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mardi, 20 mai 2014

Les mythes d'argile

Les mythes d'argile

« Avec ses 440 000 sites identifiés environs,
le Japon est une des nations
à avoir accumulé le plus de matériaux
et de renseignements sur son passé
et investi considérablement dans ce domaine.
Comme le souligne Pierre Vial, dans la préface du livre,
c’est une “vraie volonté politique identitaire ”!
»

Entretien avec Rémy Valat, auteur de Les Mythes d’argile (éditions Dualpha)

(Propos recueillis par Fabrice Dutilleul)

Pourquoi un livre sur la religion des peuples mésolithiques du Japon ?

Couv-Mythes-Argile-e.jpgC’est un coup de foudre et peut-être une « nostalgie des origines ». De parents breton et aveyronnais, grande a été ma surprise de découvrir au Japon des mégalithes et autres tumuli de l’Âge du Bronze, la période kofun  (300 av JC-645 ap. JC). J’ai cependant choisi d’aborder une période plus ancienne, le Mésolithique ou période Jômon. Le Mésolithique est une étape essentielle de l’aventure humaine, car c’est la période durant laquelle les hommes se sont sédentarisés pour exploiter les ressources alimentaires, favorisant le contrôle et le stockage des moyens de subsistance. Surtout d’un point de vue religieux, l’angle choisi pour mieux connaître ces populations de chasseurs-cueilleurs inventeurs de la poterie, le Jômon paraît être le moment où le Mythe de la Création nippon serait apparu. Les traces matérielles, et en particuliers les artefacts religieux, statuettes d’argile et autres pierres phalliformes, sont les indicateurs probants de rites, véhiculant des croyances, exprimées par ce mythe. La culture Jômon a une parenté spirituelle avec les autres traditions des populations pratiquant la domestication des plantes, dont les mythologies associent plantes alimentaires et mise en scène du sacrifice d’un être divin (les primo-populations du Pacifique et, plus proche du Japon, de Chine).

Comment saisir alors l’âme et l’identité de ses peuples disparus ?

Grâce à Mircéa Eliade, bien sûr ! La somme eladienne est un décryptage des grands principes du fait religieux : de portée universelle, elle contient les données utiles à la compréhension du phénomène dans sa globalité. Mircea Eliade avait compris la vanité d’expliquer la propension humaine (souvent inconsciente) pour le Sacré, dont les manifestations et le mode d’être n’existent que sur leur propre plan de référence. Pour révéler la fractale, la structure et la logique de la mosaïque religieuse, l’herméneutique multidisciplinaire eladienne reste un outil à mon avis encore inégalé, bien que critiqué à des fins partisanes. Une méthode reposant sur des sources exceptionnelles : l’investissement du gouvernement japonais est exemplaire. Avec ses 440 000 sites identifiés environs, le Japon est une des nations à avoir accumulé le plus de matériaux et de renseignements sur son passé et investi considérablement dans ce domaine. Comme le souligne Pierre Vial, dans la préface du livre, c’est une « vraie volonté politique identitaire » ! Si les interprétations historiques sont scientifiquement plurielles, les Japonais ont fait le choix de s’approprier Leur histoire ; c’est un choix métapolitique. Un choix qui assure la stabilité d’un pays qui mêle à la fois ultramodernité et tradition. Une réalité porteuse d’espoir, pour nous identitaires français et européens : le rêve est possible. Les « rêveurs de jour sont des hommes dangereux » disait Lawrence d’Arabie.

Les Mythes d’argile, Rémy Valat, préface de Pierre Vial, L’Æncre, collection « Patrimoine des religions » dirigée par Philippe Randa, 248 pages, 31 euros.

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jeudi, 15 mai 2014

Les ressorts psychologiques des pilotes Tokkôtai

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Manipulation esthétique et romantisme

Les ressorts psychologiques des pilotes Tokkôtai

Kamikazes, fleurs de cerisiers et nationalismes

Rémy Valat
Ex: http://metamag.fr

花は桜木人は武士(hana wa sakuragi hito wa bushi).

« La fleur des fleurs est le cerisier, la fleur des hommes est le guerrier. »


Les éditions Hermann ont eu la bonne idée de publier le livre d’Emiko Ohnuki-Tierney, Kamikazes, Fleurs de cerisier et Nationalismes, paru précédemment en langue anglaise aux éditions des universités de Chicago (2002) sous le titre Kamikaze, Cherry Blossoms, and Nationalisms : The Militarization of Aesthetics in Japanese History. La traduction de cette étude magistrale est de Livane Pinet Thélot (revue par Xavier Marie). Emiko Ohnuki-Tierney enseigne l’anthropologie à l'université du Wisconsin ; elle est une spécialiste réputée du Japon. Sa carrière académique est exceptionnelle : elle est présidente émérite de la section de culture moderne à la Bibliothèque du Congrès de Washington, membre de l’Avancées de Paris et de l'Académie américaine des arts et des sciences. 

Kamikazes, Fleurs de cerisier et Nationalismes n’est pas une histoire de bataille. L’auteure s’est intéressée aux manipulations esthétiques et symboliques de la fleur de cerisier par les pouvoirs politiques et militaires des ères Meiji, Taishô et Shôwa jusqu’en 1945. La floraison des cerisiers appartient à la culture archaïque japonaise, elle était associée à la fertilité, au renouveau printanier, à la vie. L’éphémère présence de ces fleurs blanches s’inscrivait dans le calendrier des rites agricoles, lesquels culminaient à l’automne avec la récolte du riz, et étaient le prétexte à libations d’alcool de riz (saké) et festivités. Au fil des siècles, les acteurs politiques et sociaux ont octroyé une valeur différente au cerisier : l’empereur pour se démarquer de l’omniprésente culture chinoise et de sa fleur symbole, celle du prunier ; les samouraïs et les nationalistes pour souligner la fragilité de la vie du guerrier, et, surtout pour les seconds, institutionnaliser une esthétique valorisant la mort et le sacrifice. Emiko Ohnuki-Tierney nous révèle l’instrumentalisation des récits, des traditions et des symboles nippons, ayant pour toile de fond et acteurs des cerisiers et des combattants : le Manyôshû (circa 755 ap. JC), un recueil de poèmes mettant en scène les sakimori (garde-frontières en poste au nord de Kyûshû et sur les îles de Tsushima et d’Iki) ont été expurgés des passages trop humains où les hommes exprimaient leur affection pour leurs proches de manière à mettre en avant la fidélité à l’empereur.  L’épisode des pilotes tokkôtai survint à la fin de la guerre du Pacifique et atteint son paroxysme au moment où le Japon est victime des bombardements américains et Okinawa envahi. Ces missions suicides ont marqué les esprits (c’était l’un des objectifs de l’état-major impérial) et donné une image négative du combattant japonais, dépeint comme un « fanatique »... Avec une efficacité opérationnelle faible, après l’effet de surprise de Leyte (où 20,8% des navires ont été touchés), le taux des navires coulés ou endommagés serait de 11,6%....Tragique hasard de l’Histoire, la bataille d’Okinawa s’est déroulée au moment de la floraison des cerisiers, donnant une touche romantique à cette irrationnelle tragédie, durant laquelle le Japon va sacrifier la fine fleur de sa jeunesse.

suzuki.jpgFine fleur, car ces jeunes hommes, un millier environ, étaient des étudiants provenant des meilleures universités du pays, promus hâtivement officiers-pilotes pour une mission sans retour. 3843 pilotes (estimation maximale incluant toutes les catégories socio-professionnelles et classes d’âge) sont morts en tentant de s’écraser sur un bâtiment de guerre américain. L’étude des journaux intimes de ces jeunes kamikazes, journaux parfois entamés plusieurs années auparavant constitue une source inestimable car elle permet de cerner l’évolution psychologique et philosophique des futurs pilotes. L’analyse, centrée sur 5 cas, révèle que l’intériorisation de la propagande militaire et impériale était imparfaite, individualisée. Toutefois, le panel étudié (5%de la population) est la principale faiblesse de l’argumentation d’Emiko Ohnuki-Tierney (l’auteure aurait eu des difficultés à trouver des sources originales et complètes). Il ressort de son analyse que peu de pilotes, dont aucun n’était probablement volontaire, aurait réellement adhéré à l’idéologie officielle. Ironie, les étudiants-pilotes étaient pétris de  culture : la « génération Romain Rolland » (lire notre recension du livre de Michael Lucken, Les Japonais et la guerre).


L’opposition entre la culture occidentale prônant le libre arbitre et l’obligation de se donner la mort en mission commandée a ouvert la porte à l’irrationalité et au romantisme. Leur dernière nuit était un déchirement, mais tous ont su trouver la force de sourire avant le dernier vol. Kasuga Takeo (86 ans), dans une lettre au docteur Umeazo Shôzô, apporte un témoignage exceptionnel sur les dernières heures des kamikazes : « Dans le hall où se tenait leur soirée d’adieu la nuit précédant leur départ, les jeunes étudiants officiers buvaient du saké froid. Certains avalaient le saké en une gorgée, d’autres en engloutissaient une grande quantité. Ce fut vite le chaos. Il y en avait qui cassaient des ampoules suspendues avec leurs sabres. D’autres qui soulevaient les chaises pour casser les fenêtres et déchiraient les nappes blanches. Un mélange de chansons militaires et de jurons emplissaient l’air. Pendant que certains hurlaient de rage, d’autres pleuraient bruyamment. C’était leur dernière nuit de vie. Ils pensaient à leurs parents et à la femme qu’ils aimaient....Bien qu’ils fussent censés être prêts à sacrifier leur précieuse jeunesse pour l’empire japonais et l’empereur le lendemain matin, ils étaient tiraillés au-delà de toute expression possible...Tous ont décollé au petit matin avec le bandeau du soleil levant autour de la tête. Mais cette scène de profond désespoir a rarement été rapportée. » (pp. 292-293).


Quel sens donner à leur sacrifice ?

 
Outre celui de protéger leurs proches, l’idée de régénération est forte. Un Japon nouveau, épuré des corruptions de l’Occident (matérialisme, égoïsme, capitalisme, modernité) germerait de leur sublime et suprême offrande. La méconnaissance (source d’interprétations multiples) et l’archaïsme du symbole a, semble-t-il, éveillé et mobilisé des sentiments profonds et primitifs, et pourtant ô combien constitutifs de notre humanité. Ironie encore, ce sont contre des bâtiments américains que viennent périr ces jeunes hommes, ces « bâtiments noirs, venus la première fois en 1853, obligeant le Japon à faire face aux défis de l’Occident et de la mondialisation. Il ne faut pas oublier que l’ultranationalisme japonais est une réponse à ce défi... Le Japon ne s’est pas laissé coloniser comme la Chine ; les guerres de l’opium ont donné à réfléchir aux élites japonaises. Mieux, les Japonais ont su s’armer, réfléchir et chercher le meilleur moyen de retourner les armes de l’agresseur. Le Japon a été un laboratoire intellectuel intense, et le communisme, idéologie sur laquelle la Chine habillera son nationalisme, est un import du pays du Soleil Levant... Ernst Nolte explique les excès du nazisme comme une réaction au danger communiste (La guerre civile européenne) : il en est de même au Japon. La menace des navires américains est un retour à l’acte fondateur du nationalisme nippon expliquerait l’irrationalité des actes de mort volontaire...


Le livre d’Emiko Ohnuki-Tierney, qui professe aux Ėtats-Unis, est remarquable, mais peut-être marqué par l’esprit du vainqueur. « Ce qui est regrettable par-dessus tout, écrit-elle (p. 308), c’est que la majorité de la population ait oublié les victimes de la guerre. Ces dernières sont tombées dans les oubliettes de l’histoire, ont été recouvertes par la clameur des discussions entre les libéraux et l’extrême-droite, au lieu d’être le rappel de la culpabilité de la guerre que chaque Japonais devrait partager ». La culpabilité (la repentance) est une arme politique ne l’oublions pas : une arme qui sert peut-être à garder le Japon sous influence américaine, car même si le Japon s’achemine vers une « normalisation » de sa politique et de ses moyens de défense, l’interdépendance des industries d’armement et de communication ainsi que l’instrumentalisation du débat sur la Seconde Guerre mondiale en Asie entravent le processus d’une totale indépendance politique de ce pays. Si les Japonais devraient partager la culpabilité des victimes de la guerre ? Qui doit partager celles des bombardements de Tôkyô, de Hiroshima et de Nagasaki ? Enfin, on ignore l’état d’esprit de ce qui ont le plus sincèrement adhéré à l’idéologie impériale au point de sacrifier leurs vies pour elle (Nogi Maresuke, Onishi Takijiro, fondateur des escadrilles tokkôtai, pour les plus illustres). Orages d’acier ou À l’Ouest rien de nouveau, deux expériences et deux visions, radicalement opposées, sur une même guerre...


Emiko Ohnuki-Tierney, Kamikazes, Fleurs de cerisier et Nationalismes, éditions Hermann, 2013, 580 p., 38 euros.

mardi, 29 avril 2014

Will Japan and Russia Escape the New Cold War?

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Will Japan and Russia Escape the New Cold War?

TRENIN, Dmitri

Ex: http://valdaiclub.com

 

As Russian Foreign Minister Sergey Lavrov was visiting Beijing last week, it was announced that the visit to Moscow by Japan's foreign minister Fumio Kishida was being postponed. The announcement, of course, came amid the rising tensions in Ukraine and the continuing fundamental deterioration of the West's relations with Russia. Japan, after all, is a loyal ally of the United States.

Yet, both Tokyo and Moscow have gone to some lengths to limit the damage. The joint announcement was couched in most polite phrases. The Russian foreign ministry spokesman, Alexander Lukashevich, allowed no criticism in his public comments on the postponement decision. Clearly, with the threats of economic sanctions against Russia still on the table in Washington and in EU capitals, even after the recent Geneva agreement on Ukraine, Moscow looks to Tokyo to make up for the likely losses in Europe and North America.

Japan's Prime Minister, Shinzo Abe, for his part, has not yet given up on Russia. As a geopolitical thinker, he needs Russia in an effort to balance China's rise. As a pragmatist, he thinks of going beyond simply importing energy from Russia, and seeks a stake in Russia's energy projects. As a strategist, he does not want Moscow to step up too much the technological level of its arms transfers to China's People's Liberation Army, by delivering, in particular, the S-400 air defense systems. Ideally, Shinzo Abe would also want to become the prime minister to finally resolve the almost 70-year-old territorial issue between Tokyo and Moscow.

None of this is going to be easy, but none of this is totally impossible either-provided the Japanese do their part by becoming what Germany, until recently, has been to Russia: a major technological partner, a leading investor, and a gateway to the wider region. Doing this will be exceedingly difficult, of course, in the current environment of intensifying U.S.-Russian rivalry. However, Abe may have a few useful arguments to offer to President Barack Obama when he comes to Tokyo.

Why should the US-Russian rivalry be allowed to strengthen Beijing? Who benefits when the United States is less comfortable and Japan feels less safe? In this new cold period in Russian-Western relations, there are already a few protected areas of collaboration, like non-proliferation. Why not a vibrant Japan-Russia link too? After all, wasn't it the one missing piece, even a strategic oversight in the original U.S. "pivot to Asia" concept?

Dmitri Trenin is Director of the Carnegie Moscow Center.

This article was originally published on www.carnegie.ru

mardi, 04 février 2014

Is Japan Losing its Independence?

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Record Trade Deficit in Japan and Nuclear Reality: Is Japan Losing its Independence?

Noriko Watanabe and Walter Sebastian

Ex: http://moderntokyotimes.com

The anti-nuclear lobby in Japan and the mass media in this nation on a whole continue to focus on the negative side of nuclear power stations. Not surprisingly, the government of Japan is dithering about this issue just like other important areas – for example the declining birth rate. However, Japan can’t afford to maintain its current energy policy because it is hindering the economy too much. Either Japan must re-focus on nuclear energy which helped in the modernization of this nation in the post-war period – or, Japan must bite the bullet and formulate an alternative energy policy and quickly.

The Ministry of Finance announced earlier this week that the trade deficit in 2013 reached a record figure. This should set off alarm bells in the corridors of power because the $112 billion dollar trade deficit will put enormous strains on the economy. After all, with no real energy policy existing currently in Japan, then it seem more than feasible that the next few years will follow the same pattern.

Issues related to the nuclear crisis in Japan appear to have been blown up out of all proportion. After all, the huge loss of life occurred because of the brutal tsunami that followed the massive 9.0-magnitude earthquake on March 11 in 2011. This isn’t meant to belittle the trauma caused to the local area in Fukushima because within a certain zone it is clear that problems continue to exist. However, the Fukushima Daiichi Nuclear crisis is more based on bad management, the age of the plant, deficiencies within the planning mechanisms of this nuclear plant, lack of accountability, limited safety mechanisms – and other areas of importance. Of course, the earthquake triggered the tsunami but the nuclear crisis that erupted was based on human failure when faced with the brutal reality of nature.

Vojin Joksimovich, nuclear specialist and writer at Modern Tokyo Times, stated last year: Japan has few natural resources and imports about 84% of its energy requirements. Nuclear power has been a national strategic priority since 1973. The country’s 54 nuclear plants have provided some 30% of the nation’s electricity. This was expected to increase to 40% by 2017 and to 50% by 2030. Japan has a fuel cycle capability including enrichment and reprocessing of used fuel for recycle and waste minimization. Shutdowns of 48 units capable of generating electricity have resulted in soaring fossil fuel, mostly LNG imports. Five nuclear utilities have been compelled to raise electricity rates: household rates 8.5-11.9%; commercial rates 14.2-19.2%.” 

“According to the NASA climate change study, summarized in the May 2013 issue of the Nuclear News, using nuclear power to generate electricity instead of burning fossil fuels prevented an average of 1.84 million air pollution deaths and 64 billion metric tons of CO2- equivalent greenhouse gas emissions between 1971 and 2009. In the time frame 2000-2009 the nuclear plants prevented on average 76,000 deaths/year. It appears that the NRA has ignored these types of considerations, while pursuing the absolute safety quest for the nuclear plants.” 

In the same article Vojin Joksimovich says: “There is now abundance of evidence showing that the worst accident in the history of commercial nuclear power has not harmed the Japanese public. The University of Oxford physics professor Wade Allison, author of the remarkable book Radiation and Reason: The Impact of Science on a Culture of Fear, testifying in the British House of Commons in December of 2011, was the first one to tell the world that the accident has not harmed the Japanese public: “No acute fatalities, no acute injuries, no extended hospitalizations due to radiation, unlikely cancer fatalities in 50 years.”

“World Health Organization (WHO) report followed: “Low risk to population, no observable health effects.”United Nations Scientific Committee on Effects of Atomic Radiation (UNSCEAR) report, with contributions from 80 international experts, says: “No immediate health effects, unlikely health effects in future among general public and vast majority of workers.” Most Japanese were exposed to additional radiation less than natural background level of 2.1mSv/yr. The report concludes that observable effects are attributable to stresses of evacuation and unwarranted fear of radiation. This means that the most serious health effects were not caused by radiation but by fear of it by the Japanese authorities. Lastly the Fukushima Medical University (FMU) is conducting a health management survey of all 2 million Fukushima Prefecture residents. Thus far the maximum dose received was only 19mSv. This writer, while in a local hospital, has received doses of 30-40mSv from CT scans. It means that he has received higher dose than ~99% of the Japanese population from the Daiichi accident.”

Now Japan is stuck by either adopting a pragmatic nuclear policy based on modernizing the entire system and implementing tougher standards – or to continue with importing dirty energy at a negative cost in terms of health related issues and hindering the economy. Of course, Japan could try to radically alter its energy policy by implementing a policy that boosts alternative energy – the effects and costs remain debatable. However, the current status quo of relying on expensive imported fossil fuels to bridge the non-existent energy policy isn’t viable.

The huge deficit is based on increasing imports that followed in the wake of the March 11 9.0-magnitude earthquake that triggered the tsunami and nuclear crisis in Fukushima. Since this period, imports continue to rise in relation to the demand of fossil fuels. Therefore, despite exports rising in Japan to nearly 10% in 2013, it is clear that the import imbalance, weak yen and the reliance on fossil fuels are all hitting the economy hard.

Forbes says: A surge in Japanese fossil fuel demand following the Fukushima nuclear crisisin 2011 pushed imports to their highest-ever level of 81.26 trillion yen.”

“In other words, steep post-Fukushima energy bills are taking a toll on Japan’s economy.”

“Prior to the Fukushima fiasco, nuclear reactors supplied a third of Japan’s electric demand.”

Lee Jay Walker at Modern Tokyo Times says: “The yen will continue to feel the effects of the current account deficit and if this isn’t addressed then traders may well sell off more yen. This in turn will have an adverse effect on import costs thereby creating a downward economic spiral. Therefore, given the reality that exports reached a near 10% increase last year, it is clear that Japan needs to address its energy policy along with other essential areas related to the economy.”

Akira Amari, Fiscal and Economic Policy Minister, is extremely anxious about the deficit. He warns that unless this issue is addressed then Japan “may become like the United States in depending on other countries for its financial funds.”

If the above scenario happens then Japan will further lose its independence and this also applies to the nuclear angle. After all, the development of the nuclear sector was an area of self-reliance given the overall weakness of Japan in relation to natural energy resources. Now, however, Japan is beholden to more imported fossil fuels; the nation relies on America for protecting the nation state in relation to the armed forces of this nation being stationed in Japan; while imported foodstuffs are a natural fact of life; and if the trade deficit continues then soon Japan may rely on foreign nations for funds. Therefore, the current leader of Japan needs to focus on a proper energy policy because the current status quo is undermining the economy along with other negative ills.

Lee Jay Walker gave guidance to both main writers

http://www.forbes.com/sites/williampentland/2014/01/27/the-cost-of-misguided-energy-policies-japans-record-trade-deficit/

http://www.moderntokyotimes.com/2013/07/16/restart-of-japanese-nuclear-plants-politically-correct-radiophobia-harms-the-general-public/

leejay@moderntokyotimes.com

http://moderntokyotimes.com

samedi, 01 février 2014

Les Ainu et la politique des minorités ethniques au Japon

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Les Ainu et la politique des minorités ethniques au Japon

par Rémy VALAT

« Le Japon est un peuple ethniquement et culturellement homogène », telle est l’idée dominante, héritée de la mythologie et de l’idéologie politiques modernes – qui a longtemps prévalu dans ce pays. À ce titre, pendant la période d’expansion coloniale en Asie (1895 – 1945), les populations ethniquement non japonaises ont été assimilées par la force (les habitants des îles Ryûkyû – l’actuelle préfecture d’Okinawa – et les Ainu) ou réduites au travail forcé (Coréens). D’autres minorités sont le résultat des migrations internationales contemporaines et de divisions culturelles au sein même de la société japonaise.

 

Survol sur les minorités au Japon

 

Le Japon est le « pays des dieux », un pays unique peuplé par une race homogène : une interprétation courante des groupes ethniques et des nations souhaitant se singulariser par rapport aux autres. Cette vision est défendue par les politiques et longtemps soutenue par la communauté scientifique qui défendait la thèse d’une « japonéité » se fondant sur une explication biologique, servant de prétexte à une appartenance communautaire reposant sur le « droit du sang ».

 

Toutefois, il existe des disparités au sein même de la population de même sang, une « caste » a pendant longtemps été reléguée : les Burakumin (ou « gens des hameaux » – sous-entendu « spéciaux »). Les personnes (et leurs collatéraux) exerçant des métiers « impurs » d’un point de vue religieux, parce qu’en relation avec la chair morte ou la mort, voire pour le caractère itinérant de leur profession (forains), ont été mises au ban de la société (comme les comédiens ou les bourreaux de la société française d’Ancien Régime). La discrimination à l’encontre de ces individus est en voie de disparition. D’autres Japonais, les victimes des bombes atomiques américaines, ont aussi été considérées avec un certain mépris, comme l’attesterait des enquêtes menées sur les demandes en mariage ou les demandes d’aides sociales (travail, assurance maladie), peut-être en raison de la visibilité de leurs blessures, qui serait une sorte de rappel d’un passé que l’on souhaiterait oublier.

 

La logique des vertus de l’homogénéité ethnique a été mise à mal par l’expérience d’un retour au pays de descendants d’émigrants japonais, les « personnes de lignée japonaise » (Nikkeijin). Ces derniers ont bénéficié – pendant la phase de reconstruction et d’essor économique de l’après-guerre – d’une politique favorable d’immigration, en réalité une politique officieuse d’immigration choisie. Ils seraient, à l’heure actuelle, environ 700 000 résidents permanents. Beaucoup sont revenus d’Amérique latine (principalement du Brésil), où ils ont servi de main-d’œuvre dans les plantations de café, des États-Unis, où ils ont été victimes de sévères lois sur l’immigration et – après la déclaration de guerre avec le Japon – de persécutions et d’internement dans des camps, et des Philippines. Ces « Japonais de sang » ont également été soumis, à leur arrivée, à un statut particulier (titre de résident temporaire, logement dans des quartiers réservés) et connaissent de nos jours une crise d’identité, mais aussi des difficultés d’insertion, notamment du fait de leur acculturation et, parfois d’une maîtrise insuffisante de la langue.

 

Ainu-People-2.jpgAvec les Ainu, objet de cet article, les 1,4 million d’habitants des îles Ryûkyû (actuelle préfecture d’Okinawa, annexée en 1879, puis occupée par l’armée étatsunienne entre 1945 et 1972) ont aussi bénéficié d’un statut particulier, parce que peuple autochtone. Engagés dans la lutte pour la rétrocession de l’île au Japon, les habitants d’Okinawa ont vu leur niveau de vie nettement amélioré, bien qu’encore inférieur à celui des autres préfectures japonaises.

 

La principale minorité issue de l’immigration est d’origine coréenne (700 000 personnes en 2005), qualifiés de « Ceux qui sont au Japon » (Zainichi). Cette communauté est venue sur le sol national japonais, lors de l’annexion de leur pays (1910 – 1945). Traités avec mépris, ces travailleurs – d’abord volontaires – puis soumis au travail obligatoire vivaient dans des espaces réservés (buraku) et ont mêmes été victimes de massacres collectifs : en 1923, dans les circonstances difficiles du tremblement de terre, bon nombre ont été tués par les Tôkyôites qui les ont accusés d’avoir empoisonné l’eau de consommation courante. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ils seront enrôlés de force, selon un système proche du Service du travail obligatoire allemand (S.T.O.). En 1945, plus de 2 millions de Coréens retourneront dans la péninsule, 600 000 resteront au Japon, mais privés de nationalité jusqu’en 1965 (ils deviendront « Sud-Coréens » en 1965). Le Japon compte aussi une minorité chinoise, d’immigrants venus des pays littoraux ou insulaires de l’Océan Indien et du Pacifique et un faible nombre de ressortissants des pays occidentaux, principalement nord-américains.

 

Ce tableau mérite cependant d’être nettement tempéré, car depuis l’ouverture du Japon sur le monde et la pacification de ces mœurs politiques en Asie, ce pays, doté d’une Constitution réellement démocratique, est progressivement devenu une terre d’accueil pour les étrangers (principalement asiatiques, des Chinois et des Coréens, soit 57 % des résidents étrangers au Japon), en raison du changement des mentalités et du besoin d’immigration, engendré par le vieillissement de la population : les étrangers représentent 2 % de la population totale, et leur nombre a augmenté de 50 % depuis le début du deuxième millénaire. Les nouveaux venus sans qualifications ou ne maîtrisant pas la langue sont, comme dans tous les pays économiquement développés, bien souvent réduits aux tâches les moins valorisantes ou les plus pénibles (ce sont les trois « K » : kitsui, pénible; kitanai, sale; kiken, dangereux), mais de réelles possibilités d’intégration – y compris l’adoption de la nationalité japonaise – existent pour eux. Chaque année, 42 000 nouvelles unions, soit 6 % des mariages annuels au Japon, sont le fait de couples internationaux (dans 80 % des cas, l’époux est Japonais). Dans la réalité, le regard porté par les Japonais sur les minorités asiatiques a changé, en dépit de la persistance de discriminations réelles. Le Japon paraît être en transition et s’adapter avec prudence aux réalités migratoires, corollaire de la troisième mondialisation.

 

La culture ainu : origines et principales caractéristiques

 

L’origine des populations ainu serait Préhistorique : elle remonterait à la période Jômon (voir notre article sur ce sujet), et son origine exacte reste encore incertaine. Certains individus sont parfois morphologiquement différents des hommes de la période Jômon, leurs phénotypes ayant des caractéristiques pouvant les rattacher aux populations caucasiennes. La culture Jômon sera progressivement subjuguée par une nouvelle vague de migrants venue du continent à la période Yayoi (Ve siècle av. J.-C. – IIIe siècle ap. J.-C.), importatrice de technologies (riziculture et métallurgie) et d’une culture nouvelles : leurs descendants sont les Japonais. Les populations constitutives de la culture ainu étaient implantés dans la zone septentrionale insulaire de Hokkaidô, de Tôhoku, des Kouriles, de Sakhaline et du sud de la péninsulaire du Kamtchakta. Les spécialistes penchent désormais pour la cœxistence de plusieurs groupes ethniques différents répartis dans la partie septentrionale du Japon actuel : les Emishi (voir infra) – repoussés par les Japonais – venus du Nord du Tôhoku et du Sud-Ouest de Hokkaidô- se seraient amalgamés avec les populations existantes (Ashihase).

 

Au VIIIe siècle, les ethnies ainu se répartissent sur les îles Kouriles et Sakhaline. Dans les premières annales du Japon (le Kojiki et le Nihongi ou Nihonshoki), ces derniers sont dépeints comme appartenant à une ethnie différente, farouche et sont qualifiés de différents ethnonymes (dont celui d’Emishi) faisant référence à leur pilosité corporelle abondante. Ces populations se qualifient elles-mêmes de Ainu, qui signifie  : « être humain ».

 

La langue ainu est radicalement différente du japonais (qui appartient au groupe des langues altaïques – à l’instar du turc, du mongol, du toungouse et du coréen) aussi bien d’un point de vue syntaxique, phonologique, morphologique que du vocabulaire (comme la langue basque dans le Sud-Ouest de la France et en Espagne). Enfin, la culture ainu est une tradition orale, son système d’écriture repose sur des translittérations empruntées aux langues des civilisations russes (alphabet cyrillique) et japonaises (katakana). Plusieurs dialectes la composent, mais une langue commune, véhiculaire était compréhensible par tous les membres de la communauté, parce que réservée à la transmission culturelle, notamment des mythes. La langue ainu est en voie d’extinction, peut-être une quinzaine de locuteurs l’utiliseraient de nos jours.

 

La culture ainu a hérité de nombreuses pratiques de la période protohistorique, notamment le tatouage, les fondements de la religion, la chasse, mais avec une évolution singulière dans le temps, constitutrice d’une « identité ». La société ainu est restée pendant longtemps traditionnelle et proche de la nature : ce « retard » technologique par rapport à la Russie et au Japon l’a – à terme – marginalisée.

 

Les Ainu face à la colonisation japonaise dans un contexte politique et économique d’expansion impériale (1869 – 1945)

 

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Les Ainu se trouvaient, du point du vue des gouvernements successifs japonais, au-delà du « limes ». Si les clans du Tôhoku (Nord-Est de l’île d’Honshû) ont finalement adopté la culture dominante, les autres groupes ont longtemps offert une âpre résistance au front pionnier japonais. Dès la période de Heian, les marches de l’État japonais étaient administrées par un officier supérieur, chargé de soumettre les Emishi : le shôgun. Au XVe siècle, les Japonais commencent à s’implanter dans le Sud-Ouest de Hokkaidô (Ezochi, appellation ainu) et à repousser les populations locales vers le nord, mais celles-ci parviennent à faire refluer l’invasion, puis à renouer des relations économiques avec le Japon.

 

À l’époque d’Edo (1600 – 1867), la politique de fermeture adoptée par le shôgunat ne s’applique pas aux Ainu : ces derniers commercent abondamment avec les Chinois et les Russes. Mais, la progression russe d’Ouest en Est à travers l’Asie centrale vient se heurter aux intérêts japonais : les enjeux se cristallisent autour du contrôle de l’île Ezo (ancienne appellation de Hokkaidô). Le Bakufu renforce son emprise sur l’île en détruisant la résistance des populations autochtones (bataille de Knashiri-Menashi, 1789) : l’île est économiquement exploitée par le Japon, notamment pour la production d’engrais de harengs.

 

Une rupture s’opère au XVIIIe siècle, l’invasion russe du Nord des îles Kouriles et de Sakhaline (à partir de 1730) pousse le gouvernement japonais à poursuivre une politique d’assimilation des peuples indigènes pour justifier sa revendication territoriale (un traité russo-nippon fixe la frontière entre les deux États, traité de Shimoda, 1854 : la ligne de partage séparant les deux empires se situant entre les îles d’Urup et d’Etorofu, voir notre article sur le sujet).

 

La restauration impériale (1868) et l’essor économique et industriel sont accompagnés d’un accroissement de la population japonaise : bon nombre d’insulaires partent s’installer à l’étranger, notamment en Amérique du Sud. En 1869, l’île de Hokkaidô est annexée à l’Empire et la colonisation favorisée (une commission de colonisation est créée); en 1886, l’île devient une préfecture, avec un statut particulier. Les Ainu sont rapidement soumis à un régime d’exception, leur interdisant toute activité culturelle (tatouages, pratiques funéraires, etc.) et économique traditionnelle (pêche, chasse). La situation connaît une aggravation, lorsqu’un nouveau traité russo-japonais rattache toutes les îles Kouriles au Japon, en échange de l’actuelle Sakhaline (1875). Les Ainu de Sakhaline sont contraints de rejoindre Hokkaidô, où ils sont cantonnés dans des réserves.

 

La politique cœrcitive japonaise vise à transformer la population, paupérisée par l’accaparement des terres par des colons japonais, en agriculteurs. Une politique volontariste d’assimilation, oblige les enfants des familles ainu à se rendre dans des écoles spécifiques où les enseignements sont dispensés en langue japonaise, les mariages mixtes sont encouragés. Par ailleurs, la colonisation a des effets ravageurs sur les autochtones, marqués psychologiquement, d’aucuns sombrent dans l’alcool, d’autres périssent des maladies importées par les immigrants nippons.

 

Les Ainu sont peu à peu soumis à un statut particulier. La commission de Colonisation adopte officiellement le terme de kyudojin, qui signifie « anciens aborigènes » (1878). Plus tard, en 1899, une loi est votée par les représentants japonais pour « protéger » les Ainu, considérés comme une « race primitive sur le déclin ». La politique coloniale japonaise se calque ainsi sur la pensée occidentale, notamment les théories évolutionnistes alors en vogue, et mise au service d’une politique expansionniste. Les Ainu et leurs territoires sont devenus une sorte de musée, de « zoo humain » (déjà vu sous d’autres tropiques), que viennent étudier et photographier les anthropologues occidentaux : des Ainu sont mêmes présentés aux expositions internationales de Chicago (1904) et de Londres (1910)…

 

Les Ainu vivent dans une situation de grande précarité, et ce n’est pas l’exode massif de population de la fin de la Seconde Guerre mondiale (1,5 million de Japonais supplémentaires se rendent sur l’île d’Hokkaidô, poussés par l’avancée soviétique en extrême-Orient et dans les îles Kouriles) qui permit d’apporter une amélioration à leur sort…

 

La politique coloniale japonaise est, nous l’avons dit, une appropriation et une adaptation des politiques coloniales européennes. Les autorités japonaises, nous l’avons vu, se sont octroyés le « pouvoir de nommer » la population cible, afin de l’individualiser et d’en souligner l’altérité, voire de la « dévaloriser » (la référence à la pilosité et le statut d’aborigène, voir supra). Cette qualification (1878) a été une étape déterminante à la création d’un statut singulier (1899) justifiant les pratiques discriminatoires et répressives, processus que l’on retrouve dans toutes les colonisations. Le statut de kyudojin n’est pas sans rappeler celui de l’indigénat dans les colonies françaises d’Afrique ou celui des Indiens d’Amérique du Nord.

 

Ces mesures administratives sont à l’origine d’un mouvement de défense de la part des populations ainu, même si certains, convertis au christianisme, espèrent que l’assimilation leur permettra d’obtenir une égalité de droit avec les Japonais. En 1930, un mouvement associatif voit le jour et réclame la révision de la « loi discriminatoire » de 1899. En outre, le processus de démocratisation enclenché après la défaite du Japon (1945) créé un climat plus favorable pour le mouvement revendicatif, qui peut notamment faire référence à l’article 13 de la Constitution qui rendent illégales la discrimination et l’assimilation du peuple ainu.

 

Les nouvelles représentations du peuple ainu : l’acquisition d’une reconnaissance officielle sous regard international

(1945 à nos jours)

 

Les années 1960 marquent un tournant. Pendant cette période encore, l’image des Ainu est instrumentalisée : les guides touristiques, notamment francophone, décrivent les populations locales comme « une race frappée d’impuissance » (guide Nagel, 1964); des scientifiques japonais vont même jusqu’à leur nier toute aptitude technique propre (ce qu’invalide les découvertes archéologiques actuelles). À la fin de la décennie, en pleine phase contestataire au Japon (mouvements des habitants et mouvements contre les discriminations) et dans le monde (Mai 1968), les associations de défense de la communauté ainu donnent de la voix par des actions symboliques (protestations contre la commémoration du centenaire de la colonisation de Hokkaidô, notamment).

 

ainu-5.jpgEn 1968, le gouvernement japonais fait un pas en faveur de la communauté en révisant partiellement la loi de 1899 (sans en modifier le caractère discriminatoire) et en proposant des aides sociales.  S’inspirant des mouvements de revendications des peuples autochtones de par le monde et des mouvements anti-colonialistes de libération nationale, le mouvement revendicatif ainu adopte une stratégie internationale, se fondant sur la charte internationale des droits de l’Homme.

 

L’association des revendications à ces valeurs universelles oblige le gouvernement japonais, en pleine expansion économique bâtie sur une représentation pacifique du pays, à signer la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (1978) et le Pacte international sur les droits civils et politiques (1979) et à reconnaître les droits des minorités. Mais l’existence de ces dernières est niée, le Premier ministre Nakasone Yasuhiro ayant officiellement rappelé le caractère mono-ethnique du pays (1986). En 1987, des représentants de la communauté ainu sont admis au groupe de travail des Nations unies, ayant entamé une réflexion sur le sort des peuples autochtones : il en résulte, en 1989, que le gouvernement japonais établit un comité en charge d’examiner les différents points d’une future loi concernant le peuple ainu.

 

Placé sous les projecteurs de la communauté internationale, Tôkyô finit par attribuer le statut de minorité ethnique aux Ainu et l’image de ces derniers commence à évoluer favorablement au yeux de l’opinion japonaise : en 1994, Kayano Shigeru (1926 – 2006), un des responsables du mouvement de revendication entre au Sénat; en 1997, le gouvernement japonais abolit l’appellation de kyudojin et adopte une loi de valorisation de la culture ainu (loi sur le développement de la culture ainu et la diffusion et l’instruction de la connaissance concernant la tradition ainu). Cette loi fait suite à un contentieux administratif autour du projet de construction d’un barrage sur un site sacré ainu : le rendu de la cour de justice de Sapporo ayant reconnu le caractère sacré du lieu et rappelé les carences du gouvernement japonais en matière de protection de l’héritage culturel des Ainu, cette décision a pesé sur l’adoption de la loi de 1997. C’est le premier texte reconnaissant une minorité ethnique au Japon. La législation offre désormais la possibilité aux multiples manifestations culturelles d’être subventionnées, mais ne prend spécifiquement en charge les problèmes socio-économiques de la population cible et aucune autonomie politique n’est accordée (elle n’est d’ailleurs pas recherchée par les intéressés). Le gouvernement revendique toujours sa totale légitimité sur l’île d’Hokkaidô : le centre de promotion de la culture ainu, qui a ouvert ses portes à Sapporo en 2003 est administré par des fonctionnaires japonais et lors du classement de la péninsule de Shiretoko à l’inventaire du patrimoine naturel mondial, aucune référence n’a été faite à la culture ainu, à laquelle cette langue de terre doit le nom. Enfin, le 6 juin 2008, une résolution, approuvée par la Diète, invite le gouvernement à reconnaître le peuple ainu, comme indigènes du Japon et à hâter la fin des discriminations, la résolution reconnaît le peuple ainu comme un « peuple indigène, avec un langage, une religion et une culture différente et abroge la loi de 1899.

 

D’après des enquêtes menées par l’association de défense de la culture ainu (Tari), les Ainu seraient encore victimes de discriminations scolaires (présence moindre sur les bancs universitaires) ou sociales (mariage). Cependant les mentalités et le regard porté sur les Ainu continuent de changer, notamment par le truchement des découvertes archéologiques, qui mettent en avant les peuples de la période Jômon, replacés dans une perspective et un environnement asiatiques (voir notre article sur le sujet). Des expositions internationales, un projet de parc culturel et même des artistes d’origine ainu (l’acteur Ukaji Takashi, le musicien Kano Oki) défendent et cherchent à valoriser leur culture. Des citoyens, issus de la génération d’enfants nés de couples mixtes, essayent de découvrir (pour ceux qui le découvrent) leurs origines, occultées par les parents. Cependant,  le film d’animation Princesse Mononoké (1997), réalisé par Hayao Miyazaki, fait implicitement référence aux traditions ainu, mais sans les manifester ouvertement. Mais, depuis peu (30 octobre 2011), un mouvement de militants ainu se lance dans la vie politique institutionnelle avec à sa tête, Kayano Shiro, le fils de l’ancien responsable ainu, Kayano Shigeru, et pour objectif l’instauration d’une société multiculturelle et multi-ethnique au Japon.

 

Conclusions

 

L’idée japonaise d’une société ethniquement homogène est battue en brèche, parce que pure construction politique et idéologique. Avant la Seconde Guerre mondiale, le rapport aux minorités reposait sur le rapport de force, la création d’un statut, l’assimilation et l’exploitation économique forcée. Hanté par la crainte de la dégénérescence raciale et aveuglé par le succès de l’expansion coloniale qu’ils attribuent à la supériorité de leur « race» en Asie, le Japon s’est enfermé dans une idéologie et une politique impérialiste, qui a conduit le pays à la défaite. Il est flagrant de relever qu’après un conflit multiséculaire contre les Emishi et les Ainu, c’est précisément au XIXe siècle – alors que le Japon s’ouvre aux technologies, aux économies et aux cultures de l’Occident – que ce pays en s’en appropriant certaines de ses valeurs, s’est donné les moyens d’une politique impériale à destination de l’Asie et des territoires proches revendiqués par lui (Hokkaidô, îles Ryukyu et péninsule coréenne).

 

L’objectif était ouvertement – pour les populations des îles périphériques – l’assimilation, car d’un point de vue juridique, le Japon ne reconnaissait, jusqu’à la résistance civique des Ainu, qu’une seule ethnie. Les difficultés rencontrées par les Nikkeijin dans leur intégration, a démontré que l’appartenance à un groupe sur le seul critère biologique (l’innée), est une interprétation erronée minimisant l’importance des facteurs culturels (l’acquis).

 

Même si à l’heure actuelle, les minorités ne sont toujours pas juridiquement considérées comme faisant partie intégrante de la société, car ne possédant pas les attributs de la japonité, la société japonaise change : les signes d’acceptation des minorités (officieuses et de la minorité officielle ainu) sont visibles dans les média et au quotidien. En outre, les conditions d’accès à la citoyenneté japonaise prennent les formes intelligentes, pragmatiques et prudentes d’une immigration choisie (comme remède au vieillissement programmé de la population). Enfin, émane du pays une image pacifiée et positive, que l’on retrouve dans les médias occidentaux et sur Internet (le « Cool Japan », politique internationale pacifique, etc.), qui font de ce pays, probablement un des seuls réellement démocratique en Asie, une terre d’accueil pour de nouveaux immigrants, à condition que ceux-ci fassent un effort réel d’intégration (ce qui est au demeurant la moindre des choses…).

 

Rémy Valat

 

Orientations bibliographiques :

 

• Batchelor John, Sympathetic Magic of the Ainu. The Native people of Japan, Folklore History Series, reprint 2010.

 

• Beillevaire Patrick, « Okinawa : disparition et renaissance d’un département », in Le Japon contemporain, Dir. Jean-Marie Bouissou, Fayard, C.E.R.I., 2007.

 

• Dallais Philippe, « Hokkaidô : le peuple Ainu, ou l’ambivalence de la diversité culturelle au Japon », in Le Japon contemporain, Dir. Jean-Marie Bouissou, Fayard, C.E.R.I., 2007.

 

Ethnic groups in Japan, including Ainu people, Ryukyuan people, Emishi, foreign-born Japanese, Dekasegi, Yamato people, Gaijin, Chinese people in Japan, Brazilians in Japan, Aterui, Indians in Japan, Peruvians in Japan, Burmese people in Japan, Hephaestus Books, 2011, (Une impression des sources Wikipédia disponibles sur le sujet).

 

• Kayano Shigeru, The Ainu. A story of Japan’s Original People, Tuttle Publishing, 1989.

 

• Pelletier Philippe, Atlas du Japon. Une société face à la post-modernité, Autrement, 2008.

 

• Poutignat Philippe et Streiff-Fenart Jocelyne, Théories de l’ethnicité, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », avril 2008.

 

• Reischauer Edwin O., Histoire du Japon et des Japonais. Des origines à 1945, Seuil, coll. « Points Histoire », 1988.

 

• Yamamoto Hadjime, Rapport japonais. Les minorités en droit public interne au Japon, en ligne à l’adresse suivante : www.bibliojuridica.org/libros/4/1725/45.pdf

 


 

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jeudi, 23 janvier 2014

Muere el soldado japonés que siguió luchando 30 años después del fin de la II Guerra Mundial

Muere el soldado japonés que siguió luchando 30 años después del fin de la II Guerra Mundial

alt«Victoria o derrota, yo he hecho todo lo que he podido» respondió el subteniente japonés Hiroo Onoda en 1974 al enterarse de la derrota de Japón casi 30 años después de que hubiera finalizado la II Guerra Mundial. El soldado del Ejército Imperial nipón vivió durante tres décadas escondido en la selva de Filipinas convencido de que se seguía luchando.

Onoda solo entregó sus armas cuando su comandante le ordenó abandonar su escondite en una montaña de la isla de Lubang, a 112 kilómetros al sur de Manila. Cuando fue hallado en una montaña de la isla de Lubang, a 112 kilómetros al sur de Manila, el soldado japonés conservaba en su poder una copia de la orden dada en 1945 por el emperador Hirohito para que los soldados japoneses se entregasen a los aliados, pero él insistía: «Sólo me rendiré ante mi superior».

Onada había llegado a la isla de Lubang en 1944 a los 22 años con la misión de introducirse en las líneas enemigas, llevar a cabo operaciones de vigilancia y sobrevivir de manera independiente. Tenía una orden: no rendirse jamás y aguantar hasta la llegada de refuerzos. Con otros tres soldados obedeció estas instrucciones incluso después de la capitulación de Japón.

Vivió de plátanos, mangos y el ganado que mataba en la selva, escondiéndose de la Policía filipina y de las expediciones de japoneses que fueron en su busca desde que en 1950 se supo de su existencia por uno de los soldados que le acompañaban, que decidió abandonar la selva y volver a Japón. Onoda los confundía con espías enemigos.

Expediciones fallidas

Tokio y Manila intentaron contactar con los otros dos soldados japoneses durante años hasta que en 1959 finalizaron su búsqueda, convencidos de que habían muerto. En 1972, Onoda perdió a su último hombre al hacer frente a las tropas filipinas y Tokio decidió entonces enviar a miembros de su propia familia para intentar convencerle de que depusiera las armas. Todos los esfuerzos fueron en vano y su pista se perdió de nuevo hasta que fue avistado por el estudiante japonés Norio Suzuki en marzo de 1974 cuando hacía camping en la selva de Lubang.

Tuvo que desplazarse hasta la isla el entonces ya excomandante Yoshimi Taniguchi para entregarle las instrucciones de que quedaba liberado de todas sus responsabilidades. Solo así, Onada se rindió. Su madre, Tame Onoda, lloró de alegría.Los japoneses recibieron a Onada como a un héroe nacional a su regreso a Tokio por la abnegación con la que había servido al emperador. Tenía entonces 52 años. El exteniente contaría entonces que durante sus treinta años en la jungla filipina solo tuvo una cosa en la cabeza: «ejecutar las órdenes».

Un año después se mudó a Brasil, donde se casó con Machle Onuki y gestionó con éxito una finca agrícola en Sao Paulo. En 1989 volvió a Japón y puso en marcha un campamento itinerante para jóvenes en el que impartía cursos de supervivencia en la naturaleza y escribió su increíble aventura en el libro «No rendición: mi guerra de 30 años».

Onoda, el último de las decenas de soldados japoneses que continuaron su lucha sin creer en la derrota nipona, falleció este jueves en un hospital de Tokio a los 91 años por un problema de corazón, tras llevar enfermo desde finales del año pasado.

Fuente: ABC

In morte di Hiroo Onoda: apologia dell'eroismo

In morte di Hiroo Onoda: apologia dell'eroismo

di Daniele Scalea

Fonte: huffingtonpost

Si è spento mercoledì scorso Hiroo Onoda, il militare giapponese disperso nelle Filippine che, ignorando l'esito della Seconda Guerra Mondiale, continuò a combattere nella giungla, prima con tre commilitoni e - dopo la loro resa o morte - da solo, fino al 1974. Inizialmente rifiutò d'arrendersi pure di fronte ai messaggi con cui lo si informava della fine del conflitto, ritenendoli una trappola. Depose le armi solo quando il suo diretto superiore di trent'anni prima si recò da lui per ordinarglielo, dispensandolo dal giuramento di combattere fino alla morte. Raccontò la sua storia in un libro, pubblicato nel 1975 da Mondadori col titolo Non mi arrendo.

La storia di Onoda apparirà senz'altro "esotica" (roba da giapponesi!) e "arcaica" (ormai le guerre non ci sono più! In Europa Occidentale, s'intende, perché nel resto del mondo ci sono eccome) a gran parte dei lettori italiani del XXI secolo. Chi di noi riesce a immaginarsi, poco più di ventenne nella giungla, restarci trent'anni solo per onorare un giuramento e battersi per la causa che si ritiene giusta? Eppure la storia di Hiroo Onoda qualcosa da insegnarci ce l'ha; e proprio perché la sentiamo così lontana, temporalmente e culturalmente, da noi.

In quest'epoca così moderna e avanzata, il lettore al passo coi tempi potrà ben pensare che, in fondo, Onoda era solo un "fanatico", un "folle", un "indottrinato". Nei tempi bui che furono, il senso comune l'avrebbe definito un "eroe". Questa figura dell'Eroe, così pomposamente celebrata nei millenni passati, ha perso oggi tanto del suo smalto - presso la civiltà occidentale, e in particolare europea. Bertolt Brecht sancì che è sventurata quella terra che necessiti di eroi. Il nostro Umberto Eco ha deciso che l'eroe vero è quello che lo diventa per sbaglio, desiderando solo essere un "onesto vigliacco" come tutti noi altri. Salendo più su troviamo il nuovo vate d'Italia: Fabio Volo ha scritto che non è eroe chi lotta per la gloria, ma l'uomo comune che lotta per la sopravvivenza.

Prima di discutere queste tre idee, precisiamo che l'Eroe si definisce (o almeno così fa la Treccani) come colui che si eleva al di sopra degli altri: in origine più per la nobilità di stirpe, in seguito per la nobiltà nell'agire. L'Eroe non è necessariamente un guerriero: semplicemente la guerra, mettendo chi le combatte di fronte a situazioni e rischi assenti nella vita comune, facilita il manifestarsi dell'eroismo. Ma non è banalizzazione dire che l'Eroe può esserlo nel lavoro, nella scienza, nella politica, nell'arte e così via. È invece banalizzazione individuare l'eroismo nel fare ciò che tutti fanno, perché viene meno il senso stesso del termine: l'elevarsi, il fare più del normale, il più del dovuto. Dove tutti sono eroi, nessuno è eroe.

Alla luce di quanto appena detto, si coglierà l'illogicità della formulazione di Volo (per la cronaca: tratta da Esco a fare due passi), pure se inserita nel suo epos dei broccoletti (in sintesi elogio di mediocrità e de-gerarchizzazione di valore; ma se proponi un modello anti-eroico, allora parla di anti-eroi e non di eroi). Tutti sopravvivono, indotti in ciò dall'istinto di autoconservazione, e non vi è nulla di particolarmente commendevole nel far ciò che si è costretti a fare. Al contrario, l'Eroe per distinguersi dalla massa può andare contro l'istinto di autoconservazione (sacrificare, o porre a rischio, la propria vita per conseguire un obiettivo o per salvare altre vite), o fare più di ciò che è da parte sua dovuto. Non potremmo definire un eroe, ad esempio, un Giacomo Leopardi che sacrifica la sua salute e la sua felicità per diventare un sommo poeta, e così deliziare contemporanei e posteri?

L'idea della scelta libera e volontaria pare elemento costitutivo dell'eroismo, e ciò richiama in causa anche Eco. È in fondo diventato un cliché anche hollywoodiano, quello per cui l'eroe protagonista del film non diviene tale perché convinto della causa per cui battersi, ma solo perché travolto dagli eventi. L'escamotage classico vuole che i "cattivi" massacrino la sua famiglia, inducendolo per vendetta a combatterli. Questo leit motiv lo ritroviamo in tanti film di successo: pensiamo a Braveheart, The Patriot, o Giovanna D'Arco di Luc Besson, dove tra l'altro il primo e l'ultimo cambiano la vera storia pur d'inserirvi il tema suddetto. Gli appassionati di cinema potranno trovare molti più esempi, anche in generi diversi dall'epico e dallo storico. A quanto pare, l'individuo occidentale medio riesce ad accettare molto più la vendetta personale che lo schierarsi coscientemente per una causa collettiva che si ritiene giusta.

Eppure, lo ribadiamo, è la libera scelta a dare davvero valore all'atto eroico. Sembrano in ciò molto più savi dei nostri maître à penser odierni i teologi riformatori del Cinquecento quando, con logica rigorosa, notavano che non vi può essere merito individuale senza libero arbitrio. Così come una salvezza decisa da Dio è merito esclusivamente di Dio, un atto eroico costretto (non semplicemente indotto: costretto) dalle circostanze è "merito" delle circostanze stesse.

Rimane in ballo la questione se sia davvero una sventura aver bisogno di eroi. Tanti pensatori hanno più o meno esplicitamente ricondotto il progresso a un meccanismo di sfida-risposta, in cui spesso giocano un ruolo essenziale individui straordinari per la loro capacità creativa. Tra i più espliciti assertori di tali tesi nel secolo scorso, citiamo alla rinfusaA.J. Toynbee, H.J. Mackinder, Carlo Cipolla, Lev Gumilëv. Sono le persone straordinarie (nel senso letterale di fuori dall'ordinario, e dunque non comuni) che, con i loro atti creativi (in cui spesso la creazione maggiore è l'atto in sé come esempio ispiratore per gli altri), rinnovano costantemente la vitalità di un popolo. Rovesciando l'aforisma di Brecht:sventurata quella nazione che non ha bisogno di eroi, perché significa che ha scelto coscientemente d'avviarsi sulla strada della decadenza.

Restiamo sull'eroismo, torniamo a Hiroo Onoda. C'è una lezione che potremmo apprendere dall'eroica follia di questo giapponese che per trent'anni continua da solo una guerra già conclusa, o dai mille altri eroi - di guerra e pace, armati di spada, penna o lingua che fossero? Io credo di sì.

Potremmo imparare da loro lo spirito di sacrificio e l'indomita fede di chi crede in ciò per cui lotta - sia essa una patria o un'idea, un partito o una persona, una guerra o una pace.

Dovremmo imparare da loro che eroismo non è sopportare supinamente, tutt'al più inveendo (ma su Facebook o Twitter, che la poltrona è più comoda della piazza) contro le storture del mondo; ma eroismo è insorgere, levarsi contro l'ingiustizia. Se il mondo è storto non è eroico guardarlo cadere, ma cercare di raddrizzarlo.

Dovremmo riflettere che se oggi le cose vanno male, mancano i diritti e abbondano le ingiustizie, la morale è corrotta, l'ingiusto trionfa e il giusto patisce; se l'oggi insomma ci pare sbagliato, dovremmo impegnarci a correggerlo.

Perché i diritti non li regala nessuno, la giustizia non si difende da sola, il progresso non viene da sé. Servono i creativi, servono gli eroi.

Con buona pace dei Brecht, degli Eco e dei Volo.


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vendredi, 17 janvier 2014

Hiroo Onoda: RIP

jeudi, 19 décembre 2013

Les Japonais et la Guerre de l'Asie-Pacifique

Les Japonais et la Guerre de l'Asie-Pacifique
 
De la tragédie au mythe

Rémy Valat
Ex: http://metamag.fr

Le livre de Michael Lucken, Les Japonais et la guerre (1937-1952), est un ouvrage qui fera date dans l'historiographie du Japon contemporain autant par l'originalité et la pertinence de l'approche méthodologique que par l'acuité des idées exprimées par son auteur. 


9782213661414-G.jpgMichael Lucken est professeur des université près l'Institut des langues et des civilisations orientales, spécialiste de l'art japonais, spécialité qui est une des pièces maîtresse du dispositif analytique et des sources exploitées par l’auteur pour saisir notamment les mécanismes psychologiques ayant animé les Japonais pendant la guerre de l'Asie-pacifique et l'immédiat après-guerre (fin de l'occupation américaine). Rien de plus précieux en effet, en une période où la parole publique n'est pas nécessairement libre, que de recourir aux sources littéraires, graphiques et visuelles pour saisir l'ampleur affective du drame, son appropriation par les Japonais et son instrumentalisation par les pouvoirs politiques nippons et américains. 

Il suffit de garder en mémoire les passages poignants de Shûsako Endô, notamment dans son roman Le fleuve sacré, pour apprécier l'impact sur cet auteur lorsqu'il fût informé a posteriori des actes de cannibalisme commis par des soldats affamés, harcelés et en déroute en pleine jungle de Birmanie. L'ombre de la guerre se pose aussi implicitement ou explicitement dans les réalisations cinématographiques et la bande dessinée contemporaines (films, anime, manga). Surtout, Michael Lucken, qui a exploité une importante quantité de sources japonaises, nous démontre comment la Seconde Guerre mondiale est devenue « une figure mythique » au Japon. Il nous explique comment la fin du conflit, et en particulier le drame des bombes atomiques, a été exploitée par l'empereur et sa chancellerie pour assurer, avec le consentement des autorités américaines d'occupation (SCAP), la survie et la permanence de l'institution impériale au prix du sacrifices de nombreuses vies humaines, d'une interprétation et d'une manipulation de la réalité historique. Ce thème est abordé dans la seconde partie de l’ouvrage et apporte un éclairage sur les enjeux mémoriels et politiques actuellement en jeu en Asie.

L’auteur relate peu les crimes commis par l'armée japonaise en guerre. Cela a déjà été traité par Jean-Louis Margolin (Violences et crimes du Japon en guerre, 1937-1945, Grand Pluriel, 2009) et les campagnes militaires, ce n'est pas l'objet principal de son livre. Il a surtout étudié le vécu de l'arrière, l'impact de la guerre sur le quotidien : une guerre d'abord coloniale et lointaine, et qui devient de plus en plus présente en raison d'un plus grand embrigadement du corps social, de l'accroissement du nombre des tués et des bombardements alliés. Le lecteur pourra être choqué par le mépris des autorités pour leurs soldats, et en particulier du problème du rapatriement des ossements des morts au combat : pour les Japonais, le respect aux défunts et le deuil des familles est conditionné par le retour des cendres, de restes ou d'effets personnels du défunt ; or, la réalité des engagements armés ne le permettant pas toujours, les autorités militaires japonaises ont multipliés les expédients, et même préconisé le prélèvement in vivo et anticipé de reliques, principalement les phanères (à l'instar des pilotes de kamikaze qui avaient la tête rasée, à l'exception d'une mèche de cheveux destinée à être envoyée aux proches du héros). Ce mépris a ouvert très tôt les portes à toutes les sollicitations au sacrifice : si la valorisation et la pratique d’offrir héroïquement sa vie au combat est ancienne au Japon (et pas uniquement japonaise, l'auteur explique brillamment l'influence de la pensée occidentale au Japon, et en particulier Romain Rolland), c’est surtout l’exemple des trois soldats qui se seraient délibérément sacrifiés à Shangai le 22 février 1932 en transportant un tube de Bangalore (explosif servant à faire des brèches dans les fortifications ou lignes de barbelées adverses) que les contemporains de la guerre ont en mémoire : ces « trois bombes humaines » ou « projectiles de chair » sont à l’origine du terme « nikudan », largement employé dans la presse pour désigner les soldats prêts à mourir dans une mission sans retour. L'épisode des kamikaze se situe dans cette continuité, mais avec une intensité supérieure, car le Japon se trouve devant le gouffre de la défaite...


Enfin, Michael Lucken nous éclaire sur la dimension romantique de l'engagement patriotique de la population japonaise qui pensait sincèrement que l'occupation nippone en Asie serait temporaire, le temps nécessaire d' « éclairer spirituellement » les populations des pays conquis... Malgré la brièveté de la présence des armées impériales, le message d'émancipation véhiculé à l'époque a porté ses fruits, comme en témoigne la vague de décolonisation asiatique. Nous est révélée l'irrationalité et le romantisme du peuple et des élites nippons dans le déclenchement et la poursuite d'une guerre avec de faibles, voire aucune, perspectives de victoire. « Le Japon enfermé dans la modernité occidentale (…) n'avait d'autres solutions (…) que de se lancer dans la guerre, pour que les individus puissent ainsi une dernière fois sentir et prolonger la pureté du souffle national. Il n'y avait à l'horizon ni paix ni après-guerre, seul importait un engagement immédiat, complet et sans retour. La lumière se trouverait dans la ruine. » 


Michael Lucken, Les Japonais et la guerre (1937-1952), Fayard, 2013, 399 p.

lundi, 02 décembre 2013

L’Océan Pacifique est-il devenu radioactif ?

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APRES FUKUSHIMA…

L’Océan Pacifique est-il devenu radioactif ?

Michel Lhomme
Ex: http://metamag.fr
Il faut de l’abnégation et chercher l’information pour entendre parler de Fukushima. Or on apprend assez vite que de l’eau hautement radioactive en provenance des ruines de la centrale de Fukushima se déverserait toujours dans l’océan Pacifique, créant un état d’urgence sanitaire difficilement maîtrisable selon les propres dires d’un responsable de l’agence industrielle Tepco, en charge de la gestion des équipements nucléaires japonais. 

Le problème aurait deux sources : l’eau souterraine contaminée et l’eau stockée dans des réservoirs dont une partie s’écoulerait, suite à des fuites. 300 tonnes d’eau contaminée aurait ainsi déjà atteint la mer, a reconnu Tepco au mois d’Août dernier. Mais les autorités japonaises continuent de nier et affirment que l’Océan Pacifique n’a jamais été atteint ou que le total cumulé d’éléments radioactifs s’écoulant en mer s’inscrirait dans des limites légales et autorisées pour la santé. Qui croire ? Les déclarations ou les cartes de radioactivité des chercheurs indépendants ?
 
Des mesures de contention ont été prises, tel qu’un système de décontamination prévu pour traiter 500 tonnes d’eau par jour ou encore le pompage de l’eau avant qu’elle n’atteigne la mer et enfin, la construction d’une barrière sous-marine qui a débutée en mai 2012 et qui sera achevée en septembre 2014. 

Toutes ces mesures reconnaissent donc bien que le système de décontamination existant n’est pas complètement opérationnel et qu’en tout cas, il est nécessaire. En outre, le chef de l’Autorité de sûreté nucléaire japonaise a déclaré en octobre qu’une brèche avait été détectée dans une barrière souterraine laissant émerger de l’eau contaminée dans des quantités supérieures à la radioactivité légalement admise. 

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Tepco a répliqué aussitôt en indiquant : “Nous ne savons toujours pas pourquoi le niveau de radiation a bondi, mais nous poursuivons les efforts pour éviter une nouvelle expansion de la contamination”. S’il a souvent été reproché aux autorités japonaises une certaine opacité sur la question, des chercheurs indépendants souvent américains ou canadiens se penchent régulièrement sur le sujet et leurs estimations sont alarmantes. Ce seraient des quantités extrêmement dangereuses de strontium, tritium et césium qui se seraient échappés de Fukushima pour se déverser dans tout l’Hémisphère Nord portés par les courants, la pluie et le vent. 

Face aux derniers aveux de Tepco, les risques semblent bien tangibles et s’étendraient, selon les spécialistes, sur toute la côte ouest des Etats-Unis et cette pollution radioactive pourrait potentiellement affecter la vie marine et la santé de millions de personnes vivant dans l’hémisphère nord au bord des côtes du Pacifique. 

Ce que craignent surtout les spécialistes, c’est un nouveau séisme, un de ces tremblements de terre dévastateurs dont le Japon est coutumier. La revue “The New Scientist” a tenu à préciser que la centrale nucléaire de Fukushima contenait à l’origine 1760 tonnes de matières nucléaires alors que Tchernobyl en contenait 180. Mais vous l’aurez noté, on parle beaucoup moins de Fukushima en France malgré la Polynésie française toute proche. 

dimanche, 01 décembre 2013

B52 EN ASIE : UNE PENTE DANGEREUSE

 

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B52 EN ASIE : UNE PENTE DANGEREUSE

Les stratèges américains en plein chambardement

Michel Lhomme
Ex: http://metamag.fr

Nous l’avions écrit: le prochain théâtre de guerre sera asiatique et en partie maritime (l’Océan Pacifique). Deux bombardiers américains B-52 ont pénétré dans la très controversée « zone aérienne d'identification » (ZAI) mise en place par la Chine.  Cette zone est récente et même très récente puisque elle date tout simplement de samedi dernier ! On nous dit que les Etats-Unis n’en auraient pas référé à Pékin mais heureusement puisque cette ZAI n’existe pas dans les textes ! Les avions US, qui n'embarquaient aucune arme mais sans doute de bons outils de renseignements, ont décollé de l'île de Guam dans le Pacifique lundi soit à peine deux jours après l’annonce unilatérale chinoise. Le soutien des Américains à leur allié japonais est donc total.

