit brisée à plusieurs reprises et qu'elle se soit reconstituée à chaque fois. Mais, surtout, Lady Garbatella n'offre aucune idée d'alternative. Peut-être parce qu'elle n'ose pas, pour l'instant, proposer l'Europe américaine, ou plutôt nord-américaine. Soit l'Europe des majordomes, celle qui peut enthousiasmer Crosetto.

Il ne suffit pas de célébrer la fin supposée de la relation privilégiée entre Paris et Berlin pour offrir une chance à une Italie dont la politique étrangère est déléguée à Tajani. C'est certainement un saut qualitatif par rapport à Giggino, mais la substance ne change pas beaucoup. Si vous voulez une Europe forte, ce ne peut être l'Europe de Biden. Ce ne peut être l'Europe de Crosetto. Ni celle d'un axe de sororité entre Meloni et Ursula von der Leyen.

Au cercle de la Garbatella, ils sont manifestement dans l'illusion que la politique étrangère italienne peut être basée sur les lamentations de Tajani concernant les droits civils bafoués partout dans le monde, ou sur les armes expédiées aux marionnettes américaines. Ou sur les jérémiades sur l'Europe parce que l'Italie est incapable de renvoyer les immigrants illégaux chez eux et que les mauvais partenaires de l'UE ne veulent pas assumer l'incapacité de l'Italie.

Avec ces prémisses, on voudrait créer un nouvel axe Rome-Paris? Ou Rome-Berlin avec le risque de crises cardiaques répétées en tête de l'ANPI? Et puis l'Allemagne est divisée quant à la servilité (à conserver ou à rejeter) envers les États-Unis. Le centre-droit allemand ne l'apprécie pas, la gauche arc-en-ciel, si.

Bien sûr, l'Union européenne doit être radicalement modifiée. Comme structure, comme règlement, tout comme la logique même de son existence. Les bureaucrates, pas toujours les plus intelligents, et les banquiers ne suffisent plus. L'esprit européen s'est noyé dans une mer de boue qui a également favorisé la corruption, la malfaisance. Faute de "grande politique", nous nous sommes contentés d'un cabotage mesquin, qui est le rythme favori des rats prêts à profiter de toutes les occasions pour s'enrichir.

Le changement, alors. Mais pas pour remplacer l'axe Paris-Berlin par l'axe Washington-Garbatella. Car il ne s'agirait pas d'un axe horizontal mais d'un axe strictement vertical, dépourvu de toute réciprocité. Sans compter le détail non négligeable que Washington n'est pas en Europe et a des intérêts opposés à ceux de l'Europe.

Indro Montanelli dans le Japon de l'après-guerre: un voyage dans l'empire du bonsaï

Montanelli-9.jpg

Indro Montanelli dans le Japon de l'après-guerre: un voyage dans l'empire du bonsaï

par Riccardo Rosati

Source: https://www.barbadillo.it/67460-cultura-montanelli-in-giappone-nel-dopoguerra-il-viaggio-nellimpero-bonsai/?fbclid=IwAR2OzGavIftIIDa-iP64GaiucXXpsiu0vPnONwQ0dVEpr8IuRQroxr3SK5g

Les articles rassemblés dans ce volume sont d'abord parus dans le Corriere della Sera entre novembre 1951 et mars 1952, période durant laquelle Indro Montanelli (1909 - 2001) a séjourné au Japon pour observer de près son évolution après sa défaite lors de la Seconde Guerre mondiale. Les conditions, donc, d'une nation militairement occupée et vétéran des six années de la "Régence MacArthur", avec le généralissime américain qui, dans la gestion pratiquement plénipotentiaire de l'Archipel, évitait rarement de révéler son peu d'estime pour les sujets de l'Empire du Soleil Levant. En fait, Montanelli ne l'ignore pas et rapporte clairement comment le manteau outrancier imposé par Douglas MacArthur a pratiquement cessé d'exister lorsqu'il a été remplacé au poste de SCAP (Commandant suprême des puissances alliées) par le général Matthew Ridgway, un homme doux qui n'était pas prisonnier de l'auto-idolâtrie qui allait plus tard nuire à la carrière de son collègue. Page après page, le meilleur journaliste italien de tous les temps - ainsi que ce Mussolini qui fascinait le jeune Montanelli lui-même - saisit d'un œil vif certains aspects essentiels d'un peuple qui vit pour la première fois la démocratie et se dirige vers cette extraordinaire expansion économique qui menacera bientôt la suprématie des économies occidentales.

Journalisme, voilà le mot clé qui connote le livre, comme l'explique bien Vittorio Zucconi dans la préface : "[...] parce que le secret de cette forme de journalisme n'est pas la connaissance, au contraire c'est l'ignorance du sujet". Zucconi ne jouit pas du tout de notre estime, et pourtant, en présentant ces écrits de Montanelli, il offre des réflexions d'une qualité absolue; peut-être est-ce dû au fait que lui aussi a été correspondant au Japon, mais dans les années 80, donc dans un pays aujourd'hui totalement capitaliste et en partie étranger à sa propre tradition, en raison de la forte américanisation. En effet, les mots de Zucconi font penser à ceux d'Italo Calvino, qui, avec sa Collection de sable (1984), a réussi à atteindre l'un des plus hauts sommets de la narration du Japon moderne. Comme pour Zucconi, l'ignorance est une valeur paradoxale chez l'écrivain ligure: "Nouvellement arrivé dans le pays, je suis encore au stade où tout ce que je vois a une valeur, précisément parce que je ne sais pas quelle valeur lui donner".

400619-MontanelliLIMPERO300dpi-269x431.jpgLe livre de Montanelli

Certes, Calvino est l'un des auteurs les plus importants du 20ème siècle, tandis que Montanelli et Zucconi, avec tout le respect que je leur dois, sont des journalistes et non des intellectuels. Néanmoins, dans L'Empire Bonsaï, on rencontre plusieurs passages vraiment surprenants par leur compréhension de la culture japonaise, à tel point que dans certains cas, nous nous sommes dit que, finalement, Montanelli avait "tout compris" ou presque ; comme lorsqu'il cristallise en quelques mots un élément très complexe, lié à cette composition raffinée, toute japonaise, d'une esthétique faite de cruauté: "On n'éduque pas et on n'éduque pas sans une bonne dose de méchanceté, d'intransigeance impitoyable. Je n'ai jamais vu un peuple aussi grossier et cruel'. De plus, s'il comprend avec une profondeur suffisante l'élégance de l'âme de cette nation, il ne manque pas non plus de saisir la rudesse des occupants, de cette Amérique dont Montanelli, bien que converti de longue date à l'antifascisme, ne pouvait vraiment apprécier aucune des valeurs: "Mais tout cela est-il vraiment une nouveauté, la nouveauté démocratique révolutionnaire que les Américains pensent avoir introduite ?".

Pour en revenir à Zucconi, ce dernier avoue éprouver une "admiration réticente" pour les écrits du chroniqueur le plus emblématique et le plus talentueux, qui dresse un portrait du Japon à travers une écriture qui n'est peut-être pas belle, mais est néanmoins "chaleureuse" et participative. Ce reportage sous forme d'articles journalistiques nous permet même de découvrir un très rare Montanelli 'affectueux' quand, par exemple, il parle de Shigeru Yoshida (1868 - 1977): Premier ministre japonais (1946 - 1947 et 1948 -1954), ainsi qu'un amoureux de l'Italie, et de Naples en particulier.

Le Japon envahi mais sobre et digne

L'Empire Bonsaï se dresse comme le précieux témoignage d'un pays envahi, victime d'une humiliation, que le peuple japonais affronte pourtant avec sobriété et dignité. Montanelli ne cache pas qu'il considère le "fascisme japonais" (une définition à l'égard de laquelle nous avons ponctuellement de forts doutes) comme une grave erreur. Quoi qu'il en soit, son esprit d'anarchiste structuré, donc avec un penchant parfois réactionnaire, émerge avec surabondance dans sa défense de Tomoyuki Yamashita (1885 - 1946), également connu sous le nom de "Tigre de Malaisie", en raison des atrocités commises par ses soldats à Manille, pendu comme criminel de guerre, ou du moins, c'était la version des événements propagée par les "alliés". Montanelli pense le contraire, et cela se voit lorsqu'il rapporte la dissidence de la presse, même la presse américaine, pour l'exécution de ce brave et noble officier, qui est entré dans l'histoire pour son incroyable capture de la "forteresse" britannique de Singapour: "Immédiatement après la lecture du verdict, mon collègue Pat Robinson de l'International News Service a mis au vote et publié, [...], la réponse des douze correspondants américains, britanniques et australiens qui, après avoir suivi le procès de la première à la dernière séance, se sont prononcés à l'unanimité contre la légalité de la sentence: je le dis avec une certaine fierté de journaliste".

French_School_-_Emperor_Hirohito_(1901-1989)_in_Coronation_Costume_1928_-_(MeisterDrucke-426915).jpg

La figure de l'Empereur

Nous avons dit plus haut que nous n'avons pas affaire à un intellectuel. Par conséquent, de nombreuses nuances de la société de l'Archipel sont difficiles à saisir pour lui. Tout d'abord, celles concernant la figure la plus complexe de la culture japonaise, à savoir son souverain (天皇, Tennō). Montanelli ne parvient pas à en saisir l'essence, la raison pour laquelle un simple être humain peut devenir le symbole de toute une nation, comme ce qu'est le drapeau pour nous, Occidentaux. Ce qui ne lui échappe pas, en revanche, c'est la condition humiliante de l'empereur après la guerre: "[...] aujourd'hui le cent vingt-quatrième héritier d'une dynastie qui a duré sans interruption pendant deux mille six cent quatorze ans vit comme un père de famille de la classe moyenne, sans faste ni suite". On peut donc penser, en lisant sa chronique dans un pays si éloigné géographiquement et aussi autrement, que lorsque Montanelli ne parvient pas à comprendre, et cela arrive assez souvent, il ne perd jamais le respect, et même en cela, il nous rappelle l'égarement que Calvino a également ressenti au Japon : "Ainsi le temple Manju-in, qu'un incompétent comme moi jurerait être zen et pourtant il ne l'est pas [...]".

Italo_Calvino.jpg

Italo Calvino

 

509x840.jpg

Montanelli et Calvino au Japon

En conclusion, le Japon s'avère souvent capable de faire ressortir le meilleur de nous-mêmes. L'explication donnée par Montanelli est la suivante: c'est parce que c'est un "pays sérieux" ! La collection d'articles en question est une sorte d'album de la réalité japonaise, avec des "instantanés" tirés de l'esprit d'un homme qui était capable d'expliquer et parfois même de raconter. Sa vision du Japon n'est pas élaborée, mais elle est si vraie, si puissamment authentique dans sa naïveté, comme le dit encore Zucconi à juste titre : "[...] parce qu'un journaliste n'est jamais un professeur, même s'il veut s'appeler ainsi, mais, en fait, il reste toujours et seulement un étudiant sur le point de se faire recaler". Montanelli et sa plume maussade nous manquent beaucoup. La lecture de ce texte, comme nous l'avons souligné, nous a rappelé le voyage de Calvino vers le Soleil Levant. D'un côté, un grand journaliste, de l'autre, l'un des plus grands écrivains des temps modernes, tous deux partageant cette "humilité" qui a fait la grandeur de l'odeporica (la "littérature de voyage") des Italiens au fil des siècles. Eux, les Japonais, sont ce qu'ils sont, des gens sérieux; nous, de notre côté, sommes ce que nous sommes, ou du moins nous l'étions il y a encore quelque temps, le Peuple le plus intelligent de la planète, au point qu'un "simple" journaliste se révèle capable d'exprimer des concepts sur le Japon bien plus profonds et exacts que ceux de tant d'universitaires de l'école anglo-saxonne en vogue depuis des décennies: "A moins que ce ne soit là mon erreur; de vouloir trouver une logique et donner une explication à ce que font les Japonais. Ce qui est aussi, à bien y réfléchir, une explication; et peut-être la seule qui compte".

Notes:

* L'impero bonsai Cronaca di un viaggio in Giappone 1951 - 1952 par Indro Montanelli (Rizzoli, Milan, 2007)

** Merci à notre collègue orientaliste Annarita Mavelli, qui a aimablement attiré notre attention sur le texte de Montanelli.

Riccardo Rosati

Riccardo Rosati sur Barbadillo.it

L'Occident a tendu un piège perfide aux Russes, mais il a fait chou blanc

974e436035a0488a98d8f69aa15d0c8a.jpg

L'Occident a tendu un piège perfide aux Russes, mais il a fait chou blanc

Péter G. Fehér

Source: https://www.magyarhirlap.hu/kulfold/20230113-a-nyugat-alattomos-csapdat-allitott-az-oroszoknak-de-rafazott

L'Occident se préparait déjà à la guerre contre la Russie en 2015. Il n'avait pas l'intention de persuader l'Ukraine de cesser de se battre contre sa région russophone séparatiste. Il voulait gagner du temps pour préparer l'Ukraine à la guerre. Et en poussant spectaculairement à la négociation, il tendait un piège de diversion à Moscou.

L'Occident a tendu un piège perfide aux Russes, mais il fait froid dans le dos.

0602434755787-web-tete.jpg

C'est vraiment comme jeter de l'huile sur le feu. La Commission européenne a accepté la proposition du président ukrainien Zelensky et a convoqué un sommet européen à Kiev au début du mois prochain, principalement pour discuter d'une aide supplémentaire à l'Ukraine. Les principaux sujets abordés seront le niveau de l'aide militaire, le processus de reconstruction et la base financière de la reconstruction.

Des plans ambitieux, car la reconstruction nécessiterait avant tout la paix, qui n'est pas encore à l'horizon. Les hauts fonctionnaires de l'UE ne sont pas le moins du monde gênés par le fait que Moscou prépare une offensive majeure contre Kiev, et se disent peut-être: les braves ont toute la chance du monde. Ce n'est pas de la bravoure, mais une provocation qui rend la paix encore plus improbable, car le Kremlin peut ainsi se justifier du point de vue russe en en attaquant l'Ukraine.

Pourquoi ? Il y a des années, lors de la Conférence sur la sécurité de Munich, Vladimir Poutine a expliqué pourquoi l'Ukraine devait faire partie de la sphère d'intérêt russe pour des raisons historiques, culturelles, linguistiques et religieuses. Bien sûr, on peut se demander sur quelle base une grande puissance veut-elle établir une sphère d'intérêt pour elle-même? 

Mais il faut aussi se poser la question hypothétique suivante: que dirait Washington si le Mexique commençait lentement à "glisser" vers l'autre côté? Il ne le permettrait sûrement pas; une grande puissance ne permettrait jamais une telle chose. Votre voisin ne peut pas être votre ennemi.

Et c'est ce qui s'est passé. Mais il y avait l'espoir qu'après la tentative de sécession de la région sud-est du Donbass, qui fait toujours partie de l'Ukraine et qui est en grande majorité russophone, et compte tenu que cette population russophone a essayé d'obtenir son indépendance par la lutte armée, les parties viendraient à la table des négociations et qu'une solution pacifique serait trouvée.

petro_poroshenko_1.jpeg

Mais les présages n'étaient pas bons, car en 2014, les États-Unis, pour "à peine" cinq milliards de dollars, ont organisé un coup d'État à Kiev et évincé le président ukrainien légitimement élu, Viktor Ianoukovitch. Seulement parce qu'il a refusé de signer un traité d'association avec l'Union européenne et a commencé à "draguer" Moscou. Et son successeur, Petro Porochenko (photo), a inversé les rouages du gouvernement car il aurait même inscrit dans la constitution ukrainienne que son pays deviendrait membre de l'OTAN et de l'UE.

L'accord entre feu le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev et le président américain de l'époque, George Bush, est maintenant assez bien connu: l'Union soviétique n'interviendrait pas dans les changements sociaux en Europe de l'Est en échange du fait que les États-Unis ne déplaceraient pas l'infrastructure militaire de l'OTAN d'un millimètre vers l'Est. Le pacte n'avait même pas expiré lorsque les deux États allemands ont été réunis.

C'est le président américain Bill Clinton qui a rompu avec la loi coutumière selon laquelle l'occupant de la Maison Blanche doit tenir les promesses de ses prédécesseurs. Aujourd'hui, toute l'Europe de l'Est et les trois anciennes républiques baltes soviétiques sont membres de l'OTAN.

Mais ce n'est pas tout, car après le coup d'État qui a renversé le président ukrainien en 2014, l'Occident a tendu à Moscou un piège qu'il a tardé à exploiter. Sous la forte pression de l'Occident, les parties se sont assises à la table des négociations dans la capitale biélorusse vers la fin de l'année et ont finalement signé un accord à Minsk en février 2015, qui avait alors été modifié à plusieurs reprises. Outre un cessez-le-feu immédiat, l'accord prévoit, entre autres, la séparation entre l'armée ukrainienne et les forces armées séparatistes par une zone tampon de 30 kilomètres, le retrait des armes lourdes, la libération des otages et des prisonniers de guerre, et le départ des forces armées étrangères.

Cependant, l'accord était voué à l'échec dès le départ car il contenait une clause: Kiev doit accepter de dialoguer sur le futur statut de la région de Donetsk et de Luhansk, et doit procéder à une réforme constitutionnelle pour décentraliser l'administration, c'est-à-dire créer une forme de séparation pour le Donbass.

Le temps, cependant, a devancé la réalisation de ces deux dernières conditions. À cette époque, la scène politique de Kiev était dominée par les nationalistes, l'extrême-droite, les néo-fascistes. Même si, sur le papier, l'accord existait, le seul résultat positif était que, bien que les combats armés soient devenus monnaie courante, le conflit ne s'est pas intensifié.

Et c'était cela le piège de l'Occident pour la Russie. Il y avait un conflit "gelé" russo-ukrainien, dont la solution existait sur le papier, mais en réalité la situation restait tendue. En d'autres termes, Moscou a peut-être cru que l'accord de Minsk, négocié par la médiation franco-allemande, serait finalement une garantie suffisante pour la poursuite des négociations en vue de parvenir à un cessez-le-feu et à la paix.

L5EGGLI7OQQSBL3TF5XVQ2FX7E.jpg

Sept ans après l'accord de Minsk, le Kremlin s'est un jour réveillé en constatant qu'une armée agressive compatible avec l'OTAN avait été déployée le long des frontières occidentales de la Russie, malgré le fait que l'Ukraine ne fasse pas de jure partie du système de défense occidental. En fait, l'Occident a profité de ce temps de répit pour équiper sérieusement l'armée ukrainienne. Avant même que la guerre n'éclate, Zelensky déclarait avec assurance: "Les accords de Minsk n'existent pas !".

Mais que s'est-il réellement passé? "L'Occident n'avait aucune intention de forcer Kiev à respecter les accords de Minsk. Au contraire, l'objectif était de gagner du temps et de l'utiliser pour renforcer militairement l'Ukraine" - c'est ce qu'a déclaré l'ancienne chancelière allemande Angela Merkel dans une récente interview au journal allemand Die Zeit. En d'autres termes, dès 2015, l'Occident a décidé de lancer une sorte de conflit armé pour affaiblir la Russie. L'Occident n'a donc pas utilisé les accords de Minsk pour réconcilier les parties, mais pour préparer l'Ukraine à la guerre contre la Russie. Moscou, cependant, confiant dans les bonnes relations économiques que la Russie entretenait avec l'Allemagne à l'époque, a été lent à réagir au piège qui avait été tendu. La Russie est intervenue au dernier moment, lorsqu'elle a compris le danger.

Selon Mme Merkel, les accords de Minsk ont été un succès à un égard, car "l'Ukraine a profité de ce temps pour devenir plus forte, comme nous le voyons aujourd'hui. L'Ukraine de cette époque n'est pas l'Ukraine d'aujourd'hui. Poutine aurait pu facilement gagner à ce moment-là. Et je doute fort que les pays de l'OTAN auraient pu faire autant à l'époque qu'ils le font aujourd'hui pour aider Kiev", a fait valoir Mme Merkel.

Pour Moscou, la formule est claire : on ne peut faire confiance à l'Occident et il faut lui présenter des faits accomplis. Il n'y a rien d'autre à faire.

Alors qui a commencé cette guerre ?

L'historien Emmanuel Todd sur les Allemands: "Trahis par l'ami protecteur"

todd_hd3fran.jpg

L'historien Emmanuel Todd sur les Allemands: "Trahis par l'ami protecteur"

Source: https://zuerst.de/2023/01/13/historiker-emmanuel-todd-ueber-die-deutschen-verrat-durch-den-beschuetzenden-freund/

Paris . Le sociologue, historien et journaliste français Emmanuel Todd s'est exprimé dans un entretien publié par l'hebdomadaire suisse Weltwoche, dans lequel il dresse un bilan intermédiaire du conflit Est-Ouest actuel. Il s'y exprime aussi longuement sur la situation de l'Allemagne, dont la souveraineté vis-à-vis des Etats-Unis a quasiment disparu.

Interrogé sur une évaluation globale, Todd constate tout d'abord que les Etats-Unis sont à bien des égards sur le déclin, tandis que la Russie se porte mieux que ne le laisse supposer la couverture médiatique occidentale. Todd: "Les États-Unis se sont retirés d'Afghanistan et d'Irak. Ils n'ont pas pu arrêter l'ascension de l'Iran. Pas plus que celle de la Chine. Les Saoudiens ne prennent plus les Etats-Unis au sérieux. En Amérique, la mortalité augmente et l'espérance de vie diminue. Tous les journaux écrivent: l'Occident est normal et Poutine est un malade mental. Les Russes sont des monstres assoiffés de sang. La démographie dit autre chose: la Russie est plus stable et sa société est devenue plus civilisée".

Todd_Es-geht_um_Deutschland_Logo_08-01-2023_06-27-38.png

Dans le conflit actuel, les Européens se trouvent dans une situation particulièrement regrettable - ils sont en fait sans défense et, de plus, sans orientation: "Ils ont perdu la pensée géopolitique. Entre la stratégie offensive des Américains et la stratégie défensive des Russes, les Européens sont dans un état de confusion mentale stupéfiant".

Cela concerne notamment les Allemands, qui doivent actuellement se réveiller de l'illusion qu'ils sont protégés par les États-Unis. En réalité, ils sont les principales victimes de la géopolitique américaine. Washington n'a pas pardonné à Berlin d'avoir misé sur le gaz russe bon marché pour alimenter son industrie et d'avoir cherché à se rapprocher de la Russie: "La lutte contre ce rapprochement est devenue une priorité de la stratégie américaine. Les Etats-Unis ont toujours dit clairement qu'ils voulaient torpiller l'accord gazier. Le développement de l'OTAN en Europe de l'Est n'était pas dirigé en premier lieu contre la Russie, mais contre l'Allemagne. L'Allemagne, qui avait confié sa sécurité à l'Amérique, est devenue la cible des Américains. J'éprouve beaucoup de compassion pour l'Allemagne. Elle souffre de ce traumatisme de la trahison par l'ami protecteur - qui était aussi un libérateur en 1945".

Par ailleurs, les Allemands "ne savent que trop bien que Nord Stream a été détruit par les Américains. Par une action militaire conjointe des Américains, des Britanniques et des Polonais. Contre l'Allemagne. Mais ils ne peuvent pas le dire".

A31300.jpg

Dans ce contexte, Todd, qui avait déjà consacré une "nécrologie" remarquée aux Etats-Unis en 2002 (ndt: dans Après l'Empire), considère la politique allemande vis-à-vis de la Chine sous la direction du chancelier Scholz comme l'un des derniers domaines d'une politique allemande indépendante: "Scholz s'est rendu à Pékin. L'Allemagne refuse de couper le cordon avec la Chine pour plaire aux Américains".

L'Europe dans son ensemble est actuellement de plus en plus sous contrôle américain et souffre également de sa démographie désastreuse. Mais la Russie, bien qu'elle rejette les "valeurs" occidentales, n'est pas mieux lotie démographiquement. "En Ukraine, ils se font la guerre. Si elle n'est pas arrêtée, tout le monde la perdra", prévient Todd en conclusion.

41P9DeCryQL._SX307_BO1,204,203,200_.jpg

Publiciste et chercheur français, il est diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris et titulaire d'un doctorat en histoire de Cambridge. De 1977 à 1984, il a été critique littéraire pour le journal français Le Monde. Depuis, il travaille à l'Institut national d'études démographiques. En 1976, il prédit la fin de l'Union soviétique dans son livre La chute finale (rk).

Demandez ici un exemplaire gratuit du magazine d'information allemand ZUERST ! ou abonnez-vous ici dès aujourd'hui à la voix des intérêts allemands !

Suivez également ZUERST ! sur Telegram : https://t.me/s/deutschesnachrichtenmagazin

Toussenel et la première description de la mondialisation financière (1843)

322px-Toussenel_Nadar.jpg

Toussenel et la première description de la mondialisation financière (1843)

Nicolas Bonnal

Nous feignons de découvrir la mondialisation ; mais elle est ancienne. Voltaire la chante déjà dans le Mondain (1738). Nos vins, exulte-t-il, enivrent les sultans…

Elle devient moderne, bancaire et anglo-saxonne à partir de Waterloo, dont nous fêtâmes le bicentenaire avec nos vainqueurs bien-aimés.

En 1843, Toussenel décrit la mondialisation. Son bouquin mal titré (sa cible est la Suisse réformée des banquiers genevois – les Necker…) n’a pas vieilli puisque nous vivons ce que Hegel puis Kojève-Fukuyama ont appelé la Fin de l’Histoire. Il ajoute que la mondialisation ne se fait pas au profit du peuple anglais – pas plus qu’aujourd’hui au profit du peuple américain.

Le seul changement est que l’Angleterre n’est plus seule. Depuis 1918, les États-Unis codirigent le monde avec la City. Ils mettent au pas les pays dans le cadre de guerres mondiales ou des sanctions. Ils imposent lois, sous-culture et idéologie, bien ou mal. En 1843, la tête de turc européenne est déjà le tsar.

Toussenel désigne les six piliers de cette domination permanente :

- Une dette énorme :

"Il y a eu encore une autre considération : c'est d'entraîner le trésor dans de folles dépenses, pour le forcer plus tard de crier misère, et le réduire à l'impossibilité de ne tenter aucune grande entreprise d'utilité publique."

- L’État-croupion profitant aux seules élites :

"La théorie du gouvernement-ulcère est anglaise de naissance, puisqu'elle vient des économistes. L'Angleterre est le foyer de tous les faux principes, de toutes les révolutions, de toutes les hérésies. L'Angleterre est la grande boutique où se préparent et se débitent avec un égal succès les doctrines et les drogues vénéneuses…"

- La guerre permanente pour le contrôle des ressources :

"L'Angleterre veut la garde de tous les détroits qui commandent les grandes routes commerciales du globe. Elle vise le morcellement, parce qu'elle vit des déchirements du globe ; elle est protestante et schismatique en tout : individualisme et protestantisme sont tout un."

- La ruine économique par le libre-échange :

"L'Angleterre, en tuant le travail chez tous les peuples, pour faire de ceux-ci des consommateurs, c'est-à-dire des tributaires de son industrie, a tué la richesse de ces peuples. Le capitaliste a mis le pied sur la gorge au consommateur et au producteur."

- La fin des peuples et des patries :

"Sous ce régime de castes, en effet, il n'y a pas de peuple ; ou bien le peuple est une chose qui s'appelle indifféremment l'ilote, l'esclave, le serf, le manant, l'Irlandais. Le sol de la patrie n’a plus maintenant pour défenseurs que les prolétaires."

- Enfin, la crétinisation universelle par la presse qui collabore avec le nouveau maître :

"La féodalité industrielle, plus lourde, plus insatiable que la féodalité nobiliaire, saigne une nation à blanc, la crétinise et l'abâtardit, la tue du même coup au physique et au moral. Mais la presse, qui ne craint pas d'attaquer la royauté officielle, n'oserait pas attaquer la féodalité financière."

https://ia903104.us.archive.org/22/items/lesjuifsroisdel01tous/lesjuifsroisdel01tous.pdf

https://www.google.com/search?q=toussenel+f%C3%A9odalit%C3%A9+financi%C3%A8re&tbm=isch&ved=2ahUKEwjllbud78b8AhUh4rsIHe1dC2YQ2-cCegQIABAA&oq=toussenel+f%C3%A9odalit%C3%A9+financi%C3%A8re&gs_lcp=CgNpbWcQDDoHCAAQgAQQGFDCB1jVImDgNGgAcAB4AIABUYgB6QqSAQIyMpgBAKABAaoBC2d3cy13aXotaW1nwAEB&sclient=img&ei=KobCY-XYAaHE7_UP7butsAY&bih=1124&biw=2400#imgrc=KYtbYnvmWwFTDM

 

Numérique sa mère !

f6708425dfe055fa7220ed980f2301e3.jpg

Numérique sa mère !

par Georges FELTIN-TRACOL

La Poste française innove. Elle vient de rendre le courriel payant. En effet, le timbre rouge destiné aux envois rapides a disparu le 1er janvier 2023. Au nom de la sacro-sainte « dé-ma-té-ria-li-sa-tion » des services publics, un équivalent numérique le remplace. C’est au client de réaliser toutes les démarches. Il va de soi que les caciques de l’entreprise postale n’ont pas pris en compte la césure informatique qui frappe les personnes âgées (et pas seulement elles !) et les zones difficilement connectées. Le résident d’une zone rurale qui a vécu la fermeture du bureau de poste de son bourg devra prendre son véhicule pour affranchir son courrier plus ou moins loin de son domicile. C’est très surprenant à l’heure du prix élevé du carburant et de la primauté « réchauffiste – climatiste »…

b881622_1667144245494-m-1118800-1-1200wx1200h.jpeg

Victime de trois décennies de politique hyper-libérale en faveur d’une évidente ploutocratie et d’une mise en coupe réglée par quelques syndicats rétrogrades, la Poste se trouve en pointe dans la numérisation systématique des actes quotidiens. Il devient rare de pouvoir acheter un timbre auprès d’une machine avec des pièces de monnaie. Le prétexte est la lutte contre l’économie clandestine. La surveillance statistique des échanges épistolaires serait plus juste.

La Poste n’est pas la seule à investir dans la numérisation du quotidien. Malgré la hausse constante des frais bancaires, les banques réduisent le nombre de distributeurs automatiques d’argent. Certains groupes limitent non seulement le montant maximal de chaque retrait, mais aussi la fréquence, soit deux ou trois retraits mensuels. Les sommes d’argent déposées dans les banques deviendraient-elles la propriété effective des organismes bancaires ? Il faut le croire alors que leurs ponctions sur ces mêmes comptes ne cessent de croître.

L’objectif de cette politique du « tout-numérique » est d’inciter la population à privilégier le paiement électronique bien plus traçable que le règlement des achats en espèces sonnantes et trébuchantes. On se souvient à la fin du premier confinement covidien de l’incroyable désinformation autour des pièces de monnaie et des billets de banque supposés transmettre le coronavirus. Si des études scientifiques ont démonté cette fausse accusation, bien des commerces ont exigé un paiement obligatoire par carte bancaire illégal avant que le gouvernement fasse un rappel à l’ordre bienvenu. Dans le même temps, les instances du ministère de l’Économie et des Finances cherchent à superviser en direct la totalité des mouvements sur l’ensemble des comptes bancaires des particuliers et des entreprises de l’Hexagone. Cette effroyable intrusion n’est finalement pas opérationnelle pour l’instant. Mais on sait que les outils de surveillance existent et n’attendent que le moment propice. Ainsi tend-on peu à peu vers l’« enfer sociétal suédois » où, ayant disparu, l’argent liquide ne circule plus...

AdobeStock_538440377-min-1-min-scaled.jpeg

Depuis cinq – six ans, on ne prend plus le train dans le plus strict anonymat. Sur les lignes à grande vitesse, le billet est nominatif. Sur les TER (Trains express régionaux), il faut donner au minimum son numéro de téléphone. On doit s’attendre à l’avènement du billet de train entièrement numérique. Selon les lignes, 96 à 99 % des billets sont dès à présent numériques. La SNCF prévoit déjà de supprimer à assez brève échéance les quelque 3 000 composteurs. Vouloir un billet physique imprimé coûtera bientôt des frais supplémentaires ! Et puis, il devient presque nécessaire d’avoir un téléphone intelligent. Quant au co-voiturage, il implique au préalable de s’inscrire en ligne sur des sites dédiés.

Donnons d’autres exemples de l’invasion numérique dans la vie courante. Dans certains départements ou intercommunalités, il est possible de consulter chez soi les périodiques quotidiens, hebdomadaires et mensuels dans le cadre d’une médiathèque numérique. À la différence d’une médiathèque réelle dans laquelle la lecture sur place des titres de presse n’est pas restreinte, la lecture en ligne est soumise à un contingentement mensuel. Le numérique facilite ainsi le rationnement de l’information même si les titres disponibles versent tous dans le politiquement correct.

emojis-bulletins.jpg

La notation sur dix ou sur vingt ne se pratique plus dans maintes écoles primaires et collèges. Les bonnes vieilles notes jugées traumatisantes pour les pauvres enfants sont remplacées par des compétences exprimées en smileys ou en points de diverses couleurs. Un logiciel calcule ensuite le pourcentage d’acquisition de chaque élève. D’autres logiciels de l’Éducation nationale s’occupent de l’affectation des élèves de 3e en lycée général, technologique ou professionnel selon une série ordonnée de vœux. Le tristement célèbre Parcoursup oriente les lycéens en classe de Terminale vers un établissement de l’enseignement supérieur selon des critères toujours aussi flous. Aujourd’hui, le passage du bac avec un minimum d’écrits ne fait plus peur. La crainte des parents et des adolescents se reporte dorénavant sur les décisions de Parcoursup. Sans tous ces outils informatiques, le ministère de l’Éducation nationale serait en tout cas fortement paralysé !

hors-parcoursup-ipssi-ecole-informatique-idf.jpg

Telle la gangrène, le numérique se propage partout. Les yeux constamment rivés sur les écrans, nos contemporains font preuve d’une docilité qui confine à une révolution anthropologique inédite. On assiste in vivo à l’apparition d’un inquiétant homme numérique. Il peut enfin paraître paradoxal que la présente dénonciation utilise un support lui aussi numérique. Assumons volontiers le paradoxe ! Il est parfois bon de savoir retourner les armes de l’ennemi contre lui-même !

Georges Feltin-Tracol

« Vigie d’un monde en ébullition », n° 56, mise en ligne le 10 janvier 2023 sur Radio Méridien Zéro.

11:36 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, numérique | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

vendredi, 13 janvier 2023

La Russie et la Chine dans le nouvel ordre mondial - examen des théories d'Aleksandr Dugin et de Jiang Shigong

arton27698.jpg

La Russie et la Chine dans le nouvel ordre mondial - examen des théories d'Aleksandr Dugin et de Jiang Shigong

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2023/01/05/venaja-ja-kiina-uudessa-maailmanjarjestyksessa-aleksandr-duginin-ja-jiang-shigongin-teorioiden-tarkastelua/

Alors que le nouvel ordre mondial prend forme face au Grand Jeu géopolitique et à la "tempête parfaite" de l'économie mondiale, les conservateurs de l'Ouest se demandent également ce qui va se passer. Jonathan Culbreath s'est aventuré dans les théories russes et chinoises d'un ordre mondial multipolaire dans The European Conservative.

Il passe en revue l'histoire récente et reconnaît qu'après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis, avides de victoire, ont commencé à remodeler le monde à leur propre image. Le triomphe de la démocratie libérale sur les puissances de l'Axe a marqué une nouvelle phase de l'histoire. Après la chute de l'Union soviétique, l'idéologie et la forme politique américaines, ainsi que le système économique qu'elle avait hérité de son prédécesseur britannique, ont cherché à se mondialiser. C'était une ère monopolaire d'hégémonie américaine.

Le développement économique dans le monde entier s'est fait selon les termes définis par les institutions créées par le nouvel hégémon. Même les grands pays comme la Russie et la Chine ont dû se plier aux règles de l'Occident. Pour beaucoup, ce capitalisme mondial était considéré comme du "colonialisme américain", admet Culbreath.

Depuis lors, la Chine s'est imposée comme la deuxième superpuissance et la plus grande économie du monde. Contrairement aux attentes occidentales, la commercialisation et l'ouverture de la Chine au monde n'ont pas conduit à une libéralisation idéologique de la Chine, mais ont permis à Pékin de devenir le principal challenger de l'hégémonie occidentale.

Bien que la reprise économique de la Russie depuis l'effondrement de l'Union soviétique n'ait pas été aussi impressionnante pour Culbreath que celle de la Chine, la Russie est devenue une source d'énergie essentielle pour une grande partie de l'Occident et du reste du monde. Comme les événements récents l'ont clairement démontré, la Russie dispose également d'un levier géopolitique. Comme la Chine, elle est donc un concurrent majeur de la puissance anglo-américaine.

Après l'effondrement de l'Union soviétique, la Russie a été plongée dans le chaos sous la présidence de Boris Eltsine. La transition d'une économie socialiste planifiée vers une économie de marché capitaliste et une démocratie libérale a conduit à l'inflation et à l'austérité, causées par l'application accélérée de la thérapie de choc économique néolibérale occidentale dans la grande puissance de l'Est.

Depuis lors, pendant les années de l'administration du président Vladimir Poutine, la Russie a réintégré le marché mondial de manière impressionnante, principalement grâce à la grande quantité de ses importantes ressources naturelles. Cela a conduit à une forte reprise économique. Le mépris affiché par l'Occident a également donné naissance à de nouvelles tendances idéologiques en Russie.

Culbreath estime que l'objectif de la Russie est de redevenir - sans l'aide de l'Occident - "une grande civilisation indépendante, ancrée dans une nouvelle conscience de l'unicité politique, économique et culturelle de la Russie". 

Bien que la Russie et la Chine soient très proches dans leur opposition à l'autocratie occidentale, les superpuissances ont considéré différemment le monde multipolaire émergent. Les différentes circonstances ont également influencé les idéologies qui ont émergé sur le sol russe et chinois.

Culbreath cite Aleksandr Douguine et Jiang Shigong comme exemples dont les théories peuvent être utilisées pour comprendre les différentes formations idéologiques de la Russie et de la Chine contemporaines.

eae369d_1661064592942-aleksandr-dugin-13981126000-2.jpeg

L'idéologie eurasienne d'Aleksandr Douguine

Le politologue Aleksandr Douguine a formulé une nouvelle idéologie russe dans le cadre de la "multipolarité". Son courant de pensée, qui s'inscrit dans le cadre général de la "quatrième théorie politique", cherche à envisager l'avenir mondial d'un point de vue russe - ou plus largement eurasien - dans un monde post-occidental centré et post-unipolaire.

Après le système anglo-américain, le globe dans la vision de Douguine est divisé en plusieurs "grands espaces", chacun avec ses propres systèmes politiques, économiques et culturels uniques. Ici, Douguine suit explicitement la théorie du Großraum, le grand espace, de l'Allemand Carl Schmitt, qui sous-tend également les théories "réalistes" des relations internationales avancées par John Mearsheimer et d'autres chercheurs. 

Pour sa théorie d'un monde multipolaire, Douguine se considère redevable au politologue américain Samuel P. Huntington, qui a écrit son ouvrage controversé Le choc des civilisations et la refonte de l'ordre mondial, en protestation contre la thèse triomphaliste de Francis Fukuyama sur la "fin de l'histoire".

Douguine est d'accord avec l'argument de Huntington selon lequel la fin de la guerre froide n'a pas signifié la victoire du modèle démocratique libéral de gouvernement et de ses formes économiques et culturelles associées sur le reste du monde. Au contraire, l'effondrement du système bipolaire américano-soviétique n'a fait qu'ouvrir la voie à l'émergence d'un monde multipolaire, dans lequel des civilisations indépendantes deviendraient de nouveaux acteurs de l'histoire mondiale et des sources potentielles de nouveaux conflits.

Le monde de la mondo-civilisation est en train d'émerger dans l'ère post-monopole, comme une conséquence inévitable du rejet de l'hégémonie américaine et de la désintégration du monde mono-polaire en un ensemble d'États civilisés recherchant la souveraineté dans leurs propres cadres politiques, économiques et culturels.  

Dans la pensée idéaliste de Douguine, la multipolarité russe cherche non seulement à relever sa propre tête géopolitique, mais aussi à libérer les civilisations naissantes du monde en Afrique, en Inde, en Chine, en Amérique du Sud et ailleurs de l'assaut du globalisme américain et à donner aux civilisations séparées leur propre souveraineté.

D'autre part, les détracteurs de Douguine pensent toujours qu'il prône le leadership russe dans le nouvel ordre. Ses anciens écrits ont peut-être une influence sur la façon dont l'eurasianisme de Douguine est considéré par certains comme une version réactionnaire du néoconservatisme américain.

Qiangshigong_PKU_Law.jpg

Jiang Shigong et le mondialisme chinois

La commercialisation de la Chine dans les années 1980, une période de modernisation et d'ouverture, a suivi une trajectoire très différente de celle de la Russie, affirme Culbreath. L'économie de la Russie a été soumise à une "thérapie de choc" ultra-libérale dont elle ne s'est toujours pas totalement remise, mais le communisme de marché de la Chine a permis une forte accélération de la croissance de sa productivité économique, faisant de la Chine l'un des pays les plus riches du monde en quelques décennies.

Alors que les comptes rendus occidentaux typiques lors de la réforme et de l'ouverture de la Chine sous Deng Xiaoping la décrivent comme en écart par rapport à la vision maoïste antérieure du socialisme chinois, il existe un autre point de vue qui considère cette période de l'histoire chinoise comme un retour à l'approche scientifique marxiste-léniniste préconisée par Mao Zedong lui-même.

Selon cette interprétation, le capitalisme lui-même remplit un objectif spécifique dans la progression historique vers le socialisme et le communisme. En effet, les écrits de Vladimir Lénine sont pleins de répétitions de cette formulation de base: le socialisme lui-même dépend du capitalisme pour le développement des moyens de production, conformément aux lois du développement capitaliste telles qu'exposées par Karl Marx.

La politique de réforme de la Chine était en contradiction avec la "thérapie de choc" qui a paralysé la Russie. Au lieu de libéraliser tous les prix en une seule fois, la direction communiste a décidé de libéraliser les prix progressivement dans le cadre de son propre système. Cette approche plus prudente de la commercialisation a permis à l'appareil central de contrôler les réformes et même d'encourager la création de nouveaux marchés et zones de production - avec pour effet notable que la prospérité de la Chine a commencé à croître.

Les capitaux ont également commencé à affluer en Chine depuis l'Occident, contribuant à son essor au cours des trois décennies suivantes, rappelle l'Américain Culbreath. La Chine est devenue une destination privilégiée pour l'externalisation/délocalisation occidentale, la transformant en une "usine du monde" super-industrielle. La Chine est devenue non seulement un membre pleinement intégré de la communauté mondiale, mais aussi le principal producteur mondial de biens de consommation bon marché et de produits "plus lourds" comme l'acier. En un sens, le monde entier est devenu dépendant de la Chine.

Le processus de transformation de la Chine a donné lieu à une compréhension idéologique particulière de son rôle dans l'histoire mondiale. Le président Xi Jinping incarne cette idéologie dans sa philosophie de gouvernement. L'explication et la défense la plus autorisée de la pensée de Xi, selon Culbreath, vient de Jiang Shigong, un éminent spécialiste du droit constitutionnel à l'Université de Pékin.

Certains des écrits de Jiang ont été publiés en anglais sur le site Reading the China Dream, ainsi que des essais et des discours d'autres éminents spécialistes du développement moderne de la Chine. Jiang Shigong explique les idées de Xi Jinping - ou, plus largement, l'idéologie du socialisme chinois - et la décrit en termes marxistes comme une "superstructure idéologique naturelle qui complète la base matérielle du socialisme chinois".

Jiang conteste l'interprétation courante qui tente de voir une contradiction entre les époques de Mao Zedong et de Deng Xiaoping. Il décrit plutôt le développement historique de Mao à Deng et Xi Jinping comme une évolution continue et cohérente en trois étapes: sous Mao, la Chine "s'est levée"; sous Deng, elle "s'est enrichie"; et sous Xi, la République populaire, qui s'étend dans l'espace, "devient forte". 

Tout comme le Russe Alexandre Douguine dans sa théorie de la multipolarité, Jiang présente l'idéologie du socialisme chinois comme une alternative radicale à la théorisation de Fukuyama sur la fin de l'histoire dominée par les Américains. Jiang partage la vision de Douguine et d'autres théoriciens de la multipolarité de la fin de la domination du monde et du capitalisme occidentaux.

Cependant, l'approche de Jiang à l'égard de la mondialisation diffère de celle de Douguine parce que le mondialisme est vraiment central dans son récit du développement de la Chine. Jiang estime que la position unique de la Chine dans le système international lui confère une responsabilité particulière envers l'ensemble de l'humanité, qui ne se limite pas aux frontières de la Chine.

Devenue la deuxième plus grande économie du monde, la Chine est désormais au centre de la scène mondiale et, selon Jiang, elle ne peut ignorer ses responsabilités envers le reste du monde en se concentrant uniquement sur son propre destin. La Chine doit "équilibrer ses relations avec le monde et lier la construction du socialisme au développement du monde entier à la manière chinoise, et participer activement à la gouvernance mondiale".

Jiang Shigong voit la progression de l'histoire du monde à partir d'unités politiques plus petites vers des conglomérats plus grands, ou empires, pour aboutir à la dernière phase de l'"empire mondial", actuellement dirigé par les États-Unis.

Dans ce récit, la direction irréversible de l'histoire va vers un "ordre universel des choses". Le ton de Jiang est presque fataliste: chaque pays, y compris la Chine, aura inévitablement un rôle à jouer dans la construction de cet empire mondial.

Ainsi, l'interprétation de Jiang d'un monde multipolaire n'est pas un retour à l'ère des empires civilisationnels régionaux, mais une lutte pour le leadership économique et politique après la réalisation d'un empire mondial.

Il s'agit d'une variation du schéma marxiste classique de la lutte des classes, la Chine elle-même jouant le rôle implicite du prolétariat luttant contre la bourgeoisie, que l'Amérique personnifie à son tour. La prise de pouvoir des capitalistes de l'Ouest est en réalité l'établissement d'une "dictature du prolétariat" mondiale.

Jiang n'hésite pas à suggérer que les propres aspirations de la Chine vont précisément dans ce sens, d'autant plus qu'il semble que "nous vivons dans une ère de chaos, de conflits et de changements massifs, avec l'empire mondial 1.0 [c'est-à-dire l'empire mondial américain] en déclin et en effondrement".

Les écrits de Jiang peuvent être interprétés comme signifiant qu'il estime qu'il incombe à la Chine de jouer un rôle de premier plan dans "l'empire mondial 2.0" pour faciliter le développement de toutes les nations, au-delà du modèle de développement capitaliste unilatéral qui a dominé le système occidental-centrique.

La multipolarité continue de jouer un rôle à ce stade, la Chine encourageant tous les pays en développement à ouvrir leurs propres voies vers la modernisation. Comme l'a affirmé Xi Jinping, la Chine offre "une nouvelle alternative aux autres pays et nations qui veulent accélérer leur développement tout en maintenant leur indépendance".

Jiang réitère et développe cette idée en affirmant que l'objectif de la Chine n'est pas de forcer les autres pays à suivre un modèle unique de développement économique, comme l'a fait l'Occident, mais précisément de faciliter leur développement le long de leurs propres voies régionales, déterminées par leurs propres contraintes politiques et culturelles locales.

Son souci du développement des économies régionales reflète également la "confiance communiste" caractéristique de la Chine dans le potentiel de développement de l'humanité dans son ensemble, et ses aspirations sont donc clairement universelles et cosmopolites, et non simplement nationalistes.

Le mondialisme, ou l'universalité, reste la clé de la conception que la Chine a d'elle-même et de son destin historique, qui est conforme non seulement à son idéologie communiste actuelle, mais aussi au concept cosmologique confucéen classique de tianxia (天下), ou "tout sous le ciel".

Les conclusions de Culbreath

Aleksandr Douguine envisage un ordre mondial défini par plusieurs civilisations indépendantes. Cette vision est incompatible avec un ordre mondial universel (à moins que Douguine ne veuille vraiment que Russki mir, le "monde russe", finisse par diriger la planète d'une manière ou d'une autre).

Selon Jiang Shigong, l'ordre correspondant est dirigé par "un souverain universel mais bienveillant, dont le but est de permettre aux différents peuples placés sous sa providence de poursuivre leur prospérité selon leurs propres voies de développement distinctes".

Alors que la vision de Douguine d'un monde multipolaire avec une entité politique gouvernant chaque civilisation tente, d'une manière presque hégélienne, de fusionner les différentes caractéristiques des États pré-modernes, la vision de Jiang du prochain ordre mondial parvient même à fusionner le mondialisme avec un communisme confucéen qui l'englobe.

La Russie et la Chine ont leur propre rôle important à jouer dans la définition des paramètres idéologiques ou théoriques au sein desquels tous les pays doivent considérer la question de leur avenir dans les tendances plus larges de l'histoire mondiale. Cette réflexion dépasse les frontières des idéologies politiques traditionnelles.

La question de savoir à quoi ressemblera le monde de l'après "fin de l'histoire" est une question qui concerne tout le monde. C'est pourquoi les théories politico-philosophiques de la multipolarité formulées dans les pays opposés à l'autocratie américaine, comme la Russie et la Chine, doivent, selon Culbreath, être prises au sérieux.

Partis et oligarchies expliqués par Pareto et Michels

indexmpm.jpg

Partis et oligarchies expliqués par Pareto et Michels

par Nicolas Bonnal

On parle d’oligarchies en France, en Amérique et en Europe. Voyons de quoi il retourne, car cette notion est vieille comme la lune.

Dans son livre sur les partis politiques (sixième partie, chapitre deux), le légendaire Robert Michels reprend (et n’établit pas), à partir des théoriciens Mosca et Taine, sa thèse sur la loi d’airain des oligarchies. Et cela donne, dans l’édition de 1914 :

« Gaetano Mosca proclame qu'un ordre social n'est pas possible sans une « classe politique », c'est-à-dire sans une classe politiquement dominante, une classe de minorité. »

Michels indique aussi, sur la démocratie et son aristocratie parlementaire ou intellectuelle :

« La démocratie se complaît à donner aux questions importantes une solution autoritaire. Elle est assoiffée à la fois de splendeur et de pouvoir. Lorsque les citoyens eurent conquis la liberté, ils mirent toute leur ambition à posséder une aristocratie ».

51SQn35P2dL.jpg

Il sent la menace bolchévique et stalinienne trente ans avant qu’elle n’apparaisse. Il suffit pour lui de lire Marx (un autre qui le voit bien à cette époque est notre Gustave Le Bon) :

« Marx prétend qu'entre la destruction de la société capitaliste et l'établissement de la société communiste, il y aura une période de transition révolutionnaire, période économique, à laquelle correspondra une période de transition politique et « pendant laquelle l'Etat ne pourra être autre chose que la dictature révolutionnaire du prolétariat » ; ou, pour employer une expression moins euphémique, nous assisterons alors à la dictature des chefs qui auront eu l'astuce et la force d'arracher aux mains de la société bourgeoise mourante, au nom du socialisme, le sceptre de la domination. »

On aurait donc une oligarchie vieille maison (Blum) et une autre de déraison, celle des communistes. Mais la démocratie parlementaire occidentale a tendance aussi à servir la minorité des possédants. Seul Bakounine le reconnaissait – et Michels le rappelle :

« Bakounine était l'adversaire de toute participation de la classe ouvrière aux élections. II était en effet convaincu que dans une société où le peuple est dominé, sous le rapport économique, par une majorité possédante, le plus libre des systèmes électoraux ne peut être qu'une vaine illusion. “Qui dit pouvoir, dit domination, et toute domination présume l'existence d'une masse dominée”. »

bakounine-3.png

Bakounine énonce dès 1871 : ce peuple (le Français) n’est plus révolutionnaire du tout. Il redoutait aussi les marxistes.

Partis-Politiques-Robert-Michel.jpg

Michels fait au moins une bonne prédiction sur le socialisme autoritaire façon soviétique :

« Le socialisme fera naufrage pour n'avoir pas aperçu l'importance que présente pour notre espèce le problème de la liberté… »

Loin de promouvoir le fascisme comme le prétendent les gazetiers, Michels analyse son siècle. Sur l’Italie il écrit :

« Buonarotti dit que “La république idéale de Mazzini ne différait de la monarchie qu'en ce qu'elle comportait une dignité en moins et une charge élective en plus”. »

Michels subodore aussi un présent perpétuel puisqu’il cite le fameux Théophraste, contemporain d’Aristote et auteur des caractères qui inspirèrent ceux de La Bruyère. Sur les partis socialistes, les plus traîtres qui soient, et où que ce soit, il note cette évidence éternelle :

« Mais il existe un autre danger encore : la direction du parti socialiste peut tomber entre les mains d'hommes dont les tendances pratiques sont en opposition avec le programme ouvrier. Il en résultera que le mouvement ouvrier sera mis au service d'intérêts diamétralement opposés à ceux du prolétariat ».

Plus philosophique, ce point de vue qui montre que, comme Bruxelles ou le Deep State, toute bureaucratie échappe à son mandat et devient entropique et dangereuse :

« Le parti, en tant que formation extérieure, mécanisme, machine, ne s'identifie pas nécessairement avec l'ensemble des membres inscrits, et encore moins avec la classe. Devenant une fin en soi, se donnant des buts et des intérêts propres, il se sépare peu à peu de la classe qu'il représente.

Dans un parti, les intérêts des masses organisées qui le composent sont loin de coïncider avec ceux de la bureaucratie qui le personnifie. »

Sur cette notion de machine, étudier et réétudier Cochin et Ostrogorski. On comprend après que l’Etat finisse par servir la minorité qui le tient et en joue :

« Conformément à cette conception, le gouvernement ou, si l'on préfère, l'Etat ne saurait être autre chose que l'organisation d'une minorité. Et cette minorité impose au reste de la société l' « ordre juridique », lequel apparaît comme une justification, une légalisation de l'exploitation à laquelle elle soumet la masse des ilotes, au lieu d'être l'émanation de la représentation de la majorité. »

C’est que l’ilote se contente de peu : manger, boire, regarder la télé, deux semaines de vacances…

Après cette loi d’airain, les conséquences et les inégalités qui vont avec :

« … il surgit toujours et nécessairement, au sein des masses, une nouvelle minorité organisée qui s'élève au rang d'une classe dirigeante. Eternellement mineure, la majorité des hommes se verrait ainsi obligée, voire prédestinée par la triste fatalité de l'histoire, à subir la domination d'une petite minorité issue de ses flancs et à servir de piédestal à la grandeur d'une oligarchie ».

mythes_et_ideologies-630113-264-432.jpg

Plus grave, et plus amusante aussi, cette observation :

« Il n'existe aucune contradiction essentielle entre la doctrine d'après laquelle l'histoire ne serait qu'une continuelle lutte de classes, et cette autre d'après laquelle les luttes de classes aboutiraient toujours à la création de nouvelles oligarchies se fusionnant avec les anciennes. »

Et de conclure en souriant, sur le ton du vieil Aristophane :

« On est tenté de qualifier ce processus de tragicomédie, attendu que les masses, après avoir accompli des efforts titaniques, se contentent de substituer un patron à un autre. »

Une parenthèse personnelle: le brave député, le chef d’entreprise aisé, le bon ministre insulté du coin n’est pas un oligarque. Un oligarque est une tête pesante et pensante qui conspire pour contrôler et étendre ses réseaux sur le monde. Et personne n’a mieux défini les oligarques de la présente mondialisation que Frédéric Bernays, qui écrivait en 1928, longtemps avant les Brzezinski, Soros et autres Bilderbergs :

« La manipulation consciente, intelligente, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique. Ceux qui manipulent ce mécanisme social imperceptible forment un gouvernement invisible qui dirige véritablement le pays. »

Bernays ajoutait froidement :

« C'est là une conséquence logique de l'organisation de notre société démocratique. Cette forme de coopération du plus grand nombre est une nécessité pour que nous puissions vivre ensemble au sein d'une société au fonctionnement bien huilé… nos chefs invisibles nous gouvernent en vertu de leur autorité naturelle, de leur capacité à formuler les idées dont nous avons besoin, de la position qu'ils occupent dans la structure sociale. Peu importe comment nous réagissons individuellement à cette situation puisque dans la vie quotidienne, que l'on pense à la politique ou aux affaires, à notre comportement social ou à nos valeurs morales, de fait nous sommes dominés par ce nombre relativement restreint de gens – une infime fraction des cent vingt millions d'habitants du pays – en mesure de comprendre les processus mentaux et les modèles sociaux des masses. Ce sont eux qui tirent les ficelles : ils contrôlent l'opinion publique, exploitent les vieilles forces sociales existantes, inventent d'autres façons de relier le monde et de le guider. »

Bernays ajoute que le président US devient un dieu :

« On reproche également à la propagande d'avoir fait du président des États-Unis un personnage à ce point considérable qu'il apparaît comme une vivante incarnation du héros, pour ne pas dire de la divinité, à qui l'on rend un culte ».

Pas besoin de fascistes avec des démocrates comme ça. On rappelle avec Onfray que Bernays inspirait Goebbels et que son oncle Sigmund Freud envoyait ses livres dédicacés à Benito Mussolini.

Sources:

Robert Michels – Les Partis Politiques – Essai sur les tendances oligarchiques des démocraties, Flammarion, 1914 (archive.org)

Frédéric Bernays – Propagande (introduction)

Nicolas Bonnal – Nev le bureaucrate ; chroniques sur la fin de l’histoire (Kindle_Amazon)

 

jeudi, 12 janvier 2023

Brésil: une révolution de couleur avortée?

0703168949055-web-tete.jpg

Brésil: une révolution de couleur avortée?

Par Luca Lezzi

Source: https://www.eurasia-rivista.com/brasile-una-rivoluzione-colorata-abortita/?fbclid=IwAR3Uzmr1qvahImhUv0z4RRtWl6ovX6HpUaVn0P9nK10-fdcM91fk94rr55Q

L'assaut des partisans du président sortant Jair Bolsonaro contre des bureaux institutionnels à Brasilia rappelle ce qui s'est passé deux ans plus tôt à Washington, livrant une fois de plus l'image d'un homme obsédé par la reproduction des actions de l'ancien président américain Donald Trump. D'un autre côté, cependant, un regard sur les événements à travers le sous-continent évoque des spectres tout à fait différents avec les soulèvements répétés (et parfois victorieux) visant à renverser l'ordre préétabli dans les nations que le vote populaire avait confiées à des gouvernements ne correspondant pas aux intérêts américains.

Karl Marx a affirmé que l'histoire se répète toujours deux fois: la première fois comme une tragédie, la seconde comme une farce. Les images qui sont arrivées de la capitale brésilienne dimanche 8 janvier rappelaient la farce mise en scène par les partisans du magnat américain Donald Trump, mais aussi la tragédie que de nombreux peuples riverains de la région vert-or ont vécue dans un passé très récent.

Si les feux du soulèvement au Pérou couvent encore, les barricades érigées dans les bons quartiers de Caracas et de Managua contre les gouvernements légitimes ne semblent pas si éloignées, et encore moins le coup d'État subi par Evo Morales en Bolivie, qui a ouvert, de la seule manière possible, la voie du gouvernement de la nation andine aux oligarchies de la droite libérale, bien que brièvement.

Profitant de la connivence de la police locale, de l'absence du nouvel élu Lula, qui s'est rendu dans le département de Sâo Paulo pour montrer sa proximité avec la population des zones inondées, ainsi que du jour férié, quelques milliers de partisans bolsonaristes ont pénétré dans les bâtiments qui servent de centre névralgique à la démocratie sud-américaine, dévastant bureaux et mobilier.

2023-01-08t200924z_1215281819_rc2imy9gabxr_rtrmadp_3_brazil-politics-violence_1.jpg

L'ambiguïté de Bolsonaro et le rôle de l'armée

Face aux images qui ne laissent aucun doute sur les événements, l'ancien président a pris ses distances avec la violence, tentant toutefois de relier cette attaque contre le cœur de l'État aux grèves générales des années passées proclamées par les corps intermédiaires de gauche.

Les propos de Bolsonaro sont venus directement de Floride, où il s'est rendu, sans surprise, deux jours avant de remettre l'écharpe présidentielle à Lula. La Floride elle-même est la résidence préférée de Donald Trump et de son cercle magique. Si la motivation invoquée, celle relative au traitement médical dont aurait besoin cycliquement Bolsonaro, 67 ans, suite à l'attaque qui l'a blessé à l'abdomen, semble plausible, il est inévitable de penser qu'il s'agissait d'un stratagème pour éviter de légitimer le passage de témoin dans le Palácio do Planalto à celui qui a été identifié depuis la première campagne électorale de 2018 comme son principal adversaire.

Il ne faut pas non plus oublier que Bolsonaro a toujours refusé de reconnaître la défaite électorale qu'il a subie au second tour des élections présidentielles le 30 octobre dernier, affirmant à plusieurs reprises qu'il était au courant d'une "fraude évidente" dont il n'a pourtant jamais offert la moindre preuve et que même le Tribunal électoral a démentie.

Si Bolsonaro apparaît comme l'instigateur moral des événements, c'est en suivant le fil des fonds qui sont parvenus aux manifestants qu'il sera possible de faire la lumière sur qui a déclenché la mèche.

aptopix-brazil-elections-protest-02080-scaled.jpg

Dès le premier instant, les soupçons se sont portés sur l'armée, qui a toujours été l'épine dorsale du pouvoir politique en terres lusophones, et qui a permis aux partisans de la coalition libérale de camper devant leur siège à Brasilia depuis les résultats des élections. Mais la police locale n'a pas levé le petit doigt non plus, et surtout, elle a laissé le champ libre aux militants sans opposer la moindre résistance.

Ces attitudes ont eu des conséquences immédiates: Lula, de retour dans la capitale, en accord avec Flavio Dino, nommé au ministère de la Justice, a placé l'ensemble du district sous intervention fédérale, qui, une fois en action, a procédé à plus de 1500 arrestations. Dans le même temps, Alexandre De Moraes, juge de la Cour suprême fédérale, a révoqué pour les 90 prochains jours le gouverneur de l'État, Ibaneis Rocha, dont les excuses tentant de justifier l'inaction, dont il avait fait preuve, semblaient totalement tardives et hors de propos.

La solidarité avec le gouvernement de Lula relance une vision multipolaire

Bien que la condamnation officielle de la violence soit venue plus ou moins formellement de diverses capitales, les paroles des autres membres des BRICS ont plus de poids à la lumière des premières mesures prises par la réinstallation de Lula. Parmi eux, la Fédération de Russie, qui par l'intermédiaire de Dmitry Peskov, le secrétaire de presse du président, a exprimé le soutien total de Moscou au gouvernement de Lula.

Le Brésil, qui, pendant la présidence de Bolsonaro, avait presque entièrement négligé le domaine de l'acronyme BRICS, qui réunit les principales puissances régionales de la planète, est destiné à prendre la tête de l'action en tirant de nouvelles composantes pour étendre l'accord aux États qui ont déjà demandé à rejoindre le partenariat. En ce qui concerne le monde sud-américain, depuis sa victoire fin octobre, Lula a souligné la nécessité de relancer le Mercosur en s'ouvrant à l'entrée de la Bolivie et en annonçant la reprise des relations diplomatiques avec le Venezuela de Nicolas Maduro.

Les rôles joués dans l'affaire par Steve Bannon, probablement le cerveau de l'opération qui a connu un second échec après la tentative d'exporter son projet sur le sol européen, et par l'appareil de la CIA restent à éclaircir. Le rêve américain de réaffirmer la doctrine Monroe dans son ancienne arrière-cour subit des défaites continuelles suite au vote populaire, qui a enlevé aux États-Unis l'État sud-américain le plus peuplé, ainsi que les anciennes forteresses chilienne et colombienne, et assure une situation saine aux gouvernements des "nations voyous" telles que le Venezuela, le Nicaragua et la Bolivie.

Luca Lezzi

Né à Salerne le 22 février 1989, Luca Lezzi est diplômé en sciences politiques et s'est spécialisé en histoire contemporaine et géopolitique de l'Amérique latine. Il collabore avec plusieurs journaux, dont ElectoMagazine et Diorama letterario, et a fondé, à l'automne 2019, le magazine politico-culturel approfondi Il Guastatore, dont il est le rédacteur et le coordinateur éditorial.

socialismo-XXI-secolo-circolo-proudhon.jpg

9788898509362_0_536_0_75.jpg

Co-auteur du livre '21st Century Socialism. Les révolutions populistes en Amérique du Sud' (éditions Circolo Proudhon, 2016), il est l'auteur de l'essai biographique 'Juan Domingo Perón' (Fergen, 2021). Il édite une série sur les guides de l'anti-impérialisme pour les maisons d'édition milanaises Oaks et Iduna.

Les capitalistes occidentaux démantèlent la mondialisation pour arrêter la Chine

mondialisation-090707.jpg

Les capitalistes occidentaux démantèlent la mondialisation pour arrêter la Chine

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2023/01/06/lannen-kapitalistit-globalisaatiota-purkamassa-kiinan-pysayttamiseksi/

"Il n'y a pas si longtemps, s'opposer à la mondialisation était l'apanage des radicaux et des populistes", déclare Thomas Fazi, qui a lui-même passé une grande partie de sa jeunesse à faire des émeutes (littéralement) contre le capitalisme mondial dans le cadre du mouvement antimondialisation de la fin des années 1990 et du début des années 2000.

Cependant, le mouvement activiste n'a pas réussi à obtenir des victoires politiques significatives en Occident. Il appelait à l'autodétermination des peuples de pays lointains, mais n'abordait pas sérieusement la question de la souveraineté nationale et du pouvoir politique dans, par exemple, les patries européennes des militants.

fazi_banner.jpg

battle_europe_ppt.jpg

Cependant, Fazi, qui s'identifiait comme un socialiste, et ses semblables, curieusement traités aujourd'hui de militants d'"extrême droite" par les fans du capitalisme occidental, avaient raison de dire que la mondialisation dirigée par les entreprises a eu des conséquences désastreuses.

Pendant des décennies, les politiques économiques ont été adaptées aux intérêts des grandes entreprises et une petite élite cosmopolite a pu amasser pour elle-même d'énormes richesses et pouvoirs. Cet arrangement a appauvri les travailleurs et détruit la capacité industrielle, les services publics, les infrastructures et les communautés locales. L'Occident est également devenu de plus en plus dépendant des fournisseurs étrangers pour tout, de l'énergie à la nourriture et aux médicaments.

Cette "hypermondialisation" a été un projet non seulement économique mais aussi politique. Il ne s'agit pas seulement de la centralisation du pouvoir entre les mains des dirigeants d'entreprise et des banquiers, mais aussi de la dépossession du peuple: les prérogatives nationales ont été remises aux institutions internationales et supranationales et aux bureaucraties supra-étatiques telles que l'Organisation mondiale du commerce et l'Union européenne.

artworks-3rW88OhX5W1OBfWW-ykT8pg-t500x500.jpg

Ces institutions ont complètement découplé le capital de la démocratie nationale. Le résultat final s'apparente davantage à une ploutocratie et une corporatocratie, où le pouvoir suprême est détenu par les grandes entreprises et les banques. Les partis ne se distinguent plus guère, de sorte que les choix politiques se réduisent, dans ce jeu cynique, à des nuances mineures et à des changements cosmétiques qui n'ont aucun impact sur les grandes lignes.

Bien que la politique d'aujourd'hui soit toujours ostensiblement menée au niveau des États-nations, l'économie est devenue, au cours des quarante dernières années, une affaire de plus en plus transnationale, avec ses règles truquées dictées par une classe technocratique mondiale qui a plus en commun les uns avec les autres qu'avec la majorité des citoyens de leur propre pays.

Depuis lors, la même clique des milieux d'affaires et capitalistes est devenue sceptique quant à l'avenir. Aujourd'hui, les mêmes capitalistes extrêmes proclament l'aube d'une nouvelle ère de "localisme" et même la "mort de la mondialisation".

9781787388413.jpg

Citant les problèmes de l'ère C oron a, tant aux États-Unis que dans l'Union européenne, on s'inquiète désormais de la sécurité de l'approvisionnement et on appelle à une "réorganisation des chaînes d'approvisionnement pour qu'elles soient plus locales". Soudain, la mondialisation est une menace pour la "sécurité nationale".

Les conflits géopolitiques ont ajouté à l'urgence de la démondialisation. L'Ukraine a divisé le monde selon des lignes géopolitiques et, dans le même temps, la rivalité entre les États-Unis et la Chine s'est intensifiée. En novembre, Biden a lancé une guerre économique à grande échelle contre la Chine en imposant des restrictions aux exportations.

Pourquoi la classe capitaliste mondiale fait-elle maintenant pression pour s'éloigner de la mondialisation qu'elle a construite pendant toutes ces décennies ? Alors que la tendance à la "démondialisation" et à la "localisation" pourrait potentiellement être une chose positive, selon Fazi, elle n'est pas motivée par le désir de créer des sociétés et des économies plus justes et plus autosuffisantes qui servent la politique intérieure et le bien-être humain. Le drame actuel est motivé par le désir de la puissance financière occidentale d'écraser une Chine rivale.

Outre les géants occidentaux, l'autre grand gagnant de la mondialisation a été la Chine. Du point de vue de l'Occident, la mondialisation reposait sur l'hypothèse que la Chine accepterait son rôle d'"usine du monde" dans la division mondiale du travail. Les capitalistes espéraient que la Chine produise une main-d'œuvre bon marché pour les multinationales, fabrique des biens et finisse par adopter le libéralisme économique occidental et un modèle de démocratie subordonné aux forces extérieures.

710CUSp4NJL.jpg

L'élite du parti communiste, qui s'est longtemps méfiée, à juste titre, des excès du capitalisme financier à l'américaine, a refusé de suivre le rôle dans l'ordre mondial qui lui a été assigné par la race maîtresse de la mondialisation dirigée par l'Occident. Pendant ce temps, le parti communiste mettait en œuvre ses propres plans, remontant la chaîne de valeur mondiale.

La montée en puissance de la Chine et son impact sur la compétitivité et la position de l'économie américaine était un sujet de préoccupation il y a quelques années. "Un 'pivot vers l'Asie' avait été prévu auparavant, mais sous la présidence de Donald Trump, Washington s'est montré de plus en plus ouvertement dans sa guerre commerciale avec Pékin. L'administration Biden continue de suivre la voie tracée par Trump quant à la Chine dans la compétition pour le pouvoir politique et économique. Une confrontation militaire ne peut être exclue.

Alors que la "démondialisation" actuellement commercialisée pourrait, au mieux, réparer les structures économiques, ramener la fabrication chez nous et réduire la dépendance aux importations, ce n'est pas, selon Fazi, la raison pour laquelle les pouvoirs en place ont changé d'avis. Ils considèrent le projet antimondialisation comme une nouvelle forme de construction d'empire pour maintenir l'hégémonie et stopper la montée en puissance de la Chine.

19:01 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, chine, thomas fazi, mondialisation, globalisation | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mercredi, 11 janvier 2023

John Charmley et l’effarant bilan de Winston Churchill

95c379a52c7410f93c3a9de505511095.jpg

John Charmley et l’effarant bilan de Winston Churchill

Nicolas Bonnal

Brute impériale, raciste humaniste, boutefeu impertinent, affameur et bombardier de civils, phraseur creux et politicien incapable en temps de paix, américanophile pathétique, Winston Churchill est naturellement le modèle de cette époque eschatologique et de ses néocons russophobes (Churchill recommanda l’usage de la bombe atomique contre les Russes à Truman). On laisse de côté cette fois Ralph Raico et on évoque cette fois le brillant historien John Charmley qui l’analysa d’un point de vue British traditionnel: Churchill anéantit l’empire, choisit le pire et la guerre, varia d’Hitler (le moustachu puis Staline) et humilia l’Angleterre transformée en brillant troisième des USA. Autant dire que Charmley n’est pas bien vu en bas lieu. Il écrit en effet que l’Angleterre ruina deux fois l’Europe pour abattre une Allemagne qui finit par la dominer économiquement ! Niall Ferguson a reconnu aussi les responsabilités britanniques dans la Première Guerre mondiale.

IMG_2268.jpg

51EeW0WO-LL._AC_SY780_.jpg

Coup de chance pour nous, un autre livre de Charmley a été traduit par Philippe Grasset pour les éditions Mols il y a quelques années. Dans Grande alliance, Charmley notre historien montre le progressif abaissement matériel et moral de l’Angleterre – menée au suicide de civilisation par le boutefeu préféré de notre presse au rabais. Et cela donne:

« Les Britanniques voulaient-ils un geste montrant qu’on se préoccupait d’eux? Roosevelt leur livrait cinquante vieux destroyers, pour lesquels les Britanniques payeraient avec la cession de leurs bases des Caraïbes. Churchill pouvait voir ce qui lui plaisait dans ce geste mais l’échange fut décrit de façon plus précise par le secrétaire au Foreign Office, Anthony Eden, comme « un sérieux coup porté à notre autorité et, finalement... à notre souveraineté ». Le fait qu’en janvier 1941, l’Angleterre n’avait reçu que deux des fameux cinquante destroyers faisait, pensait-il, qu’« on pouvait raisonnablement regarder ce marché comme un marché de dupes ».

Très vite, pendant la Guerre, on sent que l’empire britannique va, grâce à Churchill, changer de mains :

« Un commentateur dit justement qu’ « aucun officiel américain n’aurait jamais proclamé grossièrement que l’un des buts essentiels de notre politique extérieure serait l’acquisition de l’empire britannique »; mais Cordell Hull déclara tout de même qu’il utiliserait « l’aide américaine comme un canif pour ouvrir cette huître obstinément fermé, l’Empire ». 

71Q82W6WVSL.gif

Parfois le gros homme devenait lucide :

« La version finale de la requête britannique, transmise le 7 décembre 1940, mettait en évidence le sérieux de la situation économique du pays. Le ton de la lettre de Churchill était grave et d’une prescience inattendue. Il dit à Roosevelt qu’il croyait que son interlocuteur « accepterait l’idée qu’il serait faux dans les principes et mutuellement désavantageux dans les effets si, au plus haut de cette bataille, la Grande Bretagne devait être privée de toutes ses possessions dans une mesure où, après avoir vaincu grâce à notre sang... nous nous retrouverions dépouillés jusqu’aux os ». C’était une affirmation superbe et émouvante mais elle ne détourna en rien les Américains dans leur détermination d’utiliser la situation dramatique de l’Angleterre pour obtenir des concessions qui garantiraient qu’elle ne se trouverait pas sur la voie de la paix qu’ils voulaient. »

Les Britanniques devaient livrer leur or eux-mêmes :

« Le 23 décembre, FDR dit à l’amiral Stark, le chef de la Navy, qu’il voulait un navire de guerre « pour récupérer les [réserves] d’or [britanniques] en Afrique »; non seulement Roosevelt entendait se payer sur les vastes avoirs britanniques d’outre-mer mais il entendait également que les Britanniques assurent le paiement du transport… La première réaction de Churchill fut de dire à FDR que ce marché lui rappelait « un sheriff qui saisit les derniers biens du débiteur sans protection »

En vain Lord Beaverbrook se réveille et houspille :

« Dans une lettre furieuse à Churchill, à la fin décembre, il accusa les Américains de « n’avoir rien concédé » et d’avoir « obtenu un gain maximum de tout ce qu’ils ont fait pour nous. Ils ont pris nos bases sans autres considérations. Ils prennent notre or ». Les livraisons américaines étaient rares, contrairement aux promesses faites.

Charmley en conclut logiquement une chose :

« Rien ne dit que FDR ait jamais considéré l’Angleterre comme son principal allié…façon dont Churchill traça le portrait de FDR : si la réalité de l’accord sur les destroyers et sur le lend-lease avait été révélée et la réalité des ambitions de FDR pour l’Amérique mise en lumière, Churchill aurait passé pour une dupe de plus du Président. »

Frederick_Lindemann_(cropped).jpg

Pour une fois Lord Cherwell (photo), réfugié juif allemand (Lindemann) chargé des bombardements de la population civile allemande (un million de morts sous les bombes contre 17.000 à l’Angleterre), a raison :

« Comme son conseiller scientifique nouvellement ennobli Lord Cherwell le dit à Churchill, « les fruits de la victoire que Roosevelt nous prépare semble se résumer à la sauvegarde de l’Amérique et la famine virtuelle pour nous ». Ce n’était pas « une nouvelle très enthousiasmante à annoncer au peuple anglais ». Bien que le Chancelier jugeât les prévisions de Cherwell pessimistes, le fait est que, dans l’après-guerre, l’Angleterre allait être confrontée à un choix que ses hommes politiques jugeraient insupportable. »

On fait le maigre bilan de cette guerre que ne voulait pas Hitler (lisez Liddell Hart ou Preparata pour savoir pourquoi) :

« Alors, qu’avait donc obtenu l’Angleterre ? Elle avait acquis l’admiration de larges tranches du public américain et avait gagné leur respect. Elle s’était battue pour son indépendance mais elle avait été capable de le faire seulement avec l’aide américaine et, en fait, comme un satellite de l’Amérique. Son avenir était endetté, son économie pressée jusqu’à un point de rupture, ses villes bombardées et sa population soumise à un rationnement radical. Ce superbe et héroïque effort ne fut nullement récompensé pendant dix-huit mois. »

Le bellicisme churchillien s’accompagne d’une grosse paresse des soldats (lisez mon maître Masson, qui en parlait très bien) :

« Le féroce assaut japonais et la résistance indolente des Britanniques à Singapour montrèrent que la puissance impériale était au-delà de ses capacités ; le spectacle des 100.000 soldats se rendant à une puissance asiatique à la chute de Singapour était une de ces images à laquelle le prestige impérial ne pourrait pas survivre. »

978-1-349-14691-8.jpg

Churchill a multiplié les mauvais conseils et les mauvaises décisions, rappelle Charmley :

« C’est Churchill qui mit son veto à l’idée de garantir à Staline ses frontières de 1941; c’est Churchill qui refusa de reconnaître l’organisation gaulliste comme gouvernement provisoire de la France; c’est Churchill qui, par-dessus tout, montra un jugement si mauvais qu’il rejeta à la fin de 1944 l’idée d’une alliance européenne occidentale avec le commentaire méprisant qu’on n’y trouverait rien « sinon de la faiblesse ». Dans l’attitude de Churchill, on trouve le thème obsédant de l’Amérique. »

Nous évoquions Preparata qui s’inspira pour sa vision de Veblen. Litvinov (découvrez aussi Nicolas Starikov) confirme alors que le but de guerre était d’abord la destruction mutuelle de l’Allemagne et de la Russie :

« Maxim Litvinov, qui était marié à une Britannique et qui n’était en aucune façon anglophobe, avait dit à Davies que les Britanniques « repoussaient l’idée d’un second front de façon à ce que la Russie “soit vidée de son sang en affrontant seule les Allemands”. Après la guerre, le Royaume-Uni pourrait ainsi “contrôler et dominer l’Europe” ».

On y arriva mais bien après, avec les Américains…la destruction de l’Europe est encore au programme sous domination anglo-saxonne (on ignorera la France renégate).

A l’époque, rappelle Charmley, l’opinion publique n’est pas trop hostile à l’U.R.S.S. Elle voit d’un mauvais œil le maintien des empires coloniaux (nous aussi, il fallait les liquider en 45):

« L’opinion publique américaine n’était pas prête à lier son avenir à une alliance exclusivement anglo-américaine. Elle tendait plutôt à partager l’opinion de Josephus Daniels, du Raleigh News & Observer, selon lequel il importait d’inclure dans l’alliance générale « la Russie et la Chine » parce que « les espoirs d’une paix permanente basés sur une alliances serrée entre grandes puissances suscite la frustration en inspirant la peur et la jalousie dans les zones hors de celle que couvre l’alliance » ; la sécurité doit être « collective » pour être effective. »

webp.net-resizeimage (20).jpg

Après, cerise sur le bonbon. John Charmley se défoule :

« Derrière la politique américaine de Churchill, on trouve la proposition que le crédit moral de l’action du Royaume-Uni en 1940-41 pouvait être converti en influence sur la politique américaine. Comme nombre d’américanophiles, Churchill imaginait que l’Amérique survenant sur la scène mondiale aurait besoin d’un guide sage et avisé, et il se voyait fort bien lui-même, avec le Royaume-Uni, dans ce rôle. Cela paraît aujourd’hui une curieuse fantaisie mais c’est bien le principe qui guida la diplomatie britannique à l’égard de l’Amérique pendant la période que nous étudions dans ces pages. »

La naïveté britannique a une pointe d’arrogance :

« En tentant d’exposer « l’essence d’une politique américaine » en 1944, un diplomate définit parfaitement cette attitude. La politique traditionnelle du Royaume-Uni de chercher à empêcher qu’une puissance exerça une position dominante était écartée : « Notre but ne doit pas être de chercher à équilibrer notre puissance contre celle des États- Unis, mais d’utiliser la puissance américaine pour des objectifs que nous considérons comme bénéfiques ». La politique britannique devrait être désormais considérée comme un moyen d’ « orienter cette énorme péniche maladroite [les USA] vers le port qui convient ». 

Charmley ironise alors (que peut-on faire d’autre ?) :

« L’idée d’utiliser « la puissance américaine pour protéger le Commonwealth et l’Empire » avait beaucoup de charme en soi, en fonction de ce que l’on sait des attitudes de Roosevelt concernant l’Europe. Elle était également un parfait exemple de la façon dont les Britanniques parvenaient à se tromper eux-mêmes à propos de l’Amérique. On la retrouve avec la fameuse remarque de MacMillan, en 1943, selon laquelle les Britanniques devraient se considérer eux-mêmes comme « les Grecs de ce nouvel Empire romain ». »

Un peu d’antiquité alors ? Charmley :

« L’image de la subtile intelligence des Britanniques guidant l’Amérique avec sa formidable musculature et son cerveau de gringalet était flatteuse pour l’élite dirigeante britannique ; après l’horrible gâchis qu’elle avait réalisé à tenter de préserver son propre imperium, elle avait l’arrogance de croire qu’elle pourrait s’occuper de celui de l’Amérique. Même un Béotien aurait pu se rappeler que, dans l’empire romain, les Grecs étaient des esclaves. »

0_JS22272047.jpg

0_SWW142.jpg

La banqueroute britannique se rapproche (l’Angleterre est broke) :

« Les besoins britanniques pour l’après-guerre étaient aussi simples à définir qu’ils étaient difficiles à obtenir: une balance commerciale favorable et une balance des paiements excédentaire.

L’absence de ces deux facteurs signifiait la banqueroute et la fin du Royaume-Uni comme grande puissance.

Keynes en est conscient :

« Comme observait Keynes dans une lettre à Stettinius en 1944, ce dernier « avait non seulement omis de noter que l’administration US prenait toutes les mesures pour que le Royaume-Uni soit le plus près possible de la banqueroute avant qu’une aide lui soit apportée »…

C’était le prix de l’alliance américaine… »

J.J. Annaud me disait un jour que même affaiblie la critique de cinéma gardait son pouvoir de nuisance. De même pour l’Angleterre, qui toute à son obsession de diriger le monde avec son compère américain casse l’union sacrée antifasciste de l’après-guerre. On va citer le vice-président Wallace, humaniste progressiste et homme éminent, cité du reste par Bernanos dans sa France contre les robots :

« Pour autant, on ne dira pas que les Américains « tombaient » d’une certaine façon dans ce que Wallace dénonçait comme « les intrigues » britanniques ; ce serait plutôt à ce point que la nature pyrrhique des relations spéciales anglo-américaines deviendrait évidente. Pragmatique jusqu’au tréfonds de l’âme, la diplomatie britannique avait comme objectif de convaincre les Américains que ses batailles dans la Méditerranée orientale et la zone autour des Détroits s’appuyait sur la cause de la démocratie. »

Puis l’Amérique prend la rage antirusse (lisez Raico pour comprendre comment il fallut se faire réélire !) :

« En cherchant à susciter le soutien américain, les Britanniques fabriquaient leur propre Frankenstein. Une fois que les Américains furent convaincus que les Soviétiques ne coopéreraient pas dans leur proposition de nouvel ordre mondial, la voie était ouverte pour un conflit idéologique qui écarterait les objectifs des Britanniques et les enchaînerait dans un conflit manichéen… »

Chose intéressante, Charmley confirme que l’UE est une création 100% américaine destinée à servir les intérêts de l’amère patrie !

« L’aide américaine avait été sollicitée pour préserver la place du Royaume-Uni parmi les grandes puissances mais elle ne fit rien pour préserver l’Empire et, rapidement, les Américains exigèrent impatiemment que les Britanniques prennent la tête d’une fédération européenne. »

Pré carré américain, l’Europe devait être colonisée froidement (il était recommandé au soldat de ne pas sympathiser avec la population – cela n’excluait pas les viols qui inspirèrent le classique Orange mécanique). D’ailleurs la France :

« Les ministres n’étaient guère séduits par les conceptions de FDR selon lesquelles la France devrait être dirigée pendant un an après sa libération par un général allié. »

iplmndex.jpg

Le Plan Marshall ? Parlons du plan Marshall :

« Le Plan Marshall allait se révéler également un puissant instrument pour ce dessein. George Kennan écrit dans ses mémoires : « Nous espérions forcer les Européens à penser en Européens et non en nationalistes » ; évidemment, le « nationalisme » n’était acceptable que lorsqu’il était américain. Le Plan Marshall projeta le système d’organisation industrielle et fédéraliste américain en Europe, son objectif ultime était de créer une Europe convenant aux Américains. »

Un crochet par Eisenhower, personnage plus falot que prévu ici, mais qui va dénoncer comme on sait le lobby militaro-industriel :

« Malgré son engagement dans l’Alliance atlantique, Eisenhower ne pouvait pas ne pas s’inquiéter de l’augmentation des dépenses de défense, de leur poids sur l’économie et sur l’American way of life en cas d’aggravation de la Guerre froide. Comme il le dit en mars 1953 à un vieil ami de Churchill, Bernie Baruch, « accoutumer notre population à vivre indéfiniment sous un tel contrôle [gouvernemental] conduira graduellement à de nouvelles relations entre l’individu et l’Etat – une conception qui changerait d’une façon révolutionnaire le type de gouvernement sous lequel nous vivons ». Le Président était un vrai républicain dans le sens où il pensait que, « en permettant la croissance incontrôlée du gouvernement fédéral, nous nous sommes d’ores et déjà largement éloigné de la philosophie de Jefferson… »

Encore un clou à enfoncer pour la construction européenne :

« Dulles voulait cet élément  supranational qui aurait donné un nouvel élan à l’union européenne, dont les Américains trouvaient les progrès désespérément lents. »

On en restera là. Vous pouvez lire la suite ailleurs… On aura appris grâce à John Charmley que l’histoire moderne en Occident, si elle pleine de bruit et de fureur, est racontée non par un, mais beaucoup d’idiots dont le Nobel modèle reste Churchill. Car les idiots sont aussi dans le public.

Source:

Churchill’s Grand Alliance ou La Passion de Churchill, troisième volet d’une trilogie de l’historien britannique John Charmley, publié en 1995, décrit la fondation (1941) des “relations spéciales” (special relationships) entre les USA et le Royaume-Uni et leur développement jusqu’au tournant décisif de 1956 (crise de Suez).

http://www.editions-mols.eu/publication.php?id_pub=41

Auteur: John Charmley

Format: 155 x 230, 522 pages, ISBN: 2-87402-071-0

Prix: 15 Euros

 

Une année 2023 sous le signe de l'expansion chinoise et de la guerre de Washington contre les entreprises européennes

0f2a32fb56c1020c4e726c8dc06b7831.jpg

Une année 2023 sous le signe de l'expansion chinoise et de la guerre de Washington contre les entreprises européennes

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/un-2023-allinsegna-dellespansione-cinese-e-della-guerra-di-washington-contro-le-imprese-europee/

L'année 2022 s'est clôturée par la conversation vidéo entre Poutine et Xi. Et avec la promesse d'une visite du leader chinois à Moscou. Déjà, d'après ce qui a émergé au niveau officiel, il y aurait de sérieuses raisons de s'inquiéter pour ceux qui insistent pour défendre un monde unipolaire au service de Washington. Même si les clercs atlantistes italiens jubilent parce que Pékin n'a pas annoncé d'intervention militaire en soutien à Moscou. Il suffit de savoir se contenter, comme Dario Maltese sur Tg5.

