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mardi, 09 mars 2021

La Sibérie, ventre mou de la Russie?

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La Sibérie, ventre mou de la Russie?

Par Tommaso Minotti

http://osservatorioglobalizzazione.it/

77% du territoire russe est formé par une Sibérie sans réelles frontières. Dans cette région inhospitalière, où l'on ne compte que trois habitants au kilomètre carré, se concentrent 70 % des ressources pétrolières et gazières de la Fédération de Russie. Cela fait de la Sibérie une région stratégiquement importante pour Moscou. Le problème est que de plus en plus de Sibériens se sentent exclus des accords commerciaux lucratifs que la Russie et la Chine scellent dans la région. Ce sentiment provoque du ressentiment, surtout envers Moscou, qui est considérée comme une force étrangère, capable seulement d'exploiter la région sans rien donner en retour. Et c'est dans ce contexte potentiellement dangereux pour l'intégrité territoriale et le bien-être économique de la Russie que se développent les pulsions régionalistes, déjà présentes dans l'histoire mais restées longtemps en sommeil.

Contexte historique : quand la Sibérie ne se considérait pas comme russe

Déjà à l'époque tsariste, il y a eu des dérives séparatistes et régionalistes de la part d'éléments de la haute société sibérienne. Le premier d'entre ces contestataires fut Nikolaï Novikov, qui a émis une théorie sur une Sibérie indépendante dès 1838. En 1863, il y a eu une tentative de rendre cette immense région autonome, mais elle a été réprimée. Les principaux théoriciens de cette expérience, certes irréaliste, ont été avant tout Afanasy Shchapov, mais aussi Potanine et Yandritsov. Le premier, surtout, était le principal théoricien de l'oblstnichestvo, c'est-à-dire du régionalisme aux impulsions indépendantistes.

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Un partisan de la Sibérie indépendante fut également l'un des penseurs et fondateurs de l'anarchisme : Bakounine. Pendant la guerre civile russe qui a suivi la révolution d'octobre, les régionalistes sibériens se sont rangés du côté des Blancs, plus précisément de l’Amiral Koltchak. Mais ils ont d'abord créé un gouvernement autonome de Sibérie de courte durée, basé à Tomsk. Le gouvernement a été de courte durée car il a été décidé de soutenir les ennemis des bolcheviks sans essayer d'obtenir l'indépendance de la Sibérie.

À l'époque soviétique, les autorités centrales ont décidé de diviser les provinces de ce territoire sans fin afin d'avoir un contrôle plus efficace sur l’ensemble des terres sibériennes. Les poussées autonomistes semblaient perdre du pouvoir. Cependant, avec l'effondrement de l'URSS et l'arrivée de Poutine au pouvoir, il y a eu un changement de politique dans l'administration du territoire sibérien. Il a été décidé de fusionner les oblasts, ce qui s'avère contre-productif car les velléités régionalistes refont alors surface.

Un danger pour la Russie ?

Les Sibériens développent un certain ressentiment envers Pékin et Moscou, même s'ils ont été culturellement influencés à la fois par la Chine et, bien sûr et dans une bien plus large mesure, par la Russie. En ce sens, nous assistons à une véritable floraison des activités régionalistes dans les domaines les plus variés.

Manifestations, séminaires, propositions de référendum sur une plus grande autonomie de la Sibérie et diverses autres initiatives en ligne. Le web est un véhicule efficace pour les mouvements régionalistes, dont le plus important est celui qui s’est donné pour nom les "Vrais Sibériens". Mais la montée du régionalisme ne se limite pas au web.

Un séminaire sur l'indépendance de la Sibérie a été présenté à l'université d'Irkoutsk. Il aurait été parrainé par un département américano-sibérien, mais aucune information plus détaillée n'est disponible à ce jour. L'exposition d'art "Les États-Unis de Sibérie" a fait beaucoup de bruit, mais seulement en Russie. A côté de ces initiatives culturelles, il y a des mouvements politiques. En plus des initiatives nées sur Internet, il existe également des organisations plus profondément ancrées dans le territoire, dont la plus importante est le ‘’Mouvement sibérien’’. Enfin, il convient de noter un fait intéressant, même s'il n'en est qu'à ses débuts. De plus en plus de gens dans cette partie de la Russie se disent "Sibériens" et de moins en moins "Russes". Des signes petits mais révélateurs de quelque chose qui bouge.

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Drapeau de la région de Novosibirsk.

Protestations en Sibérie

Mais il n'y a pas que les initiatives culturelles et les mouvements politiques dont l'influence réelle est difficile à établir. Des manifestations ont également eu lieu, presque toutes avec un épicentre à Novossibirsk. En 2011 et 2012, la ville a été touchée par des manifestations dont le moteur était également régionaliste. La colère contre Moscou et la politique du Kremlin, perçue comme éloignée des intérêts des Sibériens, était particulièrement vive. En 2014, une marche pour la fédéralisation de la Sibérie a été interdite par les autorités gouvernementales. Un autre symptôme qui indique que quelque chose bouillonne dans la marmite. Enfin, en juillet 2020, à Khabarovsk, entre cinquante mille et quatre-vingt mille personnes sont descendues dans la rue pour protester contre l'arrestation du gouverneur Furgal. Il était très aimé par son propre peuple, mais n'était pas apprécié par les dirigeants du Kremlin, qui le considéraient comme déloyal. La foule, bien que n'ayant pas déclaré d'intentions régionalistes, était cependant hostile à Moscou et à l'État central. Enfin, autre signe de l'attention croissante du gouvernement central, deux blogueurs régionalistes nommés Loskutov et Margoline ont été mis sous étroite surveillance par les autorités judiciaires.

Une question politique

Mais quelles sont les caractéristiques du régionalisme sibérien, particulièrement fébrile à Omsk. Cette ville est devenue le nouveau centre autonomiste de la région. Revenons sur les particularités des poussées qui commencent à se produire en Sibérie. Tout d'abord, il faut dire que le soutien aux nombreuses initiatives qui ont été discutées ci-dessus est politiquement transversal. Le régionalisme n'est pas hégémonisé par un seul parti mais est soutenu par diverses composantes hétérogènes, pour l'instant nettement minoritaires, émanant de presque toutes les organisations politiques présentes sur le territoire. Une autre caractéristique est l'opposition à la politique financière de Moscou dans la région. Comme la région est la principale source de richesse de la Russie, la Sibérie souhaite une baisse des impôts. En bref, on croit, en Sibérie, que les relations ne sont pas équilibrées mais, au contraire, nettement déséquilibrées en faveur de la Russie occidentale. Enfin, le régionalisme bénéficie également d'un certain soutien dans les institutions. On l'a vu dans l'affaire Furgal, où la colère contre la destitution d'un homme politique populaire s'est combinée à une intolérance mal dissimulée envers Moscou, avec des connotations clairement régionalistes.

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Pour l'instant, le Kremlin a réagi en essayant de centraliser le plus possible. Bien que les impulsions régionalistes n'aient pas été jusqu'à présent particulièrement puissantes ou importantes, il est toujours nécessaire de garder un œil sur la situation en Sibérie. Région cruciale pour la Russie, qui tire l'essentiel de ses richesses de cette terre sans limites et peu peuplée, la Sibérie risque de devenir la prochaine cible américano-occidentale pour lancer l'assaut contre la Russie qui a d'abord vu l'effondrement de l'Ukraine puis du Belarus dans son environnement proche. La nouvelle administration américaine veut continuer sur la voie belliciste déjà empruntée par Obama, dont elle a recyclé de nombreux ex-collaborateurs : elle entend, sans fléchir, exercer une pression maximale sur la Russie.

Sans oublier le fait que la Chine bénéficierait elle aussi de la faiblesse de la Russie dans la région. Surtout parce que le Céleste Empire a déjà l’avantage d’une proximité géographique qui facilite l'exercice de son influence. Mais pour l'instant, ce ne sont que des hypothèses. Il n'en reste pas moins que le régionalisme sibérien fait son retour.

À propos de l'auteur / Tommaso Minotti

Né en Brianza en 2000. Étudiant en histoire à l'université de Milan, il est passionné par la politique nationale et internationale. Il s'intéresse principalement aux relations entre les nations. Il s'intéresse particulièrement aux questions sociales et économiques qui lient les différents États et garde toujours un œil sur l'histoire. Il collabore également avec L'Antidiplomatico où il gère l'espace "Un altro punto di vista" (‘’Un autre point de vue’’).

Que penser de la collapsologie ?

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Que penser de la collapsologie?

par Jacques GEORGES

51QC3BbFMBL._SX366_BO1,204,203,200_.jpgPlutôt du bien au départ, car l’homme de droite entend plus volontiers les pessimistes que les béats. Plutôt du mal à l’arrivée, car le pessimisme occidental tend à se perdre en masochisme, et le collapse final est (comme nous allons le voir) trop moche pour être accepté ou même subi, voire même pensé (sujet de la collapsosophie chère à Pablo Servigne). La collapsologie, c’est la version crue de la déclinologie entamée au début des années 1970 avec les travaux du Club de Rome sur les limites de la croissance. On est loin de l’univers doucereux de l’écologie officielle, écolo-Bisounours, qui parle de croissance verte, une consolation assez dérisoire.

Il existe plusieurs lectures du phénomène, en partie indépendantes des clivages politiques traditionnels. En voici deux, opposées et dignes d’intérêt :

La première est critique, voire négatrice du concept de collapsologie. Pascal Bruckner, homme de gauche de droite (un peu façon Régis Debray), auteur de plusieurs livres sur le sujet et d’un CD intitulé Fanatisme de l’apocalypse, voit dans l’écologie apocalyptique la version contemporaine et pseudo-scientifique d’une vieille maladie de l’humanité, le catastrophisme. Le catastrophisme mêle religion et politique.

Commençons par la composante religieuse. On y trouve (I) la résurgence du mythe du péché originel, (II) l’apparition d’une nouvelle hérésie néo-païenne et post-chrétienne autour de Gaïa, à la fois divinité, victime et nouveau Jésus, (III) un regain de puritanisme chrétien venu du Nord, (IV) une régression infantile vers la terreur de Dieu de l’humanité originelle. Une jolie collection !

Dans la composante politique, on trouve (I) des traces de romantisme allemand, (II) du culpabilisme germanique façon Hans Jonas, (III) la naissance d’une alternative mobilisatrice de masse au défunt marxisme, (IV) un activisme brouillon, infantile et dérisoire (bien incarné par l’inénarrable Greta Thunberg), (V) un mouvement néo-primitif de défiance envers la technique, (VI) la tentation de la dictature par la peur de masse, enfin (VII) la manifestation d’un fatalisme néo-primitif, la séduction morbide du désastre et de la fin du monde.

Au total, selon cette interprétation, l’écologie apocalyptique se ramènerait à un amas politico-religieux, néo-primitif, immonde et incapacitant. À ne surtout pas prendre, sinon au sérieux, du moins en considération.

9782738132529.jpgLa seconde, portée en France notamment par Jean-Marc Jancovici, un ingénieur pas idéologue qui appelle un chat un chat et ne cherche pas à plaire, est d’un avis opposé. Elle part de quelques faits simples et solides : (I) il ne peut y avoir de croissance sans limite dans un monde fini, (II) la productivité du travail, la production industrielle et agricole, la prospérité économique, le niveau de vie, la puissance des nations et la croissance sont très étroitement liées à la consommation de combustibles fossiles de plus en plus rares, (III) les substituts à ces combustibles fossiles (énergie éolienne, énergie solaire), peu denses et consommateurs d’espace et de matières premières, ne sont pas de taille à compenser l’épuisement progressif mais rapide des premiers, (IV) la croissance verte, neutralité carbone et autres salades étiquetées écolo sont en large partie des impasses ou des illusions, (V) l’émission de gaz à effet de serre résultant de la combustion des combustibles fossiles contribue au réchauffement climatique, (VI) lequel, joint à la crise planétaire de la biodiversité, à la pollution de la terre et des eaux, au réchauffement et à l’acidification des océans, et de façon générale à la surexploitation de la planète entraîne des dérèglements climatiques, perturbations et boucles de rétroaction inévitables, croissantes, dangereuses et difficilement maîtrisables, enfin (VII) le nucléaire est le seul amortisseur (partiel et non dénué d’inconvénients) possible. Je résume outrageusement.

Il en déduit la nécessité, à échéance très courte (quelques années), d’une décroissance sévère à l’échelle mondiale, acceptée et gérée si possible, brutalement subie à défaut et de toute façon. Il s’agit pour l’humanité de ne plus consommer dorénavant qu’à hauteur du durable, du reconstituable, du climatiquement supportable. Or nous sommes huit milliards. Attachez vos ceintures, car ceci signifie en pratique : réalisme de choc, abandon des fausses solutions « vertes », diminution suivie d’arrêt des émissions de gaz à effet de serre, rationnement sévère de l’énergie et des matières premières, chute vertigineuse de la productivité du travail, limitation sévère ou remise en cause radicale de la civilisation industrielle, baisse des rendements et de la production agricoles, baisse sévère du niveau de vie pas seulement occidental, chute démographique et stagnation matérielle sur l’ensemble du globe, retour à la terre et déréliction des grandes villes et métropoles, remise en cause radicale du libre-échange, révolution culturelle mondiale pour vivre heureux avec moins de moyens. La diète radicale, le changement de civilisation, la fin de l’aventure moderne, ou la mort. Rien que cela !

On s’étonne qu’avec un tel diagnostic ce porteur de très mauvaises nouvelles ne soit pas déjà assassiné au coin d’un bois ou au minimum chassé des médias. Au contraire, il est largement acclamé, notamment dans les milieux d’affaires. Il est loin d’être seul. Certains, parfois célèbres (l’ancien ministre Yves Cochet), sont plus brutaux encore, quoique à la mode aimable. Hommage au réalisme et à un diagnostic aussi solide que terrible ? Inclination à se faire peur sans y croire tout à fait ?

Je pose la question : Qui a raison ?

Jacques Georges

10:08 Publié dans Actualité, Définitions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, collapsologie, déclin, définition | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 06 mars 2021

Derrière la Covid, l'Encerclement Total de l'Europe

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Cafe Noir N.13

Derrière la Covid, l'Encerclement Total de l'Europe

Café Noir – Un Autre Regard sur le Monde.
 
Émission du Vendredi 5 mars 2021 avec Pierre Le Vigan & Gilbert Dawed.
 
Émission spéciale avec comme invités Robert Steuckers & Gabriele Adinolfi.
 
Robert Steuckers, 65 ans, est dissident depuis l'âge de 14 ans. Il est traducteur diplômé de langues allemande et anglaise, animateur du blog Euro-Synergie: https://tinyurl.com/3k82r68v
 
Gabriele Adinolfi est un activiste et théoricien politique italien. Il anime les think tank Centro Studi Polaris et EurHope qui ont aboutit au projet de l’Académie Europe (2020). Le but de cette initiative est de créer une élite apte à influer sur la politique européenne à l’échelle continentale.
 
Orchestre Rouge – L’Internationale Terroriste des Années de Plomb de Gabriele Adinolfi chez AVATAR Éditions est disponible ici: https://tinyurl.com/fpj5at6j
 
Disponible sous peu, toujours de Gabriele Adinolfi et chez AVATAR Éditions, la réédition revue et augmentée de Nos Belles Années de Plomb.
 

Les sectes de l'Occident et leurs liens avec Trump, Biden et la géopolitique

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Les sectes de l'Occident et leurs liens avec Trump, Biden et la géopolitique

Par Cristiano Puglisi

Ex : https://blog.ilgiornale.it/puglisi/

Copertina-2-2021-Prima-1-scaled-1-212x300.jpgQuelles sont les sectes religieuses de l'Occident? Et quelle est leur influence au niveau géopolitique? C'est le sujet du dernier numéro, le 62ème, de Eurasia - Rivista di studi geopolitici, récemment publié et dont le titre est précisément "Les sectes de l'Occident". D'autre part, le ton utilisé récemment par certaines personnalités du monde politique et religieux de l'Occident sont apparus exaspérants et, d'une certaine manière, carrément sectaires. Un exemple est celui des lettres envoyées, en juin puis en octobre 2020, par Monseigneur Carlo Maria Viganò, ancien nonce apostolique du Saint-Siège aux États-Unis, au président américain de l'époque, Donald Trump. Lettres dans lesquelles ils parlent, en relation, pour ceux qui suivent ce blog, avec la conception désormais bien connue d'un "Grand Reset" : on, y évoquait un affrontement entre les "enfants de la Lumière" et les "enfants des Ténèbres", ces derniers s'identifiant à la faction mondialiste soutenant un retournement de type numérique et écologique dans le sillage de la pandémie de la Covid-19. Des tons tout aussi apocalyptiques sont souvent apparus dans la communication d'une partie notable des partisans de l'entrepreneur de New York, qui se réunissent autour d'acronymes tels que "Qanon".

"La propagande trompeuse - explique le directeur d'Eurasia, le professeur Claudio Mutti - n'a fait que raviver et relancer le motif de l'affrontement entre les enfants de la Lumière et les enfants des Ténèbres, qui est un leitmotiv bien ancré dans la mythologie politique américaine. Les enfants de la Lumière et les enfants des Ténèbres est en fait le titre d'un pamphlet écrit en 1944 par un théologien réformé pour représenter le duel existentiel alors en cours entre les États-Unis et l'Europe. Le thème était d'origine biblique, mais il avait déjà eu une large diffusion grâce à la Theosophical Society (fondée en 1875 à New York) et à la production littéraire du célèbre magicien Aleister Crowley, qui s'était installé à New York à la veille de la Première Guerre mondiale. La formule du "Grand Réveil", présentée par les trumpistes américains et les milieux pro-trumpistes européens comme désignant la force des idées alternative au projet mondialiste de la "Grande Restauration" (« Great Reset »), est également née dans les milieux sectaires nord-américains. Au XVIIIe siècle déjà, le pasteur Jonathan Edwards, en rappelant au "nouvel Israël" américain l'alliance conclue avec Yahvé, avait déclenché une vague de fanatisme millénariste dans toute la Nouvelle-Angleterre avec ses sermons enflammés: le mouvement du Grand Réveil (lequel, rappelons-le, fut suivi d'un deuxième, d'un troisième et d'un quatrième "Grand Réveil")".

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Dans le nouveau numéro d'Eurasia, l'accent est mis tout particulièrement sur les États-Unis d'Amérique. En fait, dès ses origines, dans ce pays aux dimensions continentales qui est considéré comme "la plus grande démocratie du monde" et la patrie de la technologie, les sectes semblent se développer sans relâche. Il est donc naturel de supposer qu’existe un lien avec le protestantisme.

"Le principe fondamental du luthéranisme - observe Mutti - est le libre examen des Écritures, seule source et seule norme de la foi. Il est inévitable que la faculté attribuée au croyant individuel d'interpréter les Écritures et le rejet d'un magistère religieux imposé de l'extérieur donnent lieu à une pluralité de doctrines divergentes. Mais plus qu'en Europe, cette conception individualiste, anti-autoritaire et anti-hiérarchique trouve son environnement dans cette "demeure de la liberté" (Amérique) que Thomas Jefferson oppose à la "demeure du despotisme" (Europe). Dans un environnement dépourvu d'histoire et de traditions, où les populations indigènes ont pu être facilement exterminées, le protestantisme pouvait librement développer sa tendance congénitale au fractionnement et produire cette multitude de "dénominations" confessionnelles qui caractérise le panorama religieux américain".

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Des sectes de nature confessionnelle, donc, qui, comme prévu, ont acquis au fil du temps une pertinence géopolitique.

Il a été observé", poursuit le directeur d'Eurasia, "que les "nouveaux mouvements religieux" les plus diffus - comme on appelle modestement de nombreuses sectes, des Mormons à la Scientologie - sont nés, pour la plupart, aux États-Unis, tandis que d'autres groupes sectaires, nés en Europe ou en Asie, accroissent considérablement leur influence mais uniquement  après le débarquement de leurs "maîtres" en Amérique. C'est le cas de l' « Association internationale pour la conscience de Krishna », de la secte du révérend Moon, des adeptes, vêtus d'oripeaux de couleur orange, de Rajneesh ou de quelque branche dégénérée de l'ésotérisme islamique. L'importance du phénomène sectaire, d'un point de vue géopolitique, est évidente si l'on considère que l'influence exercée par les Etats-Unis a souvent pour intermédiaire les sectes qui sont nées aux Etats-Unis ou qui sont suivies par les milieux politiques américains. Suite à la victoire électorale de Bolsonaro (qui a été baptisé dans les eaux du Jourdain selon une cérémonie évangélique et a pris le nom de "Messias"), Eurasia a publié une étude sur l'influence prédominante exercée au Brésil par la secte évangélique, née du "Grand Réveil" nord-américain. Mais on retrouve une influence similaire de la même secte aux États-Unis, où, en son temps, Trump a été béni par des pasteurs évangéliques et présenté comme un messie, ou un "nouveau Cyrus" qui allait libérer le peuple d'Israël, c'est-à-dire les "vrais chrétiens" américains, de la captivité babylonienne".

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L'actuel président Joe Biden se dit catholique. Pourtant, même dans son cas, les relations avec le monde sectaire ne manquent pas.

En 2014, conclut le Prof. Mutti, "en participant en tant que vice-président des États-Unis à l'allumage de la Menorah nationale et en exaltant "l'héritage juif, la culture juive, les valeurs juives" comme une partie essentielle de l'identité américaine, Joe Biden a explicitement fait référence à l'enseignement du rabbin Menachem Mendel Schneerson, chef de la secte Chabad Lubavitch, à qui il a souhaité "Que vous croissiez tous en force, toujours en force". De plus, la secte des Lubavitcher a de nombreux adeptes dans l'environnement politique américain. En 1983, le Congrès et le président des États-Unis ont décerné au rabbin Schneerson la décoration de l'honneur nationale et ont décrété que le jour de sa naissance serait proclamé "Journée de l'éducation et du partage". En 1994, à l'occasion de l'anniversaire de la déclaration Balfour (2 novembre), les deux chambres des États-Unis ont approuvé à l'unanimité l'attribution posthume de la médaille d'or du Congrès américain à Rebbe Schneerson, en reconnaissance de ses "contributions exceptionnelles à l'éducation mondiale, à la morale et à ses importantes actions caritatives". Lors de la cérémonie de remise de la médaille, le président Bill Clinton a déclaré : "L'éminence de feu Rebbe en tant que leader moral de notre nation a été reconnue par tous les présidents depuis Richard Nixon". Dans la lignée de ses prédécesseurs, l'actuel président américain peut se targuer d'une longue familiarité avec les Lubavitcher. Dès 2008, David Margules, président de Chabad Lubavitch du Delaware, a exprimé l'enthousiasme de la secte pour les positions pro-sionistes de Biden en ces termes : "Il a acquis la réputation d'être un fervent défenseur d'Israël".

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vendredi, 05 mars 2021

Le projet « Océan Transparent »

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Le projet « Océan Transparent »

Par Giovanni Caprara

Ex : https://www.eurasia-rivista.com

Le scénario géopolitique contemporain a obligé les décideurs à augmenter les ressources consacrées à la lutte anti-sous-marins. Les sous-marins opèrent dans des environnements critiques, tels que les eaux profondes, peu profondes et troubles, parfois en l'absence totale de spécifications sur les relevés qu'ils surveillent. Pour permettre au submersible de fonctionner dans un silence absolu, les sonars classiques ne sont pas suffisants, mais il est nécessaire d'utiliser des solutions basées sur les sonars bistatiques. Afin de garantir les plus hauts niveaux d'efficacité, le projet BiSS (Bistatic Sonar System) est désormais opérationnel. La caractéristique des sonars bistatiques est qu'ils ont une source et un récepteur séparés, alors que les sonars "traditionnels" sont monostatiques, c'est-à-dire que l'émetteur et le récepteur sont dans la même position. Le BiSS est le développement d'une solution basée sur des algorithmes innovants, capable d'identifier un objet immergé dans des environnements critiques, qui peut surmonter les réflexions, les distorsions et le bruit des signaux, hostiles à la bonne exécution de la mission d'un sous-marin. Le BiSS permet la reconstruction d'environnements submergés en 3D avec une représentation claire et réaliste, grâce à la technique d'apprentissage automatique des systèmes informatiques embarqués. Fondamentalement avec un signal de transmission "ping", l'augmentation de la distance de détection passive est améliorée, augmentant ainsi l'efficacité des applications de la tactique ASW, la guerre anti-sous-marine (Anti Submarine Warfare). Cette innovation rend l'arme submergée encore plus meurtrière, il était donc nécessaire d'améliorer la capacité de la lutte ASW.

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Le système de découverte et de surveillance acoustique ULISSES, conçu par Leonardo, offre des capacités supérieures pour la guerre sous-marine, car il est capable de contrôler simultanément jusqu'à 64 bouées sonores opérationnelles, qui, associées au sonar de profondeur, améliorent la fonctionnalité multistatique. ULISSES est un système acoustique innovant optimisé pour tous les types de plates-formes à voilure fixe et tournante, y compris les aéronefs sans pilote. Un premier test des capacités du nouveau système acoustique ULISSES pour la recherche et le suivi des sous-marins a eu lieu au large des côtes italiennes, avec des résultats positifs. Des bouées acoustiques, ou bouées sonores, ont été mises à l'eau par un navire de guerre et le système a identifié rapidement et précisément l'ensemble des cibles sous-marines représentées par un simulateur de cible acoustique. Le système a automatiquement marqué les coordonnées de l'objet cible sur la console de l'opérateur à bord du navire, fournissant un scénario en temps réel de l'environnement sous-marin, à la fois en eau peu profonde et en eau "bleue", c'est-à-dire océanique. Un autre essai a permis de tester la fonctionnalité d'ULISSES en conjonction avec le sonar de profondeur HELRAS, ce qui a permis d'augmenter la portée de la découverte et de la gestion des cibles sous-marines. Tout cela a permis de terminer la phase de développement, et de commencer la production, notamment pour le marché international. Le système ULISSES (Ultra-LIght SonicS Enhanced System) s'est révélé être un système performant et fiable, capable de fonctionner de manière transparente avec une résolution maximale, en utilisant des sources d'informations acoustiques pour fournir des données précises sur les unités sous-marines potentiellement hostiles. Le système ULISSES a été développé sur la base du succès du système acoustique OTS-90, qui a été conçu et développé pour les hélicoptères NH90 italiens et néerlandais.

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Ce nouveau produit pose le problème de la vulnérabilité des sous-marins SSBN, armés de missiles balistiques nucléaires. Actuellement, en attendant que les missiles supersoniques soient régulièrement mis en ligne, les SSBN représentent à la fois la dissuasion et la principale arme pour d'éventuelles représailles. Les sous-marins américains de la classe Ohio, semblent être les plus silencieux de la planète, et lorsqu'ils naviguent en patrouille, ils sont pratiquement indétectables, et il n'y a aucune menace crédible connue pour leur survie. Il ne semble pas en être de même pour les sous-marins lance-missiles des autres pays : la flotte russe de SSBN est plus bruyante que son homologue américaine ; pire encore, les SSBN chinois, de type 094, restent assez bruyants. En fait, leur survie dans des environnements hautement conflictuels peut être mise en doute. La future génération de SSBN américains, la classe Columbia, devrait être encore plus silencieuse que celle de l'Ohio, car au lieu d'utiliser les engrenages mécaniques plus bruyants des sous-marins actuels, ils seront entraînés par un moteur électrique. Cela rendra les unités submersibles non seulement plus silencieuses, mais aussi plus durables. Les systèmes d'entraînement électrique ont une plus grande redondance intégrée, ce qui rend moins probable qu'une seule arme puisse désactiver tout le système d'entraînement. Un propulseur ultra silencieux est déjà opérationnel : il s’appelle AIP, Air Independent Propulsion, mais il semble avoir quelques limites. Il est basé sur des cellules utilisant de l'oxygène et de l'hydrogène liquides stockés dans une poudre d'hydrure métallique. L'AIP est enfermé dans un conteneur isolé et suspendu de manière à rendre la transmission des vibrations et du bruit pratiquement nulle, car il n'y a pas de pièces mobiles. Le nouveau système AIP, en réduisant la signature acoustique et en augmentant la portée des sous-marins conventionnels, améliore donc leurs capacités de combat. Le propulseur obligera les décideurs militaires à une analyse plus minutieuse pour les missions impliquant un contrôle côtier, où la supériorité des AIP vaudrait la peine d'approcher les eaux territoriales adverses sans être détectées. Au contraire, les nouveaux bateaux à pile à hydrogène ne sont pas utilisables dans les océans, où les SSBN ou SSN confirment leur validité.

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Le précurseur du système ULISSES, est l'US SOSUS : un ensemble de postes d'écoute sous-marins pour la surveillance acoustique passive. Ils sont situés entre le Groenland et le Royaume-Uni, dans une zone appelée "GIUK gap" (Greenland Iceland United Kingdom Gap). Il est composé d'une série d'hydrophones placés au fond de l'océan, et est, théoriquement, capable d'écouter le passage des sous-marins russes, mais depuis la fin de la guerre froide, il est utilisé à des fins de recherche pour les naturalistes. À l'heure actuelle, les États-Unis sont le seul pays à disposer d'une capacité de guerre sous-marine telle qu'elle rend la plupart des navires adverses vulnérables. En fait, la défense de l'Amérique du Nord peut rendre l'océan "transparent". L'importance des routes à suivre pour arriver dans la zone d'opérations est fondamentale pour assurer la sécurité d'une unité immergée. Les sous-marins américains, lorsqu'ils quittent leurs ports, sont capables d'opérer de manière relativement incontestée, étant donné la présence de ports alliés et l'absence de goulots d'étranglement territoriaux qui limiteraient leurs voies de patrouille. En revanche, les SSBN chinois sont fortement entravés par des limitations géographiques et ne peuvent pas se mettre à portée des États-Unis, espace continental, sans passer par des points d'étranglement dangereux actuellement contrôlés par la marine américaine. En cas d'attaque visant à éliminer la menace des sous-marins lance-missiles américains, il est prouvé que l'attaquant ne coulerait que 6 des 14 SSBN, puisque huit ou neuf d'entre eux sont constamment en route, et quatre ou cinq dans des ports en alerte permanente, et prêts à réagir. Même si un attaquant était capable de localiser avec précision l'emplacement de chacune de ces unités, les sous-marins d'attaque nécessaires pour les détruire seraient confrontés à des défis logistiques importants représentés par les bulles de défense maritime américaines composées d'avions, de satellites et d'unités de surface et immergées. De plus, l'attaquant ne serait probablement pas encore dans l'enveloppe d'attaque avant que les SSBN américains ne lancent leurs missiles nucléaires de défense.

Malgré le fait que les lanceurs hypersoniques sont destinés à modifier la dissuasion en leur faveur, les États-Unis ont accordé à Northrop Grumman la somme de 13,3 milliards de dollars pour développer un nouveau missile balistique intercontinental afin d'améliorer la triade nucléaire, c'est-à-dire ceux qui peuvent être lancés depuis la terre, la mer et les avions. Le nouveau concept d'océan "transparent" a, en fait, déplacé les besoins des États-Unis vers l'acquisition de nouveaux missiles, afin de compenser ceux qui pourraient être perdus lorsqu'une de leurs unités immergées est découverte et détruite.

Plusieurs pays veulent mettre en place une capacité anti-sous-marine.

L'Inde a posé sur le fond marin entre l'île de Sumatra et l'archipel Andaman/Nicobar, une série de capteurs pour capter les signaux acoustiques et magnétiques des sous-marins qui vont traverser cette zone. La chaîne de capteurs est longue de 2300 kilomètres et ils sont reliés par un câble à fibre optique capable de transporter des informations à 100 Gb/s. On peut supposer que les principales cibles sont les unités sous-marines chinoises, pour les empêcher de s'approcher de la zone économique exclusive indienne.

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Le Japon, en collaboration avec les États-Unis, a mis en place un système de détection acoustique et magnétique sur les fonds marins qui part de la Corée du Nord et atteint Bornéo, en passant par les Philippines et Taïwan, pour surveiller l'activité des sous-marins de la marine de Pékin dans la mer de Chine méridionale et le long des accès vers le Pacifique occidental. Le système, qui est actif depuis 2005, comprend un ensemble d'hydrophones et de détecteurs magnétiques d'anomalies sur le fond marin, travaillant en coordination avec les avions de reconnaissance maritime pour obtenir une capacité ASW multicouche. Il est probable que la chaîne de détection indienne sera intégrée au réseau japonais/américain Sosus existant, appelé Fish Hook. Ce dernier est exploité par le centre de recherche océanographique du Jmsdf, la force d'autodéfense maritime du Japon et le personnel de la marine américaine. Une telle décision, de la part de l'Inde, pourrait provoquer une dure réaction chinoise au point de prévoir de nouvelles "bulles" A2/AD, des zones d'interdiction spécifiques, dans leurs propres zones exclusives qui existent dans le bassin de l'Océan Indien et insérées dans la Nouvelle Route de la Soie : de Djibouti au port pakistanais de Gwadar, jusqu'à celui de Hambantota au Sri Lanka.

La Chine a également développé son propre réseau de surveillance sous-marine. Le système évalue les informations sur l'environnement sous-marin, en particulier la température et la salinité de l'eau, afin de détecter et de suivre les unités navales sous-marines adverses et, par conséquent, d'améliorer la capacité de ses propres sous-marins à les poursuivre. Le projet, réalisé par l'Institut d'océanologie de la mer de Chine méridionale sous l'égide de l'Académie des sciences chinoise, s'inscrit dans la mise en place d'un armement voulu par Pékin, pour contraster l'hégémonie navale américaine.

La mise en œuvre de la guerre anti-sous-marine démontre sans équivoque que les unités immergées restent les meilleures plates-formes de dissuasion.

mercredi, 03 mars 2021

L'Amérique est de retour : Biden bombarde comme Trump

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L'Amérique est de retour : Biden bombarde comme Trump

par Alberto Negri & Tommaso Di Francesco

Source : Il Manifesto & https://www.ariannaeditrice.it

Biden, personnage emblématique de certains des échecs internationaux des démocrates pendant les années Obama, accueille le pape en Irak en bombardant les milices chiites en Syrie. Un voyage au cours duquel le Pape Bergoglio devrait rencontrer le grand ayatollah Sistani qui, en 2014, a donné sa bénédiction aux milices chiites pour mener la lutte contre les coupeurs de têtes de l’Etat islamique.

Bien sûr, le monde est étrange. L'"espoir démocratique", le catholique Joe Biden, exactement comme Donald Trump, court aux armes et bombarde la Syrie, à la veille de la visite du pape en Irak le 5 mars. Un voyage au cours duquel le pape François devrait également rencontrer la plus haute autorité religieuse irakienne, le grand ayatollah Ali Sistani, qui en 2014 avait donné sa bénédiction aux milices chiites pour mener la lutte contre les coupeurs de têtes de l’Etat islamique, milices qui ont joué un rôle essentiel dans la libération de Mossoul, ville martyre musulmane et chrétienne que le pape devrait visiter dans quelques jours dans le cadre de sa mission en Irak.

Aujourd'hui, les raids américains risquent de nous démontrer voire de nous avertir urbi et orbi que le climat ne doit pas être exactement celui de la paix dans la région. Le monde est en effet étrange : l'ordre du jour ne devrait pas inscrire la guerre dans sa convocation mais plutôt l'urgence sanitaire vu le Covid 19. Et puis Biden n'a pas encore pris conscience du désastre de la démocratie américaine assaillie par des "terroristes internes" - comme il les a appelés - qui ont fait des ravages au Congrès. Le voilà qui commence déjà à se décharger de la crise interne en "exportant" la démocratie par les armes.

Cette fois, Biden frappe un peu au hasard, même s'il a tué plus de vingt personnes appartenant aux milices pro-chiites, celles qui ont soutenu Assad et le gouvernement irakien dans les opérations militaires qui ont conduit à la défaite du califat, qui est toujours dangereusement en action aux frontières entre la Syrie et l'Irak. L'année dernière, c'est Trump qui a frappé au Moyen-Orient en tuant le général iranien Qassem Soleimani à Bagdad, maintenant c'est Biden : mais on pouvait s'y attendre de la part d'un président qui, en 2003, a voté pour l'attaque de Bush Jr. contre l'Irak .

Biden est un type contradictoire. D'un côté, il souhaite reprendre les négociations avec Téhéran sur l'accord nucléaire de 2015 voulu par Obama et annulé par Trump en 2018, mais dans le même temps, il bombarde les alliés de l'Iran coupables, selon les Américains, de frapper leur base militaire en Irak et l'aéroport d'Erbil au Kurdistan irakien. Bien sûr, tout se passe sans la moindre preuve. Mais cela aussi fait partie de la "double norme" imposée au Moyen-Orient : les Américains et les Israéliens n'ont rien à prouver, ce qu'ils font est toujours juste.

C'est une bonne chose que Biden se soit présenté aux Européens comme le champion du multilatéralisme et des droits de l'homme en s'attaquant à la Russie et à la Chine : avec ces prémisses, il devrait au moins tuer par le truchement d’un drone le prince saoudien Mohammed bin Salman puisque, selon la CIA, celui-ci est derrière le meurtre du journaliste Khashoggi. Et pendant que nous attendons - mais cela va-t-il vraiment arriver ? - le rapport de la CIA qui le prouve, il y a des nouvelles d'un appel téléphonique "d'adoucissement" de Biden au roi Salman, pendant la nuit, sur les crimes de son fils et héritier.

Le Pacte d'Abraham entre Israël et les monarchies du Golfe, auquel le nouveau président, tout comme Trump avant lui, tient tant, pèse sur les bonnes intentions de Biden. Et on ne peut pas cacher le fait que Biden est l'une des figures emblématiques de certains des échecs internationaux des démocrates pendant les années où Obama, Hillary Clinton et Kerry ("M. Climat") tenaient les rênes du pouvoir aux Etats-Unis, alors qu'il était un vice-président connu surtout pour ses gaffes.

La preuve vivante de ces échecs est son propre homme fort, le général Lloyd J. Austin, l'actuel chef du Pentagone qui s'est dit hier confiant "que nous avons bien fait de frapper les milices chiites" qui, elles, nient toute implication dans les frappes en Irak. Devant le Sénat en 2015, le général Austin, alors commandant du CENTCOM, le commandement militaire du Moyen-Orient, a admis avoir dépensé 500 millions de dollars pour former et armer seulement quelques dizaines de miliciens syriens sur les 15.000 prévus pour combattre l’Etat islamique, qui, lui, s'est approprié toutes ces précieuses armes américaines.

Austin a également témoigné que le plan dit Timber Sycamore, géré par la CIA et doté d'un milliard de dollars, visant à évincer Assad du pouvoir, avait été lancé en Jordanie, puis décimé par les bombardements russes et annulé à la mi-2017.

Le général Austin a soulevé l'irritation et l'hilarité des Américains en découvrant une série d'échecs épouvantables dignes d'une république bananière. Mais il n'y a pas de quoi rire quand on pense à toutes les catastrophes que les États-Unis ont provoquées dans la région. Par exemple, la décision de retirer le contingent américain d'Irak : après avoir détruit un pays par des bombardements et par l'invasion de 2003 pour renverser Saddam Hussein - provoquant la fuite de millions d'êtres humains. Rappelons que cette invasion s’est déclenchée sur base de mensonges propagandistes concernant les armes de destruction massive de l'Irak. Washington a abandonné ce pauvre pays à son sort, sachant pertinemment qu'il n'avait pas les moyens de se débrouiller seul. Austin a suivi la politique d'Obama et de Clinton.

En 2014, l'Irak est submergé par la montée du califat qui, après avoir occupé Mossoul, la deuxième ville du pays, s'apprête à prendre également Bagdad : l'armée irakienne est en plein désarroi et c'est le général iranien Qassem Soleimani, avec des milices chiites, qui sauve la capitale. Et Soleimani a été tué par un drone américain à Bagdad. Pire encore : ce qui s'est passé en Syrie après le soulèvement de 2011 contre Assad. La guerre civile s'est rapidement transformée en guerre par procuration et les États-Unis, dirigés alors de facto par Hillary Clinton, ont donné le feu vert à Erdogan et aux monarchies du Golfe, dont le Qatar, pour soutenir les rebelles et les djihadistes qui étaient censés faire tomber le régime.

On sait comment cela s'est passé : les djihadistes ont envahi la Syrie puis ont inspiré plusieurs attentats à travers l'Europe mais Assad est toujours en place avec le soutien de l'Iran et surtout de la Russie de Poutine, entrée en guerre le 30 septembre 2015 en bombardant les régions de Homs et Hama. Quelques heures auparavant, Obama avait marqué son accord pour que Poutine agisse en Syrie en le rencontrant en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies à New York.

Dans cette histoire tissée de ratés, Biden a joué un rôle, même s'il ne fut pas le premier dans le spectacle: aujourd'hui, en Syrie, il joue à la fois le rôle du canardeur tout en accueillant le pape en claironnant un bruyant "bienvenue au Moyen-Orient".

La dangereuse stratégie USA-OTAN en Europe

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La dangereuse stratégie USA-OTAN en Europe

Par Manlio Dinucci

Source : Il Manifesto & https://www.ariannaeditrice.it

L'exercice OTAN Dynamic Manta de lutte anti-sous-marine se déroule en mer Ionienne du 22 février au 5 mars. Des navires, des sous-marins et des avions des États-Unis, d'Italie, de France, d'Allemagne, de Grèce, d'Espagne, de Belgique et de Turquie y participent. Les deux principales unités participant à cet exercice sont un sous-marin d'attaque nucléaire américain de la classe Los Angeles et le porte-avions français à propulsion nucléaire Charles de Gaulle et son groupement tactique, qui comprend également un sous-marin d'attaque nucléaire. Le Charles de Gaulle, immédiatement après, se rendra dans le golfe Persique.

L'Italie, qui participe à Dynamic Manta avec des navires et des sous-marins, est le "pays hôte" de l'ensemble de l'exercice : elle a mis à la disposition des forces participantes le port de Catane et la station d'hélicoptères de la marine à Catane, la base aéronavale de Sigonella (la plus grande base US/OTAN en Méditerranée) et la base logistique d'Augusta pour l'approvisionnement. Le but de l'exercice est de chasser les sous-marins russes en Méditerranée qui, selon l'OTAN, menacent l'Europe.

Ces mêmes jours, le porte-avions Eisenhower et son groupe de combat mènent des opérations dans l'Atlantique pour "démontrer le soutien militaire continu des États-Unis aux alliés et leur engagement à maintenir les mers libres et ouvertes". Ces opérations - menées par la sixième flotte, dont le commandement est à Naples et la base à Gaeta - s'inscrivent dans la stratégie énoncée notamment par l'amiral Foggo, ancien chef du commandement de l'OTAN à Naples : accusant la Russie de vouloir couler les navires reliant les deux côtés de l'Atlantique avec ses sous-marins, afin d'isoler l'Europe des États-Unis, il soutient que l'OTAN doit se préparer à la "quatrième bataille de l'Atlantique", après celles des deux guerres mondiales et de la guerre froide.

Pendant que des exercices navals sont en cours, des bombardiers stratégiques B-1, transférés du Texas à la Norvège, effectuent des "missions" à proximité du territoire russe, avec des avions de chasse F-35 norvégiens, pour "démontrer l'état de préparation des États-Unis et leur capacité à soutenir leurs alliés".

Les opérations militaires en Europe et dans les mers adjacentes sont menées sous le commandement du général Tod Wolters, de l'armée de l'air américaine, qui est à la tête du Commandement américain en Europe et en même temps de l'OTAN, le poste de commandant suprême des forces alliées en Europe revenant toujours à un général américain.

Toutes ces opérations militaires sont officiellement motivées par la "défense de l'Europe contre l'agression russe", inversant la réalité : c'est l'OTAN qui s'est étendue en Europe, avec ses forces et ses bases, y compris nucléaires, derrière la Russie. Lors du Conseil européen du 26 février, le secrétaire général de l'OTAN, M. Stoltenberg, a déclaré que "les menaces auxquelles nous étions confrontés avant la pandémie sont toujours là", mettant en avant "les actions agressives de la Russie" et, en arrière-plan, une menace de "montée de la Chine".

Il a ensuite souligné la nécessité de renforcer le lien transatlantique entre les États-Unis et l'Europe, comme le souhaite vivement la nouvelle administration Biden, en faisant passer la coopération UE-OTAN à un niveau supérieur. Plus de 90 % des habitants de l'Union européenne, a-t-il rappelé, vivent aujourd'hui dans des pays de l'OTAN (dont font partie 21 des 27 pays de l'UE). Le Conseil européen a réaffirmé "l'engagement de coopérer étroitement avec l'OTAN et la nouvelle administration Biden en matière de sécurité et de défense", rendant ainsi l'UE militairement plus forte.

Comme l'a souligné le Premier ministre italien Mario Draghi dans son discours, ce renforcement doit se faire dans un cadre de complémentarité avec l'OTAN et de coordination avec les États-Unis. Le renforcement militaire de l'UE doit donc être complémentaire de celui de l'OTAN, qui, à son tour, est complémentaire de la stratégie américaine. Elle consiste en fait à provoquer des tensions croissantes en Europe avec la Russie, de manière à accroître l'influence des États-Unis dans l'Union européenne elle-même.

Un jeu de plus en plus dangereux, car il pousse la Russie à se renforcer militairement, et de plus en plus coûteux. Ceci est confirmé par le fait qu'en 2020, au plus fort de la crise, les dépenses militaires italiennes sont passées de la 13e à la 12e place dans le monde, dépassant ainsi celles de l'Australie.

L’islamo-gauchisme, les limites d'une alliance

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L’islamo-gauchisme, les limites d'une alliance

Par Franck BULEUX

Ex: https://metainfos.com

L’expression « islamo-gauchisme » a fait son apparition dans les médias mainstream. Je l’évoque dans mon essai La guerre sociale qui vient (Éditions Dualpha, 2020) mais il était, jusqu’à l’intervention de la ministre, politiquement incorrect de suggérer l’existence de cette alliance, au moins sémantique, au-delà des cercles classés à droite de la droite. Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, a le mérite d’avoir soulevé la réalité des faits et fait révéler les soutiens de cette mouvance politico-religieuse au moins au cœur des universités françaises.

Car l’intérêt premier de cette affaire est le suivant : de l’absence de reconnaissance du concept, nous sommes passés à la liste des « pratiquants », tous ces pétitionnaires qui se sont dévoilés pour exiger (sic) la démission de la ministre. Donc, l’islamo-gauchisme existe puisqu’il a touché des « chercheurs » ou, plus exactement, des enseignants, c’est-à-dire des personnes qui délivrent une parole écoutée des futurs cadres de la France.

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Frédérique Vidal dénonce « le militantisme » de certains qui privilégient « l’opinion » sur « la recherche ». Il sera difficile de donner une stricte définition à cette « alliance » qui recouvre, dans la réalité, le fait pour des intellectuels d’extrême gauche, à la Plenel, d’utiliser l’Islam comme « la religion des prolétaires » du monde. En contrepartie, la défense systématique du port du voile dans les universités semble s’opposer dans les établissements scolaires avant le baccalauréat…

L’islamo-gauchisme revient, si nous devions utiliser les termes de cette mouvance, aux dérives du colonialisme tant décrié : ce sont des Blancs (pour la plupart) qui manipulent des populations d’origine immigrée dans le but de résister à toute intégration ou, pire, assimilation. Le nobliau du Vivarais Geoffroy Daniel de Lagasnerie, figure de la nouvelle gauche radicale, théorise ses concepts décoloniaux en faveur des populations « racisées « et la famille Traoré, emmenée par Assa, égérie du pavé parisien, rameute les troupes, y compris d’ailleurs pendant les périodes de restriction des libertés dues à la crise sanitaire. Il doit y avoir une impunité dans certaines situations. Ce partage des tâches est saisissant, il y a les penseurs et les marcheurs. Dès le milieu des années 1990, l’Organisation communiste international (OCI) avaient théorisé cette alliance et dès le début des années 2000, le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) de Besancenot et Krivine présentait des femmes voilées aux élections. Pas parce qu’elles étaient femmes mais parce qu’elles étaient voilées.

Couv-Revue-des-Deux-Mondes-octobre-2018-645x1024.jpgL’extrême gauche culturelle ne sait plus, ne peut plus mobiliser un Mai-68. En revanche, elle peut renvoyer une identité magnifiée à des populations dont l’existence varie entre la mosquée, les produits stupéfiants (qui viennent du « bled ») et le Mac-Do.

Sur le fond, que révèle cet alliage « islamo-gauchiste » ? Outre la stratégie d’une certaine gauche de mobiliser des populations, y compris lors des élections pour « faire barrage » aux candidats considérés comme « trop à droite », cet amalgame politique nous montre la faiblesse d’une idéologie que les Français ont tendance à surestimer, du fait de l’impunité que procure, à certains, le dispositif législatif.

Car s’il est plausible de comprendre les nouvelles « lumières » de cette gauche, dont le but n’a été de cesse de mettre à bas les valeurs traditionnelles (celles de l’Occident), il est plus complexe de s’interroger sur l’Islam. Ce mouvement conquérant (sic) ne serait plus que le porteur d’eau d’intellectuels en manque de résonnance. L’islam n’aurait de valeur que dans le nombre, la force (certes essentielle) de la démographie qui, peu à peu, livre nos quartiers à des bandes mettant en place des systèmes de valeurs en contradiction avec la parité femmes-hommes ou l’égalité des enfants au sein des foyers ou bien encore la liberté du choix du conjoint…

L’Islam comme symbole du prolétariat ? Qu’en pensent le protégé des États-Unis, Mohammed ben Salmane, prince héritier d’Arabie Saoudite ou le Cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, émir du Qatar qui pratique l’islamo-sportif de manière ostentatoire ?

Le prolétariat est bien porté sur les maillots des joueurs du Paris-Saint-Germain. Cette simple démonstration pose les limites de cette engeance « islamo-gauchiste ». L’islamo-gauchisme ne se veut que le fer de lance de l’ethno-masochisme européen (blanc si vous préférez, les États-Unis n’étant qu’une excroissance européenne en matière de population). Notre faiblesse nourrit leur force.

VALEURS-ACTUELLES-ISLAMO-GAUCHISME.jpgAu-delà de cet état des lieux, que révèle cette controverse de l’Islam à part la faiblesse intrinsèque de cette idéologie politico-religieuse ? Sans l’appui des forces progressistes et surtout la protection des lois (l’islamophobie, c’est-à-dire la peur d’une religion est en train de devenir un délit…), l’Islam serait une identité limitée à des croyances archaïques.

Un dernier point sur une affaire sur laquelle nous ne manquerons pas de revenir : les universitaires d’extrême gauche ont retrouvé un prolétariat et on peut penser qu’ils militeront pour la « discrimination positive », pour développer leur présence au sein des universités (ce sont les Blancs qui préparent des CAP ou des brevets professionnels, vous savez l’électorat de Le Pen…) mais ce que nos universitaires oublient, c’est le principe du « renvoi de l’ascenseur ». Dans l’islamo-gauchisme, il y a ceux qui essaient de rester sur le devant de la scène et ceux qui veulent conquérir les corps (et les esprits). Entre islam et gauchisme, il est probable qu’à terme, l’un des deux termes sera de trop et le voile se porte mieux, dans les quartiers sensibles, que l’épinglette de Trotski. C’est ainsi et à terme, les gauchistes devront eux-aussi céder leur place, les homos rentrer dans leur placard mais le romancier Michel Houellebecq n’avait-il pas déjà tout prédit avec d’avance ?… 

En complément :

L’Europe comme troisième voie

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L’Europe comme troisième voie

par Georges FELTIN-TRACOL

En ce premier quart du XXIe siècle, le projet européen ne passionne guère les jeunes; il n’enthousiasme plus les anciens; il indispose les peuples. Son évocation ne suscite que sarcasmes, critiques, agacements et indifférences. La crise sanitaire covidienne révèle les dysfonctionnements initiaux majeurs de son union marchande, dépolitisée et moralisante. Déclassée en économie, en sciences et dans les techniques de pointe, cet ensemble bureaucratique déclinant fidèle aux dogmes éculés du libre-échange global et infesté par les lobbies prend chaque jour un peu plus l’aspect d’un asile psychiatrique peu rutilant, ce qui n’empêche pas l’afflux croissant de masses envieuses de l’ancien Tiers Monde.

Certains répliquent à cette décadence manifeste en prônant d’abord une sortie nationale, puis ensuite la formation d’une Europe des États, des patries, des nations, voire des régions économiques. Cette option est vaine, car perdurent encore les filaments d’une civilisation inestimable qui souffre d’une longue et pénible dormition. L’Europe reste en outre la patrie de nos nations, de nos peuples et de nos terroirs. Sa survie conditionne leur existence, leur pérennité et leur avenir.

Le réveil européen ne passera que par l’avènement de son propre grand espace. Il ne correspondra ni à l’actuel grand espace occidental euro-américain qui s’articule autour de l’Alliance Atlantique et de son bras armé, l’OTAN, ni au grand espace eurasiatique, voire eurasien, en cours de constitution par le biais de la coopération entre Moscou et Pékin. Le renouveau européen ne proviendra ni d’une intégration militaire, économique et technique en cours tournée vers une pensée liquide propice aux surfaces océaniques, ni d’un ralliement bancal au seul horizon terrestre « steppien ».

Devant l’échec patent de la sociale-démocratie, du libéralisme social et du progressisme pragmatique, les Européens soucieux du bien commun, de l’intérêt général et de l’esprit européen se doivent de bâtir un grand foyer continental considéré comme un projet civilisationnel de puissance. Cette grande ambition nécessite la redécouverte politique, sociale, économique et géopolitique d’un non-alignement fondamental, d’un dépassement des oppositions désuètes. Au slogan politique « ni droite ni gauche » doivent désormais s’ajouter le mot d’ordre socio-économique « ni collectivisme ni individualisme », et l’orientation géopolitique « ni Est ni Ouest » (ou mieux encore « et Terre et Mer » du fait de la configuration côtière complexe de ce « petit cap de l’immense Eurasie »), soit les fondements d’une vision du monde découlant de la troisième voie.

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On retrouve ce riche concept sous des formulations socio-historiques et politiques variées dans maintes sociétés européennes. Plus qu’une position attentiste ou qu’un parti-pris vaguement « neutraliste », l’Europe envisagée en tant que troisième voie intégrale se veut une réaction à la segmentation technicienne de la vie quotidienne, son artificialisation, aux affres toujours plus brutales du « spectaculaire intégré » et à l’occultation encouragée des différences essentielles au profit de différences superficielles égotiques. La troisième voie européenne se comprend principalement comme une prise en compte de la mesure à l’aune d’un être enchâssé dans ses communautés d’appartenance charnelles, historiques, professionnelles et territoriales qu’il doit d’ailleurs retrouver, réhabiliter et fructifier.

Se revendiquer de la mesure n’implique cependant pas de végéter dans la torpeur (ou dans la tiédeur), de gesticuler avec fébrilité à la première occasion ou de lancer des propos péremptoires à la face du monde. L’attachement à la mesure dans une perspective clairement tercériste suppose plutôt d’investir la notion dans tous les champs possibles de l’existence humaine. Par exemple, refuser le mondialisme et l’État-nation pour insister sur le principe de l’Empire, soutenir l’essor des entreprises coopératives, la participation des travailleurs au destin de leur communauté de production, l’affranchissement des producteurs de la tyrannie du salariat, la mise en place au-delà du parlementarisme, du présidentialisme et de la partitocratie d’institutions novatrices avant-gardistes, associant rigueur aristocratique et aspirations populaires.

Des plans Fouchet de 1961 – 1962 à l’Initiative des Trois-Mers sans oublier le Groupe de Visegrad et les tentatives eurafricaines, bien des essais de troisième voie parsèment l’histoire européenne. Faute d’une dynamique suffisante et d’une élite préparée, tous ces plans ont échoué. Près du Minuit de leur devenir commun, seuls des Européens convaincus peuvent provoquer une nouvelle aurore civilisationnelle, une aube hespériale, en confrontant leur époque et les défis qu’elle charrie aux exigences de la réflexion, de la persévérance et de l’action.

Georges Feltin-Tracol

• D’abord mis en ligne sur Vox NR, le 9 février 2021.

mardi, 02 mars 2021

L’Europe, les GAFAM et l’impuissance régulatoire

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L’Europe, les GAFAM et l’impuissance régulatoire

par Charles Thibout
Ex: https://chronik.fr
  • Ce texte est issu de l’audition de Charles Thibout sur « la régulation européenne du numérique », dans le cadre de la réunion des commissions des affaires européennes de l’Assemblée nationale et du Bundestag (12 février 2021).

L’Europe continue de briller par son absence parmi les puissances publiques et privées nées de la troisième révolution technologique. A défaut, elle tente de renouer avec l’une fonctions modernes de la puissance publique : la régulation. Les deux règlements dévoilés par la Commission européenne – le DSA (Digital Services Act) et le DMA (Digital Market Act) sont précisément censés réguler le marché du numérique et limiter les abus des grandes entreprises de la tech. Ces textes annoncent-ils l’avènement d’une Union européenne érigée en puissance régulatrice du numérique ?

L’Europe, c’est-à-dire ici les institutions de l’UE et ses États membres, est prise dans un faisceau d’injonctions contradictoires, dès qu’il est question des grandes entreprises transnationales du numérique, en particulier d’origine américaine (GAFAM) et chinoise (BATHX). Pourtant, les déclarations des dirigeants européens sont à l’unisson (ou presque) : ces entreprises brideraient la croissance endogène de l’UE et entameraient sa « souveraineté », du moins son indépendance.

La souveraineté numérique via la régulation numérique

Pour remédier à cette situation, un mot clef, « magique », est martelé : la régulation, soit l’encadrement par des instruments normatifs plus ou moins contraignants d’un marché considéré comme défaillant. Ainsi, la Commission européenne, via le Digital Market Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA), a affiché sa volonté de contrer la puissance de ces entreprises en s’attaquant à leur position dominante (on retrouve là le souci quasi-idiosyncrasique de la concurrence libre et non faussée chère à la « machine bruxelloise »). Au-delà du marché, la Commission s’intéresse aussi à l’espace public que représentent ces plateformes, qui, avouons-le, ont joué un rôle majeur dans la démocratisation de l’information et de l’accès à l’information, en dépit de tous les problèmes réels et préoccupants qu’elles ont soulevés par ailleurs.

Les mesures envisagées par la Commission sont-elles utiles, nécessaires, voire efficaces ? D’abord, reconnaissons qu’elles sont ambitieuses et tranchent avec certaines attitudes passées. Ambitieuses quand on songe aux obligations d’interopérabilité des plateformes et à la portabilité des données des utilisateurs, notamment des professionnels, qui sont inscrites en l’état dans le DMA. Tout cela éveille l’intérêt. Il n’est pas certain, en revanche, que cela règle le problème du déficit d’innovation des entreprises européennes et des faibles performances technologiques du continent. L’on peut également douter que les procédures de contrôle et de sanction, prévues dans les deux textes, soient un jour menées à terme, en raison des difficultés techniques et géopolitiques qui ne manqueront pas de se poser.

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Quant au DSA, il est globalement plus raisonnable et mieux équilibré que certaines aventures législatives que nous avons connues par le passé – et que certaines majorités nationales continuent de promouvoir avec exaltation. Songeons particulièrement au fait que l’article 14 sur les mécanismes de notification et d’action ne mentionne pas de délais de traitement précis des signalements : c’est un choix heureux de la part de la Commission. Autrement, vu le nombre de notifications adressées à la firme et le peu de temps pour les traiter, l’on s’acheminerait inéluctablement vers des procédures de censure a priori par la plateforme, ce qui poserait un grave problème pour la liberté d’expression et pour la démocratie.

Pour la liberté d’expression, puisque l’on contraindrait ces entreprises à exercer de facto un pouvoir censorial, qui plus est absolument arbitraire et sans doute démesuré, en ceci qu’elles n’auraient d’autre choix que de retirer un contenu signalé comme « illicite » – voire suspendre le compte d’un utilisateur –, et ce, tout simplement par manque de temps pour se conformer à la législation. Heureusement, ce délai n’est pas mentionné. Cela ne signifie pas, pour autant, que tout risque de ce type est écarté car, malgré tout, l’on octroie ainsi à ces plateformes un pouvoir traditionnellement dévolu à l’autorité judiciaire, qui est, rappelons-le, le gardien des libertés individuelles et, partant, l’un des piliers de la démocratie. Or, cette privatisation et cette dénationalisation de la justice et du pouvoir de censure sont tout ce sur quoi repose l’édifice juridique du DSA : par conséquent, il apparaît nécessaire de réfléchir attentivement aux transformations que cela impliquerait pour nos institutions.

De façon apparemment paradoxale, les États membres voient aussi s’accroître leur capacité d’empiéter sur les droits fondamentaux de leurs citoyens en consacrant leur pouvoir de surveillance. L’article 7 du DSA affirme, certes, que les « fournisseurs de services intermédiaires ne sont soumis à aucune obligation générale de surveiller les informations qu’ils transmettent ou stockent, ou de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant des activités illicites ». Cependant, comme le note fort justement Marc Rees pour NextINpact, tout dépendra de l’interprétation qui est faite par les autorités nationales de l’expression « surveillance généralisée ». D’autant que le considérant 28 précise avec une clarté toute technocratique que l’interdiction de surveillance généralisée « ne concerne pas les obligations de surveillance applicables à un cas spécifique et, notamment, cela ne fait pas obstacle aux injonctions des autorités nationales émises conformément à la législation nationale ». L’UE demeure bien une organisation intergouvernementale ; les gouvernants savent imposer leurs conditions lorsque leurs intérêts sont en jeu.

Un enjeu géopolitique pour les Etats-Unis

Plus globalement et de façon quelque peu contre-intuitive, l’ambition de ces textes paraît excessive. Ils semblent s’affranchir tout à fait d’un élément de contexte pourtant central : la pression exercée par la puissance américaine sur le processus décisionnel européen – en témoigne l’épisode pathétique de la crise transatlantique autour du déploiement des équipements 5G de Huawei. En d’autres termes, il est peu probable que Washington accueille d’un œil bienveillant ces dispositions qui, au moins dans le principe, reviennent à entamer son développement économique, sa supériorité technoscientifique et sa capacité de projection sur le reste du monde ; bref, les principes cardinaux de sa puissance.

Les grandes entreprises technologiques américaines représentent un levier de pouvoir incontournable pour l’État fédéral, qui pourrait répliquer brutalement à toute tentative de leur barrer la route. Dans le même temps, l’essor général, et en particulier technologique de la Chine, ainsi que les stratégies parfois contradictoires des entreprises américaines avec les intérêts de leur État de tutelle, ouvrent une fenêtre d’opportunité historique pour les Européens pour parvenir au rééquilibrage de leurs relations avec les États-Unis et, peut-être, au recouvrement de leur autonomie.

samedi, 27 février 2021

Biden veut détacher les États-Unis des terres rares de Chine

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Biden veut détacher les États-Unis des terres rares de Chine

Paolo Mauri

Ex : https://it.insideover.com

Hier, le président américain Joseph Biden a signé un décret concernant la "chaîne d'approvisionnement" des biens essentiels et critiques pour la sécurité du pays.

La déclaration officielle de la Maison Blanche indique que "ces dernières années, les familles, les travailleurs et les entreprises américaines ont de plus en plus souffert de pénuries de produits essentiels, des médicaments aux aliments en passant par les puces électroniques. L'année dernière, la pénurie d'équipements de protection individuelle (EPI) pour les travailleurs de la santé de première ligne au début de la pandémie de Covid-19 était inacceptable. La récente pénurie de puces à semi-conducteurs pour l'industrie automobile a entraîné des ralentissements dans les usines de fabrication, ce qui montre à quel point cette pénurie peut nuire aux travailleurs américains".

Il est souligné que les États-Unis doivent veiller à ce que les pénuries de produits manufacturés, les perturbations commerciales, les catastrophes naturelles et les actions potentielles des concurrents et des adversaires étrangers ne rendent plus jamais les États-Unis vulnérables.

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Le décret de la Maison Blanche lance un examen complet de la chaîne d'approvisionnement des biens américains essentiels et charge les ministères et agences fédérales d'identifier les moyens de la protéger contre un large éventail de risques et de vulnérabilités. La mise en place d'un ensemble de chaînes d'approvisionnement résistantes ne protégera pas seulement le pays contre les pénuries de produits essentiels, elle facilitera également les investissements nécessaires pour maintenir l'avantage concurrentiel des États-Unis et renforcer la sécurité nationale.

L'ordonnance fixe un délai de 100 jours pour effectuer un examen immédiat dans les agences fédérales afin d'identifier les vulnérabilités de quatre produits clés.

Outre la production de principes actifs pharmaceutiques, dont 70 % ont été transférés à l'étranger, et les semi-conducteurs, qui ont été négligés par les investissements ayant entraîné la perte du leadership manufacturier américain, les deux secteurs les plus intéressants sur le plan géopolitique que l'administration entend mettre en œuvre sont les batteries de grande capacité (utilisées dans les véhicules électriques) et les terres rares, désignées comme "minéraux critiques" car elles constituent "une partie essentielle des produits de défense, de haute technologie et autres". Ces ressources minérales particulières - ainsi que le lithium, le cobalt et les métaux du groupe du platine (Pgm) - sont en fait nécessaires pour construire des éoliennes, des panneaux solaires et des batteries pour le stockage de l'électricité nécessaire aux véhicules électriques et le stockage de l'énergie alimentant le réseau. Les terres rares en particulier sont des éléments essentiels pour la défense, car elles sont utilisées, par exemple, dans les composants des radars de nouvelle génération, dans les systèmes de guidage et dans l'avionique des avions de chasse de dernière génération.

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Actuellement, malgré le fait que les États-Unis disposent d'importantes réserves minérales, la Chine est le premier pays dans la production et le traitement de ces éléments. Il est en effet bien connu que Pékin, outre qu'elle possède l'un des plus grands gisements de ces minéraux, fournit 97% du total mondial de cette ressource, dans la mesure où la Chine est capable aujourd’hui de retraiter le minéral brut, le transformant en matière exploitable, ce qui lui confère pratiquement un monopole ; elle est suivie, en ce domaine, à très grande distance, par les États-Unis.

On comprend donc aisément quelles pourraient être les conséquences de cette domination sur le plan stratégique : la Chine pourrait décider, comme elle l'a déjà laissé entendre en mai 2019, de réduire la production ou l'exportation de ces minéraux vers les États-Unis, ce qui deviendrait une arme fondamentale, dans l’arsenal chinois, pour une guerre hybride menée contre Washington ou serait simplement une carte avec laquelle, les Chinois pourraient faire chanter les États-Unis et leur politique d’opposition systématique à l'expansion chinoise.

Un autre facteur est le changement de cap "vert" de la nouvelle administration. Le président Biden a inscrit à son ordre du jour la relance de l'économie verte, et cette domination chinoise sur les terres rares pourrait très facilement l'entraver. A la Maison Blanche, ils ont donc réalisé que les plans du nouveau président pour un secteur énergétique zéro carbone d'ici quinze ans, se heurtent à la faiblesse des entreprises américaines dans le domaine de l'approvisionnement en minerais et dans la chaîne de transformation. En fait, les États-Unis importent actuellement 100 % de la vingtaine de minéraux clés, nécessaires à l'énergie verte, et sont presque aussi dépendants des importations de ces minéraux particuliers.

L'ordonnance prévoit également un examen plus approfondi, sur une année, d'un ensemble plus large de chaînes d'approvisionnement qui couvrira des secteurs clés tels que la base industrielle de la défense, la santé publique, les technologies de l'information et de la communication, les secteurs des transports et de l'énergie ainsi que la chaîne d'approvisionnement agroalimentaire.

Toutefois, cette activité ne sera pas limitée à une courte période de temps. La révision des chaînes d'approvisionnement, action qui identifie simultanément, outre les risques et les lacunes, les nouvelles orientations et les politiques spécifiques de mise en œuvre, durera tout au long du mandat présidentiel de quatre ans dans un travail constant d'interaction entre les ministères, les agences fédérales et l'exécutif qui impliquera également le monde de l'industrie, les universités et les organisations non gouvernementales.

Le président Biden a donc lancé une nouvelle politique pour mettre fin à la dépendance américaine vis-à-vis de la Chine, non seulement en vue de relancer l'économie nationale et de soutenir sa vision "verte", mais surtout pour une raison stratégique : en effet, il n'est pas possible de contrer l'expansionnisme économique, commercial et militaire de la Chine tout en dépendant d’elle, dans des secteurs clés tels ceux de l'industrie de haute technologie, intimement liés à la Défense. Il s'agit donc d'un plan de sécurité nationale qui libérera Washington des liens commerciaux qu'elle entretient avec Pékin, mais qui pourrait avoir des conséquences néfastes en ce qui concerne "l'exportation de la démocratie". Les ressources minérales, les gisements, ne sont pas mobiles, et il n'y a que deux façons de s'en emparer : resserrer les liens avec les nations qui possèdent de grands gisements, ou intervenir manu militari pour pouvoir contrôler la production. Quelque chose qui se passe aujourd'hui en République démocratique du Congo, où, ce n'est pas un hasard, des hommes du groupe russe Wagner sont présents, et quelque chose qui s'est déjà produit en Afghanistan, un pays qui, avec la Bolivie, le Chili, l'Australie, les États-Unis et la Chine, possède les plus grandes réserves de lithium au monde.

Premier raid de l'ère Biden : frapper les milices en Syrie

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Premier raid de l'ère Biden : frapper les milices en Syrie

Lorenzo Vita

Ex : https://it.insideover.com

L'ère de Joe Biden à la Maison Blanche commence au niveau international avec un premier raid en Syrie. Comme l'a confirmé le Pentagone, le président américain a ordonné un raid de bombardement contre des sites qui, selon les renseignements américains, sont utilisés par des miliciens pro-iraniens dans la partie orientale du pays. "Ces raids ont été autorisés en réponse aux récentes attaques contre le personnel américain et de la coalition en Irak et aux menaces continues contre ce personnel", a déclaré le porte-parole de la Défense John Kirby, qui a précisé que l'attaque avait été spécifiquement menée "sur ordre du président", visant des sites "utilisés par divers groupes militants soutenus par l'Iran, dont le Kaitaib Hezbollah et le Kaitaib Sayyid al-Shuhada". Pour Kirby, le raid "envoie un message sans équivoque qui annonce que le président Biden agira dorénavant pour protéger le personnel de la coalition liée aux Etats-Unis. Dans le même temps, nous avons agi de manière délibérée en visant à calmer la situation tant en Syrie orientale qu'en Irak".

La décision de Biden intervient à un moment très délicat dans l'équilibre des forces au Moyen-Orient. Une escalade contre les forces américaines en Irak a commencé le 15 février et a conduit à plusieurs attaques contre les troupes américaines. L’avertissement est destiné aux forces pro-iraniennes présentes en Irak, qui a toujours constitué un véritable talon d'Achille pour la stratégie américaine au Moyen-Orient. Le pays qui a été envahi par les Américains en 2003 est devenu ces dernières années l'un des principaux partenaires de l'adversaire stratégique de Washington dans la région, Téhéran. Et il ne faut pas oublier que c'est précisément en Irak que le prédécesseur de Biden s'est manifesté. Donald Trump, en effet, avait ordonné le raid qui a tué le général iranien Qasem Soleimani. Une démarche que Bagdad avait évidemment condamnée, étant donné que le territoire sous autorité irakienne est devenu un champ de bataille entre deux puissances extérieures.

Cette fois, c'est la Syrie qui a été touchée. Et cela indique déjà une stratégie précise de la Maison Blanche. Pour le Pentagone, frapper la Syrie en ce moment signifie frapper un territoire avec une autorité qu'ils ne reconnaissent pas et qu'ils ont tenté de renverser. Une situation très différente de celle de l'Irak, où les États-Unis veulent éviter que le pays ne se retourne contre les forces étrangères présentes sur place et où il existe un gouvernement que l'Amérique reconnaît comme interlocuteur. Le fait que le raid ait eu lieu en Syrie mais en réponse aux attaques en Irak, indique qu'ils ne veulent pas créer de problèmes pour le gouvernement irakien.

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L'attaque confirme également un autre problème pour l'administration américaine. La présence de milices pro-iraniennes en Syrie et en Irak est un nœud gordien qui est loin d’avoir été tranché. Les généraux américains ont longtemps demandé à la Maison Blanche, sous Trump, d'éviter un retrait des troupes de Syrie, précisément pour exclure la possibilité que les forces liées à Téhéran reprennent pied dans la région. Trump, même s’il était récalcitrant, a néanmoins accepté, en fin de compte, les exigences du Pentagone (et d'Israël) et a évité un retrait rapide des forces américaines. Pour la Défense américaine, il y avait également le risque d'un renforcement de la présence russe (Moscou a condamné l'attaque en parlant d'"une action illégitime qui doit être catégoriquement condamnée"). Ce retrait ne s'est jamais concrétisé, se transformant en un fantôme qui erre depuis de nombreux mois dans les couloirs du Pentagone et de la Maison Blanche et niant la racine de l'une des promesses de l’ex-président républicain : la fin des "guerres sans fin".

Le très récent raid américain n'indique en aucun cas un retour en force de l'Amérique en Syrie. Le bombardement a été très limité et dans une zone qui a longtemps été dans le collimateur des forces américaines au Moyen-Orient. Mais le facteur "négociation" ne doit pas non plus être oublié. Les Etats-Unis négocient avec l'Iran pour revenir à l'accord sur le programme nucléaire : mais pour cela, ils doivent montrer leurs muscles. Comme le rapporte le Corriere della Sera, Barack Obama avait l'habitude de dire : "vous négociez avec votre fusil derrière la porte". Trump l'a fait en se retirant de l'accord, en tuant Soleimani et en envoyant des bombardiers et des navires stratégiques dans le Golfe Persique. Biden a changé la donne : il a choisi de limiter les accords avec les monarchies arabes pour montrer clairement qu'il ne s'alignait pas sur la politique de Trump, en gelant les F-35 aux Émirats et les armes aux Saoudiens qui se sont attaqué au Yémen. Mais en même temps, il voulait envoyer un signal directement à l'Iran en frappant des milices à la frontière entre l'Irak et la Syrie. Tactiques différentes, stratégie différente, mais avec une cible commune : l'Iran.

La grande stratégie de l'Allemagne en matière d'hydrogène

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La grande stratégie de l'Allemagne en matière d'hydrogène

Andrea Muratore

Ex : https://it.insideover.com

Des investissements publics et privés pour accélérer la conquête de la frontière technologique et de ses applications industrielles et productives concrètes : l'Allemagne, dans le cadre des plans de lutte contre la crise pandémique, pose les bases d'une restructuration de son appareil de production. Et si, d'une part, cela implique d'adhérer à de grands plans stratégiques d'envergure européenne sur la souveraineté numérique, le cloud et l'innovation, d'autre part, le gouvernement d'Angela Merkel, qui s'apprête à passer, après les élections de l'automne prochain, à un exécutif dans lequel la CDU pourrait s'allier aux Verts, a bien en tête les défis de la transition énergétique et la recherche de nouvelles sources propres pour alimenter le transport, l'industrie et la production d'électricité. Dans ce contexte, Berlin mise beaucoup sur les technologies centrées sur l'hydrogène.

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Dans le cadre de la stratégie nationale présentée l'été dernier, le gouvernement a jugé bon de fixer des objectifs précis, visant à ce que l'Allemagne construise une capacité d'électrolyse de 5000 mégawatts (MW) d'ici 2030 et de 10.000 MW d'ici 2040 pour produire le nouveau combustible. L'objectif est de faire de l'Allemagne le premier fournisseur mondial de cette source d'énergie propre en mettant sur la table des investissements de 9 milliards d'euros et, selon le quotidien italien Repubblica, "deux des neuf milliards alloués seront destinés à des partenariats internationaux pour l'approvisionnement. L'idée est de créer un système délocalisé dans les pays du Golfe et en Afrique du Nord en utilisant l'énergie solaire pour alimenter les centrales de production".

Quels sont les objectifs de l'Allemagne? Tout d'abord, construire une chaîne complète d'approvisionnement en hydrogène, en partant des machines d'électrolyse et en arrivant à la construction d'usines fonctionnelles capables d'alimenter des technologies de grande consommation tant en termes d'applications industrielles que dans le domaine des transports. Sur le plan de l'ingénierie des centrales, la conversion des centrales à charbon en centrales de production de cette source moins polluante et plus efficace est envisagée : Par exemple, la collectivité locale de Hambourg, ‘’Warme Hamburg’’, pense, en synergie avec la société suédoise qui la possède, ‘’Vattenfall’’, et deux partenaires industriels (Shell et Mitsubishi Heavy Industries), à proposer aux autorités de la ville et au gouvernement la reconversion de la méga centrale au charbon de Moorburg, près de Hambourg, qui ne fonctionne que depuis six ans, compte tenu du retrait total de l'Allemagne du charbon en 2038.

Dans le domaine des applications industrielles, il faut souligner la possibilité de construire une part croissante de trains, d'autobus et, à l'avenir, de véhicules privés fonctionnant à l'hydrogène, mais surtout l'utilisation du matériau le plus léger du tableau périodique en tant que matière première pour l'une des industries clés du pays, l'industrie sidérurgique, qui, à l'échelle mondiale, s'oriente vers une durabilité croissante. Thyssen Krupp étudie des projets de grande envergure en synergie avec Steag, la société énergétique allemande, pour fournir de l'hydrogène à son usine sidérurgique stratégique de Duisburg.

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Mais il peut également y avoir des effets en cascade sur l'équilibre de l'énergie européenne : il est encore difficile d'imaginer, par exemple, quelles pourraient être les futures relations politiques et économiques entre l'Allemagne et la Russie si le gaz naturel (fourni à profusion par Moscou à Berlin) était ajouté au bouquet énergétique allemand, une source générée par les chaînes d'approvisionnement internes. Il est clair que des gazoducs tels que le Nord Stream 2 ne disparaîtraient pas de la scène et pourraient même redevenir utiles grâce à une application à double usage pour transporter et acheminer l'hydrogène également.

L'Allemagne a compris que dans le contexte des changements de paradigmes technologiques, la bataille porte sur les chaînes de valeur et leur contrôle, et que par conséquent, la mise en place de normes technologiques et d'applications opérationnelles de référence au niveau européen et mondial crée un avantage concurrentiel de grande envergure. En ce sens, il ne faut pas sous-estimer le rôle stratégique de l'Institut Fraunhofer, un organisme de projection de l'intervention publique en faveur de la recherche et du développement technologique pour les petites et moyennes entreprises, qui représente légalement un organisme public à but non lucratif financé par l'État fédéral allemand, les Länder et, en partie, par des contrats de recherche.

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"En plus du travail à façon", note M. Domani, l’Institut Fraunhofer "vise également à acquérir un ensemble de brevets dans des domaines d'application industrielle future qui seront mis à la disposition des petites et moyennes entreprises allemandes", représentant en ce sens un accélérateur technologique qui, dans des secteurs tels que celui de l'hydrogène, où l'innovation se produit à un rythme rapide, est fondamental. D'autant plus si l'on considère que l’Institut Fraunhofer reste souvent propriétaire des licences acquises : récemment, sur le front de l'hydrogène, une pâte spéciale a été brevetée qui permet une conservation plus facile et un stockage plus pragmatique du carburant piégé.

Un exemple de percée technologique née d'une synergie public/privé, une vision à laquelle même des pays comme le Japon s'adaptent et où l’Italie peine à décoller. En Italie, pour rester dans le domaine de l'hydrogène, la course est menée par quelques grands acteurs consolidés (de Snam à Saipem, d'Eni à Edison) et une chaîne de petites et moyennes entreprises doit être soigneusement construite pour permettre au pays de ne pas être à la traîne dans une course à laquelle Berlin participe activement. La fondation Enea Tech, créée en novembre dernier grâce au Fonds de transfert de technologie mis en place au ministère du développement économique avec une dotation de 500 millions d'euros, peut être la clé de voûte de la planification stratégique dans les domaines frontières: et la logique du système, dans le domaine de l'hydrogène, doit être surveillée de près, étant donné que son développement combine la dynamique énergétique, les questions environnementales, la consommation privée et l'industrie. Un "laboratoire" des futures révolutions technologiques et des changements de paradigmes qui animeront un monde de plus en plus complexe.

Dix déviations contre-révolutionnaires qui sabotent la véritable dissidence

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Raphael Machado

Dix déviations contre-révolutionnaires qui sabotent la véritable dissidence

Ex: http://www.novaresistencia.org

Dans l'ensemble, le milieu politique dissident, c'est-à-dire anti-libéral et anti-moderne, s'est beaucoup développé au cours des dix dernières années dans notre pays (le Brésil). Néanmoins, il est encore assailli par certaines maladies et déviations infantiles qui sabotent sa croissance.

Le milieu dissident est plein de dérives assimilables à du sabotage et d'idées contre-révolutionnaires. Dans de nombreux cas, ces dérives et idées sabotent élan et croissance de la dissidence et les idées contre-révolutionnaires se propagent avec une naïveté déconcertante. Dans certains cas, le sabotage idéologique est intentionnel et vise à paralyser ou à fragmenter la dissidence.

Même si ces idées sont agrémentées de phrases d'Evola et de Nietzsche, de photos de familles américaines des années 50 ou de statues d'Arno Breker, ce sont toutes des idées contre-révolutionnaires qu'il faut faire disparaître de notre milieu, par tous les moyens à notre disposition.

Une critique dissidente de la dissidence est devenue indispensable.

10 - Bucolisme infantile

D'une manière générale, le milieu dissident a depuis longtemps surmonté un certain optimisme historique lié au futurisme et s'est retranché dans une critique radicale de l'urbanisation, de la mécanisation des relations humaines, de la foi dans la technologie et d'une certaine artificialisation induite par l'éloignement de la nature et des cycles naturels.

Face à cela, il est devenu courant d'idéaliser la "vie à la campagne", avec ses "blondes dans les champs de blé" et ses "cabanes dans les bois" (avec wifi, bien sûr). Il n'y a aucun problème à décider de vivre dans une petite ville ou de cultiver la terre. Le problème survient lorsque cela est considéré comme un substitut à l'action et à l'activisme politiques.

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En effet, il y a quelque chose à célébrer dans la paysannerie, dans la culture de la terre, dans les relations humaines les plus étroites, mais tout cela doit être mobilisé comme un symbole pour motiver une lutte politique concrète, à mener aussi dans les villes. En dehors de la lutte politique objective, cette fugere urbem n'est rien d'autre qu'une lâcheté conservatrice déguisée en traditionalisme.

9 - Domesticité bourgeoise

Un autre moyen largement utilisé dans la dissidence pour légitimer sa propre inertie et sa lâcheté est la cantilène selon laquelle "aujourd'hui, la véritable révolution est de se marier et d'avoir des enfants", qui n'est pas rarement associée au point précédent. Parmi les incels, l'idée de fonder une famille peut sembler être une grande réussite, mais en dehors de cet environnement, il est étonnant qu'elle soit présentée comme une bannière.

Bien sûr, notre époque postmoderne de capitalisme tardif et de liquéfaction des identités implique une certaine répétition des évidences que sont "le ciel est bleu" et "2 + 2 = 4", donc à une époque où les gens ont "l'hélicoptère de combat" comme genre, il peut effectivement sembler quelque chose d'un autre monde d'épouser une personne du sexe opposé et d'avoir des enfants à l'ancienne, mais il n'y a rien de particulièrement révolutionnaire à se marier et à avoir des enfants, et cela ne remplace pas non plus l'action politique.

La perpétuation de la lignée familiale a toujours été considérée comme importante dans toutes les sociétés traditionnelles, mais c'est une chose naturelle à faire et, sauf pour ceux qui ont une vocation monastique ou similaire, c'est le strict minimum.

Contrairement à tout traditionalisme authentique, ce discours n'est qu'un appel à la domesticité bourgeoise, où le foyer est le centre de la vie de l'homme et où ses préoccupations tournent autour du "paiement des factures" et de la "croissance dans la vie".

Lorsque vous vous retirez de l'action politique pour jouer au "papa et à la maman", vous ne faites que confier à vos enfants les tâches politiques urgentes de notre époque.

8 - La peur de la politique partisane

Dans la rhétorique dissidente, on trouve souvent un certain moralisme antipolitique qui jette l’anathème sur toute implication dans la politique des partis bourgeois en la qualifiant de "corruption", de "trahison", etc. Ce discours est typique de l'infantilisme conformiste déguisé en radicalisme politique dissident.

Psychologiquement, ce refus de s'impliquer dans la politique des partis bourgeois exprime une certaine crainte générale par rapport au monde adulte. C'est une sorte de "syndrome de Peter Pan", mais appliqué à la politique. Pour adhérer à un parti politique, il faut être un homme de 30 à 40 ans qui n'a pas encore réussi à mûrir sur la "scène" depuis son adolescence.

Le monde de la politique des partis bourgeois est célèbre pour ses compromis, ses accords, ses négociations, ses alliances pragmatiques, etc. Tout ce qui provoque le dégoût et inspire le mépris à tout dissident, ce qui est parfaitement justifié. Néanmoins, dans les conditions concrètes de pratiquement tous les pays de l'hémisphère occidental, la participation à la politique des partis est l'un des moyens les plus importants pour atteindre le seul véritable objectif qu'un dissident devrait avoir : le pouvoir.

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Même si l'on veut détruire le système des partis, il faut renverser les rôles et mettre fin au jeu le plus vite possible, même si chaque dissident qui n'a pas d'implication ou d'initiative dans ce domaine, ne serait-ce que secondairement, doit être considéré comme un amateur ou assimilé à des anarchistes bobos.

7 - Spontanéité paresseuse

Si l'on demandait à Lénine, ou à son héritier italien Mussolini (ce n'est pas moi qui le dit, mais Lénine lui-même...), quel est le chemin à suivre pour la révolution, ils souligneraient le travail invisible des petites fourmis : les heures passées à taper, le temps perdu à décider et à organiser des questions logistiques insignifiantes, à écrire des articles pour de petits journaux locaux ou à faire des discours devant une douzaine de personnes.

L'action politique révolutionnaire n'est pas du tout romantique. Le romantisme vient plus tard, avec les poètes de la révolution.

Face à cette réalité souvent fastidieuse, de nombreux dissidents plaident pour le "réveil du peuple". C'est l'idée que finalement (un "éventuellement" messianique et millénaire qui pourrait être demain ou dans mille ans...) le peuple se fatiguera de "tout ce qui est là", et alors il se rebellera spontanément et renversera le gouvernement.

Naturellement, à ce moment-là, les gros granudos sortiront de leur 4x4 pour guider, en tant que patrons naturels et shiatters innés, les masses en révolte. Une illusion qui serait balayée par la lecture de La rébellion des masses d'Ortega y Gasset ou de La psychologie des foules de Le Bon. À cette foi paresseuse dans le réveil spontané des masses est généralement lié le point précédent, la crainte de la politique des partis.

En général, ceux qui lancent des anathèmes à ceux qui adhèrent à des partis, contestent les élections, etc., affirment que si nous diffusons suffisamment de critiques sur l'Holocauste, ainsi que des images de statues nues dans une esthétique vaporeuse, finalement "tout ce qui est là" changera.

6 - Défaitisme idéaliste

Honnêtement, je n'ai jamais pris au sérieux cette vieille idée selon laquelle, dans le sport, il s'agit de faire de la compétition ou de "faire de son mieux" et non de gagner. Il est évident que le plus important est de triompher ! Pour gagner des médailles ! Atteignez la notoriété ! Pour être reconnu comme l'un des meilleurs !

Dans le même sens, en politique, j'ai toujours instinctivement détourné les yeux chaque fois que j'entendais, dans les milieux dissidents, quelqu'un commencer cette litanie du "le plus important n'est pas de gagner mais oui"... Maintenant, si vous n'êtes pas intéressé par la victoire, que faites-vous en politique ? Nourrir votre propre ego ?

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Parmi de nombreux dissidents, il y a cette notion selon laquelle l'idéologie "de droite" accorde d'avance une "victoire morale" qui rend toute victoire concrète, objective et historique superflue. Vous êtes peut-être une personne isolée dans un kitnet avec une page Facebook suivie par 200 personnes, mais parce que vous avez lu quelques livres de Julius Evola, vous êtes en fait une kshatriya et vous êtes destinée au Valhalla. Ou bien vous pourriez avoir un "mouvement" d'une demi-douzaine de personnes qui ne font absolument rien d'autre que de traîner, de temps en temps, dans les bistrots pour boire et faire de la prose.

Si l'on demande à l'un de ces dissidents ce qu'il a l'intention de faire pour prendre le pouvoir, ou pourquoi exactement les choses ne semblent aller nulle part, il vous répondra inévitablement que "c'est la faute de [insérer ici, indistinctement, des juifs, des maçons, des musulmans, des communistes, ou de tous à la fois]". Bien sûr, ils ne sont pas responsables du fait qu'ils n'ont littéralement aucune stratégie, ni même un simple plan qui ait un sens.

Voyez : ils pourraient au moins essayer. Mais même pas cela. La "victoire morale" les a déjà satisfaits. Il n'est pas rare que ces types correspondent également à tous les vices idéologiques décrits ci-dessus.

5 - Accéléralisme naïf

Une infection aggravée par le contact avec les médias de droite avec son mythe du "boogaloo", dans la dissidence ne manquent pas ceux qui croient fermement que "Le Système" est au bord de l'effondrement, et que même demain le monde peut se transformer en un scénario de Mad Max.

Que ce soit à cause de ce pic pétrolier (qui, avouons-le, est tombé en désuétude), d'une révolution mécanique, d'une guerre civile mondiale, de la non-durabilité innée du capitalisme, ou pour toute autre raison, les dissidents ayant certaines tendances survivalistes (généralement seulement virtuellement) se préparent à "la fin".

Ils croient donc qu'ils descendront dans la rue armés pour restaurer la "société traditionnelle". Outre le fait qu'ils vont se retrouver dans la rue avec le Commandement rouge, le Premier Commandement de la capitale et la Ligue de justice, ce qui risque d'être tragique, le principal problème est que ce scénario est un fantasme qui sert à écarter la nécessité d'un militantisme méthodique, d'une construction approfondie du processus révolutionnaire et du pragmatisme politique. Nous n'avons pas besoin de faire quoi que ce soit, il suffit d'acheter des boîtes de thon et d'avoir un P38 pour "protéger la famille".

La grande crainte que cette catégorie de dissidents évite de rencontrer est que nous sommes déjà "à la fin". Une fin qui, si elle est laissée à l'inertie, n'aura pas de fin. Remplacez "La fin est proche" par "Cela ne finira jamais".

4 - Trotskysme dissident

Un problème commun dans le milieu dissident, et pas seulement au Brésil, est une certaine tendance au sectarisme basée sur un puritanisme idéologique qui transforme tout désaccord minimal sur des questions secondaires en contradictions majeures.

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En ce sens, au lieu d'avoir une seule grande organisation dissidente (naturellement, avec ses filières), nous voyons proliférer une myriade d'organisations nationalistes aux objectifs extrêmement spécifiques, avec un nombre de membres variant entre 1 et 20, et qui disparaissent aussi vite qu'elles sont apparues.

Parfois, il ne s'agit même pas de puritanisme idéologique, mais simplement d’un problème d'ego chez les dissidents qui sont totalement incapables de s'intégrer dans une hiérarchie et de se conformer à une discipline révolutionnaire, et qui craquent sur tout désaccord personnel.

3 - Nécromancie politique

Photographies en noir et blanc, références constantes à des idoles politiques décédées, liste bibliographique presque entièrement occupée par des rafistolages poussiéreux du XIXe et du début du XXe siècle sur des sujets aussi actuels que la voiture à manivelle.

Nous l'avons tous vu et nous continuons à le voir dans les véhicules et les canaux de propagande de nombreux groupes dissidents, ou même si ce n'est que dans leurs profils personnels.

De nombreux dissidents sont prisonniers du passé. Besoin émotionnel ? Il est impossible de le dire, mais ces dissidents semblent toujours se sentir en insécurité ou même menacés lorsqu'il s'agit d'aborder des questions contemporaines avec des auteurs contemporains originaux (et non de simples commentateurs ou répétiteurs de morts).

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La tradition, pour ces dissidents, n'est pas une lumière qui offre la possibilité d'une libération spirituelle, mais une tonne d'entraves qui se lient à des slogans répétés ad nauseam. Tout comme il existe une "seule pensée politiquement correcte" dans le monde post-libéral, il existe une "seule pensée politiquement correcte" dans le monde dissident, basée sur le fait de traiter littéralement comme la Bible toute œuvre écrite par une quelconque personnalité de la Troisième Théorie Politique, liée à des régimes défunts.

En essayant d'être optimiste, au moins ce n'est pas comme la gauche libérale, qui a transformé les livres de Harry Potter en Bible...

2 – Anti-étatisme pseudo-traditionnel

Que ce soit par infiltration libérale ou par simple opportunisme en voulant faire converger les ancêtres mythifiés et les libertaires d’aujourd’hui, il y a une minorité dans la dissidence qui ne fait délibérément pas assez la distinction entre la critique de l'État moderne et la critique libérale de l'État.

Bien sûr, ces "théonomes" déclineront leur philo-libéralisme dans toutes les teintes traditionnelles possibles, des citations de Nietzsche aux appels à une "critique d'en haut" en passant par un élitisme puéril. Mais la conclusion est la même: l'État doit être détruit pour pouvoir ensuite être "reconstruit", mais cette fois-ci de manière traditionnelle, authentique, organique.

Le soutien à ces critiques ne fait pas rougir, ce qui suscite une suspicion sincère.

En fait, d'un point de vue traditionnel, tout État, même moderne, vaut mieux que le plongeon chaotique et a-nomal dans l'indifférenciation postmoderne. L'État, même en tant que forme pure, n'est pas quelque chose de vide de sens et n'équivaut pas à l'Anarchie. C'est la base de la pensée politique d'Evola.

C'est un curieux "traditionalisme" qui a des points communs avec le libéralisme foucaldien et avec le post-marxisme autonomiste de Toni Negri et Michael Hardt, ainsi qu'avec les idées de Murray Rothbard et Hans-Hermann Hoppe. Dans des cas comme celui de Marcos Ghio, ces notions en viennent même à être associées au soutien à l'ISIS et à Al-Qaida, au point que "défendre Assad, c'est défendre l'État moderne et anti-traditionnel". Ces arguments sont également apparus chez les néo-nazis qui entendaient justifier leur soutien au terrorisme ukrainien contre les populations du Donbass ainsi que leur anti-poutinisme. "Poutine est un bourgeois !"

Tous sont les apôtres d'un affaiblissement généralisé de l'État comme moyen de parvenir à un "ordre plus juste".

Il est évident que nous savons ce qui se cache derrière tout cela et où ces idées circulent.

1 - Fétichisme marginal

Demandez à n'importe quel penseur dissident de ces cinquante dernières années ce qu'il faut faire et ils vous diront tous unanimement qu'il faut boire à la fontaine de Gramsci pour favoriser la pénétration institutionnelle de nos idées.

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Il est nécessaire de produire un contenu académique, il est nécessaire d'adhérer et de participer activement à des syndicats, il est nécessaire de faire du militantisme de base et d'organiser des communautés, il est nécessaire de produire de l'art dissident, il est nécessaire de construire des contacts et des réseaux d'influence avec les partis politiques, il est nécessaire d'utiliser les réseaux sociaux pour essayer de populariser les idées dissidentes. Popularisez, ils insisteront. Ne pas augmenter le nombre de "marginaux".

Néanmoins, il y a encore de nombreux dissidents qui insisteront sur les comportements les plus innocemment marginaux, tout en se faisant passer pour des radicaux. Faux personnages de dessins animés, théories de conspiration complètement folles, MGTOW, et tout un tas d'autres manies et fétiches qui suscitent le dégoût des gens ordinaires, même ceux qui ont tendance à être en désaccord.

La réalité est qu'il y a beaucoup de gens qui se sentent plus à l'aise dans un petit créneau politique, généralement ignoré par les médias et les organismes publics, et qui feront le possible et l'impossible pour maintenir la dissidence dans une bulle.

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vendredi, 26 février 2021

L'implication de la Turquie dans le conflit ukrainien va-t-elle conduire à l'intégration du Donbass par la Russie?

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L'implication de la Turquie dans le conflit ukrainien va-t-elle conduire à l'intégration du Donbass par la Russie?

par Karine Bechet-Golovko
Ex: https://russiepolitics.blogspot.com
 
Depuis décembre, l'intérêt grandissant de la Turquie, membre de l'OTAN, pour l'Ukraine inquiète ceux qui ne veulent pas la guerre totale dans le Donbass et sa possible extension au continent européen. En effet, l'accord militaire passé entre les deux pays, prévoyant une production commune pour l'Ukraine de ces drones de combat, qui ont donné la victoire à l'Azerbaïdjan, et la livraison d'une première partie, laisse attendre de nombreuses victimes civiles dans le Donbass et un risque d'extension du conflit. Car tout l'intérêt est là pour les Atlantistes : la Russie va-t-elle s'en tenir à un soutien caché et à des déclarations diplomatiques, et perdre politiquement tant à l'intérieur qu'à l'internatonal, ou bien va-t-elle laisser entendre être prête à défendre le Donbass russe contre cette agression, somme toute, de l'OTAN ? Les globalistes ayant eux-mêmes changé l'équilibre international par le développement d'une politique d'agression massive des pays non-alignés, la question longtemps écartée par la Russie de l'intégration du Donbass pourrait retrouver tout son sens dans ce nouveau contexte conflictuel.  

En décembre 2020, la Turquie et l'Ukraine ont passé un accord militaire concernant la production commune de drones de combat avec transfert de technologie. Et en attendant la mise en route de cette production, l'Ukraine se disait prête à acheter des drones Bayraktar TB2, ces mêmes drones qui ont fait la différence dans le conflit du Haut-Karabakh. Il semblerait, selon certains experts, que la Turquie ait été aidée par les Etats-Unis à prendre la "bonne décision", celle d'une implication active dans le conflit ukrainien, suite à des sanctions imposées à ses entreprises de production d'armes. Cette délicate incitation expliquerait certainement le prix de vente incroyablement bas. En février 2021, l'information tombe d'une vente de 6 drones de combat à l'armée ukrainienne à un prix 16 fois inférieur à celui du marché.

L'intensification de l'activité des forces armées ukrainiennes, en violation directe des Accords de Minsk, oblige effectivement à poser la question d'une reprise "finale" du conflit. De son côté, la Russie appelle les Occidentaux à dissuader l'Ukraine de se lancer dans une folie guerrière, tout en soulignant que l'armée ukrainienne est soutenue, armée et entraînée par ces mêmes Occidentaux. Aucun conflit armé ne peut être contrôlé, il sort toujours des limites initialement prévues et entraîne des conséquences imprévisibles. Les Occidentaux ont-ils réellement envie de se battre pour l'Ukraine ? L'on peut sérieusement en douter. Mais s'ils laissent faire, comme ils le font actuellement, ils pourront être embarqués dans un conflit qui mettra à genoux une Europe, déjà triste fantôme d'elle-même.

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La situation est ici extrêmement complexe (voir notre texte ici). Le Donbass n'est pas le Haut-Karabakh, en cas d'affrontement militaire, la Russie ne peut pas se permettre de rester en retrait. Certes moralement, comme le déclare Kourguiniane, la question du choix entre les néo-nazis de Kiev et les Russes et Ukrainiens du Donbass ne se pose pas : "Personne en Russie ne se permettrait de faire un autre choix, même s'il le voulait". Et le clan dit libéral, présent dans les organes de pouvoir, le voudrait fortement, espérant ainsi enfin entrer dans la danse occidentale, répétant à satiété le choix de 1991 et les erreurs qui l'ont accompagné.

Mais surtout, la situation est complexe sur le plan de la sécurité internationale, car la reprise dans le sang du Donbass par l'OTAN, sous drapeau turco-ukrainien, remettrait totalement en cause, au minimum, la stabilité sur le continent européen. Ce qui, in fine, servirait le fantasme globaliste. 

D'un autre côté, la menace d'une intervention de la Russie, doublée d'une intégration du Donbass dans la Fédération de Russie, pourraient être le seul élément qui fasse réfléchir à deux fois avant de lancer les troupes. Car il y a une différence entre faire la guerre à LDNR et faire la guerre à la Russie.

Cette option de l'intégration avait longtemps été écartée par la Russie pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le scénario de Crimée était unique et n'illustrait pas une vision expansionniste. Ensuite, la Russie n'avait pas la volonté de remettre en cause la stabilité internationale, ce que démontre ses appels incessants à exécuter les Accords de Minsk, qui inscrivent le Donbass dans le cadre de l'état ukrainien, soulignant que dans le cas contraire, l'Ukraine pourrait définitivement perdre le Donbass comme elle a perdu la Crimée. Enfin, car elle espérait, à terme, voir réintégrer l'Ukraine post-Maïdan au Donbass, c'est-à-dire pacifier l'Ukraine, la rendre à elle-même.

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Or, la situation géopolitique a changé. L'intensification de la confrontation entre le clan atlantiste et la Russie modifie la donne sur de nombreux points. Si de toute manière des sanctions sont adoptées en chaîne contre la Russie, si de toute manière la rhétorique anti-russe continue à prendre de l'ampleur, si de toute manière les Atlantistes veulent faire de la Russie un état-terroriste, un paria, pourquoi alors ne pas réagir ? Les réactions asymétriques sont les plus efficaces et l'intégration du Donbass peut être l'une d'elles. Puisque de toute manière, avec ou sans lui, le combat entre dans une phase finale, une raison sera toujours trouvée (voir notre analyse ici) pour combattre la Russie, tant que l'obéissance ne sera pas totale, tant que la Russie ne se reniera pas sur la place publique.

Soit les globalistes n'ont plus le choix, ils doivent gagner ou périr, soit ils n'apprennent pas de leurs erreurs : le Maîdan, cette erreur de trop, qui a conduit à l'intégration de la Crimée, au retour de la Russie, décomplexée, sur la scène internationale, avec la Syrie ou le Venezuela. Dans tous les cas, la Russie a les cartes en main, elle aussi doit faire un choix stratégique, avec toutes les conséquences existentielles que cela implique.

jeudi, 25 février 2021

De la surdité culturelle qui caractérise l’Occident

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De la surdité culturelle qui caractérise l’Occident


Les élites en viennent à croire leur propre récit – oubliant que celui-ci n’a été conçu que pour être une illusion faite pour capter l’imagination de leur population.


Par Alastair Crooke

Source Strategic Culture

Pat Buchanan a absolument raison : lorsqu’il s’agit d’insurrections, l’histoire dépend de celui qui écrit le récit. En général, c’est la classe oligarchique qui s’en charge (si elle finit par l’emporter). Pourtant, je me souviens d’un certain nombre de personne étiquetées « terroristes » qui sont finalement devenus des « hommes d’État » très connus. Ainsi tourne la roue de l’histoire, comme elle le fait encore.

Bien entendu, le fait de fixer un récit – une réalité incontestable, qui est perçue comme trop sûre, trop investie pour échouer – ne signifie pas qu’il n’est pas contesté. Il existe une vieille expression britannique qui décrit bien cette remise en question (silencieuse) du « récit » alors dominant (en Irlande et en Inde, entre autres). Elle était connue sous le nom d' »insolence muette ». Lorsque les actes individuels de rébellion étaient inutiles et trop coûteux sur le plan personnel, un silencieux et amère dédain, qui en disait long, exprimait cette « insolence muette » pour leurs « seigneurs et maîtres ». Elle rendait la classe dirigeante britannique furieuse car elle lui rappelait quotidiennement son déficit de légitimité. Gandhi a mené cette expression à son plus haut niveau. Et c’est finalement son récit qui est resté le plus mémorable dans l’histoire.

Cependant, avec le contrôle du récit par le Big Tech globalisé, nous sommes parvenus à un tout autre niveau que ces simples efforts britanniques pour nier la dissidence – comme le note succinctement le professeur Shoshana Zuboff de la Harvard Business School :

Au cours des deux dernières décennies, j’ai observé les conséquences de notre surprenante métamorphose en empires de surveillance alimentés par des architectures mondiales de surveillance, d’analyse, de ciblage et de prévision des comportements – que j’ai appelé le capitalisme de surveillance. En s’appuyant sur leurs capacités de surveillance et au nom du profit que leur apporte cette surveillance, les nouveaux empires ont organisé un coup d’État épistémique fondamentalement antidémocratique, marqué par des concentrations sans précédent de connaissances sur nous et le pouvoir sans limites qui en découle.

Mais le contrôle de la narrative a maintenant atteint un paroxysme :

C’est l’essence même du coup d’État épistémique. Ils revendiquent le pouvoir de décider qui sait … [et] qui va l’emporter, en tant que démocratie, sur les droits et principes fondamentaux qui définiront notre ordre social au cours de ce siècle. La reconnaissance croissante de cet autre coup d’État … nous obligera-t-elle enfin à tenir compte de la vérité dérangeante qui s’est profilée au cours des deux dernières décennies ? Nous avons peut-être une démocratie, ou nous avons peut-être une société de surveillance, mais nous ne pouvons pas avoir les deux.

Cela représente clairement une toute autre ampleur de « contrôle » – et lorsqu’il est allié aux techniques anti-insurrectionnelles occidentales de détournement du récit « terroriste », mises au point pendant la « Grande Guerre contre le terrorisme » – il constitue un outil formidable pour freiner la dissidence, tant au niveau national qu’international.

Mais il présente cependant une faiblesse fondamentale.

Tout simplement, quand à cause du fait d’être si investi, si immergé, dans une « réalité » particulière, les « vérités » des autres ne sont plus – ne peuvent plus – être entendues. Elles ne peuvent plus fièrement se distinguer au-dessus de la morne plaine du discours consensuel. Elles ne peuvent plus pénétrer dans la coquille durcie de la bulle narrative dominante, ni prétendre à l’attention d’élites si investies dans la gestion de leur propre version de la réalité.

La « faiblesse fondamentale » ? Les élites en viennent à croire leurs propres récits – oubliant que ce récit a été conçu comme une illusion, parmi d’autres, créée pour capter l’imagination au sein de leur société (et non celle des autres).

Elles perdent la capacité de se voir elles-mêmes, comme les autres les voient. Elles sont tellement enchantées par la vertu de leur version du monde qu’elles perdent toute capacité d’empathie ou d’acceptation de la vérité des autres. Elles ne peuvent plus capter les signaux. Le fait est que dans ce dialogue de sourds avec les autres États, les motifs et les intentions de ces derniers seront mal interprétés – parfois de manière tragique.

Les exemples sont légion, mais la perception de l’administration Biden selon laquelle le temps a été gelé – à partir du moment où Obama a quitté ses fonctions – et en quelque sorte dégelé le 20 janvier, juste à temps pour que Biden reprenne tout à cette époque antérieure (comme si ce temps intermédiaire n’existait pas), constitue un exemple de croyance en son propre mème. La stupéfaction – et la colère – de l’UE, qui a été décrite comme « un partenaire peu fiable » par Lavrov à Moscou, est un exemple de plus de l’éloignement des élites du monde réel et de leur captivité dans leur propre perception.

L’expression « l’Amérique est de retour » pour diriger et « fixer les règles du jeu » pour le reste du monde peut être destinée à faire rayonner la force des États-Unis, mais elle suggère plutôt une faible compréhension des réalités auxquelles les États-Unis sont confrontés : Les relations de l’Amérique avec l’Europe et l’Asie étaient de plus en plus distantes bien avant l’entrée de Biden à la Maison Blanche – mais aussi avant le mandat (volontairement perturbateur) de Trump.

Pourquoi alors les États-Unis sont-ils si systématiquement dans le déni à ce sujet ?

D’une part, après sept décennies de primauté mondiale, il existe inévitablement une certaine inertie qui empêcherait toute puissance dominante d’enregistrer et d’assimiler les changements importants du passé récent. D’autre part, pour les États-Unis, un autre facteur contribue à expliquer leur « oreille de sourd » : L’obsession de l’establishment au sens large d’empêcher l’élection présidentielle de 2020 de valider les résultats de la précédente. Cela a vraiment pris le pas sur tout le reste. Rien d’autre n’a d’importance. Leur obsession est si intense qu’elle les empêche de voir l’évolution du monde, pourtant juste là, devant leur nez.

Cette situation n’est pas unique à l’Amérique. Il est facile de comprendre pourquoi l’UE a été si aveuglée par le fait que Lavrov l’ait qualifiée de « partenaire peu fiable » (ce qu’elle a manifestement été). Yanis Varoufakis, ancien ministre grec, a écrit qu’il avait lui-même essayé de faire entendre à l’UE ses résumés et propositions détaillés concernant la crise financière de son pays : « Ils (l’Eurogroupe) sont restés assis, impavide, sans rien entendre : J’aurais tout aussi bien pu chanter l’hymne national suédois, qu’ils n’y auraient pas accordé plus d’attention », a ensuite raconté Varoufakis. Son expérience montre le modus operandi standard de l’UE. L’UE ne « négocie pas ». Les candidats, qu’ils soient grecs ou britanniques, doivent accepter les valeurs de l’UE et les « règlements du club ».

Le haut représentant Borrell est arrivé avec sa longue liste de plaintes, provenant de 27 États (dont certains ont une liste historique de plaintes contre la Russie). Il a lu les demandes et s’attendait sans doute à ce que Lavrov, comme Varoufakis, reste assis tranquillement, tout en acceptant les réprimandes et les « règlements du club », attitude appropriée à tout aspirant envisageant une sorte de relation de travail avec le « plus grand marché du monde ». Telle est la culture de l’UE.

Puis vint la fameuse conférence de presse, au cours de laquelle l’UE a été qualifiée de « peu fiable ». Toute personne ayant assisté à une réunion d’un organe décisionnel de l’UE connaît le protocole, mais laissons un ancien haut fonctionnaire de l’UE la décrire : « Le Conseil s’occupe des chefs d’État ou de gouvernement – qui relèvent de la haute politique et non de la basse réglementation – lors de sessions à huis clos. Les 28 chefs de gouvernement (avant Brexit) s’appellent par leur prénom et peuvent se retrouver à accepter des décisions qu’ils n’avaient même pas imaginées auparavant, avant de se réunir pour une « photo de famille » devant les caméras du millier de journalistes réunis pour entendre la nouvelle, leur présence rendant « tout échec impossible », puisque chaque sommet (à une seule exception regrettable) se termine par un message d’espoir et de détermination communs. »

Lavrov, comme un cousin de campagne « brut de brut », n’a pas su se comporter comme il faut dans une société européenne polie ; on n’insulte pas l’UE. Oh non !

Varoufakis explique : « Contrairement aux États-nations qui apparaissent comme des stabilisateurs de conflits entre classes et groupes sociaux, l’UE a été créée comme un cartel avec pour mission de stabiliser les marges bénéficiaires des grandes et importantes entreprises européennes. » (Elle a vu le jour sous le nom de Communauté européenne du charbon et de l’acier). « Vu à travers ce prisme, la fidélité obstinée de l’UE à des pratiques qui ont échoué commence à prendre un sens. Les cartels sont raisonnablement bons pour répartir les profits des monopoles entre les oligarques, mais ils sont terribles pour répartir les pertes ». Nous savons également que, contrairement aux États, les cartels résisteront à toute démocratisation ou à toute intervention extérieure dans leur cercle étroit de prise de décision.

Cet incident à Moscou pourrait être quelque peu amusant, sauf qu’il souligne comment le nombrilisme de Bruxelles (d’une manière différente de celui de la Team Biden), produit un résultat similaire : Cela la déconnecte du monde extérieur. Elle « écoute », mais n’entend rien. La stratégie hostile de l’Occident à l’égard de la Russie, comme Pepe Escobar l’a observé dans son analyse stratégique de la position russe, est conditionnée par l’idée que la Russie n’a nulle part où aller – et doit donc se sentir satisfaite et honorée par l’idée que l’UE condescende à « tendre un bras » vers l’Eurasie. Alors qu’aujourd’hui, le centre de gravité géo-économique se déplace vers la Chine et l’Asie de l’Est, il est plus réaliste de se demander si la grande région eurasienne, avec ses 2,2 milliards d’habitants, estime qu’il vaille la peine de tendre un bras vers l’Union européenne.

Ce n’est pas une mince affaire : L’UE qui s’énerve de la manière dont Lavrov l’a rejeté à Moscou est une chose. Mais la possibilité que les États-Unis écoutent, mais n’entendent pas, la Russie et la Chine, en est une autre. Une mauvaise écoute, une mauvaise conception de ces deux États, ramène à des questions de guerre et de paix.

Alastair Crooke

Traduit par Wayan, relu par Jj pour le Saker Francophone

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mercredi, 24 février 2021

La mort du travail

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La mort du travail

par Ernesto Milà

Ex: https://legio-victrix.blogspot.com

(article mis en ligne en avril 2011)

C'est peut-être une tragédie de le constater, mais c'est une réalité. Le travail se meurt. Il est vrai que de nouveaux emplois sont créés chaque jour, mais si nous regardons les chiffres absolus, en 20 ans, la capacité de production a doublé, mais le travail n'a augmenté que de 5 %. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que de moins en moins de personnes travaillent. Pourquoi ? En raison de l'automatisation des processus. Ce fait est l'élément sociologique le plus intéressant de notre époque.

Il est frappant de constater qu'au moment même où le travail se meurt, il est devenu un mythe universel : la droite, le centre et la gauche révèrent le travail comme une obligation sociale. Tous les partis lancent des mesures pour "stimuler le travail", "réduire la fraude au chômage", "recycler les travailleurs", etc. Aucun d'entre eux n'explique - peut-être parce que dans leur stupidité ils ne comprennent pas - que le résultat de l'ère technotronique est l'élimination progressive du travail physique.

Il y a dix ans, il fallait douze ouvriers pour récolter un champ d'un hectare. Aujourd'hui, le même travail est effectué par une machine équipée de capteurs qui détectent les grappes et par une autre personne qui, à pied, examine s'il y a une grappe non détectée. Dans la construction, il y a 20 ans, une maison était construite brique par brique ; aujourd'hui, on tend vers des structures préfabriquées. Même dans les bus, il fallait jusqu'à récemment un chauffeur et un contrôleur, et bientôt il n'y aura plus qu'un programme informatique qui conduira les passagers à leur destination. Le travail est en train de mourir. Mais jamais auparavant il n'y a eu un tel culte du travail. Le culte du travail appartient à la mythologie moderne. Il est universel, mais c'est un mythe.

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Chaque jour, des légions de chômeurs vivent un drame qu'ils ne semblent pas comprendre : ils sont prêts à vendre une main-d'œuvre que personne n'est intéressé à acheter. Soit ces personnes rejoignent les rangs des chômeurs et du système de protection sociale, soit elles acceptent des emplois mal rémunérés qui ne requièrent aucune qualification professionnelle et pour lesquels elles doivent rivaliser avec des milliers d'autres travailleurs. Il en résulte une baisse du prix de la force de travail et la prolifération des emplois d'éboueurs payés à des salaires d'éboueurs qui ne permettent qu'un minimum de subsistance.

Les 20 dernières années ont vu une mutation imperceptible mais continue. Parallèlement à la mort du travail, l'économie de production s'éteint et devient progressivement une économie spéculative.

En bourse, la folie financière n'a rien à voir avec l'économie productive. Dans le passé, les investisseurs investissaient dans une entreprise parce qu'ils croyaient en son potentiel productif, ce qui se reflétait dans la distribution des dividendes. Aujourd'hui, tout cela a changé : vous investissez en bourse pendant quelques heures, et quand elle monte, vous retirez immédiatement votre argent, et la différence entre le montant investi et le montant enregistré deux heures plus tard est déjà un profit appréciable. Puis l'argent migre vers d'autres entreprises, d'autres frontières, d'autres bourses... Il n'y a pas de lien entre l'économie productive et la spéculation financière. Ces pratiques spéculatives ne font qu'accélérer la mort du travail.

En premier lieu, nous devons considérer la mort du travail comme quelque chose d'irréversible : les processus d'automatisation vont progresser et réduire progressivement le marché du travail. Ce processus n'est ni bon ni mauvais : il est bon si l'on reconnaît son vrai visage et que l'on agit en conséquence. Elle est mauvaise dans la mesure où les partis politiques mentent et refusent de dire à la population la réalité de la mort du travail.

Imaginons une société dans laquelle le travail n'est pas la grande valeur universelle. Il existe d'autres activités humaines qui ne produisent pas de bénéfices économiques, mais qui sont indispensables à l'équilibre psychologique de la vie humaine : loisirs, études, recherche, parentalité, toutes ces activités peuvent recevoir plus de temps dans une société où le travail est mort.

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Il est clair que dans ces circonstances, il est nécessaire de réduire le temps de travail (travailler moins pour que tout le monde puisse travailler) et d'augmenter les aides sociales de l'État. Un programme basé sur ces deux points est-il possible ? C'est de plus en plus possible. Il suffit de reconnaître les faits, de stimuler les filières éducatives de la population et de parvenir à une meilleure répartition des revenus de l'État, qui doit augmenter ses recettes en sanctionnant fiscalement l'économie spéculative.

Reconnaissant que le travail est en train de mourir, nous devons également reconnaître que toute référence au culte du travail doit être retirée des programmes des partis politiques du nouveau style; nous devons être réalistes : le travail est une activité comme une autre. Bien sûr, depuis le nazisme, tous les partis promeuvent un "culte du travail". Et cela a généré une distorsion de la réalité : parce que le travail n'est pas la seule tâche que les êtres humains peuvent accomplir.

Heureusement, la vie humaine est extrêmement riche en nuances. Outre le travail, il existe de nombreuses autres formes d'activité : création artistique, loisirs, recherche, apprentissage, études, dont la nature est très différente de celle du travail et qui est souvent générée par des intérêts non économiques.

Si la mort du travail est une tragédie, c'est surtout pour la société bourgeoise des Lumières et la pratique politico-économique du XIXe siècle, et non pour ceux qui veulent un monde nouveau et original où la possibilité de ne pas mourir de faim n'est pas nécessairement échangée avec celle de mourir d'ennui.

En 1965, Herbert Marcuse a établi que la différence entre notre époque et les précédentes consistait dans le fait que la réalisation pratique des idées utopiques était désormais possible compte tenu de la croissance des forces productives. Marcuse avait presque quarante ans d'avance sur nous : pour que l'utopie soit possible, il fallait une plus grande automatisation des processus de production... et une volonté déterminée de contenir la croissance de l'économie spéculative. Ce n'était pas le cas en 1965, mais c'est le cas aujourd'hui.

L'utopie est possible, à condition que des mesures drastiques soient adoptées : il faut d'abord réduire radicalement le flux d'immigrants dans l'UE, puis inverser la tendance et rapatrier progressivement les immigrants. La devise dans ce domaine est : "Les Espagnols d'abord". Cela met un frein à la croissance d'une population qui veut vendre sa force de travail et, par conséquent, sa valeur augmente.

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La deuxième mesure est la réduction drastique du temps de travail. Aujourd'hui, il est possible de maintenir les salaires avec moins de 35 heures par semaine. En outre, la réduction du temps de travail doit s'accompagner de mesures sociales : aides au travail à domicile, protection de la famille, etc. La protection contre le chômage, loin de diminuer comme elle l'a fait jusqu'à présent, doit augmenter. Et tout cela, qui implique une forte augmentation des dépenses publiques, est obtenu par une plus grande distribution des revenus de l'État.

Enfin, l'utopie est possible tant que l'on met fin à l'économie spéculative. La taxe Tobin semble être une mesure appropriée, mais ce n'est pas la seule, ni même la plus applicable. Il faut empêcher fiscalement les accumulations importantes de capital. Il est impossible d'abolir le capital, mais il est possible de l'orienter vers la production plutôt que vers la spéculation. Les revenus provenant de la spéculation doivent être maintenus au minimum. L'utopie est possible aujourd'hui, mais l'utopie ne réside plus dans la nouvelle gauche, mais dans ceux qui ont le courage de dénoncer le fait principal de notre époque : la mort du travail.

 

La mission impossible de l’OTAN

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La mission impossible de l’OTAN

Par Finian Cunningham

(revue de presse : Information Clearing House – 18/2/21)*

Ex: http://www.france-irak-actualite.com

Il semblerait que les ministres de la défense de l’OTAN se soient réunis cette semaine pour chercher à redéfinir et actualiser la mission de l’alliance militaire. Dit plus simplement, l’organisation cherche désespérément une raison d’être pour son existence. 

Ce bloc militaire de 30 nations dispose d’un budget annuel de plus de mille milliards de dollars, dont les trois quarts sont versés par les Etats-Unis, soit $740 milliards dépensés sur sa propre force. 

La visioconférence qui s’est tenue cette semaine représentait la première prise de contact officielle de l’administration Biden avec les alliés de l’OTAN. Lloyd Austin, le secrétaire américain de la Défense s’est adressé au forum en insistant sur la priorité donnée par le président Biden au renforcement des relations avec les alliés, relations qui s’étaient largement dégradées sous l’administration Trump. 

C’est la même vielle rengaine maintes fois rabâchée par Washington dans le passé : les alliés de l’OTAN doivent dépenser toujours plus pour contrer les prétendues menaces de la Russie et de la Chine. Le même vieux disque rayé.

La seule différence tient dans le style et non le contenu. Alors que Trump demandait de façon rude et acerbe que les membres de l’OTAN injectent plus d’argent, l’administration Biden opte pour une rhétorique plus polie, caressant dans le sens du poil l’importance ‘du partenariat transatlantique’ et promettant d’être plus inclusif dans la prise de décision stratégique. 

Mais, c’est essentiellement la même escroquerie : les Etats-Unis exhortent les états européens à dépenser plus d’argent pour soutenir le complexe militaro-industriel qui maintient artificiellement en vie le défunt système capitaliste. Les Américains ont besoin que les Européens leur achètent des avions de guerre et des systèmes balistiques pour que le capitalisme américain puisse continuer à vivre.

C’est une position difficilement tenable en ce moment, alors que les difficultés économiques se font ressentir et d’énormes défis sociaux apparaissent. Comment justifier une dépense annuelle de mille milliards de dollars sur des machines de guerre improductives ? 

Il va de soi que les soutiens de l’OTAN, essentiellement les Américains, se doivent de réinventer des ennemis comme la Chine et la Russie pour justifier l’existence d’une économie militaire aussi extravagante, sans quoi elle serait vue comme une utilisation insensée et préjudiciable des ressources d’un pays. Ce qu’elle est. 

Cela dit, ce petit jeu de l’épouvantail a de sérieux défauts conceptuels. Le tout premier est que ni la Russie ni la Chine ne sont des ennemis cherchant à détruire les pays occidentaux. Deuxièmement, cette histoire ne tient pas logiquement. Le budget militaire total de l’OTAN est quatre fois supérieur aux budgets combinés de la Chine et de la Russie. Et on voudrait nous faire croire que ces deux pays menacent un bloc de 30 nations alors qu’ils ne dépensent qu’une fraction du budget de l’OTAN en dépenses militaires. 

Autre problème conceptuel pour les VRP de l’OTAN : l’organisation est née il y a huit décennies, au début de la guerre froide. Aujourd’hui, le monde est très différent et reflète une intégration multipolaire croissante tant économique que politique, ou au niveau des communications. 

Les chiffres du commerce publiés cette semaine montre que la Chine a surpassé les Etats-Unis en devenant le premier partenaire commercial de l’Union Européenne. 

La Chine, la Russie, et cette tendance à la coopération économique eurasienne représentent le futur du développement mondial. Malgré leur complaisance occasionnelle envers Washington, les Européens le savent. A la fin de l’année dernière, l’Union Européenne a conclu un accord d’investissement historique avec la Chine, et ce en dépit des objections de Washington. 

Cela sonne en effet le glas du harcèlement américain, qui voyait les Etats-Unis exhorter ses alliés de l’OTAN en inventant des histoires effrayantes d’ennemis étrangers. Le monde ne peut plus se permettre ce gâchis éhonté de ressources face à des besoins sociaux bien plus importants. Il devient de plus en plus difficile de vendre politiquement cette escroquerie qu’est l’OTAN. 

Ce “monde du Mal” dépeint par les conspirationnistes américains ne correspond en rien à la réalité que perçoivent la majorité des gens. Oui, il y a encore des irréductibles de la guerre froide qui rodent encore en Europe, tel que le secrétaire général de l’OTAN le général Jens Stoltenberg et les politiciens russophobes polonais et baltes, mais ils représentent des minorités à la marge. 

La plupart des citoyens est consciente que l’OTAN est une relique du passé, qu’elle n’a plus de raison d’être dans le monde d’aujourd’hui, et face à tous les besoins sociaux pressants, la France et l’Allemagne, les moteurs les plus puissants de l’économie européenne, ont de moins en moins d’inclination vers Washington, même dirigé par un président démocrate apparemment plus amical. 

L’administration Biden peut paraitre plus crédible et cordiale que celle de Trump, mais demander aux autres de dépenser plus militairement et d’antagoniser des partenaires commerciaux vitaux que sont la Chine et la Russie est mission impossible pour une OTAN menée par les Etats-Unis. 

Finian Cunningham a beaucoup écrit sur les relations internationales, et a été publié en plusieurs langues. Pendant près de 20 ans, il a travaillé comme éditeur et rédacteur pour les médias d’information les plus importants, y compris The Mirror, Irish Times et l’Independent. 

Source : Information Clearing House

Traduction et Synthèse: Z.E

mardi, 23 février 2021

Les sectes de l’Occident

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Les sectes de l’Occident

Par Claudio Mutti

Ex : https://www.eurasia-rivista.com

Les sectes et les États-Unis

Alors que, dans le passé, le terme ‘’secte’’ désignait surtout un groupe de personnes qui, suivant une certaine école de pensée, adoptaient une position de séparation ou de conflit par rapport à l'orthodoxie religieuse. Depuis plusieurs décennies, le même terme est utilisé pour désigner un groupe qui a grandi autour d'une personnalité charismatique et se caractérise par une attitude qui présente des traits caractéristiques, tels que "la certitude de posséder la vérité et de constituer la seule sphère de salut, le prosélytisme agressif, l'anxiété eschatologique, la dépendance poussée jusqu'à la morbidité à l'égard d'un leader ou d'un gourou, etc"[1].

i-nuovi-culti.jpgC'est ce qu'écrit un initié, le fondateur du CESNUR (‘’Centre d'étude des nouvelles religions’’), qui, en présentant son panorama des sectes chrétiennes, souligne la relation étroite existant entre le phénomène du sectarisme chrétien et la réalité quotidiennes aux États-Unis. La plupart des groupes qui se présentent sous le nom de "sectes" ou de "nouveaux mouvements religieux" - observe le sociologue - sont nés aux États-Unis : c'est le cas des Témoins de Jéhovah, des Mormons, de la Science chrétienne, de la Scientologie. Pour d'autres mouvements divers d'origine orientale ou européenne, l'expansion commence généralement par le transfert d'un leader aux États-Unis, une translatio à laquelle on attribue souvent une signification symbolique"[2]. 2] A titre d'exemple, Introvigne rappelle que le premier transfert d'une secte vers la "terre promise" américaine a eu lieu en 1774, lorsque Mother Ann Lee (1736-1784), chef du groupe des Shakers, a débarqué à New York ; Il mentionne ensuite l'arrivée plus récente aux États-Unis de certains "maîtres spirituels" célèbres, dont le fondateur du mouvement Hare Krishna, Bhaktivedanta Swami Prabhupada (1896-1977), le révérend Moon (1920-2012) et le gourou "orange" Bhagwan Shree Rajneesh (1931-1990). Si l'on voulait, on pourrait rappeler d'autres cas exemplaires, comme celui du controversé "shaykh" du prince Charles d'Angleterre, Nazim al-Haqqani al-Qubrusi (1922-2014)[3], qui, après avoir prophétisé une attaque russe contre la Turquie qui aurait été le début de la "plus grande guerre avant le Dernier Jour"[4], a inauguré en 1991, par une visite à Disneyland[5], une série de voyages aux États-Unis ; ou comme celle de son successeur Hisham Kabbani (1945 - ), qui, après avoir créé un Ordre soufi d'Amérique, a obtenu la reconnaissance officielle de sa fonction lors d'une série de rencontres avec George Bush, Bill Clinton et Hillary Clinton.

L'extraordinaire familiarité des Etats-Unis d'Amérique avec la réalité multiforme de l'univers sectaire ne peut que rappeler un fait emblématique : l'entité politique qui a vu le jour sur le sol nord-américain a, pour origine, l'action d'une secte, la secte puritaine[6].

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Les "Pilgrim Fathers", qui ont navigué en septembre 1620 sur le Mayflower depuis la baie de Plymouth et ont débarqué deux mois plus tard à Cape Cod, ont fondé une colonie anglaise sur la côte du Massachusetts, la deuxième plus grande du Nouveau Monde après Jamestown, fondée en Virginie en 1607. Engagés dans la recherche de la plus haute conformité individuelle et collective aux préceptes de l'Ancien Testament, les Puritains se croyaient les nouveaux protagonistes de l'Exode biblique: ils avaient abandonné l'Egypte pharaonique, c'est-à-dire l'Europe dépravée et idolâtre, et avaient débarqué dans la nouvelle Terre promise[7]. Animés par une véritable haine théologique envers l'Europe, quatre cents colons, presque tous puritains congrégationalistes, embarquent en mars 1630 sur cinq navires quittant Londres pour la Nouvelle-Angleterre. Parmi eux se trouvait le théologien John Winthrop (1588-1649), premier gouverneur de la colonie de la baie du Massachusetts, auteur du sermon dans lequel les colons étaient exhortés à construire en Nouvelle-Angleterre une Cité gouvernée selon la loi divine : "Nous devons considérer," dit Winthrop, "que nous serons comme une Cité sur une colline (a City upon a Hill), les yeux du monde seront sur nous ; de sorte que si nous nous comportons faussement envers notre Seigneur dans cette œuvre que nous avons entreprise, et que nous lui faisons retirer le secours qu'il nous donne maintenant, nous serons la risée du monde entier (...)"[8].

Ce concept a été développé comme suit par le pasteur Peter Bulkeley (1583-1659) : "Nous sommes comme une Cité sur une colline (...) parce que nous prétendons être un peuple qui a fait une alliance avec Dieu" [9]. Et sur la notion biblique de "l'alliance perpétuelle" stipulée entre Dieu et le "peuple élu" a été fondée la doctrine impérialiste, clairement résumée en ces termes : "Puisque Dieu nous a favorisés, nous avons le droit de soumettre les autres nations à notre volonté" [10]. En bref, "l'Israël de la Nouvelle-Angleterre"[11], selon le ministre et théologien John Cotton (1585-1652), aurait dû adopter systématiquement l'hébreu comme langue officielle ; la Divine Providence lui avait confié la mission de convertir les autres peuples à son mode de vie. Cette doctrine a ensuite été formulée par le journaliste et diplomate John L. O'Sullivan (1813-1895), qui l'a résumée par le mot-clé de "Destin Manifeste" lorsqu'il a affirmé que les États-Unis avaient reçu de Dieu lui-même le mandat de s'étendre dans toute l’Amérique du Nord. "Et de telles prétentions, écrit-il dans un article paru le 27 décembre 1845 dans le New York Morning News, sont, au nom du droit dérivé de notre destin manifeste, d'étendre et de posséder tout le continent que la Providence nous a donné pour le développement de la grande expérience de liberté et d'autonomie fédérale qui nous a été confiée". Ce sera le président Wilson qui étendra les revendications de l'Amérique au monde entier, lorsqu'à la fin d'un conflit qu'il comprend comme "la bataille apocalyptique d'Armaggedon, l'affrontement final entre les forces du Bien et les forces du Mal" [12], il invente l'expression "Nouvel ordre mondial" et réitère le dogme selon lequel les États-Unis, "phare du monde" [13], sont "un nouvel Israël, une nation choisie, destinée de façon messianique par la Providence à apporter la loi et l'ordre dans le monde" [14].

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Le "Grand Réveil" et les "enfants de la Lumière"

Grâce aux sermons enflammés d'un autre pasteur, Jonathan Edwards (1703-1758), le thème de l'alliance avec Dieu conclue par le nouvel Israël américain avait déclenché entre les années 1830 et 1840 le "Grand Réveil" une vague de fanatisme millénariste avait déferlé du Connecticut sur la Nouvelle-Angleterre, "avec des foules en extase qui écoutaient les sermons des pasteurs itinérants, des femmes en pleurs et en cris qui se tordaient dans l'expérience purificatrice de la 'conversion'"[15]. Au siècle suivant, également en raison de l'arrivée de nouvelles vagues migratoires, les sectes les plus extravagantes prolifèrent, toutes d'inspiration biblique: ‘’Réarmement moral’’, Science chrétienne, Nouvelle Harmonie, les Phalanges intégrales, l'Armée du Salut etc. etc. [16] ; néanmoins le puritanisme ne disparaît pas, mais prend la forme d'une religiosité sécularisée et démocratique.

Quant au thème du "Grand Réveil", il connaît actuellement une nouvelle vie, étant réapparu comme la force d'idées "anti-mondialistes" opposée au projet de la ‘’Grande Restitution’’. Une telle conception a trouvé un terrain fertile dans la faction des trumpistes [17], dont les dirigeants ne comprennent pas seulement des personnalités appartenant aux confessions protestantes les plus disparates [18], comme Donald Trump lui-même, ancien presbytérien et maintenant "chrétien non confessionnel" [19], mais aussi des personnalités juives, comme Jared Kushner et sa femme Ivanka Trump, et catholiques, comme le célèbre agitateur populiste Steve Bannon [20] et l'archevêque catholique Carlo Maria Viganò, ancien nonce apostolique aux États-Unis. Dans une interview accordée le 1er janvier 2021, l'agitateur a demandé à l'archevêque : "Que peuvent faire concrètement les enfants de la Lumière du Grand Réveil pour saper l'alliance impie [du soi-disant "État profond"] avec ce régime communiste [chinois] brutal ? (...) C'est une bataille de notre époque entre les enfants de la Lumière et les enfants des Ténèbres (...)"[21].

51ZJtgt8CnL._SX336_BO1,204,203,200_.jpgLa formule du conflit entre les enfants de la Lumière et les enfants des Ténèbres, que Steve Bannon tire d'une lettre envoyée par Monseigneur Viganò au Président Trump le 12 juin 2020, est un élément eschatologique qui a été injecté dans l'imagerie trumpiste ; mais sa première apparition dans la mythologie politique américaine remonte à 1944, lorsque le théologien réformé Reinhold Niebuhr (1892-1971) a publié un pamphlet à succès intitulé Les enfants de la lumière et les enfants des ténèbres, sur l'affrontement guerrier en cours entre la démocratie américaine et ses ennemis européens. La formule, que Niebuhr a tirée de la description des Adeptes de la Rose-Croix faite par le philosophe franc-maçon Karl von Eckartshausen (1752-1803)[22] ou directement de certains passages bibliques (Ancien Testament[23] et Nouveau Testament[24]), a été confirmée par le texte d'un manuscrit umranique que l'Université hébraïque de Jérusalem a acquis en 1947. C'est la Règle de la guerre ou Guerre des fils de la Lumière contre les fils des Ténèbres, une apocalypse juive dans laquelle "les membres de la secte (...) constituent (...) les forces du bien par excellence. Contre eux se battront les "fils des ténèbres", une catégorie qui comprend à la fois les païens (...) et (...) la grande masse des Israélites qui n'ont pas adhéré à la secte"[25]. Avant Niebuhr, le thème récemment repris par Viganò et Bannon avait été un leitmotiv publicitaire de la Theosophical Society [26] (fondée en 1875 à New York) et du magicien britannique Aleister Crowley [27] (1875-1947), qui s'était installé à New York à la veille de la Première Guerre mondiale.

"Enfants de la Lumière" semble donc être la nouvelle désignation de ceux qui, dans les années 1890, ont été identifiés par la célèbre organisation fondamentaliste Christian Identity comme "les seuls, authentiques, littéralement les vrais enfants de Dieu". La déclaration doctrinale de l'organisation proclamait : " Nous croyons que les États-Unis sont le lieu qui a été prophétisé (Sam. II 7:10 ; Ésa. II:12 ; Ézéch. 36:24) où les chrétiens de toutes les tribus d'Israël se rassembleront (...) L'Amérique du Nord est le désert où Dieu a apporté les graines dispersées d'Israël (...) où le désert fleurit comme la rose " [28].

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Fondamentalement, les motifs apocalyptiques "judéo-chrétiens" ravivés aux États-Unis par Steve Bannon (et en Europe par certains idéologues du "souverainisme") s'inscrivent dans la vieille tendance fondamentaliste relancée dans les années 1980 par la vague conservatrice qui a installé Ronald Reagan à la présidence des États-Unis d'Amérique. C'est une tendance qui traverse toutes les administrations américaines des quatre-vingts dernières années et qui a pour père le pasteur évangélique Bill Graham (1918-2018), chef de l'Eglise baptiste du Sud (14 millions de fidèles). Célèbre pour son action évangélique au niveau international et pour avoir exercé "sa charge pastorale auprès des différents locataires qui se sont succédé à la Maison Blanche, d'Eisenhower à Bill Clinton" [29], le pasteur Graham "a mêlé une théologie fondamentaliste à des choix politiques conservateurs : on pense à l'approche anticommuniste virulente de certains de ses sermons radiophoniques, à sa défense publique du sénateur Mc Carthy pendant les années de la "chasse aux sorcières" et à son soutien à la guerre au Vietnam" [30].

Dans la plupart des cas, en fait, la doctrine morale des sectes protestantes a fourni les justifications appropriées pour les actions étrangères et les guerres d'agression menées par la superpuissance américaine. "Lorsque la nouvelle pratique du néocolonialisme a été définie, [les missionnaires protestants] ont été envoyés, et sont toujours envoyés avec le ‘’Corps de la Paix’’, dans des pays désignés pour les mêmes objectifs. Ils doivent être considérés comme des agents du gouvernement américain, engagés dans la propagande et l'espionnage. Les missions protestantes à l'étranger sont donc financées soit par des groupes économiques privés ayant des intérêts dans le pays néocolonial donné (...) soit par le gouvernement américain directement, soit par une combinaison des deux"[31].

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Mais des scénarios apocalyptiques sont également évoqués dans les milieux non protestants. La conviction de la fin des temps, répandue dans la vaste zone du fondamentalisme protestant américain, converge avec les attentes messianiques cultivées dans les milieux juifs. À cet égard, on peut citer comme exemple une secte d'origine hassidique : celle des Lubavitchers. "La secte Chabad Lubavitch", écrit un juif américain, "a quitté la Russie pour New York en 1940, dirigée par le rabbin Yosef Yitzhok Schneersohn, auquel a succédé son gendre, le rabbin Menachem Mendel Schneerson. Beaucoup de disciples des Lubavitch en sont venus à croire que Schneerson était le messie que les prophéties juives avaient prédit. Les vrais croyants l'appelaient le roi Moshiach. Il est mort en 1994 à l'âge de 92 ans"[32]. En 1991, Rebbe Schneerson avait dit à ses disciples : "J'ai fait tout ce que je pouvais pour amener le Messie, maintenant je vous transmets cette mission ; faites tout ce que vous pouvez pour l'amener ! Il a ensuite lancé une campagne médiatique pour annoncer le début de l'ère messianique ; parmi les nombreuses annonces, une page entière a été publiée dans le New York Times, invitant les gens à se préparer à l'arrivée imminente du Messie. La secte des Lubavitcher est particulièrement influente aux États-Unis, où elle compte également des adeptes dans les milieux politiques. En 1983, le Congrès et le Président des États-Unis ont décerné au rabbin Menachem Mendel Schneerson le National Honor Roll et ont décrété que le jour de sa naissance, le 11e Nisan du calendrier juif, soit proclamé "Journée de l'éducation et du partage". Le 2 novembre 1994 (date anniversaire de la Déclaration Balfour), les deux chambres des États-Unis ont approuvé à l'unanimité l'attribution posthume de la médaille d'or du Congrès américain à Rebbe Schneerson, en reconnaissance de l'éminent rabbin pour ses "contributions extraordinaires à l'éducation mondiale, à la morale et à ses importantes actions caritatives". Lors de la cérémonie de remise de la médaille, le président Bill Clinton a déclaré : "L'éminence de feu le Rabbin en tant que dirigeant moral de notre nation a été reconnue par tous les présidents depuis Richard Nixon"[33].

L'actuel président Joe R. Biden peut se targuer d'une longue familiarité avec la secte des Lubavitcher. Dès 2008, David Margules, président de Chabad Lubavitch du Delaware, a exprimé l'enthousiasme de sa communauté pour les positions pro-sionistes de Biden : "Il a acquis la réputation d'être un fervent défenseur d'Israël"[34]. Six ans plus tard, alors qu'il participait en tant que vice-président à l'allumage de la Menorah nationale et qu'il vantait la centralité des valeurs juives dans la vie américaine ("l'héritage juif, la culture juive, les valeurs juives sont une partie si essentielle de ce que nous sommes"), Biden se référait explicitement à l'enseignement de Rebbe Schneerson et exprimait son souhait d'une nouvelle augmentation du pouvoir de la secte : "Puissiez-vous tous croître de force en force"[35].

NOTES

[1] Massimo Introvigne, Le sètte cristiane. Dai Testimoni di Geova al Reverendo Moon, Mondadori, Milano 1990, p. 8.

[2] Massimo Introvigne, op. cit., p. 19.

[3] Contre lui, le Conseil Spirituel Musulman du Daghestan diffuse un document qui l’accuse « d’avoir diffusé force corruption sur la terre et d’avoir fait mésusage du nom de l’Islam parmi ceux qui ne savent pas grand chose de l’Islam, en se travestissant en érudit pour dissimuler aux gens sa véritable identité ».

[4] Nazim al-Haqqani, Pure Hearts, Zero Publications, London 1998, p. 40. Cit. in: Rhiannon Conner, From Amuq to Glastonbury: Situating the apocalypticism of Shaykh Nazim and the Naqshbandi-Haqqaniya, University of Exeter, 2015, p. 121.

[5] https://youtu.be/fxfMhf4S0DQ (Youtube, 13 ottobre 2013).

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[6] Sur l’influence du puritanisme sur la formation des Etats-Unis, voir surtout S. Bercovitch, The Puritan Origins of the American Self, Yale University Press, New Haven 1975. Si veda anche: G.T. Amos, Defending the Declaration. How the Bible Influenced the Writing of the Declaration of Independence, Wolgemut & Hyatt 1990; A.J. Reck, The Declaration of Independance as an “Expression of the American Mind”, in “Revue Internationale de Philosophie”, XXXI, 1977, 3-4, pp. 401-437; W. Cullen Dennis, Puritanism as the Basis for American Conservatism, in “Modern Age”, autunno 1974, pp. 404-413.

[7] « L’Amérique est donc née d’une aventure à caractère religieux, biblique plus exactement. Et, dès le départ, le mythe de la Terre Promise, propagée par toute une série de sectes, s’yest révélé sous forme immanente. Il a pris la forme d’une religiosité sociale (Giorgio Locchi – Alain de Benoist, Il male americano, Settimo Sigillo, Roma 2015, p. 27).

[8] R.C. Winthrop, Life and Letters of J. Winthrop, 2 voll., Boston 1864-1967, vol. I, p. 57; cit. in T. Bonazzi, Il sacro esperimento, Il Mulino, Bologna 1970, p. 38.

[9] Peter Bulkeley, The Gospel-Covenant or the Covenant of Grace opened, Londra 1651, p. 431, cit. in T. Bonazzi, op. cit., p. 23.

[10] William Culden Dennis, Puritanism as the Basis for American Conservatism, “Modern Age”, autunno 1974.

[11] Sacvan Bercovitch, America puritana, Editori Riuniti, Roma 1992, p. 45.

[12] Emilio Gentile, Le religioni della politica. Fra democrazia e totalitarismi, Laterza, Roma-Bari 2001, p. 39.

[13] Anders Stephanson, Destino manifesto. L’espansionismo americano e l’Impero del Bene, Feltrinelli, Milano 2004, p. 154.

[14] Anders Stephanson, op. cit., p. 150.

[15] Romolo Gobbi, America contro Europa. L’antieuropeismo degli americani dalle origini ai giorni nostri, M&B, Milano 2002, p. 48.

[16] Cfr. John Humphrey Noyes, Strange Cults and Utopias of 19th Century America, Dover Publ., New York 1966.

[17] Non seulement parmi les adeptes américains du trumpisme mais aussi danslesmilieux philo-trumpistes de l’Internationale ‘’souverainiste’’. Le thème du ’’Grand Réveil’’, en fait, occupe une position centrale dans la mystique apocalyptique d’Alexandre Douguine, lequel affirme: “Our fight is no more against America. (…) There are only two parties in the world: globalist party of Great Reset and anti-globalist party of Great Awakening. And nothing in the middle. Between them there is abyss. It wants to be filled with oceans of blood. The blood of Ashley Babbitt is the first drop. (…) Trumpism is much more important than Trump himself. Trump has the merit to start the process. Now we need go further.” (A. Dugin, Great Awakening: The future starts now, www.geopolitica.ru).

[18] ‘’Les Eglises protestantes américaines peuvent se regrouper en une cinquantaine de courants : les Adventistes, les Baptistes, les Luthériens, les Méthodistes, les Pentecôtistes, les Presbytériens, les Réformés, etc. Ensuite, à leur tour, la majorité de ces confessions se subdivise en une quantité de sous-groupes, en pratique, cela équivaut à un grand nombre de congrégations indépendantes sur tous plans qui se reconnaissent cependant sous le dénominateur commun du courant auquel elles appartiennent. Par exemple, l’Eglise pentecôtiste américaine comprend les dénominations indépendantes suivantes : Apostolic Faith, Assemblies of God, Bible Church of Christ, Bible Way Church of Our Lord Jesus Christ World Wide, Church of God, Church of God Profecy, Congregational Holiness Church, General Council Christian Churches of North America, International Church of the Fourasquare Gospel, Open Bible Standard Churches, Pentecostal Assemblies of the World, Pentecostal Church of God, United Pentecostal Church International, Pentecostal Free-Will Baptist Church. Des subdivisions analogues existent pour toutes les autres églises protestantes américaines, portant le nombre de congragations indépendantes à environ 140. Cela ne vaut que pour les dénominations majeures: mais il faut aussi tenir compte des ministres du culte indépendants, ne comprenant qu’une seule paroisse. A tout cela, il convient d’ajouter toutes les sectes qui ne sont pas protestantes au sens traditionnel et historique du terme, et qui, à ce titre, ne sont pas reconnues par les autres (…) Lesplus importantes sont les Mormons, les Témoins de Jéhovah, la Worldwide Church of God et l’Armée du Salut » (John Kleeves, Un paese pericoloso. Breve storia non romanzata degli Stati Uniti d’America, SEB, Cusano Milanino 1999, pp. 245-246).

[19] Déclaration faite par lui en octobre 2020dans le cadre d’un entretien à Religion News Service.

[20] C. Mutti, L’Internazionale sovranista a difesa della “civiltà giudeo-cristiana”, “Eurasia” 3/2019, pp. 131-138; Idem, Sovranisti a sovranità limitata, in: AA. VV., Inganno Bannon, Cinabro Edizioni, Roma 2019, pp. 83-102.

[21] Entretien accordé à “War Room”, retranscrit le 4 janvier 2021 sur www.lifesitenews.com

[22] Karl von Eckartshausen, Aufschlüsse über Magie, München 1790.

[23] Sapienza 18, 4.

[24] Luca 16, 8; Giov. 12, 36 e 3, 19-21; Efesini 5, 7-9.

[25] J. Alberto Soggin, I manoscritti del Mar Morto, Newton Compton, Roma 1978, pp. 49-50.

[26] Cfr. Katherine Tingley and Her Pupils, The Mysteries of the Heart Doctrine, The Theosophical Publ. Company, Point Loma, California, 1902, pp. 118, 171, 272, 307.

[27] “(…) all the mysteries of nature are preserved in this school for the children of light” (“The Equinox. The Review of Scientific Illuminism”, a. V, vol. I, n. 1, marzo 1909, p. 7). “And my kingdom is for the children of light who trample under foot the garment of shame, and rend from their loins the sackcloth of modesty” (Ibid. p. 194). “Children of Light, Fellows of the Holy Ghost, perfect pure, Companions of the Sangreal, illustrious Knights of the Sacrosanct Order of Kadosch (…)” (Samuel Weiser, The Secret Rituals of the O.T.O. Edited and Introduced by Francis King, New York, 1973, p. 212). “There is no royal road to illumination; that which I say in Light is true to the children of Light; to them of darkness is a confusion and a snare” (Aleister Crowley, KONX OM PAX. Essays in Light, Celephaïs Press Ulthar – Sarkomand – Inquanok, Leeds 2004, p. x).

[28] Paolo Naso, Il libro e la spada, Claudiana, Torino 2000, p. 187.

[29] Paolo Naso, op. cit., p. 166.

[30] Paolo Naso, op. cit., p. 169.

[31] John Kleeves, op. cit., p. 249.

[32] Rick Alan Ross, Le sette dentro e fuori. Come le persone vi entrano e vi [sic] possono uscire, Anteo Edizioni, Cavriago 2015, pp. 311-312.

[33] “The late Rebbe’s eminence as a moral leader for our country was recognized by every president since Richard Nixon”. https://elirab.me/tag/rebbe/

[34] Dvora Lakein, Delaware Jewish Community on Senator Joe Biden, http://www4.lubavitch.com, 8 settembre 2008.

[35] When Joe Biden quoted the Rebbe, anash.org, 8 novembre 2020.

 

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Philip K. Dick, le grand reset et la désolation du monde

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Philip K. Dick, le grand reset et la désolation du monde

par Tetyana Popova-Bonnal

Revenons à Philip Dick via la crise et le Reset actuels, à ses romans qui traitent du thème du logement et de la survie des familles ordinaires. Dans la plupart de ses œuvres Dick nous parle des temps post-apocalyptiques qui durent interminablement et où nous nous retrouvons aujourd’hui. Le futur dystopique décrit par ce très grand auteur, la dégénérescence d’une civilisation dominée par des milliardaires et des bureaucrates tarés, nous le vivons maintenant.

Pour l’écrivain le facteur moteur qui pousse le récit vers la science-fiction est la bombe atomique ou la conquête de l’espace. Sans l’un et sans l’autre les gens modernes se retrouvent dans les conditions « post-atomiques » - masqués jusqu’aux cheveux, effrayés jusqu’à ne pas sortir de chez soi et de haïr son prochain. Sans aucune bombe le monde se réduit en poussière… On se retrouve directement dans le décor du roman « Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (Do Androids Dream of Electric Sheep?), écrit en 1968 et si bien mis en scène par sir Ridley Scott dans son « Blade Runner ». Les vieilleries, le « junk », la poussière, les ordures sont des personnages de plein droit dans ce texte ; ils envahissent le monde, l’espace, ils prennent les dimensions surréelles. « Les vieilleries – les choses inutiles comme des enveloppes déchirées, des boites vides des allumettes, des emballages du chewing-gum ou des serviettes hygiéniques. Quand il n’y a personne à côté – ce junk se reproduit. Par exemple, si vous ne jetez pas tout cela à la poubelle le soir avant de vous coucher, le matin le junk doublera son volume. Partout il prend de plus en plus de place ». La planète entière est couverte des immeubles abandonnés et semi-ruinés. Cela nous rappelle les visions des villes industrielles américaines abandonnées et dévastées, décrites par Jim Jarmusch – Detroit, Cleveland etc.

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Si dans « Les androïdes rêvent-ils… », les personnages peuvent choisir une ruine du mégapole pour se loger, dans les romans comme « The Simulacra » (Simulacres) de 1964, « The man who Japed » (Le Détourneur) de 1956 la situation immobilière est encore plus comique (ou tragique si vous voulez). La planète est surpeuplée et l’humanité doit se nicher dans les appartements microscopiques. Et si dans le beau film « Un Américain à Paris » la vision d’un appartement bohème parisien est plutôt sympathique, chez Dick l’image du logement moderne atteint des dimensions monstrueuses.  Dans « The man who Japed » (L’homme qui a fait une plaisanterie -  cette traduction nous semble plus juste) le personnage principal Allen Purcell (Dick adorait la musique baroque !) avec sa jeune épouse habite dans une chambrette d’un immeuble multi-étagé, et même ce logement est considéré comme privilégié - bien que sa cuisine se cache dans un mur, et sa femme doit se laver à l’étage (pensons à tous nos parisiens qui sont contents de se trouver une chambre de sept mètres carrés à 800 euros par mois, et où ont-ils leur lavabo ? ).

51J8540fNtL._SY350_.jpgLa situation immobilière est pareille pour le personnage du roman « Simulacres » - il habite dans une micro-chambre d’un complexe des condominiums à plusieurs étages où on peut trouver tout – du service d’un psychiatre ou un chapelain jusqu’à la boulangerie.

Dick souligne constamment l’impossibilité de vie dans des logements pareils. Ici les résidents sont dirigés par des comités des espèces des mesdames Merkel qui réunissent dans leurs caractères les traits des puritains, des kgbistes et des imbéciles complètes. Ces réunions à la fois communistes et féministes despotiques (le critique du féminisme est très répandue dans les œuvre de Dick) dans leurs rassemblements hebdomadaires éliminent tous les locataires suspects ou peu sûrs.

Nous trouvons une autre vision monstrueusement prophétique dans le roman « Glissement de temps sur Mars » (Martian Time-Slip, 1962) où «l’abomination de la désolation », comme disait Jésus (Marc 13-14) est encore plus folle. Cette image se manifeste dans le dessin d’un petit garçon considéré autiste qui a aperçu les futures profanations bétonnées de l’homme sur la terre martienne : « Dans le dessin du garçon il a remarqué plus que ça. Et son père, a-t-il remarqué tout cela ? Les énormes immeubles coopératifs évoluaient lugubrement devant ses yeux… Les immeubles avaient l’air vieux, comme si le temps les détruisait. Les fissures étonnantes couvraient leurs murs jusqu’au toit ; les vitres étaient brisées. Des espèces d’herbes rigides poussaient autour. Il dessinait l’image de la désolation et de l’abattement lourd, mort et éternel ». Ainsi le nouveau riche martien voit la prophétie de son fils où il a détruit les montagnes et les paysages vierges pour une richesse éphémère du béton. Et chez nous ce béton a recouvert maintenant toute la côte Méditerranéenne, tout Monaco, tout Israël, toutes les îles exotiques, Hawaii…  

91AoVqwpJVL.jpgUn autre variant du surpeuplement mais avec la vision de la catastrophe climatique se trouve dans le roman Le Dieu venu du Centaure ( The Three Stigmata of Palmer Eldritch1965) (nous pensons que « Le Diable » dans la traduction du titre sera plus juste). Philip Dick reprend la vision des logements monstrueux à plusieurs étages, mais cette fois les étages s’enfoncent dans la terre à cause des températures trop chaudes sur la surface ; alors les pauvres se cuisent avec l’air conditionné limité et les plus riches habitent aux étages plus bas et vont en vacances en Antarctique.

Un autre type de l’avenir ne s’échappe pas de l’attention de Dick – l’avenir de dépopulation de la planète, où il ne reste presque plus de gens sur terre et ils ne sont presque plus capables de se reproduire – comme dans les romans « Les Joueurs de Titan » (The Game Players of Titan, 1963), « La Vérité avant-dernière » (The Penultimate Truth, 1964) et aussi en peu dans « Les androïdes rêvent-ils… ». L’écrivain voit notre planète divisée en pays, territoires et villes entre les richissimes milliardaires qui vivotent et se déplacent entre leurs immenses propriétaires sans savoir que faire à part de jouer (pensons que nous ne sommes pas très éloignés de la situation pareille avec notre cher Bill Gates – le plus grand propriétaire foncier des Etats Unis qui ne rêve que nous refiler son vaccin ou son ersatz de bœuf ou ses excréments). 

Mais y a-t-il une alternative pour nous ? Car nous ne sommes pas trop loin de ces futurs décrits par Dick il y a soixante ans ! Chez Dick l’issue c’est le retour vers son amour et vers la terre. Et surtout vers la terre que nous pouvons et devons cultiver, cette terre qui nous nourrit, donne des forces et l’espoir. Alors Dick envoie ses héros sur les terres éloignées, où il n’y a pas de béton, sur des planètes inconnues et souvent sur Mars ; par force ou par le choix propre des héros. Hélas, un simple Américain n’est pas toujours prêt à travailler. La paresse, l’ennui, le manque de talent l’empêchent souvent de réussir. Mais le grand reset oblige les personnages à se battre pour leur vie. Ainsi l’espoir de réussir et de vivre est décrit par Dick dans « Le Dieu venu du Centaure » ( The Three Stigmata of Palmer Eldritch1965), « Les Chaînes de l'avenir » ( The World Jones made, 1956) et surtout dans « Dr Bloodmoney » ( Doctor Bloodmoney, or How we got Along after the Bomb, 1965). Ce dernier est plus survivaliste que les autres car les personnages doivent survivre sans pétrole, sans électricité, sans routes, sans téléphone, sans vitres, etc… Dick n’est pas idyllique dans ses descriptions futuriste, mais il nous donne l’espoir : les petites communautés rurales arrive à survivre. La ville reste cruelle et dur à vivre. Mais les gens partent dans la campagne, cultivent la terre, sauvent les troupeaux, apprécient le travail et la compagnie des bons animaux (comme le cheval ou le chien), enseignent tout à leurs enfants mieux qu’à l’école, partagent leur connaissances dans les manières différentes. En peu comme dans le « Fahrenheit 451 » les gens se réunissent pour écouter la lecture des livres sauvés ou de la musique.  

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L’image de cette campagne est parfois très émouvante chez Dick ; ici on sent l’arôme du bon pain et du vin authentique californien, ici les amis jouent en trio baroque du Bach. Et après le cataclysme la petite musique ne cesse pas et les deux flutes et un clavecin se réunissent et rejouent les miracles de vie grâce à Purcell et Pachelbel, musiciens baroques si aimés par notre écrivain - dans Invasion divine, Dick célèbre John Dowland…

Tetyana Popova-Bonnal

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dimanche, 21 février 2021

Quatre dames au Capitole

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Quatre dames au Capitole

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

À côté de la victoire trafiquée et usurpée de « Papy Gâteux » Biden, les élections du 3 novembre 2020 ont été marquées par la perte de treize sièges à la Chambre des représentants détenus par les démocrates à l’avantage des républicains. Le Parti républicain a connu à cette occasion une hausse des suffrages en sa faveur de 2,9 %. Parmi les 435 représentants élus pour la 117e législature, focalisons-nous sur quatre femmes, trois républicaines et une démocrate.

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Alexandra Ocasio-Cortez.

Élue pour la première fois en 2018 dans le 14e district congressionnel (circonscription législative) de l’État fédéré de New York, Alexandra Ocasio-Cortez (ou AOC) fut à 29 ans la plus jeune membre de l’histoire du Congrès. Réélue pour un nouveau mandat malgré la progression notable de son adversaire républicain (de 19 202 à 46 877 suffrages), AOC milite chez les Socialistes démocrates d’Amérique et appartient au Congressional Progressive Caucus, la tendance la plus à gauche des démocrates. Soutien public du sénateur socialiste indépendant du Vermont Bernie Sanders pendant les deux dernières primaires, elle fut en pointe contre l’administration Trump. Favorable aux minorités raciales et sexuelles, cette Latina de 31 ans soutient un Green New Deal écolo-féministe, inclusif et multiculturaliste. Elle a publiquement regretté d’être dans le même parti que Joe Biden. Sera-t-elle pour autant une vigie attentive du pacifisme inhérent à la gauche étatsunienne ? Pas sûr qu’elle qui a révélé en 2018 avoir parmi ses aïeux un juif sépharade originaire d’Espagne, rejette le bellicisme « démocratique » déjà pratiqué par Bush père, Clinton, Bush fils et Obama.

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Liz Cheney.

Bien que représentante républicaine du Wyoming, Elizabeth « Liz » Cheney peut se retrouver en phase avec la diplomatie va-t’en-guerre du nouveau président. La fille aînée de Richard « Dick » Cheney, le vice-président le plus puissant de l’histoire des États-Unis sous George W. Bush (2001 – 2009), appartient au camp des « faucons néo-conservateurs » du GOP. Sa détestation pathologique de la Russie n’a d’équivalent que son soutien inconditionnel pour le seul État nucléaire du Proche-Orient. Opposée au mariage gay, elle s’est brouillée avec sa sœur cadette Mary, lesbienne notoire. Réélue avec 68,7 %, elle inaugure son troisième mandat consécutif en votant avec neuf autres renégats républicains la seconde mise en accusation pour destituer Donald Trump. Si 145 de ses pairs républicains (contre 60) ont finalement maintenu son rang de n° 3 du groupe, l’appareil républicain du Wyoming désavoue son vote et envisage de lui lancer aux primaires de 2022 un candidat pro-Trump…

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Lauren Boebert.

Inscrite chez les démocrates jusqu’en 2007, Lauren Boebert devient à 34 ans la représentante du 3e district du Colorado. Cette chrétienne évangélique écarte aux primaires le républicain sortant Scott Tipton avec 54,6 % avant de l’emporter face à la démocrate Diane Mitsch Bush (51,27 %). S’affichant en alternative conservatrice à Alexandra Ocasio-Cortez, Lauren Boebert a rallié le Freedom Caucus, la faction la plus à droite de la Chambre, ainsi que le Second Amendment Caucus, le groupe parlementaire qui défend le port d’arme. Vivant à Rifle la bien nommée (rifle signifiant « fusil » en anglais), elle tient depuis 2013 un restaurant, le Shooter Grill, dont les serveuses peu vêtues portent à la hanche une arme chargée. Hostile aux restrictions sanitaires, la future représentante brave les autorités locales en gardant son restaurant ouvert. Son refus de se soumettre aux injonctions du politiquement correct électrise aussi bien ses sympathisants que ses adversaires.

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Marjorie Taylor Greene.

Cependant, Lauren Boebert n’est pas la cible prioritaire de l’Establishment politico-médiatique. Ce dernier préfère attaquer Marjorie Taylor Greene. Élue à 46 ans du 14e district de Géorgie, l’une des circonscriptions les plus conservatrices du pays, cette républicaine du Freedom Caucus ne cesse d’être insultée par une presse aux ordres qui la traite de « complotiste » proche de QAnon. Son traitement systématique défavorable relève de la misogynie, de la blondophobie et de la haine anti-blanche. Bête noire des démocrates et des républicains les plus falots, elle vient de perdre sa place aux commissions du budget, de l’éducation et du travail. Ses détracteurs lui reprochent ses positions pro-vie et ses doutes sur certains évènements ou faits-divers récents. Elle qualifie les antifas de « terroristes intérieurs »; elle s’en prend aux officines financées par George Soros et ose critiquer les séditieux de Black Lives Matter. Forte des 74,7 % obtenus contre le candidat démocrate et de ses 40,3 % dès le premier tour de la primaire, Marjorie Taylor Greene a enfin cosigné l’acte d’accusation pour la destitution de… Joe Biden. Les gauchistes manœuvrent dans les couloirs du Congrès afin que les deux tiers de la Chambre des représentants votent son exclusion. Elle a déjà contre elle une dizaine de républicains dont – surprise ! – l’ineffable Liz Cheney. Le chef des républicains au Sénat, le cacochyme sénateur du Kentucky, Mitch Mc Connell, l’a aussi dans le collimateur.

Avec un personnel politicien centriste et belliciste aussi nul à l’instar de Liz Cheney, les États-Unis sont bien mal en point. Fort heureusement, dans une perspective clausewitzienne de montée aux extrêmes, gageons qu’Alexandra Ocasio-Cortez, Lauren Boebert et Marjorie Taylor Greene resteront fidèles à leurs électorats respectifs et porteront jusqu’à l’incandescence la guerre culturelle en cours.

Georges Feltin-Tracol.

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 202, mise en ligne sur TVLibertés, le 16 février 2021.

18:45 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, états-unis, politique internationale | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 20 février 2021

L'objectif de Mario Draghi : déclencher la "destruction créatrice" du marché

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L'objectif de Mario Draghi : déclencher la "destruction créatrice" du marché

par Thomas Fazi

Source : La Fionda &

https://www.ariannaeditrice.it

Nombreux sont ceux qui se demandent quelle philosophie de politique économique inspirera le gouvernement Draghi en passe de gérer les affaires de l’Italie. Plusieurs commentateurs - se basant sur une interprétation absolument fallacieuse du travail de Draghi à la BCE (l'idée que les politiques monétaires expansives représentent une politique "keynésienne"), se basant également sur un de ses articles désormais célèbres d'il y a quelques mois paru dans le Financial Times, où Draghi a apuré la dette publique (la "bonne") ; et dans certains cas, en se référant même à ses études sous la houlette de l'un des plus grands économistes keynésiens du siècle dernier, Federico Caffè - semblent convaincus que Draghi va évoluer dans le sillage d'une politique substantiellement expansive, voire, précisément, "keynésienne". En bref, une politique opposée à l'austérité de Monti.

Mais c'est Draghi lui-même qui contredit ces prévisions iréniques dans son dernier communiqué public, à savoir le tout récent rapport sur les politiques post-COVID élaboré par le G30 - officiellement un groupe de réflexion, fondé à l'initiative de la Fondation Rockefeller en 1978, qui fournit des conseils sur les questions d'économie monétaire et internationale, selon de nombreux centres de lobbying de la haute finance - présidé par Draghi lui-même avec Raghuram Rajan, ancien gouverneur de la banque centrale indienne.

Il indique clairement que les gouvernements ne devraient pas gaspiller de l'argent pour soutenir des entreprises malheureusement vouées à l'échec, définies dans le rapport comme des "entreprises zombies" - pensez par exemple, en ce qui concerne l'Italie, aux centaines de milliers de magasins et d'établissements publics mis à genoux par la pandémie et ses mesures de confinement. Entreprises qui ne sont que partiellement soutenues par une "aide" gouvernementale insuffisante. Pour ce rapport, les mesures à prendre devraient plutôt accompagner la "pandémie" et plutôt s'adonner à la "destruction créatrice", propre du marché libre, en laissant ces entreprises à leur sort et en encourageant le déplacement des travailleurs vers les entreprises vertueuses qui continueront à être rentables et à prospérer après la crise.

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La thèse de base est, d’abord, que le marché devrait être laissé libre d'agir (parce qu'il est plus efficace que le secteur public) et, ensuite, que les gouvernements devraient se limiter à intervenir uniquement en présence de "défaillances du marché" manifestes - un concept intrinsèquement libéral qui indique un écart par rapport à l'"efficacité" normale du marché - tandis que lorsqu'il s'agit d'une entreprise qui échoue en raison du fonctionnement "naturel" du marché, l'État ne devrait pas s'interposer.

Le document du G30 se concentre également sur le marché du travail, en écrivant que "les gouvernements devraient encourager les ajustements du marché du travail [...] qui obligeront certains travailleurs à changer d'entreprise ou de secteur, avec un recyclage approprié et une aide économique". Le message est clair : les gouvernements ne doivent pas essayer d'empêcher l'expulsion de la main-d'œuvre des entreprises vouées à la faillite, comme l'Italie et plusieurs autres pays ont essayé de le faire jusqu'à présent, en partie grâce à un gel des licenciements (qui doit expirer en mars) et à l'utilisation généralisée des fonds de licenciement. Ils devraient plutôt aider et faciliter ce processus pour permettre au marché de prévoir une allocation "efficace" des ressources (y compris des êtres humains).

Comme le note l'économiste Emiliano Brancaccio, nous sommes confrontés à "une vision schumpétérienne à la sauce libérale qui risque de laisser un flot de chômeurs dans la rue", et de plonger des centaines de milliers de petits et moyens entrepreneurs dans le désespoir. Autre que celle de Keynes (ou de Caffè!), la vision de l'économie et de la société incarnée dans le document du G30 - et implicitement épousée par Draghi - semble rappeler l'idéologie libéraliste des premiers temps, étouffée à juste titre après la Seconde Guerre mondiale, dans laquelle les relations sociales, la vie des gens, l'essence même de la société étaient subordonnées à un seul principe régulateur, celui du marché.

Ce point de vue est non seulement exécrable d'un point de vue éthique et moral, mais il est également faux : il n'existe pas de marché qui fonctionne "en dehors" de l'État, sur la base de sa propre logique d'autorégulation, par rapport auquel l'État peut décider d'intervenir ou non ; les marchés, au contraire, sont toujours un produit du cadre juridique, économique et social créé par l'État. En d'autres termes, il n'y a rien de "naturel" dans le fait qu'une certaine entreprise échoue plutôt qu'une autre. Si aujourd'hui les petites entreprises risquent de fermer, alors que les grandes multinationales réalisent des profits faramineux, ce n'est que la conséquence du fait qu'en tant que société, nous nous sommes donné un principe d'organisation - que Draghi vise aujourd'hui à renforcer - qui favorise les grandes entreprises privées par rapport aux petites entreprises familiales. Mais c'est un choix politique.

Il va sans dire que la vision de la société du G30 et de Draghi est littéralement aux antipodes de la vision de Keynes et de Caffè - ainsi que de celle incarnée dans notre Constitution, qui est sur le point d'être violée à nouveau - selon laquelle la tâche de l'État est de dominer et de gouverner les marchés, et leur travail destructeur, en les subordonnant à des objectifs de progrès économique, social, culturel et humain.

Ayez au moins la décence de ne pas mettre leur nom à côté de celui de Draghi.

Regarder vers l'avenir alors que l'Ouest décline

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Regarder vers l'avenir alors que l'Ouest décline

Par Srdja Trifkovic

Ex : https://www.chroniclesmagazine.org/

La défaite de l'Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale a été accélérée par la réticence d'Hitler à accepter des rapports en contradiction avec sa vision de plus en plus fantasque de la réalité. Ses auto-illusions furent affirmées avec une telle fermeté si bien qu'à la mi-1944, le maréchal Erwin Rommel conclut que le Führer vivait dans un Wolkenkuckucksheim ("pays du coucou des nuages").

Le même diagnostic s'applique à la droite de l'établissement, tant en Europe qu'aux États-Unis, qui affirment toujours que nous vivons dans un monde imparfait mais perfectible dans lequel l'Occident est dominant et a l'énergie de se réinventer. Les sommités de la Heritage Foundation, leurs euro-doubles et les divers partisans du nationalisme civique rejettent toute preuve que le monde occidental est en déclin par rapport à ses concurrents mondiaux, en continuant à préconiser des solutions purement législatives aux défis civilisationnels concrets. Pour Conservative Inc, tout avertissement selon lequel la puissance occidentale n'est plus qu'une façade qui cache de la pourriture et de la faiblesse serait de la propagande paléo-réactionnaire et du défaitisme antipatriotique.

D'autre part, depuis plus d'un siècle - au moins depuis la publication du Déclin de l'Occident d'Oswald Spengler en 1918 - des philosophes, des politologues, des théologiens et d'autres, principalement des incrédules face au discours sur le "progrès" et sur l'amélioration potentielle de l'homme, avertissent que notre civilisation est en péril. Ils se servent d'une masse de preuves pour souligner que nous vivons une époque anormale, caractérisée par l'effondrement des normes morales et des standards civilisationnels des deux côtés de l'océan Atlantique. Le malaise est étonnamment accru à notre époque par la croissance métastatique de la haine de soi des Weiningeriens, (soit des penseurs qui réagissent comme le philosophe suicidaire Otto Weininger, ndt), dans le monde occidental.

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Au cours de l'année dernière, la crise du système sociopolitique américain a acquis une forme mature, avec des explosions de plus en plus fréquentes de dysfonctionnements aigus. Ce processus se manifeste principalement par la légitimation de la violence, l'avilissement du "processus démocratique", l'imposition de formes grossières de censure et la criminalisation de paroles et d'actes inacceptables pour le régime de Beltway et ses cohortes dans les médias, la Big Tech, le monde universitaire et Hollywood.

Un nouvel ordre horrible est en train de se mettre en place. Pendant un bref moment, il peut encore ressembler à l'Ancienne République, mais seulement dans la mesure où le comte Dracula ressemble à une personne vivante.

L'Europe et l'anti-Europe

Sur la rive orientale de l'Atlantique, une grande partie de l'Europe se transforme culturellement et démographiquement en une caricature grossière de ce qu'elle était auparavant. Sa frontière maritime méridionale est aussi poreuse que la frontière américaine avec le Mexique. La "théocratie laïque" de l'Europe (pour emprunter le terme pertinent de Paul Gottfried) s'attache à réformer et à remodeler la conscience de ses sujets afin d'accepter l'auto-anéantissement multiculturel comme une attitude, un ensemble de croyances et une politique obligatoire.

En conséquence, le Vieux Continent est de plus en plus peuplé d'étrangers résidant physiquement à Berlin, Toulon ou Leeds, mais spirituellement en Anatolie, au Pendjab ou au Maghreb. Ils sont souvent désespérés de se rendre en Europe, mais une fois établis, ils veulent reproduire dans leur nouvelle demeure l'environnement culturel de leurs désagréables terres natales. Méprisant les professions de foi culturelles et para-marxistes de "tolérance" et de "diversité" de leurs hôtes, leur dédain n'est pas assouvi par des concessions accordées à la légère.

L'"Europe unie" d'aujourd'hui est à des années-lumière de la communauté de nations civilisées qu’elle était jadis et, dans l'ensemble, qui présentaient des sociétés décentes comme avant 1914. L'UE ne crée pas de points communs sociaux et civilisationnels, sauf sur la base d'une négation totale des normes et valeurs authentiquement européennes. Il en résulte une morne similitude culturelle entre tous tissée d'antidiscrimination et d’une vénération anti-chrétienne de l'altérité.

Les contrôleurs de la machine européenne n'ont pas non plus renoncé à leur projet de super-État après le Brexit. Dans la perte de diversité de l'évolution sociale qui va de pair avec la diminution de la diversité de la nature, ils cherchent à faire disparaître l'identité des nations européennes, leur tonalité spéciale et leur caractère unique. Ils considèrent les élections nationales (par exemple en Hongrie ou en Pologne) comme une nuisance qui jette subitement dans leurs machinations des principes archétypaux, réactionnaires et souverainistes, et contrarie l'imposition de quotas obligatoires d'immigrants musulmans dans chaque pays membre. Leurs obsessions, qui il y a deux générations encore auraient été considérées comme excentriques ou folles, dominent aujourd'hui le monde occidental.

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La trahison de l'élite

Il y a près d'un siècle, Julien Benda publiait sa diatribe contre la corruption intellectuelle de son temps, La trahison des clercs. La "Trahison" s'est produite lorsque l'élite intellectuelle a renoncé à promouvoir des valeurs civilisationnelles durables et a laissé des préférences politiques à court terme déformer sa compréhension de la vocation intellectuelle en tant que telle. Dans l'Europe des années 1920, les intellectuels ont commencé à se défaire de leur considération pour les idéaux philosophiques et scientifiques traditionnels, vénérant plutôt les particularismes et le relativisme moral.

Un demi-siècle plus tard, Christopher Lasch diagnostiquait la forme mature de la "trahison" de Benda. Faisant allusion à la Révolte des masses de José Ortega y Gasset, Lasch a appelé son recueil d'essais La révolte des élites. La caractéristique principale du phénomène réside dans le détachement graduel (mais toujours accéléré) des nouvelles élites professionnelles et managériales - avocats, commentateurs des médias, experts universitaires, analystes de groupes de réflexion, planificateurs financiers, etc. Cette nouvelle élite existe dans le monde abstrait de la manipulation des informations et des chiffres. Elle génère une nouvelle forme de discours politique, fortement idéologique, qui repose sur la laïcité, le relativisme moral et culturel, et le rejet par ses membres de tout sentiment d'attachement à la communauté au sens large.

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Ainsi, lors de la conférence de la Maison Blanche sur l'avenir du monde industriel en février 1972, Carl Gerstacker, président de Dow Chemical, a exposé sa vision de la société "anationale" du futur proche. "J'ai longtemps rêvé d'acheter une île n'appartenant à aucune nation", a-t-il déclaré, et d'y établir le siège mondial de Dow, "n'étant redevable à aucune nation ou société".

Deux ans plus tard, Richard Gardner a affirmé avec enthousiasme aux Affaires étrangères que la "maison de l'ordre mondial" devra être construite de bas en haut plutôt que de haut en bas : "une course contre la souveraineté nationale, l'érodant pièce par pièce, accomplira bien plus que l'assaut frontal à l'ancienne". Il s'agissait clairement d'une variation du thème théorisé par Gramsci de la ‘’longue marche à travers les institutions’’. Pour sa vision et ses efforts, Gardner a ensuite été récompensé par Jimmy Carter qui l'a nommé ambassadeur en Espagne et en Italie.

51jxcyQIBzL._SX344_BO1,204,203,200_.jpgDans le même esprit, le secrétaire d'État adjoint de Bill Clinton, Strobe Talbott, a déclaré peu après avoir quitté ses fonctions que les États-Unis n'existeront pas "sous leur forme actuelle" au XXIe siècle parce que le concept de nation lui-même deviendra obsolète. Talbott a déclaré en 1992, et réitéré dans son livre de 2008, The Great Experiment, qu'au XXIe siècle "la nation telle que nous la connaissons sera obsolète ; tous les États reconnaîtront une autorité unique et mondiale et tous les pays seront fondamentalement des arrangements sociaux, des adaptations à des circonstances changeantes. Aussi permanentes et même sacrées qu'elles puissent paraître à un moment donné, ils sont en fait tous artificiels et temporaires".

En bref, les membres de l'élite occidentale ne connaissent aucune loyauté envers un pays ou une nation. Ils recherchent une fin particulière de l'histoire dans la transformation du hoi polloi déraciné et lavé de son cerveau en un système socio-technologique postmoderne régulé par eux-mêmes. Leur édifice repose sur le principe selon lequel les pays n'appartiennent pas aux peuples qui les habitent depuis des générations, mais à tous ceux qui se trouvent à l'intérieur de leurs frontières à un moment donné. Les personnes éclairées ne doivent se sentir liées à aucun groupe, sauf aux minorités prétendument défavorisées. En conséquence, ils encouragent activement l'autodestruction et la haine de soi des Caucasiens et diabolisent tous les hétérosexuels masculins blancs. Ils cherchent à fusionner les races, les sexes et les préférences sexuelles en un mélange souple régi par la Single Global Authority du Dr Talbott.

Espoir et résistance

Les Pères fondateurs ont renversé le gouvernement colonial pour des délits bien plus légers que ceux-ci. Il est possible qu'un renversement se produise même à ce stade tardif. Le modèle de redressement nécessite probablement un événement catastrophique : une crise mondiale qui s'étend rapidement, combinant un effondrement financier et une pandémie véritablement mortelle. L'incapacité prévisible du régime à gérer une telle calamité obligerait des millions de personnes à reconsidérer leur vie et leurs croyances.

La première victime serait la notion de "progrès". Le passage de la notion insidieuse de "bon côté de l'histoire" au maintien de la tradition, le passage du devenir obsessionnel à l'être, voilà le changement clé de notre redressement. La famille normale, "nucléaire", serait reconstruite comme l'unité de survie essentielle. Au milieu de l'effondrement des structures politiques et de la perte de confiance dans la politique, les obsessions idéologiques actuelles de nos dirigeants seront rejetées comme absurdes. Les personnes liées par le sang, la mémoire, la culture et la foi se regrouperont pour rester en vie et prier le Dieu unique. À cet égard, un défi supplémentaire est présenté par la trahison continue au sein du christianisme organisé, l'infiltration des cinq colonnes de la classe d'élite à des positions ecclésiastiques très élevées.

Lorsque l'on examine la théorie politique de la résistance chrétienne, il est important de souligner l'abîme entre la promesse de liberté des classes dominantes (haine, violence policière, discours offensant, privilège blanc, patriarcat, racisme, discrimination, etc.). Ce cadre peut offrir une plate-forme consensuelle pour diverses traditions chrétiennes. Elles doivent être accrochées ensemble, maintenant, sinon elles seront certainement accrochées séparément.

Igor_Shafarevich.jpegFace à la brutalité gratuite de leur régime, les Américains normaux ne devraient pas désespérer. La partie n'est pas gagnée parce que rien dans l'histoire n'est "inévitable". En 1996, une période terrible pour le peuple russe, j'ai rencontré le célèbre mathématicien et penseur conservateur Igor Shafarevich (Chafarévitch)à Moscou et je lui ai demandé s'il y avait un espoir de redressement de la Russie. Il m'a répondu : "En tant que mathématicien, je ne peux pas proposer un modèle de rétablissement empiriquement viable ; mais en tant que chrétien orthodoxe, je crois que l'effet bienveillant du Saint-Esprit est possible, donc probablement, par conséquent, imminent".

Les idéologies et les régimes contre-nature et maléfiques n'ont pas la capacité d'être permanents. Les personnes réelles sont toujours dotées de sentiments et de raison, de la conscience de qui elles sont. Leur lutte contre les élites mal nommées qui sont maintenant au pouvoir est juste. L'issue est incertaine. En attendant, les vrais Occidentaux peuvent et doivent néanmoins s'accrocher à la beauté, à la vérité et à la foi, et essayer de profiter de la vie.

Srdja Trifkovic

Le Dr Srdja Trifkovic, rédacteur en chef de la revue Chronicles pour les Affaires étrangères, est l'auteur de L'épée du prophète et la défaite du djihad.

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Srdja (Serge) Trifkovic.

Nouveaux textes sur le site "Strategika.fr" de Pierre-Antoine Plaquevent

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Gouvernement Draghi et Lega : trahison ou réalisme politique ?
Le feu vert de Matteo Salvini au gouvernement de Mario Draghi interroge le milieu souverainiste. Pour comprendre ce nouveau positionnement, il faut d’un côté prendre acte du contexte international défavorable au populisme (défaite de Trump, Covid-19) et de l’autre, se pencher sur la structure interne de la Lega, dont l’un des courants sera d'ailleurs représenté dans l’équipe de Mario Draghi.
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vendredi, 19 février 2021

Game Stop et Grand Reset: Le Décryptage de Raoul Weiss

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Café Noir N.11

Game Stop et Grand Reset:

Le Décryptage de Raoul Weiss

Café Noir – Un Autre Regard sur le Monde.
Émission du Vendredi 19 Février 2021
Avec Pierre Le Vigan, Gilbert Dawed & leur invité Raoul Weiss.
 
Cafe Noir N.09 – Réseaux Sociaux, Bourse et 5e Pouvoir https://youtu.be/xgwkTJHYcqo
 

21:13 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gaémestop, grand reset, raoul weiss, actualité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook