mercredi, 09 avril 2008
USA et Afro-Maghrébins de France
NOVOPRESS - C’est un fait nouveau, mais d’autant plus inquiétant pour les européens de souche : les Etats-Unis cherchent à former et à tisser des liens avec les “futurs leaders noirs et arabes “en Europe et particulièrement en France. Cette information a été rapportée par le journal Suisse “L’Hebdo” et mis en ligne sur le site très politiquement correct Bondy Blog. Le gouvernement des Etats-Unis cherche à tisser depuis quelques années des “liens étroits avec les minorités musulmanes en Europe”. (…) Chaque ambassade américaine sur le Vieux Continent compte au moins un collaborateur dévolu à cette mission.“La France, avec un pourcentage de sa population estimée à 10 % de confession qui se déclare musulmane (voire 30 % chez les moins de 15 ans), retient l’attention du département d’Etat de Condoleezza Rice. Le responsable du programme créé en 2005, Dan Fried, directeur des Affaires européennes au Département d’Etat, a profité de la visite de Nicolas Sarközy aux USA en novembre dernier, pour rencontrer une délégation essentiellement composée de maghrébins et de noirs de France à l’ambassade des Etats-Unis à Paris. Parmi les présents, Ali Laïdi, spécialiste du renseignement économique et du terrorisme islamique à l’IRIS (Institut des relations internationales et stratégiques), Saïd Branine, responsable du site Internet musulman oumma.com, Hervé Mbouguen, également animateur d’un site Web, grioo.com, dédié aux Noirs, Fayçal Douhane, du conseil national du Parti socialiste, en charge des questions de diversité et un membre du BondyBlog. Le but est clair, comme le confie James L. Bullock, ministre conseiller aux Affaires publiques de l’ambassade américaine, “c’est notre intérêt que ça se passe bien ici. Nous voulons aider les Français à trouver une voie paisible pour leurs minorités “. L’ambassade américaine à Paris n’a pas attendu les émeutes de 2005 pour approcher les minorités françaises. Selon le journal suisse l’Hebod,” il y a trois ans et demi, le cap a été mis sur la banlieue, avec l’envie de « comprendre »“. Comme le confirme Laura Berg, attachée culturelle de l’ambassade des Etats-Unis, au journaliste de l’Hebdo, l’ambassade des USA dispose d’un budget annuel pour aider des projets culturels ou sociaux menés dans les banlieues françaises avec la bienveillance du gouvernement français. L’ambassade a ainsi apporté un soutien financier au Festival Blues sur Seine de Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. Laura Berg préfère taire les noms des associations aidées par les Etats-Unis, certaines œuvrant au dialogue judéo-musulman. L’Amérique ne se contente pas d’aller dans les banlieues françaises. Elle invite aussi des acteurs de la diversité à se rendre chez elle. En trois ans, une cinquantaine d’entre eux, conviés par le Département d’Etat, ont eu droit à cette forme de reconnaissance. Cette année, Fayçal Douhane, Amirouche Laïdi, le président du Club Averroes qui milite pour la diversité dans les médias, et Stéphane Pocrain, ex-porte-parole des Verts, s’y sont rendus. Ali Laïdi, frère d’Amirouche, en revient. En avril 2008, Mohamed Hamidi, du Bondy Blog, et Karim Zéribi, homme politique et responsable associatif de Marseille, y effectueront un voyage de trois semaines. De même que Patrick Lozès, le président du CRAN (Conseil représentatif des associations noires), un groupe de pression mis en relation avec son grand frère américain, le NAACP, grâce aux bons soins de l’ambassade US à Paris. Cette ouverture vers les futurs leaders africains de la France, du fait de la substitution de population que connait l’Hexagone, est un condensé de la politique américaine : objectifs économiques, protection de ses intérêts et messianisme religieux. Comme le confiera Laura Berg, attachée culturelle de l’ambassade des Etats-Unis, au journaliste suisse de l’Hebdo : “Nous les juifs, dit-elle en parlant aussi de Dan Fried, avons le devoir, durant notre passage sur terre, de rendre le monde meilleur. Il est absurde de penser que les juifs, qui sont eux-mêmes une minorité, veulent écraser les autres minorités. Je suis mariée à un Tunisien musulman. Je crois qu’il y a de l’altruisme dans le gouvernement américain. Mais cela ne veut pas dire que nous prenions toujours les bonnes décisions. En France, nous voulons promouvoir une vision positive de la diversité.” [cc] Novopress.info, 2006, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine [http://lyon.novopress.info/] |
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mardi, 08 avril 2008
Andreas Mölzer: Keine Gegenseitigkeit !

Hier werden Minaretten gebaut, dort Christen verfolgt
Während die hierzulande lebenden Moslems immer lauter den Bau von Minaretten fordern, werden Christen in der islamischen Welt oftmals als Menschen zweiter Klasse behandelt, wie das Beispiel der Türkei zeigt. So ist den Christen, insbesondere den Katholiken, die Abhaltung von Gottesdiensten nur in Privathäusern oder ehemaligen Industrieanlagen möglich, und immer wieder kommt zu Angriffen auf Geistliche. Doch die Europäische Union, die dieses außereuropäische Land offenbar um jeden Preis aufnehmen will, schweigt zu dieser krassen Mißachtung grundlegender Menschenrechte.
Wenn Ankara in der Frage der freien Religionsausübung ein positives Zeichen will, dann ist Ministerpräsident Erdogan gut beraten, der Bitte des Kölner Kardinals Meisner nachzukommen und den Bau einer Kirche in Tarsus, der Geburtsstadt des Apostels Paulus, zu unterstützen. Daß die Türkei die Errichtung von Kirchen – die nicht notwendigerweise einen Turm haben, aber doch nach außen hin als christliche Gotteshäuser erkennbar sein müssen – zuläßt, ist das mindeste, was von diesem Land zu verlangen ist. Schließlich war die heutige Türkei als Teil des Byzantinischen Reiches rund 1500 Jahre lang christlich gewesen und erst die osmanischen Eroberungen verbreiteten den Islam in Kleinasien.
Ein besonderes Problem bei der Errichtung religiöser Bauten ist die fehlende Gegenseitigkeit in Europa und der islamischen Welt. Während dem politisch korrekten Polit-Establishment die Errichtung von Moscheen mit Minaretten nicht schnell genug gehen kann – schließlich müsse die religiöse und kulturelle Vielfalt ja „im öffentlichen Raum sichtbar werden“ – verhält es sich in den islamisch dominierten Ländern genau umgekehrt. Hier wird der Bau von Kirchen strikt unterbunden, und jene Christen, die sich offen zu ihrer Religion bekennen, sind in vielen Fällen ihres Lebens nicht mehr sicher.
Wenn nun Kardinal Schönborn fragt, wo beim Bau von Minaretten das Problem sei, dann ist ihm als Katholik zu antworten: Das Problem ist die falsch verstandene Toleranz mancher Kirchenfürsten gegenüber dem Islam. Im Gegensatz zu Schönborns Aussagen sind die klaren und mutigen Worte des Vorarlberger Bischofs Elmar Fischer begrüßenswert. Wenn dieser Kirchenmann Moscheen mit Minaretten als Provokation und als krasse Gefährdung des sozialen Friedens bezeichnet, dann ist das ein Zeichen von Weitblick, allzumal die Moslems in Österreich bekanntlich keine autochthone Minderheit sind.
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Maroc: paradis artificiel?

Christian MAROT:
Le Maroc : un paradis artificiel ?
Le Maroc dispose de deux “ vaches à lait ”, la drogue et les émigrés, lesquels rapatrient au pays une partie des devises gagnées en Europe. Ce sont ses deux principales ressources.
Chiffres… hallucinants
En ce qui concerne la drogue, les chiffres sont, sans mauvais jeu de mots, hallucinants ! Qu’on en juge : Le Maroc est le premier exportateur mondial de haschisch, le premier fournisseur de cannabis du marché européen. Les surfaces consacrées à la production de cannabis ont été multipliées par 6 en dix ans. Le kilo de haschisch acquis 200 $ au producteur est revendu sur le marché européen 13 000 $, si ce n’est davantage. Sachant qu’un hectare produit 60 kg de haschisch, et que dans le Rif, et principalement dans la vallée de Ketama, au moins 80 000 ha sont dévolus à la culture du cannabis, il est facile de calculer que le rapport total est de l’ordre, au moins, de 62 milliards de dollars ! En fait, c’est très probablement davantage. Plus d’un million de Marocains, au pays ou en Europe, vivent grâce à la drogue ; au pays, ce sont plus de 200 000 personnes qui se partagent près d’un milliard de dollars, ce qui leur procure en moyenne à chacun un revenu annuel de l’ordre de 5 000 $, alors qu’en 1997, le PNB par habitant n’était, en moyenne, que de 1241 $ ! Et il n’est question ici que du seul cannabis. Nous verrons plus loin que le Maroc ne dédaigne pas d’autres substances, comme l’héroïne et la cocaïne. On peut dire que le Maroc est la plaque tournante des trafics de drogues à destination de l’Europe. Près des deux tiers du cannabis, et, globalement, 50%, de la drogue, consommés en Europe ont été produits ou ont transité par le Maroc. Ces chiffres découlent de ceux fournis par les Douanes, en fonction de l’origine des cargaisons de drogue saisies par leurs services.
On pourrait imaginer, compte tenu des problèmes de santé publique causés par la drogue, que les pays européens, réagissent vigoureusement, et exercent sur le Maroc de fortes pressions. En fait, en la matière, la politique européenne à l’égard du Maroc se limite à des aides financières pour promouvoir les cultures de substitution, qui, bien que très importantes en absolu, sont en fait dérisoires par rapport à l’amplitude du marché.
L’Europe contre la drogue ?
Je place ici un point d’interrogation car on peut se poser certaines questions quant à la volonté des pays européens de vraiment lutter contre la drogue. Il n’est question que de dépénaliser, de libéraliser, de tolérer. Seule de tous les pays européens, la France semble se montrer plus ferme, mais nous verrons plus loin que les motifs de cette attitude sont moins honnêtes qu’il n’y paraît ! Aux Pays-Bas, le commerce et la consommation de haschisch sont légalement encadrés, sans que cela n’ait d’effets particulièrement positifs sur le trafic et le cortège de délinquances diverses qu’il entraîne, d’une part, ni sur la toxicomanie, avec les conséquences individuelles et sociales néfastes d’une telle pratique, d’autre part. En Belgique, les directives gouvernementales sont assez floues pour que la possession et la consommation de cannabis demeurent, en pratique, à l’abri de toute répression Cette démission généralisée de nos gouvernements n’est pas acceptable.
En effet, bien qu’il ne soit pas dans le sujet de cet article de détailler tous les inconvénients de la consommation fréquente et, a fortiori, habituelle, de cannabis sous ses différentes formes, il nous semble quand même utile der rappeler les effets dévastateurs des drogues, y compris de celles abusivement dites “ douces ” comme celles provenant du cannabis. On sait en effet que la consommation de ce produit provoque des troubles sexuels, nuit à la fécondité, entraîne la naissance d’enfants d’un poids inférieur à la normale chez les femmes qui s’y adonnent ; par ailleurs, le cannabis fumé est 70 fois plus cancérigène que le tabac, et, globalement, le premier est 40 fois plus nuisible que le second ! Surtout, sa consommation conduit à des détériorations psychologiques (perte de mémoire, difficultés d’attention, apathie, démotivation, etc.) pouvant aller jusqu’à de graves problèmes relationnels et même à la schizophrénie. Lorsqu’en 1986, la navette Columbia explosa, entraînant la mort des six membres de son équipage, l’on s’aperçut que l’accident était dû à un enchaînement d’erreurs humaines dont les responsables étaient une équipe de techniciens, fumeurs habituels de marijuana. D’ailleurs, lors d’expériences effectuées sur des simulateurs de vol, on d’est rendu compte que les sujets ayant préalablement consommé du haschisch commettaient de graves erreurs de pilotage. Enfin, si, fort heureusement, tous les adeptes du cannabis ne finissent pas victimes d’autres drogues dites “ dures ” encore plus dangereuses, il est incontestable que tous les “ accros ” de ces substances fort nuisibles ont commencé par le “ joint ”.
Pour des raisons diverses, de politique internationale, voire électoralistes, dans lesquelles la santé publique apparaît davantage comme prétexte que comme souci premier, les pays européens ont cependant décider de lutter contre la drogue à la source, c’est-à-dire dans les pays producteurs. La culture de plantes dont on peut extraire de la drogue étant une activité très rémunératrice, ils ont mis au point des programmes d’aides financières censées permettre la mise en œuvre de cultures de substitution sans que les agriculteurs ne soient trop lésés.
C’est ainsi que le 8 septembre 1993, la Communauté Européenne a lancé un plan pour l’éradication des cultures de cannabis au Maroc, en application des décisions prises lors de différents sommets, à Rome en 1990, à Lisbonne, en juin 1992, et, six mois plus tard, à Edimbourg. A ce titre, des sommes considérables ont été allouées pour la mise en place de cultures de substitution, soit, par exemple, de 1993 à 1995, 2,5 milliards de dollars. Or, le 30 octobre 1998 force était de constater que, malgré les sommes englouties, le plan avait subi un échec cuisant ; presque aucune culture alternative n’avait été entreprise. Mieux (ou pis !) les surfaces consacrées à la culture du cannabis n’avaient cessé d’augmenter. De 1986 à 2001, au Maroc, ces superficies sont passées de 11 500 hectares à plus de 80 000 et font vivre désormais plus de 200 000 personnes. Et encore ! D’après la Guardia Civil espagnole et la Fiscalia Italiana, ces chiffres pourraient être multipliés par cinq !
Cela n’a pas empêché les Européens de continuer de payer ! 580 millions d’euros en 2002, et il est encore prévu une rallonge de 70 millions d’euros pour atteindre 2004 !
Notons que les Européens sont seuls dans ce combat. En effet, l’administration Clinton avait refusé de faire figurer le Maroc sur la liste noire américaine, et il ne semble pas que sur ce point, l’administration Bush ait envie de changer de politique. Le Maroc, en effet, n’exporte pas de drogue vers les Etats-Unis, et ne gêne donc pas ce pays ; bien au contraire, en déversant sur l’Europe 80% de sa production, il contribue à affaiblir ce continent en corrompant sa jeunesse et en minant sa santé publique !
Je parlais tout à l’heure de la France. Ce pays a des liens économiques très étroits avec le Maroc, et l’on comprend que les gouvernements français, de droite comme de gauche, courtisent ce pays et son roi. Ainsi, la première visite à l’étranger effectuée par Jacques Chirac, fraîchement élu à la présidence de la République française, en 1995, fut pour le Maroc et son roi, Hassan II, lequel, entre parenthèses, fêta l’événement en faisant cadeau à son hôte d’une ferme située dans le Ouled Dzaïm, la région où Giscard d’Estaing, qui a de gros intérêts au Maroc, notamment dans les mines de phosphates, possède un grand domaine, mitoyen de celui du roi… Chirac promit à Hassan de lui faire obtenir une subvention supplémentaire de la part de la Communauté Européenne de 2 milliards de dollars pour, une fois encore, promouvoir les cultures de substitution… De retour à Paris, Chirac s’est lancé dans une diatribe extrêmement violente à l’encontre du “ laxisme ” su gouvernement néerlandais en matière de drogue, et, notamment, du cannabis. De mauvaises langues ont émis l’hypothèse que cette virulente sortie n’avait d’autre but que de complaire au roi, les cultures privées de cannabis qui se multipliaient aux Pays-Bas du fait de la tolérance des Autorités produisant localement un haschisch qui venait concurrencer celui venant du Maroc sur le marché ouest-européen ; il convenait donc d’essayer d’y mettre sinon un terme, du moins un frein...
Le problème du Maroc
En fait, le gouvernement marocain se heurte à un important problème politique. On sait que le Rif est une région traditionnellement insoumise, que les populations y sont rebelles, qu’elles supportent fort mal un pouvoir central “ arabe ” et féodal, alors qu’elles sont profondément enracinées dans leur culture berbère, démocratique et égalitaire, pour laquelle, d’ailleurs, elles revendiquent une plus grande place. Le pouvoir central, qui n’a jamais réussi à éliminer toute contestation de la région, craint, s’il prenait des mesures trop coercitives et trop radicales, de jeter une allumette dans le baril de poudre qu’est le Rif.
Quant aux aides financières européennes, pour importantes qu’elles soient en absolu, elles ne représentent pas plus de 1% des sommes rapportées par la drogue. Cette goutte d’eau dans l’océan nous coûte cher et ne peut qu’être inopérante, compte tenu de son montant ridicule en valeur relative. D’ailleurs, il a été prétendu qu’elles n’allaient pas aux paysans du Rif, mais tombaient directement dans l’escarcelle royale.
De l’autre côté, le Maroc est soumis, du moins apparemment, à la pression internationale, et plus particulièrement à celle des gouvernements européens. A la rigueur, les Autorités marocaines pourraient s’en moquer. Elles savent qu’elles ne courent aucun danger de ce côté-là. Néanmoins, elles ont conscience que la mauvaise réputation de leur pays en la matière nuit à son image dans l’opinion publique hors de ses frontières, ce qui, outre l’atteinte à l’orgueil national qui en résulte, peut avoir des répercussions économiques néfastes (risque de “ boycott ” touristique et économique de la part de certains Européens). D’où des discours tonitruants contre la drogue…suivis d’aucun effet ! Ainsi, après qu’en 1991, le roi Hassan II a “ déclaré la guerre à la drogue ”, la production, loin de diminuer, s’est mise à augmenter !
Comment sauver internationalement la face sans contrarier les populations du Rif ? Les Marocains ont eu une idée simple, mais, à leurs yeux, géniale : il suffit de faire concorder les appétits hégémoniques du Maroc et un fort discours anti-drogue ; ainsi, on flatte l’orgueil national en revendiquant certains territoires, possessions espagnoles, on occupe même l’une d’entre elles militairement (îlot de Persil), et on justifie cette action en prétendant vouloir ainsi mieux contrôler le détroit de Gibraltar pour être en mesure, étant sur place, de lutter plus efficacement, et contre l’émigration clandestine, et contre le trafic de drogue…tout en maintenant le statu quo dans le Rif ! On peut difficilement faire mieux en matière de cynisme !
N’oublions pas enfin qu’en France, et surtout en Belgique, pays où l’immigration marocaine est la plus importante, la “ vente au détail ” est assurée par une armée de dealers, originaires pour la plupart du Rif… Et ainsi, la boucle est bouclée…
En 1964, un accord a été passé entre les gouvernements marocains et belges au sujet de la main d’œuvre immigrée. Le roi du Maroc y a vu une formidable occasion de faire d’une pierre deux coups. D’abord, il pouvait se débarrasser à bon compte d’opposants potentiels et de sujets remuants, en expédiant prioritairement en Belgique des personnes originaires de certaines régions politiquement peu sûres, et, notamment du Rif. Ensuite – mais l’avantage n’est peut-être apparu que plus tard – il pouvait disposer sur place d’un contingent de revendeurs qui, compte tenu de leurs origines, pouvaient assurer un service, en quelque sorte, directement du producteur eu consommateur !
En fait, l’accord de 1964, qui prévoyait de nombreuses et rigoureuses restrictions (un immigré devait avoir un contrat de travail, il devait quitter le sol belge dès l’expiration de ce contrat, il ne pouvait, de plus, ne trouver à s’employer que dans certains domaines (mines, métallurgie, par exemple) et n’y exercer que certaines activités bien précises, etc.) fut très vite, dans les faits, vidé de sa substance. L’instauration du regroupement familial lui donna le coup de grâce. Actuellement, le plus souvent naturalisés belges, ces Marocains (ils conservent cependant leur nationalité d’origine) sont intouchables, et peuvent continuer d’œuvrer en toute impunité au service de leur roi… et alimenter leur pays d’origine en précieuses devises. Nous avons écrit au début de cet article que le Maroc avait deux “ vaches à lait ”, la drogue et l’émigration ; en fait, c’est inexact, le Maroc ne dispose que d’une seule “ vache à lait ”, la drogue, florissante, grâce à l’émigration. On peut penser en effet que la part la plus importantes des devises parvenant au Maroc ne sort pas de la poche des émigrés honnêtes, souvent chômeurs ou n’exerçant que des emplois subalternes, et de surcroît chargés de famille, dont le pouvoir d’épargne est forcément limité, mais provient plus certainement des colossaux bénéfices des trafics illicites, de celui de la drogue, principalement.
Les implications à haut niveau
L’Observatoire géopolitique des drogues (OGD) a établi, pour le compte des instances européennes, un rapport particulièrement explosif, dans lequel des noms étaient cités... que les bureaucrates européens, effrayés, ont aussitôt demandé de censurer !
Aux termes de ce rapport, des personnages très importants seraient impliqués dans ces trafics, jusque dans l’entourage du roi lui-même. Et le roi ? Il est propriétaire de très vastes étendues dans le Rif. C’est l’un des hommes les plus riches du monde. Gageons que dans ce pays, rien ne peut se faire sans, au moins, l’assentiment du roi, et que celui-ci n’a aucune raison de le donner sans contreparties sonnantes et trébuchantes… Nous disons “ le roi ” ; en, ce qui concerne Hassan II, les choses étaient claires ; pour ce qui est de Mohamed VI, nous avouons ne disposer d’aucun renseignements précis, mais nous avons tout lieu de croire que, dans ce domaine, rien n’a profondément changé.
Pour bien comprendre la situation, il faut connaître le système ancestral d’administration et de gouvernement toujours en vigueur au Maroc, le makhzen. Le sens premier de ce mot est “ grenier ”, “ magasin ”, “ entrepôt ”. C’est d’ailleurs de lui que vient le mot français “ magasin ”. Par extension, il a pris le sens de “ gouvernement ”. En effet, le rôle des administrateurs était avant tout de faire la collecte des impôts, souvent payés en nature, donc entreposés dans un “ makhzen ”. Le système conjugue monarchie absolue, d’une certaine manière de droit divin, et féodalité administrative. Les fonctionnaires sont liés au Palais. Ce sont les “ esclaves ” du roi. Par contre, les fonctionnaires ont tous pouvoirs sur leurs administrés, et surtout, leurs contribuables, au nom du roi, qui les nomme selon son bon plaisir, bien que, le plus souvent, le monarque se contente d’entériner le choix déjà fait, sauf à écarter une personnalité qui ne lui conviendrait pas, car les fonctionnaires se cooptent. Le système est donc clos, hermétique. Ainsi s’est constitué une féodalité très solidaire, au service du pouvoir central absolu. Toutefois, le pouvoir makhzénien a toujours connu des difficultés pour s’étendre à tout le pays. Au bilad al makhzen s’opposait le bilad al siba, c’est-à-dire le pays insoumis, voire rebelle, ou, en termes plus clairs, le pays berbère, et, notamment le Rif. Du fait que désormais leur prospérité dépend des possibilités d’écouler leur marchandise, les Rifains sont donc bien obligés de se soumettre au makhzen ; seuls, ils ne le pourraient pas. Comment, en effet, sans ces complicités au plus haut niveau, les filières d’exportation existantes, extrêmement sophistiquées, auraient-elles pu être mises en place et fonctionner ? C’est tout bénéfice politique pour le pouvoir central, qui, de plus, achète sa tranquillité au prix du cannabis !
La “ diversification ”
Depuis quelques temps, une culture, sinon de diversification, du moins de complément, est apparue au Maroc, celle du pavot.
En raison de son infrastructure et de sa proximité de l’Europe, le Maroc n’avait déjà pas attendu pour s’ouvrir aux maffias de l’héroïne et de la cocaïne, avec la bénédiction royale et l’aide su SAC français, organisme para-policier créé à l’origine pour lutter contre l’OAS, et dans lequel se côtoyaient flics et truands, ayant de plus participé à l’enlèvement et à l’assassinat de l’opposant marocain Ben Barka en 1965. On comprend que cet organisme ait pu faire sans difficulté du Maroc sa base arrière. L’un des plus hauts responsables du SAC s’appelait Charles Pasqua, futur ministre de l’Intérieur français. Lors du démantèlement de la French Connection, en 1971, le nom de Pasqua et celui de son (toujours) bras droit, Marchiani, avaient déjà été cités. Les choses seront encore plus claires lorsque l’affaire Bouquenat-Hémard éclatera.
L’affaire Bouquenat-Hémard
Ali Auguste Bouquenat, un juif franco-marocain, madame Hémard et sa fille, sont les trois seuls Français a avoir jamais obtenu le droit d’asile aux Etats-Unis, après avoir vu leur demande appuyée par le Département d’Etat, tant l’affaire semblait “ sensible ”. Madame Hémard était l’épouse de l’ancien propriétaire de Pernod, devenu un gros actionnaire de Ricard après la fusion de son entreprise avec celui-ci. Or, Pernod-Ricard servait de couverture pour des trafics de drogue au départ du Maroc. C’est ce que révèle madame Hémard dans sa demande d’asile aux Etats-Unis. Elle ajoute que, dès 1962, la famille de son mari avait contribué à la mise en place de laboratoires de transformation de la cocaïne au Maroc, et les choses n’avaient par la suite fait que croître et embellir. Or, jusqu’à son élection au Sénat en 1970, Pasqua, qui a fait toute sa carrière “ civile ” chez Ricard, s’occupait des exportations de cette marque au Maroc. Madame Hémard avait commis l’erreur de dénoncer ces faits et Bouquenat de se faire l’écho des propos de celle-ci, au moment, particulièrement mal choisi où le ministre français de l’Intérieur s’appelait Pasqua… Les menaces qu’ils reçurent leur semblèrent assez crédibles pour qu’ils craignissent pour leur vie et se réfugiassent aux Etats-Unis, avec la suite que l’on sait..
Conclusion
Le Maroc est donc bien la plaque tournante de la drogue qui infeste l’Europe, avec la complicité de la famille royale marocaine, de certains hommes politiques marocains et européens, ainsi que de l’armée de dealers, souvent originaires du Rif, qui quadrillent nos villes.
Christian MAROT.
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lundi, 07 avril 2008
Les critiques de Bassam Tibi

