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samedi, 09 février 2019

La stratégie perdante du Président Trump: Contrôler le Brésil et affronter la Chine

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La stratégie perdante du Président Trump: Contrôler le Brésil et affronter la Chine

par James Petras

Article original de James Petras, publié le 8 janvier 2019 sur le site Unz Review
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr  


Les États-Unis adoptent un régime voué à l’échec et menacent l’économie la plus dynamique du monde. Le président Trump a fait l’éloge du président brésilien nouvellement élu, Jair Bolsonaro, et promet de promouvoir des liens économiques, politiques, sociaux et culturels étroits avec lui. En revanche, le régime Trump s’est engagé à démanteler le modèle de croissance de la Chine, à imposer des sanctions sévères et généralisées et à promouvoir la division et la fragmentation de la Chine élargie.
 

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Le choix des alliés et des ennemis de Washington repose sur une conception étroite et à court terme des avantages et des pertes stratégiques.

Dans cet article, nous discuterons des raisons pour lesquelles les relations américano-brésiliennes s’inscrivent dans la poursuite de la domination mondiale de Washington et pourquoi Washington craint la croissance dynamique et le défi d’une Chine indépendante et compétitive.

Le Brésil à la recherche d’un Patron

Le président du Brésil, Jair Bolsonaro, a annoncé, dès le premier jour, un programme visant à inverser près d’un siècle de croissance économique dirigée par l’État. Il a annoncé la privatisation de l’ensemble du secteur public, y compris les activités stratégiques quelles soient financières ; bancaires ; minières : d’infrastructure ; de transport ; énergétiques ou manufacturières. De plus, cette vente en masse va donner la priorité aux sociétés multinationales étrangères. Les régimes civils et militaires autoritaires précédents protégeaient les entreprises nationalisées dans le cadre d’alliances tripartites comprenant des entreprises privées étrangères, étatiques et nationales.

Contrairement aux précédents régimes civils élus qui s’efforçaient – pas toujours avec succès – d’augmenter les pensions, les salaires et le niveau de vie et de faire reconnaître la législation du travail, le Président Bolsonaro a promis de licencier des milliers d’employés du secteur public, de réduire les pensions et de relever l’âge de la retraite tout en abaissant les traitements et salaires afin de faire baisser les coûts et augmenter les profits pour les détenteurs de capitaux.

Le Président Bolsonaro promet d’inverser la réforme agraire, d’expulser, d’arrêter et d’agresser les familles paysannes afin de renforcer les propriétaires terriens et d’encourager les investisseurs étrangers à les remplacer. La déforestation de l’Amazonie et son transfert aux barons du bétail et aux spéculateurs fonciers entraîneront la saisie de millions d’hectares de terres indigènes.
 

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En matière de politique étrangère, le nouveau régime brésilien s’engage à suivre la politique américaine sur chaque question stratégique : Le Brésil soutient les attaques économiques de Trump contre la Chine, soutient l’accaparement des terres d’Israël au Moyen-Orient (y compris le transfert de sa capitale à Jérusalem), soutient les complots américains de boycott et les politiques visant à renverser les gouvernements de Cuba, du Venezuela et du Nicaragua. Pour la première fois, le Brésil a offert des bases militaires au Pentagone et des forces militaires pour toute invasion ou guerre à venir.

La célébration de la remise gratuite des ressources et des richesses par le président Bolsonaro et de l’abandon de souveraineté est célébrée dans les pages du Financial Times, du Washington Post et du New York Times qui prédisent une période de croissance, d’investissement et de reprise – si le régime a le « courage » d’imposer sa trahison.

Comme cela s’est produit lors de nombreuses expériences récentes de changement de régime néolibéral de droite en Argentine, au Mexique, en Colombie et en Équateur, les journalistes et experts des pages financières ont laissé leur dogme idéologique les aveugler face à d’éventuels pièges et crises.

Les politiques économiques du régime Bolsonaro ignorent le fait qu’elles dépendent des exportations agro-minérales vers la Chine et qu’elles sont en concurrence avec les exportations américaines… Les élites agro-industrielles brésiliennes vont s’indigner du changement de partenaires commerciaux… Elles s’opposeront, vaincront et mineront la campagne anti-Chinoise de Bolsonaro s’il ose persister.
Les investisseurs étrangers prendront le contrôle d’entreprises publiques, mais il est peu probable qu’ils puisse accroitre la production en raison de la forte réduction de l’emploi, des salaires et des traitements, à mesure que le marché de la consommation va chuter.

Les banques peuvent accorder des prêts, mais exigent des taux d’intérêt élevés pour des « risques » élevés, d’autant plus que le gouvernement sera confronté à une opposition sociale accrue de la part des syndicats et des mouvements sociaux, et à une violence accrue par la militarisation du contrôle de la société.

Bolsonaro n’a pas de majorité au Congrès, qui dépend du soutien électoral de millions de fonctionnaires, de salariés, de retraités et de minorités raciales et de genre. L’alliance du Congrès sera difficile sans corruption et sans compromis… Le cabinet de Bolsonaro comprend plusieurs ministres clés qui font l’objet d’une enquête pour fraude et blanchiment d’argent. Sa rhétorique anti-corruption s’évanouira face aux enquêtes judiciaires et aux révélations.
 

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Il est peu probable que le Brésil fournisse des forces militaires significatives pour les aventures militaires régionales ou internationales des États-Unis. Les accords militaires avec les États-Unis n’auront que peu de poids face à la profonde agitation intérieure.

Les politiques néolibérales de Bolsanaro vont creuser les inégalités, en particulier parmi les cinquante millions de personnes qui sont récemment sorties de la pauvreté. La prise de contrôle du Brésil par les États-Unis enrichira Wall Street qui prendra l’argent et s’enfuira, laissant les États-Unis faire face à la colère et au rejet d’un allié dépouillé.

Les États-Unis face à la Chine

Contrairement au Brésil, la Chine n’est pas prête à se soumettre au pillage économique et à renoncer à sa souveraineté. La Chine suit sa propre stratégie à long terme qui se concentre sur le développement des secteurs les plus avancés de l’économie – y compris l’électronique de pointe et les technologies de communication.

Les chercheurs chinois produisent déjà plus de brevets et d’articles scientifiques référencés que les États-Unis. Ils diplôment plus d’ingénieurs, de chercheurs de pointe et de scientifiques innovateurs que les États-Unis, grâce à des niveaux élevés de financement de l’État. La Chine, avec un taux d’investissement de plus de 44 % en 2017, surpasse de loin les États-Unis. La Chine a progressé, passant d’exportations à faible valeur ajoutée à des exportations à forte valeur ajoutée, y compris des voitures électriques à des prix compétitifs. Par exemple, les i-phones chinois font concurrence à Apple en termes de prix et de qualité.

La Chine a ouvert son économie aux multinationales américaines en échange de l’accès à une technologie de pointe, ce que Washington appelle des saisies « forcées ».

La Chine a encouragé la conclusion d’accords multilatéraux sur le commerce et l’investissement y compris avec plus de 60 pays dans le cadre d’accords à grande échelle et à long terme sur les infrastructures en Asie et en Afrique.

Au lieu de suivre l’exemple économique de la Chine, Washington se plaint du commerce déloyal, du vol technologique, des restrictions du marché et des contraintes étatiques sur les investissements privés.

La Chine offre à Washington des possibilités à long terme d’améliorer sa performance économique et sociale – si Washington reconnaît que la concurrence chinoise est une incitation positive. Au lieu d’investir massivement dans la modernisation et la promotion du secteur des exportations, Washington s’est tournée vers des menaces militaires, des sanctions économiques et des droits de douane qui protègent les secteurs industriels américains obsolètes. Au lieu de négocier pour des marchés avec une Chine indépendante, Washington prend le contrôle de régimes vassaux comme celui du Brésil sous le gouvernement du président nouvellement élu Jair Bolsonaro, qui compte lui sur le contrôle économique et les prises de contrôle américains.

Les États-Unis peuvent facilement dominer le Brésil pour des gains à court terme – profits, marchés et ressources, mais le modèle brésilien n’est ni viable ni durable. En revanche, les États-Unis doivent négocier, discuter et accepter des accords concurrentiels réciproques avec la Chine… Le résultat final de la coopération avec la Chine permettrait aux États-Unis d’apprendre et de se développer d’une manière durable.

Conclusion

Pourquoi les États-Unis ont-ils choisi la voie de contrôler un Brésil rétrograde et de négliger le rôle d’une future nation leader ?

Fondamentalement, les États-Unis sont structurellement ancrés dans un système politique fortement militarisé qui est guidé par la quête de la domination mondiale – « l’impérialisme ». Les États-Unis ne veulent pas concurrencer une Chine innovante, ils cherchent à contraindre la Chine à démanteler les institutions, les politiques et les priorités qui font sa grandeur.

Washington exige que la Chine renonce à l’autonomie relative de l’État, augmente la pénétration de ses secteurs stratégiques par les États-Unis et s’appuie sur des banquiers et des universitaires adeptes du marché libre. La politique économique américaine est façonnée par des banquiers, des spéculateurs corrompus et des lobbyistes qui défendent des intérêts régionaux particuliers, y compris des régimes comme Israël. La politique économique de la Chine est façonnée par des intérêts industriels, guidés par les objectifs stratégiques de l’autorité d’un État centralisé, capable et désireux d’arrêter des centaines de hauts fonctionnaires à la volée.

Les États-Unis ne peuvent pas contenir la trajectoire ascendante de la Chine avec un encerclement militaire – parce que la stratégie économique de Pékin neutralise les bases militaires américaines et défait les contraintes douanières par la diversification de nouveaux accords commerciaux majeurs. Par exemple, la Chine négocie avec l’Inde pour augmenter considérablement les importations de produits agricoles, y compris le riz, le sucre, le lait, la farine de soja et le coton. L’Inde a actuellement un déficit commercial important avec la Chine, en particulier les machines et les produits industriels et est désireuse de remplacer les exportateurs américains. La Chine a conclu d’importants accords commerciaux et d’investissement en Asie du Sud-Est, Corée du Sud, Japon, Pakistan, Russie et Australie ainsi que dans les pays africains et d’Amérique latine (Brésil et Argentine) et au Moyen-Orient (Iran, Irak et Israël).

Les États-Unis n’ont que peu d’influence pour « contenir » la Chine, même dans les secteurs de haute technologie, car la Chine est moins dépendante du savoir-faire américain. Washington a conclu des accords avec la Chine, augmentant les exportations de voitures et de divertissements ; la Chine peut facilement accepter d’appliquer des mesures de lutte contre le « vol de propriété intellectuelle », d’autant plus que ce n’est plus un facteur important puisque la plupart des innovations chinoises sont créées au niveau national. De plus, les grandes entreprises et Wall Street exigent que le régime Trump parvienne à un accord d’ouverture des marchés avec la Chine et ignore ses ennemis autarciques.
Compte tenu de la vigueur soutenue de l’économie chinoise (6,5 % du PIB en 2018), de l’importance accrue accordée à l’expansion des services sociaux, du marché de la consommation et de l’assouplissement du crédit, les politiques douanières coercitives de Trump sont condamnées et les menaces militaires ne feront qu’encourager la Chine à étendre et à améliorer ses programmes militaires de défense et spatiaux.

Quels que soient les accords commerciaux temporaires et limités qui découleront des négociations entre les États-Unis et la Chine, le régime Trump poursuivra son programme impérial unipolaire de contrôle de régimes vassaux, comme le Brésil, et de lutte contre la Chine.

L’avenir appartient à une Chine indépendante, innovante et compétitive, et non à des régimes vassalisés, militarisés et soumis comme le Brésil.

James Petras

samedi, 02 février 2019

Geopolítica, de la bipolaridad a la multilateralidad

Salvador González Briceño

Ex: http://www.elespiadigital.com 

La crisis de los poderes mundiales de la posguerra fría, como base de la geopolítica crítica: SGB

La geopolítica mutó, para bien, porque perdió su carácter imperialista cuando que se le terminó el piso de la bipolaridad en la posguerra fría. Como método para entender el mundo desde las potencias, la geopolítica se abrió paso proponiendo conocer de la importancia de la geografía, física y humana, de la política y los estados en las relaciones internacionales. Es decir, en las relaciones de poder.

La geopolítica surgió en 1900 cuando el primer pensador, Rudolf Kjellén, la propuso en su libro Introducción a la geografía sueca. Pronto sería puesta a prueba durante las guerras mundiales del siglo XX, cuando las potencias se dieron a la guerra. Vendrían otros estrategas, como Mackinder y Haushofer entre otros, a complementar lo que luego se conocería como la geopolítica tradicional o clásica.

Luego entonces, la geopolítica fue adoptada desde los centros de poder mundial, para atender sus necesidades como países involucrados en la confrontación violenta, poniendo a prueba sus armamentos, su potencial, su estatus con respecto a lo demás, en aras del dominio del resto del mundo.

La geopolítica la utilizaron tanto la Alemania nazi de Hitler, como la Bretaña imperial de Churchill, la Francia de De Gaulle, los Estados Unidos de Roosevelt o la URSS de Stalin, con sus maquinarias de guerra más feroces de su tiempo, además que aceleraron sus industrias militares o la industria en su rama militar.

En los tiempos de la guerra entre las potencias desarrolladas —I Guerra Mundial y II Guerra Mundial—, se daba el tránsito del capitalismo al imperialismo, con ansias expansionistas de reparto territorial en amplias zonas de control probable, tanto de países enteros como de recursos naturales.

Adoptada y probada, la geopolítica salió bien librada. Mostró su utilidad a las potencias: primero a los países del frente de guerra —en sus modalidades como geopolítica anglosajona, renana y nipona—, luego durante la llamada guerra fría al término de la IIGM con la rendición de Japón tras el lanzamiento de las bombas nucleares sobre Hiroshima y Nagasaki.

Luego vendría el derrumbe del Muro de Berlín y la caída de la URSS que significó la pérdida de rumbo del llamado “socialismo real”, que dio pie a la llamada posguerra fría. Aquello desde el punto de vista de las relaciones internacionales y los equilibrios que logró la bipolaridad.

Pero este esquema fue puesto en jaque frente a la aparente unipolaridad de Estados Unidos, toda vez que apareció como el vencedor universal. La vigencia de la geopolítica clásica comenzó a perder influencia y sentido, en tanto sus bases fueron removidas.

En lo que se dio el reacomodo de las propias potencias a nivel mundial bajo este nuevo paradigma, los geopolíticos tradicionales intentaron seguir con sus preceptos en tanto las mutaciones no terminaron de definirse.

Pero la influencia de la globalización con sus políticas neoliberales, terminó poniendo en duda su plena vigencia. Las relaciones internacionales cambiaron con el trastocamiento del orden anterior, y hacia fines del siglo XX con el cambio de procedimientos y las alteraciones que impactaron el orden internacional, como las afectaciones al Estado nacional y al derecho internacional.

Todo lo anterior derivó serias críticas para la geopolítica clásica. Los analistas cuestionaron el método de la geopolítica, y contribuyeron a crear un cambio de visión. De ahí, de los nuevos escenarios de la posguerra, surgió la geopolítica crítica.

Se trataba ya de la geopolítica como alternativa, en el contexto de un mundo que dejó de ser bipolar y se convertía a pasos agigantados al multipolar. Es decir, que ahora la geopolítica sirve también para colocar en el escaparate a los poderosos.

Sí, y para cuidarse de sus ambiciones, de sus intentos golpistas, de sus guerras híbridas, de sus estrategias futuristas de la moderna (que no posmodernidad o posmodernismo, cual postura ideológica para la perdición analítica, entre otras razones) ciberguerra, sus fake news, los golpes suaves, etcétera.

De ahí la necesaria visión multilateral y multidisciplinaria de la geopolítica crítica, como alternativa, ahora también para el resto del mundo. La geopolítica se volvió generalizada, para el estudio y puesta en práctica de políticas, por todos los países que no se quieran quedar atrás con respecto al resto.

Es por ello que los países, antes víctimas de la disputa entre potencias por sus riquezas naturales, hoy aprenden a cuidarse, a buscar alianzas estratégicas. Los países con recursos ahora saben —o por lo menos es su obligación y de alta prioridad saber—, que la geopolítica crítica es una alternativa que posee como característica principal cuidar de su potencial en general; por su ubicación geográfica y recursos, como sus mares, minería etcétera, en la vecindad con otros estados y para unas relaciones internacionales de equilibrio y respeto.

En otras palabras, desde la posguerra fría la geopolítica dejó de ser un instrumento solo al servicio de las grandes potencias, como los Estados Unidos, Gran Bretaña, la Unión Europea, incluso de Rusia, China o la India. Hoy es útil para todos, en su modalidad como geopolítica crítica. Sin perder las bases del pasado, pero con un nuevo enfoque.

Fue en los años 90 en donde las relaciones internacionales fueron trastocadas, a partir de ahí otros países se abrieron a la disputa por un rol distinto, ajeno al sometimiento de la posguerra y lejos del dominio tradicional de las potencias, imperiales y violentas. Puesto que la globalización jaqueó el poder mismo de los otrora países poderosos.

Por eso, hoy no se habla solo de países, aislados, como de grupos de países que operan para contrapeso de los países hegemónicos. Las confrontaciones pasaron de la bipolaridad —EU vs Rusia—, a los contrapesos de la multipolaridad, con países emergentes como China, India o Irán, Irak o Corea del Norte.

Por eso la importancia de la geopolítica como herramienta hoy. Porque el análisis del poder mundial pasa ahora por la multilateralidad. Les guste o no aquellos pensadores de países siempre ganadores en el pasado, acostumbrados atropellar al resto.

Claro que subsisten todos los peligros de las guerras, incluso nucleares porque nadie ha renunciado a ellas —todo lo contrario—, se crean amenazas incluso mediante las noticias falsas, de campañas propagandísticas contra gobiernos no afines acusados de “terroristas”.

Bienvenida la Geopolítica Crítica —autores en la “periferia” sobran; muy importantes, por cierto—, herramienta útil para todos. El reto está en colocarla a la altura del análisis, en países como Latinoamérica y México. Más acá, con EUA, generador de invasiones y guerras en el mundo, como vecino.

vendredi, 01 février 2019

Le président autrichien accuse les USA de traiter l’UE comme des colonies

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Le président autrichien accuse les USA de traiter l’UE comme des colonies

par Charles Sannat

La grosse colère autrichienne est liée à la double affaire Nord Stream 2, qui est un gazoduc censé alimenter l’Europe en gaz russe, et les sanctions avec l’Iran qui empêchent les pays européens de commercer avec Téhéran.

Pour le président autrichien, les USA traitent l’UE « comme des colonies ». Cela semble pour lui une découverte alors que nous, nous le savions depuis bien longtemps.
 
L’Union européenne, au lieu de tenter de se créer et de rêver sa puissance en éradiquant ses propres peuples et ses propres nations, ferait mieux de se penser par rapport aux grands acteurs que sont la Russie, la Chine et les États-Unis.
 
C’est en construisant une unité de nos différences et de nos identités aussi précieuses les unes que les autres pour affronter un monde extérieur fort peu sympathique que nous construirons une grande Europe fédérale utile et aimée.
 
Charles SANNAT
 
Le président fédéral autrichien Alexander Van der Bellen s’en est pris aux États-Unis pour leur attitude envers les pays membres de l’UE, rapporte Die Standard. Selon le média, c’est les différends sur le Nord Stream 2 et l’accord nucléaire avec l’Iran qui ont suscité une telle réaction du chef d’État.
 
Washington traite les pays membres de l’UE « comme des colonies », estime le président fédéral autrichien Alexander Van der Bellen cité par le quotidien Die Standard.
 
Selon le média, ces déclarations sont liées à la pression exercée par les États-Unis sur l’UE au sujet de la construction du gazoduc Nord Stream 2 et de l’accord sur le programme nucléaire iranien.

Il a fait remarquer que l’UE, qui est la troisième économie mondiale, doit être plus « sûre d’elle » sur la scène internationale.
 
Le projet Nord Stream 2 est réalisé par la société russe Gazprom, en coopération avec les entreprises européennes Engie, OMV, Shell, Uniper et Wintershall. Le gazoduc reliant la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique devrait être mis en service d’ici fin 2019. Les États-Unis s’opposent énergiquement à ce projet.
 
La Russie a déclaré plusieurs fois qu’il s’agissait d’un gazoduc absolument commercial et compétitif. Par ailleurs, Vladimir Poutine a souligné que l’élaboration du Nord Stream 2 ne signifiait pas pour autant l’arrêt du transit de gaz russe via l’Ukraine.
 
Source Agence russe Sputnik.com ici

jeudi, 24 janvier 2019

Towards Continental Unity

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Towards Continental Unity

Iure Rosca
Ex: http://flux.md
 

My approach to the European issue is not an original one. Europe was divided into two occupation areas after the Second World War by the two winning superpowers, the USSR and the US.The Soviet empire collapsed. The US defeated the Cold War, and the winner imposed its conditions for the capitulation to the countries of the former communist camp.In an apparently strange way, for the first time in history, the defeated countries gladly accepted the conditions of surrender as a charity, as a liberation.The primary cause of this naive jubilation lies in the loss of the cognitive, cultural, civilization war of the Soviet camp long before the collapse of communism.Western mass culture, the consumer society’s magnetism, the fascination exercised by the capitalist model as a whole has conquered the collective mentality in the East. That is, the communist regimes have not been prepared to resist a non-military war that has taken place for decades.It followed the soft occupation of countries of the former Soviet zone of influence.

Therefore, in order for the economic, political and military occupation to succeed (for the countries absorbed in the NATO bloc), in the initial phase it was necessary to perform a psychological, intellectual, civilization occupation.The process of expanding the globalized West to Eastern Europe has been called democratization, transition to the market economy, and other components of social engineering that shaped the political and economic model of our countries.Therefore, our countries have become societies that have imitated, parodied, copied the western model. And being aware of the position of imitators, the new political elites in the ex-communist space took over completely, without any discernment, all the directives given by the power centers of the global oligarchy: the US, the IMF, the World Bank, the European Union, the WTO, etc.

But after almost three decades of transition from the communist to the liberal model, the economic and social situation in our societies has catastrophically degraded.These failures have been explained for a long time by the incompetence and corruption of governments that have succeeded over the past decades, which have been unable to implement all the reforms dictated by Washington and Brussels. This was the message sent by the emissaries of the Western financial and political organizations, which were repeated by the local politicians and the media.

But time passed, elections brought other political actors to the top of state hierarchies, but the social-economic situation continued to worsen. And then, slowly, some of us began to recover from the state of intellectual and volitional trance. Intellectuals with deeply patriotic feelings insisted on deepening the knowledge of the essence of our problems. Thus, naturally, many of the former anticommunists, including myself, have become the new dissidents who unleash the new type of imperialism, an imperialism usually associated with the US and with the European bureaucracy in Brussels, but which is in fact an extraterritorial one, even though most members of the global elite are based in America.

The discovery of the truth that the US is actually a captured state, where the power is usurped by the banksters and the military-industrial complex, of the corporatocracy as a non-state actor, more powerful than states, and subordinated them for their own financial interests: this was like a real shock for us. Today the idea that just as the Russian people were the first victim of communism, so the American people is the first victim of globalism has already become a common one. Yet, in order to regain national sovereignty, European countries naturally tend to emerge from the American protectorate. And the rise of populist political parties on our continent is the most eloquent proof of this movement of national emancipation. In this regard, I would like to emphasize an extremely sensitive difference of approach between intellectuals and political parties in the West and East of our continent. While the avant-garde of Western European dissidents advocates strongly the end of the US military occupation and the liquidation of NATO, and this message is increasingly verbalized by some anti-system political parties, eastern European countries are more reluctant.

I find it particularly important for all those who really want to restore the unity of our continent to seriously treat the difference of perception over Russia in the West and East of our continent. While Western nationalists are habitually showing a special sympathy for Russia, eastern nationalists regard their great neighbor with more caution, and often with animosity. The historical causes for these attitudes, ranging from hatred and hostility to restraint and circumspection, are well known. They are especially related to the tragic experience of our peoples in the twentieth century, when Communism was imposed by Soviet Russia (or the USSR, which is the same thing). The former Soviet republics and Warsaw Pact countries have inherited profound psychological traumas as a result of the dictatorship and repression of the communist regime. People in these countries usually say, “The Russians have occupied us, the Russians have terrorized us, the Russians deported us.”

This tragic historical confusion between the communist regime and the Russian people is the main subject of manipulation, used by the Atlanticist networks of influence. In such a favorable psychological climate, the exploitation of the subject of “Russian danger” and the nourish of Russophobia became a very easy task for professionals of social engineering. The concept launched by American neoconservatives (see the memorable speech of Donald Rumsfeld in 2003) about Old Europe and New Europe  is part of the same strategy. If Western European partners of American strategists are not so motivating to manifest sufficient level of anti-Russian attitude, Eastern Europeans are always ready to play the game which is ordered from Washington. This issue is more or less familiar for many people.

But I would like to elaborate further on this idea. I have repeatedly affirmed that the common geopolitical opponents of all European peoples, who are based in the US, will be successful in instigating and exacerbating such a type of reactions by using a classical trick named phishing or management of perceptions and behavioruntil Russia itself will defuse this ideological bomb.If we start from the premise that the principle ”Know your enemy” is one familiar to us, and our geopolitical adversary is unequivocally identified, now we should look at our Russian friends and allies without whom the idea of continental unity would be an illusion. Once again, as the Russian philosopher Ivan Ilyn said, “The Soviet Union is not Russia.” This should be the core element of speech that the peoples of Eastern Europe expect from the current leadership in Moscow. In other words, as long as Russia’s current leadership will keep an ambiguous attitude toward Soviet past and will not want to categorically distance themselves from the USSR crimes committed against all the peoples who were under its domination, the technique of our artificial division will work impeccably. We need historical reconciliation between the Russian people and the other peoples in the ex-communist area. And the initiative could be emanating from Moscow. My call to our Russian friends is to use the principle “Disarm your enemy!” Take from them their perverse argumentation which empoisons our relations.

In recent years, financial, speculative, virtual, non-productive capitalism has been largely criticized. All these criticisms are perfectly valid and I fully adhere to them. As I enthusiastically adhere to the resurrection of the European peoples under the flag of populism. I am also the advocate of economic protectionism, the restoration of the national sovereignty of the European peoples, which implies at least the disappearance of NATO and the EU. But I am equally close to those intellectuals who believe that liberalism is moving towards its historic end. The triumphal march of the so-called French Revolution ends in a lamentable manner. And if we agree that the era of all political theories that have accompanied Modernity, communism, fascism, (nazism) and even liberalism are overcome, then there is no more pressing task than developing the future model of organizing our societies. The first fundamental principle for our efforts could be based on following idea: Any society in which there is at least one value which is higher than money is better than capitalism.

I personally advocate for a post-liberal, post-capitalist, post-American Europe that builds its future based on Tradition, Christianity, Family, the millennial civilization of our continent under the conditions of post-modernity. I am convinced that our economic, political and military power, even if it would grow tenfold, and even if we succeed in overcoming the dividing lines that separate us today, will be extremely fragile without our spiritual rebirth.Europe does not exist or at least is a monstrous caricature without Christ in the center of the world, in the heart of our continent, in the soul of every European. The motto ”Nihil sine Deo” (”Nothing without God”) is a nobility blazon of our civilization.

 

Iurie Roșca is a politician, journalist, author, editor and translator.He is now the president of People’s University, which is a school of political leadership, an international think-tank and printing house.

Source: https://www.vision-gt.eu

mardi, 22 janvier 2019

Salvini, les Polonais et l'euroscepticisme

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Salvini, les Polonais et l'euroscepticisme

Ex: http://www.dedefensa.org

Il y a cinq ans encore, la chose aurait déclenché des haussements d’épaule de dérision, des sourires condescendants et quelques gloussements tonitruants. Aujourd’hui, “la chose” vient parfaitement à son heure ; elle est évidente et irrésistible, elle ne fait rire personne sinon de l’ironie d’elle-même et ouvre des horizons à bien d’autres. Nous voulons parler de l’affirmation du vice-Premier italien et ministre de l’Intérieur Matteo Salvini, poursuivant sa croisade européenne (Orban, Le Pen, etc.) et visitant la Pologne, et déclarant à l’issue des entretiens avec les dirigeants polonais : « Il est temps de remplacer l'axe franco-allemand par un axe italo-polonais »

Salvini a été prolixe et très écouté, et entendu, et approuvé par tous ses interlocuteurs polonais, lors de ses divers entretiens et de sa conférence de presse clôturant sa journée de travail d’hier à Varsovie. Il a annoncé avoir proposé à Jaroslaw Kaczynski, chef du parti de gouvernement PiS, un “programme commun” entrant dans le projet d’un vaste rassemblement des “souverainistes” (Sovranisti) européens, avec l’objectif de former un grand parti au Parlement européen (élections en mai prochain). Salvini a estimé que les Polonais et lui étaient d’accord “à 90%” sur ce programme, et précisant également qu’un seul sujet n’avait pas été abordé, – les sanctions contre la Russie, et en général les relations avec la Russie, là où le désaccord est profond entre les deux pays... (Tactique désormais établie et éprouvée : mettre de côté les points de désaccord de politique étrangère pour se concentrer sur les questions européennes.)

« “J'ai proposé, afin de dépasser les différences entre partis, différences dues à des raisons de géographie et de tradition culturelle, un contrat pour l'Europe, un pacte pour l'Europe, qui n'existe pas encore, je ne suis pas venu avec un produit déjà fini”. Quelle forme prendrait ce pacte ? Selon Matteo Salvini, il pourrait s'agir d'un “pacte pour l'Europe” en dix points. Les populations des différents pays européens décideraient ensuite “si elles sont d’accord ou pas d’accord” avec ces propositions. “Nous y travaillerons dans les prochains jours. Avant les élections. Les pactes, il vaut mieux les présenter avant les élections qu’après”.

» Déclarant espérer qu'une alliance de “tous ceux qui veulent sauver l'Europe” occupera la deuxième ou même la première place au sein du Parlement européen, il a répété qu'il était temps “de remplacer l'axe franco-allemand par un axe italo-polonais”, et qualifié de “vrais eurosceptiques” ceux qui ont gouverné l'Europe ces dernières années. [...]

