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mercredi, 27 mars 2019

La défaite américaine et le le retour de l’empire des steppes

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La défaite américaine et le le retour de l’empire des steppes

 
Ex: https://www.geopolitica.ru

Ecrabouillement américain face aux soviets et aux chinois : le poing par Philippe Grasset (dans une mer de sarcasmes et par la Rand Corporation en personne). Problème : ils n’ont pas de solutions…A compléter avec les propos de Bayan-Orson Welles (la rose noire, 1950) ; les flèches (les missiles) valent mieux que les armures (les porte-avions). Pour comprendre l’empire des steppes, lire Grousset sur classiques.uqac.ca.

L’USS Pentagone et sa Mer des Sargasses

12 mars 2019 – La communauté des experts, aussi bien férue de l’objet de leur expertise que des relations publiques, commence à  s’alarmer des progrès russes et chinois en matière d’armement ; mais  piano pianissimo, cette alarme, au rythme postmoderne, bien que les termes et les trouvailles qui la justifient effraient les experts eux-mêmes.

Il s’agit essentiellement, pour notre propos de ce jour, d’un rapport suivant une simulation particulièrement sophistiquée de la  RAND Corporation. C’est un événement important, qui devrait faire autorité à Washington : la RAND est le  think tanks  US le plus prestigieux et le plus influent pour les questions techniques de la communauté de sécurité nationale ; basée en Californie et dominant le domaine de l’expertise technique depuis 1948 (date de sa création), directement connectée à l’USAF et à l’industrie d’armement (officiellement, c’est la firme Douglas, agissant comme faux-masque de l’USAF, qui créa la RAND). Ses analyses reflètent et inspirent à la fois les conceptions des milieux experts des forces armées : une étude de la RAND ainsi présentée publiquement fait autorité et indique selon les normes de la communication ce que le Pentagone et la communauté de sécurité nationale pensent et doivent penser à la fois.

En effet, RAND est venue à Washington présenter un rapport très technique sur des simulations d’une Troisième Guerre mondiale au CNAS (Center for a New American Security), autre  think tank  mais plus doué en relations publiques et établi en 2007 pour présenter une vision “bipartisane” de la  politiqueSystème suivie par les USA ; c’est-à-dire, un institut recyclant la politique-neocon  habillé d’une parure de consensus washingtonien dans le sens évidemment belliqueux qu’on imagine. La séance d’information a été rapportée par divers médias, et nous citons aussi bien ZeroHedge.com que SouthFront.org.

Le rapport, présenté  le 7 mars, envisage divers scénarios des engagements au plus haut niveau des USA contre la Russie ou contre la Chine. Le verdict est peu encourageant : “Nous nous ferons péter le cul !” : « “Dans nos simulations, lorsque nous affrontons la Russie et la Chine, les Bleus  [les USA]  se font péter le cul”, a déclaré jeudi l’analyste de RAND David Ochmanek. “Nous perdons beaucoup de gens, nous perdons beaucoup d’équipements. Nous n’atteignons généralement pas notre objectif d’empêcher l’agression de la part de l’adversaire”, a-t-il averti. »

Et pour suivre, sur l’état général des conclusions du rapport : « Alors que la Russie et la Chine développent des chasseurs de cinquième génération et des missiles hypersoniques, “nos éléments reposant sur des infrastructures de base sophistiquées, telles que des pistes et des réservoirs de carburant, vont connaître de graves difficultés”, a déclaré Ochmanek. “Les unités navales de surface vont également connaître de graves difficultés”

» “C’est pourquoi le budget 2020 présenté la semaine prochaine prévoit notamment de retirer du service actif le porte-avions USS Truman plusieurs décennies à l’avance, et d’annuler une commande de deux navires amphibies de débarquement, comme nous l’avons signalé. C’est aussi pourquoi le Corps des Marines achète la version à décollage vertical du F-35, qui peut décoller et atterrir sur des pistes aménagées très petites et très rustiques, mais la question de savoir comment entretenir en état de fonctionnement un avion de très haute technologie dans un environnement de très basse technologie reste une question sans réponse”, selon le site Breaking Defence… »

Certains points spécifiques des équipements par rapport aux simulations de la RAND font l’objet de précisions et d’observations, – en général très critiques, parce que personne ne semble satisfait de l’état des forces et de leurs capacités en cas de conflit. On en signale ici l’une et l’autre, par ailleurs sur des sujets déjà connus, et avec des conclusions qui n’étonneront personne, dans tous les cas parmi les lecteurs de dedefensa.org.

  • Le F-35, l’inépuisable JSF. On a lu plus haut cette remarque selon laquelle le F-35B des Marines à décollage vertical (ADAC/ADAV) trouvait sa justification dans les conditions dévastées pour les USA d’un conflit à venir, mais qu’on doutait grandement qu’il puisse jouer un grand rôle opérationnel à cause de l’extrême complexité de l’entretien opérationnel de l’avion dans un tel environnement. Un autre intervenant ajoute cette remarque, où l’on pourrait voir une ironie désabusée :

« “Dans tous les scénarios auxquels j’ai eu accès”, a déclaré Robert Work, ancien secrétaire adjoint à la Défense ayant une grande expérience des exercices opérationnels, “le F-35 est le maître du ciel quand il parvient à s’y trouver mais il est détruit au sol en grand nombre”. » Cette remarque, d’ailleurs bien trop follement optimiste sinon utopiste (ou ironique ?) pour les capacités du F-35 lorsqu’il parvient à se mettre en position de combat aérien, marque surtout la prise en compte de la fin de l’ Air Dominance pour l’USAF et les forces aériennes US en général, du fait de la puissance nouvelle acquise notamment par les Russes, suivis par les Chinois en pleine expansion militaire.

  • La décision de retrait et de mise en réserve (“mise en cocon”) du porte-avions USS Truman, annoncée au début du mois, a  d’abord été présentéecomme une manœuvre de l’US Navy pour obtenir un budget supplémentaire pour garder cette unité en service actif et poursuivre en même temps la construction des deux premiers classes USS  Gerald R. Ford, toujours  aussi catastrophiques et empilant délais sur augmentation de coût. (On cite le précédent d’une manœuvre similaire lorsque la Navy avait prévu de faire subir le même sort au USS  George-Washington  en 2012, la Maison-Blanche allouant avec le soutien du Congrès les fonds nécessaires pour éviter cette réduction de la flotte des onze porte-avions de la Navy.) La Navy économiserait jusqu’à $30 milliards en écartant le  Truman  qui va bientôt entrer en refonte de mi-vie s’il reste en service (un travail très complexe, coûteux et long : 2024-2028).

Mais on voit que la RAND suscite une explication qu’elle renforce d’autres constats, qui impliquerait que la Navy estime le danger des nouvelles armes hypersoniques trop grand pour continuer à mettre toute sa puissance stratégique sur les porte-avions. Venant de la RAND, avec tout son crédit, la chose doit être considérée sérieusement, pour marquer combien les USA commenceraient à prendre conscience de la puissance de leurs adversaires stratégiques du fait de la percée majeure constituée par les missiles hypersoniques.

  • Un autre exemple des insuffisances considérables débusquées par la RAND concerne la couverture anti-aérienne des forces terrestres. Les experts du think tank ont fait leur compte, ce qui est illustré par cette remarque :

« … Si l’on se base sur une situation purement hypothétique [selon les moyens actuels], “si nous partions en guerre en Europe, il y aurait une unité de [missiles sol-air de défense aérienne] Patriot qui serait disponible pour y être envoyée, pour être déployée à la base de Ramstein. Et c’est tout”, dit Work avec amertume. L’US Army compte 58 brigades de combat mais ne dispose d’aucune capacité de défense anti-aérienne et antimissile pour les protéger contre des attaques de missiles venues de la Russie. »

Cette situation US est en complet contraste avec celle des Russes, qui intègrent dans leurs forces terrestres des unités de défense anti-aérienne chargées de la protection des forces en campagne. C’est d’ailleurs autant une question de moyens qu’une question structurelle et même psychologique. Les forces armées US ont toujours fonctionné depuis 1945 selon le principe qu’elles disposaient d’une totale domination aérienne qui jouaient un rôle d’interdiction quasi-impénétrable. Cette situation est très largement mise en cause aujourd’hui, notamment avec les progrès russes en matière d’A2/AD («  [Z]ones dite A2/AD, ou Anti-Access/Area-Denial ; c’est-à-dire des sortes de No-Fly-Zone pour l’aviation ennemie, du fait des moyens russes parfaitement intégrés de détection, de brouillage et de contrôle électroniques, et de destruction, qui transforment toute incursion aérienne ennemie dans ces zones en un risque inacceptable »).

Non seulement les forces US sont affaiblies, non seulement l’apparition des missiles hypersoniques donne aux Russes une puissance de feu d’une catégorie nouvelle et révolutionnaire, mais en plus la structure des forces US est fondée sur le postulat psychologique quasi-inconscient (“inculpabilité-indéfectibilité”) de la supériorité US (notamment aérienne) qui dispense ces forces d’avoir une défense organique puissante.

USA : le Russiagate est vraiment fini

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USA : le Russiagate est vraiment fini

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Le 12 février, nous écrivions "Le Russiagate est fini". La conclusion était basée sur un rapport de NBC :

Après deux ans d'enquête et 200 entretiens, le Comité du renseignement du Sénat touche à la fin de son enquête sur les élections de 2016, n'ayant encore trouvé aucune preuve directe d'un complot entre la campagne Trump et la Russie, selon les démocrates et les républicains siégeant au comité. ... Les démocrates et autres opposants à Trump pensent depuis longtemps que l'avocat spécial Robert Mueller et les enquêteurs du Congrès découvriront de nouvelles preuves plus explosives de la coordination de la campagne de Trump avec les Russes. Mueller pourrait encore le faire, bien que des sources au ministère de la Justice et au Congrès affirment qu’il est sur le point de clore son enquête.

La théoricienne du complot Russiagate, Marcy Wheeler, a répliqué en affirmant que le complot avait été prouvé lorsque l’ancien chef de campagne de Trump, Paul Manafort, a admis avoir transmis des données sur les élections à des contacts ukrainiens/russes pour s’attirer les faveurs d’un oligarque russe auquel il devait de l’argent. Mais les crimes de Manafort, pour lesquels il a plaidé coupable le 14 septembre 2018, n’avaient rien à voir avec « la Russie » ou avec Trump et seulement de manière indirecte avec sa campagne électorale : Vendredi, Manafort, directeur de la campagne présidentielle de Donald Trump de juin à août 2016, a plaidé coupable devant le tribunal fédéral de Washington pour deux accusations de complot contre les États-Unis, dont un pour lobbying, impliquant des crimes financiers et la violation de l'enregistrement comme agent étranger, et l'autre impliquant la subornation de témoins. Dans le cadre de son plaidoyer, Manafort a également reconnu sa culpabilité dans des accusations de fraude bancaire qu'un jury fédéral de Virginie avait portées contre lui le mois dernier.

Marcy, la théoricienne du Russiagate, et d’autres personnes espéraient que l’enquête sur Mueller aboutirait à un acte d’accusation qui justifierait le non-sens absolu qu’elle-même et d’autres ont promu pendant plus de deux ans. Il y a à peine deux semaines, l’ancien directeur de la CIA, John Brennan, qui a probablement conspiré avec les services de renseignement britanniques pour confondre Trump dans l’affaire avec la Russie, a déclaré qu’il s’attendait à de nouvelles inculpations : Lors de son apparition sur MSNBC le 5 mars 2019, Brennan a prédit que Mueller émettrait des actes d’accusation pour «complot criminel» impliquant Trump ou les activités de ses collaborateurs lors de l’élection de 2016.

Ce dernier espoir des jusqu’au-boutistes est maintenant évanoui : Le Conseil spécial, Robert S. Mueller III, a remis vendredi au procureur général, William P. Barr, un rapport très attendu, mettant ainsi fin à son enquête sur l'ingérence de la Russie dans l'élection de 2016 et l'éventuelle entrave à la justice par le président Trump. ... Un haut responsable du département de la justice a déclaré que le Conseil spécial n’avait recommandé aucune autre inculpation - une révélation applaudie par les partisans de Trump, alors même que d’autres enquêtes liées à celui-ci se poursuivent dans d’autres départements du département de la justice. ... Aucun des Américains inculpés par Mueller n'est accusé d'avoir conspiré avec la Russie pour s'immiscer dans l'élection - la question centrale du travail de Mueller. Au lieu de cela, ils ont plaidé coupable pour divers crimes, notamment d'avoir menti au FBI. L’enquête s’est terminée sans inculpation de plusieurs personnalités qui étaient sous la surveillance de Mueller depuis longtemps. ...
 

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Les conclusions du rapport Mueller seront publiées par le ministère de la Justice dans les prochains jours.

Que les promoteurs du Russiagate aient eu tort de gober les conneries du dossier Steele et les mensonges sur les « hackers russes » propagés par les marchands de sornettes Clapper et Brennan était évident depuis longtemps. En juin 2017, nous avions évoqué un long article du Washington Post sur le piratage présumé des élections en Russie et avions remarqué : En lisant cet article, il devient clair - mais jamais dit - que l'unique source de cette affirmation de Brennan sur le "piratage russe" en août 2016 est l'absurde dossier Steele, un ex-agent du MI6 payé très cher pour des recherches sur Trump commanditées par l'opposition. La seule autre "preuve" de "piratage russe" est le rapport Crowdstrike sur le "piratage" de la DNC. Crowdstrike qui soutient un agenda nationaliste ukrainien, a été embauché par la DNC et a dû se rétracter sur d'autres affirmations de "piratage russe" et personne d'autre n'a été autorisé à consulter les serveurs de la DNC. Autrement dit : Toutes les allégations de "piratage russe" reposent uniquement sur les "preuves" de deux faux rapports.

Le dossier Steele était une fausse étude commanditée par l’opposition et colportée par la campagne Clinton, John McCain et un groupe de types de la sécurité nationale anti-Trump. La prétention encore non prouvée de « piratage russe » visait à détourner l’attention du fait que Clinton et la DNC se soient entendus pour éliminer Bernie Sanders de la candidature. L’affirmation stupide selon laquelle la pêche aux clics sur internet, par une entreprise commerciale de Leningrad, aurait été une « campagne d’influence russe », a été conçue pour expliquer la défaite électorale de Clinton contre l’autre pire candidat de tous les temps. L’enquête Russiagate visait à empêcher Trump de nouer de meilleures relations avec la Russie, comme il l’avait promis lors de sa campagne.

Tout cela a connu un certain succès parce que des médias et blogueurs étaient heureux de vendre de telles absurdités sans les mettre dans un contexte plus large.

Il est grand temps de lancer une enquête approfondie sur Brennan, Clapper, Comey et la campagne Clinton afin de mettre en lumière le complot qui a conduit au dossier Steele, à l’enquête du FBI qui en découla, et à toutes les autres conneries qui ont suivi cette enquête.

En ce qui concerne Marcy Wheeler, Rachel Maddow et d’autres imbéciles qui ont colporté l’absurdité du Russiagate, je suis d’accord avec l’avis de Catlin Johnstone : Tous les politiciens, tous les médias, tous les experts de Twitter et tous ceux qui ont gobé cette giclée débile de bouses de vaches se sont officiellement discrédités à vie. ... Les personnes qui nous ont conduits dans ces deux années de folie du Russiagate sont les dernières personnes que quiconque devrait jamais écouter pour déterminer l’orientation future de notre monde.

Moon of Alabama

Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone

vendredi, 22 mars 2019

Quand Alexandre Zinoviev dénonçait la tyrannie mondialiste et le totalitarisme démocratique

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Quand Alexandre Zinoviev dénonçait la tyrannie mondialiste et le totalitarisme démocratique

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com 

 
Les propos « visionnaires » d’Alexandre Zinoviev, tenus en 1999, confirment la mise en place du mondialisme. Dans un monde où il n’y a plus de « garde-fou » tout peut arriver. Ça rejoint l’analyse de Vladimir Boukovski.
 
« Il me semble que dans le système de séparation des pouvoirs, il faudrait ajouter à ses trois composantes traditionnelles, le législatif, l’exécutif et le judiciaire, une quatrième : le pouvoir monétaire.» 
Alexandre Zinoviv - L’occidentisme (1995)

Avant-propos : Passionnante découverte: Alexandre Zinoviev (1922-2006), auteur russe qui décrit dans cet entretien sa vision de la réorganisation du monde devenu unipolaire et post-démocratique. 

Cet entretien a lieu en 1999 ! Vous serez surpris de la pertinence de ses réflexions presque 17 ans plus tard. Il y décrit l’évolution de l’Occident libéral vers une démocratie totalitaire.


Comme la domination planétaire est unipolaire (pas de contre-poids), on peut craindre des dérives totalitaires piégeant les peuples qui ne peuvent plus s’appuyer sur une aide venue de l’extérieur. Le détricotage des acquis sociaux est alors inéluctable. 

Nous pouvons ajouter à ce constat visionnaire et cinglant de Zinoviev, tout l’axe de la technologie, de la robotique et surtout du transhumanisme non abordé dans cet entretien et qui ne manque pas de nous inquiéter dans le cadre de l’ampleur potentielle des dérives attendues. 

Liliane Held-Khawam 

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Dernier entretien en terre d’Occident : juin 1999 

Entretien réalisé par Victor Loupan à Munich, en juin 1999, quelques jours avant le retour définitif d’Alexandre Zinoviev en Russie ; extrait de « La grande rupture », aux éditions l’Âge d’Homme. 

Victor Loupan : Avec quels sentiments rentrez-vous après un exil aussi long ? 

Alexandre Zinoviev : Avec celui d’avoir quitté une puissance respectée, forte, crainte même, et de retrouver un pays vaincu, en ruines. Contrairement à d’autres, je n’aurais jamais quitté l’URSS, si on m’avait laissé le choix. L’émigration a été une vraie punition pour moi. 

V. L. : On vous a pourtant reçu à bras ouverts ! 

A. Z. : C’est vrai. Mais malgré l’accueil triomphal et le succès mondial de mes livres, je me suis toujours senti étranger ici. 

V. L. : Depuis la chute du communisme, c’est le système occidental qui est devenu votre principal objet d’étude et de critique. Pourquoi ? 

A. Z. : Parce que ce que j’avais dit est arrivé : la chute du communisme s’est transformée en chute de la Russie. La Russie et le communisme étaient devenus une seule et même chose. 

V. L. : La lutte contre le communisme aurait donc masqué une volonté d’élimination de la Russie ? 

A. Z. : Absolument. La catastrophe russe a été voulue et programmée ici, en Occident. Je le dis, car j’ai été, à une certaine époque, un initié. J’ai lu des documents, participé à des études qui, sous prétexte de combattre une idéologie, préparaient la mort de la Russie. Et cela m’est devenu insupportable au point où je ne peux plus vivre dans le camp de ceux qui détruisent mon pays et mon peuple. L’Occident n’est pas une chose étrangère pour moi, mais c’est une puissance ennemie. 
 

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V. L. : Seriez-vous devenu un patriote ? 

A. Z. : Le patriotisme, ce n’est pas mon problème. J’ai reçu une éducation internationaliste et je lui reste fidèle. Je ne peux d’ailleurs pas dire si j’aime ou non la Russie et les Russes. Mais j’appartiens à ce peuple età ce pays. J’en fais partie. Les malheurs actuels de mon peuple sont tels, que je ne peux continuer à les contempler de loin. La brutalité de la mondialisation met en évidence des choses inacceptables. 

V. L. : Les dissidents soviétiques parlaient pourtant comme si leur patrie était la démocratie et leur peuple les droits de l’homme. Maintenant que cette manière de voir est dominante en Occident, vous semblez la combattre. N’est-ce pas contradictoire ? 

A. Z. : Pendant la guerre froide, la démocratie était une arme dirigée contre le totalitarisme communiste, mais elle avait l’avantage d’exister. On voit d’ailleurs aujourd’hui que l’époque de la guerre froide a été un point culminant de l’histoire de l’Occident. Un bien être sans pareil, de vraies libertés, un extraordinaire progrès social, d’énormes découvertes scientifiques et techniques, tout y était ! Mais, l’Occident se modifiait aussi presqu’imperceptiblement. L’intégration timide des pays développés, commencée alors, constituait en fait les prémices de la mondialisation de l’économie et de la globalisation du pouvoir auxquels nous assistons aujourd’hui. Une intégration peut être généreuse et positive si elle répond, par exemple, au désir légitime des nations-soeurs de s’unir. Mais celle-ci a, dès le départ, été pensée en termes de structures verticales, dominées par un pouvoir supranational. Sans le succès de la contre-révolution russe, il n’aurait pu se lancer dans la mondialisation. 

V. L. : Le rôle de Gorbatchev n’a donc pas été positif ? 

A. Z. : Je ne pense pas en ces termes-là. Contrairement à l’idée communément admise, le communisme soviétique ne s’est pas effondré pour des raisons internes. Sa chute est la plus grande victoire de l’histoire de l’Occident ! Victoire colossale qui, je le répète, permet l’instauration d’un pouvoir planétaire. Mais la fin du communisme a aussi marqué la fin de la démocratie. 

Notre époque n’est pas que post-communiste, elle est aussi post-démocratique. 

Nous assistons aujourd’hui à l’instauration du totalitarisme démocratique ou, si vous préférez, de la démocratie totalitaire. 

V. L. : N’est-ce pas un peu absurde ? 

A. Z. : Pas du tout. La démocratie sous-entend le pluralisme. Et le pluralisme suppose l’opposition d’au moins deux forces plus ou moins égale ; forces qui se combattent et s’influencent en même temps. Il y avait, à l’époque de la guerre froide, une démocratie mondiale, un pluralisme global au sein duquel coexistaient le système capitaliste, le système communiste et même une structure plus vague mais néanmoins vivante, les non-alignés. Le totalitarisme soviétique était sensible aux critiques venant de l’Occident. L’Occident subissait lui aussi l’influence de l’URSS, par l’intermédiaire notamment de ses propres partis communistes. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde dominé par une force unique, par une idéologie unique, par un parti unique mondialiste. La constitution de ce dernier a débuté, elle aussi, à l’époque de la guerre froide, quand des superstructures transnationales ont progressivement commencé à se constituer sous les formes les plus diverses : sociétés commerciales, bancaires, politiques, médiatiques. Malgré leurs différents secteurs d’activités, ces forces étaient unies par leur nature supranationale. Avec la chute du communisme, elles se sont retrouvées aux commandes du monde. Les pays occidentaux sont donc dominateurs, mais aussi dominés, puisqu’ils perdent progressivement leur souveraineté au profit de ce que j’appelle la « suprasociété ». Suprasociété planétaire, constituée d’entreprises commerciales et d’organismes non-commerciaux, dont les zones d’influence dépassent les nations. Les pays occidentaux sont soumis, comme les autres, au contrôle de ces structures supranationales. Or, la souveraineté des nations était, elle aussi, une partie constituante du pluralisme et donc de la démocratie, à l’échelle de la planète. Le pouvoir dominant actuel écrase les états souverains. L’intégration de l’Europe qui se déroule sous nos yeux, provoque elle aussi la disparition du pluralisme au sein de ce nouveau conglomérat, au profit d’un pouvoir supranational. 
 

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V. L. : Mais ne pensez-vous pas que la France ou l’Allemagne continuent à être des pays démocratiques ? 

A. Z. : Les pays occidentaux ont connu une vraie démocratie à l’époque de la guerre froide. Les partis politiques avaient de vraies divergences idéologiques et des programmes politiques différents. Les organes de presse avaient des différences marquées, eux aussi. Tout cela influençait la vie des gens, contribuait à leur bien-être. C’est bien fini. Parce que le capitalisme démocratique et prospère, celui des lois sociales et des garanties d’emploi devait beaucoup à l’épouvantail communiste. L’attaque massive contre les droits sociaux à l’Ouest a commencé avec la chute du communisme à l’Est. Aujourd’hui, les socialistes au pouvoir dans la plupart des pays d’Europe, mènent une politique de démantèlement social qui détruit tout ce qu’il y avait de socialiste justement dans les pays capitalistes. 

Il n’existe plus, en Occident, de force politique capable de défendre les humbles. 

L’existence des partis politiques est purement formelle. Leurs différences s’estompent chaque jour davantage. La guerre des Balkans était tout sauf démocratique. Elle a pourtant été menée par des socialistes, historiquement opposés à ce genre d’aventures. Les écologistes, eux aussi au pouvoir dans plusieurs pays, ont applaudi au désastre écologique provoqué par les bombardements de l’OTAN. Ils ont même osé affirmer que les bombes à uranium appauvri n’étaient pas dangereuses alors que les soldats qui les chargent portent des combinaisons spéciales. La démocratie tend donc aussi à disparaître de l’organisation sociale occidentale. Le totalitarisme financier a soumis les pouvoirs politiques. Le totalitarisme financier est froid. Il ne connaît ni la pitié ni les sentiments. Les dictatures politiques sont pitoyables en comparaison avec la dictature financière. Une certaine résistance était possible au sein des dictatures les plus dures. Aucune révolte n’est possible contre la banque. 

V. L. : Et la révolution ? 

A. Z. : Le totalitarisme démocratique et la dictature financière excluent la révolution sociale. 

V. L. : Pourquoi ? 

A. Z. : Parce qu’ils combinent la brutalité militaire toute puissante et l’étranglement financier planétaire. Toutes les révolutions ont bénéficié de soutien venu de l’étranger. C’est désormais impossible, par absence de pays souverains. De plus, la classe ouvrière a été remplacée au bas de l’échelle sociale, par la classe des chômeurs. Or que veulent les chômeurs ? Un emploi. Ils sont donc, contrairement à la classe ouvrière du passé, dans une situation de faiblesse. 
 

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V. L. : Les systèmes totalitaires avaient tous une idéologie. Quelle est celle de cette nouvelle société que vous appelez post-démocratique ? 

A. Z. : Les théoriciens et les politiciens occidentaux les plus influents considèrent que nous sommes entrés dans une époque post-idéologique. Parce qu’ils sous-entendent par « idéologie » le communisme, le fascisme, le nazisme, etc. En réalité, l’idéologie, la supraidéologie du monde occidental, développée au cours des cinquante dernières années, est bien plus forte que le communisme ou le national-socialisme. Le citoyen occidental en est bien plus abruti que ne l’était le soviétique moyen par la propagande communiste. Dans le domaine idéologique, l’idée importe moins que les mécanismes de sa diffusion. Or la puissance des médias occidentaux est, par exemple, incomparablement plus grande que celle, énorme pourtant, du Vatican au sommet de son pouvoir. Et ce n’est pas tout : le cinéma, la littérature, la philosophie, tous les moyens d’influence et de diffusion de la culture au sens large vont dans le même sens. A la moindre impulsion, ceux qui travaillent dans ces domaines réagissent avec un unanimisme qui laisse penser à des ordres venant d’une source de pouvoir unique. (…)

V. L. : Mais cette « supraidéologie » ne propage-t-elle pas aussi la tolérance et le respect ? 

A. Z. : Quand vous écoutez les élites occidentales, tout est pur, généreux, respectueux de la personne humaine. Ce faisant, elles appliquent une règle classique de la propagande : masquer la réalité par le discours. Car il suffit d’allumer la télévision, d’aller au cinéma, d’ouvrir les livres à succès, d’écouter la musique la plus diffusée, pour se rendre compte que ce qui est propagé en réalité c’est le culte du sexe, de la violence et de l’argent. Le discours noble et généreux est donc destiné à masquer ces trois piliers – il y en a d’autres – de la démocratie totalitaire. 

V. L. : Mais que faites-vous des droits de l’homme ? Ne sont-ils pas respectés en Occident bien plus qu’ailleurs ? 

A. Z. : L’idée des droits de l’homme est désormais soumise elle aussi à une pression croissante. L’idée, purement idéologique, selon laquelle ils seraient innés et inaltérables ne résisterait même pas à un début d’examen rigoureux. Je suis prêt à soumettre l’idéologie occidentale à l’analyse scientifique, exactement comme je l’ai fait pour le communisme. Ce sera peut-être un peu long pour un entretien. 

V. L. : N’a-t-elle pas une idée maîtresse ? 

A. Z. : C’est le mondialisme, la globalisation. Autrement dit : la domination mondiale. Et comme cette idée est assez antipathique, on la masque sous le discours plus vague et généreux d’unification planétaire, de transformation du monde en un tout intégré. C’est le vieux masque idéologique soviétique ; celui de l’amitié entre les peuples, « amitié » destinée à couvrir l’expansionnisme. En réalité, l’Occident procède actuellement à un changement de structure à l’échelle planétaire. D’un côté, la société occidentale domine le monde de la tête et des épaules et de l’autre, elle s’organise elle-même verticalement, avec le pouvoir supranational au sommet de la pyramide. 

V. L. : Un gouvernement mondial ? 

A. Z. : Si vous voulez. 

V. L. : Croire cela n’est-ce-pas être un peu victime du fantasme du complot ? 

A. Z. : Quel complot ? Il n’y a aucun complot. Le gouvernement mondial est dirigé par les gouverneurs des structures supranationales commerciales, financières et politiques connues de tous. Selon mes calculs, une cinquantaine de millions de personnes fait déjà partie de cette suprasociété qui dirige le monde. Les États-Unis en sont la métropole. Les pays d’Europe occidentale et certains anciens « dragons » asiatiques, la base. Les autres sont dominés suivant une dure gradation économico-financière. Ça, c’est la réalité. La propagande, elle, prétend qu’un gouvernement mondial contrôlé par un parlement mondial serait souhaitable, car le monde est une vaste fraternité. Ce ne sont là que des balivernes destinées aux populations. 
 

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V. L. : Le Parlement européen aussi ? 

A. Z. : Non, car le Parlement européen existe. Mais il serait naïf de croire que l’union de l’Europe s’est faite parce que les gouvernements des pays concernés l’ont décidé gentiment. L’Union européenne est un instrument de destruction des souverainetés nationales. Elle fait partie des projets élaborés par les organismes supranationaux. 

V. L. : La Communauté européenne a changé de nom après la destruction de l’Union soviétique. Elle s’est appelée Union européenne, comme pour la remplacer. Après tout, il y avait d’autres noms possibles. Aussi, ses dirigeants s’appellent-ils « commissaires », comme les Bolcheviks. Ils sont à la tête d’une « Commission », comme les Bolcheviks. Le dernier président a été « élu » tout en étant candidat unique. 

A. Z. : Il ne faut pas oublier que des lois régissent l’organisation sociale. Organiser un million d’hommes c’est une chose, dix millions c’en est une autre, cent millions, c’est bien plus compliqué encore. Organiser cinq cent millions est une tâche immense. Il faut créer de nouveaux organismes de direction, former des gens qui vont les administrer, les faire fonctionner. C’est indispensable. Or l’Union soviétique est, en effet, un exemple classique de conglomérat multinational coiffé d’une structure dirigeante supranationale. L’Union européenne veut faire mieux que l’Union soviétique ! C’est légitime. J’ai déjà été frappé, il y a vingt ans, de voir à quel point les soi-disant tares du système soviétique étaient amplifiées en Occident. 

V. L. : Par exemple ? 

A. Z. : La planification ! L’économie occidentale est infiniment plus planifiée que ne l’a jamais été l’économie soviétique. La bureaucratie ! En Union Soviétique 10 % à 12 % de la population active travaillaient dans la direction et l’administration du pays. Aux États Unis, ils sont entre 16 % et 20 %. C’est pourtant l’URSS qui était critiquée pour son économie planifiée et la lourdeur de son appareil bureaucratique ! Le Comité central du PCUS employait deux mille personnes. L’ensemble de l’appareil du Parti communiste soviétique était constitué de 150000 salariés. Vous trouverez aujourd’hui même, en Occident, des dizaines voire des centaines d’entreprises bancaires et industrielles qui emploient un nombre bien plus élevé de gens. L’appareil bureaucratique du Parti communiste soviétique était pitoyable en comparaison avec ceux des grandes multinationales. L’URSS était en réalité un pays sous-administré. Les fonctionnaires de l’administration auraient dû être deux à trois fois plus nombreux. L’Union européenne le sait, et en tient compte. L’intégration est impossible sans la création d’un très important appareil administratif. 

V. L. : Ce que vous dites est contraire aux idées libérales, affichées par les dirigeants européens. Pensez-vous que leur libéralisme est de façade ? 

A. Z. : L’administration a tendance à croître énormément. Cette croissance est dangereuse, pour elle-même. Elle le sait. Comme tout organisme, elle trouve ses propres antidotes pour continuer à prospérer. L’initiative privée en est un. La morale publique et privée, un autre. Ce faisant, le pouvoir lutte en quelque sorte contre ses tendances à l’auto-déstabilisation. Il a donc inventé le libéralisme pour contrebalancer ses propres lourdeurs. Et le libéralisme a joué, en effet, un rôle historique considérable. Mais il serait absurde d’être libéral aujourd’hui. La société libérale n’existe plus. Sa doctrine est totalement dépassée à une époque de concentrations capitalistiques sans pareil dans l’histoire. Les mouvements d’énormes masses financières ne tiennent compte ni des intérêts des États ni de ceux des peuples, peuples composés d’individus. Le libéralisme sous-entend l’initiative personnelle et le risque financier personnel. Or, rien ne se fait aujourd’hui sans l’argent des banques. Ces banques, de moins en moins nombreuses d’ailleurs, mènent une politique dictatoriale, dirigiste par nature. Les propriétaires sont à leur merci, puisque tout est soumis au crédit et donc au contrôle des puissances financières. L’importance des individus, fondement du libéralisme, se réduit de jour en jour. Peu importe aujourd’hui qui dirige telle ou telle entreprise ; ou tel ou tel pays d’ailleurs. Bush ou Clinton, Kohl ou Schröder, Chirac ou Jospin, quelle importance ? Ils mènent et mèneront la même politique. 

V. L. : Les totalitarismes du XXe siècle ont été extrêmement violents. On ne peut dire la même chose de la démocratie occidentale. 

A. Z. : Ce ne sont pas les méthodes, ce sont les résultats qui importent. Un exemple ? L’URSS a perdu vingt million d’hommes et subi des destructions considérables, en combattant l’Allemagne nazie. Pendant la guerre froide, guerre sans bombes ni canons pourtant, ses pertes, sur tous les plans, ont été bien plus considérables ! La durée de vie des Russes a chuté de dix ans dans les dix dernières années. La mortalité dépasse la natalité de manière catastrophique. Deux millions d’enfants ne dorment pas à la maison. Cinq millions d’enfants en âge d’étudier ne vont pas à l’école. Il y a douze millions de drogués recensés. L’alcoolisme s’est généralisé. 70 % des jeunes ne sont pas aptes au service militaire à cause de leur état physique. Ce sont là des conséquences directes de la défaite dans la guerre froide, défaite suivie par l’occidentalisation. Si cela continue, la population du pays descendra rapidement de cent-cinquante à cent, puis à cinquante millions d’habitants. Le totalitarisme démocratique surpassera tous ceux qui l’ont précédé. 
 

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V. L. : En violence ? 

A. Z. : La drogue, la malnutrition, le sida sont plus efficaces que la violence guerrière. Quoique, après la guerre froide dont la force de destruction a été colossale, l’Occident vient d’inventer la « guerre pacifique ». L’Irak et la Yougoslavie sont deux exemples de réponse disproportionnée et de punition collective, que l’appareil de propagande se charge d’habiller en « juste cause » ou en « guerre humanitaire ». L’exercice de la violence par les victimes contre elles-mêmes est une autre technique prisée. La contre-révolution russe de 1985 en est un exemple. Mais en faisant la guerre à la Yougoslavie, les pays d’Europe occidentale l’ont faite aussi à eux-mêmes. 

V. L. : Selon vous, la guerre contre la Serbie était aussi une guerre contre l’Europe ? 

A. Z. : Absolument. Il existe, au sein de l’Europe, des forces capables de lui imposer d’agir contre elle-même. La Serbie a été choisie, parce qu’elle résistait au rouleau compresseur mondialiste. La Russie pourrait être la prochaine sur la liste. Avant la Chine. 

V. L. : Malgré son arsenal nucléaire ? 

A. Z. : L’arsenal nucléaire russe est énorme mais dépassé. De plus, les Russes sont moralement prêts à être conquis. A l’instar de leurs aïeux qui se rendaient par millions dans l’espoir de vivre mieux sous Hitler que sous Staline, ils souhaitent même cette conquête, dans le même espoir fou de vivre mieux. C’est une victoire idéologique de l’Occident. Seul un lavage de cerveau peut obliger quelqu’un à voir comme positive la violence faite à soi-même. Le développement des mass-media permet des manipulations auxquelles ni Hitler ni Staline ne pouvaient rêver. Si demain, pour des raisons « X », le pouvoir supranational décidait que, tout compte fait, les Albanais posent plus de problèmes que les Serbes, la machine de propagande changerait immédiatement de direction, avec la même bonne conscience. Et les populations suivraient, car elles sont désormais habituées à suivre. Je le répète : on peut tout justifier idéologiquement. L’idéologie des droits de l’homme ne fait pas exception. Partant de là, je pense que le XXIe siècle dépassera en horreur tout ce que l’humanité a connu jusqu’ici. Songez seulement au futur combat contre le communisme chinois. Pour vaincre un pays aussi peuplé, ce n’est ni dix ni vingt mais peut-être cinq cent millions d’individus qu’il faudra éliminer. Avec le développement que connaît actuellement la machine de propagande ce chiffre est tout à fait atteignable. Au nom de la liberté et des droits de l’homme, évidemment. A moins qu’une nouvelle cause, non moins noble, sorte de quelque institution spécialisée en relations publiques. 

V. L. : Ne pensez-vous pas que les hommes et les femmes peuvent avoir des opinions, voter, sanctionner par le vote ? 

A. Z. : D’abord les gens votent déjà peu et voteront de moins en moins. Quant à l’opinion publique occidentale, elle est désormais conditionnée par les médias. Il n’y a qu’à voir le oui massif à la guerre du Kosovo. Songez donc à la guerre d’Espagne ! Les volontaires arrivaient du monde entier pour combattre dans un camp comme dans l’autre. Souvenez-vous de la guerre du Vietnam. Les gens sont désormais si conditionnés qu’ils ne réagissent plus que dans le sens voulu par l’appareil de propagande. 

V. L. : L’URSS et la Yougoslavie étaient les pays les plus multiethniques du monde et pourtant ils ont été détruits. Voyez-vous un lien entre la destruction des pays multiethniques d’un côté et la propagande de la multiethnicité de l’autre ? 

A. Z. : Le totalitarisme soviétique avait créé une vraie société multinationale et multiethnique. Ce sont les démocraties occidentales qui ont fait des efforts de propagande surhumains, à l’époque de la guerre froide, pour réveiller les nationalismes. Parce qu’elles voyaient dans l’éclatement de l’URSS le meilleur moyen de la détruire. Le même mécanisme a fonctionné en Yougoslavie. L’Allemagne a toujours voulu la mort de la Yougoslavie. Unie, elle aurait été plus difficile à vaincre. Le système occidental consiste à diviser pour mieux imposer sa loi à toutes les parties à la fois, et s’ériger en juge suprême. Il n’y a pas de raison pour qu’il ne soit pas appliqué à la Chine. Elle pourrait être divisée, en dizaines d’États. 

V. L. : La Chine et l’Inde ont protesté de concert contre les bombardements de la Yougoslavie. Pourraient-elles éventuellement constituer un pôle de résistance ? Deux milliards d’individus, ce n’est pas rien ! 

A. Z. : La puissance militaire et les capacités techniques de l’Occident sont sans commune mesure avec les moyens de ces deux pays. 

V. L. : Parce que les performances du matériel de guerre américain en Yougoslavie vous ont impressionné ? 

A. Z. : Ce n’est pas le problème. Si la décision avait été prise, la Serbie aurait cessé d’exister en quelques heures. Les dirigeants du Nouvel ordre mondial ont apparemment choisi la stratégie de la violence permanente. Les conflits locaux vont se succéder pour être arrêtés par la machine de « guerre pacifique » que nous venons de voir à l’oeuvre. Cela peut, en effet, être une technique de management planétaire. L’Occident contrôle la majeure partie des ressources naturelles mondiales. Ses ressources intellectuelles sont des millions de fois supérieures à celles du reste de la planète. C’est cette écrasante supériorité qui détermine sa domination technique, artistique, médiatique, informatique, scientifique dont découlent toutes les autres formes de domination. Tout serait simple s’il suffisait de conquérir le monde. Mais il faut encore le diriger. C’est cette question fondamentale que les Américains essaient maintenant de résoudre. C’est cela qui rend « incompréhensibles » certaines actions de la « communauté internationale ». Pourquoi Saddam est-il toujours là ? Pourquoi Karadzic n’est-il toujours pas arrêté ? Voyez-vous, à l’époque du Christ, nous étions peut-être cent millions sur l’ensemble du globe. Aujourd’hui, le Nigeria compte presqu’autant d’habitants ! Le milliard d’Occidentaux et assimilés va diriger le reste du monde. Mais ce milliard devra être dirigé à son tour. Il faudra probablement deux cent millions de personnes pour diriger le monde occidental. Il faut les sélectionner, les former. Voilà pourquoi la Chine est condamnée à l’échec dans sa lutte contre l’hégémonie occidentale. Ce pays sous-administré n’a ni les capacités économiques ni les ressources intellectuelles pour mettre en place un appareil de direction efficace, composé de quelque trois cent millions d’individus. Seul l’Occident est capable de résoudre les problèmes de management à l’échelle de la planète. Cela se met déjà en place. Les centaines de milliers d’Occidentaux se trouvant dans les anciens pays communistes, en Russie par exemple, occupent dans leur écrasante majorité des postes de direction. La démocratie totalitaire sera aussi une démocratie coloniale. 

V. L. : Pour Marx, la colonisation était civilisatrice. Pourquoi ne le serait-elle pas à nouveau ? 

A. Z. : Pourquoi pas, en effet ? Mais pas pour tout le monde. Quel est l’apport des Indiens d’Amérique à la civilisation ? Il est presque nul, car ils ont été exterminés, écrasés. Voyez maintenant l’apport des Russes ! L’Occident se méfiait d’ailleurs moins de la puissance militaire soviétique que de son potentiel intellectuel, artistique, sportif. Parce qu’il dénotait une extraordinaire vitalité. Or c’est la première chose à détruire chez un ennemi. Et c’est ce qui a été fait. La science russe dépend aujourd’hui des financements américains. Et elle est dans un état pitoyable, car ces derniers n’ont aucun intérêt à financer des concurrents. Ils préfèrent faire travailler les savants russes aux USA. Le cinéma soviétique a été lui aussi détruit et remplacé par le cinéma américain. En littérature, c’est la même chose. La domination mondiale s’exprime, avant tout, par le diktat intellectuel ou culturel si vous préférez. Voilà pourquoi les Américains s’acharnent, depuis des décennies, à baisser le niveau culturel et intellectuel du monde : ils veulent le ramener au leur pour pouvoir exercer ce diktat. 

V. L. : Mais cette domination, ne serait-elle pas, après tout, un bien pour l’humanité ? 

A. Z. : Ceux qui vivront dans dix générations pourront effectivement dire que les choses se sont faites pour le bien de l’humanité, autrement dit pour leur bien à eux. Mais qu’en est-il du Russe ou du Français qui vit aujourd’hui ? Peut-il se réjouir s’il sait que l’avenir de son peuple pourrait être celui des Indiens d’Amérique ? Le terme d’Humanité est une abstraction. Dans la vie réelle il y a des Russes, des Français, des Serbes, etc. Or si les choses continuent comme elles sont parties, les peuples qui ont fait notre civilisation, je pense avant tout aux peuples latins, vont progressivement disparaître. L’Europe occidentale est submergée par une marée d’étrangers. Nous n’en avons pas encore parlé, mais ce n’est ni le fruit du hasard, ni celui de mouvements prétendument incontrôlables. Le but est de créer en Europe une situation semblable à celle des États-Unis. Savoir que l’humanité va être heureuse, mais sans Français, ne devrait pas tellement réjouir les Français actuels. Après tout, laisser sur terre un nombre limité de gens qui vivraient comme au Paradis, pourrait être un projet rationnel. Ceux-là penseraient d’ailleurs sûrement que leur bonheur est l’aboutissement de la marche de l’histoire. Non, il n’est de vie que celle que nous et les nôtres vivons aujourd’hui. 

V. L. : Le système soviétique était inefficace. Les sociétés totalitaires sont-elles toutes condamnées à l’inefficacité ? 

A. Z. : Qu’est-ce que l’efficacité ? Aux États-Unis, les sommes dépensées pour maigrir dépassent le budget de la Russie. Et pourtant le nombre des gros augmente. Il y a des dizaines d’exemples de cet ordre. 

V. L. : Peut-on dire que l’Occident vit actuellement une radicalisation qui porte les germes de sa propre destruction ? 

A. Z. : Le nazisme a été détruit dans une guerre totale. Le système soviétique était jeune et vigoureux. Il aurait continué à vivre s’il n’avait pas été combattu de l’extérieur. Les systèmes sociaux ne s’autodétruisent pas. Seule une force extérieure peut anéantir un système social. Comme seul un obstacle peut empêcher une boule de rouler. Je pourrais le démontrer comme on démontre un théorème. Actuellement, nous sommes dominés par un pays disposant d’une supériorité économique et militaire écrasante. Le Nouvel ordre mondial se veut unipolaire. Si le gouvernement supranational y parvenait, n’ayant aucun ennemi extérieur, ce système social unique pourrait exister jusqu’à la fin des temps. Un homme seul peut être détruit par ses propres maladies. Mais un groupe, même restreint, aura déjà tendance à se survivre par la reproduction. Imaginez un système social composé de milliards d’individus ! Ses possibilités de repérer et d’arrêter les phénomènes autodestructeurs seront infinies. Le processus d’uniformisation du monde ne peut être arrêté dans l’avenir prévisible. Car le totalitarisme démocratique est la dernière phase de l’évolution de la société occidentale, évolution commencée à la Renaissance.
 

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Biographie d’Alexandre Zinoviev 

Alexandre Zinoviev est né dans un village de la région de Kostroma (URSS). Ses parents (le père est peintre en bâtiment) emménagent à Moscou. Alexandre qui montre de grandes capacités entre à l’Institut de philosophie, littérature et histoire de Moscou en 1939. Ses activités clandestines de critique de la construction du socialisme lui valent d’être exclu de l’Institut. Arrêté, puis évadé, il vit une année d’errance avant de s’enrôler dans l’Armée Rouge où il finit la Seconde Guerre mondiale comme aviateur et décoré de l’ordre de l’Étoile rouge. 

Entré à la faculté de philosophie de l’Université d’État de Moscou en 1946, Alexandre Zinoviev obtient en 1951 son diplôme avec mention. En 1954 il soutient une thèse de doctorat sur le thème de la logique dans Le Capital de Karl Marx, puis devient, l’année suivante, collaborateur scientifique de l’Institut de philosophie de l’Académie des sciences d’URSS. 

Alexandre Zinoviev est nommé professeur et directeur de la chaire de logique de l’Université d’Etat de Moscou en 1960. Il publie de nombreux livres et articles scientifiques de renommée internationale (ses oeuvres majeures ayant toutes été traduites à destination de l’Occident). Souvent invité à des conférences à l’étranger, il décline cependant toutes ces invitations. 

Après avoir refusé de renvoyer deux enseignants Alexandre Zinoviev est démis de son poste de professeur et de directeur de la chaire de logique. En 1976, pour avoir voulu publier Hauteurs béantes, un recueil de textes ironiques sur la vie en Union soviétique, il se voit proposer par les organes de sécurité le choix entre la prison et l’exil. Avec sa famille, il trouve refuge à Munich où il accomplit diverses tâches scientifiques ou littéraires. 

Révolté par la participation de la France et de l’Europe occidentale aux opérations de l’OTAN contre la Serbie, Alexandre Zinoviev retourne en Russie en 1999. Dans son article « Quand a vécu Aristote ? », il soutient que les récits et écrits historiques ont toujours été de tout temps détournés, effacés, falsifiés au profit d’un vainqueur. 

Source Liliane Held Khawam

La Russie face au regime change

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La Russie face au regime change

Ex: http://www.dedefensa.org

D’abord, quelques mots sur l’éditeur du site Dances With Bears, qui pourrait être surnommé “l’homme qui en sait trop sur la Russie”. 

John Helmer est un des plus anciens “correspondants étrangers” couvrant la Russie à Moscou même, depuis 1989. Son statut, en principe de commentateur indépendant, recouvre de nombreuses sources et ramifications, qui font souvent des textes de Helmer (sur son site), outre leur intérêt propre toujours évident, également des rébus ou des puzzles que les initiés peuvent lire au moins “entre les lignes” et entre les sous-entendus. C’est un peu cela qu’on retrouve dans l’annonce par le site Russia Insider (RI), le 10 janvier 2019, de la publication d’un livre de mémoires d’Helmer au titre révélateur des choses qu’on peut révéler et d’autres qu’on ne peut pas révéler : The Man Who Knows Too Much About Russia. Le très court commentaire de RI qui accompagne l’annonce de la publication, en décembre 2018, de ces « fascinants mémoires » est lui-même dans le style rébus à lire “entre les lignes” :

« Ce n’est pas un hasard si, au même moment [où était publié le livre], l’Office for Foreign Assets Control (OFAC) du Trésor américain publiait sa décision de dé-sanctionner les principales sociétés d'Oleg Deripaska, Rusal, EN+ et Eurosibenergo, en les supprimant de la liste publiée huit mois plus tôt.

» Dans l'annonce initiale des sanctions contre Deripaska le 6 avril [2018] par l'OFAC, une tentative de meurtre avait été mentionnée, mais il ne s'agissait pas de la tentative de Deripaska contre Helmer. Hillary Clinton et son adjoint à l'État, William Burns, l’avait dissimulée. Le pot-de-vin d'un million de dollars des Clinton, le complot pour vendre la division Opel de General Motors à Deripaska, l'implication du gouvernement australien dans la tentative d'assassinat contre le journaliste pour protéger un commerce d'alumine de plusieurs milliards de dollars avec Deripaska, tout cela et plus encore se trouvent dans ce livre. »

Il faut savoir que Deripaska, cet oligarque russe extrêmement riche et douteux dont il est question dans la citation, est clairement mentionné par Helmer, dans son texte plus récent du 18 mars 2019 (20 mars 2019 sur RI) que nous publions ci-dessous, comme l’un des soutiens affichés de Alexei Koudrine. Cet Alexei Koudrine, ancien ministre des Finances, est le prétendant affiché d’un regime change à Moscou, si l’on veut le Juan Guaido russe, en un peu plus retors et expérimenté. Il nous semblerait bien, selon notre simple approche logique sans trop chercher les parties immergées de l’iceberg, que le Trésor n’était pas vraiment informé par le département d’État lorsqu’il a établi sa liste de proscrit en avril 2018, et qu’il a rectifié vite fait en décembre, notamment après lecture (ou en avant-lecture) du livre d’Helmer, sans doute sur conseil et reproche du département d’État. Les américanistes, dans les dédales ubuesques et kafkaïens de leur appareil d’occupation hégémonique du monde, sont coutumiers de ces accidents de circulation labyrinthiques.

Si John Helmer est un homme à multiples facettes, il l’est si l’on s’en tient aux textes qu’il publie, – ce qui est pour nous l’essentiel sinon l’exclusif, – essentiellement au service d’une cause sympathique : la lutte constante contre le parti des Atlanticistes, ou Occidentalistes, ou “libéraux” à la mode-salade-russe, qui tentent de déstabiliser Poutine type-regime change, ou de le faire basculer dans une politique d’accommodement complet, c’est-à-dire d’asservissement à peine tempéré vis-à-vis du bloc-BAO (des USA). L’une des têtes de Turc, ou tête de traître de Helmer est bien entendu Koudrine, incontestable leader institutionnel des “libéraux” qui continue son travail de propagande soutenu par des fonds non mentionnés, – sauf ceux du Camarade Deripaska, sanctionné puis précipitamment dé-sanctionné par l’imprudent Trésor washingtonien.

Le texte ci-dessous organise une confrontation informelle entre deux interventions séparées de quelques jours, celle de Koudrine proposant une capitulation à peine dissimulée comme moyen pour la Russie de “discuter” avec les USA, et celle du chef de l’État-major général, le Général Gerasimov, dont nous avons déjà longuement parlé le 5 mars 2019, où il affirme que la Russie est capable de se battre contre les USA sur tous les fronts et de l'emporter, – et que c'est cela qui doit être fait, si nécessaire. Selon notre point de vue et notre façon de voir, Helmer confirme, directement ou indirectement, au moins deux choses :

• La“5èmecolonne” est, en Russie, parfaitement identifiée et l’espèce de liberté à peine surveillée où elle se trouve, puisqu’après tout elle entretient des liens directs avec l’aile libérale du gouvernement (à partir de Medvedev et à “à l’Ouest” de Medvedev [plutôt qu’à gauche ou à droite, difficile de déterminer]), c’est-à-dire la liberté d’action dont elle dispose est à la fois un handicap et un avantage pour le camp souverainiste-nationaliste : un handicap, on comprend pourquoi, mais aussi un avantage parce qu’on peut suivre sans difficultés l’activisme de cette “5èmecolonne” et éviter dans nombre de cas d’être pris par surprise.

• L’antagonisme entre le bloc de la communauté de sécurité nationale, et notamment l’État-major général, et Koudrine est manifeste, et il nous paraît assez probable que cette force pèse d’un poids important sur Poutine pour maintenir la politique russe de sécurité nationale sur une voie de fermeté. Il est vrai que cette conférence de Gerasimov, qu’Helmer interprète comme une réponse à Koudrine, nous paraît constituer un événement important sur la voie de l’affirmation des forces armées et des milieux de sécurité nationale (les “Organes” aussi) dans la politique russe. Ainsi la partie des déclaration de Gerasimov donnant une nouvelle définition de la guerre, et y incluant, pour ce qui regarde les forces armées, les pratiques de regime change et d’“agression douce”, impliquent sans guère de doute que ces forces armées se jugent fondées à considérer que toute action de déstabilisation venant du groupe des “libéraux”-“5èmecolonne” les concerne directement, et qu’elles se jugent compétentes et autorisées, ces forces armées, à agir contre cela.

• Il est certain que les dernières actions militaires, notamment en Syrie, ainsi que l’équipement en armes très puissantes (missiles hypersoniques) qui assurent aux forces armées russes une supériorité stratégique qualitative sur les forces armées US, renforcent considérablement leur position politique dans l'équation du pouvoir à Moscou. Cette nouvelle posture implique une légitimité fortement renforcée de ces forces armées, et donc une plus grande liberté d’action politique.

(Le texte de John Helmer du 18 mars 2019 porte comme titre initial : « Alexei Koudrine propose d'offrir au gouvernement américain la moitié de la Crimée, la moitié du Donbass, la moitié des îles Kouriles, la moitié de la Syrie et la moitié du Venezuela – le général Gerasimov propose de combattre les USA sur tous les fronts ».)

dedefensa.org

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Gerasimov contre Koudrine et sa 5èmecolonne

Alexei Koudrine est le plus ancien candidat au changement de régime au Kremlin qui ne soit ni en prison, ni à l’étranger. « Nous avons besoin d'un environnement mondial amical », a-t-il déclaré lors d'une conférence commerciale à Moscou la semaine dernière. Actuellement président de la Chambre des Comptes, l’organisme de contrôle de l’État, Koudrine a expliqué que cela « n’est pas encore pleinement atteint en raison de désaccords géopolitiques mondiaux et des sanctions. La Russie devrait essayer de réduire ce facteur et d'atténuer les désaccords politiques et les sanctions par le biais de pourparlers et d'autres moyens. »

Le remède de Koudrine, a-t-il ajouté, est que la Russie et les États-Unis « doivent se rencontrer à mi-chemin ». On a demandé à Koudrine de préciser ce qu'il entendait par « à mi-chemin ».

Alexei_Kudrin.jpgKoudrine emploie des porte-parole à la Chambre des Comptes et dans une organisation politique qu’il entretient, le Comité d’Initiative Civile. Cette organisation, créée par Koudrine en 2012 à la suite de sa destitutiondu poste de ministre des Finances, se décrit elle-même comme « uni autour de l'idée de la modernisation du pays et du renforcement des institutions démocratiques ».  Chaque année, le Comité mène des enquêtes sur les conditions régionales, surveille la presse et organise des conférences des organisations politiques qui soutiennent Koudrine.  Le Comité décerne également des prix annuels en argent et une figurine, le Golden Sprout, à des militants locaux sélectionnés. C'est l’organisation permanente de la campagne de Koudrine. Elle ne divulgue pas ses sources de financement sauf pour le cas de Norilsk Nickel, contrôlée par Vladimir Potanine et Oleg Deripaska, à qui elle exprime une “gratitude spéciale”.

On a demandé à M. Koudrine ce qu’il voulait dire par sa référence aux désaccords géopolitiques. Quelle est sa proposition pour l'offre russe dans les pourparlers avec les États-Unis ? Qu'entend-il par « autres moyens » ? Et, concrètement, qu'entend-il par « se rencontrer à mi-chemin » – la moitié de la Crimée donnée à l’ Ukraine ? La moitié de la Syrie affectée à Israël et à la Turquie ? La moitié des îles Kouriles pour le Japon ?

Les bureaux de M. Koudrine à la Chambre et au Comité ont dit qu'il ne répondrait pas par téléphone et ont demandé des courriels. Les questions ont été envoyées. Par téléphone, les deux bureaux ont confirmé avoir reçu les courriels. Mais il n’y a pas eu de réponse de Koudrine.

Il y a un an, alors que M. Koudrine faisait publiquement pression sur le président Vladimir Poutine pour obtenir un poste au sein du nouveau gouvernement doté de pouvoirs spéciaux pour négocier avec les États-Unis, il a présenté un plan qui est une attaque frontale contre le ministère russe de la Défense et son état-major général, avec une réduction du budget militaire, de la capacité de défense et des engagements de la Russie envers la Crimée et le Donbass. On trouvait tous les détails dans des déclarations faites en son nom à un journal de Londres ; Koudrine a évité de le faire lui-même en Russie, pour le public russe. (Pour plus de détails, lisez ceci.)

En mai [2018], alors que sa campagne de promotion politique avait échoué, M. Koudrine s'est rétracté dans un discours à la Douma d’État afin d'obtenir des voix pour confirmer son poste à la Cour des Comptes. (Cliquez ici pour en savoir plus.)  Le vote contre Koudrine a été le plus élevé jamais enregistré contre un candidat à la présidence de la Chambre. Le classement de Koudrine dans les sondages d'opinion nationaux le place dans les dix politiciens les plus suspects et les moins aimés du pays. 

La principale cible de la campagne de Koudrine reste le commandement militaire russe. Le général Valery Gerasimov, chef d'état-major général, a répondu indirectement récemment en donnant un aperçu détaillé de la stratégie russe contre les États-Unis. Son discours intitulé « Vecteurs du développement de la stratégie militaire » a été prononcé à l'Académie des sciences militaires. (Le texte intégral peut être lu en russe ici et en anglais ici.) 

Gerasimov a identifié « les États-Unis et leurs alliés » comme étant engagés dans une guerre permanente de tous types, « Ils travaillent à des actions militaires offensives, telles que des frappes mondiales, une capacité de bataille dans plusieurs sphères, et également l’utilisation des techniques dite des ‘révolutions de couleur’ et de la guerre de communicationIls cherchent à éliminer les structures étatiques de ces pays qu’ils jugent hostiles, à saper leur souveraineté, à changer les organes légalement élus du pouvoir politique. C’était le cas en Irak, en Libye et en Ukraine. C’est actuellement le cas dans le processus en cours au Venezuela... Les résultats obtenus en Syrie nous ont permis d’identifier l’orientation à suivre pour l’utilisation des Forces armées dans le cadre de l’exécution des tâches de protection et de promotion des intérêts nationaux à l'extérieur du territoire national. »

C'est la première fois que l'État-major russe identifie explicitement le Venezuela aux côtés de l'Ukraine et de la Syrie comme une cible de la guerre américaine à laquelle il est dans l'intérêt stratégique de la Russie de s'opposer.

Gerasimov avait eu aussi un mot spécialement pour Koudrine. Dans son discours, Koudrine avait ignoré les militaires dans son idée d'un gouvernement russe coordonné. « Si le système d'application de la loi fonctionne selon son propre plan, alors que les institutions internationales et le ministère des Affaires étrangères agissent seuls et que le ministère du Développement économique essaie d'augmenter le taux de croissance de l’économie à la moyenne mondiale, alors exactement rien ne se passe. Ce devrait être une seule équipe, chacun devrait travailler pour un seul but commun. Toutes les agences gouvernementales devraient synchroniser leurs actions, y compris sous la forme d'un dialogue et d’une conciliation des tâches pour améliorer le climat d’investissement. »

La réponse de Gerasimov : « Le Pentagone a commencé à développer une stratégie de guerre fondamentalement nouvelle, qui a déjà été surnommée ‘Cheval de Troie’. Son essence réside dans l'utilisation active du potentiel de protestation de la ‘cinquième colonne’ pour déstabiliser une situation tout en attaquant les installations les plus importantes avec des armes de haute précision. »

La coordination des ressources de défense de la Russie, selon l'état-major général, exige que les mesures visant à contrer les sanctions économiques américaines, les médias et les cyber-opérations contre la Russie et ses alliés, y compris la subversion intérieure, soient dirigées par l'état-major général. 

« Je tiens à souligner, a déclaré Gerasimov, que la Fédération de Russie est prête à faire face à toutes les nouvelles stratégies : ces dernières années, des scientifiques militaires [russes], en collaboration avec l'état-major général, ont mis au point des approches conceptuelles pour neutraliser les actes d'agression des opposants potentiels. Le domaine de recherche de la stratégie militaire est la lutte armée, son niveau stratégique. Avec l'émergence de nouvelles zones d'affrontement dans les conflits modernes, les méthodes de lutte évoluent de plus en plus vers l'application intégrée de mesures politiques, économiques, d'information et autres mesures non militaires, mises en œuvre avec le soutien de la force militaire. »

La coordination des ressources de défense de la Russie, selon l'état-major général, exige que les mesures visant à contrer les sanctions économiques américaines, les médias et les cyber-opérations contre la Russie et ses alliés, y compris la subversion intérieure, soient dirigées par l'état-major général. 

John Helmer

lundi, 18 mars 2019

Les sources philosophiques de Vladimir Poutine

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Les sources philosophiques de Vladimir Poutine

 
Par Xavier Moreau
commentaires ouverts sur ► http://stratpol.com/philosophie-poutine
 

mercredi, 13 mars 2019

L'Europe, usine à gaz...

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L'Europe, usine à gaz...

par Caroline Galactéros

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Caroline Galactéros, cueilli sur son blog Bouger les lignes et consacré à l'absence de politique énergétique de l'Europe. Docteur en science politique, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et intervient régulièrement dans les médias. Elle vient de créer, avec Hervé Juvin, Geopragma qui veut être un pôle français de géopolitique réaliste.

L'Europe, usine à gaz

La toute récente révision, permise par le revirement français, de la « Directive gaz » de 2009 étendant l’applicabilité des normes communautaires à l’extérieur du territoire de l’Union européenne (UE) est un nouveau coup (auto)porté par le Conseil européen à l’indépendance énergétique de l’UE. Les motifs invoqués sont, comme toujours, au cœur des « valeurs » européennes : concurrence loyale et accès équitable au marché européen. C’est beau comme l’Antique ! Exactement le corpus idéologique idéal qui a motivé, quelques jours auparavant, l’avis négatif de la Commission sur la fusion Siemens-Alstom… Sur deux chantiers d’importance stratégique évidente, Bruxelles s’est donc une fois encore trompée de cible, d’ennemi, d’enjeu et d’alliés…

L’Europe est décidément hors sol, et surtout, se croit seule au monde ! Nous agissons comme si notre marché était strictement européen, comme si nous avions la vie devant nous et nul besoin de nous mettre en ordre de bataille pour projeter notre puissance de frappe commerciale collective vers le reste de la planète, afin de ne pas nous faire dévorer tout crus par Pékin et Washington. Bref, on a tout faux, mais on fonce dans le mur avec l’assurance d’un taureau au front court se précipitant sur une muleta rouge pour finir lardé de banderilles meurtrières. Aucune vision stratégique, plutôt une myopie suicidaire angoissante de la technocratie communautaire, paralysée par ses propres règlementations anachroniques. L’Europe, une nouvelle fois, consent à son effacement de la carte des grands ensembles.

Cette révision vise évidemment le projet North Stream 2, affligé, aux yeux de Washington, donc de Paris, d’une tare insupportable : il permet à Moscou de contourner l’Ukraine…qui vient d’inscrire dans sa Constitution, cinq ans après « la révolution-coup d’État » de Maïdan, son intégration dans l’UE et l’OTAN comme objectifs prioritaires de sa politique étrangère…. La « guerre froide » n’a jamais été aussi brûlante et stupide.

La volte-face française est un « coup de pied de l’âne » de Paris à Berlin, sous prétexte de « ne pas accroître la dépendance vis-à-vis de la Russie et nuire ainsi aux intérêts de pays de l’Union européenne tels que la Pologne et la Slovaquie ». Comme si Paris était en charge de la défense des intérêts de ces deux pays… Pour l’Allemagne, cette révision est dramatique. Avec North Stream 2, Berlin doublait la quantité de gaz déjà acheminée. Gerhard Schröder, à la tête du projet, témoigne de l’importance stratégique pour l’Allemagne de la construction d’une seconde ligne de pipelines. Le ministre allemand de l’Économie, Peter Altmeier, a d’ailleurs rapidement réagi en rappelant que « chaque pays de l’Union européenne a le droit de maintenir les relations économiques et commerciales qu’il estime de son intérêt. »

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Ainsi, pourquoi cette agression française ? Alors que le couple franco-allemand est déjà au bord du divorce, Paris cherche-t-elle à nuire à son ancienne dulcinée, quelques jours seulement après la signature laborieuse du Traité d’Aix-la-Chapelle, dont l’article 1 stipule que « Les deux États approfondissent leur coopération en matière de politique européenne » ?

Sur le plan diplomatique, soutenir les Allemands dans un projet qui leur tient à cœur revenait à accompagner d’actes concrets nos grandes envolées lyriques sur « le couple franco-allemand » et nous permettait également d’entretenir des relations, certes vigilantes mais des relations tout de même, avec la Russie. Même sur les plans strictement énergétique et économique, cette renégociation de dernière minute n’est pas dans notre intérêt. North Stream 2 nous sert objectivement. Nous en attendons une baisse du prix du gaz, nous anticipons l’épuisement des réserves norvégiennes dans deux décennies (la Norvège est notre premier fournisseur de gaz naturel, à hauteur de 40 %), nous nous positionnons pour bénéficier de la production du deuxième exploitant de gaz au monde, la Russie, et de pouvoir pallier une éventuelle coupure des exportations de gaz algérien.

Qu’a-t-on cru pouvoir gagner, à Paris, en tombant dans le piège grossier de Washington, qui nourrit la division européenne pour asseoir son influence et empêcher tout rapprochement de l’UE avec Moscou ? Quid de nos motivations ? Un besoin de nous faire « pardonner » notre refus de participer au récent sommet de Varsovie, voulu par Washington pour réunir une coalition ouvertement anti-iranienne, prélude à une agression de la République islamique dont le projet gagne du terrain dans les esprits et les États-majors ? Un entêtement suicidaire dans une politique étrangère frappée d’inconséquence chronique ? Une tentative maladroite de prise d’ascendant dans le cœur de Washington- (évidemment vouée à l’échec) ? Un peu de tout cela sans doute. Mais il semblerait que ce changement radical de position soit surtout le fruit de la peur. D’une part, celle de l’augmentation de la dépendance par rapport à la Russie, entretenue par la diabolisation lancinante et interminable de ce pays ; d’autre part, la peur des pressions américaines considérables qui se manifestent depuis le début du projet.

Tout récemment encore, Richard Grenell, ambassadeur des États-Unis à Berlin, mettait en garde les entreprises allemandes contre toute participation au financement du North Stream 2. Elles prenaient le « risque de sanctions importantes », avertissait-il. L’extraterritorialité dans toute sa splendeur ! Puis il déclarait que le Parlement européen, la Commission et seize pays d’Europe « partageaient le point de vue des États-Unis ». Enfin, le 7 février, les ambassadeurs américains auprès du Danemark, de l’Union européenne et de l’Allemagne s’exprimaient dans la Deutsche Welle en ces termes : « Nord Stream 2 augmentera la sensibilité de l’Europe aux tactiques de chantage énergétique de la Russie. » Nouveau rappel à l’ordre pour une Allemagne jugée décidément un peu trop « autonome ». Paris crut-il déceler là une chance à saisir de plaire au « maitre » ? On voit ici combien l’Europe est l’outil direct (et la victime) de la manœuvre américaine contre Moscou, et combien la desservir sert la convergence objective des intérêts américains et chinois. Rappelons que les États-Unis sont les premiers producteurs de gaz au monde, les troisièmes exportateurs de gaz naturel liquéfié (GNL), mais que ce produit n’est pas encore suffisamment compétitif sur les marchés européen et asiatique pour rivaliser avec le gaz russe. Les États-Unis cherchent donc à se positionner pour s’insérer prochainement sur le marché européen…et chinois.

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Tout en portant le fer dans la plaie, les diplomates français ont cherché à s’entendre avec leurs homologues allemands sur une directive qui réunirait leurs deux votes. Le cœur du compromis finalement adopté par le Conseil européen est le suivant : « l’application des règles européennes pour les gazoducs avec des pays tiers comme la Russie incombe aux pays de l’Union européenne où ils sont reliés pour la première fois au réseau européen ». En d’autres termes, l’Allemagne peut, par exception, décider de ne pas appliquer la directive révisée au projet North Stream 2 sans que la Commission soit en mesure de s’y opposer. Si ces pourparlers ultimes n’avaient pas abouti, il aurait fallu revoir la distribution du contrôle sur les pipelines avec les Russes, ce qui aurait entraîné un retard important dans la réalisation du projet, des coûts et une renégociation ardue des termes du contrat pour toutes les parties. Ces risques ne seront pas écartés tant que la directive ne sera pas entérinée par le Parlement européen. Certains acteurs intéressés pourraient en profiter pour jouer la montre et utiliser ce répit pour mieux se positionner sur le marché européen.

On en comprend moins encore l’attitude de la France. Pourquoi avoir pris un tel risque vis-à-vis de l’Allemagne en cherchant à empêcher ou limiter l’expansion du North Stream 2, lorsque, in fine, on signe un accord en demi-teinte et que l’on n’atteint pas la moitié de son objectif initial tout en en recueillant l’opprobre ?

L’Allemagne, en effet, garde la main sur le projet et les Russes ne semblent pas traumatisés par cette péripétie, comme en témoignent les déclarations du porte-parole de la présidence russe, Dimitri Peskov : « Nous sommes catégoriquement en désaccord avec l’affirmation selon laquelle cela entraînerait une augmentation de la dépendance de l’Europe vis-à-vis du gaz russe, car de tels projets n’engendreraient pas la dépendance (…) mais assureraient principalement une interdépendance. Les Européens dépendent du gaz russe, et la Russie, en tant que fournisseur, dépend de la demande européenne ». Et Igor Chatrov, directeur adjoint de l’Institut national pour le développement de l’idéologie moderne, de dire : « En fait, le tout début de la mise en œuvre du projet Nord Stream 2 a montré à lui seul que l’Allemagne définissait elle-même sa politique énergétique. Et, plus encore, que cela ne dépendrait pas des États-Unis. » Sublime coïncidence ‒ et ultime affront pour Paris ‒, le 12 février, Peter Altmaier recevait à Berlin le Secrétaire américain adjoint à l’Énergie, Dan Brouillette. Les deux intéressés juraient n’avoir conclu aucun deal quant à une prochaine exportation de GNL en Allemagne, mais Peter Altmaier insistait sur la nécessité pour l’Europe de « se protéger, d’être moins vulnérable et, par conséquent, de se diversifier », citant, outre les États-Unis, l’Égypte, le Qatar et Israël.

L’Allemagne se sort donc de ce traquenard par une belle pirouette concernant ses relations diplomatiques avec les États-Unis, tandis que nous pâtissons d’avoir joué le proxy américain pour ne recueillir, in fine, que le mépris de notre Grand Allié et la défiance de notre indispensable comparse européen. La France s’est démarquée… mais à son détriment. Elle a fait affront à l’Allemagne mais n’a plus un atout en main. Après cet impair, il lui faudra tabler sur la seule patience du grand frère allemand. Qui est à bout.

Caroline Galactéros (Bouger les lignes).

dimanche, 24 février 2019

Cosmos russe contre Espace américain

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Cosmos russe contre Espace américain

Leonid Savin

Source: http://www.katehon.com

Le 12 avril, la Russie célèbre le Jour de la Cosmonautique. Le premier vol habité dans l’espace eut lieu en 1961 avec le cosmonaute russe Youri Gagarine. Les USA répondirent au programme spatial soviétique en créant l’ARPANET, qui posa les fondations de l’Internet. En fait, nous pouvons voir dans cette course à la supériorité davantage qu’une compétition technologique avec des slogans idéologiques.

Le terme « cosmos », qui est principalement utilisé en Russie, vient du grec est signifie « ordre ». En anglais, le mot « espace » est lié à l’idée d’expansion, c’est-à-dire un domaine qui est regardé comme le prochain pas pour conquérir la terre, la mer et l’air.

Les vols spatiaux introduisirent la cosmocratie dans la géopolitique, et à la fin du XXe siècle le Professeur d’Etudes Militaires Comparatives à l’Ecole d’Etudes aériennes/spatiales Avancées de l’US Air Force, Everett Dolman, suggéra l’introduction du terme « astropolitique ». Il dit : « La société doit considérer la conquête de l’espace comme un impératif moral, nécessaire pour la survie de la race humaine, et doit aussi se percevoir comme la mieux équipée pour dominer cette sphère (…) ». Il ne parle pas de la race humaine abstraite, mais de sa sous-espèce anglo-saxonne, formée après le combat contre les autres sur les vastes champs de la Terre. Ceci est connu sous le nom d’« esprit de la frontière », louangé par Frederick Jackson Turner à la fin du XIXe siècle, et s’élevant aujourd’hui jusqu’aux  hauteurs stellaires. Si à l’époque des pionniers l’« esprit de la Frontière » prétendait détruire des tribus indiennes, maintenant les USA sont capables de répéter cette expérience au niveau spatial. Ce n’est pas du tout par hasard que les USA créèrent la série de la « Guerre des Etoiles » et d’autres films de science-fiction classiques et célèbres comme « Avatar » ; c’est un autre retour de l’Inconscient Collectif des porteurs de  d’« esprit de la Frontière », réintroduit sous une forme moderne et équipé de méthodes de manipulation culturelle-informationnelle.

Les USA tentent de transformer ces fantaisies en réalité ; même leurs stratégies sont souvent approuvées par la recherche scientifique et le globalisme optimiste.

Le 22 avril 2010, le colonel de l’US Army et mainteneur Timothy Creamer, avec ses collègues à bord de l’ISS (ses membres étaient l’autre Américain – le capitaine, deux mainteneurs russes, et un Japonais) envoya un message à la Terre en utilisant Twitter.

Leur premier tweet dans l’espace était tout à fait inoffensif pour tous les utilisateurs de twitter : « Hello Twitterverse ! Nous sommes maintenant en train de twitter depuis la Station Spatiale Internationale – le premier tweet en temps réel depuis l’Espace ! A bientôt ».

Souvenons-nous que Twitter fut activement utilisé dans les émeutes massives en Iran en 2009, et la même année en Moldavie les manifestations furent appelées la « Twitter Revolution ».

L’autre morceau de la cosmocratie est la base du contrôle de l’espace extérieur. Le réseau américain de contrôle de l’espace extérieur est situé sur tous les continents et îles. Son but est de stimuler la conscience situationnelle comme l’un des principaux éléments de la guerre de réseau. D’après l’armée américaine, cela permettra aux USA d’atteindre une supériorité spatiale complète et d’« empêcher un Pearl Harbor spatial ». L’élite scientifique américaine décrit cela d’une manière plus délicate : détecter et traquer les objets spatiaux tels que les satellites et les débris orbitaux. L’ancien astronaute et général de l’US Air Force, directeur du Commandement Stratégique, Kevin Hilton, dit que la question des débris spatiaux est hors de contrôle : il y a en orbite autour de la Terre plus de 15.000 débris et morceaux de satellites et autres objets spatiaux. « On estime que ce nombre pourrait monter jusqu’à un total de 50.000 dans un futur pas très éloigné », a-t-il dit, et il a appelé les autres pays à coopérer pour résoudre ce problème.

Il est intéressant de savoir que l’idée d’utiliser l’espace pour stocker les déchets fut proposée à la fois par l’URSS et par les USA. En 1959, le scientifique soviétique Kapitsa proposa d’envoyer les déchets nucléaires dans l’espace. En 1972, Schlesinger proposa de faire la même chose en utilisant une navette réutilisable. Cette question demeure non-résolue aujourd’hui.

Cependant, la militarisation de l’espace est toujours un grave problème. Au milieu des années 2000, le Pentagone a défini de nouveaux objectifs dans ce domaine : création d’une arme aérienne anti-satellite, de systèmes de satellites de télécommunication, de lasers aériens et spatiaux, de vaisseaux d’études de l’espace profond, et de cargos spatiaux plus puissants. Des satellites avec divers moyens de surveillance furent lancés, et des systèmes laser furent créés.

next100.jpgGeorge Friedman, dans son livre The Next 100 Years, dit que bientôt le but du contrôle militaire et politique de l’espace sera la mise en œuvre de satellites portant des armes de destruction massive. La miniaturisation des armes et de divers systèmes automatiques est en cours de réalisation. Les experts disent que bientôt les nouveaux nano- et pico-satellites auront un diamètre de 10 centimètres environ.

Cela a provoqué une réponse : Vladimir Poutine a appelé à la prévention d’un espace extérieur militarisé, et a été appuyé par l’Assemblée Générale des Nations Unies, qui a adopté une résolution nommée Coopération internationale dans l’usage pacifique de l’espace extérieur. Cependant, du fait de la création de son système d’armes de destruction massive (WMD), les USA ont refusé de signer le document, et accusent maintenant les autres Etats de militarisation de l’espace.

Les USA ont maintenant montré la faiblesse de leur propre programme spatial (par exemple, la dépendance vis-à-vis des moteurs de fusées russes), et la Russie, au contraire, revendique le statut de puissance spatiale. Un nouveau cosmodrome [1] sera bientôt terminé, et bientôt les premiers satellites seront envoyés en orbite.

Ainsi, dans le contexte de l’astropolitique, la thèse d’Emmanuel Kant sur « le ciel étoilé au-dessus de nous et la loi morale au-dedans de nous » est à nouveau devenue urgente.

 

[1] Il s’agit du nouveau cosmodrome de Vostochny, dans l’Extrême-Orient russe, près du fleuve Amour. Un premier lancement de fusée a été effectué le 28 avril 2016. (NDT)

17:21 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : russie, cosmos, états-unis, espace | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Le paradigme civilisationnel et ethnologique dans la géopolitique

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Le paradigme civilisationnel et ethnologique dans la géopolitique

Geopolitics

Euro Continentalism

Source: http://www.katehon.com

Les sources du paradigme civilisationnel incluent deux groupes d’auteurs. Conventionnellement, ils peuvent être appelés philosophes sociaux et géopoliticiens.

Le premier groupe inclut les travaux de N.Y. Danilevsky, O. Spengler, et A. Toynbee. C’est surtout la compréhension sociale et philosophique du phénomène de la civilisation représente qui est l’objet de leur travail.

Le second groupe est formé de K. Haushofer et C. Schmitt. L’auteur S. Huntington peut aussi être ajouté à ce groupe. Ces auteurs ont davantage considéré la situation sous l’angle  géopolitique.

Pour décrire la civilisation comme l’un des acteurs de la politique mondiale, les auteurs se réfèrent aux catégories suivantes : géo-civilisation, civilisation-Etat, et Etat-civilisation.

Par civilisation nous désignons un complexe d’organisations socioculturelles à plusieurs niveaux, fondé sur la base de certaines valeurs et occupant un territoire géographique particulier. Par civilisation-Etat nous désignons le phénomène par lequel les frontières politiques et socioculturelles coïncident. L’Inde et la Chine sont des exemples de tels civilisations-Etats. La géo-civilisation est un sujet de la politique mondiale. L’Etat-civilisation  est une entité cherchant à devenir, sous forme d’un Empire, une alternative à l’Etat-nation moderne. Ici nous préférons utiliser la catégorie d’« Etat-civilisation » plutôt que celle de « géo-civilisation ». Cette catégorie est plus générale et se focalise sur l’embryon d’un nouvel Etat, différent de l’Etat-nation.

La disponibilité de la civilisation en tant que telle est l’une des conditions préalables les plus importantes pour la formation de l’Etat-civilisation.

Si nous regardons parmi les chercheurs russes, nous avons quatre approches principales dans l’analyse de la civilisation dans la géopolitique.

Alexander-Dugindedddd.png- L’approche évaluative (A. Dugin, S. Kiselyov, L. Ivashov). Ses représentants adoptent la base du système évaluatif. Cette approche est la plus commune. Cette position est typique d’A. Dugin. Pour lui, la civilisation est une vaste et stable région géographique et culturelle, unie par des valeurs spirituelles, des attitudes stylistiques et psychologiques et une expérience historique communes. La plupart de ces régions coïncident avec les frontières de la diffusion des grandes religions mondiales. La structure de la civilisation peut inclure plusieurs Etats, mais il y a des cas où les frontières des civilisations traversent des Etats particuliers, les divisant en plusieurs parties [1].

- L’approche « ethnologique » (V. Tsymbursky). Pour V. Tsymbursky, une civilisation est un  groupe de nations contrôlées par l’Etat avec une région géographique suffisamment soulignée dans le scénario mondial. Au sommet de cela, elles fondent leur géopolitique sur la verticalité, religion ou idéologie [2]. La géopolitique civilisationnelle de V. Tsymbursky considère en premier lieu la relation entre le noyau et les peuples de la périphérie.

- L’approche « culturelle-géographique » (S. Khatuntsev). La formation des civilisations survient généralement sur un critère territorial. D’après S.V. Khatuntsev, les religions viennent et passent, alors que les espaces demeurent. Il considère la civilisation comme une communauté géoculturelle, qui émerge et opère parmi plusieurs « individus géographiques » existant sur notre planète – des « espaces de développement ». Avec cette théorie, S. Khatuntsev et V. Tsymbursky ne sont pas opposés au rôle de la religion dans la vie de la  civilisation. Cette théorie critique simplement la thèse de son rôle définissant [3].

- L’approche « universaliste » (A. S. Panarin). Le représentant le plus important de cette approche est A.S. Panarin. Dans ses derniers travaux il tenta d’apporter une compréhension différente de la civilisation. Ce ne serait pas un type culturel-historique séparé, opposé aux autres mondes, mais quelque chose de mondial [4]. Malheureusement, A.S. Panarin n’étudie pas en détail le traitement de la civilisation, puisqu’il n’eut pas le temps de développer cette théorie. La vraie civilisation, selon cette logique, doit avoir un caractère non pas local mais mondial, offrant un concept universel pour une autre civilisation.

Gumiliev est souvent considéré comme le représentant le plus important de l’approche civilisationnelle. Son importante contribution au développement de ce paradigme est bien connue, ainsi que son rôle dans le développement de la stratégie civilisationnelle russe. Son nom figure même dans les livres de géopolitique.

En effet, il y a des éléments communs entre les idées de L. Gumilev et le paradigme civilisationnel.

Les groupes ethniques, selon L. Gumilev, diffèrent par leur auto-identification collective. Leur fonctionnement est associé à un paysage particulier, au-delà duquel ils ne tentent pas d’aller. Gumilev créa le concept de « super-ethnos ». Il le définit comme l’union de plusieurs nations, basée sur une conscience commune et une parenté spirituelle. Ce concept ressemble à une civilisation.

Les structures de l’ethnos et de la civilisation sont assez similaires. Nous pouvons distinguer sub-ethnos, ethnicité et super-ethnos. Ensuite, la civilisation et ses sub-civilisations constituantes. Plusieurs civilisations constituent la plus grande unité de civilisation : la méga-civilisation, caractérisée par une même origine.

Les groupes ethniques, comme les civilisations, passent par certains stades de développement, vivant à peu près le même temps de vie (mais pas toujours), environ 1.500 ans. La description par L. Gumilev de la dynamique ethnique coïncide avec les observations des représentants du paradigme civilisationnel en géopolitique et en philosophie sociale.

Mais en tous cas, L. Gumilev était le représentant de l’approche ethnologique, et voyait l’histoire à travers le prisme de l’ethnos, et non de l’interaction entre les civilisations. Je dois dire qu’il critiqua aussi l’idée des représentants de l’approche civilisationnelle, représentée par O. Spengler et A. Toynbee.

gumilevdddd.jpgGumilev comprend l’ethnicité comme un groupe humain stable, naturellement formé, s’opposant à tous les autres groupes similaires, qui est déterminé par un sens de la complémentarité, et un genre différent de comportement stéréotypé, qui change régulièrement dans le temps historique [5].

Donc, nous parlons d’un groupe, d’une communauté, plutôt que d’une organisation socioculturelle complexe, qui caractérise une civilisation. Analysant les processus globaux, L. Gumilev préfère utiliser la catégorie de « groupe ethnique » plutôt que de « civilisation ». L’ethnicité vit dans l’obéissance, en règle générale, aux rythmes biologiques, et la civilisation vit en obéissant à des lois spirituelles. L’ethnicité est le résultat de l’impulsion passionnée associée à l’impact du cosmos. Elle s’affaiblit ensuite à cause du vieillissement biologique.

Les facteurs de formation civilisationnelle sont divers. Ils peuvent être divisés en facteurs externes et internes. La mort d’une civilisation survient aussi pour des raisons différentes :

  • - pression extérieure, désastres naturels,
    ·- crise spirituelle,
    ·- troubles internes,
    ·- « burn-out ».

La mort d’une civilisation est souvent une conséquence d’un éloignement vis-à-vis de ses valeurs spirituelles. Bien sûr, dans la description de L. Gumilev, même l’ethnos peut s’éloigner de ses propres idéaux, ou les remplacer par des choses plus matérielles. Cependant, ceci est le résultat du vieillissement biologique.

La civilisation peut être identifiée à la société, mais en ce qui concerne l’ethnicité, L. Gumilev distingue le concept d’« ethnicité » et de « société ». Nous avons déjà parlé des communautés sociales. Nous pouvons ajouter que les sociologues contemporains traitent de deux types principaux de communautés sociales : ethniques et territoriales. Les dernières peuvent être attribuées à une civilisation, bien que se référant en général à une communauté territoriale : ville, village, région, macro-région. Mais même si une civilisation est identifiée comme un type, elle demeure cependant un système différent de l’ethnos. Les groupes ethniques en tant que tels sont maintenant les acteurs des relations internationales en tant que sujets indépendants, en même temps que des civilisations différentes, étant même mieux reconnus que ces dernières.

Concernant les civilisations, des discussions sont en cours dans le domaine de la recherche scientifique. Il existe une position selon laquelle le phénomène de la civilisation est plus évaluatif que réel. A notre époque, il y a souvent des discours sur la « civilisation humaine ». Sous ce critère on désigne en réalité la civilisation occidentale, qui tend à imposer aux autres cultures son propre système de valeurs. Le « reste » doit s’adapter à la zone euro-atlantique, empruntant tout ce qui est nécessaire au « progrès ». Un des auteurs abordant le sujet est A. Janov. Il écrit que même dans un cauchemar, Aristote n’aurait pas pu considérer la Perse barbare comme une civilisation et la mettre à égalité avec la démocratique Athènes, et même lui accorder une certaine supériorité sur la Grèce [6]. Il ne considère comme civilisés que les « peuples libres » (c’est-à-dire l’Occident).

Il faudrait ajouter que des groupes ethniques peuvent se remplacer l’un l’autre, mais que la civilisation survivra quand même. Un exemple frappant est la Chine. Sa culture existe depuis des siècles et des millénaires, alors que sa composition ethnique a changé. On pourrait dire la même chose de la civilisation indienne. La disparition de certains groupes ethniques peut conduire à la désintégration d’un super-ethnos, mais pas à la disparition d’une civilisation. Plusieurs peuples peuvent se transformer en une civilisation, la rendant diverse. Des groupes ethniques agissent aussi comme agents de civilisation, mais pas ceux qui demeurent isolés.

En résumé, notons quelques points. Il est clair que L. Gumilev a largement contribué aux études géopolitiques. Il a eu un impact important sur les principaux représentants de notre paradigme civilisationnel. Ses conclusions, des observations de la vie des groupes ethniques, coïncident souvent avec les estimations des partisans de l’approche civilisationnelle habituelle.

Les représentants de l’approche civilisationnelle peuvent s’appuyer sur ses idées d’interactions entre les civilisations. Rappelons la fameuse thèse de L. Gumilev. Il faut rechercher des amis – c’est la principale valeur dans la vie –, et non rechercher des ennemis, que nous avons déjà trouvés. Cette approche est acceptable pour un paradigme civilisationnel, ainsi que pour les partisans de l’idée de dialogue entre civilisations. Un important avertissement fut émis par L. Gumilev concernant l’approche civilisationnelle et l’adoption d’une culture étrangère. Le scientifique, ainsi que les représentants de l’approche civilisationnelle, ont mis en garde contre le danger de se séparer de ses racines culturelles. Dans ce cas, un peuple perdra son identité, sans en gagner une autre. En relation avec ce dernier cas, Gumilev parle de la dégradation spirituelle de la société, formant une couche de consommateurs, et il les appelle des « sub-passionnarités ».

Les concepts forgés par Gumilev présentent un grand intérêt, comme l’« antisystème », la « chimère » (une combinaison de choses incompatibles), les « super-ethnos » et d’autres. L’approche ethnique aide à expliquer certains des facteurs de formation et de déclin des civilisations. De même, avec l’aide de ce paradigme nous pouvons mieux assimiler la structure d’une civilisation.

Cependant, si L. Gumilev est un représentant du paradigme ethnologique en géopolitique, son approche est plus proche de l’approche civilisationnelle, mais néanmoins complètement différente et utilisant sa propre technique d’analyse.

D’une manière générale, les idées de L. Gumilev, ainsi que celles des représentants de l’approche civilisationnelle, aident à mieux comprendre l’essence des processus géopolitiques.

Références :

  1. 1. Dugin A.G. The theory of a multipolar world. M., 2012. P. 464-465.
    2. Tsymbursky V.L. Conjuncture of the Earth and Time. Geopolitical and chronopolitic intellectual inquiry. M., 2011.P. 56.
    3. Khatuntsev S.V. On the question of Huntington. URL: http://www.apn-nn.ru/539683.html (the date of circulation: 28. 05.2015).
    4. Panarin A.S. Orthodox civilization in a global world. M., 2003. S. 210.
    5. Gumilev L.N. Ethnosphere: history of people and the history of nature, M., 1993. URL: http://gumilevica.kulichki.net/MVA/mva09.htm (the date of circulation: 28.05.2015).
    6. Yanov A.L. How on earth civilizations? // Russia in Global Affairs. 2006. № 5. URL: http://globalaffairs.ru/number/n_7415 (the date of circulation: 13.08.2013).

vendredi, 15 février 2019

WHAT TO EXPECT FROM THE TALKS BETWEEN PUTIN, ERDOGAN AND ROUHANI?

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WHAT TO EXPECT FROM THE TALKS BETWEEN PUTIN, ERDOGAN AND ROUHANI?

 
 
Ex: http://www.katehon.com

Vladimir Putin, Hassan Rouhani and Recep Erdogan рфмк ф ьууештп in Sochi today. The main issues on the agenda are the withdrawal of US troops from Syria, the situation in Idlib and in the east of the Euphrates. Each of the three players - Russia, Turkey and Iran - has controversial issues. Are the participants of the "Astana trio" ready for a compromise?

Three powers are returning from where they started last fall. The last meeting of Vladimir Putin, Hassan Rouhani and Recep Erdogan, held on September 7 in Tehran, not only did not lead to the result, but resulted in a skirmish. Rouhani’s desire to launch a military operation against the last stronghold of the Syrian opposition in the province of Idlib, which Putin supported, angered Erdogan. By mistake, the host of the summit of the Iranian side, this part of the broadcast was in free access, and the differences between Iran and Russia with Turkey appeared in full glory.

New Variables

Since then, some variables have changed. Ten days later, Putin separately with Erdogan, without Rouhani, in Sochi agreed to create a demilitarization zone in Idlib 20 km wide. In fact, Putin decided to restrain the “hawkish” ambitions of Iran, which intends to force Bashar Assad to return the entire territory of Syria, and take a pause so as not to ruin the alliance with Turkey. According to the Sochi deal, Ankara needed to take care of the withdrawal of all heavy weapons and terrorists from the demilitarization zone. However, Turkey has not yet managed its task. Moreover, the terrorists from Hayat Tahrir al-Sham intensified in the provinces and killed the pro-Turkish groups of the National Liberation Front and Hurras ad-Din. Terrorists control, according to various sources, from 65 to 80 percent of the territory of Idlib. This state of affairs is increasingly convincing Moscow that it is necessary to deal with the terrorists themselves, without Turkey - what the Iranians are proposing.

The second event that makes adjustments to tomorrow's meeting is the fact that the United States has announced its departure from Syria. The forces of the Kurdish National Self-Defense Forces (YPG) located behind the Euphrates fear that after the withdrawal of the US troops, Turkey will go on the offensive. Erdogan almost daily repeats that today, not so, tomorrow Turkish special forces will enter Manbij. In addition, Ankara plans to create a “security zone” beyond the euphrates 30 km wide. Concerned about the growing risk of a Turkish offensive, the Kurds began negotiations with Damascus. In December, they agreed to transfer control over Manbidge to the Syrian army. In the west of the city is already located the Russian police. In parallel, Damascus through Moscow is trying to establish contact with Arab tribes in Rakka and Manbij. Just as in Idlib, outside the Euphrates, the positions of Iran and Russia coincide and consist in the transfer of these regions to Assad. Turkey intends to independently deal with the YPG in north-eastern Syria, and then, under its strict supervision, transfer this territory to the Arab opposition. Moscow and Tehran see this as an attempt to occupy the Syrian land by Ankara.

Differences between Russia and Iran

Despite the coincidence of the positions of the “hawk” of Iran and “moderate” Russia, there are even problems between them. After the latest rocket attacks on Israel in Syria, under which pro-Iranian militia were killed, Iran began to accuse Russia of having C-400 and C-300 in the region, allowing Israel to bomb the Iranians and allegedly give the IDF their coordinates. Tehran is also annoyed by Moscow’s attempts to bring Arab countries into the Syrian settlement - Saudi Arabia, the UAE, Bahrain, Qatar and Egypt. The latter have already begun to recognize Bashar al-Assad as the legal representative of Syria and may participate in the restoration of the state destroyed by the war.

Contrary to Russia's dissatisfaction with the “mess” in Idlib, which Turkey is not able to cope with, and the desire of Ankara to expand its influence in Syria, the alliance with Erdogan at this stage also has its advantages. It allows Moscow to balance the strengthening of Iranian influence in Syria, which in the future could be dangerous for Russia itself. Secondly, playing the "Turkish card" is useful in order to work together to speed up the withdrawal of the United States. Despite statements by pressure from militarists from the Pentagon John Bolton, Israel and France, Trump slowed down the evacuation of troops. The existence of disagreements between the United States and Turkey and joint Russian-Turkish projects (Akkuyu NPP, sales of C-400, Turkish Stream) still justify imitating Putin-Erdogan allied relations.

"Weak link" and a possible compromise

Turkey will not give up trying to take Manbij. Erdogan still believes that Assad should withdraw from this area, and Iran and Russia should not oppose this. The Turks will try in every way to convince Iran to give up Assad’s control over Manbij. There are contradictions between Russia and Iran over Israel. Iranians continue to insist that they should be close to Damascus, the Golan Heights and the territories bordering Israel. Russia does not agree with this, because it has its own agreements with Israel.

The biggest problem in the tripartite contradictions lies in the position of the United States and the West, which do not abandon attempts to split the “Astana format”.

Apparently, for tomorrow's meeting, Putin, Erdogan and Rouhani will come with rather big baggage of contradictions. Russia has always played the role of mediator in this trio. Probably, Putin will be able to find a “middle ground” for Erdogan and Rouhani. How exactly it will look, we learn after tomorrow’s talks. Perhaps Russia will give Turkey one more, but the last postponement in creating a demilitarization zone. This “respite” will not only turn away from Idlib a military operation that threatens Turkey with a refugee crisis, but will give the Kurds time to swear allegiance to Assad, until Erdogan turned to decisive action.

lundi, 11 février 2019

Moscou-Rome, germe d'un “désordre nouveau”

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Moscou-Rome, germe d'un “désordre nouveau”

Textes PhG

Le président russe Poutine a accepté de se rendre en Italie, durant le premier semestre de l’année, – « avec un vif plaisir », a-t-il dit. On trouve les précisiins nécessaires dans le texte ci-dessous, de Spoutnik-français bien entendu et sur recommandation des officines de bienpensance de l’équipe du suivi orwellien de la communication de la phalange qui nous dirige, ici en France. L’intérêt tout factuel de ce texte est qu’il rend compte de l’intensité considérable des relations officielles, et échanges de visites de responsables politiques, – surtout dans le sens Italie vers la Russie, – ces derniers mois. Mais la visite de Poutine a une réelle importance à cause du contexte de la situation au sein de l’UE, des divisions sur deux fronts souvent curieusement contradictoires entre États-Membres, 1) essentiellement entre deux “modèles” qui s’affrontent (en gros, “modèle globaliste“ contre “modèle populiste”), et 2) accessoirement sur la question des relations avec la Russie.

L’Italie tient un rôle considérable dans cette situation de tensions de désordre et d’affrontement, notamment et surtout dans le fait de sa querelle avec la France. La France, dans le seul ensemble de la direction et des macronistes qui affrontent les GJ, est d’une part l’archétype grossier du “modèle globaliste” ; d’autre part, et pour encore accentuer l’antagonisme, elle est singulièrement dans une période antirussiste à cause des croyances grotesques du président-FakeNews qui effectue un gros travail de causerie-Café du Commerce, et de la nomenklatura d’auto-désinformation qui l’entoure. L’affrontement avec l’Italie est donc particulièrement fécond, et même brutal, les deux Vice-Premiers italiens Salvini-DiMaio maniant la communication sans prendre de gants, mais aussi non sans efficacité (leur brutaité fait partie de leur tactique de communication).

Voici le texte de Spoutnik-français, du 9 février : « Vladimir Poutine a accepté l'invitation à se rendre en Italie et les dates concrètes de cette visite seront fixées d'un commun accord plus tard, a déclaré dans une interview à Sputnik l'ambassadeur de Russie à Rome, Sergueï Razov. “En ce qui concerne la visite du Président russe en Italie, l'invitation a été reçue et acceptée avec plaisir. Les dates précises seront déterminées par canaux diplomatiques et annoncées dans les règles établies”, a-t-il souligné.

» Le Premier ministre italien, Giuseppe Conte, avait précédemment exprimé l'espoir de pouvoir bientôt recevoir le Président russe dans la capitale italienne. L'ambassadeur d'Italie à Moscou, Pasquale Terracciano, a précisé pour sa part que Vladimir Poutine était attendu à Rome durant la première moitié de cette année. “Je ne voudrais rien anticiper, mais il est évident qu'une telle visite sera un élément clé de nos relations bilatérales”, a fait remarquer Sergueï Razov.

» L'ambassadeur russe en Italie a indiqué que Moscou et Rome maintenaient  un dialogue politique  actif. Ainsi, Giuseppe Conte s'était rendu en visite officielle en Russie en octobre dernier et avait été reçu par Vladimir Poutine et le Premier ministre, Dmitri Medvedev. Plusieurs ministres russes, dont le chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, ont également visité l'Italie dernièrement. En novembre, Dmitri Medvedev a assisté à la Conférence sur la Libye à Palerme, la Russie participant de manière constructive à la solution de ce problème international “prioritaire pour nos collègues italiens”, a poursuivi Sergueï Razov.

» ll a rappelé dans ce contexte la récente visite à Moscou de la présidente du Sénat italien, Maria Elisabetta Alberti Casellati, qui a eu des négociations intenses avec son homologue russe, Valentina Matvienko, et le président de la Douma, la chambre basse du parlement russe, Viatcheslav Volodine. “La présidente du Sénat italien s'est vu accorder la possibilité – ce qui n'arrive pas souvent – de prendre la parole à une réunion de la chambre haute du parlement russe.” Une visite du président de la Chambre des députés italienne, Roberto Fico, est prévue pour mars prochain à l'invitation de la direction de la Douma, notamment pour prendre part à une réunion de la ‘Grande commission interparlementaire’, a encore noté Sergueï Razov. “De tels contacts et visites au sommet ne sont pas seulement importants en soi-même, mais aussi parce qu'ils donnent une impulsion appropriée au renforcement des relations sur différents axes et secteurs de la coopération”, a-t-il ajouté pour conclure. »

Cette visite de Poutine en Italie semble s’inscrire dans une longue suite de rencontres, à commencer par la visite du Premier ministre Conte à Moscou à l’automne 2018 comme premier acte de l’Italie du nouveau gouvernement vers la Russie. Mais ce n’est là que l’apparence chronologique. En vérité, la visite de Poutine a une importance considérable, qui tranche sur toutes les rencontres précédentes (même si celles-ci ont évidemment préparé le terrain), essentiellement pour deux raisons :

1) parce que c’est Poutine et qu’il vient en Italie, au cœur de l’Europe, au moment où l’Europe traverse une phase délicate pour sa sécurité avec la sortie des USA du traité FNI dans une atmosphère absolument échevelée d’antirussisme ; et

 2) parce que cette visite s’effectue à un moment crucial de tension et d’affrontement au sein de l’UE et du bloc-BAO entre deux modèles, – le “modèle globaliste” (la France du gang Macron & Cie) et le “modèle populiste” (l’Italie populiste qui n’arrête pas de cogner sur Macron via les GJ, symboliquement si l'on veut).

L’aspect le plus intéressant de cette situation se situe par rapport à deux facteurs contradictoires qui ne devraient faire qu’un en bonne logique politique, –  mais qu’est-ce donc qu’une “bonne logique politique” aujourd’hui ? Ces deux facteurs sont : 1) la politique étrangère absolument antirussiste de Washington D.C. lorsqu’elle est “D.C.-la-folle”, particulièrement dans le contexte de la situation européenne et de l’OTAN ; et 2) les sentiments et la position de Trump par rapport à la politique populiste, notamment dans ses interférences par rapport aux vagues migratoires, point d’autant plus important à mesure que l’on se rapproche des élections présidentielles de 2020.

• L’attaque contre la Russie est le cœur brûlant de la politique d’agression du Système telle qu’elle est activée depuis “D.C.-la-folle”, avec ses neocons, son Russiagate, l’establishment des deux ailes (démocrate et républicaine) du “parti unique” qui est la courroie de transmission des forces de sécurité nationale (CMI dont le Pentagone, services de renseignement, presseSystème, etc.). On sait que c’est un domaine où la position de Trump est confuse, difficile à définir, insaisissable, faite de non-dits et de voltefaces, etc. Certains jugeraient que les Italiens prennent un très grand risque d’isolement, d’autant qu’ils trouveront assez peu de soutien, si pas du tout, à l’OTAN où l’alignement est de rigueur, y compris et chez les plus grands et courageux pays comme la France, dont le président entretient une haine coriace contre l’Italie comparée à une “léproserie nationaliste”.

• D’autre part et au contraire, les Italiens populistes, qui ont surtout bâti leur succès sur une politique rigoureuse face à l’immigration, rencontrent complètement dans ce domaine le sentiment de Trump et son “Mur” mitoyen et mexicain. L’éminent éditorialiste et vénérable tête pensante des paléoconservateurs populistes Patrick Buchanan vient de consacrer un texte à la position politique de Trump, où il dit que ce président (que Buchanan soutient) a trouvé la seule voie pour se faire réélire, qui est une politique anti-migratoire qui a énormément d’échos dans son électorat. L’Italie populiste est le pays européen favori d’un Bannon, qui reste proche de Trump sur ces questions des flux migratoires, et la position anti-UE de Salvini-Di Maio ne peut que plaire à Trump. Dans ce cas, l’Italie n’est pas du tout isolée, y compris dans le champ transatlantique...

• Un cas typique de cette incertitude est celui de la Pologne par rapport à l’Italie. La Pologne ne peut que s’opposer de toutes ses forces et de toute sa haine antirussiste au rapprochement de l’Italie et de la Russie, et dans ce cas le jugement de l’isolement italien est renforcé. Mais retournons le verre à moitié plein et observons le verre à moitié vide : on sait aussi que la Pologne, à cause de sa politique migratoire et son souverainisme, est attaquée au sein de l’UE, qu’elle y est isolée, et qu’elle n’a pas de meilleure alliée que l’Italie, que l’Italie est sa meilleure garante contre un isolement au sein de l’UE...

Encore n’avons-nous évoqué que les cas les plus flagrants des pays les plus importants, dans cette sorte de “désordre nouveau”. Toutes les relations intra-européennes et transatlantiques sont faites de ces contradictions qu’on dissimule depuis des années. La démarche italienne vers la Russie les expose en pleine lumière... Cela laisse à voir, si l’on veut, que “le roi est nu”, ou, dans tous les cas, habillé de bric et de broc jusqu’à faire se demander de quel royaume ce roi est-il le souverain. La Russie et l’Italie détiennent la recette d’un désordre de type nouveau. S’ils sont habiles, les deux pays en useront pour semer la discorde chez l’ennemi, – c'était la stratégie favorite de De Gaulle.

Nord Stream 2. Feu vert en vue

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Nord Stream 2. Feu vert en vue

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Tous les pays européens font appel à des gazoducs pour transporter le gaz liquide sous pression des ports d'importation et des zones de production vers les zones de consommation finale. La Russie est un des grands fournisseurs de gaz européens, du fait de ses réserves considérables de gaz en Sibérie et mer de Barentz, exploitées par l'entreprise publique Gazprom.

L'Allemagne est une grande importatrice de gaz russe. Elle n'a pas voulu se doter comme la France d'énergie nucléaire. Par ailleurs, elle fait encore en grande partie appel à des centrales à charbon, dont les effets destructeurs pour l'environnement sont de plus en plus dénoncés. L'Allemagne se procure le gaz russe en grande partie par l'intermédiaire du gazoduc Nordstream, qui apporte le gaz  à travers la Baltique dans des tuyaux situé sous la mer. Traverser la Baltique est le chemin le plus court de la Russie vers l'Allemagne, ce que n'est pas le pipe terrestre dit Transgaz traversant l'Ukraine. 

Or l'actuel Nordstream est de capacité insuffisante par rapport à la demande, et vieillissant. Les importateurs allemands, avec l'accord en son temps du chancelier Schröder, ont donc négocié avec Gazprom la mise en place d'un gazoduc dit Nord Stream 2 destiné à doubler le premier. Ce projet avait suscité depuis les origines une forte opposition des Etats-Unis, qui veulent approvisionner l'Europe en gaz naturel liquéfié par des navires pétroliers spécialisés traversant l'Atlantique.

D'autre part le gaz en provenant rendra en grande partie inutile pour l'Allemagne la nécessité d'importer du gaz russe à travers l'Ukraine, protégée de l'Amérique, et donc d'y verser des droits importants. Les Etats-Unis avaient suscité de la part des Etats Baltes et d'autres Etats européens dont la Pologne une forte opposition, au prétexte qu'ils accroîtraient ce faisant leur dépendance vis-à-vis de la Russie. La Pologne, par laquelle passe déjà un gazoduc entre la Russie et l'Allemagne, veut construire avec des financements européens un nouveau gazoduc important du gaz russe et situé sur son territoire. Etats-Unis et Pologne envisagent ainsi de frapper de « sanctions » les entreprises qui participeront à la construction du Nordstream 2.

Une résolution appelant à arrêter la construction de ce gazoduc devrait être adoptée lors de la prochaine session de la commission des affaires étrangères du Sénat américain. Cette résolution serait évidemment une ingérence extraordinaire dans les affaires européennes.

La position de la France à l'égard du projet Nordstream 2 est importante. L'économie française n'a pas besoin du gaz russe, du fait qu'elle s'approvisionne à d'autres sources et dispose de l'énergie nucléaire. Mais elle avait fait valoir que le contrat envisagé entre l'Allemagne et la Russie n'avait pas été négocié conformément aux règles de mise en concurrence imposées par l'Union Européenne. On peut craindre que ce soit là encore sous la pression américaine que la France acceptait de s'opposer directement aux intérêts allemands.

Ceci étant, les bonnes relations existant entre Angela Merkel et Emmanuel Macron ont conduit à un compromis permettant l'adoption de nouvelles règles européennes ouvrant plus largement le transport du gaz européen, sans bloquer le projet Nordstream 2. Le compromis a été soumis aux ambassadeurs des Etats-Membres à Bruxelles. Il faut espérer que Washington ne suscitera pas à travers eux de nouveaux obstacles au projet. 

Références

Les gazoducs. Voir Wikipedia

Gaz naturel en Russie Voir Wikipedia

Les gazoducs en Europe Voir Wikipedia

Sur Nordstream 2, voir le site allemand Die Zeit (article en allemand)

dimanche, 10 février 2019

Vladimir Jirinovski explique quelle est la seule solution contre le terrorisme en Europe

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Le fameux politicien russe Vladimir Jirinovski explique quelle est la seule solution contre le terrorisme en Europe

Après la récente attaque terroriste à Barcelone, en Espagne, la peur et l’hystérie dans l’Union  Européenne concernant le terrorisme et les refugiés est très élevée. C’est pourquoi Jirinovski pense que seule la Russie est capable de résoudre le problème pour les Européens mais sont-ils prêts à payer le prix ?

Ici nous vous montrons les récents commentaires de Jirinovski à la TV russe concernant le terrorisme en Europe et les problèmes avec les réfugiés.

NDLR: Jirinovski a toujours eu l'art, à la tribune de la Douma, de dire tout haut, sans circonlocutions verbales, ce que bon nombre de Russes pensaient tout bas. Est-il l'annonciateur de réalités cruelles ou simplement un bateleur d'estrade haut en couleurs? Ou les deux à la fois? Mais c'est une raison pour écouter ses paroles et les prendre. Cum grano salis, bien évidemment.

Regardez comment il explique la seule solution pour le terrorisme en Europe (sous-titré en anglais).

Lisez la transcription anglaise complète de la vidéo :

Maintenant, nous avons le leader du LDPR, Vladimir Volfovich Jirinovski. Hello, Vladimir Volfovich.

Je suis seul à travailler ici, à la Douma (le Parlement). Seulement moi.

Hôte : C’est vrai.

Jirinovski : sur 450 membres du parlement, 449 sont absents.

Hôte : Toute l’équipe éditoriale se demandait où était Jirinovski aujourd’hui. Et nous vous trouvons à votre place, à la Douma.

Jirinovski : Oui.

Hôte : Pourquoi le monde occidental… en général, nous n’aimons pas généraliser, mais cependant… pourquoi l’Occident ne peut-il pas avoir une seule pensée simple ? Au lieu de se concentrer sur des menaces imaginaires comme la Russie, les monuments de Lénine, les rues soviétiques, et pour finir les Confédérés et les esclavagistes.

Pourquoi ne pouvons-nous pas nous unir et combattre la vraie menace commune ? Le terrorisme. Ils gaspillent leur puissance à combattre n’importe quoi sauf la chose qui en réalité est en train de détruire l’Europe.

C’est à cause du modèle de démocratie dans tous ces pays ouest-européens. Ils veulent être tolérants. Comme nous l’étions à l’époque de Brejnev, l’amitié de l’Internationale des peuples (Komintern).

Quand j’étais au Conseil de l’Europe, un Suisse m’a dit qu’ils ont l’Internationale. Ils ne séparent pas les Noirs et les Blancs, les Africains et les Asiatiques.

Aujourd’hui, ils ont ce que nous avions avec Brejnev. Ils ne réalisent même pas la menace. Ils croient que ce sont de simples accès de violence.

Ils sont bien nourris, satisfaits, ils vivent mieux que l’Afrique, mieux que le Moyen-Orient, mieux que toute l’Asie. C’est pourquoi ils ne sont plus capables de rien. Ils ont besoin de nouveaux régimes.

Et après des combats sanglants, des mouvements de droite arriveront au pouvoir. Nous voyons déjà des indications en France, en Belgique, en Allemagne, etc.

Mais eux non plus n’arriveront à rien. Les régimes seront bons. Les gouvernements tenteront de remettre de l’ordre en Europe, d’expulser les réfugiés qui commettent des crimes… Mais ils n’ont pas de soldats. Ils n’ont personne pour faire le travail.

La police aussi est incapable de le faire. Donc l’Europe n’est pas capable de résister.

Et là encore, comme tous les 100 ans, ils nous appelleront à l’aide (Napoléon fut détruit par les Russes, Hitler fut détruit par les Russes). L’Amérique ne les aidera pas.

Et encore une fois, nos Spetznaz, notre expérience et notre armée et notre police remettront de l’ordre en Europe. Pas tout de suite, mais dans 5-10 ans ils nous appelleront. Et alors nous serons forcés de les aider. Ils ne peuvent pas faire cela tout seuls.

La principale raison, c’est que l’invasion des réfugiés est une invasion par les gens les plus jeunes sur la planète. L’âge moyen dans les pays islamiques est de 20 ans, 25 ans maximum. En Europe, il est de 40-50 ans. Ce sont des générations d’âge différent.

Et les jeunes veulent la révolution, la guerre, les activités criminelles, le sang. Et c’est pour cela qu’ils vont en Europe.

Le régime en Lybie doit revenir. Pour fermer les frontières. Ils doivent demander à notre flotte de la Mer Noire. Nous fermerons les routes maritimes. Et ensuite nous ramènerons l’ordre en Europe où de nouveaux réfugiés n’arriveront plus…

Et ceux qui sont déjà là doivent être contrôlés avec les mesures les plus dures possibles qu’un pays peut utiliser pour maintenir l’ordre. Sinon les réfugiés imposeront leur ordre et l’Europe sera dans le sang. C’est pour cela qu’il n’y a pas d’autre solution.

Je dis cela depuis des années. Nous ne souhaitons pas de cruauté, mais nous voyons ce qui se passe. Il y aura des attentats dans toutes les villes européennes. Et des centaines de milliers de gens mourront.

Il n’y a pas d’autre moyen. Seulement l’armée russe et les Spetznaz russes. Nous ramènerons l’ordre en Europe. Et on nous en sera reconnaissant.

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Hôte : Vladimir Volfovich, une brève question. En fait j’ai un peu peur de vous la poser, à cause de ce que vous avez dit.

Aujourd’hui Trump y est allé vraiment fort avec ses déclarations sur Twitter sur la manière dont il faut combattre le fondamentalisme islamique, les radicaux. Il a proposé de prêter attention aux méthodes du général Pershing. Oui.

Cela n’est pas confirmé. Nous avons cherché des preuves historiques toute la journée, mais en tous cas la légende sur Pershing dit que pendant le combat des Philippines pour obtenir l’indépendance vis-à-vis des USA, Pershing tuait les Philippins islamiques avec des balles trempées dans du sang de cochon. Et Trump, le président US, propose de combattre les terroristes et les islamistes radicaux de cette manière. Pouvez-vous commenter cela ?

Jirinovski : Nous avons nos méthodes. Nos Spetznaz peuvent faire les choses complètement et calmement. Comme nous l’avons fait en Afghanistan et en Crimée.

Nous avons la plus grande expérience. Mais les Européens ont peur et ont honte de nous demander de l’aide. C’est pourquoi ils auront encore plus d’attaques terroristes. Mais à un certain moment ils nous demanderont de l’aide. Et nous aiderons. Cela sera fait par des forces spécialement entraînées. Elles savent ce qu’il faut faire. Pershing c’était il y a 50-60 ans, peut-être plus.

Hôte : 100 ans.

Jirinovski : Aujourd’hui il y a d’autres méthodes. Aujourd’hui on peut les obliger à partir. Si on prend certaines mesures, avec une certaine propagande.

En général, ils sont effrayés, ils ne comprennent rien et ne peuvent rien faire. S’ils voient une force contre eux, une autre armée, une autre police, d’autres Spetznaz, ils s’enfuiront vers le sud, monteront sur des bateaux et repartiront en Afrique et au Moyen-Orient.

Et la Turquie doit aider. Fermer les frontières pour que personne ne puisse venir en Europe par la terre. Ils passent tous par la Turquie ou l’Afrique du Nord. Fermez la Méditerranée et les routes turques. Et tous ceux qui ne sont pas bienvenus en Europe doivent être mis dans des bateaux et renvoyés en Afrique et au Moyen-Orient.

Et cela peut être fait, mais les Européens ne sont pas capables de le faire.

Ils ne vous comprendront pas avec la propagande et les discours habituels. Vous devez leur parler dans leurs propres langues : arabe, kurde, turc, albanais, perse, etc. Où allons-nous trouver des milliers de gens pour les éduquer ?

Ils ont des milliers de mosquées. Ils sont influencés dans ce sens dans les mosquées. C’est pour cela qu’il est déjà trop tard sur ce front.

jiri3.jpgLes Allemands ont pris 200.000 Turcs il y a cinquante ans. Maintenant ils sont 4 millions. Voilà. Les fans turcs sont les plus nombreux dans les stades allemands pour soutenir les équipes turques. Les Allemands ne peuvent plus soutenir leur propre équipe dans leur pays.

Les Turcs travaillent dans tous les magasins et les restaurants ici. Les Allemands sont déjà sous occupation. Ils ne peuvent rien faire. Et c’est la même chose dans tous les pays.

L’Espagne. L’Espagne a ses Marocains. Franco les a invités. Et maintenant ils sont revenus. Maintenant ils [les Espagnols] ont besoin d’un autre Franco pour les expulser, ou ils nous demanderont de l’aide.

L’Afrique affamée et le Moyen-Orient vont venir en Europe. Et seules des actions coordonnées peuvent les arrêter.

Ou bien nous pouvons régler la question tous seuls. Ils peuvent nous appeler à l’aide et nous donner tous leurs budgets, tout leur argent. Nous ferons tout d’une manière complète et calme. Et l’Europe pourra vivra normalement. Sinon elle mourra.

Une islamisation totale de l’Europe est en cours. L’Europe est faible, malade, elle ne se reproduit plus, elle n’a pas de croissance démographique.

L’Europe vieillit. Et contre elle arrive la jeune Asie, la jeune Afrique. Ils vont écraser les vieux Européens. Ceux-ci vivront dans des maisons de retraite, et toutes les usines et toutes les maisons seront utilisées par les nouveaux jeunes venant d’Afrique et d’Asie. C’est déjà en train d’arriver.

Hôte : Merci beaucoup. Vladimir Volfovich Jirinovski était avec nous depuis la Douma. Le leader du LDPR. C’est son point de vue.

Link :

https://ruexperts.com/zhirinovsky-explains-solution-terro...

[Jirinovski est un personnage haut en couleurs. Certains le décrivent comme un extrémiste, un histrion ou plus finement comme un « trikster ». Derrière sa virulence et son agressivité verbale on découvre souvent un solide bon sens et un véritable talent politique, et son patriotisme est magnifique. Il défend la Grande Russie – ce n’est pas le genre d’homme qui se mettrait au service d’une idée abstraite (comme l’« Humanité » avec un grand « H », qui n’existe pas), du Globalisme ou d’une république maçonnique. Comme exemple de son sens de la répartie, voilà ce qu’il répondit à un journaliste russe qui lui demandait ce qui se passerait si la Russie était un jour en guerre avec la France : « Les Français enverront leurs Arabes, et on enverra nos Tchétchènes ! ». Jirinowski forever ! – NDT.]

 

 

jeudi, 07 février 2019

Aleksandr Solzhenitsyn: The Rise of a Prophet

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Aleksandr Solzhenitsyn:
The Rise of a Prophet

It’s striking how cherry-picking can hone the pen of a propagandist and disguise malice behind a veneer of reason. Jewish writer Cathy Young provides excellent examples of this all throughout her December 2018 Quillette article, “Solzhenitsyn: The Fall of a Prophet. [2]” Published shortly after Solzhenitsyn’s 100th birthday, the article’s point, essentially, is to tarnish the reputation of a great man in order to steer discourse away from aspects of his work which the current zeitgeist finds problematic. Her shoddy, dishonest treatment of Solzhenitsyn resembles Soviet-styled political revisionism, and it stinks, frankly, of character assassination. She doesn’t merely disagree with some of Solzhenitsyn’s positions and explain why (which would have been perfectly fine); rather, because she’s uncomfortable with some of his positions, she endeavors to dig up everything negative or embarrassing she can about the man in order to discredit him, both morally and intellectually.

Why bother to read Solzhenitsyn at all now that Cathy Young has stabbed him full of holes with her rapier-sharp pen?

Young kicks the article off by paying homage to Solzhenitsyn’s life and works with obligatory, Wikipedia-style platitudes and spices them with anecdotes from her childhood in the Soviet Union. This takes up a few paragraphs and rings true enough. However, this is completely forgotten by the time Young gets to what she really wants to talk about: Solzhenitsyn beyond his role as heroic, anti-Communist dissident.

This role, I think we can all agree, constitutes the vast majority of his legacy. The bravery, tenacity, and clarity of thought that this man demonstrated at a time when political repression was as bad as it could possibly be was frankly inhuman – in a good way. One Day in the Life of Ivan Denisovich has proven to be an immortal and poignant sketch of life in a Soviet labor camp. Many of his early short stories (“Matryona’s House” and “We Never Make Mistakes,” in particular) as well as his 1968 novel Cancer Ward were equally brilliant. His speeches and essays from the Soviet period are clear, consistent, forthright, and prescient (“The Smatterers” from 1974 and his Warning to the West collection from 1976 are among my favorites). And The Gulag Achipelago speaks for itself as one of the greatest and most consequential non-fiction works of the twentieth century. One can review David Mahoney’s centennial eulogy [3] for Solzhenitsyn for more.

Young, however, cares to ding Solzhenitsyn for his exile-era and post-Soviet writings which concern, among other things, Russian identity, nationalism, Christianity, and the Jewish Question. Consequently, Solzhenitsyn has proven himself to be quite the gadfly in the ointment for our anti-white, globalist elites who believe that all of these things are bad, bad, bad and worry about their making a comeback in the age of Trump:

In 2018, Solzhenitsyn’s hostility toward Western-style democracy and secular universalist liberalism may find much broader resonance than it did in his twilight years. When Solzhenitsyn asserted in a 2006 interview with Moscow News that “present-day Western democracy is in a grave crisis,” that statement could be easily dismissed as a maverick’s wishful fantasy. Today, it sounds startlingly prescient. In an age when nationalist/populist movements are on the rise in Europe and the Americas and the liberal project is increasingly seen as outdated, Solzhenitsyn might be seen as a man ahead of his time.

For Young, of course, this is a bad thing:

But one could also make a compelling argument for the opposite: that Solzhenitsyn’s life and career are a case study in the perils of choosing the path of nationalism and anti-liberalism, a path that ultimately led him to some dark places.

So, to prevent as many people as possible from drawing inspiration from this great man, it’s time to start taking him down. But how to take down a man of Solzhenitsyn’s titanic stature? That’s a problem, isn’t it? Well, Cathy Young decides to solve it by cherry picking elements of the man’s life to draw an ugly, mean-spirited caricature of him. She’s done this before [4]. She also relies on her audience to either not read up on Solzhenitsyn to fact-check her sloppy scholarship or to not understand Russian in case they might do so.

She begins by citing and interpreting his 1983 essay “Our Pluralists.” This essay doesn’t seem to be translated into English on the Internet; Young provides a link to the original Russian [5], and I found a partially translated version here [6]. Oddly, Young describes only how this essay offended other dissidents and doesn’t directly critique it herself.

Young:

To Solzhenitsyn, the worship of pluralism inevitably led to moral relativism and loss of universal values, which he believed had “paralyzed” the West. He also warned that if the communist regime in Russia were to fall, the “pluralists” would rise, and “their thousand-fold clamor will not be about the people’s needs . . . not about the responsibilities and obligations of each person, but about rights, rights, rights” – a scenario that, in his view, could result only in another national collapse.

Yes, and . . .? How is his incorrect? It seems as if Solzhenitsyn had a crystal ball back in 1983, and not just for Russia. In this case, pluralism for Solzhenitsyn meant pluralism of ideas, not racial or ethnic pluralism. Relativism, essentially. Solzhenitsyn was basically arguing for the acceptance of an objective Truth, albeit from within an uncompromisingly traditionalist and Christian framework.

Solzhenitsyn:

Of course, variety adds color to life. We yearn for it. We cannot imagine life without it. But if diversity becomes the highest principle, then there can be no universal human values, and making one’s own values the yardstick of another person’s opinions is ignorant and brutal. If there is no right and wrong, what restraints remain? If there is no universal basis for it there can be no morality. ‘Pluralism’ as a principle degenerates into indifference, superficiality, it spills over into relativism, into tolerance of the absurd, into a pluralism of errors and lies.

According to the essay, Solzhenitsyn has no problem with pluralism per se as long as these pluralistic ideas are constantly compared “so as to discover and renounce our mistakes.” In this regard, his framework is as much Classical as it is Christian.

One can disagree, of course, but there is absolutely nothing that is morally or intellectually objectionable about any of this. Yet because Young can dredge up a handful of names who opposed Solzhenitsyn’s Christian dogmatism or wrung their hands over his preference for Duty over Freedom, she seems to think that that makes her subject look bad. It doesn’t. These critics accused him of groupthink and labeled him a “true Bolshevik” – ridiculous claims repudiated by the essay itself. All Young can really say is that Solzhenitsyn had opponents who disagreed with him and smeared him for it. So what? Name a great man who didn’t.

Young also attempts to throw a wet blanket on Solzhenitsyn’s not-so-triumphant return to Russia in the mid-1990s. According to Young, the Russian public didn’t seem terribly interested in him. His several-thousand-page epic The Red Wheel and other later works didn’t sell terribly well. His talk show wasn’t a hit. Not many young people in Russia read him anymore, or have even heard of the Gulag system. Only a few hundred people showed up at his funeral in 2008. Again, so what? Apparently, Young believes that because Solzhenitsyn’s star power began to fade when he was in his late 70s, his legacy began to fade as well. Can she not see how desperate and superficial this tack really is?

She also takes him to task for supporting Vladimir Putin in the 2000s and inviting him to his home in 2007 – when Solzhenitsyn was eighty-nine years old. Leaving aside any charity we would wish to grant an octogenarian Gulag and cancer survivor, Young would have us believe that “the man who exposed the full horror of Stalin’s rule had nothing to say about the creeping rehabilitation of Stalin on Putin’s watch.”

Did Vladimir Putin starve twelve million people to death and wrongfully imprison and execute tens of millions more without anyone knowing about it, except Cathy Young? Sure, Putin is an authoritarian, and it’s impossible to go to bat for everything he does. But to equate him in any way with Stalin is pure idiocy. This is real “Trump is literally Hitler” territory and serves only to silence debate, not encourage it. How could the editors of Quillette not see this?

Further, by basing most of her critiques on Solzhenitsyn’s later works and statements, Young makes this “fall of a prophet” business seem like it’s something new – as if the man was righteous for a while and then lost it once he started knocking on pluralism and giving a thumbs-up to authoritarianism. By this point, she tells us, “Solzhenitsyn could no longer be seen as a champion of freedom and justice.” She omits mentioning that Aleksandr Solzhenitsyn had supported authoritarian rule since at least 1973. His essay “As Breathing and Consciousness Return” goes into eloquent detail on the virtues of such systems, provided that the autocrats are bound by “higher values.” In the past, this meant God. With Putin, it means the destiny of the Russian people. It is entirely consistent thirty-five years later for a Russian patriot like Solzhenitsyn to prefer Putin to the corruption and chaos of the Yeltsin era, in which Russia was at the mercy of corrupt oligarchs and mafioso such as Boris Berezovsky and Vladimir Gusinsky. According to Paul Klebnikov, in his 2000 work Parrain du Kremlin, Boris Berezovsky et Le Pillage de la Russie, there were 29,200 murders in Russia in 1993 alone (by 2013, according Infogalactic, that figure was down to 12,785 [7]). The number of murders in Russia increased eight hundred percent from 1987 to 1993. 1994 saw 185 police officers die in the line of duty. Yet Cathy Young wishes that we concern ourselves with Putin’s “creeping rehabilitation of Stalin.”

The crux of her dissertation involves, of course, Solzhenitsyn’s honest take on the Jewish Question – but she takes pains to paint him as an equal opportunity bigot who focused his slavophilic ire on unchosen peoples as well. This she calls “a streak of prejudice in his work.” Here is Cathy Young at her most insidious:

In his 1973 essay, “Repentance and Self-Limitation As Categories of National Life,” he suggested Russians’ moral responsibility for Soviet crimes against Hungary and Latvia was somewhat mitigated by the fact that Hungarian and Latvian nationals were actively involved in the Red Terror after the Russian revolution, while the shame of the ethnic cleansing of Crimean Tatars was lessened by their status as “chips off the Horde,” the Mongol khanate that violently subjugated Russia in the thirteenth and fourteenth centuries. And, while Solzhenitsyn often asserted that his Russian patriotism was grounded in respect for the self-determination of other nations, he was vehemently hostile to Ukrainian and Belarussian independence.

Let’s break this down carefully, since Young’s dishonesty is astonishing. In my translation of “Repentance and Self-Limitation in the Life of Nations,” Solzhenitsyn stresses often how Russians, as a people, need to show penance for their sins, not just against themselves but against other peoples. He takes a position that is as respectful and conciliatory as possible towards foreign groups while still being nationalistic:

It is impossible to imagine a nation which throughout the course of its whole existence has no cause for repentance. Every nation without exception, however persecuted, however cheated, however flawlessly righteous it feels itself to be today has certainly at one time or another contributed its share of inhumanity, injustice, and arrogance.

Solzhenitsyn then outlines a list of transgressions for which the Russians should do penance, despite how they themselves had suffered enormously in the twentieth century. “My view is that if we err in our repentance,” he states, “it should be on the side of exaggeration, giving others the benefit of the doubt. We should accept in advance that there is no neighbor to whom we bear no guilt.”

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So does this sound like a “streak of prejudice”? If anything, it’s prejudicial against Russians. There’s more. Solzhenitsyn understood that penance works only if it goes both ways. He asks, “How can we possibly rise above all this, except by mutual repentance?” [emphasis mine]. His position regarding the Latvians and Hungarians is that they repented little for what they did to Russians “in the cellars of the Cheka and the backyards of Russian villages.” So why should Russians shed many tears for them in return? Same with the Crimean Tatars, who never showed much remorse for the pain they inflicted upon the Russians over the course of centuries. Note also how Young downplays Tatar sins by casting them into the distant past of the “thirteenth and fourteenth centuries.” She neglects to mention that some of their worst transgressions occurred much more recently. According to M. A. Khan in his 2009 work Islamic Jihad, the Crimean Tatars captured, enslaved, and sold to the Ottoman Empire anywhere between 1.75 and 2.5 million Ukrainians, Poles, and Russians between 1450 and 1700. That might be worth a sorry or two, wouldn’t it? Suddenly, Aleksandr Solzhenitsyn is not quite as bigoted as Cathy Young would have him seem.

Regarding the man’s opinions on Belorussian and Ukrainian independence, Young again mischaracterizes him. Solzhenitsyn was speaking up for the persecuted kulaks and the victims of the 1930s Ukrainian terror famine as early as The Gulag Archipelago (Volume 1, Part 1, Chapter 2) and later in 2003’s Two Hundred Years Together (Volume 2, Chapter 19). His numbers from the latter work (15 million killed) roughly coincide with Robert Conquest’s from his 1986 work Harvest of Sorrow (14.5 million killed). By stating that Solzhenitsyn was “vehemently hostile” to Ukrainian independence, Young was implying that her subject was chauvinistically contemptuous of the nationalist ambitions of these nations. That’s just not true. In reality, Solzhenitysn envisioned a pan-Slavic Russia in which Russia would keep Belarus and only the eastern half of Ukraine. In a 1994 interview [8], Solzhenitsyn had this to say about it:

As a result of the sudden and crude fragmentation of the intermingled Slavic peoples, the borders have torn apart millions of ties of family and friendship. Is this acceptable? The recent elections in Ukraine, for instance, clearly show the [Russian] sympathies of the Crimean and Donets populations. And a democracy must respect this.

I myself am nearly half Ukrainian. I grew up with the sounds of Ukrainian speech. I love her culture and genuinely wish all kinds of success for Ukraine – but only within her real ethnic boundaries, without grabbing Russian provinces.

Does this sound “vehemently hostile?” I will admit his brief denunciation [9] of the Ukrainian genocide claim from April 2008 came across as cranky. But he was 89 at the time and all of four months away from the grave! Who wouldn’t come across as a little cranky under such circumstances?

Further, Young’s source [10] for the “vehemently hostile” smear is riddled with contradictions. It faults Solzhenitsyn for wanting Russia to let go of non-Slavic republics like Armenia and Kyrgyzstan (thereby respecting their nationalism) and then criticizes him for wanting to keep Belarus and parts of Ukraine (thereby disrespecting their nationalism). This is unreasonable since it puts Solzhenitsyn in a lose-lose position. In her article, Young claims that Solzhenitsyn’s nationalist path “ultimately led him to some dark places.” Well, okay, but if nationalism is bad, then why doesn’t she slam Belarus, Ukraine, Armenia, Kyrgyzstan, and all the other republics for their nationalist agendas? Why is it only Russian nationalism that leads to the path to darkness?

Note also how Young never cites instances in Solzhenitsyn’s writing in which he shows favoritism towards other groups. In Cancer Ward, the main character Kostoglotov describes how he sided in a fight with some Japanese prisoners against Russian prisoners because the Russians were behaving barbarically and deserved it. In “the Smatterers” he writes in glowing terms about the birth of Israel. His 1993 Vendée Uprising address was a veritable love letter to the French. And let’s not forget the downright tenderness he shows towards the Estonians in Volume 1, Part 1, Chapter 5 of The Gulag Archipelago. Of course, I could go on.

As for the Jews, we can’t expect to do Solzhenitsyn’s treatment of them any justice in such a short article. We can, however, condense it into two main segments: his fiction and his non-fiction. In his fiction, his tendency was to portray Jews in a somewhat negative light, it’s true. Great examples include Lev Rubin and Isaak Kagan from In the First Circle, who seem sympathetic but ultimately defend the evils of Communism. His treatment of Jews in his early play The Love-Girl and the Innocent reach Shylock/Fagin levels of stereotype (although Solzhenitsyn based one of these characters on a particularly vile Jew in real life named Isaak Bershader, who also appears in Volume 2, Part 3, Chapter 8 of The Gulag Archipelago in an unforgettable scene in which he crushes the spirit of a strong and beautiful Russian woman before coercing her to become his mistress). Then there’s the expanded version of August 1914, which included a chapter dealing with Dmitri Bogrov, the Jewish radical who assassinated the great Russian Prime Minister Pyotr Stolypin in 1911.

According to Young, Solzhenitsyn portrayed Bogrov “with no factual basis, as a Russia-hating Jewish avenger.” I would have to do a great deal of research to verify this claim, of course. However, I don’t trust Cathy Young. The deceptions and smears in her article should prevent anyone from trusting her. Furthermore, Bogrov did assassinate Stolypin, and Stolypin was a great man. Would Young rather Solzhenitsyn portray Bogrov as a hero? Is it too much of a stretch for us to believe Bogrov harbored an ethnic grudge against Russia and Russians? He wouldn’t have been the first. Kevin MacDonald has given us an entire body of work demonstrating exactly how some influential Jews harbor deep and irrational resentment towards white gentiles. So why not Dmitri Bogrov?

I have read the Bogrov passages in August 1914. Young’s take on them is jaundiced, to say the least. The author paints a moving portrait of a mentally disturbed, rigid-minded, radically-inclined, highly-informed, and ethnically-obsessed young man. How does that not fit the bill for a Jewish anarchist from a century ago? How is this any different from the way in which Solzhenitsyn portrayed a whole host of Russian authority figures in his Red Wheel opus as incorrigibly incompetent, cowardly, vain, irresponsible, and self-centered? Does this make him as anti-Russian as he is anti-Semitic? Or maybe just honest?

And speaking of honesty, let’s look at how Cathy Young most dishonestly doesn’t mention Solzhenitsyn’s positive Jewish characters, such as Ilya Arkhangorodsky, also from August 1914, and Susanna Korzner from March 1917.

As for his non-fiction, people can argue whether Solzhenitsyn unfairly singled out Jewish Gulag administrators in The Gulag Archipelago. But that’s small potatoes compared to his opus Two Hundred Years Together. On this account, Young actually does a fairly evenhanded job of assessing her subject. Even the Jews can’t decide on whether Solzhenitsyn was an anti-Semite, and many of them who actually knew him personally deny it, since Solzhenitsyn’s behavior towards them was always impeccable. Young dutifully presents both sides and links to a well-balanced Front Page symposium [11] before tilting her conclusion in favor of anti-Semitism. That’s her right, of course.

My take is a little different. I say that Solzhenitsyn acted in good faith when writing Two Hundred Years Together. He may or may not have made mistakes in his work, but I say he presented the gentile side of the argument pretty well. It is a side that rarely sees the light of day given how prolific Jews are in portraying their end of the struggle and how influential they are in suppressing literature they find threatening. Why else go after people like Pat Buchanan and Joe Sobran? Why else see to it that pro-white writers and activists like MacDonald and Jared Taylor get thoroughly marginalized? Why else suppress Holocaust denial and revisionist literature? Why else create a forbidding atmosphere for the publication of Two Hundred Years Together in English?

There’s more. Jewish writers like Cathy Young seem to suffer so much from whites-on-the-brain that they fail to recognize the abuses of their own kind when writing about gentiles. She should read Robert Wistrich, Bernard Lewis, Deborah Lipstadt, and other Jewish authors when they write about anti-Semitism and then ask herself if they were as being as sympathetic to gentiles and Solzhenitsyn was to Jews in Two Hundred Years Together. Having read many of them, I would say usually not. Solzhenitsyn lists righteous and innocent Jews by name in that work. In Chapter 25, he calls for “sincere and mutual understanding between Russians and Jews, if only we would not shut it out by intolerance and anger.”

He states further:

I invite all, including Jews to abandon this fear of bluntness, to stop perceiving honesty as hostility. We must abandon it historically! Abandon it forever!

In this book, I call a spade a spade. And at no time do I feel that in doing so it is being hostile to the Jews. I have written more sympathetically than many Jews write about Russians.

The purpose of this book, reflected even in its title, is this: we should understand each other, we should recognize each other’s standpoint and feelings. With this book, I want to extend a handshake of understanding – for all our future. But we must do so mutually!

asol2.jpgDoes this sound like it was written by an anti-Semite? Maybe it does to someone as dishonest and as blinkered as Cathy Young. Maybe it does to someone who wishes to enforce a program of mandatory philo-Semitism among the goyim. But to everyone else, it just seems like it was written by the same man who thirty years earlier told Russians they should “err . . . on the side of exaggeration” when it comes to repentance . . . but only if that repentance is mutual.

Aleksandr Solzhenitsyn was a great man and a great writer for many reasons, not least because he was honest and consistent. It’s a shame that some people today feel so threatened by him that they resort to underhanded smear pieces to discredit him and hound him out of public discourse. Undoubtedly, they fear not just his nationalism but his ethnonationalism. This may not have been terribly in vogue during the last years of his life, but it is trending that way now, especially for white people. Cathy Young was absolutely correct about that and about how Aleksandr Solzhenitsyn was a man ahead of his time. She contrives a number of arguments to make it seem as if we’re witnessing the fall of a prophet, but in reality, we are only witnessing his rise.

Spencer J. Quinn is a frequent contributor to Counter-Currents and the author of the novel White Like You [12].

Article printed from Counter-Currents Publishing: https://www.counter-currents.com

URL to article: https://www.counter-currents.com/2019/02/aleksandr-solzhenitsyn/

URLs in this post:

[1] Image: https://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2019/02/2-4-19-1.jpg

[2] Solzhenitsyn: The Fall of a Prophet.: https://quillette.com/2018/12/21/solzhenitsyn-the-fall-of-a-prophet/

[3] centennial eulogy: https://www.city-journal.org/aleksandr-solzhenitsyn

[4] before: https://reason.com/archives/2004/05/01/traditional-prejudices

[5] original Russian: http://www.golos-epohi.ru/?ELEMENT_ID=14065

[6] here: http://www.orthodoxchristianbooks.com/articles/844/solzhenitsyn,-detente-appeasement/

[7] 12,785: https://infogalactic.com/info/List_of_countries_by_intentional_homicide_rate

[8] interview: https://www.counterpunch.org/2014/03/14/an-interview-with-aleksandr-solzhenitsyn-on-ukraine/

[9] denunciation: https://jonathanmelleonpolitics.blogspot.com/2007/12/dictators-or-corporate-fascism.html

[10] source: https://www.rferl.org/a/Solzhenitsyn_Leaves_Troubled_Legacy_Across_Former_Soviet_Union/1188876.html

[11] symposium: http://www.orthodoxytoday.org/articles-2009/Glazov-Symposium-Remembering-The-Dissident.php

[12] White Like You: https://www.counter-currents.com/product/white-like-you/

mardi, 05 février 2019

Rusia y su misión histórica: El legado de Iván Ilyin

Ex: http://www.elespiadigital.com

El presidente de Rusia, Vladimir Putin, en su famoso Mensaje anual del Estado de diciembre de 2014, fundamentando la nueva doctrina nacional, citó al filósofo Iván Alexandrovich Ilyin (Иван Александрович Ильин) [1883-1954] como uno de los grandes referentes teóricos y espirituales para el tiempo histórico presente.

Sergio Fernández Riquelme

Leer: Rusia y su misión histórica: El legado de Iván Ilyin

vendredi, 01 février 2019

Europa y el alma del Oriente, de Walter Schubart

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Europa y el alma del Oriente, de Walter Schubart

La editorial Fides está llevando a cabo en España una meritoria labor de difusión cultural, poniendo al alcance del lector inquieto y disidente toda una serie de textos fundamentales que, de otra manera, difícilmente serían conocidos más allá de minorías exiguas. Uno de los frentes abiertos por esta empresa es la edición de textosmetapolíticos. Podríamos decir, en líneas muy generales, que lametapolítica no es otra cosa que la Filosofía. Pero la Filosofía entendida como arma de combate para futuras y posibles luchas políticas más concretas y pedestres.

La metapolítica podría entenderse como un arsenal cultural al cual podrán acudir futuros combatientes en orden a cambiar el status quo. El Sistema, el Nuevo Orden Mundial, nunca va a celebrar que se publiquen las obras de importantes pensadores verdaderamente críticos, incompatibles con ésta dominación mundial. Los autores de la Revolución Conservadora alemana, los pensadores identitarios franceses y de la Nueva Derecha, las obras (casi) completas de Alain de Benoist, los textos de Spengler, Sombart, Schmitt … todo este arsenal nos lo pone en las manos la editorial Fides, un arsenal literario-filosófico traducido a la lengua española, apto para ir abriendo puertas y ventanas en los gruesos muros del Sistema. Para que nos entre un poco de luz, y tracemos sendas de libertad contrarias al pensamiento único.

Entre las últimas novedades editoriales de esta casa, figura la reedición de un texto que en España no se publicaba desde los años 40. Se trata de la obra del filósofo, teólogo y sociólogo balto-alemán Walter Schubart (1897-1942), Europa y el alma del Oriente. La obra, además de contar con el prólogo original de su traductor, cuenta con un estudio preliminar deCarlos X. Blanco, colaborador habitual de La Tribuna del País Vasco, en el que se establecen comparaciones entre las ideas del filósofo contemporáneo Oswald Spengler y las de Schubart. Schubart exhibe un pensamiento menos "belicista" que Spengler, dotado de un mayor vuelo y profundidad de tipo espiritual. En cualquier caso, los dos grandes de la filosofía del siglo XX percibieron la decadencia de Europa y olieron la cercanía de esa tragedia de la Gran Guerra. Spengler no llegó a verla, y Schubart hubo de sufrir sus comienzos y conocer la muerte en 1942, cautivo en un campo de concentración de los bolcheviques. Como balto-alemán que era, Schubart reunía las condiciones nacionales idóneas para procurar un acercamiento entre esas dos Europas que todavía hoy se dan la espalda, seguramente por la cizaña extra-europea y globalista: la Europa occidental y la oriental, ésta última representada especialmente por el mundo espiritual ruso.

Rusia es, en sí misma, una Civilización y una Espiritualidad. El abrazo que puede brindar Rusia a nosotros los occidentales no es "el abrazo de oso", antes bien, puede ser el abrazo salvífico de quien nos vuelve a enseñar la fe y las tradiciones que aquí, en el otro extremo geográfico, ya hace tiempo hemos perdido. Rusia, con su cristianismo tan auténtico (en su versión ortodoxa) y su defensa de la familia, la tradición, la convivencia ordenada de nacionalidades y culturas, es y debe ser un ejemplo para todos nosotros. Schubart sabía que Rusia sobreviviría al bolchevismo, como España sobrevivirá a ésta y a mil ideologías foráneas y artificiales, inoculadas como virus de intención letal, pero ineficaces a la postre si al menos queda una llama de ese espíritu tradicional inmarcesible. No en vano, Schubart nos ve a los españoles, en cierta medida, como "los rusos de occidente".

Un libro sin duda recomendable ahora que los identitarios, los conservadores anti-sistema, los reformadores en el sentido anti-mundialista, los rebeldes de toda Europa occidental buscan una "reserva espiritual", y perciben que el acercamiento entre Europa y Rusia (Eurasia) se torna absolutamente imprescindible, casi una cuestión de supervivencia

samedi, 19 janvier 2019

Bientôt une nouvelle zone de conflit: le Pentagone veut contrer la Russie dans l’Arctique

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Bientôt une nouvelle zone de conflit: le Pentagone veut contrer la Russie dans l’Arctique

Washington: le Pentagone s’apprête à découvrir une nouvelle zone de conflit ou à en créer une de toutes pièces, s’il le faut. Le Wall Street Journal vient d’évoquer les plans de la marine américaine, qui entend accroître ses activités dans la zone arctique pour aller y affaiblir l’influence de la Russie.

L’indice premier de ce programme fut un entretien dans lequel le ministre de la marine Spencer reconnaissait récemment qu’un navire de guerre américain patrouillerait l’été prochain dans les eaux de l’Arctique dans le cadre d’un programme baptisé FONOP (« Opération pour garantir la liberté du trafic maritime »). D’après un porte-paroles de la marine, ce serait la première fois que la marine américaine lancerait une opération FONOP dans l’Océan Glacial Arctique.

En plus, les Etats-Unis projetteraient de réinstaller des troupes sur l’île d’Adak, dans l’Etat de l’Alaska. Elles seraient équipées de navires a effet de surface, d’avions patrouilleurs et d’appareils de reconnaissance du type P-8 Poseidon.

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L’île d’Adak avait abrité une base militaire américaine entre 1942 et 1991. La base fut abandonnée en 1991. Mais comme l’île se trouve à proximité du territoire russe, elle constituera, si la base est réinstallée, un indice clair et net, pour le Pentagone, soucieux de montrer aux Russes quelles sont leurs limites dans la région.

Le Wall Street Journal démontre que le réchauffement climatique global permettra d’ouvrir de nouvelles voies maritimes transarctiques. Ce nouvel état de choses entraînera l’émergence de nouvelles tensions dans le domaine du commerce international et de la défense. Les Etats-Unis et leurs alliés, ajoute le journal, s’engagent à défendre le droit de tous à mener des opérations sur les voies maritimes, où des conflits territoriaux pourraient surgir. Raison pour laquelle, toutes « prétentions exagérées » de pays tiers devront être contrées.

Il n’y a pas que la Russie qui est visée : la Chine également est perçue comme un futur adversaire dans l’Arctique. L’an dernier, la Chine a esquissé les plans d’une vaste politique arctique, comprenant l’organisation d’une « route de la soie polaire » afin d’obtenir le droit à la libre circulation dans la région. La Russie, de son côté et grâce à sa très longue frontière septentrionale dans l’Arctique, a tout de suite perçu quelles opportunités commerciales cela offrait et avait, depuis assez longtemps déjà, consolidé son influence dans la zone.

Pendant l’été 2018, le ministre russe de la défense Sergueï Choigu s’est montré préoccupé de voir émerger un conflit latent dans la zone arctique. Les activités qu’y projettent les Etats-Unis lui donne raison.

(article affiché sur le site de « Zuerst », http://www.zuerst.de , 17 janvier 2019).

jeudi, 10 janvier 2019

Nicolas Berdiaev : l’Idée russe

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Nicolas Berdiaev : l’Idée russe

Peter King

Traduction française par Chlodomir

L’Occident est obligé de prêter attention à la Russie, mais l’Occident ne comprend pas la Russie. La Russie était sonnée pour le compte après la chute du mur de Berlin, laissant la voie libre à l’Occident pour que celui-ci réalise sa destinée manifeste et chevauche le globe triomphalement. Mais maintenant il y a de la confusion et de la consternation en découvrant que la Russie a regagné sa conscience, est à nouveau debout, et se trouve à nouveau sur le chemin de l’Occident ; ne cherchant pas seulement à donner des petits coups, mais ayant l’intention de mettre l’Occident knockout. La Russie déclare impudemment à son adversaire : « Je suis là, je reste là ! ».

Winston Churchill décrivit fameusement la Russie comme une devinette enveloppée dans un mystère à l’intérieur d’une énigme. L’Occident, ayant passé les derniers siècles à regarder son propre reflet avec admiration, trouve difficile de comprendre l’Autre, d’autant plus que c’est à l’Autre de rejoindre Narcisse dans l’appréciation de sa propre beauté, plutôt que l’inverse. Mais la Russie, pense l’Occident, semble n’avoir aucune compréhension ou d’appréciation de la beauté, laissant l’Occident s’interroger sur la raison.

La religion est un concept inévitable. Tout le monde a une religion – un ensemble d’hypothèses fondamentales sur la métaphysique, l’épistémologie et l’éthique. Comme l’a reconnu le jugement de la Cour Suprême US dans l’affaire Torcaso contre Watkins, même l’humanisme laïc est une religion. Mais si affirmer que tout le monde a une religion pose problème, alors nous pouvons au moins reconnaître que tout le monde a une Weltanschauung,  une vision-du-monde.

NB-ex.jpgEt c’est en regardant la question de la religion que l’on peut commencer à comprendre la Weltanschauung russe, l’Idée russe. L’Occident, pendant les derniers siècles, a lentement apostasié le christianisme, cette apostasie s’accélérant à partir des années 60. Aujourd’hui l’Occident souligne l’étendue de sa rébellion contre Dieu en célébrant des choses comme l’homosexualité, en appelant bien ce qui est mal et mal ce qui est bien.

Mais la Russie a maintenu le cap et a refusé de tuer et d’enterrer Dieu, comme Nietzsche a reconnu que l’Occident l’avait fait. Cela confirme dans l’esprit de nombreux Russes que le christianisme orthodoxe oriental est la forme la plus vraie et la plus fidèle du christianisme, justifiant leurs raisons originelles pour se séparer du christianisme occidental en 1054. En ce qui les concerne, la direction que le christianisme occidental prit après ce schisme ouvrit la voie à l’apostasie finale de l’Occident, menant à ce christianisme décrépit d’aujourd’hui qui a pratiquement fait son temps, réclamant même l’existence de la Gaystapo.

Nicolas Berdiaev est un penseur russe qui offre à l’étranger curieux une fenêtre dans l’âme russe. « Les Russes », explique-t-il dans son livre L’Idée russe, « appartiennent au type religieux et sont religieux dans leur constitution spirituelle ». Même durant la plus grande partie du XXe siècle où leur pays était officiellement sans Dieu,

« …ils sont croyants même lorsqu’ils professent le communisme matérialiste. Même parmi ces Russes qui non seulement ne professent pas la foi orthodoxe mais mènent même une persécution contre l’Eglise orthodoxe, il reste dans les profondeurs de leurs âmes une strate qui est formée par l’Orthodoxie. »

Il semble que même quand les Russes font leur lit en enfer, l’Orthodoxie est encore là !

Découlant de cette constitution religieuse et spirituelle russe, il y a l’idée messianique russe qui informe largement le modus operandi historique de la Russie. « Le peuple russe est un peuple porteur-de-Dieu », explique Berdiaev, faisant écho à Dostoïevski, qui inventa cette expression. Au début du livre, Berdiaev cite Pierre Tchaadaïev pour donner une idée du sentiment messianique russe :

« J’ai le profonde conviction que nous avons la vocation de résoudre un grand nombre des problèmes d’ordre social, d’amener la réalisation d’un grand nombre d’idées qui sont apparues dans les sociétés du passé, et de donner une réponse à des questions de grande importance qui préoccupent l’humanité. »

Berdiaev lui-même affirme : « Les Russes sont un peuple du futur ; ils décideront des questions que l’Occident n’a pas encore la force de décider, qu’il ne pose même pas dans leur pleine profondeur ».

Cette allusion au futur est liée à un autre thème récurrent que Berdiaev voit comme définissant l’idée russe, à savoir un type russe d’eschatologie. « La pensée russe est essentiellement eschatologique et cette eschatologie prend des formes variées », explique-t-il. Elle est « inconsciente, et exprimée dans une philosophie pitoyable, un effort vers la fin, une tension vers l’état ultime… l’enlèvement des ornements frauduleux, le refus d’accepter le monde qui ‘se trouve dans le mal’ ». L’interprétation de l’eschatologie russe par Berdiaev est « active et créative, non passive. La fin de ce monde, et la fin de l’histoire, dépend aussi de l’acte créatif de l’homme ». Ce dernier point, concernant l’acte créatif de l’homme, semble faire allusion au curieux concept de Katehon, qui fait référence à ce qui retarde l’arrivée de l’antéchrist, d’après la Deuxième Epître aux Thessaloniciens, 2: 6-7.

Une partie de cette résistance katéchonique au prince de ce monde se reflète dans l’engagement russe pour la fraternité des hommes, un motif important dans L’Idée russe. A cet égard la mentalité russe contraste avec la mentalité occidentale, qui a cherché à subjuguer et dominer l’Autre :

« Les Russes ont pensé que la Russie était un pays absolument spécial et particulier, avec sa propre vocation spéciale. Mais la chose principale n’était pas la Russie elle-même mais ce que la Russie apporte au monde, avant tout la fraternité de l’homme et la liberté de l’esprit … Les Russes ne cherchent pas un royaume de ce monde ; ils ne sont pas mus par la volonté de puissance et de pouvoir. »

NB-hist.jpgBerdiaev reproche à Nietzsche d’être une métonymie de l’Occident :

« [Nietzsche] voulait connaître le divin lorsqu’il n’y avait pas de Dieu, quand Dieu avait été tué, connaître l’extase quand le monde était si dégradé, connaître l’exaltation jusqu’aux hauteurs quand le monde était plat et qu’il n’y avait pas de hauteurs. Dans l’analyse finale il  exprima son thème religieux dans l’idée du surhomme dans lequel l’homme finit son existence. L’homme n’était qu’une transition ; tout ce qu’il avait à faire était de fertiliser le sol pour l’apparition du surhomme. Ici se produit une rupture avec la moralité chrétienne et la moralité humaniste, l’humanisme se transforme en antihumanisme. »

Si les nazis représentaient l’expression la plus prononcée de cet antihumanisme, il en voyait une expression générale dans l’Occident, même si elle était un peu moins violente. L’Autre était ethniquement purifié, asservi, ou déclaré être le lien manquant reliant l’homme à ses prédécesseurs animaux. L’Occident s’était repenti de ces péchés particulièrement depuis les années 60, mais les événements récents suggèrent une possibilité de récidive. Berdiaev explique les suppositions opposées entre l’Occident et l’Orient, qui ont conduit et conduisent à leur comportement différent :

« Il y a deux interprétations de la société ; soit la société doit être comprise comme nature, soit la société doit être comprise comme esprit. Si la société est nature, alors la violence du fort contre le faible, la sélection du fort et du mieux adapté, la volonté de puissance, la domination de l’homme sur l’homme, l’esclavage et l’inégalité, l’homme comme un loup pour l’homme, sont justifiés. Si la société est esprit, alors la plus haute valeur de l’homme et les droits de l’homme, la liberté, l’égalité et la fraternité sont affirmés. »

Un corollaire intéressant de cette vision est que les Russes « adoptent une attitude différente envers le péché et le crime », parce que leurs idées éthiques sont très différentes de celles de l’Occident. Ils ont « pitié pour les déchus et les avilis ». Ainsi on peut comprendre l’attitude étrangement indulgente des Russes envers les Allemands. « L’Etat allemand est l’ennemi historique de la Russie », dit Berdiaev. Cependant, continue-t-il, « Nous sommes attachés à désirer des relations fraternelles avec le peuple allemand qui a accompli beaucoup de grandes choses, mais à condition qu’il répudie la volonté de puissance. A la volonté de puissance et de domination, il faut opposer le pouvoir masculin de défense » (oui, la Russie a un gros bâton, le brandissant actuellement vers les Etats-Unis). Ainsi s’exprime l’engagement russe en faveur de la communauté et de la fraternité de l’homme, même pour ceux qui ont apporté tant de souffrances aux Russes.

Il est difficile, sinon impossible, de réprimer cette nature spirituelle, même avec l’athéisme officiel : « Moscou la Troisième Rome et Moscou la Troisième Internationale étaient toutes deux reliées à l’idée messianique russe ; elles en représentaient une forme déformée ». Et maintenant que l’idée russe peut à nouveau déployer ses ailes, nous voyons son impact sur le monde, la Russie poursuivant une fois de plus sa vocation.

Le livre de Berdiaev L’Idée russe donne un aperçu éclairant sur l’âme russe, la vision-du-monde russe, aidant l’étranger curieux à découvrir le mystère qu’est la Russie, à expliquer et à comprendre son énigme. Mais le gouffre millénaire séparant la pensée occidentale et la pensée orientale est tel qu’il vaut peut-être mieux commencer par quelque chose comme l’excellent livre de James R. Payton Jr. Light from the Christian East: An Introduction to the Orthodox Tradition, qui aide le chrétien occidental à commencer à comprendre ce qui autrement semblerait si étrange et même si bizarre dans l’Orthodoxie. Puisque l’Orthodoxie est au cœur de l’Idée russe, il vaut peut-être mieux apprendre d’abord à marcher avant d’essayer de courir. Dès que cela est fait, on peut alors tenter de pénétrer plus profondément dans la pensée des gens comme Berdiaev et les autres slavophiles.

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lundi, 31 décembre 2018

Un nouvel ordre mondial vu de Russie

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Un nouvel ordre mondial vu de Russie

A new world order: A view from Russia

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://europesolidaire.eu

RGAff.jpgCet article, référencé ci-dessous, écrit par deux spécialistes russes de science politique internationales, Sergey Karagonov et Dmitry Suslov, est à lire d'urgence. Il présente, loin de la façon dont en France, sous l'influence des « think tanks » américains, l'on se représente la diplomatie russe, un point de vue très balancé de ce que pourrait être le rôle de la Russie dans la construction de ce que l'on commence à nommer une grande puissance eurasiatique.
Celle-ci pourrait constituer, face à un ensemble dit euro-atlantique dominé par les intérêts politiques et économiques américains, un contrepoids essentiel permettant d'éviter une guerre mondiale. Une puissance eurasiatique comprendrait, comme le nom l'indique, la Russie et certains grands pays européens ouverts au monde, comme devrait être la France. Il permettrait aussi d'associer à la Russie et à l'Europe la puissance chinoise en voie de devenir un facteur autour duquel se construira le monde de cette fin de siècle.
Mais la lecture de cet article s'impose aussi parce que celui-ci pourra faire connaître en France une revue russe de politique internationale, Russia in Global Affairs, dont on peut penser que s'inspirent Vladimir Poutine et Sergei Lavrov dans leur effort pour jouer un rôle modérateur au sein des actuels conflits militaires au Moyen-Orient.

Bref résumé de la première partie de l'article.
Nos commentaires en caractères italiques 

1. Un nouvel ordre du monde

L'ordre du monde international qui s'était imposé depuis plus d'un siècle s'est trouvé remis en cause depuis 2017-2018. une cause en a été l'élection de Donald Trump et la volonté américaine d'éliminer la Russie et la Chine des institutions en charge de le définir et le protéger. Mais plus en profondeur cet ordre du monde s'est heurté aux conflits grandissants entre puissance qui jusqu'ici s'était accordés sur la nécessité d'un tel ordre du monde. Tout laisse penser que l'ordre du monde ancien est en cours d'effondrement et qu'un nouvel ordre pourrait s'imposer. La Russie a de bonnes chances de pouvoir être un des principaux moteurs de cette transformation. Sous son influence, le nouvel ordre du monde pourrait plus équitable, stable et pacifique.

Les auteurs de l'article sont russes. On pourra objecter qu'ils défendent une thèse favorable à la Russie. Mais dans la suite de l'article ils apportent des arguments très sérieux en faveur de leur point de vue. Nous pensons que la plupart de ceux-ci mériteraient d'être pris en considération.

Malheureusement, ce nouvel ordre du monde demandera beaucoup de temps pour s'imposer. En attendant, l'état actuel des relations entre les Etats-Unis et la Russie ne contribue pas à prévenir le risque d'une 3e Guerre Mondiale qui verrait la disparition de ces deux puissance, comme sans doute de toutes les autres.

Dans ce domaine, la Russie s'efforce d'agir comme un facteur de sécurité à travers ses politiques internationales et de défense. Les réalisations actuelles de la Russie dans le domaine de nouvelles armes, exposées par Vladimir Poutine dans son discours de 2018, devraient jouer un rôle essentiel. Il s'agira d'une force de dissuasion visant à décourager les politiques d'agression des Etats-Unis.

Ceci paraîtra peu crédible au lecteur mal informé, car de nouvelles armes, aussi efficaces soient-elles en termes dissuasif, peuvent également être mises au service de politiques d'agression. Mais nous avons nous-même à l'époque indiqué que cela ne devrait pas être le cas. Un simple missile hypersonique du type de celui mis au point par la Russie, qui pourrait à lui seul détruire un porte-avions, ne pourrait jamais, à moins d'être doté d'une charge nucléaire – ce que Moscou refuse - soutenir une politique d'agression, au contraire de la flotte de porte-avions dont s'est dotée l'Amérique . Ceci étant la Russie dispose en Europe de forces terrestres largement supérieures à celles de l'Otan. Là encore il sera essentiel que la Russie continue, comme elle l'a fait jusqu'à présent, à maintenir une politique de non-agression, essentielle pour un éventuel dialogue constructif avec Washington.

Le « pivot » vers l'Asie de la Russie, se traduisant par un rapprochement avec la Chine, contribuera à créer une « Grande Eurasie ». Vu l'étendue des territoires et l'importance des forces concernées, cet ensemble pourra être un élément essentiel pour le futur ordre du monde, contrairement à ce que serait une Chine livrée à ses propres forces pour se faire respecter. De plus, la Russie s'efforcera de développer un partenariat étendu avec l'Inde et une coopération avec des alliés de l'Amérique, notamment le Japon, la Corée du sud et si possible les Etats européens. Ces différents pays cherchent à atténuer les confrontations entre l'occident et la Russie, comme entre les Etats-Unis et la Russie. Aucun n'a à y gagner.

Ceci dit, notamment pour des raisons de politique intérieure, aucun des Etats occidentaux ne paraît prêt dans les 10 prochaines années à accepter un nouvel ordre international incluant la Russie. Lorsque les élites actuellement au pouvoir auront été remplacées dans les 10 ou 20 ans prochains par d'autres plus ouvertes, c'est-à-dire vers 2030-2040, le nouvel ordre devrait devenir possible.

2) Pourquoi l'ordre du monde international actuel est-il en voie d'effondrement ?
3) La situation de l'Occident
4) Une Russie victorieuse, mais non sans problèmes
5) Les enjeux de sécurité
6) Le rôle de la Russie pour créer autour de l'Eurasie de futures politiques internationales plus ouvertes


Notes et sources

 

Référence de l'article
 https://eng.globalaffairs.ru/pubcol/A-new-world-order-A-v...

vendredi, 14 décembre 2018

L’agenda caché en vue de la nouvelle provocation dans le détroit de Kertch

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L’agenda caché en vue de la nouvelle provocation dans le détroit de Kertch

par Peter Korzun

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Le 25 novembre, trois navires militaires ukrainiens ont traversé de manière non autorisée les eaux territoriales russes. La gendarmerie maritime russe a pris des mesures pour les forcer à se conformer au règlement. Ce qu’ils ont refusé de faire. Il ne fait aucun doute que Kiev a délibérément envoyé ces navires pour provoquer la Russie. Tous les vaisseaux passant par cette voie navigable doivent contacter les autorités du port marin de Kertch, signaler leurs routes et destinations et recevoir la permission de naviguer. C’est une démarche très simple, mais le groupe de vaisseaux ukrainiens n’a pas informé la Russie de ses plans. Ils ont fait la sourde oreille aux injonctions d’arrêter leurs manœuvres dangereuses. Les vaisseaux ukrainiens ont ignoré avec insolence les demandes de quitter les eaux territoriales russes.


Kiev s’est empressée d’accuser Moscou «d’agression miliaire». L’incident a immédiatement fait les grands titres, et les dirigeants occidentaux ont pris la parole pour défendre l’Ukraine sans même offrir de détails sur ce qu’il s’est passé exactement ou ce qui a déclenché ce dangereux concours de circonstances. Le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg n’a pas perdu une minute pour exprimer le «plein appui du bloc pour l’intégrité et la souveraineté territoriale de l’Ukraine, incluant la totalité de ses droits de navigation dans ses eaux territoriales, conformément à la loi». Le Canada, la Pologne, le Danemark ainsi que d’autres pays ont rapidement joint leur voix au chœur antirusse. Cela allait dans le sens de leur intérêt propre d’écarter autant les détails que toute tentative d’obtenir un aperçu des causes réelles de cet incident en particulier ou de la situation dans la mer d’Azov en général.


Le 26 novembre, le président Ukrainien Petro Porochenko a signé une motion imposant la loi martiale. Une fois approuvée par le Parlement, cette dernière sera en vigueur pendant au moins un mois. Après cette période, elle pourra être prolongée. En 2014, lorsque la Crimée a demandé via un referendum d’être intégrée à la Russie, le président ukrainien n’avait pas soulevé la question d’imposer la loi martiale. Il ne l’a pas fait non plus, en 2015, pendant la bataille de Debalsevo Bulge [à Donezk] au cœur de la lutte dans la partie orientale du pays. Le conflit actuel des républiques auto-proclamées ne l’a jamais poussé à envisager l’état d’urgence. Cependant, il a estimé que l’incident en mer était assez grave pour justifier l’imposition de la loi martiale, cela peu de temps avant les élections présidentielles – dont les sondages indiquent son peu de chances à gagner.


Ce geste limite les libertés civiles et donne un plus grand pouvoir aux institutions étatiques durant les élections prévues pour le 31 mars 2019, si elles ne sont pas reportées. En temps de loi martiale, les élections présidentielles, parlementaires et locales ainsi que les grèves, les manifestations, les rallyes et les démonstrations de masse sont interdits. L’incident en mer pourrait ne pas être l’unique provocation prévue. La situation à la frontière des républiques autoproclamées s’est mise à se détériorer au moment même où les rapports sur l’incident en mer ont commencé à affluer. Le soir du 26 novembre, de lourds bombardements de zones résidentielles dans l’est de l’Ukraine par les forces ukrainiennes ont été reportés. 

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Autre motif: la provocation a été mise en scène pour accélérer la procédure d’adhésion à l’OTAN. L’accord entre la Russie et l’Ukraine de 2003, selon lequel la mer d’Azov est considérée comme des eaux domestiques appartenant aux deux pays, pourrait être annulé. L’été passé, un projet de loi pouvant révoquer ce traité a été présenté au Parlement ukrainien (Rada). L’accord interdit à tout bâtiment de guerre d’entrer dans cette mer sans le consentement des deux nations. Si cet accord est démantelé, la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982 prendra effet. Les eaux territoriales de la Russie et de l’Ukraine s’étendraient à 12 miles nautiques de leurs côtes respectives. L’intérieur de cette mer deviendrait des eaux internationales, ce qui permettrait aux vaisseaux de l’OTAN d’entrer dans la mer d’Azov sans restriction.


Kiev espère également une augmentation de l’aide militaire venant des pays de l’OTAN, ce qui lui permettrait de développer une flotte puissante et des défenses côtières. Elle voudrait qu’une mission d’observation internationale soit stationnée dans la mer d’Azov, probablement sous l’auspice de l’OSCE et avec la participation de forces navales au demeurant défavorables à la Russie. Une autre chose que le président ukrainien voudrait voir arriver, c’est l’annulation par le président des Etats-Unis, Trump, de sa rencontre avec le président russe Poutine lors du sommet du G20 en Argentine [ce qui a été fait].


Quel a été l’élément déclencheur des actions de Kiev? C’est le soutien de l’Occident. Le 25 octobre, le Parlement européen a adopté une résolution concernant la mer d’Azov pour exprimer son soutien à l’Ukraine. Le 19 novembre, le Haut représentant pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité de l’UE, Federica Mogherini, a déclaré que les ministres des Affaires étrangères de l’UE avaient discuté de prendre des «mesures ciblées» pertinentes contre la Russie à cause de la situation dans la mer d’Azov. Les Etats-Unis continuent d’étendre leur assistance militaire à l’Ukraine. Ils ont déjà une installation militaire à Otchakiv. Une fois que les frégates de la classe Oliver Hazard Perry arriveront en Ukraine, des instructeurs navals américains suivront. La présence américaine et les infrastructures militaires s’étendront graduellement. La Grande-Bretagne agit de même.


Le soutien de l’Occident encourage l’Ukraine à envenimer les tensions. La Cour constitutionnelle d’Ukraine vient d’approuver un amendement proclamant l’adhésion à l’OTAN et à l’UE comme objectif officiel de la politique étrangère. Si le Parlement approuve cet amendement, les Accords de Minsk deviendraient alors nuls et non avenus, parce que la Russie a initialement accepté de s’y conformer à condition que l’Ukraine demeure un Etat neutre.


Personne n’a besoin d’un tel accroissement des tensions dans une région avec une forte navigation. Toutes les nations maritimes veulent disposer de voies de navigation libres et protégées par la loi. Plus le soutien politique et militaire apporté à Kiev augmente, plus les chances qu’une étincelle mette le feu à la région de la mer d’Azov sont grandes. La responsabilité repose sur ceux qui incitent Kiev à attiser les tensions en vue de poursuivre leurs objectifs politiques.     •


Source: https://www.strategic-culture.org/news/2018/11/27/ukraine...  du 27/11/18

(Traduction Horizons et débats)

jeudi, 29 novembre 2018

Que promet au monde le démembrement de la Russie ?

 

Le projet d'une véritable autonomie européenne et d'une renaissance de sa Puissance, qui est le projet d'un Imperium européen, se doit d'inclure une coopération approfondie avec l'Imperium eurasien centré sur la Russie (afin de tendre peut-être par la suite vers une fusion telle que l'aurait voulu Jean Thiriart ou Jordis von Lohaussen). Cette coopération devra se faire dans le cadre de protocoles partagés régissant des relations bilatérales saines et respectueuses entre les pôles spirituels et politiques que seront ces Imperium du Grand Continent Eurasien. Ces protocoles, dont il sera nécessaire de déterminer les prémisses en amont d'une véritable révolution conservatrice, chassant de nos terres l'occidentalisme dégénéré et intéressant donc nos deux civilisations régénérées, devront par conséquent résulter de nos réflexions et de nos expériences relationnelles et historiques. Ils devront surtout correspondre à de nouvelles théories en phase avec l'accélération historique du paradigme de la polycentricité (multipolarité) mais réorientée de façon à être en opposition frontale avec le globalisme. Ces protocoles devront également être en phase avec les préceptes de la Quatrième Théorie Politique initiée par Alexandre Douguine et précisée, adaptée et prolongée à leurs façons par certains autres en Europe, dont nous-mêmes. Une coopération avec l'Imperium eurasien sera, en outre, d'une nécessité vitale pour notre Imperium européen car elle nous permettra de nous ouvrir aux Grands espaces eurasiatiques qui représentent incontestablement pour nous une véritable ouverture sur un vaste monde qui nous est lié aussi bien économiquement qu'énergétiquement mais aussi historiquement, ethniquement, comme spirituellement. Une ouverture, une voie directe et sûre vers les espaces perses, indiens et extrême-orientaux, jusque l'Empire japonais, pourra, et devra même, nous apporter comme autant d'opportunités de pouvoir développer une Puissance qui aujourd'hui nous manque cruellement, ce qui nous empêche de développer notre autonomie (vis-à-vis d'un pseudo-empire comme celui des États-Unis) susceptible de nous faire rejouer un rôle important dans le Monde. Nous devrons par conséquent faire sauter le verrou psychologique, amplifié à dessein par les forces occidentalo-sionistes, que constitue la russophobie des pays de l'Europe de l'Est (et résoudre le problème ukrainien en faveur du peuple ukrainien et de sa diversité historique et ethnique – une coopération sincère et égale entre les deux Imperiums devrait grandement faciliter les choses en faisant de l'Ukraine une nation autonome à la croisée de ces deux entités impériales, mais surtout à l'intersection intéressée de leur échanges et de leurs intérêts stratégiques. La Moldavie pourra aussi jouer un tel rôle). L'Eurasie devra devenir pour nous autres européens dé-occidentalisés un espace immense où l'on pourra de nouveau se ressourcer au Graal de nos origines et de nos conquêtes antérieures.

Ivan Iline, considérant le contexte historique dans lequel il s'exprimait, peut, à notre sens, vivifier par ses écrits ces réflexions futuristes – et en même temps actuelles – et permettre à ce qu'elles puissent franchir le rubicon de l'actualité imposé par l'agenda occidental de façon à pouvoir se projeter vers un devenir enthousiasmant pour nos deux civilisations.

3143518962_1_2_QlT5nhtD.jpgNous voudrions seulement préciser une chose en ce qui concerne le centralisme revendiqué de cet auteur russe : si, pour notre part, nous nous faisons le défenseur d'un certain fédéralisme, nous nous devons néanmoins d'ajouter que celui-ci ne pourrait être, selon nous, désaccouplé d'une vision centraliste du pouvoir suprême par le fait de la considération spirituelle et traditionnelle qui motive et soutient celle-ci. L'indépendance ne saurait qu'être illusoire au regard de la dynamique de l'autonomie régionale et nationale (tout comme civilisationnelle) et, dans les faits, elle n'est qu'un voile destiné à camoufler une influence néfaste (réelle celle-là et destructrice de la diversité culturelle) sur la culture des peuples et sur leur singularité (l'américanisation sous-jacente au soutien déclaré à la « réappropriation » par les peuples minoritaires de leur culture et de leurs « droits », par exemple). Le centralisme est une nécessité au regard d'une dynamique culturelle qui n'est telle que parce qu'elle peut trouver à s'élever par rapport à un lieux spirituel et politique central, et ultime du point de vue de l'affirmation de sa propre singularité. Il ne peut y avoir de véritable progrès humain sans qu'il ne soit donné à un peuple, comme à une personne, la possibilité perpétuelle de pouvoir s'élever et s'affirmer par rapport aux Autres en regard d'un Ordre qui en donne la réelle possibilité sans encourir le chaos et, au final, l'extinction. La croissance d'une culture comme d'une personnalité est autant à considérer d'un point de vue horizontal que d'un point de vue vertical. Or, il n'est qu'une juste hiérarchie pour octroyer le réel pouvoir de s'élever parmi, et non à l'encontre, des Autres.

Yohann Sparfell

QUE PROMET AU MONDE LE DÉMEMBREMENT DE LA RUSSIE ?

Source : https://legrandcontinent.eu/2018/04/12/que-promet-au-mond...

Le GEG Russie est très fier de présenter à ses lecteurs la traduction inédite d’un texte, qui bien que méconnu, reste un fondamental de la pensée politique russe – composition de l’un des penseurs les plus originaux de l’histoire des idées russes, Ivan Iline (1883-1954). Ce texte, intitulé « Que promet au monde le démembrement de la Russie ? » (« Что сулит миру расчленение России ? ») figure, parmi près de 200 articles, dans le recueil « Nos missions » (« Наши задачи », paru à titre posthume à Paris en 1956 et réédité en 1993, non traduit). Iline le rédige en Suisse en 1950, 28 ans après son exil forcé vers l’Europe dans le fameux « bateau des philosophes » qui déporta, sur ordre du Guépéou, la fine fleur de la pensée conservatrice, nationaliste et religieuse russe (qui n’avait pas été exécutée ou emprisonnée), comme Nicolas Berdiaev, Sergueï Boulgakov ou Siméon Frank. Sauvé de l’exécution, il ne reverra jamais son pays, mais put profiter de son exil pour composer une œuvre féconde.

Ivan Iline est un penseur monarchiste et conservateur, farouche opposant à la révolution d’octobre 1917 et idéologue principal de l’Union générale des combattants russes (ROVS), fondée à Paris par le baron Wrangel, un ancien général blanc. Il est aussi un spécialiste de Hegel, auquel il a consacré une thèse intitulée « la philosophie de Hegel, doctrine de la nature concrète de Dieu et de l’homme ». Ses idées mêlent, entre autres, une réfutation de la non-violence tolstoïenne au nom de la guerre contre le mal, et l’apologie d’une “dictature démocratique”, fondée sur “la responsabilité et le service”. Il fut en cela très probablement influencé par Konstantin Leontiev (auteur d’une théorie toute nietzschéenne de la « morale aristocratique »), mais aussi par Vladimir Soloviev.

Tardivement redécouvert en Russie, il rencontre, selon Michel Eltchaninoff, un très vif succès au sein de l’administration poutinienne, dont il serait l’un des principaux idéologues. C’est le réalisateur Nikita Mikhalkov, un proche du pouvoir, qui aurait selon toute vraisemblance introduit ce penseur au Président russe. Ce dernier lui prêterait depuis lors un intérêt certain. Le lecteur le constatera lui-même en lisant ce texte : les thèmes ici abordés déteignent sur la rhétorique de Vladimir Poutine. Il pourra aussi bien s’agir de la méfiance « génétique » de l’Occident vis-à-vis de la Russie, de l’hypocrisie de ses valeurs démocratiques, de l’impossible fédéralisation de la Russie, de la fourberie des dirigeants occidentaux, de la violence au nom du bien, du caractère intrinsèquement majestueux de ce pays, et surtout, de cette obsession pour l’unité de la Grande Russie contre les prédations de ses voisins. D’ailleurs, le Président russe ne s’en cache pas : le philosophe est cité dans plusieurs de ses discours.

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Ce texte est très finalement contemporain, pour son virilisme, son antioccidentalisme viscéral, ses accents obsidionaux et son révisionnisme. Il semble, à bien des égards, orienter la politique de Vladimir Poutine. Thèse particulièrement originale à l’ère du « droit à disposer de soi-même » (la Charte des Nations-Unies avait été signée cinq ans auparavant), Iline y dénie par exemple aux « tribus » peuplant la Russie, ainsi qu’aux « petits frères » voisins (ukrainiens, géorgiens ou centrasiatiques) le droit à s’organiser en unités politiques indépendantes. Il ne leur reconnaît en effet aucun génie national, technique, politique ou social, et estime en conséquence qu’ils doivent être incorporés au vaste Empire russe, seul garant de leur conservation. Selon l’auteur, il relèverait de l’intérêt illusoire des occidentaux de « démembrer » la Russie, en incorporant ces « tribus » à leur giron, au nom des principes « dévastateurs » de « démocratie », de « liberté » et de « fédéralisme », transformant ainsi la Russie en de vastes « Balkans », livrée à des guerres incessantes.

Ce texte a pour qualité première sa limpidité. Ce que glissent aujourd’hui les responsables russes derrière le concept flou de « zone d’intérêts privilégiés » ou de « verticale du pouvoir » n’en ressort ainsi qu’avec plus d’éclat. Essentiel à la compréhension des fondements intellectuels de la politique intérieure et étrangère russe, cet article trouve, à l’aune du conflit en Ukraine et de l’hypercentralisation de la Russie, une formidable actualité. Il nous permet aussi, à nous européens, d’inverser notre regard sur notre Grand continent, et finalement, peut-être, de nous saisir de l’un des fragments de l’inconscient collectif de nos voisins russes, ô combien difficiles à comprendre.


Traduit du russe par Nelson Desbenoit, Pierre Bonnet et Théo Lefloch

I

1. Devisant au sujet de la Russie avec un étranger, chaque fidèle patriote russe se doit de lui expliquer que son pays ne correspond pas à une accumulation fortuite de territoires et de peuplades, encore moins à un « mécanisme » de « régions » artificiellement agencées, mais bien à un organisme vivant, historiquement formé et culturellement justifié, ne pouvant faire l’objet d’un démembrement arbitraire. Cet organisme correspond à une unité géographique, dont les différentes parties sont liées par une interdépendance économique ; il constitue une unité spirituelle, linguistique et culturelle, liant historiquement le peuple russe à ses jeunes frères ethniques par une osmose spirituelle ; il forme une unité étatique et stratégique ayant prouvé au monde sa volonté et sa faculté à se défendre ; il incarne enfin l’authentique bastion de la paix universelle et de l’équilibre en Eurasie, et par conséquent de l’ensemble de l’Univers. Son démembrement constituerait une entreprise politique aventureuse, sans précédent historique, et dont l’humanité supporterait durablement les conséquences.

Le démembrement d’un organisme en une multitude de composantes n’a jamais apporté nulle part et n’apportera jamais ni la guérison, ni l’harmonie créative, ni la paix. A contrario, il fut toujours et restera toujours la source d’un douloureux délitement, d’une décomposition progressive, d’un mécontentement, de querelles et d’une contamination généralisée. A notre époque, l’ensemble de l’Univers sera atteint par ce processus. Le territoire russe souffrira d’interminables dissensions et de guerres civiles, dégénérant à l’infini en confrontations à l’échelle mondiale. Cette dégénérescence deviendra absolument irréversible dans la mesure où les puissances du monde entier (européennes comme asiatiques et américaines) placeront leurs richesses, leurs intérêts commerciaux et leurs visées stratégiques au service de l’apparition de nouveaux petits États ; non seulement les voisins impérialistes développeront des rivalités mutuelles, afin d’asseoir leur domination et de s’emparer de « pôles de défense », mais ils s’emploieront également à « annexer » de manière implicite ou explicite ces nouveaux États, instables et vulnérables (l’Allemagne s’étendra vers l’Ukraine et les pays baltes, l’Angleterre s’attaquera au Caucase et à l’Asie centrale, le Japon convoitera les côtes extrême-orientales, etc.). La Russie se transformera en d’immenses « Balkans », source de guerres éternelles, immense terreau de désordres. Elle deviendra un lieu d’errance planétaire, où convergeront les rebuts sociaux et moraux du monde entier (« infiltrés », « occupants », « agitateurs », « espions », spéculateurs révolutionnaires et « missionnaires »). Tous les criminels, intrigants politiques et religieux de l’univers y convergeront en masse. La Russie démembrée deviendra alors l’ulcère incurable de ce monde.

2. Démontrons dès à présent que le démembrement de la Russie, fomenté en secret par les puissants de ce monde, ne possède pas le moindre fondement, ni aucune finalité au plan spirituel ou de la realpolitik, sinon une démagogie révolutionnaire, la crainte absurde d’une Russie unie, et une profonde inimitié vis-à-vis de la monarchie russe et de l’Orthodoxie orientale. Nous savons que les peuples occidentaux ne comprennent ni ne tolèrent la singularité russe. Ils perçoivent l’État russe unifié comme entrave à leur expansion commerciale, linguistique et militaire. Ils s’apprêtent à scier la « branche de bouleau » russe en rameaux, puis à briser ces rameaux séparément pour les brûler dans le brasier déclinant de leur civilisation. Il leur est nécessaire de démembrer la Russie afin de la soumettre au nivellement et à la décomposition occidentaux, la menant ainsi à sa perdition : voici en quoi consiste leur plan haineux et avide de pouvoir.  

3. Les peuples occidentaux se réfèreront vainement aux grands principes de « liberté », de « liberté nationale », à l’exigence d’« autonomie politique »… Pourtant, jamais et nulle part les délimitations tribales des peuples n’ont coïncidé avec celles des Etats. L’Histoire dans sa globalité en a apporté les preuves vivantes et convaincantes. Il a toujours existé des tribus et peuples peu nombreux, inaptes à acquérir leur autonomie politique : retracez l’Histoire millénaire des Arméniens, peuple autonome par son caractère et sa culture, cependant dépourvu d’État ; puis demandez-vous où se trouve l’État indépendant des Flamands (4,2 millions d’entre eux vivant en Belgique, un million en Hollande) ? Pourquoi ne sont pas souverains les Gallois et les Ecossais (comptant pour 600 000 habitants) ? Où se trouve l’État des Croates (correspondant à trois millions de personnes), des Slovènes (incluant 1,26 million d’habitants), des Slovaques (près de 2,4 millions), des Vénètes (65 000 personnes) ? Qu’en est-il des Basques français (170 000 habitants), des Basques espagnols (450 000 personnes), des Tsiganes (moins de cinq millions), des Suisses romanches (45 000 personnes), des Catalans d’Espagne (six millions), des Galiciens (2,2 millions de personnes), des Kurdes (plus de deux millions) et de la multitude d’autres tribus asiatiques, africaines, australiennes et américaines ?

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Ainsi, les « liens tribaux » en Europe comme sur les autres continents ne correspondent nullement aux frontières étatiques. De nombreuses petites ethnies n’ont trouvé leur salut qu’en s’agrégeant à des peuples de plus grande envergure, constitués en Etats et tolérants : accorder l’indépendance à ces petites peuplades reviendrait soit à les faire passer sous la coupe de nouveaux conquérants, portant ainsi un coup fatal à leur vie culturelle propre, soit à les détruire à jamais, ce qui serait spirituellement dévastateur, économiquement coûteux et politiquement absurde. Souvenons-nous de l’Histoire de l’Empire romain – il s’agissait d’une multitude de peuples « intégrés », bénéficiant des droits liés à la citoyenneté romaine, indépendants et protégés des Barbares. Quid encore de l’Empire britannique contemporain ? Et voici précisément en quoi consiste aussi la mission civilisatrice de la Russie unie.

Ni l’Histoire, ni la culture moderne de la légalité ne connaissent cette loi selon laquelle « à chaque peuplade son État ». Il s’agit là d’une doctrine récente, absurde et mortifère, désormais portée au pinacle dans le but unique de démembrer la Russie unie et de briser sa culture spirituelle propre.  

II

4. Que l’on nous ne dise pas, par ailleurs, que les « minorités nationales » de la Russie vivaient sous le joug oppressif d’une majorité russe et de son souverain. C’est une fabulation idiote et fallacieuse. La Russie impériale n’a jamais dénationalisé ses petits peuples, comme l’ont fait, par exemple, les Allemands en Europe occidentale.

Donnez-vous la peine de jeter un coup d’œil à une carte historique de l’Europe à l’époque de Charlemagne et des premiers carolingiens (768-843). Vous y verrez que, presque du Danemark même, le long et au-delà de l’Elbe (du slave « Laba »), à travers Erfurt, jusqu’à Ratisbonne et sur le Danube étaient installées de nombreux peuples slaves : Abodrites, Loutitches, Linones, Heveli, Redari, Oukri, Pomériens, Sorabes et beaucoup d’autres. Où sont-ils tous ? Que reste-t-il d’eux ? Ils ont été conquis, éradiqués et dénationalisés par les Germains. La tactique des conquérants était la suivante : après une victoire militaire, les Germains convoquaient la classe supérieure du peuple conquis. Cette aristocratie était alors massacrée sur place. Puis ce peuple « étêté » était soumis au baptême et converti de force au catholicisme. Les dissidents étaient tués par milliers, les autres étaient germanisés sans vergogne.

A-t-on déjà vu quelque chose de semblable dans l’histoire de la Russie ? Jamais nulle part ! De tous les petits peuples de Russie assimilés par l’Empire au cours de l’histoire, tous ont conservé leur identité propre. Il faut distinguer, c’est vrai, les classes supérieures de ces peuples, mais uniquement parce qu’elles ont été intégrées aux classes supérieures de l’empire. Ni le baptême forcé, ni l’éradication, ni l’uniformisation n’ont été des pratiques russes. La dénationalisation forcée et le nivellement communiste n’ont été introduits que par les bolchéviques.

En voici la preuve : la population allemande, qui avait absorbé tant de peuples, fut soumise à une dénationalisation impitoyable en faveur d’une homogénéité allemande, tandis qu’en Russie, les recensements établirent d’abord plus d’une centaine, puis près de cent soixante tribus linguistiques et jusqu’à trente confessions religieuses différentes. Et messieurs les « démembreurs » voudraient nous faire oublier que la Russie impériale a toujours respecté l’intégrité des compositions tribales lorsqu’il s’agissait de procéder à des démarcations territoriales.

Rappelons l’histoire des colons allemands en Russie. Ont-ils été soumis à quelconque dénationalisation pendant 150 ans ? Entre 40 000 et 50 000 colons se déplacèrent vers la Volga et le sud de la Russie durant la deuxième moitié du XVIIIème siècle (1765-1809). Au début du XXèmesiècle, ils constituaient la couche la plus riche de la paysannerie russe et représentaient 1,2 million d’individus. Leur langue, leurs confessions et leurs coutumes étaient tolérées par tous. Et quand, poussés par les expropriations bolchéviques, ils retournèrent en Allemagne, les Allemands furent étonnés de découvrir qu’ils employaient des dialectes issus du Holstein, du Wurtemberg et d’autres régions. Tout ce qui avait été écrit sur la russification forcée s’écroulait ainsi et fut discrédité.

Mais la propagande politique ne s’arrête pas devant un mensonge aussi évident.

5. Il faut ensuite reconnaître que le démembrement de la Russie constitue un problème territorial insoluble. La Russie impériale n’a jamais considéré ces petits peuples comme du simple « bois de chauffage », susceptibles d’être transférés d’un lieu à vers un autre. Elle ne les a donc jamais arbitrairement déportés d’un bout à l’autre du pays. Leur installation en Russie relevait plutôt d’un processus historique et d’une libre sédimentation. Il s’agissait là d’un processus irrationnel, que l’on ne saurait réduire à des démarcations géographiques précises. Il s’agissait d’un processus de colonisation, de départ, de réinstallation, de dispersion, de confusion, d’assimilation, de reproduction et d’extinction. Ouvrez une carte ethnographique de la Russie prérévolutionnaire (1900-1910) et vous constaterez une extraordinaire diversité : notre pays était parsemé de petits « îlots » nationaux, de « ramifications », « d’environnements », de « baies » tribales, de « détroits », de « canaux » et de « lacs ». Regardez de plus près ce mélange tribal et considérez les avertissements suivants :

     a. Toute cette légende sur la carte n’est que symbolique car personne n’a empêché les Géorgiens de vivre à Kiev ou à Saint-Pétersbourg, les Arméniens en Bessarabie ou à Vladivostok, les Lettons à Arkhangelsk ou dans le Caucase, les Circassiens en Estonie, les Grands Russes partout, etc ;

      b. C’est pourquoi toutes ces couleurs sur la carte n’indiquent pas l’établissement « exclusif » d’une population tribale, mais une implantation seulement « majoritaire » ;

      c. Tous ces peuples, depuis cent ou deux-cents ans, se sont mélangés, et les enfants issus de ces mariages mixtes se sont à leur tour mélangés, encore et toujours.

      d. Tenez également compte de la capacité de l’esprit et de la nature russe à intégrer les hommes d’un sang étranger, chose qui se manifeste dans ce proverbe du sud de la Russie : « Papa est turc, maman est grecque, et moi je suis russe » ;

      e. Étendez ce processus à l’ensemble du territoire russe – d’Araks au fjord de Varanger et de Saint-Pétersbourg à Iakoutsk – et vous comprendrez pourquoi la tentative bolchévique de diviser la Russie en « républiques » nationales a échoué.

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Les bolchéviques n’ont pas réussi à arracher chaque peuple de son territoire propre, parce que tous les peuples de Russie avaient déjà été éparpillés et dispersés, que leur sang avait été mélangé et qu’ils s’étaient géographiquement entremêlés les uns avec les autres.

S’isolant politiquement, chaque peuple prétendait, bien sûr, avoir droit d’usage sur ses propresrivières et ses canaux, sur son sol fertile, ses richesses souterraines, ses pâturages, ses routes commerciales et ses frontières défensives, sans parler de la « matrice » principale de ce peuple, aussi petite fût-elle.

Ainsi, si nous détournons notre attention de ces petits peuples dispersés comme les Votiaks, les Permiaki, les Ziriani, les Vogoules, les Ostiaks, les Tchérémisses, les Mordves, les Tchouvaches (…), et que nous nous concentrons sur les substrats nationaux du Caucase et de l’Asie centrale, nous remarquons une chose. C’est que l’installation des tribus les plus grandes et les plus significatives en Russie est telle que chaque « État » individuel a dû abandonner ses « minorités » à ses voisins, tout en intégrant dans sa propre population des « minorités » étrangères. C’est ce qu’il se passa au début de la Révolution en Asie centrale avec les Ouzbeks, les Tadjiks, les Kirghizes et les Turkmènes. Les tentatives de démarcations nationales n’y ont cependant causé que des rivalités féroces, des haines et des méfiances mutuelles. Ce fut exactement la même chose dans le Caucase. La vieille querelle nationale entre les Azerbaïdjanais tatars et les Arméniens exigeait une division territoriale stricte, mais cette partition s’est révélée complètement inapplicable : des unités territoriales avec une population mixte ont été créées, où seule la présence des troupes soviétiques a empêché des massacres. Des problématiques similaires se sont nouées autour de la démarcation de la Géorgie et de l’Arménie, notamment en raison du fait que les Arméniens de Tiflis, principale ville de Géorgie, représentaient près de la moitié de la population et, qui plus est, la majorité prospère.

Il est entendu que les bolchéviques qui, sous prétexte de favoriser l’« indépendance nationale » voulaient isoler, dénationaliser et internationaliser les peuples russes résolurent tous ces problèmes avec un arbitraire dictatorial, derrière lequel se cachaient des considérations marxistes et la force des armes de l’Armée rouge.

La démarcation nationale-territoriale des peuples était un objectif profondément vain.

III

6. Ajoutons que de nombreuses tribus de Russie ont vécu, jusqu’à nos jours, dans une inculture (малокультурность) spirituelle et politico-étatique complète. Parmi ces tribus, certaines sont demeurées au stade le plus primitif du chamanisme ; toute la « culture » n’y est réduite qu’à un banal artisanat ; le nomadisme y perdure encore ; aucune ne dispose de frontières naturelles pour délimiter son territoire, ni de grande ville, ni de ses propres graphèmes, ni d’écoles primaires et secondaires, ni d’une intelligentsia, ni d’une conscience nationale, ni d’une culture de la légalité. Ils sont encore incapables d’une moindre vie politique, sans même citer l’impossibilité, pour eux, de mener des procédures juridiques complexes, à construire des représentations nationales, à développer des technologies, une diplomatie et des stratégies – cela était su des autorités impériales et fut vérifié par les bolchéviques. Aux mains des bolchéviques, ils obéissent désormais aux moindres gestes de la dictature, à la manière d’une marionnette. A peine les autorités agitent-elles les doigts que l’ensemble de la marionnette s’anime, se courbe, lève docilement les mains et ressasse les vulgarités partisanes et marxistes que lui ont inculqué ses maîtres. La démagogie et la duperie, les expropriations et la terreur, l’anéantissement de la religion et de la vie furent présentés comme l’« épanouissement national » des minorités russes. Et il y eut en Occident des fous et des observateurs véreux qui se félicitèrent de cette « libération des peuples » …

ffd902a65380d78cc34b4bb7bad28933.jpgQuestion inévitable : après la séparation de ces tribus de la Russie, qui les prendra sous sa responsabilité ? Quelle puissance étrangère se jouera d’elles et en retirera la sève vitale ?

7. Des décennies d’arbitraire, de famine et de terreur bolchévique se sont écoulées depuis. Même après l’ouragan de la Seconde Guerre mondiale, un « nettoyage national » post-guerre fut entrepris. Depuis maintenant 33 ans, les bolchéviques ont systématiquement éliminé ou affamé les pans les plus récalcitrants de la population et ont déporté les membres de toutes les tribus de Russie dans des camps de concentration, des villes nouvelles et des usines. La Seconde Guerre mondiale a conduit à la déportation de citoyens issus de la moitié européenne de la Russie, menant des « Ukrainiens », des colons Allemands, des Juifs vers l’est, vers l’Oural et au-delà, tandis que d’autres étaient déplacés vers l’ouest, comme les « Ostarbeiter », ou les réfugiés – notamment ceux qui se sont volontairement rendus en Allemagne, à l’instar des Kalmouks. Les Allemands ont occupé des territoires russes comptant près de 85 millions de personnes, massacré des otages et exterminé un demi-million de Juifs. Le rythme des exécutions n’a pas décéléré lorsque les bolchéviques sont parvenus à reprendre les territoires perdus. Pis, les massacres des minorités ont alors commencé : certaines durent être considérées comme presque éteintes –  comme les colons Allemands, les Tatars de Crimée, les Karatchaïs, les Tchétchènes ou les Ingouches. Le massacre se poursuit désormais en Estonie, en Lettonie et en Lettonie. Les représentants de l’UNRA estiment aujourd’hui les morts biélorusses à 2,2 millions de personnes, et de sept à neuf millions en Ukraine. De plus, nous savons de source sûre que les populations déclinantes d’Ukraine, de Biélorussie et de la Baltique sont remplacées par des populations issues des provinces centrales, avec d’autres traditions nationales.

Tout cela pour dire que le processus d’extinction et de remplacement national, ainsi que de déplacement de population atteint des proportions sans précédent en Russie depuis la Révolution. Des tribus entières disparurent complètement ou devinrent insignifiantes ; l’ensemble des provinces et des oblasts ont vu, à l’issue de la Révolution, leur population totalement recomposée ; des districts entiers tombèrent en déliquescence. Tous les plans et les estimations des « démembreurs » s’en trouvèrent infondés et caduques. Si la révolution soviétique s’achève en effet par une troisième guerre mondiale, les compositions tribales de la population russe changeront, ce après quoi l’idée même de démembrement politico-national de la Russie deviendra une chimère : un plan non seulement traître, mais aussi grossier et irréalisable.

8. Mais nous devons malgré tout nous préparer aux actions hostiles et saugrenues des « démembreurs » de la Russie, qui tenteront, dans ce chaos post-bolchévique, de la trahir au nom des principes sacro-saints de « liberté », de « démocratie » et de « fédéralisme ». Ils souhaitent mener les peuples et les tribus russes à leur perte. Au nom de la « prospérité », ils veulent livrer la Russie à ses ennemis : opportunistes et politiciens assoiffés de pouvoir. Nous devons nous y préparer, d’abord parce que la propagande allemande a investi beaucoup d’argent et d’efforts dans le séparatisme ukrainien (et peut-être pas uniquement ukrainien) ; ensuite, parce que la psychose de la « démocratie » et du « fédéralisme » influencent largement les penseurs postrévolutionnaires et des carriéristes politiques ; enfin, parce que les partisans du complot contre l’unité de la Russie ne renonceront à leurs ambitions qu’une fois qu’ils auront totalement échoué.

IV

9. Lorsque les bolchéviques s’effondreront , la machine propagandiste internationale s’efforcera de distiller dans le chaos russe ce slogan : « peuples de l’ancienne Russie, désolidarisez-vous ! ». Deux voies pour l’avenir de la Russie émergeront rapidement. Soit d’une part elle verra l’instauration d’une dictature nationale, qui s’arrogera les « rênes du pouvoir » et balaiera ces slogans pernicieux. La dictature mènera la Russie vers son unification, en mettant un terme à tous les mouvements séparatistes du pays. Soit d’autre part, s’il advenait qu’une telle dictature fût caduque, le pays plongera dans un interminable chaos : émigrations, immigrations, revanchisme, pogroms, paralysie des transports, chômage, faim, froid et anarchie (…).

La Russie, sombrant dans l’anarchie, s’abandonnera alors à ses ennemis nationaux, militaires, politiques et religieux. Débutera un cycle interminable de pogroms et de troubles, ce « Maelstrom du mal » que nous avons évoqué en première partie. Certaines tribus partiront ainsi en quête d’un salut illusoire, qu’elles ne trouveront que dans « l’être-en-soi », c’est-à-dire dans leur division.

Il va sans dire que tous nos « bons voisins » voudront profiter de cet état d’anarchie pour justifier leurs interventions au prétexte de leur « défense », d’une « pacification » ou d’un « rétablissement de l’ordre » (…). Ces « bons voisins » useront de leurs modes d’intervention habituels : menace diplomatique, occupation militaire, détournements de matières premières, appropriation de « concessions », pillage de stocks militaires, mise en place d’un parti unique et corruption de masse, constitution de groupes séparatistes (appelées « armées nationales-fédérales »), mise en place de gouvernements fantoches, incitation et aggravation de conflits civils sur le modèle chinois. La nouvelle Ligue des nations tentera quant à elle d’instaurer un « nouvel ordre », en correspondance constante avec Paris, Berlin ou Bruxelles, via des résolutions visant à la suppression et au démembrement de la Russie Nationale.

Admettons que tous ces efforts pour « la démocratie et la liberté » aboutissent et que la Russie soit démembrée. Qu’est-ce que cela apportera aux peuples de Russie et aux puissances voisines ?

10. D’après les estimations les plus modestes, il y existe près de vingt « États » qui ne possèdent ni territoire propre, ni gouvernement efficient, ni lois, ni cours de justice, ni armée, ni population proprement nationale. Près de vingt noms qui ne recouvrent que du vide. Mais la nature a horreur du vide. Et dans ce trou noir, dans ce tourbillon anarchique, sont aspirés des hommes et toute leurs vices. D’abord, tous les nouveaux aventuriers, en mal de nouvelles révolutions ; ensuite, les mercenaires des Etats voisins ; enfin, les opportunistes étrangers, les condottières [1], les spéculateurs et autres « missionnaires » (lisez, pour vous en convaincre, Boris Godounov, d’Alexandre Pouchkine, ou les textes historiques de Shakespeare). Tout ce chaos, toute cette propagande et cette agitation antirusse, toute cette corruption politique et religieuse seront bien entendu entretenus à dessein.

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Lentement, de nouveaux Etats seront créés ex nihilo ou selon un processus de fédéralisation. Chacun mènera avec son voisin une lutte à mort pour son intégrité territoriale et pour sa population, ce qui implique, pour la Russie, d’incessantes guerres civiles (…).

Ces nouveaux Etats deviendront, quelques années plus tard, ou bien les satellites de puissances voisines, ou bien des colonies étrangères, ou bien encore des « protectorats ». L’incapacité avérée de la population Russe, à se constituer en une fédération politique, ainsi que leur désir historique « d’indépendance », sont insurmontables. Et lorsque les plan de fédération auront été abandonnés, les peuples russes, dans leur désespoir, préféreront se soumettre aux étrangers plutôt que de se battre pour l’unité panrusse.

11. Afin de prendre la mesure de cette longue démence dont souffrirait la Russie, il suffit d’imaginer le destin d’une « Ukraine autonome ». Cet « État » devrait tout d’abord créer une ligne de défense d’Ovroutch à Koursk, puis à Kharkov, Bakhmout et Marioupol. Un front apparaîtrait ainsi entre l’Ukraine et la Russie. L’Ukraine serait soutenue par l’Allemagne et ses alliés ; et dans l’éventualité d’une nouvelle guerre entre l’Allemagne et la Russie, le front allemand s’étendrait d’emblée de Koursk à Moscou, de Kharkov à la Volga, de Bakhmout et Marioupol au Caucase. Cela représenterait une configuration stratégique inédite, où les Allemands disposeraient d’une avance tactique encore jamais vue.

Il est par ailleurs très aisé de deviner comment la Pologne, la France, l’Angleterre et les Etats-Unis réagiraient à cette nouvelle donne stratégique : il s’empresseraient de reconnaître l’« Ukraine autonome » – ce qui reviendrait, ironiquement, à l’offrir aux Allemands (…).

Peut-être l’Europe occidentale prendrait alors conscience du danger que représente pour elle leur obsession pour le « fédéralisme » et le démembrement de la Russie.

V

12. Compte tenu de ce qui a été dit jusqu’ici, il nous paraît désormais évident que l’intérêt profond des plans de démembrement de la Russie est limité, aussi bien pour la Russie que pour l’ensemble de l’humanité. Certes, tant que l’on se satisfera de verbiages, tant que les théories politiques ne s’appuieront que sur des slogans trompeurs et que l’on ne misera que sur des traîtres à la Russie, tant que les visées impérialistes des voisins se feront discrètes, tant que l’on considérera la Russie comme morte et enterrée, et donc sans défense, son démembrement paraîtra simple et aller de soi. Mais un jour les grandes puissances prendront conscience des répercussions catastrophiques que ce démembrement aura sur eux, car un jour la Russie s’éveillera et leur parlera ; alors toutes les solutions ne deviendront plus que des problèmes, et ce qui paraissait simple jadis deviendra extrêmement complexe.

Bien qu’elle fût l’objet de querelles incessantes, cette Russie en proie aux pillages, personne ne pourra la contrôler. Elle représentera alors un danger aussi immense qu’inacceptable pour l’ensemble de l’humanité. L’économie mondiale, déjà déséquilibrée par la dégradation de la production russe, se verra ainsi frappée de stagnation pour des dizaines d’années.

Le monde, déjà instable, devra relever épreuves sans précédent. Le démembrement de la Russie n’offrira rien aux puissances lointaines, mais renforcera inexorablement les puissances voisines – les impérialistes. Il est difficile d’imaginer une chose plus bénéfique pour l’Allemagne que la proclamation d’une « pseudo-fédération » en Russie : cela reviendrait à « effacer » tous les acquis des deux guerres mondiales, ainsi que de l’entre-deux guerres (1918-1939), et d’offrir à l’Allemagne l’hégémonie mondiale sur un plateau d’argent. L’indépendance de l’Ukraine ne peut être qu’une passerelle vers cette hégémonie allemande (…).

Les ennemis de la Russie démontrent leur frivolité et leur bêtise en voulant introduire les tribus russes au principe – déconcertant – du démembrement. Cette idée fut déjà proposée par les puissances européennes au Congrès de Versailles (1918). Elle fut acceptée et appliquée.

Et puis qu’advint-il ?

En Europe, un certain nombre de petits Etats apparurent, devant assurer, bien que faibles, leur propre défense : l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie ; la Pologne, vaste mais inconséquente ; la Tchécoslovaquie, stratégiquement insignifiante, friable et divisée dans ses propres frontières ; l’Autriche, petite et désarmée ; la Hongrie, réduite, affaiblie et dépouillée ; jusqu’à la Roumanie, ridiculement boursouflée [2],  mais dénuée de toute valeur stratégique réelle – et tout cela aux portes de l’Allemagne qui, désavouée, rêvait de revanche. Trente ans se sont écoulés depuis, et lorsque nous regardons le cours des évènements, nous sommes forcés de nous demander si les politiciens de Versailles ne cherchaient pas à transformer ces Etats en une proie facile pour l’Allemagne belliqueuse – de Narva à Varna, et de Bregenz à Baranavitchy. Car ce sont bien eux qui, après tout, ont fait de ces régions européennes une sorte de « jardin d’enfants », tout en laissant à ces petits « chaperons rouges » le soin de se défendre eux-mêmes, face au loup affamé et en colère… Étaient-ils naïfs au point de croire qu’une « gouvernante » française pourrait châtrer le loup ? Ou alors ils ont sous-estimé l’énergie vitale et les fières intentions allemandes ? Peut-être encore pensaient-ils que la Russie aurait encore l’intention de rétablir l’équilibre dans la balance européenne, certains que l’Etat soviétique représentait encore la Russie ? Qu’importe la question, elle est absurde…

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Il est désormais difficile de savoir ce à quoi pouvaient bien penser ces messieurs, ou plutôt ce à quoi ils n’ont pas pensé. La seule évidence, c’est que le démembrement de l’Europe, désormais partagée par les impérialistes allemands et soviétiques, est le fruit de leur bêtise, probablement la plus grande du vingtième siècle. Malheureusement, cette leçon ne leur a rien appris vis-à-vis du principe de démembrement, projet qui fut exhumé aussitôt achevée la guerre.

Pour nous, le fait que les politiciens européens aient commencé à parler au même moment d’union pan-européenne et de démembrement de la Grande Russie, est très symptomatique ! Nous subissons cette cacophonie depuis déjà longtemps. Dans les années 1920, les éminents socialistes révolutionnaires se gargarisaient en public de leur prouesse : éviter d’employer le nom « Russie » et lui préférer cette locution, pour le moins évocatrice : « les pays situés à l’Est de la ligne Curzon ». Cette terminologie d’apparence prometteuse, en réalité scélérate, nous ne l’avons jamais oubliée, et en en avons tiré les conclusions appropriées : le monde des intrigues souhaite, en coulisses, enterrer la Russie nationale et unie.

Mais cela n’est ni avisé, ni clairvoyant. Tout ceci ne procède que d’une haine et d’une hystérie séculaires. La Russie, ce n’est pas de la poussière humaine, ni un chaos. C’est avant tout une grande nation, qui n’a pas abdiqué sa force, ni renoncé à sa vocation. Ce peuple russe avait faim « d’ordre libre » (« свободный порядок »), de labeur tranquille, de prospérité et de culture nationale. Ne l’enterrez pas prématurément !

Car un jour viendra, où ce peuple s’extirpera de la fosse spirituelle où on l’a jeté, et réclamera ses droits !


[1] Désigne un chef de mercenaires italien qui, au Moyen-Âge, louait ses services de guerre à un prince, à une république, et parfois se saisissait du pouvoir dans une cité conquise ; mais aussi, un homme qui conduit ses entreprises d’une manière conquérante.

[2] La région de Transylvanie, jadis intégrée à l’Empire austro-hongrois, a été rattachée à la Roumanie à l’issue du traité de Trianon de 1920.

dimanche, 25 novembre 2018

Dr. Rainer Rothfuß: Feindbild Russland, Syrien, Geopolitik verstehen, menschliche Begegnung, Frieden

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Dr. Rainer Rothfuß: Feindbild Russland, Syrien, Geopolitik verstehen, menschliche Begegnung, Frieden

 
Die Macht menschlicher Begegnung als Alternative zur militärischen Eskalationsspirale 13. März 2018 Eggenfelden Europa steht am Scheideweg. Während das entspannungspolitische Experiment des US-Präsidenten Donald Trump nach wenigen Monaten unter dem Druck der Befürworter einer konsequenten Bekämpfung des aufstrebenden geopolitischen Rivalen Russland scheiterte, steht Deutschland als führende Macht Europas nun vor der Wahl, den von der US-Regierung unter Obama aufgezwungenen Anti-Russlandkurs fortzusetzen oder zu einer eigenständigen Vision und Strategie europäisch-eurasischer Integration zurückzufinden. Noch dominiert das "Feindbild Russland" die deutsche Medienberichterstattung. Doch in der politischen Debatte werden Stimmen lauter, die eine pragmatische und an langfristigen Stabilitätsinteressen orientierte Russlandpolitik propagieren. Ist eine EU, die sich von Russland aufs Schärfste abgrenzt der einzig denkbare Entwicklungsweg? Kulturelle und historische Verknüpfungen, die sich über Jahrhunderte zwischen Ost und West herausgebildet haben, zeigen mögliche Entwicklungspfade in einem weiter gefassten Kontext auf. In der Bevölkerung regt sich das Bewusstsein, dass die dialogorientierten und auf Austausch und Kooperation zielenden Ansätze, die Europa aus der Zerstrittenheit des Zweiten Weltkriegs herausgeführt hatten, auch Grundlage werden könnten für tragfähige friedliche Beziehungen zum östlichen Nachbarn Russland. Mittels "Volksdiplomatie" bzw. "Geopolitik von unten" hat die aus Deutschland hervorgegangene "Druschba"-Initiative (russisch für "Freundschaft") einen Weg eingeschlagen, der beiderseits der imaginären "unüberwindbaren" Grenze zwischen Ost und West einen Weg aufzeigt, der die NATO-Russland-Aufrüstungsspirale durch breit angelegte Bewusstseinsarbeit stoppen könnte: Völkerfreundschaft statt militärischer Abschreckung als Weg zum Frieden im eurasischen Raum. Damit könnte eine mittlerweile internationale Bürgerbewegung zugleich zum Wegbegleiter eines sich anbahnenden langfristigen Integrationsprozesses nie da gewesenen Ausmaßes werden: Das Giga-Projekt der eurasischen Integration im Kontext des Billionen-Projekts der "Neuen Seidenstraße".
 
Katholische Erwachsenenbildung Rottal-Inn-Salzach, IPPNW http://www.keb-ris.de
 
Internationale Ärzte für die Verhütung des Atomkrieges/Ärzte in sozialer Verantwortung https://www.ippnw.de #RainerRothfußFeindbildRusslandSyrienGeopolitikverstehen
 

samedi, 24 novembre 2018

Un tournant dans la politique étrangère allemande

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Un tournant dans la politique étrangère allemande

par Irnerio Seminatore

L'alliance pour le multilatéralisme et l'autonomie stratégique de l'Europe dans la redéfinition des relations euro-atlantiques.

La nouvelle responsabilité franco-allemande face à une géopolitique planétaire.

Heiko Maas et l'UE, "pilier de l'ordre international".

La tribune du quotidien allemand Handelsblaat du 22 août, portant la signature du Ministre des Affaires Étrangères Heiko Maas a marqué un tournant historique dans la diplomatie de la République Fédérale Allemande depuis sa constitution en 1949.

Heiko Maas a plaidé pour une révision de la politique étrangère de son pays et pour une "autonomie stratégique" de l'Europe, en faisant de l'Union Européenne "un pilier de l'ordre international".

Cette convergence, de l'Allemagne et de l'Union Européenne, permettra-t-elles d'instaurer "un partenariat équilibré" avec les États-Unis d'Amérique?

Pour l'heure c'est un tournant marquant de la diplomatie du Mittelage.

Après avoir surmonté les "limites de la politique rhénane"de H.Khol et de  la "voie allemande" de Schröder, la politique étrangère allemande a-t-elle tourné le dos à la "puissance discrète" de A.Merkel, en réagissant aux provocations  souverainistes de D.Trump et à la fragmentation décisionnelle de l'U.E, face aux nouveaux défis de l'ordre mondial?

Suffira-t-il à l'Allemagne et, avec elle, à l'Europe, de remplacer le concept global d'hégémonie par l'idéologie juridique du multilatéralisme et de la sécurité collective aux promesses aléatoires, en oubliant la décomposition géopolitique de la suprématie américaine, qui a pris la forme, sous Obama, d'une série de "deals régionaux" conçus pour la pérenniser?

La  déclaration de Heiko Maas, évoquant sa prise de distance avec les États-Unis évoque implicitement trois moments significatifs de l'histoire allemande et souligne ainsi la lente maturation de sa politique étrangère depuis la fin de la bipolarité:

- le "Rapport K.Lamers-W.Schauble" de 1994 sur les nouvelles responsabilités de l'Allemagne, suite à la réunification du 3 octobre 1990 et à la lecture d'une Europe reconfigurée, à partir des "intérêts nationaux allemands", jusqu'ici tabou.

- la déclaration informelle de M.me Merkel à Munich, en mai 2017, sur l'émancipation de l'Europe vis à vis des États-Unis et sur l'impératif des européens "de prendre en main leur destin". Ajoutons, dans le même sens, la déclaration du Président de la République française à l’Élysée du 27 août 2018, à l'occasion de la réunion annuelle des Ambassadeurs de France, sur "l'indispensable"autonomie stratégique de l'Europe" et sur une redéfinition générale de la politique extérieure et de défense de l'Europe".

- le Sommet de l'Otan des 12 et 13 juillet 2018 à Bruxelles, sur le partage du fardeau de la défense euro-atlantique et sur la menace du retrait des États-Unis de l'Alliance. La remise en cause de celle-ci s'est exprimée sous la forme du "veto", adressé par Trump à la Chancelière A.Merkel, à propos de la réalisation du " Nord Stream 2" et d'une politique énergétique moins dépendante de la Russie.

Quant au chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, dans son interview du 22 août au journal "Handelsblaat" redessine les contours d'une "nouvelle stratégie américaine" vis à vis de l'Allemagne et définit  les bases "d'un renouveau de la collaboration" avec l'allié transatlantique, en partenariat avec les autres pays européens.

Ce renouveau aurait pour fondement "le multilatéralisme", déjà rejeté  antérieurement par D.Trump, qui lui préfère le souverainisme et s’appuierait sur deux piliers:

- un "partenariat équilibré" entre les USA et l'UE

- une alliance avec tous les pays attachés au droit, aux règles contraignantes et à une concurrence loyale, au delà de l'U.E et sur la scène internationale. La carence de cette alliance est de ne pas tenir compte ni des rapports des forces, ni de l'esprit de système, autrement dit, des regroupements multipolaires du monde. Elle apparaît, de ce fait, en décalage avec les référents permanents de la politique globale et en syntonie avec les positions d'une négociation permanente et toujours précaire de l'ordre mondial.

Le changement de cap de la politique américaine vis à vis de l'U.E.- confirme le ministre allemand - a commencé  bien avant l'élection de Trump - et devrait survivre à sa présidence".

En effet, constate-t-il, " l'Atlantique est devenu politiquement plus large" de ce qu'il n'était à l'époque de la bipolarité, car la profondeur stratégique de l'Eurasie replace la menace et les dangers vers l'Asie-Pacifique.

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Les implications de la notion "d'autonomie stratégique "européenne

Les implications de ce tournant, qui sont imposées aux européens, comportent un double volet, interne et extérieur:

-à l'extérieur,

-induisant une reconsidération des relations de l'U.E.avec la Russie dans le cadre d'une architecture régionale de sécurité

-faisant de l'Europe "une puissance d'équilibre" entre Washington et Moscou. Ce positionnement inverserait la logique du "triangle stratégique" Washington- Moscou-Bruxelles, par l'adoption des recommandations de Kissinger des années 1970, selon lesquelles l'Europe doit être toujours plus proche de Washington ou de Moscou,que l'Amérique de la Russie ou Moscou de Washington.

à l'intérieur,

-poussant à une révision des fondements de toute construction politique, concernant la légitimité et la souveraineté, bref les conceptions de la démocratie, du pluralisme  et des autres formes de gouvernement.

- faisant évoluer les relations entre institutions européennes  et États-membres vers un modèle politique, organisé sur la base d'une hiérarchie contraignante , sans  avoir résolu les deux aspects majeurs de l'histoire européenne, ceux  de unité politique et du leadership.

Ainsi l'ensemble des défis posés par la notion "d'autonomie stratégique" situe cette perspective dans le long-terme, dont le calendrier échappe à toute maîtrise raisonnable et condamne cette idée à une rhétorique ordinaire.

Macron/Merkel, l'"armée européenne" et la nouvelle responsabilité franco-allemande

Or l'imprégnation de cette notion est revenue à la surface le 6 novembre dernier, à l'avant-veille des commémorations du centenaire de la "Grande Guerre 14-18",
dans l’exhortation aux européens du Président Macron, de créer une "armée européenne", pour protéger l'Europe des visées russes, américaines et chinoises.

Cette expression, reformulée en terme de "défense européenne", a été reprise par Macron dans l'enceinte du Bundestag allemand, le dimanche 11 novembre, lors des cérémonies du Volkstrauertag, consacrées aux victimes de guerre, dans le but "de ne pas laisser glisser le monde vers le chaos" et de "construire les outils de souveraineté", afin que l'Europe ne soit pas "effacer du jeu" par les grandes puissances.

"Nous devons élaborer une vision, nous permettant d'arriver un jour à une véritable armée européenne", a repris Angela Merkel à Strasbourg, devant le Parlement Européen le mardi 13, mais"pas une armée contre l'Otan", situant sa constitution dans un avenir lointain; le temps de corriger le strabisme divergent entre la France et l'Allemage. la première fixant ses priorités au Sud, la deuxième à l'Est.

Il a été observé (J.H.Soutou) que trois conditions doivent être remplies, pour répondre à ce défi:

- l'existence d'une culture stratégique commune et, de ce fait, d'une lecture partagée du système international et de ses menaces
- des moyens de défense adéquats, inclusifs d’États-majors doués de capacités de commandement opérationnels, en complément de l'Otan
- d'un budget européen, dont on ignore l'ordre de grandeur.


Les européens confrontés à l'hostilité de l'administration américaine.


Devenir un pilier de l'ordre international et instaurer une fonction de puissance d'équilibre entre Washington et Moscou, d'après le ministre allemand des affaires étrangères, sont-ils des objectifs compatibles avec l'exercice d'un "vrai dialogue de sécurité avec la Russie", prôné par les vœux du Président Macron?

En effet, dans le contexte de la nouvelle donne de sécurité transatlantique, l'autonomie stratégique de l'Europe pour se protéger des États-Unis, pouvait-elle échapper à la réaction de Trump, la jugeant "très insultante" pour le pays qui a volé au secours de la France par deux fois au cours du XXème siècle?

Le nouvel état d'insécurité du monde laisse les européens divisés et tétanisés, car le système immunitaire sur lequel a été bâtie la suprématie allemande,est aujourd'hui anéanti.
Le stress de l'urgence efface, en République Fédérale, le tabou du leadership et la faiblesse de l'économie ne compense pas, en France, l'hardiesse rhétorique des propos de Macron.

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Mais comment l'Europe peut-elle bâtir son unité, si la compétition pour le primat fertilise les esprits et la Pologne, porteuse de nouvelles perspectives stratégiques, se propose comme l'allié le plus sûr des États-Unis et si elle fédère autour d'elle des projets et des pays (l'initiative des trois mers,Baltique, Adriatique et Mer Noire), en matière d'énergie et de conceptions politiques et culturelles, qui allègent la dépendance de l'Europe vis à vis de Moscou et accroissent l’indépendance politique de la Pologne vis à vis de l'U.E?

Comment par ailleurs le divorce de la Grande Bretagne de l'Union Européenne et son choix, inacceptable pour les brexiters durs, entre la vassalisation à l'Union et le chaos d'une reddition sans conditions, pourrait -il ne pas se répercuter à l’intérieur du continent, plongeant l'Europe dans la solitude et dans la division?


La rétrospective historique et ses enseignements

Déjà le choix entre l'Europe européenne et l'Europe atlantique s'était posé dans les années cinquante/soixante, associé aux deux conceptions de la construction européenne, l'Europe des Patries et l'Europe intégrationniste, la première indépendante mais alliée des États-Unis, la deuxième tributaire d'une allégeance, qui mettra sa sécurité, au travers de l'Otan, dans les mains tutélaires du "Grand Frère" anglo-saxon et cherchera sa lumière dans les yeux de son maître.


Ce même dilemme se propose aujourd'hui, dans un système international devenu multipolaire, où la priorité n'est plus la révision de Yalta et de ses sphères d'influences et, par conséquent, des périls d'une confrontation permanente et générale, imputable à la "question allemande",mais  d'entrer pleinement dans une géopolitique planétaire, où le monde sera post-américain et post-occidental et imposera à l'Europe, sur tous les échiquiers, une montée en puissance d'autres acteurs et une diversification des fonctions d'influence, de dissuasion et de contrainte.

Dans ce nouvel environnement stratégique, l'accroissement des inconnues et des incertitudes, est signalé par la dégradation de la confiance des européens vis à vis de la nouvelle administration américaine et par le déploiement aux marges orientales du continent du projet russe d'ouverture eurasienne, ressenti comme une menace géopolitique.
 
C'était dès lors inévitable, qu'un rééquilibrage de l'axe euro-atlantique s'impose et que l'idée d'une armée européenne, à dominante franco-allemande, soit sortie de l'amnésie et proposée aux opinions et aux gouvernants, si l'Europe ne veut être effacée par les rivalités des grandes puissances.

On rajoutera à ces observations la fin du processus d'unification fonctionnelle de l'UE ( ordo-libéral ou bismarcko-keynésien), et l'urgence, pour l'Europe, de se positionner vis à vis de la Chine montante et d'autres grands pays asiatiques (Iran, Inde,Pakistan, Japon ), par le retour sur la scène mondiale des unités politiques rodées par l'expérience séculaire de la diplomatie et de l'histoire, les Nations.
 
Ça sera désormais par les alliances et par la coopération organisée entre les États européens, que seront abordées  les relations de sécurité et d'équilibre du système pluripolaire, en bannissant les prétentions universalistes de l'Occident et en embrassant en commun, comme "une vérité transcendante", les besoins mystiques et immanents de la foi.

Dans ce cadre, la pérennité des nations, qui vivent dans le temps, prévaudra sur la précarité des régimes et des formules de gouvernement, qui sont les produits de rapports aléatoires dans la vie turbulente des peuples et des conjonctures civilisationnelles.

Par ailleurs l'extension planétaire des "sociétés civiles" et la compétition entre "système de valeurs", supportant la compétition stratégique entre les États, englués dans le brouillard d'une guerre globale contre le terrorisme islamiste et dans  le maelström d'une immigration invasive et conquérante, imposeront  au monde une  configuration éthico-politique aux pôles raciaux et religieux multiples et, de ce fait, à une démultiplication des menaces, démographiques et culturelles.

C'est dans ce contexte, assombri et déstructuré par le rejet de la démocratie et de la "raison", que l'idée émancipatrice d'une volonté armée tire sa justification et sa légitimité, celles d'une nécessité défensive et existentielle, dictée par le "Struggle for Life" et éclairé par la foudre tardive d'une prise de conscience humiliante sur la solitude géopolitique et stratégique de l'Europe, que seul un rappel du réalisme politique, de l’égoïsme des intérêts et de la logique de la force peuvent soustraire au glissement désespéré et irrésistible vers la pente de la guerre, du déclin et de la mort.

Bruxelles, le 21 novembre 2018

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jeudi, 22 novembre 2018

Afghanistan. Guerre américaine ou paix russe

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Afghanistan. Guerre américaine ou paix russe

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

L'on se souvient qu'en 1979 les troupes soviétiques, dans le cadre des accords de défense mutuelle qui liaient l'URSS à l'État afghan, ont répondu à l'appel du parti communiste au pouvoir, menacé par une rébellion armée.

Cette intervention a entraîné une forte résistance des rebelles, armés par les Etats-Unis, qui conduira après une longue guerre au retrait des forces soviétiques en 1989. En 1996,  un gouvernement  nationaliste islamique, dit des taliban avait pris le pouvoir. Il en a été chassé par une coalition internationale conduite par les Etats-Unis.

En 2004, le pays est devenu une république islamique de type présidentiel. Elle est encore très largement contrôlé par Washington, qui y a établi des bases militaires importantes. Mais l'opposition nationaliste islamique demeure partout présente. Elle dispose de moyens militaires non négligeable, vraisemblablement fournis par l'Iran. Elle aussi continue à revendiquer l'appellation de taliban. La présence militaire des Etats-Unis y est rendue de plus en plus difficile.

Cependant, ceux-ci n'entendent pas abandonner leur actuelle position dominante dans l'Afghanistan urbaine. Pour eux, l'Afghanistan dispose d'un intérêt stratégique essentiel, dans la perspective de la lutte qu'ils entendent encore mener contre la Russie. Géographiquement, elle dispose de frontières communes avec le Pakistan, le Tadjikistan et des autres Etats d'Asie centrale voisins de la Russie.

De plus elle possède des ressources naturelles considérables, encore mal exploitées. Pour Washington, s'y établir avec des implantations militaires durables permet à la fois de continuer à menacer la Russie actuelle et d'espérer pouvoir bénéficier à terme des perspectives économiques du pays.

Malheureusement pour eux, l'opposition que l'on continue d'imputer aux seuls taliban, se fait de plus en plus forte et impossible à contenir. On se souviendra que l'armée américaine avait lancé il y a quelques années contre eux une bombe classique présentée comme aussi puissante que la bombe Hiroshima, sans autres effets que tuer des civils.

L'élément nouveau que doit désormais prendre en compte Washington est le retour de la Russie. Mais celle-ci le fait non militairement mais diplomatiquement, avec un succès croissant. Moscou affirme qu'il ne cherche pas à substituer en Afghanistan l'influence russe à celle des Etats-Unis. Il dit vouloir seulement vouloir intervenir pour qu'une présence américaine reste compatible avec une influence russe pacifique, dans le cadre d'un complet accord tant du gouvernement de Kaboul que des taliban.

Conférence de Moscou

A cette fin, la Russie avait organisé avait organisé à Moscou une conférence de paix le 9 novembre, à laquelle ont participé notamment la Chine, l'Iran, le Pakistan, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan et le Turkménistan. Une délégation de cinq membres, conduite par Sher Mohammad Abbas Stanakzaï, chef du conseil politique des taliban au Qatar, s'était rendu dans la capitale russe.Le gouvernement afghan, sous la pression américaine, n'y a pas été présent. Mais il a envoyé à Moscou des membres du Haut Conseil pour la paix, un organisme afghan chargé de superviser les efforts en vue de parvenir à un règlement politique du conflit. Bien évidemment, Washington avait refusé l'invitation.

La conférence de Moscou a été présentée par les Occidentaux comme un échec. Il est évident qu'il n'en est pas ressorti un accord pour une cessation immédiate des hostilités. Mais Moscou a fait admettre que tour accord de paix devrait dorénavant résulter d'une démarche commune américano-russe en ce sens. On peut penser que Donald Trump se ralliera à cette perspective, si du moins il peut l'imposer au Pentagone. Il s'était fait officieusement représenté à Kaboul par un envoyé spécial, Zalmay Khalilzad 1) diplomate américain connaissant bien l''Afghanistan où il semble avoir des intérêts personnels. Il y a retrouvé Zamir Kabulov,  diplomate russe exerçant les fonctions d'envoyé spécial en Afghanistan, qu'il connaît lui-même très bien. 2)

Or pour Moscou et sans doute aussi pour les taliban et même le gouvernement de Kaboul la conférence du 9 novembre a été un succès. On lira ici sa déclaration. 3)

Reste à savoir quelle sera la réaction de Donald Trump. Se résignera-t-il à admettre une présence diplomatique américaine et russe conjointe en Afghanistan, ou cédera-t-il aux pressions du lobby militaro-industriel américain pour poursuivre la guerre. On peut penser qu'il choisira la première solution, au vu de l'hostilité grandissante des électeurs américains à l poursuite d'une guerre dont ils voient les coûts grandissants, y compris en termes de pertes humains, pour des avantages qui leur paraissent de plus en plus lointains.

Macron devrait en tous cas se rapprocher de la position de Moscou, s'il entendait comme il le dit voir la France continuer à jouer un certain rôle au Moyen Orient et en Asie centrale.

1) https://en.wikipedia.org/wiki/Zalmay_Khalilzad,
2) https://en.wikipedia.org/wiki/Zamir_Kabulov
3)  https://actualite-news.com/fr/international/asie/6901-la-...


 

samedi, 17 novembre 2018

The Russian Crimea: Results and Future Outlooks

Pavel Tulaev

Ex: http://www.ateney.ru

Everyone recognises that Crimea is one of the most beautiful and bountiful places in the world. Not for nothing has it been called «the blest land», «a paradise», «the throne of the Black Sea», «the Russian Holy Mount», «a precious jewel in the crown of the Russian Empire», «a Eurasian microcosm», «an unsinkable aircraft carrier».

From time out of mind different peoples have settled it. It has always been a centre of resistance to, and rivalry with, diverse forces. Over the last thousand years, the history of Crimea has been inextricably linked to Holy Rus’, Muscovy, Russia and the USSR.

The military, political and trade route «from the Varangians to the Greeks», which passed through Novgorod, Kiev and Chersonese before ending at Constantinople, connected the Baltic and Black Seas, and the Slavic and Greco-Byzantine civilisations. This route became the backbone of Russia’s living and expansion space, and led to the creation of a new Orthodox state, which proclaimed itself the heiress to the Byzantine Empire, like a third Rome.

Why is it that Taurian Chersonese, not Kiev, is seen as the cradle of the Christianisation of Rus’? The reason is that Christ’s direct apostle Andrew (‘the First-called’), was preaching the word of God there, as early as during the 1st century AD. St. Clement (Pope Clement 1), the third bishop of Rome and founder of the first Christian communities in Crimea, was martyred there. In the early Middle Ages, the city was celebrated for its many saints and martyrs of Greek, Gothic and Scythian origin. The brothers Cyril and Methodius, considered equal to the apostles, arrived in Chersonese in 860 on their teaching mission; it was they who developed the basis of Slavonic literacy. It was here that the first Russian princes, Askold and Dir, accepted Christianity, along with their company. Lastly, it was Chersonese, in 988, that Prince Vladimir Svyatoslavovitch after his baptism wedded the Byzantine Princess Anna. In company with a priest – chronicler, he took books of liturgy as well as Orthodox relics from Chersonese to Kiev. The history of Kievan Rus’ would have been different without Chersonese.

Tulaev-on-Crimea_cover.jpgThe Russian colonisation of Crimea, which began during the first campaigns against Constantinople, continued to develop during the Tmutarakan principality from the 10th to 12th centuries, on the territory of ancient Tamatarkha. Here, on the banks of the Cimmerian Bosphorus, one of the first Russian places of worship, a shrine to the Most Holy Virgin, was built. Nikon, the first of the chroniclers known to us, lived here; he was to become the abbot of the Kiev-Pechersk monastery. Here Boyan, the legendary teller of tales, sang epics to the accompaniment of his dulcimer. And on this place marched the forces of the prince of Novgorod-Severski, whose deed was celebrated in the inspired «Tale of Igor’s Campaign».

At the beginning of the 13th century, the Tartar Horde seized the peninsula by force, cutting off the road from Rus’ to Constantinople. The military and political alliance with the Ottoman Empire had allowed the Muslims to hold the peninsula in their thrall for several centuries, and, at the same time, to alarm Rus’ with vicious predatory wars, which reached as far as Moscow itself.

Suppression of the hordes, bringing them under the sway of the Orthodox Tsar’, and incorporating Crimea into the Russian state, were very intricate problems, the resolution of which did not begin in the reign of Catherine the Great, but as early as Ivan the Terrible’s time. True, the first Russian campaigns to the Black Sea were not entirely successful, but without the military experience of Prince Golytsin, without Peter the Great’s Azov campaigns, without the strategic plans of Anna Ioannovna of Russia and Elizabeth Petrovna of Russia, Prince Potemkin would have had no basis for his ambitions in Crimea.

The absorption of Crimea into the Russian Empire was a progressive development for a number of reasons. Above all, it destroyed a focus of military threat for many Christian peoples: Greeks, Armenians, Goths, and Bulgarians. The Crimean Tartars were given the opportunity to shift from a nomadic way of life, based on warfare, to peaceful, constructive labour, but preserved themselves as an ethnic group. The rich economic potential of Crimea began to be realised on a larger, more diverse, scale. Scientists began to research all aspects of life and activity on the peninsula. It became part of enlightened European civilisation. Lastly, this valuable geopolitical acquisition facilitated the spread of the Orthodox Empire to the shores of the Black Sea and to the establishment of closer ties to Mediterranean and Western European countries, which, in turn, gave impetus to the development of Ukraine and Novorossiya. A new chapter opened in the life of the entire Eurasian region.

The sacrament of marriage entered into by Rus’ and Byzantium under the veil of the Blessed Virgin made our fatherland the tabernacle of the Queen of Heaven, while the acquisition of Crimea led to the building of the new «Mount Athos (Holy Mountain)». Crimea became not only a popular Riviera, the best-loved holiday resort of the well-off, but a place of pilgrimage for simple Christians. During the Romanovs’ rule, many valuable works pertaining to our national culture were created here.

Russia’s sortie on to the vast expanse of Black Sea significantly strengthened the international position of the Orthodox Empire. However, old Europe was watching the growth of its power with envious eyes. It always took advantage of any opportunity to weaken Russia’s position in Crimea, blowing political dissension up into bloody war. The blockade and merciless bombardment of Sebastopol in the years 1855-1856 are an instructive example.

The cost of the victories in the Crimea

We must not forget the terrible price of our victories in Crimea. During the 18th century, the Russian army, during the Russo-Turkish wars, lost a total of over 250,000 men, including those killed outright, and those who died of injury and illness.
Russia, in the 19th century, was obliged to wage four large-scale wars to retain and expand its possessions in the northern Black Sea coastal zone. According to specialists, Russia’s losses were no less than 450,000 men.

About 600,000 more people perished in the defence and liberation of the peninsula during the Second World War. No accurate information is yet available on the casualties of the civil war during the revolutionary period at the start of the 20th century. In any event, the overall losses sustained in wars for the Crimea are of the order of 1.5 million people.

There is a major monument to Russian military glory in Sevastopol – the Brotherhood Cemetery. It combines the graves of the first defence of the city and of the defenders of 1941 and 1942, as well as of the sailors from the battleship «Novorossiya», and the nuclear submarines «Komsomolets» and «Kursk». Here, in mass and personal graves, lie up to 50,000 warriors, which, as we have seen, is only a fraction of the cost in human life.

The revolution turned into a social catastrophe and a terrible tragedy for the peninsula. In November 1920 alone, over 145,000 Russian refugees fled the Crimea by sea. During the Red Terror, the widespread hunger, the liquidation of the kulaks, persecution of the Cossacks and other repressions, hundreds of thousands of people lost their lives. Many places of worship were closed and destroyed, while the monasteries were converted into labour communes and stores. The estates of the aristocracy and of the rich were looted, and, if they were lucky, converted into public spas or recreation centres. However, thanks to the bravery of museum staff, some of the art treasures and libraries were saved and preserved.

The Soviet government’s foreign policy in substance brought about the so-called «localisation» of the Tartars and Ukrainians living on the peninsula. Russians were temporarily in the minority. An attempt was made to create a Jewish Republic in Crimea. However, the attempts to wrest the former Taurian province from Russia ended in failure. In Stalin’s time, the Russian portion of the peninsula’s population began again to grow. Whereas in 1927 our compatriots made up 42% of Crimea’s population, in 1959 this figure had grown to 71.4%, and, by 2003, 79%. True enough, we should bear in mind that the deportation of persons of non-Slavonic origin between 1941 and 1944 no doubt had an effect on the sharp change in the statistical data. Also, many holders of Russian passports were Ukrainian by origin.


The Russians were always the most educated section of Crimea’s population. Even in the days of Khrushchev’s recklessness, we were bringing spiritual and temporal enlightenment to other peoples. By the start of the 21st century, there were over 400 doctors habilitati, more than 2000 doctors, and more than 12,000 highly qualified specialists active in the fields of research and education.


In the post-Soviet period, after long years of atheism and terror, the Christian faith began to re-vitalise the sacred land of Taurian Chersonese. The Orthodox cross began to shine with new glory over the Crimea, and the light of Christ enlightened us sinners, so that we might understand God’s Plan and lovingly carry it out.

Ancient places of worship have been restored and new ones opened. Orthodox communities and brotherhoods are being created, and ecclesiastical newspapers and journals are being published. The awakening of an Orthodox and Slavonic movement has inspired the hope that the Russian Crimea will rise again under the flag of the apostle Andrew the First Called, which will bring together Christian, patriotic and naval traditions.


The short-lived Ukrainisation of Crimea has not outwardly changed the familiar flow of religious, scientific, cultural and leisure and tourism aspects of life on the peninsula. It has but little effect on the peninsula’s economy. However, from a military and political point of view, Ukrainisation was a destructive process. Crimea, at the transition from the 20th to the 21st century, became an area of instability, the fault line in Eurasia’s defensive alliance.

It will not be easy for Russia to develop under conditions of permanent aggression from the West, and its economic and political blockade. The West, however, is not the whole world. There is always the East, ancient, wise and powerful. There are the economically developed countries of Asia and other regions, with which Russia has strengthened its relations through such international structures as the Eurasian Economic Union (EAEU), the Shanghai Co-operation Organisation (SCO), the Collective Security Treaty Organisation (CSTO), the deliberative bodies of the BRICS countries (Brazil, Russia, India, China, and the Republic of South Africa), et cetera. Nor is our country a tiny state, it is a vigorous power, which has entered the 21st century with confidence.

A new stage in Russia’s destiny

From a geopolitical point of view, 2014 saw the beginning of a new turn in the process of integrating the Russian regions. This is being complicated by Ukrainian nationalists, who keep ‘throwing spanners in the works’, by using ideological propaganda, and economic and political levers. In essence, Kiev is organising an all-out blockade of the peninsula. This cannot fail to cause problems of another sort. However, they are all temporary. All misapprehensions and technical difficulties can be sorted out as they arise, while the strategy of developing a Russian Crimea inspires hope for a better future.

Despite the aspersions of the opponents of the reunification, the critics and the eternal complainers, the peninsula has begun to develop much more dynamically than before. This is reflected in radical economic and social reforms for the good of its citizens, the complete refurbishment of many buildings, the building of new roads, and the modernisation of education and the health service.


As we can see, much progress has been possible despite all the blockades and sanctions. Even Western researchers recognise that life in Crimea is, on the whole, much better and more stable than in Ukraine. And, when the Kerch Bridge opens, things will be easier.

Besides, the peninsula’s development should be considered in the light of events in the south- eastern regions of Ukraine, the past and present Novorossiya. The Northern Tauria has always had close ties to Crimea, while Donbas was, and still is, the most important industrial and energy centre in the southern region.

The Russian Spring drew universal attention to the Crimea, which triggered new research into the blessed land. Books by A. Shirokorad, O. Greig, M. Korsun, A. Prokhanov, N. Starikov and other authors have been published. Previous scientific experience has been collected in the «The History of Crimea» monograph, brought out on the initiative of the Russian military history society.


The National Committee for preservation the Republic of Crimea’s cultural heritage is hard at work under the supervision of military historian V. Zarubin, who co-ordinates his activity with the local government, cultural and social organisations, as well as with the Civic Chamber of the Russian Federation, which specialises in the very same subject. A list of facilities requiring additional attention and funding has been drawn up, on the basis of which the appropriate requisitions have been made.

Vladimir Putin, who is constantly monitoring the course of events on the peninsula, has pointed out that separate funds are being allocated from the national budget not only for the construction of the Kerch Bridge, roads and power lines, but also for the restoration of monuments. «Crimea’s cultural objects are the heritage of all Russia, which has been accumulated over centuries, including Aivazovski, and Chekhov, and Kuprin, the flower of Russian culture, on whose works we have been educated for generations, and on which our children and grandchildren will also be educated», states our President.

In this connection, it is fitting to recall that, in June 2016, the monument to Catherine the Great, destroyed in Soviet times, was triumphantly re-erected in Simferopol to mark Navy Day. The sculptors are Aleksandr Chekunov and Dmitri Startsev.

A monument to General Vrangel’ was unveiled in September 2016 in Kerch, at the church of the apostle Andrew the First-called. It was created to the design of sculptor Andrew Klykov, the son and successor of outstanding sculptor and public figure Vyacheslav Mikhailovich Klykov. At a time when Crimeans, busy restoring their economy, infrastructure and cultural heritage, appealed for help to the government of fraternal Russia, the Ukrainians stepped up their informational counter-measures and received tangible assistance from the USA. More than 100 nationalistically inclined journalists and their electronic resources, such as «Crimea. The realities», «The Island», «Hromadske TV») received grants from the Soros Fund amounting to 500,000 dollars, which meant that the flow of ideological propaganda from Kiev intensified.

To sum up generally the research we have conducted over many years, the following may be confidently asserted. There was no annexation in 2014. Holy Rus’, Orthodox Muscovy, the Russian Empire, and the USSR all had close ties with Tauride over many centuries. After the illegal, short-lived isolation of our compatriots from their Motherland, they went back home as soon as a real chance resented itself. The natural, completely lawful, long-awaited re-unification of a single nation took place, on the basis of a legal referendum. This was the restoration of historical justice, the triumph of Truth and Orthodoxy. A new chapter opened in the Destiny of the Russian people, a new stage of ethnic and religious re-birth. Hail the heroes! Eternal remembrance to the holy martyrs and innocent victims!

Pavel Vladimirovich Tulaev, Professor,
International Slavonic Institute, Moscow (Russia)

 

jeudi, 08 novembre 2018

Russia, India & Iran Want to Create Alternative Trade Route to Suez Canal

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