L'Europe sans identité
La critique de la société multiculturelle par le politologue germano-syrien Bassam Tibi
Nous avions déjà eu l'occasion de souligner l'excellence des écrits du Prof. Bassam Tibi, sur les affres de la société muticulturelle. A l'occasion de la parution d'une traduction néerlandaise de l'un de ses derniers livres, consacré à la crise de la société multiculturelle, nous soumettons au jugement critique de nos lecteurs cette recension du journaliste flamand Ludo Leen, qui situe parfaitement la personnalité de Bassam Tibi et la thématique de ses ouvrages.
«Dans une société multiculturelle, il n'existe plus de valeurs liantes, propres d'une culture-modèle; il n'y a plus que des hommes qui vivent les uns à côté des autres, dans des groupes réduits à eux-mêmes, dans des espaces réduits, ce qui revient, en fait, à juxtaposer les ghettos ethniques. Une telle Europe ne serait dès lors plus qu'une simple zone habitée, neutralisée sur le plan axiologique, sans identité propre» (Bassam Tibi).
Douter des dogmes imposés par l'église de la multiculturalité n'est pas une démarche de l'esprit exempte de tout danger. Aux Pays-Bas, on a diabolisé Pim Fortuyn pour cela, avant de s'en débarrasser de manière professionnelle. Quant au Vlaams Blok, pour le même motif, on le traîne devant les tribunaux pour délit d'opinion. Toute résistance à l'idéologie multiculturaliste est considérée comme "anti-démocratique" ou comme "raciste", et automatiquement mis en équation avec un appel à l'épuration ethnique ou avec un plaidoyer en faveur d'une Flandre monoculturelle, répondant aux canons de la pure "aryanité", peuplée uniquement de grands Germains blonds aux yeux clairs… Cette escroquerie intellectuelle, cette malveillance caricaturale, ont rendu impossible jusqu'ici tout débat rationnel sur la société multiculturelle. Or c'est justement un débat social ouvert que les tenants du beau monde onirique de la multiculture ne tiennent pas à amorcer.
L'intégration est un échec…
Jusqu'ici, Bassam Tibi a été un illustre inconnu sous nos cieux, alors qu'en Allemagne il s'est taillé une solide réputation grâce à ses articles provocateurs et bien ciselés sur l'islam et l'intégration. Bassam Tibi est un client particulièrement difficile à cerner pour les faiseurs d'opinion, adeptes de la "political correctness", surtout parce qu'il sait de quoi il parle. Son argumentation ne peut être balayée comme de "simples propos racistes de bistrot". Le Prof. Tibi est musulman, il est originaire de Syrie et naturalisé allemand. Ses racines se situent à Damas. Dans son livre intitulé "Europa zonder identiteit - De crisis van de multiculturele samenleving" (= "L'Europe sans identité - La crise de la société multiculturelle"), ce politologue germano-syrien donne un formidable coup de pied dans la fourmilière. L'intégration est un échec, dit Tibi. Immédiatement après la seconde guerre mondiale, seulement un million de musulmans vivaient en Europe. En 1998, il y en avait plus de 15 millions. Ce groupe au sein de la population globale va doubler voire tripler au cours de la première décennie du nouveau millénaire: nous ferons face à une poudrière, ajoute-t-il. L'Europe évitera-t-elle un scénario cauchemardesque à la bosniaque? Cela dépend de notre capacité à intégrer les musulmans ou non. Quoi qu'il en soit, les pronostics n'augurent rien de bon. «La société multiculturelle est loin d'être idyllique et les illusions multiculturalistes s'évanouissent comme des bulles de savon, dès qu'un problème réel se pose».
Du relativisme culturel
Bassam Tibi critique sévèrement le "relativisme culturel" qui domine la scène intellectuelle aujourd'hui en Europe, car elle repose sur un aveuglement: celui de croire à l'égalité des hommes et des cultures. L'Europe contemporaine fait comme si ses valeurs démocratiques ne se trouvaient pas loin au-dessus des idées "pré-modernes" des cultures autoritaires. «En se niant elle-même l'Europe en arrive à se haïr elle-même; ce qui doit susciter de la pitié, mais qui conduit aussi les autres à la considérer avec mépris et à se détourner d'elle», écrit Tibi, qui considère que les tenants de la multiculturalité constituent une "dangereuse combinaison de stupidité et d'ignorance délibérée" et font montre d'un haut degré d'intolérance! Tibi ne cesse, tout au long de ses ouvrages, de critiquer très sévèrement l'idée de tolérance occidentale, qui est une tolérance mal comprise, et qui conduit à accepter le voile islamique; celui-ci n'est rien d'autre que le symbole publicitaire d'un islam en marche en nos murs; pire, l'Europe accepte que des fondamentalistes algériens, qui ont assassiné des milliers de femmes et d'enfants, reçoivent purement et simplement l'asile politique en Occident, où ils peuvent continuer tranquillement à faire du prosélytisme. Tibi crache tout son mépris à l'endroit de la dictature intellectuelle qu'exerce en Europe la "political correctness", avec "son utilisation inflationniste de concepts dénaturés, hissés au rang de slogans creux, tels 'l'extrême-droite', le 'racisme' et la 'xénophobie' ". Il s'insurge enfin contre les interdits qu'érigent les intellectuels de gauche, qui font l'opinion. Ce sont eux qui sont les inventeurs du multiculturalisme.
Une idéologie de gauche…
Bassam Tibi exprime clairement son rejet des marxistes actuels, avec lesquels il se trouvait sur les barricades en mai 68: «Ces idéologues des années 60, qui rêvent tout haut, qui demeurent étrangers au monde, ont troqué leurs slogans utopiques, répétés à satiété, qui nous parlaient d'une société sans classe contre une vision multiculturelle de la société. C'est comme cela qu'ils règlent leurs comptes avec les valeurs occidentales. Leur révolution, qu'ils ont tant attendue, et qui devait se diriger contre un système haï, est restée lettre morte, tant ici que dans le tiers monde. Aujourd'hui, nous, les étrangers et les immigrés, devrions devenir leurs complices, pour que soient enfin réalisés leurs rêves éthérés et pour que le système, qu'ils abominent, soit ébranlé jusqu'en ses tréfonds». On comprendra que Bassam Tibi n'est guère apprécié aujourd'hui par ses anciens compagnons de combat…
Une culture directrice
Bassam Tibi présente à l'Europe un miroir et ce qu'il lui fait voir ainsi ne correspond pas à l'image idyllique que véhiculent les médias. Tibi plaide en faveur d'un "euro-islam", qui accepte et respecte l'identité européenne et partage les valeurs et les normes occidentales. Il estime que la culture européenne, dans ce processus, doit demeurer la culture directrice, la culture-guide, la culture sur laquelle on s'orientera. Tibi plaide pour un dialogue sans tabous. Mais pour en arriver là, il faut du courage politique et il faut "abandonner la censure qu'exercent la political correctness et le moralisme trivial et vulgaire, qui en découle, afin de pouvoir résoudre les véritables problèmes. Cela signifie surtout qu'il faut appeler un chat un chat". Et Tibi s'y emploie avec une verve incontestable. Selon lui: «L'intégration n'est possible que si nous enterrons définitivement l'idéologie multiculturaliste». Cette philippique contre le faux idéal d'une société multiculturelle et ce vibrant plaidoyer pour l'identité européenne nous viennent d'un "allochtone": ce qui en dit long, nous force à agiter nos méninges mais indique aussi, espérons-le, que le vent est vraiment en train de tourner… Les droites nationales et populistes trouveront à coup sûr dans l'œuvre de Bassam Tibi une mine d'arguments; l'auteur est indubitablement un allié féal de ces droites populistes dans leur combat pour la spécificité européenne, pour ses valeurs et ses normes. Nous demandons à tous nos lecteurs de lire attentivement l'œuvre de ce courageux politologue allemand de souche syrienne!
Ludo LEEN.
(ex : Vlaams Blok Magazine, n°11/novembre 2002; références du livre de Bassam Tibi traduit en néerlandais: TIBI, Bassam, Europa zonder identiteit. De crisis van de multiculturele samenleving, Deltas, 2002, 287 pages, ISBN 90-243753-8X).
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F. Ranson: communication / Congres Euro-Rus (15 maart 2008)

Communicatie van Frederic Ranson op het Congres van Euro-Rus (15 maart 2008)
Geachte aanwezigen,
Als wij hier vanmiddag bijeenzijn, dan is dat omdat wij het belang beseffen van Europees-Russische broederschap. Want alleen broederschap – en precies die broederschap – is in staat om toekomstige broederoorlogen voorkomen en de noodlottige gevolgen van de voorbije oorlogen uitwissen. We zijn hier echter niet bijeen om “Europa's nederlaag” (of nederlagen) te herdenken, te betreuren of te beklagen, want meer dan zestig jaar Amerikaanse bezetting van Europa mag geen reden zijn om de wonden te likken of de slagen te tellen.
Het onderwerp van deze uiteenzetting luidt dus: het eurazisme. Dat is – kort en bondig gezegd – het wezen van élke Russische geopolitiek. Rusland is door zijn geografische werkelijkheid immers een Euraziatisch land. Elk politiek regime – tsaristisch, communistisch, democratisch – is vanuit een zeker pragmatisme en realisme gedwongen met die werkelijkheid rekening te houden. Er zijn verschillende interpretaties van het eurazisme, maar in het licht van deze uiteenzetting zijn vooral het ideologische eurazisme van Alexander Doegin en het pragmatische eurazisme van Vladimir Poetin van belang. Het eurazisme is oorspronkelijk ontstaan in de jaren ’20 in kringen van Russische bannelingen. In de loop van de jaren ’30 is de ideologie echter van het politieke toneel verdwenen voor een lange tijd. Sinds de jaren ’90 is ze in een geactualiseerde vorm terug van weggeweest.
Het ideologische eurazisme is interessant voor ons, omdat het beweert een “wetenschappelijk patriottisme” te zijn. Het bouwt vooral voort op inzichten uit de Duitse en de Angelsaksische geopolitiek, want een eigen Russische geopolitiek heeft nooit echt bestaan. Geopolitiek werd in de USSR afgedaan als een “valse, imperialistische pseudo-wetenschap”. Het eurazisme vult de inzichten uit de Realistische geopolitiek aan met die uit de Traditionalistische cultuurkritiek. De dynamiek van landmachten en zeemachten wordt hierbij in een radicale zin toegepast op beschavingen. Alexander Doegin schrijft zelfs: “Alleen beschavingen van het land kunnen stabiele waardestelsels voortbrengen”. Het eurazisme ziet beschavingen als de uitkomst van een wisselwerking tussen bevolking en ruimte. De frontlijn van de “beschavingenoorlog” loopt volgens het eurazisme tussen oosterse en westerse beschavingen. Het Oosten heeft Rusland als kernland en geldt als de bakermat van de Traditie. Het Westen heeft de Verenigde Staten als kernland en geldt als de bakermat van de Moderniteit. Pal op de frontlijn ligt dus Europa. René Guénon schrijft echter: “Het is essentieel te benadrukken dat de tegenstelling van het Oosten en het Westen geen enkele bestaansreden had, toen er ook in het Westen nog traditionele beschavingen waren. Ze heeft slechts zin als het in het bijzonder gaat om het moderne Westen, want die tegenstelling is veel meer die van twee geesten dan die van twee meer of minder scherp gedefinieerde geografische entiteiten”. Het eurazisme ziet de moderne geopolitiek tot slot als de voortzetting van de traditionele “sacrale geografie”. Die laatste is de geïnduceerde kosmisch-religieuze symboliek volgens welke traditionele volkeren hun geografische ruimte zouden inrichten. De grondgedachte is dus dat ruimte – net zoals tijd – een kwalitatief en geen louter kwantitatief karakter heeft. Die gedachte vormt precies het uitgangspunt van de moderne geopolitiek.
De concrete invulling van Eurazië of Groot Europa gaat van een Euraziatische optie (Europa en Rusland, inclusief het GOS) tot een Eurosiberische optie (Europa en Rusland, exclusief het GOS). De eerste benadrukt vooral de factor ruimte (geopolitiek) en de tweede vooral de factor bevolking (biopolitiek). Pleiten voor een “Eurosiberië” (Guillaume Faye) en vooral voor een “Europa van Gibraltar tot aan de Oeral” (Charles de Gaulle) is eigenlijk pleiten voor een geopolitiek verminkt Rusland. Jean Thiriart schrijft: “Een Europa ‘tot aan de Oeral’ zou het verlies betekenen van de Russische gebieden gelegen ten oosten van de Oeral en de aanwezigheid van een supermacht, China, op een voetstap van Moskou! Als men stelt dat de roeping van Rusland Europees is, kan men geen voor de helft geamputeerd Rusland aanvaarden”. Het zou ook een ongelooflijke dwaasheid zijn om op grond van oude nationalistische vetes Turks-islamitische en Slavische-orthodoxe volkeren tegen elkaar op te zetten in Centraal Azië. Temeer daar het neoconservatieve Project for the New American Century (PNAC) pleit voor de vorming van pro-Amerikaanse en (pro-Israëlische) bruggenhoofden, zowel in het Midden-Oosten als in Centraal Azië. Die bruggenhoofden dienen volgens het PNAC – letterlijk – om alle “mogelijke rivalen of levensvatbare alternatieven voor Amerika’s visie op de vrijemarkteconomie” uit te schakelen.
Onder Vladimir Poetins bewind is het pragmatische eurazisme geleidelijk de staatsdoctrine geworden. Doegin schrijft: “Dikwijls lijkt onze maatschappij van buiten gezien hecht, hoewel de elites eigenlijk wanordelijk en afzonderlijk handelen. In de Verenigde Staten lijkt de maatschappij echter van buiten gebarsten, maar de elites handelen saamhorig en zorgvuldig. In het algemeen bezit de ware Amerikaanse elite – de WASP of zelfs de nieuwe types van de Afro-Amerikaanse elite (Condoleezza Rice) – talrijke kenmerken van een taai totalitarisme”. Europa mist – in tegenstelling tot Poetins Rusland – nog steeds “imperiale wil”, zoals Marcello de Angelis schrijft. Die laatste stelt terecht dat het Europese lichaam wordt gestuurd door Amerikaanse hersenen. Na de Koude Oorlog bedacht oud-minister James Baker dan ook de Amerikaanse strategie dat de transatlantische betrekkingen gelijke tred moesten houden met de Europese eenmaking. Kortom, het Europese lichaam heeft veel weg van een kadaver of een zombie. Julius Evola schrijft: “Zolang er een schim blijft en zolang in het bloed nog een echo weerklinkt van de handeling van het hogere element, blijft het gebouw overeind. Het lichaam lijkt nog een ziel te hebben. Het kadaver – volgens de beeldspraak van Gobineau – loopt nog en kan nog neerslaan wie het op zijn weg ontmoet. Als het laatste spoor van hogere kracht en geestesras in de afstammelingen uitgeput is, is er niets meer. Geen enkele bedding kanaliseert de stroom, die zich in alle richtingen verspreidt”. De beeldspraak met betrekking tot Europa was te mooi om u te onthouden.
De oorlogen in de onderbuik van Eurazië (Balkan, Kaukasus, Mesopotamië) dienen – zoals onder meer het PNAC beweert – de mogelijke totstandkoming van een Groot-Europese of Euraziatische geopolitieke identiteit te verhinderen. Zij dienen natuurlijk de Amerikaanse en Israëlische “nationale” belangen, maar belangrijker nog: ook die van de Nieuwe Wereldorde (NWO). Dat wil zeggen: de wereldorde die de stichters van de Verenigde Naties (en voordien: de Volkenbond) voor ogen hadden, maar die door het intermezzo van de Koude Oorlog (en voordien: de Tweede Wereldoorlog) nooit kon worden verwezenlijkt. Sinds de val van de USSR is dat wel mogelijk. De uitkomst van de Koude Oorlog – einde van de bipolaire wereldorde en strijd om een unipolaire of een multipolaire wereldorde – toont aan dat het messianisme, het internationalisme en het imperialisme dat van het kapitalistische Westen uitgaat véél gevaarlijker is dan dat van het communistische Oosten ooit is geweest. Het is niet voor niets dat heel wat Joods-Amerikaanse trotskisten zich in de jaren ’70 bekeerden tot het neoconservatisme. Ze zagen dat het communisme als “emanciperende kracht” was ingehaald door het amerikanisme en verweten de USSR haar steun aan de Arabische nationalistische regimes. De échte vlag van de “permanente revolutie” is de Amerikaanse Stars en Stripes gekoppeld aan de Israëlische Davidsster. Elke keer als die revolutie een land verovert, voegt ze een ster aan haar vlag toe. Voorlopig staat de teller op vijftig. De neocons worden dikwijls “gelaarsde Wilsonianen” genoemd, omdat ze de NWO unilateraal of unipolair interpreteren. Ze vinden dus dat de actieradius van het “democratische” Amerika en het “democratische” Israël onbeperkt moet zijn om de NWO te kunnen handhaven.
De voorstelling van het “rode gevaar” (het communisme) blijkt achteraf gezien schromelijk overdreven. Even overdreven is nu de voorstelling van het “groene gevaar” (het islamisme). Beide waanvoorstellingen dienen alleen om de transatlantische betrekkingen te verstevigen. De VSA hebben geen vijanden meer. Doegin schrijft: “De ‘vijand’ is fictief. Het ware doel is een manipuleerbare structuur te scheppen”. Het spel van de huidige unipolaire (nieuwe) wereldorde – de VSA als (militaire) supermacht – is niet met de ene tegen de andere, maar het is de manipuleerbare structuur zelf. Het is die structuur die het heartland en de rimlands van Eurazië tegen elkaar uitspeelt, zoals onder meer tot uiting komt in de bevroren conflicten en de gekleurde revoluties. De VSA scheppen stelselmatig denkbeeldige vijanden, dringen die door een angst- en veiligheidspsychose aan de wereld op en lokken oorlogen uit. Ze hebben wat dat betreft een historische palmares om u tegen te zeggen. Die manipuleerbare structuur doet enigszins denken aan films als The Matrix, V for Vendetta en Wag the Dog. De enige mogelijke vijanden van de VSA zijn politieke regimes die groot en sterk genoeg zijn om hun wereldorde in vraag te stellen. Wat als Rusland, het heartland van Eurazië, groot en sterk genoeg zou zijn om dat te doen?
We zijn bijna gekomen tot de harde kern van de Amerikaanse wereldorde en het Amerikaanse “nationale” belang. Dat wil zeggen: de optelsom van de verschillende financieel-economische belangen. De VSA willen koste wat het kost de heerschappij van het “Dollar Wall Street Regime” (DWSR) handhaven. Met de dollar als belangrijkste internationale reservemunt kunnen de VSA ongestraft reusachtige tekorten (schulden) opstapelen en de rest van de wereld ervoor laten betalen. De rest van de wereld leggen ze een strenge financiële discipline op door middel van het Internationale Muntfonds en de Wereldbank. Rik Coolsaet schrijft: “De NAVO-aanval op Servië en de invasie van Irak hadden vele doelstellingen, maar één van de belangrijkste volgens [Peter] Gowan was het zaaien van strategische verdeeldheid in Europa en het zoeken naar nieuwe Europese bondgenoten, zoals Polen, Roemenië en Bulgarije om een eventuele Europees-Russische as geopolitiek af te snijden. De Verenigde Staten zijn voorlopig geslaagd in hun opzet Europa en Oost-Azië ondergeschikt te maken aan hun imperium”.
Een kleine uitweiding over het reilen en zeilen van de financieel-economische wereldorde is dus op zijn plaats. Zij is eigenlijk niets anders is dan een 300 jaar oud Ponzi-schema. Dat is te vergelijken met een piramidespel waarbij vroegere inleggers worden betaald met het geld van latere inleggers, tot er geen geld van nieuwe inleggers meer kan worden gevonden en de laatste inlegger het gelag betaalt. Er moet dus voortdurend nieuw geld in de economie worden gepompt en dat geld wordt gecreëerd door leningen van commerciële banken. Die leningen voorzien wel in het kapitaal, maar niet in de interesten die noodzakelijk zijn om hen te betalen. Aangezien centrale en commerciële banken de enige bron van nieuw geld zijn, moeten ze voortdurend nieuwe leners vinden. Nieuwe bronnen van schuld – economische zeepbellen – moeten worden aangewakkerd om nieuwe investeerders te lokken. De leenvoorwaarden worden daarom stelselmatig verlaagd. De zeepbellen spatten – zoals elk Ponzi-schema – uiteen, van zodra er een gebrek is aan investeerders. Het bankwezen is dus één grote fraude. Het kan immers dankzij “fractionele reserves” aan de lopende band onbestaand krediet verlenen. Zeepbellen of conjunctuurschommelingen worden ons echter voorgesteld alsof ze als weersschommelingen zouden zijn, terwijl ze het gevolg zijn van het lenen met fractionele reserve. De groei van de reële economie en de (onevenredige) toename van de geldhoeveelheid (inflatie) zijn noodzakelijk om de interesten te betalen en dus een schuldeneconomie overeind te houden. De laatste zeepbel die is uiteengespat, is natuurlijk de Amerikaanse vastgoedmarkt. Met de gekende gevolgen van dien (dreigende recessie en stagflatie). Veel imperialismetheoretici zien in het financiële kapitalisme de oorzaak van het geopolitieke imperialisme.
Gabriele Adinolfi schrijft: “Eens de rekeningen met onszelf vereffend zijn – in ons geweten – moeten we de tweede vijand identificeren, de vijand van allen: de internationale van de misdadigers, de multinationale maffia die de overwinning heeft behaald tijdens de Tweede Wereldoorlog en over de planeet regeert door de rationalisering van de drugstrafiek en de stelselmatige plundering van de grondstoffen, terwijl ze hongersnood, volkenmoord, wanhoop, migraties en onrecht exporteert op alle niveaus. Die maffia is sterk door drie onscheidbare elementen: de Amerikaanse militaire supermacht, de hypnotische campagnes van de planetaire medianetwerken, de lafheid van de politieke en intellectuele klassen. Die laatste hebben nooit een innerlijke revolutie uitgevoerd en zijn dus noch fier noch vrij”. De wereldeconomie staat of valt met internationale geldstromen. Adinolfi voegt aan de witte geldstromen van het bankwezen nog eens de zwarte geldstromen van de georganiseerde misdaad toe. Beide zijn de levensaders van de financieel-economische wereldorde. Zij voeden het financiële kapitalisme en het dollar-imperialisme, de instrumenten waarmee Europa en de Derde Wereld worden gewurgd. Om periodieke recessies van de Amerikaanse economie – de melkkoe van bankiers en speculanten – te voorkomen, voeren de VSA periodiek oorlog. Het financiële kapitaal vindt hierbij dikwijls een bondgenoot in het militair-industriële kapitaal. Kortom, woekeraars en wapenhandelaars slaan de handen in elkaar. Als we het “populaire” antikapitalisme en dito anti-imperialisme van hun holle frasen willen ontdoen, dan moeten we eerst en vooral weten welk kapitalisme en welk imperialisme we bestrijden. Anders spuien we dezelfde onzin als de zelfverklaarde No-Globals of New-Globals, die het Amerikaanse imperialisme in Europa een “bevrijding” en in Irak een “bezetting” noemen…
Het is de hoogste tijd dat we als Europese nationalisten de daad bij het woord te voegen. Ruim zestig jaar Amerikaans imperialisme in Europa met militaire bezetting, culturele vervreemding, financiële uitbuiting en morele verwildering van ons continent tot gevolg: het is genoeg geweest! We moeten het verzet organiseren – sociaal, nationaal, continentaal – en mogen geen kostbare tijd meer verliezen in achterhoedegevechten. Adinolfi schrijft: “Hoe dus die revolutionaire elite vormen? In feite vóór alles door op haar in te werken. Dat alles niet met zelfbevrediging tot doel, maar gericht op een antropologische mutatie. Die laatste laat toe om de achterhoede te verlaten […] om over te gaan tot de voorhoede van een revolutionair proces, zoals de macht Europa of de macht Eurazië. Een dergelijke macht zal niet kunnen worden uitgedacht – en nog minder verwezenlijkt – zonder de deelname van mensen en elites van diverse herkomst, zoals het geval is in elke revolutie. Want de breuklijn tussen links en rechts is vals. Zij bestaat slechts in de stilstand, de stagnatie”. Doegin ziet dan weer de “absolute revolutionair” – die links en rechts overstijgt – als “ascetisch, Spartaans, bijna bovenmenselijk. Dat ideaal van de beroepsmatige revolutionair – volledig gewijd aan zijn zaak – zal later worden hernomen door Sorel, Niekisch, Che Guevara en Thiriart”.
Tot besluit: de vrijheid van de Europese volkeren hangt af van die van de gehele Europese ruimte, zoals de vrijheid van de delen steeds afhangt van die van het geheel. Het zijn de kuiperijen van de VSA die de Europese volkeren en de Europese ruimte verdeeld houden en waarop veel nationalisten geen antwoord hebben. Ze verliezen zich liever in oude vetes met broedervolkeren en zijn zelden in staat om hun “tweedimensionale” wereldbeeld – de manipuleerbare structuur – te verlaten. Ze leven in Flatland en hebben geen besef van een Europese (derde) dimensie, laat staan van een Euraziatische. Het is dus onze taak om daartegenover een “driedimensionaal” wereldbeeld te plaatsen met een verticale as, die de achterhaalde tegenstellingen moet overstijgen. Groot Europa (Eurazië) moet een “imperiale wil” ontwikkelen om de uitdagingen van het derde millennium aan te kunnen. We moeten – zoals Francesco Mancinelli zegt – het volgende drieluik bewerkstelligen: “1) het Euraziatische vaderland en de idee van een Derde Rome; 2) de filosofische en culturele strijd tegen het globalistische monotheïsme en tegen de globalisering; 3) de ontvoogding en vervolgens de bevrijding vanonder het juk van het westerse Anglo-protestants-Amerikaans-kapitalistische blok”. Het leidmotief dat onze beschaving uit het slop kan halen, is de revolutie van het Eeuwige Rome en het Eeuwige Rijk. Van het Vestaalse vuur kunnen we nu nog een zwak schijnsel zien in Moskou. Maar dat zal moeten volstaan om weldra Parijs, Berlijn en alle andere Europese hoofdsteden aan te steken! Ik dank u voor uw aandacht. Carthago delenda est!
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dimanche, 06 avril 2008
Comment fonctionne la pensée racialisante en Chine?

Moestasjrik/’t Pallieterke :
Comment fonctionne la pensée racialisante en Chine
La pensée chinoise pré-moderne, quand elle aborde la question des peuples étrangers, oscille entre deux pôles : elle se présente parfois comme un ethno-racisme, la plupart du temps comme un « universalisme de civilisation ». Cet « universalisme de civilisation » est l’idéal du confucianisme : la civilisation du milieu intègre graduellement toutes les tribus de la périphérie, soit les barbares des « si yi », ou des « quatre directions (du vent) ». Cette approche des barbares s’appelait « yong xia bian yi », soit « utiliser les mœurs chinoises pour transformer les barbares ». Les minorités intérieures « hanhua », deviennent chinoises, tandis que les étrangers « laihua », vont et viennent.
Les étrangers, hors milieu, dans une telle vision, n’ont pas d’identité digne d’être mentionnée, sauf qu’ils ne sont pas chinois ou ne sont qu’au début du processus qui fera à terme d’eux des Chinois. Si tout se déroule correctement, l’ensemble de l’humanité finira par participer à la civilisation (chinoise). L’harmonie universelle sera alors un fait acquis, et chacun sera heureux. Je vous le dis directement : je trouve que ce scénario est lumineux. Mutatis mutandis, nous pourrions nous-mêmes reprendre cette approche pour résoudre la problématique de nos propres relations difficiles avec les peuples qui sont nos voisins et que nous jugeons moins civilisés, de même qu’avec nos immigrés. L’Empire romain a du reste mené une politique similaire à l’endroit des Germains, Sarmates et autres peuples cavaliers turbulents.
Le grand exemple historique d’une intégration réussie des barbares au sein de la civilisation chinoise est celui de la dynastie Zhou (du 12ième au 3ième siècle av. J. C.). Pendant le deuxième millénaire avant J. C., cette dynastie relevait d’une tribu barbare errant le long de la frontière occidentale de l’Empire chinois qui s’est progressivement sinisée en servant l’Empereur Shang ; cette tribu montait la garde sur les marges de l’Empire face aux « vrais barbares ». Dans le langage de l’Europe féodale, nous dirions que le chef Zhou était un « markgraaf », un « comte des marches ». Lorsque les Shang entrèrent en décadence, les Zhou commirent un coup d’Etat, péripétie de l’histoire chinoise qui forme l’arrière-plan du livre des oracles bien connu, le Yijing (ou « I Tjing »), ou « Livre des Transformations ». Les débuts du régime des Zhou seront considérés plus tard par le confucianisme féodal et conservateur comme l’idéal d’une société ordonnée et équilibrée.
Cependant, tous les peuples barbares ne se laissèrent pas aussi aisément domestiquer. Certains d’entre eux restèrent menaçants, pendant des siècles, le long des frontières, comme les Huns contre qui la Grand Muraille de Chine fut construite. D’autres réussirent même à occuper certaines parties de l’Empire. Deux d’entre eux purent même soumettre la Chine toute entière : les Mongols, qui formèrent par après la dynastie Yuan (1277-1367) et les Mandchous qui donnèrent la dynastie Qing (1644-1911). Ces deux peuples menèrent, en tant que castes dominantes, une sorte de politique d’apartheid à l’encontre des Chinois. Sous la République populaire, ils furent rapidement sinisés, une promotion que l’on réservait également aux Tibétains. Quand un long combat opposait la Chine à des peuples étrangers ou quand elle était occupée par ces derniers, une sorte de conscience raciale émergeait. Dans la pensée racialisante qui en découlait, on se mit rapidement à faire le lien entre l’aspect (physique) de l’étranger et son manque de culture chinoise : « S’il n’est pas de notre race, alors son cœur et son esprit sont autres », dit une chronique féodale du 4ième siècle avant J.C.
Caractéristiques et couleurs
Les barbares vivant dans la sphère d’influence chinoise sont désignés par leur propre nom ethnique, ou désignés collectivement par l’expression de « barbares cuits » ; les barbares de l’extérieur sont, eux, les « barbares crus », ou, plus habituellement, les « diables » ou les « bêtes ». Dans les idéogrammes chinois, on ajoutait à la graphie de leur nom le signe signifiant « reptile » pour désigner les barbares du sud, ou les signes signifiant « chèvre » ou « chien » pour les barbares du nord. Les Japonais et leurs collaborateurs chinois, pendant la seconde guerre mondiale, firent de même avec les caractères « Ying », pour les Anglais, et « Mei », pour les Américains. Cette façon de procéder perpétuait en fait l’habitude primitive et universelle de ne considérer que son propre peuple comme humain.
Parfois les barbares sont désignés par des caractéristiques corporelles. Pour ce qui concerne les couleurs, le blanc, pour la peau, est la couleur des Chinois, à côté du jaune solaire, couleur symbolique du « milieu ». Le noir ou toute autre couleur sombre désigne les divers peuples barbares : par exemple, les méridionaux foncés d’Indonésie et, après les importations d’esclaves par les Portugais, les étrangers venus d’Afrique. Les couleurs sombres désignent aussi les ressortissants d’Asie centrale qui sont à peine plus basanés que les Chinois, notamment les robustes Tibétains, qui leur font peur. Les étiquettes colorées, attribuées aux peuples, étaient donc fantaisistes : ainsi les peuples d’Inde méridionale et d’Arabie étaient décrits comme « violets ». Les esclaves, quelle qu’ait été leur race, qui travaillaient en plein soleil, se voyaient attribuer le terme de « faces de suie ». Les Blancs étaient décrits comme froids, grands, velus, barbus, roux, « blancs comme la cendre » et « aux yeux de couleur ». Parfois les peuples se voyaient attribuer une couleur qui n’était pas celle de leur peau, de leur aspect extérieur, mais qui faisait référence au point cardinal dont ils provenaient : ceux de l’Est étaient « verts-bleus », ceux du sud, « rouges », ceux de l’ouest, « blancs », ceux du nord, « noirs » et ceux du milieu, « jaunes ». Sans doute parce que les Mongols utilisaient le même langage pour leur propre Empire, le terme de « Russie Blanche » ou « Biélorussie », signifierait en fait « Russie occidentale ».
Mis à part les invasions militaires étrangères, l’introduction pacifique du bouddhisme indien en Chine donna lieu à des spéculations inamicales relatives aux différences raciales. D’après les exposants du taoïsme chinois, le bouddhisme était inadapté à la nature raciale des Chinois. Bouddha avait dû inventer des règles très strictes contre la violence, l’avidité et le vice parce que son propre peuple était un ramassis de sauvages et ne connaissait pas la mesure, alors que les Chinois, eux, possédaient par eux-mêmes le sens de la mesure et de l’harmonie.
En bref, comme le reste de l’humanité, les Chinois ont eu tendance, eux aussi, à procéder à des distinctions d’ordre racial. Aux 19ième et 20ième siècles, ce racisme de circonstances, dépourvu de systématicité, deviendra une pensée racialiste quasi scientifique.
Moestasjrik / ‘t Pallieterke.
(article paru dans « ‘ t Pallieterke », Anvers, 26 mars 2008, traduction française : Robert Steuckers).
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samedi, 05 avril 2008
Armée américaine: bilan noir en Irak et noyautage par les fondamentalistes religieux

M. / ‘t Pallieterke :
Armée américaine : bilan noir en Irak et noyautage par les fondamentalistes religieux
La manière dont une armée est structurée révèle bon nombre de choses quant aux priorités des dirigeants politiques de son pays : c’est vrai pour l’armée américaine, dont nous évoquerons la situation ici, comme pour toutes les autres armées du monde. L’ancien ministre américain de la défense, Donald Rumsfeld, avait une idée fixe sur les forces armées idéales du 21ième siècle. Elles devaient être peu nombreuses, disposer d’un haut degré de technologie et être capables de pouvoir intervenir rapidement, y compris dans des conflits de dimensions limitées. Le fétiche de Rumsfeld était l’avion Stealth, qu’il a promu comme un mot d’ordre. Et Rumsfeld fut exaucé. A l’avant-veille de l’invasion de l’Irak, nombreux furent les militaires qui tirèrent la sonnette d’alarme à Washington. Le problème, disaient ces sceptiques, n’allait pas être la neutralisation de l’armée irakienne par frappe militaire mais bien l’occupation d’un pays dont la surface totale est plus grande que l’Allemagne. Ce n’est pas faisable avec seulement 150.000 hommes. Il faut pour cela une armée bien plus nombreuse. Le reste de l’histoire est bien connu aujourd’hui, alors que l’on vient de « fêter » le premier lustre de l’aventure militaire américaine en Irak. Ces dernières semaines, les critiques ont fusé de partout. La situation est différente de celle de 1991, lorsque, sous Bush Senior, l’invasion de l’Irak s’est effectuée avec une armée constituée au temps de la Guerre Froide. Sous Bush Junior, l’armée américaine, en 2003, est le résultat d’une réforme générale qui a surtout visé une réduction considérable des effectifs.
Les discussions, débats et enquêtes sur les armées induisent souvent en erreur et donnent l’impression que l’on traite de quelque chose d’abstrait. Mais les soldats sont bien entendu des hommes de chair et de sang. Dans le cas de l’armée américaine, ils sont tous des volontaires. Certains d’entre eux sont mêmes des illégaux aux Etats-Unis. Ils ont choisi d’être incorporés pour servir leur futur pays, car leur engagement leur permet d’obtenir la fameuse « carte verte » (« green card »), le document sésame qui leur donne accès au territoire et au marché du travail. Une telle armée de professionnels ne nous donne évidemment pas une image exacte de la société dont elle est issue ni même des catégories d’âge qui la composent.
Première constatation : dans les forces armées américaines certaines catégories sont sur-représentées, comme les Afro-Américains, les Hispaniques et, si l’on focalise notre enquête sur la géographie des Etats-Unis, la plupart des volontaires viennent surtout du sud et des zones rurales. Et puis, il y a ceux qui reviennent à l’état de cadavre, dans les sinistres sacs du gouvernement. Proportionnellement, le nombre de Blancs, parmi les hommes tombés au champ d’honneur, est assez élevé. Cela semble étrange car le cliché de la guerre du Vietnam, qui veut que ce furent surtout les Noirs qui tombèrent au combat, reste tenace (la réalité est toutefois plus nuancée). Bon nombre d’enquêtes montrent toutefois que les soldats servant dans les unités combattantes sont plus « blancs » que ceux incorporés dans les autres unités. Cette disproportion est déjà en soi fort instructive. Sur un plan, la comparaison avec la guerre du Vietnam est pourtant intéressante. Le nombre de tués par soldat engagé en Irak est 5,6 fois moins élevé qu’au Vietnam. L’utilisation de méthodes et de techniques médicales modernes (p. ex. : aller vers le soldat blessé plutôt que l’évacuer vers l’arrière) et de gilets pare-balles y ont considérablement contribué. De cette manière, on a réussi à augmenter de 50% la moyenne des blessés qui demeurent finalement en vie, par rapport aux chiffres du Vietnam. Il n’en demeure pas moins que le nombre de tués dépasse désormais les 4000 militaires. Malgré toutes les difficultés, la guerre en Irak est la moins sanglante de l’histoire américaine.
Entre la composition d’une armée professionnelle et celle, plus large, de la société, peut exister une césure béante. Les Noirs « pauvres », les Hispaniques illégaux, tous ont leurs raisons de suivre l’appel de l’Oncle Sam. Mais, fait nouveau, les extrémistes religieux de la droite chrétienne, s’engagent, eux aussi. « Nous avons au sein de notre armée des talibans chrétiens et un Al-Qaeda chrétien », écrit Michael Weinstein, fondateur de la « Military Religious Freedom Foundation ». Le souci de voir s’accroître l’influence des chrétiens radicaux au sein de l’armée américaine amena ce Weinstein à créer cette fondation en 2005. L’engouement pour les idées chrétiennes radicales, explique-t-il, a considérablement augmenté au cours de cette dernière décennie. Il y a vingt ans d’ici, leur influence était négligeable. Aujourd’hui, jusqu’à 30% des soldats auraient des sympathies pour ce mode d’exprimer sa foi. Il en veut pour preuve l’existence de l’association « Officers’ Christian Fellowship », une amicale pour officiers qui a installé des sections dans toutes les bases d’une certaine importance. La charte de cette association ne laisse aucun doute quant à ses projets : l’armée doit être remodelée sur le plan spirituel ; les militaires doivent devenir des ambassadeurs du Christ et porter leur uniforme, là où se trouve l’Esprit Saint. Ce phénomène se développe-t-il au sein de l’armée américaine comme il s’était développé dans l’armée israélienne auparavant ? Malgré les difficultés de recrutement que rencontre l’Etat hébreu, on constate que les troupes des unités opérationnelles comptent de plus en plus d’extrémistes religieux. Notre intention n’est pas d’amplifier le phénomène mais celui-ci, objectivement, ne mérite-t-il d’éveiller notre intérêt ?
M. / ‘t Pallieterke.
(article paru dans « ‘t Pallieterke », Anvers, 26 mars 2008, traduction française : Robert Steuckers).
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vendredi, 04 avril 2008
De Hobbes aux pressions, boycotts et conspirations du silence

Pankraz :
De Hobbes aux pressions, boycotts et conspirations du silence
On les reconnaîtra à leurs paroles et mots favoris. Le terme favori, dans la sphère politique allemande d’aujourd’hui, est « pression », plus exactement « faire pression », soit « Druck » et « Druck ausüben ». On ne débat plus ensemble, on ne cherche plus à se convaincre par des arguments (réfléchis et pesés), on ne domine plus l’adversaire politique par son excellence argumentative ou rhétoricienne, non, on se borne à « faire pression », sans discontinuité, pendant de longs laps de temps. Les actualités télévisées, les informations de nos journaux fourmillent de « pressions » exercées, qu’elles soit imposées ou subies. « La pression sur la Chine dans la question du Tibet va en s’accroissant », annonçait, en début d’émission, il y a quelques jours, la speakerine des actualités quotidiennes de la chaîne ARD.
La rhétorique de la « pression exercée ou à exercer » s’est considérablement déployée et ne fait que croître chaque jour davantage, se dotant de nouvelles tournures et expressions. Jadis, on préparait toutes sortes de menaces en coulisses ; aujourd’hui, on prépare des « pressions », toujours en coulisses. Le cas échéant, la pression est accentuée systématiquement ; on ne la modère que rarement. On épuise totalement le potentiel de pression dont on pense disposer. Que ce soit l’ami ou l’ennemi qui soit visé, peu importe. Même et surtout les forces qui sont alliées au fauteur de pression ressentent la pression qu’il exerce sur elles, si besoin s’en faut. C’est certain : la pression politique, en tant que telle, est axiologiquement neutre.
Parallèlement à l’exercice de la pression augmente également la capacité de lui résister. La phrase usuelle, « Nous ne nous laisserons pas mettre sous pression », qu’elle soit prononcée sur un ton moqueur ou sur celui de l’indignation, appartient désormais au répertoire standardisé des politiciens, qui sont inévitablement mis sous pression ou tentent de se défendre contre les pressions exercées par des forces ennemies ou alliées. Pourront-ils, sur le long terme, résister à la pression ? Ou cèderont-ils, à la longue, aux multiples pressions qui s’exercent sur eux ? Ou crouleront-ils, défaits, sous le poids de celles-ci ?
En quoi consiste l’essentiel de l’exercice moderne de la pression ? Aujourd’hui, on n’exerce quasiment plus de pression par moyens militaires, en faisant manœuvrer des armées le long d’une frontière, en massant des troupes, etc., car pour déclencher une guerre, on dispose désormais de rampes de lancement dûment installées sur terre, sous eau ou sur orbite, qui peuvent frapper immédiatement, sans le moindre délai. Personne ne se laisse plus impressionner, mettre sous pression par ces engins télécommandés, surtout pas les grandes puissances, car elles sont prêtes à riposter efficacement à tout moment. Ce n’est pas davantage le cas des plus petites puissances car l’éventualité de se faire envahir ou mater militairement appartient à leur quotidien ; elles ne considèrent plus cela comme une pression mais comme une fatalité qui peut survenir à tout moment.
La pression économique, de manière similaire, que l’on appelle aussi le « boycott », est devenue inefficace. Les « boycottés » s’habituent assez vite à ce mode de pression et l’acceptent avec une certaine sérénité. Il suffit de songer à Cuba. Depuis cinquante ans, le boycott américain sévit contre l’île et, indubitablement, il nuit à son déploiement économique. Mais le régime cubain ne s’est jamais effondré.
Non, la véritable pression aujourd’hui -qui n’est pas seulement une pression exercée dans le cadre de la politique extérieure mais constitue surtout un instrument en politique intérieure- ne consiste pas en moyens militaires ou économiques, mais en méthodes sémantiques et en pressions sur le quotidien. Dans la vie mondaine actuelle, on appelle cela le « mobbing », vocable anglo-saxon, ou en bon vieil allemand, le « Bierverschiss », sorte de mise en quarantaine démonstrative et affirmée (ndt : en Belgique, on appelle cela le « Cordon sanitaire », que le Vlaams Belang, la NVA, Yves Leterme et certains identitaires wallons de gauche comme de droite ont subi ou subissent encore ; ajoutons que Joëlle Milquet, lors des négociations de 2007 pour la formation d’un gouvernement à utiliser toutes les ficelles du « mobbing »). On ignore ainsi consciemment et de manière ostentatoire la personne ou le groupe mis sous pression. On le réduit au silence, on lui inflige la conspiration du silence, on l’ignore, on ne le voit plus. Il ne peut plus jouer dans le jeu ou on le menace de ne plus l’autoriser à y jouer, exactement comme le font les enfants ou certains peuples primitifs quand ils ne tolèrent plus la participation au jeu social de certains membres de leur groupe ou communauté, qui se sont attirés la colère de la collectivité et doivent « être mis au pas » ou « éliminés ».
Elisabeth Noelle-Neumann est celle qui a analysé pour la première fois et de manière précise ce procédé d’exclusion dans son livre sur la « spirale du silence » (« Die Schweigespirale »). La pression née de cette exclusion, de cette quarantaine que nous appelons « Bierverschiss », est effectivement considérable et, en de nombreux cas, sinon dans la plupart des cas, très efficace parce que fort douloureuse. On ne s’y habitue qu’à grand peine ; on ne peut pas adapter avec précision son comportement sur ce mode d’exclusion, ni prévoir de manière exacte les façons dont il se manifestera à très court terme. Les directions d’où peuvent provenir ce type de pression, sont extrêmement diversifiées et exigent de celui, qui veut y résister, une attention extrême et permanente, une mobilisation pleine et entière de ses énergies. En prenant acte de ce mode de défense et de résistance, comme nous venons de le faire, on pourrait presque affirmer que ce type de quarantaine est un écolage idéal pour former une élite.
Sur ceux qui exercent cette forme de pression, celle-ci ne joue nullement un rôle formateur, capable de faire surgir une élite. La sphère politique s’infantilise et se primitivise. Ce n’est pas une élite qui émerge de cette praxis : bien au contraire, tout ce qui relève de l’ontologie humaine spécifique, c’est-à-dire des capacités à fonder la « Polis » ou l’Etat, déchoit, à vue d’œil, dans le matérialisme le plus plat. Que faut-il penser d’une « politologie » qui ramène tout à un schéma simpliste de pression et de contre-pression et ne mesure pas le carat des argumentaires et stratégies politiques à leur qualité substantielle et formelle, mais seulement au caractère purement quantitatif de la pression mécanique qui s’exerce sur des adversaires ou des compagnons de route plus ou moins récalcitrants ?
Thomas Hobbes, le grand théoricien du politique à l’aube des temps modernes en Europe, avec sa pensée rigoureusement mécaniciste, ne peut en aucun cas être mobilisé, comme figure de proue de la politologie, pour défendre une perspective aussi étroite, étriquée. Le schéma de la pression et de la contre-pression, qu’il a élaboré pour expliciter le monde organique et les « bas » instincts de la nature humaine, devait, disait-il, être résolument mis hors d’état de fonctionnement pour faire advenir le politique pur. Dans le domaine du politique pur, ce ne sont pas les pressions et contre-pressions qui doivent donner le ton, mais la volonté toute puissante du Léviathan, dans la construction politique duquel l’ensemble des autres porteurs de volonté doit ranger et soumettre ses directives, quel que soit le potentiel de pression que ses volontés et directives pourraient par ailleurs exercer.
Ou, pour parler le langage de la politique actuelle : lorsque la situation devient véritablement sérieuse, préoccupante, inquiétante, une pression vient d’en haut, de tout en haut, qui séduit chacun par le plus bel exercice de pression qui soit. Ce ne doit pas toujours être la pression du Léviathan. Pour générer la contre-pression nécessaire, la nécessité ou la misère subie hic et nunc par la patrie peut suffire ainsi que le regard conscient et offensif que portent les contestataires du désordre établi en direction des fauteurs de pression, des spécialistes du « mobbing », des experts ès-Bierverschiss, responsables de cette misère.
Jadis, les gamins de rue de Berlin, comme l’atteste une lettre de Zelter à Goethe, au temps de l’occupation napoléonienne, chantonnaient : « Druck und Stoss / Gehn in die Hos’ » (« Pressions et coups / vous vont dans la culotte »). Il n’y a pas grand-chose à y ajouter, sauf peut-être ceci : souvent les coups portent droit au cœur.
PANKRAZ.
(article paru dans « Junge Freiheit », Berlin, n°14/2008 ; traduction française: Robert Steuckers).
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jeudi, 03 avril 2008
F. Böckelmann et la perception contemporaine de l'espace