» Dès le début de sa visite de quelques heures à Varsovie, il Capitano avait affirmé que l'Italie et la Pologne seraient les “protagonistes du nouveau printemps européen” qu'il appelle de ses vœux pour réformer l'Union européenne. Il s'adressait aux médias à l'issue d'une rencontre avec le ministre polonais de l'Intérieur, Joachim Brudzinski, [qui] a souligné de son côté que l'Italie et la Pologne étaient d'accord sur presque tous les sujets abordés. Les deux pays, a-t-il insisté, “ne comptent pas quitter l’Union européenne” car ils sont “partie intégrante de l’Union”. Ils souhaiteraient au contraire la “renforcer” en “améliorant la sécurité” et la “réformer” afin qu'elle soit “plus proche des citoyens que des élites”. » 

Parlant précisément du projet de renouvellement du Traité de l’Élysée de 1963, qui doit être signé par Macron et Merkel le 22 janvier prochain, Breitbart-UK écrit à propos de la visite de Salvini en Pologne, pour préciser dans quelle circonstance a été suggérée l’idée de remplacer un axe par un autre : « Faisant allusion à un autre pacte évoqué mercredi, – celui de Macron et de Merkel prévoyant d’intégrer leurs deux pays sur des matières telles que la défense et les affaires étrangères comme un arrangement précurseur de l’“Europe souveraine”, – Mr Salvini a interrogé : “Je me demande si un axe polono-italien ne pourrait pas remplacer l’axe franco-allemand ?” »  

Le projet de renouvellement du Traité de l’Élysée représente ainsi la plus parfaite trahison de ce que devait être le premier traité, tel qu’imaginé par de Gaulle et très rapidement défiguré par l’ajout d’un “Protocole” liant l’Allemagne à l’OTAN et aux USA, par le Bundestag, quelques mois après sa signature. Macron-Merkel achèvent ainsi la complète liquidation de la souveraineté, conformément à la tradition globaliste que ces deux dirigeants totalement discrédités entendent imposer avant leur naufrage commun, ou en même temps que leur naufrage commun, – car Macron et Merkel ont au moins et sûrement quelque chose en commun, qui est leur naufrage politique : 

« La France et l'Allemagne doivent élaborer des politiques de défense, des politiques étrangère et économique communes dans le cadre d'un pacte de “jumelage” sans précédent, considéré comme un prototype pour l'avenir de l'Union européenne. Angela Merkel et le président Macron vont signer ce mois-ci un traité qui permettra à ces deux pays voisins de présenter un front diplomatique uni et d'agir conjointement dans les missions de maintien de la paix.

» Les régions situées de part et d'autre de la frontière franco-allemande seront encouragées à former des “Eurodistricts” comprenant des réseaux fusionnés d'eau, d'électricité et de transports en commun. Berlin et Paris offriront des liquidités pour encourager ces zones transfrontalières, qui pourraient impliquer des hôpitaux partagés, des projets conjoints ou des projets environnementaux communs. » (Selon le Times de Londres du 10 janvier.)

... Par conséquent, on ne rit plus à l’idée de Salvini, de remplacer l’axe franco-allemand, parce que cet axe est devenu nocif, catastrophique et mortifère à l’image de leurs deux opérateurs, Macron et Merkel. Les deux dirigeants faillis, ayant conduit l’Europe à la faillite, ayant capitulé partout où cela pouvait être fait face au monstre bureaucratique de Bruxelles ; lequel monstre, à la fois Orque etMordor, est bien loin d’être un substitut et un outil de la puissance allemande, mais bien une monstrueuse machinerie produisant d’elle-même des politiques catastrophiques pour tous les peuples.

La visite de Salvini en Pologne confirme donc bien qu’une immense bataille est désormais engagée en Europe et au sein de l'Europe, et le premier acte aura lieu en mai prochain. Cette bataille sera engagée dans des conditions nouvelles, qui sont apparues subrepticement dans les déclarations italiennes et polonaises :

• Les “eurosceptiques”, désormais, ce ne sont plus les souverainistes et les populistes, mais les globalistes du type du tandem Macron-Merkel, parce qu’ils sacrifient la sécurité de l’Europe, notamment avec leur politique d’immigration et le transfert de tous leurs pouvoirs au réseaux financiers et bancaires internationaux. Ce tournant autant dialectique que tactique est rendu possible par la montée vertigineuse du mécontentement politique dans le sens du populisme, et bien entendu l’important événement des Gilets-Jaunes en France.

• Donc, le but des souverainistes-populistes n’est plus de “quitter l’Europe” mais de “sauver l’Europe” des mains des globalistes. Il s’agit de hausser les principes du “nationalisme” au niveau européen, tout en protégeant les souverainetés des pays-membres... On en revient évidemment et toujours à “l’Europe des patries”. 

• Il y a tout aussi évidemment de la tactique électorale là-dedans : Salvini veut “ratisser très-large” en abandonnant l’aspect négatif prêté aux “eurosceptiques”, surtout à la lumière du catastrophique Brexit ; et en adoptant une tactique d’entrisme qui commencerait par le Parlement Européen. (On voit bien que l’objectif réel de Salvini, c’est bien de parvenir à faire des souverainistes-populistes le premier parti européen au PE.)

• Il nous paraît assez inutile de chercher en détails les impossibilités et les imperfections de cette tactique, – qui, justement, n’est qu’une tactique, et donc un moyen et un outil plutôt qu’un but. Là n’est pas le débat, parce que le débat c’est d’abord de tenter de mettre KO toute la nomenklatura globaliste européenne, dans les gouvernements, au PE, dans les institutions européennes, etc. Après, on verra, parce que la situation politique sera complètement nouvelle et qu’alors tout sera ouvert et possible.

• “Tout sera ouvert et possible”... Y compris, selon notre appréciation, une véritable explosion-révolution de l’intérieur de l’UE, si les souverainistes-populistes l’emportent. L’entrisme, cela sert également à aller poser une bombe dans le cœur grondant de la chose qu’on veut conquérir : quelles que soient les intentions réelles de Salvini, notre sentiment est qu’il est inexorablement poussé d’abord à détruire (d’une façon ou d’une autre et selon ce qui est possible et souhaitable, tout ce qui a rapport avec l’UE en place) ; cela, même s’il se dit meilleur européen que les globalistes, – ce qui est d’ailleurs vrai, – et pas du tout “eurosceptique”, – ce qui est disons à moitié vrai, en poussant un peu pour faire passer l’argument qui a le charme des paradoxes et le panache de l’oxymore...

• Ce que nous désignerions comme un “Moment” historique pour l’Europe, c’est bien ceci que la prépondérance franco-allemande est totalement mise en cause, et elle l’est, et elle peut et doit l’être à juste raison, à cause de la trahison des élites. Il est montré par les divers événements en cours autant que par le comportement et l’action des dirigeants de cet “axe” franco-allemand que cette prépondérance n’a plus aucune légitimité.

 

Mis en ligne le 11 janvier 2019 à 13H40

lundi, 21 janvier 2019

Les États-Unis sont-ils toujours une superpuissance ?

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Les États-Unis sont-ils toujours une superpuissance ?

par Dmitry Orlov

 
Article original de Dmitry Orlov, publié le 11 janvier 2018 sur le site Club Orlov
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr

Certains pensent que les États-Unis sont une superpuissance. Ils citent les chiffres du PIB, les dépenses militaires, la capacité de contraindre divers vassaux américains à accéder aux demandes américaines/israéliennes aux Nations Unies. Ils soulignent également sa capacité à forcer d’autres nations à respecter ses sanctions unilatérales, même si elles sont au mieux inefficaces, généralement contre-productives et tendent à nuire aux alliés des États-Unis. Ne s’agit-il pas là des signes distinctifs d’une véritable superpuissance ?

Voyons voir…. Si les États-Unis étaient un super-héros doté de plusieurs super-pouvoirs, quels seraient-ils ?

La superpuissance pour les nuls et en toute impunité serait certainement sur la liste. Si l’on soustrait l’augmentation de la dette de l’augmentation du PIB, jusqu’à présent, au cours de ce siècle, l’économie américaine s’est contractée, elle n’a pas crue. Une foule d’autres statistiques – chômage, inflation, réserves de pétrole de schiste – ont également été falsifiées. Cette superpuissance est super mal en point, mais elle a la super-capacité de cacher ce fait à la plupart de ses propres citoyens pour le moment en leur envoyant un puissant flux de désinformation dans les médias chaque jour de l’année afin que seuls les plus intelligents d’entre eux puissent le savoir.

Ce super-héros a aussi la superpuissance de gaspiller d’énormes sommes d’argent pour ses forces armées tout en restant incapable de l’emporter (en termes de paix à long terme selon ses propres termes et à son propre avantage) dans tout conflit depuis la Deuxième guerre mondiale – sauf lors de son invasion de la petite île de Grenade et quelques autres escarmouches toutes aussi mineures. La Corée, le Vietnam, l’Afghanistan et l’Irak sont tous des échecs d’une manière ou d’une autre. La capacité de voler des milliers de milliards de dollars sans aller en prison pour cela nécessite sans aucun doute une sorte de superpuissance.

Le dernier super-pouvoir de Captain America est sa gestion politique, étrangement efficace, de ces larbins. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, il a réussi à dépouiller une longue liste de nations de leur souveraineté et il ne l’a pas encore restituée. L’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne et l’Italie figurent sur cette liste, ainsi que le Japon et la Corée du Sud. Captain America garde jalousement son pouvoir d’abuser et d’humilier ces vassaux. Les seules personnes autorisées à diriger ces nations sont celles sur lesquelles Captain America a recueilli suffisamment de preuves compromettantes pour les forcer à démissionner en raison d’un scandale sexuel ou d’un scandale financier au moment où elles tentent de s’opposer à sa volonté.

Maintenant, le truc, c’est que chacun  de ces super-pouvoirs porte en lui sa propre charge de kryptonite.
  • La capacité de s’endetter à l’infini en forçant les nations productives du monde entier à vous exporter des produits en échange de l’argent que vous imprimez, puis en leur empruntant cet argent à de faibles taux d’intérêt. C’est une astuce court-termiste, mais le destin final est toujours le même : la faillite nationale.
  • Gaspiller des milliers de milliards pour se « défendre » (de qui ?) et voler la plus grande partie de cet argent sans que personne n’aille en prison est un tour de passe-passe incroyable, mais en fin de compte, on se retrouve avec un tas de matériel militaire inutile pendant que des nouveaux venus comme la Russie et la Chine vous contournent et vous humilient à leur guise.
  • La capacité de mettre en scène la gestion de vos vassaux internationaux pour qu’ils fassent votre volonté contre la leur ou celle de leurs électeurs est très impressionnante, mais une fois que ces électeurs en auront assez (comme les Gilets Jaunes en France l’ont apparemment fait)… que se passera-t-il ?
Parfois, l’actualité offre un tableau vivant des plus instructifs. Témoin, John Bolton, le conseiller de Trump en matière de sécurité nationale, qui a récemment effectué un voyage à Ankara. Trump a récemment annoncé que les troupes américaines allaient se retirer de Syrie. Pour se donner une certaine contenance, Trump a dit que c’est parce que la « mission était accomplie » – la routine habituelle – parce qu’ISIS a été détruit. Oui, ISIS a été détruit mais par les forces syriennes et russes. Ils ont utilisé l’équivalent de plus de 50 porte-conteneurs chargés d’armes et de fournitures en trois ans d’efforts. Et qui, je vous prie, a armé, équipé et réapprovisionné ISIS à tel point qu’il a fallu tout ce travail pour le détruire ? Croyez-vous un seul instant qu’ISIS a acheté une cinquantaine de conteneurs de matériel militaire dans un bazar à Bagdad ou à Alep ? Au Vietnam, c’était « Il fallait détruire le village pour le sauver ». En Syrie, c’est « Nous devions créer une menace terroriste pour la détruire » – ou pas – et dire que nous l’avons fait.

Retour à Bolton : il s’est rendu en Turquie pour dire à Erdoğan qu’il devait garantir la sécurité des alliés américains en Syrie (certains étant des terroristes, d’autres non). C’était vraiment absurde de la part de Bolton de tenter une telle chose : une retraite militaire est par définition inconditionnelle. Bolton n’est pas Kissinger. Ce dernier était un sale type, mais il avait une connaissance quasi parfaite de la situation, alors que Bolton est le Mr Magoo de la géopolitique. Il aurait tout aussi bien pu dire des âneries du genre : « Je suis une petite théière courte et trapue… » ou « Lait-lait-limonade… ».
Erdoğan  n’a même pas voulu parler à Bolton ; au lieu de cela, il s’est présenté devant son propre parlement et a dit que Bolton essayait une sorte de coup d’État de palais contre Trump. Ensuite, le ministre turc des Affaires étrangères a déclaré que le retrait des troupes américaines de Syrie devra être coordonné avec la Russie et l’Iran. (La Turquie, la Russie et l’Iran doivent se réunir à Moscou pour décider de l’avenir de la Syrie). C’est à ça que ressemble la « victoire des États-Unis sur ISIS » ? Ne renifle pas trop fort, Bolton, ou tu vas brûler ta moustache !

Quoi qu’il en soit, décidez pour vous-même, mais à mon avis, les États-Unis ne sont pas seulement une superpuissance, ils l’ont toujours été et le seront toujours. En fait, il ne s’agit pas seulement d’une superpuissance, mais d’une super-extra-puissance ! C’est l’odeur du napalm, ou juste la moustache de John Bolton en feu ?

Dmitry Orlov

Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateur de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie » c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.

samedi, 19 janvier 2019

Bientôt une nouvelle zone de conflit: le Pentagone veut contrer la Russie dans l’Arctique

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Bientôt une nouvelle zone de conflit: le Pentagone veut contrer la Russie dans l’Arctique

Washington: le Pentagone s’apprête à découvrir une nouvelle zone de conflit ou à en créer une de toutes pièces, s’il le faut. Le Wall Street Journal vient d’évoquer les plans de la marine américaine, qui entend accroître ses activités dans la zone arctique pour aller y affaiblir l’influence de la Russie.

L’indice premier de ce programme fut un entretien dans lequel le ministre de la marine Spencer reconnaissait récemment qu’un navire de guerre américain patrouillerait l’été prochain dans les eaux de l’Arctique dans le cadre d’un programme baptisé FONOP (« Opération pour garantir la liberté du trafic maritime »). D’après un porte-paroles de la marine, ce serait la première fois que la marine américaine lancerait une opération FONOP dans l’Océan Glacial Arctique.

En plus, les Etats-Unis projetteraient de réinstaller des troupes sur l’île d’Adak, dans l’Etat de l’Alaska. Elles seraient équipées de navires a effet de surface, d’avions patrouilleurs et d’appareils de reconnaissance du type P-8 Poseidon.

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L’île d’Adak avait abrité une base militaire américaine entre 1942 et 1991. La base fut abandonnée en 1991. Mais comme l’île se trouve à proximité du territoire russe, elle constituera, si la base est réinstallée, un indice clair et net, pour le Pentagone, soucieux de montrer aux Russes quelles sont leurs limites dans la région.

Le Wall Street Journal démontre que le réchauffement climatique global permettra d’ouvrir de nouvelles voies maritimes transarctiques. Ce nouvel état de choses entraînera l’émergence de nouvelles tensions dans le domaine du commerce international et de la défense. Les Etats-Unis et leurs alliés, ajoute le journal, s’engagent à défendre le droit de tous à mener des opérations sur les voies maritimes, où des conflits territoriaux pourraient surgir. Raison pour laquelle, toutes « prétentions exagérées » de pays tiers devront être contrées.

Il n’y a pas que la Russie qui est visée : la Chine également est perçue comme un futur adversaire dans l’Arctique. L’an dernier, la Chine a esquissé les plans d’une vaste politique arctique, comprenant l’organisation d’une « route de la soie polaire » afin d’obtenir le droit à la libre circulation dans la région. La Russie, de son côté et grâce à sa très longue frontière septentrionale dans l’Arctique, a tout de suite perçu quelles opportunités commerciales cela offrait et avait, depuis assez longtemps déjà, consolidé son influence dans la zone.

Pendant l’été 2018, le ministre russe de la défense Sergueï Choigu s’est montré préoccupé de voir émerger un conflit latent dans la zone arctique. Les activités qu’y projettent les Etats-Unis lui donne raison.

(article affiché sur le site de « Zuerst », http://www.zuerst.de , 17 janvier 2019).

jeudi, 10 janvier 2019

L’Union européenne vote pour les missiles USA en Europe

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L’Union européenne vote pour les missiles USA en Europe

par Manlio Dinucci 

Ex: http://www.zejournal.mobi 

Auprès du Palais de Verre des Nations Unies, à New York, se trouve une sculpture métallique intitulée “Le Mal terrassé par le Bien”, représentant Saint Georges qui transperce un dragon avec sa lance. Elle fut donnée par l’URSS en 1990 pour célébrer le Traité FNI (INF) stipulé avec les USA en 1987, qui éliminait les missiles nucléaires à courte et moyenne portée (entre 500 et 5000 km) avec base à terre. Le corps du dragon est en effet réalisé, symboliquement, avec des morceaux de missiles balistiques étasuniens Pershing-2 (auparavant basés en Allemagne de l’Ouest) et de SS-20 soviétiques (auparavant basés en URSS). 

Mais maintenant le dragon nucléaire, qui dans la sculpture est représenté à l’agonie, revient à la vie. Grâce aussi à l’Italie et aux autres pays de l’Union européenne qui, à l’Assemblée Générale des Nations Unies, ont voté contre la résolution présentée par la Russie sur la “Préservation et la mise en oeuvre du Traité FNI”, rejetée avec 46 votes contre 43 et 78 abstentions.

L’Union européenne -dont 21 des 27 membres font partie de l’Otan (comme en fait partie la Grande-Bretagne sortant de l’Ue)- s’est ainsi uniformisée à la position de l’Otan, qui à son tour s’est totalement uniformisée à celle des États-Unis. L’administration Obama d’abord, puis l’administration Trump ont accusé la Russie, sans aucune preuve, d’avoir expérimenté un missile de la catégorie interdite et ont annoncé leur intention de se retirer du Traité FNI. Ils ont en même temps lancé un programme visant l’installation à nouveau en Europe contre la Russie de missiles nucléaires, qui seraient basés aussi dans la région Asie-Pacifique contre la Chine.

Le représentant russe à l’ONU a prévenu que “cela constitue le début d’une course aux armements à part entière”. En d’autres termes il a prévenu que, si les États-Unis installaient à nouveau en Europe des missiles nucléaires pointés sur la Russie (comme l’étaient aussi les Cruise basés à Comiso dans les années 80), la Russie installerait à nouveau sur son propre territoire des missiles analogues pointés sur des objectifs en Europe (mais ne pouvant pas atteindre les États-Unis).

Faisant fi de tout cela, le représentant Ue à l’ONU a accusé la Russie de miner le Traité FNI et a annoncé le vote contraire de tous les pays de l’Union parce que “la résolution présentée par la Russie dévie de la question qui est en discussion”. En substance, donc, l’Union européenne a donné son feu vert à l’installation possible de nouveaux missiles nucléaires USA en Europe, Italie Comprise. 

Sur une question de cette importance, le gouvernement Conte, renonçant comme ses prédécesseurs à exercer la souveraineté nationale, s’est aligné sur l’Ue qui à son tour s’est alignée sur l’Otan sous commandement USA. Et de tout l’arc politique aucune voix ne s’est élevée pour demander que ce soit le Parlement qui décide comment voter à l’ONU. Et aucune voix non plus ne s’est élevée au Parlement pour demander que l’Italie observe le Traité de non-prolifération, imposant aux USA de retirer de notre territoire national les bombes nucléaires B61 et de ne pas y installer, à partir de la première moitié de 2020, les nouvelles et encore plus dangereuses B61-12.

Ainsi est à nouveau violé le principe constitutionnel fondamental que “la souveraineté appartient au peuple”. Et comme l’appareil politico-médiatique maintient les Italiens dans l’ignorance de ces questions d’importance vitale, est violé le droit à l’information, dans le sens non seulement de la liberté d’informer mais du droit d’être informés.

Ou bien on le fait maintenant ou demain il n’y aura pas de temps pour décider : un missile balistique à portée intermédiaire, pour atteindre et détruire son objectif avec sa tête nucléaire, met 6-11 minutes.

mardi, 08 janvier 2019

La guerre commerciale aura bien lieu

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La guerre commerciale aura bien lieu

Guillaume Berlat 

Ex: http://www.zejournal.mobi

Hormis les bruits de bottes qui résonnent aux quatre coins de la planète, une guerre réelle et meurtrière à maints égards fait rage dans la plus grande indifférence. Cette guerre, c’est la guerre commerciale que mène, telle une croisade païenne, le 45ème président des États-Unis. Il fut élu, à la surprise générale des diplomates, experts, journalistes, prévisionnistes de tout poil, sur un slogan simple, pour ne pas dire simpliste, l’Amérique, d’abord et avant tout (« America First »). Les mêmes feignaient d’ignorer que Donald Trump n’était pas issu du sérail politique des bords du Potomac. Et qu’il avait un grave défaut pour un politicien traditionnel, il fait ce qu’il dit, y compris pour mener à bien ses idées les plus baroques. Le président américain n’a que faire du droit, des conventions internationales. Il veut imposer un sérieux aggiornamento des règles du commerce mondial et se lance dans un durable bras de fer avec la Chine. Pour ce qui est de la désunion européenne, il s’agit d’une simple promenade de santé tant le courage n’est pas la vertu cardinale de ce colosse aux pieds d’argile.

UN AGGIORNAMENTO DES RÈGLES DU COMMERCE MONDIAL

Donald Trump est avant tout un homme d’affaires qui sait ce que compter veut dire. Il ne s’embarrasse pas de théories fumeuses. Il est un praticien dur en négociation. Pour lui, tout échange doit être équilibré, gagnant/gagnant. Fini le temps des concessions octroyées par ses prédécesseurs aux Chinois qui inondent le marché américain de produits « made in China » tout en lui pillant ses technologies de pointe, aux Européens (plus spécialement les Allemands) qui exportent aciers, automobiles… Pour l’ancien magnat de l’immobilier new-yorkais, il était grand de temps de mettre un point final à cette symphonie d’une Amérique bienveillante, aux contrats qu’il juge léonins, à cette pétaudière multilatérale. Désormais, c’est la loi du talion qui doit gouverner les relations internationales. Au diable, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui fait le jeu des Chinois alors que ces derniers ne respectent pas les règles du jeu. Au feu, les G7 et autres G20 et leurs communiqués à l’eau de rose qui servent les délinquants du commerce international. Le mot d’ordre est clair, réciprocité. Le signal est rapide, le Tweet ravageur qui règle en 140 signes un problème complexe. Le procédé est simple, sanction et extraterritorialité du droit américain. Au passage, on se débarrasse des concurrents encombrants que sont les actionnaires d’Airbus que l’on met à genou pour favoriser Boeing, sous de fallacieux prétextes(1). La méthode est brutale. Téhéran ne veut pas répondre au Diktat américain, on lui inflige des trains de sanctions dont l’Iran aura le plus grand mal à se remettre. Il n’y a plus d’alliés dans cette guerre mondiale. Il n’y a que des concurrents ennemis potentiels de l’Amérique impériale. Gare à celui à qui il viendrait l’idée saugrenue de se mettre en travers du bulldozer américain. Il lui en coûtera. Le cadre général du débat est posé. Pour ceux qui n’auraient pas compris le message de l’homme à la mèche blonde tel qu’il ressort de ses déclarations et de ses saillies, on demande au secrétaire d’État américain (l’équivalent de notre ministre des Affaires étrangères), Mike Pompeo (ex-directeur de la CIA) de faire la leçon aux Européens dans leur capitale d’opérette en carton-pâte qui a pour nom Bruxelles(2). Une sorte de village Potemkine à la sauce libérale.

UN BRAS DE FER DURABLE AVEC LA CHINE

Donald Trump considère qu’il n’est plus possible de tolérer un tel déficit commercial avec une Chine impériale et « impérieuse »(3), pas qu’un pillage systématique des technologies américaines. Il faut y donner un sérieux coup d’arrêt. Le différend prend deux dimensions.

Une dimension commerciale, tout d’abord. Washington lance ses premières fatwas qui ne sont pas suivies d’effet du côté chinois. Et comme Pékin semble ne pas comprendre la méthode douce, on passe aussitôt (mars 2018) à la méthode force : coercition et sanction pour démontrer sa détermination à ne pas laisser les choses traîner. On allume alors le deuxième étage de la fusée en imposant des droits de douane dissuasifs sur une impressionnante de produits chinois. Et ce qui devait se produire se produit. Dès le mois d’avril, la Chine réplique par l’imposition de taxes sur 123 produits américains. Et le jeu des sanctions et des contre-sanctions se prolonge. Il faudra attendre le G20 de Buenos Aires (censé traité de la réforme des règles du commerce mondial et de l’OMC) pour qu’en marge de cette réunion Donald Trump et Xi Jinping décide d’une trêve. Mais pour combien de temps encore ? Une réunion entre experts des deux pays a lieu à Pékin le 7 janvier 2018. C’est le remake de la célèbre politique du bâton et de la carotte.

Mais, le problème prend une dimension diplomatique, ensuite. Quand les États-Unis mènent une guerre commerciale, ils ne lésinent pas sur les moyens. Ils exigent et obtiennent du Canada l’arrestation à Vancouver de Meng Wanzhou, directrice financière du géant chinois des telécoms Huawei, qui est à Pékin ce qu’Apple est à Washington. Que lui reproche-ton ? Rien d’autre que d’avoir violé l’embargo américain contre l’Iran, et de tomber sous le coup d’une législation que les Américains entendent imposer au monde entier. Les Chinois réagissent en arrêtant deux Canadiens sur leur territoire. La réponse du berger à la bergère. Les États-Unis et le Canada demandent, le 21 décembre 2018, la « libération immédiate » de deux Canadiens emprisonnés en Chine et au centre d’une crise diplomatique entre Ottawa et Pékin après l’arrestation au Canada d’une dirigeante du géant chinois des télécoms Huawei. Affaire à suivre… Derrière l’affaire qui touche les géants des télécoms se joue la rivalité stratégique entre la Chine et les États-Unis(4).

« Quelle que soit l’issue de ce bras de fer, les Européens seraient bien inspirés de ne pas rester l’arme commerciale au pied, en jouant les idiots du village global »(5). Or, nous n’en sommes pas encore là !

UNE PROMENADE DE SANTÉ AVEC L’UNION EUROPÉNNE

Les Diktats commerciaux américains (menaces d’imposition de droits de douanes exorbitants sur l’acier et l’aluminium, en mars 2018, en violation des règles de l’OMC accompagnées de l’application extraterritoriale du droit américain) s’accumulent régulièrement sur l’Union européenne (ainsi que sur ses États membres, en particulier l’Allemagne). Et sans que cela ne suscite, jusqu’à présent du moins, de réactions dignes de ce nom, hormis quelques borborygmes inaudibles (Tweets du genre : « Donald Trump est du mauvais côté de l’histoire ») de la commissaire européenne au commerce, Anna Cecilia Malmström (suédoise au nom prédestiné) ou de menaces de porter l’affaire devant l’Organisation mondiale du commerce dont le fonctionnement est paralysé par l’Amérique du nord. L’Union européenne, qui exerce une compétence entière sur ces matières, a-t-elle définie une stratégie claire, un plan d’action, un dialogue stratégique ou tout autre gadget du genre dont elle a le secret ? Pas du tout. Elle préfère s’occuper à des questions techniques ou juridiques qui n’ont pas le moindre intérêt pour les citoyens européens. Laissant ainsi le soin à chacun des Vingt-Sept États membres de réagir à sa manière. Berlin va négocier directement à Washington pour faire exempter de droits de douanes ses exportations d’automobiles vers les États-Unis. Paris, par la voix de son inefficace ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, multiplie les déclarations lyriques et viriles qui ne changent rien à l’affaire. Il est vrai que l’addition de vingt-sept lâchetés n’a jamais conduit à une politique commerciale européenne courageuse et crédible face à la détermination de Donald Trump et à ses Oukases. Le fameux diviser pour mieux régner fonctionne à la perfection. Lors du sommet UE/Chine du 16 juillet 2018 à Pékin, le tandem Juncker/Tusk ne saisit pas l’occasion du différend américano-chinois pour poser le problème du commerce entre la Chine et l’Europe en termes de réciprocité et mettre des propositions concrètes sur la table. On préfère s’en tenir aux toasts diplomatiques célébrant la vigueur de l’amitié entre l’Empire du milieu et l’empire du néant.

Au-delà de sa dimension purement commerciale qui n’est pas négligeable, cette crise est avant tout une crise de la mondialisation. Crise qui n’est traitée jusqu’à présent que par des gesticulations, des provocations verbales, de coups de communication. Ces faux remèdes ne font qu’aggraver le mal. Les institutions internationales compétentes sont neutralisées. Les chefs d’État s’exposent dans une surcommunication à outrance, pratiquant le narcissisme stérile et l’irresponsabilité totale. Résultat, les crises s’ajoutent aux crises : celles de la mondialisation, de la régulation internationale, du multilatéralisme, de l’Europe, de l’autorité…, en vérité une crise géopolitique (« l’ère des cauchemars », Nicolas Tenzer). Cependant, tout cela n’aura aucun sens si l’on croit s’en tirer grâce à un remède miracle. Il faudra bien répondre un jour à la question de l’avenir de la gouvernance mondiale au XXIe siècle. Le veut-on ? Le peut-on ? Si le diplomate-écrivain, Jean Giraudoux écrivait en 1935 « La guerre de Troie n’aura pas lieu », nous pouvons dire, sans grand risque d’erreur en cette fin d’année 2018 et en ce début d’année 2018, que la guerre commerciale avec les États-Unis aura bien lieu.

Notes:

(1) Chloé Aeberhadt/Marie-Béatrice Baudet/Vincent Nouvet/Stéphanie Pierre, La justice américaine enquête sur Airbus, Le Monde, Économie & Entreprise, 21décembre 2018, pp. 1-2-3.

