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samedi, 12 mars 2022

L'Europe suspendue entre l'être et le non-être : est-ce une patrie commune ou un cadavre atlantique ?

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L'Europe suspendue entre l'être et le non-être: est-ce une patrie commune ou un cadavre atlantique?

par Luigi Tedeschi

Source : Italicum & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/l-europa-sospesa-tra-essere-e-non-essere-e-una-patria-comune-o-un-cadavere-atlantico

L'avènement du multilatéralisme dans la géopolitique mondiale place l'Europe devant un dilemme existentiel entre: être une patrie commune ou ne pas être un cadavre atlantique. L'histoire impose parfois des choix cruciaux et inéluctables.

La nécessaire neutralité de l'Ukraine

La guerre en Ukraine a des origines lointaines. Elle est le résultat de tensions de longue date qui ont explosé en raison de l'ineptie européenne et de la politique expansionniste de l'OTAN, qui ont empêché l'existence d'un équilibre stable entre la Russie et l'Occident. Avec l'effondrement de l'URSS et l'indépendance des républiques d'Europe de l'Est qui faisaient déjà partie de l'ancien empire soviétique, la logique de partition déjà éprouvée à Versailles en 1919 avec le démembrement des empires centraux s'est reproduite. L'Europe était en fait fragmentée en de nombreux États, souvent artificiels, et de nombreux peuples, très différents sinon hostiles les uns aux autres, étaient contraints de vivre ensemble. Comme on le sait, Versailles a jeté les bases de la Seconde Guerre mondiale.

L'ouest de l'Ukraine est peuplé de catholiques ukrainophones qui veulent être intégrés à l'Europe, tandis que l'est est habité par une population majoritairement orthodoxe et russophone qui s'identifie à la Russie. Pour Kissinger, l'indépendance de l'Ukraine était un facteur d'instabilité politique potentielle. Soljénitsyne, qui considérait que l'Ukraine faisait partie intégrante de l'histoire et de l'identité russes, s'y opposait. Une réconciliation pacifique entre les deux âmes de l'Ukraine s'est avérée impossible, en raison de l'expansion progressive de l'OTAN à l'est, qui envisageait l'intégration de l'Ukraine à l'Ouest en hostilité ouverte avec la Russie, qui, elle, voyait sa sécurité menacée. Le coup d'État pro-occidental de Maidan en 2014 en est une preuve objective.

Il était possible de parvenir à un équilibre géopolitique qui empêcherait cette guerre d'éclater : la médiation européenne aurait pu favoriser l'entrée de l'Ukraine dans l'UE, à condition qu'elle ne rejoigne pas l'OTAN. Une telle perspective aurait impliqué une rupture entre l'Europe et l'Alliance atlantique. Mais l'Europe n'est pas une entité géopolitique indépendante ; au contraire, elle ne trouve son unité que dans le contexte atlantique.

En effet, l'Ukraine est déjà associée à l'UE depuis 2017 et a bénéficié d'un financement européen de plus de 5 milliards, en plus des 1,2 milliard déboursés récemment. Par ailleurs, les accords de Minsk de 2014 (jamais respectés par l'Ukraine), entre la Russie et l'Ukraine, qui prévoyaient l'autonomie des républiques russophones du Donbass, ramenées à la souveraineté ukrainienne, ont été signés sous les auspices de l'OCDE. Afin d'éviter un conflit russo-ukrainien, l'Europe pourrait exiger que la partie ukrainienne les respecte. Mais l'Europe a brillé par son ignorance coupable.

Cette guerre entraînera une redéfinition des frontières entre l'Occident et la Russie, évoquant un retour au rideau de fer qui a marqué l'époque de la guerre froide. Mais les similitudes sont plus apparentes que réelles. Pendant la guerre froide, deux puissances mondiales, les États-Unis et l'URSS, se sont affrontées en tant que systèmes idéologiques, politiques et économiques alternatifs, entre lesquels les affrontements (jamais directs) alternaient avec les négociations. Aujourd'hui, les États-Unis et la Russie sont tous deux des puissances capitalistes. Les Américains ne reconnaissent pas le statut de puissance mondiale de la Russie et ne concluent donc pas d'accords avec Poutine, qui n'est pas considéré comme un partenaire égal. Avec la dissolution de l'URSS et la dissolution du Pacte de Varsovie, l'OTAN, en tant qu'alliance de défense de l'Occident contre la menace soviétique, aurait également dû être liquidée. L'expansion dans les pays d'Europe de l'Est et les guerres "humanitaires" menées par l'OTAN sur une période de 30 ans ont réfuté la nature défensive de l'Alliance atlantique. Il faut également considérer que l'OTAN a été fondée en 1949, tandis que le Pacte de Varsovie a vu le jour en 1955. Donc, entre les États-Unis et l'URSS, qui a dû se défendre contre qui ? La nature agressive de l'OTAN n'était-elle pas génétique ?

Cette guerre aurait pu être évitée si la nécessaire neutralité de l'Ukraine avait été reconnue. La stabilité et la sécurité de la région ne peuvent être garanties que par la neutralité ukrainienne, comme l'a observé Henry Kissinger : "Trop souvent, la question ukrainienne se présente comme une épreuve de force : l'Ukraine choisit-elle de rejoindre l'Est ou l'Ouest ? Mais si l'objectif de l'Ukraine est de survivre et de prospérer, elle ne peut être l'avant-poste de deux factions qui se combattent - elle doit être un pont." Kissinger, en 2014, était également un prophète facile lorsqu'il a déclaré qu'en l'absence d'une politique de réconciliation, "la dérive vers le conflit va s'accélérer, et à ce rythme, elle se produira assez rapidement". 

L'Amérique, une puissance en crise entre pacifisme et russophobie

Cette guerre a éclaté parce qu'elle a été déclenchée par le désir de la Russie de sauvegarder sa sécurité et de contrer l'avancée de l'OTAN à l'est et par le désir des États-Unis d'éradiquer toute relation entre l'Europe et la Russie et de réaffirmer ainsi leur domination sur l'Europe elle-même. Les États-Unis ont en fait facilité l'invasion russe en déclarant leur réticence à s'engager dans une intervention militaire directe et en refusant tout accord avec Poutine. L'Amérique de Biden est pacifiste. Les divisions au sein de la société américaine ont eu pour effet de paralyser la politique étrangère américaine. L'aile libérale de la côte américaine ne veut pas la guerre pour des raisons pacifistes-idéologiques, pas plus que la population intérieure, patriotique par nature mais désormais fatiguée et désabusée par la succession des défaites américaines dans le monde.

L'Occident veut donc contrer la Russie avec l'arme des sanctions. Avec l'éviction de la Russie du système de paiement rapide et l'embargo économique, elle veut provoquer l'implosion financière de la Russie, avec le défaut de paiement russe associé. Mais la Russie est déjà sous le coup de sanctions depuis 2014. L'arme des sanctions provoque nécessairement des représailles et s'est toujours révélée inefficace. Au contraire, les sanctions politiques renforcent la cohésion interne des nations et encouragent la production de biens pour remplacer les produits étrangers qui ne sont plus importés. En outre, la Russie a été bien équipée au fil des ans pour faire face à de telles éventualités. Devenue économiquement vulnérable lors de la crise de 2014, la Russie a adopté ses propres contre-mesures. Depuis 2016, l'économie russe a enregistré une croissance annuelle du PIB de plus de 4 %, augmenté ses réserves de 631 milliards de dollars, principalement en devises autres que le dollar, contre une dette de 350 milliards de dollars, augmenté ses réserves d'or de 196 %, réalisé d'importants investissements dans le numérique, et le commerce avec la Chine s'élève désormais à 140 milliards de dollars, avec l'objectif d'atteindre 200 milliards de dollars.

Les sanctions ont évidemment aussi un impact majeur sur l'Occident, étant donné l'interdépendance des marchés mondiaux. L'Europe dépend du gaz russe pour 40 % de ses besoins et, puisque les approvisionnements de Gazprom ont été exclus des sanctions, paradoxalement, l'UE finance indirectement les dépenses militaires russes pour l'invasion de l'Ukraine avec les revenus de l'énergie. Alors que la bourse russe a été fermée pour cause de baisse excessive et que le rouble est à son plus bas niveau historique, les marchés européens ont enregistré des pertes de plus de 20 % depuis janvier. Standard & Poor's a rétrogradé la dette publique de la Russie au statut de "junk", mais cette dette ne représente que 20 % du PIB. La crise énergétique, avec des prix du gaz et du pétrole à des niveaux records et une inflation galopante, ainsi que la hausse des prix des matières premières, causent des dommages importants à l'économie européenne. Par le biais de sanctions, l'Occident veut amener la Russie à faire défaut, mais toute implosion russe impliquerait aussitôt l'Europe, étant donné l'exposition du système bancaire européen à la Russie (l'Italie seule est exposée pour plus de 25 milliards), et le blocage des flux commerciaux avec la Russie elle-même. Pour l'Europe, les dommages causés par les mesures de sanction sont encore incalculables.

L'expansion progressive de l'OTAN en Eurasie occidentale est conforme à une stratégie américaine bien connue, poursuivie depuis 1991. La pénétration de l'Atlantisme en Eurasie entraînerait la déstabilisation de la Russie. Les guerres qui ont déjà éclaté en Géorgie et en Tchétchénie, ainsi que la révolution colorée en Ukraine, sont des événements fonctionnels à une stratégie globale : la décomposition de la Russie en de nombreux petits États et leur insertion dans le contexte de l'OTAN, avec l'exploitation indiscriminée de leurs ressources, sous l'égide de la domination américaine.

L'objectif est de reproduire en Russie la stratégie qui a conduit à la fragmentation de l'ex-Yougoslavie (qui a également été expérimentée sans succès au Moyen-Orient). Mais quelqu'un a-t-il prévenu Biden et son équipe que la Russie n'est pas comparable à la Yougoslavie ? Le défaut de paiement et la déstabilisation économique de la Russie devraient être suivis d'une déstabilisation politique, avec la défenestration de Poutine par un complot ourdi par les oligarques russes sanctionnés. Mais les États-Unis, qui ont été incapables de faire tomber Saddam, Assad ou Milosevic, pourront-ils un jour faire tomber Poutine et avec lui tout l'appareil politique et militaire russe ?

À l'ONU, la résolution condamnant la Russie, outre l'unité des talibans européens pro-OTAN et son approbation par 141 voix, a enregistré 35 abstentions et 5 voix contre. Parmi les abstentions figurent la Chine, l'Inde, l'ensemble du monde islamique (à l'exception du Qatar et du Koweït), l'Afrique du Sud, le Brésil, le Mexique et le Congo. Il est donc nécessaire de réfléchir à l'importance économique et géopolitique de ces pays (qui, par ailleurs, détiennent une grande partie des matières premières mondiales et représentent la moitié de la population mondiale). La Turquie elle-même n'appliquera pas de sanctions à la Russie et Israël s'est déclaré prêt à jouer un rôle de médiateur dans le conflit : les intérêts d'Israël ne coïncident manifestement pas toujours avec ceux des Américains. Le front abstentionniste est donc hostile à l'Occident et constitue une démonstration tangible que la Russie n'est nullement isolée dans le contexte géopolitique mondial. La politique de l'Occident américain est inspirée par une profonde russophobie, qui conduira à l'isolement de l'Occident lui-même et à sa réduction géopolitique.

La politique expansive de l'OTAN a favorisé la création d'un partenariat russo-chinois qui pourrait devenir stratégique. La Chine a adopté une politique d'attention prudente dans le conflit russo-ukrainien. La Chine est le premier partenaire commercial de l'Ukraine, mais il faut surtout noter que 90 % du commerce de l'Europe avec la Chine passe par la Russie et l'Asie centrale. Cette guerre pourrait être un coup mortel pour l'économie européenne. Mais le plus important est que l'intensification des relations économiques et politiques de la Chine, de l'Inde et du monde islamique avec la Russie entraînerait une contraction drastique de la zone dollar, qui a jusqu'à présent dominé le commerce mondial. Et, à cet égard, on peut s'interroger : mais l'euro n'a-t-il pas été créé comme monnaie alternative au dollar afin de libérer l'Europe de la tyrannie financière américaine ? Cependant, des changements systémiques dans l'économie mondiale nous attendent.

L'Europe sortira-t-elle de son hibernation historique ?

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec les accords de Yalta et de Potsdam, l'Europe est divisée en deux zones d'influence : l'américaine à l'ouest et la soviétique à l'est. Alors que l'Europe de l'Est a souffert de l'occupation soviétique et de ses régimes totalitaires, l'Europe occidentale a accepté la domination américaine avec un large consentement. Le régime pro-américain de souveraineté limitée a ensuite été étendu, après 1989, aux pays de l'ancien bloc soviétique et s'est étendu à l'UE elle-même, au point de déterminer une identification parfaite entre l'Europe et l'OTAN.

L'Europe a ainsi renoncé à son indépendance et à un rôle puissant dans le contexte géopolitique mondial. Le statut de l'Europe est comparable à celui d'un colonialisme consentant, c'est-à-dire un groupe de pays économiquement avancés, à la prospérité généralisée, mais politiquement aseptisés, culturellement américanistes, dépourvus de pouvoir de décision et de responsabilité en matière de défense et de politique internationale, délégués aux États-Unis. Ce statut colonial, perpétué jusqu'à ce jour, a représenté la sortie de l'Europe de l'histoire.

Ce modèle socio-politique, qui a présidé à la fondation de l'UE elle-même, trouve sa pleine réalisation en Allemagne, qui, en vertu de sa suprématie économique continentale, l'a imposé à l'ensemble de l'Europe. Depuis 70 ans, l'Allemagne vit dans la dimension de la post-histoire. Le diplomate allemand Thomas Bagger a effectivement déclaré que "la fin de l'histoire était une idée américaine, mais une réalité allemande". Dans un article paru dans Limes, Ulrike Franke affirme que, pour la génération des millennials allemands, l'histoire est un récit d'événements passés, et non un processus dynamique en constante évolution. L'oubli de la mémoire historique a condamné les nouvelles générations à vivre dans une dimension existentielle absorbée par l'éternel présent. Il s'agit d'une dimension nihiliste, qui implique l'impossibilité de concevoir des réalités historiques et des horizons futurs comme des alternatives à celle-ci. Le progrès, le bien-être, le cosmopolitisme libéral pacifiste et le marché mondial sont les traits distinctifs d'un modèle économique et social occidental post-historique, qui a néanmoins généré dans la génération post-1989 l'idée de vivre dans le meilleur des mondes possibles.

Ulrike Franke dit : "Et la fin de l'histoire a pris notre avenir. Après tout, nous savions tous comment cela allait se terminer. La politique est devenue ennuyeuse - une activité administrative plutôt qu'une compétition idéologique. Et cela peut aussi nous aider à comprendre pourquoi tous les partis allemands prétendent toujours être du centre. Il semble qu'il ne soit pas nécessaire de penser stratégiquement à l'avenir. Une telle vision ahistorique de la réalité a été transmise à l'ensemble de l'Europe, qui est devenue un continent dépourvu de toute identité culturelle et sans aucune perspective d'avenir".

L'avènement de la post-histoire est lié à une époque où la souveraineté politique de l'Europe était dévolue au protectorat atlantique. L'UE elle-même a été créée en tant qu'organe supranational intégré à l'OTAN à l'extérieur et en tant que structure financière qui a établi un système économique d'extrême compétitivité entre les États à l'intérieur. L'UE n'a pas favorisé le développement et l'émancipation, mais a créé un système de domination économique de l'Allemagne et de ses satellites dans lequel la croissance allemande s'est accompagnée d'une dépression dans les pays du sud. Mais aujourd'hui, l'Europe est confrontée à un ordre géopolitique considérablement modifié. Les États-Unis poursuivent des objectifs qui ne sont pas compatibles, voire conflictuels, avec l'Europe.

Les États-Unis, qui se sont engagés à contenir la Russie et la Chine, n'ont plus l'intention de soutenir les dépenses militaires pour la défense des pays européens, qui sont tenus de consacrer 2 % de leur PIB à l'armement. L'objectif géopolitique poursuivi par les Américains n'est en fait pas la défense de l'Ukraine contre l'invasion russe, mais la restauration de leur domination politique absolue dans l'espace européen, en rompant les relations entre l'Europe et la Russie et en interrompant les flux commerciaux entre l'Europe et la Chine. Une Europe, dévastée par la crise économique provoquée par l'urgence énergétique et réduite dans son rôle de puissance économique dans le monde (surtout en ce qui concerne ses exportations vers les USA), pourrait être réduite à une condition de subordination totale aux USA. Les États-Unis pourraient alors imposer à l'Europe un traité de libre-échange transatlantique capricieux, semblable au tristement célèbre TTIP.

Le retrait américain d'Afghanistan a entraîné un changement substantiel de la stratégie géopolitique américaine. La politique étrangère de Biden, dans la continuité de celle d'Obama et de Trump, n'envisage pas d'interventions militaires dans le monde, sauf si les intérêts américains sont directement menacés. Par conséquent, des déploiements politico-militaires de dimension continentale ont été mis en place pour sauvegarder les zones d'influence de l'Amérique dans le monde. Dans le cadre de cette nouvelle stratégie géopolitique américaine, à travers le pacte abrahamique, la nouvelle OTAN du Moyen-Orient a été établie, dirigée par Israël et avec la participation de nombreux pays arabes. Et aussi l'AUKUS, qui est une alliance militaire dans la zone Indo-Pacifique qui vise à contenir la puissance chinoise. La décision de l'Allemagne d'allouer 100 milliards d'euros aux dépenses d'armement doit être interprétée de la même manière. Jusqu'à hier, le réarmement allemand aurait suscité l'inquiétude de tout l'Occident. L'Europe, sous la direction de l'Allemagne, devrait devenir une puissance continentale au sein de l'OTAN dans une fonction anti-russe. Mais il semble hautement improbable que la société allemande accepte de mourir pour l'Ukraine, comme la société japonaise le ferait pour Taïwan.

La phase post-historique de l'Europe touche donc à sa fin. Une perpétuation de l'hibernation historique de l'Europe est inconcevable. Nous devons occuper une place dans une histoire en constante évolution, sinon l'histoire elle-même s'occupera de nous, c'est-à-dire que d'autres décideront pour nous en fonction de leurs propres intérêts. Et dans notre cas, ce seront les Américains qui décideront.

L'Europe à la croisée des chemins entre multilatéralisme et abandon de l'histoire

Le conflit entre Poutine et l'Occident a pris la dimension d'une opposition d'époque de nature historico-idéologique. Depuis la crise de 2014, la réaction de Poutine au tournant pro-occidental en Ukraine a été interprétée par le courant dominant officiel comme la renaissance d'une conception de la politique du XIXe siècle, qui a été reproposée à travers la résurrection du nationalisme russe comme une réaction à une Russie assiégée et visant à défendre ses frontières et à sauvegarder son indépendance nationale. Ces concepts étaient considérés par l'intelligentsia libérale comme relégués à des époques historiques dépassées. Poutine est donc considéré comme un leader anti-historique.

Cependant, nous voyons dans le conflit ukrainien une opposition géopolitique et un affrontement idéologique, qui avaient déjà émergé dans l'histoire récente. L'Occident est dominé par un système néolibéral et une culture postmoderne qui postulent l'individualisme absolu, les droits de l'homme, la primauté de l'économie sur la politique, l'éradication des cultures identitaires et la dissolution des États. Ainsi, le conflit entre l'Occident et la Russie, selon l'idéologie libérale, est interprété comme le choc entre liberté et répression, progrès et réaction, démocratie et autocratie, laïcité et obscurantisme.

L'émergence de nouvelles puissances continentales telles que la Russie, la Chine, l'Inde, l'Iran et d'autres puissances mineures, qui revendiquent au contraire leur propre identité nationale, la valeur de la patrie en tant que destin commun des peuples, leurs racines historiques et culturelles, a mis en évidence depuis longtemps le déclin de l'idéologie libérale comme seul canon d'interprétation de la réalité dans une clé post-historique, individualiste et progressiste. La défense des droits de l'homme et l'imposition du système libéral-démocratique au niveau mondial constituent donc les valeurs en vertu desquelles l'Occident revendique sa suprématie morale dans le monde. Ces principes constituent la légitimation idéologique du "Nouvel Ordre Mondial". Les conflits qui ont eu lieu au cours des dernières décennies démentent les hypothèses idéologiques sur lesquelles repose le "Nouvel Ordre".  C'est ce que dit Alberto Negri dans son article dans "Il Manifesto" du 13/02/2022 : "Cette fois, l'atlantisme est nu. Comme le roi" : "Quel "ordre" libéral les États-Unis et l'OTAN préconisent-ils? Celle qui a incité Washington à utiliser les djihadistes contre l'URSS dans les années 1980? Celle de l'Afghanistan 2021? L'"ordre" de l'intervention fabriquée en Irak en 2003? L'"ordre" de la guerre en Libye en 2011, dont les désastres sont encore sous nos yeux?

L'"ordre" américain qui nous a valu des attaques en Europe et des millions de migrants traités comme des objets et repoussés dans le désespoir, tout en nous privant des ressources énergétiques de nos voisins? L'"ordre" de la Turquie, un pays de l'OTAN utile pour massacrer les Kurdes sous le sultan Erdogan? L'"ordre" qui réduit au silence et efface les Palestiniens?

Les Américains et les atlantistes s'arrogent le droit de décider de ce qui est bon et de ce qui est mauvais, s'accrochant à des principes d'autodétermination des peuples qu'ils sont les premiers à violer.

Prenez la Syrie : pendant des années, Washington et Bruxelles ont déclaré que "Assad devait partir", mais pour le déstabiliser, ils ont encouragé Erdogan à envoyer des milliers d'égorgeurs djihadistes de l'autre côté de la frontière. Ils ont demandé à la Syrie de rompre ses liens avec l'Iran, puis la Russie, alliée historique de Damas, est intervenue.

Que voulait l'Occident, peut-être le bien des Syriens, toujours maintenus sous un embargo dramatique? Que voulaient les Américains de l'Afghanistan? Pour se venger du 11 septembre 2001, comme Biden l'a lui-même admis? Eh bien, après avoir tué Ben Laden, ils auraient pu partir, mais ils sont restés et ont tué plus de civils que les talibans, à qui ils ont rendu le pays, et maintenant ils se vengent sur la population en gelant les fonds afghans et en entravant l'acheminement de l'aide humanitaire.

L'unilatéralisme américain a généré de nouveaux conflits dans le monde entier entre les États dominés par le néolibéralisme et les États dominés par la souveraineté, entre les gagnants et les perdants de la mondialisation, entre l'Occident post-moderniste et l'Orient traditionaliste. Ce conflit irréductible est également présent au sein de la société occidentale. Les classes dominantes sont idéologiquement libérales et mondialistes, les classes subalternes revendiquent les valeurs communautaires, l'État-providence, les cultures identitaires.

Le monde occidental s'est révélé anti-historique dans la mesure où il n'a pas su comprendre l'esprit de notre époque, dans laquelle un nouvel ordre multipolaire émerge dans la géopolitique mondiale. Et c'est la cause du déclin progressif de l'unilatéralisme américain.

Nous sommes au seuil d'un tournant historique, annoncé prophétiquement par Alexandre Douguine dans son ouvrage La quatrième théorie politique: "La seule alternative plausible, aujourd'hui, se trouve dans le contexte d'un monde multipolaire. Le multipolarisme peut garantir à chaque pays et civilisation de la planète le droit et la liberté de développer son propre potentiel, de s'organiser intérieurement selon l'identité de sa culture et de son peuple, de fournir une base acceptable pour un système de relations internationales justes et équilibrées entre les nations du monde. La multipolarité doit être fondée sur le principe d'équité entre les différentes organisations politiques, sociales et économiques des diverses nations. Le progrès technologique et l'ouverture croissante doivent favoriser le dialogue entre les peuples et les nations et leur prospérité, mais ne doivent pas pour autant mettre en péril leur identité. Les différences entre les civilisations ne doivent pas nécessairement culminer dans un affrontement inévitable - contrairement à ce que pensent de manière simpliste certains auteurs américains. Le dialogue - ou plutôt le polylogue - est une possibilité réaliste que nous devrions tous explorer.

L'avènement du multilatéralisme dans la géopolitique mondiale place l'Europe devant un dilemme existentiel entre être une patrie commune ou ne pas être un cadavre atlantique. L'histoire impose parfois des choix cruciaux et inéluctables. 

Opération militaire en Ukraine : Analyse géopolitique

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Opération militaire en Ukraine : Analyse géopolitique

En toute exclusivité: la perspective russe selon Alexandre Douguine

Alexandre Douguine

Source: https://katehon.com/en/article/military-operation-ukraine-geopolitical-analysis?fbclid=IwAR3Y3lIY5eabLUPz3tvclSDLIcGNl6PFCv0d4vj71c0Avnjof-Ojj7AzSBM


La question ukrainienne à l'origine de la géopolitique

La place de l'Ukraine dans la confrontation géopolitique entre la Terre et la Mer a déjà fait l'objet de nombreux écrits et de descriptions détaillées. Il est d'ailleurs symbolique que le fondateur de la géopolitique, Halford J. Mackinder, ait été le haut commissaire de l'Entente pour l'Ukraine pendant la guerre civile en Russie. Et à cette époque-là, dans le gouvernement blanc de Wrangel, le fondateur de l'eurasisme, le géographe Piotr Savitsky, qui fut le premier, dans le journalisme de langue russe, à mentionner lui-même le terme "géopolitique" et à exposer les points principaux de cette méthodologie, travaillait comme assistant du ministre des Affaires étrangères Peter Struve.

La géopolitique : la guerre continuelle entre la terre et la mer

Mackinder a formulé la théorie de la grande guerre des continents, l'opposition entre la civilisation de la Mer (l'Occident en général, l'Empire britannique plus spécifiquement) et la civilisation de la Terre (Heartland, Russie-Eurasie) quelques années plus tôt, en 1904, dans son célèbre ouvrage The Geographic Pivot of History.  Terre (Rome, Sparte) et Mer (Carthage, Athènes) représentent deux civilisations antagonistes, opposées en tout - traditionalisme et modernité, spiritualité et matérialisme, esprit militaire et esprit commercial. Le conflit qui les oppose est une constante de l'histoire du monde.

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L'Eurasie, théâtre d'affrontements géopolitiques

Au cours des derniers siècles, lorsque le Grand Jeu, la confrontation entre les empires britannique et russe, battait son plein, la grande guerre continentale s'inscrivait dans l'espace de l'Eurasie. Dans cet espace, le "Heartland", c'était la Russie. Et la "civilisation de la mer" était portée par l'Angleterre. L'Angleterre tentait d'enserrer l'Eurasie de l'extérieur, depuis les océans. La Russie se défendait de l'intérieur, en essayant de briser le blocus.

La principale bande territoriale où se multipliaient les tensions se nommait alors, dans le langage spécial de la géopolitique mackindérienne, le Rimland, la "zone côtière". Elle s'étendait de l'Europe occidentale à l'Asie du Sud-Est, comprenait l'Inde et la Chine, en passant par le Moyen-Orient et l'Asie centrale.

L'objectif de la Mer était de subjuguer le Rimland. L'objectif de la Terre était de briser cette influence et de déserrer l'anneau de l'anaconda thalassocratique qu'il fallait rétrécir. C'est la raison de l'avancée de la Russie en Asie centrale et en Extrême-Orient.

D'où la formule principale de la géopolitique: "Qui contrôle l'Europe de l'Est contrôle le Heartland. Qui contrôle le Heartland, contrôle le monde". Telle est la théorie.

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Le démembrement de la Grande Russie

De par sa position de Haut Commissaire de l'Entente, Mackinder tenta de mettre la théorie en pratique. La guerre civile russe a donné à la civilisation de la mer une nouvelle chance de repousser les frontières du Rimland vers l'est, aux dépens des territoires qui quittaient alors la sphère de la puissance russe - la Finlande, la Pologne et, surtout, l'Ukraine.

Mackinder (comme Savitsky) avait compris que la victoire des bolcheviks conduirait inévitablement à une confrontation avec l'Occident et à une tentative de recréer l'Empire russe sous une nouvelle forme (et c'est exactement ce qui s'est passé). Et face à cette perspective, Mackinder a exigé que le gouvernement britannique soit plus actif dans l'aide aux Blancs [1], il a tenté de convaincre les dirigeants anglais de la nécessité de soutenir l'indépendance de l'Ukraine. Il a également élaboré un plan visant à séparer de la Russie la grande région du Caucase méridional, la Biélorussie, l'Asie centrale, ainsi que la Sibérie orientale et même un certain nombre de territoires du sud de la Russie. Plus tard, en 1991, l'effondrement de l'URSS permet, dans une large mesure, de réactiver le plan de Mackinder.

L'Ukraine et le cordon sanitaire

L'Ukraine jouait un rôle majeur dans le plan géopolitique de Mackinder. Ce territoire, avec la Pologne et les pays d'Europe de l'Est, faisait partie du "cordon sanitaire", une zone stratégique qui devait être sous le contrôle direct de l'Angleterre et de la France (les alliés de l'Entente à l'époque) et empêcher tout rapprochement entre la Russie et l'Allemagne. Retenue par un "cordon sanitaire", la Russie-Eurasie ne pouvait pas devenir un Empire à part entière. Sans l'Ukraine, la Russie n'est pas un Empire. Et de plus, l'Ukraine, rendue hostile à la Russie et placée sous le contrôle direct des Anglo-Saxons, couperait la Russie de l'Europe continentale, où l'Allemagne, à son tour, était un Heartland, mais pas un Heartland mondial (comme la Russie), mais local, européen. Le conflit de l'Angleterre avec l'Allemagne (aussi avec l'Autriche) était une constante de la géopolitique européenne.

En conséquence, le projet d'une Ukraine indépendante était initialement dirigé contre la Russie et était supervisé par les Anglo-Saxons.

