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dimanche, 24 octobre 2010

Israël et la régression intellectuelle de la civilisation occidentale

Israël et la régression intellectuelle de la civilisation occidentale

Ex: http://www.mecanopolis.org/

Par Manuel de Diéguez

 Les Etats et les Eglises ne se décident à ouvrir les yeux qu’à l’heure où il ne leur reste d’autre ressource que de retirer le bandeau qu’ils s’étaient mis sur les yeux. La cloche des évidences est-elle proche de sonner au beffroi de l’histoire ? Car enfin, jamais encore l’histoire du genre humain n’avait pris la tournure d’une farce planétaire.

Certes, il y avait longtemps qu’on se frottait les yeux au spectacle des négociations fantasmagoriques qui se déroulaient entre Israël et la Palestine et l’on n’en revenait pas de ce que des tractations condamnées à demeurer fictives pussent tenir en haleine des chancelleries médusées et une presse mondiale ébahie, on n’en croyait pas ses oreilles qu’une tragi-comédie de cette envergure pût un jour trouver place dans les livres d’histoire. Comment la raconter demain aux enfants sur les bancs de l’école si les adultes y jouaient, eux aussi, le rôle de spectateurs en bas âge?

Et voici que les bras vous en tombent de découvrir que ce théâtre d’ombres et de songes n’était pas encore allé au terme de sa puérilité et que l’on verrait un fantoche, un paltoquet, une marionnette débouler des coulisses sur la scène et saluer le public d’acte en acte. Quelle pièce jouait-on, à quel répertoire inconnu était-elle empruntée, quel en était l’auteur? L’histoire cache dans ses archives de nombreuses effigies d’une condition humaine titubante. Mais qui aurait pu imaginer qu’un Président de Etats-Unis adresserait au Premier Ministre d’un Etat étranger une lettre officielle dont les termes lui auraient été dictés au préalable par le destinataire et selon laquelle, primo, le locataire de la Maison Blanche mettrait son veto « à toute résolution concernant Israël, d’où quelle vienne, durant la période des négociations, laquelle est fixée à un an« , secundo, que la « dotation militaire annuelle des Etats-Unis à Israël, de trois milliards de dollars, serait augmentée » et que Tel-Aviv pourrait « avoir accès à de nouvelles armes et à des systèmes de surveillance satellitaires« , tertio, qu’Israël demeurerait maître de sa prédéfinition unilatérale des « exigences de sa sécurité« , c’est-à-dire de la formulation aussi solitaire qu’incontrôlée de ses ambitions politiques et militaires sous le couvert traditionnel de l’évocation de la « sécurité » du pays; quarto, que durant l’ année que dureraient les négociations imaginaires appelées à monter en volutes vers le ciel des anges, Israël disposerait d’une totale impunité, puisqu’aucune résolution ne pourra se trouver adoptée par le Conseil de Sécurité, quel que soit le comportement peu séraphique de son armée sur le champ de bataille; quinto, que le futur pseudo Etat palestinien sera privé d’armée et sera si peu souverain qu’il devra ouvrir tout grand son territoire et sans jamais rechigner aux mouvements des troupes israéliennes stationnées à ses frontières, sexto, qu’en retour Israël ne prolongerait que de deux mois la suspension de son expansion territoriale en Cisjordanie, après quoi il en reprendrait le cours inexorable, sauf à obtenir de nouveaux bénéfice tangibles en échange de l’ascension dans les airs d’un nouveau nuage de fumée.

Pourquoi les Etats-Unis ont-ils signé un marché de dupes de ce calibre? Pourquoi le parti démocrate a-t-il accepté de payer d’un ridicule immortel et d’un effondrement sans remède du poids de l’Amérique dans le monde l’avantage éphémère de perdre un peu moins cruellement les élections de mi-mandat de novembre 2010? Un désastre politique aussi indélébile ne s’explique que par le ligotage et le bâillonnement pur et simple de M. Barack Obama. Comme je l’ai écrit le 4 juin 2009 en prévision du discours du Caire du 6 juin, le garrottement politique de ce chef d’Etat résulte de son refus de se laisser héroïquement assassiner, donc de la dérobade de ce faux héros devant le destin sacrificiel auquel la vocation d’un vrai Président des Etats-Unis l’appelle aujourd’hui.

En raison de la désertion piteuse de la victime, déjà l’immolateur s’approche de l’autel. Est-il un tueur ou un délivreur ? Ce qui est sûr, c’est qu’un nouvel équilibre des forces vient d’ores et déjà démontrer que la nature a horreur du vide et qu’un locataire de la Maison Blanche réduit à un mannequin dont Israël tire les ficelles aux yeux du monde entier enfantera un nouvel équilibre des forces , qui remettra les rênes du monde à la Chine, à la Turquie, à l’Iran, à la Syrie, à la Russie, au Brésil. Du coup, le déclin de l’Europe deviendra irréversible pour s’être rangée jusqu’au bout aux côtés d’un empire agonisant.

Mais, depuis la plus haute antiquité, les sacrifices cultuels sont ambigus. Peut-être l’Europe saisira-t-elle cette occasion de sortir de son sépulcre. De toutes façons, cette tragédie deviendra, me semble-t-il, un peu plus intelligible à la lumière de la science historique et politique dont je tente d’exposer les fondements anthropologiques depuis près de dix ans.

A l’écoute des dernières péripéties et rebondissements de l’histoire d’Israël, je rappelle ci-dessous les paramètres d’une mutation des offertoires de la politique internationale. La vocation d’une politologie critique l’appelle à déchiffrer l’histoire d’une espèce auto-sacrificielle de naissance.

1 – Les fondements anthropologiques de l’intelligibilité de l’Histoire

Dans quelques mois au plus tard et peut-être déjà dans quelques semaines, un thème de fond va occuper la presse, les médias et surtout les quelques commentateurs de la politique internationale encore attachés non point à flâner en promeneurs désœuvrés dans les coulisses de l’actualité planétaire, mais à descendre en spéléologues hardis dans les arcanes de la politique et de l’histoire.

On peut lire, dans le Monde du 10 août 2010: « Un tremblement de terre moral ». Pas moins. C’est la formule utilisée, dimanche 8 août, par Yediot Ahronot, le quotidien le plus lu en Israël, pour décrire la dernière nouvelle qui embarrasse l’armée. De quoi s’agit-il ? De la destruction du village bédouin d’Al-Farasiya, dans la vallée du Jourdain, qui a transformé une centaine de paisibles paysans en sans-abri ? Du fait que le ministère de la défense et la Cour suprême aient interdit à une jeune habitante de Gaza d’aller étudier les droits de l’homme en Cisjordanie ? »

Non, en Israël ce genre d’information, reléguée en bas de page, ne soulève guère d’indignation. L’émoi des médias trouve son origine dans le dernier épisode de la  » guerre des généraux ».

C’est dire qu’aucun événement digne de faire la une des journaux n’aura stupéfié l’opinion publique mondiale au point d’alerter tout subitement la conscience journalistique endormie sur les cinq continents. Et pourtant, dans les profondeurs, la science de la mémoire aura été ébranlée au point que la problématique et la méthodologie politique mondiale en sera bouleversée.

Pourquoi cela? Parce que ce sont les contradictions internes du géocentrisme, les défis à la logique interne de la phlogistique, l’incohérence interne de la physique classique, l’irrationalité interne de la psychologie dite « des facultés » qui ont contraint l’héliocentrisme, la chimie de Lavoisier, la relativité générale, la psychanalyse à faire exploser les présupposés immanents aux sciences antérieurement validées par une grille de lecture erronée. C’est dire que la science historique est longtemps parvenue à éluder la question centrale du statut anthropologique de son axiomatique et de sa problématique, donc à se dérober à la réflexion sur la validité de l’enceinte même dans laquelle Clio déplace les pions du jeu. Mais l’accumulation d’évènements allogènes à l’échiquier classique favorise l’examen critique et la mise en cause des coordonnées des anciens joueurs.

Il en sera de même des interprétations politiques et historiques traditionnelles du destin d’hier, d’aujourd’hui et de demain d’Israël parce que les prolégomènes approximatifs ou partiels qui permettent d’interpréter le parcours de cette nation au sein de la civilisation semi rationnelle d’aujourd’hui répondent à un code vieilli de l’intelligibilité des événements. Chaque fois qu’une science se conquiert une organisation cérébrale plus englobante que la précédente, donc un système de navigation qui lui permet de transcender les critères convenus de la compréhensibilité en usage à son époque, son armure méthodologique change radicalement de voltage et de pilotage de ses signifiants, donc de balisage mental. Il en sera nécessairement de même de la révolution de la science des Etats et des relations que leur logique interne entretient avec le récit historique de demain, parce que la nécessité s’imposera de changer entièrement de dialectique. Comment enserrerons-nous le présent et l’avenir d’Israël dans une trame moins anachronique et plus explicative que l’ancienne?

2 – Une parturition rousseauiste

Il s’agira d’insérer dans le tissu d’une anthropologie critique un Etat né d’une décision rousseauiste, celle de tous les pays de la terre de déverser soudainement et d’un seul coup une ethnie déterminée et reconnue dans sa singularité depuis trois mille ans sur un étroit territoire du Moyen Orient et de lui demander de cultiver gentiment son Eden en miniature. Mais comment lui faire paître ses moutons blancs sur le modèle bucolique dont Adam se prélassait dans le jardinet originel de l’humanité?

Jamais un régime d’assemblée privé de la lanterne de Diogène n’avait tenté de fonder une nation sur un modèle aussi pseudo-séraphique. Mais l’archétype biblique brutalement plaqué sur le Moyen Orient était censé avoir peuplé un désert de sable et non point une terre vrombissante de créatures. Certes, les historiens ont démontré qu’en 1948, le vote majoritaire des Paul et Virginie de la démocratie rassemblés dans l’enceinte des Nations Unies en faveur d’une répétition de l’Exode avait été obtenu avec le secours des méthodes de prévarication habituelles; les voix censées inspirées par un ciel de bergerie sont presque toujours achetées à prix d’or. Mais un adage latin dit que « nous sommes impuissants à changer le passé », ce que le français traduit par l’expression: « Ce qui est fait est fait ».

L’Etat d’Israël existe donc bel et bien; et s’il n’a pas encore la tête sur les épaules, il a déjà les pieds sur terre. L’historien des songes incarnés tente donc de rendre compte d’une existence à la fois onirique et dûment concrétisée. Du coup, il constate que les paramètres chantonnants sur lesquels repose encore la science évangélique des Etats n’éclairent en rien le paysage, parce que le verdict des urnes ne saurait s’inscrire dans une logistique de type eschatologique, même si cette théologie politique se trouve aussitôt bousculée par les nouveaux marchands du temple. Du coup, une science du temps des nations qui ne se vissera à l’œil que la loupe du quotidien rendra le paysage incompréhensible à l’observateur, tellement les narrations patentées par un long usage se révèleront étrangères à l’histoire biblique que le mythe bénisseur sera censé raconter sur ses pâturages et qui paraîtra dicter ses péripéties à l’histoire en chair et en os.

Comment le récit traditionnel dont les ongles et les crocs s’ appellent l’histoire va-t-il se trouver anéanti et jeté aux oubliettes à l’heure où les relations « objectives » des Etats entre eux ne répondent plus au code sentimental élaboré tout au long des siècles par une histoire artificiellement euphorisée du monde?

3 – Les vêtements religieux du temps

Un seul exemple : en août 2010, l’Arabie Saoudite entend acheter des avions de guerre américains baptisés F15. Mais la puissance du mythe biblique sur les imaginations est redevenue si grande que les Etats-Unis ne sauraient conclure un contrat rationnel de ce genre avec aucun Etat arabe sans avoir reçu l’autorisation « théologique » d’Israël. Ce sera en grand secret que les négociations para religieuses entre Washington et Tel Aviv seront menées. Comment expliquer les relations célestiformes qu’un Etat microscopique entretient avec l’empire le plus puissant du monde? Il sera supposé vital, pour les successeurs des Hébreux, de simuler une fragilité et même une précarité d’origine et de nature mythologiques, afin de donner au monde entier l’illusion que la nation biblique se trouve aussi menacée de mort sous les coups de ses ennemis que sous Pompée ou Vespasien. Or, il en est paradoxalement ainsi, mais sur d’autres chemins, et cela pour les mêmes raisons théologiques d’apparence qu’il y a deux mille ans.

Que disent aujourd’hui les Isaïe de la démocratie libératrice? Que la civilisation de la rédemption par la justice et le droit ne saurait faire de sa sotériologie décolonisatice une conséquence logique, donc universelle, de la religion du salut par la Liberté, puis se réfuter elle-même à légitimer la conquête armée, puis la vassalisation systématique d’un autre peuple. La réfutation du culte des droits de l’homme et du citoyen exige une eschatologie inversée selon laquelle une idole aurait légitimé de toute éternité un propriétaire prédestiné à occuper un sol déterminé. Les partis religieux d’Israël le savent et le disent haut et fort : « Si cette terre, confessent-ils, ne nous avait pas été expressément octroyée par le roi du cosmos, nous ne serions que des brigands. »

Mais il se trouve qu’au début du IIIe millénaire, la science psychologique sait depuis longtemps que les dieux iréniques ou sanglants sont là pour porter sur leurs larges épaules les pires forfaits de leurs chétives créatures et qu’ils ne se contentent pas de rendre payant le sang des sacrifices qu’on leur présente sur leurs offertoires, mais à glorifier l’hémoglobine des immolations qu’on leur donne à humer. C’est pourquoi les profanateurs, les blasphémateurs et les saints iconoclastes qu’on appelle des prophètes et qu’Israël a tués en chaîne ne cessent de rappeler que le « vrai Jahvé » a horreur des meurtres sacrés sur les parvis de son temple et que, depuis trois mille ans les narines du génie d’Israël ont rendez-vous avec une civilisation irénique.

Mais si les habillages messianiques de la guerre échappent à la lecture laïque du monde – Clio se trouve encore privée des clés d’une interprétation anthropologique du temps de l’histoire – comment l’étude du profane accèderait-elle à une intelligibilité réfléchie? Pour que la science historique classique accède à la connaissance des secrets du temps mythologique dans lequel un peuple prétend dérouler le tapis de sa durée, il faut une épistémologie capable d’expliquer les propitiatoires, donc conquérir un regard de haut et de loin sur le globe oculaire dont nos ancêtres usaient à l’égard de notre espèce.

4 – Les cités et leur mythe

Israël n’est pas le seul peuple à vivre sa propre histoire dans le temps du mythe. Le monde hellénique est né du débarquement d’une expédition navale dans un univers littéraire appelé à devenir celui de la civilisation mondiale. La cité de Priam opposait ses murailles aux mâtures de la flotte de Ménélas. Les dieux décidèrent de se mettre de la partie. Les flèches de l’arc d’or d’Apollon vont venger Calchas, le devin outragé du dieu du soleil. Iphigénie est sacrifiée au dieu du vent. Ulysse et Achille vont se partager les premiers rôles. Un poète entre en scène. Il en tire deux légendes, celle du siège d’une cité fortifiée et celle du voyage initiatique d’un marin et de ses compagnons sur le chemin du retour au pays. La Grèce du symbolique a trouvé sa voix et son destin. Que serait-il advenu de la civilisation d’Eschyle et d’Archimède, de Platon et d’Aristophane, des mathématiques et de la tragédie si une guerre mythique n’avait pas vivifié la civilisation mondiale sur les cinq continents? Le Vieux Monde attend un nouvel Homère. Quelles sont les relations que les peuples entretiennent avec le nectar et l’ambroisie de leur immortalité? Comment un peuple de navigateurs a-t-il fondé la première civilisation de l’alliance de la parole avec le sacrifice?

Rome n’est née de la voix de Virgile que sur le tard : à l’origine, le berceau mythique de la ville se réduisait à la légende d’une louve qui aurait nourri de son lait les jumeaux Rémus et Romulus. Mais l’histoire réelle s’est trop hâtée de débarquer dans le récit fabuleux: Rémus sera assassiné par son frère de lait, lequel mourra de la main des patriciens. Et déjà le sacré est de retour. Les ambitieux sont aussi de malins comploteurs: ils vont s’entendre entre eux pour faire descendre le trépassé du haut des nues. Pour fonder la République, il leur faut mettre dans la bouche d’un mort l’annonce de la future grandeur de l’empire romain. Néanmoins la première civilisation des armes et des lois gardera une mémoire tenace et rancunière de la modestie de son mythe originel – celui de l’apparition d’une victime dont Tite-Live raconte le trucage et qui deviendra un classique de l’autel dans le monothéisme redevenu sacrificiel des chrétiens – l’islam s’en est tenu à la brebis d’Abraham. Sous Tibère encore, les prétentions religieuses de plusieurs cités de l’empire seront rognées par un Sénat soucieux de ne pas laisser supplanter son mythe fondateur par un Olympe plus illustre et plus généreux que le sien. Et puis, le culte romain des ancêtres ne s’était même pas procuré des dieux vivants et visibles: les édiles sont allés chercher des statues de divinités antiques et prestigieuses à Athènes et ils les ont installées en grande pompe dans l’enceinte de la ville, tellement l’Enéide faisait pâle figure auprès de l’Iliade et de l’Odyssée des Grecs.

5 – De l’universalité du sacré

Pour comprendre comment Israël s’est coulé dans le moule de son épopée biblique, il faut observer que les peuples forgent leur mythe à l’école de leur sainteté et que le naufrage des dieux antiques dans le monothéisme a seulement modifié le creuset antique du sacré. La France monarchique a entretenu avec une divinité plus unifiée que les précédentes les relations éloquentes et clairement énoncées qui permettaient d’élever les rois au rang de frères de Jésus-Christ. Puis, le songe de la délivrance universelle et définitive du simianthrope par l’assassinat d’un seul homme sur un autel planétaire a déserté les fonts baptismaux d’une révélation ciblée et que les scribes d’un ciel localisé avaient circonscrite avec précision afin de se forger sur l’enclume d’une Révolution dont Robespierre disait: « Une nation n’a pas accompli sa tâche véritable quand elle a renversé les tyrans et chassé des esclaves, ainsi faisaient les Romains, mais notre œuvre à nous, c’est de fonder sur la terre l’empire inébranlable de la justice et de la vertu. »

A l’instar de celui des Anciens, le royaume du ciel panoptique des démocraties s’arrime à des territoires autonomes. Certes, le ciel nouveau se trouve seulement dans un état de latence ici-bas ; mais il ne va pas tarder à se transporter sur les arpents du salut et de l’innocence providentiellement retrouvées – les lopins du Nouveau Monde serviront de territoire à une résurrection plus globale de l’Eden. Le fossé qui s’est creusé entre les patries bénies par le Dieu récent des chrétiens et l’Olympe vieilli des Anciens n’est pas si difficile à combler. La prière rituelle « Dieu bénisse l’Amérique » s’est mondialisée : un finalisme religieux commun à la Rome d’autrefois et à l’ubiquité chrétienne a illustré l’appel à l’universalité du droit et de la justice déjà perceptibles chez Horace, Pline le Jeune, Cicéron.

Toute la scolastique du Moyen Age et de saint Thomas d’Aquin lui-même, demeuré le « docteur angélique » de l’Eglise – même à la suite du faux séisme de 1962 – n’est-elle pas la copie du Sénèque qui programmait les travaux futurs des théologiens chrétiens en ces termes: « Oui, je rends surtout grâces à la nature lorsque, non content de ce qu’elle montre à tous, je pénètre dans ses plus secrets mystères; lorsque je m’enquiers de quels éléments l’univers se compose; quel en est l’architecte ou le conservateur ». Du coup, il s’agit déjà de savoir « ce que c’est que Dieu. Est-il absorbé dans sa propre contemplation ou abaisse-t-il parfois sur nous ses regards ».

Autre difficulté: on ne sait s’il crée « tous les jours ou s’il n’a créé qu’une fois ; s’il fait partie du monde ou s’il est le monde même, si, aujourd’hui encore, il peut rendre de nouveaux décrets et modifier les lois du destin ou si ce ne serait pas descendre de sa majesté et s’avouer faillible que d’avoir à retoucher son œuvre ». Et puis, quel casse-tête, pour la sagesse d’ « aimer toujours les mêmes choses »; car « Dieu ne saurait aimer que les choses parfaites et cela non point qu’il soit, pour autant, moins libre ni moins puissant, car il est lui-même sa nécessité. Ah, si l’accès à ces mystères m’était interdit, aurait-ce été la peine de naître! »

Saint Anselme se fera le logicien d’un ciel plus unifié encore que celui de Sénèque. Si Dieu n’existait pas, dit la première prémisse de son raisonnement, il ne serait pas parfait, puisque l’existence est un attribut sine qua non de la perfection; et puisque Dieu est nécessairement parfait par nature et par définition, dit la seconde branche du syllogisme, il s’ensuit qu’il existe par la puissance invincible de la logique syllogistique qui inspire ses démonstrateurs. C’est dire que si la République n’était pas parfaite, elle n’existerait pas. Or, elle est visiblement imparfaite, donc elle n’existe que dans la tête de ses fidèles argumenteurs. Quelle est donc la sorte d’existence bancale de l’Etat d’Israël en tant que République à la fois juive et idéale dans la tête de M. Benjamin Netanyahou ou de M. Avigdor Lieberman? Qu’en est-il des personnages tout ensemble terrestres et cérébraux? C’est demander quelle était la spécificité de l’existence de Zeus dans l’encéphale des Grecs en chair et en os. Pour l’apprendre, il faudrait également préciser la double nature de Gulliver, de don Quichotte ou de Robinson Crusoé. A ce titre, quelle est la nature de l’existence cérébrale et physique de la civilisation européenne dans la tête des Européens si, à l’exemple du dieu universel de Sénèque, de saint Anselme, de saint Thomas d’Aquin ou de saint Augustin, le Vieux Continent n’existe que dans les âmes et les cerveaux et si toute la difficulté est de la faire partiellement débarquer sur la terre?

On voit que la question du statut psycho-physique du sacré est politique par définition, et même tellement politique que les civilisations qui ne se sont pas encore ancrées dans une interprétation salvatrice de leur propre historicité n’en sont pas moins lovées dans une politique de leur destin eschatologique et sotériologique: le culte d’un empereur tenu pour le fils du soleil figure le cœur glorieux de la civilisation nippone et la Chine elle-même, la seule civilisation à n’écouter que les leçons d’un grand sage, Confucius, expédie néanmoins un dragon rédempteur peupler un vide habité hier de statues d’airain, de bois ou de fer, aujourd’hui de statues mentales dressées dans les encéphales en l’honneur des idéalités devant lesquelles les démocraties se prosternent.

6 – « Dieu » est une île intérieure

Mais, dira-t-on, si Israël conduit la science historique moderne à se pencher en anthropologue sur la boîte osseuse du singe théologisé depuis le paléolithique, existerait-il cependant des civilisations entièrement dépourvues d’un symbole et d’une effigie de leur existence physico-eschatologique? Ne dira-t-on pas que l’Angleterre, par exemple, n’honore aucun héros mythique qui « donnerait corps » à son existence psychique? Mais l’insularité est un focalisateur naturel des âmes, l’insularité jaillit d’un feu identitaire physique. Cette génitrice change Neptune en compagnon d’une nation enserrée dans le corset de l’identité maritime qui l’isole du reste du monde et qui fait, de son autonomie océane, une autorité bénédictionnelle. Tout mythe sacré glorifie la solitude qu’il féconde. L’insularité psychique voit la géographie elle-même courir au secours de son soleil.

Mais que ferons-nous de l’identité mythique des civilisations évanouies? Le passé est un vivant appelé à jouer le même rôle que les dieux. C’est à la fontaine de leur trépas que les vivants boivent l’eau pure de leur histoire intérieure. Athènes respire encore dans la postérité d’Homère, l’Egypte entre-ouvre encore un œil sur l’immortalité de son souffle – celui qu’elle a inscrit dans la pierre des Pyramides.

Et la France ? Que restera-t-il de son âme et de sa tête quand elle se sera débranchée de son ascendance dans la folie de son rêve de justice? Le « Dieu » de la France serait-il son île intérieure, celle que féconde l’esprit de justice du simianthrope? Mais alors, quel est l’esprit de justice qui rend vivant à leur tour don Quichotte, Gulliver ou Robinson Crusoé, quel est l’esprit de justice qui fait d’une civilisation un personnage intérieur, quel est l’esprit de justice qui fait de l’Europe un héros en attente de son Homère? Israël donne du fil à retordre au verbe exister dont la science historique et la politique du XXIe siècle tentent de trouver le mode d’emploi.

7 – L’identité mythico-terrestre du simianthrope

La face cachée des « sanglantes ténèbres » de l’Histoire qu’évoquait Robespierre pose à une civilisation mondiale désormais mise à l’épreuve et au banc d’essai de sa schizoïde cérébrale la question, anthropologique en diable, de la nature de son propre déchirement intrérieur entre la pieuvre de l’abstrait et les floralies du singulier; car notre espèce se révèle irréductible à la fois aux tentacules d’une logique universelle et aux piquets mémorables de l’instant.

Un peuple juif à la fois ligoté à son sol et errant rappelle à l’Europe qu’elle se situe, elle aussi, dans son double enracinement cérébral. La question de l’identité délocalisée et pourtant fichée en terre des fuyards dédoublés de la simiologie que nous sommes demeurés se placerait-elle au cœur de la politique internationale contemporaine, donc au cœur de l’histoire biface de la planète? Dans ce cas, l’horloge de la pensée et de l’action conjuguées en appelleraient à l’anthropologie critique de demain; et cette science déboucherait sur la connaissance rationnelle d’un animal condamné, à l’instar d’Israël, à réfuter le sacré et à en vivre. Comment manier ensemble le glaive et le songe, l’épée et le totem, le poignard et les ciboires?

Notre civilisation des nouveaux crucifix cloue les idéalités de la démocratie sur la potence de l’histoire du monde. Nos banderoles des « droits de l’homme » sont aussi ensanglantées que les aigles romaines. Où sont passés les Bossuet de la démocratie séraphique? On cherche les orateurs qui monteraient en chaire pour dénoncer le sacrifice d’une ville d’un million cinq cent mille habitants, on cherche les dénonciateurs dont l’éloquence clouerait une tribu de Judée au pilori. Où est-elle passée, l’île intérieure qui donnerait une âme à l’Europe? Voyez comme ce continent se scinde entre la prudence de la Rome des papes, dont la foi a renoncé depuis deux millénaires à universaliser les Evangiles et la diplomatie, bifide à son tour, du Dieu du Nouveau Monde; voyez la loyauté semi évangélique du protestantisme du nord et l’attentisme de la Russie et de la Chine, de l’autre; voyez l’angoisse des peuples du monde entier face aux exploits du ciel des Hébreux . Comment domicilier Jahvé en Judée et donner le pain de son ciel à manger à un Dieu sans domicile fixe?

8 – Où faire passer la frontière entre la théologie et la politique ?

Qu’est-ce donc que le « pain du ciel » des mystiques et dans quel four faire monter ce pain-là ? Pour l’apprendre, observons pourquoi Israël se plaint si fort de ce que les F15 se trouvent dotés de missiles à longue portée et de haute précision. Tel-Aviv sue sang et eau à rendre crédible l’intention de l’Arabie saoudite de pulvériser le peuple juif. Impossible d’expliquer cette diplomatie théologique à la lumière des interprétations de la science historique traditionnelle: il faudra, disais-je, en passer par une anthropologie critique entièrement inédite, dont la méthode intronisera une mutation de la notion même de raison au sein de la science historique traditionnelle. Celle-ci s’imagine que Clio pourra, longtemps encore, se passer allègrement d’une science psychologique et généalogique de la « rationalité » des guerres de religion du XVIe siècle, pour ne citer que cet exemple.

Et pourtant, si l’on ignore allègrement les raisons anthropologiques pour lesquelles la rationalité théologique de la foi catholique, entend faire consommer aux fidèles la chair crue et ingurgiter le sang frais de la victime qu’elle est censée immoler physiquement le dimanche sur ses autels, on ignorera plus joyeusement encore les raisons psychobiologiques pour lesquelles la science historique moderne se garde bien de scanner les entrailles du messianisme sanglant que les peuples hébreu et chrétien se partagent depuis deux millénaires. Par bonheur, si je puis dire, cette histoire ne peut s’écrire qu’à l’école d’une anthropologie critique qui mettra la civilisation bicéphale dite des droits de l’homme face à la schizoïdie de sa prétendue sainteté.

Car enfin, Israël parvient, comme il est dit plus haut, à rendre crédible le scénario absurde et barbare selon lequel l’Arabie Saoudite serait le successeur attitré de Pompée et de Titus. Où le Président des Etats-Unis a-t-il la tête ? Mais qu’on ne s’y trompe pas, l’habillage théologique de l’histoire des glaives n’a jamais fait quitter davantage à Clio les planches du théâtre de l’inexorable qu’à Israël les vêtements religieux de ses relations avec le peuple palestinien. Quelle est donc la clé sacerdotale de ce marché simoniaque? On sait que ce contrat, si doctrinal qu’il paraisse, devra recevoir l’approbation politique des biblistes qui siègent en rangs serrés à la Chambre trans-océane des Représentants du peuple américain. Or, le suffrage de ces derniers n’est pas aussi confessionnel qu’il y paraît: on sait qu’il se trouve entre les mains des groupes de pression dont dispose Israël à Washington et qu’ils y jouissent du même statut que les autres entreprises nationales installées sur le territoire des Etats-Unis – ce qui signifie qu’ils s’y trouvent régis par un droit américain fondé, en l’espèce, sur un encouragement légalement adressé aux citoyens juifs du pays de se mettre au service des intérêts d’un Etat étranger, situation à laquelle le sénateur Robert Kennedy a tenté de faire obstacle au cours d’un combat inutile de plus de vingt ans .