(2) Guillaume Berlat, Mike Pompeo : Requiem pour le multilatéralisme, www.prochetmoyen-orient.ch , 17 décembre 2018.

(3) Éditorial, La Chine, puissance impérieuse, Le Monde, 22 décembre 2018, p. 19.

(4) Alain Frachon, Huawei dans la bataille, Le Monde, 21 décembre 2010, p. 22.

(5) Jack Dion, Le symbole Huawei, Marianne, 14-19 septembre 2018, p. 30.

Gli Stati Uniti fra Terra e Mare

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Gli Stati Uniti fra Terra e Mare

Ex: https://www.eurasia-rivista.com

Gli studiosi di geopolitica hanno approfondito la natura messianica dell’ideologia politica americana, collegandone l’universalismo escatologico di matrice protestante non solo alle prassi politiche filosioniste ed imperialiste, ma anche al pensiero dei moderni teorici americani – da Fukuyama a Huntington. L’ideologia dell’eccezionalismo americano non si esaurisce nel neoconservatorismo, ma, sotto diversa forma, si esprime anche nel pensiero degli “idealisti” progressisti. Gli “idealisti” sono corrente trasversale a democratici e repubblicani, così come i “realisti” – da Kissinger a Brzezinski fino a Mearsheimer – non mettono in discussione l’assunto per cui o l’America è potenza globale o non è. Pur trovando compimento nella dottrina Monroe (enunciata nel discorso al Congresso del 1823), l’origine del virulento imperialismo americano può essere ricercata anche nella prassi politica di Theodore Roosevelt (1858 – 1919, presidenza dal 1901 al 1909). È ormai diffusa anche la comprensione del livello geoeconomico del predominio del dollaro e del controllo sul Medio Oriente, nonché del contrasto all’Eurasia.

È interessante inserire nell’analisi della geopolitica americana e dei suoi riflessi un ulteriore fattore: la comprensione della sua geopolitica “interna”.

Gli Stati Uniti sono un paese animato da una marcata dialettica interna, fatta di contrasti anche aspri tra le sue componenti religiose (per quanto il cattolicesimo americano sia ormai completamente “protestantizzato” e normalizzato, opera che prosegue nell’America Latina di Bolsonaro grazie all’insipienza dei Sacri Palazzi romani) ma soprattutto razziali e, prima ancora, geopolitiche. La società americana è un coacervo di contraddizioni che vengono toccate con mano se la si vive dall’interno: è importante coglierle per comprendere le debolezze presenti e future dell’iperpotenza a Stelle e Strisce.

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Seguendo un percorso ideale squisitamente geopolitico, di dialettica tra dimensione talassocratica e tellurica, possiamo dividere la storia americana in fasi marittime e terrestri. Le Tredici Colonie Britanniche, popolate da normali coloni in cerca di terra e fortuna nonché da esuli religiosi di sette protestanti, nascono dal mare e sul mare si affacciano, dovendo sì all’agricoltura ma soprattutto al commercio marittimo il proprio sostentamento e la propria incipiente fortuna. La dichiarazione di indipendenza arriva nel 1776 e sorge dall’indisponibilità delle colonie a sottostare all’oppressione fiscale e al monopolio commerciale della madrepatria britannica.

A questa primissima fase marittima succede una fase di terraferma e di espansione continua verso l’Ovest: un’immigrazione giunta da tutto il mondo in cerca di terra ed opportunità nella “Land of the Free” segna l’animo americano con quella fusione di senso dell’avventura e di autosufficienza e individualismo noto come “spirito della frontiera”. Vengono inglobate culture europee provenienti dal Vecchio Continente ma anche già presenti in quello nuovo: la Gran Bretagna (con la quale i rapporti rimarranno tesi per tutto il XIX secolo, fino a quando questa non rivolgerà le proprie attenzioni di nuovo al Vecchio Continente e all’emergente potere tedesco) verrà sconfitta in una nuova guerra nel 1812 senza guadagni territoriali, guadagni che arriveranno dalle sconfitte della Spagna (1898) e del Messico (1846-48), dall’acquisto delle colonie francesi o spagnole e dei territori russi, dall’annessione di Stati sovrani (la Repubblica del Vermont nel 1701 o quella del Texas nel 1845).

La visione degli Stati Uniti si concentra sulla conquista di terra contro le potenze coloniali europee, contro le tribù native (vittime di un vero e proprio genocidio) e contro il vicino messicano. È in questa fase storica che vanno ricercate le basi dell’isolazionismo americano del XIX secolo – isolazionismo rispetto agli affari europei. Per sopravvivere gli Stati Uniti devono concentrarsi sull’esclusione degli avversari dal proprio territorio e dal continente americano, senza intromettersi in vicende diplomatiche ad esso esterne. Una certa “mentalità dell’assedio” si salda con lo “spirito della frontiera”, temprando il carattere di un popolo bellicoso, ostinato e determinato. Popolo composto da popoli: la maggior parte degli americani bianchi discende da tedeschi ed irlandesi, seguiti da inglesi, italiani e polacchi (in ordine di incidenza). Né si può ignorare la presenza di una vasta popolazione di schiavi importati dal continente africano nei secoli trascorsi. Spartiacque della costruzione dell’identità e della fase geopolitica terrestre con la seconda fase marittima è appunto la Guerra Civile tra gli stati del Nord e del Sud. Due modelli politici e geopolitici, economici e sociali. Il Nord è industriale e tendenzialmente protezionista nonché tecnologicamente avanzato, mentre il Sud, assai meno popolato, è mercantile e liberoscambista, con un’economia agricola e cotoniera la cui prosperità dipende dal lavoro degli schiavi, dal libero commercio dell’oro bianco e dal controllo del Mississippi. Il Nord si proietta nella realizzazione della Dottrina Monroe di dominio sul continente: il Sud, filobritannico, continua a guardare al mare e al resto del mondo. Si tratta di due visioni della politica americana confliggenti anche sul piano istituzionale: un’Unione forte e centralista si contrappone ad una Confederazione di Stati gelosi della propria autonomia.

La prima grande linea di frattura della geopolitica americana, quella tra Nord e Sud, si risolve con la sconfitta del secondo, ma si riassume in una faglia tuttora irrisolta: la frattura razziale tra bianchi e neri e tra bianchi ricchi e progressisti del nord e bianchi poveri e conservatori del sud (paradossalmente, in origine repubblicani i primi e democratici i secondi).

Completata la conquista della terra col processo di autocostruzione di una nazione, la strategia americana torna volgersi al mare: gli Stati Uniti riunificati si affacciano saldamente su due oceani e, sconfitta la Spagna sul finire del secolo XIX, guadagneranno Cuba, Porto Rico e le Filippine. La disponibilità di terra e di risorse, lo spirito di intraprendenza degli immigrati europei, la saldezza dei diritti di proprietà e l’assenza di contrasti di classe nel senso europeo – l’operaio oppresso può semplicemente scegliere di cambiare vita spostandosi ad ovest – favoriscono un formidabile accumulo di capitale che proietta gli Stati Uniti ad essere la prima potenza economica globale già nei primi decenni del XX secolo. Se il consolidamento come primo potere militare e politico giunge con la vittoria nelle due guerre civili europee del ‘14-‘18 e del ’39-’45 che hanno come risultato l’autodistruzione del Vecchio Continente, la primazia geopolitica era in realtà già conseguita: gli Stati Uniti si possono volgere al mare e all’intervento nelle altre aree del mondo perché non hanno più rivali sul continente americano.

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La terza fase marittima – meglio: talassocratica – è quella che dura tutt’oggi. La geopolitica interna degli Stati Uniti che permette questo volgersi al mare è in realtà una geopolitica di tutto il continente americano, “giardino di casa” degli USA, che vi dominano con trattati commerciali, tramite l’installazione di governi vassalli o saldamente alleati (i regimi castrensi dell’Operazione Condor) o tramite l’intervento diretto (a Grenada o Panama).

Possiamo identificarvi i seguenti tre cerchi concentrici.

  1. Gli Stati Uniti propriamente detti. Se il grande contrasto tra Nord industriale (diviso tra Midwest e costa orientale) e Sud cotoniero (il Mississippi e i porti del Sud e dell’Est, piegati dal blocco marittimo dall’Unione) si è risolto, non si risolve quello tra le due coste, centro cosmopolita dell’economia globalizzata, della finanza (predominio del Dollaro) e dell’innovazione (predominio tecnologico) e quindi due vere punte di lancia del potere americano globale, e gli Stati centrali agricoli e industriali, dominati da settori dell’economia più tradizionale che vede ormai minori tassi di investimento, accumulazione e crescita delle produzione e dei redditi e dove ha avuto luogo la rivolta della classe media e povera bianca (e non solo). Per la prima volta il Nord industriale e il Sud agricolo, con l’elezione di Trump, si sono saldati contro le coste, nella seconda grande frattura geopolitica e geoeconomica americana.
  2. Il primo anello marittimo: sostanzialmente il Mediterraneo del Golfo del Messico, dallo Yucatan alla Florida, con la salda base del Portorico ma con la spina nel fianco cubana (il cui tasso di effettiva pericolosità si è estremamente ridotto nei decenni). La piaga strategica che infesta quest’area (ma che costituisce anche il pretesto per il continuo intervento statunitense nell’area) è quella di un narcotraffico che ha trasformato interi paesi (come ad esempio l’Honduras) in Stati falliti.
  3. Il terzo anello marittimo e terrestre: l’America del Sud, con il cruciale canale di Panama e i paesi dell’America Latina, che dopo la stagione dei governi progressisti sono stati normalizzati dal riflusso dei governi liberisti di destra neocon (dal Cile al Brasile di Bolsonaro), con la Bolivia ed il Venezuela isolati e minacciati. L’America di Trump, per mezzo del suo grande tessitore Steve Bannon, ha riaffermato che la sua sicurezza e la sua esistenza come potenza hanno nel controllo del Continente un piedistallo non negoziabile. La politica interna dei paesi dell’America Latina è politica interna agli USA: si pensi alla passata diffusione dell’ideologia marxista e dei movimenti anticapitalisti (dalle guerriglie sino alla stagione del movimenti pacifici di Porto Alegre) o al rischio presente, rappresentato dal narcotraffico in Stati travolti da una violenza senza limiti come Brasile, Colombia e soprattutto Messico, con i conseguenti devastanti effetti sociali sul traffico di oppioidi e di cocaina. Geopoliticamente l’America Latina si concentra sulle proprie coste sin dall’epoca dei porti coloniali (molto più che non in entroterra di foreste impenetrabili, aridi deserti o gelidi e inospitali altipiani). È troppo poco per dire che alla potenza marittima basta assicurarsi il controllo dei porti: le risorse dell’America Latina, dalle acque dei fiumi, al petrolio, al rame, agli spazi agricoli, sono nel suo interno.

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Questo sintetico excursus mira a porre il tema della complessità interna agli Stati Uniti d’America e alle loro radici geopolitiche. Visti – a ragione – come una potenza prevalentemente finanziaria, tecnologica e marittima (in una parola: talassocratica), gli Stati Uniti (non esenti in passato da contrasti giunti fino al sanguinoso conflitto civile) sono attraversati da almeno due fratture interne, una di natura sociale e una, per l’appunto, di natura geopolitica.

  1. L’irrisolto contrasto razziale tra bianchi e neri. I primi tendenzialmente più ricchi ed istruiti, i secondi tendenzialmente più poveri ed esposti a forme varie di emarginazione sociale. Si aggiunge il contrasto tra bianchi “wasp” (“white, anglo-saxon, protestant”), i bianchi portatori del nucleo culturale attorno al quale è stata edificata la costruzione statunitense dal 1776 ad oggi, e i nuovi migranti, composti sì da poveri latino-americani, ma anche da una borghesia cosmopolita di indiani, cinesi ed europei.
  2. La faglia geoeconomica che vede da un lato le due coste fulcro dell’economia globalizzata tecnologica e finanziaria, e dall’altro la fascia centrale delle tradizionali economie agricole ed industriali. Qui la vecchia classe media americana, artefice dello sviluppo votato ai consumi dei decenni passati (e spesso, ma non sempre, definibile come “wasp”) ha visto i propri redditi ristagnare nel contesto dell’economia globalizzata della quale è rimasta se non esclusa comunque ai margini. Qui si concentrano sia la classe operaia bianca e nera delle aree industriali (un tempo sicuro serbatoio elettorale democratico). Qui si trovano anche i bianchi poveri del Sud, spregiativamente definiti “redneck” (colli rossi bruciati dal sole durante i lavori agricoli) o addirittura “white trash”, “immondizia bianca”. Questa frattura riproduce lo scontro tra città e campagna, un tempo economie interdipendenti ed oggi scisse, nonché tra i centri dell’economia globalizzata (votati a finanza e tecnologia) e le periferie dell’economia tradizionale industriale ed agricola, nelle quali sopravvivono solo poche eccellenze manifatturiere, e le aree storicamente depresse. Si tratta del medesimo fenomeno in corso in Europa, per quanto su scala geograficamente assai più ridotta e con in più strumenti di coesione sociale e di welfare che agli USA sono ignoti (come del resto è ignoto all’Europa il patriottismo nazionalista americano, unico ma sin qui efficace collante sociale del paese).

Abbiamo proposto una visione in cui l’intera geopolitica del continente americano (Nord e Sud) è vista come geopolitica interna degli USA. Gli USA non possono perdere le Americhe, pena la perdita dell’inviolabilità terrestre. Se il Pacifico resta inattraversabile da forze ostili e l’Atlantico resta un “lago americano”, urge comunque porsi le seguenti domande.

  1. Sino a che punto i popoli dell’America Latina desiderano appartenere ad un proconsolato americano? La recente vittoria elettorale di governi filostatunitensi sembra indicare un forte riflusso dalla stagione delle lotte antimperialiste, ma il successo di questi governi si misurerà nel successo economico di economie deboli, a scarsa tecnologia e dominate dall’esportazione di materie prime, nonché ormai alla fine del proprio “dividendo demografico” o fortemente integrate, quando industriali, nell’economia statunitense (si pensi al Messico).
  2. Sino a che punto il confine settentrionale può restare silente e privo di minacce? Non pensiamo sicuramente al Canada – pur culturalmente molto diverso e segnato da uno stile di vita maggiormente “europeo” – integrato con l’economia americana, ricco di materie prime e spazio ma gelido e poco popolato, quanto all’eventualità che, con lo scioglimento dei ghiacci, l’Artico (e quindi l’Alaska) diventi oggetto di contesa (è già oggetto di attenzioni militari) con Russia e Cina.

Tendiamo a definire le sfide all’egemonia americana nel XXI secolo come completamente esterne all’area geopolitica statunitense, immaginando la prima potenza mondiale come un blocco geopolitico e sociale omogeneo: esse sono sempre considerate di natura economica o finanziaria (sfida al Dollaro, sfida al controllo delle materie prime delle quali pure l’America è immensa riserva), di natura militare (sfida cinese), oppure di natura sì geopolitica, ma prettamente esterna all’area americana (sfida dell’Eurasia unita, sfida dell’Africa cinese). Apprezzarne le contraddizioni sociali e persino le faglie geopolitiche interne ci porta meglio a comprendere come le istanze che gli Stati Uniti d’America dovranno e già devono affrontare siano di natura estremamente più sfaccettata. La domanda che gli osservatori dovrebbero porsi è la seguente: quanto è in primis resiliente ed in secundis flessibile la società americana per assorbire e superare queste contraddizioni in un contesto globale in cui l’America non è più una solitaria potenza egemone?

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Finché gli Stati Uniti garantiranno a larghe fette della propria popolazione livelli enormi di benessere materiale e ai nuovi arrivati opportunità di accostarvisi, tutte le contraddizioni passeranno sotto traccia. È a questo benessere che si deve anche il primato culturale e ideologico americano (il cosiddetto “soft power”) e non certo alle astrazioni “libertà”, “democrazia”, “libera circolazione delle idee”, privilegi riservati alla ristretta cerchia degli appartenenti alle classi ricche o al massimo alle sempre più ristrette classi medie. La domanda che ci poniamo non interessa alle classi politiche ed intellettuali europee, che sembrano conquistate fino a deporre qualsiasi spirito critico. Nessuno, in nessuna corrente politica con diritto di tribuna in Europa, mette in discussione il modello americano, i valori americani, nemmeno l’imperialismo americano. Il mondo “progressista”, un tempo critico, ha applaudito l’intervento in Libia, ha invocato quello in Siria, ha taciuto su quelli degli alleati degli americani in Palestina e in Yemen. Il mondo “conservatore”, che un tempo contrapponeva valori “spirituali” al materialismo (liberale o comunista che fosse), oggi ne è completamente dimentico.

Il benessere deriva dal dominio economico del pianeta, il quale deriva dal dominio tecnologico e finanziario, che a sua volta deriva da quello militare e strategico – il quale, in un circolo virtuoso, è garantito dai due precedenti. Qualora il dominio tecnologico e finanziario dovessero infrangersi o anche solo ridursi o dovesse venir meno quello militare e strategico, l’economia americana non potrebbe più garantire livelli di benessere e consumi a tutta la popolazione né opportunità ai nuovi arrivati, cosicché le faglie sociali interne potrebbero allargarsi pericolosamente. Un paese che ai propri cittadini non concede nulla gratuitamente, né assistenza sanitaria né istruzione di qualità, dovrebbe per esempio iniziare a rendere loro conto di tutto questo, una volta esauritesi le opportunità di arricchirsi e di acquistare il meglio della sanità e il meglio dell’istruzione sul mercato privato. Il dollaro è moneta globale solo finché la potenza militare americana non conoscerà sfide reali; e la potenza militare americana non conoscerà sfide reali finché il dollaro sarà moneta globale.

Non ci è dato sapere se e quando tutto ciò verrà meno, ma quello che è certo è che l’equilibrio interno della società americana dipende dalla sua potenza esterna, dalla sua capacità di espansione nel mondo; e la sua potenza nel mondo dipende viceversa da una coesione sociale interna data dal benessere. Da questo benessere sono escluse ampie fette della popolazione americana (buona parte della popolazione nera ed ispanica nonché i bianchi poveri e della ex-classe media).

In Europa, area del mondo teoricamente democratica e caratterizzata da diritti individuali affermati, il patto socialdemocratico che scambiava pace sociale con benessere si è infranto miseramente con le crisi petrolifere degli anni ’70 e con la globalizzazione; ciò ha generato società pessimiste sino alla sterilità, diseguali, patologicamente incapaci di integrare gli immigrati, nelle quali le classi medie ristagnano e quelle povere regrediscono al livello di “lumpenproletariat”, mentre la Repubblica Popolare Cinese – paese estraneo al sistema liberaldemocratico – vanta continui successi economici e tecnologici. La partecipazione del cinese medio, dell’americano medio e dell’europeo medio al “processo democratico” è del tutto simile e passiva, nonostante la diversità dei tre sistemi: a comprare il consenso sociale sembra che sia il benessere materiale. Con questo non diciamo che vivere nelle tre aree del mondo sia indifferente e che i tre stili di vita siano intercambiabili, data la diversità di ritmi, culture e tradizioni.

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È un dato di fatto che la natura multipolare del pianeta tende altresì a consolidarsi: da un lato il blocco eonomico-politico del continente americano – che sembra riesca a tenere in subordine l’inesistente Europa – dall’altro un blocco cinese asiatico e pacifico in formazione non senza difficoltà, con alcune potenze più (Russia) o meno (India) in fase di collocamento autonomo. In mezzo al guado, una Germania tristemente incapace di assumere la guida dell’Europa e di fare scelte finalmente autonome dall’area atlantica per insipienza della propria classe politica.

Indicatore chiarissimo di questa tendenza è il mercato dell’auto, settore trainante rispetto alla manifattura globale, tra i primi per consumo di acciaio, che muove, su programmazioni pluriquinquennali (se non pluridecennali), investimenti, strategie e forze produttive e tecnologiche immani. È notizia di questi giorni (inizi di Dicembre 2018) che la General Motors desidera chiudere stabilimenti nel Nord America licenziando un totale di 14.000 lavoratori circa per focalizzarsi sul mercato asiatico. È quanto decide di fare anche la Nissan, rompendo forse l’alleanza storica con i francesi della Renault. Questa rottura garantirebbe alle controparti giapponesi la mano libera sul mercato asiatico, mentre il gruppo italoamericano FCA sarebbe in procinto di essere venduto “a pezzi”, nel solco di una profonda rifocalizzazione produttiva e di vendite fuori dall’Europa e verso le Americhe.

Nel mondo multipolare, l’egemonia unica degli USA è già in discussione.

L’Amérique latine en quête d’indépendance

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L’Amérique latine en quête d’indépendance

par Oscar Fortin

Ex: http://www.zejournal.mobi

L’histoire de l’Amérique latine nous apprend que cette dernière a été et continue d’être considérée comme « la cour arrière des États-Unis ». La doctrine Monroe en consacre la légitimité et donne à Washington tous les pouvoirs sur le Continent.

1) Les États-Unis ont reconnu, l’année précédente, l’indépendance des nouvelles républiques latino-américaines ; en conséquence de quoi, l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud ne sont  plus ouvertes à la colonisation européenne.

2) Les États-Unis regardent désormais toute intervention de leur part dans les affaires du continent américain comme une menace pour leur sécurité et pour la paix.

3) En contrepartie, les États-Unis n’interviendront jamais dans les affaires européennes.

La doctrine de Monroe se résume en définitive comme suit : « l’Amérique aux Américains ».

De fait, la reconnaissance de l’indépendance des nouvelles républiques latino-américaines de la part de Washington permettait à ce dernier de se défaire de la présence des pays colonisateurs européens tout en ouvrant toute grande la porte pour qu’il puisse y régner en maître. L’indépendance de ces pays serait respectée dans la mesure où ces derniers harmoniseraient leurs politiques avec ses propres intérêts. De là l’expression bien connue qui qualifie l’Amérique latine comme étant la « cour arrière des États-Unis ».

On ne saurait comprendre ce qui se passe, présentement, en Amérique latine sans faire référence à cette Doctrine Monroe qui ne répond qu’aux intérêts de Washington. L’histoire des conflits du siècle dernier et ceux d’aujourd’hui illustrent de manière claire et sans équivoque le veto unilatéral de Washington sur l’indépendance et la souveraineté des pays du Continent latino-américain.

La révolution du Peuple cubain (1958-1959), sous la direction de Fidel Castro, visant la destitution du dictateur Batista, en était une qui reposait sur l’indépendance et la souveraineté de ce peuple. De toute évidence, Batista était l’homme de main de Washington lui permettant d’agir à sa guise à Cuba. Nous connaissons de plus en plus l’histoire de cette révolution qui fut et est toujours victime de l’interventionnisme de Washington. Le seul « blocus économique » qui dure depuis plus de 59 ans et que condamnent, année après année, les membres de l’Assemblée générale des Nations Unies représente un véritable crime contre l’humanité.

La révolution du Peuple chilien (1973) reproduit les mêmes comportements de Washington à l’endroit de l’indépendance et de la souveraineté de ce Peuple. À la différence de Cuba où régnait un dictateur, Salvador Allende prit le pouvoir en respectant le cadre démocratique prévu à la constitution chilienne.  Ses politiques se sont concentrées sur la récupération des richesses du pays, dont le cuivre occupe une place importante, pour en faire bénéficier le peuple. Il a agi avec les pouvoirs d’un État indépendant et souverain, dans le respect du droit international. C’était déjà trop. Washington avait déjà préparé tout son arsenal politique, économique et militaire, pour en finir avec le gouvernement de Salvador Allende. Nous connaissons l’histoire des bombardements de la Moneda (édifice du parlement chilien), de la trahison du général Augusto Pinochet ainsi que tous les crimes qui en ont suivi.

La révolution du peuple vénézuélien (1998), sous la direction d’Hugo Chavez s’impose par une élection libre et démocratique qu’il remporte avec grande majorité. Donnant suite à ses promesses électorales, il procède dès les premiers instants à la rédaction d’une nouvelle constitution, écrite et voulue par le peuple. Soumise à un référendum, l’année suivante, elle fut acceptée avec une très grande majorité. Il s’agit d’une révolution qui consacre la démocratie participative, donnant ainsi au peuple un droit de regard et d’intervention dans l’exercice des pouvoirs de l’État. Il s’agit également d’une révolution de format socialiste, humaniste, chrétien et anti-impérialiste. Encore là, Washington et les oligarchies locales ne l’entendirent pas de la même manière. Au diable, la démocratie, en avril 2002, le gouvernement est victime d’un Coup d’État et son président, Hugo Chavez, est enlevé de force et détenu en un endroit secret. En un rien de temps, le peuple et l’armée restée fidèle sont descendus dans les rues et ont repris le contrôle de la résidence du Président et arrêter les auteurs de ce coup d’État. Depuis lors, les tentatives d’intervention pour éliminer ce gouvernement n’ont cessé. Le 11 janvier prochain, on annonce une intervention musclée pour empêcher l’assermentation du  président Nicolas Maduro, élu avec grande majorité, en mai dernier, pour le mandat allant de 2019 à 2025.

Je pourrais ajouter à ces révolutions celles de la Bolivie, avec Evo Morales, du Brésil, avec Lula et Dilma Rousseff, de l’Équateur, avec Rafael Correa, du Nicaragua, avec Daniel Ortega, d’Argentine avec Hector y Cristina Kirchner. Le format d’intervention est toujours le même : guerre économique, désinformation sous toutes ses formes , mise à contribution des épiscopats catholiques qui s’apparentent bien souvent aux forces de l’opposition politique.

C’est dans ce contexte que se présente la grande alliance du Vatican et de Washington. Pendant que ce dernier veut récupérer ses pleins pouvoirs sur les gouvernements de l’Amérique latine, le Vatican veut se défaire de tout ce qui raisonne communisme, socialisme, anti-impérialisme, etc. À toute fin pratique, les deux s’entendent sur les mêmes ennemis sans pour autant partager les mêmes objectifs.

En 1982, à la bibliothèque du Vatican, un premier Pacte a été signé entre le pape Jean-Paul II et Ronald Reagan.  Ils en étaient à leur premier contact. Il s’agissait, à cette époque, de la Pologne et des mouvements socialistes en A.L, dont la théologie de libération qui en  faisait partie.

En 2014, un second Pacte est signé, cette fois entre le pape François et Obama. Ce dernier n’arrive toujours pas à se libérer de Maduro au Venezuela, de Lula et Dilma Rousseff au Brésil, de Daniel Ortega au Nicaragua, etc. L’aide du Vatican et des épiscopats nationaux de ces pays s’impose.

Dans certains de ces pays, les épiscopats utilisent à plein régime la « religion » avec tous ses symboles pour discréditer les gouvernements au pouvoir et soulever le peuple contre ces derniers. Ils assument, pratiquement en totalité, les fonctions d’une opposition qui a perdu toute crédibilité. Ils en arrivent eux-mêmes à perdre la leur. Ça sent beaucoup la « religion opium du peuple ».

Liens:

https://www.mondialisation.ca/nouveau-pacte-entre-le-vati...

http://www.elcorreo.eu.org/Nouveau-pacte-entre-le-Vatican...

https://www.courrierinternational.com/article/2005/04/07/...

http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/lamerique-latine...


- Source : Humanisme Blogspot

dimanche, 06 janvier 2019

Bogdan Herzog : sortez le pétrole du pétrodollar, sortez le dollar du narcodollar

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Bogdan Herzog : sortez le pétrole du pétrodollar, sortez le dollar du narcodollar

Bogdan Herzog

Traduction française par Chlodomir

Conférence Internationale “Financial capitalism and its alternatives for the 21st century. Contributions to the 4th Economic Theory” (Le capitalisme financier et ses alternatives pour le XXIe siècle. Contributions à la 4e Théorie économique).

Chișinău, 15 décembre 2017

J’ai récemment lu l’interview du Pr. Douguine dans le magazine The Economist. C’est une interview très intéressante qui permet d’exprimer notre vision-du-monde à une audience non-eurasiste plus grande. J’ai moi-même distribué le matériel à un certain nombre de gens et il a été apprécié même par des personnes qui n’ont pas forcément la même perception de la réalité que nous. Le professeur s’avère être un intellectuel hautement distingué, un digne adversaire du libéralisme et cela peut être apprécié par des gens neutres et même par des ennemis.

Cependant, je prends l’exemple d’une question posée par l’interviewer et de la réponse du Pr. Douguine, où je proposerais une approche différente. La question posée était : « Pourquoi pensez-vous que l’autre civilisation, l’anglo-saxonne, réussit économiquement mieux que la civilisation eurasienne ? », et la réponse fut la suivante : « Précisément parce que l’économie est, pour vous, le destin. Pour nous, c’est l’esprit qui est le destin. Si vous placez une valeur matérielle comme la plus haute valeur, alors vous avez mieux réussi en cela ».

Bien que je comprenne le raisonnement philosophique et religieux qui se trouve derrière la réponse, incluant que l’on ne peut pas servir deux maîtres, Dieu et Mammon, je préférerais une approche plus directe et économiquement orientée à une telle question. Etonnamment ou pas, Marx, du moins dans ses premiers écrits, avait une approche similaire à celle du Pr.  Douguine sur cette question.

En ce qui me concerne, je voudrais d’abord noter la manière dont la question est structurée. C’est une affirmation : « L’Occident est meilleur pour développer des systèmes économiques », déguisée en une question. Répondre à la question en tentant de donner une explication revient à accepter la supposition de l’interviewer. C’était un piège. A mon avis, la réponse aurait dû être la suivante : « La civilisation anglo-saxonne n’est pas meilleure pour développer des systèmes économiques. Sa prospérité actuelle est due au fait qu’elle peut imprimer une quantité illimitée d’argent à partir de rien et qu’elle a la capacité militaire et politique à obliger les autres à l’accepter comme moyen de paiement ». C’est un vol déguisé. Obliger les autres à abandonner leurs valeurs pour rien est une forme de vol. C’est la source de leur prospérité, pas seulement leur obsession pour les biens matériels. En d’autres mots, l’Occident est meilleur pour imposer son point de vue dans le monde entier, pas pour développer des systèmes économiques supérieurs.