Les bolcheviks créent et démantèlent simultanément l'Ukraine

Nous savons que pendant la guerre civile, les Blancs ont adhéré à une politique de restauration d'un Empire uni et indivisible. En même temps, ils dépendaient du soutien de l'Entente, qui leur imposait certaines conditions. Quoi qu'il en soit, le gouvernement britannique, n'étant pas d'accord avec Mackinder sur la nécessité d'un soutien fort aux Blancs en échange de leur accord à la sécession de l'Ukraine, les Blancs ont perdu la guerre. Dans cette configuration, le sujet a donc été écarté de l'ordre du jour.

Les bolcheviks, quant à eux, ont d'abord soutenu l'Ukraine et encouragé activement les cercles nationalistes en pensant qu'ils s'étaient orientés contre le "tsarisme", mais ils ont ensuite opté pour une politique centraliste, voyant que l'Ukraine n'allait pas accepter le pouvoir bolchevique sans se plaindre et cherchait à céder aux Anglo-Saxons (ce qui signifiait alors le "capitalisme mondial"). Par conséquent, comme Mackinder l'avait prévu, Lénine a commencé la saisie directe de l'Ukraine, qui n'avait pas eu, dans son passé, une histoire d'État indépendant et était une proie relativement facile pour les Rouges. Les Rouges n'ont pas réussi à conquérir la Pologne par le même stratagème. Mais le territoire de la Biélorussie, qui était revendiqué par la Pologne de Piłsudski, est resté aux mains des Rouges.

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Ensuite, déjà sous l'autorité des bolcheviks en 1922, Lénine a donné à la République socialiste soviétique d'Ukraine les vastes territoires qui avaient toujours fait partie de l'Empire russe - Slobozhanshchina, Donbass, Novorossiya, ainsi que de vastes zones au nord (oblast de Tchernigov) et à l'ouest (Petite Russie proprement dite). La Galicie est restée sous la tutelle de la Pologne, la Bucovine faisait partie de la Roumanie. La Crimée appartenait à la RSFSR.

Mais cet arrangement territorial de l'Ukraine n'impliquait pas véritablement la création d'un État. Le pouvoir bolchevique s'étendait à tous les territoires de l'URSS et, dans l'esprit de l'idéologie internationaliste, il ne pouvait être question d'un statut d'État pour les différentes républiques. Il s'agissait presque d'une division purement administrative dans le cadre d'un pouvoir solidement unifié. C'est exactement ce que Mackinder avait craint.

Les bolcheviks ont à la fois créé l'Ukraine et l'ont abolie (en tant qu'État indépendant).

L'Ukraine dans l'URSS après la Grande Guerre patriotique

La Galicie, la Volhynie et la Bukovine ont été annexées à l'Ukraine juste avant la Grande Guerre patriotique et la Transcarpathie - juste après la guerre. Mais à ce moment-là, la Russie-Eurasie sous la forme de l'URSS s'est déplacée de manière significative vers l'ouest, déplaçant la frontière du pays au détriment du Rimland, et établissant son contrôle sur l'Europe de l'Est, qui était toute entière sous le pouvoir de Moscou. L'URSS a ainsi réduit à néant et totalement aboli le "cordon sanitaire" de Mackinder et de Lord Curzon, s'installant directement en Europe continentale et s'emparant, en fait, des territoires de l'ancienne Prusse/Brandebourg (RDA).

Dans une telle position - profondément à l'arrière de ce rimland européen de l'Eurasie et donc dans le Heartland eurasien - l'Ukraine a existé jusqu'en 1991. Dans le même temps, pour des raisons de convenance purement administrative dans les limites d'un État absolument unitaire, Khrouchtchev a transféré en 1954 la Crimée à Kiev. Du point de vue géopolitique, cependant, cela ne signifiait rien, car toutes les frontières entre les sujets de l'URSS, les républiques fédératives, étaient conditionnelles et ne signifiaient rien du tout dans la pratique.

L'atlantisme et le monde bipolaire

Pendant la guerre froide, l'Occident est revenu à sa pratique particulière de la géopolitique. C'est ainsi qu'en 1949, suivant les modèles mise au point par Mackinder, l'OTAN (l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord) a été créée. Le terme "Atlantique" ayant été introduit dans le sigle de l'organisation militaire, le vocable "atlantisme" devient synonyme de "civilisation de la mer", de thalassocratie, dans le sens exact où Mackinder l'entendait. L'"atlantisme", c'est l'Occident et ses alliés, le monde capitaliste avec un noyau dur anglo-saxon, dont le centre, au XXe siècle, s'est progressivement déplacé de Londres à Washington, de l'Angleterre aux États-Unis.

La carte dessinée par Mackinder correspondait parfaitement à l'équilibre des forces dans la guerre froide, et les deux camps - le communiste et le capitaliste - étaient strictement alignés sur les critères attribués à la Terre et à la Mer. Le bloc de l'Est était la Terre, avec l'URSS en son centre, le Heartland. Le bloc occidental était la Mer, centrée sur l'Atlantique (les Anglo-Saxons), mais comprenait les colonies stratégiques d'après-guerre des États-Unis - les pays d'Europe, le Japon et d'autres États du tiers-monde qui proclamaient leur allégeance au capitalisme. Ils étaient disposés en ordre dispersé en Asie, en Afrique et en Amérique latine, qui constituaient la carte géopolitique de la confrontation mondiale. Terre et Mer s'affrontaient rarement directement (comme lors de la crise des missiles de Cuba), et agissaient généralement par le biais de leurs mandataires, les régimes pro-soviétiques ou pro-américains. Et si la Terre était directement impliquée dans un conflit - comme en Tchécoslovaquie, en Afghanistan, etc., alors la Mer s'y opposait par le biais de mandataires, de "proxies", de groupes et de mouvements antisoviétiques sans intervenir directement. Et quand la Mer intervenait ouvertement - comme en Corée et au Vietnam -  la Terre aidait indirectement, avec des conseillers, la diplomatie, l'économie, etc.

Le problème du Rimland

Pendant la guerre froide, le problème du Rimland est redevenu extrêmement pertinent. Ainsi, le géopolitologue américain Nicholas Spykman, révisant les théories de Mackinder, arrive à la conclusion que c'est le Rimland qui est la principale zone de confrontation. Il formule la loi de la géopolitique comme suit : "Celui qui contrôle le Rimland contrôle le monde". Mais il ne s'agit pas d'une nouvelle géopolitique, mais d'une réinterprétation - mineure - du poids des zones principales dans la théorie de Mackinder. D'autant plus que Mackinder lui-même a commencé par énoncer une théorie sur "l'Europe de l'Est", c'est-à-dire sur ce qui deviendra le "cordon sanitaire", et que celui-ci appartient au Rimland.

Quoi qu'il en soit, la guerre froide, d'un point de vue géopolitique, était une bataille pour le Rimland. Moscou a tenté d'étendre son influence - par le biais de partis et de mouvements de gauche - en Europe, au Moyen-Orient, en Asie, en Afrique et en Amérique latine. À une certaine époque, la Chine maoïste faisait également partie d'un camp socialiste unique, c'est-à-dire du Heartland eurasien.

L'attaque de l'Atlantisme

Lorsque l'URSS a commencé à s'affaiblir, les géopoliticiens atlantistes (Z. Brzezinski, R. Gilpin, etc.) ont commencé à penser et à agir de manière plus avant-gardiste. Outre le modèle bipolaire et le déplacement partiel de l'équilibre à la périphérie du monde et le long des contours de l'Eurasie, ils ont commencé à élaborer des concepts plus audacieux, évoquant un monde unipolaire. Ainsi, les idées de Mackinder ont retrouvé leur fraîcheur et leur pertinence. Pour obtenir la victoire décisive et finale de la civilisation de la mer, il fallait briser le bloc de Varsovie, puis de préférence l'URSS, et enfin ce qu'il en restait. En d'autres termes, faire progresser de manière significative le Rimland dans les profondeurs de la terre, en le bridant et en bloquant l'accès aux "mers chaudes", vers lesquelles la Russie tentait constamment de se porter.

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L'un des géopoliticiens atlantistes les plus constants était Zbigniew Brzezinski. À l'époque bipolaire, il soutenait farouchement les forces antisoviétiques en Afghanistan, jusqu'à et y compris Al-Qaïda. Au début des années 80, Brzezinski et Kissinger se sont efforcés de rompre définitivement les derniers liens que la Chine entretenait encore avec l'URSS, en cherchant à l'inclure dans l'économie mondiale et à l'intégrer progressivement dans la civilisation de la mer.

Lorsque les processus destructeurs de l'URSS ont commencé à agir, les atlantistes ont augmenté la pression sur l'Europe de l'Est, provoquant, fomentant et soutenant par tous les moyens possibles des sentiments artificiellement antisoviétiques/russophobes. D'un point de vue géopolitique, le soviétique et le russe coïncidaient à l'époque.

Avec Gorbatchev, l'effondrement rapide du camp socialiste a commencé. La Terre reculait, la Mer avançait. Nous ne devons donc pas être surpris que l'expansion de l'OTAN vers l'Est ait commencé et se soit parachevé. Cette expansion était à l'origine inscrite dans la théorie géopolitique de l'atlantisme. On ne pouvait rien attendre d'autre de la politique atlantiste.

La création de l'anti-Russie

Lorsque l'on a assisté à l'effondrement de l'URSS, les projets de Mackinder visant à démembrer la Russie-Eurasie, redevenaient toujours plus pertinents. Les frontières conditionnelles des républiques au sein d'un État unitaire, entièrement et étroitement contrôlé par le parti communiste, se sont soudainement transformées en frontières d'États-nations souverains. Tous les États post-soviétiques ont été créés selon les moules atlantistes. Ces entités n'ont d'autre sens que d'être anti-russes. L'une de ces "Anti-Russie" était la Fédération de Russie elle-même. Mais parce que la Fédération de Russie occupait le territoire du Heartland, même si elle s'est considérablement réduite, elle représente toujours la Terre ennemie aux yeux des géopoliticiens atlantistes, c'est-à-dire de l'ennemi thalassocratique. Et pour achever l'ennemi, il a fallu pousser l'OTAN plus loin vers l'Eurasie, et aussi tenter de démembrer la Russie elle-même (la première campagne de Tchétchénie, la vague des séparatismes internes à la Fédération de Russie, etc.)

La Russie ne pourra jamais se relancer sans l'Ukraine.

Tous ces processus, Brzezinski les a compris et a contribué à les mettre en pratique (comme Mackinder l'avait fait auparavant). Dans son célèbre livre Le grand échiquier, Brzezinski parle ouvertement de la nécessité de démembrer davantage la Russie, de renforcer le "cordon sanitaire", etc. Plus important encore, Brzezinski comprend le rôle de l'Ukraine dans cette question. Brzezinski dit à son propos que la chose la plus importante est :

    - d'arracher irrévocablement l'Ukraine, alors hésitante, à la Russie,
    - d'en faire un avant-poste de l'Atlantisme et
    - d'imposer à son peuple le nationalisme russophobe comme idéologie principale.

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Sans l'Ukraine, la Russie ne sera jamais en mesure de devenir une puissance souveraine à part entière, un Empire, un pôle indépendant du monde multipolaire. Ainsi, le sort de l'unipolarité et du globalisme (pour Brzezinski, c'est presque la même chose), dépend de la capacité de l'Occident à mettre en œuvre la séparation de l'Ukraine d'avec la Fédération de Russie. Après tout, si la Russie et l'Ukraine s'unissent - d'une manière ou d'une autre, l'unipolarité s'effondrera et la carte géopolitique changera à nouveau de manière irréversible.

La bataille pour l'Ukraine et contre la Russie est une constante historique dans la stratégie géopolitique de l'Occident. Cela explique tout, de la déclaration d'indépendance à la révolution orange Iouchtchenko-Timochenko, en passant par le Maïdan et huit années de préparation intensifiée par Kiev, sous la houlette des instructeurs atlantistes, aux opérations militaires visant à s'emparer du Donbass et de la Crimée.

La naissance de la géopolitique en Russie : L'Eurasie comme sujet

Depuis le début des années 1990 en Russie, juste au moment de l'effondrement de l'URSS et de l'arrivée au pouvoir des agents atlantistes (l'ancien ministre des Affaires étrangères Andrey Kozyrev a directement admis qu'il était un atlantiste), contrairement à l'attitude politique et idéologique de base envers le libéralisme et l'occidentalisme, la Russie - principalement dans les cercles militaires (en particulier, à l'Académie d'état-major militaire) - a commencé à développer sa propre école géopolitique. Elle était basée sur l'eurasisme, car ce sont les premiers Eurasiens russes qui, dans les années 1920, ont décrit la carte géopolitique de la confrontation entre la Russie et l'Occident, en dehors de l'idéologie communiste (les Eurasiens étaient des Blancs). Leurs idées sont les plus adaptées à la situation actuelle, face à l'offensive de l'OTAN à l'Est et aux propres politiques incompréhensibles (par endroits perfides) de Moscou. Les militaires ne pouvaient pas prendre pour amis ceux dont ils enregistraient toutes les heures les intentions et les actions agressives contre la Russie. Mais le gouvernement libéral est resté sourd à la géopolitique. Néanmoins, l'école géopolitique ne pouvait être détruite. Tout le monde était occupé par les processus fascinants de la corruption totale.

La géopolitique expliquait parfaitement ce qui se passait en Europe de l'Est et dans l'espace post-soviétique dans les années 1990 (l'écrasement par la mer de la terre, l'expansion des "cordons sanitaires" et du territoire du Rimland), mais cette compréhension restait à l'intérieur des cercles militaires, qui n'appréciaient guère la politique officielle, mais qui n'avaient à l'époque aucun poids ni aucune influence politique. Les atlantistes, en revanche, ont méthodiquement poursuivi leur cause, nourrissant et renforçant l'anti-Russie, à la fois à l'extérieur et, en partie, au sein même de la Fédération de Russie.

Poutine change le vecteur géopolitique

Tout a changé lorsque Poutine est arrivé au pouvoir. Il a commencé par restaurer la souveraineté de la Russie, à se débarrasser des agents atlantistes qui étaient à la tête du pays, à concentrer et à développer son potentiel militaire, et à renforcer l'unité de la Russie. La deuxième campagne de Tchétchénie, l'introduction des districts fédéraux et les changements dans la législation ont renforcé l'intégrité territoriale et la verticalité du pouvoir. Poutine a progressivement commencé à s'opposer de plus en plus à l'Occident et à mener une politique d'intégration eurasienne dans l'espace post-soviétique. En bref, Poutine a rendu à la Russie le statut de sujet de la géopolitique, et a anénati son état de déréliction, qui faisait d'elle un objet de la géopolitique globale, atlantiste. Il a rejoint de manière consciente et responsable la grande guerre continentale au nom de la Terre.

Cela n'a pas échappé à l'Occident et a entraîné une pression accrue sur les pays post-soviétiques pour qu'ils adoptent une position de plus en plus anti-russe, pour qu'ils s'intègrent plus rapidement aux structures occidentales. Cela a touché tous les pays post-soviétiques, mais surtout l'Ukraine. Il dépendait de l'Ukraine de déterminer si la Russie serait capable ou non de restaurer pleinement sa souveraineté géopolitique. Selon les lois de la géopolitique, sans l'Ukraine, la Russie n'est pas un Empire, pas un pôle, pas une civilisation, mais avec l'Ukraine, elle est un Empire, un pôle et une civilisation. Et cette formule peut être lue depuis deux positions - celle des yeux de la Mer et celle des yeux de la Terre. De toute évidence, Poutine l'a lue avec les yeux de la Terre, car il était et reste le dirigeant du Heartland, conscient et puissant.

Le nationalisme ukrainien comme outil géopolitique de l'Atlantisme

Dans le même temps, l'initiateur des cataclysmes en Ukraine était l'Occident atlantiste. Même les politiques neutres, modérément pro-occidentales - multi-vectorielles - de Kuchma ou de Yanukovich ne convenaient pas aux atlantistes. Ceux-ci ont fait pression sur Kiev pour que l'Ukraine se transforme le plus rapidement possible en une anti-Russie agressive et radicale, attaquante. Dans cette logique, Kiev devait attaquer. 

Cela explique la Révolution orange, le Maïdan et les raisons de l'opération militaire russe actuelle.

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L'Occident se battait pour l'Ukraine. Il faut tenir compte du fait que l'Ukraine n'a pas du tout d'histoire en tant qu'Etat inscrit dans la durée, et que les territoires dans lesquels elle se trouve sont historiquement accidentels et sont le résultat de la créativité administrative des bolcheviks. Lorsque Poutine a justifié l'opération militaire en Ukraine en disant que "Lénine a créé l'Ukraine", il avait parfaitement raison. Cependant, Lénine n'a pas créé l'Ukraine en tant que telle, mais une des zones de contrôle bolchevique parmi d'autres. La nationalité, selon la théorie bolchevique, devait être complètement dépassée dans une société internationale socialiste. Lénine a créé l'Ukraine et l'a en fait immédiatement abolie.

Par conséquent, après 1991, il y avait sur le territoire de l'Ukraine des peuples et des territoires ayant chacun une histoire, une identité, une langue et une culture complètement différentes. La moitié d'entre eux n'étaient pas du tout différents des Russes. La seconde moitié était constituée d'Ukrainiens plus ou moins russifiés. Et seule une écrasante minorité professait une idéologie nationaliste autoproclamée. Mais seule cette minorité était capable, selon les géopoliticiens occidentaux, de transformer les Ukrainiens en une "nation" et ce, à un rythme accéléré. Il s'agissait d'un projet géopolitique atlantiste. Dans d'autres pays, l'Occident a soigneusement éradiqué le nationalisme, surtout dans ses formes radicales. En Ukraine, cependant, l'Occident a agi exactement à l'inverse, soutenant activement toutes les formes de nationalisme jusqu'aux plus extrêmes. Selon les stratèges atlantistes, c'était le seul moyen d'accélérer la formation d'une construction artificielle, rigidement russophobe, un simulacre virtuel de nation. C'est pourquoi la sphère de l'information était si importante, car elle inculquait de manière obsessionnelle aux Ukrainiens une haine infondée des Russes et de tout ce qui unissait nos peuples. Toutes les inepties étaient utilisées, jusqu'à "l'ancienne civilisation des anciens Ukrainiens", ce qui n'aurait provoqué qu'une totale perplexité en Occident. Cependant, toute l'opération était supervisée par les services secrets atlantistes, et c'est pourquoi l'Occident a créé une image artificielle de l'Ukraine comme une jeune démocratie ouvertement vulnérable, souffrant de la menace russe. En fait, un état d'esprit nazi s'est affirmé de manière obsessionnelle dans la société, inextricablement lié à l'atlantisme et même au mondialisme libéral (peu importe combien ces systèmes se contredisent, car le mondialisme nie l'État, et le libéralisme toute identité collective, et surtout l'identité nationale).

L'affrontement final

Le virage russophobe prononcé de Kiev et de l'ensemble de la société ukrainienne est le résultat des événements de Maidan de 2013-2014, qui ont culminé avec l'expulsion et la fuite du président Ianoukovitch. Ianoukovitch n'était ni un politicien pro-russe ni un eurasiste. C'était plutôt un pragmatique à courte vue, mais même cela, du point de vue de l'Occident, était tout aussi inacceptable. L'Occident voulait "tout et pas tout". En regardant la Russie de Poutine se renforcer et en tenant compte des événements de 2008 en Géorgie, où l'Occident a également opposé Saakashvili à la Russie, mais où le résultat n'était clairement pas en faveur de la civilisation de la Mer, les Atlantistes ont décidé d'agir par les méthodes les plus radicales.

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L'actuel président américain Joe Biden, alors vice-président, et d'autres membres de son équipe, comme Victoria Nuland, etc., ont participé très activement au renversement de Ianoukovitch et à la préparation du Maïdan. L'objectif était le même que celui de Mackinder et Brzezinski : arracher enfin l'Ukraine à la Russie et préparer le terrain pour un conflit violent entre Kiev et Moscou.

Poutine a répondu en ramenant la Crimée dans le giron russe et en soutenant le Donbass, mais cela n'a pas résolu le problème sur le plan géopolitique. Poutine a déjoué le plan visant à accélérer l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, notamment celui qui visait à expulser la marine russe de Sébastopol, il a ensuite empêché les génocides en Crimée et dans le Donbass, mais l'ampleur de l'Ukraine était trop importante pour qu'il puisse poursuivre son offensive eurasienne en 2014 et mener la défense du monde russe à sa conclusion logique. À ce moment-là, la Terre a cessé de réagir. Le processus des accords de Minsk avait commencé, mais d'un point de vue géopolitique, il était évident qu'aucune solution pacifique ne pourrait être trouvée et qu'une confrontation directe se produirait inévitablement tôt ou tard. En outre, les services de renseignement russes ont reçu des informations selon lesquelles la partie ukrainienne ne faisait que profiter de ce report pour préparer une opération militaire dans le Donbass, puis en Crimée.

Les forces nationalistes qui avaient remporté le coup d'État de 2014 à Kiev haïssaient encore plus la Russie, déployaient une propagande massive pour laver le cerveau de la population, lançaient une opération punitive brutale contre les habitants du Donbass, victimes d'un génocide systématique, et préparaient une attaque contre le Donbass et la Crimée d'ici le printemps 2022. Dans le même temps, Kiev, en collaboration avec l'Occident, élaborait des plans pour construire ses propres armes nucléaires. En outre, il y avait des laboratoires biologiques dispersés dans toute l'Ukraine, engagés dans des expériences illégales pour produire des armes biologiques.

Tout cela faisait partie d'une même géostratégie atlantiste.

[1] L'armée blanche (également connue sous le nom de Gardes blancs ou simplement Blancs) était des forces militaires qui ont combattu le régime bolchevique pendant la guerre civile russe.

La grande instrumentalisation du sermon du patriarche orthodoxe

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La grande instrumentalisation du sermon du patriarche orthodoxe

par Antonio Catalano 

Source : Antonio Catalano & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-grande-strumentalizzazione-del-sermone-del-patriarca-ortodosso

- La7 : "Sermon choquant. Kirill : "C'est une guerre juste contre le lobby gay".
- Famiglia Cristiana : "Le triste sermon du patriarche de Moscou : ces mots que nous n'aurions pas préféré entendre".
- Il Mattino : "Sermon choquant : La guerre en Ukraine est contre ceux qui soutiennent les gays".
- Il Giorno : "Kirill : la guerre est juste, elle est contre le lobby gay".
- La Stampa : "Sermon choquant : Droit de combattre, résister au lobby gay'".
- Ansa : "Kirill, droit de se battre, c'est contre le lobby gay".
- Il Giornale : "Délire mystique du patriarche orthodoxe : "La guerre est juste, écrasons le lobby gay"".
- Sky Tg24 : "Droit de se battre, c'est contre le lobby gay"".
- Il Corriere : "Kirill : la guerre est juste, combattons le lobby gay".
- Il Fatto : "Choqué par les propos du patriarche Kirill sur les homosexuels".

Je vais m'arrêter d'énoncer les titres de nos journaux en Italie, mais je pourrais continuer, tant la liste est longue. Ne voit-on pas clairement comment se forme la soi-disant "opinion publique"? Par ailleurs, quand on fait la guerre... à la guerre comme à la guerre... la guerre est menée avec tous les moyens disponibles, sans jamais être subtile, même en couvrant le David de Michel-Ange d'un tissu noir. Je ne suis pas choqué que la presse à l'esprit unique fasse son travail, mais ceux qui veulent aller plus loin ne peuvent se contenter de boire l'eau empoisonnée qui nous est offerte dans un cycle continu par l'information dite "libre". Par souci d'honnêteté, je me dois de signaler dans la presse nationale une réflexion calme et argumentée de Francesco Borgonovo dans la Vérità d'aujourd'hui.

J'ai cherché le texte sur le web, ce n'était pas facile, on ne trouve que des phrases citées dans les journaux, alors je suis allé directement sur le site du Patriarche et, grâce au traducteur (la traduction n'est donc pas très bonne), j'ai lu le texte complet du sermon (deux pages, c'est court, je le rapporte dans les commentaires). Comme quiconque veut le vérifier, le sermon de Kirill ne contient pas la phrase "cette guerre est contre ceux qui soutiennent les gays", ni, comme le dit le Corriere, que le patriarche de Moscou "a prié pour la souffrance des soldats. Les soldats russes, on suppose".

Dans le sermon du patriarche de Moscou, il est surtout question d'une "lutte métaphysique". À un moment donné, en effet, il déclare que "tout ce qui précède indique que nous sommes entrés dans une lutte qui n'a pas une signification physique, mais métaphysique".

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Cela n'enlève rien au fait qu'après avoir parlé du Carême comme d'un printemps spirituel, il déclare : "Mais nous savons que ce printemps a été éclipsé par de graves événements liés à la détérioration de la situation politique dans le Donbass, que constitua pratiquement le déclenchement des hostilités". Kirill attribue donc le déclenchement des hostilités à la "détérioration de la situation dans le Donbass". En d'autres termes, de la guerre de "basse intensité" menée depuis huit longues années et qui a fait 8000 morts, et dont notre presse "libre" a toujours fait semblant de ne pas voir. Kirill dit que depuis huit ans, on tente de détruire ce qui existe dans le Donbass. "Et dans le Donbass, il y a un rejet, un rejet fondamental des soi-disant valeurs qui sont proposées aujourd'hui par ceux qui prétendent au pouvoir mondial". Passage ignoré par la plupart de nos journaux.

Le patriarche aborde ensuite la question que les gens de presse, et ceux qui les lisent, feignent de ne pas en comprendre la haute valeur symbolique. "Aujourd'hui, il y a un tel test pour la loyauté de ce gouvernement [= le pouvoir mondial], une sorte de transition vers ce monde 'heureux', le monde de la surconsommation, le monde de la 'liberté' visible." Mais quel est ce test, demande le patriarche. "Le test est très simple et en même temps terrible : il s'agit d'une parade gay. Les demandes faites à de nombreuses personnes d'organiser une parade gay sont un test de loyauté envers ce monde très puissant ; et nous savons que si les gens refusent ces demandes, alors ils n'entrent pas dans ce monde, ils en deviennent des étrangers".

Eh bien, je ne pense pas qu'il ait dit quoi que ce soit de scandaleux. Ce n'est pas un mystère que la "gay pride" est utilisée comme un cheval de Troie pour pénétrer en territoire "ennemi". Un peu comme les incursions des Pussy Riot ou des ONG, sans surprise, généreusement soutenues par des magnats occidentaux. La religion libérale progressiste a ses rites de passage, et malheur à ceux qui les rejettent. L'East Journal l'a candidement écrit en 2020, en consacrant un article aux droits des LGBT et en déclarant qu'"en Ukraine, en Moldavie et en Géorgie, l'adoption de lois anti-discrimination a été un critère essentiel pour la signature d'accords d'association et de libéralisation des visas entre ces pays et l'UE". Le même article soulignait que ces "avancées législatives" avaient toutefois eu lieu "principalement sur le papier", et ajoutait de lourdes critiques à l'égard du gouvernement de Kiev, qui était manifestement réfractaire aux applications.

Mais revenons à Kirill. "Les parades gay sont conçues pour montrer que le péché est l'une des variantes du comportement humain. C'est pourquoi, pour rejoindre le club de ces pays, vous devez organiser une gay pride. Pas pour avoir fait une déclaration politique, pas pour avoir signé des accords, mais pour avoir organisé une parade gay. Et nous savons comment les gens résistent à ces demandes et comment cette résistance est réprimée par la force. Cela signifie qu'il s'agit d'imposer par la force un péché condamné par la loi de Dieu, et donc d'imposer par la force aux gens la négation de Dieu et de sa Vérité".

Le patriarche de Moscou et de toute la Russie, en tant que prêtre chrétien, avait auparavant rappelé, toujours dans le sermon, qu'en entrant dans le champ du Grand Carême, "essayons de pardonner à tout le monde". "Par notre pardon, nous confions nos délinquants entre les mains de Dieu, afin que le jugement et la miséricorde de Dieu puissent s'exercer sur eux. Pour que notre attitude chrétienne envers les péchés, les déceptions et les insultes des hommes ne soit pas la cause de leur mort, mais que le juste jugement de Dieu s'exerce sur tous".

Il n'est pas nécessaire d'être d'accord avec les paroles de Kirill, chacun peut faire ce qui lui convient, mais il est évident que nous sommes confrontés à une manipulation des paroles du patriarche. Avec son sermon, Kirill n'ajoute rien de nouveau à ce qui a déjà été dit en d'autres occasions. Le patriarche veut creuser une tranchée pour défendre cette "âme" russe que le progressisme libéral "occidental" entend anéantir pour pouvoir vagabonder dans cet immense espace libre comme au temps d'Eltsine. Un Occident qui se renie en reniant son histoire, sa civilisation, sa culture profondément imbriquée dans le monde russe, qui est prêt à tout perdre sauf son "âme".

Les limites de la patience russe

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La limite de la patience russe

Par Claudio Mutti

Source: https://www.eurasia-rivista.com/il-limite-della-pazienza-russa/

"Patrie de la patience, terre des Russes !"
Fyodor Ivanovič Tjutčev

Il y a environ trente ans, en 1993, le politologue américain John Mearsheimer posait l'éclatement d'un conflit entre la Russie et l'Ukraine comme inévitable. "La situation, écrit-il dans Foreign Affairs, est mûre pour qu'une vive rivalité sécuritaire éclate entre les deux pays. Les grandes puissances divisées par une ligne frontalière très large et non protégée, comme celle qui sépare la Russie et l'Ukraine, entrent souvent en conflit poussées par la crainte pour leur propre sécurité. La Russie et l'Ukraine pourraient surmonter cette dynamique et apprendre à vivre ensemble en harmonie, mais une telle solution serait très inhabituelle (1).

