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dimanche, 01 novembre 2020

Paul Gottfried: «Trump n’est pas un accident de l’histoire américaine»

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Paul Gottfried: «Trump n’est pas un accident de l’histoire américaine»
 
Ex: https://frontpopulaire.fr

ENTRETIEN. Historien des idées et intellectuel américain influent, Paul Gottfried a notamment été conseiller de Richard Nixon. Grand penseur du conservatisme, il publie L’Amérique de Trump, entre nation et empire chez Jean-Cyrille Godefroy. A la veille des élections américaines, nous l’avons interrogé pour comprendre le phénomène Trump.

41Tm8r-HWdL._SX195_.jpgFront Populaire : Depuis la campagne électorale américaine de 2016, Donald Trump a été conspué par beaucoup et partiellement adulé par d’autres, mais sans doute jamais vraiment compris dans sa spécificité. De quoi Trump est-il le nom, et quelle serait une définition du « trumpisme » ?

Paul Gottfried : Pour autant que le terme « trumpisme » ait un sens, on pourrait le définir comme la jonction entre le talent manœuvrier, le pragmatisme d’un homme d’affaire démocrate de New York et des courants souterrains d’une partie de l’opinion américaine qui entend qu’on lui rende un pays dont elle s’estime dépossédée.

FP : Vous expliquez au début de votre ouvrage que Donald Trump a été l’alibi des médias libéraux dans leur volonté de détourner le mouvement conservateur de son sillon traditionnel. Qu’entendez-vous par là ?

PG : Plus largement, les médias libéraux (au sens américain du terme) se servent de Trump comme ils se sont servis des néoconservateurs mais dans un sens différent. Avec les néoconservateurs, les médias libéraux mettaient en avant les plus « progressistes » comme dirait votre président (en fait partisans du libre-échange, de la finance, du multiculturalisme et de l’option militaire tous azimuts). Pour Trump, il s’agit de faire de lui un épouvantail pour réunir une gauche émiettée entre ceux pour qui les droits des minorités et la lutte contre les mâles blancs pauvres priment toute considération et un renouveau socialiste qui se fait jour aux États-Unis. Alors que pour le conservatisme américain historique, Donald Trump est sinon un homme de gauche du moins de centre gauche.

FP : Vous vous revendiquez vous-même du « paléo-conservatisme ». A quoi correspond ce courant d’idées et comment s’insère-t-il dans le conservatisme américain ? Et par rapport aux néoconservateurs ?

PG : Ce qu’on appelle « paléoconservatisme » équivaut à la tentative américaine de constituer un courant conservateur sur le modèle européen avec un succès discutable. Les néoconservateurs sont un groupe de pression qui a pris le contrôle du parti républicain à partir des années 70, en a expulsé les conservateurs classiques et qui ont imposé leurs visions économiques (libérales), géopolitiques (militariste) et sociales (multiculturelles) alors que le conservatisme américain originel est avant tout un anti-étatisme avec toutes les conséquences que cela implique (refus des grands travaux fédéraux, refus du multiculturalisme imposé par Washington et refus des aventures militaires).

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Paul Gottfried.

FP : Les courants idéologiques américains sont à restituer dans leur propre horizon de cohérence. Par exemple, le qualificatif « libéral » n’a pas le même sens outre-Atlantique que chez nous. Pourriez-vous nous donner quelques exemples de ce type de pièges à éviter pour penser le champ des idées américaines ?

Libéral équivaut au français « gauchiste », conservateur ou paléoconservateur est un courant qui n’a plus de représentation politique américaine autre qu’intellectuelle (via American conservative). Néoconservateur est le visage le plus connu du wilsonnisme soit l’école de l’impérialisme américain bien-pensant. Les libéraux radicaux au sens économique et philosophique sont des libertariens dans le lignage de Murray Rothbard. Les populistes américains sont un courant spécifique que vous connaissez en France à travers l’œuvre de mon regretté ami Christopher Lasch.

FP : En France, nous sommes en train, depuis quelques années déjà, de questionner la pertinence du vieux clivage gauche-droite pour d’autres formes d’approches transversales des oppositions politiques. Pourriez-vous nous éclairer sur les grands clivages politique du monde américain ?

imatz-droite-gauche.jpgPG : De mon point de vue, la grille de lecture droite/gauche est encore plus problématique aux États-Unis qu’elle ne l’est en France comme l’a démontré mon ami Arnaud Imatz, notamment dans son ouvrage Droite-Gauche, pour sortir de l’équivoque. Je pense que le clivage le plus structurant de la vie politique américaine s’articule aujourd’hui dans l’opposition entre les partisans de l’« America First » (ndlr : littéralement, L’Amérique d’abord, soit une politique fondée sur la primauté des intérêts intérieurs américains) contre ceux qui entendent que l’Amérique domine le monde (y compris, selon eux, pour le bien de celui-ci) en s’engageant un peu partout sur la planète. Cela explique le regard noir porté sur la politique protectionniste du président sortant.

FP : Vu depuis l’Europe, Trump représente la figure par excellence d’un certain populisme vulgaire et droitier, comme une créature de l’ancien monde que personne n’avait vu venir. Comment analysez-vous ce populisme, et lui voyez-vous des équivalences à l’étranger ?

PG : Dès qu’un homme confesse aimer son pays, dès lors qu’il n’est pas convaincu que Justin Trudeau soit l’avenir de l’humanité et qu’il appelle un chat un chat, il devient pour la social-démocratie mourante un « populiste vulgaire et droitier ». Vous savez, vous Français, qu’ils ont fait la même chose avec de Gaulle en son temps. Ils ne voudront jamais comprendre cette leçon essentielle de l’histoire : ce sont les États faibles qui attirent la ruine, les guerres civiles et les régimes autoritaires. Trump ou d’autres dans le monde, comme Poutine en Russie par exemple, incarnent cette volonté de force et d’incarnation face à l’Histoire. Est-ce si répréhensible de vouloir vivre ?

FP : La société américaine a toujours semblé fracturée sur des thématiques de race, de genre, d’origine et d’identité. Les présidents américains sont-ils condamnés à ne pouvoir être les représentants que d’une certaine catégorie de la population contre les autres ?

PG : Au-delà de quelques extrémistes qui trouvent d’ailleurs des gens – pour ne pas dire des manipulateurs - pour les aider, les influencer, les utiliser et les jeter, les américains issus des minorités veulent être Américains avant tout parce que le patriotisme n’est pas une notion vaine ici, donc je suis plutôt confiant sur ce point. Le problème est bien plus large que cela. La question est davantage : est-ce que l’Amérique n’est qu’une sous-culture mondialisée ou est-elle une vraie nation consciente d’elle-même ? C’est cela l’enjeu.

FP : A la veille de l’élection américaine, pouvez-vous nous faire un court bilan de la présidence Trump ? Quelles sont selon vous ses chances de réélection ?

PG : Il n’a pas engagé les États-Unis dans de nouvelles guerres extérieures. En se concentrant sur la politique intérieure, il a géré ce qu’il a pu avec les moyens qui étaient les siens, le tout avec, dans son dos et sur ses côtes, une guérilla institutionnelle et médiatique de tous les instants qui a fragilisé nos institutions. Ensuite, le paléo-conservateur que je suis est obligé de remarquer qu’il n’a pas engagé une politique vraiment conservatrice. Pour ce qui est des élections, il est devenu très difficile, à l’heure actuelle et compte tenu des conditions exceptionnelles de vote (ndlr : le vote par correspondance pour cause de Covid-19), de faire une prédiction fiable. Je peux toutefois faire une remarque de fond : Trump en lui-même, en tant que personne, peut être vaincu mardi prochain, mais il n’est pas un accident de l’histoire américaine. A ce titre, les courants souterrains et la dynamique historique qui l’ont porté lui survivront.

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EL REY PERDIDO, UN MITO EUROPEO

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EL REY PERDIDO, UN MITO EUROPEO

Ernesto Mila

Ex: https://info-krisis.blogspot.com

Todos los países de Europa sin excepción, tienen un tema común relacionado con sus monarquías: el mito del Rey Perdido. Un rey justo, legítimo y amado por sus súbditos, desaparece misteriosamente; todos se niegan a creer que haya muerto, se ha retirado a un lugar oculto y volverá cuando la hora sea propicia para ponerse al frente de la legión de los elegidos en la batalla final contra las fuerzas del mal.

ORIGEN DE LA FUNCION REAL

La etimología de la palabra “rey” es importante a la hora de determinar el concepto que el mundo antiguo se hacía de la función y del símbolo real. Se admite unánimemente que se trata de un término indo–europeo cuya huella se encuentra desde el área extrema de expansión celta (Europa Occidental) hasta la india védica.

Tatius.jpgEn ese ámbito geo-étnico siempre se encuentra la raíz reg– que da lugar a las variaciones rex (latino), el raj (hindú) y el rix (galo), presentes en palabras y nombres como dirigere, Mahararajh, o Vercingetorix. En general, la raíz reg– indica a “aquel que traza el camino”, es decir, define la jefatura y el mando.

De esta misma raíz deriva la palabra y el concepto de derecho (trazar el camino implica, en definitiva, enunciar un derecho, promulgar una ley): right (en inglés), recht (irlandés antiguo), recht (alemán), y encontramos la misma simetría en la lengua latina entre rex y lex.

Al establecer que la función real era “trazar el camino”, los pueblos indo–europeos hacían algo más que calificar al jefe político–militar. De hecho, la historia nos enseña que no fue sino en un período tardío cuando los monarcas asumieron la conducción militar de su pueblo, mientras que la política estaba delegada a la nobleza. El “dux” –palabra próxima a rex– indicaba a los caudillos militares que asumían el mando en momentos de crisis y en los que el rex delegaba la función guerrera. Luego, cuando se superaba la crisis, desaparecía el cargo de “dux bellorum”, caudillo de las batallas, literalmente. “Trazar el camino”, guiar a su pueblo por las seis rutas del espacio definidas por la cruz tridimensional que marca las direcciones del espacio. El rex tenía el poder de guiar a su pueblo en todas estas direcciones.

La función real primitiva se justificaba en que reyes y dioses no eran sino una misma persona. En el Apocalipsis de Juan se encuentra un eco de este orden de ideas: “Aquel que se sienta sobre el trono” declara “Yo soy el Alfa y el Omega, el Principio y el Fin”.

El rey era concebido como un punto de irradiación, no humano, encarnación directa de poderes trascendentes y, en tanto que tal, digno de ser obedecido; el mando, no era obtenido ni mediante elección, ni por aclamación, sino que procedía de un contacto tangible con entidades superiores, condición imprescindible para que los súbditos aceptaran la sumisión a su voluntad.

LA IDEA DE ORDEN

La prosperidad del reino, la victoria en las batallas y la justeza de sus decisiones, es decir, el Orden, eran muestra del origen divino y legítimo del poder. Si se producía un descalabro militar, una mala cosecha, si la injusticia se enseñoreaba, todo ello mostraba el debilitamiento del vínculo que unía al rey con el supramundo y con los poderes trascendentes. Entonces, sus súbditos podían destronarlo.

La vieja leyenda itálica del Rey de los Bosques de Nemi, cuenta que el rey de aquellos dominios está siempre en guardia bajo un árbol sagrado, y seguirá siendo rey hasta que un esclavo fugitivo consiga sorprenderlo y arrancar una rama del árbol que custodia. Por “esclavo fugitivo” hay que entender un hombre emancipado de los lazos de la materia y que ha logrado establecer un vínculo con la trascendencia.

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El mismo símbolo del árbol es reiterativo, indica la fuente de un poder y se relaciona habitualmente en el universo simbólico indo–europeo con la montaña, el centro, la isla, el jardín bienaventurado, etc. Todos estos símbolos suponen lugares inaccesibles, en los que reina el Orden, mientras que, a su alrededor, todo fluye, es caos y dinamismo contingente. Residir o tener acceso a uno de estos símbolos supone conquistar la función real. La montaña del Grial, el castillo de Camelot, la isla de Avalon, el Roble del Destino, el Jardín de las Rosas, el Omphalos de Delfos, etc. pueden ser relacionados fácilmente con lo que decimos y constituyen el centro de un período dorado para la humanidad.

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Ahora bien, el hecho de que todo en el mundo tradicional indo–europeo esté sometido a ciclos –ciclo de las estaciones, ciclos lunares, rotación sideral, vida humana– hace que la Edad Dorada no se prolongue hasta el infinito. El tiempo la va desgastando hasta que se produce una caída de nivel que registran todas las tradiciones. Sin embargo, el centro, la montaña, el jardín, o la misma función real no desaparecen, sino que entran en un estado de latencia; se vuelven inalcanzables para los hombres comunes y dejan de influir en los destinos contingentes del mundo. El Jardín del Edén, no desaparece tras la caída de Adán, simplemente se hace inaccesible; otro tanto ocurre con el castillo del Grial, solo visible para las almas puras; en el caso del Jardín de las Rosas del Rey Laurin –que todavía puede visitarse en Bolzano– un hilo de seda lo convierte en impenetrable. La idea es siempre la misma: algo visible, pasa a otra dimensión, no muere, sin embargo, se oculta temporalmente, “hasta que los tiempos estén prestos”, es decir, hasta que una nueva renovación del cosmos, haga posible la manifestación del centro supremo. Y lo mismo ocurre con los monarcas.

EL REY PERDIDO, NO–MUERTO, AGUARDA SU HORA

En este contexto los pueblos indo–europeos han tenido siempre muy arraigado en su estructura mental, el mito del Rey Perdido: un rey querido por todos, justo, amado por su pueblo, deseado, en un momento dado, desaparece; su pueblo se niega a creer en su muerte; no es posible que los dioses hayan abandonado a un ser tan noble y justo, se dicen, “no ha muerto, está vivo en algún lugar, y un día regresará para ponerse al frente de sus fieles”. Esta estructura se repite una y otra vez en las viejas tradiciones de las distintas ramas del tronco común indo–europeo.

Podemos establecer que los últimos reflejos en estado puro de tal mito terminan con Federico I Barbarroja y, ya en una dimensión esotérica, con la marcha de los Rosacruces de Europa al inicio de la Guerra de los Treinta Años. Pero el mito, ha reaparecido insistentemente en la edad moderna e incluso contemporánea, mostrando la fuerza de su arraigo en la mentalidad indo–europea.

EL "GRAN MONARCA" Y "EL REY DEL MUNDO"

Dos autores de singular personalidad han recuperado tradiciones relativas a este mito. De una parte, Nostradamus en sus célebres “centurias” alude al “gran monarca”, mientras que René Guénon, consagra uno de sus ensayos más esmerados al tema del “rey del mundo”.

indexgrandmo.jpgNostradamus en una cuarteta de sus famosas Centurias se hace eco de tradiciones más antiguas sobre el “gran monarca” y las incorpora a sus profecías. Su advenimiento se producirá después de una guerra de 27 años, que empezará en 1999, único año que se menciona con todos sus números y de forma explícita en las profecías de Nostradamus.

Esta leyenda tiene su origen en las décadas inmediatamente anteriores al año 1000, se trata pues, de un mito milenarista, una promesa de renovación. Los primeros rastros de tal tema se encuentran en los escritos del abad Adson de Montier–en–Der (muerto en el 992). Pero Adson bebe de fuentes anteriores, una de ellas el testimonio de San Isidoro de Sevilla (siglo VII) y otra, incluso anterior, de Cesario de Arles (siglo VI).

Es evidente que profecías de este tipo ganan fuerza justo en momentos de crisis y devastación. En el período posterior a las invasiones bárbaras, cuando los movimientos migratorios remiten, cobra fuerza la añoranza y el recuerdo del Imperio Romano, incluso entre los mismos pueblos germánicos invasores, la idea de que Roma representaba el Orden gana fuerza y se produce un sincretismo entre los mitos nórdico–germánicos, con fuerza en esas razas, y los temas propios de la romanidad.

Esa añoranza de la grandeza de Roma se traduce en la aspiración a renovar el Imperio. Cuando Clovis (Clodoveo) es entronizado rey de los francos en el 496, recibe del Emperador de Oriente, la dignidad de Patricio y de César y, por este acto se considera renovado y regenerado el antiguo Imperio Romano. En siglos siguientes, a partir de Carlomagno y de los Hohenstaufen, la fórmula de consagración será calcada de la entronización de los Césares de Roma.

Pero la baja edad media supone una sucesión trepidante de convulsiones que crean en las poblaciones la sensación de que un ciclo está a punto de terminar. Los grandes príncipes son pocos y sus reinados breves, su recuerdo histórico se va diluyendo y entran vertiginosamente en el campo de la leyenda. En esa situación se suceden las profecías, todas interpretando el mismo deseo subconsciente: un gran príncipe –el gran monarca– reunirá a todos los pueblos de Occidente para librar la última batalla contra las fuerzas del anticristo. Aquí podemos ver cristianizado el tema de la “horda salvaje” de Odín y de sus guerreros que esperan en el Walhalla la hora de la batalla contra las fuerzas del mal.

Ahora bien, en el tema del “gran monarca” existe un ápice de nacionalismo galo. El “gran monarca” nace en Francia, en Blois concretamente, y queda ligado indisolublemente a la corona de ese país; contrariamente, el tema del “rey del mundo” tiene un carácter más universal.

LA UNIVERSALIDAD DEL MITO

En los siglos XIX y XX dos relatos traen a Occidente el recuerdo aún vivo del “rey del mundo”. Saint Yves d'Alveydre en su Misión de la India y Ferdinand Osendowsky en Bestias, Hombres y Dioses hablan, respectivamente de un reino subterráneo, Agartha o Agarthi, al que se refieren tradiciones vivas de Mongolia y la India, transmitidas por monjes budistas, en el que moraría el “rey del mundo”, el “chakravarti”.

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En la tradición budista el “chakravarti” es el “señor de la rueda”, o si se quiere “el que hace girar la rueda”. Guénon nos dice al respecto: “es quien, instalado en el centro de todas las cosas, dirige su movimiento sin él mismo participar, o sea quien es –según la expresión de Aristóteles– el ‘motor inmóvil’”. Esa rueda está habitualmente representada con la forma de una svástica, símbolo que, ante todo, indica movimiento en torno a un centro inmóvil.

El “rey del mundo” no es un tema exclusivamente budista. La Biblia registra la misteriosa figura de Melkisedec, rey y sacerdote de Salem, señor de Paz y Justicia. Salem, es equivalente al Agartha y Melkisedec el “chakravarti” judeo–cristiano.

2a19ff28896591071510b37becd52144.jpgEl lugar de acceso a ese centro del mundo aparece en distintas tradiciones: son muchas las leyendas de cavernas que dan acceso al centro del mundo, también montañas que tienen la misma función, islas, lugares marcados con monumentos megalíticos (menhires frecuentemente), lugares “Omphalos” (ombligos del mundo como el santuario de Delfos), todos estos puntos tienen como denominador común el constituir “centros espirituales”, es decir, lugares en los que se favorece el tránsito entre el mundo físico y el metafísico, entre lo contingente y lo trascendente. Todos estos símbolos facilitan la entrada a otro nivel de la realidad, aquel que se ha hecho invisible para los hombres dada su impiedad o simplemente a causa de la involución cíclica del mundo. Entrado éste en la Edad Oscura (Kali Yuga, Edad del Hierro o Edad del Lobo), lo que antes era visible y accesible se convierte en secreto y oculto. No puede llegarse hasta él sino a través de pruebas iniciáticas y de una ascesis interior: tal es la temática de la conquista del Grial, de las grandes rutas de peregrinación, de temas masónicos como el de la “búsqueda de la palabra perdida”, etc.

En esos lugares mora un rey supremo, indiscutible, acaparador del poder espiritual y del temporal, oculto e inaccesible, señor de paz y justicia: el rey del mundo, el rey perdido.

LA RENOVACION DEL MUNDO A TRAVES DEL REY PERDIDO

Existe una interferencia entre los temas del Rey del Mundo y el Gran Monarca de un lado y los del Rey Perdido de otro. Este último, es un gran monarca que ha desaparecido misteriosamente y cuyos súbditos se niegan a creer que haya muerto. Las tradiciones indo–europeas, hablan de reyes que se ocultan en cavernas, o simplemente que desaparecen pero que no han muerto. Pues bien, este es el punto de interferencia entre una y otra tradición.

El tema del “rey perdido” alude a reyes históricos que la crónica ha revestido de contenidos míticos; por el contrario, el tema del “rey del mundo” pertenece exclusivamente al universo mítico. Cuando un rey histórico no muere, sino que desaparece, oculto en una cueva, en una montaña o en una isla, es que ha pasado al dominio del Rey del Mundo, ha establecido contacto con él y ha tenido acceso a ese reino latente que está oculto por culpa de la degeneración del mundo. En todas las tradiciones el “rey perdido”, al desaparecer y entrar en contacto con el “rey del mundo”, legitima su poder y alcanza un rango divino.

Ahora bien, esa situación no durará siempre. Finalizado el ciclo, la espada vengadora del “rey perdido” se manifestará de nuevo y, gracias al poder de su brazo, el mundo quedará renovado, habitualmente tras una gran batalla.

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En el Tíbet solo los monjes budistas que han alcanzado un más alto grado de perfección, tienen acceso al reino oculto de Shambala, del cual el Dalai Lama es su delegado y embajador. Allí reside Gesar de Ling, rey histórico que vivió aproximadamente en el siglo XI y gobernó el Tíbet. Las leyendas locales afirman que Gesar no ha muerto, sino que retornará de Shambala al mando de un ejército, para someter a las fuerzas del mal y renovar el mundo agotado y caduco.

ARTURO Y FEDERICO BARBARROJA EN LAS LEYENDAS MEDIEVALES

En la Edad Media europea, mientras tanto, aparece una leyenda que fue considerada como verdad histórica, la del Preste Juan, el Rey Pescador. En Oriente, en un lugar impreciso entre Abisinia e India, existía un reino inmenso gobernado por un avatar de Malkisedec, el Rey Pescador. En su castillo se alojó Perceval en el curso de su conquista del Grial y fue allí donde vio la preciada copa y donde le fueron formuladas las preguntas fatídicas que Perceval en ese momento no supo contestar. Robert de Boron llega a calificar a Perceval de sobrino del Rey Pescador.

En el terreno de la historia se sabe que el Emperador Federico I recibió tres regalos del Preste Juan, (un abrigo de piel de salamandra, que le permitía atravesar las llamas, un anillo de oro y un frasco de agua viva) que suponían un reconocimiento de la dignidad imperial de Federico I por parte del “Rey del Mundo”. Así pues, el Rey del Mundo es aquel rey superior a los demás reyes y que los legitima para su misión.

En diversas ocasiones, monarcas europeos organizaron expediciones para establecer el contacto con el mítico reino del Preste Juan, que invariablemente se perdieron y jamás regresaron. Pero el tema subsistió en las leyendas del Grial.

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Arturo, después de la batalla contra las fuerzas del mal representadas por Mordred, se retira a la isla de Avalon. De Carlomagno se dirá lo mismo: que no está muerto, sino que, aguarda el tiempo en que sus súbditos vuelvan a necesitarlo. Federico I y su hijo Federico II, alcanzarán el mismo rasgo legendario, morando en el interior de montañas como el Odenberg o el Kyffhäuser, volverán cuando se produzca la irrupción de los pueblos de Gog y Magog, aquellos que Alejandro Magno –otro rey perdido– encerró con una muralla de hierro.

Es también en el período medieval en el que se establece la festividad de los Reyes Magos, personajes misteriosos que siguen a la estrella que marca el lugar de nacimiento de Cristo. Su triple imagen es un desdoblamiento de la figura de Melquisedec. Si en el rey de Salem está concentrado la triple función de “Señor de Justicia”, “Sacerdote de justicia” y “Rey de Justicia”, en los Reyes Magos, esta función está separada e individualizada en cada uno de ellos.

EL MITO DEL REY PERDIDO EN LA PENINSULA IBERICA

Sobre el suelo de la península ibérica florecieron también leyendas del mismo estilo. Jamás se encontró el cadáver de Roderic o Don Rodrigo, último rey godo; su recuerdo y el de la monarquía legítima animó a su portaespadas, Don Pelayo a iniciar la reconquista en su nombre.

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Más tarde, floreció el mito de Otger Khatalon, héroe epónimo de Cataluña; oriundo de Baviera, empuñaba como el Hércules mítico una pesada maza; liberó el valle de Arán y el valle de Aneu del dominio musulmán; una vez cumplida su obra desapareció, no está muerto, solo oculto, y solo volverá cuando se produzca una nueva crisis desintegradora.

Alfonso el Batallador y Don Sebastián de Portugal, desaparecido tras la batalla de Alcazarquivir, dejaron tras de sí un halito de misterio; años después todavía se creía que seguían vivos e incluso algunos impostores pretendieron usurpar su personalidad.

LAS ULTIMAS MANIFESTACIONES DEL MITO

A mediados del siglo XIX aun debía manifestarse el tema del rey perdido en Francia. La historiografía oficial no ha logrado desenmarañar el destino del Delfín de Francia, Luis XVII, desaparecido en la Torre del Temple de París tras el asesinato de sus padres por los revolucionarios. Algunos todavía hoy sostienen que el relojero holandés Naundorff, que llegó un día a París demostrando conocer con una precisión absoluta la infancia del Delfín, era el hijo de Luis XVI.

Setenta años después, algunos rusos blancos exiliados tras la Revolución Rusa, quisieron creer que la Gran Duquesa Anastasia jamás había muerto, sobrevivió a la masacre de Ekhaterinemburgo y daría continuidad a los Romanov.

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Finalmente hubo muchos que se negaron a creer en la muerte de Hitler y durante años estuvo extendida la idea que había logrado sobrevivir al cerco ruso de Berlín y huir al Polo en donde prepararía el retorno y la venganza.

La fuerza de la leyenda tuvo aun un postrero coletazo en el “affaire” de Rennes le Chateau, cuyo tema central era la supervivencia de la dinastía merovingia y el hallazgo del “rey perdido” en la figura de un astrólogo y documentalista que decía ser gran maestre de un “Priorato de Sión”. Se trata de un eco postrero en el que la credulidad de las masas arraiga en un sustrato de la psicología profunda de los europeos. Y es que, en el fondo, el “rey perdido” no es sino el arquetipo simbólico de una calidad espiritual próxima a la trascendencia, latente en todos los hombres, olvidada, más no perdida.

A MODO DE CONCLUSION

Caudillo derrotado en ocasiones (Dagoberto, Arturo), en otras muerto, pero cuyo cadáver jamás se encuentra (Barbarroja, Rodrigo), o simplemente líder victorioso de un período áureo (Guesar de Ling), consciente de que los ciclos históricos han decaído y que decide pasar a un estado de latencia hasta que se produzca la renovación del tiempo (de la que él mismo será vehículo), este mito es transversal en el espacio y en el tiempo, reiterándose en todo el ciclo indo–ario.

Siempre la morada de este rey perdido es un símbolo polar: una montaña inaccesible (Barbarroja), una isla dorada (el Avalon de Arturo), el “centro” de la tierra (Cheng Rezing, el “rey del mundo” extremo–oriental), un castillo dorado (Otger Khatalon). El presentimiento de su existencia anima a otros a emprender gestas y hazañas imposibles (la reconquista de Don Pelayo en relación a Rodrigo, los atentados del “Wehrwolf” en relación a Adolfo Hitler, la conquista del Grial por los caballeros del Arturo muerto en Avalon) o estar a la espera de la llamada del monarca para acudir a la última batalla (el tema del Räkna–rok y de la morada del Walhalla, el tema del último avatar de Buda y de Shambala).

Lo que se pretende en otros casos es tomar el mito del rey perdido de una forma utilitarista: sería él y sus presuntos descendientes los que garantizarían la legitimidad dinástica (los descendientes de Dagoberto II en el affaire de Rennes le Chateau, los partidarios de Naundorf en la cuestión del Delfín, los de Juan Orth en la dinastía austro–húngara, incluso los de la gran duquesa Anastasia en el caso de la herencia de los Romanov, etc.).

El mito del Rey del Mundo, las leyendas de los reyes perdidos y de los monarcas que aguardan la batalla final rodeados de sus fieles guerreros, pertenece a nuestro pasado ancestral. Es una parte de nosotros mismos, algo que debemos conocer y encuadrar en un universo simbólico y mítico, hoy perdido, pero del cual no podemos prescindir si queremos conocer nuestro origen y nuestro destino.

 

samedi, 31 octobre 2020

Macron veut confiner «l’ancien monde» … grâce à notre soumission

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Macron veut confiner «l’ancien monde» … grâce à notre soumission

 
 
Auteur : Karine Bechet-Golovko 
Ex: http://www.zejournal.mobi

Sans aucune surprise, Macron l’a annoncé : la France doit être confinée, pour cause d’énième vague d’un énième virus. Et partout de s’indigner de « l’incompétence » de ce Gouvernement, qui serait « dépassé » par la situation. Vous pensez vraiment qu’ils ne connaissent pas les saisons ? Qu’ils n’ont pas accès aux statistiques de l’INSEE ? Qu’ils n’ont pas noté la disparition de la grippe et autres maladies respiratoires virales ? Vous pensez qu’ils ont arrêté « l’optimisation » des hôpitaux ? Qu’ils soutiennent l’économie locale, ancré dans les territoires de notre pays, et l’industrie nationale ? Ce serait, en effet, plus confortable de penser ainsi, de se réfugier encore et toujours dans cette complaisance de la fausse indignation. Mais il est urgent de sortir de cette zone de confort qui nous conduit, avec notre pays, à l’abattoir. Après un premier choc de confinement inattendu au printemps, qui a mis la population en état de choc, avec une pression psychologique sans précédent depuis, les gens ont accepté le masque omniprésent – « c’est pas grave », puis le couvre-feu – « c’est toujours mieux que le confinement », enfin le confinement – c’est toujours mieux que la mort ? Macron impose ce nouveau monde d’une vie réduite au biologique et la société au service du transnational. Et pour l’instant, tout se passe à merveille.

À force de tout accepter, sur le mode du « ce n’est pas grave », « on n’a pas le choix », « on peut faire avec », les Français sont mis le dos au mur. Évidemment, un certain confinement est annoncé, mais un confinement différent du précédent, car il doit permettre la normalisation de l’anormal, la mise à mort de la société que nous connaissons, que nous aimons. Il doit permettre le « Nouveau monde » avec ses « nouveaux hommes ». Comme à chaque phase totalitaire de l’histoire de l’humanité. Nous avons eu avec l’homo oeconomicus, l’homo sovieticus, voici l’homo … covidicus ?

Cette fois-ci, les écoles sont ouvertes. Pas les universités, le nouveau monde n’a pas besoin de véritables cerveaux de ce côté du monde, et pour assurer la maintenance, l’enseignement à distance est suffisant. Mais l’école, elle, est un élément fondamental de la formation de l’être humain. Formation idéologique. Ainsi, dès le plus bas âge, il va pouvoir apprendre « les gestes barrières », il va pouvoir construire des barrières mentales, puisque le Covid a restauré le culte des murs. La barrière du masque va devenir naturelle, il ne fera plus de bisous (trop dangereux), il n’aura plus de contact physique (trop dangereux), il entrera naturellement dans le virtuel – l’isolement. Ainsi, le nouveau monde va former une génération faible, intellectuellement, psychiquement, émotionnellement. Donc, une masse qui sera facile à travailler, à manipuler, à gouverner.

Les commerces « non-essentiels » seront fermés. Ainsi, resteront ouverts :

« Concrètement, les commerces alimentaires, à savoir les supermarchés, les épiceries ou encore les boulangeries pourront rester ouverts, tout comme les banques et assurances, les bureaux de tabacs et distribution de la presse, les stations-services, les pharmacies, les hôtels, les établissements de santé, les pompes funèbres ou encore les garages et autres lieux de réparation et entretien automobile ».

Donc, adieu librairies (le livre est vraiment trop dangereux), vêtements, bijoux, etc. Mais, les grandes surfaces vendent des livres, des bijoux, des vêtements … Quelle chance, le Gouvernement va enfin pouvoir détruire le commerce local au profit des grandes surfaces, va enfin pouvoir achever l’économie nationale. Car tout le monde ne perd pas à ce jeu de suicide collectif. Par exemple, les bénéfices nets de Microsoft ont augmenté de 30% déjà cette année. Je ne vous parle même pas des fournisseurs de plateformes comme ZOOM, qui ont littéralement explosé. Celui qui perd, c’est le monde réel, celui qui nous permet de vivre. Les petits commerçants dénoncent cette concurrence déloyale. Et les entreprises qui fonctionnent doivent au maximum passer au télétravail … ou au chômage partiel. Et bien sûr pas de loisirs : vous n’êtes pas là pour ça. Restos, bars, cinémas, théâtres, fermés. Pour le reste, la soumission est la règle et le retour des autorisations de déplacement en est le signe visible.

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La question n’est pas simplement économique. Elle n’est pas économique. On ne résoudra pas le problème en devenant tous des IT manageurs, des livreurs à domicile, des « conseillers » sur plateformes électroniques. En s’enfermant chez soi, avant d’être enfermés dans un caveau. Sur le mode du « il faut s’adapter ». La question est de savoir dans quel monde nous voulons vivre ? La technologie fait partie de notre vie et c’est normal, mais elle ne peut ni remplacer, ni conditionner notre vie.

Le confinement a été possible, car nous avons finalement tout accepté jusque-là. Parce qu’aucune opposition politique n’existe réellement. Parce que les gens sont abandonnés à eux-mêmes, sans aucune structure pour les aider à garder la tête haute.

Parce que ce monde est vraiment global et qu’il a écrasé l’humain. Sa force est de n’avoir laissé aucun espace à la contestation politique, seule la contestation individuelle est possible, qui peut être écrasée (amendes et privation de liberté) et ne présente aucun danger quant à l’exercice du pouvoir. Sa force vient de ce qu’aucune force intellectuelle réelle n’ait pu émerger en tant que force, le conformisme est trop puissant. Et ce ne sont certainement pas des articles de blog ici ou là, quelques déclarations tonitruantes sur les réseaux sociaux, qui vont renverser la vapeur.

Et quelle sera la réaction cette fois ? Ce nouveau monde est dans le réel, seule une action dans le réel peut y mettre fin. Qui sera cet Homme qui osera vivre l’Ultima Verba :

… Quand même grandirait l’abjection publique
A ce point d’adorer l’exécrable trompeur ;
Quand même l’Angleterre et même l’Amérique
Diraient à l’exilé : – Va-t’en ! nous avons peur !

Quand même nous serions comme la feuille morte,
Quand, pour plaire à César, on nous renîrait tous ;
Quand le proscrit devrait s’enfuir de porte en porte,
Aux hommes déchiré comme un haillon aux clous ;

Quand le désert, où Dieu contre l’homme proteste,
Bannirait les bannis, chasserait les chassés ;
Quand même, infâme aussi, lâche comme le reste,
Le tombeau jetterait dehors les trépassés ;

Je ne fléchirai pas ! Sans plainte dans la bouche,
Calme, le deuil au cœur, dédaignant le troupeau,
Je vous embrasserai dans mon exil farouche,
Patrie, ô mon autel ! Liberté, mon drapeau !


- Source : Russie politics

Le Songe impérial de Dominique de Roux

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Luc-Olivier d’Algange:

Le Songe impérial de Dominique de Roux

         «  L’existence, c’est quand l’être envoie en exil une expérience particulière de lui-même, qui devient alors souvenir, mémoire, volonté ou désir de retour, sinon revenir. Exister, c’est donc être en exil par rapport à l’être, s’en souvenir et tout sacrifier au retour, ressusciter les choses mortes. Reconquête de tout un art, d’un esprit de renaissance. »

Dominique de Roux

La portée poétique et métaphysique d’une œuvre tend à demeurer méconnue de ceux qui n’en retiennent que la figure humaine qu’elle dessine et le génie du style, en oubliant ce dont il est question, l’action que le Songe précipite comme une matière ardente dans ces conditions nécessaires que sont un destin d’homme et un art d’écrire. Il existerait ainsi, dans une zone antérieure à l’œuvre, comme le sceau d’une empreinte invisible. Qu’en est-il du sceau de l’œuvre de Dominique de Roux ? Quelle est sa mise-en-demeure ? De quelle nature, ouranienne, héliaque, impériale, est l’invisible dans ce que nous voyons d’elle, de ces images qu’elle fait apparaître ? Qu’en est-il des mythes et des Symboles ? Quelle attente ardente brûle dans ces phrases ? Et pour qui ? Une œuvre, et surtout une œuvre laissée en suspens, n’est-elle pas une courbe qui débute avant la page écrite et s’achève après elle ? Faute de se poser ces questions, la littérature des littérateurs, ou des idéologues, ce qui revient au même, nous rattrape, et nous en sommes réduits à juger et à jauger l’œuvre selon des normes sommaires, stéréotypées, grégaires.

le-cinquieme-empire-1239636-264-432.jpg        L’œuvre de Dominique de Roux témoigne d’une stratégie de rupture, mais rupture pour retrouver la plénitude de l’être, à laquelle, selon la théologie apophatique, « tout ce qui s’ajoute retranche ». Il faut donc rompre là, s’arracher avec une ruse animale non moins qu’avec l’art de la guerre (et l’on sait l’intérêt tout particulier que Dominique de Roux porta à Sun Tsu et à Clausewitz) pour échapper à ce qui caractérise abusivement, à ce qui détermine, et semble ajouter à ce que nous sommes, alors que la plénitude est déjà là, dans « l’être-là », dans l’existant pur, lorsque celui-ci, par une succession d’épreuves initiatiques, de ressouvenirs orphiques, de victoires sur les hypnoses léthéennes, devient le témoin de l’être et l’hôte du Sacré.

         La radicalité de Dominique de Roux, ses provocations de Moderne anti-moderne, ne s’expliquent pas autrement : il faut aller au cœur de l’être, résolument, encourir le blâme pour s’établir souverainement dans ce qui nous appartient de toute éternité, s’y établir pour en devenir l’hôte et ne point laisser prise à ce qui, par l’usage quotidien, nous dépossède de sa claire vérité. N’hésitons point alors à encourir le reproche que certains firent à Dominique de Roux : de parler de lui-même en parlant des autres, - reproche mal fondé au demeurant car à parler de ce qu’une œuvre met en mouvement, de ce qu’elle suscite, à s’éloigner du texte et de la biographie, de la linguistique et de la psychologie, ou encore de l’idéologie, qui furent longtemps les seules grilles d’interprétation des critiques ( mais que voir et que vivre derrière des grilles ?), à s’évader de la fausse objectivité où s’exacerbe jusqu’à l’hybris la vanité du savoir, c’est bien une humilité que nous retrouvons, celle de laisser l’œuvre agir sur nous, d’en recevoir, pour nous-mêmes, ce qu’elle veut nous donner, de la lire comme si elle n’avait été écrite que pour nous, de suivre les pistes qu’elle nous indique au lieu, du haut de notre science, de la vouloir démonter, déconstruire, expliquer, comme si nous savions mieux que l’auteur ce dont il s’agit !

Longtemps Dominique de Roux fut notre aîné ; et voici, depuis quelques années, qu'il est notre cadet, qu'il nous devance déjà et encore de sa juvénilité, nous rappelle aux audaces essentielles, nous invite à découvrir et à défendre d'autres oeuvres que la nôtre et nous délivre, par cela même, de la mécanique odieuse de la subjectivité, de cet enfermement dans le « moi », autrement dit, de la « psychologie des larves » dont parlait Novalis, pour solliciter en nous ce songe de grandeur, cette nostalgie impériale qui veut le monde plus grand que ce que nous en pouvons penser. Nous gardons le souvenir des découvertes, des « missions de reconnaissance », où il nous précéda,  de l’aventure prodigieuse des Cahiers de l’Herne, de son ultime revue Exil, où nous retrouvions tout ce qui, ces dernières années, nous avait requis, d'une requête tout autant métaphysique que littéraire, Pessoa, Julius Evola, Valery Larbaud, Knut Hamsun, Céline, Raymond Abellio, Gombrowicz, et parmi les contemporains, Jean Parvulesco, André Coyné, Matthieu Messagier, Patrice Covo…  Les poètes et leurs intercesseurs, les aventuriers du Logos, les « calenders », selon le mot de Gobineau, les Exilés, car depuis que le monde se montre tel que nous le connaissons, les Fils de Roi  sont toujours en exil. Qu’en est-il de l'exil, non point dans l'ailleurs mais dans l'ici-même ?  Qu'en est-il de l'exil ontologique, et non point circonstanciel ou historique ? (1)

71zEV3-Da9L.jpgL'exil, dans un monde déserté de l'être, dans un monde de vide et de vent, où toute présence réelle est démise par sa représentation dans une sorte de platonisme inversé, est notre plus profond enracinement. Et ce plus profond enracinement est ce qui nous projette, nous emporte au voisinage des prophéties. «  Etre aristocrate, que voulez-vous, c’est ne jamais avoir coupé les ponts avec ailleurs, avec autre chose ». Cette fidélité aristocratique, qui scelle le secret de l’exil ontologique, autrement dit, de l’exil de l’être en lui-même, dans le cœur et dans l’âme de quelques uns, est au plus loin de la seule révérence au passé, aux coutumes d’une identité vouée aux processions funéraires : «  Je ne me dédouble pas je cherche à multiplier l’existence, toujours dans le flot des fluctuations, vérités et mensonges qui existent, qui n’existent pas, au bord du langage. »

L’héritage, alors, n’est plus un poids, un carcan de convenances mais un recours, une puissance à celui qui sait de par ses choix « être toujours et partout en territoire ennemi ». Etre en exil, c’est-à-dire au plus proche de l’être, au bord du langage, c’est être offert, comme en sacrifice, à la possibilité d’inventer une écriture dont le tracé, de crêtes en crêtes, d’énigmes en clartés, ravive le pouvoir de « protéger le ciel le plus haut, autrement dit, sa tradition ». Rien de moins conservateur, toutefois, que cette sauvegarde de sa tradition ; nul repli, fût-il stratégique, sur des positions obsolètes. Aux guerres frontales, qui, de notre côté, ne peuvent qu’être perdues, Dominique de Roux préfère les guérillas nuancées de logique taoïste, d’un « ethos » à la Sun Tsu qui feront de cet « anti-moderne » une figure décisive de l’ultra modernité, -autrement dit de la modernité au sens rimbaldien : celle de « l’étincelle d’or », de la fulgurance imprévisible. D’où l’importance de se garder d’être « inébranlable dans ses concepts, catégorique dans ses déclarations, clair dans ses idéologies, féru dans ses goûts, responsable dans ses dires et dans ses actes, précis et cristallisé dans ses manières d’être.»

         Seuls pourront, en territoire ennemi, prolonger ce qui doit l’être, « le plus haut ciel », ceux qui refusent d’endosser un rôle, de se revêtir de la livrée ou de l’uniforme, de simplifier ou de schématiser leurs pensées ou leurs croyances à toutes fins utiles. Ce qui importe n’est point la doxa mais la gnosis, non point la représentation mais la présence réelle, non point l’eau croupie de la citerne mais l’eau vive, non point les mots mais la parole : «  Le présent, donc, le passé ainsi que l’avenir d’une littérature qui est celle dont nous assumons les destinées sont chacun pris à part et tous ensemble, le temps d’un seul et même combat. Le combat de la parole contre les mots, du pouvoir d’intégration contre les puissances de la désintégration, et c’est là le mystère ultime de la parole d’Orphée déchiré par les chiens d’Hécate que sont les mots laissés à eux-mêmes ».

Loin d’être soumission aux prestiges fallacieux de la lettre, à la fascination des « signifiants » et à leurs structures immanentes, l’écriture de Dominique de Roux, au sens où lui-même parlait de l’écriture du Général de Gaulle, ressaisit dans un même combat le passé, le présent et le futur, la nostalgie orphique et le pressentiment sébastianiste, ressaisit, ou plus exactement refonde, la fondation étant aussi fusion dans le creuset alchimique de l’existence voulue comme expression de l’être, le Sens lui-même, le fluidifiant, lui restituant ses impondérables, ses fugacités tremblantes, ses chromatismes insaisissables qui sont le propre de la parole, c’est-à-dire du Logos lorsque de celui-ci ne se sont pas encore emparés les idolâtres et les abstracteurs.

         9782268034195.jpgEcrire sera ainsi pour Dominique de Roux cette action subversive, « ultra-moderne » qui consiste à retourner à l’intérieur des mots la parole contre les mots, à subvertir, donc, l’exotérique par l’ésotérique et à ne plus s’en laisser conter par ceux-là qui oublient que la parole humaine voyage entre les lèvres et les oreilles, comme sur les lignes ou entre les lignes, qu’elle voyage entre celui qui la formule et celui qui la reçoit, comme entre la vie et la mort, le visible et l’invisible : ce profond mystère qui se laisse sinon éclaircir, du moins comprendre, par la Théologie.

         L’ardente polémique contre les diverses cuistreries plus ou moins universitaires qui prévalaient alors, loin de relever seulement d’une joyeuse humeur mousquetaire, se fondait, on ne le vit pas assez, sur une autre vision du langage et du monde, autrement dit de l’écriture comme « praxis » du haut et du profond, du lointain  et de l’immédiat, destinée à lutter contre l’obscurcissement de l’être, contre cette banalité et cet ennui, toujours aux aguets, qui nous envahissent à la moindre inadvertance.

Dominique de Roux fut ainsi bien davantage que « le plus grand éditeur de l’après-guerre » selon la formule perfide de Jean-Edern Hallier qui dut avoir quelque difficulté à comprendre que l’on pouvait être un écrivain de grande race sans être exclusivement tourné vers soi-même. « Editeur », au demeurant, fût-ce « le plus grand » suffit mal à définir l’action de Dominique de Roux dans ce domaine pour autant que sa méthode, si méthode il y eut, fut d’abord de prolonger, de prouver par des actes, ses admirations. Editeur, Dominique de Roux le fut non par défaut mais par surcroît.

Par surcroît aussi, la politique, sujet litigieux. Disons simplement, avant d’en revenir à l’écriture, qu’il n’y a plus à discutailler de son prétendu « fascisme » dès lors que l’on sait que tout ce qui s’est opposé, s’oppose ou s’opposera au monde comme il va globalement a été, est, ou sera traité de « fasciste » par les adeptes de la loi du plus fort et qu’il n’y a pas de rébellion, de « contre-monde », fussent-ils purement contemplatifs, qu’il n’y a pas de métaphysique ou d’esthétique rétives au règne de l’argent et de la technique qui ne seront traités de « fascistes » par les défenseurs, pathétiquement dépourvus d’imagination, de l’ordre établi, comme naguère on réputait hérésiarques Maître Eckhart ou Giordano Bruno. Comme si le fascisme réel, le nazisme opérationnel ne furent pas aussi et d’abord de lourdes collusions entre l’esprit grégaire et les puissances de l’argent et de la technique !

000978428.jpgDes temps où il fut notre aîné, Dominique de Roux nous incita à donner forme à notre dessein. Devenu notre cadet, lorsque nous eûmes dépassé la frontière des quarante-deux ans, son œuvre nous fut cette mise-en-demeure à ne point céder, à garder au cœur la juvénile curiosité, à déchiffrer, dans son écriture aux crêtes téméraires, le sens d’une jeunesse qui, suspendue trop tôt dans l’absence, ne peut finir.  Il y a une écriture de Dominique de Roux, un style, un usage de la langue française en révolte contre cette facilité à glisser, avec élégance, mais sans conséquence, sur la surface du monde. On s’exténue à condamner ou à défendre sa plume de « polémiste d’extrême-droite », alors que ce qui advient dans ces bouillonnements, ces ébréchures, ces anfractuosités n’est autre que la pure poésie.

Sauver la poésie de ce qu’en font les poètes de laboratoire ou les poètes minimalistes ou illettrés, redonner la poésie à la prose et la prose à la poésie ( et je ne vois nul texte dit de « poésie » plus digne du beau nom de poème que La Maison jaune, texte inclassable, lapidaire et mystérieux) ; retrouver de la poésie un à un les pouvoirs, tel fut, semble-t-il le dessein de Dominique de Roux, - d’où l’absurdité de vouloir juger de ses œuvres selon les normes du genre romanesque ou de la prose française néoclassique.

La poésie est aussi présente à chaque page des romans et des essais que du journal et de la correspondance ( dont l’excellente biographie de Jean-Luc Barré nous livre maints extraits inédits) qu’elle est absente de la plupart des recueils de poèmes des « poètes » patentés par  les satrapes du texte à lignes irrégulières qui officièrent alors dans la régulation des petits bouts de proses vantardes qui n’emportent rien sinon la pose de celui qui consent à ne rien dire, à ne rien évoquer, à s’en tenir rigoureusement en deçà du péril lyrique et liturgique du langage en cultivant de molles ambiguïtés par l’utilisation de métaphores discrètes, bien policées, insoupçonnables de moindres « accointances » avec le Sacré, avec le mythe ou avec le tragique, - autrement dit, avec la vérité orphique que l’enfer du décor où nous vivons nous dissimule alors qu’elle est, cette vérité, la seule à pouvoir dire en même temps notre destin et notre anti-destin, notre monde ( c’est-à-dire notre exil) et ce contre-monde qu’il nous faut ourdir en faveur de l’être et contre le néant.

C’est donc bien vers l’écriture de Dominique de Roux qu’il nous faudra nous tourner comme lui-même se tourna par un livre ardent vers l’écriture du Général de Gaulle : écriture des épicentres, non point cette écriture diurne, cette écriture de l’après-midi, coulée d’évidences en évidences au rythme du canotage mais bien une écriture nocturne, s’enroulant autour d’une métaphore solaire, mais d’un soleil en voie de création. D’abord l’Image, et ensuite les mots : «  Ne servir que sa vision ». La rencontre éblouie avec d’autres œuvres, venues là comme des « confirmations », selon le mot de Philippe Barthelet, lui permettra précisément d’échapper au déjà formulé, au banal, au stéréotype et d’aller chercher l’impondérable entre l’œuvre et celui qui la reçoit : ce passage où le Verbe devient silence. L’espace de la passation des pouvoirs, la zone philosophale et « diplomatique » n’est pas le moi fictif, la subjectivité dont le triomphe nous réduit à l’état de mécanique, mais l’expérience métaphysique du Verbe. Ainsi la confrontation explicite avec d’autres œuvres, avec l’encre de sang d’autres « horribles travailleurs » devient fondatrice d’une vérité et d’une liberté essentielle.

81CKBFJlZLL.jpgRien n’importe que « la saison mystérieuse de l’âme». Toutes nos luttes, nos impatiences, et notre solitude conquise et notre exil, nos œuvres, qui ne sont ni des victoires ni des défaites, tout cela, non seulement au bout du compte, mais dès le départ ne vaut que pour ces retrouvailles légères : « Je viendrai en janvier. Je viendrai longtemps. Vous me parlerez encore des jardins et des hommes… dans cette petite salle blanche du monastère qui sent la pomme et le grain, sur cette colline de silence et de beauté, parmi les pluies qui tressent tout autour une saison mystérieuse. Je vous écouterai. Vous calmerez ma foi clignotante comme une étoile. J’enserrerai votre trésor comme un écureuil entre mes mains. »

Dominique de Roux ne fut ni « fasciste » ni « réactionnaire » comme le disent les imbéciles mais anti-moderne (ce qui est tout autre chose et peut-être le contraire) ; et anti-moderne, il faut bien reconnaître qu’il y a de bonnes rasions de l’être pour peu que l’on soit sensible à l’âme des êtres et des choses, à leurs « saisons mystérieuses ». Substituant le confort à la beauté, la prédation à l’héroïsme, le pouvoir de l’argent (qui rend également esclaves les dominants et les dominés) aux jeux divers de la puissance et de la gloire, le monde moderne est cette lèpre, cet enlaidissement général de tout par tous les moyens, y compris ceux de la morale déchue en « moraline », pour reprendre le mot de Nietzsche.

Antimoderne en morale, c’est-à-dire ultra-moderne pour ce qui est de l’inventivité littéraire, penseur paradoxal, c’est-à-dire littéralement en marge de la doxa, de la croyance commune de son temps, aimant le heurt des contradictions, Dominique de Roux fut, à sa façon, le parfait représentant de sa lignée alors que d’autres, qui ne sont point idiots, le voient en rebelle à toute convenance héritée. Or, s’il fut l’un et l’autre, fidèle et rebelle, ce ne fut pas même alternativement mais en même temps, c’est-à-dire dans l’éternité qui, pour éternelle qu’elle soit, ne nous est donnée que par brusques échappées, semblables à ces rafales qui, dans leurs embruns, nous étourdissent.

Dominique de Roux fut cet aristocrate anti-moderne, ce fidèle, ce chevalier, dans le geste même qui affirme la liberté absolue : «  Un nouvel équilibre est à conquérir dans la fièvre » ou encore : «  Il faut rester des hommes libres… Jamais je ne me laisserai prendre dans ma vie à quelque parti que ce soit, droite gauche centre vert bleu hormis celui de l’amitié, de la violence de l’amitié, ses traits bien fermes, ses grandes passes d’ombre, ses vivacités nerveuses, ses inconnues, ses droits. »

283.2541567696_450_285.jpgA l’exigence morale qui consiste à ne pas être là où les autres vous attendent correspondra une écriture aux incidentes imprévisibles où les mots inattendus, dans leurs explosions fixes, captent les éclats du pur instant : «  Par rapport à l’écriture, ni loi, ni science, pas même une destinée ». L’héritage comme force motrice, élan donné, s’oppose à la destinée, forme consentie de la soumission. Du peu de liberté qui nous reste, l’anti-moderne ultra-moderne veut étendre le champ d’action et les prestiges secrets pour aller vers la réalité, tracé de lumière entre deux ténèbres : «  Retrouver la réalité, aller vers le réel, l’élémentaire, vers la mort prévue de l’homme et vers l’homme secret qui vit encore, vers sa réapparition dans la forme nouvelle, dans l’éternelle jeunesse de l’antiforme éternelle ».

S’il faut « jeter par-dessus bord les totems et les tabous de la tribu », c’est-à-dire devenir, selon la  formule d’Al-Hallâj  « un Unique pour un Unique », s’il faut, en même temps, accompagner « la longue marche de l’Occident à son propre être, au-delà du déclin », ce ne saurait être sans le dévoilement de l’écriture par elle-même, où plus exactement, sans le voilement de l’écriture par l’Ecriture qui accomplit à travers elle cette « intelligence prophétique de l’Histoire » cette « expérience du salut, secrète, existentielle » que Dominique de Roux évoquait à propos du Général de Gaulle.