Et ils sont très bons pour quelque chose d’autre aussi, pour présenter leur propre intérêt comme étant, d’une manière ou d’une autre, dans l’intérêt général de l’humanité, de l’humanité en général. Ils sont les maîtres du culot ! C’est comme si un dealer de drogue, ou un voleur, demandait à un enseignant ou à un ouvrier : « Pourquoi pensez-vous que je suis plus riche que vous ? ». La réponse peut être philosophique : « Vous êtes préoccupé par l’argent », mais elle peut aussi être plus directe : « Parce que vous êtes un voleur ».

C’est un aspect important, ce n’est pas quelque chose à négliger. Puisque nous sommes en guerre, du moins dans le domaine des idées, ne laissons pas l’ennemi tenir le haut du pavé. Stratégiquement nous ne voulons pas mener une bataille pénible. Nous avons l’avantage moral même dans le monde de l’économie, et il faut rappeler cela à l’ennemi et au grand public. Nous avons affaire à un empire bâti par des voleurs, des pirates et des dealers audacieux, qui arrivent toujours au nom d’idées généreuses, comme la « liberté » et le « libre-échange », et qui repartent les poches pleines d’argent. Ce sont les gens qui nous font la leçon aujourd’hui !

Donc, mon premier message est : ne laissez pas l’ennemi prendre l’avantage moral. J’étayerai mes affirmations plus tard, avec quelques cours d’histoire, plus précisément sur les guerres de l’Opium.

Mais nous allons faire une très brève récapitulation de la nature de l’actuel système économique, et des manières possibles de le rendre plus juste.

Comme je l’ai dit avant, la prospérité de l’Occident est basée sur deux facteurs : l’impression de monnaie et la capacité d’obliger les autres à l’accepter. Puisque n’importe qui, n’importe quelle nation ou même des non-nations peut émettre de la monnaie (à Hong-Kong par exemple les billets de banque sont imprimés par des banques commerciales), il est évident que dans cette équation le facteur important est la capacité à imposer son usage. L’actuel système monétaire a un nom, le pétrodollar. Ce n’est pas par hasard. Cela vient du fait qu’en 1971, quand les Américains mirent fin à la convertibilité du dollar en or, ils la remplacèrent par la convertibilité en matières premières, et spécialement, mais pas exclusivement, en pétrole. La capacité militaire et politique des Américains à imposer leurs vues aux producteurs de pétrole, et à les obliger à vendre leurs produits en dollars, est la clé du système. La même logique peut être étendue à toutes les matières premières et au commerce international en général. La présence de troupes américaines au Moyen-Orient assure la domination du dollar sur le marché pétrolier, leur présence en Europe assure une certaine parité entre l’euro et le dollar, et ainsi de suite. Je n’entrerai pas dans les détails, mais je voulais souligner qu’en fin de compte tout se ramène au pouvoir. Ce pouvoir n’est pas limité à la capacité d’imposer un certain accord commercial à une troisième nation, mais aussi à sécuriser les voies d’approvisionnement ainsi que certaines régions.

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Pour créer un système économique meilleur et plus juste, il ne suffit pas de signer des accords de commerce bilatéraux exprimés dans d’autres monnaies. Des corridors de transit et de protection pour les pays désireux de commercer en utilisant d’autres monnaies devront être assurés. Bien sûr ce sont des réalités bien connues. L’initiative chinoise de la Nouvelle Route de la Soie et les événements du Moyen-Orient sont la preuve du fait que ces idées de base ont été comprises et que des pas sont faits dans la bonne direction. Nous devons sortir le pétrole du pétrodollar. C’est le second message du jour.

Enfin, je voudrais attirer votre attention sur une zone plus cachée, opaque, que je considère comme importante. Il y a un précédent historique au pétrodollar, en tant que monnaie fiduciaire basée sur la projection de pouvoir. Je parle de la narco-livre (britannique). Au début du XIXe siècle, les Britanniques enregistrèrent des déficits considérables dans leur commerce avec la Chine. A ce propos, c’est la Chine, et non l’Occident comme l’affirme erronément le reporter de The Economist, qui, sauf pendant 150 ans, fut le centre de l’activité économique de la planète.

Au début du XIXe siècle, exactement comme aujourd’hui, la Chine n’était pas intéressée par les produits que les Britanniques pouvaient lui offrir en échange et demandait que les dettes commerciales soient réglées par le paiement d’argent réel sous la forme de lingots d’argent. Quelle fut la solution découverte par les Britanniques pour stopper l’écoulement du « fleuve » d’argent ? Ils obligèrent les Chinois à s’adonner à la drogue, et quand ces derniers tentèrent de s’y opposer, ils déclarèrent la guerre à la Chine. Deux fois. Tout cela au nom du libre-échange et de la paix, bien sûr. Je voudrais ajouter que certaines des plus grandes banques et sociétés commerciales d’aujourd’hui ont leurs racines dans cette affaire infâme : HSBC, Jardine Matheson, Swire, etc. On peut dire la même chose de nombreuses familles « nobles », qui devinrent des lords, des pairs et des chevaliers de l’Empire britannique. Mais nous ne les nommerons pas aujourd’hui.

Pourquoi cela est-il important aujourd’hui ? Parce qu’aujourd’hui, tout comme 200 ans auparavant, le trafic de drogue est entre les mains des mêmes réseaux. L’opium est produit en Afghanistan à des niveaux record, même selon les statistiques officielles de l’ONU. Même chose pour la cocaïne de Colombie, un autre protectorat. Pourquoi cela a-t-il lieu ?

Certains disent que c’est parce que l’argent généré par les drogues est nécessaire pour financer les opérations clandestines, les dénommées « black-ops ». Peut-être, mais pour moi cette réponse est insuffisante. Ce genre d’argent est requis pour des pays de second ordre. Le système qu’utilisent la CIA et le Pentagone dispose déjà de la machine à imprimer l’argent ! Il peut envoyer tout l’argent qu’il veut, partout où il le désire. Il peut créer des sociétés fictives et leurs comptes peuvent être remplis à volonté. Donc pourquoi ont-ils besoin de contrôler le marché de la drogue et en quoi cela est-il relié au pétrodollar ?

Le système monétaire lui-même est dirigé exactement comme un cartel de la drogue. La FED américaine est l’équivalent du producteur, les banques nationales représentent les réseaux de distribution, et les banques commerciales représentent les dealers de rue. Un système de blanchiment assure la distribution des fonds et des profits. Le produit fini, l’argent, génère bien sûr sa propre addiction.

Crude-Oil-268x300.pngL’argent qui provient des drogues a deux caractéristiques : il est en grandes quantités et il est généré en cash. Le problème pour le syndicat de l’argent est de s’assurer que cet argent est réintégré dans le système bancaire, sinon il pourrait finir dans de mauvaises mains, qui pourraient demander des avoirs réels en retour. Cela pourrait bien sûr générer des déséquilibres majeurs et des fluctuations de la monnaie. Alors que dans le système bancaire, l’argent sera blanchi et distribué à travers le mécanisme du blanchiment.

Vous souvenez-vous de Pablo Escobar qui cachait des milliards de dollars en cash dans la jungle colombienne ? Je suis certain que c’est l’une des principales raisons de son élimination. Ce n’était sûrement pas pour éliminer le trafic de drogue, qui a explosé depuis. Nous devons sortir le dollar du narcodollar. C’est le troisième et dernier message pour aujourd’hui.  Pourquoi ?

Pour l’instant le système n’a pas besoin du trafic de drogue pour financer les opérations clandestines « black-ops », mais il a besoin de s’assurer que ce trafic, comme tout trafic, soit effectué dans sa monnaie et que l’argent cash revienne dans le système. De même que le pétrole, l’énergie, le cuivre ou le zinc, l’héroïne et la cocaïne doivent être payés en argent généré à partir de rien, en dollars.

Il est aussi important d’avoir la capacité de cibler avec des drogues la population des Etats rivaux. De ce point de vue, l’Afghanistan est idéalement situé à la frontière des deux principaux rivaux du système, la Chine et la Russie. En même temps, ce pays présente l’avantage que les réseaux de distribution qui en proviennent traverseront les pays musulmans d’Asie Centrale, et donc des réseaux de distribution de drogue à base ethnique peuvent être développés, créant des prémisses pour de futurs conflits interethniques.

L’annihilation des centres de production de drogue n’est pas seulement nécessaire pour le bien de la population. Leur sortie hors du système du dollar créera d’importants déséquilibres monétaires. La monnaie sortira du système et ne reviendra plus jamais, ajoutant une pression supplémentaire aux déficits commerciaux existants. Les bénéficiaires secondaires dans les pays secondaires devront être financés directement et cela requerra la redistribution des ressources.

C’est une ironie du destin, ou une justice karmique peut-être, qu’en sortant le dollar du narcodollar, l’Eurasie pourra rendre au monde anglo-saxon le cadeau empoisonné que ce dernier lui a donné il y a 200 ans. Nous ne parlons pas d’encourager la consommation de drogue de la manière dont l’ont fait les Anglo-Saxons, parce que ce serait une infamie, mais la neutralisation de cette arme, aujourd’hui encore entre les mains du système, tout en concurrençant le pétrodollar, fera renaître le « fleuve d’argent » qui sortait de l’Occident et entrait en Eurasie au XVIIIe siècle. Cela signifierait le retour à l’économie réelle.

Bogdan Herzog.

 

 

Une magnifique trilogie pour l'Europe !

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Une magnifique trilogie pour l'Europe !

par Georges FELTIN-TRACOL

Après avoir publié un excellent livre d’entretiens de Laurent Ozon et les souvenirs de Frédéric Lynn au Donbass, les éditions Bios ont fait paraître, il y a un an, trois recueils d’articles, d’entretiens et de conférences de Robert Steuckers consacrés à l’histoire, à la géopolitique et à l’avenir de l’Europe. Quelle prodigieuse triple somme ! Certes, un esprit chagrin pourrait regretter de lire ici ou là quelques répétitions, mais c’est la loi du genre; ces inévitables répétitions demeurent didactiques.

Bruxellois parlant depuis l’enfance le français, le néerlandais flamand et l’allemand, Robert Steuckers enseigne l’anglais et connaît l’italien et l’espagnol. C’est un « bon Européen » au sens que l’entendait le Grand Frédéric. Infatigable militant métapolitique et culturel de la cause identitaire européenne, il se considère pleinement comme un sujet de l’Âme sacro-impériale romaine germanique et de ses déclinaisons historiques, bourguignonne, habsbourgeoise et hispanique. Ce n’est pas un hasard si Robert Steuckers apprécie la Franche-Comté, cette terre bourguignonne puis espagnole annexée sous Louis XIV et dont maintes familles paysannes se faisaient enterrer pendant plus d’un siècle en tournant le dos à Paris pour signifier leur allégeance véritable à la Couronne espagnole.

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Fidélité à l’Empire

Robert Steuckers estime que l’idée impériale a une histoire et donc un avenir qu’il importe de forcer. Cependant, « toute notion d’empire aujourd’hui doit reposer sur les quatre vertus de Frédéric II Hohenstaufen : justice, vérité, miséricorde et constance. L’idée de justice doit se concrétiser aujourd’hui par la notion de subsidiarité, donnant à chaque catégorie de citoyens, à chaque communauté religieuse ou culturelle, professionnelle ou autre, le droit à l’autonomie, afin de ne pas mutiler un pan du réel. La notion de vérité passe par une revalorisation de la “ connaissance ”, de la “ sapience ” et d’un respect des lois naturelles. La miséricorde passe par une charte sociale exemplaire pour le reste de la planète. La notion de constance doit nous conduire vers une fusion du savoir scientifique et de la vision politique, de la connaissance et de la pratique politicienne quotidienne (I, p. 138) ». Il regrette bien sûr les tentatives impériales avortées à la fin du Moyen Âge et à la Renaissance. Le décès de la reine Mary Tudor a des « conséquences […] catastrophiques pour l’Espagne, les Pays-Bas, le Saint-Empire et, finalement, l’Europe entière (I, p. 102) ». Avant que l’Espagne et le Portugal ne forment pour six courtes décennies l’Union ibérique (1580 – 1640), on oublie qu’« en 1554, l’héritier de la couronne d’Espagne et du Cercle de Bourgogne (les Pays-Bas), Philippe II, épouse Mary Tudor, reine d’Angleterre. […] Pendant quatre ans donc, les Pays-Bas, l’Angleterre, l’Espagne, le Milanais et le Royaume de Naples et des Deux-Siciles connaîtront une direction unique, celle de Philippe II, allié aux Habsbourg d’Autriche, qui détiennent la titulature impériale (I, p. 101) ».

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Outre la Sainte-Alliance post-napoléonienne imaginée par le chancelier Metternich, Robert Steuckers se félicite à rebours de Mélancolie française d’Éric Zemmour (Fayard – Denoël, 2010) du « renversement des alliances » de 1756 validé par Louis XV et poursuivi par son petit-fils Louis XVI. « Nous avons une alliance tacite, eurasienne avant la lettre […], entre la France de Louis XVI (réconcilié avec l’Autriche par son mariage avec Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine), l’Autriche de Marie-Thérèse puis de Joseph II et la Russie de Catherine II la Grande. Cette alliance tacite […] offrait un espace stratégique de la Bretagne atlantique, voire de l’Espagne des Bourbons éclairés notamment sous le règne de Carlos III, jusqu’aux confins pacifiques de la Sibérie orientale. Cette alliance eurasienne a permis, entre l’avènement de Louis XVI en 1774 et la révolution française, d’esquisser une unité géostratégique entre les trois principales puissances continentales européenne (où la France avait acquis une supériorité navale dans l’Atlantique Nord suite à la guerre d’indépendance des États-Unis) (II, p. 4). »

Judicieux rappels historiques pour quiconque souhaite la libération et l’affirmation de la civilisation européenne ! « L’Europe-croupion, que nous avons devant les yeux, est une victime consentante de la globalisation voulue par l’hegemon américain (II, p. 17). » En effet, pour la puissance thalassocratique étatsunienne, « l’ennemi, c’est l’Europe qu’il faut ré-enclaver et qu’il faut faire imploser de l’intérieur en la livrant en permanence à des politiciens écervelés et en y déversant constamment des populations hétérogènes et inassimilables, débarquant à Lampedusa et sur les îles de l’Égée grecque (II, p. 63) ». Dans ces conditions, il importe d’éliminer impitoyablement ses trois ennemis prioritaires : « L’intégrisme religieux / terroriste de pure fabrication, le banditisme organisé et les cénacles manipulateurs et pervers d’économistes néo-libéraux (II, p. 150). » Ce n’est hélas ! pas gagné…

L’influence hydrologique

N’y aurait-il donc plus aucun espoir ? Non, si l’on accepte enfin de renouer avec l’héritage du Grand-Duché d’Occident. « Comme Philippe le Bon entendait reconstituer la dorsale lotharingienne pour mieux unir l’Europe et comme l’Ordre de la Toison d’Or était destiné à devenir l’instrument de cette politique, l’épine dorsale spirituelle et militaire d’une future Europe unifiée, la “ matière bourguignonne ”, dans sa rutilante diversité, recèle in toto les linéaments de notre “ mission nationale et impériale ”. Il n’y en a pas d’autre (II, p. 170). » Robert Steuckers fait sien ce projet grandiose « repris par Maximilien Ier, dès son mariage avec Marie de Bourgogne; le projet bourguignon fusionne, dès la fin du XVe siècle, avec l’impérialité romaine – germanique; il y a donc continuité entre ce projet bourguignon et les actions du binôme austro-hongrois d’une part, et avec celles de l’Espagne et de l’Ordre de Malte en Méditerranée, d’autre part (II, p. 168) ».

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Outre la dimension historique, il s’attarde en outre sur les aspects religieux et culturels ainsi qu’aux données géographiques au point qu’il recourt au concept perspicace d’« hydropolitique ». Les cours d’eau principaux et leurs affluents expliquent en dernière analyse la configuration des espaces politiques. « La dynamique de l’histoire romaine […] ou la logique de l’expansion territoriale romaine, repose in fine sur la bonne maîtrise de ces trois bassins fluviaux d’Europe (I, pp. 151 – 152) » : le Rhône, le Rhin et le Danube. D’antiques logiques stratégiques continuent leur œuvre aujourd’hui.

L’autre précision qu’apporte Robert Steuckers concerne le caractère forcément bigarré des empires européens. Il souligne le côté polyculturaliste de tout cadre impérial conséquent et réel. Polyculturalisme et non multiculturalisme, nuance de taille ! Le polyculturalisme est l’agencement politique des cultures autochtones européennes tandis que le multiculturalisme fait cœxister sur le même sol des peuples à l’esprit divergent. « Dans un empire cohabitent diverses communautés et, partant, vu l’extension territoriale importante de tout empire, divers peuples, que l’on ne songe pas à fusionner dans un magma insipide et indifférencié. Les empires sont généralement pluri-ethniques. C’était le cas de la monarchie austro-hongroise, dernière détentrice de l’impérialité romaine-germanique, où des hommes de toutes origines ethniques ont servi (I, pp. 157 – 158). » S’il ne croit pas au cadre stato-national réductionniste normativiste forcené et négateur des différences ethno-culturelles vivantes, il n’en est pas moins favorable au concept d’État. En lecteur attentif et assidu de Carl Schmitt et de Julien Freund, il estime que l’État s’adapte aux manifestations géographiques du politique, qu’il se fonde en cité, en région, en nation ou en empire. Là encore intervient l’influence des aires hydrologiques. « La dynamique de l’histoire allemande est centrifuge parce que les bassins fluviaux qui innervent le territoire germanique sont parallèles les uns aux autres et ne permettent pas une dynamique centripète comme en Russie d’Europe et en France. Un pays dont les fleuves sont parallèles ne peut être aisément centralisé. Les bassins fluviaux restent bien séparés les uns des autres, ce qui sépare également les populations qui se fixent dans les zones très œcuméniques que sont les vallées (III, p. 2). »

Une vision originale

Tout étudiant en histoire, en géographie et en sciences politiques devrait se procurer cette trilogie Europa de Robert Steuckers ou, pour le moins, demander aux fonds universitaires d’acquérir cette somme magistrale mille fois plus profitable qu’une énième étude quelconque sur le prétendu genre. On pourrait toutefois être dérouté par l’ampleur du champ de vision de l’auteur. Très mobilisé par le sort de notre grande patrie européenne, Robert Steuckers n’hésite pas à aborder d’autres champs sur d’autres continents. Dès le tome II, il se prononce « pour une “ grande alliance ” eurasienne et ibéro-américaine (p. 133) », se manifestant entre autres par un « soutien total à l’Arménie (II, p. 143) », la rupture de « l’alliance entre Washington et Ankara (II, p. 141) » et un « soutien total à Chavez (II, p. 144) ». Certes, cette prise de position paraît maintenant dépassée avec le naufrage, en partie prémédité par Washington, du Venezuela de Maduro et au moment où l’Amérique du Sud retrouve des dirigeants de droite libérale-conservatrice atlantiste (Chili, Argentine, Colombie, Brésil). La démarche demeure néanmoins actuelle en s’appuyant sur le justicialisme argentin et l’indigénisme andin présent au Bolivie, en Équateur et au Pérou.

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Dans les trois volumes se trouvent aussi ses notes sur l’Afghanistan, l’Iran, le monde arabe, le Tibet, le Japon ou le Pakistan. À chaque fois, une vision historique de la très longue durée se combine aux interprétations psychologiques des peuples, aux faits géopolitiques les plus complets possibles et à l’arrière-plan – primordial – de la spiritualité et de la culture. Il s’agit de saisir à un instant précis la vigueur des civilisations, des peuples, des États et des nations face au « monothéisme globaliste » d’essence marchande. Le réveil et l’affirmation des peuples constituent d’excellentes nouvelles pour tous ceux qui estiment que « le monde est un “ pluriversum ” (II, p. 104) ». Il revient par conséquent aux Européens les plus éveillés la délicate mission d’obtenir une « synthèse nouvelle entre ouverture et fermeture, pour reprendre la terminologie inaugurée par Popper, [qui] postule un rejet de l’extrémisme néo-libéral, un planisme souple de gaullienne mémoire, une volonté de provoquer la “ dédollarisation ” de l’économie planétaire et de créer une alternative solide au système anglo-saxon, manchestérien et néo-libéral (II, p. 104) ». Tel est donc le combat engagé par Robert Steuckers depuis plus de quarante ans. Gageons que les nombreux jalons qu’il a dès à présent posés indiqueront aux peuples albo-européens et à leurs véritables élites organiques la juste direction à suivre.

Georges Feltin-Tracol

• Robert Steuckers, Europa. Valeurs et racines profondes de l’Europe, Éditions Bios, 2017, 338 p., 25 €; Europa. De l’Eurasie aux périphéries, une géopolitique continentale, Éditions Bios, 2017, 316 p., 25 €, et Europa. L’Europe, un balcon sur le monde, Éditions Bios, 2017, 342 p., 25 €, les trois volumes à 80 € (75 € + 5 € de frais de port).

Pour toute commande directe chez l'éditeur: https://editionsbios.fr

lundi, 31 décembre 2018

Un nouvel ordre mondial vu de Russie

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Un nouvel ordre mondial vu de Russie

A new world order: A view from Russia

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://europesolidaire.eu

RGAff.jpgCet article, référencé ci-dessous, écrit par deux spécialistes russes de science politique internationales, Sergey Karagonov et Dmitry Suslov, est à lire d'urgence. Il présente, loin de la façon dont en France, sous l'influence des « think tanks » américains, l'on se représente la diplomatie russe, un point de vue très balancé de ce que pourrait être le rôle de la Russie dans la construction de ce que l'on commence à nommer une grande puissance eurasiatique.
Celle-ci pourrait constituer, face à un ensemble dit euro-atlantique dominé par les intérêts politiques et économiques américains, un contrepoids essentiel permettant d'éviter une guerre mondiale. Une puissance eurasiatique comprendrait, comme le nom l'indique, la Russie et certains grands pays européens ouverts au monde, comme devrait être la France. Il permettrait aussi d'associer à la Russie et à l'Europe la puissance chinoise en voie de devenir un facteur autour duquel se construira le monde de cette fin de siècle.
Mais la lecture de cet article s'impose aussi parce que celui-ci pourra faire connaître en France une revue russe de politique internationale, Russia in Global Affairs, dont on peut penser que s'inspirent Vladimir Poutine et Sergei Lavrov dans leur effort pour jouer un rôle modérateur au sein des actuels conflits militaires au Moyen-Orient.

Bref résumé de la première partie de l'article.
Nos commentaires en caractères italiques 

1. Un nouvel ordre du monde

L'ordre du monde international qui s'était imposé depuis plus d'un siècle s'est trouvé remis en cause depuis 2017-2018. une cause en a été l'élection de Donald Trump et la volonté américaine d'éliminer la Russie et la Chine des institutions en charge de le définir et le protéger. Mais plus en profondeur cet ordre du monde s'est heurté aux conflits grandissants entre puissance qui jusqu'ici s'était accordés sur la nécessité d'un tel ordre du monde. Tout laisse penser que l'ordre du monde ancien est en cours d'effondrement et qu'un nouvel ordre pourrait s'imposer. La Russie a de bonnes chances de pouvoir être un des principaux moteurs de cette transformation. Sous son influence, le nouvel ordre du monde pourrait plus équitable, stable et pacifique.

Les auteurs de l'article sont russes. On pourra objecter qu'ils défendent une thèse favorable à la Russie. Mais dans la suite de l'article ils apportent des arguments très sérieux en faveur de leur point de vue. Nous pensons que la plupart de ceux-ci mériteraient d'être pris en considération.

Malheureusement, ce nouvel ordre du monde demandera beaucoup de temps pour s'imposer. En attendant, l'état actuel des relations entre les Etats-Unis et la Russie ne contribue pas à prévenir le risque d'une 3e Guerre Mondiale qui verrait la disparition de ces deux puissance, comme sans doute de toutes les autres.

Dans ce domaine, la Russie s'efforce d'agir comme un facteur de sécurité à travers ses politiques internationales et de défense. Les réalisations actuelles de la Russie dans le domaine de nouvelles armes, exposées par Vladimir Poutine dans son discours de 2018, devraient jouer un rôle essentiel. Il s'agira d'une force de dissuasion visant à décourager les politiques d'agression des Etats-Unis.

Ceci paraîtra peu crédible au lecteur mal informé, car de nouvelles armes, aussi efficaces soient-elles en termes dissuasif, peuvent également être mises au service de politiques d'agression. Mais nous avons nous-même à l'époque indiqué que cela ne devrait pas être le cas. Un simple missile hypersonique du type de celui mis au point par la Russie, qui pourrait à lui seul détruire un porte-avions, ne pourrait jamais, à moins d'être doté d'une charge nucléaire – ce que Moscou refuse - soutenir une politique d'agression, au contraire de la flotte de porte-avions dont s'est dotée l'Amérique . Ceci étant la Russie dispose en Europe de forces terrestres largement supérieures à celles de l'Otan. Là encore il sera essentiel que la Russie continue, comme elle l'a fait jusqu'à présent, à maintenir une politique de non-agression, essentielle pour un éventuel dialogue constructif avec Washington.

Le « pivot » vers l'Asie de la Russie, se traduisant par un rapprochement avec la Chine, contribuera à créer une « Grande Eurasie ». Vu l'étendue des territoires et l'importance des forces concernées, cet ensemble pourra être un élément essentiel pour le futur ordre du monde, contrairement à ce que serait une Chine livrée à ses propres forces pour se faire respecter. De plus, la Russie s'efforcera de développer un partenariat étendu avec l'Inde et une coopération avec des alliés de l'Amérique, notamment le Japon, la Corée du sud et si possible les Etats européens. Ces différents pays cherchent à atténuer les confrontations entre l'occident et la Russie, comme entre les Etats-Unis et la Russie. Aucun n'a à y gagner.

Ceci dit, notamment pour des raisons de politique intérieure, aucun des Etats occidentaux ne paraît prêt dans les 10 prochaines années à accepter un nouvel ordre international incluant la Russie. Lorsque les élites actuellement au pouvoir auront été remplacées dans les 10 ou 20 ans prochains par d'autres plus ouvertes, c'est-à-dire vers 2030-2040, le nouvel ordre devrait devenir possible.

2) Pourquoi l'ordre du monde international actuel est-il en voie d'effondrement ?
3) La situation de l'Occident
4) Une Russie victorieuse, mais non sans problèmes
5) Les enjeux de sécurité
6) Le rôle de la Russie pour créer autour de l'Eurasie de futures politiques internationales plus ouvertes


Notes et sources

 

Référence de l'article
 https://eng.globalaffairs.ru/pubcol/A-new-world-order-A-v...

mardi, 18 décembre 2018

Le Royaume-Uni et le dernier Empire - Sur la souveraineté, l'intérêt nation et l'ordre libéral des nations

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Le Royaume-Uni et le dernier Empire
 
Sur la souveraineté, l'intérêt nation et l'ordre libéral des nations
 
par Irnerio Seminatore
Le Royaume Uni et le dernier Empire 

Le 25 Novembre 2018, après 18 mois d'âpres négociations, un projet d'accord a été signé par les Chefs d’États et de Gouvernement des 27 Pays-membres de l'Union Européenne et par la Première Ministre du Royaume-Uni, M.me Theresa May, pour mettre fin à la membership de la Grande Bretagne aux institutions européennes, après 45 ans d'adhésion(1973).

S'ensuivit une courte allocution, puis le retour amer de la Première Ministre à Londres, afin de  soumettre le texte (de 585 pages) et une déclaration politique d'accompagnement (de 26 pages), au débat et à la ratification parlementaires de Westminster.

La journée, historique et peu jubilatoire, a marqué un échec du projet européen et un tournant grave de son évolution, que certains (Macron) préconisent de "refondation".

En effet, les dangers internes du consensus de masse, exprimés par référendum et libérés des freins et des contrepoids traditionnels, ont pris le poids sur la définition de l'avenir.

Voulu par un choix populaire, ce retour à l'exercice intégrale de la "souveraineté nationale" de la part de la deuxième puissance économique du continent s'est fait dans l'amertume et dans l'incertitude.

Trois arguments ont pesés sur le vote populaire: l'immigration, la zone euro et le fossé culturel et politique entre l'Est et l'Ouest.

Confronté à un compromis insatisfaisant et au dilemme de se soumettre ou de sortir sans accord (no deal), certains ministres du gouvernement de Theresa May ont réconforté le débat,en indiquant au pays, comme objectif ambitieux, un nouveau destin planétaire, le seul à la hauteur de son passé.

Enfin, l'U.E et la Grande Bretagne sont revenues, chacune, à leurs traditions et pratiques. Les continentaux à l'utopie bureaucratique des institutions européennes avec, en corrélat, l'opposition pré-moderne du "peuple" et des"élites" (France) et le Royaume-Uni à ses fondamentaux, de liberté et de démocratie politiques, avec, en corrélat, le droit de dissidence, de sécession et de résistance à la contrainte  normative de l'Union.

Contre ce tyran (l'empire oppressif de l'U.E) on a pu invoquer ainsi le droit moyenâgeux de sédition et de mort, le tyrannicide.

La volonté de quitter l'hydre européenne  a été la première exigence à satisfaire, en parfaite conformité avec le référendum et avec les demandes des "brexiters" (les tories) de mener une politique d'austérité et, des remainers, de souhaiter une plus grande présence de l’État dans la vie économique.

Le vote en faveur du Brexit a représenté pour tous, continentaux et britanniques, une victoire du populisme, du nationalisme et du souverainisme, comme "longue usurpation du pouvoir", ou, en d'autres termes, comme fondement d'une légitimité ancienne.

Face au dernier empire (l'U.E) et à l'extrémisme normatif de la "raison", tous les avatars de l'anti-souverainisme n'ont pu éviter une crise de confiance envers les institutions et contre les "élites globalistes" de la mondialisation.

En France et en Italie, l'impuissance de l'ordo-libéralisme et des traités de l'U.E, à proposer une offre politique par le biais d'un dépassement des partis politiques,de la représentation bi-partisane (justifiant l'appel "ni droite, ni gauche"), et de l'usure des corps intermédiaires , a mis en lumière, grâce au référendum britannique, le clivage qui existe désormais entre deux visions de la société, nationale et international, à l'ère d'internet.