Thorsten HINZ :
Un ordre nouveau dans un monde sans frontière ?
Les réflexions du situationniste et médiologue allemand Frank Böckelmann sur la perception contemporaine de l’espace
L’essence du dernier livre de Frank Böckelmann peut se résumer en paraphrasant Goethe : la nation et l’Etat national ne veulent plus dire grand-chose aujourd’hui. Le monde (entier) est le lieu qui nous est désormais assigné. Mais pour que ce monde puisse être une partie (charnelle) pour l’Européen, tant sur le plan politique que sur le plan spirituel, il doit s’y ancrer avec modestie et sur un mode nouveau.
Les « raids de reconnaissance dans l’existence sans frontières » du médiologue Frank Böckelmann se subdivisent en six chapitres, où il disserte sur des thèmes apparemment fort disparates, tels le corps à multiples fonctions, la catastrophe urbaine, le sexe à l’ère d’internet, les droits de l’homme, la fin de l’hégémonisme américain, le retour des grands espaces (Grossräume) et, à la fin du volume, la chance que peut saisir l’Europe pour assurer sa survie en résistant. Quand on lit ce livre, ces thèmes disparates apparaissent vite liés entre eux par une logique rigoureuse, celle que Carl Schmitt a mise au point dans son essai « Land und Meer » (« Terre et Mer »), lorsqu’il traitait de la « révolution globale de l’espace ».
Cette révolution spatiale commence au 15ième siècle quand les Européens se lancent dans la navigation sur les océans de notre planète, conquièrent et mettent en valeur de nouvelles régions du monde. Cette révolution a transformé la notion des distances et la perception des ordres de grandeur ainsi que la structure du concept ‘espace’, ce qui a conduit à « une mutation générale de la politique, de l’économie et de la culture ». « Surgissent alors de nouvelles échelles de grandeur, de nouvelles dimensions de l’activité politique et historique des hommes, de nouvelles sciences, de nouveaux ordres, une nouvelle vie pour des peuples nouveaux ou renés de leurs cendres », écrivait Carl Schmitt. Au 20ième siècle, cette révolution poursuit sa course par l’avènement de la navigation aérienne, qui réduit à quelques heures de vol seulement les distances entre les continents et les points les plus extrêmes de l’Europe. Les technologies des fusées et de l’astronautique permettent aujourd’hui de surveiller n’importe quel point du globe et de l’atteindre techniquement en quelques minutes voire de le détruire, le cas échéant. Böckelmann écrit, en se référant au philosophe français de la vitesse et de la cinétique, Paul Virilio, sur les suites actuelles de cette « révolution de l’espace », cette fois en tenant compte des conditions imposées par les nouveaux médias et modes de communication. Les techniques nouvelles, qui permettent à internet de fonctionner, font en sorte qu’aujourd’hui chacun est potentiellement joignable en tous points du globe. C’est une nouvelle modification dans la perception de nos structures spatiales qui nous touche et nous saisit : l’homme lui-même cherche désormais à agencer son ego physique et psychique pour participer à la concurrence globale, avec pour but, de devenir un « soi sans soi » (« ein selbstloser Selbst »).
Dans un tel monde, les lieux en viennent à devenir partout de plus en plus semblables. Pour pouvoir exister économiquement parlant, chaque intervenant sur le marché, aussi modeste soit-il, est contraint d’être connecté au monde, d’envoyer des flux de données et d’en recevoir, d’avoir à proximité de son implantation un aéroport ou une autoroute. Ce que l’on nous demande, c’est d’avoir un signe permettant d’être reconnu partout sur la planète. Cela signifie que partout les marchandises, marques et services usuels doivent être directement accessibles ou aisément appelables, comme par exemple les distributeurs de billets ou les chaînes de restaurant. C’est la disparition du genius loci. Les lieux deviennent les filiales d’une société mondialisée. Les villes historiques ne nous révèlent plus ce qui se passe, se fait et se pense réellement derrière les murs ; elles ne véhiculent plus une spécificité vivante, ne sont plus l’écho d’une histoire ; leur signification se réduit à leur attrait touristique. Exemple actuel de cette « dé-localisation » (« Ortlosigkeit ») : le nouveau slogan publicitaire « Be Berlin » (« Sois Berlin »). Voilà donc une ville historique, qui n’est pas sans importance, mais qui, pour des raisons bien connues, se situe dans une zone marginale de l’économie globale, mendie de la sympathie et de la présence, en s’offrant comme une simple surface où chacun viendrait inscrire sa marque, sa touche personnelle.
La dévalorisation des structures traditionnelles, y compris les structures nationales et étatiques, semble inévitable, irrémédiable. Néanmoins, la petite musique emphatique qui accompagne le phénomène trahit de la naïveté. Est illusion l’espoir que ce processus conduira à un nouvel ordre mondial, où le politique, comme instance où se télescopent et fusionnent des forces concurrentes, se verrait enfin dépassé et remplacé par un ‘droit’ accepté par tous, un droit qui reposerait sur un canon de valeurs à l’origine européennes et désormais universelles (et universalistes). Le philosophe grec contemporain, hélas disparu depuis quelques années, Panajotis Kondylis en avait d’ailleurs démontré le caractère illusoire dès 1992, dans son ouvrage « Planetarischer Politik nach dem Kalten Krieg », « Politique planétaire après la Guerre Froide ». Partir du principe que la mise en réseau globale va amener une standardisation définitive des cultures et des formes de droit et de pratiquer la politique, cela a toujours été une idée fixe des « héritiers de l’Occident ». Les positions de départ et les intérêts des uns et des autres sont bien trop divergents. La « communication totale », que l’on nous annonce, ne s’opère qu’en surface et sous cette surface règne un « silence impénétrable ». Les kamikazes, qui ont frappé les métropoles occidentales, étaient des hommes cultivés selon les critères occidentaux actuels, accoutumés à toutes les finesses technologiques de l’Occident ; ils prouvent par leurs actes, et cela donne le frisson, que leur proximité violente conduit plutôt à des confrontations qu’à l’harmonie.
La mise en réseau du monde ne rend pas celui-ci plus sûr mais au contraire plus vulnérable. Une action de guerre asymétrique dans un coin perdu du monde fait l’effet d’une menace pour tous, à cause de sa rapide diffusion médiatique et plonge les économies et les Etats de la planète entière dans des zones de turbulence. Pour prévenir de telles actions, les flux de circulation et de données sont de plus en plus contrôlés. Mais qui peut exercer un contrôle réellement efficace ? Et voilà que revient à l’avant-plan la question de la puissance politique et militaire, qui avait été neutralisée par une volonté universaliste de tout ‘juridifier’. Et les Etats-Unis sont à l’avant-scène, le seul pays qui, jusqu’ici, avait profité de la globalisation et avait consolidé les atouts de sa puissance. L’existence politique des Etats-Unis avait commencé à se déployer sans aucun arrière-plan historique, comme la pure incarnation du système capitaliste et libéral. Les Etats-Unis avaient promu sans frein la « révolution de l’espace » aux 19ième et 20ième siècles ; ils avaient fait de la volonté universaliste de ce système l’équivalent des intérêts de l’Etat américain lui-même.
La situation actuelle de l’Europe correspond véritablement aux aspirations des Etats-Unis. L’Union Européenne élimine les compétences des Etats nationaux au profit d’un espace économique unitaire, sans jamais formuler les contours clairs d’une volonté politique propre et commune. Ce processus de dévolution de la puissance politique vers l’économie transnationale a lieu au moment précis où le capitalisme, en tant que mode de production (fabrication, commercialisation et vente de biens produits dans un but d’engranger des profits), se dissout sous les effets de la finance spéculatrice, sans fondement rationnel.
Simultanément, on constate que certains pays européens tiennent, têtus, à leur souveraineté : c’est purement chimérique et, à l’échelle globale, sans conséquence aucune, parce que cette souveraineté n’est plus qu’une espièglerie anachronique perpétrée sous le parapluie militaire américain. La véritable souveraineté ne peut être restaurée aujourd’hui que dans un cadre européen, vu les rapports de force sur ce globe, tant ceux qui dominent aujourd’hui que ceux qui domineront demain. La condition préalable à cette souveraineté retrouvée serait une volonté politique d’auto-préservation physique, volonté à partir de laquelle la capacité de décider réellement ré-émergera. Mais rien ne signale à l’horizon les moindres prémisses d’une telle volonté.
Les Européens se sont habitués à concevoir leur Europe comme un continent dé-territorialisé, comme un non lieu, dont l’esprit, jadis, a missionné et conquis le monde, raison pour laquelle il n’a plus besoin d’un véritable ancrage dans l’espace. Dans « Terre et Mer », Carl Schmitt nous rappelle la teneur du roman intitulé « Tancred » de Benjamin Disraeli. Celui-ci proposait que la Reine Victoria et toute sa Cour déménagent aux Indes, où les attendaient de gros revenus et une armée bien aguerrie. A l’époque, la Grande-Bretagne était la plus grande puissance de la Terre, alors qu’aujourd’hui l’Europe se présente au monde extérieur, sur les plans militaire et politique, comme une masse gélatineuse. Les messages qui émanent de ce lieu dé-territorialisé et sevré de toute puissance ne sont pas pris au sérieux ou, pire, sont réinterprétés et renvoyés à l’expéditeur pour l’abuser, le ponctionner et l’affaiblir encore davantage.
Böcklemann avance de solides arguments pour annoncer la fin prochaine de la globalisation unilatérale et le nouveau partage du monde, qui deviendra ainsi un pluriversum de grands espaces. L’Europe constituera-t-elle un de ces grands espaces autonomes ? Pour qu’elle le devienne, il faut d’abord qu’elle cesse de poursuivre sa mission universaliste, et qu’au contraire, elle recommence à souligner les différences qui existent entre elle et les autres, qu’elle redécouvre la volonté de puissance. Cette espérance de Böckelmann semble totalement incongrue vu l’état désespérant de l’actuelle élite eurocratique. Le retour de l’Europe ne dépend plus d’elle-même mais des intentions que cultivent à son égard les peuples de sa périphérie, surtout le monde islamique. Peut-être qu’un jour, les pressions deviendront totalement insupportables pour l’Europe, tant et si bien qu’elle n’aura pas d’autre alternative que de faire revivre en elle ses traditions, connaissances et anciennes vertus, qui lui donneront la force de s’affirmer et de décider. Mais personne ne peut se porter garant d’une telle issue.
Le livre de Böckelmann est fascinant. Il nous oblige à penser en termes nouveaux, à penser plus loin, à dépasser les étroitesses du présent.
Thorsten HINZ.
(recension parue dans « Junge Freiheit », Berlin, n°14/2008; traduction franç.: Robert Steuckers).
Frank BÖCKELMANN, „Die Welt als Ort. Erkundungen im entgrenzten Dasein“, Karolinger Verlag, Wien, 2007, 312 Seiten, 24 Euro.
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mercredi, 02 avril 2008
Réflexions sur le discours d'Erdogan à Cologne

Rolf KOSIEK :
Réflexions sur le discours d’Erdogan à Cologne
Maintenant, la mèche est vendue, les choses sont claires, on sait à quoi s’en tenir. Le dimanche 10 février 2008, le chef actuel du gouvernement turc Recep Tayyip Erdogan tenait un discours à la Salle Arena de Cologne devant 16.000 de ses compatriotes résidant en Allemagne ou dans les pays limitrophes. Textuellement, il a appelé ses auditeurs turcs à ne pas s’assimiler en Allemagne, à ne pas s’adapter au mode de vie allemand et à ne pas devenir citoyens allemands, mais, au contraire, à préserver leur identité turque. Il leur a surtout demandé de conserver leur spécificité culturelle et religieuse. Son discours, sans cesse entrecoupé de vivats tonitruants et d’applaudissements frénétiques, a atteint son apogée quand il a prononcé la phrase suivante : « L’assimilation est un crime contre l’humanité ».
Erdogan demande aux Turcs d’Allemagne, qui sont actuellement plus de 2,5 millions, de se maintenir comme une minorité islamique, culturellement isolée, en République Fédérale. En réclamant une telle attitude, il espère, en tant que politicien nationaliste et missionnaire religieux, que ce groupe devienne un jour, à une époque d’ores et déjà prévisible, la majorité dans le pays hôte pour pouvoir déterminer la marche des choses en Europe centrale. Il a demandé instamment à ses compatriotes de ne pas adopter le mode de vie allemand. Ils doivent, précise-t-il, conserver, en tant que groupe fermé sur lui-même, leur spécificité en terre étrangère, y constituer une colonie et subvertir substantiellement le peuple hôte. Lorsque Erdogan accepte le principe d’une intégration, il n’entend pas la dissolution des Turcs au sein du peuple qui les a accueillis, mais, en clair, une simple adaptation, purement extérieure, permettant de maintenir l’identité turque et les liens unissant les immigrés à leur ancienne patrie. Il demande surtout que la religion musulmane demeure intacte. Il faut d’abord qu’une société parallèle turque se constitue en Allemagne.
En tant que chef du gouvernement de la République turque et que pieux musulman, il œuvre depuis quelque temps à ramener son pays à un islam rigoureux, histoire de remettre les pendules à l’heure, après un bon siècle de sécularisation selon le modèle occidental. Au début du siècle qui vient de s’écouler, Mustafa Kemal Pacha avait imposé à la Turquie de se tourner vers l’Occident : sur le plan symbolique, il avait interdit le port du voile, mesure qui est rendue caduque aujourd’hui par le gouvernement Erdogan, dans une aire importante de la société turque. En effet, l’interdiction du port du voile dans les universités turques a été levée par le Parlement d’Ankara, où c’est le parti d’Erdogan qui donne le ton.
La deuxième étape sera l’islamisation de l’Europe. Les quelques dix millions de musulmans qui vivent aujourd’hui en Europe aideront à parachever ce processus. Ils devront œuvrer comme une avant-garde et remplacer lentement mais sûrement les peuples autochtones. Le recul des naissances, que l’on observe en Europe depuis les années 70, leur facilitera la tâche. Déjà, dans bon nombre d’écoles des grandes villes de la République Fédérale, les musulmans sont majoritaires.
Pour réaliser cet objectif, les Turcs qui vivent depuis deux générations en Allemagne et sont largement assimilés, doivent être ramenés à un islam strict. ‘Ceux qui ont depuis longtemps abandonné le voile et qui ont été contaminés, par le truchement de la langue allemande, par l’idéologie occidentale des droits de l’homme’, a déclaré avec force emphase Erdogan, il faut les ramener à la vraie foi et les empêcher de la renier, elle qui a été forgée par Mohammed, car le Coran interdit tout reniement. Ils peuvent certes conserver le passeport allemand comme un second atout mais doivent toujours se sentir liés à leur vieux peuple et à sa culture et ne pas se dissoudre dans la société allemande. Il faut que ces Turcs immigrés en Allemagne renouent avec l’intolérance islamique, rejettent le principe de la liberté d’opinion et de culte, continuent à pratiquer les mariages forcés et l’assassinat d’honneur et ramènent leurs femmes à leur position subalterne et, si possible, étendre ces attitudes dans toute l’Europe.
Afin que la minorité turque puisse continuer à exister en tant que groupe fermé sur lui-même, ses ressortissants doivent apprendre la langue allemande de manière satisfaisante. Erdogan a réclamé à Cologne l’introduction d’écoles turques dans la République Fédérale et la constitution d’une université turque. Ces mesures doivent servir à consolider la société parallèle turque d’Allemagne, lui donner la possibilité de mieux fonctionner et d’empêcher toute véritable intégration.
En prononçant ce discours, Erdogan a expressément attaqué la politique du gouvernement fédéral dont les buts, clairement exprimés, visent encore et toujours à intégrer au maximum les étrangers vivant sur le territoire allemand. Même si cette intégration a déjà clairement échoué depuis une dizaine d’années surtout par la volonté des Turcs, qui ne veulent pas de cette intégration, les instances de la République Fédérale ne cessent de pratiquer une politique immigrationniste reposant sur cette illusion. Elles ne veulent pas reconnaître que leur programme a été élaboré contre la volonté de ceux à qui il s’adresse, contre la volonté des immigrés, qui s’exprime dans le sens d’un refus depuis de nombreuses années ; raison pour laquelle cette politique immigrationniste est condamnée à l’échec, aujourd’hui comme demain.
On ne s’étonnera pas dès lors que tous les partis représentés au Bundestag ont apporté la contradiction à Erdogan, tant il a dénoncé et démasqué leur politique d’intégration, la posant très clairement comme irréaliste. Le Président du Bundestag, Norbert Lammert (CDU), considérait que ce discours était « lamentable sur le plan intellectuel et contre-productif sur le plan politique », qu’Erdogan « s’était, avec beaucoup d’énergie dans l’argumentation, opposé à une exigence que personne ne formule… Je pense que c’est malheureux et dommage ». Angela Merkel a déclaré, avec emphase, qu’elle était aussi la Chancelière des Turcs vivant en Allemagne. Le Président de la faction socialiste (SPD) du Bundestag, Struck, reprochait à Erdogan de favoriser l’éclosion de sociétés parallèles et a qualifié ses paroles de « totalement inacceptables ». Le Président de la fraction de l’Union démocrate-chrétienne (= CDU + CSU), Kauder, déplorait qu’Erdogan considérât ouvertement que les Turcs vivant en République Fédérale et possédant souvent la citoyenneté allemande comme des ressortissants turcs à part entière (cf. Frankfurter Allgemeine Zeitung, 13 février 2008). La chargée d’affaires à la politique d’intégration du gouvernement fédéral, Maria Böhmer, déclare, pour sa part, « avoir été totalement étonnée » du discours d’Erdogan. Elle a dit : « Car ce débat est depuis longtemps derrière nous. Nous voulons intégrer en Allemagne, ce qui signifie que nous voulons une participation de tous, avec l’égalité en droit ». Elle tentait d’attirer le client par des promesses : « Celui qui s’intègre en Allemagne, y gagne quelque chose » (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2008). Soit dit en passant : elle ne dit pas que ce sont les Allemands qui paieront. Quant au nouveau président de la CSU, Huber, il n’a trouvé qu’une réponse à la proposition d’Erdogan de créer en Allemagne des écoles turques : « C’est un poison pour la politique d’intégration, cela conduit à la formation de ghettos et à l’émergence d’une ‘Petite Turquie’ en Allemagne ». A ce propos, rappelons qu’en Bavière, depuis 1987/1988, existe un « cours d’initiation religieuse pour les écoliers turcs de confession islamique » pour les cinq premières années d’école primaire, cours pour lequel on opte volontairement ; ces cours sont donnés par des enseignants qui, pour la plupart, sont directement originaires de Turquie et prodiguent leurs leçons en langue turque. Il existe donc déjà bel et bien une ‘Petite Turquie’ en Bavière, terre où la CSU de Huber se présente aux électeurs (cf. Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2008).
Les politiciens allemands, qui prennent leurs distances avec les dures réalités politiques, ne veulent tout simplement pas admettre ce que veulent vraiment Erdogan et la caste dirigeante turque. Par exemple, il ne leur viendrait jamais à l’idée de parler sur le même ton aux Allemands d’Alsace ou du Tyrol méridional qui, contrairement aux Turcs d’Allemagne, constituent, dans leur pays, la population autochtone, installée là depuis des siècles et formant la majorité. Ceux qui, en dépit de la « political correctness » qui règne en Allemagne, n’oublient quand même pas les réalités ethniques à l’instar de la caste qui donne le ton en République Fédérale, ne « dénieront pas à Erdogan tout droit moral à contester la coercition existante imposée à tous les hommes en République Fédérale de s’assimiler », comme le souligne Patrick Bahner (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2008). Les recettes allemandes pour l’intégration, replacées à l’avant-plan du débat suite aux déclarations d’Erdogan, conduiraient tout droit à l’égalitarisme de jacobine mouture. On reconnaîtrait encore dans l’avenir comme Turcs ceux d’entre ceux-ci qui parlent parfaitement l’allemand. « Les Turcs sont une nation fière et personne ne doit s’attendre à ce qu’ils troquent cette fierté pour un passeport ».
Seuls les Allemands sont suffisamment stupides et dépourvus d’amour-propre pour axer leur politique seulement sur les besoins des étrangers. Ils laissent les Turcs s’emparer ouvertement de terrains en Allemagne depuis de nombreuses années et continuent à promouvoir une politique d’intégration ; de surcroît, ils minimisent la criminalité violente commise par des étrangers sur leur sol. Justement, parlons-en : une semaine exactement avant le discours d’Erdogan à Cologne, le ministre fédéral de l’intérieur, Schäuble, avait facilité l’importation d’époux ou d’épouses en provenance de Turquie (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 6 février 2008) et cherché ainsi à ouvrir la porte à une nouvelle vague d’immigration. Qui plus est, toute remarque sévère et critique à l’endroit d’étrangers en Allemagne est qualifiée de xénophobie voir d’incitation à la haine entre peuples et est, subséquemment, poursuivie pénalement et punie de lourdes peines de prison, disproportionnées, tandis que les jeunes Turcs peuvent allègrement scander leurs slogans où il est question de « Scheiss-Deutsche », de « Boches de merde », sans encourir les foudres de la justice. Les manchettes des journaux turcs, publiées à la suite de la catastrophe de Ludwigshafen, où des Turcs avaient péri dans un incendie attribué erronément à des pyromanes racistes, fourmillaient de sous-entendus germanophobes fort explicites.
Erdogan avait été annoncé à Cologne comme le « Führer de la Turquie » et, faut-il le dire, a tout de même raison sur bon nombre de points. Quelques jours plus tard, revenu à Ankara, il a confirmé ses propos qui avaient suscité tant d’incompréhension et de désarroi chez les gouvernants allemands. Devant la fraction parlementaire de l’AKP, son parti gouvernemental conservateur islamisant, il a notamment déclaré : « J’ai dit en Allemagne que nous étions contre l’assimilation… Je voudrais répéter une fois de plus ici que l’assimilation est un crime contre l’humanité » (Frankfurter Allgemeine Zeitung, 13 février 2008, page 1). En prononçant ces paroles, en persistant et en signant de cette façon, il a fait ce qu’un citoyen allemand devrait faire en Allemagne, où règne la « political correctness », pour être poursuivi pour racisme et xénophobie. Qui plus est, il a répété la falsification habituelle des Turcs, qui prétendent qu’ils ont contribué substantiellement à la construction de l’Allemagne contemporaine.
La grande manifestation turque de Cologne avait été organisée par l’UETD (= « Union der Europäisch-Türkischen Demokraten » ; « Union des Démocrates Turcs d’Europe ») et aurait été pour l’essentiel financée par elle. Cette organisation a été fondée récemment par l’AKP, le parti gouvernemental d’Erdogan, parce que les associations turques qui avaient existé jusqu’ici en Europe sont considérées comme trop peu religieuses ou trop laïques par le nouveau pouvoir à Ankara. La centrale de l’UETD se trouve à Cologne, dans la « Villa Turca » dans le faubourg de Porz. Elle dispose de bureaux dans les principales grandes villes allemandes. C’est par l’intermédiaire de cette association que l’AKP au pouvoir veut désormais influencer les Turcs résidant en Europe et les mobiliser pour réaliser ses projets de politique étrangère sur le long terme. Ce n’est pas un hasard si le Parlement d’Ankara, il y a à peu près quatre semaines, a accordé aux Turcs résidant à l’étranger le droit de vote pour le Parlement turc. Dans l’avenir, nous allons assister en Allemagne aux campagnes électorales turques, selon le ton donné par Erdogan dans son discours de Cologne.
Bien qu’Erdogan et ses projets politiques se démarquent considérablement de l’idéologie occidentale, de sa conception de la liberté et de sa vision de l’homme, on continue à soutenir les efforts pour faire entrer la Turquie dans l’UE, d’ici quelques courtes années. Même s’il n’y avait rien d’autre à reprocher aux Turcs, le spectacle donné par Erdogan à Cologne devrait suffire pour guérir les Européens de leurs errements, de l’idée que la Turquie est essentiellement une partie de l’Europe et que son adhésion à l’UE serait une aubaine pour la communauté. Les autorités eurocratiques de Bruxelles feraient bien, à leur tour, de mobiliser leurs énergies pour contrer l’actuel héritier de la puissance islamique dominante, qui, pendant des siècles, a visé la conquête de l’Europe et a fini par être battue, et d’œuvrer à conserver l’identité culturelle de notre continent.
De même, il va falloir réaffirmer les intérêts vitaux de l’Europe face aux tentatives actuelles des Etats-Unis d’exciter leurs alliés turcs contre la Russie ou d’autres puissances du Proche Orient et d’essayer à tout prix de les introduire dans l’Union Européenne dans le dessein d’affaiblir politiquement l’Europe. Une telle attitude exige de se défendre énergiquement contre les prétentions croissantes des mouvements islamistes. Le discours d’Erdogan à Cologne a eu au moins le mérite de la clarté, de nous montrer sans ambiguïté la situation telle qu’elle est aujourd’hui, où se situent les clivages, les lignes de fracture. Cela n’a toutefois rien à voir avec l’amitié qu’ont toujours cultivée les Allemands à l’égard des peuples arabes, une amitié qui doit demeurer.
Rolf KOSIEK.
(article paru dans « Deutschland in Geschichte und Gegenwart », n°1/2008).
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mardi, 01 avril 2008
A. Ivanov: trois Europe, trois pays

Anatoly IVANOV :
Trois Europe, trois pays
Sur plus d’un point, je marque mon accord avec mon ami français Guillaume Faye. Nous avons effectivement besoin d’une utopie positive, d’autant plus que la définition de celle-ci correspond à celle du mythe, telle qu’elle nous a été léguée par Georges Sorel: le mythe est le but des efforts déployés. Le mythe est réalisable mais sa réalisation est difficile et exige beaucoup d’efforts pour arriver au succès dans la lutte, exige aussi le sacrifice de soi mais non pas avec cette joie triste des chrétiens dévorés par les lions, plutôt avec l’extase dionysiaque. Le mythe est une projection du pouvoir, générée par des hommes rares qui forgent une conception de l’avenir. Avant de vouloir, il faut créer un projet, susciter l’émergence d’une vision du monde.
Le mythe est donc un bon atout. Les sceptiques nous diront cependant que nos mythes n’inspirent plus que nous-mêmes. Et parmi ces mythes, il y a la conception fausse d’une Europe unie.
Il y a un siècle et demi, Nikolaï Danilevski, principal idéologue du slavisme russe, défendait, dans son ouvrage célèbre, « La Russie et l’Europe », une double thèse : Russie et Europe sont deux mondes différents et l’Europe ne connaît pas la Russie, ne peut pas la connaître et ne veut pas la connaître.
Sa thèse de la méconnaissance de la Russie par l’Europe reste actuelle. Pavel Toulaev a participé, en novembre l’année dernière (ndt : en 2006), à une conférence internationale à Madrid, d’où il nous a rapporté une affiche titrant « Ellos guian nuestra Europa » (« Ils guident notre Europe »). L’affiche reproduisait en outre trente portraits de penseurs ou d’écrivains : parmi eux, je n’ai trouvé aucun Russe, sans parler des Slaves en général. Conclusion : devons-nous distinguer ainsi LEUR Europe de NOTRE Europe ?
La seconde thèse de Nikolaï Danilevski ne correspond pas à la vérité. La présence de délégués européens à notre colloque précédent, et à celui d’aujourd’hui, prouve le contraire. S’ils peuvent et veulent nous connaître ? L’avenir le montrera.
Mais l’Europe de Danilevski est, elle aussi, une abstraction. Plekhanov ironisait à ce sujet, en disant qu’il ressemblait au gamin juif d’un récit qui divisait le monde en deux parties : la Russie et l’étranger. Il y a quatre ans, à l’époque où l’Irak était agressé, les Américains, mécontents de la position prise alors par la France et l’Allemagne, ont forgé une nouvelle dichotomie, en opposant les pays dits « énergiques » aux pays dits « passifs », ce qui me rappelle la classification raciale d’un savant allemand, Klemm, qui posait, lui aussi, une dichotomie entre races actives et races passives. Il tenait, bien évidemment dans le contexte de son époque, les Slaves pour les représentants d’une race « passive ».
Les considérations des Américains actuels ne sont pas aussi généralisantes : quelques pays slaves ont récolté leurs compliments, surtout la Pologne. Les Américains ont utilisé celle-ci pour enfoncer un coin dans l’Axe Paris-Berlin-Moscou. Il faut dire, avec regret, que cet Axe, en lequel Jean Parvulesco et d’autres ont placé de grandes espérances ne fut qu’une vision éphémère. Le changement de gouvernement en Allemagne l’a brisé et, après l’élection en France du russophobe Sarközy, il ne reste de cet Axe que des débris.
Mais il ne faut pas confondre les Etats et les peuples. Charles Maurras, qu’on a parfois appelé le « Marx de la Droite » affirme qu’il n’existe pas seulement un « pays légal », c’est-à-dire un pays officiel, mais aussi un « pays réel », ce que l’on appelle aujourd’hui la « majorité silencieuse ». Maurras a cru que cette majorité silencieuse pensait comme lui, qu’elle était au fond royaliste et catholique. Il s’est trompé : son « pays réel », en effet, était plutôt irréel, imaginé.
On peut idéaliser son peuple ; ou, au contraire, on peut désespérer de ses possibilités, de son avenir. Un exemple classique nous en est fournit par la discussion entre Tchernytchevski et Dobrolioubov.
Cette discussion nous est livrée par le roman « Le Prologue », où l’auteur s’est représenté, lui et son ami, sous les noms de ‘Volguine’ et ‘Levitski’. Dobrolioubov n’était pas d’accord avec son interlocuteur qui disait : « Le peuple est mauvais et bas dans la même mesure que le monde est beau ». Et Tchernytchevski racontait par dérision que les artisans chantaient, fin saouls : « Nous ne sommes ni voleurs ni brigands, nous sommes ouvriers de Stenka Razine ! ». Mais après le premier cri d’un policier, ces « anciens ouvriers de Razine » se dispersent tout de suite, en remerciant Dieu qu’ils ont rencontré un bon policier.
On cite souvent la piètre estime dans laquelle est tenue le peuple russe dans ce roman : « C’est une nation misérable, tous sont des esclaves, du haut en bas ». Comment cette nation, à son avis ‘misérable’ a pu vaincre Napoléon ou, du vivant même de l’auteur, libérer la Bulgarie du joug turc, ce démocrate-révolutionnaire n’a pas pu nous l’expliquer.
Nekrassov doutait aussi des capacités du peuple russe :
« Si tu te réveilleras, plein de forces…
Ou si tu as déjà fait tout ce que tu as pu :
As-tu créé une chanson qui ressemble à un gémissement
Pour t’endormir ensuite pour toujours ? ».
L’activité politique est sans aucun doute l’indice le plus important pour juger des ressources en énergie d’une nation, mais elle n’est pas le seul indice. Il y en a au moins un autre : c’est la capacité à construire un Etat. Mais un Etat qui ne doit pas se substituer au peuple. L’écrivain français Georges Bernanos écrivait dans son « Journal », au début de la seconde guerre mondiale, encore avant la défaite de la France : « On a volé la France aux Français, depuis qu’on leur a mis dans la tête que la France était uniquement l’œuvre de l’Etat, non la leur ». Et : « On a substitué au sentiment de la patrie la notion juridique de l’Etat ». Et voilà le résultat, ajoutait-il, « les Français n’ont plus de patrie » (cf. « Les enfants humiliés »). Les fruits d’une telle substitution sont toujours d’abord la stagnation, et puis l’effondrement.
L’Etat soviétique fut très fort mais tout le monde sait, aujourd’hui, quelle fut sa triste fin. Je note avec inquiétude tous les signes d’engourdissement de notre Etat et j’observe avec envie la vie politique orageuse, tempétueuse, de l’Europe orientale : Pologne, Roumanie, Ukraine. Vraiment, il y a deux Europe. La première est celle des pays où les sentiments nationaux demeurent aigus, où l’énergie non épuisée des peuples trouve à se manifester vers l’extérieur. Et puis, il y a celle où les sentiments sont émoussés, où règne l’apathie, l’indifférence et le je-m’en-fichisme.
Alors, et la dichotomie de départ ? Russie et Europe ? Il y a la Russie et les deux Europe. Où la Russie et la troisième Europe, différentes des deux précédentes mais néanmoins aussi l’Europe.
Vous dites, chers interlocuteurs, qu’il n’y en a que deux, la Russie et l’Union Européenne ? Mais l’élargissement de l’UE fait de celle-ci une instance de plus en plus instable. Perle parmi les nouvelles acquisitions de l’UE est la Pologne qui, fidèle à ses traditions, utilise son « liberum veto » envers et contre l’avis de toute l’Europe, médusée. Mais quelle raison les Européens ont-ils de s’étonner ? Il faut se souvenir de l’histoire.
La Pologne se pose comme obstacle au rapprochement mutuel entre l’UE et la Russie. Mais quelle Pologne : la Pologne légale ou la Pologne réelle ? Nous savons, par exemple, que malgré les affects anti-russes traditionnels des Polonais, plus de la moitié de la population polonaise s’oppose à l’installation des bases militaires américaines sur le territoire de sa patrie. Mais que faire, si ton peuple se tait, s’il est privé de la possibilité d’exprimer son opinion, si les autorités ‘légales’ ne s’intéressent pas à cette opinion, se contentant de ‘sondages’ falsifiés à plaisir ?
On peut imaginer que le peuple se tait à l’unisson avec toi, à la Maurras ; on peut désespérer du peuple, à la Tchernytchevski. Mais se dernier ne se perdait pas en conjonctures pour deviner comment se transformerait le peuple, seize ans après sa mort.
A part les deux pays de Maurras, le légal et le réel, il y en a encore un troisième, que j’appellerai le ‘peuple potentiel’. Nietzsche le devinait quand il disait : « Aimez le pays de vos enfants ». S. Morozov, dont je cite constamment le livre « La conspiration actuelle contre les peuples de Russie », affirme que nous traversons une période transitoire, où la vieille nation russe n’existe plus et la nouvelle nation n’existe pas encore. Mais l’image de cette nouvelle nation reste vague, y compris pour l’auteur du livre lui-même.
L’image de l’Euro-Russie, évoquée dans les milieux amis d’Europe occidentale, est encore plus vague. Gabriele Adinolfi, rédacteur auprès de la revue italienne « Orion », a prononcé un discours très important, qui est publié dans la revue espagnole « Tierra y Pueblo » (septembre 2006). Dans ce discours, Adinolfi exprime sa crainte : « Plus nous sommes immergés dans la réalité, plus nous la reflétons. Plus la sphère de notre imagination est vaste, plus ses contours seront indéfinis et nous ne pourrons les dessiner ». L’hypothèse de l’Euro-Sibérie ne se base, à son avis, que sur un espoir mal fondé. Nos pensées planent dans le domaine de la politique extérieure. Nous transférons nos propres vœux aux pays exotiques, que nous ne connaissons pas pratiquement. Cette Euro-Sibérie désirée, conclut Adinolfi, pourra s’avérer un mirage dans le désert.
Je voudrais ajouter une observation, tiré de mon expérience vitale. Quand il pleut, il semble toujours que le trottoir d’en face est plus sec, mais quand on traverse la rue, on s’aperçoit qu’il est mouillé dans la même mesure. Il y a vingt ans, Guillaume Faye plaçait ses espérances dans un réveil de l’Allemagne. En vain. Aujourd’hui, il les place dans une renaissance de la Russie. Et demain ?
Les catégories de pensée que sont l’Empire, l’Etat, etc. ne sont pas destinées à nous. Si nous sommes incapables de récolter suffisamment d’argent pour payer un billet d’avion Moscou/Paris ou pour louer une salle, nos affaires sont posément désastreuses. Mais, dans le même temps, nous songeons à construire l’Empire !
Gabriele Adinolfi compare notre situation à celle des premiers chrétiens dans l’Empire romain. A mon avis, c’est la seule comparaison adéquate, mais il saute, en la posant, par-dessus une grande étape historique nécessaire, parce qu’il nous parle des chrétiens, qui avaient déjà un canon et des structures bien organisées. Nous, nous n’avons rien.
Les chrétiens ne rêvaient pas de l’Empire, au contraire, ils le tenaient pour un ennemi. Ils cherchaient le Royaume de Dieu et on sait que ce Royaume n’est pas d’ici ou de là, il est « dedans de nous », ou, en d’autres mots, « au centre de nous-mêmes ».
Il me paraît curieux que Gabriele Adinolfi prêche la même chose. Il croit, par exemple, que le fameux choc des civilisations a lieu au-dedans de nous et que nous devons mettre en ordre notre monde intérieur avant de résoudre les problèmes mondiaux. Il doute ensuite de l’existence réelle d’une communauté spirituelle qui nous serait propre et dont les membres pourraient se référer à un « nous ». Je partage ses doutes, parce que quand on me suggère une ‘synthèse organique’ qui serait un mélange étrange de Gengis Khan et des saints chrétiens, je le dis sans circonlocutions inutiles : je ne ferai jamais partie d’un tel « nous » !
Existons-nous ? Non. Pour le moment. Mais je suis convaincu que nous existerons.
Anatoly IVANOV.
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lundi, 31 mars 2008
L'itinéraire politique de Nobusuke Kishi

L’itinéraire politique de Nobusuke Kishi
Né le 13 novembre 1896 à Yamaguchi au Japon, Nobusuke Kishi fut un homme d’Etat japonais, à l’ascendance samouraï. Le clan aristocratique, dont il faisait partie, avait favorisé le mouvement de modernisation et d’occidentalisation (technique) du Japon. Bon nombre de membres de son clan serviront donc le Japon moderne dans la marine, l’armée ou la politique. En 1917, il s’inscrit à l’Université Impériale de Tokyo et devient disciple du professeur Shinkichi Uesugi, interprète nationaliste et conservateur de la nouvelle constitution. Plus tard, Nobusuke Kishi lira le penseur nationaliste Ikki Kita, qui cherchait à établir un ordre nouveau pour la société japonaise. Devenu haut fonctionnaire de l’Empire du Soleil Levant après ses études, il travaillera à l’industrialisation de la Mandchourie, sous les auspices du Général Hideki Tojo, commandant de l’armée japonaise du Kwantung. Quand Tojo devint premier ministre en octobre 1941, Kishi rejoint son cabinet en tant que ministre du commerce et de l’industrie. Il prépare la guerre contre les Etats-Unis. Arrêté par l’occupant américain en 1945, il est interné pendant trois ans au titre de criminel de guerre dans la sinistre prison de Sugamo. Il sera libéré en 1948 sans avoir eu à subir de jugement. En prison, il se familiarisera avec les concepts de la gouvernance à l’occidentale tout en déplorant les mesures prises par les occupants.
Dès sa libération, il replonge avec enthousiasme dans la politique, devenant premier ministre en 1952. Maître dans l’art de manier les pions en coulisses, il parvient à faire fusionner les deux partis conservateurs japonais et à créer ainsi le parti libéral-démocratique, dont il devient le secrétaire général. En 1956, il est ministre des affaires étrangères, puis, quand le premier ministre doit se retirer pour raison de santé, il prend sa place en 1957. Sa ferme intention était de réviser la constitution et de réarmer le Japon (comme l’a voulu plus tard Koinuchi). Le débat était ouvert à l’époque : le Japon avait regagné confiance en lui-même : la gauche était neutraliste et refusait le stationnement de troupes américaines pour surveiller des pays tiers ou pour mater des révoltes sociales. La droite refusait les clauses du traité nippo-américain qui réduisait la souveraineté japonaise. Kishi s’envole en juin 1957 pour Washington et y obtient des Américains la promesse de retirer toutes les troupes terrestres endéans un an. Au terme de toutes ces négociations, Kishi obtient un nouveau traité, d’où les clauses prévoyant l’intervention des troupes américaines en cas de troubles intérieurs ont disparu. Pour l’opposition de gauche, ce traité, où les deux partenaires sont en théorie égaux, reste inacceptable. Des troubles éclatent dans tout le Japon au cours de l’année 1960. Le 23 juin 1960, Kishi est contraint de démissionner. Quelques jours plus tard, un nationaliste radical le poignarde mais sans lui porter un coup fatal. Retiré de la politique active, il continuera à diriger en coulisses le parti libéral-démocrate. Il meurt à Tokyo le 7 août 1987 (Robert Steuckers).
00:26 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : biographie | |
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A. Mölzer: sur le Kosovo

Andreas MÖLZER :
Réflexions sur la proclamation unilatérale d’indépendance au Kosovo
Cette manière de procéder -de proclamer unilatéralement son indépendance- peut avoir de terribles conséquences pour l’Europe, du moins pour sa portion située entre les Pays Baltes et les Balkans. Si l’on suit cette logique, la plupart des Etats doivent se dissoudre. Pourquoi les Hongrois de Transylvanie ou du sud de la Slovaquie, pourquoi les Russes des Pays Baltes, pourquoi les Allemands de Haute Silésie (actuellement polonaise) devraient-ils renoncer à cette autodétermination que s’accordent les Kosovars ? Vu sous cet angle, nous avons, en reconnaissant le Kosovo, ouvert une véritable boîte de Pandore. Les groupes ethniques, nés au cours de l’histoire, qui se sont développés sur un territoire précis pendant plusieurs siècles successifs, ont bien davantage le droit de revendiquer leur indépendance politique que les Kosovars, qui ne sont jamais qu’une nation d’immigrants.
Vu la nature explosive que revêt l’idée du droit des peuples à l’autodétermination dans ces régions multi-ethniques et bigarrées et vu les conséquences que cela pourrait entraîner, la seule alternative viable aurait été d’européaniser ces territoires. L’imbroglio ethnique et culturel que l’on retrouve en Europe orientale, et surtout dans les Balkans, et qui forme la trame de ces régions, ne peut trouver de solution pacifique que sous un baldaquin supra-national, comme au temps de la monarchie des Habsbourgs. Une perspective européenne pour l’ensemble des Balkans occidentaux serait effectivement une solution envisageable. Lorsque tous les Etats qui ont émergé de l’ancienne Yougoslavie seront devenus membres de l’UE, lorsque les marchandises circuleront librement dans un territoire sans frontières, les conflits de nationalités pourront de fait être définitivement surmontés.
Mais la situation actuelle ne nous permet pas d’être optimistes : les Balkans, semble-t-il, resteront un baril de poudre en Europe, pendant quelques générations encore. La fierté de la nation serbe a été bafouée ; l’orgeuil nationaliste des Albanais a été galvanisé ; les Croates de Bosnie n’ont trouvé aucune solution à leurs problèmes ; plus généralement, ces Etats nés de la dissolution de la Yougoslavie ne sont pas viables économiquement, ce qui rajoute encore de la poudre au baril déjà plein à ras bord.
Les autres Etats européens ne semblent pas réellement conscients de la situation : ils ne suggèrent aucune politique intelligente pour enrayer ce processus calamiteux. Dans le cas du Kosovo, ils ont aggravé la situation en voulant l’améliorer, n’ont pas contribué à apporter une solution durable. Nous réclamons une politique qui aille dans le sens des intérêts de l’Europe toute entière !
Andreas MÖLZER.
(Extrait d’un long article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; trad. fran9. : Robert Steuckers).
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dimanche, 30 mars 2008
Sur le juriste Pieter Stockmans

Sur le juriste Pieter Stockmans
Pieter Stockmans, juriste brabançon, naît à Anvers le 3 septembre 1608. Il devint professeur à l’Université de Louvain en 1632, puis Conseiller d’Etat du Brabant en 1643. En 1663, il fait partie du « Conseil Secret » et, en 1665, de la « Cour Suprême de Guerre » (« Opperkrijgsraad » / « Oberkriegsrat »). En 1666, il prend la plume pour fustiger, avec force arguments, les prétentions de Louis XIV sur la rive occidentale du Rhin. Ses arguments sont collationnés dans le « Tractatus de jure devolutionis ». Stockmans est fasciné par l’antiquité grecque et par le stoïcisme, qui entend demeurer au-dessus de la petitesse humaine. Ami du gouverneur espagnol, le Marquis de Caracena, qui exerça ses prérogatives de 1659 à 1664, il est envoyé à la Diète Impériale de Ratisbonne pour réclamer l’intervention de l’Empire contre les prétentions françaises. Il soumet à cette lamentable assemblée deux écrits : « Scriptum gallicum contra securitatem circuli Burgundici nuper in comitiis Ratisbonensis compositum » (36 pages) et « Refutatio scripti gallici contra circuli Burgundici securitatem compositi ». Il prouve et rappelle dans ces textes que le « Cercle de Bourgogne », menacé par la France, demeure une partie intégrante du Saint Empire et doit donc recevoir le soutien du Reich. Il ne sera pas écouté. La menace française devient de plus en plus pesante, surtout à partir du moment où Louis XIV énonce « les droits à la dévolution ». Stockmans y répond par une « Deductio » anonyme, en latin et en néerlandais. Ensuite, il récapitule tous ses arguments dans son « Tractatus de jure devolutionis » (1666). L’historien français Guy Joly lui répond. Stockmans rédige alors une « Pars Secunda » de son « Tractatus », puis une « Pars Tertia », qualifiant les prétentions françaises d’inepties et d’erreurs. Pieter Stockmans meurt à Bruxelles le 7 mai 1671 (Robert Steuckers).
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Du précédent bosniaque à la crise du Kosovo

Andreas MÖLZER :
Du précédent bosniaque à la crise du Kosovo
A coup sûr, nous pouvons dire que la création de la Bosnie a constitué le premier péché originel de la communauté internationale et de l’Union Européenne. Dans leurs efforts pour imposer le dogme de la viabilité et de l’excellence des entités étatiques multi-ethniques et muti-culturelles, elles ont cru, jusque aujourd’hui, qu’en Bosnie comme au Kosovo elles allaient pouvoir neutraliser les vieilles haines nationales et apaiser définitivement les conflits entre peuples qui en découlaient.
Dans le cas de la Bosnie, elles ont commencé par reconnaître, à côté des habituelles catégories ethniques, des identités religieuses. Serbes et Croates vivent là-bas dans des communautés imbriquées les unes dans les autres sur un même territoire, ce qui rendait la situation déjà extrêmement compliquée. Or, par-dessus cet imbroglio ethnique, les instances internationales n’ont rien trouvé de mieux que d’y superposer un niveau identitaire supplémentaire, d’ordre religieux et culturel, en mettant les Musulmans de Bosnie sur le même pied que les identités serbe et croate : le champ de la problématique en est devenu encore plus complexe. Le Kosovo s’ajoute aujourd’hui à un Etat bosniaque à dominante musulmane sur le sol européen, un Etat kosovar dont l’islam s’est considérablement radicalisé au cours des conflits de ces vingt dernières années. Des influences venues du Proche Orient et l’arrivée de moudjahiddins flanqués d’imams militants ont contribué à rendre fondamentaliste un islam albanais qui s’était fortement laïcisé au fil du temps. On ne s’étonnera pas, dès lors, d’apprendre que la Turquie fut le premier Etat à reconnaître le Kosovo indépendant, en y mettant beaucoup d’emphase.
Conséquence immédiate de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo : les Serbes de Bosnie, ceux de la « Republika srpska », réclament, en même temps que les Serbes du Kosovo, que leurs zones de peuplement soient détachées des nouveaux Etats à dominante musulmane pour être rattachés à la Serbie. Quels arguments la communauté internationale et surtout l’Union Européenne pourraient-elles bien avancer pour rejeter cette requête ? Après qu’elles aient reconnu le Kosovo, mystère et boule de gomme !
Le projet imaginé et mis au point, il y a une bonne décennie, par le chef d’Etat serbe Milosevic et son homologue croate Tudjman, apparaît rétrospectivement bien réaliste, lui qui prévoyait, dans les zones de peuplement où Serbes et Croates vivaient imbriqués, une « épuration ethnique pacifique ». Ce projet rappelait certes les accords entre Hitler et Mussolini pendant la seconde guerre mondiale au Tyrol méridional et dans la zone du « Kanaltal » en Carinthie. Tudjman et Milosevic voulaient « désimbriquer » les zones mixtes de manière pacifique sans tenir compte du facteur islamo-bosniaque et arrondir à terme les territoires de la Croatie et de la Serbie. Mais ce projet n’a pu se réaliser. L’intervention américaine et la volonté de l’UE d’imposer son dogme de l’absolue nécessité d’Etats multi-ethniques s’y sont opposés.
Dorénavant, les frontières d’Etat pourront donc être révisées par des déclarations unilatérales d’indépendance et ces révisions seront automatiquement reconnues par la communauté internationale. Pour les Balkans, il conviendra d’imaginer et d’élaborer des projets viables sur le long terme et réellement générateurs de paix. Dans ce cas, le droit des peuples à la pleine autodétermination devra s’appliquer de manière radicale et complète. Il faudra organiser des referenda et votations populaires, ensuite procéder au détricotage des zones ethniquement bigarrées sur base du droit privé, dans la mesure où il faudra liquider et vendre des biens immeubles et mettre en œuvre le déménagement volontaire des populations qui ne veulent pas vivre sous la domination d’autres ethnies. Dans la logique qui vient de s’imposer, on devra envisager l’émergence d’un Etat pan-albanais, qui regroupera tous les territoires peuplés d’Albanais, c’est-à-dire l’Albanie, le Kosovo et les parties de la Macédoine et de la Bosnie où ils sont majoritaires. Mais ce qui est vrai pour les Albanais, doit être vrai pour les Serbes : ceux-ci doivent recevoir le droit de décider par consultation populaire, dans tous les Etats nés du démantèlement de l’ancienne Yougoslavie, s’ils veulent vivre ensemble dans un grand Etat serbe ou séparés dans plusieurs Etats. Il faudra ensuite vérifier dans quelle mesure les Monténégrins et les Macédoniens constituent ou non de véritables ethnies, avec une langue et une culture particulières, et dans quelle mesure ils sont encore ou non animés par le désir de posséder leur propre Etat.
Andreas MÖLZER.
(extrait d’un article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°9/2008 ; trad. franç. : Robert Steuckers).
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1814: Bonaparte à Fontainebleau

30 mars 1814: Napoléon Bonaparte, aux abois, se réfugie à Fontainebleau, alors que Paris capitule après de violents combats. Les armées coalisées entrent en France, sous le commandement du Prussien Blücher et de l’Autrichien Schwarzenberg. Ceux-ci renouent avec la stratégie de Götz von Berlichingen au 16ième siècle : pénétrer l’espace des Gaules par la conquête du plateau de Langres, où la Seine, les rivières du bassin de la Seine et la Meuse prennent leurs sources. Sur le flanc oriental du plateau de Langres coule la Saône, principal affluent du Rhône, qu’elle rejoint à Lyon. Les stratégies impériales, quand elles ont été déployées contre la France, avaient une dimension hydrographique. Les Autrichiens entendaient soumettre à une occupation permanente ce plateau de Langres, de façon à :
1) contrôler le bassin de la Seine et, partant, Paris, ensuite
2) prévenir toutes manœuvres françaises en direction de la Meuse, et, simultanément de l’ensemble fluvial le plus proche à l’Est, constitué par la Meurthe et la Moselle, qui donne sur le Rhin et, enfin
3) mettre un pied dans le bassin du Rhône, pour, à bien plus long terme, ramener dans le giron impérial l’espace rhodanien, ancien royaume de Burgondie du temps de l’empereur Conrad II.
Charles-Quint, et son allié et parent Philibert de Savoie, avaient tenté des opérations similaires en Provence, façade méditerranéenne de l’espace médiéval du royaume de Burgondie. La chute de Napoléon Bonaparte n’a pas entraîné l’application de cette vieille stratégie hydrographique : Metternich préféra se ménager une France dirigée par Talleyrand (qui accède au pouvoir le lendemain 31 mars 1814) contre un danger prussien et protestant qu’il voit poindre à l’horizon. Metternich veut rétablir de la sorte l’alliance franco-autrichienne, scellée avant la révolution, par le mariage du futur Louis XVI et de Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine.
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samedi, 29 mars 2008
Entretien avec S.E. Vladeta Jankovic

Entretien avec son Excellence Vladeta Jankovic, ambassadeur de Serbie auprès du Saint-Siège
L’ « Indépendance » du Kosovo : une entorse au droit international
Le quotidien romain « Rinascita » a interviewé l’ambassadeur de Serbie auprès du Saint Siège, Vladeta Jankovic. Les journalistes de Rinascita lui ont posé quelques questions sur l’avenir de la Serbie, sur les très prochaines élections politiques et administratives prévues pour le 11 mai 2008 et sur les risques qu’encourt le droit international à la suite de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo par les séparatistes albanais.
Propos recueillis par Andrea PERRONE
Q. : Monsieur Vladeta Jankovic, Voyeslav Kostunica a démissionné de son mandat de premier ministre. La crise de la coalition au pouvoir à Belgrade a été suscitée par les débats sur l’adhésion éventuelle à l’Union Européenne et par la problématique de l’intégrité territoriale de la Serbie. Quelles sont les prévisions pour les prochaines élections ?
VJ : La démission du premier ministre était inévitable. Les divergences de vue entre les différents partenaires de la coalition portaient sur les éléments suivants : une partie du gouvernement, axée autour du Parti Démocratique de Boris Tadic, le Président serbe, était en faveur du processus d’intégration à l’Union Européenne, sans tenir compte du fait que la majeure partie des membres de l’UE avait reconnu la proclamation illégale d’indépendance du Kosovo. Les autres partenaires de la coalition de l’exécutif serbe, comme le Premier ministre, estimaient qu’il fallait geler le processus d’intégration à l’UE afin que les pays membres se déclarent tous en faveur de l’intégrité territoriale de la Serbie, telle qu’elle existait de facto avant la proclamation de l’indépendance kosovare. Ces divergences de vue portaient effectivement sur des éléments substantiels. A partir du moment où il a constaté qu’il ne pouvait plus obtenir l’unanimité, le Premier ministre a demandé au Président, en accord avec les principes de la Constitution, de dissoudre le Parlement et de fixer une date pour de prochaines élections législatives. Celles-ci ont été prévues pour le 11 mai. Le peuple se prononcera : il décidera s’il faut aller de l’avant dans les négociations avec l’Union Européenne, nonobstant le fait qu’une grande partie des Etats européens ait reconnu l’indépendance du Kosovo ou, au contraire, si Belgrade devra concentrer tous ses efforts pour conserver l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Serbie, comme le reconnaissent par ailleurs les résolutions des Nations Unies.
Q. : Il y a un mois, Pristina s’est déclarée indépendante de Belgrade. Qu’en pensez-vous ?
VJ : Pour l’essentiel, je retiens qu’il n’y aura pas de différence, quel que soit l’équipe qui sortira victorieuse des élections du 11 mai : tous seront d’accord pour dire que l’indépendance du Kosovo est illégale et que l’idée d’un Etat kosovar indépendant est impensable. La Serbie ne le reconnaîtra jamais. Cependant, il est plus difficile de dire maintenant quelle approche sera la meilleure. Le plus important, c’est que tous les Serbes se mettent d’accord pour refuser l’indépendance du Kosovo. A l’heure actuelle, la majorité des Etats de l’UE a reconnu l’indépendance du Kosovo, ce qui fait 16 Etats sur 27.
Q. : Pensez-vous qu’un gouvernement plus fort, par exemple porté par un tandem Kostunica-Nikolic, aura une approche plus ferme sur la question de la sécession du Kosovo ?
VJ : Il me parait fort difficile de spéculer dès aujourd’hui sur les résultats des prochaines élections. Il me parait cependant impossible qu’un seul parti puisse obtenir d’emblée la majorité absolue, sans avoir besoin de partenaire.
Q. : Avec la sécession du Kosovo, c’est une boîte de Pandore qui s’ouvre…
VJ : C’est prévisible. Et c’était prévisible depuis longtemps. Et, de fait, les Albanais de Macédoine, qui forment 30% de la population macédonienne, cherchent déjà à obtenir davantage de droits pour leur minorité ; ils exigent que la langue albanaise soit reconnue comme langue officielle en Macédoine, que leur drapeau soit hissé sur les bâtiments publics, qu’une amnistie soit décrétée pour tous les Albanais qui ont participé à l’insurrection de 2001 en Macédoine. Ce pays est donc sur la voie de la fédéralisation. La partie albanophone de la Macédoine réclament aujourd’hui cette fédéralisation et finira demain par réclamer une sécession, vu que les Albanais de Macédoine ont déjà reconnu l’indépendance du Kosovo. Nous avons donc une crise sécessionniste en Macédoine et une autre en Géorgie, où les républiques indépendantistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud veulent s’unir à la Russie. Voilà donc la boîte de Pandore que vous évoquiez dans votre question… De manière analogue, la Transnistrie pourra proclamer son indépendance, de même que le Nagorno-Karabakh, où le processus est déjà à l’œuvre. On peut également prévoir que de telles sécessions auront lieu ailleurs dans le monde. A peu près vingt-six pays ont reconnu l’indépendance du Kosovo, mais d’autres ont refusé de reconnaître cette sécession parce qu’ils craignent qu’ils auront tôt ou tard à affronter un problème similaire à l’intérieur de leurs propres frontières, comme Chypre, la Slovaquie, la Roumanie et l’Espagne. En dehors d’Europe nous avons l’Indonésie et l’Inde en conflit avec le Pakistan pour le Cachemire. L’indépendance du Kosovo a mis en crise l’ensemble du droit international. On remet ainsi en question les décisions des Nations Unies et leurs résolutions. Certains Etats prétendent que le Kosovo est un cas à part, un cas sui generis. C’est faux.
Q. : Pensez-vous que le rôle de Moscou et les futures décisions russes seront vraiment importants pour trouver une solution ?
VJ : Pour ce qui concerne Moscou, la Russie a soutenu la Serbie depuis le début de la crise. Le Kosovo est virtuellement perdu pour la Serbie depuis 1999. La Fédération russe, en 1999, sous Eltsine, était très faible économiquement et politiquement. Depuis lors, tout a changé. La Fédération de Russie est devenue beaucoup plus forte et veut prouver au monde qu’elle peut exercer une réelle influence sur la question. La Russie sous Poutine est en mesure de soutenir la Serbie, de forcer la décision en sa faveur, non pas parce que les Russes sont orthodoxes et slaves mais pour une question de principes, liée au droit international qui a subi une grave entorse à la suite de la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo. La Russie est redevenue forte et soutient la Serbie à la tribune des Nations Unies, à l’OSCE et dans toutes les organisations internationales. Mais il n’y a pas que la Russie qui soutient la Serbie au niveau international ; en effet, au Conseil de Sécurité, quinze pays s’affirment en faveur de Belgrade, dont la Russie, bien sûr, mais aussi la Chine, le Vietnam, l’Indonésie, la Libye et l’Afrique du Sud, dont le soutien est ferme, car, en Afrique, les frontières des Etats sont instables, complexes et difficiles à maintenir. Les Américains exercent une forte pression sur la République Tchèque, la Grèce, la Roumanie, mais ces pays continuent à résister car, potentiellement, ils pourraient avoir les mêmes problèmes que la Serbie avec le Kosovo. En outre, rappelons-nous que le monde a une population d’environ six milliards d’âmes et que si l’on additionne les habitants de la Chine, de la Russie, de l’Inde, de l’Indonésie, de l’Afrique du Sud, nous obtenons un chiffre de quelque trois milliards et demi de personnes ; nous pouvons dire alors que la majeure partie de la population de la planète soutient la Serbie.
Q. : Je voudrais vous parler des églises, des monastères et des Serbes du Kosovo ? Quel sera leur avenir ?
VJ : Les monastères et les églises du Kosovo doivent impérativement être placés sous la protection des contingents militaires de l’UNMIK. Les monastères orthodoxes du Kosovo sont d’une valeur culturelle inestimable : ils remontent aux 12ième, 13ième et 14ième siècles. Pour l’heure, ce sont des soldats italiens très courageux qui les défendent : leur attitude est exemplaire malgré le comportement du gouvernement italien et le rappel à Belgrade de notre ambassadeur en Italie. Ces monastères et ces églises, sous la protection des troupes italiennes de l’UNMIK relèvent d’un héritage culturel important pour le monde entier. Ils sont un patrimoine pour l’humanité toute entière et figurent d’ailleurs sur la liste des sites à protéger, dressée par l’UNESCO. Les fresques que l’on trouve dans ces bâtiments historiques sont parmi les plus belles de cet art au monde. On peut comparer leur facture et leur qualité à ce que l’on retrouve dans la cathédrale de Chartres en France.
Q. : Quelle différence y a-t-il entre la mission de l’UNMIK et celle d’EULEX ?
VJ : La mission de l’UNMIK est très importante. La Serbie ne s’oppose nullement à la présence de l’UNMIK parce que celle-ci a été décidée par le Conseil de Sécurité de l’ONU. En revanche, la mission européenne EULEX ne rencontre pas l’approbation de la Serbie, parce qu’elle n’a pas été sanctionnée par une décision des Nations Unies. La différence entre les deux missions est donc de taille. La mission de l’UNMIK découle d’une résolution votée aux Nations Unies et repose sur les principes de l’ONU, voilà pourquoi la Serbie accepte pleinement sa présence sur le territoire serbe.
Q. : Quelle est la position du Saint Siège et du Pape Benoît XVI, alias l’ancien Cardinal Josef Ratzinger, à propos de l’indépendance du Kosovo ?
VJ : La position du Saint Siège repose sur la prudence et la modération. Elle s’est déjà exprimée en diverses occasions et le Saint Père l’a confirmée lors de la présentation de mes lettres de créance, il y a un mois. Le Saint Siège comprend qu’il y a péril pour toute la chrétienté, pour les milliers de réfugiés qui ont dû quitter le Kosovo en 1999 ; le Saint Siège se préoccupe surtout de la défense de la justice et des principes du droit international. La Serbie croit, elle aussi, au droit international, au droit des gens et des Etats. C’est le moment de faire montre de solidarité et de ne plus penser aux divisions au sein de la chrétienté. Les chrétiens doivent défendre les droits et principes culturels des autres peuples. C’est très important pour le Saint Siège, non seulement pour les droits de la Serbie mais aussi pour ceux de tous les autres peuples et, subséquemment, pour la paix dans le monde.
(entretien paru dans « Rinascita », Rome, 20 mars 2008 ; http://www.rinascita.info ; adresse électronique pour toute information : info@rinascita.net ).
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Citation de Montesquieu

Citation de Montesquieu
« Dans les monarchies extrêmement absolues, les historiens trahissent la vérité, parce qu’ils n’ont pas la liberté de la dire : dans les Etats extrêmement libres, ils trahissent la vérité à cause de leur liberté même, qui, produisant toujours des divisions, chacun devient aussi esclave des préjugés de sa faction, qu’il le serait d’un despote ».
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vendredi, 28 mars 2008
Citation de Nicolas Berdiaev

Citation de Nicolas Berdiaev
« Les événements se déroulent dans la réalité de l’esprit avant de se manifester dans la réalité extérieure de l’histoire ».
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Socialisme et gildes

Davide D’AMARIO :
Le projet social d’Ezra Pound : communautés et gildes
« Je sais, et non d’après une théorie mais bien par expérience, que l’on peut vivre infiniment mieux avec très peu d’argent et beaucoup de temps libre, qu’avec plus d’argent et moins de temps. Le temps n’est pas de l’argent, mais presque tout le reste… » (Ezra POUND).
Les réflexions, que je couche ici sur le papier, sont le fruit d’une lecture du très beau livre de Luca Gallesi, « Le origini del fascismo di Ezra Pound », édité auprès des Edizioni Ares. A l’évidence, cet article est tout simplement un point de départ qui me permettra de développer ultérieurement mes sentiments « extravagants » et, quelles que soient les positions que prendront les hommes que je mentionnerai dans mes interprétations, celles-ci ne pourront être ramenées ou assimilées en tous points à la structure solide et scientifique du livre de Gallesi.
Quand Marx, bien à raison, proposait l’unité de tous les travailleurs du monde, à une période historique bien précise, les capitalistes étaient divisés. Ils s’opposaient les uns aux autres dans des querelles internes, inhérentes à la division de leur camp en « capitalismes nationaux ». Rappelons aussi que Marx, à cette époque, parlait de gouvernements réduits à des « comités d’affaires » pour le compte de leurs bourgeoisies respectives. Je pense que Marx se rendait parfaitement compte que les limites territoriales opposaient les bourgeoisies capitalistes entre elles, limites dans lesquelles on retrouvait une diversité monétaire, la concurrence, le protectionnisme, de véritables barrières économiques de toutes natures qui contribuaient à limiter l’internationalisation des capitaux et généraient des tensions parmi les capitalistes.
Par ce préambule, je veux simplement arriver au constat que la réflexion de Marx est plus actuelle aujourd’hui qu’elle ne l’était hier parce que, depuis trente ans environ, les travailleurs subissent attaque sur attaque ; certes, on me rétorquera qu’ils en ont toujours subies mais, aujourd’hui plus que jamais, c’est bien pire : ils ont été totalement éliminés du jeu dans la mesure où ils ont perdu toute conscience unitaire. Dans cette situation difficile, la pensée prophétique d’Ezra Pound me semble mieux expliquer la situation de nos contemporains. Effectivement, les communautés de travailleurs ont été, à intervalles réguliers, divisées, fragmentées, disloquées ; les attaques principales contre elles se sont faites au niveau des salaires mais plus encore au niveau de leur dignité humaine. C’est ici que reviennent les fameux « comités d’affaires » de Marx. Plus que jamais, aujourd’hui, et sous les yeux de tous, les exploités sont divisés et les décideurs du monstre capitaliste s’organisent de plus en plus, s’unissent et coordonnent leurs agissements criminels.
Que le lecteur me pardonne cette petite digression, mais j’entends exprimer ici ma conviction que cette digression peut intégrer le raisonnement que je vais développer ici, justement parce que je vais parler des socialismes atypiques, utopiques et étranges, de ces socialismes que l’inquisition de certains pontes marxistes-léninistes, sans Marx ni Lénine, ont campé comme des drôleries dépourvues de sens (dans le meilleur des cas !).
Le socialisme qui trouve ses origines quasi magiques dans l’œuvre du poète-économiste Ezra Pound propose une vision du monde humain diamétralement opposée aux spéculations financières et à l’usure, qui ont perfectionné aujourd’hui leur horrible règne. Ce socialisme est communautaire et il a séduit également le génial poète irlandais William Butler Yeats, qui a lutté pour l’indépendance de sa Terre, fière et passionnée, une indépendance enracinée dans la littérature, le théâtre, la poésie, la Vie. Mieux que toutes paroles ou éloges à l’adresse à ce héraut de la liberté irlandaise : l’épitaphe gravé sur sa tombe, qui évoque l’attitude existentielle à adopter sur le chemin terrestre et difficile de chacun. « Jette un regard froid sur la Vie, sur la Mort, Chevalier, et poursuis ton chemin ».
Je vais maintenant chercher à ramener à la mémoire de mes lecteurs ces nombreux socialistes, dont les idées n’ont pas été concrétisées, ces expériences de communautariens inconscients, en leur époque, de la portée de leurs projets, de tous ces hommes dont les propositions généreuses n’ont pas été suivies d’effets, mais que nous pouvons, sans hésiter, poser comme les pionniers au cœur pur, au langage vrai, du mouvement actuel de décroissance. Et pas seulement de ce mouvement-là…
Esquissons l’historique de quelques-unes de ces tentatives ou expériences. Dans l’Angleterre, rebelle et pensante, fièrement anti-capitaliste et anti-colonialiste, une perspective révolutionnaire s’est dessinée dans les esprits, certes sur un plan plutôt théorique et nettement moins pratique, mais néanmoins digne de nos respects. Dans cette Angleterre, une culture alternative a vu le jour, très différente de l’impérialisme officiel, qui n’était que racisme hautain, exclusivisme social et économique, à des années lumière des politiques maçonniques et sectaires axées sur la violence envers les exploités : la littérature de l’époque en témoigne. Les enfants, filles et garçons, furent les premières victimes de cette violence sociale, de la monstrueuse dynamique socio-politique de cet âge du manchestérisme triomphant. On les retrouvaient par dizaines de milliers dans de sinistres orphelinats, dans d’hideuses fabriques, dans des « maisons de correction ou de redressement », sans cesse exposés au châtiment de la bastonnade, au stupre, ou furent purement et simplement tués car considérés comme inutiles ou bons à rien voire destinés à devenir simple viande de boucherie dans un futur imaginé comme complètement robotisé.
Face à ces visions d’horreurs, se constitue, sur le plan doctrinal, le « socialisme des gildes ». Il se veut une doctrine culturelle alternative, différente de l’horreur manchésterienne. Le « gildisme » a été théorisé par un historien anglais, G. D. H. Cole, puis, au fil des années, par le livre manifeste d’un architecte socialiste et chrétien, Arthur Joseph Penty (1875-1937), « The Restoration of the Gild System », paru en 1906.
Ce socialisme atypique, admirateur du moyen âge, ennemi infatigable et passionné de l’industrialisme moderne, lançait un appel au retour à l’artisanat, à un système de production à petite échelle, sous le contrôle normatif des gildes professionnelles. En suivant l’exemple du socialiste William Morris, ce socialisme refusait l’idée que la production de produits « de qualité médiocre et vendus à bon marché » constituait un avantage pour le consommateur. De cette façon, ce socialisme gildiste anticipait, avec ses idées radicales, tous les courants critiques du système capitaliste nés dans les années 70 du 20ième siècle, courants qui, au cours de ces dernières années, sont revenus à pas de colombe sur l’avant-scène idéologique mondiale. Ces critiques recèlent des rancoeurs contre un système abominable et sont perpétuellement à la recherche de solutions pour soulager les peines des travailleurs réduits à l’esclavage, y compris de solutions dans la lutte actuelle contre les caractères démoniaques de l’exploitation mentale des travailleurs. Dans cette optique intellectuelle et socialiste, l’homme ne doit pas se limiter à analyser la vie à l’intérieur des structures dominantes de la société industrielle mais, au contraire, doit s’en évader et lancer des dards empoisonnés sur le monstre « Progrès », posé comme fin en soi et qui nous broie tous aujourd’hui.
Dans le même filon, où se mêlent intérêts culturels et intérêts politiques, nous trouvons la publication « The New Age », éditée par A. R. Orage. Elle fut une revue, une tribune, qui assura le lien, la jonction, entre ce socialisme des gildes et le renouveau artistique et culturel constitué par la résistance communautarienne (avant la lettre). A cette revue contribuèrent des militants et des penseurs, des écrivains et des poètes du calibre d’un Ezra Pound, d’un William Butler Yeats, d’un G. K. Chesterton et de bien d’autres qui, ensemble, formèrent une redoute dans les années 10 et 20 du 20ième siècle en Angleterre, où germèrent des idées qui demeurent encore et toujours actuelles. Dans cette revue, on étudiait et analysait les œuvres de Nietzsche et de Marx, pour les enrichir et les dépasser, les inscrire dans des projets réalisables.
Nous avons eu affaire, là, à une culture socialiste originale et non dogmatique, qui a pris forme, a émergé à la vie en se mêlant sans remords à la religiosité véritable du peuple, sans chercher à trancher le cordon ombilical qui reliait le socialisme aux traditions populaires, sans renier des formes fortes et solidement ancrées de religiosité païenne ou chrétienne, présentes au sein du peuple.
La « Ligue des Gildes Nationales » en fut le mouvement organisé, la représentante de cette jeune communauté de pensée. Elle naquit en l’année fatale 1915, où une boucherie sans nom allait commencer, où la fine fleur de la jeunesse européenne tombera au combat ou en sortira renforcée. Dès son émergence, cette « Ligue » eut à subir les avanies des marxistes sectaires, ignorants et démagogues, qui la traitèrent de « mouvement petit-bourgeois et utopiste ». Ces socialistes communautariens et gildistes, qui avaient adhéré à la « Ligue », croyaient que la force éthique, et non le matérialisme vulgaire, devait se poser comme le noyau incandescent de la lutte socialiste parce qu’ils estimaient que la liberté individuelle devait s’épanouir à l’intérieur et en symbiose avec la communauté populaire ; ils pensaient également que la responsabilité sociale devait s’étendre au peuple tout entier, de façon à ce que la Révolution trouve dans le peuple lui-même, et non à l’extérieur de lui, une légitimité faite de sang, de chair et d’idée, prête à prendre, aux moments terribles de l’épreuve, les rênes de la cause communautaire. Pour ces militants communautariens et nationaux, la lutte contre l’esclavage et contre l’incertitude étaient les axes majeurs de l’action socialiste.
Dans leurs propositions, les gildistes de la « Ligue » réclamaient d’être libérés du spectre du chômage, d’être libres dans les usines, de bénéficier du droit au travail sous la houlette de directeurs qu’ils auraient choisis, d’éliminer du monde du travail tous les dirigeants imposés d’en haut, tant dans les entreprises privées que dans le secteur de l’Etat. Ils étaient convaincus que sans une démocratie industrielle, il ne pouvait pas y avoir de démocratie politique. Cette brève approche de l’idéologie gildiste nous permet de conclure que le « contrôle communautarien » devait venir de la « base ». Ce mouvement, non unitaire, alignait à l’évidence des personnalités diversifiées, exprimant des positions parfois contradictoires, mais, en dépit de ces divergences de surface, elles avaient toutes un projet général, qu’il serait intéressant de raviver aujourd’hui.
Davide D’AMARIO.
(article paru dans le quotidien romain « Rinascita », 19 février 2008).
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jeudi, 27 mars 2008
Kosovo: nouveau protectorat américain?

Safet BABIC :
Le Kosovo : nouveau protectorat américain ?
Le Kosovo, que les Allemands nomment aussi l’Amselfeld, le « Champ des Merles », est une région au centre de la péninsule balkanique, dont les frontières touchent au sud-ouest l’Albanie, au nord-ouest le Monténégro, au nord et à l’est la Serbie aujourd’hui réduite et, au sud-est, la Macédoine. Après la guerre de 1999, le Kosovo a reçu, par le truchement de la résolution 1244 des Nations Unies, le statut d’un territoire autonome à l’intérieur de la Serbie et a été placé sous l’administration de l’ONU.
Les frontières occidentales et méridionales du Kosovo sont constituées de zones montagneuses. Au centre de cette cuvette, nous trouvons deux plaines : celle du Champ des Merles, avec Pristina pour capitale, et la Métochie à l’Ouest, dont le centre est Prizren. Les deux plaines sont séparées par une zone de collines, semi-montragneuse. Le Kosovo, avec ses 10.877 km², a une superficie a peu près égale au tiers de celle de la Belgique. Sa densité démographique de 175 habitants par km² en fait un territoire à la population relativement dense. On estime que la population du Kosovo est d’environ 1,9 million d’habitants. Cette population est très jeune : 33% a moins de quinze ans ; 6% seulement a plus de 65 ans. Entre 350.000 et 400.000 Kosovars vivent à l’étranger, surtout en Allemagne, en Autriche et en Suisse. D’après des estimations récentes de l’OSCE, 91% de la population du Kosovo est albanaise, 5% est serbe et les derniers 4% sont constitués d’autres minorités, surtout des Tziganes et des Turcs. A la suite des élections parlementaires du 17 novembre 2007, que les Serbes ont boycottées, le PDK, ou « Parti Démocratique du Kosovo », formation du chef de l’opposition Hashim Thaçi, est devenu la principale force politique du pays. Une semaine après ces élections, ont commencé les ultimes négociations entre Serbes et Albanais du Kosovo à Baden près de Vienne. Elles se sont terminées le 28 novembre 2007 sans qu’un accord n’ait été conclu. Après cet échec, le Président Sejdiu a exclu toute poursuite des négociations avec la Serbie et a annoncé que la seule alternative serait de proclamer bien vite l’indépendance du Kosovo.
C’est ainsi que l’indépendance du Kosovo est devenue une probabilité toujours plus grande, même si la Serbie, et son allié traditionnel, la Russie, ont annoncé que ce ne serait pas sans conséquences. Les Albanais du Kosovo reçoivent le soutien des Etats-Unis et de l’Union Européenne. Même l’ancien ministre allemand des affaires étrangères, l’écologiste Fischer, n’hésite pas à transgresser certaines règles diplomatiques et à propager l’idée d’un Kosovo indépendant. Mais l’histoire nous enseigne toutefois que le Kosovo est le cœur même de la Serbie.
Une histoire sanglante
Ce n’est pas sans raison qu’un homme politique macédonien, il y a quelques années, qualifiait les Balkans de « débris d’empires ». Longtemps peuplé de populations de souche illyrienne, le Kosovo est devenu la patrie des Serbes, une population slave méridionale. Au départ, le Kosovo a été le centre de la Serbie médiévale. Le biographe de Charlemagne, Eginhard, mentionne déjà la Serbie en 822. L’Albanie n’apparaîtra dans les textes médiévaux qu’en 1272, après qu’elle eût été fondée par Charles d’Anjou. Avant l’occupation ottomane à la suite de la défaite serbe du Champ des Merles en 1389, aucune chronique n’évoque d’Albanais en Serbie. Ce n’est qu’après l’occupation complète de la Serbie par les Turcs musulmans que les Albanais pénètrent dans cette région située au nord de leur zone de peuplement, après avoir adhéré en masse à la religion islamique. Les historiens albanais voient dans les Albanais des descendants des Illyriens, ce qui est cependant contesté. Les Serbes quittent le pays par vagues, ce qui diminue leur pourcentage au sein de la nouvelle population.
A la suite des avancées des troupes du Prince Eugène de Savoie-Carignan, qui battent les Turcs, les Serbes se soulèvent au Kosovo et font payer cher aux occupants ottomans les avanies que ceux-ci leur avaient fait subir. La « Grande Migration » de 1690 mena beaucoup de Serbes sur le territoire de l’actuelle Croatie, où les souverains autrichiens les utilisèrent comme paysans-colons et garde-frontières, dotés de privilèges, le long de la frontière militaire austro-ottomane, afin de prévenir et contenir toute nouvelle invasion turque.
En 1871, le rapport était de 318.000 Serbes pour 161.000 Albanais au Kosovo. Tandis que la Serbie était devenue complètement indépendante en 1878, la domination turque au Kosovo ne se termina qu’en 1912. Dans les dernières années de l’occupation ottomane, la terreur anti-serbe alla crescendo, tant et si bien que peu avant que n’éclate la première guerre mondiale en 1914, il n’y avait plus que 90.000 Serbes dans la région. Pendant la seconde guerre mondiale, la Kosovo appartenait à l’Albanie qui était protectorat italien. Tandis que les Serbes sont demeurés jusqu’à nos jours assez germanophobes, l’Allemagne était généralement adulée chez les Albanais. Il y eut même une division de Waffen-SS constituée de volontaires albanais (la Division « Skanderbeg »).
Après 1945, le chef de la nouvelle Yougoslavie communiste, Tito, interdit aux Serbes de revenir sur le territoire du Kosovo, alors qu’il laissait les frontières entre la Serbie et l’Albanie ouvertes, ce qui entraîna l’immigration de 100.000 Albanais sur le territoire kosovar, sous souveraineté yougoslave. Sous Tito régnait un véritable embargo sur toutes les informations en provenance du Kosovo. Finalement, la minorité serbe subit ouvertement attaque sur attaque, ce qui, d’après des sources américaines, a entraîné l’exode hors du Kosovo de quelque 60.000 Serbes entre 1972 et 1982. En 1974, le régime titiste accorde une autonomie élargie aux Albanais du Kosovo. Cette autonomie fut annulée en 1989 après l’énorme vague d’indignation qui secoua la Yougoslavie après que les Albanais eurent commis des viols en masse et des voies de fait contre des concitoyens non albanais au Kosovo.
Dans les années 90, l’UçK se constitue grâce aux appuis que lui procurent les services secrets américains. L’UçK entendait systématiser la terreur pour parvenir à un Kosovo indépendant. L’appareil policier serbe riposta, avec toute la rigueur voulue, en 1999. L’exode des Albanais du Kosovo vers l’Albanie fut le prétexte saisi par l’OTAN pour intervenir militairement contre la Serbie. En Allemagne, le gouvernement rouge-vert de l’époque participa allègrement à cette violation flagrante du droit des gens, déguisée en « action de représailles », alors qu’un pays de l’OTAN comme la Grèce a eu le courage d’exprimer à l’égard de la Serbie sa « solidarité orthodoxe » et de rester neutre. Depuis 1999, 16.000 soldats de la KFOR, sous le commandement de l’OTAN, sont stationnés au Kosovo, dont 3500 militaires de la Bundeswehr allemande. Malgré cette présence, personne ne s’attend à une relance économique de la province, vu le taux de chômage de 70% qui y règne.
Aujourd’hui, on parle d’installer au Kosovo un protectorat américain supplémentaire, après que l’expérience bosniaque se soit, elle aussi, avéré un fiasco total. Dans le nouveau cabinet kosovar, on constate, par exemple, que le ministère de l’énergie sera confié à l’économiste Justina Pula-Shikora, qui avait travaillé jusqu’ici à la fameuse Fondation Soros à Pristina. L’Etat du Kosovo ne sera donc jamais qu’une marionnette aux mains de Washington. Pour amadouer le gouvernement de Belgrade, on promet aux Serbes qu’ils pourront adhérer à l’UE. Le contribuable allemand ira bien entendu de sa poche pour financer ce marché de dupes.
Un avenir sanglant ?
Il serait tout à fait incongru d’appliquer des critères centre-européens dans une région comme les Balkans. Sur le plan historique, le Kosovo a appartenu politiquement, depuis toujours, à la Serbie. Mais la Voïvodine, très fertile sur le plan agricole, appartenait jadis ethniquement à la Hongrie et est aujourd’hui peuplée majoritairement de Serbes. Quant aux Serbes de Bosnie, qui menacent de proclamer leur propre Etat indépendant sur le territoire bosniaque, ils ne sont arrivés là qu’à partir du 16ième siècle. Beaucoup d’entre eux venaient d’ailleurs du Kosovo. Il faut aussi se rappeler qu’une grande partie des 600.000 Serbes qui ont vécu pendant plusieurs siècles en Krajina, un territoire croate, ont quitté la Croatie après l’opération « Tempête » du Général Ante Gotovina en 1995.
Le mieux, à l’évidence, est de trouver des solutions pacifiques à cet imbroglio, prévoyant des entités ethniquement homogènes et cohérentes sur le plan territorial. On pourrait éventuellement procéder à des « échanges territoriaux » et à des compensations matérielles. Or ce sont précisément des solutions pacifiques de ce type-là que l’Occident, avec les Etats-Unis en tête, a sans cesse torpillé. Car finalement l’existence d’entités étatiques fragiles sert l’hégémonisme global. Les faiblesses intérieures entraînent la dépendance en politique extérieure. Cette réalité vaut sur le plan de la domination culturelle comme sur celui de la domination économique, ce que démontrent notamment les privatisations au profit de consortiums étrangers en Bosnie et au Kosovo. Ce dernier détient, soulignons-le, les plus grandes ressources en minerais divers d’Europe. Les Balkans ont toujours eu une grande importance géopolitique et, au beau milieu de ceux-ci, le Kosovo réunit à lui seul tous les atouts stratégiques de la péninsule. Il est à la croisée des voies de communications, à cheval sur les lignes de fracture de demain, quand il s’agira de maîtriser les sphères d’influence politiques et les réserves de matières premières.
L’offre serbe d’accorder une très large autonomie au Kosovo, d’accepter que se constitue une équipe de football kosovar indépendante et que la province aujourd’hui majoritairement albanophone dispose de représentations diplomatiques a été une offre correcte, une ouverture au dialogue intelligente et posée. Mais les Kosovars, excités par les Américains, ont exigé l’indépendance totale. Même si l’on raisonne en termes d’ethnies, de patries charnelles ou d’appartenance linguistique, on doit alors partir du principe minimal d’une partition possible et nécessaire du Kosovo entre la Serbie et l’Albanie. En effet, au nord de la rivière Ibar, la majorité de la population est serbe. En revanche, si l’on raisonne en termes d’histoire et de culture, cette partition est impensable pour les Serbes car la plupart des monuments religieux et des monastères serbes se situent au-delà de la rive sud de l’Ibar.
Si d’aventure le Kosovo devenait définitivement indépendant, les mouvements sécessionnistes auraient le vent en poupe dans le monde entier, ce qui constituerait un désavantage évident pour la Russie, principal adversaire géopolitique des Etats-Unis. La problématique du Kosovo montre, de manière exemplaire, que tout assemblage étatique multiculturel est, à terme, menacé d’éclatement et, qu’en fin de compte, seules les puissances extérieures à l’espace (« raumfremde Mächte ») profitent de leurs tensions intérieures. La protection qu’accordent les Etats-Unis aux Albanais musulmans du Kosovo ne tiendra qu’aussi longtemps que cela conviendra aux intérêts des cénacles dominants de New York et Washington. Si, un jour, les Albanais du Kosovo décidaient de mener leur politique à leur guise, ils devront vite déchanter et il ne leur resterait plus qu’à méditer un adage jadis forgé par Ernst Niekisch : « Celui qui a l’Amérique pour amie, n’a plus besoin d’ennemis ! ».
Safet BABIC.
(article paru dans « Deutsche Stimme », février 2008 ; cf. http://www.deutsche-stimme.de ; trad. franç. : Robert Steuckers).
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Franz Xaver Baader

27 mars 1765: Naissance à Munich de Franz Xaver von Baader. Ingénieur des mines de formation, il se révèle comme philosophe en 1814, quand il soumet un mémoire aux Empereurs d’Autriche et de Russie et au Roi de Prusse, afin de pérenniser l’idéal de “Sainte-Alliance” continentale. Pour forger définitivement ce bloc véritablement eurasien (avant la lettre!), Baader étudie la théologie et plaide pour un rapprochement entre le catholicisme occidental et l’orthodoxie russe, que Rome refusera. Baader deviendra ainsi un adversaire résolu de la Papauté romaine, ennemie de l’unification européenne et eurasiatique.
La théologie de Baader puise ses sources chez les Pères de l’Eglise et chez les mystiques allemands du moyen-âge. Hostile au cartésianisme et au rationalisme des Lumières, Baader croit à la révélation divine et pense que l’homme participe du divin, comme le pensaient aussi les mystiques médiévaux. L’homme est donc un être intermédiaire entre la sphère du divin et celle de la nature. L’homme est une part d’un donné préexistant, dont il s’agit de maintenir l’harmonie. L’Etat doit tenir compte de ce donné et ne jamais succomber aux sirènes des idéologies mécaniques qui se revendiquent fallacieusement d’un “état de nature” et d’un “droit naturel”. Les Etats doivent se donner des constitutions particulières, fruits organiques de leur propre histoire, et non pas viser à adopter tous un modèle préétabli, unique, de constitution, qui serait considéré comme une panacée valable en tous temps et tous lieux. Baader s’insurgera très vite contre les misères générées par la société industrielle et réclamera l’avènement d’un Etat qui ait une politique sociale bien définie, afin d’éviter la prolétarisation des masses. Franz Xaver von Baader meurt à Munich le 23 mai 1841.
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mercredi, 26 mars 2008
Nouvelle alternative à la mondialisation

Rodolphe LUSSAC:
Ni Davos, ni Porto Alegre: pour une troisième voie, nouvelle alternative à la mondialisation
D’un côté, Davos, la Mecque du patronat planétaire, le pèlerinage des ultra-riches, le séminaire des évêques de l’ultralibéralisme, nous donne la température de l’univers de l’argent-roi en direct de la capitale éphémère de la World Company. De l’autre côté, Porto Alegre, la grande ferme expérimentale, des hippies high-tec, des anarcho-libertaires recyclés, les gourous d’une humanité juste et paisible, les routards du tiers mondisme et les fidèles répliques du Che, pour nous donner mauvaise conscience et, en passant, laisser quelques larmes sur les favellas brésiliennes, histoire de comprendre quelque chose sur le fossé Nord-Sud. Bref à en croire les apparences, il s’agirait là de deux camps ennemis, hermétiques, bien retranchés, entre le camp des mondialistes et ceux du "non mondialisme". En fait, structurellement, sociologiquement, culturellement et même politiquement, il n’en est rien.
Le camp des mondialistes et celui des prétendus anti-mondialistes sont tous deux affectés par ce que l’on appelle, en sociologie, les vertus de "l’isomorphisme", c’est-à-dire qu’ils possèdent les propriétés structurelles analogues qui permettent une autorégulation et une conservation délétère du système dominant. D’un côté, la légitimité de Davos, de l’autre, la contestation de Porto Alegre, le tout saupoudré à la sauce médiatique et le tout est joué. Tous deux sont de vastes agents de socialisation à l’échelle internationale; ils fonctionnent dans une complémentarité fallacieusement hostile, comme des vases communicants par interposition médiatique. L’un comme l’autre de ces deux camps ont besoin de leurs coups de gueule, d’action spectaculaires pour jouir d’une notoriété médiatique. Il s’agit en fait d’un commerce médiatique. Les deux camps ont l’un comme l’autre besoin de leur façade antagoniste et agressive, pour se médiatiser et se vendre mutuellement, en inculquant systématiquement, d’une façon complémentaire, une culture spécifique et unique à l’échelon planétaire.
Jeunes rebelles sans cause
"Soutenir la croissance et réduire la fracture" le mot d’ordre de Davos. Les deux camps se confortent dans leur rôle de courroie de transmission médiatique réciproque; la participation de soixante-neuf représentants d’organisations non-gouvernementales et de nombreux syndicalistes au côté de représentants de multinationales, n’ont fait que refléter la promotion médiatique d’une version réformiste, humanisée des "globals leaders". Une forme de mondialisation sociale à l’écoute des plus défavorisés. De l’autre côté, à Porto Allegre on est bien loin des cocktails molotov, des affrontements, des gaz lacrymogènes et des voitures incendiés de Seattle et Zurich. Cette fois-ci, on a bien compris le message. A l’ajustement phraséologique de Davos ont répondu les accents institutionnels et réformistes d’une nouvelle forme de mondialisation à visage humain. Le mouvement des sans-terre, l’organisation Via Campesina, le mouvement ATAC, les rescapés de mouvements maoïstes, les crados anarcho-libertaires , les bolchos en tout genre et les étudiants ratés des campus de la nouvelle gauche, ont planché, répartis en cent ateliers, pour affirmer une plus grande participation de la société civile dans le commerce international. Bref les jeunes rebelles sans cause ont bien compris la leçon de leurs paternels. Le forum de Porto Alegre s’est terminé sans déclaration finale. Et pour cause, en l’absence de fondements suffisants pour une réflexion articulée et fructueuse, les participants n’ont fait que leur aveu d’impuissance et de leur incapacité de véhiculer une quelconque vision du monde, un quelconque projet de société, à part le fait de fumer du shit en communauté sous l’oeil bien veillant du Che et de la Passionaria. Le discours révolutionnaire a cédé le pas devant une stratégie réformiste qui rejoint le discours globalisant et rassurant d’une croissance soutenue des pontifes de Davos.
Macdonaldisation des styles de vie
En fait d’un point de vue culturel, Davos et Porto Allegre ne sont que l’alter ego, les deux faces prétendument opposées d’un seul et unique processus de mondialisation qui se propage à l’échelon planétaire, articulé autour d’une dualité complémentaire, le nivellement uniformisateur d’un côté et la micro-hétérogénéité anarchique de l’autre côté. En effet, la mondialisation propage la macdonaldisation des styles de vie, des normes de comportement, des musiques, des modes de consommation par un processus de nivellement culturel uniformisateur. Cette uniformisation est soutenue par les relais médiatiques et non gouvernementaux de la société civile qui propage subtilement le répertoire des normes et des valeurs des droits de l’homme, de la démocratie, de l’économie de marché, de la protection de l’environnement qui s’imposent aux quatre coins du monde. A cela vient se greffer la cyberspace et la hightech culturelle dernier cri.
En effet, d'un côté, on vend en quantité colossale des ordinateurs de dernier cri à des populations du tiers-monde, des représentants de l’élite locale, des intellectuels, des universitaires, des opérateurs sociaux culturels, qui en font la promotion et la commercialisation auprès de leur propre population en louant les vertus de la démocratie de marché, de l’écologie, du féminisme, etc. De l'autre côté, en réaction à la propagation de la culture consumériste et globalisante, se constitue des pôles culturels pseudo-contestataires, des groupes de pression souvent affiliés à des partis d’obédience socialisante voire communisante, qui prônent et génèrent un modèle micro-hétérogène culturel qui se manifeste dans toutes sortes de métissage, de crispations identitaires régionalistes, d’ethnicité , de prêt-à-porter spiritualiste, lesquels seraient bien sûr les remèdes et l’alternative à l’économie libérale, avec une redistribution plus juste des richesses, une solidarité internationale et une humanité plus juste, bref le tralala pleurnichard des alternatifs de tous bords.
Un échappatoire insuffisant et bricolé
En fait, ce camp contestataire est affecté par la maladie de l'hybridation, et ne constitue en réalité qu’un échappatoire insuffisant et bricolé à la culture Mcdonald de Davos, comme les larmoyants refrains sur le terroir pathétique de José Bové. Ce courant d’idée n’est que le rejeton de la mondialisation culturelle et ne peut être perçu comme un véritable mouvement de contre-modernité, car il procède des mêmes matrices individualistes, égalitaristes et économicistes qui font les piliers de la technocratie internationale. D’un côté, le monde de Davos serait une gigantesque Bourse mondiale avec toboggans entre les diverses places boursières mondiales, un argent facile et une frénétique spéculation où se délecteraient les yuppies débiles sur les start-ups du dernier modèle net, les sites, les portals, providers avec tous les barbarismes qui nous en mettent plein la figure: Yahoo, Wanadoo, Amazon, Vizzavi; dans ce parc d’attraction dernier cri, le décrochage définitif de la religion ultra-libérale par rapport à la ringardise économique et sociale de "l'archaïsme" socialo-humain s’opérerait par la promotion et la banalisation des nouvelles technologies, du monde virtuel et de la cyberconscience planétaire. De l’autre côté, le monde de Porto Allegre deviendrait une gigantesque rave party, avec le cannabis légalisé, où gigoteraient des générations entières de pacifistes décervelés, des gourous de l’humanisme techno, des raspoutines ethnos, au-dessus de laquelle s’élèverait un gigantesque nuage de fumée, du hashish recyclé pour préserver la couche d’ozone. Bref, la symbiose des deux mondes se fait par la vénération de l’hyperhédonisme et de l’ultra-rentabilité de milliards instantanés dans une ivresse collective, voilà l’alchimie du mondialisme réalisée, la pierre philosophale de la Word company enfin trouvée.
A l’ordre technocratique néolibéral des high tech trusts de Davos et l’hétérodésordre anarcho-soviet de Port Allegre, une Troisième voie s’impose, véritable alternative philosophique, métapolitique et économique qui soit une force de proposition, non seulement réactive, mais authentiquement et profondément matricielle. Cette nouvelle matrice se propose de :
Soumettre la modernité à un “Modulor”
- Ne pas rejeter la modernité mais repenser la modernité comme le résultat d’une dialectique entre la nature biologique de l’homme, l’organicité de la vie et les constructions de l’intelligence entre lesquels une équation étroite et asymétrique doit être établie au risque d’un débordement abstrait et incontrôlé du phénomène de la technicité, qui s’égare dans un désert d’artificialité, de dissymétrie et de stérilité. Comme chez Le Corbusier, la modernité serait soumise à un "Modulor", une unité de mesure dont les valeurs proportionnelles sont basées sur le corps humain et sur le corps organique social.
- Dénoncer l’imposture libérale qui, depuis Kant, Adam Smith, en passant par Milton Friedman, Hayek et la théorie de la justice de John Rawls, en vient à générer un véritable darwinisme social sous l’appellation sordide d’égalité des chances, processus dissolvant de toute forme de solidarité sociale où le rôle de l’Etat disparaît pour laisser place à la suprématie techno-financière des grands trusts transnationaux;
-La mondialisation est le fruit de ferments individualistes qui, depuis la révolution française et l’avènement du règne de la bourgeoisie mercantile, désintègre tout lien social et empêche toute forme de société d’évoluer organiquement de manière responsable et disciplinée.
Réintroduire le civisme et le loyalisme
L’absence de contrôle social engendre une irresponsabilité collective et individuelle croissante. Face à cette contagion individualiste, la crispation sécuritaire et la répression s’organise à l’échelon planétaire pour contenir la montée de l’incivisme et de la criminalité pandémique. C’est la nouvelle "guerre civile" localisée dont a parlé Hans Magnus Enzensberger, une forme de "brutalisation de la société" qui est le fruit conjugué de l’anomie généralisée, de l’idéologie sécuritaire et l’individualisme moderne. L’homme est dualité: tourné vers le dedans et membre de la cité, sa tragédie intérieure comme son drame politique découlent de cette double et contradictoire orientation; toute vraie politique, toute religion , tout mythe qui prétend ignorer l’un des deux aspects ou supprimer l’une des appartenances est malfaisant. L’être humain et son milieu réagissent en symbiose; c’est pourquoi il sera prioritaire de réintroduire dans les sociétés contemporaines le civisme et le loyalisme des citoyens, comme premier fondement d’une refonte globale du système.
- Face à la conception économiciste, mercantile et sociétaire de la vie sociale et individuelle, face à la sclérose et le déficit des institutions démocratiques qui se manifestent dans la structure des partis politiques et dans les méthodes de travail parlementaire, il convient de restaurer la suprématie de la sphère politique sur celle de l’économique, une politique au service du bien-être général, qui au-delà des clivages politiciens, de l’impuissance, de la gabegie, des luttes partisanes stériles saura sagement combiner l’autorité et la liberté, la hiérarchie et la justice sociale. Ainsi, le primat du politique en tant qu’incarnation d’une "polis" régénérée, saura écarter le plus insidieux et le plus nocif abus de pouvoir commis en Occident qu’est le "scientisme politique", cette prétention du rationalisme qui veut que la raison réglerait seule toutes les relations de la collectivité. Cette restauration du politique, terrain de communion, agira comme principe d’unité spirituelle, comme symbole unificateur d’une nation et ultime ancrage d’une adhésion à la famille de chaire et de sang que sont les nations.
-Dénoncer l’utopie conservatrice et réactionnaire du progrès. Depuis, Marx, Darwin, Rousseau, puis Fukuyama, le courant progressiste, qui croit en un progrès linéaire et continu de l’humanité, confondu avec les performances de l’informatique et des hautes technologies, nous annonce la fin de l’histoire. Or l’histoire même, les guerres, les génocides apportent un démenti radical à l’idée de progrès et même à l’idée de providence. Le mal pourrait se transformer en bien, or la crise de l’idée de progrès résulte de la crise de la représentation du mal, d’un dérèglement de la dialectique du mal et du bien, corroboré par l’absence de représentation du point de démarcation entre le bien et le mal. Toute la philosophie du progrès est à revoir.
Une vision synecdotique et métonymique de l'univers
- Devant l’anti-historicisme de la pensée contemporaine, il convient de réinstaller au cœur de la vie des peuples le sens de l’histoire. L’histoire conçue comme un phénomène culturel, métapolitique et organique indispensable dans la vie et l’affirmation de l’être collectif que sont les peuples, laquelle est une succession de conflits, de mélanges entre le pouvoir consensuel et le pouvoir absolu, la liberté et la contrainte, l’égalité et la hiérarchie, l’initiative et le contrôle multiple, la fraternité et la terreur. L’histoire s’inscrit dans une vision "synecdotique et métonymique de l’univers" qui, dans un espace-temps donné, est le vecteur d’une mise en forme et le moteur d’un ordre de choses, expression d’un espace symbolique collectif, qui tire ses sources d’une dialectique conflictuelle entre le conscient et l’inconscient collectif des peuples.
- A l’idée illuministe et utopique d’une humanité au singulier, substituer le concept d’une universalité régénérée par les valeurs de pluralité, de noblesse et de dignité, une humanité en tant que jonction solidaire et organique entre l’individu, la communauté et leur intégration harmonieuse dans l’espace-temps.
Attirer l'adhésion volontaire des peuples
- Substituer à la conception gestionnaire libérale de l’Etat, la conception et la fonction anagogique de l’Etat souverain, comme créateur de valeurs et de concepts transcendantaux, capables d’attirer l’adhésion volontaire des peuples.
-Dans la lignée de Hobbes et de Bodin, réhabiliter l’idée schmittienne du "nomos", d’un enracinement territorial de l’Etat moderne, à vocation universelle qui supplanterait les mécanismes artificiels multinationaux et régionaux qui servent l’uniformité mondialiste.
-A la suprématie de "l’international law", en vigueur et d’essence anglo-saxonne, en tant que droit international général, impersonnel, uniformisateur, abstrait et indifférencié, le plus souvent instrumentalisé par les puissances dominantes, il conviendra de procéder à une refonte juridique européenne, qui instituera un droit des peuples et des gens générateur d’un ordre de rapports organiques et différenciés entre les nations européennes, garant du respect de la pluralité, de la gradation fonctionnelle et de l’autonomie relative de chaque sujet et composante nationale. Un droit "éminent, central et de souverainetés partielles " —imperium eminens et jus singulare—, en vertu duquel il sera possible d’appliquer le principe pondéré des nationalités qui se substituerait aux divisions et aux inégalités générées par l’actuel "international law".
Hypertrophie logocentrique et refoulement du mythos
-Nous assistons, depuis l’ère philosophique socratique, à une contagion de l’hypertrophie logocentrique, marqué par le phénomène du "refoulement du mythos par le logos", lequel a précédé ce que Heidegger a appelé "la domination du logos", le règne du concept de la raison discursive et narrative précédant la période du nihilisme occidental. A cette image contemporaine logocentrique en laquelle un Logos construit le centre du monde, pour reprendre une expression de Ludwig Klages, il convient de substituer une nouvelle forme de déconstructivisme philosophique comme paradigme d’un nouveau nihilisme actif. Il ne s’agit pas ici d’opposer le "mythos", le langage en "état stationnaire", au soi-disant "logos" , " le langage en processus", car la démonstration irréfutable a été faite que le logocentrisme depuis les Lumières, et jusqu'à nos jours, a été contaminé par un esprit de vengeance et de ressentiment, ce que Gabriel de Malby, à la veille de la révolution, illustrera par ces termes: "Vengez les droits de l’homme, c’est à quoi se réduit la poétique de l’histoire". De sorte que le logocentrisme de la philosophie contemporaine est devenu l’une des expressions les plus conservatrices et les plus totalitaires dans l’interprétation de la vérité et du monde. Il convient donc de substituer à cette interprétation logocentrique du monde une interprétation "épochale" de la vérité et du monde, permettant un retour à l’essence humaine, conçue non pas comme une hégémonie de la présence, mais comme la perception active d’un perpetuum mobile de la remontée vers l’en-deçà de l’abaissement et de la réduction logocentrique. Cette position déconstructiviste ouvrirait la voie vers une forme de philosophie active, qui pour combattre les théories totalitaires, ne l’affronte pas par un affrontement critique mais par le biais d’une pensée créatrice, qui dépasse, transcende les oppositions, les contraires vers une forme de synthèse totale.
Le rôle actif, créateur et novateur du mythe
-Réinstaller dans l’histoire collective des peuples le rôle actif, créateur et novateur du mythe. Non pas le mythe conçu comme l'image archaïque et stationnaire, passéiste, d’une figure fondatrice, mais comme le vecteur de nouvelles potentialités créatrices à l’oeuvre dans l’inconscient collectif et individuel des peuples. Même si, selon la définition de Lévi-Strauss, le mythe a longtemps été considéré comme une onde stationnaire, il est néanmoins certain que cette onde stationnaire est soumise à des ruptures. La rupture dans l’histoire contemporaine consiste dans le clivage entre l’entropie du mythe prométhéen progressiste et utopique des sociétés contemporaines et les leçons qualifiées comme "régressives" de l’histoire, ponctués d’événements tragiques à rebours d’un sens linéaire et progressiste de l’humanité. Tout comme le langage, dont Deleuze et Foucault ont démontré qu’il s’agissait d’un composé de rapport de force, nous assistons, à l’époque contemporaine, à une scission entre le théâtre des énoncés c’est-à-dire, la glose médiatique et conformiste promettant la fin de l’histoire et l’avènement du bien-être de l’humanité entière, et la réalité du champ de visibilité quotidien c’est-à-dire l’actualité cruelle de tous les jours, une scission entre le primat du parler et de la penser unique et de l’irréductibilité du visible. C’est précisément à l’intersection de cette scission, que nous entendons restaurer le rôle créateur du mythe, non plus comme une onde stationnaire, mais considéré comme une onde dynamique et dialectale d’un rapport de forces.
Non pas le mythe fondateur de jadis mais une nouvelle forme de "mythe constitutif" et dynamique, constitutif de "jus terrae", projection archétypale du "jus spiritus", substituant au processus de la sécularisation de l’histoire et à sa réduction à une forme d’engineering realpoliticien et calculateur, la matrice et support d’un nouveau droit, facteur "historicisant", d’une affirmation souveraine, d’une négation radicale, d’une confrontation constante de forces opposés et irrationnelles en perpétuel devenir. Le "logos" mondialiste, qui désagrège les continuités naturelles et historiques, crée des séismes épistémologiques, marqués par le signe de l’inadéquation. Lorsque l’on entre dans le champ de la mondialisation technicienne, nous s’assistons plus aux transmutations mais à l’action des forces mutilantes, et au règne des mutations brutales.
Le logos mondialiste élimine le rôle cognitif de l'imagination
A la relation corps-âme-esprit de l’univers du "mythos" se substitue l’inéluctabilité d’un dualisme foncier qui relègue l’imagination et l’inconscient à la folie. Car l’espace du "mythos" est l’espace de la transmutation qui ne s’épanouit que par l’imagination. Notre nouveau mythe constitutif voyage à travers d’autres cultures qu’il assimile par l’espace de transmutation. C’est-à-dire que la convergence s’opère au plan des symboles. La transmutation du "mythos" possède une faculté transfiguratrice en vertu de laquelle un symbole, un archétype, sort de sa propre constellation, passe à la suivante, s’y installe, en subit l’impact mais retrouve sa propre origine et longueur d’onde, sans dégrader le champ d’allégorie et sans mutilation. Le "logos mondialiste" élimine le rôle cognitif de l’imagination en lui substituant le langage virtuel. Dès lors, à la transmutation des formes symboliques se substituent des mutations de toutes espèces, avec l’explosion de contenus étrangers dans des formes inadéquates à les contenir et le résultat est l’apparition de formes hybrides, des monstres de Frankenstein, un bricolage idéologique produisant des amalgames construits des plus pervers. Seul le "mythos" qui conquiert, digère et intègre par voie de transmutation est en mesure de parvenir et de faire croître le "telos" des grandes cultures universalisantes.
Face aux passéismes oniriques des souverainistes et l’absence de vision d’avenir des technocraties gouvernantes, le seul choix historique est désormais entre l’Europe, en tant que communauté spirituelle de nations unies par la même histoire, la même culture et le même destin, et l’ultralibéralisme américain fondé sur le consumérisme cosmopolite. A la rhétorique médiatique dominante, pleurnicharde et fallacieuse quand elle évoque le fossé Nord Sud, le fossé entre riches et pauvres, il conviendra de dénoncer prioritairement le génocide culturel et identitaire européen. C’est pourquoi, l’européanisation indispensable des nations européennes se fera sous la forme de cercles concentriques qui, de façon centripète, agiront à partir des axes "piémontais" franco-germanique, germano-mitteleuropéen, et germano-russe, fondement de l’unité et de l’idéal symphonique grand européen.
Rodolphe LUSSAC.
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mardi, 25 mars 2008
Eurasia come destino
Eurasia come destino
Luca Leonello Rimbotti
Quello che ci domina non è un Impero. L’America ha un esercito e un’industria molto forti: ed è tutto. Le sue multinazionali - assai più agevolmente dei suoi eserciti - occupano qua e là nazioni e intere aree. Poi, però, l’America perde sempre la pace. Contrariamente a quanto ne pensano Luttwak, il geostratega dei finanzieri, oppure Toni Negri, il parafilosofo della borghesia parassita, gli USA non sono affatto un Impero, ma la sua grottesca parodia: non un segno di interiore potenza, non un cenno di superiore civiltà, nessun grandioso disegno valoriale, che non sia l’ottusa ripetizione di una vuota parola, in cui non crede più nessuno: democrazia, solo e sempre lo stesso logoro slogan.
Il disegno politico di opporre al Nulla planetario la sostanza di un vero Impero portatore di tradizione culturale, di civiltà e di autentico potere di popolo ha i confini precisi dell’Eurasia. In quello spazio geostorico che va da Lisbona a Vladivostok - l’Europa decenni or sono indicata da Jean Thiriart - numerose intelligenze politiche europee dell’ultimo secolo hanno visto la giusta risposta agli interrogativi posti dalla moderna politica mondiale. Se proprio quest’anno si ricordano i cento anni della conferenza londinese in cui Sir Halford Mackinder gettò le prime basi della moderna geopolitica, è proprio per rammentare che fin da allora l’Eurasismo poté dirsi una via ideologica e politica prettamente europea. Si voleva la risposta del blocco di terraferma nei confronti della talassocrazia mercantilista anglo-americana, già allora ben delineata. Behemoth contro Leviathan. La schmittiana, solida e immutabile Terra, contro il liquido, infido e mutevole Mare. Oppure, per dirla con le parole antiche di Pound: contadini radicati al suolo contro usurai apolidi. L’Eurasismo è il disegno geopolitico di assicurare l’Asia centrale all’Europa, per farne un blocco in grado di reggere la contrapposizione con il mondo occidentale-atlantico.
Antica idea russa, questa. I Russi avevano - (hanno?) - come una doppia anima: temono l’Asia (specialmente l’Asia gialla), ma ne amano il mistero, gli spazi. Dostoewskij ben rappresenta quest’angoscia russa. Maksim Gorkij, ad esempio, che pure stava dalla parte dei bolscevichi, era terrorizzato dalla possibile mongolizzazione della Russia bianca. Savickij invece, uno dei primi “eurasisti”, proclamava l’Oriente come fatale terra del destino europeo. Per parte sua, Karl Haushofer - lo studioso tedesco che con Ratzel fu il vero fondatore della geopolitica - aveva un’idea ben chiara: “Europa alleata della Russia contro l’America”. Intorno a questa nuova scienza - la geopolitica - da lui energicamente divulgata, si ritrovarono in molti.
L’Eurasismo come movimento politico storico fu cosa effimera: nato nel 1921 a Sofia per iniziativa di alcuni russi fuggiti dalla rivoluzione, si diceva erede dei vecchi slavofili: sognavano una grande Russia eurasiatica avversa all’Occidente. Cristiani ortodossi, alla maniera di Spengler pensavano che l’Occidente stesse tramontando e che al suo posto dovesse sorgere la “terza Roma” moscovita. Ma già nel 1927 l’organizzazione, infiltrata dai bolscevichi, sparì dalla scena. Ma non le sue idee. Che l’Europa dovesse sottrarsi all’egemonia anglosassone e al crescente predominio americano, appoggiandosi invece alla Russia e al suo prolungamento asiatico, rimase una convinzione diffusa. Il nazional-bolscevismo fu una viva espressione di questa tendenza, soprattutto nella Germania di Weimar, ma anche nell’URSS. Furono in diversi - a cominciare da Ernst Niekitsch - a pensare a una forma di comunismo nazionale e a un asse Berlino-Mosca, per creare una nuova forma di politica europea macro-continentale. E persino Alfred Rosenberg rifletté su un blocco russo-germanico. Erano orientamenti politici, ma al di sotto si animavano forti suggestioni culturali. L’Asia centrale, il Tibet, la Mongolia: realtà mitiche e mistiche, di cui alcuni personaggi subivano uno strano fascino. Era la terra magica del “Re del Mondo”, una specie di ombelico terrestre che si diceva racchiudesse tradizioni, saperi, occulte potenze. Questo mito era alimentato da figure al limite del fantastico: Roman Ungern-Sternberg, ad esempio. Detto Ungern Khan, questo bizzarro barone baltico combatté l’Armata rossa in Asia centrale, organizzò un esercito di cosacchi, mongoli, tibetani, siberiani, puntando all’erezione di un Impero teocratico di tipo lamaista in Eurasia. Claudio Mutti riporta che egli avrebbe ereditato, come potente talismano, nientemeno che il misterioso anello con la svastica che era stato di Gengis Khan.
Ma ci furono anche eminenti studiosi che videro nell’Asia centrale il fulcro di una forza che l’Europa avrebbe fatto bene ad assicurarsi. Giuseppe Tucci, grande orientalista, promosse studi, viaggi, contatti, fondò istituti e riviste, si disse convinto che il patrimonio di conoscenze esoteriche di cui l’Asia è detentrice dovesse far parte della nostra cultura: “Io non parlo mai di Europa e di Asia, ma di Eurasia”. Ma si può ricordare anche l’etnologo e geografo svedese Sven Hedin - tra l’altro, noto ammiratore di Hitler - che vagò per tutta la vita nell’Asia centrale alla ricerca delle sue più arcane tradizioni. E sulle tracce di un Tibet lontano padre del mondo ariano si misero, in quegli stessi anni, anche studiosi e ricercatori delle SS. A tutto questo si intrecciano interi brani di quella cultura alternativa, animata dall’esoterismo tradizionalista, che può riassumersi negli studi in materia portati avanti da Guénon o da Evola. E per molti decenni fu Lev Gumilëv, storico dei popoli della steppa, a lungo perseguitato dai sovietici, a elaborare il modello eurasiatico e a rilanciarlo anche in epoca post-comunista. Ma la geopolitica, erede della “geografia sacra” e così ricca di retroterra sapienziale, è soprattutto realtà. E’ la scienza che lega economia, storia e geografia: i popoli devono seguire le vie della loro collocazione, non quelle degli interessi dettati dall’internazionalismo finanziario. La geografia è quella: immutabile nei secoli, e i bisogni dei popoli ne sono la diretta conseguenza.
Da un po’ di tempo, sotto la spinta negativa dell’espansionismo americano-atlantista, si è avuto un ritorno della concezione geopolitica e, di conseguenza, dell’Eurasismo. Nella Russia post-comunista, una forma di Eurasismo è rinata per iniziativa di Aleksandr Dughin, che nel 1992 fondò la rivista “Elementy”, recante il sottotitolo “rassegna eurasista”. E tuttavia, il suo è un Eurasismo differente da quello religioso e conservatore degli anni venti. Dughin si è rifatto alla Rivoluzione Conservatrice tedesca - di cui Karl Haushofer era stato leader in materia di geopolitica - oppure a quell’ambiente della Nuova Destra europea (De Benoist, Steuckers) che ha fatto della scelta europeista anti-americana un suo cardine: rompere con l’atlantismo filo-americano, che sta portando i popoli alla rovina. Guardare invece a est, alla Russia, e a tutto quell’enorme bacino centroasiatico, dalle cui potenzialità ancora inespresse potrebbe partire un progetto di antagonismo politico di portata mondiale.
L’Eurasia non è una trovata dell’ultima ora. Quella di guardare alla Scizia, al Caucaso o addirittura alle Indie è un’antica nostalgia europea. Oggi la geopolitica ci ricorda che i bisogni, la collocazione e la terra dei nostri popoli europei sono i medesimi di duemilacinquecento anni fa. Solo che, nel frattempo, e in nome di interessi estranei, lontani e pericolosi, la nostra identità viene per la prima volta nella storia minacciata molto da vicino. La geopolitica e l’Eurasismo servono a ricordarci che l’Europa ha in mano la possibilità di gestire uno spazio imperiale omogeneo territorialmente e culturalmente, bene in grado di fronteggiare l’imperialismo atlantista-occidentale, e che questo grande spazio aspetta solo di essere organizzato da una volontà politica. Poiché l’Europa si merita un destino europeo.
* * *
Tratto da Linea del 4 Luglio 2004.
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lundi, 24 mars 2008
Quand les Turcs ravageaient le Frioul

Archimede Bontempi:
Quand les Turcs saccageaient le Frioul
Pier Paolo Pasolini, qui était Frioulan (et fier de l'être), a toujours gardé le souvenir des histoires que la tradition orale et populaire lui avait légué; plus tard, il a lu les documents conservés dans les archives municipales de sa province. Ces souvenirs et cette lecture l'ont conduit à écrire une pièce de théâtre, où transparaît toute son émotion, I Turcs tal Friûl, dans laquelle il a introduit une prière rappelant les invasions les plus effrayantes de ces cinq derniers siècles, remémorées par les documents d'archives de notre Europe. Cette œuvre dramatique de Pasolini est l'une des rares pièces jamais rédigées sur l'invasion et l'oppression subie par le peuple frioulan, face aux Ottomans. Quels ont été les faits historiques?
Les premières pressions ottomanes sur la Padanie orientale remontent à plus de 500 ans, quand les troupes d'Osman Bey amorcent une série d'incursions terribles en partant de leurs bases en Bosnie, terre où ils se sont installés après le succès de l'invasion menée personnellement par le Sultan Mourad I et la défaite de l'armée serbe au Champs des Merles au Kosovo-Métohie en 1389.
En 1415, l'armée ottomane soumet la Slovénie (terre impériale!) et des bandes d'irréguliers bosniaques et albanais pénètrent dans le Frioul pour en saccager les campagnes. Ils n'osent pas encore s'approcher des villes, bien défendues par les troupes de la Sérénissime. En 1472, pour la première fois, une armée régulière ottomane se présente aux frontières. Huit mille cavaliers turcs franchissent l'Isonzo et arrivent aux portes d'Udine. Leur nombre est toutefois insuffisant pour disloquer les défenses frioulanes. Ils se contentent de décrocher en emportant leur butin et les esclaves qu'ils ont capturés au sein de la population. Venise sent le danger et ordonne la construction d'une ligne de fortifications entre Gradisca et Fogliano et d'un mur entre Gradisca et Gorizia. Cinq ans plus tard, le 31 octobre 1477, une véritable armée bien structurée attaque le Frioul, déjà éprouvé en août par une invasion de troupes de cavaliers, légères et mobiles. Lorenzo de Papiris nous narre cette attaque dans une chronique conservée dans les archives du chapitre d'Udine. L'avant-poste de Cittadella sur l'Isonzo tombe; les Ottomans se répandent dans le Frioul. Vieillards et enfants sont systématiquement massacrés. Les garçons et les femmes sont enlevés pour être réduits en esclavage dans l'Empire ottoman. Au printemps suivant, les hordes turques pénètrent en Carniole et en Carinthie, terres germaniques et impériales, pour y commettre les mêmes déprédations. Ces attaques sont les premières escarmouches dans une longue série d'invasions.
1499: le Frioul ravagé et incendié
Dans la nuit du 28 septembre 1499, une armée de 30.000 hommes, commandée par Iskander Bey, vient renforcer les bandes d'irréguliers bosniaques, albanais et tziganes qui écument les campagnes à la recherche de butin et d'esclaves. Les 30.000 hommes d'Iskander Bey franchissent l'Isonzo, assiègent la forteresse de Gradisca, où se sont retranchées les troupes de la Sérénissime. Tout le Frioul est incendié: du haut des clochers de San Marco à Venise, on pouvait voir rougir les flammes des incendies allumés par les Ottomans dans toute la plaine, de la Livenza jusqu'au Tagliamento. Les flèches incendiaires, enduites de soufre, n'épargnaient ni les petites bourgades ni les fermes isolées. Les Ottomans assiègent ensuite Pantanins. Aviano, Polcenigo, Montereale, Valcellina et Fono tombent les unes après les autres. Morteglan, solidement fortifiée, résiste, mais un tiers de la population est tué ou déporté. Selon le haut magistrat vénitien Marin Sanudo, 25.000 Frioulans disparaissent durant cette invasion. Marco Antonio Sebellico, de Tarcento, écrit que toute la plaine entre l'Isonzo et le Tagliamento n'est plus qu'un unique brasier. Aujourd'hui encore, une stèle rappelle l'événement à la Pieve de Tricesimo: «…et le dernier jour d'octobre, les Turcs ont franchi l'Isonzo pour venir ensuite brûler notre patrie de fond en comble».
La valeur militaire des estradiots serbes
Les seules troupes capables d'opposer une résistance réelle aux Ottomans ont été les estradiots (ou stradiotes) serbes et grecs qui combattaient pour le compte de la Sérénissime. Ces troupes réussirent à tuer mille Ottomans dans les durs combats sur la plaine d'Udine. Elles connaissaient bien les techniques de combat des Turcs: de rapides incursions de cavaliers, qui criblent leurs cibles de flèches incendiaires, puis feignent de se retirer, pour ré-attaquer avec la rapidité de l'éclair. Les estradiots étaient capables de contrer cette stratégie, propre des peuples de la steppe. Ils ont aussi été utilisés contre les alliés des Turcs, les Français, en pénétrant les rangs de la cavalerie lourde pour en disloquer les dispositifs.
Le 4 octobre, comblés de butin et d'esclaves, l'armée ottomane s'apprête à repasser le Tagliamento, mais la rivière est en crue et tous les prisonniers ne peuvent se masser sur les bacs et radeaux. Pour ne pas s'en encombrer, Iskander Bey en fait égorger plus de mille sur les rives du Tagliamento. Le gros de l'armée passe à côté de Sedegliano, assiège le château de Piantanins, et met un terme à la résistance désespérée des Frioulans, commandés par Simone Nusso de San Daniele, qui, capturé, sera empalé par les vainqueurs. Le château est complètement rasé.
Le Frioul mettra de très nombreuses années pour se remettre de ces ravages. Le Doge de Venise, Agostino Barbarigo, à la demande des nonnes d'Aquileia, exempte de nombreuses communes de l'impôt. Le Sultan Bajazet II, plus tard, reprend cette guerre d'agression contre Venise sur terre et sur mer, avec l'appui de la France, allié traditionnel des Ottomans. Marco d'Aviano, prédicateur de réputation européenne, qui s'était distingué pendant le siège de Vienne en 1683, n'a jamais cessé de puiser des arguments historiques dans les chroniques frioulanes relatant ces invasions. C'est ce qu'il a fait quand il exhortait les troupes de l'armée européenne qui s'apprêtaient à libérer l'Europe du Sud-Est de la domination turque. L'écrivain contemporain Carlo Sgorlon retrace la biographie de ce prédicateur thaumaturge dans son roman Marco d'Europa.
Archimede BONTEMPI.
(article paru dans La Padania, le 20 octobre 2000; http://www.lapadania.com ).
00:58 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : affaires européennes | |
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