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vendredi, 16 mars 2007

Fundamentos filosoficos de la ND francesa

Los Fundamentos Filosóficos de la Nueva Derecha Francesa

Michael Torigian

http://es.geocities.com/sucellus23/591-es.htm

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jeudi, 15 mars 2007

Iran's star rises in the East

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Iran's star rises in the East
By Clive Parker
 

Found on: http://www.atimes.com/

Interesting article showing how Iran's diplomatic visions and efforts to get nukes for civilian uses are accepted by Muslim and non Muslim countries in East Asia.

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G. FAYE & R. STEUCKERS: la leçon de C. Schmitt

Guillaume FAYE & Robert STEUCKERS :

La leçon de Carl Schmitt

(Texte de 1981)

C'est dans son village natal de Plettenberg où il a fait retraite, en Westphalie, que nous avons rencontré Carl Schmitt. Quatre heures d'une étonnante conversation avec celui qui demeure sans doute le plus grand politologue et le plus grand juriste de notre temps : "Nous en sommes maintenant au stade du paître, nous dit Carl Schmitt, nous sommes comme des animaux domestiques qui jouissent des bienfaits du champ clôturé qui leur est attribué. L'espace est conquis. Les frontières sont fixées. Plus rien à découvrir. C'est le règne du statu quo..."

Cet ordre glacé, qui s'étend sur la Terre et qui ruine les souverainetés politiques, a toujours fait l'objet des mises en garde du politologue. Déjà en 1928, dans Der Begriff des Politische, il décèle dans les idéologies universalistes, celles "du Droit, ou de l'Humanité, ou de l'Ordre, ou de la Paix", le projet de transformation de la planète en une sorte d'agrégat économique dépolitisé qu'il compare à un "autobus avec ses voyageurs" ou à un "immeuble avec ses locataires". Et cette vision prémonitoire d'un monde où se meurent les peuples et les cultures, ce n'était pas au marxisme qu'il en attribuait la responsabilité mais aux démocraties libérales et marchandes. C. Schmitt apparaît dès lors comme un des critiques les plus perspicaces et les plus aigus du libéralisme, autrement profond et original que les "antidémocrates" de la vieille droite réactionnaire.

Il apparaît également comme le continuateur du courant d'analyse "réaliste" du politique et de l'État, dans la lignée de Bodin, Hobbes et Machiavel. Aussi éloignées du libéralisme que des théories totalitaires modernes (bolchevisme et fascismes), la profondeur et la modernité de ses vues en font le plus important politologue et juriste constitutionnel contemporain. C'est à ce titre que nous pouvons le suivre, sans nous priver cependant de tenter de dépasser certaines de ses analyses, comme a su le faire d'ailleurs son disciple français Julien Freund, dont l'œuvre, en pleine éclosion (1), tend déjà à surpasser celle de Carl Schmitt.

L'itinéraire intellectuel du politologue rhénan commence par une réflexion sur le droit et sa pratique politique auxquels il consacre 2 ouvrages, en 1912 et en 1914, à la fin de ses études universitaires accomplies à Strasbourg. Après la guerre, devenu juriste aux universités de Berlin et de Bonn, sa réflexion s'oriente vers la politologie. C. Schmitt, en rupture avec les philosophies libérales du Droit, se refuse alors à séparer celui-ci du politique.

Son 1er ouvrage de théorie politique, Politische Romantik (1919), est consacré à une critique du romantisme politique qu'il oppose au réalisme. Idéaux millénaristes des communistes révolutionnaires ou rêveries völkisch des réactionnaires lui apparaissent également impropres au gouvernement des peuples. Quant à Die Diktatur, son 2ème grand ouvrage théorique (1921), il constitue, comme l'écrit Julien Freund, "une des études les plus complètes et les plus pertinentes sur cette notion dont l'histoire est analysée depuis l'époque romaine jusqu’à Machiavel et Marx" (2).

C. Schmitt distingue la "dictature" de la "tyrannie" oppressive. La dictature apparaît comme une méthode de gouvernement destinée à faire face aux urgences. Dans l'héritage romain, le dictateur avait pour fonction d'affronter les états d’exception. Mais Machiavel introduit à une pratique différente ; il contribue à envisager "l’État moderne", fondé sur le rationalisme, la technicité et le rôle puissant d'un exécutif complexe : cet exécutif ne s'appuie plus sur le seul souverain. Schmitt montre qu'avec le juriste français Jean Bodin, la dictature prend la forme d'une "praxis des commissaires" qui s'installe aux XVIe et XVIIe siècles. Les "commissaires" sont les délégués omnipotents du pouvoir central. L'absolutisme royal, assis sur les intendants, comme le modèle rousseauiste du contrat social qui délègue le pouvoir absolu aux détenteurs de la "volonté générale" mis en place par la Révolution française, constitue le fondement des formes contemporaines de dictature. Celle-ci ne peut pas, dans cette perspective, s'apparenter à un seul type d'idéologie politique ; contrairement aux analyses des constitutionnalistes actuels, Maurice Duverger not., la "démocratie" n'est, pas plus qu'une autre forme de pouvoir étatique, exempte de l'usage dictatorial. Simplement, elle s'illusionne en se croyant à l'abri du recours à la dictature et en prétendant concilier un pouvoir exécutif réel avec le pragmatisme et les transactions des systèmes parlementaires.

Dans une étude fondamentale sur le parlementarisme (Die geistesgeschichtliche Lage des heutigen Parlamentarismus, Munich-Leipzig, 1923), C. Schmitt tente une réflexion sur l'identification entre démocratie et parlementarisme. La démocratie lui apparaît comme un principe idéologique et abstrait qui masque des modalités particulières de pouvoir ; position proche de celles de Vilfredo Pareto et de Gaetano Mosca. L'exercice du pouvoir en "démocratie" est soumis à une conception rationaliste de l'État qui fonde par ex. l'idée de division des pouvoirs, de dialogue supposé harmonieux entre les partis et de pluralisme idéologique. C'est aussi la rationalité, celle de l'histoire, qui fonde la dictature du prolétariat. À l'opposé du courant démocratique et du parlementarisme, C. Schmitt place les courants "irrationalistes", not. G. Sorel et sa théorie de la violence, ainsi que tous les critiques non marxistes du bourgeoisisme, Max Weber par ex.

Ce bourgeoisisme libéral illusionne les peuples en envisageant toute activité politique selon les catégories de l'éthique et de l'économie. Illusion commune, d'ailleurs, aux idéologies socialistes libérales ou marxistes : la fonction de la puissance publique n'est plus qu'économique et sociale. Les valeurs spirituelles, historiques, militaires ne sont plus légitimes. Seule est morale l'économie, ce qui permet de valider l'individualisme marchand, et de se réclamer, dans le même temps d'idéaux humanitaires : Bible and business. Cette moralisation de la politique non seulement détruit toute vraie morale mais transforme l'unité politique en "société" neutralisée où la fonction souveraine n'est plus capable de défendre le peuple dont elle a la charge.

À l'inverse, la démarche de C. Schmitt consiste à analyser le phénomène politique indépendamment de tout a priori moral. Il renonce, comme Machiavel et Hobbes, auquel on l'a comparé, à utiliser les bons sentiments et la sotériologie des fins dernières. Sa philosophie s'oppose globalement, et à l'idéologie des Lumières (Locke, Hume, Montesquieu, Rousseau, etc.), et aux divers socialismes marxistes, comme à l'humanisme politique chrétien. Pour lui, ces idéologies se méfient utopiquement du pouvoir et tentent d'évacuer le politique assimilé au Mal, quitte à l'admettre provisoirement - c'est le cas du marxisme.

Mais l'essentiel de la critique de Schmitt porte sur le libéralisme et l'humanisme, accusés d'illusionnisme et d'hypocrisie. Ces théories envisagent l'activité de la puissance publique comme purement gestionnaire tournée vers la réalisation du bonheur individuel et de l'harmonie sociale. Elles tablent sur la disparition du politique en tant que tel et sur la fin de l'histoire. Voulant dédramatiser la vie collective, elles ne parviennent qu'à construire des jungles sociales dominées par l'exploitation économique et incapables de surmonter les aléas. Les gouvernements soumis à ce type de libéralisme voient toujours démentis leurs rêves de transformer la politique en administration pacifique : d'autres États, animés d'intentions hostiles, ou une subversion politique interne, surgissent toujours au moment imprévu. Un État qui renonce, par idéalisme ou par moralisme mal compris, à placer au-dessus de tout sa volonté politique souveraine, lui préférant la rationalité économique ou la défense d'idéaux abstraits, renonce aussi à son indépendance et à sa survie.

C. Schmitt ne croit pas à la disparition de la catégorie politique. Elle peut s'investir dans tout type d'activité. Elle constitue une notion qui relève de l'anthropologie collective. À ce titre, l'activité politique peut être qualifiée de substance. L'État, en revanche, qualifié d'instance, c-à-d. de forme contingente de la souveraineté, peut disparaître ou se dépolitiser sans que le politique - comme substance - ne disparaisse. Mais l'État ne peut se maintenir que s'il conserve le monopole du politique, qui suppose, par ex., qu'il soit le seul à définir les valeurs et les idéaux pour lesquels les citoyens accepteront de donner leur vie ou de tuer légalement leur prochain - cas de la guerre. Sinon des partisans reprendront à leur compte l'activité politique et tenteront de se constituer en nouvelle légitimité. Ce risque menace particulièrement les États bureaucratiques produits par les social-démocraties libérales modernes et où seule l'anémie de la société de consommation évite la guerre civile.

Ces idées sont exprimées dans La notion de politique, le texte le plus fondamental de Carl Schmitt, publié pour la 1ère fois en 1928, remanié en 1932 et éclairé en 1963 par son corollaire la Théorie du partisan. L’activité politique y est définie comme le produit d'une polarisation autour d'une relation d'hostilité. Un des critères fondamentaux d'un acte politique est sa faculté de mobiliser une population en lui désignant un ennemi, ce qui peut concerner un parti comme un État. Omettre une telle désignation, par idéalisme not., c'est renoncer au politique. Le jeu d'un État conséquent sera donc d'éviter que des partisans ne s'arrogent le pouvoir de désigner des ennemis intérieurs à la collectivité, voire même l'État lui-même. En aucun cas, le politique ne peut se fonder sur l'administration des choses ou renoncer à sa dimension polémique. Toute souveraineté, comme toute autorité, est contrainte à désigner un ennemi pour faire aboutir ses projets ; les thèses de C. Schmitt rejoignent là les recherches des éthologues sur le comportement humain inné, Konrad Lorenz not.

Cette conception "classique" et machiavélienne du politique valut à Carl Schmitt les persécutions et les menaces qu'il dut subir de la part des nazis, pour qui le politique était au contraire la désignation du camarade" (Volksgenosse).

La définition schmittienne du politique nous permet de comprendre que le débat politicien contemporain est dépolitisé et s’apparente à un spectacle électoral. Est réellement politique la valeur pour laquelle on est prêt à sacrifier sa vie ; ce peut fort bien être sa langue et sa culture. C. Schmitt écrit à ce propos qu'un "système d’organisation sociale orienté uniquement vers le progrès de la civilisation" ne possède pas "de programme, d'idéal, de norme ou de finalité qui puisse conférer le droit de disposer de la vie physique d'autrui". La société libérale, fondée sur la consommation de masse, ne peut exiger que l'on meure et que l'on tue pour elle. Elle repose sur une forme apolitique de domination : "C'est précisément quand elle demeure apolitique, écrit C. Schmitt, qu'une domination des hommes reposant sur une base économique, en évitant toute apparence et toute responsabilité politique, se révèle être une terrible imposture".

L'économisme et le "pluralisme" des libéraux masquent l'incurie de l'État, la domination des castes marchandes et la destruction des peuples ancrés dans une culture et une histoire. En accord avec Sorel, C. Schmitt plaide pour une forme de pouvoir qui ne renonce pas à son plein exercice, qui manifeste son autorité politique avec les moyens normaux qui y sont afférents, la puissance, la contrainte et, dans les cas exceptionnels, la violence. C'est pour avoir méconnu ces principes que la République de Weimar a laissé s'installer Hitler ; c'est également sur un rejet idéologique de l'idée de puissance étatique que s'appuient les totalitarismes techno-économiques du capitalisme moderne, incontournables parce que proclamés humanitaires et fondés sur la double idée de pluralisme et d'individualisme sociaux qui mettent les nations à la merci des dominations technocratiques.

La critique schmittienne du pluralisme interne, au sens où Montesquieu, Locke, Laski, Cole et toute l'école libérale anglo-saxonne l'ont conçu, a pour objet de défendre l'unité politique des nations, seule garante de la protection civique et des libertés. Le pluralisme interne débouche sur la guerre civile larvée ou réelle, le corporatisme sauvage des groupes et des factions d’intérêts économiques et au final réintroduit à l'intérieur de la société la distinction ami-ennemi que les États européens avaient su, depuis Bodin et Hobbes, reporter à l'extérieur.

Un tel système se réclame naturellement, pour se débarrasser des unités politiques, de l'idée d'Humanité. "L'Humanité n'est pas un concept politique" écrit C. Schmitt qui ajoute : "L'Humanité des doctrines fondées sur le Droit naturel, libérales et individualistes, est une construction sociale idéale de caractère universel, c-à-d. englobant tous les hommes de la terre (...), qui ne sera pas réalisée avant que ne soit éliminée l'éventualité effective du combat et que soit rendu impossible tout regroupement en amis et ennemis. Cette société universelle ne connaîtrait plus de peuples (...) Le concept d'Humanité est un instrument idéologique particulièrement utile aux expansions impérialistes, et sous sa forme éthique et humanitaire, il est un véhicule spécifique de l'impérialisme économique (...) Étant donné qu'un nom aussi sublime entraîne certaines conséquences pour celui qui le porte, le fait de s'attribuer ce nom d'Humanité, de l'invoquer et de le monopoliser, se saurait que manifester une prétention effrayante à faire refuser à l'ennemi sa qualité d’être humain, à la faire déclarer hors la loi et hors l'Humanité et partant à pousser la guerre jusqu'aux limites extrêmes de l'humain".

Définir le politique sous la catégorie de l'ennemi, refuser l'égalitarisme humanitaire n'aboutit absolument pas au mépris de l'homme ou au racisme. Bien au contraire. Reconnaître la dimension polémique des rapports humains et l'homme comme "un être dynamique et risqué", c'est garantir le respect de tout adversaire conçu comme l'Autre dont la cause n'est pas moins légitime que la sienne propre.

Cette idée revient souvent dans la pensée de C. Schmitt : les idéologies modernes qui prétendent détenir une vérité universelle et qui, de ce fait, envisagent l'ennemi comme absolu, comme une "non-valeur absolue", débouchent sur des génocides. Elles sont toutes d'ailleurs inspirées du monothéisme : chrétien, lui aussi pacifiste et prosélyte. C. Schmitt soutient avec raison la conception européenne classique qui validait l'existence de l'ennemi et qui admettait la légitimité de la guerre – non pour la défense d'une cause "juste" mais comme nécessité éternelle des rapports humains - provoquait moins de guerres et induisait un respect de l'ennemi envisagé comme adversaire (comme hostis et non comme inimicus).

Les successeurs de C. Schmitt, précisant et prolongeant sa pensée, ont forgé avec Rüdiger Altmann la notion d'Ernstfall (cas d'urgence), qui constitue un autre critère fondamental du politique. La souveraineté politique ou la crédibilité d'une nouvelle instance politique se fondent sur leur capacité à affronter et à résoudre les cas d'urgence. Les idéologies politiques dominantes, toutes pénétrées d'hédonisme et volontiers sécurisantes, veulent ignorer d'urgence, le coup du sort, l'aléa. Le politique digne de ce nom - et cette idée pulvérise les catégories idéologiques et abstraites de "droite" et de "gauche" - est celui qui, secrètement, répond au défi du cas d'urgence, tire la collectivité du mauvais pas imprévu ou de la tempête et par-là autorise une mobilisation totale du peuple et une intensification de ses valeurs. Les conceptions libérales du politique ne voient dans l'Ernstfall que l'exception, et dans la "normalité juridique", la règle. Cette vision des choses, inspirées de la philosophie téléologique de l’histoire de Hegel, correspond à la domination de la bourgeoisie qui place la sécurité avant le dynamisme historique et le destin du peuple. Selon C. Schmitt, au contraire, la fonction du souverain est sa capacité de décider de l'état d'exception, qui ne constitue nullement une anomalie mais une éventualité permanente. Cet aspect de la pensée de C. Schmitt traduit ses inspirations essentiellement françaises et espagnoles (Bonald, Donoso Cortès, Bodin, Maistre, etc.) et permet de le situer, à égalité avec Machiavel, dans la lignée de la grande école latine des sciences politiques.

Dans Legalität und Legitimität (1932), C. Schmitt, en disciple de Hobbes, invite à considérer que la légitimité prime la notion abstraite de légalité. Est légitime un pouvoir qui peut protéger par la force la collectivité dont il a la charge. La conception idéaliste et "juridiste" de la légalité, déplore C. Schmitt, a, par ex., autorisé Hitler à parvenir au pouvoir. Le légalisme débouche sur le renoncement à la puissance, ce que C. Schmitt appelle la "politique de la non-politique" (Politik des Unpolitischen), celle qui ne prend pas ses responsabilités, qui ne formule pas de choix concernant le destin collectif. "Celui qui ne possède pas la puissance de protéger quelqu'un, écrit C. Schmitt dans La Notion de politique, n'a pas non plus le droit d'exiger l'obéissance. Et inversement, celui qui cherche et accepte la puissance n'a pas le droit de refuser l'obéissance".

Cette dialectique de la puissance et de l'obéissance est refusée par les tenants du dualisme social, qui opposent arbitrairement la société et la fonction souveraine en s'imaginant, contre toute expérience, que l'exploitation et la domination sont le fait politique du "pouvoir" alors qu'elles ressortissent beaucoup plus fréquemment aux féodalités économiques.

C. Schmitt élabore ainsi une critique de l’État dualiste du XIXe siècle fondé sur les conceptions de John Locke et de Montesquieu visant à une séparation entre la sphère de l'État et la sphère privée. De fait, les technocraties modernes, historiquement issues des institutions de représentativité parlementaire, connaissent des interpénétrations et des oppositions entre le privé et le public, comme l'a montré Jürgen Habermas. Une telle situation déstabilise l'individu et affaiblit l'État. C'est cette faiblesse des démocraties qui permit, selon C. Schmitt, l'établissement des régimes à parti unique, comme il l'explique dans Staat, Bewegung, Volk (3). Ce type de régime constitue la révolution institutionnelle du XXe s. ; de fait, c'est aujourd'hui celui qui est le plus répandu dans le monde. Seule l'Europe occidentale et l'Amérique du Nord ont conservé la structure pluraliste de la démocratie traditionnelle, maintenue d'ailleurs comme une fiction, puisque le véritable pouvoir est économique et technique. L'État à parti unique tente de reconstituer l'unité politique de la nation, selon une triple structure : l'État proprement dit regroupe les fonctionnaires et l'armée ; le Peuple n'est pas une population statistique mais une entité politisée et fortement organisée en institutions intermédiaires ; Le Parti met cet ensemble en mouvement (Bewegung) et constitue un sas de communication entre l'État et le Peuple.

C. Schmitt, qui renvoie dos à dos nazisme, stalinisme, théocraties et totalitarismes humanitaires, n'avalise évidemment pas les régimes de parti unique. Il ne prône pas de "régime" particulier. Ce qu'il demande, c'est, selon la vieille tradition réaliste latine héritée de Rome, un exécutif puissant et légitime, qui n'"idéologise" pas l'ennemi et puisse, dans les cas réels, faire usage de la force, qui sache faire de l'État "l'auto-organisation de la société".

La guerre devient alors objet d'étude pour le politologue. Esprit universel, C. Schmitt s'intéresse ainsi à la géopolitique comme prolongement naturel de la politique. La vraie, la grande politique, pour lui, c'est la politique extérieure, qui trouve son aboutissement dans la diplomatie. Dans Der Nomos der Erde (1951), il montre que l'État répond à la conception européenne de la politique depuis le XVIe s. Or l'Europe est entrée en décadence : l'État bureaucratique se dépolitise et ne permet plus le maintien dans l'histoire des peuples européens ; le jus publicium europaeum qui déterminait les relations inter-étatiques décline au profit d'idéologies mondialistes et pacifistes incapables de fonder un droit international efficace. L'idéologie des droits de l'homme et l'humanitarisme affiché des institutions internationales préparent paradoxalement un monde où la force prime le droit. À l'inverse, une conception réaliste des rapports inter-étatiques, qui admet et norme le conflit, qui reconnaît la légitimité des volontés de puissance, tend à civiliser les rapports entre les nations.

C. Schmitt est, avec Mao-Tsé-Toung, le meilleur théoricien moderne de la guerre révolutionnaire et de la figure énigmatique du partisan qui, en cette ère de dépolitisation des États, reprend à son compte le politique, désigne "illégalement" ses ennemis et fait s'estomper la distinction entre guerre et paix (4).

Un tel "faux pacifisme" est bien celui d'un monde où les instances politiques et les souverainetés indépendantes s'effacent devant une civilisation mondiale plus aliénante que toutes les tyrannies. C. Schmitt, qui influença les rédacteurs de la constitution de la Ve République, la plus intelligente, la plus politique et la moins inspirée de l'idéalisme des Lumières que la France ait connue, nous délivre ce message : la Liberté, l'Humanité, la Paix ne sont que des chimères qui préparent d’invisibles oppressions. Seules comptent les libertés, celles des peuples ou des individus : elles ne peuvent être garanties que par la force légitime d'une instance politique qui s'érige en règle et fonde le droit.

Il manque évidemment à Carl Schmitt de définir pour quelles valeurs le politique mobilise et légitime sa désignation de l'ennemi. Ces valeurs doivent être, non pas des idéologies, toujours abstraites et lourdes de totalitarisme, mais des mythologies. C'est en ce sens que la fonction gouvernementale, purement politique, ne suffit pas. Il faut lui adjoindre sa dimension "religieuse" de première fonction, telle qu'elle se trouve définie dans la tripartition indo-européenne. Telle nous paraît être la voie selon laquelle il faudrait compléter la politologie de Carl Schmitt. Car si celui-ci bâtit un pont entre l'anthropologie et le politique, il reste à en constituer un autre entre le politique et l'histoire.

NOTES :

  1. Cf. J. Freund, L'Essence du politique, Sirey, 1965, et La Fin de la Renaissance, PUF, 1980.
  2. Dans sa préface à La notion de politique, Calmann-Lévy, 1972.
  3. Il s'agit d'une série d'études sur les régimes à parti unique, marxistes not., parue en 1932.
  4. Cf. L'Ère des neutralisations, texte publié en 1972 chez Calmann-Lévy dans le même ouvrage que La notion de politique et Théorie du partisan.

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Interview mit Dr. Sunic, kroatischer Schriftsteller

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Interview mit Tomislav Sunic, kroatischer Schriftsteller

Tomislav Sunic, 1953 in Zagreb/Agram geboren, ist Autor von drei wichtigen Büchern Against Democracy and Equality. The European New Right, Dissidence and Titoism (beide bei Peter Lang, Bern/Frankfurt a. M.) und Americka Ideologija ( Die amerikanische Ideologie). Wegen politischer Dissidenz mußte er 1983 in die Vereinigten Staaten emigrieren, wo er in der California State University von Sacramento und in der University of California in Santa Barbara studierte und promovierte. Er hat in den USA für verschiedenen Zeitschriften geschrieben und hat in der California State University in Long Beach und in dem Juniata College in Pennsylvanien doziert. Seit 1993 ist er zurück in Europa. Heute schreibt er für Chronicles of American Culture und für Eléments (Frankreich).

Dr. Sunic, in welchem Familienkontext sind Sie aufgewachsen? Welche ideologische Einflüße hat ihr Vater auf Ihnen gehabt?

