Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

samedi, 03 février 2018

La Russie, centre de contre-culture

Polienko_Ivan_Winter_In_Zagorsk_medium_254186.jpg

La Russie, centre de contre-culture

Ex: http://www.dedefensa.org

Des sites russes d’inspiration nettement proche de l’Église chrétienne orthodoxe diffusent les résultats d’une enquête sur l’évolution des opinions concernant des questions sociétales extrêmement présentes aujourd’hui. Les résultats sont évalués sur un temps assez long, sur les vingt années qui nous séparent de 1998, ce qui permet d’avoir une indication de tendance profonde. D’autres précisions, venues d’autres sources complètent le travail avec d’autres précisions dans les mêmes domines. Le chiffre le plus marquant est celui de l’évolution du nombre d’avortements, passant en 25 ans de 5 millions (en 1993) à 600 000 (en 2017), et cela accompagnant une évolution également remarquable dans le jugement des personnes qui ont été interrogées pour l’enquête : le pourcentage des personnes jugeant l’avortement “inacceptable” est passé de 12% en1998 à 35% en 2017, – alors que cette pratique était elle-même institutionnalisée durant la période communiste (sauf pendant la période 1936-1955). Tous les autres résultats sur les questions sociétales vont dans le même sens.

Le fait que cette enquête se fasse sur ce “temps assez long” est d’une réelle importance, surtout pour la Russie. Il permet une comparaison entre la Russie post-URSS “occidentalisée” type-Eltsine des années 1990 et celle d’aujourd’hui. Outre les conditions économiques, son évolution culturelle (et donc psychologique) se déplace exactement à l’inverse de la politique générale suivie dans le bloc-BAO, sous l’impulsion du Système.

C’est le site Orthochristian.com, version anglaise du site en russe Pravoslavie.ru, qui publie le texte (le 12 janvier 2018) sur cette enquête et les divers à-côtés.

« La proportion de citoyens russes qui considèrent l'avortement comme inacceptable a triplé au cours des 20 dernières années, passant de 12% à 35%. La condamnation de l’adultère et des relations homosexuelles a également augmenté de manière significative, selon les données d'un récent sondage sociologique du Levada Center. Selon les experts, le changement dans l'opinion publique atteste du renforcement des valeurs familiales traditionnelles, rapporte Pravoslavie.ru.

» L'enquête nationale réalisée fin décembre 2017 a montré que la majorité des Russes (68%) condamnent les relations sexuelles extra-conjugales, alors que seulement 50% les condamnaient en 1998. Ce pourcentage de 2017 comprend 77% de femmes et 57% d'hommes. Les personnes interrogées qui désapprouvant les relations homosexuelles sont passés de 68 à 83% au cours de la même période, avec seulement 1% de différence entre les hommes et les femmes.

» En ce qui concerne le sondage sur l’avortement (jugé inacceptable par 35% des sondés contre 12% en 1998), le pourcentage des réponses est équivalent selon les situations économiques, y compris st dans le cas des familles à faible revenu. Les femmes ont adopté une position plus stricte, avec 37% condamnant l'avortement dans tous les cas, contre 31% des hommes. Aucune différence n'a été observée en ce qui concerne l'âge de la femme qui répond.

» Karina Pipia, sociologue du Centre Levada, a noté que les chiffres démontrent une tendance générale conservatrice dans la nation, bien que les répondants des petites villes et des villages soient plus fidèles à l'avortement en raison du faible revenu. Le président de la Société russe des obstétriciens-gynécologues, Vladimir Serov, a déclaré au journal Izvestia que les avortements ont diminué de 800% en Russie au cours des 25 dernières années, passant d'environ 5 millions à 600 000 chaque année.

» Cette évolution a été facilitée par un certain nombre de mesures, notamment le soutien économique de l'État aux familles, la création de centres de soutien aux femmes enceintes en difficulté, le développement de la contraception et le développement de l'éducation sur les dangers de l'avortement. Le directeur scientifique de l'Institut indépendant de la famille et de la démographie Igor Beloborodov considère que le changement d’opinion publique sur l’avortement est le résultat de la politique gouvernementale et du travail éducatif de l'Église orthodoxe russe.

» Alors qu'il y a eu une tendance positive à la diminution du nombre d'avortements, cet acte terrible reste légal en Russie, avec environ 2 000 enfants tués chaque jour. L'Église et diverses sociétés orthodoxes organisent régulièrement des manifestations pro-vie à Moscou et dans tout le pays. Le mouvement “Pour La Vie !” a organisé hier (11 janvier 2018) une cérémonie symbolique avec 2 000 bougies allumées durant une moleben dans une église de Moscou, pour symboliser les enfants perdus tous les jours du fait des avortements. En outre, plus d'un million de signatures ont été recueillies dans toute la Russie l'année dernière, appelant à une interdiction législative de l'avortement. »

Le commentaire que nous allons faire écarte absolument tout débat de fond sur les diverses questions qui sont abordées (avortement, homosexualité, concubinage, etc.). Ce qui nous intéresse, c’est la question des tendances profondes qu’illustrent ce sondage et les autres événements cités. Le fait que le site rapportant la chose d’une manière favorable soit chrétien orthodoxe n’est pas indifférent : le poids de l’Église chrétienne orthodoxe russe, autant que la politique familiale et sociétale du gouvernement depuis les premières années-Poutine, jouent un rôle considérable dans l’évolution constatée. Il n’empêche que cette évolution n’apparaît pas forcée, mais bien facilitée par ces politiques institutionnelles. A côté des agitations souvent très médiatisées, – et pour cause, – des minorités pro-occidentalistes toutes suspectes d’“intelligence avec l’ennemi”, il existe aujourd’hui en Russie un accord profond entre la population, sa direction politique et sa hiérarchie religieuse. Cet accord est une affirmation de type néo-conservateur, dans le vrai sens de l’expression exactement contraire au “neoconisme” US qui est un parfait usurpateur du sens des mots et des choses, – rien pour nous étonner, dans cela.

Par conséquent, il nous paraît peu indiqué de monter tel ou tel procès indigné sur ce parti-pris ici ou là, ni d’éditos vengeurs sur “ces populations rétrogrades”, ces “fachos-réacs’” et toute cette saltimbanquerie, – ce néologisme pour exprimer l’épuisement de nos âmes poétiques devant ce traquenard où tombent tant d’esprits aiguisés. Ce qui nous intéresse c’est l’essentiel, savoir les positions et les forces s’exerçant par rapport au Système, pour ou contre. Il faut laisser notre emportement affectiviste courant de croire à la centralité du débat sociétal pour admettre cette évidence que ce débat sociétal fait partie de la stratégie considérablement puissante du Système, et que c’est par conséquent en fonction de ce fait central (la stratégie du Système) et rien d’autre qu’il faut déterminer, affirmer et assurer sa position.

Dès lors, le constat est le suivant : la Russie est devenue, en profondeur d’elle-même et en cela retrouvant sa tradition, un centre de contre-culture face à la postmodernité et le Système. Il est évident que les autorités politiques et religieuses l’y poussent ; avec une direction politique qui est aussi radicale dans les domaines culturel et social, avec effet sur le sociétal, qu’elle est modérée dans le domaine économique par rapport par rapport à l’“offre” pressante du bloc-BAO d’adopter ses références-Système ; avec une hiérarchie religieuse extrêmement pugnace dans la défense des intérêts culturels russes dans le sens de la tradition... Les accusations de corruption que colportent régulièrement les porte-voix de la communication-Système contre ces directions n’ont pas d’effets de rupture dans la mesure où cette corruption, qu’elle apparaisse ou pas du point de vue vénal, ne touche pas le niveau psychologique. (En aucun cas, on ne peut en dire autant des élites-Système du bloc-BAO.)

(De même, les accusations d’“autoritarisme” qui fondent la stratégie antirussistes du bloc-BAO n’ont d’autres effets que de mettre en lumière la position d’agonie accélérée dans le désordre et le nihilisme du “modèle démocratique” du bloc-BAO et du Système. C’est dans ce contexte qu’il faut poser un jugement.)

Cette situation implique effectivement que la Russie constitue non plus un obstacle, mais un véritable “barrage culturel” contre la tentative permanente d’invasion de la culture-Système dont le programme implique l’équation déstructuration-dissolution-entropisation (dd&e). Du fait même de cet antagonisme, et quoi qu’on pense selon la moraline courante de façon parcellaire et cloisonnée de toutes ces positions et options, la situation générale russe est perçue comme s’opposant à la poussée dissolvante du Système et devient de ce fait, par simple logique antagoniste, complètement structurante pour la Russie elle-même. Cette perception du Système ne peut aller qu’en s’amplifiant parce qu’elle se nourrit à l’antirussisme qui lui-même se renforce de la perception qu’il induit : logique fermée parfaite.

Pour autant, il ne faut pas conclure que les Russes offrent un “contre-modèle” : leur contre-culture est uniquement défensive et d’ailleurs ne prétend à rien d’autre, ni ne peut prétendre à rien d’autre car c’est effectivement dans le mode défensif qu’elle est réellement efficace en mettant en évidence les outrances et les vices de l’adversaire. La Russie n’est pas en position d’offrir un “contre-modèle” parce qu’elle n’a pas les instruments pour le faire, ni encore moins la capacité conceptuelle. (Personne n’a d’ailleurs cette capacité conceptuelle ni “les instruments” pour l’opérationnaliser, bien entendu : nous sommes en attente de la chute du Système.) La Russie servant donc de “barrage culturel” a comme véritable fonction opérationnelle de faire s’épuiser le Système dans son hostilité à son encontre, et par conséquent d’accélérer son propre effondrement en cours. Tout cela trace une certaine situation d’équilibre pour la Russie dans laquelle Poutine occupe la place qui convient, – ce qui explique aussi bien sa popularité que les intentions de vote pour l’élection présidentielle (actuellement, 81,1% en faveur de Poutine).

 

Mis en ligne le 24 janvier 2018 à 13H40

Fernando Pessoa

FP-porti2.jpg

Fernando Pessoa

Fernando Pessoa was the greatest Portuguese poet of the modern era and arguably one of the most interesting and protean literary figures of the twentieth century. His vast body of work, some of which remains unpublished, includes hundreds of poems as well as essays on philosophy, religion, literature, and politics. His verse combines avant-garde modernism with pagan mysticism and a vision of national rebirth.

Following the death of his father, his family moved to Durban, South Africa, where the young Pessoa spent most of his childhood. Coincidentally Durban was also the hometown of the South African poet Roy Campbell, who hailed Pessoa as a modern Camões.[1] [2] In Durban Pessoa learned to write fluently in English and received a thorough education in English literature. His first major success came at 15, when he won an award for an English-language essay. He returned to Lisbon two years later and enrolled in the University of Lisbon but dropped out two years later and became an autodidact. During this time he spent his days at the National Library of Portugal and read widely. He spent the rest of his life in Lisbon, making a living as a translator of commercial correspondence.

FP-por1.pngOne of his earliest influences was Thomas Carlyle, whose concept of the “hero as poet” as described in Heroes, Hero-Worship, and the Heroic in History made a particular impression on him; from a young age, Pessoa saw his vocation as a poet as an heroic, almost messianic calling.

Although Pessoa was active in Portuguese literary circles, he was mostly unknown outside of Portugal during his lifetime. He achieved posthumous literary fame when it was discovered upon his death that he had left behind a trunk full of several thousand pages of unpublished work. The ordeal of editing and cataloguing his works is still in progress.

Pessoa is best known for his use of numerous literary alter egos, which he termed heteronyms. Behind each heteronym was a meticulously crafted persona possessing a complex biography and a distinct temperament, worldview, and writing style. He used more than 70 heteronyms over the course of his life, beginning with adolescent experiments in creating elaborate fictional newspapers complete with news, poems, jokes, and essays authored under various heteronyms. The three main heteronyms he consistently used were Alberto Caeiro, a man of humble origins and lover of nature; Ricardo Reis, a classics scholar and Stoic; and Álvaro de Campos, a naval engineer, world traveler, and Futurist dandy. His heteronyms frequently engaged in dialogues with each other and criticized each other’s works. Pessoa’s work is rife with seeming contradictions, like the man himself: by turns nostalgic and futuristic, cerebral and impassioned, decadent and ascetic, etc.

Among his heteronyms was one “semi-heteronym,” the quasi-autobiographical Bernardo Soares. Pessoa wrote The Book of Disquiet, his greatest prose work, under Soares’s name. (He ascribed the first part to Vicente Guedes and the second to Soares.) The Book of Disquiet is at once a novel, poem, philosophical essay, character study, and “autobiography without events.”[2] [3] Guedes/Soares is an introspective loner with a melancholy temperament, not unlike Pessoa. An bookkeeping assistant by day, he feels imprisoned by the tedium of modern office life and becomes thoroughly disillusioned with the modern world. He finds refuge in cultivating within himself an attitude of aristocratic detachment and complete disinterest in the outside world and escaping into a dreamlike parallel reality. Much of the text reads like fragmentary recollections of dreams and is suffused with rich lyricism and mystical, surreal imagery.

The second phase of the book opens with a statement on religion in the modern world: “I was born at a time when most young people had lost their belief in God for much the same reason that their elders had kept theirs—without knowing why.”[3] [4] Soares then identifies “the worship of Humanity, with its rituals of Liberty and Equality” as a modern substitute for religion and scorns the hollow ideals of liberalism and egalitarianism.[4] [5] Pessoa in his own writings was likewise a fierce critic of the modern cult of “humanity” on the grounds that internationalism had the effect of erasing natural human differences and believed it did little to fill the spiritual vacuum of modernity. In his view this void could only be filled through the creation of art: instead of seeking to express reality, art must itself become reality.

Soares heaps especial scorn upon liberal reformers and their crudely optimistic faith in humanity. Indeed his political apathy and his detachment from the modern world lead him to condemn political revolutionaries of all stripes. Being self-aware, he recognizes that this stance is a symptom of modern decadence but ultimately remains perpetually suspended in a liminal realm between action and inaction (again much like Pessoa himself). This state of unease and ambiguity characterizes The Book of Disquiet both thematically and in a literal sense, as the work was never completed and consists of disjointed fragments, aphorisms, etc. The novel provides a fascinating mirror into the psychology of modern man and the quest to find meaning amid a decaying society.

Pessoa is best known for The Book of Disquiet among the general public, but in his homeland he is primarily known for his 1934 epic poem Message, one of the few works he published during his lifetime and the only one published in Portuguese. He did not write in standard Portuguese but instead in the orthography used before the First World War, which lends the poem an antiquated feel in the original. It consists of 44 short poems grouped into three parts, representing three stages of Portugal’s history. Message became a Portuguese national epic and soon after its publication won second prize in a contest organized by the propaganda branch of António Oliveira de Salazar’s corporatist regime.

FP-porti3.jpg

The first part, “Brasão” (“Coat of Arms”), has in turn five sections: The Fields, The Castles, The Escutcheons, The Crown, and The Crest, each representing a component of the coat of arms of the Kingdom of Portugal. The coat of arms remains a Portuguese national symbol and is thought to date back to the reign of Afonso I (known as “the Conqueror” and “the Founder”), the first king of Portugal. The shield of the coat of arms can be found on the modern Portuguese flag. The first poem, “The Fields of the Castles,” refers to the bordure of castles in Portugal’s coat of arms that represent Moorish castles conquered by the Kingdom of Portugal during the Reconquista. Pessoa begins by invoking Portugal’s role in the Age of Discovery, describing the European continent as a woman whose face—Portugal—stares westward. The second, “The Fields of the Escutcheons,” refers to the escutcheons in the center of the shield. Each escutcheon bears five white dots, thought to represent the five wounds of Christ, or alternatively the five wounds suffered by Afonso Henriques in the Battle of Ourique (in which he defeated the Moorish Almoravids). Here he defends the notion that glory is borne from misfortune and struggle.

The 17 remaining poems in the first part consist of poems in honor of Portuguese heroes. He begins with Ulysses. According to legend, Lisbon was founded by Ulysses on his journey home from Troy, and Roman authors referred to the city as “Ulyssippo”/”Olissippo.” Pessoa believed that the roots of Portuguese culture lay in ancient Greece and was fascinated with classical antiquity. (Indeed, Lusitanian mythology incorporated the influences of both Celtic and Greco-Roman mythology.) He deems Ulysses one of the founders of the Portuguese nation, despite that he exists only in legend:

Myth is the nothing that is everything.
The very sun that breaks through the skies
Is a bright and speechless myth—
God’s dead body,
Naked and alive.

This hero who cast anchor here,
Because he never was, slowly came to exist.
Without ever being, he sufficed us.
Having never come here,
He came to be our founder.

Thus the legend, little by little,
Seeps into reality
And constantly enriches it.
Life down below, half
Of nothing, perishes.[5] [6]

Next is a poem in honor of Viriathus, a military leader who led the revolts of the Lusitanians (an Indo-European tribe of Celtic origin concentrated in modern-day Portugal) against the Romans during the 2nd century B.C. The remaining titles include Afonso Henriques, who became the first king of Portugal; his parents, the Count and Countess of Portugal; King John I; Prince Henry the Navigator; King Sebastian I; Nuno Álvares Pereira; and others.

King Sebastian I was of particular significance for Pessoa. Toward the end of his life, Sebastian embarked upon a crusade against the Kingdom of Morocco. Ignoring the advice of his top advisors, he marched inland with his entire army. In the Battle of Alcácer Quibir in 1578 (dramatized in Donizetti’s Dom Sébastien), the Portuguese army was routed and it was thought that Sebastian perished, although his body was never found. The absence of an heir to the throne following Sebastian’s death ignited the Portuguese succession crisis of 1580, and Portugal was thrown into turmoil. Philip II of Spain gained control of the Portuguese throne in 1581, uniting Spain and Portugal under the Iberian Union. This marked the beginning of Portugal’s decline. Since Sebastian’s death was never confirmed, many Portuguese hoped that one day he would return to save the nation. A cult grew around this “king in the mountain” myth and Sebastian became Portugal’s equivalent of King Arthur. It was prophesied that one day Sebastian would return and lead Portugal into a new era of imperial glory.

FP-p4.png

The second part, “Mar Português” (“Portuguese Sea”), is a paean to Portuguese maritime exploration during the Age of Discovery. Here Pessoa eulogizes explorers such as Vasco da Gama, Bartholomeu Dias, and Ferdinand Magellan and describes their journeys at sea. The following short poem describes Vasco da Gama’s ascension following his death, invoking the Titans and the gods of Olympus and comparing da Gama to Jason, leader of the Argonauts:

The Gods of the storm and the giants of Earth
Halt the rage of their war and gape.
In the valley leading up to the skies
A silence falls; then there’s a stirring
And a specter rising in veils of mist.
Fears flank it while it lingers; its vestige
Rumbles in distant clouds and flashes.

On the earth below, the shepherd freezes
And his flute falls as in rapture he sees,
By the light of a thousand thunderbolts,
The sky’s vault open to the Argonaut’s soul.[6] [7]

The title of the third part, “O Encoberto” (“The Hidden One”), refers to a revelation attributed to St. Isidore of Seville, who envisioned that a Messiah would arrive known as “O Encoberto.” This prophecy was popularized during the sixteenth century by a cobbler by the name of Gonçalo Anes (“O Bandarra”); King Sebastian was thought to be “O Encoberto.” In the first two sections, Pessoa invokes the voice of Sebastian and prophesies that he will return, in spirit if not in body, and bring about the Fifth Empire. (He identifies the first four “empires” as Greece, Rome, Christendom, and Europe.) Followers of Sebastianism looked to Daniel 2 in the Bible, in which Daniel interprets the four metals of the statue in Nebuchadnezzar’s dream to signify four great kingdoms that will be followed by a fifth, as a prophecy of the Fifth Empire. In the third section, Pessoa describes the current state of Portugal and states that the hour has come for the prophecy to be fulfilled.

Imperialism deserves criticism from an ethnonationalist point of view. It negates the idea of self-sovereignty and represents the tyranny of commerce and financial greed. Portugal specifically also played a leading role in the Atlantic Slave Trade, which ultimately had disastrous consequences. Nonetheless it is necessary to distinguish the heroism and courage of European explorers during the Age of Discovery from the mercantile greed that was the driving force of colonialist expansion. “Who wants to pass beyond Bojador,” Pessoa writes in “Mar Português” (the Portuguese explorer Gil Eanes was the first to discover a route around Cape Bojador, known for its cold winds and violent storms), “must also pass beyond pain.” Carl Schmitt was highly critical of “thalassocratic” colonial empires but nonetheless admired “the intrepid performance of seamen in their sailing ships, the high art of navigation, the solid training and strict selection of a particular human type fit for it,” which he contrasted with “modern, hazard­-free, and technicized maritime traffic.”[7] [8]

Furthermore Pessoa’s vision of the Fifth Empire does not represent a revanchist imperative to conquer the world and reinstate colonialism and imperialism. Rather he envisioned that Portugal would stand at the forefront of a global literary and artistic renaissance and would regain national dignity through cultural renewal. The Sebastianism of Message represented a symbolic national myth that he believed would unite the Portuguese people.

Message has often been compared to Camões’s Os Lusíadas, an epic poem chronicling Vasco da Gama’s discovery of a sea route to India. Both invoke heroic and nationalistic themes. Both are also reminiscent of ancient epics, particularly Os Lusíadas. The opening lines of Os Lusíadas recalls Virgil’s Aeneid and are followed by an episode in which the Olympian gods and goddesses gather to deliberate over Vasco da Gama’s voyage and split into two parties, one favoring the Portuguese and the other in opposition to them. The gods accompany da Gama throughout his journey and Greco-Roman mythology in general figures prominently throughout the poem.

FP-porti5.jpg

Pessoa’s greatest inspiration was ancient Greece. He was an avid Hellenist and dreamed of a renaissance of the ancient gods. This point of view is shared among his heteronyms. He articulated his views on religion most thoroughly through Antonio Mora, a disciple of Caeiros, who wrote some treatises on the subject and argued that paganism was the religion most in harmony with nature. His most interesting argument here involves a discussion of how a Christian, pantheist, materialist, and pagan would perceive any given object. Regarding Christians, he remarks: “Whoever values something because it was created by ‘God’ values it not for what it is but for what it recalls. His eyes behold the object, but his thoughts lie elsewhere.”[8] [9] For the materialist, each object is simply “a screen through which he atomistically peers, just as for the pantheist it is a screen or window for perceiving the Whole, and for the creationist a screen through which to see God.”[9] [10] Only the pagan is capable of perceiving reality to the full. Pessoa under his own name laid out a similar view in his writings on what he termed “sensationism.”

Mora also cites the polytheism and plurality inherent in paganism and argues that this lends it greater objectivity: “Reality, when it first appears to us, is multiple. By referring all received sensations to our individual consciousness, we impose a false unity (false to our experience) on the original multiplicity of things.”[10] [11] Pessoa believed that metaphysical subjectivism lay at the root of modern decadence. His use of heteronyms thus represented an extension of his religious views and an attempt to reflect nature in all its plurality.

Mora’s remark on being a pagan in the modern world will resonate with dissidents:

What relationship can an age like this one have with a spiritual heir to the race of constructors, with a soul inspired by paganism’s glorious truths? None, except one of instinctive rejection and automatic scorn. We, the only dissenters from decadence, are thus forced to assume an attitude that, by its nature is likewise decadent. An attitude of indifference is a decadent attitude, and our inability to adapt to the current milieu forces us to just such an attitude. We don’t adapt, because healthy people cannot adapt to a sick milieu, and since we don’t adapt, it is we who are sick. This is the paradox in which those of us who are pagans live.[11] [12]

In 1924 Pessoa founded a short-lived literary journal called Athena in which he published essays, poems, and translations under his three main heteronyms as well as his own name. These included translations from the Greek Anthology, Ricardo Reis’s Horace-inspired classical odes, and selections from Alberto Caeiro’s The Keeper of Sheep. The journal both eulogized pagan antiquity and stood at the vanguard of literary modernism; it represented “a denial of the old querelle des Anciens et des Modernes, and an impressive attempt to find an ancient form of dramatic art in modern times.”[12] [13]

Athena was an attempt to revive the movement surrounding the similarly short-lived journal Orpheu, which dissolved after the publication of two issues in 1915. It was responsible for introducing modernism to Portugal and was named for Orpheus to symbolize its forward-looking orientation. Orpheu represented a wide variety of literary currents ranging from Symbolism to Futurism. The most notable poems in Orpheu were the poems of Pessoa’s Álvaro de Campos. In “Opiario,” written while sailing through the Suez Canal on an eastward voyage, he describes with despair his opium addiction and the tedium of life aboard his ship. Directly following was “Ode Triunfal,” which takes place later in his evolution (although in reality Pessoa wrote it earlier), a Futurist ode to modern technology that extols the “great human tropics of iron and fire and strength.” There was also “Ode Maritima,” in which a man on a deserted quay gazes at a faraway steamer; “a steering wheel begins to turn, slowly” in his imagination, launching a stream-of-consciousness ode to “shipwrecks, far-off voyages, dangerous crossings,” pirate adventures, and so forth.

FP-6.jpgPessoa was also fascinated with the occult and wrote extensively on the subject, largely under his own name. In 1915, he began translating theosophist texts and later claimed to have become a medium with the ability to produce automatic writing. He also claimed to have “sudden flashes of ‘etheric vision'” that enabled him to perceive certain symbols and “auras.”[13] [14] He later came to distance himself from Theosophy, however, objecting to what he saw as its egalitarian premise and the theosophical ideal of a universal brotherhood of humanity, which in his view rendered it scarcely different from Christianity and liberal humanism (which he referred to as Christianity’s secular equivalent).

Pessoa also maintained a correspondence with Aleister Crowley. An avid astrologer, he first made contact with Crowley in 1930 by pointing out an astrological error in his Confessions. Crowley visited Portugal later that year and Pessoa aided him in faking his death. He also translated Crowley’s “Hymn to Pan” into Portuguese.[14] [15]

The glorification of Sebastianism as national myth in Message had an occult component. Pessoa’s vision of the Fifth Empire was a spiritual one and the arc of Message represents a religious quest, both on an individual and national level. The final part of Message alludes to Arthurian legend throughout (the Holy Grail, Excalibur, Sir Galahad). In “O Desejado” (“The Yearned-for One”), the narrator exhorts Sebastian to lift up Excalibur, his “anointed sword.” In “O Encoberto” (the poem that gives the final part its name), Pessoa also links Sebastianism with Rosicrucianism.

Pessoa is frequently compared to W. B. Yeats: in addition to their shared interest in the occult (Yeats was a member of the Hermetic Order of the Golden Dawn) and their use of alternate personae (Yeats’s “masks” and Pessoa’s heteronyms), both were “mystical nationalists” who wrote poetry of a pagan, heroic character through which they sought to bring about a renaissance in their respective nations. Pessoa admired Yeats’s poetry and was influenced by the Irish Literary Revival. The following lists some parallels between the two regarding their shared “underlying mythopoeic goal” and is worth quoting:

Pessoa’s concept of the ‘Portuguese soul’ is analogous to what Yeats calls ‘the permanent character of the race’ in ‘First Principles.’ Not only that, but he also attributes the same characteristics to it as those which Yeats attributed to the Celts in ‘The Celtic Element in Literature,’ namely an adventurous, tragic and mystical nature. The similarities extend to Pessoa’s characterization of the ‘Portuguese soul’ as originating from ancient dreams, which recalls Yeats’s depiction of his ideal of ‘Unity of Culture’ as ‘a nationwide multiform reverie.’ Yeats believed that by drawing on his country’s legends and folklore, a poet could reveal the Anima Mundi, or rather ‘a Great Memory passing on from generation to generation.’ Pessoa also believed that poets should derive their inspiration from ‘o que nas almas há de superindividual’ [that which is supra-individual in souls].[15] [16]

Also like Yeats, Pessoa was a man of the Right who opposed modern liberalism and egalitarianism. He described the ideal state as an “aristocratic republic” governed by an elite based on merit (rather than birth).[16] [17] Although he had reservations about fascism in his later years, he criticized it nonetheless from a right-wing perspective.

As a young man, Pessoa was a staunch opponent of monarchy and the Catholic Church, which he considered to be corrupt, moribund institutions and to which he attributed Portugal’s decline. (Other factors he associated with Portugal’s decline were “foreign influence, the oligarchy of political bosses, and the decline ofWestern civilization itself.”)[17] [18] He initially supported the First Portuguese Republic and was associated with the Portuguese Renaissance, a movement of intellectuals who sought to lend the republic cultural legitimacy, but turned against the new government when it became clear that it had not improved upon the flaws of the recently deposed monarchy. He supported the military coup d’état on May 28, 1926, which he believed would reinvigorate the nation following the failure of the republic. In a pamphlet written in 1928, he argued that military dictatorship was a useful temporary measure through which national consciousness could be strengthened.[18] [19] He also supported Salazar’s Estado Novo for this reason. However, he later began to grow disillusioned with Salazar and criticized the regime’s ban on Freemasonry and what he perceived as Salazar’s lack of interest in cultural affairs.

FP-7.jpgThe theme of decay and the need for national regeneration runs throughout his political writings, particularly his unfinished “History of a Dictatorship,” a survey of modern Portuguese history in which he attempts to outline the causes for Portugal’s decline.[19] [20] Pessoa viewed the state as akin to an organism that, on account of its inherent plurality, possesses a natural tendency toward disintegration. Like the ancients, he held that unity ought to be the principle aim of politics and that achieving national unity would enable the state to resist decline. He writes in “The Portuguese Regicide and the Political Situation in Portugal”:

Let us apply to the organism called the state the general law of life. Which are the elements (composing the cells) of this organism? Obviously the people, that is, the individuals composing the nation. Which is then, in the state, the force that integrates, which is the force that disintegrates? There is an exact analogy—how could there not be, since both are living “bodies”?—with the individual organism. Thus, in the state, obviously, the disintegrating force is that which makes the people many—their number—and the integrating force is that which makes them one, a people—the unification of sentiments, of character brought about by identity of race, of climate, of history, etc.[20] [21]

Pessoa also commented on certain political events outside of Portugal, particularly in his English-language poetry. At 16, he wrote a sonnet on the Second Boer War entitled “Joseph Chamberlain,” a scathing indictment of Chamberlain’s role in causing the war and the brutal treatment of the Boers in South Africa. He also drafted a sonnet in which he excoriated Lord Horatio Herbert Kitchener, the man responsible for the establishment of concentration camps during the war. He commended the Irish volunteers who had sided with the Boers and also lent support to Irish nationalism.[21] [22]

In his short story The Anarchist Banker, Pessoa takes aim at modern capitalism and classical liberalism. It takes the form of a conversation between a cigar-smoking senior banker and a younger interlocutor. The banker is a left-wing anarchist who sets out to argue that his being a banker does not contradict the ideals of liberty and equality that he espouses. Indeed he argues that financial acquisitiveness is the logical culmination of his ideals, and by extension of modern liberalism. In order to obtain true freedom and equality (the two main pillars of modernity), he argues that man must be freed from all existing social structures. But he is averse to any collective attempts to foment revolution due to the fact that social hierarchies will inevitably arise in any group (the banker is realistic about natural disparities in talent and willpower among humans, in spite of his hope that human inequality will eventually be eliminated). Thus he advocates the pursuit of pure self-interest, arguing that “we should all work for the same end, but separately.”[22] [23] Due to the fact that money/commerce is the prevailing “social fiction” in the modern age, the end goal of social liberation is, to his mind, best achieved by simply making as much money as possible; the erosion of this “social fiction” would then pave the way for complete societal upheaval. It is a compelling argument that sheds light on some of the contradictions behind the underlying axioms of modernity.

The best collections of Pessoa’s work in English translation are The Selected Prose of Fernando Pessoa (2001), Fernando Pessoa & Co: Selected Poems (1999), and A Little Larger Than the Entire Universe: Selected Poems (2006).

Notes

[1] [24] George Monteiro, “Fernando Pessoa: an Unfinished Manuscript by Roy Campbell,” Portuguese Studies, vol. 10 (1994): 126. Pessoa and Campbell attended the same high school, although not at the same time. Campbell translated some of Pessoa’s poems and had intended to write a book on him.
[2] [25] Fernando Pessoa, The Book of Disquiet, trans., Margaret Jull Costa (New York: New Directions Books, 2017), 191.
[3] [26] Ibid., 146. Pessoa wrote “opening passage” in the margins of this fragment and Richard Zenith’s translation places it at the beginning of the book.
[4] [27] Ibid., 147.
[5] [28] Zenith’s translation.
[6] [29] Zenith’s translation.
[7] [30] Carl Schmitt, Land and Sea, trans. Simona Draghici (Washington, D.C.: Plutarch Press, 1997), 54.
[8] [31] The Selected Prose of Fernando Pessoa, trans. Richard Zenith (New York: Grove Atlantic, 2001).
[9] [32] Ibid.
[10] [33] Ibid.
[11] [34] Ibid.
[12] [35] Steffen Dix, Portuguese Modernisms: Multiple Perspectives in Literature and the Visual Arts (New York: Routledge, 2011).
[13] [36] The Selected Prose of Fernando Pessoa.
[14] [37] For more information on their correspondence see Marco Pasi and Patricio Ferrari, “Fernando Pessoa and Aleister Crowley: New discoveries and a new analysis of the documents in the Gerald Yorke Collection,” Pessoa Plural, vol. 1 (Spring 2012).
[15] [38] Patricia Silva-McNeill, Yeats and Pessoa: Parallel Poetic Styles (New York: Routledge, 2010), 94.
[16] [39] José Barreto, “‘History of a Dictatorship’: An Unfinished Political Essay by the Young Fernando Pessoa,” trans., Mario Pereira. In Patricio Ferrari & Jerónimo Pizarro, eds., Fernando Pessoa as English Reader and Writer (Dartmouth, MA: Tagus Press, 2015): 132.
[17] [40] Barreto, 139.
[18] [41] The Selected Prose of Fernando Pessoa.
[19] [42] Barreto, 110.
[20] [43] Fernando Pessoa, The Transformation Book, eds., Nuno Ribeiro and Claudia Souza (New York: Contra Mundum Press, 2014), 12-13.
[21] [44] See Carlos Pittella, “Chamberlain, Kitchener, Kropotkine—and the political Pessoa,” Pessoa Plural, vol. 10 (Fall 2016).
[22] [45] The Selected Prose of Fernando Pessoa.

 

Article printed from Counter-Currents Publishing: https://www.counter-currents.com

URL to article: https://www.counter-currents.com/2018/01/fernando-pessoa/

La trilogie EUROPA sur Radio Méridien Zéro !

Meridienne-330-500x340.jpg.pagespeed.ic.v63yd2wRSm.jpg

La trilogie EUROPA sur Radio Méridien Zéro !

Monsieur PGL vous propose un entretien avec notre ami Robert Steuckers, à l’occasion de la trilogie qu’il publie aux éditions Bios et qui est la somme de ses écrits et réflexions sur le destin de notre continent. Ce sera l’occasion également de revenir sur son parcours.

A la barre PGL, à la technique JLR.

Pour écouter:

https://radiomz.org/emission-n330-europa-eurasia-identite...

 

Le prophète de la grande Europe, Jean Thiriart

ob_d853ef_thiriart-ars-magna.jpg

Le prophète de la grande Europe, Jean Thiriart

par Yannick Sauveur

Ex: http://www.leblancetlenoir.com 

En Suède, en Europe de l'Est, en Italie, en Espagne, en Amérique latine, Jean Thiriart est traduit, cité, mentionné favorablement. Des travaux universitaires, des livres sont en cours. La revue d’études géopolitiques Eurasia, dirigée par Claudio Mutti, reproduit très régulièrement des écrits de (ou sur) Thiriart. En France, des chercheurs, bien que ne lui étant pas favorables, reconnaissent, avec une certaine objectivité, l'influence déterminante des idées de Thiriart, c’est le cas de l’historien Nicolas Lebourg. Dans l’ouvrage Europa (trois volumes) que vient de publier Robert Steuckers, deux chapitres sont consacrés à Jean Thiriart.  (https://editionsbios.fr/auteur/robert-steuckers).

Le livre que viennent de publier les éditions Ars Magna, Le prophète de la grande Europe, Jean Thiriart, participe de ce mouvement. Il rassemble un certain nombre de textes devenus introuvables et qui, même en leur temps, avaient eu une diffusion ultra confidentielle. Aussi, faut-il saluer l’heureuse initiative de Christian Bouchet qui, même s’il ne partage, loin de là, toutes les analyses de Thiriart, n’en est pas moins un proche.

Dans une telle entreprise, les erreurs sont inévitables. Il serait bon toutefois qu’une bonne fois pour toutes, les auteurs cessent de répéter tout et n’importe quoi sans opérer la moindre vérification. Il en est ainsi de la rencontre entre Thiriart et Chou-en-Laï, laquelle n’est que pure imagination ainsi que j’ai eu l’occasion de le signaler en citant un courrier de Thiriart adressé à José Cuadrado et à moi-même : « Un livre de dénonciation-chantage vient d’être mis en vente en Belgique [...] On m’y consacre 20 pages de ragots. Pas un mot de mes écrits ou de mes livres. J’y apprends que j’ai rencontré Chou-En-Laï à Bucarest. Pas moins… » (26/02/1983). Certes, à des fins de propagande, Thiriart a exploité le filon, l’a enjolivé, et ce, d’autant mieux que cela flattait son narcissisme exacerbé. Mais à quoi bon aujourd’hui persévérer dans l’entretien de telles légendes ? Il en est de même de sa prétendue rencontre avec Nasser.

Il n’est pas exact de dire (ou redire) que Thiriart a soutenu la création du Parti communautaire national-européen même si, effectivement, il a donné un certain nombre d’articles à la revueConscience Européenne éditée à Charleroi par Luc Michel. Là aussi, je rappelle ce que j’ai eu l’occasion d’écrire en citant une lettre de Thiriart à Manuel Abramowicz, journaliste à Regards, revue juive de Belgique : « Michel a créé tout seul son PCN (Parti Communautaire National-Européen). En utilisant 95 % de mes écrits. Je n'ai jamais mis les pieds à Charleroi. Je n'ai jamais été membre (sic) du PCN ».

Christian Bouchet a rassemblé les textes suivants :

  • L’entretien réalisé avec le général Péron et paru dans le n° 30 et dernier de La Nation européenne (février 1969). On comprend qu’il ne soit pas facile de faire des choix parmi l’ensemble des éditoriaux et divers écrits de Thiriart. Christian Bouchet, avec  l’interview de Péron, a retenu le côté emblématique. Il serait intéressant, par la suite, de rééditer l’ensemble des éditoriaux de La Nation européenne.
  • L’entretien accordé aux Cahiers du CDPU (1976) qui est la première manifestation publique de Thiriart depuis son arrêt de toute politique active en 1968,
  • Et surtout l’entretien avec Bernardo-Gil Mugarza qui a milité dans sa jeunesse à Joven Europa, le réseau espagnol de Jeune Europe. L’entretien avec Mugarza date de 1983 et c’est vraiment le moment fort du livre (300 pages d’un livre qui en compte près de 500 !). Thiriart se livre complètement sur tous les sujets, sans fioritures, sans tabou. L’évolution de la pensée politique est nette  par rapport à celle qu’il développait en 1964. Avec ce texte, les jeunes, ou tout simplement ceux qui ne connaissent pas Thiriart, découvriront tout à la fois un vrai penseur politique et une personnalité charismatique,
  • La Turquie, la Méditerranée et l’Europe, article paru dansConscience Européenne  (juillet 1987) dans lequel Thiriart écrit : « La Turquie, c’est l’Europe obligatoirement. Obligatoirement par la géopolitique et par la stratégie ». À la lecture de cet article, et compte tenu du contexte actuel, il n’est pas sûr que le lecteur partage l’analyse strictement rationnelle de Thiriart,
  • Enfin un article paru dans la revue Nationalisme et République (juin 1992), Europe : L’État-nation politiquecorrespondant aux idées que Thiriart développera à Moscou en août 1992. C’est un texte évidemment très important reflétant une pensée très aboutie mais c’est aussi l’un des derniers écrits de Thiriart qui meurt quelques mois plus tard.

Dans une seconde partie, on trouve des écrits sur Thiriart. C’est une partie plus modeste du volume et de notre point de vue d’une  moindre valeur exception faite de l’excellent article de  Carlo Terracciano paru dans la brochure d’hommage In Memoriam Jean Thiriart (1993), que nous avions réalisée, Luc Michel, Robert Steuckers et moi-même. Carlo Terracciano (1948-2005), qui n’a rencontré Thiriart qu’une fois (à Moscou en 1992), dresse un portrait d’une infinie justesse et il nous restitue l’homme tel qu’il était réellement pour ceux qui l’ont connu en privé.

Dans les témoignages figure un texte d’Ernesto Milá Rodriguez, Le nationalisme européen et ses limites. Quelles que soient les motivations des uns et des autres, il était inévitable de voir fleurir les interprétations les plus diverses. Ernesto Milá Rodriguez a bien le droit d’avoir sa propre vision, son appréciation personnelle de la pensée de Thiriart. Là n’est pas le problème. Nous pensons qu’il eût été pertinent d’accompagner ce texte de celui de José Cuadrado Costa, L’anarchisme mystique ou la paralysie de l’action révolutionnaire (Conscience Européenne, N° 12, mai 1985, p.16-40) qui répond point par point à l’article d’EMR. Le point de vue de JCC est important parce qu’en tant que collaborateur le plus proche de Thiriart, il traduit très précisément la pensée de Thiriart. L’article de Cuadrado est une longue critique argumentée s’insurgeant contre le fait que Jean Thiriart serait, selon EMR, avec Julius Évola, le principal « révisionniste » du fascisme. Cuadrado cite diverses erreurs d’appréciation, dont celle qui se rapporterait, pour Thiriart, à la nécessité de « réviser le nationalisme jacobin » alors qu’il est de notoriété que Thiriart était un grand admirateur de Sièyes et des Jacobins. Les têtes de paragraphes se passent de commentaires : « Une tentative néo-fasciste de récupération de l’œuvre de Thiriart », « une incompréhension totale de la pensée de Thiriart »,... On peut être d’accord ou non avec Thiriart et ne pas partager (ou ne pas comprendre) son évolution, encore convient-il de ne pas travestir voire déformer ses propos. Assurément, l’article de Cuadrado mériterait une réédition.

Que ces quelques réserves ne fassent pas oublier l’essentiel, à savoir l’importance de ce livre, la nécessité de le lire, de le faire circuler.

Yannick Sauveur

Pour mémoire, mon livre QSJ Thiriart, Éditions Pardès, 2016.

sarl.pardes@orange.fr 

ob_eb8d03_thiriart.jpg

Je signale également mon entretien avec la rédaction de Rivarol, N° 3315 du 31/1/2018.Jean Thiriart, de la Collaboration au mythe de la Grande Europe (le titre est de la rédaction).

 Le prophète de la grande Europe, Jean Thiriart vous est proposé au prix de 32 euros  (franco) à Ars Magna, BP 60426, 44004 Nantes cedex 1 ou commande en direct à www.editions-ars-magna.com

vendredi, 02 février 2018

Histoire du soft power américain

SPFBH-2bis.jpg

Histoire du soft power américain

par François-Bernard Huyghe

Ex: http://www.huyghe.fr

1. De la guerre froide à Obama

Aux USA, l’influence est pensée depuis longtemps comme technique à finalité stratégique: une guerre pour désarmer l’hostilité, une guerre à la guerre en somme qui fera du monde « un endroit plus sûr pour les États-Unis » selon la formule de Wilson. Ce dernier partait du principe que les démocraties ne se combattent pas par les armes. Il entrevoyait déjà un apaisement général par propagation des principes politiques américains.

D’où l’idée récurrente d’influencer l’autre pour le rendre un peu moins « autre » et éventuellement un peu plus démocrate, un peu plus amoureux de la liberté à l’américaine, davantage désireux d’en adopter le mode de vie. Cela repose sur une certaine confiance en la valeur universelle du système et sur la conviction que celui qui le combat ne peut être qu’en proie à illusion doctrinale, à une méconnaissance de la réalité ou à une passion contraire à la nature humaine : il s’agit donc de le guérir. Par une contre-offensive idéologique.

Durant la guerre froide, la CIA conçoit un plan de «guerre culturelle» et conduit, notamment à travers le Congrès pour la Liberté Culturelle, une politique de subventions à des journaux, des livres, des conférences, des manifestations artistiques. Tout cela est censé sauver l’intelligentsia du giron du communisme et offrir une alternative culturelle, politique et morale aux populations de l’Est ou des pays tiers. L’affrontement est clairement idéologique.

L’agence s’emploie à diffuser les auteurs antistaliniens, fussent-ils de gauche, mais aussi le jazz, la peinture abstraite, toutes les formes d’une culture distractive, « jeune », antitotalitaire qui font contraste avec le pesant réalisme socialiste : des gens qui lisent Koestler, sifflent l’air de Porgy and Bess ou aiment la peinture abstraite ne seront jamais de vrais Rouges, pense-t-on à l’Agence. De la concurrence des idées on passe à celle des cultures.

Diplomatie publique

L’entreprise eut un prolongement. Eisenhower créa en 1953 l’United States Information Agency qui devait fonctionner jusqu’en 1999 pour mener une politique de vitrine médiatique. Elle lança des publications et manifestations et surtout des radios dont Voice of America émettant en 45 langues et Radio Free Europe, destinée à l’autre côté du rideau de fer. Le but était projeter une « bonne image » des USA, d’offrir à des audiences étrangères des informations auxquelles elles n’avaient pas accès, de promouvoir certaines valeurs en particulier culturelles. L’USIA se chargeait d’entretenir des réseaux d’amis des USA : journalistes et personnalités invités à visiter le pays, boursiers (notamment le programme Fullbright) et contacts avec d’anciens étudiants des universités américaines…

Le tout fut baptisé en 1970 : « diplomatie publique », une diplomatie qui soutient les objectifs politiques en s’adressant directement à l’opinion extérieure. Mais pas au public domestique : l’US Information and Educational Exchange Act de 1948 connu comme Smith-Mundt Act, interdisant de faire de la propagande destinée aux citoyens américains.
Dans la décennie 90, la notion devait tomber en désuétude faute d’ennemi à combattre, l’USIA finit par se « fondre » dans le département d’État).

voice-of-america-labyrinth.jpgPendant un demi siècle, relayée par l’USIS (United State Information Service), la diplomatie publique avait ainsi produit ou exporté des milliers d’heures d’émission, de films, de livres,…, mais aussi établi des contacts avec des milliers de gens pour «raconter au monde l’histoire vue d’Amérique».

Son bilan sera discuté : l’USIA est parfois vue comme un agence de propagande coûteuse qui faisait mal ce que l’autre camp réalisait plus efficacement en sens inverse, relayé par des intellectuels progressistes et profitant du courant de la contre-culture.
Second reproche à la diplomatie publique : était-il vraiment utile de payer des fonctionnaires pour rendre l’Amérique plus populaire alors que James Dean, Marilyn Monroe, Elvis Presley , la MGM, puis CNN y parvenaient de cause de façon plus crédible et en rapportant des devises ? D’autres se demandent pareillement si la chute du Mur de Berlin n’est pas à porter au crédit de la télévision de RFA reçue en RDA : elle propageait une image bien plus positive de l’Occident que tout service officiel.

Dans les années qui séparent la fin de l’URSS du 11 septembre, la politique d’influence US semble se confondre au moins dans l’esprit de ses promoteurs avec un « élargissement » du modèle occidental, pour ne pas dire avec le mouvement de l’Histoire. Il s’agit pour les USA de « contrôler la mondialisation » (shapping the globalization), donc d’encourager une mondialisation qui repose autant sur les droits de l’homme et le marché que sur les technologies de la communication et la mondialisation des cultures.

Cette politique quasi pédagogique prend de multiples formes. Ce peut être l’accompagnement du passage à la démocratie des anciens pays socialistes par ONG ou think tanks interposés, aussi bien que l’apologie des autoroutes de l’information comme « agora planétaire ». Le tout dans un contexte où l’influence US semble sans rivale.

Le contrôle de la globalisation

Pour une part, l’influence se privatise. Elle devient une dimension fondamentale de l’intelligence économique. Elle sert d’abord à la conquête des marchés ; là encore, les Américains comprennent qu’il faut combiner soutien politique, imitation des modes de vie, prépondérance des les standards techniques ou juridiques et un imaginaire culturel rendant désirable le made in USA. D’autres facteurs jouent telle la complexité croissante des normes internationales de production, donc le rôle des instances internationales et partant l’intérêt du lobbying.

Citons aussi le poids de mouvements d’opinion concernés par des dimensions écologiques, sociales ou sécuritaires de l’activité économique donc le rôle des ONG et des « parties prenantes », les facteurs d’image et de réputation dans la compétitivité des firmes… Autant de raisons pour les entreprises de se lancer à dans une politique internationale d’influence positive, voire agressive. Elles sont à la merci d’une rumeur sur Internet, d’une mise au pilori par une ONG, d’une attaque médiatique, d’une offensive informationnelle : elles doivent se préserver d’une influence déstabilisatrice comme une « e-rumeur ».

Parallèlement, une notion prend de l’importance dans les années 90 : celle d’affaire, action ou coopération civilo-militaires (qui donnent toujours le sigle ACM). Elle est liée à des conflits typiques de la fin du XX° siècle : des États disloqués, en proie à des guerres civiles, ou des situations indécises entre guerre et paix où des violences armées sont menés sporadiquement par des groupes ethniques, politiques, criminels voire mêlant les trois. L’intervention des forces occidentales, avec ou sans mandat des Nations Unies appelle une politique de reconstruction de la paix ou de la nation (peace building, nation building) ou, pour le moins, la gestion d’une situation indécise. À rebours de leur fonction traditionnelle (affronter symétriquement une autre troupe en uniforme jusqu’à la victoire politique scellée par le traité de paix), les troupes sont confrontées à des situations où il s’agit de contrôler l’exercice de la violence pour en freiner l’escalade. Il est tout aussi nécessaire de recréer les conditions d’une vie « normale » sur des territoires livrés au chaos.

Surtout dans la période qui mène à la mise en place d’autorités civiles reconnues, les troupes sont de facto chargées de tâches humanitaires, économiques administratives, politiques, bref non militaires. Cela les met au contact de civils, d’ONG, d’organisations internationales, de forces politiques, d’autres armées, d’entreprises… et bien sur des médias . Cette quête pratique n’est pas forcément désintéressée : les ACM peuvent rapporter des dividendes en termes d’image, de contrats de reconstruction pour ses entreprises, d’adoption de normes favorables à ses industries, …. Intérêts publics et privés peuvent se trouver liés comme civils et militaires. Mais l’objectif immédiat est surtout de contribuer à la stabilité du pays par des relations fiables avec les autres acteurs, un mélange entre action d’urgence et relations publiques.

géopolitique,actualité,soft power,sharp power,métapolitique,politique internationale,états-unis,services secrets,services secrets américains


La quête du soft power

Aux USA et dans la même période que l’influence trouve son nouveau nom : soft power. L’expression lancée par le doyen Joseph S.Nye gagne le statut de concept clé des relations internationales. Elle exprime une attractivit américaine qui repose sur la séduction de sa culture de masses (blockbusters hollywwodiens, séries TV, Mc Donald, basket, etc.), plus excellence scientifique et universitaire, plus les succès de sa technologie surtout numérique (les GAFA et la Silicon Valley), plus médias internationaux, plus influence intellectuelle de ses essayistes et de ses think tanks, plus américanisation des élites mondiales, plus image démocratique du pays, plus popularité de l’american way of life, plus...

Si l’Amérique prédomine dans le domaine du hard power, en particulier militaire, dit en substance Nye, elle doit aussi son statut d’hyperpuissance à sa capacité de séduire et d’attirer. La notion recouvre le rayonnement de l’Amérique, dû à sa technologie, à sa réputation, à ses artistes, à son cinéma, à ses université, … et autres choses où le gouvernement a peu de responsabilité, mais elle repose aussi sur sa diplomatie, sa capacité de convaincre et d’entraîner dans les organisations internationales. Amener les autres à désirer ce que vous voulez « sans carotte ni bâton » : voilà qui est tentant mais résonne un peu comme un vœu pieux.

Ce débat plutôt abstrait avant le 11 septembre prend une tout autre tournure en 2001. L’Amérique découvre alors la haine qu’elle suscite. Pour une part, les néo-conservateurs qui tenaient en réserve leurs plans contre les États voyous, leur guerre « préemptive » voire leur « quatrième guerre mondiale » contre le terrorisme jouent la carte du dur.

Parallèlement le recours à l’influence douce semble redevenir un saint Graal de la géopolitique US ou une ressource mystérieuse que l’Amérique devrait retrouver pour mettre fin à l’animosité.

L’appel à rétablir un soft power submergé par l’antiaméricanisme et décrédibilisé par une guerre contreproductive devient une des constantes du discours critique contre G.W. Bush. Ce slogan résonne souvent comme un pathétique « Aimez nous ». Ainsi, lorsque Francis Fukuyama rompt avec le camp néo conservateur, l’ancien chantre de la fin de l’histoire oppose la mauvaise méthode, la promotion de la démocratie par les armes, à la «bonne», celle qui consisterait à restaurer le soft power. Il ne faudrait pas renoncer au principe wilsonien, mais, parallèlement recommencer à négocier, à rechercher le consensus de ses alliés, à mener une action à travers des ONG et des organisations internationales régionales. Il est tentant de traduire : se rendre aimable, en somme.

Il serait caricatural de faire du soft power un monopole des démocrates, et de croire les républicains forcément partisans du «hard». La nuance entre diplomatie publique, soft power et influence renseigne davantage sur le locuteur que sur le contenu de la politique qu’elle recouvre.

Ainsi, quand Nye déclare que "l'Amérique doit mélanger le pouvoir dur et soft en un "pouvoir intelligent" (smart power), comme elle le faisait du temps de la guerre froide.", pareille nostalgie ne caractérise pas exactement un progressiste. Du reste, dans le camp conservateur, beaucoup en appellent à une grande politique qui tarirait les sources de l’extrémisme religieux et restaurerait une image de leur pays dont les sondages –ils en sont grands consommateurs - montrent la dégradation depuis six ans.

charlotte-beers-81-56-03.jpg

Une des premières réactions de l’administration Bush en 2001, fut de recréer un sous-secrétariat d’État à la diplomatie publique. Il fut d’abord confié à la publicitaire Charlotte Beers ; elle s’employa à produire des vidéos démontrant la liberté de culte dont jouissent les musulmans aux USA. Au fur et à mesure des guerres d’Afghanistan et d’Irak apparurent des radios arabophones et même une télévision, al Hurrah, censée concurrencer al Jazeera, mais avec un succès modéré dans le monde arabe. Parallèlement, l’administration Bush créa un Bureau d’Influence Stratégique (Office of Strategic Influence): il fallut le dissoudre lorsque la presse révéla qu’il risquait de mener des actions de désinformation qui toucheraient les citoyens américains.

Mais la diplomatie publique n’est pas seulement l’affaire des hauts fonctionnaires : le secteur privé intervient dans la promotion de l’Amérique. Ainsi Walt Disney produisant avec le département d’État des films présentant le pays à ses visiteurs ou les entreprises qui créent des « cercles d’influence » avec des groupes de journalistes ou des chambres de commerce. De la même façon, nombre d’opérations sont sous-traitées à des « agences de communication » ou assimilées qui, suivant le cas, «vendent» l’opposition à Saddam et la thèse des armes de destruction massive (comme le groupe Rendon) avant la guerre d’Irak ou, après, s’assurent de la bonne orientation de la presse locale (comme le Lincoln Group).

On verra aussi l’appareil d’État américain s’engager dans un combat quasi spirituel : il faut contrer « l’extrémisme violent » (comprenez le djihadisme), lancer un contre-discours, montrer que cela n’a rien à voir avec le vrai islam, contrer la propagande mensongère d’al Qaïda puis celle, plus moderne, plus efficace, et plus « Web 2.0 » de Daech.

Game_Intext_003-1444294901.jpg

La stratégie d’influence américaine comporte aussi un volet « subversif » : l’aide aux mouvements dits de la socité civile qui luttent contre des régimes autoritaires et, comme par hasard, antiaméricains,. Ceci vaudra sous les présidences successives de G.W. Bush et de Obama, mais prend la suite du bons vieux système de regime change consistant à aider l’oppostion dans certains pays. S’inspirant de l’expérience du renversement de Milosevic et des méthodes du groupe OTPOR, il y aura la révolution des roses en Géorgie (2003), orange en Ukraine (2004), des tulipes au Kirghizistan, « en jean » en Biélorussie (2005), du cèdre au Liban (2005). Ne parlons pas de la vague verte d’Iran (2009) ni de l’enthousiasme que déclenchera le printemps arabe de 2011 (ça y était, le monde arabe, évitant le double péril de l’islmamisme et des autocraties, allait se convertir au modèle démocratique occidental). Chaque fois on retrouve des fonds (d’ailleurs pas dut tout occultes- de l’US AID, du département d’État, du National Endowment for Democracy, de l’Institut pour la paix, etc. Des Ong finançant et formant les activistes démocratiques comme l’Albert Einstein Institute et la fondation Soros Open Society soutiennent les révoltes. Nous ne sommes pas en train de dire que les services américains ou quelques ONG renversent les gouvernement à leur guise partout sur la planète, mais qu’il jouent ouvertement la carte du soutien aux forces réputées modernes et ouvertes, donc pro-occidentales.

obama-soft-power-11.jpg

Soft Obama

Les années Obama ont-elles changées la pratique de l'influence stratégique d'État ?

La personnalité même du président devenu star internationale avant son élection et nobelisé au seul bénéfice de l'image fut en soi un exemple de "branding". Il "était" la marque USA dans toute sa splendeur, et rendait visible l'idée de soft power, comme s'il lui suffisait d'apparaître pour réconcilier l'Amérique avec le monde. La communication de la Maison Blanche exploita largement l'effet de contraste : elle opposait sa pratique apaisée à la brutalité de G.W. Bush. Très vite Hillary Clinton, au Département d’État, prit le relais, elle qui se réclame de Joseph Nye et de son smart power : la nouvelle Amérique utilisant suivant le cas sa puissance militaire, diplomatique, économique... mais aussi culturelle pour accomplir ses objectifs internationaux ; le moindre n'était pas de lutter contre les djihadistes et de dissiper les fantasmes dont est sensé se nourrir l'antiaméricanisme. Bien entendu, l'enthousiasme des débuts se heurtera aux réalités assez vite.

Si le soft power est un état idéal ou un résultat désiré, l'influence, la lutte idélogique, la présence médiatique, la "com", la mise en valeur de l'image américaine (éventuellement à travers celle de son président) en furent les moyens. Du coup, le terme "diplomatie publique" perdit ses connotations de Guerre foide et d'anti-communisme républicain. On se mit à parler d'une "nouvelle diplomatie publique" qui reposerait moins sur l'utilisation de grands médias émettant vers l'étranger (telle la télévision arabophone al Hurrah) que sur la présence sur les réseaux sociaux, le prestige culturel, la coopération avec les ONG et la société civile pour véhiculer le bon message... La propagande d’État devait passer par les réseaux sociaux et par les organisations de la société civile.

L'administration Obama a joué de ses atouts comme ses bonnes relations avec les entreprises de la Silicon Valley. Sa stratégie devient ostensiblement "2.0". Tandis que l'armée (qui ne fait désormais plus de "psyops" mais des "Military Informations Strategic Operations", ce qui sonne moins redoutable), la diplomatie américaine devient "e-diplomacy". Les représentants des USA, militaires ou diplomates, sont invités à être très présents sur les réseaux sociaux, à y faire du "storytelling" et à délivrer y compris à des audiences étrangères leur message de soutien aux objectifs de leur pays.

hillary-caricature-large.jpgParallèlement l'Amérique affiche sa volonté de soutenir les cyberdissidences et de lutter pour que s'épanouisse en ligne une société civile sans frontières. Hillary Cliton, en particulier, présente le droit de se connecter comme un droit de l'homme et milite pour des "technologies de libération" : l'extension d'Internet, échappant au contrôle des régimes étatiques est sensée apporter à la fois des bénéfices économiques, politiques (favoriser la démocratie pluraliste) aussi favoriser l'épanouissement d'une indispensable société civile. Du coup la cause universelle du Net se confond avec les intérêts des USA, première société de l'information de la planète (comme pendant la Guerre froide, ils se confondaint avec la défense universelle des libertés politiques).

La lutte pour la liberté du Net, se concrétise par le refus de principe de laisser des entreprises américaines vendre des techniques de censure à des gouvernements dictatoriaux mais aussi la volonté de fournir aux "blogueurs démocrates" de la formation ou des outils et logiciels pour échapper à la police. Même si les mauvais esprits font remarquer que les États Unis changent d'attitude lorsqu'il s'agit de lutter contre Wikileaks ou Megaupload... Ou contre Snowden.

Par ailleurs, en 2011, Obama crée le Center for Strategic Counterterrorism Communications qui doit mener la lutte pour la déradicalisation et la réfutation de la propagande djihadiste. Preuve que l’on en revient aux méthodes de guerre froide, ou plutôt d’affrontement idéologique à l’échelle de la planète. En 2016 le CSCC se transforme en Global Engagement Center sensé lutter avec des partenaires (ONG; écoles, leaders religieux...) contre le jihad dans les têtes. Mais, o surprise, juste avant que quitter son bureau ovale, Obama rajoute aux compétences du GEC la lutte contre la propagande et les interférences étrangères : Chine, Corée et surtout Russie.

Counter-speech (la contre-propagande contre le djihad, smart power, "nouvelle" diplomatie publique : le vocabulaire change, mais les fondamentaux restent les mêmes : l'Amérique retrouve spontanément sa tentation de convertir le reste du monde à ses valeurs pour sa propre sécurité (en vertu du vieux principe kantien que les démocraties ne se font pas la guerre), mais aussi pour sa prospérité. Et elle tend facilement à se persuader que les outils de la communication garantissent la liberté et l'harmonie des peuples, ce qui est très exactement la définition de l'idéologie de la communication.

SPFBH-4trump.jpg2. Trumpisme et « sharp power »

Peu de gens nieraient que le soft power américain ait diminué : un président qui traite les autres pays de trous à merde n’incarne pas exactement l’attractivité et la persuasion.

Si l’on s’en réfère à des sources comme le classement annuel des pays « The soft power 30 » du centre de diplomatie publique de Portland - qui range les nations selon leur capacité à « attirer, construire et mobiliser des réseaux d’acteurs pour agir en commun », les États-Unis sont passés en troisième position, dépassés par la France (grâce à l’élection de Macron qui nous aurait sauvés du péril populiste) et le Royaume-Uni (en dépit du Brexit). Les U.S.A. continuant à prédominer dans le domaine de l’excellence universitaire, de l’influence culturelle, de la technologie, etc. souffriraient de la déplorable image (y compris personnelle) et de la rhétorique de Trump qui affirme sans complexe vouloir poursuivre les intérêts de son pays et non des valeurs ou des buts universels. On accordera sans trop chicaner : la perception de la nouvelle présidence est désastreuse. Une fois que nous avons dit cela, nous n’avons pas dit grand chose.
On pourrait aussi analyser la supposée crise du soft power U.S. comme traduisant - au-delà de la perte d’attractivité d’un modèle qui se prenait pour celui de la fin de l’Histoire - la concurrence d’autres pouvoirs nationaux d’influence.

Si l’on parle concurrence, et en mettant de côté des pays qui peuvent avoir une bonne image internationale comme la Suisse ou l’Australie mais ne pèsent guère sur les affaires du monde, on pense immédiatement à la Chine. Qu’il s’agisse de la prolifération des instituts Confucius, de l’accueil d’étudiants étrangers, de l’engagement économique en Afrique, d’opérations de communication spectaculaires comme le thème des Routes de la Soie, de l’image globale de ses performance, la Chine progresse dans l’opinion hors frontière et développe une diplomatie efficace. L’autre grande puissance qui entend développer son soft power (miagkaïa sifa dans sa langue) est la Russie, même si l’idée même que Moscou puisse faire quoi que ce soit de doux semble hérisser beaucoup de commentateurs.

L’influence russe est largement idéologique ; elle passe, en synergie avec sa diplomatie, par l’affirmation d’un pôle « illibéral », contre-modèle à la mondialisation à l’occidentale. Son message préconise les valeurs traditionnelles, les identités et souverainetés ; il prône une alternative multilatérale (on aurait dit autrefois impérialistes) au modèle occidental, atlantiste, unipolaire. L’influence russe se manifeste largement par les médias et les réseaux, réalisant ainsi une performance assez paradoxale dans le domaine de la public diplomacy et du cyberpower où l’Amérique était censée être imbattable. La Russie est en effet présente à travers des médias internationaux (RT qui vient de lancer une chaîne francophone, Spoutnik, etc.) et sur le Web 2.0. D’où un contre-discours accusant la Russie, ses pompes, ses œuvres et sa disinformatsya, d’être derrière les mouvements populistes et à l’origine de la diffusion des fake news, d’asphyxier les médias 2.0 avec des armées de trolls (pour la propagande) et de hackers (pour saboter, voler des données confidentielles et éventuellement les publier comme dans le cas des mail du parti démocrate américain), d’avoir des agents et des réseaux politiques et intellectuels partout, de fausser les élections, ... Ces accusations de subversion, souvent plus violentes que ce que l’on disait pendant la guerre froide de l’influence occulte des agents bolchevik, se ramènent à l’idée d’une sorte de gigantesque sabotage. Poutine tenterait en somme de provoquer le chaos politique et, plutôt que d’attirer en faveur de son modèle idéologique, de saboter les démocraties (on ne dit plus le monde libre) par le chaos électoral, idéologique et politique. Cette influence « alternative » destinée à casser le monopole médiatique et idéologique des sociétés « ouvertes » est donc présentée comme purement négative pour ne pas dire nihiliste. D’où apparition d’un néologisme sharp power, qui désignerait ce pouvoir « aigu » de la Chine et de la Russie ; elles chercheraient à nous blesser : moins à persuader de l’excellence de leurs régimes autoritaires qu’à affaiblir l’adversaire occidental. De The Economist qui dénonce en couverture le sharp power chinois, à Foreign Affairs qui soupçonne Moscou de favoriser toutes les tendances antidémocratiques qui peuvent affaiblir l’Otan, l’UE ou les USA. Ce serait donc une nouvelle façon de désigner une guerre subversive de l’information et même Joseph Nye, l’homme qui a lancé les notions de soft et smart power, se joint au concert contre ces opérations occultes. Profitant de l’asymétrie des forces et de nos faiblesses (donc de la liberté d’informer occidentale, du libéralisme et du pluralisme, comme de notre manque de pugnacité idéologique), deux États seraient donc en train de nous manipuler et de nous diviser.

Le concept-valise de sharp power ne traduit pas seulement le retour d’une rhétorique de guerre froide (les agents de l’étranger s’en prennent à nos valeurs et diffusent de fausses informations subversives), il est la traduit en termes de causalité diabolique (l’action des méchants pervertissant le meilleur des mondes possibles) des faiblesses de l’idéologie. Et la plus grave d’entre elles : être incapable de penser que l’on s’oppose à elle autrement que par méchanceté ou par naïveté.

Avondland en Rijksgedachte

reichskrone800.jpg

Avondland en Rijksgedachte

door Jonathan Van Tongeren

Ex: https://www.novini.nl

Er wordt veel gesproken over Europa of het Avondland. Maar wat is Europa? Velen hebben al gewezen op de betekenis van het Romeinse recht en het Griekse denken en sommigen noemen de Europese cultuur daarom zelfs excentrisch. Zij zien echter iets cruciaals over het hoofd. Kenmerkend voor het Avondland is de spanning tussen universaliteit en particulariteit. Dit laat zich het beste illustreren aan de hand van de Rijksgedachte.

Enerzijds is Europa voor een klein continent zeer rijk aan volken en naties, kent het een grote diversiteit aan regionale culturen en levenswijzen, anderzijds leeft nergens het universele denken sterker dan in Europa. Dat universele denken heeft bijvoorbeeld betrekking op het denken in termen van Europa of Avonland; ondanks de niet geringe culturele onderscheiden tussen de volken en regio’s van Europa, bestaat er toch een besef dat de Europeanen iets gemeen hebben, in zekere zin bij elkaar horen. Verder heeft het universele denken ook betrekking op de hele mensheid. Nergens wordt er zo sterk in termen van de gehele mensheid gedacht als in de Europese cultuurkring.

Aanvankelijk was Europa vooral een term die betrekking had op de klassieke beschaving ten westen van de oostkust van de Middellandse Zee. Het Romeinse Rijk breidde zich echter uit naar Gallië, Iberië en Germanië en incorporeerde Galliërs, Germanen en anderen in het Romeinse Rijk, ging ze op enig moment als Romeinse burgers beschouwen. Zo werden deze Germanen en anderen vanuit hun particulariteit opgenomen in de universaliteit van de Pax Romana. Hier werd een belangrijk fundament gelegd voor wat Europa later zou worden.

In de nadagen van het Romeinse Rijk organiseerde zich buiten het bereik van Rome, aan de andere kant van Rijn en Donau een confederatie van Germaanse stammen. Zij noemden zich de Franken, dat wil zeggen de vrijen, vrij van Romeinse overheersing. Deze Franken zouden later net als de Alemannen en anderen het Romeinse Rijk binnenvallen, zich vermengen met de lokale Gallo-Romeinse bevolking en er eigen koninkrijken vormen.

Nog later zou echter juist een Frankische koning de draad van het gevallen West-Romeinse Rijk weer opnemen: Karel de Grote. Dit is het eerste rijk, hier begint de Rijksgedachte. Het Rijk van Karel de Grote stond natuurlijk niet alleen in de universele traditie van het Romeinse Rijk, de Franken namen ook hun particulariteit mee. Hier zien we de typische spanning die kenmerkend is voor Europa. De Franken waren de dragende natie van het nieuwe Rijk, maar voor andere volken was zeer beslist plaats daarbinnen.

Zo hebben we gezien hoe het Romeinse en het Germaanse een rol speelde in de totstandkoming van het Europese. Ook het christendom speelde echter een belangrijke rol, het faciliteerde het samengaan van het Romeinse universele en het Germaanse particuliere. Het christendom kon de samenvloeiing van het Romeinse en het Germaanse faciliteren, doordat het zelf al de spanning tussen het universele en het particuliere in zich draagt. Dit zien we bijvoorbeeld als de apostel Paulus vanuit Klein-Azië naar Europa is gekomen en op de Areopagus in Athene met de mensen spreekt. We lezen hierover in Handelingen 17:15-34. In vers 26 zegt de apostel dan: “Hij [God] heeft uit één enkele [mens]het gehele menselijke geslacht gemaakt om op de ganse oppervlakte van de aarde te wonen en Hij heeft de hun toegemeten tijden en de grenzen van hun woonplaatsen bepaald.” Enerzijds is de hele mensheid dus verwant, anderzijds wil God dat de mensen zich verspreiden op de aarde en volken zich ergens vestigen om eigen particuliere tradities vormen.

HRRDN-Tshirt.jpg

We zien in de geschiedenis ook terug dat dit denken heeft postgevat bij de gekerstende Germanen. Zonder Clovis die zich liet dopen, was er geen Karel de Grote geweest die bij Byzantium erkenning zocht van zijn rijk als opvolger van het West-Romeinse Rijk. Waar het Romeinse Rijk nog uitging van het opnemen van Galliërs en Germanen in het Romeinse Rijk door assimilatie, is deze neiging nauwelijks  aanwezig in het Rijk van Karel de Grote. Waar Rome zijn particulariteit expandeerde tot universele proporties, neemt de universaliteit van het Frankische Rijk andere particulariteiten in zich op zonder die op te heffen.

De Rijksgedachte leeft later voort in het Heilige Roomse Rijk der Duitse Natie. De Duitse natie is daarin dragend, maar andere naties hebben een plaats binnen het rijk dat zich uitstrekt naar Bohemen en Italië. Nog later zien we nog het meeste van de Rijksgedachte terug in de Oostenrijks-Hongaarse Dubbelmonarchie. Dat rijk wordt na de Eerste Wereldoorlog echter onder het mom van Wilsons idee van nationale zelfbeschikking aan stukken gereten. Deze schending van de Rijksgedachte zal grote gevolgen hebben voor Europa. “Dat is nu eenmaal”, zoals Schiller dicht, “de vloek van de euvele daad, dat ze, zich voortplantend, steeds nieuw kwaad baart.”

Hieruit komt dan ook de geperverteerde Rijksgedachte van een door de afloop van de Eerste Wereldoorlog gefrustreerde Oostenrijkse korporaal in Duitse dienst voort. Zijn zogenaamde Derde Rijk heeft niets uit te staan met de oude Rijksgedachte, het gaat hem om Lebensraum voor de Duitse natie en andere volken moeten daarvoor wijken of zelfs uitgeroeid worden. Om deze demonische pervertering van de Rijksgedachte uit te bannen moest alles uit de kast getrokken worden.

Maar na het uitbannen van deze geest, is Europa niet teruggekeerd naar de Rijksgedachte. Zo zitten we nu met een ten diepste on-Europese ‘ever closer union’. De vraag is of een terugkeer naar de Rijksgedachte om die onder de nieuwe omstandigheden opnieuw vorm te geven nog mogelijk is. Een appreciatie van het Europese erfgoed lijkt daarvoor niet toereikend. De Britse Conservatieve politicus, wijlen sir Fred Catherwood bracht het treffend onder woorden: “We have swept our European house clean of fascism and of communism. We now have democracy and  freedom of speech from the Atlantic to the Urals. But we also now have a Europe emptier than before of the Christian faith. In the words of Christ’s parable, Europe is a house swept clean, ready for seven devils worse than the first to come in.”

Les sociétés développées sont-elles condamnées à disparaître?

city_of_london_0.jpg

Les sociétés développées sont-elles condamnées à disparaître?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Pour aborder sérieusement cette question, il faut en préciser les termes.

Par sociétés développées, nous entendrons: les sociétés ayant à peu près maitrisé ce que l'on nomme le progrès scientifique et technique. Les Etats-Unis en font partie ainsi qu'une grande partie des pays européens. Des parts grandissantes de la Russie et de la Chine s'y ajoutent dorénavant.

Par disparaître, nous entendrons: subir des dislocations de plus en plus rapides, avec la multiplication des guerres et des conflits armés, la destruction des structures étatiques et administratives, ainsi que du cadre légal qu'elles imposent, la généralisation des luttes mortifères pour les ressources entre groupes sociaux appauvris.

Par condamnées, enfin, nous désignerons l'action de mécanismes destructifs s'imposant inexorablement, quels que soient les efforts de certains pour en prendre conscience et les combattre.

Bien que les conditions de cette disparition seront très différentes de celles ayant provoqué ou provoquant la disparition des espèces animales, les résultats en seraient très voisins.

Or aujourd'hui la question suscite de plus en plus l'intérêt des chercheurs en sciences politiques et sociales. Ils constatent, comme d'ailleurs les plus avertis d'entre nous, que les sciences et techniques se développent à un rythme accéléré, que le nombre de ceux qui en bénéficient ne cesse de s'accroitre, mais qu'en même temps les inégalités entre le 5% des dominants et les 95% des dominés ne cessent d'augmenter. Ils constatent aussi que non seulement les guerres et conflits ne diminuent pas, mais que la perspective d'une guerre nucléaire mondiale qui provoquerait la disparition de toute l'humanité est de plus en plus évoquée sérieusement.

Ils constatent aussi que si un nombre très minoritaire de citoyens plus ou moins conscients du phénomène voudraient voir les décideurs de toutes sortes se décider à inverser la course à la catastrophe, la grande majorité de ceux ayant le pouvoir de le faire font tout au contraire pour accélérer cette course. Les dominants se donnent comme argument qu'ils échapperont, si catastrophe il y a, aux effets destructeurs de celle-ci, et que de toute façon ces effets se produiront dans un lointain futur.

Mais leur vraie motivation, qu'ils ne peuvent évidemment pas avouer, est qu'ils ne veulent pas renoncer à des processus dont ils tirent des avantages personnels immédiats. Il n'y a d'ailleurs pas que les riches pour raisonner de la sorte. Quel utilisateur d'automobile y renoncerait pour les transports en commun ou concernant les jeunes, pour la bicyclette, tout en constatant la rapide dégradation de la vie urbaine résultant de l'abus de l'automobile individuelle.

Mécanismes inconscients d'auto-destruction

Or, pour certains de ces chercheurs, il existerait dans les sociétés humaines un grand nombre d'individus, qu'ils soient ou non décideurs, incapables de maitriser leurs instincts immédiats, même s'ils prennent conscience de leur dangerosité. Bien pire, ils seraient incapables d'avoir une forme de pensée à long terme leur permettant de se projeter dans le futur. Toujours, chez eux, la pression de l'immédiat oblitérerait leurs possibilités d'abstraction et leurs capacités prévisionnelles .

Nous ne développerons pas ici les aspects de ces nouvelles recherches. Un article du NewScientist daté du 20/01/2018, p.29, intitulé The Writing on the Wall, en donne un aperçu 1) . Disons seulement ici que ceux qui ont toujours voulu se battre pour des changements sociaux se sont depuis longtemps insurgés contre des recherches entendant démontrer scientifiquement que ces changements sont impossibles.

Cependant aujourd'hui il faut se demander sérieusement, si possible scientifiquement, pourquoi les études elles-mêmes scientifiques dénonçant l'accroissement monstrueux des inégalités entre les « have » et les « have not » sont reçues avec une telle indifférence, y compris par les victimes de ces inégalités. Il en est de même des prévisions des chercheurs dénonçant les effets des modifications climatiques et de la disparition des espèces, sans qu'aucun gouvernement n'ait encore pris le moindre début de mesure destinée à en limiter les effets.

Quant à la course générale au réarmement, dont les Etats-Unis ont toujours tenu la tête, pourquoi les société développées restent-elles toujours incapables de la contrôler, même si des prévisions de plus en plus insistantes dénoncent la guerre nucléaire mondiale qui, si rien n'est fait, en résultera inévitablement dès les prochaines années ?

  1. https://www.newscientist.com/article/mg23731610-300-end-o...

     

00:47 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : philosophie, sociologie, écologie, développement | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Presseschau Februar 2018

KLfeb8-5.Jpeg

Presseschau

Februar 2018

 

AUßENPOLITISCHES

 

Das Weltwirtschaftsforum in Davos: Wer bestimmt die globale Agenda?

https://www.youtube.com/watch?v=iuJsEufXP-4

 

Weltwirtschaftsforum in Davos

George Soros wirft CSU Rechtsruck vor

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/george-...

 

Deutschland geht leer aus: Was geschieht mit den 73 Sitzen Großbritanniens in der EU?

http://www.epochtimes.de/politik/europa/deutschland-geht-...

 

Reaktion auf Schulz-Kritik

Orbán: „Ihr wolltet die Migranten, wir nicht!“

https://jungefreiheit.de/politik/ausland/2018/orban-ihr-w...

 

Brutaler Sieg eines scheinbar Sanftmütigen

Sebastian Kurz bei Maischberger: Der Tag, an dem das Alter sichtbar wurde

https://www.tichyseinblick.de/feuilleton/medien/sebastian...

 

Die halbe "Ente" aus Finnland

Was für ein Grundeinkommen spricht

https://www.n-tv.de/wirtschaft/Was-fuer-ein-Grundeinkomme...

 

Wie läuft's in Finnland?

560 Euro monatlich fürs Nichtstun

https://www.n-tv.de/wirtschaft/560-Euro-monatlich-fuers-N...

 

Massenausweisung

Schweden plant Abschiebung von Zehntausenden Flüchtlingen

http://www.spiegel.de/politik/ausland/fluechtlinge-schwed...

 

„Beleidigung“

Bulgariens Staatschef fühlt sich von Merkel übergangen

https://www.welt.de/politik/ausland/article172813056/Ange...

 

Insel versinkt im Dreck

Müllgesetz für Mallorca: Jetzt geht es Plastiktellern und Kaffeekapseln an den Kragen

https://www.focus.de/reisen/reise-news/insel-versinkt-im-...

 

„Fire and Fury“

Bannon verläßt Breitbart

https://jungefreiheit.de/politik/ausland/2018/bannon-verl...

 

Bann gegen Bannon

https://sezession.de/58102/58102

 

(Manipulativer "Spiegel")

USA

Debatte um Polizeigewalt

Weiße Täter, schwarze Opfer?

von Lukas Mihr

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/weisse-ta...

 

Papst Franziskus in Chile: "Würde ist ansteckend"

http://www.dw.com/de/papst-franziskus-in-chile-w%C3%BCrde...

 

Vor Papstbesuch: Angriffe auf Kirchen in Chile

http://www.dw.com/de/vor-papstbesuch-angriffe-auf-kirchen...

 

"Operation Olivenzweig"

Machtpolitik auf syrischem Flickenteppich

Türkische Truppen gehen mit syrischen Verbündeten militärisch gegen die kurdischen Volksschutzeinheiten (YPG) vor. Russlands Präsident Putin lässt seinen türkischen Kollegen Erdogan gewähren. Die USA stehen ihren Verbündeten nicht bei.

https://www.n-tv.de/politik/Machtpolitik-auf-syrischem-Fl...

 

Flüchtlingspolitik

Marshallplan für Syrien

von Dieter Stein

https://jungefreiheit.de/debatte/streiflicht/2018/marshal...

 

Wieso Nordkoreas Diktator von einem Berg abstammt

Kein Volk der Welt glaubt, dass sein Staatsoberhaupt von einem Berg abstammt. Ausser die Nordkoreaner. Die Macht von Kim Jong Un beruht auf einem kuriosen Führermythos - und einer Berglandschaft.

https://nzzas.nzz.ch/hintergrund/im-hoehenrausch-nordkore...

https://www.welt.de/politik/ausland/article124520518/Kim-...

 

KLfeb8-4.jpg

INNENPOLITISCHES / GESELLSCHAFT / VERGANGENHEITSPOLITIK

 

Migration

Es muss erst noch schlimmer kommen, bevor es besser wird

Von Michael Stürmer

https://www.welt.de/debatte/kommentare/article172916494/F...

 

(Geld fließt in die Asylrücklage)

Bund verzeichnet offenbar Überschuss von 3,7 Milliarden Euro

https://www.finanzen.net/nachricht/aktien/ueber-den-erwar...

 

Steinmeier will jetzt auch geistiger Brandstifter sein

http://www.achgut.com/artikel/steinmeier_will_jetzt_auch_...

 

Frauen in Chefetagen

Barley droht Vorständen mit Regulierungen

https://jungefreiheit.de/wirtschaft/2018/barley-droht-vor...

 

Bremens Wirtschaft klagt an

Bremer Politik schreckt Arbeitnehmer mit Kindern ab

von Bastian Behrens

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/bremer-po...

 

Paragraf 103 StGB gestrichen

Majestätsbeleidigung ist in Deutschland Geschichte

http://www.spiegel.de/panorama/gesellschaft/majestaetsbel...

 

Heiko Maas verteidigt NetzDG gegen Kritik

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/heiko-m...

 

Die AfD und das Netzgesetz

Gelungene Inszenierung

https://www.ovb-online.de/politik/gelungene-inszenierung-...

 

Eigener Tweet verschwunden 

Lösch-Gesetz wird für Maas zum Bumerang

http://www.t-online.de/nachrichten/deutschland/id_8300963...

 

Heiko Maas und das NetzDG

Der Zensurbesen schlägt zurück

von Felix Krautkrämer

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/zensurbes...

 

Netzwerkdurchsetzungsgesetz

Der Unmut wächst

von Dieter Stein

https://jungefreiheit.de/debatte/streiflicht/2018/der-unm...

 

Nach Kritik von Amtskollegen „Völlig willkürlich“ - Palmer wehrt sich gegen Rassismus-Vorwürfe

https://www.welt.de/politik/deutschland/article172472965/...

 

Nach Kandel: Nichts wird vergessen

https://sezession.de/57524/nach-kandel:-nichts-wird-verge...

 

Sohn von Boris Becker

Noah Becker klagt über Rassismus

https://www.focus.de/kultur/musik/sohn-von-boris-becker-n...

 

Maier-Tweet

„Halbneger“-Aussage sorgt für Streit in AfD

von Lukas Steinwandter

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/halbneg...

 

Maier-Tweet

Zweifel an der Zurechnungsfähigkeit

von Dieter Stein

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/zweifel-a...

 

Von Halbnegern und Meinungsfreiheit für Vollidioten

http://www.achgut.com/artikel/von_halbnegern_und__meinung...

 

Anmerkungen zu einem aktuellen Konflikt

„Halbneger“ ist kein Wort für Patrioten

http://www.pi-news.net/2018/01/halbneger-ist-kein-wort-fu...

 

(Til Schweiger muss natürlich auch noch einen in seinem Stil drauflegen…)

Unterstützung für Noah Becker

Darum nennt Til Schweiger einen AfD-Politiker „widerlicher Drecksack“

https://www.bz-berlin.de/leute/darum-nennt-til-schweiger-...

 

Jens Meier und Noah Becker

von Johannes Konstantin Poensgen

https://sezession.de/57523/jens-meier-und-noah-becker

 

„Halbneger“-Tweet

Was Jens Maier von Becker & Becker lernen kann

von Thorsten Hinz

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/was-jens-...

 

Parteiausschlußverfahren

Gedeon und die Grenzen der AfD

von Dieter Stein

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/gedeon-un...

 

AfD-Berlin kritisiert Demokratiedefizit an Humboldt-Uni

http://www.pi-news.net/2018/01/afd-berlin-kritisiert-demo...

 

Bundestag

Deutscher Kulturrat: „Ausschußvorsitz darf nicht an AfD gehen“

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/deutsch...

 

Die Angst der Kulturmarxisten vor der Aufklärung und der AfD

von Alice Weidel

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/die-angst...

 

Élysée-Vertrag: AfD boykottiert Feierlichkeiten

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/elysee-...

 

Andreas Kalbitz im Gespräch – Die soziale Frage und die AfD

https://sezession.de/58155/andreas-kalbitz-im-gespraech-d...

 

FAZ: „Hurra, wir haben die AfD unter Kontrolle“

http://www.pi-news.net/2018/01/faz-hurra-wir-haben-die-af...

 

Eklat um Björn Neumann wegen ehem. NPD Mitgliedschaft auf dem 8. AfD-Bundesparteitag (02.12.2017)

https://www.youtube.com/watch?v=bEMAsxwe05c

 

Landtag 

Landtag: Rasches Ende der staatlichen Finanzierung der NPD

http://www.t-online.de/nachrichten/id_83110992/landtag-ra...

 

(Kommentar dazu)

Parteienfinanzierung

Im Geiste undemokratisch

von Moritz Schwarz

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/im-geiste...

 

Wer hat uns verraten?

Der Doppelbetrug der Sozialdemokraten

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/der-doppe...

 

SPD

Wirklichkeitsferne

Abschied vom Volk

von Nicolaus Fest

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/abschied-...

 

Bundesdelegiertenkonferenz der Grünen

Neue Gesichter, alter Größenwahn

von Michael Paulwitz

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/neue-gesi...

 

Öffentliche Verkehrsbetriebe

Richterbund: Schwarzfahren soll keine Straftat mehr sein

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/richter...

 

Ersatzfreiheitsstrafe

Schwarzfahrer im Knast kosten den Staat Millionen

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/schwarz...

 

Hessens Behörden haben 2017 erneut mehr Kleine Waffenscheine ausgestellt

http://www.echo-online.de/politik/hessen/hessens-behoerde...

 

Einsatz zur Ortung von Tatverdächtigen: Behörden schicken immer mehr "stille SMS" Handy-Überwachung nimmt zu

https://www.ovb-online.de/handy-ueberwachung-nimmt-955604...

 

Bundesnachrichtendienst

Deutschland lässt zu, dass sein Geheimdienst unkontrolliert schaltet und waltet

http://www.sueddeutsche.de/politik/bundesnachrichtendiens...

 

Der geheimnisvolle Neubau des Bundesnachrichtendienstes

http://www.tagesspiegel.de/berlin/buchvorstellung-ueber-a...

 

Verbrennen von Israel-Flaggen verbieten

CDU-Fraktion im Abgeordnetenhaus stellt Antrag. Zentralrat der Juden begrüßt die Initiative

http://www.juedische-allgemeine.de/article/view/id/30569

 

Niederschlesien erhalten - Historisches nicht einfach streichen!

http://www.afdsachsen.de/presse/pressemitteilungen/nieder...

 

Greifswald

Ernst-Moritz-Arndt-Universität benennt sich um

https://jungefreiheit.de/kultur/2018/ernst-moritz-arndt-u...

 

Rudolf Gramlich gehörte der Waffen-SS an

Eintracht lässt NS-Zeit ihres Ehrenpräsidenten untersuchen

https://www.op-online.de/sport/eintracht-frankfurt/eintra...

 

Oskar Gröning

Ex-SS-Mann reicht Gnadengesuch ein

http://www.tagesspiegel.de/politik/oskar-groening-ex-ss-m...

 

Ex-SS-Mann Gröning: Gnadengesuch abgelehnt

https://www.ndr.de/nachrichten/niedersachsen/lueneburg_he...

 

KLfeb8-3.jpg

LINKE / KAMPF GEGEN RECHTS / ANTIFASCHISMUS/ RECHTE

 

Friktionen in der Linkspartei

Die Dialektik des Sozialen

von Werner Patzelt

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/die-diale...

 

Karheinz Weißmann: Kulturbruch ’68 – eine Rezension

Von Werner Olles

https://sezession.de/58137/karheinz-weissmann-kulturbruch...

 

Ellen Kositza: "Nebenbei: knallrechts"

Ellen Kositza lebt auf einem Rittergut, hat sieben Kinder und gilt als Frontfrau der Neuen Rechten. Sieht so ein nationalistischer Feminismus aus?

http://www.zeit.de/2018/05/ellen-kositza-neue-rechte-femi...

 

Kampagne gegen IB-Chef Sellner

„Wer nicht ihrer Ideologie entspricht, soll ruiniert werden“

von Lukas Steinwandter

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/wer-nic...

 

AfD-Anzeige gegen Eintracht-Präsident Fischer

http://www.faz.net/aktuell/sport/fussball/bundesliga/afd-...

 

JF-TV

Zwietracht Frankfurt – Die Doppelmoral des Peter Fischer

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/zwietra...

 

Eintracht-Frankfurt-Präsident Peter Fischer legt gegen AfD nach

https://www.gmx.net/magazine/sport/fussball/bundesliga/ei...

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/frankfu...

 

Politisierung des Sports

HSV geht auf Distanz zu Anti-AfD-Antrag

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/hsv-geh...

 

(Linke Demonstration gegen die "Demo für alle")

„Queer, pervers und arbeitsscheu“

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/queer-p...

 

"Recht auf faires Asylverfahren" Hunderte demonstrieren in Darmstadt gegen Abschiebegefängnis

In Darmstadt haben sich hunderte Menschen gegen die Einrichtung eines Abschiebegefängnisses gewandt. Mit Trillerpfeifen und Plakaten forderten sie faire Verfahren für alle Asylbeweber.

http://www.hessenschau.de/gesellschaft/hunderte-demonstri...

 

Düsseldorf

Proteste gegen Abschiebung nach Afghanistan

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/protest...

 

Leipziger Buchmesse

Skipis: Rechte Verlage sind keine Opfer, sondern Täter

https://jungefreiheit.de/kultur/literatur/2018/skipis-rec...

 

#verlagegegenrechts

Literarischer Zwergenaufstand

von Boris T. Kaiser

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/literaris...

 

Konzerte sollen verboten werden

Frei.Wild: Grüne sind beim Zündeln immer in erster Reihe

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/frei-wi...

 

Martin Schulz (SPD) beschimpft während Pressekonferenz Zwischenrufer als "Nazi" (15.01.2018)

https://www.youtube.com/watch?time_continue=39&v=5uEg...

 

Kritik an Facebook-Eintrag

Empörung über KZ-Vergleich von Jusos

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/empoeru...

 

Ermittlungsverfahren

„Bullenhunde“: Linken-Politikerin pöbelt gegen Polizisten

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/bullenh...

 

65 Prozent mehr "Reichsbürger" – 1000 besitzen legal Waffen

https://www.morgenpost.de/politik/article213229301/65-Pro...

 

SPD warnt vor Reichsbürger

Die SPD hat einen neuen Feind ausgemacht, der das gesellschaftliche Leben bedroht: Bundesvize Ralf Stegner warnt vor Unterschätzung der „Reichsbürger“-Szene.

https://www.mmnews.de/politik/46209-spd-warnt-vor-reichsb...

 

„Aufstehen gegen Rassismus“

AfD: Keine öffentlichen Gelder für Feierabendterroristen

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/afd-kei...

 

(Geduldeter Linksextremismus in Offenbach)

Polizei: Aktion in Zollamt-Studios unbedenklich

Tätowieren für die Antifa

https://www.op-online.de/offenbach/taetowieren-antifa-955...

https://de-de.facebook.com/events/1552738274761305/

 

G20-Ausschreitungen

Linken-Politikerin attackiert „Rote Flora“-Besetzer

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/linken-...

 

Kosten in Millionenhöhe

Polizei räumt besetzte Schule in Berlin-Kreuzberg

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/polizei...

 

KLfeb8-2.jpg

EINWANDERUNG / MULTIKULTURELLE GESELLSCHAFT

 

PRO ASYL – Migrationsnetzwerk und Meinungsmacht

https://fassadenkratzer.wordpress.com/2016/06/06/pro-asyl...

 

Türkische Gemeinde: Deutschland neu denken

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/tuerkis...

 

Europa Reform des Asylrechts der Gemeinschaft besorgt einige Mitgliedstaaten / Bis zu 1,4 Millionen zusätzliche Einwanderer?

Nachzugspläne alarmieren Deutschland

https://www.morgenweb.de/mannheimer-morgen_artikel,-polit...

 

Bundesagentur für Arbeit

Mittlerweile ist fast jeder sechste Hartz-IV-Empfänger ein Flüchtling

https://www.welt.de/politik/deutschland/article172660377/...

 

Die Flüchtlingskosten sind ein deutsches Tabuthema

https://www.nzz.ch/meinung/kommentare/die-fluechtlingskos...

 

(Na dann ist ja alles wieder gut…)

GroKo-Sondierungen

Union und SPD erklären Flüchtlingskrise für beendet

https://www.welt.de/politik/deutschland/article172416497/...

 

(Na also… Nur, wer bezahlt es den Kassen?...)

Regierung soll „gute Situation nutzen“

Kassen: Flüchtlinge entlasten Krankenversicherung

https://www.op-online.de/wirtschaft/kassen-fluechtlinge-e...

 

Gesundheitsversorgung für Flüchtlinge

Die Mär von der Entlastung der Krankenkassen

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/die-maer-...

 

Christmette im Petersdom

Papst ruft zu Mitgefühl für Geflüchtete auf

http://www.spiegel.de/panorama/gesellschaft/papst-franzis...

 

Papst fordert zum Weltflüchtlingstag Überwindung von Ängsten

https://www.kirche-und-leben.de/artikel/papst-fordert-zum...

 

Papst Franziskus fordert offene Türen für Migranten

https://www.stern.de/panorama/papst-franziskus-fordert-of...

 

Essen

SPD-Politiker beklagt Moslemisierung ganzer Stadtteile

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/spd-pol...

 

Knapp die Hälfte der Klagen gegen Asylbescheide erfolgreich

https://www.welt.de/politik/deutschland/article172477957/...

 

Bayern

Gericht hängt Kreuz in Prozeß gegen Afghanen ab

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/gericht...

 

Merkels Erbe: Ein verunsichertes Land

https://www.youtube.com/watch?v=M55Tkb0V4nI

 

Werner J. Patzelt - "Europa für alle? Aspekte der neuen Völkerwanderung"

https://www.youtube.com/watch?v=t2YOyDPN4RQ

 

Udo di Fabio - "Europa für alle? Aspekte der neuen Völkerwanderung"

https://www.youtube.com/watch?v=nyO-3yj1CNA

 

Flüchtlingszahlen

Eine Hartz-IV-Stadt jährlich

von Michael Paulwitz

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/eine-hart...

 

(Abschiebung verunmöglicht; gleich arabisch übersetzt)

https://www.youtube.com/watch?v=nYC0rdmKo-A

 

SPD-Außenminister verbreitet wiederholt "türkische Wiederaufbaulüge"

Sigmar Gabriel: Türken haben Deutschland aufgebaut

http://www.pi-news.net/2018/01/sigmar-gabriel-tuerken-hab...

 

Die Sonntage immer den Künsten!

Von Michael Klonovsky

https://www.michael-klonovsky.de/acta-diurna/item/741-14-...

 

(Christian Pfeiffer)

Zuwandererkriminalität

Schuld ist die Gesellschaft

von Fabian Schmidt-Ahmad

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/schuld-is...

 

Interview

Aras Bacho: „Ich will nicht provozieren“

von Felix Krautkrämer

https://jungefreiheit.de/debatte/interview/2018/aras-bach...

 

Familiennachzug

500.000 Syrern könnten genau so viele Angehörige folgen

https://www.welt.de/politik/deutschland/article160844524/...

 

Behörde genehmigt Ausnahmen 

Zwei Syrer dürfen Zweitfrauen nach Deutschland holen

http://www.t-online.de/nachrichten/deutschland/gesellscha...

 

Düsseldorf

Islamisten bedrohen Bundespolizisten vor seiner Haustür

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/islamis...

 

Flüchtlingspolitik

Jeder Zweite klagt erfolgreich gegen negativen Asylbescheid

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/jeder-z...

 

Studie

Radikal-islamisch in der dritten Generation

von Boris T. Kaiser

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/radikal-i...

 

Besonders Schwarze betroffen

Antidiskriminierungsbeauftragte geißelt Alltagsrassismus

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/antidis...

 

Arbeitsagentur

Integration von Flüchtlingen dauert noch lange

http://www.hessenschau.de/wirtschaft/arbeitsagentur-integ...

 

Moslemische Kopfbedeckungen

Islamkurs-Debatte: Volkshochschule bietet Burkaanprobe an

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/islamku...

 

Forscher schlagen Alarm

Flüchtlinge bringen neue Form der Tuberkulose nach Europa

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/fluecht...

 

Es wurden Raubtiere unter Schafe gemischt und die Folgen werdet ihr spüren!

https://www.youtube.com/watch?v=YjT2NcvHdV8

 

KiKA-Sendung über junges Pärchen

Flüchtlingsliebe im Kinderfernsehen

von Lukas Steinwandter

https://jungefreiheit.de/kultur/medien/2018/fluechtlingsl...

 

Kinderkanal von ARD und ZDF betätigt sich als Kuppelsender mit "Flüchtlingen"

KiKA: Love-Story zwischem Moslem-Syrer und 16-jähriger Deutscher

http://www.pi-news.net/2018/01/kika-love-story-zwischem-m...

 

„Malvina, Diaa und die Liebe“

Flüchtlingsliebe im Kinderfernsehen: Unions-Politiker fordern Stopp von Doku

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/fluecht...

 

KiKA-Sendung

Hessischer Rundfunk verteidigt Doku über Flüchtlingsliebe

https://jungefreiheit.de/kultur/medien/2018/hessischer-ru...

 

Kritik an AfD

Grüne nehmen KiKA-Doku über Flüchtlingsliebe in Schutz

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/gruene-...

 

KiKA-Dokumentation

Flüchtlingsliebe: Sender weist Islamismus-Vorwürfe zurück

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/fluecht...

 

KiKA-Liebesdoku

Gemeingefährliche Vielfalts-Propaganda

von Michael Paulwitz

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/gemeingef...

 

KiKA und Kandel

https://sezession.de/57527/?komplettansicht=1

 

Frankfurt : Betonblöcke gegen Anschläge mit Lastwagen

http://www.faz.net/aktuell/rhein-main/betonbloecke-gegen-...

 

Debatte nach Mord in Kandel

Kinderärzte stemmen sich gegen Alterstests bei Flüchtlingen

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/kindera...

 

Darmstadt

Parallelen zu Kandel

16-Jähriger sticht Ex-Freundin nieder - Staatsanwaltschaft beantragt Altersüberprüfung

https://www.focus.de/panorama/welt/parallelen-zu-kandel-1...

 

Parallelen zum Fall Kandel

Altersprüfung bei Flüchtling nach Messerstichen auf 17-Jährige

https://www.welt.de/politik/deutschland/article172199090/...

 

#120db

Mein Name ist Mia

https://sezession.de/58169/mein-name-ist-mia

 

Angriff in Berlin

19-Jähriger versucht, 17-Jährige in Havel zu ertränken

https://www.welt.de/vermischtes/article171756964/Angriff-...

 

Studie zu Asylbewerber-Kriminalität

Und nun?

https://www.ovb-online.de/politik/nun-9497730.html

 

Gewaltkriminalität

Zahl der Messerattacken in Hessen gestiegen

http://www.hessenschau.de/panorama/zahl-der-messerattacke...

 

(Prügelopfer in Wien)

Edi Finger: So schlecht geht es ihm

http://www.oe24.at/oesterreich/chronik/wien/Edi-Finger-So...

 

Vier Fälle in einer Nacht

17 Jahre alter Afghane tritt Polizisten immer wieder gegen Kopf

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/17-jahr...

 

Polizisten krankenhausreif geprügelt

Regensburg: Foto zeigt Hauptverdächtigen auf Polizeiauto

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/regensb...

 

„Schweigespirale durchbrechen“

Weidel: Angriffe auf Einsatzkräfte sind „kulturelles Phänomen“

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/weidel-...

 

Hamburg

Barmbeker Messerstecher wollte als Märtyrer sterben

https://www.abendblatt.de/hamburg/article213088835/Prozes...

 

Kein heißes Pflaster

Spricht Serie von Gewalttaten für veränderte Sicherheitslage?

https://www.op-online.de/region/hanau/serie-gewalttaten-h...

 

Neun Jahre in Haft nach lebensgefährlichen Schüssen

Eskalation im Zockermilieu

https://www.op-online.de/offenbach/eskalation-zockermilie...

 

Nauen

Urteil im Prozess um Mord in Flüchtlingsheim - "Menschlich schwer nachvollziehbar, wie das geschehen konnte"

https://www.rbb24.de/politik/beitrag/2018/01/urteil-somal...

 

Gesicht aufgeschlitzt

Erneute Messerattacke in Cottbus – zwei Syrer festgenommen

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/erneute...

 

Erneut Konflikte zwischen Ausländern und Deutschen in Cottbus

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/erneut-...

 

Nach Messerangriffen

Cottbus wird keine weiteren Flüchtlinge aufnehmen

https://www.welt.de/politik/deutschland/article172640202/...

 

Prenzlau

18-jähriger Syrer wegen Bedrohung angezeigt

https://www.nordkurier.de/prenzlau/18-jaehriger-syrer-weg...

 

Nicht der erste Konflikt an Prenzlauer Schule

https://www.nordkurier.de/prenzlau/nicht-der-erste-konfli...

 

Suhl: Asylbewerber lassen Polizei nicht zur Ruhe kommen

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/suhl-as...

 

Gelsenkirchen

Wegen Wodka: Moslemische Sittenwächter bedrohen Supermärkte

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/wegen-w...

 

KLfeb8-1.jpg

KULTUR / UMWELT / ZEITGEIST / SONSTIGES

 

Leben im Denkmal

Alle wollen im Fachwerk wohnen, im Bauhaus lieber nicht

https://www.welt.de/finanzen/immobilien/article172210406/...

 

Initiative „Gegen die Zerstörung historischer Fassaden durch Wärmedämmung“

https://stadtbildberlin.wordpress.com/schwerpunktthema-en...

 

Bahnprojekt Stuttgart 21

Stuttgart – Massengrab

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/stuttgart...

 

Frankfurts Merkel-Poller sollen schöner werden

Junge Union mit Ideen, BFF hat natürlich die besseren

http://www.bff-frankfurt.de/artikel/index.php?id=1260

 

Gegenwartsbewältigung durch Realitätsverweigerung

http://www.achgut.com/artikel/gegenwartsbewaeltigung_durc...

 

Inflationsbedingt

ARD-Intendant fordert höhere Rundfunkgebühr

https://jungefreiheit.de/kultur/medien/2018/ard-intendant...

 

„Strategie der schlauen Schlange“

Papst Franziskus ruft zum Kampf gegen „Fake News“ auf

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/papst-f...

 

Umstrittenes Busen-Memory

Heute bei Kika: Brüste! Brüste! Brüste!

https://www.bz-berlin.de/kultur/fernsehen/heute-bei-kika-...

 

Fragwürdiger Online-Beitrag

Neuer Kika-Wirbel: Hier lernen Jungs, wie man Mädchen an die Wäsche geht

https://www.bz-berlin.de/panorama/kika-beitrag-bh-oeffnen...

 

Politische Korrektheit

Formel 1 verzichtet zukünftig auf „Grid-Girls“

https://jungefreiheit.de/kultur/gesellschaft/2018/formel-...

 

Eklat um WDR-Sendung: "Cool" - Pubertierendes Mädchen wird zum Tragen eines Kopftuchs animiert

https://deutsch.rt.com/inland/64099-wdr-sendung-fur-puber...

 

Veranstaltung mit Hermann-Hesse-Schülern

Kabarettist Malte Anders: „Ich muss nicht mehr lügen“

Obertshausen - Schwul, lesbisch, bi – soll das Schule machen? – Die „Partnerschaft für Demokratie im Kreis Offenbach“ und die Hermann-Hesse-Schule in Obertshausen sagen Ja und laden den Kabarettisten Malte Anders ein, mit Achtklässlern zu reden.

https://www.op-online.de/region/obertshausen/ich-muss-nic...

 

Frankreich plant Gesetz gegen sexistische Beleidigungen

https://jungefreiheit.de/politik/ausland/2018/frankreich-...

 

Amazon und Google erhalten Einblick auf private Kontodaten

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/amazon-...

 

Überwachung

Amazon: Datenabfrage der Behörden auf Rekordniveau

von Henning Lindhoff

https://jungefreiheit.de/wirtschaft/2018/amazon-datenabfr...

 

„Freiheit, lästig zu sein“

#MeToo-Debatte: Filmstar Deneuve verteidigt offenen Brief

https://jungefreiheit.de/politik/ausland/2018/metoo-debat...

 

("Antirassistische" Feministen)

„Boris Palmer, wir hassen dich!“

Wilde Mädchen

von Felix Krautkrämer

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/wilde-mae...

 

Berlin

Politische Korrektheit

Sexismus-Vorwurf: Liebesgedicht an Hochschule wird übermalt

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/liebesg...

 

Alice-Salomon-Hochschule

Poesie-Zensur – Wie eine Hochschule für Sozialarbeit versagt

https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2018/poesie-ze...

 

Das Drei-Klassen-Bildungssystem des Globalismus in Frankfurt

Privatschulen für Brexit-Kinder ausgebucht

http://www.bff-frankfurt.de/artikel/index.php?id=1262

 

Fiume kommt nicht wieder – Demographie und Chancen

von Martin Sellner

https://sezession.de/58149/fiume-kommt-nicht-wieder-demog...

 

„2.000 Jahre alte Hirtenmythologie“

Jusos blasen zum Kirchenkampf

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/jusos-b...

 

Frankreich-Polen

Posse um Papst-Denkmal

In einer französischen Kleinstadt soll das Kreuz von einem Denkmal für den 2005 verstorbenen Papst Johannes Paul II. verschwinden.

http://www.deutschlandfunk.de/frankreich-polen-posse-um-p...

 

Aufsehenerregende Aktion in der Domstadt

Identitäre zünden Bengalos auf Kölner Hohenzollernbrücke

http://www.pi-news.net/2018/01/identitaere-zuenden-bengal...

 

CSU

Dobrindt fordert konservative Revolution

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/dobrind...

 

(Zum Wiener Akademikerball)

Inländertaxi, Cucking und Quadrille: Wiener Akademikerball

https://sezession.de/58151/inlaendertaxi-cucking-und-quad...

 

Angebliches Islamverbot in Türkei

Medien verdrehen Aussage von Björn Höcke über Islam

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/medien-...

 

Hessen

Karnevalsrede

Innenminister provoziert mit Witz über Flüchtlinge

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/innenmi...

 

Rassismusvorwurf in Frankfurt

Ausländerbeirat fordert Namensänderung der „Mohren“-Apotheken

https://www.welt.de/vermischtes/article172872020/Rassismu...

 

„Mohren-Apotheke“ in Frankfurt entfernt Logo

https://jungefreiheit.de/politik/deutschland/2018/mohren-...

 

Amerikanische Baseball-Liga

Nach Rassismusvorwürfen: Cleveland Indians entfernen Logo

https://jungefreiheit.de/politik/ausland/2018/nach-rassis...

 

Foto zurückgezogen

Rassismus-Vorwürfe gegen H&M wegen „Affen“-Pullover-Werbung

https://www.welt.de/vermischtes/article172294655/Foto-zur...

 

(Der "Skandal" hat sich nicht nur für einen offenbar gelohnt)

Nach Rassismus-Skandal: H&M-Model bekommt Millionen-Deal von P. Diddy

https://www.gmx.net/magazine/unterhaltung/lifestyle/rassi...

 

Nach Rassismus-Vorwurf

Randale in südafrikanischen H&M-Filialen

https://www.br.de/nachrichten/randale-in-suedafrikanische...

 

Umstrittene H&M-Werbung

Das Empörende ist der Rassismus-Aufschrei

https://www.welt.de/vermischtes/article172302125/Umstritt...

 

Disney-Klassiker mit Will Smith

Weiße zu Arabern geschminkt: Rassismus-Vorwürfe gegen "Aladdin"-Neuverfilmung

https://www.stern.de/kultur/film/aladdin--disney-neuverfi...

 

Rassismus-Vorwürfe

Was für ein Affenzirkus!

Ein Journalist des "Kicker" bezeichnet Pierre-Emerick Aubameyangs Eskapaden als "Affenzirkus". Der BVB-Stürmer begibt sich auf Internetrecherche und fühlt sich rassistisch beleidigt – Aufregung allenthalben. Doch die Sache ist kompliziert.

http://www.rp-online.de/sport/fussball/borussia-dortmund/...

 

Rattenexperiment

(Calhoun 1962).

http://www.nulb.de/Calhoun.htm

 

L’Oréal wirbt mit Kopftuchmoslemin für Haarshampoo

http://www.pi-news.net/2018/01/loreal-wirbt-mit-kopftuchm...

 

Sieben Millionen sind zu wenig

Verkäufer bleibt auf Hitlers Mercedes sitzen

https://www.n-tv.de/auto/Verkaeufer-bleibt-auf-Hitlers-Me...

 

Darren Aronofskys „Mother!“ über die Zerstörung unserer kulturellen Identität

https://sezession.de/58136/darren-aronofskys-mother-ueber...

 

(Ängste vor der politischen Rechten in der Unterhaltungsliteratur und im Kino)

Wer hat Angst vor welchem Mann?

https://sezession.de/58101/wer-hat-angst-vor-welchem-mann

 

Das war's. Diesmal mit: Panik vor Büchern und unserem "Stoff"

https://sezession.de/57522/das-war's

 

Jelena Tschudinowa: „Die Moschee Notre-Dame“

https://sezession.de/58114/jelena-tschudinowa-die-moschee...

 

Buchtipp: "Tote weiße Männer lieben"

Streitschrift gegen Weißenfeindlichkeit

http://www.pi-news.net/2018/01/streitschrift-gegen-weisse...

jeudi, 01 février 2018

The Economist et la guerre mondiale

NWar-201031asd001.jpg

The Economist et la guerre mondiale

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Dans son édition papier du 27 janvier 2018 1) The Next War le journal financier britannique The Economist annonce une menace grandissante de guerre entre les grandes puissances “The Growing Threat of Great Power Conflict.”

TheE-NW93084.jpgEn éditorial, The Economist déclare que même si les guerres de ces 25 dernières années ont causé des millions de morts, une guerre entre Grandes Puissances n'était pas imaginable. Aujourd'hui du fait de changements à long terme dans les équilibres géopolitiques et parce que la domination militaire des Etats-Unis et de ses alliés est mise en défaut par la prolifération des nouvelles technologies, une troisième guerre mondiale est devenue plausible. Le monde, écrit-il, n'y est pas préparé.

D'ores et déjà, il prévoit l'explosion de conflits régionaux ou urbains meurtriers, notamment dans les quartiers misérables et surpeuplés des grandes villes. Le changement climatique, la croissance démographique, les conflits ethniques ou religieux, en seront les moteurs. Les carnages récents à Mossoul et Alep en sont la préfiguration.

Mais bien plus menaçant est le fait la Russie et la Chine soient désormais considérées par Washington comme des adversaires stratégiques. Ceci de proche en proche pourrait déboucher sur un holocauste nucléaire.

Or The Economist, organe représentatif du capitalisme anglo-américain dont le succès est lié à la domination américaine, loin d'utiliser ces mises en garde pour un nouvel appel à une mobilisation contre la guerre et aux négociations diplomatiques, évoque ces perspectives pour demander que le “hard power” c'est-à-dire l'armée américaine, soit utilisée partout dans le monde.

Cela seul permettra, selon lui, de sauvegarder la paix. Il prévient que si les classes dominantes russes et chinoises sont autorisées par l'Amérique à assurer leur domination dans leur propre pays, elles refuseront rapidement la domination américaine dans leurs sphères d'influence élargie, l'Asie orientale pour la Chine, l'Europe continentale et l'Asie centrale pour la Russie.

A la suite de cet éditorial, l'essentiel de The Next War est consacré à l'énumération des domaines où les Etats-Unis doivent réaffirmer leur pouvoir après « vingt ans de dérives stratégiques » L'ouvrage mentionne notamment de nouvelles armes nucléaires, ainsi que des armes conventionnelles rajeunies utilisant notamment l'Intelligence Artificielle et la robotique. Ni la Chine ni la Russie ne doivent être laissées libres de se doter de moyens comparables. Il ne mentionne pas le fait que les dépenses militaires américaines équivalent déjà à celles réunies des autres Etats

De plus, pour The Economist, les entreprises américaines de l'informatique et de l'Internet doivent être intégrées dans l'effort de réarmement américain. En particulier les GAFA doivent dorénavant, par une censure préalable, ne pas permettre aux oppositions à l'Amérique de s'exprimer librement, et moins encore de mener des cyber-guerres, comme la Russie, d'après Washington, l'a fait jusqu'ici sans opposition.

Observation

On notera que, dans tous les domaines où The Economist s'alarme d'un prétendu recul des Etats-Unis, le complexe militaro-industriel américain a déjà imposé au pays et au monde les différentes décisions que le journal estime nécessaires pour sauvegarder la domination américaine. Le dispositif nucléaire est en plein renforcement, les vecteurs comme les bombardiers stratégiques et les sous-marins en sont déployés dans le monde entier, y compris aux frontières de la Russie et de la Chine. Quant aux nouvelles technologies de l'informatique et de l'Internet, y compris l'Intelligence Artificlle avancée, tous les experts savent que les investissements américains visant à leur utilisation militaire dépassent largement ce que peuvent faire de leur côté la Russie et la Chine.

Ce qui manque encore aux Etats Unis et à leurs alliés, en premier lieu les Britanniques, est d'avoir convaincu leurs populations qu'elles doivent se préparer à une guerre mondiale inévitable. Or pour l'éviter, affirme The Economist, dans l'immédiat, elles doivent accepter de prendre en charge les coûts nécessaires à la domination militaire américaine. Ceci en admettant de fortes baisses de leurs niveaux de vie.

Ce dernier numéro de The Economist, manifestement, souhaite contribuer à une remobilisation des esprits. « Augmentons dramatiquement les moyens nécessaire au rétablissement de la domination américaine et la guerre nucléaire pourra peut-être être évitée ».

1) https://www.economist.com/na/printedition/2018-01-27
 

Een wereldorde gewrocht op wereldzeeën

meridien-trodesillas-terre.jpg

Een wereldorde gewrocht op wereldzeeën

door Jonathan Van Tongeren

Ex: http://www.novini.nl

In zijn boek Land en zee schetst de Duitse staatsrechtsgeleerde Carl Schmitt (1888-1985) de geopolitieke bronnen van het internationale recht en de Anglo-Amerikaanse wereldhegemonie, hij lokaliseert die in de overgang van de Britten van een eilandnatie naar een echte zeemacht.

In de eerste hoofdstukken van zijn boek schetst Schmitt de ontwikkelingen in de scheepvaart, de verkenning en de uiteindelijke beheersing van de zeeën. Hij gebruikt daar ettelijke hoofdstukken voor, waarmee hij ook het punt van de grote geleidelijkheid van deze ontwikkelingen overbrengt. Eerst was er wel zeevaart, maar waren er nog geen echte zeemachten, de zee begon als kustvaart en later beperkten handelsmachten als Genua en Venetië zich aanvankelijk tot binnenzeeën als de Middellandse Zee en de Zwarte Zee. Pas in de loop van de vijftiende eeuw gaat men de kust van Afrika verkennen, rondt men uiteindelijk de Kaap en trekken ontdekkingsreizigers als Vasco da Gama en Magellaan er op uit. En Columbus niet te vergeten.

schmitt.jpg.pagespeed.ic.Fn7rzaPS8K.jpgMaar het zijn protestanten in Noordwest-Europa die zich tot echte zeemachten ontwikkelen, doordat watergeuzen en piraten een primaire afhankelijkheid van de zee ontwikkelen. Het zullen uiteindelijk dan ook de Engelsen (en zij die als de Engelsen denken) zijn die de vrijgemaakte maritieme energieën beërven en het idee propageren dat de zee vrij is, dat de zee niemand toebehoort.Dat idee lijkt eerlijk genoeg, de zee is vrij dus van iedereen, niet waar? Maar als de open zee niemand toebehoort, geldt er uiteindelijk het recht van de sterkste. “De landoorlog heeft de tendens naar een open veldslag die beslissend is”, schrijft Schmitt. “In de zeeoorlog kan het natuurlijk ook tot een zeeslag komen, maar zijn kenmerkende middelen en methoden zijn beschieting en blokkade van vijandelijke kusten en confiscatie van vijandige en neutrale handelsschepen [..]. Het ligt in de aard van deze typerende middelen van de zeeoorlog, dat zij zich zowel tegen vechtenden als niet-vechtenden richten.”

En dan maakt Schmitt een cruciaal punt: “[S]inds de Britse inbezitname van de zee raakten de Engelsen en de volkeren die in de ban van Engelse ideeën staan, eraan gewend. De voorstelling dat een landrijk een wereldomspannende macht zou kunnen uitoefenen zou volgens hun wereldbeeld ongehoord en onverdraaglijk zijn.”

Het Britse eilandrijk groeide uit tot een wereldomspannende macht, doordat het voor de zee koos. “Nadat de scheiding van land en zee en de tweespalt der beide elementen eenmaal tot constitutie van de planeet was geworden” ontwikkelde men een hele manier van denken en een internationaal rechtssysteem “waarmee de mensen voor zichzelf de wijsheid en redelijkheid van deze situatie verklaarden, zonder het oerfeit daarvan in het oog te houden: de Britse keuze voor de zee en de tijdsgebondenheid daarvan.” Zodoende kunnen we ons geen ander mondiaal economisch systeem en geen ander internationaal recht meer voorstellen. Daaruit blijkt “dat de grote Leviathan ook macht over de geest en de ziel van de mens heeft”.

Land en zee is rijk aan waardevolle gedachten, maar tegelijk een zeer compact boek, zodat de lezer vooral de tijd moet nemen om de sterk geconcentreerde ideeën die het bevat op zich in te laten werken. Recent is er een Nederlandse vertaling verschenen bij Uitgeverij De Blauwe Tijger, die dit klassieke werk mooi uitgevoerd heeft in een tweetalige editie met op de rechterpagina’s de vertaling en links het originele Duits. Een kleinood voor iedereen die iets wil begrijpen van de wereld waarin wij leven!

N.a.v. Carl Schmitt, Land en zee. Een wereldhistorische beschouwing (Uitgeverij De Blauwe Tijger: Groningen, 2017), vertaling: Henry van Sanderburg, paperback met stofomslag.

Pourquoi l’écologie est nôtre. Ré-enchaîner Prométhée

Sommer_Oberhof_Thueringer_Wald_02_011c66225f.jpg

Pourquoi l’écologie est nôtre

Ré-enchaîner Prométhée

Partie I

par Thierry DUROLLE

Comme le soulignait très justement le philosophe italien Julius Evola (1), les mots n’échappent pas au processus total d’involution, ce qui résulte en une perte de sens, en un galvaudage et, pire, à une substitution de sens. Le terme de « païen » ne se soustrait donc pas à la dégradation de son sens originel, c’est-à-dire à celui de « paysan » (2).

Le paganisme peut susciter de nombreuse interrogations quant à sa pratique et quant aux différentes façon d’être païen. Étant donné que cette forme spirituelle ne possède pas de dogme, la porte reste ouverte à tout et n’importe quoi, notamment le néo-paganisme, démarche obsolète et souvent ridicule. Il convient de balayer d’un revers de main ces manifestations de « religiosité seconde ».

appel-aux-dieux-essais-sur-le-paganisme-dans-un-monde-oublie-de-dieu.jpgEnsuite, certains appliquent un verni (pseudo-)polythéiste à l’athéisme. Tel est le cas d’Alain de Benoist, notamment, à l’époque de son livre Comment peut-on être païen ? (3). Faisant fi de son athéisme, il faut tout de même saluer le « paganisme philosophique » professé dans cet ouvrage de qualité. En ce qui nous concerne, notre critique du livre d’Alain de Benoist demeure semblable à celle de l’auteur américain Collin Cleary (4) qui lui oppose un polythéisme théiste aux accents heideggériens.

La question du polythéisme, et de la manière d’être païen, nécessiterait un article à part entière, si ce n’est pas un ouvrage complet. Nous ne pouvons donner ici que quelques pistes avant d’approfondir notre sujet. Renouer avec les textes fondateurs de l’Europe pré-chrétienne est indispensable : L’Iliade et L’Odyssée d’Homère, La théogonie d’Hésiode, Les métamorphoses d’Ovide, les sagas nordiques et les textes du cycle arthurien. Quant aux écrivains et penseurs païens contemporains, impossible de tous les citer ici. Néanmoins, nous conseillons trois lectures aux personnes intéressées par ce sujet. Tout d’abord, le numéro 73 de la revue Terre & Peuple (5) dont le dossier central porte justement sur le paganisme. Puis L’Âme européenne. Réponses à Bernard-Henri Lévy (6) de Robert Dun (précurseur dans notre milieu du sujet central développé dans cet article) et, enfin, Histoire et tradition des Européens. 30 000 ans d’identité (7) de Dominique Venner. Ces titres devraient apporter, dans un premier temps, une lumière bienvenue sur ce thème fondamental.

pitie-pour-le-cosmos-bkhnes.jpgLe sujet que nous abordons constitue peut-être la racine principale de ce que l’on nomme paganisme : la relation de l’homme à sa terre, à la nature et au Kosmos; ces relations, ou plutôt interrelations, nous pourrions les réunir dans une seule expression, celle d’« écologie profonde » (ou « écologie intégrale »). Préoccupation majeure, l’écologie est malheureusement délaissée par de nombreuses personnes se réclamant de Droite au titre qu’elle serait de Gauche. Grave erreur ! La Gauche (extrême) a mis le grappin sur les questions environnementales, car la Droite radicale – sauf certains mouvements faisant exception comme feu le MAS ou, dans un registre plus « folklorique » dirons-nous, le Greenline Front – a abandonné ce thème qui fut le sien à l’origine. Heureusement vient de paraître aux éditions Akribeia un livre qui, nous espérons, remettra les pendules à l’heure, Piété pour le cosmos de l’Italien Giovanni Monastra et du Français Philippe Baillet.

Sans doute n’est-il pas nécessaire de présenter Philippe Baillet, illustre traducteur de Julius Evola, essayiste, auteur de nombreux articles (nous pensons notamment à la revue de tendance traditionaliste-révolutionnaire Totalité; saluons aussi son article écrit pour le dossier du numéro du magazine Terre & Peuple susnommé) et de plusieurs essais. Quant à Giovanni Monastra, il doit probablement être inconnu du public français. Son profil est très intéressant, car Monastra a une formation scientifique (il effectua des recherches dans les domaines de la neuropharmacologie, de l’immunopharmacologie) et se réclame également de la pensée traditionnelle, principalement d’Evola. Autant dire que nous avons affaire à un mélange explosif ! Le premier de nos auteurs, traduisant l’étude du second – et qui figure dans cet ouvrage – eut l’envie de contribuer, lui-aussi, à ce sujet essentiel qu’est l’écologie. Voici comment Piété pour le cosmos vit le jour.

GM-vita.jpgLa première partie de l’ouvrage s’intitule « Les racines révolutionnaires-conservatrices de la pensée écologique », elle est l’œuvre de Giovanni Monastra. Celui-ci débute son exposé par un constat évident, à savoir la césure entre l’homme et la nature, séparation qui s’est d’autant plus accéléré à cause de la révolution scientifique et de la révolution industrielle. Cet état dichotomique procède de la dégradation cyclique, la relation entre l’homme et la nature n’a pas toujours été ainsi comme le rappelle l’auteur. Les sociétés traditionnelles connurent une relation empathique et holistique de la nature. « La première modalité, dominante par le passé et qui renaît de nos jours, consiste en une approche empathique et holistique, donc une approche qui perçoit et “ sent ” la réalité vivante comme un Tout au sein duquel les différentes parties, du niveau microscopique aux macrosystèmes en passant par celui où nous nous situons, ont certes leur autonomie (et cela vaut en premier lieu pour l’homme, dont la liberté est hors de question), mais où cette autonomie ne revient pas à nier les interrelations profondes qui existent entre les parties. Tout cela s’accorde avec la conception de la nature comme “ puissance ” créatrice et sacrée (pour les cultures prémodernes), force unitaire ordonnée et complexe, gouvernée par un équilibre délicat qu’il ne faut pas enfreindre, mais au contraire respecter, si bien qu’il importe de ne pas dépasser certaines “ limites ” (p. 11.). »

Ces « limites » sont d’une importance capitale car elles garantissent l’équilibre naturel. Notre civilisation (devrions-nous pas l’orthographier Zivilisation ?), que l’auteur qualifie de « faustienne », ou « prométhéenne », avec son axiome indépassable du Progrès ne peut qu’enfreindre ces limites. Le respect scrupuleux de celles-ci et, par conséquent, la lutte contre le prométheisme caractérise normalement toute écologie (ante litteram) véritable. « Il est fermement établi que la conception “ traditionnelle ” du monde est porteuse d’éléments culturels qui impliquent l’« endiguement » de la poussée prométhéenne, donc qui tendent à conserver, en freinant certaines tendances à la domination incontrôlée et rapace de la nature, tendances latentes chez l’homme en tant que tel, hier non moins qu’aujourd’hui (p. 13). »

À cause de ces tendances prométhéennes, l’homme envisage différemment la nature qu’il se contentait jusqu’à présent de respecter, toujours dans le cadre holiste des sociétés traditionnelle. Dorénavant, la nature est vu d’un point de vue mécaniste, rationaliste et scientiste; l’homme sort de la nature, et « le monde devient un champ d’expérimentation illimité, les seules limites étant celles imposées par les moyens techniques (p. 15) ». Giovanni Monastra poursuit : le monde « est comparé à un gigantesque laboratoire, où il convient de réaliser, c’est-à-dire de satisfaire, tous les rêves de puissance, de bonheur et de bien-être de l’homme complètement absorbé et englouti dans son aveugle hédonisme consumériste (p. 15) ». Ce qu’il faut retenir, c’est que l’« on assiste au passage de la technique traditionnelle comme « imitation de la nature » à la technique moderne comme « subversion de la nature (p.15) ». La conséquence ? « La nature devient muette : elle se referme sur elle-même et ne nous permet pas de la connaître à fond et complètement. Elle nous devient étrangère (p.17). »

GM-port.jpgAvant d’évoquer plusieurs précurseurs de l’écologie, et d’autres défenseurs de la nature, Giovanni Monastra se devait de mentionner le rapport entre la Gauche et les mouvements de préservation de la nature de manière générale. De nos jours, les partis écologistes sont souvent synonyme de partis d’extrême gauche, à tel point qu’un politicien comme Jean-Marie Le Pen les qualifiait de « pastèques » puisque vert à l’extérieur et rouge à l’intérieur, cette couleur désignant, bien entendu, leur véritable couleur politique. Assimiler l’écologie et la Gauche est « une énorme tromperie, qui a malheureusement pu s’appuyer aussi sur la façon de penser et le comportement concret […] d’une large faction des milieux de “ droite ” européens (p. 18) ». Pourtant, quelle soit marxiste ou pas, la Gauche ne fut pas toujours l’amie de l’écologie. « Elle a toujours exalté les vertus émancipatrices du progrès matériel sous toutes ses formes, au point de se faire la championne la plus stupide de l’industrialisme le plus exacerbé, à l’origine de toutes les pollutions. Le marxisme, lui, a toujours été intrinsèquement hostile aux perspectives écologistes. […] Selon Marx, la nature doit être “ humanisée” à travers la science afin de transformer la valeur intrinsèque du milieu en valeur d’usage pour l’homme (p. 19). »

Si nous remontons dans le temps, il apparaît très clairement que deux visions du monde antagonistes s’affrontent, celle issue des Lumières et celle qui provient du romantisme. La première est mue par l’idée de Progrès et de la domination de la nature par l’homme pour l’homme. La seconde « est volontiers antiprogressiste, holiste, organiciste, vitaliste, plus ou moins mystique (parfois dans un sens néopaïen), empathique envers la nature (p. 23) ». Cette dernière possède les valeurs promptes à la défense de la nature, elle instaure ainsi les fondements d’une pensée écologique ante litteram. L’Allemagne est le berceau de ce que l’on appellera plus tard l’écologie. « Ce fut précisément dans l’Allemagne de la fin du XIXe siècle que se forma un courant écologiste très actif, autour de quelques idées-forces. Il faut signaler en premier lieu les conceptions anthroposophiques de Rudolf Steiner, défenseur de l’agriculture biodynamique, puis les orientations antibourgeoises des Wandervögel (“ Oiseaux migrateurs ”), un mouvement de jeunesse non politique au sens strict, mais existentielle et culturel, animé par des idéaux nationaux-conservateurs, et enfin la composante ruraliste, nourrie par le mythe “ Sol et Sang ” (Blut und Boden), tournée vers la formation d’une nouvelle aristocratie spirituelle et très hostile à la modernité, à l’industrialisation, à l’urbanisation effrénée et à l’internationalisme niveleur, ennemi des identités populaires (p. 25). »

Citant l’historien George L. Mosse, Monastra montre bien l’influence sur le réenchantement entre le peuple et sa terre via l’intermédiaire du romantisme. Il « a bien fait ressortir l’influence du romantisme sur l’intérêt croissant pour la nature lié au bien-être du Volk dans les milieux “ nationaux ” allemands à la fin du XIXe siècle et au début du siècle suivant. Mosse a également souligné l’intégration panthéiste des racines historiques du Volk dans la nature, conformément au sentiment de la correspondance de l’homme, par l’intermédiaire de son âme, avec le paysage et ainsi avec le Volk incarnant l’esprit vital du cosmos (p. 25) ».

klagesttttttt.jpgGiovanni Monastra va donc ensuite énumérer, en les présentant eux et leur idées, différents penseurs écologistes ou proche de la nature. Citons Ernst Haeckel, Ernst Moritz Arndt, Wilhelm Heinrich von Riehl, l’écrivain norvégien Knut Hamsun, les frères Friedrich Georg et Ernst Jünger, Oswald Spengler – qui dénonça « la domination de la technique [qui] nourrit la toute-puissance de l’économie et la diffusion cancérigène du marché, tout en s’en nourrissant elle-même (p. 46) » – Konrad Lorenz, Alexis Carrel, Ortega y Gasset, Julius Evola, René Guénon, etc. Parmi tous ces brillants penseurs, Giovanni Monastra s’intéresse particulièrement à un personnage regrettablement méconnu en France : Ludwig Klages (photo).

Nous omettrons volontairement une succincte biographie de cet auteur allemand, pour le moment du moins… Concentrons-nous sur ce qui, chez Klages, suscite l’intérêt de Giovanni Monostra. Notons déjà qu’il rédigea un manifeste écologiste en 1913 qui fit date (8). Analysant la pensée de Klages, Monostra souligne que l’« on voit s’exprimer ici [chez Ludwig Klages], il y a donc un siècle, plusieurs thèmes chers à l’écologisme de ces dernières décennies : la dénonciation de l’aliénation urbaine, de la pollution, du trafic routier, la conscience de la perte de l’empathie humaine envers la nature. […] De manière prémonitoire, il dénonce les dommages infligés au milieu par les troupeaux de touristes (pp.36 et 38) ». Ludwig Klages fustigeait l’idéologie du Progrès, tout autant que son pendant technique qui remettra l’homme au servage, dans les usines, au service d’un patron.

meditations-du-haut-des-cimes-2016.jpgGiovanni Monastra, se réclamant de l’immense œuvre de Julius Evola, met brièvement en lumière la pensées du philosophe italien concernant la nature ou plutôt sa vision de la nature, bien qu’elle ne représente pas un sujet à part entière dans son œuvre. Notons qu’Evola critiquait tout mouvements de « retour à la nature » qu’il identifiait à une réponse catagogique à un vide existentiel, les deux émanant d’une société « crépusculaire et décomposée ». Evola connaissait bien l’un des aspects de la nature, celui qui défie les hommes et les pousse à se surpasser, quitte à y laisser la vie. Alpiniste chevronné sa vision de la nature ne se targue d’aucun matérialisme, ni d’aucun sentimentalisme, Giovanni Monastra cite le philosophe. Il « s’agit donc de rendre à la nature – à l’espace, aux choses, au paysage – ce caractère lointain et étranger à l’homme qui était couvert à l’époque de l’individualisme, quand l’homme projetait dans la réalité, pour se la rendre proche, ses sentiments, ses passions, ses petits élans lyriques. Il s’agit de redécouvrir le langage de l’inanimé […]. C’est de cette façon que la nature peut parler à la transcendance (p. 60) ».

Monastra explique très bien que pour Evola, « la nature incontaminée est avant tout expression du primordial et de l’inaccessible, qui renvoie symboliquement, dans son objectivité pure, au sacré, au numineux, dont elle est saturée. L’approche évolienne est donc éloignée de l’« humain trop humain », et c’est pourquoi, sans doute, elle paraît « indigeste » à beaucoup : elle exprime une écologie digne du bouddhisme zen, à des distances abyssales de tout sentimentalisme et de toute rhétorique fastidieuse (p. 60) ».

En conclusion, Giovanni Monsatra conseille en premier lieu au lecteur de méditer les pensées des différents auteurs cités à travers son article. Puis, il appelle de ses vœux la « création » d’un anthropocentrisme « écocompatible ». « On n’échappe as à son destin en se cachant, mais plutôt en exposant sous une forme claire un nouvel anthropocentrisme “ écocompatible ”, responsable et solidaire, ancré dans des valeurs fondatrices, réellement conscient de la dimension temporelle et de la succession des générations, à l’égard desquelles nous avons des devoirs imprescriptibles (p. 67). »

Selon l’auteur, « une approche écologique identitaire, et jamais prédatrice, non fondée sur le culte du développement et l’exploitation, permet de privilégier la vocation spécifique d’un lieu et d’en mettre en valeur les particularités (p. 68) ». Mais, ce qui transparaît avant tout dans l’essai de Monastra, c’est l’urgence d’un retour à l’organicité (ou holisme). « La tâche d’aujourd’hui qui apparaît essentielle consiste à faire un travail culturel de recomposition d’un tout unitaire (p. 68). »

alpinisme-sommet.jpg

De ce roboratif essai, qui constitue la première partie de Piété pour le cosmos, nous retiendrons quelques idées directrices dont l’importance se révèle cruciale pour l’établissement d’une écologie profonde conforme à notre vision du monde. Parmi elles, mettre un terme à l’hybris, trait de caractère de notre civilisation faustienne, en réhabilitant un « juste retour à la limite ». Plus que jamais, il est grand temps de ré-enchaîner Prométhée ! Cela devrait permettre à l’homme de se « ré-intégrer au monde » dans une logique biocentrique, donc de reconsidérer la nature et les interactions qu’il a avec elle. Les idées fantaisistes de développement durable ou de Green Economy prônées par les pseudo-écologistes, et les bonnes âmes, ne sont que foutaises. Une écologie intégrale ne sera jamais conciliable avec l’économie de marché et le libéralisme, même dans sa variante libérale-libertaire. Bien que le sujet ne soit que légèrement effleuré par Giovanni Monastra, l’enracinement nous semble une condition sine qua non. Nous entendons par enracinement un sentiment d’appartenance au sol de ses ancêtres par exemple ou un attachement émotionnel/spirituel fort à une « patrie charnelle ». Va de paire l’exaltation du Beau (et du Bien), le fameux Kalos Kagathos, ré-apprendre à s’émerveiller devant une cascade ou une forêt plutôt qu’applaudir l’implantation d’éoliennes qui défigurent le paysage. Grâce à ce texte de Giovanni Monastra, l’homme de Droite redécouvrira les liens qui l’unissent à la terre, et (re)découvrira peut-être que la défense de la nature ne fut jamais et n’est toujours pas l’exclusivité des crasseux à dreadlocks et des écologistes de salon.

Thierry Durolle

Notes

1 : Julius Evola, « L’affaiblissement des mots », dans L’Arc et la Massue, Éditions Trédaniel, 1996.

2 : Du latin paganus, paysan.

3 : Alain de Benoist, Comment peut-on être païen ?, Albin Michel, 1981, réédition Avatar Éditions, 2009.

4 : Collin Cleary, L’appel aux dieux. Essais sur le paganisme dans un monde oublié de Dieu, Les Éditions du Lore, 2016.

5 : Magazine Terre & Peuple, n° 73, équinoxe d’automne 2017, « Paganisme pour aujourd’hui et pour demain ».

6 : Robert Dun, L’Âme européenne. Réponses à Bernard-Henri Lévy, L’Anneau, 1993, nouvelle édition, chez l’auteur, 1994.

7 : Dominique Venner, Histoire et tradition des Européens. 30 000 ans d’identité, Éditions du Rocher, 2002, réédité en 2004.

8 : Ludwig Klages, L’Homme et la Terre, RN Éditions, 2017.

• Giovanni Monastra, Philippe Baillet, Piété pour le cosmos, Akribeia, 2017, 176 p., 15 €.

konrad_lorenz.jpg

Pourquoi l’écologie est nôtre. De l’utilité d’être intelligemment conservateur

Partie II

par Thierry DUROLLE

Dans la première partie de notre article sur Piété pour le cosmos, nous avions décortiqué la première partie de l’ouvrage. Giovanni Monastra y rappelait les bases de l’écologie envisagée d’un point de vue traditionaliste, celle-ci s’apparentant à la Deep Ecology (biocentrée et en opposition avec la Shallow Ecology anthropocentrée), puis l’auteur énumérait un certains nombre d’auteurs ayant influencé cette pensée écologique issue majoritairement du romantisme allemand.

Cette partie était à l’origine un article. Celui-ci eut un effet stimulant sur son traducteur, Philippe Baillet, co-fondateur de la revue Totalité et traducteur émérite, entre autre, de Julius Evola. En plus de la version de l’article originale, Philippe Baillet décida d’écrire une contribution sur l’écologie qui se nomme par conséquent « Conservation, conservatisme, national-socialisme, écologie : des liens très étroits ».

À la vue de la longueur de la première partie de cette recension, cette deuxième partie sera volontairement beaucoup plus courte.

lorenzkraehe.jpgPhilippe Baillet débute son étude avec la notion de conservatisme. Le dictionnaire Larousse propose la définition suivante : « Attitude ou tendance de quelqu’un, d’un groupe ou d’une société, définie par le refus du changement et la référence sécurisante à des valeurs ou des structures immuables (1). » Un brin réducteur tout de même que cette définition. Nonobstant les a priori partisans sur le conservatisme, le bon sens voudrait que sa définition première corresponde au maintien et à la préservation de ce qui est bien pour une société ou une nation. Ainsi préserver, conserver la nature intacte n’est-il pas, au-delà de la nécessité vitale, une question politique de bien commun ?

Baillet rappelle également l’importance que revêtait, au sein du national-socialisme, la défense de l’environnement et de la protection des animaux, et par conséquent l’application en terme politique de la compréhension du Sinn der Erde national-socialiste. La programmation mentale post-Seconde Guerre mondiale fut efficace en ce qu’il s’agit de la dénazification et de l’occultation des tenants et des aboutissants de la politique hitlérienne. Personnellement, nous avions découvert la dimension écologique du IIIe Reich via la revue Terre & Peuple (2). Quoi que l’on pense du national-socialisme, les lois du 24 novembre 1933 sur la protection des animaux, du 19 juillet 1934 et du 1er juillet 1935 sont exemplaires.

Parmi les sujets évoquées dans la riche étude de Philippe Baillet, il nous semble impératif, en tant que païen identitaire, d’évoquer le concept d’Heimat. Contrairement à Das Vaterland, « la terre des pères », expression possédant un sens juridique dans la langue de Goethe, l’expression Die Heimat, « le pays natal », possède un caractère essentiellement organique impliquant de facto l’enracinement. « La Heimat peut donc être perçue même en l’absence d’un État. Elle ne renvoie pas à un concept juridique, c’est une réalité d’ordre phénoménologique : elle relève volontiers du “ ressenti ”, comme on a coutume de dire aujourd’hui, mais au sens le plus fort du terme (p 92). »

Plus développée, cette partie du livre écrite par Philippe Baillet a notre préférence. Nous regrettons l’absence d’éclairage sur certains mouvements tels l’Artamanen Gesellschaft, et plus généralement, la mouvance Völkisch. Il est d’ailleurs vraiment regrettable qu’aucun ouvrage, qu’aucune étude ne soit disponible en français sur le sujet… Globalement Piété pour le cosmos est un excellent livre sur l’écologie vue de Droite. L’ouvrage aurait pu sans doute être plus complet, mais la présence de nombreuses références devraient permettre aux intéressés de la question écologique d’explorer de nouveaux horizons.

Thierry Durolle

• Giovanni Monastra – Philippe Baillet, Piété pour le cosmos, Akribeia, 2017, 176 p., 15 €.

Notes

1 : Nous citons la définition trouvée sur www.larousse.fr.

2 : cf. Terre & Peuple Magazine, n°41, automne 2009.

La barbarie vivifiante de Julien Gracq

JGR.jpg

La barbarie vivifiante de Julien Gracq

par Fares Gillon

Ex: https://www.philitt.fr

[Cet article est initialement paru dans la revue PHILITT #5 consacrée à la barbarie]

syrtes.gifDans Le Rivage des Syrtes, Julien Gracq prend le contre-pied d’une conception exclusivement négative de la barbarie en la présentant comme un renouveau nécessaire à la revivification d’un vieil État somnolent.

Le Rivage des Syrtes met en scène une vieille cité fictive, Orsenna, qui jouit tranquillement de sa paix, dans la sérénité des cimetières. Autrefois, une guerre l’avait opposée à un monde de l’autre côté de la mer, le Farghestan, civilisation en forme de « mosaïque barbare où le raffinement extrême de l’Orient côtoie la sauvagerie des nomades ». Après quelques escarmouches, « les hostilités languirent et s’éteignirent d’elles-mêmes tout à fait ». Selon un accord tacite, toutes les relations furent coupées, la mer devint une frontière infranchissable, et chacun vécut de son côté comme si l’autre n’existait plus. Durant trois siècles, Orsenna s’est enfoncée dans sommeil sans heurts. Le jeune héros, Aldo, s’ennuie d’une vie de plaisirs mondains et se fait envoyer comme fonctionnaire à l’Amirauté, port censément militaire sur le rivage de la région des Syrtes, qui fait face à l’ennemi tricentenaire, invisible et inconnu. L’inactivité militaire a progressivement fait de l’Amirauté une « bizarre entreprise rentable, qui s’enorgueillissait devant les bureaux de la capitale de ses bénéfices plus que de ses faits d’armes », plus occupée de fermage que de conquêtes ou de défense. « On pouvait enregistrer le progrès de son engourdissement inquiétant, dans le reflux de la vie aventureuse et dans le sourd appel montant de la terre rassurante et limitée. »

La rumeur barbare

Aldo s’étonne de trouver l’Amirauté dans un « état de stagnation », d’« irrémédiable décadence » : « L’aspect habituel du port était celui du profond sommeil », dit-il déçu. Pourtant, il demeure sceptique face à la montée de rumeurs et de « bruits » persistants qui laissent deviner que quelque chose se prépare du côté du Farghestan. Il refuse de les créditer du moindre fond de vérité – alors même qu’il aspire confusément à la nouveauté qui s’annonce, alors même qu’il a précisément quitté Orsenna dans l’espoir de rompre la monotonie de l’existence d’un fils de bonne famille. Lorsque l’administration d’Orsenna l’engage à prendre ces « bruits » plus au sérieux, il est surpris que son scepticisme qu’il croyait de commande ne soit pas partagé en haut lieu ; il franchira pourtant le pas qui précipitera le bouleversement.

JGRherne.jpgOrsenna est l’image même de l’État stable, depuis si longtemps habitué qu’il en a perdu toute vigueur. « Le rassurant de l’équilibre, c’est que rien ne bouge. Le vrai de l’équilibre, c’est qu’il suffit d’un souffle pour faire tout bouger », ainsi que le fait dire Gracq à Marino, le commandant de l’Amirauté, très attaché au maintien de cet équilibre, satisfait de l’existence sans surprise qu’il entraîne et inquiet du moindre changement. Mais à la tête d’Orsenna, un nouveau maître a l’ambition de secouer les choses : « Il y a trop longtemps qu’Orsenna n’a été remise dans les hasards. Il y a trop longtemps qu’Orsenna n’a été remise dans le jeu. » Devant un Aldo effaré, Danielo, l’homme fort de la Seigneurie d’Orsenna, expose sa volonté de sauver Orsenna contre elle-même, contre son « assoupissement sans âge », quitte à l’engager sur un chemin de mort et de destruction. « Quand un État a connu de trop de siècles, dit Danielo, la peau épaissie devient un mur, une grande muraille : alors les temps sont venus, alors il est temps que les trompettes sonnent, que les murs s’écroulent, que les siècles se consomment et que les cavaliers entrent par la brèche, les beaux cavaliers qui sentent l’herbe sauvage et la nuit fraîche, avec leurs yeux d’ailleurs et leurs manteaux soulevés par le vent. 

La sécurité contre la vie

La sécurité dans laquelle végète Orsenna, son assurance que rien ne changera, que les choses resteront toujours ce qu’elles sont, sont les signes de son déclin et de sa momification. Dans une société comme la nôtre où la sécurité est un argument électoral, il peut sembler surprenant que cette dernière soit comprise ici comme le signe de la mort ; c’est que nous confondons la conservation d’une vie individuelle, la bourgeoise « sécurité des biens et des personnes », avec la vie au sens fort. Mais « le monde n’est justifié qu’aux dépens éternels de sa sûreté » : quand on se mure contre les « hasards » et le « jeu », contre l’aiguillon de la vie, on conserve certes son corps et sa tranquillité d’esprit, mais c’est au même titre que les onguents conservent les cadavres. Or les cadavres n’ont aucun droit sur la vie, par définition. « Il y a plus urgent que la conservation d’une vie, si tant est qu’Orsenna vive encore. Il y a son salut. » Comme dans la parabole évangélique des talents, celui qui ne remet pas en jeu ce qu’il a reçu, celui qui ne risque rien, ne mérite rien. On ne peut faire fructifier quelque chose que l’on ne risque pas de perdre.

Au cœur du roman, le récit du lent éveil d’Orsenna face aux événements prend une dimension spirituelle lorsque Aldo assiste au sublime sermon d’une messe de Noël. C’est que Noël est la fête du « Roi qui apportait non la paix, mais l’épée », d’une lumière germant au cœur des ténèbres hivernales, de la naissance par excellence qui est le modèle de tout avènement : « Je vous apporte la nouvelle d’une ténébreuse naissance », clame le prêtre. Si le texte ne le dit pas explicitement, l’évocation de la Nativité vise bien les « invasions barbares » qui, du Farghestan, déferleront bientôt sur Orsenna, en ceci qu’elles ouvrent un nouveau cycle, une ère d’incertitude féconde : « En cette nuit d’attente et de tremblement, dit le prêtre, en cette nuit du monde la plus béante et la plus incertaine, je vous dénonce le Sommeil et je vous dénonce la Sécurité. »

La commémoration de la naissance du Christ est l’occasion de fustiger « la race de la porte close », « ceux qui tiennent que la terre a désormais son plein et sa suffisance », « les sentinelles de l’éternel Repos » prêtes à tout pour préserver le statu quo et sauvegarder ce qu’elles n’ont pas même acquis de leurs mains, mais dont elles n’ont fait qu’hériter. Or, comme l’écrit Ernst Jünger, ami de Gracq, dans Les Falaises de marbre, « l’héritage est la richesse des morts ». Et les morts s’opposent aux vivants, a fortiori aux naissances et à leur cortège de désagréments : « Il est des hommes pour qui c’est chose toujours mal venue que la naissance ; chose ruineuse et dérangeante, sang et cris, douleur et appauvrissement, un terrible remue-ménage – l’heure qu’on n’a point fixée, les projets qu’elle traverse, la fin du repos, les nuits blanches, toute une tornade de hasards autour d’une boîte minuscule. »

Et si la naissance doit apporter aussi la mort, si les têtes doivent fleurir au bout des piques, si l’ordre et la marche du monde doivent en être troublés, ainsi soit-il ! Car vient un moment où « tout vaut mieux que d’être ligoté vivant à un cadavre, tout soudain est préférable à se coller à cette chose condamnée qui sent la mort ». Outre que la naissance est « le Sens ». Quel sens ? Celui même de la vie.

[Vous pouvez vous procurer PHILITT #5 en cliquant sur ce lien.]

mercredi, 31 janvier 2018

Rencontre avec Julien Hervier: ERNST JÜNGER - L'OISEAU TEMPÊTE

ej-plm2.jpg

ERNST JÜNGER - L'OISEAU TEMPÊTE

Rencontre avec Julien Hervier

 
Approche d'Ernst Jünger
Rencontre avec Julien Hervier.
Emission Mauvais genres, France Culture
 

Le réel-vrai et son simulacre

Bn-Tf3dCQAAsLfJ.jpg

Le réel-vrai et son simulacre

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

 

Nous sommes constamment exposés à des flux de messages médiatiques. Il est quasiment impossible de s’en protéger. Celui qui serait sous-exposé, en n’ayant pas la télévision par exemple, aurait toute les chances de passer pour un original et de subir un processus de désocialisation. Pour être « intégré », il faut en effet connaître des codes et avoir des références qui sont souvent le produit de messages médiatiques. Impossible, par exemple, de participer à certaines conversations si l’on n’a pas regardé l’OM à la télé, si l’on ne connaît pas les chansonniers à la mode, si l’on n’a pas vu le nouveau film de Woody Allen, ou si l’on ne peut commenter les propos philosophiques de Cyril Hanouna.

Cette avalanche de messages médiatiques impose progressivement dans les esprits une représentation  de la réalité qui paraît plus réelle que le réel. Il s’agit bien sûr d’une réalité falsifiée qui ne représente qu’elle-même et qui crédibilise « notre » modèle de société. Le problème est que cette réalité falsifiée apparaît de plus en plus comme la seule réalité et que c’est en fonction de celle-ci, et pas du vrai réel, que les « décideurs » prennent leurs décisions. Même ceux qui construisent cette réalité falsifiée sont aujourd’hui dans l’obligation psychologique de la prendre comme critère, comme référence et comme justification de leurs choix politiques, géopolitiques, sociétaux ou économiques. Nous aboutissons à un monde kafkaïen qui ne peut à terme que se fracasser sur le monde réel qui, bien que nié, existe toujours.

Prenons quelques exemples pour être plus clair.

On sait que la propagande clintonienne sur les relations de Donald Trump avec la Russie, puis sur l’ingérence russe dans les élections américaines, a été reprise par l’ensemble des médias occidentaux. Ce discours de propagande, qui ne repose sur aucun fait précis, dont le contenu s’apparente à un dénigrement de cours de récréation et qui, dans sa première mouture, se réduit à un simple élément de langage politicien, est indissociable des dernières élections présidentielles américaines. Ce discours consécutif à la campagne électorale et lié à la politique intérieure américaine a été repris, gonflé, constamment répété et agrémenté de nouvelles « révélations » sur le complot russe  à seule fin d’orienter l’élection puis de neutraliser le président élu. Ce qui n’était à l’origine qu’une stratégie de communication politique destinée à retourner l’opinion publique en faveur d’Hillary Clinton est devenue au fil des mois, à force d’être récitée par toutes les télévisions, tous les journalistes, tous les politiciens, tous les journaux, une  vérité en soi. Une vérité incontestable : la réalité à partir de laquelle il convenait de raisonner et d’appréhender les relations avec la Russie !

Cette description volontairement falsifiée de la réalité, simple opération de propagande électorale à l’origine, a très vite eu des répercussions sur la politique extérieure américaine. Comment, si l’on tient pour vrai le complot russe, proposer un « rapprochement » avec la Russie ?  Comment, bien que les nécessités géopolitiques et les risques de guerre l’imposent, entamer des discussions avec Vladimir Poutine ? Les Etats-uniens sont prisonniers du système de représentation qu’ils ont fabriqué. Au risque d’une guerre avec la Russie, ils ne peuvent plus en sortir sans perdre la face.

La réalité falsifiée a donc un impact certain sur la politique étrangère des pays occidentaux. Cette pseudo-réalité est ici une construction purement politico-médiatique. Mais La représentation falsifiée de la réalité peut se doter aussi d’un habillage scientifique qui la rendra plus crédible. Ainsi du discours sur le changement climatique d’origine anthropique et la transition énergétique.

Ce discours, véritable bruit de fond de la communication médiatique, s’apparente davantage au discours d’une Eglise avec son credo, ses hérétiques et ses excommuniés, qu’à un discours véritablement scientifique. Quand les thèses divergentes ne peuvent ni se faire entendre, ni même s’exprimer, alors le discours qui ne se laisse pas contester sort du domaine de la science pour entrer dans celui des représentations religieuses. Or les politiciens, sans l’avoir étudié, « croient » au système de représentation de la réalité proposé de manière totalitaire par le GIEC. Ils croient qu’il y a d’une part un changement climatique  et que d’autre part l’homme en est l’unique responsable.  Leur action découlera non d’un jugement éclairé après un libre débat mais d’une foi dans l’énoncé de vérités révélées dans les bibles médiatiques.  Or, ce système de représentation médiatisé  entraîne un certain nombre de choix qui pourraient s’avérer catastrophiques. En effet, le réel-vrai nous dit que l’humanité a besoin d’énergie pour subvenir à ses besoins, que l’énergie, notamment fossile, a tendance à se raréfier ou à devenir moins accessible, qu’il n’existe pas pour le moment de source d’énergie qui pourrait remplacer le pétrole et le gaz. Or, dans la réalité de substitution des politiciens et des journalistes, les énergies fossiles sont responsables du réchauffement climatique et les éoliennes ou les panneaux solaires vont bientôt pouvoir remplacer gaz, charbon et pétrole (et même le nucléaire !). Jugeant en fonction de cette fausse réalité, les politiciens en viennent à la conclusion que l’on peut dès à présent cesser de financer la recherche et l’extraction de gaz et de pétrole. Ainsi la Banque mondiale arrêtera l’année prochaine de financer la recherche et l’exploitation de nouveaux gisements de pétrole et de gaz. Le gouvernement « français » vient d’interdire la recherche et l’exploitation de gaz et de pétrole sur son territoire. Dans le sillage de l’Accord de Paris, d’autres pays vont suivre. Certaines banques refusent déjà de financer les activités liées aux  hydrocarbures non conventionnels.

FakeNews.jpg

L’attachement au système de représentation de la réalité plutôt qu’au réel-vrai, va avoir des conséquences considérables dans les années qui viennent.  La réduction des investissements dans l’exploration pétrolière en 2015-2016 a fait chuter les découvertes de 9 milliards de barils depuis 2000 à 2,4 milliards de barils l’an dernier (21 milliards de barils en 2014 !).  Autrement dit, la pénurie de pétrole qui se profile de toute façon (le pic de production a déjà été atteint) risquera d’être beaucoup plus sévère et rapide. Or, il y a un rapport étroit entre croissance et quantité d’énergie disponible. Moins d’énergie injectée dans l’économie signifie décroissance de la production. Et la décroissance signifie chômage, problèmes sociaux, effondrement économique. L’idéologie du changement climatique va-t-elle en  répondre ?

L’effondrement économique est d’ailleurs une perspective qui est écartée du système de représentation de l’économie servi par les médias. Depuis 2008, ce système peut se résumer en un leitmotiv : « la croissance repart » ! Comme d’habitude, tout le monde adhère au système de représentation : même si les gens ne sont pas complètement dupes, ils laissent dormir leur argent en banque. Pourtant le réel-vrai nous montre tout autre chose : une montagne de dette qui ne cesse de croître et qui ne sera jamais remboursée, des bulles financières qui ne demandent qu’à éclater, des Etats virtuellement en faillite, une croissance atone, des lois qui prévoient de puiser l’argent des épargnants pour renflouer les banques en faillite, le chômage qui s’accroît, la planche à billet qui nourrit la bourse, etc. La réalité falsifiée et médiatisée dit que tout va continuer comme avant. La réalité vraie dit que rien ne peut continuer comme avant. Pourtant, puissance du message médiatique oblige, la population produit et consomme imperturbablement, comme si rien n’allait changer pour elle, comme si elle n’allait pas payer tôt ou tard le prix du « réajustement  nécessaire ».   

Dernier exemple : le système sociétal de représentation des sexes. Selon ce système, une femme est un homme sans testicules, ou, si l’on préfère, un homme est une femme comme les autres. Le message médiatique dit qu’hommes et femmes sont identiques et qu’il ne devrait pas y avoir de rôles sociaux dévolus aux uns plutôt qu’aux autres. La confusion des sexes est en effet l’un des grands thèmes structurants de la propagande-Système.

femme.homme_.jambes.jpg

Là encore, faisant fi de la nature, nous pouvons observer que c’est en fonction de la réalité falsifiée et non du réel-vrai qu’évoluent les lois, les choix sociétaux et même les mœurs en général. L’histoire de l’humanité et la biologie (qui démontrent qu’hommes et femmes sont différents et complémentaires) ne comptent pour rien face à la réalité falsifiée que télévision, publicité et cinéma font entrer dans les têtes. Progressivement, les comportements sociaux évoluent comme si hommes et femmes n’existaient plus vraiment et s’étaient en quelque sorte dissous dans la « femâlité », catégorie intermédiaire faite de femmes viriles et d’hommes efféminés.  

Pourtant le/la « femâle » est un type humain mutant et non viable qui contredit 2 millions d’années d’évolution. Pourquoi le femâle n’est-il pas viable ? Parce qu’une société qui ne confie plus la procréation aux femmes et la défense du groupe aux hommes est condamnée à être rapidement remplacée par des populations dont les femmes enfantent sous la protection des hommes. La femâlité est donc un phénomène temporaire, une parenthèse contre-nature, un court moment qui précède l’effacement.

Tout ce qui contredit le réel vrai est d’ailleurs par avance condamné. La réalité falsifiée ne peut s’imposer que dans une société où les besoins élémentaires sont généreusement satisfaits. Se mentir est un luxe réservé à ceux qui sont sortis de la lutte pour la vie. Il est possible, lorsque l’assiette est pleine, de faire comme si l’économie se porte bien. Il est possible, dans un monde pacifié et aseptisé, de se passer des qualités masculines. Il est possible, quand on peut faire facilement son plein, d’ignorer le problème énergétique. Il est possible, tant que les Russes se taisent, de les stigmatiser impunément. Mais imaginons que l’assiette se vide, que le pétrole vienne à manquer et qu’il soit nécessaire de défendre physiquement sa famille ? Ce surgissement du réel remettrait instantanément chaque chose à sa place.

C’est une règle : l’image falsifiée de la réalité  s’efface immédiatement  quand surgit le réel-vrai. Prenons l’exemple du mythe de la multiracialité heureuse que le message médiatique cherche à imposer dans les esprits. Nous pouvons facilement constater que ce message est parfaitement accepté par la classe des bobos urbains surprotégés, qui ne connaît pas réellement le « vivre-ensemble ». Par contre, ce message ne prend pas chez les Autochtones vivant dans des quartiers où la multiracialité est une réalité vraie : il n’est tout simplement pas crédible.

Quoi qu’il en soit, le retour dans le monde réel est inéluctable pour tous. On ne pourra longtemps faire comme si ce monde réel n’existe pas. Il en a toujours été ainsi : celui-ci s’imposera tôt ou tard comme une évidence aussi cruelle qu’incontestable. Les fabricants de réalités falsifiées devront se taire : plus personne ne pourra ni mentir, ni se mentir. Le bon sens voudrait que l’on passe en douceur de la réalité falsifiée au réel-vrai. Mais personne n’invitera le réel-vrai. Nos dirigeants sont allés trop loin. Ils ne peuvent plus faire machine arrière. Autrement dit, le réel-vrai va s’imposer de manière brutale, lors d’un effondrement économique, d’une crise migratoire de trop, d’une guerre ou d’une rupture de l’approvisionnement énergétique… La réalité falsifiée nous entraîne vers des catastrophes qui vont la révéler et nous réveiller.

Nous allons bientôt apprendre à nos dépens que nous ne vivons pas dans le monde réel, mais dans un simulacre de monde réel. Un grand nombre de choses que nous tenons pour indiscutables vont apparaître dans toute leur fatuité. D’autres, que nous considérons avec mépris comme des préjugés, nous sembleront des lois d’airain. Le retour au monde réel se fera comme un enfantement : dans la douleur. Autant le savoir et s’y préparer.

Antonin Campana

00:42 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

W.B. Yeats: Irish Revolutionary Conservative

“I do not appeal to the professional classes, who, in Ireland, at leastappear at no time to have thought of the affairs of their country till they first feared for their emoluments – nor do I appeal to the shoddy society of ‘West Britonism‘ – but to those young men clustered here and there throughout our landwhom the emotion of patriotism has lifted into that world of selfless passion in which heroic deeds are possible and heroic poetry credible.” – Ireland and the Arts. W.B. Yeats.

The political and cultural figures present in the early foundation of the Irish State present Irish liberals with some quandaries. Beneath the narrative of Irish independence being an inherently progressive movement betrayed by a post-Treaty “carnival of reaction”, lies an irreconcilable fact that the many of the figures driving separation from Britain belonged to a stridently conservative brand of thinking. Any budding conservative movement in Ireland should embrace these figures and cultivate a counter-narrative in response to the simplistic mistruths presented in works such as Ken Loach’s “Wind that Shakes the Barley”. Here, the Irish struggle is distilled down to a failed left wing revolt and those of a conservative inclination are portrayed as flagrantly unpatriotic and sometimes even at odds with Irish language revivalism.

The character of W.B. Yeats ranks perhaps first and foremost amongst those figures. Despite his Anglo-Irish background, he threw himself wholeheartedly behind not merely the political separation of his country from Britain, but the equally important task of forming a distinct Irish consciousness. First a political Tory committed to the cause of Irish freedom, he later became a reform-minded senator campaigning against the myopia of the Church-dominated Free State whilst simultaneously advocating for a more conservative state. Yeats, from the onset, strikes the modern reader as an enigma with his distinct brand of politics.

Yeats formed a central plank in what is now termed the Gaelic Revival, a cultural movement that emerged to fill the vacuum in Irish life after the fall of Parnell in 1891 with a yearning to revive the traditions and customs of Ireland in an increasingly anglicised world. In the minds of Yeats and fellow revivalists, Ireland was besieged under the weight of Anglo-American modernity. He recognised a state of affairs that could only be reversed by committed cultural nationalism in the fields of arts and education. Whilst officially apolitical, the Gaelic Revival would act as an incubator for most of the future revolutionaries who would eventually sever formal British rule in Ireland and nurture the early Free State.

ladygregory.jpgDespite cultural nativism being at its centre, Yeats’s Protestant background was shared by most of the leading figures of the movement. Among these were the Galway based aristocrat and folklorist Lady Gregory, whose Coole Park home formed the nerve centre of the movement, and the Rathfarnham born poet and playwright J.M. Synge, who later found solace in Irish peasant culture on the western seaboard as being a vestige of authentic Irish life amid a society of anglicisation. The poet’s identification with both the people and the very landscape of Ireland over the materialist England arose from his early childhood and formative experiences in Sligo, a period that would define him both as an artist as well as a man.

Yeats’s formal conversion to the cause of Irish separation came primarily through his relationship with the veteran Fenian John O’Leary, a minor member of the Young Irelanders. These were a group of mainly Trinity College based nationalists who split off from O’Connell’s Repeal movement. O’Leary had spent large tracts of his life in exile following the botched 1848 rebellion. Whilst abroad, he cultivated a distinctly cultured brand of Irish nationalism drawing not only on the recent traditions of the Young Irelanders but which also encompassed a wide range of influences stretching all the way back to classical antiquity. This form of nationalistic expression appealed very much to the twenty year old Yeats with its patriotic elements and emphasis on the individual in the shaping of history. Soon after his acquaintance with O’Leary, Yeats became a member of the fraternal organisation the Irish Republican Brotherhood, a secret oath bound group organised along semi-masonic lines counting the likes of Michael Collins and the leadership of the Easter Rising among their number and which played an often overlooked role in the securing of Irish freedom.

Whist being traditionally associated as a man of the right, Yeats did in fact rub shoulders with a group of left wing radicals in the form of the Socialist League, a bohemian group sympathetic to Irish nationalism and lead by the artist William Morris. The League attracted many Victorian artists to it’s ranks, including Oscar Wilde and Bernard Shaw. Though Yeats was sympathetic for a time to a form of socialism that would best promote the welfare of artists, he parted ways due to his disagreement with the “atheistic premises of Marxism” that the League embraced. Regardless of that, the League nurtured in Yeats a brand of politics that harboured respect for the individual within society, as well as furthering his disdain for the system of values of a decadent and increasingly mechanised England and the ascendant Catholic bourgeois in Ireland.

KOH.jpgDespite some apprehension about the nature of the Easter Rising, as well as a latent sense of guilt that his work had inspired a good deal of the violence, Yeats took a dignified place within the Irish Seanad. He immediately began to orientate the Free State towards his ideals with efforts made to craft a unique form of symbolism for the new State in the form of currency, the short lived Tailteann Games and provisions made to the arts. Despite his objection to anti-divorce legislation passed by the Free State and his defence of Republican prisoners, the writer Grattan Freyer details how the poet’s primary gripe with the new state was a failure to be sufficiently conservative, to cast off any trappings of liberalism inherited from England, and embrace some sort of aristocratic order (with Yeats no doubt playing a major role). In cabinet, he found minister Kevin O’Higgins (photo) as a potential ally and was so aghast at the young minister’s death at the hands of Republican gunmen that he penned his poem “Blood And The Moon” a defence not only of the ailing world of the Anglo-Irish aristocracy to which he belonged, but also to the poet’s brand of conservative politics.

Yeats very famously had a bumbling relationship with the Blueshirts Ireland’s proto-fascist movement, which was born out of Treatyite politics and disgruntled farmers’ anger at De Valera’s trade war with the UK. There appears even to have been a ham-fisted attempt by Yeats to fashion the Blueshirts in his image with what one would imagine to be humorous attempts made to lecture Blueshirt leader Eoin O’Duffy on finer points about Hegel by the Nobel laureate, who did still script several marching tunes for the movement. Yeats’ anti-communism fitted naturally with an already conservative outlook of life and with his Burkean understanding that any utopian vision regarding the perfection of man and the trampling down of supposedly oppressive hierarchies, rested not merely on flimsy axioms but on an inevitable mound of corpses. Regardless to the extent of his involvement with Irish fascism this was to be Yeats’ final venture into the world of politics, with the poet largely withdrawing into artistic solitude in his final years. He had left a considerable mark on the Irish state and Irish people as a whole, even if today, their primary understanding doesn’t go beyond the handful of traditionally learnt poems of the Leaving Cert.

In an era when the Irish appear to be jettisoning any form of national distinctness retained after 700 years of colonisation in favour of the bum deal of cosmopolitanism, and with conservatives driftless in the shadow of a fallen Church, the potential use of Yeats as a cultural icon is attractive. Within this dynamic figure we see a man motivated by a sheer love of one’s own country as well as a desire to see a newly independent Ireland fashioning an identity from the richness of her traditions. There is not an iota of doubt that the poet would find himself at home in the embryonic conservative movement embodied in a journal such as this, and in similar movements across the western world which are at odds with the current order of affairs.

We Irish, born into that ancient sect
But thrown upon this filthy modern tide
And by its formless spawning fury wrecked,
Climb to our proper dark, that we may trace
The lineaments of a plummet-measured face.”  -The Statues by W.B. Yeats

Colloque de l'Institut Iliade: « Fiers d’être Européens ! »

aurige.jpg

Repentance, ahurissement, avachissement…

Stop ou encore ?

« Fiers d’être Européens ! »

 

Cinquante ans après Mai 68, le « macronisme » achève la victoire du libéral-libéralisme le plus débridé. Son cœur idéologique reste celui de la gauche, marquée par l’héritage d’une mauvaise conscience coloniale, la repentance perpétuelle et obligatoire, la haine de soi. Il est temps d’y mettre un terme en retrouvant l’amour de nos racines, la fierté de ce que nous sommes ! C’est à cet impératif que s’attachera le colloque annuel de l’Institut Iliade pour la longue mémoire européenne, organisé samedi 7 avril 2018 à partir de 10h à la Maison de la Chimie, 28 Rue Saint Dominique, 75007 Paris

La journée est divisée en deux séquences. La matinée (10h-12h30) dressera le cadre de l’analyse, pour appeler à en finir avec la culpabilisation des Européens. Interviendront à cette occasion Philippe Conrad (« Pourquoi s’attaquent-ils à notre Histoire ? »), Javier Portella (« Du nihilisme à l’ethnomasochisme »), ainsi qu’Olivier Dard, Bernard Lugan et Martial Bild (TVLibertés) autour du thème : « En finir pour de bon avec la culture de la repentance ». La conclusion de la matinée sera présentée par le juriste Thibault Mercier, qui s’attachera à définir « le droit des Européens à la continuité historique ». Une première séance de rencontres et dédicaces est proposée avec les orateurs de cette matinée.

L’après-midi (14h-18h30) explorera les voies et moyens de redevenir ce que nous sommes. Interviendront ainsi Hélène Gallois (« L’apport du Moyen Âge à l’identité européenne »), Jean-François Gautier (« Ce que nous devons aux Européens ») et François Bousquet (« Gagner la guerre culturelle »), la conclusion valant synthèse des travaux étant assurée par Jean-Yves Le Gallou. Ces interventions seront entrecoupées d’illustrations concrètes, à partir de travaux des auditeurs de l’Iliade, et de deux tables rondes. La première réunira Rémi Soulié, Paul-Marie Coûteaux et Gérard Dussouy pour traiter des moyens de se réapproprier notre identité, tant à l’échelle locale que nationale et européenne. La deuxième table ronde, illustrée d’une vidéo de témoignages dans différents pays européens, réunira les journalistes Yann Vallerie (Breiz-Info) et Ferenc Almassy (Visegrád Post) autour du thème « Irlande & Europe centrale et orientale : comment se réveille un peuple ? ».

Ce colloque constitue la manifestation publique annuelle de l’Institut Iliade. Il s’est rapidement imposé comme l’un des plus importants rassemblements des partisans de l’identité nationale et européenne avec, à chaque édition, plus de 1'000 participants désireux d’explorer les pistes du nécessaire réveil de notre civilisation, d’échanger et de se retrouver, y compris autour d’un verre, dans la convivialité d’une communauté ainsi reformée.

L’édition 2018 sera l’occasion de présenter en exclusivité le deuxième ouvrage édité par l’Iliade chez Pierre-Guillaume de Roux : Ce que nous sommes. Les sources de l’identité européenne. Ce livre original, tout à la fois érudit et engagé, réunit douze auteurs autour de trois grands chapitres (« Notre longue mémoire », « Un regard européen sur le monde », « Combats d’aujourd’hui et de demain »). Leurs contributions composent un chant polyphonique d’amour et de combat pour l’Europe de demain. Histoire, mythologie, arts, musique, sciences, littérature, politique et philosophie : en se réappropriant les différentes facettes de leur héritage commun, les Européens ont toutes les raisons de croire encore en leur avenir !

Pour être certain de disposer d’une place et accéder plus rapidement à la salle, il est vivement recommandé de réserver en s’inscrivant en ligne dès maintenant via la page d’accueil du site de l’Institut : institut-iliade.com

 
Contact, demandes d’interviews et renseignements complémentaires : contact@institut-iliade.com

 

mardi, 30 janvier 2018

Madeleine Charnaux, aviatrice, artiste et romancière

MCH-por.jpg

Madeleine Charnaux, aviatrice, artiste et romancière

par Daniel COLOGNE

Je connais peu de choses sur Jean Fontenoy. Je les ai découvertes il y a quarante ans dans l’excellent livre de Pierre-Marie Dioudonnat, Je suis partout. Les maurrassiens devant la tentation fasciste. Il était dépeint comme un intrépide combattant apte à mener un assaut sur skis. Sa légende lui prêtait une liaison dangereuse avec l’épouse de Tchang Kaï-Chek. D’aucuns pensent aujourd’hui qu’il n’existe qu’une seule biographie « non romancée » (Philippe Vilgier, Jean Fontenoy. Aventurier, journaliste et écrivain, Via Romana, 2012) de cet étonnant personnage qui, à son retour de Chine, fait connaissance de Madeleine Charnaux.

MCH-passion.jpgCelle-ci naît à Vichy en 1902 et y meurt en 1943, ce qui pourrait faire penser à une existence tranquille. C’est tout au contraire un parcours semé d’aventures qui caractérise cette femme dont la première passion est le sculpture. Elle est l’élève et le modèle d’Antoine Bourdelle. Elle obtient une première consécration artistique en 1931 à la faveur d’une exposition de ses œuvres au musée du Luxembourg.

Ensuite résonne en Madeleine Charnaux l’appel des grands espaces aériens. Première aviatrice à atterrir à Marrakech en 1932, elle participe à de nombreuses démonstrations et travaille à l’école d’acrobatie Morane-Saulnier. Elle réalise un raid inédit Paris – Tripoli et, d’un nouveau périple en Afrique du Nord, elle ramène des dessins et des sculptures dont l’exposition est bien accueillie par le public et la critique, mais dont le succès commercial est mitigé en 1934.

Également journaliste, Madeleine Charnaux propose au Petit Parisien un reportage sur Italo Balbo, promoteur de l’aviation italienne. Après avoir battu plusieurs records (notamment de vitesse en 1937), elle épouse en 1938 l’auteur de Shanghai Secret évoqué plus haut. Bien qu’affaiblie par un cancer, elle écrit ses souvenirs d’aviatrice (La Passion du ciel, 1942) et un roman policier qui sortira chez France-Empire après sa mort en 1944.

Récemment réédité, ce polar se passe tout naturellement dans le milieu de l’aviation et le préfacier Philippe Vilgier écrit : « Après avoir refermé le livre, comment ne pas songer que Maria Sturm est une cousine de Madeleine Charnaux qui aurait mal tourné ? » En effet, l’héroïne trouve la mort après avoir été impliquée dans un trafic de stupéfiants, au grand déplaisir du commissaire Félix, pour qui Marina était une « idole ailée ». Il aurait peut-être préféré que l’aviatrice ait été assassinée par son amant le colonel Terne qui, en raison de leur virulente altercation la veille du drame, fait longtemps figure de suspect numéro un.

MCHqui.jpgVoici Terne sortant de prison, disculpé et attendu dans un taxi par son épouse qui lui pardonne son aventure extra-conjugale. « Terne avait appris ce matin de bonne heure qu’il était libre et pouvait rentrer chez lui. La levée d’écrou avait eu lieu. Grisonnant, le teint sali par l’insomnie, le colonel paraissait très vieux, marchant lentement, tête basse, le long du corridor froid et sombre. Le gardien lui avait rendu ses effet. C’est-à-dire son col, sa cravate et ses lacets de soulier. Il tenait à la main le sac de toilette en cuir dont les coins s’étaient usés dans les carlingues d’avions. Terne passa la grande voûte d’entrée et se trouva dans la rue la plus lugubre de Paris.

Il leva les yeux sur le café triste À la Bonne Santé qui fait face aux hautes murailles noires de la prison et s’approcha d’un taxi qui semblait l’attendre. Un visage fané, aux beaux yeux brillants de larmes, se tourna vers lui, encadré par la portière. Madame Terne lui enleva le petit sac des mains, le posa à côté d’elle et sans rien dire, tendrement, pitoyablement, serra dans ses bras son compagnon malheureux.

– Rentrons vite, les enfants nous attendent. Ils vont être si contents ! »

Douée pour le dessin, les arts plastiques, l’écriture narrative et journalistique, Madeleine Charnaux n’a pas eu le temps de développer les diverses facettes de sa personnalité. Emportée par la maladie à l’âge de quarante ans, elle laisse surtout le souvenir d’une grande figure de l’aviation française. « C’était une jeune femme d’un grand charme. Blonde aux yeux pervenche, amoureuse de Rimbaud, de Rilke et de Bach, elle était douée d’une volonté indomptable (Saint-Paulien). »

Forçant l’admiration de Mermoz et bénéficiant de l’estime de Jean Cocteau, elle a côtoyé dans la revue Lecture 1940 Paul Morand et Henri de Montherlant. Il faut remercier Francis Bergeron et Pierre Gillieth d’avoir accueilli Madeleine Charnaux dans leur collection.

Daniel Cologne

• Madeleine Charnaux, Qui a tué Marina Sturm ?, Éditions Auda Isarn, coll. « Le Lys noir », 2017, 184 p., 12 €.

Interview with Michael Walker

MW-how-photo.jpg

Counter-Currents Radio Podcast No. 210
Interview with Michael Walker

Audio version: To listen in a player, use the one above or click here [2]. To download the mp3, right-click here [2] and choose “save link as” or “save target as.” To subscribe to the CC podcast RSS feed, click here [3].

https://www.counter-currents.com/2018/01/counter-currents...

Greg Johnson, John Morgan, and Michael Polignano reconvene for a new weekly Counter-Currents Radio podcast. This week, we interview author and founder of the British New Right magazine The Scorpion, Michael Walker.

  • Introduction: 0:17
  • What led Michael Walker to create The Scorpion: 3:05
  • What was the rationale for naming the publication “The Scorpion“: 10:45
  • What kind of circulation did The Scorpion have: 18:00
  • Was anyone else involved with the production of The Scorpion: 19:27
  • The issue of Anglo-Saxon anti-intellectualism: 21:30
  • Walker’s opinion of populism, the Alt Right, and alternative media: 23:45
  • How the Right in Britain today compares to how it was in 1981: 32:25
  • How most people are only concerned with peace and prosperity: 37:42
  • The extreme reaction of the Left to Brexit and Trump’s election: 41:07
  • Nigel Farage’s call for a second Brexit referendum: 53:52
  • The Austrian election: 57:55
  • How the Austrian election and the new ÖVP is an example of ideological hegemony: 63:20
  • Walker’s career as a playwright and what he hopes to accomplish with it: 69:03
  • The importance of making political and metapolitical work financially possible: 81:40
  • Walker’s recollections of Jonathan Bowden: 87:00

    MW-affaxresdefault.jpg

Daniel Bell: The Man Who Foresaw the West’s Fantasia

bell^pic.jpg

Daniel Bell: The Man Who Foresaw the West’s Fantasia

While he couldn't predict selfies, multiculturalism, or Oprah, Daniel Bell sensed the rage against bourgeois order would eventually lead to crisis.

De quoi Savitri Devi est-elle le nom?

SD-photo-passport17.jpg

De quoi Savitri Devi est-elle le nom?

Chargé d’enseignement, auteur, essayiste

Propos recueillis par Michel Lhomme

Ex: https://metamag.fr

Michel Lhomme : Après l’Europe et l’éternel débat du fédéralisme européen, nous nous retrouvons pour un livre déroutant venant de votre part, une biographie sur l’indianiste Savitri Devi née à Lyon en 1905, figure connue du monde underground et qui a été la première à considérer Adolf Hitler comme un avatar, un dieu venu sur terre sous forme humaine pour restaurer l’Age d’Or. Alors de quoi Savitri Devi est-elle le nom ? Comment expliquer individuellement cet intérêt porté à une « païenne végan » pour parler comme l’époque ?

savitri-devi-couv.jpgFranck Buleux: Écrire une biographie sur Savitri Devi, c’est surtout avoir la capacité préalable, et nécessaire, d’éloigner de son propre esprit la reductio ad hitlerum dont elle a fait – et fait toujours – l’objet et, il faut bien le dire, dans laquelle elle a baigné de son plein gré. Toutefois, refuser de réduire une personne à un mythe même convenu – et accepté -est l’essence même du respect de la nature humaine, par définition complexe.
Il n’est pas question de nier la proximité de cette femme avec les individus qui composèrent l’Internationale nationale-socialiste après la Seconde Guerre mondiale jusqu’à, et au-delà, de sa mort en 1982. Mais malgré cela, ses rencontres ne se sont pas limitées à des admirateurs du Führer allemand.

Mais comment expliquer individuellement cet intérêt pour une païenne végan pour parler comme l’époque ?

Véritable dépositaire de la défense animale, voire végétale et minérale, Savitri Devi consacra son existence aux être non-humains qu’elle considérait probablement mieux, car meilleurs, que ses propres congénères. Elle déifiait la Nature pour laquelle elle vouait un culte immodéré. Devenue hindouiste, elle n’écartait pas le phénomène de la réincarnation auquel elle n’appliquait aucune hiérarchisation (contrairement à la réincarnation traditionnelle qui privilégie une évolution vers la perfection humaine).
Intriguée aussi par le monde de l’occulte, elle affirma sa proximité avec de nombreuses sociétés secrètes, de la Rose-Croix, qui ira jusqu’à éditer certains de ses travaux sur le pharaon Akhenaton, jusqu’à la franc-maçonnerie en passant par la Société théosophique.
Érudite, titulaire d’un double doctorat, littéraire comme scientifique, cette femme complexe ne fut rien d’autre… qu’une femme libre. Libre à travers le temps et l’espace, née à Lyon, convertie à l’hindouisme en Inde, morte en Grande-Bretagne, inhumée à Arlington, en Virginie…
Elle manifesta cette liberté suprême par la défense des proscrits et des réprouvés.

Une femme libre mais sans enfants ?

Son regret ultime, ne pas avoir pu transmettre. Transmettre à un fils, une fille… à un être qui aurait pu continuer son combat, qui aurait pu tout simplement la comprendre. Mais comment mettre au monde lorsque l’on a pris l’option d’une union chaste ? Comment mettre au monde quand on a découvert des origines que l’on repousse?
Oui, je sais, cette femme solitaire peut susciter des polémiques mais elle ne manquera pas de vous intriguer, de vous déplaire comme de vous émouvoir. C’est ce que j’ai cherché à transmettre par ce court travail. Pour moi, à travers l’ordre établi du monde, Savitri Devi tenta de survivre à contre-temps et à contre-courant dans le monde du kali yuga.

Indubitablement effectivement, dans cette brève mais dense biographie, ni complaisante, ni assassine, vous découvrirez une femme en quête de ses propres repères mais son univers, le monde qui l’entoure n’est-il jamais que le reflet de son propre être ?

Certainement, Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux, cette inscription au seuil du Temple de Delphes reflète pour moi toute la vie de Savitri Devi. Née Maximiani Portas, elle s’était muée en Savitri Devi, tel le papillon abandonnant la chenille. Et la quête qu’elle entreprit, qui la mena jusqu’en Inde, est éternelle. Elle est aussi la nôtre.

SD-780692371947.jpgQue découvrirons-nous alors dans cette biographie ?

Dans cette biographie, vous découvrirez:
– que Savitri Devi quitte l’Europe pour l’Inde avant l’arrivée de Hitler au pouvoir en Allemagne ;
– que Savitri Devi épousa un Brahmane pour éviter d’être expulsée d’Inde ;
– qu’elle fut la préceptrice, à Athènes, d’un futur intellectuel trotskiste ;
– qu’elle rentra en Europe, faute d’avoir pu être reconnue comme elle le souhaitait en Inde ;
– qu’elle eut des amitiés maçonniques avec lesquelles elle partagea des conceptions philosophiques ;
– qu’elle travailla pour l’Éducation nationale française (dont elle fut pensionnée lors de sa retraite) ;
– qu’elle séjourna au cœur de la Normandie chez la nièce de Christian Dior pour rédiger son autobiographie ;
et pourquoi elle ne souhaitait pas d’héritiers biologiques ?

En somme elle n’était pas une femme ordinaire ?

Oui et décidément, Savitri Devi ne fut pas une femme ordinaire. Trente-cinq ans après son départ, il est probablement temps de découvrir, un peu, cette femme qui se situait hors du Temps.

Pour notre part, nous avions lu il y a quelques années la biographie intellectuelle de 336 pages de Nicholas Goodrick-Clarke, “Savitri Devi, la grande prêtresse d’Hitler”. Dans cette biographie à l’anglo-saxone, Goodrick-Clarke s’intéressait à la formation intellectuelle de Savitri, au nationalisme hindou, aux réseaux clandestins d’après-guerre, à l’émergeance du révisionnisme, à l’internationale néo-nazie, à l’héritage idéologique de S. Devi au sein de divers mouvements nationalistes, écologistes et au cœur du New Age. Croyez-vous aussi que la doctrine de Savitri Devi soit comme une passerelle entre le mysticisme aryen associé à l’extrême droite et le paganisme du Nouvel Age ? Comment caractériseriez-vous finalement cette doctrine et en quoi peut-elle nous intéresser aujourd’hui ? De quelle religion avons-nous donc besoin ?

Le livre que vous citez est issu d’une thèse universitaire et utilisant une technique relativement attrape-tout, à partir d’un mot-clé, il brode tout en oubliant le sujet principal, Savitri Devi, ce qui lui permet ainsi de « faire des pages ». Pour en revenir à votre question, Savitri Devi cherche la Vérité, c’est-à-dire une théorie absolue et transcendante qui lui permet d’affirmer que la Nature est éternelle s’incarnant dans différents éléments et l’Homme n’est qu’une espèce de parasite éphémère. Sa conception du monde nous renvoie à une prépondérance de Gaïa contre l’Homme, en cela les mouvements écologiques alternatifs (la « deep ecology ») rejoignent la pensée de Savitri Devi. Le politologue Stéphane François l’avait déjà relevé dans son livre “L’écologie politique“, paru en 2012 aux éditions du Cerf.

Il y a une permanence incarnée dans le monde naturel dans la pensée de Savitri Devi qui va bien au-delà de la perception de nos contemporains sur sa propre personne. Sa doctrine est, vous venez de le relever, beaucoup plus religieuse que politique. Ses rencontres, qu’elle n’a jamais rejetées, en firent un archétype de l’extrême-droite la plus radicale mais sa pensée, son mode de vie, la plupart de ses écrits nous ramènent vers un courant traditionnaliste universel en quête d’absolu et de vérité, où l’Homme moderne n’a guère sa place. Ses aspirations anti-modernistes et son apparence indianiste auraient pu faire de Savitri Devi une femme inspirant une dissidence sociale, voire religieuse mais notre époque l’a brusquement abandonné tout près de la jetée. Elle aurait préféré la haute mer. Elle restera donc un rocher contre le Temps, et comme elle s’auto-définissait, une femme « pure, dure, sûre »!

lundi, 29 janvier 2018

Présidentielles tchèques : Zeman réélu pour un deuxième mandat

milo zeman.JPG

Présidentielles tchèques : Zeman réélu pour un deuxième mandat

Ex: http://www.zuerst.de

Prague. Les Présidentielles tchèques donnent un bon résultat pour l’Europe parce qu’il est mauvais pour les eurocrates et pour les gauches dévoyées : l’actuel Président tchèque Milos Zeman est réélu et pourra exercer son mandat pendant cinq années supplémentaires. Après le dépouillement des résultats de 95% des bureaux de vote, force était de constater, samedi après-midi, qu’il emportait les présidentielles avec un score de 52,2%, tandis que son concurrent Jiri Drahos obtenait 47,8% des suffrages.

Zeman occupe la fonction de Président depuis 2013. Âgé aujourd’hui de 73 ans, cet ancien premier ministre d’un gouvernement de gauche est devenu, contrairement à beaucoup de ses homologues socialistes d’Europe occidentale, un critique virulent de toute immigration musulmane vers l’Europe. Il a eu aussi maintes fois l’occasion de critiquer les sanctions de l’UE contre la Russie, alors que son concurrent, le scientifique Drahos, est considéré comme pro-occidental. Zeman s’est également engagé pour que les Tchèques aient le droit de porter les armes, pour que le peuple tout entier soit armé pour faire face à tout éventuel problème.

Zeman, malgré son étiquette de gauche, se trouve sur la même longueur d’onde que le nouveau gouverment du « populiste de droite » Andrej Babis qui, toutefois, n’a pu obtenir, ces derniers jours, un vote de confiance. Babis a donc présenté la démission de son gouvernement mais on peut d’ores et déjà envisager que l’ancien et nouveau Président Zeman lui confiera, une fois de plus, la tâche de former un gouvernement.

Jean de Brem

JdB-2.jpg

Jean de Brem

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

En 1964, les Éditions de la Table Ronde publient Le testament d’un Européen. Le titre de cette formidable fresque historique européenne revient à l’éditeur. En effet, l’auteur, Jean de Brem, avait été assassiné par des flics, quelques mois plutôt, le 18 avril 1963 dans le Ve arrondissement près du Panthéon et de la Montagne Sainte-Geneviève.

JdB-1.jpgLe lieu de la mort de Jean Nicolas Marcetteau de Brem, né le 2 août 1935, est un tragique clin d’œil pour ce défenseur de la civilisation chrétienne européenne. Sous-lieutenant parachutiste, il combat en Algérie et, sous les ordres du colonel Château-Jobert, futur doctrinaire « contrerévolutionnaire », participe à l’intervention de Suez en novembre 1956.

Démobilisé, le cousin du futur ministre gaulliste Olivier Guichard continue la lutte à Paris Match, à Combat et dans la revue L’Esprit public, bientôt considérée comme la tribune quasi-officielle de l’OAS dont Brem est par ailleurs un membre actif. Poète, il adapte en français le chant militaire allemand J’avais un camarade qu’il nomme La Cavalcade. Mais son grand œuvre demeure Le testament d’un Européen.

Cette épopée en deux volumes se compose de cinq parties, de « L’Antiquité. L’exemple des grands anciens » au « Grand séisme. Les quatre révolutions » en passant par « Le classicisme. L’Europe des cousins », « La Renaissance. Le temps des capitaines » et « Le Moyen Âge. Le temps de la foi ». L’auteur ne cache pas ses convictions chrétiennes, à la fois viriles et œcuméniques puisqu’il prend en compte l’Orthodoxie, spiritualité gréco-byzantine de l’« Europe d’Orient », et le protestantisme, croyance germano-nordique de l’« Europe septentrionale ».

Il inclut dans la longue durée historique les paganismes antiques aux différentes phases temporelles et géographiques du christianisme. Guelfe d’Empire – il salue l’ouverture du concile Vatican II -, il se montre sévère à l’égard de Frédéric II de Hohenstaufen et n’hésite pas à parler de « Jeune Europe », d’« Europe nation », de « Grand Empire » romain qu’il qualifie d’« État-nation de la “ Mare Nostrum ”, premier gouvernement mondial (p. 118) ». Il célèbre bien sûr Charlemagne, le Grand Duc d’Occident Charles le Téméraire, Charles Quint, Philippe II de Habsbourg et même Louis XIV, maître de facto entre 1700 et 1713 d’un empire mondial franco-espagnol. Jean de Brem ne s’attarde pas sur Napoléon Bonaparte; on peut supposer qu’il avait l’intention de développer cette dernière tentative de bâtir une Europe unie française…

JdB-3.jpgDes cinq parties, la dernière est la plus courte et la moins aboutie. Il faut préciser que Jean de Brem fut tué en pleine correction du premier jeu d’épreuves. Il prévoyait en outre un troisième volume dans lequel il eût exposé sa vision européenne. Avait-il des notes ? Ses proches ont-ils conservé ses brouillons ? Par cet ouvrage, il voulait « exalter les martyrs et les grands capitaines qui ont installé sur le monde la domination de l’Europe [… et] dénoncer les apprentis sorciers qui ont provoqué le recul de l’Occident et préparent maintenant son écrasement total (p. 12) ».

Anti-communiste virulent, Jean de Brem approuve le projet d’Eurafrique et soutient toutes les luttes coloniales de l’Occident européen. « L’Afrique, source d’énergies futures, continent à la mesure de la politique planétaire, peut et doit devenir le théâtre de la Renaissance européenne, au profit des Africains comme des Blancs. […] La confédération eurafricaine est la plus grande force de dissuasion que nous puissions édifier (p. 15). » Brem estime que « l’Europe, pour être plus forte, doit premièrement s’unifier. Ensuite elle doit s’allier étroitement au “ moindre mal ” américain. Ce qui manque aux États-Unis, ce colosse cybernétique sans âme, l’Europe l’a depuis plusieurs millénaires : des raisons de se battre, un idéal à défendre ! (p. 13) ».

Écrit dans un style épique qui donne un indéniable souffle historique à ce panorama – hélas inachevé ! – de la geste européenne, Le testament d’un Européen a paradoxalement influencé Dominique Venner et Jean Mabire au moment d’Europe-Action. Nonobstant son arrière-plan catholique, le plaidoyer de Jean de Brem en faveur de la nation européenne emporte l’adhésion.

Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, souhaite vérifier la qualité des manuels de l’enseignement primaire. Quand des éditeurs oseront-ils concevoir des manuels destinés aux collégiens et aux lycéens ouvertement inspirés du Testament d’un Européen ?

Georges Feltin-Tracol

• Chronique n° 13, « Les grandes figures identitaires européennes », lue le 2 janvier 2018 à Radio-Courtoisie au « Libre-Journal des Européens » de Thomas Ferrier.

• Disponible, Le testament d’un Européen peut être commandé à Francephi : https://francephi.com/livre/le-testament-dun-europeen

15:49 Publié dans Hommages, Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hommage, livre, jean de brem, europe, france | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Les cinq leçons de Carl Schmitt pour la Russie

schmitt_russie.jpg

Les cinq leçons de Carl Schmitt pour la Russie

par Alexandre Douguine

Ex: https://www.geopolica.ru

Extrait de The Conservative Revolution (Moscou, Arktogaïa, 1994), The Russian Thing Vol. 1 (2001), et de The Philosophy of War (2004). – Article écrit en 1991, publié pour la première fois dans le journal Nash Sovremennik en 1992.

Le fameux juriste allemand Carl Schmitt est considéré comme un classique du droit moderne. Certains l’appellent le « Machiavel moderne » à cause de son absence de moralisme sentimental et de rhétorique humaniste dans son analyse de la réalité politique. Carl Schmitt pensait que, pour déterminer les questions juridiques, il faut avant tout donner une description claire et réaliste des processus politiques et sociaux et s’abstenir d’utopisme, de vœux pieux, et d’impératifs et de dogmes a priori. Aujourd’hui, l’héritage intellectuel et légal de Carl Schmitt est un élément nécessaire de l’enseignement juridique dans les universités occidentales. Pour la Russie aussi, la créativité de Schmitt est d’un intérêt et d’une importance particuliers parce qu’il s’intéressait aux situations critiques de la vie politique moderne. Indubitablement, son analyse de la loi et du contexte politique de la légalité peut nous aider à comprendre plus clairement et plus profondément ce qui se passe exactement dans notre société et en Russie.

Leçon #1 : la politique au-dessus de tout

Le principe majeur de la philosophie schmittienne de la loi était l’idée de la primauté inconditionnelle des principes politiques sur les critères de l’existence sociale. C’est la politique qui organisait et prédéterminait la stratégie des facteurs économiques internes et leur pression croissante dans le monde moderne. Schmitt explique cela de la manière suivante : « Le fait que les contradictions économiques sont maintenant devenues des contradictions politiques … ne fait que montrer que, comme toute autre activité humaine, l’économie parcourt une voie qui mène inévitablement à une expression politique » [1]. La signification de cette allégation employée par Schmitt, comprise comme un solide argument historique et sociologique, revient en fin de compte à ce qu’on pourrait définir comme une théorie de l’« idéalisme historique collectif ». Dans cette théorie, le sujet n’est pas l’individu ni les lois économiques développant la substance, mais un peuple concret, historiquement et socialement défini qui maintient, avec sa volonté dynamique particulière – dotée de sa propre loi – son existence socioéconomique, son unité qualitative, et la continuité organique et spirituelle de ses traditions sous des formes différentes et à des époques différentes. D’après Schmitt, le domaine politique représente l’incarnation de la volonté du peuple exprimée sous diverses formes reliées aux niveaux juridique, économique et sociopolitique.

Une telle définition de la politique est en opposition avec les modèles mécanistes et universalistes de la structure sociétale qui ont dominé la jurisprudence et la philosophie juridique occidentales depuis l’époque des Lumières. Le domaine politique de Schmitt est directement associé à deux facteurs que les doctrines mécanistes ont tendance à ignorer : les spécificités historiques d’un peuple doté d’une qualité particulière de volonté, et la particularité historique d’une société, d’un Etat, d’une tradition et d’un passé particuliers qui, d’après Schmitt, se concentrent dans leur manifestation politique. Ainsi, l’affirmation par Schmitt de la primauté de la politique introduisait dans la philosophie juridique et la science politique des caractéristiques qualitatives et organiques qui ne sont manifestement pas incluses dans les schémas unidimensionnels des « progressistes », qu’ils soient du genre libéral-capitaliste ou du genre marxiste-socialiste.

La théorie de Schmitt considérait donc la politique comme un phénomène « organique » enraciné dans le « sol ».

La Russie et le peuple russe ont besoin d’une telle compréhension de la politique pour bien gouverner leur propre destinée et éviter de devenir une fois de plus, comme il y a sept décennies, les otages d’une idéologie réductionniste antinationale ignorant la volonté du peuple, son passé, son unité qualitative, et la signification spirituelle de sa voie historique.

Leçon #2 : qu’il y ait toujours des ennemis ; qu’il y ait toujours des amis

Dans son livre Le concept du Politique, Carl Schmitt exprime une vérité extraordinairement importante : « Un peuple existe politiquement seulement s’il forme une communauté politique indépendante et s’oppose à d’autres communautés politiques pour préserver sa propre compréhension de sa communauté spécifique ». Bien que ce point de vue soit en désaccord complet avec la démagogie humaniste caractéristique des théories marxiste et libérale-démocratique, toute l’histoire du monde, incluant l’histoire réelle (pas l’histoire officielle) des Etats marxistes et libéraux-démocratiques, montre que ce fait se vérifie dans la pratique, même si la conscience utopique post-Lumières est incapable de le reconnaître. En réalité, la division politique entre « nous » et « eux » existe dans tous les régimes politiques et dans toutes les nations. Sans cette distinction, pas un seul Etat, pas un seul peuple et pas une seule nation ne pourraient préserver leur propre identité, suivre leur propre voie et avoir leur propre histoire.

Analysant sobrement l’affirmation démagogique de l’antihumanisme, de l’« inhumanité » d’une telle opposition, et de la division entre « nous » et « eux », Carl Schmitt note : « Si on commence à agir au nom de toute l’humanité, au nom de l’humanisme abstrait, en pratique cela signifie que cet acteur refuse toute qualité humaine à tous les adversaires possibles, se déclarant ainsi comme étant au-delà de l’humanité et au-delà de la loi, et donc menace potentiellement d’une guerre qui serait menée jusqu’aux limites les plus terrifiantes et les plus inhumaines ». D’une manière frappante, ces lignes furent écrites en 1934, longtemps avant l’invasion terroriste du Panama ou le bombardement de l’Irak par les Américains. De plus, le Goulag et ses victimes n’étaient pas encore très connus en Occident. Vu sous cet angle, ce n’est pas la reconnaissance réaliste des spécificités qualitatives de l’existence politique d’un peuple, présupposant toujours une division entre « nous » et « eux », qui conduit aux conséquences les plus terrifiantes, mais plutôt l’effort vers une universalisation totale et pour faire entrer les nations et les Etats dans les cellules des idées utopiques d’une « humanité unie et uniforme » dépourvue de toutes différences organiques ou historiques.

41SyAtkwoQL._SX322_BO1,204,203,200_.jpgCommençant par ces conditions préalables, Carl Schmitt développa la théorie de la « guerre totale » et de la « guerre limitée » dénommée « guerre de forme », où la guerre totale est la conséquence de l’idéologie universaliste utopique qui nie les différences culturelles, historiques, étatiques et nationales naturelles entre les peuples. Une telle guerre représente en fait une menace de destruction pour toute l’humanité. Selon Carl Schmitt, l’humanisme extrémiste est la voie directe vers une telle guerre qui entraînerait l’implication non seulement des militaires mais aussi des populations civiles dans un conflit. Ceci est en fin de compte le danger le plus terrible. D’un autre coté, les « guerres de forme » sont inévitables du fait des différences entre les peuples et entre leurs cultures indestructibles. Les « guerres de forme » impliquent la participation de soldats professionnels, et peuvent être régulées par les règles légales définies de l’Europe qui portaient jadis le nom de Jus Publicum Europeum (Loi Commune Européenne). Par conséquent, de telles guerres représentent un moindre mal dont la reconnaissance théorique de leur inévitabilité peut protéger les peuples à l’avance contre un conflit « totalisé » et une « guerre totale ». A ce sujet, on peut citer le fameux paradoxe établi par Chigalev dans Les Possédés de Dostoïevski, qui dit : « En partant de la liberté absolue, j’arrive à l’esclavage absolu ». En paraphrasant cette vérité et en l’appliquant aux idées de Carl Schmitt, on peut dire que les partisans de l’humanisme radical « partent de la paix totale et arrivent à la guerre totale ». Après mûre réflexion, nous pouvons voir l’application de la remarque de Chigalev dans toute l’histoire soviétique. Si les avertissements de Carl Schmitt ne sont pas pris en compte, il sera beaucoup plus difficile de comprendre leur véracité, parce qu’il ne restera plus personne pour attester qu’il avait raison – il ne restera plus rien de l’humanité.

Passons maintenant au stade final de la distinction entre « nous » et « eux », celui des « ennemis » et des « amis ». Schmitt pensait que la centralité de cette paire est valable pour l’existence politique d’une nation, puisque c’est par ce choix que se décide un profond problème existentiel. Julien Freud, un disciple de Schmitt, formula cette thèse de la manière suivante : « La dualité ennemi-ami donne à la politique une dimension existentielle puisque la possibilité théoriquement impliquée de la guerre soulève le problème et le choix de la vie et de la mort dans ce cadre » [2].

Le juriste et le politicien, jugeant en termes d’« ennemi » et d’« ami » avec une claire conscience de la signification de ce choix, opèrent ainsi avec les mêmes catégories existentielles qui donnent aux décisions, aux actions et aux déclarations les qualités de réalité, de responsabilité et de sérieux dont manquent toutes les abstractions humanistes, transformant ainsi le drame de la vie et de la mort en une guerre dans un décor chimérique à une seule dimension. Une terrible illustration de cette guerre fut la couverture du conflit irakien par les médias occidentaux. Les Américains suivirent la mort des femmes, des enfants et des vieillards irakiens à la télévision comme s’ils regardaient des jeux vidéo du genre Guerre des Etoiles. Les idées du Nouvel Ordre Mondial, dont les fondements furent posés durant cette guerre, sont les manifestations suprêmes de la nature terrible et dramatique des événements lorsqu’ils sont privés de tout contenu existentiel.

La paire « ennemi »/« ami » est une nécessité à la fois externe et interne pour l’existence d’une société politiquement complète, et devrait être froidement acceptée et consciente. Sinon, tout le monde peut devenir un « ennemi » et personne n’est un « ami ». Tel est l’impératif politique de l’histoire.

Leçon #3 : La politique des «circonstances exceptionnelles» et la Décision

L’un des plus brillants aspects des idées de Carl Schmitt était le principe des « circonstances exceptionnelles » (Ernstfall en allemand, littéralement « cas d’urgence ») élevé au rang d’une catégorie politico-juridique. D’après Schmitt, les normes juridiques décrivent seulement une réalité sociopolitique normale s’écoulant uniformément et continuellement, sans interruptions. C’est seulement dans de telles situations purement normales que le concept de la « loi » telle qu’elle est comprise par les juristes s’applique pleinement. Il existe bien sûr des règlementations pour les « situations exceptionnelles », mais ces réglementations sont le plus souvent déterminées sur la base de critères dérivés d’une situation politique normale. La jurisprudence, d’après Schmitt, tend à absolutiser les critères d’une situation normale lorsqu’on considère l’histoire de la société comme un processus uniforme légalement constitué. L’expression la plus complète de ce point de vue est la « pure théorie de la loi » de Kelsen. Carl Schmitt, cependant, voit cette absolutisation d’une « approche légale » et du « règne de la loi » [= « Etat de droit »] comme un mécanisme tout aussi utopique et comme un universalisme naïf produit par les Lumières avec ses mythes rationalistes. Derrière l’absolutisation de la loi se dissimule une tentative de « mettre fin à l’histoire » et de la priver de son motif passionné créatif, de son contenu politique, et de ses peuples historiques. Sur la base de cette analyse, Carl Schmitt postule une théorie particulière des « circonstances exceptionnelles » ou Ernstfall.

L’Ernstfall est le moment où une décision politique est prise dans une situation qui ne peut plus être régulée par des normes légales conventionnelles. La prise de décision dans des circonstances exceptionnelles implique la convergence d’un certain nombre de facteurs organiques divers reliés à la tradition, au passé historique, aux constantes culturelles, ainsi qu’aux expressions spontanées, aux efforts héroïques, aux impulsions passionnées, et à la manifestation soudaine des énergies existentielles profondes. La Vraie Décision (le terme même de « décision » était un concept clé de la doctrine légale de Schmitt) est prise précisément dans une circonstance où les normes légales et sociales sont « interrompues » et où celles qui décrivent le cours naturel des processus politiques et qui commencent à agir dans le cas d’une « situation d’urgence » ou d’une « catastrophe sociopolitique » ne sont plus applicables. « Circonstances exceptionnelles » ne signifie pas seulement une catastrophe, mais le positionnement d’un peuple et de son organisme politique devant un problème, faisant appel à l’essence historique d’un peuple, à son noyau, et à sa nature secrète qui fait de ce peuple ce qu’il est. Par conséquent, la Décision politiquement prise dans une telle situation est une expression spontanée de la volonté profonde du peuple répondant à un défi global, existentiel ou historique (ici on peut comparer les vues de Schmitt à celles de Spengler, Toynbee et d’autres révolutionnaires-conservateurs avec lesquels Carl Schmitt avait des liens personnels).

Dans l’école juridique française, les adeptes de Carl Schmitt ont développé le terme spécial de « décisionnisme », à partir du mot français décision (allemand Entscheidung). Le décisionnisme met l’accent sur les « circonstances exceptionnelles », puisque c’est dans ce cas que la nation ou le peuple actualise son passé et détermine son avenir dans une dramatique concentration du moment présent où trois caractéristiques qualitatives du temps fusionnent, à savoir le pouvoir de la source d’où est issu ce peuple dans l’histoire, la volonté du peuple de faire face à l’avenir et d’affirmer le moment précis où le « Moi » éternel est révélé et où le peuple prend entièrement la responsabilité dans ses mains, et l’identité elle-même.

En développant sa théorie de l’Ernstfall et de l’Entscheidung, Carl Schmitt montra aussi que l’affirmation de toutes les normes juridiques et sociales survient précisément durant de telles périodes de « circonstances exceptionnelles » et qu’elle est primordialement basée sur une décision à la fois spontanée et prédéterminée. Le moment intermittent de l’expression singulière de la volonté porte plus tard sur la base des normes constantes qui existent jusqu’à l’émergence de nouvelles « circonstances exceptionnelles ». Cela illustre en fait parfaitement la contradiction inhérente aux idées des partisans radicaux du « règne de la loi » : ils ignorent consciemment ou inconsciemment le fait que l’appel à la nécessité d’établir le « règne de la loi » est lui-même une décision basée précisément sur la volonté politique d’un groupe donné. En un sens, cet impératif est avancé arbitrairement et pas comme une sorte de nécessité fatale et inévitable. Par conséquent, l’acceptation ou le refus du « règne de la loi » et en général l’acceptation ou le refus de tel ou tel modèle légal doit coïncider avec la volonté du peuple ou de l’Etat particulier auquel est adressée la proposition ou l’expression de volonté. Les partisans du « règne de la loi » tentent implicitement de créer ou d’utiliser les « circonstances exceptionnelles » pour mettre en œuvre leur concept, mais le caractère insidieux d’une telle approche et l’hypocrisie et l’incohérence de cette méthode peuvent tout naturellement provoquer une réaction populaire, dont le résultat pourrait très bien apparaître comme une autre décision alternative. De plus, il est d’autant plus probable que cette décision conduirait à l’établissement d’une réalité légale différente de celle recherchée par les universalistes.

51XZ6ZEG2JL._SX195_.jpgLe concept de la Décision au sens supra-légal ainsi que la nature même de la Décision elle-même s’accordent avec la théorie du « pouvoir direct » et du « pouvoir indirect » (potestas directa et potestas indirecta). Dans le contexte spécifique de Schmitt, la Décision est prise non seulement dans les instances du « pouvoir direct » (le pouvoir des rois, des empereurs, des présidents, etc.) mais aussi dans les conditions du « pouvoir indirect », dont des exemples peuvent être les organisations religieuses, culturelles ou idéologiques qui influencent l’histoire d’un peuple et d’un Etat, certes pas aussi clairement que les décisions des gouvernants mais qui opèrent néanmoins d’une manière beaucoup plus profonde et formidable. Schmitt pense donc que le « pouvoir indirect » n’est pas toujours négatif, mais d’un autre coté il ne fait qu’une allusion implicite au fait qu’une décision contraire à la volonté du peuple est le plus souvent adoptée et mise en œuvre par de tels moyens de « pouvoir indirect ». Dans son livre Théologie politique et dans sa suite Théologie politique II, il examine la logique du fonctionnement de ces deux types d’autorité dans les Etats et les nations.

La théorie des « circonstances exceptionnelles » et le thème de la Décision (Entscheidung) associé à cette théorie sont d’une importance capitale pour nous aujourd’hui, puisque c’est précisément à un tel moment dans l’histoire de notre peuple et de notre Etat que nous nous trouvons, et les « circonstances exceptionnelles » sont devenues l’état naturel de la nation – et non seulement l’avenir politique de notre peuple mais aussi la compréhension et la confirmation essentielle de notre passé dépendent maintenant de la Décision. Si la volonté du peuple s’affirme et que le choix national du peuple dans ce moment dramatique peut clairement définir qui est « nous » et « eux », identifier les amis et les ennemis, et arracher une auto-affirmation politique à l’histoire, alors la Décision de l’Etat russe et du peuple russe sera sa propre décision existentielle historique qui placera un sceau de loyauté sur des millénaires de « construction du peuple » et de « construction de l’empire ». Cela signifie que notre avenir sera russe. Si d’autres prennent la décision, à savoir les partisans de l’« approche humaine commune », de l’« universalisme » et de l’« égalitarisme », qui depuis la mort du marxisme représentent les seuls héritiers directs de l’idéologie utopique et mécaniste des Lumières, alors non seulement le futur ne sera pas russe mais il sera « seulement humain » et donc il n’y aura « pas de futur » (du point de vue de l’être du peuple, de l’Etat et de la nation). Notre passé perdra tout son sens et les drames de la grande histoire russe se transformeront en une farce stupide sur la voie du mondialisme et du nivellement culturel complet au profit d’une « humanité universelle », c’est-à-dire l’« enfer de la réalité légale absolue ».

Leçon #4 : Les impératifs d’un Grand Espace

Carl Schmitt s’intéressa aussi à l’aspect géopolitique des questions sociales. La plus importante de ses idées dans ce domaine est la notion de « Grand Espace » (Grossraum) qui attira plus tard l’attention de nombreux économistes, juristes, géopoliticiens et stratèges européens. La signification conceptuelle du « Grand Espace » dans la perspective analytique de Carl Schmitt se trouve dans la délimitation des régions géographiques à l’intérieur desquelles les variantes de la manifestation politique des peuples et des Etats spécifiques inclus dans cette région peuvent être conjointes pour accomplir une généralisation harmonieuse et cohérente exprimée dans une « Grande Union Géopolitique ». Le point de départ de Schmitt était la question de la Doctrine Monroe américaine impliquant l’intégration économique et stratégique des puissances américaines dans les limites naturelles du Nouveau Monde. Etant donné que l’Eurasie représente un conglomérat beaucoup plus divers d’ethnies, d’Etats et de cultures, Schmitt postulait qu’il fallait donc parler non tant de l’intégration continentale totale que de l’établissement de plusieurs grandes entités géopolitiques, chacune devant être gouvernée par un super-Etat flexible. Ceci est assez analogue au Jus Publicum Europeaum ou à la Sainte Alliance proposée à l’Europe par l’empereur russe Alexandre 1er.

D’après Carl Schmitt, un « Grand Espace » organisé en une structure politique flexible de type impérial et fédéral équilibrerait les diverses volontés nationales, ethniques et étatiques et jouerait le rôle d’une sorte d’arbitre impartial ou de régulateur des conflits locaux possibles, les « guerres de forme ». Schmitt soulignait que les « Grands Espaces », pour pouvoir être des formations organiques et naturelles, doivent nécessairement représenter des territoires terrestres, c’est-à-dire des entités tellurocratiques, des masses continentales. Dans son fameux livre Le Nomos de la Terre, il traça l’histoire de macro-entités politiques continentales, la voie de leur intégration, et la logique de leur établissement graduel en tant qu’empires. Carl Schmitt remarquait que parallèlement à l’existence de constantes spirituelles dans le destin d’un peuple, c’est-à-dire des constantes incarnant l’essence spirituelle d’un peuple, il existait aussi des constantes géopolitiques des « Grands Espaces » qui gravitent vers une nouvelle restauration avec des intervalles de plusieurs siècles ou même de millénaires. Dans ce sens, les macro-entités géopolitiques sont stables quand leur principe intégrateur n’est pas rigide ni recréé abstraitement, mais flexible, organique, et en accord avec la Décision des peuples, avec leur volonté, et avec leur énergie passionnée capable de les impliquer dans un bloc tellurocratique unifié avec leurs voisins culturels, géopolitiques ou étatiques.

La doctrine des « Grands Espaces » (Grossraum) fut établie par Carl Schmitt non seulement comme une analyse des tendances historiques dans l’histoire du continent, mais aussi comme un projet pour l’unification future que Schmitt considérait non seulement comme possible, mais désirable et même nécessaire en un certain sens. Julien Freund résuma les idées de Schmitt sur le futur Grossraum dans les termes suivants : « L’organisation de ce nouvel espace ne requerra aucune compétence scientifique, ni de préparation culturelle ou technique dans la mesure où elle surgira en résultat d’une volonté politique, dont l’ethos transforme l’apparence de la loi internationale. Dès que ce ‘Grand Espace’ sera unifié, la chose la plus importante sera la force de son ‘rayonnement’ » [3].

9782081228733-fr-300.jpgAinsi, l’idée schmittienne du « Grand Espace » possède aussi une dimension spontanée, existentielle et volitionnelle, tout comme le sujet fondamental de l’histoire selon lui, c’est-à-dire le peuple en tant qu’unité politique. Tout comme les géopoliticiens Mackinder et Kjellen, Schmitt opposait les empires thalassocratiques (la Phénicie, l’Angleterre, les Etats-Unis, etc.) aux empires tellurocratiques (l’empire romain, l’empire austro-hongrois, l’empire russe, etc.). Dans cette perspective, l’organisation harmonieuse et organique d’un espace n’est possible que pour les empires tellurocratiques, et la Loi Continentale ne peut être appliquée qu’à eux. La thalassocratie, sortant des limites de son Ile et initiant une expansion navale, entre en conflit avec les tellurocraties et, en accord avec la logique géopolitique, commence à miner diplomatiquement, économiquement et militairement les fondements des « Grands Espaces » continentaux. Ainsi, dans la perspective des « Grands Espaces » continentaux, Schmitt revient une fois de plus aux concepts des paires ennemis/amis et nous/eux, mais cette fois-ci à un niveau planétaire. La volonté des empires continentaux, les « Grands Espaces », se révèle dans la confrontation entre les macro-intérêts continentaux et les macro-intérêts maritimes. La « Mer » défie ainsi la « Terre », et en répondant à ce défi, la « Terre » revient le plus souvent à sa conscience de soi continentale profonde.

Comme remarque additionnelle, nous illustrerons la théorie du Grossraum avec deux exemples. A la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe, le territoire américain était divisé entre plusieurs pays du Vieux Monde. Le Far West, la Louisiane appartenaient aux Espagnols et plus tard aux Français ; le Sud appartenait au Mexique ; le Nord à l’Angleterre, etc. Dans cette situation, l’Europe représentait une puissance tellurocratique pour les Américains, empêchant l’unification géopolitique et stratégique du Nouveau Monde sur les plans militaire, économique et diplomatique. Après que les Américains aient obtenu l’indépendance, ils commencèrent graduellement à imposer de plus en plus agressivement leur volonté géopolitique au Vieux Monde, ce qui conduisit logiquement à l’affaiblissement de l’unité continentale du « Grand Espace » européen. Par conséquent, dans l’histoire géopolitique des « Grands Espaces », il n’y a pas de puissances absolument tellurocratiques ou absolument thalassocratiques. Les rôles peuvent changer, mais la logique continentale demeure constante.

En résumant la théorie schmittienne des « Grands Espaces » et en l’appliquant à la situation de la Russie d’aujourd’hui, nous pouvons dire que la séparation et la désintégration du « Grand Espace » autrefois nommé URSS contredit la logique continentale de l’Eurasie, puisque les peuples habitant nos terres ont perdu l’opportunité de faire appel à l’arbitrage de la superpuissance [soviétique] capable de réguler ou d’empêcher les conflits potentiels et réels. Mais d’un autre coté, le rejet de la démagogie marxiste excessivement rigide et inflexible au niveau de l’idéologie d’Etat peut conduire et conduira à une restauration spontanée et passionnée du Bloc Eurasien Oriental, puisqu’une telle reconstruction est en accord avec toutes les ethnies indigènes organiques de l’espace impérial russe. De plus, il est très probable que la restauration d’un Empire Fédéral, d’un « Grand Espace » englobant la partie orientale du continent, entraînerait au moyen de son « rayonnement de puissance » l’adhésion de ces territoires additionnels qui sont en train de perdre rapidement leur identité ethnique et étatique dans la situation géopolitique critique et artificielle prévalant depuis l’effondrement de l’URSS. D’autre part, la pensée continentale du génial juriste allemand nous permet de distinguer entre « nous » et « eux » au niveau continental.

La conscience de la confrontation naturelle et dans une certaine mesure inévitable entre les puissances tellurocratiques et thalassocratiques offre aux partisans et aux créateurs d’un nouveau Grand Espace une compréhension claire de l’« ennemi » auquel font face l’Europe, la Russie et l’Asie, c’est-à-dire les Etats-Unis d’Amérique avec leur alliée insulaire thalassocratique, l’Angleterre. En quittant le macro-niveau planétaire et en revenant au niveau de la structure sociale de l’Etat russe, il s’ensuit donc que la question devrait être posée : un lobby thalassocratique caché ne se trouve-t-il pas derrière le désir d’influencer la Décision russe des problèmes dans un sens « universaliste » qui peut exercer son influence par un pouvoir à la fois « direct » et « indirect » ?

Leçon #5 : La « paix militante » et la téléologie du Partisan

A la fin de sa vie (il mourut le 7 avril 1985), Carl Schmitt accorda une attention particulière à la possibilité d’une issue négative de l’histoire. Cette issue négative de l’histoire est en effet tout à fait possible si les doctrines irréalistes des humanistes radicaux, des universalistes, des utopistes et des partisans des « valeurs communes universelles », centrées sur le gigantesque potentiel symbolique de la puissance thalassocratique que sont les USA, parviennent à une domination globale et deviennent le fondement idéologique d’une nouvelle dictature mondiale – la dictature d’une « utopie mécaniste ». Schmitt pensait que le cours de l’histoire moderne se dirigeait inévitablement vers ce qu’il nommait la « guerre totale ».

Selon Schmitt, la logique de la « totalisation » des relations planétaires au niveau stratégique, militaire et diplomatique se base sur les points-clés suivants. A partir d’un certain moment de l’histoire, ou plus précisément à l'époque de la Révolution française et de l’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique, commença un éloignement fatal vis-à-vis des constantes historiques, juridiques, nationales et géopolitiques qui garantissaient auparavant l'harmonie organique sur la planète et qui servaient le « Nomos de la Terre ».

Sur le plan juridique, un concept quantitatif artificiel et atomique, celui des « droits individuels » (qui devint plus tard la fameuse théorie des « droits de l'homme »), commença à se développer et remplaça le concept organique des « droits des peuples », des « droits de l’Etat », etc. Selon Schmitt, l’élévation de l’individu et du facteur individuel isolé de sa nation, de sa tradition, de sa culture, de sa profession, de sa famille, etc., au niveau d’une catégorie juridique autonome signifie le début du « déclin de la loi » et sa transformation en une chimère égalitaire utopique, s’opposant aux lois organiques de l’histoire des peuples et des Etats, des régimes, des territoires et des unions.

Au niveau national, les principes organiques impériaux et fédéraux ont fini par être remplacés par deux conceptions opposées mais tout aussi artificielles : l’idée jacobine de l’« Etat-nation » et la théorie communiste de la disparition complète de l’Etat et du début de l'internationalisme total. Les empires qui avaient préservé des vestiges de structures organiques traditionnelles, comme l’Autriche-Hongrie, l’empire ottoman, l’empire russe, etc., furent rapidement détruits sous l’influence de facteurs externes aussi bien qu’internes. Enfin, au niveau géopolitique, le facteur thalassocratique s’intensifia à un tel degré qu’une profonde déstabilisation des relations juridiques entre les « Grands Espaces » eut lieu. Notons que Schmitt considérait la « Mer » comme un espace beaucoup plus difficile à délimiter et à ordonner juridiquement que celui de la « Terre ».

La diffusion mondiale de la dysharmonie juridique et géopolitique fut accompagnée par la déviation progressive des conceptions politico-idéologiques dominantes vis-à-vis de la réalité, et par le fait qu’elles devinrent de plus en plus chimériques, illusoires et en fin de compte hypocrites. Plus on parlait de « monde universel », plus les guerres et les conflits devenaient terribles. Plus les slogans devenaient « humains », plus la réalité sociale devenait inhumaine. C’est ce processus que Carl Schmitt nomma le début de la « paix militante », c’est-à-dire un état où il n’y a plus ni guerre ni paix au sens traditionnel. Aujourd’hui la « totalisation » menaçante contre laquelle Carl Schmitt nous avait mis en garde a fini par prendre le nom de « mondialisme ». La « paix militante » a reçu son expression complète dans la théorie du Nouvel Ordre Mondial américain qui dans son mouvement vers la « paix totale » conduit clairement la planète vers une nouvelle « guerre totale ».

Carl Schmitt pensait que la conquête de l’espace était le plus important événement géopolitique symbolisant un degré supplémentaire d’éloignement vis-à-vis de la mise en ordre légitime de l’espace, puisque le cosmos est encore plus difficilement « organisable » que l’espace maritime. Schmitt pensait que le développement de l’aviation était aussi un pas de plus vers la « totalisation » de la guerre, l’exploration spatiale étant le début du processus de la « totalisation » illégitime finale.

Parallèlement à l’évolution fatale de la planète vers une telle monstruosité maritime, aérienne et même spatiale, Carl Schmitt, qui s’intéressait toujours à des catégories plus globales (dont la plus petite était « l’unité politique du peuple »), en vint à être attiré par une nouvelle figure dans l’histoire, la figure du « Partisan ». Carl Schmitt y consacra son dernier livre, La théorie du Partisan. Schmitt vit dans ce petit combattant contre des forces bien plus puissantes une sorte de symbole de la dernière résistance de la tellurocratie et de ses derniers défenseurs.

Le partisan est indubitablement une figure moderne. Comme d’autres types politiques modernes, il est séparé de la tradition et il vit en-dehors du Jus Publicum. Dans son combat, le Partisan brise toutes les règles de la guerre. Il n’est pas un soldat, mais un civil utilisant des méthodes terroristes qui, en-dehors du temps de guerre, seraient assimilées à des actes criminels gravissimes apparentés au terrorisme. Cependant, d’après Schmitt, c’est le Partisan qui incarne la « fidélité à la Terre ». Le Partisan est, pour le dire simplement, une réponse légitime au défi illégitime masqué de la « loi » moderne.

0 bXwKHvaAXdbQ1z3o.jpg

Le caractère extraordinaire de la situation et l’intensification constante de la « paix militante » (ou « guerre pacifiste », ce qui revient au même) inspirent le petit défenseur du sol, de l’histoire, du peuple et de la nation, et constituent la source de sa justification paradoxale. L’efficacité stratégique du Partisan et de ses méthodes est, d’après Schmitt, la compensation paradoxale du début de la « guerre totale » contre un « ennemi total ». C’est peut-être cette leçon de Carl Schmitt, qui s’inspirait lui-même beaucoup de l’histoire russe, de la stratégie militaire russe, et de la doctrine politique russe, incluant des analyses des œuvres de Lénine et Staline, qui est la plus intimement compréhensible pour les Russes. Le Partisan est un personnage intégral de l’histoire russe, qui apparaît toujours quand la volonté du pouvoir russe et la volonté profonde du peuple russe lui-même prennent des directions divergentes.

Dans l’histoire russe, les troubles et la guerre de partisans ont toujours eu un caractère compensatoire purement politique, visant à corriger le cours de l’histoire nationale quand le pouvoir politique se sépare du peuple. En Russie, les partisans gagnèrent les guerres que le gouvernement perdait, renversèrent les systèmes économiques étrangers à la tradition russe, et corrigèrent les erreurs géopolitiques de ses dirigeants. Les Russes ont toujours su déceler le moment où l’illégitimité ou l’injustice organique s’incarne dans une doctrine s’exprimant à travers tel ou tel personnage. En un sens, la Russie est un gigantesque Empire Partisan, agissant en-dehors de la loi et conduit par la grande intuition de la Terre, du Continent, ce « Grand, très Grand Espace » qui est le territoire historique de notre peuple.

Et à présent, alors que le gouffre entre la volonté de la nation et la volonté de l’establishment en Russie (qui représente exclusivement « le règne de la loi » en accord avec le modèle universaliste) s’élargit dangereusement et que le vent de la thalassocratie impose de plus en plus la « paix militante » dans le pays et devient graduellement une forme de « guerre totale », c’est peut être cette figure du Partisan russe qui nous montrera la voie de l’Avenir Russe au moyen d’une forme extrême de résistance, par la transgression des limites artificielles et des normes légales qui ne sont pas en accord avec les canons véritables de la Loi Russe.

Une assimilation plus complète de la cinquième leçon de Carl Schmitt signifie l’application de la Pratique Sacrée de la défense de la Terre.

Remarques finales

Enfin, la sixième leçon non formulée de Carl Schmitt pourrait être un exemple de ce que la figure de la Nouvelle Droite européenne, Alain de Benoist, nommait l’« imagination politique » ou la « créativité idéologique ». Le génie du juriste allemand réside dans le fait que non seulement il sentit les « lignes de force » de l’histoire mais aussi qu’il entendit la voix mystérieuse du monde des essences, même si celui-ci est souvent caché sous les phénomènes vides et fades du monde moderne complexe et dynamique. Nous les Russes devrions prendre exemple sur la rigueur germanique et transformer nos institutions lourdaudes et surévaluées en formules intellectuelles claires, en projets idéologiques clairs, et en théories convaincantes et impérieuses.

Aujourd’hui, c’est d’autant plus nécessaire que nous vivons dans des « circonstances exceptionnelles », au seuil d’une Décision si importante que notre nation n’en a peut-être jamais connue de telle auparavant. La vraie élite nationale n’a pas le droit de laisser son peuple sans une idéologie qui doit exprimer non seulement ce qu’il ressent et pense, mais aussi ce qu’il ne ressent pas et ne pense pas, et même ce qu’il a nourri secrètement en lui-même et pieusement vénéré pendant des millénaires.

Si nous n’armons pas idéologiquement l’Etat, un Etat que nos adversaires pourraient temporairement nous arracher, alors nous devons forcément et sans faille armer idéologiquement le Partisan Russe qui se réveille aujourd’hui pour accomplir sa mission continentale dans ce que sont maintenant les Riga et Vilnius en cours d’« anglicisation », le Caucase en train de s’« obscurcir », l’Asie Centrale en train de « jaunir », l’Ukraine en train de se « poloniser », et la Tatarie « aux yeux noirs ».

La Russie est un Grand Espace dont la Grande Idée est portée par son peuple sur son gigantesque sol eurasien continental. Si un génie allemand sert notre Réveil, alors les Teutons auront mérité une place privilégiée parmi les « amis de la Grande Russie » et deviendront « les nôtres », ils deviendront des « Asiates », des « Huns » et des « Scythes » comme nous, des autochtones de la Grande Forêt et des Grandes Steppes.

Notes

[1] Carl Schmitt, Der Begriff des Politischen, p. 127

[2] Julien Freund, « Les lignes de force de la pensée politique de Carl Schmitt », Nouvelle Ecole No. 44.

[3] Ibid.

La revue de presse de Pierre Bérard (29-01-2018)

44608634_l.jpg

La revue de presse de Pierre Bérard (29-01-2018)

Au sommaire :

Frédéric Lordon développe une excellente argumentation à propos des fake news, dernière trouvaille du « système » pour cadenasser un peu plus la liberté d’expression. « Tout le discours de la politique Macron et tous les médias qui le soutiennent sont eux-mêmes d’intense propagateurs de fake news… », dit-il. Le fait qu’il n’y ait qu’une seule vérité consonne avec cette autre proposition suivant laquelle « il n’y a pas d’alternative ». Le mythe de la seule vérité comme l’absence supposée d’alternative est une clôture des choix possibles et un refus de la libre délibération. L’obsession autour des fake news est le symptôme d’une crise manifeste de légitimité des autorités qui ne font plus autorité. C’est ainsi que le thème récurrent de la post-vérité aboutit à la pseudo-fin des idéologies et à un monde dépolitisé. La « lecture renversée » du « gauchiste » Lordon est en tous points coruscante :

 

frederic-lordon-le-vrai-realis.jpg

 
Sur cette chimérique histoire des fake news on lira du même Frédéric Lordon son article désopilant dans son blog du Monde Diplomatique, « Macron décodeur en chef », qui rappelle cette célèbre apostrophe de Guy Debord « Dans le monde réellement renversé le vrai est un moment du faux » (La Société du spectacle, 1967)  :
 
 
Dans le cadre de de la campagne un brin hystérique lancée contre les fake news, Google a déjà supprimé 150 000 comptes YouTube entre juin et décembre 2017 et les comptes Faceboook suivent la même pente. Alors que Twitter s’engage dans une voie identique l’Union européenne félicite ces entreprises américaines pour leur « civisme » dans leur programme de « lutte contre les contenus haineux ». Traduction libre de cet élément de langage : il est désormais interdit de critiquer trop vivement l’impolitique européenne :
 
 
Dans une tribune du Figaro Vox Renée Fregosi s’en prend à « radicalisation », un mot qui ne dit rien que d’extrêmement vague. Selon elle ce choix sémantique dissimule une attitude lâche qui préfère masquer la réalité islamique plutôt que de l'affronter. La philosophe, elle, désigne l'ennemi sans complexe. Encore faudrait-il savoir qui a fait entrer cet ennemi dans nos murs et pour quelles raisons. Bizarrement c’est un question qu’on ne pose jamais :
 
 

20160607_25_5_1_0_0_obj11944170_1.jpg

 
Entretien de Paul-François Paoli avec Edouard Chanot sur Radio Sputnik à propos de son livre « L’imposture du vivre-ensemble de A à Z » (L’Artilleur, 2018) :

https://www.youtube.com/watch?v=NXYCy5BqROo

Quatrième de couverture du livre de Paul-François Paoli. Ce livre comporte près de 300 entrées qui constituent un panorama de la vie intellectuelle française et de ses enjeux idéologiques:
 
 
Olivier Maulin sur l’affaire Céline :
 
 
Eric Zemmour en débat défend la liberté d’expression sans restriction et oppose l’état de droit à la démocratie. Au cours du débat le chanteur Cali se casse du plateau ne pouvant supporter plus avant les discours d'un Zemmour qui ne donne pas dans le repentir :
 
 

613803XVM7ddaa78c7b5111e69ef5d234889e3a0a.jpg

Du porc matin, midi et soir. Jean-Paul Brighelli réagit avec beaucoup de drôlerie aux campagnes d’intimidation lancées par les chiennes de garde contre les mâles blancs hétérosexuels. Autant de tartuffettes qui s’emparant de la « parole libérée » entendent surtout faire parler d’elles aux bénéfice d’un rapport hommes/femmes toujours plus psychiatrisé et plus judiciarisé.
 
 
Fort du succès rencontré par ses « Conversations » avec Alain de Benoist, Paul-Marie Coûteaux nous emmène cette fois au château de Plieux à la rencontre de l’essayiste et écrivain Renaud Camus. Une série de six épisodes pour une rencontre de haut vol où se mêlent culture, littérature, histoire, patrimoine et politique. Nous devons ces brillantes conversations à TV-Libetrtés. Ici le quatrième épisodes :
 
https://www.tvlibertes.com/2018/01/25/21433/conversations...ts  :
 
 

dimanche, 28 janvier 2018

27 janvier: longue journée de travail et de rencontre à Paris

actualité,synergies européennes,robert steuckers,paris

27 janvier: longue journée de travail et de rencontres à Paris

Samedi 27 janvier: une longue journée de travail et de rencontres à Paris, avec le concours de la radio libre "Méridien Zéro" et de l'équipe des éditions BIOS, dirigée par Laurent Hocq !

L'émission radio sera diffusée cette semaine et immédiatement accessible sur le site "euro-synergies".

Débat fructueux avec mes lecteurs sur la géopolitique européenne, la révolution conservatrice, Ernst Jünger, Carl Schmitt, Marc Eemans, Jean Thiriart, Henry Corbin, Günter Maschke, etc. Merci à tous !

Les livres sont disponibles auprès des éditions BIOS, de la librairie FACTA (rue de Clichy n°4, Paris 9ème) et sur le site de diffusion des éditions "Le retour aux sources".

Encore mille merci à Vincent, le chaleureux libraire de FACTA !

Dîner au "Royal Trinité" où je n'avais plus mis les pieds depuis le colloque du GRECE de 1989 ! Comme le temps passe ! Il y a 37 ans, pendant neuf mois, j'ai habité le quartier !

RS27-1.jpg

RS27-3.jpg

RS27-4.jpg