Aucun plan de vol n'avait été déposé au préalable auprès de la Chine et la mission s'est déroulée "sans incident". Les deux avions sont restés "moins d'une heure", - ce qui est assez long - dans la dite "zone aérienne d'identification". Ils attendaient sans doute les avions de chasse chinois que Pékin s’est bien gardé d’envoyer. Cette "zone aérienne d'identification" a suscité l'opposition ferme et justifiée du gouvernement japonais car elle englobe les îles Senkaku, îles fermement revendiquées par Pékin sous le nom de Diaoyu. Mais la ZAI chinoise de samedi va aussi plus loin : elle englobe des eaux revendiquées par Taïwan et la Corée du Sud, ces derniers ayant également manifesté leur mécontentement après la décision de Pékin.

CHINA_-_JAPAN_-_Diaoyu-Senkaku.jpgDans sa déclaration de samedi, la Chine exigeait que tout appareil s'aventurant dans cette ZAI fournisse désormais au préalable son plan de vol précis, affiche sa nationalité et maintienne des communications radio permettant de "répondre de façon rapide et appropriée aux requêtes d'identification" des autorités chinoises, sous peine d'intervention des forces armées. Le ton est monté lundi entre Tokyo et Pékin à la suite de la décision chinoise d'imposer cette zone de contrôle aérien. Le même jour et en solidarité avec son allié japonais, le colonel Warren, porte-parole de la Défense américaine a qualifié la mesure chinoise d'"incendiaire". Des responsables du Pentagone ont alors précisé que les avions de l'armée américaine continueraient de voler dans cette région comme avant, sans soumettre de plans de vol à Pékin au préalable.

Le différend territorial entre les deux puissances asiatiques s'est aggravé depuis septembre 2012, lorsque le Japon a nationalisé trois des cinq îles qui appartenaient à un propriétaire privé nippon. Cette décision avait entraîné une semaine de manifestations anti-japonaises violentes en Chine, et une forte contestation de Pékin. Le Japon fit de son côté patrouiller ses garde-côtes dans les mêmes eaux et ce chassé-croisé avait suscité les craintes d'un éventuel incident armé entre les deux puissances.

B52 dans le Pacifique mais lâchage en Afghanistan

Par ailleurs, poursuivant leur politique de « changement de pivot stratégique », la conseillère de sécurité nationale américaine Susan Rice en visite à Kaboul a prévenu le président afghan Hamid Karzaï qu’il ne serait « pas viable » de retarder la signature de l’accord de sécurité entre leurs deux pays. Elle a haussé le ton en affirmant que sans signature rapide d’un accord réciproque, les Etats-Unis n’auraient d’autre choix que de prévoir un après-2014 où les troupes américaines et de l’Otan ne seraient plus présentes .Le gouvernement de Karzaï se retrouverait seul et sans appui financier. Sans le dire ouvertement, les USA affirment qu’ils sont prêts à lâcher l’Afghanistan, quitte à  entériner un retour taliban dans le secteur. Un peu déroutant tout de même pour nos défunts soldats : pour qui, pourquoi sont-ils morts finalement ?

La relation entre les Etats-Unis et l’Afghanistan est extrêmement tendue. L’enjeu est la signature du traité bilatéral de sécurité (BSA) que Washington et Kaboul négocient actuellement depuis plusieurs mois. Kharzaï ne cesse de faire monter les enchères. La Loya Jirga, grande assemblée traditionnelle afghane, a pourtant approuvé dimanche le Traité, qui doit définir les modalités d’une présence militaire américaine en Afghanistan après le départ des 75 000 soldats de l’Otan. En fait, d’ores et déjà, ce retrait fait craindre une recrudescence des violences dans le pays et même une offensive taliban au printemps prochain entraînant une déstabilisation de la partie indienne ou pakistanaise.

Pour précipiter cette signature, la Maison Blanche tente de jouer des divisions locales et s’est donc vivement félicitée de l’approbation du Traité bilatéral de Sécurité par la Loya Jirga pachtoune. Elle demande des comptes à Kharzaï ! Or, ce dernier aurait énoncé de nouvelles conditions pour signer l’accord et aurait même indiqué qu’il n’était pas prêt à signer rapidement.

Hamid Karzaï est aux abois 

Il souhaite que la promulgation de l’accord ait lieu après l’élection présidentielle d’avril 2014, à laquelle cependant la Constitution lui interdit de se présenter. Les Etats-Unis ont refusé catégoriquement les nouvelles exigences de Karzaï et répondu que « retarder la signature jusqu’aux élections de l’année prochaine n’était pas viable, car cela ne donnerait pas la clarté nécessaire aux Etats-Unis et à l’Otan pour planifier leur présence après 2014. L'absence d’un BSA signé mettrait en danger les promesses d’aides faites par l’Otan et d’autres pays aux conférences de Chicago et Tokyo en 2012 ».

La diplomatie a aussi des perspectives économiques. En Iran, les entreprises automobiles américaines s’apprêtent à revenir dans le pays, satisfaites au passage d’avoir pu, avec l’aval du blocus occidental, éliminé les compagnies françaises concurrentes, Renault et Peugeot ! En fait, on n’est pas vraiment sûr que la diplomatie française ait compris les changements d’alliances en cours, qu’elle ait réellement pris la mesure de la rapidité avec lequel les Etats-Unis, très bien informés sur l’état réel de la défense chinoise sont aujourd’hui déterminés à pivoter à cent quatre vingt degrés. Ils ont accéléré l’accord sur le Sahara occidental et renforcé l’alliance militaire avec le Maroc. Ils sont en train  d’éclaircir leurs positions en Amérique latine tout cela pour se concentrer ensuite sur le Pacifique et l’endiguement de la Chine. Il serait peut-être temps que le Quai d’Orsay se réveille. Mais après tant de décisions irrationnelles, le peut-il encore vraiment sans se désavouer totalement ?

vendredi, 15 novembre 2013

Okinawa : la « bataille Ragnarök »

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Okinawa : la « bataille Ragnarök » (1er avril – 21 juin 1945)

par Rémy VALAT

 

En mémoire du soldat Tsukamoto Sakuichi, mort au combat à Okinawa (1945)

 

塚本作一氏を偲んで

 

Il y a 68 ans s’est déroulée sur l’île d’Okinawa une des batailles les plus sanglantes de la Seconde Guerre mondiale. Les habitants de l’île, retournée sous la souveraineté du Japon en 1972, vivent dans le souvenir de cette bataille et subissent au quotidien les conséquences de celle-ci : présence de l’armée américaine d’occupation, à la fois fardeau financier et source de crimes sexuels, un sol miné par 2 100 tonnes d’obus encore intacts, des séquelles psychologiques et morales. En un mot, le Japon paye encore le prix de la défaite face aux forces alliées en septembre 1945.

 

Une île martyre…

 

L’île est encore occupée par un fort contingent de troupes de marine américaines, bien que 9 000 soldats vont être prochainement déplacés sur l’échiquier de la zone Pacifique, en application des accords bilatéraux nippo-américains, récemment révisés, sur le redéploiement des forces américaines stationnées à Okinawa (2006). Les États-Unis vont relocaliser une partie de leurs unités à Guam et à Darwin (Australie). Ces mouvements sont une réponse à la montée en puissance de la flotte de guerre chinoise au sud et à l’est de la Mer de Chine, flotte qui mène d’audacieuses actions de déstabilisations près des îlots dont ils revendiquent la souveraineté (les îles japonaises Senkaku). La stratégie navale chinoise aurait pour ambition de prévenir la présence de porte-avions américains, par la construction de bâtiments de la même catégorie et l’amélioration de son équipement en missiles balistiques anti-navires : la dispersion des unités américaines aurait pour objectif de multiplier les cibles potentielles et de créer une nouvelle donne stratégique. Les unités restantes (9 000 hommes environ) aurait pour zone d’intervention l’Asie du nord-est (péninsule coréenne et façade orientale de la Chine comprise), celle de Guam la zone du Pacifique ouest, et enfin, celle de Darwin, le sud de la Mer de Chine et l’Océan Indien. La présence de la 3e force expéditionnaire du corps des Marine (IIIrd Marine Expeditionary Force) (1) et d’une formation équivalente à un régiment (les 2 200 hommes du 31st Marine Expeditionary Unit) est jugé indispensable par les autorités américaines qui considèrent l’île comme une « position clé de la ligne de front (key frontline base) face à la Chine et à la Corée du Nord. Washington a aussi argué que cette nouvelle répartition faciliterait les interventions humanitaires américaines en cas de catastrophe naturelle majeure dans la zone du Pacifique, ce qui ne peut laisser le gouvernement japonais indifférent après le désastre du 11 mars 2011.

 

Or la population tolère de moins en moins le coût financier et la présence de l’armée américaine dans l’île, dont 10 % du territoire est affecté aux installations militaires. La soldatesque commet régulièrement des actes de délinquance et les habitants subissent les nuisances des entraînements, et aussi un certain mépris des autorités états-uniennes pour leur sécurité. 24 Osprey MV-22, appareils destinés au remplacement des hélicoptères de transport de troupes CH-46 ont été officiellement choisis pour leurs meilleures capacités techniques comparativement aux hélicoptères CH-46 (vitesse double et capacité de portage triple). Leur rayon d’action (3 900 km) permettrait une rapide projection de troupes sur la péninsule coréenne. Mais, les déficiences techniques à répétition ayant occasionné le décès des personnels embarqués (Maroc, Floride et le 5 août 2013 sur une base américaine d’Okinawa) inquiètent les habitants et autorités locales qui se sont opposés vigoureusement à leur arrivée. Les Okinawaiens font également obstacle au déménagement de la base aéronavale de Futenma (qui doit être réinstallée dans la la baie de Henoko). Cette résistance passive, qui rappelle sur la forme celui du « Mouvement d’opposition à l’extension du camp du Larzac » des années 1970 : un noyau de militants, soutenus par la population, se relaient en permanence sur le chantier pour empêcher la progression des travaux. S’ajoute à cela le fléau des viols perpétrés régulièrement et en quasi-impunité (en raison de l’extra-territorialité des polices militaires) depuis 1945 par des soldats américains (118 viols ont été commis par des GI’s entre 1972 et 2008, selon un décompte de l’association des femmes d’Okinawa contre la violence militaire, réalisé à partir de rapports de police et de la presse locale (2). Ce phénomène récurrent (deux marins américains ont été condamnés cette année par un tribunal japonais à 9 et 10 ans de prison pour le viol en octobre 2012 d’une habitante de l’île) a obligé l’état-major des marines a décrété un couvre-feu pour ses hommes.

 

L’actualité entretient le souvenir douloureux de la Seconde Guerre mondiale, la bataille est ancrée dans les mémoires, et aussi souvent dans les chairs. L’année dernière (le 23 juin 2012, en marge des cérémonies officielles) des contemporains de l’affrontement ont relaté leur histoire. « Maman, je suis encore venue te voir cette année », susurre une habitante de Naha, Keiko Oshiro (68 ans). Nourrisson en 1945, Oshiro ne se souvient pas du visage de sa jeune mère, Tomi, âgée de 21 ans, atteinte à l’épaule par une balle alors qu’elle l’alimentait au sein. Selon le témoignages de proches, Tomi serait décédée dans une des grottes servant d’abris et d’hôpitaux aux militaires et aux civils. Lorsque le nom de sa mère a été gravé sur l’un des murs du Mémorial en 1995, Oshiro a pu commencer à faire le deuil de cette disparition… Fumi Nakamura (79 ans), une habitante du village de Nakagusuku est également venue rendre hommage à son père, mort de la malaria dans un camp des prisonniers. Résidant à proximité d’un aérodrome militaire américain, Nakamura déclare se crisper lorsqu’elle entend le rugissement du moteur des avions…

 

On comprend, à la lecture des récits de ces témoins que les habitants de l’île souffrent encore des conséquences de cet épisode de leur histoire : la guerre est restée quelque part en eux. En août 2012, 40 résidents de l’île (survivants ou membres de la famille des victimes) ont décidé d’ester contre le gouvernement : ils réclament un dédommagement financier et moral (une compensation financière de 440 millions de yen et des excuses officielles) pour les souffrances endurées pendant la Seconde Guerre mondiale, soulevant au passage la douloureuse question de l’implication des civils dans la bataille. Cette réclamation s’insère dans un mouvement plus large de reconnaissance des excès de l’armée impériale commis à l’encontre des habitants pendant la guerre.

 

Okinawa est une île marquée par l’Histoire… De par sa position géostratégique, et les derniers développements dans la région le confirment, l’île reste et restera une pièce maîtresse de l’« échiquier nord-américain» dans la région, notamment en raison de l’importance militaire des îles Nansei, passage obligé pour la marine de guerre chinoise voguant vers le Pacifique. Okinawa est un « porte-avion fixe » et une base avancée de l’armée américaine faisant face au continent est-asiatique. Pour ces raisons, les États-Unis ne sont pas prêts de retirer leurs troupes d’une position aussi importante, de surcroît acquise par la mort au combat de milliers de GI’s et de marines, au cours de ce qui a probablement été la bataille la plus sanglante de la bataille du Pacifique. Bataille ayant eu également pour conséquence (même si ce n’était pas la raison première), les bombardements atomiques de Hiroshima et de Nagasaki… Position qui cependant pourrait légitimement défendue par les forces japonaises elles-mêmes, si l’article 9 de la Constitution venait enfin à être modifié et redonnerait au Japon (troisième puissance économique mondiale) sa dignité et sa place comme grande puissance à part entière. De grands espoirs sont portés sur le Premier ministre Abe Shinzô qui œuvre en ce sens dans un contexte international devenu favorable (3).

 

La bataille : enjeux, unités engagées, déroulement des opérations et bilan des pertes humaines

 

Okinawa est une bataille majeure de la guerre Asie – Pacifique : l’ « Opération Iceberg », nom de code donné à l’automne 1944 par l’état-major américain au plan d’invasion des îles Ryûkyû, est l’opération amphibie ayant mobilisé le plus de moyens humains et matériels sur le front Pacifique depuis 1941. Pour la seconde fois, l’armée impériale japonaise va défendre le sol national avec opiniâtreté et courage (Iwo Jima est tombée le26 mars). Surtout, il s’agit d’empêcher l’armée américaine de contrôler les deux bases aériennes de l’île (Yontan et Kadena), autant de facilités pour les flottes de bombardiers stratégiques d’atteindre les îles principales du Japon et sa capitale (550 km environs séparent les deux archipels). Okinawa prise, les troupes américaines pourraient y stationner en prévision de l’invasion du Japon, programmée pour le printemps 1946 (Opération DownFall).

 

Les troupes alliées, très majoritairement américaines (la contribution britannique et des pays du Commonwealth, plus modeste, est navale et logistique) sont appuyées par une importante marine de guerre. L’armée d’invasion (la Xe armée), de plus de 180 000 hommes ayant une expérience du feu inégale, a été subdivisée en deux corps d’armée et en unités de réserve : le IIIe corps amphibie, composé de deux divisions de marines (1re et 6e divisions); le XXIVe corps d’infanterie (7e et 96e divisions d’infanterie), et en réserve la 2e division de marines ainsi que les 27e et 77e divisions d’infanterie. Cette armée est dirigée par le général Raymond A. Spruance.

 

9f312e7244db1e034005b44a2e25f239.jpgL’armée japonaise (la 32e armée, composée de deux divisions d’infanterie  – 24e, 62e divisions – et d’une brigade mixte indépendante), d’un effectif avoisinant 70 000 combattants. La 62e division est une unité aguerrie ayant combattu en Chine. Ce corps principal a été renforcé par des unités à terre de la marine (9 000 hommes), des habitants des îles Ryûkyû réquisitionnés comme combattants ou comme auxiliaires du génie (39 000 individus) et des formations plus modestes composées de lycéens servant de coursiers, de miliciens ou affectés aux hôpitaux de campagne. Les forces navales sont inexistantes ou presque et les forces aériennes reposent sur les unités de Tokubetsu kôgeki-tai (特別攻撃隊), les kamikaze. Comme le firent les officiers commandant les positions de Tarawa ou d’Iwo Jima, les troupes japonaises se sont fortifiées et cantonnées dans des positions souterraines aménagées, construites le plus souvent avec les seuls outils individuels du fantassin (pelle, pioches), un éclairage sommaire et dans des conditions sanitaires pénibles d’un sous-sol volcanique (chaleur et humidité). Les soldats-ouvriers ont ainsi creusé un dense réseau de tunnels de communication et d’installations connectés entre-eux et équipés de discrets systèmes de ventilation. Cette défense a été conçu pour compenser la nette supériorité de la puissance de feu de l’armée d’invasion (aviation, marine et infanterie). D’un point de vue tactique, les fantassins japonais, outre leur valeur intrinsèque, disposent de lance-grenades à tir courbe, très utiles en défense.

 

Avant les opérations terrestres du printemps 1945, l’île a été intensément bombardée : lors du raid du 10 octobre 1944, l’aviation stratégique américaine procède à 1 400 sorties et a lancé 600 tonnes de bombes sur les installations portuaires de Naha et les positions de l’armée. 65 000 civils périrent. Le Jour J, le principal débarquement américain (1er avril 1945) se déroule sans opposition et fait suite aux attaques des îles Kerama et des îlots de Keise prises d’assaut respectivement les 26 et 31 mars.

 

Sur mer, les unités déployées le long de la côte subissent, à partir du 6 avril, des attaques massives et répétées des unités aériennes de kamikaze : entre le 26 mars et le 30 avril, 20 bâtiments lourds sont coulés et 157 unités ont été endommagées; l’armée de l’air japonaise perd 1 100 appareils… Du début des raids massifs au 22 juin, 1 465 unités de kamikaze ont été engagées avec pour cibles privilégiées : les porte-avions. Dans le même esprit, le cuirassé Yamato (le bâtiment était escorté par 8 destroyers), lancé dans une attaque suicide contre l’U.S. Navy, est coulé par l’aviation embarquée américaine (7 avril) sans avoir pu faire le moindre dégât à la flotte de débarquement alliée. Sur une échelle stratégique générale (période du 3 mars au 16 août 1945), les forces aériennes de l’armée de terre et de la marine japonaises ont perdu 2 571 pilotes et aéronefs; la flotte américaine recense 13 navires coulés (dont 9 destroyers) et un grand nombre de navires sérieusement endommagés (9 cuirassés, 10 porte-avions, 4 croiseurs, 58 destroyerset 93 navires de différentes catégories).

 

Sur terre, les unités américaines ont lancé l’offensive sur deux axes après leur débarquement sur les plages de Hagushi (au nord de Naha). La partie nord de l’île est tombée assez rapidement : les aérodromes, enjeux de la bataille, ont été capturés peu après le débarquement (Kadena et Yomidan); le 21 avril, un aérodrome est rendu opérationnel sur l’île de Ie. Le 18 avril, la résistance nippone n’est plus que sporadique et locale dans cette partie de l’île.

 

Mais, comme à Iwo Jima, Ushijima a concentré et fortifié ses unités sur un terrain difficile et c’est dans la partie sud de l’île que va se livrer une sanglante guerre d’usure, proche des combats de la Grande Guerre en Europe. Les positions méridionales de l’île d’Okinawa ont été renforcées et les unités japonaises défendent le terrain pied à pied, avec l’énergie du désespoir et au prix de pertes humaines importantes. Le 12 avril, les unités japonaises contre-attaquent nuitamment avant d’être repoussées et récidivent le 14 avril avec un même résultat. L’offensive américaine reprend, après une relève des unités les plus marquées par l’attrition. La dernière contre-attaque japonaise, le 4 mai, échoue également : mise à découvert, l’artillerie mise en batterie pour appuyer l’assaut a été partiellement anéantie par les canons lourds américains. En juin, sous une pluie continuelle (le phénomène de « mousson japonais », le « tsuyu »), la bataille fait rage autour de la position dite du « Shuri Castle »; celle-ci tombée, la 32e armée se replie, fin mai, encore plus au sud et se positionne sur sa dernière ligne de défense, dans la péninsule de Kiyan. Le dernier carré japonais (environ 40 000 hommes) se bat avec l’énergie du désespoir : face à l’attaque de la 6e division de marines, 4 000 marins japonais (dont l’amiral Minoru Ota) se suicident dans les constructions souterraines leur servant de quartier-général (13 juin).

 

Le 21 juin se livrent les derniers combats d’importance : les généraux Ushijima et Chô se donnent la mort par éventration dans leurs quartiers généraux de la cote 89. Jusqu’en août 1945, des éléments isolés poursuivaient encore le combat contre l’armée américaine en différents points de l’île.

 

Les pertes humaines sont sans précédent sur le front du Pacifique : l’armée américaine déplore 62 000 hommes mis hors de combat (dont 12 500 tués ou portés disparus), à titre de comparaison 58 000 GI’s trouveront la mort au Vietnam entre 1967 et 1973… L’armée japonaise déplore 95 000 morts au combat ou s’étant donné la mort par seppuku ou à l’aide d’une grenade à main (voir l’épisode poignant du film de Clint Eastwood, Letters from Iwo Jima, montrant la mort de soldats japonais selon ce procédé). 7 400 soldats japonais ont été faits prisonniers. Les pertes humaines au sein de la population civile sont estimées être entre 42 000 et 150 000 tués; mais les statistiques officielles de l’armée américaine – qui prennent en considération les civils réquisitionnés – avancent le chiffre de 142 058 victimes (soit ? de la population).

 

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Suicides volontaires ou sacrifice programmé ? Un phénomène d’implication totale de l’individu impliquant les militaires…

 

La bataille d’Okinawa frappe encore les imaginations par les suicides de masse de combattants et de civils, mais aussi par la détermination des combattants (attaques nocturnes au corps-à-corps, collision volontaire de pilotes kamikaze sur les bâtiments de la flotte américaine, flottilles de bateaux suicides, sortie du cuirassé Yamato).

 

L’histoire des kamikaze a fait coulé beaucoup d’encre. Les morts volontaires de pilotes japonais (et américains) dans le Pacifique étaient avant cela des actes héroïques et isolés, d’hommes aux commandes d’un engin sérieusement endommagé et se trouvant dans une situation sans issue. Dès 1942, des pilotes japonais se sacrifient dans de semblables situations et l’idée d’attaques suicides massives chemine dans les esprits en raison du renversement de la situation militaire. La 201e escadrille est la première formation de volontaires a avoir été formée dans ce but et engagée pendant la bataille de Leyte (la première mission se déroule le 25 octobre 1944). Selon Raymond Lamont-Brown, les pilotes auraient eu différents profils à différents moments de leur implication dans la guerre; des profils qui auraient évolués dans le temps. Dans un premier temps se seraient engagés uniquement des volontaires, patriotes fervents, romantiques et inspirés par l’esprit de la chevalerie japonaise : ce sont eux qui instituent les pratiques et les rituels attribués aux kamikaze (écriture de testaments et de poèmes, port d’attributs patriotiques et faisant référence à l’esprit guerrier japonais, la consommation de la dernière coupe de saké, etc.). Les générations suivantes de volontaires auraient eu des motivations plus « rationnelles » : ces jeunes hommes sont souvent des étudiants dont la formation a été interrompue par la guerre ou plus généralement des individus ayant reçu une excellente éducation (85 % étaient lycéens ou étudiants). La lettre de Sasaki Hachirô ci-dessus témoigne d’une grande maturité, mais aussi et surtout d’une forme de résignation : on se sacrifie par devoir, par nécessité… À l’extrême fin de la guerre, toujours selon Raymond Lamont-Brown, d’autres jeunes pilotes auraient été recrutés parmi les délinquants ou des personnes dont le comportement les mettaient en marge de la société. Il est difficile de prendre pour argent comptant une telle catégorisation, mais il est probable qu’il y ait eu une « dépréciation » de la qualité morales des pilotes (des volontaires éduqués aux exclus de la société) en raison du manque de candidats à la mort… La jeunesse (17 ans pour certains) et le niveau d’éducation élevé des kamikaze montre la volonté consciente ou non des autorités militaires à priver la nation d’un futur… Il témoigne aussi peut-être d’une forte intériorisation des valeurs patriotiques apprises, notamment (mais pas seulement) en milieu scolaire. Pendant la bataille d’Okinawa les pilotes étaient aux commandes de chasseurs de combats ou de bombardiers-torpilles (ohka). Ils ont été engagés dans 10 raids majeurs contre la flotte américaine (6 avril – 2 juin 1945). Sur mer, des navires-torpilles, basés dans l’île de Kerama, n’ont pu être engagés et ont été détruits dans leurs installations par les soldats de la 77e division américaine et le cuirassé Yamato, nous l’avons vu, a été coulé avec 4 destroyers de son escorte.

 

Enfin, sur terre, l’armée impériale se livre à des attaques nocturnes ayant pour objectif d’engager l’ennemi en limitant les effets ravageurs de sa puissance de feu. On constate pendant la bataille que, comme pendant la Grande Guerre, l’usage d’une puissance de feu considérable ne peut empêcher la confrontation directe et rapprochée des infanteries ennemies. Celle-ci est souvent d’une brutalité multipliée, parce que fondée sur la recherche du corps-à-corps en réponse à la volonté d’annihilation par les armes de destructions massives (exemple des Stosstruppen de la Première Guerre mondiale). Le soldat japonais s’est bâti une solide réputation de combattant résolu autant pour cette raison que pour sa valeur intrinsèque. Toutefois, la détermination des soldats nippons est une composante de la stratégie des armées alliées qui a pris en considération ce « facteur ». Le maréchal William Slim, commandant des forces alliées en Inde aurait déclaré : « Tout le monde parle de se battre jusqu’au dernier homme, mais actuellement seuls les Japonais le font ». Si les « charges banzai » ont eu un impact moral sur les combattants alliés, les moteurs psychologiques de celles-ci sont plus complexes qu’il n’y parait. Dans son ouvrage, Joanna Bourke (4) souligne l’importance de l’action de « tuer ». Sans minorer l’importance des facteurs et effets psychologiques collectifs (camaraderie, propagande, diabolisation de l’ennemi) et individuels, essentiellement la peur de la mort, cette étude apporte un éclairage significatif l’« intimité » de l’homicide en temps de guerre, la mort donnée au contact de l’ennemi. Les représentations de l’acte de tuer, bâtie souvent sur une éducation, une vision romantique de la guerre ou instrumentalisée par la propagande, tiennent une place importante; et bien souvent l’attaque à la baïonnette ou à l’arme blanche, est considérée être la plus virile et prend une dimension mythique (au Japon le « mythe du samurai »), que renforce le « culte de l’offensive » prôné par l’état-major (qui rappelle la doctrine française des premiers mois de la Grande Guerre). L’entraînement et la discipline (très difficiles dans l’armée impériale japonaise) stimulent le sentiment d’agressivité tout en se mariant aux représentations positives (le mythe du guerrier/« nous ») et négatives (dévalorisation de l’ennemi/« eux ») : l’accent est mis sur les comportements instinctifs et les pulsions primales. Ces facteurs « théoriques » prennent une ampleur plus importante avec l’enchaînement des violences et le sentiment de livrer un combat désespéré.  Ces facteurs sont des pistes utiles à la compréhension des moteurs psychologiques externes et généraux sous-jacents aux attaques suicides, conduites dans un contexte militaire ayant pour horizon la défaite.


 

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Le suicide individuel ou collectif à la grenade était une pratique de l’armée impériale en campagne, souvent le fait de soldats épuisés, grièvement blessés et d’aucune « utilité » militaire. Le sergent Nishiji Yasumasa, décrit une scène de mort collective dans la jungle birmane :« Il arrivait souvent que les soldats prennent leur propres vies par paires. Ils s’étreignaient et plaçaient une grenade entre eux. Nous appelions cela un suicide double. »

 

Les officiers supérieurs pratiquaient généralement l’éventration au sabre (exemple sus-mentionné des généraux Ushijima et Chô) ou livraient le dernier combat avec leurs hommes.

 

Les modes opératoires pourraient être divisés en deux catégories : celui du combattant en pleine potentialité (et correspondant aux normes admises par le groupe) et les autres. Les premiers se donnent la mort avec « noblesse » (seppuku, suicide des pilotes kamikaze) ou au combat avec des armes nobles et viriles (arme blanche, baïonnette); un combat visant au corps-à-corps. Concernant les pilotes d’avion, il pourrait s’agir ici d’une importation des valeurs martiales occidentales qui assimile le combat aérien à un duel chevaleresque (constatations de Joanna Bourke). Que se soit l’arme blanche ou les commandes d’un avion, l’« arme » (avion, sabre, baïonnette) est un prolongement de la main de l’homme : la mort est donnée par la volonté et l’aptitude du combattant à tuer. Il s’agit d’un acte jugé authentique. Les armes de projection (fusils, fusils-mitrailleurs, mitrailleuses, etc.) ou projetées (grenade à main) sont moins valorisantes (parce que utilisées à distance par un tireur susceptible d’atteindre sa cible à l’insu de celle-ci), c’est pourquoi, elles sont utilisées par les combattants ne se trouvant plus en mesure de se battre. Il y a peut-être, au regard de ces constatations, une dimension culturelle et symbolique dans ces actes. Une dimension que nous replacerons dans un contexte général, en infra.

 

Il est surtout intéressant de constater le phénomène de contagion de la pratique et des méthodes suicidaires des militaires aux civils.

 

… Et, par contagion, les populations civiles

 

C’est surtout l’implication directe des civils dans la bataille, phénomène majeur de la Seconde Guerre mondiale (et déjà constaté pendant la Grande Guerre) qui marque encore les esprits, même si en cela la bataille d’Okinawa ne constitue pas un précédent : celle de Saipan (15 juin – 9 juillet 1944), la préfigurait déjà. Pourquoi ? Parce que la prise de cette île signifiait le bombardement régulier du sol national… Le général Saito n’a fait aucune distinction entre civils et militaires dans les derniers moments de la bataille (préconisant que les premiers s’arment de lances en bambou) qui s’est conclue par une attaque suicide de grande ampleur. Dans le cas de la bataille de Saipan également, des civils se sont jetés du haut de falaises…

 

À la différence de la population d’Iwo Jima, qui a été évacuée sur l’ordre du général Kuribayashi, les habitants d’Okinawa ont dû rester sur place et ont été mobilisés pour des travaux de terrassement et comme combattants. D’ailleurs une population aussi nombreuse aurait-elle pu être déplacée, compte tenu de l’état de délabrement de la flotte japonaise, après plus de trois années de guerre dans le Pacifique ?

 

La population a souffert des excès de militaires (confiscation de nourriture, exécution d’habitants soupçonnés d’espionnage en raison de la différence de leur dialecte) et des conditions sanitaires. Si une frontière perméable exista entre le statut de civil et de combattant (Jean-Louis Margolin les qualifient de « civils militarisés »), c’était autant pour des motifs opérationnels qu’idéologiques (une nation unie contre l’envahisseur) : les habitants de l’île sont des auxiliaires précieux en raison de leur connaissance du terrain, mais aussi, pratique peu honorable, comme chair à canons : si des soldats porteurs d’une charge d’explosif ont pu se faire passer pour des civils pour commettre des attaques suicides, les civils étaient souvent utilisés pour cette mission ou comme boucliers humains pour couvrir une attaque… Sur l’île d’Ie, des femmes armées de lances se sont opposées aux troupes américaines. Ailleurs, des collégiens ont été enrôlés dès l’âge de 13 ans et divisés en escouades, souvent armés de sabres, voire d’explosifs : leur mission dans ce cas était de se précipiter sur les chars américains ou d’aller au contact de l’ennemi. Imamine Yasunabu témoigne : « Il y eut un cas où le groupe avec qui j’étais aperçut 40 ou 50 militaires américains à peu près à 100 mètres. Nous priâmes notre professeur de nous permettre d’ouvrir le feu. À ce moment, nous disposions de fusils. Il refusa, et l’ennemi finit par disparaître sans que nous ayons eu une chance d’agir. Je fus à cette époque stupéfait du comportement du professeur. Maintenant, je le comprends. Il réalisait que le Japon était en train de perdre, et il ne voulait pas sacrifier ses élèves. Nous n’avions que 6 balles chacun. Si nous avions ouvert le feu, les Américains, bien équipés, nous auraient aisément anéantis. »

 

La similitude des décisions et du comportement des officiers supérieurs à l’endroit des populations civiles à Saipan et à Okinawa laissent supposer la possible existence de directives de l’état-major général à l’endroit des populations civiles (ce qui a été partiellement admis par le ministère de l’ Éducation japonais en 2006), mais il ne fait aucun doute que celles-ci étaient considérées comme des « combattants ».

 

Enfin, sur ordre de l’armée, les habitants auraient été incités ou contraints de se suicider sur le modèle des militaires. Les suicides se sont produits par vagues, tout au long de la bataille : la première a eu lieue au moment du débarquement, voire dans certains cas, avant celui-ci, par crainte des représailles et des exactions américaines. Les circonstances ont été décrites par l’historien Jean-Louis Margolin : les responsables, civils ou militaires, organisèrent des regroupements communautaires (familles, voisins); les participants après un toast d’adieu se donnaient la mort (une personne dégoupillait une grenade au milieu d’un petit groupe de participants). Des témoins auraient assistés à des scènes d’horreur entre membres d’une même famille : assassinat à l’arme blanche, matraquages à mort, lapidations…

 

Komine Masao (77 ans en 2007), un survivant des suicides compulsifs de l’île de Tokashiki, raconte (propos recueillis par Kamata Satoshi, le narrateur dans l’extrait qui suit) :« Monsieur Komine m’a montré une grotte d’évacuation [des populations] construite à flanc de colline. Il avait 15 ans au moment de la bataille, et avec l’aide de son jeune frère (qui avait atteint le premier grade [sic]), il l’a creusé pour que sa famille puisse y trouver refuge. La cavité était large de 3 mètres et profonde de 10 mètres. À l’intérieur, Masao, sa grand-mère , tantes et autres parents y ont trouvé refuge des attaques aériennes et des tirs de l’artillerie de marine, mais le 28 mars, le jour suivant le débarquement américain dans l’île, ils se rendirent à Nishiyama, désigné comme un “ point de rassemblement ”. Ce jour-là, des grenades ont été distribuées aux personnes réunies. Massao et ses parents s’assirent en cercle. Sa mère et sa sœur, qui étaient allées chercher du ravitaillement, à leur retour se joignirent au cercle. Sa mère étreignit ses enfants comme s’ils étaient deux jeunes oisillons. Alors le cercle de chaque famille se resserra, se pressant les uns contre les autres et les grenades détonnèrent. Des explosions assourdissantes se firent écho et les gens crièrent. À cet instant, un feu de mortier américain s’abattit sur eux. Comme il était un enfant, Masao n’a pas reçu de grenade, mais le milicien (“ local defense soldier ” dans le texte, ou bôeitai) près de lui en avait une et elle explosa. Sur le sol gisaient des gens recouverts de sang. Les corps allongés les uns sur les autres. Ce jour-là, 315 personnes moururent sur l’île de Tokashiki, soit le tiers de la population du village de Awaren. Les personnes en familles qui ne parvinrent pas à faire exploser leurs grenades s’entre-tuèrent à la faucille ou au rasoir, en se frappant avec des battes ou des rochers ou s’étranglèrent avec des cordes…Ceux qui encore en vie se pendirent eux-mêmes ».

 

Dans d’autres cas, les militaires accompagnent en les contraignant peut-être les civils dans la mort, comme en témoigne notamment le récit de Frank Barron, combattant de la 77e division d’infanterie. L’action se déroule à Kerama Retto, le 26 mars 1944 : « Comme nous atteignions le sommet du premier repli de terrain, j’ai réalisé que les fantassins autour de moi étaient pétrifiés. Aussitôt mon attention a été attiré par un groupe de civils. Sur notre droite, sur le rebord du précipice, une jeune femme portant un nourrisson dans ses bras, avec derrière elle, une autre jeune femme, précédée d’un enfant de 2 ou 3 ans. Elles étaient à 30 ou 40 pieds de moi, toutes les deux nous regardant fixement comme de petits animaux apeurés. À cet instant, apparu la tête d’un homme derrière les épaules de la femme (sic). Je n’ai pu seulement voir que sa tête et son cou, mais il avait un collet d’uniforme. Si cet homme a une arme, à savoir une grenade, nous serions réellement en situation périlleuse, à moins que nous n’ouvrions le feu et tuions l’ensemble des individus se trouvant sur cette colline. J’ai fait signe à l’homme de s’approcher de moi, tandis que je me déplaçai de quelques pas pour voir si il avait quelque chose à aux mains. En un instant, ils étaient tous évanouis. Si j’avais  fait quelques pas de plus, j’aurais pu voir leurs corps rebondir le long de la paroi jalonnant leur chute. »

 

Ailleurs, les suicides en masse se firent avec de la mort-au-rat, quand les grenades vinrent à manquer (île de Zamami, en ce lieu 358 civils trouvèrent la mort). Il y eu des cas, où des officiers poussèrent la population au suicide, puis se rendirent aux troupes américaines (îles de Tokashiki et de Zamami).

 

Cet ensemble de témoignages illustre le contexte d’extrême tension nerveuse dans laquelle se trouvait les habitants. Si il est impossible de connaître les mobiles exacts des personnes à s’entre-tuer ou à commettre l’acte suprême d’autodestruction. Les actes perpétrés par les uns et les autres sont révélateurs d’un contexte : il existe probablement une étude sur ces questions, mais pour saisir ces mécanismes, je renvoie à la lecture du livre d’Alain Corbin (Le village des cannibales), une analyse du massacre d’Hautefaye en 1870.

 

En définitive, cette tactique délibérée ou non a eu pour effet de raidir l’affrontement : les soldats américains préférant souvent ouvrir le feu, et même sur des enfants, que d’être victimes d’une potentielle attaque suicide.

 

Okinawa : une « bataille Ragnarök » dans une guerre totale ?

 

Nous pourrions qualifier l’affrontement d’Okinawa de « bataille Ragnarök », une bataille ultime, eschatologique (nous signalons au passage que cette dimension n’apparaît pas dans la mythologie japonaise). Pourquoi ?

 

Tout d’abord parce qu’elle se déroule sur le sol national, comme à Iwo Jima. Il ne s’agit plus d’îles lointaines comme auparavant. Nous sommes dans le contexte des bombardements de Tôkyô, celui de la nuit du 9 au 10 mars (20 jours avant l’attaque générale sur Okinawa), surpasse en victimes et en intensité celui de Dresde (100 000 victimes de bombes incendiaires lancées de manière à provoquer un maximum de dégâts sur la population et leurs habitations, 30 km2 de surface urbaines ont été détruits). En cette fin de conflit (commencé en 1937), la violence devient quasi-paroxystique et le nombre des pertes humaines augmente sensiblement (186 000 combattants jusqu’en 1941, puis 2 millions, dont 400 000 civils entre 1942 et 1945).

 

Les officiers supérieurs (et probablement une large partie de la population) ont conscience de livrer une bataille perdue d’avance… Le capitaine Koichi Itoh a déclaré, lorsqu’il a été interrogé sur ces événements plusieurs années après : « Je n’ai jamais envisagé, après le commencement de la guerre, que nous puissions la gagner. Mais après la chute de Saipan, je me suis résolu à admettre que nous l’avions perdue. »

 

Quelque puisse être le mobile, l’honneur, la défense de la patrie, différer l’invasion américaine, etc., la guerre est perdue et l’on redoute la ire du vainqueur (le sentiment de peur est entretenu par la propagande) et peut-être la fin d’une vision du Japon.

 

À cela s’ajoute des facteurs internes, tout d’abord le rôle de la propagande. Si cette dernière a pu être intériorisée par les combattants japonais (et en particulier sur les officiers) et peut-être les plus jeunes habitants d’Okinawa, son impact est difficile à déterminer, mais les acteurs ont dû se positionner par rapport à elle. De la lucide méfiance (dans sa lettre Sasaki Hachirô qualifie de « litanies creuses » les discours des « chefs militaires ») à l’adhésion sincère et naïve (dans son journal personnel un jeune habitant d’Okinawa de 16 ans qualifie les Américains de « Bêtes démoniaques », plusieurs passages du texte répète son patriotisme et son attachement au Japon au point de donner sa vie), la palette des motivations a pu varier dans le temps. Les femmes et les enfants qui se donnent la mort « à chaud » dans la bataille n’ont probablement pas suivi le même « raisonnement » qu’un pilote de kamikaze qui « à froid » décide de se porter volontaire pour une mission sans retour.

 

Ces suicides marquent aussi un refus de la réalité, de la défaite et de ses possibles conséquences. D’autant et bien qu’occulté par l’ampleur du nombre des suicides parmi les civils, il apparaîtrait aujourd’hui que, comme sur le sol français (et à une échelle moins importante que l’armée russe en Allemagne au printemps 1945), des soldats américains aient violé des habitantes de l’île (peut-être 10 000 cas).

 

Cette bataille (par un phénomène déjà constaté dans d’autres engagements nippo-américains dans le Pacifique et en particulier à Saipan) prend une dimension symbolique : le Japon offre la valeur (et les valeurs traditionnelles) de ses combattants aux moyensimpersonnels et techniques de l’armée américaine… Cette interprétation paraît résulter autant d’une décision pragmatique sur le champ de bataille que d’une interprétation dépréciative sur la combativité du soldat américain. L’exemple des femmes armées de lance (à l’instar des « fédérés » de la Révolution française, mais aussi parce que les armes longues sont généralement l’apanage des femmes au Japon, par exemple le naginata) symbolise l’engagement total d’un peuple (les femmes étant généralement tenues éloignées du métier des armes) pour défendre son sol, teintés de la part de quelques officiers d’une forme de mépris de la vie humaine. La dimension symbolique se retrouve peut-être également dans les suicides de mères et de leurs enfants du haut des falaises d’Itoman, peut-être un répétition involontaire et inconsciente du sacrifice du jeune empereur Antoku, précipité dans les flots par sa grand-mère Nii qui l’accompagne dans la mort lorsque la bataille navale de Dan-no-Ura (1185) a été perdue pour le clan Taira (face aux Minamoto qui instaureront le premier shôgunat).

 

Si ces facteurs ont motivés les suicides compulsifs (coercition des militaires, propagande et l’éducation données aux jeunes habitants de l’île dans le cadre d’une politique d’assimilation), on recherche aussi échapper à l’ennemi et la mort paraît être le seul refuge, comme pour les défenseurs de Massada… On redoute la culpabilité et l’infamie pour avoir préféré le déshonneur de vivre et d’endosser une partie de la responsabilité de la défaite… On retrouve un écho de cet état d’esprit (notamment dans la littérature et les mangas) dans la jeune génération n’ayant pas pris les armes de l’après-guerre… Les arguments culturels ont été avancés, le code de l’honneur du « bushidô » (en réalité une construction intellectuelle à destination des Occidentaux) notamment… Mais que penser de la lettre de Ichizu Hayashi, pilote de confession chrétienne ? On se rend bien compte qu’il est quasi-impossible de comprendre totalement le phénomène.

 

En 1944, le Japon était entré, selon l’expression de Maurice Pinguet, dans l’« engrenage du sacrifice » : « Dans la guerre du Pacifique, l’armée japonaise avait mis son existence en jeu, la défaite serait sa mort – ce serait donc aussi la mort du Japon : elle s’identifiait trop étroitement à la nation pour imaginer une autre conclusion. » Cela, je pense, résume bien ce qui s’est déroulé à Okinawa à une échelle ayant atteint quasiment son paroxysme.

 

Rémy Valat

 

Notes

 

1 : L’accord initial prévoyait, selon une source rendue disponible par la marine américaine en 2009, le départ de l’état-major du IIIrd M.E.F. pour Guam. Cette structure est un élément singulier des forces américaines outre-mers : elle est dirigé par un lieutenant-général qui commande les forces américaines sur l’île et sert de coordinateur pour la « zone d’Okinawa ».

 

2 : Cf. http://japon.aujourdhuilemonde.com/au-japoncontre-les-viols-des-soldats-americains-les-femmes-lancent-un-cri-dalarme

 

3 : Le 28 août dernier, le ministre de la Défense japonais, Itsunori Onodera et le secrétaire d’État à la Défense nord-américain, Chuck Hagel, ont entamé une discussion en faveur d’une possibilité pour les forces aériennes d’autodéfense japonaise d’effectuer des frappes préventives sur des bases ennemies (c’est-à-dire contre la Corée du Nord).

 

4 : Joanna Bourke, Intimate Story of Killing. Face-to-Face Killing in Twentieth-Century Warfare, Londres, Granta, 1999. Cette étude aborde aussi la guerre du Pacifique, bien que centrée sur la Première Guerre mondiale.

 

Bibliographie

 

• Astor Gerald, Operation Iceberg. The invasion and conquest of Okinawa in World War II, World War II Library, 1995.

 

• Daily Yomiuri (The), 24 juin et 16 août 2012.

 

• Kakehashi Kumiko, Lettres d’Iwo Jima. La plus violente bataille du Pacifique racontée par les soldats japonais, Les Arènes, 2011.

 

• Lamont-Brown Raymond, Kamikaze. Japan’s suicide samurai, Cassell Military Paperbacks, 1997.

 

• Margolin Jean-Louis, Violences et crimes du Japon en guerre (1937 – 1945), Hachette, Pluriel, 2007.

 

• Pinguet Maurice, La mort volontaire au Japon, Tel – Gallimard, 1984.

 

• Rabson Steve, The Politics of Trauma. Compulsory Suicides During the Battle of Okinawa and Postwar Retrospectives, http://intersections.anu.edu.au/issue24/rabson.htm.

 

• U.S. Army in the World War II. The War in the Pacific. Okinawa The last battle,www.ibiblio.org/hyperwar/USA/USA-P-Okinawa/USA-P-Okinawa.

 

Concernant les violences et leur dimension psychologiques en temps de guerre, voici quelques pistes de lectures :

 

— Alain Corbin, Le village des cannibales, Aubier, 1990.

 

— Christopher R. Browning, Des hommes ordinaires, le 101e bataillon de réserve de police allemande et la solution finale en Pologne, Belles Lettres, 1994, (chapitre « Des hommes ordinaires »).

 

— Louis Crocq, Les traumatismes de guerre, Odile Jacob, 2006.

 

— Jacques Sémelin, Purifier et détruire. Usages politiques des massacres et des génocides, Le Seuil, 2003.

 

— Rémy Valat, Les calots bleus et la bataille de Paris. Une force de police auxiliaire pendant la guerre d’Algérie, Michalon, 2007 (chapitre « Salah est mort ! Les moteurs psychologiques d’une unité en guerre »).

 


 

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dimanche, 10 novembre 2013

LE JAPON MEDIEVAL : LE MONDE A L'ENVERS...

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LE JAPON MEDIEVAL : LE MONDE A L'ENVERS...
 
Connaitre l’autre pour être soi-même

Rémy Valat
Ex: http://metamag.fr

Le Japon médiéval est méconnu en France et grande est la tentation de le comparer à la période féodale européenne, tant il est vrai que nombreuses similitudes peuvent être constatées entre ces deux modèles de sociétés pourtant situées aux deux extrémités du continent eurasiatique. 


Ce rapprochement, plutôt cette interprétation, est notamment le produit de l'historiographie nippone : le terme de « Moyen-Âge » apparaît pour la première fois sous la plume de l'historien Hara Katsurô, auteur d'une Histoire du Moyen-Âge parue en 1906. Pour lui, cette période instable et transitoire se situe entre deux sociétés stabilisées : Heian (794-1185) et Edo (1603-1867). Ce néologisme s'imposa sur l'appellation originelle des contemporains (l'« âge des guerriers »). Il est vrai que l'émiettement de l'autorité, la captation du pouvoir politique par les hommes d'armes, l'apparition de liens de vassalité, la naissance de seigneuries foncières, le phénomène monastique, l'émergence d'oppositions pour les libertés communales, l'essor économique et démographique, le développement d'une bourgeoisie urbaine favorisent le rapprochement (en dépit d'un décalage chronologique dans le développement de ce type de société au Japon).

 

 

À l'heure de la montée en puissance du nationalisme et d'une politique coloniale dynamique, le livre Hara Katsurô écrit dans le contexte de la victorieuse guerre russo-japonaise souhaite interpréter le « Moyen-Âge » comme une période fondatrice, d'affirmation de l'identité nationale, similaire à la période féodale européenne et où auraient dominé les valeurs martiales : ce discours visait à démontrer une « supériorité intrinsèque » des industries et des armées japonaises et à légitimer l'expansion coloniale en Asie. Une idée similaire sous-tend le livre de Nitobe Inazo, Le Bushidô : l'âme du Japon, ouvrage paru en 1910 et très prisé des artistes martiaux ou amoureux de la chose militaire qui tombent dans le piège tendu par l'auteur... 

Le travail de Pierre-François Souyri a été de « remettre à l'endroit » l'histoire médiévale nippone et de corriger cette interprétation... L'histoire du Japon médiéval : le monde à l'envers, paru cette année au éditions Perrin-Tempus , paru en août 2013, est une réédition de l'ouvrage Monde à l'envers, la dynamique de la société médiévale, publié par la très regrettée maison d'éditions Maisonneuve et Larose en 1998. Le contenu de ce livre offre une forte similitude avec la 3ème partie (consacrée au Moyen-Âge) du même auteur de L'histoire du Japon des origines à nos jours, paru chez Hermann en 2009  avec cependant un intéressant chapitre additionnel comparant les sociétés médiévales européennes et nippones (chapitre 13. De la comparaison entre les sociétés médiévales d'Occident et du Japon). L'auteur, Pierre-François Souyri, professeur à l'université de Genève et ancien directeur la Maison Franco-japonaise de Tôkyô, est un spécialiste incontesté du sujet : on lui doit notamment la traduction du livre de Katsumata Shizuo relatif aux coalitions et ligues de la période médiévale (Ikki. Coalitions, ligues et révoltes dans le Japon d'autrefois, CNRS éditions, 2011). Enfin, le livre se fonde sur une abondante documentation et sources primaires japonaises, soigneusement confrontées et analysées. 


L'« âge des guerriers » est une période foisonnante, aussi violente que créatrice. Après la victoire du clan des Minamoto sur celui des Taira (1185), un premier pouvoir militaire central s'impose : le shôgunat de Kamakura (1185-1333). Minamoto Yoritomo obtient de l'empereur le titre de sei tai shôgun (征夷大将軍 ), c'est-à-dire de « général en chef chargé de la pacification des barbares ». Mais, à la mort de ce dernier en 1199, le pouvoir réel échappe au fils du défunt (Minamoto Yoriie) ; le pouvoir est confié à un conseil de vassaux que domine le clan des Hôjô, clan dont l'influence ne cesse de s'étendre et de s'affirmer. Le shôgunat de Kamakura est resté dans toutes les mémoires en raison du célèbre épisode des tentatives d'invasions mongoles, dispersées par un typhon, un « vent divin » (1274 et 1281)... Ce long XIIIe siècle est propice à une intense réflexion spirituelle et à la contestation religieuse : des réformes sont initiées par les prédicateurs Hônen, Shinran, Nichiren et les maîtres zen, Eisai et Dôgen. 


L'échec des invasions mongoles aussi est le prélude à la chute du clan Hôjô, incapable de récompenser les guerriers qui ont contribué aussi bien financièrement que par leur engagement personnel à la victoire. Une coalition de malcontents appuie l'empereur Go Daigo qui réalise une éphémère et autoritaire restauration impériale (restauration Kemmu, 1333-1336). L'empire se scinde ensuite en deux entités rivales (les cours du Nord et du Sud) ; la guerre civile fait rage, mais celle-ci profite au clan des Ashigaka, partisan de la cours kyôtoîte du Nord : en 1338, Ashikaga Takauji reprend la fonction de shôgun. Après la défaite de la « cour sudiste » en 1392 : les Ashikaga deviennent les maîtres du pays. La période Muromachi (1392-vers 1490) est entrecoupée de crises politiques et sociales sur fond d'essor économique (développement d'une économie commerciale avec échanges monétaires et premières tentatives d'accumulation de capital). C'est le « monde à l'envers » (gekokujô, 下剋上) : les mouvements civils ou religieux d'autonomie rurale et urbaine et l'irrésistible ascension de la classe des guerriers débouchent sur un affrontement général, dont l'enjeu devient l'unification du pays. Oda Nabunaga, Toyotomi Hideyoshi et Tokugawa Ieyasu la réaliseront au prix d'une longue guerre contre les forces politiques centrifuges, conflit dont Ieyasu sort vainqueur en créant la dernière dynastie de shôgun en 1603.

 
Le monde à l'envers c'est surtout celui des petites gens avides d'autonomie et d'ascension sociales dans un contexte de mutation économique et sociale, mais aussi celui d'un monde flottant qui a influencé les modes de vie et la culture nippones (les parias, appelés notamment kawaramono, 河原者). Les guerriers, acteurs principaux de la période médiévale et en particulier ceux de l'est de l'île d'Honshû, s'organisent sur une base familiale et clanique et créent des liens de vassalité (bushidan, 武士団). Ils sont issus de lignées de déclassés de la cour (voire de princes de la famille impériale, c'est le cas du lignage des Taira et des Minamoto qui font s'affronter entre 1180 et 1185) venu tenter leur chance loin de la capitale ou bien proviennent du milieu des paysans aisés et de la petite notabilité rurale. Ces hommes sont très attachés à leur terroir et défendent les intérêts des travailleurs de la terre, desquels ils se désolidarisent progressivement pour les dominer. Ces militaires en quête d'ascension sociale et de récompenses sont loin de la représentation conventionnelle du serviteur fidèle et loyal façonnée à l'époque d'Edo. Leur engagement est conditionné par les revenus de leurs terres : la période des récoltes (et de la perception des redevances) venue, le souffle d'un vent politique ou militaire contraire, ces hommes s'évaporent ou changent de camp. Leurs prouesses militaires, relatées dans les « dits » servent autant à bâtir une réputation qu'à ouvrir droit à récompenses... Si la bravoure du guerrier japonais médiéval ne peut être remis en question, leur éthique et leurs motivations étaient cependant plus prosaïques... 


Histoire du Japon médiéval, le monde à l'envers, de Pierre-François Souyri, aux éditions Perrin-Tempus, août 2013, 522 p.
 

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mercredi, 06 novembre 2013

Un texte du 19ème siècle sur la formation du Samouraï déchiffré

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Un texte du 19ème siècle sur la formation du Samouraï déchiffré

Auteur : Les Découvertes Archéologiques 

Ex: http://www.zejournal.mobi

Un texte d'entraînement, utilisé par une école d'arts martiaux pour enseigner aux membres de la classe bushi (samurai ou samouraï), a été déchiffré. Il révèle les règles que les samouraïs étaient censés suivre et ce qu'il fallait faire pour devenir un véritable maître épéiste.

Le texte est appelé Bugei no jo, ce qui signifie "Introduction aux arts martiaux" et est daté de la 15e année de Tenpo (1844).

Écrit pour les étudiants samouraïs sur le point d'apprendre le Takenouchi-Ryu, un système d'arts martiaux , il devait les préparer pour les défis qui les attendaient.

Une partie du texte traduit donne ceci: "Ces techniques de l'épée, nées à l'âge des dieux, ont été prononcées par la transmission divine. Elles forment une tradition vénérée de par le monde, mais sa magnificence se manifeste seulement quand on a pris connaissance (...). Quand [la connaissance] est arrivée à maturité, l'esprit oublie la main, la main oublie l'épée," un niveau de compétence que peu obtiennent et qui requiert un esprit calme.

Le texte comprend des citations écrites par les anciens maîtres militaires chinois et est écrit dans un style Kanbun formel: un système qui combine des éléments de l'écriture japonaise et chinoise.

Le texte a été publié à l'origine par des chercheurs en 1982, dans sa langue originale, dans un volume de l'ouvrage "Nihon Budo Taikei." Récemment, il a été partiellement traduit en anglais et analysé par Balázs Szabó, du département d'études japonaises de l'Université Eötvös Loránd à Budapest, en Hongrie.

La traduction et l'analyse sont décrites dans la dernière édition de la revue Acta Orientalia Academiae Scientiarum Hungaricae.

Parmi ses nombreux enseignements, le texte dit aux élèves de montrer une grande discipline et de ne pas craindre le nombre d'ennemis. "(...) c'est comme franchir la porte d'où nous voyons l'ennemi, même nombreux, nous les voyons comme quelques uns, donc aucune crainte ne s'éveille, et nous triomphons alors que le combat vient à peine de commencer", citation d'un enseignement Sur les Sept Classiques Militaires de la Chine ancienne.

Le dernier siècle des samouraïs

En 1844, seuls les membres de la classe Samouraï étaient autorisés à recevoir une formation d'arts martiaux. Szabó explique que cette classe était strictement héréditaire et qu'il y avait peu de possibilités pour les non-samurai d'y adhérer.

Les étudiants Samurai, dans la plupart des cas, auraient participé à plusieurs écoles d'arts martiaux et, en outre, auraient appris "l'écriture chinoise, les classiques confucéens et la poésie dans les écoles du domaine ou des écoles privées", a expliqué Szabó.
Les étudiants qui commencent leur formation de Takenouchi-ryu en 1844 ne réalisaient pas qu'ils vivaient à une époque où le Japon était sur ??le point de subir d'énormes changements.

Pendant deux siècles, il y a eu des restrictions sévères sur les Occidentaux entrant au Japon. Cela a pris fin en 1853 quand le commodore américain Matthew Perry est entré dans la baie de Tokyo avec une flotte et a exigé que le Japon signe un traité avec les États-Unis.
Dans les deux décennies qui ont suivi, une série d'événements et de guerres ont éclaté qui on vu la chute du Japon Shogun, la montée d'un nouveau Japon moderne et, finalement, la fin de la classe des Samouraïs.

Les règles Samurai.

Le texte qui vient d'être traduit énonce 12 règles que les membres de l'école de Takenouchi-ryu étaient censés suivre.
Certaines d'entre elles, dont "Ne quittez pas le chemin de l'honneur !" et "Ne commettez pas de turpitude !" étaient des règles éthiques que les samouraïs étaient censés suivre.

 

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Une règle notable, "Ne laissez pas les enseignements de l'école s'échapper !" a été créé pour protéger les techniques secrètes d'arts martiaux de l'école et à aider les élèves s'ils devaient se trouver au milieu d'un combat.

"Pour une école d'arts martiaux ... afin d'être attrayante, il était nécessaire de disposer de techniques spéciales permettant au combattant d'être efficace même contre un adversaire beaucoup plus fort. Ces techniques sophistiquées faisaient la fierté de l'école et étaient gardées secrètes, car leur fuite aurait causé une perte aussi bien économique que de prestige", écrit Szabó.

Deux autres règles, peut-être plus surprenantes, précisent que les étudiants "ne se concurrencent pas !" et "Ne racontent pas de mauvaises choses sur d'autres écoles !".

Les occidentaux modernes ont une vision populaire des samouraïs s'affrontant régulièrement, mais en 1844, ils n'étaient pas autorisés à se battre entre eux.
Le shogun Tokugawa Tsunayoshi (1646-1709) avait placé une interdiction sur les duels d'arts martiaux et a même réécrit le code que le samouraï devait suivre, en l'adaptant pour une période de paix relative. "L'apprentissage et la compétence militaire, la loyauté et la piété filiale, doit être promue, et les règles de la bienséance doivent être exécutées correctement", expliquait le shogun (traduction du livre "Études sur l'histoire intellectuelle du Japon des Tokugawa," par Masao Maruyama, Princeton University Press, 1974).

Les compétences secrètes.

Le texte propose seulement un faible aperçu des techniques secrètes que les élèves auraient appris à cette école, en séparant les descriptions en deux parties appelées "secrets les plus profonds du combat" et "secrets les plus profonds de l'escrime."

Une partie des techniques secrètes de combat à mains nues est appelé Shinsei no daiji, ce qui se traduit par "techniques divines", indiquant que ces techniques étaient considérées comme les plus puissantes.

Curieusement, une section de techniques secrètes d'escrime est répertoriée comme ?ry?ken, également connu sous le nom IJU ichinin, ce qui signifie "ceux considérés être accordés à une personne" - dans ce cas, l'héritier du directeur.

Le manque de détails décrivant ces techniques dans des cas pratiques n'est pas surprenant pour Szabó. Les directeurs avaient des raisons pour utiliser un langage crypté et l'art du secret.


Non seulement ils protégeaient le prestige de l'école, et les chances des élèves dans un combat, mais ils contribuaient à "maintenir une atmosphère mystique autour de l'école," quelque chose d'important pour un peuple qui tenait l'étude des arts martiaux en haute estime.

 - Source : Les Découvertes Archéologique

lundi, 07 octobre 2013

LE MYTHE JAPONAIS DE LA CREATION

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LE MYTHE JAPONAIS DE LA CREATION
L’archéologie à la (re)découverte de la période Jômon

Rémy VALAT*
Ex: http://metamag.fr
La période Jômon est un « mésolithique japonais » caractérisé par une amorce d’agriculture et la mise en place d’une société de chasseurs-cueilleurs complexes.  En Asie, le passage du Paléolithique supérieur à la culture Jômon est marqué par l’usage de la poterie et par une tendance progressive à la sédentarité. Ont simultanément coexisté les cultures Shengwen  (Chine-Modèle de poteries marquées à la « corde » sur une technique proche du modèle japonais.), Chulmun  (Corée-Modèle de poteries marquée au peigne) et Jômon, (La technique consistait à enrouler un cordon (ou plusieurs cordons) autour d’un bâtonnet et à « imprimer » le motif sur l’argile fraîche de la poterie de manière à obtenir des figures décoratives. Ce modèle de poteries n’était pas répandu dans tout l’archipel pendant la période concernée et l’on en trouve encore après, il s’agit juste d’un procédé commode de repérage chronologique adopté par les archéologues japonais) toutes associées à un style de fabrication de céramiques et à un mode de vie sédentaire. Les poteries à cordons -ou « Jômon » -seraient les doyennes de l’Humanité , mais la récente découverte en Chine de fragments de poteries plus anciens (20 000 ans bp) laisse la question en suspens. Cette technologie aurait peut-être été importée du continent, via la péninsule coréenne. Des similarités ont été constatées entre les poteries de la culture Hoabinhian (Vietnam), par exemple. 


D’ailleurs, la date de leur apparition au Japon a été récemment réajustée. Elles remonteraient, selon la professeure Junko Habu, à environ 16 500 ans bp, soit 4 000 ans avant son usage quotidien par les civilisations moyen-orientales. Les fragments retrouvés sur le site de Odaï Yamamoto I (太平山元 1) seraient, sous réserve d’autres découvertes archéologiques, les plus anciennes de l’histoire humaine. Ces créations sont apparentées à un modèle produit à une date ultérieure (11 000 ans av. JC) dont des fragments ont été excavés sur les berges du fleuve Amour (Russie). Il est prudent de dire que les poteries les plus anciennes de l’histoire humaine auraient été façonnées et cuites par des groupes humains présents dans un large triangle Sibérie-Chine-Japon. Sur une échelle planétaire, il s’agit plutôt d’une révolution de forme (manufacture de contenants), car l’usage de la terre cuite (pour la fabrication de statuettes d’argile) est antérieure aussi bien en Europe Orientale (28 000-27 000 bp) qu’au Japon.
 
La Protohistoire nippone échappe au schéma conventionnel des archéologues occidentaux. Elle correspond, selon le découpage chronologique déterminé par les archéologues japonais, aux périodes culturelles  Jômon (縄文) , Yayoi (弥生)  et Kôfun (古墳) , c’est-à-dire la continuité chronologique remontant à 16 500 ans bp (ou 11 000 ans bp, selon d’autres estimations) jusqu’à 645 ap. JC. Ces subdivisions singulières reposent uniquement sur des données matérielles (constatation de l’absence fabrication d’objets usuels en terre cuite, puis leur manufacture selon des modèles caractéristiques variables dans le temps et, en période finale de la Protohistoire, sur un mode d’inhumation des élites politiques locales) et diffèrent des critères européens, fondés sur une perspective globale interdisciplinaire. Si la période précédente (Iwajuku) coïncide aux grandes lignes des changements techniques et culturels du Paléolithique, la période Jômon pose problème du point de vue de l’archéologie occidentale, car l’absence d’une société agraire (qui place l’agriculture au cœur du fonctionnement de la société) ne permet pas de la caractériser comme une culture du Néolithique. 

 
Certains auteurs (Laurent Nespoulous, Sahara Makoto) la rattachent aux caractéristiques communes du Mésolithique européen, dont l’évolution générale tendrait à la « néolithisation ». De même le phénomène de « télescopage », de « rattrapage » ou d’« accélération » technologique de la période Yayoi est une singularité japonaise : l’apparition synchrone du bronze et du fer font passer l’archipel de l’ « Âge de pierre » à l’ « Âge du fer », bien que culturellement (avec la pratique funéraire du dépôt d’objets en bronze), elle pourrait encore se rattacher à l’ « Âge du Bronze » en Europe.

Les cent (ou cent-cinquante) siècles du Jômon ont été subdivisés en six principales sous-périodes par les archéologues nippons permettant de dégager les principales phases de l’évolution technique et des changements culturels de la période (les limites chronologiques indiquées ci-dessous sont celles conventionnellement admises au Japon) : le Jômon initial (proto-Jômon, selon d’autres auteurs, 10 000 à 8 000 bp), précoce (ou archaïque, 8 000-6 000 bp), antérieur (ou ancien, 6 000-3000 bp), moyen (3 000-2000 bp), postérieur (ou récent, 2 000-1 000 bp) et final (1000-500 bp). La culture Jômon sera progressivement subjuguée par une nouvelle vague de migrants venue du continent à la période Yayoi (Ve siècle av. JC-IIIe siècle ap. JC), importatrice de technologies (riziculture, bronze) et d’une culture nouvelles.
 
 
La population japonaise protohistorique a fait l’objet de nombreuses recherches, mais nos connaissances sur son effectif et son mode de vie restent en bonne partie spéculatives en dépit de l’importance des données de l’archéologie. Selon le professeur Shuzo Koyama , la population générale (avec des variations locales) aurait décuplée entre le Jômon naissant (20 100 hab.) et moyen (261 300 hab.), puis diminué progressivement de deux tiers (160 300 hab. Jômon tardif /75 800 hab. Jômon final), mais ces estimations sont probablement surévaluées. Ces variations ont été constatées sur la façade orientale de l’archipel ; sur le versant ouest, la population aurait augmentée lentement pendant toute la période. Il est certain que la densité est toujours restée inférieure à un habitant au kilomètre carré, sur tout le territoire archipélagique. 

Sur l’ensemble des îles du Japon (à l’exception probablement de l’île d’Hokkaidô), les groupes humains étaient mobiles dans les limites d’un territoire dispensateur de nourriture (grâce à l’adoucissement du climat) et adaptaient leurs stratégies de subsistance en fonction des disponibilités. La découverte de la poterie a permis certes la conservation des aliments, mais les tribus continuèrent à connaître des migrations saisonnières lorsque les ressources d’un endroit se tarissaient ou s’étaient épuisées. Les stratégies de subsistance sont opportunistes et les conditions de vie ont considérablement variées dans le temps et dans l’espace. Les membres de la communauté chargés de la collecte, de la chasse ou de la pêche se dispersaient du centre principal d’habitations (rarement de grottes) ou de centres de chasse, de pêche ou de collecte périphériques pour ravitailler le groupe . Lorsque les ressources alimentaires viennent à suffire (sur les îles d’Hokkaidô et de Kyûshû principalement), les communautés se sédentarisent et le ravitaillement en profondeur s’effectue à partir de centres périphériques permanents. Les hommes du Jômon se sont adaptés aux ressources naturelles : essentiellement installés dans le nord-est du Japon, leur environnement de prédilection était les forêts à feuilles caduques, productrices de fruits durs (plus de 50 % de l’apport calorique des hommes du Jômon). La poterie servait à la cuisson lente et à la conservation des fruits de la cueillette, ce qui eu pour principal effet d’améliorer les conditions sanitaires et l’espérance de vie (celle-ci excèdait légèrement la trentaine d’années pour les individus ayant pu atteindre l’âge adulte). 


Ces cultures marginales, que nous pourrions qualifier d’horticulture (ou de « niches de productions »), ne constituaient pas le régime principal de la population et le cycle saisonnier des collectes d’aliments et de la chasse rendaient les hommes tributaires des aléas de la nature. Les communautés n’étaient pas totalement autarciques : des liens de proximité existaient, comme en témoigne les changements et les parentés stylistiques dans les productions artisanales. L’amélioration de la qualité des produits artisanaux , la présence de produits finis exhumés en des sites éloignés de leur lieu de production prouve l’existence d’une économie reposant sur l’échange de biens (déjà constatée au Paléolithique, mais d’une plus grande ampleur et sur de plus longues distances, par voies de terre et de mer ), la spécialisation de la production et la gestion des surplus.
 
Ces changements ont probablement modifié la physionomie des communautés qui se sont structurées tout en générant des inégalités sociales plus prononcées. Il n’existe pas de traces archéologiques significatives de hiérarchisation pérenne (Jômon moyen et tardif), la distinction entre les individus était probablement horizontale, en fonction de leur position « socio-économique» au sein de la tribu. Bien qu’il n’existait probablement pas, selon la professeure Junko Habu, de transmission héréditaire du pouvoir, nous sommes bien en présence d’une société ayant toutes les caractéristiques des chasseurs-cueilleurs complexes.

La mythologie japonaise : tableau général 

Les mythes japonais ont été modifiés et épurés lors de leurs rédactions ; ces textes, rédigés plusieurs siècles après l'introduction de l'écrit au Japon , sont pour les plus importants, le Nihongi (日本紀) ou Nihonshoki (日本書紀)  et le Kojiki (古事記). Le premier a été rédigé en 720 ap. JC et le second a été finalisé en 712 ap. JC. Or, ces textes, et a fortiori le premier cité, sont l'aboutissement d'un long processus séculaire de tentatives publiques et privées d'écriture de l'histoire du Japon ancien. Son objectif est de figer une histoire officielle et de mettre un terme aux nombreuses contrefaçons et ré-écritures servant des intérêts particuliers. Le flores des généalogies fictives mettaient en péril l'équilibre de l’État, car ces dernières justifiaient des revendications à l'exercice de hautes fonctions. 

Le mythe des origines japonais, comme tous les mythes, a subi des influences culturelles et religieuses d’un environnement géographique et temporel proches (notamment le taoïsme chinois, le bouddhisme) ou plus lointains dans l’espace et dans le temps (groupes de populations venues d’Asie centrale à la période Paléolithique) et d’Océanie. Ces empreintes extérieures sont indéniables, mais un simple regard porté sur les mythes fondateurs de civilisations géographiquement proches (mais pas seulement), la Corée (royaume de Koguryŏ ) et la Chine par exemples, permettent de relever de frappantes similitudes : les deux traditions attribuent communément à un œuf l’origine de l’univers (« mythe de l’œuf cosmogonique »). 

Tous ces récits ont la même trame, parce que les mythes de la création de l’humanité, outre leurs similitudes dans le récit, auraient - bien que modifiés dans le temps- été tous imaginés dès le Paléolithique. Il ne fait quasiment aucun doute que le 1er volume du Kojiki et le chapitre « l’Âge des Dieux » du Nihongi (et plus particulièrement l’épisode relatif au couple divin Izanami et Izanagi) recèlent de précieuses informations -certes altérées- sur le panthéon, la cosmogonie et probablement les rites  autochtones du Japon préhistorique. Surtout, il est saisissant de constater que le concept de création de l’univers par un « œuf cosmogonique » est caractéristique des sociétés pratiquant la domestication des plantes, ce qui pourrait effectivement permettre de « dater » le récit à la période Jômon.
 
La Création : la « faute » et le sacrifice d’Izanami et le voyage initiatique d’Izanagi 

Pour les Japonais, la création du monde n’est pas l’oeuvre d’un dieu originel unique, mais plutôt celle de sa descendance, plus précisément du premier couple de sexes différenciés et opposés (masculin-féminin/ciel-terre) : Izanagi et Izanami. Les couples sont une constante des mythes de la création ou de la recréation du Monde. Ce duo d’êtres complémentaires constatant la vacuité du monde terrestre, créent, par un acte au net symbolisme sexuel, la première île de l’archipel en barattant l’eau salée à l’aide d’une hallebarde céleste ornée de joyaux, le tamaboko (玉鉾); des gouttes retombées sur les flots, puis agrégées entre-elles et solidifiées émergent une île, baptisée : le « pilier du centre de la terre » (Ono-Goro-Jima). Le mythe de la création du monde terrestre est tout au long du récit associé au tamaboko, objet renvoyant à la notion de centralité, d’axe du monde, d’échelle permettant la communication entre le ciel et la terre (axis mundi). C’est autour de cet axe, planté dans le sol, que les deux divinités se déplacent, prononcent la phrase rituelle du mariage sur les différentes îles sur lesquelles ils se rendent pour procréer de nouvelles divinités ou créer de nouvelles îles. 

La création reste cependant entachée, par le « péché originel  » d’Izanami. Cette dernière ayant prononcé – en lieu et place de l’époux- la phrase rituelle précédant l’union physique, cette maladresse constitue un irréparable manquement : c’est la « faute  ». Cet acte est sanctionné par la naissance de monstruosités, notamment un enfant sans os (une limace), lequel est abandonné sur esquif de roseau . Plus tard, lorsque le protocole est respecté, Izanami crée les principales composantes de la nature (les rivières, les montagnes, les arbres, etc.), mais également le soleil et la lune. Toutefois, la « faute » d’Izanami ne peut être expiée : Izanami meurt en couche en donnant naissance au dieu du feu, Kagu Tsuchi (迦具土), mais de son corps en décomposition sous l’action destructrice des flammes apparaissent les divinités associées à la fertilité : l’eau, la terre, le mûrier, cinq variétés de graines (chanvre, millet, riz, maïs, légumes secs) et le ver à soie. Commence alors pour Izanagi, un parcours initiatique  : infanticide de Kagu Tsuchi, descente dans le monde chtonien des morts (Yomi) pour y retrouver son épouse, échec de sa quête initiale (Izanagi éclairé par une dent d’un peigne aperçoit le corps décomposé d’Izanami, enfreignant ainsi la promesse qu’il avait faite à son épouse de ne pas porter son regard sur elle) et enfin purification du dieu à son retour dans le monde terrestre des vivants, préliminaire à son ascension définitive dans les cieux. Izanami est par conséquent responsable de son malheur, par son péché, elle est devenue impure. Ce voyage initiatique aux enfers (répété par les dieux Opo-kuni-nushi ) témoigne des racines profondes du mythe, dont on retrouve la trame, par exemple dans la tradition indoeuropéenne et dans de nombreux mythes anciens  : la tristesse d’Izanagi n’est pas sans évoquer la lamentation universelle décrétée par les Ases après la mort du dieu Balder , le regard fatal échangé par le couple rappelle celui d’Orphée et d’Eurydice , le voyage sans retour de Gilgamesh  aux enfers, histoires ayant comme thématique commune et récurrente un séjour au pays des morts. 

Un mythe ritualisé... 

Dans les sociétés traditionnelles, les mythes sont mis en scène : le temps de la Création est « réactualisé ». S' il est difficile de « dater » l’élaboration de l’épisode de la « mort d’Izanami », de forts indices prêtent à penser que ce dernier faisait partie intégrante des rites de quelques communautés de la période Jômon. La concordance des données archéologiques avec le récit et les caractéristiques de la société qui la produit (société pratiquant la domestication des plantes) viennent étayer cette hypothèse. Les traces matérielles sont des indicateurs de rites, associés à des croyances, exprimées par le mythe.

*Rémy Valat publiera très porchainement Les mythes d’argile. La culture spirituelle du Japon mésolithique, aux éditions Dualpha . Il s’agit d’une étude complète sur la culture jômon et sa culture spirituelle.

En savoir plus :

Barnes Gina L., Rise of Civilization in East Asia. The Archeology of China, Korea and Japan, Thames and Hudson, London, 1992.
Eliade Mircea, Histoire des croyances et des idées religieuses. De l’âge de pierre aux mystères d’Eleusis, Paris, Payot, 1976.
Habu Junko, Ancient Jômon of Japan, Cambridge University Press, 2011.
Hayden Brian, A Prehistory of Religion. Shamans, Sorcerers and Saints, Washington, Smithonians Books, 2003 ; L’homme et l’inégalité. L’invention de la hiérarchie durant la préhistoire, CNRS éditions, 2008.
Keiji Imamura, Prehistoric Japan. New Perspectives on Insular East Asia, University of Hawaï Press, 1996.
Kônoshi Takamitsu, Kojiki no sekaikan, Yoshikawa Kôbunkan, 1986.Naumann Nelly, “Japanese Prehistory. The Material and Spiritual Culture of the Jômon Period”, in : Asien und Afrika Studien 6 der Humboldt-Universität zu Berlin, Harrassowitz Verlag, 2000. 
Nespoulous Laurent, « Cadres chrono-culturels et dynamiques protohistoriques », in : Archéologie et patrimoine au Japon, [lieu?], éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2008.Société d’étude sociale du Japon de la période du Quaternaire (Nihon Daiyonki Gakkai), Ono Akira, Harunari Hideji, Oda Shizuo, Les traces de la présence humaine au Japon (illustrations), 1992.図解・日本の人類遺跡 日本第四紀学会/小野 昭/春成秀爾/小田静夫-編 東京大学出版
Yamagata Mariko, “The Shakadô Figurines and Middle Jômon Ritual in the Kofû Basin”, in : Japanese Journal of religious Studies, 1992, 19/2-3.

mardi, 18 juin 2013

JAPON 2013: l’Empire du soleil déclinant

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JAPON 2013: l’Empire du soleil déclinant

Auran Derien
Ex: http://metamag.fr/
Le Japon sera-t-il le modèle de la décadence occidentale? La conversion de ses dirigeants aux tripotages financiers anglo-saxons, qu’elle soit volontaire, par aliénation, ou obligée, sous l’influence de chantages divers, est étonnante: le saut dans la création monétaire débridée imitant l’escroquerie de la réserve fédérale aura des effets pervers. Pourtant, dans les années 80 tout se présentait bien
 
Le grand ingénieur OHNO et sa révolution organisationnelle.
 
On se souvient que la méthode OHNO eut tant de succès qu’elle transforma toutes les entreprises dans le monde. Elle reposait sur deux piliers : la production juste à temps et l’activation automatique de celle-ci. Dans un pays totalement détruit après la guerre, les entreprises devaient offrir des produits très différents en petites quantités et dans des variétés multiples. 
 

Taiichi Ohno
 
Aussi, l’ingénieur Ohno utilisa-t-il l’expression : penser à l’envers (de l’occident) quand il chercha et trouva comment augmenter la productivité lorsque les quantités produites sont stables. La révolution dans l’organisation se concentra sur la chasse aux excédents, tant de matière que de personnes, ce qui obligea à repenser toute la structure des entreprises pour faire apparaître ces derniers où qu’ils soient, et les éliminer par des adaptations. Bien sûr, le succès japonais d’alors possédait quelques traits spécifiques, en particulier la pratique du marché du travail interne aux organisations, des syndicats d'entreprises avec une éthique coopérative, l’emploi à vie car le Japon manquait alors de main d’œuvre adulte, et un salaire croissant avec l’ancienneté. Ainsi, le Japon transforma le monde. Jusqu’à ce que les voyous de la finance bloquent son développement.
 
La crise asiatique des années 90.
 
Le fondement du pillage de la finance repose sur la création puis la dévalorisation de créances. Ce processus donne vie aux assassins financiers, leur fournit l’oxygène nécessaire à leurs entreprises. Ils gonflent les créances (les croyances en l’avenir radieux d’un secteur, d’un pays, d’une technique) puis les dégonflent en leur faisant perdre toute valeur. Alors ils volent, désarticulent et tuent. Cela permet d’empêcher le développement de zones car celles-ci sont ruinées au moment où les créances sont dégonflées.
 
Le Japon a subi une agression similaire dans les années 90. La finance anglo-saxone voulait déstructurer son économie, l’émietter, la vider de sa substance comme ils le font avec l’Europe moribonde. Le Japon a cependant préféré l’austérité. La déflation s’est effectuée en interne, sans démembrement. Pendant des années, les gains ont servi à compenser la bulle antérieure. Le dégonflement a signifié stagnation. Pendant ce temps, la commission européenne était corrompue pour un prix modique, les frontières détruites par Lord Brittan, l’homme de Rothschild, et la Chine pouvait décoller, écoulant en Europe ses produits puis acquérant peu à peu une technologie que les Européens sont désormais incapables de renouveler car tout le tissu humain, culturel, socio-politique, éducatif s’effrite sous l’œil torve de dégénérés béats placés là par la supra classe financière. Malheureusement, il semble que le Japon ne veuille plus résister.

Un présent qui ne prépare pas l’avenir.
 
D’abord, la population japonaise vieillit. On sait que le nombre de retraités va augmenter et que le système de retraite a placé son épargne dans les titres publics. Le niveau de vie des anciens est donc conditionné par la politique monétaire. On ne sait pas si le désastre de Fukushima, qui va marquer génétiquement la zone pour une assez longue période, résulte d’un phénomène naturel ou si le système HAARP en est la cause. Toujours est-il que le pouvoir politique a voulu tout secouer et s’est lancé dans la production monétaire avec l’allégresse de l’enfant découvrant la machine à fabriquer des bulles de savon. On s’attendra donc à deux phénomènes, au moins: les folies monétaires font croître à court terme les valeurs des actifs, car il faut bien utiliser ces yens. 
 
 
La bourse va donc monter. La rapidité de l’inondation monétaire, sans investissements nouveaux - et rentables - suffisants provoque l’achat d’autres devises, à titre de placements. Le yen baisse. Le premier ministre, nouveau converti aux béatitudes monétaristes, espère que cela maintiendra un écart constant entre le yen et les autres monnaies soumises au même phénomène de production inflationniste. Aucun effet sur les exportations et importations n’en est attendu. Il est probable qu’une partie des yens émis sera convertie en devises d’autres zones, et que ces capitaux entreront dans des fonds souverains, peut-être pour acheter, eux-aussi, des terres, immeubles, etc. puisque tout est à vendre, surtout en Europe où les gagistes des ministères bradent tout pour se remplir les poches. 
 
L'Humain avant tout
 
La production de yens répond à la production de dollars, livres, etc. dans un monde dominé par les faux-monnayeurs. Il est regrettable que l’élite japonaise n’ait pas plus d’idées que Bernanke. Les modèles de développement sont à réinventer. La grande innovation japonaise d’après-guerre a porté ses fruits. Mais les pillards veillent et gardent le même cap: étouffer tout ce qui est humain car ils s’éduquent à cela.  Aucune réforme pertinente, tant dans la finance que dans l’éducation, dans les retraites comme dans l’écologie n’a jamais été décidée au Japon ou en Europe depuis la victoire de la finance mondialiste. Il faut repenser le développement car ni le FMI, ni l’OMC et ses démolisseurs, ni les tueurs en série des associations de financiers n’amélioreront le sort de quelque humain que ce soit. Ces institutions ont été pensées par des trafiquants pour assurer leur domination. Il ne faut jamais cesser de regarder du côté de la Grèce antique, seul moment où l’homme a été considéré comme la mesure de toute chose. Et non le dollar, le yen ou l’euro.

lundi, 06 mai 2013

L’être de l’aikido

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L’être de l’aikido

Ex: http://dhdc2917.eu/

L’aikido est le principe de la lignée des dix mille générations de l’univers.
 L’aikido est la vérité reçue du ciel, l’agissement merveilleux de l’aiki de takemusu.
 L’aikido est la voie d’harmonie du ciel, de la terre et des hommes.
 Mais encore, l’aikido est la voie d’ordonnance des dix mille choses.

O’Sensei Morihei Ueshiba

« La multitude des visages de l’aikido, apparaissant souvent comme antagonistes par certains de leurs aspects, doit nous engager à nous poser cette question essentielle, en nous tournant vers Ueshiba Morihei : qu’est-ce que l’aikido ? Si depuis la disparition de Ueshiba Morihei, l’intérêt légitime du pratiquant a été le faire et le « comment faire ? », la question de l’être, de ce qu’est l’aikido, a été le plus souvent éludée. En matière de discipline orientale, l’appréhension de l’être passe nécessairement par la pratique et par conséquent, la question de ce qu’est l’aikido et la question de savoir comment faire l’aikido sont uniment liées. Pour autant le questionnement quant à l’essence fait le plus souvent défaut. Or, c’est proprement l’objet de ces discours, et particulièrement du premier d’entre eux, transcrit dans le présent volume. Ueshiba n’explique pas ici tel ou tel mouvement. Il ne s’agit ni d’une description technique ni de la présentation historique de la discipline, mais plutôt de l’essence de ce qu’on appelle « aikido ». Ainsi, dès les premiers mots de cette conférence, Ueshiba nous propose-t-il d’opérer un changement de point de vue, d’une part, en nous détournant de la question proprement gestuelle du comment, et d’autre part, d’une manière plus fondamentale, en nous invitant à abandonner l’idée qui consiste à réduire le terme aikido à une discipline particulière. En effet, à la question qu’est-ce que l’aikido ? il ne répond pas par une phrase du type : « L’aikido est une discipline martiale créée en telle année dont les pratiquants, aikidoka, portent tels et tels vêtements et usent de telles armes… », mais par « L’aikido est le principe de la lignée unique des dix mille générations de l’univers », assignant ainsi au terme « aikido » la valeur d’un principe et non celle d’un fait particulier. Au fil de ces conférences, Ueshiba Morihei donne ainsi un double sens au terme aikido : le premier désigne la discipline qu’il fonde au cours du vingtième siècle, le second signifie un principe naturel* de création et d’ordonnance qui, comme tel, existe depuis toujours concomitant à la création du monde. Les deux aspects du terme ne sont pas étrangers l’un à l’autre, mais entretiennent, pour Ueshiba, un rapport de type causal : l’aikido en tant que discipline est l’expression phénoménale adéquate, le visage, ou du moins sa recherche, de l’aikido en tant que principe**.

Dès lors la question qu’est-ce que l’aikido ? ouvre un questionnement sur l’être de l’aikido en tant qu’il est à la fois principe et chemin vers la réalisation effective de ce principe. Le double sens du terme « aikido » renvoie ainsi à l’idée d’actualisation, autrement dit au passage d’une virtualité à sa réalité tangible. Il y a donc implicitement l’idée majeure, s’agissant d’un principe naturel, d’une évolution de la nature vers sa pleine réalisation, son parachèvement [kansei]. »

Bruno Traversi, in préface de « Takemusu Aiki » de Morihei Ueshiba.

———————————————-
* Le rapport de l’aikido avec la nature est communément admis. Toutefois, il faut préciser que nature doit s’entendre dans un double sens : la nature dans ses expressions, dans son foisonnement, et la nature en tant que force productrice et ordonnatrice du réel, autrement dit dans ses principes, nature naturée et nature naturante. On se fourvoierait certainement en pensant les techniques d’aikido d’après une imitation des formes et des mouvements de la nature. La corrélation entre nature et aikido doit se penser selon un plan plus fondamental, celui des principes. L’aikido, en tant que discipline, est naturel en ce que l’aikido, en tant que principe, est un principe naturel, et non une convention humaine et sociale. Et si, effectivement, on trouve entre les mouvements d’aikido et les mouvements de la nature une certaine similitude, c’est qu’ils sont produits selon les mêmes principes, issus d’une même origine ou racine [kongen].

** Ces notions sont particulièrement importantes pour comprendre que la génèse de l’aikido ne résulte nullement de la synthèse de différents arts martiaux, mais est un principe naturel qui se révèle à Ueshiba à travers diverses expériences spirituelles et martiales. Cet aspect fait l’objet de long développements dans ses conférences.

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vendredi, 11 janvier 2013

Japan op ramkoers met buren

shinzo abe1De Japanse kiezers hebben de conservatieve Liberaal-Democratische Partij (LDP) een erg ruime parlementaire meerderheid bezorgd. Premier Shinzo Abe kan vrijuit een nog meer liberale en militaristische koers varen. Hij zal zonder veel problemen de grondwet kunnen herschrijven om alle pacifistische resten te verwijderen en van Japan een militaire grootmacht te maken, evenwel (voorlopig?) zonder atoomwapens. Buren China, Zuid- en Noord-Korea en Taiwan hebben gegronde redenen tot bezorgdheid.

Hebben de Japanners vooral rond de economische problemen gestemd? Als we de campagne bekijken, ging het nauwelijks over de nucleaire kwestie, Fukushima leek ver weg. De economie, ja, maar Japan zit nu al twintig jaar in de problemen. Sinds de vastgoedzeepbel uit elkaar spatte, kent het vroegere mirakel vooral stagnatie. De jongste tijd wordt het wel erger, met grote industriereuzen die in zware problemen zitten. Maar de campagne draaide ook voor een groot deel rond nationalistische thema’s, en de uitslag weerspiegelt dat.

Militarisme

Abe’s boodschap kwam erop neer dat Japan moet optornen tegen het gevoel van neergang. China verdrong Japan als economische macht van twee naar drie, China bouwt een sterke marine uit terwijl Japan is gehandicapt door een grondwet opgesteld om een herleving van het militarisme te beletten. De buren kijken Japan op de vingers omwille van zijn schoolboeken geschiedenis. Elk bezoek van hooggeplaatsten aan de tempel van Yakasuni, waar ook de stoffelijke overschotten van oorlogsmisdadigers zijn, lokt woedende reacties uit in Oost-Azië.

Die nationalistische campagne sloeg aan. Laten we even de uitslagen bekijken. De Kamer van volksvertegenwoordigers heeft twee soorten gekozenen: er zijn 300 zetels aangeduid per district, met één zetel per district volgens Brits systeem (“winner takes all”). De andere 180 zetels zijn verdeeld volgens nationale lijsten. Vooral met die laatste kan men de percentages van elke partij bekijken.

De LDP haalt met die lijsten 27,8 %, zijn bondgenoten van Komeito (politieke arm van een invloedrijke boeddhistische groep) 11,9 %, samen bijna 40%. Maar de Partij van Nationaal Herstel van de ultranationalistische ex-gouverneur van Tokyo, Shintaro Ishihara, en van de burgemeester van Osaka, Toru Hashimoto, haalt met haar chauvinistische en sterke anti-Chinese campagne 20,5 %. Een groot succes voor een partij die nauwelijks twee maanden bestaat en die de LDP zwaar onder druk zette.

 De Democratische Partij (DP) die drie jaar regeerde en soms als centrumlinks wordt geklasseerd, 15,5 %, de Communistische Partij 6,2%, de Sociaaldemocratische 2,4%. De centrumrechtse “Uw Partij”, afsplitsing van de LDP, staat er met 8,8%.

Ontgoocheld

Dit is een bijzonder rechtse nationalistische uitslag. Veel heeft te maken met de zware ontgoocheling van veel kiezers in de DP die in 2009 een grote meerderheid haalde. Toen was er de grote hoop dat die partij een einde zou maken aan een halve eeuw bijna onafgebroken LDP-bewind. Maar de DP sloeg die hoop de bodem in, het verschil met de LDP was niet groot. De beloofde herziening van de banden met de VS kwam er niet, de staatsbureaucratie bleef oppermachtig, de crisis met de ramp van Fukushima werd zeer halfslachtig aangepakt, de partij was geen echte partij maar bleef een kartel van diverse groepen, de ene afkomstig uit de LDP, anderen van de Socialistische Partij.

Daar kwam bovenop de internationale financieel-economische crisis waar Japan ook de gevolgen van ondervond. De vraag naar Japanse producten stagneerde of daalde, grote bedrijven als Panasonic en Sony raakten in moeilijkheden. Intussen steeg de staatsschuld tot 230% van het BNP en steeg het begrotingstekort tot 10%. Dat 16% van de bevolking onder de armoededrempel leeft en 34 % van de werkenden in een precaire arbeidssituatie verkeert, kwam in de campagne nauwelijks aan bod.

Boeman China

Tot overmaat van ramp leden de Japanse ondernemingen de voorbije maanden ook sterk onder de slechtere relaties met China. Het conflict over de omstreden eilandengroep Senkaku/ Diaoyu leidde aan weerszijden tot hyper nationalistische explosies én tot een gevoelige daling van Japans uitvoer naar China.

Daarmee duiken weer de oude spanningen op. In China werd deze maand de 75e verjaardag van de slachting in Nanjing, waarbij de Japanners volgens Peking 300.000 mensen ombrachten, herdacht. De Volkskrant, spreekbuis van de Chinese Communistische Partij, somde in neen reactie op de verkiezingsuitslagen in Japan drie punten op waar Tokyo moet op letten om goede relaties met zijn buren te hebben: de bezoeken aan Yakasuni, symbool van het Japans imperialisme, stopzetten; geen provocaties rond de betwiste eilanden; niet raken aan de grondwet. Peking had daar kunnen aan toevoegen: de geschiedenisboeken in het Japanse onderwijs waarvan sommige edities ronduit negationistisch zijn, de Japanse oorlogsmisdaden worden gewoon uitgeveegd.

In Tokyo gaat men er echter vanuit dat de nieuwe Chinese leider Xi Jinping op dezelfde anti-Japanse lijn zit als zijn “promotor”, gewezen leider Jiang Zhemin. Of dan toch tenminste wil inspelen op de zeer levendige anti-Japanse gevoelens in China. Dat is immers gesneden brood voor de Chinese leiders die zelf graag een nationalistische toon aanslaan. Dat nationalisme is het ideologisch cement dat de verdwijning van de maoïstische ideologie (zelf ook al nationalistisch) moet opvullen.

Zakelijk

Maar nu in Japan de campagne achter de rug is en de LDP minder rekening moet houden met de Partij voor Nationaal Herstel, kan Abe misschien weer dezelfde pragmatische politiek volgen als toen hij in 2006 een eerste keer premier werd. De Japanse zakenwereld heeft als investeerder en uitvoerder grote belangen bij die buur, vanuit die hoek zal er allicht op matiging worden aangedrongen.

Anderzijds is Abe een ideologische nationalist. Hij heeft de grootste bewondering voor wijlen zijn grootvader Nobusuke Kishi die minister van Handel en Industrie was toen Japan in 1941 Pearl Harbor aanviel. Kishi werd na de oorlog opgepakt als oorlogsmisdadiger, maar in 1948 met Amerikaanse zegen vrijgelaten. Van 1957 tot 1960 was hij premier.

Zoals zijn grootvader geeft Abe prioriteit aan de banden met de VS. Zijn eerste bezoek gaat naar Washington waar men niets liever vraagt dan nog nauwere militaire banden. Want Japan is een koninginnestuk in de Amerikaanse strategie van “containment” van China. Heeft Japan dan zelf geen kernwapens, de VS hebben er naar believen op en rond Japan.

mardi, 13 novembre 2012

Fall 1941: Pearl Harbor and The Wars of Corporate America

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Fall 1941: Pearl Harbor and The Wars of Corporate America

Myth: The US was forced to declare war on Japan after a totally unexpected Japanese attack on the American naval base in Hawaii on December 7, 1941. On account of Japan’s alliance with Nazi Germany, this aggression automatically brought the US into the war against Germany.

Reality: The Roosevelt administration had been eager for some time to wage war against Japan and sought to unleash such a war by means of the institution of an oil embargo and other provocations. Having deciphered Japanese codes, Washington knew a Japanese fleet was on its way to Pearl Harbor, but welcomed the attack since a Japanese aggression would make it possible to “sell” the war to the overwhelmingly anti-war American public.

An attack by Japan, as opposed to an American attack on Japan, was also supposed to avoid a declaration of war by Japan’s ally, Germany, which was treaty-bound to help only if Japan was attacked. However, for reasons which have nothing to do with Japan or the US but everything with the failure of Germany’s “lightning war” against the Soviet Union, Hitler himself declared war on the US a few days after Pearl Harbor, on December 11, 1941.

Fall 1941. The US, then as now, was ruled by a “Power Elite” of industrialists, owners and managers of the country’s leading corporations and banks, constituting only a tiny fraction of its population. Then as now, these industrialists and financiers – “Corporate America” – had close connections with the highest ranks of the army, “the warlords,” as Columbia University sociologist C. Wright Mills, who coined the term “power elite,”[1] has called them, and for whom a few years later a big HQ, known as the Pentagon, would be erected on the banks of the Potomac River.

Indeed, the “military-industrial complex” had already existed for many decades when, at the end of his career as President, and having served it most assiduously, Eisenhower gave it that name. Talking about presidents: in the 1930s and 1940s, again then as now, the Power Elite kindly allowed the American people every four years to choose between two of the elite’s own members – one labelled “Republican,” the other “Democrat,” but few people know the difference – to reside in the White House in order to formulate and administer national and international policies. These policies invariably served – and still serve – the Power Elite’s interests, in other words, they consistently aimed to promote “business” – a code word for the maximization of profits by the big corporations and banks that are members of the Power Elite.

As President Calvin Coolidge candidly put it on one occasion during the 1920s, “the business of America [meaning of the American government] is business.” In 1941, then, the tenant of the White House was a bona fide member of the Power Elite, a scion of a rich, privileged, and powerful family: Franklin D. Roosevelt, often referred to as “FDR”. (Incidentally, the Roosevelt family’s wealth had been built at least partly in the opium trade with China; as Balzac once wrote, “behind every great fortune there lurks a crime.”)

Roosevelt appears to have served the Power Elite rather well, for he already managed to be nominated (difficult!) and elected (relatively easy!) in 1932, 1936, and again in 1940. That was a remarkable achievement, since the “dirty thirties” were hard times, marked by the “Great Depression” as well as great international tensions, leading to the eruption of war in Europe in 1939. Roosevelt’s job – serving the interests of the Power Elite – was far from easy, because within the ranks of that elite opinions differed about how corporate interests could best be served by the President. With respect to the economic crisis, some industrialists and bankers were pretty happy with the President’s Keynesian approach, known as the “New Deal” and involving much state intervention in the economy, while others were vehemently opposed to it and loudly demanded a return to laissez-faire orthodoxy. The Power Elite was also divided with respect to the handling of foreign affairs.

The owners and top managers of many American corporations – including Ford, General Motors, IBM, ITT, and Rockefeller’s Standard Oil of New Jersey, now known as Exxon – liked Hitler a lot; one of them – William Knudsen of General Motors – even glorified the German Führer as “the miracle of the 20th century.”[2] The reason: in preparation for war, the Führer had been arming Germany to the teeth, and the numerous German branch plants of US corporations had profited handsomely from that country’s “armament boom” by producing trucks, tanks and planes in sites such as GM’s Opel factory in Rüsselsheim and Ford’s big plant in Cologne, the Ford-Werke; and the likes of Exxon and Texaco had been making plenty of money by supplying the fuel Hitler’s panzers would need to roll all the way to Warsaw in 1939, to Paris in 1940, and (almost) to Moscow in 1941. No wonder the managers and owners of these corporations helped to celebrate Germany’s victories against Poland and France at a big party in the Waldorf-Astoria Hotel in New York on June 26, 1940!

American “captains of industry” like Henry Ford also liked the way Hitler had shut down the German unions, outlawed all labour parties, and thrown the communists and many socialists into concentration camps; they wished Roosevelt would mete out the same kind of treatment to America’s own pesky union leaders and “reds,” the latter still numerous in the 1930s and early 1940s. The last thing those men wanted, was for Roosevelt to involve the US in the war on the side of Germany’s enemies, they were “isolationists” (or “non-interventionists”) and so, in the summer of 1940, was the majority of the American public: a Gallup Poll, taken in September 1940, showed that 88 percent of Americans wanted to stay out of the war that was raging in Europe.[3] Not surprisingly, then, there was no sign whatsoever that Roosevelt might want to restrict trade with Germany, let alone embark on an anti-Hitler crusade. In fact, during the presidential election campaign in the fall 1940, he solemnly promised that “[our] boys are not going to be sent into any foreign wars.”[4]

That Hitler has crushed France and other democratic countries, was of no concern to the US corporate types who did business with Hitler, in fact, they felt that Europe’s future belonged to fascism, especially Germany’s variety of fascism, Nazism, rather than to democracy. (Typically, the chairman of General Motors, Alfred P. Sloan, declared at that time that it was a good thing that in Europe the democracies were giving way “to an alternative [i.e. fascist] system with strong, intelligent, and aggressive leaders who made the people work longer and harder and who had the instinct of gangsters – all of them good qualities”!)[5] And, since they certainly did not want Europe’s future to belong to socialism in its evolutionary, let alone revolutionary (i.e. communist) variety, the US industrialists would be particularly happy when, about one year later, Hitler would finally do what they have long hoped he would do, namely, to attack the Soviet Union in order to destroy the homeland of communism and source of inspiration and support of “reds” all over the world, also in the US.

While many big corporations were engaged in profitable business with Nazi Germany, others now happened to be making plenty of money by doing business with Great Britain. That country – in addition to Canada and other member countries of the British Empire, of course – was Germany’s only remaining enemy from the fall of 1940 until June 1941, when Hitler’s attack on the Soviet Union caused Britain and the Soviet Union to become allies. Britain was desperately in need of all sorts of equipment to continue its struggle against Nazi Germany, wanted to purchase much of it in the US, but was unable to make the cash payments required by America’s existing “Cash-and-Carry” legislation. However, Roosevelt made it possible for US corporations to take advantage of this enormous “window of opportunity” when, on March 11, 1941, he introduced his famous Lend-Lease program, providing Britain with virtually unlimited credit to purchase trucks, planes, and other martial hardware in the US. The Lend-Lease exports to Britain were to generate windfall profits, not only on account of the huge volume of business involved but also because these exports featured inflated prices and fraudulent practices such as double billing.

A segment of Corporate America thus began to sympathize with Great Britain, a less “natural” phenomenon than we would now tend to believe. (Indeed, after American independence the ex-motherland had long remained Uncle Sam’s archenemy; and as late the 1930s, the US military still had plans for war against Britain and an invasion of the Canadian Dominion, the latter including plans for the bombing of cities and the use of poison gas.)[6] Some mouthpieces of this corporate constituency, though not very many, even started to favour a US entry into the war on the side of the British; they became known as the “interventionists.” Of course, many if not most big American corporations made money through business with both Nazi Germany and Britain and, as the Roosevelt administration itself was henceforth preparing for possible war, multiplying military expenditures and ordering all sorts of equipment, they also started to make more and more money by supplying America’s own armed forces with all sorts of martial material.[7]

If there was one thing that all the leaders of Corporate America could agree on, regardless of their individual sympathies towards either Hitler or Churchill, it was this: the war in Europe in 1939 was good, even wonderful, for business. They also agreed that the longer this war lasted, the better it would be for all of them. With the exception of the most fervent pro-British interventionists, they further agreed that there was no pressing need for the US to become actively involved in this war, and certainly not to go to war against Germany. Most advantageous to Corporate America was a scenario whereby the war in Europe dragged on as long as possible, so that the big corporations could continue to profit from supplying equipment to the Germans, the British, to their respective allies, and to America herself. Henry Ford thus “expressed the hope that neither the Allies nor the Axis would win [the war],” and suggested that the United States should supply both sides with “the tools to keep on fighting until they both collapse.” Ford practised what he preached, and arranged for his factories in the US, in Britain, in Germany, and in occupied France to crank out equipment for all belligerents.[8] The war may have been hell for most people, but for American “captains of industry” such as Ford it was heaven.

Roosevelt himself is generally believed to have been an interventionist, but in Congress the isolationists certainly prevailed, and it did not look as if the US would soon, if ever, enter the war. However, on account of Lend-Lease exports to Britain, relations between Washington and Berlin were definitely deteriorating, and in the fall of 1941 a series of incidents between German submarines and US Navy destroyers escorting freighters bound for Britain lead to a crisis that has become known as the “undeclared naval war.” But even that episode did not lead to active American involvement in the war in Europe. Corporate America was profiting handsomely from the status quo, and was simply not interested in a crusade against Nazi Germany. Conversely, Nazi Germany was deeply involved in the great project of Hitler’s life, his mission to destroy the Soviet Union. In this war, things had not been going according to plan. The Blitzkrieg in the East, launched on June 1941, was supposed to have “crushed the Soviet Union like an egg” within 4 to 6 weeks, or so it was believed by the military experts not only in Berlin but also in Washington. However, in early December Hitler was still waiting for the Soviets to wave the white flag. To the contrary, on December 5, the Red Army suddenly launched a counter-offensive in front of Moscow, and suddenly the Germans found themselves deeply in trouble. The last thing Hitler needed at this point was a war against the US.[9]

In the 1930s, the US military had no plans, and did not prepare plans, to fight a war against Nazi Germany. On the other hand, they did have plans war against Great Britain, Canada, Mexico – and Japan.[10] Why against Japan? In the 1930s, the US was one of the world’s leading industrial powers and, like all industrial powers, was constantly looking out for sources of inexpensive raw materials such as rubber and oil, as well as for markets for its finished products. Already at the end of the nineteenth century, America had consistently pursued its interests in this respect by extending its economic and sometimes even direct political influence across oceans and continents. This aggressive, “imperialist” policy – pursued ruthlessly by presidents such as Theodore Roosevelt, a cousin of FDR – had led to American control over former Spanish colonies such as Puerto Rico, Cuba, and the Philippines, and also over the hitherto independent island nation of Hawaii. America had thus also developed into a major power in the Pacific Ocean and even in the Far East.[11]

The lands on the far shores of the Pacific Ocean played an increasingly important role as markets for American export products and as sources of cheap raw materials. But in the Depression-ridden 1930s, when the competition for markets and resources was heating up, the US faced the competition there of an aggressive rival industrial power, one that was even more needy for oil and similar raw materials, and also for markets for its finished products. That competitor was Japan, the land of the rising sun. Japan sought to realize its own imperialist ambitions in China and in resource-rich Southeast Asia and, like the US, did not hesitate to use violence in the process, for example waging ruthless war on China and carving a client state out of the northern part of that great but weak country. What bothered the United States was not that the Japanese treated their Chinese and Korean neighbours as Untermenschen, but that they turned that part of the world into what they called the Greater East Asia Co-Prosperity Sphere, i.e., an economic bailiwick of their very own, a “closed economy” in with there was no room for the American competition. In doing so, the Japanese actually followed the example of the US, which had earlier transformed Latin America and much of the Caribbean into Uncle Sam’s exclusive economic playground.[12]

Corporate America was extremely frustrated at being squeezed out of the lucrative Far Eastern market by the “Japs,” a “yellow race” Americans in general had already started to despise during the 19th century.[13] Japan was viewed as an arrogant but essentially weak upstart country, that mighty America could easily “wipe off the map in three months,” as Navy Secretary Frank Knox put it on one occasion.[14] And so it happened that, during the 1930s and early 1940s, the US Power Elite, while mostly opposed to war against Germany, was virtually unanimously in favour of a war against Japan – unless, of course, Japan was prepared to make major concessions, such as “sharing” China with the US. President Roosevelt – like Woodrow Wilson not at all the pacifist he has been made out to be by all too many historians – was keen to provide such a “splendid little war.” (This expression had been coined by US Secretary of State John Hay in reference to the Spanish-American War of 1898; it was “splendid” in that it allowed the US to pocket the Philippines, Puerto Rico, etc.) By the summer of 1941, after Tokyo had further increased its zone of influence in the Far East, e.g. by occupying the rubber-rich French colony of Indochina and, desperate above all for oil, had obviously started to lust after the oil-rich Dutch colony of Indonesia, FDR appears to have decided that the time was ripe for war against Japan, but he faced two problems. First, public opinion was strongly against American involvement in any foreign war. Second, the isolationist majority in Congress might not consent to such a war, fearing that it would automatically bring the US into war against Germany.

Roosevelt’s solution to this twin problem, according to the author of a detailed and extremely well documented recent study, Robert B. Stinnett, was to “provoke Japan into an overt act of war against the United States.”[15] Indeed, in case of a Japanese attack the American public would have no choice but to rally behind the flag. (The public had similarly been made to rally behind the Stars and Stripes before, namely at the start of the Spanish-American War, when the visiting US battleship Maine had mysteriously sunk in Havana harbour, an act that was immediately blamed on the Spanish; after World War II, Americans would again be conditioned to approve of wars, wanted and planned by their government, by means of contrived provocations such as the 1964 Gulf of Tonkin Incident.) Furthermore, under the terms of the Tripartite Treaty concluded by Japan, Germany, and Italy in Berlin on September 27, 1940, the three countries undertook to assist each other when one of the three contracting powers was attacked by another country, but not when one of them attacked another country. Consequently, in case of a Japanese attack on the US, the isolationists, who were non-interventionists with respect to Germany but not with respect to Japan, did not have to fear that a conflict with Japan would also mean war against Germany.

And so, President Roosevelt, having decided that “Japan must be seen to make the first overt move,” made “provoking Japan into an overt act of war the principal policy that guided [his] actions toward Japan throughout 1941,” as Stinnett has written. The stratagems used included the deployment of warships close to, and even into, Japanese territorial waters, apparently in the hope of sparking a Gulf of Tonkin-style incident that could be construed to be a casus belli.  More effective, however, was the relentless economic pressure that was brought to bear on Japan, a country desperately in need of raw materials such as oil and rubber and therefore likely to consider such methods to be singularly provocative. In the summer of 1941, the Roosevelt administration froze all Japanese assets in the United States and embarked on a “strategy for frustrating Japanese acquisition of petroleum products.” In collaboration with the British and the Dutch, anti-Japanese for reasons of their own, the US imposed severe economic sanctions on Japan, including an embargo on vital oil products. The situation deteriorated further in the fall of 1941. On November 7, Tokyo, hoping to avoid war with the mighty US, offered to apply in China the principle of non-discriminatory trade relations on the condition that the Americans did the same in their own sphere of influence in Latin America. However, Washington wanted reciprocity only in the sphere of influence of other imperialist powers, and not in its own backyard; the Japanese offer was rejected.

The continuing US provocations of Japan were intended to cause Japan to go to war, and were indeed increasingly likely to do so. “This continuing putting pins in rattlesnakes,” FDR was to confide to friends later, “finally got this country bit.” On November 26, when Washington a demanded Japan’s withdrawal from China, the “rattlesnakes” in Tokyo decided they had enough and prepared to “bite.” A Japanese fleet was ordered to set sail for Hawaii in order to attack the US warships that FDR had decided to station there, rather provocatively as well as invitingly as far as the Japanese were concerned, in 1940. Having deciphered the Japanese codes, the American government and top army brass knew exactly what the Japanese armada was up to, but did not warn the commanders in Hawaii, thus allowing the “surprise attack” on Pearl Harbor to happen on Sunday, December 7, 1941.[16]

The following day FDR found it easy to convince Congress to declare war on Japan, and the American people, shocked by a seemingly cowardly attack that they could not know to have been provoked, and expected, by their own government, predictably rallied behind the flag. The US was ready to wage war against Japan, and the prospects for a relatively easy victory were hardly diminished by the losses suffered at Pearl Harbour which, while ostensibly grievous, were far from catastrophic. The ships that had been sunk were older, “mostly 27-year old relics of World War I,” and far from indispensible for warfare against Japan. The modern warships, on the other hand, including the aircraft carriers, whose role in the war would turn out to be crucial, were unscathed, as per chance (?) they had been sent elsewhere by orders from Washington and were safely out at sea during the attack.[17] However, things did not quite work out as expected, because a few days later, on December 11, Nazi Germany unexpectedly declared war, thus forcing the US to confront two enemies and to fight a much bigger war than expected, a war on two fronts, a world war.

In the White House, the news of the Japanese attack on Pearl Harbor had not arrived as a surprise, but the German declaration of war exploded there as a bombshell. Germany had nothing to do with the attack in Hawaii and had not even been aware of the Japanese plans, so FDR did not consider asking Congress to declare war on Nazi Germany at the same time as Japan. Admittedly, US relations with Germany had been deteriorating for some time because of America’s active support for Great Britain, escalating to the undeclared naval war of the fall of 1941. However, as we have already seen, the US Power Elite did not feel the need to intervene in the war in Europe. It was Hitler himself who declared war on the United States on December 11, 1941, much to the surprise of Roosevelt. Why? Only a few days earlier, on December 5, 1941, the Red Army had launched a counteroffensive in front of Moscow, and this entailed the failure of the Blitzkrieg in the Soviet Union. On that same day, Hitler and his generals realized that they could no longer win the war. But when, only a few days later, the German dictator learned of the Japanese attack on Pearl Harbor, he appears to have speculated that a German declaration of war on the American enemy of his Japanese friends, though not required under the terms of the Tripartite Treaty, would induce Tokyo to reciprocate with a declaration of war on the Soviet enemy of Germany.

With the bulk of the Japanese army stationed in northern China and therefore able to immediately attack the Soviet Union in the Vladivostok area, a conflict with Japan would have forced the Soviets into the extremely perilous predicament of a two-front war, opening up the possibility that Germany might yet win its anti-Soviet “crusade.” Hitler, then, believed that he could exorcize the spectre of defeat by summoning a sort of Japanese deus ex machina to the Soviet Union’s vulnerable Siberian frontier. But Japan did not take Hitler’s bait. Tokyo, too, despised the Soviet state but, already at war against the US, could not afford the luxury of a two-front war and preferred to put all of its money on a “southern” strategy, hoping to win the big prize of resource-rich Southeast Asia, rather than embark on a venture in the inhospitable reaches of Siberia. Only at the very end of the war, after the surrender of Nazi Germany, would it come to hostilities between the Soviet Union and Japan. In any event, because of Hitler’s needless declaration of war, the United States was henceforth also an active participant in the war in Europe, with Great Britain and the Soviet Union as allies.[18]

In recent years, Uncle Sam has been going to war rather frequently, but we are invariably asked to believe that this is done for purely humanitarian reasons, i.e. to prevent holocausts, to stop terrorists from committing all sorts of evil, to get rid of nasty dictators, to promote democracy, etc.[19]

Never, it seems, are economic interests of the US or, more accurately, of America’s big corporations, involved. Quite often, these wars are compared to America’s archetypal “good war,” World War II, in which Uncle Sam supposedly went to war for no other reason than to defend freedom and democracy and to fight dictatorship and injustice. (In an attempt to justify his “war against terrorism,” for example, and “sell” it to the American public, George W. Bush was quick to compare the 9/11 attacks to Pearl Harbor.) This short examination of the circumstances of the US entry into the war in December 1941, however, reveals a very different picture. The American Power Elite wanted war against Japan, plans for such a war had been ready for some time, and in 1941 Roosevelt obligingly arranged for such a war, not because of Tokyo’s unprovoked aggression and horrible war crimes in China, but because American corporations wanted a share of the luscious big “pie” of Far Eastern resources and markets. On the other hand, because the major US corporations were doing wonderful business in and with Nazi Germany, profiting handsomely from the war Hitler had unleashed and, incidentally, providing him with the equipment and fuel required for his Blitzkrieg, war against Nazi Germany was definitely not wanted by the US Power Elite, even though there were plenty of compelling humanitarian reasons for crusading against the truly evil “Third Reich.” Prior to 1941, no plans for a war against Germany had been developed, and in December 1941 the US did not voluntarily go to war against Germany, but “backed into” that war because of Hitler’s own fault.

Humanitarian considerations played no role whatsoever in the calculus that led to America’s participation in World War II, the country’s original “good war.” And there is no reason to believe that they did so in the calculus that, more recently, led to America’s marching off to fight allegedly “good wars” in unhappy lands such as Iraq, Afghanistan, and Libya – or will do so in the looming war against Iran.

A war against Iran is very much wanted by Corporate America, since it holds the promise of a large market and of plentiful raw materials, especially oil. As in the case of the war against Japan, plans for such a war are ready, and the present tenant in the White House seems just as eager as FDR was to make it happen. Furthermore, again as in the case of the war against Japan, provocations are being orchestrated, this time in the form of sabotage and intrusions by drones, as well as by the old-fashioned deployment of warships just outside Iranian territorial waters. Washington is again “putting pins in rattlesnakes,” apparently hoping that the Iranian “rattlesnake” will bite back, thus justifying a “splendid little war.” However, as in the case of Pearl Harbor, the resulting war may well again turn out to be much bigger, longer, and nastier than expected.

Jacques R. Pauwels is the author of The Myth of the Good War: America in the Second World War, James Lorimer, Toronto, 2002

 

Notes

[1] C. Wright Mills, The Power Elite, New York, 1956.
[2] Cited in Charles Higham, Trading with the Enemy: An Exposé of The Nazi-American Money Plot 1933-1949, New York, 1983, p. 163.
[3] Robert B. Stinnett, Day of Deceit: The Truth about FDR and Pearl Harbor, New York, 2001, p. 17.
[4] Cited in Sean Dennis Cashman, America, Roosevelt, and World War II, New York and London, 1989, p. 56; .
[5] Edwin Black, Nazi Nexus: America’s Corporate Connections to Hitler’s Holocaust, Washington/DC, 2009, p. 115.
[6] Floyd Rudmin, “Secret War Plans and the Malady of American Militarism,” Counterpunch, 13:1, February 17-19, 2006. pp. 4-6, http://www.counterpunch.org/2006/02/17/secret-war-plans-and-the-malady-of-american-militarism
[7] Jacques R. Pauwels, The Myth of the Good War : America in the Second World War, Toronto, 2002, pp. 50-56. The fraudulent practices of Lend-Lease are described in Kim Gold, “The mother of all frauds: How the United States swindled Britain as it faced Nazi Invasion,” Morning Star, April 10, 2003.
[8] Cited in David Lanier Lewis, The public image of Henry Ford: an American folk hero and his company, Detroit, 1976, pp. 222, 270.
[9] Jacques R. Pauwels, “70 Years Ago, December 1941: Turning Point of World War II,” Global Research, December 6, 2011, http://globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=28059.
[10] Rudmin, op. cit.
[11] See e.g. Howard Zinn, A People’s History of the United States, s.l., 1980, p. 305 ff.
[12] Patrick J. Hearden, Roosevelt confronts Hitler: America’s Entry into World War II, Dekalb/IL, 1987, p. 105.
[13] “Anti-Japanese sentiment,” http://en.wikipedia.org/wiki/Anti-Japanese_sentiment
[14] Patrick J. Buchanan, “Did FDR Provoke Pearl Harbor?,” Global Research, December 7, 2011, http://www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=28088 . Buchanan refers to a new book by George H. Nash, Freedom Betrayed: Herbert Hoover’s Secret History of the Second World War and its Aftermath, Stanford/CA, 2011.
[15] Stinnett, op. cit., p. 6.
[16] Stinnett, op. cit., pp. 5, 9-10, 17-19, 39-43; Buchanan, op. cit.; Pauwels, The Myth…, pp. 67-68. On American intercepts of coded Japanese messages, see Stinnett, op. cit., pp. 60-82. “Rattlesnakes”-quotation from Buchanan, op. cit.
[17] Stinnett, op. cit., pp. 152-154.
[18] Pauwels, “70 Years Ago…”
[19] See Jean Bricmont, Humanitarian imperialism: Using Human Rights to Sell War, New York, 2006.

lundi, 29 octobre 2012

Die wirklichen Gründe für den amerikanischen Abwurf der Atombomben über Japan

Die wirklichen Gründe für den amerikanischen Abwurf der Atombomben über Japan

Redaktion

Wie allen Amerikanern wurde auch mir beigebracht, dass die USA die Atombomben über Hiroshima und Nagasaki abwarfen, um den Zweiten Weltkrieg zu beenden und sowohl amerikanische wie japanische Menschenleben zu retten.

Aber die meisten führenden amerikanischen Militärs vertraten damals eine andere Auffassung.

 

Die amerikanische Untersuchungsgruppe Strategic Bombing Survey (USSBS), die im August 1945 von Präsident Truman beauftragt worden war, die Auswirkungen der Luftangriffe auf Japan zu untersuchen, kam in ihrem Bericht vom Juli 1946 zu dem Schluss:

»Auf der Grundlage einer ausführlichen Untersuchung aller Tatsachen und unter Berücksichtigung der Aussagen der überlebenden beteiligten japanischen Führer, vertritt die Untersuchungsgruppe die Auffassung, Japan hätte auch ohne den Abwurf der Atombomben, mit Sicherheit vor dem 31. Dezember 1945 und aller Wahrscheinlichkeit nach schon vor dem 1. November 1945 kapituliert. [Dies gilt auch dann,] wenn Russland nicht in den Krieg eingetreten und eine Invasion weder geplant noch angedacht worden wäre.« (United States Strategic Bombing Survey: »Japans’s Struggle to End the War«, 1. Juli 1946, Harry S. Truman Administration, Elsey Papers, S. 50

Der spätere Präsident General Dwight Eisenhower war zum damaligen Zeitpunkt »Oberbefehlshaber der alliierten Streitkräfte« in Nordwesteuropa (»Supreme Commander of Allied Expeditionary Forces«, SHAEF) und für einen Großteil der amerikanischen militärischen Planungen des Zweiten Weltkriegs für Europa und Japan zuständig. Er erklärte damals: »Die Japaner waren zur Kapitulation bereit, und es war unnötig, sie noch mit diesen furchtbaren [Waffen] anzugreifen.« (Newsweek, 11.11.63, »Ike on Ike«.)

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dimanche, 28 octobre 2012

Japan: Im September größtes Handelsdefizit seit 1979

Japan: Im September größtes Handelsdefizit seit 1979

Redaktion

Vor dem Hintergrund der anhaltenden Krise in Europa und zunehmender Spannungen mit seinem wichtigsten Handelspartner China verzeichnete Japan im September dieses Jahres seinen schwersten Einbruch im Handel seit mehr als 30 Jahren.

Das japanische Handelsdefizit erhöhte sich im September auf 558,6 Milliarden Yen (etwa 5,34 Milliarden Euro), da die Exporte im Jahresvergleich um 10,3 Prozent eingebrochen waren, wie das Finanzministerium am vergangenen Montag bekannt gab. Die Handelsbilanz  im September markiert den Wendepunkt von einem Handelsüberschuss von 288 Milliarden Yen (2,7 Milliarden Euro) im vergangenen Jahr zum nunmehr größten Handelsdefizit seit 1979, berichtete der Londoner Telegraph.

Am schwersten betroffen war die japanische Automobilindustrie. Dort ging der Export im September im Vergleich zum Vorjahr um 15 Prozent zurück. Auch im Kernbereich, der Unterhaltungselektronik, brach der Export im zweistelligen Bereich ein.

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mercredi, 24 octobre 2012

Japans geheime Tradition

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Japans geheime Tradition

von Johannes Seitz
 
 

Ehre bleibt in Japan ein großes Wort. Zu den grausamsten, radikalsten und zugleich faszinierendsten Beispielen gehört die rituelle Selbsttötung der Samurai, das Seppuku.

Denn im Gegensatz zu Europa hat der Zeitgeist die alten Werte und den damit verbundenen Ehrbegriff noch nicht gänzlich aus Japans Gesellschaft tilgen können. Um das Seppuku zu verstehen, ist ein Blick in die jüngere Geschichte des Landes notwendig.

Rasanter Weg zum ersten Industriestaat Asiens

Vor rund 150 Jahren öffnete sich das wirtschaftlich und kulturell bisher isolierte Land den Handelsnationen aus dem Westen. Damals wurde Japan durch das Feudalsystem der Samurai beherrscht. Schnell stellte sich heraus, dass die alte Ordnung nicht mit dem Reformeifer unter Tenno Mutsuhito mithalten konnte. Der Tenno, dessen Titel mit dem europäischen Kaiser vergleichbar ist, führte unter anderem 1889 eine konstitutionelle Verfassung ein und setzte die allgemeine Schulpflicht durch. 1872 wurde die erste Eisenbahnstrecke zwischen Tokio und Yokokama eröffnet.

Innerhalb von 50 Jahren entwickelte sich Japan so von einer Agrarnation zum ersten Industriestaat Asiens. Mutsuhito reformierte unter dem Einfluss westlicher Berater Verwaltung und Militär umfassend. Die feudale Kriegerkaste der Samurai gehörten zu den ersten Opfer der Meiji-​Ara, die 1868 begann. Sie konnten für die moderne Armee nicht mehr eingesetzt werden. Geschulte Beamte ersetzten die mittelalterliche Kriegerkaste in der Verwaltung. So löste sich der Samurai-​Stand auf und verschwand schrittweise aus der japanischen Gesellschaft. Mit dem Ende der feudalen Lebensweise veränderten sich bestimmte Werte und auch Rituale. Im Bushido, der Lebensphilosophie der Samurai, findet sich zum Beispiel noch eine Anleitung dafür, wie sich ein ehrenwerter Krieger zu jener Zeit verhalten sollte. Der Ehrenkodex der Kriegerkaste ermöglicht einen lebendigen Einblick in die Geburt des modernen Japans.

Symbol des Wertewandels: Das Seppuku

Doch die Rituale und der Ehrenkodex der Samurai verschwanden nicht von heute auf morgen. Sie lösten sich eher mit der Zeit auf oder existierten noch bis ins moderne Japan in ihrer Form verändert fort. Vor allem am Beispiel des Seppuku zeigt sich der Wertewandel der japanischen Gesellschaft innerhalb der letzten 150 Jahre.

Unter Seppuku, dass in Europa und Nordamerika auch fälschlicherweise als Harakiri bekannt ist, versteht man eine rituelle Form der Selbsttötung. Dieses Ritual wurde von Samurai oder Adeligen mit der Hilfe eines Assistenten durchgeführt, wenn deren Ehre durch eigene Schuld als verwirkt galt. Auch der Herr des Entehrten konnte den Seppuku des Untergebenen fordern, wenn dieser seinen Vorgesetzten entehrt hatte. Dabei handelte es sich keineswegs um ein juristisch vollstrecktes Urteil wie die Todesstrafe. Der Entehrte sollte durch diese Handlung seinen Ruf wiederherstellen und seinem Herrn die eigene Loyalität beweisen. Er übernahm somit die volle Verantwortung für sein Fehlverhalten.

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Streng ritualisierter Ablauf

Dabei blieb das Seppuku nur den Samurai und Adeligen selbst vorbehalten, während die einfachen Leute durch Henker hingerichtet wurden. Da die Henker aus der untersten Schicht der japanischen Gesellschaft kamen, durften diese nicht Hand an einen Adeligen oder Krieger anlegen. So entwickelte sich das Recht der Selbsttötung für die traditionelle Elite.

Sowohl Assistent als auch Verurteilter mussten sehr strenge Regeln beachten. Nur der kleinste Fehler konnte schon das Ritual und die wiederherzustellende Ehre des Verurteilten gefährden. Es genügte schon, dass der Platz nicht ordnungsgemäß vorbereitet wurde, der erste Sekundant nicht in einem Zug den Kopf abtrennte oder der Verurteilte Schmerzensschreie von sich gab. Es mussten also ein würdiger Platz bestimmt und Sekundanten ausgesucht werden, die bei der Durchführung halfen. Der zum Seppuku Verurteilte durfte dabei unter Umständen seinen Sekundanten und das Schwert, durch welches er enthauptet wurde, selbst wählen. Er musste sich, vor den Anwesenden sitzend, mit einer dolchähnlichen Klinge namens Wakizashi den Bauch aufschneiden. Sobald er die Klinge aus den Körper zog, enthauptete ihn der erste Sekundant.

Bis heute lebt Seppuku im Geheimen fort

Im Zuge der Meiji-​Ära wurde die rituelle Selbsttötung in Japan verboten. Auch das allmähliche Verschwinden der Samurai aus der japanischen Gesellschaft trug dazu bei, dass die Zahl der Seppuku immer mehr zurückging. Nur hohe Beamte des Tenno oder Shogune, die obersten militärischen Befehlshaber des Kriegeradels, Augenzeugen sowie der Herr, auf dessen Grundstück das Seppuku stattfand, verfolgten und ahndeten es zumeist auch. Bis zum Ende des Zweiten Weltkrieges gab es immer wieder Einzelfälle von Seppuku bei hohen Armeeangehörigen, die allesamt dem japanischen Adel entstammten. Gerade nach dem verlorenen Weltkrieg erwartete die japanische Bevölkerung, dass der Kaiser, trotz des Verbotes, die hohen Generäle zum Selbstmord auffordern würde. Doch Tenno Hirohito schwieg und nur einige wenige hochrangige Mitglieder des Militärs, darunter der Kriegsminister Anami Korechika, begingen freiwillig Selbstmord. Durch dieses kaiserliche Schweigen wurde das Ritual in der japanischen Öffentlichkeit als Relikt der Vergangenheit wahrgenommen.

Obwohl das letzte offizielle Seppuku am 25. November 1970 durch den Autor Yukio Mishima ausgeführt wurde, bleibt der Grundgedanke hinter dieser Zeremonie noch immer in Japan lebendig. Bis heute wird es noch in der Kunst der japanischen Gesellschaft thematisiert und auch gewürdigt. Samurai, die diesen Schritt wagten, gilt bis heute Bewunderung. Gerade unter den größten Helden der japanischen Geschichte finden sich viele, die diesen radikalen Weg wählten. Ihre Gräber bleiben bis heute Pilgerstätten, an denen alljährlich Feiern stattfinden. Auch die nach wie vor sehr hohe Selbstmordrate in Japan zeigt, wie sehr sich traditionelle Werte behaupten konnten. Für viele Japaner bleiben selbst mehr oder minder zur modernen Arbeitswelt gehörende Erlebnisse wie eine Kündigung oder Prüfungsversagen eine große Schande. So barbarisch und grausam das Seppuku westlichen Menschen erscheinen mag, spiegelt es doch die im Geheimen fortlebende Kontinuität traditioneller japanische Werte.

mardi, 24 juillet 2012

L’itinéraire d’un géopolitologue allemand: Karl Haushofer

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Robert Steuckers:
L’itinéraire d’un géopolitologue allemand: Karl Haushofer

Préambule: le texte qui suit est une brève recension du premier des deux épais volumes que le Prof. Hans-Adolf Jacobsen a consacré à Karl Haushofer. Le travail à accomplir pour réexplorer en tous ses recoins l’oeuvre de Karl Haushofer, y compris sa correspondance, est encore immense. Puisse cette modeste contribution servir de base aux étudiants qui voudraient, dans une perspective néo-eurasienne, entamer une lecture des oeuvres de Haushofer et surtout analyser tous les articles parus dans sa “Zeitschrift für Geopolitik”.

Haushofer est né en 1869 dans une famille bien ancrée dans le territoire bavarois. Les archives nous rappellent que le nom apparaît dès 1352, pour désigner une famille paysanne originaire de de la localité de Haushofen. Les ancêtres maternels, eux, sont issus du pays frison dans le nord de l’Allemagne. Orphelin de mère très tôt, dès l’âge de trois ans, le jeune Karl Haushofer sera élevé par ses grands-parents maternels en Bavière dans la région du Chiemsee. Le grand-père Fraas était professeur de médecine vétérinaire à Munich. En évoquant son enfance heureuse, Haushofer, plus tard, prend bien soin de rappeler que les différences de caste étaient inexistantes en Bavière: les enfants de toutes conditions se côtoyaient et se fréquentaient, si bien que les arrogances de classe étaient inexistantes: sa bonhommie et sa gentillesse, proverbiales, sont le fruit de cette convivialité baroque: ses intiatives porteront la marque de ce trait de caractère. Haushofer se destine très tôt à la carrière militaire qu’il entame dès 1887 au 1er Régiment d’Artillerie de campagne de l’armée du Royaume de Bavière.

En mission au Japon

Le 8 août 1896, il épouse Martha Mayer-Doss, une jeune femme très cultivée d’origine séphérade, côté paternel, de souche aristocratique bavaroise, côté maternel. Son esprit logique seront le pendant nécessaire à la fantaisie de son mari, à l’effervescence bouillonnante de son esprit et surtout de son écriture. Elle lui donnera deux fils: Albrecht (1903-1945), qui sera entraîné dans la résistance anti-nazie, et Heinz (1906-?), qui sera un agronome hors ligne. Le grand tournant de la vie de Karl Haushofer, le début véritable de sa carrière de géopolitologue, commence dès son séjour en Asie orientale, plus particulièrement au Japon (de la fin 1908 à l’été 1910), où il sera attaché militaire puis instructeur de l’armée impériale japonaise. Le voyage du couple Haushofer vers l’Empire du Soleil Levant commence à Gênes et passe par Port Saïd, Ceylan, Singapour et Hong Kong. Au cours de ce périple maritime, il aborde l’Inde, voit de loin la chaîne de l’Himalaya et rencontre Lord Kitchener, dont il admire la “créativité défensive” en matière de politique militaire. Lors d’un dîner, début 1909, Lord Kitchener lui déclare “que toute confrontation entre l’Allemagne et la Grande-Bretagne coûterait aux deux puissances leurs positions dans l’Océan Pacifique au profit du Japon et des Etats-Unis”. Haushofer ne cessera de méditer ces paroles de Lord Kitchener. En effet, avant la première guerre mondiale, l’Allemagne a hérité de l’Espagne la domination de la Micronésie qu’elle doit défendre déjà contre les manigances américaines, alors que les Etats-Unis sont maîtres des principales îles stratégiques dans cet immense espace océanique: les Philippines, les Iles Hawaï et Guam. Dès son séjour au Japon, Haushofer devient avant tout un géopolitologue de l’espace pacifique: il admet sans réticence la translatio imperii en Micronésie, où l’Allemagne, à Versailles, doit céder ces îles au Japon; pour Haushofer, c’est logique: l’Allemagne est une “puissance extérieure à l’espace pacifique” tandis que le Japon, lui, est une puissance régionale, ce qui lui donne un droit de domination sur les îles au sud de son archipel métropolitain. Mais toute présence souveraine dans l’espace pacifique donne la maîtrise du monde: Haushofer n’est donc pas exclusivement le penseur d’une géopolitique eurasienne et continentale, ou un exposant érudit d’une géopolitique nationaliste allemande, il est aussi celui qui va élaborer, au fil des années dans les colonnes de la revue “Zeitschrift für Geopolitik”, une thalassopolitique centrée sur l’Océan Pacifique, dont les lecteurs les plus attentifs ne seront pas ses compatriotes allemands ou d’autres Européens mais les Soviétiques de l’agence “Pressgeo” d’Alexander Rados, à laquelle collaborera un certain Arthur Koestler et dont procèdera le fameux espion soviétique Richard Sorge, également lecteur très attentif de la “Zeitschrift für Geopolitik” (ZfG). Dans son journal, Haushofer rappelle les rapports qu’il a eus avec des personnalités soviétiques comme Tchitchérine et Radek-Sobelsohn. L’intermédiaire entre Haushofer et Radek était le Chevalier von Niedermayer, qui avait lancé des expéditions en Perse et en Afghanistan. Niedermayer avait rapporté un jour à Haushofer que Radek lisait son livre “Geopolitik der Pazifischen Ozeans”, qu’il voulait faire traduire. Radek, roublard, ne pouvait faire simplement traduire le travail d’un général bavarois et a eu une “meilleure” idée dans le contexte soviétique de l’époque: fabriquer un plagiat assorti de phraséologie marxiste et intitulé “Tychookeanskaja Probljema”. Toutes les thèses de Haushofer y était reprises, habillées d’oripeaux marxistes. Autre intermédiaire entre Radek et Haushofer: Mylius Dostoïevski, petit-fils de l’auteur des “Frères Karamazov”, qui apportait au géopolitologue allemand des exemplaires de la revue soviétique de politique internationale “Nowy Vostok” (= “Nouveau Monde”), des informations soviétiques sur la Chine et le Japon et des écrits du révolutionnaire indonésien Tan Malakka sur le mouvement en faveur de l’auto-détermination de l’archipel, à l’époque sous domination néerlandaise.

Le séjour en Extrême-Orient lui fait découvrir aussi l’importance de la Mandchourie pour le Japon, qui cherche à la conquérir pour se donner des terres arables sur la rive asiatique qui fait face à l’archipel nippon (l’achat de terres arables, notamment en Afrique, par des puissances comme la Chine ou la Corée du Sud est toujours un problème d’actualité...). Les guerres sino-japonaises, depuis 1895, visent le contrôle de terres d’expansion pour le peuple japonais coincé sur son archipel montagneux aux espaces agricoles insuffisants. Dans les années 30, elles viseront à contrôler la majeure partie des côtes chinoises pour protéger les routes maritimes acheminant le pétrole vers les raffineries nippones, denrée vitale pour l’industrie japonaise en plein développement.

Début d’une carrière universitaire

Le retour en Allemagne de Karl et Martha Haushofer se fait via le Transibérien, trajet qui fera comprendre à Haushofer ce qu’est la dimension continentale à l’heure du chemin de fer qui a réduit les distances entre l’Europe et l’Océan Pacifique. De Kyoto à Munich, le voyage prendra exactement un mois. Le résultat de ce voyage est un premier livre, “Dai Nihon – Grossjapan” (en français: “Le Japon et les Japonais”, avec une préface de l’ethnologue franco-suisse Georges Montandon). Le succès du livre est immédiat. Martha Haushofer contacte alors le Professeur August von Drygalski (Université de Munich) pour que son mari puisse suivre les cours de géographie et passer à terme une thèse de doctorat sur le Japon. Haushofer est, à partir de ce moment-là, à la fois officier d’artillerie et professeur à l’Université. En 1913, grâce à la formidable puissance de travail de son épouse Martha, qui le seconde avec une redoutable efficacité dans tous ses projets, sa thèse est prête. La presse spécialisée se fait l’écho de ses travaux sur l’Empire du Soleil Levant. Sa notoriété est établie. Mais les voix critiques ne manquent pas: sa fébrilité et son enthousiasme, sa tendance à accepter n’importe quelle dépêche venue du Japon sans vérification sourcilleuse du contenu, son rejet explicite des “puissances ploutocratiques” (Angleterre, Etats-Unis) lui joueront quelques tours et nuiront à sa réputation jusqu’à nos jours, où il n’est pas rare de lire encore qu’il a été un “mage” et un “géographe irrationnel”.

Le déclenchement de la première guerre mondiale met un terme (tout provisoire) à ses recherches sur le Japon. Les intérêts de Haushofer se focalisent sur la “géographie défensive” (la “Wehrgeographie”) et sur la “Wehrkunde” (la “science de la défense”). C’est aussi l’époque où Haushofer découvre l’oeuvre du géographe conservateur et germanophile suédois Rudolf Kjellen, auteur d’un ouvrage capital et pionnier en sciences politiques: “L’Etat comme forme de vie” (“Der Staat als Lebensform”). Kjellen avait forgé, dans cet ouvrage, le concept de “géopolitique”. Haushofer le reprend à son compte et devient ainsi, à partir de 1916, un géopolitologue au sens propre du terme. Il complète aussi ses connaissances par la lecture des travaux du géographe allemand Friedrich Ratzel (à qui l’on doit la discipline de l’anthropogéographie); c’est l’époque où il lit aussi les oeuvres des historiens anglais Gibbon (“Decline and Fall of the Roman Empire”) et Macaulay, exposant de la vision “Whig” (et non pas conservatrice) de l’histoire anglaise, étant issu de familles quaker et presbytérienne. Les événements de la première guerre mondiale induisent Haushofer à constater que le peuple allemand n’a pas reçu —en dépit de l’excellence de son réseau universitaire, de ses érudits du 19ème siècle et de la fécondité des oeuvres produites dans le sillage de la pensée organique allemande,— de véritable éducation géopolitique et “wehrgeographisch”, contrairement aux Britanniques, dont les collèges et universités ont été à même de communiquer aux élites le “sens de l’Empire”.

Réflexions pendant la première guerre mondiale

Ce n’est qu’à la fin du conflit que la fortune des armes passera dans le camp de l’Entente. Au début de l’année 1918, en dépit de la déclaration de guerre des Etats-Unis de Woodrow Wilson au Reich allemand, Haushofer est encore plus ou moins optimiste et esquisse brièvement ce qui, pour lui, serait une paix idéale: “La Courlande, Riga et la Lituanie devront garder des liens forts avec l’Allemagne; la Pologne devra en garder d’équivalents avec l’Autriche; ensuite, il faudrait une Bulgarie consolidée et agrandie; à l’Ouest, à mon avis, il faudrait le statu quo tout en protégeant les Flamands, mais sans compensation allemande pour la Belgique et évacuation pure et simple de nos colonies et de la Turquie. Dans un tel contexte, la paix apportera la sécurité sur notre flanc oriental et le minimum auquel nous avons droit; il ne faut absolument pas parler de l’Alsace-Lorraine”. L’intervention américaine lui fera écrire dans son journal: “Plutôt mourir européen que pourrir américain”.

Haushofer voulait dégager les “trois grands peuples de l’avenir”, soit les Allemands, les Russes et les Japonais, de l’étranglement que leur préparaient les puissances anglo-saxonnes. Les énergies de l’ “ours russe” devaient être canalisées vers le Sud, vers l’Inde,sans déborder ni à l’Ouest, dans l’espace allemand, ni à l’Est dans l’espace japonais. L’ “impérialisme du dollar” est, pour Haushofer, dès le lendemain de Versailles, le “principal ennemi extérieur”. Face à la nouvelle donne que constitue le pouvoir bolchevique à Moscou, Haushofer est mitigé: il rejette le style et les pratiques bolcheviques mais concède qu’elles ont libéré la Russie (et projettent de libérer demain tous les peuples) de “l’esclavage des banques et du capital”.

En 1919, pendant les troubles qui secouent Munich et qui conduisent à l’émergence d’une République des Conseils en Bavière, Haushofer fait partie des “Einwohnerwehrverbände” (des unités de défense constituées par les habitants de la ville), soit des milices locales destinées à maintenir l’ordre contre les émules de la troïka “conseilliste” et contre les pillards qui profitaient des désordres. Elles grouperont jusqu’à 30.000 hommes en armes dans la capitale bavaroise (et jusqu’à 360.000 hommes dans toute la Bavière). Ces unités seront définitivement dissoutes en 1922.

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Les résultats du Traité de Versailles

La fin de la guerre et des troubles en Bavière ramène Haushofer à l’Université, avec une nouvelle thèse sur l’expansion géographique du Japon entre 1854 et 1919. Une chaire est mise à sa disposition en 1919/1920 où les cours suivants sont prodigués à onze étudiants: Asie orientale, Inde, Géographie comparée de l’Allemagne et du Japon, “Wehrgeographie”, Géopolitique, Frontières, Anthropogéographie, Allemands de l’étranger, Urbanisme, Politique Internationale, Les rapports entre géographie, géopolitique et sciences militaires. L’objectif de ces efforts était bien entendu de former une nouvelle élite politique et diplomatique en mesure de provoquer une révision des clauses du Traité de Versailles. Pour Wilson, le principe qui aurait dû régir la future Europe après les hostilités était celui des “nationalités”. Aucune frontière des Etats issus notamment de la dissolution de l’Empire austro-hongrois ne correspondait à ce principe rêvé par le président des Etats-Unis. Dans chacun de ces Etats, constataient Haushofer et les autres exposants de la géopolitique allemande, vivaient des minorités diverses mais aussi des minorités germaniques (dix millions de personnes en tout!), auxquelles on refusait tout contact avec l’Allemagne, comme on refusait aux Autrichiens enclavés, privés de l’industrie tchèque, de la viande et de l’agriculture hongroises et croates et de toute fenêtre maritime de se joindre à la République de Weimar, ce qui était surtout le voeu des socialistes à l’époque (ils furent les premiers, notamment sous l’impulsion de leur leader Viktor Adler, à demander l’Anschluss). L’Allemagne avait perdu son glacis alsacien-lorrain et sa province riche en blé de Posnanie, de façon à rendre la Pologne plus ou moins autarcique sur le plan alimentaire, car elle ne possédait pas de bonnes terres céréalières. La Rhénanie était démilitarisée et aucune frontière du Reich était encore “membrée” pour reprendre, avec Haushofer, la terminologie forgée au 17ème siècle par Richelieu et Vauban. Dans de telles conditions, l’Allemagne ne pouvait plus être “un sujet de l’histoire”.

Redevenir un “sujet de l’histoire”

Pour redevenir un “sujet de l’histoire”, l’Allemagne se devait de reconquérir les sympathies perdues au cours de la première guerre mondiale. Haushofer parvient à exporter son concept, au départ kjellénien, de “géopolitique”, non seulement en Italie et en Espagne, où des instituts de géopolitique voient le jour (pour l’Italie, Haushofer cite les noms suivants dans son journal: Ricciardi, Gentile, Tucci, Gabetti, Roletto et Massi) mais aussi en Chine, au Japon et en Inde. La géopolitique, de facture kjellénienne et haushoférienne, se répand également par dissémination et traduction dans une quantité de revues dans le monde entier. La deuxième initiative qui sera prise, dès 1925, sera la création d’une “Deutsche Akademie”, qui avait pour but premier de s’adresser aux élites germanophones d’Europe (Autriche, Suisse, minorités allemandes, Flandre, Scandinavie, selon le journal tenu par Haushofer). Cette Académie devait compter 100 membres. L’idée vient au départ du légat de Bavière à Paris, le Baron von Ritter qui, en 1923 déjà, préconisait la création d’une institution allemande semblable à l’Institut de France ou même à l’Académie française, afin d’entretenir de bons et fructueux contacts avec l’étranger dans une perspective d’apaisement constructif. Bien que mise sur pied et financée par des organismes privés, la “Deutsche Akademie” ne connaîtra pas le succès que méritait son programme séduisant. Les “Goethe-Institute”, qui représentent l’Allemagne sur le plan culturel aujourd’hui, en sont les héritiers indirects, depuis leur fondation en 1932.

L’objectif des instituts de géopolitique, de la Deutsche Akademie et des “Goethe-Institute” est donc de générer au sein du peuple allemand une sorte d’ “auto-éducation” permanente aux faits géographiques et aux problèmes de la politique internationale. Cette “auto-éducation” ou “Selbsterziehung” repose sur un impératif d’ouverture au monde, exactement comme Karl et Martha Haushofer s’étaient ouverts aux réalités indiennes, asiatiques, pacifiques et sibériennes entre 1908 et 1910, lors de leur mission militaire au Japon. Haushofer explique cette démarche dans un mémorandum rédigé dans sa villa d’Hartschimmelhof en août 1945. La première guerre mondiale, y écrit-il, a éclaté parce que les 70 nations, qui y ont été impliquées, ne possédaient pas les outils intellectuels pour comprendre les actions et les manoeuvres des autres; ensuite, les idéologies dominantes avant 1914 ne percevaient pas la “sacralité de la Terre” (“das Sakrale der Erde”). Des connaissances géographiques et historiques factuelles, couplées à cette intuition tellurique —quasi romantique et mystique à la double façon du “penseur et peintre tellurique” Carl Gustav Carus, au 19ème siècle, et de son héritier Ludwig Klages qui préconise l’attention aux mystères de la Terre dans son discours aux mouvements de jeunesse lors de leur rassemblement de 1913— auraient pu contribuer à une entente générale entre les peuples: l’intuition des ressources de Gaia, renforcée par une “tekhnê” politique adéquate, aurait généré une sagesse générale, partagée par tous les peuples de la Terre. La géopolitique, dans l’optique de Haushofer, quelques semaines après la capitulation de l’Allemagne, aurait pu constituer le moyen d’éviter toute saignée supplémentaire et toute conflagration inutile (cf. Jacobsen, tome I, pp. 258-259).

Une géopolitique révolutionnaire dans les années 20

En dépit de ce mémorandum d’août 1945, qui regrette anticipativement la disparition de toute géopolitique allemande, telle que Haushofer et son équipe l’avaient envisagée, et souligne la dimension “pacifiste”, non au sens usuel du terme mais selon l’adage latin “Si vis pacem, para bellum” et selon l’injonction traditionnelle qui veut que c’est un devoir sacré (“fas”) d’apprendre de l’ennemi, Haushofer a été aussi et surtout —c’est ce que l’on retient de lui aujourd’hui— l’élève rebelle de Sir Halford John Mackinder, l’élève qui inverse les intentions du maître en retenant bien la teneur de ses leçons; pour Mackinder, à partir de son célèbre discours de 1904 au lendemain de l’inauguration du dernier tronçon du Transibérien, la dynamique de l’histoire reposait sur l’opposition atavique et récurrente entre puissances continentales et puissances maritimes (ou thalassocraties). Les puissances littorales du grand continent eurasiatique et africain sont tantôt les alliées des unes tantôt celles des autres. Dans les années 20, où sa géopolitique prend forme et influence les milieux révolutionnaires (dont les cercles que fréquentaient Ernst et Friedrich-Georg Jünger ainsi que la figure originale que fut Friedrich Hielscher, sans oublier les communistes gravitant autour de Radek et de Rados), Haushofer énumère les puissances continentales actives, énonciatrices d’une diplomatie originale et indépendante face au monde occidental anglo-saxon ou français: l’Union Soviétique, la Turquie (après les accords signés entre Mustafa Kemal Atatürk et le nouveau pouvoir soviétique à Moscou), la Perse (après la prise du pouvoir par Reza Khan), l’Afghanistan, le sous-continent indien (dès qu’il deviendra indépendant, ce que l’on croit imminent à l’époque en Allemagne) et la Chine. Il n’y incluait ni l’Allemagne (neutralisée et sortie du club des “sujets de l’histoire”) ni le Japon, puissance thalassocratique qui venait de vaincre la flotte russe à Tsoushima et qui détenait le droit, depuis les accords de Washington de 1922 d’entretenir la troisième flotte du monde (le double de celle de la France!) dans les eaux du Pacifique. Pour “contenir” les puissances de la Terre, constate Haushofer en bon lecteur de Mackinder, les puissances maritimes anglo-saxonnes ont créé un “anneau” de bases et de points d’appui comme Gibraltar, Malte, Chypre, Suez, les bases britanniques du Golfe Persique, l’Inde, Singapour, Hong Kong ainsi que la Nouvelle-Zélande et l’Australie, un cordon d’îles et d’îlots plus isolés (Tokelau, Suvarov, Cook, Pitcairn, Henderson, ...) qui s’étendent jusqu’aux littoraux du cône sud de l’Amérique du Sud. L’Indochine française, l’Insulinde néerlandaise et les quelques points d’appui et comptoirs portugais sont inclus, bon gré mal gré, dans ce dispositif en “anneau”, commandé depuis Londres.

Les Philippines, occupées depuis la guerre hispano-américaine puis philippino-américaine de 1898 à 1911 par les Etats-Unis, en sont le prolongement septentrional. Le Japon refuse de faire partie de ce dispositif qui permet pourtant de contrôler les routes du pétrole acheminé vers l’archipel nippon. L’Empire du Soleil Levant cherche à être une double puissance: 1) continentale avec la Mandchourie et, plus tard, avec ses conquêtes en Chine et avec la satellisation tacite de la Mongolie intérieure, et 2) maritime en contrôlant Formose, la presqu’île coréenne et la Micronésie, anciennement espagnole puis allemande. L’histoire japonaise, après Tsoushima, est marquée par la volonté d’assurer cette double hégémonie continentale et maritime, l’armée de terre et la marine se disputant budgets et priorités.

Un bloc continental défensif

Haushofer souhaite, à cette époque, que le “bloc continental”, soviéto-turco-perso-afghano-chinois, dont il souhaite l’unité stratégique, fasse continuellement pression sur l’ “anneau” de manière à le faire sauter. Cette unité stratégique est une “alliance pression/défense”, un “Druck-Abwehr-Verband”, soit une alliance de facto qui se défend (“Abwehr”) contre la pression (“Druck”) qu’exercent les bases et points d’appui des thalassocraties, contre toutes les tentatives de déploiement des puissances continentales. Haushofer dénonce, dans cette optique, le colonialisme et le racisme, qui en découle, car ces “ismes” bloquent la voie des peuples vers l’émancipation et l’auto-détermination. Dans l’ouvrage collectif “Welt in Gärung” (= “Le monde en effervescence”), Haushofer parle des “gardiens rigides du statu quo” (“starre Hüter des gewesenen Standes”) qui sont les obstacles (“Hemmungen”) à toute paix véritable; ils provoquent des révolutions bouleversantes et des effondrements déstabilisants, des “Umstürze”, au lieu de favoriser des changements radicaux et féconds, des “Umbrüche”. Cette idée le rapproche de Carl Schmitt, quand ce dernier critique avec acuité et véhémence les traités imposés par Washington dans le monde entier, dans le sillage de l’idéologie wilsonienne, et les nouvelles dispositions, en apparence apaisantes et pacifistes, imposées à Versailles puis à Genève dans le cadre de la SdN. Carl Schmitt critiquait, entre autres, et très sévèrement, les démarches américaines visant la destruction définitive du droit des gens classique, le “ius publicum europaeum” (qui disparait entre 1890 et 1918), en visant à ôter aux Etats le droit de faire la guerre (limitée), selon les théories juridiques de Frank B. Kellogg dès la fin des années 20. Il y a tout un travail à faire sur le parallèlisme entre Carl Schmitt et les écoles géopolitiques de son temps.

En dépit du grand capital de sympathie dont bénéficiait le Japon chez Haushofer depuis son séjour à Kyoto, sa géopolitique, dans les années 20, est nettement favorable à la Chine, dont le sort, dit-il, est similaire à celui de l’Allemagne. Elle a dû céder des territoires à ses voisins et sa façade maritime est neutralisée par la pression permanente qui s’exerce depuis toutes les composantes de l’ “anneau”, constitués par les points d’appui étrangers (surtout l’américain aux Philippines). Haushofer, dans ses réflexions sur le destin de la Chine, constate l’hétérogénéité physique de l’ancien espace impérial chinois: le désert de Gobi sépare la vaste zone de peuplement “han” des zones habitées par les peuples turcophones, à l’époque sous influence soviétique. Les montagnes du Tibet sont sous influence britannique depuis les Indes et cette influence constitue l’avancée la plus profonde de l’impérialisme thalassocratique vers l’intérieur des terres eurasiennes, permettant de surcroît de contrôler le “chateau d’eau” tibétain où les principaux fleuves d’Asie prennent leur source (à l’Ouest, l’Indus et le Gange; à l’Est, le Brahmapoutre/Tsangpo, le Salouen, l’Irawadi et le Mékong). La Mandchourie, disputée entre la Russie et le Japon, est toutefois majoritairement peuplée de Chinois et reviendra donc tôt ou tard chinoise.

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Sympathie pour la Chine mais soutien au Japon

Haushofer, en dépit de ses sympathies pour la Chine, soutiendra le Japon dès le début de la guerre sino-japonaise (qui débute avec l’incident de Moukden en septembre 1931). Cette option nouvelle vient sans doute du fait que la Chine avait voté plusieurs motions contre l’Allemagne à la SdN, que tous constataient que la Chine était incapable de sortir par ses propres forces de ses misères. Le Japon apparaissait dès lors comme une puissance impériale plus fiable, capable d’apporter un nouvel ordre dans la région, instable depuis les guerres de l’opium et la révolte de Tai-Peh. Haushofer avait suivi la “croissance organique” du Japon mais celui-ci ne cadrait pas avec ses théories, vu sa nature hybride, à la fois continentale depuis sa conquête de la Mandchourie et thalassocratique vu sa supériorité navale dans la région. Très branché sur l’idée mackindérienne d’ “anneau maritime”, Haushofer estime que le Japon demeure une donnée floue sur l’échiquier international. Il a cherché des explications d’ordre “racial”, en faisant appel à des critères “anthropogéographiques” (Ratzel) pour tenter d’expliquer l’imprécision du statut géopolitique et géostratégique du Japon: pour lui, le peuple japonais est originaire, au départ, des îles du Pacifique (des Philippines notamment et sans doute, antérieurement, de l’Insulinde et de la Malaisie) et se sent plus à l’aise dans les îles chaudes et humides que sur le sol sec de la Mandchourie continentale, en dépit de la nécessité pour les Japonais d’avoir à disposition cette zone continentale afin de “respirer”, d’acquérir sur le long terme, ce que Haushofer appelle un “Atemraum”, un espace de respiration pour son trop-plein démographique.

L’Asie orientale est travaillée, ajoute-t-il, par la dynamique de deux “Pan-Ideen”, l’idée panasiatique et l’idée panpacifique. L’idée panasiatique concerne tous les peuples d’Asie, de la Perse au Japon: elle vise l’unité stratégique de tous les Etats asiatiques solidement constitués contre la mainmise occidentale. L’idée panpacifique vise, pour sa part, l’unité de tous les Etats riverains de l’Océan Pacifique (Chine, Japon, Indonésie, Indochine, Philippines, d’une part; Etats-Unis, Mexique, Pérou et Chili, d’autre part). On retrouve la trace de cette idée dans les rapports récents ou actuels entre Etats asiatiques (surtout le Japon) et Etats latino-américains (relations commerciales entre le Mexique et le Japon, Fujimori à la présidence péruvienne, les théories géopolitiques et thalassopolitiques panpacifiques du général chilien Pinochet, etc.). Pour Haushofer, la présence de ces deux idées-forces génère un espace fragilisé (riche en turbulences potentielles, celles qui sont à l’oeuvre actuellement) sur la plage d’intersection où ces idées se télescopent. Soit entre la Chine littorale et les possessions japonaises en face de ces côtes chinoises. Tôt ou tard, pense Haushofer, les Etats-Unis utiliseront l’idée panpacifique pour contenir toute avancée soviétique en direction de la zone océanique du Pacifique ou pour contenir une Chine qui aurait adopté une politique continentaliste et panasiatique. Haushofer manifeste donc sa sympathie à l’égard du panasiatisme. Pour lui, le panasiatisme est “révolutionnaire”, apportera un réel changement de donne, radical et définitif, tandis que le panpacifisme est “évolutionnaire”, et n’apportera que des changements mineurs toujours susceptibles d’être révisés. Le Japon, en maîtrisant le littoral chinois et une bonne frange territoriale de l’arrière-pays puis en s’opposant à toute ingérence occidentale dans la région, opte pour une démarche panasiatique, ce qui explique que Haushofer le soutient dans ses actions en Mandchourie. Puis en fera un élément constitutif de l’alliance qu’il préconisera entre la Mitteleuropa, l’Eurasie (soviétique) et le Japon/Mandchourie orientant ses énergies vers le Sud.

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Toutes ces réflexions indiquent que Haushofer fut principalement un géopolitologue spécialisé dans le monde asiatique et pacifique. La lecture de ses travaux sur ces espaces continentaux et maritimes demeure toujours aujourd’hui du plus haut intérêt, vu les frictions actuelles dans la région et l’ingérence américaine qui parie, somme toute, sur une forme actualisée du panpacifisme pour maintenir son hégémonie et contenir une Chine devenue pleinement panasiatique dans la mesure où elle fait partie du “Groupe de Shanghai” (OCS), tout en orientant vers le sud ses ambitions maritimes, heurtant un Vietnam qui s’aligne désormais sur les Etats-Unis, en dépit de la guerre atroce qui y a fait rage il y a quelques décennies. On n’oubliera pas toutefois que Kissinger, en 1970-72, avait parié sur une Chine maoïste continentale (sans grandes ambitions maritimes) pour contenir l’URSS. La Chine a alors eu une dimension “panpacifiste” plutôt que “panasiatique” (comme l’a souligné à sa manière le général et géopolitologue italien Guido Giannettini). Les stratégies demeurent et peuvent s’utiliser de multiples manières, au gré des circonstances et des alliances ponctuelles.

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Réflexions sur l’Inde

Reste à méditer, dans le cadre très restreint de cet article, les réflexions de Haushofer sur l’Inde. Si l’Inde devient indépendante, elle cessera automatiquement d’être un élément essentiel de l’ “anneau” pour devenir une pièce maîtresse du dispositif continentaliste/panasiatique. Le sous-continent indien est donc marqué par une certaine ambivalence: il est soit la clef de voûte de la puissance maritime britannique, reposant sur la maîtrise totale de l’Océan Indien; soit l’avant-garde des puissances continentales sur le “rimland” méridional de l’Eurasie et dans la “Mer du Milieu” qu’est précisément l’Océan Indien. Cette ambivalence se retrouve aujourd’hui au premier plan de l’actualité: l’Inde est certes partie prenante dans le défi lancé par le “Groupe de Shanghai” et à l’ONU (où elle ne vote pas en faveur des interventions réclamées par l’hegemon américain) mais elle est sollicitée par ce même hegemon pour participer au “containment” de la Chine, au nom de son vieux conflit avec Beijing pour les hauteurs himalayennes de l’Aksai Chin en marge du Cachemire/Jammu et pour la question des barrages sur le Brahmapoutre et de la maîtrise du Sikkim. Haushofer constatait déjà, bien avant la partition de l’Inde en 1947, suite au départ des Britanniques, que l’opposition séculaire entre Musulmans et Hindous freinera l’accession de l’Inde à l’indépendance et/ou minera son unité territoriale ou sa cohérence sociale. Ensuite, l’Inde comme l’Allemagne (ou l’Europe) de la “Kleinstaaterei”, a été et est encore un espace politiquement morcelé. Le mouvement indépendantiste et unitaire indien est, souligne-t-il, un modèle pour l’Allemagne et l’Europe, dans la mesure, justement, où il veut sauter au-dessus des différences fragmentantes pour redevenir un bloc capable d’être pleinement “sujet de l’histoire”.

Voici donc quelques-unes des idées essentielles véhiculées par la “Zeitschrift für Geopolitik” de Haushofer. Il y a en a eu une quantité d’autres, parfois fluctuantes et contradictoires,  qu’il faudra réexhumer, analyser et commenter en les resituant dans leur contexte. La tâche sera lourde, longue mais passionnante. La géopolitique allemande de Haushofer est plus intéressante à analyser dans les années 20, où elle prend tout son essor, avant l’avènement du national-socialisme, tout comme la mouvance nationale-révolutionnaire, plus ou moins russophile, qui cesse ses activités à partir de 1933 ou les poursuit vaille que vaille dans la clandestinité ou l’exil. Reste aussi à examiner les rapports entre Haushofer et Rudolf Hess, qui ne cesse de tourmenter les esprits. Albrecht Haushofer, secrétaire de la “Deutsche Akademie” et fidèle disciple de ses parents, résume en quelques points les erreurs stratégiques de l’Allemagne dont:
a)    la surestimation de la force de frappe japonaise pour faire fléchir en Asie la résistance des thalassocraties;
b)    la surestimation des phénomènes de crise en France avant les hostilités;
c)    la sous-estimation de la durée temporelle avec laquelle on peut éliminer militairement un problème;
d)    la surestimation des réserves militaires allemandes;
e)    la méconnaissance de la psychologie anglaise, tant celle des masses que celle des dirigeants;
f)    le désintérêt pour l’Amérique.
Albrecht Haushofer, on le sait, sera exécuté d’une balle dans la nuque par la Gestapo à la prison de Berlin-Moabit en 1945. Ses parents, arrêtés par les Américains, questionnés, seront retrouvés pendus à un arbre au fond du jardin de leur villa d’Hartschimmelhof, le 10 mars 1946. Karl Haushofer était malade, déprimé et âgé de 75 ans.

L’Allemagne officielle ne s’est donc jamais inspirée de Haushofer ni sous la République de Weimar ni sous le régime national-socialiste ni sous la Bundesrepublik. Néanmoins bon nombre de collaborateurs de Haushofer ont poursuivi leurs travaux géopolitiques après 1945. Leurs itinéraires, et les fluctuations de ceux-ci devrait pouvoir constituer un objet d’étude. De 1951 à 1956, la ZfG reparaît, exactement sous la même forme qu’au temps de Haushofer. Elle change ensuite de titre pour devenir la “Zeitschrift für deutsches Auslandswissen” (= “Revue allemande pour la connaissance de l’étranger”), publiée sous les auspices d’un “Institut für Geosoziologie und Politik”. Elle paraît sous la houlette d’un disciple de Haushofer, le Dr. Hugo Hassinger. En 1960, le géographe Adolf Grabowsky, qui a également fait ses premières armes aux côtés de Haushofer, publie, en n’escamotant pas le terme “géopolitique”, un ouvrage remarqué, “Raum, Staat und Geschichte – Grundlegung der Geopolitik” (= “Espace, Etat et histoire – Fondation de la géopolitique”). Il préfèrera parler ultérieurement de “Raumkraft” (de “force de l’espace”). Les ouvrages qui ont voulu faire redémarrer une géopolitique allemande dans le nouveau contexte européen sont sans contexte ceux 1) du Baron Heinrich Jordis von Lohausen, dont le livre “Denken in Kontinenten” restera malheureusement confiné aux cercles conservateurs, nationaux et nationaux-conservateurs, “politiquement correct” oblige, bien que Lohausen ne développait aucun discours incendiaire ou provocateur, et 2) du politologue Heinz Brill, “Geopolitik heute”, où l’auteur, professeur à l’Académie militaire de la Bundeswehr, ose, pour la première fois, au départ d’une position officielle au sein de l’Etat allemand, énoncer un programme géopolitique, inspiré des traditions léguées par les héritiers de Haushofer, surtout ceux qui, comme Fochler-Hauke ou Pahl, ont poursuivi une quête d’ordre géopolitique après la mort tragique de leur professeur et de son épouse. A tous d’oeuvrer, désormais, pour exploiter tous les aspects de ces travaux, s’étendant sur près d’un siècle.

Robert Steuckers,
Forest-Flotzenberg, juin 2012.

Bibliographie:

Hans EBELING, Geopolitik – Karl Haushofer und seine Raumwissenschaft 1919-1945, Akademie Verlag, 1994.
Karl HAUSHOFER, Grenzen in ihrer geographischen und politischen Bedeutung, Kurt Vowinckel Verlag, Berlin-Grunewald, 1927.
Karl HAUSHOFER u. andere, Raumüberwindende Mächte, B.G. Teubner, Leipzig/Berlin, 1934.
Karl HAUSHOFER, Weltpolitik von heute, Verlag Zeitgeschichte, Berlin, 1934.
Karl HAUSHOFER & Gustav FOCHLER-HAUKE, Welt in Gärung – Zeitberichte deutscher Geopolitiker, Verlag von Breitkopf u. Härtel, Leipzig, 1937.
Karl HAUSHOFER, Weltmeere und Weltmächte, Zeitgeschichte-Verlag, Berlin, 1937.
Karl HAUSHOFER, Le Japon et les Japonais, Payot, Paris, 1937 (préface et traduction de Georges Montandon).
Karl HAUSHOFER, De la géopolitique, FAYARD, Paris, 1986 (préface du Prof. Jean Klein; introduction du Prof. H.-A. Jacobsen).
Hans-Adolf JACOBSEN, Karl Haushofer, Leben und Werk, Band 1 & 2, Harald Boldt Verlag, Boppard am Rhein, 1979.
Rudolf KJELLEN, Die Grossmächte vor und nach dem Weltkriege, B. G. Teubner, Leipzig/Berlin, 1930.
Günter MASCHKE, “Frank B. Kellogg siegt am Golf – Völkerrechtgeschichtliche Rückblicke anlässlich des ersten Krieges des Pazifismus”, in Etappe, Nr. 7, Bonn, Oktober 1991.
Emil MAURER, Weltpolitik im Pazifik, Goldmann, Leipzig, 1942.
Armin MOHLER, “Karl Haushofer”, in Criticon, Nr. 56, Nov.-Dez. 1979.
Perry PIERIK, Karl Haushofer en het nationaal-socialisme – Tijd, werk en invloed, Aspekt, Soesterberg, 2006.
Robert STEUCKERS, “Les thèmes de la géopolitique et de l’espace russe dans la vie culturelle berlinoise de 1918 à 1945 – Karl Haushofer, Oskar von Niedermayer & Otto Hoetzsch”, in Nouvelles de Synergies européennes, n°57-58, Forest, août-octobre 2002 [recension de: Karl SCHLÖGEL, Berlin Ostbahnhof Europas – Russen und Deutsche in ihrem Jahrhundert, Siedler, Berlin, 1998].

lundi, 16 juillet 2012

Il nuovo ordine giapponese in Asia nel 1941-42 rese inevitabile la fine del colonialismo occidentale

Il nuovo ordine giapponese in Asia nel 1941-42 rese inevitabile la fine del colonialismo occidentale

Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

Non è uno sterile esercizio di retorica e non è neppure una forma di nostalgia verso la “ucronia” o “storia alternativa” teorizzata dal filosofo Charles Renouvier, in polemica con il determinismo positivista, domandarsi che cosa sarebbe accaduto se la politica giapponese in Asia, negli anni del secondo conflitto mondiale, fosse stata diversa da quella che è stata; o meglio, se avesse privilegiato alcuni elementi che pure in essa erano presenti, a scapito di altri – dettati specialmente dai militari – che finirono per prevalere nettamente.

 

Che cosa sarebbe accaduto, in particolare, se la “sfera di co-prosperità della grande Asia Orientale” non fosse stato un semplice slogan propagandistico, ma avesse tenuto nel debito conto le esigenze e le aspirazioni nazionali dei popoli coloniali, dalla Birmania alla Malacca, dall’Indocina alle Indie Orientali olandesi, per non parlare della Manciuria e dell’India stessa, la quale ultima, pur non essendo stata occupata dalle armate nipponiche, fu tuttavia minacciata da vicino, mentre un esercito nazionale indiano veniva armato ed istruito sotto la guida prestigiosa di Subhas Chandra Bose, già presidente del Partito del Congresso e oppositore della linea nonviolenta di Gandhi?

Che cosa sarebbe accaduto se, una volta occupato l’immenso territorio che va dalle pendici dell’Himalaya alle isole Salomone e dalla Manciuria a Singapore, le autorità giapponesi non si fossero limitate a sfruttare nel loro esclusivo interesse le forze indipendentistiche locali, ma avessero dato loro una effettiva autonomia, cointeressandole alla sconfitta finale delle potenze occidentali e stabilendo verso di esse un rapporto paritario, invece di spremere le risorse economiche ed umane di quei territori, con una spietatezza che fece loro rimpiangere, in molti casi, la precedente dominazione coloniale europea o (nel caso delle Filippine) americana?

Certo, si potrebbe rispondere che se ciò non avvenne, e l’ottuso militarismo giapponese sciupò in tal modo una straordinaria occasione di mobilitare l’immenso potenziale asiatico contro l’Occidente (si pensi solo a quel che accadde nel Vietnam dopo la guerra e il ritorno dei Francesi), ciò non fu per un caso o per una imprevedibile fatalità, ma perché le vedute politiche del governo giapponese e, in genere, della sua classe dirigente, non andarono mai oltre una visione grettamente nazionalistica e, diciamolo pure, razzista, fondata sulla presunta superiorità degli abitanti del Giappone imperiale, “stirpe divina” della dea Amaterasu, non solo rispetto ai detestati occidentali, ma anche rispetto agli altri popoli dell’Asia.

E ciò è innegabilmente vero.

Tuttavia, non si deve tacere il fatto che una minoranza di menti illuminate, specialmente fra i membri civili del governo imperiale nipponico, aveva invece compreso il grandissimo valore del nazionalismo pan-asiatico quale strumento di lotta contro l’Occidente; e, inoltre, che il processo di formazione di una moderna coscienza nazionale era già in atto, specialmente in alcuni Paesi (l’India in primis) e che, pertanto, una intelligente politica giapponese avrebbe dovuto soltanto assecondarlo e favorirlo, non già creare o “inventare” qualche cosa che ancora non esisteva, almeno nei Paesi più evoluti o dove esistevano delle élites culturalmente formate in senso europeo o americano, che avevano preso sul serio la lezione del Risorgimento italiano e, in genere, della lotta per l’indipendenza dei popoli europei prima e dopo la guerra 1914-18.

Potremmo spingere lo sguardo ancora più in là e domandarci che cosa sarebbe avvenuto se una siffatta politica, lungimirante e realistica, fosse stata adottata dalle forze dell’Asse in Europa, particolarmente dalle autorità tedesche in Polonia, Ucraina, Russia e nei Balcani, oltre che in Francia, Belgio, Olanda, Danimarca e Norvegia, invece di instaurare un regime di occupazione che deluse e disgustò quelle stesse popolazioni che, in un primo tempo, avevano accolto l’avanzata germanica con sentimenti in parte favorevoli o, comunque, ancora incerti e suscettibili di positivi sviluppi. Si pensi, ad esempio, a come sarebbero potute andare le cose sul fronte orientale, se l’armata anticomunista del generale Vlasov fosse stata dotata di mezzi adeguati e se questa carta fosse stata giocata dai Tedeschi prima e con più convinzione, e non quando ormai le sorti della guerra in quel teatro erano praticamente segnate.

Ciò equivarrebbe a domandarsi se la seconda guerra mondiale, nel suo complesso, fu davvero combattuta tra le forze del “nuovo” e quelle del “vecchio”, ossia, come recitava la propaganda fascista, tra “il sangue” e “l’oro”; o se non fu, invece (e salvo alcune eccezioni) l’ennesimo scontro fra potenze, vecchie e nuove, interessate solo a uno sfruttamento miope ed egoistico delle risorse mondiali, secondo gli schemi collaudati nei secoli della modernità, dall’avventura dei “conquistadores” spagnoli in avanti.

In questo senso, si potrebbe anche dire che l’unico membro del Tripartito le cui vedute andavano, almeno in parte, al di là di tale visione grettamente obsoleta della politica estera, era proprio l’Italia; e i maligni potrebbero aggiungere che ciò avveniva proprio perché, essendo la potenza più debole, non aveva forze bastanti per condurre una vera politica imperiale e doveva necessariamente puntare più a destabilizzare gli imperi avversari, facendo leva sui nazionalismi dei popoli soggetti. Così si può interpretare la politica filo-islamica e filo-araba di Mussolini, finché la valle del Nilo e il Canale di Suez furono a portata delle forze italo-tedesche del Nordafrica; e così le simpatie del Gran Muftì per l’Italia, almeno fino a che le vicende della guerra, a noi sfavorevoli, non lo indussero a rivolgersi piuttosto verso la Germania.

Inoltre, per far leva sui nazionalismi dei popoli coloniali sarebbe stato necessario mostrare la capacità militare di aiutarli validamente a scrollare il giogo delle potenze alleate; mentre l’esito disastroso della rivolta anti-inglese irachena scatenata da Rashid Ali el Gaylani nell’aprile-maggio 1941, e la palese incapacità dell’Asse di supportarla in maniera adeguata, mostrarono al mondo arabo che non vi erano margini concreti per una azione coordinata con la Germania e l’Italia per colpire in modo decisivo l’Impero britannico in quell’area.

Anche in Europa, è noto che la politica italiana prima della seconda guerra mondiale era stata piuttosto quella di aggregare una coalizione danubiano-balcanica in funzione antifrancese e antibritannica, piuttosto che quella di sottomettere direttamente quelle nazioni. Tale politica era culminata con la firma del cosiddetto protocollo di Roma, il 17 marzo 1934, fra Mussolini, Dollfuss e Gömbös, primo ministro magiaro, che in pratica includeva l’Austria a l’Ungheria nella sfera d’influenza italiana; ma si era poi sgretolata con l’abbandono del “fronte di Stresa” e con il riavvicinamento italo-tedesco del 1936, all’epoca della guerra d’Etiopia, quando (per usare l’espressione dello storico Gordon Brook Shepherd) l’attenzione di Mussolini fu spostata dal bacino del Danubio all’alto corso del Nilo.

Nei primi mesi del 1943, dopo la duplice sconfitta di El Alamein e di Stalingrado, un nuovo blocco fra l’Italia e gli scoraggiati alleati minori dell’Asse (Ungheria, Romania, Bulgaria) stava potenzialmente riformandosi, con l’obiettivo a breve termine di persuadere Hitler, d’accordo col Giappone, a giungere ad una pace negoziata con l’Unione Sovietica; o, in alternativa, ad uscire dal Tripartito e abbandonare l’alleanza con la Germania. Ma le vicende del 25 luglio e, poi, dell’8 settembre, fecero abortire il tentativo: e si noti che ancora la mattina dopo il voto del Gran Consiglio e poche ore prima di essere arrestato, Mussolini si incontrava con l’ambasciatore giapponese a Roma, Hidaka, per concertare la pressione da svolgere su Hitler in vista dell’apertura di una trattativa coi Sovietici.

Ma torniamo al Giappone e al suo mancato sfruttamento della politica panasiatica basata sugli slogan della “co-prosperità” e della “più grande Asia orientale”.

Non si dimentichi che la guerra del Pacifico è tuttora considerata, dai Giapponesi, come una episodio a sé stante, staccato dal contesto che gli storici europei e americani chiamano, genericamente, la “seconda guerra mondiale”; e che essa incominciò non dopo l’attacco di Hitler alla Polonia, e cioè con il bombardamento di Pearl Harbor del 7 dicembre 1941, ma alcuni anni prima, e cioè con l’incidente al ponte Marco Polo di Pechino e con l’inizio della guerra sino-giapponese, il 7 luglio 1937.

Al tempo stesso, essi la considerano – e non del tutto a torto – come una guerra sostanzialmente difensiva, cui il Giappone fu tirato per i capelli dalla politica statunitense mirante ad accerchiarlo e metterlo in ginocchio con il blocco delle importazioni di materie prime. Anche la strategia giapponese fu originata essenzialmente da esigenze economiche: in particolare, la campagna delle Indie Olandesi fu dettata dalla necessità di impadronirsi del petrolio necessario all’industria bellica e specialmente alla flotta (più o meno come il petrolio romeno era indispensabile alla macchina bellica tedesca); e la campagna di Malacca, culminata nell’attacco a Singapore, non fu che la sua necessaria premessa tattica.

Tali esigenze economiche spiegano, almeno in parte, la diversità di trattamento riservata dal Giappone alle forze indipendentiste indonesiane (ma sarebbe meglio dire giavanesi, dato che un sentimento nazionale indonesiano ancora non esisteva) rispetto a quelle indiane, birmane o allo stesso governo fantoccio cinese. Infatti, Giava, Sumatra, Borneo e Celebes dovevano restare delle semi-colonie nipponiche, di cui la madrepatria non avrebbe potuto fare a meno senza dover rinunciare a tutta la sua politica imperiale; mentre gli altri Paesi, una volta divenuti indipendenti, avrebbero anche potuto essere trattati come soci alla pari, o quasi.

Il potenziale rivoluzionario dell’India, in particolare, era immenso; e fu certo un grave errore quello di non aver sostenuto in maniera convinta il movimento di Chandra Bose, lesinandogli i mezzi e trattandolo con malcelata diffidenza. Una rivolta indiana alle spalle del fronte birmano avrebbe potuto avere conseguenze incalcolabili e far crollare il dominio coloniale britannico; mentre in Birmania, nel 1944, l’ultima offensiva giapponese si risolse in un disastro, quando già l’Assam e il Bengala sembravano a portata di mano, cosa che provocò la fine del sogno di Bose (che aveva stabilito la sede provvisoria del suo governo, l’Hazad Hind, a Port Blair, nelle Isole Andamane). Per inciso, di Bose si parla ancor oggi poco e malvolentieri, fra gli storici occidentali: un po’ perché gli si preferisce l’immagine più rassicurante del Mahatma Gandhi, e molto perché Bose fu amico di Mussolini e Hitler, ciò che lo rende politicamente impresentabile nel salotto buono della cultura democratica odierna, tutta miele e buone intenzioni.

Generalmente, poi, in Occidente si pensa che la guerra doveva finire come è finita, data la sproporzione delle forze in campo; e la tenacissima resistenza delle forze armate giapponesi a Tarawa, Okinawa, Iwo Jima, viene immancabilmente presentata come un esempio di fanatismo folle e irresponsabile, dettato dal disprezzo della vita umana. Per un Occidentale, è cosa ovvia che, quando la superiorità materiale del nemico si delinea schiacciante, non resta altro da fare che arrendersi; ma ciò deriva dalla concezione materialistica della storia, e più in generale della vita, tipica dell’Occidente.

Per la cultura giapponese, e più specificamente per la religione scintoista, quel che conta non è un preventivo puramente materiale delle forze in campo, ma la capacità del singolo individuo di sacrificarsi fino all’estremo, se necessario, per la salvezza comune (della squadra, del gruppo, della patria): solo così si può entrare nella giusta ottica per comprendere il fenomeno dei “kamikaze” o quello dei soldati che rifiutarono di arrendersi e continuarono a resistere, nella giungla di qualche sperduta isola del Pacifico, per molti e molti anni dopo che la guerra era cessata.

Dunque, se il Giappone fosse stato in grado di mobilitare a fondo le forze nazionaliste dell’India, della Birmania, della Malesia, delle Filippine e delle Indie Orientali olandesi, non è scontato che la guerra sarebbe finita come è finita; del resto, la guerra del Vietnam e, poi, quella dell’Afghanistan, hanno mostrato cosa può fare un piccolo popolo, privo di armi moderne e di una moderna industria, contro una superpotenza mondiale, purché la coscienza nazionale sia salda e le condizioni del terreno siano favorevoli alla guerriglia.

Fra parentesi, lo stesso ragionamento si può fare a proposito dell’Europa, se la Germania avesse saputo giocare meglio la carta russa, mobilitando tutte le forze anticomuniste, ma non offrendo a Stalin – come invece accadde – la possibilità di presentarsi come il difensore del sacro sentimento nazionale e di ricevere perfino la benedizione della Chiesa ortodossa, da lui così crudelmente perseguitata fino alla vigilia dell’invasione tedesca. Oppure – già vi abbiamo accennato – se l’Italia avesse saputo giocare meglio la carta araba, per colpire gli Inglesi nel Mediterraneo e per minacciare le loro posizioni nel Medio Oriente.

Siamo proprio sicuri che la seconda guerra mondiale doveva necessariamente finire come è finita, solo perché il potenziale industriale e militare degli Alleati superava di molto quello del Tripartito? Non è forse vero che, coordinando la loro azione politico-militare (non diciamo: coordinandola meglio, perché non la coordinarono affatto), i Paesi del Tripartito sarebbero stati in grado di vincere: in particolare, se i Giapponesi avessero attaccato l’Unione Sovietica nell’autunno-inverno del 1941, quando la Wehrmacht era giunta alle porte di Mosca?

La politica giapponese in Asia orientale durante la seconda guerra mondiale è stata così sintetizzata dall’inglese Richard Storry, studioso del nazionalismo giapponese, nel suo libro Storia del Giappone moderno (titolo originale: A History of Modern Japan, Penguin Books, 1960; tradizione italiana di Laura Messeri, Firenze, Sansoni, 1962, pp. 268-71):

«I tedeschi, esperti nel genocidio nei loro rapporti con gli ebrei e i popoli della Russia e dell’Europa orientale, nel complesso si comportarono correttamente verso i prigionieri di guerra americani, inglesi e francesi caduti nelle loro mani. I giapponesi che non arrivarono mai agli abissi di spietatezza in cui piombarono le SS tedesche nel loro programma di sterminazione [sic] scientifica, inasprirono i loro nemici per il modo brutale e disordinato con cui sfruttarono e abbandonarono i prigionieri. Simili crudeltà si manifestarono nei riguardi del grosso dei popoli asiatici che caddero sotto il controllo giapponese; e ciò oltre che immorale fu pazzesco. Ciò significò che i Giapponesi ben presto dissiparono il rispetto e la simpatia con cui erano stati accolti in molte parti dell’Asia sudorientale dopo le prime grandi vittorie. Gli amministratori o consiglieri civili inviati da Tokyo in certe località, vi venivano trattati in modo da sentirsi inferiori alle autorità militari; e fra queste, nelle aree occupate, nessuna era più potente dell’odiato “kempei”, o polizia militare, che dominava col terrore seminando la paura e guadagnandosi così l’odio di coloro che avevano sperato nei Giapponesi come amici piuttosto che come conquistatori. Il risultato fu che i Giapponesi rovesciato il vecchio ordine, fecero in modo, col loro folle comportamento, che il popolo dell’Asia sud-orientale non accettasse mai volentieri il programma di “sfera di prosperità comune” sostenuta dal Giappone, dal momento che questo pratica significava passare da un colonialismo a un altro. Il movimento di resistenza sviluppatosi in paesi come le Filippine, la Birmania e la Malacca fu fortemente soggetto, come in Europa, all’influenza comunista, e in realtà lo sviluppo del comunismo fu un importante retaggio del malgoverno giapponese nell’Asia sud-orientale. Inoltre i rigori dell’occupazione giapponese specialmente nelle Filippine, creano un pregiudizio che rallentò il rientro del Giappone come esportatore nei mercati dell’Asia sud-orientale dopo la guerra.

Detto ciò, sarebbe nondimeno erroneo liquidare come completamente insincero e inefficiente il motto di guerra del Giappone “un’Asia orientale più grande!”. Sebbene i militari sul luogo si comportassero nel complesso con scarso riguardo per la suscettibilità delle razze asiatiche sotto il lotro controllo, il governo di Tokyo era abbastanza in grado di comprendere il nazionalismo asiatico. Lo stesso Tojo aveva sufficiente immaginazione per accorgersi che, promettendo l’indipendenza ai territori coloniali e semi-coloniali dell’Asia sud-orientale, il Giappone aveva un’arma di propaganda di incalcolabile potere. Non mancava l’idealismo nella visione di un Giappone come forza liberatrice dell’Asia, come socio più vecchio, piuttosto che come dittatore di un gruppo di nazioni da poco indipendenti. Questo era il nobile sogno degli uomini migliori della vita pubblica; e la maggior parte di essi videro malvolentieri entrare in guerra; per molti di loro poi la guerra fu giustificata solo in misura che questo sogno potesse divenire realtà. Ma fra i comandanti civili e militari, non c’era cooperazione su base di parità. Le forze armate avevano la preminenza e fra di loro, più specialmente nel’esercito, predominavano persone dalla mentalità ristretta e grossolanamente interessata. Per esempio, gli ufficiali giapponesi con un po’ più di immaginazione si erano ben accorti che i capi del cosiddetto “esercito nazionale indiano (un esercito costituito di vecchi prigionieri di guerra indiani e residenti indiani nell’Asia sud-orientale) andavano trattati come alleati, non come dei semplici fantocci; dopotutto, l’arrivo dall’Europa di Subhas Chandra Bose per capeggiare il governo della “India libera” poteva essere considerato un importantissimo punto di vantaggio per la causa giapponese. Eppure l’atteggiamento della maggior parte dei giapponesi verso l’esercito nazionale indiano, può essere riassunto da Terauchi, il generalissimo del’Asia sud-orientale, il quale fece sapere come egli disprezzasse alquanto Chandra Bose e i suoi seguaci. Parlando con altri Giapponesi, Terauchi notò che suo padre, che egli rispettava grandemente, quando era governatore generale della Corea, non aveva affatto tempo per i movimenti coloniali d’indipendenza. Così la conferenza dell’”Asia Orientale più grande” tenuta a Tokyo nel novembre 1943 e indetta dal Primo Ministro, con la presenza di Wang Ching-wei in rappresentanza della Cina, e i capi politici del Manchukuo, del Siam, delle Filippine, della Birmania e della “India libera”, fu una faccenda alquanto priva di significato. Esser festeggiati a Tokyo non compensava gli schiaffi ricevuti a Rangoon o a Manila.

Tuttavia, la concessione di una sia pur apparente indipendenza ai paesi occupati d’Asia (nelle Indie Orientali olandesi ciò non avvenne fino agli ultimi giorni di guerra) significava che sarebbe stato moralmente impossibile per le nazioni coloniali occidentali rifiutare loro una indipendenza effettiva una volta sconfitto il Giappone. Là dove nel dopoguerra l’indipendenza fu calorosamente richiesta, e poi rifiutata, i popoli asiatici in questione ebbero abbastanza fiducia in sé da conquistarsela con la lotta; così le vittorie giapponesi distruggendo la mistica della supremazia bianca, e la politica giapponese accordando ai territori occupati almeno una forma esteriore di indipendenza, accelerarono moltissimo la nascita nel dopoguerra delle nuove nazioni dell’Asia meridionale e sud-orientale.»

In conclusione, il Giappone non seppe sviluppare le potenzialità offerte dalla presenza, nei territori asiatici da esso conquistati o minacciati durante la seconda guerra mondiale, di movimenti nazionalisti più o meno sviluppati, che avrebbero potuto dare un contributo decisivo alla sconfitta degli Alleati e all’instaurazione di un “nuovo ordine” in Asia orientale.

Ciò fu una conseguenza del fatto che la politica giapponese, e specialmente la politica estera, erano virtualmente nelle mani di una casta di generali e di ammiragli dalle vedute corte, imbevuti di un nazionalismo gretto e di un senso di superiorità razziale che li portava a guardare ai popoli della Corea, della Manciuria, della Cina, dell’Indocina, delle Filippine, delle Indie Orientali e della stessa India, con un disprezzo mal dissimulato.

Ciò spinse la stragrande maggioranza di quei popoli ad astenersi dalla collaborazione attiva con i Giapponesi, i quali, da parte loro, li trattarono con stupida ed inutile durezza, un po’ come fecero i Tedeschi in Europa e specialmente in Europa orientale. Le premesse ideologiche dei regimi nipponico e germanico erano simili, così come erano simili alcuni tratti dello sviluppo economico-sociale dei due Paesi tra la fine dell’Ottocento e la prima metà del Novecento; anche se i due sistemi politici erano molto diversi perché, nel Giappone scintoista dominato dal culto della divina persona dell’imperatore, una figura come quella del Füher sarebbe stata impensabile.

Qualcuno ha detto che non si può versare del vino vecchio in otri nuovi e, in questo senso, la politica giapponese (e tedesca) negli anni della seconda guerra mondiale fu vecchia nella sostanza, nel senso che ricalcava i moduli classici del nazionalismo e dell’imperialismo, anche se talune trovate propagandistiche avevano, in effetti, l’apparenza del nuovo.

Nuova, semmai, era la politica del fascismo, o almeno suscettibile di elementi di novità, dato che essa faceva appello non a un cieco egoismo nazionale, ma a valori e riferimenti di portata trans-nazionale; tanto è vero che ad essere imitato nel mondo fu il modello fascista italiano, non quello nazista tedesco e meno ancora quello imperiale giapponese. Cade, perciò, il mito che fa parlare gli storici occidentali di “nazifascismo” come di una categoria perfettamente logica ed omogenea, persino ovvia. L’alleanza tra fascismo e nazismo era, in origine, tattica e non strategica; quello che la trasformò in un abbraccio mortale furono la stupidità e la miopia della politica francese e soprattutto inglese, fra il 1935 e il 1940.

Comunque, se si vuol capire qualcosa dei Paesi asiatici e africani dopo il 1945, bisogna ricordare questo: che l’Italia fascista, più della Germania e più del Giappone, fu un modello per una intera generazione di giovani nazionalisti, i quali, dopo la fine della guerra, andarono al potere nei rispettivi Paesi, una volta raggiunta l’indipendenza.

Tanto per citarne uno, tale è il caso di Anwar el Sadat, imprigionato dai Britannici durante la seconda guerra mondiale per essersi rivolto alle potenze dell’Asse allo scopo di ottenere l’indipendenza dell’Egitto. Non tutti, ad Alessandria e al Cairo, facevano il tifo per il maresciallo Montgomery, quando i carri armati di Rommel si erano spinti fino ad El Alamein, come agli storici occidentali piacerebbe credere far credere; e meno che meno gli Egiziani, ossia i più diretti interessati all’esito della battaglia.

Di Chandra Bose abbiamo già detto, così come abbiamo accennato al Gran Muftì di Gerusalemme; e lo stesso si potrebbe dire di molti altri. Certo, alcuni di questi leader non piacciono all’Occidente, ad esempio – come nel caso del Gran Muftì – a causa del loro conclamato e virulento antisemitismo. Ma questo è un altro discorso; e, in ogni caso, è un problema inerente alla visione del mondo occidentale; un problema nostro, insomma.

Comunque, tornando al Giappone, un risultato importantissimo la sua politica panasiatica lo ottenne, indipendentemente dal fatto che quella politica rimase allo stato di abbozzo o di mera propaganda: e cioè che essa rese inevitabile e quasi immediata la partenza delle potenze coloniali occidentali, a guerra finita.

Chi avrebbe potuto immaginare, ancora pochi anni prima, che già nel 1947 l’India sarebbe diventata una grande nazione indipendente, sia pure a prezzo della secessione del Pakistan; e che, nel 1949, la stessa cosa sarebbe accaduta per l’Indonesia, altro gigante mondiale: i quali sono, oggi, rispettivamente il secondo Stato del pianeta (l’India), il quarto (il Pakistan) e il quinto (l’Indonesia), per numero di abitanti?

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Tratto, col gentile consenso dell’Autore, dal sito Arianna Editrice.

jeudi, 17 mai 2012

Yukio Mishima: Man of Pure Action

Yukio Mishima: Man of Pure Action

In Action, Contemplation, and the Western Tradition, Julius Evola writes that action can take on the qualities of ‘Being’ only if the action is ‘pure.’ According to Evola, the pure act does not aim at “contingent and particular fruits, considering as the same happiness and calamity, good and evil, even victory and defeat, looking neither at the ‘I’ nor at the ‘you’, overcoming love as well as hatred and any other pair of opposites.”

Evola sees a man in the motion of a pure act as becoming truly free. In it, such a man breaks away from the bonds of individualism and everything that grounds him to the material order of things. Here, man can act from “the deep and in a way supra-individual core of being” and with a quality that “never varies, divides, or multiplies: they are a pure expression of the self,” as Evola writes in Ride the Tiger.

Evola explains that pure action is taken regardless of the pleasure or pain implied in one of its acts. This does not mean that pure action is devoid of pleasure, but rather it enjoys only heroic pleasure, or the superior pleasure derived from “decisive action that comes from ‘being’.” Evola considers in the realm of ‘heroic pleasure’ the type of pleasure that is derived from “action in its perfection” or actions that require training to the point of becoming an acquired skill.

A popular literary figure who lived and died embodying these principles is Yukio Mishima. Although in no way associated with the Traditionalist school and more of an intellectual than a strict metaphysician, Mishima sought the revival of the Samurai “Tradition” and attempted to live his life by the code and ethics described in the Hagakure, despite his living in an era far more decadent and removed from Tradition than the one Hagakure’s writer, Yamamoto Tsunetomo, lived in and sought to overcome.

Mishima famously committed suicide in the traditional Seppuku way after taking several capitalist governmental figures hostage. Mishima’s obsession with death and his suicide can be interpreted as conformance with the Hagakure’s dictate that the Samurai “decide to die” and the advice that it should probably be done before old age because by that time one would likely have little reason to continue living. Mishima’s suicide should also be seen as an expression of the pure act though.

Scorning modern man’s and Japan’s loss of tradition and contempt for the body, Mishima died not as a martyr for his cause and much less a savior for his people, but instead, he died in service to the pure idea. Mishima overcame petty individuality and in his act died as a Samurai. Mishima himself wrote that he wished to “achieve pure action that admitted of no imagination, either by the self or by others” in Sun and Steel. Mishima clearly acquired Being in its actual sense while making death his heroic pleasure.

Throughout Mishima’s text, other Traditional attitudes can be observed. Mishima explains that the “glorification of individual style in literature” is “no more than a beautiful ‘perversion of words’.” Here, Guenon’s observation that art is first reduced to Quantity through the introduction of “individuality” is seen.

Mishima also saw a universality in man from what was highest in him as opposed to the lowest. Despising the frailty of his youth, Mishima used body building to strip “my muscles of their unusualness and individuality.” Doing this, he realized “the triumph of knowing that one was the same as others.” Using both words and muscles, Mishima did not deny his individuality or being, but achieved the supra-individuality Evola referred to. He used both to “universalize my own individuality” and created a “general pattern in which individual differences ceased to exist.”

Mishima undoubtedly captures the spirit of the warrior in Sun and Steel, but he also has the powers of the spiritual/intellectual class as well. He would fit the mold of Evola’s conception of the early Brahmin. Mishima himself stated that contemplation to the point of discounting the body leads to a “steadily perverted and altered reality.” Instead, through an asceticism of strength, Mishima claimed to have found “a reality that rejected all attempts to make it abstract… that flatly rejected all expression of phenomena by resort to abstraction.”

Here, the problem of the modern notion of spirituality as abstract, renouncing, and soft is solved. Like Buddha, Mishima combated the infernal becoming of the Kali Yuga by developing a spirituality that sought direct contact with reality, overcoming what he saw as the nihilism of this state by living a philosophy of steel and pure action.