Il a poussé à une radicalisation des termes de l'accord, arraché par Theresa May, qui a dramatisé à l'excès le choix final, "Ou moi,ou le chaos (identifié à un "no deal", ou à une négation de l'intérêt national).

Le Royaume Uni, l'intérêt national et la "Balance of Power"

En effet et par le passé, c'est au nom de "l'intérêt national" que le Royaume Uni a toujours défini ses choix, en politique interne, prônant pour l'unité du royaume et en politique européenne et mondiale, penchant  pour l'adoption  du vieux principe de "divide et impera!"

A titre d'impact psychologique, la crise de la Grande Bretagne avec l'Union européenne, a été comparée, par les médias et par une partie de la classe gouvernementale britannique à la "crise de Suez" de 1956, qui tourna politiquement au fiasco, malgré la victoire militaire.

Cette comparaison a rappelé à l'opinion la première prise de conscience, encore circonscrite, du déclin de l'Empire.

Son déclassement géopolitique et historique confina depuis et pour l'essentiel, les deux puissances coloniales de l'époque, la France et la Grande Bretagne, à peser sur le seul continent européen.

La "limite", qu'imposait désormais au Royaume -Uni  la "surextention impériale"(P. Kennedy), n'était rien d'autre que l'adaptation de l'intérêt national à la politique de "l'équilibre de puissance" de David Hume, comportant  une surveillance permanente sur les intentions et les manœuvres des acteurs continentaux concurrents, afin que "ne soit pas tenue en une seule main une force supérieure à toutes les autres coalisées"!

Une image efficace pour définir l'opposition résolue de l'Angleterre aux ambitions continentales et montantes de toute puissance hégémonique, dont témoignèrent la première et la deuxième guerre mondiales.

Cependant, la conscience du déclin de l'Empire fut ressentie pour la première fois et de manière plus aiguë par Churchill, vis à vis de l'Amérique et de l'Union Soviétique, à la "Conférence de Téhéran, des trois Grands, Roosevelt, Staline et Churchill", en 1943, organisée pour définir la coordination militaire et politique de la dernière phase du conflit, par l'ouverture d'un deuxième front et le débarquement en Normandie, ainsi que pour redessiner la carte de la Pologne et de l'Allemagne dans l'organisation de l'ordre mondial et dans la recherche de la sécurité collective sur le théâtre européen.

Rien de comparable avec l'amertume de Theresa May, de retour à Westminster, après la conférence extraordinaire des Chefs d’État et de Gouvernement des Pays-membres de l'Union. Ni l'enjeu, ni la taille des protagonistes semble justifier une telle comparaison.

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Perspectives et équilibres planétaires

Toutefois, sur la toile de fond de l'histoire européenne la réappropriation du passé acquière désormais une valeur symbolique différente pour les diverses classes d'acteurs et mobilise différemment les deux camps, face à l'avenir et aux projets de"reforme" des institutions qui avaient été jusqu'ici communes.

Si les deux impératifs de l'intérêt national et de l'équilibre de puissance ont été les deux fils conducteurs du Royaume Uni depuis le traité de Utrecht (en 1713, reconfirmé par le Congrès de Vienne en 1805), se résumant à l'unité des îles britanniques autour de la couronne et à la division des joueurs sur le continent, rien de tel pour les 27 pays membres, irréductibles à un principe d'action commun.

Vers quelle direction tournera-t-il le vent de l'histoire du XXIème siècle et qui en saisira la force et les opportunités?

Il semble désormais acquis que l'entrée de la Grande Bretagne dans la Communauté européenne en 1973 n'a été rien d'autre que l'adaptation du principe directeur de la politique britannique traditionnelle, visant à empêcher de l'intérieur toute transformation de l'Union en puissance politique susceptible de devenir une menace et à privilégier l'élargissement, au détriment de l'approfondissement institutionnel, lors de la demande d'adhésion des pays de l'Est, en faisant accepter son pouvoir de regard et de veto, qui lui permirent de bloquer toute avancée significative du bloc concurrent et de rester libre d'agir, sans les contraintes économiques de la zone euro.

Or, l'identification claire de son intérêt de sécurité et de sa survie et l' insertion de cet intérêt vital dans les nouveaux équilibres planétaires, portera-t-elle la Grande-Bretagne à oublier son encrage insulaire entre l'Europe et l'Amérique?

Par ailleurs le Royaume-Uni vise-t-il désormais l'Océan Pacifique et l'Océan Indien, dont le contrôle représente l'enjeu majeur du XXIème siècle, comme nouveau centre de gravité du monde, où pulsera le cœur du capitalisme universel de la finance et de la grande manufacture.

A-t-il oublié que l'enjeu d'une accession à cette zone pivot est un défi et un pari disputés, impliquant simultanément le visage bifront de la paix et de la guerre, au marges extérieures d'une Asie, multiple et conflictuelle?

En est-il de même des préoccupations et des clés de lecture du système international de la part de l'Union Européenne?

Grande Bretagne, France et Allemagne face au renouveau diplomatique de l'Europe

Dans la foulée d'un renouveau diplomatique, consécutif au Brexit, concernant les relations de puissance à l'échelle mondiale et  face à une France qui demande à l'Allemagne de surmonter ses tabous économiques pour faire avancer l'Union, le Ministre des Finances et Vice-Chancelier allemand Olaf Scholz (SPD), a invité la France à consentir de transformer son siège au Conseil de Sécurité  des Nations Unies, pour permettre à l'Europe de parler d'une seule voix.

En effet le "droit de veto" au sein du Conseil de Sécurité, consent aux membres permanents de disposer d'un instrument diplomatique, permettant de traiter d'égal à égal avec les Grands de la planète.

Ainsi le retour au premier plan de la scène internationale et le risque de démantèlement de l'Union Européenne dans la lutte ouverte entre les différents principes de légitimité, visant à débarrasser le débat des vieux carcans idéologiques, impose une polarisation des idées et des positions, soit en ce qui concerne  la rétrospective historique que pour la définition de l'avenir.

Quant aux pronostics d'avenir sur la réussite du Brexit ou  sur son éventuel rejet par la Chambre des Communes, deux analystes du divorce anglo-unioniste, Kevin  O' Rourke et Marc Roche, ont formulé deux idées opposées.

Selon le premier, après le rejet quasi certain de l'accord convenu entre les négociateurs des deux parties, s'ouvrirait une crise politique majeure au Royaume Uni.  Un vrai purgatoire pour M.me Theresa May, prise dans un conflit sans fin, opposant une coalition de contraires (composée de brexiters et de remainers), pour qui l'échec du Leadership, ferait du Royaume Uni, "un pays hors d'Europe, mais encore dirigé par l'Europe et tenu de respecter des règles, qu'il n'aurait pas écrites" (Financial Times).

D'après le deuxième, non seulement Westminter votera l'accord, mais la ferveur de cette option sera telle que le Royaume Uni, deviendra plus dur, plus inégalitaire, mais beaucoup fort économiquement, de telle sorte qu'un nouveaux  destin planétaire s'ouvrira au Royaume, délibérément projeté vers le contrôle de l'Océan Indien et du Pacifique, pivots maritimes de l'Asie.

Un "Partenariat ambitieux"entre le Royaume Uni et l'U.E?

Face à une Union Européenne, à qui a fait défaut une capacité de conception et d'action géopolitique et stratégique globales et une impuissance singulière en matière monétaire, de politique étrangère et de sécurité, mais aussi de frontières et d'immigration, et encore de R&D, de technologies avancées et d'environnement, l'attractivité de jadis s'est commuée en une délégitimation, en une prise de distance et en diffractions internes multiples, qui rendent douteuses ses propositions de "partenariat ambitieux après le Brexit"(Michel Barnier/ Le Figaro du 2 août 2018).

En effet M.Barnier, se penchant sur les modalités de retrait du Royaume Uni, membre du G7 et du Conseil de sécurité des Nations Unies, après avoir passé en revue les points litigieux et les résultats positifs de la difficile négociation, précise que les fondations économiques sur lesquelles s'est construite l'U.E, ne peuvent être affaiblies.

Puis et en conclusion, il met en exergue l'essentiel de la dispute, son caractère politique, axé sur le concept de souveraineté et il précise "le Royaume Uni souhaite reprendre la souveraineté et le contrôle de sa propre législation...mais il ne peut pas demander à l'U.E de perdre le contrôle de ses frontières et de ses lois."

S'opposent, dans ce passage et dans les aspects sous-jacents de ces formulations, deux interprétations du concept de souveraineté et de sa "summa potestas".

Du côté britannique, une conception unitaire  et cohérente du pouvoir et de la légitimité, ancienne et absolue en son principe, en son étendue et en sa liberté de manifestations historiques, qui s'exprime sous forme de "balance".

Du côté de l'Union une définition relative et partagée du pouvoir souverain, inessentielle du point de vue historique, artificielle du point de vue institutionnel et circonstancielle du point de vue décisionnel, sécuritaire et stratégique.

Or, quelles histoires sont en train d'écrire aujourd'hui, ces deux acteurs de la vie contemporaine, le Royaume Uni et l'Union Européenne?

Une histoire de capitulation et de vassalisation du Royaume Uni à l'entreprise déclinante du projet européen, ou, en revanche, une nouvelle histoire de la liberté des peuples et du retour des nations?

Assistons nous, dans une période de turbulences internationales aiguës, à une recrudescence de revendications ingérables et, simultanément, à un appel à la souveraineté incontestée?

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Jo Johnson et Mike Pompeo

La souveraineté, le multilatéralisme et l'ordre libéral des États-Nations

A l'échelle européenne, la fronde de Jo Johnson, ex secrétaire d’État pro-européen aux transports, menée contre l'accord obtenu par Mme May lors des longues négociations avec l'U.E, porte sur la limitation de la souveraineté britannique, non compensée par la liberté promise, de mener une politique commerciale autonome.

Il prône ainsi pour un nouveau référendum, en donnant au peuple le dernier mot.

A l'échelle mondiale, le secrétaire d’État, MIke Pompeo, a décrété au même moment,  à Bruxelles, au German Marshall Fund, la fin du multilatéralisme, au nom de la priorité de la souveraineté américaine sur la logique du système international.

Après avoir rappelé que le vieux système de la coopération internationale ne fonctionne plus et qu'il profite à des acteurs de l'ombre (la Chine), lui permettant d'avancer ses pions, au sein des institutions supra-nationales ou de creuser un clivage entre les intérêts d'une bureaucratie non élue et leurs peuples et pays (U.E), il a rappelé que les intérêts  de l'Europe et des États Unis précèdent ceux des institutions supra-nationales (ONU, UE, FMI, BM, OMC etc), puisque seuls les États-Nations peuvent garantir les libertés démocratiques et ont pour assise le peuple libre.

En effet, seuls les États-Nations sont l'expression de la souveraineté, à l'instar des organisations multilatérales, porteuses de compétences dépourvues de contraintes et de sanctions.

Le multilatéralisme, défendu par les européens, n'est pas seulement une méthode, ou mieux, un choix de régime politique (démocratie ou autocratie), mais une question de stratégie et d'intérêt à long terme, bref de polarisation des forces et des cultures.

L'effacement des vieilles administrations américaines (Obama, Clinton, etc), et l'alignement de certains gouvernements européens (A.Merkel, F.Hollande/ E.Macron, Gentiloni, etc..), ont conduit l'Occident à la paralysie ou à l'impuissance. Or, conclut-t-il les États-Unis, qui revendiquent un rôle central dans le nouvel ordre libéral, mènent le monde vers le recouvrement des souverainetés nationales, comme le font les britanniques avec le Brexit.

Un monde libre est un monde d’États-Nations et ne peut être un univers de bureaucraties supra-nationales.

Ce nouvel ordre libéral ne peut jaillir que d'une profonde reforme des esprits et des institutions et ne peut aspirer à la stabilité que par l'affirmation d'un principe de cohérence, fondé sur le soubassement de trois notions, le Leadership, pourvu du sentiment instinctif de l'histoire, la capacité de décision et d'action et l'ordre contraignant du monde, bannissant l'inaction, les compromis sans fin et les déclarations illusoires.

Il ne s'agit pas de rééquilibrer mais de refonder!

Pas d'inclure l'ennemi ou la menace, mais de les combattre!

Lorsque la liberté et la démocratie se dissocient et la foi dans la raison disparaît ou s'affaiblit, la "guerre civile"mondiale est proche!

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La souveraineté et le "Pacte mondial pour les migrations"

Les bases normatives d'un droit futur aux migrations élaborées par les Nations Unies dans un "Pacte mondial", signé à Marrakech les 11 décembre 2018, vident les souverainetés nationales de leur substance et prétendent apporter une réponse globale à un phénomène d'ordre planétaire.

Elles poursuivent le long chemin de la proclamation des droits de l'homme et du citoyen, débuté avec les révolutions américaine et française et poursuivi après la IIème G.M, sans enfreindre la tutelle juridictionnelle des États.

L'humanité multiculturelle qui se dessine à Marrakech est destinée, dans sa rhétorique, à mettre fin à toutes les discriminations accumulées au fil des siècles.

Les États y sont réduits à des outils de gestion des flux forcés de populations, dénaturant leur fonction essentielle, mais circonscrite dans l'espace terrestre, de protection et de sécurité.

Il en découle que la marche vers le communautarisme, par l'acceptation de la part des États signataires, de la diversité, ethnique et religieuse, n'est rien d'autre que la rupture de toute cohésion et de toute solidarité nationale et, de ce fait, la dissolution des États-Nations, nés de l'idée de "raison", de liberté et d'ordre.

Par ailleurs la recommandation du "Pacte", adressée aux États de "priver de subventions...tous les médias qui promeuvent des formes de discriminations à l'égard des migrants", est un encouragement totalitaire pour tous les dictateurs de la planète, réels ou virtuels, à censurer la presse et à instaurer la"pensée unique".

En perspective la signature d'un tel "Pacte", marque l'alliance des gauches tiers-mondistes et des lobbies post-colonialistes  de la répentence et cache le coût annuel des migrants qui est évalué pour la seule France, à 12,2 milliards d'euros, sans coûts annexes.

Cette signature, au sein de l'Union européenne, n'est que le prélude à d'autres Bréxit et à d'autres litiges entre États Membres, concernant le fardeau des flux migratoires et ne peut être interprétée que comme un recul du concept de souveraineté, d’intérêt national et de frontières, bref comme un recul du cadre juridique au sein duquel la progression des droits s'accompagnait jadis,de la progression des mœurs et des sociétés.

Or, ce cadre a été celui de la civilisation occidentale moderne!

Par ailleurs, du point de vue idéologique, ce pacte, s'il consacre comme acteur culturel naissant la société civile trans-nationale, constitue néanmoins un  danger  de submersion démographique pour les sociétés européennes  et pour leur rempart identitaire, la chrétienneté.

En subordre, et dans le concret du phénomène migratoire, il demeure difficile dans le marasme des arrivées de masse, d'opérer un tri de légalité, entre émigrants économiques et émigrants politiques et d'ignorer ,dans l'accueil, le malaise profond des musulmans de vivre dans des "sociétés ouvertes", sauf à oublier, dans un univers de conflits, le rôle de la "ruse" historique  du "cheval de Troie".

La souveraineté et la géopolitique globale

Or, si "la souveraineté" est la "summa potestas" ou  l'auctoritas, superiorem non recognoscens", qui décide du cas d'exception, le Brexit est né d'un conflit entre deux principes de souveraineté et de légitimité ,millénaire pour l'empire britannique et circonstanciel pour l'empire des normes. 

En son pur concept, la souveraineté reste le nœud incontournable du maintien ou de la  déconstruction de tout ordre social, interne ou international et  permet  d'inscrire un pouvoir  dans la  géopolitique des grandes espaces, constitués, au XXIème siècle, par le Pacifique et l'Océan indien, comme pivots maritimes de l'Eurasie.

Dans le contexte d'aujourd'hui,le retrait américain du pacte de libre-échange trans-pacifique rend aléatoires les garanties de sécurité de l'immense zone maritime jadis recouverte par l'empire britannique, l'Australie et la Nouvelle Zélande, mais aussi la Malaisie et l'Indochine, où l'exacerbation de l'affrontement, pour l'heure commercial, entre la Chine et les États-Unis, conduit à la constitution d'un front commun entre le Japon et la Chine.

Ainsi, il est à parier que l'après Brexit sera marqué, moins par l'accroissement de la rivalité entre le Royaume Uni et l'Union Européenne, que par la recherche d'un nouveau destin, planétaire et multipolaire, pour les deux ensembles

De la vieille architecture euro-continentale de la sécurité, le Royaume-Uni héritera l'objectif historique d'une opposition permanente à la Russie et à toute organisation eurasienne à caractère militaire, dans le but d’empêcher un rapprochement euro-russe et, encore davantage germano-russe, qui en ferait un ensemble dominant et menaçant.

Au delà de l'espace européen, il partagera avec les États-Unis ou l'Inde, l'objectif d'une compétition sans merci, dans les domaines clés de l'espace, des big-data,de la  cyber-war et de l'intelligence artificielle. La réappropriation de la souveraineté et d'un réalisme retrouvé lui permettront  une alliance sans états d'âme avec des États autoritaires, à capitalisme publique, débarrassée du chantage encombrante du modèle démocratique et des droits de l'homme.

A l'image de son passé, il pourra actualiser à l'échelle du monde,  les principes unifiants de la cohérence stratégique, qui ont fait grande à toute époque la notion d'empire.

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La souveraineté européenne et son impasse stratégique

Le dossier nucléaire et celui des deux traités INF (interdiction des armes nucléaires à portée intermédiaire - de 500 à  5500 km, de 1987, susceptible de péremption), et START (sur le plafonnement des missiles nucléaires intercontinentaux ou sol-sol), constituent les domaines, sur lequel l'Europe montre la plus grande atonie et manque de suggestions et d'idées.

Sauver l'INF et prévoir le renouvellement de START, implique, pour les Européens, de favoriser le dialogue stratégique entre les États-Unis et la Russie et proposer l'inclusion de la Chine dans ces pourparlers et dans leurs issues, dans le but de la contraindre aux mêmes règles.

L'espace diplomatique pour de telles propositions existe, mais l'Europe, pourtant déclassée de rang et menacée en sa force vive par des systèmes d'armes placés (Pologne) ou pointés contre elle (Volgograd), n'y exprime ni des projets ni des avis.

L'Europe voudra-t-elle rester une Europe des normes et des règles budgétaires, plutôt qu'une Europe de la sécurité ou une Europe identitaire et de civilisation?

Pour l'heure elle semble préférer les disciplines de l'euthanasie et l'abandon à l'irréparable destin du "Fatum", soudé autour du nœud menaçant d'"Islam-migrations-terrorisme-démographie", plutôt que secouer la paresse intellectuelle de ses élites et s'éveiller politiquement.

La souveraineté et l'ordre libéral du monde

Le Brexit, comme beaucoup d'autres moments des relations euro-britanniques a été une victime du consensus de masse des démocraties et des tentations des classes dirigeantes, divisées, de satisfaire simultanément aux revendications populaires et aux objectifs à long terme de leurs pays.

C'est pourquoi il apparaît si difficile à Mme May de définir un nouveau rapport entre les retournements presque quotidiens des députés de Westminster et les arrangements obtenus avec les négociateurs des trois institutions de l'Union européenne.

En effet le défi est de taille et concerne l'art de gouverner, bref la capacité de conjuguer les impératifs immédiats des passions populaires et les objectifs à long terme de l'avenir.

Il ne s'agit pas d'agir pour toute l'humanité, mais  de se frayer un chemin dans la voie ardue de la complexité, autrement dit d'accorder les objectifs émotionnels de la nouvelle diplomatie avec les calculs à long termes de la diplomatie du passé.

Un difficile équilibre, consistant à ne pas se plier à la loi du nombre du consensus de masse, sans que l'ordre transcendant d'une mission publique puisse prévaloir sur la liberté et celle-ci se plier aux humeurs variables des foules, négligeant la définition de la perspective et celle de la grande stratégie.

Ainsi le Brexit marque la fin du sentiment d'appartenir à une même communauté humaine de peuples et de nations, distincte de toutes les autres, la communauté européenne, qui avait réussi à modérer par la raison et à atténuer par le calcul et par l'équilibre des forces, les rivalités de position et de principe entre ambitions concurrentes.

Ce qu'on a appelé le même système de valeurs (ou même parenté spirituelle), n'était rien d'autre que l'adaptation aux temps modernes du vieux système de Westphalie, d'apparente neutralité idéologique ou de non intervention dans les affaires intérieures d' autres pays.

Or ce sentiment, autrefois fortifiant, s'affaiblit ou disparaît, face à la submersion démographique des migrants extra-européens et à la différente perméabilité de leur acceptation dans les pays d’accueil, ce qui prouve la difficulté de traduire des cultures différentes en un système unique de civilisation.

Par ailleurs la différente appréciation de l'ordre mondial, implique une réévaluation de la notion d'équilibre des forces, à l'intérieur des différents régions et dans leurs relations d'interdépendance.

Ceci impose un réexamen philosophique du concept de "limite" dans le rapprochement de ce qui est distinct, au sein d' un système socio-politique régional ou global.

Pour conclure, le Brexit pousse à une reconsidération sur la transcendance de l’État et de la souveraineté étatique, reposant, dans la conception post-moderne du projet européen, sur le soft power, dépourvu de l'expérience millénaire du conflit, de la tragédie et de la volonté de puissance.

Ou, pour le rappeler avec David Hume, dénoué du principe-clé de l'art britannique de gouverner, le principe de "l'équilibre des forces" qui, au dessous de apparences, suppose "l'unité équilibrée des contraires" (Héraclyte).
 
Bruxelles le 12 décembre 2018
 
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vendredi, 14 décembre 2018

L’agenda caché en vue de la nouvelle provocation dans le détroit de Kertch

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L’agenda caché en vue de la nouvelle provocation dans le détroit de Kertch

par Peter Korzun

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/fr

Le 25 novembre, trois navires militaires ukrainiens ont traversé de manière non autorisée les eaux territoriales russes. La gendarmerie maritime russe a pris des mesures pour les forcer à se conformer au règlement. Ce qu’ils ont refusé de faire. Il ne fait aucun doute que Kiev a délibérément envoyé ces navires pour provoquer la Russie. Tous les vaisseaux passant par cette voie navigable doivent contacter les autorités du port marin de Kertch, signaler leurs routes et destinations et recevoir la permission de naviguer. C’est une démarche très simple, mais le groupe de vaisseaux ukrainiens n’a pas informé la Russie de ses plans. Ils ont fait la sourde oreille aux injonctions d’arrêter leurs manœuvres dangereuses. Les vaisseaux ukrainiens ont ignoré avec insolence les demandes de quitter les eaux territoriales russes.


Kiev s’est empressée d’accuser Moscou «d’agression miliaire». L’incident a immédiatement fait les grands titres, et les dirigeants occidentaux ont pris la parole pour défendre l’Ukraine sans même offrir de détails sur ce qu’il s’est passé exactement ou ce qui a déclenché ce dangereux concours de circonstances. Le secrétaire général de l’OTAN Jens Stoltenberg n’a pas perdu une minute pour exprimer le «plein appui du bloc pour l’intégrité et la souveraineté territoriale de l’Ukraine, incluant la totalité de ses droits de navigation dans ses eaux territoriales, conformément à la loi». Le Canada, la Pologne, le Danemark ainsi que d’autres pays ont rapidement joint leur voix au chœur antirusse. Cela allait dans le sens de leur intérêt propre d’écarter autant les détails que toute tentative d’obtenir un aperçu des causes réelles de cet incident en particulier ou de la situation dans la mer d’Azov en général.


Le 26 novembre, le président Ukrainien Petro Porochenko a signé une motion imposant la loi martiale. Une fois approuvée par le Parlement, cette dernière sera en vigueur pendant au moins un mois. Après cette période, elle pourra être prolongée. En 2014, lorsque la Crimée a demandé via un referendum d’être intégrée à la Russie, le président ukrainien n’avait pas soulevé la question d’imposer la loi martiale. Il ne l’a pas fait non plus, en 2015, pendant la bataille de Debalsevo Bulge [à Donezk] au cœur de la lutte dans la partie orientale du pays. Le conflit actuel des républiques auto-proclamées ne l’a jamais poussé à envisager l’état d’urgence. Cependant, il a estimé que l’incident en mer était assez grave pour justifier l’imposition de la loi martiale, cela peu de temps avant les élections présidentielles – dont les sondages indiquent son peu de chances à gagner.


Ce geste limite les libertés civiles et donne un plus grand pouvoir aux institutions étatiques durant les élections prévues pour le 31 mars 2019, si elles ne sont pas reportées. En temps de loi martiale, les élections présidentielles, parlementaires et locales ainsi que les grèves, les manifestations, les rallyes et les démonstrations de masse sont interdits. L’incident en mer pourrait ne pas être l’unique provocation prévue. La situation à la frontière des républiques autoproclamées s’est mise à se détériorer au moment même où les rapports sur l’incident en mer ont commencé à affluer. Le soir du 26 novembre, de lourds bombardements de zones résidentielles dans l’est de l’Ukraine par les forces ukrainiennes ont été reportés. 

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Autre motif: la provocation a été mise en scène pour accélérer la procédure d’adhésion à l’OTAN. L’accord entre la Russie et l’Ukraine de 2003, selon lequel la mer d’Azov est considérée comme des eaux domestiques appartenant aux deux pays, pourrait être annulé. L’été passé, un projet de loi pouvant révoquer ce traité a été présenté au Parlement ukrainien (Rada). L’accord interdit à tout bâtiment de guerre d’entrer dans cette mer sans le consentement des deux nations. Si cet accord est démantelé, la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982 prendra effet. Les eaux territoriales de la Russie et de l’Ukraine s’étendraient à 12 miles nautiques de leurs côtes respectives. L’intérieur de cette mer deviendrait des eaux internationales, ce qui permettrait aux vaisseaux de l’OTAN d’entrer dans la mer d’Azov sans restriction.


Kiev espère également une augmentation de l’aide militaire venant des pays de l’OTAN, ce qui lui permettrait de développer une flotte puissante et des défenses côtières. Elle voudrait qu’une mission d’observation internationale soit stationnée dans la mer d’Azov, probablement sous l’auspice de l’OSCE et avec la participation de forces navales au demeurant défavorables à la Russie. Une autre chose que le président ukrainien voudrait voir arriver, c’est l’annulation par le président des Etats-Unis, Trump, de sa rencontre avec le président russe Poutine lors du sommet du G20 en Argentine [ce qui a été fait].


Quel a été l’élément déclencheur des actions de Kiev? C’est le soutien de l’Occident. Le 25 octobre, le Parlement européen a adopté une résolution concernant la mer d’Azov pour exprimer son soutien à l’Ukraine. Le 19 novembre, le Haut représentant pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité de l’UE, Federica Mogherini, a déclaré que les ministres des Affaires étrangères de l’UE avaient discuté de prendre des «mesures ciblées» pertinentes contre la Russie à cause de la situation dans la mer d’Azov. Les Etats-Unis continuent d’étendre leur assistance militaire à l’Ukraine. Ils ont déjà une installation militaire à Otchakiv. Une fois que les frégates de la classe Oliver Hazard Perry arriveront en Ukraine, des instructeurs navals américains suivront. La présence américaine et les infrastructures militaires s’étendront graduellement. La Grande-Bretagne agit de même.


Le soutien de l’Occident encourage l’Ukraine à envenimer les tensions. La Cour constitutionnelle d’Ukraine vient d’approuver un amendement proclamant l’adhésion à l’OTAN et à l’UE comme objectif officiel de la politique étrangère. Si le Parlement approuve cet amendement, les Accords de Minsk deviendraient alors nuls et non avenus, parce que la Russie a initialement accepté de s’y conformer à condition que l’Ukraine demeure un Etat neutre.


Personne n’a besoin d’un tel accroissement des tensions dans une région avec une forte navigation. Toutes les nations maritimes veulent disposer de voies de navigation libres et protégées par la loi. Plus le soutien politique et militaire apporté à Kiev augmente, plus les chances qu’une étincelle mette le feu à la région de la mer d’Azov sont grandes. La responsabilité repose sur ceux qui incitent Kiev à attiser les tensions en vue de poursuivre leurs objectifs politiques.     •


Source: https://www.strategic-culture.org/news/2018/11/27/ukraine...  du 27/11/18

(Traduction Horizons et débats)

mardi, 27 novembre 2018

Désordre et Géopolitique : "Lorraine engagée" reçoit Jean-Michel Vernochet

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Désordre et Géopolitique : "Lorraine engagée" reçoit Jean-Michel Vernochet

dimanche, 25 novembre 2018

Geopolitics of Turkey in Asia

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Geopolitics of Turkey in Asia

 
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Turkey is a transcontinental power, and, while the European side of the country is secure and calm, the situation could not be more different on the Asian front. The collapse of the Sykes-Picot agreement is disintegrating the territorial borders from within and in the subsequent vacuum of power, major nations seek to carve out their own spheres of influence. All these activities, directly and indirectly, affect Turkey and determine the country’s geopolitical objectives in Asia.
 