Aussi, les « inquiétudes » ou les « craintes » militaires simulées de Tel Aviv ont-elles été « apaisées » par l’engagement solennel de l’administration américaine de livrer à l’Arabie Saoudite des F15 sous-équipés, donc privés du système « Standoff » qui seul permet des tirs précis et à longue portée. Le contrat ainsi amputé et devenu humiliant pour l’acheteur comme pour le vendeur portera sur quatre-vingt quatre appareils pour une durée de dix ans et d’un montant de trente milliards de dollars.

9 – Un Graal à plusieurs convois

Mais pourquoi seule l’anthropologie historique et critique fournit-elle la problématique et la méthodologie susceptibles de rendre scientifiquement intelligible un marché des sacrifices simulés? Certes, on comprend que l’industrie américaine de l’armement nourrisse l’ambition commerciale légitime d’étendre la vente de sa technologie au Moyen Orient. Mais si vous n’introduisez pas des paramètres messianiques et bibliques, donc une axiomatique de l’irréel dans la problématique mondiale du savoir historique bi-dimensionnel d’aujourd’hui, jamais vous n’expliquerez pourquoi Washington feint d’exorciser un autre danger encore, non moins biblique que le précédent, celui que les descendants de Cyrus et d’Artaxerxès sont désormais censés faire courir à la planète entière des marchands . Car ces déments sont prêts, n’est-ce pas, à recevoir l’ordre exprès d’Allah de se ruer tête baissée et sans armes contre un Etat nucléaire, Israël, lequel dispose, lui, de plus de deux cents ogives hautement exterminatrices. Dès le mois prochain, le Congrès autorisera donc la Maison Blanche à livrer des appareils sous-armés et dévalués à l’Arabie Saoudite en échange de la promesse secrète d’Israël de ne pas faire voter par le Congrès l’interdiction pure et simple de la vente des armes sus-dites, ce qui irait de surcroît, à l’encontre des intérêts électoraux d’un Président des Etats-Unis réduit au rang d’otage pitoyable d’un Etat étranger aux yeux du monde entier. (voir préambule)

On voit que le mythe biblique est un fusil à plusieurs canons: il faut que les Etats arabes soient perçus comme des Pompée potentiels afin que l’Iran, le Hamas, Gaza, Damas, Beyrouth et même Moscou soient censés menacer Israël dans sa survie – sinon, la planète entière des mythes sacrés actuels cesserait de se trouver dirigée par Jahvé. C’est cela qui contraindra une politologie mondiale devenue anachronique à conquérir les instruments de la connaissance rationnelle d’une humanité au cerveau onirique – connaissance sans laquelle l’histoire biblique contemporaine deviendrait la tragédie pleine de bruit et de fureur racontée par un idiot qu’évoquait un anthropologue célèbre de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle.

Afin de ne pas fatiguer l’attention du lecteur par un texte trop long, je poursuivrai la semaine prochaine l’analyse anthropologique du destin mi-terrestre, mi-mythologique d’Israël, afin de mettre davantage en évidence la mutation des méthodes de la science historique classique qu’appelle la mise en évidence planétaire de la dimension schizoïde d’une espèce livrée à ses dieux bicéphales.

Manuel de Diéguez, le 17 octobre 2010

Manuel de Diéguez est un philosophe français d’origine latino-américaine et suisse.

Visiter le site de Manuel Diéguez [2]

 


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vendredi, 15 octobre 2010

Come l'Occidente ha devastato l'Afghanistan

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Come l'Occidente ha devastato l'Afghanistan

Ex: http://www.massimofini.it/

Testo integrale dell'articolo pubblicato sul Fatto il 12 ottobre 2010 e ridotto per ragioni di spazio:

Ogni volta che muore un soldato italiano in Afghanistan ci chiediamo «Che cosa ci stiamo a fare lì?». Ma c'è un'altra domanda da farsi: cosa abbiamo fatto in Afghanistan e all'Afghanistan?

1) Dismesse le pelose giustificazioni che siamo in Afghanistan per regalare le caramelle ai bambini, per "ricostruire quel disgaziato Paese", per imporre alle donne di liberarsi del burqua, perché, con tutta evidenza, quella in Afghanistan, dopo dieci anni di occupazione violenta, non può essere gabellata per un'operazione di "peace keeping", ma è una guerra agli afgani, l'unica motivazione rimasta agli Stati Uniti e ai loro alleati occidentali, per legittimare il massacro agli occhi delle proprie opinioni pubbliche e anche a quelli dei propri soldati, demotivati perché a loro volta non capiscono «che cosa ci stiamo a fare quì», è che noi in Afghanistan ci battiamo "per la nostra sicurezza" per contrastare il "terrorismo internazionale".

È una menzogna colossale. Gli afgani, e quindi anche i talebani, non sono mai stati terroristi. Non c'era un solo afgano nei commando che abbatterono le Torri gemelle. Non un solo afgano è stato trovato nelle cellule, vere o presunte, di Al Quaeda. Nei dieci, durissimi, anni di conflitto contro gli invasori sovietici non c'è stato un solo atto di terrorismo, tantomeno kamikaze, né dentro né fuori il Paese. E se dal 2006, dopo cinque anni di occupazione si sono decisi ad adottare contro gli invasori anche metodi terroristici (dopo un aspro dibattito al loro interno: il leader, il Mullah Omar, era contrario perché questi atti hanno delle inevitabili ricaute sui civili e nulla può convenire meno ai Talebani che alienarsi la simpatia e la collaborazione della popolaione sul cui appoggio si sostengono) è perché mentre i sovietici avevano almeno la decenza di stare sul campo, gli occidentali combattono quasi esclusivamente con i bombardieri, spesso Dardo e Predator senza equipaggio, ma armati di missili micidiali e comandati da Nells nel Nevada o da un'area "top secret" della Gran Bretagna. Contro un nemico invisibile che cosa resta a una resistenza? Nei rari casi in cui il nemico si fa visibile i Talebani, nonostante l'incomparabile inferiorità negli armamenti, lo affrontano con classiche azioni di guerriglia com'è stata quella che è costata la vita ai quattro soldati italiani. Azione definita "vigliacca" dal ministro La Russa. Chi è vigliacco? Chi ci mette il proprio corpo e il proprio coraggio o chi stando fuori portata schiaccia un bottone e lancia un missile e uccide donne, vecchi, bambini, com'è avvenuto mille volte in questi anni ad opera soprattutto degli americani ma anche, quando è il caso, degli altri contingenti?

Nel 2001 in Afghanistan c'era Bin Laden che, con l'appoggio degli americani, si era introdotto nel Paese anni prima in funzione antisovietica. Ma Bin Laden cotituiva un problema anche per il governo talebano, tanto è vero che quando ne 1990 Bill Clinton propose ai Talebani di farlo fuori, il Mullah Omar, attraverso il suo numero due Waatki inviato appositamente a Washington dove incontrò due volte il presidente americano, si disse d'accordo purchè la responsabilità dell'assassinio del Califfo saudita se la prendessero gli americani perché Osama godeva di una vasta popolarità nel Paese avendo fatto costruire con i suoi soldi, ospedali, strade, ponti, infrastrutture, avendo fatto cioè quello che noi abbiamo detto che volevamo fare e non abbiamo fatto.

Ma Clinton, nonostante fosse stato il promotore dell'iniziativa, all'ultimo momento si tirò indietro. Tutto ciò risulta da un documento del Dipartimento di Stato americano dell'agosto 2005.

Comunque sia oggi Bin Laden non c'è più e in Afghanistan non ci sono più nemmeno i suoi uomini. La Cia, circa un anno fa, ha calcolato che su 50 mila guerriglieri solo 359 sono stranieri. Ma sono ubzechi, ceceni, turchi, cioè non arabi, non waabiti, non appartenenti a quella Jihan internazionale che odia gli americani, gli occidentali, gli "infedeli" e vuole vederli scomparire dalla faccia della terra. Agli afgani, e quindi ai Talebani, interessa solo il loro Paese. Il Mullah Omar, come scrive Jonathan Steel, inviato ed editorialista del Guardian nella sua approfondita inchiesta "La terra dei taliban" più che un leader religioso è un leader politico e militare. A lui (come ai suoi uomini) interessa solo liberare la propria terra dagli occupanti stranieri così come aveva già fatto combattendo, giovanissimo, contro i sovietici, rimediando la perdita di un occhio e quattro gravi ferite. E sarà pur lecito a un popolo o a una parte di esso esercitare il legittimo diritto di resistere ad un'occupazione straniera, comunque motivata. L'Afghanistan, nella sua storia, non ha mai aggredito nessuno (caso mai è stato aggredito: dagli inglesi, dai sovietici e oggi dagli occidentali) e armato rudimentalmente com'è non può costituire un pericolo per nessuno.

2) Per avere un'idea delle devastazioni di cui siamo responsabili in Afghanistan bisogna capire perché i Talebani vi si sono affermati agli inizi degli anni Novanta. Sconfitti i sovietici i leggendari comandanti militari che li avevano combattuti (i "signori della guerra"); gli Ismail Khan, i Pacha Khan, gli Heckmatjar, i Dostum, i Massud, diedero vita a una feroce guerra civile e, per armare le loro milizie, si trasformarono con i loro uomini in bande di taglieggiatori, di borseggiatori, di assassini, di stupratori che agivano nel più pieno arbitrio e vessavano in ogni modo la popolazione (un camionista, per fare un esempio, per attraversare l'Afghanistan doveva subire almeno venti taglieggiamenti). I Talebani furono la reazione a questo stato di cose. Con l'appoggio della popolazione che non ne poteva più, sconfissero i "signori della guerra", li cacciarono dal Paese e riportarono l'ordine e la legge nel Paese. Sia pur un duro ordine e una dura legge, quella coranica, che comunque non è estranea alla cultura e alla tradizione di quella gente come invece lo  per noi. In ogni caso la popolazione afgana dimostrò di preferire quell'ordine e quella legge al disordine e agli arbitri di prima.

a) Nell'Afghanistan talebano c'era sicurezza. Vi si poteva viaggiare tranquillamente anche di notte come mi ha raccontato Gino Strada che vi ha vissuto e vi ha potuto operare con i suoi ospedali anche se doveva continuamente contrattare con la sessuofobia dei dirigenti talebani che pretendevano una rigida separazione dei reparti a volte impossibile (medici e infermieri donne per i reparti femminili). Gli occidentali gli ospedali li chiudono come è avvenuto a Laskar Gah.

b) In quell'Afghanistan non c'era corruzione. per la semplice ragione che la spiccia ma efficace giustizia talebana tagliava le mani ai corrotti e, nei casi più gravi, anche un piede. Per la stessa ragione non c'erano stupratori. La carriera di leader del Mullah Omar comincia proprio da qui. Una banda aveva rapito due ragazze nel suo piccolo villaggio, Zadeh, a una ventina di chilometri da Kandahar, e le aveva portate in un posto sicuro per farne carne di porco. Omar, a capo di altri "enfants de pays", raggiunse il luogo, liberò le ragaze, sconfisse i banditi e ne fece impiccare il boss all'albero della piazza del Paese). Ancora oggi, nella vastissima realtà rurale dell'Afghanistan, la gente, per avere giustizia, preferisce rivolgersi ai Talebani piuttosto che alla corrotta magistratura del Quisling Karzai dove basta pagare per avere una sentenza favorevole.

c) Nel 1998 e nel 1999 il Mullah Omar aveva proposto alle Nazioni Unite il blocco della coltivazione del papavero, da cui si ricava l'oppio, in campio del riconoscimento internazionale del suo governo. Nonostante quella di boicottare la coltivazione del papavero fosse un'annosa richiesta dell'Agenzia contro il narcotraffico dell'Onu la risposta, sotto la pressione degli Stati Uniti, fu negativa. All'inizio del 2001 il Mullah Omar prese autonomamente la decisione di bloccare la coltivazione del papavero. Decisione difficilissima non solo perché su questa coltivazione vivevano moltissimi contadini afgani, a cui andava peraltro un misero 1% del ricavato totale, ma perché il traffico di stupefacenti serviva anche al governo talebano per comprare grano dal Pakistan. Ma per Omar il Corano, che vieta la produzione e il consumo di stupefacenti, era più importante dell'economia. Aveva l'autorità e il prestigio per prendere una decisione del genere. Una decisione così efficace che la produzione dell'oppio crollò quasi a zero (si veda il prospetto del Corriere della Sera 17/6/2006). Insomma il talebanismo era la soluzione che gli afgani avevano trovato per i propri problemi. Se poi, alla lunga, non gli fosse andata più bene vrebber rovesciato il governo del Mullah Omar perchè in Afghanistan non c'è uomo che non posssieda un kalashnikov. Noi abbiamo preteso, con un totalitarismo culturale che fa venire i brividi (per non parlare degli interessi economici) di sostituire a una storia afgana la storia, i costumi, i valori, le istituzioni occidentali. Con i seguenti risultati.

Sono incalcolabili le vittime civili provocate, direttamente o indirettamente dalla presenza delle truppe occidentali. Le stime dell'Onu non sono credibili perchè una recente inchiesta ha rilevato che in almeno 143 casi i comandi alleati hanno nascosto gli "effetti collaterali" provocati dai bombardamenti indiscriminati sui villaggi. Vorrei anche rammentare, in queste ore di pianto per i nostri caduti, che anche gli afgani e persino i guerriglieri talebani hanno madri, padri, mogli e figli che non sono diversi dai nostri. Inoltre in Afghanistan sono tornati a spadroneggiare i "signori della guerra" alcuni dei quali, i peggiori come Dostum, un vero pendaglio da forca, sono nel governo del Quisling Karzai.

La corruzione, nel governo, nell'esercito, nella polizia, nelle autorità amministrative è endemica. Ha detto Ashrae Ghani, un medico, terzo candidato alle elezioni farsa di agosto, il più occidentale di tutti e quindi al di sopra di ongi sospetto: «Nel 2001 eravamo poveri ma avevamo una nostro moralità. Questo profluvio di dollari che si è riversato sull'Afghanistan ha distrutto la nostra integrità e ci ha reso diffidenti gli uni verso gli altri».

Infine oggi l'Afghanistan "liberato" produce il 93% dell'oppio mondiale.

Ma c'è di peggio. Armando e addetrando l'esercito e la polizia del governo fantoccio di Karzai noi abbiamo posto le premesse, quando le truppe occidentali se ne saranno andate, per una nuova guerra civile, per "una afganizzazione del conflitto" come si dice mascherando, con suprema ipocrisia, la realtà dietro le parole. La sola speranza è che il buon senso degli afgani prevalga. Qualche segnale c'è. Ha detto Shukri Barakazai, una parlamentare che si batte per i diritti delle donne afgane: «I talebani sono nostri connazionali. Hanno idee diverse dalle nostre, ma se siamo democratici dobbiamo accettarle». Da un anno, in Arabia Saudita sotto il patrocinio del principe Abdullah, sono in corso colloqui non poi tanto segreti fra emissari del Mullah Omar e del governo Karzai. Ma prima di iniziare una seria trattativa ufficiale Omar, di fatto vincitore sul campo, pretende che tutte le truppe straniere sloggino. Non ha impiegato trenta dei suoi 48 anni di vita a combattere per vedersi imporre una "soluzione americana". E, come ha detto giustamente il comandante delle truppe sovietiche che occuparono l'Afghanistan: «Bisogna lasciare che gli afgani sbaglino da soli». Bisogna cioè rispettare il principio, solennemente sancito a Helsinki nel 1975 e sottoscritto da quasi tutti gli Stati del mondo, dell'autodeterminazione dei popoli.

E allora perché rimaniamo in Afghanistan e anzi il ministro della Difesa Ignazio La Russa, un ripugnante prototipo dell' "armiamoci e partite", vuole dotare i nostri aerei di bombe? Lo ha spiegato, senza vergognarsi, Sergio Romano sul Corriere del 10 ottobre: perché la lealtà all' "amico americano" ci darà un prestigio che potremo sfruttare nei confronti degli altri Paesi occidentali. Gli olandesi e i canadesi se ne sono già andati, stufi di farsi ammazzare e di ammazzare, per questioni di pretigio. Gli spagnoli, che hanno affermato che nulla gli interessa di meno, che portare la democrazia in Afghanistan, se ne andranno fra poco. Rimaniamo noi, sleali, perché fino a poco tempo fa abbiamo pagato i Talebani perché ci lasciassero in pace, ma fedeli come solo i cani lo sono. Gli Stati Uniti spendono 100 miliardi di dollari l'anno per qusta guerra insensata, ingiusta e vigliacchissima (robot contro uomini). L'Italia spende 68 milioni di euro al mese, circa 800 milioni l'anno. Denaro che potrebbe essere utilizzato per risolvere molte situzioni, fra cui quelle di disoccupazione o di sottoccupazione di alcune regioni da cui partono molti dei nostri ragazzi per guadagnare qualche dollaro in più e farsi ammazzare e ammazzare senza sapere nemmeno perché.

Massimo Fini

mercredi, 14 juillet 2010

Cosmopolis: The West as Nowhere

Cosmopolis: The West as Nowhere

Guillaume Faye / Ex: http://www.counter-currents.com/

From Guillaume Faye, L’Occident comme déclin [The West as Decline] (Agir pour l’Europe, 1985).

Translated by Greg Johnson

The old tradition is mistaken: the West is no longer European, and Europe is no longer the West. In its course toward the West, the sun of our civilization has dimmed. Starting from Greece, settling in Italy, then in Western Europe, then in England, and finally, having crossed the seas, installing itself in America, the center of the “West” has been slowly disfigured.

Indeed, today, according to Raymond Abellio, California has been established as the epicenter and essence of the West.[1] Pacified at the edge of the Pacific, it is the symbol of the happiness where our civilization dies; land of the end of history, land of Hollywood’s simulacrum, it is the asymptotic approach to madness, to commercial society, to the society of the spectacle, and to cosmopolitanism.

The West as a planetary movement which is always-already underway will thus continue its course towards the West by establishing its center where it has already been prepared, in the Far East, in the archipelagos of the Pacific Ocean, from Japan to the East Indies. It is the absolute reverse of the movement across the seas departing from Europe in the 16th century . . .

The West thus becomes “something” global. It appears in the form of a vague whole composed of networks of decisions, dispersed territorial zones, cultural and human blocs distributed in all countries. If the United States still dominates it, the West will increasingly take on the countenance of a “qualification”—and no longer as a membership—which crosses national boundaries.

The West, or Western civilization, indicates those places where the “Western system” prevails. These places are less and less describable in political, geographical, and ethnic terms. If the epicenter remains localized in the United States, the foreseeable future leads us to forecast a dispersion of the West, of its transformation into a polycentric ensemble of quite Western nations (Germany), fairly Western nations (the Ivory Coast), partially Western nations (Czechoslovakia), and not very Western nations (Afghanistan). But few places will be able to “escape the West.”

In parallel, if the center is everywhere and that “everywhere” is at bottom nowhere, the West has to lose any specific virtue; to be Western is to be nothing rather than something. In this process, Europeans—and Europeans alone—lose the very possibility of designating themselves validly as anything but Western. The Indian, for example, can remain “Indian” and Western, but the German or the Dutchman has to be nothing but Western, i.e., at bottom, nothing.

Neglecting borders, states, religions, the West covers much more than a geopolitical reality or a diplomatic solidarity with the “free world.” It goes far beyond this framework. It is, in its essence, the global establishment of a form of society, that of the “Americanosphere.”

Not all people feel that they are founding members of the club called Western civilization. France, Italy, Spain, or Greece will never be as integrated into Western capitalist society as, for example, New Zealand which belongs culturally to the source from which capitalism drew its impulse, namely the Anglo-Saxon hegemony founded by England and continued by the United States.

The smallest deviation of identification from the primary source of ideas and the current seat of power inexorably causes national anxiety and dissatisfaction. Thus the whole planet experiences an identity crisis in relation to a global cultural standard that few participate in completely. The schizophrenic shame that results from this is, perhaps, from a psycho-political point of view, a powerful engine of Westernization.

Organized in concentric membership circles, the West has its center, its club house, in the so-called developed countries where English is the native tongue or at least the second language, as in Northern Europe, where the mentality has been shaped by Protestantism.

The “second circle” of club membership includes, for example, France, a moral member because of its democratic universalism and the memory of Lafayette; Israel, an honorary member; Germany and Italy, associate members due to military reverses, etc. As for Japan, it has made itself a member, and American industrialists are surely beginning to regret it.

In the countries known as the “Third World,” a Westernized class, often cut off from its culture, serves as the model of emulation for the population, whose identity crisis vis-à-vis the cultural standard of its “elites” makes their deculturation that much easier. Many Southern countries are thus internally divided by a cultural and economic abyss separating those who have hastily Westernized to the point of parody from the disadvantaged bearers of the wreckage of the traditional culture.

Delirious Americanism and traditional culture in decay—which appears in this regard as backwards and inferior—are violently opposed through the logic of ethnocide. Town planning, daily manners, arts, family and social structures are the places where the Western standards of “evolution” and “development” collide with traditional cultures that, as in Africa, end up thinking of themselves as backwards.

One can wonder if “Western civilization,” in particular its American aspect, is not also constructed on a rejection of Europe, although European culture is in part the starting point of Occidentalism.

Consider, for example, Greece, which with some justice is presented as one of the fundamental matrices of European civilization: Occidentalism of the Anglo-Saxon variety violently conflicts with the original Greek culture as if it were a cancer. Thus Greek culture, by an incredible reversal, appears—and not only, alas, in the eyes of tourists—“Oriental” to Westerners, whereas in Europe it remains an almost unique example of authenticity and ancestral rootedness, and for the historians and the sociologists its linguistic, musical, religious, economic, and family forms are deeply European. In Greece, and to a lesser degree in all the other European countries, the Western standard makes the people “foreign to itself,” foreign to its own culture, which becomes an object of ethnology or is classified and neutralized as “folklore.”

The essential difference between traditional cultural standards and the Western standard is that the former are defined in relation to the cultural standards of other ethnic groups, according to a logic of differentiation (relative standards), whereas the latter claims to be the standard, having universal value and indeed regarding all other cultures as atypical—“backwards”—or morally abnormal, as “savages” who need to be civilized., i.e., domesticated.

This “domestication” described, inter alia, as a mass global culture, is well analyzed in the artistic field by Theodor Adorno. In this mass global culture, anthropologist Arnold Gehlen saw signs of the appearance of a “neo-primitive” era.

In this respect three types of “standardized” cultures seem to coexist: (1) global mass culture, which imposes in music, cinema, furniture, clothing, food, etc., ever more uniform styles, and which is presented in the form of a distractive culture; (2) an abstruse and elitist culture, both abstract and universalist, whose function is social and discriminatory (to substitute for ethno-cultural divisions a vertical separation between two cultural spheres on the scale of the entire West); and finally (3) a “museum” culture that codifies the “ancient,” rationalizes collective memory, with the aim of transforming the cultural past unique to each population into a standardized folkloric stock described as the “inheritance of humanity,” etc.

The image of the Westerner (a socio-mental system common to all who are Westernized) has reigned since the 1950s. It is generally organized around a simplified American culture and sanctions the domination of the Anglo-American language even in the arts and sciences.

In this regard, the ideology of “communication” plays a central role.  For example, Gaston Dommergues, a specialist on the United States, showed that the American doctrines of transparency of information, world freedom of communications, established in particular on the construction of television networks, planetary data communication, and data processing, are not free of hegemonic inclinations.

The universalization of a language, especially when it passes though the computer, means the generalization of an international mode of thinking, acting, and feeling “American style.” Even if “liberty” reigns as the supreme value, with this enterprise, one must wonder if this planetary standardization of culture, supported by communications technology, really encourages dialogue between men and peoples. Can one communicate through a code that is in itself deculturized?

The most striking example of planetary cultural standardization appears to be the international youth culture of the generations since World War II. This culture, presented as an anti-bourgeois ideology of “liberation” and protest, has in reality functioned in scores of countries to create the first Westernized middle class in history. The generation born just after the war first bought in. Today, a large part of Western youth—including those in non-industrialized countries—share the same music, manners, and “practical culture.” One can say, according to the expression of Robert Jaulin, that the West is no longer a place, a zone, but a form of life that “crosses” all boundaries, that is interiorized in each ego.

As much as the West is a cultural and geopolitical reality, it is also a coherent and structured ideology whose totalitarian aim is all the more present as it is generally not immediately apparent to those lovers of freedom who claim to be our intellectuals.


[1] Raymond Abellio, La structure absolue [The Absolute Structure] (Paris : Gallimard, 1965).

mardi, 06 juillet 2010

La Turquie tourne le dos à l'Occident

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Bernhard TOMASCHITZ:

La Turquie tourne le dos à l’Occident

L’amitié étroite entre la Turquie et Israël est un fait politique qui relève désormais du passé. Ankara envisage des sanctions contre l’Etat sioniste à la suite de l’attaque israélienne contre la flotille de la paix qui faisait route vers Gaza. Si Israël refuse de satisfaire à l’exigence turque de mettre en oeuvre une commission d’enquête internationale, le gouvernement turc songe à réduire voire à rompre les relations diplomatiques et les coopérations économiques et militaires. De même, la résistance turque au sein du Conseil de sécurité de l’ONU contre tout raffermissement des sanctions contre l’Iran a conduit à un refroidissement considérable du climat entre Ankara, d’une part, Jérusalem et Washington, d’autre part. Président de la commission de politique étrangère du Parlement turc, Murat Mercan explique ce soutien apporté à Téhéran: “La Turquie a des liens historiques, culturels et religieux d’une grande profondeur temporelle avec l’Iran. En d’autres mots: les Iraniens sont non seulement nos voisins mais aussi nos amis et nos frères”.

A Washington, la nouvelle orientation de la Turquie vers la Syrie et vers l’Iran (deux “Etats voyous selon les Etats-Unis) suscite une vigilance toute particulière. Car, en fin de compte, la Turquie est un allié particulièrement important des Etats-Unis pour assurer la pacification de l’Irak. Parce que le gouvernement turc a décidé de ne pas participer aux sanctions, Robert Gates, le ministre américain des affaires étrangères, s’est déclaré “déçu”. Gates avait toutefois une explication toute faite: c’est l’UE qui est responsable de cet état de choses, vu le gel des négociations entre l’Europe et la Turquie en vue de l’adhésion de ce pays à l’Union. Les Etats-Unis mettent une fois de plus la pression sur l’Union européenne pour qu’elle accepte le plus rapidement possible la Turquie en son sein. Et cette pression ira croissant pour autant qu’Ankara n’exagère pas dans son soutien à Téhéran. Au Congrès américain, nous entendons désormais des voix qui réclament une attitude de plus grande fermeté à l’encontre d’Ankara: “Il y aura un prix à payer si la Turquie maintient son attitude actuelle et se rapproche davantage de l’Iran, tout en se montrant hostile à Israël”, a menacé le Républicain Mike Pence. Quant à la Démocrate Shelley Berkley, elle s’est adressé aux Turcs en ces termes: “Ils ne méritent pas de devenir membres de l’UE, tant qu’ils ne commencent pas à se comporter comme les peuples européens et tant qu’ils ne cessent pas d’imiter l’Iran”.

Désormais, la Turquie tourne donc ses regards vers le Proche Orient. Mais l’adoption de cette politique n’est pas vraiment une surprise. De fait, le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan et son parti gouvernemental, l’AKP de tendance islamiste, se sentent plus proches du monde musulman que des Etats-Unis ou de l’Europe. A ce sentiment d’affinité s’ajoute le concept de “profondeur stratégique”, élaboré dès 2001 par l’actuel ministre turc des affaires étrangères, Ahmed Davutoglu. Selon ce concept, la Turquie doit retrouver sa propre “identité historique et géographique”, démarche où l’Empire ottoman constitue la principale référence. Davutoglu considère son pays, la Turquie, comme un “Etat clef”, situé sur le point de rencontre de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique car, en effet, la Turquie est tout à la fois partie des Balkans, du Caucase, de l’espace pontique (Mer Noire), du Proche Orient et de l’espace maritime du bassin oriental de la Méditerranée, ce qui implique, ipso facto, qu’elle doit s’efforcer d’entretenir un “rapport équilibré avec tous les acteurs globaux et régionaux”.

Cette notion de “rapport équilibré” est très visible dans les relations qu’entretient aujourd’hui la Turquie avec la Syrie. Ces relations se sont remarquablement détendues, depuis que la Turquie essaye de jouer un rôle médiateur dans le conflit israélo-syrien. Avant ce travail de médiation, on évoquait fort souvent une possible “guerre pour l’eau” entre les deux pays redevenus amis, parce que la Turquie contrôlait le cours supérieur de l’Euphrate.

Quant à la “profondeur stratégique”, elle constitue le pendant en politique étrangère de l’islamisation de la Turquie en politique intérieure. La notion de “profondeur stratégique” et l’islamisation constituent deux modes de rupture avec le kémalisme, idéologie déterminante de la Turquie depuis la fondation de la République en 1923. Heinz Kramer, politologue oeuvrant à la “Stiftung Wissenschaft und Politik” de Berlin (“Fondation Science et Politique”), évoque, dans l’une de ses études, la rupture fondamentale que cette idée de “profondeur stratégique” apporte dans la praxis turque en politique étrangère: “La domination mentale exercée jusqu’ici par l’exclusivité de l’orientation pro-occidentale, considérée comme l’un des piliers de l’identité républicaine en gestation, se trouve relativisée. La Turquie, dans cette perspective, ne se perçoit plus comme un Etat en marge du système européen mais comme le centre d’une ‘région spécifique’, pour l’ordre de laquelle Ankara doit assumer une responsabilité ou une co-responsabilité politique”.

Conséquence de cette nouvelle vision en politique étrangère et de cette nouvelle conscience politique: la Turquie essaye de se positionner comme un acteur plus déterminant qu’un simple pays assurant le transport d’énergie. En juillet 2009, la Turquie a signé l’accord sanctionnant la construction du gazoduc Nabucco qui devra acheminer le gaz naturel de la région caspienne ou de l’Iran vers l’Europe centrale: cette signature est un véritable coup de maître politique. Morton Abramowitz et Henri J. Barkey, tous deux actifs pour les “boîtes à penser” américaines, écrivent à ce propos dans la très influente revue “Foreign Affairs”: “Le gazoduc Nabucco sera-t-il un jour construit? On demeure dans l’incertitude. Tant le coût de son installation que la question de savoir s’il y aura suffisamment de gaz naturel à disposition pour le remplir, sont des éléments qui restent à élucider (...). Mais le projet de gazoduc a d’ores et déjà augmenté l’influence de la Turquie aux yeux des pays de l’UE, animés par une perpétuelle fringale d’énergie”. Avec la clef énergétique, la Turquie pourrait bien s’ouvrir la porte de l’UE.

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°25-26/2010; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

jeudi, 17 juin 2010

Il vizio oscuro dell'Occidente

Massimo Fini     

[28 apr 2003] :

Il vizio oscuro dell’Occidente

Ex: http://www2.unicatt.it/unicatt/

 

onclesam575757.jpgE se l’11 settembre fosse colpa nostra? Non, come farneticato da qualche fanatico in preda a convulsioni anti-americane, che siano stati gli statunitensi ad abbattere le Twin Towers, magari con la complicità degli ebrei, in una riedizione un po’ stantia del complotto dei «Savi di Sion». No, in altro senso. E cioè nel senso che l’11 settembre sarebbe la «conseguenza logica, e prevedibile, della pretesa dell’Occidente di ridurre a sé l’intero esistente».

 

È quello che cerca di dimostrare Massimo Fini nel suo pamphlet «Il vizio oscuro dell’Occidente», dove sferra un attacco violento alla nostra certezza, manifesta, inconscia, o ipocriticamente celata nel politically correct, di appartenere ad una civiltà superiore. L’accusa all’Occidente è di totalitarismo, di reductio ad unum, ossia di voler cancellare tutto ciò che è «altro da sé», fagocitandolo. «All’occupazione dell’intero pianeta», afferma Fini, avevano già aspirato in passato «il cristianesimo, il colonialismo classico, il marxismo-leninismo». Oggi il tentativo sta riuscendo al modello di sviluppo economico e industriale egemone, di cui gli Stati Uniti incarnano l’essenza ed esprimono la potenza.

 

La matrice di questo impulso totalitario è la convinzione, sincera ma nefasta, di vivere nel «migliore dei mondi possibili», e quindi di «credersi il Bene» senza rendersi conto «di operare eternamente il Male». Perché nel mondo della democrazia, delle libertà, del benessere materiale, ossia nel presunto migliore dei mondi possibili, il luccichio è illusorio. Sentiamo, secondo Fini, la frustrazione «di non essere né felici né sereni, ma divorati dall’angoscia, dalla nevrosi, dalla depressione, dall’anonimia, in misura maggiore del più disperato abitante di un tugurio terzomondista». La causa va ricercata in un sistema incardinato sull’insoddisfazione, sulla competizione e l’invidia, in cui l’uomo è costantemente lanciato verso obiettivi, raggiunti i quali se ne daranno di ulteriori, in una corsa senza fine. Solo in questo modo il sistema economico può mantenere quel dinamismo indispensabile alla sua conservazione. «Come al cinodromo i cani levrieri…inseguono la lepre di stoffa che, per definizione, non possono raggiungere», così l’uomo insegue la felicità, parola senza corrispettivo reale: l’appagamento e l’armonia interiore sono preclusi.

 

All’origine di questo andamento schizofrenico la centralità, nel sistema di valori occidentale, dell’economia rispetto ai legami affettivi, emotivi, esistenziali. Il prodotto di questa civiltà è il «Consumatore», un essere vivente omologato e privato di un’identità autentica, terminale acefalo di tutto quello che il mercato propina, narcotizzato grazie all’induzione di nuovi bisogni.

 

Questa è per Fini la civiltà «made in West» che, in forza della nostra potenza militare ed economica, andiamo esportando nel mondo, nel tentativo di assimilarlo al nostro sistema di valori, al «migliore dei mondi possibili». Con le buone o le cattive, per ragioni che di volta in volta sono economiche o etiche o umanitarie, ma sempre, alla fine, perché non tolleriamo la diversità. E quale arma, si chiede Fini, è opponibile all’assoluta egemonia militare occidentale (o meglio statunitense), ai tribunali speciali, costituiti ad hoc dai vincitori per processare gli sconfitti, ad un «modello economico pervasivo», il sistema capitalista, in continua espansione? «Di fronte ad un blocco di potere di questa portata, inattaccabile direttamente e frontalmente, quale altra risposta se non il terrorismo, per chi voglia combatterlo con le armi?». Perché quando tale modello avrà inglobato il mondo intero, lo scontro si sposterà al suo interno: «fra i fautori della modernità e le folle deluse, frustrate ed esasperate, che avranno smesso di crederci».

 

Bastano poco più di sessanta pagine a Fini per fustigare con gelida lucidità l’Occidente, i suoi valori e il suo attualizzarsi. Illuminante, eccessivo, provocatorio, inquinato da un relativismo livellante, «Il vizio oscuro dell’Occidente», comunque lo si voglia considerare, è un libricino sferzante e acuto che si può condividere o meno, ma che ha il pregio di non lasciare indifferenti e attizzare il dibattito. Stimolando quel «pensiero che pensi la modernità», la cui assenza è per Fini una delle carenze più gravi del nostro tempo.

Paolo Algisi

mardi, 15 juin 2010

Lancinante rupture avec l'Occident

Lancinante rupture avec l'occident

20090103_DNA017062.jpgUn agréable périple familial dans notre cher Hexagone, — on n'écrit plus la Doulce France, — m'a permis de suivre, l'actualité grâce aux quotidiens régionaux. Et durant la semaine écoulée, ils évoquaient les péripéties consécutives à la participation de quelques Français à l'opération turque de solidarité avec Gaza.

Le mercredi 2 juin, on pouvait lire et partager l'inquiétude du grand quotidien de Touraine "la Nouvelle République". Gros titre en première page : "Gaza : sans nouvelles des huit Français".

Le vendredi 4 juin "La République des Pyrénées" donnait quelques rassurantes précisions : "Six Français de retour". Tout est bien qui finit bien. Il s'agit de cinq membres du "Comité de bienfaisance et de secours aux Palestiniens" (CBSP) : Salah Berbagui, Mounia Cherif et Miloud Zenasni débarqués à Roissy vers 16 h 45 d'un vol de la compagnie Turkish Airlines, en provenance d'Istanbul puis de Ahmed Oumimoun et Mouloud Bouzidi. Le sixième, Thomas Sommer-Houdeville appartient à la "Campagne civile internationale pour la protection du peuple palestinien" (CCIPPP).

Enfin le samedi 5 juin, le grand quotidien de Marseille "La Provence" (1) saluait le retour chez lui et les déclarations de l'enfant du pays Miloud Zenasni. Notons cependant que ces nouvelles, les seules supposées informer le lecteur de ce qui se passe à l'Etranger apparaissent seulement en page 32 rubrique "Méditerranée-Monde", l'Europe n'existant pas.

Ne nous attardons pas aux évaluations d'origine américaine à propos du Comité de bienfaisance et de secours aux Palestiniens (CBSP). La CIA ose prétendre depuis août 2003 que cette organisation doit être considérée comme "entité terroriste" car elle "apporte son soutien au Hamas et forme son réseau de collecte de fonds en Europe".

En même temps, et comme je m'y attendais un peu, ma modeste chronique du 2 juin a déclenché un certain nombre de réactions . Or, elles répondent à ce que je n'ai pas écrit. Comme elles se montrent outrancières, se veulent insultantes et/ou tombent sous le coup de la loi (2), et puisque, par ailleurs, elles n'apportent aucune information je ne les installe pas sur ce site.

Je ne cherche même pas à croiser le fer, renvoyant simplement mes lecteurs habituels à ce que cette chronique exprime effectivement.

Et je me contenterais aujourd'hui de préciser certains contours de mon propos personnel, soulignant d'abord quelques réalités.

Les deux questions les plus importantes à mes yeux, dans cette affaire, ne résultent ni des gens qui hurlent avec les loups, ce que je m'efforce de ne jamais faire, ni de ceux qui se disent "pour" avec la peau des autres mais des faits objectifs nouveaux ou confirmés.

Première constatation : la politique extérieure européenne n'existe toujours pas. Lady Ashton reste strictement inconsistante et on peut croire qu'elle a été choisie pour remplir cette mission, qu'elle accepte. Chacun de nos pays persiste dans un repli matérialiste sur lui-même, faussement confortable. On refuse de voir les dangers qui s'accumulent dans le monde, qui justifieraient le renforcement des moyens et de l'esprit de défense. Nos soldats sont engagés en Afghanistan dans une guerre. Les dirigeants et commentateurs parisiens agréés paraissent s'en moquer. L'héroïsme, le devoir, la croisade n'appartiennent pas à leur registre. Ils évoquent seulement les morts et les blessés, comme s'il s'agissait de statistiques des accidents de la route. Cela dit tout.

Deuxième fait majeur : la rupture de l'alliance turco israélienne.

Il ne s'agit ni de louer ici ni de stigmatiser quiconque. Observons.

Contrairement ce que deux ou trois correspondants semblent croire, je ne cherche d'ailleurs à développer aucun sentiment particulièrement hostile à la Turquie. Militant d'abord pour l'exactitude, je me contente de considérer que l'Europe ne saurait intégrer cette nation dans le projet que représente au départ son "Union" (3). Et d'autre part je préfère la voir s'occuper du Proche Orient que du sud est européen.

Je souligne d'autre part qu'il est un peu extravagant, quand même, qu'à la fois, ce pays occupe illégalement un territoire européen à Chypre, qu'il refuse de reconnaître le génocide arménien, et prétende, en même temps, s'ériger en défenseur du droit des peuples.

Son alliance stratégique avec Israël date des années 1950 et non des années 1990 comme on le lit souvent. À Ankara, les équipes actuellement au pouvoir semblent, depuis 2003, souhaiter la rupture entre les deux vieux partenaires et désirer renforcer leur position aux côtés du monde arabe. La tradition kémaliste cherchait à s'en séparer radicalement. Cela révolutionne donc à terme toute la région. Rappelons que jusqu'ici l'OTAN tenait la Turquie pour son très précieux, loyal et fidèle allié. Les Israéliens se trouveront dans l'obligation de changer, eux aussi, leurs orientations. Ils ne pourront plus faire, comme par le passé, l'apologie systématique outrancière de leur ancien ami désormais infidèle. Sans aller jusqu'à une repentance publique, contraire à leur esprit traditionnel de "peuple à la nuque raide", ils devront peut-être revenir sur certains paradigmes.

Doit-on sérieusement se féliciter que la Turquie aurait "retrouvé une âme", comme le dit un de mes contradicteurs anonymes, plus logique que d'autres ?

Quand d'ailleurs l'aurait-elle perdue ?

Ce qui me passionnerait ce serait de voir l'Europe retrouver son âme !

Et sans recourir à de tels hyperbolismes il s'agit de savoir, pour les citoyens et les contribuables français, à quoi tend concrètement la politique de la France. Lorsque l'on constate les soutiens matériels, les subventions et les encouragements que la république accorde au développement des communautarismes et de l'islamisme sur le territoire de l'Hexagone on se doute bien qu'il ne s'agit pas pour elle de les combattre vraiment sur la scène internationale.

Seuls et sans moyens bien considérables des policiers intelligents et courageux mènent une lutte acharnée et efficace, quoique discrète, contre le terrorisme : combien de temps les "braves gens" dormiront-ils en paix grâce à eux ?

Certes on peut prends acte de la logique idéaliste de ceux qui "voudraient que le monde vive dans la paix et la justice" : on la comprend, mais on ne doit aucunement succomber à ce doux rêve messianique. La paix ne se définit raisonnablement que par l'intervalle séparant deux conflits. Votre serviteur souhaite seulement que l'armée de son pays puisse repousser "les Barbares qui veulent la guerre". J'admire beaucoup, j'ose l'avouer, la pacifique nation suisse de se préparer constamment à affronter des conflits dont, par là même, elle écarte l'hypothèse. Ces Gaulois ont bien retenu la devise de l'Empire romain : "si tu veux la paix, prépare-toi à la guerre".
JG Malliarakis

Apostilles
  1. Ce titre est lui-même issu de l'absorption du "Méridional la France", bien connu des amis de l'Algérie française, par le "Provençal" de Gaston Deferre.
  2. Pour situer la hauteur du débat, je note qu'un correspondant anonyme osant lui-même se présenter comme "Grec", me targue d'être "un juif de Salonique", et non un "Grec orthodoxe". Je dois dire que le trait m'amuse. Il appelle de ma part les précisions suivantes. Les Thessaloniciens israélites portent le plus souvent des noms d'apparence espagnole (Daninos, Moreno, etc.). Ils parlaient autrefois le judéo-espagnol ou ladino. Ils sont considérés comme les descendants des Juifs expulsés d'Espagne en 1492. Leurs ancêtres ont été accueillis et protégés par les Sultans. Aucun Grec n'imaginerait que mon patronyme, typiquement crétois, puisse se rattacher à cette histoire. D'ailleurs je constate que les organismes de bienfaisance juifs qui utilisent volontiers des fichiers onomastiques ne me sollicitent pas. Enfin, quoique partageant chaque année la joie pascale et recevant les vœux du métropolite grec orthodoxe de Paris, je ne ressortis pas de sa juridiction ecclésiastique, appartenant à la "communauté orthodoxe française de la Sainte Trinité" au sein de laquelle cohabitent pacifiquement toutes les opinions politiques françaises.
  3. C'est le propos de mon livre sur "La Question turque et l'Europe"
Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique
sur le site de
Lumière 101

jeudi, 10 juin 2010

La Turquie s'éloigne de l'Occident, comme le reste du monde

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La Turquie s’éloigne de l’Occident, comme le reste du monde

La Turquie et toutes les nations émergentes, rendues confiantes par leurs succès économiques, s’émancipent d’une tutelle occidentale moralisatrice de plus en plus mal supportée, écrit l’éditorialiste Semih Idiz, dans le quotidien turc Hürriyet.

 

Le best-seller de Fareed Zakaria titré « Le monde post-américain et l’essor du reste du monde » est une lecture fascinante, un livre prémonitoire. La question de l’Iran s’inscrit parfaitement dans cette perspective. Le problème va bien au delà des actuelles ambitions nucléaires de Téhéran. Cette affaire est en train de se transformer en une impasse qui dessine une nouvelle division du monde.

Cette division peut être caractérisée ainsi : « L’Occident et le Reste du monde », pour reprendre l’expression de Zakaria. Le développement de pays comme l’Inde, la Chine, le Brésil et la Russie – en d’autres termes « le Reste » – dessine un nouveau paysage mondial qui ne répond pas aux vœux de l’Occident.

La Turquie, qui connait également une croissance rapide, montre des tendances plus en plus marquées en direction du « Reste », et moins vers « l’Occident ». Ceci est interprété comme par certains, en Europe et aux États-Unis, comme une « islamisation de la politique étrangère turque », mais cette évolution pointe vers quelque chose de bien plus significatif.

L’émergence de ce nouvel ordre mondial ne constitue bien évidemment pas une surprise. Il était prévu par ceux qui sont suffisamment compétents pour en déceler les signes avant-coureurs. Nombre d’historiens occidentaux, d’économistes, et des chercheurs en sciences humaines ont décrit ce processus depuis un certain temps.

Quelques noms viennent immédiatement à l’esprit, notamment ceux de Walter Laqueur (« Les derniers jours de l’Europe : une épitaphe pour le vieux continent »), Joseph E. Stiglitz (« La Grande Désillusion »), et Zakaria, mentionné ci-dessus.

Même un Timothy Garton Ash, apparemment optimiste dans « Monde Libre : l’Amérique, l’Europe et le futur inattendu de l’Occident », décrit ce qui se adviendra si le lien de transatlantique n’est pas renforcé dans toutes ses dimensions, ce qui est bien sûr plus facile à dire qu’à faire, comme l’admet l’auteur.

Dans le même temps, l’anti-occidentalisme en général et particulièrement l’anti-américanisme deviennent de plus en plus palpable chez les Turcs. Rester partisan de l’orientation occidentale de la Turquie dans ce climat devient un défi pour une élite minoritaire. Mais l’éloignement de la Turquie des États-Unis et de l’Europe n’est pas quelque chose qui inquiète les Turcs dans leur majorité.

Cette attitude à l’égard de l’Occident n’est à l’évidence pas spécifique aux Turcs. De la Russie à l’Inde, de la Chine à l’Afrique, on assiste à une réaction croissante et forte contre l’Occident. Certains parlent d’un retour de bâton « post-colonial. »

Roberto Fao, un doctorant à l’Université d’Harvard qui a écrit pour le Financial Times, a travaillé à la Banque Mondiale et été consultant pour des projets gouvernementaux, propose des vues intéressantes sur la question.

Dans une tribune publiée par EUobserver.com le 25 mai, M. Fao affirme que les Européens doivent aujourd’hui « se demander pourquoi ils provoquent si peu de respect dans le monde. » Il cite Kishore Mahbubani, le doyen de la Lee Kwan Yew School of International Affairs de Singapour, qui soutient que l’Europe ne comprend pas à « quel point elle devient peu pertinente pour le reste du monde. »

M. Fao rappelle également que Richard Haas, le président du Council on Foreign Relations, a déclaré publiquement « adieu à l’Europe en tant que puissance de haut rang. » M. Fao ne croit cependant pas que l’on puisse négliger cette situation, en n’y voyant qu’une simple « jalousie » de la part des non-européens.

« Au contraire », écrit-il, « j’y discerne une vérité plus dérangeante. Les pays du monde entier ne supportent plus depuis longtemps l’ingérence et les leçons de morale de l’Occident, et ont acquis assez de confiance pour parler haut face à une Europe dont l’influence mondiale n’est plus considérée comme assurée ».

Dans son livre, Zakaria parle de la même « confiance » que des nations ont gagnée face aux États-Unis, avec quelques raisons pour ce faire.

« Les plus grandes tours, les plus grands barrages, les films à succès, et les téléphones mobiles les plus sophistiqués sont tous réalisés désormais à l’extérieur de l’Europe et les États-Unis », note-t-il, en ajoutant que « les pays qui manquaient par le passé de confiance politique et de fierté nationale les acquièrent. »

A la suite du monde bipolaire, le monde unipolaire semble lui aussi en train de s’effondrer, donnant naissance à un monde multipolaire où les possibilités de « l’Occident » sont en déclin, tandis que celles du « Reste » augmentent progressivement.

De fait, si l’Iran doit bien sûr être empêché d’obtenir une arme nucléaire – tout comme Israël et tous les autres devraient être obligés de mettre fin à leurs programmes et d’abandonner leurs stocks d’armes nucléaires existants – l’enjeu va bien au-delà.

Il s’agit d’un nouvel ordre qui va exiger des réponses très différentes à ce que nous connaissons aujourd’hui, si l’on veut que les problèmes brûlants ne mènent pas à des affrontements dont personne ne sortira gagnant au bout du compte.

Article original en anglais : Hürriyet (Turquie)

Traduction française : ContreInfo

mardi, 16 février 2010

Slavoj Zizek: le philosophe le plus dangereux d'Occident

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Slavoj Zizek : le philosophe le plus dangereux d'Occident

Ex: http://unitepopulaire.org/

« Slavoj Zizek – philosophe issu de la minuscule Slovénie, dont la renommée sulfureuse est devenue mondiale : le bandeau entourant son dernier le présente comme “le philosophe le plus dangereux d’Occident” – fait paraître ces jours-ci un essai qui vise à requinquer l’idée communiste. Après la tragédie, la farce ! est un livre hirsute, aux accents prophétiques : dressant le bilan d’un capitalisme libéral rongé par des contradictions insurmontables, il prédit même que l’avenir devrait se jouer entre le socialisme et le communisme. Féru de psychanalyse lacanienne, le philosophe résume son programme par une formule qui pastiche Marx : Dans nos sociétés, les gauches critiques n’ont fait jusqu’à présent que souiller ceux qui sont au pouvoir ; ce qui importe, c’est de les castrer... Slavoj Zizek résiste toujours mal au plaisir d’une bonne provocation.

Son succès doit sans doute beaucoup à ce tempérament. On se délecte du personnage mal peigné, agité, tonitruant, zézayant, qui plonge la philosophie dans un bain d’extravagance balkanique. Le lire est un exercice parfois éprouvant, en particulier quand il brasse le jargon lacanien. Sa désinvolture intellectuelle peut agacer. Ses concepts restent souvent fumeux (comme cette idée communiste qu’il manipule sans vraiment la définir). Mais on sort de ses livres intrigué, dérangé, stimulé et récompensé par quelques passages d’une grande drôlerie : Slavoj Zizek est un marxiste de tendance Groucho.

Aux Etats-Unis, ses conférences sont prises d’assaut. A Buenos Aires, près de 2500 personnes se sont massées pour l’écouter philosopher en plein air. A Londres, Tokyo ou New Delhi, sa réputation n’est plus à faire. La France, en revanche, s’est longtemps montrée plus réservée sur ce philosophe sorti de nulle part.

A cet égard, une page est en train de se tourner. La récente venue de Slavoj Zizek à Paris aura été l’occasion d’une véritable intronisation. […] Le Nouvel Observateur a décidé d’organiser le match au sommet en opposant l’énergumène slovène au champion hexagonal, Bernard-Henri Lévy. […] “Vous savez, glisse Zizek, quel est le problème de Bernard-Henri Lévy ? Cela fait des années qu’il essaie de pénétrer le marché américain, avec le soutien de CNN, mais ça ne marche pas! Pour lui, c’est un mystère: comment se fait-il qu’Alain Badiou, le philosophe le plus radical de la gauche européenne, réussisse mieux que lui aux Etats-Unis ? Moi, j’y vois plutôt un bon signe. Cela montre qu’on ne doit pas sous-estimer intellectuellement les Etats-Unis !” »

 

L’Hebdo, 21 janvier 2010

Un  Esprit  Libre :  Slavoj  Zizek

00:15 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, slovénie, occident | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 08 février 2010

Ondergang van het Avondland - Het decadentiebegrip bij Spengler en Evola

ONDERGANG VAN HET AVONDLAND

HET DECADENTIEBEGRIP BIJ SPENGLER EN EVOLA

door Peter LOGGHE

Ex: http://www.peterlogghe.be/

spenglerqqqqqqq.jpgDecadentie, verval van beschaving, het houdt de mensheid – en in elk geval het bewuste, het denkende deel ervan – al eeuwen in de ban. Het klinkt banaal, maar net als mensen hebben culturen, beschavingen geen eeuwigheidsduur en voelt iedereen bijna met de elleboog aan wanneer wij ons in een opgaande fase of in een neergaande fase van onze beschaving bevinden. Decadentie is een niet eenduidig te vatten fenomeen, er werden ganse boekenkasten over volgeschreven : niet alleen zijn er verschillende vormen van decadentie en verval, economisch, cultureel, demografisch, militair en tenslotte politiek, maar de verschillende vormen kunnen elkaar versterken of de invloed van deze of gene vorm afzwakken. Twee vragen houden geïnteresseerden bezig :
- Hoe ontstaat decadentie ? Wat is decadentie en waardoor ontstaat ze ?
- Zijn er wetmatigheden werkzaam ? Verloopt decadentie overal en altijd volgens een bepaald stramien en kunnen we m.a.w. het verloop, de uitkomst van de decadentie voorspellen ? Kunnen wij het proces positief beïnvloeden ?



1. OVER DE ACTUALITEIT VAN HET DENKEN OVER DECADENTIE


Niet alleen historici, cultuurfilosofen en sociologen hadden en hebben oog voor deze vragen, Evola, Spengler en Nietzsche zijn namen die in dit verband automatisch in het oog springen, maar ook natuurwetenschappers als Konrad Lorenz of prof. Eibl-Eibesfeldt laten zich in dit verband niet onbetuigd. Zo noteerde Karl Heinz Weissmann in TeKoS 113 : “Lorenz liet zich niet afschrikken en duidde de eigenlijke ondermijning van elk organisme aan als “decadentie”. Onder decadentie verstond hij als bioloog het “verstoren van de totaliteit van het systeem” (…) “ (1). Maar wij kunnen nog een stap verder zetten. Ook het fenomenale boek van J. J. Tolkien, In de Ban van de Ring – met de meesterlijke verfilming – kan zonder enig probleem in de literatuur over decadentie worden ondergebracht. Dreiging van buiten (Sauron !) wordt gecombineerd met interne zwakte (Theoden in Rohan, tot hij door Gandalf wordt geholpen, en Denethor in Gondor).

Over decadentie is eigenlijk in veel culturen nagedacht, de meeste traditionele maatschappijen hadden er zelfs mythes over – we komen er nog op terug. De eerste moderne denker over decadentie, meent althans Gerd Klaus Kaltenbrunner (2), was Niccolo Machiavelli (gestorven in 1527). Hij noemt hem zelfs een groot theoreticus van de decadentie. Machiavelli studeerde vlijtig op de antieke geschiedenisschrijvers en als diplomaat en politicus in het politiek zeer woelige en verdeelde Italië – de periode van De Medicis - deed hij ervaringen op, die hij combineerde met de conclusies die hij uit zijn studies trok. Hij ontwikkelde een theorie over de oorzaken van het politieke verval en de voorwaarden voor politieke grootheid, vernieuwing en regeneratie, heropstanding zeg maar. Hij droeg zijn Discorsi op aan die jongeren van zijn tijd die het verval afwezen en een nieuwe virtu voorbereidden. De necessità, waarover Machiavelli het heeft, staat los van elk determinisme en daarom kan Niccolo Machiavelli eigenlijk in geen enkel opzicht worden beschouwd als een pessimist. Want het is steeds mogelijk – houdt Machiavelli ons voor – met scheppingskracht het verval tegen te houden. En die kringen die het algemeen belang kunnen terugbrengen tot haar kern, houden ook het welzijn van de gemeenschap het best in stand. Die staten, die institutionele voorzorgsmaatregelen tot zelf-vernieuwing afwijzen, schrijft Machiavelli, zijn het best toegerust en hebben veruit de beste toekomstperspectieven, want het middel om zich te hernieuwen, bestaat erin terug te keren tot de eigen oorsprong. Want alle begin moet iets goeds hebben ! Het moet dus mogelijk zijn, schrijft een historicus-filosoof in de 16e eeuw, om met oorspronkelijke inzichten vanuit dit begin opnieuw te starten.

Op zich een optimistische ingesteldheid, misschien kenmerkend voor de renaissance-mens van de late Middeleeuwen. Latere cultuurfilosofen zullen opnieuw aanknopen bij de cyclische theorieën, en ipso facto het geheel eerder pessimistisch inkleuren.

Is er iets actueler te vinden dan het fenomeen decadentie ? Is er een prangender vraag dan : houdt Europa het vol ? Worden wij niet onder de voet gelopen ? Hoe een economie draaiende houden met een demografische ontwikkeling zoals in gans Europa ?

De laatste decennia toonden ons een eigenaardige revival – een eigenaardig woord in dit verband – van het nadenken over decadentie. Een nieuwe oogst aan filosofen en theorieën over ondergang. Er was niet alleen Fukuyama - het einde van de geschiedenis, u weet wel – of Samuel Huntington met Botsende beschavingen (3), wij moeten het niet eens meer zo ver zoeken om de relevantie en de toepasbaarheid van het begrip decacentie en de cultuurtheorieën vast te stellen. Concreet : het opiniestuk van filosoof Paul Cliteur in De Standaard van 14 en 15 februari 2004, met als titel Het decadentie cultuurrelativisme. Het artikel mag gekoppeld aan het recente boek van dezelfde Paul Cliteur, Tegen de decadentie (4). Zonder de stellingen van de heer Cliteur aan een kritisch onderzoek te onderwerpen, wil ik er gewoon even op wijzen dat de filosoof een rechte lijn trekt tussen het antieke Griekenland en Europa. Hij legt ons de volgende redenering voor : Een beschaving, die open staat voor àlle tradities, die alle waarden de moeite waard vindt, is decadent, is een beschaving die niet meer in zichzelf gelooft, is voorbestemd om ten onder te gaan.

Wij blijven rond de centrale vraag draaien : wat is decadentie ? Is ze onvermijdelijk ? En is het stellen van de vraag of onze beschaving decadent is geworden, niet onmiddellijk het beste bewijs dat wij inderdaad decadent zijn ?
Toevallig een artikel in Junge Freiheit voor ogen, Die heroische Existenz im Geistigen (5).
Daarin stelt de reeds geciteerde Weissmann de filosoof-socioloog Arnold Gehlen (1904-1976) aan het publiek voor, de man die zich vooral bezighield met het bestuderen en het koel analyseren van “het verval”. Wanneer begint het proces van verval in een gebouw, dat mensen hebben opgetrokken en dat ze in een relatief korte tijdspanne zien ontbinden ? Gehlen is dé anti-romanticus, en wie probeert zijn conservatisme te verklaren vanuit een nostalgische blik op het Wilhelminische Duitsland bijvoorbeeld, wens ik veel geluk toe. Arnold Gehlen verwierp het streven naar voormoderne toestanden, dit leek hem totaal nutteloos en zinloos, zonder doel. De fase van de sociale ordening zijn we endgültig voorbij, schrijft de Duitse auteur kort na de Tweede Wereldoorlog, die tijden komen niet meer terug. Wij bevinden ons in het tijdperk van Mensch und Technik, culturele vormen verstenen, grote geestelijke opwellingen zijn niet meer te verwachten. Pessimisme pur sang ? Later zou Gehlen hier en daar wel correcties aanbrengen en zou hij proberen de mens weer iets centraler te zetten en opnieuw het statuut van “natuurlijk wezen” meegeven. Maar hij bleef een pessimist. Hij ziet uiteindelijk maar twee mogelijke houdingen : ofwel, wat hij omschreef als de nihilistische houding, het grote Opgeven, het meedrijven met de stroom, “het zal mijn tijd wel doen” – ofwel de heroïsche houding, bereid zijn dat oorspronkelijke, dat aparte te realiseren, maar in het besef dat de wereld waarschijnlijk toch verloren is.


Even terugkomen op Paul Cliteur, die de superioriteit van de Westerse moderne wereld dik in de verf zet. De betreurde Julien Freund, Frans socioloog, had het in zijn bijdrage voor één van de dossiers “H” van de uitgeverij L’Age d’Homme (6) over de decadentietheorie van J. Evola. En in tegenstelling tot diegenen die de superioriteit van de moderne wereld poneren, beklemtoonde de Italiaanse filosoof juist “de decadente natuur van dezelfde moderne wereld”, wat ook betekent dat ze gedoemd is om te verdwijnen.

Deze inleiding besluiten ? Het fenomeen decadentie heeft zowat iedereen beziggehouden, wetenschappers van alle slag en soort, politieke denkers, filosofen, schrijvers van alle politieke gezindten en overtuigingen. Elkeen probeerde het begrip in te passen in het eigen denk- en waardensysteem. Zelfs marxisten als Lukacs – het marxisme is toch eerder een liniair gerichte filosofie ? – vonden het thema zo interessant dat ze erover publiceerden. Maar decadentie is een thema bij uitstek van rechts, van het conservatieve kamp. Anderen leggen het conservatieve kamp graag een verkrampte houding t.o.v. decadentie in de mond. Maar : “Lorenz hield het decadentieproces echter niet voor onvermijdelijk. En rechts neigt er slechts uitzonderlijk naar om de idee van een involutie aan te houden, de idee dus van een onvermijdelijke neergang, hoe sceptisch hij voor de rest ook staat tegenover het begrip “vooruitgang”. Normaal gezien vindt men (in het conservatieve kamp) voorstanders van de idee van een wisselend spel van opgang en verval, van een alternerend proces, waarin decadentie en hergeboorte elkaar opvolgen.” (7)

Het kan wellicht nuttig zijn de twee belangrijkste epigonen van het conservatief denken over decadentie, tevens de filosofen met de meest uitgesproken – én tegelijk de meest omstreden - mening hierover, aan u voor te stellen. Het is de bedoeling van deze bijdrage om de aandacht te richten op het begrip decadentie bij de Duitse filosoof Oswald Spengler, auteur van het veel geciteerde maar minder gelezen Untergang des Abendlandes (8) verschenen in 1923, en bij Julius Evola, de Italiaanse filosoof en auteur van o.a. Rivolta contro il mondo moderno (9), verschenen in 1934.



2. OSWALD SPENGLER – met Duitse Gründlichkeit



Belangrijkste werken van Oswald Spengler :

1918 Untergang des Abenlandes, Band I
1920 Preussentum und Sozialismus
1921 Pessimismus
1922-1923 Untergang des Abendlandes, Band I + II
1924 Neubau des deutschen Reiches
1924 Politische Pflichten der deutschen Jugend
1931 Der Mensch und die Technik
1932 Politische Schriften
1933 Jahre der Entscheidung

Postume uitgave bezorgd door Hildegard Kornhardt
1937 Reden und Aufsätzen
1941 Gedanken

Postume uitgaven bezorgd door Anton Mirko Koktanek
1963 Briefe 1913-1936
1965 Urfragen
1966 Frühzeit der Weltgeschichte

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Op het leven zelf van Oswald Spengler gaan wij niet uitgebreid in, maar geïnteresseerde lezers willen wij graag doorverwijzen naar de studie van Frits Boterman (10). Een zo uitgebreide en goed gedocumenteerde studie dat wij in de loop van deze bijdrage nog graag wat zullen verwijzen naar de bevindingen van de heer Boterman.

Oswald Spengler werd geboren in 1880 en stierf in 1936, drie jaar na de machtsovername door Hitler, en drie jaar voor het begin van de Tweede Wereldoorlog. Boterman beschrijft Spengler als een man die zowel thuis hoort in de 19e eeuw – romantisch, visionair en met een zwak voor metafysici – als in de 20e eeuw – met zijn nuchterheid, diagnosticerend, futurologisch, en een groot zwak voor techniek. Hij erfde van zijn moeder de gevoelige geest, zijn sterk geworteld pessimisme en een bepaald künstlerisches aanvoelen. Spengler zelf zag zich graag als een dromer, een dichter en een visionair. Hij wilde de geschiedenis niet wetenschappelijk aanpakken, omdat de geschiedenis daarmee te kort zou worden gedaan. Neen : “Geschichte wissenschaftlich behandeln zu wollen, ist im letzten Grunde immer etwas Widerspruchvolles. Natur soll man wissenschaftlich behandeln, über Geschichte soll man dichten” (11). Maar Boterman ziet tegelijkertijd de gladschedelige beursmakelaar, met harde ogen, totaal illusieloos, vol cynisme, het gezicht van de andere Spengler, die tot politieke daden bereid was, die Mussolini vereerde, en de Weimardemocratie verafschuwde. Hij zag in de autoritaire staat de voorbode van een nieuw, imperiaal caesarisme, misschien één van de laatste overlevingsfases van de Avondlandse beschaving.



Het geschiedenisbeeld van Oswald Spengler

In wezen is Oswald Spengler dus een introvert, gevoelig persoon, een kunstenaar, een romantische estheet. En reeds zeer vroeg kwam hij tot de bevinding dat de lijnvormige of dialectische vooruitgangsidee op een leugen berustte, berustte op wishfull thinking eerder dan op de realiteit. Spengler hield het bij het bestaan van een aantal soevereine culturen, waarvan elk apart haar eigen leven, wil, voelen en lotsbestemming had. En deze culturen, die met de kracht van de oerwereld in een bepaald gebied ontstaan, zijn eigenlijk het best te vergelijken met plantaardige organismen, die opbloeien, rijpen, verwelken en tenslotte afsterven. Dit biologisme, dat ook in andere wetenschapstakken zijn invloed liet gelden, werd tevens één van de aanvalspunten van tegenstanders van Spengler : waarom zouden culturen, die niets plantaardigs hebben, een ontwikkeling doormaken als planten ?

Spengler onderscheidde 8 culturen – organismen :

De Egyptische (met inbegrip van de Kretenzische en de Minoïsche)
De Babylonische cultuur
De Indische cultuur
De Chinese cultuur
De Grieks-Romeinse cultuur
De Arabische cultuur
De Oud-Amerikaanse, Mexicaanse cultuur
De Avondlandse cultuur

In het Rusland van Dostojevski’s figuren zal Spengler de kern zien van een nieuwe cultuur, in zoverre Rusland erin slaagt zich te ontdoen van het uit het Westen geïmporteerde marxisme.

Elke cultuur, meent Oswald Spengler, is een in zich gesloten gansheid, een vensterloze monade, waarin alle niveau’s morfologisch samenhangen. Boterman schrijft dat ze de uitdrukking is van een onvervangbare ziel, die elke cultuur belichaamt. Zelfs de meest prozaïsche uitdrukkingen, instellingen, etc., hebben ook steeds een symbolische waarde. Ze zijn de getuigen, samen met de mythes, de religies, kunst en filosofie, van een supra-individueel levensgevoel, een fundamentele houding ook t.o.v. tijd en ruimte, verleden en toekomst. Binnen de Avondlandse cultuur hebben luidsprekers, een cheque, de dubbele boekhouding geen geringere symbolische waarde dan de gotische dom, het contrapunt in de muziek.

De cultuur van Griekenland en Rome omschrijft de auteur als apollinisch : ze is gericht op het heden, is a-historisch, en valt voor het genie van de plastiek (beeldhouwwerk bvb.), ze is somatisch. De Arabische cultuur, waar Spengler ook de Perzische, de vroegchristelijke en de Byzantijnse wereld toe rekent, krijgt het etiket magisch mee : haar oersymbool is de grot, en in de centrale koepelbouw vindt het grotgevoel haar hoogste uitdrukking, net als in de apocalystiek en de alchemie, en de goudgrond van de Byzantijnse mozaïeken. De oud-Egyptische cultuur is “een incarnatie van de zorg”, en die grondhouding vindt men terug in de bewateringsaanleg, de beambtenhiërarchie en de mummiecultus, het hiëroglyfenschrift, en de keuze voor basalt en graniet voor de beeldhouwwerken. De auteur omschrijft de Avondlandse cultuur als faustisch. Ook deze cultuur, waarvan het grondsymbool de ruimte is – let op de gotische dom, in de hoogte gebouwd, fuga’s van Bach, de moderne techniek – is ondertussen aan haar verval begonnen, bevindt zich in de fase van de beschaving, de laatste fase van elke cultuurcyclus. Elke cultuurcyclus omvat ongeveer een periode van duizend jaar.

Kritiek kreeg Oswald Spengler met emmers over zich: de marxistische theoreticus George Lukàcs had het in zijn boek Die Zerstörung der Vernunft over het dilettantisme van Spengler, de cynische openheid, absurditeiten en mystiek van de auteur. Thomas Mann, de liberale rationalist Theodor Geiger (“één van de ergste boeken van onze eeuw”), iedereen had wel iets over de theorieën in Untergang des Abendlandes te zeggen (12). Gerd-Klaus Kaltenbrunner schat de situatie juister in als hij vermeldt dat zoveel schuim op de mond van critici meestal een teken is van de armoede van de tegenargumenten. En een figuur als Theodor Adorno vindt dat Oswald Spengler zijn tegenstander nog steeds niet heeft gevonden.

Frits Boterman past het geheel goed samen : Untergang des Abendlandes was het meest gelezen geschiedenisfilosofisch werk van de Republiek van Weimar, en zijn auteur heeft de 20e eeuw heel duidelijk mee bepaald (13).

Welke kenmerken zijn er Boterman nu bijgebleven als zeer belangrijk ? Wij sommen ze even op :

Spengler heeft de bedoeling met zijn Untergang de diagnose van de cultuurcrisis te stellen en tegelijkertijd een prognose over de ondergang van faustische cultuur. Aan de hand van de zgn. morfologische methode probeerde de Duitse filosoof culturen met elkaar te vergelijken en de crisis van de westerse cultuur in zijn laatste fase, die van beschaving, te beschrijven. Boterman stelt dat Spengler de bedoeling had niet louter de populaire cultuurgeschiedenis te schrijven maar hij wilde doordringen tot een diepere laag van de historische werkelijkheid, de fundamentele vragen des levens aansnijden, en de metafysische kern van het leven vatten (leven, tijd, lot). Boterman noemt dit de metafysische laag in het werk van Oswald Spengler, hij was op zoek naar de “metaphysische Struktur der historischen Menschheit” (14), hij wilde op een intuïtieve manier doordringen tot een diepere laag van de werkelijkheid en de “onzichtbare” patronen van de geschiedenis blootleggen. Spengler verweet anderen dat ze zich te weinig met metafysica bezighielden, en zal door Julius Evola hetzelfde verwijt krijgen toegespeeld !

Het cultuurcyclisch systeem. Naast de metafysische kern van het leven is er het leven zelf, de ontwikkeling ervan, het biologische leven van de cultuur als een organisme. Culturen zijn organismen die te vergelijken zijn met dieren of planten. Hiermee maakt hij ook de evolutie van cultuur naar beschaving duidelijk. Dit is de tweede laag, de cultuurmorfologisch-cultuurcyclische laag

Er is de derde laag: het geheel van de politieke consequenties die Oswald Spengler uit zijn cultuurfilosofie trok. Vooral in het tweede deel van zijn Untergang worden zijn politieke ideeën verder ontwikkeld. Ze werden ook op een later moment aangebracht dan de vorige twee niveau’s. De drie niveau’s bevatten een hoge samenhang en de uitspraak van Tracy B. Strong, aangehaald door Frits Boterman, vat het geheel goed samen : “Paradoxaal genoeg is hij zowel een onbuigzaam reactionair als ook een mysticus” (15). Wat Spengler op politiek vlak nastreefde, was Duitsland een nieuwe zonnereligie geven, en een wereldrijk. Vergeten we de tijdsomstandigheden niet : het eerste deel van Untergang des Abendlandes was grotendeels reeds in 1913 geschreven en werd gepubliceerd in 1918. Het tweede deel, met de focus op de politieke gevolgtrekkingen van een en ander, pas in 1922-1923.


Spenglers ergste vijand, Heinrich Rickert, verweet hem zijn modern biologisme. En van dat biologisme een verband leggen naar Nietzsche is heel eenvoudig, want ook de filosoof met de hamer is schatplichtig aan dit biologisme, dat leert dat zijn niet alleen betekent dat het zijnde moet worden behouden, maar zich moet vermeerderen, vergroten, aan uitbreiding doen. De Wille zur Macht. De cultuurmorfologie van Spengler wordt door Rickert op een hoopje geworpen met Nietzsche.

Nu kan de invloed van Friedrich Nietzsche op de auteur van Untergang moeilijk worden overschat, maar het zou een fout zijn niet te wijzen op de invloed van de filosoof Danilevski en van de historici E. Meyer en Friedrich Schiller.

Oswald Spengler sprak zich meermaals uit tegen absolute waarheden en eeuwige waarden, wat in zijn cultuurfilosofie regelmatig terug komt. Er is géén universele geschiedenis van de mensheid en elke moraal is cultureel bepaald. Ook Spengler is iemand die zich verzet tegen een eurocentrische benadering van de mensheid, zonder daarom ook maar even te vervallen in de in bepaalde milieus zo mondain staande “weg-met-ons”- mentaliteit. Spengler laat echter ook aan duidelijkheid niets over : het Westen gaat onvermijdelijk ten onder, de vrijheid van de mens is uiterst beperkt, en elke filosofie was en is tijdsgebonden, dus relativistisch en perspectivistisch. Hij legde als cultuurcriticus bloot wat er aan cultuurwaarde, religie, bezieling en geestelijke vitaliteit was verdwenen. In tegenstelling tot Nietzsche geloofde de auteur van Der Untergang niet meer in regeneratie van cultuur : Nietzsche heeft als geen ander – vandaar zijn invloed op zovelen, ook nu nog – de culturele symptomen van zijn tijd geanalyseerd en geïnterpreteerd als tekenen van verval en achteruitgang. Hij merkt overal de tekens van vermoeidheid, van uitputting en decadentie. En waar een figuur als Thomas Mann blijft steken in zijn Bildungsbürgertum, is Friedrich Nietzsche een stuk verder gegaan en kan men in zijn Uebermensch het Nietzscheaans genezingsproces zien. De therapie van Nietzsche is heel radicaal en superindividueel : enkelingen zullen de therapie van Nietzsche wel kunnen volgen – en genezen ? – maar daar heeft een ganse cultuur of natie niet veel aan, natuurlijk. Mann schreef over Nietzsche de volgende waarderende woorden : “..als vielmehr der unvergleichlich grösste und erfahrenste Psycholog der Dekadenz” (16). Alleen de Uebermensch kan de decadentie overwinnen. Decadentie bij Friedrich Nietzsche is veel minder een mechanisch, een automatisch proces dan bij Spengler. Decadentie ontstond – althans volgens Nietzsche – op het moment dat duidelijk werd dat God dood was en dat de mens in zichzelf de zin van het leven moest vinden. Wie kan zich met deze waarheid staande houden ? Alleen de Uebermensch, de mens die brug is geworden, en die gedreven is door de gedachte van de eeuwige wederkeer en door de wil tot macht is bezield.

Ze zijn beiden decadentie-filosofen, Nietzsche en Spengler, maar hun visie op het ontstaan en de uitrol van de decadentie is erg verschillend, dus ook de “oplossingen”. Maar ook gelijkenissen springen in het oog. Zo stelde Nietzsche vast dat de decadentie in de Griekse wereld – het ijkpunt voor Nietzsche en zovele andere 19e en 20e eeuwse denkers – dan is gestart op het moment dat de cultuur geïntellectualiseerd werd. Dit gebeurde door een figuur als Socrates die alles in vraag begon te stellen en die het weten tot grootste deugd verhief (17).
Ook Spengler zag een en ander analoog gebeuren, en zal hieraan het begrip Zivilisation verbinden. Maar waar Spengler deze versteende cultuur onvermijdelijk op haar einde zag toestappen, ontwaarde Nietzsche wel degelijk ontsnappingswegen. Lebensbejahung, Wille zur Macht, hetgeen wij hierboven reeds opsomden. Maar in de Griekse cultuur gebeurde juist het tegenovergestelde : reeds verzwakt door de socratische levenshouding wordt ze volledig vernietigd door de overwinning van de christelijke moraal.

Maar Spengler nam veel over van Nietzsche, zoveel is duidelijk : hij geloofde sterk in diens Umwertung aller Werte, de antithese cultuur-beschaving is zonder Nietzsche niet te begrijpen. Spengler voltooide de Nietzscheaanse boodschap en gaf er een metapolitieke en politieke inhoud aan. Hij heeft Nietzsche misbruikt, zullen anderen zeggen. Voor Spengler was de figuur van de Uebermensch een echt Luftgebilde, Spengler geloofde niet in de verbetering van de menselijke natuur en deelde de ondergang in bij de onvermijdelijkheden. Hij zag Nietzsche als de laatste romanticus. Politiek gezien brak de periode aan voor de nieuwe Caesars, niet voor een nieuwe Goethe. Nietzsche daarentegen was geen politiek denker, hij was op zoek naar individuele waarheden en oplossingen, terwijl Oswald Spengler geloofde in collectiviteiten, waaraan de mens is overgeleverd (18). Omdat de cultuur in de visie van de ondergangsfilosoof Spengler niet meer te regenereren was, moest zijn cultuurfilosofie in dienst staan van de harde politiek van het Duits imperialisme en zijn nieuwe Caesars – de laatste fase van de Zivilisationsperiode. De laatste doet dus het licht uit.



De levensfilosofie van Oswald Spengler


De Duitse cultuurfilosoof was duidelijk een man van de moderne wereld, hij gebruikte heel wat moderne begrippen en had heel wat te danken aan Nietzsche. Frits Boterman wees hier in zijn biografie op. Toch merkt dezelfde auteur op dat Spengler zich ook verzette tegen de rationalistische en natuurwetenschappelijke werkelijkheidsconceptie van zijn tijd. Op die manier sloot de Duitser zich aan bij de filosofische stroming van de Lebensphilosophie, een verzameling van - zowel naar methodiek als naar afbakening van interessegebied – antirationalisten (19). De heer Boterman stelt vast dat – hoewel we het ons nog moeilijk kunnen voorstellen – het Leben hét centrale thema was in de Duitse filosofie tussen 1880 en 1930. De Lebensphilosophie legde de nadruk op het intuïtieve, irrationele en gevoelsmatige van het leven, en was gericht tegen het natuurwetenschappelijk positivisme. Spengler kwam dus met zijn cultuurfilosofie niet zomaar uit de lucht vallen in Duitsland. Zijn zoektocht naar de “achterliggende” waarheid lag in dezelfde lijn als Schopenhauer, Nietzsche, Dilthey, Freud en Sorel. De invloed van deze levensfilosofische school reikte ver, buiten Duitsland en in geheel Europa.

Frits Boterman onderneemt een meer dan verdienstelijke poging om de algemene lijnen van de Lebensphilosophie samen te vatten; wij geven de grote lijnen (20) :

De levensfilosofie gaat er in het algemeen van uit dat er geen transcendente realiteit bestaat, behalve het bestaan zelf. Het vertrekpunt is de Diesseitigkeit (het leven op aarde).
T.o.v. het primaat van het rationeel positivistisch denken stelden de levensfilosofen het primaat van het gevoel, de beleving, de intuïtie (de Tiefenerlebnis van Oswald Spengler). Belangrijk zijn dus de emotionele momenten die de mens zijn plaats in de totaliteit van het leven doen beleven.


Spengler moet worden gesitueerd in de brede stroom van deze Lebensphilosophie. Merkwaardig is wel dat hij hier niet helemaal in past : immers, Frits Boterman merkt op dat, hoewel de Duitser de natuurwetenschappelijke werkelijkheidsconceptie bestreed, hij haar bestaansrecht helemaal niet betwistte.

In bijlage, de drie vergelijkende tafels uit Der Untergang des Abendlandes, waarin Oswald Spengler steeds op een analoge manier enkele culturen naast elkaar zet.

Op het vlak van de filosofie en de geesteswetenschappen zette hij in deze vergelijking de volgende culturen naast elkaar : de Indische, de Antieke, de Arabische en tenslotte de Avondlandse cultuur.
In de 2e vergelijking – op het vlak van kunst : de Egyptische, de Antieke, de Arabische en de Avondlandse
En tenslotte op het vlak van de politiek : de Egyptische, de Antieke, de Chinese en de Avondlandse

De vergelijkende tabellen worden in de oorspronkelijke, Duitse taal gebracht, een Nederlandse vertaling heb ik immers niet gevonden.





3. JULIUS EVOLA – met Romeinse virtù




Belangrijkste werken van Julius Evola :

Julius-Evolaqqqq.jpg1926 L’uomo come potenza. I tantri nella loro metafisica e nei loro metodi di autorealizzazione magica.
1928 Imperialisme pagano. Il fascismo dinnanzi al pericolo euro-cristiano
1931 La tradizione ermetica. Nei suoi simboli, nella sua dottrina e nella sua “Arte Regia”
1932 Maschera e volto dello spiritualismo contemporaneo. Analisi critica delle principali correnti moderne verso il « sovranaturale ».
1934 Rivolta contro il mondo moderno
1937 Il mistero des Graal e la tradizione ghibellina dell’Impero
1950 Orientamenti. Undici punti
1953 Gli uomini e le rovine
1958 Metafisica del sesso
1961 Cavalcare la tigre
1963 Il cammino del Cinabro



De metafysica die Julius Evola (1898-1974) in zijn werken uiteenzet (in Rivolta, zijn hoofdwerk, maar ook in andere werken), en die hij steeds zelf heeft omschreven als “transcendent realisme”, omvat een involutionistische filosofie van de geschiedenis (van beter naar minder dus), gebaseerd op het dubbele axioma dat geschiedenis een proces van verval is, en de moderne wereld een fenomeen van decadentie. Deze geschiedenisfilosofie identificeert zich eigenlijk totaal met de wereld van de Traditie. Wat men in de moderne wereld als “politiek” omschrijft, betekent in het perspectief van de Traditie slechts een geheel van gedegradeerde vormen van een superieure vorm van politiek, gebaseerd op de ideeën van autoriteit, soevereiniteit en hiërarchie.


Involutie is de zin van de geschiedenis, zegt Julius Evola

Volgens Pierre-André Taguieff in Politica Hermetica, nr. 1, 1987 (21) is het Evoliaans denken eerder een denken over decadentie dan een denken over restauratie. Zijn radicale kritiek op de moderne wereld is even coherent als overtuigend, terwijl zijn politieke ideeën bepaald zijn door nostalgisch utopisme, irrealistisch – nog eens, volgens de auteur Taguieff. Hij (Evola) streeft een ideaal regime na, dat echter door elke historische realiteit wordt verraden, want in de realiteit omgezet. Dat is de voornaamste reden waarom wetenschapper Taguieff vindt dat Evola sterker staat in het bepalen van decadentie, dan in het neerpennen van politieke alternatieven. Maar zijn interpretatie en zijn onderzoek naar het decadentiebegrip bij Julius Evola is zo helder geschreven, dat wij hem in ons artikel
meermaals zullen moeten citeren.

Het thema van de decadentie kan elke aandachtige lezer terugvinden in alle vruchtbare periodes in Evola’s leven. Natuurlijk is er veel plaats voor het thema van zijn metafysica van de geschiedenis ingeruimd in het hoofdwerk, Rivolta, het volledige tweede deel van het werk. Het thema van de “decadentie” neemt een centrale plaats in in het werk van de Italiaanse filosoof : de fundamentele thesis is de idee van de decadente natuur van de moderne wereld, en is te vinden in de Rivolta (22). Maar ook in de andere werken, La dottrina del Risveglio. Saggio sull’ascesi buddista en Cavalcare la tigre en tenslotte Gli uomini e le rovine, zijn veel verwijzingen terug te vinden. Het voornaamste werk heeft als kern, de vraag hoe te reageren in een tijdperk van algemene, uitsluitende dissoluzione.

In tegenstelling tot heel wat moderne denkers, die vertrekken van een sociologische vaststelling van wat is en wat verkeerd loopt, vertrekt Evola in zijn studie over het begrip decadentie – en hierin is hij toch wel origineel – van de primordiale wereld van de Traditie, de oorspronkelijke Traditie, als absoluut referentiepunt. De moderne wereld wordt bestudeerd vanuit dit ijkpunt, en niet omgekeerd. Een drieledig standpunt : een axiologische visie, als een legitiem systeem van normen en als enige authentieke weg dus.
En de decadentie, aldus Evola, is een ziekte die al heel lang in deze samenleving sluimert, maar die geen mens durft uit te spreken. Ook bleven de symptomen lange tijd verborgen, door allerlei ogenschijnlijk positieve ontwikkelingen aan ons oog onttrokken. “De realiteit van de decadentie is nog verborgen door de idee van vooruitgang, door idyllische perspectieven, ons door het evolutionisme aangeboden” (23), gemaskeerd dus door de idee van vooruitgang, en “gesecondeerd door de superioriteit van de moderne beschaving”. Zo zal het gevoel van de val ons maar duidelijk worden tijdens de val zelf. Om weerstand te kunnen bieden, moet de kleine minderheid, aldus Evola, het referentiepunt, de Traditie, leren kennen. En de twee modellen die Evola naar voren schuift om het involutieproces dat de geschiedenis is, te leren kennen, ontwikkelt hij uit de traditionele leerstellingen : de doctrine van de 4 tijdperken en de wet van de regressie van de kasten.


De doctrine van de 4 tijdperken

In het tweede deel van zijn Rivolta stelt Julius Evola een “interpretatie van de geschiedenis op traditionele basis” voor (24). De geschiedenis evolueert niet, maar volgt het proces van regressie, van involutie, in de zin van het zich loskoppelen van de suprawereld, van het verbreken van de banden met het transcendente, van het macht van het “slechts menselijke”, van het materiële en het fysieke. Dit juist is het onderwerp van de doctrine van de vier tijdperken. En de moderne wereld past als gegoten in de vorm van het vierde tijdperk, de Kali Yuga, het IJzeren Tijdperk. Reeds Hesiodos beschreef de vier tijdperken als het Gouden Tijdperk, het Zilveren, het Bronzen en het IJzeren Tijdperk. Het zelfde thema vinden wij terug in de Hindoetraditie (satya-yuga – tijdperk van het zijn, de waarheid in transcendente zin, tretâ-yuga – tijdperk van de moeder, dvâpara-yuga – tijdperk van de helden, en kali-yuga of het sombere tijdperk) naast zovele andere mythen over zowat de ganse (traditionele)
Wereld. Evola heeft deze cyclustheorie van René Guénon, die ze opnieuw in Europa binnenbracht.

De metafysica van de geschiedenis had een belangrijk gevolg : als de geschiedenis inderdaad het proces van progressieve involutie volgt, van het ene, hogere tijdperk naar het lagere tijdperk, dan kan het eerste tijdperk – althans de doctrine – niet dat zijn van de primitief, van de barbaren, maar wel dat van een superieure staat van de menselijke soort. Het gevolg was dat Evola, naast andere auteurs, onmiddellijk ook de evolutietheorie afwees.

De metafysica van de geschiedenis schrijft een onontkoombaar lot voor, een onweerlegbare koers. Evola legt er de nadruk op dat “hetgeen ons in Europa overkomt, niet arbitrair of toevallig gebeurt, maar voortkomt uit een precieze aaneenschakeling van oorzaken” (25). En “net als de mensen hebben ook beschavingen hun cyclus, hun begin, hun ontwikkeling en hun einde… Zelfs als de moderne beschaving moet verdwijnen, zal ze zeker niet de eerste zijn die verdwijnt en ook niet de laatste…. Cycli openen zich en sluiten af. De traditionele mens was bekend met de doctrine van cycli en alleen de onwetendheid van de moderne mens heeft hem en zijn tijdgenoten doen geloven dat zijn beschaving, die haar wortels heeft in het tijdelijke en het toevallige, een ander en meer geprivilegieerd lot zou kennen” (26)

Wanneer begonnen zich de eerste tekenen van decadentie te manifesteren volgens de Italiaanse cultuurfilosoof ? “De eerste tekenen van moderne decadentie zijn reeds aan te wijzen tussen de 8ste en 6e eeuw voor Christus…. Het komt er dus op aan het begin van de moderne tijden te laten samenvallen met wat men de historische tijden heeft genoemd…. Binnen de historische tijden en in de westerse ruimte duiden de val van het Romeinse Rijk en de komst van het christendom een tweede etappe aan van de vorming van de moderne wereld. Een derde etappe tenslotte doet zich voor met het ineenstorten van de feodale en Rijkswereld van het Middeleeuwse Europa, en bereikt haar hoogtepunt met het humanisme en de reformatie. Van dan af aan, en tot in onze dagen, hebben machten – al dan niet openbaar – de leiding genomen van alle Europese stromingen op het materiële en spirituele vlak” (27)

De etappes van de decadentie – de wet van het verval van de kastes

Het is in het 14e en 15e hoofdstuk van het tweede deel van zijn Rivolta dat we de belangrijke uitleg krijgen over de objectieve wet van de val van beschavingen. Ook hier is er opnieuw zwaar tol aan René Guénon betaald, zoals ook P. A. Taguieff opmerkte (28). De wet van de vier kastes beantwoordt grotendeels aan de doctrine van de vier tijdperken, want in de vier kastes vindt men de waarden terug die volgens deze doctrine opeenvolgend domineerden in één van de vier tijdperken van de regressie. Voor Evola verklaart deze wet ten volle het involutieve karakter in alle sociaalpolitieke aspecten. In alle traditionele maatschappijen zou er een gelijkaardige stratificatie hebben bestaan : aan de top staan overal de vertegenwoordigers van de spirituele autoriteit, daarna de krijgsaristocratie, erop volgend de bezittende burgerlijke stand en tenslotte de knechten. Deze vier “functionele klassen” corresponderen aan bepaalde levenswijzen, elk met zijn eigen gezicht, eigen ethiek, rechtssysteem in het globale kader van de Traditie (29). “De zin van de geschiedenis bestaat nu juist in de afdaling van de macht en van het type van beschaving van de ene naar de andere van de vier kastes, die in de traditionele maatschappijen beantwoorden aan de kwalitatieve differentiering van de belangrijkste menselijke mogelijkheden” (30). Evola vatte in zijn autobiografisch werk Le chemin du cinabre deze regressie en het belang ervan voor de geschiedenis als volgt samen : “Na de val van die systemen die berustten op de zuivere spirituele autoriteit (“sacrale maatschappijen”, “goddelijke koningen”) gaat in een tweede fase de autoriteit over in handen van de krijgsaristocratie, in de cyclus van de grote monarchieën, waar het “goddelijk recht” van de soeverein nog slechts een restecho is van de waardigheid van de eerste leiders. Met de revolutie van de Derde Stand, met de democratie, het kapitalisme en de industrialisering gaat de effectieve macht over in handen van de derde kaste, de eigenaars van de rijkdom, met een even grote transformatie van het type van beschaving en van de heersende belangen. En uiteindelijk kondigen socialisme, marxisme en communisme – en realiseren het ook ten dele - de ultieme fase aan, de komst van de laatste kaste, de antieke kaste van de slaven, die zich organiseren en de macht veroveren. Zij zet de regressie door tot in de laatste fase” (31). Op de creditzijde van de Italiaanse filosoof mag in elk geval genoteerd worden dat hij ook op momenten dat het niet “opportuun” werd geacht, want men moest zijn beschermheer niet de haren in strijken, er steeds op gewezen heeft dat Europa door Amerika werd bedreigd : niet militair, maar politiek, economisch en vooral cultureel. Amerika, dat is voor Evola een perversie van de waarden, en deze perversie leidt onvermijdelijk tot bolsjewisme. Amerika doekte in Europa de laatste restanten op van een feodale en traditionele maatschappij. De Amerikaans liberale weg leidt de beschaving naar haar laatste fase. Metafysisch plaatst de Italiaan Amerika en Sojwet-Rusland in hetzelfde kamp : het zijn twee kanten van dezelfde munt. Communisme is de laatste fase van de involutie, die wordt voorafgegaan door de derde fase, die van de liberale bezitters.


De tweedeling van de beschaving : traditionele versus moderne maatschappij


Het zal onze aandachtige lezers natuurlijk al duidelijk geworden zijn dat er tussen moderne maatschappij en traditionele maatschappij een bijna letterlijk te nemen “onmacht tot communiceren” bestaat, toch in het concept van Julius Evola. En uit de wet van de regressie van de kasten valt al evenzeer een vergankelijkheid van de moderne wereld af te leiden, wat ook heel wat “modernen” zal choqueren. Het verdwijnen van de moderne wereld heeft voor de filosoof slechts “de waarde van het puur toeval” (32) En bovenop het beschavingspluralisme, waarover Spengler het heeft, moet u in Evola’s model rekening houden met het “dualisme van de beschaving”. Er is de moderne wereld en er zijn aan de andere kant die beschavingen die haar vooraf zijn gegaan, tussen die beiden is er een volledige breuk, het zijn morfologisch gezien totaal verschillende vormen van beschaving. Twee werelden waartussen bijna geen contact mogelijk is, want zelfs de betekenis van dezelfde woorden verschilt. Een begrip van de traditionele maatschappij is derhalve voor de grote meerderheid van de modernen onmogelijk (33).
En zoals in de vertaling van een artikel, dat wij in TeKoS (34) afdrukten, vermeld, kunnen tijds- en ruimtebeschavingen terzelfdertijd en naast elkaar bestaan. Moderne wereld en traditionele maatschappijen : twee universele types, twee categorieën.

Tekens van decadentie – diagnose van het heden als geheel van regressieve processen

Als denker van de Traditie heeft Julius Evola een misprijzen voor de moderne westerse wereld, en daarin wordt hij gevolgd én voorafgegaan door nogal wat denkers van de Conservatieve Revolutie. De symptomen waren voor de meeste auteurs in dezelfde hoek te zoeken, alleen over de remedies was men het minder eens. Ook het alternatieve staatsmodel, welk mechanisme de staats- of rijksordening moest leiden, was voor de meesten verschillend.

In hetzelfde artikel over het decadentiedenken van Julius Evola somt auteur Taguieff de symptomen op (35) :

1. Het egalitarisme, pendant van het universalisme van het joods-christelijk type. En Evola benadrukt de christelijke wortels van de egalitaire wortels.
2. Het individualisme. Samen met Guénon bestrijdt Evola het individualisme, want door het bestaan ervan wordt elke transcendentie genegeerd, te beginnen met die die “de persoon” belichaamt. De moderne vergissing : persoon met individu verwarren.
3. Het economisme, de overwaardering dus van productie (productiviteit, aanbidden van de afgod van de materiële vooruitgang, het integraal economisch materialisme, vergoddelijking van geld en rijkdom. Evola is schatplichtig aan Werner Sombart.
4. Het rationalisme, de ideologische implicaties van het paradigma van de “moderne wetenschap” – de neoreligie van de Vooruitgang, het scientisme – verwerping van elke contemplatieve gedachte t.v.v. een weten, gestuurd door een technische actie.
5. De ontbinding van de staat, van de macht, en vooral van de spirituele macht, van de idee zelf van hiërarchie, in en door democratie, liberalisme en communisme. De massificatie van de volkeren, zodat gedragingen, geëgaliseerd en geïnfantiliseerd, beter controleerbaar worden.
6. Het humanisme in zijn historische vormen: het humanisme of het humanitaire cosmopolitisme, de bourgeoisie met haar fundamentele sociale, morele en sentimentele aspecten, en het valse koppel van het liberaal utilitarisme (gericht op de opperste waarde van het welzijn, gebaseerd op de norm van profijt) en het “spiritueel evasionisme”.
7. De verschillende vormen van “seksuele revolutie”, met daarin de hegemonie van de vrouwelijke waarden (broederschap, veiligheid), de groeiende gelijkmaking en uitvlakken van de seksuele verschillen, het oprukken van psychoanalyse als “de demonie van de seksualiteit”, waardering van de “derde sekse”.
8. Het verschijnen van valse elites, oligarchieën van verschillende types, plutocratie, dictators en demagogen, moderne intellectuelen. Twee signalen onderzocht Evola nauwkeurig : het verlies aan zin voor aristocratie, de kracht ervan en de originele traditie, en aan de andere kant de ontbinding van de artistieke vormen, getuige daarvan de twijfel van de moderne muziek tussen intellectualisering en primitieve hypertrofie van zijn fysieke karakter.
9. De ondergang van hetgeen Evola superieure rassen noemt, ras niet te begrijpen in een biologische opvatting.
10. Opkomst van allerlei vormen van neospiritualisme, de zgn. tweede spiritualiteit, met een term eigen aan Spengler. Het vernielen van de traditionele vormen van religie en ascese, hertaald in een “humanitaire democratische moraal”. Evola omschrijft dit neospiritualisme als de evenknie, het evenbeeld van het westers materialisme.
11. De overbevolking. Evola behoort niet tot de natalistische vleugel van de Conservatieve Revolutie: bezorgd is hij niet door ontvolking, hij zoekt menselijke kwaliteit, géén kwantiteit.
12. Het totalitarisme, mogelijk gemaakt door het organisch concept van de staat te vernietigen, en belichaamd door een nieuwe paradoxale formatie : de idôlatrie van de staat en de atomisatie van de gemeenschap. Vanaf dan reflecteert hetgeen beneden is, niet meer hetgeen boven is, want er is geen boven meer. Elke afstand is afgeschaft. De totale horizontaliteit van de geatomiseerde maatschappij – de som van perfect uitwisselbare individuen – is de voorwaarde voor het verschijnen van de pseudostaat, die de totalitaire staat in wezen is.
13. Tenslotte het naturalisme in al zijn varianten : biologisme, materialisme, collectivisme, ja, zelfs nationalisme.

Slotopmerking : wat is decadentie voor Julius Evola ?


Het moet al duidelijk geworden zijn : de negatie van de Traditie is het beginpunt van decadentie en verval. Decadentie kan in de ogen van Evola het best omschreven worden als het toaal verlies aan “oriëntatie naar het transcendente” (36). Had ook Friedrich Nietzsche het niet over “God is dood” als beginpunt van het Europees nihilisme ? In die mate is de moderne maatschappij dan ook volledig tegengesteld aan de traditionele maatschappij en is de toegang naar het transcendente voor haar afgesloten. In zijn later werk Orientamenti zal de Italiaan de lijn doortrekken en noteren dat het antropocentrisme eigenlijk het begin betekent van de decadente moderniteit. Hierin ligt trouwens de scherpste kritiek van Evola aan het adres van Oswald Spengler, iets wat we nu gaan ontdekken.




4. JULIUS EVOLA OVER OSWALD SPENGLER


De twee belangrijke cyclisten, beiden actief in wat men later de Conservatieve Revolutie is gaan noemen, moesten elkaar vroeg of laten wel ontmoeten. Evola kwam een aantal keren in Duitsland spreken voor bvb. de Herrenclub, maar tot een ontmoeting tussen de beide filosofen is het nooit gekomen. We mogen ervan uitgaan dat Spengler de Italiaan niet kende en ook zijn werken niet had gelezen. Vergeten we trouwens niet dat het magnus opum van Evola pas in 1936 verschijnt, en dat Spengler hetzelfde jaar overleed. Maar Spengler kende bvb. ook de naam van Vico niet, wat erop kan duiden dat hij weinig kennis had over de Italianen. Evola kende het werk van Spengler wel, hij las alle werken van de Duitser, niet alleen Der Untergang des Abendlandes, maar ook zijn Jahre der Entscheidung. En in een tweetal artikels ging de Italaanse filosoof dieper in op de betekenis van Spengler voor het traditioneel denken en poogde hij tevens een traditionele kritiek te formuleren op de fundamenten van het Spengleriaans denken. Evola vertaalde Der Untergang des Abendlandes in het Italiaans in 1957 en vatte in zijn inleiding enkele punten van kritiek samen. Verder schreef hij in Vita Italiana in 1936 over de Duitse ondergangsfilosoof. De beide artikels werden in 1997 in het Frans vertaald en uitgegeven (37).

Voor Julius Evola is Spengler géén moderne auteur, in die zin dat hij met zijn werk het gevoel wekt reëel te zijn, te appelleren aan iets dat groter is dan zichzelf. De beschaving, aldus Spengler, ontwikkelt zich niet volgens het ritme van een continue vooruitgang naar de “beste” beschaving. Er bestaan slechts verschillende culturen, afzonderlijk van elkaar. Tussen culturen bestaan hoogstens verbindingen van analogie, maar er is géén continuïteit.
Evola merkt op dat dit de centrale ideeën van Spengler zijn, die op geen enkele manier terug te brengen zijn tot een persoonlijke filosofische stelling. Want op een of andere manier leefden dezelfde ideeën ook reeds in de antieke wereld, onder de vorm van cyclische wetten die de culturen en de volkeren leidden. Alleen, dit maakt ook direct dé grote zwakte uit van Spengler, want op geen enkel moment wordt er ook maar gewag gemaakt van het transcendente karakter van de cyclische wetten van de culturen : “Hij ontwierp zijn wetten als nieuwe naturalistische en deterministische wetten, als een reproductie van het somber lot dat planten en dieren (…) te wachten staat: ze worden geboren, groeien en verdwijnen. Zo had Spengler geen enkel begrip van de spirituele en transcendente elementen die aan de basis liggen van elke grote cultuur. Hij is de gevangene van een laïcistische stelling die de invloed onderging van de moderne ideeën van de levensfilosofie, het Faustisch activisme en het aristocratisch elitisme van Friedrich Nietzsche” (38). En Evola komt tot de essentie : Spengler heeft niet begrepen dat er boven de pluraliteit van culturen en hun ontwikkelingsfasen een dualiteit van cultuurvormen bestaat. Hij benaderde dit concept nochtans op het moment dat hij culturen in opgang plaatste tegenover culturen in neergang, en cultuur t.o.v. beschaving. Maar, zegt Evola, hij slaagde er niet in om de essentie van de tegenstelling bloot te leggen.

legromsss.gifDe Spengleriaanse opvatting van de aristocratische cultuur is schatplichtig aan Nietzsche, Julius Evola had er al op gewezen, de Duitse filosoof van Der Untergang zal er nooit van loskomen : “Het ideaal van de mens als een prachtig roofdier en een onverwoestbaar heerser bleef het geloofspunt van Spengler, en referenties naar een spirituele cyclus blijven bij hem sporadisch, onvolmaakt en verminkt vanuit zijn protestantse vooroordelen. De aanbidding van de aarde en de devotie voor de klassen van knechten, de graafschappen en de kastelen, intimiteit van tradities en corporatieve gemeenschappen, de organisch georganiseerde staat, het allerhoogste recht toegekend aan het ras (niet in biologische zin begrepen, maar in de zin van gedrag, van diep ingewortelde viriliteit), dit alles is het fundament van Spengler, waarin volkeren zich in de fase van de cultuur ontwikkelen. Maar eigenlijk is dit alles te weinig… In de loop van de geschiedenis is een dergelijke wereld eerder te vinden reeds als het gevolg van een eerste val. We bevinden ons dan in de cyclus van de “krijgersmaatschappij”, het traditionele tijdperk dat vorm krijgt eens het contact met de transcendente realiteit verbroken werd, en die ophoudt de creatieve kracht van de beschaving te zijn” (39). Oswald Spengler gaat dus in de eerste plaats niet ver genoeg in zijn analyses, en verder haalt hij ook niet de juiste referenties aan. Daarom, schrijft Julius Evola op pagina 11, “komt Spengler ons eerder voor als de epigoon van het conservatisme, van het beste traditionele Europa, die haar ondergang bezegeld zag in de Eerste Wereldoorlog en het ineenstorten van de laatste Europese rijken”.

Toch kan Evola zich vinden in de beschrijving van de beschaving in verval : “Massacultuur, anti-kwalitatief, anorganisch, urbanistisch en nivellerend, diep anarchistisch, demagogisch en antitraditioneel”. En verder wijdt hij enkele zinnen aan de twee wereldrevoluties die het Westen in Spengleriaans opzicht zullen nekken : “Een eerste, interne, heeft zich al gerealiseerd, de sociale revolutie van de massificatie en assimilatie (…). De tweede revolutie is zich aan het voorbereiden, de invasie van de gekleurde rassen, die zich in Europa vestigen, zich europeaniseren en die de beschaving naar hun hand zullen zetten” (40). En dan opnieuw de kritiek van de Italiaanse filosoof : als antwoord op deze bedreigingen “weet Spengler slechts het ideaal van het mooie beest op te roepen, het eeuwige instinct van de krijger, latent aanwezig in periodes van ondergang, maar klaar om op te springen als de volkeren zich in hun vitale substantie bedreigd voelen (…). Dit beantwoordt volledig aan de visie van een tragische Faustische ziel, dorstend naar het eeuwige, wat voor Spengler juist model stond voor het Leitmotiv van de westerse cyclus”. Deze weg vindt Evola zeer vaag en onduidelijk, want de opkomst van de grote rijken, met hun binoom massa-Caesar, waren de emanatie van de kanker van het vernietigend cosmopolitisme, van het demonisch karakter van massa’s en dus uitingen van de decadentie zelf. Het echte alternatief zou er juist in bestaan de massa’s als massa te vernietigen en in haar nieuwe articulaties te provoceren, nieuwe klassen, nieuwe kasten (41). Niets van dit alles bij Spengler, stelt Evola bijna teleurgesteld vast, er is maar één ankerpunt, zijn Pruisen, zijn Pruisisch ideaal. Spengler zag Pruisen niet in nationale dimensies, maar eerder als een levenswijze : niet hij die in Pruisen is geboren, kan zich Pruis noemen, maar “dit type kan men overal vinden, het is een teken van ras, van gedisciplineerde toewijding, van innerlijke vrijheid in het uitvoeren van de taak, autodiscipline”. Evola besluit met te stellen dat dit Pruisen op zijn minst een solide traditioneel referentiepunt is, maar betreurt toch dat Spengler niet verder is gegaan.


5. ENKELE VERDIENSTEN VAN DE BEIDE HEREN

De betreurde Armin Mohler vatte de betekenis van Oswald Spengler in een aantal rake punten samen. Wij kunnen de voornaamste punten bij uitbreiding ook toepassen op de Italiaanse ondergangsauteur :

Spengler trekt in crisissituaties ondergrondse stromingen van het denken met een radicaliteit in het bewustzijn, wat voor hem hoogstens door een Georges Sorel werd voorgedaan. En die gedachtenstroming is een denken over de realiteit, gestart door de Stoa en Herakleitos, dat vanaf de start afzag van valse troostende gedachten of van de voorspiegeling van ordenende systemen. Dit denken – dat ook dat van Spengler is – staat boven elk optimisme of pessimisme. Geschiedenis is een in elkaar lopend proces van geboorten en ondergang en er blijft de mens niets anders over dan deze realiteit met heroïsche aanvaarding te ondergaan.

Een tweede verdienste, schrijft Mohler, is het opnieuw in baan brengen van het cyclisch denken, vanuit een stroom van Europese en buiten-Europese denkers. T.o.v. het aan invloed winnende liniair denken - zeker na de overwinning van het liberaal kapitalistische mens- en maatschappijbeeld - is het nodig en noodzakelijk dat een alternatief, ook op intellectueel vlak, geboden wordt op de vooruitgangsidee (42). De originaliteit bestaat hierin dat hij het organisch concept van de Duitse Romantiek overbracht op de cyclische gedachte en deze van toepassing verklaarde op zijn acht cultuurkringen. Hij combineerde de cyclische idee met het probleem van de decadentie en het verval van de cultuur. Een fundamentele breuk dus met de optimistische liberale vooruitgangsidee, en vooral nuttig in het doorprikken van de zeepbel, als zou er slechts één manier bestaan om naar de wereld te kijken.

Werd er van wetenschappelijke hoek vaak kritiek uitgebracht op de cyclische cultuurfilosofen – vooral het determinisme werd als onwetenschappelijk van de hand gewezen – dan is diezelfde kritiek even goed van toepassing gebleken op het liniaire beeld van de geschiedenis : ook hier speelt een determinisme mee, dat wetenschappelijke kringen al evenmin kunnen accepteren. Match nul, zullen wij maar zeggen, of is de eerste helft pas gespeeld ? Het is belangrijk te beseffen dat Spengler er samen met Toynbee, Sorokim Pitrim en anderen, voor heeft gezorgd dat de liniaire geschiedenisfilosofie – een uitvloeisel van de drie monotheïstische godsdiensten en hun wereldlijke realisaties – een cyclisch geschiedenisbeeld tegenover zich kreeg, dat eerder of opnieuw aanknoopte bij de oude, heidense, polytheïstische godsdiensten : een tijdlang hield de liniaire geschiedenisfilosofie vol, dat zij en zij alleen wetenschappelijke waarde had. Sinds het oprukken van de cyclische geschiedenisfilosofie kan zij dit niet meer volhouden.

Tenslotte heeft niemand zo duidelijk en onverbiddelijk als Spengler gewezen op de sterfelijkheid en vergankelijkheid van culturen en tot het einde toe doorgedacht. Sommige one-liners moeten toch doen denken : “De blanke heersers zijn van hun troon gestoten. Vandaag onderhandelen zij waar ze gisteren nog bevalen en morgen zullen ze moeten smeken om nog te mogen onderhandelen. Ze hebben het bewustzijn verloren van zelfstandigheid van hun macht en ze merken het niet eens”.


De verdienste van Julius Evola in dit alles : de Italiaanse filosoof verruimde de blik van Spengler en voegde er een transcendente, spirituele dimensie aan toe. Verder wees hij erop dat het proces van het sombere tijdperk, de finale fase dus, zich eerst bij ons heeft ontwikkeld. Daarom is het niet uitgesloten dat we ook de eersten zullen zijn om het nulpunt te passeren, op een moment waarop andere beschavingen zich nog in de fase van ontbinding zullen bevinden.



Voetnoten


(1) Weismann, K., Het rechtse principe, TeKoS, nr. 113, pag. 5
(2) Kaltenbrunner, G-K, Europa, Seine geistigen Quellen in Porträts aus zwei Jahrtausenden, regio – Glock und Lutz, Sigmaringendorf, 1987, pag. 36 e.v.
(3) Huntington, S., Botsende beschavingen, Uitgeverij Anthos, Baarn, 1997, ISBN 90 763 4115 x
(4) Cliteur, P., Tegen de decadentie, Arbeiderspers, Amsterdam, 2004, 223 blz., 16,95 euro)
(5) Weismann, K., Die heroische Existenz im Geistigen, in Junge Freiheit, nr. 6/04, 30 januari 2004, pag. 17
(6) Freund J., Evola ou le conservatisme révolutionnaire, in Guyot-Jeannin, A., Julius Evola, Les dossiers H, L’Age d’Homme, Lausanne, Suisse, 1997, pag. 187
(7) Weissmann, K., Het rechtse principe, TeKoS, nr. 113, pag. 5
(8) Spengler, O., Der Untergang des Abendlandes. Umrisse einer Morphologie der Weltgeschichte, Verlag C. H. Beck, München, 1973, eerste uitgave 1923,1249 pagina’s
(9) Evola, J., Rivolta contro il mondo moderno, Ulrico Hoepli, Milano, 1934, 482 pagina’s
(10) Boterman, F., Oswald Spengler, Der Untergang des Abendlandes, Cultuurpessimist en politiek activist, Van Gorcum, Assen/Maastricht, 1992, ISBN 90-232-2695-X, 402 pagina’s.
(11) Kaltenbrunner, G-K, Europa, Seine geistigen Quellen in Porträts aus zwei Jahrtausenden, Regio – Glock und Lutz, Sigmaringendorf, 1987, pag. 396
(12) Kaltenbrunner, G-K, Europa, Seine geistigen Quellen in Porträts aus zwei Jahrtausenden, Regio – Glock und Lutz, Sigmaringendorf, 1987, pag. 397-398
(13) Boterman, F., Kultur versus Zivilisation: Oswald Spengler en Nietzsche, in Ester, H., en Evers, M., In de ban van Nietzsche, Damon, Dudel, 2003, pag. 161-176
(14) Spengler, O., Untergang des Abendlandes, pag. 3
(15) Strong, T. B., Oswald Spengler – Ontologie, Kritik und Enttäuschung, in Ludz, P. C., Spengler heute, München, 1980, pag. 88
(16) Mann, T., Betrachtungen eines Unpolitischen, geciteerd in Ester, H., en Evers, M., In de ban van Nietzsche, Damon, Dudel, 2003
(17) Evers, M., Het probleem van de decadentie : Thomas Mann en Nietzsche, in Ester, H., en Evers, M., In de ban van Nietzsche, Damon, Dudel, 2003, pag. 130
(18) Boterman, F, Kultur versus Zivilisation: Oswald Spengler en Nietzsche in Ester, H., en Evers, M., In de ban van Nietzsche, Damon, Dudel, 2003, pag. 175 e.v.
(19) Boterman, F., Oswald Spengler, Der Untergang des Abendlandes, Cultuurpessimist en politiek activist, Van Gorcum, Assen/Maastricht, 1992, pag. 67
(20) Boterman, F., Oswald Spengler, Der Untergang des Abendlandes, Cultuurpessimist en politiek activist, Van Gorcum, Assen/Maastricht, 1992, pag. 68
(21) Politica Hermetica, nr. 1, Métaphysique et Politique – René Guénon, Julius Evola, L’Age d’Homme, Paris, 1987, 204 pagina’s
(22) Evola, J., Rivolta contro il mondo moderno, misschien gemakkelijkst in zijn Franse vertaling te lezen. Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, 501 pagina’s
(23) Evola, J., Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, pagina 9
(24) Evola, J., Il cammino del Cinabro, in Franse vertaling te lezen : Le chemin du Cinabre, Archè, Milano, 1982, pagina 123-124
(25) Evola, J., Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, pagina 487
(26) Evola, J., Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, pagina 493
(27) Evola, J., Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, pagina 493 e.v.
(28) Taguieff, P. A., Julius Evola, penseur de la décadence, in Politica Hermetica, nr. 1, Métaphysique et Politique – René Guénon, Julius Evola, L’Age d’Homme, Paris, 1987, p. 27
(29) Evola, J., Le chemin du cinabre, Arché-Arktos, Carmagnola, 1982, pagina 125
(30) Evola, J., Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, pagina 449
(31) Evola, J., Le chemin du cinabre, Arché-Arktos, Carmagnola, 1982, pagina 125
(32) Evola, J., Révolte contre le monde moderne, Les Editions de l’Homme, Montréal-Brussel, 1972, pagina 12
(33) Evola, J., La tradition hermétique, Ed. Traditionelles, Paris, 1975, pagina 26
(34) Evola, J., Waarom tijdsbeschavingen en ruimtelijke beschavingen een verschillende geschiedenis hebben, in TeKoS, nr. 57, pagina 13 en volgende
(35) Taguieff, P. A., Julius Evola, penseur de la décadence, in Politica Hermetica, nr. 1, Métaphysique et Politique – René Guénon, Julius Evola, L’Age d’Homme, Paris, 1987, p. 31 en volgende
(36) Evola, J., Chevaucher le tigre, Trédaniel, Paris, 1982, pagina 269
(37) Evola, J., L’Europe ou le déclin de l’occident, Perrin & Perrin, 1997
(38) Evola, J., L’Europe ou le déclin de l’occident, Perrin & Perrin, 1997, pagina 7-9
(39) Evola, J., L’Europe ou le déclin de l’occident, Perrin & Perrin, 1997, pagina 10
(40) Evola, J., L’Europe ou le déclin de l’occident, Perrin & Perrin, 1997, pagina 14
(41) Ibidem
(42) Evola, J., L’Europe ou le déclin de l’occident, Perrin & Perrin, 1997, pag. 15-16
(43) Mohler, A., Oswald Spengler (1880-1936) in Criticon, nr. 60-61, pagina 160-162

mercredi, 23 septembre 2009

Le bouclier antimissile américain en Europe relancé?

Le bouclier antimissile américain en Europe relancé ?

Des missiles SM-3 en Europe...

PARIS (NOVOpress) – Contrairement à ce que pouvait laisser penser la décision du président Obama de renoncer à implanter un système antimissile en Pologne et en Tchéquie, les Etats-Unis n’ont nullement renoncé à leur projet de bouclier antimissile en Europe, bien au contraire.

En effet, dans un article paru samedi dans The New-York Times, Robert M. Gates, secrétaire à la Défense des Etats-Unis l’affirme très clairement : « nous renforçons la défense antimissile en Europe, nous ne l’abandonnons pas» .

Selon lui, le système qui vient d’être abandonné ne serait pas entré en service « avant au moins 2017 et probablement beaucoup plus tard»  alors que le nouveau plan prévoit un déploiement, effectif dès 2011, de missiles d’interception SM-3 embarqué à bord de navires, sans doute en Méditerranée orientale. Une deuxième phase, « vers 2015″, verra, elle, le déploiement d» une version améliorée du SM-3 au sol « en Europe du sud et centrale» .

Bref, la tutelle militaire américaine sur L’Europe, renforcée par le retour de la France dans l’Otan, a encore de beaux jours devant elle.

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samedi, 05 septembre 2009

Pourquoi nous sommes Européennes et non pas Occidentaux

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

 

Robert Steuckers:

Pourquoi nous sommes Européens et non pas Occidentaux

 

Les tenants des vieilles droites dans la partie ouest de notre continent s'engagent pour la «défense de l'Occident». La Nouvelle Droite, dans le sillage des critiques conservatrices-révolutionnaires et nationales-révo­lutionnaires allemandes, avec Alain de Benoist et Guillaume Faye, ont soumis la notion d'Occident à une critique serrée, au nom de l'Europe. Du coup, dans l'espace linguistique francophone, les droites sont désormais divisées en deux camps: celui des Occidentalistes et celui des Européens ou Néo-Européens (l'expression est de Faye, sou­cieux de donner une dimension projectuelle et «futuriste» à son engagement et de le détacher de tout ancrage pas­séiste et démobilisateur). Ce clivage oppose aussi souvent, à de très rares exceptions près, ceux qui s'accomodent du libéralisme et de l'américanisation des mœurs en gardant comme alibi ou comme colifichet un christianisme intégriste ou moderniste, d'une part, à ceux qui luttent pour un socialisme enraciné, contre le ni­vellement culturel venu d'outre-Atlantique, d'autre part, tout en refusant le discours manipulatoire des christia­nismes historiques et des sectes actuelles (Moon, scientologistes, etc.), lesquelles cherchent à recréer artificiel­lement des «suppléments d'âme», dans une société désertifiée par le matérialisme.

 

A l'Occident des premiers, les seconds opposent l'Europe, parce qu'ils sont conscients que notre continent ne pourra survivre que s'il demeure entier, s'il s'unit, s'il fait retour sur lui-même, s'il recentre ses énergies pour les mettre au service de tous. Or l'idée d'Occident ne séduit que les droites françaises, belges, espagnoles et britan­niques, qui se posent comme héritières de l'Empire Romain d'Occident, issu de la scission de 395, et de l'Europe carolingienne, destructrice de l'autonomie économique des sociétés paysannes, notamment en Allemagne du Nord. Cet occidentalisme des droites, surtout lorsqu'il est vulgarisé outrancièrement, conduit implicitement à dévaloriser l'histoire des régions d'Europe situées en dehors des limites de l'Empire Romain d'Occident ou du vaste territoire jadis soumis à Charlemagne, à ignorer délibérément les productions culturelles des espaces ger­maniques, slaves, celtiques, scandinaves, grecs, magyars, roumains, finnois, etc. L'occidentalisme est une vi­sion hémiplégique de l'Europe. Une réduction délétère. Et dangereuse car elle ne valorise qu'une frange atlantique de notre continent au détriment de son centre (la Mitteleuropa), de la synthèse balkanique et de l'immensité terri­toriale russo-sibérienne, marquée du génie slave. L'occidentalisme ne valorise donc qu'une petite portion d'Europe; pire: il valorise dans la foulée le greffon monstrueux que cette portion d'Europe a crée en Amérique du Nord, cette implosion culturelle, où toutes les énergies créatrices s'annullent lamentablement.

 

L'historiographie russe du XIXième siècle a réagi vertement contre cette réduction. Des historiens ou philo­sophes de l'histoire comme Danilevski ou Leontiev, un écrivain aussi important que Dostoïevski, ont dénoncé l'Occident comme le terreau où a germé la maladie libérale, où l'individualisme a brisé les réflexes communau­taires, provoquant une irrémédiable décadence. Leurs arguments consistaient souvent en des laïcisations didac­tiques des reproches adressés par le christianisme orthodoxe/byzantin aux catholiques et aux protestants. Basée sur le «mir», c'est-à-dire la communauté paysanne et villageoise russe, l'orthodoxie slave dénonce l'autoritarisme catholique et l'individualisme protestant. En effet, l'église catholique nomme des prêtres étran­gers aux paroisses, condamnés par dogme à ne pas avoir de descendance donc à être des individus nomadisés, qui appliquent le plus souvent des politiques allant dans le sens des intérêts de l'église et non dans celui de l'intérêt vital, biologique et immédiat du peuple. Le protestantisme, pour sa part, laisse la porte ouverte à tous les subjec­tivismes, donc favorise la dissolution des communautés. De plus, l'église catholique a progressé en Germanie grâce à son alliance avec l'appareil militaire carolingien, lequel délègue à ses officiers démobilisés des fiefs, privant de la sorte les élites enracinées, nées au sein du peuple lui-même, de leur rôle naturel de guide. L'église catholique enclenche ainsi un processus d'aliénation catastrophique, qui creusera, tout au long du Moyen Age, un fossé profond entre la culture des élites et la culture du peuple (cette distinction a été bien mise en lumière par Robert Muchembled, historien français). Qui plus est, l'officier carolingien démobilisé devient individuelle­ment propriétaire du sol, jusqu'alors propriété collective d'une communauté villageoise et transmise telle quelle de génération en génération (lire à ce propos le splendide roman de Henri Béraud: «Le Bois du Templier pendu»). Le peuple devient économiquement dépendant du bon vouloir d'un officier allochtone.

 

Quand nous refusons l'occidentalisme aujourd'hui, nous ne rejettons pas simplement les enfantillages de l'American Way of Life, la fadeur de l'idéologie américaine, les horreurs de la décadence américaine par l'héroïne ou le crack, nous nous insurgeons avec une égale vigueur contre toutes les idéologies qui refusent de tenir compte de l'enracinement comme valeur primordiale. Nous sommes, pour reprendre le vocabulaire de Muchembled, du côté de la «culture du peuple» contre la «culture des élites» (nécessairement allochtones dans la définition de l'historien). Nous nions au christianisme manipulateur, à l'autoritarisme carolingien et catholique, au cléricalisme, au monarchisme coupé du peuple, toute valeur potentielle parce qu'ils nient et tuent la force jail­lissante et vivifiante de l'enracinement. Les critiques protestantes, libérales, illuministes (l'idéologie des Lumières), marxistes, etc., n'ont pas constitué des révolutions (au sens étymologique de «retour sur soi») véri­tables; elles sont restées détachées des glèbes et des chairs; elles ont tiré des plans sur la comète sans retomber dans la lourde concrétude du sol et de l'histoire; elles sont restées des joujoux d'élites bourgeoises ou embour­geoisées vivant de leurs rentes ou aux crochets de leurs amis (Marx!). Elles sont des manifestations d'occidentalisme dans le sens où l'Occident est l'assemblage hétéroclite de toutes les pensées et pratiques déta­chées des glèbes et des chairs. Lorsque nous privilégions l'usage des termes «Europe» et «européen» pour dési­gner notre vision continentale des choses, nous opérons mentalement une révolution réelle, une révolution qui nous reconduit à l'essentiel immédiat et concret, que Barrès désignait par sa belle expression: «La Terre et les Morts».

 

De ce choix philosophique, découle évidemment la nécessité de lutter sans relâche contre toutes les idéologies de manipulation que je viens de citer, de réhabiliter les réflexes religieux spontanés de nos populations, de se pencher sur le passé, de soutenir dans la pratique les cercles d'archéologie locale, de créer et d'instituer des formes d'économie qui assurent à tous les membres de notre communauté de quoi vivre décemment et de fonder des familles, de privilégier les droits collectifs et enracinés des peuples plutôt que les droits bourgeois, déraci­nés et individualistes que l'on nomme fallacieusement «droits de l'homme», sans apercevoir que l'humanité ne peut survivre que si les hommes concrets tendent la main à d'autres hommes concrets, vivent dans des foyers avec des femmes et des enfants concrets, travaillent dans des ateliers ou des fermes avec d'autres hommes con­crets, sans jamais être isolés comme Robinson sur son île. L'Occident a raisonné depuis mille ans en termes de salut individuel, lors de la phase religieuse de son développement, en termes de profit individuel, lors de sa phase bourgeoise et matérialiste, en termes de narcissisme hédoniste, dans la phase de déliquescence totale qu'il traverse aujourd'hui. Le centre et l'est de notre continent ont su mieux conserver l'idée de communauté charnelle. En Allemagne et en Scandinavie, les idéaux populistes de toutes sortes ont su donner une harmonie intérieure à la société depuis deux siècles, laquelle s'est traduite par des progrès considérables tant sur le plan intellectuel que sur le plan technique. L'Allemagne et la Suède enregistrent des succès industriels et sociaux considérables préci­sément parce que l'individualisme occidental les a moins marquées. Les peuples slaves et baltes ont traversé l'âge sombre de l'ère marxiste sans oublier leurs racines, comme le prouve quantité de faits divers de l'actualité récente, notamment en Estonie, en Moldavie, en Lithuanie et en Azerbaïdjan.

 

Dans cette optique, le recentrage de l'Europe sur elle-même ne peut se faire sur base des idéaux occidentaux et des pratiques sociales qu'ils ont générées. Le recentrage de l'Europe se fera sur base des idéaux fructueux que la philo­sophie de Herder a fait germer de Dunkerque au Détroit de Bering. Ces idéaux placent au sommet de la hiérarchie des valeurs le peuple comme porteur et vecteur d'une culture spécifique et inaliénable, hissent la solidarité com­munautaire au rang de principe social cardinal. Dans cette optique, l'autre est toujours un frère, non pas un gogo à berner, à qui soutirer du fric, un péquenaud que l'on administre à coups d'ukases, que l'on écrase d'impôts en lui contant qu'il jouit tout de même des «droits de l'homme» et qu'il n'a qu'à être bien content et s'esbaudir à la pen­sée que les p'tits chinois, eux, ils n'en bénéficient pas. Tous les défenseurs de beaux principes idéalistes sont des escobars, des escrocs, des distilleurs d'opium du peuple. L'Occident des réactionnaires et le One-World aseptisé des américanolâtres, libéraux ou ex-soixante-huitards, sont des principes de nature manipulatoire. Notre Europe, elle, n'est pas un principe, elle une terre, une terre-mère qui a enfanté dans la douleur quelques races d'hommes qui se sont entrecroisés (des Méditerranéens et des Nordiques, des Ostbaltiques et des Dinariques, etc.) puis ont pro­duit des tas de choses magnifiques qui étaient déjà inscrites virtuellement dans les gènes de leurs plus lointains ancêtres. Il faut continuer l'aventure. Il faut faire passer toutes nos énergies du virtuel au réel.

 

Robert STEUCKERS.                           

 

  

dimanche, 24 mai 2009

La quasi-réunification: l'Ouest déchante déjà!

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SYNERGIES EUROPÉENNES - Décembre 1989

La quasi-réunification: l'Ouest déchante déjà!

par Gilles TEGELBECKERS

Les journaux occidentaux, surtout ceux des trois puis-sances d'occupation, ont salué, début no-vembre, la disparition du Mur de Berlin. "Démo-cratie" oblige. Personne ne peut évidemment se déclarer partisan des barbelés, des champs de mines, ne peut idéaliser les ordres de tirer à vue, ne peut applaudir à la mort des malheureux abat-tus froidement pour avoir voulu quit-ter la RDA. Mais dès que le Chancelier Kohl a parlé de "procéder à l'élaboration de structures confédéra-tives", dès que le peuple, à Leipzig et à Dresde, a scandé sa volonté de réunification, dès que les ci-toyens de la RDA ont fait la chasse aux flics de la po-lice politique et qu'un général de cette même police a échappé de justesse au lynchage, les politiciens de l'établissement en Occident et les prêtres du journa-lisme bien-pensant ont chan-gé de disque. On dirait de-puis deux ou trois se-maines qu'ils regrettent les vo-pos, les chiens policiers, les mines et les barbelés. Au moins, du temps d'Ulbricht, les choses étaient simples: les mauvais étaient de l'autre côté et, eux, les "généreux démocrates" étaient ici, parmi nous, pour nous dispenser leurs bienfaits, en détour-nant acces-soi-rement les deniers publics pour satisfaire quelques caprices.

L'Allemagne, paume de la "main Europe"

L'euphorie de la chute du Mur est bien finie. Les Oc-cidentaux s'aperçoivent que leurs construc-tions poli-tiques, la CEE et l'OTAN, n'ont été que des structures provisoires qui contredisent les lois de la géopolitique. L'Europe est une et indi-visible: il ne peut y avoir d'Europe à long terme sans l'inclusion des pays du COMECON et sans le retour de la Russie dans le giron européen commun. Cette unité continentale n'est pas pos-sible sans la réunification: l'Europe, pour parler en termes d'allégorie, est une main, avec une pau-me, en l'occurrence l'Allemagne avec la Hongrie et la Tchécoslovaquie, et cinq doigts insulaires ou pénin-sulaires (Iles Britanniques, Scandinavie, Ibérie, Italie et Balkans). Sans pau-me, pas de cohésion. Rien que des doigts isolés, repliés sur eux-mêmes. Dans la même logique, l'Ukraine et la Biélorussie forment le poignet, tandis que la Russie-Sibérie forme le bras. La France actionne le pouce ibérique: sa double ou-verture sur l'Atlantique et la Méditerranée en fait la frange laté-rale de la paume. Elle est de ce fait indissoluble-ment liée à la paume et la politique de vouloir la dislo-cation de la paume va fina-lement à l'encontre de ses intérêts. Le processus de cet automne constitue en quelque sorte la restructuration de la "main Europe". Les troubles en Biélorussie et en Ukraine signalent que le poignet participe lui aussi à ce travail de restructuration.

Le défi de Kohl, qui a lancé un plan de réunification en dix points, provoque un sursaut chez les Alliés occi-dentaux et à Moscou. Kohl, en formulant son plan, cherche à atteindre plu-sieurs objectifs. D'abord, cou-per l'herbe sous les pieds de Schönhuber, le dyna-mique leader des Républicains. En arrêtant la progres-sion républi-caine, il arrête l'hémorragie de son propre parti. Il garde pour lui les voix des réfugiés silésiens et poméraniens, qui, avec leur famille, donnaient à la CDU/CSU le pourcentage de suffrages né-cessaires à obtenir la majorité. Ensuite, il tente tout bonnement de faire avancer le processus de réunification auquel aspi-rent tous les Allemands. Les dix points de Kohl inquiètent Gorbatchev, pas tant parce que les Russes craignent la réuni-fication (au fond, ils la souhaitent pour diminuer la puissance des Etats-Unis) mais parce que cet appel, venu trop tôt, a déclenché des troubles en RDA, accéléré les choses en Tchécoslovaquie, pro-voqué des incidents avec les troupes russes stationnées là-bas et fragilisé la position de Gorbatchev qui doit encore lutter chez lui contre les internationalistes anti-européens et certains staliniens partisans du statu quo.

Dans l'Europe de demain, il y aura place pour tous

L'ouverture des frontières de la RDA, de la Hongrie et de la Tchécoslovaquie, la libérali-sation en Pologne, constituent un processus de suture de notre continent. La libre circulation des personnes et des marchandises provoquera un bouleversement pacifique et une multi-plica-tion des échanges économiques. La CEE ne peut plus se replier sur elle-même: elle est contrainte de s'élargir jusqu'aux frontières de l'URSS et puis de s'insinuer jusqu'aux rives de la Mer d'Okhotsk. S'il n'y a plus de barrière militaire, les lois de la géopoli-tique peuvent jouer à fond, sans restriction. Elles don-nent tort à l'Occident, à l'espace où sont nés les prin-cipes désincarnés du libéralisme, qu'il soit de mouture anglo-saxonne ou française. Mitterand et Thatcher, parce qu'ils ne se sont pas débarrassés de vieux ré-flexes obsolètes, croient que leurs pays seront margi-nalisés devant une Allemagne réunifiée. Or, dans le processus de restructuration euro-péen-ne, il y place pour tous: les Espagnols, par exemple, qui sont géo-graphiquement coupés de l'Europe dite de l'Est, ont élaboré un plan d'aide et de coopération très cohérent. Le Président von Weizsäcker a proclamé à Moscou que Fran-çais et Allemands pouvaient se partager les investissements en URSS et qu'il n'y avait pas en ce domaine de concurrence franco-alle-mande.

Il est évident que les systèmes français et britannique sont conçus pour vivre repliés sur eux-mêmes, en cul-tivant une sorte de nostalgie impériale désuète. Il est temps de proclamer dans ces deux pays une peres-troïka qui ba-layerait les institutions résiduelles et en édifie-rait de nouvelles. Rien ne sert de bouder comme le fait Mitterand, tiraillé entre une vision gaul-lien-ne grande-européenne et un repli sur l'Occi-dent avec sa bonne vieille laïcité et sa pensée individualiste. Rien ne sert non plus de ressortir la vieille alliance franco-russe contre le retour de l'Allemagne: contrairement au passé, les peuples de la Zwischeneuropa  (l'Europe d'entre-deux) marcheraient cette fois du côté allemand. Et il n'est pas sûr que les Baltes et les Ukrainiens fe-ront bloc avec les Russes. Le modèle fédéral allemand et la constitution fédé-rative soviétique (même si du temps de Staline, Khroutchev et Brejnev, elle a été manipulée dans le sens de la russification) sont bien plus séduisants que le jacobinisme français, toujours incapable de se réformer, d'accorder un statut d'autonomie à ses provinces selon le modèle des Län-der  allemands. La solution: octroyer aux pro-vinces françaises le même statut que les Länder  allemands, dans une Europe où ce statut se serait généralisé (les Polonais de Solidarnosc  y songent aussi). Le centra-lisme couplé à l'in-dividualisme libéral affaiblissent; la notion de peuple et le centrage des énergies populaires autour d'échelons administratifs intermédiaires, de re-lais, fédèrent les forces et les amplifient.

Les réactions en Israël

Mais les réactions les plus intéressantes à la nouvelle donne en Europe nous sont venues d'Israël. Le Mur de Berlin était le symbole d'une punition, écrit Mena-chem Shalev dans le Jerusalem Post.  Il avait une si-gnification "métaphy-sique". Sa disparition clôt l'univers mental de notre après-guerre, au sein duquel le sionisme avait pu se déployer. Benjamin Begin, fils de l'ancien ministre et militant de l'Irgoun, entend combattre la réunification en toutes circonstan-ces. Pire, l'Europe risque de revenir à l'avant-plan et le conflit du Proche-Orient de déchoir en importance. La fin de la guerre froide réduira l'importance stratégique de la Palestine pour la puissance protectrice américaine. Un député de la Knesseth a dit à ce propos: "Nous pourrions devenir une sorte de Sri Lanka proche-oriental, un phénomène marginal de l'histoire mondiale". A Malte, Bush a déclaré que pour le Proche-Orient, aucune divergence de vue ne le séparait de Gorbatchev. Ce qui signifie en clair que les que-relles du Proche-Orient ont cessé de préoc-cuper les deux grands et les Européens. Les cortèges d'assassinats brutaux, revendiqués au nom de principes religieux fumeux, qu'ils soient juifs, chrétiens ou musulmans, ont fini par lasser. Le Liban et la Pa-lestine devront désor-mais régler leurs propres pro-blèmes sans inter-vention étrangère. Il est temps par ailleurs que les retombées de ces conflits stupides, is-sus d'un âge théologique, cessent d'importuner les Euro-péens. Des mesures doivent être prises avec éner-gie pour que les protagonistes de ces barbaries ne puissent étendre leurs fantasmes sur le sol sacré de notre Europe. Le panier à crabes pro-che-oriental ne vaut pas qu'on lui sacrifie le moindre matelot breton: que Mitterand le sache et que les foudres de guerre, nostalgiques d'un passé colonial, se le mettent en tête. Autant que l'argent du contribuable français aille sou-tenir une usine de chaussures en Ukraine... Une bon-ne godasse vaut mieux qu'un précepte théolo-gique, qu'une sourate absconse ou qu'une icône sur la crosse de fusil d'un fou de dieu libanais.

Les Juifs réformistes américains ont d'ailleurs très bien compris que le Proche-Orient ne valait plus un kopeck. Lors de leur rassemblement à la Nouvelle-Orléans, quatre conférences sur 125 seulement trai-taient encore d'Israël. Quant à l'ex-cellent historien is-raëlien Dan Diener (Univer-sité de Tel Aviv), il a réfuté d'un haussement d'épaule l'argument qui décrétait le Mur de Berlin symbole d'une punition: "ce sont des Al-lemands qui l'ont construit et cela n'a rien à voir avec l'holocauste; il n'y a pas de rapport logique entre la discorde inter-allemande et Auschwitz".

L'Europe revient au centre de nos préoccu-pations. Le Proche-Orient et l'Afrique s'estom-pent à l'horizon de nos soucis. Il ne s'agit pas d'un repli sur soi définitif de la part des Eu-ropéens mais d'un recentrage légi-time, prélude nécessaire à notre retour en force sur la scène historique. Cette fois, nous ne serons plus dés-unis mais rassemblés. Avant cette heure décisive, une perestroïka devra souffler sur la partie occidentale de notre continent. Une perestroïka doublée d'une vo-lonté énergique de balayer les corruptions. Comme à Leipzig. Nous sommes tous des manifestants de Leipzig. Nous sommes tous des citoyens de Dresde en colère.

Gilles TEGELBECKERS.

 

vendredi, 08 mai 2009

La croisade européenne pour l'indépendance des Etats-Unis

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

 

La Croisade européenne pour l'indépendance des Etats-Unis

Jacques de LAUNAY, La croisade euro­péen­ne pour l'indépendance des Etats-Unis 1776-1783,  Albin Mi­chel, 1988, 258 pa­ges, 120 FF.

 

Cette étude de Jacques de Launay dégage des événe­ments de la fin du XVIIIième siècle une constante: la volonté de Louis XVI et de Marie-Thérèse de cons­truire la paix en Europe par une politique d'alliances dynastiques. Cette unité eu­ropéenne, re­groupant au moins les Bourbons de France et d'Espagne et les Habs­bourgs d'Au­triche, se serait di­rigée contre la puissance mari­time qu'était l'Angleterre. La politique de Louis XVI visait à trans­former le bloc européen en une puissance navale ca­pable de damer le pion à la thalassocratie britannique. C'est la raison essen­tielle de l'intervention française aux côtés de Washington, soutenue par une volonté de venger l'affront canadien et le désastre du Traité de 1763, qui avait ôté à la France ses possessions sur les rives du St. Laurent. Jacques de Launay décrit aussi les avatars ultérieurs des «Amé­ricains», aristocrates et francs-maçons fran­çais qui participèrent à l'aventure américaine. Leurs idéaux ne correspondaient ni à l'absolutisme ni au ja­cobinisme. Beaucoup connurent l'exil, cer­tains d'en­tre eux périrent sous le couperet. A la fin du livre, dans un jeu de douze annexes, l'auteur nous com­munique une foule de ren­seignements divers sur l'é­poque de la guerre d'indépendance américaine (Robert Steuckers).

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dimanche, 26 avril 2009

Nog eens 60 jaar NAVO?

Nog eens 60 jaar NAVO?

lundi, 23 février 2009

Le secret américain de Nicolas Sarközy

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Le secret américain de Nicolas Sarkozy

 

Par Philippe Bourcier de Carbon*

Ex: Journal du chaos 7, 2009

Dans les coulisses du pouvoir, il y a ceux mis au devant de la scène, ceux qui restent dans l’ombre
et, surtout, ceux des tréfonds que nul n’entrevoit jamais. Qui connaît Frank George Wisner ? Ce
senior américain, diplomate et homme de réseaux, pourrait bien être la clé pour expliquer
l’ascension fulgurante de Nicolas Sarkozy. Le chef de l’Etat français bénéficie là du meilleur
conseiller occulte pour jouer un rôle dans la marche du monde. A condition que le Président
continue de servir avant tout les intérêts de l’Empire américain, que celui-ci soit dirigé par Bush ou
Obama.

« Un néoconservateur américain à passeport français » : la formule cinglante d’Eric Besson au sujet de
Nicolas Sarkozy, formulée en vue de la campagne électorale de 2007, demeure d’une lucidité
implacable. Le nouveau ministre chargé de l’immigration n’ira sans doute plus remettre en question
le patriotisme de son mentor. Il n’en demeure pas moins que le mystère du succès rapide dans la
conquête du pouvoir suprême par Nicolas Sarkozy passe par l’analyse de son rapport personnel
aux Etats-Unis.

A cet égard, le destin peut s’avérer facétieux lorsqu’il veut avantager un jeune ambitieux désireux
d’atteindre les sommets. C’est vers la fin des années 70 que le jeune loup du RPR saura tirer profit
d’une fortune incomparable : le remariage de sa belle-mère, Christine de Ganay, avec un
personnage prometteur de la vie politique américaine, Frank George Wisner.

Celui-ci avait déjà hérité d’une charge lourde : le patronyme et la carrière sulfureuse d’un homme
exceptionnel, dans ses coups d’éclat comme dans sa folie, Frank Gardiner Wisner (1909-1965),
cofondateur de la CIA. Le père Wisner, impliqué dans les renversements du pouvoir au Guatamala
et en Iran, restera célèbre pour l’opération Mockingbird (un noyautage réussi des médias
américains par des agents de la CIA), avant de se suicider en 1965, victime de démence. Né en
1938 à New York, diplômé de Princeton, le jeune Frank George ne marchera pas exactement dans
les pas de son père mais suivra plus habilement un tracé parallèle : la diplomatie, dont on connaît
les passerelles avec le monde de l’espionnage. Il apprendra ainsi l’arabe au Maroc dans son
détachement effectué pour le compte du Département d’Etat avant un bref passage par Alger
après l’indépendance et un long séjour au Vietnam. De retour à Washington en 1968, il sera chargé
des affaires tunisiennes. Plus tard, après la spécialisation dans les questions asiatiques et arabes,
Frank George Wisner exerça le poste d’ambassadeur en Zambie, en Egypte, aux Philippines et en
Inde.

Derrière ces honorables activités, qui ont culminé par un poste de sous-secrétaire d’Etat sous
Clinton et, plus récemment, dans sa médiation pour la Troïka dans le règlement de la crise au
Kosovo, Frank G. Wisner demeure, selon ses détracteurs, la clé de voûte dans l’exécution de
l’espionnage économique pour le compte de la CIA. Mieux encore, l’homme est la caricature du
personnage multicartes et influent, présent dans tous les centres réels ou fantasmés du pouvoir
parmi lesquels les fameux Council on Foreign Relations ou le groupe Bilderberg. Mais c’est en 1997
qu’un tournant s’opère : après avoir longtemps manoeuvré dans le monde feutré de la diplomatie et
des renseignements, Wisner se risque à mélanger encore plus les genres en rejoignant, au sein de
son conseil d’administration, l’entreprise Enron, la célèbre compagnie énergétique qui fera scandale
quatre ans plus tard et dont la gigantesque fraude en Californie, portant sur des milliards de
dollars, ne sera jamais exactement détaillée, « grâce » à la disparition des milliers de pages
caractérisant la fraude fiscale dans la destruction des bureaux de la SEC, gendarme américain des
opérations boursières , lors de la chute de la Tour 7 du World Trade Center.

Ironie du sort, ou étrange coïncidence, la sécurité de ce gratte-ciel (effondré alors qu’il ne fut pas
percuté par un avion en ce jour du 11 Septembre 2001) relevait de la compagnie Kroll Associates,
qui appartenait alors à l’AIG, assureur dont Wisner est le vice-président . S’il est vrai que les
entreprises prestigieuses sont souvent interconnectées de par leurs administrateurs, il est notable
de constater la récurrence curieuse de Wisner dans les anomalies du 11 Septembre. Ainsi, pour
résumer, l’homme, spécialiste du monde musulman et de l’espionnage économique, responsable
haut placé de Enron et de l’AIG, échappe à toute poursuite judiciaire lors du scandale Enron, jamais
complètement décrypté de par la destruction des détails compromettants lors de la chute
controversée d’un immeuble du World Trade Center qui abritait également, autre heureuse
coïncidence, les bureaux de la CIA dédiés précisément à l’espionnage économique…
Quel rapport dès lors entre ce personnage sulfureux et Nicolas Sarkozy, mis à part le lien familial
d’antan ?

A priori, il serait logique de présumer que le temps et la distance géographique auront
naturellement creusé le fossé entre le chef de l’Etat et la famille de l’ancienne belle-mère. Il n’en est
rien. Pour preuve, la campagne électorale de l’UMP qui a porté triomphalement au pouvoir, et dès
la première tentative, Nicolas Sarkozy, disposait dans ses rangs d’un acteur discret, responsable de
la section anglophone, mais dont le nom est suffisamment éloquent : David Wisner. Celui-ci semble
également reprendre le flambeau de la lignée Wisner puisqu’il a intégré le Département d’Etat en
septembre dernier, après des études d’arabe.

Et au-delà du légitime renvoi d’ascenseur du chef de l’Etat envers le fils de son parrain d’outreatlantique,
un autre fait passé inaperçu mérite d’être évoqué, non comme la preuve mais plutôt
comme l’indice de la volonté présidentielle d’occulter l’existence et les agissements troubles de
Wisner. S’il s’avère à l’avenir que les fameux délits d’initiés opérés à la veille du 11-Septembre ont
été le fait de citoyens américains avertis, dont le point commun serait d’être à la jonction du
renseignement et de la finance, alors il ne serait guère étonnant de voir figurer sur la liste de ces
personnes au vent d’un « attentat terroriste imminent » un certain Frank George Wisner. Outre
qu’il ait bénéficié de la destruction du dossier fiscal Enron tout en étant dans le même temps
responsable de la sécurité du World Trade Center via Kroll Associates ( détenue par AIG), une
réçente réaction de Nicolas Sarkozy pourrait laisser penser que le silence en la matière doit
s’imposer.

En effet, selon le Canard Enchaîné du 24 septembre 2008, le Président avait vivement critiqué le
Pdg de la chaîne info internationale, France 24, pour avoir organisé un débat sur la « théorie du
complot » autour du 11-Septembre. Cette réaction de Nicolas Sarkozy pourrait prêter à sourire si
elle venait simplement confirmer sa propension légendaire à tout régenter, y compris la
programmation audiovisuelle. Mais compte tenu de l’implication éventuelle d’un de ses proches
dans les coulisses logistiques et financières de l’attentat du World Trade Center, la colère
présidentielle prend une tout autre tournure. De par le signal qu’il envoie ainsi aux journalistes
mainstream tentés d’évoquer à l’antenne la question des zones d’ombre du 11-Septembre, le
message relève plus de la censure tacite d’un sujet grave que de l’irritation d’un téléspectateur
capricieux. Sans aller jusqu’à faire de Wisner un des instigateurs du 11-Septembre, il est plus
vraisemblable de supposer que sa position et ses relations l’ont idéalement avantagé pour faire

partie de ceux à avoir, « au mieux » anticipé l’événement, au pire participé par une quelconque
assistance matérielle, en l’occurrence la mise à disposition de la gestion de la sécurité électronique
des 3 tours effondrées, de par l’implosion de bombes pré-installées selon certains scientifiques
spécialistes de la démolition contrôlée.

Au-delà des inévitables spéculations sur le rôle exact de Wisner dans l’opération à multiples
facettes du 11-Septembre, force est de constater que l’homme dispose des diverses relations
accumulées depuis près de 50 ans dans les élites dirigeantes des Etats-Unis et les cercles
internationaux pour pouvoir, si besoin est, favoriser le jeune politicien impétueux que son épouse
française affectionne. Nicolas Sarkozy doit beaucoup à Jacques Chirac pour son maillage lent et
progressif du corps électoral français. Il doit sans doute davantage encore à Frank George Wisner
pour avoir obtenu l’assentiment et la faveur de l’hyper-puissance occidentale.
Les parrains occultes du Président et méconnus du citoyen sont souvent les plus redoutables.

* Philippe Bourcier de Carbon est démographe à l'Ined (Institut national des études démographiques).

jeudi, 18 décembre 2008

La crise de l'idéal démocratique en Occident?

La crise de l’idéal démocratique en Occident ?

« Ce que nous sommes en train de voir ce n’est pas seulement la fin de la guerre froide ou simplement le passage d’une période particulière de l’après-guerre, mais la fin de l’histoire elle-même : c’est-à-dire la fin de l’évolution idéologique de l’homme et l’universalisation de la démocratie libérale occidentale comme forme finale du gouvernement des hommes » ! » (Francis Fukuyama, « The End of History and the Last Man », 1992.)

Depuis la chute du Mur de Berlin et l’éclatement de l’URSS, la prophétie de Fukuyama semble accomplie : la démocratie libérale occidentale règne sur le monde. Sa cote est à son zénith (1). Plus de 60% des pays dans le monde sont des démocraties ; celles-ci n’étaient qu’au nombre de dix en 1900. Pourtant, alors même qu’il paraît s’imposer au monde entier, l’idéal démocratique est de plus en plus fragilisé. Cinq courants au moins tendent aujourd’hui à le saper chez ceux qui en sont en principe les plus ardents défenseurs. Les voici par ordre inverse d’apparition, en commençant donc par le plus récent.

1. Courant géopolitique

Depuis les débuts de leur histoire, les Etats-Unis ont régulièrement invoqué l’idéal démocratique pour légitimer toutes leurs interventions militaires, mais aussi pour réduire ou fragiliser les autres puissances mondiales : les empires coloniaux britannique et français, et bien entendu l’URSS. La démocratie reste une arme contre l’influence russe dans les Balkans, en Ukraine ou en Asie centrale, mais elle n’a plus guère de marge de progression. Et surtout, l’expansionnisme américain est en phase d’épuisement ; le discours démocratique qui lui est consubstantiel s’en trouvera donc affaibli.

Au même moment, l’argument démocratique menace de faire boomerang. Les Russes ont longtemps répondu aux invocations démocratiques sur le ton de l’ironie ou de la vertu outragée. Mais la guerre d’Ossétie du Sud leur a montré que cela ne suffisait pas. Sûrs de la légitimité de leur intervention, ils ont été douloureusement surpris de constater les interprétations qui en étaient données dans la presse occidentale. « L’Occident a armé la Géorgie, le régime Saakachvili a été complètement subventionné par l’Occident et présenté comme un parangon de démocratie », déplorait ainsi Valeri Lochtchinine, représentant permanent de la Russie à l’ONU (dépêche RIA Novosti, 26 août 2008). Cette crise semble avoir provoqué une certaine prise de conscience chez les Russes : hypocrisie pour hypocrisie, ils pourraient invoquer eux-mêmes la démocratie. Il est probable que ce sera davantage le cas désormais, avec des arguments qui vaudront bien ceux du camp américain. Dmitri Medvedev déclarait récemment que la Russie était prête « à renforcer son potentiel de défense et à protéger les citoyens russes et la démocratie » (dépêche RIA Novosti, 1er octobre 2008).

Les Russes commencent à peine à découvrir le concept. Mais quand ils le maîtriseront à leur tour et que les débats n’opposeront plus la démocratie à l’expansionnisme russe mais la démocratie vue par les Américains à la démocratie vue par les Russes (voire la démocratie à l’expansionnisme américain), l’idéal démocratique perdra fatalement de son caractère consensuel.

2. Courant stratégique

Avant même le début de leur intervention en Irak en 2003, les Américains avaient compris que l’argument des armes de destruction massive allégué par le président George W. Bush dans son discours sur l’état de l’Union en janvier 2003, puis par le secrétaire d’Etat Colin Powell à l’ONU en février 2003, ne tiendrait pas longtemps. Dès le 26 février, trois semaines avant le début de l’intervention militaire, le président Bush commençait à soutenir que les Etats-Unis devaient apporter la démocratie à l’Irak (2). Ce thème est par la suite devenu dominant ; le président Bush l’a généralisé en affirmant que « l’engagement en faveur de la démocratie doit tenir une place centrale dans la politique américaine au cours des prochaines décennies » (3).

Aujourd’hui, la priorité démocratique est expressément remise en cause par de nombreux acteurs et observateurs de la politique américaine. Dans leur dernier livre (4), Brzezinski et Scowcroft, anciens conseillers des présidents Carter et Bush père, regrettent ouvertement que les Etats-Unis aient réclamé des élections chez les Palestiniens, qui ont mené à une victoire du Hamas. Instruits par l’expérience, ils se déclarent hostiles à des élections libres en Egypte, de peur qu’elles ne soient remportées par les Frères musulmans, « ils ne voudraient pas voir en Arabie Saoudite une élection à laquelle Oussama ben Laden se présenterait face à un membre de la famille royale », et affirment qu’il n’appartient pas aux Etats-Unis de réclamer la démocratie en Chine. D’autres notent qu’au Pakistan et en Turquie l’armée est un allié plus fiable que les urnes. L’évolution de la situation en Irak et l’effondrement de la popularité du président Bush provoquent ainsi des dégâts intellectuels collatéraux au détriment de l’idéal démocratique.

3. Courant économique

À l’instar de Milton Friedman, beaucoup de théoriciens et d’hommes politiques ont longtemps cru ou affecté de croire que la liberté des échanges économiques faisait le lit de la démocratie. L’idée arrangeait beaucoup de monde puisqu’elle légitimait le développement du commerce avec la Chine. Pourtant, on sait depuis longtemps que la démocratie n’est pas une condition du libéralisme économique. Tant que ce constat reposait sur des exemples relativement marginaux comme Singapour, Taiwan ou les EAU (Emirats arabes unis – NDLR), cette idée pouvait être consensuellement mise en parenthèse. Quant au Chili de Pinochet, il était si disqualifié que son cas ne pouvait fonder de réflexions déviantes.
Il en va autrement de la Chine, dont l’expansion économique se poursuit à un rythme effréné sans guère de signes de progrès démocratique. Il devient de plus en plus difficile de faire semblant de ne pas le voir, et les réflexions sur d’éventuels avantages économiques de la dictature se répandent au point d’alarmer des observateurs qui ne sont pas des adversaires du marché. « Bien entendu, nul ne met vraiment en cause la démocratie », s’inquiétait ouvertement Roger de Weck, éditorialiste des « Echos » (5). « Mais à force de côtoyer des régimes autoritaires, cela pourrait finir par détonner. »

La crise financière apporte de l’eau à ce courant. Pourtant réputées bondées de créances douteuses, les banques chinoises y résistent à ce jour mieux que celles de l’Occident. Comme l’a noté Richard Spencer (6), correspondant de « The Telegraph »à Pékin, les démocraties occidentales ont tenté au-delà de toute raison de satisfaire des acheteurs de logements, qui pèsent lourd dans le corps électoral ; la Chine a pu s’en dispenser et a donc échappé au dérapage des prêts « subprime ».

4. Courant technocratique

Ce courant va en s’affirmant depuis de nombreuses années en parallèle avec l’interventionnisme public. Elections et pressions politiques perturbent les plans des hauts fonctionnaires et des gouvernements qui, au lieu de se plier à la règle démocratique, cherchent à s’en affranchir. Une partie des innovations institutionnelles des soixante dernières années répondent clairement à cet objectif. Ainsi la construction européenne favorise-t-elle les discussions non plus de fonctionnaires à politiques mais de fonctionnaires nationaux à fonctionnaires européens. Les intercommunalités tendent, elles aussi, à mettre dans une certaine mesure l’action publique locale à l’abri du corps électoral. Bien entendu, ce courant ne remet pas en cause formellement la démocratie, il ne théorise pas sa démarche. Cependant, on pourrait dire que celle-ci revient à effectuer, en écho à la dichotomie maurrassienne, une distinction entre « politique légale » et « politique réelle ».

Ce courant est, lui aussi, renforcé par la crise financière. Aux Etats-Unis, l’administration Bush a été profondément ulcérée du rejet du plan Paulson I par le Parlement, qui l’a obligé à travailler sous pression pour développer un plan Paulson II boursouflé par les concessions à de multiples groupes de pression. En Europe, les gouvernements ont préféré une démarche de fait accompli. En France, la création de la Société de prises de participation de l’Etat est intervenue une semaine avant d’être annoncée à l’Assemblée nationale par le premier ministre le 8 octobre. Les autres pays européens ont fait de même ; « Gordon Brown décide la nationalisation partielle de banques britanniques », titraient « Les Echos » (7), évoquant un engagement de 635 millions d’euros.

5. Courant démocratique

« Pas de liberté pour les ennemis de la liberté », proclamait Saint-Just en 1793. Dans son sillage, certains se sont toujours souciés de déterminer à la place des électeurs ce qui est une démocratie acceptable ou pas. Ce souci n’est pas uniquement idéologique : assez naturellement, les élus en place tentent de se protéger contre les nouveaux venus. La montée des mouvements dits « populistes » a donné une nouvelle impulsion à ce courant en Europe. Le premier signal fort a probablement été donné par le parti conservateur britannique d’Edward Heath quand il a privé de ses responsabilités le député britannique Enoch Powell dès le lendemain de son célèbre discours du 20 avril 1968, pourtant approuvé selon un sondage par 74% des électeurs.

Les socialistes français ont cessé de proclamer la supériorité démocratique du système proportionnel sur le scrutin majoritaire par circonscriptions à partir du moment où, en l’instaurant, ils ont ouvert l’Assemblée nationale au Front national. Tout succès d’un parti populiste en Europe entraîne une réflexion non sur la politique à suivre pour satisfaire le corps électoral mais sur les mesures institutionnelles à prendre pour mettre hors circuit une fraction de celui-ci. Cette démarche à la Saint-Just est systématique et parfois explicite ; tous les pays de l’Union européenne ont ainsi appliqué des sanctions contre l’Autriche quand des membres du Fpö ont été nommés ministres en 2000.

La sélection entre bonne et mauvaise démocratie n’est pas réservée aux populistes. On l’a bien vu avec le refus systématique des gouvernements de se plier au résultat des référendums européens quand il était négatif. Mais c’est probablement à propos du populisme que ce courant s’affirmera dans les prochaines années. Car il pourrait un jour rejoindre le premier courant, le courant géopolitique : quand la Russie aura compris le potentiel que lui offrent les mouvements « populistes » dans une perspective de retournement du discours démocratique à son avantage, le krach de l’idéal démocratique occidental ne sera sans doute pas loin.

Charles Rupiquet 02/12/08
Source : Correspondance Polémia 07/12/08

Notes :

(1) L’indice CAC 40 a atteint le 4 septembre 2000 un sommet historique de 6.922 points.
(2) Discours du président George W. Bush, 26 février 2003 :
http://www.whitehouse.gov/news/releases/2003/02/20030226-...
(3) Discours du président George W. Bush, 6 novembre 2003 :
http://www.whitehouse.gov/news/releases/2003/11/20031106-...
(4) Zbigniew Brzezinski et Brent Scowcroft, « America and the World », Basic Books, New York, 2008.
(5) « Les Echos », 18 décembre 2007.
(6) Blog du 16 octobre 2008 :
http://blogs.telegraph.co.uk/richard_spencer/blog/2008/10...
(7) « Les Echos », 9 octobre 2008.

samedi, 13 décembre 2008

Envers du rêve américain

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Envers du rêve américain

Article paru dans le numéro 30 ( épuisé) de Rébellion (http://rebellion.hautetfort.com/

 

Rébellion n’a jamais fait la confusion, dans son opposition à l’hégémonie mondiale de l’impérialisme américain, entre le peuple américain et son gouvernement. Beaucoup d’américains savent que lorsque leurs politiciens et leurs médias évoquent l’intérêt « national » des Etats-Unis,  il s’agit de l’intérêt de ceux qui dominent, contrôlent, possèdent et  influencent l’économie américaine et que la plupart des conflits provoqués, depuis deux siècles,  par les dirigeants des Etats-Unis le furent pour asseoir et sauvegarder la position  dominante du système capitaliste, le discours officiel légitimant cette politique d’agression au nom de la défense de la liberté et de la démocratie n’étant que du vent.

 

Société du capitalisme triomphant, l’histoire des Etats-Unis offre l’exemple le plus parfait de la réalité de la lutte de classes : un combat entre les puissances de l’argent et les classes populaires. L’accaparement par une minorité oligarchique des richesses d’une nation pour son seul profit. On connaît l’histoire du génocide indien et de l’esclavage, mais on parle peu de la longue lutte des petits paysans expropriés par les riches compagnies et des ouvriers exploités. Rares sont ceux, qui en Europe, connaissent la longue lutte des syndicalistes révolutionnaires américains ou des populistes agrariens pour arracher aux financiers des conditions de vie et de travail décentes. Et comment ses mouvements furent réprimés – souvent dans le sang- par le gouvernement américain. L’American Way of life que l’on a vendu à la terre entière n’est qu’un mirage qui ne résiste pas à l’éclairage de l’histoire.

 

 

 

Il est vain d’entreprendre la caractérisation précise d’une société en quelques lignes, et a  fortiori celle de la société américaine. A la démesure des échelles du continent nord-américain vient s’ajouter la diversité d’un peuplement issu de vagues d’immigration successives. Quelques traits essentiels sont communs à l’ensemble de l’Amérique en raison de l’uniformisation culturelle, intellectuelle et émotionnelle dont sont responsables les médias.

 Le plus frappant en arrivant aux Etats-Unis, et en particulier à Los Angeles, est l’impression de déjà vu qui vient à l’esprit : sensation à la fois irréelle de se déplacer dans un décor de cinéma mais aussi tellement banale car le moindre signe fait déjà partie intégrante de l’univers dans lequel nous baignons. La ville américaine, à l’exception de quelques grandes métropoles comme New York, Washington ou San Francisco, imbrication de pavillons individuels semblables, de centres commerciaux et autres stations-service, est la parfaite illustration de cette monotonie et de cette banalité. La société américaine est à son image : terriblement ennuyeuse. Si l’Américain moyen est en général souriant et sympathique, il est en revanche privé de toute originalité et spontanéité. Chez lui, tout est planifié jusqu’au plus infime détail. Ce conformisme, inscrit dans la mentalité puritaine américaine, auquel s’ajoute le contrôle permanent des faits et gestes des individus – watching neighborhoods, dénonciation des infractions aux autorités, contrôle strict des ventes de tabac et d’alcool avec vérification d’identité obligatoire (Selling alcohol (tobacco) to any person under 21 (18) is a federal crime), interdiction de fumer dans les lieux publics s’accompagnant d’une ostracisation des fumeurs… - donnent l’impression de vivre dans une société oppressive. Les aéroports, avec leur litanie de messages coercitifs Smoking is prohibited, Unattended vehicles will be towed away at owner’s expense,…, et la multiplication des procédures de contrôle des passagers, procédures qui se sont considérablement renforcées ces dernières années suite au 11 septembre 2001,  en sont l’expression paroxystique. Il y a finalement peu de liberté au pays de la liberté, hormis celle d’entreprendre (et de posséder des armes). Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les Américains, dans leur grande majorité, sont favorables à cette surveillance. Pour eux, ces dispositifs de contrôle sont synonymes de sécurité et sont le prix à payer pour une grande liberté au sein d’espaces sécurisés.

 

  La société américaine est en effet dans l’ensemble craintive car l’Amérique ne fait plus figure de sanctuaire suite aux attentats du 11 septembre, que nombre d’Américains considèrent comme la plus grande catastrophe de l’histoire de l’humanité (sic), qu’elle est le pays du déchaînement de la violence, dont les carnages dans les universités et plus généralement le nombre de morts par arme à feu sont les aspects les plus visibles, et de l’insécurité sociale - licenciements sans préavis, absence de couverture sociale et médicale, coût des soins prohibitif… « Si les Américains ont gardé un sens aigu de l’intérêt individuel, ils ne semblent pas avoir préservé le sens qui pourrait être donné collectivement à leurs entreprises (1)». D’où l’individualisme exacerbé qui se manifeste à tous les échelons de la société, renforcé par la distinction entre élus et non élus issue de la doctrine puritaine de la prédestination, sentiments conduisant à considérer que les plus démunis (36 millions d’américains, soit 10,5 % de la population, vivaient sous le seuil de pauvreté en 2006 (2)) sont responsables de la situation dans laquelle ils se trouvent.

 

L’autre conséquence est la solitude dans laquelle vivent de nombreux Américains. Comme le décrit très bien Jean Baudrillard, « c’est la scène au monde la plus triste, plus triste que la misère, plus triste que l’homme qui mendie est l’homme qui mange seul en public (3)». Il est ici monnaie courante de voir la majorité des tables des fast-foods occupées par des personnes seules. Envers du rêve américain.

Autre valeur capitale pour comprendre la société américaine est la notion de destinée manifeste des Etats-Unis, c’est-à-dire que la nation américaine ait pour mission divine de répandre la démocratie et la civilisation, initialement vers l’Ouest et désormais à la Terre entière. Elle se traduit, au niveau de la société américaine, par une absence de recul face à l’histoire et une certitude d’être toujours dans son bon droit. Ce qui exclut tout remords et même le moindre questionnement historique. Symptomatique est cette réflexion d’Ann Coulter, célèbre polémiste outre-Atlantique, au sujet des islamistes: « Autrefois, les Japonais nous détestaient, eux aussi. Quelques bombes nucléaires bien ajustées, et maintenant ils sont doux comme des agneaux (4) ». Cet exemple, bien qu’extrême, ne doit pas apparaître comme un cas isolé. En effet, dans un sondage réalisé en juillet 2005 par l’institut Gallup, 57% des Américains interrogés approuvaient l’usage de la bombe atomique contre le Japon (5). Pour un Américain, l’histoire des Etats-Unis est irréprochable. D’où l’amnésie au sujet du génocide indien, même au Smithsonian National Museum of the American Indian (6). Alors que les ennemis de l’Amérique sont considérés « comme des incarnations du mal (7)». C’est pour cela que les critiques concernant la politique du président Bush sont le plus souvent mal interprétées par les Européens : elles ne visent pas à remettre en cause « la guerre juste menée par les Américains contre le terrorisme, God bless America » mais à sanctionner l’échec militaire de cette administration et le ternissement de l’image de l’Amérique dans le monde. Les opposants au terrorisme d’Etat américain (improprement qualifié de guerre) s’insurgent contre la mort des GI’s américains (Bring our boys home), mais se désintéressent complètement du sort de la population irakienne (y a-t-il eu des protestations contre l’odieux chantage pétrole contre nourriture imposé à l’Irak durant 10 ans et ayant causé la mort d’un million d’Irakiens dont la moitié d’enfants, ou beaucoup de manifestations pour dénoncer les victimes civiles des bombardements US ?), voire critiquent « l’incapacité » des forces de police irakienne à maintenir l’ordre et à assurer la sécurité des troupes américaines présentes en Irak (sic). Leur seconde principale critique est liée à la perception de l’Amérique à l’étranger, « une Amérique narcissique, agitée et agressive [qui] a remplacé, en quelques mois, celle de la nation blessée, sympathique et indispensable à notre équilibre (8) ». Pas de remise en cause d’une guerre perçue comme légitime, mais critique d’un loser qui, au contraire de son père lors de la première guerre d’Irak, n’a pu fédérer une large coalition internationale fournissant aide militaire et financière pour le plus grand profit des Etats-Unis.

 

  Il est certain, comme le rappelle très justement Alain de Benoist, que « dans le domaine des idées, [aux] Etats-Unis, malgré le « politiquement correct », règne une liberté d’expression que nous ne connaissons pas (ou plus), [et qu’] on y est également frappé de la qualité des débats d’idées (9)». Malheureusement ces idées ne sont que peu connues hors des cercles universitaires « car la multiplication des chaînes de télévision […] contribue paradoxalement à homogénéiser l’offre (10)» et non à diffuser des idées non conformes à l’idéologie dominante.

 

Frédéric

 

Notes :

(1) Jean Baudrillard, Amérique, p. 215, Ed. Grasset.

(2) http://www.census.gov/hhes/www/poverty/histpov/hstpov2.ht...

(3) Jean Baudrillard, Amérique, p.35, Ed. Grasset.

(4) Citation d'Ann Coulter rapportée par Silvia Grilli pour le magazine Panorama, traduite et publiée dans le numéro 628 de Courrier International du 14 novembre 2002.

(5) http://www.pollingreport.com/news.htm#Hiroshima

(6) http://www.truthdig.com/arts_culture/item/20071005_the_gr...

(7) Romolo Gobbi, Un grand peuple élu : Messianisme et anti-européanisme aux États-Unis des origines à nos jours, p.18, Ed. Parangon/Vs.

(8) Emmanuel Todd, Après l’Empire : Essai sur la décomposition du système américain, p.17, Folio Actuel.

(9) Robert de Herte, L’Amérique qu’on aime, Editorial du numéro 116 d’Eléments, avril 2005.

(10) Pascal Riutort, Le résistible quatrième pouvoir, in l’Exception américaine, Collectif sous la direction de Pascal Gauchon, p. 125, Ed. PUF.

dimanche, 07 décembre 2008

Occidentalisme

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Occidentalisme

Gevonden op: http://yvespernet.wordpress.com

Een paar dagen geleden heb ik nieuwe aankopen gedaan in De Groene Waterman. Één van mijn aankopen was het volgende boek: “Occidentalisme: het Westen in de ogen van zijn vijanden” van Uitgeverij Olympus. Autheurs zijn Ian Buruma en Ashivai Margalit. Het geeft een interessante kijk op de vijandige denkwijzes tegenover het Westen. Van de anti-modernistische conferentie van Kyoto van 1942 tot en met het huidige islamisme. Ook het stuk over het verschil in denkwijze, en de onmogelijkheid om elkaar te verstaan, tussen de Russisch-Orthodoxen en de Amerikaanse protestanten is interessant. Het geeft ook goed weer hoe de aanslagen van 11 september 2001 enorme hoeveelheden symboliek met zich meedroegen.

Ook de afkeer van traditionalisten en anderen tegenover steden komt uitgebreid aan bod, met vaak verrassende citaten en anekdotes tot gevolg. Op pagina 30 bijvoorbeeld:

Friedrich Engels zag iets ‘afstotelijks’ in de stedelijke massa’s van Manchester en Londen, ‘iets waartegen de menselijke natuur rebelleert’. De stad is waar mensen van ‘alle rangen en standen langs elkaar heen drommen’, lukraak, willekeurig en vooral onverschillig”.

Een visie die ook gedeeld wordt T.S. Eliot die in zijn poëzie uithaalde tegenover de goddeloosheid van de steden. Maar ook een Sayyid Qutb, islamitisch denker, die in 1948 New York bezocht, vond de steden een afgrijselijk iets. Hij nam aanstoot aan “de atmosfeer van verleiding, de schokkende sensualiteit van het dagelijks leven en het onbetamelijke gedrag van Amerikaanse vrouwen” (pagina 36).

Een rode lijn in het boek is de clash tussen de traditionalisten, ongeacht hun culturele en religieuze achtergrond, die de “modernisten” hoogmoed verwijten. Steden worden beschouwd als plaatsen van verderf, waar de islam ze in het verleden als bakens van kennis tenmidde van woestijnen nomadische onwetendheid zag, de hoogmoed en speculatiedrang van handelaars op de beurs wordt verworpen. Wat de modernisten achterlijkheid noemen, zal door de traditionalisten als een rijkdom worden gezien. Het boek is ook een aanrader omdat het de dingen wat in perspectief zet, wat zeker nodig als men de aanslagen in Mumbai e.d. in perspectief wilt plaatsen.

Ik raad het boek dan ook zeer aan, voor de prijs (€10) moet je het alvast niet laten!

samedi, 29 novembre 2008

"Europe" et "Occident": deux concepts antagonistes

«Europe» et «Occident»: deux concepts antagonistes

 

par Claudio FINZI

 

Nos hommes politiques et nos intellectuels parlent continuellement de l'Europe et de l'Occident, comme s'il était évident que la pre­mière était contenue toute entière dans le second. L'Occident, dans une telle acception, indiquerait ainsi un ensemble formé par les pays d'Europe, surtout d'Europe occidentale, et les Etats-Unis d'Amérique, avec l'appendice canadien. En d'autres mots, l'Occident coïncide avec l'OTAN.

 

Mais si nous examinons l'origine du terme «Occident», non pas au sens géographique évidemment, mais au sens politique, nous dé­couvrons quelque chose de très différent de cette acception “otanienne”: au début du XIXième siècle, aux Etats-Unis d'Amérique, cette expression est née, non pas pour englober l'Europe dans un contexte atlantique plus vaste, mais, au contraire, pour que le jeune Etat américain prenne ses distances par rapport aux pays du Vieux Continent.

 

Nous trouvons les premières traces de cette distinction dans les dis­cours de l'un des plus intéressants présidents américains, Thomas Jefferson, dont on a fêté en 1993 le 250ième anniversaire de la nais­sance. Déjà en 1808, Jefferson affirmait que l'Amérique était un «hémisphère séparé»; ensuite, en 1812, et plus nettement encore en 1820, il évoquait un méridien destiné à séparer pour toujours «notre hémi­sphère» de l'Europe. Dans l'hémisphère améri­cain, prophétisait-il, c'est-à-dire l'hémisphère occidental, «le lion et l'agneau vivront en paix l'un à côté de l'autre».

 

L'étape suivante fut celle de la fameuse déclaration du Président Monroe, le 2 décembre 1823, par la­quelle il interdit à toute puis­sance européenne d'intervenir dans l'hémisphère occidental-améri­cain. Depuis lors, l'affirmation de cette spécificité occidentale-amé­ricaine est allé crescendo, jusqu'aux prises de position du Président Théodore Roosevelt au début de notre siècle, puis aux déclarations diploma­tiques de 1940 et de l'immédiat après-guerre. Ce qui compte, c'est que dans tous ces discours, dans toutes ces déclara­tions, dans tous ces documents diplomatiques américains, par hémi­sphère occidental, par Occident, on entend quelque chose de radica­lement opposé à l'Europe. Il ne s'agit pas seulement d'indiquer et de délimiter une sphère d'influence ou une zone de défense dans la­quelle on exclut la pré­sence de tout ennemi potentiel. Si tel était le cas, l'Occident ne serait que l'une de ces innombrables dé­nomina­tions utilisées en politique et en diplomatie pour définir un lieu ou une situation géographique ou stratégique.

 

Il s'agit de bien autre chose. En réalité, l'idée de choisir un méridien qui séparerait l'Europe de l'Occident se fonde sur l'idée que l'Occident, c'est-à-dire l'Amérique comprise comme Occident par opposition à l'Europe, serait fondamentalement différent de l'Europe dans son essence et sa signification. Cette idée se fonde donc sur la présomption que ces deux mondes, le vieux et le nouveau, sont ra­dicalement diffé­rents par nature, selon la tradition et la morale. Dans un tel contexte, l'Amérique finit par être différente de l'Europe, parce que l'Amérique est la terre de l'égalité et de la li­berté, opposée à l'Europe, terre où existent des stratifications so­ciales et où règne l'oppression. L'Amérique, comprise comme Etats-Unis d'Amérique, est la terre où l'homme bon a réussi à créer un ordre social et politique bon, tandis que l'Europe est la terre du vice et de la corruption; l'Amérique est la terre de la paix, l'Europe, celle de la dis­corde et de l'esclavage.

 

Le méridien, qui devrait séparer l'Occident de l'Europe, revêt donc une fonction de préservation des bons contre les mauvais, signale une opposition radicale et insurmontable, du moins tant que l'Europe ne re­nonce pas à ses perversités (mais sera-ce un jour possible?).

 

Ce type de raisonnement trouve ses racines dans les plus anciennes traditions politiques américaines, celles des pères fondateurs. Rappelons-nous qu'ils étaient des puritains, des protestants extré­mistes, animés par une profonde foi en Dieu et en eux-mêmes, parce qu'ils croyaient être des élus de celui-ci, contraints d'abandonner l'Angleterre pour échapper aux persécutions et aux contacts entre protestants corrompus et papistes diaboliques. Pour eux, l'Amérique était une terre vierge, où ils pouvaient construire un monde nouveau, un monde de “purs”, un monde pour le peuple de Dieu, un monde libéré des règles im­pies de l'Europe, heureuse­ment séparé de celle-ci par des milliers de miles d'océan.

 

Dieu avait donc donné l'Amérique à ses habitants et ceux-ci devaient la garder pure et incorrompue, libre de toutes les turpitudes euro­péennes qu'ils venaient d'abandonner. La Doctrine de Monroe et la notion d'«hémisphère occidental» sont la transposition politique et laïcisée au fil des décennies, de cette menta­lité qui, au départ, était religieuse et qui aspirait à une séparation plus nette d'avec l'Europe.

 

Ceux qui, aujourd'hui, utilisent indifféremment les termes «Europe» et «Occident», comme s'ils étaient synonymes, ou comme si le se­cond comprenait la première, et adoptent cet usage erroné, com­mettent une grave erreur historique et politique. A moins qu'ils n'acceptent, consciemment ou inconsciemment, la vision américaine du monde, espérant de la sorte que l'Europe soit entrée tout entière dans l'Occident.

 

Il me semble bon de relever le fait suivant: dans la définition de l'Occident, telle qu'elle est née chez un Jefferson, s'inscrivent d'emblée les deux formes américaines de concevoir les relations internationales, que l'on a coutume de considérer comme exclusive l'une de l'autre: l'interventionnisme et l'isolationnisme. En effet, si l'Occident est le «bien», est le monde non infecté par les perversités européennes, alors il faut en tirer deux conséquences. D'une part, on peut décider de se refermer sur soi-même, pour empêcher la conta­gion d'entrer; d'autre part, on peut décider de sortir de sa propre tranchée pour s'élancer et sauver le monde. C'est cette seconde politique qui a prévalu dans l'histoire américaine, surtout parce que l'idée d'un Occident incorrompu s'est unie à celle du «destin manifeste» des Etats-Unis (cette expression a été forgée en 1845 durant le conten­tieux qui opposait les USA à l'Angleterre pour l'Oregon) pour former le pire des impérialismes.

 

Ainsi, toute action américaine sur le continent américain relève de la défense des intérêts propres des Etats-Unis; toute action outre-mer est dès lors une «mission» du Bien pour sauver le monde. Tandis que la réciproque ne vaut pas pour les Européens, porteurs du «mal», qui ne pourront jamais s'ingérer de bon droit dans les affaires du continent américain, comme le prétendait précisément la Doctrine de Monroe, qui interdisait aux Européens tout mouve­ment à l'Ouest du méridien “séparateur”. Ceux qui en Europe au­jourd'hui s'imaginent être des paladins de l'Occident, sont tout sim­plement des individus qui se sont inté­grés dans le mode d'être et de penser des Américains et qui, consciemment ou inconsciemment, estiment avoir été “sauvés” par eux et “libérés”. En réalité, ils se sont soumis dans l'âme, en renonçant aux tradi­tions européennes.

 

Claudio FINZI.

(traduction française : Robert Steuckers).

 

 

vendredi, 21 novembre 2008

Il termine "Occidente" nasconde un equivoco pesante

 LA VIA CHE PORTA IN ALTO E QUELLA CHE PORTA IN BASSO
SONO LA STESSA IDENTICA VIA (Eraclito)

Il termine “Occidente” nasconde un equivoco pesante.

Nell’anno 2008, non si è più agli inizi del secolo XX, quando ancora uno Spengler (nella foto in basso) poteva parlare della crisi dell’Occidente come fase terminale di un’involuzione ciclica mondiale. O un Massis poteva invocare la défense de l’Occident.

Oggi non c’è più alcun Occidente da difendere, ma ce n’è uno da cui difendersi.In questi cento anni, la nostra civiltà ha visto bruciare la sua ultima grande possibilità, quella profetizzata appunto da Spengler come fase faustiana, cesaristica, che in un ultimo sforzo di interiore potenza sarebbe sorta dal ventre europeo come antidoto alla sincope finale della civiltà dell’uomo bianco, causata dal progressismo.

Alla metà del Novecento, al culmine di una crisi comatosa mondiale risolta dalla violenza bruta, si è potuto assistere allo strangolamento nella culla proprio di questo ciclo storico faustiano appena insorto, che il filosofo tedesco aveva vaticinato in qualità di ultima e conclusiva manifestazione creativa dell’anima europea. Tale crimine è stato consumato precisamente per mano di un’appendice occidentale, non-europea e anzi anti-europea. La mano che ha soppresso l’Europa in quanto civiltà espressiva e centro di potere individuato, proveniva da Occidente.

Quest’appendice,
che ha impedito al nostro continente di riappropriarsi sul ciglio dell’abisso del suo destino e del suo spirito – secondo vie che forse avrebbero soltanto dilazionato il tracollo, ma probabilmente di secoli – ha rappresentato, sin dal suo primo formarsi nel secolo XVIII, una precisa congiura contro l’Europa e tutti i suoi patrimoni culturali, che dalle profondità della protostoria erano giunti sostanzialmente impregiudicati fino nel cuore dell’età contemporanea.

Parliamo infatti dell’America, di quel bacino di formidabili energie distruttive infuse nel calderone progressista, giunte a maturazione utilizzando i letali ingredienti del puritanesimo, del biblismo, del liberismo e del materialismo capitalista: dalla micidiale mistura è uscito un cocktail infernale che, fatto bere a forza ai popoli europei dopo il 1945, ne ha garantita la rapida liquidazione come entità culturali e politiche storicamente individuate.

Quello che è nel frattempo avvenuto è stato infatti il tramonto dell’Europa e l’insediarsi in suo luogo dell’Occidente made in USA. L’Occidente, nel senso geografico e politico di America, è ciò che è uscito in qualitmercury_dime_reverse US renzagliaà di solo vincitore dalla lotta tra l’onore dell’appartenenza, valore di fondazione senza il quale i nostri popoli non avrebbero potuto darsi una forma, e il disonore della disgregazione affidata al culto totemico del denaro e dell’individualismo di massa.

Chi confonde l’Europa con l’Occidente, cioè con ciò che oggi coincide con l’America, non ha compreso il dramma della civiltà bianca. Chi giudica l’Europa e l’America come un’unica civilizzazione accomunata da comuni linguaggi esistenziali e da una comune volontà di destino, mostra di non avere la sensibilità che occorre per distinguere la creatività dalla distruzione, l’ordine dal caos, l’ideale dal materiale, il sano dal malato, il bello dal brutto.

Si tratta di due antitesi, di due antropologie, di due monadi.

Oggi l’Europa è in coma perché sottoposta alle radiazioni americane. Il vampirismo si è ormai compiuto, e nuove costellazioni extra-europee e anche extra-occidentali già sorgono all’orizzonte, preparando una sicura fase di regolamenti di conti con gli stessi Stati Uniti, un colosso vacillante che, se privato della forza materiale, rappresenta un vuoto inespressivo tutto sommato molto fragile.

 Scriveva Georges Bernanos nel 1947 che

«l’Europa è tramontata nel momento stesso in cui ha dubitato di sé, della sua vocazione e del suo diritto […] e questo momento ha coinciso con l’avvento del capitalismo totalitario», sancendo in questo modo proprio la vittoria del denaro contro l’onore.

Ma chi mise nel cuore europeo il tarlo roditore del dubbio di sé, cosa minò l’antico senso europeo della sua vocazione e del suo diritto in faccia al mondo? Non furono proprio l’ideologia dei diritti individuali e quella del capitalismo calvinista, non furono l’illuminismo e il razionalismo sposati al liberismo inglese, al biblismo millenarista delle sette protestanti che, una volta lasciati fermentare nello spazio del Nuovo Mondo, produssero l’odio per la tradizione europea, la diffamazione del nostro passato, l’incomprensione per la nostra storia e per le nostre realizzazioni sociali?

Quest’informe viluppo di nevrosi sotto maschera moderna, costituito dai riformatori fondamentalisti, fino a quando rimase un caso clinico di minoranze europee ben controllate e circoscritte dal discredito generale (le allucinazioni anabattiste, i deliri di un Giovanni di Leyda circa il “Regno di Dio” in terra, le psicosi settarie dei profetismi biblici, il concetto di capitale usurario come fonte di benedizione divina…) non costituirono alcun pericolo reale per i popoli europei. Episodi marginali, di cui furono in molti allora a non accorgersi neppure.

Ma quando tutta questa schiuma di allucinati e di malati mentali, di invasati di versetti biblici, insieme ai tagliagola, ai criminali e agli asociali fuggiti da tutta Europa, prese a sbarcare a frotte sulle coste americane, là dove non c’era l’Europa con la sua cultura a fare da involucro, proprio in quel momento il destino europeo si compì.

Ci vollero due-tre secoli di gestazione, ma poi la risacca, montata in uno spazio reso deserto dall’etnocidio dei nativi americani e ripopolato con lo schiavismo e il fuoriscitismo dei peggiori elementi espulsi dai popoli europei, è ritornata da noi come un pendolo dannato, sotto l’etichetta di “ideologia americana”. Qualcosa che è stato sin dall’inizio ben deciso a fare a pezzi ciò che era rimasto della vecchia Europa. I lugubri “padri pellegrini” sono tornati di qua dell’Atlantico come un turbine di sventura, hanno riportato indietro con sé il dono avvelenato delle loro distorsioni mentali, ma potenziate in ideologia di potere mondiale, e in più sorrette da una potenza industriale mai prima vista.

Quelli che erano poveri alienati nel Seicento, nel Novecento si sono potuti presentare ai popoli europei addirittura come i “liberatori”, i portatori del “benessere”, i garanti di una “nuova frontiera” di riscatto materiale e morale. Lo sguardo alienato, quelle occhiaie da invasato febbricitante di visioni veterotestamentarie che ebbe ad esempio un Lincoln (un uomo con problemi di disagio mentale acclarato: riferiscono i biografi che fosse una specie di semidemente lombrosiano, che non mancò di suscitare perplessità nei suoi stessi contemporanei), ha potuto diventare una faccia da “liberatore”.

L’icona, il marchio stesso dell’America.
Al di sotto di Hollywood e di Mc Donald’s corre un fiume di tetra e morbosa volontà rieducatoria, quelle tirate quacchere sul destino di dominio del mondo in nome di Jeovah, quel maledire la diversità, quel sentirsi “eletti” alla salvezza…un’anima fobica e contorta, tutta avvolta dalla sindrome di rappresentare il bene e pertanto di poter infliggere agli altri il male. È la fiaba del lupo travestito da agnello. È quello sbaglio della storia che si chiama Stati Uniti.

Nel Novecento non sono stati più i pochi disadattati del Seicento a straparlare di Nuova Israele nella penombra di qualche taverna massonica del New England: stavolta era una potenza mondiale, era la modernità in persona, un’organizzazione formidabile, risoluta a volgere le elucubrazioni dei padri predicatori evangelisti in un lucido progetto di dominazione universale.

Con i mezzi dell’etnocidio metodico prima e dell’annientamento coscienziale propagandistico poi, col metodo mai smesso del ricatto e dell’intimidazione, è stato strappato all’Europa il diritto di essere se stessa, relegandola al rango di provincia cui imporre liberamente i propri voleri. L’Occidente ha minato alle fondamenta il diritto dell’Europa a rimanere fedele ai propri simboli, salda al suo posto, come andava facendo da un paio di millenni.

In questo quadro, cosa può ancora significare volgere lo sguardo a ciò che l’Europa è stata nei secoli?

Cosa può ancora dire ai popoli europei di oggi il richiamo alle loro tradizioni di ineguagliata cultura, ai loro primati di sapere e di volere, ai loro fondamenti di identità e di legame?
Ha ancora un senso parlare di civiltà europea, dato che possiamo solo riferirci a un passato che è stato rinnegato e irriso dai nuovi dominatori occidentali, col consenso prima estorto e poi spontaneo delle nostre élites culturali e delle masse? Esprimere la parola di verità nel dominio totale della confusione e dell’invertimento dei significati è operazione probabilmente inutile. Ma proprio per questo va ugualmente tentata.

La lotta novecentesca, a cui l’Europa non è sopravvissuta, è stata essenzialmente una lotta tra l’Ordine e il disordine.

Un mondo di forme e proporzioni è crollato dinanzi alla violenta intrusione di un mondo di difformità e asimmetrie. Tra i documenti più antichi della nostra civiltà, è stato da molto tempo notato in posizione di pietra d’angolo il concetto di Ordine.

Ben oltre l’Illuminismo o il Cristianesimo, che si vorrebbero a fondamento dell’Occidente-Europa (da parte di quanti non avvertono l’ingiuria di unificare i due opposti), e anche oltre il mondo classico, noi troviamo il mondo indoeuropeo: qui l’Europa, piuttosto che dell’Occidente, è sposa feconda dell’Oriente.

Indoeuropeismo significa soprattutto verifica che l’Origine è sorta insieme al senso dell’ordinamento, della percezione sensibile della misura e della conformazione al creato. In questi ambiti, il popolo vive la sostanza intima della natura, ne ripete nella socialità gli schemi di complementarietà dei ruoli, non va in cerca di soluzioni astratte, ma vive concretamente nella dimensione di una realtà visibile, cosmica come umana.

Non altrimenti, se non come rispecchiamenti dell’ordine naturale, possono essere giudicati i nostri più antichi documenti identitari, quali i Veda o le Upanishad, che vivono ancora oggi nei vocabolari e nelle lingue delle culture europee.

 

 

 Notava non a caso Adriano Romualdi che nell’inno vedico a Mithra e Varuna (un millennio e mezzo prima di Cristo) si impetravano le energie ordinatrici del cosmo, quali archetipi sul cui metro dare compimento alle edificazioni sociali umane. Tutto è dipeso e ha preso vita inizialmente da questa mattinale consapevolezza che all’uomo non è dato sottrarsi alla sua natura e alle leggi del mondo nel quale si trova “gettato”. Il paganesimo arcaico e quello classico non fecero che ratificare questo dato di fatto.

La sorgente della civiltà europea sgorgò dall’intuizione della presenza dell’Ordine, ovunque e in tutte le cose. C’è sempre una legge che stabilisce i nessi, che dà un limite, che indica un “fin qui e non oltre”. C’è sempre una necessità che regola i rapporti tra le cose, gli uomini e gli eventi. Se ne avessimo lo spazio, sarebbe facile ammassare le prove culturali occorrenti a dimostrare che il sorgere della nostra civiltà – sin nell’esatta rispondenza etimologica tra il rito religioso e politico e l’ordine cosmico – si radica nella legge delle gerarchie e delle aggregazioni tra simili, quali sono presenti in natura.
Basterà un piccolo esempio.

A un certo punto, nella Repubblica di Platone
si parla di due vie: quella che trascina verso il basso e quella che conduce verso l’alto. Platone racconta che la prima è quella battuta da Socrate, allorquando un giorno, per assistere a una festa, scende lungo la strada che porta da Atene, su in alto, al Pireo, giù in basso. Qui al porto, simbolo di mercanteggiamento, di confusione di genti e di caos, ciò che regna è il formicolare dei cittadini e dei forestieri, che in casuale e disordinata comunanza perdono ogni sigillo di nobiltà differenziante.

È il luogo per eccellenza della mescolanza e dell’infrazione, è lo spazio dell’eccezione,
in cui vigono il frammisto e l’incomposto, simboleggiati dai riti stranieri in cui tutti sono uguali.

 

 

Qui, l’Io identitario è a repentaglio, è il kateben, il discendere che esprime l’avventurarsi nell’alieno e nel difforme, paragonato all’Ade, alla perdizione coscienziale, addirittura alla morte. Dopo la festa, Socrate, sensibile al richiamo di ritornare al più presto nel seno della propria polis, si affretta a rientrare in città, a risalire lassù nella sua città, nello scrigno della sua comunità, lungo la via che riconduce in alto, al proprio, al simile e al composto, vincendo le insistenze di certi amici che vorrebbero trattenerlo.

 

 


È questo il racconto allegorico della discesa pericolosa nell’Altro-da-sé, è la simbologia platonica in cui si racconta l’appartenenza politica e filosofica alla polis come vicenda di pericoli da vincere e tentazioni da attraversare con salda tenuta.

 

 

 

 

Essa è parallela al mito di Er, il figlio di Panfilia (“l’amica di tutti”, l’indifferenziata), anch’esso metafora di caduta nella perdizione.

 

 

Eric Voegelin, nel commentare questi passi della Repubblica, nel suo libro Ordine e storia precisò in maniera oltremodo eloquente che si trattava di un tema irto di simboli. Al cui epicentro si trovava la celebrazione dell’Ordine, quale categoria politica e umana giudicata insostituibile. Il “panfilismo” del Pireo – ha scritto Voegelin –, il suo essere luogo egualitario e livellante, dove ognuno è uguale a tutti gli altri, lo rende simile all’Ade, alla morte: «è il “panfilismo” del Pireo che lo rende Ade. L’eguaglianza del porto è la morte di Atene».

 

 

La via che discende, là dove i limiti si frantumano e le differenze si annullano, comporta dunque il precipitare nella morte di Atene. Poiché Atene muore quando muore nel cuore dei suoi cittadini.
Lo stesso significato è presente nella figura del ricco Cefalo, un vecchio incontrato da Socrate, col cui personaggio Platone vuol significare la crisi epocale, la renitenza di una generazione indebolita dinanzi ai valori, la trascuratezza della legge.

 

 

E, anche in questo caso, il simbolo platonico torna a parlare con evidenza:

 

 

«Di colpo diviene manifesto – commentava Voegelin a proposito di questo episodio – che la vecchia generazione ha trascurato di costruire la sostanza dell’ordine nei giovani e un’amabile indifferenza, unita a una certa confusione, si trasforma in pochi anni negli orrori della catastrofe sociale».

 

 

 

 

 

 

Non è possibile seguire oltre questi temi, che sarebbe interessante sviluppare fino in fondo. Ma si sarà capito lo stesso, dai pochi cenni fatti, che è proprio l’Ordine – naturale, interiore, umano, sociale, politico – il nervo sensibile che fu avvertito dalla nostra cultura antica come quello decisivo per assicurare alla Città la sua fortuna, se mantenuto; la sua rovina, se tradito.

 

 

Ora, di fronte a questo ancestrale sentimento prima indoeuropeo, poi ellenico, romano, gotico (si pensi ad es. ai significati di ordinamento cosmico che avevano sia i collegia romani che le corporazioni medievali), si erge il colosso distruttivo del dis-ordine applicato a tutti campi (politico, familiare, sociale, mentale, economico), concepito e realizzato alla fine in America in simultanea con l’idea di mercato liberista.

 

 

Che è considerato come sinonimo di “libertà” perché aperto e senza limiti, in perenne espansione, disumano, annullando con ciò dalle fondamenta il concetto rigoroso di Ordine e di misura.

 

 

Che è innanzi tutto un principio regolatore, un demarcatore, e quindi un discriminatore che fissa leggi, che qui ingloba e là per forza esclude, disponendo frontiere e sbarramenti precisi, logici, ideali come materiali, senza i quali si entra nell’illimite e nel privo di senso, il regno del caos.

 

 

La finale perdita europea dell’onore che è legato all’applicazione dell’Ordine in ogni manifestazione della vita, dopo le iniziali aggressioni del Cristianesimo paolino, dell’Illuminismo e del marxismo, la dobbiamo all’egemonia del pensiero americano di derivazione puritano-utilitarista, incardinato sulla menzognera divulgazione di un’idea di “libertà” che coincide con l’annientamento della personalità individuale e sociale.

 

 

La disintegrazione di ciò che Spengler chiamava ancora “Occidente” data da quando l’America ha distrutto le fondamenta della Tradizione europea, sostituendo ad esse la patologia settaria del totalitarismo capitalista e millenarista. Da un pezzo l’Occidente non parla più con la voce solenne di Platone, ma con quella stridula dei miliardari anabattisti americani travestiti da capi politici.

 

 

Luca Leonello Rimbotti

 

 

 

 

mercredi, 30 juillet 2008

Conversing with Alexander Zinoviev

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Conversing with Alexander Zinoviev

 

We all remember the great Soviet dissident Alexander Zinoviev, a lucid analyst not only of all the odds of the Soviet regime but also and especially of all the odds of the human soul, which lead unequivocally to all those forms of rigid totalitarianism. Today Zinoviev criticizes ”Westernikism” with an equal vigor as he criticized Soviet power before. “Westernikism” is in his eyes an American version of a Gleichschaltung of the human soul, which is equally mutilating as the former Soviet version. Because he formulated his sharp critiques under Breshnev's Soviet Union , he was deprived of his Soviet citizenship in the Seventies. Zinoviev was compelled to live a long exile abroad, in Munich in Bavaria , a City which gave a safe harbour to many more Russian emigrations. Zinoviev is now disgusted by the dominant "Westernikism" in the world and cannot accept its haughtiness. He decided thus to leave the West to go back to his Russian homeland. His last work published in Switzerland, La grande rupture (The Big Rupture; ed. L'Age d'Homme, Lausanne) is pushing and assaulting, but without any illusion, full of bitterness and lucidity. A lucidity that will lead him soon to be deprived of his access right to the main media, for having asserted clearly and sharply some truths that aren't universally accepted. Our correspondent in Paris, Xavier Cheneseau, met ex-Soviet dissident Zinoviev during one of his last stays in the French capital. Zinoviev was attended by his publisher and interpreter Slobodan Despot, who translated into French the Russian answers of the philosopher.

Q.: What do you mean by a "Big Rupture" in your book and which is the central topic of it?

AZ: The Western-European civilization is doubtless the greatest civilization of history. Its apex was incarnated by the development of the main Nation-States as Germany, Italy, Britain and France . At the beginning of the 20th century, the idea appeared of a definitive decay of this civilization, that from then on was perceived as exhausted and mortal. Today one thing is certain: after having allowed the development of a superior organization system, the Western European civilization undergoes history and is not making it anymore. The rupture, that I define in my book, appeared immediately after the Western victory in the Cold War, followed by the crumbling down of the Soviet Block and the transformation of the United States in the only remaining Super-State of our Planet, ruling the entire Western world without any serious challenger.

Q.: According to you, how things evolved towards this situation?

AZ: You can explain it by saying that a new level of an organization that is superior than the one ruling the Western societies, was created, also by the fact that all Western societies were integrated in one single unity, which is a super-civilization, in comparison with the Western civilization, and, endly, by the fact that a World Order was instaured under the leading of the Western world. I was astonished some years ago to state that there was a real and a virtual dimension in every thing. The virtual world is now the dominant culture of nowadays people. In fact, people today perceive the real world through the expedient of this virtual world. They only perceive what the virtual world authorizes them to see. The virtual world doen't express the world as it is in plain reality.

Q.: According to you, do we still live in a democracy in the context of what you are describing us?

AZ: If you want a democracy to exist actually, you need to accept the possibility of a choice, thus you need plurality. During the Cold World, there was a plurality in the world, i. e. the actual possibility of a democracy: you had the coexistence of a communist system, of a capitalist system and of a group of other countries, which were named the "non-aligned". The Soviet Block was influenced by the critiques from the West and the West was influenced by the Soviet Union, due to the fact that communist parties were active on the political checkboards of the Western States. Today, you have only one ideology left, which serves exclusively the one-worldists. The belief that the future of human kind doesn't lay in communism anymore but in americanism (the superior form of Westernikism) is a belief shared by a majority of Westerners.

Q.: Nevertheless in Europe and notably in France , you find, despite of all, political forces that still oppose this general trend…

AZ: The shear existence of those forces is only virtual, it is not real. Look and you will see that this kind of opposition is more and more formal. As a proof, look at the attitude of the European political class during the war against Serbia . Almost unanimously, this political class supported the aggression against this sovereign and free nation.

Q.: Are we then allowed to talk about totalitarianism?

AZ: Totalitarianism spreads itself everywhere because the supranational structure impose its rule and law to all nations. There is a non democratic superstructure, which is giving orders, punishes, organizes blocades, bombs and lets people starve. Financial totalitarianism submitted the political powers. Totalitarianism is a cold ideology. It has no feelings and expresses no pity. Besides, we must accept the fact that people do not resist a bank, but can eventually compel any political dictature to handle or leave power.

 

Q.: Nevertheless, we can say that the system can explode due to the social situation in our countries…

 

AZ: Please, don't display naively illusions. Movements of that sort aren't possible anymore, because the working class has been replaced by the workless, who are in an extremely weak position, and only aspire to one thing; to get a job.

 

Q.: If I follow your words, you tell me that our societies aren't democratic…

 

AZ: The historical period of the all-pervading democracy of Western style belongs now to the past, because the end of communism introduced us fully in the post-democratic era.

 

Q.: Which is the role and the power of the media in such a situation?

 

AZ: The role of the media is that of a very important bolt that can work owing to a genuine sphere, which extends without measure the presence and the activity of the capital and the State's interests. It's one of the main pillars on which the Western system settles. The media represent the most powerful instrument to shape the tastes and the forms of knowledge shared by the big mass of people in the world. Today the media represent a real instrument to influence directly the masses. The media interfere in all the sphres of society: sports, everyday life, economics and, of course, politics. Everything becomes an aim for the media. They exert a totalitarian power on the people living nowadays, and even worse, they arrogated for themselves the function of the great arbitrator in the ideological choices.

 

Q.: How can we in your eyes organize the struggle against this "media-cracy" that surrounds us?

 

AZ: It's an historical struggle. We are the witnesses of history but we also take a part in it. We have to take into account the historical time because we have to bring thousands and even millions of people into movement, without having the certainty to win the battle. We have to take into account the fact that millions of people are today the victims of the mediatic contagion. We simply have to take the exemple of the war against Serbia to state that the number of contaminated people is huge. Moreover we must be always on the look-out in order that our attention may not be deviated by the mediatic smoke curtain.

 

Q.: How do you see the access to power of Vladimir Putin?

 

AZ: Putin's access to power is indeed the first sign of an interior resistance against globalization and americanization. But Putin's success depends in the end and despite of all from factors that are exterior to Russia.

 

Q.: We hear a lot about a survival of communist ideology in Russia today…

 

AZ: What do yo mean? Ideas are eternal. The marxist form of communism in Russia has been severely defeated. It survives marginally but isn't operational anymore. Today you cannot start anything with this ideology. As a proof, I would mention the Russian Communist Party itself, which doesn't evoke the Revolution anymore. The communists don't refer to the dictature of the proletariat and evolve even towards liberalism in a certain way.

 

Q.: Mr. Zinoviev, we thank you for this interview.

 

(Interview taken for "Synergon" by Xavier Cheneseau and translated into French by Slobodan Despot and into English by Robert Steuckers).