A cette approche, basée sur un modèle "étatiste" de l'école réaliste, Samuel Huntington reproche d'ignorer le fait historique des "liens historiques, culturels et personnels étroits qui unissent la Russie et l'Ukraine et le fort degré d'assimilation mutuelle qui existe entre les populations des deux pays" [2] ; soulignant plutôt la "profonde césure culturelle qui divise l'Ukraine orthodoxe orientale et l'Ukraine uniate occidentale" [3], le théoricien du "choc des civilisations" a appelé à envisager la possibilité d'une scission du pays en deux parties, mais a jugé improbable une guerre russo-ukrainienne.

Presque simultanément, l'ancien conseiller à la sécurité nationale Zbigniew Brzezinski, se référant ouvertement à la célèbre formule de Sir Harold Mackinder ("Celui qui gouverne l'Europe de l'Est gouverne le cœur du monde ; celui qui gouverne le cœur du monde gouverne le monde insulaire [4] ; celui qui gouverne le monde insulaire gouverne le monde" [5]), a illustré la fonction stratégique fondamentale qu'une Ukraine séparée de la Russie pourrait jouer pour faciliter le renforcement du contrôle américain sur l'Eurasie.

"L'Ukraine, nouvel espace important sur l'échiquier eurasien", a soutenu Brzezinski dans Le Grand Échiquier, "est un pivot géopolitique parce que son existence même en tant que pays indépendant contribue à transformer la Russie. Sans l'Ukraine, la Russie cesse d'être un empire eurasien. (...) Si Moscou reprend le contrôle de l'Ukraine, avec ses cinquante-deux millions d'habitants et ses grandes ressources, ainsi que l'accès à la mer Noire, la Russie trouve automatiquement un moyen de devenir un puissant État impérial, s'étendant sur l'Europe et l'Asie" [6].

La "géostratégie pour l'Eurasie" [7], proposée par Brzezinski aux États-Unis, impliquait donc qu'il fallait à tout prix empêcher Moscou d'exercer son hégémonie sur sa sphère d'influence historique. L'Ukraine, à laquelle Brzezinski a assigné la fonction de bloquer la Russie à l'ouest et au sud, est ainsi devenue le "bouclier défensif" de l'Europe centrale (un concept réitéré dans les mêmes termes, vingt-cinq ans plus tard, par le président ukrainien Volodymyr Zelensky à la Conférence de Munich sur la sécurité [8]) ; une autre tâche de l'Ukraine serait de maintenir le Belarus sous un contrôle constant. Enfin, bien que Brzezinski se soit rendu compte que la Russie aurait "incomparablement plus de mal" [9] à accepter l'entrée de l'Ukraine dans l'alliance militaire hégémonisée par les États-Unis, Kiev fournirait à l'OTAN des bases militaires et lui garantirait l'accès à la mer Noire. Ainsi, avec l'affaiblissement de la Russie, l'Ukraine aurait été le canal permettant de relier le bloc occidental à la région de la Transcaucasie et lui aurait donc permis de menacer la République islamique d'Iran à bout portant.

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Le projet élaboré par Brzezinski constitue le contexte stratégique du document que l'OTAN et l'Ukraine ont elles-mêmes signé en 1997 pour formaliser leur partenariat. Dans ce document, on peut lire que "le rôle positif de l'OTAN consiste à maintenir la paix et la stabilité en Europe, à promouvoir une plus grande confiance et une plus grande transparence dans la zone euro-atlantique, et à ouvrir la coopération avec les nouvelles démocraties d'Europe centrale et orientale, dont l'Ukraine est une partie inséparable". Plus tard, en novembre 2002, les relations entre l'OTAN et l'Ukraine seront approfondies et élargies avec l'adoption du plan d'action OTAN-Ukraine, "qui renforce les activités de réforme de l'Ukraine en vue de sa pleine intégration dans les structures de sécurité euro-atlantiques" [10].

Dans le projet géostratégique de Brzezinski, le rôle attribué à l'Ukraine s'inscrivait dans un panorama européen caractérisé par l'élargissement de l'OTAN à l'Est et l'élargissement complémentaire de l'Union européenne, "tête de pont géopolitique essentielle de l'Amérique en Eurasie"[11]. L'élargissement de l'Union européenne n'aurait donc pas dû inquiéter outre mesure la Maison Blanche, bien au contraire. "Une Europe plus grande - a assuré Brzezinski - élargira le champ de l'influence américaine (...) sans créer en même temps une Europe, si intégrée politiquement qu'elle pourrait bientôt défier les États-Unis dans des affaires géopolitiques de grande importance pour l'Amérique ailleurs dans le monde, notamment au Moyen-Orient" [12].

En offrant à l'Ukraine la perspective d'adhérer à l'Union européenne, en s'ingérant sans vergogne dans les affaires ukrainiennes pour aider les subversifs de Maïdan à transformer l'Ukraine en un pays hostile à la Russie, en apportant un soutien politique et militaire au régime issu du coup d'État, et en soutenant les initiatives anti-russes des administrations américaines, l'Union européenne et les gouvernements de certains pays européens ont activement collaboré à la consolidation de la "tête de pont démocratique" requise par le projet américain de pénétration du continent eurasien.

Enfin, après plus de 20 ans de patience, la Russie a été contrainte de réagir. Même un ancien soldat de l'OTAN, le général Marco Bertolini [13], a admis: "Les États-Unis ne se sont pas contentés de gagner la guerre froide, ils ont également voulu humilier la Russie en prenant tout ce qui se trouvait d'une certaine manière dans leur zone d'influence. La Russie a vu les États baltes, la Pologne, la Roumanie et la Bulgarie entrer dans l'OTAN : face à l'Ukraine, qui lui aurait ôté toute possibilité d'accès à la mer Noire, elle a réagi" [14].

Bien avant de franchir le Rubicon, Vladimir Poutine avait averti l'Occident. Déjà en 2007, lors de la conférence annuelle sur la sécurité de Munich, il avait dénoncé le caractère agressif et provocateur de l'expansion de l'OTAN. En Bulgarie et en Roumanie, dit-il, il y a des bases américaines dites avancées avec environ cinq mille hommes chacune. Il s'avère que l'OTAN a déployé ses forces avancées en direction de nos frontières, tandis que nous, tout en continuant à remplir nos engagements en vertu du traité [15], nous ne réagissons en aucune façon. Je pense qu'il est évident que l'expansion de l'OTAN n'a rien à voir avec la modernisation de l'Alliance elle-même ou la sécurisation de l'Europe. Au contraire, elle représente un sérieux facteur de provocation qui réduit le niveau de confiance mutuelle. Et nous avons le droit de demander : contre qui cette expansion a-t-elle lieu ? Et qu'est-il advenu des déclarations faites par nos interlocuteurs occidentaux après la dissolution du Pacte de Varsovie ? Où sont ces déclarations aujourd'hui ?" [16].

NOTES

[1] John J. Mearsheimer, "The Case for a Nuclear Deterrent", dans Foreign Affairs, n° 72, été 1993, p. 54.

[2] Samuel P. Huntington, Le choc des civilisations et le nouvel ordre mondial, Garzanti, Milan 2001, pp. 38.

[3] Samuel P. Huntington, op. cit. p. 39.

[4] L'île-monde est, pour Mackinder, la masse continentale qui comprend l'Europe, l'Asie et l'Afrique.

[5] "Qui gouverne l'Europe de l'Est commande le Heartland ; qui gouverne le Heartland commande l'île-monde ; qui gouverne l'île-monde commande le monde" (H. J. Mackinder, Democratic Ideals and Reality. A Study in the Politics of Reconstruction, [1919, 1942], National Defense University, Washington 1996, p. 106.

[6] Zbigniew Brzezinski, The Grand Chessboard. American Primacy and Its Geostrategic Imperatives, Basic Books, New York 1997, p. 46.

[7] Zbigniew Brzezinski, op. cit. p. 197.

[8] "L'Ukraine est le 'bouclier de l'Europe' contre l'armée russe. C'est ce qu'a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors de la conférence sur la sécurité de Munich" (ANSA, Berlin, 19 février 2022).

[9] Zbigniew Brzezinski, op. cit. p. 121.

[10] https://www.nato.int/docu/sec-partnership/sec-partner-it.pdf

[11] Zbigniew Brzezinski, "A Geostrategy for Eurasia", Foreign Affairs, septembre-octobre 1997, p. 53.

[12] Zbigniew Brzezinski, op. cit, p. 199.

[13] Le général Marco Bertolini était, entre autres, le chef d'état-major de la "force d'extraction" de l'OTAN en République de Macédoine (ARYM) pour la récupération éventuelle des vérificateurs de l'OSCE au Kosovo.

[14] www.liberoquotidiano.it, 24 février 2022.

[15] Le Traité adapté sur les forces armées conventionnelles en Europe, signé en 1999.

[16] Discours de Vladimir Poutine à la 43e Conférence de Munich sur la sécurité, Eurasia. Journal of Geopolitical Studies, 2/2007, p. 251.

vendredi, 11 mars 2022

Pourquoi Biden voulait que Poutine attaque l'Ukraine

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Pourquoi Biden voulait que Poutine attaque l'Ukraine

Maria Scopece 

Toutes les convergences parallèles de la Russie et des États-Unis en Ukraine. Le rôle du Qatar sur le gaz à destination de l'Europe selon l'administration américaine. Et les faiblesses internes de Biden et de Poutine. Conversation entre Germano Dottori (Limes) et Lucio Martino (Institut Guarini)

SOURCE : https://www.startmag.it/mondo/ucraina-russia-usa/?fbclid=IwAR2eShy-pb385NegsS_0TTT8kXsvbNBTzUFlRIl2uAArvB5XNheqDgeB7Qc

Cui prodest la menace de guerre en Ukraine ? Au président russe Vladimir Poutine et au président américain Joe Biden. Le professeur Germano Dottori, analyste géopolitique et conseiller scientifique de la revue de géopolitique Limes, et Lucio Martino, membre de l'Institut Guarini pour les affaires publiques de l'Université John Cabot et ancien directeur de recherche au Cemiss, le Centre militaire d'études stratégiques, soutiennent la convergence parallèle des intérêts des deux dirigeants.

Dossier Ukraine

"Les objectifs de politique étrangère actuellement poursuivis par l'administration américaine sont clairement wilsoniens, l'extension et la protection de la démocratie partout dans le monde font désormais partie d'une stratégie et d'une idéologie néo-conservatrices - a souligné Lucio Martino lors d'une conversation sur la page Facebook du professeur Dottori . De plus, la politique étrangère de l'administration Biden est entre les mains de personnes comme Victoria Nuland, l'épouse de Robert Kagan, l'idéologue de l'administration de Bush fils, celui des guerres du Moyen-Orient, mais aussi comme Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale, ou Antony Blinken, le secrétaire d'État lui-même. C'est la même équipe qui a signé la politique étrangère américaine de 2003, la guerre en Irak, la question du Kosovo de 2008 et la crise ukrainienne de 2014. C'est une équipe qui a pour objectif de réduire la taille de la Fédération de Russie, de ce point de vue idéologique, il y a donc une cohérence."

Victoria Nuland et le scandale de la crise ukrainienne de 2014

Victoria Nuland est une diplomate de longue date, elle a été directrice adjointe du département des affaires soviétiques pendant la présidence Clinton et conseillère du vice-président Dick Cheney. George Bush Jr l'a nommée ambassadrice auprès de l'OTAN à Bruxelles et, sous le président Obama, elle est devenue secrétaire d'État adjointe aux affaires européennes et eurasiennes, gérant les relations diplomatiques avec les pays européens et l'OTAN. Elle a joué un rôle central dans la gestion de la crise ukrainienne en 2014, et a été au centre d'un scandale parce qu'elle a dit Fuck the EU lors d'un appel téléphonique privé avec l'ambassadeur américain en Ukraine, Geoffrey Pyatt. L'appel téléphonique a été intercepté et publié sur Youtube.

Biden et les difficultés de la politique intérieure

Environ un an après son élection, Joe Biden navigue déjà en eaux troubles. Sa cote d'approbation personnelle n'a cessé de baisser, passant de 55 % à 36 %, son retrait précipité d'Afghanistan a porté un coup à son image, l'inflation a atteint 6 % pour la première fois depuis des décennies et le déficit fédéral a atteint le chiffre record de 3000 milliards de dollars. "L'administration Biden n'a guère connu de lune de miel avec son électorat", a ajouté M. Martino. "L'inflation est la plus élevée depuis quarante ans, ce qui a même entraîné une pénurie de produits de première nécessité. C'est un pays divisé culturellement, politiquement et aussi ethniquement selon des lignes identitaires qui sont les mêmes que celles de la guerre civile d'il y a 150 ans". Dans ce contexte, le succès en politique étrangère pourrait être une porte de sortie. "L'administration Biden se tourne vers la politique étrangère pour chercher l'affirmation et le succès, ce théâtre pourrait être l'Ukraine".

Les intérêts américains au Qatar

L'une des raisons des intérêts anti-russes des États-Unis concerne le gaz qatari.  Selon Lucio Martino, les Etats-Unis voudraient "rediriger les intérêts européens loin de la Russie par le biais d'un mécanisme de sanction encore plus sévère que celui qui est actuellement en place. Je ferais le rapprochement entre la crise ukrainienne et l'accord qui vient d'être conclu avec le Qatar, qui est un autre grand producteur de gaz naturel". Le Qatar "a été élevé au rang de pays allié, presque comme s'il était membre de l'OTAN. Le grand dessein, s'il en est un poursuivi par l'administration Biden, me semble être celui-ci", a ajouté M. Martino.

Poutine cherche le succès en politique étrangère

Détourner l'attention des problèmes intérieurs vers la politique étrangère n'est pas l'apanage de l'administration américaine. "J'ai l'impression que le succès que Poutine cherche à obtenir actuellement en Ukraine est de fixer des enjeux et d'empêcher l'alliance atlantique de s'étendre davantage vers l'est, en arguant que la Fédération de Russie ne peut l'accepter, et en essayant également de montrer aux dirigeants ukrainiens actuels que la garantie de sécurité fournie par l'Occident à leur pays n'est pas si solide. Le jeu dialectique qui se joue entre les parties atteindra à un moment donné un "moment de vérité".

La guerre : une hypothèse plausible pour le déclenchement des sanctions

La guerre, selon Dottori, serait une hypothèse plausible. Mon impression est que les Américains essaient de convaincre les Russes que l'agression peut être payante", selon le conseiller scientifique de la revue Limes : "Au moment où ils font savoir au monde entier que la guerre est probable, ils en font en quelque sorte une hypothèse normale, voire acceptable, à laquelle l'opinion publique internationale est préparée, et d'autre part, en abandonnant les Ukrainiens à leur destin, ils mettent Poutine dans la position de devoir envisager une attaque facile, ou en tout cas une situation dans laquelle l'Ukraine se retrouve complètement seule".

L'attaque contre l'économie européenne

Tout cela peut entraîner d'énormes conséquences. "Si les Russes n'attaquent pas, la stratégie américaine tire un coup dans l'eau - a ajouté M. Dottori - Si les Russes attaquent et mènent une offensive même limitée, des sanctions sont déclenchées, ce qui pourrait être le véritable objectif de l'administration américaine, afin de séparer définitivement la Russie du marché européen de l'énergie et de porter en quelque sorte un coup à la solidité de l'économie européenne à un moment où l'Europe sort de la pandémie et a besoin de se relancer. La stratégie comporte de multiples objectifs dans lesquels l'Europe peut également être une cible. L'Ukraine est un jeu complexe dans lequel les Européens, les Américains et les Russes ne sont pas complètement alignés, en fait ils me semblent être en compétition les uns avec les autres.

Maria Scopece

La guerre de religion de Vladimir Poutine

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La guerre de religion de Vladimir Poutine

Vladimir Poutine a attaqué l'Ukraine animé par un dessein politico-religieux ultra-conservateur. L'autonomie de Kiev signifie également l'autocéphalie de l'Église orthodoxe ukrainienne

Andrea Molle 

Source: https://www.dissipatio.it/putin-dostoevskij-ucraina/

En Occident, nous sommes certains que Poutine a envahi l'Ukraine uniquement pour des raisons géopolitiques, stratégiques ou économiques et nous oublions un facteur fondamental de la politique russe contemporaine : la religion. C'est parce que, malheureusement, en Occident, la religion est considérée comme un élément irrationnel, ou tout au plus comme une expérience privée et en tout cas sans rapport avec la dynamique de la politique.

En réalité, on pourrait dire, à mon avis, que l'invasion est pour Poutine un acte profondément religieux. Ou plutôt une étape dans son projet de recréer un État impérial chrétien sur le modèle des anciens empires préindustriels : une entité étatique qui réunit le pouvoir temporel et spirituel, se proposant alors comme l'unique référence internationale pour ceux qui rejettent la laïcité, qu'elle soit de type néo-libéral individualiste en Occident, ou de type collectiviste socialiste en Chine. 

Le plan de Poutine s'inscrit dans un cadre contre-révolutionnaire plus complexe dans lequel les franges traditionalistes de l'orthodoxie russe, du protestantisme évangélique américain et du traditionalisme catholique convergent dans le cadre d'une unité supranationale inspirée du christianisme médiéval. Le dénominateur commun de cette agrégation est le désir de réaffirmer la pureté de la foi chrétienne en opposition au sécularisme décadent du monde occidental et au pouvoir croissant de la Chine et du monde islamique, tel qu'envisagé par Samuel Huntington.

De ce point de vue, nous pouvons également comprendre la dynamique de l'action de désinformation promue par le Kremlin ces dernières années. Si nous analysons son contenu, tant textuel que visuel (mèmes), nous pouvons mettre en évidence des lignes de tendance qui reposent largement sur le fondamentalisme chrétien. Pour cette raison, ils ont immédiatement gagné l'approbation des mouvements traditionalistes et identitaires. Au fil des ans, ils ont également alimenté l'idée que Poutine est une sorte de figure messianique, la seule entité politique capable aujourd'hui de contrer la dégradation et l'immoralité prêtées à la civilisation occidentale en la restaurant aux splendeurs d'un supposé âge d'or.

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Aux États-Unis, le nationalisme chrétien s'est incarné à la fois dans le monde subversif du suprémacisme blanc et dans le monde institutionnel du courant "théo-con" et de la soi-disant alt-right, initialement promue par Steve Bannon et qui voit aujourd'hui plusieurs représentants politiques siéger au Congrès américain. L'Europe catholique, en revanche, a posé un sérieux problème pour la réalisation de cette convergence transnationale. L'élection du pape François en 2013 s'est avérée capable d'endiguer la formation d'un axe transversal entre les deux côtés de l'Atlantique. Malgré les nombreuses tentatives faites tant par les Américains, par exemple à travers leur soutien au Brexit ou l'ouverture d'un think tank dirigé par Bannon lui-même à Rome, que par les Russes, avec les fréquents voyages en Europe du philosophe politique et représentant du courant mystique et noétique au sein de l'orthodoxie Aleksandr Gelyevich Dugin (Douguine), le projet n'a jamais vraiment pris pied sur le vieux continent. Il y a toutefois eu l'émergence d'un courant traditionaliste quantitativement important au sein de l'Église catholique, mais il n'a jamais réussi à créer une masse critique suffisante pour promouvoir un véritable schisme. C'est ici, d'ailleurs, que l'on trouve bon nombre des partisans européens de Poutine.

En Russie, grâce également à l'application des préceptes de la Quatrième théorie politique de Douguine, Poutine a réussi à promouvoir l'Église orthodoxe comme point de référence de ce mouvement, gagnant ainsi à la fois la sympathie des évangéliques américains et l'intérêt des traditionalistes européens. Ces dernières années, Poutine a vu sa popularité croître en tant que point de référence moral de ce monde. Et c'est là que se pose, à mon avis, la question ukrainienne : l'Église orthodoxe ukrainienne n'a jamais reconnu la prétention de Moscou à la primauté et c'est un sérieux problème pour Poutine, car, dans la théologie orthodoxe qu'il a embrassée, Kiev occupe religieusement la deuxième place après Jérusalem.

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Pour faire court, en 980, le prince Vladimir le Grand a unifié les actuelles Russie, Biélorussie et Ukraine en un seul royaume. Se tournant vers Constantinople, Vladimir décide de se convertir au christianisme, épousant l'une des princesses impériales et faisant passer l'ensemble du royaume sous l'égide de l'église byzantine. Dès lors, Kiev devient un centre névralgique de l'Empire byzantin, comme en témoigne sa riche architecture religieuse. C'est également pour cette raison qu'au XIIIe siècle, la ville a été soumise aux tentatives de conquête d'autres princes russes et d'envahisseurs mongols, qui ont fini par s'installer dans ce qui est aujourd'hui Moscou, donnant naissance à l'Église orthodoxe russe, qui est devenue avec le temps l'une des églises les plus riches et les plus puissantes du monde oriental. La profonde tension entre le siège patriarcal de Moscou et l'Église ukrainienne a duré jusqu'à la chute de l'URSS, lorsque cette dernière a recommencé à se tourner vers Kiev. Avec la dissolution du bloc soviétique, les tensions ethniques bien connues ont commencé, entraînant l'émergence de tendances autonomistes parmi les minorités russes, comme par exemple en Crimée et aujourd'hui dans le Donbass, pour lesquelles la religion a toujours représenté un élément fondamental de leur identité ethnique. En 2018, l'Église orthodoxe ukrainienne unifiée s'est rendue complètement indépendante de Moscou, en réactivant l'ancien siège patriarcal à Kiev avec le placet du Patriarcat œcuménique de Constantinople.

Poutine et les autorités religieuses russes ont vivement protesté et ont tenté d'imposer leur primauté en s'appropriant la figure de Vladimir le Grand, prétendant qu'il n'était pas ukrainien mais russe. La proximité de Kiev avec le patriarcat de Constantinople, qui a toujours été le sommet de l'orthodoxie et qui, au fil du temps, a adopté des positions progressistes sur diverses questions religieuses et sociales, a été considérée comme une menace directe pour le pouvoir du patriarcat de Moscou, qui aspire au contraire à devenir le symbole du conservatisme et du traditionalisme chrétien dans le monde entier.

Pour le président russe, dont la fortune politique est également due à sa capacité à faire appel aux sentiments religieux de son peuple, prendre parti contre Kiev était nécessaire pour légitimer ses propres aspirations politiques et religieuses. Vladimir Poutine a commencé à se considérer comme le véritable héritier de Vladimir le Grand, se voyant comme une sorte de Vladimir II, en mission pour reconstruire l'âme et les frontières de la Sainte Mère Russie. 

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Cela explique pourquoi l'existence même de l'Ukraine en tant qu'État indépendant et prétendant au rôle d'unificateur et de "christianisateur" des peuples russes est lue par Poutine presque comme une offense personnelle. Pour Poutine et l'Église de Moscou, l'invasion est donc devenue une partie indispensable de la croisade pour reconquérir la terre sainte de l'orthodoxie, dans laquelle Kiev figure comme une seconde Jérusalem.

Cela explique également la participation forcée de la Biélorussie au conflit. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si, quand on écoute attentivement les discours de Poutine, on y trouve de nombreuses références pseudo-religieuses et eschatologiques à ce conflit. Enfin, un élément très important est la fréquence et la quasi-intimité de ses contacts passés et présents avec Israël (Jérusalem), la Turquie (Constantinople) et l'Italie (Rome) : des pays qu'il considère peut-être secrètement comme les seuls dignes d'interagir sur un pied de quasi-égalité avec la Russie, dans la mesure où ils sont les héritiers de ces mêmes empires auxquels il fait évidemment référence. En ce sens, l'Italie devrait peut-être occuper un rôle de premier plan dans les négociations, au lieu d'être éclipsée comme toujours par la France et l'Allemagne, pays envers lesquels Poutine ne cache pas un certain mépris paternaliste. 

Il est difficile de faire des prédictions sur l'avenir du conflit, mais il est certain que les sanctions fondées sur la conception de la Russie comme un acteur rationnel influencé uniquement par des facteurs économiques ne suffisent pas. Poutine voit son combat comme une croisade contre l'hérésie et la décadence morale occidentale, où la renaissance de la Russie est inspirée et approuvée par Dieu. C'est pourquoi il sera très difficile de trouver une solution à la crise avec les outils auxquels nous avons été habitués jusqu'à présent, car Poutine ne peut même pas envisager de céder ses prétentions sur l'Ukraine. 

Tout pour le pétrole: comment les Etats-Unis réhabilitent le Venezuela - Mais isoler la Russie pose problème à l'Europe!

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Tout pour le pétrole: comment les Etats-Unis réhabilitent le Venezuela

Mais isoler la Russie pose problème à l'Europe!

Eugenio Palazzini

SOURCE : https://www.ilprimatonazionale.it/esteri/tutto-petrolio-cosi-usa-riabilitano-venezuela-isolare-russia-problema-europa-226438/

La guerre en cours ouvre les portes à une série de scénarios imprévisibles et met en lumière un aspect difficile à digérer pour ceux qui ont l'habitude d'observer les dynamiques géopolitiques avec un manichéisme superficiel. En substance, on assiste à une prise de conscience générale de la complexité inhérentes aux relations internationales. Aujourd'hui, plus que jamais, elles sont liquides, elles ne sont pas ancrées dans les schémas du siècle dernier, elles sont volatiles car les bases sur lesquelles elles sont construites sont strictement contingentes. Si nous saisissons ce concept, ce qui se passe dans un pays géographiquement très éloigné du conflit en Ukraine est frappant, mais pas trop surprenant. Nous parlerons ici du Venezuela, qui, sur le papier - du moins en politique plutôt qu'en géographique - est depuis des années proche de la Russie et éloigné des États-Unis.

Le Venezuela et les États-Unis, nous nous haïssions tellement

Avec l'imposition de sanctions à l'encontre de Moscou, le gouvernement de Caracas a réagi comme prévu : il ne s'est pas aligné en pointant du doigt l'Occident. "C'est un crime ce qu'ils font contre le peuple russe, une guerre économique. Maintenant que l'Occident a sombré dans l'hystérie, le désespoir et la folie contre la Russie, nous allons maintenir nos relations commerciales avec la Russie et nous sommes prêts à leur vendre tout ce que nous pouvons", a déclaré le président vénézuélien Nicolas Maduro. Prévisible, voire trop prévisible. Et pourtant, preuve du fluide qui érode toute certitude dans les relations entre nations, samedi dernier, quelque chose a ébranlé la position de granit qu'avait prise ce pays sud-américain.

Le pétrole de mon ennemi...

Une rencontre totalement inattendue entre une délégation du gouvernement des États-Unis et le gouvernement de Caracas. Une rencontre que Maduro a qualifiée de "respectueuse, cordiale et très diplomatique". Un jargon diplomatique inhabituel pour quelqu'un qui a l'habitude d'invectiver les Américains. "J'ai estimé qu'il était très important de pouvoir parler face à face des questions qui intéressent le plus le Venezuela et le monde", a déclaré Maduro, précisant que "les pourparlers, la coordination et un agenda positif avec le gouvernement des États-Unis se poursuivront". Sur quoi exactement ? C'est le président vénézuélien lui-même qui le souligne : "Le Venezuela est prêt, une fois que le Pdvsa (géant pétrolier vénézuélien, ndlr) sera renforcé, à augmenter d'un, deux, trois millions de barils si cela est nécessaire pour la stabilité du monde".

Le déménagement américain est un problème pour l'Europe

Ce revirement soudain sur les hydrocarbures intervient au moment où Washington envisage de nouvelles sanctions contre la Russie, notamment sur le pétrole et le gaz. En conséquence, l'administration Biden semble disposée, comme l'a souligné CNN hier, à envisager un assouplissement des sanctions à l'encontre du Venezuela, afin que Caracas puisse produire davantage de pétrole et ainsi le vendre sur le marché international. La démarche américaine semble donc claire : isoler encore plus la Russie, en l'éloignant également de ses alliés historiques en Amérique du Sud. Aucune mesure concrète n'a encore été prise dans ce sens. Pourtant, selon le New York Times, les États-Unis ont promis au Venezuela la libération de prisonniers afin de parvenir à un accord visant à acculer davantage les Russes. Il s'agit d'un plan très risqué pour des raisons évidentes, difficile à mettre en œuvre et peu souhaitable pour une Europe qui se trouverait en grande difficulté sur le plan énergétique. Comme si la situation, en laquelle nous nous débattons, n'était pas déjà assez mauvaise.

Eugenio Palazzini

mercredi, 09 mars 2022

Guerre Russie-Ukraine, la Suède exclut de rejoindre l'OTAN : "Cela déstabiliserait davantage cette partie de l'Europe"

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Guerre Russie-Ukraine, la Suède exclut de rejoindre l'OTAN : "Cela déstabiliserait davantage cette partie de l'Europe"

Source: https://www.ilfattoquotidiano.it/2022/03/08/guerra-russia-ucraina-la-svezia-esclude-lingresso-nella-nato-si-destabilizzerebbe-ulteriormente-questa-parte-delleuropa/6519815/?utm_campaign=mondo&utm_medium=twitter&utm_source=twitter

Le Premier ministre social-démocrate Magdalena Andersson, à l'issue d'une réunion avec les principales forces politiques suédoises, est intervenu dans une conférence de presse pour expliquer avoir envoyé à Bruxelles un document commun pour rappeler qu'en cas d'attaque armée, les Etats membres sont tenus de fournir "soutien et assistance avec tous les moyens disponibles".

La Suède ne veut pas adhérer à l'OTAN. La raison ? Le risque de déstabilisation de l'Europe, avec des réactions possibles de la Russie. "Si la Suède décide en ce moment de poser sa candidature à l'OTAN, cela déstabiliserait encore plus notre partie de l'Europe", a déclaré le Premier ministre social-démocrate Magdalena Andersson lors d'une conférence de presse après une réunion avec les principales forces politiques suédoises.

Andersson est intervenu après que l'invasion russe de l'Ukraine ait ouvert le débat sur l'éventuelle entrée de la Suède et de la Finlande dans l'OTAN. Mais pour l'instant, Stockholm ne veut pas changer sa politique. Et, avec le gouvernement finlandais, a déclaré M. Andersson, il a envoyé un document commun à Bruxelles rappelant qu'en cas d'attaque armée, les États membres sont tenus de fournir "soutien et assistance avec tous les moyens disponibles", comme le stipule "la clause de défense commune contenue dans le traité de Lisbonne".

M. Andersson n'a pas exclu d'envoyer du matériel de guerre à l'Ukraine, même si pour l'instant la Suède préfère se concentrer sur la lutte contre les cyberattaques et le piratage informatique. L'invasion russe de l'Ukraine préoccupe beaucoup l'opinion publique des deux pays neutres où, pour la première fois depuis la naissance de l'Alliance atlantique, les sondages montrent une majorité, bien qu'à peine supérieure à 50 %, en faveur de l'adhésion à l'OTAN.

L'alliance franco-russe de Louis XVI relègue le projet de l'Union Européenne au niveau d'un bac-à-sable d'école maternelle !

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L'alliance franco-russe de Louis XVI relègue le projet de l'Union Européenne au niveau d'un bac-à-sable d'école maternelle !

Par Frédéric Andreu

La tragédie qui secoue l'Europe ne veut absolument rien dire par elle-même. Sans le recours au temps long de l'Histoire, ces images de guerre qui nous martèlent nuit et jour ne font qu'imposer leur vérité. Or, une vérité, surtout lorsqu'elle est martelée par des médias partisans, n'est pas une découverte, c'est même exactement le contraire.

Ce modeste article reflète au contraire une découverte, résultat de l'“effet puzzle” produit par l'emboitement de plusieurs pièces, alors même que les bombes pleuvent sur Kiev.

Il y a quelques années, j'avais traversé la Biélorussie à bicyclette, puis l'Ukraine du nord au sud, jusqu'à la Crimée encore territoire ukrainien. Je me souviens que le passage de la frontière avait été rendu possible par une liasse de billets glissée dans la poche du douanier. Mon voyage sur les routes défoncées s'acheva au-dessus des falaises blanches d'où s'étalait une mer magnifiquement bleue pourtant appelée “mer noire”.

Ces souvenirs de voyages, ces images, ces rencontres, se sont emboitées à une carte, à des lectures, pour se transformer en pistes intuitives.

En lisant ces lignes, vous pouvez vous demander : quels rapports entretiennent les vociférations anti-russes de Biden, la guerre en Ukraine, Louis XVI, Catherine II ? Apparemment aucun ! Et pourtant.

On peut se dire : L'Ukraine de Poutine sera-t-elle le bourbier espagnol de Napoléon ? La résistance farouche des Ukrainiens est-elle comparable à celle des résistants pendant l'occupation allemande ? Tous ces rapprochements infusent en nous des émotions, éclairent des feux, mais qui n'éclairent finalement pas grand chose. La première des choses qui compte dans l'univers des compréhensions politiques, ce sont les contraintes géographiques, ce sont elles qui déterminent aussi bien les rapports entre voisins que le mindscape des peuples qui y habitent.

Or, l'Ukraine n'est pas une péninsule comme l'Espagne, ni un “finisterre” comme la France, mais une zone de contact continental avec deux polarités, l'Occident et la Russie (voire, trois si l'on y ajoute la Turquie) à la fois différentes et complémentaires. L'axe Estonie-Ukraine est une ligne de fracture qui oppose deux géopolitiques antagonistes, la première arrimée au Etats-Unis le “Sea-power" et la seconde, au "Land-Power" incarné par l'immense Russie. Puissances de la mer et puissances et la terre, d'un côté, une Europe gagnée par l'imaginaire libéral-américain ; de l'autre, une Russie pan-continentale, siège de la “troisième Rome”. Ce sont ces deux mondes qui s'affrontent aujourd'hui en Ukraine.

Tout cela dépasse, bien sûr, les personnes et les passions. Mais il faut connaître un peu les hommes car l'Histoire est aussi faite d'imaginaire, de personnalité, de passions et d'irrationnel.

Les masses humaines, lorsqu'elles sont guidées par des élites illégitimes, se limite au niveau du bas-ventre. Les Ukrainiens se trouvent aujourd'hui devant le choix du ventre devant celui de l'âme. Ils sont partagés entre, d'un côté, la perspective d'un salaire à 150 Euros qu'implique le rattachement au grand frère russe et, de l'autre, les paillettes de l'Occident...

Le problème, c'est que la stratégie insidieuse  des Etats-Unis et de l'Otan oblige à cette alternative diabolique entre mourir à 50 ans dans une église orthodoxe ou à 75 dans un supermarché Carrefour.

Cela c'est la victoire posthume de Brzezinski, le merlin noir des élites étatsuniennes. A ce jeu-là, il n'est pas impossible que la guerre fratricide qui se déroule en Ukraine s'achève par la scission du pays de son territoire au niveau du fleuve Dniepr. L'Ukraine pays-tampon entre Europe et Russie est en train de se transformer en deux Ukraines rivales, instrument d'affrontement entre l'Occident et la Russie. Il y a une différence  majeure entre les deux scénarios qui déterminent deux géopolitiques mondiales. Le second scénario rimerait avec le martyr des minorités de part et d'autre. A la vérité, ce martyr a déjà commencé dans l'Est du pays, le Donbass. Huit ans de guerre où les villes russophones sont bombardées par un gouvernement ukrainien à la botte de l'Etat profond américain ; non par quelques obus égarés, mais par un bombardement systématique, ciblé, visant les populations civiles et non militaires.

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En d'autre terme, un nettoyage ethnique qui ne semble pas émouvoir nos bonnes âmes droits-de-l'hommistes. Au cours de mon séjour en Russie, j'avais rencontré des Ukrainiens du Donbass (ukrainiens russophones) traumatisés par les frappes, les immeubles éventrés, les enfants contraints de vivre dans des caves.

On peut comprendre, sans diplôme de géopolitique, qu'une Ukraine à couteaux tirés, arrange les affaires de Washington puisque le but des Etats-Unis est de diviser l'Europe et la Russie et pour se faire, détacher l'Ukraine de la Russie.

Le camp des “non-alignés”

Les politiques assez lucides pour refuser cette  fatalité sont nombreux à droite. On connait François Fillon, Philippe de Villiers, favorable à une “Europe de l'Altantique à l'Oural”. Mais tous ne sont pas issus des rangs de la droite. Jean-Luc Mélenchon, fervent défenseur du non-alignement, ancien député socialiste, certes, mais pas plus ni moins que ne l'était Marcel Déat avant guerre, étonne par ses positions. Les candidats patriotes de droite et de gauche veulent chasser du pouvoir la classe politique embourgeoisée et technocratique qui règne à Paris et à Bruxelles. Ces politiques, capables des pires traîtrises et des pires contre-sens historiques, déclaraient, encore hier, tous en coeur : “Avec nos sanctions, nous allons isoler la Russie !”.

Ont-ils tort ? Ces idiots utiles des Multi-nationales américaines pensent sanctionner, comme on le ferait à un mauvais élève, un “pays-continent” dont la superficie est 35 fois celle de la France, allié de surcroît de la Chine, voire de l'Inde, dont le réservoir démographique correspond à la moitié de la population mondiale ! Une super union économique basée sur l'étalon or et indépendante du dollar.

Bref, le conséquence de cette union, c'est la mort lente de l'Europe, continent déclassé, vieilli, asséché par 50 ans de planification technocratique.

L'Europe aurait alors pour seul avenir d'être un marché américain. Certes, elle l'est déjà depuis 1945 mais cette dépendance s'amplifierait de manière exponentielle. Elle distillerait le poison consumériste, le wokisme, la culpabilisation, pilules abortives des ventres et des âmes. Mais que les démographes se rassurent, l'Afrique pourra toujours suppléer au manque démographique des Européens : les populations noires déracinées pourront se déverser, toujours plus nombreuses, sur le Vieux Continent, avec la bénédiction d'un pape tiers-mondiste et des élites européennes métissolâtres.

Nul doute que ce grand remplacement de populations aidera à l'harmonie entre les peuples, fera augmenter le nombre de prix Nobel. Oui, lorsque cette classe de libéraux-traitres non élue qui dirige l'Union Européenne parle de "paix", il faut entendre : “Lgbtisme”, “pensée unique”, “matérialisme pratique”, “MacDonaldisation” de la société, autant de dissolvants de la société traditionnelle. Ces technocrates incarnent parfaitement les deux vers écrits par le poète :

“Ils refusent le halo autour des choses

Ils appellent solidarité la cohabitation”.

Avec la mise au ban de la Russie, l'Europe sera en donc “paix”, mais sans halo autour des choses, soumis au communisme libéral de l'UE à la puissance dix. Voici le contenu des mots “paix” et “démocratie” pour la génération à venir ! Voulez-vous de cette “paix” là ? Alors, dites adieu à Homère et à Pic de la Mirandole et dites bonjour au clown Mac-Do !

La “triple alliance” France-Autriche-Russie, contingence historique ou “alignement de planètes” géopolitiques ?

Les partisans d'une autre paix que celle imposée par les instances de l'OTAN savent que l'Europe a au contraire tout intérêt à s'ouvrir à cette Russie frappée de l'aigle à deux têtes, l'”empire bicéphale”, janus bifrons orient-occident et symbole de l'union des polarités grand continentales.

En effet, on ignore complétement, dans le pays qui a coupé la tête au roi, que le projet du Roi Louis XVI était non seulement d'en finir avec la rivalité Bourbon/Habsbourg, mais aussi de créer une alliance commerciale, voire plus, avec la Russie de Catherine II. Il m'a fallu tomber sur le livre de Jean Savant: Louis XVI et l'alliance russe pour en arpenter l'histoire différemment. On y apprend que l'ambassadeur français, le comte de Ségur, signa de nombreux échanges commerciaux entre Paris et St Petersbourg.

imagel16s.jpgQuant à la fameuse expédition de La Pérouse dans le Pacifique, elle fut rendu possible grâce à une alliance de facto entre la France, l'Autriche-Hongrie et la Russie. Les Russes explorent le Pacifique et installent un comptoir de pêche à Hawaï. Ils se rendent maître de l'Alaska et poussent jusqu'en Californie. Sensible à l'ouverture vers les mers, Catherine II crée une politique monde du Pacifique à la Mer Noire...

La Crimée et l'Ukraine, déjà objets de toutes les convoitises au XVIIIème siècle

On sait peu de choses du comte Louis-Philippe de Ségur sinon qu'il a été une pièce maitresse dans le projet d'alliance franco-russe. Il faut comprendre que l'histoire officielle de la France écrite après la Révolution, a cherché à faire la part belle aux Lumières et à la République. Elle a cherché a discréditer Louis XVI et la Royauté en général jusqu'à la caricature. Très peu d'études ont été consacrées à la politique de Louis XVI, sinon pour, au bas mot, la dénigrer. Nous savons donc peu de choses sur les motivations de Ségur. Nous savons cependant que Ségur accompagna Catherine II en Crimée. C'est sur les rives de la Mer Noire que Ségur aurait eut la pré-science d'une relation étroite entre la Russie, l'Autriche et la France... Nous savons qu'en France, Necker y fut opposé et retarda la projet. Des accords étaient sur le point d'être noués lorsque la Révolution, qui plongea la France dans 10 ans de guerre civile, mis brutalement un terme au projet.

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Portrait de Louis-Philippe de Ségur

A l'époque, les aristocrates russes et européens ne phosphoraient pas dans un anglais d'aéroport, de taux d'inflation et de statistiques. Ils pratiquaient l'art de la conversatio dans le Français de Molière. De quoi parlaient-ils ? De découvertes d'îles, de Nouveau Monde, de philosophie, de vin et de Belles Lettres. Le comte de Ségur, poète, jouait, paraît-il, les pièces qu'il écrivait lui-même, dans le théâtre privé de l'Impératrice...

Au-delà des anecdotes, la politique du dernier Roi Bourbon, reposa sur un tissage diplomatique de longue date qui a laissé des traces dans le vocabulaire. Les mots russes pour “bagage”, “étage”, “chauffeur”, “ambassade” sont tous des mots d'origine française. Les mots parlent d'eux-mêmes. On imagine bien que ce champs lexical (russe mais aussi suédois et autres) reflète, bien mieux que des thèses universitaires illisibles et politisées, l'intense activité diplomatique de la France des XVIIème et XVIIIème siècle.

Au fond, qu'a fait Napoléon, sinon poursuivre la politique des Bourbons ?

Même si les choses ne sont, là encore, jamais présentées comme cela, la même politique pan-continentale inspira l'Empereur des Français même si Napoléon fut - bien malgré lui - contraint de la réaliser... sur les champs de bataille.

Cherchant à nouer des alliances, Napoléon aurait sans doute épousé la grande duchesse Anna Pavlovna, la soeur du Tsar, si le camp de Talleyrand ne l'avait emporté sur celui de Cambacéres. Cependant, cherchant à créer une dynastie européenne, il épousa la nièce de Marie-Antoinette d'Autriche, imitant ainsi Louis XVI. Bien que rival des Bourbons, il aimait à rappeler qu'il était le “neveu du Louis XVI !”.

Bref, les deux tentatives françaises avortées n'empêchèrent pas la IIIème République de poursuivre des relations avec la Russie, mais le rêve d'alliance grand continental fut oublié au profit de la soumission à l'Angleterre et de l'aventure coloniale. Au lieu d'un rapprochement organique avec la Russie, ce sont des peuples africains et asiatiques qui ont été, aux cours du XIXème Siècle, la proie des exploitations honteuses de la bourgeoisie industrielle et cela, au détriment de la paysannerie française.

Le grand tremblement géopolitique déclenchée par la guerre en Ukraine oblige à revoir notre Histoire officielle. Il serait temps de ressortir des cartons ce plan d'alliance datant de Louis XVI. On s'apercevra alors que Louis XVI était loin d'être le chef d'Etat poussif décrit par la propagande républicaine. En réalité, ce roi si dénigré relègue le petit projet néolibéral de l'UE à un bac-à-sable d'école maternelle. Pourquoi ? Tout simplement parce que cette grande politique est inscrite dans le destin de la France, à la fois géographiquement, politiquement et aussi spirituellement. Oui, il ne s'agit pas seulement d'échanges économiques, il s'agit de faire passer l'oxygène du poumon gauche (l'Europe) au poumon droit (la Russie) et vice-versa. Deux mondes différents et organiquement complémentaires qu'un demi-siècle de guerre froide ont rendus incompréhensibles. Ce projet est d'ailleurs inscrit dans la géographie car, lorsqu'on ouvre une carte, on s'aperçoit que la France commence le Grand Continent et que la Russie, le termine. Louis XVI, catholique pratiquant et Catherine II, impératrice d'origine allemande, n'ignoraient rien de cette géopolitique. Cherchant à s'extirper du rapprochement anglo-prussien, Catherine qualifie la France de “nation privilégier de la Russie”. Louis XVI parlera à cet endroit de “politique naturelle”. Les acteurs politiques de cette époque n'étaient pas de vulgaires technocrates interchangeables, ils incarnaient aussi et surtout des principes cosmiques reliant la terre et les peuples.

Des révolutions très opportunes...

Cette voie pan-continentale reliant la France à la Russie a pu émerger ici ou là dans le cours méandreux de l'Histoire. Nous avons ciblé ici les accords qui précédèrent de quelques mois la Révolution Française. Mais il y a une différence entre des accords conjoncturels et un tropisme géopolitique profond, or, l'alliance franco-russe et ceux qui s'y opposent, oppose également la puissance de la terre à la puissance de la mer. La seule fois où elle fut en voie de réalisation concrète c'est au cours de l'année 1788, début 1789, mais ô surprise, une révolution éclata à Versailles qui allait renverser le roi... Au lendemain de la prise de la Bastille, élément rhétorique du coup d'Etat libéral téléguidée par les ennemis de la France, Catherine II coupa toute relation avec la France.

La seconde fois dans l'Histoire où une coalition d'alliance franco-russe aurait pu se réalisé, c'est dans les années qui précèdent la première guerre mondiale mais la révolution bolchevique de 1917 en décida autrement. La troisième fois, dans les années 2012 / 2015, un scénario similaire se produisit. Vladimir Poutine, conseillé par son merlin en politique, Alexandre Douguine, inspira cette politique de rapprochement ; des pipelines de gaz allaient été construits, des liens diplomatiques, renforcés, mais une autre révolution éclata. Non pas à Paris ni à Moscou, mais à Kiev. La révolution dite de Maïdan.

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Fomentée par un gouvernement ukrainien pro-américain et par un étrange conglomérat composé de néo-nazis auto-proclamés et de sionistes activistes, la révolution “orange” présentée dans les mass-média occidentaux comme une révolution populaire et spontanée, reste en réalité mal connue. Elle mériterait une étude approfondie.

Retenons simplement la coïncidence troublante entre les projets d'alliance et ces révolutions – toujours téléguidées de l'extérieur - qui éclatent presque toujours au moment où une alliance constructive va être scellée... Alors que les planètes semblaient alignées une nouvelle fois pour une alliance trans-continentale qui auraient pu renverser le nouvel ordre mondial, Maïdan fait en effet figure d'une enième révolution “de couleur”.

Aujourd'hui, l'Ukraine subit une guerre téléguidée par des puissances étrangères, une sale guerre où résonne plus que jamais les mots de Paul Valéry : “La guerre, c'est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent et ne  se massacrent pas”. Notre article peut aider à montrer les enjeux géopolitiques énormes qui s'y déroulent visant l'isolement de la Russie, enjeux que ne montrent ni les caméras ni les commentaires à chaud, de part et d'autre.

Et si le rêve pan-continental pouvait encore inspirer l'avenir ?

Si le vieux rêve du dernier roi capétien et de l'Empire Français reprenait vie dans le moment dramatique que traverse aujourd'hui l'Europe, par un socialiste franc-maçon d'inspiration révolutionnaire ? Alors, Jean-Luc Mélenchon, ou un autre candidat qui réaliserait ce dessein, resterait dans l'Histoire d'abord et avant tout comme Français !

Contact : fredericandreu@yahoo.fr

lundi, 07 mars 2022

La guerre mondiale à l'Est

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Stefan Schubert

La guerre mondiale à l'Est

Ex: https://kopp-report.de/der-weltkrieg-im-osten/

D'un point de vue purement militaire, la guerre en Ukraine est un conflit militairement limité, comme on le dit sobrement dans le jargon militaire. Mais les sanctions ont pris une telle ampleur et une telle dynamique que leurs effets s'apparentent à une bombe atomique économique. La destruction totale de l'économie russe est désormais l'objectif ouvertement revendiqué par l'Occident. Mais cette bataille finale comporte des risques considérables, tant pour la puissance économique allemande que pour la situation militaire à l'Est. Ce n'est rien de moins que jouer avec le feu, car personne n'est en mesure de prédire comment un Vladimir Poutine ébranlé et acculé va réagir.

La plus haute fonctionnaire de l'UE, Ursula von der Leyen, qui n'a pas été élue à ce poste mais qui doit son pouvoir uniquement à ceux qui tirent les ficelles dans les coulisses, est en mode guerre depuis plusieurs jours. Cela surprend beaucoup l'observateur objectif, car pas un seul coup de feu n'a été tiré sur un pays membre de l'UE. Ce qui est encore plus déconcertant, c'est la motivation de von der Leyen pour faire avancer le "mode guerre" au sein de l'UE.

Une telle volonté d'action de sa part a non seulement manqué à tous les soldats de la Bundeswehr pendant son mandat de ministre de la Défense, et c'est exactement le contraire qui s'est produit.

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Lors d'entretiens personnels, des officiers d'élite ou haut gradés la caractérisaient comme la "fossoyeuse" de la troupe en raison de son action qui fut quasiment destructrice. Comme elle a été intronisée par Angela Merkel, qui a représenté la déstabilisation de l'Allemagne comme aucun autre chancelier, la boucle est bouclée. Von der Leyen parle désormais ouvertement de la destruction de la base économique de la Russie. De tels fantasmes de destruction contre les 145 millions d'habitants du grand pays de l'Est ont une connotation plus que déconcertante au regard de l'histoire commune du siècle dernier.

Il faudrait plusieurs pages pour simplement énumérer les innombrables sanctions contre la Russie : l'exclusion des banques russes de SWIFT s'est accompagnée de la privation des Russes d'une grande partie de leurs propres réserves d'or et de devises, d'une valeur de plus de 600 milliards de dollars. La FIFA, l'UEFA et le Comité olympique ont exclu des athlètes et des équipes russes, et une chasse publique aux milliardaires russes, les oligarques, a été lancée. Ils ne sont pas accusés d'avoir participé à la guerre en Ukraine, mais seulement d'être "proches" de Poutine.

Le vieil homme blanc américain Joe Biden, dans son premier discours sur l'état de l'Union, a lancé à la face des milliardaires russes, et sans doute à celle de Poutine lui-même, la déclaration de guerre suivante : "Nous allons prendre vos yachts, vos appartements de luxe et vos jets privés".

Malgré tout son zèle, l'Occident, qui se pose comme si moralement supérieur, semble, ces jours-ci, ne plus accorder aucune importance aux bases juridiques de ces expropriations et confiscations. La classe supérieure russe doit désormais se trouver dans la quasi impossibilité de séjourner en Europe et en Amérique à cause des sanctions et du durcissement de la politique des visas. Roman Abramovitch, entre autres - qui est encore propriétaire du club de football londonien FC Chelsea, serait en train d'essayer de vendre sa villa de 180 millions d'euros et son penthouse londonien de trois étages pour 26 millions de livres.

Le message de l'UE et des Américains pour les oligarques s'assène à coups de maillet. Ceux qui sont avec Poutine, même s'ils sont neutres, ne pourront ni gagner ni investir de l'argent en Occident, et même les longues vacances en yacht sur la Côte d'Azur tomberont à l'eau. Mais le véritable message de ce message va bien au-delà des projets de vacances, car il met en œuvre un appel direct au coup d'État contre Poutine. Ce n'est que si les milliardaires russes s'opposent ouvertement à Poutine et participent à un changement de régime, sous quelque forme que ce soit, qu'il y aura un avenir pour eux et leurs enfants en Occident. Cette déclaration de guerre de l'Occident va créer un front mondial qui risque d'entraîner la nouvelle puissance mondiale, la Chine, dans le conflit. En effet, la Chine s'est jusqu'à présent exprimée de manière pro-russe et pourrait atténuer bon nombre des sanctions imposées par l'Occident. Au plus tard dans ce cas, le conflit ukrainien se transformerait en une guerre économique mondiale.

Les Russes sont les nouveaux non vaccinés

Bien entendu, nous compatissons avec les Ukrainiens et ils ont besoin de notre aide. L'armée russe a envahi le pays sur ordre de Poutine. Point final. L'expansionnisme de l'OTAN vers l'Est a certes pu être l'un des déclencheurs, mais il ne justifie pas la guerre contre le pays voisin. Surtout maintenant, alors que la stratégie militaire risque de changer. La guerre éclair s'étant enlisée, le nombre de victimes dans les villes risque désormais d'être élevé. Les chars, les tirs de missiles et les attaques aériennes menacent de détruire les centres-villes et les infrastructures.

Mais, malgré toutes les critiques, qu'y peuvent les plus de 3 millions de personnes d'origine russe qui vivent en Allemagne ? L'incitation de certains groupes de la population contre d'autres, qui, eux, seraient bien ciblés par la politique et les médias contrairement à certains, tient la république en otage depuis des années déjà et la polarise. Les effets de cette incitation de masse frappent maintenant les Russes en Allemagne.

Les réseaux sociaux montrent un petit supermarché russe dans la Ruhr dont les vitrines ont été brisées et dont la façade a été recouverte de peinture blanche. Un restaurateur allemand a immédiatement déclaré que toutes les personnes ayant un passeport russe étaient des personnes indésirables qu'il refusait de servir. Même les jeunes enfants ne sont pas épargnés par cette société civile qui se targue d'être si tolérante. Sur les réseaux sociaux, une vidéo devient virale : un père tente de parler à une enseignante de son fils qui est rentré à la maison perturbé. L'enseignante, qui serait une de ces auxiliaires qui aident les élèves à faire leurs devoirs, cela n'est pas clairement établi, avait forcé le garçon à enlever sa veste préférée, car il s'agissait d'une veste de l'équipe olympique russe.

La bien-pensante, dûment idéologisée, a alors prononcé la phraséologie typique de ces derniers jours, celle qui évoque la "solidarité" avec l'Ukraine et autres. Nous en sommes arrivés là dans ce que nos dirigeants et nos idéologues appellent "la meilleure Allemagne de tous les temps".

dimanche, 06 mars 2022

La revue de presse de CD - 06 mars 2022

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La revue de presse de CD

06 mars 2022

EN VEDETTE

La chaîne russe RT France fermée sans procès : une décision qui fait peur

« Cette chaîne n’est pas disponible dans votre pays ». Le message s’affiche désormais en blanc sur fond de bandeau rouge sur le site de RT France, la déclinaison française de la chaîne russe Russia Today. Après Facebook et Instagram lundi soir, YouTube a à son tour bloqué mardi le flux vidéo des médias russes Russia Today (RT France) et Sputnik. Une décision « avec effet immédiat » justifiée par Youtube auprès de l’AFP par « la guerre en cours en Ukraine ». Selon Russia Today, contactée par BV ce 1er mars vers 16h45, la chaîne fonctionnait toujours sur Twitter et continuait à émettre sur Free, CanalSat et Molotov.

Bvoltaire.fr

https://www.bvoltaire.fr/la-chaine-russe-rt-france-fermee...

DÉSINFORMATION/CORRUPTION

« Devant les sénateurs : saint Xavier, comédien et martyr », par Aude Lancelin

Le jeudi 18 février dernier, c’était au tour de Xavier Niel, patron du groupe Le Monde, d’être auditionné au Sénat dans le cadre de la commission d’enquête visant à évaluer l’impact de la concentration des médias en France sur la démocratie. Beaucoup de mensonges, de storytelling et de bluff, qui ne laisse rien augurer de bon quant à l’issue d’une commission où les grands oligarques français de l’information auront été approximativement interrogés et constamment ménagés

QG.media

https://qg.media/2022/02/21/devant-les-senateurs-saint-xa...  

« Le Seigneur des anneaux » d’Amazon souille le chef-d’œuvre de Tolkien

La plus grande menace de la Terre du Milieu et du monde du Seigneur des anneaux n’est plus Sauron ou Morgoth, mais les wokes. 

contrepoints.org

https://www.contrepoints.org/2022/03/05/422688-le-seigneu...

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Le Media Development Investment Fund : arme financière des réseaux d’influence médiatique de George Soros

Anciennement “Media Développement Loan Fund” de 1995 à 2013, le Media Development Investment Fund (MDIF) est destiné à soutenir financièrement « les entreprises indépendantes du secteur des médias et de l’information opérant dans des environnements difficiles, surtout dans les pays ayant un passé en matière d’oppression de la presse ».

ojim.fr

https://www.ojim.fr/media-development-investment-fund-geo...

ÉCOLOGIE

Agriculture européenne : Farm to Fork ou N’importe Quoi

Le volet agriculture et alimentation du « green deal » connu sous le nom de stratégie « Farm to Fork » est une catastrophe qui va fragiliser encore plus l’Europe.

Contrepoint.org

https://www.contrepoints.org/2022/03/05/422765-agricultur...

5 démentis sur l’utilité des éoliennes en mer ou sur terre

Voici cinq arguments faux sur les éoliennes en mer ou sur terre.

Contrepoints.org

https://www.contrepoints.org/2022/03/03/422640-5-dementis...

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ÉTATS-UNIS

Afrique de l’Ouest : Quand les protégés des États-Unis multiplient les coups d’État

Neuf protégés des États-Unis ont renversé des gouvernements depuis 2008, dont l’un la semaine dernière. Pendant ce temps, les attaques extrémistes ont augmenté de 70 %.

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/afrique-de-l-ouest-quand-les-pr...

Brève analyse de la politique étrangère américaine

« Mais je soutiens que les crimes commis par les États-Unis durant cette même période [depuis 1945] n’ont été que superficiellement rapportés, encore moins documentés, encore moins reconnus, encore moins identifiés à des crimes tout courts. » Harold Pinter, Prix Nobel de la paix 2005.

Breizh-info.com

https://www.breizh-info.com/2022/03/03/180796/politique-e...

FRANCE

Médecins étrangers en France : le scandale continue

L’annonce a fait peu de bruit, mais l’information est d’importance : 1 200 médecins algériens vont bientôt arriver en France pour y exercer leur activité professionnelle. Le gouvernement français favorise ainsi le départ de professionnels qualifiés du Maghreb, sans résoudre pour autant en profondeur le problème récurrent du manque de médecins qui sévit dans notre pays depuis plusieurs années. Pire, il crée d’autres problèmes dans les pays d’origine des professionnels de soins qui arrivent en France.

Polémia

https://www.polemia.com/medecins-etrangers-en-france-le-s...

GAFAM

Une société américaine de surveillance affirme que l'iCloud d'Apple est un atout "phénoménal" pour les forces de l'ordre

Lors d'une présentation non publique, un représentant de la société américaine de surveillance PenLink a fait l'éloge de l'iCloud d'Apple, le qualifiant de "phénoménal". Certes, Apple ne déverrouille pas les iPhone à la demande des forces de l'ordre, mais leurs sauvegardes dans l'iCloud sont remises après l'obtention d'un mandat de perquisition. Ainsi, l'iCloud d'Apple permettrait de consulter les iPhone et de demander l'emplacement exact de suspects via Google et Facebook. Les messages WhatsApp pourraient également être lus via les sauvegardes - pour autant que ceux-ci ne soient pas chiffrés

Developpez.com

https://www.developpez.com/actu/331436/Une-societe-americ...

La tech française dans la guerre des données

Nouvelle bataille entre les États-Unis et l’Europe quant à la gestion des données personnelles. Cette fois-ci, c’est Facebook qui lance l’offensive, ouvrant un risque majeur pour les entreprises européennes. 

revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/charles-degand-angelsquare/...

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L'esclavage numérique et la fin de l'enseignement

Le monde de l'éducation a été totalement happé par l'engouement pour la numérisation. A l'occasion de la pandémie, le GAFAM s'est frotté les mains. De manière anarchique d'abord, puis, formellement ou non, de concert avec les administrations, les géants technologiques ont profité du choc pandémique (la "Shock Doctrine" de Naomi Klein s'applique ici à la perfection) pour usurper les fonctions pédagogiques qui n'appartiennent qu'aux parents, aux instituteurs et aux professeurs.

euro-synergies

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/02/27/l...

GÉOPOLITIQUE

Souveraineté alimentaire et développement durable, entretien avec Thierry Pouch

La forte hausse des prix de l’alimentation a fait prendre conscience de l’enjeu de la souveraineté alimentaire. Méthodes de production, intrants et produits chimiques, maitrise des flux commerciaux, les enjeux alimentaires sont immenses, d’autant que la demande de nourriture est croissante. Entretien avec Thierry Pouch, membre de l’Académie d’Agriculture de France, pour mieux en saisir les enjeux.

Revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/souverainete-alimentaire-et...

LECTURE

« Les infiltrés. Comment les cabinets de conseil ont pris le contrôle de l’État », de Matthieu Aron et Caroline Michel-Aguirre. Allary Éditions, 2022

Présentation :

« C’est l’histoire d’un putsch progressif, presque rampant, sans effusion de sang mais qui, de l’intérieur, a changé la France. Depuis vingt ans, les consultants se sont installés au cœur de l’État. Gestion de la pandémie et de l’hôpital, stratégie militaire, numérisation de nos services publics… : les cabinets de conseil, pour la plupart anglo-saxons, sont à la manœuvre dans tous les ministères. On les retrouve même au cœur de nos services de renseignements. […] Ce livre relate ce suicide assisté. » (extrait de la 4e de couverture)

Auteurs :

Matthieu Aron et Caroline Michel-Aguirre sont grands reporters à l’Obs. Le premier à notamment participer à l’excellent témoignage de Frédéric Pierucci, « Le piège américain : l’otage de la plus grande entreprise de déstabilisation économique raconte » (JC Lattès, 2019) sur l’affaire Alstom.

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Extraits :

« Les responsables de la santé publique parlent entre eux du ‘’paradoxe du serpent’’. Ou comment l’État paie deux fois. La première pour que des cabinets l’incitent à rogner les budgets, la seconde pour que ces mêmes cabinets l’aident à suppléer les carences qu’ils ont eux-mêmes contribué à organiser ».

« Les consultants américains sont les héritiers du taylorisme. Dans les années 1980, ils vont appliquer la même ‘’organisation scientifique du travail’’ à la démanteler à coups de privatisations, et transforment les fonctionnaires, du moins ceux qui ont échappé à la purge, en ouvriers de bout de chaîne, privés d’autonomie et soumis à des reportings permanents. »

« A la fin des années 2010, McKinsey a été mis en cause par la justice américaine pour avoir joué un rôle, au travers de ses conseils aux grands laboratoires, dans la surprescription de médicaments à base d’opiacés, qui a coûté la vie à 500 000 personnes aux Êtats-Unis. En février 2021, McKinsey a accepté de verser 573 millions de dollars pour éteindre les poursuites. »

« En 2007, le maître d’œuvre de la RGPP [La révision générale des politiques publiques] s’appelle Éric Woerth. Personne ou presque ne le note à l’époque, mais avant d’exercer en politique, il a travaillé pendant vingt ans dans le conseil : chez Bossard Consultants, précurseur français de la diffusion du New Public Management, puis chez le géant de l’audit Arthur Andersen. »

« ‘’Emmanuel Macron ? C’est l’idole des consultants ! Tout simplement parce qu’il est comme eux.’’ Alain Minc nous livre ce diagnostic en octobre 2021, lorsque nous l’interrogeons sur le rapport singulier du chef de l’État avec les ‘’infiltrés’’ » 

« Les cabinets, en investissant la bataille des idées, incitent leurs clients (privés ou publics) à acheter leurs prestations. Ce n’est jamais dit comme ça évidement. La ‘’com’’ des consultants est plus subtiles. Mais le ‘’diagnostic-vente’’ revient à être juge et partie. Et si pour la présidentielles 2022, ils affichent ouvertement leur programme, en réalité, cela fait longtemps qu’ils labourent le terrain, y compris auprès de la fine fleur des économistes. »

« Henri Verdier, qui était le directeur interministériel du numérique jusqu’en 2018, est bien placé pour le savoir. Il n’a cessé d’entendre au sein de ses équipes : ‘’Nous avons deux soucis, les GAFAM et les CASSOS’’. Soit d’un côté les Américains Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft et de l’autre les Français Capgemini, Atos, Sopra Steria, Orange, et SIA Partner. Les CASSOS, donc. Un vilain sigle pour ces entreprises florissantes. ‘’Sans elles, l’État ne sait plus faire’’, reconnaît cependant Henri Verdier, normalien et ex-créateur de start-up. L’État est devenu accro : il a pris l’habitude de se retrouver au consulting informatique sans songer à former ses propres experts. »

« ‘’On a créé des tas d’échelons intermédiaires (l’unité, le pôle, le groupe hospitalier) qui ont chacun leurs tableaux Excel pour suivre de soi-disant indicateurs de qualité. Mais les tableaux donnent une vision virtuelle de l’hôpital, pas une vision réelle’’, constate de son côté le professeur André Grimaldi, qui s’inquiète encore pour l’avenir : ‘’Cette organisation en chaîne de production a fini par dégrader la qualité des soins, en poussant les médecins à délaisser ce qui ne peut pas être valorisé par les indicateurs’’. […] ‘’Ce qui était vendu comme un indicateur de qualité était en fait un indicateur de productivité’’, raconte le chercheur Nicolas Belorgey. »

« La montée en puissance du consulting est en effet concomitante de la déresponsabilisation progressive du personnel politique, paniqué à l’idée de devoir rendre des comptes jusque devant un tribunal. Une dérive que la Cour des comptes dénonçait, dès 2014, jugeant très ‘’contestable (…) l’utilisation des consultants comme cautions techniques des décisions de l’Administration, parfois en doublons avec des avis internes, avec pour objectif ou conséquence une dilution de la responsabilité des décideurs publics.’’ »

« La priorité consiste à stopper un processus de privatisation larvée afin de bâtir un futur commun. Ministres et hauts fonctionnaires doivent en urgence se ‘’désintoxiquer’’ du consulting, réapprendre à penser par eux-mêmes, et cesser d’être les faire-valoir des grands cabinets américains. C’st au prix de cet effort qu’ils redeviendront ce qu’ils n’auraient jamais dû cesser d’être, d’authentiques responsables politiques. A l’heure où nous terminons ce livre, alors que la campagne présidentielle bat son plein, les consultants sont déjà à la manœuvre. Frédéric Lemoine – huit ans chez Capgemini puis chez McKinsey – s’est vu charger par Valérie Pécresse de penser son programme. Et c’est à une autre ancienne de McKinsey, Marguerite Cazeneuve, qu’Emmanuel Macron a confié le soin de réfléchir à sa future réforme des retraites. Cela pose une question cruciale ! qui décide de notre avenir et du périmètre d’action de notre État ? »

PROCHE ORIENT

L’apartheid d’Israël contre les Palestiniens : un système cruel de domination et un crime contre l’humanité

L’apartheid d’Israël contre les Palestiniens : un système cruel de domination et un crime contre l’humanité.

Les-crises.fr

https://www.les-crises.fr/l-apartheid-d-israel-contre-les...

RUSSIE

L’eau. L’autre enjeu de la guerre en Ukraine. Entretien avec Franck Galland

L’eau potable, comme la question des vivres, est un sujet primordial, bien que souvent négligé dans l’analyse des conflits armés. Cette ressource qui nous paraît si abondante et facile d’accès dans le monde occidental n’est pas une réalité pour tous. Ce sont des défis auxquels les stratèges Russes comme Ukrainiens vont devoir résoudre tout au long de cette guerre. Décryptage avec Franck Galland, spécialiste des questions sécuritaires liées aux ressources en eau.

Revueconflits.com

https://www.revueconflits.com/franck-galland-guerre-eau-u...

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SANTÉ/MENSONGES/LIBERTÉ

Pendant que l’Ukraine flambe, le puçage des populations continue

On ne sait pas comment s’achèvera le triste cirque ukrainien, mais rien ne semble vouloir arrêter l’asservissement des peuples. On détourne notre attention avec l’incohérence crasse maintenant habituelle (on veut la liberté des Ukrainiens mais on est farouchement contre celle des Français, non vaccinés, pas assez pucés-passés-QRCodisé, par exemple), mais c’est malheureusement pour mieux laisser toutes les autorités occidentales fabriquer nos propres chaînes, placer nos propres barreaux à la prison que nous nous construisons avec application.

Contrepoints.org

https://www.contrepoints.org/2022/03/04/422593-pendant-qu...

samedi, 05 mars 2022

Comment les sanctions accélèrent le Reset et la débâcle occidentale

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Comment les sanctions accélèrent le Reset et la débâcle occidentale

par Nicolas Bonnal

J’ai demandé récemment si on vivait le Grand Reset ou simplement le grand épisode apocalyptique occidental : fin des énergies fossiles, fin de l’ère industrielle et bon écroulement de la cité Potemkine euro-américaine bâtie sur une montagne de dettes. La guerre de Poutine accélère cette formidable déglingue que certains ont prophétisé. Et comme il m’arrive d’être optimiste, je dirais qu’il semble difficile d’établir une dictature totalitaire et numérique dans le cadre d’un effondrement énergétique et systémique. On le peut après une guerre civile mais je ne vois pas nos brillantes élites la gagner cette guerre.

Le litre d’essence est à 2.13 euros, les 1000 m3 de gaz à 2500 dollars. On n’est qu’au début. Dirigé par des Trudeau, des Macron et des Biden, l’Occident est mal parti. Militairement il est nul (voyez mon texte sur Buchanan) et cela se savait en haut lieu. Cela se sait en tout lieu maintenant. Même Zelenski le dit ! Il n’avait pas vu la défaite face à l’Iran, la défaite au Yémen, en Syrie et leur retraite de ‘roussie’ en Afghanistan ? Bureaucratie odieuse destinée à plumer le contribuable l’OTAN n’est pas là pour se battre : tout au plus peut-il par son incompétence et sa chutzpah déclencher la Fin du Monde.

Restent la chasse aux chefs d’orchestre et la guerre hybride – qui n’est pas très brillante intellectuellement  (souvenez-vous des frites rebaptisées  Freedom fries pendant la très utile et morale guerre contre l’Irak). Patrick Armstrong repris par Bruno Bertez écrit à ce sujet :

« Pour l’Occident, tel qu’il a été, c’est fini. La confusion, les conneries, la vantardise, l’hystérie, les interdictions : l’Occident n’a plus rien dans sa besace. Verser de la vodka russe dans les toilettes, virer un chanteur et réalisateur, changer le nom d’une boisson ou d’une salade, interdire les chats ou les arbres, sanctionner un ploutocrate russe et voler son yacht, porter un t-shirt bleu et jaune. Pathétique. »

Il reste les sanctions, les goulues et jouissives sanctions, les érotomanes sanctions ; qui vont nous faire encore plus mal qu’à la Russie. Pourquoi ? « Les Occidentaux ne se tirent plus de balles dans le pied mais dans la tête » disait Charles Gave à Bercoff.  On rappellera que nous vivons dans une idiocratie et ce dans tous les pays occidentaux. Pepe Escobar écrit lui sur notre présent effondrement industriel :

 « …L'Allemagne et d'autres pays n'ont pas commencé à ressentir la douleur de la privation de gaz, de minéraux et de nourriture. CELA va être le vrai jeu…jusqu'à 60 % des industries manufacturières allemandes et 70 % des industries italiennes pourraient être contraintes de fermer définitivement, avec des conséquences sociales catastrophiques. La machine européenne ultra-kafkaïenne non élue à Bruxelles a choisi de commettre un triple hara-kiri en se présentant comme des vassaux abjects de l'Empire, en détruisant toutes les impulsions de souveraineté française et allemande restantes et en imposant l'aliénation de la Russie et de la Chine. »

L’Occident anglo-saxon en est réduit comme à ses débuts (cf. Keynes) à la piraterie (on vole l’or, l’argent, les yachts, tout ce qui traîne).

Mais Patrick Armstrong ajoute :

« Le judo consiste à tromper et à utiliser la force de l’adversaire contre lui. Poutine, le judoka, a poussé l’Occident au suicide. Il a dévoilé ce qui n’était pas compris : Mettez votre argent dans nos banques, nous pouvons le confisquer ; placez vos actifs sur notre territoire, nous pouvons les voler ; utiliser notre argent et nous pouvons l’annuler ; mettez votre yacht dans notre port, nous pouvons le pirater; Mettez votre or dans notre coffre, nous pouvons le saisir. »

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Les conséquences sont claires avec la méfiance de tous les pays émergents (c’est le retour de Bandoeng ou du communisme nationaliste de décolonisation) et fin rapide du SWIFT :

« C’est une leçon qui retentira dans le monde entier. Une illustration nue que « l’ordre international fondé sur des règles » est simplement une fiction: nous élaborons les règles et vous ordonnons de leur obéir. Dans 2 ou 3 semaines, tout le monde dans le monde qui est sur la liste des cibles potentielles de l’Occident aura déplacé ses actifs hors de portée de l’Occident. Xi se permettra un petit sourire. »

Et Armstrong de conclure :

« Quant aux sanctions occidentales contre la Russie, je pense qu’il y a une réponse très simple à cela : la semaine dernière, 1000 mètres cubes de gaz coûtaient 1000 $ ; aujourd’hui , c’est plus du double. La semaine prochaine, ce ne sera certainement pas moins cher. 

Idem pour l’aluminium, la potasse, le titane, le blé. Les compagnies aériennes russes louent leurs avions. Maintenant quoi? Les moteurs-fusées sont russes. Ce que les Occidentaux ne comprennent pas, c’est que le rouble est la monnaie que les Russes utilisent à l’intérieur du pays, mais que le prix du pétrole et du gaz est la monnaie russe à l’extérieur du pays. Je suis stupéfait de la stupidité : ils se coupent la gorge et détruisent leurs propres économies. »

Autrement dit pour nos énarques à la Trissotin : les sanctions ne renforcent pas les Russes ; elles les enrichissent. Et Poutine finance ainsi ses opérations. Les menaces démentes de Biden contre l’Inde et le reste du monde ne risquent pas d’accroître la confiance dans ce système américain qui peut à tout moment voler sa clientèle.

Comme on le sait, les Russes ont des problèmes avec leurs banques, avec Apple, avec Facebook, avec Google, les GAFAM étant la dernière émanation impériale destinée à nous tourmenter plus que les Russes ou les Chinois. Mais rien qui ne puisse être réglé promptement (voir l’article de Karine Bechet-Golovko à ce sujet), et celui de Pepe Escobar sur la doctrine Glaziev (couper les ponts avec l’Occident, et passer à l’étalon-or).

Il reste à ces élites mondialistes à se venger sur leur troupeau, ce qui semble facile vu le degré de soumission ou de conditionnement de ces populations accoutumées à être conditionnées et maltraitées. On pourrait avoir la confiscation de l’argent, la fin du gaz et de toute électricité, la fin des usines (déjà arrêtées en Allemagne), bref le Grand Reset de Schwab ou le plan Morgenthau, le célèbre banquier de Roosevelt qui voulait réduire de moitié la population allemande.

Sources :

https://thesaker.is/how-russia-will-counterpunch-the-u-s-...

https://brunobertez.com/2022/03/04/russia-observer-tactiq...

https://brunobertez.com/2022/03/03/larme-de-lor-le-verita...

https://russiepolitics.blogspot.com/2022/03/premiere-vict...

https://reseauinternational.net/buchanan-et-le-grand-effo...

https://reseauinternational.net/du-grand-reset-a-la-grand...

https://reseauinternational.net/guerre-du-gaz-leurope-pre...

vendredi, 04 mars 2022

Le général de la Bundeswehr Gerd Schultze-Rhonhof : "Le président Poutine a tiré le frein d'urgence"

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Le général de la Bundeswehr Gerd Schultze-Rhonhof: "Le président Poutine a tiré le frein d'urgence"

L'auteur et ancien général de la Bundeswehr Gerd Schultze-Rhonhof revient sur les causes du conflit ukrainien et les rôles honteux joués par les puissances impliquées

propos recueillis par le Dr. Bernhard Tomaschitz

Source: https://zurzeit.at/index.php/praesident-putin-hat-die-notbremse-gezogen/

Votre livre sur le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale s'intitule "La guerre qui avait plusieurs pères". Combien de pères la guerre ou le conflit en Ukraine ont-ils ?

Schultze-Rhonhof : Il s'agit de huit États et alliances d'États, à savoir l'Allemagne et la France en tant qu'avertisseurs et médiateurs infructueux, les États-Unis, l'OTAN et l'UE en tant que faux jetons dans le jeu et la Russie, l'Ukraine et les oblasts de Donetsk et de Lougansk, soit ceux qui ont joué avec le feu.

Je voudrais ajouter une chose : tout ce désastre a commencé par un événement heureux, la réunification allemande. Une partie du prix à payer a été la promesse faite par le secrétaire d'État américain Baker à M. Gorbatchev, le 8 février 1990, que "l'OTAN n'avancerait pas d'un pouce vers l'Est". Cette promesse a été confirmée le 17 mai 1990 par le secrétaire général allemand de l'OTAN, M. Wörner, puis à nouveau par notre ministre des Affaires étrangères, M. Genscher, en présence de M. Baker. Cette dernière assurance est encore visible aujourd'hui sur Internet sous la forme d'un petit film visionnable sur Youtube. Ce prix pour la réunification n'a jamais été payé. Aujourd'hui, Poutine en a fait les frais.

Gerd Schultze-Rhonhof, né en 1939 à Weimar, marié, trois filles, soldat de 1959 à 1996, en dernier lieu commandant de division et commandant militaire dans la région militaire de Basse-Saxe. Retraité, il est l'auteur de plusieurs livres sur les prolégomènes de la Seconde Guerre mondiale.

A l'époque, dans les années 90, la situation géopolitique était très différente. L'Union soviétique s'était effondrée. La Russie était faible et devait faire face à de nombreux problèmes internes. Aujourd'hui, la Russie est un pays sûr de lui. Les Américains ont-ils sous-estimé cette situation et pensé qu'ils pourraient continuer comme avant ?

Schultze-Rhonhof : Les Américains ont toujours une énorme longueur d'avance sur les Russes. Ils ont probablement cru qu'ils pouvaient se permettre de ne pas tenir leur promesse. Dans le cas du souhait des Ukrainiens de rejoindre l'OTAN et de la sécession des deux oblasts à majorité russe, ils ont en outre invoqué et compté sur un principe qu'ils ont eux-mêmes bafoué sans scrupule à de nombreuses reprises en Amérique du Sud et au Proche-Orient : l'intégrité territoriale d'autres États.

Puisque vous évoquez l'intégrité territoriale : Un autre principe du droit international qui fait partie de l'intégrité territoriale est la non-ingérence dans les affaires intérieures d'autres États. Or, il semblerait que les États-Unis aient joué un rôle important dans le coup d'État de Maidan en 2014.

Schultze-Rhonhof : C'était et cela reste toujours un événement opaque. Il est tout à fait possible que les Américains aient eu leur mot à dire dans le coup d'Etat de Maidan - peut-être aussi les Anglais - afin d'alimenter la révolution contre le président de l'époque, Ianoukovitch. Entre-temps, certains tireurs d'élite étrangers ont déclaré avoir tiré sur les manifestants et les policiers depuis les toits autour de la place Maidan, attisant ainsi la colère des parties en présence. A l'époque, à partir de 2014, j'ai souvent noté des chiffres dans les médias sur les détachements d'étrangers en Ukraine, par exemple 150 mercenaires de la société militaire privée américaine Greystone portant des uniformes ukrainiens, puis 400 mercenaires de la société de services militaires américaine Academy (anciennement Blackwater, ndlr). Une autre fois, il s'agissait de 75 instructeurs militaires britanniques. Les États qui envoient des mercenaires peuvent toujours dire qu'ils n'ont pas utilisé de militaires, et ils n'ont alors pas besoin de se justifier pour les violations du droit de la guerre commises par leurs mercenaires.

    En Ukraine, les intérêts nationaux des États-Unis se conjuguent avec les intérêts financiers de la famille Biden.

Pourquoi les Etats-Unis font-ils une telle fixation sur l'Ukraine ?

Schultze-Rhonhof : Il s'agit de la volonté d'hégémonie des États-Unis en Europe et d'intérêts économiques de grande ampleur. L'Ukraine a des ressources naturelles importantes et c'est un marché d'exportation considérable. Pensez à la Treuhand qui a liquidé l'économie de la "RDA" en Allemagne. À l'époque, des étrangers fortunés pouvaient racheter des sociétés et des entreprises à des prix défiant toute concurrence. C'est ce qui attend aujourd'hui les étrangers disposant de moyens financiers importants en Ukraine. Le fils du président américain Biden, Hunter Biden, qui siège aujourd'hui au conseil d'administration de la plus grande entreprise gazière ukrainienne, Burisma, est un exemple de ce type de chanceux. Il reçoit un montant fixe en dollars pour chaque millier de mètres cubes de gaz naturel qui passe par les tuyaux de Burisma. Dans ce cas, les intérêts patrimoniaux de la famille Biden se combinent avec les intérêts économiques nationaux des États-Unis.

Pourquoi le conflit d'influence en Ukraine a-t-il pris une telle ampleur, au point de dégénérer en guerre ?

Schultze-Rhonhof : Cela a été une longue évolution, à commencer par la réunification allemande et l'effondrement de l'Union soviétique. En 1990, la réunification avait été acceptée parce que les Américains avaient soi-disant renoncé à tout élargissement de l'OTAN vers l'Est. Cet engagement n'a pas été respecté. En 2001, Poutine a proposé une zone de libre-échange paneuropéenne incluant la Russie. Cette proposition a été rejetée. En 2007, lors de la conférence sur la sécurité de Munich, Poutine a qualifié un nouvel élargissement à l'Est sur le territoire de l'ancienne Union soviétique de "franchissement d'une ligne rouge". Il n'a pas été pris au sérieux. En 2008, les États-Unis ont demandé l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, ce qui a échoué en raison du veto de la France et de l'Allemagne, ce pourquoi nous les remercions.

Jusque-là, tout s'est déroulé pacifiquement.

Schultze-Rhonhof : Cela a continué. En 2013, l'UE a proposé à l'Ukraine un accord d'association et en 2014, le nouveau président Porochenko, orienté vers l'Occident, a exprimé le souhait que l'Ukraine rejoigne l'OTAN. La sonnette d'alarme a alors retenti au Kremlin. Il était clair pour Poutine qu'après l'UE, l'OTAN et, avec elle, les Américains s'installeraient en Crimée et que la marine américaine prendrait le contrôle du port de guerre russe de Sébastopol si cela devait se produire. Il en a tiré les conclusions et a annexé la péninsule de Crimée, dont la population est majoritairement russe. La population de Crimée avait d'ailleurs déjà choisi de rester dans le giron russe à 93% lors de l'indépendance de l'Ukraine en 1991, suite à un référendum.

Peu après la prise de contrôle de la Crimée par la Russie, les deux oblasts de Lougansk et de Donetsk, majoritairement peuplés de Russes, ont également souhaité se séparer de l'Ukraine. Ils ont déclaré leur indépendance, ce qui a entraîné une guerre civile dans l'est de l'Ukraine, qui dure depuis huit ans. Grâce à la médiation de la France et de l'Allemagne, les accords de Minsk ont été conclus en 2015 entre l'Ukraine et la Russie, la puissance protectrice des deux oblasts sécessionnistes. Cet accord prévoyait un cessez-le-feu et une loi sur le statut spécial de Lougansk et de Donetsk au sein de l'Ukraine. Au lieu de cela, le gouvernement de Kiev a promulgué en 2018 une "loi de réintégration" pour les deux oblasts, interdisant toute négociation avec eux et l'utilisation de leur langue maternelle russe dans les écoles. La guerre civile s'est poursuivie sans relâche dans l'est de l'Ukraine. Poutine a vu à la fois la souffrance de la population dans la zone de guerre et la réticence du gouvernement de Kiev à honorer les accords de Minsk en accordant une autonomie partielle à Lougansk et au Donetsk, et il a observé les pressions constantes de Kiev pour être admis dans l'OTAN. Selon Poutine, un grand Etat membre de l'OTAN situé directement à la frontière russe était et reste incompatible avec les intérêts vitaux de la Russie en matière de sécurité. Il a donc ordonné un déploiement de troupes comme menace aux frontières avec l'Ukraine et a demandé à deux reprises au président américain, en décembre 2021, de renoncer de manière permanente à l'admission de l'Ukraine dans l'OTAN. Deux fois cela lui a été refusé. Une fois de plus, Poutine en a tiré ses conclusions.

Voyez-vous un risque que ce conflit se transforme en un incendie généralisé ?

Schultze-Rhonhof : Je ne nie pas ce risque, mais je pense que c'est peu probable. Si la Russie contraint l'Ukraine à accepter une quelconque relation de dépendance, elle aura déjà un énorme problème sur les bras. Mais la Russie ne peut pas se permettre de s'engager dans une guerre contre l'OTAN. Je pense que Poutine est un calculateur froid. Il ne le fera pas. Poutine a toujours demandé que deux choses soient mises au point: premièrement, que l'Ukraine ne soit pas admise dans l'OTAN et, deuxièmement, que le Donbass soit apaisé avec la fin de la guerre civile qui y sévit. Dans quelques semaines, il aura obtenu les deux.

    S'engager dans une guerre avec l'OTAN serait trop difficile pour la Russie. Poutine ne le fera pas.

Il est frappant de constater que l'Union européenne ne fait que répéter ce que disent les États-Unis. N'est-ce pas inquiétant, car le conflit ukrainien concerne aussi et surtout la sécurité de l'Europe ?

Schultze-Rhonhof : L'UE est à cet égard un chien de garde sans dents. Elle n'a joué aucun rôle dans cette crise et n'a donné aucune impulsion. Les seules impulsions positives de l'Europe sont venues de la France et de l'Allemagne avec les deux conférences de Minsk. Pour le reste, la Commission européenne n'a rien trouvé d'autre expédient que des menaces de sanctions qui, une fois de plus, coûteront très cher à la population européenne. S'il y avait eu un seul homme d'État doté d'un sens stratégique et de la persévérance nécessaire au quartier général de l'OTAN ou à la Commission européenne, l'Ukraine aurait été finlandisée à temps, c'est-à-dire déclarée neutre par traité, comme l'étaient autrefois la Suisse, l'Autriche et la Finlande.

Les médias disent maintenant "c'est la guerre de Poutine". Vous êtes d'accord ?

Schultze-Rhonhof : Cela ressemble à un blâme unilatéral qui, exprimé de manière aussi péremptoire, ne reflète nullement la vérité. En tant qu'auteur du livre "1939 - La guerre qui eut plusieurs pères", je pense que la responsabilité d'une guerre n'incombe pas seulement à celui qui l'a commencée, mais aussi à celui qui a contribué à la provoquer auparavant.

L'entretien a été mené par Bernhard Tomaschitz.

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Le grand dessein de la Moscovie post-soviétique et les prémisses culturelles du poutinisme

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L'Ukraine, un Non-Etat ? La Russie, une succession d’Empires ? La démocratie, un ennemi mortel de l’Etat russe ?

Le grand dessein de la Moscovie post-soviétique et les prémisses culturelles du poutinisme

Irnerio Seminatore

Depuis la guerre de Tchéchénie et celle de Géorgie, les théories sur l'empire ont cessées d'être marginales dans l'historiographie de la Russie post-soviétique

Elles constituent en revanche le terreau culturel des "silovikis", les anciens du KGB, devenus les décideurs de l'Etat actuel. Ces conceptions se résument à un cadre conceptuel selon lequel l'Etat russe est un Etat-civilisation et l'histoire de la Russie, depuis l'époque païenne, est une succession d'empires, ceux de Kiev-Novgorod, de la Moscovie, des Romanov et de Staline, pour lesquels la démocratie et le libre débat sont des ennemis mortels (Prokhanov).

A la base de l'invasion de l'Ukraine il y a l'idée que la liberté mène à l'anarchie et aux coups d'Etats (Maïdan) et que ceux-ci conduisent, par l'intervention de l'étranger (hégémon ,Otan, UE), au démembrement de l'Etat russe et à une menace vitale pour son existence (missiles rapprochés) .

La réévaluation de Staline et de son génie, fut celle d'avoir sauvé l'Etat, par remise en selle de l'autocratie, contre la folie démocratique généralisée, imputée aux bolchéviques, coupables d'avoir établi un pouvoir collégial au sommet de l'Etat.

Le "poutinisme", dans un contexte marqué par ce révisionnisme post-soviétique, est une lecture de la réalité internationale dans laquelle l'Ukraine est un non-Etat et un bras armé de l'étranger et ce dernier se rapproche sournoisement par vagues successives (par les élargissements de l'Otan), dans le but d'anéantir la Russie.

Dans ce cadre, l'Europe occidentale, impuissante, puisque subalterne de l'Amérique, ne peut apporter de solutions à la fissuration induite par l'Occident, à cause de l'inexistence d'une politique étrangère autonome et par la dissociation de l'unité indispensable (Raymond Aron) du "verbe diplomatique et de l'action militaire".

Dissociation qui conduit tout droit à un pouvoir désarmé (Macron) et à une politique internationale posée comme "politique des valeurs" (UE).

Dans une situation internationale où la position des Etats ne correspond plus aux principes juridiques de l'indépendance et de la souveraineté, en raison surtout des nouveaux systèmes d'armes et, du point de vue du système international, en raison de l'existence d'alliances intégratives à vocation régionale, la mutation des régimes politiques ne peut conduire au revirement des alliances et des engagements de sécurité que si elle est suscitée ou soutenue de l'extérieur par le leader du système (les Etats-Unis d'Amérique). Tel est le cas de l'Ukraine.

Dans de pareilles situations les jeux d'influences sont démultipliés et les politiques d'aide, d'amitié et de coopération recouvrent  en réalité des projets stratégiques de déstabilisation (des différents types de révolution de couleur et des interventions diverses, ouvertes ou sournoises)

Or, sur la scène mondiale, la communauté internationale représente idéologiquement le pendant des Etats, qui ne sont jamais complètement autonomes. En sa forme et en sa structure, la communauté internationale (onusienne et multilatéraliste), à la recherche d'un ordre stable, se plie à la cohérence du système hégémonisé par le pouvoir dominant (l'Amérique), donc "la compétition s'organise en fonction du conflit" (Raymond Aron).

Ainsi le noyau et le centre de rassemblement d'autres Etats, comme lieu de compétition entre hégémonies, américaines et russes, devient non seulement l'Ukraine, mais l'espace occidental tout entier, le "Rimland" européen (Europe de l'Ouest et de l'Est). L'enjeu n'est plus seulement régional, mais mondial; pire, multipolaire et systémique.

Or le pari historique pris par la Russie avec l'invasion de l'Ukraine, lui impose de ne pas subir une défaite, car elle perdrait alors, non seulement vis à vis de l'Occident, mais du monde entier et, en particulier, de l'Orient chinois et serait déclassée dans la hiérarchie de la "Triade" et des puissances du système international dans son ensemble.

Dans cette hypothèse et en termes de pur pouvoir politique, imposé par l'issue du conflit, Poutine et le poutinisme sortiraient de l'histoire et laisseraient la place à l'Empire du milieu renaissant.

Selon des observateurs désenchantés, par son invasion de l'Ukraine, la Russie ferait davantage, pour l'unité de l'Europe et de l'Union Européenne , en termes de blâmes et d'acrimonie anti-américaine, que la multiplicité des Sommets et des déclarations multilatéralistes des institutions "démocratiques". Des manifestations de rues, en rajouteraient, aussi bien à l'intérieur de la Russie, qu'à l'extérieur.

Assisterions nous ainsi, avec "l'opération spéciale" lancé contre un pays-frère mais asservis à Hégémon, à la renaissance de la "Doctrine Medvedev" sur la sécurité européenne de 2008 à Berlin, visant à faire contrepoids à l'Otan, dans un espace eurasien intégré, à l'image du vieux Pacte de Varsovie défunt?

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Cela serait alors le "début véritable de reconstitution de l'Union Russe, c'est à dire de l'Etat civilisationnel, qui à différentes périodes de son histoire, s'est appelé grande principauté de Moscou, royaume de Moscou, empire de Russie et Union Soviétique"? Comme l’a rappelé Poutine à la Conférence de Munich en 2007 (photo, ci-dessus), les bases d'un rassemblement anti-hégémonique, porté par le vent de l'histoire, étaient déjà là, mais devaient encore être coordonnés et démultipliés, composés de plusieurs axes fondamentaux, idéologique, diplomatico-stratégique et militaire".

Axe idéologique, car l'Occident aurait perdu le leadership intellectuel et moral. Axe diplomatico -stratégique, car la puissance américaine est un obstacle au plein épanouissement des potentialités eurasiennes du continent, rapprochant l'Est et l'Ouest. Axe militaire, puisque "le parapluie américain sur l'Europe se serait effondré". Puisque "l'Atlantisme a vécu, selon Medvedev, nous devons parler d'unité au sein de tout l'espace euro-atlantique de Vancouver à Vladivostok(2008)", mais au nom "des intérêts nationaux" et non des alliances ou des blocs. Au cas où cette proposition aurait été acceptée, la "solidarité européenne » aurait volé en éclat et la Russie se serait retrouvée au coeur du dispositif de sécurité européen, en symétrie du pouvoir chinois dans l'Asie-Pacifique.

Plus d'un chef d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne pense aujourd'hui que l'opération spéciale consistant à décapiter politiquement l'Ukraine, vise ce même objectif, bien que les Européens portent une partie des responsabilité pour ne pas avoir entendu ni satisfait les revendications de sécurité de la Russie, depuis l'effondrement de l'Urss. Ainsi, derrière la crise de l'Ukraine, le test de la sécurité européenne a pour objectif la relation entre la Russie et l'Allemagne et de façon plus large, le bras de fer mondial entre le multilatéralisme occidental et le multipolarisme eurasiatique, autrement dit la forme de gouvernement démocratique et la forme autocratique.

Bruxelles le 27 février 2022

Les enjeux de la guerre en Ukraine. Une perspective métaphysique

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Les enjeux de la guerre en Ukraine. Une perspective métaphysique

Avec le lancement de la vaste opération militaire russe sur le territoire ukrainien, le monde entier est entré dans une phase décisive de son histoire. Et en gardant à l’esprit que l’histoire n’est pas un déroulement mécanique, implacable et fataliste d’événements sans aucune sens, restant ouverte à une infinité d’options et de probabilités, déterminées par la volonté divine, la fin de cette bataille majeure est incertaine.

Toute l’humanité semble saisie par le tourbillon d’éléments d’une force irrésistible, par la puissance aveugle de contradictions insurmontables, dont la libération ne peut avoir d’autre issue que celle d’une lutte à mort entre deux mondes, entre deux visions de la vie. Cet affrontement planétaire ne semble pas laisser place à une fin où les deux parties s’entendraient sur un compromis. Chacun des belligérants aspire à l’anéantissement définitif de l’ennemi.

Derrière le plan étroit des deux camps belligérants se cachent deux visions antagonistes et diamétralement opposées du monde et de la vie. C’est un choc majeur de civilisations radicalement différentes, qui ne peut s’affirmer que par contraste au modèle opposé. Au cœur de cette bataille irréconciliable se trouvent deux modèles civilisationnels. En fait, deux civilisations qui diffèrent de façon frappante.

Voici donc le profil identitaire des ces deux mondes d’un point de vue métaphysique.

• la civilisation tellurocratique versus la civilisation thalassocratique;
• la civilisation de la Terre contre la civilisation de la Mer;
• la civilisation continentale versus la civilisation océanique;
• la civilisation de la clarté céleste versus la civilisation de l’obscurité marine;
• la civilisation stable versus la civilisation versatile;
• la civilisation verticale versus la civilisation horizontale;
• la civilisation de la Tradition versus la civilisation de la Modernité;
• la civilisation de la croix versus la civilisation usuraire;
• la civilisation du salut contre la civilisation de la perdition;
• la civilisation solaire versus la civilisation sélénaire;
• la civilisation de l’amour contre la civilisation de la haine;
• la civilisation du transcendant contre la civilisation de l’immanent;
• la civilisation de l’esprit versus civilisation de la matière;
• la civilisation de la masculinité versus la civilisation du féminisme gynécocratique;
• la civilisation religieuse versus civilisation païenne;
• la civilisation du sacré versus la civilisation du profane;
• la civilisation du mysticisme contre la civilisation du gnosticisme;
• civilisation colombienne versus civilisation reptilienne;
• la civilisation créationniste versus la civilisation évolutionniste;
• la civilisation du christocentrisme versus la civilisation de l’anthropocentrisme;
• la civilisation organique versus civilisation nihiliste;
• civilisation naturelle versus civilisation mécaniciste;
• la civilisation de la foi versus la civilisation du scientisme;
• la civilisation des lentes transformations versus la civilisation des ruptures révolutionnaires;
• la civilisation lumineuse de l’esprit contre la civilisation terne de la matière;
• la civilisation de la vie contre la civilisation de la mort;
• la civilisation du don versus la civilisation de l’argent;
• civilisation contemplative versus civilisation utilitaire;
• la civilisation de l’honneur contre la civilisation de l’intérêt;
• la civilisation de l’esprit de sacrifice versus la civilisation hédoniste;
• la civilisation des héros contre la civilisation des marchands;
• la civilisation des saints contre la civilisation des idoles;
• la civilisation du culte du travail versus la civilisation du profit parasitaire;
• la civilisation rurale versus la civilisation urbaine;
• la civilisation de la modération contre la civilisation de l’abondance;
• la civilisation du naturel versus la civilisation technocratique;
• la civilisation de l’harmonie versus la civilisation du chaos;
• la civilisation du beauté versus la civilisation de l’abominable;
• la civilisation de la famille contre la civilisation de la perversion sexuelle;
• la civilisation de la fidélité versus la civilisation de la promiscuité ;
• la civilisation de la morale contre la civilisation de la dépravation;
• la civilisation de la fertilité contre la civilisation de la stérilité;
• la civilisation du sens versus la civilisation de l’absurde;
• la civilisation de la décence contre la civilisation de l’indécence;
• la civilisation du génie humain versus la civilisation de l’intelligence artificielle;
• la civilisation de l’homme contre la civilisation du transhumanisme.

Cette bataille n’est donc pas entre deux pays, mais entre deux manières de vivre et d’interpréter la vie. Et dans ce cas, il importe moins que tous ceux qui sont du côté de la Russie sont conscients ou non de sa mission civilisationnelle. Il ne pouvait en être autrement puisque ce pays doté d’une mission historique majeure a subi deux énormes chocs civilisationnels: l’expérimentation communiste et l’expérimentation libérale. Mais malgré ces traumatismes historiques, les archétypes ancestraux, la dot spirituelle byzantine, les codes culturels continentaux ont été préservés dans les profondeurs de l’inconscient collectif. Au-delà des traumatismes historiques, de l’ankylose et des tics idéologiques obsolètes, se cache la vigueur régénératrice d’une nation qui n’a pas abandonné sa vocation à faire l’histoire et à perdurer dans le temps.

La lutte convulsive de toute l’humanité comme au bord d’une mort inexorable a commencé il y a deux ans, avec le lancement de la phase finale de la conspiration occulte visant la dépopulation de la planète. Rien ne semblait pouvoir renverser le cours des événements. Mais cette guerre pourra-t-elle désormais arrêter le génocide mondial et mettre fin aux tueries de masse par injection, ou ne fera-t-elle qu’accélérer la fin implacable de la civilisation humaine?

Nos prières s’adressent à notre bon Dieu pour permettre la victoire des forces de la lumière et nous donner un peu plus de temps pour vivre. Face à la mort imminente, nous sommes toujours dans une crise de temps pour nous repentir.

Notre espoir est que la tragédie sanglante de la guerre en Ukraine ne précipitera pas la fin du monde, mais seulement la fin de ce monde déchu, qui sera suivie d’un nouveau commencement.

P.S.: Et ceux qui hésitent encore, ne sachant à quel côté de la ligne de front adresser leur sympathie, il serait bon de ne retenir que quelques figures monstrueuses qui sont dans le camp des pacifistes antirusses: le prédateur financier et oligarque sordide George Soros, la super-star satanique Madonna et Marina Abramović, célèbre pour ses improvisations artistiques sinistres avec des rituels sataniques du cannibalisme, des assassinats de bébés, des perversions sexuelles, etc., cette personne démoniaque étant étroitement liée au clan Iluminati Rothschild.

Toute l’armée de mercenaires du monde entier, qui a rejoint il y a deux ans l’arnaque du Covid-19, arborant leurs masques de protection et nous appelant à l’injection, arbore désormais déjà un autre masque, celui des amoureux de la paix et en même temps d’alliés des guerriers de Kiev. Derrière ces masques se cache le rictus hideux des forces mondialistes maléfiques.

Iurie Roşca
04.03.2022

Finlandisation de l'Ukraine ? - Deux points de vue de l'Autriche neutre

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Finlandisation de l'Ukraine ?

Deux points de vue de l'Autriche neutre

Erich Körner-Lakatos & Bernhard Tomaschitz

Source : https://zurzeit.at/index.php/ploetzlich-ist-fuer-selenskij-eine-neutralitaet-der-ukraine-denkbar/ & https://zurzeit.at/index.php/kommt-es-zur-finnlandisierung-der-ukraine/


Va-t-on vers une finlandisation de l'Ukraine?

Erich Körner-Lakatos

Neutralité et renonciation à l'adhésion à l'OTAN : une alternative envisageable

Au vu de la situation en Ukraine, on parle ces derniers jours de la possibilité que le pays situé sur le Dniepr renonce à l'avenir à adhérer à l'OTAN et devienne un Etat durablement neutre. Des signes en ce sens sont même apparus dans la bouche du président Volodymyr Zelenski (soit dit en passant, le prénom Volodymyr signifie Vladimir ; Zelenski et son adversaire Poutine partagent donc au moins le même prénom). Avant cela, Emmanuel Macron avait déjà évoqué le terme de finlandisation, car la Finlande et l'Ukraine sont tout à fait comparables d'un point de vue géographique : les deux pays ont une longue frontière avec leur voisin oriental, la Russie, qui est militairement surpuissante.

En d'autres termes, la finlandisation signifie que le petit voisin ne peut affirmer son indépendance limitée que si sa neutralité présente une caractéristique particulière, à savoir un déséquilibre en faveur de la Russie. Un autre parallèle saute aux yeux : la Finlande et l'Ukraine ont longtemps fait partie de la Russie des Tsars, l'Ukraine en sa totalité en fit même partie après le pays nordique, et, dans ses frontières actuelles pendant la seule période de domination communiste. Les deux pays n'ont pu obtenir leur indépendance étatique que pendant une période de faiblesse de la Russie.

Pour comprendre ce que signifie la finlandisation pour la future Ukraine, il est nécessaire de se pencher sur l'histoire de la Finlande pendant qu'a germé le processus qui a donné, in fine, cette forme particulière de neutralité.

Comme on le sait, la Finlande faisait partie de la sphère d'intérêt soviétique en vertu du protocole additionnel secret du pacte Molotov-Ribbentrop signé en août 1939. C'est pourquoi les troupes soviétiques ont envahi les trois États baltes, l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie, sans rencontrer de résistance. Il en fut autrement en Finlande : pendant la guerre dite de l'hiver 1939/40, l'armée finlandaise, relativement petite, remporte des succès défensifs et met à mal l'Armée rouge, affaiblie par les purges de Staline. Ce n'est qu'au bout de six mois que la supériorité de Moscou se fait sentir et qu'Helsinki doit demander un armistice et subir des pertes territoriales, tout en étant épargnée par l'occupation.

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La situation est similaire après la guerre dite "de Continuation" qui rangea la Finlande du côté allemand dans le cadre de l'entreprise Barbarossa. En 1944, la Finlande n'est pas non plus occupée, mais commence alors une période qui durera jusqu'à l'effondrement de l'Union soviétique et qui est connue sous le nom de finlandisation, c'est-à-dire de prise en compte particulière des sentiments et des souhaits de Moscou.

Sous les présidences de Juho Paasikivi (1946-1956) et d'Urho Kekkonen (1956-1981), la Finlande a plutôt le statut de vassal de l'Union soviétique, du moins en politique étrangère. Kekkonen, qui appartient au parti paysan du centre et gouverne de manière presque dictatoriale, fait participer les communistes finlandais au gouvernement. On murmure même que Kekkonen a travaillé pendant des années pour les services secrets soviétiques, le KGB.

L'obéissance anticipée d'Helsinki est frappante. Lorsque la télévision suédoise diffuse un film basé sur la nouvelle d'Alexandre Soljenitsyne Un jour dans la vie d'Ivan Denissovitch, la Finlande coupe les émetteurs des îles Åland (un groupe d'îles dans le golfe de Botnie entre la Suède et la Finlande) parce que le bureau de la censure d'Helsinki interdit le film car il est considéré comme hostile aux Soviétiques. Le roman L'Archipel du Goulag, également écrit par Soljenitsyne, ne peut pas être publié en finnois - le chef de l'État Kekkonen s'y oppose. Par crainte d'effrayer Moscou.

Les manuels scolaires ne doivent rien contenir qui puisse fâcher les amis russes (les deux pays ont signé un traité d'amitié en 1948). Même la vie culturelle est soumise à une censure sévère : les acteurs et les artistes de cabaret qui se permettent de faire de petites blagues sur le voisin de l'Est n'obtiennent plus de rôles.

Leonid Brejnev et son Politburo vieillissant se réjouissent d'autant plus des quelque mille manifestations festives organisées en Finlande en 1970. L'occasion en est le retour du centenaire de la naissance de Vladimir Ilitch Lénine, le fondateur de l'Union soviétique.

D'autre part, entre 1945 et 1979, l'économie finlandaise connaît un essor fulgurant, basé sur l'économie de marché occidentale. On se transforme pour le voisin de l'Est en une sorte d'épicerie fine, qui profite certes en premier lieu à la nomenklatura, c'est-à-dire à la classe des fonctionnaires du PC soviétique.

En ce qui concerne l'Ukraine, une neutralité à la finlandaise serait un moindre mal. D'autres scénarios - un État vassal à la manière de la Biélorussie, voire une incorporation totale dans la Fédération de Russie - ne sont probablement pas du goût des citoyens ukrainiens.

***
Soudain, la neutralité de l'Ukraine est envisageable pour Zelensky

Dr. Bernhard Tomaschitz

Un statut de neutralité aurait permis à l'Ukraine d'éviter la guerre avec la Russie

Dans le cadre de l'opération militaire lancée par la Russie en Ukraine, les troupes russes ont désormais atteint la capitale Kiev. Face au désespoir de sa propre situation, le président ukrainien Volodimir Zelensky est manifestement en train de changer d'avis.

Dans un message vidéo diffusé sur Telegram, Zelensky a déclaré qu'il était prêt à discuter d'un statut de neutralité pour l'Ukraine: "Nous n'avons pas peur de la Russie, nous n'avons pas peur de parler avec la Russie, de parler de tout : des garanties de sécurité pour notre pays et un statut de neutralité". Si l'Ukraine avait négocié plus tôt un statut de neutralité avec la Russie ou avait déclaré sa neutralité de son propre chef au lieu de se laisser entraîner dans le sillage de la politique hégémonique américaine, le pays aurait évité bien des désagréments. Notamment la guerre actuelle avec son puissant voisin de l'Est.

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En outre, Zelenskij s'est plaint de ce qu'il considère comme un manque de solidarité de la part de l'OTAN : "Nous sommes livrés à nous-mêmes. Qui est prêt à partir en guerre pour nous ? Honnêtement, je ne vois personne. Qui est prêt à donner des garanties à l'Ukraine pour qu'elle devienne membre de l'OTAN ? Franchement, tout le monde a peur".

Pour les États-Unis, l'Ukraine, qui a été réarmée et qui devait se rapprocher de l'OTAN, était un instrument important pour parfaire l'endiguement de la Russie. Mais dans la situation actuelle, les pays de l'OTAN ne sont pas prêts à envoyer des soldats dans ce pays non-membre, pour des raisons compréhensibles. En ces heures amères, l'Ukraine et son président Zelenski doivent se rendre compte qu'ils ont été des pions dans le jeu des États-Unis.

jeudi, 03 mars 2022

Géopolitique d'un échec

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Géopolitique d'un échec

par Stefano De Rosa 

Source : Italicum & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/geopolitica-di-un-fallimento

Au lieu de justifier une critique à sens unique contre la Russie, les événements de guerre en Ukraine devraient surtout interpeler l'Union européenne sur sa fonction politique, laquelle est inexistante, et sur sa subordination aux États-Unis et à l'OTAN

Au cours de l'été 2008, l'actualité internationale et la diplomatie du monde entier ont été monopolisées par la crise russo-géorgienne. Presque tous les commentateurs et décideurs politiques ont traité les événements caucasiens selon la distinction habituelle entre "bons" et "mauvais", plaçant la Géorgie, l'OTAN, les États-Unis et l'UE parmi les premiers et la Russie, l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud parmi les seconds.

L'affaire présentait des analogies avec la question du Kosovo, une région serbe à majorité albanaise qui, une décennie plus tôt, a jugé bon de se séparer de la Serbie, faisant valoir un droit fondé sur l'autodétermination des peuples et donnant naissance à une nation artificielle. Chacun se souvient de la façon dont l'Occident - avec sa logique coloniale du XIXe siècle - s'est comporté face à la réaction légitime de Belgrade qui, voulant préserver son intégrité territoriale, ne pouvait tolérer le séparatisme islamo-kosovar.

L'OTAN, composée d'États membres dans un but de défense mutuelle, a bombardé un État souverain - la Serbie - sans que cet Etat n'ait menacé l'un de ses membres. Pour la première fois, l'Alliance atlantique est intervenue dans une guerre civile sans mandat du Conseil de sécurité des Nations unies, inaugurant ainsi une nouvelle ère dans les relations internationales, dans laquelle le "droit d'ingérence" était justifié par la défense de la démocratie, des minorités et des droits de l'homme.

Un critère refusé, par exemple, aux Serbes de Bosnie (quelques années plus tôt), aux Kurdes ou au Tibet, au nom de la (prétendue) intangibilité des frontières. Cette guerre - une monstruosité juridique avalisée, de surcroît, en Italie par le gouvernement D'Alema - s'est révélée être un dangereux précédent historique, dont la légitimité a été contestée par de larges couches de l'opinion publique internationale et, de manière significative, par la Russie elle-même.

Plus de neuf ans plus tard, les camps des acteurs se sont inversés: c'est la Russie, alliée traditionnelle de la Serbie, qui a bénéficié politiquement de l'indépendance vis-à-vis de la Géorgie des deux petites républiques ethniques caucasiennes, désireuses d'entrer dans la sphère d'influence et la protection militaire du Kremlin. Pourquoi la Russie aurait-elle fait fi en 2008 du principe d'autodétermination (si cher au président Wilson en 1919) alors qu'en 1999, son exercice était garanti aux Kosovars avec la précieuse contribution de l'uranium appauvri des bombes lancées sur Belgrade ?

Cela n'a pas eu pour résultat le bombardement de Moscou par l'OTAN en 2008. De toute évidence, l'intangibilité des frontières était considérée comme un principe élastique à adapter au potentiel atomique ou au droit de veto à l'ONU du "mauvais" pays. Les récurrences de l'histoire (et parfois de la géographie) se sont répétées au cours de l'hiver 2022 en Ukraine. Les revendications des républiques autoproclamées de Donetsk et Luhansk dans le Donbass reconnues par Moscou étaient similaires à celles des républiques ethniques de Géorgie en 2008 et similaires aussi avec celles du Kosovo en 1999: les raisons invoquées étaient linguistiques, culturelles et religieuses pour justifier un détachement légitime (malgré une application intermittente du principe d'autodétermination des peuples) d'avec l'État auquel elles appartiennent.

Plutôt que de se diviser, de se demander si les craintes de la Russie sont fondées et si les raisons de son action militaire sur le territoire ukrainien sont justifiées, il serait plus constructif de se demander quelle est la fonction actuelle de l'Union européenne et si, dans cette affaire, elle n'a pas manqué une nouvelle occasion de se libérer de la protection des États-Unis, d'un point de vue énergétique et militaire, et de se différencier de l'OTAN, d'un point de vue politico-international. Une approche géopolitique à long terme pourrait peut-être offrir des éléments pour une meilleure compréhension prospective des événements et nous permettre d'échapper au joug d'une propagande narrative banalisée et à sens unique.

À cet égard, la théorie organique de l'État élaborée en 1897 par Friedrich Ratzel peut venir à la rescousse. Il considère l'entité étatique comme un organisme vivant et, en tant que tel, ayant tendance à s'étendre, à acquérir de nouveaux espaces également par le biais de fusions entre États et à lutter pour la conquête de son espace vital (le Lebensraum, l'espace géographique dont il a besoin pour vivre). Selon Ratzel, ce sont les batailles et les conflits, et non les accords, qui régissent les relations entre les États.

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À la mort de Ratzel en 1904, Sir Halford Mackinder (photo), dans un discours célèbre à Londres, a parlé du "pivot géographique de l'Histoire", le Heartland, le cœur eurasien de la Terre. Le géographe anglais a appelé cette région l'île du monde, dominée par le Heartland. Mackinder a écrit en 1919 : "Celui qui dirige l'Europe de l'Est dirige le Heartland ; celui qui dirige le Heartland dirige l'île du monde ; celui qui dirige l'île du monde dirige le monde". Il est facile d'y voir les préoccupations d'un exposant de la "thalassopolitique" dont parle Julien Freund.

La Première Guerre mondiale venait de se terminer. Pour Mackinder, il était essentiel d'empêcher une alliance entre l'Allemagne et la Russie et donc la conquête du Heartland. D'où la nécessité de créer des "États tampons" pour contrecarrer ce projet. Malgré les développements ultérieurs de la Seconde Guerre mondiale, de la Guerre froide et de l'effondrement du système soviétique, son modèle peut encore être adopté avec succès pour clarifier la dynamique d'un présent qui, autrement, serait incompréhensible.

Il ne peut y avoir de politique - pour emprunter à Carl Schmitt - que s'il existe une pluralité d'entités politiques entretenant entre elles des relations amicales ou hostiles. L'unification politique du monde poursuivie par la globalisation économique et financière conduit à une "dépolitisation totale" (Alain de Benoist). Le dilemme schmittien entre le monopole mondial d'une seule puissance (univers), d'une part, et les sphères d'intervention et les aires de civilisation (plurivers), d'autre part, est la véritable clé d'interprétation de ce qui se passe sur le flanc oriental de l'Europe.

Sans connaître l'issue, le mérite de l'initiative russe est, pour l'instant, au moins celui d'avoir remis la géographie et la politique sur le devant de la scène. Elle a également mis en évidence une saine distinction entre solide et liquide, entre fermeture et ouverture, entre identité et hybridité, entre enracinement et nomadisme, entre sentiment de limitation et omnipotence. C'est sur ces dichotomies que les chancelleries et les consciences individuelles doivent être appelées à s'exprimer. Il ne s'agit pas d'adhérer sans critique à ces visions stratégiques et culturelles ou de les partager. Ce qui est important, cependant, c'est de ne pas les négliger ou de les reléguer dans les scories contaminées de l'histoire.

 

 

Ukraine, la première guerre sociale et cybernétique de l'histoire

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Ukraine, la première guerre sociale et cybernétique de l'histoire

Francesca Salvatore

Source: https://it.insideover.com/guerra/ucraina-la-prima-guerra-social-e-cyber-della-storia.html

Une guerre étrange qui nous catapulte dans le troisième millénaire. Semblable à aucune autre, si ce n'est la peur et les rues tachées du sang des innocents. Le conflit en Ukraine est une émission en direct constante qui passe par les réseaux sociaux comme une émission en direct continue d'un reality show dystopique. Les réseaux sociaux sont remplis d'images postées par les protagonistes eux-mêmes qui, à l'aide de smartphones et de connexions précaires, se documentent, demandent de l'aide et exorcisent la peur.

Le reportage en direct rend obsolètes les reporters, les correspondants, les relais, les documents et les histoires. D'autre part, le web est un protagoniste sombre. La guerre de l'information du Kremlin va de pair avec l'escalade militaire en cours. Le flux de désinformation se poursuit depuis des mois afin de discréditer l'Ukraine en tant que pays et en tant que société. Puis il y a ceux, comme le collectif Anonymous, le réseau sans visage de "bons" geeks, qui décident de faire la guerre à Poutine en sabotant ses sites gouvernementaux. C'est comme être dans les Hunger Games, mais ce n'est "que" le début de 2022.

Un conflit sur l'air

"Papa, maman, je vous aime". La vidéo d'un jeune soldat ukrainien partant en guerre a fait le tour du monde. Un "Piero" 3.0 qui ne laisse pas derrière lui une photo en noir et blanc, immobile à côté d'un pilier, et encore moins des lettres du front qui arriveront des semaines plus tard. Il emmène son monde à la guerre avec lui, et marquera la guerre par des nouvelles de chez lui. Tant que ce téléphone émet, c'est une bonne nouvelle. Les réseaux sociaux arrivent dans les abris, tandis que les bombes déchirent le ciel et nous font passer nous aussi des "foyers chaleureux" au théâtre de la guerre. Les objectifs des téléphones portables bénis/maudits immortalisent les regards, les chars d'assaut, documentent la vie et la mort. Et c'est sur les réseaux sociaux que les dirigeants lancent des appels et des réparties.

Le président ukrainien Zelensky n'abandonne jamais son téléphone, et c'est son sceptre en ces heures tragiques. De ce téléphone, il écrit des messages sur les réseaux sociaux, prend des photos pour témoigner qu'il est vivant, incite les Ukrainiens à résister par des messages vidéo, dirige l'armée: le web fait partie intégrante de sa mythopoïèse, qui mêle chevalerie, courage et drame.

Mais les médias sociaux sont aussi la bête noire de Moscou en ce moment : Facebook a interdit à tous les médias d'État russes de parrainer et de monétiser leur contenu, tandis que Moscou a bloqué l'accès à Twitter sur le territoire russe. Le web est devenu un véritable front où s'affrontent vérité, mensonges et post-vérités, où les fake news sont générées et les démentis correspondants à la vitesse de l'éclair. Facebook a commencé à bloquer le contenu de quatre médias russes comme étant des sources possibles d'informations trompeuses, déclenchant la colère de Poutine qui demande que ces blocages soient retirés. Les forums de discussion, les photos de profil, les histoires et les reels deviennent instruments de guerre, pour la fomenter, la documenter, se rebeller contre elle.

La cyberguerre est déjà là

Parallèlement à une invasion, les cyberattaques mettent le grappin sur un système étranger. L'année 2021 nous a silencieusement habitués à ce nouveau type d'attaques, puisque leur nombre et leur gravité moyenne ont atteint des niveaux jamais égalés en Italie ou à l'étranger. Un exemple frappant est l'attaque contre le Colonial Pipeline aux États-Unis, qui a révélé en mai dernier, pour la première fois, comment les pirates informatiques peuvent perturber le fonctionnement du système d'un pays : le plus important réseau d'oléoducs américains a été bloqué, les approvisionnements ont été interrompus et le président Biden a été contraint de déclarer l'état d'urgence en pleine pandémie. La puissance de l'attaque, principalement à des fins d'extorsion, avait ouvert un énorme point d'interrogation sur l'avenir. Jeudi, le jour où Moscou a attaqué l'Ukraine, le Conseil européen, en plus de condamner l'invasion, a appelé "la Russie et les formations soutenues par la Russie à cesser les campagnes de désinformation et les cyber-attaques", marquant ainsi le début d'une nouvelle ère.

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Toutefois, il ne s'agit pas entièrement d'une cyberguerre. La bataille du web et des réseaux sociaux en matière d'informations trafiquées et déformées est le volet information de cette guerre, mais en soi, elle n'est rien d'autre que les fausses informations traditionnelles véhiculées auparavant par d'autres méthodes. Plusieurs cyberattaques ont eu lieu ces derniers jours, dont l'origine remonte à Moscou. Selon les experts du Washington Post, dans les prochains jours, les cyberattaques vont s'intensifier pour deux raisons principales : en réponse aux sanctions occidentales ; et comme instrument de soutien tactique aux opérations militaires sur le terrain.

La guerre hybride que suppose le conflit ukrainien est ainsi confirmée. En ce qui concerne le premier point, selon le journal, dans les prochaines heures, "il est très probable que nous assisterons à l'intensification de l'utilisation de capacités cybernétiques offensives avec des cyberattaques en guise de représailles contre les sanctions imposées à la Russie". Même l'Italie ne peut se targuer d'être à l'abri : le secteur de l'énergie en particulier est sur le qui-vive, où les attaques pourraient être plus probables et potentiellement plus dommageables.

Le 22 février, les spécialistes de l'Unité 42, le groupe de recherche basé à Palo Alto et spécialisé dans les cybermenaces, ont signalé "une augmentation significative des cyberattaques" au cours des neuf jours précédents. Depuis la mi-février, une série d'attaques Ddos (celles qui bloquent les réseaux et les infrastructures) a frappé le gouvernement et les banques ukrainiennes.

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Le 23 février, des organisations américaines (CISA, FBI, National Security Agency) et le National cyber security center (NCSC) britannique ont signalé la propagation de Cyclops Blink, un malware distribué à l'aide d'une mise à jour du célèbre antivirus WatchGuard. Les agences ont remonté la piste du malware jusqu'à Sandworm, une organisation cybercriminelle bien connue qui a des liens avec le gouvernement russe : une équipe qui comprendrait plusieurs officiers militaires du Crane (Direction principale des renseignements russes). Il s'agit du même groupe responsable des attaques de 2015 et 2017 contre l'Ukraine via le ransomware Petya.

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Les Anonymous et la "bonne guerre"

Les hacktivistes du célèbre groupe qui se cache derrière le masque de Guy Fawkes enchaînent actuellement les actions. Dans un long message vidéo, le mouvement international de pirates informatiques a déclaré la "guerre" au président Poutine après que les troupes russes ont envahi l'Ukraine dans le cadre d'une opération appelée "OpRussia - Defend Ukraine". Dans la vidéo, le collectif appelle les gens à rejoindre la cyber-guerre au nom de la défense des droits de l'homme.

Samedi, le groupe de pirates informatiques a rendu inaccessibles depuis longtemps les sites Web du Kremlin et du ministère de la Défense, ainsi que celui du diffuseur russe RT - la première chaîne d'information en langue anglaise de Russie. Samedi également, après que Poutine a ordonné une plus grande censure de ce qui pouvait être montré à la télévision, les Anonymous ont piraté les réseaux de télévision et ont diffusé un montage de la guerre en cours. En arrière-plan, une chanson russe de Monatyk, qui a participé au concours Eurovision de la chanson en 2017. Et encore, un site du réseau de contrôle du gaz russe a également été piraté, dans le cadre de l'offensive contre la Russie et pour la défense de l'Ukraine. Il s'agit du terminal russe Linux à Nogir, en Ossétie du Nord. "Nous avons modifié les données et augmenté la pression du gaz à tel point que cela a failli provoquer un incendie", peut-on lire dans un tweet des hackers. "Mais cela n'a pas été le cas", ajoute-t-il, "grâce à l'action rapide d'une personne responsable. En tant que collectif, Anonymous a pour objectif d'aider à fournir des informations valables au peuple russe sur les actions "folles" de Poutine, tout en essayant d'aider le peuple ukrainien en fournissant des colis de soins, en essayant de garder les canaux de communication ouverts et en aidant à obscurcir leurs communications des "yeux indiscrets".

Au début, les opérations perturbatrices des hackers les plus notoires du monde ont suscité un soutien inconditionnel et une sympathie collective. Mais de nombreux doutes entourent une organisation aussi mystérieuse et pourtant puissante de "justiciers du web".  Combien de hackers y a-t-il dans le collectif ? Comment s'organisent-ils ? La série d'actions perturbatrices en Russie est-elle vraiment de leur fait ? Est-il possible qu'un État soit derrière eux, se cachant pour empêcher l'escalade ? À ce stade de la "règle de suspicion", toutes les hypothèses sont plausibles.

Le collectif est officiellement né en 2003 lorsque des images et du contenu sont apparus pour la première fois de manière anonyme sur "4Chan", un site anglophone de conseil en image fondé par Christopher Poole en 2003, sur le modèle du site japonais "2channel". Dès le départ, Anonymous s'est déclaré être "une idée, un drapeau qui rassemble ceux qui veulent la justice et l'honnêteté dans le monde". Parmi leurs exploits les plus récents, citons les menaces à l'encontre d'Elon Musk, accusant le milliardaire de surinfluencer les cryptomonnaies par le biais de ses messages sur les médias sociaux ; et encore l'attaque contre l'Église de Scientologie en 2008, contre Visa et Mastercard en 2010 et l'opération KKK en 2015, lorsque les identités de plus de 1000 membres du Ku Klux Klan ont été rendues publiques.

Colonel Douglas Macgregor : "Poutine met en garde l'Otan depuis 15 ans"

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Colonel Douglas Macgregor : "Poutine met en garde l'Otan depuis 15 ans"

Roberto Vivaldelli

Source: https://it.insideover.com/guerra/il-colonnello-macgregor-putin-ha-avvisato-per-15-anni-la-nato.html

L'ancien président américain Donald Trump a toujours apprécié et tenu en haute estime les opinions hors normes du colonel Douglas Macgregor, à tel point qu'il a failli le nommer conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche après le départ de John Bolton en 2019. Vétéran de la guerre du Golfe, Macgregor est l'auteur de Breaking the Phalanx, un texte proposant la réforme de l'armée américaine, qui a intéressé le secrétaire à la Défense de l'époque, Donald Rumsfeld, à l'automne 2001. Après avoir quitté l'armée en 2004, Macgregor a souvent été invité à commenter la politique étrangère américaine à la télévision - sur Fox News, en particulier -, souvent à partir d'une position moins conventionnelle, critiquant l'immigration illégale et le magnat libéral, George Soros, avec des mots très durs.

Le 27 juillet 2020, la Maison Blanche a annoncé l'intention de Donald Trump de nommer Macgregor au poste d'ambassadeur des États-Unis en Allemagne, mais les médias libéraux américains ont lancé une offensive haineuse contre le vétéran de l'armée américaine en raison de ses positions, ce qui a conduit à l'enlisement de sa nomination au sein de la commission des affaires étrangères du Sénat. Lorsque l'idée de s'installer à Berlin a été écartée, il a été nommé conseiller principal du secrétaire à la défense par intérim Christopher Miller le 11 novembre 2020. Aujourd'hui, le colonel Macgregor est de retour dans l'actualité, une fois de plus en raison de ses opinions résolument "contre-culturelles" sur l'invasion russe de l'Ukraine, telles qu'exprimées sur Fox News. Nous l'avons rattrapé pour lui poser quelques questions.

Macgregor : "Poutine a averti l'Occident depuis des années"

Selon le vétéran de l'armée américaine, l'invasion russe de l'Ukraine était planifiée depuis des mois. L'objectif de Vladimir Poutine, explique-t-il, "est de faire en sorte que les États-Unis et leurs alliés ne puissent pas stationner des missiles et des forces de combat à la frontière" avec la Fédération de Russie. Dans son discours du 24 février, le président russe a souligné que "ce qui se passe est une mesure nécessaire. On ne nous a laissé aucune possibilité de faire autrement". Une lecture correcte, selon le colonel Macgregor. "Oui. Poutine a essayé à plusieurs reprises, depuis au moins 15 ans, de signaler l'opposition de la Russie à l'avancée de l'OTAN vers les frontières de la Russie."

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Le colonel explique quels sont les objectifs du Kremlin en Ukraine : "Moscou veut une Ukraine neutre, non alignée et non hostile à la Russie. Le modèle est l'Autriche et son traité d'État de 1955. Il n'est pas enclin à traverser le Dniepr et à se diriger vers l'ouest. L'armée russe a déjà encerclé et coupé les forces ukrainiennes à l'est du fleuve Dniepr. Elle souhaiterait une résolution telle que décrite. Si cela échoue, elle écrasera les forces ukrainiennes, traversera le Dniepr et annexera ou déclarera l'Ukraine orientale comme une République russe indépendante. Cela lui donnerait le "tampon" qu'elle souhaite", explique Macgregor. "Compte tenu de la géo-hydrographie de l'Ukraine occidentale, elle peut retenir au-delà du Dniepr les forces occidentales qui tenteraient de traverser le fleuve et qui rencontreraient une destruction certaine par des moyens conventionnels." Mais combien de temps l'armée ukrainienne peut-elle résister à l'avancée russe ? L'expert n'a aucun doute: "Au maximum 30 jours". Et les sanctions économiques n'arrêteront pas Moscou: "Les sanctions ont-elles forcé Moscou à quitter la Crimée ? Les sanctions ont-elles forcé l'Iran à se soumettre aux exigences des États-Unis et d'Israël ? Non. Les sanctions ne changent pas les gouvernements".

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"Biden a provoqué la Russie"

L'ancien conseiller principal du Pentagone sous l'administration Trump explique quelles ont été les erreurs de l'actuel locataire de la Maison Blanche, Joe Biden. Il aurait essayé de tout faire sauf d'établir un dialogue diplomatique avec la Fédération de Russie: "Biden a commencé son mandat en condamnant Poutine et son gouvernement. Il n'a pas cessé de menacer Poutine et de pousser les gouvernements européens à le rejoindre. Plus sérieusement, Macgregor note que "les forces américaines ont mené des exercices et des opérations militaires à moins de 50 miles nautiques de Saint-Pétersbourg". En revanche, l'ancien président Donald Trump a "écouté le président Poutine, en cherchant à améliorer les relations avec la Russie". Cependant, note-t-il, "Poutine a compris que le président Trump avait été subverti par son propre gouvernement et a conclu qu'il devait se préparer à une nouvelle administration américaine hostile. Encore une fois, le résultat est l'action en cours dans l'est de l'Ukraine".

Une autre question clé concerne l'ordre mondial qui émergera après la fin du conflit. L'isolement de l'Occident et les sanctions économiques sévères pousseront la Russie à se tourner de plus en plus vers la Chine, mais attention : il ne s'agit pas, pour le moment, d'une véritable "alliance". "Moscou et Pékin ne sont pas des alliés", explique le colonel Macgregor. "Ce sont des partenaires stratégiques qui entretiennent des relations économiques mutuellement bénéfiques. Tous deux sont menacés par les États-Unis et, bien sûr, coopèrent pour des raisons de sécurité."

Arrogance américaine et réaction russe: écoutez les paroles du général Marco Bertolini

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Arrogance américaine et réaction russe: écoutez les paroles du général Marco Bertolini

par Eugenio Palazzini

Source: https://www.ilprimatonazionale.it/esteri/arroganza-usa-reazione-russia-leggere-parole-generale-bertolini-224970/?goal=0_5b66923a54-9657225476-437176193&mc_cid=9657225476&mc_eid=dc220ae7bc

Rome, 23 février - Lire avec un grain de sel les textes et les communiqués sur la très délicate crise ukrainienne, en constante évolution, n'est pas à la portée de tous. Ces derniers jours, de nombreuses analyses et déclarations bizarres ont été émises, dictées par une ignorance substantielle, même par ceux qui occupent des rôles institutionnels de premier plan. Au contraire, le général Marco Bertolini, ancien chef du Haut Commandement Interforce, propose une analyse prudente et réfléchie, également à la lumière des précédents historiques.

Général Bertolini : "La volonté américaine de gagner"

"Le fait que Poutine ait reconnu les deux républiques du Donbass change certainement la situation. Le général a expliqué à Adnkronos qu'"il existe d'illustres précédents historiques dans le camp opposé, la même chose s'est effectivement produite au Kosovo de notre côté, et malgré les remontrances russes au moment où nous avons reconnu l'autonomie du Kosovo par rapport à la Serbie, la Russie ne s'y est finalement pas opposée. C'est une situation très délicate, je pense que la Russie essaie maintenant de nous mettre devant le fait accompli, un peu comme ce qui s'est passé avec la Crimée, que la Russie a reprise et où nous n'avons pas réagi, sur la base également d'un plébiscite dans la région".

Mais pourquoi semble-t-il maintenant que nous ayons atteint un point de non-retour en Ukraine ? "Je crois que la Russie, comme nous, a été victime de la volonté américaine de gagner", déclare Bertolini. "Les États-Unis n'ont pas seulement gagné la guerre froide, ils voulaient aussi humilier la Russie en prenant tout ce qui se trouvait dans sa zone d'influence. Ils ont soutenu l'autonomisation ou l'indépendance des pays baltes, de la Pologne, de la Roumanie et de la Bulgarie : face à l'Ukraine qui lui enlève toute possibilité d'accès à la mer Noire, la Russie a réagi".

L'arrogance d'acculer la Russie et les risques pour l'Italie

Le Kremlin ne peut donc pas assister sans réagir aux avancées continues de l'OTAN vers l'est, sous peine de perdre définitivement le contrôle de ce qu'il considère comme sa "voisine étrangère", assorti du sentiment consécutif d'un encerclement ingérable à long terme. C'est la situation à laquelle nous sommes confrontés", déclare Bertolini, "il y avait un peu d'arrogance à pousser les Russes dans un coin, alors, maintenant, ils ont réagi. Nous espérons désormais qu'elle se limitera aux deux républiques du Donbass et qu'il n'y aura rien d'autre, mais il y a aussi le problème de la stabilité du régime en Ukraine, où une situation a été créée avec un président plutôt improbable, qui vient du monde du show-business.

Ce sont toutes des questions que le gouvernement italien ne peut ignorer, car notre nation risque de lourds revers économiques causés par la poursuite du bras de fer qui est en cours. "C'est un moment très dramatique. L'Italie est impliquée d'un point de vue énergétique, car si la Russie ferme les robinets ce soir, nous nous cuirons nos repas sur des feux de bois et non sur des cuisinières à gaz", a noté le général. Mais ce n'est pas tout, puisque "nous sommes également impliqués d'un point de vue opérationnel, car les Global Hawks qui survolent l'Ukraine partent de Sigonella, l'Italie étant en grande partie une base militaire américaine. Le risque est là, il est présent et réel. Nous espérons une rencontre entre Draghi et Poutine, à ce stade les jeux sont déjà faits et je ne pense pas qu'ils auront une grande marge de manœuvre, mais s'il y a une chance de faire entendre notre voix, c'est certainement une chose importante.

Lire aussi : Ukraine, soldats et drones de Sigonella : comment Washington "exploite" l'Italie d'Alessandro Della Guglia: https://www.ilprimatonazionale.it/esteri/ucraina-soldati-e-droni-da-sigonella-cosi-washington-sfrutta-litalia-224921/

mercredi, 02 mars 2022

Mourir à 50 ans dans une église orthodoxe ou à 70 ans dans un supermarché occidental: tel est le choix de la ménagère ukrainienne !

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Mourir à 50 ans dans une église orthodoxe ou à 70 ans dans un supermarché occidental: tel est le choix de la ménagère ukrainienne !

par Frédéric Andreu

Ce qui motive en premier lieu les masses humaines, guidés par des élites débiles, résident au niveau du bas-ventre. Les Ukrainiens se trouvent devant un choix de civilisation et identitaire que leur imposent, ni la Russie, ni l'Europe européenne, mais les forces otanesque de la division. Ils sont partagés entre, d'un côté, la perspective d'un salaire à 200 Euros qu'impliquerait le rattachement au contre-Empire du grand frère russe et de l'autre, les paillettes lucifériennes de l'Occident...

Le problème, c'est que la stratégie impériale des Etats-Unis et de l'Otan oblige à ce faux choix. Elle pose un limes entre votre âme et votre ventre. Cela c'est la victoire postume de Brzezinski, le merlin noir des élites étatuniennes.

A ce jeux-là, il n'est pas impossible que l'Ukraine connaisse un partage géopolitique en deux, au niveau du fleuve Dniepr. Mais cela rimerait alors avec le martyr des minorités de part et d'autre. Cette politique serait la victoire des puissances atlanto-sionistes qui sont derrière ce scénario diabolique.

L'un des rares politiques français qui ne s'y résigne pas n'est pas issu des rangs de la droite. C'est Jean-Luc Mélanchon, ancien député socialiste, certes, mais pas plus ni moins que ne l'était Marcel Déat avant guerre... En fait, la classe politique embourgeoisée et technocratique qui règne en France et à Bruxelles, capables des pires traîtrises et des pires non-sens historiques, déclarent en coeur: “avec nos sanctions, nous allons isoler la Russie !”.

L'hôpital se moque vraiment de la Charité ! Ces idiots utiles de l'Amérique pensent isoler un pays-continent 35 fois plus vaste que la France, allié de surcroît à la Chine et à l'Inde, pays dont le réservoir démographique correspond à la moitié de la population mondiale !

Résultat de cette stupidité sans nom est le suicide de l'Europe : c'est la petite péninsule européenne et non la Russie qui serait isolée comme une tête isolée du corps.

L'Europe aurait alors pour seule perspective d'être une annexe du grand marché américain. Bien sûr, que les démographes se rassurent, l'Afrique pourra toujours suppléer au manque démographique des Européens : les populations noires déracinées pourront se déverser, toujours plus nombreuses, sur le Vieux Continent, avec la bénédiction d'un pape tiers-mondiste et des élites européennes panmixistes.

Quand cette classe de Libéraux-traitres non élue qui dirige l'Union Européenne parle de paix, il faut entendre LGBTISME, pensée unique, matérialisme pratique, MacDonaldisation souriante de la société. Avec la mise au ban de la Russie, l'Europe sera en “paix” à la puissance dix. Voici le contenu du mot “paix” pour la génération à venir ! Adieu Homère et Pic de la Mirandole ; bonjour le clown multicolore Mac Do !

Les partisans du réel savent au contraire que l'Europe a tout intérêt à s'ouvrir à cette Russie frappée de l'aigle à deux têtes, l' ”empire bicéphale” reliant notre présent à la grande politique transcontinentale des derniers Bourbons.

En effet, on ignore trop souvent, dans le pays régicide qui a coupé la tête à Louis XVI, que le projet du Bon Roi était non seulement de lier alliance avec la maison des Habsbourg par le mariage avec Marie Antoinette, mais aussi de créer une alliance commerciale, voire plus, avec la Russie de Catherine II. A l'époque les élites russes et européennes ne parlaient pas seulement en terme de taux d'inflation et de statistique, ils ne parlaient pas dans un anglais d'aéroport mais dans le français de Molière. Ils parlaient de philosophie, de découverte des îles, de voyage, de vin et de belles lettres.

On ne sait généralement pas, non plus, que cette politique que les derniers Bourbons ont incarné par des mariages et des liens diplomatiques, est dans les faits, le même tropisme que Napoléon Bonaparte a suivi mais que l'Empereur a été contraint de faire par la guerre...

Les deux tentatives ont échoué, mais c'est pourtant ce flambeau-là qu'il faudrait reprendre car il est inscrit dans le destin même de la France, à la fois politique et spirituel. Il s'agit aussi de faire passer l'oxygène du poumon gauche (l'Europe) au poumon droit (la Russie) et vice-versa. Ce futur est tout simplement inscrit dans le critérium géographique de la terre puisque la France commence le Grand Continent et la Russie le termine, preuve que le plan spirituel et matériel ne s'opposent pas. Cela, Louis XVI et Catherine II le savaient, lui le catholique pratiquant ; elle, l'orthodoxe, lorsqu'elle déclara que la France devait être “nation privilégiée de la Russie”. La Révolution dite “française”, fomentée en réalité par des agents anglais, allait mettre un terme à ce rêve.

Et si le rêve de la Monarchie et de l'Empire napoléonien se réalisait finalement par un socialiste franc-maçon d'inspiration révolutionnaire ? Dans ce cas, Jean-Luc Mélanchon resterait dans l'Histoire d'abord et avant tout comme Français !

 

France - La Dictature En Marche : les candidats prorusses privés de parrainages ?

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France

La Dictature En Marche : les candidats prorusses privés de parrainages ?

Nicolas Bonnal

Nous affrontons en France l’an V de la dictature. Régis de Castelnau a rappelé :

« La campagne de l’élection présidentielle 2022 est un grand révélateur de la déshérence politique dans laquelle se trouve notre pays. En 2017, un trio constitué de la haute fonction publique d’État, de l’oligarchie économique et de la magistrature politisée, a organisé de longue main un coup d’État pour faire élire à la magistrature suprême un parfait inconnu.

S’appuyant sur l’essentiel de l’armature politique du Parti socialiste, Emmanuel Macron a ainsi réalisé un hold-up mettant la dernière main à la destruction des institutions républicaines. Une Constitution en lambeaux, plus de séparation des pouvoirs, plus de mécanismes de contrôle démocratique, corps intermédiaires mis hors-jeu, multiplication des règles et des initiatives proprement liberticides : la France, si elle ne peut être qualifiée de dictature, ne peut plus être considérée aujourd’hui comme une démocratie… »

En réalité il me semble que le coup d’Etat en France a commencé avant (s’il n’est, comme dirait Mitterrand, permanent) : arrivée du syndic de faillite Lagarde aux affaires, élection du pion yankee Sarkozy et surtout l’élection de Hollande qui avec Macron et Valls a tout pourri dans ce qui nous restait de république.

Comme on sait l’absence de résistance rend les tyrans plus fous et plus sanguinaires. Tel joueur de tennis (Monfils) flingué par le vaccin sera vilipendé par les médias ; tel gosse vacciné mais dépourvu de son masque, fût-ce en faisant un effort sportif, sera viré de son école sous les applaudissements de ses petits camarades ; tel dirigeant russe occupant une région martyr sans tirer un coup de feu sera comparé à Hitler ravageant la Pologne. Mais comme la Russie n’est pas la Lybie et que l’armée US ne vaut plus tripette (cf. Scott Ritter), il n’est pas question de lui faire la guerre. On reparle de sanctions jusqu’au jour mérité où la Russie asphyxiera les Européens prostrés et anesthésiés et filera son gaz aux Asiatiques plus fiables, plus riches et moins moralistes. Car « la vieille race blanche » des boomers et des bobos commence à nous les gaver.

Cela n’empêche pas l’animal blessé de devenir fou et dangereux. Il se venge alors sur les gilets jaunes et sur les petits candidats qui sont dépourvus de signatures s’ils sont jugés prorusses. Philippe Grasset a écrit :

« Face à Macron, sur ce sujet, une étrange ligne de bataille : Le Pen-Mélenchon-Zemmour. Peut-être se trouvera-t-il un grand esprit pour considérer que ces trois-là, qui représentent à peu près 40% des votants selon les chuchotements sondagiers, doivent subir les foudres d'une justice quasi-divine pour les punir d’être compréhensifs pour le Diable, en étant interdits des 500 signatures qui leur permettraient d’être candidats. Je pense que c’est bien la sorte d’état d’esprit qui conduit les raisons cannibalisées de ceux qui sont toute inconscience-toute innocence, au Culte de la Doxa, ou divinum lumen. Avec eux le Déluge, comme disait Noé. »

En effet nous allons nous retrouver sans candidats d’opposition (même contrôlée, mais ce n’est pas la question ici), et avec un Macron réélu face à Artaud et Hidalgo, à charge pour la Pécresse de fournir un feu d’artillerie verbale dont on sait qu’elle a le secret.

Pour moi la république est une farce tranquille et je pense comme l’Auteur de la controverse de Sion que depuis qu’elle est républicaine la France est la terre du fiasco récurrent (the land of recurrent fiasco, p. 603). Ce n’est pas une raison pour bouder son plaisir et c’en est une (de raison) de rappeler qu’au pays du passe et du masque éternel, du vaccin pour tous et de la presse orwellienne, il est bon de relire Drumont : ne fût-ce, comme dirait Bloy, que pour exaspérer les imbéciles.

« Les Français sont admirablement dressés à toute cette organisation fiscale (NDLR : ou autre) ; ils sont comme les méharis qui s’agenouillent pour qu’on puisse les charger plus facilement ou comme les chevaux de renfort d’omnibus qui, leur besogne faite, vont tout seuls rejoindre leur place en bas dans la montée et attendent là qu’on les attelle de nouveau. »

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Et Drumont ne les avait pas vus dans le métro ou à la pizzéria, codés, vaccinés et masqués.

La réélection de Macron sur fond de candidats et d’électeurs cocufiés, de passe éternel et de triplement du prix de l’électricité et de réforme des retraites enchantera au moins les rares Français lucides. Le petit nombre des victimes (Léon Bloy encore) ne tempèrera pas notre joie cette fois. Car Macron réélu jettera à la poubelle avec leurs occupants neuf millions de maisons jugés polluantes. On espère que flics et gendarmes sauront montrer alors leur zèle coutumier.

Et le reste est littérature.

Sources principales :

https://www.revuemethode.org/m101828.html

https://www.dedefensa.org/article/la-montagne-qui-rugissait

https://ia800304.us.archive.org/35/items/LaControverseDeS...

https://www.rt.com/op-ed/547526-us-power-biden-ukraine/

https://books.googleusercontent.com/books/content?req=AKW...

https://www.bfmtv.com/immobilier/renovation-travaux/sous-...

mardi, 01 mars 2022

La guerre en Europe et l'autodestruction de l'Occident

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La guerre en Europe et l'autodestruction de l'Occident

Stefan Schubert

https://kopp-report.de/krieg-in-europa-und-die-selbstzerstoerung-des-westens/

Alors que les hommes politiques allemands se sont confortablement installés dans leur monde parallèle aux couleurs de l'arc-en-ciel, monde dans lequel des licornes en train de brouter peuvent décider chaque jour si elles préfèrent être aujourd'hui une femelle ou un mâle, les armes parlent à nouveau en Europe. Avec un projet planifié à long terme, mis en œuvre avec autant d'habileté stratégique que d'absence de scrupules, Poutine a mis fin brutalement à l'une des plus longues périodes de paix du continent européen. Et la seule chose que les politiciens allemands, incapables de gérer la crise, parviennent à faire en cette heure historique, c'est de débiter des phrases creuses et d'éclairer en bleu et jaune la porte de Brandebourg.

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Dans ce texte, il ne sera pas question de la violation du droit international ou de l'agenda mondialiste de l'OTAN, mais de la destruction de l'Allemagne, de la destruction de son identité et de la modification délibérée de la composition de sa population. Certes, de nombreux réseaux internationaux agissent depuis l'étranger, mais le plus grand ennemi du citoyen allemand aujourd'hui se cache dans son propre pays.

Alors que le principal objectif des gouvernements occidentaux est de rééduquer leur propre population et de la transformer en une masse conformiste sans défense (notamment avec les mesures décidées suite à l'apparition du coronavirus), d'autres pays créent des faits. Nous ne connaissons la chute de l'Empire romain que par les livres d'histoire, or nous assistons non seulement en direct à l'effondrement historique du monde occidental, et nous nous trouvons en plein dedans.

Alors qu'en Allemagne, le gouvernement fédéral le plus incompétent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale a commencé son œuvre de destruction, les absurdités des élites berlinoises s'empilent chaque jour un peu plus. Une ministre des Affaires étrangères qui n'est même pas capable de manipuler son propre CV et son livre de bonnes manières pour qu'ils résistent à un simple examen et qui, pour l'une de ses premières interventions lors de son entrée en fonction, baragouine quelque chose à propos d'une "politique étrangère féministe". Et puis, il y a cet homme portant une perruque et des vêtements de femme qui a obtenu un mandat au Bundestag grâce aux quotas de femmes chez les Verts.

Et une ministre de l'Intérieur qui s'enfonce de plus en plus dans les marécages de l'extrême gauche antifa, diffame les promeneurs pacifiques (ndt: qui contournent les interdictions de manifester) et est sur le point de pousser à une nouvelle immigration de masse incontrôlée. De plus, des responsables de parti occupant les plus hautes fonctions de l'État, le président de la Cour constitutionnelle fédérale et le président de la protection constitutionnelle fédérale, donnent l'impression, dans leurs interventions et leurs décisions, d'avoir déclaré la guerre à une partie de leur propre peuple.

En outre, dans la soi-disant "lutte contre la droite", les autorités des forces de sécurité sont soumises à de telles vagues d'épuration que la police et l'armée ne sont plus que l'ombre des jours précédents et ont été privées de leur capacité opérationnelle.

Cet État de gauche détruit systématiquement la capacité de défense de cette génération et des suivantes et veut les rééduquer pour en faire une jeunesse unitaire gauche-verte : végétalienne, antiraciste et activiste pour le climat. Une jeunesse qui finit par appliquer une à une toutes les directives du gouvernement - sans réfléchir par elle-même. Les mesures arbitraires, l'obligation de porter un masque à l'extérieur, etc. sous prétexte de l'épidémie du coronavirus, servent ici de modèle pour les années à venir.

Parallèlement, le gouvernement de gauche lance une véritable campagne de destruction de l'industrie allemande. A cause de l'idéologie verte, maquillée en tournant énergétique, de grands secteurs économiques risquent de perdre leur compétitivité internationale, de faire faillite ou de voir leur production partir à l'étranger. Sur l'autel de cette idéologie, on renonce en outre à des prix abordables pour l'électricité et le gaz, ainsi que la sécurité énergétique des 83 millions de citoyens de ce pays. Les black-out sont aussi certains que les amen à l'église. Parlons-en de l'Église: au lieu de fournir un soutien moral et une foi solide en ces temps difficiles, les institutions ecclésiales allemandes (protestantes et catholiques) se perdent dans un marécage sordide, fait d'enrichissements personnels et d'abus pédophiles. Cette liste est loin d'être exhaustive, mais elle illustre la chute délibérée d'une nation autrefois si fière.

L'Occident - préoccupé par lui-même, sans défense et sans projet

Cette destruction de l'intérieur par une idéologie de gauche ne se limite pas à l'Allemagne. On l'observe de la même manière en Amérique, en France, en Grande-Bretagne et dans de nombreux autres pays. Alors que l'Occident est détruit par les réseaux mondialistes à la suite de la "grande réinitialisation", des pays et des groupes concurrents reconnaissent sa faiblesse et l'exploitent pour défendre leurs propres intérêts. La Chine, la Russie et la fuite humiliante devant les talibans d'Afghanistan ne sont qu'une partie de ce nouvel ordre mondial.

Alors que la stupidité est récompensée par des postes ministériels en Allemagne, Poutine crée des faits. Les slogans répétés de l'Occident et les innombrables menaces de sanctions ne provoquent plus qu'un haussement d'épaules en dehors des élites occidentales. Moscou et Pékin semblent s'être concertés sur leur approche, la Chine critiquant ouvertement les États-Unis et annonçant qu'elle ne se joindra à aucune des sanctions occidentales. Au contraire, le pays demande publiquement la levée de celles-ci. Et comme l'Europe et l'Amérique dépendent du flux économique constant de la Chine dans tous les domaines de la vie, l'Occident a été relégué au rang de spectateur sur la scène mondiale.

L'armée allemande a été systématiquement détruite par les politiques et le ministère de la Défense a été transformé en dispensaires pour politiciennes usées. Les noms des fossoyeurs au féminin de notre armée sont: Ursula von der Leyen, Annegret Kramp-Karrenbauer et Christine Lambrecht. Si vous essayez de survivre à une telle direction, vous n'avez pas besoin d'une guerre d'usure sur le front de l'Est pour vous rendre sans défense. Et non, il ne s'agit pas de fake news - Ursula von der Leyen a fait modifier les chars allemands pour que les femmes enceintes puissent également les conduire dans la cour de la caserne. La révélation publique de la Bundeswehr est complétée par le plus haut gradé de l'armée de terre allemande, l'inspecteur de l'armée de terre Alfons Mais (photo), qui dénonce la négligence de la préparation opérationnelle pendant des années. Dans la crise ukrainienne, la Bundeswehr est "plus ou moins à sec", ce sont ses mots exacts.

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L'ère de l'Occident et de sa suprématie sur le monde est désormais définitivement révolue. Après la fuite humiliante devant des guerriers de Dieu à la belle barbe bien fournie en Afghanistan, c'est maintenant un Waterloo à l'est du continent européen. Les impacts se rapprochent et les secousses actuelles sont déjà perceptibles à Berlin.

"Accéder au canal Telegram de l'auteur Stefan Schubert : le point de situation de Schubert, https://t.me/SchubertsLM

La Russie: la lutte contre la Turquie passe par l'Ukraine

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La Russie: la lutte contre la Turquie passe par l'Ukraine

Emanuel Pietrobon

Source: https://it.insideover.com/guerra/russia-se-il-contrasto-alla-turchia-passa-dall-ucraina.html

L'Ukraine est le doigt, la transition multipolaire est la lune. Le changement de régime en Ukraine est un faux-fuyant, la réécriture du système de sécurité européen est l'objectif. Cette guerre n'est pas une affaire isolée, dont le déclenchement s'est produit soudainement et du jour au lendemain, mais un chapitre clé de la nouvelle guerre froide. Un chapitre dans lequel les intérêts et les voies de la Russie et des États-Unis s'affrontent, dans lequel l'Union européenne est paralysée et l'Empire céleste sur le qui-vive, et qui, de surcroît, est le dernier reliquat des nouvelles guerres russo-turques.

Kiev, berceau de la Russie et rêve de la Turquie

L'Ukraine, veine exposée du Vieux Continent et ligne de fracture inter-civilisationnelle depuis la nuit des temps, c'est seulement ici que la plus grave crise entre l'Ouest et l'Est de l'après-guerre froide aurait pu éclater. Et, de fait, elle a éclaté.

Convoitée par tous, des Polonais aux Mongols, l'Ukraine est un lieu qui, au-delà des apparences et des stéréotypes, a une histoire complexe et une identité plurielle. Pour les Russes, c'est l'un des berceaux de la civilisation orthodoxe slave, en tant que foyer de la plus ancienne organisation étatique des Slaves orientaux - la Rus' de Kiev. Pour les Polonais, c'est la fille prodigue de leur plus importante constitution impériale : la République dite des Deux Nations. Pour les Américains, les derniers arrivés, c'est le "pivot géopolitique" de l'Eurasie - le nœud territorial décisif dont dépend l'hégémonie sur l'Europe et la vassalisation de l'Europe par le rejet définitif de la Russie à l'est, sa transformation en empire asiatique.

Mais l'Ukraine a joué et continue de jouer un rôle clé, tant sur le plan politique qu'historique, pour une autre puissance: la Turquie. Prolongement du monde turc (Türk dünyası) depuis l'invasion mongole de 1223, l'Ukraine est dans les tranchées des guerres russo-turques depuis la bataille de Kalka et a façonné l'imaginaire collectif des habitants de la Sublime Porte pendant des siècles, leur ayant donné Roxelana et le mythe de la Petite Tatarie.

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Il ne faut pas s'étonner, à la lumière de l'histoire, que la Turquie ait vu dans l'Euromaïdan une occasion de prendre pied dans un ancien domaine, populairement connu sous le nom de Hanshchyna, et qu'elle y ait fait des paris et des investissements importants, en particulier pendant la présidence Zelensky, étendant ses tentacules dans divers domaines : de l'industrie au commerce, en passant par la sécurité régionale, la défense et les affaires religieuses.

Un compte rendu ?

L'avancée des forces armées ukrainiennes dans le Donbass en 2021 n'aurait pas été possible sans l'utilisation des nouveaux Janissaires mortels du ciel, les drones Bayraktar TB2. Et la transformation de la minorité tatare en un pilier de l'ordre post-Euromaidan, avec ses bataillons de combattants volontaires actifs entre Donetsk et Lugansk, ne se serait pas produite aussi rapidement sans la médiation anatolienne.

Le Kremlin n'a jamais caché qu'il ressent un fort sentiment d'agacement, parfois à la limite de l'animosité ouverte, à l'égard de l'ordre du jour turc en Ukraine. Parce que Recep Tayyip Erdoğan était et est l'un des chefs de file du mouvement contre la reconnaissance de la souveraineté russe sur la péninsule de Crimée. Il était et reste parmi les principaux financiers de l'économie ukrainienne - 7 milliards de dollars d'échanges commerciaux au total en 2021, contre 4 milliards en 2019. Et il figurait parmi les principaux fournisseurs d'armements aux forces armées ukrainiennes, à la réorganisation desquelles la Turquie a également contribué.

Le lien entre l'Ukraine et la Turquie est devenu si solide sous l'ère Zelensky qu'en août 2020, le chef du Marinsky avait inauguré les travaux pour l'adhésion du pays au Conseil turc en tant que membre observateur. Un lien solide, certes, mais qui prendrait fin inévitablement si la Fédération de Russie parvenait à re-satelliser l'Ukraine.

Trois indices font une preuve

Les preuves que l'attaque de Moscou contre Kiev est également à considérer dans le contexte des nouvelles guerres russo-turques ne manquent pas : il y en a au moins trois, mais d'autres pourraient être ajoutées étant donné l'évolution constante de la situation. Et puisque, selon Agatha Christie, un indice est un indice, deux indices sont une coïncidence, mais trois indices font une preuve, l'affaire mérite d'être approfondie.

Le premier indice est le fait que c'est la deuxième fois en deux mois que la Russie envoie ses soldats sur un théâtre contesté avec la Turquie : au début de l'année, c'était le Kazakhstan. Dit de cette façon, il est clair que cela ne peut qu'apparaître comme un étirement basé sur l'attraction, mais l'image est incomplète. Car en Turquie, curieusement, l'intervention éclair au Kazakhstan par le biais de l'Organisation du traité de sécurité collective a été reçue très froidement et interprétée par certains comme un avertissement, un message subliminal adressé au Conseil turc.

Le deuxième élément de preuve est le bombardement d'un navire marchand turc au large d'Odessa, qui s'est produit de manière éloquente dans les heures qui ont suivi le déclenchement de la guerre. Un bombardement symbolique, en ce sens qu'il s'est terminé sans blessés ni morts, et qui, du moins dans l'immédiat, a eu l'effet escompté : réduire considérablement l'exposition de la Turquie au conflit.

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Le troisième indice, qui pour l'instant est aussi le dernier, est l'arrivée en Ukraine d'une petite armée de Tchétchènes - composée de dix mille à douze combattants (photo, ci-dessus) - sous le commandement de Ramzan Kadyrov, fidèle de Poutine et ennemi juré d'Erdoğan. On ne sait pas quelles sont les véritables raisons de l'intervention tchétchène en Ukraine, mais une chose est plus que certaine : l'utilisation de ces effectifs contre les Ukrainiens aurait un impact négatif sur le soutien de l'opinion publique à la guerre - qui est déjà faible, comme en témoignent les protestations pacifistes qui ont explosé comme une traînée de poudre dans toute la Fédération -, il est donc possible qu'on lui ait délégué la tâche de régler des comptes avec les agents turcs sur place, à savoir les islamistes et les djihadistes, en échange d'une carte blanche dans la chasse aux dissidents anti-Kadyrov.

Peu de choses ont été écrites sur l'alliance profane entre l'Ukraine post-Euromaidan et l'islam radical, mais cela ne signifie pas qu'il s'agisse d'un phénomène sans importance et insignifiant. Deux bataillons d'islamistes tchétchènes combattent les séparatistes pro-russes dans le Donbass depuis 2014. Des éléments djihadistes ont été capturés par le FSB, accusés de travailler pour les services secrets ukrainiens. Et les islamistes du Hizb al-Tahrir, une organisation légale dans certains pays mais interdite dans d'autres, dont la Russie, ont transformé l'Ukraine en un maxi-camp de recrutement, convertissant les Tatars à leurs croyances fondamentalistes.

Qu'est-il advenu de ces guérilleros et islamistes, dont l'implication dans le sabotage d'infrastructures critiques est bien connue, dont la présence dans le Donbass a été constatée et dont les liens avec les djihadistes internationaux ont fait l'objet de rumeurs et, dans d'autres cas, ont été prouvés ? Nous n'entendons pas parler d'eux, car ils sont loin des projecteurs, mais ils existent, ils sont nombreux - des milliers - et c'est à eux que le Kremlin, via Kadyrov, pourrait maintenant vouloir donner la chasse.

La vision de Poutine contre le plan de Biden

Les garanties de sécurité proposées par le Kremlin à l'Alliance atlantique ces derniers mois, qui avaient une forme difficilement acceptable mais un fond tout-à-fait compréhensible - pour ceux qui avaient des oreilles pour entendre - ont été conçues dans le but d'ouvrir une table de négociation : partir de 100, en sachant que l'autre partie offrait 0, pour arriver à un 50 avantageux.

La concentration de troupes aux confins de l'Ukraine était un moyen de parvenir à une fin: un levier de pression utilisé par le Kremlin dans l'espoir d'impressionner, ou plutôt d'intimider, la Communauté euro-atlantique et de la persuader d'entamer une action attendue depuis longtemps, à savoir les travaux d'une nouvelle conférence de Yalta. Remodeler la forme et l'objectif de l'architecture défensive-offensive euro-atlantique, en réduisant son potentiel de pénétration stratégique au cœur de la Russie européenne. Œuvrer pour un "diviser pour régner" mutuellement bénéfique, car il s'appuie sur les principes de non-ingérence et de sphères d'influence. Créez, si possible, un mécanisme de concertation sur le modèle du Congrès de Vienne de 1815.

Aux États-Unis, où le parti de la diplomatie triangulaire - s'ouvrir à la Russie pour isoler la République populaire de Chine - n'a toutefois jamais réussi à prendre pied dans la salle de guerre, c'est pourquoi l'intense séance de négociation a connu une issue malheureuse. La vision du parti qui règne depuis l'ère Obama, le parti du "double endiguement", a prévalu, sentant le retour de bâton potentiel de cette arme à double tranchant qu'est la diplomatie de la canonnière. Retirer cette force potentielle cyclopéenne sans avoir obtenu quoi que ce soit, pas même une lueur d'ébauche, était tout simplement devenu impossible - le point de non-retour était inévitablement passé - et aurait représenté une défaite tonitruante pour Poutine à différents niveaux : contractualité, crédibilité, image.

Et c'est ainsi, au milieu de refus clairs, de non ambigus et de portes fermées à tous les bâtisseurs de ponts en puissance - au premier rang desquels Emmanuel Macron - que l'administration Biden a fait tomber Poutine dans le piège machiavélique : rendre l'évitable inévitable, transformer l'option la plus éloignée en la seule viable. Pour gagner sans combattre. Faire d'une pierre deux coups : l'Union européenne, en lui faisant oublier l'autonomie stratégique et la détente, et la Russie, entraînée dans une guerre fratricide pleine d'embûches.

Modèles géopolitiques comparés

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Modèles géopolitiques comparés

Par Daniele Perra

Source: https://www.eurasia-rivista.com/modelli-geopolitici-a-confronto/

L'article suivant est la suite idéale d'une autre contribution intitulée "L'ennemi de l'Europe", parue sur le site "Eurasia" ( https://www.eurasia-rivista.com/il-nemico-delleuropa/ - version française: http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/02/10/l-ennemi-de-l-europe-6365403.html ).  Dans le cas présent, nous tenterons de mettre en évidence les principales différences entre deux modèles contrastés d'application de la science géopolitique à la lumière de la recrudescence actuelle de la crise ukrainienne: le modèle russe "traditionnel" (ou classique) et le modèle "moderne" (ou peut-être serait-il plus correct de dire "techno-financier") des États-Unis et de l'OTAN.

Le théoricien chinois Wang Huning (photo, ci-dessous) a été l'un des premiers à avancer la thèse selon laquelle pour comprendre la stratégie nationale américaine, il faut d'abord comprendre la façon dont les Américains sont une nation: c'est-à-dire observer attentivement leur mode de vie avant d'accorder du crédit à ce qui apparaît dans les publications "géopolitiques" de leurs groupes de réflexion [1].

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Lors de son séjour aux États-Unis dans la seconde moitié des années 1980, Huning est arrivé à la conclusion que le fondement du mode de vie américain est l'idée de richesse ou de prospérité. Cette prospérité (apparente ou réelle) n'est maintenue que par le flux continu de capitaux internationaux dans les coffres américains. Et, pour que ce flux de capitaux reste constant, il est nécessaire que la position hégémonique du dollar ne soit pas ébranlée de quelque manière que ce soit. C'est la véritable source de pouvoir qui maintient les États-Unis forts et prospères pour le moment.

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Cela soulève bien sûr la question suivante : comment a-t-il été possible d'atteindre une telle position ? La réponse se trouve dans l'histoire contemporaine. Au début de la Première Guerre mondiale, les États-Unis sont l'un des pays les plus endettés au monde. À la fin du conflit, cependant, les États-Unis étaient un créancier mondial. En 1917, l'Entente reçoit une ligne de crédit de 2,3 milliards de dollars de Washington. Au cours de la même période, l'Allemagne, vaincue à la bataille navale du Jutland (1916) et déjà soumise à un blocus naval britannique, a reçu un peu plus de 27 millions de marks d'aide étrangère.

En fait, les États-Unis ont été parmi les premiers à comprendre la guerre exclusivement comme une entreprise économique à une époque où les empires européens traditionnels, toujours convaincus que la victoire serait déterminée uniquement et exclusivement par la force des armées sur le terrain (ce qui n'était possible que dans le cas de la "Blitzkrieg"), étaient devenus incompatibles avec la base économique du capitalisme. La Première Guerre mondiale est donc également le premier conflit dans lequel le flux de capitaux a joué un rôle plus important que le flux de sang au sens littéral du terme. Les États-Unis eux-mêmes ne sont intervenus que lorsqu'il était certain qu'il n'y aurait pas de différence substantielle entre les vainqueurs et les vaincus (qui sont tous sortis du conflit avec les os brisés).

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En effet, le véritable objectif était d'évincer la Grande-Bretagne de son rôle de puissance thalassocratique hégémonique au niveau mondial. Cet objectif ne sera atteint qu'après la Seconde Guerre mondiale et après que la Grande-Bretagne elle-même (grâce à celui que l'on définit peut-être à tort comme un grand politicien et stratège, Winston Churchill) ait contribué de manière décisive à son suicide et à celui de l'Europe.

Le 15 août 1971 est une autre date clé dans l'histoire contemporaine et, surtout, pour les besoins de cette analyse. Ce jour-là, le président Richard Nixon a annoncé la fermeture de la "fenêtre dorée", rompant ainsi le lien entre le dollar et l'or et trahissant ainsi délibérément le système créé à Bretton Woods. Depuis cette date, les États-Unis ont acquis le pouvoir théorique d'imprimer des dollars à volonté. De plus, à la suite du conflit israélo-arabe de 1973 et d'un accord avec l'OPEP, les États-Unis ont ancré le dollar dans le commerce mondial du pétrole, faisant de leur monnaie la seule monnaie de règlement international du commerce du pétrole. Ce faisant, ils ont imposé au monde le principe selon lequel il faut des dollars pour acheter du pétrole. Ainsi, si un pays a besoin de pétrole, il a également besoin de dollars pour l'acheter. La mondialisation économique, dans ce sens, a été le résultat inévitable de la mondialisation du dollar.

En ce sens, les États-Unis, selon l'ancien général de l'armée de l'air de l'Armée de libération du peuple, Qiao Liang, ont créé la première "civilisation financière" en transformant toutes les monnaies du monde en accessoires du dollar [2]. De plus, depuis les années 1970, ils délocalisent les industries manufacturières de bas et moyen niveau vers les pays en développement (encourageant la consommation et la dégradation de l'environnement et des ressources), ne gardant sur leur territoire que celles à haute valeur ajoutée technologique.

Les effets néfastes de ces politiques se sont reflétés dans l'économie américaine elle-même lorsque la crise de 2007 a mis en évidence sa nature exclusivement "virtuelle" face à la mise à zéro du secteur manufacturier. Une tendance que les administrations Obama et Trump ont toutes deux tenté (et échoué) à contrebalancer. Par conséquent, la fortune des États-Unis reposera encore longtemps sur la capacité de Washington à concentrer les flux de capitaux internationaux sur son territoire, générant des crises géopolitiques et éliminant les concurrents potentiels.

En d'autres termes, les États-Unis ont créé un "empire vide" totalement parasitaire (en 2001, 70% de la population américaine travaillait dans le secteur financier et les services connexes) basé sur la production de dollars, tandis que le reste du monde produit les biens qui sont échangés contre des dollars. "La mondialisation", dit Qiao Liang (photo, ci-dessous), "n'est rien d'autre qu'une lubie financière prise en otage par le dollar américain" [3].

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Dans l'article précédent, que je cite ci-dessus et intitulé L'ennemi de l'Europe, il était largement fait référence à la guerre du Kosovo comme à un "conflit américain au cœur de l'Europe" visant à polluer le climat d'investissement sur le Vieux Continent et à tuer dans l'œuf un rival potentiellement dangereux : l'euro. En fait, avant la guerre du Kosovo, rapporte l'ancien général chinois, 700 milliards de dollars erraient en Europe sans pouvoir être investis nulle part [4]. Une fois la guerre commencée avec le soutien des gouvernements collaborationnistes européens (celui de l'Italie en particulier), 400 milliards de dollars ont été immédiatement retirés du sol européen. 200 milliards sont retournés directement aux États-Unis. Une autre tranche de 200 milliards est allée à Hong Kong, où certains spéculateurs optimistes visaient à utiliser la ville comme tremplin pour accéder au marché de la Chine continentale. C'est à ce moment précis qu'a eu lieu le bombardement "accidentel" de l'ambassade de Chine à Belgrade par des "missiles intelligents" de l'OTAN. Le résultat final : les 400 milliards ont tous coulé dans les caisses américaines.

En novembre 2000, Saddam Hussein a annoncé que les exportations de pétrole irakien seraient réglementées en euros. Le premier décret du gouvernement irakien établi par (et sous) les bombes américaines stipulait le retour immédiat à l'utilisation du dollar pour le commerce du pétrole brut.

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Le même argument peut facilement être appliqué à la crise ukrainienne de 2014, qui a éclaté à un moment où les États-Unis (comme aujourd'hui) ne souhaitaient en aucun cas que les capitaux restent ou soient investis en Europe. La meilleure façon d'empêcher cela était de créer une crise régionale. Une crise qui a également contraint l'Europe à se joindre aux États-Unis pour imposer des sanctions à la Russie.

À ce jour, le seul pays qui a contré ce jeu nord-américain en essayant d'intercepter le flux de capitaux est la Chine. Cela devrait expliquer en partie pourquoi il y a eu une intensification substantielle des crises régionales autour du géant asiatique, de Hong Kong à Taiwan.

Cependant, la recrudescence actuelle de la crise ukrainienne appelle également un autre type de réflexion. En effet, indépendamment de la volonté occidentale d'exacerber au maximum la crise par les provocations (et les opérations "false flag"/"fausse bannière"), la propagande et le non-respect des accords de Minsk, nous assistons à la confrontation de deux modèles opposés d'interprétation de la géopolitique. Dans l'article déjà mentionné, L'ennemi de l'Europe, il était fait référence à l'utilisation des crises géopolitiques par les États-Unis comme instruments subordonnés à la politique monétaire.  Par conséquent, dans le cas ukrainien, nous sommes confrontés à un double niveau de manipulation : géographique/idéologique et financier. La crise géopolitique n'a pas seulement la tâche (cachée) de faire circuler les capitaux vers Washington en affaiblissant la reprise économique de l'Europe post-pandémique, mais elle est également utilisée comme un outil pour maintenir l'Europe dans une condition de "captivité géopolitique" au sein de l'invention géographique/idéologique de l'Occident.

Or, étant donné que la mise en œuvre des stratégies globales des grandes puissances dépend toujours de la force (c'est Staline qui a déclaré "tous les traités sont des vieux papiers, ce qui compte c'est la force"), il faudra faire la distinction entre un modèle de géopolitique subordonné à la finance (il ne faut pas oublier que l'abattage d'un avion russe grâce aux systèmes de l'OTAN en Turquie a également entraîné une fuite des capitaux qui ont quitté Moscou et Ankara en 2015) et un modèle classique ou traditionnel qui reste (volontairement ou non) lié à l'idée d'Élisée Reclus selon laquelle la géographie n'est rien d'autre que l'histoire dans l'espace [5] et à la notion de Lebensraum développée par Friedrich Ratzel (photo).

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Ce concept mérite un bref développement, étant donné l'interprétation erronée dont il a fait l'objet afin de présenter la géopolitique comme une sorte de pseudo-science nazie (une opération qui n'a déjà pas beaucoup de sens si l'on considère que Ratzel est mort en 1904) (ndt: et ne développait nullement des théories qualifiables de "racistes", cf. http://robertsteuckers.blogspot.com/2013/10/friedrich-ratzel.html ). Le Lebensraum (espace de vie) est profondément lié à la relation entre l'homme/les gens et le sol/l'espace. L'espace de vie, dans la théorie de Ratzel, se développe selon deux lignes de croissance (Wachstum) qui incluent tous les phénomènes détectables dans l'espace : une croissance verticale et une croissance horizontale. Les phénomènes sont les signes vitaux du lien entre l'homme et le sol : champs cultivés, mais aussi lieux de culte, écoles, œuvres d'art et industries. Cette connexion génère l'idée politique, le ciment spirituel de l'État et l'expression la plus élevée de la croissance verticale, c'est-à-dire de l'État lui-même en tant qu'organisme spirituel. La croissance horizontale, en revanche, est liée à la pure expansion militaire et à l'État en tant qu'organisme biologique. Toutefois, cette expansion doit suivre les phénomènes sur le territoire, dans le sens de préférer la direction qui permet une plus grande continuité entre le centre et la périphérie [6]. Il est évident qu'une telle élaboration théorique se traduit directement par une condamnation de l'impérialisme moderne, qui ne connaît pas de frontières mais uniquement et exclusivement des zones de sécurité.

La géopolitique subordonnée à la finance, en fait, est fondée non pas sur la sauvegarde du limes, mais sur le contrôle et la gestion des flux de capitaux (même en recourant à la force militaire pour les manipuler) comme moyen de contrôler le flux des ressources à travers les carrefours géopolitiques (par exemple, le canal de Suez ou le détroit de Malacca). La géopolitique classique, au contraire, est basée sur le contrôle logistique du voisin immédiat comme espace de projection et d'influence. En ce sens, par exemple, on pourrait interpréter la colonisation grecque de l'espace autour de la mer Noire (qui était crucial pour l'accès aux céréales produites par les Scythes et les Sarmates) dans l'Antiquité [7].

Aujourd'hui, l'annexion de la Crimée par la Russie (alors qu'elle n'a été incluse dans les frontières ukrainiennes que dans les années 1950), outre le fait que le droit international est souvent interprété toujours à l'avantage de la puissance hégémonique qui l'a créé, peut et doit également être interprété dans un sens traditionnel. Empêcher que cet avant-poste (après la réduction progressive de la marge de manœuvre suite à l'effondrement de l'URSS) ne passe sous le contrôle de l'OTAN a à la fois un sens purement stratégique et une valeur en termes de lien spirituel entre la terre et les gens et, par conséquent, de réaffirmation de l'espace vital russe. La Russie a également besoin de transporter ses ressources naturelles vers le marché et de promouvoir son économie. La coupure des gazoducs et des oléoducs (ce que les États-Unis tentent de faire par le biais de la crise ukrainienne elle-même) aurait (et a) donc un impact non seulement sur l'économie russe mais aussi (et peut-être même de manière plus décisive) sur le destinataire final : l'Europe occidentale [8].

Ici, une autre considération entre également en jeu. La reconnaissance russe des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk (qui en soi ne peut être critiquée par ceux qui, par exemple, ont créé de toutes pièces le Kosovo ou le Sud-Soudan par simple opportunisme géopolitique) a une double valeur. Ceci est lié à la fois au discours précédent sur la réaffirmation de l'espace vital russe (et comme l'achèvement d'un processus commencé en 2014 après le coup d'État atlantiste à Kiev), et à un projet plus large d'accélération vers la reconstruction de l'ordre mondial. Il semble clair que le choix russe s'impose également comme un défi ouvert au modèle unipolaire. Le Kremlin, en effet, à l'heure où la coopération eurasiatique ne cesse de se renforcer (grâce surtout au travail diplomatique de la Chine et de l'Iran), montre qu'il ne craint absolument pas un nouveau régime de sanctions (principal instrument de l'unipolarité) qui, comme déjà prévu (et malgré les timides efforts du président français Emmanuel Macron pour sauver le Vieux Continent du resserrement de l'étau atlantique), se ferait surtout au détriment du seul vrai perdant de cette crise : une Europe incapable de sauvegarder son propre intérêt et de devenir un pôle autonome et indépendant.

À cet égard, une dernière considération s'impose pour tous ceux qui, en Europe occidentale, regardent la Russie avec un espoir excessif. Bien que la Russie soit un exemple d'opposition à l'idée unipolaire, elle poursuit naturellement son propre intérêt national. Ce n'est pas la Russie (également beaucoup trop patiente à cet égard) qui sauvera l'Europe. Toutefois, dans le cas ukrainien, Moscou a le mérite de mettre l'Europe devant le fait accompli et de souligner davantage le rôle néfaste de l'Alliance atlantique en tant qu'instrument de coercition du Vieux Continent.

NOTES:

[1] Voir Wang Huning America against America, Shanghai Arts Press, Shanghai 1991.

[2] Qiao Liang, L’arco dell’impero con la Cina e gli Stati Uniti alle estremità, LEG Edizioni, Gorizia 2021, p. 101.

[3] Ibidem, p. 63.

[4] Ibidem, p. 109.

[5] "La géographie n'estrien d'autre que l'histoire dans l'espace, tout comme l'histoire est la géographie dans le temps". Cette phrase apparaît, mise en exergue, dans chacun dessix volumes de l'oeuvre monumzentale du géographe français, L’homme et la terre (Hachette, Parigi 1906-1908).

[6] Voir F. Ratzel, Politische Geographie, R. Oldenbourg, Monaco-Lipsia 1897.

[7] Il ne faut pas oublier le fait qu'aujourd'hui encore, la Russie et l'Ukraine sont parmi les principaux exportateurs de blé au monde. 50% du  blé importé par Israël, par exemple, vient d'Ukraine.

[8] De la même façon, la Chine, avec la Nouvelle Route de la Soie, cherche à construire un modèle eurasien de coopération et de développement, aussi pour donner une force propulsante à sa propre production économique intérieure. Le fait de fomenter des crises le long du parcours de cette route de la soie nuit non seulement à l'économie chinoise mais aussi à tous les pays d'Asie centrale et méridionale qui, via ce projet infrastructurel, visent à améliorer leurs propres capacités de développement.