Ecrire, alors, ce n’est plus s’évertuer, dans le néant du sens, à composer un « texte », lui-même destiné aux thanatopracteurs virtuels, universitaires ou journalistes, mais laisser œuvrer en soi la « vague d’assaut », l’action théurgique, d’un « certain retour à la vie ». Ces vagues, toutefois, ne sont pas un vain tumulte mais orbes venues d’une immobilité centrale, d’un cœur de calme infini, là où règnent « les Forts, les Sereins, les Légers » de L’Etoile de l’Alliance, évoquée par Stefan George. « Maintenant, les cercles sont plus lents et plus hauts, c’est le temps de l’exil, de l’écriture ».  Le sens de la tradition, de la fidélité à l’appartenance se révèlent dans la distance et dans la solitude. L’écrivain doit être séparé du monde « pour qu’il lui faille l’imaginer à nouveau et l’aimer autrement, l’unifier et en éclairer toutes les causes, le pénétrer, le vaincre intérieurement, le régénérer. »

Pour témoigner du monde, il faut le porter en soi, et pour le porter en soi, il faut s’en détacher. La politique et l’écriture dévoilante sont à équidistance de ce détachement qui permet de « transcender abruptement l’actualité immédiate, de nouer avec le passé le fil rompu, d’appliquer un De Monarchia. » Point de retour à Ithaque sans l’arrachement, le déracinement, sans l’exil dans le vent et la mer qui nous revêt de « la livrée majeure de l’Esprit ».

dominique_de_roux02_450.jpg« L’exil n’est pas une autre demeure. Il est séparation d’avec notre demeure. L’exil s’accompagne de la volonté de retour. C’est le visage dans les mains de l’homme séparé de lui-même (…) Et si la grande poésie arrache au monde, le développement de l’exil ne concerne pas seulement l’expérience de celui qui le vit, il abandonne les organisations têtes baissées vers la flamme et commence une vie nouvelle, cherchant la passe. »

Cette « passe », impériale et portugaise, passe vers l’écriture à travers la politique et non subordination de l’une à l’autre, comme il en advient aux écrivains dits « engagés ». Loin d’être ce retour contrit à l’Histoire et au collectif des clercs hantés par la conscience malheureuse ou mauvaise, l’engagement de Dominique de Roux se trouve être exactement contemporain de son plus radical désengagement, de sa perception d’un au-delà de l’Histoire, véritable et seul objet de l’enquête : « Le Portugal, parce qu’il croit aux réalités finales a compris, quand le reste de l’Afrique est livré au désordre, que dans le continent noir il ne fallait pas seulement avancer en espace mais aussi en esprit (…). Quand l’histoire européenne est pleine de peuples morts ou moralement détruits par le temps, le Portugal, refusant d’échapper au temps humain, qui est aussi une manière d’échapper aux exigences de la réalité, fait coexister dans son espace planétaire, une réalité humaine universellement pensée et prétendant agir sur l’Histoire ».

Ne pas échapper au temps mais le transmuter de l’intérieur, tel sera le propre du Cinquième Empire que Dominique de Roux entrevoit. C’est aussi toute la différence entre la Révolution et la contre-révolution qui veulent échapper au temps en le niant, en refusant le palimpseste du réel et ce « contraire de la révolution » qu’évoquait Joseph de Maistre qui vainc le temps en opérant à sa transmutation alchimique, providentielle. L’écriture de Dominique de Roux accompagne et souvent précède ces étapes successives, ou ces stations de la conscience où la conscience individuelle devient le miroir ardent de la conscience du monde. A la globalisation uniformisatrice, Dominique de Roux n’oppose pas ces vieilleries du modernisme que sont le nationalisme, le racisme, le pétainisme mais une autre universalité qui est celle du palimpseste, de la mémoire libérée de ses propres représentations, de la mémoire rendue à sa matière fusible, chatoyante et dispersée.

2068280-gf.jpgLe révolutionnaire comme le contre-révolutionnaire sont des nihilistes : ils nient la mémoire réelle, ils veulent, dans l’hybris de leur volonté, conformer le monde à leurs plans : hybris de ménagère et non de conquérant. Il faut défendre sa vision du monde ; mais telle est la limite du colonialisme, il convient que les mondes conquis, et même le monde natal, nous demeurent quelque peu étrangers. Cette étrangeté discrète et persistante est la condition universelle de l’homme que les planificateurs modernes ont en horreur et dont ils veulent à tout prix départir les êtres et les choses au nom d’un « universalisme » qui n’est rien d’autre que la plus odieuse des hégémonies, la soumission des temporalités subtiles de l’âme au temps utilitaire, au faux destin de l’Histoire idolâtrée, à l’optimisme stupide, au nihilisme béat.

Le « code secret du fado », la saudade qui « projette les êtres et les choses hors du temps », sera pour Dominique de Roux le signe du retour, l’aperception directe, en mode visionnaire, d’un horizon paraclétique où s’opèrent les noces de l’eau mercurielle et du feu apollinien, de la nostalgie et du pressentiment : «  Le Cinquième Empire ? L’Empire de la Fin d’après la fin, quand toutes les choses humaines auront été consommées (consumées) et ce qui apparaîtra de l’homme alors, ce sera ce que l’homme aura passé l’histoire entière à gommer, et qui lui reviendra : sa ressemblance. »

Que l’homme soit enfin, et au-delà de toute fin, à sa propre ressemblance comme à la ressemblance de son empire infime et infini sur les êtres et les choses, que notre solitude soit enfin signe et condition de cette amitié divine qu’évoquent Maître Eckhart et Rûmî, qu’une ombre jetée, qui est pure transparence, « antiforme éternelle », entre le monde et nous advienne pour nous réconcilier, l’écriture de Dominique de Roux nous en persuade d’autant mieux qu’elle devance, par un Songe (creuset de la réalité) toute démonstration et toutes arguties : ainsi à la pointe du Songe comme à la pointe du Calame, l’écriture de l’Empire « universel, missionné pour l’éternité » sera désormais  « comme fondu dans l’immensité océanique de son rêve, non point âge de conquérants ou de bâtisseurs, mais de découvreurs, de messagers, de navigateurs sans fin tenant leur raison d’être et leur force de cette absence de fin. »

Le Cinquième Empire appartient au passé autant qu’à l’avenir et quand bien même son attente semble déçue, il appartient encore au présent, à cette « lumière qui persiste identique à elle-même derrière le film » pour reprendre la formule de Nisargadata Maharaj. L’une des énigmes du Cinquième Empire se trouve  paradoxalement chez Gombrowicz dont le parti pris anti-idéologique, le mépris de toute forme collective, l’aristocratisme libertaire sont précisément les plus profondes raisons d’être. C’ est que l’Empire, pour Dominique de Roux, loin d’être un super-état (c’est-à-dire, pour paraphraser Nietzsche, le plus grand des plus froids des monstres froids) serait au contraire, s’il advenait, un espace géopolitique et spirituel d’une « rejuvénation » du monde, d’un retour à cette enfance, à cette adolescence, d’avant les systèmes, à cet Eros premier, cette humeur turquoise, qui précède les adultérations, le sérieux utilitaire, l’esprit « homaisien », le puritanisme, auquel les intellectuels échappent si rarement quand bien même ils se veulent parangons de la « transgression » et de la « dérision » .

51yfsJMYAZL._SX349_BO1,204,203,200_.jpgQue ce monde soit triste, torve, rancuneux et qu’il nous apparaisse tel sans que nous en eussions connu un autre suffit à convaincre qu’il n’est qu’un leurre, un mauvais rêve, un brouillard qui laisse deviner, derrière lui, une vérité éclatante mais encore plus ou moins informulée. Dominique de Roux fut exactement le contraire d’un nihiliste ; loin de nous ressasser que tout a déjà été dit, il nous donne à penser que presque tout reste à dire et même à créer : ainsi le Cinquième Empire dont la venue a pour condition le retour du Roi, un soir de brume sur le Tage ou le Nouveau Règne paraclétique de Stefan George ou encore l’Imam caché du prophétisme ismaélien.

L’attente paraclétique n’est pas le contraire de l’action, quand bien même elle subordonne l’action à la contemplation, l’action n’ayant pour raison d’être que de favoriser les conditions de la contemplation.  Cette attente est une « écriture du monde », et cette écriture est un renouvellement, une « rejuvénation poétique », celle là même que Dominique de Roux chercha chez les poètes de la Beat Génération ou chez les Electriques. De même que pour Sohravardî la prophétie n’était point scellée, que d’autres prophètes pouvaient survenir, croyance qui lui coûta la vie, Dominique de Roux crut en une poésie future, une poésie autre, non encore advenue, celle des « langues de feu » de la Pentecôte, du Paraclet annonçant l’Imperium Amoris, ou celle encore de la « foudre d’Apollon » qui frappa Hölderlin. D’où l’incertitude où nous sommes de savoir si sa vue-du-monde est païenne ou prophétique, inspirée par quelque gnose orphique ou empédocléenne ou inscrite dans l’œcuménisme des racines, des branches, des fleurs et des parfums de la tradition abrahamique.

md30242852158.jpgSi le Paraclet est avenir, s’il est l’eschaton de notre destin, la foudre d’Apollon, elle, est déjà tombée, mais elle est aussi mystérieusement en chemin vers nous, comme voilée, encore insue. De son ultime chantre, ou victime, Hölderlin, qui incarne pour Dominique de Roux « la poésie absolue », il nous reste encore à déchiffrer les traces, ces « jours de fêtes » dans l’éclaircie de l’être, ces silhouettes à la fois augurales et nostalgiques sur les bords précis de la Garonne, dans la lumière d’or de Bordeaux, cet exil en forme de talvera de la patrie perdue et infiniment retrouvée.

 «  Tout recommence » écrit Dominique de Roux et ce recommencement contient en lui l’admirable paradoxe de la coexistence du révolu et du prophétique, dépassant ainsi dans une torrentueuse assomption, l’opposition, somme toute subalterne, de l’anti-modernité et de l’ultra-modernité que nous évoquions plus haut. Le propre du Songe impérial est non seulement d’arracher le politique au despotisme de la société individualiste ou communautariste, de retrouver la dimension historiale et légendaire du destin commun des peuples, des races, des nations, mais aussi, et par cela même, de sauver, en même temps, la fidélité hölderlinienne aux dieux antérieurs et le frémissement annonciateur du Nouveau Règne. La société, dès lors qu’elle est livrée à la goujaterie, à la crétinisation de masse ne saurait en aucune façon trouver en elle-même les ressources du recommencement. Condamnée à l’infantilisme cacochyme, elle laisse jouer, en une apparence de liberté, une alternative emprisonnée dans la conjoncture profane, apoétique, soumise aux aléas des coutumes dévastées. Ces « communautés » que l’on veut opposer à l’individualisme, prises dans le plan général (et donc dépourvue de volume) sont à l’intérieur de la société, comme une âme qui serait emprisonnée dans un corps, comme dans un cachot dont, sauf un gardien muet, tout le monde a oublié l’existence. L’Empire que rêve Dominique de Roux suppose un radical renversement herméneutique : comprendre soudain que ce n’est point l’âme qui gît dans le corps mais le corps qui est dans l’âme, qui est environné d’âme, qui voyage dans l’âme.

A ce point de recouvrance, l’intériorité et l’extériorité ne se distinguent plus  et le temps n’est plus de distinguer l’individu du collectif, le subjectif de l’objectif, une autre logique apparaît  où nous nous apercevons soudain que la clef de notre destin est un « mantra » en accord avec la poésie du monde. Le Cinquième Empire, comme le nouveau règne de Stefan George, comme l’état confucéen rêvé par Ezra Pound, comme la « république » impériale de Valery Larbaud apparurent à Dominique de Roux comme autant de chances offertes à un contre-impérialisme – étant entendu que seule une idée d’Empire, idée au sens platonicien de « forme formatrice » suscitée par l’anamnésis (le ressouvenir d’Hésiode à Hölderlin, en vagues d’or…) disposera de la puissance en songe et en acte de frapper d’inconsistance l’impérialisme brutal, fiduciaire et puritain.

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Gagner la guerre économique - Entretien avec Olivier de Maison-Rouge

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Gagner la guerre économique

Entretien avec Olivier de Maison-Rouge

 
La guerre économique est désormais une réalité bien connue, comprise et anticipée par de nombreuses entreprises. Pour la gagner il faut certes en prendre conscience mais aussi développer un certain nombre d'outils et de stratégies. C'est ce que nous présente Olivier de Maison-Rouge, docteur en droit, avocat, professeur à l'Ecole de guerre économique.  Emission présentée par Jean-Baptiste Noé.
 
 
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Prometheus as a Specter with Jason Reza Jorjani

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Prometheus as a Specter with Jason Reza Jorjani

 
 
Jason Reza Jorjani, PhD, is a philosopher and author of Prometheus and Atlas, World State of Emergency, Lovers of Sophia, Novel Folklore: The Blind Owl of Sadegh Hedayat, Iranian Leviathan: A Monumental History of Mithra's Abode, and Prometheism. Here he describes many facets associated with the archetype of Prometheus: the creator of humanity, the rebel, the trickster, the martyr, the wise titan, the visionary, and the daemonic force behind science and technology. He argues that if humanity does not become conscious of Prometheus' mesmeric power, we will continue to blindly fall under the spell of our technological power – to our own detriment. He maintains that a deeper understanding of Prometheism is an antidote to the pitfalls of either fatalism or authoritarianism. Many viewers will know that Jason Reza Jorjani has suffered from libel and persecution as a result of his, generally misunderstood, political views. He is a brilliant scholar who has now been unfairly disgraced and is forced to fight a legal battle, while continuing his research and writing, without any regular employment. Therefore we have set up this "Go Fund Me" page in order to assist this worthy individual.
 
 
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vendredi, 30 octobre 2020

L’échec spectaculaire de la campagne anti chinoise occidentale

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L’échec spectaculaire de la campagne anti chinoise occidentale

Par Joseph Thomas

Source New Eastern Outlook

Alors même que l’AFP tente de dépeindre une récente réunion des Nations Unies comme une prise de position historique contre ce qu’elle prétend être des violations des droits de l’homme par la Chine dans sa région du Xinjiang, ce même article souligne l’ampleur de l’échec et la diminution de l’influence occidentale en général.

Le titre de l’AFP est le suivant : « Près de 40 nations exigent de la Chine qu’elle respecte les droits des Ouïgours », et note que parmi ces « presque 40 nations″ se trouvent les États-Unis, la plupart des États membres de l’UE, l’Australie ainsi que le Japon et une poignée d’autres États clients occidentaux.

Voila ce que dit l’AFP :

Les États-Unis, le Japon et de nombreux pays de l'UE se sont joints 
mardi à un appel exhortant la Chine à respecter les droits de l'homme
de la minorité ouïgour, exprimant également leur inquiétude quant
à la situation à Hong Kong. "Nous demandons à la Chine de respecter les droits de l'homme, en
particulier les droits des personnes appartenant à des minorités
religieuses et ethniques, notamment au Xinjiang et au Tibet"
, a

déclaré l'ambassadeur allemand auprès des Nations unies, Christoph
Heusgen, qui a dirigé l'initiative lors d'une réunion sur les droits
de l'homme.

L’initiative, signée par 39 nations, a été contrée par une autre présentée par le Pakistan et signée par 55 nations, ainsi que par une autre présentée par Cuba et signée par 45 nations. Ce nombre de signatures est très éloquents à l’égard de la puissance décroissante de Washington et de son ordre international.

Malgré la campagne de propagande anti-chinoise menée par l’Occident et axée sur les abus présumés de la minorité ouïgour du Xinjiang, région à prédominance musulmane, pas une seule nation à majorité musulmane n’a soutenu l’initiative occidentale à l’ONU. En fait, de nombreuses nations à majorité musulmane sont venues à l’aide de la Chine. Il s’agit du Pakistan lui-même, de l’Iran et de la Syrie, mais aussi de l’Irak occupé par les États-Unis et même du Koweït, du Qatar, des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite. Même les nations ayant des conflits territoriaux avec la Chine dans la mer de Chine méridionale et un passé de tensions, notamment le Vietnam et les Philippines, ont soutenu Pékin.

L’Inde, bien que membre du projet anti-chinois « Quad » de Washington, s’est abstenue de signer l’une ou l’autre déclaration, comme un grand nombre d’autres nations clés qui tentent doucement de se réorienter à mesure que le pouvoir mondial se déplace de l’Ouest vers l’Est. Cela inclut la Turquie, membre de l’OTAN, qui a été pendant de nombreuses décennies un fidèle serviteur de l’hégémonie occidentale.

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Pourquoi personne ne s’intéresse à la croisade anti-chinoise de l’Occident ?

Il y a trois raisons principales pour lesquelles la majorité du monde n’est pas intéressée par cette campagne de propagande anti-chinoise menée par les États-Unis.

Premièrement, et c’est le plus important, cette campagne de propagande américaine est basée sur des allégations fabriquées de toutes pièces.

Comme beaucoup d’autres l’ont fait remarquer depuis des années, y compris les médias occidentaux eux-mêmes à un moment donné, la Chine a été confrontée à un problème de terrorisme très réel au Xinjiang. L’actuelle campagne de propagande menée par les États-Unis contre la Chine dépeint les mesures de sécurité et les campagnes de déradicalisation comme des « violations des droits de l’homme », tout en omettant totalement la violence qui les a rendues nécessaires au départ.

Pire encore, des preuves documentées exposent le fait que les États-Unis et leurs alliés étaient à l’origine des efforts visant à radicaliser les extrémistes ouïgours.
Toutes choses étant égales par ailleurs, les nations qui n’ont pas investi dans l’obsession de Washington d’encercler et de contenir la Chine ou qui n’en bénéficient pas n’ont aucune raison d’approuver une campagne de propagande fondée sur des allégations fabriquées de toutes pièces et résultant du séparatisme parrainé par les États-Unis et du terrorisme qui en découle.

En fait, en soutenant la campagne américaine contre la Chine, ils soutiendraient une ingérence qui pourrait un jour se retourner contre eux. La liste des nations que les États-Unis et leurs partenaires ont déjà détruites [ou essayent de détruire, NdT] au cours du seul XXIe siècle est considérablement longue et ne cesse de s’allonger.

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Deuxièmement, les États-Unis et leurs alliés occidentaux n’ont manifestement pas la capacité de contraindre les nations désintéressées à soutenir leur campagne de propagande anti chinoise en cours. Le manque de motivation des nations du monde à y adhérer et le manque de moyens de pression des États-Unis pour les forcer à le faire ont conduit la plupart des nations à soutenir ouvertement la Chine ou à éviter de prendre position.

La troisième est due à l’essor de la Chine. Ses relations internationales sont fondées sur des liens économiques et commerciaux plutôt que sur la force militaire, l’ingérence politique ou d’autres stratégies de « soft power » de l’Occident.

L’essor de la Chine signifie également l’essor de nombreuses nations qui font des affaires avec Pékin. Les projets d’infrastructure, les investissements, le tourisme et le commerce menés par les Chinois dans le monde entier stimulent les économies des nations désireuses de travailler avec la Chine d’une manière que l’Occident ne peut tout simplement pas concurrencer.

Afin de travailler avec la Chine, ces nations doivent contourner l’hostilité croissante de Washington envers la Chine et toutes les façons dont elle se manifeste, comme cette initiative « allemande » qui vient d’être lancée à l’ONU.
L’échec de la propagande du Xinjiang signifie l’échec total de la propagande américaine

Cette dernière initiative de l’ONU marque peut-être l’apogée de la campagne de propagande anti chinoise menée par Washington.

Cette initiative montre à quel point le reste du monde s’intéresse peu à cette campagne et les nombreux mensonges qui ont été révélés au grand jour sont la base de la campagne elle-même. Alors que la Chine poursuit la réintégration de Hong Kong dans le continent après avoir mis fin aux troubles financés par les États-Unis et qu’elle remplace les agitateurs soutenus par les États-Unis dans des endroits comme le Tibet par des progrès économiques, les États-Unis doivent inventer de nouvelles histoires pour attaquer la Chine.

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Mais si le monde ne s’intéresse pas aux mensonges des États-Unis concernant les « millions » de Ouïghours détenus et maltraités dans la région du Xinjiang en Chine, sachant parfaitement ce que font les États-Unis et pourquoi, il y a peu de chances que de nouveaux mensonges aient plus d’attrait dans un avenir proche.

Tant que la Chine restera fidèle à sa stratégie actuelle, qui consiste à apporter la croissance économique et la stabilité politique au monde face à la belligérance et à la coercition des États-Unis, sans avantages perceptibles pour les partenaires potentiels, cette tendance de l’Occident à perdre sa crédibilité, parallèlement au déclin de sa puissance politique, économique et même militaire, se poursuivra.

Ce n’est que lorsque les États-Unis et leurs partenaires restants seront prêts à se réorienter vers ce que le monde est en train de devenir plutôt que vers ce qu’ils souhaiteraient qu’il soit, qu’ils commenceront (comme tout le monde) à profiter pleinement des avantages d’un nouveau monde multipolaire où la souveraineté nationale et le progrès économique, étayés par un équilibre des pouvoirs plus équitable, supplanteront la poursuite destructrice de l’hégémonie mondiale par l’Occident.

Joseph Thomas

Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone

 

»125 Jahre Ernst Jünger« Götz Kubitschek und Erik Lehnert würdigen Jüngers Geburtstag

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»125 Jahre Ernst Jünger«

Götz Kubitschek und Erik Lehnert würdigen Jüngers Geburtstag

 
 
Der Vortragsabend »125 Jahre Ernst Jünger« wird wegen der Corona-bedingten Verlegung im Live-Stream übertragen.
 
 
Hier die Sezession abonnieren: https://sezession.de/abo
 
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»Das Buch im Haus nebenan« Götz Kubitschek über Ernst Jünger – Das abenteuerliche Herz

 
 
 
Das Abschlußkapitel aus dem "Buch im Haus nebenan" von Ellen Kositza und Götz Kubitschek. Am Buch beteiligt haben sich außerdem Martin Sellner und Caroline Sommerfeld, Erik Lehnert und Benedikt Kaiser, Heino Bosselmann, Thorsten Hinz und Martin Lichtmesz. Jeder von ihnen stellt fünf lebensverändernde Bücher vor.
 

Interview de Thomas Ferrier, leader du Parti des Européens

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« Une Europe qui ne serait pas européenne n’aurait aucun sens »

Interview de Thomas Ferrier, leader du Parti des Européens

Ex: https://barr-avel.blog

Nous proposons aujourd’hui à nos lecteurs une interview de Thomas Ferrier, leader du Parti des Européens et figure de l’européisme identitaire dans le monde francophone. Bien que nous ne partagions pas toutes ses options, il nous semblait intéressant de donner la parole à l’un de ceux qui luttent contre l’impasse souverainiste française.

  • Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs et présenter votre parcours politique ?

Thomas FERRIER, 43 ans, dirigeant du Parti des Européens, seul mouvement européiste identitaire assumé. J’ai fait mes classes à proximité de la droite nationale sur un malentendu idéologique, avant de m’en détacher nettement. N’étant pas anti-européen mais au contraire intégralement pro-européen, n’étant pas spécialement catholique puisque païen revendiqué, ne pensant pas que Clovis a créé la France, condamnant l’utilisation de troupes coloniales par la France en 14/18 et 39/45 et la colonisation elle-même, qui a ruiné la France, ce qui m’a valu récemment de perdre ma place sur Radio Courtoisie, j’ai compris l’impasse politique représentée par la fameuse « mouvance » comme ses partisans ont tendance à l’appeler.

  • Vous animez le LPE (Le Parti des Européens), un parti politique (re)fondé en 2016 sur les cendres du PSUNE (Parti socialiste unitaire national-européen). Quels sont les propositions phares du parti et qu’en est-il aujourd’hui de l’implantation du parti à l’échelle européenne ?

La position du LPE est très originale et susceptible potentiellement d’unir l’électorat des deux droites et de mordre sur le centre. Nous défendons en effet une Europe politique bien plus ambitieuse que celle prônée par Emmanuel Macron, démentie chaque jour par ses actes. Nous prônons un Etat européen unitaire se substituant aux Etats existants afin de ne pas avoir à hériter juridiquement et politiquement de leurs trahisons vis-à-vis des peuples qu’ils auraient dû protéger et qu’ils ont livrés au péril migratoire et à la globalisation économique, et maintenant épidémique.

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Mais une Europe qui ne serait pas européenne n’aurait aucun sens. Si l’Europe ne pourrait être qu’une étape aux yeux des euro-mondialistes, pour nous elle est au contraire une finalité et un destin. Les « droites nationales » n’existent que par leur refus, de plus en plus tiède d’ailleurs, de l’immigration post-coloniale et extra-européenne, principalement musulmane mais surtout planétaire. Associer l’Europe politique et la mise en place de processus remigratoires destinés à restaurer l’européanité de l’Europe, c’est unir l’électorat de la droite pro-européenne (pro-€ et pro-intégration) et l’électorat de la droite nationale (anti-immigration).

Le LPE n’est pas connu en dehors de la France aujourd’hui ou à la marge, même si des sections en Albanie, en Suisse et en Russie notamment sont envisagées du fait de soutiens d’un certain nombre de gens de valeur sensibles à notre discours dans ces deux pays. Il est ironique d’ailleurs de souligner que ces pays sont hors de l’UE actuelle, car le LPE se veut un parti de tous les Européens, et pas seulement de ceux de l’UE. Mais nous avons besoin d’une réelle émergence médiatique en France pour pouvoir l’imaginer chez nos voisins. De fait, il faudra bien un Piémont pour démarrer.

  • Quel regard portez-vous sur le Rassemblement National ? Un parti d’opposition peut-il exister à l’heure où le RN s’impose comme leader dans le domaine en France ?

Je considère que le Rassemblement National (ex-Front National) a représenté une véritable duperie, un leurre pour les électeurs qui lui ont fait confiance. Sa mise en avant par Mitterrand était destinée à diviser la droite, et surtout Jean-Marie Le Pen a été son propre bourreau en cédant à la stratégie des bons mots et des provocations stériles sur des sujets mémoriels délicats n’intéressant personne, y compris ses propres électeurs.

Si Jean-Marie Le Pen représentait, malgré sa culture et son talent rhétorique, une impasse, que dire alors de Marine Le Pen qui est dans la même impasse stratégique, mais sans les deux talents susmentionnés. Elle navigue à vue, entouré de courtisans fielleux et de partisans aveugles, après un lamentable débat de second tour en 2017.

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Sa stratégie de dédiabolisation, qui est un échec total, l’amène à avoir aseptisé son discours au moins de le rendre indigeste. Mais elle est sauvée par Macron, qui voit en elle son meilleur adversaire pour sa réélection, et par des media qui continuent de la diaboliser, malgré toutes ses reptations idéologiques. Son soutien aux DOM, Mayotte en tête, comme caution anti-raciste, est pathétique. Elle a renoncé à envisager toute restauration du caractère européen de la France, reprenant les antiennes soraliennes, l’antisémitisme en moins certes. C’est la réconciliation de la carpe et du lapin autour de « l’amour de la France », slogan incantatoire vide de sens. Ainsi, en juillet 2020, explique-t-elle défendre les millions de français d’origine non-européenne contre une minorité nocive. C’est résumer la question au seul prisme sécuritaire et passer la question identitaire sous le boisseau.

Le RN ne s’impose pas. Il est imposé. La gauche est en lambeaux, la droite est en pièces. Par défaut, le RN est la seule opposition, opposition nominale car fondamentalement factice. Marine Le Pen n’a jamais cherché à gagner car elle se sait incapable de gouverner. Mais elle cherche en revanche à maintenir cette rente électorale, qui offre bien des avantages, sans avoir à en assumer les conséquences.

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Un homme nouveau peut-il émerger en vue des élections présidentielles ? Je reste sceptique. On aura toujours à peu près les mêmes. Seul Yannick Jadot (EELV), mais il en est loin, pourrait éventuellement représenter le troisième homme et griller de justesse Macron ou Marine Le Pen, mais j’en doute. Son parti est davantage un boulet à traîner qu’un renfort. Le jeu des élections nationales semble verrouillé mais est-il le véritable enjeu ?

  • Voyez-vous les signes d’un réveil identitaire en Europe aujourd’hui ?

Les populismes de droite progressent et régressent en sinusoïde et en décalé. La Lega en Italie a eu le vent en poupe mais régresse dans les sondages. Le DFP danois est moribond. L’AfD est en crise interne depuis des mois. La droite nationale a disparu en Grèce, en Bulgarie, en Roumanie et dans bien d’autres pays. Certes les Démocrates Suédois sont forts en ce moment, les Vrais Finlandais aussi. Au Royaume-Uni, le « fake nationalism » de UKIP a tout détruit avant de disparaître lui-même. S’il y a un réveil identitaire, c’est en dehors des partis populistes. Or en effet je pense que les Européens sont de plus en plus conscients du péril migratoire et démographique, mais ils ne veulent pas pour autant cautionner des idéologies réactionnaires et europhobes sous prétexte que le Système leur a laissé le monopole de la dénonciation de l’immigration. C’est l’europhobie (en France) ou le cléricalisme (en Pologne) qui décrédibilisent ce courant politique.

  • Envisagez-vous de présenter des candidats aux prochaines élections européennes ?

Si les moyens financiers et humains sont suffisants, et si nous avons pu émerger médiatiquement même à la marge, oui.

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  • Que vous évoque la récente décapitation de Samuel Paty ?

Que la civilisation européenne a été trop permissive depuis 1968 et découvre que l’homme n’est pas bon par nature. Le rêve rousseauiste tourne au cauchemar. Être enseignant en 2020 est un métier compliqué, avec le sentiment d’une hiérarchie pleutre qui cherche à éviter les « vagues ». Et peut mener à l’horreur dont cet enseignant courageux de 47 ans a été la victime, son seul tort aux yeux des fanatiques ayant été d’illustrer concrètement la nécessaire liberté d’opinion et d’expression, fondement de toute démocratie, deux libertés essentielles que même les gouvernements d’Europe occidentale ont tendance à trop souvent vouloir limiter.

  • Peut-on encore changer quelque chose à la situation en France ?

Oui mais pas en restant dans le cadre politique français. Pour guérir la France, il faut bâtir l’Europe unie.

  • Quel regard portez-vous sur la Bretagne et le monde celtique en général ?

Comme la plupart des Français, j’ai une grande part de Gaulois en moi. Mais le gaulois comme langue a disparu au cours du VIème siècle, sous le double coup de la romanisation et de la christianisation. On ne pourra pas le ranimer. Mais on peut en revanche chérir les langues celtiques qui nous rattachent à sa mémoire, et en premier lieu le breton (brezhoneg), qui est assez proche du gallois (cymraeg). Je trouve que la renaissance de la langue cornique en Cornouaille britannique (Kernow) est admirable.

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Je possède pour ma part le dictionnaire breton/français du grand Roparz Hemon. C’est une mine remarquable d’information et de termes, comme drouiz (« le druide »), parmi des milliers d’exemples. On découvre un breton riche et beau, qui donne envie de l’apprendre malgré sa relative complexité. J’avoue que les grammaires de gallois et de gaélique m’effraient parfois à cause de cela. Mais les langues celtiques sont admirables, magnifiques à l’écoute, et je soutiens l’extension maximale de l’apprentissage du breton en Bretagne.

Dans l’Europe Nation, la Bretagne aussi est une nation. Breizh Bro. Tous ceux qui comme vous œuvrent à la défense et à l’illustration des langues celtiques, de la culture celtique, voire de la tradition druidique authentique (je pense à l’éminente revue « Message du Groupe druidique des Gaules » ou à la vieille revue de jadis « Nemeton »), lorsqu’elle n’est pas polluée de délires New Age bien entendu.

  • Comment suivre ou soutenir le Parti des Européens ?

Le LPE utilise les moyens modernes de communication, à défaut de pouvoir accéder aux grands media télévisés qui restent essentiels pour se faire connaître. Il est donc présent par la chaîne youtube « Thomas Ferrier », par le canal telegram (http://t.me/LePartiDesEuropeens), par mon compte twitter (@ThFerrier) ou celui du parti (@PDesEuropeens), par mon blog (http://thomasferrier.hautetfort.com) et par le site du parti (http://psune.fr) où vous pourrez retrouver le programme du parti. Ce dernier est également traduit en anglais, espagnol et italien, et bientôt en russe.

Alexandre Del Valle : "La Turquie s'attaque à la France parce qu'elle est faible"

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Alexandre Del Valle : "La Turquie s'attaque à la France parce qu'elle est faible"

 
 
Avec Alexandre Del Valle, Géopolitologue, enseignant, directeur de recherche au Multipolar World Institute de Bruxelles et au CF2R. Actualité, politique, invités...
 
Du lundi au vendredi, de 12h à 13h20, retrouvez André Bercoff dans tous ses états.
 

jeudi, 29 octobre 2020

Bélarus. L’appel de l’opposition à une « grève générale pour paralyser le pays » ne parvient pas à convaincre les travailleurs

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Bélarus. L’appel de l’opposition à une « grève générale pour paralyser le pays » ne parvient pas à convaincre les travailleurs

Par Moon of Alabama

Le 30 avril 2019 au Venezuela, un certain Random Guyaidó était pris au piège d’une tentative de coup d’État qui s’était transformé en farce lorsque les troupes qu’il avait espéré voir le soutenir ne se sont pas présentées :

La tentative de coup d'État s'est déroulée dans un couloir de 500 x 200 mètres, 
sans que rien de significatif ne se produise en dehors de ce couloir. Un dangereuse
propagande, mais jusqu'à présent rien de plus que cela. Cette légère modification de l’image de Guaidó et López ci-dessous semble appropriée.
Ces mecs ne sont que des comiques, des héros de fantaisie à la noix.

On aurait pu penser que l’échec d’une telle farce aurait mis fin aux tentatives de changement de régime similaires soutenues par l’« Occident ».

Ce n’est malheureusement pas le cas.

En juin 2020, il est devenu évident qu’une révolution de couleur dirigée par les États-Unis était planifiée pour renverser le président biélorusse Loukachenko. Cela s’est produit comme d’habitude après que les résultats des élections ont été mis en doute. Mais quelques jours plus tard, il est devenu évident que la tentative avait échoué :

Alors que le président Alexandre Loukachenko affirmait avoir remporté 80% des voix 
lors de l'élection de dimanche dernier, la candidate "occidentale" Svetlana Tikhanovskaya
affirmait avoir gagné. (Si ces 80 % sont certainement trop élevés, il reste très probable
que Loukachenko ait été le véritable vainqueur). Des protestations et des émeutes ont suivi. Mardi, Mme Tikhanovskaya s'est vu dire en termes très clairs de quitter le pays.
Elle est allée en Lituanie.

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Loukachenko a alors conclu un accord avec la Russie qui lui a promis une protection en échange de progrès dans la création d’un État de l’Union Russie-Biélorussie.

Même l’Atlantic Council, organe proche de l’OTAN, admettait que la tentative de coup d’État avait échoué :

L'auteur conclut à juste titre :

"La résistance du régime de Loukachenko se renforce de jour en 
jour. La Russie semblant désormais soutenir fermement Loukachenko,
des rassemblements photogéniques et des grèves sporadiques ne
suffiront pas à provoquer un changement historique."
C'est fini. Les "grèves sporadiques" n'ont jamais été de véritables actions syndicales.

Quelques journalistes de la télévision d'État biélorusse se sont mis en grève. Ils
ont été licenciés sans cérémonie et remplacés par des journalistes russes. Quelques
centaines d'ouvriers de l'usine de tracteurs MTZ de Minsk ont tenté une grève. Mais
MTZ compte 17 000 employés et les 16 500 autres qui n'ont pas quitté leur poste savent
très bien pourquoi ils ont encore leur travail. Si Loukachenko venait à tomber, il est
très probable que leur entreprise d'État serait vendue pour quelques centimes et remis
immédiatement "à la bonne taille", ce qui signifie que la plupart d'entre eux seront
au chômage. Au cours des 30 dernières années, ils ont vu cela se produire dans tous
les pays autour du Bélarus. Ils n'ont pas envie d'en faire l'expérience eux-mêmes. Lundi, le leader du mouvement de grève à MTZ, un certain Sergei Dylevsky, a été arrêté
alors qu'il cherchait à provoquer d'autres grèves. Dylevsky est membre du Conseil de
coordination autoproclamé de l'opposition qui exige des négociations sur la présidence.
D'autres membres du conseil ont été convoqués pour être interrogés par les enquêteurs
de l’État dans le cadre d'une affaire pénale contre le conseil.

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Pendant ce temps, la malheureuse candidate de l'opposition, Svetlana Tsikhanouskaya, 
qui a faussement prétendu avoir gagné les élections, est toujours en Lituanie. Elle est
censée être professeur d'anglais, mais elle a des difficultés à lire les textes en anglais,
ce qui l'oblige à demander un soutien "occidental" (vidéo). Elle a déjà rencontré plusieurs
hommes politiques "occidentaux", dont Peter Zeimiag, le secrétaire général du parti de
l'Union chrétienne-démocrate allemande, parti de la chancelière Angela Merkel, et le
secrétaire d'État adjoint américain Stephen Biegun. Aucun des deux ne pourra l'aider.

Malgré son manque évident de soutien populaire, Svetlana Tikhanovskaya, comme Juan Guaidó au Venezuela, a été exhortée à faire une nouvelle tentative.

Il y a deux semaines, elle a eu le courage de lancer un ultimatum à Loukachenko pour qu’il démissionne :

Mardi, le leader de l'opposition biélorusse en exil a donné au président Alexandre 
Loukachenko un délai de deux semaines pour démissionner, mettre fin à la violence et
libérer les prisonniers politiques, avertissant qu'il serait sinon confronté à une
grève générale paralysant le pays. Svetlana Tikhanovskaya, qui affirme être la véritable gagnante des élections du 9 août,

a lancé un "ultimatum du peuple", exigeant que Loukachenko quitte le pouvoir avant le
25 octobre et mette fin à la "terreur d'État" déclenchée par les autorités contre les
manifestants pacifiques. "Si nos demandes ne sont pas satisfaites d'ici le 25 octobre, le pays tout entier
descendra pacifiquement dans la rue"
, a-t-elle déclaré dans une déclaration publiée

en Lituanie, où elle est actuellement en exil après avoir quitté le Belarus à la suite
des élections. "Et le 26 octobre, une grève nationale commencera dans toutes les entreprises, toutes
les routes seront bloquées et les ventes dans les magasins d'État s'effondreront"
, a-t-elle

déclaré. "Vous avez 13 jours."

Le 25 octobre, il y a effectivement eu une autre manifestation de taille moyenne à Minsk. Mais ceux qui y ont participé faisaient partie de la classe moyenne supérieure et les personnes les plus aisées, et non les travailleurs de l’industrie et les agriculteurs qui constituent la majorité du peuple biélorusse.

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Mais la grève générale annoncée pour hier n’a eu que peu ou pas de participants :

"Aujourd'hui, la grève du peuple commence - la prochaine étape pour les Biélorusses vers 
la liberté, la fin de la violence et de nouvelles élections"
, a déclaré Mme Tikhanovskaya

lundi. "Les Biélorusses savent que l’objectif principal du 26 octobre est de montrer que
personne ne travaillera pour le régime".
Cependant, malgré la vue de grandes colonnes de manifestants dans les rues - et le

sentiment que la protestation a retrouvé une partie de l'élan qu'elle avait perdu
ces dernières semaines - il n'y a eu aucun signe d'un nombre significatif de travailleurs
dans les usines contrôlées par l’État qui se soient joints à la grève pendant une période
prolongée. ... À l'usine de tracteurs de Minsk, l'une des grandes usines qui font la fierté de l'économie

néo-soviétique de Loukachenko, la plupart des travailleurs semblaient pointer normalement
pour l'équipe du lundi matin. Le leader d'une grève précédente à l'usine en août a été forcé de fuir le pays sous
la pression des autorités, et de nombreux travailleurs craignent des représailles pour
avoir fait grève. Tout au plus, certains travailleurs ont brièvement exprimé leur soutien
à la protestation avant ou après leur quart de travail, mais n'ont pas réellement refusé
de travailler.

Quelques centaines d’étudiants venant de certaines universités ont séché les cours et se sont promenés dans les rues. Mais les travailleurs ont continué à travailler. Aucune route n’a été bloquée. La circulation dans les magasins était normale.

Les travailleurs des industries d’État savent très bien que la plupart d’entre eux se retrouveront sans emploi et pauvres si l’opposition néolibérale, soutenue par l’« Occident », prend le pouvoir en Biélorussie. Tout serait privatisé pour quelques centimes et remis « à la bonne taille » par des licenciements massifs. Ils ont vu cela se produire encore et encore dans chacun de leurs pays voisins.

Juan Guaido a déclaré un coup d’État sans s’être assuré que les soldats qu’il attendait se présenteraient. Les soldats savaient qu’il n’était pas dans leur intérêt de le suivre.

Svetlana « Guaidoskaya » a déclaré une grève générale sans comprendre que les travailleurs auxquels elle faisait appel n’étaient pas intéressés par ses projets néo-libéraux. Le fait qu’elle, ou ses responsables, aient même tenté de provoquer une grève montre à quel point ils ne comprennent pas les véritables préoccupations des travailleurs.

La Biélorussie, comme le Venezuela, a un gouvernement et un système qui est soutenu par la majorité de sa population. Aucun des deux pays ne changera de régime sans une intervention militaire organisée par l’étranger. Ce n’est pas demain la veille.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Jj pour le Saker Francophone

Deux aspects non visibles de la géopolitique

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Deux aspects non visibles de la géopolitique

Par Alastair Crooke

Source Strategic Culture

Au niveau visible, la lutte géopolitique actuelle concerne le maintien de la primauté du pouvoir américain ; le pouvoir financier étant un sous-facteur de ce pouvoir politique. Carl Schmitt, dont les réflexions ont eu une telle influence sur Leo Strauss et sur la pensée américaine en général, préconisait que ceux qui ont le pouvoir doivent « l’utiliser ou le perdre ». L’objectif premier de la politique est donc de préserver son « existence sociale ».

Mais à un niveau moins visible, le découplage technologique vis-à-vis de la Chine est un aspect implicite d’une telle stratégie (camouflé sous le slogan de la récupération des emplois et de la propriété intellectuelle « volés » aux États-Unis) : L’objectif que l’Amérique cherche réellement à atteindre est de s’accaparer, au cours des prochaines décennies, toutes les normes mondiales en matière de technologie de pointe, et de les refuser à la Chine.

Ces histoires de normes peuvent sembler obscures, mais elles sont un élément crucial de la technologie moderne. Si la guerre froide était dominée par une course à la construction du plus grand nombre d’armes nucléaires, la lutte actuelle entre les États-Unis et la Chine, ainsi que vis-à-vis de l’UE, se jouera, au moins en partie, par une lutte pour contrôler l’établissement de normes bureaucratiques qui se cache derrière les industries les plus importantes de l’époque. Et ces normes sont encore à établir.

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La Chine s’est depuis longtemps positionnée stratégiquement pour lutter dans cette « guerre » des normes technologiques (voir « les normes chinoises 2035 », un plan directeur pour la gouvernance de la cybernétique et des datas).

Le même argument est valable pour les chaînes d’approvisionnement qui sont maintenant au centre d’une lutte acharnée qui a des implications majeures pour la géopolitique. Il est difficile et onéreux de démêler le rhizome des chaînes d’approvisionnement construites au cours de décennies de mondialisme : Les multinationales qui vendent sur le marché chinois n’ont pas d’autre choix que d’essayer de rester sur place. Toutefois, si le découplage, qui est un élément clé de la politique étrangère américaine, persiste, des produits allant des serveurs informatiques aux iPhones d’Apple pourraient se retrouver avec deux chaînes d’approvisionnement distinctes, l’une pour le marché chinois et l’autre pour une grande partie du reste du monde. Ce sera plus coûteux et moins efficace, mais c’est la voie que la politique prend (du moins pour l’instant).

Où en sommes-nous dans cette lutte pour le découplage ? Jusqu’à présent, c’est assez confus. Les États-Unis se sont concentrés sur le découplage de certaines technologies de pointe (qui ont également un double potentiel de défense civile). Mais Washington et Pékin sont restés à l’écart du découplage financier (jusqu’à présent), car Wall Street ne veut pas perdre un commerce financier bilatéral de 5 000 milliards de dollars.

Il y a quelques années, lors de leurs déplacements en Europe, les passagers devaient généralement sortir d’un train lorsqu’ils atteignaient la frontière, et passer à un autre train et à d’autres wagons, au-delà de la frontière. Cette pratique existe toujours. Les chemins de fer fonctionnaient sur des voies à écartement totalement différent. Nous n’avons pas encore atteint ce point là en technologie. Mais l’avenir risque de devenir plus complexe, et plus coûteux, si l’Europe, les États-Unis et la Chine adoptent des protocoles différents pour la 5G. Cette technologie, avec sa faible latence, permet d’extraire et de modéliser en temps quasi réel des données très diverses (un facteur qui change la donne pour les systèmes de ciblage de missiles et de défense aérienne, où chaque milliseconde compte).

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Il est donc possible que la 5G soit divisée en deux systèmes concurrents pour refléter les différentes normes américaines et chinoises ? Pour que des étrangers puissent entrer en concurrence, il pourrait être nécessaire de fabriquer des équipements distincts pour ces différents protocoles. Une certaine division est également possible dans le domaine des semi-conducteurs, de l’intelligence artificielle et dans d’autres domaines où la rivalité entre les États-Unis et la Chine est intense. Pour l’instant, les infrastructures russes et iraniennes sont pleinement compatibles avec la Chine. L’Occident n’est pas encore un « système séparé » ; il peut encore travailler avec l’Iran et la Russie, mais la double fonctionnalité dans la sphère technologique coûtera néanmoins, et nécessitera probablement, des aménagements juridiques minutieux, afin d’éviter toute sanction légale ou réglementaire.

Et pour être clair, la bataille pour l’influence sur les normes technologiques est distincte de la « guerre réglementaire » dans laquelle les données, l’IA et les éco-sphères réglementaires sont « balkanisées ». L’Europe est presque inexistante dans la sphère analytique du Cloud, mais elle essaie de rattraper rapidement son retard. Elle doit le faire. La Chine est tellement en avance que l’Europe n’a pas d’autre choix que de se frayer un chemin au bulldozer dans cet espace, c’est-à-dire en « réglementant » les activités américaines dans le Cloud (déjà sous la menace de lois anti-trust) vers l’Europe.

Les entreprises du cloud fournissent à leurs clients un espace de stockage de données, mais aussi des outils sophistiqués pour analyser, modéliser et comprendre les vastes ensembles de données qui se trouvent dans le Cloud. La taille même des ensembles de données modernes a déclenché une explosion de nouvelles techniques pour en extraire des informations. Ces nouvelles techniques sont rendues possibles par les progrès constants de la puissance et de la vitesse de traitement des ordinateurs, ainsi que par l’agrégation de la puissance informatique pour améliorer les performances (connue sous le nom de calcul haute performance, ou HPC).

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Nombre de ces techniques (« extraction de datas », « apprentissage machine », ou IA) font référence au processus d’extraction d’informations à partir de données brutes. L’apprentissage machine fait référence à l’utilisation d’algorithmes spécifiques pour identifier des modèles dans les données brutes et présenter ces données sous forme de modèle. Ces modèles peuvent ensuite être utilisés pour faire des déductions sur de nouveaux ensembles de données ou pour guider la prise de décision. Le terme « Internet des objets » (IoT) fait généralement référence à un réseau d’ordinateurs et de dispositifs physiques connectés qui peuvent générer et transmettre automatiquement des données sur des systèmes physiques. Le « système nerveux » qui sert à la « messagerie corporelle » sera de type 5G.

L’UE réglemente déjà les Big Data ; elle a l’intention de réglementer les plate-formes américaines de Cloud ; et elle cherche à établir des protocoles européens pour les algorithmes (afin de refléter les objectifs sociaux et les « valeurs libérales » de l’UE).

Toutes les entreprises qui dépendent de l’analyse et de l’apprentissage machine dans le Cloud seront donc touchées par cette fragmentation réglementaire en sphères distinctes. Bien entendu, les entreprises ont besoin de ces capacités pour faire fonctionner efficacement la robotique et les systèmes mécaniques complexes, et pour réduire les coûts. L’analytique a permis d’énormes gains de productivité. Accenture estime que l’analytique pourrait à elle seule générer jusqu’à 425 milliards de dollars de valeur ajoutée, d’ici 2025, rien que pour l’industrie du pétrole et du gaz.

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Ce sont les États-Unis qui ont déclenché ce cycle de découplage, mais la conséquence de cette décision initiale est qu’elle a incité la Chine à répondre par son propre découplage des États-Unis, dans le domaine des technologies de pointe. L’intention de la Chine n’est plus simplement de perfectionner et d’améliorer la technologie existante, mais de faire passer les connaissances existantes à un autre niveau technologique (par exemple en découvrant et en utilisant de nouveaux matériaux qui dépassent les limites actuelles de l’évolution des microprocesseurs). [Technologie quantique, NdSF]

Ils pourraient bien réussir, dans les trois prochaines années environ, étant donné les énormes ressources que la Chine consacre à cette tâche (c’est-à-dire aux microprocesseurs). Cela pourrait modifier l’ensemble du calcul technologique, et accorder à la Chine la primauté sur la plupart des domaines clés de technologie de pointe. Les États ne pourront pas facilement ignorer ce fait, qu’ils prétendent ou non « aimer » la Chine.

Ce qui nous amène au deuxième domaine non visible de cette lutte géopolitique. Jusqu’à présent, les États-Unis et la Chine ont largement séparé la finance du découplage principal. Mais un changement substantiel est peut-être en cours : Les États-Unis et plusieurs autres États expérimentent des monnaies numériques émises par leurs banques centrales, et les plateformes internet FinTech commencent à supplanter les institutions bancaires traditionnelles. Pepe Escobar remarque :

Donald Trump réfléchit à des restrictions sur Ant's, Alipay et d'autres plateformes 
de paiement numérique chinoises comme Tencent Holdings... et, comme pour
Huawei, l'équipe de Trump prétend que les plateformes de paiement numérique
de Ant's menacent la sécurité nationale des États-Unis. Il est plus probable que
Trump s'inquiète de ce que Ant menace l'avantage bancaire mondial que les
États-Unis considèrent depuis longtemps comme acquis.

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L'équipe Trump n'est pas la seule. Le gestionnaire de fonds spéculatifs 
américain Kyle Bass, de Hayman Capital, affirme que Ant et Tencent sont
"des dangers visibles et actuels qui menacent la sécurité nationale des
États-Unis plus que tout autre problème"
. Bass estime que le Parti communiste chinois pousse son système de
paiement numérique en yuan vers environ 62% de la population mondiale
d'une manière qui menace l'influence de Washington. Ce qui a commencé
comme un simple service de paiement en ligne s'est depuis fortement
transformé en une véritable jungle de services financiers. C’est en train
de devenir une véritable locomotive en matière de prêts, de polices
d'assurance, de fonds communs de placement, de réservation de voyages
et de toutes les synergies multi plate-formes permettant de réaliser des
ventes et des économies d'échelle. À l'heure actuelle, plus de 90 % des utilisateurs d'Alipay utilisent l'application
pour d'autres raisons que le simple paiement. Cela "crée effectivement un
écosystème en boucle fermée où il n'est pas nécessaire que l'argent quitte
l'écosystème du portefeuille"
, explique l'analyste Harshita Rawat de Bernstein
Research.

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Rawat note que Ant a "utilisé son service de paiement comme une source 
d'acquisition d'utilisateurs pour construire des fonctionnalités de services
financiers plus larges"
. Il s'agit notamment de trouver des moyens de croiser
l’ambition de Ant de devenir le centre de services financiers de la Chine avec
celle d'Alibaba de devenir le principal bazar en ligne... Étant donné que de nombreux Chinois ont déjà téléchargé l'application Alipay,
le PDG Eric Jing envisage d'exporter son modèle à l'étranger. Il collabore avec
neuf start-ups de la région, dont GCash aux Philippines et Paytm en Inde. Ant
prévoit d'utiliser le produit de sa cotation en bourse pour accélérer son pivot
vers l'étranger.

Le point ici est double : La Chine est en train de préparer le terrain pour défier un dollar papier, à un moment sensible de faiblesse du dollar. Et deuxièmement, la Chine met en place une politique de « fait accompli », en façonnant les normes de bas en haut, grâce à l’adoption généralisée de sa technologie à l’étranger.

Tout comme Alipay fait d’énormes percées en Asie, le projet chinois « Smart Cities » diffuse les normes chinoises, précisément parce qu’elles intègrent de nombreuses technologies : Systèmes de reconnaissance faciale, analyse de données volumineuses, télécommunications 5G et caméras IA. Toutes représentent des technologies pour lesquelles les normes restent à définir. Ainsi, les « villes intelligentes », qui automatisent de multiples fonctions municipales, contribuent également à l’évolution des normes chinoises.

Selon les recherches de RWR Advisory, un cabinet de conseil basé à Washington, les entreprises chinoises ont conclu 116 accords pour installer des systèmes de « ville intelligente » et de « ville sûre » dans le monde entier depuis 2013, dont 70 dans des pays qui participent également à l’initiative « Nouvelle Route de la soie ».

La principale différence entre les équipements pour villes « intelligentes » et « sûres » est que le second est principalement destiné à l’enquête et au suivi de la population, tandis que le premier vise principalement à automatiser les fonctions municipales tout en intégrant des fonctions de surveillance. Des villes d’Europe occidentale et méridionale ont signé au total 25 projets de ce type.

Mark Warner, vice-président Démocrate de la commission du renseignement du Sénat américain, voit la menace chinoise en termes très clairs : Pékin a l’intention de contrôler la prochaine génération d’infrastructures numériques, dit-il, et, ce faisant, d’imposer des principes « contraires aux valeurs américaines ». « Au cours des 10 à 15 dernières années, le rôle de leader [des États-Unis] s’est érodé et notre influence pour établir des normes et des protocoles reflétant nos valeurs a diminué », déplore Warner : « En conséquence, d’autres, mais surtout la Chine, ont comblé ce vide pour promouvoir des normes et des valeurs qui profitent au parti communiste chinois ».

Tout indique que l’influence de la Chine sur les normes technologiques mondiales augmente. Mais il est tout aussi certain que la réaction de Washington s’intensifie. Si les États-Unis devenaient plus conflictuels, cela pourrait conduire la Chine à accélérer son évolution vers des alternatives parallèles. Il pourrait en résulter, à terme, une arène où les normes industrielles feraient doublon.

Alastair Crooke

Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone

État de droit, état d’impuissance ?

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État de droit, état d’impuissance ?

 
 
Ex: https://www.bvoltaire.fr

Après chaque attentat commis en France, les coups de menton du gouvernement se répètent, sempiternels et quasi à l’identique : « Les auteurs de ces attentats seront châtiés, la Justice passera. » On se souvient des déclarations de Charles Pasqua, ministre de l’Intérieur, à la suite des attentats de 1986 : «  Nous allons terroriser les terroristes… » Il me précisa, lors d’un entretien, que la formule n’était que de communication afin de rassurer l’opinion, le gouvernement n’ayant aucun indice pour frapper les terroristes. Par la suite, les mesures effectives de répression se sont souvent perdues dans les méandres des procédures, judiciaires ou autres.

Après l’odieux assassinat de , Gérald Darmanin annonce l’expulsion de 231 islamistes radicalisés : belle décision, mais sera-t-elle suivie d’effet ?

Jean-Éric Schoettl, ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel, analyse avec une grande lucidité, dans un article publié par Le Figaro du 22 octobre dernier, les raisons de l’incapacité d’agir des gouvernements. Les autorités françaises se sont laissées enfermer dans les carcans juridiques des multiples textes de défense des droits de l’homme, interprétés strictement par le Conseil d’État, la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel, la Cour européenne de Justice et la Cour européenne des droits de l’homme ().

Jean-Éric Schoettl appelle à modifier la et à renégocier les traités européens pour restaurer notre souveraineté et la primauté des lois françaises sur la jurisprudence des cours qui n’ont de cesse d’encadrer et de limiter l’action régalienne de l’État dont la mission essentielle, ne l’oublions pas, est d’assurer la sécurité des Français.

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Dans l’actuel État de droit, tous les domaines d’action régaliens sont strictement encadrés par la jurisprudence des cours susmentionnées : le regroupement familial, la liberté d’association, l’expulsion des étrangers, le droit d’asile.

Dans ces conditions, la loi nationale est suspendue aux décisions des juges et souvent invalidée. Le vrai législateur n’est plus le Parlement mais les juges. Le gouvernement est sous contrôle permanent, les ministres sont devenus du gibier de mise en examen devant la Cour de justice de la République ! La judiciarisation de notre société est une dérive inacceptable qui paralyse l’action gouvernementale de l’État.

Chaque action des pouvoirs publics doit être, au préalable, analysée au regard des risques juridiques, voire pénaux encourus. Cette situation n’est pas sans rappeler la scène de Louis Jouvet jouant le rôle d’un chef de bande qui préparait ses actions en étudiant scrupuleusement… le Code pénal !

La paralysie de l’action régalienne du gouvernement est incompréhensible pour nos concitoyens qui accueillent au premier degré les déclarations martiales… sans suite ! Cela ne peut perdurer au risque de ruiner, à jamais, toute confiance dans l’autorité.

Il est urgent de restaurer l’autorité de l’État en rétablissant l’ordonnancement juridique naturel fondé sur le suffrage universel national, seul juge dans une démocratie souveraine. Cela passe par une révision constitutionnelle qui rétablisse la supériorité des lois sur les traités et accords internationaux antérieurs (article 55) et précise que l’expulsion des étrangers relève uniquement de l’autorité administrative, en écartant le juge judiciaire (article 66).

Ces propositions vont faire pousser des cris d’orfraie à tous les tenants du « politiquement correct » et à tous les défenseurs qui ont investi en masse ces domaines, que ce soit à titre professionnel ou, pis encore, au nom de leur idéologie.

Mais il y a urgence à agir pour restaurer l’autorité de l’État, car la situation présente nourrit l’extrémisme et les solutions radicales. Il faut, dans le monde inextricable des procédures, trancher le nœud gordien, sans attendre.

Les Technocrates contre le pays réel

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Les Technocrates contre le pays réel

par Jean-Gilles Malliarakis

Ex: https://www.insolent.fr

mercredi, 28 octobre 2020

Valle des Los Caídos : pourquoi tant de polémiques autour d’un temple chrétien?

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Valle des Los Caídos : pourquoi tant de polémiques autour d’un temple chrétien?
 
par Arnaud Imatz
Ex: https://lanef.net

Inaugurée en 1959 par le général Franco et consacrée basilique pontificale en 1960 par le Cardinal Gaetano Cicognani au nom du pape Jean XXIII, la Santa Cruz del Valle de los Caídos (Sainte-Croix de la vallée des morts au combat), fait de plus en plus l’objet de critiques et de condamnations. Les polémiques sur sa signification et sa destination future ont même atteint un sommet, en 2019, à la suite de la décision du gouvernement espagnol de procéder à l’exhumation du corps de Franco. Mais pourquoi tant de controverses autour de ce temple chrétien ?

Il y a déjà des années, Maria Teresa Fernández de la Vega, vice-présidente du gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero (2004-2011) souhaitait en faire « un musée de la dictature ». Le président du Forum pour la mémoire voulait qu’il soit converti en musée « des horreurs de la répression ». Plus radical encore, l’écrivain socialiste d’origine irlandaise, Ian Gibson, inconsciemment marqué par les islamistes démolisseurs des Bouddhas de Bamiyan, suggérait sa destruction par dynamitage.

La loi sur la mémoire historique, du 26 décembre 2007, avait provisoirement tranché : la basilique de la Vallée des morts au combat devait continuer d’être un lieu de culte catholique, mais les concentrations politiques y seraient interdites. Cette solution semblait somme toute raisonnable car le monument, alors le plus visité d’Espagne après le palais royal et l’Escurial, était considéré comme une partie intégrante du patrimoine historico-culturel espagnol. Mais la trêve a été de courte durée.

Au lendemain de son arrivée au palais de la Moncloa, en juin 2018, prenant exemple sur son prédécesseur socialiste José Luis Rodriguez Zapatero (2004-2011), Pedro Sánchez a délibérément relancé la bataille idéologique et mis un terme définitif à l’esprit de la Transition démocratique (1976-1982) qui avait été unanimement loué par la presse internationale. Dès le 15 février 2019, le gouvernement de Sánchez s’est engagé à procéder au plus vite à l’exhumation de la dépouille du dictateur Francisco Franco enterré quarante-trois ans plus tôt dans le chœur de la basilique du Valle de los Caídos. Par la suite, moins d’un an après avoir réalisé le transfert des cendres, le 15 septembre 2020 la coalition gouvernementale socialo-communiste (PSOE-Podemos), a adopté un « Avant-projet de loi de mémoire démocratique » au nom de la « justice historique » et du combat contre « la haine », « le franquisme » et « le fascisme », afin de compléter et de parfaire la loi de mémoire historique de 2007. Le gouvernement socialo-communiste espagnol entend promouvoir la réparation morale des victimes de la guerre civile et du franquisme, « garantir aux citoyens la connaissance de l’histoire démocratique espagnole » et condamner à de lourdes amendes « l’apologie du franquisme et l’incitation à la haine ou à la violence contre les victimes du coup d’État et de la dictature franquiste ».

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Le terrible bilan de la guerre d’Espagne et de ses antécédents (avec notamment le coup d’État socialiste de 1934) et celui de la répression dans l’un et l’autre camp est à ce jour bien connu des historiens. Le coût humain se distribue de façon relativement équilibré bien qu’il ne puisse tenir compte de la diminution régulière du territoire du camp républicain au cours des trois années de conflit : 71 500 morts au combat pour les nationaux et 74 000 pour les républicains, 57 000 victimes d’assassinats et d’exécutions sommaires chez les « nationaux », dont 6964 religieux, et 51 000 chez les « républicains ». Cet équilibre n’est finalement rompu que par les 28 000 exécutions de républicains au lendemain du conflit.

En 1976, lors de l’instauration de la démocratie, la classe politique espagnole désirait avant tout surmonter le passé. Il ne s’agissait pas de l’oublier, comme on le dit trop souvent aujourd’hui, mais de regarder résolument vers l’avenir et de refuser de s’emparer du sujet pour attiser les rancœurs et les luttes partisanes. Cet esprit de la Transition démocratique – esprit de pardon réciproque et de concertation entre gouvernement et opposition –, a désormais vécu. Le pouvoir et les principaux médias ne veulent plus y voir qu’une manipulation éhontée de la justice et de l’histoire, une lâcheté inacceptable. La nation, la famille, la religion (le catholicisme bien sûr, mais aussi plus généralement le christianisme) sont redevenues des cibles privilégiées de la propagande. Le gouvernement de coalition du président Pedro Sánchez (socialiste en rupture avec le modérantisme idéologico-culturel du socialiste Felipe González) et du vice-président Pablo Iglesias (leader de Podemos, parti de marxistes-léninistes et de populistes d’extrême gauche admirateurs des modèles « bolivarien » ou « venezuelien ») n’a de cesse de ranimer la bataille idéologique et de fomenter l’agitation sociale.

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Au fil des ans, le Valle de los Caídos est devenu l’un des piliers de la mythologie « progressiste ». Il est aussi, pour d’autres, un symbole de la lutte pour la liberté d’expression et de culte. Situé à 58 kilomètres de Madrid, l’imposant mausolée de la Sierra de Guadarrama, où reposent à parts égales les restes de 33 847 nationaux et républicains (dont plus de 21 000 identifiés et plus de 12 000 inconnus), a été conçu à l’origine par Franco et les franquistes comme un monument devant perpétuer le souvenir de la « glorieuse Croisade ». C’était le point de vue de l’Église et en particulier celui du cardinal catalan, Primat d’Espagne, Plá y Deniel, en 1945. La composante religieuse avait été, rappelons-le, décisive lors du soulèvement de juillet 1936 et pendant toute la durée de la guerre civile (1936-1939). Près de 7000 prêtres, religieux et religieuses avaient été assassinés (sans compter les milliers de laïcs, éliminés en raison de leur foi), le culte religieux avait été interdit (sauf au Pays Basque) et la destruction des édifices religieux avait été systématique. Quinze ans plus tard, les esprits enfin un peu calmés, le monument avait été présenté officiellement comme un hommage aux combattants des deux camps « au nom de la réconciliation ». Le décret-loi du 23 août 1957 ordonnait d’ailleurs sans ambiguïtés : « En conséquence, ce sera le Monument à tous les morts au combat, sur le sacrifice desquels triompheront les bras pacifiques de la Croix ».

Abrité à l’intérieur de la montagne et couronné d’une Croix monumentale, le temple colossal a été construit entre 1940 et 1958. La direction de l’ouvrage a d’abord été confiée à l’architecte Basque Pedro Muguruza, puis au madrilène Diego Méndez. Ses dimensions pharaoniques permettent d’accueillir 24 000 personnes. La nef ne mesure pas moins de 262 mètres et le transept culmine à 41 mètres. Sur l’esplanade extérieure ce sont pas moins de 200 000 personnes qui peuvent se rassembler. La majestueuse Croix, œuvre de l’architecte Pedro de Muguruza, s’élève à 150 mètres, hauteur à laquelle il faut ajouter les 1400 mètres d’altitude du Risco de la Nava. Deux voitures pourraient se croiser dans les bras de la Croix, qui mesurent chacun 45 mètres de long.

f625ebedf4ebaef2aec8b10186c777e5.jpgJuan de Avalos est le créateur des sculptures, en particulier des gigantesques têtes d’évangélistes au pied de la Croix. Avant la guerre civile, il militait dans les rangs des jeunesses socialistes et détenait la carte d’adhérent nº 7 du parti socialiste de Mérida. Autre détail piquant, le Christ qui domine l’autel majeur et qui repose sur une croix dont le bois de genévrier a été coupé par Franco, est l’œuvre d’un nationaliste basque, le sculpteur Julio Beobide, disciple du célèbre peintre Ignacio Zuloaga. C’est enfin un artiste catalan, Santiago Padrós, qui a conçu et réalisé l’impressionnante mosaïque de la coupole de la basilique (40 mètres de diamètre).

L’édifice religieux comprend non seulement une église monumentale – qui a été visitée et admirée par les futurs papes Jean XXIII et Benoît XVI – mais aussi une abbaye bénédictine et une auberge pour les visiteurs. Jusqu’à la Transition démocratique, il y avait un Centre d’Études Sociales, dont l’objectif était d’étudier, de rassembler et de diffuser la doctrine sociale de l’Église, afin qu’elle inspire les lois, et l’action des hommes d’affaires et des syndicats. L’idéologie du régime de Franco était on le sait marquée par la volonté de reconstruire un État avant tout catholique. C’était pour cette raison que le pape Pie XII avait conféré au généralissime l’Ordre suprême de Notre Seigneur Jésus-Christ, plus haute distinction du Saint-Siège.

L’histoire de la construction de l’ouvrage est l’objet de tous les fantasmes. Les grands médias ont fait état des chiffres les plus extravagants. Le nombre des prisonniers politiques qui auraient travaillé sur le chantier se serait élevé à 14 000 ou 20 000 hommes (voire même selon certains à 200 000). C’est du moins ce qui a été répété à satiété à la suite des élucubrations du socialiste Léo Brincat, responsable du projet de recommandation du Conseil de l’Europe condamnant le régime franquiste (4 novembre 2005). Le chiffre exact des travailleurs-prisonniers n’a pourtant jamais excédé 800 à 1000 hommes, soit moins de la moitié de la totalité des travailleurs présents sur le chantier (prisonniers et salariés libres). À la fin de 1943, la presse espagnole faisait état d’un total de 600 ouvriers. L’architecte, Diego Méndez, affirme pour sa part, dans son livre Valle de los Caídos, Idea, proyecto y construcción, que 2000 hommes au total ont travaillé au Valle entre 1940 et 1958.

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L’un des rares chercheurs, sinon le seul, qui a pris la peine d’analyser méthodiquement le fonds documentaire Valle de los Caídos, aux Archives générales du Palais royal de Madrid (Section administrations générales) est le professeur d’histoire à l’Université CEU San Pablo de Madrid, Alberto Bárcena Pérez, auteur d’une thèse sur la « Redención de penas en el Valle de los Caídos » (La rédemption des peines à la Vallée des morts au combat), et d’un livre sur « Los presos del Valle de los Caídos (Les prisonniers du Valle de los Caídos). Il s’agit de 69 boîtes, dont les milliers de documents lui ont permis de démolir l’image caricaturale qui assimile sans nuances le chantier du Valle aux pires camps de concentration nazis voire, plus rarement, au Goulag soviétique. Les archives de l’ancien Centre d’études sociales du Valle font état d’un chiffre total précis : 2643 travailleurs dont une minorité de prisonniers politiques qui, en principe, « devaient être volontaires et avoir choisi librement le système de réduction de peine par le travail », soit, d’abord, 2 jours de réduction de peine pour un jour de travail, puis, 6 jours pour un jour.

Alberto Barcena précise que les détenus ont effectué les mêmes travaux que les travailleurs libres, dans des conditions identiques de salaires, d’horaires et de nourritures. Les détenus et les travailleurs libres étaient tous embauchés par les entreprises chargées des travaux. Ils devaient présenter leur demande par l’intermédiaire du Patronato de Nuestra Señora de la Merced ou Centre national pour la rédemption des peines, qui avait été crée à cet effet et qui avait son siège au Ministère de la justice. Le salaire des détenus (fixé en fonction de leurs charges familiales) était divisé en trois parties : la partie principale était envoyée directement aux familles par l’intermédiaire des « Comités locaux pro-prisonniers », qui couvraient la majeure partie du territoire national ; une deuxième partie était placée sur un livret dont le montant total était reversé au moment de la libération du détenu ; enfin, une troisième partie était remise en main propre. Les prisonniers politiques ne touchaient pas 0,5 ou 1 peseta par jour comme on l’a souvent écrit, mais 7, puis 10 pesetas, plus des primes pour les travaux dangereux. Leurs familles pouvaient résider dans les baraquements du Valle prévus à cet effet. Les conditions de travail étaient bien sûr extrêmement dures et les salaires plus que modestes, mais il faut rappeler que le niveau de vie en Espagne était alors très bas puisque le salaire moyen d’un assistant d’université s’élevait à peine à 300 pesetas par mois.

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En 1950, neuf ans avant la fin des travaux, en vertu du système de remise de peine, il n’y avait plus un seul prisonnier politique au Valle de los Caídos. Selon les témoignages du docteur, médecin-chef, Angel Lausin et de l’infirmier Luis Orejas (deux partisans du Front Populaire, qui arrivèrent dès le début du chantier comme prisonniers politiques, et qui y restèrent, après avoir exécuté leur peine), en dix neuf ans de travaux, il y eut entre quatorze et dix-huit morts (auxquels il faut ajouter plus de cinquante victimes décédées en raison de la silicose). Enfin, le monument ne fut pas financé par le contribuable espagnol, mais par des dons privés et par les bénéfices de loteries annuelles.

Ultime avatar de l’histoire : la dernière volonté du vieux dictateur Francisco Franco, décédé le 20 novembre 1975, ne fut pas respectée. Le Caudillo souhaitait être enterré au cimetière du Pardo comme d’autres personnalités du régime, mais le chef du premier gouvernement de la Transition, Arias Navarros (1973-1976) et le nouveau chef d’État Juan Carlos (proclamé roi le 22 novembre 1975) en décidèrent autrement. Le roi demanda à la communauté bénédictine, gardienne du Valle et du culte de la basilique, l’autorisation d’enterrer le corps de Francisco Franco au pied de l’autel en face de la sépulture de José Antonio Primo de Rivera, ce qui fut fait, en grande pompe, le 23 novembre 1975.

Quarante-trois ans plus tard, l’exhumation du cadavre de Franco ne pouvait manquer de raviver de vieilles blessures. L’ignorance et la méconnaissance insondables de la majorité des hommes politiques et des journalistes français en matière d’histoire d’Espagne, expliquent l’incompréhension et le parti pris avec lesquels la bataille juridico-politique qui l’a précédée a été accueillie par les grands médias de l’Hexagone. Les explications données par eux ayant été aussi rares que superficielles, il n’est pas inutile de rappeler ici quelques faits ignorés ou passés sous silence.

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La basilique est un lieu de culte dont l’inviolabilité est garantie par un traité international sur la liberté religieuse, signé par l’Espagne et le Saint-Siège en 1979 ; les bénédictins, responsables du monument, dépendent non pas du Vatican mais de l’autorité de leur abbé et de celle l’abbé de l’abbaye de Solesmes supérieur de leur ordre ; la famille Franco a demandé que la dépouille du Caudillo soit transférée dans le caveau familial de la Cathédrale de la Almudena (Madrid), solution jugée inacceptable par le gouvernement socialiste ; enfin, le décret-loi royal a été la source de complications en raison du caractère improvisé de sa rédaction. L’application stricte de ses clauses pouvait entrainer l’exhumation immédiate de 19 moines bénédictins et de 172 personnes, tous morts et enterrés dans le monument après la fin de la guerre civile. Finalement, après que le Tribunal Suprême a donné son aval, la volonté politique du gouvernement a pu s’imposer. Les forces de l’ordre ont procédé à l’exhumation le 24 octobre 2019.

Mais à peine quelques mois plus tard, en pleine pandémie de Covid-19, le gouvernement socialo-communiste a clairement manifesté sa volonté de ne pas en rester là. Il a adopté, le 15 septembre 2020, un « Avant-projet de loi de mémoire démocratique », prévoyant que les moines bénédictins seront expulsés et que José Antonio Primo de Rivera, pourtant lui-même une victime de la guerre civile, sera aussi exhumé. Pendant des mois, un bon nombre de voix officielles ou autorisées se sont jointes aux associations de familles de victimes républicaines pour exiger que des recherches ADN soient effectuées sur les cadavres enterrés dans l’ossuaire du Valle de los Caídos afin de pouvoir récupérer les dépouilles de leurs ancêtres.

Mais l’affaire n’est pas simple. Les restes des 33 847 nationaux et républicains (dont plus de 21 000 identifiés et plus de 12 000 inconnus) sont pour la plupart inextricablement mêlés, du fait des dégradations et des ravages du temps, et un grand nombre de familles refusent que l’on viole la sépulture de leurs aïeux. L’avant-projet de loi prévoit par ailleurs de donner une nouvelle « signification » au monument. La basilique sera-t-elle profanée et reconvertie en ossuaire laïc ou en musée de la guerre civile ? La Croix chrétienne monumentale sera-t-elle démolie ? Les 57 martyrs béatifiés par l’Église, actuellement enterrés dans la chapelle Virgen del Pilar, seront-ils aussi déterrés et déplacés ?

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Ces différentes options sont ouvertement envisagées par les autorités et régulièrement commentées dans les principaux médias. La vice-présidente socialiste, Carmen Calvo, a fait savoir qu’il n’y a pas de « symétrie » possible entre les actes imputables aux ennemis de la démocratie et ceux commis par ses défenseurs ; en d’autres termes, que le camp du « bien » et le camp du « mal » ne sauraient être comparés. Quant au vice-président communiste-léniniste, Pablo Iglesias, il ne cache pas son intention d’abolir la monarchie, déclarant sans détour que « la tâche politique fondamentale » est désormais d’avancer résolument « vers l’horizon républicain ».

Le gouvernement espagnol a l’intention de soumettre au parlement tout un ensemble de projets de lois (sur l’euthanasie, l’interruption de grossesses, l’éducation, le choix en matière de genre, etc.) qui heurte de front les conceptions chrétiennes de la vie et le magistère de l’Église. Lors de l’audience accordée à Pedro Sánchez et à la délégation gouvernementale espagnole, au Vatican, le 24 octobre dernier, le Pape François a rappelé significativement que « les idéologies rendent sectaires et déconstruisent », et qu’un homme politique doit « construire la patrie avec tous ». Mais il est à craindre qu’il n’ait pas été entendu.

Les chrétiens espagnols ont été victimes d’une terrible persécution religieuse pendant la guerre civile. L’Église a béatifié 1915 martyrs de la foi dont 11 ont été canonisés (471 par Jean-Paul II, 530 par Benoît XVI et 914 par François, auxquels une cinquantaine devrait bientôt venir s’ajouter). Doit-elle aujourd’hui rester silencieuse et muette devant l’insolite regain d’agressions et de provocations dont elle est à nouveau l’objet ?

Le gouvernement espagnol ne semble plus rechercher la paix qu’à travers la provocation et l’agitation ; la justice prend la forme de la rancœur ; la démocratie, née de l’esprit de la Transition, se voit bafouée de plus en plus ouvertement. Après plusieurs décennies de relative sérénité, l’Espagne affronte ses moments les plus difficiles depuis la Guerre civile. Rattrapée par ses vieux démons, elle s’enfonce inexorablement dans une crise morale, politique, sociale, sanitaire et économique d’une ampleur dramatique.

Arnaud Imatz

Arnaud Imatz, historien et politologue, né à Bayonne en 1948, est docteur d’Etat en sciences politiques. Fonctionnaire international à l’OCDE puis administrateur d’entreprise, il a notamment publié José Antonio et la Phalange Espagnole et La Guerre d’Espagne revisitée. Auteur de nombreux articles parus en Europe et en Amérique, il a contribué à faire redécouvrir en France l’œuvre de José Ortega y Gasset et de Juan Donoso Cortés. Dernier livre paru : Droite/gauche, pour sortir de l’équivoque (Pierre-Guillaume de Roux, 2016).

© LA NEF le 28 octobre 2020, exclusivité internet

Frithjof Schuon: The Contradiction Of Relativism

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Frithjof Schuon: The Contradiction Of Relativism

 
'The Contradiction Of Relativism' from Logic And Transcendence by Frithjof Schuon
 
To listen to: https://www.youtube.com/watch?v=3v5zNMtMtiM
 

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A Conversation With Keith Woods: Postmodernism & Hyper Irony

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A Conversation With Keith Woods: Postmodernism & Hyper Irony

 
 

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mardi, 27 octobre 2020

Ezra POUND – Une Vie, une Œuvre : Violemment américain

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Ezra POUND – Une Vie, une Œuvre : Violemment américain (France Culture, 1992)

 
Voici la publication du vendredi, jour dédié aux inspirations de la Poésie française : Émission "Une Vie, une Œuvre », par Pascale Charpentier, sous-titrée « Violemment américain », diffusée le 5 novembre 1992 sur France Culture. Invités : Hubert Lucot, Jacques Henric, Jacqueline de Roux, Michel Morht, Yves di Manno et Richard Sieburth.
 
Mise en ligne par Arthur Yasmine, poète vivant, dans l’unique objet de perpétuer la Poésie sur tous les fronts.
 
 
Facebook : http://ow.ly/ZRq2X
 
Sur la Beat Generation, ses précurseurs et ses héritiers (en construction) : http://bit.ly/2qBXD8j
Les inspirations de la Poésie française (en cours de construction) : http://bit.ly/2qC8PoQ
Les émissions 'Une vie, une Œuvre' à propos d'un poète : http://bit.ly/2noIk5W
Le reste est dans les plis du voleur : http://ow.ly/Zqubf
 
Notice : Comme Louis-Ferdinand Céline, Erza Pound a connu la gloire et l'opprobre. Sa vie et son œuvre posent à l'esprit humain une question insoluble, une insupportable énigme : comment peut-on être en même temps écrivain de génie - le plus grand poète américain du siècle - et chantre de l'idéologie fasciste, ennemi irréductible de la démocratie ? Au départ, il sollicite le dépaysement ; enfant du vieil Ouest, il laisse derrière lui l'Amérique, quitte en 1907 la morne société victorienne pour l'Europe où il décide de vivre. Londres, Paris, Venise... Traducteur, poète, critique, Erza Pound est capable d'avoir une idée par seconde et fonde une demi douzaine de mouvements littéraires. Compositeur, éditeur, plus généreux que marmoréen, il "épaule" James Joyce dans la recherche, dans la continuation d' "Ulysse"... Point d'effusions diffuses ou d'épanchements, le poète n'écrit pas en son nom puisque sa création englobe tout l'héritage culturel. Ezra Pound entreprend les Cantos, un "livre des morts" ou une "descente aux Enfers", qui établit un dialogue avec les textes célèbres de la culture Européenne puis chinoise ... Et visite les traductions inconnues et convoque les maîtres relégués dans l'ombre, oubliés ou négligés.
 
Défenseur érudit de la tradition artistique et promoteur de formes nouvelles, Ezra Pound procède par conversation fragmentaire, fusion de personnages, montage de citations, d'événements spirituels et de Faits divers de l'époque, compression de l'Histoire... Contempleur acharné de l'usure et de la décadence des Etats-Unis, il se livre pendant la Seconde guerre mondiale à des causeries véhémentes et violemment anti-américaines, à la radio romaine, et en faveur de Mussolini, se prononce contre l'intervention US Traitre à l'Amérique, dès que les Américains débarquent, il est enfermé par les forces militaires dans une cage de fer, ramené et interné à Washington. L'homme déchu est primé et célébré en 1948, "grand poète américain", les Cantos sont salués comme "la grande épopée de Notre temps et de l'homme moderne". Au terme de sa vie, Ezra Pound se plaît à dire qu'il a été le dernier Américain a avoir vécu la tragédie de l'Europe ou encore "une fourmi qui aurait échappé au naufrage de l'Europe".
 
[RAPPEL des jours de publication :
- Lundi : modèles antiques (poètes de la Bible, de la Grèce ou de la Rome antique) ;
- Mardi : poésie médiévale ;
- Mercredi : poètes de la Renaissance ;
- Jeudi : poètes de l'Âge classique et baroque ;
- vendredi : inspirations étrangères (du Dolce stil novo à la Beat Generation) ;
- samedi : poètes de la Modernité ;
- dimanche : poésie contemporaine ou vivante.]
 
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Star Trek vs. the Radical Right: Visions of a Better World - About Guillaume Faye's futurism

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Star Trek vs. the Radical Right: Visions of a Better World

About Guillaume Faye's futurism

Guillaume Faye’s writing is a prime example of how radical-right fictional accounts imagine the transformation toward what the radical right considers a better world.

Science fiction has a long history of progressive politics. Probably the best-known example is the Star Trek franchise that started in the 1960s with an Asian helmsman, a navigator from Russia and a black woman as a communications officer and features non-binary and transgender characters in the upcoming third season of “Star Trek: Discovery.” Such politics are not that of the radical right, be they communicated through doctrinaire texts or (science) fiction(s) of a “better world,” the latter being arguably more persuasive due to their emotive nature and a good story’s ability to psychologically transport the reader away from reality and into the world of a hero’s fictive journey.

An occasion where these two modes meet is Guillaume Faye’s “Archeofuturism: European Visions of the Post-Catastrophic Age,” which was originally published in French in 1998. Faye recently featured on these pages, and it is thus sufficient to say that this key thinker of the radical right puts forward a specific argument against egalitarianism and the philosophy of progress.


Did a French Far-Right Thinker Predict 2020?

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Following an introduction, “Archeofuturism” starts with an assessment of the Nouvelle Droite (the New Right), including criticism of “ethno-cultural relativism” that prevented the affirmation of “the superiority of our own civilization.” This is followed by a chapter on archeofuturism; an “Ideologically Dissident Statements”; Faye’s discussion of a two-tier world economy; a chapter entitled “The Ethnic Question and the European”; and, finally, a short science fiction story to which I now turn.

indexGFconv.jpgThe Great Catastrophe

Concerning archeofuturism, Faye introduces archaism in terms of the unchangeable “values, which are purely biological and human,” meaning separated gender roles, defending organic communities and “explicit and ideologically legitimated inequality” among social statuses, while futurism is described as “the planning of the future,” a “constant feature of the European mindset” that rejects “what is unchangeable.” Hence, “Archeofuturism” celebrates technological advancements such as genetic engineering from a distinctly radical-right ethos.

Not quite Star Trek’s message, but why bother? Although Faye presents “Archeofuturism” in a classic intellectual style, he also attempts to increase its appeal by fictionalizing his ideas. That is, a story at the end of the book conveys not simply its key points, but an entire, alternative future. This final chapter is not simply dystopian, as is the case with so many radical-right fiction novels, but utopian — not foregrounding decadence and catastrophe, but “the good life” and a happy rebirth of “our folk — whether in Toulouse, Rennes, Milan, Prague, Munich, Antwerp or Moscow.” Thus, the story facilitates emotional identification with a not so distant future, warranting a closer look at this fictionalization of radical-right politics.

The short story is entitled “A Day in the Life of Dimitri Leonidovich Oblomov: A Chronicle of Archeofuturist Times” and introduces the reader to Faye’s future through the eyes of the Plenipotentiary Councillor of the Eurosiberian Federation Dimitri Leonidovich Oblomov on a day in June 2073. It describes what happened following the “Great Catastrophe,” a convergence of catastrophes central to Faye’s theory that allegedly manifests the end of the “fairytale ideology” of egalitarianism and progress underpinning modernity.

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According to Faye, this is the convergence of seven main crises: a demographic colonization of Europe; an economic and demographic crisis; the chaos in the South; a global economic crisis; the rise of religious fanaticism, primarily Islam; a North-South confrontation; and environmental pollution, which, interestingly, includes an unambiguous acceptance of anthropogenic climate change. Faye assumed this convergence to take place between 2010 and 2020. The story speaks of 2014-16 and tells the reader that, consequently, 2 billion people had died by 2020.

Readers furthermore learn that following this Great Catastrophe, the Eurosiberian Federation, resulting from the fusion of the European Union and Russia, was founded. Indeed, the idea of a federal Europe is central to Faye’s approach. In contrast to most of his fellow travelers on the radical right, Faye views the contemporary European Union as an insufficient but necessary step toward this federation. Such an imperial block — like India, China, North America, Latin America, the Muslim world, black Africa and peninsular Asia — would be a semi-autarky and an actor on the world stage while simultaneously enabling strengthening of regional identities across the federation.

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Another key element of Faye’s theory, its unrestricted celebration of technoscience, is also present throughout the story. For example, Oblomov speaks of a base on Mars and spends most of the story on a “planetary train” from Brest to Komsomolsk, a journey which takes only about three hours.

However, within the federation, only 19% cent of the population participate in the technoscientific economy and way of life which “solve[ed] the problems of pollution and energy waste – the planet could finally breathe again. … Still, it was too late to stop global warming, the greenhouse effect and the rise of sea levels caused by wide-scale toxic emissions in the Twentieth century. Science had made rapid progress, but it only affected a minority of the population; the others had reverted to a Medieval form of economy based on agriculture, craftsmanship and farming.”

Not only is this program manifestly inegalitarian, Faye also simply assumes that the vast majority, in fiction and reality, will enjoy a pre-industrial, neotraditional way of living. Faye’s technoscientific vision includes chimeras and the genetic manipulation of children, the benefits of which will only be available to a minority.

Extra-European

Turning to the representation of women, the story introduces three in particular and not untypical ways: Oblomov’s wife, who looks after the children and who only really enters at the end of the story; a virtual female secretary — not “a fat and repulsive old hag” but one who “had perfect measurements, always appeared in scanty dresses and made suggestive remarks from time to time”; and a “dark-skinned and very beautiful girl.” In fact, it is through the conversation between this Indian girl and Oblomov during the train ride that the reader learns much about Faye’s archeofuturist vision.

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Finally, Faye’s vision of the post-catastrophic age includes the cleansing of Europe from its “extra-European” population. In Faye’s writing, Islam is the main enemy and, consequently, the story reports an invasion of Europe by an Islamic army in 2017 that teams up with ‘“ethnic gangs”’ before a Reconquista (with the help of Russia) leads to victory and the deportation of millions of descendants of extra-European immigrants. Unsurprisingly, deportation is driven by archaic criteria as Faye talks about the “right of blood” and the “collective biological unconscious.” 

A radical-right publisher in Germany recently released the story as a stand-alone book, and the piece is particularly notable due to its direct transformation of theory into science fiction. Indeed, the story is a prime example of how radical-right fictional accounts “imagine the unimaginable” — the transformation toward what the radical right considers a “better world.” Not only fans of Star Trek should take notice of such worlding as the latter can have real-world consequences.

*[Fair Observer is a media partner of the Centre for Analysis of the Radical Right.]

The views expressed in this article are the author’s own and do not necessarily reflect Fair Observer’s editorial policy.

Cambio de situación política - Tesis sobre el europeísmo - Volviendo al sol

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Cambio de situación política

Tesis sobre el europeísmo

Volviendo al sol

Crónica. Nueva etapa

**La moción de censura abre una nueva etapa en la política española. Cada cual se ha puesto  en su sitio. Es el hecho político más relevante desde la condena del 18 de julio por Aznar, a partir del cual toda la política se resume en un progresivo socavamiento de la democracia y de la unidad nacional. El resultado de la moción es el dato nuevo y decisivo, 

**Ahora parece que hay alternativa. Ningún analista, que yo sepa, ha querido verlo. Los  “análisis” corrientes no pasan del chismorreo de política menor, como de costumbre, que si el PP perderá muchos votos o pocos,  si antes o después volverán a ponerse de acuerdo, si VOX conseguirá votos para gobernar a corto plazo, si el Doctor continuará mucho o poco, y nimiedades por el estilo. La derecha tipo COPE, ABC y similares, y los grandes medios, procurarán que el asunto se olvide y que “todo siga igual”.

**Los términos “derecha” e izquierda” son engañosos, como ha expuesto Arnaud Imatz en un libro: los rasgos “definitorios” de la derecha han sido adoptados muchas veces por la izquierda, y viceversa. No obstante mantienen cierta capacidad indicativa en cada momento. Así, el PP, ayuno de “pouvoir spirituel”, que decía Ortega, es hoy parte del frente popular zapateril al que ya Aznar regaló la legitimidad moral e histórica, para ver si así le admitían en el club.

**Un rasgo definitorio de la miseria intelectual y cultural de la España de hoy es la ausencia de debates. Y no porque el país no tenga problemas de enorme alcance. Pero no son tratados más que al nivel infecto de los cotilleos televisivos y radiofónicos. En cambio se ha formado una Cheka cultural que ejerce de verdadera policía del pensamiento.

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Algunas tesis sobre el europeísmo

piomoa-europa.jpg1.Observen este dato crucial: desde la transición, y aun antes, prácticamente todos los políticos, intelectuales y periodistas españoles, de cualquier partido, PSOE, PP o separatistas, han rivalizado en europeísmo. Casualmente nos han llevado entre todos a esta situación de democracia fallida y golpe de estado permanente.

2. El lema del  europeísmo lo definió Ortega en su tiempo: “España es el problema y Europa la solución”. Explícita o implícitamente, ese lema ha gobernado la política y la intelectualidad española desde entonces con pocas excepciones. La frase, de una sandez chocante, impedía ver que España no era ningún problema,  tenía serios problemas –a los que contribuían los europeístas–. Tan serios que desembocaron en la guerra civil. Y el resto de Europa, –que no “Europa”– los tenía aún más graves, hasta desembocar en dos guerras devastadoras, que acabaron con le hegemonía política, militar y cultural europea. Nuestros “europeístas” son tan idiotas que ni siquiera perciben estas evidencias.

3. Ortega solo dejó de desbarrar en política cuando volvió a la España de Franco y se centró en  la filosofía.

4. España se libró de las dos guerras mundiales y se reconstruyó con sus propias fuerzas después la guerra civil. Los “europeístas” no lo ven como el enorme mérito que fue, incluso  como ejemplo para los demás, sino como una desgracia.

5. El europeísmo actual ha degenerado en una UE multiculturalista –es decir, partidaria de disolver la cultura europea como “una más” en Europa–, de ideología LGTBI, abortista, inmigratoria sin tasa, socavadora de las naciones históricas europeas (llevamos más de sesenta años con la  cantinela de que hemos entrado en una era posnacional), con pretensiones estatales de gobernar hasta los sentimientos de las personas… Nos acercamos cada vez más, “europeísticamente”, al estado antihumano pronosticado por Tocqueville.

6.  El europeísmo español se concreta en hechos como la apertura de la verja de Gibraltar, conversión de la colonia en un emporio de negocios sucios y corruptores, y declaración de “amistad y alianza” con la potencia invasora (que, paradójicamente, ha resultado mucho menos europeísta  –sin dejar de ser europea– que los corrompidos políticos hispanos). Otro “europeísmo” es la rampante colonización cultural por el inglés. O la instrumentación del ejército en operaciones de interés ajeno,  bajo mando ajeno y en lengua ajena.

7. Debemos contentarnos con ser europeos sin necesidad de “ismos”,  mantener y defender nuestra independencia y desarrollar nuestras capacidades y recursos, que son muchos si superamos la plaga “europeística” actual. Volver a la neutralidad y promover en la UE, con Polonia y Hungría, políticas contrarias a la desintegración moral y política de Europa.

************* 

Volviendo al sol

Nuestra conversación sobre tus novelas  es bastante desordenada, pero creo que tampoco importa, pues, como dijo Luis del Pino, la última sobre todo, la de los “perros verdes”, da mucho qué pensar, a mí me lo ha dado, desde luego. Así que vuelvo sobre lo del sol, al que da tanta importancia  el relato,  que empieza con la aurora y termina con el ocaso, algo verdaderamente original en una novela, pues no sé de otra planteada de ese modo, supongo que puede verse como una alegoría de la vida en general: en una jornada se encierra una vida. Y en la vida ocurren mil cosas bajo el sol…

… Como dice el Eclesiastés, días de vanidad bajo el sol o algo parecido me parece recordar. Los días del hombre son pura vanidad.

pio moatransi.jpgSí, algo de eso, pero, ¿has querido decir que las peripecias de la novela, como reflejo de las peripecias humanas,  son pura vanidad? Ahora que lo dices, ¡el Eclesiastés se ha adelantado a Sartre, con otras palabras! ¡Me asombro, de verdad! Es lo que sostiene Moncho contra Santi, así que las reflexiones sobre el sol parecerían más propias de un nihilista que de un católico practicante, en fin, ya te he dado muchos consejos sobre cómo conducir la novela, que no te han convencido pero ahora lo veo claro: debía ser Moncho y no Santi quien fuera a ver la salida y la puesta del sol para convencerse de la inutilidad de la vida. Conste que yo simpatizo más con Santi.

Bueno, pues escribe tú mismo la novela, a ver qué te sale. Los personajes son algo complicados y contradictorios, como  somos siempre los seres humanos. A Santi no debería preocuparlo lo del sol ni sus analogías con la divinidad. El sol puede considerarse una entidad benéfica, puesto que permite la vida, aunque al mismo tiempo la vida es dura y cruel. Pero en conjunto, la vida sigue. Para Santi no debería ser un problema. Él cree en Dios, concretamente en el Dios cristiano, y por tanto el sol y los planetas serían solo una creación suya. Sin embargo ve en el sol una imagen, una analogía con la divinidad, que le inquieta.

Sabes que a mí escribir no se me da bien, pero tengo un espíritu crítico… Y el sol se parece al ojo de Dios, que desde lo alto lo ve todo, y sin embargo no parece preocuparle lo que pase aquí abajo, pues nos ha atormentado con ideas de justicia y de moral que sin embargo no se cumplen. También se lamenta el Eclesiastés de cómo suelen triunfar los injustos y malvados.

piomoaquiebra.jpgHay otra analogía que hacer. El sol se oculta y llega la noche. De día tenemos luz, nos movemos, interactuamos unos con otros. La luz nos permite afrontar nuestros problemas y disfrutar de los momentos en que nos sentimos bien. Pero llega la noche y cesa todo eso. Todo lo que consideramos realidad se disuelve. Dormimos y perdemos la consciencia, estamos indefensos, no hay movimiento ni interacción, y la mente se puebla de imágenes extrañas y enigmáticas,  de demonios. Recuerdo una vez en que mi mujer y yo fuimos a un pequeño yacimiento prehistórico en una colina desde la que se divisaba un gran panorama bajo el ocaso, lo he contado en Adiós a un tiempo. Y  creí sentir  lo que debía sentir un hombre prehistórico ante  tal  misterio,  ante aquel tremendo fenómeno cósmico  con tal exhibición de poder, del que dependía su vida y al mismo tiempo  tan lejano y tan ajeno a él. El hombre actual urbano, intelectualizado, es poco capaz de sentir tales cosas. O las siente como una especie de diversión estética, que cabreaba a Santi. Como una cosa de consumo “bonito” que las agencias de viaje pueden venderte: “Tenemos una oferta para ti: disfruta de las puestas de sol del Caribe”.

 

 
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Arnaud Imatz: "La historia no es maniquea, está siempre hecha de claros y oscuros, no hay buenos y malos absolutos"

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Arnaud Imatz: "La historia no es maniquea, está siempre hecha de claros y oscuros, no hay buenos y malos absolutos"

Ex: https://latribunadelpaisvasco.com

Arnaud Imatz (Bayona - Francia -, 1948) es un historiador francés, doctor de Estado en Ciencias Políticas, diplomado en Derecho y Ciencias Económicas y Académico Correspondiente extranjero de la Real Academia de la Historia. Ha sido también funcionario internacional (OCDE) y fundador y administrador de empresas. Estudioso desde hace largo tiempo del mundo hispánico ha publicado una docena de libros y ha colaborado con numerosos ensayos y artículos en una treintena de las más prestigiosas revistas europeas y americanas. Ahora, La Tribuna del País Vasco Ediciones publica su última obra, un magnífico opúsculo titulado Vascos y Navarros, Mitos, historia y realidades identitarias.

ai-vascos.jpg¿Cómo surgió la idea de escribir el librito “Vascos y Navarros”?

Empecé escribiendo un artículo-cronología en francés que tuve la sorpresa de ver publicado en una guía turística en la cual ni siquiera mencionaban mi firma. A raíz de ese asunto, decidí revisar y ampliar considerablemente el texto. Más que nada es un pequeño homenaje a mis antepasados. Eran vascos, navarros y bearneses. Eran pescadores, panaderos, vinateros, contratistas de obras públicas, militares, carpinteros, tabacaleros, libreros, dueños de restaurantes y hosteleros, ubicados en la mayoría de los casos en Hendaya.

Yo nací en Bayona, pero a los pocos meses de vida ya iba con mi madre a la playa de Hendaya, la de La pointe, justo en frente de Fuenterrabía. Un lugar precioso, hoy desaparecido, habiendo sido sustituido por la bonita pero convencional marina, o puerto deportivo de Sokoburu. Con mi mujer, mi hijo y mis dos hijas he vivido primero en París y luego durante veinte años en Madrid. Allí tengo recuerdos inolvidables y amigos entrañables (incluso un autentico “hijo espiritual”). Pero he pasado la mayoría de mi tiempo - más de cuarenta años -  en el País Vasco, un lugar del mundo excepcional. Por supuesto, mis amigos gallegos, bretones, andaluces o corsos pueden discrepar. Esto es normal. Mis hijos y nietos, que viven más al norte, y mi mujer, nacida en la “Isla de Francia” (aunque de ascendencia en parte vizcaína), se burlan a veces de mi excesivo apego al terruño. ¡Pero qué más da! Yo también tenía mis dudas y reaccionaba con escepticismo cuando en los lejanos años ochenta un amigo vasco, catedrático de Derecho, que había sido miembro del tribunal que examinó mi tesis doctoral, contestaba a mis preguntas: “¿Qué tal La Reunión”, ¿Qué tal La Martinica?”, etc. : “Bien, bien, pero ya sabes que cuando uno conoce Biriatu…”. Ni siquiera se tomaba la molestia de acabar su frase. Ahora sé que tenía razón.

¿Así que su familia ha echado hondas raíces en el País Vasco?

Sí, efectivamente. El patrononímico Imatz o Imaz, significa mimbre, mimbral, pastizal o juncal, se encuentra, sobre todo, en la comunidad autónoma vasca, pero también está presente, aunque de una forma menos frecuente, en Navarra y en el País Vasco francés. En mi rama materna hay un buen número de apellidos vascos. La mayoría nacieron y vivieron en Hendaya. Algunos se alejaron, se fueron a trabajar a diferentes ciudades de Francia o de España (Madrid, Palencia o en Andalucía), incluso en América, pero tarde o temprano casi todos volvieron a su pueblo nativo en el País Vasco francés. Mi abuelo materno era vasco, carlista y por supuesto católico. Conservó toda su vida una boina regalada a su familia por Don Carlos. Estuvo trabajando en hoteles de Guayaquil y de Londres y luego en el María Cristina de San Sebastián, cuando su inauguración en 1912. Durante la Primera Guerra Mundial participó como artillero en la Batalla de Verdún. Una vez desmovilizado volvió a Hendaya para hacerse cargo del hotel de sus padres. Hablaba vasco y francés, pero también español, como la mayoría de los miembros de mi familia de aquella época, y por cierto eran muy amigos de España y de los españoles.

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A finales del siglo XIX y principios del siglo XX, mi bisabuelo tenía un hermano párroco en Biriatu. El hombre se dedicaba a su sacerdocio, pero le gustaba jugar a la pelota, eso sí, siempre llevando su sotana. Se involucró mucho en la defensa y salvaguardia de la lengua y cultura vascas. Así eran los famosos sacerdotes vasco-franceses de antaño. Mi tía-abuela solía tocar el piano y me enseñó, entre otras cosas, el Oriamendi y el Himno de San Marcial. Desde su casa, situada en las orillas del Bidasoa, podía ver el Alarde de Irún y de noche escuchar, aunque muy pocas veces, los susurros de los contrabandistas. Mi tía-abuela y mi bisabuela (una viuda de carácter fuerte que había sido directora del Casino de Hendaya en los años veinte del pasado siglo) me contaron numerosísimos recuerdos de nuestra familia fronteriza.

¿Nos puede contar algunos de estos recuerdos?

Algunas anécdotas: pocos meses antes de morir, mi abuelo carlista, naturalmente a favor del bando nacional, negoció con el comandante Julián Troncoso, un amigo suyo, el canje de una amiga del bando republicano, Pepita Arrocena. A raíz del intento de Revolución Socialista, en 1934, Pepita había cruzado la frontera con su chófer y con el líder socialista Indalecio Prieto escondido en el maletero de su coche.

En otras circunstancias, amigos franceses de mi abuelo participaron al fallido asalto al submarino republicano C2 fondeando en el puerto de Brest. Debo decir que durante la Guerra Civil muchísimos corresponsales extranjeros acostumbraban a alojarse en el hotel de mis abuelos. Al final de la contienda, mi abuela, ya viuda, era muy amiga de la mujer del Mariscal Pétain, embajador de Francia en España. Pero dos años después, estando en la zona llamada “prohibida”, en plena ocupación nazi, y a pesar de su amistad con Annie Pétain, la “Mariscala”, mi abuela simpatizaba con los gaullistas y participaba a la Resistencia anti-alemana. Estaba en contacto con la ORA (Organisation de Résistance de l’Armée) del País Vasco y con su amigo el doctor irunés Alberto Anguera Anglés, el cual se encargaba de encaminar el correo de los evadidos de Francia.

La otra rama de mi familia, la paterna, era bearnesa, venía de Pau y Orthez. Mi abuelo paterno era un republicano católico, un suboficial mayor que había sido uno de los soldados más condecorados de la Primera Guerra Mundial. Mutilado de guerra, se instaló en 1919 en Hendaya con su mujer y sus cuatro hijos para ejercer la profesión de tabacalero y librero. Su hijo, mi padre, llegó a Hendaya a los seis meses. Gran deportista, fue cuatro veces campeón de Francia de pelota en los años 1930 y 1940, en la modalidad de pala larga, en plaza libre. Mi familia paterna se dividía entonces entre los incondicionales del Mariscal Pétain, como mi abuelo, y los partidarios de Charles de Gaulle, como sus cuatro hijos, entre los cuales figuraban mi padre y mi padrino, el mayor de edad herido de gravedad en Dunquerque. Todos estos recuerdos de familia me hicieron entender muy temprano que la historia no es maniquea, que está siempre hecha de claros y oscuros, que no hay buenos y malos absolutos, que no hay pretendidas justicias históricas o democráticas como vuelven a decir hoy los traficantes de odio y de rencor, los miserables fantoches de la política que viven para jugar con el fuego.

En su opinión, entre vascos y navarros, ¿hay más cosas que unen o separan?

Para contestar con detalle habría que referirse a la historia larga de los condados vascos medievales, del reino de Navarra, de España, del Imperio hispánico y del Estado-nación francés. Son temas que abordo, aunque sucintamente, en el breviario histórico al que te refieres y que ha publicado La Tribuna del País Vasco. Sería por supuesto incapaz de resumir todos estos enjundiosos temas en unas pocas palabras. Confieso que a título personal, a pesar de mi nacionalidad, y debido a mi cultura hispano-francesa, simpatizo bastante más con el Imperio Católico Hispánico de Carlos V y Felipe II que con el Estado-nación galicano-católico francés de Richelieu, Luis XIII, Luis XIV y los Revolucionarios de 1789 y 1792. Ya sabemos que la “razón de Estado” de dichos políticos franceses estuvo muy influenciada por Maquiavelo e indirectamente por la prosa y actitud de los protestantes. Dicho esto, no se puede borrar, así como así, cinco, diez o quince siglos de historia común, ni manipularlos, ni tergiversarlos.

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Ahora bien, si en su pregunta se refiere esencialmente a nuestros días le diré que, paradójicamente, hay cada día más cosas que unen a los vascos y navarros y menos que les separen. Pero, ¡ojo!, no caigo por ello en los ensueños independentistas o separatistas. Lo que pienso es que dichos pueblos pierden cada uno sus especificidades y se van uniendo poco a poco, pero desgraciadamente en la nada, en el gran mortero del mundialismo. Me explico: a estas alturas todos somos víctimas de la globalización, del consumismo, del mercantilismo, del declive demográfico, del individualismo multiculturalista, de la decadencia de la religión, de la Iglesia y del cristianismo, tantas plagas que se han revelado a la larga muchísimo más corrosivas y mortíferas para los vascos y los navarros (y también en general para todos los pueblos de Europa) que los “cuarenta años de dictadura franquista”, el “centralismo borbónico del siglo XIX”, o el “centralismo jacobino francés” aún vigente.

Es verdad, gracias a Dios, que nuestras tierras (que han sido a veces marcadas por una violencia salvaje indigna de los seres humanos) no han padecido de forma duradera los horrores del nazismo o peor aún (debido al número de muertos) las monstruosidades del totalitarismo marxista-comunista. En esto, los nacionalistas radicales están completamente ciegos y se equivocan totalmente de adversario. Gangrenado por la mezcolanza del internacionalismo marxista y de lo que los americanos llaman el “marxismo cultural”, el radicalismo izquierdista abertzale ha venido a ser el perfecto aliado del hipercapitalismo o turbocapitalismo mundialista. Los dos, mundialistas y nacionalistas-separatistas, van arrancando lo mejor de los valores de los navarros y vascos, las más hondas raíces de sendos pueblos. En el fondo son dos lados de una misma pinza.

En su opinión, ¿qué supone el euskera para la realidad de vascos y navarros?

Es un factor importante, pero no suficiente para definir toda la identidad y realidad vasca. Tan importantes son la etnia, la demografía, la cultura y la historia. Hay vascos euskaldunak, porque hablan la lengua vasca, hay vascos euskotarrak porque se definen étnicamente como vascos aunque se expresen en francés o en español y hay vascos que son ciudadanos vascos porque residen en el País Vasco y quieren al País Vasco. En la Comunidad Foral de Navarra, que se funda en una larga y brillante historia propia, es otro cantar: hay vascos que se sienten vascos y muchos navarros que no son ni se sienten vascos.

ai-josé.jpgLo que hace el Gobierno Vasco para la defensa de la lengua vasca me parece bastante acertado, a pesar de todas las acciones caricaturescas y desprovistas de sentido que han sido tomadas en contra del idioma castellano o -mejor dicho- del español, una de las dos o tres lengua más habladas del mundo. Ya sabemos que el idioma no es suficiente, pero además de esto no se debe esconder que los resultados de las políticas a favor del euskera son más bien escasos. La realidad es que no hay nación o patria posible sin un legado histórico combinado a un consentimiento y una voluntad de existencia por parte del pueblo. Nicolas Berdiaev y otros autores europeos famosos como Ortega y Gasset hablaban de unidad o comunidad de destino histórico. Pues bien, sin la combinación armoniosa del fundamento histórico-cultural y del factor voluntarista o consensual, sin esos dos ejes, no puede haber nación. Y por eso ya no hay hoy una verdadera nación española como no hay tampoco hoy verdaderas nacionalidades o naciones pequeñas dentro de España.

Lo mismo se puede decir del resto de Europa occidental, cuyo poderío esta en claro declive, si lo comparamos a las grandes potencias actuales. En Francia, es muy significativo que un político profesional como Manuel Valls, que siempre cree tener un as en la manga, haya admitido por fin recientemente que “la sociedad francesa está gangrenada, fracturada por el islamismo”. Por eso mismo las autoridades catalanas y los catalanistas que declaran con énfasis o dejan entender hipócritamente que prefieren una inmigración norteafricana que no habla el español, por considerarla más propensa a aprender el catalán, a una inmigración hispanoamericana católica e hispanohablante, son ignorantes e incoherentes. Con ellos los días del fet Catala están contados. Por lo menos, y de momento, los despropósitos inmigracionistas de los catalanistas no parecen imperar tan fuertemente entre los militantes nacionalistas vascos radicales.

¿Cómo definiría el sentimiento identitario navarro?

Creo haber contestado ya en parte. Para mí el navarrismo se sitúa en el pasado, sus señas de identidad eran el catolicismo y el tradicionalismo. Era lo propio de los requetés, las boinas rojas que tanto admiraba mi abuelo materno y que hoy solo existen a dosis homeopáticas. Lo mismo diría de la figura del vasco noble, católico, arraigado, trabajador y honesto de antaño. Parece que las “élites”, la oligarquía o casta política vasca y navarra hayan elegido, no sé si definitivamente o no, el camino de la armonización y del alineamiento con los valores y presupuestos del mundialismo o del altermundialismo (lo que da lo mismo) o del llamado transnacionalismo progresista. Fingen creer que el vasco y el navarro se definen solo administrativamente o jurídicamente a partir de un documento o un DNI. Parece que ansían poblar los futuros territorios vascos y navarros con el homo economicus, asexual, apatrida y fantasmagórico, tan criticado antaño por el vasco-español Unamuno y por las figuras más relevantes del nacionalismo vasco. Si a esto añadimos los estragos de la terrible crisis demográfica, sin duda la peor de toda España y posiblemente de toda Europa occidental, las perspectivas no son muy alentadoras. Y, mientras tanto, los jóvenes vascos escuchan la música anglosajona, tocan el “rock vasco”, comen hamburguesas, consumen drogas (los jóvenes abertzales más que cualquiera), defienden la apertura de las fronteras, la inmigración sin límites, el laicismo agresivo, la teoría del género, el transhumanismo, el odio al Estado y a la historia de la nación española, y todas la chorradas importadas desde los campus americanos. Podría limitarme a decir en francés o en inglés: “Grand bien leur fasse / Great good to them”. Pero tengo la íntima y terrible convicción que si no se reacciona rápidamente nos traerán un futuro sombrío, crudo y sanguinario que nuestros descendientes padecerán.

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¿Qué opinas de la afirmación que hace Stanley Payne en el prólogo del libro señalando que “El País Vasco es la región más singular de España”? ¿Cuáles son sus sentimientos hacia el País Vasco y hacia Navarra?

Stanley Payne pertenece a la tradición de los historiadores anglosajones que casi nunca pierden su flema o digamos una cierta compostura prudente y equilibrada. Es un investigador e historiador, pero es un hombre y no un robot. Por eso opina, juzga e interpreta, aunque siempre con cierta sobriedad y ponderación. En ese texto se refiere a la singularidad del idioma, de las instituciones y de la historia vasca (pasa por alto la etnia). Ahora bien, es americano, yo no, y si digo que estoy de acuerdo con él cuando dice que "el País Vasco es la región más singular de España" muchos dirán que esto se debe a mi querencia personal. Precisamente a raíz de ese texto de Payne un amigo mío, no exento del sentido del humor, me escribió: "Esta muy bien, aunque yo creo que los gallegos somos más particulares que los vascos".

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En el libro Vascos y Navarros he intentado ser lo más riguroso, honesto y desinteresado posible. Siempre he pensado que la auténtica objetividad no reside tanto en un alejamiento hostil cuanto en una suerte de voluntad bienintencionada que sea capaz de comprender y explicar las ideas ajenas sin renunciar a sus propias razones. Esto dicho, permítanme decir y repetir aquí que, a pesar de las evoluciones o involuciones recientes y de las carencias de las seudo o autoproclamadas "élites" políticas vasco-navarras, el País Vasco y Navarra son mis tierras predilectas. 

¿Cómo se ve la reciente historia del País Vasco y de España desde el País Vasco francés?

El partidismo, el desconocimiento o el desinterés, no solo de la mayoría de los franceses sino también de la mayoría de los políticos y periodistas galos, por la historia y la política del País Vasco y Navarra, y más generalmente por la de España en su conjunto, son abismales, insondables. La tendencia es un poco diferente en el País Vasco francés debido a la proximidad de la frontera y a la presencia de un electorado nacionalista vasco, débil pero no insignificante, que representa del 10% al 12% del electorado. Globalmente, muchos se sienten vascos, pero como en el resto de Francia la mayoría se desinteresa de la historia y de la política de la península a no ser que ocurra un hecho trascendental. En cuanto a la pequeña minoría nacionalista vasca del norte recicla incansablemente los tópicos hispanófobos aunque a veces temen ser fagocitados por sus potentes hermanos del sur.

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En mi caso, no bajo las armas. Con la ayuda de un puñado de jóvenes y veteranos historiadores franceses y de editoriales valientes, sigo y seguiré explicando, denunciando y rebatiendo las leyendas negras, las ideas falsas, los datos censurados, los hechos instrumentalizados y las sandeces hispanofóbicas, difundidas por los ignorantes, los malvados y, lamentablemente, por una buena parte de la casta política vasca, navarra y española.

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Joe Scotchie: Recovering Authentic (= Politically Incorrect) Conservatism

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Joe Scotchie: Recovering Authentic (= Politically Incorrect) Conservatism

Joe Scotchie’s recently published anthology Writing on the Southern Front: Authentic Conservatism For Our Times made me aware of the task that confronts every serious student of the Right—recovering what otherwise might slip down the Memory Hole. Both the American media and, more generally, American political culture have moved so far away from anything that looks even vaguely non-Left that we may soon need archeologists to rediscover what has been driven underground. American “conservatism” (yes the scare quotes here are very deliberate) is now represented by Jonah Goldberg, telling us how frighteningly homophobic, racist, anti-Semitic and sexist the 1950s were and Rich Lowry calling for the removal of all statues of Robert E. Lee, since they may offend American blacks.[Mothball the Confederate Monuments, National Review, August 15, 2017]. It is therefore comforting to read Scotchie’s latest effort to revive and defend an “authentic conservatism.”

41+ZcQXQVML._SX331_BO1,204,203,200_.jpgSimilarly, I’ve also been watching on Fox News the steady procession of “proud, Republican” homosexuals, lesbians, bisexuals, and “moderate” feminists and wonder whether I’ve tuned in by mistake to a multicultural festival. Recently, I heard the “conservative” Geraldo Rivera explaining on Fox News how truly blessed we are by having so many Latinos streaming across our borders and assimilating “at a rate that’s faster than any ethnic group” in US history. [Tom Brokaw’s Hispanic remarks were ‘shockingly uninformed,’ Geraldo Rivera says, by Joseph A. Wulfsohn, January 30, 2019] My cup runneth over with such “conservative” verities.

Scotchie, a native of Ashville NC who now works as a journalist in Queens NY, has returned to his task of recovering ideas and traditions that don’t pass the current PC litmus test. In books on paleoconservatism, the “Southern” history of Ashville, Richard Weaver and Pat Buchanan, (The Paleoconservatives, A Gallery of Ashevilleans, The Vision of Richard Weaver, and Street Corner Conservative) Scotchie has tried to bring to life what the American Right, when it still existed as part of the permissible political conversation, believed and revered.

Not all of his heroes, like Robert E. Lee, the Southern Agrarians, Thomas Wolfe, Sam Francis, M.E. Bradford, Douglas Southall Freeman, the biographer of Washington and Lee, and Patrick J. Buchanan, would necessarily have agreed on all basic moral and political questions.

But they all fit easily into a plausible Right, a position that I explore in an essay “Defining Right and Left” included in my 2017 anthology Revisions and Dissents. Scotchie associates the Right (even when he doesn’t use that term) with a strong sense of family and place, a settled authority structure, deep reservations about modernity, and the belief in a fixed human nature.

Scotchie is also intensely loyal to the historic South, which he understands as did one of his subjects Richard Weaver, as a premodern, hierarchical society. Throughout his essays and commentaries, including the ones on literature, it is hard to ignore Scotchie’s revulsion for globalism and uprooted anthropoids.

I was particularly struck in reading his anthology by how, in the last piece in the book, Scotchie eulogizes his recently deceased friend “Mark Royden Winchell, the Last of the Vanderbilt Greats.”[PDF]. Like Joe, I was moved by the early death of this brilliant essayist from Clemson University, who rarely expressed political opinions but whose sensibilities were apparent:

More than ever, Mark sided with the cause of the Old Right and the conservative South. He opposed the Iraq War, and on the pages of The American Conservative, offered up the America First foreign policy of his fellow Ohioan Robert Taft as a proper antidote to endless foreign meddling. Mark was also a member of the League of the South, for which he published an extensive critique of the legacy of Martin Luther King Jr. one that not only focused on King’s plagiarism, adultery, and support for leftist politics, but one that also mourned the passing of the George Washington—Abraham Lincoln America of Mark’s youth. [Links added].

Although I was hardly aware of Mark’s strong political statements until I read this eulogy, produced in 2008, I am delighted to discover that we were all on the same page regarding the Zeitgeist. It is also good to know that Mark came to the defense of the Southern Agrarians against the charge that they were (what else?) racists.

But I am even more pleased that Mark managed in his abbreviated life to expose the multiple shortcomings of that now exemplary conservative saint, Martin Luther King. [Canonizing Martin Luther King, League of The South Institute, via Archive.is, 2005] The cloying tributes to this glaringly flawed Leftist that come each year around January 19 from Heritage Foundation and other outlets of Conservatism, Inc. were particularly oppressive this year. It is gratifying to known that our fallen comrade weighed in against this mendacious hagiography, variously featuring King as a lover of family values, a traditional Christian theologian, and a martyr for conservative causes.

For clarification: I’ve never shared the deep disgust for King felt by my late friend Sam Francis and by other members of the Old Right. I just loathe the transparent lies told about him by phony conservative journalists and foundations. The fact that these contemptible fabrications don’t attract minority support is not at all surprising, given their nonsensical character and given the now fixed political identity of blacks and the white Left.

joescrevolt.jpgAmong Scotchie’s topics and personalities for discussion, another that especially interested me, given my preoccupation with modern European history, is the essay devoted to British statesman Enoch Powell. Scotchie approaches this British Tory opponent of immigration through Simon Heffer’s exhaustive biography, Like the Roman: The Life of Enoch Powell, which was published in 1999. Despite his lustrous careers as a classics professor, British officer during World War Two, and member of the Tory shadow cabinet in the late 1960s, Powell fell from grace after delivering what is misleadingly called the “Rivers of Blood” speech against unchecked immigration in 1968. The most offending line from that speech, about “the Tiber River foaming with much blood,” was drawn from Virgil’s Aeneid—a Latin epic that Powell had no doubt taught during his years as a classics professor in Sydney, Australia. Immediately after giving this oration, Powell was dropped by Tory leader Edward Heath from the shadow cabinet. Misnamed Conservatives then alternated with the Labourites in denouncing this moving target as a xenophobe.

Powell, one of the most learned and intelligent Englishman to enter national politics in the twentieth century, was destroyed socially and professionally (although VDARE.com Editor Peter Brimelow argues he in fact came much closer to returning as Tory leader than is generally realized) for expressing views on immigration that in 1954 his mentor Winston Churchill had stated far more boldly. [What Churchill said about Britain’s immigrants, by David Smith, Guardian, August 4, 2007] By the late 1960s the political pendulum on immigration and other social questions was moving rapidly Leftward; and so even slightly right-of-center celebrities were being hammered by the Leftward-moving media for stating what had been previously unexceptional views.

Scotchie notes in praising this fallen victim of PC:

Powellism lives, but not in England. Meanwhile the civilization he loved and honored may yet survive, but throughout Western Europe and North America, it is more imperiled than ever.

This judgment may be overly sanguine.

Paul Gottfried [email him] is a retired Professor of Humanities at Elizabethtown College, PA. He is the author of After Liberalism, Multiculturalism and the Politics of Guilt and The Strange Death of Marxism His most recent book is Leo Strauss and the Conservative Movement in America.

La désintégration?...

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La désintégration ?...
 
par Maxime Tandonnet
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré à l'assassinat islamiste de Conflans vu comme un symptome de la désintégration accélérée de notre pays. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l’Élysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

La désintégration

La décapitation d’un professeur d’histoire à Conflans n’est que dans la continuité d’une longue série d’attentats en cours depuis 2012. M. Paty est la 263e victime de l’islamisme. La vague se poursuit, inexorablement. Ceux qui n’ont pas la mémoire courte le savent. A chaque fois, les réactions de la société politico-médiatique française sont strictement identiques: hystérie de quelques jours, indignation furibonde, hommages solennels, marches blanches, bouquets de fleurs, grandiloquence, coups de menton, annonces spectaculaires, toujours les mêmes, expulsions, fermetures , interdictions, etc. Et toujours le même discours: « Cette fois, plus jamais pareil! » Mais rien n’y fait, la tragédie continue.

Essayer de prendre de la hauteur, de resituer la vague sanguinaire dans son contexte historique. La France est sur la pente d’une désintégration accélérée. Les fanfaronnades de ses dirigeants, de gouvernement en gouvernement, ne doivent leurrer personne. L’Etat est débordé par la violence qui se déchaîne partout. Les flux migratoires en hausse fulgurante (asile, titres de séjour) échappent à son contrôle. Le territoire se morcelle en enclaves étrangères et se hérisse de frontières intérieures. L’école au centre de la tragédie, confrontée au chaos, n’assure plus correctement la transmission du savoir et de l’intelligence, produisant une génération en déshérence. La nature ayant horreur du vide, l’idéologie islamiste s’engouffre dans l’espace laissé vacant par la culture française. L’explosion de la dette publique (120% du PIB), est la mesure de l’impéritie et de l’incapacité des gestionnaires de la chose publique. Les principes et les repères de la nation achèvent de voler en éclat, tels que la solidarité nationale (avec 9 millions de pauvres). Amalgame? Non, tout ceci procède d’une même faillite de long terme.

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La France, au prise d’une vertigineuse poussée de l’inculture et de la bêtise, est privée de boussole, à l’image d’un bateau ivre: où est le bien, où est le mal? Les déclarations de ses plus hauts dirigeants prônent le haine de soi, la culpabilité et la repentance. La suppression emblématique de la figure paternelle à travers la « PMA sans père » n’est pas le moindre aspect de cette œuvre de destruction des repères. Les scandales, l’arrogance et le mépris du peuple sont au cœur de la décomposition. Bref, la France se désagrège, se dissout dans la médiocrité, prend l’eau de toute part et le meurtre horrible de M. Paty n’est qu’une étape supplémentaire dans ce désastre.  Aucune gesticulation, aucune pitrerie ne doit entretenir l’illusion. Remède miracle? Il n’en existe que pour les imbéciles. C’est au prix d’un changement radical de perspective et d’un effort de plusieurs décennies, peut-être de plusieurs générations, qu’un début de redressement est envisageable. Il passe à la base, par une prise de conscience, un retour à l’intelligence collective, mais nous en sommes bien loin et la pente tragique se poursuit.

Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 20 octobre 2020)

lundi, 26 octobre 2020

Hommage à Henry Corbin - Clavis hermeneutica

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Hommage à Henry Corbin

Clavis hermeneutica  

par Luc-Olivier d'Algange 

La philosophie est cheminement, ou plus exactement, comme le disait Heidegger, « acheminement vers la parole ». Ce qui est dit porte en soi un long parcours, une pérégrination, à la fois historique et spirituelle. Avant de parvenir à l'oreille de celui à qui elle s'adresse, la parole humaine accomplit un voyage qui la conduit des sources du Logos jusqu'à l'entendement humain. Ce voyage, à maints égards, ressemble à une Odyssée. Dans l'éclaircie de la présence de la chose dite frémissent des clartés immémoriales, des songes et des visions. Toute spéculation philosophique témoigne, en son miroitement étymologique, d'une vision qui n'appartient ni entièrement au monde sensible, ni entièrement au monde intelligible, mais participe de l'un et de l'autre en les unissant, selon la formule de Platon, « par des gradations infinies ». L’idée est à la fois la « chose vue », l’Idea au sens grec, la forme, et la « cause » qui nous donne à voir. De même que la parole ne se situe ni exactement dans la bouche de celui qui parle ni exactement dans l'oreille de celui qui entend, mais entre eux,  le monde imaginal, qui sera au principe de l'herméneutique corbinienne, se situe entre l'Intelligible et le sensible, donnant ainsi accès à la fois à l'un et à l'autre et favorisant ainsi l'étude historique la mieux étayée non moins que l'interprétation spirituelle la plus précise.

         unnamedHCisl.jpgOn pourrait, par analogie, transposer ce qu'à propos de Mallarmé, Charles Mauron nomma le « symbolisme du drame solaire ». De l'Occident extrême, crépusculaire, de Sein und Zeit, de la méditation allemande du déclin de l'Occident, une pérégrination débute, qui conduit, à travers l'œuvre-au-noir et la mise-en-demeure de « l’être pour la mort » à l'aurora consurgens de la « renaissance immortalisante ». Point de rupture, ni de renversement, ici, mais un patient approfondissement de la question. Le crépuscule inquiétant des poèmes de Trakl, la « lumière noire » de la foudre d'Apollon des poèmes d'Hölderlin, ne contredisent point mais annoncent l'âme d'azur, « dis-cédée », et la terre céleste dans le resplendissement du Logos. Le crépuscule détient le secret de l'aurore, l'extrême Occident tient, dans son déclin, le secret de la sagesse orientale. Au philosophe, pour qui, je cite, « les variations linguistiques ne sont que des incidents de parcours, ne signalent que des variantes topographiques d'importance secondaires », l'art de l'interprétation sera une attention matutinale. A l'orée des signes, entre le jour et la nuit, sur la lisière impondérable, il n'est pas impossible que le secret de l'aube et le secret du crépuscule, le secret de l'Occident et le secret de l'Orient soient un seul un même secret. L'attention herméneutique guette cet instant où le Sens s'empourpre comme l'Archange dont parle le Traité de Sohravardî.

         Cet Archange  empourpré, dont une aile est blanche et l'autre noire, dont l'envol repose à la fois sur le jour et sur la nuit, est le Sens lui-même qui se refuse à l'exclusive ou à la division. Opposer l'Orient et l'Occident, ce serait ainsi refuser le drame solaire du Logos lui-même, découronner le Logos, le réduire à n'être qu'une monnaie d'échange, un or irradié, dont la valeur est attribuée, utilitaire au lieu d'être un or irradiant, donateur et philosophal, forgé dans l'œuvre-au-rouge de l'herméneutique. Tout homme habitué au patient compagnonnage avec des textes lointains ou difficiles connaît ce moment de l'éclaircie, où le Sens s'exhausse de sa gangue, où les signes s'irisent, où l'exil devient la fine pointe des retrouvailles. Après avoir affronté les tempêtes et le silence des vents, l'excès du mouvement comme l'excès de l'immobilité, la houle et la désespérance du navire encalminé, après avoir déjoué les ruses de Calypso, les asiles fallacieux, et la nuit et le jour également aveuglants, l'odyssée herméneutique entrevoit le retour à la question d'origine, enfin déployée comme une voile heureuse. L'acheminement se distingue du simple cheminement. L'herméneute s'achemine vers: il ne vagabonde point, il pèlerine vers le secret de la question qu'il se pose au commencement. Il ne fuit point, ne s'éloigne point, mais s'approche au plus près du Dire dans la chose dite, de l'essence même du Logos qui parle à travers lui.

         imagesHCisliran.jpgToute herméneutique est donc odysséenne, par provenance et destination. Elle l'est par provenance, comme en témoigne le catalogue des œuvres détruites par le feu de la bibliothèque d'Alexandrie dont une grande part fut consacrée à la méditation du « logos intérieur » (selon la formule du Philon d'Alexandrie) de l'Odyssée, et dont quelques fragments nous demeurent, tel que L'Antre des Nymphes de Porphyre. L'Orient, comme l'Occident demeure spolié de cet héritage de l'herméneutique alexandrine où s'opéra la fécondation mutuelle du Logos grec et de la sagesse hébraïque. L'herméneutique est odysséenne par destination en ce qu'elle ne cesse de vouloir retrouver dans l'oméga, le sens de l'alpha initial. Pour l'herméneute, l'horizon du voyage est le retour. La ligne ultime, celle de l'horizon, comme « l'heure treizième » du sonnet de Gérard de Nerval, est aussi et toujours la première ligne de ce livre originel que figurent les rouleaux de la mer. L'herméneute, pour s'avancer sur les abysses, dont les couleurs assombries sont elles-mêmes l'interprétation de la lumière du ciel, pour s'orienter dans les étendues qui lui paraissent infinies, ne dispose que du sextant de son entendement qu'il sait faillible, dont il sait qu'il n'est qu'un instrument,- ce qui lui épargnera l'hybris de la raison qui omet de s'interroger sur elle-même et les errances du discours subjectif qui perd de vue l'alpha et l'oméga et restreint le sens dans l'aléatoire, l'éphémère et l'accidentel.

         Ainsi devons-nous à Henry Corbin, non seulement la lumière faite sur des pans méconnus des cultures orientales et occidentales mais aussi le recouvrance de l'Art herméneutique à sa fine pointe, qui au-delà de l'exposition et de l'explication, serait une nouvelle implication du lecteur dans l'écrit qui se déroule sous ses yeux. Loin de considérer les œuvres de Mollâ Sadrâ ou de Ruzbéhan de Shîraz comme des objets culturels, délimités par l'histoire et la géographie, et dont nous séparerait à jamais la doxa de notre temps, Henry Corbin nous restitue à elles, à notre possibilité de les comprendre (dont dépend la possibilité de nous comprendre nous-mêmes), à cette implication, plus pointue que toute explication, à cette gnosis qui, je cite « convertit en jour cette nuit qui pourtant est toujours là, mais qui est une nuit de lumière ». «  Ainsi donc, écrit Henry Corbin, lorsqu'il nous arrive de mettre en épigraphe les mots Ex oriente lux, nous nous tromperions du tout au tout en croyant dire la même chose que les Spirituels dont il sera question ici, si, pour guetter cette lumière de l'Orient, nous nous contentions de nous tourner vers l'orient géographique. Car, lorsque nous parlons du Soleil se levant à l'orient, cela réfère à la lumière du jour qui succède à la nuit. Le jour alterne avec la nuit, comme alternent deux contrastes qui, par essence, ne peuvent coexister. Lumière se levant à l'orient, et lumière déclinant à l'occident: deux prémonitions d'une option existentielle entre le monde du Jour et ses normes et le monde de la nuit, avec sa passion profonde et inassouvissable. Tout au plus, à leur limite, un double crépuscule: crepusculum vesperinum qui n'est plus le jour et qui n'est pas encore la nuit; crepusculum matutinum qui n'est plus la nuit et n'est pas encore le jour. C'est par cette image saisissante, on le sait, que Luther définissait l'être de l'homme ».

         couv-corbin-jung.jpgDans ce crépuscule matutinal, auquel Baudelaire consacra un poème,  dans cette lumière transversale, rasante, où le ciel semble plus proche de la terre, tout signe devient sacramentum, c'est-à-dire signe d'une chose cachée. L'oméga du crépuscule vespéral ouvre la mémoire à l'anamnésis du crépuscule matutinal. Par l'interprétation du « signe caché », du sacramentum, l'herméneute récitera, mais en sens inverse, le voyage de l'incarnation de l'esprit dans la matière, semblable, je cite « à la Columna gloriae constituée de toutes les parcelles de Lumière remontant de l'infernum à la terre de lumière, la Terra lucida ».

         Matutinale est la pensée de l'implication dont l'interprétation est semblable à une procession liturgique, à une trans-ascendance vers la nuit lumineuse des Symboles. Voir les signes du monde et le monde des signes à la lumière de l'Ange suppose cette conquête du « suprasensible concret » qui n'appartient ni au monde matériel ni au monde de l'abstraction, mais à la présence même, qui selon la formule Héraclite, traduite par Battistini, « ne voile point, ne dévoile point, mais fait signe ». Or, si tout signe est signe d'éternité, la chance prodigieuse nous est offerte de lire les œuvres non plus au passé, comme s'y emploient les historiographies profanes et les fondamentalismes, mais bien au présent, à la lumière matutinale de l'Ange de la présence, témoin céleste de l'avènement herméneutique qui, souligne Henry Corbin, « implique justement la rupture avec le collectif, le rejonction avec la dimension transcendante qui prémunit individuellement la personne contre les sollicitations du collectif, c'est-à-dire contre toute socialisation du spirituel ».

         L'implication de l'herméneute dans le déchiffrement des signes, le monde lui-même apparaissant, selon l'expression de Hugues de Saint-Victor, comme « la grammaire de Dieu », dévoile ainsi la vérité matutinale de l'Orient, en tant que « pôle de l'être », centre métaphysique, d'où l'Archange Logos nous invite à la transfiguration de l'entendement, à la conquête d'une surconscience délivrée des logiques grégaires, des infantilismes et des bestialités de ce que Simone Weil, après Platon, nomma « le Gros Animal », autrement dit, le monde social réduit à lui-même. « Le jour de la conscience, écrit Henry Corbin, forme un entre-deux entre la nuit lumineuse de la surconscience et la nuit ténébreuse de l'inconscience ». La psychologie transcendantale, dont Novalis, dans son Encyclopédie, déplorait l'inexistence ou la disparition, Henry Corbin en retrouvera non seulement les traces, mais la connaissance admirablement déployée dans la « Science de la Balance » et les théories chromatiques des soufis qui décrivent exactement l'espace versicolore entre la nuit ténébreuse et la nuit lumineuse, entre l'inconscience et la surconscience. L'intérêt de l'étude de cette psychologie transcendantale dépasse, et de fort loin, l'histoire des idées; elle se laisse si peu lire au passé, elle devance si largement nos actuels savoirs psychologiques que l'on doit imputer sans doute à une déplorable imperméabilité des disciplines qu'elle n'eût point encore renouvelé de fond en comble ces « sciences humaines » qui se revendiquent aujourd'hui de la psychologie ou de la psychanalyse, et semblent encore tributaires, à maint égards, du positivisme du dix-neuvième siècle.

         51Z4ITUBStL._SX195_.jpgSans doute le moment est-il venu de ressaisir aussi l'œuvre de Henry Corbin dans cette vertu transdisciplinaire, qui fut d'ailleurs de tous temps le propre de toutes les grandes œuvres philosophiques, à commencer par celle de Sohravardî qui, dans son traité de la Sagesse orientale, résume toutes les sciences de son temps, à l'intersection des sagesses grecques, abrahamiques, zoroastriennes et védantiques.

         De l'herméneutique heideggérienne, dont il fut un des premiers traducteur, jusqu'à cette phénoménologie de l'Esprit gnostique, que sont les magistrales études sur l'imagination créatrice dans le soufisme d'Ibn’Arabî,  Henry Corbin renoue avec la lignée des philosophes qui ne limitent point leur dessein à méditer sur l'essence ou la légitimité de la philosophie, mais œuvrent, à l'exemple de Leibniz ou de Pascal, à partir d'un savoir, d'un corpus de connaissances, qu'ils portent au jour et qui, sans eux fût demeuré voilé, méconnu ou hors d'atteinte. L'acheminement, à travers les disciplines diverses qu'il éclaire, rétablit l'usage d'une gnose polyglotte et transdisciplinaire qui s'affranchit des assignations ordinaires du spécialiste. Au voyage extérieur, historique et géographique, correspond un voyage intérieur vers la Jérusalem Céleste, pour autant que ces deux personnage: le Chevalier de la célèbre gravure de Dürer, chère à Gilbert Durand, qui s'achemine vers le Jérusalem Céleste, entre la Mort et le Diable, et Ulysse sont les deux versants, l'un grec et l'autre abrahamique, de l'aventure herméneutique.

         Mais revenons, faisons retour sur le principe même de l'acheminement, à partir d'une phrase lumineuse d'Eugenio d'Ors qui écrivait, je cite «  Tout ce qui n'est pas tradition est plagiat ».  L'herméneute participe de la tradition en ce qu'il suppose possible la traduction, en ce qu'il ne croit point en la nature arbitraire, immanente et close des langues humaines. Traduire, suppose à l'évidence, que l'on ne récuse point l'existence du Sens. Hamann, dans sa Rhapsodie en prose Kabbalistique, éclaire le processus herméneutique même de la traduction: « Parler, c'est traduire d'une langue angélique en une langue humaine, c'est-à-dire des pensées en des mots, des choses en des noms, des images en des signes ».  Ce qui, dans les œuvres se donne à traduire est déjà, à l'origine, la traduction d'une langue angélique. L'office du traducteur-herméneute consistera alors à faire, selon la formule phénoménologique, « acte de présence » à ce dont le texte qu'il se propose de traduire est lui-même la traduction. Les théologiens médiévaux nommaient cette « présence » en amont, la vox cordis, la voix du cœur.

         imageshcgb.jpgLoin de délaisser l'herméneutique heideggérienne et la phénoménologie occidentale, Henry Corbin en accomplit ainsi les possibles en de nouvelles palingénésies. A lire « au présent » les œuvres du passé, l'herméneute révèle le futur voilé inaccompli dans « l'Ayant-été ». « L'être-là, le dasein, écrit Henry Corbin, c'est essentiellement faire acte de présence, acte de cette présence par laquelle et pour laquelle se dévoile le sens au présent, cette présence sans laquelle quelque chose comme un sens au présent ne serait jamais dévoilé. La modalité de cette présence est bien alors d'être révélante, mais de telle sorte qu'en révélant le sens, c'est elle-même qui se révèle, elle-même qui est révélée ». L'implication essentielle de cette lecture au présent, qui révèle ce que le passé recèle d'avenir, fonde, nous dit Corbin, « le lien indissoluble, entre modi intellegendi et modi essendi, entre modes de comprendre et modes d'être ». Le dévoilement de ce qui est caché, c'est-à-dire de la vérité du Sens n'est possible que par cet acte de présence herméneutique qui, selon la formule soufie « reconduit la chose à sa source, à son archétype ». « Cet acte de présence, nous dit Henry Corbin, consiste à ouvrir, à faire éclore l'avenir que recèle le soi-disant passé dépassé. C'est le voir en avant de soi. ». A cet égard l'œuvre de Henry Corbin, bien plus que celle de Sartre ou de Derrida, qui usèrent à leur façon des approches de Sein und Zeit, semble véritablement répondre à la mise-en-demeure de la question heideggérienne, voire à la dépasser dans l'élan de son mouvement même.

         Ainsi de la notion fondamentale d'historialité (qu'Heidegger distingue de l'historicité en laquelle nous nous laissons insérer, nous interdisant par là même l'acte de présence phénoménologique) que Henry Corbin couronnera de la notion de hiéro-histoire: « histoire sacrale, laquelle ne vise nullement les fait extérieurs d'une "histoire sainte", d'une histoire du salut mais quelque chose de plus originel, à savoir l'ésotérique caché sous le phénomène de l'apparence littérale, celle des récits des Livres saints. » Si l'historialité permet de se déprendre des sommaires logiques déterministes, « en nous arrachant à l'historicité de l'Histoire », aux logiques purement discursives et chronologiques qui enferment les pensées dans leurs « contextes » sociologiques, la hiéro-histoire, elle, « nous apprend qu'il y a des filiations plus essentielles et plus vraies que les filiations historiques. » Non seulement les disparités linguistiques ou sociologiques ne nous interdisent pas de comprendre les œuvres du passé, mais, nous détachant des contingences de la chose dite, des écorces mortes, elles révèlent la vox cordis, la présence en acte, la vérité des filiations essentielles. L'empreinte visible détient le secret du sceau invisible et « la vieille image héraldique qui parlait en figures » dont parle Ernst Jünger dans La Visite à Godenholm, se révèle sous l'acception acquise des mots à celui interroge leur étymologie. Hamann, dans sa lumineuse « Rhapsodie » ne dit rien d'autre: « La poésie est la langue maternelle de l'humanité », de même que les alchimistes et des théosophes de l'Occident, les philosophes de la nature, les paracelsiens qui s'acheminent vers le déchiffrement des « signatures » de l'Invisible dans le visible et perçoivent la lumière révélante dans les éclats de la lumière révélée. 

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Le propre de cette langue, « qui parle en image », de cette langue prophétique et poétique sera, en dévoilant ce qui est caché, en laissant éclore et fleurir la lumière révélante, en élevant l'œcuménisme des branches et des racines jusqu'à la temporalité subtile de l'œcuménisme des essences et des parfums, de nous délivrer de la causalité historique,  de transfigurer notre entendement, de l'ouvrir en corolle aux « Lumières seigneuriales » dont les lumières visibles et sensibles ne sont que les épiphénomènes ou les ombres. Lux umbra dei, disent les théologiens médiévaux: « La lumière est l'ombre de Dieu ». L'histoire n'est que l'ombre projetée dans les apparences de la hiéro-histoire. D'où, chez le gnostique, comme chez l'herméneute-phénoménologue, le nécessaire renversement de la métaphore.

         Ce ne sont point l'Idée ou le Symbole qui sont métaphores de la nature ou de l'histoire, mais la nature et l'histoire qui sont une métaphore de l'Idée ou du Symbole. Ainsi, les interprétations allégoriques ou evhéméristes tombent d'elles-mêmes. Ce ne sont point les Symboles qui empruntent à la nature, ni les Mythes qui empruntent à l'histoire mais la nature et l'histoire qui en sont les reflets ou les réverbérations. Etre présent aux êtres et aux choses, c'est percevoir en eux l'éclat de la souveraineté divine dont ils procèdent. Le renversement de la métaphore dépasse la connaissance formelle, qui présume une représentation, pour atteindre à ce que les Ishrâqîyûns, les platoniciens de Perse, nomment une « connaissance présentielle ». Dès lors, les êtres et les choses ne sont plus des objets mais des présences. A « l'être pour la mort », qui fut pour un certain existentialisme, l'horizon indépassable de la pensée heideggérienne, et à la « laïcisation du Verbe » qui lui correspond (avec toutes les abusives et monstrueuses sacralisations de l'immanence qui s'ensuivirent), Henry Corbin répond par « l'être par-delà la mort » que dévoile « l'ek-stasis herméneutique » vers, je cite  « ces autres mondes invisibles qui donnent son sens vrai au nôtre, à notre phénomène du monde. »  Loin de débuter avec Sein und Zeit, comme sembleraient presque le croire quelques fondamentalistes heideggériens, la distinction classique entre l'Etre et l'étant (fut-il « Etant Suprême ») est précisément à l'origine de la méditation sur le tawhîd, sur « l'Attestation de l'Unique », qui est au cœur de la pensée d'Ibn’Arabî et de Sohravardî. Tout l'effort de ces gnostiques consiste à nous donner penser la distinction entre l'Unité théologique, exotérique, en tant que Ens supremum et l'Unificence ésotérique qui témoigne d'une ontologie de l'unité transcendantale de l'Etre. Nulle trace, ici, d'un « quiproquo onto-théologique », nul syncrétisme ou mélange malvenu. Pour reprendre la distinction platonicienne, la « doxa » ne confond pas avec la « gnosis ». Si la croyance s'adresse à un Dieu personnel ou à un Etant suprême, la gnose s'ordonne à la phrase ultime et oblative de Hallâj: « Le bon compte de l'Unique est que l'Unique le fasse unique », autrement dit, en langage eckhartien: « Le regard par lequel je vois Dieu et le regard par lequel Dieu me voit sont un seul et même regard. »

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La Tradition, au sens d'art herméneutique de la traduction, Sapience de la « réelle présence », comme eût dit Georges Steiner, implication du « comprendre » dans l'être, est donc bien comme le suggère Eugenio d'Ors, recommencement, c'est-à-dire le contraire du plagiat ou du psittacisme. Ce qui est traduit recouvre son sens dans la traduction. Lorsque la traduction se prolonge en herméneutique, cette recouvrance est révélation. De même que les textes grecs nous sont parvenus par l'ambassade de la langue arabe, la traduction en français des textes persans et arabe de Sohravardî s'offre à nous comme un recommencement, une recouvrance, de la pensée grecque, aristotélicienne et platonicienne. L'œuvre de Henry Corbin s'inscrit ainsi dans une tradition et son art diplomatique, sinon par des circonstances contingentes, ne diffère pas essentiellement, des commentaires de ses prédécesseurs iraniens. Dans son mouvement odysséen, l'herméneutique, fut-elle le « commentaire d'un commentaire », ne s'éloigne point de la source du sens, mais s'en rapproche. Ainsi qu'Heidegger le disait à propos d'Hölderlin, certaines œuvres demeurent « en réserve »; et c'est bien à partir de cette « réserve », qui est le fret du navigateur, que s'accomplissent les renaissances, y compris artistiques. Point de Renaissance florentine, par exemple, sans le retour au texte, sans la volte néoplatonicienne de Pic de la Mirandole, de Marsile Ficin, ou celle kabbalistique et hébraïsante, du Cardinal Egide de Viterbe. La cause est entendue, ou devrait l'être depuis Saint-Bernard: « Nous sommes des nains assis sur les épaules des géants ». Non seulement les textes anciens ne nous sont pas devenus étrangers, incompréhensibles, inutiles, comme nous le veulent faire croire ces plagiaires qui s'intitulent parfois « progressistes », mais nos ombres qui nous devancent ne bougent que par la clarté antérieure qu'ils jettent sur nous. Traducteur, homme de Tradition, au sens étymologique, l'herméneute, ravive un lignage spirituel dont l'ultime manifestation, aussi obscurcie et profanée qu'elle soit, récapitule, pour qui sait se rendre attentif, l'entière lignée dont elle est l'aboutissement mais non la fin.

        51zAarfF8zL._SX311_BO1,204,203,200_.jpg Les ultimes sections d'En Islam iranien portent ainsi sur la notion de chevalerie spirituelle et de lignage spirituel. Ce lignage toutefois n'implique nulle archéolâtrie, nulle vénération fallacieuse des « origines ». Il n'est point tourné vers le passé, et sa redite, il n'est récapitulation morne ou cortège funèbre, mais renouvellement du Sens, fine pointe phénoménologique obéissant à l'impératif grec: sôzeïn ta phaïmomenon, sauver les phénomènes. « Ce qu'une philosophie comparée doit atteindre, écrit Henry Corbin, dans les différents secteurs d'un champ de comparaison défini, c'est avant tout ce que l'on appelle en allemand Wesenschau, la perception intuitive d'une essence ». Or cette perception intuitive dépend, non plus d'une nostalgie mais d'une attente eschatologique qui, nous dit Corbin « est enracinée au plus profond de nos consciences ». L'archéon de l'archéologie, ne suffit pas à la reconquête de l'eschaton de l'eschatologie. La transmutation du temps du ressouvenir en temps du pressentiment suppose que nous surmontions « la grande infirmité de la pensée moderne » qui est l'emprisonnement dans l'Histoire et que nous retrouvions l'accès à notre temps propre. « Un philosophe, écrit Henry Corbin, est d'abord lui-même son temps propre car s'il est vraiment un philosophe, il domine ce qu'il est abusivement convenu d'appeler son temps, alors que ce temps n'est pas du tout le sien, puisqu'il est le temps anonyme de tout le monde. »

          A se délivrer du temps anonyme, autrement dit de la temporalité grégaire, propre au « Gros Animal », l'herméneute, je cite, « s'insurge contre la prétention de réduire la notion d'événement aux événements de ce monde, perceptibles par la voie empirique, constatables par tout un chacun, enregistrés dans les archives. » A cette conception de l'homme à l'intérieur de l'histoire, s'opposera, écrit Henry Corbin « une conception fondamentale, sans laquelle celle de l'histoire extérieure est privée de tout fondement. Elle considère que c'est l'histoire qui est dans l'homme ». Ces événements intérieurs, supra historiques, sans lesquels il n'y aurait point d'événements extérieurs, ces visions, intuitions ou extases qui nous font passer du monde des phénomènes à celui des noumènes sont à la fois le fruit de la grâce et d'une décision résolue. Dans sa temporalité propre reconquise Ruzbéhân de Shîraz écrit: « Il m'arriva quelque chose de semblable aux lueurs du ressouvenir et aux brusques aperçus qui s'ouvrent à la méditation. »

         Ce quelque chose qui arrive, ou, plus exactement qui advient, qui n'appartient ni à la subjectivité ni à la perception empirique, n'arrive toutefois pas à n'importe qui et ne peut être jugée, ou contredit par n'importe qui. Ce que voient les yeux de feu ne saurait être contesté par les yeux de chair. « Que valent en effet, écrit Henry Corbin, les critiques adressées à ceux qui ont vus eux-mêmes, donc aux témoins oculaires, par ceux qui n'ont jamais vu et ne verront jamais rien ? La position est intrépide, je le sais, mais je crois que la situation de nos jours est telle que le philosophe, conscient de sa responsabilité, doit faire sienne cette intrépidité sohravardienne. » L'événement intérieur porte en lui le principe de la recouvrance d'une temporalité délivrée des normes profanes et de ces formes de socialisation extrême où se fourvoient les fondamentalismes religieux ou profanes. Ces événements hiérologiques dévoilent à l'intrépide, c'est-à-dire au chevalier spirituel,  ce qui caché dans ce qui se révèle en frappant d'inconsistance le hiatus chronologique qui nous en sépare. Ce caché-révélé, qui réconcilie Héraclite et Platon, nous indique que l'Idée est à la fois immanente et transcendante. Elle est immanente, par les formes perceptibles qu'elle donne aux choses mais transcendante car, selon la belle formule platonisante d'André Fraigneau, « sans jeunesse antérieure et sans vieillesse possible ».

         41C92PF457L._SX210_.jpgCe paradoxe, que la philosophe platonicienne résout sous le terme de methexis, c'est-à-dire de « participation », précède un autre paradoxe. Les Platoniciens de Perse parlent en effet des Idées comme de natures ou de substances « missionnées » ou « envoyées ». Cet impérissable que sont les Idées n'est point figé dans un ciel immuable, mais nous est envoyé dans une perspective eschatologique, dans la profondeur du temps qui doit advenir. Dans le creuset de la pensée des Platoniciens de Perse, la fusion des Idées platoniciennes, des archanges zoroastriens, des Puissances divines (Dynameis) de Philon d'Alexandrie s'accomplit bien dans et par un feu prophétique. Les Lumières des Idées archétypes, comparables aux séphiroth de la kabbale hébraïque, ne demeurent point dans leur lointain: elles ont pour mission de nous faire advenir au saisissement de leur splendeur, elles nous sont « envoyées » pour que nous puissions établir un pont entre l'archéon et l'eschaton, entre ce que nous dévoile l'anamnésis et ce qui demeure caché dans les fins dernières. La Tradition à laquelle se réfère la chevalerie spirituelle n'a d'autre sens: elle est cette tension, dans la présence même de l'expérience intérieure, d'une relation entre ce qui n'est plus et ce qui n'est pas encore. Cette Tradition n'est point commémorative ou muséologique mais éveil du plus lointain dans la présence, fraîcheur castalienne, élévation verdoyante du Sens, semblable à l'Arbre qui, dans l'Ile Verte domine le temple de l'Imâm Caché.

         L'intrépidité sohravardienne qu'évoque Henry Corbin et qu'il fit sienne, cette vertu d'areté, qui est à la fois homérique et évangélique, donne seule accès à ce qu’il nomme, à partir de l'œuvre de Mollâ Sadrâ, « la métaphysique existentielle » des palingénésies et des métamorphoses que supposent le processus initiatique et la tension eschatologique: « L'acte d'exister, écrit Henry Corbin est en effet capable d'une multitude de degrés d'intensification ou de dégradation. Pour la métaphysique des essences, le  statut de l'homme, par exemple, ou le statut du corps sont constant. Pour la métaphysique existentielle de Mollâ Sadrâ, être homme comporte une multitude de degrés, depuis celui des démons à face humaine jusqu'à l'état sublime de l'Homme Parfait. Ce qu'on appelle le corps passe par une multitude d'états, depuis celui du corps périssable de ce monde jusqu'à l'état du corps subtil, voire du corps divin. Chaque fois ces exaltations dépendent de l'intensification ou de l'atténuation, de la dégradation de l'existence, de l'acte d'exister ». Ce champ de variation, cette « latitude des formes » est au principe même de l'expérience intérieure, des événements du monde imaginal. Leur histoire est l'histoire sacrée de la temporalité propre du chevalier spirituel, le signe de son intrépidité à reconnaître dans les apparences la figure héraldique dont elles procèdent par la précision des lignes et l'intensité des couleurs. L'herméneutique tient ainsi à une métaphysique de l'attention et de l'intensité. La tension de l'attente eschatologique favorise l'intensité de l'attention. A l'opposé de cette tension, l'inattention à autrui, au monde et à soi-même est atténuation et dégradation de l'acte d'exister, par le mépris, l'indifférence, l'insensibilité, la complaisance dans l'illusion ou l'erreur, la vénération du confus ou de l'informe, qui engendrent les pires conformismes.

         L-ame-de-l-Iran.jpgL'areté de l'herméneute, l'intrépidité chevaleresque précisent ainsi une éthique, c'est-à-dire une notion du Bien, indissociable du Vrai et du Beau qui s'exerce par l'attente et l'attention, en nous faisant hôtes, au double sens du mot: recevoir et être reçu. Si le voyage chevaleresque entre l'Orient et l'Occident définit une géographie sacrée avec ses épicentres, ses sites de haute intensité spirituelle, ses « cités emblématiques » où la Vision advint, où s'opéra la jonction entre le sensible et l'Intelligible, c'est bien parce qu'il se situe dans l'attente et dans l'attention, dans l'accroissement de la latitude des formes, et non dans la soumission aux opinions, aux jugements collectifs, fussent-ils de prétention religieuse. Que des temples eussent été édifiés à l'endroit où des errants, des déracinés, ont vu la terre et le Ciel s'accorder, que, de la sorte, l'espace et la géographie sacrée fussent déterminés par les révélations, les extases des « Nobles Voyageurs », cela suffirait à montrer que le mouvement, le tradere, la pérégrination précède les certitudes établies. D'où l'importance de la distinction, maintes fois réaffirmée par Henry Corbin et les auteurs dont il traite, entre la vérité ésotérique, intérieure, et l'exotérisme dominateur, qui veut emprisonner la spéculation et la vision dans l'immobilité d'une légalité outrecuidante et ratiocinante.

         Ainsi, la notion de chevalerie spirituelle, que Henry Corbin définit comme un compagnonnage avec l'Ange, se donne à comprendre comme l'acheminement de la philosophie vers la métaphysique, c'est-à-dire vers son origine, sa source désempierrée. Loin d'être une philosophie plus abstraite que la philosophie, la métaphysique de la « latitude des formes » se distingue, comme le souligne Jean Brun par une relation concrète à des hommes concrets: « L'homme qui prétend atteindre une connaissance directe de Dieu par la nature ou par l'histoire se divinise et ne rend, en effet, témoignage que de lui-même. » Si la philosophie forge la clavis herméneutica, la métaphysique ouvre la porte qui nous porte au-delà du seuil. « Un mot simple comme l'être, écrit Jünger, a des profondeurs plus grandes qu'on ne saurait l'exprimer, ni même le penser. Par un mot comme sésame, l'un entend une poignée de graines oléagineuses, alors que l'autre, en le prononçant, ouvre d'un coup la porte d'une caverne aux trésors. Celui-ci possède la clef. Il a dérobé au pivert le secret de faire s'ouvrir la balsamine. » La clef n'est point la porte et la porte n'est point l'espace inconnu qu'elle ouvre à celui qui la franchit. Toutefois, ainsi que le souligne Jünger, « ce sont les grandes transitions que l'on remarque le moins. » 

         On ne saurait ainsi nier, que, par la vertu de l'art odysséen de l'herméneutique, une sorte de translation essentielle soit possible entre la philosophie et la métaphysique. Si la vérité ne se réduit pas à la cohérence des propositions logiques, si elle est bien aléthéia, dévoilement et ressouvenir, c'est-à-dire expérience intérieure où l'homme en tant qu'être du lointain s'éveille à la « coprésence », la conversion du regard qui change la philosophie en métaphysique, les yeux de chair en yeux de feu, échappe à toute contrôle, à toute vérification, voire à toute législation. De ce voyage intérieur, le grand soufi Djalal-ûd-din Rûmi put dire: «  Ceci n'est pas l'ascension de l'homme jusqu'à la lune mais l'ascension de la canne à sucre jusqu'au sucre. » Le savoir ne devient Sapience, la philosophie ne devient métaphysique que par l'épreuve de la saveur, de l'essentielle intimité du voyage intérieur. S'adressant à nous, c'est-à-dire à ces êtres du lointain que nous étions pour lui, dans la coprésence du ressouvenir et de l'attente, Sohravardî nous dit « Toi-même tu es l'un des bruissements des ailes de Gabriel ». L'embarcation herméneutique est la clef de la mer et du ciel, le vaisseau subtil alchimique de l'interprétation infinie nous invite au dialogue où la lumière matérielle, sensible, devient la lux perpétua de la philosophie illuminative, autrement dit de la métaphysique. Ce que le ciel et la mer ont à se dire, en assombrissements et en splendeurs, nous invite à nous retrouver nous- mêmes. « Nous sommes un dialogue, écrit Heidegger, dans ses Approches de Hölderlin, l'unité du dialogue consiste en ce que chaque fois, dans la parole essentielle soit révélé l'Un et même sur lequel nous nous unissons, en raison duquel nous sommes Un et ainsi authentiquement nous -mêmes. » Loin de ramener le religieux au social, ou la philosophie à une religiosité grégaire, la conversion de la philosophie en métaphysique, telle qu'elle s'illustre dans l'œuvre de Henry Corbin, en ce voyage vers l'Ile Verte en la mer blanche nous conduit à une science de la vérité cachée, non détenue, et, par voie de conséquence, rétive à toute instrumentalisation.

         41M912F8HJL._SX210_.jpgCes dernières décennies nous ont montré, si nécessaire, que l'instrumentalisation du religieux en farces sanglantes appartenait bien à notre temps, qu'elle était, selon la formule de René Guénon, avec la haine du secret, un des « Signes des Temps » qui sont les nôtres.  Si elle n'est pas cortège funèbre, fixation sur la lettre morte, idolâtrie des écorces de cendre, la Tradition est renaissance, recueillement dans la présence du voyage intérieur où l'Un dans son unificence devient principe d'universalité. « Il ne s'agit plus, écrit Jean Brun, de permettre à l'historicisme d'accomplir son travail dissolvant en laissant croire que la recherche des sources se situe dans le cadre d'une histoire comparée de la philosophie des religions ou de la mythologie. Toutes ces spécialités analysent des combustibles ou des cendres au lieu de se laisser illuminer par le feu de la Tradition. » Il ne s'agit pas davantage, de se soumettre, par fidélité aveugle, à des coutumes ou des dénomination confessionnelles, d'emprisonner la parole dans la catastrophe de répétition mais bien de comprendre la vertu paraclétique de la Tradition, qui n'est point un « mythe » au sens de mensonge, moins encore une réalité historique mais, selon la formule de Henry Corbin « un synchronisme réglant un champs de conscience dont les lignes de force nous montrent à l'œuvre les mêmes réalités métaphysiques. » Le Paraclet est la présence même dont l'advenue confirme en nous la pertinence de l'idée augustinienne selon laquelle le passé et le présent, par le souvenir et l'attente, sont présents dans la présence.  « Tout se passe, écrit Henry Corbin, comme si une voix se faisait entendre à la façon dont se ferait entendre au grand orgue le thème d'une fugue, et qu'une autre voix lui donnât la réponse par l'inversion du thème. A celui qui peut percevoir les résonances, la première voix fera peut-être entendre le contrepoint qu'appelle la seconde, et d'épisode en épisode l'exposé de la fugue sera complet. Mais cet achèvement c'est le Mystère de la Pentecôte, et seul le Paraclet a mission de le dévoiler. »

         Loin de se réduire à un comparatisme profane, l'art de percevoir des résonances relève lui-même sinon du Mystère du moins d'une approche du Mystère. Husserl, qui définissait la phénoménologie comme une « communauté gnostique » disait que, pour mille étudiants capables de restituer ses cours de façon satisfaisante et même brillante, il ne devait s'en trouver que deux ou trois pour avoir vraiment réalisé en eux-mêmes l'expérience phénoménologique du « Nous transcendantal ». Sans doute en est-il de même des symboles religieux, qui peuvent être de banales représentations d'une appartenance collective ou pure présence d'un retour paraclétique à soi-même, c'est à dire au principe d'un au-delà de l'individualisme, d'une universalité métaphysique dont l'uniformisation moderne n'est que l'abominable parodie. « J'ai réfléchi, dit Hallâj, sur les dénominations confessionnelles, faisant effort pour les comprendre, et je les considère comme un Principe unique à ramification nombreuses. Ne demande donc pas à un homme d'adopter telle dénomination confessionnelle, car cela l'écarterait du Principe fondamental, et certes, c'est ce Principe Lui-même qui doit venir le chercher, Lui en qui s'élucident toutes les grandeurs et toutes les significations: et l'homme alors comprendra. »

         656980_medium.jpgQue le Principe dût nous venir chercher, car il est de l'ordre du ressouvenir et de l'attente, de la nostalgie et du pressentiment, que nous ne puissions-nous saisir de Lui, nous l'approprier, le soumettre à l'hybris de nos ambitions trop humaines, il suffit pour s'en persuader de comprendre ce qu'Heidegger disait du langage: « Le langage n'est pas un instrument disponible, il est tout au contraire, cet historial qui lui-même dispose de la suprême possibilité de l'être de l'homme. » L'apparition vespérale-matutinale de l'Archange Logos, dont nous ne sommes qu'un bruissement, ce dévoilement de la vérité hors d'atteinte, à la fois anamnésis et désir, n'est autre, selon la formule de Rûmi que « la recherche de la chose déjà trouvée » qui, entre la nuit et le jour, réinvente le dialogue de l'Unique avec l'unique: « Si tu te rapproches de moi, c'est parce que je me suis rapproché de toi. Je suis plus près de toi que toi-même, que ton âme, que ton souffle ».

         Loin d'être cet Etant suprême de la théologie exotérique, qui nous tient en exil de la vérité de l'être, séparé de l'éclaircie essentielle, Dieu est alors celui qui se voit lui-même à travers nous-mêmes, de même que nous ne parlons pas le langage mais que le langage se parle à travers nous, nous disant, par exemple, par la bouche d'Ibn’Arabî, à ce titre prédécesseur de la Mystique rhénane,: « C'est par mon œil que tu me vois , ce n'est pas par ton œil que tu peux me concevoir ». Croire que Dieu n'est qu'un Etant suprême, c'est confondre la forme avec ce qu'elle manifeste, c'est être idolâtre, c'est demeurer sourd à l'Appel, c'est renoncer à la vision du cœur et à l'attestation de l'Unique. A la tristesse, la morosité, l'ennui, la jalousie, le ressentiment qui envahissent l'âme emprisonnée dans l'exil occidental, dans le ressassement du déclin, dans l'oubli de l'oubli comme dans « la volonté de la volonté », la vertu paraclétique oppose la ferveur, la légèreté dansante, le tournoiement des possibles, l'intensification des actes d'exister. « Comment, écrit Rûmi, le soufi pourrait-il ne pas se mettre à danser, tournoyant sur lui-même comme l'atome au soleil de l'éternité afin qu'il le délivre de ce monde périssable ? » S'unissant en un même mouvement, dans un même tournoiement des possibles, la nostalgie et le pressentiment, le passé et le futur se délivrent d'eux-mêmes pour éclore dans la présence pure en corolle, qui est la réponse même, le répons, à « la question qui ne vient ni du monde, ni de l'homme ».

         La clef herméneutique heideggérienne, trouvant son usage pertinent dans la métaphysique, qui n'est plus la métaphysique dualiste, et pour tout dire caricaturale, du platonisme scolaire, ni la théologie de l'Etant suprême, ni la soumission aveugle à la forme en tant que telle, -  en nous ouvrant à la perspective de la « gradation infinie » des états de l'être et de la conscience, du plus atténué au plus intense, en graduant la connaissance selon les principes initiatiques, nous délivre ainsi, du même geste, de toute forme de socialisation extrême, de tout fondamentalisme, fût-il « démocratique ». L'Imâm caché sous le grand Arbre cosmogonique d'où jaillit la source la vie, l'eau castalienne de la mémoire retrouvée, interdit toute socialisation du religieux, toute réduction du Symbole à la part visible et immanente, à une beauté qui ne serait que purement terrestre, donc relative et variable selon les us et coutumes. La laideur qui s'empare des Symboles profanés, des coutumes instrumentalisées, est un signe de la fausseté qui en abuse. La Beauté prouve le Vrai, comme l'humilité et courtoisie prouvent le Bien. Si le monde sensible est la métaphore de l'intelligible, si la forme perçue est le miroir de la forme idéale, ce monde-ci, avec ses Normes profanes, ses communautés vindicatives, ne peut en aucune façon prétendre au Beau et au Vrai. «  Dès que les hommes se rassemblent, écrit Henry de Montherlant, ils travaillent pour quelque erreur. Seule l'âme solitaire dialogue avec l'esprit de vérité. » Cette solitude cependant, par un paradoxe admirable, n'est point esseulement mais communion car elle suppose l'oubli de soi-même, l'extinction du moi devant l'Ange de la Face, le consentement à la pérégrination infinie loin de soi-même, dans les écumes de la mer blanche et le pressentiment de l'Ile Verte. Au relativisme absolu des Modernes, qui emprisonnent chaque chose dans une abstraction profane, pour lesquels « le corps n'est que le corps », la danse des soufis oppose l'absolu des relations tournoyantes dans l'approche d'une Beauté dont toutes les beautés relatives ne sont que l'émanation ou le reflet. A la philosophie, comme instrument de pouvoir (ce qu'elle fut, dans la continuité hégélienne, avec fureur) la métaphysique reconquise, par l'humilité et l'abandon à la grandeur divine, opposera ce décisif retournement de la métaphore qui laisse à la beauté de la vérité son resplendissement, comme le reflet du soleil sur la mer, comme la solitude de l'Unique pour un unique.

Luc-Olivier d'Algange.

 

Kris Roman rencontre Robert Steuckers sur le thème des grands axes de communication terrestre en Eurasie

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Время Говорить 

Kris Roman rencontre Robert Steuckers sur le thème des grands axes de communication terrestre en Eurasie

 
ВРЕМЯ ГОВОРИТЬ! РАЗГОВОР С КРИСОМ РОМАНОМ
 
Dans le talk show Время Говорить («Il est temps de parler»), Kris Roman reçoit des invités spéciaux qui expliquent au grand public leurs découvertes et leurs connaissances sur des sujets d'actualité. Dans cet épisode, enregistré le 17-10-2020, Robert Steuckers est notre invité. Les conflits au Haut-Karabakh, en Syrie, dans le Donbass, au Yémen et ailleurs montrent une tension accrue dans le monde. Robert Steuckers explique dans cet épisode de «Vremya Govorit» les différents intérêts ainsi que les axes eurasiens.