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samedi, 20 janvier 2018

LES HOMMES LIBRES de Frédéric Lynn

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LES HOMMES LIBRES de Frédéric Lynn

 
Préfacé par Robert Steuckers, l'ouvrage LES HOMMES LIBRES est disponible sur http://editionsbios.fr/livre/les-homm...
ISBN : 979-10-94233-02-3
 
FLy-HLcouv.jpg« J'ai commencé ce livre en Ukraine. Être volontaire est bien plus compliqué que de «ramasser un fusil et d'aller se battre». La difficulté est de persister envers et contre toutes les frustrations, les déceptions et les trahisons. La difficulté est d’affronter ses propres contradictions. Je suis parti au Donbass jeune, la tête emplie d'idées tourbillonnantes et de fureur adolescente. J'en suis sorti autre et la plupart de mes camarades aussi. Changés sur un plan moléculaire. Tellement intime, tellement profond, que la majorité d'entre nous n'en parleront jamais. Beaucoup choisissent le silence, et moi-même, j'ai souvent failli abandonner ce livre. La guerre au Donbass a été traitée essentiellement par des analystes, des politiciens ou des idéologues mais il n’existe pas de témoignages de soldat et de sa vie quotidienne sur le front. Ce n'est pas un livre « de guerre » au sens classique du terme. Nos arrestations multiples, nos passages illégaux de frontières, nos attentes, nos romances, nos intrigues, nos misères et nos joies quotidiennes appartiennent autant à la guerre que les combats eux-mêmes. Les faits et les personnages, qu'ils soient héroïques ou sordides, constituent la raison d'être de ce livre. Je n'ai pas honte d'avoir participé à cette guerre. Au contraire, comme disait un modèle de mon enfance, « je n'ai qu'un seul regret, c'est de ne pas m'être engagé plus tôt ». L'un des personnages de ce livre se plaisait à décrire le phénomène de la parallaxe : « un fait ne peut être perçu par différentes personnes que de leur point de vue individuel et donc, limité. » Ce n'est qu'en additionnant les points de vue que l'on obtient une idée de la réalité. Ce récit est ma contribution. »
 
Frédéric Lynn
 

lundi, 15 janvier 2018

Tocqueville et la rage antirusse en 1849

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Tocqueville et la rage antirusse en 1849

Par Nicolas Bonnal 

Source nicolasbonnal.wordpress.com

Sans l’Angleterre, notre diplomatie est frappée de la « peur du vide » écrit le général de Gaulle dans ses Mémoires. À partir de 1815, on aime jouer au caniche, jusqu’au suicide de 1940. Voyons une guerre évitée contre la Russie, racontée par Tocqueville dans ses souvenirs.

On est en 1849. Les peuples se révoltent et se font écraser les uns après les autres, en France y compris. La belle révolution finit par le pitoyable coup d’État de Louis-Napoléon, qui laisse le peuple à peu près sans réaction. Sur cette triste époque Flaubert a tout dit en 1853 dans sa correspondance :

« 89 a démoli la royauté et la noblesse, 48 la bourgeoisie et 51 le peuple. Il n’y a plus rien, qu’une tourbe canaille et imbécile. Nous sommes tous enfoncés au même niveau dans une médiocrité commune. »


Un temps ministre, Tocqueville est confronté à une grande crise antirusse. Le tzar Nicolas (ce n’est pas qu’on le défende…) a contribué à écraser les rebelles de l’empire autrichien, ils se sont réfugiés en Turquie et il menace l’empire ottoman qui héberge ces rebelles, dont le fameux hongrois Kossuth. L’empire ottoman devient un havre de paix et de démocratie, lui qui massacrera les bulgares puis les Arméniens, simples orthodoxes il est vrai. Tout d’un coup, la presse britannique qui laisse « le marché » exterminer et exiler trois millions d’Irlandais au cours d’une famine qui dure cinq ans, décide de faire la guerre à la Russie pour sauver les droits de l’homme ! Cette guerre continentale pouvait détruire l’Europe (la guerre de Crimée – toujours d’actualité – aussi barbare et occidentale qu’elle soit, aura le mérite de rester limitée, en ne privant de vie qu’un million de soldats…).

On écoute Tocqueville qui narre la préparation britannique d’une guerre occidentale (déjà…) contre l’Autriche et la Russie :

« Malgré la gravité des circonstances, les ministres anglais, alors dispersés à cause des vacances du parlement, furent assez longs à se réunir, car, en ce pays, le seul dans le monde où l’aristocratie gouverne encore, la plupart des ministres sont en même temps de grands propriétaires et, d’ordinaire, de grands seigneurs. Ils se délassaient, en ce moment, dans leurs terres des fatigues et des ennuis des affaires ; ils ne se pressèrent pas de les quitter.

Pendant cet intervalle, toute la presse anglaise, sans distinction de parti, prit feu. Elle s’emporta contre les deux empereurs et enflamma l’opinion publique en faveur de la Turquie. »

Qui tenait, qui finançait cette fameuse presse anglaise, la plus libre du monde qui n’est bonne depuis toujours qu’à abrutir sa masse de lecteurs par le culte du fric et du people et à déclencher des guerres plus ou moins mondiales ?

soldatsrusse19.jpgTocqueville décrit cette préparation à la grande guerre européenne (et je crois que mon ami Preparata a raison, les élites anglaises sont aussi responsables de la première guerre mondiale que de la deuxième, comme elles seront responsables de la troisième à venir) :

« Le gouvernement anglais, ainsi chauffé, prit aussitôt son parti. Cette fois il n’hésitait point, car il s’agissait, comme il le disait lui-même, non seulement du sultan, mais de l’influence de l’Angleterre dans le monde. Il décida donc : 1° qu’on ferait des représentations à la Russie et à l’Autriche ; 2° que l’escadre anglaise de la Méditerranée se rendrait devant les Dardanelles, pour donner confiance au sultan et défendre, au besoin, Constantinople. On nous invita à faire de même et à agir en commun. Le soir même, l’ordre de faire marcher la flotte anglaise fut expédié. »

Le ministre Tocqueville, qui passe pour un anglophile (ici encore on ne l’a pas lu) essaie de calmer les ardeurs guerrières abruties et eschatologiques :

« La nouvelle de ces résolutions décisives me jeta dans une grande perplexité ; je n’hésitais pas à penser qu’il fallait approuver la conduite généreuse qu’avait tenue notre ambassadeur et venir en aide au sultan, mais quant à l’attitude belliqueuse, je ne pensais pas qu’il fût encore sage de la prendre. Les Anglais nous conviaient à agir comme eux ; mais notre position ne ressemblait guère à la leur. En défendant les armes à la main la Turquie, l’Angleterre risquait sa flotte et nous notre existence. Les ministres anglais pouvaient compter qu’en cette extrémité le parlement et la nation les soutiendraient, nous étions à peu près sûrs d’être abandonnés par l’Assemblée et même par le pays, si les choses en venaient jusqu’à la guerre. Car les misères et les périls du dedans rendaient en ce moment les esprits insensibles à tout le reste. J’étais convaincu, de plus, qu’ici, la menace, au lieu de servir à l’accomplissement de nos desseins, était de nature à lui nuire. »

Tocqueville évoqua la Russie sans sympathie et surtout sans hostilité préconçue :

« Si la Russie, car c’était d’elle seule au fond qu’il s’agissait, voulait par hasard ouvrir la question du partage de l’Orient par l’envahissement de la Turquie, ce que j’avais peine à croire, l’envoi de nos flottes n’empêcherait pas cette crise : et s’il ne s’agissait réellement, comme cela était vraisemblable, que de se venger des Polonais, il l’aggravait, en rendant la retraite du tsar difficile et en mettant sa vanité au secours de son ressentiment. J’allai dans ces dispositions au Conseil. »

Il comprend alors que Louis-Napoléon (il n’est alors que président, et comploteur encore) est un bon agent anglais qui pousse ses pions :

« Je m’aperçus sur-le-champ que le président était déjà décidé et même engagé, comme il nous le déclara lui-même. Cette résolution lui avait été inspirée par l’ambassadeur anglais, lord Normanby, diplomate à la manière du XVIIIe siècle, lequel s’était fort établi dans les bonnes grâces de Louis-Napoléon… La plupart de mes collègues pensèrent comme lui, qu’il fallait entrer sans hésitations dans l’action commune à laquelle nous conviaient les Anglais, et envoyer comme eux notre flotte aux Dardanelles. 

Je ne me troublais guère de ce qui allait se passer à Vienne, car je n’assignais dans cette affaire à l’Autriche d’autre position que celle de satellite. Mais qu’allait faire le tsar, qui s’était engagé si inconsidérément et en apparence si irrévocablement vis-à-vis du sultan, et dont l’orgueil était mis à une si rude épreuve par nos menaces ? »

Tocqueville tente de sauver la paix malgré le bellicisme humanitaire (et à géométrie variable) du gouvernement républicain :

« Heureusement, j’avais alors à Saint-Pétersbourg et à Vienne deux agents habiles, avec lesquels je pouvais m’expliquer à cœur ouvert. ‘Engagez l’affaire très doucement’, leur mandai-je, ‘gardez de mettre contre nous l’amour-propre de nos adversaires, évitez une trop grande et trop ostensible intimité avec les ambassadeurs anglais, dont le gouvernement est abhorré dans les cours où vous êtes, tout en conservant pourtant avec ces ambassadeurs de bons rapports. Pour arriver au succès, prenez le ton de l’amitié, et ne cherchez pas à faire peur. Montrez notre situation au vrai ; nous ne voulons pas la guerre ; nous la détestons ; nous la craignons ; mais nous ne pouvons-nous déshonorer. Nous ne pouvons conseiller à la Porte, qui nous demande avis, de faire une lâcheté ; et, lorsque le courage qu’elle a montré et que nous avons approuvé lui attirera des périls, nous ne pouvons, non plus, lui refuser une aide qu’elle réclame. Il faut donc qu’on nous prépare un moyen de sortir d’affaire.’ »

Lajos_Kossuth.jpgPuis Tocqueville met les pieds dans le plat sans mâcher ses mots cette fois :

« La peau de Kossuth vaut-elle la guerre générale ? Est-ce l’intérêt des puissances que la question d’Orient s’ouvre en ce moment et de cette façon ?

Ne peut-on trouver un biais qui ménage l’honneur de tout le monde ? Que veut-on enfin ? Ne veut-on que se faire livrer quelques pauvres diables ? Cela ne mérite pas assurément de si grandes querelles ; mais si c’était un prétexte, si au fond de cette affaire se trouvait l’envie de porter, en effet, la main sur l’empire ottoman, ce serait alors décidément la guerre générale qu’on voudrait ; car, tout ultra-pacifiques que nous sommes, nous ne laisserions jamais tomber Constantinople sans tirer l’épée. »

Le grand homme est aidé par la « diplomatie de style arabe » de Lamoricière pour éviter la guerre en soutenant la Turquie :

« L’affaire était heureusement terminée quand ces instructions arrivèrent à Saint-Pétersbourg. Lamoricière s’y était conformé sans les connaître. Il avait agi, dans cette circonstance, avec une prudence et une mesure qui surprirent ceux qui ne le connaissaient pas, mais qui ne m’étonnèrent point. Je savais que son tempérament était impétueux, mais que son esprit formé à l’école de la diplomatie arabe, la plus savante de toutes les diplomaties, était circonspect et fin jusqu’à l’artifice.

Lamoricière, dès que le bruit de la querelle lui fut arrivé par la voie directe de la Russie, se hâta d’exprimer très vivement, quoique sur un ton amical, qu’il blâmait ce qui venait de se passer à Constantinople ; mais il se garda de faire des représentations officielles et surtout menaçantes. Tout en se concertant avec l’ambassadeur d’Angleterre, il évita soigneusement de se compromettre avec lui dans des démarches communes ; et quand Fuad-Effendi, chargé de la lettre d’Abdul-Medjid, arriva, il lui fit dire secrètement qu’il n’irait pas le voir, afin de ne pas compromettre le succès de la négociation, mais que la Turquie pouvait compter sur la France. »

Le génie turc se rapproche alors prudemment de la Russie en déboutant les boutefeux occidentaux dirigés par le monstrueux Palmerston (lisez le très bon texte de Marx sur ce sinistre personnage) :

« Il fut merveilleusement aidé par cet envoyé du Grand Seigneur, qui, sous sa peau de Turc, cachait une intelligence très prompte et très déliée. Quoique le sultan eût réclamé l’appui de la France et de l’Angleterre, Fuad en arrivant à Saint-Pétersbourg, ne voulut pas même rendre visite aux représentants de ces deux puissances. Il refusa de voir personne avant d’avoir parlé au tsar de la volonté libre duquel il attendait seulement, disait-il, le succès de sa mission. »

Nicolas_1er_-_01.jpgComme notre Poutine, le tzar Nicolas garde son sang-froid :

« Celui-ci dut éprouver un amer déplaisir en voyant le peu de succès qu’avaient eu ses menaces et le tour imprévu que prenaient les choses, mais il eut la force de se contenir. Au fond, il ne voulait pas ouvrir la question d’Orient, bien que, peu de temps auparavant, il se fût laissé aller à dire : ‘L’empire ottoman est mort ; il ne reste plus qu’à régler l’ordre de ses funérailles.’ »

Puis le tzar recule :

« Faire la guerre pour forcer le sultan à violer le droit des gens était bien difficile. Il eût été aidé en cela par les passions sauvages de son peuple, mais repoussé par l’opinion de tout le monde civilisé. Il savait déjà ce qui se passait en Angleterre et en France. Il résolut de céder avant qu’on le menaçât. Le grand empereur recula donc, à la profonde surprise de ses sujets et même des étrangers. Il reçut Fuad et se désista de la demande qu’il avait faite au sultan.

L’Autriche se hâta de suivre son exemple. Quand la note de lord Palmerston arriva à Saint-Pétersbourg, tout était fini. »

Les Anglais en rajoutent comme toujours (le flegme ?) :

« Le mieux eût été de ne plus rien dire, mais tandis que dans cette affaire nous n’avions visé qu’au succès, le cabinet anglais avait, de plus, cherché le bruit. Il en avait besoin pour répondre à l’irritation du pays. L’ambassadeur anglais lord Bloomfield, le lendemain même que la résolution de l’empereur eût été connue, se présenta donc chez le comte de Nesselrode, qui le reçut fort sèchement, et il lui lut la note, par laquelle lord Palmerston demandait d’une façon polie, mais péremptoire, qu’on ne forçât pas le sultan à rendre les réfugiés. — Le Russe répliqua qu’il ne concevait ni le but ni l’objet de cette demande ; que l’affaire dont, sans doute, on voulait parler était arrangée, et que, d’ailleurs, l’Angleterre n’avait rien à y voir. »

Les Russes remettent le British à sa place :

« Lord Bloomfield demanda où en étaient les choses. Le comte de Nesselrode refusa avec hauteur de lui donner aucune explication ; parce que ce serait, dit-il, reconnaître le droit de l’Angleterre de s’immiscer dans une affaire qui ne la regarde point. Et comme l’ambassadeur anglais insistait pour laisser du moins copie de la note dans les mains du comte de Nesselrode, celui-ci après s’y être d’abord refusé, reçut enfin la pièce de mauvaise grâce et le congédia en disant nonchalamment, qu’il allait répondre à cette note, qu’elle était terriblement longue et que ce serait fort ennuyeux. »

Et la classe russe pour conclure – et remettre les Occidentaux à leur place :

« La France, ajouta le chancelier, m’a déjà fait dire les mêmes choses ; mais elle les a fait dire plus tôt et mieux. »

Cent-cinquante ans plus tard on en est toujours au même stade belliqueux, imbécile et humanitaire. C’est Borges qui évoquant Bouvard et Pécuchet, contemporains de Louis-Napoléon et de Palmerston, définit notre temps : « ce sont deux êtres qui copient et ne meurent pas. » Idem de Theresa May et de nos présidents…

Nicolas Bonnal

Sources bibliographiques

Alexis de Tocqueville – Souvenirs (dernières pages)

Nicolas Bonnal sur Amazon.fr

 

mercredi, 10 janvier 2018

Yevgeni Zamiatin “El Dragón”

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Yevgeni Zamiatin “El Dragón”

por Anna Prystupa

http://revista-arbil.es

A Yevgeni Zamiatin se le considera el maestro de la prosa. Su obra más conocida es la novela "Nosotros". El escritor ruso aparte de esa novela escribió además una serie de cuentos cortos, uno de los cuales se titula "El Dragón".

“ El Dragón “ es un cuento breve, que apenas ocupa una página. Es el primer texto que sitúa la revolución como tema central. La obra describe San Petersburgo en un día de invierno del mes de febrero. La ciudad se encuentra en llamas. Se ve la imagen de los hombres-dragones que bajan del cielo. Están montados en los tranvías. Somos testigos del diálogo que mantienen los dos entre ellos. Uno ha encontrado por la calle a un intelectual y cuenta a su compañero cómo lo asesinó. No se siente culpable, porque le parece que ha hecho lo correcto. Se siente orgulloso. Lo sorprendente es que el hombre que acaba de aniquilar al intelectual, en razón de pertenecer a una cierta clase social, es capaz al instante de salvar la vida a un gorrión. El pájaro que se encuentra, estaba helado, a punto de morir. Pero el soldado suelta la bayoneta y concentra todas sus fuerzas en soplar al animal para que entre en calor. No quiere que se muera. El pájaro se recupera y vuelve a volar. El cuento termina con el dato de que el tranvía coge el rumbo a lo desconocido, abandonando el mundo humano.

En la obra el gran símbolo es el dragón. Tiene su referencia histórica en los dragones de la Guardia, como se llamaba al cuerpo de élite del ejército ruso. En la primera etapa de la Revolución, este tipo de soldados realizaban patrullas por la ciudad. El hombre - dragón era uno de ellos. En la cultura rusa este tipo de criatura aparece en el escudo de Moscú. Ahí nos encontramos con el personaje de San Jorge que lucha contra un dragón. El animal mítico simboliza el mal y el santo- es la alegoría del bien. Se muestra el eterno conflicto entre el bien y el mal. En el cuento, los dragones son asesinos, los servidores de la revolución, que es el macro tema de la obra. El cuento se desarrolla en el trayecto del tranvía. El camino que recorre es desde los cielos hacia lo desconocido. Deja de ser un recorrido real. Lo oculto, lo que no se sabe, es el camino a dónde va a llegar la revolución. El tranvía sale de la ciudad ardiente, del delirio humano y va hacia fuera, había lo inhumano.

zamdrag.jpgLo sorprendente es la capacidad de los dragones de unir lo positivo y lo negativo. Matan a los seres humanos, pero son capaces de resucitarles, y devuelven la vida a un ser que está mucho más abajo en la evolución. Por otro lado, vemos que poco significa la vida humana, según el cuento, menos que la de un pájaro. El cuento está lleno de contrastes. Uno de ellos es el personaje del soldado – dragón: asesino y salvador a la vez. Ya la misma ciudad, el espacio en el que se desarrolla la acción está lleno de contradicciones. La ciudad arde, pero está helada. Tenemos las dos fuerzas ancestrales luchando. Estamos en invierno, y la ciudad está congelada, muerta, parada. Al mismo tiempo, el fuego de la revolución la despierta, “ la hace vivir “. Las llamas derriten el hielo, que es la capa que oprime todo, pero también queman, matan.

Una de las dualidades más importantes es la pugna entre el bien y el mal. Son los dos elementos que deben mantener un equilibrio. Aunque según los cuentos fantásticos, en las leyendas de las cuales procede el personaje del dragón, finalmente el bien siempre gana. En la obra de Zamiatin ocurre lo contrario. Gana el mal, la revolución. La destrucción es total: por un lado, la ciudad que arde en llamas, y por otro, el humano para el cual, asesinar, quitar la vida al otro, no significa nada. Otra oposición que, me parece importante es la comparación entre la tierra y el cielo. El dragón viene de arriba, desde el cielo. El ser humano tiene en sí mismo algo divino, ha sido creado por Dios. Cuando baja a la tierra, pierde su “rasgo divino”, se convierte en un ser malvado. ¿Y dónde terminará? No sabemos. Ziemiatin ahí deja la pregunta en el aire. El tren se va a lo desconocido, ¿dónde llegará?

El cuento “ Dragón “ denuncia lo que es inaceptable de la revolución- la crueldad. Hay que recordar que Zamiatin, al principio, apoyaba la revolución, veía positivamente el cambio. Cuando vio que todo esto estaba lleno de crueldad y que no era lo esperado, se empezó a distanciar de ello. La obra fue escrita en el año 1918. Es el aviso de que la revolución corre peligro de convertirse en el terror. Desgraciadamente eso es el lo que ocurrió. Zamiatin no se equivocaría, predijo el futuro. El deber del escritor es decir la verdad. En el cuento que acaba de analizarse por primera vez, el escritor denuncia el terror de la revolución. Se retracta de sus ideas, quita el apoyo que daba a la iniciativa socialista.

Nos encontramos con un nuevo tipo del cuento. Se le suele llamar “anticuento”. Hay una búsqueda de nuevas vías, una nueva experiencia literaria. En la obra están incorporados los elementos políticos y simbólicos. Por supuesto no falta lo fantástico que coge Zamiatin de Hoffman, pero es muy triste que la visión del escritor se haya cumplido. La revolución trajo el terror y la crueldad, se volvió en contra de los que la apoyaban, y los destruyó.


Anna Prystupa

 

mardi, 02 janvier 2018

Comparaison entre les moyens militaires américains et russes

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Comparaison entre les moyens militaires américains et russes

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Dans un article du 29/12/2017, nous avions évalué rapidement ce à quoi correspondent ce que l'article avait nommé les « nouvelles forces armées russes »

Il est intéressant de comparer les moyens de celles-ci à ceux de l'armée américaine. Le site Russiafeed fournit des éléments à cet égard. Nous ne pouvons évidemment pas garantir la validité des chiffres. Disons seulement qu'ils paraissent très vraisemblables. Précisons qu'ils ne concernent pas les moyens aéro-navals, notamment en nombre de porte-avions et de flottes aériennes embarquées. Sur ce point l'Amérique dispose d'une supériorité écrasante. La Russie est en train de mettre au point de nouveaux missiles capables de traverser les barrières électroniques actuelles des navires américains. Mais l'US Navy ne restera certainement pas sans réponse.

Voir http://russiafeed.com/russia-vs-us-who-has-the-stronger-m...

Nous en retiendrons les éléments suivants:

Budget militaire annuel.
Etats-Unis $594 milliards, Russie $67 milliards.

Personnels d'active.
Etats-Unis 1.492.200, Russie 845.000

Bases militaires à l'étranger
Etats-Unis 800 dans 80 pays dont 174 en Allemagne, Russie 12 dont 10 dans les anciens Etats de l'Union soviétique à sa frontière sud, 2 autres l'une en Syrie et l'autre au Viet-Nam.

Arsenal nucléaire.
Nous ne reprendrons pas ici les chiffres. Disons que chacun des deux adversaires éventuels dispose de la capacité de rayer l'opposant de la carte mais aussi d'anéantir la Terre entière. Néanmoins, récemment, Donald Trump a ordonné de moderniser et renforcer les moyens américains, tètes nucléaires et ICBM, sans doute sous la pression du complexe militaro-industriel, toujours avide de nouveaux contrats, même s'ils ne reposent sur aucun besoin.

Aptitude à la « réponse asymétrique ».
On appelle ainsi, dans le cas des grandes puissances, la disponibilité de systèmes de défense aérienne, de systèmes de détection, de systèmes de défense anti-missiles. Or sur ce point la Russie, beaucoup plus exposée que l'Amérique aux attaques provenant des bases militaires qui l'encerclent, à mis au point divers systèmes qui semblent beaucoup plus efficaces que leurs homologues américains. Elle a pu les utiliser avec succès et les améliorer encore lors de la récente campagne en Syrie.

Le représentant russe à l'Otan a prévenu en été 2016 ses homologues des capacités de réponse asymétrique russes, non seulement peu couteuses, mais hautement efficace https://www.rt.com/news/337818-russia-nato-asymmetrical-r.... Voir aussi, en langue russe https://ria.ru/syria/20161006/1478654294.html?utm_source=...

Cyber-guerres.
Sur ce point, l'Amérique possède une indéniable supériorité sur la Russie, compte tenu du nombre et de la variété de systèmes d'espionnage, y compris spatiaux, dont disposent notamment la CIA et la NSA (National Security Agency). On peut penser que rien d'important de ce qui de passe à Moscou ou plus généralement en Russie n'échappe aux « grandes oreilles américaines.

Les capacités russes ont été volontairement surévaluées par le Pentagone et le Département d'Etat à propos de l'affaire dite du Russiagate. Il avait été dit que des Hackers russes étaient intervenus dans l'élection présidentielle américaine pour gêner la candidature d'Hillary Clinton. Mais après des mois d'enquêtes approfondies, les services américains n'ont jamais pu identifier la moindre cyber-intervention. Ceci n'est pas la preuve d'une « incomparable supériorité de la Russie dans la cyber-guerre », comme prétendu par le gouvernement américain, mais de l'absence de toute intervention russe d'ampleur, faute de moyens adéquats.

Dans son récent discours au Club de Valdaï, Vladimir Poutine avait ironisé sur la capacité de son pays d'intervenir dans la vie politique américaine avec des moyens électroniques. «  L'Amérique est un grand Etat et non une république bananière. Dites moi si je me trompe »

samedi, 30 décembre 2017

Europe et Russie: ne pas mettre en danger les points communs

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Europe et Russie: ne pas mettre en danger les points communs

Dans le Brandebourg oriental, la conférence avec Gabriele Krone-Schmalz et Matthias Platzeck a suscité un vif intérêt

par Eva-Maria Föllmer-Müller

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Le 25 novembre 2017, au château de Neuhardenberg à l’est de Berlin, la journaliste et écrivaine Gabriele Krone-Schmalz et l’ancien Ministre-président du Land de Brandebourg et actuel président du Forum germano-russe Matthias Platzeck (SPD) ont pris part à un débat public. Le modérateur de la conférence était Frank Mangelsdorf, rédacteur en chef de la «Märkische Oderzeitung». Le thème de la conférence était «Les relations entre l’Europe et la Russie».

Le texte d’introduction parlait d’une «relation faussée entre l’Europe et la Russie» et commentait: «Indépendamment de la qualité des relations du moment, les deux parties ne sont nullement indifférentes l’une à l’autre, et l’intérêt fondamental de vouloir coopérer ne peut être nié. Il y a donc suffisamment de raisons de rechercher des voies vers un nouveau rapprochement.»
Les participants à cette réunion étaient au nombre de 200 environ, la plupart d’entre eux venus de Berlin. En juin, trois heures à peine après l’annonce de la conférence, tous les billets avaient été écoulés. Malgré tout, quelques intéressés tentèrent leur chance à l’entrée. Et pourtant Neuhardenberg, ça n’est pas vraiment la porte à côté. Il faut compter au moins une heure et demie depuis Berlin vers l’est, et traverser en partie le Margraviat de Brandebourg, le paysage le plus aquatique d’Allemagne, avec ses belles allées bordées d’arbres presque jusqu’à la frontière polonaise.

Comprendre la Russie: la meilleure des positions

Les participants y ont trouvé leur compte, ce que l’on a pu mesurer aux applaudissements fournis. Il en a été ainsi dès l’ouverture, lorsque Gabriele Krone-Schmalz a critiqué l’utilisation négative de la notion de «Russlandversteher» [personnes faisant preuve de compréhension envers Moscou, ndt.], terme dont elle est elle-même également souvent affublée. Elle n’a jamais compris pourquoi le mot de «comprendre» pouvait être utilisé de façon aussi négative, car la compréhension est à la base de toute démarche sensée. Pour elle, il est évident que la connaissance et la compréhension doivent être à la base de tout jugement (et non la condamnation). Donc, le fait de «comprendre» Moscou, d’être un «expert» de la Russie, est la meilleure des positions qu’on peut avoir.

Relations culturelles et humaines millénaires

A la question du modérateur sur les évènements des 27 dernières années, depuis l’enthousiasme initial de l’Ouest pour la Perestroïka et la Glasnost de Gorbatchev, et l’évolution de nos rapports avec la Russie, Matthias Platzeck a apporté la réponse suivante: la recherche des causes est toujours en cours, mais ce qui s’est passé est plutôt effrayant. La Russie, cependant, est un pays avec lequel nous avons des relations culturelles, humaines et sociales millénaires. Avec aucun autre pays, notre histoire n’est aussi étroite, et cela avec tous les hauts et les bas qu’elle comporte. Reste inoubliable, un postulat élaboré dans les années 1989/90: en Occident, on est parti de l’idée que nous avions gagné la guerre froide. Francis Fukuyama a publié son livre sur «La fin de l’histoire» et proclamé la victoire définitive de la démocratie occidentale et du capitalisme. Il n’y aurait à l’avenir plus qu’une seule superpuissance. Il y avait pourtant aussi la Charte de Paris et son idée maîtresse: «A présent, nous vivrons tous ensemble et en paix.»
Bien sûr, la Russie était toujours là. Mais le pays était accablé, et l’Occident n’avait pas vraiment réagi comme il l’aurait fallu. Au contraire, le concept dominant était que nos valeurs, notre démocratie, notre système économique étaient les meilleurs. Il ne restait donc aux Russes qu’à devenir comme nous, s’ils désiraient un meilleur avenir pour eux. Jusqu’à présent, on s’interroge encore trop peu sur l’histoire, les traditions, la mentalité de ce peuple. Et Platzeck de préciser qu’il était convaincu que la Russie et les Russes chercheront leur propre voie et qu’ils la trouveront.

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«Diktats idéologiques»

Mais l’Occident a réagi une fois de plus avec la «diabolisation de la Russie» [«Feindbild Russland»] aux tentatives de ce pays de trouver sa propre voie. La «russophobie» ne date cependant pas d’hier, selon Gabriele Krone-Schmalz. En Occident, on a toujours prétendu que nous avions gagné la guerre froide. Cependant, en disant cela, la guerre froide n’est pas automatiquement terminée. Pour qu’elle soit vraiment finie, il faudrait que les deux parties se considèrent comme gagnantes. Mais nous avons tout mesuré à l’aune de notre propre monde: chez nous tout est mieux et nous faisions tout mieux.
Gabriele Krone-Schmalz parle d’expérience. Pendant la période des bouleversements, elle était à Moscou correspondante pour la Russie de l’ARD – la 1re chaîne de télévision allemande – et elle l’a constaté elle-même: tout le monde s’y est précipité pour expliquer qu’il fallait faire ceci, et puis cela, et encore cela. «Tous ces diktats idéologiques ont mis fin à beaucoup de bonnes initiatives, et le font encore aujourd’hui», dit-elle. La Russie a dû surmonter simultanément trois révolutions: premièrement, le passage de l’économie planifiée à l’économie de marché, deuxièmement, de la suprématie du parti communiste à un système orienté vers l’Etat de droit et troisièmement, de l’Union soviétique à l’Etat national. L’Ouest a montré peu de compréhension en la matière. Au contraire, il s’est produit une mise sous tutelle occidentale accrue.

Si nous avions considéré les choses sur un pied d’égalité …

Matthias Platzeck sait de quoi il parle, quand il décrit les effets délétères de l’ère Eltsine sur l’amour-propre des Russes. A l’époque, on lui expliquait: «Maintenant, nous ne sommes plus rien du tout. Nous n’avons plus aucune importance dans le monde.» Si aujourd’hui, «dans la Russie profonde», on utilise dans une discussion les notions «économie de marché», «démocratie» ou «privatisation», cela jette un «froid glacial» dans la salle parce que, pour beaucoup de Russes, cela reste associé à leur pire traumatisme du passé récent, c’est-à-dire les années 1991–1998, durant lesquelles 95% de la population ont presque tout perdu.
«Le fait que nous ayons si peu pris tout cela en considération et avions été si peu attentifs, signifie un manque d’intérêt, sinon nous aurions agi différemment sur de nombreux points, si nous avions pris tout cela plus au sérieux, si nous avions considéré les choses sur un pied d’égalité», a ajouté Platzeck.

Journalisme sérieux …

La plupart des grands médias occidentaux y ont joué un rôle très défavorable. Sous les applaudissements, Krone-Schmalz a attiré l’attention sur les divergences existant entre l’opinion publique et l’opinion propagée par les médias. Sur la question du modérateur de savoir si nous ne nous donnions pas assez de temps de réflexion et décrivions les choses uniquement en noir et blanc, Gabriele Krone-Schmalz, qui enseigne également le journalisme, a expliqué quel devait être aujourd’hui la contribution d’un journalisme sérieux. Même si aujourd’hui tout doit aller plus vite et que le monde est devenu plus complexe, il ne faut pas sacrifier le soin et la minutie, ne pas tomber dans la simplification divisant l’univers en bons et méchants.
A présent, de nombreux journalistes ont modifié leur image de soi et leur rôle en croyant devoir mettre leurs semblables sur la «bonne voie». «Je trouve cela déplorable.» En réalité, le journalisme a la tâche, «de raconter toute l’histoire, le mieux possible, et pas seulement le point de vue d’une partie. Il a l’obligation d’effectuer un changement de perspective, c’est-à-dire de se mettre à la place de ceux-là mêmes, dont il veut décrire la réalité de vie, afin de mieux la comprendre et la situer.» Quand, pour des raisons de manque de temps ou parce que tout est compliqué, on suit un schéma directeur [«mainstream»] en créant l’atmosphère que tout ce qui n’entre pas dans ce modèle doit être taxé d’extrémisme ou être rejeté, alors apparait une situation dans laquelle «une majorité de la population ne se retrouve plus dans cette presse».

… au lieu de reportages stéréotypés

Matthias Platzeck critique également les reportages stéréotypés. Il s’agit d’une situation dramatique, quand il n’y a pratiquement plus de différenciation possible dans des processus aussi sensibles que le travail pour la paix. Il y a d’énormes divergences entre ce qui préoccupe et ce que pensent le citoyen lambda et la «réalité» publiée par les médias et les politiques. «C’est une situation qui doit nous alarmer.» Et: «Les médias ne doivent pas éduquer, ils doivent informer sur la réalité.»

Informer sur la réalité avec respect et en gardant une certaine distance

A ce propos, Gabriele Krone-Schmalz s’est exprimé très clairement sur les récits concernant Donald Trump: «Ce que je pense de Trump n’a aucune importance. En tant que journaliste, je dois trouver et expliquer les raisons pour lesquelles il a été élu.» Il est inacceptable que je le fasse d’une «manière irrespectueuse, simplement parce que je ne peux pas supporter ce type». Il est tout aussi irresponsable d’expliquer l’élection de Trump par les activités «de quelques services et le piratage de quelques comptes de courrier électronique». Cela s’avoisine à «du colportage de rumeurs». Il faut informer sur la réalité, avec respect et en gardant une certaine distance. C’est ainsi qu’il faut lire les articles. Si l’on commence à criminaliser tout contact avec la Russie, cela ne contribuera en rien à l’amélioration des relations entre la Russie et les Etats-Unis, tout au contraire. Lors de sa campagne électorale, Trump a déclaré que de bonnes relations russo-américaines sont dans l’intérêt des Etats-Unis, «et là, cet homme a raison». Mais tout ce qu’il entreprend en ce sens joue en sa défaveur et génère des accusations contre lui «allant éventuellement même lui coûter son poste».

Aller sur place et entretenir des relations personnelles

Le modérateur a également interrogé Matthias Platzeck, qui a présidé le SPD pendant une année, sur les rapports entretenus par son parti avec la Russie. Réponse de Platzeck: «Ah, c’était une belle soirée … jusqu’à présent.» – La politique est un métier, il faut savoir ce qu’on fait, et c’est lourd à porter. Pour maintenir la paix sur notre continent, il ne suffit pas de lire des rapports, il faut aussi aller sur place, il faut entretenir des relations personnelles. Dans les CV des députés du Bundestag, on trouve de nombreux liens avec les Etats-Unis, l’Angleterre, la France, et plus souvent avec la Nouvelle-Zélande qu’avec la Russie.


Egon Bahr a toujours pris grand soin de ses canaux d’informations à Moscou. Lorsqu’une situation s’aggravait, il pouvait les appeler et obtenir des informations fiables basées sur une confiance mutuelle. Quand on ne connaît pas un pays, le danger d’une guerre accidentelle est d’autant plus grand. C’est un des aspects à prendre en compte, lorsqu’aujourd’hui on parle de l’«aliénation des peuples». 2017 a été l’année de l’échange de jeunes germano-russe: «Cette année n’a pas été prise en compte en Allemagne, c’est un signal d’alarme.»

Deux poids, deux mesures

Suite à la question de savoir si l’Occident utilise le système du «deux poids, deux mesures» quand il s’agit de la Russie, Gabriele Krone-Schmalz répond spontanément qu’elle traite de ce sujet dans tous ses livres. Chaque jour, on peut traiter de ce sujet, tant c’est fréquent. «C’est égal, qu’il s’agisse du dopage ou d’autres choses, le deux poids deux mesures est définitivement établi quand il s’agit de la Russie, ce qui est très blessant.» Et Matthias Platzeck complète qu’il s’en est lui-même souvent aperçu lors de débats publics en Russie. Quand il était question de violation du droit international de la part de la Russie, des Russes l’ont souvent questionné sur les décisions du Bundestag de 2003, lors de l’attaque – contraire au droit international – des Américains contre l’Irak, ayant coûté des centaines de milliers de vies humaines. «Pourquoi, à l’époque, aucun d’entre vous n’a-t-il réclamé de sanctions?»

Le manque d’entente mutuelle met en danger l’intérêt commun

A la fin de la réunion, le modérateur a soulevé la question concernant les points communs encore existants entre l’Allemagne et la Russie. Krone-Schmalz a répondu qu’il y avait, en réalité, de très nombreux points communs, entre autres l’intérêt commun du bien-être des sociétés de part et d’autre et d’une bonne entente mutuelle. Le plus grand danger est que, suit à la méfiance qui s’est installée, on en vienne à des affrontements violents. Le plus grand problème réside dans les nombreux malentendus qui pourraient mener, «à ce que les choses tournent mal, échappent à tout contrôle et qu’on ne puisse plus les corriger.»
Il faut donc instaurer en Allemagne une politique de l’histoire et de la mémoire, a commenté Matthias Platzeck, il n’y a aucun futur possible tant que cela n’aura pas été mutuellement éclairci. Nous devons nous demander pourquoi 27 millions de victimes des opérations militaires contre l’Union soviétique, la «pire guerre d’extermination que l’humanité ait jamais connue», n’ont pas, dans notre mémoire collective, la même valeur que d’autres victimes. Après cette guerre d’extermination, les peuples de l’Union soviétique nous ont proposé la réconciliation, et pour finir également leur amitié. «Nous n’avons pas traité ce cadeau avec la sensibilité qui s’imposait.» Grande approbation dans la salle.
Tout cela est perçu en Russie, et accroit encore l’aliénation. Il y a, certes, une sympathie marquée envers l’Europe et particulièrement envers l’Allemagne, mais la Russie commence peu à peu à s’en détacher. Cette aliénation croissante induit un grand danger: moins on en connait sur la culture, la façon de vivre, la langue de l’autre, plus on peut raconter les plus grandes absurdités, car il n’y a plus guère de connaissances réelles à disposition.

Quand ça ne marche pas «en haut» – l’importance des jumelages

Toutefois, à la Conférence Internationales des Jumelages ayant récemment eu lieu à Krasnodar en Russie et à laquelle ont participé les ministres allemands et russes des Affaires étrangères, l’ambiance était bien différente: «Nous ne laisserons pas détruire cela!» Et on a proclamé l’année des jumelages interrégionaux et intercommunaux. C’est là une initiative sensée à laquelle il faut maintenant insuffler la vie. Et sous les applaudissements nourris, ils ont ajouté: «Si cela ne marche pas «en haut», il faut qu’au moins cela fonctionne ‹en bas›».    •

GKS-Rver.jpgGabriele Krone-Schmalz

Gabriele Krone-Schmalz est née en 1949 à Lam en Basse-Bavière en 1949. Elle a étudié l’histoire de l’Europe orientale, les sciences politiques et la slavistique. Elle est diplômée en Histoire et Sciences politiques, journaliste indépendante et auteur. De 1987 à 1991, elle a été correspondante d’ARD pour la Russie à Moscou. Depuis 2000, elle est membre du comité directeur du Dialogue de Pétersbourg, depuis 2006, elle est membre du Conseil d’administration du Forum germano-russe. Depuis 2011, elle occupe une chaire de journalistique et de communication télévisuelle à la Business and Information Technology School (BiTS) d’Iserlohn. Comptant au nombre des experts majeurs de la Russie en Allemagne, elle passe régulièrement à la télévision. Elle a publié de nombreux livres, dont le dernier «Comprendre la Russie» (17. édition 2016) et «L’âge de glace» (2017).

Matthias Platzeck

Matthias Platzeck est né en 1953 à Potsdam. Il est ingénieur diplômé en cybernétique biomédicale. Il a fait partie des 144 députés des nouveaux Länder, envoyés au Bundestag allemand après la réunification. En 1990, il a été nommé, pour le parti Bündnis 90, ministre de l’Environnement, de la Protection de la nature et l’Aménagement du territoire du Land de Brandebourg. De 1991 à 1993, il a appartenu au Comité fédéral des porte-paroles du parti Bündnis 90, dont il refusa la fusion avec les Verts ouest-allemands en 1993.

platzeck-teaser-DW-Vermischtes-Potsdam-jpg.jpgEn 1994, il fut de nouveau nommé ministre, et en 1995 Matthias Platzeck a rejoint le SPD. En 1997, Matthias Platzeck fut félicité pour sa gestion des opérations lors des inondations catastrophiques de l’Oder en juillet et août. Depuis juin 1998, il appartient au Comité national du SPD au Brandebourg. En 2005, il a été nommé président du SPD. De 1998 à 2002, il a été maire de Potsdam. En 2002, il a été élu Ministre-président du Land de Brandebourg par le Parlement. En 2004 puis en 2009, il a chaque fois été réélu Ministre-président de Brandebourg. En 2013, il s’est retiré de son poste pour raisons de santé. Matthias Platzeck a reçu de nombreuses distinctions, entre autres la Croix fédérale du mérite de première classe de la République fédérale d’Allemagne (1998), l’Ordre «Pierre le Grand» de l’Académie russe pour les questions de sécurité, de défense et du système juridique (2005), la Grande Croix fédérale du mérite avec étoile et bandoulière de la République fédérale d’Allemagne (2011).


Le 19 février 2017 à Dresde, Matthias Platzeck a prononcé une allocution fondamentale très remarquée sur les rapports entre l’Europe et la Russie. On peut retrouver et relire ce discours sur: www.deutsch-russisches-forum.de/portal/wp-content/uploads...

vendredi, 29 décembre 2017

Relations internationales: la fin des dogmes!

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Relations internationales: la fin des dogmes!

par Guillaume Berlat

Ex: http://www.zejournal.mobi

 
Auteur : Guillaume Berlat | Editeur : Walt | Mardi, 19 Déc. 2017 - 14h46

« La pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à quoi que ce soit, si ce n’est aux faits eux-mêmes, parce que, pour elle, se soumettre, ce serait cesser d’être » (Henri Poincaré). Mais qu’est-ce au juste que le dogme ? « Point de doctrine établi ou regardé comme une vérité fondamentale, incontestable (dans une religion, une école philosophique) ». Telle est la définition qu’en donne le petit Robert 1 ! Aujourd’hui, le champ des relations internationales est soumis par certains esprits critiques à un questionnement sans précédent – depuis 1989, la chute du mur de Berlin, l’effondrement de l’URSS et l’avènement de l’hyperpuissance américaine (Hubert Védrine), le retour en force de la Russie au Moyen-Orient – après avoir vécu sous le règne incontesté de multiples dogmes venus, le plus souvent, d’outre-Atlantique. Qui n’a pas entendu parler de celui de « la fin de l’histoire » pensée et vulgarisée par le grand expert en prévision, Francis Fukuyama ?

Horresco referens, les dogmes font désormais l’objet d’attaques anti-dogmes – telles celles des hackers informatiques -, par des hérétiques, des déviants qui contaminent par leurs mauvaises pensées les peuples et dont le nombre ne cesse de croitre de façon exponentielle. Que constate-t-on en effet aujourd’hui ? Après le temps des certitudes assénées et des vérités révélées vient celui des interrogations légitimes et des doutes sérieux sur l’intangibilité des dogmes. Vérité d’un jour n’est pas celle de toujours comme dit l’adage. Certaines vérités imposées ad nauseam aux citoyens par les médias « mainstream », au nom d’une fausse transparence, n’auraient-elles été que de grosses contre-vérités, de vulgaires mensonges, de mauvaises fables, de minables bobards ? Heureusement, les médias alternatifs jouent parfois leur rôle de passeurs d’idées, d’éclaireurs de l’obscurantisme, contribuant, avec le temps, le courage, la volonté à démystifier les supercheries de nos dirigeants, nos chercheurs idéologues et autres usurpateurs de haut vol.

Même si la liste est loin d’être exhaustive, cinq exemples récents (libre-échange et mondialisation ; hyperpuissance américaine ; effacement russe ; pérennité de l’Union européenne ; omnipotence de l’OTAN) éclairent notre propos. Rien ne vaut la confrontation de la théorie à la pratique.

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LE DOGME DU LIBRE-ÉCHANGE ET DE LA MONDIALISATION (1)

Que n’a-t-on entendu depuis la chute du mur de Berlin de la part des grands ayatollahs du libéralisme nous assénant le primat incontesté et incontestable du libre-échange, de la mondialisation et son corollaire, la fin des États nations avec l’ouverture des frontières. En dernière analyse, ces augures nous promettent la paix perpétuelle à l’instar de l’ouvrage d’Emmanuel Kant qu’ils n’ont vraisemblablement jamais lu. Leur projet de Grand Moyen-Orient immortalisé par George W. Bush doit être le premier point d’application de leur dada dans le monde du XXIe siècle. Il doit conduire à une occidentalisation/américanisation de la planète que les peuples accueilleront tel un don du ciel (2). A tel point qu’ils en redemanderont, supplieront de se vautrer dans la servitude volontaire pour l’éternité. Tel est le nouveau rêve américain relayé urbi et orbi par les amis fidèles, disons les « idiots utiles » de l’administration américaine et de ses « think tanks ». Un remake du meilleur des mondes grâce au « soft power » à l’américaine, voire parfois avec l’aide du « hard power » pour les récalcitrants ! La carotte et surtout le bâton.

Or, quelle est l’une des plus importantes conclusions du sommet du G20 de Hangzhou (4-5 septembre 2016), premier sommet du genre sous présidence chinoise ? Les dirigeants constatent la défiance croissante des peuples à l’égard du libre-échange, de la mondialisation. Ils relèvent, avec objectivité, que ce dogme n’a plus les faveurs de ses géniteurs si l’on en croit les positions tranchées prises sur le sujet par les deux candidats à l’élection présidentielle américaine de novembre 2016. Ils observent également que les négociations des traités de libre-échange entre les États-Unis et l’Union européenne (TAFTA) ; entre les États-Unis et l’Asie (TPP) sont dans l’impasse, si ce n’est menacés par Donald Trump. Enfin, « en dépit des promesses répétées du G20, le nombre des restrictions affectant le commerce et les services a continué à augmenter » (communiqué final) (3). Mieux encore, lors du sommet du G20 au niveau des ministres des Finances de Baden-Baden (17-18 mars 2017), le premier de la présidence de Donald Trump, la délégation américaine s’oppose à toute mention de la défense du libre-échange, de l’interdiction du protectionnisme et des résultats de la COP21 sur le climat (4). On sait ce qu’il en est advenu depuis. Elle jette les évangiles dans la poubelle de l’Histoire. Rien ne va plus dans le monde idéal qui nous avait été promis, juré, craché. Il ne s’agissait que d’un remake du Veau d’or. Y compris à l’OMC (5).

La pilule est difficile à digérer, certes. Mais, pas le moindre acte de contrition de la part des prêtres du libre-échange et du mondialisme ! (6) Ils sont aux abonnés absents.

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LE DOGME DE L’HYPERPUISSANCE AMÉRICAINE

Que n’a-t-on entendu après la chute de l’empire du mal ? Le monde passerait d’une structure bipolaire à une nouvelle unipolaire marquée par le règne sans partage de l’hyperpuissance américaine. Une sorte de gendarme du monde allant éteindre les feux aux quatre coins du monde, y compris sans l’autorisation du Dieu Conseil de sécurité de l’ONU. Tel Moïse et les Tables de la Loi, l’Amérique s’impose comme une sorte de législateur universel imposant ses normes, ses idées, sa langue, sa cuisine, son mode de vie, son manque d’humour et ses mensonges (sur la présence d’armes de destruction massive en Irak que personne n’a du reste jamais trouvées)… à tout un chacun. Le multilatéralisme se réduit comme peau de chagrin sous les coups de boutoir de l’unilatéralisme américain. A quoi bon entretenir à grands frais le machin qui n’est qu’un vulgaire arbre à palabres inutile ? A quoi bon penser, Washington s’en charge à votre place et gratuitement ?

Or, que constate-t-on aujourd’hui ? (7) La superbe n’est plus de mise tant la réalité douche l’hubris américain. Sur le plan économique, la Chine tient la dragée haute aux États-Unis endettés. Sur le plan technique, certains émergents monopolisent le marché du numérique et de la connectique en dépit de la puissance de la « Silicon Valley ». Sur le plan géopolitique, le Moyen-Orient, qui était la chasse gardée et exclusive de l’Amérique, voit quelques braconniers (russes) opérer au vu et au su de tout le monde, voir défier ouvertement l’Oncle Sam en débauchant certains de ses alliés les plus fidèles et les plus historiques. L’Amérique, en pleine campagne électorale, se montre affaiblie face à un quarteron de dirigeants autoritaires lors du G20 de Hanghzou (Chine) qui jettent quelques grains de sable dans la machine yankee (8). La situation en Irak, en Syrie semble lui échapper pour employer un euphémisme très diplomatique (9). L’allié historique turc rue dans les brancards, faisant ami-ami avec Moscou qui fait la loi sur le théâtre d’opérations syrien, y compris en tançant Israël.

La remise en cause du dogme par les croyants est toujours, à plus ou moins long terme, annonciatrice de réformes, voire de schismes. Elle a aussi pour corollaire la croissance du nombre des agnostiques déçus par les manquements à la parole du Dieu Amérique. Que dire de la semaine durant laquelle les Chinois refusent de dérouler le tapis rouge, à sa descente d’avion, à Barack Obama (en fin de second mandat présidentiel). En outre, il se fait traiter par le président philippin de « fils de pute » (en tagalog) ?

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LE DOGME DE L’EFFACEMENT RUSSE (10)

Que n’a-t-on entendu en boucle après la transformation de l’URSS en Fédération de Russie sur la sortie de l’Histoire, de la marginalisation économique, politique, géopolitique, culturelle, sécuritaire du gros ours rouge ? Le temps du duopole américano-soviétique est définitivement révolu. Il appartient désormais à une histoire ancienne, celle du XXe siècle. Pire encore, la chute vertigineuse du cours des matières premières de ces dernières années aura à l’évidence raison des velléités de Vladimir Poutine de jouer les empêcheurs de tourner en rond, voire de se prendre pour un nouveau Tsar en annexant la Crimée. Elle le mettra à genoux et le conduira à faire amende honorable la corde au cou tels les Bourgeois de Calais immortalisés par Auguste Rodin. La slavophobie, la russophobie courent partout sur les plateaux de télévision. Personne n’y trouve à redire sauf quelques hurluberlus ou originaux qui croient à l’avenir des nations.

Or, qu’en est-il aujourd’hui ? Prenons deux exemples emblématiques pour mesurer le chemin parcouru depuis le début des « révolutions arabes » (11). Hier, les Russes étaient traités en parias, en pestiférés, surtout au Proche et au Moyen-Orient. Aujourd’hui, ils ont droit aux égards américains (12). S’agissant du conflit syrien, les choses sérieuses ne se traitent plus dans les conférences des « affinitaires » et autres farfeluteries imaginées dans les usines à penser américaines (13). Désormais, c’est Moscou qui mène le branle militairement (en faisant le ménage sur le terrain) et diplomatiquement (en organisant une rencontre à Moscou et Syriens et Turcs au nez et à la barbe des Américains) (14). Pour ce qui est du conflit israélo-palestinien, Moscou tente une médiation entre les deux adversaires en les invitant à Moscou pour discuter directement entre eux alors (15) que Washington a jeté l’éponge il y a belle lurette et que Paris ne pèse plus rien, y compris avec sa conférence internationale médiatique, à Paris au début 2017. La Russie dispose de plus d’atouts de médiateur que l’Amérique de Donald Trump surtout après sa décision de transfert de son ambassade à Jérusalem.

L’écriture et la lecture des Évangiles se fait de moins en moins à Washington et de plus en plus à Moscou par une curieuse ironie de l’Histoire, au grand désespoir des « ludions médiatiques » anglo-saxons (16). « Les mouches ont changé d’âne ».

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LE DOGME DE LA PÉRÉNNITÉ DE L’UNION EUROPÉENNE (17)

Que n’a-t-on entendu au cours des dernières décennies ? La liste de ces vérités incontestables est impressionnante. C’est grâce à la construction européenne que nous vivons en paix depuis 1945. C’est grâce au marché commun, puis à l’Union européenne que le niveau de vie des Européens connaît une croissance permanente et que le chômage recule. C’est grâce à la politique européenne de sécurité et de défense que les 28 comptent dans le concert des nations et que la sécurité, la paix, la concorde règnent dans le monde. C’est grâce à un puissant service européen d’action extérieure (SEAE) que l’Europe est un acteur incontournable dans le concert des nations. C’est grâce à un euro fort que l’Europe s’impose dans le monde économique. C’est grâce à Schengen et à la liberté de circulation que ce traité organise que nous sommes protégés d’incursions extérieures. C’est grâce à une commission indépendante que l’intérêt général européen prévaut sur l’intérêt égoïste des nations (18). En un mot, « l’eurobéatitude court partout et transforme toutes les salles de presse en sacristies de la nouvelle religion » (19).

Or qu’en est-il aujourd’hui, plus particulièrement après le vote du peuple sur le « Brexit » ? Les certitudes d’hier se transforment aujourd’hui en incertitudes, en interrogations sur les mantras de la technostructure bruxelloise relayés par l’élite parisienne. La guerre est en Ukraine, le terrorisme frappe au cœur de l’Europe, la croissance est atone, le chômage augmente, la PESD est une coquille vide (20), l’Europe est spectatrice du monde, l’euro fort est critiqué par les exportateurs, Schengen est vilipendé et remis en cause par certains États membres dans le contexte de la crise migratoire (21). Pire encore, les peuples, que l’on avait voulu ignorer et mettre au pas en contournant l’expression de leur malaise (Cf. l’opération inqualifiable de Nicolas Sarkozy sur traité constitutionnel), se rebellent dans les urnes. Certains vont même jusqu’à reprendre les propos de Margaret Thatcher : « les référendums sont les armes des dictateurs et des démagogues ». A ce rythme, il faudra dissoudre les peuples. La béance actuelle donne le vertige (22). L’Europe a été bâtie à l’envers. C’est cela qu’il faut changer comme le souligne justement Hubert Védrine.

Les croyants sont de moins en moins nombreux aux offices. Heureusement, les grands prêtres (chefs d’État et de gouvernement des 27/28) se retrouvent régulièrement à Bruxelles pour d’inutiles grands-messes. Mais la foi n’y est plus. Seule reste une liturgie désuète pour tenter de sauver les apparences ! L’hymne à la joie n’a pas les mêmes accents lyriques lors des cérémonies du soixantième anniversaire du traité de Rome (25 mars 2017) qui coïncident avec le lancement du « Brexit ». Aujourd’hui, et plus encore demain, il faut (faudra) sauver le soldat Europe (23). Dans tous les cas, le statu quo n’est plus tenable

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LE DOGME DE L’OMNIPOTENCE DE L’OTAN (24)

Que n’a-t-on entendu après l’effondrement de l’URSS à Evere (siège de l’OTAN situé près de l’aéroport de Bruxelles-Zaventem), temple de l’atlantisme, d’une liturgie désuète ? Alors que certains agnostiques (la France) caressent le projet fou de démonter « l’Église » avec la dissolution du Pacte de Varsovie, la mise au point américaine la plus solennelle tombe telle une fatwa. Il n’en est pas question. Au contraire, l’OTAN va s’élargir aux anciens ennemis (la Russie exceptée), oublier le hors-zone en se mêlant de tout et de rien (sécurité, économie, écologie, droits de l’homme…) aux quatre coins de la planète. L’ambassadeur des États-Unis auprès de l’OTAN est chargé, par le Dieu Amérique, de réciter la nouvelle religion atlantiste et d’encourager les fidèles à psalmodier sur les nouveaux textes sacrés. Mais, il faut aussi aller remettre de l’ordre manu militari en ex-Yougoslavie, et, plus tard, après les attentats du 11 septembre 2001, en Afghanistan.

Or, qu’en est-il aujourd’hui ? Y compris, parmi les croyants les plus inconditionnels, les aventures militaires américaines – parfois maquillées sous le logo de l’OTAN – sont de plus en plus remises en cause, pire elles agacent. Les batailles gagnées haut la main ne se finissent-elles pas par des débandades peu glorieuses (Irak, Afghanistan, Libye…) que les peuples désavouent majoritairement, découvrant les mensonges sur les prétendues armes de destruction massive en Irak ? Certains voient d’un mauvais œil cette nouvelle guerre froide développée par l’OTAN avec la Russie (déploiement de défenses anti-missiles en Pologne et en Roumanie, de troupes dans les pays baltes, langage belliqueux des secrétaires généraux de l’Alliance). Washington n’inventerait-il pas un nouvel ennemi (grosse ficelle américaine) pour justifier sa présence sur le continent européen ? Manifestement, la défiance éclairée fait place à la confiance aveugle. Cerise sur le gâteau, Donald Trump qualifie le « NATO » d’ « obsolète », allant même jusqu’à accuser les alliés (Allemagne en tête) de ne pas contribuer suffisamment à leur défense commune. Le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson snobe la réunion des 5 et 6 avril 2017 à Bruxelles, nouvel acte de défiance à l’égard de l’Alliance atlantique.

Force est de constater que le dogme atlantiste de l’Amérique – hormis chez ses fidèles relais néo-conservateurs européens – ne fait plus guère recette. Pire encore, les évangiles otaniens sont contestés après avoir longtemps été loués et célébrés lors des sommets de l’Alliance au cours desquels la liturgie servait de bible. Horresco referens ! Le temps est à l’hérésie venue d’Outre-Atlantique ! Qui l’eut cru, il y a quelques années encore ?

« L’évidence détruit le doute » (25). Rien ne pire qu’une fausse évidence, puisqu’elle a tout d’une vraie. Montrer sans démontrer, c’est le mensonge dans lequel nous piège cette frénésie de dogmes venue d’Outre-Atlantique, d’Outre-Tombe, dirait Chateaubriand. Surtout lorsqu’elle s’entoure d’une « névrose de répétition » (Freud) à travers une débauche de communication. « Ainsi dans un monde saturé d’images, on aurait tendance à espérer le triomphe de la transparence. Au contraire, la très grande visibilité a généré une nouvelle forme d’invisibilité » (26). Or, cette démarche idéologique et dogmatique, qui nous submerge à travers une information à jet continu, se situe à l’opposé d’une approche scientifique respectueuse de la « vérité des faits » et permettant d’appréhender la réalité au travers de la raison (« libido sciendi » de Saint-Augustin), démarche qui sied, en principe, à l’étude sérieuse des relations internationales. Que sont devenus les authentiques cartésiens au pays de René Descartes ? Vers quel monde allons-nous ? Nul ne le sait, y compris chez nos brillants oracles. Il est vrai que les « prévisions sont difficiles surtout lorsqu’elles concernent l’avenir » comme nous le rappelle l’humoriste Pierre Dac.

Aujourd’hui, les questions ne manquent pas. Oserons-nous opposer l’information au savoir ? Saurons-nous dépasser l’image qui absorbe le regard mais, surtout, neutralise la réflexion sans laquelle rien n’est possible dans une démocratie digne de ce nom ? Aurons-nous le courage de ne plus céder à la tentation facile du panurgisme médiatique et américain ? Tels sont les principaux défis que devront relever les citoyens au XXIe siècle s’ils ne souhaitent pas se transformer en pions d’un totalitarisme médiatique ! Une question de la plus haute importance est désormais aussi sur la table. La liberté d’expression, sans cesse invoquée, n’est-elle plus qu’un leurre ? Les mots ne sont-ils plus désormais que mensonges (Cf. le débat lancé aux États-Unis par Donald Trump sur les informations bidon ou « fake news ») ? Tout semble embrumé dans une langue de bois épaisse. In fine, les crises multiples qui secouent le monde n’auront-elles pas un effet positif sur nos modes d’appréhension de la réalité de notre planète en nous contraignant, lentement mais sûrement, à nous orienter vers la fin des dogmes dans les relations internationales et, peut-être, à imaginer un futur recomposé ?

Notes:

(1) Guillaume Berlat, La mondialisation c’est comme les trains : elle peut en cacher une autre, www.prochetmoyen-orient.ch , 8 août 2016.

(2) Serge Audier (critique de l’ouvrage La démocratie universelle. Philosophie d’un modèle politique de Florent Guénard, Seuil, 2016), La démocratie, ça s’exporte mal, Le Monde des Livres, 9 septembre 2016, p. 8

(3) Simon Leplâtre, Commerce, climat, Brexit, fiscalité : les leaders mondiaux dans le flou, Le Monde, 7 septembre 2016, p. 3.

(4) 20/20 au G20, Le Canard enchaîné, 22 mars 2017, p. 1.

(5) Éditorial, L’OMC est morte, vive l’OMC !, Le Monde, 13 décembre 2017, p. 25.

(6) Sylvie Kauffmann, La mondialisation en panne, Le Monde, 11-12 septembre 2016, p. 26.

(7) Frédéric Chatillon/Célia Belin (sous la direction de), Les États-Unis dans le monde, CNRS éditions, 2016.

(8) Brice Pedrolotti/Cédric Pietralunga, Au G20, le triomphe des dirigeants autoritaires. Les chefs d’État chinois russe et turc se sont imposés face à des responsables occidentaux affaiblis, Le Monde, 7 septembre 2016, p. 3.

(9) Isabelle Mandraud, Poutine pousse ses pions au Moyen-Orient, Le Monde, 13 décembre 2017, p. 2.

(10) Guillaume Berlat, L’étrange victoire ou les clés du succès russe en Syrie, www.prochetmoyen-orient.ch , 25 avril 2016.

(11) Yves Aubin de la Messuzière, Monde arabe, le grand chambardement, Plon, 2016.

(12) Marc Semo, Accord américano-russe pour une trêve en Syrie, Le Monde, 11-12 septembre 2016, p. 3.

(13) Claude Angeli, L’imprévisible Poutine rebat les cartes en Syrie, Le Canard enchaîné, 7 septembre 2016, p. 3.

(14) Richard Labévière, Nouvelle donne : Assad et Erdogan bientôt à Moscou, www.prochetmoyen-orient.ch , 5 septembre 2016.

(15) Piotr Smolar, Moscou tente une médiation dans le conflit israélo-palestinien, Le Monde, 7 septembre 2016, p. 4.

(16) Andreï Gratchev, Un nouvel avant-guerre ? Des hyperpuissances à l’hyperpoker, Alma, 2017.

(17) Guillaume Berlat, Union européenne : un nouveau remake de la SDN ? De Stefan Zweig à Romain Gary, www.prochetmoyen-orient.ch , 9 mai 2016.

(18) Thierry de Montbrial/Thomas Gomart (sous la direction de), Notre intérêt national. Quelle politique étrangère pour la France ?, Odile Jacob, 2017.

(19) Philippe de Villiers, Le moment est venu de dire ce que j’ai vu, Albin Michel, 2016, p. 239-240.

(20) Éditorial, L’Europe de la sécurité est une priorité, Le Monde, 9 septembre 2016, p. 22.

(21) Pierre Lellouche, Une guerre sans fin, Cerf éditions, 2017, pp. 207-215.

(22) Didier Modi, Le rêve européen. Autopsie d’un cauchemar, éditions Europolis, 2017.

(23) Hubert Védrine, Sauver l’Europe, Liana Lévi, 2016.

(24) Guillaume Berlat, Varsovie : comme un parfum de guerre froide…, www.prochetmoyen-orient.ch , 11 juillet 2016.

(25) Mazarine Pingeot, La dictature de la transparence, Robert Laffont, 2016, p. 137.

(26) Mazarine Pingeot, précitée, pp 19-20.

jeudi, 21 décembre 2017

Amerika moet weg uit het Midden-Oosten

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Amerika moet weg uit het Midden-Oosten

SAMEN MET TURKIJE EN IRAN WIL RUSLAND DE WERELD HERTEKENEN

‘Amerika moet weg uit het Midden-Oosten’

Alexander Doegin wordt wel eens de huisideoloog van Poetin genoemd. Hij droomt van een nieuwe wereld. Waar Turkije en Iran het Midden-Oosten beheersen en Europa geen vazal van de Verenigde Staten meer is. ‘Vergeet dat liberalisme. Daag ons uit met jullie eigen waarden.’

Van onze redactrice in Nederland Corry Hancké

De Russische filosoof Alexander Doegin was zaterdag in Amsterdam voor de jaarlijkse Nexus Conferentie. Een dag later vertelt hij over de clash die hij daar met de Franse filosoof Bernard-Henri Lévy had. De twee mannen zijn elkaars tegenpolen.

‘Hij is alles wat ik niet ben. Lévy verdedigt de imperialistische ideologie van het Westen en vecht tegen de opkomende multipolaire wereld. Alles wat ik bewonder, keurt hij af. Alles waarvoor hij staat, vind ik fout. Het was een echte clash van ideeën. Het was boeiend, want we vertrekken allebei vanuit de idee van een eeuwenoude oorlog tussen beschavingen: de oorlog tussen Sparta en Athene of tussen Rome en Carthago. Een oorlog tussen een landmacht en een zeemacht.’

‘De landmacht – en dat is een land als Rusland, staat voor een onveranderlijke, collectieve identiteit. De zeemacht ziet constante verandering, globalisering en vooruitgang als hoogste goed. Ze probeert iedereen te bevrijden van een collectieve identiteit, omdat die onderdrukkend zou zijn.

Maar dat liberalisme loopt ten einde. Het eindigt in decadentie en een complete loskoppeling van de natuurlijke wetten. Geslachtsbepaling of het uitstellen van de dood door artificiële intelligentie, zijn een ontkenning van de menselijke waarden. Je krijgt immortaliteit voor de prijs van
menselijkheid.’

Welke waarden zijn belangrijk voor een landmogendheid?

‘Een landmacht baseert zich op het concept van eeuwigheid. Het gaat om identiteit, het is een sacrale houding tegenover de natuur, de wereld en God. In die visie is God belangrijker dan de mens, hiërarchie is beter dan gelijkheid, traditie en identiteit zijn belangrijker dan verandering en grensverlegging. Eigenlijk is de afwezigheid van verandering de meest positieve waarde. Je probeert dezelfde te zijn als je voorouders en je conserveert hun manier van leven.’
‘De geest van de moderne mens is zo beïnvloed door de zeemogendheid dat hij de landwaarden als archaïsch, negatief beschouwt. Maar als je vanuit de waarden van een landmacht kijkt, dan zie je dat vooruitgang leidt tot decadentie, immoraliteit en verlies van waardigheid. Het verlies van de collectieve identiteit is nihilisme.’
‘Men probeert ons tegenwoordig te vertellen dat de weg naar een zeemogendheid de enige mogelijke is. Maar dat klopt niet, het is een keuze. Landen als Rusland, China, Turkije, Iran of zelfs India kunnen kiezen voor identiteit in plaats van voor liberalisme, vooruitgang, bevrijding,... De hegemonie van de westerse waarden is niet onaantastbaar. De geschiedenis ligt open.’

Rusland zoekt toenadering tot Turkije. De Turkse president Erdogan deelt jullie ‘landwaarden’?

‘Correct, hij moet kiezen tussen een Euraziatische en westerse identiteit. Ik had mijn bedenkingen bij hem, maar nadat hij de Gülenpartij heeft opzijgezet, komt hij steeds dichter bij die Euroaziatische kernwaarden en neemt hij steeds meer afstand van het Westen.’

Helpt u hem daarbij?

‘Ja, ik help de Turken om te kiezen voor het Eurazianisme. Mijn boek is in Turkije vertaald en het biedt aan de militairen een ander denkkader. Tevoren kenden ze alleen het Navo-Atlantisch denkkader, waarin hen werd geleerd hoe ze tegen Rusland moeten vechten. In mijn handleiding leg ik uit dat Turkije kan kiezen en ook tegen de VS kan vechten. Vroeger, als je als Turk niet tevreden was met de rol van de Amerikanen in de regio, zoals hoe ze de Koerden naar onafhankelijkheid helpen, dan had je geen keuze, want je had maar één denkkader.’
‘Iran staat voor dezelfde keuze. Dat land zag Rusland altijd als de oude vijand, maar toen mijn boeken er werden vertaald, ontdekten de Iraniërs dat er parallellen bestaan tussen het Euroazianisme en hun visie op de samenleving. Dat sloeg een brug tussen Rusland, Turkije en Iran. Die metafysische brug leidt uiteindelijk naar concrete politieke actie.’
Ze heeft alvast de situatie in Syrië doen kantelen. Rusland en Turkije gingen samenwerken en samen gaven ze de Syrische president al-Assad de mogelijkheid om de burgeroorlog in zijn land te winnen. ‘Dat klopt, Syrië was de laatste dominosteen die viel.’

Begon het toen in 2015 een Russische piloot boven Turkije werd neergeschoten?

‘Ik heb toen hard gewerkt om een confrontatie tussen Turkije en Rusland te vermijden en om de banden tussen beide landen aan te halen. Niet omdat ik pro-Turks ben, neen, ik ben Russisch-orthodox. Maar ik ben tegen de Amerikaans hegemonie.’
‘Die samenwerking heeft ook geleid tot de deal tussen Irak en de Iraanse generaal Soeleimani, waardoor het opstandige Kirkoek weer in handen van Irak kwam. Dat was de tweede grote overwinning die we hebben behaald in de multipolaire wereld.’

Die nieuwe samenwerking verandert de situatie in het Midden-Oosten grondig.

‘Ja, maar daar zijn tientallen jaren aan voorafgegaan. Na de val van de Sovjetunie hebben we met een aantal Russische patriotten een Euraziatische visie ontwikkeld, gebaseerd op de “landwaarden”. Die visie zijn we aan het uitdragen en we werken aan een alliantie met Turkije en Iran. Het was een lange weg. Poetins politiek is de finalisatie van die ideeën.’ 

De strijd in Syrië was het eerste kantelpunt. Wat wordt de volgende stap?

‘Amerika moet weg uit het Midden-Oosten. Eerst zullen we aandacht geven aan de heropbouw van Syrië en Irak. We hebben een militaire overwinning behaald, nu moet de politieke volgen. We moeten de territoriale eenheid bewaren, we moeten uitzoeken wat we aan de Koerden kunnen bieden. Ze zijn door het Westen in de steek gelaten en nu kan Rusland een oplossing voor de Koerden zoeken. We zullen hen geen nieuwe staat laten bouwen, want niet iedereen is daar voorstander van. Islamitische Staat moet verdwijnen, dat is duidelijk. En de invloed van de Saudi’s moet worden gestopt. De oorlog in Jemen moet worden beëindigd. Daar kunnen we, tegen de Saudi’s in, de sjiieten helpen.’

U wil de Verenigde Staten weg uit het Midden-Oosten. De huidige Amerikaanse president Trump is sowieso minder geïnteresseerd in buitenlands beleid. Het kan dus voor de Russen niet zo moeilijk zijn om de Amerikanen te verdrijven?

‘Het is iets gemakkelijker dan vroeger. Trump zegt dat hij een non-interventionist is. Hij zou natuurlijk afstand kunnen nemen van die belofte, zoals hij wel vaker heeft gedaan. Maar hij heeft binnenlandse problemen. Dat hij die maar eerst oplost. Wij willen vrede, we willen een wereld die vrij is van de Verenigde Staten en van zijn zogenaamde democratie. Laat Eurazië en Europa met rust. Europa moet niet bang zijn, wij gaan dat niet inpalmen.’

En Oekraïne dan?

‘Oekraïne is deels Europees deels Russisch. Het is een nieuwe staat, die de keuze had als België te worden, een land met twee entiteiten. Maar het westelijke deel van Oekraïne wilde het hele land domineren, in naam van de democratie en de mensenrechten, alhoewel er ook fascisten bij waren.
Daarom is het oostelijk gedeelte in opstand gekomen en die opstand hebben wij gesteund. Wij zijn dus geen dreiging voor Europa, wij zijn geen dreiging voor West-Oekraïne. Dat is voor ons een legitiem deel van Oost-Europa.’
‘Het is boeiend: je ziet in Oost-Europa steeds meer landen die toenadering tot ons zoeken. Ik merk dat landen als Polen of Hongarije zich afvragen of Europa wel zo’n ideale wereld is. De Polen denken dat democratisering en vooruitgang hun katholieke identiteit vernietigen. De beweging die de nadruk legt op de Poolse identiteit groeit, ik krijg er steeds meer aanhangers. Hetzelfde voor Hongarije. Daar vraagt men zich af wat het beste is: hun identiteit laten vernietigen door Europa of ze te behouden, met onze steun. Voor hen is de EU een culturele bedreiging. Wij daarentegen dringen ons niet op, zij hebben gewoon de keuze.’
‘Aangezien wij Europa niet bedreigen, hebben de Europeanen een kans om over hun identiteit na te denken. Ze hebben gezien welke chaos de Amerikaanse zeemogendheid veroorzaakt. Europa heeft een kans om zich te bezinnen. Ik droom van een sterk, onafhankelijk Europa dat zijn eigen logica hanteert en dat misschien tegen ons is. En toch verkies ik dat, want dat zou betekenen dat Europa opnieuw waardigheid heeft en niet langer de vazal van de Verenigde Staten is. Wees de ander die het verschil maakt. Nu? met al dat liberalisme, zijn jullie dat niet. Daag ons uit met jullie eigen
waarden.’

lundi, 18 décembre 2017

« Dans les démocraties libérales, tout est fake news » : entretien avec Alexandre Douguine

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« Dans les démocraties libérales, tout est fake news » : entretien avec Alexandre Douguine

Entretien accordé par Alexandre Douguine aux hebdomadaire Knack (version néerlandaise) et Le Vif à Bruxelles

Propos recueillis par Jeroen Zuallaert

Ex: http://zejournal.mobi

 
Auteur : Jeroen Zuallaert | Editeur : Walt | Lundi, 18 Déc. 2017 - 11h04

« Vous prononcez le mot démocratie comme s’il était sacré. Vous trouvez certainement que les antidémocrates ne sont pas humains ! » Notre confrère de Knack s’est entretenu avec Alexandre Douguine, le prophète autoproclamé de Vladimir Poutine qui rêve d’un empire eurasien où il n’y a pas de place pour les journalistes.

Alexandre Douguine n’est pas l’idéologue maison de Vladimir Poutine. « Ou du moins pas littéralement », admet-il. « À l’heure actuelle, je n’occupe pas de position officielle au sein de l’appareil d’État. Je n’ai pas de ligne directe avec Poutine, je ne l’ai même jamais rencontré. Mais j’ai mes façons de communiquer ».

Pourtant, le terme « idéologue maison » n’est pas mal choisi, estime Douguine. « Si vous comparez mes théories et mes écrits à mon travail, vous pouvez uniquement en conclure que Poutine a suivi pratiquement toutes mes propositions politiques. Il a resserré les liens avec l’Iran et la Turquie et il a annexé la Crimée, ce que je lui recommande depuis des années. Il mise sur les normes et les valeurs traditionnelles. Il a fondé l’Union eurasienne, qui doit constituer la base d’un empire eurasien. Il y a dix ans, j’étais à Washington pour un débat, et on m’a introduit en ces termes : "Ne regardez pas la position de monsieur Douguine, regardez ses écrits et comparez-les aux actes de Poutine". C’est tout à fait ça ».

En Russie, Douguine est surtout populaire dans les cercles militaires, où la lecture de sa Quatrième théorie politique est obligatoire pour les futurs officiers. Cette théorie succède à trois idéologies politiques – le libéralisme, le communisme et le fascisme – qui d’après lui ont perdu leur légitimité. La quatrième théorie politique doit combiner les éléments des trois théories précédentes, même si Douguine semble surtout détester la démocratie libérale. La quatrième théorie politique doit devenir l’idéologie dominante en Eurasie, une alliance géopolitique entre la Russie et l’Europe, qui, tout comme dans 1984 de George Orwell, doit endiguer ce qu’il appelle l’impérialisme américain.

Vous avez qualifié l’investiture de Trump de « l’une des meilleures journées de votre vie ». Êtes-vous toujours de cet avis ?

Alexandre Douguine : Je pouvais à peine en croire mes oreilles ! Pour moi, l’élection de Trump est la preuve que le peuple américain est toujours en vie. Je suis très heureux de l’avènement du trumpisme, même si aujourd’hui il est pris en otage par le Deep State (l’État dans l’État, NLDR). Aujourd’hui, Trump se trouve dans la camisole de force des globalistes américains, on dirait un personnage de Vol au-dessus d’un nid de coucou. Et pourtant, rien que son élection a été une gifle énorme pour l’interventionnisme américain. Grâce à lui, l’Amérique n’est plus le centre de la globalisation. Même s’il n’arrive qu’à implémenter un centième de ce qu’il a promis, ce serait un soutien incroyable pour le projet eurasien.

Assistons-nous à la fin du libéralisme ?

Ce n’est certainement pas encore la fin, mais les aspects négatifs du libéralisme se manifestent de plus en plus clairement. C’est une sorte de fascisme libéral qui considère tout le monde qui ne possède pas au moins un iPhone 6 comme moins humain. La modernité se voit elle-même comme un objectif final, alors que pour les traditionalistes c’est un choix. Heureusement, de plus en plus de personnes comprennent que le libéralisme est fondamentalement une erreur.

Quelle est pour vous l’erreur du libéralisme ?

Il a privé l’homme de toute forme d’identité collective. La religion, les valeurs traditionnelles, la hiérarchie, la conscience nationale : il faut s’en débarrasser. Tout devient optionnel : on peut choisir sa religion, sa nation, et aujourd’hui même son sexe.

Les transgenres sont tout de même une réalité...

Au contraire, c’est l’idéologie pure. L’homme invente ces concepts et la réalité s’y adapte. Les transgenres et l’homosexualité sont une idéologie politique, ils sont le dernier stade du libéralisme.

L’homosexualité a toujours existé, non ?

C’est de la propagande politique pure qui impose des normes de manière totalitaire à la société.

Dans une démocratie libérale, personne n’est contraint à être homosexuel, non ?

À partir du moment où on autorise quelque chose, la norme change. Au fond, les normes sont une sorte de schéma qu’il faut suivre, et si vous tolérez autre chose que la norme, vous en faites automatiquement une nouvelle norme. Si vous autorisez l’homosexualité, vous détruisez la société hétérosexuelle, parce que vous lui enlevez une forme d’identité collective. L’objectif ultime du libéralisme, c’est d’éliminer l’humanité : vous donnez le choix aux gens de poursuivre leur vie comme un cyborg, ou comme un animal.

Il n’y a tout de même personne qui propose ça sincèrement ?

Nous devons comprendre que le libéralisme est un produit de la modernité. Les concepts tels que le racisme, l’esclavage et le totalitarisme sont des concepts européens nés dans la modernité. Quand le libéralisme était encore contraire au fascisme et au communisme, on aurait dit un système antitotalitaire. Mais à présent qu’il n’y a plus de grands ennemis idéologiques, le libéralisme montre son vrai visage. Les idéologues tels que George Soros et Karl Popper divisent le monde en deux groupes : les sociétés ouvertes et fermées. Tout comme les communistes divisaient le monde en capitalistes et prolétaires et les nazis faisaient la distinction entre les ariens et les non-ariens, ils divisent le monde en progressistes – les bons – et les conservateurs – les mauvais.

Cela ne rime à rien, non ? Dans une démocratie libérale, les conservateurs ont tout à fait le droit d’avoir des idées conservatrices.

Dans une démocratie libérale, seuls les conservateurs libéraux sont les bienvenus. Ceux qui ne le sont pas sont immédiatement marginalisés et criminalisés. Les gens comme moi, qui préconisent une démocratie non libérale, sont immédiatement traités de fascistes et de stalinistes. Nous sommes les nouveaux juifs et ouvriers du goulag. Votre société soi-disant ouverte n’accepte que les partisans de la société ouverte.

AD-book4PTH.jpgMais les partis conservateurs sont tout de même autorisés dans les sociétés occidentales ?

Le débat est mené uniquement parmi les partisans du libéralisme. On peut être libéral de droite et libéral de gauche. On peut être libéral d’extrême droite ou libéral d’extrême gauche. Mais il est impossible d’être non libéral.

Considérez-vous le Front national comme un parti libéral ?

Le FN est un parti libéral d’extrême droite, car il est pour la république et la démocratie. Mais même lui est diabolisé et conspué parce qu’il n’est pas assez libéral.

N’est-il pas normal que les opposants politiques se critiquent entre eux ? Le FN peut tout de même simplement participer aux élections.

Mais ses adeptes sont diabolisés, ce sont des parias ! La même chose vaut pour les personnes qui soutiennent Trump. Si vous êtes dans un café à New York et vous dites que vous avez voté Trump, vous risquez de vous prendre une gifle.

Si vous êtes dans un café à Moscou et vous dites que vous détestez Poutine, vous risquez aussi de vous prendre une gifle.

Je ne suis pas d’accord avec cette analogie. En Russie, on peut parfaitement être anti-Poutine. Le seul moment où nous défendons Poutine, c’est quand nous sommes confrontés aux haïsseurs de l’extérieur. C’est une forme de solidarité russe collective.

Selon votre interprétation, l’Eurasie est-elle une démocratie ?

Vous prononcez le mot démocratie comme s’il était sacré. Vous trouvez certainement que les antidémocrates ne sont pas humains !

C’est une simple question. Votre interprétation de l’Eurasie est-elle démocratique ?

Ah, c’est quoi démocratique ? Disons-le ainsi : pour moi, l’Eurasie ne doit pas être non démocratique. Le taux démocratique de l’Eurasie dépend de ce que décide la société.

N’est-il pas logique qu’une telle décision découle d’un processus démocratique ?

Je trouve qu’une société doit pouvoir décider d’être régie par un monarque ou un dictateur. Le résultat d’une telle décision ne doit pas forcément être une démocratie. La seule véritable décision démocratique en Russie a été prise à l’époque du Zemski Sobor, l’assemblée russe qui a élu le premier tsar des Romanov au 17e siècle. Nous avons choisi un monarque, et nous en avons toujours été contents.

Que se passe-t-il si une société change d’avis ?

Tant qu’il n’y a pas de révolution, il y a un accord tacite qui légitime l’autorité du régime. Les libéraux veulent mettre fin à l’histoire et imposer leur idéologie à tout le monde alors que l’histoire politique est ouverte : la démocratie n’est pas une valeur universelle incontestable que le monde entier n’a qu’à accepter.

Ne trouvez-vous pas problématique que la Russie n’ait pas d’élections impartiales ?

Nos élections sont absolument impartiales, car chez nous elles ne servent pas à amener un nouveau régime au pouvoir. En tant que société, nous sommes plus ou moins contents de Poutine. Alors peu importe le pourcentage exact de gens qui votent pour lui.

Pourtant, vous êtes régulièrement critique vis-à-vis de Poutine ?

Je trouve qu’il ne fait pas ce qu’il a à faire, mais cela ne signifie pas que je ne trouve pas qu’il soit le seul leader légitime possible de la Russie. L’esprit russe fonctionne à plusieurs niveaux. Pour nous, la contradiction n’est pas inacceptable.

Quelle est votre principale critique envers Poutine ?

Je lui reproche d’avoir créé un système où il soit le seul individu capable de prendre une décision. En soi, c’est mieux que le chaos total, mais c’est instable. Poutine se comporte comme s’il était immortel. Malheureusement, il ne l’est pas.

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Vous plaidez en faveur d’une dynastie Poutine.

C’est impossible, car pour cela il faut les institutions, et pour fonder ces institutions il faut formuler les principes de votre vision de la société. Il ne le fait pas. Le plus grand problème de Poutine, c’est qu’il n’a pas d’idéologie. C’est un leader génial qui a transformé un pays qui se désagrégeait en puissance souveraine. Aujourd’hui, chacun doit deviner ce qu’il signifie par « démocratie », « tradition », « religion » ou « modernisation ». Et celui qui devine mal, est puni. En 2014, j’ai été éjecté de l’université parce que j’ai critiqué sa politique étrangère. Mais je me suis résigné, je ne m’intéresse pas à ma carrière.

Êtes-vous content de la politique étrangère de Poutine ?

Je la trouve généralement équilibrée. Sa plus grande erreur c’est de ne pas avoir poursuivi la libération de l’Est de l’Ukraine. Il aurait pu pénétrer beaucoup plus loin en Ukraine. On savait à l’avance qu’il y aurait des sanctions économiques. Aujourd’hui, nous payons un prix lourd pour un produit relativement limité.

Voyez-vous un successeur possible ?

Dans le système de Poutine, il n’y a pas de place pour un successeur. Il craint de nommer un héritier qui soit aussi fort que lui, parce qu’il pourrait l’éclipser. Il était impossible de trouver un meilleur dirigeant que lui, mais nous en avons trouvé de pires. Entre 2008 et 2012, Dmitri Medvedev a pratiquement détruit le système, et il est toujours Premier ministre. C’est un danger que Poutine manipule : si vous ne me soutenez pas, je mets le monstre libéral sur le trône, et notre stratégie au Moyen-Orient tombe à l’eau. Rien n’a été réglé formellement. Le problème, c’est que Poutine parie sur deux systèmes : il est tant eurasianiste que libéral. Dans le paradigme économique, il trouve le libéralisme nettement plus important. Il devrait faire un testament où il explique son idée à son héritier.

Vous souhaitez que Poutine détermine à quel point la Russie peut être occidentale.

(hoche la tête) Il doit traduire son intuition individuelle en une doctrine destinée à sécuriser l’ordre futur. Il n’a tout simplement pas d’idéologie déclarée, et cela devient de plus en plus problématique. Chaque Russe sent que cette approche hyper individuelle de Poutine représente un risque énorme. La propagande à la télévision russe devient de plus en plus stupide. Les talk-shows politiques sur Pervyj Kanal (la principale chaîne publique, NLDR) sont carrément stupides. Les présentateurs sont une bande de libéraux qui se font passer pour des conservateurs par considérations financières. C’est une espèce de jeu : si Poutine change d’avis, il faut changer toute la machine de propagande. Là, ils invitent en permanence les mêmes idiots américains et ukrainiens pour faire passer l’Occident pour stupide. Ce n’est plus convaincant. Comprenez-moi bien : l’Occident est mauvais, mais nous devons au moins prendre la peine de l’étudier.

Ne craignez-vous pas que pour beaucoup de Russes les libertés occidentales paraissent attrayantes ?

Les Russes sont plus constants que vous ne le pensez. Dans les années nonante, les Russes ont été séduits par le libéralisme, mais ils ont rapidement senti la réalité amère. Nous ne devons pas craindre les Russes et leur présenter une caricature de la réalité à laquelle personne ne croit. C’est pourquoi je trouve la télévision russe actuelle aussi répugnante.

Cette critique vaut-elle également pour Russia Today et Sputnik ?

C’est tout à fait différent. RT et Sputnik font parfaitement leur travail. Ils promeuvent une alternative à l’agenda libéral globaliste. Ils élargissent l’opinion démocratique. Nous nous défendons uniquement contre l’élargissement agressif de la société moderne. L’Occident devrait accepter que la forme de société libérale soit optionnelle.

Ne trouvez-vous pas problématique que des médias comme Russia Today et Sputnik inventent tout le temps des événements ?

Les médias mentent en permanence. Tout est fake news. On ne peut approcher la réalité de manière neutre. L’esprit humain fonctionne toujours avec de l’information pro-cédée. Si vous cherchez la vérité, je vous conseille de devenir philosophe : vous aurez une vie intéressante. Celui qui travaille dans les médias est par définition un menteur.

De quelle façon est-ce que je mens, monsieur Douguine ?

Vous mentez parce que vous faites passer une réalité codée définie par la société, par les détenteurs de pouvoir qui contrôlent les médias. Antonio Gramsci dirait : vous mentez parce que vous avez conclu un pacte historique avec le capitalisme. Tout est idéologique, dit le marxisme, et l’idéologie est une fausse conscience : un mensonge pur.

AD-putin.jpgMais il y a les faits, tout de même ? Si demain Moscou lâche une bombe sur Bruxelles, et j’écris que Moscou a lâché une bombe sur Bruxelles, ce n’est pas un mensonge ?

(ricane) D’abord et avant tout, vous ne pourrez rien écrire si cela arrive. Vous serez mort.

Mettons que je survive.

Même alors, il vous faut recueillir des informations et vérifier les sources. Qui paiera votre billet pour accéder aux ruines ? Comment allez-vous prouver que Moscou est derrière les bombardements et non Oussama ben Laden ? Aujourd’hui, il n’est même pas clair qui étaient les auteurs du 11 Septembre ! D’abord, c’étaient les Saoudiens, mais à présent le président Trump a suggéré qu’il fallait une nouvelle enquête. Pourquoi est-ce nécessaire ? Parce que tout est fake news.

Vous êtes sérieux là ?

Dans notre société, on ne peut jamais être vraiment sûr que l’avion avec lequel Moscou a soi-disant lâché la bombe ait été détourné au dernier moment par des musulmans. Vous connaissez le film Conspiracy Theory ?

Non.

C’est un film extrêmement intéressant dont le personnage principal voit des complots partout, et qui est traité de fou. Mais finalement, il s’avère qu’il est le seul à avoir eu raison depuis le début.

Mais c’est de la fiction, non ?

Non, c’est le paradigme de la réalité. Nous vivons dans une réalité virtuelle du fake news. Le journalisme aussi est un produit typique de la modernité. La vérité est difficile à trouver, et pour la trouver nous devons éliminer le journalisme.

Vous voulez supprimer le journalisme ?

Il y a des sociétés sans journalisme qui ne sont pas pires que la société occidentale. En même temps je réalise que les mensonges peuvent être diffusés de millions de façons. Nous cherchons tout au plus la sécurité, la tolérance, le confort, et peut-être un peu de justice sociale. Le libéralisme ne s’occupe que d’efficacité et d’accélération, et plus de la recherche de la vérité.

L’autoritarisme s’intéresse encore beaucoup moins à la vérité.

Au contraire, dans l’autoritarisme il y a encore un choix. Le totalitarisme, la théocratie, la société de castes : dans les systèmes autoritaires, nous avons le choix entre plusieurs mensonges, ce qui est nettement plus agréable. En démocratie libérale, il n’y a qu’un mensonge à croire : l’assertion que la démocratie est la moins pire de toutes les formes de gouvernement. (réfléchit) Vous savez, le mal est surtout en nous. Nous mettons trop d’espoir et de confiance en la technologie épistémologique. Par exemple, je suis très préoccupé par la confiance aveugle des sociétés en les réseaux sociaux.

Vous aussi vous êtes un fervent utilisateur des réseaux sociaux.

J’essaie de transformer le poison en remède.

La Russie utilise les réseaux sociaux pour influencer les élections étrangères.

(ricane) Je crains que vous nous surestimiez. Oui, la Russie essaie de s’armer contre les attaques technologiques de l’Occident, mais nous n’y parvenons guère. Au fond, c’est une réaction à la guerre en réseau américaine des années nonante. Il vous faudra encore un peu de patience. Notre cyberprogramme n’en est qu’à ses balbutiements, et on nous accuse déjà d’avoir piraté les élections !


- Source : Le Vif (Belgique)

Ukraine. L'Union européenne à la botte de Washington

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Ukraine. L'Union européenne à la botte de Washington

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

L'Union européenne, lors d'un sommet européen à Bruxelles le 14 décembre, a décidé de reconduire ses sanctions contre la Russie à propos de l'Ukraine. Ces sanctions touchent des banques, des entreprises de défense et des compagnies pétrolières russes, et interdisent aux Européens les investissements financiers en Russie.

Le conflit ukrainien connait actuellement un regain. Les Ukrainiens de Kiev, soutenus et armés jusqu'ici de façon non officielle par les Etats-Unis, ont repris de violentes offensives contre les séparatistes russophones de l'Est. Les Occidentaux accusent la Russie de soutenir les « rebelles » séparatistes, notamment en leur fournissant des armes, ce qui semble exact, bien que Moscou démente catégoriquement la chose. Mais le soutien russe reste modeste. Il n'est en rien comparable à l'aide occidentale. On apprend d'ailleurs aujourd'hui que le Canada a décidé, officiellement, d'armer les Ukrainiens de l'Ouest   https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/...

La décision du sommet européen devra encore être officiellement adoptée par les 28 pays de l'Union européenne, probablement dès la semaine prochaine, selon un porte-parole de l'Estonie, le pays qui assure la présidence tournante de l'Union jusqu'à fin décembre.

Il est regrettable que ni Angela Merkel ni Emmanuel Macron n'aient présenté d'objections à la décision du Conseil, au prétexte que le protocole de Minsk n'était toujours pas appliqué. Mais ils ont paru en imputer la responsabilité à la Russie, sans mentionner la volonté de Kiev, affichée dès le début, de n'en tenir aucun compte,. Depuis quelques mois, elle a repris ses offensives sur une large échelle.

Moscou a réagi calmement, mais il est évident que les relations entre la Russie et les Européens, déjà quasiment au point mort, ne s'amélioreront pas. Dans un premier temps, les contre-sanctions russes, dont souffre principalement l'agriculture françaises, ne seront pas levées.

La récente tournée européenne du secrétaire d'Etat Rex Tillerson a montré que Donald Trump fera tout son possible pour éloigner l'Europe de la Russie...et qu'il y a déjà réussi. Tillerson n'a cessé d'affirmer que la Russie était une menace grandissante pour l'Europe: « L'agression russe en Ukraine reste la plus grande menace actuelle contre la sécurité européenne » “Russia's aggression in Ukraine remains the biggest threat to European security.”. Aucun de ses interlocuteurs européens n'a fait valoir la moindre objection.

Il en résultera qu'au plan géostratégique, l'alliance entre la Russie et la Chine se renforcera. L'Europe sera de moins invitée à s'y joindre, le voudrait-elle. Quant à l'Ukraine, Vladimir Poutine dans sa dernière conférence de presse a mis en garde contre le risque d'un « massacre dans les Etats ukrainiens russophones pire que celui de Srebrenica si les Occidentaux continuaient à renforcer leur aide aux forces ukrainiennes nationalistes de Kiev ». On remarquera qu'avec sa prudence habituelle il n'a pas évoqué dans ce cas une intervention militaire de la Russie en défense des républiques populaires de Lougansk et de Donetz.

dimanche, 17 décembre 2017

Un pont-tunnel ferroviaire à travers le détroit de Bering?

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Un pont-tunnel ferroviaire à travers le détroit de Bering?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce projet, plusieurs fois étudié dans le passé, a toujours échoué devant le refus du Canada et des Etats-Unis d'être relié à la Russie. Pourtant il ressurgit dans l'esprit d'un certain nombre d'Etats et d'investisseurs privés susceptibles d'être intéressés par les perspectives d'emplois et de développement économique qu'il générerait.

Il suffit de regarder une carte pour en comprendre l'intérêt. Même si le réchauffement climatique facilitait les trafic maritimes dans les mers adjacentes dites mer des Tchouktches et mer de Sibérie orientale, ces passages resteraient aléatoires voire dangereux une grande partie de l'année. Les liaisons trans-Pacique présentent leurs propres inconvénients. Une voie ferrée rapide doublée d'un pont-tunnel ferroviaire sous le détroit de Bering représenterait un investissement certes coûteux mais qui serait vite rentabilisé par les retombées économiques en résultant.

Le détroit n'est large que de 51 miles nautiques. Le tunnel pourrait selon les premières estimations être construit à des profondeurs d'entre 50 et 100 m, ce qui est tout à fait à la portée , même si l'on tient compte du fait que le sol est gelé, des méthodes modernes d'ingénierie. Il en serait de même des tronçons de ponts permettant d'y accéder.

La Chine a repris le projet dans le cadre de son grand programme d'interconnexion international dit One Belt One Road. La voie ferrée permettrait la circulation de trains à grande vitesse, tant pour les marchandises que pour les voyageurs. Ils relieraient la Chine et la Russie au Canada et aux Etats-Unis. L'Académie Chinoise d'Ingénierie ( Chinese Academy of Engineering) a déjà proposé de nommer la future ligne China-Russia-Canada-America line.

La Chine a besoin de charbon. Elle pourra l'importer des mines de l'Alaska. De même, elle pourra importer du pétrole de l'Alberta, à hauteur de 3 millions de barils par jour. Les défenseurs des énergies nouvelles ne s'en réjouiront pas, mais ils ne seront évidemment pas écoutés. Le coût du tunnel serait d'environ $35 milliards, montant très faible au regard du coût total d'une future liaison ferroviaire reliant Pékin à Moscou et à Washington.

Même si pour le moment, le climat politique à Washington ne peut pas faire espérer un accord des Etats-Unis sur un tel projet, on peut penser que le Canada, le Mexique et même certains Etats d'Amérique centrale y verraient une occasion irremplaçable de se relier à l'ensemble euro-asiatique en cours de mise en place. L'Allemagne, nous l'avons vu dans un article précédent, sera certainement prête à y investir, compte tenu des bénéfices qu'elle en retirerait.

vendredi, 15 décembre 2017

L'Allemagne, la France et l'Eurasie

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L'Allemagne, la France et l'Eurasie

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Dans une Allemagne ou Angela Merkel semble avoir perdu sa capacité à rassembler les différents partis politiques, il est intéressant de constater la montée en influence de Sigmar Gabriel, actuel ministre des Affaires Etrangères et membre influent du SPD, Parti social-démocrate (voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Sigmar_Gabriel).

Ceci est d'autant plus important que Sigmar Gabriel défend des perspectives très intéressantes dans le domaine international. Elles concernent tout autant la France que l'Allemagne. Ainsi, dans un discours-programme sur la politique étrangère, le 5 décembre, il paru prendre acte de la perte d'influence des Etats-Unis en Europe. Mais loin de la regretter, il s'est est quasiment réjoui. Il y voit une occasion pour l'Allemagne de réaffirmer ses ambitions géopolitiques. Il parlait devant des diplomates et experts de haut rang rassemblés dans le cadre du Forum Berlinois sur la politique étrangère organisé par l'influente Fondation Körber 1).

Certains pourraient craindre en France que le concept de Grande Allemagne qui était sous-jacent à son discours corresponde à celui d'Europe allemande. En effet, pour lui, il n'est pas question d'envisager d'une façon ou d'une autre le retrait de l'Union européenne. Cependant, même s'il ne l'a pas dit, obligé à la réserve diplomatique, il considère que l'Allemagne n'a rien à gagner dans l'Europe actuelle, largement au service des intérêts américains, tant économiques omni-présents à Bruxelles que politico-militaires fondamentalement anti-russes au sein de l'Otan.

Par contre, si l'on peut dire les choses d'une façon un peu brutale que Sigmar Gabriel ne voudrait certainement exprimer officiellement, il ambitionne une Europe franco-allemande, ou plutôt alémano-française. Avec réalisme, il admet que si l'Allemagne dispose d'une puissance économique et financière infiniment supérieure à celle de la France, celle-ci aura longtemps, car ces choses ne s'improvisent pas, la supériorité d'une force armée polyvalente, de solides industries de défense et de capacités de déploiement incomparables dans un certain nombre de théâtres mondiaux.

On peut penser qu'aujourd'hui Emmanuel Macron, par divers qualités que nous n'examineront pas ici, est beaucoup plus rassurant pour l'Allemagne que ses prédécesseurs. Macron lui-même avait déjà montré son attrait pour une Europe franco-allemande, mais le moins que l'on puisse dire est qu'Angela Merkel ne l'avait pas encouragé dans cette voie. Les ouvertures d'un Sigmar Gabriel, même si celui-ci ne dispose encore que de pouvoirs limités au sein de l'actuelle ou de la future Grande Coalition, ne pourront que l'intéresser.

Une stratégie eurasiatique

Au plan international, Sigmar Gabriel, dans son discours, s'est radicalement démarqué de ce que l'on pourrait appeler la stratégie américaine de ses prédécesseurs, visant à faire de l'Allemagne le meilleure élève d'une classe européenne dont Washington resterait toujours le magister. Il a expliqué, pour la première fois en Allemagne, dans une instance aussi influente que le Forum Berlinois, qu'il portait un intérêt considérable au grand projet de la Chine, dont nous avons souvent discuté ici, relatif à l'OBOR, “One Belt One Road” ou “nouvelle Route de la Soie”). Il y voit une initiative très prometteuse pour intégrer les politiques économiques, géopolitiques et géostratégiques des nombreux pays qui seront ainsi reliés.

Certes la Chine, responsable de l'initiative, entend en rester le moteur, mais en aucun cas elle ne paraît viser à le faire à son seul profit, non plus qu'à celui de la Russie, son alliée indéfectible. Il a expliqué que «  Nous, en Occident, pourrions être à juste titre critiqués pour n'avoir conçu aucune stratégie comparable ». Il semble y voir, non seulement pour l'Allemagne, mais pour une Europe alémano-française, une occasion irremplaçable permettant de s'intégrer à la construction d'un grand ensemble eurasiatique en gestation. Celui-ci deviendrait sans discussions la première puissance mondiale à tous égards – peut-être la seule puissance capable d'assurer la survie du monde face aux multiples crises qui se préparent.

Il serait inadmissible que la France ne voit pas les enjeux et tarde encore, comme elle le fait actuellement, à rejoindre le grand ensemble eurasiatique qui se mettra d'autant plus vite en place qu'une Allemagne sous la direction d'un Sigmar Gabriel, déciderait sans attendre d'en exploiter les opportunités.

1) Voir
* https://www.deutschland.de/fr/topic/politique/forum-berli...
* https://www.koerber-stiftung.de/en/berlin-foreign-policy-...

dimanche, 10 décembre 2017

Nikolaï Starikov : «Les politiciens occidentaux auraient dû créer une ceinture d’États indépendants en Europe centrale»

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Nikolaï Starikov : «Les politiciens occidentaux auraient dû créer une ceinture d’États indépendants en Europe centrale»

Ex; https://www.visegradpost.com/fr

Roumanie, Timişoara – Entretien avec Nikolaï Starikov, écrivain russe, journaliste d’opinion, activiste social et co-président du Parti de la Grande-Patrie: « Si les politiciens occidentaux s’inquiétaient vraiment de la possibilité d’une guerre et voudraient l’éviter, ils auraient établi une ceinture d’États indépendants en Europe centrale. »

En mai, Ferenc Almássy a eu l’occasion de rencontrer Nikolaï Starikov, qui était à Timişoara, pour présenter son livre « La nationalisation du rouble – La voie vers la liberté de la Russie ». Une bonne occasion d’avoir une petite conversation avec un intellectuel et politicien patriotique russe pour mieux comprendre le point de vue des Russes sur les pays d’Europe centrale et orientale.


Ferenc Almássy : D’abord, je voudrais vous remercier pour cet entretien. Nous avons l’occasion de nous rencontrer à Timişoara, où vous avez lancé la promotion de l’édition roumaine de votre livre « La nationalisation du rouble – La voie vers la liberté de la Russie ». Je commencerais par une première question : comment vit-on en Russie, dans une démocratie illibérale ?

Nikolaï Starikov : Vous avez posé la question clé. D’un côté, en utilisant le mécanisme du marché, Poutine a réussi à rétablir une part importante du pouvoir de l’État en Russie et à rétablir la position de la Russie sur la scène internationale. Aujourd’hui, la situation en Russie est contradictoire, d’une part nous avons une politique étrangère puissante et sûre d’elle. D’un autre côté, en économie interne, nous avons suivi le système économique mondial américain. Mon opinion est que les opportunités offertes par le modèle économique libéral ont été épuisées. Nous avons besoin d’une nouvelle politique économique et de nouvelles personnes capables de l’appliquer. Je veux souligner que lorsque je parle de nouvelles personnes, je veux dire, nouveau Premier ministre, nouveaux gouverneurs, de nouvelles forces politiques. Ceux-ci doivent compléter l’activité du Président, que je considère comme l’un des meilleurs politiciens de l’histoire de la Russie.

FA : Vous êtes le président de votre propre parti, le Parti de la Grande-Patrie. Cela signifie-t-il que vous voulez gagner le pouvoir ou que vous voulez travailler avec Vladimir Poutine, une personnalité que vous semblez apprécier ?

Nikolaï Starikov : La politique est l’art du possible et toute force politique est créée pour accéder au pouvoir. Nous approuvons la politique de Vladimir Poutine, notre Président. Toutefois, nous sommes opposés à la politique économique mise en place par le gouvernement. L’évolution du processus politique au cours des dernières décennies peut être résumée comme suit : après la chute de l’Union soviétique, les «ultra-libéraux» sont arrivés au pouvoir. Toutes leurs actions n’étaient pas destinées au bien de la Russie mais à celui des États-Unis. En raison des actions de Poutine, ces “ultra-libéraux” ont été remplacés par des patriotes libéraux. Ils sont prêts à s’opposer aux Américains en matière de politique étrangère, mais ils ne sont pas prêts à avoir une politique intérieure souveraine. Cela conduit à une situation dangereuse, dans laquelle l’engagement d’une politique intérieure souveraine devient impossible parce que notre économie est négativement affectée par son cours libéral. À mon avis, nous avons besoin de nouvelles personnes et de nouvelles forces politiques pour changer la politique intérieure du pays. Je qualifierais ces forces de patriotiques, parmi lesquelles je compte, bien sûr, le Parti de la Grande-Patrie.

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FA : Votre parti est présenté comme un “parti de la défense” russe, mais dans les médias occidentaux en particulier, la Russie est présentée comme une agresseuse et non comme une victime, et il y a plusieurs exemples : la Crimée, le Donbass, l’exercice Zapad, les provocations dans les pays baltes. Alors, la Russie est-elle vraiment dans une situation défensive ?

Nikolaï Starikov : Analysons les faits. De 1945 à 1990 en Europe, il y avait deux États allemands. Cela veut-il dire qu’il y avait deux peuples allemands différents ? Bien sûr que non. En 1990, un État a englouti l’autre et aujourd’hui nous avons un État allemand uni et un peuple allemand uni. Cela a été rendu possible parce que l’Union Soviétique, c’est-à-dire la Russie, a organisé ce processus et ne l’a pas bloqué. Aujourd’hui, nous ne comprenons pas pourquoi l’Europe bloque le même type d’intégration pour le peuple russe. En politique, il est risible de parler de gratitude, néanmoins on aimerait voir, d’abord en Allemagne et en Europe de l’Est, qu’on a laissé choisir son propre destin politique, une certaine forme d’appréciation. Pour mieux comprendre notre situation, regardez-la de notre point de vue : Hitler a attaqué l’Union Soviétique. À cette époque, trois jours d’avance ininterrompue étaient nécessaires pour qu’un char allemand atteigne Moscou. Aujourd’hui, il y a 350 km de la frontière russo-ukrainienne à Moscou. Des bases militaires américaines dans les pays baltes à ma ville natale de Saint-Pétersbourg, il y a moins de 200 km. Aujourd’hui, les Américains, les troupes de l’OTAN, sont beaucoup plus proches de nos centres économiques, culturels et politiques. La question est de savoir pourquoi ils se rapprochent et qui est l’agresseur potentiel ? Si les politiciens occidentaux s’inquiétaient vraiment de la possibilité d’un éclatement de la guerre et voudraient l’éviter, ils auraient établi une ceinture d’États indépendants en Europe centrale. Au lieu de cela, ils ont violé tous les engagements pris envers Gorbatchev, et l’infrastructure de l’OTAN a été accolée à la Russie. Autour de nos frontières, un soi-disant bouclier anti-missiles est en train d’être mis en place. Lorsque nous nous interrogeons sur son objectif, nous sommes traités comme des enfants de maternelle et nous nous voyons répondre que le bouclier est dirigé contre les missiles iraniens et nord-coréens. Évidemment, si ce bouclier était dirigé contre l’Iran et la Corée du Nord, deux pré-requis auraient été nécessaires : premièrement, que ces pays possèdent ce type de missiles et deuxièmement, dans ce cas le bouclier aurait dû être placé aux frontières de la Corée du Nord et de l’Iran, pas en Roumanie, en Bulgarie et en Pologne. Si nous devions suivre cette pseudo-explication proposée par les politiciens américains à l’époque, le réarmement de l’armée russe est entrepris afin de protéger l’Europe contre une invasion extraterrestre. Peut-être que cela aura lieu. Et nous avons une bonne armée. Ou peut-être que nous devons nous défendre contre les barons de la drogue colombiens.

FA : Vous avez dit que l’Europe centrale devrait être neutre, être une zone tampon. Quelle est votre opinion sur le groupe de Visegrád et cette région de l’Europe ? Comment voyez-vous la situation actuelle ?

Nikolaï Starikov : Le comportement est différent d’un État à l’autre. Le plus inquiétant est la position de la Pologne. D’un autre côté, nous, en tant que réalistes, comprenons que les décisions politiques en Europe ne sont prises ni à Bucarest, ni à Budapest ni à Varsovie, pas même à Bruxelles, mais à Washington. Par conséquent, notre président essaie de conclure un accord avec ceux qui déterminent le cours des politiques européennes. Mais, au lieu d’un accord, nous voyons le rapprochement des forces militaires vers nos frontières. Lorsque les pays de l’Europe de l’Est ont adhéré au Traité de Varsovie, ils ont été confrontés à l’infrastructure militaire de l’OTAN. Aujourd’hui, parce qu’ils appartiennent à l’OTAN, ils seront automatiquement pris pour cibles par l’appareil militaire russe. Quelle est la différence ? Je ne pense pas que leur sécurité ait été augmentée en devenant la cible d’une arme nucléaire différente. La priorité était complètement différente : aucune arme nucléaire ne devrait viser les pays d’Europe de l’Est. Quand les Américains effraient l’Europe avec le péril russe, chacun devrait se poser la question suivante : de quoi la Russie a-t-elle besoin de l’Europe ? A-t-elle besoin de territoires européens ? Avons-nous des revendications territoriales sur la Pologne, la Roumanie ou la Bulgarie? Nous n’en avons jamais eu. La Pologne a des fantômes historiques et des griefs contre nous. Nous n’avons aucun grief contre la Pologne. Nous voulons seulement rétablir l’unité de notre peuple. Nous ne cherchons pas à acquérir de territoires étrangers.

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FA : Cela signifie-t-il que vous voulez reprendre d’autres parties de l’Ukraine ou certaines parties des pays baltes où il y a d’importantes minorités russes ?

Nikolaï Starikov : Chaque ère historique dicte ses propres formes d’intégration. Auparavant, un empire intégrait un certain territoire. Et ce territoire devenait une partie de l’empire en question. Il y avait des États dans une certaine dépendance des grands empires, mais ils gardaient leur indépendance. À l’époque, les empires se battaient entre eux en essayant de démembrer leurs rivaux par la création de petits États « indépendants » sur le territoire de leurs rivaux, qui finissaient par devenir dépendants d’un certain acteur géopolitique. À titre d’exemple, aujourd’hui, les États européens sont subordonnés aux États-Unis d’Amérique. C’est pourquoi nous pouvons affirmer que, dans l’Europe d’aujourd’hui, il n’y a pas de véritables Etats indépendants même si certains attributs extérieurs de l’indépendance tels que le Président, le drapeau national ou le sceau sont conservés. Personne ne dit que l’Europe fut légalement occupée par les États-Unis, mais, en fait, ce sont les Américains qui la dirigent. C’est pourquoi je pense que quand quelqu’un affirme que nous voulons inclure des territoires dans notre État, il pense au siècle dernier. Nous voulons rétablir notre influence sur ces territoires et mettre fin à l’influence de nos opposants géopolitiques, en l’occurrence les États-Unis, qui ont conduit à des conflits armés. Peut-être qu’en Europe occidentale, tout le monde ne sait pas que l’Ukraine, la Russie et la Biélorussie sont trois États habités en réalité par le même peuple. L’Ukraine n’a pas existé dans l’histoire. C’est un projet artificiel de l’Empire austro-hongrois, et il a une date de naissance, la fin du XIXe siècle. Aux États-Unis, les immigrants de ces parties de l’Empire austro-hongrois imprimaient des journaux. Si vous regardez dans un de ces journaux, vous verrez que jusqu’à une certaine date, dans la seconde moitié du XIXe siècle, ils s’appelaient eux-mêmes ruthènes ou russes. Soudainement, dans les mêmes journaux le terme Ukrainiens est apparu. Donc, hier, ils étaient des Ruthènes, aujourd’hui ils sont des Ukrainiens. C’est impossible. L’Ukraine a été créée et elle a été approuvée jusqu’à aujourd’hui par les Américains afin de devenir un État anti-russe et russophobe. Imaginez qu’aux frontières de la Hongrie, un nouvel État, dont l’idéologie et le but de l’existence serait la destruction de la Hongrie, apparaisse. Dans cet État, les habitants seraient hongrois et la langue officielle serait un dialecte hongrois avec un grand nombre de mots allemands et roumains. La langue hongroise serait interdite. Le hongrois ne serait pas étudié dans les écoles et son utilisation serait interdite à la radio et à la télévision. Toute personne ayant le hongrois comme langue maternelle, soit 98% de la population, serait obligée d’écrire tous les documents dans cette nouvelle langue avec beaucoup de mots étrangers. Et tout cela au milieu d’une énorme propagande qui dit aux gens qu’ils sont des Ukrainiens et non des Hongrois et que les Hongrois se sont moqués des Ukrainiens tout au long de leur Histoire. C’est la situation actuelle.

FA : J’ai compris, mais si des millions de personnes disent qu’elles forment une nation, qui peut-il leur refuser ce droit ? Les nations aussi naissent et finissent par mourir. Peut-être, d’un certain point de vue, la naissance de la nation ukrainienne peut être considérée comme artificielle, mais maintenant, elle existe. Et après ? Niez-vous le droit des Ukrainiens d’avoir un État ?

Nikolaï Starikov : À notre époque, les gens découvrent l’émergence de nouvelles nations à la télévision. On leur dit ces choses. C’est un projet absolument artificiel et des millions de personnes n’ont pas leur mot à dire. Par exemple, nous pourrions tirer la conclusion qu’en 1933, 80 millions d’Allemands ont soudainement décidé, pour une raison inconnue, de tuer des Juifs et des communistes et d’occuper toute l’Europe. Il est évident que cette décision n’a pas été prise par des dizaines de millions d’Allemands, mais par un petit cercle de nazis qui sont arrivés au pouvoir. C’est pourquoi je dis que la déclaration selon laquelle des millions de personnes participent au processus de construction de la nation n’est qu’une spéculation politique. Les gens simples sont intéressés par des choses simples : ils veulent un bon travail, un bon salaire, ils veulent élever leurs enfants et vivre en paix. Ils sont inoculés avec la rage, qui à la longue est censée mener à la guerre. Pendant six ans, les Allemands ont été inoculés avec la haine envers les Slaves, les Tsiganes, les Juifs et les communistes. Que s’est-il passé après? Les nazis ont amené les gens à tuer sans pitié. En Ukraine, une propagande similaire est en cours depuis deux décennies. Une génération prête à tuer a été élevée. Aujourd’hui, cette génération tue des gens dans le Donbass. Il n’y a pas de pas combats entre Russes et Ukrainiens dans le Donbass. Là, des représentants du même peuple se combattent. Il y a des personnes avec un prénom et un nom totalement russes qui combattent du côté de l’Ukraine. De même, il y a des personnes avec des noms de famille spécifiques aux régions du sud de la Russie combattant pour le compte du Donbass. Ils parlent la même langue. Dans la majorité des bataillons ukrainiens les plus brutaux, le russe est la langue parlée. Les politiciens ukrainiens parlent seulement ukrainien devant les caméras de télévision. Une fois que les caméras sont éteintes, ils recommencent à parler le russe, qui est leur langue maternelle.

FA : Je comprends votre opinion sur l’Ukraine, mais ne pensez-vous pas que l’Europe centrale, que vous aimeriez voir neutre, est devenue membre de l’OTAN (et l’Ukraine veut faire de même) parce que la Russie n’a pas bien géré fin de l’Union soviétique et n’a pas été en mesure de développer de nouvelles relations avec ces pays ?

Nikolaï Starikov : Nous avons établi de nouveaux types de relations avec ces pays au cours des deux dernières décennies. Nous n’avons pas interféré dans la politique interne et, sous la pression de Washington, nous avons subi des pertes commerciales en vendant du gaz à l’Ukraine à un très petit prix. À la fin, nous avons obtenu un État ennemi à nos frontières et des missiles de l’OTAN qui peuvent atteindre notre capitale en quelques minutes. Nous ne pouvons pas et ne voulons pas continuer une telle politique.

FA : Que pourrait-on faire sur le plan diplomatique, ainsi qu’à d’autres niveaux, pour aider l’Europe centrale à redevenir neutre ? Comment pouvons-nous avoir un nouveau départ entre la Russie et l’Europe centrale ? Que devrait faire la partie russe ?

Nikolaï Starikov : En tant que réaliste politique, je dirai que la Russie doit s’entendre avec les États-Unis. Et les États-Unis ne peuvent pas et ne parviendront pas à un accord avec nous parce que le but final des politiciens américains n’est pas la paix du monde mais le maintien de la domination à n’importe quel prix, y compris par les conflits militaires.

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FA : Avez-vous une opinion concernant l’Initiative des Trois Mers, un projet qui envisage un réseau de gazoducs et de terminaux GNL pour relier les trois mers – la mer Baltique, l’Adriatique et la mer Noire ?

Nikolaï Starikov : Aujourd’hui, les gazoducs sont des instruments politiques. Nous serions heureux qu’ils soient construits uniquement pour acheminer du gaz du point A au point B. Mais, étant donné qu’ils sont construits dans un but géopolitique, nous appuierons les gazoducs qui sont à notre avantage et à l’avantage de l’Europe. Nous nous opposerons également aux tentatives des Américains de construire des gazoducs dont le but est de nous exclure du processus politique européen. En passant, les Américains agissent de la même manière. C’est la raison pour laquelle la Russie et l’Europe ne peuvent pas construire la deuxième ramification du Nord Stream 2 ou du South Stream, initialement arrêté par la Bulgarie, suivi par la Macédoine, où des émeutes «inattendues» ont éclaté. À l’heure actuelle, il y a une intention de construire ces gazoducs à travers la Turquie.

FA : Une dernière question : ne pensez-vous pas que le monde devient multipolaire et que l’Europe centrale pourrait être l’un de ces pôles ? Ne serait-il pas bon que la Russie cautionne de tels efforts afin de libérer cette région de la domination occidentale et de devenir un voisin et un partenaire indépendant ?

Nikolaï Starikov : Nous exprimons notre désir d’un monde multipolaire parce que ce serait un monde beaucoup plus stable. À mon avis, nous devons soutenir le processus qui a pour but final la création d’un nouveau centre de pouvoir mondial, sur l’ensemble du continent européen (ou des parties de celui-ci).

dimanche, 03 décembre 2017

Les Etats-Unis continuent à développer une scission entre la Russie et l’Europe

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Les Etats-Unis continuent à développer une scission entre la Russie et l’Europe

par Eberhard Hamer,

professeur en économie, Allemagne

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Récemment, le Département d’Etat américain a présenté une nouvelle liste des sanctions contre la Russie. Il remplit ainsi une exigence signée par le Président Trump le 2 août, intitulée CAATS (Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act). Ce règlement prend effet le 29 janvier 2018 et comprend une nouvelle attaque de la guerre économique contre la Russie, concernant non seulement des entreprises russes, mais en premier lieu les entreprises européennes réalisant des affaires avec des entreprises russes sanctionnées.


L’accentuation de cette nouvelle guerre économique correspond entièrement à la devise trumpienne de l’«Amérique d’abord». S’agissant par exemple des sanctions contre les entreprises russes et allemandes participant à la pipeline North Stream, le but avoué est de couper l’Europe du gaz russe, afin de mieux lui imposer l’achat de gaz liquide américain plus cher, actuellement disponible en abondance mais sans aucun acheteurs trouvé. Il faut donc que le gazoduc North Stream soit interrompu à mi-chemin, tout en menaçant en même temps les entreprises allemandes impliquées, pour stopper leur participation.


Toutes les sanctions américaines sont punissables aux Etats-Unis, car la justice américaine soumet au droit américain toutes les affaires accomplies dans le monde entier et facturées en dollar ou effectuées à l’aide du dollar. Tout endroit, où le dollar est utilisé, est un territoire soumis à la juridiction et à l’hégémonie américaine. Cela permet aux Etats-Unis de condamner et d’exploiter à volonté les sociétés européennes. Seul VW a déjà dû payer 25  milliards d’euros à la justice américaine à cause des normes US spécialement introduites contre les moteurs diesel. La Deutsche Bank, quant à elle, a dû régler plus de 10 milliards et d’autres multinationales européennes des montants de différentes hauteurs.


EH-visionen.jpgL’acte américain CAATS prévoit que toutes les sanctions doivent être harmonisées avec les partenaires étatsuniens. On ne peut donc guère l’exprimer plus ouvertement: les sanctions ne seront poursuivies que là où elles nuisent aux partenaires américains au niveau de la concurrence. Finalement, les entreprises américaines restent les instances décisionnelles des sanctions.


De cette manière, les Etats-Unis veulent non seulement isoler systématiquement la Russie de l’Europe et empêcher les sociétés russes de réaliser quelques affaires que ce soit avec l’Europe, mais ils veulent également menacer de peines (et d’exécution de peines) le reste du monde et notamment l’Europe, si un commerce a lieu avec des entreprises russes. Cela a des conséquences considérables en Europe, où le commerce avec le marché de l’avenir le plus optimiste (Russie) a diminué de 30% au cours des deux dernières années. Parallèlement à la réduction du commerce européen avec la Russie, le commerce américain avec ce pays a augmenté. Il ne s’agit donc non seulement de causer du tort à la Russie, mais aussi de soutenir l’idée «America first» [«Amérique d’abord»], c’est-à-dire empêcher l’Europe de faire des affaires avec la Russie, là où les entreprises américaines veulent et peuvent les accomplir.


Il est difficile de s’imaginer une manière plus brutale d’effectuer l’impérialisme économique américain au détriment de l’Europe. Non seulement les grandes entreprises n’osent plus faire du commerce avec la Russie ou participer à des investissements russes – mais également des centaines d’entreprises de grandeur moyenne, ayant jusqu’à présent bien commercé avec la Russie, n’osent plus continuer leurs affaires, parce qu’ils ne survivraient pas à des brutaux paiements de sanction américains.


Aux Etats-Unis se prépare encore un nouveau durcissement de la guerre économique contre la Russie: on veut interdire aux banques européennes et même à des privés de commercer ou de tenir des emprunts russes. Ainsi, on veut punir la Russie de ne plus vouloir accepter le dollar comme seul monnaie mondial, mais de vouloir imposer le rouble comme moyen de paiement international. En outre, on veut empêcher les marchés financiers européens d’utiliser le rouble au lieu du dollar et de ne plus du tout travailler avec des emprunts en roubles.


De telles mesures unilatérales nuisent à l’Europe et devraient être discutées avec les alliés européens. On aurait au moins pu s’attendre à des protestations de la part de la Commission européenne et du gouvernement fédéral allemand. Mais non, pas de réaction! L’UE cède sans broncher à la puissance coloniale, même là où cela fait mal.


Isoler la Russie de l’Europe est non seulement fatale à court terme pour une partie de notre économie, mais à long terme pour toute notre prospérité en Europe: la politique de l’«Amérique d’abord» au profit des sociétés américaines rend maintenant déjà tout commerce avec les Etats-Unis de plus en plus difficile et le réduit fortement. Cela aura des conséquences dramatiques, quand le système pourri du dollar des Etats-Unis surendettés s’effondra.


A long terme, la Russie va continuer à augmenter sa solvabilité, mais à l’avenir, elle aura également besoin de l’économie européenne. L’économie allemande continuera uniquement à croître jusqu’en 2050, si elle s’élargit vers l’Est. La Russie dispose de toutes les matières premières dont nous avons besoin et nous avons toutes les technologies dont la Russie a besoin. Pour les deux pays et pour l’Europe, cette coopération est décisive pour la prospérité durant un siècle.1 Si nous nous laissons évincer par les Etats-Unis, les entreprises américaines concurrentes vont conquérir ce marché et nous resterons les perdants.


Mais qui ose, en Allemagne ou en Europe, s’opposer au comportement arbitraire des Américains?   

1    cf. Hamer, Eberhard, Visionen 2050. Wohin steuern wir? Trends und Prognosen für Deutschland und Europa. [Vision 2050. Où nous dirigeons-nous? Tendances et prévisions pour l’Allemagne et l’Europe], Kopp Verlag 2016

dimanche, 26 novembre 2017

Accord de la Russie et de la Chine pour développer la route maritime nord

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Accord de la Russie et de la Chine pour développer la route maritime nord

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Dès l'époque soviétique, la Russie avait fait d'importants investissements pour développer la route maritime nord qui relie l'Est du pays au nord de l'Europe le long des côtes arctiques de la Russie. Un moment mis en sommeil avec la chute de l'URSS, cet ambitieux projets avait été repris par la Russie, notamment à partir du début de ce siècle. Nous avions précédemment consacré plusieurs articles à cette question.
 

Une telle route impose des dépenses considérables, compte tenu du fait que même en été, la banquise s'étend tout au long du parcours. Le réchauffement climatique espéré dans ces régions n'a pas encore eu d'effets sensibles. Il faut d'abord construire des brise-glaces, aujourd'hui à propulsion nucléaire, des brise-glaces remorqueurs, des tankers et navires de charges adaptés, et surtout des ports permettant d'accueillir ces navires et les marchandises destinées à être transportées.

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Comme il fallait s'y attendre, récemment, la Russie et la Chine viennent de s'accorder pour coopérer sur ce projet. En juillet 2017 une réunion entre Xi Jinping et Dmitri Medvedev a confirmé que Moscou et Pékin avaient l'intention de développer conjointement la route nord, dans la cadre du grand projet chinois de Route de la soie maritime chinoise. Pékin a l'intention de transporter ses marchandises à travers l'Arctique depuis l'Europe vers la Chine, réduisant ainsi les distances de 20% à 30%, économisant du temps, du carburant et des ressources humaines. Considérant que 90% des marchandises chinoises sont transportées par voie maritime, cette route nord, même si elle n'intéressait qu'une petite partie de ces transports, générerait d'importantes économies. .

Il y a quelques jours, le brise-glace russe Christophe de Margerie, du nom du défunt PDG français (touchante attention, à remarquer), affrété par Total, a été le premier navire commercial à emprunter le passage Arctique du nord-est pour rallier l'Asie. Ceci a représenté un gain de 15 jours par rapport à la route de Suez.

Simultanément le brise glace chinois Xuelong 2 a emprunté la route vers l'Amérique du nord, réduisant dans les mêmes proportions la durée du passage de traversé le passage du Nord-Ouest dans l'Arctique, atteignant l'Amérique du Nord depuis l'Asie. C'était la première fois qu'un navire chinois avait fait ce trajet, si l'on excepte les navires non chinois affrétés par l'entreprise chinoise COSCO.

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L'intérêt futur de la route nord-est

D'un point de vue pratique, il existe deux routes maritimes à travers l'Arctique, si l'on excepte la route dite nord-nord traversant le pôle, qui ne sera pas praticable avant au mieux 2050, la route dite du nord-est, et celle dite du nord-ouest. Cette dernière reste encombrée de glaces profondes, même pendant l'été. La route du nord-est n'est évidemment jamais en eau libre, mais les glaces que l'on y rencontre en été peuvent être fracturées par de puissants brise-glaces, à l'avenir de préférence nucléaire.

La coopération entre la Russie et la Chine sur cette voie sera très rentable pour les deux pays. Ils l'utiliseront pour leurs besoins propres, mais aussi ceux d'autres pays (probablement notamment le Japon) choisissant cette solution. Pour la Chine, le passage par le Canal de Suez représente 12.000 miles nautiques, celui par le nord sera inférieur à 7.000 nautiques.

Rappelons que les ambitions de la Chine en matière de nouvelles voies maritimes ne se limitent pas à l'Arctique. Elle envisage la construction à travers le Nicaragua d'un canal transaméricain qui se propose de rivaliser avec le canal de Panama. Mais les travaux au Nicaragua seront considérables et Panama a entrepris de doubler la capacité de son canal.

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Les routes de l'Arctique représenteront inévitablement l'avenir en termes d'opportunités et d'économies de coûts. En comparaison avec le canal de Suez, qui est la route actuelle par laquelle la Chine atteint l'Europe, avec un trajet de près de 12 000 miles nautiques, le passage par la voie arctique du Nord-Ouest est inférieur à 7 000 milles.

Dans l'Arctique, la Chine ne se limitera pas à offrir du transport. Elle envisage, en accord avec la Russie, d'y exploiter des réserves apparemment considérables en hydrocarbures et autres ressources naturelles.

Les environnementalistes ne manqueront pas de dénoncer les dégâts nécessairement considérables que provoqueront ces projets sur la faune et la flore arctiques. Celles-ci apparaissent aujourd'hui aux scientifiques bien plus riches qu'ils ne supposaient. Mais aucune des puissances composant le Conseil de l'Arctique ne s'en soucie évidemment.

Rappel

Rappelons que, en terme de droit international, l'Arctique est partagée entre les États-Unis, le Nord du Canada, la Finlande, le Groenland (Danemark), l'Islande, la Norvège, la Russie et la Suède et est administré par le Conseil de l'Arctique. Les pays non membres comprennent la France, l'Allemagne, l'Inde, l'Italie, le Japon, la Corée du Sud, les Pays-Bas, la Pologne, Singapour, l'Espagne, le Royaume-Uni et la République populaire de Chine. Ceci ne veut pas dire qu'un de ces Etats puisse s'attribuer un monopole sur les routes l'empruntant. Par contre, ils sont juridiquement habilités à décider de l'usage qu'ils font de ce que l'on nomme leurs zones côtières exclusives.


Pour en savoir plus:

Voir :

https://journal-neo.org/2017/11/22/the-huge-implications-...

http://french.china.org.cn/china/txt/2017-10/10/content_5...

 

jeudi, 16 novembre 2017

Un Front de la Tradition?...

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Un Front de la Tradition?...

Les éditions Ars Magna viennent de publier un recueil de textes d'Alexandre Douguine intitulé Le Front de la Tradition. Théoricien politique influent, un moment proche d'Edouard Limonov, Alexandre Douguine est la figure principale du mouvement eurasiste en Russie. Outre L'appel de l'Eurasie (Avatar, 2013), le texte d'une longue conversation entre lui et Alain de Benoist, plusieurs  de ses ouvrages ou recueils de ses textes sont déjà traduits en français comme La Quatrième théorie politique (Ars Magna, 2012), Pour une théorie du monde multipolaire (Ars Magna, 2013) ou Vladimir Poutine, le pour et le contre - Écrits eurasistes 2006-2016 (Ars Magna, 2017).

" Connu surtout comme le promoteur de l’idée eurasiste et comme le théoricien qui a une influence fondamentale sur les orientations géopolitiques de l’actuel maître du Kremlin, Alexandre Douguine est aussi (voire surtout) pour beaucoup de ses lecteurs celui qui a le mieux exposé l’idée traditionaliste dans notre Kali Yuga.

On reconnaît un arbre à ses fruits et ceux issus du traditionalisme de René Guénon et de Julius Evola étaient bien décevants. Ces grands penseurs avaient laissé une oeuvre gigantesque mais des disciples aussi petits que médiocres dont la seule fréquentation était de nature à dégouter de se revendiquer de la Tradition.

Puis Alexandre Douguine vint… et il ouvrit des perspectives immenses sur l’islam, l’orthodoxie, le judaïsme, sans oublier les liens entre la Tradition et la géopolitique. On peut résumer son influence en écrivant qu’il fit de ses disciples des « traditionalistes du XXIe siècle ».

D’où la nécessité impérative de rendre accessible aux lecteurs francophones la totalité de ses textes consacrés à la Tradition traduits dans notre langue. Nombre d’entre eux sont totalement inédits, d’autres ont déjà été publiés dans d’obscures revues ou sur des sites internet éphémères, tous méritent d’être lus et médités, tous vous changeront en profondeur et contribueront à faire de vous les kshatriyas que demande notre âge de fer. "

lundi, 13 novembre 2017

V. V. Putin & Eastern Wisdom

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V. V. Putin & Eastern Wisdom

By MEHMET SABEHEDDIN

Ex: http://www.newdawnmagazine.com

Back in October 2000, the newly elected President of the Russian Federation, Vladimir V. Putin, granted a revealing interview to the editors of India Today and The Russian Journal. President Putin paid special tribute to Nicholas Roerich, the Russian artist, explorer and mystic, stating:

“Roerich’s life was an amazing life, a marvel of creativity and astonishing example of spiritual closeness that, perhaps doesn’t lie on the surface, but is nevertheless the spiritual closeness that binds all peoples.”

In December 2002, President Putin’s wife Lyudmila opened an exhibition of Nicholas Roerich’s work at the National Museum of India in Delhi.

Nicholas Roerich (1874-1947) is remembered today as a celebrated Russian painter and occultist, whose intrepid journeys through Central Asia captured the attention of the Western public in the 1920s and 1930s. But Nicholas Roerich was also a master of ‘spiritual geopolitics’ who sought to establish a pan-Buddhist, transnational ‘New Country’ stretching from Tibet to southern Siberia, including territory that was governed by China, Mongolia, Tibet, and the Soviet Union. This ‘New Country’ was conceived by Roerich as the manifest, earthly expression of the invisible Kingdom of Shambhala, “the Holy Place, where the earthly world links with the highest states of consciousness.”1 This Shambhala Project was to establish the Sacred Union of the East.

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The American scholar John McCannon, who is writing a biography of Roerich, points out that in today’s Russia Roerich’s ideas are discussed at the highest echelons:

Roerich’s name has appeared with surprising frequency in civic and academic discussion of international relations and new directions in foreign policy. Mainly, he has been cited by political scientists and strategic thinkers in Russia looking for models of ‘multipolarity’ and ‘global pluralism’ to counter U.S. hegemony and seemingly triumphalist or confrontational political theories from the West…2

Since the earliest days of his first presidency, Vladimir Putin has worked tirelessly to lay the foundations of a Eurasian alliance. Just weeks after paying tribute to Nicholas Roerich, Putin told an international forum that “Russia has always perceived of itself as a Eurasian country.” Then in 2001, Russia and China, along with the states of Central Asia, founded the Eurasian political, economic and military organisation known today as the Shanghai Cooperation Organisation. Mongolia, Pakistan, Iran and India, have all expressed interest in joining the group.

In the lead up to his election for a third term as Russian president, Putin set out his grand Eurasian vision in a series of widely published articles.

Nicholas Roerich was introduced to the Buddhist legend of Shambhala while working on the first Buddhist temple ever constructed in Europe, in St. Petersburg the imperial capital of the vast Russian Empire. The Russian Tsar Nicholas II, although a devout Orthodox Christian and head of the Russian Church, had a deep interest in mysticism and Eastern wisdom. On several occasions the Tsar received the Buddhist monk Dorzhiev, assuring him that, “Buddhists in Russia may feel as if under the wing of a mighty eagle.” Construction of the St Petersburg Buddhist temple commenced in 1913 to coincide with the 300th anniversary of the Romanov dynasty. That same year Lama Dorzhiev, a friend of Nicholas Roerich and George Gurdjieff, wrote that Russia was about to fulfil the old Buddhist messianic myth of Shambhala by founding a great Buddhist empire in the East.

One hundred years later in 2013, President Putin, himself a native of St. Petersburg, promised “100-percent support” for Russia’s Buddhists. Speaking during a visit to Russia’s Buryatia republic, Putin said he was proud that Russia is the only country in Europe where Buddhism is officially recognised as a traditional religion. The Russian President emphasised that “Buddhism plays a significant role in Russia… It has always been that way. It is well known that the Buddhists helped during both world wars.” Putin described Buddhism as a “kind, humanist learning based on love for others and love for one’s country,” and said he, the federal government and regional authorities were “always at [the Buddhists’] disposal and ready to support them.”3

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Like Tsar Nicholas II, President Vladimir Putin is known to be a devout Russian Orthodox believer with a strong interest in Eastern wisdom. A master of both sambo and judo, Putin has often spoken of how the martial arts – imbued with Asian philosophy – are intended to train the body and the mind. Though an Orthodox Christian, he is conscious of the spiritual authenticity of other traditional religions. And like Nicholas Roerich, who was born Orthodox Christian but later became steeped in Buddhism, Vladimir Putin may well sympathise with the view that the highest forms of all the world’s religions point to the same ultimate reality.

For more about Russian President Putin, check out New Dawn Special Issue Vol 8 No 5. 

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Footnotes

1. See ‘From Synarchy to Shambhala, The Role of Political Occultism and Social Messianism in the Activities of Nicholas Roerich’ by Markus Osterrieder, www.scribd.com/doc/119329670/From-Synarchy-to-Shambhala

2. ‘By the shores of white waters: the Altai and its place in the spiritual geopolitics of Nicholas Roerich’ by John McCannon, www.roerichmongolia.org/files/sibirica%20full%20text%20ar...

3. ‘Putin Promises 100% Support for Buddhists’, RIA Novosti, 11 April 2013, http://en.ria.ru/russia/20130411/180578136.html

MEHMET SABEHEDDIN is a researcher, writer and global traveller. He is a longtime contributor to New Dawn magazine. He can be contacted c/- of New Dawn Magazine, GPO Box 3126, Melbourne VIC 3001, Australia.

The above article appeared in New Dawn Special Issue Vol 7 No 6.

vendredi, 03 novembre 2017

Stolypine l’incompris

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Stolypine l’incompris

Article rédigé le 14 septembre 2017, anniversaire de l’attentat contre Stolypine qui mourra le 18 septembre 1911 des suites de sa blessure.

Dans le numéro 74 de la revue « Cahiers du mouvement ouvrier », une intéressante interview de Jean-Jacques Marie, son directeur de publication, à l’occasion de la parution de son livre, « La Guerre des Russes blancs (1917-1920) ». Jean-Jacques Marie est l’auteur d’un autre livre sur cette guerre, « La Guerre Civile russe (1917-1922). Armées paysannes rouges, blanches et vertes ». Il a tenu à prolonger cette étude en calant cette guerre non plus entre 1917 et 1922 mais entre 1917 et 1920, et il précise pourquoi.

JJM-RB.jpgDe fait, cette guerre se prolongea bien jusqu’en 1922 ; mais en 1920, la dernière armée de Russes blancs, celle de Wrangel, est battue et quitte la Crimée. Il reste certes des bandes armées mais plus d’armées. Les puissances étrangères qui soutiennent les Russes blancs l’ont compris, à commencer par la France et la Grande-Bretagne qui aident les forces de Wrangel à fuir avant d’abandonner le terrain et de remplacer sans tarder la pression militaire par la pression économique. Les techniques de combat sont rudimentaires et le grand nombre de victimes (environ quatre millions cinq cent mille) est beaucoup plus le fait des épidémies de typhus et de choléra, sans compter l’absence presque totale de soins pour les blessés, que des combats eux-mêmes. Il faudrait par ailleurs évoquer le rôle de la Légion tchécoslovaque (entre trente et quarante mille hommes), d’anciens prisonniers de guerre de l’armée austro-hongroise.

Dans cette dernière étude, Jean-Jacques Marie écrit que Lénine était prêt à accepter un « Brest-Litovsk de l’intérieur », qu’à la mi-janvier 1919 Lloyd George et le président Wilson avaient proposé une conférence rassemblant les représentants des diverses forces en présence en Russie, dont les bolcheviks. Lénine commence par repousser plutôt sèchement cette proposition. Un mois plus tard, il est inquiet de la double offensive alors victorieuse de Koltchak à l’Est et de Denikine au Sud et se montre prêt à l’accepter. L’envoyé du président Wilson avait proposé un armistice entre les forces combattant en Russie, armistice suivi d’une conférence, armistice qui s’accompagnerait d’un statu quo : chaque force conserverait son territoire au moment de la signature, le blocus du pays serait levé et tous les gouvernements russes se reconnaîtraient responsables des dettes de l’Empire. Lénine est donc prêt à signer un Brest-Litovsk de l’intérieur avec Denikine et Koltchak qui, sûrs de leur victoire, refusent de traiter avec ces bolcheviks qu’ils méprisent. Nous sommes en 1919. En novembre 1920, Lénine dira : « Il y a dix-huit mois nous voulions signer une paix qui accordait une immense partie du territoire à Denikine et Koltchak. Ils s’y sont refusés et ils ont tout perdu. »

Jean-Jacques Marie avance des explications pertinentes sur les causes de la défaite des Russes blancs, des causes que Denikine formule (implicitement) dans un livre de quelque deux mille pages consacré à cette guerre civile.

Cette période de l’histoire de la Russie me conduit à la période qui l’a immédiatement précédée, avec une figure centrale bien oubliée, injustement oubliée : Stolypine.

Stolypine m’intéresse depuis longtemps, comme m’intéresse depuis longtemps Miguel Primo de Rivera, deux hommes tragiques, soit des hommes de bonne volonté restés incompris de tous et oubliés. Stolypine est encore perçu comme un défenseur de l’ordre ancien. Il est vrai que sans son action, le pouvoir tsariste aurait probablement disparu dès les années 1905-1907…

On oublie (à moins qu’on ne veuille le reconnaître) que Stolypine fut aussi un réformateur, et pas un timide. Il fut détesté des révolutionnaires (car monarchiste) et des conservateurs (car réformateur). Il fut un homme de terrain ; il parcourait les campagnes, entrant en relation directe avec les paysans. Tout en s’efforçant de remettre de l’ordre, et d’une manière forte, en tant que ministre de l’Intérieur puis en tant que Premier ministre, il s’attela à une réforme fondamentale de la propriété paysanne et à la transformation de l’autocratie en un type de gouvernement ouvert à la représentation populaire. Il envisageait la Douma comme nécessaire au fonctionnement du Gouvernement.

Ce gentilhomme rural avait une vision ample et précise de la société russe, une société composée d’une énorme masse paysanne à peine sortie du servage et dispersée sur un territoire immense. Au sommet, une aristocratie plutôt occidentalisée et peu soucieuse des affaires du pays. Entre les deux, un énorme appareil administratif, inerte et diversement corrompu. La structure même de cette société la faisait osciller entre l’autocratie et les désordres extrêmes.

Stolypine empruntait aussi peu que possible les couloirs des administrations et il détestait la paperasserie. Il avait compris que dans ce pays essentiellement paysan, l’amélioration de la société dans son ensemble passait par une profonde réforme agraire.

Vyacheslav_von_Plehve.jpgPeu après sa nomination en 1904 comme gouverneur de la province de Saratov, le ministre de l’Intérieur Viatcheslav Plehve (photo) est assassiné. L’année suivante le général Viktor Sakharov est victime d’un attentat chez Stolypine, Stolypine qui a déjà échappé à trois tentatives d’assassinat, sans compter les courriers anonymes menaçant jusqu’à ses enfants.

Stolypine n’hésite pas à s’adresser directement aux émeutiers, sans arme et en laissant derrière lui l’escorte des Cosaques. Les récits de sa détermination et de son courage deviennent un sujet de conversation à la cour du tsar. Le 9 mai 1906, à la veille de l’ouverture de la première Douma, Nicolas II le nomme ministre de l’Intérieur dans un pays en proie à des violences qui ne cessent de se multiplier. Cette Douma incapable de gouverner est dissoute le 9 juillet 1906. Les violences se multiplient. Le 12 août 1906, une explosion détruit une partie de la résidence de Stolypine à Saint-Pétersbourg, tuant et blessant près de soixante personnes, parmi lesquelles sa fille qui restera infirme. Dans les campagnes sévissent des bandes armées. La deuxième Douma se réunit en février 1907. Elle se montre encore plus impuissante que l’autre face à la virulence des partis révolutionnaires, des partis qui avaient pu participer en toute légalité aux élections. Le 16 juin 1907, elle est dissoute. La troisième Douma est élue en novembre 1907, avec cette fois un système électoral capable de lui donner une majorité de gouvernement.

Contrairement au tsar et à une partie de l’aristocratie, Stolypine apprécie et défend la vie parlementaire. Il participe avec entrain aux débats pour s’expliquer sur sa politique. Il sait par ailleurs que le travail parlementaire est un moyen de former d’authentiques hommes d’État, des hommes dont manque tant la Russie.

La dissolution de la deuxième Douma correspond à une baisse de l’activité révolutionnaire (commencée en janvier 1905). L’arrestation de leaders ne provoque aucune réaction dans la population. A partir de 1908, les grèves deviennent fort rares. Les effectifs des partis révolutionnaires, considérables après 1905, fondent. Lénine, inquiet, observe le succès des réformes menées par Stolypine, l’amenant même à envisager de renoncer à tout programme agraire. Sur le site AgoraVox, un article signé « Le pire cauchemar de Lénine » et signé Yannick Harrel, un cauchemar qui portait un nom : Piotr Stolypine :

https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/l...

Le tsar lui-même est subjugué par l’énergie de son ministre dont il soutient les réformes, comme celles du 9 novembre 1906, du 14 juin 1910 et du 29 mai 1911 qui élargissent les possibilités de sortir du mir, une communauté villageoise où tous vivent pour tous dans un système de mutualisation du travail et de la production. Jusqu’à la Révolution d’Octobre, neuf millions de paysans deviennent propriétaires de leurs terres et leur rendement va vite s’avérer bien supérieur à celui des terres gérées par le mir. Et ce sont eux, les koulaks, que les bolcheviks réduiront méthodiquement, implacablement. Koulak, une accusation qui suffira à vous condamner à mort, à la prison ou à la déportation et dès la fin des années 1920. En 1917, les bolcheviks avaient commencé à faire d’eux des boucs-émissaires, une image de propagande qu’ils ne cesseront d’amplifier jusqu’à la liquidation de ces « ennemis de classe », de ces « exploiteurs ». Le tsar soutient son ministre dont les réformes déplaisent à nombre de grands aristocrates. Mais Stolypine a d’autres ennemis, plus dangereux, notamment chez les Cent-Noirs qui jugent que la popularité de Stolypine porte préjudice au tsar en personne.

Ce qui suit est sombre, sordide même en regard de l’œuvre de modernisation accomplie par Stolypine, une œuvre qui n’en était qu’à ses débuts et qui aurait probablement pu éviter la Révolution d’Octobre et la venue au pouvoir des Bolcheviks.

raspoutine6.jpgL’impératrice devint peu à peu implacablement hostile à Stolypine, une hostilité sur fond d’hémophilie, celle de son fils, un secret qui ne sortait pas du cercle étroit de la famille impériale et dont Stolypine ne sut jamais rien, ce qui lui rendit incompréhensible et insupportable la présence de Raspoutine au Palais, Raspoutine dont il ignorait les pouvoirs de thaumaturge. L’eût-il su, il aurait sans doute agi autrement. Il se montrait avant tout soucieux de la réputation de la famille impériale, une réputation qui se dégradait avec la présence de Raspoutine considéré comme un débauché, une rumeur dont le bien-fondé n’a pas été établi. Quoiqu’il en soit, Stolypine était sensible à cette rumeur qui se répandait, et il chargea le colonel Guérassimov, responsable de l’Okhrana, de lui faire un rapport sur ce personnage, un rapport peu favorable qu’il présenta au tsar qui en prit connaissance sans lui donner suite et en continuant à taire la maladie de son fils. Stolypine prit alors la décision de faire éloigner Raspoutine de Saint-Pétersbourg, une mission qu’il confia au colonel Guérassimov. L’impératrice protesta mais le tsar refusa de désavouer son ministre ; et elle se mit à haïr Stolypine en qui elle vit celui privait son fils ce qui le maintenait en vie.

La tragédie de Stolypine a plusieurs noms, l’un d’eux est Raspoutine. Raspoutine et ceux de son cercle décident d’écarter le colonel Guérassimov et de le remplacer, avec l’appui de l’impératrice, par le général Kourlov qui avait été gouverneur de Minsk lors des pogroms de 1905 et qui n’avait rien fait pour s’y opposer. Cet homme sans principe n’est soucieux que de son avancement.

Autre nom de la tragédie Stolypine : Dmitri Bogrov, indicateur de police chevronné et… révolutionnaire exemplaire. J’ai lu que par cet acte il voulait venger la mort des Juifs victimes de pogroms, mais aussi qu’en bon révolutionnaire il voulait empêcher toute réforme « bourgeoise » et, de la sorte, hâter la révolution et sa violence. On a également dit qu’il aurait bénéficié (à son insu) de l’appui d’éléments de l’Okhrana hostiles aux réformes agraires de Stolypine et à son parlementarisme. Les hypothèses continuent à faire la ronde, avec, bien sûr, celles qui flirtent plus ou moins ostensiblement avec la théorie de la conspiration (ou du complot). A l’appui de cette théorie, l’extrême rapidité du jugement et de l’exécution de l’assassin ainsi qu’une enquête ajournée sur ordre de Nicolas II en personne.

Kiev, 14 septembre 1911. Stolypine accompagne le tsar pour célébrer des actes officiels. Le général Kourlov qui est en charge de la sécurité et qui a fait converger vers Kiev quelque deux mille policiers et gendarmes afin de renforcer les effectifs locaux n’a pas cru bon d’affecter un seul de ses hommes à la protection de Stolypine, alors que le risque d’attentat est jugé élevé.

Bogrov1910.jpgSoirée du 14 septembre. Dmitri Bogrov prétexte un attentat en préparation dont il démasquera sur place les suspects, un coup de bluff. Ainsi obtient-il une invitation délivrée par l’Okhrana. Il atteint Stolypine sans peine, d’une balle dans la poitrine. Il mourra quatre jours plus tard, le 18. Dmitri Bogrov venait d’assassiner un homme qui s’était employé à alléger la législation contraignante qui pesait sur les Juifs de l’Empire.

Les Russes ne comprirent probablement pas qui ils perdaient. On avait probablement mieux compris la valeur de cet homme à l’étranger, car l’activité considérable de Stolypine ne s’était pas limitée à la politique intérieure. Son ministère avait connu la crise bosniaque, en 1909. Il avait réussi à préserver la paix en obtenant de la Serbie qu’elle négociât avec l’Autriche-Hongrie, affermissant ainsi les relations avec l’Allemagne sans compromettre celles avec la France. Je crois pouvoir affirmer sans forcer la note que cet assassinat fut l’une des causes de la Première Guerre mondiale.

Stolypine est boudé par nombre d’intellectuels « distingués », et déjà parce que Soljenitsyne l’admirait et pour diverses raisons. Concernant les motivations de l’assassin Dmitri Bognov, Soljenitsyne en avance deux principales :

1 – Les réformes de Stolypine, notamment les réformes relatives à la question agraire, risquaient de porter préjudice à la vigueur révolutionnaire en Russie, une appréciation courant chez les révolutionnaires d’alors.

2 – Le deuxième motif invoqué par Soljenitsyne me semble plus contestable, et même tiré par les cheveux. Selon lui Dmitri Bognov jugeait que Stolypine était antisémite, non parce qu’il avait pris des mesures dans ce sens (rappelons que Stolypine voulait débarrasser son pays des entraves que la loi plaçait autour des Juifs) mais parce qu’il se préoccupait exclusivement de promouvoir la nature russe de l’État (?). Il me semble que Soljenitsyne donne trop d’importance au mobile juif de l’assassin. Je m’empresse de préciser qu’à aucun moment Soljenitsyne n’attaque l’assassin parce qu’il est juif, accusant ainsi « les Juifs » d’être responsables de la mort de Stolypine, comme le fait ouvertement Holodomorinfo.com, un site particulièrement délirant revêtu des oripeaux d’une vaste pseudo-culture.

Olivier Ypsilantis  

01:57 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : russie, histoire, piotr stolypine, réforme agraire russe | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mardi, 31 octobre 2017

Bientôt le pétro-yuan-rouble

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Bientôt le pétro-yuan-rouble

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Il est certain désormais que le petro-dollar se trouvera bientôt concurrencé sur le marché des changes par une nouvelle monnaie internationale, associant le yuan chinois et le rouble russe elle-même adossée aux cours du pétrole et de l'or. Nous l'avons nommé ici le pétro-yuan-rouble, pour plus de compréhension, mais elle disposera certainement bientôt d'un nom plus commode à utiliser.

 On s'étonnera de voir prendre le prix du pétrole, très volatile ces dernières années, en référence à une monnaie internationale visant à constituer une réserve pour les investisseurs et les épargnants. Mais la Russie, gros exportatrice de pétrole, et la Chine, grosse consommatrice, peuvent raisonnablement faire espérer qu'elles s'entendront pour stabiliser dans des limites du raisonnable le cours du pétrole. Ajoutons que le pétrole n'est pas seul en cause, mais aussi le gaz. D'importants gazoducs permettront ainsi d'alimenter la Chine en gaz russe.

Le pétro-yuan était jusqu'ici un projet soutenu principalement par la Chine, souhaitant échapper à sa dépendance au Roi-Dollar. L'on pouvait se demander si les intérêts économiques russes, pétroliers et autres, accepteraient de remplacer cette dépendance par une dépendance à l'égard du yuan, c'est-à-dire de la Chine. Ceci désormais parait chose faite.

Selon un article de Bryan MacDonald, journaliste irlandais basé en Russie et très bien informé 1), Vladimir Poutine se serait enfin décidé à cette conversion. Il le ferait d'abord pour échapper aux « sanctions » imposées par Washington aux pays commerçant en dollars avec la Russie. Il le ferait aussi, après de nombreuses hésitations, pour affaiblir l'économie de ses « partenaires » américains.

Mais pour que la mesure soit efficace, il faudrait que d'autres pays producteurs se rallient à la nouvelle monnaie. C'est déjà le cas concernant le Vénézuela dont le président Maduro avait annoncé il y a quelques semaines qu'il vendrait son pétrole en pétro-yuan. Ce pourrait bientôt être le cas de l'Iran, grosse productrice, et le l'Indonésie. D'autres petit pays pourraient faire de même. Mais le plan prendrait toute sa portée si l'Arabie saoudite acceptait, au moins pour ses ventes en Chine et dans les pays du Brics, la nouvelle unité de compte. La récente visite du roi Salman à Moscou peut faire penser que ceci pourrait se produire.

Tous ceux qui veulent de par le monde lutter contre le réchauffement climatique pourront s'inquiéter. La rentabilité des investissements en énergie verte, déjà difficile à assurer, ne sera-t-elle pas reportée de quelques dizaines d'années. N'en sera-t-il pas de même de l'énergie nucléaire. On leur répondra qu'ils ne devraient avoir aucune inquiétude. Le besoin en énergie non fossile est si grand que la demande ne diminuera pas. La Chine, en particulier, victime d'une pollution croissante venant de l'utilisation du pétrole, réservera ce dernier à des industries situées loin des villes et des campagnes.

1)  Référence

Voir RT :  Putin's revenge may see petro-yuan replace petrodollar

https://www.rt.com/op-edge/408006-china-oil-petro-yuan-ru...

Note au 29/19

Il n'est pas impossible que la Chine et la Russie mettent en place une petro-virtual currency en bitcoins destinée à combattre également le pétro-dollar. 

Je trouve cependant que l'auteur ne précise pas assez comment un petrobitcoins pourrait fonctionner par accord entr la Chine et la Russie, ni comment il sera possible d'éviter les fraudes qui se produiront nécessairement sur ce sujet sensible.

Voir https://oilprice.com/Energy/Energy-General/The-Petrodollars-Biggest-Challengers.html

lundi, 18 septembre 2017

Michel Grabar: Pourquoi les USA ont peur de l'Eurasie

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Michel Grabar: Pourquoi les USA ont peur de l'Eurasie

 
Vice-président du Conseil de coordination du Forum des Russes de France, Michel Grabar est maître de conférences en langue et littérature à l’Université de Rennes et spécialiste de l’Eurasie. Ce descendant de Russe blanc évoque très librement ce concept d’Eurasie qui se traduit sur le plan institutionnel, géographique, géopolitique mais aussi idéologique à travers tout le travail exemplaire entrepris par Alexandre Douguine.
 
Michel Grabar évoque aussi la question du leadership de l’Eurasie entre la Russie et la Chine mais il rappelle avec fougue que la Chine est avant tout une nation asiatique. Le propos de l’universitaire est en rupture avec ce que les médias professent quotidiennement.
 
 
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dimanche, 03 septembre 2017

US-Hauptziel ist, ein Bündnis zwischen Russland und Deutschland zu verhindern

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US-Hauptziel ist, ein Bündnis zwischen Russland und Deutschland zu verhindern

Ex: http://www.zeit-fragen.ch

Der Gründer und Vorsitzende des führenden privaten US-amerikanischen Think tanks Stratfor (Abkürzung für Stategic Forecasting Inc.) George Friedman in einem Vortrag vom 4. Februar 2015 für The Chicago Council on Global Affairs über die geopolitischen Hintergründe der gegenwärtigen Ukraine-Krise und globale Situation insgesamt (Ausschnitte):

«Kein Ort kann auf Dauer friedlich bleiben, auch die USA nicht. Ich meine, wir [die USA] werden von Kriegen begleitet beziehungsweise betroffen. Europa wird, wie ich vermute, zwar nicht zu den grossen Kriegen zurückkehren, aber es wird wieder zum menschlichen Normalfall zurückkehren: Es wird seine Kriege haben, seine Friedenszeiten, und es wird seine Leben verlieren. Es wird keine 100 Millionen Tote geben wie im letzten Krieg, aber die Idee von der europäischen Auserwähltheit, wie ich denke, wird dazu beitragen. Es wird Konflikte in Europa geben, es gab schon Konflikte in Jugoslawien und jetzt auch in der Ukraine.


Europas Beziehungen zu den Vereinigten Staaten – wir haben keine Beziehungen mit «Europa». Wir haben Beziehungen mit Rumänien, wir haben Beziehungen mit Frankreich, aber es gibt kein Europa, mit dem die USA Beziehungen haben […].

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Mit dieser Karte (ohne die deutschsprachige Beschriftung auf der rechten Seite) illustrierte George Friedman, was er mit einem «Cordon Sanitaire» meint, der Russland von Deutschland trennen sollte. Solche Pläne, die auf den polnischen Marschall Pilsudski zurückgehen – dieser wollte damit nach dem Ersten Weltkrieg einen antirussischen slawischen Staatenbund schaffen –, lebten nach 1990 wieder auf und nahmen 2016 konkrete Gestalt an, als Polen und Kroatien die Drei-Meere-Inititiative ins Leben riefen. Der zweite Kongress der Initiative fand vom 6.–7. Juli 2017 in Warschau unter Teilnahme von US-Präsident Donald Trump statt.


Das Hauptinteresse der US-Aussenpolitik während des letzten Jahrhunderts, im Ersten und Zweiten Weltkrieg und im Kalten Krieg, waren die Beziehungen zwischen Deutschland und Russland, denn vereint sind sie die einzige Macht, die uns bedrohen kann. Unser Hauptinteresse war, sicherzustellen, dass dieser Fall nicht eintritt.


Wenn Sie ein Ukrainer sind, werden Sie Ausschau danach halten, wer Ihnen als einziger helfen kann – und das sind die Vereinigten Staaten. Letzte Woche oder etwa vor 10 Tagen war der Oberbefehlshaber der amerikanischen Bodentruppen in Europa, General Ben Hodges, zu Besuch in der Ukraine. Er kündigte dort an, dass die US-Militärberater offiziell demnächst kommen sollen. Eigentlich hat er dort die Medaillen an die ukrainischen Kämpfer verteilt, obwohl das militärische US-Protokoll verbietet, dass die Medaillen an Ausländer verliehen werden. Doch er tat das, weil er damit zeigen wollte, dass die ukrainische Armee seine Armee ist. Dann ging er weg. Und die Vereinigten Staaten liefern baltischen Staaten Waffen, Artillerie und andere Militärausrüstung – die baltischen Staaten, Rumänien, Polen und Bulgarien – das ist ein sehr interessanter Punkt. Und gestern haben die Vereinigten Staaten angekündigt, dass sie vorhaben, die Waffen in die Ukraine zu liefern. Das wurde dementiert, aber sie tun das, die Waffen werden geliefert. Und bei allen diesen Handlungen agieren die Vereinigten Staaten ausserhalb der Nato. Denn die Nato-Entscheidungen müssen von allen Nato-Mitgliedern einstimmig getroffen werden.


Der Punkt bei der ganzen Sache ist, dass die USA einen «Cordon Sanitaire», einen Sicherheitsgürtel um Russland herum aufbauen. Und Russland weiss es. Russland glaubt, die USA beabsichtigten, die Russische Föderation zu zerschlagen. Ich denke, wir wollen sie nicht töten, sondern nur etwas verletzen beziehungsweise ihnen Schaden zufügen. Jedenfalls sind wir jetzt zurück beim alten Spiel. Und wenn Sie einen Polen, Ungarn oder Rumänen fragen – sie leben in einer ganz anderen Welt als die Deutschen, und die Deutschen leben in einer ganz anderen Welt als Spanier, also es herrscht Uneinigkeit in Eu­ropa. Aber was die Ukrainer bevorzugen werden, das werde ich Ihnen genau sagen: Sie werden versuchen, das Zischen seitens der USA zu vermeiden.


Die Vereinigten Staaten aus ihrem fundamentalen Interesse kontrollieren alle Ozeane der Welt. Keine andere Macht hat das je getan. Aus diesem Grunde intervenieren wir weltweit bei den Völkern, aber sie können uns nicht angreifen. Das ist eine schöne Sache. Die Aufrechterhaltung der Kontrolle über die Ozeane und im Weltall begründet unsere Macht. Der beste Weg, die feindliche Flotte zu besiegen, ist zu verhindern, dass diese gebaut wird. Der Weg, den die Briten gegangen sind, um sicherzustellen, dass keine europäische Macht die Flotte bauen konnte, ist, dass die Europäer einander bekämpften. Die Politik, die ich empfehlen würde, ist die, die Ronald Reagan angewendet hat, in Iran und im Irak. Er unterstützte beide Kriegsseiten, so dass sie gegeneinander kämpften (Iran-Irak-Krieg 1980–1988) und nicht gegen uns. Er war zynisch, es war nicht moralisch vertretbar, aber es funktionierte. […]


Die Frage, die jetzt für die Russen auf dem Tisch ist, ist, ob man die Ukraine als eine Pufferzone zwischen Russland und dem Westen haben will, die wenigstens neutral bleiben wird, oder ob der Westen so weit in die Ukraine vordringen wird, dass der Westen nur 100 Kilometer von Stalingrad und 500 Kilometer von Moskau entfernt sein wird. Für Russ­land stellt der Status der Ukraine eine existenzielle Frage dar. Und die Russen können bei dieser Frage nicht einfach so weggehen, loslassen. Für die USA gilt, wenn Russland sich weiterhin an die Ukraine hängt, werden wir Russ­land stoppen. Deshalb starten die USA solche Massnahmen, wie sie kürzlich General Hodges, der für Blamagen bekannt ist, angesprochen hat, und zwar über Eingreiftruppen in Rumänien, Bulgarien, Polen und den baltischen Staaten. Damit begründet man das Intermarium («Zwischenmeer-Land»), das Territorium zwischen dem Schwarzen Meer und der Ostsee. Dieses Konzept arbeitete Pilsudski aus, und das ist die von den USA bevorzugte Lösung.


Und die Sache, worauf wir keine Antwort parat haben, ist die Frage, was wird Deutschland in dieser Situation unternehmen. Die reale unbekannte Variable in Europa sind die Deutschen, wenn die USA diesen Sicherheitsgürtel aufbauen, nicht in der Ukraine, sondern zum Westen, und der Einfluss der Russen in der Ukraine wird schwinden – wir wissen nicht, wie die deutsche Haltung ausfallen wird. Deutschland befindet sich in einer sehr eigenartigen Lage. Der ehemalige Bunderkanzler Gerhard Schröder ist im Aufsichtsrat von Gazprom. Die Deutschen haben ein sehr komplexes Verhältnis zu den Russen. Die Deutschen wissen selbst nicht, was sie tun sollen. Sie müssen ihre Waren exportieren, die Russen müssen ihre Waren abnehmen.

Anderseits verlieren sie die Freihandelszone, die sie brauchen, um andere Sachen aufzubauen. Für die Vereinigten Staaten ist es das Hauptziel zu verhindern, dass deutsches Kapital und deutsche Technologien und die russischen Rohstoff-Ressourcen und die russische Arbeitskraft sich zu einer einzigartigen Kombination verbinden – was die USA seit einem Jahrhundert zu verhindern versuchen. Also, wie kann man das erreichen, dass diese deutsch-russische Kombination verhindert wird? Die USA sind bereit, mit ihrer Karte diese Kombination zu schlagen: Das ist die Linie zwischen dem Baltikum und dem Schwarzem Meer.


Für die Russen ist die entscheidende Frage, dass die Ukraine ein neutrales Land wird, kein prowestliches. Weissrussland ist hier eine andere Frage. Nun, wer mir eine Antwort darauf geben kann, was die Deutschen in dieser Situation tun werden, der kann mir auch sagen, wie die nächsten 20 Jahre Geschichte aussehen werden. Aber unglücklicherweise müssen die Deutschen immer wieder Entscheidungen treffen. Und das ist das ewige Problem Deutschlands. Deutschland ist wirtschaftlich enorm mächtig, aber gleichzeitig geopolitisch sehr zerbrechlich, und sie wissen niemals, wie und wo sie ihre Exporte verkaufen können. Seit 1871 – das war immer «die deutsche Frage» und die Frage Europas. Denken Sie über die deutsche Frage nach, welche jetzt wieder mal aufkommt. Das ist die nächste Frage, die wir uns stellen müssen, was wir aber nicht tun, weil wir nicht wissen, was die Deutschen tun werden.»

Abschrift der Untertitel des Videos, veröffentlicht am 17.3.2015;  http://www.youtube.com/watch?v=9fNnZaTyk3M

vendredi, 01 septembre 2017

Walter Schubart’s Messianic-Promethean Synthesis

Walter Schubart’s Messianic-Promethean Synthesis
Ex: http://www.geopolitica.ru
 
Oswald Spengler, the philosopher-historian who gave the modern West an empirical theory for the traditional outlook of history as organic, on studying civilizations over millennia, warned Western Civilization that it was on its downward cycle of decay and death, and would after a last hurrah on the world stage, sink into cultural and historical oblivion. This final and permanent stagnation, when history would end for Western Civilisation like it had for others, he called fellaheen, after the Arabic word for those who till the soil. While the soil is where the healthy organism germinates at its beginning, it is also where it ends, when Civilization collapses, and returns to its primal origins from whence it does not re-emerge. (Oswald Spengler, The Decline of The West, London: Allen and Unwin, 1972).
 
That Western Civilization has indeed embarked on a prolonged cycle of decay into death can only be rejected by the ignorant such as those who overpopulate academia, who are too befuddled by the West’s technology and ability to impose democracy over the world with a combination of bombs and moral degeneracy, to see what is unfolding before the eyes of anyone who does not live a mentally and/or physically closeted existence.
 
WS-ESO.jpgLike the optimism of the Victorians (or at least the strata that did not live in squalor) during the Industrial Revolution, with their Darwinism, the West is supposedly continuing to march forward in progress as the epitome of human ascent, toward which all that has gone before was merely a prelude. In this scenario, we are about to enter a dispensation that will “end history,” as Professor Francis Fukuyama put it, (F. Fukuyama, “The End of History?,” The National Interest, Summer 1989, http://www.wesjones.com/eoh.htm) having achieved all that there is to achieve with the universal triumph of liberal-democracy. Those such as Fukuyama and Amercian millenialists such as Colonel Ralph Peters, (R. Peters, “Constant Conflict,” Parameters, U. S. Army War College, Summer 1997, http://ssi.armywarcollege.edu/pubs/parameters/Articles/97...) and fellow “neocon” ideologues such as Michael Ledeen (M. Ledeen, “Dishonorable Congressman,” National Review, 10 September 2003, http://www.nationalreview.com/article/207982/dishonorable...) see life eternal, where detached realists see for the Western Civilisation death, and the Western organism as a zombified rotting corpse animated by technology and money, infecting all it touches with a cultural syphilis that those such as Colonel Peters actually applaud as wonderfully “toxic” to whatever remains in the world of traditional cultures. (R. Peters, op. cit.).
 
Even if the USA is, as the centre of contagion, beyond remedy, must Europe exhaust its possibilities and succumb to fellaheen level? Organic relationships can be symbiotic and complementary (Lev Gumilev, Ethnogenesis and the Biosphere,  http://gumilevica.kulichki.net/English/ebe2a.htm) or amalgamate through synthesis. They need not be parasitic, distorting, or retarding in regard to a culture-organism’s life cycle. That is how, if we accept at least broadly the work of Russian ethnologist Lev Gumilev, new ethnoi and super-ethnoi are formed (Ibid.). Like any mixture, it depends on the qualities and circumstances of what is being mixed as to whether the consequences will be invigorating or pathogenic. A blood transfusion of compatible types might save a life, but will sicken or kill if the blood types are incompatible. A virus can create a vaccine, or it can cause sickness and death, depending on the amount and transformation of the virus. 
 
Dr. Walter Schubart, a Baltic-German convert to Orthodoxy, married to a Russian, widely known as an authority on Russia prior to World War II, reaching a similar historical-philosophy to Spengler’s, proposed the synthesis of the “Promethean” (what Spengler called “Faustian”) Westerner and the messianic Russian, each complementing the other. (Schubart was professor of sociology and philosophy at the Latvian State University. Dismissed by the Germans in 1941, he was thought to have died in a Soviet prison camp).
 
Even Spengler, despite his suspicion of Bolshevik Russia as leading a “coloured revolution against the white world,” (Spengler, The Hour of Decision, New York: Alfred A Knopf, 1963) also foresaw other possibilities for Russia, even under Bolshevism, as early as 1922 (Spengler, “The Two Faces of Russia and Germany’s Eastern Problems,” Politische Schriften, Munich, 14 February, 1922). He foresaw that Bolshevism would probably become Russianized, divest itself of Marxist doctrine, and develop into a Slavic authoritarian state, with which Germany could work in alliance against the Western liberal plutocracies. This at least was the policy pursued by Walter Rathenau, German foreign minister, with the Treaty of Rapallo, and a Russo-German alliance was sought by the most conservative of Germany’s military and political elite, regardless of any Marxian façade maintained by Russia. 
 
Of the two types, Promethean and Messianic, Schubart wrote that “Messianic man” “longs to bring the discordant external world to harmony with the image that he carries within him.” “He does not love the world for itself but only so that he can build within it the Kingdom of God”. The world is “raw material for his mission.” “Messianic man” seeks reconciliation; unity. (W. Schubart, Russia and Western Man ([1938] New York: Frederick Ungar, 1950), 72-73). The Kingdom of God must be realised on earth. (Ibid., 74).The Gothic Westerner had a messianic impulse with his Crusades not only to secure the Holy Land from the Moor, but to make Jerusalem the centre of the Kingdom of God. 
 
The contrast now between the West and Russia is that “Promethean” (Faustian) man seeks only to exploit and rule the earth, (Ibid., 80) which Spengler saw as the final epoch of the Late West’s domination by the machine. (Spengler, The Decline…, XIV, “The Form-World of Economic Life (B) The Machine,” Vol. II, 499-507). The Westerner seeks as an end goal “middle class comfort.” The Russian is impelled to sacrifice “in a final dramatic scene.” (Schubart, 80). The Russian is the collective Katehon, holding back the Antichrist. The West has become the Antichrist. The Russian is a martyr. He accepts his fate Christ-like. Rather than submit to Napoleon, the Russians set their Holy City, Moscow, ablaze. The sight forever affected Napoleon. (Ibid., 83-84).
 
The Russian mission is to liberate the world from the contagion of the Late West, or to liberate Europe from its own terminal Western hubris; to “redeem” the West or to “replace it.” (Ibid., 191). This sense of mission has long been conscious among Russian thinkers and holy men. In 1852, seventy years before Spengler, Ivan Kireyevsky, the Slavophil philosopher, wrote of the decline of the West: “The spiritual development of Europe has already passed in zenith. In atheism and materialism it exhausted the only powers at its disposal – those of abstract rationalism – and now it is approaching bankruptcy.” (Quoted by Schubart, ibid.).
 

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Schubart cited ethnologist and philosopher-historian Nikolay Danilevski’s Russia and Europe (1871) as anticipating Spengler on organic culture cycles, in which the replacement of the West by Russia as the next world-civilisation was part of the ongoing cyclic historical process. (Ibid., 192). Danilevski had also critiqued the Westernisation of Russia by Peter as ill-fated. Foreshadowing Spengler, Danilevski’s culture epochs are those of youth, adulthood, and old age. He saw the Slavic as being in the youth phase, and that with its capital in Constantinople, the Slavic would be considered by a decaying world as its redeemer. 
 
With the revival of “Eurasianism,” and Dr. Alexander Dugin’s blueprint for a multipolar world against Amercian globalization, achieving influence among the highest echelons of Russian politics and scholarship, the vision of Danilevski and the 19th century Slavophils, and Spengler’s prescience on a post-Western Russian world-civilisation are being actualized. Konstantin N. Leontiev at about the time of Danilevski advanced the idea of “the law of cyclicity of historical development.” Lev Gumilev’s cyclic-ethnology has a great deal of influence in present-day Russia. (Mark Bassin, The Gumilev Mystique, Cornell University Press, 2016). Russia has therefore had a long tradition of scholarship on culture-morphology. 
 
Schubart believed there was after the crisis of World War I a revival of religion in the West. Spengler also stated that during the epochal crisis of a Late civilisation there is a “second religiousness” (Spengler, The Decline…, Vol. II, 455). Materialism, secularism, rationalism and scientism, do not satisfy an innate religious yearning, and themselves must assume religious forms. Note how zealous atheists and Darwinists are in defending their faith. Now there are a proliferation of cults and religions throughout the West, symptomatic of existential crisis, of a yearning for a return to the nexus with the divine that is lost in the “Winter” epoch. If the spiritual chaos that marks a culture in decay takes form as a “second religiousness” in the Spenglerian sense, then perhaps Schubart’s aborted hope of a re-spiritualised West as the prelude to a Russian symbiosis will eventuate. At the time Schubart saw Western man “approaching closer to the spirit” of Russia. “While the night of decline is descending upon Western culture, which is destined to perish, the dawn of the Millennium is coloring the distant horizon…” (Schubart, 284). “The approaching collapse of Western culture is unavoidable, and we may even ask ourselves whether it would be desirable to avoid it.” (Ibid., 293). 
 
Neither Spengler nor Schubart believed it organically possible to return the West to a “Spring” epoch, any more than it is possible for a geriatric to return to youth, despite whatever cosmetic and medicinal efforts are made.
 
What Schubart did hope for was a chastising of the Late West’s hubris, which we see in our collapsing societies, and existential angst, that would lead to the liberation of religious feeling without which “no new creation can become possible.” (Ibid., 293). In this “apocalyptic age” Schubart saw the promise of “new life,” while in Russia a new type emerges that is transforming what is of value in Western culture, without being retarded or distorted by it, despite the conscious efforts of inner and outer enemies. “This new type, while truly Russian, is yet heir to the eternal values of the West.” (Ibid., 295). “For although the Russian of today is not yet the Man of the Millennium, yet it is he – and only he – who will succeed in evolving him; the Russian will purify himself until he has attained the height of development necessary to produce him.” (Ibid., 295).
 
Schubart wrote that “The spiritual Russian needs practical qualities; the practical European is in need of a new humanity.” Schubart called it a “synthesis.” (Ibid., 297). The remaining option is for the Late West to continue as an animated zombie at the call of the USA, as a carrier of culture-pathogens. 
 
“A new Apocalypse is approaching with a Last Judgement – and a Resurrection! Promethean man already bears upon his brow the sign of Death. Now let the Man of the Millennium be born!” (Ibid., 300).
 

mercredi, 23 août 2017

Guerre économique contre l’Europe

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Guerre économique contre l’Europe

par Eberhard Hamer, professeur d’économie

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

«L’Amérique d’abord», le slogan de Trump, doit être considéré non seulement d’un point de vue militaire mais également économique. Toutefois, la prédominance des Etats-Unis dans l’industrie cinématographique, le traitement des données, le monopole sur les semences par la génétique et la suprématie mondiale de l’industrie américaine d’armement, ne suffisent plus pour financer la demande d’importation de machines européennes, de produits chimiques, de voitures de luxe ainsi que de produits pour les besoins du quotidien, dont la production de masse est délocalisée en Asie. Avec 600 milliards de dollars de dettes annuelles sur les ventes, les Etats-Unis seraient depuis longtemps insolvables s’ils n’avaient la possibilité de faire marcher la planche à billets sur un rythme effréné en émettant des dollars comme monnaie de référence pour couvrir leurs dépenses mondiales. Ainsi s’édifie une montagne de dettes, augmentant chaque année, d’actuellement 20 billions (!) de dollars, dont le collapsus financier n’est repoussé que par les taux d’intérêt artificiellement créés par la FED.

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Les Etats-Unis doivent donc soit épargner, soit retirer leurs forces armées du monde (600 milliards de dollars par an) ou alors exporter plus et importer moins.
Pour l’application de cette dernière ligne stratégique, ils ont choisi l’Europe.
Les exportations vers les Etats-Unis sont systématiquement combattues:

  • Le but de la lutte contre les moteurs diesel est non seulement de protéger l’industrie américaine, mais encore d’empêcher l’importation de véhicules diesel européens. Les normes arbitraires concernant les gaz d’échappement sont une attaque généralisée contre les voitures diesel européennes, non seulement aux Etats-Unis mais aussi en Europe, alors qu’on ignore totalement la pollution massive produite par les poids lourds.
  • L’application de tarifs douaniers est faite pour paralyser les importations d’acier venant d’Europe.
  • Le droit américain et le statut juridique des multinationales américaines devaient être garantis par le TTIP, même à l’encontre des normes de protection européennes et du Parlement européen.
  • La justice américaine poursuit systématiquement les sociétés européennes pour leur porter préjudice en leur infligeant des amendes pénales (actuellement déjà plus de 20 milliards de dollars).
  • Les tribunaux américains considèrent que tout contrat conclu en dollars, où que ce soit dans le monde, relève automatiquement de la juridiction américaine, et peut donc ainsi faire l’objet des sanctions appliquées selon cette même juridiction.
  • Le sénat et le gouvernement américains recourent régulièrement à des sanctions, des menaces et des amendes, partout au monde où des entreprises européennes mettent en danger la concurrence américaine. Suite aux sanctions à l’encontre de la Russie, par exemple, auxquelles ont adhéré les Européens, le commerce extérieur européen avec ce pays a diminué de moitié, alors que celui des Etats-Unis a doublé.

En outre, des mesures au niveau national et légal sont utilisées afin de réaliser la suprématie américaine dans les secteurs économiques.

  • Dans la lutte pour la domination sur le marché mondial du gaz, les Etats-Unis tentent actuellement d’exclure l’Europe de l’approvisionnement en gaz russe bon marché en menaçant de sanctions de toutes les sociétés qui participeraient à la construction du gazoduc North Stream II par la mer Baltique.
  • En Syrie, ils cherchent une interzone déserte afin de construire un gazoduc menant à la Méditerranée pour le gaz qatari – un arrière-plan essentiel de la guerre en Syrie.
  • Par des manipulations de prix sur le marché pétrolier, ils tentent de faire exploser l’OPEP pour récupérer leur propre hégémonie pétrolière.
  • Ayant le monopole mondial des réseaux de données, ils ont en tout temps l’accès aux serveurs et aux «clouds» demeurés aux Etats-Unis, en espionnant simultanément de manière générale l’économie européenne en faveur de leur propre économie, sans que les gouvernements européens, et notamment le gouvernement allemand, risquent de s’opposer à cet espionnage économique total.
  • Les consortiums américains ont aussi appelé à la guerre économique contre la Russie pour empêcher et soumettre aux sanctions toute coopération économique dangereuse pour eux entre l’Europe et la Russie. (Doctrine de l’OTAN: «To keep the Americans in, the Russians out and the Germans down!»)

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Les Etats-Unis mènent une guerre économique contre l’économie européenne, avant tout contre celle exportant aux Etats-Unis. Elle lutte donc contre toute collaboration économique entre l’Europe et la Russie, afin de maintenir leur règne économique sur l’Europe, contre l’euro et tous les efforts européens visant aux économies, contre les tentatives européennes d’empêcher l’espionnage américain total et la position d’hégémonie des Etats-Unis sur l’Europe en matière de numérique et de sanctionner l’avance de la concurrence des entreprises européennes à l’égard des Etats-Unis au plan mondial.
Aux Etats-Unis même, l’élite financière, les consortiums électoraux, le complexe militaire, sont les soutiens de l’impérialisme économique américain. A l’extérieur, ces soutiens sont représentés par l’administration de l’UE, Angela Merkel et d’autres hommes politiques détestant les Russes, les partis allemands parce qu’ils ne s’opposent pas à l’espionnage total des Etats-Unis et ne s’opposent pas même aux organisations américaines dites «privées» ou «non gouvernementales» (Fondation Soros et autres).
Alors qu’actuellement l’Allemagne se réjouit encore de l’accroissement de ses excédents d’exportations, nos «amis» ont depuis longtemps commencé à saper les bases de ces excédents. Si notre industrie automobile mondialement reconnue perd de son attractivité, si nos inventions techniques continuent à se retrouver plus vite aux Etats-Unis qu’elles sont développées chez nous, si l’industrie gazière américaine évince en Europe le gaz russe meilleur marché et si l’industrie américaine de la finance encourage sans aucun scrupule l’endettement des pays méditerranéens, entrainant également l’écroulement de l’euro malheureusement garanti par l’Allemagne, toujours davantage de lumières s’éteindront en Europe et en Allemagne et la prospérité en Europe, issue du commerce international, diminuera rapidement.
Soros et Angela Merkel ont, en outre, régularisé l’immigration de masse avec chaque année des centaines de milliers de bénéficiaires de prestations sociales supplémentaires, surchargeant les systèmes sociaux allemands, et défavorisant ceux qui contribuent à la production et au financement de ce système.
En Allemagne, deux tiers de la population vivent déjà des prestations sociales. Dans 10 ans, le rapport sera de trois pour un, peut-être pire encore.
L’allégresse des organismes confessionnels et des institutions sociales sur l’immigration de masse des bénéficiaires de prestations sociales cédera déjà bientôt à l’horreur, lorsque nos excédents d’exportation fondront, que le nombre des supports économiques payant leurs charges diminuera tandis que la vague de bénéficiaires des prestations sociales continuera d’enfler.
Notre génération a joui du niveau de confort et de prospérité le plus haut qu’ait connu l’Allemagne. Cette prospérité est attaquée tant par l’administration américaine que par une politique sociale et démographique certes pleines de bonnes intentions, mais destructive – et nous ne nous y opposons pas. Pour cela, la génération montante nous insultera tout comme nous avons insulté nos parents parce qu’ils n’avaient pas voulu ou pu empêcher Hitler et ses destructions.     •
(Traduction Horizons et débats)

mardi, 22 août 2017

Heidegger Against the West

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Heidegger Against the West

by Jeff Love

Ex: http://www.rowmaninternational.com

Martin Heidegger's thought has had a truly global impact. Yet, while his influence on European philosophers is well documented, we cannot say the same regarding other parts of the world, like China, Iran, and Japan. Heidegger's influence in the countries of the former Soviet bloc is an especially rich case, in part because of the powerful brand of resistance to western thought that has taken root most noticeably in Russia. Indeed, these radical strains of resistance to the west have become more important than ever now that at least one advisor of a sitting president of the United States has openly cited Russian extremists in what seems to be a subversive gesture of solidarity. Heidegger has perhaps never been more directly influential in politics - world politics - than he is now, despite the various scandals that attend his thought in the west.

Before returning to this point, let me give a brief sketch of the history of Heidegger reception in Russia and Eastern Europe.

The crucial factor here is of course political. In the earliest years of Heidegger's fame, the 1920s and 1930s, the Soviet Union was actively engaged in the creation of the world's first socialist state whose primary philosophical allegiance was to dialectical materialism or 'diamat.' After the relative openness of the 1920s, the restrictive ideological controls imposed in the 1930s ensured that almost any other form of philosophy was censured as bourgeois, reactionary or counter-revolutionary. Heidegger's open support for the National Socialist party in 1933 did nothing to improve matters. Phenomenology made greater inroads into Eastern Europe during the interwar period, perhaps most notably in Czechoslovakia, but the consolidation of Soviet power throughout Eastern Europe after the German defeat in 1945 meant that Heidegger's thought could not be openly studied there either prior to the momentous changes of 1989. As all witnesses concur, it was neither easy nor safe to study Heidegger in the post-war period, neither in the Soviet Union, nor in the countries of the Eastern block.

With the collapse of the Soviet Union, formalised by the official dissolution of the latter in December of 1991, the situation changed radically. But this radical change had been prepared for some years in advance. Heidegger's thought became already in the 1960s a furtive source of resistance, primarily to the rigid dogmas of dialectical materialism. But it also became later on a source of inspiration for broader resistance to the hegemony of western modes of thinking itself. If the former applies to Heidegger's reception both in Eastern Europe and the Soviet Union, the latter applies almost exclusively to the post-Soviet situation in Russia where traditional forms of resistance to the west exploited Heidegger's critique of metaphysics for their own purposes. It is well to emphasise this astonishing conjuncture since it features two levels of Heideggerian influence, both of which were and are perceived as emancipatory, although that emancipation itself is far more problematic.

It is far more problematic precisely because emancipation from the strictures of dogmatic Marxism seems more acceptable than emancipation from the west in toto, moreover as emancipation that condemns western culture as tyrannous, banal and numbing 'Americanism.' This distinctively Russian phenomenon will occupy me for the rest of my brief essay.

VLbibi.jpgHeidegger's thought came to prominence in the post-Soviet era through the work of a remarkable polyglot translator and charismatic philosopher, Vladimir Bibikhin (1938-2004). Not only did Bibikhin translate Being and Time into Russian, he also cultivated a generation of young philosophers through his widely-attended lectures at the University of Moscow. It is difficult to apply a label to Bibikhin's thought, and I shall not try to do so. Suffice it to say that Bibikhin attempted to graft Heidegger onto central currents in Russian thought in such a way as to renovate Russian culture in the post-Soviet era, not as a wholesale rejection of western thought but as an effort at correcting its sometimes baleful influence, especially in regard to the insensate selfishness and venality that made strong inroads into post-Soviet Russia under the guise of promoting a free market and capitalist democracy. Bibikhin fought against the hypocrisy of American democracy as reflected in Russia, the ostensibly principled pursuit of freedom concealing there, as elsewhere, naked greed and exploitation.

Alexander Dugin took a different path. Dugin emerged from the shadows of far-right nationalist movements in the 1990s and seems to have come into his own in the Putin era as an advocate of a harshly anti-liberal, anti-American political stance. His 'fourth political theory' encourages resistance to the hegemony of modern liberalism, epitomized in its decadence by the United States, and develops a concept of multi-polarity whereby different cultural identities might be free to co-exist without having to submit to the hegemony of the United States. If this thinking may seem to reflect platitudes of post-colonialist thought, Dugin's advocacy of 'Eurasianism,' of Russia's destiny as a mediating entity between West and East, often referred to as an ideology of empire, as well as his reliance on thinkers such as Julius Evola and Carl Schmitt, suggest a profoundly conservative orientation not typically associated with post-colonialism.

Heidegger's thought has grown increasingly prominent as a source of inspiration for Dugin. Rather than grafting Heidegger's thought onto central currents of the Russian tradition, Dugin views Heidegger as offering a powerful productive example to Russian thought. For it is Heidegger, according to Dugin, who shows most clearly that western thought is exhausted and at an end such that it can - and indeed must - be totally overcome. The other beginning Heidegger proclaims in the 1930s as an overcoming of the exhaustion and sterility of western thought becomes a rallying cry for Dugin as well: Russian thought may offer a corresponding example by freeing itself of the suffocating hegemony of the west, of Americanism, to create a new multi-polar world. Yet, it should be noted that Russia becomes thereby a new beacon of freedom, a new centre in a multi-polar world. The ostensibly liberating proclamation of multi-polarity thus ends up reflecting little more than the venerable tradition of Russian 'Messianism' whereby it falls to Russia to save the world - in this case to save the world from the west, as the beneficent'star arising in the East' referred to by another unrepentant nationalist, Fyodor Dostoevsky in The Brothers Karamazov over 136 years ago.

Jeff Love
Author of Heidegger in Russia and Eastern Europe

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lundi, 07 août 2017

Pilotes croates, slovaques, bulgares et vlassovistes dans la Luftwaffe (1941-1945)

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Erich Körner-Lakatos :

Pilotes croates, slovaques, bulgares et vlassovistes dans la Luftwaffe (1941-1945)

Les forces aériennes de l’Etat oustachiste croate (« Nezavisna Drzava Hrvatska » ou NDH) ont été créées le 19 avril 1941. Leur nom officiel est « Zrakoplovstvo NDH ». Leur premier commandant est le Colonel Vladimir Kren. Sur le plan de l’organisation, ces forces aériennes s’établissent à Zagreb (1ère escadrille) et à Sarajevo (7ème et 8ème escadrilles).

Les escadrilles de chasseurs n°10 & 11, ainsi que celles des bombardiers n°12 & 13, sont créées au mois de juillet de la même année. Elles constituent une unité séparée, la Légion aérienne croate, qui doit combattre dans le cadre de l’Opération Barbarossa contre l’URSS. Le chef de l’Etat croate ou Poglavnik, Ante Pavelic, offre au Reich une participation des forces aériennes croates à la lutte contre le bolchevisme. Cette démarche du Poglavnik constitue un rapprochement très net avec l’Allemagne pour contrebalancer la position dominante qu’occupait l’Italie dans le nouvel Etat.

Les pilotes de chasse croates, après avoir subi une brève formation sur appareils allemands (des Me109B) à Fürth, sont envoyés à l’Est et engagés dans l’escadrille n°52 de la Luftwaffe allemande. A partir du mois de novembre, ils opèrent à partir du champ d’aviation de Taganrog sur les rives de la Mer d’Azov. Les pilotes de ce « Jagdgruppe Dzal », baptisé ainsi du nom de leur commandant, le Major Franjo Dzal, sont particulièrement motivés. En avril 1942, ils avaient engrangé 30 victoires.

A Greifswalde, les Allemands forment les pilotes de bombardiers sur appareils Do17. Les deux escadrilles de 15 appareils sont adjointes au « Kampfgeschwader 3 » et opèrent à partir des pistes de Vitebsk, Viasma et Rchev. Le 6 janvier 1942, un communiqué de la Wehrmacht annonce : « Dans le cadres des actions aériennes récemment menées, une unité de pilotes croates s’est particulièrement distinguée par des attaques en piqué très audacieuses ! ».

Il est plus que probable qu’Adolf Hitler avait ce communiqué en tête lorsqu’il refusa sèchement de livrer davantage d’avions à son partenaire hongrois qui en avait fait la demande : « Que s’imaginent ces Hongrois ! Au lieu d’attaquer, ils vont se promener dans les airs avec leurs passagers ! Si je dois livrer des appareils, alors je les livrerai plutôt aux Croates car ils ont montré qu’ils savaient attaquer ! ».

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Mais lorsque le sort des armes se retourne contre la Wehrmacht, les désertions croates se succèdent. Le 14 mai 1943, deux pilotes croates passent aux Russes avec leur Me109G-2. A partir de ce moment-là de la seconde guerre mondiale, les bombardiers des alliés occidentaux attaquent de plus en plus souvent la Croatie. Les nécessités de la guerre font que les pilotes croates doivent défendre l’espace aérien de leur patrie, ce qui n’est pas une mince affaire vu leur infériorité numérique face aux aviations anglo-saxonnes.

Les chasseurs de la NDH ont glané quelque 259 victoires sur le Front de l’Est entre novembre 1941 et septembre 1944. Seul ombre au tableau : la désertion du Capitaine Mato Dukovac, l’as incontesté de l’aviation de l’Etat oustachiste croate, avec ses quarante victoires. Il désertera le 20 septembre 1944 et passera aux Russes.

Autres alliés du Reich pendant la seconde guerre mondiale : les Slovaques. Le parlement de Bratislava proclame le 14 mars 1939 l’indépendance de l’Etat slovaque. Immédiatement, le jeune Etat doit se défendre par les armes contre les revendications territoriales de la Hongrie dans les régions orientales du pays. Les forces aériennes slovaques subissent leur baptême du feu, avec le gros de leurs effectifs équipés de 60 biplans de type Avia B-534. Le 23 mars, la défense anti-aérienne hongroise abat deux de ces vieux coucous. Le Premier Lieutenant Jan Svetlik et le sous-officier Stefan Devan meurent au combat. Le lendemain, les bombardiers Ju-86 hongrois endommagent sept appareils slovaques sur le champ d’aviation de Zipser-Neudorf. Le 31 mars, un armistice est signé.

Le 1 septembre 1939, Bratislava se range du côté allemand dans la campagne de Pologne. Les chasseurs Avia accompagnent les Stukas allemands dans une mission de protection : deux B-534 sont perdus pour les Slovaques. Au début de l’Opération Barbarossa, 22 appareils B-534 sont dans les airs. Les pilotes slovaques se distinguent par une vive volonté de se rendre utiles. A plusieurs reprises, des pilotes, qui avaient dû atterrir derrière les lignes soviétiques, ont été secourus par des camarades qui se sont posés pour les reprendre. Souvent de manière aventureuse car le pilote ainsi sauvé devait souvent s’accrocher aux ailes des B-534.

Petit à petit, l’aviation slovaque s’équipe de Me109. La première escadrille est placée sous le commandement du Capitaine Ondrej Dumbala, qui avait obtenu 14 victoires en 1944. Cette escadrille n°13 fut baptisée par la propagande de Monseigneur Tiso, les « aigles des Tatra ». Deux Slovaques obtiennent leur première victoire sur Me109 le 28 novembre 1942 : ils abattent trois Polikarpov I-153. L’escadrille n°13 peut s’enorgueillir d’un excellent bilan : au cours de ces deux mille missions, elle a obtenu 155 victoires. Jan Reznak, à lui seul, en a engrangé 32.

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L’escadrille n°13 se replie en février 1944 sur le territoire national slovaque, à Priest’any, afin de protéger Bratislava et les raffineries de pétrole, avec leurs Me109G-6 flambant neufs. Le 26 juin 1944 fut la journée la plus terrible pour cette 13ème escadrille : six Me109, sous le commandement d’un vétéran du Front de l’Est, Juray Puskar, affrontent des bombardiers américains venus d’Italie du Sud. Les chasseurs américains de type Mustang, qui les protègent, s’avèrent nettement supérieurs : cinq Me109 sont perdus, le sixième est sévèrement endommagé. Puskar et deux autres pilotes tombent au champ d’honneur : l’un d’entre eux, Stefan Jambor, qui a sauté en parachute, est mitraillé, sans pouvoir se défendre.

Erich Körner-Lakatos.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°31/2017, http://www.zurzeit.at ).

Les aviateurs bulgares et vlassovistes

Les forces aériennes bulgares (Vozdushni Voiski) étaient constituées, en 1939, de 42 chasseurs-bombardiers PZL-P-43-B, de 78 biplans Avia B-534 (des chasseurs) et de 32 bombardiers Avia B-71. A tout cela s’ajoutaient 60 appareils de reconnaissance Letov S-328.  En 1940, les Allemands fournissent des appareils plus modernes dont 18 Me109E-3. En 1943, les Bulgares reçoivent du Reich 29 Me109G-2 et 12 Do17.

Lorsque, le 1 août 1943, des bombardiers américains B-24 partent d’Afrique du Nord et survolent la Bulgarie pour attaquer les champs pétrolifères roumains de Ploesti, les Bulgares les attaquent lors de leur vol de retour, en n’hésitant pas à engager leurs vieux Avia B-534. Les équipages des B-24 Liberators sont d’abord surpris plutôt qu’effrayés : le spectacle de ces vieux biplans à quelque chose de surréaliste. On se croirait pendant la première guerre mondiale. Mais les Américains déchantent très rapidement : les Me109 bulgares, partis du champ d’aviation de Karlovo passent à l’attaque et descendent cinq B-24.

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Au début de l’année 1944, le Reich livre encore 65 chasseurs Me109G. Ce sera toutefois quelques semaines après un désastre : les Américains ont attaqué le 10 janvier la capitale bulgare, Sofia, commettant un bombardement particulièrement violent. 300.000 habitants ont quitté la ville en panique. Le 26 août, les Bulgares livrent leur dernier combat contre les Américains. Leur pays passe ensuite dans le camp allié.

Pour être complet et parler de tous les pilotes d’ethnie slave qui ont combattu du côté allemand pendant la seconde guerre mondiale, il ne faut pas oublier les pilotes russes de l’armée Vlassov qui disposait d’une escadrille de chasseur composée de seize Me109G-10, d’une escadrille pour les opérations nocturnes, avec douze Ju88 et d’une escadrille de bombardiers (cinq He111). Cette dernière a exécutée la seule mission aérienne confiée à l’Armée Vlassov. Contre l’Armée Rouge, la douzaine de Ju88 s’envole le 13 avril 1944 pour attaquer la tête de pont conquise par les Soviétiques à Erlenhof au sud de Francfort-sur-l’Oder.

(EKL).

 

mardi, 01 août 2017

La guerre froide du gaz et les inacceptables sanctions des États-Unis contre l’Europe!

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La guerre froide du gaz et les inacceptables sanctions des États-Unis contre l’Europe!

Marc Rousset

Ex: http://synthesenationale.hautetfort.com

Que ne feraient pas les États-Unis pour exporter leur gaz de schiste nouveau et contrer la puissance stratégique de la Russie aussi bien en Europe qu’au Moyen-Orient !

Le russe Gazprom (Газпро́м) veut construire un nouveau gazoduc (Nord Stream 2) de 9,5 milliards d’euros dans la Baltique, qui augmenterait d’un tiers en 2019, soit de 55 milliards de m3, le gazoduc sous-marin Nord Stream 1 déjà existant entre Vyborg (Выборг, Russie) et Greifswald (Allemagne).

Suite à l’opposition de l’Ukraine et de la Pologne, dont les gazoducs continentaux Yamal et Brotherhood passant par leurs territoires sont court-circuités, Gazprom a été amené à être le seul actionnaire du projet. Le français Engie, les allemands Uniper (ex-E.ON) et Wintershall (BASF) ainsi que l’anglo-néerlandais Shell ont décidé d’être seulement des financiers à hauteur de 10 % chacun, et non plus des actionnaires, ce qui était initialement prévu. Nord Stream, passant sous la mer, échappe à la juridiction de Bruxelles ; les Allemands considèrent ce projet comme strictement commercial.

Mais le 15 juin 2017, le Sénat américain a décidé, au grand dam de l’Europe, d’envisager des sanctions contre les entreprises européennes « du fait des effets préjudiciables de Nord Stream 2 sur la sécurité énergétique européenne ». Bref, l’Amérique est plus royaliste que le roi Europe, alors qu’il s’agirait bien au contraire de diminuer la sécurité énergétique de l’Europe et de nous obliger à acheter du gaz de schiste américain transporté sous forme liquéfiée à partir des États-Unis jusqu’à des ports terminaux européens. À noter qu’aux États-Unis mêmes, l’idée d’exporter du gaz de schiste est considérée par l’Industrial Energy Consumers of America comme stupide car contribuant à augmenter la cherté du gaz dans les industries manufacturières porteuses de valeur ajoutée.
 
Selon Isabelle Kocher, directrice générale d’Engie, « il s’agit d’une ingérence spectaculaire et inacceptable dans les affaires européennes », après les sanctions financières des États-Unis contre BNP Paribas, Alstom et les contraintes imposées à Renault, PSA et Total pour investir en Iran. Cette implication est d’autant plus surréaliste, impérialiste et inacceptable que Nord Stream est un projet non américain avec des entreprises non américaines et un financement sans dollars américains.

L’Europe ne peut, au contraire, que se réjouir de diversifier son approvisionnement en gaz naturel pour 40 % en provenance de la Russie, pays frère continental européen, d’autant plus que la production chute au Royaume-Uni (mer du Nord) et au Pays-Bas.

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La folle agressivité américaine se comprend d’autant mieux que la Russie, suite à son intervention victorieuse en Syrie, est devenue le maître du jeu au Moyen-Orient pour le gaz en provenance du Qatar et d’Iran. Le projet « Turkish Stream » prévoit la construction en Turquie par la Russie de deux conduites d’une capacité de 15,75 milliards de m3 par an chacune, qui formeront un gazoduc sous la mer Noire, évitant encore une fois l’Ukraine, pour fournir l’Europe. Le Qatar a dû passer sous les fourches caudines russes et renoncer au projet initial « sunnite » évitant l’Irak, passant par l’Arabie saoudite et une Syrie non Bachar el-Assad. La Russie devient le pivot central pour que le gaz tant iranien que qatari transite vers l’Europe sans déposséder Moscou via le futur gazoduc russo-turc « Turkish Stream ». À quand une Europe européenne et enfin libre ?

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