La Chine est prête à accroître la coopération politique avec la Russie, à être, avec celle-ci, des partenaires mondiaux dans une situation internationale difficile. Et cela a été déclaré par Xi Jinping. Êtes-vous sûr, sur Tg5, qu'il y a lieu de célébrer un refroidissement des relations russo-chinoises ? La Fédération de Russie et la Chine poursuivront leur coopération dans le domaine militaro-technique", a ajouté M. Poutine. Le chiffre d'affaires commercial entre la Russie et la Chine a augmenté d'environ 25% cette année et se rapproche désormais de la barre des 200 milliards de dollars. Pas mal pour des pays isolés et éloignés du contexte international.

Mais Pékin regarde bien au-delà des frontières russes. Un accord de coopération militaire a été conclu avec l'Arabie saoudite. Et l'Équateur rejoindra le Chili, le Pérou et le Costa Rica dans des accords de libre-échange avec la Chine, avec une priorité donnée aux entreprises chinoises dans l'achat de certaines matières premières des pays d'Amérique latine. Sans compter que la Russie et la Chine se rapprochent et que Téhéran est en train de conclure un accord avec le Venezuela.

D'autre part, sur le front opposé, les protestations se multiplient en Europe contre les politiques économiques de Washington qui protègent les entreprises américaines au détriment des entreprises européennes, violant en fait tous les accords sur le commerce mondial. Et cela n'est pas dit par Poutine, mais par Prodi. Mais par les Français aussi, qui doutent que les protestations du Vieux Continent fassent changer d'avis Biden. Donc une Europe de moins en moins compétitive par rapport aux États-Unis, mais qui continuera à surpayer le gaz américain pour favoriser la concurrence nord-américaine. Il faut être assez stupide. Ou peut-être quelque chose d'autre. L'année 2023 s'ouvre donc pour l'Italie sous le signe d'une nouvelle hausse des prix, mais il faut dédramatiser. Et avec des perspectives de récession, mais il faut minimiser cela. Et avec une pauvreté croissante, mais il faut la cacher. Tout va très bien, madame la marquise...

La déstabilisation américaine du monde orthodoxe

imrs.jpg

La déstabilisation américaine du monde orthodoxe

par Antonio Catalano

Source : Antonio Catalano & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-destabilizzazione-americana-del-mondo-ortodosso 

Ceux qui ont voulu le comprendre l'ont compris : le 24 février ne marque pas le début de la guerre russo-ukrainienne. Les autres, ceux qui sont de bonne foi, seront convaincus par les faits matériels lorsque ceux-ci leur crieront la réalité des choses haut et fort dans les tympans. Pendant ce temps, ceux qui sont à la solde de la propagande de l'OTAN continueront à répéter les paroles véhiculées par Washington, du moins tant que les scénarios actuels le permettront, ensuite nous verrons... et, comme dans la vieille série, soyons tous antifascistes quand le fascisme cesse d'exister.  

Ceux qui comprennent comment les choses se sont passées savent donc que l'intervention russe découle de la stratégie américaine, vieille de plusieurs décennies, qui consiste à avancer vers l'Est, notamment avec des manœuvres visant à utiliser l'Ukraine dans une fonction anti-russe, en particulier depuis le coup d'État perpétré à Kiev en 2014. Un processus qui s'est traduit par l'installation d'avant-postes de l'OTAN dans les pays de l'ancien camp soviétique, par des exercices à grande échelle aux frontières occidentales de la Russie, par l'imposition de sanctions commerciales aux assujettis européens contre leurs propres intérêts (objectif principal : briser l'axe Berlin-Moscou) et, depuis un an, par le financement de l'armement et de l'entraînement du collaborationniste Zelensky. 

Mais la guerre contre la Russie s'est jouée non seulement sur les plans commercial, économique, politique, diplomatique, militaire et culturel, mais aussi sur le plan religieux. Négliger ou même nier ce dernier plan est le signe d'une myopie qui empêche de voir la force que le facteur religieux libère dans le mouvement réel, surtout dans une région où la religiosité est un élément fort de l'identité et se combine avec un appel profond aux valeurs de la tradition. 

C'est pourquoi les États-Unis, avec leur Département d'État, s'efforcent depuis quelque temps de favoriser la rupture entre les différentes Églises orthodoxes nationales (autocéphales, c'est-à-dire autonomes) et le patriarcat de Moscou. Ce processus a abouti à l'imposition en Ukraine de la célébration de Noël le 25 décembre au lieu du 7 janvier, comme le veut la tradition du monde orthodoxe orienté vers Moscou, qui suit le calendrier julien.

L'Occident collectif (comme on définit l'Occident en Russie depuis un an), avec son transhumanisme, son vision fluide du sexe, son néo-malthusianisme, son effacement de l'histoire et ses autres dystopies qui s'attaquent à la hiérarchie naturelle des valeurs humaines, est vécu en Russie comme une menace à laquelle opposer un système de valeurs fondé sur la tradition de la civilisation chrétienne dont elle se sent dépositaire.

GettyImages-1375061784.jpg

Pour mieux comprendre la distance culturelle et anthropologique qui sépare l'âme russe de celle de l'Occident, lisez, par exemple, les récents mots durs du secrétaire du Conseil de sécurité de la Russie, Nikolai Patrušev.
"L'Occident promeut des valeurs néolibérales contraires à la nature humaine. Les sociétés transnationales influencent les politiques de divers pays, comme les expériences sur les agents pathogènes et les virus dangereux menées dans les laboratoires biologiques militaires gérés par le Pentagone. Après avoir lavé le cerveau des gens avec une propagande de masse, l'Occident cherche maintenant à utiliser des armes cognitives en ciblant chaque personne par le biais des technologies de l'information et des moyens neuropsychologiques, tandis que l'agenda LGBT vise à réduire progressivement le nombre de personnes supplémentaires qui ne font pas partie du tristement célèbre milliard d'or [expression indiquant la population totale des pays développés]. Ceux qui ont fait la promotion des OGM sont les mêmes qui exhortent maintenant les femmes à ne pas avoir d'enfants pour lutter contre le changement climatique. Les chercheurs d'outre-mer mesurent et calculent les êtres humains comme le faisaient les scientifiques nazis, afin d'établir des critères permettant de distinguer les "races supérieures et inférieures".

Bref, s'exprimer en langage religieux, une Russie qui vit comme une sorte de Katechon (un concept biblique qui signifie "celui qui retient") contre l'Antéchrist représenté par l'Occident dissolu et satanique, presque comme si nous avions finalement atteint l'inversion de la prophétie de la "Troisième Rome" de Moscou par le moine Philothée. Qui, en 1520, a prédit que la capitale russe assumerait le rôle d'unique bastion de la foi, après la chute des deux capitales précédentes, Rome et Constantinople. La tradition veut que le moine Philothée, s'adressant au grand duc Vassili III, lui ait dit : "Souvenez-vous que les deux Romes sont tombées, que la troisième, Moscou, est debout et qu'il n'y en aura pas de quatrième".  

Les agences de renseignement occidentales se sont déchaînées dans les Balkans pour diviser les Églises orthodoxes et favoriser la rupture avec l'Église orthodoxe russe. Malheureusement, elles ont réussi à tirer profit de la création de l'"Église orthodoxe d'Ukraine" et de sa reconnaissance par les autres Églises orthodoxes. 

Geoffrey-Pyatt.jpg

Le grand architecte de cela était Geoffrey Pyatt, qui, avec Victoria Nuland (celle qui en 2014 à Kiev distribuait des biscuits à Maidan et incitait à un coup d'État contre le gouvernement ukrainien légitime), a géré la situation au moment des événements violents de 2014 à Kiev. Pyatt, après avoir fait ses devoirs en Ukraine, a été transféré par le département américain en Grèce, où il s'est consacré à "conditionner" (certains disent à corrompre) le patriarche "primus inter pares" (dans le monde orthodoxe, il n'y a pas de pape) Bartholomée de Constantinople, jusqu'à ce que ce dernier cède. Et voilà qu'en septembre 2018, le département d'État américain déclare péremptoirement que les États-Unis soutiennent l'autocéphalie en Ukraine et considèrent le patriarche Bartholomée comme la voix de la tolérance dans le monde. Comment le patriarche Bartholomée, flatté par cette attribution, peut-il décevoir ses amis américains?  Ainsi, en janvier 2019, il accorde le Tomos (document) d'autocéphalie à " l'Église orthodoxe d'Ukraine ". Bon travail, Geoffrey !

Πατριάρχης_Βαρθολομαῖος.jpeg

La relation de collaboration entre Bartholomée (photo) et ses nouveaux parrains et marraines a culminé lors du voyage de douze jours aux États-Unis à l'automne dernier (23 octobre - 3 novembre 2022). Douze jours remplis de réunions et de réceptions, au cours desquels le patriarche "œcuménique" (comme les mondialistes aiment les patriarches et les papes "œcuméniques" !) a parlé de la liberté religieuse, d'une plus grande justice environnementale, de l'accès universel au vaccin contre le cov id, de la situation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Dans un excès de transport, Bartholomée va jusqu'à appeler Biden "un homme de foi et de vision, qui offrira à ce merveilleux pays et au monde les meilleurs conseils et la meilleure direction". Et puis, en tant que "bâtisseur de ponts": "Le chemin vers l'unité des chrétiens n'a été ni pacifique ni indolore. L'unité est une tâche qui reste difficile à réaliser. Mais les liens d'amitié entre les Églises divisées et les ponts par lesquels nous pouvons surmonter nos divisions sont indispensables, maintenant plus que jamais". À cet égard, Bartholomée cite en exemple l'appel à la protection de l'environnement lancé "pour la première fois dans l'histoire du christianisme" avec le pape François et l'archevêque de Canterbury. 

Juste en passant, et j'en arrive à la conclusion, une référence à l'attitude différente des Américains envers le pape Benoît XVI, dont la "ferme volonté de parvenir à une réconciliation historique avec le patriarcat de Moscou" a été combattue de toutes les manières - comme l'écrit Germano Dottori dans Limes en mai 2017, qui aurait été dans ses intentions [du pape] le véritable couronnement religieux d'un projet géopolitique d'intégration euro-russe soutenu avec conviction par l'Allemagne et aussi par l'Italie de Silvio Berlusconi - mais pas par celle, plus pro-américaine, qui s'est reconnue en Giorgio Napolitano.

La façon dont cela s'est terminé, conclut l'article de Dottori, est connue de tous. Le gouvernement italien et la papauté auraient été simultanément attaqués par une campagne scandaleuse et coordonnée d'une violence rare et sans précédent, à laquelle seraient également associées des manœuvres plus ou moins opaques dans le domaine financier, avec pour effet final de précipiter en novembre 2011 la destitution de Berlusconi et en février 2013 l'abdication de Ratzinger".

Les faits brièvement exposés ci-dessus nous permettent de mieux cerner la position manifestement pro-ukrainienne du Pape Bergoglio, malgré les "aboiements de l'OTAN aux portes de Moscou", position prononcée en juin dernier, contrebalancée par le récent "dérapage" d'une interview dans la revue jésuite America dans laquelle il a qualifié les Tchétchènes et les Bouriates (deux peuples de Russie) de "soldats les plus cruels parmi les militaires russes". Cela a suscité l'ire de la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Maria Zakharova, qui a répondu: "Les propos du pape sur la cruauté des Tchétchènes et des Bouriates ne sont plus une preuve de russophobie, mais une perversion de la vérité". Incident clos après les excuses du Vatican. Mais Zakharova a clairement indiqué que cet "incident" a mis fin à toute possibilité pour le Vatican de s'asseoir à une future table de négociation en tant que partie médiatrice. 

Ces manœuvres visant à diviser le monde de l'orthodoxie ne pourraient qu'entraîner l'Ukraine dans une spirale de véritable chasse aux sorcières et de répression, inspirée par le gouvernement banderiste de Zelensky. Avec l'identification de "traîtres" parmi le clergé, les agressions physiques (voir le coup de couteau encaissé par l'archiprêtre Kovtonyuk devant l'autel de son église), les raids sur les lieux de culte (voir le monastère de la grotte de Kiev), les arrestations d'ecclésiastiques et de religieuses, les menaces contre les simples croyants de l'observance de Moscou et la fermeture des églises de rite russe. Jusqu'à la proclamation, le 2 décembre 2022, du décret interdisant l'Église ukrainienne pro-russe.