Soundtrack: Dreams Become Real by Kevin MacLeod (incompetech.com)
 
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Dr. Rainer Rothfuß: Feindbild Russland, Syrien, Geopolitik verstehen, menschliche Begegnung, Frieden

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Dr. Rainer Rothfuß: Feindbild Russland, Syrien, Geopolitik verstehen, menschliche Begegnung, Frieden

 
Die Macht menschlicher Begegnung als Alternative zur militärischen Eskalationsspirale 13. März 2018 Eggenfelden Europa steht am Scheideweg. Während das entspannungspolitische Experiment des US-Präsidenten Donald Trump nach wenigen Monaten unter dem Druck der Befürworter einer konsequenten Bekämpfung des aufstrebenden geopolitischen Rivalen Russland scheiterte, steht Deutschland als führende Macht Europas nun vor der Wahl, den von der US-Regierung unter Obama aufgezwungenen Anti-Russlandkurs fortzusetzen oder zu einer eigenständigen Vision und Strategie europäisch-eurasischer Integration zurückzufinden. Noch dominiert das "Feindbild Russland" die deutsche Medienberichterstattung. Doch in der politischen Debatte werden Stimmen lauter, die eine pragmatische und an langfristigen Stabilitätsinteressen orientierte Russlandpolitik propagieren. Ist eine EU, die sich von Russland aufs Schärfste abgrenzt der einzig denkbare Entwicklungsweg? Kulturelle und historische Verknüpfungen, die sich über Jahrhunderte zwischen Ost und West herausgebildet haben, zeigen mögliche Entwicklungspfade in einem weiter gefassten Kontext auf. In der Bevölkerung regt sich das Bewusstsein, dass die dialogorientierten und auf Austausch und Kooperation zielenden Ansätze, die Europa aus der Zerstrittenheit des Zweiten Weltkriegs herausgeführt hatten, auch Grundlage werden könnten für tragfähige friedliche Beziehungen zum östlichen Nachbarn Russland. Mittels "Volksdiplomatie" bzw. "Geopolitik von unten" hat die aus Deutschland hervorgegangene "Druschba"-Initiative (russisch für "Freundschaft") einen Weg eingeschlagen, der beiderseits der imaginären "unüberwindbaren" Grenze zwischen Ost und West einen Weg aufzeigt, der die NATO-Russland-Aufrüstungsspirale durch breit angelegte Bewusstseinsarbeit stoppen könnte: Völkerfreundschaft statt militärischer Abschreckung als Weg zum Frieden im eurasischen Raum. Damit könnte eine mittlerweile internationale Bürgerbewegung zugleich zum Wegbegleiter eines sich anbahnenden langfristigen Integrationsprozesses nie da gewesenen Ausmaßes werden: Das Giga-Projekt der eurasischen Integration im Kontext des Billionen-Projekts der "Neuen Seidenstraße".
 
Katholische Erwachsenenbildung Rottal-Inn-Salzach, IPPNW http://www.keb-ris.de
 
Internationale Ärzte für die Verhütung des Atomkrieges/Ärzte in sozialer Verantwortung https://www.ippnw.de #RainerRothfußFeindbildRusslandSyrienGeopolitikverstehen
 

Karl Haushofer and the Rise of the Monsoon Countries

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Karl Haushofer and the Rise of the Monsoon Countries

Long before Robert Kaplan identified the Indian Ocean and its surrounding region as the new geopolitical pivot of world politics in his 2010 book Monsoon: The Indian Ocean and the Future of American Power, the leading intellectual theorist of German geopolitics in the 1920s and 30s, Karl Haushofer, foresaw the power potential of what he called the “Indo-Pacific” or “Asiatic Monsoon countries” and urged German policymakers to promote the geopolitical unity of this region to offset British and American sea power.

Born in Munich on the eve of the Franco-Prussian War, Haushofer studied at the Royal Maximilian Gymnasium before joining the Bavarian Army in 1887. He excelled at the Military Academy (Kriegsschule), attended artillery and engineering school, and from 1895 to 1898 studied at the General Staff College (Kriegsakademie). Between 1898 and 1908, Haushofer served with the troops at various posts, taught military history at the Military Academy, and worked on the General Staff.

In 1908, Major Haushofer was assigned to the German Embassy in Tokyo to observe and study the Japanese military that had so recently stunned the world by besting the great Russian Empire in the Russo-Japanese War. On his way there, he stopped at Cyprus, Alexandria, Aden, India, Singapore and elsewhere and noticed the Union Jack flying from those strategic outposts. Haushofer’s trip to the Orient shaped all of his subsequent geopolitical writing. As Andreas Dorpalen noted in The World of General Haushofer, it was in Japan and the Far East that his “transformation from political geographer to geopolitican was completed.”

Haushofer studied the geopolitical works of Friedrich Ratzel, Rudolf Kjellen, and Sir Halford Mackinder, calling Mackinder’s 1904 “The Geographical Pivot of History” the greatest of all geographical world views. Like Ratzel and Kjellen, Haushofer believed that nation-states were living organisms that either expanded or declined and eventually died. He included factors such as location, size, population, national unity, and economics in his analyses of the power potential of nations. Haushofer wrote his Ph.D thesis in 1911 on the geographic foundations of Japan’s power. Between 1913 and 1923 – with a gap for his service in the First World War – he wrote five more books on Japan and the Far East. Then, in 1924, he wrote his most important geopolitical work, The Geopolitics of the Pacific Ocean. In that book and in articles written for Geographische Zeitschrift and Zeitschrift fur Geopolitik, Haushofer urged German leaders to align their country to the Indo-Pacific peoples of India, China and Japan.

He described the Monsoon countries as “[e]xtending from the mouth of the Indus to that of the Amur and taking in the littoral of Southeast Asia as well as the divides of the large central highland of Asia.” With the “uniform climate rhythm” of the monsoon, more than half the world’s population, and age-old Indian and East Asian cultures, the region contains “the two greatest concentrations of mankind ever witnessed in the history of the world.” Those countries, wrote Haushofer, “are beginning to stir and to rise.”

Haushofer later criticized Japan for its invasion of China in the 1930s, predicting that it would over-extend itself and suffer defeat. He opposed Germany’s invasion of Soviet Russia in June 1941 for the same reason. Haushofer hoped instead for a great transcontinental Eurasiatic bloc to oppose the sea powers of Britain and the United States, with Japan leading the Asian sphere and Germany leading the European sphere and both powers collaborating with Russia. In this, he underestimated the powerful force of nationalism and political rivalries on the world stage.

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Haushofer and his geopolitical ideas were tarnished by his associations with key Nazi leaders, including Rudolph Hess. Some scholars have attempted to blame him for creating a geopolitical blueprint for Nazi expansion. There is no convincing evidence, however, that he was ever an adviser to Hitler or had any significant influence on Nazi foreign policy. Indeed, as noted above, Haushofer was vigorously opposed to the German invasion of Soviet Russia that was the centerpiece of Hitler’s expansionist policies. Both Haushofer and his son Albrecht wound up in concentration camps. Albrecht was later shot for his alleged involvement in a plot to kill Hitler, and Karl Haushofer and his wife committed suicide after the war.  Haushofer was interrogated after the war by Fr. Edmund Walsh of Georgetown University who determined that there was no evidence to prosecute him for war crimes.

Haushofer’s tarnished reputation should not prevent statesmen and scholars from perusing his works, especially those focused on the Indo-Pacific region. The monsoon countries, especially China and India, are rising just as he predicted more than ninety years ago. That region has become the focal point of global geopolitics in the 21st century. Skeptics should consider this quote from a 1939 article: “If an empire could arise with Japan’s soul in China’s body, that would be a power which would put even the empires of Russia and the United States in the shade.”

Francis P. Sempa is the author of Geopolitics: From the Cold War to the 21st Century (Transaction Books) and America’s Global Role: Essays and Reviews on National Security, Geopolitics, and War (University Press of America). He has written articles and reviews on historical and foreign policy topics for Strategic Review, American DiplomacyJoint Force Quarterly, the University Bookman, the Washington Times, the Claremont Review of Books, and other publications. He is an adjunct professor of political science at Wilkes University, and a contributing editor to American Diplomacy.

samedi, 24 novembre 2018

Oude en Nieuwe Zijderoutes - Geopolitiek als drijvende kracht in de geschiedenis

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Oude en Nieuwe Zijderoutes

Geopolitiek als drijvende kracht in de geschiedenis

door Jonathan van Tongeren

Ex: http://www.novini.nl

Het onderstaande artikel is de tekst van een lezing gehouden op het 2e congres van het Geopolitiek Instituut Vlaanderen-Nederland (GIVN) op 17 november 2018 te Leuven.

526 jaar geleden bereikte een groep Spaanse schepen onder het commando van de 41-jarige Genuees Cristoforo Colombo (vernederlandst Christoffel Columbus) het eiland Guanahani. Dit geldt als de ‘ontdekking van Amerika’. De zeelui hadden een reis van 5.700 kilometer in het ongewisse achter zich en hun admiraal daarenboven nog dik zeven jaar aan overtuigingswerk aan de Spaanse en Portugese hoven.

Het idee om simpelweg naar het westen te varen om de oostkust van Azië te bereiken, stamde oorspronkelijk van de Griekse filosoof en naturalist Aristoteles. In de tijd daarna werd het idee onder andere door grootheden als Seneca, Roger Bacon en Pierre d’Ailly naar voren gebracht. In de 15e eeuw was het de Florentijnse geleerde Paolo dal Pozzo Toscanelli die er de grootste voorvechter van was. Tegelijk was de voorstelling van de aarde als schijf grotendeels obsoleet geworden. Zo schreef paus Pius II in zijn rond 1460 verschenen ‘Cosmographia’, dat onze planeet een bol is die om de zon draait. In zoverre zwom Columbus echt niet meer tegen de stroom in, toen hij in 1484 begon te werven voor een zeetocht naar Azië via het westen.

Constantinopel en het Iberisch schiereiland

Bovendien waren de geopolitieke verhoudingen in het Middellandse Zeegebied hem behulpzaam. Want door de Ottomaanse verovering van Constantinopel in mei 1453 was de route over land naar China en Indië afgesneden, wat de zoektocht naar nieuwe handelsroutes over zee enorm stimuleerde.

Overigens onderschatte Columbus de afstand tussen Europa en Oost-Azië ernstig. Hij meende dat de Canarische eilanden en Japan slechts 4.500 kilometer van elkaar verwijderd waren – in werkelijkheid was het 20.000. Verantwoordelijk hiervoor waren de onjuiste gegevens over de breedte van de Euraziatische landmassa van Toscanelli en D’Ailly, waarop Columbus zich baseerde. De respectievelijke deskundigen aan het Spaanse en Portugese hof zagen dit in, en ontrieden hun vorsten in eerste instantie de Genuees te ondersteunen bij zijn onderneming.

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De kaart van Toscanelli over een hedendaagse kaart geprojecteerd

Toen kwam echter 2 januari 1492, de dag waarop de emir van Granada, Muhammad XII, capituleerde. Waarmee de Reconquista op het Iberisch schiereiland succesvol afgesloten werd. Nu groeide het verlangen van Isabella I van Castilië en León en Ferdinand II van Aragón, om de Portugese koning Johan II in te halen. Zijn zeevaarders tastten zich namelijk langs de kust van Afrika een weg naar Indië en leken daarbij kort voor een succes te staan.

Koopwaar

Columbus verlangde echter dermate veel privileges, dat de hele zaak daarop stuk dreigde te lopen. De Genuees verlangde namelijk de benoeming tot ‘admiraal van de oceaan’ als ook de titel van onderkoning en gouverneur-generaal van de door hem ontdekte gebieden. Bovendien stond hij erop, dat hij het recht zou hebben om van alle “parels, edelstenen, goud, zilver, specerijen als ook alle andere koop- en handelswaar die in zijn gebied gevonden, geplukt, verhandeld of gewonnen worden, na aftrek van de kosten, een tiende voor zichzelf te houden”. Uiteindelijk gaven Isabella en Ferdinand op advies van hun schatmeester Luis de Santángel op 17 april 1492 in de zogenaamde capitulatie van Santa Fe toe.

De voor de expeditie benodigde twee miljoen Maravedi’s (zo’n 300.000 euro) kwamen echter niet uit de schatkist van het koningspaar, maar grotendeels van het confederale politieleger Santa Hermandad (Heilige Broederschap). Daarnaast droegen Santángel en enkele Genuese kooplieden nog enkele honderdduizenden Maravedi’s bij. Van dat geld werden de grote driemaster (kraak) ‘Santa Maria’ en de twee karvelen ‘Niña’ en ‘Pinta’ gecharterd en van proviand voor een jaar voorzien. Daarnaast moesten circa 90 zeelieden ingehuurd en betaald worden.

De drie schepen verlieten in de morgen van 3 augustus 1492 de haven van Palos de la Frontera bij Huelva in Andalusië, waarbij de Santa Maria onder het bevel van Columbus zelf stond, terwijl de twee andere schepen onder het commando van Vicente Yáñez Pinzón en Martín Alonso Pinzón stonden. Om het beschadigde roer van de Niña te repareren en het grootzeil van de Pinta te vervangen, maakte Columbus weinig later halt in de haven van San Sebastián op het Canarische eiland La Gomera, om op 6 september aan de tocht dwars over de Atlantische Oceaan te beginnen.

Las Indias

In de daarop volgende weken zeilde de groep schepen met bestendige passaatwinden in de rug bij overwegend goed weer met een doorsnee snelheid van tien knopen naar het westen. De admiraal hoopte zo de door Marco Polo beschreven Chinese havenstad Quinsay, het huidige Hangzhou, te bereiken, waar hij de groot-khan brieven van zijn koninklijke opdrachtgevers Isabella en Ferdinand wilde overhandigen. Anders dan vaak onjuist gesteld wordt, was Columbus namelijk niet voornemens naar Indië zelf te varen, maar naar ‘Las Indias’, waarmee naast het eigenlijke Indië destijds ook alle landen ‘voorbij’ Indië (vanuit het westen gezien) bedoeld werden.

In de nacht van 11 op 12 oktober 1492 kreeg de joodse matroos Rodrigo de Triana alias Juan Rodriguez Bermejo van de Pinta een eiland in zicht, waarop de Genuees en zijn bemanning dan later op de dag voet aan wal zetten. Daarover lezen we in Columbus reisdagboek het volgende:

“Om 2 uur ’s morgens kwam het land in zicht, waarvan we zo’n acht zeemijlen verwijderd waren [..] Toen kwamen we bij elkaar en wachtten tot de dag aanbrak. Het was een vrijdag, waarop we voet aan wel zetten op een eiland, dat in de Indianentaal Guanahani heette.”

Met deze ontdekking ontsnapte de admiraal overigens aan een naderende muiterij, want veel van zijn mannen werd de reis, die ogenschijnlijk nergens naartoe leidde, met de dag ongemakkelijker. Om welk eiland het precies gaat, is tot op de dag van vandaag onduidelijk. Inmiddels gelden zowel het Watling-eiland dat sinds 1926 officieel de naam San Salvador heeft, als ook Samana Cay, Plana Cays en Mayaguana in de Bahama’s als mogelijke kandidaten.

Hoe het ook zij, Columbus voer aansluitend tot 16 januari 1493 door de Caraïbische Zee en ontdekte daarbij onder andere Cuba en Hispaniola. De terugtocht vond plaats zonder de Santa Maria, die op Kerstdag van het jaar daarvoor op een zandbank gelopen was. De overige twee schepen bereikten Palos op 15 maart 1493. Daarna werd Columbus als held gevierd.

Geopolitiek

Zo ziet u wat een ingrijpende gevolgen geopolitieke gebeurtenissen kunnen hebben. De verovering van Constantinopel door de Ottomanen en de voltooiing van de reconquista van het Iberisch schiereiland, leidden tot de ontdekking van Amerika. En enkele eeuwen later zou een voormalige kolonie in de Nieuwe Wereld uitgroeien tot de ‘laatste supermacht’.

Maar wat is nu eigenlijk geopolitiek? Het gebruik van de term geopolitiek lijkt de laatste jaren sterk in opkomst te zijn, nadat er enige tijd een taboe op rustte. Dat taboe kwam voort uit de associatie van geopolitiek met Duitse nationaalsocialistische noties als Lebensraum en Heim ins Reich. Een associatie kortom met een specifieke subjectieve en ideologische kijk op geopolitiek. Nu het taboe allengs afneemt, zien we het gebruik van de term sneller toenemen dan het verstaan ervan. Geopolitiek wordt dikwijls gebruikt als synoniem voor internationaal conflict. Of men veronderstelt dat het hoofdzakelijk over pijpleidingen en olie of andere delfstoffen gaat. Nu kunnen die zaken wel met geopolitiek te maken hebben, maar ze zijn niet zelf de geopolitiek. Kort gezegd gaat geopolitiek over de beheersing van geografische ruimtes. Waarbij beheersing uiteraard gradueel kan verschillen van invloed tot effectieve soevereiniteit. In het hiervoor besproken voorbeeld hebben we gezien hoe de beheersing van de geografische ruimtes van wat nu respectievelijk Turkije en Spanje zijn, leidde tot de opschorting van de Oude Zijderoute en een zoektocht naar een nieuwe zijderoute die zou leiden tot de ontdekking van de Nieuwe Wereld, oftewel de Amerika’s.

Enfin, geopolitiek dus, de beheersing van geografische ruimte. Denk maar aan het bordspel Risk, één van de manieren om verder te komen in het spel en kans te maken om te winnen, is het beheersen van continenten. In de geopolitieke realiteit is het niet veel anders. De Verenigde Staten beheersen bijvoorbeeld al geruime tijd het Noord-Amerikaanse continent en hebben stevige invloed in Latijns-Amerika, wat een goede uitgangspositie bood om uit te groeien tot de ‘enige supermacht’.

Eén van de lastigste continenten om onder controle te krijgen in het bordspel Risk is Azië. Ook in de geopolitiek ligt er een sterke focus op dit grote en centrale continent. Azië wordt gedomineerd door twee grootmachten: Rusland, dat zich in Europa bevindt, maar zich ook uitstrekt over Noord-Azië tot aan het Verre Oosten, en China. Mede daartoe gedreven door het westerse sanctiebeleid, is Rusland zich in de afgelopen jaren meer en meer op China gaan richten.

Oost-Azië

Het economisch expansieve China heeft van zijn kant te maken met een Amerikaans containmentbeleid, onder president Obama ‘pivot to Asia’ genoemd. De VS hebben een snoer van bondgenoten en meer halfslachtige partnerlanden in Oost-Azië gevormd, van Zuid-Korea tot Vietnam en verder richting India, waarmee China als het ware ingesnoerd wordt.

Juist de import en export over zee spelen echter een grote rol in de economische ontwikkeling van China. Het conflict in de Zuid-Chinese Zee draait dan ook in essentie niet om een handvol nietige eilandjes, maar om de vraag wie de zeewegen beheerst. De VS werpen zich wel op als kampioen van de vrije navigatie, maar het is veeleer China dat er vitaal belang bij heeft deze zeewegen open te houden.

Door de combinatie van containmentbeleid tegenover China en sanctiepolitiek tegenover Rusland, heeft het Westen deze twee grootmachten onbedoeld in elkaars armen gedreven en zo de consolidatie van een Euraziatische synergie in de hand gewerkt.

China heeft economisch echter zo’n sterke uitstraling in de regio, dat het niet alleen diverse Centraal-Aziatische landen aantrekt, maar dat ook diverse Zuidoost-Aziatische landen het containmentbeleid inmiddels doorbroken hebben. President Duterte van de Filipijnen nam hierin het voortouw en werd al snel gevolgd door de Maleisische regering en later zelfs de Japanse.

Zuid-Azië

China laat zich door dergelijke ontwikkelingen op de korte termijn echter niet in slaap sussen, maar houdt voor de langere termijn nog altijd rekening met een eventuele blokkade van cruciale zeewegen. Zo heeft het transportcorridors met autowegen, spoorwegen, pijpleidingen, diepzeehavens en olie- en gasterminals door Birma en Pakistan aangelegd, waardoor het toegang krijgt tot de Indische Oceaan, i.c. de Golf van Bengalen en de Arabische Zee, met omzeiling van de flessenhals van de Straat van Malakka.

Vanzelfsprekend vertegenwoordigen deze transportcorridors niet dezelfde capaciteit als die van de aanvoer langs de traditionele routes. Niettemin lijken andere spelers er het nodige aan te doen om deze Chinese strategie te doorkruisen. Zo laaide recent het conflict tussen de Rohingya-minderheid en de Birmese staat weer op, uitgerekend in die provincie waar zich de diepzeehaven van Kyaukpyu bevindt die voor China van belang is. Gewapende groeperingen, waarvan de leiders in Saoedi-Arabië zijn opgeleid, richtten dood en verderf aan in dorpen van andere etnische groepen en vielen militaire posten aan. De Birmese regering sloeg keihard terug, maar inmiddels geven ook westerse mensenrechtenorganisaties toe dat de Rohingya het conflict in gang hebben gezet.

ONZ2afgh.jpgOok de transportcorridor door Pakistan heeft met dergelijke destabilisaties te kampen. In deze regio strekken veel bevolkingsgroepen zich uit over de grens tussen Afghanistan en Pakistan, zodat instabiliteit in Afghanistan ook uitstraalt naar Pakistaanse regio’s.

Ondanks de jarenlange militaire aanwezigheid van de Amerikanen in het land floreren ‘Islamitische Staat’ en de Taliban er nog altijd, zodat de vraag rijst of men soms belang heeft bij het in stand houden van deze groepen ter rechtvaardiging van voortdurende Amerikaanse militaire aanwezigheid. Ondertussen speelt Afghanistan weer een grote rol in de drugshandel en hebben de Amerikanen hier een stevige vinger in de pap. In diverse provincies bestaat daarnaast onvrede over de vermoedelijke exploitatie van mijnen, onder andere uranium, door de Amerikanen.

Centraal-Azië

De voortdurende Amerikaanse aanwezigheid in Afghanistan dient echter ook het indirecte nut, dat men door het instabiel houden van de regio de belangen van de grote concurrent China in deze regio doorkruist. Men onttrekt Afghanistan op deze wijze grotendeels aan de mogelijke economische synergie met China, Pakistan en de Centraal-Aziatische landen en bovendien hangt het schrikbeeld van het overslaan van islamistisch radicalisme naar andere landen in de regio als een donkere wolk boven de politiek van die landen.

Het zoeken naar nieuwe handelsroutes om te ontsluiten, lijkt de aangewezen weg voor China en dit is dan ook precies wat Peking doet. Zo wordt er sterk geïnvesteerd in de economische betrekkingen en de aanleg van nieuwe transportroutes naar Rusland en Siberië en diverse Centraal-Aziatische landen, in het kader van de zogenoemde Nieuwe Zijderoutes (let op: meervoud). Hiermee kan uiteindelijk bijvoorbeeld ook de verbinding over land gelegd worden met Iran en Turkije. Economisch niet onbelangrijke spelers die ieder op hun eigen manier een moeizame verhouding met de VS hebben.

Voor de verbindingen over land naar Voor-Azië en Europa is China echter afhankelijk van de samenwerking met diverse Centraal-Aziatische landen. De regeringen van deze landen zien hier het belang van in, ze hebben zelf baat bij de economische groei en de stabiliteit die dit met zich meebrengt. Dit is de steppe- en woestijnzone tussen de traditionele Russische en Chinese beschavingsgebieden. Hier zijn islamitische en grotendeels Turkse volkeren gevestigd. Dit is echter ook de zwakke plek van de Euraziatische integratie waarop de Amerikanen geregeld in proberen te spelen. Dit was bijvoorbeeld te zien in de Tulpenrevolutie in Kirgizië en we zien het ook in het opstoken van het separatisme onder de Oeigoeren in de noordwestelijke Chinese provincie Sinkiang.

Noord-Azië

Mede vanwege dit complex aan factoren is Rusland een waardevolle partner voor China. Rusland kent reeds een hoge mate van economische en militaire integratie met voormalige Sovjetrepublieken in Centraal-Azië en heeft op die wijze een stabiliserende werking. Daarnaast heeft Rusland goede relaties met traditionele vijanden van China in Azië, zoals India en Vietnam, die anders geheel onder Amerikaanse invloed zouden kunnen komen.

Verder heeft Rusland ook vanwege zijn geografische ligging China het nodige te bieden. Zo wordt er geïnvesteerd in het revitaliseren van de Trans-Siberische spoorlijn, die vertakkingen heeft naar Binnen-Mongolië en Mantsjoerije, maar aan de andere kant ook naar Finland. Hier liggen kansen voor Europa, zowel qua economische kosten als milieukosten ligt intensivering van de handel met Eurazië meer voor de hand dan de intercontinentale handel met Noord- en Zuid-Amerika (TTIP, CETA, Mercosur) waardoor de Europese Commissie in beslag genomen wordt. De Oostenrijkse en Slowaakse regeringen hebben in ieder geval concrete plannen om aan te sluiten op de Trans-Siberische spoorlijn, waarbij in Wenen een grote terminal moet komen voor de overslag naar Europees spoor of andere transportvormen.

ONZ3arct.jpgNog groter is het potentieel van de zogeheten Arctische Zijderoute. Rusland en China verkennen in dit kader de mogelijkheden om de Noordoostelijke Doorvaart te gaan gebruiken. Het gaat om een potentiële scheepvaartroute langs de noordkust van de Russische Federatie, die de Stille Oceaan met de Atlantische verbindt via de Beringzee, de Oost-Siberische Zee, Karazee, Barentszzee en de Noorse Zee.

Dit heeft het grote (kosten)voordeel dat deze route voor vrachtschepen tussen China en Europa twee weken korter is dan de route door de Zuid-Chinese Zee, de Straat van Malakka, de Indische Oceaan, het Suez-kanaal en de Middellandse Zee. Daarnaast heeft het voor China het voordeel dat de route grotendeels door de Russische invloedssfeer verloopt en dus veel minder flessenhalzen kent dan de hierboven beschreven gangbare route.

Zo bezien komt ook de recente grootschalige NAVO-oefening Trident Juncture op IJsland, de Noorse Zee en in Noorwegen, zogenaamd tegen een eventuele Russische invasie gericht, in een geheel ander licht te staan. Maar dat terzijde.

Afrika

ONZ4afr.pngDe Noordoostelijke Doorvaart biedt dus veel voordelen ten opzichte van de nu gangbare route. Het gebied rond het Suez-kanaal is momenteel immers bepaald instabiel. De Straat van Bab el Mandeb, die vanuit de Golf van Aden toegang geeft tot de Rode Zee en het Suezkanaal, ligt immers tussen Jemen enerzijds en Eritrea/Djibouti anderzijds. In Jemen voert een Arabische coalitie onder leiding van Saoedi-Arabië en met ondersteuning van de VS, het Verenigd Koninkrijk en Frankrijk een alles vernietigende oorlog tegen de Houthi-rebellen, waarvan valselijk beweerd wordt dat het Iraanse proxy’s zouden zijn. Iets zuidelijker ligt het door burgeroorlog verscheurde Somalië, van waaruit de piraten van al Shabab opereren. Door de komst van een nieuwe Ethiopische premier lijkt de spanning tussen Ethiopië en Eritrea en tussen Ethiopië en Egypte wat af te nemen, maar een recente (mislukte) moordaanslag op deze politicus maakt behoedzaam. China heeft intussen een militair steunpunt in Djibouti ingericht ter ondersteuning van de bestrijding van de piraterij. Diverse andere landen hebben ook militaire bases in het land en Turkije heeft sinds kort een basis in buurland Somalië om de regering daar te steunen. Vooralsnog is het roeien met de voor handen zijnde riemen, maar het mag duidelijk zijn dat een dermate volatiele regio, inclusief de militaire aanwezigheid van diverse grootmachten een riskante cocktail vormt. Dit maakt een alternatieve verbinding tussen Oost-Azië en Europa des te interessanter.

Voor Rusland heeft dit het bijkomende voordeel dat het een extra impuls kan geven aan de ontwikkeling van het hoge noorden. Zowel Siberië als het Noordpoolgebied herbergen nog veel niet geëxploiteerde bodemschatten, China is dan ook zeer geïnteresseerd in het investeren in de ontsluiting hiervan. Zo neemt China bijvoorbeeld al deel aan de recent begonnen productie van vloeibaar gas (LNG) op het schiereiland Jamal. Toen de Britten tijdens de koude van de afgelopen winter een aardgastekort hadden, moest een grote tanker met LNG van het Jamal-schiereiland aanrukken om de Britten, ondanks sancties en gezwollen retoriek, toch nog een behaaglijke Kerst te geven.

Europa

Met de extra capaciteit van de Nordstream II-pijpleiding zou er zo nodig natuurlijk, via Nederland, op goedkopere wijze meer aardgas naar Engeland geloodst kunnen worden. Of die pijpleiding definitief doorgaat, is echter nog altijd niet geheel duidelijk. Er wordt immense druk uitgeoefend op de betrokken Europese landen om er vanaf te zien. Economisch is de aanleg van Nordstream II echter zeer voor de hand liggend. Russisch aardgas is relatief dichtbij, de kosten voor het transport liggen laag, terwijl de prijzen voor het Russische gas ook goed zijn. Rusland niet gunstig gezinde EU-lidstaten als Polen en Litouwen kiezen er echter om politieke redenen voor te investeren in terminals om per schip veel duurdere LNG te kunnen importeren, bij voorkeur uit Amerika, dus met grote transportkosten en uit schaliegas, dus sowieso al duurder.

De strategische logica van de pijpleiding door de Oostzee is dat hiermee de afhankelijkheid van Oekraïne als doorvoerland verkleind wordt. Om politieke redenen willen verscheidene Europese politici dit niet. Als men de antipathie tegen Rusland even tussen haakjes zet, ligt – gezien de reputatie van Oekraïne voor het illegaal aftappen van gas, waardoor EU-lidstaten met tekorten te kampen hadden – niets meer voor de hand dan het omzeilen van Oekraïne. Door de logica van de oppositie tussen het westerse, Atlantische blok en het Russische blok, zou Europa er echter nog toe komen om in dezen tegen haar eigen belangen in te handelen, zoals Polen en Litouwen reeds voordoen.

Noord-Amerika

De Russische en Chinese investeringen in het Noordpoolgebied doen in de VS intussen reeds alarmbellen afgaan. Zo riep oud-staatssecretaris Paula Dobriansky (dochter van de beruchte Lev Dobriansky) het westerse bondgenootschap op zijn positie in het Noordpoolgebied te versterken en een militaire infrastructuur uit te bouwen. De VS hebben zelf immers maar een relatief kleine claim op het poolgebied, in de vorm van Alaska. Zodoende moeten NAVO-bondgenoten als Canada, Denemarken en Noorwegen er aan te pas komen – onder Amerikaanse leiding uiteraard.

Intussen worden er in de Groenlandse politiek concrete voorbereidingen getroffen voor afscheiding van Denemarken. Chinese bedrijven zijn in de arm genomen voor het winnen van de Groenlandse bodemschatten, maar Chinese aanwezigheid op het Noord-Amerikaanse continent zou natuurlijk een doorn in het oog van Amerika zijn. De Groenlandse regering heeft echter ten eerste de inkomsten uit de winning van haar delfstoffen nodig om financieel onafhankelijk te worden van Denemarken. Ten tweede bevindt de meest noordelijke luchtmachtbasis van de Verenigde Staten zich in Groenland. Van daaruit worden spionagevluchten boven Rusland uitgevoerd. Een verlies van deze positie zou de Amerikaanse greep op de Noordpool verder verslappen.