Mein Vater war Anwalt, hat politische Dissidenten verteidigt, wurde zweimal wegen politischer Nonkonformität im kommu-nistischen Jugoslawien eingesperrt. Er war antikommunistisch und stark vom kroatischen Bauernkatholizismus geprägt. Amnesty International hat ihn als Mustergefangenen adoptiert, weil er 1985 der älteste politische Gefangene im kommunistischen Osteuropa war. Die FAZ und Die Welt haben sich auch für ihn engagiert. Wir lebten in sehr bescheidene Umstände, wir hatten weder Fernsehen noch Pkw. Mein Vater war der Meinung, nur Bücher machen eine richtige Bildung. Wir wurden ständig schikaniert und mein Vater verlor bald das Recht, seinen Beruf auszuüben. Er war während des Krieges nicht Mitglied der Ustascha, stand eher kritisch dem kroatischen Staatswesen von Pavelic gegenüber. Mein Vater war Domobran, d. h. in der Einwohnerwehr. Heute ist er 83 und hat 1996 seine Memoiren unter den Titel Moji "inkriminari" zapisi ( Meine "inkriminierten" Papiere) publiziert, wobei er im neuen kroatischen Staat viel Aufmerksamkeit geregt hat.

Aber wie würden Sie ihre eigenen philosophisch-ideologischen Weg beschreiben?

Um es kurz zu fassen, bin ich ein "reaktionärer Linke" oder ein "konservativer Sozialist". Ich gehöre keiner Sekte oder keiner theologish-ideologischer Partei. Ich war antikommunistisch wie mein Vater, aber, als ich jung war, nahm meine persönliche Revolte den Gewand des Hippismus. Ich pilgerte nach Amsterdam, danach nach Indien im kaschmirischen Srinagar und in der Stadt Goa. Der Ersatz zum Kommunismus war für mich die hippy Gemeinschaft. Ich war gegen alle Formen von Establishment, egal welche ideologische Gestalt es hat. Aber ich verstand sehr bald, daß der Hippismus auch eine traurige Farce war. Um es salopp auszudrucken: Eben beim Joints-Rauchen, haben die Hippies eine Art Hierarchie mit aller möglichen Heuchelei reproduziert. Das gilt auch selbstverständlich für den Feminismus und den Schwulenbewegungen. Mein einziger Trost war das Lesen der großen Klassiker der Weltliteratur. Die sind die richtigen Antidoten zum Konformismus. Als Kind las ich Tintin (dt. Tim) auf französisch, Karl May auf deutsch sowie den Dichter Nikolas Lenau. Als Jugendlicher las ich weiter deutsche, französische und englische Bü-cher. Mit dieser klassischen Bildung und meiner Hippy-Erfahrung, habe ich dann die Rock-Musik entdeckt, u. a. "Kraftwerk" und Frank Zappa, der zur gleichen Zeit Anarchist, Pornograph und Nonkonformer war. Zappa war für mich sehr wichtig, da er mich die Realsprache gegen alle Heucheleien der etablierten Gesellschaft gelernt hat. Mit ihm habe ich das amerikanische Slang bemeistern können, die ich oft benutzt in meinem Schreiben, um das links-liberale Establishment diesmal konservativ aber immer ironisch und höhnisch zu bespotten.

Können Sie uns ein Paar Worte über ihre Studien sagen?

In Kroatien zur Zeit der kommunistischen Herrschaft habe ich Literatur, moderne Sprachen und Vergleichende Literatur studiert. Ich war 1977 fertig. Ästhetisch und graphisch konnte ich den Jugo-Kommunismus nicht mehr ertragen, Betonsprache und balkanische Vetternwirtschaft machten mich kotzen. 1980 nutzte ich die Gelegenheit, für ein jugoslawisches Unternehmen in Algerien als Dolmetscher zu arbeiten. 1983 emigrierte ich in den Vereinigten Staaten. Dort las ich wiedermal die nonkonforme Literatur. Damals waren meine Lieblingsautoren Kerouac und der Franzose Barbusse; weiter habe ich Sartre gelesen, weil er nicht nur Linker sondern ein bissiger Entlarver war, ohne Hermann Hesse zu vergessen, weil er mich an meine Indien-Reise erinnerte.

In den Vereinigten Staaten haben Sie den amerikanischen Neo-kon-servatismus entdeckt?

Zuerst muß ich sagen, daß der amerikanische Neokonservatismus nicht mit dem europäischen gleichgestellt sein kann. Links, rechts, was heißt das heute? Ich teile die Leute in Konformisten und Nonkonformisten. Der Mann, der mich in diesen Kreisen beeindruckt hat, war Thomas Molnar. Er war damals mein Mentor, weil er Ungarn und Angehöriger des ehemaligen k.u.k-Kulturraumes ist. Molnar ist ganz und klar Konservativer aber er bleibt ein Mann mit Ironie und sehr viel Humor. So trifft er immer das Wesentliche. Der Schmitt und Hegel-Spezialist Paul Gottfried übte auch auf mich einen tiefen Einfluß. Danach habe ich Paul Fleming kennengelernt, der die Zeitschrift Chronicles of American Culture leitet. Ich bin Autor der Redaktion seit mehr als zehn Jahre. Aber Rebell bin ich geblieben, deshalb interessierte ich mich intensiv für die sogenannten europäischen Neue Rechte bzw. den Neo-konservatismus Europas mit Mohler und seinem heroischen Realismus, Schrenck-Notzing und seiner Feindschaft jeder öffentlichen Meinungsdiktatur gegenüber, Kaltenbrunner und seiner Faszination für die Schönheit in unserer geistigen Trümmernwelt, Benoist mit seine Synthese in Von rechts gesehen. Ich habe dann die Autoren gelesen, die die Neue Rechte empfahl. Mein Buch über die Neue Rechte ist eigentlich ein follow-up meines Eintauchens in diese Bildungswelt. Aber die Benennung "Neue Rechte" kann auch trügen: ich ziehe es vor, diese neue Kulturbewegung als GRECE zu bezeichnen, d.h. wie Benoist es sieht, als ein dynamische Forschungstelle zur Erhaltung der Lebendigkeit unserer gesamteuropäischen Kultur. Céline (mit seiner groben Pariser Rotwelschsprache die alle eingebürgerten Gewißheiten zertrümmert), Benn und Cioran mit ihrem unnachahmbaren Stil bleiben aber die Lieblingsautoren des Rebells, der ich bin und bleiben werde.

Sie sind in Kroatien und in Europa 1993 zurückgekommen. Wie haben Sie die neue Lage in Ostmitteleuropa beurteilt?

Das Schicksal Kroatiens ist eng mit dem Schicksal Deutschlands verbunden, egal welches politische System in Deutschland herr-scht. Sowie der schwedische Gründer der Geopolitik, Rudolf Kjellén, sagte: "man kann seine geopolitischen Bestimmung nicht entweichen". Andererseits, hat uns Erich Voegelin gelernt, daß man politische Religionen wie Faschismus und Kommunismus wegwerfen kann, aber daß man das Schicksal seines Heimatlandes nicht entrinnen kann. Das deutsche Schicksal, eingrekreist zu sein, ist dem kroatischen Schicksal ähnlich, eben wenn Kroatien nur ein kleiner Staat Zwischeneuropas ist. Ein gemeinsames geographisches Fakt vereint uns Deutsche und Kroaten: die Adria. Das Reich und die Doppelmonarchie waren stabile Staatswesen solange sie eine Öffnung zum Mittelmeer durch die Adria hatten. Die westlichen Mächte haben es immer versucht, die Mächte Mitteleuropas den Weg zur Adria zu versperren: Napoleon riegelte den Zugang Österreiches zur Adria, indem er die Küste direkt an Frankreich annektierte (die sog. "départements illyriens"), später sind die Architekte von Versailles in dieser Politik meisterhaft gelungen. Deutschland verlor den Zugang zum Mittelmeer und Kroatien verlor sein mitteleuropäisches Hinterland sowie seine Souveränität. Das ist der Schlüssel des kroatischen Dramas im 20. Jahrhundert.

Wird Kroatien den Knoten durchhaken können? Seine Position zwischen Mitteleuropa und Mittelmeer optimal benutzen können?

Unsere Mittelschichten und unsere Intelligentsija wurden total durch die Titoistischen Repression nach 1945 liquidiert: Das ist soziobiologisch gesehen die schlimmste Katastrophe für das kroatisches Volk. Der optimale und normale Elitekreislauf ist seitdem nicht mehr möglich. Der "homo sovieticus" und der "homo balkanicus" dominieren, zu Ungunsten des homini mitteleuropei.

Wie sehen Sie die Beziehungen zwischen Kroatien und seinen balkanischen Nachbarn?

Jede aufgezwungene Heirat scheitert. Zweimal in diesem Jahrhundert ist die Heirat zwischen Kroatien und Jugoslawien gescheitert. Es wäre besser, mit den Serben, Bosniaken, Albanern und Makedoniern als gute Nachbarn statt als schlechte und zänkische Eheleute zu leben. Jedes Volk in ehemaligen und in Restjugoslawien sollte seinen eigenen Staat haben. Das jugoslawische Ex-periment ist ein Schulbeispiel für das Scheitern jeder aufgezwungen Multikultur.

Was wird nach Tudjman?

Hauptvorteil von Tudjman ist es, daß er völlig die Geschichtsschreibung des Jugokommunismus entlarvt hat. Größtenteils hat er das kroatische Volk und besonders die Jugend von der Verfälschung der Geschichte genesen.

Herr Dr. Sunic, wir danken Ihnen für dieses Gespräch.

(Robert STEUCKERS, Brüssel, den 13. Dezember 1997).

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mercredi, 14 mars 2007

De Schmitt à Deleuze

Robert STEUCKERS:

L'Europe entre déracinement et réhabilitation des lieux: de Schmitt à Deleuze

L'Europe d'aujourd'hui est contrainte de répondre à un double défi:
a) s'unifier au-delà de tous les vieux antagonismes stato-nationaux, pour survivre en tant que civilisation, et
b) renouer avec son tissu pluriel, extrêmement bigarré, dans un jeu permanent d'ancrages, de ré-an-crages et d'arrachements projectuels.
Cette pluralité est, concrètement parlant, une pluralité de paysages, de sites où se sont effectués des processus de sédentarisation dense et pluriséculaire. L'unification européenne est projet, elle anticipe un avenir qu'elle construit à l'aide d'organigrammes et de plans, tandis que le maintien de sa pluralité origi-nelle et originale implique de conserver et d'entretenir des legs du passé. L'équilibre entre le projet d'avenir et la gestion des legs du passé est difficile à tenir. Nous sommes effecti-vement habitués à des clivages qui privilégient unilatéralement soit l'avenir (le camp ³progressiste²) soit le passé (le camp ³con-ser-vateur²). Les progressistes se veulent accélérateurs, les conservateurs se veulent en quelque sorte ³katechons².

Cette difficulté de penser tout à la fois l'avenir et le passé dans la simultanéité et l'harmonie a marqué la pensée de Carl Schmitt. Celui-ci en effet a d'abord, dans les années 20 et 30, voulu être un accélérateur (Beschleuniger). Pour échapper à la ³cage d'acier² qu'était la légalité bourgeoise, wilhelminienne et puis surtout weimarienne, il fallait à ses yeux dynamiser à outrance les potentialités techniques de l'Etat dans les domaines des armements, des communications, de l'information, des mass-media, parce que tout ac-croissement en ces domaines augmentait la puissance de l'Etat, puis la dépassait pour se hisser à un seuil nouveau, celui du ³Großraum². L'accélération continuelle des dynamiques à l'¦uvre dans la société allemande des premières décennies de ce siècle a poussé Schmitt à abandonner son étatisme classique, de type européen et prussien, au nom de la sauvegarde, du maintien et du renforcement de la ³sou-ve-rai-neté².

Les Etats européens, dont la population oscille entre 3 et 80 millions d'habitants, sont de dimensions in-suffisantes face aux géants américain, soviétique ou chinois, pensait Carl Schmitt. Contrairement au la-bel de ³réactionnaire² qu'on lui a collé sur le dos, Schmitt a bel et bien participé à cette idéologie des ³in-gé-nieurs², moderniste et techniciste, qui s'est ancrée dans l'Allemagne de Weimar, no-tamment par le biais des écrits de Rathenau. Mais après 1945, ce futurisme schmittien se dissipe. Si Schmitt retient l'idée d'un ³grand espace², il n'est plus fasciné par la dynamique industrielle-technique. Il se rend compte qu'elle con-duit à une horreur qui est la ³dé-localisation totale², le ³déracinement plané-taire², surtout si elle est por-tée par la grande thalassocratie américaine, victorieuse des puissances eu-ropéennes de l'Axe et op-posée à l'Union Soviétique stali-nienne et continentale.

En Europe, pensait Schmitt, la dynamique industrielle-technique était tempérée et  freinée par une con-ception implicite du droit qui n'existe qu'en vertu d'un ancrage dans un sol, comme l'ont admirablement démontré Savigny et Bachofen. L'ancrage dans le territoire modérait le cinétisme frénétique de l'ère in-dustrielle-technique. Mais si le cinétisme et le dynamisme sont désor-mais véhiculés par une thalassocra-tie qui n'est pas moti-vée en ultime instance par un ancrage dans un sol, ils perdent toute retenue et pré-cipitent l'humanité dans le chaos. La présence ou le retour nécessaires aux ³ordres élémentaires de nos exis-tences terrestres² postule chez Schmitt un nouveau pathos: celui du tellurique. Sans espace habi-table  ‹et la mer n'est pas un espace habitable‹  il n'y a pas de droit et sans droit il n'y a aucun conti-nuum possible. Das Recht ist erdhaft und auf Erde be-zogen (Le droit est tellurique et lié à la Terre), écrit Schmitt dans son journal, inti-tulé Glossarium.  La mer ne connaît pas l'unité de l'espace et du droit, elle échappe à toute tentative de codification. Elle est a-sociale et an-écouménique. La logique de la mer, constate Schmitt, transforme tout en flux délocalisés: les flux d'argent, de marchandises ou de désirs (véhiculés par l'audio-visuel). Ces flux, déplore Schmitt, recouvrent les ³machines impériales². Il n'y a plus de Terre: nous naviguons sans cesse, sans pouvoir plus mettre pied au sol et tous les livres que phi-losophes et juristes peuvent écrire deviennent, volens no-lens,  autant de log-books,  de livres de bord, se bornant à rendre compte des événements ponctuant ce perpétuel voyage de l'humanité, condamnée à rester accrochée à son ³bâteau ivre².

Cette horreur de toute ³logique de la mer², nous la retrouvons également chez le poète et philosophe Rudolf Pannwitz (1881-1969): pour Pannwitz la Terre est substance, gravité, intensité et cristallisation. L'Eau (et la Mer) sont mobilités dissolvantes. Parler de ³Continent², dans cette géophilosophie ou cette géopoésie implicites, signifie invoquer la ³substance², la ³con-crétude² incontournable de la Terre et du droit. L'Europe qu'espèrent donc Schmitt et Pannwitz est ³la forme politique du culte de la Terre², car elle est la dépositaire de cultures (au pluriel!), issues de la glèbe, comme par définition et par force des choses toute culture est issue d'une glèbe. Ce travail de production de sens et de substance a été inter-rompu par le triomphe de la logique de la Mer. Il faut dès lors procéder à une ³re-territorialisation² de ce qui peut être re-territorialisé. Pour un exé-gète de Schmitt comme le philosophe deleuzien allemand Friedrich Balke, le monde contemporain est un vaste jeu de flux de tous ordres où plus aucune stabilité ni aucune représentation rigide n'a sa place. Le conservateur, fasciné par la figure du Katechon, dira: il faut re-terri-torialiser, ré-hiérarchiser, restaurer l'approche classique du politique, c'est-à-dire se donner ³la possibilité de faire des distinctions univoques et claires², bloquer les flux, rigidifier et coaguler partout, colmater les brèches.

En avançant cette définition classique du politique, Schmitt appelait de ses v¦ux une re-visibi-lisation fixe et nette du souverain et de la souveraineté, des formes sévères du politique, alors justement que les vic-toires des thalassocraties sur les dictatures de l'Axe, en imposant une logique fluide de la Mer, rendaient impossible à jamais le retour de ces représentations hiératiques de l'Etat et de la chose poli-tique. Sommes-nous dès lors condamnés à ³naviguer² sans repos, sans jamais rejoindre un port d'attache? Oui, mais si et seulement si on reste dans la logique de la Mer en ignorant délibérément la Terre. Si l'on tient compte à la fois de la Terre et de la Mer, on pensera simultanément le voyage, la croi-sière ou le raid, d'une part, et l'accostage, le débarquement, le port d'attache, la crique accueillante, l'hinterland fascinant, d'autre part. Pour Deleuze et Balke, rien n'est plus fixe, mais non pas parce que nous naviguons sans au-cun port d'attache. Rien n'est fixe parce qu'en marge des représentations, dé-sormais toujours grosses de caducité, nous avons des ³zones d'indécision², des ³zones entre forme et non-forme², où grouillent de po-tentielles innovations ou fulgurances, qui feront immanquablement irruption un jour pour recouvrir les formes figées, tombées en désuétude. Deleuze nous dit dès lors, comme une sorte de réponse à Schmitt et aux  étatistes classiques: il ne s'agit plus de savoir si l'on va produire ou reproduire des formes, mais si l'on va réussir ou non à capter des forces. Et éventuel-lement à les chevau-cher (Evola!) temporairement, le temps de repérer et d'emprunter une autre monture.

Par conséquent, la forme ³Etat², de modèle classique, est obsolète. Schmitt l'avait déjà perçu, mais ne l'avait pas systématiquement théorisé. Il avait déploré l'effacement graduel de la forme ³Etat², au profit de la société, plus bigarrée et moins clairement appréhendable de par la multiplicité de ses expressions. Avec l'Etat, au stade de sa rigidification suprême telle que l'a imaginée un Kafka dans Le Château, nous avions une ³unité de communication bureaucratique², où les représentants de l'Etat étaient d'office pla-cés au-dessus de ceux qui ne représentaient que des formations sociales subordonnées. Dans un monde de moins en moins déterminé par les formes et de plus en plus par les flux, l'Etat apparaît comme une ³instance sublime de surcodage², qui a soumis à son autorité des formations sociales déjà elles-mêmes codées, comme la famille, les tribus, les états (tiers-état, etc.), les communautés religieuses, les classes. Nous assistons aujourd'hui, à la suite de l'effritement de la forme et de l'hyper-fluidification qui s'ensuit, à un retour en force des formations de moindre codage. Car l'instance surcodée, le ³Code², l'Etat classique, l'appareil, la bureaucratie étatique, etc. n'ont au fond pas de substance propre et ne se nour-rissent que des substances réelles présentes, uniquement dans les corps sociaux, voire les ³corps intermédiaires² dont Bodin avait revendiqué l'élimination en même temps que celle des religiosités parallèles ou résiduaires (sorcelleries, paganismes).

Le retour des ethno-nationalismes (dans les Balkans ou ail-leurs), des revendications régionales (Lom-bar-die, Savoie, Catalo-gne, biorégionalisme américain, etc.), des impératifs religieux (dans les fon-da-men-ta-lis-mes de diverses moutures), des conflits sociaux (comme en France en 1995 ou en Belgique aujourd'hui), des revendications communautaires (le communautarisme américain), des ³marches blanches² contre l'appareil judiciaire accusé de fermer les yeux sur la pédophilie et les violences faites à l'enfant (Belgique, 1996), sont autant de signes d'une rébellion généralisée des groupes sociaux, aupara-vant surplombés par l'instance étatique ³surcodifiante², trop rigide dans sa re-présentation et incapable, justement, de ³capter des forces², parce que trop occupée à soigner, produire et reproduire son ³look², sa ³re-pré-sen-ta-tion². Dans un monde réagencé à la suite de la victoire écrasante d'une thalassocratie mar-chande, l'in-satiable répétition ³psittaciste² d'un modèle invariable fait scandale, même si l'extrême fluidité que la puis-san-ce maritime dominante impose par ailleurs au monde ne provoque pas outre mesure l'adhésion des masses ou des ressortissants des groupes sociaux soumis préalable-ment au ³Surcode².

Nous découvrons donc une problématique ambivalence dans l'appréhension par nos contemporains de la sphère du politique: d'une part, ils tentent de se débarrasser du ³surcode² étatique classique, car celui-ci est trop peu à même de ³capter les forces² qui les interpellent dans leurs vies quotidiennes; d'autre part, ils réclament du repos et tentent aussi d'échapper à ce voyage sans fin, à ce voyage permanent sur le ³bâteau ivre². Nos contemporains veulent à la fois voyage et ports d'attache. Aventure (ou distraction) et ancrage (et repos). Ils veulent un va-et-vient entre dé-territorialisation et re-territorialisation, dans un con-texte où tout retour durable du politique, toute restauration impavide de l'Etat, à la manière du Léviathan de Hobbes ou de l'Etat autarcique fermé de Fichte, est désormais impossible, quand tout est ³mer², ³flux² ou ³production². Deleuze, Guattari et Balke acceptent le principe de la navigation infinie, mais l'inter-prè-tent sans pessimisme ni optimisme, comme un éventail de jeux complexes de dé-territorialisa-tions (Ent-Ortungen) et de re-territorialisations (Rück-Ortungen). Le praticien du politique traduira sans doute cette phrase philosophique par le mot d'ordre suivant: "Il faut re-territorialiser partout où il est pos-sible de re-territorialiser", tout en sachant que l'Etat classique, rigide et représentatif, surcodifiant et surplombant les grouillements sociaux, n'est plus la seule forme de re-territorialisation possible pour nos contem-po-rains. Il y a mille et une possibilités de micro-re-territorialisations, mille et une possiblilités d'injecter pro-vi-soi-rement de l'³anti-production², c'est-à-dire des ³jets de stabilisation coagulante² dans le flux de flux con-tem-porain, que Deleuze et Guattari avaient nommé la ³production² dans L'Anti-Oedipe  et dans Mille Pla-teaux.  Ainsi, la nécessité des formes ou des ³stabilisations coagulantes² ne s'estompe pas mais change d'aspect: elle n'est plus surcodage rigide mais stabilisation provisoire et captation de forces réellement existantes que l'on chevauchera ou canalisera.

Face à ce constat des philosophes, quelle pourrait être la ³bonne politique² dans l'Europe contemporaine? Elle me semble devoir osciller d'une part, entre un ³grand-espace², une instance ³grand-spatiale² souple et flexible, légère, svelte et forte, remplaçant et dépassant l'Etat classique pour reprendre sur une plus grande échelle le rôle d'un ³converteur continental², d'un capteur-dynamiseur de forces réelles di-verses, et d'autre part, une mosaïque effervescente de sites réels et repérables dans leur identité que rien ne viendra mutiler ou handicaper. Nous aurions une instance de représentation non surcodante, mais au contraire captatrice, sorte de nouveau Saint-Empire (Heiliges Reich)  dynamiseur et généreux, et un tissu de patries charnelles, de sites originaux, de villes, de provinces et de pays typés, qui se regroupe-ront et se sépareront au gré des forces fluides à l'¦uvre partout, à la manière de ces initiatives auda-cieuses qu'on a vu s'épanouir récemment: les coopérations transré-ionales, au-delà des frontières des vieux Etats, coopérations qui fonctionnent au nom même du site, de la terre que ses contrac-tants occu-pent, au nom du paysage montagnard qui les unit plus qu'il ne les sépare, au nom du bassin fluvial qui les irrigue, au nom de la mer qui les baigne. Au nom du réel tellurique. Immanent. Immanent de par son extra-philoso-phicité. De par sa présence vitale. Car l'immanence est vie et rien d'autre, alors que la représenta-tion est toujours vision sans grouil-lement vital.

Robert STEUCKERS.
Sources:
- Friedrich BALKE, "Beschleuniger, Aufhalter, Normalisierer. Drei Figuren der politischen Theorie Carl Schmitts", in F. BALKE, E. MÉCHOULIAN & B. WAGNER, Zeit der Ereignisses - Ende der Geschichte?,  Wilhelm Fink Verlag, München, 1992.
- Friedrich BALKE, Joseph VOGL, "Einleitung. Fluchtlinien der Philosophie", in F. BALKE u. J. VOGL (Hrsg.), Gilles Deleuze - Fluchtlinie der Philosophie, W. Fink Verlag, München, 1996.
- Friedrich BALKE, "Fluchtlinie des Staates. Kafkas Begriff des Politischen", in F. BALKE u. J. VOGL, op. cit., 1996.
- Robert STEUCKERS, "La décision dans l'¦uvre de Carl Schmitt", in Vouloir, n°3/1995.
- Robert STEUCKERS, "Rudolf Pannwitz: ³Mort de la Terre², Imperium Europæum et conservation créa-trice", in Nouvelles de Synergies Européennes,  n°19, 1996.

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Un site consacré à Raoul Heinrich Francé

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Un site entièrement consacré au pionnier de l'écologie Raoul Heinrich Francé, par son petit-fils Pierre Francé

En allemand, anglais et français.

http://perso.orange.fr/france.pierre/

A lire également: In Memoriam Raoul Heinrich Francé (1874-1943):

http://www.thomas-caspari.com/bodenkunde/france/index.htm

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J. Vertemont: Qu'est-ce que le paganisme?

QU'EST-CE QUE LE PAGANISME ?

Source : Jean Vertemont, Vouloir n°142/145 (1998).

Le paganisme se caractérise fondamentalement par la compréhension intuitive de l’ordre intrinsèque du réel, ordre fondé sur un réseau de correspondances qui relient le corps, l'âme et l'esprit de chaque homme, sujet des phénomènes, (microcosme) à un ordre cosmique, ou ordre des phénomènes extérieurs au sujet (macrocosme). Cet ordre inhérent, appelé Rita chez les Indiens, Asha chez les Iraniens, Cosmos chez les Grecs, a un prolongement dans la société humaine, appelé Dharma en Inde pour l'aspect éthique et Varna pour l'aspect social, ou encore symbolisé chez les Grecs par une déesse de la mesure et de l'équité, Némésis.

Un des plus grands symboles de cet ordre est le zodiaque, celui que tout le monde connaît, mais aussi le zodiaque des runes, ou celui des positions de la lune, qui a survécu en Inde, faisant référence à de multiples processus concomitants, d'ordre temporel, mais aussi atmosphérique, mental, social, rappelant que les grands dieux exprimaient un ordre extérieur aussi bien qu'intérieur, un ordre cosmique aussi bien que social, ignoré par le monothéisme simpliste. La méthode comparative appliquée sur les textes védiques d'une part, et les textes traditionnels plus tardifs d'Europe d'autre part, a bien montré que les indo-européens avaient placé au centre de leur religiosité une cosmologie, permettant à de nombreuses cosmogonies de prospérer.

Et c'est précisément l’intérêt de la tradition védique d'avoir été un remarquable conservatoire de cette antique religiosité. Un sanskritiste comme Jean Varenne avait bien montré que ces cosmogonies pouvaient se classer selon les 3 grandes fonctions duméziliennes, car il existe dans les textes védiques des cosmogonies décrivant l'apparition du monde par l'action de la parole sacrée, avec la formule "fendre la montagne par le hurlement sacré pour délivrer la lumière cachée" ou par l'action guerrière du champion des dieux, Indra, contre des puissances de résorption et de renfermement, ou par l'action d'un démiurge constructeur et organisateur, comme Vishvakarman. Cette cosmologie, dont on retrouve des traces chez tous les peuples d'origine indo-européenne, est extrêmement ancienne, elle remonte à leur commune préhistoire. Elle tient la place qu’occupe l'eschatologie dans les grandes religions abrahamiques, qui ont pour corollaire un temps linéaire et orienté.

Au contraire, dans le paganisme, le temps est cyclique, il existait même un culte de l'année avec un rituel très précis et paradoxalement, il est possible de gagner l'immortalité justement en transcendant les cycles, ce qui est impossible et impensable avec un temps linéaire. La toile de fond de ces cosmogonies est la même que celle des cosmogonies grecques : l'eau, sous la forme de l'océan et des rivières célestes qui lui sont associées, forme l’élément primordial duquel est issu le monde. Du ciel supérieur, les dieux veillent au maintien de l'Ordre dont ils ont saisi les secrets, à la fois par la raison, mais aussi par la volonté. De ceci découle une mode d'existence, une façon d’être au monde, qui se caractérise par de multiples aspects bien soulignés par des centaines d'auteurs sur le sujet.

Les pouvoirs de la volonté

La reconnaissance des pouvoirs de la volonté, pour laquelle ont été conçus de multiples exercices spirituels, simples et efficaces, se basant sur la méditation, le contrôle du corps, la maîtrise des sens, la magie et la prière, dont le but est d'affirmer un potentiel de spiritualité, lequel s’élève vers le sacré et se fixe sur ses symbolisations multiples. Tous ces exercices spirituels puissants et effectifs, découlent de la vision païenne et doivent être dirigés vers des buts bien déterminés, comme autant de flèches précises sur leur cible. C'est ce qu'avaient observé les Anciens, qui érigèrent un dieu pour chaque force de la nature, pour chaque puissance cosmique, pour chaque manifestation relevant des mystères divins, pour chaque vertu morale.

La primauté de l'énergie sur la parole

La reconnaissance de la primauté de l’énergie sur la parole : La méditation, la prière et l'intercession sont des actes magiques dont nous ignorons encore toute la puissance. La psychanalyse caractérise partiellement ce processus en le comparant au phénomène physique de la sublimation. C'est une source incomparable qu'il faut savoir diriger en condensant les énergies. Le christianisme, comme toutes les religions abrahamiques, met l'accent sur la parole révélée, sur un logos qui serait créateur, sur la Loi et sur l'Amour, bref toutes sortes de processus qui peuvent se perpétuer sans fin en déconnexion du réel.

La reconnaissance de l'art comme voie d’accès au divin : Sous toutes ses formes, par la concrétisation de l'idéal, du beau, du sublime, non seulement dans ses expressions religieuses mais profanes. La sculpture, l'architecture, la peinture, la danse, la musique, la poésie, la philosophie, le sport, toute activité résulte plus ou moins de l'inspiration du divin, du sacré, dans ce que l'homme peut de meilleur et de plus élevé. L'artiste ou l'artisan, ou ce qui est plus difficile aujourd'hui, le travailleur, le citoyen, le militant, condensent inévitablement leur pensée sur l'oeuvre à laquelle ils adhèrent. Le paganisme, par sa glorification de la nature, s'adresse à un homme centré et équilibré, et finalement plus à l'esprit qu'au cœur. II inculque le sens de la grandeur, de l'harmonie, et de la santé par le sens de la mesure et des proportions, par la maîtrise et l’unification de l’être trinitaire esprit/âme/corps totalement inséparables, par la culture de la beauté des formes et la noblesse des sentiments.

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L'hommage de Ph. Randa à J. Mabire

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A jamais parmi nous

Le magnifique testament de Jean Mabire

Voilà dix ans que ses amis savaient Jean Mabire très malade, mais tous avaient fini par ne plus y penser. Jusqu’à ses dernières forces, il a poursuivi son œuvre, appelée à devenir une référence majeure. « Ecrire, dit-il, doit être un jeu dangereux. C’est la seule noblesse de l’écrivain, sa seule manière de participer aux luttes de la vie. »

« Si quelqu’un mérite bien le paradis des chrétiens, c’est assurément lui ! Il n’y croyait peut-être pas, mais il a vécu sur Terre comme un vrai chrétien, et même bien davantage que certains qui s’autoproclament comme tel sans en respecter les plus simples préceptes. »
Jean Bourdier

N é le 8 février 1927, Jean Mabire ne fêtera donc pas ses 80 ans « parmi nous ». Depuis mercredi dernier, 28 mars, il a rejoint tous les personnages historiques qu’il fit revivre dans ses cent et quelques livres publiés, tous ses amis partis avant lui, et ceux qui furent tout autant l’un que l’autre. Il rendait ainsi dernièrement un ultime hommage à Christian de La Mazière, le « rêveur casqué et blessé », dans la chronique littéraire qu’il tenait à « National Hebdo ». Souffrant de la même grave maladie, il lui demandait, voici quinze jours, de ne pas marcher trop vite car il savait qu’il n’allait pas tarder à le rejoindre. Gageons que Christian de La Mazière l’a entendu et donc attendu sur le chemin de ce royaume où l’honneur et la fidélité unissent ceux qui ont bravé, leur vie durant, le conformisme intellectuel.

Le chantre de « tous les braves »

Jean Mabire avait d’abord voulu être dessinateur et graphiste ; il avait fondé voilà un demi-siècle un atelier d’art graphique, « Les Imagiers normands ». Puis il se fit journaliste, d’abord à la normande « Presse de la Manche », puis dans des organes très engagés (« L’Esprit Public », « Europe Action », « Défense de l’Occident », « Dualpha », « Eléments ») puis très « droitiers » (« Valeurs actuelles »,  « Spectacle du Monde », « Minute », « Le Choc du Mois ») et enfin à « National Hebdo », où le convièrent voilà quinze ans Roland Gaucher et Jean Bourdier, et qu’il ne quitta plus.

Il ne faudrait pas oublier non plus ses multiples collaborations aux revues historiques (« Historia », « Enquête sur l’Histoire », « Visages de l’Histoire » et, bien sûr, « Hommes de Guerre », qu’il dirigea) ou régionalistes (« Heimdal », « Vikland », « Haro », « Hellequin »…) Une telle carrière rendrait déjà envieux bien des professionnels de la presse, mais avant tout, mais surtout, Jean aura été historien.

Le grand public le connaît pour ses récits de guerre et parmi ceux-ci, plus encore pour ses livres sur les unités de la Waffen SS européenne. Des livres qu’il ne reniait certes pas, mais dont il s’exaspérait qu’on lui parle parfois exclusivement, alors qu’ils ne représentent qu’un tiers environ de son œuvre. Un tiers seulement ? Oui, mais un tiers qui ne passa pas inaperçu dans les années soixante-dix et quatre-vingt du siècle dernier. Il n’était pas rare, alors, de voir les « casques à boulons» signés Jean Mabire en pile dans les rayons des grandes surfaces. Il y a moins de vingt-cinq ans de cela et il semble aujourd’hui que ce fut il y a un siècle…

Ce succès devait occulter celui, tout aussi réel, mais moins voyant, de ses récits consacrés aux Chasseurs alpins (lui-même étant un ancien du 12e bataillon de chasseurs alpins), aux paras américains et anglais de la Seconde Guerre mondiale, aux samouraïs (avec Yves Bréhéret) ou encore aux guerriers de la plus Grande Asie et tout particulièrement au baron Raoul Ungern von Sternberg. La postérité lui rendra un jour justice d’avoir voulu être le chantre de « tous les braves », quelles qu’aient été leur nationalité, leurs convictions ou leur engagement…

Libre en amitiés

On l’oublie trop souvent, Jean Mabire a été aussi un grand historien de la Normandie, du Nord et de la mer. A ce titre, il cultivait des amitiés qu’on ne lui aurait pas devinées : par exemple celle de Gilles Perrault (ex-président de Ras l’front) ou celle de Jean-Robert Ragache, grand maître du Grand Orient de France, avec lequel il signa une Histoire de la Normandie, trois fois rééditée. A ce propos, je lui demandais un jour son avis sur la franc-maçonnerie. Il me répondit, amusé : « Personne ne m’a jamais proposé d’y entrer, même pas mes amis francs-maçons dont beaucoup s’imaginent sans doute que j’en suis… »

Ce que tout le monde savait en revanche, c’est qu’« à la religion des autels et des livres », il préférait « la croyance aux bois et aux sources ». Ce à quoi ses amis très catholiques, comme Jean Bourdier, répondent en chœur, depuis mercredi dernier : « Si quelqu’un mérite bien le paradis des chrétiens, c’est assurément lui ! Il n’y croyait peut-être pas, mais il a vécu sur Terre comme un vrai chrétien, et même bien davantage que certains qui s’autoproclament comme tel sans en respecter les plus simples préceptes. »

Sans doute ai-je toujours été un lecteur type de Jean Mabire : adolescent, je m’enflammais aux exploits des guerriers qu’il faisait revivre. A peine majeur (de la majorité d’avant Giscard), je les délaissais pour ses livres politiques (Drieu parmi nous, La Torche et le Glaive, Thulé, Le Soleil retrouvé des Hyperboréens, Les Grands Aventuriers de l’Histoire : les Eveilleurs de peuple…). Puis, jeune homme, je découvrais ces autres aventuriers qui le fascinèrent tout autant et dont il fut le biographe : Bering, Roald Amundsen, Ungern, Patrick Pearse… Enfin, ayant largement dépassé la quarantaine, je reste à jamais fasciné par ses portraits d’écrivains qu’il nous a offerts chaque semaine dans sa chronique « Que lire ? ».

Que lire ? Mabire !

C’est une œuvre d’une tout autre ampleur que ses récits de guerre, sa quête incessante de l’Ultima Thulé ou ses aspirations régionalistes (il fut co-fondateur de l’Union pour la Région Normande qui donnera naissance en 1971 au Mouvement normand). Les sectaires lui reprocheront d’avoir osé parler de tel auteur, « inverti » notoire, qui n’a donc pas sa place dans la littérature ! De tel autre, communiste, et donc complice du diable ! De tel autre enfin, qui était du camp des vaincus de 1945 et n’a de ce fait plus même droit au qualificatif d’écrivain !

On trouve une preuve de l’honnêteté intellectuelle de Jean Mabire à travers chacun de ses portraits d’écrivains : pas une seule mesquinerie raciste, politique, religieuse, littéraire, n’entache sa volonté manifeste de pousser le lecteur à lire, toujours et encore, et souvent à découvrir un auteur. Ainsi commence l’éternité d’un écrivain lorsqu’on sauvegarde son souvenir, c’est-à-dire son « âme ».

« Que lire ? » est non seulement la grande œuvre de Jean Mabire, mais un testament magnifique qu’il laisse à ses innombrables lecteurs passés, présents et futurs. Un jour, peut-être, on dira « le Mabire » comme on disait hier « le Lagarde et Michard ». Nous serons quelques-uns à dire que nous le Mabire, l’homme, nous l’avons connu. Et aimé.

Philippe Randa

Les cinq premiers tomes de Que lire ?, de Jean Mabire, sont disponibles aux éditions Dualpha (www.dualpha.com ou Dualpha diffusion, BP 58, 77522 Coulommiers Cedex) au prix unitaire de 26,00 euros. Les deux tomes suivants paraîtront prochainement.

 

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mardi, 13 mars 2007

Les manipulateurs

A lire également:

Florence AUTRET :

Les manipulateurs - Le pouvoir des lobbies

Ed. Denoël, 2003, 232 pages.

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Le blog de Florence Autret

A propos de Florence Autret

Florence Autret vit et travaille à Bruxelles. Journaliste indépendante, elle collabore notamment aux publications financières de L’AGEFI et au quotidien Le Télégramme.

Son précédent travail d’investigation, « Les Manipulateurs, le pouvoir des lobbys » paru en 2003 chez Denoël, levait pour la première fois le voile sur l’étrange déni du lobbying au sein des élites politiques et les pratiques contestables qu’il cachait.

C’est en poursuivant l’enquête sur Bruxelles, qu’elle a découvert la prégnance des intérêts américains en Europe et leur rôle dans l’invention d’un modèle politique européen sui generis. Mais son intérêt pour l’Europe remonte aux années universitaires et à des recherches sur les origines de l’intégration européenne et l’émergence d’un pouvoir judiciaire communautaire. « L’Amérique à Bruxelles » est ainsi le fruit et la synthèse de quinze ans d’observation et de recherches sur l’Union européenne. Il prolonge et complète la note publiée en 2005 par la République des Idées, « Bruxelles Washington, la relation transatlantique sur le métier » (télécharger gratuitement la note)

Diplômée de l’université Paris IX-Dauphine, de Sciences Po Paris et titulaire d’un Diplôme d’études approfondies de l’université de Paris I-Sorbonne, Florence Autret donne un cours sur le lobbying européen à Sciences-Po Paris.

URL du Blog de Florence Autret: http://lobbying.typepad.fr/

A propos du livre :

L'Amérique à Bruxelles

Depuis soixante ans, l’Europe est l’alliée des États-Unis et les États-Unis le protecteur de l’Europe. En ce début de XXIe siècle, l’alliance scellée au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale n’a pas été dénouée, en dépit des désaccords sur la guerre en Irak et la lutte contre le terrorisme. Bien au contraire. L’interdépendance économique entre les deux rives de l’Atlantique devient chaque jour plus forte. L’ ‘Alliance’ atlantique et l’ ‘Europe’ sont les deux faces d’une même réalité : le rapprochement inexorable des continents européen et américain depuis six décennies.
L’Union européenne que nous connaissons n’est certainement pas le résultat ou le moyen d’une opposition européenne à la puissance américaine, comme on serait parfois tenté de le penser en France. Elle n’est pas non plus le cheval de Troie de la puissance américaine. L’Union européenne, comme puissance politique et réglementaire, est le produit des épisodes de conflit et de coopération de la relation transatlantique. Elle est, en d’autres termes, le fruit d’une dialectique atlantique. « L’Amérique à Bruxelles » est consacré à l’exploration de cette dialectique méconnue.
Au-delà de l’interdépendance économique croissante, le livre décrit l’inexorable convergence entre les deux plus grands marchés de la planète. Que l’ancienne Commissaire à l’environnement devenue vice-présidente de la Commission, Margot Wallström, mette sur les rails une réglementation nouvelle des produits chimiques qui entraînera probablement le retrait de centaines de substances aujourd’hui supposées dangereuses, et c’est Colin Powell en personne, alors secrétaire d’État, qui, alerté par l’industrie américaine, écrit à ses ambassadeurs pour leur demander de faire pression sur Bruxelles. Tous les grands domaines de la réglementation économique, qu’il s’agisse de services financiers, d’environnement, de normes comptables ou de gouvernement d’entreprise, comportent une dimension transatlantique déterminante. Lorsque le Commissaire Charlie McCreevy en charge du Marché intérieur, se déplace à Washington, il n’y reste pas un jour ou deux, il y passe toute la semaine. Le centre de gravité de l’économie mondiale, situé quelque part au dessus de l’Atlantique, aspire comme un siphon les réglementations des deux marchés et même la manière de faire de la politique.
Il y a déjà trente ans, les grandes entreprises américaines ont emmené dans leurs bagages les techniques d’influence qui ont fait de Washington la capitale mondiale du lobbying. Adaptées, ‘customisées’ par une poignée de ‘Pères fondateurs’, souvent britanniques, parfois américains, ces techniques sont devenues la grammaire du microcosme bruxellois. Faut-il se réjouir de cette convergence ou la regretter ?
La force du lien transatlantique interroge l’Europe sur son identité, particulièrement lorsqu’elle touche aux questions de sécurité. L’après-11 septembre qui a vu le a souligné la vulnérabilité européenne. Le Patriot Act a fait voler en éclat le délicat équilibre dégagé par l’Union européenne sur l’équilibre en liberté et sécurité. D’un jour à l’autre, pour les transporteurs aériens, ce n’était plus la loi européenne mais la loi américaine.
Mais comme toujours dans la brève histoire de l’Union, ce choc transatlantique a aussi agi comme un ferment d’intégration. Bruxelles n’est jamais allée aussi loin dans la formulation d’une politique de sécurité européenne que depuis le 11 septembre. Mais son autonomie semble si fragile. Lorsque Washington, pris d’un vertige sécuritaire, quitte la route, l’Europe est entraînée dans sa chute. L’histoire des activités illégales menée par la CIA sur le territoire européen sous prétexte de lutte contre le terrorisme en administre la triste preuve. De quelles valeurs les Européens oseront-ils se prévaloir lorsqu’ils découvriront qu’a existé sur leur sol un Guatanamo roumain et un Abou Grahib polonais ?
L’Europe ne peut échapper à son destin atlantique. Ce qui menace son intégrité, ses valeurs, son autonomie, ce ne sont pas les États-Unis, mais les Européens eux-mêmes. L’influence américaine à Bruxelles souligne a contrario l’indétermination des dirigeants politiques européens ou, à tout le moins, l’absence de consensus sur le sens du projet politique européen.

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Who was Bela Hamvas?

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Who was the Hungarian Thinker Bela Hamvas ?

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Sangue, potere e petrolio

Sangue, potere e petrolio

Partita mortale tra le macerie di Grozny e Beslan

Giacomo Catrame

Il Caucaso torna a far parlare di sé a seguito del duplice attentato aereo avvenuto ai danni di due apparecchi delle aviolinee russe e al sequestro mostre di Beslan dove alcune decine di guerriglieri ceceni hanno preso in ostaggio bambini e genitori di un complesso scolastico della città della Repubblica autonoma dell'Ossezia del nord appartenente alla Federazione Russa. La guerra in Cecenia sembra essere diventata permanente e a pagarne le spese sono sempre di più le popolazioni civili della Federazione Russa e della stessa repubblica secessionista ormai pesantemente martirizzata. Lo scontro ceceno, però, non è l'unica guerra in corso nella tormentata penisola ponte tra l'Europa e l'Asia. In Georgia il neo presidente Mikheil Saakashvili, dopo aver piegato la repubblica secessionista dell'Adzaria, posta tra la Georgia e la Turchia, ha iniziato le manovre di attacco all'Ossezia del Sud la cui popolazione è etnicamente e culturalmente la stessa del nord, ma il cui territorio è situato all'interno della Georgia.

L'Ossezia del Sud è indipendente de facto dal 1993 quando emerse vittoriosa dalla breve guerra di secessione contro Tblisi all'indomani dello scioglimento dell'URSS. Tale secessione venne appoggiata dai Russi che, grazie ai movimenti indipendentisti in Ossezia, Abkhazia e Adzaria poterono rientrare nella repubblica caucasica diventata indipendente in funzione di peace-keepers, costruendo basi militari sul suo territorio in zone non controllate da Tblisi. La cacciata del Presidente Shevardnadze avvenuta a dicembre del 2003 con l'appoggio degli Stati Uniti è stato il primo segnale del palesarsi di un progetto nazionalista georgiano per recuperare i territori perduti nel 1991-93. Tale progetto viene posto in essere oggi grazie all'appoggio esplicito degli USA che contano alcune centinaia di militari sul campo, ufficialmente in funzione antiterrorista, ma in pratica con quella di addestratori dell'esercito della repubblica caucasica.

L'appoggio di Washington non nasce da spiccate propensioni americane a favorire la Georgia nella sua disputa territoriale con osseti ed abkhazi, ma dalla volontà di isolare in modo drastico Mosca dal trasporto degli idrocarburi del Mar Caspio verso l'Europa. Il nuovo presidente georgiano, infatti, si è impegnato alla costruzione dell'oleodotto Baku-Ceyan che dovrebbe portare il petrolio del Caspio dall'Azerbaigian al porto turco attraversando il territorio di Tblisi, mettendo così fuori gioco la linea di trasporto verso il porto russo di Novorossijsk sul Mar Nero. Inoltre, questo secondo oleodotto passa all'interno della Cecenia. Diventa così chiaro perché il conflitto in Cecenia ha un'importanza strategica nei rapporti Usa-Russia e perché Washington si stia mobilitando per consentire ai georgiani di piegare due piccole repubbliche ribelli e per espellere le basi e le truppe russe dalla repubblica caucasica. La costruzione di un oleodotto completamente controllato dalla Georgia nel momento in cui l'oleodotto concorrente è a continuo rischio di sabotaggio da parte della guerriglia cecena comporterebbe l'esclusiva USA nel controllo delle risorse petrolifere del Caspio meridionale, l'isolamento della Russia verso l'Europa e il completamento dell'accerchiamento dell'Iran.

All'interno di questo quadro deve essere posta la mobilitazione progressiva di decine di migliaia di soldati della Georgia ai confini dell'Ossezia e il rinnovato appoggio di Tblisi alla guerriglia cecena. Saakashvili spera di scatenare una guerra di breve durata che pieghi gli osseti, ne provochi la fuga verso il territorio russo e gli consenta di annettersi il territorio ribelle. Gli osseti da parte loro sanno, in caso di sconfitta di doversi aspettare una feroce pulizia etnica che "georgizzi" il loro paese e si preparano a una guerra di resistenza che probabilmente assumerà tratti di una ferocia inimmaginabile, dal momento che nessuno degli osseti si è dimenticato i 20.000 morti (quasi tutti civili) subiti da questa popolazione nel corso della guerra di secessione dalla Georgia.

I russi dal canto loro sanno che la loro cacciata dalle basi ossete ed abkhaze vorrebbe dire l'emarginazione di Mosca da qualsiasi gioco caucasico e il diffondersi della ribellione all'interno delle molte repubbliche autonome della Federazione. Anche Mosca, quindi, non abbandonerà la mano se non a seguito di un conflitto catastrofico che potrebbe portare alla dissoluzione della stessa Russia in un insieme di staterelli oligarchici gestiti da locali feudatari di Washington.

La questione dell'oleodotto è quella attorno alla quale si è venuto a costruire il conflitto che più di ogni altro sta portando Russia e USA sulla strada del confronto armato, sia pure per interposto esercito. Inoltre Ossezia ed Abkhazia, in quanto stati de facto ma non riconosciuti sono da sempre basi perfette per il contrabbando, il traffico d'armi, di droga e di uomini, totalmente controllati dalla mafia russa e dai suoi molti appoggi all'interno del Kremlino e dell'Armata Russa; una ragione in più per la quale Mosca non può permettersi di abbandonare le due repubbliche caucasiche secessioniste.

 

Chi soffia sul fuoco: padri e padrini dell'indipendentismo ceceno

 

L'assalto alla scuola di Beslan e la successiva carneficina attuata dalla guerriglia cecena tra gli ostaggi (bambini, maestre e qualche genitore) in seguito all'attacco all'edificio condotto dalle forze speciali russe con il consueto mix di ferocia ed incapacità al quale hanno abituato il mondo negli ultimi anni si inserisce in questa partita come un episodio della stessa guerra che devasta il Caucaso dalla fine dell'URSS ad adesso. È vero, infatti, come ricordano molti commentatori sui media occidentali che la guerra coloniale russa in Cecenia è iniziata nella prima metà dell'Ottocento quando l'espansionismo russo toccò le terre del Caucaso meridionale e non è mai davvero finita, ma è altrettanto vero che la nuova fiammata indipendentista iniziata con la dichiarazione d'indipendenza del 1991 e con la successiva guerra voluta e persa da Eltsin nel biennio 1994-96, ha sponsor e padrini in parte coincidenti con quelli che oggi sponsorizzano la ventata nazionalista ed aggressiva georgiana. Il moderno indipendentismo ceceno nasce laico e guidato da ex ufficiali dell'esercito sovietico decisi ad approfittare dello sfascio russo seguito ai convulsi giorni dell'Autunno del 1991 per affermare l'indipendenza di un territorio che avrebbe potuto contare sulla rendita del transito petrolifero per garantirsi una certa prosperità. Gli anni successivi vedono la progressiva emarginazione della leadership laica e la sua sostituzione con una religiosa a base wahabita, il cui finanziamento veniva effettuato in primo luogo dalla monarchia saudita desiderosa di estendere la propria influenza politica su tutti i territori a maggioranza islamica, tramite l'esportazione della versione reazionaria ed oscurantista della religione musulmana, nata in Arabia nel corso del XVIII secolo ed adottata dalla dinastia dei Saud, allora re beduini del Neged in perenne conflitto con gli altri regni della penisola arabica e con gli Sceriffi della Mecca appartenenti alla dinastia Hascemita (quella per intendersi che tuttora esprime il Re di Giordania).

Accanto al wahabismo saudita opera all'islamizzazione dell'indipendentismo ceceno e alla sua trasformazione in una guerriglia feroce, capace di utilizzare l'attentato suicida come la strage di ostaggi, la guerra aperta come l'infiltrazione nel territorio russo, anche una delle principali compagnie petrolifere mondiali: la Chevron-Texaco, la cui consigliera per l'area caucasica, responsabile per le politiche locali, è una signora che tutto il mondo ha imparato a conoscere negli ultimi quattro anni: Condoleeza Rice, l'attuale ministro per la Sicurezza nazionale dell'amministrazione Bush.

La presenza di volontari wahabiti della più diversa estrazione nazionale (arabi, algerini, egiziani, afgani, bengalesi.) tra i guerriglieri ceceni indica, inoltre, che il reclutamento degli effettivi delle formazioni wahabite cecene avveniva fin dalla prima metà degli anni Novanta a cura dell'ISI, il famigerato servizio segreto pakistano inventore e sostenitore del regime talebano afgano e delle organizzazioni politiche e militari wahabita e deobandiste (un'altra scuola islamica a forte orientamento reazionario nata nel XIX secolo nell'India musulmana). Insomma, come in Afganistan, la sinergia tra petroldollari ed ideologia religiosa saudita, logistica ed addestramento pakistani e supervisione geopolitica e geoeconomica a cura dell'intreccio tra dirigenza economica e politica a stelle e strisce. L'interesse della multinazionale americana nello sviluppo della guerriglia cecena è chiaro: mettere fuori gioco la concorrenza europea ed asiatica nel trasporto del greggio del Mar Caspio e tagliare le gambe al monopolio russo. Questi obiettivi vengono perseguiti con una politica di sostegno sempre più marcato alle oligarchie che governano in modo autocratico gli stati asiatici creati dalla disintegrazione dell'URSS, in primis l'Azerbaigian che possiede i giacimenti maggiormente sviluppati, e al contempo con una spinta aggressiva tendente a sabotare le linee di trasporto del greggio costruite al tempo dell'Unione Sovietica che, invariabilmente, passano tutte all'interno della Russia. Da questo punto di vista l'insurrezione della Cecenia, sul cui territorio passa la condotta che porta a Novorossijsk, il porto russo sul Mar Nero specializzato nell'esportazione petrolifera, viene colta come un'occasione unica per il perseguimento dell'obiettivo di inglobamento del controllo del petrolio. Le amministrazioni americane, dal canto loro, hanno continuato a perseguire una politica volta ad impedire che la Russia potesse ripresentarsi come potenza autonoma dagli Stati Uniti, capace di continuare la tradizione sovietica di contrapposizione alla potenza americana, e a costruire le condizioni per le quali l'immenso paese potesse diventare una buona occasione per la speculazione finanziaria internazionale a guida USA. D'altro canto in questa politica hanno trovato l'interessata collaborazione all'interno del paese di una nuova classe di ex funzionari del Partito Comunista riciclatisi grazie alla loro posizione fra i capitalisti della "nuova Russia", distruttivi dal punto di vista dello sviluppo produttivo ma estremamente abili nel fare profitti nel campo finanziario. Sono loro che hanno gonfiato al massimo la bolla della finanza russa esplosa poi nel 1998 travolgendo il risparmio nazionale del paese ma salvaguardando le immense fortune che questa classe di capitalisti senza imprenditoria avevano accumulato negli anni precedenti.

La guerra in Cecenia è sempre stata un buon affare per questa neo classe dominante; a prescindere dai profitti realizzati con il contrabbando e il commercio delle armi con il "nemico", in questi anni la guerriglia cecena è stata soprattutto un ottimo pretesto per indirizzare il malcontento della popolazione verso un obiettivo esterno e per decidere i destini politici della Russia del XXI secolo; Eltsin e la sua banda vengono definitivamente sacrificati grazie a una strana offensiva della guerriglia a suon di bombe a Mosca ed occupazione di ospedali in Daghestan (azioni, guarda caso, condotte dall'incredibile capo guerrigliero Dasayev, concorrente del Presidente ceceno in esilio Maskhadov, responsabile anche del rapimento carneficina di Beslan) nel 1999, mentre Putin viene presentato alla nazione come il futuro Presidente grazie all'offensiva che porta alla rioccupazione del martoriato paese caucasico e che tuttora non ha trovato la sua conclusione. Oggi non si può che sospettare che la stessa classe di grandi capitalisti finanziari, proprietari di tutte le risorse strategiche del paese, sia interessata a contrastare il tentativo del gruppo dirigente riunito attorno a Putin di costruire un capitalismo nazionale nel paese, sviluppando la propria base produttiva e rafforzando i propri legami commerciali e politici con i paesi europei e, necessariamente, esautorando questa classe di oligarchi legata a doppio filo al capitale finanziario americano e alla svendita delle materie prime del paese. La facilità con la quale i guerriglieri ceceni sono riusciti a far saltare in aria due aviogetti, a far scoppiare due ordigni nella metropolitana di Mosca e, infine, ad assaltare la scuola osseta, rimandano alla presenza di sicure complicità all'interno del paese oltre che ai suoi vulnerabili confini con la Georgia con la quale, come abbiamo visto, è in corso una vera e propria guerra sul procinto di diventare calda con sullo sfondo l'appoggio statunitense a Tblisi.

Dietro alle tragedie russe di questi giorni si configura un'alleanza spuria tra gli interessi strategici americani, quelli economici delle multinazionali petrolifere USA, quelli del nazionalismo georgiano e del fondamentalismo wahabita a guida saudita e quelli dell'oligarchia finanziaria russa. L'obiettivo di questa alleanza oggi è quello di dimostrare che l'amministrazione Putin non è in grado di difendere la Russia e di suscitare un clima che ne permetta la sostituzione con un'altra più morbidamente incline ad assecondare gli interessi interni ed esteri legati alla finanza internazionale. L'assalto criminale con il quale le forze di sicurezza russe hanno chiuso la vicenda del sequestro di Breslan, con il corollario di centinaia di morti tra bambini ed adulti rinchiusi nella scuola osseta rimanda alla necessità per il gruppo dirigente putiniano di mostrarsi deciso e feroce nei confronti della guerriglia cecena per ottenere l'obiettivo di impadronirsi realmente della Russia, defenestrandone i padroni finanziari che continuano a muovere i fili fondamentali del potere nell'immenso paese eurasiatico. La posta in gioco è enorme e le conseguenze della vittoria di uno o dell'altro dei due contendenti sono tali che i massacri della popolazione civile, carne da macello e massa di manovra per gli interessi contrastanti dei contendenti in campo, sono destinati a continuare e ad approfondirsi, tanto più adesso quando, dopo il massacro di Breslan, l'ultimo dei tabù comunemente accettati dall'umanità, quello del rispetto della vita dei bambini, è stato definitivamente violato tanto dalla guerriglia che dalle forze di sicurezza russe in diretta televisiva mondiale.

Giacomo Catrame

Umanità Nova

fonte: http://www.ecn.org/uenne/archivio/archivio2004/un27/art3356.html

 

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lundi, 12 mars 2007

L'affiche du jour

Trouvée sur : http://arqueofuturista.wordpress.com/

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Islam: options peu engageantes de l'Europe

Islam : les options peu engageantes de l'Europe

Daniel PIPES / http://theatrumbelli.hautetfort.com/

A long terme, l'évolution la plus décisive du continent européen, celle de ses relations avec sa minorité musulmane croissante, suivra l'une de ces trois voies : intégration harmonieuse, expulsion des Musulmans ou prise de pouvoir islamique. Lequel de ces scénarios est le plus vraisemblable ?

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L'avenir de l'Europe revêt une grande importance non seulement pour ses résidents. Pendant un demi-millénaire, de 1450 à 1950, les 7% de la surface des terres émergées qu'elle représente ont décidé de l'histoire du monde; sa créativité et sa vigueur ont inventé la modernité. La région a perdu cette position cruciale il y a 60 ans, mais elle reste d'une importance vitale en termes économiques, politiques et intellectuels. Ainsi, la direction qu'elle prendra aura des incidences majeures pour le reste de l'humanité, et tout particulièrement pour ses nations sœurs telles que les États-Unis qui, historiquement, ont toujours considéré l'Europe comme une source d'inspiration, de peuplement et de biens.

Voici une appréciation de la vraisemblance des trois scénarios.

 

I. Règne musulman

Feu Oriana Fallaci observa qu'avec le passage du temps, «L'Europe se transforme toujours davantage en une province de l'Islam, une colonie de l'Islam». L'historienne Bat Ye'or a donné un nom à cette colonie – « Eurabia». Walter Laqueur prédit dans son prochain ouvrage Last Days of Europe (Les derniers jours de l'Europe) que l'Europe telle que nous la connaissons sera contrainte de changer. Mark Steyn, dans America Alone : The End of the World as We Know It (L'Amérique seule: la fin du monde tel que nous le connaissons) va plus loin encore et affirme qu'une grande partie du monde occidental «ne survivra pas au XXIe siècle et une grande partie, dont la plupart sinon la totalité des pays européens, disparaîtra pendant notre génération». Trois facteurs - la foi, la démographie et le patrimoine culturel - indiquent que l'Europe s'islamise.

Foi. Une laïcité extrême prédomine en Europe, surtout parmi ses élites, au point que les Chrétiens croyants (tels que George W. Bush) y sont considérés comme mentalement déséquilibrés et incapables d'assumer des tâches publiques. En 2005, Rocco Buttiglione, un politicien italien distingué et un Catholique croyant, a été empêché d'accéder au poste de membre de la Commission européenne pour l'Italie en raison de ses opinions sur l'homosexualité. Une laïcité inflexible va de pair avec des églises vides : à Londres, des chercheurs estiment que les mosquées reçoivent plus de Musulmans le vendredi que les églises chrétiennes le dimanche, bien que la ville compte près de sept fois plus de Chrétiens de naissance que de Musulmans de naissance. Plus le Christianisme pâlit, plus l'Islam attire - le Prince Charles fournit un bon exemple de la fascination exercée par l'Islam sur de nombreux Européens. L'Europe pourrait connaître un grand nombre de conversions à l'avenir, car comme le dit ce mot attribué à G.K. Chesterton, «lorsque les gens cessent de croire en Dieu, ils ne croient pas en rien - ils croient en n'importe quoi».

La laïcité de l'Europe donne à son discours des formes tout à fait inhabituelles pour les Américains. Hugh Fitzgerald, ex-vice-président de JihadWatch.org, illustre ici une dimension de cette différence:

Les déclarations les plus mémorables des présidents américains comprennent presque toujours des passages bibliques aisément reconnaissables. [...] Cette source de vigueur rhétorique a été mise à contribution en février dernier (2003), lors de l'explosion de la navette Columbia. Si la navette détruite avait été non pas américaine, mais française, et si Jacques Chirac avait dû prononcer un discours à ce sujet, il aurait peut-être usé du fait que l'engin transportait sept astronautes et aurait tiré un parallèle avec les sept poètes de la Pléiade, soit avec l'Antiquité païenne. Le président américain, intervenant dans le cadre d'une cérémonie solennelle qui débutait et s'achevait par des passages en hébreu biblique, fit les choses différemment. Il prit son texte dans Isaïe 40:26, ce qui permettait de créer une transition harmonieuse entre d'une part le mélange d'émerveillement et d'effroi devant les hôtes des cieux générés par le Créateur et d'autre part la consolation pour la perte de l'équipage.

La foi des Musulmans, avec son tempérament djihadiste et son suprématisme islamique, tranche autant qu'il est possible avec celle des Chrétiens européens non pratiquants. Ce contraste amène de nombreux Musulmans à considérer l'Europe comme un continent mûr pour la conversion et la domination. Il en résulte des revendications suprématistes extravagantes telles que cette déclaration d'Omar Bakri Mohammed, «Je veux que la Grande-Bretagne devienne un État islamique, Je veux voir les couleurs de l'Islam flotter au 10, Downing Street.» Ou encore cette prédiction d'un imam installé en Belgique : «Nous prendrons bientôt le pouvoir dans ce pays. Ceux qui nous critiquent aujourd'hui le regretteront. Ils devront nous servir. Préparez-vous, car l'heure est proche.» [1]

Population. L'effondrement démographique indique également que l'Europe s'islamise. Actuellement, le taux global de fertilité européen oscille autour de 1,4 par femme, alors que le maintien d'une population exige un taux légèrement supérieur à deux enfants par couple, ou 2,1 enfants par femme. Le taux réel n'en représente que les deux tiers - un tiers de la population nécessaire ne vient tout simplement pas au monde.

Pour éviter une chute démographique critique, avec tous les malheurs que cela implique - notamment l'absence de travailleurs pour financer de généreux plans de retraite -, l'Europe a besoin d'immigrants, de beaucoup d'immigrants. Ce tiers importé tend à être musulman, en partie parce que les Musulmans sont proches (13 kilomètres seulement séparent le Marc et l'Espagne, quelques centaines relient l'Italie à l'Albanie ou à la Libye) ; en partie parce que des liens coloniaux continuent d'unir l'Asie du Sud à la Grande-Bretagne ou le Maghreb à la France ; et en partie à cause de la violence, de la tyrannie et de la pauvreté si répandues dans le monde musulman actuel et qui génèrent d'incessantes vagues migratoires.

De même, le taux de fertilité élevé des Musulmans compense le manque d'enfants parmi les Chrétiens indigènes. Bien que les taux de fertilité musulmans soient en baisse, ils restent sensiblement supérieurs à ceux de la population chrétienne indigène. Il est certain que les taux de natalité élevés sont liés aux conditions de vie pré-modernes dans lesquelles vivent de nombreuses femmes musulmanes en Europe. À Bruxelles, «Mahomet» est le nom de garçon nouveau-né le plus populaire depuis quelques années. Amsterdam et Rotterdam pourraient devenir, d'ici 2015, les premières grandes villes européennes à majorité musulmane. L'analyste français Michel Gurfinkiel estime qu'une guerre des rues en France verrait s'affronter les enfants des indigènes (en français dans le texte) et ceux des immigrants quasiment à égalité. Les pronostics actuels prévoient une majorité musulmane dans l'armée russe dès 2015 et dans l'ensemble du pays vers 2050.

Patrimoine culturel. Ce qui est souvent décrit comme la rectitude politique de l'Europe reflète à mon avis un phénomène plus profond, à savoir l'aliénation de leur civilisation que ressentent de nombreux Européens, l'impression que leur culture historique ne vaut pas qu'on la défende, voire qu'on la préserve. Les différences entre Européens sont frappantes à cet égard. Le pays peut-être le moins touché par cette aliénation est la France, où le nationalisme traditionnel reste vivace et où les gens sont fiers de leur identité nationale. La Grande-Bretagne est le pays le plus affecté, comme l'illustre bien le programme gouvernement larmoyant «ICONS - A Portrait of England», qui tente maladroitement de raviver le patriotisme des Britanniques en les réconciliant avec des «trésors nationaux» tels que Winnie the Pooh et la minijupe.

Ce manque d'assurance a eu des conséquences directes négatives pour les immigrants musulmans, comme l'explique Aatish Taseer dans le magazine Prospect.

L'appartenance à la culture britannique est l'aspect le plus purement nominal de l'identité de nombreux jeunes Pakistanais britanniques. [...] En dénigrant sa culture, on court le risque de voir les nouveaux-venus en chercher une ailleurs. Cela va si loin dans le cas précis que pour beaucoup de Pakistanais britanniques de deuxième génération, la culture du désert des Arabes revêt plus d'attrait que la culture britannique ou continentale. Arrachés par trois fois au sentiment de posséder une identité durable, les Pakistanais de deuxième génération trouvent une identité disponible dans la vision du monde extranationale de l'Islam radical.

Les Musulmans immigrants méprisent profondément la civilisation occidentale, tout particulièrement sa sexualité (pornographie, divorce, homosexualité). Les Musulmans ne s'assimilent nulle part en Europe, les mariages intercommunautaires sont rares. Voici un exemple pittoresque du Canada: la mère du tristement célèbre clan Khadr, connu pour être la première famille canadienne du terrorisme, retourna au Canada depuis l'Afghanistan et le Pakistan en avril 2004 avec l'un de ses fils. Bien qu'elle ait demandé l'asile au Canada, elle affirmait à peine un moins auparavant que les camps d'entraînement sponsorisés par Al-Qaïda étaient l'endroit rêvé pour ses enfants. «Vous voudriez que j'élève mes enfants au Canada pour qu'ils se retrouvent drogués ou homosexuels à l'âge de 12 ou 13 ans? Vous trouvez que ce serait mieux ?»

(Ironie du sort, aux siècles passés, comme l'a documenté l'historien Norman Daniel, les Chrétiens européens méprisaient les Musulmans, dont la polygamie et les harems leur semblaient révéler une obsession du sexe, et se sentaient moralement supérieurs à eux précisément sur ce point.)

En résumé, cette première argumentation avance que l'Europe sera islamisée, qu'elle se soumettra ou se convertira sans résistance à l'Islam parce que le yin de l'Europe s'accorde si bien au yang de l'Islam: faiblesse et puissance de la religiosité, de la fertilité et de l'identité culturelle. [2] L'Europe est une porte ouverte que les Musulmans franchissent librement.

 

II. Expulsion des Musulmans

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Ou la porte leur sera-t-elle fermée au nez ? Le commentateur américain Ralph Peters écarte le premier scénario : «Loin de jouir de la perspective de s'approprier l'Europe en y faisant des enfants, les Musulmans d'Europe y vivent leurs dernières heures. [...] les prédictions de prise de pouvoir musulman en Europe [...] font abstraction de l'histoire et de la brutalité indéracinable de l'Europe.» Sur ce, décrivant l'Europe comme l'endroit «où ont été perfectionnés le génocide et le nettoyage ethnique», il prédit que ses Musulmans «auront de la chance de n'être que déportés», et non tués. Claire Berlinski, dans Menace in Europe: Why the Continent's Crisis Is America's, Too (Menace en Europe : pourquoi la crise du continent est aussi celle de l'Amérique), approuve cela implicitement en désignant les «anciens conflits et schémas de pensée [...] qui s'extirpent lentement des brumes de l'histoire européenne» et qui pourraient bien susciter la violence.

Ce scénario veut que les Européens indigènes - qui constituent toujours 95% de la population du continent - se réveillent un jour et imposent leur volonté. «Basta !» - diront-ils, en restaurant leur ordre historique. Cela n'est pas si improbable; un mouvement d'irritation se fait jour en Europe, moins parmi les élites qu'au sein des masses, qui proteste bruyamment devant l'évolution en cours. Ce ressentiment est illustré notamment par la loi antivoile française, par la mauvaise humeur suscitée par les restrictions imposées aux drapeaux nationaux et aux symboles chrétiens et par l'insistance à servir du vin lors des diners officiels. On peut mentionner aussi un mouvement spontané apparu dans plusieurs villes françaises au début de 2006 et qui consiste à distribuer de la soupe au lard parmi les pauvres, excluant ainsi intentionnellement les Musulmans.

Certes, ce sont des affaires mineures, mais des partis ouvertement opposés aux immigrants ont déjà émergé dans de nombreux pays et commencent à exiger non seulement des contrôles efficaces aux frontières, mais l'expulsion des immigrants illégaux. Un mouvement anti-immigration est en train de se former sous nos yeux, de manière largement inaperçue. Si son parcours est encore très discret, son potentiel n'en est pas moins énorme. Les éléments opposés à l'immigration et à l'Islam ont généralement des racines néofascistes mais ont gagné en respectabilité avec le temps, se sont dépouillés de l'antisémitisme de leurs origines et de leurs théories économiques douteuses pour se concentrer plutôt sur les questions de foi, de démographie et d'identité, et pour étudier l'Islam et les Musulmans. Le British National Party et le Vlaamse Belang belge sont deux exemples d'une telle évolution vers la respectabilité, laquelle peut déboucher un jour sur l'éligibilité. Ainsi, la course à la présidence française en 2002 s'est résumée à une compétition entre Jacques Chirac et le néofasciste Jean-Marie Le Pen.

D'autres partis de ce type ont déjà goûté au pouvoir. Jörg Haider et le Freiheitliche Partei autrichien y ont accédé brièvement. La Lega Nord italienne a fait partie des années durant de la coalition au pouvoir. Ces partis vont vraisemblablement progresser car leurs messages anti-islamistes et souvent anti-islamiques trouvent un répondant et les partis du courant dominant vont probablement les adopter en partie (le Parti conservateur danois en est un exemple - il est revenu au pouvoir en 2001, après 72 ans passés dans la marge, essentiellement en raison du mécontentement provoqué par l'immigration). Ces partis bénéficieront sans doute de la situation lorsque l'immigration gonflera encore pour atteindre des proportions incontrôlables en Europe, avec peut-être un exode de masse en provenance d'Afrique, comme l'indiquent de nombreux indices.

Une fois au pouvoir, les partis nationalistes rejetteront le multiculturalisme et tenteront de rétablir les valeurs et les mœurs traditionnelles. On ne peut que spéculer sur les moyens qu'ils utiliseront et sur les répliques des Musulmans. Peters s'attarde sur les aspects fascistes et violents de certains groupes et s'attend à ce que la réaction antimusulmane revête des formes menaçantes. Il esquisse même un scénario dans lequel «des navires américains sont à l'ancre et des Marines sont descendus à terre à Brest, Bremerhaven ou Bari pour garantir l'évacuation des Musulmans d'Europe dans de bonnes conditions».

Depuis des années, les Musulmans s'inquiètent justement de telles incarcérations brutales, suivies d'expulsions, voire de massacres. Déjà dans les années 1980, feu Kalim Siddiqui, alors directeur du London's Muslim Institute, agitait le spectre des «chambres à gaz hitlériennes pour Musulmans». Dans son livre de 1989, Be Careful With Muhammad (Soyez prudents avec Mahomet), Shabbir Akhtar avertissait que «la prochaine fois qu'il y aura des chambres à gaz en Europe, il n'y a aucun doute sur l'identité de ceux qu'on y mettra», à savoir les Musulmans. Un personnage du roman de Hanif Kureishi paru en 1991 et intitulé The Buddha of Suburbia (Le Bouddha des banlieues), prépare une guérilla dont il prévoit l'instauration quand «les blancs se seront tournés contre les noirs et les Asiatiques et tenteront de nous faire passer dans des chambres à gaz».

Mais il est plus vraisemblable que les revendications européennes seront mises en œuvre pacifiquement et légalement, et que les violences proviendront de Musulmans, conformément aux récentes tendances à l'intimidation et au terrorisme. De nombreux sondages confirment que 5% environ des Musulmans britanniques approuvent les attentats à la bombe du 7 juillet, ce qui indique une disposition générale à recourir à la violence.

Quoi qu'il en soit, on ne peut pas s'attendre à ce qu'un redressement des Européens se déroule de manière coopérative.

 

III. Intégration des Musulmans

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Dans le scénario le plus réjouissant, les Européens autochtones et les immigrants musulmans trouvent un modus vivendi et vivent ensemble harmonieusement. Le témoignage peut-être le plus classique de cette perspective optimiste provient d'une étude de 1991, La France, une chance pour l'Islam, par Jeanne-Hélène et Pierre Patrick Kaltenbach. «Pour la première fois dans l'histoire, il est offert à l'islam de ‹se réveiller› dans un pays démocratique, riche, laïc et pacifique», écrivaient-ils alors. Cette espérance persiste. Un article de premier plan paru dans l'Economist à la mi-2006 affirme que «pour le moment du moins, la perspective d'Eurabia semble alarmiste». À la même époque, Jocelyne Cesari, professeur associée à la Harvard Divinity School, discernait un équilibre en la matière : de même que «l'Islam change l'Europe», disait-elle, «l'Europe change l'Islam». Elle estime ainsi que «les Musulmans ne veulent pas changer la nature des États européens» et s'attend à les voir s'adapter au contexte européen.

Mais un tel optimisme est hélas peu justifié. Les Européens pourraient certes encore redécouvrir leur foi chrétienne, faire davantage d'enfants et mieux chérir leur patrimoine. Ils pourraient encourager une immigration non-musulmane ou acculturer les Musulmans vivant parmi eux. Mais ces changements ne sont pas en cours actuellement, et les chances de les voir apparaître sont faibles. Au lieu de cela, les Musulmans cultivent des revendications et des ambitions conflictuelles à l'égard de leurs voisins indigènes. Fait inquiétant, chaque génération semble plus aliénée que la précédente. Le romancier canadien Hugh MacLennan qualifia le fossé anglais-français séparant son pays de «Two Solitudes» ; un phénomène similaire apparaît et se développe en Europe, mais de manière beaucoup plus prononcée. Ces sondages de Musulmans britanniques, par exemple, révèlent qu'une majorité d'entre eux perçoivent un conflit entre leur identité britannique et leur identité musulmane - et ils souhaitent l'instauration de la loi islamique.

L'éventualité de voir les Musulmans accepter les restrictions de l'Europe historique et s'intégrer sans heurt dans ce cadre peut être pratiquement exclue. Même Bassam Tibi, professeur à l'université de Göttingen, qui a maintes fois averti que «soit l'Islam s'européanise, soit l'Europe s'islamise» a personnellement abandonné tout espoir pour le continent. Récemment, il annonça qu'il allait quitter l'Allemagne, après avoir y vécu 44 ans, pour déménager à l'université de Cornell, aux États-Unis.

Conclusion

Comme le résume le commentateur américain Dennis Prager, « Il est difficile d'imaginer un autre scénario pour l'Europe occidentale que l'islamisation ou la guerre civile». En effet, ces deux alternatives extrêmement déplaisantes semblent bien définir les choix offerts à l'Europe - prise entre deux forces antagonistes, l'une menant au pouvoir des Musulmans et l'autre à leur expulsion, elle peut devenir une extension de l'Afrique du Nord ou entrer dans un état de quasi guerre civile.

Quelle voie prendra-t-elle ? Les événements décisifs qui apporteront une réponse à cette question sont encore en devenir, de sorte que personne ne peut porter un jugement définitif. Mais l'heure de la décision est proche. D'ici la prochaine décennie à peu près, les louvoiements actuels toucheront à leur terme, l'équation Europe-Islam se resserrera et la pente qui déterminera l'avenir du continent devrait apparaître.

Il est d'autant plus difficile d'anticiper cette transformation qu'elle est sans précédent historique. Aucun territoire de grande envergure n'a jamais ainsi glissé d'une civilisation à une autre à la suite de l'effondrement démographique, religieux et identitaire d'une population ; et aucun peuple ne s'est jamais redressé à une telle échelle pour prôner son patrimoine historique. Le problème européen est si inédit et si étendu qu'il est difficile de le comprendre, tentant de l'ignorer et presque impossible d'en pronostiquer l'évolution. L'Europe nous entraîne tous en terre inconnue.

 

Daniel PIPES (traduction en français : Alain Jean-Mairet)

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Daniel Pipes est directeur du Forum du Moyen-Orient et professeur invité à l'université de Pepperdine. Cet article a été adapté d'un exposé donné au Centre de conférence Woodrow Wilson et intitulé «Euro-Islam: la dynamique d'une intégration efficace».

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[1] De Morgen, 5 oct. 1994. Cité dans Koenraad Elst, «The Rushdie Rules», Middle East Quarterly, Juin 1998.

[2] Il est frappant de relever qu'à ces trois égards, l'Europe et les États-Unis étaient beaucoup plus semblables il y a 25 ans qu'ils ne le sont aujourd'hui. Cela indique que leur écart actuel résulte moins d'évolutions historiques remontant à plusieurs siècles qu'à des développements intervenus dans les années 1960. Cette décennie a eu un impact très marqué sur les États-Unis, mais elle a affecté l'Europe beaucoup plus profondément encore.

Source du texte : REVUE MILITAIRE SUISSE.CH 

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Un site sur Jean Raspail

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http://jeanraspail.free.fr/

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Kateschismus der deutschen "Weltalternative"

Jürgen W. GANSEL :

Katechismus der deutschen »Weltalternative«

Armin Mohler/Karlheinz Weißmann: Die Konservative Revolution in Deutschland 1918-1932

Armin Mohler selbst stellte die Frage: »,Konservative Revolution‘ – ist das nicht ein Widerspruch in sich selbst? Kann es einen bewahrenden Umsturz geben?« Und als Schöpfer dieser Begriffsbildung, die zu den erfolgreichsten in der jüngeren Ideengeschichtsschreibung gehört, erklärte er frank und frei: »Ja«. Im Geisteskampf der Weimarer Zeit sah er neue Denkströmungen jenseits von Reaktion und Revolution ihre gewaltige Ausstrahlungskraft entfalten. Eine von jungen Intellektuellen getragene Erneuerungsbewegung verschmolz diese beiden so scheinbar gegensätzlichen Begriffe mit neuem nationalistischen Ideengehalt und wandte sich ebenso gegen eine Bewahrung um der Bewahrung Willen, wie gegen eine Revolution um der Revolution willen. In strikter Abgrenzung von der überlebten wilhelminischen Vergangenheit, der staats- und volkszerstörenden liberalistischen Gegenwart und der drohenden bolschewistischen Zukunft traten die konservativen Revolutionäre auf den Plan. Ihr Ansinnen brachte Moeller van den Bruck auf die Kurzformel: »Dinge zu schaffen, die zu erhalten sich lohnt.« Revolutionär sollten neue deutsche Verhältnisse geschaffen werden, unter denen Bewahrung überhaupt erst wieder möglich und wünschenswert ist.
Erstmals tauchte das Begriffspaar »konservative Revolution« im Gewoge des Mai 1848 auf, um die geistige Unübersichtlichkeit dieser Tage zwischen Revolution und Restauration zu bezeichnen. 1923 schrieb Moeller van den Bruck dann in seinem Schlüsselwerk »Das dritte Reich« das Grundanliegen einer konservativen Revolution nieder. Vier Jahre später sekundierte ihm der Dichter Hugo von Hofmannsthal in seiner Rede zum »Schrifttum als geistiger Raum der Nation« und erklärte, Ziel dieser Denkrichtung sei »eine neue deutsche Wirklichkeit, an der die ganze Nation teilnehmen« könne.
Endgültig eingeführt wurde das Begriffspaar aber erst 1950 durch Armin Mohler und sein einzigartiges Buch, das nun in einer sechsten, völlig überarbeiteten und erweiterten Auflage vorliegt. Dem zeitweiligen Privatsekretär Ernst Jüngers ist es darin wie keinem Autor davor und danach gelungen, die rechtsintellektuelle Kritik am Weimarer System in ihrer ganzen Bandbreite bibliographisch zu dokumentieren, geistig zu durchdringen und politisch zu würdigen. Der einzige Jüngere, der sich fachlich profund und mit viel politischem Einfühlungsvermögen des Themas annimmt, ist der Historiker Karlheinz Weißmann. Fast zwingend beauftragte Mohler deshalb ihn mit der Fortschreibung seines Werkes. Auf aktuellem Forschungsstand und frei von antifaschistischem Distanzierungszwang kann der geneigte Leser hier in das Zeitkolorit von Weimar eintauchen, als noch gefühlsschwere Weltanschauungen in scharfer Konkurrenz standen und tatbereite Persönlichkeiten nicht nur mit der Feder um die Neugeburt ihres Vaterlandes rangen.
Ursache und Folge dieser geistesrevolutionären Tage waren Zeitschriftentitel wie »Standarte« und »Der Vorkämpfer«, »Die sozialistische Nation«, »Die Kommenden« und »Widerstand«. Für diese und andere Organe griffen die Gebrüder Jünger und Friedrich Hielscher, Ernst Niekisch und Edgar Julius Jung, Hans Zehrer und Carl Schmitt zur Feder. In den konservativ-revolutionären Kreisen tummelten sich der Politiker Gregor Strasser, der Feldherr Erich Ludendorff, der Bauernführer Claus Heim, der Freikorpskämpfer Ernst von Salomon und der Soziologe Hans Freyer.
Es gab jedoch kein Zentralorgan, keine Generalversammlung und keine Sammlungspartei, in der sich die konservativen Revolutionäre zusammengefunden hätten, um ihr gleichgerichtetes Wollen kundzutun. Es existierte nur ein geistiges Kraftfeld, in dem Personen und Ideen zirkulierten, ohne eine direkte geistige Einheit zu bilden. Armin Mohler identifizierte mit den Völkischen, den Jungkonservativen, den Nationalrevolutionären, der Landvolkbewegung und den Bündischen fünf Denkfamilien der konservativen Revolution, nicht ohne festzustellen: »Dieses Buch stellt Menschen nebeneinander, die nichts gemeinsam zu haben scheinen. (…). Nordische Urnebel – Ministerialbürokratie und Salon – Sprengstoff und Untergrund – Widerstand des Bauerntums gegen Gerichtsvollzieher und Maschine – Banjo-Klänge in den Kothen am Lagerfeuer: wie reimt sich das alles zusammen?«

Revolution gegen die Revolution

Nach Lektüre der Monumentalstudie weiß man, daß es sehr wohl einen gemeinsamen Kernbestand an Zielvorstellungen und vor allem Feindbildern gab: Der Trümmerhaufen der Gegenwart samt seiner in der Französischen Revolution von 1789 geborenen Geisteshaltungen sollte beseitigt und einer neuen Volks- und Staatsordnung der Weg geebnet werden. Der Dichter Rudolf Borchardt spitzte dies 1931 so zu: »Die ganze Welt wird reißend konservativ, aus Selbstschutz, aus Erbschutz, aus der Pflicht heraus, die durcheinandergerüttelten Elemente (…) wieder einzufangen, jeder auf einem anderen Wege, wir auf dem schwersten, der Wiederumstürzung des Umsturzes, der negierten und negierenden Negation, der Revolution gegen die Revolution.«
Das Aufkommen dieser Denkströmung hing ursächlich mit einer Reihe von zeitgeschichtlichen Ereignissen zusammen. Dazu gehörte 1917 die rote Oktoberrevolution, die für konservative Revolutionäre sowohl Angstfaktor und Feindbild als auch Inspirationsquelle für die nationalrevolutionäre Umgestaltung des eigenen Landes war. Ein Jahr später markierte der Zusammenbruch der Monarchie eine Epochenwende, die die Zeitgenossen aufwühlte und insbesondere die Jugend zu politisch »Suchenden« mit großem Sehnsuchtspotential machte. Entscheidende Faktoren für die Entstehung eines neuen Nationalismus waren überdies das Kriegserlebnis und das Versailler Diktat. Der Weltkrieg überspülte alle bis dahin bestehenden geistigen und sozialen Gegensätze im Volk und schweißte die Deutschen zu einer kriegsgestählten Schicksalsgemeinschaft zusammen. Der Nationalrevolutionär Franz Schauwecker konnte deshalb feststellen: »Wir mußten den Krieg verlieren, um die Nation zu gewinnen.« Mit dem Versailler Diktatfrieden entlarvte sich der Westen als Unterdrücker Deutschlands, dessen Heuchelparolen von »Freiheit« und »Demokratie« schon damals nur die eigenen maßlosen Herrschaftsansprüche bemäntelten. Unter dem Eindruck des »Entente-Kapitalismus« stellte Moeller van den Bruck fest: »Nicht Klassen, sondern Nationen sind heute die Unterdrückten.«

Konservativ-revolutionäre Denkfamilien

Aus den krisenhaften Zeitumständen sind – nach Auffassung Mohlers – die Denkfamilien der Völkischen, der Jungkonservativen und Nationalre- volutionäre, der Bündischen und der Landvolkbewegung hervorgegangen. »In ihnen ist die Welt der ,Ideen von 1789’ mit einer unbedingten Verneinung ihrer Werte konfrontiert«, so der Bibliograph der deutschen Gegenrevolution.
Die Völkischen übten eine starke Vergangenheitsschau und knüpften konsequent an die germanisch-heidnischen Wurzeln des deutschen Volkstums an. Das Wort »völkisch« setzten sie in bewußten Gegensatz zum Begriff »national«, weil eine Nation als Staatsvolk auch Angehörige fremden Volkstums umfassen kann. Das Judentum begriffen diese Kreise als »Fremdkörper, das es aus rassehygienischen Gründen aus der Volksgemeinschaft auszusondern« gelte. Dem Kapitalismus warfen die Völkischen seine immanente Einebnung aller ethno-kulturellen Eigenheiten vor, und sie entwickelten sozialromantische Ideen von Entstädterung und Re-Agrarisierung im Zeichen einer neuen Einheit von Blut und Boden.
Die Jungkonservativen waren – wie es der Name schon vermuten läßt – mehr konservativ als revolutionär geeicht. Ihre Liberalismus- und Parteienkritik führte zu Forderungen nach einem ständestaatlichen und neoaristokratischen Staatsaufbau. Als Antwort auf Versailles strebten sie nach einem »neuen Reich« mit durchaus übernationalen Zügen. Eine echte Staatsautorität sollte eine gegliederte Volksordnung mit der »Herrschaft der Besten« sicherstellen. Edgar Julius Jung formulierte: »Rechte Demokratie, d.h. die Herrschaft des nur metaphysisch zu begreifenden volonté générale, ist das höchste Ideal; es kann aus dem organischen Weltbild nicht hinweggedacht werden. In diesem Sinne ist Demokratie vollendeter Konservativismus.«
Ganz anderes wollten die Nationalrevolutionäre – geistig wie in der Wahl der Mittel, wozu auch schon einmal Sprengstoff und Attentat gehören konnten. Sie, die manchmal auch als Nationalbolschewisten bezeichnet wurden, bejahten entschieden den Untergang der monarchischen Ordnung, dem die Vernichtung der Weimarer Schand- und Chaosrepublik folgen sollte. Alles war den Nationalrevolutionären recht, um die Ketten von Versailles zu zerbrechen und die Weltausbeutung durch den Westen zu beenden. Zur Schwächung der Entente-Mächte gab es in diesen Kreisen Sympathien für ein außenpolitisches Bündnis mit Sowjetrußland. Den Liberalismus bekämpften diese »Jungen Wilden« in seiner politischen wie wirtschaftlichen Gestalt. Durch eine soziale Umwälzung – gemeint war die Entmachtung des Großbürgertums und die Schaffung eines autarken, vom angelsächsisch dominierten Weltkapital unabhängigen Deutschlands – sollte die nationale Freiheit errungen werden.
Dann war da noch die bündische Jugend, die es in der erstarrten Bürgerwelt nicht mehr aushielt und die Rückkehr zum Wesentlichen, also einer naturhaften Lebensweise, anstrebte. Sie verband ihre Zivilisationskritik mit dem Sehnen nach einer brüderlichen Volksgemeinschaft ohne die Entfremdungszustände der modernen Welt. Ihr antibürgerlicher Habitus fand seine Ergänzung in der preußischen Suche nach Bindung und Gemeinschaft. Nicht ihres Schrifttums, das spärlich war, sondern ihres Lebensgefühls wegen zählte Mohler mit einigem Recht die Bündischen zu den konservativen Revolutionären.
Die bäuerliche Existenzkrise ließ Ende der 1920er Jahre im Norddeutschen die Landvolkbewegung entstehen, die sich zuerst nur gegen kapitalistische Freihandelsdiktate und die Gleichgültigkeit der Weimarer Parteien wandte. Angesichts fortgesetzter Zwangsversteigerungen ihrer traditionsreichen Höfe sowie staatlicher Provokationen radikalisierten sich die Bauern aber immer mehr und lernten das System der Parlamente und Banken zu hassen. Als sich mit diesem urkonservativen Kampf für Leben und Scholle literarisch beschlagene Nationalrevolutionäre solidarisierten und dem Formlosen eine Form zu geben suchten, entstand eine ganz eigene Verbindung von Konservativem und Revolutionärem – ein revolutionäres Landvolk eben.
Diesem Fünf-Gruppen-Schema stellte Mohler ein Buchkapitel »Leitbilder« voran, das zeigt, wie stark sich der Autor in die Zeitstimmung der Weimarer Republik einzufühlen vermag und wie vertraut er mit den Leitgedanken ist, die – neben den benannten äußeren Anlässen – den eigentlichen Humus der konservativen Revolution bildeten. Es handelt sich hierbei um eine grandiose Aktualisierung Nietzsches, die »Friedrich den Unzeitgemäßen« als einen ihrer Erzväter ausweist. Der geschichtsphilosophische Nachweis der Unvereinbarkeit von Christentum und konservativer Revolution ist ebenso bedeutend wie der Abschnitt zum »heroischen Realismus«, den man als »Rechter« einfach gelesen haben muß.
Dieses Kapitel »Leitbilder« fehlt in der Neuausgabe aber genauso wie andere entscheidende Texte Mohlers. Ganz ohne Zweifel hat der Verlag mit Karlheinz Weißmann den einzigen Ideenhistoriker gewinnen können, der die Wissensfülle, die Formulierungssicherheit und Gesinnung Mohlers teilt. Die Ausführungen zum »Deutschen Sonderbewußtsein« oder zum »Weltkrieg als Kulturkrieg« sind wie alles von Weißmann überaus lesenswert. Aber auch dessen gelungene Fortschreibung ersetzt nicht die eigentlichen Ursprungstexte mit ihrer stilistischen Brillanz und Gedankentiefe. Hier liegt ein nicht wegzurezensierendes Defizit der Neuausgabe, das auf Kosten des Stoffes selbst geht, auch wenn der neue Bildteil ganz nett ist.
Eingedenk des stolzen Preises von 49,90 Euro wäre die kaufmännische Rechnung des Verlages sicherlich auch dann noch aufgegangen, wenn man die 165 Seiten umfassenden Originaltexte übernommen und den Weißmann-Texten an die Seite gestellt hätte.
So kann nur noch die Empfehlung ausgesprochen werden, sich die »Konservative Revolution« aus der Feder Mohlers unverzüglich antiquarisch und die Neuausgabe beim DS-Verlag zu besorgen. Das Original wie die Fortschreibung sind Schlüsselwerke zur Ergründung dessen, was Karlheinz Weißmann zitierend die deutsche »Weltalternative« nennt – jene Bestrebungen, »die Deutschen bei sich selbst zu halten, zu sich selbst zurückzuführen oder zu sich selbst zu machen«.

Jürgen W. Gansel


Buchempfehlung: Armin Mohler/Karlheinz Weißmann: Die Konservative Revolution in Deutschland 1918-1932, 643. S., Abb., geb., 49,90 Euro. Zu beziehen beim DS-Verlag, Postfach 100 068, 01571 Riesa.

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Subha Chandra Bose et l'indépendance indienne

Il y a soixante ans disparaissait le combattant national-révolutionnaire indien Subha Chandra Bose !

Thomas HARTENFELS :

Subha Chandra Bose : le troisième homme dans la lutte pour l'indépendance de l'Inde

Le Premier ministre indien actuel, Atal Bihari Vajpayee a rendu visite fin mai au lieu où est née la nation indienne moderne, le pays où, pour la première fois, on a joué son hymne national, où l'on a hissé pour la toute première fois le drapeau national indien et où l'on a imprimé les premiers timbres-poste indiens : Atal Bihari Vajpayee a visité l'Allemagne.

Les premières manifestations indépendantes de l'Etat indien actuel se sont en effet déroulée en Allemagne, notamment grâce aux impulsions données, à l'époque par Subha Chandra Bose. A côté de Gandhi et de Nehru, Bose est le plus connu des combattants indépendantistes indiens. Lors de son exil en Allemagne, il a forgé des plans pour libérer sa patrie du joug colonial britannique.

Les exilés indiens déclarent la guerre à l'Empire britannique

Après que la police britannique ait procédé à de nombreuses arrestations en Inde, Subha Chandra Bose, l'ancien maire de Calcutta, décide de quitter le pays en 1941, en compagnie de son épouse allemande, qu'il avait connue lors d'un séjour prolongé à Vienne. Muni d'un passeport de diplomate italien, il se rend en Allemagne en passant par Kaboul et l'Union Soviétique (qui n'était pas encore en guerre avec le Reich; ndt). Âgé à l'époque de 44 ans, Bose appelle les Indiens par radio depuis l'Allemagne à se soulever comme les colonisateurs britanniques; en même temps, il recrute des volontaires pour l'“Azad Hind”, la Légion “Inde Libre”.

Les succès militaires allemands contre l'Union Soviétique, à partir de juin 1941, et contre les Britanniques en Afrique du Nord, encouragent Bose à former une “Légion indienne” en 1942, dont l'objectif est de libérer l'Inde avec l'aide des forces de l'Axe. Les quelque 3000 volontaires de la “Légion indienne” seront instruits dans la région de Dresde. Ils portent des uniformes allemands avec, sur la manche, les couleurs nationales indiennes, sur lesquelles se détachent un tigre bondissant et la mention, en allemand, de “Freies Indien” (= “Inde Libre”). La langue de cette unité est une forme simplifiée d'hindoustani, qui tient compte de la grande diversité des dialectes indiens et de la complexité du système des castes. Les officiers allemands, affectés à l'unité, doivent l'apprendre via un manuel spécial, édité par la Wehrmacht, intitulé Hindustani-Sprachlehre (= Manuel d'hindoustani). Les symboles extérieurs de l'Etat indien ont donc été utilisés et présentés pour la première fois en Allemagne, quatre ans avant l'indépendance de l'Inde. En 1943, Bose fonde à Hambourg la “Deutsch-Indische Gesellschaft” (= La société germano-indienne). Lors des cérémonies qui présidèrent à cette fondation, la mélodie de l'actuel hymne national indien a été jouée pour la première fois et les trois couleurs indiennes ont été hissées au mat. Au même moment, les premiers timbres-poste indiens sortent d'une imprimerie berlinoise.

Le 26 janvier 1943, des officiers allemands et la “Légion Indienne” fêtent de concert le jour de l'indépendance indienne, fête nationale célébrée aujourd'hui encore en Inde. L'Inde libre, comme le voulait le mouvement indépendantiste, a pris forme en Allemagne.

Bose voulait étendre la lutte pour l'indépendance sur plusieurs fronts. En 1943, il se rend au Japon comme passager à bord d'un sous-marin allemand, l'U-Boot 180. Arrivé à Tokyo, il lance quelques-uns de ses célèbres appels radiophoniques, très écoutés et quasi légendaires en Inde, et, avec l'aide des Japonais, met une armée nationale indienne de 50.000 hommes sur pied. Tandis que la “Légion indienne” se battait aux côtés des Allemands en France, notamment pour tenter d'enrayer la progression des Alliés occidentaux après le débarquement de Normandie, l'“Armée Nationale” de Bose participait avec succès à l'offensive japonaise en Birmanie. En tant que chef du gouvernement indien en exil, Bose déclare la guerre en 1943 à la Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Le 18 août 1945, deux ans avant que son objectif ne se soit réalisé, c'est-à-dire l'indépendance de l'Inde, Subha Chandra Bose périt dans un accident d'avion au-dessus de Taiwan, en revenant du Japon.

La fille de Bose vit toujours en Allemagne aujourd'hui

La fille de Subha Chandra Bose, Anita, née en 1941 en Allemagne, est aujourd'hui professeur d'économie politique à l'Université d'Augsbourg. Anita Pfaff s'occupe beaucoup d'histoire indienne et, plus particulièrement, du rôle de son père dans la lutte pour l'indépendance de l'Inde. Comme la plupart des Indiens aujourd'hui, elle sait que l'indépendance de leur grand pays n'a été possible que par l'action résolue de quelques hommes comme Bose, Nehru et Gandhi. Les festivités qui se sont déroulées partout en Inde à l'occasion du centième anniversaire de la naissance de Bose en 1997 le prouvent amplement. Un aéroport et plusieurs artères dans les grandes villes indiennes portent son nom. Il y a des monuments à sa gloire, ainsi que des pièces de monnaie et des timbres-poste.

Thomas HARTENFELS.

(article paru dans Junge Freiheit, n°28/2003 - http://www.jungefreiheit.de ).

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"Europe" et "Occident": deux concepts antagonistes

"Europe" et "Occident"; deux concepts antagonistes

par Claudio FINZI

Nos hommes politiques et nos intellectuels parlent continuellement de l'Europe et de l'Occident, comme s'il était évident que la pre-mière était contenue toute entière dans le second. L'Occident, dans une telle acception, indiquerait ainsi un ensemble formé par les pays d'Europe, surtout d'Europe occidentale, et les Etats-Unis d'Amérique, avec l'appendice canadien. En d'autres mots, l'Occident coïncide avec l'OTAN.

Mais si nous examinons l'origine du terme "Occident", non pas au sens géographique évidemment, mais au sens politique, nous dé-couvrons quelque chose de très différent de cette acception ³otanienne²: au début du XIXième siècle, aux Etats-Unis d'Amérique, cette expression est née, non pas pour englober l'Europe dans un contexte atlantique plus vaste, mais, au contraire, pour que le jeune Etat américain prenne ses distances par rapport aux pays du Vieux Continent.

Nous trouvons les premières traces de cette distinction dans les dis-cours de l'un des plus intéressants présidents américains, Thomas Jefferson, dont on a fêté en 1993 le 250ième anniversaire de la nais-sance. Déjà en 1808, Jefferson affirmait que l'Amérique était un "hémisphère séparé"; ensuite, en 1812, et plus nettement encore en 1820, il évoquait un méridien destiné à séparer pour toujours "notre hémi-sphère" de l'Europe. Dans l'hémisphère américain, prophétisait-il, c'est-à-dire l'hémisphère occidental, "le lion et l'agneau vivront en paix l'un à côté de l'autre".

L'étape suivante fut celle de la fameuse déclaration du Président Monroe, le 2 décembre 1823, par la-quelle il interdit à toute puis-sance européenne d'intervenir dans l'hémisphère occidental-améri-cain. Depuis lors, l'affirmation de cette spécificité occidentale-amé-ricaine est allé crescendo, jusqu'aux prises de position du Président Théodore Roosevelt au début de notre siècle, puis aux déclarations diploma-tiques de 1940 et de l'immédiat après-guerre. Ce qui compte, c'est que dans tous ces discours, dans toutes ces déclara-tions, dans tous ces documents diplomatiques américains, par hémi-sphère occidental, par Occident, on entend quelque chose de radica-lement opposé à l'Europe. Il ne s'agit pas seulement d'indiquer et de délimiter une sphère d'influence ou une zone de défense dans la-quelle on exclut la pré-sence de tout ennemi potentiel. Si tel était le cas, l'Occident ne serait que l'une de ces innombrables dé-nomina-tions utilisées en politique et en diplomatie pour définir un lieu ou une situation géographique ou stratégique.

Il s'agit de bien autre chose. En réalité, l'idée de choisir un méridien qui séparerait l'Europe de l'Occident se fonde sur l'idée que l'Occident, c'est-à-dire l'Amérique comprise comme Occident par opposition à l'Europe, serait fondamentalement différent de l'Europe dans son essence et sa signification. Cette idée se fonde donc sur la présomption que ces deux mondes, le vieux et le nouveau, sont ra-dicalement diffé-rents par nature, selon la tradition et la morale. Dans un tel contexte, l'Amérique finit par être différente de l'Europe, parce que l'Amérique est la terre de l'égalité et de la li-berté, opposée à l'Europe, terre où existent des stratifications so-ciales et où règne l'oppression. L'Amérique, comprise comme Etats-Unis d'Amérique, est la terre où l'homme bon a réussi à créer un ordre social et politique bon, tandis que l'Europe est la terre du vice et de la corruption; l'Amérique est la terre de la paix, l'Europe, celle de la dis-corde et de l'esclavage.

Le méridien, qui devrait séparer l'Occident de l'Europe, revêt donc une fonction de préservation des bons contre les mauvais, signale une opposition radicale et insurmontable, du moins tant que l'Europe ne re-nonce pas à ses perversités (mais sera-ce un jour possible?).

Ce type de raisonnement trouve ses racines dans les plus anciennes traditions politiques américaines, celles des pères fondateurs. Rappelons-nous qu'ils étaient des puritains, des protestants extré-mistes, animés par une profonde foi en Dieu et en eux-mêmes, parce qu'ils croyaient être des élus de celui-ci, contraints d'abandonner l'Angleterre pour échapper aux persécutions et aux contacts entre protestants corrompus et papistes diaboliques. Pour eux, l'Amérique était une terre vierge, où ils pouvaient construire un monde nouveau, un monde de ³purs², un monde pour le peuple de Dieu, un monde libéré des règles im-pies de l'Europe, heureuse-ment séparé de celle-ci par des milliers de miles d'océan.

Dieu avait donc donné l'Amérique à ses habitants et ceux-ci devaient la garder pure et incorrompue, libre de toutes les turpitudes euro-péennes qu'ils venaient d'abandonner. La Doctrine de Monroe et la notion d'"hémisphère occidental" sont la transposition politique et laïcisée au fil des décennies, de cette menta-lité qui, au départ, était religieuse et qui aspirait à une séparation plus nette d'avec l'Europe.

Ceux qui, aujourd'hui, utilisent indifféremment les termes "Europe" et "Occident", comme s'ils étaient synonymes, ou comme si le se-cond comprenait la première, et adoptent cet usage erroné, com-mettent une grave erreur historique et politique. A moins qu'ils n'acceptent, consciemment ou inconsciemment, la vision américaine du monde, espérant de la sorte que l'Europe soit entrée tout entière dans l'Occident.

Il me semble bon de relever le fait suivant: dans la définition de l'Occident, telle qu'elle est née chez un Jefferson, s'inscrivent d'emblée les deux formes américaines de concevoir les relations internationales, que l'on a coutume de considérer comme exclusive l'une de l'autre: l'interventionnisme et l'isolationnisme. En effet, si l'Occident est le "bien", est le monde non infecté par les perversités européennes, alors il faut en tirer deux conséquences. D'une part, on peut décider de se refermer sur soi-même, pour empêcher la conta-gion d'entrer; d'autre part, on peut décider de sortir de sa propre tranchée pour s'élancer et sauver le monde. C'est cette seconde politique qui a prévalu dans l'histoire américaine, surtout parce que l'idée d'un Occident incorrompu s'est unie à celle du "destin manifeste" des Etats-Unis (cette expression a été forgée en 1845 durant le conten-tieux qui opposait les USA à l'Angleterre pour l'Oregon) pour former le pire des impérialismes.

Ainsi, toute action américaine sur le continent américain relève de la défense des intérêts propres des Etats-Unis; toute action outre-mer est dès lors une "mission" du Bien pour sauver le monde. Tandis que la réciproque ne vaut pas pour les Européens, porteurs du "mal", qui ne pourront jamais s'ingérer de bon droit dans les affaires du continent américain, comme le prétendait précisément la Doctrine de Monroe, qui interdisait aux Européens tout mouve-ment à l'Ouest du méridien ³séparateur². Ceux qui en Europe au-jourd'hui s'imaginent être des paladins de l'Occident, sont tout sim-plement des individus qui se sont inté-grés dans le mode d'être et de penser des Américains et qui, consciemment ou inconsciemment, estiment avoir été ³sauvés² par eux et ³libérés². En réalité, ils se sont soumis dans l'âme, en renonçant aux tradi-tions européennes.

Claudio FINZI.
 

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dimanche, 11 mars 2007

Réflexions sur la notion de "soldat politique"

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Pour nourrir la réflexion de ce thème inactuel, qu'est la notion du "soldat politique", nous proposons un texte de Carlos Salas issu de la revue espagnole Fundamentos n° 2 (1984), traduit par Rogelio Pete et publié dans la revue VOULOIR n° 80-82 (sept. 1991).

Carlos SLAS :

Réflexions sur la notion de "soldat politique"

Durant dix ans, au Vietnam, la machine de guerre des États-Unis d’Amérique, dotée de la meilleure capacité destructive que l’histoire ait jamais connue, a répondu avec une violence sans égal aux attaques d’une armée de paysans pour la plupart analphabètes. La capacité dévastatrice des bombardements américains a montré sa terrible réalité sans aucun masque : l’aviation américaine a, durant les 3 premières années de son intervention, arrosé le Vietnam d’une plus grande quantité d’explosifs que durant son intervention contre l’Allemagne et les Pays de l’Axe au cours de la IIe Guerre Mondiale. Presque chaque jour, le napalm boutait le feu à des villages, les brûlant en entier ; sur le terrain, les marines en rasèrent des centaines. La VIIe Flotte pilonna jusqu’à l’écrasement toute la côte du Golfe du Tonkin. En 5 ans, le contingent US passa de 15 000 à 500 000 hommes. Les armes les plus performantes de la technologie la plus récente furent employées sur cet excellent terrain de manœuvres et d’essais que constituait le Vietnam. Et cependant, cette armée fut mise en déroute.

Certaines choses résistent à la logique. L’intervention US au Vietnam en est une. Les guerilleros du Vietcong bien qu’approvisionnés d’armes de fabrication soviétique et chinoise restaient néanmoins, en tous points, en état d’infériorité face à la toute puissante machine de guerre américaine. En tous points effectivement excepté un : le moral. Les combattants de Pathet-Lao savaient pourquoi ils luttaient : ils étaient des Soldats Politiques et si la mort était leur destin, ils ne se posaient aucune question sur la vérité ontologique de l’être. Les 56 000 Américains qui laissèrent leur vie dans les marais du Viet-nam auraient-ils pu penser de même ? "Pour les Américains, ce fut une expérience tragique et purificatrice. Le géant industriel et la puissance militaire de l’Amérique ne purent atteindre la victoire. Contrairement à la Guerre de Corée où des forces réguliéres luttèrent sur des frontières reconnues, au Vietnam la supériorité technologique en armements et la puissance de la flotte aérienne se sont révélées insuffisantes contre un ennemi spécialisé dans la guerre insurrectionnelle et pénétré de ferveur révolutionnaire" (Pallmer & Colton in Histoire contemporaine). Cet exemple de ferveur ne fut pas d’ailleurs le 1er de l’histoire. Les 300 Spartiates de Léonidas, les légions de Scipion, les Croisés de Richard Cœur de Lion firent montre d’une même fermeté morale. Nous sommes devant le phénomène du Soldat Politique.

Soldat national contre soldat international

Machiavel considérait que l’une des causes de la ruine de l’Empire romain réside dans cet égarement qui consiste à vouloir grossir ses troupes, jusqu’alors invaincues, de mercenaires. Pour Machiavel, un mercenaire, quelque soit l’importance de la solde reçue, manquera toujours d’une valeur suffisante devant l’adversité. Par contre, les troupes de nationaux, enrôlés dans des contingents nationaux, seront capables de donner leurs vies pour un Prince : "L’expérience nous enseigne que seuls les princes défendus par des armées qui leur sont propres et les républiques qui jouissent de ce même bénéfice font de grands progrès, tandis que les républiques et les princes qui s’appuient sur des armées de mercenaires ne récoltent que des revers" (in Le Prince). Toujours selon Machiavel, les mercenaires seraient des gens souvent sans idées précises, ambitieux, sans discipline, peu fidèles, fanfarons et couards. La raison sautait aux yeux : "ils n’ont pas d’autre amour ni motif qui les attachent au Prince que ceux de leur petite solde".

Il est bien évident que le mercenaire est tout l’opposé du soldat politique. Pour le moins, les raisons de Machiavel sont convaincantes. Mais il laisse néanmoins sans explication le pourquoi de la milice nationale. En effet, pourquoi une armée formée par des hommes ressortissant d’une même communauté ethnique et culturelle était-elle supérieure à toute autre armée, par ex., celle composée d’hommes sous contrat ? Machiavel supposait que des hommes liés à un sol, parlant la même langue et partageant la même tradition, auraient de raisons de savoir ce qu’ils défendaient : patrie, coutume, norme, en somme, ce que nous appelerions une "unité philosophique". Nous savons bien que l’armée nord-américaine n’était pas composée de mercenaires, mais, en revanche, peut-on dire qu’ elle s’appuyait sur une unité philosophique ? Nous pouvons répondre sans hésitation : non.

La morale des "pilgrims" se vida de son contenu lorsqu’entra en scéne la "diversité philosophique" : "elle représente un indice de l’état de dissociation, de cohésion insuffisante du corps social. Ceci est déjà plus grave qu’une simple divergence dans les manières de penser" (in Pasado y Porvenir para el Hombre actual). Vu ainsi, par Ortega, la "diversité philosophique" scinde les nations en cassant les normes morales établies au cours des siècles. Elle fut, à 1ère vue, l’écueil le plus important que rencontra la démocratie américaine. Se battre contre quelque chose, lorsque l’on ne sait pas avec exactitude ce que l’on édifiera lorsque les volutes de brume se dissiperont, est décourageant. Mettre en déroute un Vietcong composé de partisans fanatiques alors qu’au pays, la presse, l’opinion publique et les milieux artistiques réclament à cor et à cri le retrait, est une tâche de titans. Jamais ne pourraient naître dans de telles circonstances des soldats politiques.

Les 3 clés de la victoire

Il semble qu’il faille 3 causes pour qu’un soldat commun se transforme en soldat politique : une injustice, un ennemi et une mission. Les forces de frappe se mesureront alors par le nombre des individus qui participent ouvertement et librement à ces 3 causes. Les Espagnols de la guerre d’Indépendance (1808) les reçurent servies sur un plateau : l’injustice : l’invasion du pays ; l’ennemi : Napoléon ; la mission : l’expulsion de leur territoire de toutes les troupes françaises. Voilà des motifs plus que suffisants pour soutenir un moral de lutte.

Bismarck donna aux peuples germaniques 3 autres motifs pour la consolidation de l’unité de l’Empire : une injuste atomisation de la communauté allemande, une Autriche décadente et oppresseuse et le devoir du soldat prussien à rétablir l’unité. Pour le cas où l’on se heurterait à un ennemi ayant les mêmes arguments, on aurait alors recours à ce que Napoléon appela, en l’adptant, "la logique des baïonnettes". Le reste est question de persévérance.

Le Manifeste du Parti Communiste rédigé par Marx et Engels fut le 1er manuel contemporain du Soldat Politique, avec la particularité de ce que l’ennemi n’était pas extérieur mais intérieur, aussi intime à une communauté nationale que la corporation patronale. La mission des ouvriers fut dès lors et inexorablement de renverser "par la violence tout l’ordre social existant. Les classes dominantes peuvent trembler devant une Révolution Communiste". Et en plus des 3 clés, une consigne : "Prolétaires de tous les pays, unissez vous !"

Jusqu’alors, les "soldats politiques", les "forces autochtones" s’étaient distinguées par l’accomplissement d’une mission contre une entité étrangére à la communauté. Les campagnes militaires étaient capables de réunir coude à coude le valet de ferme et le propriétaire terrien. L’entrée en lutte unissait en un seul bastion celui-ci et celui-là. L’arrivée du Manifeste mit un terme à ce genre de pacte.

Et comme si les siècles précédents eussent servi de banc d’essai à la mise en scéne la plus tourmentée, le XXe siècle fit office de théâtre pour représenter la consécration définitive du soldat politique. Ce qui s’était répété de temps à autre le devint de manière soutenue. Dans un implacable bombardement idéologique, les gouvernements endoctrinèrent leurs fantassins aux consignes et motifs de leur mission dans le monde : effacer l’injustice, annihiler l’ennemi, accomplir son devoir.

De cette manière surgit la redoutable Garde Rouge de Trotsky, le "justicier" Fascio di combattimento de Mussolini, la SS, fer de lance de Hitler, et aussi les obsédants "Bo-Doi" de Hô Chi Minh. Toutes de puissantes armées politiques. Si leurs objectifs étaient différents, leurs fondements étaient communs. La Phalange macédonienne aurait fait long feu devant ces vives machines de guerre.

Le phénomène du soldat politique était-il réellement un phénomène aussi récent ? Dans la protohistoire humaine, la lutte pour la nourriture quotidienne ne donnait pas lieu à philosopher. L’instinct de survie était l’ordre du jour permanent. Il n’était pas nécessaire d’éduquer "politiquement" les jeunes car tous comprenaient instinctivement ce que pouvait signifier la perte du territoire. Les calamités naturelles et les agressions des tribus hostiles étaient les maîtres idéologiques" du clan. Mais avec l’avance de la technique, cet instinct de survie perdit l’impulsion protectrice des premiers temps. L’application de châtiments devint nécessaire afin que l’homme se souvienne en permanence de cet instinct primordial. Dans sa campagne des Gaules, César vérifia un usage qui naquit probablement de ce souvenir forcé : "Tel est l’usage des Gaulois. Pour entreprendre la guerre, ils obligent par la loi tous les jeunes hommes à se présenter armés et celui qui arrive le dernier au lieu de rassemblement, ils l’écartèlent" (in La Guerre des Gaules). Leçon terrifiante aux yeux d’un contemporain, mais vitale pour éviter la relâche de la troupe. Certaines tribus de l’Europe d’alors interdisaient l’approche des marchands auprès des troupes car le vin et les fastes pouvaient amoindrir l’esprit viril des soldats : "Aucun marchand ne pouvait entrer, ils ne permettaient pas l’introduction des vins ni de denrées semblables destinées au plaisir, persuadés que ces articles efféminent l’esprit et font perdre la vigueur, car ces soldats sont d’un naturel brave et fort". La religion et la politique se confondaient chez eux dans un même état d’esprit, en une norme morale héritée de leurs ancêtres.

Mais les communautés modernes, denses et complexes, se sont éloignées de manière radicale de cette connaissance primordiale. Faudrait-il affiner l’art gaulois de l’écartèlement ? Au moins en tout cas éduquer politiquement les jeunes recrues. Autrement dit, leur inculquer un moral.

Du moral du soldat

Tout bon stratége militaire apprécie comme une des armes les plus puissantes celle qui confére cette force animique qui a pour nom : le moral. Avec une forte dose de moral, on peut en une certaine mesure pallier même aux insuffisances de l’armement et aussi à celles du nombre d’hommes alignés. Le fondement d’un moral guerrier est le même dans toutes les armées ; seule varie la "tonalité" avec laquelle se manifeste cette puissance en un caractére déterminé. Mais dans le fond, il consiste à reconnaître que le droit que l’on a à l’existence est plus juste pour soi que pour l’ennemi. Lorsque le soldat perçoit chez autrui que ce droit à autant sinon plus de raison de s’exercer que chez lui, la guerre peut dès lors être considérée comme perdue.

Un Soldat Politique est une totalisation du moral. Bien que sans épée, sans possibilité de sortir vivant du combat, le soldat politique existera tant que survivra l’esprit de lutte et de victoire. Les exemples historiques ont été suffisants où l’on peut voir un groupe d’intrépides affronter avec héroïsme leur destin sachant que leurs vies s’éteindraient avec la fin de la bataille. Un colonel européen contemporain, Hans Frick, décrivait ainsi le moral du guerrier : "Cet esprit du combattant dépend des aptitudes guerrières d’un peuple, de la conviction qu’il a d’avoir la raison et le droit de son côté, de son éducation militaire, de la confiance qu’il met en ses chefs et en sa propre capacité, et, enfin, de l’état physique du soldat." (in Bréviaire tactique)

Les Spartiates de Léonidas, les Kamikazes nippons et certains Feddayims de la Jihad participent de ces particularités. Dans ces 2 derniers cas, la technique de convertit en une simple comparse devant le destin tragique du soldat.

Ce fut le génie de Clausewitz qui pressentit comme personne auparavant l’importance du moral dans ce qu’il dénomma "l’art de la Guerre". Celui qui exclurait de ses règles et de ses principes les facteurs du moral serait un mesquin et un maladroit. Si ces "agents moraux" échappent au savoir livresque, l’on ne peut oublier que leur influence confére le triomphe ou la déroute. "L’alliage" du physique avec ce qui relève du moral est inséparable car ils constituent un tout : "nous pourrions bien dire que ce qui relève du physique est la poignée en bois alors que ce qui reléve du moral est le métal noble de la lame. Par conséquent, le moral est la vraie et authentique arme à devoir manipuler" (in De la guerre). Clausewitz qualifia les facteurs moral comme étant la question la plus importante de la guerre, il se désolait de ce qu’on ne pouvait les quantifier, les classer et les chiffrer : "Ils forment l’esprit qui pénètre jusqu’au plus petit détail de la guerre ; ce sont eux qui s’unissent en premier en une étroite affinité à la volonté, laquelle dirige et met en mouvement toute la mase des forces."

Tels sont les piliers du moral. Il serait donc vain d’établir un tribunal pour décider qui détient la raison en une guerre. De même, il serait sot de soutenir le moral sur la base de démonstrations alignant causes et effets. En fin de compte, ce qui incite à la guerre totale est l’incertitude dans laquelle l’on est : continuerons-nous demain à exister ou disparaîtrons-nous ? Il est très vrai que le moral est fils de cet axiome naturel et non de déductions syllogistiques. C’est pour cette raison qu’il est déprimant d’entendre d’une armée, lorsqu’elle est devant une situation extrême comme l’est la guerre, qu’elle n’est pas empreinte d’un moral à toutes épreuves. La guerre, cette terrible circonstance, oblige qu’on lui fasse face comme le lion au combat et non à la manière de l’autruche qui plonge sa tête dans le sable.

Presse, Propagande et Persuasion

Il existe une infinité de moyens pour doter une armée d’un moral à l’épreuve des bombes. César, qui connaissait à fond la nature de ses légionnaires, avait pour habitude de se poster au sommet d’une colline non seulement pour voir mais aussi pour être vu de ses combattants. De cette manière, chaque Romain se sentait naturellement un héros et était mu par une force combative difficile à contenir par l’ennemi. La Guerre des Gaules posséde plus de valeur comme précis de propagande de guerre que comme ouvrage historique. Grâce à son sens pénétrant de l’observation, César notait rapidement les points faibles tant de ses hommes que de l’ennemi. Lorsqu’en pleine bataille, l’une de ses légions fléchissait, il se lançait à son secours afin de l’aider. Sa présence et deux coups d’épée rétablissaient le. moral et l’ordre de la troupe : "César était si pressé qu’il arriva sans bouclier, en arracha un à l’un de ses soldats en poste au dernier rang, pour ensuite aller se mettre en première ligne. Appelant les centurions par leurs noms, les exhortant à plus d’efforts, il ordonna d’avancer et d’élargir les rangs pour que les coups d’épées soient plus aisés et efficaces. Par sa seule présence, à la vue de leur général au milieu d’un danger extrême, les soldats reprirent espoir et s’illustrèrent à nouveau" (Clausewitz in De la guerre). La lecture de ce passage nous dit combien le moral du soldat est la clé de la victoire.

De nos jours, l’harangue est devenue la propagande. Les immenses armées humaines se nourrissent jour aprés jour de cette harangue moderne dont 1a chaire de vérité est le journal. En temps de guerre, il est l’appui inconditionnel du soldat, lui donnant foi en son combat, lui rappelant ses devoirs, bref le formant comme Soldat Politique.

Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, la vulgarisation rapide de la presse servit tout autant à la division des Français qu’à les lancer dans des campagnes des plus audacieuses. Au début, chaque révolutionnaire possédait sa "feuille" déblatérant même contre ceux qui devaient être des siens. Le résultat fut cet infernal carrousel de prises de pouvoir et de chutes de gouvernements. La patience militaire à bout, ce fut le 18 Brumaire. Ces mêmes machines imprimantes furent alors employées à mouler la conscience des Français dans un droit unique, une seule administration, une seule éducation et un code civil, une "Grande Armée" - tout cela sous le sceau d’une seul esprit : Napoléon. Le soldat napoléonien parcourut l’Europe 15 années durant. Il put admirer les coupoles du Kremlin ; il vint à bout de la machine de guerre prussienne ; il pilla les pinacothéques italiennes et tint en un suspens angoissant les habitants des Iles Britanniques. Napoléon put proclamer à la fin de sa vie avec orgueil : "La France est une mine inépuisable. J’en ai été témoin en 1812 et en 1815. Il suffit de mettre le pied sur son sol pour que jaillissent armées et trésors. Un tel peuple ne sera jamais subjugué" (in Mémorial).

Ceci vu, on constate que la Presse et la Propagande qui se mettent au service d’une idée ont le même effet qu’une injection de béton armé dans la structure d’un édifice. Cette structure chez l’humain est "l’unité philosophique" ; une unité - peu importe laquelle – du moment qu’elle soit unique, indivisible et absolument intègre.

Alexis de Tocqueville, panégyriste de la démocratie américaine, vit en ce systéme une immense faille : "Dans les nations démocratiques, en temps de paix, la carrière militaire est peu suivie et estimée. Ce discrédit public pèse fort sur le courage de l’armée ; les esprits sont comme opprimés. Et lorsque survient un conflit, ils ne sont point capables de retrouver leur mobilité et leur vigueur" (in De la démocratie en Amérique).

Lorsqu’il y a divergence entre le sentiment militaire et civil, phénoméne qui apparaît quand une société est pénétrée de "divisions philosophiques", les nations en souffrant auront moins de poids spécifique à l’heure des grandes décisions. Un affrontement armé inattendu dévoilerait leur pusillanimité au grand jour. Probablement que c’est dans l’intention de se débarasser de ce "cercueil" que les 1ères mesures d’un gouvernement révolutionnaire marxiste sont le contrôle de presse et l’éducation. Le projet de base a toujours été composé de vastes plans d’éducation et de politisation populaires pour convertir les jeunes en Soldats Politiques et ce, en moins d’une génération. La différence entre ce systéme et ceux appliqués en Europe occidentale et dans ce qu’il est convenu d’appeler "Occident" est que, sous l’hégémonie marxiste, l’unité de la presse et de l’éducation populaire sont constantes alors que les démocraties occidentales ne sortent ces méthodes du tiroir que lorsqu’elles sont acculées à un conflit. Alors seulement l’on tente de doter le soldat d’un moral de lutte qui ne puisse être contredit sur ses fondements. Alors aussi, on tente d’arrêter les déviations fatales de la presse devant la nécessité d’une "unité philosophique".

Il y a peu, un journaliste français, JF Revel, publia un livre dans lequel il dévoila cette mortelle insuffisance des démocrates face aux systèmes totalitaires. Le problème reste en suspens : les démocraties sont le système le moins mauvais pour que d’autres États aux intentions douteuses en tirent profit. Mais si les démocrates prennent des mesures préventives, elles cessent d’être des démocraties car elles appliqueraient alors des méthodes totalitaires. Plus qu’une énigme, c’est un paradoxe digne de Zénon.

Ce journaliste dénonce les totalitarismes, plus particuliérement le soviétique, introduisant, selon lui, des "taupes idéologiques" dans la philosophie de l’Occident. Il secoue encore les consciences de l’Occident, piquant au vif leur infériorité idéologique : "La guerre idéologique est une nécessité pour les totalitarismes et une impossibilité pour les démocraties. Cela est consubstantiel à l’esprit totalitaire et inaccessible à l’esprit démocratique. Pour faire la guerre idéologique, il faut avant tout avoir une idéologie. Et les démocraties n’en ont pas une, mais mille, cent mille"(in Ainsi meurent les démocraties).

L’Europe devant sa IVe Guerre Punique

En résumé, le problème que l’on traite est éminemment stratégique. Le soldat politique se révèle l’arme la plus efficace d’une nation. Peu importe si ses principes s’accordent avec les normes philosophiques qu’accepte la nouvelle science. Peu importe la causalité, la non-contradiction, l’identité, la raison suffisante et le tiers exclu. Au moment décisif, celui que Clausewitz définit comme le moment de la "friction", il "faut y aller" avec une fermeté morale à toutes épreuves, celle qui est le propre des soldats politiques.

L’Europe se trouve actuellement à la veille de ce qui survint en des situations analogiques en 480 et en 216 avant notre ère, la 1ère lorsque les Perses mirent Athènes à sac et la seconde, lorsque l’Empire romain souffrit la déroute la plus grave de son histoire devant Carthage. Seule l’audace d’un Thémistocle et la patience d’un Fabius Cunctator arrivérent à protéger la culture que le destin s’obstinait à condamner.

Le plus délicat du "dossier" européen de l’heure présente est que, loin de former des soldats politiques, on répugne plutôt à le faire. À défaut, il pourrait bien arriver à l’Europe ce qui arriva, lors de son interrogatoire, à ce soldat français prisonnier du Viêt-minh : une impossibilité de répondre.

  • - "Répondez ! Pourquoi ne vous êtes-vous pas laissé tuer en défendant votre position ?"
  • Glatigny se posait lui-même la question...
  • - "Moi, je peux vous l’expliquer - poursuivit le commissaire du Viêt-minh – vous avez vu comment nos soldats, qui vous paraissent menus et fragiles, montaient à l’assaut de vos tranchées, malgré vos mines, votre artillerie et vos barbelés, et toutes ces armes offertes par les américains. Les nôtres se sont battus jusqu’à la mort parce qu’ils savaient, parce que nous tous savons, que nous sommes les détenteurs de la vérité, de l’unique vérité. C’est elle qui rend nos soldats invincibles. Et comme vous n’aviez pas ces mêmes raisons,. vous êtes ici, devant moi, prisonnier et vaincu. Vous, officiers bourgeois, appartenez à une société dévastée et pourrie par les intérêts égoïstes de votre classe. Vous avez contribué à maintenir l’humanité dans les ténèbres. Vous n’êtes que des obscurantistes, des mercenaires, incapables de dire pourquoi vous vous battez" (J. Lartéguy in Les centurions).

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Idées politiques de G. Le Bon

Les idées politiques de Gustave Le Bon

par Ange SAMPIERU :

Source : Recension Les idées politiques de Gustave Le Bon, Catherine Rouvier (PUF, 1986) par Ange Sampieru, revue Vouloir n°35/36 (janv. 1987).

Né en 1841, mort en 1931, le docteur Gustave Le Bon est resté célèbre dans l'histoire des idées contemporaines pour son ouvrage historique, La psychologie des foules, paru en 1895. Pourtant, en dépit de plusieurs décennies de gloire, que Catherine Rouvier situe entre 1910 (date de la plus grande diffusion de son ouvrage) et 1931, année de sa mort, il erre depuis maintenant 50 ans dans un pénible purgatoire. Cette éclipse apparaît, au regard de la notoriété de Le Bon, comme un sujet d'étonnement. L’influence de Le Bon ne fut pas seulement nationale et française. Son livre fut lu, loué et utilisé dans de nombreux pays étrangers. Aux États-Unis, par ex., où le Président Théodore Roosevelt déclarait que l’ouvrage majeur de Gustave Le Bon était un de ses livres de chevet. Dans d'autres pays, le succès fut également assuré : en Russie, où la traduction fut assurée par le Grand-Duc Constantin, directeur des écoles militaires ; au Japon et en Égypte aussi, des intellectuels et des militaires s'y intéressent avec assiduité. Cette présence significative de Gustave Le Bon dans le monde entier ne lui évita pourtant pas la fermeture des portes des principales institutions académiques françaises, notamment celles du monde universitaire, de l'Institut et du Collège de France.

Un ostracisme injustifié

Le mystère de cet ostracisme, exercé à l'encontre de ce grand sociologue aussi célèbre qu'universel est l'un des thèmes du livre de Catherine Rouvier. La curiosité de l’auteur avait été éveillée par une étude sur le phénomène, très répandu, de la "personnalisation du pouvoir". Autrement dit, pourquoi les régimes modernes, parlementaires et constitutionnalistes, génèrent-ils aussi une "humanisation" de leurs dirigeants ? Ce phénomène apparaît d'ailleurs concomitant avec un phénomène qui lui est, historiquement parlant, consubstantiel : l'union des parlementaires contre ce que le professeur Malibeau nommait une "constante sociologique". De Léon Gambetta à Charles de Gaulle, l’histoire récente de France démontre à l'envi cette permanence. D'ailleurs les régimes démocratiques, à l'époque de Le Bon, n'étaient évidemment pas seuls à sécréter cette tendance. Les régimes totalitaires étaient eux-mêmes enclins à amplifier cette constante (Hitler en Allemagne, Staline en Russie). Après maintes recherches dans les textes devenus traditionnels (Burdeau, René Capitant) Catherine Rouvier découvrit l'œuvre maîtresse de Le Bon. Malgré les nombreuses difficultés rencontrées dans sa recherche laborieuse d'ouvrages traitant des grandes lignes de la réflexion de Le Bon, c'est finalement dans un article paru en novembre 1981 dans le journal Le Monde, double compte-rendu de 2 ouvrages traitant du concept central de Le Bon, la foule, que l'auteur trouva les 1ers indices de sa longue quête. En effet les 2 ouvrages soulignaient l’extrême modernité de la réflexion de Le Bon. Pour Serge Moscovici, directeur d'études à l'École des Hautes Études en Sciences sociales, et auteur de L'Âge des foules (Paris, Fayard, 1981), Le Bon apporte une pensée aussi nouvelle que celle d'un Sigmund Freud à la réflexion capitale sur le rôle des masses dans l'histoire. Il dénonce dans la même foulée l'ostracisme dont est encore frappé cet auteur dans les milieux académiques français.

Pour Moscovici, les raisons sont doubles : d'une part, "la qualité médiocre de ses livres", et d'autre part, le quasi-monopole exercé depuis des années par les émules de Durkheim dans l'université française. Et, plus largement, l'orientation à gauche de ces milieux enseignants [mode du freudo-marxisme]. Contrairement au courant dominant, celui que Durkheim croyait être source de vérité, Le Bon professait un scepticisme général à l'égard de toutes les notions communes aux idéologies du progrès. Les notions majeures comme celles de Révolution, de socialisme, de promesse de paradis sur terre, etc. étaient fermement rejetées par Le Bon. On l'accusa même d'avoir indirectement inspiré la doctrine de Hitler. Sur quoi Catherine Rouvier répond : pourquoi ne pas citer alors Staline et Mao qui ont, eux aussi, largement utilisé les techniques de propagande pour convaincre les foules ?

Une dernière raison de cet ostracisme fut le caractère dérangeant de la pensée de Le Bon. Son approche froidement "objective" du comportement collectif, le regard chirurgical et détaché qu'il porte sur ses manifestations historiques, tout cela allait bien à l'encontre d'un certain "moralisme politique". En associant psychologie et politique, Le Bon commettait un péché contre l'esprit dominant.

De la médecine à la sociologie en passant par l'exploration du monde...

Avant de revenir sur les idées politiques de G. Le Bon, rappelons quelques éléments biographiques du personnage. Fils aîné de Charles Le Bon, Gustave Le Bon est né le 7 mai 1841 dans une famille bourguignonne. Après des études secondaires au lycée de Tours, G. Le Bon poursuit des études de médecine. Docteur en médecine à 25 ans, il montre déjà les traits de caractère qui marqueront son œuvre future : une volonté de demeurer dans !'actualité, une propension à la recherche scientifique, un intérêt avoué pour l'évolution des idées politiques. En 1870, il participe à la guerre, d’où il retire une décoration (il est nommé chevalier de la légion d'honneur en décembre 1871). Paradoxalement, cet intérêt pour des sujets d'actualité n'interdit pas chez cet esprit curieux et travailleur de poursuivre des recherches de longue haleine. Ainsi en physiologie, où il nous lègue une analyse précise de la psychologie de la mort. Gustave Le Bon est aussi un grand voyageur. Il effectue de nombreux déplacements en Europe et, en 1886, il entame un périple en Inde et au Népal mandaté par le Ministère de l'Instruction publique. Il est d'ailleurs lui-même membre de la Société de Géographie. Et c'est entre 1888 et 1890 que ses préoccupations vont évoluer de la médecine vers les sciences sociales. Le passage du médical au "sociologique" passera vraisemblablement par le chemin des études d'une science nouvelle au XIXe siècle : l'anthropologie. Il rejoindra d'ailleurs en 1881 le domaine de l'anthropologie biologique par l'étude de l'œuvre d'AIbert Retzius sur la phrénologie (étude des crânes).

De cet intérêt est né la "profession de foi" anthropologique de Le Bon, consignée dans L'homme et les sociétés. La thèse principale de ce pavé est que les découvertes scientifiques, en modifiant le milieu naturel de l'homme, ont ouvert à la recherche une lecture nouvelle de l'histoire humaine. Le Bon utilise d'ailleurs l'analogie organique pour traiter de l'évolution sociale. Avant Durkheim, il pose les bases de la sociologie moderne axée sur les statistiques. Il propose aussi une approche pluridisciplinaire de l'histoire des sociétés. Mais, en fait, c'est l'étude de la psychologie qui va fonder la théorie politique de Le Bon.

Naissance de la "psychologie sociale"

En observateur minutieux du réel, le mélange des sciences et des acquis de ses lointains voyages va conduire Le Bon à la création d'un outil nouveau : la "psychologie sociale". La notion de civilisation est au centre de ses réflexions. Il observe avec précision, en Inde et en Afrique du Nord, le choc des civilisations que le colonialisme provoque et exacerbe. C'est ce choc, dont la dimension psychologique l'impressionne, qui mènera Le Bon à élaborer sa théorie de la "psychologie des foules" qui se décompose en théorie de la "race historique" et de la "constitution mentale des peuples". Rejetant le principe de race pure, Le Bon préfère celle de "race historique", dont l'aspect culturel est prédominant. Là s'amorce le thème essentiel de toute son œuvre : "le mécanisme le propagation des idées et des conséquences". À la base, Le Bon repère le mécanisme dynamique de la "contagion". La contagion est assurée par les 1ers "apôtres" qui eux mêmes sont le résultat d'un processus de "suggestion". Pour Le Bon, ce sont les affirmations qui entraînent l'adhésion des foules, non les démonstrations. L'affirmation s'appuie sur un médium autoritaire, dont le 'prestige" est l'arme par excellence.

Le Bon est aussi historien. Il trouve dans l'étude des actions historiques le terrain privilégié de sa réflexion. Deux auteurs ont marqué son initiation à la science historique : Fustel de Coulanges et Hippolyte Taine. La lecture de La Cité Antique, ouvrage dû à Fustel de Coulanges, lui fait comprendre l'importance de l'étude de l'âme humaine et de ses croyances afin de mieux comprendre les institutions. Mais Taine est le véritable maître à penser de Le Bon. Les éléments suivants sous-tendent, selon Taine, toute compréhension attentive des civilisations : la race, le milieu, le moment et, enfin, l'art. La théorie de la psychologie des foules résulte d'une synthèse additive de ces diverses composantes. Mais Le Bon va plus loin : il construit une définition précise, "scientifique", de la foule. L'âme collective, mélange de sentiments et d'idées caractérisées, est le creuset de la "foule psychologique". Le Bon parle d'unité mentale...

Un autre auteur influence beaucoup Le Bon. Il s'agit de Gabriel de Tarde. Ce magistrat, professeur de philosophie au Collège de France, est à l'origine de la "loi de l’imitation", résultat d'études approfondies sur la criminalité. La psychologie des foules, théorie de l'irrationnel dans les mentalités et les comportements collectifs (titre de la 1ère partie), offre à Gustave Le Bon une théorie explicative de l'histoire et des communautés humaines dans l'histoire. À travers elle, l'auteur aborde de nombreux domaines : les concepts de race, nation, milieu sont soumis à une grille explicative universelle.

Une nouvelle philosophie de l'histoire

Le Bon se permet aussi une analyse précise des institutions politiques européennes : ainsi sont décortiquées les notions de suffrage universel, d'éducation, de régime parlementaire. L'actualité fait aussi l'objet d'une approche scientifique : Le Bon analyse les phénomènes contemporains de la colonisation, du socialisme, ainsi que les révolutions et la montée des dictatures. Enfin, Le Bon traite de la violence collective au travers de la guerre, abordant avec une prescience remarquable les concepts de propagande de guerre, des causes psychologiques de la guerre, etc. Tous ces éléments partiels amènent Le Bon à dégager une nouvelle philosophie de l'histoire, philosophie qui induit non seulement une méthode analytique, mais aussi et surtout les facteurs d'agrégation et de désintégration des peuples historiques (plus tard, à sa façon, Ortega y Gasset parlera, dans le même sens, de peuples "vertébrés" et "invertébrés"). La civilisation est enfin définie, donnant à Le Bon l'occasion d’aborder une des questions les plus ardues de la philosophie européenne, celle que Taine avait déjà abordé et celle que Spengler et Toynbee aborderont.

G. Le Bon est un auteur inclassable. Profondément pessimiste parce que terriblement lucide à propos de l'humanité, Le Bon utilise les outils les plus "progressistes" de son époque. Il sait utiliser les armes de la science tout en prévenant ses lecteurs des limites de son objectivité. Observateur des lois permanentes du comportement collectif, Le Bon est un historien convaincu. Il comprend très vite l'importance, en politique, de la mesure en temps. L'histoire est le résultat d'une action, celle qu'une minorité imprime sur l'inconscient des masses. Il constate que cette influence des minorités agit rarement sur la mentalité, donc sur les institutions de ses contemporains. Il y a donc un écart historique entre l'action et la transformation effective du réel. L'élaboration d'une idée est une étape. La pénétration concrète de cette idée est l'étape suivante. Son application enfin, constitue une autre étape. Cette mesure au temps vaut au fond pour tous les domaines où l'homme s'implique. Dans l'histoire bien sûr mais aussi dans la science, dans le politique. Le grand homme politique est simplement celui qui pressent le futur de son présent. Il est la synthèse vivante et dynamique des actions posées par les générations précédentes. L'histoire du passage de l'inconscient au conscient est aussi à la mesure de ce temps. Les institutions et le droit sont les fruits de l'évolution des mentalités.

Au-delà des misères de la droite et de la gauche

Le livre de Catherine Rouvier a un immense mérite : comprendre, au travers de l'œuvre de Le Bon, comment l'histoire des idées politiques est passée du XIXe au XXe siècle. La multiplicité des questions abordées par l'auteur est le miroir de l'immense variété des outils de réflexion utilisés par Le Bon. Les idées politiques de Gustave Le Bon supportent mal une classification simplette. Si la droite libérale lance aujourd'hui une tentative de récupération de Le Bon et si la gauche continue à dénoncer ses théories, on peut déceler dans ces 2 positions, au fond identiques même si elles sont formellement divergentes, une même incompréhension fondamentale de la théorie de Le Bon. Les idées politiques de ce sociologue de l'âge héroïque de la sociologie, dont le soubassement psychologique est présenté ici, ne sont en fait ni de droite ni de gauche. La dialectique d'enfermement du duopole idéologique moderne refuse catégoriquement toute pensée qui n'est pas immédiatement encastrée dans une catégorie majeure. C'est le cas de Le Bon. Catherine Rouvier compare d'ailleurs, avec beaucoup de pertinence, cette originalité à celle des travaux de Lorenz (cf. Postface, p. 251 et s.). Le Bon exprime bien l’adage très connu de Lénine : les faits sont têtus...

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Euro-Bruxelles noyauté par Washington

L'Amérique à Bruxelles

medium_Florence_AUTRET.jpgComment la CIA accède-t-elle à nos données personnelles depuis l'Europe ? Comment les services secrets US peuvent-ils enlever et torturer en toute impunité sur le sol européen ? Quel est le véritable pouvoir de nos élus dans la communauté européennes qui se construit ? Comment les Etats-Unis influencent-ils nos dirigeants ?
Journaliste économique et conférencière à Science-Po en tant que spécialiste du lobbying européen, Florence Autret nous dévoile cette face cachée de l'Europe : celle d'une Europe noyautée par Washington.

Voir: http://theatrumbelli.hautetfort.com/

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Haushofer et le Pacifique

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HAUSHOFER ET LE PACIFIQUE

http://www.stratisc.org/PN5_Korinman_3.html

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samedi, 10 mars 2007

Erreurs stratégiques des Gaulois

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LES ERREURS STRATEGIQUES DES GAULOIS FACE A CESAR

Par PHILIPPE RICHARDOT

La guerre des Gaules est presque toujours vue du côté des Romains, car il n'y a pas eu de grands historiens gaulois pour rapporter l'évènement. Qui plus est, la guerre des Gaules est vue du côté du conquérant romain, Jules César, auteur du seul grand récit sur le sujet, admirablement ramassé dans ses Commentaires. Même lorsque certains historiens contemporains essaient de prendre César en flagrant délit de désinformation, c'est toujours du côté romain qu'ils se placent, tant la conquête de la Gaule a, après deux millénaires, romanisé les descendants des fils de la Gaule vaincue. Le nom même de 'Gaulois' est un jeu de mots latins qui signifie 'coq', déformé d'après le nom que se donnaient les Celtes de Gaule. Limage classique de César est celle d'un conquérant de marbre qui réalise un grand projet de civilisation sur un peuple aussi indiscipliné que divisé dont l'ardeur bravache vient se briser contre l'art des légions. Hors des poncifs et d'une analyse romanocentrique, cet ouvrage montre un César politicien qui mène une quasi-guerre privée, sinon partisane pour financer sa carrière à Rome, voire pour échapper au tribunal. En face de lui, des Gaulois, certes divisés, dont la partie méridionale, déjà romanisée, choisit le camp de César. Des Gaulois, dont la communauté de culture apparaît malgré les clivages politiques aussi profonds entre tribus rivales qu'à l'intérieur d'elles-mêmes. Mais c'est une Gaule riche, en proie à une crise démographique et militaire qu'aggresse César avec un cynisme implacable : une Gaule incapable de s'opposer aux migrations armées des Germains et des Helvètes, avant d'être écrasée par le conquérant Romain. Si le résultat de la lutte est connu, les calculs des Gaulois, la valeur stratégiques de leurs chefs, l'art militaire des peuples celto-germaniques, les opérations les moins avouables de César sont peu étudiées, les Gaulois pouvaient-ils l'emporter? César était-il un maître joueur d'échecs ou a-t-il vaincu sur les erreurs de stratégie des Celtes ?

Ed. Economica

Texte en français
184 pages
Format : 155 X 240

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Petite histoire de l'idéologie roumaine

Petite histoire de l'idéologie roumaine

 

 

 

par Robert STEUCKERS

 

 

 

Analyse:

 

Armin HEINEN, Die Legion "Erzengel Michael" in Rumänien. Soziale Bewegung und politische Organisation. Ein Beitrag zum Problem des internationalen Faschismus,  R. Oldenbourg Verlag, München, 1986, 558 S., DM 128, ISBN 3-486-53101-8.

 

 

 

L'ouvrage d'Armin Heinen, consacré au mouve­ment de Codreanu, diffère de beaucoup d'autres tra­vaux consacrés à la Garde de Fer et aux tu­mul­tes de la politique roumaine de l'entre-deux-guer­res. Il en diffère parce qu'il explore à fond le con­texte historique de la Roumanie depuis son émer-gence en tant qu'Etat et parce qu'il résume, de ma­nière limpide et pédagogique, les multiples li­néa­ments de l'idéologie nationale roumaine. Ce sont ces pages-là que nous analyserons dans le pré­sent article, laissant de côté  —mais pour y re­venir plus tard—  l'exposé brillant et détaillé des é­vé­nements politiques du terrain que Heinen nous livre dans son remarquable ouvrage. 

 

 

 

Au XIXième siècle, les principautés roumaines (la Moldavie et la Valachie), en s'émancipant de la tutelle ottomane, entrent automatiquement dans un champ conflictuel, excitant la convoitise des puis­sances voisines, l'Autriche-Hongrie et la Rus­sie. La société, marquée par l'orthodoxie aux ré­­flexes ruraux et par l'idéologie guerrière tur­que/ot­tomane, reçoit comme de mauvais gref­fons les éléments épars de l'occidentalisme, le li­béra­lis­me économique et politique. La société roumai­ne est affectée par une cascade de crises dues aux facteurs de modernisation: dans une société ac­coutumée à la dépendance voire au ser­vage, l'é­man­cipation moderne ébranle les struc­tures so­cia­les. En amont, chez les dirigeants, les principes in­dividualistes, propres à la modernité politique, disloquent le sens du devoir de solida­rité et de cha­rité, plongeant du même coup les masses ru­ra­les dans la perplexité puis dans la co­lère. En aval, dans les masses, le respect pour les élites tradi­tion­nelles s'estompe et, vis-à-vis des élites im­por­tées ou de la bourgeoisie urbaine émergente, éclot une haine qu'il sera de plus en plus difficile de contenir. Pour les masses, les élites tradition­nel­les ont succombé aux tentations du mirage oc­ci­dentaliste; elles ont basculé dans le péché, en ou­bliant leurs devoirs paternalistes de solidarité et de charité. Les élites importées et les élites urbai­nes (ou fraîchement urbanisées) sont, elles, les ten­tatrices, les vectrices du péché.

 

 

 

Le poporanisme, équivalent roumain du narodnikisme russe

 

 

 

Dans un tel contexte, à terme explosif, se profi­lent quatre filons idéologiques, dont trois sont cal­qués sur leurs équivalents ouest-européens: le libéralisme, le conservatisme, le socialisme; qua­trième filon, le «poporanisme», lui, est «na­tio­nal» (au sens ethnique) et paysan, c'est-à-dire at­ta­ché aux modulations traditionnelles des rela­tions sociales. Le libéralisme roumain est coincé en­tre une volonté théorique de démocrati­sation et la défense effective d'intérêts précis (ceux de la bour­geoisie «parvenue» et importée). Le conser­va­tisme roumain est, quant à lui, im­mobiliste: rai­sonnant en termes d'idéaltypes con­servateurs fi­gés, il refuse de prendre en compte toutes les mo­difications politiques survenues après 1848. Dans le conservatisme roumain, émerge tout de même une figure intéressante, celle de Constantin Radu­lescu-Motru, auteur de Cultura româna si politi­cia­nismul (= La culture roumaine et la poli­ti­cail­le). Radulescu-Motru es­time que les Roumains, par manque d'énergie, n'ont pas transformé leur culture rurale du départ en une culture plus vaste, plus générale, plus viable, semi-urbaine, ou d'u­ne urbanité non ou­blieuse de ses racines, à la mo­de allemande. Dans cette ruralité demeurée primi­tive et en consé­quence fragilisée, des «politi­cards» et des «avocats», rusés et spéculateurs, ont instrumen­talisé des idées étrangères, occi­den­tales, ont ra­tionalisé à leur profit l'appareil étati­que, pour prendre la place des élites déclinantes et pour bar­rer la route à toute élite nouvelle, issue du peuple roumain, qui se profilerait à l'horizon.

 

 

 

Une doctrine de l'Etat démocratique paysan

 

 

 

Le socialisme roumain, enfin, est un socialisme sans ouvrier, dans un pays aux structures indus­trielles peu développées. Le poporanisme, spéci­fi­cité roumaine, élabore une doctrine de l'Etat dé­mocratique paysan, optant pour une voie non ca­pitaliste. Le poporanisme est donc bel et bien une expression de l'ethnicité rurale roumaine, or­phe­line de ses élites et haïssant les nouveaux ve­nus dans la société roumaine. Il est démocratique par­ce qu'il estime ne plus avoir d'élites tradition­nel­les ou a perdu toute confiance dans les élé­ments qui subsistent de celles-ci. Les dominants tradi­tion­nels ayant dérogé, le peuple roumain doit pren­dre son destin en mains: ses élites doivent sortir directement de ses rangs. Mais son carac­tè­re démocratique ressort également parce qu'il re­fuse toute domination des masses rurales par de nouvelles élites dans lesquelles il ne se reconnaît pas. La voie est non capitaliste parce que le capi­talisme est porté par des éléments non issus de ces masses rurales. L'idéologie poporaniste se ba­­se, au départ, sur les écrits de Constantin Ste­re, un socialiste qui a refusé le marxisme et s'est inspiré des narodniki  russes (et ortho­doxes). Le terme narodniki vient de narod (= peuple), com­me "poporanisme" vient de popor  (= peuple) (Cf. Constantin Stere, «Socialdemocratism sau po­poranism», in Viata românesca, 2, 1907-1908). Stere refuse le marxisme parce qu'il ne con­vient pas à un pays à forte dominante agraire comme la Roumanie. L'idéologie marxiste a été in­capable de produire un discours cohérent sur les masses rurales. Le modèle de l'idéologue po­pu­liste-paysan roumain est le Danemark (qui, en Grundvigt, avait eu son théoricien-poète de la ru­ralité et de la populité, initiateur du courant d'i­dées folkelig, de l'adjectif dérivé de folk, "peu­ple"). Le Danemark a su conserver intact son pay­sannat; par un réseau de coopératives, il a ren­du les petites fermes familiales viables et les a cou­plées au monde industriel. En termes plus en­thousiastes, G. Ibraileanu, un disciple de Stere, ima­gine une Roumanie démocratique, avec un Par­lement de petits producteurs et une armée de paysans-soldats, à la mode des Boers sud-afri­cains; ces chefs de famille permettraient à leurs cadets, filles et garçons, d'étudier des ma­tières cul­turellement enrichissantes, à l'université ou dans les conservatoires, générant ainsi une nou­velle élite intellectuelle ayant acquis ses quali­tés en dehors de toutes préoccupations utilitaires. Con­trairement aux conservateurs, les popora­nis­tes se considéraient comme les successeurs des ré­volutionnaires de 1848. Mais, comme les con­ser­vateurs du mouvement Junimea, ils refu­saient d'inclure dans leur vision idéale de la so­ciété, les éléments non issus des masses rurales.

 

 

 

Les piliers d'un nationalisme ethnique, farouchement

 

anti-occidental

 

 

 

Le conservatisme du mouvement Junimea, dont Radulescu-Motru fut le principal théoricien, et le poporanisme ruraliste de Stere et Ibraileanu sont les deux piliers de l'anti-occidentalisme roumain, dont la Garde de Fer sera, plus tard, un avatar ra­di­calisé. Ceci dit, Stere refusera toujours la ra­di­ca­lisation légionnaire; demeurant rationnel et fi­dèle à son «modèle danois», basant ses argu­ments sur des statistiques et sur des observations empiriques, se bornant à déplorer l'accroissement trop rapide des populations non roumaines en Rou­manie (et des Juifs en particulier), Stere res­te­ra éloigné de toutes les déformations mystiques de son socialisme agrarien.

 

 

 

Sur cette double généalogie idéologique, s'est gref­fé un antisémitisme qui, dans un premier temps, était principalement littéraire. Des figures com­me Mihail Eminescu, Aurel C. Popovici et Ni­colae Iorga effectueront, petit à petit, la syn­thè­se entre le populisme roumain, conservateur ou po­poraniste, le nationalisme inspiré des autres na­tionalismes européens et de l'antisémitisme. Par­mi les leitmotive de cette synthèse: la moder­nité, en accordant un droit égal à tous, confisque aux pay­sans pauvres, porteurs de la substance ethni­que roumaine, l'égalité des chances; la so­ciété mo­derne, impliquant la division du travail, induit un clivage entre producteurs (paysans et artisans) et «parasites» (commerçants et spécula­teurs). L'an­tisémitisme qui découle de ces res­sentiments sociaux présente toutes les nuances et gradations du genre: pour les uns (Iorga et Eminescu), les Juifs sont assimilables s'ils adoptent des «métiers productifs»; pour Stere, qui raisonne en termes ra­tionnels, la naturalisa­tion demeure possible, si les Juifs s'adaptent à la culture roumaine (ce qui re­vient en fait à adopter les mêmes métiers que les Roumains); pour d'autres, comme V. Alecsandri, B.P. Hasdeu, N.C. Paulescu et Alexandru C. Cu­za, toute vie en commun avec les Juifs est im­pos­sible. Comment justifient-ils cette exclusion sans appel? En mettant en avant, comme beau­coup d'autres antisémites européens, des citations du Talmud (Rohling, Rosenberg, Picard, etc.). Pour cette tradition anti-talmudiste, l'existence du Tal­mud dans l'héritage spirituel juif interdit l'as­si­milation et la coexistence pacifique.

 

 

 

Nicolae C. Paulescu introduit cependant des nu­an­ces: la substance populaire roumaine n'est pas tant menacée par la concurrence économique de l'élément juif que par la perte des «directives res­trei­gnantes». Une société rurale est une société «é­conome», épargnante, qui restreint ses pul­sions vers la consommation. Le rôle de la morale est de pérenniser cette propension à la restriction, pour que la société ne perde ni son équilibre ni son harmonie. A.C. Cuza introduit dans ce dis­cours des éléments tirés de Malthus: deux peu­ples, les Roumains et les Juifs, ne peuvent pas vi­vre «dissimilés» sur un même territoire, sans que n'éclate une guerre à mort.

 

 

 

Le divorce entre le peuple et l'élite

 

 

 

Pour Eminescu, la Roumanie est passée de l'o­béissance aux Turcs à l'obéissance à l'étranger (hongrois, juif ou allemand), parce qu'en 1878, au Congrès de Berlin, qui instaure l'indépen­dan­ce définitive de la Roumanie, les puissances im­posent comme clause que les non orthodoxes peu­vent acquérir la citoyenneté rou­maine, intro­dui­sant de la sorte une cassure diffici­lement sur­montable entre la ville et la campagne. Cette cas­su­re marginalise une intelligentsia bril­lante, de souche paysanne et roumanophone, très nom­breu­se et privée d'avenir parce que les postes sont déjà occupés dans les villes, par les franco­philes, les fils urbanisés et francisés des boyards (dénoncés surtout par Iorga), les Juifs, les étran­gers. L'idéal de ces laissés-pour-compte, c'est une culture authentiquement roumaine qui puisse accéder à l'universel, être appréciée dans le mon­de entier, exprimer la créativité profonde de l'âme roumaine aux yeux de tous les peuples de la pla­nète, souder la solidarité des Roumains vi­vant à l'intérieur et à l'extérieur des frontières du ro­yaume.

 

 

 

Cet idéal, les Roumains sentent qu'ils ne pour­ront le réaliser. Raison pour laquelle leur nationa­lisme, au début du XXième siècle, est le produit d'une «conscience malheureuse», de doutes et de peurs. Les Roumains ont l'impression, en 1900, que, dans le siècle qui s'annonce, ils auront le statut d'«ilotes». Heinen (pp. 86-87) résume ce pas­sage au nationalisme angoissé chez Eminescu: «[Chez Eminescu], la nation apparaît comme une essence spécifique, qui déploie ses propres re­ven­dications et a sa propre personnalité. Elle se trouve au-dessus de l'idée de liberté individuelle, ce qui veut dire qu'elle ne se constitue pas par la volonté de ses membres mais est un donné natu­rel se situant au-delà d'eux. Le sens qu'acquiert la vie individuelle d'un chacun existe par la Na­tion et pour la Nation. Le corps populaire me­nace toutefois d'être détruit à cause de la lutte des clas­ses, principe égoïste, rendant impossible le don de soi à la Nation. L'inégalité, résultant de la di­vi­sion du travail social, et les conflits qui en dé­coulent doivent être limités par la conscience d'u­ne appartenance à la Nation. Quant à A.C. Cuza, il estime que la réalité Roumanie ne réside pas dans la lutte des classes mais dans la lutte des races, c'est-à-dire dans la question de savoir si ce sont des Roumains ou des Juifs qui conduiront le pays».

 

 

 

Un vigoureux plaidoyer

 

contre la «raison pure»

 

 

 

Aurel C. Popovici introduisit dans la littérature roumaine la critique conservatrice moderne des fondements du libéralisme. Appuyée sur les tra­vaux de Burke, de Joseph de Maistre, de Gustave Le Bon, de Taine, Langbehn, Houston Stewart Chamberlain et Gumplowicz, sa démarche vise es­sentiellement à déconstruire le mythe de la rai­son pure. Heinen la résume comme suit (p. 87): «L'oeil humain n'a pas été créé pour ne regarder que le soleil. Nous ne pouvons pas éduquer nos jeunes gens pour n'être que de purs savants; nous aurions pour résultat une catégorie sociale de de­mi-cultivés ridicules, avançant des prétentions ir­réalisables [...]. La raison pure dissout tout, re­met en question les structures traditionnelles et met ainsi en danger l'intégration sociale [...]. Sans religion, les gens simples du peuple perdent leur retenue morale, la haine sociale et l'envie "ron­gent des trous" dans la vie spirituelle de la na­tion». Popovici estime que tous les maux du mon­de moderne sont réunis dans la démocratie. Par le fait qu'elle hisse les intérêts matériels de la plèbe insatiable et égalitariste au rang de source des décisions politiques, nous voyons nécessai­rement naître un monde de démagogie, de lutte des classes, orienté seulement vers la satisfaction des intérêts particuliers et éphémères. La ville mo­derne reflète d'ores et déjà, pour Popovici, cet­te dégénérescence des mœurs politiques.

 

 

 

A la décadence de la Roumanie de la fin du XIXième siècle, les nationalistes opposent, nous ex­plique Heinen (p. 89), la grandeur nationale des XVième et XVIième siècles ou évoquent les Da­ces. Les nationalistes roumains préféraient d'of­fice tout ce qui s'était passé avant 1800, les époques de simplicité patriarcale, où règnait une so­lidarité naturelle entre paysans, boyards et let­trés. L'assaut des mœurs occidentales délétères, la pénétration en Roumanie d'éléments étrangers a ruiné définitivement cette harmonie.

 

 

 

Un César lié au peuple

 

 

 

Mais les nationalistes ne veulent pas pour autant d'un retour au Moyen Age. Les innovations de la modernité, notamment dans les domaines éco­no­mique et militaire, doivent être assimilées et sou­mises à des principes directeurs pré-mo­dernes. L'évolution de la société doit être gra­duelle, mais c'est le paysannat de souche qui doit la contrôler, de façon à ce qu'il demeure toujours la classe so­ciale dominante. Pour chapeauter ce paysannat, les nationalistes réclament une monar­chie héré­di­taire, se plaçant au-dessus des classes sociales; le monarque souhaité n'est pas absolu: il devra ê­tre un César lié au peuple. A ses côtés, devra se trou­ver une oligarchie politique capable de com­pren­dre l'évolution naturelle des choses. Raison­nant sur un mode «évolutionnaire», rejet­tant toute forme de rupture révolutionnaire, A.C. Cuza et N. Iorga préconisaient une démocratie constitu­tion­­nelle, ayant pour organe législatif un parle­ment des états, calqué sur ceux de l'Ancien Ré­gime mais adapté aux impératifs de l'heure. Con­trairement à Popovici, influencé par les idéolo­gèmes sociaux-darwiniens, Cuza et Iorga préco­ni­saient l'intervention de l'Etat, notamment dans les domaines de l'enseignement et de la forma­tion professionnelle, parce que le retard économique de la Roumanie était dû, pour une bonne part, à l'absence de corps de métier, de maîtres éduca­teurs, de gildes, d'instituts agronomiques. Emi­nes­cu, Iorga et Cuza réclamaient le partage des grands domaines au profit de groupes, fami­liaux ou villageois, composés de petits paysans. Cette re­vendication distingue les nationalistes des con­servateurs, pour qui l'Etat agrarien doit être dirigé par les gros propriétaires et pour qui l'indivi­dua­lisme de type occidental ne doit pas être abandon­né et/ou éradiqué au profit d'un don total de la personne à la nation.

 

 

 

L'influence de la revue «Samanatorul»

 

 

 

Après la première guerre mondiale, quand la don­ne change de fond en comble, le poporanisme de Stere se transforme en «taranisme» (de "tsa­ra", paysan). Le néo-nationalisme gardiste prend une coloration mystique, absente chez Iorga et Cu­za. Le projet de fonder un système d'éducation ra­tion­nel, mettant l'accent sur l'agronomie et le dé­veloppement des corps de métier, cède le pas, dans l'idéologie gardiste, à une éducation de type militaire (milice de Dieu) et activiste. Ce glisse­ment vers le mysticisme armé et politisé, s'est o­pé­ré, graduellement, par l'intermédiaire d'une re­vue très lue, Samanatorul  (= Le Semeur), dont Ni­colae Iorga fut pendant un certain temps le ré­dacteur-en-chef. Le «samanatorisme» esquissa, dans le monde des lettres roumain, l'image d'un vil­lage où vivent deux peuples, selon des modes très différents. D'un côté, la Roumanie patriar­ca­le, avec ses boyards, ses lettrés, ses prêtres et ses paysans; de l'autre, les étrangers et les parvenus so­ciaux d'origine non roumaine, qui ne vivent que pour satisfaire leurs intérêts et leurs pulsions.

 

 

 

Dans l'orbite de cette vision samanatoriste, d'abord circonscrite à la littérature, naît un ro­man, de la plume de Bucura Dumbrava, Haiducul (= L'Haiduc). Dumbrava y décrit une société dé­terminée par des conflits qui ne sont pas de nature sociale mais ethnique. Les Phanariotes grecs ont pu régner sur les Valaques et les Moldaves parce que l'élite nationale était désunie. Précisément par­ce qu'elle était étrangère, la domination des Pha­nariotes était arbitraire. L'idéal de Dumbrava est le Prince Vlad Tepes (1448-1476), souverain im­placable mais national. Dans son roman, les ban­des de brigands que sont les Haiducs, repré­sentent le renouveau national. Ils se placent déli­bérément en dehors des lois, pour faire triompher le véritable droit national, oblitéré par les domi­nants étrangers. Les paysans considèrent les Hai­ducs comme leurs protecteurs et leurs sau­veurs; ils les nourrissent et les cachent comme des par­ti­sans. A l'intérieur des bandes, les membres sont liés par serment et se placent sous l'autorité d'un chef aux qualités exceptionnelles, le Capitan. Tra­hir le Capitan  implique non seule­ment une entor­se aux règles du groupe mais est un crime contre l'ensemble du peuple roumain et mérite, de ce fait, la mort. Dans ce roman, lu par des quantités d'adolescents roumains, se retrou­vent l'éthique na­tionale et l'esprit de corps de la Garde de Fer, expression d'un nationalisme nou­veau par rap­port à celui, littéraire et idéologique, des Emines­cu, Iorga et Cuza, fondateurs du Parti National-Dé­mocrate. A l'intérieur de ce parti, dans les an­nées 20, nous trouvons une aile radi­cale, dirigée par Corneliu Sumuleanu et Ion Zelea-Codreanu. De cette aile radicale naîtra, après une rupture survenue quelques années plus tard, la Légion de l'Archange Michel.

 

 

 

(Nous donnons ici une vision assez incomplète du livre d'Armin Heinen; les chapitres sur l'é­volution des doctrines nationalistes en dehors de la Légion et de la Garde sont importants eux aus­si; notamment, quand il évoque, dans l'œuvre de Mihail Maïnolesco, le passage du néo-libéra­lisme technocratique roumain à la doctrine du parti uni­que et du corporatisme moderne. Maïnolesco a eu une influence très importante en Allemagne, en I­talie, dans la France de Vichy et dans la Po­litieke Akademie de Victor Leemans à Lou­vain en Flan­dre. Maïnolesco a donné une di­men­sion euro­péen­ne à l'idéologie roumaine. Nous y revien­drons).

 

 

 

Robert STEUCKERS.    

 

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Balkan: Europäische Perspektive

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Balkan: Europäische Perspektive, aber keine voreiligen Beitritte
 
Von Andreas Mölzer /
http://www.zurzeit.at/  März 2007
 

Bei ihrem jüngsten Treffen haben die Außenminister der Mitgliedstaaten der Europäischen Union wieder einmal die Beitrittsperspektive für die Staaten des sogenannten Westbalkans bekräftigt. Zweifelsfrei sind Staaten wie Serbien, Montenegro oder Mazedonien ein Teil Europas, auch wenn sie jahrhundertelang vom Osmanischen Reich besetzt waren und deshalb auch erst relativ spät die politische Bühne betreten haben. Allerdings darf Brüssel nicht den Fehler der letzten, überhasteten Erweiterungsrunde wiederholen und jene Balkanstaaten, die noch nicht EU-Mitglieder sind, in Bausch und Bogen aufnehmen oder ihnen voreilig die Mitgliedschaft versprechen. 


Derzeit erfüllt als einziger Staat in der Region nur Kroatien die Kopenhagener Kriterien, weshalb Agram auch aufgenommen werden sollte. Wann aber beispielsweise Serbien EU-reif sein wird, läßt sich heute beim besten Willen nicht sagen. Daher sollte Serbien, das Schlüsselland am Balkan, wie auch die übrigen Balkanstaaten, die schon laut an die EU-Türe anklopfen, erst nach entsprechend langen Vorlauffristen und erst dann, wenn an deren Beitrittsreife keine Zweifel mehr bestehen, in die EU aufgenommen werden. 


Die vielzitierte europäische Perspektive für all jene Balkanstaaten, die in die EU drängen, ist vor allem als ordnungspolitische Aufgabe für Brüssel zu sehen. Denn mit dem Zusammenbruch der alten Ordnung, dem Untergang Jugoslawiens, einem Kunstprodukt der Pariser Vororteverträge, entstand am Balkan ein sicherheitspolitisches Vakuum, das von den Vereinigten Staaten und ihres militärischen Arms, der NATO, gefüllt werden könnte. Der Beitritt der Baltischen Staaten, Polens oder Tschechiens zum nordatlantischen Bündnis zeigte bereits die Folgen der aggressiven US-Außenpolitik auf europäischem Boden. Das Verhältnis zu Rußland, das der natürliche strategische Partner der EU ist, wurde belastet, und Warschau oder Prag fühlen sich in ihrer Außen- und Sicherheitspolitik weniger ihren „europäischen Partnern“, sondern vielmehr der Befehlszentrale in Washington verpflichtet. Daher kann das mögliche Festsetzen einer fremden Macht an seiner südöstlichen Flanke für Europa nicht von Interesse sein. 
Das Wahrnehmen seiner ordnungspolitischen Aufgabe am Balkan ist auch ein Testfall dafür, wie es um die Gemeinsame Außen- und Sicherheitspolitik der EU wirklich bestellt ist. Noch vor eineinhalb Jahrzehnten, als das alte Jugoslawien in seine ethnischen Bestandteile zerfiel, zeigten sich auf bittere Weise jene Bruchlinien zwischen Deutschland, Frankreich und Großbritannien, die auf die alten, im späten 19. Jahrhundert fußenden Bündnisse zurückgehen. Als Kroatien seine Unabhängigkeit erklärte, fand Agram in Deutschland und Österreich, personifiziert durch die Außenminister Hans Dietrich Genscher und Alois Mock, die engagiertesten Unterstützer seiner Eigenstaatlichkeit, während Frankreich und Großbritannien ihren „serbischen Verbündeten“ auf dem diplomatischen Parkett alle erdenkliche Hilfe zukommen ließen. Als Folge dieses unwürdigen Schauspiels wurde die ganze Welt Zeuge der sicherheitspolitischen Ohnmacht Europas. 


Und nicht zuletzt ist es ein Gebot der politischen Vernunft, daß die EU am Balkan, der – wie heute der Kosovo heute beweist – noch lange nicht befriedet ist, ihre außen- und sicherheitspolitischen Ankündigungen mit Leben erfüllt. Schließlich ist der Balkan anders als der Kongo, wo die Europäische Union im vergangenen Jahr für Ordnung und Stabilität sorgen sollte, ein Teil Europas.

06:15 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook