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dimanche, 02 mai 2010

Pensée, parole, action dans la tradition indo-européenne

Pensée, parole, action dans la tradition indo-européenne

Jean Haudry

Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

La première partie de cette étude, fondée sur une série de travaux antérieurs de l’auteur, est consacrée à montrer, contre l’opinion qui a prévalu ces dernières décennies, que la célèbre triade avestique pensée, parole, action a des correspondants anciens, le plus souvent hérités, dans plusieurs autres traditions du monde indo-européen, et notamment en Grèce, où la triade figure dans un texte daté du VIIIe siècle, la « Grande Rhètra » de Tyrtée, dans les poèmes homériques et chez Hésiode. Ces correspondants sont restés inaperçus jusqu’à ce jour, en dépit de quelques indications remontant au XIXe siècle, parce que les formes les plus anciennes de la triade sont beaucoup plus libres, et donc beaucoup moins saisissables, que les formes les plus récentes, issues d’un processus de «cristallisation» déjà signalé dans l’une des premières études qui lui ont été consacrées: manifestement, la triade a été vécue et mise en pratique avant d’être formulée et bien avant que sa formulation ne se fixe. L’évolution est sensible de l’Avesta ancien à l’Avesta récent et, à l’intérieur de l’Avesta ancien, des Gâthâs au Yasna aux sept chapitres. Il est apparu d’autre part que la triade présente deux variantes principales: l’une dans laquelle le corps, ou, plus anciennement, l’un de ses constituants, tient la place de l’action (la «triade médicale» indienne, et ses parallèles germaniques), l’autre dans laquelle la vue tient la place de la pensée – à moins que ce ne soit l’inverse.

A partir de ces données a été effectuée une triple reconstruction.

1° Une reconstruction des formes par lesquelles s’expriment les termes de la triade. Elles sont assez unitaires pour la variante principale, dans laquelle les trois notions sont exprimées par les dérivés verbaux et nominaux des racines *men- «penser», *wekw- «parler», *werg̑- «faire», plus flottantes pour les variantes secondaires: il n’y a pas de désignation ancienne du corps, et l’on a supposé récemment que «voir» était le sens premier de la racine *men-, dont le sémantisme apparaît beaucoup plus complexe que celui des deux autres. Outre les formes, on reconstruit une «triade de la conformité» comportant pour chacun des termes une forme de la racine signifiant «adapter, ajuster», et une «triade héroïque» comportant le nom du héros. La triade se présente donc dans une situation intermédiaire entre celle des formules reconstruites réunies par Rüdiger Schmitt et celle d’un groupe de notions comme les «trois fonctions» de Georges Dumézil. De fait, la triade et ses variantes sont largement représentées dans les trois domaines – indo-iranien, grec, germanique – dans lesquels le formulaire traditionnel est bien conservé. On n’en connaît pas d’exemples latins. Il est en revanche un exemple slave dans le mythe du dieu printanier Jarilo, qui par l’éclair a donné à l’homme la pensée, par le tonnerre la parole, par la foudre à la fois le feu et l’éveil, «feu de l’action».

2° Une étude rétrospective de la transmission, envisageant les différentes possibilités, héritage, emprunt à l’Avesta, direct ou indirect (à travers la formule du Confiteor). Il en ressort que des attestations anciennes peuvent résulter d’un emprunt (la triade principale chez Héraclite) et qu’en revanche des attestations plus récentes sont attribuables à un héritage (la «triade médicale» dans les poèmes eddiques).

3° Une étude de la signification des termes reconstruits, de leurs rapports mutuels, et des rapports de la triade avec la société; il en ressort que la variante principale est liée à la «société héroïque» de la période des migrations qui met l’accent sur l’opposition entre la vérité (la loyauté, la fidélité) et le mensonge (la déloyauté, l’infidélité) dans les rapports entre le chef et ses compagnons, et sur le «choix» entre ces deux attitudes. De la provient la prédominance du couple parole (donnée) action. Mais le *ménos y trouve sa place, qu’il s’agisse de l’ardeur du guerrier ou de l’inspiration du poète. Une situation privilégiée est le rituel, où ces trois activités complémentaires ont été institutionnalisées. La variante pensée, parole, corps est devenue la «triade médicale».

La seconde partie montre que les cinq termes impliqués, les trois de la variante principale (pensée, parole, action) et les deux autres (corps, vue), sont étroitement liés au feu, en particulier, mais non exclusivement, à ses formes latentes: il y a un «feu de la vision», lié en partie au «feu du regard»; un «feu de la pensée»; un «feu de la parole»; un «feu de l’action»; et un assez grand nombre de «feux du corps», qu’il s’agisse du «feu de la vie» ou des feux de différents fluides corporels, comme le feu froid du phlegme. On y a joint un chapitre consacré aux «feux de la personne» rassemblant les diverses composantes sociales qui s’ajoutent à l’individualité, en premier lieu le lignage, et qui sont figurées sous la forme d’un «rayonnement» ou d’un feu: feu de la gloire, feu de l’autorité, feu de la fortune. Il y a aussi un «feu du lignage».

Outre les deux conclusions principales, l’antiquité de la triade avec ses variantes et leurs rapports avec le feu, un certain nombre de vues nouvelles ont été exposées chemin faisant:

L’interprétation par la triade du rôle de trois des quatre officiants majeurs du sacrifice védique, le brahman (pensée silencieuse), le chantre (parole chantée), l’officiant manuel (action physique); cette hypothèse concorde avec celle selon laquelle le hotar «oblateur» s’identifie initialement au sacrifiant laïc, et n’est donc pas un officiant et la comparaison avec le *gudjan germanique, désigné lui aussi comme «celui qui verse la libation». Cette tripartition fondée sur la triade se retrouve dans les Mystères d’Eleusis et dans les dénominations islandaises du magicien (§§ 1.2.10, 1.3.4, 1.7.2.4). La triade a eu tendance à s’institutionnaliser.

Le feu physique s’intériorise parfois pour produire l’une ou l’autre des formes du feu de la pensée (§ 3.7). Le tapas, spécifiquement indien, est issu d’un tel processus; mais, au départ, il doit s’agir de la transposition au prêtre du feu de l’action guerrière, beaucoup plus largement représenté (§ 3.4.7.9).

Les différents sens du vieil-indien púruṣa- (homme, géant primordial, pupille de l’œil, âme, feu latent des plantes) ont en commun un rapport direct ou indirect avec le feu, ce qui suggère de rattacher la forme à l’un des noms du feu (§§ 3.3.1, 5.6.3). Il en va de même pour un certain nombre d’autres noms communs de l’homme, du héros, et de noms propres de peuples. Le «feu de la victoire» et la «lumière du héros» sont des formes du feu de l’action (§ 5.5).

A partir du «feu de la parole», le Feu divin est à l’origine du théâtre en Inde, avec Bharata (= Agni) et en Grèce, avec Dionysos, ancien Feu divin «fils de Zeus» (§ 4.9).

Le Feu de la parole s’incarne dans plusieurs personnages mythologiques comme Narāśaṃsa dans l’Inde védique, Nairyō.saŋha dans l’Avesta, dont le nom signifie «proclamation qualifiante des seigneurs» et qui sont une forme du Feu divin du panthéon correspondant; une part de la mythologie du dieu scandinave Loki s’explique aussi par là (§§ 4.8.1 et 4.8.3).

Le genius latin est l’équivalent de l’agni jania «feu lignager» védique (§ 7.4.3).

L’*awgos est un éclat, cf. grec αὐγή « éclat solaire » (§ 7.6.6).

Le nom i.-e. du roi, *rēg̑-, est issu de composés dans lesquels la forme signifie «éclat» (§ 7.6.7).

Plusieurs concordances ont été relevées entre le domaine germanique et le domaine indien: l’homonymie des deux substantifs vieil-islandais bragr «art poétique» et «éminent» et la convergence entre Bráhmaṇas páti «maître de la formule» et Bŕ̥haspáti «maître de la hauteur» (§ 4.2.1); la légende de Thor et Loki et celle d’Indra et Kutsa (§ 4.8.3) ; le feu de l’installation sur un nouveau territoire (§ 3.5.4); le rôle du Feu divin dans la procréation (§ 6.4.1.6). Certaines s’étendent à l’ensemble indo-iranien, et au domaine grec: ainsi la correspondance entre la «Satire contre le noble», les syntagmes sur lesquels se fondent les théonymes Nárāśáṃsa, Nairyō.saŋha, et le nom propre grec Cassandre (§ 4.8.1.9), ainsi que la «triade médicale» précitée. Une concordance formulaire indo-grecque: l’adjectif védique suagní- «qui possède un feu bénéfique» et les Eupuridai (§ 7.3.1).

Ces quelques exemples donnent un aperçu de la fécondité de l’hypothèse proposée pour la reconstruction de la tradition indo-européenne.

Jean Haudry

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mardi, 27 avril 2010

Le monde du tantrisme indien

couple-01.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1999

Le monde du tantrisme indien

 

Analyse : Helmut UHLIG, Das Leben als kosmisches Fest.

Magische Welt des Tantrismus, Gustav Lübbe Verlag, Bergisch Gladbach, 1998, 304 p., ISBN 3-7857-0952-8.

 

Né en 1922 et décédé en 1997, Helmut Uhlig, historien de l’art, a été pendant toute sa vie fasciné par l’Inde. On lui doit des ouvrages remarqués sur des thèmes aussi diversifiés que la route de la soie, sur le Tibet, sur l’Himalaya, sur l’Anatolie, sur la Grande Déesse, sur le bouddhisme et le tantrisme, etc. Jochen Kirchhoff vient de publier son dernier livre sur le tantrisme, resté inachevé, en le complétant d’une postface remarquable, branchant les réflexes mentaux que nous enseignent les voies tantriques sur les acquis de la physique et de la biologie contemporaines.

 

Premier constat d’Uhlig : le monde occidental est atomisé, handicapé psychiquement. Les Occidentaux et les Asiatiques qui les imitent vivent désormais dans un monde d’illusions et de falsifications, où l’esprit de carrière, l’envie, l’obsession de l’avoir et l’orgueil tiennent le haut du pavé. Il écrit (p. 9) : «…l’homme a perdu son fonds originel (Urgrund) religieux et noumineux, est victime d’une attitude purement matérialiste et pragmatique, qui domine le monde occidental, qui a ses racines intellectuelles dans cette vita activa, issue de l’esprit greco-romain et du christianisme paulinien». Exactement comme Evola, il constate que ce double héritage de l’hellénisme (qui n’est pas la Grèce dorienne des origines, précisons-le ! !) et du paulinisme distrait dangereusement l’homme, qui devient incapable de saisir le noumineux : «Ce sont des éléments que nous pouvons considérer comme des représentations originelles de l’esprit et de la dignité humains qui, au cours des millénaires, n’ont rien perdu de leur force, de leur signification et de leur pouvoir fondateur de sens. Nous les résumons sous le concept de “tantrisme”, un concept encore et toujours mystérieux, à la fois magique et cosmique» (p. 10). Le tantrisme est donc la religiosité qui se réfère immédiatement au “vécu primordial” (Urerlebnis), et n’est nullement cette pâle caricature que certains tenants du New Age et de la spiritualité de bazar en font. Le boom ésotérique de ces récentes années a fait du vocable “tantrisme” un article de marché, une fadeur exotique parmi tant d’autres. Ceux qui l’emploient à tort et à travers ne savent pas ce qu’il signifie, n’en connaissent pas la profondeur.

 

«Je vais tenter dans ce livre d’aborder et de révéler le tantrisme comme un phénomène cosmique, comme l’un des vécus primordiaux de l’homme. Ce qui est nouveau dans mon approche du tantrisme, c’est que je ne vais pas le réduire à ses manifestations historiques, comme celles qui nous apparaissent dans l’espace culturel indien et himalayen mais je vais poser la question des origines et de la puissance de la pensée et du vécu tantriques. Car je crois que, dans le tantra, se cache l’un des phénomènes primordiaux de l’Etre de l’homme. Ainsi, mon texte est une tentative de retrouver la trace de ce phénomène primordial et de sa constitution cosmique, de la rendre visible, car, dans les dernières décennies du deuxième millénaire, elle acquerra une importance toujours croissante et une puissance réelle, y compris pour le monde occidental» (p. 11). Ensuite, il précise son approche du noumineux : «Il existe des aspects de la réalité qui ne sont ni spatiaux ni temporels. Ils n’ont pas de dimension historique. Ils agissent (wirken), mais restent pour nous invisibles, ils viennent du Tout, du cosmos, et sont reconnaissables de multiples manières» (p. 19).  

 

C’est en 1960 que Helmut Uhlig débarque pour la première fois en Inde. Le Brahmane qui le reçoit et le guide lui déclare, quelques jours après son arrivée : «Nous les Indiens, nous sommes assez tolérants. Le mot de Yahvé qu’on trouve dans la Bible : “Tu n’auras pas d’autres Dieux que moi”, personne ne le comprend ici. Et personne ne le suivrait d’ailleurs, vu le très grand nombre de Dieux qui sont enracinés dans la psyché de notre peuple. C’est aussi la raison pour laquelle les missionnaires chrétiens ont à peine été acceptés en Inde» (p. 14). Le culte de Shiva et des autres divinités indiennes prouve combien profondément enracinée dans l’âme hindoue est la propension “à être toujours bien disposé à l’égard de tous les Dieux à la fois, à ne pas se couper d’eux” (p. 21). D’où la religiosité tantrique repose sur une acceptation du monde tel qu’il est dans sa pan-imbrication (Allverflechtung), où monde visible et invisible sont unis par mille et un fils (de tapisserie). Uhlig en conclut que des éléments tantriques ont été présents dans toutes les religions primordiales. Mais cette idée centrale de pan-imbrication de tout dans tout est difficile à expliquer et à comprendre, surtout pour les Occidentaux, habitués à penser en termes de césures et de cloisonnements. Le terme “tantra” lui-même dérive d’une racine étymologique, tan, qui signifie “élargir”, “accroître en dimension et en étendue”. Quant à tana, cela signifie tout à la fois “fils” (au pluriel) et “étendue”. Tantawa signifie “fait de fils”, “tissé”. Le tantrisme indique donc ce qu’est la texture du cosmos : un tapis immense fait de milliards et de milliards de fils (p. 28).  Uhlig : «Nous ne pouvons comprendre et juger correctement le tantrisme que si nous nous libérons de l’emprise des commandements et des principes qui nous sont conventionnels et que l’Etat et la religion ont imposés chez nous depuis la fin du moyen âge. Les critères de valeurs que nous a transmis le christianisme clérical, notamment la doctrine des catégories du bien et du mal, du moral et de l’immoral, troublent notre regard et le grèvent de préjugés, ne nous permettant pas d’entrer dans le monde tel que le saisit et le réalise le tantrisme. Cela vaut surtout pour le jugement que porte l’Occident sur la sphère sexuelle, ses formes d’expression et ses pratiques. Les relations sexuelles entre les personnes ne sont soumises à aucun tabou dans le tantrisme, car elles y sont considérées comme des fonctions centrales et naturelles, qui sont effectivement traduites en actes. Pour la plupart des auteurs occidentaux, qui ont écrit sur le tantrisme depuis une centaine d’années, la sexualité tantrique a suscité d’âpres critiques, formulées dans une terminologie chrétienne, dévalorisant tout ce qui touche à la sexualité. Ainsi, le tantrisme a été dévalorisé sur le plan éthique, ses cultes ont été diabolisés ; les textes critiques des Occidentaux ne tentaient même pas de comprendre le contexte du tantrisme» (pp. 26-27). Cela vaut également pour le contre-mouvement, où une mode pro-tantrique, portée par des oisifs californiens ou des décadents des beaux quartiers de Londres, a superficialisé les dimensions sexuelles, les faisant basculer dans un priapisme vulgaire et une pornographie bassement commerciale. Le tantrisme ne vise nullement à favoriser une promiscuité sexuelle de nature pornographique, à transformer la Cité en lupanar, mais, plus fondamentalement, à appréhender les secrets les plus profonds de la conscience humaine. Uhlig rend hommage au premier Européen, Sir John Woodroffe (alias Arthur Avalon) qui a traduit et explicité correctement les textes tantriques, si bien que les Indiens adeptes du tantrisme le considèrent comme un sauveur de cet héritage.

 

Les pratiques tantriques ont un lointain passé, affirme Uhlig, y compris hors d’Inde. La religiosité visant à appréhender les plus profonds secrets de l’âme humaine se retrouve partout : elle a été occultée par le christianisme ou la modernité. Ainsi, pour Uhlig, est tantrique le mythe sumérien d’Inanna et Tammuz, où une hiérogamie est réalisée au sommet d’un zigourat à huit niveaux (dans bon nombre de traditions, sauf dans le judaïsme pharisien et le christianisme, le “8” et l’octogone indiquent l’harmonie idéale de l’univers ; cf. le château de Frédéric II de Hohenstaufen, Castel del Monte, les Croix de Chevalier inscrites dans un motif octogonal de base et non sur la croix instrument de torture, les plans des églises byzantines, de la Chapelle d’Aix/Aachen ou de la Mosquée El-Aqsa à Jérusalem, le Lotus à huit feuilles de l’initiation à la Kalachakra ou “Roue du Temps”, la division de l’orbe terrestre en quatre fois huit orientations chez les navigateurs scandinaves du haut moyen âge ; pour Marie Schmitt, la religion pérenne privilégie l’harmonie du “8”, les religions coercitives et messianiques, le “7”).

 

Revenons au mythe d’Inanna et de Tammuz. Dans la chambre hiérogamique se trouvent simplement un lit, avec de belles couvertures, et une table d’or. Il n’y a pas l’image d’un dieu. L’essentiel du culte vise la préservation et la revitalisation de la fertilité. Ce culte a frappé les Israélites lors de la captivité babylonienne, ce qui s’est répercuté dans le texte du fameux “Chant des Chants”, où, en filigrane, il ne s’agit nullement de Yahvé, mais bel et bien d’une hiérogamie, tendrement sexuelle et sensuelle. Martin Buber l’a traduit, restituant sa signification originelle, au-delà de toutes les traductions “pieuses”. Pharisaïsme et christianisme paulinien/augustinien s’ingénieront à occulter ce “Chant des Chants”, joyeuse intrusion pagano-tantrique dans l’Ancien Testament. Ainsi, en 553, lors du deuxième concile de Constantinople, Théodore de Mopsuestia, interprète “sensuel” du “Chant des Chants” est banni, son interprétation ravalée au rang d’une hérésie perverse. «… les zélés pères de l’église ont tout fait pour combattre les interprétations mystiques du “Chant des Chants” : à leur tête Origène, suivi plus tard de Bernard de Clairvaux, de Bonaventure et de François de Sales, qui ont rivalisé pour en donner une interprétation dépourvue de fantaisie, fade» (p. 71). «Ici se révèle l’un des fondements de l’attitude anti-naturelle du christianisme, qui détruit l’holicité des sens et de l’Etre, qui débouche sur un ascétisme qui condamne les corps, et auquel l’église tient toujours, puisqu’elle continue à imposer le célibat des prêtres. Non seulement cela a conduit à faire perdre toute dignité aux prêtres, mais cela a rejeté la femme dans les rôles peu valorisants de la séductrice et du simple objet de plaisirs. La dégénérescence de l’antique union sacrée des corps, don de soi à l’unité mystique, dans la vulgaire prostitution en est le résultat, car la femme n’est plus considérée que comme une prostituée» (p. 71). En revanche, Inanna/Ichtar était la déesse des déesses, la reine et la conductrice de l’humanité entière. Ce passage du rôle primordial de “déesse des déesses” à celui de vulgaire prostituée constitue le fondement de l’âge sombre, du Kali Yuga. Il y a assombrissement parce que le culte de la Reine Conductrice est progressivement ignoré, parce qu’il n’y a plus d’hiérogamie sacrée possible car tout accouplement est désormais démonisé.

 

Enfin, après avoir exploré le tantrisme dans toutes ses dimensions, Uhlig rend hommage à Plotin (pp. 214-222). Plotin était également opposé à la gnose et au christianisme, rejetant leur “religiosisme”, leurs simplismes de “croyeux”, hostiles à la philosophie grecque. Plotin commence sa quête en 233, année où il rencontre le philosophe Ammonios Sakkas, dont il sera l’élève pendant onze ans. Pendant cette période, à Alexandrie, il entre en contact (tout comme Origène !) avec des représentants de la spiritualité persane et indienne. Leurs enseignements le fascinent. Si bien qu’il veut aller à la rencontre de leur culture. Il suit l’Empereur Gordien III dans sa campagne contre les Perses, espérant atteindre leur pays et découvrir directement leur religion. Uhlig écrit à ce propos (p. 218) : «L’historiographie de la philosophie en Europe n’a consacré que trop peu d’attention à ce fait et n’a jamais étudié l’influence indienne sur la philosophie de Plotin». Gordien III est assassiné en 244 sur les rives de l’Euphrate par un de ses généraux. Plotin doit fuir vers Antioche puis vers Rome. Son enseignement influence la famille impériale. Il est holiste comme sont holistes les enseignements tantriques. Ses Ennéades évoquent une Gesamtverwobenheit (un tissage cosmique), très proche de la vision tantrique originelle. L’élimination violente des filons néoplatoniciens et plotiniens dans la pensée européenne a commencé par l’horrible assassinat d’Hypathie, philosophe néoplatonicienne d’Alexandrie, par une foule de chrétiens furieux et délirants qui ont lacéré son corps et en ont traîné les lambeaux dans les rues. Elle se poursuit par l’occultation systématique de ces traditions dans nos principaux établissements d’enseignement. Cette élimination est aux sources du malaise de notre civilisation, aux sources de notre nervosité et de notre cinétisme insatiable, de nos désarrois, de notre incapacité à nous immerger dans l’organon qu’est le monde. La tradition néoplatonicienne chante, comme les filons panthéistes et pélagiens celtiques, la “merveilleuse variété” du monde et de la nature (poikilè thaumatourgia). «Il y a aussi des dieux dans la cuisine», disait Héraclite à des visiteurs inattendus, qui l’avaient trouvé près de son feu, sur lequel cuisait son repas.

 

Dans sa postface, Jochen Kirchhoff nous rappelle les exhortations de David Herbert Lawrence dans son plaidoyer pour les religiosités païennes et cycliques, intitulé Apocalypse (1930). Pour Lawrence, il fallait retourner à la cosmicité, raviver nos rapports avec le cosmos. Ensuite, Kirchhoff rappelle les tentatives de Nietzsche de restaurer les dimensions extatiques et dionysiaques de l’Etre pour les opposer au christianisme, ennemi de la vie. L’Etre doit être une “fête cosmique”, entièrement, sans partage, sans dualité.

 

Kirchhoff explore ensuite toutes les possibilités de restaurer la vision tantrique du monde (la pan-imbrication) via les pratiques sexuelles, complétant et actualisant ainsi La Métaphysique du sexe et Le Yoga tantrique d’Evola. Il salue un ouvrage à succès de Margo Anand dans les milieux “New Age” (The Art of Sexual Ecstasy. The Path of Sacred Sexuality for Western Lovers) mais constate rapidement les limites philosophiques de la démarche de cet auteur. Le New Age a produit peu de bonnes choses en la matière. Le travail de Margo Anand est bon, écrit Kirchhoff, utile pour une thérapeutique sexuelle, mais reste superficiel, ne permet pas un approfondissement philosophique et métaphysique. Quant à l’Américain Franklin Jones (alias “Da Free John”, “Da-Love Ananda” ou “Adi Da”), il a poussé la caricature du tantrisme jusqu’au ridicule (cf. son ouvrage le plus connu : Dawn Horse Testament). Finalement, le freudo-marxiste Wilhelm Reich a élaboré une théorie et une thérapeutique de l’orgasme plus valable (Kirchhoff est moins sévère qu’Evola), car sa vision de la bio-énergie ou orgon était au moins omni-compénétrante. Kirchhoff souligne toutefois bien la différence entre les rituels sexuels tantriques et l’obsession moderne de la performance (orgasmique ou non, mais toujours multi-éjaculatoire).  Car, dit-il, «il existe des rituels tantriques qui freinent effectivement l’orgasme féminin comme l’orgasme masculin, visant de la sorte une prolongation contrôlée ou un retardement de celui-ci pour atteindre des objectifs (spirituels) supérieurs ou pour obtenir un accroissement du plaisir» (p. 278). En effet, poursuit-il, l’orgasme et/ou l’éjaculation masculine mettent un terme à l’étreinte sexuelle, limitant la durée du plaisir et des caresses partagés. Retenir ses énergies (et son sperme) permet de jouir du plaisir sexuel et de donner à la femme davantage de joie. C’est dans cet exercice, cette ascèse (ce yoga), que réside la qualité inégalée du tantrisme sur le plan sexuel, le hissant très au-dessus du stupide priapisme rapide et bâclé que nous servent les médias contemporains, véhicules de la pornographie populaire.    

 

Mais c’est dans la physique moderne que Kirchhoff place ses espoirs de voir réémerger une vision tantrique de l’univers. Depuis la consolidation de la physique quantique, le monde apparaît à nouveau comme “pan-imbriqué”. Dans les colonnes d ’Antaios, Patrick Trousson avait déjà démontré l’étroite similitude entre les acquis de l’antique mythologie celtique et ceux de la science physique actuelle. Kirchhoff répète ces arguments, citant Carl Friedrich von Weizsäcker (Zeit und Wissen, 1992), Frithjof Capra (Le Tao de la physique), le physicien indien Amit Goswami (qui a comparé la philosophie du Vedanta et les acquis de la nouvelle physique), le théoricien systémique Ervin Lazslo, le biochimiste Rupert Sheldrake, etc. L’essentiel dans cette physique est de refuser les dualismes segmenteurs, de réfuter les pensées de la césure.

 

En philosophie, Kirchhoff cite l’Américain Ken Wilber (Eros, Kosmos, Logos. Sex, Ecology, Spirituality), qui lutte contre tous les réductionnismes et les dualismes. Wilber est influencé par le bouddhisme tantrique, mais aussi par les Vedanta.

 

Le livre d’Uhlig nous dévoile de manière très didactique tous les aspects de la merveilleuse vision du monde tantrique. La postface de son ami Kirchhoff nous ouvre de très larges horizons : en physique et en philosophie. La lutte d’Uhlig (et la nôtre…) contre les mutilations de la pensée n’est pas terminée. Mais nos adversaires doivent désormais savoir une chose : nos arsenaux sont mieux fournis que les leurs…

 

Detlev BAUMANN.  

 

mercredi, 14 avril 2010

Forme della personalità umana nell'Ellade

Forme della personalità umana nell’Ellade

Autore: Nuccio D'Anna

Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

leonida.jpgUno degli aspetti più caratterizzanti nello studio dell’Iliade e dell’Odissea è la scoperta delle modalità da parte di tutti i personaggi che hanno un rilievo narrativo, di “entrare” in se stessi e di dialogare non solo con gli dèi che si svelano in ogni aspetto dell’accadere umano, ma anche di scrutare i propri sentimenti, di “guardare” il vasto mondo che si muove nella vita interiore. E’ una realtà particolare, non facilmente rinvenibile in altre civiltà antiche e tale da spingere alcuni studiosi del mondo ellenico ad ipotizzare una particolare capacità percettiva, probabilmente caratterizzante l’intero popolo ellenico, tesa a dare significato al senso vivo della personalità umana che già alle origini di quella civiltà ne ha reso unica la visione del mondo.

Agli albori del mondo ellenico l’uomo rappresentato da Omero ci rivela immediatamente quello che è stato definito “il suo vigile e chiaro pensiero“, una speciale capacità di guardare il mondo in modo impersonale pur avendo consapevolezza del valore del proprio Io in quell’atto essenziale, e poi di esprimere un giudizio che tiene conto contemporaneamente della realtà esteriore, della libertà insita in ogni scelta, del fatto che ciò che ne sostanzia il significato è la persona del singolo, l’uomo libero. Per esprimere questa tendenza profondamente connaturata, gli Elleni usavano il termine εύλάβεια = “circospezione”, “cautela”, che invitava ad un atteggiamento di prudente azione, di misurato rapporto prima con gli dèi, poi con il vasto mondo, infine con la comunità degli uomini. Un atteggiamento profondamente vissuto di misurato equilibrio rendeva ogni Elleno incapace di mostrare una eccessiva espansività e dava forza ad ogni loro atto nel quale si riteneva che i sentimenti dovessero dimorare come la sostanza dell’agire umano.

E’ la tragedia greca che rivela questo aspetto particolare del vivere. Qui l’uomo è continuamente messo di fronte a se stesso, alla grandiosità di sentimenti in grado di abbracciare il vasto mondo, ad emozioni che molto spesso sembrano caricarsi di un peso insopportabile, ma che nel punto in cui il protagonista li incanala nell’alveo della tradizione e li articola nella complessa sua vita interiore, risultano essenziali per la valorizzazione di sé, diventano la base per capire il significato del mondo e lo stesso “agire” degli dèi.

Nella stessa poesia lirica i vari poeti manifestano per la prima volta un senso della propria individualità che è un segnale della vivacità intellettuale di quel tempo. Essi parlano di sé, fanno persino conoscere il proprio nome, “esistono” come persone individuabili, con aspirazioni e ideali che differenziano ognuno di loro dagli altri e li caratterizzano come individui coscienti di una personalità irripetibile. Non basta dire che la lirica greca è strettamente legata a forme poetiche pre-letterarie, forse derivate dalla tradizione compositiva scaturita dal mondo del sacro, le cui radici affondano nei canti dei danzatori sacri, nei peana che arricchivano la vita rituale dei vari santuari, oppure nelle stesse canzoni popolari e contadine “ordinate” attorno a ritmi di un mondo antichissimo, tutto un insieme tradizionale che, come ha fatto notare Louis Gernet, costituiva l’elemento fondamentale della vita rituale del primitivo mondo ellenico. Quando la poesia lirica giunge al suo momento di maturità, l’individualità del poeta è chiara, non c’è nessuna possibilità di confondere le poesie di un Alceo con quelle di Saffo, le nitide descrizioni di un Anacreonte con quanto scrivono Bacchilide, Simonide o Stesicoro. Ognuno di loro canta ciò che lo distingue dagli altri e lo rende unico, irrepetibile; il canto è il frutto di una individualità che esprime un mondo interiore e un fluire di sentimenti assolutamente “personale”. La coscienza della propria personalità e del proprio mondo interiore non solo è chiaramente affermata, ma diventa il segno distintivo capace di valorizzare ogni uomo, anche coloro che ascoltano solamente questi canti, ognuno vi ritrova aspetti fondanti della propria vita interiore. Non c’è destino o fato che possa impedire all’Elleno di attingere a questo suo pulsare interiore, dove i sentimenti, gli impulsi e i valori tradizionali sono vissuti secondo modalità irripetibili, si incontrano, danno vita alla personalità individuale, ad un essere umano “completo”.

La grande filologia dell’Ottocento riteneva che nei due grandi poemi delle origini elleniche la coscienza dell’Io fosse poco evidente, qualcuno addirittura ne negava la presenza anche se l’ira di Achille, il ruolo di Ulisse, quello di Patroclo, di Ettore e di tanti altri sembravano smentire con ogni evidenza queste affermazioni, verosimilmente scaturite da una visione evoluzionistica della vita incapace di ammettere che poemi tanto antichi contenessero già tutto ciò che i filologi positivisti ritenevano caratteristico dell’uomo razionale ed “evoluto”, insomma, “moderno”. Ma la primitiva esperienza filosofica greca, la lirica, la tragedia e la stessa commedia ci dicono che la percezione dell’Io per l’Elleno era un fattore essenziale del suo modo di vedere l’universo, di percepire la vita del cosmo, di sperimentarne i ritmi, di guardare con un occhio che andava a penetrare lo stesso significato del vasto mondo.  Da ciò la varietà di termini, tipica del vocabolario ellenico, per esprimere l’atto del “vedere”, verbi che da una percezione puramente fisica a poco a poco ci trasportano in un ambito carico di significati astratti,  poi di simboli, di valori, di spiritualità. L’Elleno classico riteneva che questo suo sentimento dell’Io doveva essere vissuto fino in fondo, percepiva una distanza incolmabile fra ciò che lo caratterizzava in modo irripetibile e gli uomini che vivevano attorno a sé e sperimentavano un identico sentimento della propria specificità. Non concepì l’Io come un limite da controllare o da sopprimere, ma come un valore fondamentale capace di rendere irripetibile la stessa esistenza, caratterizzante anche le personalità divine, persino il modo di essere degli stessi dèi olimpici.

La tragedia ci rappresenta spesso un personaggio-eroe di fronte all’enigma di  sconosciute potenze estranee alla propria vita quotidiana che vorrebbero condizionarne l’esistenza, obbligarlo a scelte non appartenenti alla sua interiorità, al suo naturale atteggiarsi come un essere libero posto di fronte al vasto mondo. In questi momenti l’Elleno attinge al suo Io che “vuole”, alla volontà di determinare la stessa esistenza, di restare fedele al destino che gli è stato assegnato, di non abbandonarsi, di esigere da sé non solo il totale controllo della propria vita, ma anche di affrontare la morte, il momento ultimo dell’esistenza, con la consapevolezza di aver vissuto l’”attimo” irripetibile che è l’essere se stessi forgiando il proprio capolavoro, la propria esistenza. Per questo la sua appartenenza alla polis, ad una comunità completa ed organica, non diminuiva il senso dell’Io, il valore assegnato ad una interiorità ricca e variegata, ma si riteneva che la persona umana e la “ricchezza” di valori che ne distingueva il modo di essere, doveva essere in grado di completarsi nella vita sociale, non di spegnersi o annegare in un  “collettivo statale”.

Questo spiccato senso dell’Io ha una particolarità: il differenziare il soggetto da  un oggetto posto fuori da chi contempla la natura con sue leggi specifiche, non assimilabili a quelle dell’uomo, comporta la capacità di interpretare le leggi di quel mondo, di enucleare una loro formulazione, di astrarre dall’esperienza unica ed irripetibile del singolo delle definizioni logico-razionali che ne dovranno fare capire il significato e le costanti valide non solo per chi ha sperimentato questa capacità, ma anche per coloro che non ne sono consapevoli e restano ai margini della sua ricchezza analitica e descrittiva. Nasce la volontà di astrarre concetti logici, e dunque leggi valide universalmente quand’anche non se ne sappia comprendere il processo costruttivo. La filosofia e la scienza ellenica, il primo risultato di questa attitudine astrattiva, presuppongono un Io che analizza, si pone come soggetto riflessivo che astrae dall’esperienza contenuti ormai spesso persino estranei all’etica e al mondo del sacro. Affiora la prima esperienza di un pensiero laico.

Nella civiltà ateniese che raggiunge il sua apogeo al tempo di Pericle, la consapevolezza del valore della libertà umana è piena e condivisa. La libertà viene considerata un valore oggettivo al quale non è assolutamente possibile rinunciare se non perdendo la propria identità di uomo. E tuttavia Pericle non teme di proclamare che il limite di questa libertà sta nelle leggi che strutturano l’ordinamento giuridico e danno definizione appropriata alla libertà civica, che indirizza ognuno ad essere non solo un uomo libero, ma un cittadino libero che assieme ad altri suoi eguali esercita il proprio diritto. Il rischio di un ordinamento politico come quello dell’Atene del V secolo era che nel punto in cui cessava di essere tutelato da una personalità eccezionale come quella di Pericle, si potevano verificare forme di sfaldamento verso un individualismo esasperato che poteva condurre non solo alla decadenza dello stato, ma al suo diventare preda di avventurieri affascinanti. E’ quello che accadde alla morte di Pericle nella temperie particolare succeduta alla fine delle guerre peloponnesiache, la “guerra civile” del mondo ellenico che condusse gradatamente alla perdita della libertà e alla sottomissione all’impero macedone.

La consapevolezza del valore dell’individualità umana, il dovere di agire secondo coscienza e in piena libertà, non porta l’Elleno a staccarsi dai valori religiosi che ne sostanziano l’esistenza e nel quotidiano arricchiscono la sua vita comunitaria, i ritmi della convivenza cittadina. Quella “legge divina” il cui valore fu potentemente tratteggiato nelle tragedie di Eschilo, attraversa ogni aspetto della vita del singolo e della comunità cittadina (“tutte le leggi umane traggono nutrimento dall’unica legge divina”, egli ci dice), e non c’è abitante della Grecia arcaica, dal più umile dei contadini al più arrogante dei governanti che non ne sia stato consapevole.

Anche se i Sofisti cercarono con i mezzi della dialettica e con una parola onnipervadente di fare sperimentare una diversa dimensione dell’Io completamente staccata dai valori tradizionali; anche se molti membri dell’élite nobiliare ateniese pensarono di aderire a questa nuova realtà capace di svincolare l’Io da ogni legame rituale, di appartenenza o di eredità, la gran parte degli Elleni non si riconobbe in questa nuova predicazione che commisurava ogni cosa alla capacità di persuadere con la parola, di ammaliare, di rendere non significante ogni valore, il vivere individuale e la stessa comunità cittadina tutta. In un’epoca nella quale sembrava trionfare la ricchezza e il potere, Socrate volle ricordare che i valori reali non stavano nell’apparenza e nell’arbitrio individuale, ma nel valore che l’uomo assegnava a se stesso. Socrate valorizza il sentimento dell’Io in rapporto all’interiorità umana, alla ricchezza che riteneva di trovare nell’animo umano e alla possibilità di scoprire il Bene come un elemento essenziale e assolutamente primario nella vita dei singoli e della realtà comunitaria. Certo, il suo insistere nel dialogo con tutti per cercare quella che sembrava l’irraggiungibile verità, poteva farlo sembrare simile ai Sofisti, apparentarlo al loro modo di essere, alla loro sfrenata dialettica, e Aristofane non mancò di ridicolizzare questi aspetti del metodo educativo di Socrate. E tuttavia la sua ricerca ha un fine, mira a stabilire una precisa condizione interiore dell’uomo, a fare emergere una certezza nella quale il Bene si identifica con la coscienza dell’uomo retto. E’ una scoperta dalle conseguenze importanti che Platone non mancherà di sviluppare. Il giusto non può più sottrarsi alla verità che affiora nella propria anima, una verità che vive della certezza di azioni pure e rette, si alimenta nel rispetto della propria interiorità, si nutre di una giustizia non più delegata alle istituzioni, ma resa viva da una vita vissuta come conformità al Vero e al Bene. La grandezza della morte di Socrate, il Giusto che affronta il proprio destino pur nella consapevolezza della sentenza ingiusta decretata da un tribunale ostile e di parte, conclude una vita vissuta secondo giustizia e senza tentennamenti: l’ingiustizia (=la fuga dalla prigione preparata dai suoi discepoli) non può sostituire l’altra ingiustizia, quella che hanno orchestrato i suoi nemici condannandolo a morte. Socrate dimostra con la propria morte accettata consapevolmente e con virilità, che il rispetto delle leggi della patria non deve ridursi ad un atto esteriore “obbligato” dalla forza dello stato, ma è un “modo di essere” scaturente da una forma interiore, dalla consapevolezza che il Giusto coincide con il Bene e dimora nell’animo dell’”uomo nobile”. La legge non è una norma empirica creata per regolamentare una astratta comunità, ma è la “forma formante” della vita degli uomini liberi. L’uomo che vive della propria ricchezza interiore, si nutre di un’etica capace di rendere la vita degna di essere vissuta, non può eludere il richiamo della giustizia. Anche quando ogni cosa parrebbe giustificare la trasgressione e gli altri uomini approverebbero.

E tuttavia, per quanto attento al valore della persona, alla ricchezza dell’interiorità umana, alla consapevolezza che ogni uomo vive in rapporto con una comunità cittadina, in Socrate non troviamo una compiuta dottrina dello Stato e dei rapporti fra i cittadini. Pur nella viva e straordinaria attenzione al senso della comunità e al valore delle leggi comunitarie che l’uomo libero ha scelto, non c’è in Socrate una dottrina dello Stato, almeno non ne è rimasta traccia nelle testimonianze arrivate fino a noi. La sua attenzione al Bene come valore essenziale che giustifica il significato dell’esistenza umana, non si traduce in una riflessione compiuta sul “bene comune”, sulla società e le sue istituzioni.

L’arcaica società ellenica era arrivata alle forme di vita nella polis dopo un lungo processo che aveva trasformato antichissime tradizioni cui erano legati tutti i popoli dell’Ellade. Al centro della vita familiare troviamo il padre che nell’età arcaica copriva aspetti pontificali connessi alla sua funzione di sacerdote domestico. La madre, invece, era la garante della perpetuità del recinto familiare, del prolungamento nel tempo della famiglia, non una somma di individui legati da sentimenti, ma un tipo particolare di confraternita sacra diretta dal capo-famiglia che ne officiava i riti ancestrali conservati con cura e gelosamente custoditi e trasmessi da padre in figlio. Più all’esterno c’era il genos, costituito da tutti i “rami” che praticavano lo stesso rituale e spesso si riunivano attorno ad una tomba-ara gentilizia. La tribù riuniva una serie di genos attorno ad un culto unitario che veniva celebrato da tutti i membri nell’anniversario dell‘eroe eponimo. Quando le tribù elleniche cominciarono ad urbanizzarsi è evidente che tali ordinamenti poggianti su strutture gentilizie e familiari, non potevano più reggere e fu necessario un riadattamento sfociato in quella particolare struttura sociale da Aristotele definita il governo dei “liberi governati”.

Hoplites.jpgLa prospettiva politica di Aristotele muove dalla constatazione che l’organizzazione statale è la condizione stessa del vivere civile. E’ all’interno della polis che l’uomo può soddisfare non soltanto i suoi bisogni materiali, ma anche quelli morali solo che riesca ad equilibrare la libertà della comunità cittadina con la norma o costituzione che regola la vita civile, realizzando la concordia fra i membri dello stato, concordia che permette la partecipazione di “diritto” e di “giustizia” alla vita pubblica. Aristotele non fa altro che teorizzare la vita cittadina nella sua dimensione etica, analizzando oggettivamente una realtà politica ritenuta ormai “normale”. Nella vita comunitaria l’uomo può adempiere a funzioni altrove impossibili; solo nella realtà sociale si concretizza interamente una armonica maturazione della persona umana; solo in rapporto agli altri è possibile commisurare la grandezza di un essere libero. E’ questa dimensione che rende “vera” la celebre definizione di Aristotele secondo cui “l’uomo è un animale sociale”, nella sua interezza concepibile solo in rapporto agli altri uomini e alle istituzioni datesi liberamente da tutti i cittadini. Si tratta di una prospettiva particolare, che in sè rappresenta una novità rispetto ad altre elaborazioni di tipo politico che i vari pensatori greci non avevano mancato di elaborare. Si pensi a questo proposito a Platone e ai fondamenti dello stato da lui delineati, alle tre “classi sociali” che sostanziano il suo ideale di uno stato armonico, un ideale che G. Dumézil ha ritrovato in tutte le civiltà derivate dalla preistoria indoeuropea. Si pensi a questo proposito ai vari legislatori ellenici che in età arcaica, al sorgere delle città, ne hanno dettato i fondamenti giuridici e hanno costituito molto spesso l’elemento fondante delle molte colonie nate dalle ondate migratorie condotte all’insegna della spiritualità apollinea.

C’è in Platone una preminenza dello stato rispetto ai cittadini giustificata nella prospettiva dello “stato ideale”, di un ordinamento ideale che si ritiene possa essere il solo a conservare l’eredità più antica dell’Ellade, agli occhi di Platone l’unico in grado di garantire l’equilibrio del corpo sociale. Nelle sue tre opere politiche, la Repubblica, Le Leggi e il Politico, lo stato è la “forma” capace di dare ordine ad una sostanza=demos che lasciata a se stessa rischia di restare amorfa poichè in sé contiene elementi di dispersione e di disordine che impediscono ogni pur piccolo tentativo di erigere una società ordinata. E’ anche per questo motivo che lo stato ideale di Platone diviso nelle sue tre “classi sociali”, non fa che riflettere le tre “potenze dell’anima” che costituiscono il complesso della vita interiore di ogni uomo retto. L’ordinamento dello stato ideale, quello che probabilmente doveva attualizzare sul piano filosofico una arcaica consuetudine un tempo ben viva presso tutti i popoli indoeuropei, oggettiva l’armonia che regge la vita dell’uomo arcaico, un “corpo sociale” capace sul proprio piano di riprodurre la gerarchia delle “potenze” che ritmano la vita interiore dell’organismo umano.

La prospettiva delle Leggi è diversa. Platone qui sembra più attento a dare indicazioni perché si formi uno stato che nella realtà delle condizioni decadenti della Grecia del suo tempo possa adempiere alla sua funzione formativa, uno stato capace hic et nunc di enucleare le leggi e gli ordinamenti che devono essere come la “spina dorsale” di un corpo vivo il cui compito continua ad essere quello di dare “forma” all’informe. Proprio per queste ragioni qui è possibile trovare alcuni cenni a tradizioni antichissime nelle quali predominavano aspetti iniziatici che intendevano trasformare il giovane in un guerriero pienamente integrato nella propria comunità. A questo proposito è forse utile fare un cenno a Sparta e alla sua struttura cittadina per le oggettive similitudini che è possibile rinvenire con alcuni aspetti delle dottrine platoniche. L’ordinamento elaborato da Licurgo, che si incentrava sulla supremazia degli Spartiati e sulla selezione più rigorosa per ottenere un’élite dirigente presso la quale le caratteristiche guerriere dovevano essere assolutamente predominanti, non era altro che il tentativo di perpetuare in una società urbanizzata, strutture iniziatiche appartenenti al passato guerriero delle tribù doriche che in un’epoca ormai confinata nel mito avevano invaso il Peloponneso. Non si tratta solo della rigida educazione guerriera che, d’altronde, anche le altre città elleniche possedevano e aveva formato quei magnifici combattenti che avevano fermato l’assalto dei Persiani salvando la civiltà ellenica. Il fondamento statale spartano restava il rigido senso della comunità, la preminenza data allo stato e alla patria, la consapevolezza che la libertà del singolo non significava nulla fuori di quel contesto comunitario, il senso della custodia di valori antichissimi trasmessi mediante metodi educativi i quali, quanto ai fini, in parte è possibile trovare anche in altre aree culturali.

La prospettiva di Aristotele, questo straordinario discepolo sostanzialmente “infedele” di Platone, tuttavia è cambiata. Al centro della sua riflessione non c’è più lo stato, il genos, la fratrìa o le arcaiche famiglie con i loro culti e i loro rituali ancestrali. Lo stesso stato acquista un rilievo particolare, perde la sua preminenza sulla società e diventa l’elemento di coesione e di identità della comunità cittadina. Al centro ora troviamo il cittadino di una città che molto spesso ha eliminato tutte le tracce degli ordinamenti antichi e che non intende più ordinarsi attorno alle tradizioni custodite dalle famiglie patrizie. E’ un rivolgimento che rende molto diversa la prospettiva aristotelica e giustifica la sua attenzione al cittadino senza radici di una città cosmopolita e tesa ad aperture verso mondi nuovi che necessariamente in antico non era possibile neanche concepire. Il cittadino deve esplicare la sua libertà individuale nell’ambito di ordinamenti liberamente accettati e condivisi, deve vivere una vita sociale che è come il segno distintivo della sua ricchezza creativa, deve concorrere ad ordinare il mondo circostante e i suoi concittadini con piena aderenza allo spirito e alla lettera delle leggi, ormai diventate la vera  “ossatura” dello stato, alle quali egli stesso ha concorso.

Secondo Aristotele l’unità dello stato e la concordia dei cittadini, ossia l’equilibrio dell’organismo che egli ha in vista, non può essere conservata a lungo se le famiglie e i gruppi sociali sono economicamente dipendenti, se vige un sistema economico incapace di garantire l’autonoma esistenza dei vari corpi sociali e dei singoli cittadini. L’enucleazione del principio della proprietà privata come elemento assolutamente indispensabile per il libero esercizio della libertà individuale è uno degli elementi che danno alla dottrina aristotelica dello stato quei caratteri di “modernità” che da sempre ne hanno reso importante lo studio e la riflessione. I proprietari, sostiene Aristotele, proprio per la loro attività amministrativa, sono abituati a rispettare il diritto, a chiedere che le leggi abbiano una definizione chiara e non discussa, a decidere autonomamente e liberamente l’utile per se stessi e per la comunità cittadina tutta. L’attenzione aristotelica per questi aspetti della libera espressione della personalità umana, in sé una forma di “allargamento” e di consolidamento dello spazio di libertà individuale, si potrebbe definire come una prima delineazione di forme di sussidiarietà che solo le moderne encicliche papali hanno sviluppato in modo consequenziale.

E tuttavia il cittadino-proprietario che intende rimanere estraneo alla vita politica della propria città non può far parte del sistema politico che Aristotele ha in mente. Il cittadino deve partecipare delle decisioni politiche, il suo contributo alla vita comunitaria costituisce uno dei momenti essenziali della sua stessa vita di uomo libero, ne contrassegna il modo di essere e alcune delle stesse finalità esistenziali. L’ideale pan-ellenico del “governo dei governati” non può realizzarsi se non nel presupposto di un cittadino libero che esprime il proprio punto di vista, partecipa alla vita sociale e concorre alle decisioni dello stato. L’assunzione di responsabilità è insita in questa condizione di libertà individuale. Non potrebbe esserci per Aristotele un governo rappresentativo al quale delegare la vita legislativa. Non c’è delega che il cittadino della polis possa accettare, egli deve concorrere liberamente alla formazione delle leggi, ne deve vedere i risvolti, persino convincere gli altri di eventuali errori: il dialogo sociale è la forma della partecipazione diretta in un organismo che ha eretto al centro della propria esistenza un sistema di valori da tutti condivisi.

Nuccio D'Anna

samedi, 10 avril 2010

Jünger, los mitos y el mar

Jünger, los mitos y el mar

Ex: http://losojossinrostro.blogspot.com/ 

Me encuentro inmerso en la lectura de “Mitos griegos”, un libro de Friedrich Georg Jünger, el hermano de Ernst, que fue editado en España el año pasado por la editorial Herder. Surcando sus páginas alcancé un pasaje realmente especial, por su extraordinaria fuerza evocadora (al menos por lo que a su humilde servidor respecta). Es precisamente eso lo que hace de ese libro algo interesante; los mitos no se presentan como reliquias del pasado, como equivalencias despojadas de poder fascinador y ambiguo (Apolo=sol, Marte=guerra) y petrificadas por el proceso alegórico. No; los mitos aquí son algo vivo, real, palpitante, pletórico de belleza y terror a partes iguales.

El pasaje está dentro del fragmento que hace referencia a dos titanes, Océano y Tetis. Océano está vinculado, como otros titanes, con los fenómenos elementales. Se relaciona con las aguas, con la corriente universal que envuelve la tierra, con un rumor fluido y pacífico –Océano es el único que no interviene en la lucha entre Crono y Urano- pero también persistente. Siempre es igual a sí mismo y, también como los otros titanes, es presa de un “eterno retorno” (hay un inconfundible eco nietzscheano en la prosa de Jünger). Tetis es su esposa, madre de las oceánides y divinidades del agua.

Pero es cuando habla de Poseidón cuando aparece este pasaje, abismado en la contemplación de las formas marinas:


circunvoluciones y curvaturas. Determinadas criaturas marinas poseen una estructura estrictamente simétrica a partir de la cual configuran formas estrelladas y radiales, imágenes en las que también el agua interactúa con su fuerza moldeadora, radial y estrellada. Otras, como las medusas, son transparentes, su cuerpo entero está bañado en luz y avivado por exquisitos tornasoles. A todo lo nacido en el agua le es propio un esmalte, un color y un brillo que sólo el agua puede conferir. Es iridiscente, fluorescente, opalino y fosforescente. La luz que penetra a través del agua se deposita sobre un fondo sólido que refleja las delicadas refracciones y los destellos de la luz. Este tipo de brillo se observa en el nácar y aún más en la perla misma. Al mar no le faltan joyas, es más, todas las alhajas están en relación con el agua, poseen también una naturaleza acuática que les confiere un poder lumínico. En él los colores son más bien fríos“El reino de Poseidón está mejor ordenado que el de Océano. Es más suntuoso y armonioso. La corriente universal que fluye poderosamente lo encierra con un cinturón, lo encierra como centro a partir del cual la entera naturaleza marítima adquiere su forma (…) Todo lo que procede del mar muestra un parentesco, tiene algo en común que no oculta su origen. Los delfines, las nereidas, los tritones, todos emergen del medio húmedo y su complexión muestra el poder del elemento del que proceden. Las escamas, las aletas, las colas de pez únicamente se forman en el agua y, por el modo en que se mueven, están en correspondencia con la resistencia de las corrientes. Algo parecido muestran las conchas y las caracolas en sus formas planas, en sus y aún así resplandecientes, y se reflejan los unos en los otros. Prevalecen el verde y el azul, oscuros y claros a través de todos los matices. Al agitarse, las aguas se tornan negras y arrojan una espuma color de plata. También allí donde asoma el rojo, o el amarillo en estado puro, el agua participa de su formación.

Al que contempla estas formas admirables y a primera vista, a menudo, tan extrañas, le recuerdan ante todo los juegos de las nereidas. Son los juegos que ellas juegan en las aguas cristalinas, en sus cuevas verdes. Al nadador, al bañista le vienen a la mente estos juegos y lo serenan. La fertilidad del mar oculta un tesoro de serenidad; por mucho que se extraiga de él, siempre permanecerá inagotable. Quien descienda a las profundidades, sentirá el cariño con el que el mar se apodera del cuerpo y lo penetra, sentirá los abrazos que reparte. De la caracola en forma de espiral hasta el cuerpo blanco y níveo de Leucótea, de la que se enamoró el tosco Polifemo cuando la miraba jugar con la espuma de la orilla, todo sigue en él la misma ley. También Afrodita Afrogeneia emergió del mar; su belleza y su encanto son un obsequio del mar.

Del ámbito de Poseidón, del reino de Poseidón depende todo esto. Todo lo que se halla bajo la tutela del tridente tiene algo en común y muestra un parentesco inconfundible, Fluye, se mueve, es luminoso, transparente, cede a la presión y ejerce presión. Se eleva y se hunde rítmicamente, y en su formación revela el ritmo que lo impregna.”

¡Cuántas imágenes ha conjurado este texto en mi imaginación! Recuerdo aquel verano en la Costa Brava, hace ya muchos años, en el que me dediqué casi exclusivamente a recoger erizos de mar entre las rocas; era como una obsesión. Trataba de encontrar algo reconocible entre ese bosquecillo de púas, hasta que finalmente pasaba el dedo por él... y las púas respondían con un parsimonioso movimiento, todas hacia un mismo punto. Probablemente estuve haciendo eso durante horas y horas; alrededor había también estrellas y caballitos de mar, organismos que en su singularidad no pueden más que asombrar a los niños.

Por supuesto, recuerdo también el brillo de los corales y las procesiones de destellos plateados, y recuerdo también su nuca, cuando nadamos juntos aquella noche, hace ahora algo más de un año… el agua acariciaba nuestros cuerpos pero también infundía un terror primordial; era, de nuevo, una danza de sexo y muerte. Hubo otras muchas noches antes en que fuimos mecidos por ese rumor… todas iguales y diferentes a un tiempo.

Ah, me vienen tantas imágenes a la cabeza...

dimanche, 04 avril 2010

Evola e la "notte dei lunghi coltelli"

Evola e la ”notte dei lunghi coltelli”

     

di: Luigi Carlo Schiavone

Ex: http://www.rinascita.eu/

evola.jpgIn un articolo del marzo 1935 dal titolo “Il nazismo sulla via di Mosca?” apparso sul quotidiano “Lo Stato”, Julius Evola, allora umile pensatore ai margini del fascismo italiano, prendendo spunto dalle vicende occorse il 30 giugno del 1934 in Germania storicamente note come “Notte dei lunghi coltelli” e cioè la decapitazione sanguinosa, da parte della “destra” hitleriana, delle S.A., le Squadre di Assalto di Roehm e di Strasser che volevano – conquistato il potere – che la rivoluzione nazionalsocialista mettesse in opera il programma sociale, la cosiddetta “seconda rivoluzione” - muove una profonda critica alle posizioni espresse da Carl Dryssen nella sua opera “Fascismo nazionalsocialismo, prussianesimo”, considerato da Evola come il testo guida delle volontà dei rivoluzionari delle SA, facenti capo ad Ernst Röhm, nel quale si rintracciava la linea che essi volevano imporre al movimento nazionalsocialista.
Dryssen, partendo da considerazioni di carattere prettamente politico- economico, delinea due mondi contrapposti, l’Oriente e l’Occidente, che, oltre a risultar divisi da un punto di vista ideologico, trovano in Dryssen anche una frontiera naturale rappresentata dalla linea del Reno.
Il mondo dell’ “Occidente”, in cui Dryssen inquadrava gli Stati Uniti, la Francia e la Gran Bretagna, è identificato come la patria del liberalismo, della democrazia, dell’internazionalismo e del capitalismo, fondamenta del libero commercio e dell’imperialismo finanziario. Un mondo in cui, secondo Dryssen, vigevano due principi: quello dell’individualismo che ne regolava i rapporti in ambito interno e quello dell’imperialismo su cui venivano fondati i rapporti verso l’esterno a servizio di un liberalismo “ipocrita”, generatore di un’azione egemonica o distruttrice a danno di altri popoli.
Radicalmente opposti risultavano essere, nella visione del Dryssen, i tratti caratterizzanti il mondo orientale. Nell’ “Oriente”, identificato territorialmente nella Germania, vigeva un diverso tipo di Stato caratterizzato da un ampio spirito sociale ed essenzialmente agrario sorretto da un’economia di consumo fondata, principalmente, sulla relazione del “Blut und Boden” (sangue e suolo); un’impostazione, questa, totalmente diversa dall’economia imperialistica ed internazionalistica tipica dello Stato Occidentale.
È in forza di suddette considerazioni che Dryssen fornisce una versione della prima guerra mondiale vista, dall’autore, come un’aggressione dell’Occidente ai danni dell’Oriente dettata da una volontà individualista-capitalistica di piegare l’unica parte d’Europa che ancora le resisteva. Dal caos ideologico scaturito nel dopoguerra, inoltre, Dryssen vede il sorgere di due visioni contrapposte che identifica nella corrente riformistica-romana, incarnatasi nel fascismo, e nella corrente germanico-rivoluzionaria, propria del movimento nazionalsocialista.
Secondo Dryssen, infatti, il movimento fascista, sebbene caratterizzato da originari tratti rivoluzionari e socialistici, non avrebbe avuto la forza di travolgere l’antico sistema di marca romana, base del sistema occidentale, ma vi avrebbe apportato solo delle modeste correzioni identificabili nell’instaurazione di un “capitalismo autoritario” sottoposto al controllo dello Stato, evitando così la rivoluzione. Un’altra motivazione, caratterizzante la volontà del movimento fascista di non rivoluzionare ma solo di riformare l’antico sistema, è da trovarsi, secondo l’autore tedesco, nel mantenimento dell’imperialismo. Questa nuova Roma, quindi, considerata da Dryssen come “salvatrice del capitalismo occidentale” viene avvertita come un nuovo ostacolo per la tradizione anticapitalista e socialistica tedesca; compito del nazionalsocialismo, quindi, era quello di dar vita ad una rivoluzione “social prussiana” che, rifacendosi al motto di luterana memoria, Los von Rom! (via da Roma!) avrebbe tutelato la tradizione germanica dalla minaccia occidentale e capitalistica e da Roma, ultimo baluardo di un mondo ormai agonizzante. Ad Adolf Hitler, innalzato da Dryssen a novello Vidukind, (il duce sassone che si oppose a Carlo Magno) il compito di orientare la Germania verso il socialismo nazionale e improntarla su una visione “eroica” e non prettamente economica dell’esistenza. […]
In merito al fascismo, invece, sono altri gli elementi che Evola cita per smantellare l’impostazione di Dryssen: dall’ “educazione guerriera” impartita alle nuove generazioni, ai processi di agrarizzazione e alla lotta contro l’urbanizzazione oltre alla concezione del diritto di proprietà del fascismo, che trasforma il detto, di proudhoniana memoria, “la proprietà è un furto” in la “proprietà è un dovere”.
La proprietà in Evola assume, quindi, una caratterizzazione differente rispetto alla considerazione che se ne ha nella visione “occidentale” data da Dryssen; considerata come una delle condizioni materiali imprescindibili per la dignità e l’autonomia della persona è opportunamente ridimensionata in un sistema, come quello fascista, non asservito al capitalismo e che mira a capovolgere la dipendenza della politica all’economia subordinando nuovamente quest’ultima alla prima in forza di un’idea superiore rappresentata in un primo momento dalla Nazione e successivamente dall’Impero.
Un ulteriore errore da parte di Dryssen, e di alcuni esponenti di spicco dello N.S.D.A.P., è da rintracciarsi, secondo Julius Evola, nell’errata considerazione del binomio individualismo-personalità. Se è lecito, secondo Evola, opporsi all’individualismo, concezione maturata in seno al liberalismo, non alla stessa stregua deve essere considerata la personalità, elemento essenziale per il recupero di buona parte dei valori indoeuropei. Se il socialismo e l’individualismo possono essere considerati come due facce della stessa medaglia in quanto figlie di un’unica decadenza materialistica, antiqualitativa e livellatrice, infatti, diversi sono i tratti tipici del pensiero indoeuropeo miranti alla realizzazione di realtà organiche e gerarchiche che, caratterizzate proprio dall’ideale di personalità libere, virili e differenziate, mirino, ciascuna nel proprio ambito, ad assegnare ad ogni cittadino una propria funzione e una propria dignità. Un ideale, questo, che Evola considera superiore sia al liberalismo che al socialismo, che si è protratto nel tempo approdando dalla comune matrice indoeuropea alla tradizione classica prima e alla tradizione classico-germanica poi, per consolidarsi, infine, nella tradizione romano-germanica medioevale.
Per quel che concerne l’antiromanità professata da Dryssen, essa è da considerarsi, secondo Evola, come diretta emanazione di quel processo di allontanamento della Germania che, come già citato, ebbe inizio con Lutero e che in quel determinato periodo storico favoriva esclusivamente un riposizionamento della stessa a favore della Russia, che a detta dello stesso Dryssen, era l’unica grande potenza ad essersi elevata contro l’Occidente e contro Roma oltre che al capitalismo. L’assenza di reali frontiere spirituali fra l’Elba e gli Urali avrebbe favorito, inoltre, una maggior unione fra il nazionalsocialismo e il bolscevismo. La fusione dell’antico sistema tedesco dell’Almende e del Mir slavo avrebbe finito, secondo Dryssen, per patrocinare una nuova forma di collettivismo che, in Russia come in Germania, sarebbe stato tutelato da uno Stato agrario socializzato ed armato. Nella visione di Dryssen, inoltre, Evola rintraccia un ulteriore parallelismo tra l’ateismo sovietico e la riforma luterana.
L’ateismo sovietico, infatti, mutuerebbe dalla riforma luterana la volontà di battersi contro una religiosità ufficiale, mondanizzata, legata alle ricchezze e romanizzata; solo dalla rivolta, pertanto, sarebbero potute nascere nuove religioni interiori e a favore del popolo al pari degli effetti che Lutero anelava dalla sua riforma.
A favore di suddetta visione, che porterebbe la Germania all’accordo con la Russia, Dryssen evoca più volte, secondo Evola, lo spauracchio dell’imperialismo italiano quasi come se esso fosse una tendenza esclusivamente romana e non riscontrabile presso altri popoli. Dimenticando, quindi, il primo verso dell’inno tedesco (Deutschland Deutschland über alles, über alles in der Welt) e ponendosi negativamente contro l’universalità romana Dryssen, secondo Evola, accettava implicitamente l’internazionalismo bolscevico all’interno del quale, ricorda il filosofo tradizionalista, scarso posto trovavano i concetti di Patria e di Nazione e ancor meno quello di tradizione nel senso più ampio del termine, tutti e tre più volte ripresi dallo stesso Dryssen. […]
Antiromanità, antiaristocrazia, antitradizione, sono gli elementi che si trovano alla base della visione di quanti, secondo Evola, volevano che il Reich volgesse lo sguardo verso la Russia e concludendo il suo articolo auspicava invece che l’Italia fascista tracciasse una propria strada che si trovasse ad egual distanza dall’Occidente delineato da Dryssen che dalla Russia bolscevica.
Che ci si ritrovi maggiormente nelle posizioni di Carl Dryssen o in quelle espresse da Julius Evola, è indubbio lo stupore di fronte a simili analisi volte ad individuare, tramite profonde riflessioni e ricerche, le soluzioni migliori per l’attuazione di piani politici volti a cesellare, come si trattasse di statue antiche, i tratti ed i caratteri di interi popoli. Uno stupore che si fa ancora più grave se si pensa che tali analisi vennero svolte in quell’epoca che tutti additano come la più oscura d’Europa mentre oggi, nell’epoca delle libertà, si è costretti ad assistere ad ignominiosi spettacoli nei quali, oltre ad essere ripetuti costantemente i medesimi mantra salvifici, l’individuo, sempre più asservito alla tecnocrazia di jungeriana memoria, non è più essere da formare ma tifoso da consolidare.

mardi, 16 mars 2010

Lestravaux de Michel Chodkiewicz: Ibn Arabî, le Livre et la Loi

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1992

Les travaux de Michel Chodkiewicz:

Ibn Arabî, le Livre et la Loi

 

par Serge HERREMANS

 

shaykh-ibn-arabi.jpgDescendant d'une famille aristocratique polonaise établie en France depuis quelques générations, le Professeur Michel Chodkiewicz, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, est le grand spécialiste de l'œuvre éternelle d'Ibn Arabî et de ses disciples; converti à l'Islam, il a dirigé les éditions du Seuil, où il a fait publier une quantité d'ouvrages qui permettent à nos contemporains de redécouvrir les fondements des traditions spirituelles de l'humanité. Son souci majeur est de souligner non pas le fanatisme simpliste qui transparaît dans bon nombre de manifestations fondamentalistes musulmanes  —surtout celles qui sont téléguidées depuis l'Arabie Saoudite—  mais d'ouvrir les esprits aux dimensions de générosité et de miséricorde, présentes dans l'Islam et qu'illustre aujourd'hui le Grand Mufti de Syrie, le Cheik Ahmad Kaftaru.

 

La démarche du Professeur Chodkiewicz, comme celle du Grand Mufti de Syrie, consiste à définir l'Islam essentiellement comme une religion fondée sur l'intellection de la vérité et sur la sacralité de l'existence. Lorsque l'Islam parle de «sacralité de l'existence», explique le Prof. Michel Chodkiewicz, il signifie que toutes nos actions doivent être sacralisées, perçues comme reflet de la transcendance, parce qu'elles sont voulues par Dieu. Le jeûne du ramadan, consiste, pour le croyant, à prendre conscience de sa pauvreté existentielle, de sa dépendance, de l'impossibilité de (sur)vivre sans les dons généreux d'Allah. Pauvreté et dépendance, que souligne le jeûne, doivent être sacralisées par une méditation des paroles de Dieu, consignées dans le Coran. Le jeûne montre à l'homme son indigence ontologique, ce qui le force, explique Michel Chodkiewicz, à s'interroger sur les besoins illusoires, sur les actes inutiles et sur les désirs puérils, auxquels tout un chacun est prêt à céder lorsqu'il se met en tête de vouloir construire un pseudo-paradis terrestre, taillé à sa mode.

 

La prise de conscience de l'indigence ontologique conduit à une éthique qui impose de «préférer son prochain à soi-même et Dieu à tout»; tel est le véritable sens du jeûne, qui implique le service à autrui, en dehors de toutes formes de mépris, d'indifférence ou de fausse supériorité. Se référant à Ibn Arabî, qui a écrit, «Dieu n'a pas créé les êtres à partir de rien (...) afin que tu les méprises», Michel Chodkiewicz définit le ramadan comme un exercice collectif de renoncement aux passions personnelles et individuelles; renoncement qui est le fondement de toute religion véritable: car il permet de relier les individus par l'essentiel, et empêche du même coup que ne s'instaure la loi de la jungle par le déchaînement des passions individuelles et des volontés acquisitives.

 

Pour Michel Chodkiewicz, l'élévation spirituelle a connu son maximum d'intensité chez le philosophe musulman d'Andalousie Muhy ad-Din ibn ’Arabî. Sa pensée repose sur une perception de la présence universelle de Dieu. «C'est Lui que nous voyons dans tout ce que nous voyons; c'est Lui que nous sentons dans tout ce que nous sentons. Dans toute vision, c'est Lui qui apparaît. Les langues ne parlent que de Lui, les cœurs ne palpitent que par Lui». Pour ibn ’Arabî, «il n'y a pas de mouvement dans l'univers qui ne soit pas mouvement d'amour». Parole qui rappelle Dante qui, dans la Divine Comédie, chante «l'amour qui meut le soleil et les autres étoiles». Ibn ’Arabî influence les soufis musulmans, qui répercutent sa pensée sur la spiritualité hébraïque. Ainsi, par exemple, le neveu du célèbre Maïmonide reprend intégralement des passages de Ghazali et Suhrawardi; le cabbaliste Abraham Abu l-Afiya adopte et adapte certaines thèses d'ibn ’Arabî et, en sens inverse, Ibn Hud, prince arabe du XIIIième siècle, commente à Damas l'œuvre de Maïmonide pour ses disciples musulmans et juifs. Côté chrétien, Sainte Thérèse d'Avila et Saint Jean de la Croix s'inspirent de ce filon mystique musulman.

 

Cette symbiose a disparu. Rien ne permet d'espérer son retour, vu les déchirements d'aujourd'hui. Les juifs quittent l'Espagne en 1492, n'alimentent plus leur propre ésotérisme aux sources arabo-andalouses. Idem pour les chrétiens. Il faudra attendre 1795, quand s'ouvre à Paris l'Institut des langues orientales, pour que l'on recommence à s'intéresser à la pensée islamique en Occident. Mais dans des conditions très différentes de celles qui règnaient au Moyen Age. Les traducteurs d'Avicenne et d'Averroes vénéraient ceux-ci comme leurs maîtres. Les orientalistes de la première génération examinaient et disséquaient les écrits arabes avec l'arrogance du colonisateur. Le mysticisme soufi, quand il est abordé par ces positivistes, déchoit en un exotisme «amusant»: on dresse l'inventaire de ses manifestations. La dimension authentiquement mystique de l'Islam en général, et du soufisme en particulier, ne revient pas pour corriger la superficialité matérialiste et mécaniciste de l'Europe des Lumières. Pire: l'école des orientalistes positivistes baptise «renaissance islamique», nahda  en arabe, ce qui en réalité est le commencement du déclin de la civilisation arabo-islamique; le soufisme est relégué à l'arrière-plan, considéré comme une relique du passé, au profit d'une pauvre théologie pseudo-fondamentaliste et en réalité moderniste et puritaine, aussi aride que le positivisme occidental. Dans le cadre de cette pseudo-renaissance, apparaît également le wahhabisme saoudien, avec sa théologie rigide et sa spiritualité appauvrie à l'extrême.

 

ibnarabi.jpgCette théologie schématique, dépourvue de toute vigueur soufie, de tout élan mystique, enlève toute potentialité de séduction à l'Islam. Les non-musulmans finissent par identifier l'Islam à quelques personnages sinistres qui le stérilisent. Pour sortir de cette impasse, Michel Chodkiewicz propose de réécrire complètement l'histoire de la philosophie islamique, de reprendre et de continuer les travaux de Henri Corbin. Pour le Professeur Chodkiewicz, la renaissance islamique authentique implique un retour et un recours aux écrits d'ibn ’Arabî, véritable maître de connaissance et non pas simple «philosophe». La plupart des travaux de Michel Chodkiewicz ont d'ailleurs été consacrés à ibn ’Arabî et à ses disciples (cf. Emir Abd el-Kader: Ecrits spirituels, présentation, traduction et notes, Seuil, 1982; Awhad al-Dîn Balyânî: Epître sur l'Unicité absolue, présentation, traduction et notes, Les Deux Océans, 1982; Le Sceau des Saints, prophétie et sainteté dans la doctrine d'Ibn Arabî, Gallimard, 1986; Les Illuminations de La Mecque, textes choisis des Futûhât Makkiya, Sindbad, 1988).

 

Pour Michel Chodkiewicz, l'Europe et l'Islam aurait intérêt à réouvrir le dialogue philosophique et spirituel interrompu depuis le Moyen Age. Car, à cette époque, en dépit des croisades, Chrétiens et Musulmans recherchaient en commun la sagesse, bien que sous des modalités différentes. Les sages savaient que la vérité divine et cosmique s'exprimait sous des formes religieuses différentes et que ces différences n'étaient pas indices de contrastes, mais reflets de la richesse du monde créé, émanations de la profusion du divin. Moralité: nous devons accepter l'autre et son point de vue, sans vouloir à tout prix réaliser un œcuménisme qui unifierait les formes tout en les stérilisant.

 

La figure d'Ibn ’Arabî est au centre également du dernier ouvrage de Michel Chodkiewicz:

 

Michel Chodkiewicz, Un océan sans rivage. Ibn Arabî, le Livre et la Loi, Seuil, Paris, 1992, 218 p., 120 FF, ISBN 2-02-013217-6.

 

Dans les pages de cet ouvrage, notre auteur entreprend un voyage initiatique dans la Parole divine elle-même, c'est-à-dire dans le Coran, cet «océan sans rivage». 

 

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lundi, 15 mars 2010

Platon et les trois fonctions indo-européennes

Platon et les trois fonctions indo-européennes

platon.jpgEx: http://tpprovence.wordpress.com/ 

On trouve de tout chez Platon, comme au rayon bricolage du BHV (à ne pas confondre avec le BHL, où l’on ne trouve rien d’autre que le vide abyssal de la non-pensée nombriliste) : le mythe de la caverne, l’Atlantide et même … les trois fonctions indo-européennes.

LES TROIS FONCTIONS CHEZ LES INDO-EUROPÉENS

C’est Georges Dumézil qui a découvert, en 1938, l’existence d’une véritable « idéologie » indo-européenne, d’une structure mentale spécifique se manifestant par une même conception du monde. « Suivant cette conception, que la comparaison de documents pris dans la plupart des vieilles sociétés indo-européennes permet de reconstituer, écrira-t-il, tout organisme, du cosmos à n’importe quel groupe humain, a besoin pour subsister de trois types hiérarchisés d’action, que j’ai proposé d’appeler les trois fonctions fondamentales : la maîtrise du sacré et du savoir avec la forme du pouvoir temporel qu’elle fonde, la force physique et la valeur guerrière, la fécondité et l’abondance avec leurs conditions et leurs conséquences » (1).

Sur le plan social, l’on retrouve cette tripartition dans tout l’espace indo-européen, de l’Inde à l’Irlande, les trois fonctions correspondant schématiquement aux prêtres-rois, aux guerriers ainsi qu’aux producteurs, paysans et artisans. C’est ainsi que dans l’Inde traditionnelle les Brahmânes correspondent à la 1ère fonction, les Kshatriyâs à la 2 ème et les Vaishyâs à la 3 ème. A l’extrême ouest de l’aire couverte par les indo-européennes, chez les Celtes, César nous apprend que la société gauloise se composait des Druides, des Equites ou Chevaliers, et de la Plebs, le Peuple…

Reste le cas de la Grèce antique, qui a tendu très tôt à éliminer toute trace de l’idéologie trifonctionnelle. Si l’on en croit Dumézil, « la Grèce n’est pas généreuse envers nos dossiers. M. Bernard Sergent a fait un bilan critique des expressions de la structure des trois fonctions, la plupart du temps isolées, en voie de fossilisation, qu’on a proposé d’y reconnaître : c’est peu de chose, comparé aux richesses qu’offrent l’Inde et l’Italie » (2). Toutefois, un lecteur attentif de l’œuvre de Platon peut y découvrir la preuve d’une survivance de la tripartition fonctionnelle dans la Grèce classique.

LA CITÉ IDÉALE PLATONICIENNE

Dans La République, Platon, s’interrogeant sur la cité idéale, affirme que « les classes qui existent dans la Cité sont bien les mêmes que celles qui existent dans l’âme de chacun pris individuellement » (3). Au terme d’une analyse psychologique de la nature humaine, le philosophe grec reconnaît dans l’homme trois sortes d’âmes ou de dispositions à agir : la raison, située dans la tête, qui lui permet de penser ; le sentiment, situé dans le cœur, qui conduit à aimer ; et le désir, situé dans le ventre, qui le pousse à se reproduire. Elles impliquent trois vertus qui représentent l’excellence de chacune des âmes : la sagesse, le courage et la tempérance. Selon lui, la constitution de la cité n’est que la projection de la constitution de l’âme soumise à son exigence de justice, cette dernière étant à son tour, l’articulation harmonieuse des trois vertus.

Concrètement, le philosophe distingue au sein de la cité trois fonctions. D’abord, « ceux qui gardent entièrement la Cité, aussi bien des ennemis de l’extérieur que des amis de l’intérieur » (4), les Gardiens, qui correspondent à la tête, siège de l’intelligence et de la raison, le Logos. Ensuite,  « les auxiliaires et assistants des décisions des gouvernants » (5), qui correspondent au cœur, siège du courage, le Thymos. Enfin les Producteurs, artisans et paysans, qui correspondent au ventre, siège des appétits. « Vous qui faites partie de la Cité, précise Platon,vous êtes tous frères, mais le dieu, en modelant ceux d’entre vous qui sont aptes à gouverner, a mêlé de l’or à leur genèse ; c’est la raison pour laquelle ils sont les plus précieux. Pour ceux qui sont aptes à devenir auxiliaires, il a mêlé de l’argent, et pour ceux qui seront le reste des cultivateurs et des artisans, il a mêlé du fer et du bronze » (6).

« Une cité semble précisément être juste, souligne Platon, quand les trois groupes naturels présents en elle » exercent « chacun sa tâche propre » (7). Effectivement, de même que l’homme doit soumettre le ventre au cœur, puis le cœur à la raison, les arts qui sont au service du ventre doivent être soumis à l’art des guerriers, qui lui-même doit obéir à celui des magistrats, c’est à dire à la Politique – cette dernière étant inséparable de la philosophie, car les magistrats doivent être philosophes. Il distingue également trois sortes de régimes politiques, dont chacun est lié à l’une des fonctions de la cité et, par conséquent, à l’une des parties et des facultés de l’organisme humain : la monarchie, ou gouvernement d’un seul, et l’aristocratie, gouvernement des meilleurs, régimes commandés par la raison ; la timocratie, ou gouvernement des guerriers, est quant à elle commandée par les passions nobles, celles du cœur ; enfin la démocratie, ou gouvernement du plus grand nombre, régime caractérisé par les passions les plus basses de l’âme humaine et les appétits matériels…

Pas de doute : cette cité idéale platonicienne reposant sur trois classes strictement hiérarchisées, reproduit l’organisation traditionnelle de la société en trois fonctions propre aux indo-européens. En effet, dans une Grèce qui semble avoir totalement oublié la tripartition, Platon confie la vie politique de la cité à des philosophes-rois ,les Gardiens, assistés d’une caste militaire, les Auxiliaires, qui règnent sur les basses classes productives.

Platon est convaincu que seuls les Gardiens, c’est-à-dire les sages, ont la capacité d’user équitablement de la raison pour le bien commun, alors que les hommes ordinaires ne peuvent s’élever au-dessus de leurs passions et de leurs buts personnels. En contrepartie, les membres de ce qu’il faut bien appeler la caste dirigeante doivent mener une vie entièrement commune, sans propriété privée ni famille, autant d’éléments de tentation égoïste, de division et, au final, de corruption. « Nul bien ne sera la possession privée d’aucun d’entre eux, sauf ce qui est de première nécessité » décrète le philosophe, qui préconise en outre « qu’ils vivent en communauté, comme ceux qui sont en expédition militaire » , et que parmi les habitants de la cité « ils soient les seuls à n’avoir pas le droit de prendre une part, ou de toucher l’or et l’argent, les seuls à ne pouvoir entrer sous un toit qui en abrite, en porter sur eux comme ornement, ou boire dans un récipient d’or ou d’argent » (8).

« Car, ajoute-t-il, dès qu’ils possèderont privément de la terre, une habitation et de l’argent, ils deviendront administrateurs de leurs biens, cultivateurs au lieu d’être les gardiens de la cité, et au lieu d’être les compagnons défenseurs des autres citoyens,  ils en deviendront les tyrans et les ennemis, remplis de haine et eux-mêmes haïs, ils passeront leur vie conspirant contre les autres et deviendront objets de conspiration, et ils redouteront bien davantage et plus souvent les ennemis de l’intérieur que ceux de l’extérieur, se précipitant vers la ruine eux-mêmes et l’ensemble de la cité » (9). En outre, leurs enfants seront enlevés dès la naissance afin de recevoir une éducation collective de type militaire.

Ce « communisme platonicien », un communisme viril et ascétique sans rapport avec les cauchemars messianiques à la Marx et Trotsky, n’est pas sans rapport avec le national-communautarisme spartiate. D’ailleurs, Montesquieu ne soulignera-t-il pas avec justesse que « la politique de Platon n’est pas plus idéale que celle de Sparte ».

Edouard Rix, Réfléchir & Agir, hiver 2009, n°31.

NOTES

(1) G. Dumézil, L’oubli de l’homme et l’honneur des dieux et autres essais. Vingt-cinq esquisses de mythologies, Gallimard (Coll. « Bulletin des sciences humaines »), 1985, p.94.

(2) Ibid, p.13.

(3) Platon, La République, Flammarion (Coll. « Le monde de la philosophie »), 2008 p. 262.

(4) Ibid, p. 199.

(5) Ibid, p. 200.

(6) Ibid, p. 201.

(7) Ibid ,p. 245.

(8) Ibid,p. 205.

(9) Ibid, pp. 205-206.

vendredi, 12 mars 2010

Zadruga: un groupe nationaliste et païen en Pologne

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1989

Zadruga: un groupe nationaliste et païen en Pologne

 

Explications de Jaroslaw Tomasiewicz et réponses d'Antoni Wacyk

 

zadruga.jpgFondé en 1937 par Jan Stachniuk, la revue et le mouvement Zadruga ont voulu, dans la Pologne catholique, exprimé et illustré une sensibilité païenne, ont perçu l'essentiel dans l'enraciment dynamique et évolutif dans une terre, dans la localisation précise des hommes et des peuples, localisation d'où s'élance un déploiement harmonieux et créatif. Cet enracinement/localisation constitue la culture proprement dite: les théories, idées, systèmes, principes qui ne reposent pas sur ce locus primordial relèvent de la non-culture, dont le père spirituel est Socrate. Les idéaux du socratisme sont vidés de toute concrétude et brisent l'élan de l'homo creans enraciné. Les grands systèmes religieux et/ou philosophiques (bouddhisme, islam, christianismes) relèvent de la non-culture.

Pour une approche complète des idées de Zadruga, on lira avec profit l'ouvrage de

Stanislaw Potrzebowski,

Zadruga. Eine völkische Bewegung in Polen,

Institut für angewandte Sozialgeschichte, Bonn, 1982, 325 S., DM 66,90, ISBN-3-923428-00-6.

Malgré les vicissitudes de l'histoire polonaise, l'occupation allemande et le régime communiste, Zadruga existe toujours. Ce n'est plus qu'un cercle très réduit, nous explique Jaroslaw Tomasiewicz, regroupant cinq à sept intellectuels adultes et beaucoup de jeunes sympathisants. Il rencontre des difficultés énormes d'ordre financier et technique et appelle les mouvements d'inspiration païenne et néo-droitiste à l'aider à se diffuser. Notamment par le biais de photocopies. Les anciens membres de Zadruga continuent sans répit à écrire articles, poèmes, manifestes, lettres, etc. mais sans pouvoir rien publier à grande échelle. Jaroslaw Tomasiewicz tente de faire passer le message dans les masses en militant dans des mouvements politiques et dans des associations culturelles, notamment sur la scène de la pop-culture. Celles-ci font notamment paraître une revue Kolomir, (le nom slave de la croix irlandaise), destinée à la jeunesse et consacrée à la musique et aux idées politiques. Elles organisent entre autres choses des soirées de danses populaires traditionnelles et diffusent des cassettes audio, de musique engagée rock'n'roll et folk. Tomasiewicz songe à créer un magazine de littérature fantastique et un journal sportif. Au niveau de la «culture des élites», J. Tomasiewicz entretient d'excellents contacts avec les grands peintres nationalistes et païens comme Konarski et Fraczek et un écrivain comme Nienacki. Par son intermédiaire, nous avons pu transmettre dix questions à Antoni Waczyk, le principal collaborateur de Stachniuk aux débuts de l'histoire de Zadruga.

 

1. Qu'en est-il de votre mouvement Zadruga aujourd'hui?

 

AW: Fondé par Jan Stachniuk (1905-1963), Zadruga est un mouvement culturel et non politique. Le terme Zadruga signifie «communauté» (au sens holiste). Aujourd'hui nous existons à l'état embryonnaire. Notre objectif est de déclencher une révolution culturelle, assise sur une conception de l'homme et de l'humanité diamétralement opposée à celle du christianisme, de l'hindouisme, du bouddhisme et des autres idéologies décadentistes, le communisme y compris.

 

2. Quelles sont les sources d'inspiration de Zadruga? Herder? Nietzsche?

 

Notre inspiration ne nous vient ni de Nietzsche ni de Herder. Dans l'histoire des idées en Pologne, nous nous référons dans une certaine mesure à Stanislaw Brzozowski (1878-1911). Mais pour l'essentiel nous nous inspirons des écrits de Stachniuk lui-même.

 

3. Le groupe Zadruga défend-il un principe ethniste? Si oui, quel type d'institutions suggéreriez-vous pour votre peuple?

 

Oui, Zadruga défend le principe ethnique. Quant aux institutions, je crois qu'il est encore trop tôt pour y penser. C'est un problème qui est encore fort éloigné...

 

4. Comment le groupe Zadruga explique-t-il l'émergence des peuples slaves en Europe orientale?

 

Les peuples slaves sont d'origine indo-européenne et leur foyer préhistorique initial s'étendait entre l'Oder et la Vistule.

 

5. Comment le groupe Zadruga explique-t-il la christianisation de la Pologne?

 

La christianisation de la Pologne était inévitable puisque le catholicisme en expansion avait pour lui la gloire de feu l'Empire Romain et la puissance militaire des Allemands récemment convertis.

 

6. Comment jugez-vous le phénomène politique qu'est Solidarnosc?

 

Solidarnosc est un facteur politique traditionnel en Pologne, animé qu'il est par des prêtres. C'est une garantie de stagnation assurée pour le peuple polonais.

 

7. La Pologne est coincée entre deux géants, l'Allemagne et la Russie. En tenant compte de ce fait géographique, comment voyez-vous l'avenir de votre pays?

 

C'est difficile à dire. Cela dépend du temps que mettront ces deux géants, nos voisins, à résoudre leurs propres problèmes. Mais une chose est sûre, si une nouvelle agression venait de l'Est, il y aurait appaisement à l'Ouest.

 

8. Les frontières de la Pologne sont à nouveau objet de discussion dans le monde? Quelle est votre position?

 

Les frontières de la Pologne sont inviolables.

 

9. Comment jugez-vous les événements d'URSS (la perestroïka), de Tchécoslovaquie (l'accession de Vaclav Havel à la Présidence), en Hongrie et en Allemagne de l'Est?

 

Nous saluons la perestroïka russe comme un phénomène positif. Mais nous avons des doutes quant à son succès final... Vaclav Havel? He is the right man in his place. C'est l'homme de la situation. Les Hongrois retourneront à l'Europe bien avant nous. Quant aux Est-Allemands, ils ont droit à la réunification.

 

10. La presse occidentale, ignorant la plupart du temps les réflexes profonds des peuples slaves, parle abondamment d'un mouvement russe appelé Pamyat et le décrit comme «populiste»? Qu'en pensez-vous?

 

Pamyat est un mouvement ethno-nationaliste russe et, en tant que tel, ne peut qu'être populiste.

jeudi, 11 mars 2010

Hermann Wirth e Julius Evola, un profondo rapporto culturale

Tratto da CentroStudilaRuna di Silvio degli Aurelli:

Continuando una serie di pubblicazioni brevi, ma estremamente interessanti, le benemerite Edizioni del Veltro di Parma hanno appena stampato il libro di Arthur Branwen, Ultima Thule. Herman Wirth e Julius Evola (coll. “I Quaderni del Veltro”, pp. 110, € 13,00). Si tratta in assoluto del primo ed unico studio che intende delineare i rapporti fra lo studioso tedesco-olandese e l’esoterista italiano. Herman Wirth è poco conosciuto in Italia. Di origini olandesi, nel 1910 ottenne la cittadinanza tedesca e nel primo dopoguerra si dedicò allo studio delle tracce dei popoli preistorici europei. La conoscenza di una cospicua quantità di diversificate lingue antiche e moderne, e una straordinaria preparazione sulla preistoria, gli consentì di avvicinarsi ai reperti che man mano studiava con una mentalità molto lontana dalle usuali prospettive accademiche. Non solo, ma per dirla con Evola, “il Wirth ha preteso di ricostruire non solo la storia della razza nordico-atlantica, ma altresì la sua religione. Sarebbe stata una religione già superiore, monoteistica, assai distinta dall’animismo e dal demonismo degli aborigeni negreidi o finno-asiatici, senza dogmi, di una grande purezza e potenzialmente universale”.
Utilizzando tutta una serie di dati e di testimonianze tratte dalla storia delle religioni, dal folklore, dalla paletnologia e dalla linguistica il Wirth pensò di poter dimostrare che alle origini dell’attuale umanità si trovasse un continente artico abitato da un popolo che incentrava la propria vita religiosa sul percorso solare e sui significati cosmico-spirituali che il tracciato dell’astro diurno disegna ogni anno. Il Wirth giunse ad enucleare una serie di segni primordiali che chiamò “serie sacra”, servita a questo popolo preistorico non solo come strumento espressivo, ma anche come un sistema di simboli e di notazioni astrali che articolavano il percorso del sole, i ritmi rituali, le forme espressive e probabilmente anche un sistema arcaico di scrittura derivato da questi segni cosmico-sacrali.
Herman Wirth

Julius Evola ha ammesso in molte occasioni la profonda influenza che l’opera del Wirth esercitò sul suo sistema speculativo,wirth.jpg ma nessuno aveva osato tentare di chiarire fin dove era arrivata questa influenza. Anzi, la quasi totalità dei biografi, degli estimatori o dei denigratori di Evola, ha solamente utilizzato quanto lo stesso Evola ha detto a questo proposito, non riuscendo neanche a leggere le opere dello studioso tedesco-olandese e restando paghi di quanto ha scritto lo stesso Evola.

Un’attenta comparazione dei testi permette ad Arthur Branwen di chiarire fin dove è arrivata questa influenza, cosa ha diviso i due studiosi, i limiti delle interpretazioni wirthiane, quelle che Evola riterrà confuse e farraginose. D’altronde, il punto di vista di Evola si era arricchito della lettura degli scritti di René Guénon che in quel tempo mostravano un diverso modo di studiare le dottrine spirituali e addirittura osavano indicare una superiorità dell’Oriente su un Occidente privo di ogni base rituale e religiosa. Persino l’interpretazione evoliana del mondo romano a poco a poco sembra riposizionarsi sulle prospettive wirthiane e l’arrivo dei Latini nel Lazio diventa un prolungamento delle invasioni nordico-atlantiche che cambieranno la stessa struttura morfologica dei popoli e delle tante tradizioni spirituali che ne deriveranno.

Il testo di Arthur Branwen è ben documentato, contiene una serie di dottissime note che da sole avrebbero avuto bisogno di ampliamenti dottrinali ed esplicativi capaci di trasformarle in altrettanti capitoli. La documentazione è abbondante, precisa, attenta e l’autore non si fa sfuggire l’occasione di puntualizzare la portata di studiosi come Frobenius, Pettazzoni, Altheim, Schmidt, Rasmussen, ecc. L’autore ci ha confidato che sta conducendo uno studio parallelo su Evola e Bachofen, e coloro che intendono capire la portata della cultura fiorita fra le due guerre e le prospettive che ne sono derivate, non possono che plaudire ad un’opera che mostra la superficialità di quegli interpreti evoliani (e sono molti) che in realtà non hanno mai studiato veramente il vasto retroterra sul quale sono state costruite le opere dell’esoterista romano.

Silvio degli Aurelii

lundi, 08 février 2010

Julius Evola on Tradition and the Right

Julius Evola on Tradition and the Right
(La Vera Destra)

evola01.jpgBaron Julius Evola (1899-1974) was an important Italian intellectual, although he despised the term. As poet and painter, he was the major Italian representative of Dadaism (1916-1922). Later he became the leading Italian exponent of the intellectually rigorous esotericism of René Guénon (1886-1951). He enjoyed an international reputation as the author of books on magic, alchemy and eastern religious traditions and won the respect of such important scholars as Mircea Eliade and Giuseppe Tucci. His book on early Buddhism, The Doctrine of Awakening,[1] which was translated in 1951, established his reputation among English-speaking esotericists. In 1983, Inner Traditions International, directed by Ehud Sperling, published Evola’s 1958 book, The Metaphysics of Sex, which it reprinted as Eros and the Mysteries of Love in 1992, the same year it published his 1949 book on Tantra, The Yoga of Power.[2]

The marketing appeal of the topic of sex is obvious. Both books, however, are serious studies, not sex manuals. Since then Inner Traditions has reprinted The Doctrine of Awakening and published many of Evola’s esoteric books, including studies of alchemy and magic,[3] and what Evola himself considered his most important exposition of his beliefs, Revolt Against the Modern World.[4]

In Europe Evola is known not only as an esotericist, but also as a brilliant and incisive right-wing thinker. During the 1980s most of his books, New Age and political, were translated into French under the aegis of Alain de Benoist, the leader of the French Nouvelle Droite.[5] Books and articles by Evola have been translated into German and published in every decade since the 1930s.[6]

Discussion of Evola’s politics reached North America slowly. In the 1980s political scientists Thomas Sheehan, Franco Ferraresi, and Richard Drake wrote about him unsympathetically, blaming him for Neo-Fascist terrorism.[7] In 1990 the esoteric journal, Gnosis, devoted part of an issue to Evola. Robin Waterfield, a classicist and author of a book on René Guénon, contributed a thoughtful appreciation of his work on the basis of French translations.[8] Italian esotericist Elémire Zolla discussed Evola’s development accurately but ungenerously.[9] The essay by Gnosis editor Jay Kinney was driven by an almost hysterical fear of the word “Fascist.” He did not appear to have read Evola’s books in any language, called the 1983 edition of The Metaphysics of Sex Evola’s “only book translated into English” and concluded “Evola’s esotericism appears to be well outside of the main currents of Western tradition. It remains to be seen whether his Hermetic virtues can be disentangled from his political sins. Meanwhile, he serves as a persuasive argument for the separation of esoteric ‘Church and State.’”[10]

With the publication of Men Among the Ruins: Post-War Reflections of a Radical Traditionalist,[11] English speakers can read Evola’s political views for themselves. They will find that the text, in Guido Stucco’s workman-like translation, edited by Michael Moynihan, is guarded by a double firewall. Joscelyn Godwin’s “Foreword” answers Jay Kinney’s hysterical diatribe of 1990. Godwin defends publishing Evola’s political writings by an appeal to “academic freedom,” which works “with the tools of rationality and scholarship, unsullied by emotionality or subjective references” and favors making all of Evola’s works available because “it would be academically dishonest to suppress anything.” Godwin’s high praise for The Doctrine of Awakening implicitly condemns Kinney’s ignorance. Evola’s books on esoteric topics reveal “one of the keenest minds in the field . . . The challenge to esotericists is that when Evola came down to earth, he was so ‘incorrect’ – by the received standards of our society. He was no fool; and he cannot possibly have been right . . . so what is one to make of it?”

Godwin’s “Preface” is followed by an introduction of more than 100 pages by Austrian esotericist H. T. Hansen on “Julius Evola’s Political Endeavors,” translated from the 1991 German version of Men Among the Ruins,[12] with additional notes and corrections (called “Preface to the American Edition”). Hansen’s introduction to Revolt Against the Modern World[13] is, with Robin Waterfield’s Gnosis essay, the best short introduction to Evola in English. His longer essay is essential for serious students, and Inner Traditions deserves warm thanks for publishing it. The major book on Evola is Christophe Boutin, Politique et Tradition: Julius Evola dans le siècle (1898-1974).[14]

Readers of books published by Inner Traditions might have guessed Evola’s politics. The Mystery of the Grail,[15] first published in 1937, praises the Holy Roman Empire as a great political force, led by Germans and Italians, which tried to unite Europe under the Nordic Ghibellines. Esotericists will probably guess that the title of Revolt Against the Modern World is an homage to Crisis of the Modern World,[16] the most accessible of René Guénon’s many books. The variation is also a challenge. Evola and Guénon see the modern world as the fulfillment of the Hindu Kali Yuga, or Dark Age, that will end one cosmic cycle and introduce another. For Guénon the modern world is to be endured, but Evola believed that real men are not passive. His praise of “The World of Tradition” with its warrior aristocracies and sacral kingship is peppered with contempt for democracy, but New Age writers often make such remarks, just as scientists do. If you believe you know the truth, it is hard not to be contemptuous of a system that determines matters by counting heads and ignores the distinction between the knowledgeable and the ignorant.

Visionary Among Italian Conservative Revolutionaries

Evola was not only an important figure in Guénon’s Integral Traditionalism, but also the leading Italian exponent of the Conservative Revolution in Germany, which included Carl Schmitt, Oswald Spengler, Gottfried Benn, and Ernst Jünger.[17] From 1934-43, Evola was editor of what we would now call the “op-ed” page of a major Italian newspaper (Regime Fascista) and published Conservative Revolutionaries and other right-wing and traditionalist authors.[18] He corresponded with Schmitt,[19] translated Spengler’s Decline of the West and Jünger’s An der Zeitmauer (At the Time Barrier) into Italian and wrote the best introduction to Jünger’s Der Arbeiter (The Worker), “The Worker” in Ernst Jünger’s Thought.[20]

Spengler has been well served by translation into English, but other important figures of the Conservative Revolution had to wait a long time. Carl Schmitt’s major works have been translated only in the past few decades.[21] Jünger’s most important work of social criticism, Der Arbeiter, has never been translated.[22] The major scholarly book on the movement has never been translated, either.[23] It is a significant statement on the limits of expression in the United States that so many leftist mediocrities are published, while major European thinkers of the rank of Schmitt, Jünger, and Evola have to wait so long for translation, if the day ever comes. It is certainly intriguing that a New Age press has undertaken the translation and publishing of Evola’s books, with excellent introductions.

The divorced wife of a respected free market economist once remarked to me, “Yale used to say that conservatives were just old-fashioned liberals.”[24] People who accept that definition will be flabbergasted by Julius Evola. Like Georges Sorel, Oswald Spengler, Whittaker Chambers, and Régis Debray, Evola insists that liberals and communists are in fundamental agreement on basic principles. This agreement is significant, because for Evola politics is an expression of basic principles and he never tires of repeating his own. The transcendent is real. Man’s knowledge of his relationship to transcendence has been handed down from the beginning of human culture. This is Tradition, with a capital T. Human beings are tri-partite: body, soul, and spirit. State and society are hierarchical and the clearer the hierarchy, the healthier the society. The worst traits of the modern world are its denial of transcendence, reductionist vision of man and egalitarianism.

These traits come together in what Evola called “la daimonìa dell’economia,” translated by Stucco as “the demonic nature of the economy.”[25] Real men exist to attain knowledge of the transcendent and to strive and accomplish heroically. The economy is only a tool to provide the basis for such accomplishments and to sustain the kind of society that permits the best to attain sanctity and greatness. The modern world denies this vision.

In both individual and collective life the economic factor is the most important, real, and decisive one . . . An economic era is already by definition a fundamentally anarchical and anti-hierarchical era; it represents a subversion of the normal order . . . This subversive character is found in both Marxism and in its apparent nemesis, modern capitalism. Thus, it is absurd and deplorable for those who pretend to represent the political ‘Right’ to fail to leave the dark and small circle that is determined by the demonic power of the economy – a circle including capitalism, Marxism, and all the intermediate economic degrees. This should be firmly upheld by those today who are taking a stand against the forces of the Left. Nothing is more evident than that modern capitalism is just as subversive as Marxism. The materialistic view of life on which both systems are based is identical.[26]

Most conservatives do not like the leftist hegemony we live under, but they still want to cling to some aspect of modernity to preserve a toehold on respectability. Evola rejected the Enlightenment project lock, stock, and barrel, and had little use for the Renaissance and the Reformation. His books ask us to take seriously the attempt to imagine an intellectual and political world that radically rejects the leftist worldview. He insists that those really opposed to the leftist regime, the true Right, are not embarrassed to use words like reactionary and counter revolutionary. If you are afraid of these words, you do not have the courage to stand up to the modern world.

He also countenances the German expression, Conservative Revolution, if properly understood. Revolution is acceptable only if it is true re-volution, a turning back to origins. Conservatism is valid only when it preserves the true Tradition. So loyalty to the bourgeois order is a false conservatism, because on the level of principle, the bourgeoisie is an economic class, not a true aristocracy. That is one reason why at the end of his life, Evola was planning a right-wing journal to be called The Reactionary, in conscious opposition to the leading Italian conservative magazine, Il Borghese, “The Bourgeois.”

For Evola the state creates the nation, not the opposite. Although Evola maintained a critical distance from Fascism and never joined the Fascist Party,[27] here he was in substantial agreement with Mussolini and the famous article on “Fascism” in the Enciclopedia Italiana, authored by the philosopher and educator, Giovanni Gentile. He disagreed strongly with the official philosophy of 1930’s Germany. The Volk is not the basis of a true state, an imperium. Rather the state creates the people. Naturally, Evola rejected Locke’s notion of the Social Contract, where rational, utilitarian individuals come together to give up some of their natural rights in order to preserve the most important one, the right to property. Evola also disagreed with Aristotle’s idea that the state developed from the family. The state was created from Männerbünde, disciplined groups entered through initiation by men who were to become warriors and priests. The Männerbund, not the family, is the original basis of true political life.[28]

Evola saw his mission as finding men who could be initiated into a real warrior aristocracy, the Hindu kshatriya, to carry out Bismarck’s “Revolution from above,” what Joseph de Maistre called “not a counterrevolution, but the opposite of a revolution.” This was not a mass movement, nor did it depend on the support of the masses, by their nature incapable of great accomplishments. Hansen thinks these plans were utopian, but Evola was in touch with the latest political science. The study of elites and their role in every society, especially liberal democracies, was virtually an Italian monopoly in the first half of the Twentieth century, carried on by men like Roberto Michels, Gaetano Mosca, and Vilfredo Pareto. Evola saw that nothing can be accomplished without leadership. The modern world needs a true elite to rescue it from its involution into materialism, egalitarianism and its obsession with the economy and to restore a healthy regime of order, hierarchy and spiritual creativity. When that elite is educated and initiated, then (and only then) a true state can be created and the Dark Age will come to an end.

Egalitarianism, Fascism, Race, and Roman Catholicism

Despite his criticism of the demagogic and populist aspects of Fascism and National Socialism, Evola believed that under their aegis Italy and Germany had turned away from liberalism and communism and provided the basis for a return to aristocracy, the restoration of the castes and the renewal of a social order based on Tradition and the transcendent. Even after their defeat in World War II, Evola believed that the fight was not over, although he became increasingly discouraged and embittered in the decades after the war. (Pain from a crippling injury suffered in an air raid may have contributed to this feeling.)

Although Evola believed that the transcendent was essential for a true revival, he did not look to the Catholic Church for leadership. Men Among the Ruins was published in 1953, when the official position of the Church was still strongly anti-Communist and Evola had lived through the 1920s and 1930s when the Vatican signed the Concordat with Mussolini. So his analysis of the Church, modified but not changed for the second edition in 1967, is impressive as is his prediction that the Church would move to the left.

After the times of De Maistre, Bonald, Donoso Cortés, and the Syllabus have passed, Catholicism has been characterized by political maneuvering . . . Inevitably, the Church’s sympathies must gravitate toward a democratic-liberal political system. Moreover, Catholicism had for a long time espoused the theory of ‘natural right,’ which hardly agrees with the positive and differentiated right, on which a strong and hierarchical State can be built . . . Militant Catholics like Maritain had revived Bergson’s formula according to which ‘democracy is essentially evangelical’; they tried to demonstrate that the democratic impulse in history appears as a temporal manifestation of the authentic Christian and Catholic spirit . . . By now, the categorical condemnations of modernism and progressivism are a thing of the past . . . When today’s Catholics reject the ‘medieval residues’ of their tradition; when Vatican II and its implementations have pushed for debilitating forms of ‘bringing things up to date’; when popes uphold the United Nations (a ridiculous hybrid and illegitimate organization) practically as the prefiguration of a future Christian ecumene – this leaves no doubt in which direction the Church is being dragged. All things considered, Catholicism’s capability of providing an adequate support for a revolutionary-conservative and traditionalist movement must be resolutely denied.[29]

Although his 1967 analysis mentions Vatican II, Evola’s position on the Catholic Church went back to the 1920s, when after his early Dadaism he was developing a philosophy based on the traditions of India, the Far East and ancient Rome under the influence of Arturo Reghini (1878-1946).[30] Reghini introduced Evola to Guénon’s ideas on Tradition and his own thinking on Roman “Pagan Imperialism” as an alternative to the Twentieth Century’s democratic ideals and plutocratic reality. Working with a leading Fascist ideologue, Giuseppe Bottai (1895-1959), Evola wrote a series of articles in Bottai’s Critica Fascista in 1926-27, praising the Roman Empire as a synthesis of the sacred and the regal, an aristocratic and hierarchical system under a true leader. Evola rejected the Catholic Church as a source of religion and morality independent of the state, because he saw its universalistic claims as compatible with and tending toward liberal egalitarianism and humanitarianism, despite its anti-Communist rhetoric.

Evola’s articles enjoyed a national succès de scandale and he expanded them into a book, Imperialismo Pagano (1928), which provoked a heated debate involving many Fascist and Catholic intellectuals, including, significantly, Giovanni Battista Montini (1897-1978), who, when Evola published the second edition of Men Among the Ruins in 1967, had become the liberal Pope Paul VI. Meanwhile, Mussolini was negotiating with Pope Pius XI (1857-1939) for a reconciliation in which the Church would give its blessings to his regime in return for protection of its property and official recognition as the religion of Italy. Italy had been united by the Piedmontese conquest of Papal Rome in 1870, and the Popes had never recognized the new regime. So Evola wrote in 1928, “Every Italian and every Fascist should remember that the King of Italy is still considered a usurper by the Vatican.”[31] The signing of the Vatican Accords on February 11, 1929, ended that situation and the debate. Even Reghini and Bottai turned against Evola.[32]

Evola later regretted the tone of his polemic, but he also pointed out that the fact that this debate took place gave the lie direct to extreme assertions about lack of freedom of speech in Fascist Italy. Evola has been vindicated on the main point. The Catholic Church accepts liberal democracy and even defends it as the only legitimate regime. Notre Dame University is not the only Catholic university with a Jacques Maritain Center, but neither Notre Dame nor any other Catholic university in America has a Center named after Joseph de Maistre or Louis de Bonald or Juan Donoso Cortés. Pope Pius IX was beatified for proclaiming the doctrine of the Immaculate Conception, not for his Syllabus Errorum, which denounced the idea of coming to terms with liberalism and modern civilization.

Those who want to distance Evola from Fascism emphasize the debate over Pagan Imperialism. For several years afterwards Fascist toughs harassed Evola, until he won the patronage of Roberto Farinacci, the Fascist boss of Cremona. Evola edited the opinion page of Farinacci’s newspaper, Regime Fascista, from 1934 to 1943 in an independent fashion. Although there are anecdotes about Mussolini’s fear of Evola, the documentary evidence points in the opposite direction. Yvon de Begnac’s talks with Mussolini, published in 1990, report Mussolini consistently speaking of Evola with respect. Il Duce had the following comments about the Pagan Imperialism debate:

Despite what is generally thought, I was not at all irritated by Doctor Julius Evola’s pronouncements made a few months before the Conciliation on the modification of relations between the Holy See and Italy. Anyhow, Doctor Evola’s attitude did not directly concern relations between Italy and the Holy See, but what seemed to him the long-term irreconcilability of the Roman tradition and the Catholic tradition. Since he identified Fascism with the Roman tradition, he had no choice but to reckon as its adversary any historical vision of a universalistic order.[33]

Mussolini’s strongest support for Evola came on the subject of race, which became an issue after Italy’s conquest of Ethiopia in 1936. Influenced by Nazi Germany, Italy passed Racial Laws in 1938. Evola was already writing on the racial views consistent with a Traditional vision of mankind in opposition to what he saw as the biological reductionism and materialism of Nazi racial thought. His writings infuriated Guido Landra, editor of the journal, La Difesa della Razza (Defense of the Race). Landra and other scientific racists were especially irritated by Evola’s article, “Scientific Racism’s Mistake.”[34] Mussolini, however, praised Evola’s writings as early as 1935 and permitted Evola’s Summary of Racial Doctrine to be translated into German as Compendium of Fascist Racial Doctrine to represent the official Fascist position.[35]

Evola accepts the Traditional division of man into body, soul, and spirit and argues that there are races of all three.

While in a ‘pure blood’ horse or cat the biological element constitutes the central one, and therefore racial considerations can be legitimately restricted to it, this is certainly not the case with man, or at least any man worthy of the name . . . Therefore racial treatment of man can not stop only at a biological level.[36]

Just as the state creates the people and the nation, so the spirit forms the races of body and soul. Evola had done considerable research on the history of racial studies and wrote a history of racial thought from Classical Antiquity to the 1930’s, The Blood Myth: The Genesis of Racism.[37] Evola knew that in addition to the tradition of scientific racism, represented by Gobineau, Houston Stewart Chamberlain, Alfred Rosenberg, and Landra was one that appreciated extra- or super-biological elements and whose adherents included Montaigne, Herder, Fichte, Gustave Le Bon, and Evola’s contemporary and friend, Ludwig Ferdinand Clauss, a German biologist at the University of Berlin.[38]

Hansen has a thorough discussion of “Evola’s Attitude Toward the Jews.” Evola thought that the negative traits associated with Jews were spiritual, not physical. So a biological Jew might have an Aryan soul or spirit and biological Aryans might – and did – have a Semitic soul or spirit. As Landra saw, this was the end of any politically useful scientific racism. The greatest academic authority on Fascism, Renzo de Felice argued in The Jews in Fascist Italy that Evola’s theories are wrong, but that they have a distinguished intellectual ancestry, and Evola argued for them in an honorable way.[39] In recent years, Bill Clinton was proclaimed America’s first black president. This instinctive privileging of style over biology is in line with Evola’s views.

Hansen does not discuss Evola’s views on Negroes, to which Christophe Boutin devotes several pages of Politique et Tradition.[40] In his 1968 collection of essays, The Bow and the Club,[41] there is a chapter on “America Negrizzata,” which argues that, while there was relatively little miscegenation in the United States, the Telluric or Negro spirit has had considerable influence on the quality of American culture. The 1972 edition of Men Among the Ruins ends with an “Appendix on the Myths of our Time,” of which number IV is “Taboos of our Times.”[42] The two taboos discussed forbid a frank discussion of the “working class,” common in Europe, and of the Negro. Although written thirty years ago, it is up-to-date in its description of this subject and notices that the word “Negro” itself was becoming taboo as “offensive.”[43] La vera Destra, a real Right, will oppose this development. This appendix is not translated in the Inner Traditions or the 1991 German editions, confirming its accuracy.

At the end of Men Among the Ruins, instead of the Appendix of the 1972 edition, stands Evola’s 1951 Autodifesa, the speech he gave in his own defense when he was tried by the Italian democracy for “defending Fascism,” attempting to reconstitute the dissolved Fascist Party” and being the “master” and inspirer” of young Neo-Fascists.[44] Like Socrates, he was accused of not worshipping the gods of the democracy and of corrupting youth. When he asked in open court where in his published writings he had defended “ideas proper to Fascism,” the prosecutor, Dr. Sangiorgi, admitted that there were no such passages, but that the general spirit of his works promoted “ideas proper to Fascism,” such as monocracy, hierarchism, aristocracy or elitism. Evola responded.

I should say that if such are the terms of the accusation,[45] I would be honored to see, seated at the same bank of accusation, such people as Aristotle, Plato, the Dante of De Monarchia, and so on up to Metternich and Bismarck. In the same spirit as a Metternich, a Bismarck,[46] or the great Catholic philosophers of the principle of authority, De Maistre and Donoso Cortés, I reject all that which derives, directly or indirectly, from the French Revolution and which, in my opinion, has as its extreme consequence Bolshevism; to which I counterpose the ‘world of Tradition.’ . . . My principles are only those that, before the French Revolution, every well-born person considered sane and normal.[47]

Evola’s Autodifesa was more effective than Socrates’ Apology, since the jury found him “innocent” of the charges. (Italian juries may find a defendant “innocent,” “not guilty for lack of proof,” or “guilty.”) Evola noted in his speech, “Some like to depict Fascism as an ‘oblique tyranny.’[48] During that ‘tyranny’ I never had to undergo a situation like the present one.” Evola was no lackey of the Fascist regime. He attacked conciliation with the Vatican in the years before the 1929 Vatican Accords and developed an interpretation of race that directly contradicted the one favored by the German government and important currents within Fascism. His journal, La Torre (The Tower), was closed down in 1930 because of his criticism of Fascist toughs, gli squadristi. Evola, however, never had to face jail for his serious writings during the Fascist era. That had to wait for liberal democracy. Godwin and Hansen are absolutely correct to emphasize Evola’s consistency and coherence as an esoteric thinker and his independence from any party-line adherence to Fascism. On the other hand, Evola considered his politics a direct deduction from his beliefs about Tradition. He was a sympathetic critic of Fascism, but a remorseless opponent of liberal democracy.

Inner Traditions and the Holmes Publishing Group[49] have published translations of most of Evola’s esoteric writings and some important political books. Will they go on to publish the rest of his oeuvre? Joscelyn Godwin, after all, wrote, “It would be intellectually dishonest to suppress anything.” Evola’s book on Ernst Jünger might encourage a translation of Der Arbeiter. Riding the Tiger[50] explains how the “differentiated man” (uomo differenziato) can maintain his integrity in the Dark Age. It bears the same relation to Men Among the Ruins that Aristotle’s Ethics bears to his Politics and, although published later, was written at the same time.Riding the Tiger[51] There are brilliant essays in The Bow and the Club, but can a book be published in contemporary America with an essay entitled “America Negrizzata?” Pagan Imperialism is a young man’s book, vigorous and invigorating.

The most challenging book for readers who enjoy Men Among the Ruins is Fascism Seen from the Right, with its appendix, “Notes on the Third Reich,”Riding the Tiger[52] where Evola criticizes both regimes as not right-wing enough. A world respectful of communism and liberalism (and accustomed to using the word “Fascist” as an angry epithet) will find it hard to appreciate a book critical, but not disrespectful, of il Ventennio (the Twenty Years of Fascist rule). I would suggest beginning with the short pamphlet, Orientamenti (Orientations),[53] which Evola composed in 1950 as a summary of the doctrine of Men Among the Ruins.

Hansen quotes right-wing Italians who say that Evola’s influence discourages political action because his Tradition comes from an impossibly distant past and assumes an impossibly transcendent truth and a hopelessly pessimistic view of the present. Yet Evola confronts the modern world with an absolute challenge. Its materialism, egalitarianism, feminism, and economism are fundamentally wrong. The way out is through rejecting these mistakes and returning to spirit, transcendence and hierarchy, to the Männerbund and the Legionary Spirit. It may be discouraging to think that we are living in a Dark Age, but the Kali Yuga is also the end of a cosmic cycle. When the current age ends, a new one will begin. This is not Spengler’s biologistic vision, where our civilization is an individual, not linked to earlier ones and doomed to die without offspring, like all earlier ones.[54]

We are linked to the past by Tradition and when the Dark Age comes to an end, Tradition will light the way to new greatness and accomplishment. We may live to see that day. If not, what will survive is the legionary spirit Evola described in Orientamenti:

It is the attitude of a man who can choose the hardest road, fight even when he knows that the battle is materially lost and live up to the words of the ancient saga, ‘Loyalty is stronger than fire!’ Through him the traditional idea is asserted, that it is the sense of honor and of shame – not halfway measures drawn from middle class moralities – that creates a substantial, existential difference among beings, almost as great as between one race and another race. If anything positive can be accomplished today or tomorrow, it will not come from the skills of agitators and politicians, but from the natural prestige of men both of yesterday but also, and more so, from the new generation, who recognize what they can achieve and so vouch for their idea.[55]

This is the ideal of Oswald Spengler’s Roman soldier, who died at this post at Pompeii as the sky fell on him, because he had not been relieved. We do not need programs and marketing strategies, but men like that. “It is men, provided they are really men, who make and unmake history.”[56] Evola’s ideal continues to speak to the right person. “Keep your eye on just one thing: to remain on your feet in a world of ruins.”

End Notes

[1]. La dottrina del risveglio, Bari, 1943, revised in 1965.

[2]. Lo Yoga della potenza, Milan, 1949, revised in 1968, was a new edition of L’Uomo come Potenza, Rome, 1926; Metafisica del sesso, Rome, 1958, revised 1969.

[3]. Introduzione alla magia quale scienza del’Io, 3 volumes, Rome, 1927-29, revised 1971, Introduction to Magic: Rituals and Practical Techniques for the Magus, Rochester, VT: 2001; La tradizione hermetica (Bari, 1931), revised 1948, 1971; The Hermetic Tradition, Rochester, VT: 1995.

[4]. Rivolta contro il mondo moderno, Milan, 1934, revised 1951, 1969.

[5]. Robin Waterfield gives a useful bibliography at the end of his Gnosis essay (note 8, below) p. 17.

[6]. Karlheinz Weissman, “Bibliographie” in Menschen immitten von Ruinen, Tübingen, 1991, pp. 403-406, e.g., Heidnischer Imperialismus, Leipzig, 1933; Erhebung wider die moderne Welt, Stuttgart, 1935; Revolte gegen die moderne Welt, Berlin, 1982; Den Tiger Reiten, Vilsborg, 1997.

[7]. Thomas Sheehan, “Myth and Violence: The Fascism of Julius Evola and Alain de Benoist,” Social Research 48: 1981, pp. 45-73; Franco Ferraresi, “Julius Evola: tradition, reaction and the Radical Right,” Archives européennes de sociologie 28: 1987, pp. 107-151; Richard Drake, “Julius Evola and the Ideological Origins of the Radical Right in Contemporary Italy,” in Peter H. Merkl, (ed.), Political Violence and Terror: Motifs and Motivations, Berkeley, 1986, pp. 61-89; idem, The Revolutionary Mystique and Terrorism in Contemporary Italy, Bloomington, 1989.

[8]. Robin Waterfield, “Baron Julius Evola and the Hermetic Tradition,” Gnosis 14:1989-90, pp. 12-17.

[9]. Elémire Zolla, “The Evolution of Julius Evola’s Thought,” Gnosis 14: 1989-90, pp. 18-20.

[10]. Jay Kinney, “Who’s Afraid of the Bogeyman? The Phantasm of Esoteric Terrorism,” Gnosis 14: 1989-90, pp. 21-24.

[11].. Gli uomini e le rovine, Rome, 1953, revised 1967, with a new appendix, 1972.

[12]. H. T. Hansen, “Julius Evolas politisches Wirken,” Menshen immitten von Ruinen (note 6, above) pp. 7-131.

[13]. H. T. Hansen, “A Short Introduction to Julius Evola” in Revolt Against the Modern World, Rochester, VT, 1995, ix-xxii, translated from Hansen’s article in Theosophical History 5, January 1994, pp. 11-22.

[14]. Christophe Boutin, Politique et Tradition: Julius Evola dans le siècle, 1898-1974; Paris, 1992.

[15]. Il mistero del Graal e la tradizione ghibellina dell’Impero, Bari, 1937, revised 1962, 1972; translated as The Mystery of the Grail: Initiation and Magic in the Quest for the Spirit, Rochester, Vt., 1997.

[16]. René Guénon, Crise du monde moderne (Paris, 1927) has been translated several times into English.

[17]. H. T. Hansen, “Julius Evola und die deutsche konservative Revolution,” Criticón 158 (April/Mai/June 1998) pp. 16-32.

[18]. Diorema: Antologia della pagina special di “Regime Fascista,” Marco Tarchi, (ed.) Rome, 1974.

[19]. Lettere di Julius Evola a Carl Schmitt, 1951-1963, Rome, 2000.

[20]. L”Operaio” nel pensiero di Ernst Jünger (Rome, 1960), revised 1974; reprinted with additions, 1998.

[21]. The Concept of the Political, New Brunswick, NJ, 1976; The Crisis of Parliamentary Democracy, Cambridge, MA, 1985; Political Theology, Cambridge, MA, 1985; Political Romanticism, Cambridge, MA, 1986. Recent commentary includes Paul Gottfried, Carl Schmitt: Politics and Theory, New York, 1990; Gopal Balakrishnan, The Enemy: An Intellectual Portrait of Carl Schmitt, London, 2000.

[22]. Ernst Jünger, Der Arbeiter. Herrschaft und Gestalt, Hamburg, 1932, was translated into Italian in 1985.

[23]. Armin Mohler, Die konservative Revolution in Deutschland, 1918-1932, Stuttgart, 1950, revised and expanded in 1972, 1989, 1994, 1999.

[24]. Panajotis Kondylis, Conservativismus: Geschichtlicher Gehalt und Untergang, Stuttgart, 1986, devotes 553 pages to this theme.

[25]. My impression is that daimonìa dell’economia implies “demonic possession by the economy.” In Orientamenti (see note 53, below), Evola writes of “l’allucinazione e la daimonìa dell’economia,” “hallucination and demonic possession.”

[26]. Men Among the Ruins: Post-War Reflections of a Radical Traditionalist, Rochester, VT, 2002, p. 166. “Absurd and deplorable” is for assurdo peggiore, literally, “the worst absurdity;” circolo buio e chiuso “dark and small circle,” literally “dark and closed circle.” Chiuso is used in weather reports for “overcast.”

[27]. Evola applied for membership in the Fascist Party in 1939 in order to enlist in the army as an officer, but in vain for reasons discussed by Hansen (note 26, above) xiii. The application was found by Dana Lloyd Thomas, “Quando Evola du degradato,” Il Borghese, March 29, 1999, pp. 10-13. Evola mentioned this in an interview with Gianfranco De Turris, I’Italiano 11, September, 1971, which can be found in some reprints of L’Orientamenti, e.g., Catania, 1981, 33 (See note 53, below).

[28]. Evola cites Heinrich Schurtz, Altersklassen und Männerbünde: Eine Darstellung der Grundformen der Gesellschaft, Berlin, 1902; A. van Gennep, Les rites du passage, Paris, 1909; The Rites of Passage, Chicago, 1960.

[29]. Men Among the Ruins (note 26, above) pp. 210-211; Gli uomini e le rovine (note 11, above) pp. 15-151. “A ridiculous hybrid and illegitimate organization” translates questa ridicola associazione ibrida e bastarda.

[30]. Elémire Zolla gives the essentials about Reghini’s influence on Evola in his Gnosis essay (note 9, above).

[31]. Imperialismo Pagano, Rome, 1928, p. 40.

[32]. Richard Drake, “Julius Evola, Radical Fascism, and the Lateran Accords,” Catholic Historical Review 74, 1988, pp. 403-319; E. Christian Kopff. “Italian Fascism and the Roman Empire,” Classical Bulletin 76: 2000, pp. 109-115.

[33]. Yvon de Begnac, Taccuini Mussoliniani, Francesco Perfetti, (ed.), Bologna, 1990, p. 647.

[34]. “L’Equivoco del razzismo scientifico,” Vita Italiana 30, September 1942.

[35]. Sintesi di dottrina della razza, Milan, 1941; Grundrisse der faschistischen Rassenlehre, Berlin, 1943.

[36]. Sintesi di dottrina della razza (note 35, above) p. 35. Since Hansen (note 26, above) 71 uses the German translation (note 12, above) 90, the last sentence reads “Fascist racial doctrine (Die faschistischen Rassenlehre) therefore holds a purely biological view of race to be inadequate.”

[37]. Il mito del sangue: Genesi del razzismo, Rome, 1937, revised 1942.

[38]. Ludwig Ferdinand Clauss, Rasse und Seele. Eine Einführung in den Sinn der leiblichen Gestalt, Munich, 1937; Rasse ist Gestalt, Munich, 1937.

[39]. Renzo de Felice, The Jews in Fascist Italy: A History, New York, 2001, 378, translation of Storia degli Ebrei Italiani sotto il Fascismo, Turin, 1961, revised 1972, 1988, 1993. Evola is discussed on pp. 392-3.

[40]. Boutin (note 14, above) pp. 197-200.

[41]. L’Arco e la clava, Milan, 1968, revised 1971. The article is pp. 39-46 of the new edition, Rome, 1995.

[42]. Gli uomini e le rovine (note 11, above) Appendice sui miti del nostro tempo, pp. 255-282; Tabù dei nostri tempi, pp. 275-282.

[43]. Gli uomini e le rovine (note 11, above) p. 276: la tabuizzazione che porta fino ad evitare l’uso della designazione “negro,” per le sue implicazioni “offensive.”

[44]. J. Evola, Autodifesa (Quaderni di testi Evoliani, no. 2) (Rome, n.d.)

[45]. Banco degli accusati is what is called in England the “prisoner’s dock.”

[46]. At this point, according to Autodifesa (note 44, above) p. 4, Evola’s lawyer, Franceso Carnelutti, called out, “La polizia è andata in cerca anche di costoro.” (“The police have gone to look for them, too.”)

[47]. Men Among the Ruins (note 25, above) pp. 293-294; Autodifesa (note 44, above) pp. 10-11.

[48]. Bieca is literally “oblique,” but in this context means rather “grim, sinister.”

[49]. Holmes Publishing Group (Edwards, WA) has published shorter works by Evola edited by the Julius Evola Foundation in Rome, e.g. René Guénon: A Teacher for Modern Times; Taoism: The Magic of Mysticism; Zen: The Religion of the Samurai; The Path of Enlightenment in the Mithraic Mysteries.

[50]. Cavalcare la tigre, Rome, 1961, revised 1971.

[51]. Gianfranco de Turris, “Nota del Curatore,” Cavalcare la tigre , 5th edition: Rome, 1995, pp. 7-11.

[52]. Il Fascismo, Rome, 1964; Il Fascismo visto dalla Destra, con Note sul terzo Reich, Rome, 1970.

[53]. Orientamenti (Rome, 1951), with many reprints.

[54]. J. Evola, Spengler e “Il tramonto dell’Occidente” (Quaderni di testi Evoliani, no. 14) (Rome, 1981).

[55]. Orientamenti, (note [53]., above), p. 12; somewhat differently translated by Hansen (note 26, above) p. 101.

[56]. Orientamenti (note 53, above) p. 16. Hansen (note [26]., above) p. 93 translates “It is humans, as far as they are truly human, that make history or tear it down,” reflecting the German (note 12, above) p. 118: “Es sind die Menschen, sofern sie wahrhaft Menschen sind, die die Geschichte machen oder sie niederreissen.” The parallel sentence in Men Among the Ruins (note 11, above) p. 109: sono gli uomini, finché sono veramente tali, a fare o a disfare la storia, is translated by Stucco (note 26, above) p. 181: “It is men who make or undo history.” He omits finché sono veramente tali, but gets the meaning of uomini right.

dimanche, 07 février 2010

El influjo de Francia en Juan Donosos Cortés

El influjo de Francia en Juan Donosos Cortés

 

por Gonzalo Larios Mengotti - Ex: http://www.arbil.org/

Si señalábamos en el nº 117 de Arbil que Donoso Cortés había recibido en su juventud una formación liberal ilustrada, debemos ahora hacer hincapié en que ésta fue fundamentalmente bebida de fuentes y modelos provenientes de Francia.

donoso-cortes-observateur-revolution-europe-f-L-1.jpgNo sólo sus primeras lecturas lo acercan a los autores galos del siglo XVIII, sino también sus estudios universitarios los desarrolló en las universidades más progresistas y, por ende, más afrancesadas de la España de entonces.

 

Donoso recibió lecciones de francés desde muy joven [1] , perfeccionándolo luego durante sus diversas estadías en Francia a partir de 1840. Al margen de esta circunstancia, un joven ávido de lecturas, como lo fue siempre Donoso, no podría estar ajeno al poderoso influjo cultural que desplegaba por entonces Francia, no sólo en su vecina España, sino, en mayor o menor medida, en todo el mundo occidental. De esta influencia transpirenaica, como casi todos los de su generación, bebió el joven Donoso sus primeras ideas políticas, incomprensibles si no se tiene en cuenta el devenir vanguardista de los acontecimientos políticos franceses. No me refiero en especial a la trascendente revolución de 1789, ni a la consiguiente expansión napoleónica, sucesos que a pocos europeos o hispanoamericanos pudieron dejar de afectar de algún modo, sino a la política francesa que se desarrolló a partir de la Carta de 1814, que acompañó el interrumpido reinado de Luis XVIII, y al de su sucesor Carlos X; a los intentos involucionistas de éste, y a su final anticipado por la llamada revolución de julio, que dió lugar a una monarquía burguesa encabezada por Luis Felipe de Orleans. Por último, al devenir de ésta a través de sus distintos ministerios.

 

Fueron éstos los acontecimientos que marcaron el entorno de la juventud de Donoso Cortés. Sus estudios y sus análisis y, como consecuencia, sus pensamientos políticos de entonces estuvieron fuertemente influenciados por la apasionante realidad política de Francia. Esta se convirtió así en estadio avanzado del desarrollo político europeo, guía previa y, por ello, modélica y aleccionadora de la situación española, que a través de la guerra de la independencia, las Cortes de Cádiz, el regreso del rey "deseado", pasando por el trienio liberal, la "invasión" de los cien mil hijos de San Luis, la férrea restauración de Fernando VII, el Golpe de Estado de 1832, y el Estatuto Real, para detenernos sólo aquí, demuestran un paralelismo demasiado evidente y deudor de los sucesos franceses.

 

Desde hacía tiempo la "luz" venía de Francia y Donoso estuvo siempre alerta para recibirla. Si la revolución del 48 o la posterior llegada al poder de Luis Napoleón se consideran indispensables para entender al último Donoso, este papel en su juventud lo desempeñará la revolución de julio y la monarquía de Luis Felipe. Siempre fueron francesas las fuentes básicas en que se inspiró su pensamiento aunque las filtró con las peculiariedades propias de su estilo y de su genio. Liberales doctrinarios sucederán a las lecturas clásicas de la Ilustración. Contrarrevolucionarios franceses como de Bonald, de Maistre, o el romántico Chateaubriand, influyeron, antes de lo que comúnmente se cree, en el pensamiento del extremeño.

 

Si el pensador español recibe con avidez las nuevas tendencias intelectuales que surgen allende los pirineos, también, siguiendo el tópico ilustrado, considera a España vacía de filosofía, no sólo en su tiempo, lo que en parte es correcto, sino, y recojo sus palabras, "siempre es cierto que en la península española jamás levantó sus ramas frondosas a las nubes el árbol de la filosofía" [2] . Su formación afrancesada le aleja del conocimiento de la filosofía española, con gravedad de los pensadores escolásticos del siglo XVI, Suárez, Mariana o Vitoria, en alguno de los cuales sólo se interesó durante los años finales de su vida. La causa del influjo galo la debemos encontrar también en su propio tiempo, la primera mitad del siglo XIX; "de ese maestro soy plagiario" [3] , replicará con orgullo y desdén, a aquellos que tildan de afrancesadas sus Consideraciones sobre la diplomacia, acometiendo luego en contra del estilo desfasado de puristas, "que imitan más o menos al de los escritores del siglo XVI, sin saber que cometen un anacronismo" [4] . Donoso no dejó nunca de sentirse español, pero, como vemos, su formación y su circunstancia le otorgaron una clara disposición receptiva de las principales corrientes del pensamiento galo: "la dote con que me envanezco es un amor entrañable a mi país, y la debilidad que publico es mi inclinación irresistible, instintiva, por la Francia" [5] .

 

La confesión fue sincera. De ambos sentimientos dio copiosas pruebas durante toda su vida.

 

Si bien pudo conocer el pensamiento liberal inglés, el utilitarismo de Bentham y quizás el conservadurismo de Burke, como también la corriente idealista que con fuerza surgía en Alemania, estas fuentes fueron por lo general secundarias dentro de su pensamiento y recibidas, si no conocidas, a través de obras principalmente francesas. Por ello señaló que M. de Staël, Cousin y Constant, tres autores ya leídos por Donoso, "fueron los que principalmente hicieron conocer a la Francia los sistemas filosóficos de la Alemania" [6]  y, probablemente, a su vez, por esa vía los conoció él mismo.

 

Comprendiendo la fuerza de este influjo cultural galo, es como mejor podemos valorar sus constantes reflexiones en torno a los vaivenes políticos de Francia, en estos primeros años de actividad publicista, relacionados con la Carta de 1814 y la revolución de julio de 1830.

 

En este artículo describiremos la conexión  intelectual del español con un sistema, para con él dar, mediante la adopción del principio de la soberanía de la inteligencia, una respuesta global al problema político que planteó el desmoronamiento del Antiguo Régimen en gran parte de Europa. Esta relación esta fundamentada en el ideario que en su día había inspirado la Carta francesa de 1814, y que luego volvió a replantearse con la monarquía luisfelipista. Es decir, en la acción ideológica que llevó a cabo el grupo, más que partido, conocido como liberal doctrinario, que en torno a Royer-Collard reúne, entre otros, a Guizot, Víctor de Broglie, Barante, y Pierre F. de Serre; todos destacados intelectuales que ingresan en la política en una época compleja y de constante agitación, en busca de una línea conciliadora entre el antiguo y el nuevo régimen, propiciando el justo medio que sin retornar al pasado, logre acabar con los excesos provenientes de la revolución.

 

Donoso, en 1834, denota ya una marcada y evidente inspiración en el grupo al que nos acabamos de referir. Aquel año, el joven intelectual español se queja amargamente de que el principio victorioso de julio de 1830, es decir, el de los doctrinarios, el de la inteligencia, no haya sido extendido desde Francia hacia el resto de Europa. Ello se lo imputa a la política internacional no intervencionista que ha impuesto la Santa Alianza a Luis Felipe de Orleans y que no disgusta a algunos de los propios doctrinarios, que la considerarían propicia para una mayor consolidación de la frágil situación francesa. Donoso, por el contrario, pretende hacer ver el supuesto papel histórico que corresponde al país galo en la expansión por Europa del principio de la inteligencia. Para el extremeño, la revolución de Julio debió de tener el carácter de "una revolución en las ideas" [7]  y Francia, por someterse a los dictados de la Santa Alianza, habría renunciado a su misión. No es, sin embargo, filantrópica y desinteresada la posición de Donoso, sino más bien un llamado a sus vecinos a intervenir en apoyo de la causa liberal en España, acuciada por entonces en la guerra contra el carlismo. Con esta intención plantea que el gobierno francés debe encabezar una guerra en el extranjero que le permitiría exteriorizar el espíritu revolucionario, sacarlo de sus fronteras, ya que, de otro modo, pugnaría internamente por destruir la propia nación francesa. Para Donoso la revolución fue, en 1830, una respuesta al intento de restauración que encabezó Carlos X, por lo tanto la estima como una "revolución inmensa, poderosa, que debió presidir la regeneración del mundo... pero que se está devorando a sí misma por no haber tenido la conciencia de su poder y el sentimiento de su fuerza" [8] . El espíritu revolucionario es disolvente en la situación que aqueja a Francia, ya que se expresaría en contra de la monarquía orleanista, instauradora del principio de la inteligencia; por el contrario, ese espíritu es positivo en España, ya que, mientras el carlismo se mantenga en armas, es decir, el absolutismo [9]  se plantee como una alternativa de poder, la posibilidad de un regreso al Antiguo Régimen es, a diferencia de Francia, aún factible.

 

Al año siguiente vuelve el extremeño a referirse a la revolución de julio en términos incluso de mayor admiración, en contraste, esta vez, con la cruda situación española que califica, expresivamente, como un "combate de pigmeos que luchan en una tierra movediza" . La revolución de julio, en cambio, "ha saludado al pueblo rey que hizo en tres días la obra de tres siglos y se reposó después majestuoso y sublime" [10] . Está aquí el valor que Donoso reconoce en esta hora a la conocida como revolución de 1830: produjo rapidos avances y reformas, acabó con la tentación absolutista y, de forma simultánea, ha dominado el inicial espíritu revolucionario disolvente, al defender sus justas conquistas. En el fondo, se está valorando la significativa situación por la cual los doctrinarios se han hecho con los frutos de la revolución y, al mismo tiempo, la han logrado encauzar y dominar. Es en estos años cuando aparecen con énfasis, en el pensador español, los aspectos positivos de las revoluciones, en la medida en que hayan sido guiadas por la inteligencia. En el caso de julio de 1830, la revolución significaría la encarnación momentánea de la inteligencia en todas las clases sociales, conformando así el pueblo una existencia excepcional (así lo será también su soberanía), que se diluirá luego, en tiempos normales, al retornar la inteligencia a las clases medias.

 

El propio Donoso no esconde en sus Lecciones de derecho político su seguimiento del ideario doctrinario al citarlos para afirmar el principio de la soberanía de la inteligencia, incluso en tiempos de revolución, y más aun cuando salen en defensa de la revolución de julio, legitimada por la "falta de inteligencia" demostrada por la restauración de Carlos X, como por la conducta, "prudente y entendida" [11] , que la revolución adoptó tras la victoria. Este es el ánimo que habría acompañado al sector moderado en el golpe de 1832 en La Granja. Pero más allá de la utilidad que le pueda prestar para legitimar la situación española, de los doctrinarios franceses recoge Donoso la idea maestra de su esquema político de entonces la soberanía radicada en la inteligencia y, aun más, un método de interpretación de la realidad, un instrumento filosófico: el eclecticismo. Royer-Collard, padre y, en sus inicios, primera figura del grupo doctrinario, conocedor de la filosofía escocesa del sentido común, esbozó principios que, al dedicarse él por entero a las actividades políticas, desarrollaría su discípulo Víctor Cousin, incorporando influencia del idealismo alemán. Lo que propone Cousin con su eclecticismo, ya en 1828, es encontrar la vía media, la selección de las partes que se consideran verdaderas de cada sistema, en la creencia de que ninguno de ellos era completo, y de que no existía tampoco ninguno absolutamente falso. Como lo describe el propio Donoso, su pretensión "era proceder, por medio del examen de todos los sistemas filosóficos, a la reunión en un cuerpo de doctrina de todas las verdades exageradas o incompletas que encerraban en su seno" [12] .

 

El espíritu de esta corriente del justo medio lo reconocía emblemáticamente plasmado en la Carta francesa de 1814, que en lo político buscaba cuidadosamente el objetivo de "hacer posible el tránsito al Estado constitucional salvaguardando los derechos de la Corona" [13] . Por ello la Carta no era una Constitución corriente sino, más bien, una concesión voluntaria del rey que pretendería dar satisfacción a lo que fue considerado como una necesidad de sus súbditos. La soberanía no está en cuestión, arranca la Carta de la autoridad Real que, graciosamente, concede ciertas prerrogativas como, históricamente, la monarquía tradicional pudo en su tiempo realizar análogas concesiones. Los doctrinarios participaron directamente con esta fórmula, colaborando desde la Cámara con el gobierno de Luis XVIII en una actitud de orientación política que fue tornándose cada vez más crítica, a medida que el régimen tiende hacia políticas restauracionistas. El régimen que emana de la revolución de julio será distinto, como diferente será la nueva Carta, e incluso la casa reinante. Ya no se trata de una mera concesión real, sino de una aceptación del nuevo rey de jurar y observar una Carta. A Luis Felipe se le llama por una necesidad superior, no sólo dinástica ni únicamente popular; busca su reinado la combinación de ambos principios de legitimidad, originado, como fue, por peculiares e irrepetibles circunstancias. De allí que su posición representó finalmente una transición de uno a otro principio, diluyéndose la nueva legitimidad y la posibilidad de la instauración de una nueva dinastía. [14]Cuando Donoso se refirió al Estatuto Real, que en España se estableció en 1834, calificándolo como un equilibrio entre el pasado y la modernidad a través del principio de inteligencia, bien cabe aplicar también esta inspiración a las Cartas francesas de las que venimos hablando. Fueron estos documentos los que, en desmedro de los antecedentes constitucionales de 1791 en Francia y de 1812 en España, dan pasos seguros y no precipitados que permiten la transición hacia un nuevo régimen que culminará, años después, instaurando la soberanía popular. Donoso, en esta época, piensa aún en la capacidad de contención del pueblo que suponen las clases medias, a través del mecanismo electoral censitario, ya que, como veremos, jamás fue partidario de la soberanía popular.

 

El anhelo de tranquilidad, tras decenios de enorme agitación, la victoria de cierto ánimo de equilibrio, ante fuerzas radicales desorganizadas, permitió que fueran los doctrinarios quienes se hicieran con el poder tras los tumultos de 1830. Como lo ha descrito Ortega y Gasset:

 

"el grupo de Royer-Collard y Guizot fue el que primero dominó intelectualmente los hechos, que tuvo una doctrina. Y, como es inevitable, se hizo dueño de ellos" [15]

 

El momento político les era de modo evidente favorable, y supieron aprovecharlo. Su doctrina era precisamente la del justo medio, aquella que no quería regresar al pasado, ni olvidarlo del todo. Que quería las conquistas de la revolución, pero no sus desmanes..

 

En este período, que se extiende entre los años 1834 y 1837, es cuando Donoso se muestra mayormente imbuido, decididamente influenciado por una corriente específica de pensamiento, el liberalismo doctrinario. Lo acogió globalmente con el entusiasmo y vigor propio de su carácter y al mismo tiempo con cierto particularismo. Dogmatiza el principio doctrinario de la inteligencia, convirtiéndolo, durante estos tres años, en una especie de panacea, capaz de resolverlo todo y, sin el cual, nada podría entenderse correctamente de la vida en sociedad. No obstante, el joven intelectual español asume el doctrinarismo con peculiariedad propia, lo diferencia de los franceses su consideración unitaria del poder y la consiguiente crítica a su pretendida división; aspecto éste clave dentro de su pensamiento político, más allá de sus años doctrinarios.

 

Existe innegable unidad en los escritos donosianos que van desde 1834 hasta la última de sus Lecciones, en febrero de 1837. Dentro del itinerario de sus ideas, lo considero un paréntesis, esencialmente marcado por su dependencia ideólogica del grupo francés de Royer-Collard. Influencia del liberalismo doctrinario, pudo muy probablemente recibir antes de 1834 y algo después de 1837, pero en ningún caso determinante. Sólo entre aquellos años Donoso se mostró consciente y convencido de la eficacia de su sistema basado en la soberanía de la inteligencia. Antes o después, aparece difuso; sin plantearlo con decisión, hacia 1832 o 1833, y, ciertamente, haciéndole compartir con otros, desde 1837, el sitial director de la vida social, que en su día le había atribuido en exclusiva. Ningún autor ha negado unidad a los tres escritos claves de este paréntesis [16] , y así se entiende que hayan sido considerados como su apogeo doctrinario, aunque se ha tendido en general a extender en demasía la fase liberal doctrinaria, o mejor dicho, a no delimitarla con suficiente claridad. Curiosamente, Joaquín Costa [17] , aún en el siglo XIX, con innegable acierto distingue estos escritos de los que inmediatamente le anteceden y continúan. Coincido pues con Costa en ajustar la fase doctrinaria al período 1834-1837.

 

Distinto es lo que acontece con el eclecticismo, ya que, como método o filosofía, si bien Donoso lo critica con agudeza junto al doctrinarismo durante 1838, posteriormente, en variadas ocasiones y con no menos ingenio, lo continuará utilizando cuando las circunstancias se lo señalen conveniente. Así, avanzados los años cuarenta, Donoso seguirá, con altos y bajos, utilizando el método de interpretación ecléctico para enfrentarse a la realidad de su sociedad, probablemente por carecer de otro método que lo reemplace o, simplemente, porque es el que, en ocasiones, mejor le satisface a sus propósitos político-publicistas.

·- ·-· -······-·
Gonzalo Larios Mengotti


[1] Donoso, durante su infancia en Don Benito, estudió en su casa bajo la guía de Antonio Beltrán, un tutor que desde Madrid trajeron sus padres. Beltrán le habría enseñado latín, francés y las materias básicas que necesitaría en Salamanca. Graham, Ob. cit. p. 22. 

[2]  Filosofía de la Historia  Juan Bautista Vico (1838), OC, I, 620.

[3]  Respuesta a una crítica (1834), OC, I, 288.

[4]  Ibid, 289.

[5]  Relaciones entre Francia y España (1838), OC, I, 618.

[6]  Lecciones de derecho político (1836-1837), OC, I, 425. En adelante me refiriré a este escrito sólo como Lecciones.

[7] Consideraciones sobre la diplomacia (1834), OC, I, 261.

[8]  Ibid., 253.

[9]  Para el liberalismo decimonónico, el carlismo representó el absolutismo. El concepto no es ciertamente el más adecuado, ya que la intención carlista fue la restauración de la monarquía tradicional española, que, expresada en el lema Dios, Rey y Fueros, pretendió diferenciarse de la monarquía absoluta de inspiración francesa. Ver Suárez, Federico: La crisis política del Antiguo Régimen en España.

[10]  Sobre la opinión emitida por el señor Istúriz (1835), OC, I, 298.

[11]  Lecciones (1836-1837), OC, I, 427. 

[12] Ibid. p.426. Antes de dos años, Donoso cambiará su visión optimista ante el eclecticismo. Ver Polémica con Rossi (1838), OC, I, pp. 492-510.

[13]  Díez del Corral, Ob. cit. p. 56.

[14]  Metternich resume así su punto de vista con respecto a la frágil condición del trono de Luis Felipe: "El trono del nueve de agosto se ha erigido en lugar del que acaba de caer. ¿Está éste en posesión de buenas condiciones de vitalidad? Ciertamente que no. Por un lado carece de la autoridad de los sufragios populares, en los cuales se han apoyado todas las formas de gobierno que han existido entre 1792 y 1801; por otro le falta el apoyo tan poderoso del derecho histórico, sobre el cual reposaba el trono restaurado; tampoco tiene la fuerza popular de la República, aunque esta fuerza sea extremadamente brutal; del Imperio no tiene la gloria militar ni el genio ni el brazo de Napoleón; tampoco dispone del apoyo del principio de legitimidad que poseen los Borbones... El trono de 1830 era, en cierta manera, algo híbrido: la historia se encargará de demostrar su debilidad". ( Mémoires, documents et écrits divers laissés par le prince Metternich, Paris, 1882) . Citado por Roger, Juan: Ideas políticas de los católicos franceses , Madrid, 1951, p. 168.

[15] Ortega y Gasset, José. "Guizot y la Historia de la civilización en Europa", prólogo a F. Guizot, Historia de la civilización en Europa , Madrid, 1990, p.10.

[16]  Estimo como tales, Consideraciones sobre la diplomacia (1834), La Ley Electoral (1835), y  Lecciones de derecho político (1836-1837).

[17] Costa, Joaquín: "Filosofía política de Donoso Cortés" en Estudios jurídicos y políticos, Madrid, 1884, p.123. Costa señala cuatro períodos en la vida del "ilustre marqués de Valdegamas"; el segundo lo sitúa entre 1834 y 1837, y lo caracteriza por su "eclecticismo doctrinario".


mercredi, 03 février 2010

Le secret polaire de l'Ordre du Temple

silhouette-de-templier.jpgLe secret polaire de l'Ordre du Temple

par Paul-Georges Sansonetti

Ex: http://www.hyperboreemagazine.fr/

Comment évoquer l’ésotérisme chrétien en passant sous silence l’Ordre du Temple ?
On sait qu’il fut fondé par le chevalier Hugues de Payens (un nom qui en dit peut-être long sur les orientations secrètes de cette famille) et huit autres compagnons d’armes. Il est également bien connu que la désignation de leur Ordre est venue du fait que ces chevaliers se virent confier la garde des ruines du temple de Salomon. L’Ordre fut officiellement reconnu en 1118 mais, selon certaines sources, la fondation daterait de 1111, autrement dit 111 ans après l’an Mil marquant le milieu de l’ère astrologique des Poissons. Inutile de revenir sur la signification éminemment polaire du 111. Cette date de 1111 aurait donc été judicieusement choisie pour signifier, à ceux susceptibles de comprendre, l’affiliation de l’Ordre au courant johannite et, de la sorte, à la tradition primordiale. Ce nombre se retrouve à plusieurs reprises – mais toujours de façon occulte - dans l’emblématique templière. Ainsi pour le premier sceau de l’Ordre représentant le célèbre « Dôme du Rocher » à Jérusalem (illustration 1).
Pourquoi donc choisir un édifice musulman (surtout aussi fondamental pour l’Islam) ? Est-ce à dire, comme l’écrirent plusieurs auteurs, que des liens occultes auraient uni les Templiers à la religion de Mahommet ? Leurs affrontements avec les Maures disent tout le contraire. Précisons que, s’il y eut entente réelle, car fondée sur un ésotérisme identique, entre le Temple et une organisation moyen-orientale, ce fut avec l’Ordre des Ashasshins créé à l’initiative du mystérieux Hassan Saba et dont le siège, Alamût, en Perse, était une formidable citadelle. La réponse concernant la représentation de cette mosquée sur le sceau du Temple serait à la fois plus simple et plus inattendue. Le sommet du dôme est exactement à 111 pieds du sol. Ce nombre étant celui du Pôle, on comprend que le monument en question ait servi à masquer une signification d’une importance essentielle. Le décor de Jérusalem dissimulait la véritable « Terre sainte », celle qui fut au commencement de l’Histoire des peuples d’Europe ainsi que d’autres continents. Comme l’écrit René Guénon, « il existe une « Terre sainte » par excellence, prototype de toutes les autres, centre spirituel auquel tous les autres sont subordonnés ».

Citons un second exemple de cryptage montrant que l’Ordre du Temple se référait à la notion de Pôle. Ce cryptage concerne l’étendard des Templiers appelé « Beauçant », un nom singulier qui a suscité de multiples interprétations. On l’a parfois orthographie « Beaucéant », ce qui pourrait s’interpréter comme « beau céans », c’est-à-dire « beau dedans », « belle intériorité ». Formule qui, dans le domaine initiatique, serait allusive à l’intériorité d’un être ou même de l’Ordre. Il s’agirait de quelque chose de non visible car demeurant dans l’être (on songe à l’âme, sinon au Soi immortel) ou qu’on ne révèlerait point en dehors des murailles templières. Mais l’on est en droit de se demander si, en fait, ce nom de « Beaucéant » ne concerne pas l’étendard lui-même. Ce qui est « beau » se révèlerait alors contenu dans (la signification de) cette enseigne. On sait que l’étendard était noir et blanc et il est loisible de supposer que la partie noire en occupait le bas et la blanche le haut. En rapport avec l’alchimie, pareilles couleurs énoncent les deux premières phases du Grand Œuvre nommée nigredo (« noirceur ») et albedo (« blancheur »). Il suffit de faire la guématrie de ces deux termes latins pour comprendre ce que signifie Beaucéant : n (14) + i (9) + g (7) + r (18) + e (5) + d (4) + o (15) = 72 et a (1) + l (12) + b (2) + e (5) + d (4) + o (15) = 39. Ce qui nous donne 72 + 39 = 111. Aux yeux de ceux (Johannites) qui savaient, le Beaucéant proclamait l’existence du 111. Les Templiers manifestaient ainsi secrètement leur appartenance à la Tradition polaire.
Toutes ces données, parmi d’autres que nous révèlerons lors d’un numéro de la présente revue consacré à la notion de chevalerie et aux Templiers en particulier, montrent que l’Ordre du Temple fut avant tout une organisation souchée sur ces notions synonymes que sont le Pôle, l’Âge d’Or et le Centre suprême. En conséquence, une telle organisation n’a strictement rien à voir - et surtout ne doit pas être confondue ! - avec l’idéologie humanistico-mondialiste de certaines sociétés (supposées) initiatiques et qui prétendent inscrire leur action dans la continuité du templarisme.
En attendant, donc, une étude plus détaillée et pour bien montrer le lien existant entre la doctrine ésotérique du Temple et une connaissance issue du paganisme germanique, il suffit de mettre en parallèle deux images. La première, est présente sur une bractéate qui, remontant à la période dite des invasions, fut trouvée à Pliezhausen (Wurtemberg), ainsi que sur le casque d’un chef saxon enterré à Sutton-Hoo, dans le Suffolk (Grande-Bretagne). Elle montre un Germain combattant à cheval tandis que, le secondant en maintenant sa lance, on voit un petit personnage positionné derrière lui. Il s’agit de ce que le monde viking dénommera la fylgja, (illustration 2) terme que l’on traduit par l’« accompagnatrice » - on pourrait dire le Double - et qui désigne l’aspect supérieur de l’âme d’une personne (à la condition, bien entendu, que cette personne ait la capacité de se hisser à ce niveau).
La seconde image n’est autre que le célèbre sceau templier (illustration 3). Sceau ayant succédé à celui évoqué plus haut et représentant deux chevaliers sur un même cheval. On a prétendu que ce cheval pour deux symbolisait la pauvreté des chevaliers du Temple mais, sachant quelle était la richesse de l’Ordre à l’époque où ce sceau était en usage, une telle explication prête à sourire. En réalité l’image se veut la transcription de la notion germanique de fylgja.
La preuve de ce que nous avançons est peut-être sur les écus semblables des deux cavaliers ou, plus exactement, du Templier et de son Double. On remarque en effet que le motif qui orne la surface de chaque bouclier et que l’on nomme en héraldique « raie d’escarboucle » est formé de deux croix superposées marquant les huit directions de l’espace. (illustration 4)
L’une +, représentant l’être terrestre, corporel, et l’autre, dite de saint André, X, symbolisant l’être céleste (autrement dit le Double spirituel du premier). Telle est en fait la signification du célébrissime dessin de Léonard de Vinci reproduit maintenant sur la pièce de 1 euro italien. Par ce sceau, l’Ordre du Temple résumait tout un ensemble doctrinal repris du passé païen de l’Europe et en rapport avec le concept de terre originelle, lieu de l’Âge d’Or et siège du Centre suprême.

 

 

 

 

Revue "Hyperborée": Qu'est-ce que l'ésotérisme?

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SOMMAIRE DU N°9

ÉDITORIAL

Qu’est-ce que l’ésotérisme ?

DOSSIER L’ÉSOTÉRISME CHRÉTIEN

Ganagobie : des mosaïques pas très catholiques
Thulé sous le masque chrétien
L’image du Golgotha et les mythes nordiques
Le secret polaire de l’Ordre du Temple
Les saints du calendrier et le symbole zodiacal
La religion orthodoxe, gardienne de la Tradition

LU, VU, ENTENDU

Charbonneau-Lassay et le Bestiaire du Christ
La chanson populaire
Page solaire
Le feu de Naciketas
Les alignements du Ménec
Vincenot, de Pierre Vial
Célestin et Amycus

ORIGINES

La Nwyvre, l’énergie procréatrice des origines
Pensée, parole, action dans la tradition européenne

NOTRE EUROPE

La Sardaigne : du temps et des dieux
L’Irlande - 2e partie : Du génocide à la reconquête

EDITORIAL DU N°9

Qu'est-ce que l'ésotérisme ?


Qu’est-ce que l’ésotérisme ? C’est le monde tel qu’il existe et tel que le voient certains êtres selon une logique et une vision qui ne sont pas apparentes ou reconnues par les autres. Nietzsche disait que le philosophe exotérique voit les choses d’en bas, tandis que le philosophe ésotérique les voit d’en haut. Cette explication n’est guère satisfaisante ; l’ésotériste n’est pas, dieu merci, un philosophe, tout au moins, dans son acception actuelle. Et, les choses, il ne les voit ni d’en haut ni d’en bas, il les voit à travers, superposées, ou comme à la lecture d’un palimpseste. Don Juan, le chaman yaqui de Castaneda, assimilait la connaissance aux peaux d’un oignon qu’il faut éplucher pour en découvrir le secret (… en pleurant). On peut tout aussi bien s’en référer à l’image de la peau humaine ; on ne voit des êtres que leur apparence physique. La peau humaine comporte elle aussi plusieurs couches ; sa fonction permet de protéger – quelquefois de refléter – l’intérieur. L’étymologie du mot ésotérisme renvoie à ce dernier mot, intérieur, avant de signifier caché. Mais il n’y a pas lieu d’opposer exotérisme et ésotérisme, comme il n’y a pas lieu d’opposer science moderne et ancienne qui sont deux aspects d’un même corpus. Evidemment, l’accélération de notre fin de cycle fait que l’on n’a guère le loisir de pousser l’investigation plus loin que les apparences.
Le monde est régi par un ensemble de lois qui ne sont pas édictées par les hommes. Lorsque le temps fut venu de les occulter, puisqu’on entrait dans l’« âge sombre », ces lois et principes furent conservés sous forme de symboles, architecturaux, artistiques, ou autres, sous forme de transmission orale, ou écrite, de traditions rituelliques ou autres perpétuées depuis le fond des âges. Eliade, Evola, Dumézil, ou Guénon et bien d’autres ont largement contribué à expliquer ces modes de transmission dans les sociétés anciennes ou celles contemporaines, qu’on nomme « primitives » mais chez lesquelles perdurent encore bien des signes d’un savoir oublié. L’ésotérisme est donc la science qui étudie les connaissances qui ne sont pas accessibles à une perception immédiate, tout en incluant celles qui le sont – qui peut le plus peut le moins – et qui structurent le monde en profondeur. Et dès l’origine. Ces connaissances étant éternelles et universelles, l’ésotérisme peut encore se définir comme la voie de leur transmission.
De ce fait, les connaissances exotériques contemporaines, telles que les hommes les pratiquent d’une manière qu’ils définissent comme « rationnelle » ou « cartésienne » et qu’ils appellent « scientifiques », ces connaissances somme toute superficielles - « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil » - ne sont qu’une infime partie du matériau intellectuel, et spirituel, que les hommes ont à leur disposition, de même que nous n’exploitons qu’une infime partie des potentialités de notre cerveau. Un domaine – celui le plus en pointe - de ces nouvelles sciences a inclus, ou plutôt rejoint, nous dirions presque spontanément, naturellement, certaines de ces anciennes connaissances ; c’est celui de la physique quantique, qui fausse justement ces règles de logique scientifique qu’on pensait indétrônables et incontournables. Le serpent se mord la queue. La science et la tradition se sont rejoints et ont un bel avenir commun.

L’ésotérisme chrétien

« Y a-t-il ésotérisme chrétien ou christianisme ésotérique ? dans le premier cas, le christianisme est fondamentalement un ésotérisme qui s’est dégradé en religion ; dans le second cas, le christianisme est une religion qui comporte quelques éléments ésotériques et a pris quelques formes ésotériques ».
Quant à nous, nous n’avons pas opposé exotérisme ou science à ésotérisme ou spiritualité. Il conviendrait tout autant de ne pas opposer paganisme et christianisme, en vertu d’une tradition de continuité redécouverte dans le présent numéro d’Hyperborée par Paul-Georges Sansonetti ; car il existe un ésotérisme chrétien qui énonce, lorsqu’on y prête attention, les mêmes vérités que professaient les spiritualités anciennes, que le christianisme dogmatique (ou religieux, comme l’écrit Riffard ) a tenté d’éradiquer par l’épée et le feu. Pour dire autrement, la Tradition s’est maintenue au sein même de ce qui pouvait être considéré comme son plus implacable ennemi. Ce qui nous permet, à nous, d’être encore là, nous référant à ces quelques bribes de savoir, tout aussi précieuses que la moindre molaire d’un mammouth qui permet aux archéologues de reconstituer le mastodonte dans son ensemble. Et à quelques injections d’ADN de faire marcher les spécimens congelés dans un proche avenir.
Et l’on s’attend, au jour du Jugement dernier, comme diraient les chrétiens, à voir se lever et s’animer toutes ces figures de pierre patiemment et délicatement sculptées dans la fraîcheur et la pénombre des cloîtres par des hommes courageux dont la mission était de transmettre ces connaissances primordiales, au nez et à la barbe (blanche) des Pères de l’Eglise.
Mais cela aurait-il pu se produire s’il n’y avait eu dans les fondements même du christianisme quelques éléments qui auraient permis cette continuité, à commencer par le personnage du Christ ?
Et même la vaste entreprise de récupération décidée d’une manière systématique par l’Eglise n’a-t-elle pas permis de sauvegarder certains vestiges ? On peut penser, bien sûr, à ces temples païens, eux-mêmes construits sur des lieux telluriques et qui ont été détruits, certes, mais aussi marqués, par l’emplacement d’une chapelle ? ou à cette surabondance de saints, destinés à remplacer les anciens dieux, lesquels étaient, rappelons-le encore une fois, des principes. Le coucou chrétien n’aurait, dans ce cas, fait que garder le nid au chaud pour le retour de l’aigle.
Pour illustrer ce qui vient d’être dit, voici le récit d’une petite expérience, que chacun peut faire sur le site de n’importe quel édifice chrétien près de chez lui.
J’ai découvert sur un tourniquet de l’unique bistrot d’un village perdu de la Drôme provençale une revue fort bien faite par une équipe d’érudits locaux qui s’appelle Mémoire d’Ouvèze, du nom de la rivière qui arrose les villages de ce pays aux confins de la Drôme et du Vaucluse, et qui a sinistre « mémoire » puisque c’est elle qui a emporté une partie de Vaison-La Romaine il y a quelques années. Ce numéro était consacré aux chapelles du Val d’Ouvèze et recense une trentaine de ces bâtiments qui sont souvent des petites merveilles d’architecture (voir encadré).

Notre dossier sur « l’ésotérisme chrétien » n’est évidemment pas exhaustif, nous aurions par exemple aimé évoquer la grande figure de Rudolf Steiner dont nous avons parlé à maintes reprises dans cette revue ; ce n’est que partie remise.

lundi, 01 février 2010

Symbolisme du faucon: protecteur du Pharaon

Dr. Karlheinz WEISSMANN :

Symbolisme du faucon : protecteur du Pharaon

 

faucon-crecerelle-443.jpgParmi les découvertes archéologiques de première importance, en cette année nouvelle, nous avons celle qui a retrouvé une tombe égyptienne, vieille de 2500 ans, à proximité de la pyramide de Sakkara. Le site a été daté de l’époque de la vingt-sixième dynastie (de 664 à 525 avant J. C.) et comprend plusieurs couloirs et chambres, d’où l’on a exhumé des squelettes, des fragments d’argile et d’autres reliques mais surtout des faucons momifiés.

 

La momification d’animaux sacrés avait un rôle important dans l’Egypte antique. On avait déjà découvert en grand nombre des chats, des crocodiles et des singes embaumés. Dans ce contexte, le faucon revêt une grande importance car il est l’animal symbolique du dieu solaire Râ et le protecteur du Pharaon. De même, dans le Rig-Veda, le faucon est assimilé à l’astre solaire et c’est lui qui apporte le breuvage sacré, le soma, au dieu Indra. Chez les Incas  —« fils du soleil »—   dans le Pérou ancien, le faucon est considéré comme un ancêtre mythique. Sinchi, deuxième souverain connu de l’empire inca, a pour surnom « Roca », ce qui signifie « faucon ». Pour le premier Inca, le terme « Roca/faucon » constitue même le nom principal.

 

On affirme la même chose pour la dynastie hongroise des Arpads, qui font remonter leur ascendance au faucon légendaire « Turul ». C’est un résidu archaïque qui nous est parvenu jusqu’à notre époque médiévale, sans que l’on en comprenne la véritable importance. En Europe, le faucon, en tant qu’animal symbolique, n’a joué qu’un rôle secondaire. Georg Scheibelreiter, dans son ouvrage de référence sur l’héraldique, explique cela par les conceptions ambivalentes liées au faucon dans le monde de la chevalerie. Dans le « Minnesang » allemand, le faucon est le symbole de l’amoureux : il est leste, agile, noble, susceptible et rapide, mais, simultanément, indomptable et imprévisible ; il est aussi le faucon de chasse, dont la présence est indispensable à toute vénerie royale, où il est symbole de soumission et de fidélité. Avec ses attributs habituels, la cape, l’anneau au cou et la chaine, il n’était pas l’animal approprié de l’héraldique car, en ce cas, il aurait dû inspiré la crainte. Sur les écus, il figure donc rarement et quand on l’y trouve, c’est généralement en position assise, les ailes fermées, sans que l’on insiste sur le bec et les serres. C’est son parent de grande taille, l’aigle, qui prend souvent la place d’honneur en héraldique, où on le présente généralement dans une posture agressive.

 

Il faudra attendre le 19ème siècle pour que l’ambivalence attachée au faucon se perde ; ainsi, en suivant un modèle allemand antérieur, le mouvement de gymnastique tchèque adopte le nom de « sokol », « faucon ». Les « Sokol » étaient nationalistes tchèques, se réclamaient en partie de l’héritage des Hussites de médiévale mémoire, option impliquant l’anticléricalisme, le libéralisme et le démocratisme mais aussi le panslavisme, ce qui explique pourquoi des mouvements « sokol » équivalents virent rapidement le jour en Pologne, en Croatie, en Serbie et en Slovénie. Des émigrants emmenèrent l’idée avec eux en Amérique. En 1920, la minorité sorabe en Allemagne fonde à son tour un « sokol ».

 

Le mouvement « sokol » avait un caractère nettement paramilitaire, ses membres portaient l’uniforme et défilaient derrière des drapeaux à fond rouge sur lesquels figurait un faucon blanc ou en couleurs naturelles, les ailes déployées. Nous avons donc affaire, ici, à un faucon symbolique, mais que l’on ne retrouve comme tel que dans les pays slaves, par ailleurs de manière isolée, car, en tant qu’emblème, il n’apparaît que pour les organisations de jeunesse.

 

En Allemagne, la symbolique politique ne le reprend que rarement : dans les mouvements nationalistes / folcistes (völkisch), nous trouvons les « Adler und Falken » (« Aigles et faucons ») et, chez les socialistes de gauche, les « Falken » (« Faucons »), ou, chez leurs équivalents autrichiens et belges, les « Faucons rouges ». Ces groupes de la gauche socialiste sont nés à l’époque de la République de Weimar et ont joué un certain rôle politique jusqu’à nos jours ; leur emblème montre, comme leur nom l’indique, la silhouette d’un faucon rouge sur fond blanc.

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Par ailleurs, on utilise le terme « faucons » pour l’opposer aux « colombes » des pacifistes et des partisans du désarmement. Les « faucons » sont devenus synonymes de « hardliner », de partisans de la ligne dure, dans le jargon des luttes politiciennes actuelles. Mais cela ne changea rien à la marginalité du faucon dans l’univers des animaux symboliques. Les Européens seront dès lors étonnés d’apprendre que dans les régions d’Afrique du Nord et du Proche-Orient, imprégnées par l’islam, le rapace de l’espèce faucon a pu garder toute son importance symbolique. Certes, l’Egypte l’a à nouveau ôté des armes de l’Etat (pour le remplacer par l’aigle de Saladin) mais il demeure encore aujourd’hui la principale figure animale dans les symboles de la souveraineté en Libye, aux Emirats Arabes Unis, au Koweït et en Syrie. Dans ces pays, plus personne ne fait évidemment le lien entre le faucon et l’empire des Pharaons ou le dieu solaire Râ mais avec l’emblème légendaire des Qurayshites, la tribu dont serait issu le Prophète Mohammed.

 

Dr. Karlheinz WEISSMANN.

(article paru dans « Junge Freiheit », Berlin, n°3/2010 ; trad. franc. : Robeert Steuckers).

jeudi, 07 janvier 2010

Entretien avec Marc. Eemans, le dernier des surréalistes de l'école d'André Breton

EEMANSTABLEAU.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

Entretien avec Marc. Eemans, le dernier des surréalistes de l’école d’André Breton

 

propos recueillis par Koenraad Logghe

et Robert Steuckers

 

Aujourd'hui âgé de 83 ans, Marc. Eemans affirme être le dernier des surréalistes. Après lui, la page sera tournée. Le surréalisme sera définitivement entré dans l'histoire. Qui est-il, ce dernier des surréalistes, ce peintre de la génération des Magritte, Delvaux et Dali, aujourd'hui ostracisé? Quel a été son impact littéraire? Quelle influence Julius Evola a-t-il exercé sur lui? Ce «vilain petit canard» du mouvement surréaliste jette un regard très critique sur ses compères morts. Ceux-ci lui avaient cherché misère pour son passé «collaborationniste». Récemment, Ivan Heylen, du journal Panorama (22/28.8.1989), l'a interviewé longuement, agrémentant son article d'un superbe cliché tout en mettant l'accent sur l'hétérosexualité tumultueuse de Marc. Eemans et de ses émules surréalistes. Nous prenons le relais mais sans oublier de l'interroger sur les artistes qu'il a connus, sur les grands courants artistiques qu'il a côtoyés, sur les dessous de sa «collaboration»...

 

Q.: La période qui s'étend du jour de votre naissance à l'émergence de votre première toile a été très importante. Comment la décririez-vous?

 

ME: Je suis né en 1907 à Termonde (Dendermonde). Mon père aimait les arts et plu­sieurs de ses amis étaient peintres. A l'âge de huit ans, j'ai appris à connaître un parent éloigné, sculpteur et activiste (1): Emiel De Bisschop. Cet homme n'a jamais rien réussi dans la vie mais il n'en a pas moins revêtu une grande signification pour moi. C'est grâce à Emiel De Bisschop que j'entrai pour la première fois en contact avec des écrivains et des artistes.

 

Q.: D'où vous est venue l'envie de dessiner et de peindre?

 

ME: J'ai toujours suivi de très près l'activité des artistes. Immédiatement après la première guerre mondiale, j'ai connu le peintre et baron Frans Courtens. Puis je rendai un jour visite au peintre Eugène Laermans. Ensuite encore une quantité d'autres, dont un véritable ami de mon père, un illustre inconnu, Eugène van Mierloo. A sa mort, j'ai appris qu'il avait pris part à la première ex­pédition au Pôle Sud comme reporter-dessina­teur. Pendant la première guerre mondiale, j'ai visité une exposition de peintres qui jouissent aujourd'hui d'une notoriété certaine: Felix Deboeck, Victor Servranckx, Jozef Peeters. Aucun d'entre eux n'était alors abstrait. Ce ne fut que quelques années plus tard que nous con­nûmes le grand boom de la peinture abstraite dans l'art moderne. Lorsque Servranckx organisa une exposition personnelle, j'entrai en contact avec lui et, depuis lors, il m'a considéré comme son premier disciple. J'avais environ quinze ans lorsque je me mis à peindre des toiles abstraites. A seize ans, je collaborais à une feuille d'avant-garde intitulée Sept Arts. Parmi les autres colla­borateurs, il y avait le poète Pierre Bourgeois, le poète, peintre et dessinateur Pierre-Louis Flouquet, l'architecte Victor Bourgeois et mon futur beau-frère Paul Werrie (2). Mais l'abstrait ne m'attira pas longtemps. Pour moi, c'était trop facile. Comme je l'ai dit un jour, c'est une aber­ration matérialiste d'un monde en pleine déca­dence... C'est alors qu'un ancien acteur entra dans ma vie: Geert van Bruaene.

 

Je l'avais déjà rencontré auparavant et il avait laissé des traces profondes dans mon imagina­tion: il y tenait le rôle du zwansbaron,  du «Baron-Vadrouille». Mais quand je le revis à l'âge de quinze ans, il était devenu le directeur d'une petite galerie d'art, le «Cabinet Maldoror», où tous les avant-gardistes se réunissaient et où furent exposés les premiers expressionnistes al­lemands. C'est par l'intermédiaire de van Bruaene que je connus Paul van Ostaijen (3). Geert van Bruaene méditait Les Chants de Maldoror  du soi-disant Comte de Lautréamont, l'un des principaux précurseurs du surréalisme. C'est ainsi que je devins surréaliste sans le sa­voir. Grâce, en fait, à van Bruaene. Je suis passé de l'art abstrait au Surréalisme lorsque mes images abstraites finirent par s'amalgamer à des objets figuratifs. A cette époque, j'étais encore communiste...

 

Q.: A l'époque, effectivement, il semble que l'intelligentsia et les artistes appartenaient à la gauche? Vous avez d'ailleurs peint une toile superbe représentant Lénine et vous l'avez intitulée «Hommage au Père de la Révolution»...

 

ME: Voyez-vous, c'est un phénomène qui s'était déjà produit à l'époque de la Révolution Française. Les jeunes intellectuels, tant en France qu'en Allemagne, étaient tous partisans de la Révolution Française. Mais au fur et à mesure que celle-ci évolua ou involua, que la terreur prit le dessus, etc., ils ont retiré leurs épingles du jeu. Et puis Napoléon est arrivé. Alors tout l'enthousiasme s'est évanoui. Ce fut le cas de Goethe, Schelling, Hegel, Hölderlin... Et n'oublions également pas le Beethoven de la Sinfonia Eroica, inspirée par la Révolution fran­çaise et primitivement dédiée à Napoléon, avant que celui-ci ne devient empereur. Le même phé­nomène a pu s'observer avec la révolution russe. On croyait que des miracles allaient se produire. Mais il n'y en eut point. Par la suite, il y eut l'opposition de Trotski qui croyait que la révolu­tion ne faisait que commencer. Pour lui, il fallait donc aller plus loin!

 

Q.: N'est-ce pas là la nature révolutionnaire ou non-conformiste qui gît au tréfonds de tout artiste?

 

ME: J'ai toujours été un non-conformiste. Même sous le nazisme. Bien avant la dernière guerre, j'ai admiré le «Front Noir» d'Otto Strasser. Ce dernier était anti-hitlérien parce qu'il pensait que Hitler avait trahi la révolution. J'ai toujours été dans l'opposition. Je suis sûr que si les Allemands avaient emporté la partie, que, moi aussi, je m'en serais aller moisir dans un camp de concentration. Au fond, comme disait mon ami Mesens, nous, surréalistes, ne sommes que des anarchistes sentimentaux.

 

Q.: Outre votre peinture, vous êtes aussi un homme remarquable quant à la grande diversité de ses lectures. Il suffit d'énumérer les auteurs qui ont exercé leur influence sur votre œuvre...

 

ME: Je me suis toujours intéressé à la littérature. A l'athenée (4) à Bruxelles, j'avais un curieux professeur, un certain Maurits Brants (5), auteur, notamment, d'une anthologie pour les écoles, intitulée Dicht en Proza.  Dans sa classe, il avait accroché au mur des illustrations représentant les héros de la Chanson des Nibelungen. De plus, mon frère aîné était wagnérien. C'est sous cette double influence que je découvris les mythes germaniques. Ces images de la vieille Germanie sont restées gravées dans ma mémoire et ce sont elles qui m'ont distingué plus tard des autres sur­réalistes. Ils ne connaissaient rien de tout cela. André Breton était surréaliste depuis dix ans quand il entendit parler pour la première fois des romantiques allemands, grâce à une jeune amie alsacienne. Celle-ci prétendait qu'il y avait déjà eu des «surréalistes» au début du XIXième siècle. Novalis, notamment. Moi, j'avais découvert Novalis par une traduction de Maeterlinck que m'avait refilée un ami quand j'avais dix-sept ans. Cet ami était le cher René Baert, un poète admi­rable qui fut assassiné par la «Résistance» en Allemagne, peu avant la capitulation de celle-ci, en 1945. Je fis sa connaissance dans un petit ca­baret artistique bruxellois appelé Le Diable au corps. Depuis nous sommes devenus insépa­rables aussi bien en poésie qu'en politique, di­sons plutôt en «métapolitique» car la Realpolitik n'a jamais été notre fait. Notre évolution du communisme au national-socialisme relève en ef­fet d'un certain romantisme en lequel l'exaltation des mythes éternels et de la tradition primordiale, celle de René Guénon et de Julius Evola, a joué un rôle primordial. Disons que cela va du Georges Sorel du Mythe de la Révolution et des Réflexions sur la violence à l'Alfred Rosenberg du Mythe du XXième siècle, en passant par La Révolte contre le monde moderne de Julius Evola. Le seul livre que je pourrais appeler méta­politique de René Baert s'intitule L'épreuve du feu  (Ed. de la Roue Solaire, Bruxelles, 1944) (6). Pour le reste, il est l'auteur de recueils de poèmes et d'essais sur la poésie et la peinture. Un penseur et un poète à redécouvrir. Et puis, pour revenir à mes lectures initiales, celles de ma jeu­nesse, je ne peux oublier le grand Louis Couperus (7), le symboliste à qui nous devons les merveilleux Psyche, Fidessa et Extase.

 

Q.: Couperus a-t-il exercé une forte influence sur vous?

 

tetes_nus.jpgME: Surtout pour ce qui concerne la langue. Ma langue est d'ailleurs toujours marquée par Couperus. En tant que Bruxellois, le néerlandais officiel m'a toujours semblé quelque peu artifi­ciel. Mais cette langue est celle à laquelle je voue tout mon amour... Un autre auteur dont je devins l'ami fut le poète expressionniste flamand Paul van Ostaijen. Je fis sa connaissance par l'entremise de Geert van Bruaene. Je devais alors avoir dix-huit ans. Lors d'une conférence que van Ostaijen fit en français à Bruxelles, l'orateur, mon nouvel ami qui devait mourir quelques an­nées plus tard à peine âgé de trente-deux ans, fixa définitivement mon attention sur le rapport qu'il pouvait y avoir entre la poésie et la mystique, tout comme il me parla également d'un mysticisme sans Dieu, thèse ou plutôt thème en lequel il re­joignait et Nietzsche et André Breton, le «pape du Surréalisme» qui venait alors de publier son Manifeste du Surréalisme.

 

Q.: Dans votre œuvre, mystique, mythes et surréalisme ne peuvent être séparés?

 

ME: Non, je suis en quelque sorte un surréaliste mythique et, en cela, je suis peut-être le surréa­liste le plus proche d'André Breton. J'ai toujours été opposé au surréalisme petit-bourgeois d'un Magritte, ce monsieur tranquille qui promenait son petit chien, coiffé de son chapeau melon...

 

Q.: Pourtant, au début, vous étiez amis. Comment la rupture est-elle survenue?

 

ME: En 1930. Un de nos amis surréalistes, Camille Goemans, fils du Secrétaire perpétuel de la Koninklijke Vlaamse Academie voor Taal en Letterkunde  ( = Académie Royale Flamande de Langue et de Littérature), possédait une galerie d'art à Paris. Il fit faillite. Mais à ce moment, il avait un contrat avec Magritte, Dali et moi. Après cet échec, Dali a trouvé sa voie grâce à Gala, qui, entre nous soit dit, devait être une vraie mégère. Magritte, lui, revint à Bruxelles et devint un misé­reux. Tout le monde disait: «Ce salaud de Goemans! C'est à cause de lui que Magritte est dans la misère». C'est un jugement que je n'admis pas. C'est le côté «sordide» du Surréalisme belge. Goemans, devenu pauvre comme Job par sa faillite, fut rejeté par ses amis surréalistes, mais il rentra en grâce auprès d'eux lorsqu'il fut redevenu riche quelque dix ans plus tard grâce à sa femme, une Juive de Russie, qui fit du «marché noir» avec l'occupant durant les années 1940-44. Après la faillite parisienne, Goemans et moi avons fait équipe. C'est alors que parut le deuxième manifeste surréaliste, où Breton écrivit, entre autres choses, que le Surréalisme doit être occulté, c'est-à-dire s'abstenir de tous compromis et de tout particula­risme intellectuel. Nous avons pris cette injonc­tion à la lettre. Nous avions déjà tous deux reçu l'influence des mythes et de la mystique germa­niques. Nous avons fondé, avec l'ami Baert, une revue, Hermès, consacrée à l'étude comparative du mysticisme, de la poésie et de la philosophie. Ce fut surtout un grand succès moral. A un mo­ment, nous avions, au sein de notre rédaction, l'auteur du livre Rimbaud le voyant,  André Rolland de Renéville. Il y avait aussi un philo­sophe allemand anti-nazi, qui avait émigré à Paris et était devenu lecteur de littérature allemande chez Gallimard: Bernard Groethuysen. Par son intermédiaire, nous nous sommes assurés la col­laboration d'autres auteurs. Il nous envoyait même des textes de grands philosophes encore peu connus à l'époque: Heidegger, Jaspers et quelques autres. Nous avons donc été parmi les premiers à publier en langue française des textes de Heidegger, y compris des fragments de Sein und Zeit.

 

Parmi nos collaborateurs, nous avions l'un des premiers traducteurs de Heidegger: Henry Corbin (1903-1978) qui devint par la suite l'un des plus brillants iranologues d'Europe. Quant à notre se­crétaire de rédaction, c'était le futur célèbre poète et peintre Henri Michaux. Sa présence parmi nous était due au hasard. Goemans était l'un de ses vieux amis: il avait été son condisciple au Collège St. Jan Berchmans. Il était dans le be­soin. La protectrice de Groethuysen, veuve d'un des grands patrons de l'Arbed, le consortium de l'acier, nous fit une proposition: si nous enga­gions Michaux comme secrétaire de rédaction, elle paierait son salaire mensuel, plus les factures de la revue. C'était une solution idéale. C'est ainsi que je peux dire aujourd'hui que le célé­brissime Henri Michaux a été mon employé...

 

Q.: Donc, grâce à Groethuysen, vous avez pris connaissance de l'œuvre de Heidegger...

 

ME: Eh oui. A cette époque, il commençait à de­venir célèbre. En français, c'est Gallimard qui publia d'abord quelques fragments de Sein und Zeit. Personnellement, je n'ai jamais eu de con­tacts avec lui. Après la guerre, je lui ai écrit pour demander quelques petites choses. J'avais lu un interview de lui où il disait que Sartre n'était pas un philosophe mais que Georges Bataille, lui, en était un. Je lui demandai quelques explications à ce sujet et lui rappelai que j'avais été l'un des premiers éditeurs en langue française de ses œuvres. Pour toute réponse, il m'envoya une petite carte avec son portrait et ces deux mots: «Herzlichen Dank!» (Cordial merci!). Ce fut la seule réponse de Heidegger...

 

Q.: Vous auriez travaillé pour l'Ahnenerbe. Comment en êtes-vous arrivé là?

 

ME: Avant la guerre, je m'étais lié d'amitié avec Juliaan Bernaerts, mieux connu dans le monde littéraire sous le nom de Henri Fagne. Il avait épousé une Allemande et possédait une librairie internationale dans la Rue Royale à Bruxelles. Je suppose que cette affaire était une librairie de propagande camouflée pour les services de Goebbels ou de Rosenberg. Un jour, Bernaerts me proposa de collaborer à une nouvelle maison d'édition. Comme j'étais sans travail, j'ai ac­cepté. C'était les éditions flamandes de l'Ahnenerbe. Nous avons ainsi édité une ving­taine de livres et nous avions des plans gran­dioses. Nous sortions également un mensuel, Hamer,  lequel concevait les Pays-Bas et la Flandre comme une unité.

 

Q.: Et vous avez écrit dans cette publication?

 

ME: Oui. J'ai toujours été amoureux de la Hollande et, à cette époque-là, il y avait comme un mur de la honte entre la Flandre et la Hollande. Pour un Thiois comme moi, il existe d'ailleurs toujours deux murs séculaires de la honte: au Nord avec les Pays-Bas; au Sud avec la France, car la frontière naturelle des XVII Provinces historiques s'étendait au XVIième siècle jusqu'à la Somme. La première capitale de la Flandre a été la ville d'Arras (Atrecht). Grâce à Hamer,  j'ai pu franchir ce mur. Je devins l'émissaire qui se rendait régulièrement à Amsterdam avec les articles qui devaient paraître dans Hamer. Le rédacteur-en-chef de Hamer-Pays-Bas cultivait lui aussi des idées grand-néer­landaises. Celles-ci transparaissaient clairement dans une autre revue Groot-Nederland, dont il était également le directeur. Comme elle a conti­nué à paraître pendant la guerre, j'y ai écrit des articles. C'est ainsi qu'Urbain van de Voorde (8) a participé également à la construction de la Grande-Néerlande. Il est d'ailleurs l'auteur d'un essai d'histoire de l'art néerlandais, considérant l'art flamand et néerlandais comme un grand tout. Je possède toujours en manuscrit une traduction de ce livre, paru en langue néerlandaise en 1944.

 

Mais, en fin de compte, j'étais un dissident au sein du national-socialisme! Vous connaissez la thèse qui voulait que se constitue un Grand Reich allemand dans lequel la Flandre ne serait qu'un Gau parmi d'autres. Moi, je me suis dit: «Je veux bien, mais il faut travailler selon des principes or­ganiques. D'abord il faut que la Flandre et les Pays-Bas fusionnent et, de cette façon seulement, nous pourrions participer au Reich, en tant qu'entité grande-néerlandaise indivisible». Et pour nous, la Grande-Néerlande s'étendait jusqu'à la Somme! Il me faut rappeler ici l'existence pendant l'Occupation, d'une «résistance thioise» non reconnue comme telle à la «Libération». J'en fis partie avec nombre d'amis flamands et hollandais, dont le poète fla­mand Wies Moens pouvait être considéré comme le chef de file. Tous devinrent finalement victimes de la «Répression».

 

Q.: Est-ce là l'influence de

Joris van Severen?

 

ME: Non, Van Severen était en fait un fransquil­lon, un esprit totalement marqué par les modes de Paris. Il avait reçu une éducation en français et, au front, pendant la première guerre mondiale, il était devenu «frontiste» (9). Lorsqu'il créa le Verdinaso, il jetta un oeil au-delà des frontières de la petite Belgique, en direction de la France. Il revendiqua l'annexion de la Flandre française. Mais à un moment ou à un autre, une loi devait être votée qui aurait pu lui valoir des poursuites. C'est alors qu'il a propagé l'idée d'une nouvelle direction de son mouvement (la fameuse «nieuwe marsrichting»). Il est redevenu «petit-belge». Et il a perdu le soutien du poète Wies Moens (10), qui créa alors un mouvement dissident qui se cristal­lisa autour de sa revue Dietbrand  dont je devins un fidèle collaborateur.

 

Q.: Vous avez collaboré à une quantité de publications, y compris pendant la seconde guerre mondiale. Vous n'avez pas récolté que des félicitations. Dans quelle mesure la répression vous a-t-elle marqué?

 

ME: En ce qui me concerne, la répression n'est pas encore finie! J'ai «collaboré» pour gagner ma croûte. Il fallait bien que je vive de ma plume. Je ne me suis jamais occupé de politique. Seule la culture m'intéressait, une culture assise sur les traditions indo-européennes. De plus, en tant qu'idéaliste grand-néerlandais, je demeurai en marge des idéaux grand-allemands du national-socialisme. En tant qu'artiste surréaliste, mon art était considéré comme «dégénéré» par les ins­tances officielles du IIIième Reich. Grâce à quelques critiques d'art, nous avons toutefois pu faire croire aux Allemands qu'il n'y avait pas d'«art dégénéré» en Belgique. Notre art devait être analysé comme un prolongement du roman­tisme allemand (Hölderlin, Novalis,...), du mou­vement symboliste (Böcklin, Moreau, Khnopff,...) et des Pré-Raphaëlites anglais. Pour les instances allemandes, les expressionnistes flamands étaient des Heimatkünstler  (des peintres du terroir). Tous, y compris James Ensor, mais excepté Fritz Van der Berghe, consi­déré comme trop «surréaliste» en sa dernière pé­riode, ont d'ailleurs participé à des expositions en Allemagne nationale-socialiste.

 

Mais après la guerre, j'ai tout de même purgé près de quatre ans de prison. En octobre 1944, je fus arrêté et, au bout de six ou sept mois, remis en liberté provisoire, avec la promesse que tout cela resterait «sans suite». Entretemps, un audi­teur militaire (11) cherchait comme un vautour à avoir son procès-spectacle. Les grands procès de journalistes avaient déjà eu lieu: ceux du Soir, du Nouveau Journal, de Het Laatste Nieuws,... Coûte que coûte, notre auditeur voulait son pro­cès. Et il découvrit qu'il n'y avait pas encore eu de procès du Pays réel  (le journal de Degrelle). Les grands patrons du Pays réel avaient déjà été condamnés voire fusillés (comme Victor Matthijs, le chef de Rex par interim et rédacteur-en-chef du journal). L'auditeur eut donc son procès, mais avec, dans le box des accusés, des seconds cou­teaux, des lampistes. Moi, j'étais le premier des troisièmes couteaux, des super-lampistes. Je fus arrêté une seconde fois, puis condamné. Je restai encore plus ou moins trois ans en prison. Plus moyen d'en sortir! Malgré l'intervention en ma faveur de personnages de grand format, dont mon ami français Jean Paulhan, ancien résistant et futur membre de l'Académie Française, et le Prix Nobel anglais T.S. Eliot, qui écrivit noir sur blanc, en 1948, que mon cas n'aurait dû exiger aucune poursuite. Tout cela ne servit à rien. La lettre d'Eliot, qui doit se trouver dans les archives de l'Auditorat militaire, mériterait d'être publiée, car elle condamne en bloc la répression sauvage des intellectuels qui n'avaient pas «brisé leur plume», cela pour autant qu'ils n'aient pas com­mis des «crimes de haute trahison». Eliot fut d'ailleurs un des grands défenseurs de son ami le poète Ezra Pound, victime de la justice répressive américaine.

 

1_w200.jpgQuand j'expose, parfois, on m'attaque encore de façon tout à fait injuste. Ainsi, récemment, j'ai participé à une exposition à Lausanne sur la femme dans le Surréalisme. Le jour de l'ouverture, des surréalistes de gauche distribuè­rent des tracts qui expliquaient au bon peuple que j'étais un sinistre copain d'Eichmann et de Barbie! Jamais vu une abjection pareille...

 

Q.: Après la guerre, vous avez participé aux travaux d'un groupe portant le nom étrange de «Fantasmagie»? On y rencontrait des figures comme Aubin Pasque, Pol Le Roy et Serge Hutin...

 

ME: Oui. Le Roy et Van Wassenhove avaient été tous deux condamnés à mort (12). Après la guerre, en dehors de l'abstrait, il n'y avait pas de salut. A Anvers règnait la Hessenhuis:  dans les années 50, c'était le lieu le plus avant-gardiste d'Europe. Pasque et moi avions donc décidé de nous associer et de recréer quelque chose d'«anti». Nous avons lancé «Fantasmagie». A l'origine, nous n'avions pas appelé notre groupe ainsi. C'était le centre pour je ne sais plus quoi. Mais c'était l'époque où Paul de Vree possédait une revue, Tafelronde.  Il n'était pas encore ultra-moderniste et n'apprit que plus tard l'existence de feu Paul van Ostaijen. Jusqu'à ce moment-là, il était resté un brave petit poète. Bien sûr, il avait un peu collaboré... Je crois qu'il avait travaillé pour De Vlag (13). Pour promouvoir notre groupe, il promit de nous consacrer un numéro spécial de Tafelronde.  Un jour, il m'écrivit une lettre où se trouvait cette question: «Qu'en est-il de votre "Fantasmagie"?». Il venait de trouver le mot. Nous l'avons gardé.

 

Q.: Quel était l'objectif de «Fantasmagie»?

 

ME: Nous voulions instituer un art pictural fan­tastique et magique. Plus tard, nous avons attiré des écrivains et des poètes, dont Michel de Ghelderode, Jean Ray, Thomas Owen, etc. Mais chose plus importante pour moi est la création en 1982, à l'occasion de mes soixante-quinze ans, par un petit groupe d'amis, d'une Fondation Marc. Eemans  dont l'objet est l'étude de l'art et de la littérature idéalistes et symbolistes. D'une activité plus discrète, mais infiniment plus sé­rieuse et scientifique, que la «Fantasmagie», cette Fondation a créé des archives concernant l'art et la littérature (accessoirement également la mu­sique) de tout ce qui touche au symbole et au mythe, non seulement en Belgique mais en Europe voire ailleurs dans le monde, le tout dans le sens de la Tradition primordiale.

 

Q.: Vous avez aussi fondé le Centrum Studi Evoliani, dont vous êtes toujours le Président...

 

ME: Oui. Pour ce qui concerne la philosophie, j'ai surtout été influencé par Nietzsche, Heidegger et Julius Evola. Surtout les deux der­niers. Un Gantois, Jef Vercauteren, était entré en contact avec Renato Del Ponte, un ami de Julius Evola. Vercauteren cherchait des gens qui s'intéressaient aux idées de Julius Evola et étaient disposés à former un cercle. Il s'adressa au Professeur Piet Tommissen, qui lui communiqua mon adresse. J'ai lu tous les ouvrages d'Evola. Je voulais tout savoir à son sujet. Quand je me suis rendu à Rome, j'ai visité son appartement. J'ai discuté avec ses disciples. Ils s'étaient dispu­tés avec les gens du groupe de Del Ponte. Celui-ci prétendait qu'ils avaient été veules et mesquins lors du décès d'Evola. Lui, Del Ponte, avait eu le courage de transporter l'urne contenant les cendres funéraires d'Evola au sommet du Mont Rose à 4000 m et de l'enfouir dans les neiges éternelles. Mon cercle, hélas, n'a plus d'activités pour l'instant et cela faute de personnes réelle­ment intéressées.

 

En effet, il faut avouer que la pensée et les théo­ries de Julius Evola ne sont pas à la portée du premier militant de droite, disons d'extrême-droite, venu. Pour y accéder, il faut avoir une base philosophique sérieuse. Certes, il y a eu des farfelus férus d'occultisme qui ont cru qu'Evola parlait de sciences occultes, parce qu'il est consi­déré comme un philosophe traditionaliste de droite. Il suffit de lire son livre Masques et vi­sages du spiritualisme contemporain pour se rendre compte à quel point Evola est hostile, tout comme son maître René Guénon, à tout ce qui peut être considéré comme théosophie, anthropo­sophie, spiritisme et que sais-je encore.

 

L'ouvrage de base est son livre intitulé Révolte contre le monde moderne  qui dénonce toutes les tares de la société matérialiste qui est la nôtre et dont le culte de la démocratie (de gauche bien en­tendu) est l'expression la plus caractérisée. Je ne vous résumerai pas la matière de ce livre dense de quelque 500 pages dans sa traduction française. C'est une véritable philosophie de l'histoire, vue du point de vue de la Tradition, c'est-à-dire selon la doctrine des quatre âges et sous l'angle des théories indo-européennes. En tant que «Gibe­lin», Evola prônait le retour au mythe de l'Em­pire, dont le IIIième Reich de Hitler n'était en somme qu'une caricature plébéienne, aussi fut-il particulièrement sévère dans son jugement tant sur le fascisme italien que sur le national-so­cialisme allemand, car ils étaient, pour lui, des émanations typiques du «quatrième âge» ou Kali-Youga, l'âge obscur, l'âge du Loup, au même titre que le christianisme ou le communisme. Evola rêvait de la restauration d'un monde «héroïco-ouranien occidental», d'un monde éli­taire anti-démocratique dont le «règne de la masse», de la «société de consommation» aurait été éliminé. Bref, toute une grandiose histoire philosophique du monde dont le grand héros était l'Empereur Frédéric II de Hohenstaufen (1194-1250), un véritable héros mythique...

 

Q.: Vous avez commencé votre carrière en même temps que Magritte. Au début, vos œuvres étaient même mieux cotées que les siennes...

 

ME: Oui et pourtant j'étais encore un jeune galo­pin. Magritte s'est converti au Surréalisme après avoir peint quelque temps en styles futuriste, puis cubiste, etc. A cette époque, il avait vingt-sept ans. Je n'en avais que dix-huit. Cela fait neuf ans de différence. J'avais plus de patte. C'était la rai­son qui le poussait à me houspiller hors du groupe. Parfois, lorsque nous étions encore amis, il me demandait: «Dis-moi, comment pour­rais-je faire ceci...?». Et je répondais: «Eh bien Magritte, mon vieux, fais comme cela ou comme cela...». Ultérieurement, j'ai pu dire avec humour que j'avais été le maître de Magritte! Pendant l'Occupation, j'ai pu le faire dispenser du Service Obligatoire, mais il ne m'en a pas su gré. Bien au contraire!

 

Q.: Comment se fait-il qu'actuellement vous ne bénéficiez pas de la même réputation internationale que Magritte?

 

ME: Voyez-vous, lui et moi sommes devenus surréalistes en même temps. J'ai été célèbre lorsque j'avais vingt ans. Vous constaterez la vé­racité des mes affirmations en consultant la revue Variétés,  revue para-surréaliste des années 1927-28, où vous trouverez des publicités pour la ga­lerie d'art L'Epoque, dont Mesens était le direc­teur. Vous pouviez y lire: nous avons toujours en réserve des œuvres de... Suivait une liste de tous les grands noms de l'époque, dont le mien. Et puis il y a eu le formidable krach de Wall Street en 1929: l'art moderne ne valait plus rien du jour au lendemain. Je suis tombé dans l'oubli. Aujourd'hui, mon art est apprécié par les uns, boudé par d'autres. C'est une question de goût personnel. N'oubliez pas non plus que je suis un «épuré», un «incivique», un «mauvais Belge», même si j'ai été «réhabilité» depuis... J'ai même été décoré, il y a quelques années, de l'«Ordre de la Couronne»... et de la Svastika, ajoutent mes ennemis! Bref, pas de place pour un «surréaliste pas comme les autres». Certaines gens prétendent qu'«on me craint», alors que je crois plutôt que j'ai tout à craindre de ceux qui veulent me réduire au rôle peu enviable d'«artiste maudit». Mais comme on ne peut m'ignorer, certains spéculent déjà sur ma mort!

 

Propos recueillis en partie par Koenraad Logghe, en partie par Robert Steuckers. Une version néerlandaise de l'entrevue avec Logghe est parue dans la revue De Vrijbuiter, 5/1989. Adresse: De Vrijbuiter, c/o Jan Creve, Oud Arenberg 110, B-2790 Kieldrecht.   

 

(1) L'activisme est le mouvement collaborateur en Flandre pen­dant la première guerre mondiale. A ce propos, lire Maurits Van Haegendoren, Het aktivisme op de kentering der tijden, Uitgeve­rij De Nederlanden, Antwerpen, 1984.

(2) Paul Werrie était collaborateur du Nouveau Journal,  fondé par le critique d'art Paul Colin avant la guerre. Paul Werrie y te­nait la rubrique «théâtre». A la radio, il ani­mait quelques émis­sions sportives. Ces activités non po­li­tiques lui valurent toute­fois une condamnation à mort par contumace, tant la justice mi­litaire était sereine... Il vé­cut dix-huit ans d'exil en Espagne. Il se fixa ensuite à Marly-le-Roi, près de Paris, où résidait son compagnon d'infortume et vieil ami, Robert Poulet. Tous deux participèrent activement à la rédaction de Rivarol  et des Ecrits de Paris.

(3) Paul André van Ostaijen (1896-1928), jeune poète et es­sayiste flamand, né à Anvers, lié à l'aventure activiste, émigré politique à Berlin entre 1918-1920. Fonde la revue Avontuur, ouvre une galerie à Bruxelles mais miné par la tuberculose, abandonne et se consacre à l'écriture dans un sanatorium. Inspiré par Hugo von Hoffmannsthal et par les débuts de l'expres­sionnisme allemand, il développe un nationalisme fla­mand à dimensions universelles, tablant sur les grandes idées d'humanité et de fraternité. Se tourne ensuite vers le dadaïsme et le lyrisme exprérimental, la poésie pure. Exerce une grande in­fluence sur sa génération.

(4) L'Athenée est l'équivalent belge du lycée en France ou du Gymnasium en Allemagne.

(5) Maurits Brants a notamment rédigé un ouvrage sur les héros de la littérature germanique des origines: Germaansche Helden­leer,  A. Siffer, Gent, 1902.

(6) Dans son ouvrage L'épreuve du feu. A la recherche d'une éthique,  René Baert évoque notamment les œuvres de Keyser­ling, Abel Bonnard, Drieu la Rochelle, Montherlant, Nietzsche, Ernst Jünger, etc.

(7) Louis Marie Anne Couperus (1863-1923), écrivain symbo­liste néerlandais, grand voyageur, conteur naturaliste et psycho­logisant qui met en scène des personnages décadents, sans vo­lonté et sans force, dans des contextes contemporains ou an­tiques. Prose maniérée. Couperus a écrit quatre types de romans: 1) Des romans familiaux contemporains dans la société de La Haye; 2) des romans fantastiques et symboliques puisés dans les mythes et légendes d'Orient; 3) des romans mettant en scène des tyrans antiques; 4) des nouvelles, des esquisses et des récits de voyage.

(8) Pendant la guerre, Urbain van de Voorde participe à la rédac­tion de la revue hollando-flamande Groot-Nederland.  A l'épu­ration, il échappe aux tribunaux mais, comme Michel de Ghel­de­rode, est révoqué en tant que fonctionnaire. Après ces tra­cas, il participe dès le début à la rédaction du Nieuwe Standaard  qui reprend rapidement son titre De Standaard,  et devient princi­pal quo­tidien flamand.

(9) Dans les années 20, le frontisme est le mouvement politique des soldats revenus du front et rassemblés dans le Frontpartij.  Ce mouvement s'oppose aux politiques militaires de la Belgique, notamment à son alliance tacite avec la France, jugée ennemie héréditaire du peuple flamand, lequel n'a pas à verser une seule goutte de son sang pour elle. Il s'engage pour une neutralité ab­solue, pour la flamandisation de l'Université de Gand, etc.

(10) Le poète Wies Moens (1898-1982), activiste pendant la première guerre mondiale et étudiant à l'Université flamandisée de Gand entre 1916 et 1918, purgera quatre années de prison entre 1918 et 1922 dans les geôles de l'Etat belge. Fonde les re­vues Pogen  (1923-25) et Dietbrand  (1933-40). En 1945, un tribunal militaire le condamne à mort mais il parvient à se réfu­gier aux Pays-Bas pour échapper à ses bourreaux. Il fut l'un des principaux représentants de l'expressionnisme flamand. Il sera lié, à l'époque du Frontpartij,  à Joris van Severen, mais rompra avec lui pour les raisons que nous explique Marc. Eemans.

Cfr.: Erik Verstraete, Wies Moens,  Orion, Brugge, 1973.

(11) Les tribunaux militaires belges était présidés par des «au­diteurs» lors de l'épuration. On parlait également de l'«Audi­torat militaire». Pour comprendre l'abomination de ces tribunaux, le mécanisme de nomination au poste de juge de jeunes juristes inexpérimentés, de sous-officiers et d'officiers sans connaissances juridiques et revenus des camps de prison­niers, lire l'ouvrage du Prof. Raymond Derine, Repressie zonder maat of einde? Terug­blik op de collaboratie, repressie en amnes­tiestrijd,  Davidsfonds, Leuven, 1978. Le Professeur Derine si­gnale le mot du Ministre de la Justice Pholien, dépassé par les événements: «Une justice de rois nègres».

(12) Pol Le Roy, poète, ami de Joris Van Severen, chef de pro­pagande du Verdinaso, passera à la SS flamande et au gouverne­ment en exil en Allemagne de septembre 44 à mai 45. Van Was­senhove, chef de district du Verdinaso, puis de De Vlag (Deutsch-Vlämische Arbeitsgemeinschaft),  à Ypres, a été con­dam­né à mort en 1945. Sa femme verse plusieurs millions à l'Au­ditorat militaire et à quelques «magistrats», sauvant ainsi la vie de son époux. En prison, Van Wassenhove apprend l'es­pagnol et traduit plusieurs poésies. Il deviendra l'archiviste de «Fantasmagie».

(13) De Vlag (= Le Drapeau) était l'organe culturel de la Deutsch-Vlämische Arbeitsgemeinschaft. Il traitait essentielle­ment de questions littéraires, artistiques et philosophiques.

 

jeudi, 31 décembre 2009

Frithjof Schuon ou l'unité de l'essence-ciel: pour son 90ième anniversaire

Frithjof-Schuon.jpgArchives de Synergies Européennes - 1999

FRITHJOF SCHUON OU L'UNiTE DE L'ESSENCE-CIEL:

POUR SON 90ième ANNIVERSAIRE

 

Frédéric d'HÖLKELUNN

 

«Et telle que serait la folie d'un homme qui, ne sachant ce que c'est que la navigation, se mettrait sur mer sans pilote, telle est la folie d'une créature qui embrasse la vie religieuse sans avoir la volonté de Dieu pour son guide».

(Bossuet)

 

«Il est des hommes qui adorent le soleil parce qu'il est une manifestation de Dieu; il en est d'autres qui refusent de l'adorer parce qu'il n'est pas Dieu, ce qu'il semble prouver par le fait qu'il se couche. Les adorateurs du soleil pourraient faire valoir à bon droit qu'il ne se couche pas, mais que c'est la rotation de la terre qui crée cette illusion; et on pourrait comparer leur point de vue à celui de l'ésotérisme, qui, d'une part, a conscience du caractère théophanique et pour ainsi dire sacramentel des grands phénomènes du monde visible, et, d'autre part, connaît la nature réelle et totale des choses et non tel aspect ou telle apparence seulement.

 

Mais il faut mentionner aussi une troisième possibilité, celle de l'idolâtrie: il est des hommes qui adorent le soleil, non parce qu'il savent qu'il manifeste Dieu, ou que Dieu se manifeste par lui, ni parce qu'ils savent qu'il est immortel et que ce n'est pas lui qui se couche (1), mais parce qu'ils s'imaginent que Dieu est le soleil; dans ce cas, les contempteurs exotéristes du soleil ont beau jeu de crier au paganisme . Ils ont relativement raison, tout en ignorant que l'idolâtrie  —ou plus précisément l'héliolâtrie—  ne peut être qu'une dégénérescence d'une attitude légitime; attitude non exclusive sans doute, mais en tout cas consciente de la situation réelle, au point de vue du sujet aussi bien qu'à celui de l'objet».

 

- (1) “Le fait que le soleil se déplace à son tour, à ce qu'il paraît, n'entre pas en ligne de compte dans un symbolisme limité à notre système solaire”. (Frithjof Schuon, L'Esotérisme comme Principe et comme Voie, page 216).

 

C'est le 18 juin 1997, que “le plus grand philosophe du XXième siècle” selon Jean Biès (1), a discrètement fêté ses 90 printemps, à la lisière des vastes forêts de l'Indiana, près de la petite cité universitaire de Bloomington, aux Etats-Unis, où il vit depuis 1980.

 

Quelques jalons biographiques:

 

Près d'un siècle auparavant, la ville de Bâle en Suisse avait bercé les premières années de son enfance (2-, quasiment au son du violon de son père, d'origine wurtembergeoise. Après un apprentissage de dessinateur d'art sur tissus dans une entreprise de Mulhouse, Frithjof Schuon qui est d'ascendance alsacienne par sa mère, effectue son service militaire dans l'armée française, tout en poursuivant des études d'Islamologie à l'Institut de la Mosquée de Paris. Il voyage au Maroc et en Algérie, approfondi ses connaissances des arts et métiers traditionnels d'Extrême-Orient, et rencontre en 1932 le Shaykh Ahmad al-Alawî, Maître d'une tariquah soufie, dont il deviendra le disciple. Lors d'une escale au Caire en 1938, Schuon rend une visite courtoise à René Guénon avec lequel il entretenait d'importantes relations épistolaires. Pendant plus de vingt ans il sera d'ailleurs le plus proche collaborateur de Guénon auprès de la revue Etudes Traditionnelles.

 

Indépendamment de son engagement au sein de l'Islam, Schuon se lie a quelques-unes des personnalités les plus remarquables des tribus sioux Lakota d'Amérique du Nord, et accompli plusieurs séjours auprès d'elles durant les étés 1959 et 1963. Son journal, ainsi que maintes études d'une acuité exceptionnelle et de splendides fresques peintes témoigneront de son empathie à l'égard de la primordialité de cette civilisation qu'il désignera de l'épithète de “Rubérien” ou “Ruberindien”.

 

Cependant, la déclaration de guerre l'oblige à écourter un voyage en Egypte et en Inde pour servir sous le drapeau tricolore; puis, la lueur des hostilités s'estompant, il gagne la Suisse où il s'établit à Pully, près de Lausanne sur les bords du Lac Léman. C'est sur ces coteaux paisibles que va se peaufiner, pendant près de quarante ans, les linéaments d'une œuvre qui sert l'arc-en-ciel divin de la Vérité parce qu'elle témoigne dans les labours du cœur humain de la Grâce de la Présence.

 

Une œuvre “essence-ciel”

 

Si l'on tente de ceindre  —tant que faire se peut!—  d'un seul regard cette somme (3) spirituelle incomparable, l'éclat premier qui en rejaillit parait s'énoncer autour de trois principes fondamentaux: Le Beau, Le Vrai et Le Bien, qui, à l'instar des lois globales  de la physique, mais avec une dimension —universelle- qui les implique, conditionne toute une hiérarchie des états d'être du microcosme au macrocosme. Platon dans sa célèbre formule “le beau est la splendeur du vrai” avait confirmé le lien indissoluble qui unit la beauté et la vérité. Ce qu'il convient de souligner, c'est que ces notions comme toutes celles présentes dans les différents livres de Schuon, doivent être appréhendées au plus intime de soi, (re)-vécues par chacun, comme une aventure intérieure.

 

Ces éléments donnés pour préciser en quoi dès que l'on aborde les religions, et plus généralement le champs de la transcendance, on ne saurait se passer d'une herméneutique des formes et de la substance symboliques dont sont constituées les Révélations. Faute de quoi les concepts ne véhiculent qu'une sorte de constructivisme intrinsèquement subjectif.

 

Devant l'efflorescence actuelle de groupes néo-païens et l'opacité que recèle l'expression même de paganisme, il convient de nous interroger sur ce phénomène. Comme l'atteste la citation de Schuon en exergue, nul mieux que lui n'est à même de clarifier et rectifier certaines dérives  néo-paiennes, à l'image de celle offerte dans une récente revue de la “nouvelle droite” française. Ainsi se confirmera l'impérieuse nécessité de la perspective schuonienne pour cette fin du second millénaire.

 

Le néo-paganisme selon la “nouvelle droite”:

 

Le n°89 de juillet 1997 d'Eléments pour la civilisation européenne, s'ouvre sur un remarquable éditorial intitulé “sortir du nihilisme” dont le propos se poursuit en quelque sorte au sein d'un entretien avec Alain de Benoist, intitulé «Comment peut-on être païen?». Extrêmement synthétique et pleinement justifié dans son diagnostic, l'éditorial d'Eléments  souffre néanmoins d'une certaine incomplétude en ce qu'il ajourne la logique même qui le sous-tend. En effet, un tel constat ne devrait-il pas déboucher sur un rattachement à l'une des Voies authentiquement traditionnelles? Dans le cas contraire ne demeurons-nous pas simple spectateur-sociologue, d'un discours au demeurant brillant? Ce sont les premières questions que suscite cet éditorial comme l'entretien qu'a accordé Alain de Benoist.

 

En page 10-11 de celui-ci, nous découvrons, on ne sait trop pourquoi ce qui suit: «Les groupes “néopaiens” extrêmement nombreux qui évoluent dans ce milieu échappent rarement à ce syncrétisme (c'est nous qui soulignons), en fait un patchwork de croyances et de thèmes de toutes sortes, où l'on voit se mêler les tarots et les “charmes” karmiques, l'interprétation des rêves et les invocations à la Grande Déesse, les traditions hermétiques égyptiennes et les Upanishads, Castañeda et le roi Arthur, Frithjof Schuon et la psychologie jungienne, le marteau de Thor et le Yi-King (...), etc.».

 

Pour un lecteur peu ou non instruit des Doctrines Traditionnelles, et surtout qui ne dispose pas d'information précise sur Frithjof Schuon, ce qui précède prête à diverses supputations qui ont en commun d'altérer l'image de ce dernier. En effet:

- M. Schuon pourrait passer pour l'un des dirigeants ou conseillers de ces “groupes néo-païens”.

- On pourrait penser que M. Schuon avalise une quelconque idée de néopaganisme, ou cautionnerait l'une des tendances ou formulations du courant “New Age” ou de l'un des auteurs ci-dessus cité.

 

Or tout ceci est contraire à la Vérité et l'œuvre inestimable de Frithjof Schuon en apporte une éclatante réfutation. Mais il y a plus ennuyeux, ce sont les deux termes de “syncrétisme” et de “patchwork” accolé à sa personne qui ne peuvent qu'induire que son propos correspondrait à un (sic) “syncrétisme” ou un (sic) “patchwork”, ce qui est encore une fois l'exacte inverse de la réalité.

 

Il suffit pour s'en convaincre de se pénétrer des deux citations suivantes: “le paganisme c'est la réduction de la religion à une sorte d'utilitarisme” (4); “Le paganisme, s'il ne se réduit pas à un culte des esprits,  —culte pratiquement athée qui n'exclut pas la notion théorique d'un Dieu—  est proprement un “angélothéisme”; le fait que le culte s'adresse à Dieu dans sa “diversité”, si l'on peut dire, ne suffit pas pour empêcher la réduction du Divin  —dans la pensée des hommes—  au niveau des puissances créées. L'unité divine prime le caractère divin de la diversité: il est plus important de croire à Dieu -donc à l'Un- que de croire à la divinité de tel principe universel. L'Hindouisme ne perd pas de vue l'Unité; il a tendance à voir l'Unité dans la diversité et dans chaque élément de celle-ci. On ne saurait donc sans grave erreur comparer les Hindous aux païens de l'antiquité, pour lesquels la diversité divine était quasiment quantitative» (5).

 

Les interprétations limitatives d'Alain de Benoist

 

schuonregards.jpgIl est manifeste qu'Alain de Benoist, sans doute par tempérament, n'a malheureusement jamais étudié (6) les écrits de Frithjof Schuon. C'est regrettable, particulièrement, dans l'optique de cet article, l'ouvrage Regards sur les Mondes anciens (7) et le chapitre (pages 9-35) qui lui donne son titre, de même que le chapitre du même livre «Dialogue entre Hellénistes et Chrétiens» (pages 71-89) qui répond à notre sens bien mieux que ne le fait Heidegger de ce que fut la relation amphibologique mais véritable entre les anciens Grecs et les premiers Chrétiens.

 

Ceci exprimé, il convient d'éclaircir les points suivants:

- Maîtrisant à la perfection les catégories de la Métaphysique Universelle (8), M. Schuon ne saurait de ce fait en aucun cas être suspecté de syncrétisme ou de toute autre idée du même genre. Rappelons que Guénon a plus d'une fois montré la différence entre synthèse et syncrétisme d'une part, et la nécessité d'un rattachement à une tradition religieuse avérée d'autre part. En l'occurrence et comme pour M. Schuon, ce fut le Soufisme au sein de l'Islam Traditionnel.

 

- Quant à la psychologie jungienne et à Jung en particulier (9), nous citerons ce judicieux commentaire de Schuon (l0) à propos de l'exigence d'une “vigilance implacable” quant à “la réduction du spirituel au psychique”: «D'après C. G. Jung, l'émersion figurative de certains contenus du “subconscient collectif” s'accompagne empiriquement, à titre de complément psychique, d'une sensation nouménale d'éternité et d'infinitude; c'est ruiner insidieusement toute transcendance et toute intellection. Selon cette théorie, c'est l'inconscient  —ou subconscient—  collectif qui est à l'origine de la conscience “individuée”, l'intelligence humaine ayant deux composants, à savoir les reflets du subconscient d'une part et l'expérience du monde externe d'autre part; mais comme l'expérience n'est pas en soi de l'intelligence, celle-ci a nécessairement pour substance le subconscient, et on en vient alors à vouloir définir le subconscient à partir de sa ramification. C'est la contradiction classique de toute philosophie subjectiviste et relativiste». Il est difficile d'être plus clair quant à la dénonciation des erreurs de la “psychologie” jungienne, comme des dérives farfelues de groupes néo-paiens!

 

D'autre part, on ne saurait, sans fausser ce qui est présupposé dans toute Révélation ou Tradition authentique, parler des écrits de M. Schuon (11)  —ou de tout autre représentant qualifié de la Sophia perennis  (12)—  de la même façon que ceux des philosophes des XIXième et XXième siècle. Dans le cas contraire, on retomberait dans un relativisme (l3) n'autorisant pas un acte de foi plénier.

 

Métaphysique et philosophie ne sont pas synonymes!

 

On s'interroge sur l'existence distincte de ces deux termes dès lors que quasi toutes les sciences “dures” (sic) ou “humaines” (re-sic) les emploient alternativement et sans se préoccuper un seul instant du sens que ceux-ci avaient à l'origine. Ce confusionnisme (l4) est assez grave car il fausse toute tentative d'interprétation du fait religieux. René Guénon a pourtant définitivement établit la distinction radicale qu'il y a lieu de retenir entre philosophie et Métaphysique (15), et la démarche “quelque peu honteuse et confuse” (16) de Heidegger se trouve renvoyée à sa juste place.

 

Quoique nous estimons beaucoup la pertinence de certaines analyses critiques d'Heidegger sur le sens de la technique dans le monde moderne, nous ne pouvons acquiescer à l'engouement disproportionné que certains lui voue à l'instar du “gourou” de la psychanalyse Jacques Lacan (17). Frithjof Schuon a bien circonscrit les confins de la pensée d'Heidegger, lorsqu'il relève dans Les Stations de la Sagesse (18): «Pour Heidegger, la question de l'Etre “a tenu en haleine l'investigation de Platon et d'Aristote”, et: “ce qui a été arraché jadis, dans un suprême effort de pensée, aux phénomènes, bien que d'une manière fragmentaire et par tâtonnements (im ersten Anlaufen)  est rendu trivial depuis longtemps” (Sein und Zeit).  Or il est exclu a priori que Platon et Aristote aient “découvert” leur ontologie à force de “penser”; ils étaient tout au plus les premiers, dans le monde grec, à estimer utile de formuler par écrit une ontologie.

 

Comme tous les philosophes modernes, Heidegger est loin d'avoir conscience du rôle tout “indicatif” et “provisoire” de la pensée en métaphysique; aussi n'est-il pas étonnant que cet auteur conclue, en vrai “penseur” méconnaissant la fonction normale de toute pensée: «Il s'agit de trouver et de suivre un chemin qui permette d'arriver à l'éclaircissement de la question fondamentale de l'ontologie. Quant à savoir si ce chemin est le seul chemin, ou s'il est le bon chemin, c'est ce qui ne pourra être décidé qu'après coup» (ibid.). Il est difficile de concevoir attitude plus antimétaphysique; c'est toujours le même parti pris de soumettre l'Intellect, qui est qualitatif par essence (19), aux vicissitudes de la quantité, ou en d'autres termes, de réduire toute qualité d'absolu à du relatif. C'est la contradiction classique des philosophes: on décrète que la connaissance est relative, mais au nom de quoi le décrète-t-on?

 

L'estimation d'Evola et celle d'Henry Corbin:

 

Julius Evola rejoint là-dessus Schuon lorsqu'il note que “le sens de l'existentialisme de Heidegger” est “sans ouverture franchement religieuse”, et que lorsque le philosophe de la Forêt Noire “parle du courage qu'il y a à éprouver de l'angoisse devant la mort” (20), nous sommes aux antipodes du type humain que toute religion bâtit dans la tourbe du temps.

 

L'anecdote sympathique (pages 16-17) d'Heidegger procédant à une génuflexion (21) “lorsqu'il entrait dans une chapelle ou une église”, dévoile une signification dont le caractère “historique” précisément, est à comprendre dans la perspective que nous avons jusqu'à présent essayé de présenter et qui se trouve également au cœur du retournement, de la transmutation qu'effectua Henry Corbin lorsqu'il délaissa Heidegger pour l'étude approfondie de Sohrawardî, Shaykh al-Ishrâq. Daryush Shayegan écrit à cet effet: «Ce que Corbin trouvait chez les penseurs iraniens était en quelque sorte un autre “climat de l'Etre” (eqlîm-e wojûd, Hâfez), un autre niveau de présence, niveau qui était exclu pour ainsi dire du programme de l'analytique heidegerienne. Le “retour aux choses mêmes” que préconisait Husserl, les mises entre parenthèses, le retrait hors des croyances admises que prônaient les adeptes de la phénoménologie, ne débouchaient pas sur le continent perdu de l'âme pas plus que Heidegger, analysant les existentiaux du Dasein et la structure de la temporalité, ne parvenait à atteindre ce huitième climat  ou le monde de l'imaginal. Ainsi le passage de Heidegger à Sohrawardî n'était pas uniquement un parcours ordinaire, encore moins une évolution mais une rupture, une rupture qui marquait l'accès à un autre climat de l'être (...) (22)”. C'est avec la publication de la traduction française du livre du sage safavide Sadr al-Dîn Shîrâzî (Mullâ Sadrâ) intitulé Kitâb al-mashâ'ir  (= Le

 

livre des pénétrations métaphysiques), qu'Henry Corbin mis “en parallèle, écrit Seyyed Hossein Nasr, le destin de l'étude de l'être en Occident et en Orient (...)” et “montra (...) dans sa magistrale comparaison entre l'ontologie de celui-ci et celle de Heidegger, que la découverte d'une métaphysique authentique révèle la limitation et l'insuffisance des débats qui occupent les principaux courants de la philosophie occidentale” (23).

 

Ce “climat” ne s'accomplit pleinement dans les tréfonds de l'homme que par le guéret des rites  qui le rétablit dans sa verticalité  chaque fois qu'il y déchoît. Or ceux-ci pour rassasier l'être de l'eau du symbole  —étoile fixe— et générer toute leur efficience, reçoivent leur légitimité seulement de la radicale Transcendance du Tout Autre qui, nous affirme Le Saint Coran “est plus près de lui que sa veine jugulaire” (24), mais il est dans son évanescence  que l'homme ne cesse de l'oublier.

 

C'est pour cette juste mesure que Jean Borella remarque encore: «Un simple regard sur le Parménide  ou le Sophiste aurait dû suffire cependant à leur faire comprendre (parlant de Heidegger et de Derrida) qu'il ne peut y avoir de compréhension (à tous les sens de ce terme) de l'être que du point de vue, qui n'est pas un point de vue, du sur-ontologique. A défaut de s'établir dans le surontologique (on y est ou on n'y est pas), on ne peut jamais parler de l'être, mais seulement à partir de l'être, et bien que la parole elle-même soit alors tout simplement impossible. C'est ici que se trouve la réponse à la question que Derrida pose à Foucault: y a-t-il un “autre” du Logos et quel est-il? Ou bien n'y en a-t-il pas? Et cette réponse est la suivante: c'est le Logos  lui-même qui est l'autre (que l'être), contrairement à ce qu'affirme Parménide qui ne le conçoit que comme parole-de-l'être (ontologos);  sinon, comment serait-il possible de dire ce qui n'est pas?» (25).

 

icon3.jpgBien d'autres remarques seraient à formuler sur cet entretien qu'Alain de Benoist à d'ailleurs renouvelé dans la revue Antaios (26), ce qui justifie à nos yeux la présente mise au point. Ainsi à propos des nuances qu'il y aurait lieu de faire entre aimer et ne pas aimer le monde, dans la référence à la lère Epître de Jean (2, 15) que donne Alain de Benoist en pages 14-15 d'Eléments, mais nous ouvririons alors un autre débat. Néanmoins nous ne poserons qu'une très simple question pour en dégager les prémices: n'est-il jamais arrivé, dans toute son existence, à Alain de Benoist de maudire, et de vouer aux gémonies la terre entière, même l'espace d'un instant?

 

Pareillement nous ne pouvons pas nous accorder avec Alain de Benoist lorsqu'il dit (pages 10-11) qu'“il n'est que trop évident qu'il (= l'ésotérisme) sert aisément de support à tous les délires”, c'est un peu court (27)! En l'occurence un certain néopaganisme véhicule autant sinon davantage de (sic) délires, surtout lorsqu'il refuse de se présenter pour ce qu'il est. C'est pourtant grâce à l'apport guénonien que nous pouvons distinguer entre occultisme et Esotérisme, surtout dans son sens doctrinal. Ne conviendrait-il pas mieux alors de parler de spiritisme (rebaptisé channeling, comme il est indiqué d'ailleurs) ou d'occultisme?

 

Nous ne pouvons supposer qu'un livre de Sel et de vie  —à la dimension impeccablement axiale, et véritable viatique pour l'homme moderne décentré comme l'est L'Esotérisme comme Principe et comme Voie, de Frithjof Schuon, qui vient d'être réédité, véhiculerait (sic) un pareil “délire”? Nous sommes persuadé que tel n'est pas le propos d'Alain de Benoist, et que seul les nécessités de l'entretien lui ont obvié la possibilité de clarifier ce point.

 

Une lettre ridicule du rédacteur en chef d'«Eléments»:

 

A la fin des Actes du XXVIième Colloque national du GRECE, le 1er décembre 1996, intitulé «Les grandes peurs de l'an 2000», Alain de Benoist relève: «Je suis toujours un peu surpris de voir à quel point il est parfois difficile pour chacun d'entendre des points de vue avec lesquels ils ne sympathisent pas. Je suis un peu différent, (...) en général, j'aime bien entendre des gens qui disent des choses que je ne pense pas (...) (28)». Fort de cette belle profession de foi, nous souhaitons que le présent petit écrit soit lu en observant si possible le sens de cette dernière!

 

Suite à un échange de correspondance relativement à ce numéro, son rédacteur en chef m'a fait part de son refus de publier ma mise au point (29) et de quelques objections vaniteuses dénuée de toute pertinence. J'en relèverai trois qui sont symptomatiques d'une clôture épistémologique:

 

a) M. Champetier estime que l'on ne saurait s'autoriser à “déduire quoi que ce soit des limites évidentes de notre constitution humaine”. Mais il ne lui vient pas un seul instant à l'esprit que ces limites ne sont si évidentes que pour lui, et que c'est lui-même qui arbitrairement se les pose!

 

Nous sommes ici en présence de l'aporie kantienne-type qui induit obligatoirement une clôture épistémologique. Kant estimait en effet que “la philosophie est non un instrument pour étendre la connaissance mais une discipline pour la limiter” (30).  Or cette limite réside ici dans l'aperception et la mission octroyée à la ratio. Autrement énoncé, c'est le serpent qui se mord la queue pour emprunter à l'un des épisodes ubuesques de Tintin au Congo l'image qui qualifie au plus près la réflexion du rédacteur d'Eléments.

 

Sur un autre plan, M. Champetier en ne tenant aucun compte des remarques —plus haut—  relatives à la fonction (31) des écrits schuoniens, entérine curieusement un égalitarisme méthodologique en ce qu'il prétend a priori récuser la pertinence de ceux-ci sans se soucier des conséquences que cela implique. En d'autres termes: M. Champetier a-t-il, oui ou non, suivi une Initiation authentique, quel est le degré  et la qualité  de réalisation de celle-ci, et enfin, maîtrise-t-il, oui ou non, tout ce qui découle  —Métaphysique comprise—  d'une Tradition donnée? La réponse à ses diverses questions ne peut qu'être négative et il apparaît dès lors que nous sommes en présence d'un incroyable orgueil dû à une ratio mutilée.

 

b) M. Champetier cite Wittgenstein, manifestement sans l'avoir vraiment lu. Il traduit quasi littéralement tout en la surinterprétant sa formule “sur ce dont on ne peut parler il vaut mieux se taire”. Outre que l'on peut également renvoyer Wittgenstein aux observations citées en a), celui-ci n'infére aucunement  —contrairement aux positivistes du Cercle de Vienne—  d'une impossibilité du langage à désigner une acception alors que son expression la proscrirait. Dans une étude importante (32), Jean-François Malherbe relève: «Nul athéisme donc chez Wittgenstein qui s'en tient strictement à montrer qu'il n'y a pas de savoir sur Dieu, si du moins l'on entend par savoir ce qui peut faire l'objet d'un discours sensé, et à suggérer une possiblité (ineffable) de Dieu. Mais il n'en va pas de même chez les positivistes logiques qui se sont référés au Tractatus comme à une “Bible”. Ce que refusent obstinément les néo-positivistes  —et qui les distingue radicalement de Wittgenstein—, c'est la possibilité que le langage montre des choses qu'il ne peut pas dire. Le problème de Dieu est donc, à leurs yeux, strictement dépourvu de sens, même de ce sens ineffable dont Wittgenstein pensait qu'il pouvait se montrer sans se dire».

 

c) M. Champetier estime que l'on “retrouverait paradoxalement dans l'humanisme moderne” une “démarche d'absoluité propre à la métaphysique”. Ou est-il allé chercher pareille incongruité? Primo, comment entend-il le terme “métaphysique”? Secondo, lorsque nous lisons,  —connivence de vue?—  comme allant de soi, chez Alain de Benoist, l'expression “métaphysique de la subjectivité” (33), nous nous demandons ce qu'il faut comprendre exactement par là? En réalité, l'humanisme moderne nous apparait d'abord marqué par un refus ou une ignorance manifeste de toute dimension de transcendance et à fortiori d'Absolu, ce qui ne l'empêche pas d'absolutiser des concepts purement relatifs,  —le phénomène de la sécularisation—  ce qui constitue sa principale aberration. Frithjof Schuon souligne bien que “l'humanisme (...) exalte de facto l'homme déchu et non l'homme en soi. L'humanisme des modernes est pratiquement un utilitarisme pointé sur l'homme fragmentaire; c'est la volonté de se rendre aussi utile que possible à une humanité aussi inutile que possible” (34), ajoute-t-il avec humour.

 

Présence de Frithjof Schuon à l'aube du 3ème millénaire:

 

Michel Valsan signale qu'“il existe nécessairement un principe d'intelligibilité de l'ensemble, correspondant à la sagesse qui dispose cette multiplicité et cette diversité. Mais ce principe ne peut être que métaphysique” (35). Nous croyons que l'honneur revient à Schuon d'avoir livré, à tous ceux qui s'en montrent dignes, les clefs  —le principe d'intelligibilité—  inestimables des grandes sagesses incréées. Ce faisant, la responsabilité lui est dévolue d'un double écueil: celui d'une interprétation erronée par manque de qualification, et où même la sincérité peut s'avérer un piège, et celui de l'utilisation équivoque et délibérément altérée.

 

Or l'une des vertus proprement traditionnelle est de servir “La Tradition” et non de s'en servir  (36).  Dans cette configuration humaine se déclôt soit l'être transfiguré par l'appel intérieur à la verticalité, ou broyé par l'implosion d'une volonté qui le vampirise. Sur ce choix existentiel, comme sur bien d'autres, quels seraient les autres Métaphysiciens  en cette fin du XXième siècle qui apporteraient dans un langage aussi cristallin les réponses aux questions légitimes que l'humain, parfois pétri d'angoisse, se pose légitimement? C'est dans l'équilibre fragile  où se dévoile les arcanes de la quête que se meut également le mystère de la rencontre de Dieu avec sa créature.

 

Dès lors pourra-t-on approcher, comprendre, notre insistance sur le service et la Grâce dont Schuon est investi pour ce prochain millénaire, alors que partout se généralisent des conflits qui trouvent leur sens originel et par là-même final au sein d'une incompréhension capitale de la relation de l'Un et du multiple? Cette portée ontologique  a entre autre été relevée par Jean Biès (37) à la fin des entretiens que Frithjof Schuon lui avait accordé voici quelques années alors qu'il résidait encore en Suisse. A juste titre, Jean Biès compare la fonction de Schuon avec le Prophète Elie. L'Universalité vraie,  —qui est l'exact contraire de l'universalisme dégénéré abstrait ou cosmopolitisme totalitaire— que Schuon incarne, constitue justement, en cette fin de siècle où se généralise le triomphe de la parodie (38), comme une sorte de miracle. Songe-t-on un instant que l'une des perspectives essentielles d'un livre tel que De l'unité transcendante des religions  est d'offrir le socle inébranlable,  —par delà tous les confusionismes aberrants du New Age—,  et la colonne vertébrale céleste sur laquelle s'édifient et puisent toutes les religions, et à travers cette Unité  qui discerne, d'assécher jusqu'à une certaine limite le stérile jeu des conflits théologiques?

 

indians27a.jpgSelon la doctrine bien connue de Saint Augustin qui est comme l'image inversée du discours d'Alain de Benoist: «En soi, la réalité qu'on appelle aujourd'hui religion chrétienne, existait même chez les anciens, et n'a pas manqué depuis le commencement du genre humain jusqu'à ce que le Christ vînt en la chair, à partir de quoi la religion vraie, qui existait déjà, commença de s'appeler chrétienne» (39). De l'Islam au Christianisme, du Paganisme à l'Hindouisme ou au Bouddhisme, le vêtement de l'exotérique se dissout toujours devant la venue de l'Ineffable. Car comme le formule merveilleusement Schuon, “les antagonismes de ces formes ne portent pas plus atteinte à la Vérité une et universelle que les antagonismes entre les couleurs opposées ne portent atteinte à la transmission de la lumière une et incolore” (40).

 

N'entrons-nous alors pas dans le temps où il nous faudrait concevoir le paganisme non comme un unilatéralisme formel, toujours en opposition, ce qui est le propre d'une expectative qui résèque toute dimension métaphysique et spirituelle  —mais plus simplement et plus véridiquement comme un simple moment de l'être, une goutte dans l'océan du divin?

 

C'est dans ce sillon qu'à l'été de l'année 1980, Georges Gondinet (41), qui actuellement dirige les Editions Pardès, adressait une lettre ouverte à Alain de Benoist, dont les termes nous semble toujours d'actualité: «“Là où existe une volonté, existe un chemin”, déclarait Guillaume d'Orange. Malheureusement, si vous possédez une incontestable volonté, vous vous arrêtez en chemin. A l'imitation de Renan, vous proposez une “réforme intellectuelle et morale”, mais vous la proposez à une société qui appelle sourdement une révolution totale».

 

Puissions-nous miser sur cette révolution du cœur  flamboyant, qui se consume dans la fidélité inébranlable aux Principes de La Tradition.

 

Frédéric d'HÖLKELUNN.

 

NOTES:

(1) Qui écrit ceci: «S'avisera-t-on un jour que le plus grand philosophe (français) du XXème siècle n'était pas parmi ceux que l'on cite partout, mais très probablement celui qui, dans l'indifférence générale et la conjuration d'un silence bien organisé, édifia patiemment, hors de tout compromis, l'une des œuvres décisives de ce temps, la seule qui, à la suite de René Guénon, mais dans une autre tonalité, rend compte en notre langue de la Philosophia Perrenis». Précisons encore une fois  —en regard de la déclaration de Jean Biès—  que Frithjof Schuon est naturalisé Suisse et né en Suisse!

 

(2) Pour de plus amples détails biographiques, voir l'étude d'Olivier Dard, parue dansl es colonnes de Vouloir et intitulée: «Frithjof Schuon le Jnâni: transparence et primordialité chez un Métaphysicien et Maître spirituel du XXième siècle», in: Vouloir, n°1 (AS: n°114-118), avril-juin 1994.

 

(3) Au sens où le terme est usité, par exemple, dans le titre de la célèbre Somme Théologique  de Saint Thomas d'Aquin.

 

(4) Voir, F. Schuon, Perspectives spirituelles et faits humains, page 92.

 

(5) Idem, op. cit., page 91.

 

(6) L'un de ses proches collaborateurs nous a d'ailleurs confirmé le fait lors d'un entretien téléphonique!

 

(7) Editions Traditionnelles, Paris, 1980. Cet ouvrage vient d'être réédité aux Editions Nataraj, F-06.950 Falicon, France. Signalons également la réédition de deux ouvrages capitaux de Schuon:

a) L'Esotérisme comme Principe et comme Voie, collection l'Etre et l'Esprit, Edition Dervy, Paris, 1997.

b) L'Oeil du Coeur, Edition l'Age d'Homme, Lausanne.

 

(8) Telle qu'elles sont exposées chez Aristote et que Schuon a corrigé dans le chapitre II/1, «Catégories Universelles», in: Avoir un Centre, pages 73-95, Edition Maisonneuve & Larose, Paris, 1988.

 

(9) Que semble apprécier Alain de Benoist, qui lui avait naguère consacré une chronique dans le Figaro-magazine  en date du samedi 28 février 1981. Cet intérêt porté à l'œuvre de Jung, qui a reçu une réfutation définitive par Titus Burckhardt, ne rejaillit-elle pas sur sa propre conception du paganisme?

 

(10) In: Images de l'Esprit: Shinto, Bouddhisme, Yoga, note 54/ page 111, Edition Le Courrier du Livre, Paris,1982. L'ami d'enfance de Schuon, Titus Burckhardt, a démontré toute l'absurdité du concept d'“inconscient collectif” et la confusion qu'entraine la “psychologie” évolutionniste de Jung dans Science moderne et Sagesse Traditionnelle, c hapitre IV, pages 87-127, Edition Archè-Milano, 1986. Pareillement, nous y découvrons une splendide mise au point de l'incompatibilité totale entre Métaphysique et “théorie” (sic) darwinienne de l'évolution: voir chapitre III, pages 61-87, du même ouvrage.

 

(11) Avec une prétention monstrueuse  —et c'est un euphémisme!—  M. Charles Champetier, rédacteur en chef d'Eléments  nous a donné à mon compatriote Olivier Dard (spécialiste de l'œuvre de Schuon), dans une correspondance privée, que nous réfutons plus loin, les preuves de son étroitesse de vue conditionnée par un réductionnisme désuet en provenance directe des singeries de l'Union Rationaliste!

 

(12) Qui, rappelle Schuon, “désigne la science des principes ontologiques fondamentaux et universels; science immuable comme ces principes mêmes, et primordiale du fait même de son universalité et de son infaillibilité (...)”, in, Sur les traces de la Religion pérenne, page 910, Edition Le Courrier du Livre, Paris, 1982. Parmi ses représentants, outre René Guénon, citons, Titus Burckhardt, Ananda K. Coomaraswamy, Jean Borella, Seyyed Hossein Nasr, Jean Phaure, Julius Evola, etc.

 

(13) Dont Frithjof Schuon a amplement démontré l'inconsistance dans les premiers chapitres de Logique et Transcendance, Edition Traditionnelles, Paris, 1982, pages 7-67, justement intitulés “La contradiction du relativisme”, “Abus des notions du concret et de l'abstrait”, “Rationalisme réel et apparent”, etc. Après une aussi irréfutable démonstration, nous ne pouvons que sourire des “post-kantiens” qui s'amusent encore avec les joujoux du “positivisme” (sic), “logique” ou pas!

 

(14)  A ce sujet, voir l'excellent petit livre de Philippe BOUET, Le Divin commerce: de la croyance à l'intelligence, Editions Harriet-Jean Curutchet, Hélette, 1995. Certains pseudo-paiens devraient en méditer toute la substantifique moëlle!

 

(15) Voir le chapitre VIII, pages 115-133, d'Introduction générale à l'étude des Doctrines Hindoues, Edition Véga, Paris, 1983. Ainsi que: La Métaphysique orientale, seule conférence que Guénon donna à la Sorbonne, Edition Traditionnelles, Paris, 1985.

 

(16) Selon les termes de Georges Vallin dans La Perspective Métaphysique, note 9, page 237, Edition Dervy-Livres, Paris, 1977. Nous ne voyons pas ce que l'extrême imbroglio heideggerien apporte de plus au non-dualisme Védantique? D'ailleurs cette manie de l'a priori qu'ont les modernes  envers La Tradition ne renvoie-t-elle pas à un vieux fond d'ethnocentrisme et d'incapacité à penser l'altérité? Si l'on nous rétorque la même réflexion, nous rappellerons, avec Guénon, que l'on ne peut prendre “la partie pour le tout” ou que le “plus ne peut s'extraire du moins”. La remarque suivante de Schuon nous paraît s'appliquer au mode de fonctionnement et au type de représentation que suscite la verbosité  —pour ne pas dire le galimatias—  de certains textes d'Heidegger auquel des philologues allemands éprouvés nous ont plus d'une fois confirmé ne rien (sic) comprendre! Cette tendance ethnocentrique à plaquer la mentalité moderne sur tout et n'importe quoi: «On fait la “psychanalyse” d'un scolastique par exemple, ou même d'un Prophète, afin de “situer” leur doctrine  —inutile de souligner le monstrueux orgueil qu'implique une semblable attitude—  et on décèle avec une logique toute machinale et parfaitement irréelle les “influences” que cette doctrine aurait subie; on n'hésite pas à attribuer, ce faisant, à des Saints toutes sortes de procédés artificiels, voire frauduleux, mais on oublie évidemment, avec une satanique inconséquence, d'appliquer ce principe à soi-même et d'expliquer sa propre position  —prétendument “objective”— par des considérations psychanalytiques; bref, on traite les Sages comme des malades et on se prend pour un dieu. Dans le même ordre d'idées, on affirme sans vergogne qu'il n'y a pas d'idées premières: qu'elles ne sont dues qu'à des préjugés d'ordre grammatical  —donc à la stupidité des Sages qui en ont été dupes— et qu'elles n'ont eu pour effet que de stériliser “la pensée” durant des millénaires, et ainsi de suite; il s'agit d'énoncer un maximum d'absurdités avec un maximum de subtilité. Comme sentiment de plénitude, il n'y a rien de tel que la conviction d'avoir inventé la poudre ou posé sur la pointe l'oeuf de Christophe Colomb», note 1, chapitre «Chute et déchéance», page 40, in: Regards sur les Mondes Anciens, op. cit. Lorsque Heidegger disserte sur Platon par exemple, on sent bien qu'il ne le considère pas comme ce que l'Académie et son Guide incarnait véritablement en son temps. Voir le témoignage de Diogène Laërce, à ce sujet instructif.

 

(17) Ce n'est pas en vain que nous établissons ce rapport entre Jacques Lacan et Martin Heidegger, et indépendamment du fait que tous deux se sont sentis le besoin de se confectionner un langage imaginaire où ils puissent à la fois se réfugier et jouer par ce moyen ce rôle d'“intellectuels” dominateurs et condescendants envers autrui qui est le propre de l'hyperrationalité du monde moderne. La psychanalyste Elisabeth Roudinesco dans sa biographie de Jacques Lacan, Edition Fayard, Paris, 1993, écrit, page 297, à propos de Jean Beaufret qui était en cure chez le Dr. Lacan: «Quand J. Beaufret se rendit rue de Ulm, il se trouvait dans un grand désarroi. Son amant, en cure chez Lacan, venait de le quitter. (...)» Un peu plus loin: «(...) Lacan portait une attention particulière à Beaufret à cause de la relation privilégiée que celui-ci entretenait avec Heidegger»; elle ajoute, page 298 que, «Lacan accepta, de fait, d'être initié à une lecture de Heidegger qui était celle de Beaufret». Beaufret fut longtemps le chef de file des heideggeriens en France. Question à Alain de Benoist au sujet de l'homosexualité du sieur Beaufret et de ses relations avec un charlatan initiateur d'une secte néo-freudienne: estime-t-il qu'un vice contre-nature additionné de délires logomachiques constituent des aptitudes réelles pour être un grand (sic) “philosophe”? Peut-il nous expliquer pourquoi le “grand” Heidegger ne s'est jamais formalisé de l'inconduite extrêmement choquante de son principal interprête français? D'autre part et de façon non moins déterminante, relevons que l'ontologie heideggerienne ne permet pas d'entrer dans une célébration du sacré, dans une transcendance qui, reliant l'homme à l'Absolu (Dieu), le constitue en même temps gardien de la Règle et réceptacle de la Grâce déifiante ou de l'influence spirituelle de celle-ci. C'est en ce sens qu'il convient d'approcher la réponse du Pasteur Jean Borel, dans Quelle religion pour l'Europe? Un débat sur l'identité religieuse des peuples européens, auquel Alain De Benoist participa, textes et propos rassemblés par Démètre Théraios, Edition Georg, Genève, 1990, en page 289, lorsqu'il dit: “L'objet par excellence de sa quête” (à Alain De Benoist) étant la compréhension du sacré, il ne peut pas ne pas être convaincu, par le sacré lui-même, de se laisser “sacraliser”, pour pouvoir rejoindre le sacré là où il l'attend, son mode d'être déterminant, encore une fois, le mode de son comprendre”.

 

(18) Note 1/, page 53, Edition Maisonneuve & Larose, Paris, 1992.

 

(19) On rappellera la célèbre parole de Maître Eckhart concernant la “prééminence” de l'Intellect sur la ratio: «Aliquid est in anima quod est increatum et increabile; si tota anima esset talis, esset increata et increabilis, et hoc est Intellectus». Saint Thomas d'Aquin dit la même chose dans la Somme Théologique en I, q, 84, a, 5. Le Prophète Muhammad (sur lui la Paix et la Bénédiction de Dieu) exprime: «La prernière chose créée par Dieu a été l'Intellect». Dans la théologie Orthodoxe, notamment chez Maxime le confesseur, l'Intellect s'appelle le "Noûs".  Enfin, le passage suivant de la Bhagavad-Gîta, ref., 14, 3., énonce la même réalité: «La Vaste-immensité (le Principe dont est issu l'Intellect) est la matrice dans laquelle je dépose ma semence. D'elle naît le premier élément, l'Intellect manifesté (...)». Ceci pour souligner que la phrase ci-dessus de Maître Eckhart n'est ni “fausse”, ni en rien “suspecte” comme le prétend tout à fait gratuitement et de façon erronée François Chenique, page 92 et suiv., de son livre Sagesse chrétienne et mystique orientale, Edition Dervy, Paris, 1996. L'un de nos amis, M. Wolfgang Wackernagel, spécialiste de Maître Eckhart auquel il a consacré une thèse publiée chez l'éditeur Vrin, nous a confirmé par écrit la rigoureuse validité de cette importante citation et sa conformité selon les dernières traductions disponibles, entre autre celle qui fait autorité du Pr. Alain Libéra. Vu l'importance de cette citation, et malgré notre admiration pour Francois Chenique, nous ne pouvons accepter qu'il l'expédie laconiquement, pour des motifs personnels qui n'ont pas lieu d'être, et finalement, d'apologétique catholique.

 

(20) Voir Chevaucher le tigre, pages 122-123, Edition Guy Trédaniel, Paris, 1982.

 

(21) Nous connaissons des personnes d'une toute autre envergure —dans tous les sens du terme— que le jeune Champetier ou que le verbeux Heidegger, qui ont procédé de même lors de leur rencontre avec Schuon!

 

(22) C'est nous qui soulignons! Voir pages 41-42, in: Henry Corbin, la topographie spirituelle de l'Islam iranien, Edition de la Différence, Paris, 1990. Rappelons qu'Henry Corbin fut le premier traducteur d'Heidegger...

 

(23) Voir, Seyyed Hossein Nasr, L'Islam traditionnel face au monde moderne, pages 197-204, Ed., L'Age d'Homme, Lausanne, 1993; et Le livre des pénétrations métaphysiques, coll., Biblioth. Iranienne, n°10, Ed., Adrien Maisonneuve, Paris, 1964.

 

(24) Sourate Qaf, L-16.

 

(25) Voir La crise du symbolisme religieux, pages 264-265, Edition l'Age d'Homme, Lausanne, 1990.

 

(26) Voir «Penser le Paganisme, entretien avec Alain de Benoist», pages 10-23, in, Antaios, Hindutva II, n°11, solstice d'hiver 1996.

 

(27) Rappelons que dans le Soufisme (at-Taçawwuf) le mot arabe “bâtin” se traduit par “ésotérique” ou “intériorité”. Voir, Titus Burckhardt, Introduction aux doctrines ésotériques de l'Islam, Ed., Dervy-Livres, Paris, 1985.

 

(28) op. cit., page 120, Ed. du G.R.E.C.E., Paris, décembre 1997.

 

(29) Lettre à M. Olivier Dard du 15 septembre 1997. D'autant plus inadmissible que ce n'est pas la première fois, et que manifestement l'analyse développée dérange le confort intellectuel de M. Champetier. Et à la fin de cette année le GRECE organisait un colloque consacré à la censure!... Rapport de causalité?...

 

(30) Kant, Kritik der reinen Vernunft, page 256, Ed. Hartenstein.

 

(31) Dans le sens Métaphysique de l'expression, ou de la finalité réelle, et de la même façon que l'entend Michel Vâlsan dans L'Islam et la fonction de René Guénon, Ed. de l'Œuvre, Paris, 1984.

 

(32) Voir J.-F. Malherbe, Le langage théologique à l'âge de la science; lecture de Jean Ladrière, page 41, Ed. du Cerf, Paris, 1985. Ce réductionnisme langagier qui s'oppose à Wittgenstein, est défini par M. Schlick dans, Die Wende der Philosophie, Erkenntnis, 1, 1930. J.-F. Malherbe qui avait déjà publié une splendide étude sur Maître Eckhart, nous livre ici un travail de premier plan sur les rapports qu'entretient l'épistémologie scientifique avec la théologie et la Métaphysique.

 

(33) In: «Face à la mondialisation», communication au XXXième Colloque national du GRECE, «Les grandes peurs de l'an 2000», page 13, op. cit. L'expression revient dans l'entretien accordé à la revue Antaios, «Penser le paganisme», op. cit., page 11, pour qualifier le fondement de la modernité. Elle n'est guère heureuse, et nous lui substituerons celle d'“hyper-subjectivisme” ou d'“égo-lâterie”, en pensant bien sûr à Stendhal, qui est bien plus clair.

 

(34) F. Schuon, Avoir un centre, page 12.

 

(35) Voir Michel Vâlsan, L'Islam et la fonction de René Guénon, page 13, op. cit.

 

(36) Le nom islamique de René Guénon était Shaykh Abdel-Wâhid Yahya, qui signifie “Serviteur de l'Unique”...

 

(37) Voir Jean Biès, Voies de Sages, douze maîtres spirituels témoignent de leur vérité, Ed. Philippe Lebaud, Paris, 1996.

 

(38) Qui, par la doublure opérée sur toutes les facettes du réel —la pseudo “réalité virtuelle” en est un exemple extrême— produit au sein de la psyché une division, une dualité, que l'on est en droit d'appeler, respectant en cela l'étymologie, de satanisme (Satan = “celui qui sépare”).

 

(39) Saint Augustin, Retractationes, I, XII, 3; CSEL, t. XXXVI, pp. 58,12.

 

(40) F. Schuon, De l'Unité transcendante des religions, page 14.

 

(41) Voir la revue Totalité,  n°11, «La “Nouvelle droite” à la lumière de la Tradition», page 54.

 

 

 

jeudi, 24 décembre 2009

Symboles: du monde païen au monde chrétien

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Archives de SYNERGIES EUROPPEENNES - 1999

 

SYMBOLES, DU MONDE PAïEN AU MONDE CHRETiEN

 

Marie BRASSAMIN

 

Depuis la nuit des temps, l'homme use de symboles: les dessins rupestres sont symboles religieux et non, comme on l'a cru longtemps, des fresques narratives. La symbolique évolue en fonction du degré de la civilisation: on peut distinguer quatre étapes qui se chevauchent et/ou coexistent.

 

1) Le symbole matérialise un concept philosophique ou religieux inaccessible autrement au commun des mortels. En général, le symbole est inclus dans une narration, mythe, conte, légende, épopée...

 

2) Le symbole représente une chose concrète ou abstraite et se substitue à elle par souci de poésie (neige et vieillesse), par pudeur ou tabou (avoir la puce à l'oreille), par similitude de forme (ventre et grotte), par recouvrement de caractère (rat et avarice)...

 

3) Le symbole masque une vérité que l'on ne veut pas ou que l'on ne peut pas exprimer en clair: ésotérisme (alchimie), sociétés secrètes ou sectes (franc-maçonnerie), politique, psychanalyse...

 

4) Le symbole permet les jeux de mot, sur les armes (Hugues Capet, abbé de Senlis, élu roi, pris pour écu un semis de lys  —cent lis—  sur champ d'azur  —le fleuve—); les rébus, le pictionary (contraction de picture et dictionary).

 

La deuxième série permet d'obtenir quelques renseignements sur les mœurs, la troisième est inexploitable sauf par les personnes concernées directement, la quatrième catégorie, un temps utilisée pour favoriser l'éveil des enfants à leur langue matemelle, a été abandonnée par suite de trop nombreuses confusions de sens et d'orthographe.

 

Universalité des symboles philosophiques

 

Les symboles philosophiques et religieux sont remarquables par leur universalité. Du Mexique au Danemark, du Japon à la France, de Chine en Australie, le même animal, la même plante expriment la même idée. Aucune explication rationnelle ne peut être avancée sinon l'observation: mais est-ce vraiment une explication? En effet, à partir d'une même observation, il est possible d'entreprendre différentes études qui déboucheront sur des enseignements différents; or, les anciennes civilisations ont une sorte d'uniformité de vue! Ces symboles, dont certains remontent au néolithique, ont été repris ou absorbés par la religion chrétienne, mais, l'Europe seule est réellement concernée car, la christianisation de l'Amérique s'est faite par le vide (massacres importants, isolation des autochtones, non-souci de conversion); celle de l'Afrique n'a concerné que les zones non-musulmanes, les massacres furent politiques, et, du point de vue religieux, les idoles ont cédé le pas aux rituels (“Gospel” par exemple); en Asie, comme dans le monde islamisé du temps passé, il y a eu coexistence (pas forcément pacifique) des anciennes religions et de la nouvelle.

 

Sanctuaires mariaux et déesses-mères païennes

 

D'une facon générale, on remarque que les sanctuaires mariaux les plus importants se situent sur les zones d'influence d'une déesse païenne: Lourdes et la Vénus de Cauterets, et, plus troublant, les régions ayant opté pour le protestantisme sont les aires de tribus guerrières où les femmes ne jouaient aucun rôle dans l'organisation sociale (épouses et mères seulement), alors que les pays actuellement catholiques et fortement attachés à la Vierge furent des nations dévouées à une déesse-mère toute puissante (Maeva en Irlande).

 

Le nomadisme et le fractionnement en petites unités sociales ont aussi joué un rôle dans l'essaimage des symboles et leur amalgame au christianisme. Jusqu'en l'an 500, les mouvements migratoires répondent à des impératifs alimentaires plus que conquérants, même si l'on se bat souvent. Si, durant une période de 30 à 50 ans aucune épidémie ou catastrophe naturelle ne décimait la tribu, il y avait surpopulation, d'où nécessité d'éliminer le surnombre d'individus par un départ concerté. Pour accroître les chances de survie des exilés, plusieurs tribus regroupaient leurs migrants, et se mettait en marche une horde qui, en cours de route, s'augmentait souvent. Chaque groupe avait son langage, ses dieux, ses coutumes, mais, chemin faisant, progressivement et inconsciemment, tout cela se mêlait. Ils allaient ainsi, parfois en un voyage de plusieurs décennies, jusqu'à ce qu'ils trouvent une terre vierge pouvant les nourrir: partis des Monts de Thuringe vers la Pologne puis la Biélorussie, descendant vers l'Ukraine pour revenir sur leurs pas par la Slovaquie, la Hongrie, atteindre la vallée du Rhône, la descendre, suivre la côte méditerranéenne jusqu'à l'Andalousie, tel fut le périple des Wisigoths d'Espagne! (Une partie de la troupe s'installa sur une bande de terre de l'Italie du Nord à la Croatie actuelles, en gros). Au terme du voyage, ceux qui étaient partis étaient morts en route, ceux qui arrivaient ne savaient pas leur origine, la culture initiale s'était diluée au contact d'autres cultures (haltes, compagnons de voyage, unions...); le temps est facteur d'oubli.

 

Le CYGNE:

Sous la forme de cet oiseau, Zeus féconda Léda. Dans la Grèce antique, le cygne n'est pas un animal local, mais, le pays est situé sur un axe de migration: les gens ont pu voir un animal, fatigué ou blessé, lors d'une pause. La rareté, la beauté ont fait naître l'idée de l'associer à Zeus. Sur l'axe de migration, en Europe centrale, les devins étudiaient le vol des cygnes pour en tirer un présage pour l'année nouvelle (qui commençait au printemps). Pour les peuples familiers des cygnes, plus que la grâce et la blancheur, le fait marquant était sa disparition durant les mois de froidure. Il devint donc symbole de pureté et de jeunesse: de nombreuses légendes mettent en scène des hommes-cygnes (Lohengrin en Allemagne; Andersen d'après des traditions orales, au Danemark;...). Il est à noter que le cygne est associé à une femme (épouse, sœur) mais que la femme elle-même n'est que rarement cygne.

 

Ces légendes orales ont atteint des régions où le cygne est très rare, voire inexistant, il a donc été remplacé logiquement par l'oie et le canard. L'oie était associée au dieu Mars dans la Rome antique (les oies du Capitole). Sequana est représentée debout, un canard dans ses bras ou à ses pieds: le long de la vallée de la Seine, il existe plusieurs représentations de la Vierge au canard, (av. le XIIième siècle). Très tôt, les tribunaux ecclésiastiques, (l'Inquisition), se sont élevés contre cette imagerie: le canard a toujours joui de mœurs sexuelles douteuses, contre sa volonté sûrement!!! Extrait d'un texte religieux du XIIième, en français moderne: «L'oie est un animal blanc extérieurement, mais sa chair est noire; Notre Seigneur l'a mise parmi les hommes afin qu'ils ne se laissent pas duper par ces faux croyants dont l'apparence de pureté cache l'âme la plus noire; la Très Glorieuse Mère de notre Sauveur ne saurait être représentée au côté de cet animal ou de tout autre lui ressemblant». Le rapport cygne-pureté ou cygne-protection divine est aussi linguistique. Au VIième siècle, on constate dans des traductions latines, un glissement entre Algis = cygne et Hal ghis  = protection du sanctuaire (actuelle Allemagne). Plus tard, le gothique oublié, pour garder cette association, on liera étymologiquement swen = blanc et sunn = soleil (mot féminin) (XIième).

 

Le SANGLIER:

Lui aussi est un animal courant et va englober dans sa symbolique la laie, le cochon et la truie. Dans la Grèce, la mythologie représente le sanglier comme instrument des dieux: il est tueur ou tué selon que le héros a été condamné par les dieux ou testé (Héraclès, Adonis, Attis...). Le sanglier était attribut de Déméter et d'Atalante. Dans les cultures germano-nordiques, il est attribut de Freya, et Frey, son frère, a pour monture un sanglier aux poils d'or. C'est peut-être Freya qui est devenue en terres erses et celtiques la déesse Arwina, figurée avec un sanglier, et qui, en France, a donné son nom aux Ardennes et à l'Aude, ainsi que divers prénoms: Aude, Audrey, Aldouin, Ardwin... En outre, en Irlande et en France, le sanglier représente symboliquement la classe des druides et, plus tard, les prêtres: il figure à ce titre sur un des chapiteaux de la basilique de Saulieu —21—. Parce que lié à la fécondité, de nombreuses légendes mettent en scène des héros élevés par des suidés; parce que lié à la force mâle, sa chasse fut longtemps initiatique.

 

L'Eglise a tenté d'intervenir, mais sans succès cette fois, pour quatre raisons essentielles:

1) trop répandus, sangliers et porcs sont une ressource alimentaire importante; la peau, les défenses, les ongles, les os... tout ce qui n'est pas mangeable sert à l'artisanat utilitaire;

2) il est associé à trop de saints populaires: Antoine, Emile, Colomban...;

3) mettre l'interdit sur les porcs serait avoir la même attitude que les juifs,

4) en Allemagne, il y eut confusion étymologique entre Eber = sanglier et Ibri, ancêtre mythique des Hébreux et donc du Christ, parfois représenté sous forme de sanglier (à Erfurt notamment).

 

Le CERF:

Le dernier élément du bestiaire symbolique que je présente est le CERF (élan, renne, chevreuil, daim...). «Au pied de l'Arbre du Monde, quatre élans broutaient...», ainsi commence la légende germano-nordique. La Bible, Cantique des Cantiques, développe l'association femme-gazelle, laquelle correspond très exactement à l'association femme-biche. Héraclès chasse la Biche aux Pieds d'Airain tandis qu'Artémis se promène dans un char tiré par quatre biches. De nombreuses légendes mettent en scène des femmes-biches: Ossian en Irlande, naissance de la Hongrie... Gengis Khan serait né d'une biche et d'un loup! La biche, sous son apparente douceur, reste un animal inquiétant, toujours doté de pouvoirs magiques: fée ou sorcière se transformant ou innocente victime d'un maléfice.

 

Les mâles, par contre, sont symboles de force et de courage, image issue de tribus où la chasse est vitale. Leur ramure est associée aux rayons du soleil: le dieu celte Esus porte une ramure de cerf. C'est ce rapport qu'il faut voir dans le char (symbole solaire également) du Père Noël, tiré par des rennes (solstice d'hiver). Quant aux cornes des cocus, elles sont historiques et honorifiques! Lorsque les rois, puis empereurs, de Byzance prenaient pour favorite, concubine ou maîtresse une femme mariée, des cornes d'or étaient apposées sur la façade de la maison de l'époux, en signe de haute distinction. L'Eglise a tenté de gommer ces cerfs gênants parce que trop païens, sans plus de succès qu'avec les sangliers, parce que:

1) le cerf était un gibier noble, uniquement chassé par les nobles et le dévaloriser était s'attaquer à la force politique et militaire;

2) de ce fait, ils étaient, aux yeux du peuple, nobles et sacrés (peine de mort pour le manant qui abattait un cerf);

3) trop de saints populaires l'avaient pour attribut: Hubert, Meinhold, Oswald, Procope...

 

Cependant, le travail de sape des ecclésiastiques a donné un résultat inattendu, l'expression “couard comme un cerf”, en dépit du bon sens.

 

De la symbolique des plantes

 

Pour la symbolique des plantes, la signification est plus ciblée, car, jusqu'au XVIIIième siècle, la classification n'existait pas, et, deux plantes voisines peuvent être dissemblables alors que deux plantes sans parenté peuvent se ressembler. La situation géographique, climat et géologie, influe plus sur les plantes que sur les animaux. Enfin, une plante est statique, et frappe moins l'imagination qu'un animal. Donc, les plantes symboles sont médicinales ou comestibles, avec une restriction: nous devons garder à l'esprit que durant plusieurs millénaires la plante-mère a évoluée par sélection naturelle ou intervention humaine (l'épeautre a une action bénéfique sur le système nerveux que le blé n'a pas).

 

Le CHARDON:

Le CHARDON, plante médicinale (il en existe plusieurs variétés), et légume en période de disette (avant l'artichaut ou en son absence), a frappé l'imagination parce qu'il pousse dans des conditions extrêmes (terrain pauvre, résistance aux chaleurs et aux froidures)... Il a donc été symbole de la résistance à l'oppresseur (en Ecosse) et étalé sur les portes ou posé sur les cheminées pour chasser les mauvais esprits. Le chardon acaule s'ouvre ou se resserre en fonction du taux d'humidité de l'air: ne sachant à quoi attribuer ces mouvements de corolle, certains peuples l'utilisèrent comme oracle: on posait une question au chardon et on revenait le lendemain, si le chardon était ouvert la réponse était favorable. Il fut aussi symbole de la femme-mère protectrice du foyer en référence à la carde (qui servait à carder la laine). Les gnomes et autres esprits domestiques s'en servaient pour punir (mis dans les litières, paillasses, chaussures...) ou pour aider (carder, guérir...). Les ronces et le citronnier ne poussant pas partout, il fut Couronne d'Epines du Christ.

 

La TANAISIE:

La TANAISIE est un chrysanthème, qui, comme le chardon, se dessèche sans faner. De cette qualité d'immortelle et de sa couleur jaune, elle fut très tôt associée au soleil, d'autant qu'elle fleurit en été, puis, aux débuts de la christianisation, à la vie éternelle. L'odeur très forte qu'elle dégage dut être liée à des pratiques magiques avant que l'homme ne s'avise qu'elle éloigne bon nombre de “parasites” (avec plus ou moins d'efficacité): puces, poux, mouches, moustiques... La médecine progressant, de l'usage externe, on passa à l'usage interne, tisanes et décoctions vermifuges: l'Eglise suivit, et la tanaisie devint symbole de la foi missionnaire. Mais, en faire des bouquets que l'on pendait dans les étables ou les pièces d'habitation en fit, très tôt aussi, une fleur ornementale et le symbolisme y perdit sa force et sa valeur.

 

L'EGLANTINE:

L'EGLANTINE (et la rose), sont symboles de jeunesse inaltérable, de noblesse et de pureté; ces fleurs furent naturellement attributs de la Vierge; en Grèce, rattachées au mythe et au culte d'Adonis, elles expriment la métamorphose et la renaissance. Souvent représentées en quintefeuilles sur les écus, bas-reliefs, chapiteaux, linteaux, guirlandes..., ces fleurs font intervenir un autre type de symbole, plus profond peut-être, celui des chiffres: 5 = 3 + 2, c'est l'association du concept mâle (3) et du concept femelle (2).

 

Arbres-symboles

 

Très peu nombreux sont les arbres symboles paiens devenus symboles chrétiens: peut-être parce que dans l'esprit des hommes anciens il n'existait que deux types d'arbres, ceux que l'on pouvait utiliser (chauffage, construction, teinture, alimentation...) et ceux qui ne servaient à rien; les premiers étaient trop “matérialistes”, les seconds “inexistants” pour qu'ils aient valeur symbolique.

 

Le CHENE:

Cependant, le CHENE, par son aspect majestueux et la qualité de son bois s'est imposé. Il est toujours associé à un dieu majeur: Thor dans les civilisations nordiques, Donar en Allemagne, Perkunas en Lithuanie, Zeus en Grèce, Jupiter à Rome; arbre isolé représentant le dieu lui-même, bois sacrés ou forêts sanctuaires. Si, en Grèce le chêne était la demeure des dryades (nymphes), en Europe Centrale il se transformait en une sorte de sirène-vampire. Pour les chrétiens, il est symbole d'immortalité: le bois de la Croix fut longtemps en chêne! Le chêne sous lequel Saint Louis rendait la justice est sûrement plus symbolique qu'historique.

 

Le SAPIN:

Le SAPIN, a un parcourt plus tortueux et moins net. A l'origine, le pin noir est attribut d'un dieu ou déesse des batailles, sur une grande partie des pays nordiques et baltes: il était habituel de pendre les dépouilles (sauf le cadavre) des soldats vaincus aux branches de ces arbres; il est bien difficile de démêler le rite social du rite religieux d'un tel comportement, les deux étant probablement liés: image tangible de la victoire et offrande. Au moment de la christianisation de ces régions, cette pratique s'était effacée, mais, devaient subsister, de façon occulte, des “dons” à un arbre représentant une divinité, sortes d'ex voto. Par quelles arcanes de la mémoire collective cette coutume a-t-elle transitée? Car, ce n'est qu'au XIXième siècle que le Sapin de Noël (un épicéa, le plus souvent), a resurgi, les branches couvertes d'offrandes, mais associé au christianisme sans être élément religieux. Il faut noter que le “mai” a une autre origine, reprise par les “Rameaux”.

 

Les choses-symboles

 

Les choses symboles sont innombrables et surtout reflet de civilisation. Il nous est difficile, à nous, hommes modernes, d'imaginer ce que tel objet pouvait représenter pour les hommes anciens: un pot, c'est toujours un pot, un récipient pour cuire ou conserver. Il y a mille ans, un pot était signe d'aisance, objet utilitaire et précieux que l'on transmettait en héritage; c'était aussi la recherche de la meilleure argile, du décor; c'était encore l'angoisse de la cuisson dernière épreuve pouvant anéantir bien des heures de travail; c'était enfin l'image d'une famille réunie dans l'assurance d'un repas; c'était... peut-on savoir?

 

Le CŒUR:

Dans l'imagerie religieuse, sans cesse revient le CŒUR. Il était courant de prêter à ce muscle les qualités du cerveau, à ce point que, de nos jours, restent toute une série d'expressions qui en atteste: agir selon son cœur, va où le cœur te porte... Les premières formes d'écriture en Europe sont des idéogrammes dont certains subsisteront jusqu'au XIIIième siècle avec valeur de lettre (runes), d'autres disparaîtront: le cœur est de ceux-là. Il était symbole de la femme puisqu'il représente en réalité les organes génitaux externes stylisés, symbole étendu à tout ce qui est d'essence féminine, il est associé à la terre et au soleil, au cycle de reproduction et de culture. L'iconographie chrétienne en a largement usé et abusé comme représentation de l'Amour, siège des pensées et sentiments nobles... au point que le cœur dans tous ces états (sauf celui de viande!) s'étale depuis des siècles dans une certaine littérature qui fut tour à tour courtoise, galante, romanesque avant d'être rose, grivoise ou X!

 

L'ANCRE:

L'ANCRE n'est pas présente dans les anciennes cultures, et pour cause, c'est un objet récent. Sans que rien le laisse prévoir, l'ancre est apparue associée à la Vierge sur quelques représentations moyenâgeuses, sporadiquement et spontanément, puis est retombée dans l'oubli. Cette bizarrerie n'en est que plus suspecte, d'autant que les dites Vierges, en pied sur l'ancre, surgissent dans les terres, loin de la mer et des voies d'eau navigables: il faut y voir la transposition d'une déesse (Freya?) debout sur le marteau de Thor. Beaucoup plus tard, les mariniers reprirent cette image, en toute logique. Quant aux croix ancrées, il s'agit d'un système de fermeture de porte et non d'une ancre; les croix ancrées sont apparues tout d'abord sur les écus, dans les armes et signifiaient “je garde au nom du Christ”.

 

Le MARTEAU:

Puisque le MARTEAU est cité, autant signaler que lui n'a jamais quitté la symbolique païenne; Thor, juge impitoyable des guerriers, a transmis, tel quel, son instrument aux hommes contemporains: le marteau siège au tribunal! Avant d'être utilisé, également avec le sens de sentence rendue, par les commissaires priseurs, il servit, toujours avec ce sens, a entériner les mariages. Jusqu'à la Première Guerre mondiale, on pouvait trouver dans les campagnes françaises des “forgeux”: forgerons véritables qui, en plus de leur métier somme toute banal, chassaient les esprits; le malade (souvent névrosé ou psychotique) était étendu nu sur une table dans la forge; le “forgeux” abattait sur lui sa masse la plus effrayante et arrêtait son geste au ras de la poitrine ou du ventre. Ou on était débarrassé de toute psychose ou on devenait complètement fou de terreur!

 

Les premières sociétés humaines dressèrent des axes de vie ou axes du monde, symbole du lien des dieux avec les hommes. Sous différents aspects, ce symbole est universel et perdure: menhir, lingam, pyramide, totem, arbres ou pieux sculptés... La Croix et les cierges (avec la flamme en plus) sont chargés de ce sens.

 

L'évolution n'est donc que la prise de conscience des phénomènes et leur enrobage dans diverses enveloppes fournies par la société. Notre esprit est le même que celui de Lucy!

 

Marie BRASSAMIN.

 

 

mardi, 08 décembre 2009

Gildensozialismus

urzelparade_agnetheln.jpg Gildensozialismus

Ex: http://rittermabuse.wordpress.com/

Aus:

Harry Graf Kessler
Aufsätze und Reden 1899-1933

Gildensozialismus

(1920)

Bolschewismus und »Spartakismus« nehmen vor der Öffentlichkeit soviel Raum ein, daß die Entwicklung einer anderen, tief bedeutsamen Richtung innerhalb des Sozialismus ziemlich unbemerkt erfolgt ist. Diese neue Richtung macht sich seit kurzem in mannigfaltigen Formulierungen fast gleichzeitig in Deutschland, Österreich und England bemerkbar. Ihre Geschichte weist zurück auf den französischen Syndikalismus der ersten Jahre des Zwanzigsten Jahrhunderts, der – von Georges Sorel und seinem Intellektuellenkreis formuliert – die bis dahin bei der radikalen französischen Arbeiterschaft herrschende staatssozialistische Doktrin revolutionierte. Jener staatssozialistischen Idee setzte nämlich Sorel ein Programm entgegen, das als Ziel die Selbstherrlichkeit des einzelnen Betriebes oder wenigstens Produktionszweiges und die unbeschränkte Herrschaft seiner Arbeiter über seine Produktionsmittel und Produkte forderte und als wirksamstes Mittel zu diesem Ziele nicht erst die Eroberung der Staatsgewalt, sondern die direkte Besitzergreifung aller Produktionsmittel durch die Arbeiter mithilfe des Generalstreiks proklamierte. Aus diesem Ideenvorrat holte oder schuf sich die erste russische Revolution (1905) den Rätegedanken. Gleichzeitig begann aber auch schon der Syndikalismus den von ihm heftig bekämpften Marxismus zu befruchten. Und diese Kreuzung war der Ausgangspunkt der jetzt hervortretenden neuen Anschauungen.

Für ihre Verbreitung in Deutschland und Österreich muß es hier genügen, auf Otto Bauers ›Weg zum Sozialismus‹ und auf sein neues, glänzendes, in der ›Vossischen Zeitung‹ bereits ausführlich gewürdigtes Buch ›Bolschewismus oder Sozialdemokratie‹ hinzuweisen, ferner auf Hilferdings ›Mehrheitsbericht‹ der deutschen Kohlensozialisierungskommission sowie auf mannigfache Vorschläge von Walther Rathenau, Georg Bernhard und anderen für eine planmäßige Selbstverwaltung der Produktion. Diese Vorstellungen und Vorschläge nähern sich, von einer andern Seite, der sozialistischen Grundanschauung der ›Sozialistischen Monatshefte‹ und dem daraus folgenden Postulat eines Aufbaus der Gemeinschaftsproduktion, wie es auf dem zweiten Rätekongreß in Berlin von Julius Kallski und Max Cohen vertreten wurde.

In England, wo der französische Syndikalismus durch die Agitation des fanatischen und hochbegabten Arbeiterführers Tom Mann einen stürmischen, aber kurzlebigen Erfolg errang, gab den Anstoß zum sogenannten »Gildensozialismus«, in dem dort sich die neuen Anschauungen verkörpert haben, das 1906 erschienene Buch von Arthur J. Penty: ›The Restoration of the Gild System‹. Die eigentliche Theorie entwickelten in den nächsten Jahren die Schriftsteller A. R. Orage und S. B. Hodson in ihrer Zeitschrift ›The New Age‹ in einer Aufsatzreihe, die sie dann als Buch: ›National Guilds‹ herausgaben. Zu Einfluß gelangte die ganze Bewegung aber erst im Kriege, als die Notwendigkeit sich ergab, neue organisatorische Lösungen vorzubereiten für den Abbau der Kriegswirtschaft und für den Aufbau einer neuen Friedenswirtschaft. Ostern 1915 war als Propagandazentrum die ›National Guilds League‹ in London gegründet worden, und das allgemeine Bedürfnis nach neuen Organisationsformen der Wirtschaft bahnte ihren Ideen schnell einen Weg in die Arbeiterbewegung. Vor allem waren es gewisse einflußreiche Arbeiterführer, die das neue Programm in die Arbeiterschaft einzelner großer Produktionszweige hineintrugen. So schloß sich zum Beispiel der Generalsekretär der Bergarbeiterföderation Großbritanniens, Frank H. Hodges, der ›National Guilds League‹ an und begründete die 1918 vom Bergarbeiterkongreß der Regierung präsentierte Vorlage für die Sozialisierung des englischen Kohlenbergbaus auf dem Gilden-Gedanken. Auch der Vertreter dieser Vorlage vor dem Regierungsausschuß, der rasch zu großem Ansehen gelangte Arbeiter Straker, gehört zur ›National Guilds League‹. Noch bedeutsamer war der Anschluß der Eisenbahner, die ebenfalls ihr Sozialisierungsprogramm auf dem Gilden-Gedanken aufbauten; denn dieses übernahmen alsbald auch die amerikanischen und französischen Eisenbahner, so daß auch dort bereits eine gewaltige Bewegung den gleichen Zielen wie der Gildensozialismus nachstrebt. Die großen Eisenbahnerstreiks in diesem Jahre drüben und hüben bezweckten die Verwirklichung gerade von gildensozialistischen Forderungen.

Was ist nun das Neue und Positive am »Gilden-Sozialismus«? Zunächst ein großes Mißtrauen gegen den Staat und gegen jede Form des Staatssozialismus. Ein Mißtrauen, das im englischen Gildensozialismus vor allen Dingen wächst aus seinem Haß gegen jede Art von Despotismus. Dieses scheidet auch grundsätzlich den Gildensozialismus vom Bolschewismus. Der Pol, um den sich alle Gedanken der Gildensozialisten drehen, ist der der Freiheit, der zweckmäßigen Sicherung möglichst vollständiger politischer, wirtschaftlicher und kultureller Selbstbestimmung. Auf die Frage, was das Grundübel der modernen Gesellschaft ist, antwortet einer der bedeutendsten gildensozialistischen Schriftsteller, G. D. H. Cole, in seinem Buche ›Self Government in Industry‹ (London 1917): nicht die Armut weiter Schichten, sondern die Versklavung weiter Schichten. Der Arbeiter klagt die heutige Gesellschaft mit Recht an, nicht weil er arm, sondern weil er unfrei ist. »Die Massen sind nicht Sklaven, weil sie arm sind, sondern arm, weil sie Sklaven sind.« Das Problem ist nicht, dem Arbeiter mehr Lohn oder mehr Lebensannehmlichkeiten (etwa auf dem Wege patriarchaler Fürsorge) zu schaffen, sondern ihn zu einem freien Mann zu machen! Das Gegenteil der »gottgewollten Abhängigkeit« muß die Norm werden.

Aber außerdem verbindet er die Idee der Freiheit mit einer von Genossenschaftstheoretikern wie Gierke und dem Staatsrechtslehrer der Universität Bordeaux, Léon Duguit, übernommenen genossenschaftlichen Auffassung vom Aufbau der Gesellschaft und des Staates. Die Gesellschaft und der Staat sind danach nicht bloß ein Sammelsurium von geographisch durch die Landesgrenzen zusammengehaltenen Individuen, sondern ein kunstvolles Ineinanderarbeiten von tätigen genossenschaftlichen Gruppen. Der einzelne Mensch kann gleichzeitig einer ganzen Reihe verschiedener Gruppen (mehreren geographischen, mehreren beruflichen) angehören. Aber jede Gruppe ist trotzdem in sich geschlossen und von einem eigenen, spezifischen Leben erfüllt durch den Zweck, dem sie dient: durch die Funktion, die sie in der Gesellschaft ausübt. Nicht vom Staate, überhaupt nicht durch irgendwelche Verleihung oder »Delegation«, sondern aus sich selbst, aus ihrer Funktion, bekommt die Gruppe nicht bloß ihre Existenz, sondern auch ihr Recht, jedes ihr überhaupt zustehende Recht. Und zu diesen Rechten gehört auch für sie, ebenso wie für den einzelnen Menschen, die Freiheit, d. h. die Selbstbestimmung innerhalb der Grenzen ihrer Funktion. Die umwälzende staatsrechtliche und soziale Bedeutung dieser Anschauungen kann hier nur angedeutet werden. Es würde an dieser Stelle zu weit führen, darauf näher einzugehen. Nur ein Punkt muß noch hervorgehoben werden:

Den Rechten jeder funktionellen Gruppe steht die von diesen untrennbare Pflicht gegenüber, ihre Funktion möglichst vollkommen auszuüben, ihre funktionelle Energie auf das höchste zu steigern und daher allen Fähigkeiten innerhalb der Gruppe den Weg zu öffnen, damit sie ungeschmälert im Sinne der Funktion, der die Gruppe dient, wirken können. Auf dem Umwege über den Begriff der Funktion gelangt daher diese Anschauung zu einer neuen und erweiterten Begründung der menschlichen Freiheit: der Mensch muß frei sein, nicht bloß ganz allgemein als Individuum, als »Zeitgenosse« und gleiches unter gleichen Individuen, weil die Freiheit eine metaphysische oder ethische oder sentimentale Forderung ist; sondern er muß frei sein auch ganz besonders als tätiges Individuum, als spezifisches und ungleiches unter ungleichen Individuen, als Mitträger einer Funktion, als Glied einer innerhalb der menschlichen Gesellschaft spezifisch wirkenden Gruppe, damit seine Kräfte unvermindert zur Stärkung der Funktion, zur Stärkung der Gruppe bei ihrem funktionellen Wirken beitragen. Es ergibt sich ein Begriff der Demokratie, der, weit über das Politische hinausgreifend, alle Gebiete des menschlichen Lebens erfaßt und mit der Zeit verwandeln muß: der Begriff einer die einseitige, bloß politische Demokratie ergänzenden, allseitigen, funktionellen Demokratie, deren Ziel sich knapp in Nietzsches kraftvoll aktivistischen Worten formulieren läßt: »Freiheit sich schaffen, zu neuem Schaffen.«

Der Stellung des Arbeiters im modernen Unternehmen, dem Begriff der Lohnarbeit überhaupt widersprechen diese Forderungen, wie man sieht, von Grund auf. Denn der Arbeiter wird nicht mit allen seinen Kräften, als ganze Persönlichkeit, zur Produktion herangezogen, sondern nur als Lieferant einer Ware, seiner Ware »Arbeit«, die ihm der Unternehmer abkauft.

Und ebenso widersprechen jene Forderungen der Einstellung eines Produktionsprozesses auf den privaten Profit. Denn seine Rechte beruhen nach jener Theorie ausschließlich auf seiner öffentlichen Funktion (nicht auf dem Eigentum des Unternehmers). Seine Einstellung auf den größten privaten Profit statt auf den größten öffentlichen Nutzen und Bedarf ist daher eine Rechtsbeugung.

In beiden Punkten, in dem der Lohnarbeit und dem des privaten Profits, verlangt der Gildensozialismus einen radikalen Umschwung und bietet dafür jene Lösungen, die seine Eigenart ausmachen.

Die Lohnarbeit soll verschwinden dadurch, daß die Verwaltung der Unternehmungen den privaten Kapitalisten entzogen und auf die Gewerkschaften (Trade Unions) übertragen wird. Die Gildensozialisten weisen darauf hin, daß schon heute die Leiter, die technischen und kaufmännischen Direktoren, Aufsichtsratmitglieder usw. der großen Unternehmungen zum großen Teil nicht mehr mit eigenem Kapital arbeiten, sondern bloß Angestellte von Kapitalisten sind. Nunmehr sollen sie statt dessen Angestellte einer Gewerkschaft, der organisierten Werktätigen des betreffenden Produktionszweiges werden, wobei sie selbst als Mitbeteiligte am Produktionsprozeß ihre Stellung innerhalb der Gewerkschaft fänden. Jeder Produktionszweig der englischen Volkswirtschaft würde also eine von seinen sämtlichen organisierten Arbeitern und Angestellten verwaltete ›Nationale Gilde‹, die ganze englische Produktion eine planmäßige Maschine aus lauter selbstverwaltenden nationalen oder nationalföderierten Gilden, deren Mittelstück ein alle einzelnen Gilden zusammenfassender nationaler ›Gildenkongreß‹ zu sein hätte.

Damit wäre in der Tat die Lohnarbeit abgeschafft. Nicht aber ohne weiteres die Einstellung der Produktion auf den Profit. Denn ein selbstverwaltender Produktionszweig könnte ebenso für die in ihm organisierten Werktätigen wie ein kapitalistisches Unternehmen für seine Aktionäre sorgen und ebenfalls bloß auf deren Profit statt auf den gesellschaftlichen Nutzen und Bedarf sehen. Wer letzten Endes bestimmen soll, was und zu welchem Preise produziert wird, bleibt also problematisch. Auch sind sich in dieser Hinsicht die Gildensozialisten selbst noch nicht einig. Aber die Kämpfe, die um diese Frage in ihren Reihen vor sich gehen, sind gerade deshalb lehrreich. Und eine gewisse Klärung scheint sich anzubahnen. Ursprünglich beeinflußt von der staatssozialistischen, besonders durch den Altmeister des englischen Sozialismus, Sidney Webb, vertretenen Anschauung, daß der Staat, d.h. das Parlament der natürliche Vertreter der Konsumenten sei und als solcher das letzte Wort haben müsse, sind jetzt die Gildensozialisten, durch die Kriegswirtschaft abgeschreckt, eher geneigt, den Staat auch bei diesen Fragen zurückzudrängen. Die Sozialisierungsvorlage der englischen Bergarbeiter (1919) überträgt das Bergwerkseigentum nicht auf den Staat, sondern (Art. 5 und 1) auf einen zu gleichen Teilen von der Regierung und den Bergarbeitern (der Bergarbeiterföderation von Großbritannien) ernannten zwanzigköpfigen ›Rat‹ (›Mining Council‹), in dem der Staat nur insofern einen kleinen Vorsprung hat, als der Ratspräsident von der Regierung ernannt und dem Parlamente verantwortlich ist. Die Konsumenten als solche sind nicht vertreten, d. h. eben nur durch die Regierungsmitglieder im ›Rat‹.

Aber der Glaube, daß überhaupt der Staat (d. h. das Parlament) die gegebene alleinige und genügende Vertretung der Konsumenten gegenüber den organisierten Produzenten sein könnte, ist gerade in gildensozialistischen Kreisen stark erschüttert. Cole meint jetzt, daß es eine einzige, allumfassende Vertretung aller Konsumenten, wie der Staatssozialismus sie im Parlamente sehen will, überhaupt nicht geben könne, da die Interessen der Konsumenten viel zu mannigfaltig und widerspruchsvoll seien. Er verlangt zwar, daß die Vertretungen der Konsumenten geographisch abgegrenzt werden, im Gegensatz zu den beruflich abgegrenzten Produzentenorganisationen, lehnt es aber ab, das Staatsgebiet als die einzig maßgebende, ja auch nur als die wichtigste geographische Einheit anzusehen, erkennt vielmehr die Konsumentengruppe, die ein gemeinsames Interesse an irgendeinem Produkt oder Dienste hat, als eine wirkliche, lebendige Einheit an, die nach den Grundsätzen der funktionellen Demokratie von sich aus das Recht hat, die Befriedigung ihrer Bedürfnisse zusammen mit der Produzentengruppe zu regeln, und will daher je nach dem Produkt oder Dienst, dessen Art und Preis geregelt werden sollen, wechselnde Vertretungen der Konsumenten, deren geographische Basis auch verschieden groß sein kann. Also einerseits eine weitgehende Dezentralisation, so daß bei Bedürfnissen persönlicher und häuslicher Art örtliche Konsumvereine die Bestimmung hätten; bei mehr kommunalen Bedürfnissen örtliche, für das besondere Fach oder Produkt spezifische Vertretungen, die nicht etwa identisch wären mit unseren heutigen, unterschiedslos für alle Zwecke gewählten Gemeindevertretungen. Andererseits aber auch nationale und sogar internationale Zusammenfassungen der Konsumenten bei großen, gleichförmigen, nationalen oder internationalen Bedürfnissen oder Diensten. Mit diesem Ausblick, der auf das Gebiet des Völkerbundes hinübergreift, muß diese kurze, leider gar zu unvollständige Darstellung des gildensozialistischen Planes für die Organisation der Erzeugung und Verteilung enden.

Nur ein besonderer Fall soll zum Schluß noch kurz erwähnt werden, weil er die erste praktische Verwirklichung des Gildensozialismus werden könnte. Die Wohnungsnot hat im Januar dieses Jahres die Bauarbeiter von Manchester veranlaßt, ihre verschiedenen Gewerkschaften zu einem Gildenausschuß zusammenzufassen, der faktisch sämtliche Bauarbeiter der Stadt und Umgegend vertritt. Gestützt auf dieses Monopol, hat der Gildenausschuß dem Stadtrat von Manchester angeboten, sofort zweitausend Häuser zu bauen zu einem Preise, der wesentlich niedriger wäre als der von den Bauunternehmern angeforderte. Der Gildenausschuß verlangt als Gegenleistung nur Vorstreckung des nötigen Kapitals, wogegen natürlich die Stadt das Eigentum an den fertigen Häusern bekäme. Aus dem Artikel, in dem Cole (›New Republic‹ vom 3. März 1920) über diesen Plan berichtet, scheint hervorzugehen, daß seine Verwirklichung bevorstand. Man wird seine Fortschritte mit dem lebhaftesten Interesse verfolgen müssen, denn es wäre das erste Beispiel der wenn auch bloß örtlichen Selbstverwaltung eines großen und lebenswichtigen Produktionszweiges.

 

Quelle: http://gutenberg.spiegel.de/?

lundi, 07 décembre 2009

French visions for a New Europe

French visions for a New Europe

Ex : http://rezistant.blogspot.com/


Raymond Abellio and Jean Parvulesco are two prominent French esotericists who have visualised and tried to implement a roadmap for what Europe – and the Western world as a whole – should become. It is a future where the real role of the Priory of Sion comes into its own.

An article by Stephan Chalandon and Philip Coppens

Raymond Abellio claimed that the Flemish occultist S.U. Zanne (pseudonym of Auguste Van de Kerckhove) was amongst the greatest initiates of our time. But hardly anyone knows who he is. Some have placed Abellio in the same category – though he too is a great unknown for most. And those that have looked at Abellio, have largely concluded that he was a fascist politician, who was also interested in esoteric beliefs.
Is he? Part of the problem is that his writings – like that of so many alchemists – need a key. So much of their material is largely coded text, and Abellio himself used to laugh that most people’s keys “only opened their own doors” – not his. So who was he really, and what were his real political aims?

Raymond Abellio was the pseudonym of Georges Soulès (1907-1986), who rose to fame during the Second World War, when he became the leader of the MSR (Mouvement Social Révolutionnaire) in 1942, after the peculiar assassination of its leader, Eugène Deloncle. The invitation to join the organisation had come from none other than Eugène Schueller, owner of the cosmetics giant L’Oréal. As Guy Patton, author of “Masters of Deception”, has pointed out: “This group had evolved out of the sinister Comité Secret d’Action Revolutionaire (CSAR), also known as the Cagoule. Soules was now to become acquainted with Eugène Deloncle, head of the political wing, dedicated to secret, direct, and violent action.” Later, Patton adds: “So here we have a Socialist turned Fascist, deeply involved in political movements, who actively collaborated with the Vichy government. In the course of his political activities, he was to work closely with Eugène Deloncle, who […] was closely acquainted with a fellow engineer, François Plantard, and whose niece married [French President Francois] Mitterrand’s brother, Robert.”
Though never confirmed, it is claimed that Abellio was involved with Bélisane publishing, founded in 1973. Bélisane published several books on Rennes-le-Château, the village so intimately connected with the Priory of Sion. In his book, Arktos, Joscelyn Godwin refers to Raymond Abellio as another ‘Bélisane’ pseudonym. For Guy Patton, Abellio is part of a network that tried to create a New Europe, ruled by a priest-king, whereby various modern myths, like the Priory of Sion, are meant to provide the modern Westerner with a longing of sacred traditions and rule, very much like the myths of King Arthur that gave a surreal dimension to European politics in medieval times.

Abellio’s views of politics have therefore been described as very utopian, and he has been suspected of synarchist leanings – the belief that the real leaders of the world were hidden from view, politicians being largely their puppets. But in truth, Abellio had a well-defined vision for social change. When the battle lines of the Cold War were drawn after the Second World War, he tried to find the best of both camps, and hoped he could reunite them. Why? To create a type of Eurasian Empire, stretching from the Atlantic to Japan, an idea that was taken up by the novelist, theoreticist and his friend Jean Parvulesco. “Parvu” has been identified as the man largely responsible for acquainting at least some with the visions of Abellio – though whether it was the real Abellio or a character created by Parvulesco, remains for some open to debate.
Guy Patton thus sums up Abellio’s view as being “typical of an extreme right-wing esotericism, the aim of which is to ‘renew the tradition of the West’. He wanted to replace the famous Republican slogan, ‘Liberty, Equality, Fraternity’, with ‘Prayer, War, Work’, to represent a new society built on an absolute hierarchy led by a king-priest.”
The implication, however, is that several of the people involved, were not truly devoted to such spiritualism and merely used it as a mask for making money, acquiring more power, and pushing an extreme right wing agenda. Though that is the case for many of those involved, within the mix of powerful and/or money-hungry people, most are agreed that Abellio was truly a “spiritual” man. And it was professor Pierre de Combas who is credited with Abellio’s transformation from politician Georges Soulès into the visionary Abellio (the Pyrenean Apollo), making him not merely a “man of power”, but also a “man of knowledge” – an initiate?

To understand his vision, we need to acknowledge that Abellio’s system, as mentioned, needs a key, and without a key, there is no understanding – hence, no doubt, why he is often misunderstood. Secondly, his system is complex and difficult to summarise in a few words and is perhaps best described by listing some examples.
He wanted to “de-occultise” the occult (e.g. his book “The End of Esotericism”, 1973), whereby he hoped this would help science. His knowledge of science – acquired as a polytechnic student – meant that he could build bridges between the two subjects, for example between the 64 hexagrams of the Yi-King and 64 codons of DNA, or the correspondences between the numbers of the Hebrew alphabet and the polygons that could be inscribed in a circle.
The most famous of his works is “The absolute structure” (1965), which made him be regarded as an heir to phenomenological philosopher Husserl. Such topics, of course, hardly make for bestsellers, but are the type of study one would expect from a genuine alchemist.
His drive for an “absolute structure” is a vital ingredient for his visions of the “Assumption of Europe”, i.e. what he sees as the destiny of Europe: “the Occident appears to us not to be only as an interval separating the opposing masses of the East and the West, but is the most advanced carrier of the dialectical of the present time.” In short, he did not believe in the subject-object duality that continues to drive most politicians into fear-mongering and the other usual tactics employed by their ilk, but instead preferred a more complex model, centred on Conscience (the zero point), which evolved along the base towards Quantity (science) and upwards to Quality (knowledge), which gave him a six-armed cross, or the “hypercubic” cross, to use Salvador Dali’s words – a man who equally spoke of the “Assumption of Europe” in some of his paintings. In short, the “hypercubic cross” allowed Abellio to express all ontological and spiritual problems in dynamic terms – and it is clear that he used complex wording, making his thinking difficult to understand, which is no doubt why he is easily misunderstood, was thought to be writing mumbo-jumbo, or simply neglected.

First of all, to get our heads around his terminology, we need to know that the Bible was one of Abellio’s most often consulted books and he described the stages of the evolution of a civilisation in Christian terminology: birth, baptism, communion, etc. Hence why he said that the next stage in Europe’s development mimicked assumption, which is specifically linked with the Virgin Mary – the Saint who was deemed to play a pivotal part in Europe’s future. She is, of course, also a supernatural being, which was said to have appeared on numerous occasions, to advice Christian Europe what to do and what not, such as in the politically charged “secrets” of Fatima in 1917.
In 1947, in his book “Towards a new form of prophecy, an essay on the political notion of the sacred and the situation of Lucifer in the modern world”, he notes: “not more than any other being, man is but an addition, a juxtaposition of Spirit and Matter, but an accumulator and an energy transformator, of variable power according to the individual, and capable of passing his energetic quantity of one qualitative level to another, higher, or lower.” Thus, we see a mixture of Christian eschatology, prophecy, as well as quite Gnostic doctrines on what it is to be truly human.

Abellio was therefore a modern visionary, but he was also an astrologer. He predicted the fall of the Soviet Union for 1989, as well as the ascent of China. He qualified its Marxism as “Luciferian”, which he did not suggest should be interpreted in a moral sense, but that the Chinese materialism had to be integrated in terms of the Absolute Structure, in opposition to the individual and “Satanic” materialism of the United States.
In the West, it was the task of terrorists – freedom fighters – to bring about this change. These “heroic” terrorists’ battles were brought to life in his novels. In retrospect, he said that his first three novels were indeed “apprenticeships”, where his heroes evolved, whereas his final novel – published 24 years after “The pit of Babel” (1962) – “Motionless Faces” (1986) was for him “that of the companion who is trying to become master”.
However, many consider “The pit of Babel” to be his best work and it is here that he plots intellectuals that are disengaged from all forms of ideology and scruples engaging in wide-spread terrorism. It is a theme he revisited in “Motionless Faces”, where the primary character attempts to poison the population of New York, not through any straightforward means, but by using the creation of an illuminated architect who had built a type of “counter-structure” underneath Manhattan, which was reserved for an elite – a type of urban Aggartha.
The heroine of his last novel is named Helen, also – not coincidentally – the name of the companion of Simon Magus. In the end, she perishes, taken to the centre of the earth by a subterranean stream, underneath Manhattan. In the case of Simon Magus, Helen was the personification of Light, held prisoner by matter. Abellio specifically chose his name because he identified himself with Apollo, another deity connected with light and the initials of Raymond Abellio – RA – were of course those of the Egyptian sun god.
Abellio himself never met his “ultimate woman”, even though he searched for her. She may have been Sunsiaré de Larcone, herself a writer of fantasies as well as a model, who died at the age of 27 in a car crash in 1962. She had labelled herself his disciple. Other – equally beautiful – women had gone before, and would go after, but no-one was apparently worthy of being “his” woman. Hence, his tomb contains an empty space for his “Lady”.

It is in “Motionless Faces” that Parvulesco studied in detail in his essay, “The Red Sun of Raymond Abellio”, published in 1987. Parvu was a novelist who is both close and far removed from Abellio. Close, because they shared a similar vision of the “Great Eurasian Empire of the End”. He too had his initiators, and he saw himself heir to the “Traditional School”, which had previously had authors such as René Guenon and Julius Evola, whom he met in the 1960s. He was preoccupied with the “non-being”, the forces of chaos, which make him into something of a dualist, i.e. a Gnostic. With Evola, he shared the idea that there was a need for a final battle against the counter-initiatory and subversive forces (the non-being), as well as having a certain desire for Tantrism.
Parvulesco often uses the term “Polar”, which he used to refer to the “polar fraternities” – of which Guénon had once been a member – and which he saw as important instruments in the creation of modern Europe. He also used the term to refer to the Hyperborean origins of the present cycle of humanity, which he argued would soon end with a polar reversal. Here, he is close to Guénon, but far from Abellio’s thinking, who had an altogether more optimistic vision of the future. So despite their kinship and a common goal, how that New Europe would be accomplished, was not identical – or compatible.

Parvulesco has often been cited by the European extreme right-wing. It has meant that several authors have seen him as one of them, but it is clear that no single writer is in charge of who and where his name is used.
In the early 1960s, “Parvu” was close to the OAS, the “Organisation Armée Secrète”, a terrorist group that was opposed to allowing Algeria to become independent. This meant that he was opposed to De Gaulle, yet he is largely known to have claimed everywhere he could that he was a strong supporter of De Gaulle. Incidents such as these have therefore made him another person that is difficult to place on the political landscape, and it would be best simply to not try and put him into one category. Indeed, what sets him and Abellio apart, is largely that they had an independent vision of the future – and the role of politics. They realised that the world was radically changing, and though their models might in the end prove not to work or be unrealisable, it does not negate the fact that they were innovative thinkers.

It is Parvulesco who brings further detail as to what this New Europe would be and why, specifically, a priest-king is needed as its ruler. In ancient times, these rulers were primarily seen as a denizen of both worlds, a mediator between this reality and the divine realm and Parvulesco makes it clear that “the beyond” is guiding us towards Europe’s destiny, whereby the role of European leaders is first and foremost to correctly interpret the signs, rather than invent new goals and targets.
Parvu has a few constant themes running through his writings, one of them being that of gateways to other dimensions. Whenever historical people (most often politicians) make appearances in his novels, they are not the politicians we know, but their doubles, who evolve in our and another dimension. The novels of Parvulesco are hence often seen as those of the “eternal present”, or the “ninth day”.
In “Rendez-vous au manoir du Lac”, the setting is a strange site where there is a gateway to heaven – Venus in particular – from where, according to Parvulesco, some chosen ones have to transit. In “En attendant la junction de Vénus”, he repeats this claim, but links it with Mitterrand and specifically the Axe Majeur of Cergy-Pontoise, near Paris. This axis is the creation of artist Dani Karavan and is the “soul” of this new town. It stretches for three kilometres and, if ever archaeologists were to stumble upon its remains in future centuries, it would be classified as a leyline. Though the project commenced before Mitterrand’s presidency, it was during his term in office that the line became properly defined and executed. Today, it is seen – in France – as an enigmatic work, far superior to the Louvre Pyramid or Arche de la Défense, which has set the likes of Dan Brown and Robert Bauval questioning the reasons behind these projects. The Axe, however, is a far more ambitious, greater and more enigmatic project. When we note that Abellio was closely associated with the Mitterrand family, we can merely ponder whether he had a hand in the project.
With the Axe Majeure, it is clear that we are in a strange world where politics and esoterica mingle, partly in this dimension and partly in a divine realm. Well, Abellio hoped that from this mixture, a new form of politics, and a New Europe, would arise. And it is here where we need to see the role of the Priory of Sion, not so much – as Dan Brown and others would like it – as the preservers of a sacred, old bloodline, but a new priesthood – a mixture of politician and esotericist, i.e. like Abellio himself – that can rule a New Europe.

So even though Abellio and Parvulesco have been described as synarchists, they repeatedly referred to themselves as terrorists – freedom fighters, laying the foundation for this New World. The new powerbrokers would not always remain hidden puppet masters, but would clearly one day step to the forefront, to take up the role of priest-king. And for such thinkers, it was a given that France had come closest to attaining this ideal under De Gaulle, whereby the “Great Work” of Mitterrand was seen along the same lines, though clearly not to the same extent, or drive.
Abellio and Parvulesco were therefore new agers, building “An Age of Aquarius”: however, they did not focus on personal transformation, but on social transformation. As an author, one might argue that Parvulesco operates within the domain of the “esoteric thriller”, which in Hollywood is visualised like Roman Polanski’s “The Ninth Gate” or Umberto Eco’s “Foucault’s Pendulum”. But both works have great difficulty in convincingly integrating the “passage to another world” within their storyline, often leaving the reader/viewer unsatisfied, or – alternatively – unconvinced of the end goal. Lovecraft has a better reputation and others argue that Parvulesco, thanks to the influence of both Abellio and Dominique de Roux, has gone further, and done better. But the main point is that his esoteric thrillers were to make this step through this “interdimensional passage” not as an individual, but as a society – as Europe.

De Roux (1935-1977) was a great inspiration for novelists that evoked what is known as “novels of the End” – however they visualised that transformation of Europe. Parvulesco actually began his literary career in the magazine “Exil”, published by de Roux. De Roux travelled widely, and in 1974 wrote “The Fifth Empire”, about the struggle for independence in Portugal’s colonies, which brings up the same struggle for a new future of a country. The title “The Fifth Empire” is an allusion to a popular Portuguese myth, namely that of the lost king. Like King Arthur, the Portuguese king Dom Sebastian was said to one day return, to lead his people to a fabulous destiny – which, as can be expected in light of Abellio and Parvulesco’s ideology, was not necessarily of this plane. To quote the Portuguese poet Fernando Pessoa (a friend of Aleister Crowley): “We have already conquered the sea, there only remains for us to conquer the sky and leave the earth for others.”
What Algeria and De Gaulle had been for Abellio, what Portugal was for De Roux, Putin’s Russia was for Parvulesco. But it is in Abellio’s preface to “The Fifth Empire” that we find an interesting note that explains the true context and “key” that will unlock their works: “those who attach a profound meaning to coincidences cannot be but stricken by the fact that the last message of Fatima was delivered in October 1917, at the moment when the Bolshevik Revolution begun. What subtle link of the invisible history was thus established between the two extremities of Europe?”
For esotericists who saw our dimension as being infiltrated by the other plane of existence, the coincidences of the apparitions of the Virgin Mary at Fatima and her clearly political messages, to do with the future of Russia and how it should embrace the Virgin Mary, are part and parcel of how this Great Europe was not merely a political ambition, but part of their vision as to how “real politicians” worked together in league with the “denizens of the otherworld”, so as to accomplish the Assumption. Hence why Parvulesco held Putin’s Russia to be so important. Hence why, no doubt, Abellio tried to make contact with the Soviets to enable this New Europe, which indeed has come about largely under Putin’s presidency.

As mentioned, for Guy Patton, Abellio and Parvulesco were largely Fascists, who abused newly created myths like that of the Priory of Sion, to exert their influence, make money and group power. But that, of course, is merely one interpretation. Take the literature of the Priory and its creator Pierre Plantard and we find that he was close to De Gaulle’s regime. Plantard was in fact responsible for running part of De Gaulle’s “terrorist cells” in Paris when De Gaulle was trying to get to power. Then, Plantard used the Priory to create an ideology that saw a unified Europe, from the East to the West, and it is clear that those involved in the promotion of the Priory later spoke of the importance of Francois Mitterrand.
The Priory is indeed a fabricated myth, a non-existent secret society. But it is equally clear that those involved (Plantard) and those that could be linked with it (Abellio, and to some extent Parvulesco), had genuine convictions of what a future Europe should be. It is equally clear that their interest in Marian apparitions was genuine, and that they saw them as divine guides along the path that Europe had to walk to its future and its next stage, its assumption. And as Parvulesco pointed out: it depends whether you believe in coincidences or not. If not, then you will argue that the major political events of the past century are but tangentially related to the messages received from these apparitions and which are subsequently shuttled to the Vatican (to some extent, together with the British queen, the only priest-king ruling in Europe at the moment). If you do believe that coincidences have meaning, then it is clear that this New Europe is slowly emerging.

In the 1980s, Parvulesco reviewed a strange novel, “La boucane contre l’Ordre Noir, ou le renversement”, by one “Father Martin”, who had already published “livre des Compagnons secrets. L’enseignement secret du Général de Gaulle”. For an avowed Gaullist, Parvu was obviously in his element. The novel itself has certain common points with one volume of the tetralogy of Robert Chotard, “Le grand test secret de Jules Verne”. Both books speak of a “reserved region” in Canada, from where there is a conspiracy directed to change the world’s climate. The base is controlled by the sinister “Black Order” and aims to create a pole reversal – a theme also explored by Jules Verne. We can only wonder whether the stories of HAARP – set in nearby Alaska – might be inspired, or reflective, of this. But it is here that we see the final framework of their political ambition: they saw their quest not so much as a desire, a longing, but as a genuine struggle of good versus evil: if a New Europe did not come, the “Black Order” would have won. And in the end, perhaps Abellio and Parvulesco should thus be seen as modern knights, fighting for Europe – a new Europe.

This article appeared in New Dawn, Volume 10, Number 11 (November - December 2008).

http://www.philipcoppens.com/abu_parv.html

mardi, 24 novembre 2009

Samurai: storia, etica e mito

Samurai: storia, etica e mito





La società giapponese

La società giapponese del XVI secolo aveva una struttura definibile come feudalesimo piramidale.
Al vertice di questa ideale piramide vi erano i signori dell’alta nobiltà, i daimyo, che esercitavano il loro potere tramite legami personali e familiari. Alle dirette dipendenze dei daimyo vi erano i fudai, ovvero quelle famiglie che da generazioni servivano il proprio signore. In questo contesto i samurai rappresentavano una casta familiare al servizio dei daimyo, ne erano un esercito personale.
Accadeva che durante le guerre feudali, il clan sconfitto, per non perdere le proprietà precedentemente conquistate, entrava a far parte dello stato maggiore del clan vincitore con funzioni di vassallaggio.
In questa organizzazione politica, quella militare dei samurai aveva caratteristiche e funzioni proprie al suo interno. Divisi in 17 categorie, i samurai avevano il compito di rispondere alla chiamata alle armi del daimyo cui facevano riferimento combattendo con armi proprie. Al di sotto dei samurai propriamente detti, ma facenti parte della stessa famiglia, vi erano i sotsu (“truppe di fanteria”) a loro volta divisi in 32 categorie.
Alla base della piramide troviamo gli ashigaru, cioè la maggior parte dei combattenti (soldati semplici diremmo oggi) che erano per lo più arcieri e lancieri o semplici messaggeri. Nei periodi di pace gli ashigaru svolgevano mansioni come braccianti del samurai incaricato al loro mantenimento.


Excursus storico sui samurai


L’epopea dei samurai comincia nel periodo Heian (794-1185).
Alla fine del XII secolo il governo aristocratico di Taira subì una sconfitta nella guerra di Genpei cedendo il potere al clan dei Minamoto. Minamoto Yoritomo, spodestando l’imperatore, assunse di fatto il potere col titolo di shogun (capo militare) e fu lui a stabilire la supremazia della casta dei samurai, che fino a tal periodo svolgeva il ruolo di classe servitrice in armi estromessa da questioni di natura politica. Nei 400 anni a venire la or più accreditata casta guerriera avrebbe svolto un ruolo decisivo nella difesa del Giappone da tentate invasioni esterne, – come quella mongola del XIII secolo –, e nelle faide interne tra i vari feudatari (daimyo), tra le quali vanno ricordate quella del periodo Muromachi (1338-1573) in cui gli shogun Ashikaga affrontarono i daimyo, e quella del periodo Momoyama (1573-1600) in cui i grandi samurai Nobunaga (in foto) prima e il suo successore Hideyoshi dopo si batterono per sottomettere il potere dei daimyo e riunificare il paese.

La politica interna troverà stabilità al termine della battaglia di Sekigahara (1600), nella quale il feudatario Tokugawa Ieyasu, col titolo di shogun, sconfiggendo i clan rivali, assumerà pieni poteri sul paese insediando il suo “regno” nella città di Edo (odierna Tokyo) e inaugurando il periodo che da tale città prese nome (1603-1867), mentre l’imperatore rimaneva di fatto confinato nell’antica capitale Kyoto.
In questo periodo la pace fu garantita dal fatto che i daimyo giurarono fedeltà, di fatto sottomettendovisi, allo shogunato e a loro volta mantennero all’interno dei loro castelli contingenti di soldati e servi. Le conseguenze per la casta dei samurai furono immediate. Divenuta una casta chiusa e non essendoci più motivi di gerre feudali, il suo ruolo guerriero assunse sempre più toni di facciata: i duelli, in un contesto dove regnava la pace tra clan, divennero per lo più di tipo privato. Lo sfoggio di abilità guerriere e l’uso della spada (per il samurai un vero e proprio culto religioso) avveniva, in maniera sempre più frequente, soltanto per scopi cerimoniali; mentre le funzioni a cui venivano sempre più spesso preposti erano di tipo burocratico ed educativo, integrandosi sempre di più nella società civile. Un segnale della trasformazione del ruolo dei samurai è testimoniato dai rapporti che questi intrapresero con il disprezzato ceto chonin (borghesia in ascesa). Tale avvicinamento ha avuto tuttavia una grande importanza per aver “esportato” i valori della “casta del ciliegio” nella società civile fino ad oggi.

Una classe di samurai che fece la sua comparsa in questa epoca di pace fu quella dei ronin (“uomini onda” o “uomini alla deriva”). Si tratta di quei soldati rimasti senza signore perché soppresso il feudo di appartenenza; in sostanza samurai declassati.
Con la caduta dell’ultimo shogunato, vale a dire quello di Yoshinobu Tokugawa, ebbe inizio l’era Meiji (1868-1912). Fu questo un periodo di radicali riforme, note con il nome di “rinnovamento Meiji”, le quali investirono a pieno anche la struttura sociale del Sol levante: l’imperatore tornava ad essere la massima figura politica a scapito dello shogunato, lo Stato fu trasformato in senso occidentale e i feudi soppressi. La casta samurai abolita in funzione di un esercito nazionale.


L’arte e l’onore. La morte e il ciliegio


hana wa sakuragi, hito wa bushi (“Tra i fiori il ciliegio, tra gli uomini il guerriero”)

La costante ricerca di una condotta di vita onorevole si fondeva, nell’etica della guerra del samurai, con una disciplina ferrea nelladdestramento marziale. Anche durante la pace del lungo periodo Edo, i samurai coltivarono le arti guerriere (bu-jutsu, oggi budo). Le principali discipline praticate e di giorno in giorno perfezionate erano il tiro con larco (kyu-jutsu, oggi kyudo), la scherma (ken-jutsu, oggi kendo) e il combattimento corpo a corpo (ju-jutsu, oggi più comunemente conosciuto come ju-jitsu).

La katana (“spada lunga”) era il principale segno di identificazione del samurai e lacciaio della lama incarnava tutte le virtù del guerriero; ma più che questa funzione meramente riconoscitiva, la spada rappresentava un vero e proprio oggetto di culto. L’attenzione rivolta nel costruirla (sarebbe più preciso dire crearla), nel curarla e nel maneggiarla dà l’impressione che la spada venisse venerata più che utilizzata.
Trattando la figura del samurai non è possibile scindere l’allenamento fisico da quello spirituale, così come non è possibile scindere l’uomo dal soldato; tuttavia, per fini esemplificativi, potremmo dire che se il braccio era rafforzato dalla spada, lo spirito era rafforzato dalla filosofia confuciana. Fin da bambino, il futuro guerriero, veniva educato all’autodisciplina e al senso del dovere. Egli era sempre in debito con l’imperatore, con il signore e con la famiglia e il principio di restituzione di tale debito era un obbligo morale, detto giri, che accompagnava il samurai dalla culla alla tomba.

Il codice d’onore del samurai non si esauriva, tuttavia, nel principio giri, ma spaziava dal disprezzo per i beni materiali e per la paura, al rifiuto del dolore e soprattutto della morte. È proprio per la preparazione costante all’accettazione della morte che il samurai scelse come emblema di appartenenza alla propria casta il ciliegio: esso stava infatti a rappresentare la bellezza e la provvisorietà della vita: nello spettacolo della fioritura il samurai vedeva il riflesso della propria grandezza e così come il fiore di ciliegio cade dal ramo al primo soffio di vento, il guerriero doveva essere disposto a morire in qualunque momento.
Se morte e dolore erano i principali “crimini”, lealtà e adempimento del proprio dovere erano le principali virtù; atti di slealtà e inadempienze erano (auto)puniti con il seppuku (“suicidio rituale”, l’harakiri è molto simile, ma è un’altra cosa...).
Il codice d’onore del samurai è espresso, dal XVII secolo, nel bushido (“via del guerriero”), codice di condotta e stile di vita riassumibile nei sette princìpi seguenti:

- , Gi: Onestà e Giustizia
Sii scrupolosamente onesto nei rapporti con gli altri, credi nella giustizia che proviene non dalle altre persone ma da te stesso. Il vero Samurai non ha incertezze sulla questione dell’onestà e della giustizia. Vi è solo ciò che è giusto e ciò che è sbagliato.

- , Yu: Eroico Coraggio
Elevati al di sopra delle masse che hanno paura di agire, nascondersi come una tartaruga nel guscio non è vivere. Un Samurai deve possedere un eroico coraggio, ciò è assolutamente rischioso e pericoloso, ciò significa vivere in modo completo, pieno, meraviglioso. L’eroico coraggio non è cieco ma intelligente e forte.

- , Jin: Compassione
L’intenso addestramento rende il samurai svelto e forte. È diverso dagli altri, egli acquisisce un potere che deve essere utilizzato per il bene comune. Possiede compassione, coglie ogni opportunità di essere d’aiuto ai propri simili e se l’opportunità non si presenta egli fa di tutto per trovarne una.

- , Rei: Gentile Cortesia
I Samurai non hanno motivi per comportarsi in maniera crudele, non hanno bisogno di mostrare la propria forza. Un Samurai è gentile anche con i nemici. Senza tale dimostrazione di rispetto esteriore un uomo è poco più di un animale. Il Samurai è rispettato non solo per la sua forza in battaglia ma anche per come interagisce con gli altri uomini.

- , Makoto o , Shin: Completa Sincerità
Quando un Samurai esprime l’intenzione di compiere un’azione, questa è praticamente già compiuta, nulla gli impedirà di portare a termine l’intenzione espressa. Egli non ha bisogno né di “dare la parola” né di promettere. Parlare e agire sono la medesima cosa.

- 名誉, Meiyo: Onore
Vi è un solo giudice dell’onore del Samurai: lui stesso. Le decisioni che prendi e le azioni che ne conseguono sono un riflesso di ciò che sei in realtà. Non puoi nasconderti da te stesso.

- 忠義, Chugi: Dovere e Lealtà
Per il Samurai compiere un’azione o esprimere qualcosa equivale a diventarne proprietario. Egli ne assume la piena responsabilità, anche per ciò che ne consegue. Il Samurai è immensamente leale verso coloro di cui si prende cura. Egli resta fieramente fedele a coloro di cui è responsabile.

Che i Samurai, nei tanti secoli della loro storia, si siano sempre e comunque attenuti a questi princìpi, è un elemento di certo secondario, né tantomeno spetta a noi il compito di ergerci a giudici. Ciò che rimane indelebile e si manifesta in tutta la sua grandezza è invece lo spirito autentico e “romantico” di un’etica guerriera (ma non solo guerriera) fondata sul rispetto, l’onore, la lealtà, la fedeltà, il coraggio e l’abnegazione: valori che furono incarnati da molti samurai i cui nomi sono stati – a buon diritto – consegnati alla storia. E in una società che sembra aver smarrito la bussola, sempre timorosa (finanche di se stessa), l’etica samurai potrebbe rappresentare un ausilio, una salda coordinata per un recupero dell’autocoscienza e della padronanza di sé; sicuramente un ottimo strumento per il rifiuto di un’esistenza meschina ed esclusivamente materiale e per una riscoperta del proprio spirito. Lo stesso spirito che animò i “guerrieri-poeti” i quali, grazie alla lama della loro spada e al tenue turbinare dei fiori di ciliegio, seppero coniugare sapientemente Poesia e Azione.

Percorrere e tracciare i lineamenti fondamentali della storia dei samurai non è cosa facile perché alla mera ricostruzione evolutiva dei fatti si intreccia inevitabilmente la visione, più romantica che storica, della figura del guerriero in sé, il samurai appunto. Per il giapponese questa figura non è la semplice “protagonista” di un certo periodo storico; è, al contrario, il periodo storico, il tempo a trovarsi in una posizione di sudditanza rispetto al mito e alle tradizioni che intorno a tal mito sono state costruite, tanto che il tempo stesso risulta avere un ruolo secondario di fronte al “protagonista” che questo tempo ha vissuto. Cosicché parlare di “etica della guerra” e di “cultura samurai” ci appare come un discorso sempre attuale, che esula dalla visione della storia come “trattato dello ieri” e ci pone in quella che è la giusta visione della storia, vale a dire la storia come “metafora del mito”. Utile ribadire che ogni area geografica e culturale ha avuto (ha) i suoi (e di tutti) miti eternamente attuali.

Le rapport politique-ésotérisme: entretien avec le Prof. G. Galli

magier.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

Le rapport politique-ésotérisme

Entretien avec le prof. Giorgio Galli

 

Pendant de nombreux siècles, les rois, les empereurs, les hommes politiques, toujours isolés de leurs contemporains, ont demandé les conseils de “mages”, d'astrologues, de voyants, d'alchimistes, avant de prendre des décisions importantes. Ces curieux conseillers étaient toujours présents, plus ou moins officiellement, dans l'orbite des hommes qui les consultaient fidèlement. La révolution scientifique nous a fait croire que le mystérieux filon occulte qui s'insère entre la politique et les pratiques ésotériques s'était dilué et avait disparu. Mieux vaut être prudent avant de l'affirmer péremptoirement! Même à notre époque pleinement sécularisée, marquée par un grand scepticisme, par l'athéisme généralisé, on peut repérer les liens obscurs unissant de mystérieuses congrégations aux hommes du pouvoir.

 

Giogio Galli, professeur d'histoire des doctrines politiques à l'Université de Milan, s'est préoccupé de ces thématiques, en écrivant des livres qui ont suscité la curiosité, l'intérêt mais aussi causé une certaine inquiétude. Nous lui avons demandé de nous expliquer dans quelle mesure l'ésotérisme influence les lieux du pouvoir dans le monde occidental, au seuil du troisième millénaire.

 

GG: «Les rapports entre l'ésotérisme et la politique n'ont plus de nos jours la continuité qu'ils avaient dans les temps passés, mais le phénomène n'est pas pour autant épuisé depuis l'avènement de la révolution scientifique. Il est moins apparent, mais il est néanmoins présent. En notre siècle qui s'achève, à côté des idéologies de masse qui ont favorisé l'avènement de l'homme nouveau, dominateur de la technique et de la science, forgé dans l'acier des fabriques et prêt à se jeter dans les tempêtes d'acier comme l'a décrit Ernst Jünger, nous voyons réémerger des cultures anciennes qui, bientôt, influeront les événements historiques. De la mystérieuse figure de Raspoutine installée à la cour des Tsars aux voyants consultés par Hitler pendant la guerre, on constate que les hommes à la tête de la politique mondiale contemporaine ont consulté des astrologues connus: autant de phénomènes qui contredisent l'apparent cynisme de notre société contemporaine et démontrent que l'homme, même s'il est puissant, a besoin de croire en quelque chose».

 

Q: Depuis plusieurs années, vous avez étudié les rapports entre la culture politique et les anciennes cultures ésotériques. En lisant vos livres consacrés à cette thématique, comme Hitler e il nazismo magico, La politica e i maghi, Alba magica,  des pans obscurs des époques historiques récentes se révèlent et j'ai noté que l'ésotérisme en politique intéresse davantage la droite que la gauche. Comment cela se fait-il?

 

GG: «Je crois plutôt que la présence de l'occultisme est transversale et se retrouve dans tous les camps politiques, même si divers penseurs auxquels la droite extrême fait constamment référence, comme Julius Evola ou Ernst Jünger, ou l'entourage des SS de Himmler, ou les savants nationaux-socialistes qui se préoccupaient du Graal, se sont profondément intéressés aux arts ésotériques. Les écrivains Pauwels et Bergier, auteurs d'un livre devenu rapidement très célèbre, Le matin des magiciens, ont donné une définition lapidaire du national-socialisme: «C'est Guénon plus les Panzerdivisionen». René Guénon fut un grand connaisseur des cultes traditionnels pré-chrétiens et est devenu une sorte de “phare illuminant” pour certains cercles de la droite dure en Europe. Ces phénomènes idéologico-politiques nous amènent à constater ce que vous venez d'évoquer dans votre question: l'ésotérisme semble être un engouement des droites dures, mais, à l'analyse, on doit constater qu'il est présent dans toute la sphère politique et n'est nullement un apanage exclusif des droites. La recherche de l'irrationnel est profondément ancrée dans l'âme humaine. La science ne peut pas expliquer aux hommes pourquoi ils sont nés, pourquoi ils tombent amoureux, pourquoi ils meurent, etc.».

 

Q.: D'aucuns prétendent que lorsque l'on ne croit plus en Dieu, on croit en tout le reste...

 

GG: «Nous nous trouvons face à une grande crise des religions institutionalisées de modèle occidental. Le christianisme s'est transformé, alors que le mystère nous accompagne tout au long de notre vie. Le sacré connait une éclipse, aussi parce que l'Eglise catholique ne réussit plus à donner une réponse convaincante aux questions que les hommes lui posent. L'illusion des Lumièresa réduit les mystères de l'univers, ce qui s'est avéré une erreur. En outre, dans le monde entier, on assiste à un retour aux peurs ataviques de la fin des temps, parce que nous approchons le passage d'un millénaire à un autre. Toutes ces situations sont le terrain de culture de doctrines plus ou moins ésotériques, présentes en filigrane dans la société moderne: de l'homéopathie au New Age, de la prolifération des cartomanciennes aux prédicateurs itinérants. Ce vaste champ, qui a été jusqu'ici ignoré des historiens et des sociologues, pourrait être défini comme celui de la “fantapolitologie”: il pourrait révéler des indices intéressants sur la société actuelle. C'est pour cette raison que j'étudie le phénomène avec une attention soutenue».

 

Q.: Les symboles utilisés par les mouvements politiques peuvent avoir une signification dépassant le message politique proprement dit et renouer avec des mythes très anciens. Que pensez-vous de la récupération par la Lega Nord de Bossi des traditions celtiques et lombardes-germaniques? Et du symbole de la Padanie, le “Soleil des Alpes”?

 

GG: «Il me semble que la Ligue, qui existe depuis bientôt quinze ans, a connu des évolutions diverses. Le concept de Padanie est très récent et s'est imposé dans une phase de l'évolution du mouvement, où l'aspect symbolique est devenu plus important, où l'on assiste à la réémergence graduelle de cultures alternatives, y compris dans le champ politique. Aujourd'hui, la Ligue cherche à créer une identité padanienne, mais qui ne pourra pas se profiler sur une base seulement économique, religieuse ou linguistique, vu que la Padanie n'est pas l'Ecosse. D'où le projet de fonder cette identité sur un symbole fort. Indubitablement, la symbolique padanienne semble jouir d'un certain succès: la couleur (le vert) et le symbole (le Soleil des Alpes) sont immédiatement et clairement perceptibles. Evidemment, nous ne sommes pas en mesure de jauger de l'efficacité d'un tel message à court terme. Je ne crois pas que la référence à la culture celtique soit adaptée à la Padanie actuelle. Les Celtes possédaient une vision du sacré fortement liée à la nature. Les prêtresses druidiques y jouaient un rôle important. Les croyances celtiques n'ont rien de commun avec la culture des habitants de la Padanie en 1997».

 

Q.: De quoi parlera votre prochain livre?

 

GG: «Il traitera d'un aspect social particulier de l'Italie contemporaine. Je vais me référer au premier livre que j'ai écrit et j'intitulerai mon nouvel ouvrage Italia e meriggio dei maghi  (= L'Italie et le midi des mages). Je parlerai des innombrables personnes qui se sont rapprochées des cultures restées jusqu'ici marginales dans la société post-industrielle. Je vais démontrer que ces personnes n'ont pas choisi cette voie parce qu'elles se défient de la science, ou qu'elles ne l'ont pas empruntée uniquement en raison d'une telle méfiance. En Italie, un quart de la population se tourne désormais vers la médecine alternative, croit aux horoscopes, visite les cartomanciennes ou se rapproche des philosophies orientales. L'Italie est en train de changer, sous bon nombre d'aspects».

(propos recueillis par Gianluca Savoini, parus dans La Padania, 22 oct. 1997; trad. frtanç.: Robert Steuckers).

lundi, 23 novembre 2009

Sol Innocentis

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Sol Innocentis

Qui se tient au soleil et ferme les yeux,
Commence à ne plus savoir ce qu'est le soleil,
Et à penser maintes choses pleines de chaleur.
Mais il ouvre les yeux et voit le soleil,
Et voilà qu'il ne peut plus penser à rien,
Parce que la lumière du soleil vaut mieux que les pensées
De tous les philosophes et de tous les poètes.
La lumière du soleil ne sait pas ce qu'elle fait
Et pour cela elle n'est pas erronée, elle est commune et bonne.

(Alberto Caeiro, Le gardeur de troupeaux, V)

Trouvé sur: http://lephoton.hautetfort.com/

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dimanche, 22 novembre 2009

Sur le Japon: entretien avec le Prof. G. Fino

sol_levante.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1998

Sur le Japon

Entretien avec le Prof. Giuseppe Fino

 

Aujourd’hui, la modernité a certes récupéré le Japon et l’a enveloppé dans sa grisaille, mais de temps en temps, un trait de lumière perce l’obscurité, nous rappelant un passé assez récent qui n’est pas encore complètement oublié. Le Professeur Giuseppe Fino vit au Japon. Il est l’auteur d’une étude sur Yukio Mishima (Mishima et la restauration de la culture intégrale). Nous lui avons posé quelques questions sur les “manifestations lumineuses qui rappellent la chaleur incandescente du Soleil Levant.

 

Q.: Il y a quelques temps, les journaux télévisés italiens ont évoqué l’épisode de ce soldat japonais qui considérait être encore en guerre, en dépit de la défaite de 1945. Que signifie le comportement de ce soldat pour les Japonais d’aujourd’hui?

 

R.: Au Japon aussi, les journaux télévisés ont rendu compte de la disparition de Yokoi Shoichi, le soldat japonais qui avait continué à “combattre” dans la jungle de l’Ile de Guam après 1945. Pour les Japonais de “gauche”, nés et élevés dans le climat pacifiste et démocratique de l’après-guerre, le comportement de Yokoi est difficilement compréhensible et acceptable: pour eux, c’est une manifestation du fanatisme qu’il faut taire ou dont il faut avoir honte. Pour les Japonais nés avant la guerre ou pour ceux qui ont encore la fibre patriotique, le comportement de Yokoi est exemplaire et héroïque. Pour les plus jeunes générations, en revanche, le nom de ce soldat ne dit hélas plus rien. Je voudrais ajouter une considération personnelle. Plus que Yokoi Shoichi, qui, en quelque sorte avait fini par s’accomoder  au climat de l’après-guerre, je voudrais rendre hommage à l’un de ses camarades, Onada Hiroo, qui avait préféré abandonner le Japon consumériste et américanisé pour aller s’installer en Amérique du Sud et y “élever des veaux et des lapins”.

 

Q.: Dans le livre Tenchû (= Punition du ciel), paru aux éditions Sannô-kai, on décrit les événements qui ont conduit à la révolte des officiers de 1936. Existe-t-il aujourd’hui au Japon des forces politiques qui se souviennent de ces événements, de ces hommes et des idéaux de cette époque?

 

R.: Non, il n’y a absolument aucune réminiscence valable. L’insurrection des “Jeunes Officiers” du 26 février 1936 (Ni niroku jiken)  n’est plus qu’un sujet de romans, d’essais et de films un peu nostalgiques. Les familles des “révoltés”, qui ont été exécutés, ont constitué des associations pour les réhabiliter mais aucun groupe politique ne se réfère plus à cette expérience, qualifiée de “pure néo-romantisme fasciste”. Enfin la droite japonaise extra-parlementaire considère que cet épisode est déshonorant et “hérétique”, car il n’a pas été approuvé par l’Empereur. Cela en dit long sur le conformisme qui règne au japon. Mishima est le seul à avoir donné en exemple le sacrifice de ces “Jeunes Officiers” et à les avoir réhabilité dans l’après-guerre.

 

Q.: Mishima est l’auteur japonais le plus traduit en Europe, mais la plus gran­de partie de ses lecteurs se contente de l’aspect narratif de ses œu­vres. Prof. Fino, vous êtes le seul à avoir reconstitué les racines culturelles de l’œuvre de Mishima dans Mishima et la restauration de la culture inté­grale;  pouvez-vous nous synthétiser les points essentiels de sa vision du monde?

 

R.: Les racines culturelles de Mishima sont nombreuses et complexes. Dans sa jeunesse, il a fait partie du mouvement néo-romantique de Yasuda Yo­juro et du poète Ito Shizuo, mais il a surtout été influencé par Hasuda Zen­mei, le théoricien de la “belle mort”. Dans l’après-guerre, après une pério­de de réflexion et d’activité littéraire un peu “intimiste” et “autobiogra­phique”, Mishima s’est mis à redécouvrir et réinterpréter la culture japo­naise (Nipponjin-ron; = Débats sur les Japonais). Dans son essai Défense de la culture (1969), Mishima découvre trois caractéristiques de cette culture japonaise, à ses yeux essentielles: la cyclicité, la totalité et la subjectivité. Pour Mishima, l’action, elle aussi, est culture. La forme la plus élevée de la culture est le bunburyodo, l’union de l’art et de l’action. Mishima retrouve aussi, dans la foulée, la philosophie activiste et intuitive du Wang Yang-ming (en japonais: Yomeigaku), le bushido intégral de l’Hagakure (Cf. Il pazzo morire, ed. Sannô-kai), le traditionalisme ou l’anti-modernisme du Shinpuren (La Ligue du Vent Divin) et l’idéalisme impérialiste et romantique des “Jeunes Officiers” du Ni niroku jiken. Au centre de la pensée de Mishima demeure toutefois l’Empereur comme concept culturel suprême, corollaire de son opposition politique contre-révolutionnaire et de son implacable critique de l’intellectualisme pacifiste et démocratique de l’après-guerre.

 

Q.: En Occident, c’est devenu une habitude de pratiquer des disciplines physiques extrême-orientales, tantôt comme pratiques sportives tantôt comme disciplines martiales. Cependant, je doute qu’il soit resté beaucoup d’éléments originaux dans ces disciplines telles qu’elles sont pratiquées en Occident. Qu’en est-il au Japon?

 

R.: La situation au Japon n’est guère différente. Surtout pour le judo et le karaté, il devient de plus en plus difficile de trouver des palestres donnant tout son poids à l’aspect “spirituel” de ces disciplines qui ne sont pas seulement sportives et agonales. La situation est légèrement meilleure dans les palestres de kendo et d’aikido. Elle est satisfaisante dans ceux qui s’adonnent au kyudo (tir à l’arc) et au i-ai (discipline de l’épée nue). Telle est du moins mon impression. Je dois vous confesser que je n’ai jamais fréquenté que les salles de judo...

 

Q.: Est-il possible de recevoir du Japon ultra-technologique d’aujourd’hui des enseignements valables pour l’Homme de la Tradition?

 

R.: Oui, il existe des possibilités, mais elles sont limitées à quelques monastères Zen et à quelques palestres d’arts martiaux, justement ceux qui sont influencés par la pensée Zen. Il faudrait une bonne dose de patience et de chance avant de trouver le Maître juste et le milieu adapté. Pour ceux qui voudraient éventuellement pratiquer le Zen, je conseille un engagement inconditionnel à long terme, si possible auprès des monastères de l’Ecole ou de l’Ordre Rinzai.

(propos parus dans la revue Margini, n°21/juin 1998; adresse: Margini, Libreria Ar, CP 53, Salerno).

samedi, 21 novembre 2009

"Aventure Japon": la "bi-civilisation"

biciv9782869596177.jpgArchives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

«Aventure Japon»: la “bi-civilisation”

Spécialiste du Japon, Robert Guillain publie Aventure Japon, une approche très vivante de cette “bi-civilisation” qu'il évoque ainsi: «La bicivilisation, voilà selon moi l'invention majeure du Japon. Ce monsieur que voici, ce monsieur “derrière sa cravate”, comme j'aime à le décrire, est à première vue devenu le semblable de l'ingénieur, de l'industriel, du professeur français, européen, occidental. Mais qu'on ne s'y trompe pas: il a derrière lui  —lui-même n'y pense pas et ne s'en doute même pas—  une culture et une civilisation complètement différentes des nôtres. Grattez un peu, et ses racines, son pedigree, si je peux dire, le situent dans un monde qui a peu de traits communs avec le nôtre (...). Le bicivilisé peut dans tous les domaines de la vie quotidienne et de la culture nous présenter des réalisations tout à fait différentes des nôtres, et qui souvent semblent nous dire: il y avait une solution autre que la vôtre, la voici. Elle a plus de mille ans! C'est ainsi qu'au Japon tout est en double, à commencer par la façon de vivre la vie quotidienne, de se loger, de se nourrir, de s'habiller. Deux sortes de repas, menu occidental et menu japonais; deux types de maisons, la maison japonaise avec toutes ses merveilles  —comme les armoires dans le mur—  et la maison ordinaire, semblable aux nôtres; deux couches où dormir, le lit et le tatami, deux vêtements, le kimono et le complet-veston ou la robe de style “parisien”; deux sortes d'instruments pour écrire, le pinceau et la plume; deux peintures, noir et blanc “à la chinoise” et peinture en couleurs; deux types d'hôtelleries, l'hôtel occidental et l'auberge japonaise avec ses qualités et ses défauts; deux sortes de musique, fondamentalement dissemblables du point de vue de ia composition et de l'exécution, et certaines viennent du fond des âges, et du fond de l'Asie. Voilà le Japonais bicivilisé. Bicivilisé comme d'autres sont bilingues. Est-ce là une façon d'être qui ne durera qu'un temps, déjà impraticable dans un pays moderne, aligné sur le modèle des grandes nations? Je ne le crois pas. Le Japon n'est pas une deuxième Amérique aux yeux bridés, il reste le pays du dédoublement, prodigieusement intéressant par son appartenance durable à la fois à l'Extrême-Occident et à l'Extrême-Orient. Le pays bicivilisé ne s'embarasse pas des contradictions qui en résultent. Il est le pays de la coexistence des contraires. Il est le pays où le contraire aussi est vrai. Si j'affirme que le Japon aime la nature, on m'opposera toutes les atteintes qu'il lui fait subir. Le bicivilisé se soucie peu de logique. Pour lui, une des lois du réel peut se formuler en trois mots: “C'est comme ça”. Et portant, s'il est un moment où le Japon ne demeure pas “comme çà” mais entre sur la voie des changements multiples, profonds, c'est bien le moment présent».

 

Jean de BUSSAC.

 

Robert GUILLAIN, Aventure Japon, Editions Arléa, 1997, 436 pages, 165 FF.

vendredi, 20 novembre 2009

Pan

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Pan

Le dieu Pan n'est pas mort,
Chaque champ qui expose
Aux sourires d'Apollon
Les seins nus de Cérès -
Tôt ou tard vous verrez
En ces lieux se dresser
Le dieu Pan, l'immortel.

Non, il n'a pas tué de dieux,
Le triste dieu, le dieu chrétien.
Christ est un dieu en plus,
Un qui manquait, peut-être.
Pan continue à instiller
Les sons de sa syrinx
Dans le creux des oreilles
De Cérès par les champs cambrée.

Oui, les dieux sont les mêmes,
Calmes et clairs, toujours,
Gorgés d'éternité,
De mépris envers nous,
Et apportant le jour,
La nuit, les récoltes dorées,
Non point pour nous donner
Le jour et la nuit et les blés,
Mais selon un tout autre
Dessein divin fortuit.

(Ricardo Reis, Odes retrouvées)

Trouvé sur: http://lephoton.hautetfort.com/