Slotwoord

We zien kortom dat er op diverse continenten een concurrentiestrijd gaande is tussen de Verenigde Staten en China, waarbij geopolitieke realiteiten als nabijheid, bereikbaarheid en de kostenefficiëntie van transport herhaaldelijk in botsing komen met gevestigde politieke voorkeuren en ideologische vooronderstellingen. Ik durf u echter wel te voorspellen dat de geopolitieke realiteiten de langere adem zullen blijken te hebben.

Un tournant dans la politique étrangère allemande

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Un tournant dans la politique étrangère allemande

par Irnerio Seminatore

L'alliance pour le multilatéralisme et l'autonomie stratégique de l'Europe dans la redéfinition des relations euro-atlantiques.

La nouvelle responsabilité franco-allemande face à une géopolitique planétaire.

Heiko Maas et l'UE, "pilier de l'ordre international".

La tribune du quotidien allemand Handelsblaat du 22 août, portant la signature du Ministre des Affaires Étrangères Heiko Maas a marqué un tournant historique dans la diplomatie de la République Fédérale Allemande depuis sa constitution en 1949.

Heiko Maas a plaidé pour une révision de la politique étrangère de son pays et pour une "autonomie stratégique" de l'Europe, en faisant de l'Union Européenne "un pilier de l'ordre international".

Cette convergence, de l'Allemagne et de l'Union Européenne, permettra-t-elles d'instaurer "un partenariat équilibré" avec les États-Unis d'Amérique?

Pour l'heure c'est un tournant marquant de la diplomatie du Mittelage.

Après avoir surmonté les "limites de la politique rhénane"de H.Khol et de  la "voie allemande" de Schröder, la politique étrangère allemande a-t-elle tourné le dos à la "puissance discrète" de A.Merkel, en réagissant aux provocations  souverainistes de D.Trump et à la fragmentation décisionnelle de l'U.E, face aux nouveaux défis de l'ordre mondial?

Suffira-t-il à l'Allemagne et, avec elle, à l'Europe, de remplacer le concept global d'hégémonie par l'idéologie juridique du multilatéralisme et de la sécurité collective aux promesses aléatoires, en oubliant la décomposition géopolitique de la suprématie américaine, qui a pris la forme, sous Obama, d'une série de "deals régionaux" conçus pour la pérenniser?

La  déclaration de Heiko Maas, évoquant sa prise de distance avec les États-Unis évoque implicitement trois moments significatifs de l'histoire allemande et souligne ainsi la lente maturation de sa politique étrangère depuis la fin de la bipolarité:

- le "Rapport K.Lamers-W.Schauble" de 1994 sur les nouvelles responsabilités de l'Allemagne, suite à la réunification du 3 octobre 1990 et à la lecture d'une Europe reconfigurée, à partir des "intérêts nationaux allemands", jusqu'ici tabou.

- la déclaration informelle de M.me Merkel à Munich, en mai 2017, sur l'émancipation de l'Europe vis à vis des États-Unis et sur l'impératif des européens "de prendre en main leur destin". Ajoutons, dans le même sens, la déclaration du Président de la République française à l’Élysée du 27 août 2018, à l'occasion de la réunion annuelle des Ambassadeurs de France, sur "l'indispensable"autonomie stratégique de l'Europe" et sur une redéfinition générale de la politique extérieure et de défense de l'Europe".

- le Sommet de l'Otan des 12 et 13 juillet 2018 à Bruxelles, sur le partage du fardeau de la défense euro-atlantique et sur la menace du retrait des États-Unis de l'Alliance. La remise en cause de celle-ci s'est exprimée sous la forme du "veto", adressé par Trump à la Chancelière A.Merkel, à propos de la réalisation du " Nord Stream 2" et d'une politique énergétique moins dépendante de la Russie.

Quant au chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, dans son interview du 22 août au journal "Handelsblaat" redessine les contours d'une "nouvelle stratégie américaine" vis à vis de l'Allemagne et définit  les bases "d'un renouveau de la collaboration" avec l'allié transatlantique, en partenariat avec les autres pays européens.

Ce renouveau aurait pour fondement "le multilatéralisme", déjà rejeté  antérieurement par D.Trump, qui lui préfère le souverainisme et s’appuierait sur deux piliers:

- un "partenariat équilibré" entre les USA et l'UE

- une alliance avec tous les pays attachés au droit, aux règles contraignantes et à une concurrence loyale, au delà de l'U.E et sur la scène internationale. La carence de cette alliance est de ne pas tenir compte ni des rapports des forces, ni de l'esprit de système, autrement dit, des regroupements multipolaires du monde. Elle apparaît, de ce fait, en décalage avec les référents permanents de la politique globale et en syntonie avec les positions d'une négociation permanente et toujours précaire de l'ordre mondial.

Le changement de cap de la politique américaine vis à vis de l'U.E.- confirme le ministre allemand - a commencé  bien avant l'élection de Trump - et devrait survivre à sa présidence".

En effet, constate-t-il, " l'Atlantique est devenu politiquement plus large" de ce qu'il n'était à l'époque de la bipolarité, car la profondeur stratégique de l'Eurasie replace la menace et les dangers vers l'Asie-Pacifique.

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Les implications de la notion "d'autonomie stratégique "européenne

Les implications de ce tournant, qui sont imposées aux européens, comportent un double volet, interne et extérieur:

-à l'extérieur,

-induisant une reconsidération des relations de l'U.E.avec la Russie dans le cadre d'une architecture régionale de sécurité

-faisant de l'Europe "une puissance d'équilibre" entre Washington et Moscou. Ce positionnement inverserait la logique du "triangle stratégique" Washington- Moscou-Bruxelles, par l'adoption des recommandations de Kissinger des années 1970, selon lesquelles l'Europe doit être toujours plus proche de Washington ou de Moscou,que l'Amérique de la Russie ou Moscou de Washington.

à l'intérieur,

-poussant à une révision des fondements de toute construction politique, concernant la légitimité et la souveraineté, bref les conceptions de la démocratie, du pluralisme  et des autres formes de gouvernement.

- faisant évoluer les relations entre institutions européennes  et États-membres vers un modèle politique, organisé sur la base d'une hiérarchie contraignante , sans  avoir résolu les deux aspects majeurs de l'histoire européenne, ceux  de unité politique et du leadership.

Ainsi l'ensemble des défis posés par la notion "d'autonomie stratégique" situe cette perspective dans le long-terme, dont le calendrier échappe à toute maîtrise raisonnable et condamne cette idée à une rhétorique ordinaire.

Macron/Merkel, l'"armée européenne" et la nouvelle responsabilité franco-allemande

Or l'imprégnation de cette notion est revenue à la surface le 6 novembre dernier, à l'avant-veille des commémorations du centenaire de la "Grande Guerre 14-18",
dans l’exhortation aux européens du Président Macron, de créer une "armée européenne", pour protéger l'Europe des visées russes, américaines et chinoises.

Cette expression, reformulée en terme de "défense européenne", a été reprise par Macron dans l'enceinte du Bundestag allemand, le dimanche 11 novembre, lors des cérémonies du Volkstrauertag, consacrées aux victimes de guerre, dans le but "de ne pas laisser glisser le monde vers le chaos" et de "construire les outils de souveraineté", afin que l'Europe ne soit pas "effacer du jeu" par les grandes puissances.

"Nous devons élaborer une vision, nous permettant d'arriver un jour à une véritable armée européenne", a repris Angela Merkel à Strasbourg, devant le Parlement Européen le mardi 13, mais"pas une armée contre l'Otan", situant sa constitution dans un avenir lointain; le temps de corriger le strabisme divergent entre la France et l'Allemage. la première fixant ses priorités au Sud, la deuxième à l'Est.

Il a été observé (J.H.Soutou) que trois conditions doivent être remplies, pour répondre à ce défi:

- l'existence d'une culture stratégique commune et, de ce fait, d'une lecture partagée du système international et de ses menaces
- des moyens de défense adéquats, inclusifs d’États-majors doués de capacités de commandement opérationnels, en complément de l'Otan
- d'un budget européen, dont on ignore l'ordre de grandeur.


Les européens confrontés à l'hostilité de l'administration américaine.


Devenir un pilier de l'ordre international et instaurer une fonction de puissance d'équilibre entre Washington et Moscou, d'après le ministre allemand des affaires étrangères, sont-ils des objectifs compatibles avec l'exercice d'un "vrai dialogue de sécurité avec la Russie", prôné par les vœux du Président Macron?

En effet, dans le contexte de la nouvelle donne de sécurité transatlantique, l'autonomie stratégique de l'Europe pour se protéger des États-Unis, pouvait-elle échapper à la réaction de Trump, la jugeant "très insultante" pour le pays qui a volé au secours de la France par deux fois au cours du XXème siècle?

Le nouvel état d'insécurité du monde laisse les européens divisés et tétanisés, car le système immunitaire sur lequel a été bâtie la suprématie allemande,est aujourd'hui anéanti.
Le stress de l'urgence efface, en République Fédérale, le tabou du leadership et la faiblesse de l'économie ne compense pas, en France, l'hardiesse rhétorique des propos de Macron.

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Mais comment l'Europe peut-elle bâtir son unité, si la compétition pour le primat fertilise les esprits et la Pologne, porteuse de nouvelles perspectives stratégiques, se propose comme l'allié le plus sûr des États-Unis et si elle fédère autour d'elle des projets et des pays (l'initiative des trois mers,Baltique, Adriatique et Mer Noire), en matière d'énergie et de conceptions politiques et culturelles, qui allègent la dépendance de l'Europe vis à vis de Moscou et accroissent l’indépendance politique de la Pologne vis à vis de l'U.E?

Comment par ailleurs le divorce de la Grande Bretagne de l'Union Européenne et son choix, inacceptable pour les brexiters durs, entre la vassalisation à l'Union et le chaos d'une reddition sans conditions, pourrait -il ne pas se répercuter à l’intérieur du continent, plongeant l'Europe dans la solitude et dans la division?


La rétrospective historique et ses enseignements

Déjà le choix entre l'Europe européenne et l'Europe atlantique s'était posé dans les années cinquante/soixante, associé aux deux conceptions de la construction européenne, l'Europe des Patries et l'Europe intégrationniste, la première indépendante mais alliée des États-Unis, la deuxième tributaire d'une allégeance, qui mettra sa sécurité, au travers de l'Otan, dans les mains tutélaires du "Grand Frère" anglo-saxon et cherchera sa lumière dans les yeux de son maître.


Ce même dilemme se propose aujourd'hui, dans un système international devenu multipolaire, où la priorité n'est plus la révision de Yalta et de ses sphères d'influences et, par conséquent, des périls d'une confrontation permanente et générale, imputable à la "question allemande",mais  d'entrer pleinement dans une géopolitique planétaire, où le monde sera post-américain et post-occidental et imposera à l'Europe, sur tous les échiquiers, une montée en puissance d'autres acteurs et une diversification des fonctions d'influence, de dissuasion et de contrainte.

Dans ce nouvel environnement stratégique, l'accroissement des inconnues et des incertitudes, est signalé par la dégradation de la confiance des européens vis à vis de la nouvelle administration américaine et par le déploiement aux marges orientales du continent du projet russe d'ouverture eurasienne, ressenti comme une menace géopolitique.
 
C'était dès lors inévitable, qu'un rééquilibrage de l'axe euro-atlantique s'impose et que l'idée d'une armée européenne, à dominante franco-allemande, soit sortie de l'amnésie et proposée aux opinions et aux gouvernants, si l'Europe ne veut être effacée par les rivalités des grandes puissances.

On rajoutera à ces observations la fin du processus d'unification fonctionnelle de l'UE ( ordo-libéral ou bismarcko-keynésien), et l'urgence, pour l'Europe, de se positionner vis à vis de la Chine montante et d'autres grands pays asiatiques (Iran, Inde,Pakistan, Japon ), par le retour sur la scène mondiale des unités politiques rodées par l'expérience séculaire de la diplomatie et de l'histoire, les Nations.
 
Ça sera désormais par les alliances et par la coopération organisée entre les États européens, que seront abordées  les relations de sécurité et d'équilibre du système pluripolaire, en bannissant les prétentions universalistes de l'Occident et en embrassant en commun, comme "une vérité transcendante", les besoins mystiques et immanents de la foi.

Dans ce cadre, la pérennité des nations, qui vivent dans le temps, prévaudra sur la précarité des régimes et des formules de gouvernement, qui sont les produits de rapports aléatoires dans la vie turbulente des peuples et des conjonctures civilisationnelles.

Par ailleurs l'extension planétaire des "sociétés civiles" et la compétition entre "système de valeurs", supportant la compétition stratégique entre les États, englués dans le brouillard d'une guerre globale contre le terrorisme islamiste et dans  le maelström d'une immigration invasive et conquérante, imposeront  au monde une  configuration éthico-politique aux pôles raciaux et religieux multiples et, de ce fait, à une démultiplication des menaces, démographiques et culturelles.

C'est dans ce contexte, assombri et déstructuré par le rejet de la démocratie et de la "raison", que l'idée émancipatrice d'une volonté armée tire sa justification et sa légitimité, celles d'une nécessité défensive et existentielle, dictée par le "Struggle for Life" et éclairé par la foudre tardive d'une prise de conscience humiliante sur la solitude géopolitique et stratégique de l'Europe, que seul un rappel du réalisme politique, de l’égoïsme des intérêts et de la logique de la force peuvent soustraire au glissement désespéré et irrésistible vers la pente de la guerre, du déclin et de la mort.

Bruxelles, le 21 novembre 2018

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jeudi, 22 novembre 2018

Puissance militaire US : Vertige et délire du sommet

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Puissance militaire US : Vertige et délire du sommet

Ex: http://www.dedefensa.org & https://echelledejacob.blogspot.com

 
Le sujet de l’état des forces armées des États-Unis est particulièrement important dans la mesure où ces forces armées constituent le socle de la puissance de ce pays, pour toutes ses activités, y compris le statut dominant (pour combien de temps ?) du dollar et de la finance US qui utilisent essentiellement la menace (militaire) pour conserver (pour combien de temps ?) leur position actuelle. Aujourd’hui, ce “socle de puissance” (militaire) s’appuie essentiellement sur une “image” faite d’une perception faussaire, celle que lui donne la communication, mais sa vérité-de-situation qui s’impose de plus en plus rapidement entraîne évidemment l’érosion très rapide de cette perception. Aujourd’hui encore paraît une étude de la National Defense Strategy Commission, service interne au Pentagone, mettant en évidence la possible/probable incapacité de la puissance militaire US de l’emporter dans une guerre contre la Chine et/ou la Russie.

On en examine régulièrement des signes sur ce site, encore récemment avec le cas du porte-avions USS Gerald R. Ford, et le 12 novembre avec « Suicide, mode d’emploi ». Dans ce dernier article, nous signalions un texte très récemment paru et d’un grand intérêt, sur lequel nous voudrions revenir pour nous attarder sur certains de ses aspects : « On notera qu’un complément de très grande qualité et extrêmement détaillé sur l’état catastrophique de la puissance militaire US, de sa base industrielle et technologique, du technologisme, etc., se trouve dans un très long article d’analyse de SouthFront.org. »

Il y a notamment un passage, concernant essentiellement les forces aéronavale embarquées sur les porte-avions, qui met en évidence la fragilité structurelle des forces US, derrière la massivité des chiffres.

« Le deuxième problème, qui est peut-être plus grave encore, est le fait que les escadrons F/A-18 sur lesquels la Navy s'appuie pour effectuer presque toutes les tâches aéronavales de ses porte-avions, et surtout les missions d’attaque, de supériorité aérienne, de défense de la flotte, de ravitaillement en vol, de guerre sous-marine et de surveillance, sont dans un état de délabrement alarmant. En février 2017, la Marine a annoncé que les deux tiers, soit 62% de tous les F/A-18 Hornet et Super Hornet, étaient incapables d’accomplir leur mission en raison de problèmes de maintenance. Vingt-sept pour cent de ces aéronefs subissaient non pas des travaux de maintenance mineurs et de routine mais de très importants travaux de réhabilitation. Sur les 542 Hornet F/A-18 et E/F-18, 170 seulement sont capables de remplir leur mission avec une maintenance normale. [...] La décision a également été prise d’utiliser 140 des Hornet des plus vieilles versions (variantes A/C) de la Navy et de les cannibaliser pour des pièces ou de les transférer aux escadrons de l'USMC qui rencontrent des problèmes de maintenance similaires. Dans le cas de l'USMC, ils attendent depuis si longtemps les nouveaux F-35B que leurs anciens F-18 tombent en ruines. [...]

» Le fait que 62% des F-18 de la US Navy ne soient pas capables de remplir mission n’est pas une anomalie. En 2017, environ 72% des avions de l’US Air Force n’étaient pas capables de remplir leur mission. [...]La marine et l'armée de l'air affirment que leurs budgets respectifs ne disposent pas de suffisamment d'argent pour se procurer les pièces de rechange nécessaires à la poursuite du service normal ces avions. On pourrait se demander pourquoi, dans ce cas, des dizaines de milliards de dollars sont investis dans de nouveaux aéronefs [aux capacités incertaines et non démontrées] alors que les flottes existantes sont délabrées. Les décisions prises à l'échelon supérieur du DoD sont assez déconcertantes pour les milliers de soldats, marins et aviateurs qui luttent pour que les armes et les véhicules soient prêts à l’action. »

... On comprend que la dernière phrase concerne l’inévitable JSF/F-35, dont il a été question entre les deux extraits, pour décrire et déplorer cette incroyable catastrophe qui pompe tous les budgets disponibles et empêche de ce fait le maintien en état de vol et/ou le renouvellement en partie de la flotte des avions de combat venus des années 1970 (A-10, F-15, F-16 et F-18) constituant l’essentiel sinon la quasi-entièreté de l’aviation de combat des États-Unis. (La crise vient de loin et tout le monde est au courant ; elle est largement documentée sur ce site, notamment concernant les F-15 de l’USAF, et puis le reste de l’USAF également.)

La catastrophe-JSF est assez unique en son genre, dans ce sens qu’en plus de s’autoproduire sous la forme d’un monstre inutilisable, elle dévore autour d’elle tout ce qui fait la puissance de l’USAF, – pour ce cas spécifique de l’USAF comme principal utilisateur de l’avion, les autres services étant logés à la même enseigne. Le JSF/F-35 reste un mystère considérable, qui porte la marque de la catastrophique destinée du technologisme. Si l’on peut aisément détailler les divers aspects de cette catastrophe, tant au niveau des technologies que des aspects budgétaires, que des aspects bureaucratiques, le mystère est complet au niveau général de l’appréciation du désastre dans tous ses effets et conséquences stratégiques pour la puissance des USA. Ce mystère se résume à quelques questions fondamentales : comment la direction politico-militaire des USA n’a-t-elle pas réalisé ne serait-ce que la possibilité de l’ampleur du désastre qui se profilait de plus en plus précisément ? Comment n’a-t-elle pas admis qu’il était nécessaire de garder quelques options annexes ou complémentaires, pour limiter ces éventuels effets et ces conséquences, notamment en réservant une part budgétaire pour entretenir et renouveler en partie le parc existant depuis 1970 de l’aviation de combat ?

En cela, du fait que ces questions restent sans réponse, on mesure la confusion de la pensée et le désarroi psychologique où se trouve cette direction politico-militaire. Le même texte qu’on a pris comme référence insiste sur un autre aspect, qui montre une autre facette de cette confusion et de ce désarroi, dans une partie très longue qu’il nomme « L’obsession des MRAP » (MRAP pour Mine Resistant Ambush Protecteddésignant les véhicules résistant aux mines et autres explosifs d’embuscade, ou IED [Improvised Explosive Devices]). Il s’agit du développement, à partir de 2003, de véhicules pouvant résister aux attaques par mines et embuscades du fait de la résistance, en Irak et en Afghanistan. Les pertes du fait de ces attaques au sein des innombrables convois de ravitaillement et de livraison de la logistique, spécialité US s’il en est, déclenchèrent dès la fin 2003 une grande panique au Pentagone, où l’on se lança dans le développement et la production de MRAP de différents modèles et de plus en plus monstrueux, croulant sous les amas de blindage. La production a dû atteindre entre 45 000 et 50 000 unités depuis 2003, pour un coût affiché d’autour de $45 milliards...

« Le DoD [Pentagone]a consacré des milliards de dollars en contrats pour des véhicules blindés protégés contre les mines (MRAP) entre 2003 et aujourd'hui. Le coût total d’acquisition des différents MRAP commandés et mis en service de manière conservatrice dépasse 45 milliards USD. L'armée américaine ne compte pas moins de sept types différents de MRAP en service à ce jour, plus que tout autre pays de loin. Alors que les États-Unis ont réduit leur présence active en Afghanistan et en Irak, ils ont vendu bon nombre de ces véhicules aux forces de sécurité locales, et même aux forces de police nationales des États-Unis, ceux-ci n’étant de guère d’utilité sur un champ de bataille ouvert où l'armée américaine livrerait un conflit conventionnel avec un puissant adversaire... »

Ce cas est particulièrement intéressant pour montrer, non seulement la confusion et le désarroi que nous mentionnons plus haut, mais plus encore la perversion des esprits qui habite (qui habita à partir de la fin de la Guerre froide) la direction politico-militaire des USA. Il y eut donc cette panique déclenchée par le fait que l’“offre US” (démolition sauvage du pays puis conquête quasi-évidente des cœurs et des esprits [harts & minds] par la démocratie américaniste) avait reçu comme réponse les mines et les IED sur les routes qui réduisaient en cendres la doctrine de la guerre “zéro-mort”, autre legs de la présidence Clinton, et cette panique débouchant sur une production compulsive de plusieurs dizaine de milliers de monstres blindés sans la moindre utilité hors des bourbiers auto-créés par la politique Système dans les pays pulvérisés par les bombes very-intelligentes (smart bombs).

Mais il y a surtout ceci ; à côté et largement au-dessus, il y avait la conviction que de toutes les façons on se trouvait “à la fin de l’Histoire” aux conditions dictées par le Pentagone, et donc à part les paniques en passant produisant autour de 50 000 MRAP qui finiraient par faire de la figuration dans les blockbusters d’Hollywood, rien n’était à craindre. Cet état d’esprit explique que la puissance militaire US s’est trouvée largement distancée ces quinze dernières années au niveau de la vraie guerre conventionnelle.

(Au niveau de l’aviation de combat, et cela suggérant en partie des réponses aux questions posées plus haut, la stealth technology était censée verrouiller la “fin de l’Histoire” grâce à la formule-surprise type-air dominance.)

Tout cela se trouve largement suggéré, pour ce qui est de la philosophie inspirant cette situation, dans notre texte déjà référencé « Suicide, mode d’emploi »... Pour rappel :

« “La cupidité des entreprises américaines, l’idéologie de la globalisation et la conviction absolue d’être arrivé à la “fin de l’histoire” façon-Fukuyama sont, ensemble, sur le point de causer [et ont même d’ores et déjà causé] aux capacités de défense des États-Unis des dommages dont leurs opposants géopolitiques ne pouvaient même pas rêver.”

Cet “état de l’esprit”, qui confine à une “paralysie de l’esprit” rien de moins, s’est installé aux USA au lendemain de la Guerre froide et particulièrement durant la présidence Clinton, jusqu’à s’épanouir durablement durant le deuxième terme.

[...] Cette création fixait effectivement le monde en l’état, avec une domination-hégémonique des USA installée effectivement ad vitam aeternam. Tout juste était-il nécessaire de le rappeler de temps en temps pour les têtes de linottes françaises (à cette époque), russes, etc, pour ce cas au lendemain du 11-septembre sous la rubrique “virtualisme-narrative” (“Nous sommes un empire désormais, et lorsque nous agissons nous créons notre propre réalité”.) »
 
Puissance militaire US : fin du récit

Si nous avons développé ces remarques et rappelé la conception résumée dans notre texte référencé du 12 novembre, c’est pour aborder un autre aspect de la puissance militaire vers lequel un commentaire de ce texte d’un de nos lecteurs nous a orientés. Ce lecteur, se faisant “l’avocat du diable”, développe une appréciation de la puissance militaire US, autant que de l’état de la guerre. Nous nous arrêtons à un point de son commentaire, qui introduit notre propre commentaire d’une appréciation technique et métahistorique du destin de la puissance militaires américaniste, du “récit de son destin” si l’on veut, accordée à la psychologie et à la perception de l’américanisme :

« La faillite de l'armée US “finissante” a-t-elle été voulue ? Comme dans toutes les obsolescences précédentes (1917, 1941, etc.) sans aucun doute, mais voilà, à chaque fois les États-Unis en sont sortis plus puissants, et malgré tous les hélicoptères jetés par-dessus bord en 1975 lors de la Chute de Saigon, Nike est aujourd'hui le premier employeur privé du Viet-Nam… »

Ce texte implique qu’il y a eu plusieurs “faillites” des forces armées US, suivies d’autant de renaissance : en 1917 et en 1941, pour l’entrée dans les deux guerres mondiales avec une force militaire réduite, le “etc.” désignant par exemple le Vietnam. Cette interprétation sinusoïdale (des hauts et des bas, ou plutôt des bas suivis de hautes, avec renaissance des cendres comme un phénix) n’est pas la nôtre ; elle donne une idée qui est à notre avis trompeuse de la flexibilité et de l’adaptabilité de la puissance militaire US.

• Ni en 1917, ni en 1941 il n’y a eu faillite militaire US. Dans les deux cas, l’armée était quasiment inexistante, sauf l’US Navy dont l’existence qui garantit la sécurité des voies maritimes et du commerce est actée dans la Constitution d’un pays fondé sur le profit et sur le commerce. Quant à la chose militaire proprement dite, l’isolationnisme (sauf la parenthèse 1917-1918) domine jusqu’en 1941 et l’armée n’est qu’une force de police aux USA et dans les pays voisins (Mexique) ou un outil expéditionnaire pour les bonnes affaires à saisir (le Corps des Marines intervenant dans l’arrière-cour latino-américaine, à Cuba, etc., – avec l’extrême de l’intervention cruelle et dévastatrice aux Philippines [1899-1902] qui est l’amorce de la politique impérialiste post-1945.)

• En 1917, l’armée US partie de quasiment rien fut essentiellement formée et équipée par les conseillers français et l’industrie françaises, ce que les érudits américains commencent à reconnaître. Le Général Pershing avait obtenu ce qu’il cherchait : une structure d’armée moderne qu’il conserva et transmit malgré la réduction radicale des effectifs dès 1919. En 1941, la seule puissance militaire US opérationnelle existante fut largement liquidée à Pearl Harbor, mais selon une orientation qui fut une formidable fortune du sort : avec l’attaque, les Japonais avaient prouvé que le porte-avions était devenu le roi des mers à la place du cuirassé et ils avaient liquidé les cuirassés US de la Flotte du Pacifique, et épargné ses trois porte-avions... Quant à l’armée et à l’aviation US, leurs structures étaient prêtes, et le développement de l’industrie aéronautique militaire à partir de 1935-1936 pour l’exportation (Chine, France, Royaume-Uni) fournissait à cette expansion une base technologique exceptionnelle, – sans doute la période de l’histoire où les USA furent les plus efficaces, les plus inventifs et les plus performants en matière de technologie. (Le P-51 Mustang [d’abord A-36 Apache], le meilleur chasseur de la guerre, fut développé par North American en six mois au printemps 1940, sur commande britannique [et complète indifférence de l’USAAC, le corps aérien de combat US d’alors], pour un coût R&D de $40 000 ; les premiers exemplaires [Mustang Mark-I] furent livrés à la RAF à l’automne 1940 et l’avion fut adopté par l’USAAC/USAAF en 1942... A comparer avec le récit de la vie jusqu’ici et maintenant du F-35.)

• Au Vietnam, l’armée US ne fit pas faillite ni ne s’effondra sous les coups de l’ennemi. Simplement, elle se battit extrêmement mal, avec le marteau des bombes et des obus, comme d’habitude et comme toujours, et elle abandonna la partie pour la seule et unique raison que l’opinion publique US était au bord de la révolte et que cette révolte gagnait l’armée elle-même, par exemple avec l’épouvantable pratique courante à partir de 1969 du “freaking” (liquidation d’officiers par leurs propres hommes, selon la “technique” de jeter une grenade dans le bureau d’un officier). Le seul événement capital pour l’armée US au Vietnam fut l’abandon de la conscription en 1974, au profit d’une armée de métier, ce qui garantissait désormais l’inexistence d’un parti antiguerre aux USA et au sein de l’armée elle-même, – comme on le constate aujourd’hui.

• La seule fois dans l’histoire où l’armée US, non seulement fit faillite mais s’effondra littéralement, c’est à l’automne 1945 lorsque le Congrès décida une démobilisation en complet désordre, ce qui amena une désintégration totale de l’armée US dont le seul équivalent dans l’histoire est la désintégration de l’armée russe en 1917, après la première révolution de février. (Voir les principaux détails de cet épisode capital, totalement passé sous silence dans l’historiographie officielle, dans notre Glossaire.dde : « Le “Trou Noir” du XXème siècle ».)

Ce que nous voulons mettre en évidence essentiellement, c’est la linéarité du développement de la puissance militaire US : une droite ascensionnelle qui justement n’a jamais connu de “faillites” ni de défaites dues à l’adversaire, pour des raisons qui ne sont nullement héroïques mais tiennent simplement à la géographie. (Une spécialité des USA est d’entrer en guerre bien après ses alliés-supposés pour pouvoir s’imposer politiquement grâce à son poids, sans subir de dommages, la combinaison lui assurant la certitude d’une domination d’après-guerre.) Cette puissance a connu deux accidents internes, le plus grave (1945) ayant été passé sous silence, et le second lui ayant permis de ne plus dépendre de la volonté démocratique du pays ; aucun des deux n’a interrompu durablement le tracé rectiligne de sa montée en puissance, ni ne l’a modifié en aucune façon.

A partir de 1989-1991, s’appuyant sur un récit totalement faussaire de la fin de la Guerre froide, la puissance militaire US s’est installée sur ce qu’elle a considéré être son hégémonie absolue et elle n’a plus bougé de cette perception. La guerre a subi le même traitement que l’histoire et la réalité, selon les penseurs neocons & associés comme le rapporta Ron Suskind : au lieu du « Nous sommes un empire désormais, et lorsque nous agissons nous créons notre propre réalité », ce serait “Nous sommes la plus grande puissance militaire de tous les temps passés et à venir, et lorsque nous agissons nous créons notre propre guerre qui sera la seule guerre réelle possible”. Le moins qu’on puisse dire est que la vérité-de-situation n’a guère été impressionnée par cette profession-de-réalité : la puissance militaire US est partout, et partout elle est plus ou moins en guerre, elle n’arrive nulle part à gagner et se découvre dépassée dans des domaines qu’elle croyait verrouillés à jamais à son avantage.

(Nous sommes, quant à nous, d’avis que la possibilité d’une guerre conventionnelle de haut niveau est redevenue d’actualité, certainement dans l’esprit des militaires US qui l’affirment curieusement après avoir conclu que “la fin de l’Histoire” figeait éternellement leur supériorité, – mais la confusion et le désarroi des esprits expliquent beaucoup de choses. Entretemps, certes, les Russes ont fait l’une ou l’autre démonstration, en Crimée comme en Syrie. On peut se reporter au SACEUR d’alors, le Général Breedlove, en avril 2014, à propos de la Crimée : « Nous suivions plusieurs exercices simultanés au cours desquels des forces [russes]importantes étaient formées, manœuvraient puis s’arrêtaient... Et tout d’un coup, boum ! On les retrouve en Crimée, restructurée en une force prête au combat et fort bien préparée. »)

Au bout de ce périple, la puissance militaire US ne sait plus ce qu’est le concept de “victoire”, – si elle l’a jamais su, d’ailleurs, – parce que sa conception complètement figée et sa certitude d’être arrivée au sommet de la puissance l’empêchent autant qu’elles lui interdisent de voir une fin à quelque chose où elle serait impliquée.

Une “victoire” signifierait la fin d’une guerre, donc la réduction du rôle de la puissance militaire US, ce qui est impossible dans l’état actuel et d’ailleurs définitif de sa perception de l’histoire, savoir la “fin de l’Histoire” du type-Fukuyama. Cette paralysie touche également ses décisions bureaucratiques et technologiques, en même temps qu’elle transforme les énormes budgets annuels qu’elle reçoit en trous noirs sans fond où se contorsionnent et grouillent sur un même rythme ses propres “Quatre Cavaliers de l’Apocalypse”, – gaspillage, corruption, irresponsabilité et aveuglement. Au sommet de ce qu’elle croit être la puissance, la puissance militaire US déploie totalement et sans la moindre entrave une impuissance complète que secrète la paralysie de sa pensée alimentée par la pathologie schizophrénique de sa psychologie.

Comme on l’a compris, les USA suivent fidèlement le tracé de leur puissance militaire qui est devenue désormais leur raison d’être et leur façon d’être. Le contraste est d’ailleurs saisissant entre la communication triomphante de la puissance militaire US et la situation intérieure catastrophique des USA. La puissance militaire est la dernière structure, – ou disons, ce qu’ils croient être une structure, – à laquelle les dirigeants politiques washingtoniens s’accrochent. Washington D.C. suit aveuglément le Pentagone, pour pouvoir mieux jouer à “D.C.-la-folle” dans ses démentes querelles internes ; ce que Washington D.C. a omis de noter, c’est que le Pentagone suit aveuglément la puissance militaire US qui s’est totalement installée dans l’impuissance et la paralysie qui l’aveuglent elle-même ; c’est un défilé d’aveugles qui se guident les uns les autres, le pas ferme, vers le néant. Le pouvoir des États-Unis d’Amérique est un lieu incertain et dans un équilibre extraordinairement instable où plus personne ne sait rien de personne. Tout cela ne garantit rien de la forme et du parcours que prendra la chute, laquelle ne saurait se faire attendre puisqu’elle a déjà commencé.

Nous revenons sur un document rapidement mentionné dans notre F&C d’hier, l’« étude de la National Defense Strategy Commission, service interne au Pentagone, mettant en évidence la possible/probable incapacité de la puissance militaire US de l’emporter dans une guerre contre la Chine et/ou la Russie. » Nous le faisons parce qu’un texte de WSWS.org en fait une analyse détaillée sur un ton remarquable par son alarmisme. Gens sérieux, les analystes du site trotskiste ont lu avec attention le document, mais ils l’ont lu avec un état d’esprit particulier qui, dans son intensité, rencontre celui des membres de la commission qui ont rédigé la chose. Ainsi, deux choses nous intéressent dans ce texte :

ce qu’il nous dit du contenu du document, analysé avec précision et selon les axes qui importent comme fait d’habitude WSWS.org ;

la façon dont WSWS.org reçoit et commente ce document, selon un état d’esprit qui est similaire en intensité (bien que radicalement opposé d’un point de vue politique) à celui du document, ce qui mérite qu’on s’attache bien entendu à ce phénomène.

Contrairement à d’autres rapports sur ce document, WSWS.org insiste sur l’aspect d’un cri d’alarme et d’un appel à la mobilisation générale des forces armées US face à la probabilité d’une guerre massive avec l’une des deux puissances (ou les deux), – Chine et Russie, – dans un très court délai. Parmi les scénarios cités, il y a celui d’une guerre avec la Chine débutant en 2022 à la suite d’une déclaration d’indépendance de Taïwan et du lancement d'une invasion de Taïwan par la Chine. Le fait même d’un tel conflit n’est pas débattu dans toutes ses possibilités, et notamment et essentiellement la possibilité que les États-Unis puissent agir pour éviter le susdit conflit : la chose est présentée comme étant inéluctable, fatale, inarrêtable... « En énumérant les différents défis auxquels seraient confrontés les États-Unis pour combattre et gagner une guerre contre la Russie ou la Chine, aucun des membres distingués du comité n’est parvenu à la conclusion apparemment évidente selon laquelle les États-Unis ne devraient peut-être pas mener une telle guerre. »

D’une façon très affirmée, WSWS.org admet cette possibilité de l’absence de recherche d’une façon d’éviter un tel conflit dont la venue est par ailleurs affirmée comme une certitude alors qu’il ne s’agit que d’une hypothèse au profit de laquelle le comportement même des USA contribue très fortement. La comparaison est faite avec le comportement de Hitler tandis que la responsabilité d’un tel état d’esprit est portée au crédit du capitalisme en faillite et, – assez curieusement et sans démonstration aucune, – du “système des États-nation”...

« Mais en cela, [les rédacteurs du rapport] représentent l’énorme consensus au sein des cercles politiques américains. Dans ses derniers jours, Adolf Hitler aurait déclaré à maintes reprises que si la nation allemande ne pouvait pas gagner la Seconde Guerre mondiale, elle ne méritait pas d'exister. La classe dirigeante américaine est entièrement attachée à un plan d’action qui menace de faire disparaître non seulement une grande partie de la population mondiale, mais également la population américaine elle-même.

» Ce n'est pas la folie des individus, mais la folie d'une classe sociale qui représente un ordre social dépassé et en faillite, le capitalisme et un cadre politique également obsolète, le système des États-nation... »

L’état d’esprit de WSWS.org rencontre celui dont le rapport est imprégné tant les commentateurs trotskistes ne cessent d’annoncer la survenue inéluctable d’un conflit mondial, conventionnel au plus haut niveau, avec la panoplie des armes conventionnelles les plus puissantes, et jusqu’à l’escalade nucléaire que toute analyse raisonnable d’une telle hypothèse jugerait effectivement comme inévitable. Cela conduit le commentateur à affaiblir ou à ignorer des remarques qui sembleraient pourtant évidentes à la lecture d’un tel rapport, – à commencer, pour mémoire si mémoire il y a, une remarque à propos de l’équilibre de la psychologie collective de ces individus, en tant qu’individus tout simplement et individus américanistes, plus qu’en tant que représentant de cette “classe sociale qui représente un ordre social dépassé et en faillite”.

En effet, il n’y a pas un Hitler avec sa folie paranoïaque de la fin de la guerre parmi ces dirigeants-Système, et pas de climat qui puisse se rapprocher des années apocalyptiques 1944-1945 dans l’Allemagne nazie. Si l’on tient à cette comparaison il faut la replacer dans la chronologie et l’on observera qu’Hitler n’a jamais préparé et annoncé la guerre en doutant une seule seconde qu’il ne l’emporterait pas puisqu’il parlait au contraire d’un “Reich pour mille ans”, alors que les auteurs du rapport évoquent puissamment la possibilité d’une défaite pour une guerre dont tout semble indiquer que les USA auraient la part principale dans son déclenchement. Il est bien question ici d’un état mental en grand dérangement dans cette urgence de s’armer pour une guerre qu’on songe à déclencher soi-même sans être menacé le moins du monde, et dont on sait qu’on risque bien de la perdre. (Sans doute y a-t-il des lecteurs du Lincoln de 1839 parmi ces analystes : « ... En tant que nation d’hommes libres, nous devons éternellement survivre, ou mourir en nous suicidant. »)

Finalement, les dispositions conseillées de toute urgence par la commission pour un réarmement d’urgence des USA relèvent d’une étrange logique et d’une vision en forme de monstrueux simulacre de la situation. Le Pentagone tourne à plein régime avec un budget colossal de plus de $700 milliards officiels, et dépassant largement les $1 000 milliards en réalité. Les capacités de production de l’armement sont aujourd’hui chaotique set florissantes aux USA, avec l’imbrication antagoniste de divers programmes (par exemple, l’imbroglio des avions de combat avec l’actuelle génération en pleine décrépitude mais privée de budget pour la remettre à niveau, et le maître du chaos qu’est le programme F-35). L’idée de “militariser” l’économie US en l’orientant vers un effort de guerre total, et cela dans les quatre années qui viennent puisqu’on suggère un conflit pour 2022, est surréaliste. (« Enfin, toute la société doit être mobilisée derrière l’effort de guerre. Une approche “pangouvernementale” doit être adoptée, notamment “la politique commerciale, l’enseignement des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques”. »)

Sur ce point, au reste, la présentation de WSWS.org rejoint également l’état d’esprit que le site trotskiste dénonce chez les auteurs du rapport. Cette présentation accrédite l’idée que la direction occulte des USA (les usual suspects du DeepState), se tenant aux manettes derrière la couverture factice des agitations de “D.C.-la-folle” qui n’auraient aucune importance, avanceraient masqués en cachant au public US cette préparation à une guerre totale(à ne pas confondre tout de même avec une “théorie complotiste”) :

« Il est impossible de comprendre quoi que ce soit dans la politique américaine sans reconnaître une réalité fondamentale: les événements et les scandales qui dominent le discours politique, qui font l'actualité du soir et qui font la une des journaux télévisés et des médias sociaux, ont peu à voir avec les considérations de ceux qui prennent réellement des décisions. Les responsables des médias jouent les rôles qui leur sont assignés, sachant qu’ils doivent limiter les sujets abordés dans des limites très circonscrites.


» Ceux qui élaborent les politiques – un groupe restreint de membres éminents du Congrès, de responsables du Pentagone et de personnel de groupes de réflexion, ainsi que des collaborateurs de la Maison Blanche – parlent entre eux une langue tout à fait différente et ils savent que leurs appréciations ne seront pas connues du grand public parce que les grands médias ne feront pas d’analyses sérieuses à cet égard.

» Ces personnes acceptent toutes comme un fait évident des déclarations qui, si elles faisaient la une des journaux télévisées de grande écoute seraient considérées comme des “théories complotistes”... »

On reste quelque peu étourdi d’étonnement... Il s’agit, selon les hypothèses envisagées d’une période de quatre ans, pour mobiliser une industrie énorme et fragmentée, aux capacités de production dévastées, pour rétablir une armée gonflée de $milliards, de gaspillages et de pléthores de matériels inutiles, et pour retourner toute une société vers la perspective d’une guerre totale de dévastation où les USA risqueraient, nous n’en sommes pas loin, d’être anéantis eux-mêmes. Tout cela se ferait dans l’esprit de confiance de la direction occulte et dissimulée, sans que le public ne s’aperçoive de rien, y compris sans doute lorsqu’il sera appelé à servir puisque de si grandioses alertes et démarches de ré-ré-réarmement (il y en a eu tant depuis 9/11) impliqueraient sans guère de doute le rétablissement au moins partiel de la conscription pour gonfler les effectifs, – à moins, certes, qu’on mobilise pour piloter les drones de la CIA, les chars de l’US Army et les avions (F-35, certes) de l’USAF, les troupes de Daesh et d’al Qaïda.

Peut-être bien que le théâtre de “D.C.-la-folle” est un simulacre comme les Folies Bergères et les Bouffes Parisiennes pour dissimuler le DeepState mais l’on se demande si le spectacle n’a pas finalement englobé et très fortement influencé tous les experts convoqués pour ce rapport et les diverses directions occultes qui pullulent à Washington, – et un tout petit peu, WSWS.org également... Tout cela, certes, hors de toute allusion à la moindre “théorie complotiste”.

Ci-dessous, adaptation en français du texte « Bipartisan panel: US must prepare for “horrendous,” “devastating” war with Russia and China », du 16 novembre 2018 sur WSWS.org.

dedefensa.org

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Se préparer à une guerre “horrible” et “dévastatrice”

Une commission bipartite nommée par le Congrès a publié mardi un long rapport soutenant les plans du Pentagone visant à préparer une guerre de « grandes puissances » contre la Russie, la Chine ou les deux, précisant que la politique belligérante de l’administration Trump était partagée par le Parti démocrate.

Conscients que ses conclusions ne seront jamais sérieusement relatées par les médias, les auteurs du rapport ne mâchent pas leurs mots concerenant les conditions d'une telle guerre. Une guerre entre les États-Unis et la Chine, qui, selon le rapport, pourrait éclater d'ici quatre ans, sera « horrible » et « dévastatrice ». L'armée « fera face à des pertes plus importantes qu'à tout autre moment depuis des décennies ». Une telle guerre pourrait conduire à une « escalade nucléaire rapide », et des cibles civiles américaines seront attaquées avec de nombreuses pertes.

Il est impossible de comprendre quoi que ce soit dans la politique américaine sans reconnaître une réalité fondamentale: les événements et les scandales qui dominent le discours politique, qui font l'actualité du soir et qui font la une des journaux télévisés et des médias sociaux, ont peu à voir avec les considérations de ceux qui prennent réellement des décisions. Les responsables des médias jouent les rôles qui leur sont assignés, sachant qu’ils doivent traiter des sujets abordés dans des limites très circonscrites.

Ceux qui élaborent les politiques – un groupe restreint de membres éminents du Congrès, de responsables du Pentagone et de personnel de groupes de réflexion, ainsi que des collaborateurs de la Maison Blanche – parlent entre eux une langue tout à fait différente et ils savent que leurs appréciations ne seront pas connues du grand public parce que les grands médias ne feront pas d’analyses sérieuses à cet égard.

Ces personnes acceptent toutes comme un fait évident des déclarations qui, si elles faisaient la une des journaux télévisées de grande écoute seraient considérées comme des “théories complotistes”.

Le dernier exemple de cette situation est un nouveau rapport publié par la Commission de la Stratégie de Défense Nationale, un organe créé par le Congrès pour évaluer la nouvelle stratégie de sécurité nationale du Pentagone publiée au début de cette année, qui déclare que « la compétition entre les grandes puissances, – et non le terrorisme, – est désormais le principal objectif » de l'armée américaine.

Les conclusions du panel peuvent se résumer comme suit : L’armée américaine a parfaitement raison de se préparer à la guerre avec la Russie et la Chine. Mais le Pentagone, qui dépense chaque année plus que les huit plus grandes forces militaires nationales combinées, doit bénéficier d’une augmentation massive de son budget, qui se fera aux dépens de coupes dans les programmes sociaux fondamentaux tels que Medicare, Medicaid et la sécurité sociale.

En d’autres termes, le rapport est une confirmation complète du Congrès de l’effort militaire de l’administration Trump, décrivant ce que le Congrès a accompli cette année lorsqu'il a adopté, avec un soutien écrasant des partis, la plus importante augmentation du budget militaire depuis la Guerre froide.

Mais au-delà de la reconnaissance du fait que les États-Unis doivent se préparer à une guerre imminente impliquant l’ensemble de la société, avec des conséquences « dévastatrices » pour la population américaine, le document met en garde contre une autre réalité fondamentale : les États-Unis pourraient très bien perdre une telle guerre, qui exige en effet la conquête militaire de la planète entière par un pays comptant moins de cinq pour cent de la population mondiale.

Les États-Unis « pourraient avoir du mal à gagner, ils pourraient même perdre une guerre contre la Chine ou la Russie », affirme le document. Ces guerres ne se dérouleraient pas uniquement à l’étranger, mais viseraient probablement la population américaine : « Il serait imprudent et irresponsable de ne pas attendre des adversaires qu'ils tentent des attaque de type cinétique, cybernétique ou d’autres actions paralysantes contre des Américains alors qu’ils chercheraient à vaincre nos forces armées à l’extérieur. »

Il ajoute: «En cas de guerre, les forces américaines devront faire face à des combats plus difficiles et à des pertes plus importantes qu’elles n’ont essuyés depuis des décennies. Il convient de rappeler que pendant la guerre des Malouines, un adversaire nettement inférieur, l’Argentine, a paralysé et a coulé un important navire de guerre britannique en le frappant avec un seul missile guidé. Le volume de destruction qu’un adversaire de grande puissance pourrait infliger aux forces américaines pourrait être d’une ampleur considérable. »

Pour illustrer son propos, le rapport décrit un certain nombre de scénarios. Le premier concerne la déclaration d'indépendance de Taiwan par rapport à la Chine en 2022, ce qui provoquerait des représailles de la part des Chinois. « Le Pentagone informe le président que les États-Unis pourraient probablement vaincre la Chine dans une longue guerre, si toute la puissance de la nation était mobilisée. Pourtant, ils perdraient d'énormes quantités de navires et d'aéronefs, ainsi que des milliers de vies, en plus de subir de graves perturbations économiques – le tout sans aucune garantie d'avoir un impact décisif avant que Taïwan ne soit envahie ... Mais éviter cette issue causerait des pertes horribles. »

Le rapport conclut que la solution est une armée beaucoup plus grande, financée par des augmentations constantes et pluriannuelles des dépenses. « La crise de la défense nationale doit faire face à une urgence extraordinaire », écrit-il.

L'armée a besoin de « plus de blindés, d’artillerie à longue portée, d’unités de logistique, d’unités de défense aérienne. » L'Armée de l'air a besoin de « plus de chasseurs et de bombardiers à longue distance furtifs, de ravitailleurs en vol, de capacités de transport, de plateformes de renseignement, de surveillance et de reconnaissance. » Les forces nucléaires ont besoin de plus de missiles. Et ainsi de suite.

Pour payer tout cela, il faut hacher dans les dépenses sociales. « Les programmes d’aide sociale obligatoire entraînent la croissance des dépenses », se plaint le rapport, exigeant que le Congrès se penche sur ces programmes, notamment Medicare, Medicaid et la sécurité sociale. Il avertit que « de tels ajustements seront sans aucun doute très douloureux ».

Enfin, toute la société doit être mobilisée derrière l’effort de guerre. Une approche « pangouvernementale » doit être adoptée, notamment « la politique commerciale, l’enseignement des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques ».

En énumérant les différents défis auxquels seraient confrontés les États-Unis pour combattre et gagner une guerre contre la Russie ou la Chine, aucun des membres distingués du comité n’est parvenu à la conclusion apparemment évidente selon laquelle les États-Unis ne devraient peut-être pas mener une telle guerre.

Mais en cela, ils représentent l’énorme consensus au sein des cercles politiques américains. Dans ses derniers jours, Adolf Hitler aurait déclaré à maintes reprises que si la nation allemande ne pouvait pas gagner la Seconde Guerre mondiale, elle ne méritait pas d'exister. La classe dirigeante américaine est entièrement attachée à un plan d’action qui menace de faire disparaître non seulement une grande partie de la population mondiale, mais également la population américaine elle-même.

Ce n'est pas la folie des individus, mais la folie d'une classe sociale qui représente un ordre social dépassé et en faillite, le capitalisme et un cadre politique également survécu, le système État-nation. Et il ne peut être combattu que par une autre force sociale: la classe ouvrière mondiale, dont les intérêts sociaux sont internationaux et progressistes, et dont l'existence même dépend de l'opposition aux objectifs de guerre mégalomane du capitalisme américain.

André Damon, WSWS.org
 

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Afghanistan. Guerre américaine ou paix russe

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Afghanistan. Guerre américaine ou paix russe

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

L'on se souvient qu'en 1979 les troupes soviétiques, dans le cadre des accords de défense mutuelle qui liaient l'URSS à l'État afghan, ont répondu à l'appel du parti communiste au pouvoir, menacé par une rébellion armée.

Cette intervention a entraîné une forte résistance des rebelles, armés par les Etats-Unis, qui conduira après une longue guerre au retrait des forces soviétiques en 1989. En 1996,  un gouvernement  nationaliste islamique, dit des taliban avait pris le pouvoir. Il en a été chassé par une coalition internationale conduite par les Etats-Unis.

En 2004, le pays est devenu une république islamique de type présidentiel. Elle est encore très largement contrôlé par Washington, qui y a établi des bases militaires importantes. Mais l'opposition nationaliste islamique demeure partout présente. Elle dispose de moyens militaires non négligeable, vraisemblablement fournis par l'Iran. Elle aussi continue à revendiquer l'appellation de taliban. La présence militaire des Etats-Unis y est rendue de plus en plus difficile.

Cependant, ceux-ci n'entendent pas abandonner leur actuelle position dominante dans l'Afghanistan urbaine. Pour eux, l'Afghanistan dispose d'un intérêt stratégique essentiel, dans la perspective de la lutte qu'ils entendent encore mener contre la Russie. Géographiquement, elle dispose de frontières communes avec le Pakistan, le Tadjikistan et des autres Etats d'Asie centrale voisins de la Russie.

De plus elle possède des ressources naturelles considérables, encore mal exploitées. Pour Washington, s'y établir avec des implantations militaires durables permet à la fois de continuer à menacer la Russie actuelle et d'espérer pouvoir bénéficier à terme des perspectives économiques du pays.

Malheureusement pour eux, l'opposition que l'on continue d'imputer aux seuls taliban, se fait de plus en plus forte et impossible à contenir. On se souviendra que l'armée américaine avait lancé il y a quelques années contre eux une bombe classique présentée comme aussi puissante que la bombe Hiroshima, sans autres effets que tuer des civils.

L'élément nouveau que doit désormais prendre en compte Washington est le retour de la Russie. Mais celle-ci le fait non militairement mais diplomatiquement, avec un succès croissant. Moscou affirme qu'il ne cherche pas à substituer en Afghanistan l'influence russe à celle des Etats-Unis. Il dit vouloir seulement vouloir intervenir pour qu'une présence américaine reste compatible avec une influence russe pacifique, dans le cadre d'un complet accord tant du gouvernement de Kaboul que des taliban.

Conférence de Moscou

A cette fin, la Russie avait organisé avait organisé à Moscou une conférence de paix le 9 novembre, à laquelle ont participé notamment la Chine, l'Iran, le Pakistan, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan et le Turkménistan. Une délégation de cinq membres, conduite par Sher Mohammad Abbas Stanakzaï, chef du conseil politique des taliban au Qatar, s'était rendu dans la capitale russe.Le gouvernement afghan, sous la pression américaine, n'y a pas été présent. Mais il a envoyé à Moscou des membres du Haut Conseil pour la paix, un organisme afghan chargé de superviser les efforts en vue de parvenir à un règlement politique du conflit. Bien évidemment, Washington avait refusé l'invitation.

La conférence de Moscou a été présentée par les Occidentaux comme un échec. Il est évident qu'il n'en est pas ressorti un accord pour une cessation immédiate des hostilités. Mais Moscou a fait admettre que tour accord de paix devrait dorénavant résulter d'une démarche commune américano-russe en ce sens. On peut penser que Donald Trump se ralliera à cette perspective, si du moins il peut l'imposer au Pentagone. Il s'était fait officieusement représenté à Kaboul par un envoyé spécial, Zalmay Khalilzad 1) diplomate américain connaissant bien l''Afghanistan où il semble avoir des intérêts personnels. Il y a retrouvé Zamir Kabulov,  diplomate russe exerçant les fonctions d'envoyé spécial en Afghanistan, qu'il connaît lui-même très bien. 2)

Or pour Moscou et sans doute aussi pour les taliban et même le gouvernement de Kaboul la conférence du 9 novembre a été un succès. On lira ici sa déclaration. 3)

Reste à savoir quelle sera la réaction de Donald Trump. Se résignera-t-il à admettre une présence diplomatique américaine et russe conjointe en Afghanistan, ou cédera-t-il aux pressions du lobby militaro-industriel américain pour poursuivre la guerre. On peut penser qu'il choisira la première solution, au vu de l'hostilité grandissante des électeurs américains à l poursuite d'une guerre dont ils voient les coûts grandissants, y compris en termes de pertes humains, pour des avantages qui leur paraissent de plus en plus lointains.

Macron devrait en tous cas se rapprocher de la position de Moscou, s'il entendait comme il le dit voir la France continuer à jouer un certain rôle au Moyen Orient et en Asie centrale.

1) https://en.wikipedia.org/wiki/Zalmay_Khalilzad,
2) https://en.wikipedia.org/wiki/Zamir_Kabulov
3)  https://actualite-news.com/fr/international/asie/6901-la-...


 

mercredi, 21 novembre 2018

La fin de la paix et de la sécurité en Europe

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La fin de la paix et de la sécurité en Europe

par Martin Sieff

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

J’ai couvert la signature du Traité sur les forces nucléaires intermédiaires (INF) en décembre 1987 lors du sommet de Washington DC, entre le président américain Ronald Reagan et le dernier président soviétique Mikhail Gorbatchev. C’était un bon moment à vivre de couvrir la diplomatie entre les superpuissances nucléaires. Il y avait un sentiment palpable d’optimisme sur le fait que les deux parties étaient résolues à détruire des milliers d’armes thermonucléaires – ce qu’elles ont fait – et à réduire les tensions en Europe. 
 
En quelques années, Gorbatchev devait également accepter la dissolution du pacte de Varsovie. L’Union soviétique a été démantelée de manière pacifique par ses pays membres, dirigés par la Russie peu de temps après.

La négociation et la signature du traité INF était un préalable indispensable à la fin de la guerre froide. Cela a inauguré deux générations de paix et de stabilité en Europe. Suite aux déclarations du président Donald Trump le 20 octobre 2018, le traité est maintenant mort debout. Le président semble déterminé à s’en retirer. Il semble être totalement sous l’influence de son troisième conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, dont la haine pour l’INF comme pour tous les accords de contrôle des armements, à l’instar de ses collègues néo-conservateurs, a toujours été plus qu’incompréhensible.

Les Démocrates au Sénat ne feront pas non plus la moindre tentative de défense, de préservation ou de restauration de l’INF. John Kerry, dernier sénateur à prendre au sérieux les accords importants sur le contrôle des armements, a présidé sans aucune objection publique à l’encontre les États-Unis et de l’Union européenne, au renversement, par une révolution violente, d’un gouvernement élu démocratiquement et pacifiquement en Ukraine en février 2014.

La subordonnée de Kerry, Victoria Nuland, alors secrétaire d’État adjointe aux Affaires européennes et eurasiennes et épouse du chef du clan néo-conservateur Robert Kagan, a littéralement distribué des biscuits dans les rues de Kiev pour assurer, aux révolutionnaires violents qui subvertissaient le processus démocratique, que l’administration Obama était avec eux. Ni Kerry ni son propre président, Barack Obama, n’ont levé le petit doigt pour contrecarrer le comportement d’une haute responsable qui, dans n’importe quelle autre administration de l’histoire américaine, aurait été virée sommairement et bannie de toute discussion sérieuse et de la conduite des affaires publiques à vie.

Aujourd’hui, tous les sénateurs démocrates de Capitol Hill cherchent passionnément à diaboliser la Russie pour des crimes imaginaires et paranoïaques qui auraient fait rougir Joe McCarthy.

La moisson actuelle de sénateurs démocrates au Congrès, dirigée par des personnalités telles que Ben Cardin du Maryland, semble au contraire déterminée à provoquer une guerre thermonucléaire à grande échelle avec la Russie. Ils ont non seulement soutenu, mais insisté, pour une nouvelle série de sanctions financières féroces à l’encontre de la Russie, qui ont clairement pour objectif de ruiner l’économie du pays et la mettre en condition pour le type de changement de régime révolutionnaire que les administrations successives ont pris pour acquis de droit divin depuis que Ronald Reagan est entré à la Maison Blanche.

Les jours actuels sont bien différents de ceux qui ont vu Washington célébrer la signature du traité INF en 1987. À cette époque lointaine, les décideurs américains faisaient au moins semblant de consulter leurs « alliés » européens et les membres de l’OTAN qu’ils prétendaient protéger.

Jusqu’à présent, dans les déclarations de Trump sur la suppression du traité INF, rien n’indique que les Européens aient eu voix au chapitre dans cette décision de Washington qui met en jeu leur survie même. Bonjour pour l’idée que l’OTAN est un « partenariat » !

Le respect mutuel prudent que Washington entretenait encore pour Moscou dans les années 1980 – ou du moins le prétendait occasionnellement – est maintenant révolu. L’idée que supprimer les armes nucléaires et renforcer la confiance et le dialogue entre les puissances nucléaires soit une bonne chose est maintenant considérée comme risible, tant par les néo-libéraux que par les néo-cons. Toutes les voix contraires sont ridiculisées et font ricaner les couards se présentant comme des patriotes intrépides. Ils n’ont aucune considération pour ceux qu’ils ciblent avec leur tactique d’intimidation. Ils seront les premiers à hurler de terreur lorsque leurs propres fantasmes seront réalisés et que les missiles nucléaires décolleront. Mais alors, il sera trop tard.

Martin Sieff

Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone